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Full text of "Histoire générale des auteurs sacrés et ecclésiastiques, qui contient leur vie, le catalogue, la critique, le jugement, la chronologie, l'analyse et le dénombrement des différentes éditions de leurs ouvrages.."

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HISTOIRE  GÉNÉRALE 


DES 


AUTEURS  SACRÉS 


ET  ECCLÉSIASTIQUES. 


BEAUGENCY.  -  IMPRIMEniE  DE  F.  RENOU. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE 


DES 


AUTEURS  SACRÉS 

ET  ECCLÉSIASTIQUES 

QUI  CONTIENT 

LF.l-n  VIE,  LE  CATALOGUE,  LA  CHITIQDE,  LE  JUGEMENT,  LA    CHRONOLOGIE,  L'ANALYSE 

ET  LE   DÉNOMBREMENT   DES    DIFFÉRENTES   ÉDITIONS   DE  LEURS   OUVRAGES  ; 

CE  qu'ils  RENFERMENT  DE  PLUS  INTÉRESSANT  Sl'U  LE  DOGME,  SUR  LA  MORALE  ET  SUR  LA  DISCIPLINE  DE  L'ÉGLISE  ; 

L'HISTOIRE  DES  CONCILES  TANT  GÉNÉRAUX  QUE  PARTICULIERS,  ET  LES  ACTES  CHOISIS  DES  MARTYRS, 

PAR  LE  R.  P.  DOM  REMY  CEILLiER 

Bénédictin  de  la  Congrégation  de  Saint-Vannes  et  de  Saint-Hydulplie,  Goadjuteur  de  Flavigny. 

NOUVELLE  ÉDITION 

SOIGNEUSEMENT  REVUE,  CORRIGÉE,  COMPLÉTÉE  ET  TERMINÉE  PAR  UNE  TABLE  GÉNÉRALE  DES  MATIÈRES, 

PAR  L'ABBÉ  BAUZON,  ANCIEN  DIRECTEUR  DE  GRAND  SÉMINAIRE, 

DÉDIÉE  * 

AU  CLERGÉ  CATHOLIQUE  FRANÇAIS, 

HONORÉE  DES  SUFFRAGES  DE  PLUSIEURS  ÉVÊQUES, 

Des  eacoiitajenienls  de  plusieurs  Vicaires  Oéiéraux,  Ditecleors  de  Séminaires  et  d'un  grand  mmlre  de  personnajes  dislinjuK 

de  la  France  el  des  pajs  élranjers. 


TOME    ONZIÈME 


PAEIS 
CHEZ  LOUIS  VIVES,  LIBRAIRE-ÉDITEUR 

5,   RUE   DELAiMBBE,    5. 

1862. 


m  1 6  ^^33 


5  9-9Ô 


TABLE 


DES  CUAPITRES.  ARTICLES  ET  PARAGRAPHES 

COniTENUS  DAIMS  CE  VOLUME. 


Pages 

CHAPITRE  I".  Saint  Fulgencc,  évêque  d  e  Ruspe 

et  confesseur  (Pèro  latin,  535) 1 

Art.  I.  Histoire  de  sa  vie 1 

Art.  II.  Des  écrits  de  saint  Fulgence.  ...    10 

§  I.  Des  livres  h  Mouime 10 

§11.  Li-vTC  contre  les  Ariens 10 

§  m.  Les  trois  livres  au  roi  Trasamond.   .    19 
§  IV.  Lettre  de  saint  Fulgence  sur  le  vœu 

de  continence 25 

§  v.  Lettres  à  Galla  et  à  Proba 96 

§  VI.  Lettres  à  Eugippius,  à  Théodore  et  à 

Vénantie 29 

§  VII.  Livre  de  la  Foi  orthodoxe  à  Donat.    32 
§  VIII.  Livre  contre  le  sermon  de  Fastidio- 

sus 31 

§  IX.  Lettres  de  saint  Fulgence  à  Scarilas 

et  à  Ferrand,  diacre 35 

§  s.  Lettre  à  Jean  et  à  Vénérius  ....    41 
§  SI.  Lettre    des    évêques    d'Afrique    aux 

moines  de  Scythie 44 

§  XII.  Lettre  au  comte  Régin 50 

§  sill.  Livre  de  la  Trùîif^  à  Félix.    ...    50 
§  XIV.  Des  deux  livres  de  la  Rémission  des 

péchés 52 

§  XV.  Des  trois  livres  de  la  Vérité  de  la 
Prédestination  et  de  la  Grâce  de  Dieu.    56 

§  XVI.  Du  livre  de  la  Foi 63 

§  XVII.  Du  livre  de  la  Foi  contre  l'évêque 

Pinta,  de  quelques  Homélies 69 

§  xvm.  Des  livres  contre  Fabien.    ...    70 
§  XII.  Des  ouvrages  de  saint  Fulgence  que 

nous  n'avons  plus 74 

§  XX.  Des    écrits   faussement  attribués    à 

saint  Fulgence 75 

§  XXI.    Jugement    des    ouvrages  de  saint 
Fulgence.  Catalogue  des  éditions  qu'on 

en  a  faites 75 

CHAP.   H.   Saint  Rémi,   évèque   de  Reims  et 

apôtre  des  Français  (écrivain  latin,  535).    .    76 
CHAP.  III.  Eugippius,  abbé  de  Lucullane  (avant 
l'an  567),  et  Ferrand,  diacre  de  Carthage 

(vers  547,  écrivains  latins) 85 

CHAP.  IV.  Adrien,  Laurent  de  Novarre,  Mar- 
ceUin,  Elpidius,  Gilles,  Orientius  (écrivains 

latins  du  vi»  siècle) 95 

CHAP.  V.  Epiphane  Scholastique  (écrivain  la- 
tin), Théodore  Lecteur  (écrivain  grec  vers 

l'an    535) 102 

CHAP.  VI.  Sévère  de  Sozopole,  Jean  de  Scy- 
thople,  Rasile  de  Cilicie,  Jean  d'Egée,  Jean 
Epiphane  de  Constantinople,  Epiphane  de 
Constantinople  (écrivains  grecs  du  vi=  siè- 
cle)  106 

CHAP.  VII.  Saint  Jean  I  (526),  saint  Félix  IV 


P««ei 

(529),  Boniface  11  (531),  saint  Jean  II  (533) 

et  saint  Agapet  (536),  papes 112 

CHAP.  VIII.  Denis  surnommé  le  Petit  (écrivain 

latin,  510) 121 

CHAP.  l.\.  Saint  Césaire,  évêque  d'Arles  (écri- 
vain latin,  540) 125 

ART.  I.  Histoire  de  sa  vie 125 

Art.  II.  Des  écrits  de  saint  Césaire  d'Arles.  128 
§  I.  De  ses  sermons  recueillis  dans  VAp- 

pendice  de  ceux  de  saint  Augustin.     .    .  128 
§  II.  Des  homélies  de  saint  Césaire  recueil- 
lies dans  la  Bibliothèque  des  Pères  et  par 

Baluze 143 

§  ni.  De  quelques  autres  homélies  que  l'on 

a  attribuées  à  saint  Césaire 147 

§  IV.  Des  règles  de  saint  Césaire  ....  147 
§  V.  Des  lettres  de  saint  Césaire.  .  .  .  152 
§  VI.  Jugement  des  écrits  de  saint  Césaire. 

Éditions  qu'on  en  a  faites 155 

CHAP.  X.  Saiut  Benoît,  jiatriarche  des  moines 

d'Occident  (écrivain  latin,  543) 156 

CHAP.  XI.  Éphrem,  patriarche  d'Antioche  (écri- 
vain syrien  vers  546),  saint  Barsanuphe, 
anachorète  (écrivain  grec  vers  l'an  550).  171 
CHAP.  XII.  De  Procope  de  Gaze,  Eusthate 
(écrivain  grec,  moine  du  vi"  siècle),  un 
Commentateur  anonyme  sur  l'Octateuque, 
Choricius,  sophiste  de  Gaze  (écrivains  grecs 

vers  l'an  S46) 176 

CHAP.  XIU.  Jobius,  moine  d'Orient  (écrivain 

grec  du  VF  siècle) 181 

CHAP.  XIV.  Cosme  d'Egypte,  surnommé  Indi- 

copleustes  (écrivain  grec  du  vi=  siècle)  .  .  186 
CHAP.  XV.  Silvérius  (538)  etVigile  (555).  papes.  192 
CHAP.  XVI.  Arator,  poëte   chrétien  (écrivain 

latin,  551) 197 

CHAP.  XVU.  Pontien,  évêque  d'Afrique  (340), 
et  Aurélien,  évêque  d'Arles  (546)  (écrivains 
latins,  anonymes  grecs  du  vi»  siècle).  .  .  198 
CHAP.  XVllI.  Saint  Viventiole ,  évêque  de 
Lyon  (540)  ;  Léon,  archevêque  de  Sens  ; 
Trojanus,  évêque  de  Saintes  ;  saint  Nicé- 
tius,  évêque  de  Trêves  (566);  et  Mappinius, 
évêque  de  Reims  (550,  écrivains  latins).  .  201 
CHAP.  XIX.  Cassiodore,  chancelier  et  premier 
ministre  de  Théodoric,  roi  d'Italie,  et  en- 
suite abbé  de  Viviers  (écrivain  latin,  560).  207 

Art.  I.  Histoire  de  sa  vie 207 

Art.  II.  Des  écrits  de  Cassiodore 212 

§  I.  Des  lettres  de  Cassiodore 218 

§  II.  De  l'Histoire  ecclésiastique  appelée 
Tripartite,  de  la  Chronique,  du  Comput 
pascal  et  de  l'Histoire  des  Golhs.    .    .  220 
S  III.  Du,  Commentaire  de  Cassiodore  sur 


M 


TABLE  DES  CHAPITRES. 


les  Psaumes 223 

§  IV.  Du  Commentaire  sur  leCantique  des 

Cantiques  attribué  à  Cassiodore    ...  226 
§  V.  Du  Livre  de  l'Institution  aux  lettres 

divines 226 

§  VI.  Traité  des  sept  arts  libéraux,  de  l'o- 
raison, de  l'orthographe  et  des  tropes 

ou  des  figures 235 

§\i].  Du  Traité  de  l'âme 238 

§  VIII.  Des  livres  de  Cassiodore  (jui  sont 
perdus,  ou  qu'on  lui  a  faussement  attri- 
bués  242 

Abt.  m.  De  la  doctrine  de  Cassiodore.    .    .  !43 
Abt.  IV.  Jugement  des  écrits  de  Cassiodore. 
Éditions  qu'on  en  a  faites 353 

CHAP.  .\X.  Justinien,  empereur  (écrivain grec, 
566) 23* 

CHAP.  .\XI.  Dacius,  évoque  de  .Milan;  Justi- 
nien et  Juste,  évéques  d'Espagne  ;  Aprigius, 
évèque  de  Badajoz  (  écrivains  latins  du 
VI»  siècle);  Arétas,  évèque  de  Césarée  ;  Aga- 
pet,  diacre  do  Coustantinople;  Constantin 
le  diacre  (tous  écrivains  grecs  vers  l'an 
535) 264 

CHAP.  .\.\II.  Zacharie,  évèque  de  Mitilène 
(après  l'an  536);  Théodore  et  Cyrille  de  Scy- 
tople;  Timolhéc,  prêtre  de  Jérusalem;  Eu- 
sèbe,  patriarche  d'Alexandrie  (écrivains 
grecs  du  vi'  siècle) 270 

CHAP.  X.MII.  Saint  Crégentius,  archevêque  de 
Taphar  (553)  ;  Nouuosus  et  Eutychieu  (écri- 
vains grecs  du  vi«  siècle) 279 

CHAP.  XXIV.  Junilius,  évèque  d'Afrique  (530)  ; 
Primase,  évèque  d'Adrumète  (553);  Bellator 
efMucien  (vers  le  même  temps,  écrivains 
latins) 281 

CHAP.  XXV.  Facundus,  évèque  d'Uermiane 
(547),  et  Rustique,  diacre  de  Rome  (549, 
écrivains  latins) 285 

CHAP.  XXVI.VictordeTunones  (566);  Libéral, 
diacre  de  Carthage  (vers  556)  ;  Victor  de 
Capoue  (550,  écrivains  latins) 302 

CHAP.  XXVII.  Saint  Fortunat  (576);  Eusèbe, 
évèque  d'Antibes  (avant  573):  saint  Ger- 
main, évèque  de  Paris  (576);.\lérérius,  évè- 
que d'Angoulème  (vers  570  ;  écrivains  la- 
tins)  306 

CHAP.  XXVIII.  Saint  Fcrréol,  évèque  d'Uzès  ; 
saint  Domnole,  évêijue  du  .Mans  (57G);  saint 
Félix,  évèque  de  Nantes  (382);  Chilpéric, 
roi  de  France  (écrivains  latins  du  vi' siècle).  312 

CHAP.  XXl.X.  Sainte  Radcgoudc,  reiuc  de 
France  (587),  et  sainte  Césarie,  abbesse  de 
Saint-Jean  d'Arles  (vi«  siècle  ;  écrivains  la- 
lins) ai5 

CHAP.  XXX,  Saint  Gildas,  abbé  deRuis;  saint 
Frédolin,  abbé  de  Sainl-llilaire,  à  Poitiers 
(écrivains  latins  du   vi«  siècle) 318 

CHAP.  .\XXI.  Jauuarin,  moine  de  Saint-Auré- 
lien  d'Arles  (après  l'an  553)  ;  saint  Prétex- 
tât, évèque  de  Rouen  (58G);  salut  Véran, 
évèque  de  Cavaillon  (après  l'an  389);  Aut- 
monde.  évèque  de  Toul  (à  la  fin  du  vi'  siè- 
cle; écrivains  laliiis) 321 

CHAP.  XXXII.  Saint  Aunaire,  évèque  d'Auxcrrc 
(586);  Etienne,  prêtre  d'Auxerre;  Si-dalus, 
«vêquc  de  Béliers;  saint  Yrieix,  abbé  d'A- 


tane  (591);   Gontran,  roi  de   France  (593  ; 
écrivains  latins) 323 

CHAP.  XXXllI.  Pelage  I,  pape  (559) 327 

CHAP.  .XXXIV.  Les  papes  Jean  IH  (572);  Pe- 
lage II  (390) 333 

CHAP.  XXXV.  Timothéc,  prêtre  de  Constanti- 
nople.  .4nonymc  sur  la  réception  des  ma- 
nichéens (auteur  anonyme  qui  écrit  contre 
les  manichéens;  écrivains  grecs  du  vi«  siè- 
cle)  340 

CHAP.  XXXVI.  De  la  Chronique  d'Édesse  et 
d'une  autre  chronique  anonyme,  par  des 
écrivains  grecs  du  vi«  siècle 342 

CHAP.  X.XXVII.  Julien,  évèque  d'Halicar- 
nasse  ;  Domitien,  évoque  d'Ancyre  (écri- 
vains grecs  du  vi«  siècle);  Vérécundus,  évè- 
que d'Afrique  (écrivain  laliu  du  \l'  siècle); 
Paul  le  Silentiaire  ;  Eustralius,  prêtre  de 
Constantinople  (écrivains  grecs,  même  siè- 
cle). Cogitosus  (écrivain  latin,  même  siècle).  344 

CHAP.  XXXVIII.  Agnellus  (vers  556),  Gordien, 
Simplice  (570)  et  Colomba  (598,  écrivains 
latins) 349 

CHAP.  XXXIX.  Saint  Martin  de  Dume,  archevê- 
que de  Brague  (écrivain  latin,  vers  580).    .  350 

CHAP.  XL.  Eutychius  (582)  et  Jean  le  Scholas- 
tiquc  (575),  patriarches  de  Constantinople 
(écrivains  grecs) 352 

CHAP.  XLI.  Grégoire  (593)  et  saint  Anastase 
(598),  patriarches  d'Antioche  (écrivains 
grecs) 856 

CHAP.  XLII,  Saint  Grégoire,  évèque  de  Tours 

(Père  latin,  595) 365 

Art.  I.  Histoire  de  sa  vie 365 

Art.  11.  Des  écrits  de  saint  Grégoire  de  Tours.  367 
§1.  L'Histoire  ecclésiastique  des  Français.  367 
§  II.  Livre  de  la  Gloire  des  Martyrs.  .  .  372 
§  III.  Livre  dii  Martyr,  des  Miracles  et  de 

la  Gloire  de  saint  Julien 374 

§  IV.  Livre  de  la  Gloire  des  Confesseurs.  .  375 
§  V.  Des  Miracles  de  saint  Martin  .    .    .377 

§  VI.  les  T'ies  des  Pères 379 

§  VII.  Des  Commentnires  sur  les  Psaumes, 
des  Miracles  de  saint  Ayuiré,  des  Actes 
de  saint  Julien  et-de  l'Histoire  des  sept 

DorniaJit 383 

§  VIII.  Des  Vies  de  saint  Uaurille,  de  saint 
rnciJ,  et  de  quelques  autres  écritsattri- 
bués  à  saint  Grégoire  de  Tours.    .    ,     .  384 
§  IX.  De  quelques  ouvrages  de  saint  Gré- 
goire qui  sont  perdus 385 

Art.  m.  Doctrine  de  saint  Grégoire  de  Tours  385 
Abt.  IV.  Jugement  des  écrits  de  saint  Gré- 
poire  de  Tour» 395 

CHAP.  XLIII.  Marins,  évèque  d'Avcnches  (596); 
Tétérius,  clerc  de  l'église  d'Auxcrre  ;  Uoté- 
rius,  historien  (écrivains  latins,  vers  le 
même  temps) 399 

CHAP.  XLIV.  Dyname,  Patrice  (écrivain  latin, 
601). , 400 

CHAP.  XLV.  Saint  Fortunat,  évèque  de  Poi- 
tiers (écrivain  laliu,  vers  609);  Baudonivie, 
religieuse  de  Poitiers  (vers  le  même  temps).  402 

CHAP.  XLVI.  Evagre  d'Epiphanie,  historien 
ecclésiastique  (écrivain  grec,  après  l'an  593), 
Jean  d'Asie  ou  d'Éphèse  (écrivain  grec, 
vers  le  même  tempç). 415 


TABLE  DES  en  APURES.                                                VII 

CHAP.  XLVII.  Saint  Léandre,    évÉque  de   Se-  l'an  CIÎJ);  saint  Bcrtchran,  évêquo  du  Mans 

ville  (éoriTiiin  latin,  fi03);  Jean,    abbiS    de  (écrivain  lutin,   aprèa  l'au  029);  saint  l'ro- 

Biclnr  (écrivain  latin,  590) 422  tade,    do    licsançon    (écrivain   latin,   C2S); 

CHAP.  XLYIII.  Jean  le  Jeûneur,  patriarche  de  saint  Kusiase,  abbé  de  Liiseu  (écrivain la- 

Constantinuple   (écrivain  grec,  tiO^);  Lici-  tin,  G2.'i);    Luculeutius    (temps    incertain, 

nien,   évCque   de  Cartbagcnc  (écrivain  la-  écrivain  latin) ,     .    •    .  630 

tin,  595);  Sévère,  évéque   de  Malaga  (écri-  CHAP.  LV.  Marc  (écrivain  latin,   012);  Sébas- 

vain  latin,  vers  le  mémo  temps)    .    .    .    .  420  tien  et  Siniplice,  disciples  de  saint  Benoît; 

CHAP.  XLIX.  Saint  Grégoire  le  Grand,  pape  et  Eutrope,  évéque  de  Valence,   et  Maxime, 

docteur  de  l'Église  (Père  latin,  601).    .    .  429  évù([ne  de  Saragosse  (tous  écrivains  latins 

Abt.  I.  Histoire  de  sa  vie 429  au  coinnicncenient  du  vii"  siècle).    .    .    .634 

Art.  II.  Des  écrits  de  saint  Grégoire.    .    .    .  441  CHAP.  LVl.  Marc  l'Ermite  (écrivain  grec,  épo- 

§  I.  De  ses  livres  de  Morale  sur  Job.    .    ,  W  que   incertaine,   peut-être   au   commence- 

§  II.  Des  homélies  sw)-  le  prophète  Ézéchiel.  452  ment  du  v»  siècle  ;  Galland  le  place  en390).  636 

§  III.  Des  homélies  sur  les  évangiles    .    .  458  CHAP.  LVII.    Audronicien,   Lucius  Charinus, 

§  IV.  Du  Pastoral  de  saint  Grégoire.  .     .     .  4G2  Méthrodore,  Héraclien    et    Léontius  (écri- 

§  V.  Des  Dialogues  de  saint  Grégoire.    .    .  470  vains   grecs,  vers    le    commencement  du 

Art.  m.  Des  lettres  de  saint  Grégoire.  .     .     .  479  vii«  siècle) C43 

§1.  Lettres  du  premier  livre 479  CHAP.  LVlll.    Les    papes    Boniface   IV    (614), 

§  II.  Livre  ii.  Des  lettresde  saint  Grégoire.  486  Deusdedit   (616),    Boniface  V  (625),  Hono- 

§  m.  Livre  m.           —                 —                490  rius  (C28),  Jean  IV  (642) 645 

§  IV.  Livre  iv.            —                 —                494  CHAP.  LIX.  Jean  Philoponus   (écrivain  grec, 

§  V.  Livre  V.              —                 —               499  610),  Tbéodose,  Conon,  Eugène  Thémistius, 

§  VI.  Livre  vi.            —                 —               503  Théodore,  Nicias,  Léontius  et  Georges  Pi- 

§  vu.  Livre  VII.          —                 —               506  sidès  (écrivains  grecs,  vers  le  même  temps).  650 

§  VIII.  Livre  viil.        —                  —                509  CHAP.  LX.    Hésychius,    prêtre    de   Jérusalem 

'§  IX.  Livre  ix.            —                 —               513  (écrivain  grec,  en  513  d'après  Galland),  et 

§  X.  Livre  x.              —                 —               518  Hésychius,  prêtre  de  Constantinople  (écri- 

§  XI.  Livre  XI.            —                 —                520  vain  grec,  versle même  temps,  peut-êtreen 

§  XII.  Livre  XII.          —                  —                528  513  d'après  Galland 654 

§  XIII.  Livre  XIII.        —                 —               529  CHAP.  LXI.  Léonce,  évêque  de  Naples  en  Cy- 

§  XIV.  Livre  xiv.        —                  —                 535  près  (écrivain  grec,  entre  602  et  616).     .    .  658 

§  XV.  Appendice  aux  lettres  de   saint  Gré-  CHAP.  LXII.  Léonce   de  Bysance,   avocat,    et 

goire 535  depuis  moine  (écrivain  grec,  610).    .     .    .  666 

Art.  iv.  Du  Sacramentaire  de  saint  Gre'goire  CHAP.  LXllI.  Nicéphore,maître  d'Antioche  (écri- 

et  des  autres  écrits  qui  regardent  la  Celé-  vain  grec,  commencement  du  viin  siècle); 

bratiôn  des  offices  divins 537  saint  Siméon  Stylite  le  Jeune  (597,  écrivain 

Art.  v.  Des  Commentaires  sur  le  premier  grec);  Paul,  diacre  de  Mérida  (écrivain  la- 

livre  des  Rois,  sur  le  Cantique  des  Canti-  tin,    610) 673 

ques,  sur  la  Pénitence,  et  de  la  Concor-  CHAP.  LXIV.  Saint   Jean   Climaque,  abbé  du 

dance  de  l'Écriture 545  Mont-Sinaï  (écrivain grec,  605);  Jean,  abbé 

Art.  VI.  Extraits  des  écrits  de  saint  Gré-  de  Raïthe  (écrivain  grec,  après  605).    .    .  676 

joire,  par  Patérius  et  par  Alulfe.    .    .    .651  CHAP.  LXV.  Agathias,  poète  et  historien  (écri- 

Art.  vil.  Doctrine  de  saint  Grégoire.    .    .    .552  vain  grec,  590):  Auremond,  abbé  du  Maire 

Art.  viii._  Jugement  des  écrits  de  saint  Gré-  (écrivain   latin,  625);   Sonnace,  évêque  de 

goire.  Éditions  qu'on  en  a  faites.    .    ,    .583  Reims  ;  Florent  prêtre  de  l'église  de  Trois- 

CHAP.  L.  Saint  Euloge,    patriarche  d'Alexan-  Châteaux    (écrivains    latins,    après   625).  692 

drie  (608);    Saint  Grégoire,  évêque  d'Agri-  CHAP.  LXVI.  Dorothée,  archimandrite  :  Hypéré- 

gente  (vers  598;  écrivains  grecs)  ....  587  chius,  prêtre;  Antioehus,  moine  de  Saint- 

CHAP.  LI.  Anastase   Sinaïte,   prêtre  et  moine  Sabas  (écrivains  grecs,  au  commencement 

(écrivain  grec,  vers  680) 594  du  vil"   siècle) 695 

CHAP.  LU.  Fauste,  moine  de  Glanfeuil  (écri-  CHAP.  LXVII.  Modeste,  patriarche  de  Jérusa- 

vain  latin,  VIF  siècle) 610  lem  (écrivain  grec,  629);  Georges  d'AIexan- 

CHAP.  LUI.  Saint  Colomban,  abbé  de  Luxeuil  drie  (630);  Jean,  moine  d'Antioche  (vers  le 

(écrivain  latin,  615) 612  même  temps;  écrivains  grecs);    Aransius, 

Art.  I.  Sa  vie 612  Helladius,   Juste,   Nonnitus  et  Conantius, 

Art.  11.  Écrits  de  saint  Colomban 617  évêques     d'Espagne  (écrivains  latins   au 

§  i.  Règle  de  saint  Colomban 617  commencement  du  vii«  siècle) 698 

§  II.  Instructions  ou  discours  de  saint  Co-  CHAP.  LXVIII.  Jean  Mosch,  abbé  (619  ou  620), 

lomban 622  et  Sophrpne,  évêque  de  Jérusalem  (619  ou 

g  III.  Des  lettres  de  saint  Colomban.    .    .  624  744)  (écrivains  grecs) 700 

■       §  IV.  Poésies  de  saint  Colomban  .     .    .    .  62T  CHAP.  LXIX.  Saint  Isidore,  évêque  de  Séville 

§  T.  Des  ouvrages  de  saint  Colomban  qui  et  docteur  de  l'Église  (écrivain  latin,  636).  710 

sont  perdus 629  CHAP.  LXX.  Braulion,    évêque  de  Sarragosse 

§  VI.  Jugement  des  écrits  de    saint  Colom-  (vers  l'an  646);    Jean,   évêque  de  la  même 

ban.  Édition?  qu'on  en  a  faites.    .     .    .  629  ville;  saint  Sulpice,   évêque  de  Bourges; 

CHAP.  LIV.  Varnahaire  (écrivain  latin,  après  saint  Didier,  évêque  de  Cabors;    Vérns, 


vni 


TABLE  DES  CHAPITRES. 


Figt* 


éyèqne  de  Rodez  ;  saint  Valère,  abbé  (655; 
tous  écrivaius  latins  du  vii«  siècle)  .    .    .728 

CHAP.  LXXI.  Saint  Gnl,  abbé,  (646);  Jonas, 
abbé  d'Elnone;  saint  Cuméen,  abbé  en  Hi- 
beniie;  saint  Donat,  abbé  de  Besançon;  la 
Bègle  du  Maître  (deux  anonymes;  tous 
écrivains  latins  du  vii«  siècle) .736 

CHAP.  LXXII.  Marculphe,  moine  (660):  saint 
Livin  (vers  l'an  656);  Eugène,  évêque  de 
Tolède  (657);  Apollonius  de  Novarre  (xv«  siè- 
cle ;  écrivains  latins) 739 

CHAP.  LXXIII.  Frédiîgaire,  historien  (658),  et 
ses  continuateurs  (  écrivains  latins  du 
vil"  siècle) 744 

CUAP.  LXXIV.  Les  papes  Tbéodore  I  (649), 
saint  -Martin  (655)  et  Maure,  archevêque  de 
Ravenne  (648;  écrivains  latins) 748 

CHAP.  LXXV.  Saint  Éloi,  évêque  de  Noyon 
(659):  saint  Ouen,  évêque  de  Rouen  (683; 
écrivains   latins  ) 753 

CHAP.  LXXVI.  Saint  Maxime,  abbé  de  Chryso- 
polis (écrivain  grec, 662);  Anastase,  disciple 
de  saint  Maxime  (même  année)  ;  Anastase, 
apocrisiaire  (666);  Théodore  et  Théodose 
(vii«  siècle  ;  tous  écrivains  grecs)  ....  760 

CHAP.  LXXVII.  Saint  Udephonse,  archevêque 
de  Tolède  (667);  Quiricius  de  Barcelone 
et  Taion  de  Saragosse  (écrivains  latins, 
Ters    le  même  temps) 773 

CHAP.  LXXVIIl.  Saint  Priest  ou Préjcct,  évêque 
de  Clermout  (678);  saint  Léger,  évêque 
d'Autun  (6"8):  saint  Arbogaste,  évêque  de 
Strasbourg  (678),  et  Ternacc,  évêque  de  Be- 
sançon (vers  680  ;  tous  écrivains  latins).    .  778 

CHAP.  LXXIX.  Les  papes  Vitalien  (672),  saint 
Agathon  (682),  saint  Léon  II  (684),  saint 
Benoit  11  (685) 781 

CHAP.  LXXX.  Saint  Siviard,  abbé  (vers  687, 
écrivain  latin):  Jean,  archevêque  de  Thes- 
saloniquc;  Théodore,  abbé  de  Rhaîte  ; 
Pierre  de  Laodicée;  Thalassius;  l'abbé 
Isaïe:  l'abbé  Théofride  :  Cosme,  moine  de 
Jérusalem  :  Pantaléou,  diacre  de  Constan- 
tinoplc  (écrivains  grecs  du  vu*  siècle).    .     .  786 

CHAP.  LXXXI.  Julien,  archevêque  de  Tolède 
(690);  Idalius,  évêque  de  Barcelone  (vers le 
même  temps;  écrivains  latins) 791 

CHAP.  LXXXII.  Théodore,  archevêque  de  Can- 
torbéry  (690,  écrivain  latin) 796 

CHAP.  LXXXlll.  Saint  Fructueux,  archevêque 
de  Brague  (666);  Adamnan,  abbé  de  Hi  (704 
ou  705);  Arculfe,  évêque  gaulois  (vers  le 
même  temps);  Céolfride,  abbé  de  Wire- 
mouth  et  de  Jarou  (716) 799 

CHAP.  LXXXIV.  Saint  Adelme ,  évêque  de 
Schirburn  (709):  Apponius  (vu»  siècle);  Cres- 
conius.  évêque  d'Afrique  (viF  siècle;  écri- 
vains latins):  Démétrius  de  Cizique;  Jean 
de  Nicée  (du  vii"  siècle;  écrivains  grecs); 
saint  Lucius,  archidiacre  (vi»ouvii«  siècle, 
écrivain  latin) 804 

CHAP,  LXXXV.  Ursin,  abbé  de  Ligugé;  saint 
Ausbert  de  Rouen;  Évance,  abbé  de  Tro- 
clar;  Défenseur,  moine  de  Ligugé  (sur  la  fin 
du  vii°  siècle  ;   écrivains  latins);  Denis  de 

Telmera  (écrivain  syrien) 811 

FIN   DE    LA   TABLE 


Ptgu 

CHAP.  LXXXVI.  Conciles  du  vi«  siècle.   .    .    .814 

Art.  I.  Conciles  d'Épaone  et  de  Lyon   (517).  814 

Art.  II.  Des  conciles  de  Constanliuople  (518), 
de  Jérusalem  (518),  de  Tyr  (518)  et  de 
Rome  (519) glS 

Art.  III.  Conciles  d'Arles  (524),  de  Lérida 
(  524)  et  de  Valence  (524) 823 

Art.  IV.  Des  conciles  de  Junque  (524)  et  de 
Carthagc  (525) 828 

Art.  V.  Du  concile  de  Carpentras  (527),  du 
second  d'Orange  (529),  du  troisième  de  Va- 
lence (329)  et  du  second  de  Vaison  (529).    .  831 

Art.  VI.  Concile  de  Tolède  (531) 839 

Art.  VII.  Des  conciles   de   Rome  (530,  531).  841 

Art.  viii.  De  la  conférence  des  Catholiques 
avec  les  Orientaux  ou  Sévériens,  à  Constan- 
tinople  (533; 843 

Art.  IX.  Du  second  concile   d'Orléans  (533).  847 

Art.  X.  Des  conciles  de  Clermont  en  Auver- 
gne (535),  et  de  Carthage  (535) 849 

Art.  XI.  Conciles  de  Constantinople  et  de 
Jérusalem  (536).  .     .     • 851 

Art.  XII.  Troisième  concile  d'Orléans  (538)  et 
du  concile  de  Barcelone  (540) 856 

Art.  XIII.  Du  concile  d'Afrique  (541)  et  du 
quatrième  concile  d'Orléans  (541).    .    .    .859 

Art.  XIV.  Des  conciles  de  Constantinople 
(54Ti,  du  cinquième  d'Orléans  (549);  du 
deuxième  de  Clermont  (549)  et  concile  de 
Toul  (550) 862 

Art.  XV.  Concile  de  Mopsueste  (550),  du  se- 
cond concile  de  Constantinople,  cinquième 
général.  Edit  de  Justinicn  contre  Origène.  .  865 

Art.  xvi.  Conciles  de  Paris  (551),  d'Arles  (554) 
et  de  Paris  (557);  ordonnance  de  Childebert 
(?58):  édit  de   Clotaire  (559) 882 

Art.  XVII.  Conciles  de  Landaf  (560).    .    .    .884 

Art.  sviii.  Concile  de- Brague  (863).    .    .    .885 

Art.  XIX.  Conciles  de  Saintes  (563),  de  Lyon 
(566)  et  de  Tours  (566) 886 

Art.  XX.  Conciles  de  Brague  et  de  Lugo  (572)  891 

Art.  XXI.  Conciles  de  Paris  (573)  et  de  Chft- 
lons  (579) 892 

Art.  xïu.  Conciles  de  Màcon  (581),  de  Lyon 
(583)  et  de  Braine  (580) 894 

ART.  XXIII.  Conciles  de  Valence  (584)  et  de 
Mâcon  (585; 896 

Art.  XXVI.  Conciles  d'Auxerre  (après  585;,  de 
Clermont  (585)  et  de  Constantinople  i587).  897 

Art.  XXV.  Conciles  de  Tolède(586)et  de  Nar- 
bonne  (589),  de  Sauriciac  et  de  Rome  (589).  899 

Art.  XXVI.  Des  conciles  de  Poitiers  et  de  Metz 
au  sujet  de  troubles  excités  &  Sainte-Croix 
de  Poitiers  (590) 905 

Art.  XXVII.  Des  conciles  de  Nanterre  (591), 
de  Saragosse  (592),   de  Tolède  (597),  et  de 

Barcelone  (599} 906 

CHAP.  LXXXVll.  Des  conciles  du  \ii«  siècle.  .  908 

Art.  1.  Concilesde  Rome(OOl),  de  M'orchester 
(601),  de  Byzacène  (602),  de  Numidie  (602), 
de  Cantorbéry  (605),  de  Rome  (606),  de  To- 
lède (610)  et  d'Égara  (614) 908 

Art.  II.  Conciles  de  Paris  (615),  de  Kent 
(617),  de  Séville  (619)  et  de  Théodosiopo- 
lis  (020) 'Mi 

DES   C1IAP1TBES. 


HISTOIRE  GÉNI'RALE 


DES 


AUTEURS  SACRÉS 

ET  ECCLÉSIASTIQUES. 


AUTEURS    ECCLÉSIASTIQUES. 


[suite  du  vi"  siècle.] 


CHAPITRE  I. 


Saint  Fulgence,  évêqne  de  Ruspe  et  confesseur. 


[Père  latin,   en  l'an   533.] 


CHAPITRE  I". 


niSTOIRE   DE    SA    VIE. 


l.  Genséiic,  roi  îles  Goths ,  s'étant  em- 
paré de  Cartilage,  en  chassa  tous  les  séna- 
teurs après  les  avoir  tlépouillés  de  leurs 
biens.  Gordien,  aïeul  de  saint  Fulgence,  fut 
de  ce  nombre.  [1  se  retira  en  Italie  avec  sa 
famille  et  y  mourut  quelque  temps  après. 
Deux  de  ses  fils  retournèrent  en  Afrique 
dans  l'espérance  de  recouvrer  la  succession 
de  leur  père  ;  mais  ils  ne  purent  demeurer 
dans  Cartilage  où  leurs  maisons  avaient  été 
données  aux  prêtres  ariens.  Etant  toutefois 
rentrés  dans  la  possession  de  leurs  biens  par 
l'autorité  du  roi,  ils  passèrent  dans  la  By- 
zacène  et  s'établirent  .■'iTélcpte.  L'un  d'eux, 
nommé  Claude,  épousa  Marie-Anne,  femme 
chrétienne  et  d'honneur,  dont  il  eut  un  iils 
qu'il  nomma  Fulgence.  C'était  en  468.  Claude 
ne  survécut  pas  longtemps  à  la  naissance  de 
ce  fils.  Marie-Anne,  sa  mère,  chargée  seule 
de  son  éducation,  lui  fît  apprendre  dès'  son 
bas  âge  les  lettres  grecques,  afin  qu'il  pro- 
nonçât mieux  celte  lani;ne,  et  ne  lui  permit 
point  de  pai  1er,  ni  de  hre  eu  latin  qu'il  n'eût 
XI. 


appris  par  cœur  flomère  entier  et  une  bonne 
partie  de  Ménandre.  Fulgence  prononça  en 
effet  toute  sa  vie  le  grec  comme  s'il  eût  été 
né  dans  la  Grèce,  gardant  exactement  les 
aspirations  et  toutes  les  autres  propriétés  de 
cette  langue.  Après  cela,  elle  lui  donna  des 
maîtres  pour  la  langue  latine  et  pour  la 
grammaire  ,  dans  lesquelles  il  fit  de  grands 
progrès. 

2.  Ses  études  furent  interrompues  par  le 
soin  qu'il  fut  obligé  de  prendre  de  ses  af- 
faiies  domestiques.  Mais  il  se  conduisit  en 
tout  suivant  les  ordres  et  les  avis  de  sa  mère 
à  laquelle  il  était  parfaitement  soumis.  Il 
usait  de  son  pouvoir  avec  bonté,  traitant  ses 
débiteurs  avec  douceur  et  sans  les  vexer  ja- 
mais. Les  reproches  qu'on  lui  en  lit  ne  con- 
tribuèrent pas  peu  à  lui  faire  trouver  pesant 
le  poids  des  affaires  dont  on  l'avait  chargé  ; 
et,  commençant  à  se  dégoûter  de  la  vie  du 
monde,  il  sentit  croître  en  lui  l'amour  d'une 
vie  toute  opposée  à  celle  du  siècle.  11  visi- 
tait souvent  les  moines,  prenant  plaisir  dans 
leurs  conversations  et  à  s'instruire  de  leurs 
observances.  Ayant  considéré  que  la  retraite 
et  l'abstiueuce  dans  laquelle  ils  vivaient,  les 
mcUaieut  à  couvert  des  tentations  du  siècle, 


Il  opl  clinr. 
gè  dos  nlT.iires 
de  su  Tainillu. 


Cai..  II. 


2 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIOITS. 


et  qu'ils  vivaient  ensemble  dans  une  vraie 
charité,  il  fut  vivement  touclié  d'embrasser 
le  même  ëtat,  sedistint  souvent  à  lui-même  : 
«  Pourquoi  travaillons-nous  dans  ce  siôcle 
sans  l'espérance  des  biens  futurs?  Si  nous 
désirons  de  nous  réjouir,  quoiqu'il  soit  beau- 
coup mieux  de  bien  pleurer  que  de  se  mal 
réjouir,  les  plaisirs  de  ceux  dont  la  cons- 
cience est  tranquille  en  Dieu  et  qui  ne  crai- 
gnent rien  que  le  péché,  ne  sont-ils  pas  pré- 
férables? «  Sur  ces  réilexions  et  sur  d'autres 
très-salutaires,  il  forma  le  dessein  de  renon- 
cer au  monde  ;  mais  il  ne  s'en  ouvrit  à  per- 
sonne, se  contentant  de  s'exercer  dans  la 

c.p.iii.  maison  de  sa  mère  à  la  retraite,  au  jeune  et 
à  la  prière.  11  rompit  insensiblement  avec 
ses  anciens  amis,  diminua  la  quantité  du 
boire  et  du  manger  qu'on  avait  coutume  de 
lui  servir,  ne  fréquenta  plus  les  bains  ;  en 
sorte  qu'étant  encore  laïque,  il  vivait  com- 
me un  moine.  Ceux  qui  l'avaient  coiuiu,  ne 
sachant  point  la  cause  de  son  changement, 
l'attribuèrent  à  une  faiblesse  d'esprit.  Mais 
Fulgence,  en  qui  l'amour  de  la  vie  reli- 
gieuse croissait  chaque  jour,  ayant  lu  un 
sermon  de  saint  AugusUn  sur  le  psaume 
XXXVI,  en  fut  si  touché,  qu'il  résolut  de  ren- 
dre, public  son  dessein  en  changeant  d'ha- 
bit, afin  qu'il  ne  fût  plus  obligé  de  recevoir 
amiablement  chez  lui  ceux  avec  qui  il  avait 
vécu  longtemps  d'une  manière  mondaine. 

3.  La  plupart  des  évêques  que  Gensciric 
avait  contraints  de  soitir  de  leurs  diocèses, 
étaient  relégués  dans  les  lieux  voisins.  Ce 
prince  en  usait  ainsi  dans  l'espérance  que, 
souflVant  les  incommodités  de  l'exil  proche 
du  lieu  de  Icni-  demeure,  ils  en  seraient  plus 
tentés  de  renoncer  à  la  foi  catholique.  Fauste, 
l'un  de  ces   évêques ,  bâtit  un  monastère 

lap.  1'.  dans  le  lieu  de  sou  exil,  où  il  vivait  avec  tant 
d'édification  qu'il  s'attirait  le  respect  de  lous 
les  chrétiens.  Fulgence,  de  qui  il  était  connu, 
l'alla  trouver  pour  lui  ouvrir  son  cœur.  Le 
saint  évoque  sachant  que  Fulgence,  né  de 
parents  nobles  et  riches,  avait  été  élevé 
dans  les  délices,  le  rebuta  d'abord,  comme 
s'il  ne  fût  venu  dans  son  monastère  que 
pour  tromper  par  un  extérieur  de  piété  les 
servitiHU's  do  Dieu  qui  y  demeuraient.  <c  Vous 
serez,  lui  dit-il,  reçu  au  nomijre  des  moines 
lorsque,  ayant  changé  votre  ancienne  habi- 
tude de  vivie  dans  les  plaisirs,  vous  ne  se- 
rez point  ollcnsi;  à  la  vue  des  mets  et  des 
vêlemenls  les  plus  vils.  »  Ce  discours  ne  (it 
qn'augnu'nlcr  dans  Fulgence  le  désii'  d'une 


Il  so   rcliro 
dans   un    mo> 


vie  retirée  et  pénitente.  Il  se  jeta  aux  ge- 
noux de  Fauste,  lui  baisa  la  main,  et,  les 
yeux  baissés  vers  la  terre,  il  lui  demanda 
avec  beaucoup  d'humilité  l'entrée  du  mo- 
nastère pour  y  vivre  sous  sa  discipline.  Le 
saint  vieillard,  ne  pouvant  se  refuser  h  ses 
prières,  lui  accorda  sa  demande  aux  condi- 
tions de  l'éprouver  pendant  peu  de  jours, 
pour  savoir  si  ses  actions  étaient  d'accord 
avec  ses  paroles.  Le  bruit  de  la  retraite  du 
jeune  homme  se  répandit  bientôt  dans  sa 
famille  et  parmi  ses  amis.  Les  gens  de  bien 
le  congratulaient  de  s'être  fait  moine.  Les 
méchants  que  cette  retraite  couvrait  de  cou-  cap.v, 
fusion,  en  murmuraient.  Mais  plusieurs  avec 
qui  il  avait  lié  amilié  dès  son  enfance  suivi- 
rent son  exemple  et  renoncèrent  au  monde. 
Sa  mère  fut  troublée  de  sa  retraite,  parce 
qu'elle  se  reposait  sur  lui  du  soin  de  sa 
maison,  et  vint  au  monastère  en  criant  et  se 
lamentant ,  comme  si  son  fils  eut  été  i\  la 
veille  de  sa  mort.  Quoique  pieuse,  elle  char- 
gea d'injures  l'évoque  Fauste,  en  lui  disant  : 
(i  Rendez  le  fils  à  sa  mère  et  le  maître  au  ser- 
viteur. Les  évêques  ont  toujours  comblé  les 
veuves  de  bienfaits.  Pourquoi  soull'rez-vous 
aujourd'hui  que  la  maison  d'une  veuve  pé- 
risse par  vous?  »  L'évêque  lui  représenta 
avec  beaucoup  de  sagesse,  que  ce  n'élait  point 
lui  qui  lui  avait  enlevé  son  fils,  et  qu'elle 
ne  devait  point  trouver  mauvais  qu'il  se  fût 
consacré  au  service  de  Jésus-Christ  ;  il  lui 
refusa  même  de  le  voir  :  ce  qui  lui  fit  re- 
doubler ses  cris  et  ses  larmes.  Fulgence  qui 
aimait  tendrement  sa  mère  et  qui  l'enten- 
dait g(''mir,  en  fut  sensiblement  touché  ;  mais 
élevant  son  cœur  ;\  Dieu  il  demeura  ferme. 
Après  cette  épreuve ,  Fauste  l'admit  sans 
peine  dans  sa  communauté ,  disant  à  ses  re- 
ligieux :  «  Ce  jeune  homme  pourra  suppor- 
ter tous  les  travaux  que  \ous  lui  iuqioserez, 
puisqu'il  a  pu  mépriser  la  douleur  de  sa 
mère.  »  Ses  austérités  furent  incroyables , 
il  n'usait  ni  de  vin  ni  d'huile,  mangeant  et 
buvant  si  peu,  que  son  corps  en  devint  tout 
desséché  et  sa  peau  converle  d'ulcères.  Mais 
à  mcsiu-e  que  sa  chair  s'atlaiblissait,  son  es- 
prit prenait  de  nouvelles  forces;  et  comp-  c^p.  n, 
tant  p(uu-  rien  tout  ce  qu'il  faisail,  il  s'élu- 
diait  à  devenir  de  jour  en  jour  plus  parfait. 
Il  laissa  à  sa  mère  la  portion  de  bien  (jui 
lui  appartenait  quoiqu'il  eût  un  frère  plus 
jeuiH!  que  lui  nonuni'^  Claude,  voulant  toute- 
fois (|uo  cette  portion  fut  ensuite  donnée  à  ce 
frère,  s'il  se  conduitait  bien.  Par  celte  sage 


CnAPITltl':  I.  —  SAIXT  FIXGKNCE  DE  RUSPE. 


[Vl'  SIKCLE.] 

ilisposilion,  il  songeait  i'i  abattro  rorjriicil  ilc 
son  jeune  frère,  afin  qiie,  s'il  ne  voulail  pas 
(■•Ire  Inmilile  par  un  uinlif  de  pii'-li",  il  appi'it 
(lu  moins  à  IV'trn  i\  cause  ilc  la  siuccssiiin  à 
laquelle  sa  sagesse  |)ouvail  lui  dcuuK!!-  lieu 
de  prétendre. 

4.  Il  ne  restait  plus  aucun  des  obstacles 
(pie  Fulj,'cnco  avait  eus  à  surmonter  dans 
les  commeiK'cmeuts  de  sa  conversion,  lors- 
(]ue,  la  persécution  s'allumani  de  nouveau, 
IVhêque  Fauste  se  trouva  obligé  de  changer 
souvent  de  demeure  pour  se  cacher.  Cela 
obligea  Fulgencc,  de  l'avis  de  Fauste  même, 
de  passer  à  un  monastère  voisin  où  il  y 
avait  peu  de  moines,  mais  d'une  grande 
simpliciti-,  et  dont  l'abbé,  nornuK-  Félix,  était 
son  ami  dès  sa  jeunesse.  L'abbé  le  recrut, 
non-seulement  avec  joie,  mais  connaissant 
sa  capacité,  il  voulut  lui  céder  le  gouverne- 
ment de  sou  monastère.  Fulgencc  s'en  ex- 
cusa ,  et  après  plusieurs  contestations,  ils 
convinrent,  du  consentement  de  la  commu- 
nauté, de  le  gouverner  ensemble.  Fulgence 
était  chargé  particulièrement  de  l'instruc- 
tion des  frères  et  des  étrangers,  Félix,  du 
temporel  et  de  l'hospitalité  ;  mais  ils  ne  fai- 
saient rien  l'un  et  l'autre  que  de  concert. 
L'incursion  des  Barbares  les  ayant  peu  de 
temps  après  obligés  de  quitter  leiu-  monas- 
tère, ils  sortirent  avec  toute  leur  commu- 
nauté, et  après  un  assez  long  voyage  dans 
les  régions  inconnues  de  l'.Afrique,  ils  s'arrê- 
tèrent à  Sicque,  attirés  par  la  fertilité  du 
lieu  et  par  la  charité  de  cjnelques  fidèles  qui 
les  avaient  re(^ns.  Il  y  avait  dans  le  voisi- 
nage un  prêtre  arien ,  riche ,  barbare  de 
naissance,  cruel  et  très-animé  contre  les  ca- 
tholiques, qui  était  chai-gé  de  la  desserte 
d'une  paroisse.  S'apercevant  que  le  nom  de 
Fulgence  devenait  célèbre  dans  ces  cantons, 
il  le  prit  pour  un  évêque  déguisé  en  moine, 
et  craignit  qu'il  ne  ramenât  à  la  foi  catho- 
lique ceux  qu'il  avait  engagés  dans  l'erreur. 
En  efl'et,  Fulgence  travaillait  à  réconcilier 
tous  ceux  qu'il  pouvait,  en  les  invitant  par 
de  salutaires  instructions  à  se  convertir.  Le 
prêtre  arien  mit  donc  des  sentinelles  sur 
le  chemin  pour  arrêter  Félix  et  Fulgence.  Le 
premier  portait  quelques  pièces  d'or  pour  la 
subsistance  des  frères.  Se  voyant  arrêté,  il 
les  jeta  où  il  put,  sans  que  les  gardes  s'en 
aperçussent.  Ils  les  menèrent  tous  deux  liés 
au  prêlre  arien,  qui  leur  demanda  d'une 
voix  clfrayante,  pourquoi  ils  étaient  venus 
secrètement  de  leur  pays,  contre  le  service 


des  rois  chréliens?  Comme  ils  se  préparaient 
!\  lui  répondre,  le  prêtre,  sans  leur  d(unicr 
I(!  liiisir  de  parler ,  les  lit  frapper.  Alors  , 
l'abbé  Félix,  poussé  d'i.n  mouvement  de 
charité,  dit  :  «  Epargnez  mon  frère  Ful- 
gence (pii  n'a  pas  la  force  de  souffrir  les 
tourments  :  peut-être  mourra-t-il  entre  vos 
mains;  que  voire  colère  se  tourne  contre 
moi  qui  suis  cause  de  tout,  je  ne  sais  que 
répondre.»  L'arien,  étonné  de  cette  charité, 
fit  un  peu  éloigner  Fulgence  et  ordonna  à 
ses  gens  de  frapper  rudement  Félix.  En-  cip.  u 
suite,  il  revint  à  Fulgence,  à  qui  la  délica- 
tesse de  tempérament  ne  permit  pas  de 
soutenir  longtemps  les  coups  de  bâton. 
Pour  avoir  quelque  relâche,  il  s'écria  qu'il 
avait  quelque  chose  à  dire.  Ou  le  lui  per- 
mit, et  alors  il  commença  à  raconter  l'his- 
toire de  son  voyage  avec  tant  d'agrément 
que  le  prêtre  arien  peusa  oublier  toute  sa 
cruauté.  Mais  dans  la  crainte  de  paraître 
vaincu,  il  ordonna  de  le  frapper  une  se- 
conde fois  et  fortement ,  disant  :  Je  pense 
qu'il  veut  me  séduire.  Enfin,  il  leur  fit  raser 
la  tête  a  l'un  et  à  l'autre,  et  après  les  avoir 
dépouillés,  il  les  chassa  de  sa  maison.  En 
passant  à  leur  retour  par  la  plaine  où  ils 
avaient  été  pris,  ils  retrouvèrent  toutes  les 
pièces  d'or  que  l'abbé  Féli.x  avait  jetées. 
Us  les  reçurent  comme  venant  de  la  main 
de  Dieu  ;  ils  lui  en  rendirent  grâces  et  s'en 
retournèrent  chez  eus,  sans  s'émouvoir  des 
ignominies  qu'ils  avaient  souffertes  pour  l'a- 
mour de  la  religion  ;  regardant  au  contraire 
la  nudité  à  laquelle  on  les  avait  réduits  , 
comme  la  marque  d'une  insigne  victoire. 
L'évêque  qui  était  à  Carthage  pour  les 
ariens,  informé  de  la  cruauté  que  ce  prêtre 
avait  exercée  contre  Fulgence  qu'il  connais- 
sait, voulut  l'en  châtier.  Mais  Fulgence,  loin 
d'écouter  ceux  qui  l'excitaient  à  demander 
vengeance,  leur  répondit  cpi'il  n'était  pas 
permis  à  un  chrétien  de  la  chercher  en  ce 
monde;  que  Dieu  savait  de  quelle  manière 
il  devait  défendre  ses  serviteurs ,  et  que 
plusieurs  seraient  scandalisés  de  voir  un 
catholique  et  un  moine  demander  justice  à 
un  évêque  arien, 

3.  Néanmoins  pour  éviter  de  nouvelles 
cruautés  de  la  part  des  ariens,  ils  sortirent 
de  cette  province,  et  se  retirèrent  dans  un 
autre  lieu  qui  n'était  pas  éloigné  de  la  leur, 
aimant  mieux  avoir  les  Maures  pour  voisins 
que  de  s'exposer  encore  à  la  violence  des 
ariens.  Ils  y  fondèrent  un  monastère  près  de 


11  ff-nde  LD 
D^slère. 


IIlSTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


(«p.  m.      la  ville  nommde  Idicli.  Ce  fut  en  cet  endroit 
que  Fulgencc,  lisant  dans  les  Institutions  et 
les  Conférences  de  Cassieu  ,  les  vies  admira- 
bles des  moines  d'Égfvpte,  forma  le  dessein 
d'aller  dans  leur  pays ,  tant  pour  renoncer 
aux  fonctions  d'abbé,  et  vivre   sous  l'obéis- 
sance dans  l'humilité,  que  pour  pratiquer  les 
lois  d'une  abstinence  plus  rigoureuse.  Pré- 
voyant que  si  son  dessein  venait  A  être  connu 
on  l'eiupèdicrait  de  l'exécuter,  il  alla  à  Car- 
thageavec  un  seul  moine,  nommé  Rédemp- 
tus,  qu'il  avait  choisi  pour  le  compagnon  de 
son  voyage,  et  s'embarqua  pour  Alexandrie. 
De  là  il  passa  avec  un  vent  favorable  à  Sy- 
racuse, où  il  fut  bien  reçu  par  l'évêque  Eu- 
lalius,  homme  de  grande  vertu,  qui  avait  im 
monastère  où  il  passait  avec  les  moines  fout 
le  temps  que  ses  fonctions  lui  laissaient  lilire. 
Fendant  le  repas  qu'il  donna  à  Fulgcnce  ', 
comme  on  vint  à  parler  des  choses  de  Dieu, 
comme  il  était  d'usage  à   la  table  des  évo- 
ques, il  connut  bientôt  aux  discours  de  son 
hôte  ,  que  c'était  un  homme   d'un  grand 
savoir ,    sous    l'apparence   et    l'habit    d'un 
moine.  Il  ne  voulut  pas  toutefois  lui  deman- 
der, en  présence  des  convives ,  qui  il  était, 
ni  pourquoi  il  était  venu.  Mais  après  le  dîner 
il  le  flt  venir,  et  le  pria  de  lui  apporter  le  li- 
vre des  Institutions  et  des  Conférences,  dont 
il  avait  commencé  à  dire  quelque  chose  pen- 
dant le  repas.  Fulgence  obéit  sur  le  champ, 
instruisit  Eulalius  du  contenu  de  ces  livres. 
L'évêque  admirant  sa  science,  voulut  savoir 
de  lui  par  quel  motif  il  était  venu  d'Afrique. 
Fulgence  ne  dissimula  point  que  c'était  pour 
.iller  vivre  dans  le  désert  de  la  Thébaïde,  où  il 
pùtimilerlesvertusdes  moines  qui  y  étaient, 
et  mourir  au  monde.  «  Vous  faites  bien,  lui 
dit  l'évêque,  de  chercher  la  jierfection;  mais 
vous  saveï  aussi  qu'il  est  impossible  de  plaire 
à  Dieu  sans  la  loi.  Le  pays  où  vous  allez  est 
séparé  par  un  schisme   perfide  de  la  com- 
munion de  saint   Pierre.  Tous  ces  moines, 
dont   on  loue   l'abstinence  admirable ,   ne 
communiqueront  point  avec  vous  dans  le  sa- 
crement de  l'autel.  Que  vous  servira-t-il  d'af- 
lliger  votre  corps  par  les  jeûnes,  tandis  que 
votre  Ame  qui  vaut  mieux  manquera  de  con- 
solation spirituelle.  Relournez-vous-en,  mon 
fds,  de  peur  de  mettre  votre  foi  en  danger. 
J'ai  eu  le  même  dessein  que  vous  avant  d'être 
évoque,  mais  cette  raison  m'en  a  détourné.  » 


Fulgence  se  rendit  à  un  avis  si  salutaire. 
Mais  à  la  persuasion  d'Eulalius,  il  demeura 
quelques  mois  ù  Syi-acuse,  retiré  d^ns  un  petit 
logement,  que  cet  évêque  lui  donna.  Quoi- 
qu'il ne  voulut  y  recevoir  que  très-peu  de 
choses  pour  sa  subsistance,  il  ne  laissait  pas 
d'y  exercer  l'hospitalité  envers  les  étran- 
gers, ce  qui  remplissait  Eulalius  d'admira- 
tion et  de  joie.  Cet  exemple  lui  fut  même  un 
motif  de  devenir  de  jour  en  jour  plus  libéral 
et  plus  miséricordieux  envei-s  les  pauvres. 

G.  Après  que  l'hiver  fut  passé,  Fulgcnce  |_J' 
traversa  par  terre  la  Sicile,  pour  aller  voir  ""■"• 
un  évêque  nommé  Rufinien,  que  la  violence 
de  la  persécution  avait  obligé  de  quitter 
l'Afrique  pour  se  retirer  dans  une  petite  île 
où  il  pratiquait  la  vie  monastique.  Le  but  de  c»;. 
ce  voyage  était  de  consulter  Rufinien  sur 
celui  qu'il  avait  eu  le  dessein  de  faire  en 
Egypte  :  non  qu'il  eût  de  la  défiance  sur 
l'avis  qu 'Eulalius  lui  avait  donné,  mais  parce 
qu'il  s'imaginait  que  dans  les  choses  dou- 
teuses il  fallait  consulter  plusieurs  personnes. 
Mais  le  conseil  de  Rufinien  fut  le  même  qpie 
celui  d'Eulalius.  Fulgence  ne  pensa  donc 
plus  à  aller  en  Egypte.  Ayant  trouvé  l'occa- 
sion d'aller  à  Rome  par  mer,  il  en  profita 
pour  visiter  les  sépulcres  des  apôtres.  C'était 
vers  l'an  500.  Ce  fut  en  cette  année  que  le 
roi  Tbéodoric  vint  dans  cette  capitale  du 
monde.  Sa  présence  remplit  toute  la  ville  de 
joie.  Fulgence  fut  non-seulement  témoin  de 
la  pompeuse  réception  qu'on  fit.^  ce  prince, 
il  assista  encore  à  la  harangue  qu'il  fit  en 
présence  du  sénat  et  du  peuple.  Mais  toute 
l'impression  que  ces  spectacles  firent  sur 
son  esprit,  se  réduisit  à  la  réflexion  qu'il  fit 
sur  les  degrés  de  beauté  que  devait  avoir  la 
Jérusalem  céleste,  puisque  la  splendeur  de 
Rome  terrestre  était  si  grande  ;  et  sur  les  de- 
grés de  gloire,  dont  devaient  jouir  les  saints 
qui  contemplent  la  vérité,  puisqu'on  accor- 
dait tant  d'honneur  en  ce  monde  aux  ama- 
teurs de  la  vanité. 

7.  Le  désir  de  revoir  son  monastère  lui  fit  n  i 
bientôt  quitter  Rome;  il  s'embarqua  pour 
l'Afrique  par  la  Sardaigne.  Ses  frères,  en  le  c.p. , 
voyant,  ne  savaient  s'ils  devaient  ou  se  plain- 
dre d'abord  de  ce  qu'il  les  avait  quittés,  on 
plutôt  lui  ti'moigner  leur  joie  de  son  retour. 
Aucun  néanmoins  n'osa  le  blùmor  de  s'être 
retiré;  mais  tous  s'empressèrent  de  rendre 


'  tfox  sicul  moris  est  in  convivio  sacerdotum, 
dum  de  divinis  rcbus  ortiis  est  sermo,  vintm  sin. 


gnlaris  snenlUe  loculio  sua  continua  prodidit. 
Vitii  Kulgfliit.,  cap.  XII. 


vr  SIKCLE. 


CIIAPITIIE  1.  —  SAINT  FULGENGE  DE  UL'Sl'E. 


grâces  à  Dieu  pour  f5on  retour,  el  t\  lui  donner 
de  grandes  marques  de  charitd.  Un  nommé 
Sylvestre  qui  était  im  bon  cliri'tion,  et  l'un 
des  premiers  do  la  Byzacène,  lui  oll'rit  tiii 
endroit  propre  à  bâtir  nu  monasti'^re.  Ful- 
gcnco  l'accepta,  et  il  eut  la  consolation  de 
le  voir  dans  peu  rempli  d'un  grand  nom])r(î 
de  sujets  qu'il  avait  engagés  par  ses  exhor- 
tations ;\  reuoncei-  au  siècle.  Après  les  avoir 
gouvernés  pendant  quelque  temps,  il  alla  se 
cacher  dans  une  île  en  un  autre  monastère 
où  il  savait  que  l'on  observait  avec  plus 
d'exactitude  l'ancienne  discipline.  11  y  vécut 
en  simple  moine,  s'occupant  ;ï  écrire,  parce 
qu'il  avait  la  main  bonne,  et  à  faire  des  éven- 
tails de  feuilles  de  palmier,  comme  il  avait  eu 
coutume  d'en  faire  dans  le  monastère  où  il 
était  abbé.  Il  s'occupait  aussi  dans  sa  cellule 
à  la  lecture,  et  voyait  fréquemment  les  reli- 
gieux de  la  communauté,  dont  il  gagna  l'es- 
time et  l'amitié. 

8.  L'abbé  Félix  et  ses  moines  ayant  ap- 
pris le  lieu  de  la  retraite  de  Fulgence,  enga- 
gèrent l'évoque  Fauste  à  le  revendiquer 
comme  son  moine.  Fauste  menaça  d'excom- 
munication les  moines  de  l'ile  où  Fulgence 
s'était  retiré,  s'ils  refusaient  de  le  renvoyer; 
et  il  le  menaça  lui-même  d'une  semblable 
peine  en  cas  de  désobéissance.  Il  revint,  fut 
obligé  de  reprendre  la  charge  d'abbé,  et, 
afin  qu'il  ne  pût  plus  quitter  le  monastère, 
ni  être  ordonné  dans  une  autre  église,  Fauste 
l'ordonna  prêtre.  Sa  l'éputation  était  si  grande 
en  Afrique  qu'on  l'aurait  demandé  pour 
évoque,  si  on  avait  pu  en  ordonner.  Mais  le 
roi  Trasamond  avait  défendu  de  ponrvoir  d'é- 
véques  les  églises  vacantes.  Quoique  cette 
défense  mît  l'esprit  de  Fulgence  en  repos  , 
sachant  toutefois  que  les  évêqnes  avaient  ré- 
solu de  faire  des  ordinations,  nonobstant  ledit 
du  roi,  il  sut  si  bien  se  cacher  qu'on  ne  put  le 
trouver,  et  qu'après  l'avoir  élu  en  plusieurs 
endroits,  on  fut  obligé  d'en  élire  d'autres. 

9.  Mais  lorsqu'il  vit  la  province  de  Byzacène 
remplie  de  nouveaux  évêqnes,  en  sorte  qu'il 
restait  peu  d'églises  cathédrales  vacantes,  et 
ceux  qu'on  avait  nouvellement  élus  envoyés 
en  exil  par  ordre  du  roi  Trasamond,  il  crut 
qu'ayant  évité  d'être  élevé  à  l'épiscopatpour 
cette  fois,  il  n'avait  plus  rien  à  craindre  à 
l'avenir,  et  retoui-na  en  son  monastère.  La 


ville  de  Huspc  était  ime  de  celles  que  l'on 
n'avait  point  pourvues  d'évôque,  parce  qu'un 
diacre  nonnné  Félix,  qui  n'avait  pas  assez 
de  mérite  pour  se  faire  choisir  lui-même, 
avait  trouvé  le  moyen  d'empêcher  l'élection 
d'un  autre  à  la  faveur  de  la  puissance  sécu- 
lière. Les  plus  honnêtes  gens  de  la  ville,  pé- 
nétrés de  douleur  de  se  voir  seuls  sans  pas- 
teur, ayant  ap|iris  que  Fulgence  était  de- 
meuré prêtre,  s'adressèrent  à  Victor,  primat  / 
de  la  Byzacène,  comme  on  le  menait  par  or- 
dre du  roi  à  Carthage,  et  obtinrent  permis- 
sion de  faire  ordonner  Fulgence  par  les  évê- 
qnes voisins.  Victor  consentit  même  qu'on 
l'allât  surprendre  dans  sa  cellule.  Il  s'assem- 
bla à  cet  efî'el  une  troupe  nombreuse  qui  le 
prit  et  l'emmena,  le  conduisant  à  celui  qui 
devait  faire  l'ordination,  en  sorte  qu'on  ne 
le  pria  pas  de  recevoir  l'épiscopat,  on  l'y 
contraignit.  Le  diacre  qui  avait  ambitionné 
le  siège  de  Ruspe  mit  une  embuscade  sur  le 
chemin  par  où  devait  passer  Fulgence  après 
la  consécration  ;  mais  le  peuple  de  cette 
ville,  je  ne  sais  par  quelle  inspiration  du 
Saint-Esprit,  l'amena  par  un  autre  chemin 
que  celui  où  son  enuemi  l'attendait.  Ful- 
gence fut  mis  dans  la  chaire  épiscopale, 
célébra  le  même  jour  les  divins  mystères, 
et  tout  le  peuple,  après  avoir  reçu  de  ses 
mains  la  communion,  se  retira  avec  joie.  Le 
diacre,  averti  de  ce  qui  était  arrivé,  céda  à 
la  volonté  de  Dieu  et  se  soumit.  Saint  Ful- 
gence le  reçut  sans  délai  et  avec  bonté  :  en- 
suite il  l'ordonna  prêtre.  Mais  il  mourut  dans 
l'aunée,  et  le  procurateur,  qui  avait  appuyé 
sa  brigue,  fut  réduit  à  une  pauvreté  extrê- 
me. On  met  l'ordination  de  saint  Fulgence 
en  508,  la  quar;jntième  année  de  son  âge, 
étant  né  en  468. 

10.  L'honneur  de  l'épiscopat  n'occasionna     socnnduuo 
aucun  changement  dans  les  mœurs  de  saint  «i"'"i-'- 
Fulgence.   Il   conserva   l'état   de   moine  et 
toutes  les  pratiques  de  la  vie  monastique, 
ne  portant  jamais  d'habits  précieux,  conti- 
nuant ses  jeûnes  accoutumés  et  vivant  so- 
brement.   Hiver  et  été  il  n'était  vêtu  que    Ca.-.  xvni. 
d'une   tunique   fort   pauvre,    qu'il   ceignait 
d'une   ceinture  de  peau  à  la  manière   des 
moines,  sans  porter  '  VOrarium,  suivant  la 
coutume  des  évoques.  C'était  une  -  écharpe 
de  toile  autour  du  cou,  dont  est  venue  notre 


1  Orario  quidem,  sicut  omnes  episcopi,  nun- 
quam  utebatiir  :  pelliceo  cingulo  tanquam  mona- 
chus  cingebalur.  Vila  Fulg.,  cap.  xvui. 


*  Fleury,  liv.  XXX  Hist.  ecclés.,  tom.  VII,  pag. 


6 


HISTOIRE  GKNKRALE  DES 


diolc.  Il  ne  portait  pas  la  chaussure  des 
clercs,  mais  telle  des  moines,  et  marcliait 
souvent  nu-pieds,  si  ce  n'est  dans  le  monas- 
tère où  il  se  sen'ait  ordinairement  de  la 
chaussure  commune  aux  autres.  Jamais  il  ne 
porta  de  chasiilile  piëcieusc,  ou  de  couleur 
éclatante,  ni  n'eu  peimil  de  telle  i\  ses  ndi- 
gieux.  C'était  un  habillement  ordinaire  qui 
couvrait  tout  le  corps.  Il  portait  par  dessous 
sa  chasuble  nn  petit  manteau  noir  ou  blanc; 
et  quand  le  temps  était  doux,  quelquefois 
dans  le  monastère,  il  ne  portait  que  le  man- 
teau. Il  n'ùtait  pas  même  sa  ceinture  pour 
dormir;  et  il  offrait  le  sacrifice  avec  la  même 
tuni([ue  dans  laquelle  il  couchait,  disant, 
que  pour  cette  sainte  action  il  fallait  plutôt 
changer  de  cœur  que  d'habits.  Personne  ne 
put  jamais  l'obliger  à  manger  de  la  chair  de 
quelque  espèce  qu'elle  fût.  Il  se  nourrissait 
d'herbes,  de  grains  et  d'œufs,  sans  les  assai- 
sonner d'huile,  tant  qu'il  fut  jeune  ;  dans  sa 
vieillesse  on  lui  persuada  d'en  user,  de  peur 
que,  sa  vue  venant  à  s'allaiblir,  il  ne  put  plus 
lire.  Tandis  qu'il  se  porta  bien  il  s'abstint  du 
vin  :  lorsqu'il  fut  obligé  d'en  boire  par  rai- 
son de  santé,  il  le  trempait  avec  tant  d'eau 
qu'il  ne  sentait  point  le  goût  du  vin.  Avant 
que  l'on  avertit  les  frères  pour  les  veilles  de 
la  nuit,  il  se  levait  pour  prier,  lire,  dicter, 
ou  méditer,  parce  qu'il  n'en  avait  pas  le  loi- 
sir pendant  le  jour,  étant  occupé  pour  les 
all'aircs  de  son  peuple.  Quelquefois  il  des- 
cendait pour  célébrer  les  Vigiles  avec  les 
serviteurs  de  Dieu,  mais  il  ne  manquait  pas 
de  vaquer  aux  exercices  dont  nous  venons 
c>p.  xi».  (Je  parler.  Jusqncs-k'i  on  no  l'avait  vu  en  au- 
cun endroit,  saus  demeurer  avec  des  moi- 
nes; c'est  pourquoi  la  première  grûce  qu'il 
demanda  aux  citoyens  de  Uuspe,  depuis 
qu'il  en  fut  fait  évêque,  fut  de  lui  donner 
une  place  propre  pour  bâtir  un  monastère. 
Plusieurs  s'empressèrent  de  seconder  ses 
désirs.  Postliuraien  entre  autres  lui  donna 
un  piMit  héritage  qui  n'était  pas  éloigné  de 
l'église,  où  des  pins  trcs-élevés  formaient 
un  bois,  dont  la  verdure  rendait  l'endroit 
agréable.  Saint  FuJgence  r;icce]ila  d'autant 
plus  volontiers,  qu'il  tiouvail  pur  les  lieux 
mêmes  les  bois  nécessaires  à  l'édifice.  Il  fit 
venir  aussitôt  l'abbé  Félix  avec  la  plus  grande 
partie  de  sa  communauté,  l'autre  demeura 
sons  la  conduite  d'im  des  frères  noiiim('!  Vi- 
tal ;  mais  avec  la  même  union  entré  les  deux 
monastères  que  si  ce  n'en  eût  été  qu'un 
sinl  ;  en  sorte  que,  si  l'on  recevait  quelques 


AUTEURS  ECCLESIASTIQUES, 

nouveaux  moines  dans  l'un  ou  dans  l'autre, 
ils  y  avaient  rang  suivant  le  temps  de  leur 
conversion. 

1 1 .  Pendant  que  saint  Fulgence  était  oc-  s-im 
ciipé  â  ces  œuvres  de  piété,  le  roi  Trasa-  wjéen» 
moud  l'envoya  prendre  par  les  ministres  de 
sa  fureur,  pour  le  conduire  en  Sardaigne 
a\ecles  autres  évéques.  Quelle  que  fut  la  don-  c»r-xi- 
leur  du  Saint  d'abandonner  son  Eglise  avant 
qu'il  eût  le  temps  de  l'instruire,  il  témoigna 
néanmoins  sa  joie  de  participer  a  la  glo- 
rieuse confession  de  ses  confrères.  Il  sortit 
de  Ruspe  accompagné  de  moines  et  de 
clercs,  laissant  tous  les  la'iques  en  pl.icc.  La 
ville  de  Cartilage  le  reçut  avec  honneur,  on 
lui  fit  des  présents,  qu'il  envoya  au  monas- 
tère qu'il  faisait  billir,  et  s'embarqua  sans 
rien  emporter  que  les  richesses  d'une  science 
singulière,  dont  il  faisait  part  à  tous  ceux 
chez  qui  il  allait.  Quoique  saint  Fulgence  fut 
par  l'ordination  le  dernier  de  tous  les  évé- 
ques exilés,  ils  le  reconnaissaient  pour  le 
premier,  h  cause  de  sa  science  et  de  sa  vertu. 
Dans  les  choses  douteuses,  le  primai  et  tous 
les  autres  évéques  voulaient  toujours  l'enten- 
dre pour  savoir  son  avis ,  et  le  chargeaient 
d'expliquer  les  résolutions  communes.  Lors- 
qu'il s'agissait  aussi  de  répondre  au  nom  de 
tous  aux  évéques  d'oulre-mer,  soit  sur  la  foi, 
soit  sur  d'autres  matières,  on  lui  en  donnait 
la  commission,  en  quoi  on  l'a  comparé  à  Au- 
rèle  de  Carthage  qui  écrivait  ordinairement 
au  nom  des  évéques  du  concile  d'Afrique  ce 
qu'ils  y  avaient  résolu  en  commun.  Outre  les 
lettres  publiques  que  saint  Fulgence  écrivait 
au  nom  de  soixante  t'vêques  exilés,  il  en  écri- 
vait encore  de  particulières  pour  tous  ceux 
qui  l'en  priaient,  lorsqu'ils  avaient  quelques 
avis  .i  donner  à  leur  peuple,  ou  quelqu'un  à 
corriger.  C'était  encore  à  saint  Fulgence  que 
s'adressaient  ceux  qui  avaient  été  punis  de 
quelques  censures  ])ar  leurs  évéques  ab- 
sents, afin  qu'il  intercédât  pour  eux.  N'ayant 
pu  emmener  avec  lui  assez  de  moines  pour 
en  former  un  monastère,  il  persuada  .1  deux 
évéques,  l'un  nommé  Illustre,  et  l'autre  Jan- 
vier, de  demeurer  avec  lui ,  et  ayant  ras- 
semblé ipielqiu's  moines  et  quelques  clercs  . 
il  composa  l'image  et  la  ressemblance  d'une 
grande  communauté.  Tout  était  commun 
entre  eux,  la  table,  le  cellier,  l'oraison,  la 
lectuie,  aucun  ne  s'élevait  insolcnnnent  au- 
dessus  des  autres  :  siudement  les  moines  se 
distinguaient  par  une  plus  grande  «lustérité 
que  les  clercs,  et  ne  possédaient  rien  en  pro- 


SIKCLE. 


CHAPITRE  I.  —  SAINT  FUl.fiKNCE  DE  lUJSPE. 


T.n. 
fait 


pi'O.  I,ii  iiKiisoii  où  ils  clciiiiMiiaicnt  ('liiil  l'n- 
rarlo  do  la  villn  tir  Ca^liari  :  les  alllim'"s  y 
vcnaiont  recevoir  le  remède  de  la  consola- 
tion :  on  y  accordait  ceu\  qui  dlaient  en  dil- 
férèiid  :  et  ceux  qni  aimaient  i\  cntendi'e  les 
divines  Ecritures,  IrouvaionI  dans  coite  mai- 
son de  quoi  se  satisfaire.  On  y  faisait  l'au- 
mône, que  le  saint  accompagnait  ordinai- 
rement de  quel<[ue  insiruclion,  et  il  arrivait 
souvent  ([ne  ceux,  dont  il  avait  soulagL^  les 
besoins,  emlirassaienl  par  ses  exhortations 
la  viemonastiqne. 

12.  Cependant  le  roi  Trasamond,  feignant 
saTil!  de  vouloir  s'instruire,  s'informa  qui  était  le 
plus  puissant  di'fenseur  de  la  doctrine  catho- 
lique. On  hii  nomma  Fuiyence  entre  les 
évêques  exilés.  Aussitôt  le  roi  le  fit  venir  à 
Carthage,  où  le  saint  Evêque ,  profitant  de 
l'occasion  ,  instruisait  soigneusement  du 
mystère  de  la  Trinité  les  catholiques  qui 
venaient  le  trouver  à  son  logis,  leur  ensei- 
gnant comment  le  Père,  le  Fils  et  le  Saint- 
Esprit  ne  sont  qu'un  seul  Dieu,  quoicpie  la 
diU'ércnce  des  personnes  demeure.  Tous  les 
fidèles  s'empressaient  de  le  venir  entendre, 
parce  qu'il  parlait  avec  ime  grâce  particu- 
lière. II  répondait  à  tous  ceux  qui  l'interro- 
geaient, sans  en  mépriser  aucun,  toujours 
prêt  à  écouter  lui-même  les  autres,  et  à  ap- 
prendre d'eux,  s'il  se  trouvait  que  Dieu  leur 
eût  révélé  quelque  chose  de  mieux.  Il  en- 
seignait k  ceux  qui  s'étaient  laissés  rebapti- 
ser, de  pleurer  leur  faute ,  et  les  réconciliait 
ensuite  à  l'Eglise.  Il  soutenait  les  autres  prêts 
de  tomber,  ceux-ci  à  leur  tour  se  trouvant 
fortifiés  par  ses  discours ,  attaquaient  avec 
confiance  les  ariens.  Le  roi ,  averti  des  pro- 
grès que  la  foi  catholique  faisait  dans  Car- 
thage par  le  ministère  de  saint  Fulgence, 
lui  envoya  un  écrit  plein  du  venin  de  l'héré- 
sie arienne ,  avec  ordre  d'y  répondre  au 
plus  tôt.  Comme  cet  écrit  était  fort  long,  le 
saint  évêque  le  réduisit  à  quelques  objec- 
tions divisées  pai  articles,  auquelles  il  joi- 
gnit des  réponses  nettes  et  solides.  Avant 
de  les  envoyer  à  Trasamond,  il  les  exa- 
mina longtemps  avec  plusieurs  person- 
nes habiles ,  les  fit  même  connaître  au 
peuple  ;  puis  il  les  donna  au  roi  qui  les 
attendait  avec  impatience.  Trasamond  les 
lut  attentivement  ,  admira  l'éloquence  de 
leur  auteur,  loua  son  humilité,  mais  il 
ne  mérita  pas  de  connaître  la  vérité.  Le 
peuple  de  Carlhage,  sachant  que  les  pro- 
positions du  roi  avaient  été  réfutées,  se  ré- 


jouit secrèlcmenl   do  la  victoire  quo  la  foi 
catholique  avait  remportée  sur  l'arianisme. 

13.  Pour  ('prouver  encore  la  science  du      n  i"  p'»- 
samt  éveqnn,  le  roi  lui  envoya  d  autres  ques-  j','';jj'°°'  "' 
lions,  enjoignant  au  poi-teur  de  les  lire  seu- 
lement une  fois  devant  lui,  sans  lui  pormet- 

Ire  d'en  tirer  copie.  Ce  prince  craignait  que  cjp.  mu 
saint  Fidgence  n'insérât  dans  sa  réponse  les 
paroles  de  l'écrit,  comme  la  première  fois, 
et  que  tonte  la  ville  ne  connut  une  seconde 
fois  qu'il  avait  éîé  vaincu.  Saint  Fulgence 
pouvant  i\  peine  se  ressouvenir  de  ce  qu'on 
lui  avait  lu ,  dilTérait  de  répondre.  Mais, 
pressé  d'obéir ,  il  composa  les  trois  livres 
adressés  à  Trasamond  ,  dans  lesquels,  en 
répondant  avec  étendue  aux  questions  du 
roi,  il  lui  faisait  voir  que  le  Verbe,  en  se  fai- 
sant chair,  avait  aussi  pris  une  âme  raison- 
nable. Le  roi,  étonné  de  la  réponse  de  saint 
Fulgence,  n'osa  plus  lui  faire  de  question  ; 
mais  un  des  évêques  ai'iens,  nommé  Pinta, 
fut  plus  hardi.  Ilcomposaun  écrit,  auquel  ce 
saint  évêque  répondit  de  façon  qu'il  fit  voir  à 
ses  adversaires  que  vainement  ils  étaient  re- 
venus au  combat.  11  écrivit  un  autre  traité 
touchant  la  divinité  du  Saint-Esprit,  contre 
un  prêtre  nommé  Ahragila.  Les  ariens,  ne  se 
trouvant  point  assez  forts  pour  se  défendre 
contre  lui,  persuadèrent  à  Trasamond  de  le 
renvoyer  en  Sardaigne,  disant  qu'ayant  déjà 
perverti  quelques-uns  des  évêques  de  leur 
secte,  elle  serait  en  danger  dë'périr,  s'il  res- 
tait plus  longtemps  à  Carthage. 

14.  Le  roi  céda  à  leurs  remontrances,  et     "  «  "'lé 

l-nû     seconde 

pour  dérober  au  peuple  le  départ  du  saint  '"'=• 
évêque ,  il  le  fit  embarquer  de  nuit.  Mais  les 
vents  contraires  arrêtèrent  le  vaisseau  sur 
la  côte  pendant  plusieurs  jours  :  ce  qui  don-  <'»p-  "iv, 
na  lieu  à  presque  toute  la  ville  de  s'y  assem- 
bler pour  lui  dire  adieu,  et  de  communier 
de  sa  main.  11  prédit  à  un  nommé  Juliatée, 
qui  s'afUigeait  de  son  départ,  que  son  exil 
ne  serait  pas  long,  et  que  l'Eglise  recouvre- 
rait bientôt  sa  liberté  ;  mais  il  lui  recom- 
manda de  tenir  là-dessus  un  grand  secret, 
ne  voulant  point  passer  pour  prophète.  Une 
demandait  jamais  à  Dieu  de  faire  des  mira- 
cles ;  et  lorsqu'on  le  pressait  quelquefois  de 
prier  pour  des  infirmes,  il  se  contentait  de 
dire  au  Seigneur  :  «  Vous  savez  ce  qui  con- 
vient au  salut  de  nos  âmes,  que  votre  vo- 
lonté soit  premièrement  accomplie.»  Une  de 
ses  maximes  était  que  les  miracles  *  ne  don- 

'  Mirabilia  non  conferunl  homini  juslitiam  sed 


mSTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Cap.  x*rii. 


Sn  écr:i<i 

]t  ^ort  Cl-  ««Il 
e  1  i  I  ,    e  -^  i> . 

vient  à  Ra»i  f , 
C«J>.  XklX. 


ncnt  pas  la  justice,  mais  la  réputation,  qui 
sans  la  justice  ne  sert  qu'à  nous  fViire  con- 
damner au  s\ipplicc  éternel.  Arrivé  en  Sar- 
daigne,  il  bàlit  un  nouveau  '  monastère, 
avec  la  permission  de  Brumas.  évoque  de 
Cagliari.  près  de  l'église  du  martyr  saint 
Saturnin,  loin  du  bruit  de  la  ville.  Il  assem- 
bla en  ce  lieu  plus  de  quarante  moines,  aux- 
quels il  faisait  observer  exactement  la  règle 
de  leur  profession,  surtout  l'article  qui  dé- 
fend d'avoir  rien  en  propre,  mais  qui  veut 
que  tout  soit  en  commun;  ce  qu'il  regar- 
dait comme  l'essentiel  de  la  vie  monasti- 
que. Il  disait  qu'un  moine  pouvait  quelque- 
fois être  obligé  par  l'infirmité  de  son  corps 
à  prendre  une  nourriture  plus  délicate  ;  mais 
que  de  s'attribuer  la  propriété  même  des 
petites  choses,  c'était  un  signe  d'orgueil  et 
d'avarice.  Il  distribuait  lui-même  avec  une 
grande  discrétion  les  besoins  aux  serviteurs 
de  nieu,  faisant  attention  aux  forces  ou  à  la 
faiblesse  de  chacun,  avertissant  ceux  à  qui 
il  donnait  davantage,  de  s'en  humilier  à 
cause  de  leur  faiblesse.  Comme  il  avait 
grand  soin  de  prévenir  les  demandes  de  ses 
religieux,  aussi  ne  voulait-il  pas  qu'ils  le  pré- 
vinssent, mais  qu'ils  attendissent  avec  une 
entière  résignation.  C'était  assez  pour  être 
refusé  que  de  lui  demander.  Il  regardait 
comme  de  véritables  moines  ceux  qui,  en 
mortifiant  leiffs  volontés,  étaient  toujours 
prêts  de  se  conformer  en  tout  aux  avis  et 
aux  préceptes  de  l'abbé.  C'est  pourquoi  il 
ne  permettait  pas  que  celui  qu'il  avait  pré- 
posé au  gouvernement  de  son  monastère, 
fit  quelque  chose,  sans  l'avoir  consulté  au- 
paravant. 11  préférait  ceux  en  qui  il  voyait 
un  graud  amour  pour  la  lecture  et  la  science 
spirituelle  quand  même  la  faiblesse  de  leur 
corps  les  eût  absolument  empêchés  de  tra- 
vailler de  leurs  mains,  à  ceux  qui  ne  s'oc- 
cupaient qu'au  travail  corporel. 

15.  Pendant  son  séjour  en  Sardaigne,  il 
écrivit  plusieurs  lettres  et  composa  divers 
écrits  dont  nous  parlerons  dans  la  suite.  Il 
finissait  son  ouvrage  contre  Fausle  de  Riez, 
lorsque  le  roi  Trasamond  mourut.  C'était  en 
02.3,  le  28  mai.  Ce  prince,  avant  de  mourir 
avait  fait  jurer  à  Ilildéric,  son  successeur. 


qu-î  pendant  son  règne  il  n'ouvrirait  point 
les  églises  aux  catholiques  et  ne  leur  ren- 
drait point  leurs  privilèges.  Hildéric,  croyant 
ne  pas  fausser  son  serment,  donna  ses  ordres 
avant  d'être  roi  pour  le  rappel  des  ëvcques 
catliolicpies,  et  pour  faire  ouvrir  les  églises. 
Il  ordonna  en  même  temps,  par  une  bonté 
singulière,  d'élire  des  évêques  partout  où  il 
en  manquait.  Ainsi,  saint  Fulgence  retourna 
en  Afrique  avec  les  autres  évêques  exilés 
sous  le  règne  de  Trasamond.  Ils  furent  re- 
çus à  Carthage  comme  des  confesseurs  de 
Jésus -Christ  ,  surtout  saint  Fulgence  qui 
était  plus  connus  que  les  autres  dans  cette 
ville,  d'où  il  était  sorti  seul.  Le  peuple  as- 
semblé sur  le  rivage  ne  l'eut  pas  plutôt 
aperçu,  qu'il  s'éleva  un  grand  cri  de  joie, 
et  on  entendit  chanter  les  louanges  de 
Dieu  en  toutes  sortes  de  langues.  C'était 
à  qui  recevrait  le  premier  sa  bénédiction  , 
et  tous  s'etforçaient  de  le  toucher  au  moins 
du  bout  des  doigts.  Les  évêques  allèrent 
d'abord  à  l'église  de  Saint-Agilée,  précédés 
et  suivis  du  peuple  qui  les  conduisait  comme 
en  triomphe.  Les  plus  zélés  environnèrent 
saint  Fulgence  pour  le  soulager  dans  la 
chaleur  et  lui  faire  un  passage  libre.  Dieu, 
pour  montrer  la  charité  de  ses  peuples,  per- 
mit qu'il  survînt  une  grande  pluie  :  ils  n'en 
furent  point  dissipés,  et  comme  saint  Ful- 
gence marchait  la  tête  nue,  les  plus  nobles 
étendirent  sur  lui  leur  manteau  pour  en 
éloigner  la  pluie.  Le  saint,  après  avoir  vi- 
sité ses  amis  h  Carthage.  en  sortit  pour  se 
rendre  à  Iluspe.  Pendant  tout  le  chemin  qui 
était  long,  les  peuples  vinrent  au-devant  de 
lui  de  tous  les  côtés  portant  des  lampes,  des 
flambeaux  et  des  branches  d'arbres,  en  ren- 
dant grâces  à  Dieu  de  ce  qu'il  leur  faisait 
voir  un  si  saint  personnage.  A  son  retour  à 
Ruspc,  il  continua  de  vivre  avec  les  moines; 
mais  pour  ne  point  diminuer  l'autorité  de 
l'abbé  Félix,  il  voulut  lui-même  être  soumis 
à  uu  autre,  ne  faisant  rien  dans  son  propre 
monastère,  sans  avoir  atiparavant  consulté 
l'abbé  Félix.  Il  ne  voulut  pas  même  s'attribuer 
quelque  chose  en  propre  dans  le  monastère, 
ni  user  d'aucune  autorité  sur  les  moines.  Et 
afin  -  que  ses  successeurs  ne  pussent  rien 


hominum  nntitinm.  Quisquis  autem  hominibus 
fueril  noins,  nisi  fnerit  justus  ad  a-tenia  perve- 
niet  supplicia  cotulrninatus   Vila  Fulg.,  cap.  25. 

•  Drumasio  Catnrilanœ  civilalis  antislile,prius, 
sicul  dccuil  postulalo,  nocii/m  propriis  sumptibus 


moiiaKlcriiim  fabricavit.  Vila  Fulfi.,  l'np.  xxvii. 
*  l'arum  fuil  bealo  Ftil^geiilio  verbix  et  operi- 
6m.«  hanc  huwililalcin  scriiti  ac  rctinere,  nisi  per 
scripluram  qvoqur  firmarel,  nihil  se  in  illo  mo- 
na$lerio  proprium  vindicare,  nec  pro  potestatc. 


cnAPirnE  i.  —  saint  FULnENCE  de  ruspe. 


Son 

té,  M 

U3. 


Cap. 


hnmil. 
T.orX  en 


[Vl'  SIKCI-E.] 

prétpndrc  «an  pn'Jiulicc  dos  moines  do  son 
inonastèro,  il  (h'clara  par  ('crit  qu'il  n'y  prc^- 
toniiait  plus  l'ion  lui-mômi',  et  que,  s'il  y  de^ 
lueuiait,  ce  n'ctail  pas  qu'il  en  eût  le  ilroit, 
mais  parce  qu'on  voulait  bien  le  lui  permct- 
Ire.  1!  poussa  plus  loin  ses  pri'caulions  ;  car 
il  aclietii  une  maison  dans  le  voisinage  do 
l'église ,  et  la  bAtit  commodihuont  pour 
qu'elle  servit  à  la  demeure  de  l'évèquc  de 
lluspc.  Il  pourvut  encore  aux  logements  dos 
clercs,  et  au  r6p;loment  de  lours  mmurs;  vou- 
lant qu'ils  fussent  tous  proches  de  l'Kglise, 
que  chacun  d'eux  cultivât  un  jardin  de  ses 
propres  mains,  qu'ils  s'étudiassent  h  psal- 
modier avec  grâce  et  à  bien  prononcer, 
qu'ils  évitassent  le  faste  dans  lours  habits,  et 
qu'ils  ne  s'ingérassent  pas  dans  le  maniement 
des  affaires  séculières,  de  peur  que  cette 
occupation  no  los  détournât  trop  souvent  des 
fonctions  de  leur  ministère.  Il  les  choisit  pres- 
que tous  d'entre  ses  moines.  Il  prescrivit 
deux  jours  '  de  jeûne  la  semaine,  le  mercredi 
et  le  vendredi,  à  tous  les  clercs,  aux  veuves, 
et  à  ceux  des  laïques  qui  le  pouvaient ,  leur 
ordonnant  en  outre  de  se  trouvei'  aux  offices 
et  aux  prières  du  jour  et  de  la  nuit. 

16.  Dans  un  concile  tenu  à  Junque,  en  524, 
un  évéque  nommé  Quod-mlt-Deus,  lui  dis- 
puta la  préséance;  tout  le  concile  l'adjugea 
a  saint  Fulgence.  Le  saint  ne  dit  mot,  pour 
ne  point  préjudicier  à  l'autorité  du  concile. 
Mais  s'étant  trouvé  encore  dans  celui  de  Suf- 
féte,  avecle  même  évoque,  il  supplia  publi- 
quement de  le  mettre  devant  lui  :  ce  que  les 
évéques  du  concile  lui  accordèrent,  en  admi- 
rant son  humihté.  Un  an  avant  sa  mort  il  quitta 
secrètement  son  église  et  son  monastère , 
pour  seretirerenunautre  qu'il  avait  fait  bâtir 
sur  un  petit  rocher  dans  File  de  Circine.  Là 
il  redoubla  ses  mortifications  et  ses  larmes, 
vaquant  continuefiemeut  à  la  prière  ou  à  la 
lecture,  comme  s'il  eût  senti  approcher  son 
dernier  jour.  Mais  la  chanté  l'obligea  de  re- 


9 


tourner  â  Ruspe  pour  faire  cesser  les  plaintes 
que  l'on  faisait  de  son  absence.  Il  y  tomba 
jnalado  ,  et  pondant  [ilus  do  deux  mois  qu'il 
fut  attaqué  de  douleurs  très-aiguës,  il  disait 
sans  cesse  â  Dieu  :  «  Donnez-moi  maintenant 
la  patience,  et  ensuite  le  pardon.»  Ses  méde- 
cins étaient  d'avis  de  lui  faire  prendre  les 
bains.  «  Pourront-ils,  leur  répondit-il,  empê- 
cher qu'un  homme  ne  meure,  après  avoir 
accompli  le  temps  de  sa  vie?  S'ils  ne  le  peu- 
vent, pourquoi  voulez  qu'('tant  près  de  mou- 
rir, je  relâche  quelque  chose  de  la  rigueur 
de  la  profession  que  j'ai  observée  depuis 
longtemps?  »  Se  voyant  près  de  sa  fin  ,  il  as- 
sembla tous  ses  clercs  et  ses  moines,  et  après 
leur  avoir  demandé  pardon  de  la  sévérité 
dont  il  craignait  d'avoir  usé  envers  eux,ildis- 
tribua  l'argent  qui  lui  restait  aux  veuves, 
aux  orphelins  et  aux  étrançers,  les  nommant 
cliacun  pau  leur  nom.  Il  n'oublia  pas  ses 
clercs  dans  cette  distribution  ,  sachant  leurs 
besoins.  A  l'égard  de  ceux  qui  le  venaient  voir 
il  leur  donnait  sa  bénédiction.  Il  mourut  le 
premier  jour  de  janvier  de  Tan  333  ,  le  vingt- 
cinquième  de  son  épiscopat,  et  le  soixante- 
cinquième  de  son  âge.  On  ne  put  point  lui 
donner  la  sépulture  le  même  jour,  mais  on 
porta  son  corps  *  dans  l'oratoire  du  monas- 
tère, où  les  clercs  et  les  moines  passèrent 
toute  la  nuit  à  chanter  des  psaumes,  des 
hymnes  et  des  cantiques.  Le  matin ,  après 
que  les  peuples  du  voisinage  furent  arrivés 
pour  ses  funérailles,  il  fut  porté  par  les  mains 
des  prêtres  à  l'église  de  la  ville,  que  l'on 
nommait  la  Seconde,  et  où  le  saint  évêque 
avait  mis  des  reliques  des  apôtres.  Il  fut  le 
premier  qui  mérita  d'être  enterré  dans  cette 
basilique  ,  aucun  prêtre,  ni  laïque  n'y  ayant 
jusque-là  eu  sa  sépulture  suivant  l'ancienne 
coutume.  Mais  ou  passa  au-dessus  de  l'usage 
à  cause  de  l'amour  que  l'on  portait  au  saint 
évêque.  Les  habitants  de  Ruspe  éprouvèrent 
en  plus  d'une  occasion  les  eifets  de  l'inter- 


sed  prochariiate  inter  monachos  habitari.  Consi- 
derans  eixim  vir  providus ,  ne  quod  servi  Vei 
simplices  prœjudicium  postea  paterentiir,  obicem 
conlradiclionis  in  hac  scriptu7-a  successoribus 
suis  apposuit.  Emit  tamen  juxta  Ecclesinm  do- 
mum,  oui  fabricandœ  cvram  maTimam  diligen- 
ter  inipendit  :  ne  fuluro  successori  suo  deesset 
hospilium.  Vita  Fulg.,  cap.  xxix. 

'  Per  singulns  septimanas  omnes  clericos  ac 
viduns  et  quicumque  potuisset  ex  laïcis  qunrla 
et  sexta  feria  stntuit  jejunare,  quotidianis  vigi- 
liis,  jejuniis,  malutinis  et  respertinis  oratiunibus 
adesse  prœcipitns  omnes.  Ibid. 


»  Ipso  autem  die  sanctum  corpus  ejus  sepeliri 
minime  potuit  :  sed  in  oratorio  monasterii  cons- 
titiitum,  tota  nocte  illa  in  psahnis,  hymnis  et 
canlicis  spiritualibus  vigilare  monachos  simul 
et  clericos  invitavit.  Mane  rero  sncerdotum  ma- 
nibus  ad  ecclesiam  civitatis  quœ  Secunda  dicitur, 
«fti  etiam  reliquias  apostolorum  conslituerat , 
deporlaltis,  sortitus  est  honorabile  monumentuyn. 
Primtis  plane  iti  eadem  basilica  pontifex  poni 
meruit,  wfcî  nullum  mortuum,  neque  sacerdotem, 
i\eqne  laïcum,  sepeliri consuetudo sinebat  antiqua. 
Sed  magna  vis  dilcctionis  removebat  impedimen- 
tum  consueludinis.  Jbid. 


10 


HISTOIRE  GE.NKR.\LE  DES 


Érri»    t.» 
MJOI    FoIgtD- 


cession  de  saint  Fulgcnce,  particulièrement 
dans  l'incui-sion  des  Maures.  Toute  la  pro- 
vince eut  ti  Foulliir  de  leur  part  des  maux 
infinis,  et  une  Imrrible  caplivilc.  Le  saint, 
servant  comme  de  mur  aux  babitants  de 
Ruspe,  les  préserva  de  la  cruauté  de  ces  bar- 
bares. Les  laïques  et  les  clercsue  s'accordanl 
point  pourl'éleclion  d'un  successeur,  le  siège 
vaqua  presqu'un  an  entier,  après  quoi  on 
élut  Félicien,  qui  fut  installé  le  même  jour 
que  saint  Fulgence  était  mort.  C'est  ce  que 
dit  l'auteur  de  sa  vie  qui  était  un  de  ses  dis- 
ciples. (Juelques-uns  croient  que  c'est  Fer- 
rand,  diacre  de  l'église  de  Cartliage,  mais  la 
cbose  n'est  point  certaine  ,  et  il  parait  que 
celui  qui  a  composé  celte  vie,  avait  non -seu- 
lement été  disciple  de  saint  Fulgence ,  mais 
qu'il  l'avait  encore  suivi  partout ,  ce  qu'on 
ne  peut  dire  du  diacre  Ferrand. 

17.  Les  écrits  que  nous  connaissons  de 
lui  sont  dix  réponses  aux  dix  objections  des 
ariens;  trois  livres  à  Trasamond;  un  livre 
contre  Pinta  ;  trois  livres  à  Monime  ;  deux  li- 
vres de  la  rémission  des  péchés;  plusieurs 
lettres,  dont  la  iiremière  est  à  Proba,  dame 
Romaine  ;  un  livre  à  Donat  sur  la  foi;  divers 
traité  sur  la  proposition  de  Jean  Maxen- 
ce:  Un  de  la  Trinité  a  souffert;  trois  livres 
de  la  vérité,  de  la  prédestination  et  de  la 
grâce  ;  la  lettre  à  Jean  et  à  Vénérius,  au 
nom  des  évoques  d'Afrique  ;  dix  livres  con- 
tre Fabien;  un  traité  adressé  à  Victor;  un 
traité  de  la  foi  à  un  laïque,  nommé  Pierre  : 
un  autre  où  il  répondait  à  cinq  questions  du 
diacre  Ferrand;  un  traité  à  Réginus,  et  plu- 
sieurs sermons.  Voilà  l'ordre  dans  lequel  on 
aurait  dû  mettre  les  ouvrages  de  saint  Ful- 
gence, si  on  eut  voulu  les  placer  suivant  le 
temps  où  ils  paraissent  avoir  été  composés. 
Maison  ne  s'est  point  embarrassé,  dans  la  nou- 
velle édition  de  ses  œuvres  à  Paris,  en  1684, 
de  les  mettre  selon  l'ordre  chronologique,  et 
l'on  a  mis  en  premier  lieu  les  trois  livres  à 
Monime,  qiioique  saint  Fulgence  ne  les  ait 
écrits  qu'après  ceux  qu'il  adressa  au  roi  Tra- 
samond. .Nous  suivrons  néanmoins  cette  nou- 
velle édition  pour  la  commodité  des  lecteurs. 

ARTICLE  n. 


D£S  ECRITS  DE   SAINT   FULGENCE. 
§1- 

Des  Livres  à  Monime. 
Utr«  4       I.Mouime.un  des  principaux  amis  de  saint 


'.  Adk- 

ire- 


AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 

Fulsonce,  lui  avait  écrit  plusieurs  lettres,  m»» m» 
dans  lesquelles  il  lui  demandait  son  senti-  '^;' ,  ^'^^ 
ment  sur  plusieurs  diflicullés  qu'il  ne  pou-  j^';!-*  ""■* 
vait  résoudre  lui-même,  quoiipi'il  ne  fut  pas 
sans  érudition.  Le  saint  évêque,  chargé  de 
diverses  occupations,  ne  se  trouva  point  en 
état  de  répondre  à  Monime  aussitôt  qu'il  l'au- 
rait souhaité  :  il  ne  le  fit  que  dans  son  second  *•*•"■  '  "  ''• 
exihlansl'ile  de  Sardaignc,  c'ost-à-dire,  vers 
l'an  321.  Il  renferma  dans  trois  livres  ses  ré- 
ponses aux  difficultés  de  son  ami.  La  pre- 
mière était  touchant  la  doctrine  de  saint 
Augustin  sur  la  prédestination.  Monime  qui 
n'avait  pas  bien  conçu  ce  que  ce  Père  en- 
seigne sur  cette  matière,  s'était  imaginé  que, 
suivant  les  principes  établis  dans  son  livre 
de  la  Perfection  de  la  justice ,  et  ailleurs, 
Dieu  nous  prédestinait  également  au  mal 
comme  au  bien,  au  péché  comme  à  la  vertu, 
à  la  mort  comme  à  la  vie.  Pour  appuyer  son 
scnlinicnt,  il  apportait  dans  ses  lettres  quel- 
ques passages  des  écrits  de  saint  Augustin. 
Saint  Fulgence  emploie  son  premier  livre  tout 
entier  à  montrer  que,  dans  le  sentiment  de 
saint  Augustin,  Dieu  ne  prédestine  point  les 
hommes  au  péché,  mais  seulement  à  la  peine 
ou  au  supplice  qu'ils  ont  mérité  par  leurs 
péchés.  11  montre  que  ce  saint  docteur,  en  ca?.  >. 
disant  qu'il  y  a  des  hommes  prédestinés  à  la 
mort,  n'a  pas  entendu  par  le  terme  de  mort  la 
première  mort  de  l'àmc  dans  laquelle  les  en- 
fants naissent,  ou  celle  que  nous  nous  don- 
nons par  nos  crimes  pr  iprcs  ,  mais  la  seconde 
mort,  c'est-à-dire  ,  les  tourments  que  nous 
méritons  par  nos  péchés,  soit  ceux  que  nous 
avons  commis  avant  le  baptême,  quand  nous 
mourons  sans  avoir  été  régénérés;  soit  ceux 
que  nous  commettons  depuis  le  baplêmc  , 
lorsque  nous  mourons  sans  les  avoir  cttacés 
par  la  pénitence.  C'est  cette  mort  que  lepé-  cap.  v,. 
cheur  se  donne  lui-même  par  le  mépris  qu'il 
fait  des  divins  commandements,  que  Dieu 
punit  par  une  double  mort  :  la  première, 
dans  la  séparation  de  l'àine  et  du  corps  ,  la 
seconde  dans  les  supplices  éternels,  dont  il 
punil  làuie  et  le  corps.  Comme  donc  en  Dieu 
il  n'y  a  point  de  péché,  le  péché  ne  peut  pas 
venir  de  lui,  ni  par  conséquent  être  son  ou- 
vrage. Or  il  ne  pr.ulestine  que  ce  qu'il  fait, 
ou  ce  qu'il  veut  faire  :  il  ne  fait  point  de 
mal ,  ni  ne  le  veut  faire  :  le  mal  n'est  donc 
point  un  elfet  de  sa  prédestination.  D'où  il  ci.-.  >„. 
suit  que  les  méchants  ne  sont  point  prédes- 
tini'S  pour  faire  le  mal,  mais  seulement  pour 
souffrir  la  peine  due  à  leurs  péchés.  La  pré- 


[Vl'  SlLCLE.] 

dcslinatinn  '  ne  renferme  point  une  néccssito 
do  contrainle  pour  hivoloiilé  humaine,  mais 
mu' jiisie  ,  miséricordieuse  el  éternelle  dis- 
position de  l'ieuvie  ili^  Dieu,  par  laquelle  il 
accorde  gratuitement  le  pardon  à  un  miséra- 
ble, tandis  qu'il  en  punit  un  autre;  le  tout  par 
un  conseil  secret,  mais  juste,  de  sa  volonté. 
Dieu  prévient  par  sa  miséricorde  celui  qu'il 
veut,  sauver,  quoiqu'il   en   soit  indigne:  il 

c»r.  T11-.  trouve  l'autre  digne  de  sa  colère.  Il  donne 
gratuilemeut  la  grâce  ;"!  celui  (]ui  on  est  indi- 
gne :  par  elle  l'impie  étant  justilié  se  trouve 
éclairé  par  la  bonne  volonté  qu'il  lui  inspire, 
et  il  reçoit  en  même  temps  le  pouvoir  de 
faire  de  bonnes  œuvres;  en  sorte  qu'il  com- 
mence il  vouloir  le  bien  par  la  miséricorde; 
de  Dieu  qui  le  prévient;  et  par  la  même  mi- 
séricorde qui  le  suit  et  l'accompagne,  il  peut 
faire  le  bien  qu'il  veut.  Dieu  -  donne  aussi 
la  grâce  â  celui  qui  la  mérite,  lorsqu'il  rend 
aux  œuvres  de  l'homme  juste  la  récompense 
éternelle,  de  telle  sorte  que,  soit  qu'étant 
juste  lui-même,  il  justifie  l'impie  par  sa  mi- 
séricorde, selon  ces  paroles  de  saint  Paul  : 

Rom.  11,20.  Montrant  tout  ensemble  (ju' il  est  juste  et  qu'il 
justifie  celui  qui  a  la  foi  en  Jésus-Christ;  soit 
aussi  que,  plein  débouté,  il  donne  au  juste 
la  gloire  qui  lui  est  due,  selon  ces  autres  pa- 

Rnm.  VIII,  rôles  du  même  apôtre  :  Ceux  qu'il  a  justi- 
fiés, il  les  a  glorifiés.  C'est  toujours  la  grâce 
qui  agit,  et  qui  commence  le  mérite  dans 
l'homme,  en  le  rendant  juste,  et  qui  le  con- 
somme et  le  perfectionne,  en  le  couronnant 
delà  gloire.  C'est  elle  qui  commence  à  met- 
tre la  bonne  volonté  dans  l'bomme,  qui  aide 
ensuite  cette  bonne  volonté  ;  de  sorte  que  la 


cn.\prniii  I.  — .  SAINT  FUi/'.ivNCE  \m  nusPE. 


11 


même  volonté  qui  est  rendue  Ijonne  par  le 
don  do  Dieu,  suiraonte  ensuite  la  mauvaise 
concupiscence  par  son  divin  secours,  et  est 
cnlin  établie  lie  Dieuniêiiie  dans  cet  heureux 
état  où  elle  n'a  plus  de  mauvaises  concupis- 
cences. Saint  Fulgencc  enseigne  qu'il  n'y  a 
dans  l'Écriture  :  C'est  le  Seigneur  qui  prépnrr 
lu  cdlnnté ,  que  parce  que  le  prophète  a  pré- 
dit par  ces  paroles  que  Dieu  nous  la  donne- 
rait. C'est  de  cette  bonne  volonté  qu'il  entend 
le  cœur  nouveau  et  l'osprit  nouveau  que 
Dieu  promet  dans  Ezéchiel.  Dieu  nous  donne' 
ce  cœur  nouveau  afin  que  nous  marchions 
dans  ses  préceptes;  et  c'est  en  cela  que  con- 
siste le  commencement  de  la  bonne  volonté. 
Il  nous  donne  aussi  de  garder  et  de  prati- 
quer ses  commandements,  ce  qui  regarde 
l'elfet  de  la  bonne  œuvre  :  d'où  nous  ap- 
prenons que  c'est  un  don  de  Dieu  de  ce  que 
nous  voulons  faire  le  bien,  et  de  ce  que  nous 
pouvons  le  pratiquer.  Ce  Père  autorise  cette  cap. 
doctrine  par  divers  passages  de  l'Écriture  , 
où  nous  lisons  que  la  volonté  et  le  pouvoir 
de  faire  le  bien  nous  viennent  de  Dieu;  d'où 
il  infère  que  c'est  Dieu  même  '  qui  fait  en 
nous  tout  le  bien  que  nous  faisons  en  lui ,  la 
bonne  volonté  et  la  bonne  œuvre  venant  de 
lui.  11  eu  infère  encore  que,  par  la  prédesti- 
nation ,  Dieu  prépare  non-seulement  la  va- 
lonté  par  laquelle  nous  voulons  le  bien , 
mais  encore  les  bonnes  œuvres  que  nous  fai- 
sons. Il  prouve  que  la  vie  éternelle,  qui  est 
la  récompense  de  la  bonne  vie,  est  encore  un 
don  de  Dieu,  et  que,  comme  la  bonne  vie  est 
donnée  "  gratuitement  aux  personnes  justi- 
fiées, la  vie  éternelle  est  de  même  donnée 


PrtT,    ri  1, 


LVPfh. 
xxivi,36. 


'  Prœdestinationis  nomine  non  aliqua  volun- 
tatis  hitmanœ  coactilia  nécessitas  exprimitur, 
sed  niisericors  et  justa  futuri  operis  dicini  sem- 
pilerna  dispositio...  ciijus  hoc  opus  est  in  homine 
ut  occulUv  roltintatis  suœ  noti  tamen  injiislo 
consilio,  aut  gratuitnm  misericordiam  prœrnget 
misero  aut  debitam  juslitia}n  rependat  injuslo  .. 
ac  sic  aut  istum  prorsus  imlignuin  misericordia 
prœveiiiat,  aut  illum  ira  dignum  inveniat.  Ipse 
eniin  dnnat  gratis  indigna  gratiain  qua  jusiifi- 
catus  impins  illuminetur  munere  bunœ  volan- 
latis,  et  facullate  bunœ  nperatinnis  ut  pnve- 
nienle  misericordia  bonum  velle  incipial,  el  sub- 
séquente misericordia  bonum  quod  vult  facere 
valent.  Tahg.,  lib.  Il  ad  Monim.,  cap.  vu. 

-  Donat  eliam  gratiam  digno  in  retributione 
mercedis  œternœ  ut  scilicet,  sive  cum  impium  pie 
justilicat  jiistus  ,  quia  de  ipso  .ipostolus  dicit  : 
Ut  sit  ipse  ju?tu3  et  justiCcaus  eum  qui  ex  fide. 
est  Jesu.  Seu  cum  justum  juste  (jlorificat  pius , 
quiaquosjustificavit,  illos  et  glorificavit,  eadem  sit 


operatio  graliœ  quœ  meritum  hominis  bonum 
et  initiât  ad  juslitiam  et  consununat  ad  glo- 
riam.  Primo  inctioans  in  homine  bonam  volun- 
latem  deinde  eamdem  voluntatem  adjurons  in- 
choatam  ut  eadem  voluntas  et  divino  dono  bona 
sit  et  divino  adjutorio  malam  concupiscentiam 
superare  possit,  et  Dco  perficienle  talis  poslmo- 
dum  ipsa  voluntas  sit  ut  malam  concupiscetitiam 
liabcre  non  possit.  Ibid.,  cap.  viii. 

'  Dat  Deus  cor  norum  ut  injusti/icationibus  ejus 
ambulenius,  quod  perlinet  ad  bonœ  volunlalis 
initium  ;  dat  etiam  ut  judicia  ejus  obscrvemus 
et  faciamv.s,  quod  pertinet  ad  bonœ  operationis 
effectum.  Unde  cognoscimus  Dei  esse  et  ut  bonum, 
facere  velimus,  et  ui  bonum  facere  valeamus.  IHd. 
et  cap.  IX. 

*  Omne  igitur  opus  quod  a  nobis  in  Deo  fit, 
Deus  in  nobis  facit.  Ex  ipso  est  ergo  et  voluntas 
bo  a  et  operalio  bona.  Ibid. 

*  En  gratia  dalur  non  solum  juslificalis  vila 
bona,    sed  etiam  glorificatis  vita  œterna.  Quod 


12 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


par  irrâce  à  celles  que  Dieu  a  glorifiées, 
cp...  C'est,  dit-il,  saint  Paul  qui  nous  apprend 
ntn..x.  cette  vérité,  lorsqu'il  nous  dit  :  La  mort 
est  la  solde  du  péché  ;  mais  la  vie  éternelle 
est  une  grâce  de  Dieu  en  Nntre-Seigveur  Jé- 
sus-Christ. Car  pourquoi  r.-Vpûlrc  appclle-t- 
il  la  mort  la  paie  et  la  solde  du  péché,  et 
dit-il  que  la  vie  éternelle  est  une  grAce,  si  ce 
n'est  parce  que  la  première  est  donnée  à 
celui  à  qui  elle  est  due,  au  lieu  que  la  se- 
conde est  accordée  par  pure  grâce  à  celui 
qui  n'y  a  aucun,  droit?  Or,  lorsque  Dieu  puuit 
de  mort  le  pécheur,  il  punit  en  lui  l'œuvre 
mauvaise,  qu'il  n'aurait  point  commise,  s'il 
ne  s'était  retiré  de  Dieu  ;  au  lieu  que  lors- 
qu'il accorde  la  vie  éternelle  ,  il  achève,  en 
glorifiant  le  juste ,  l'ouvrage  qu'il  avait  lui- 
mcm.e  commencé,  enle  rendant  juste,  d'impie 
Tip.  I.  qu'il  était.  Il  montre  par  les  paroles  du  psau- 
me que  la  grâce  de  Dieu,  que  David  exprime 
par  le  mot  de  miséricorde,  prévieut  notre 
volonté,  et  qu'elle  la  suit  pour  l'empêcher 
de  retomber  dans  le  mal;  elle  prévient  l'im- 
pie '  afin  qu'il  devienne  juste;  elle  le  suit 
lorsqu'il  est  devenu  juste,  de  peur  qu'il 
ne  redevienne  impie.  Elle  prévient  l'aveugle 
pour  lui  communi(juer  une  lumière  qu'il  n'a- 
vait pas  :  elle  le  suit  lorsqu'il  voit ,  aliu  de 
lui  conserver  la  lumière  qu'elle  lui  a  donnée. 
Ainsi  la  grâce  ne  rappelle  pas  seulement  au 
bon  chemin,  en  justiliunt  celui  qui  était  dans 
l'égarement  :  elle  le  garde  encore  et  l'aide 
dans  le  chemin  pour  le  conduire  au  don  de 
la  gloire  éternelle.  Or  toutes  ces  choses, 
c'est-à-dire  les  commeucemcnls  de  notre  vo- 
cation, les  accroissements  de  la  justice,  et 
les  récompenses  de  la  gloire,  ont  toujours  été 
renfermées  dans  la  prédestination  de  Dieu, 
parce  qu'il  a  prévu  les  œuvres  futures  de  sa 


c>r  iM. 


grâce  dîxns  la  vocation,  dans  la  justification, 
et  dans  la  glorification  des  saints,  selon  que 
le  dit  l'.\potre  dans  sonÉpitre  aux  Romains. 
2.  Quoique  Dieu  n'exécute  que  dans  le 
temps  ce  qu'il  a  ordonné  pour  l'avantage 
de  ses  élus,  on  ne  laisse  pas  de  dire  qu'il  l'a 
fait  de  toute  éternité,  parce  que  sa  volonté 
est  immuable;  c'est  ainsi  que  nous  regar- 
dons ses  promesses  comme  déjà  accomplies, 
parce  que  nous  ne  doutons  point  qu'elles  ne 
le  soient  un  jour,  rien  n'étant  capable  de 
l'empêcher  de  les  exécuter  tôt  ou  tard,  selon 
sa  volonté.  Il  a  donc  pu,  comme  '  il  a  voulu,  ci?  x<». 
en  prédestiner  quelques-uns  à  la  gloire  et 
d'autres  à  la  peine  due  à  leurs  péchés.  Ceux 
qu'il  a  prédestinés  à  la  gloire,  il  les  a  pré- 
destinés à  la  justice  ;  mais  ceux  qu'il  a  pré- 
destinés à  la  peine,  il  ne  les  a  pas  prédesti- 
nés au  péché.  II  couronne  dans  '  les  saints 
la  justice  qu'il  leur  a  donnée  gratuitement, 
qu'il  a  conservée  en  eux  gratuitement,  qu'il 
a  consommée  et  perfectionnée  gratuitement 
en  eux.  Mais  il  condamnera  les  méchants 
pour  leur  impiété,  et  leur  injustice  qu'il  n'a 
point  faites  en  eux.  Dans  les  uns  il  glorifie 
ses  propres  œuvres  ;  dans  les  autres  il  con- 
dimine  des  œuvres  qui  ne  sont  pas  les  sien- 
nes. Dans  les  justes,  comme  dans  les  injus-  cip.  \<^. 
tes,  il  faut  considérer  trois  choses  :  le  com- 
mencement de  la  volonté,  le  progrès  de 
l'aclion,  et  la  fin  de  la  rétribution;  attribuer 
à  uu  Dieu  bon  et  juste  tout  te  que  nous 
voyons  être  bon  et  juste,  et  regarder  comme 
indigne  de  lui  tout  ce  en  quoi  nous  n'aper- 
cevons ni  bonté  ni  justice.  D'où  il  suit  qu'en 
ce  qui  regarde  la  foi,  et  les  bonnes  œuvres, 
nous  ne  devons  nous  glorifier  de  rien,  n'ayant 
rien,  selon  l'Apôtre,  que  nous  n'ayons  reçu  icor.  ni. 
de  Dieu.  C'est  gratuitement*  qu'il  appelle  les    cj...  i». 


Pauli  lenemus  prcedicalione  compertum  dicentis  : 
Slipendium  eiiiiii  peccati  mors,  gratia  autem  X)v 
vita  œterna  in  Cliii.sto  Jesu.  Cur  autem  mors  sii- 
pendium,  vila  rero  œterna  gratia  dicitiir,  nisi 
ijuia  illa  redditur,  hœc  donatur  ?  Sed  nbi  illam 
Deus  reddil  npus  mnlum  peccatoris  hoinims  pu- 
nit, quod  nullalcnus  fecisset  liomn,  nisi  dis- 
cessissel  a  Dco.  Cum  vero  Deus  douai  litam 
œternam,  opus  suutn  quod  inchoavil  justifi- 
cans  impium,  perficit  gluri/lcans  justtim.  Ibid.. 
cnp.  X. 

'  Misericordia  prœvenit  impium  ut  /iat  jusius. 
SuUsequitur  justum  ne  fiât  iinpius.  Prwienil  cœ- 
cum  ut  lumen,  quod  non  invenil  doiiel.Suhsequitur 
videiitcm  xit  lumen, qund  conlulit,  sériel;  et  ideo 
vnn  solum  erranlem  justiftcanito  ad  viam  rerocat, 
sed  etiam  bene  ambulanlrm  tuslodil  et  adjuvat, 
ul   ad  donum  glorificalionis   œternœ  perducal. 


Hœcaulem  omnia,id  est  et  vocalionis  noslrœ  ini- 
tia, et  justiftcationis  augmenta,  et  glorificalionis 
prœmia,  in  prœdestinalione  scmper  ])cus  Itabuit  : 
quia  et  in  rocatinne  it  in  justificalione  d  in  glo- 
rificatione  sanctorum ,  gratiœ  suic  opéra  futurœ 
pricscirit.  Il)iil.,  cap.  xi. 

*  Perinde  potuit ,  sicut  roluit ,  prœdestinare 
quosdani  ad  glariam,  qvosdam  ad  pœnam.  Sed 
quos  prd'destinaiùl  ad  glariam,  prœdeslittavit  ad 
justitiam.  Quos  autem  prœdeslinavil  ad  pœnam 
non  privdestinatit  ad  culpam.  Il)i(l.,  rap.  xiii. 

'  In  sanclis  cnronat  Deus  justiliam,  quam  eis 
gratis  ipse  tribuit,  gratis  sen'niit,  gratv<que  per- 
fccil.  Iiiiquos  autem  condemnabit  pro  impitlate 
rel  injustitia  quam  ipse  in  eis  non  fecit.  In  illis 
enim  opéra  sui/  glorificat,  in  istis  opéra  non  sua 
condemnal.  \b\<\.,  lap.  xiii. 

*  Unns  autem  Deus  est  qui  gratis  el  vocal  prœ- 


ClTAPITrtl':  I.  —  SAINT  FLlI.r.ENCE  DR  RUSPË. 


Cap.  »vi. 


Cnp.  x\l. 
x.ili. 


Cai,  \ni. 


Cap.  is* 


[VI*  SIÈCLE.] 

pi'iUlcsIinds;  qu'il  Justifie  ceux  qu'il  appelle; 
et  qu'il  glorifie  ceux  qu'il  jusiilio. 

3.  Siiint  Fulpeuce  cxiimirin  cusuito  si  Dieu 
a  prodosliuo  les  uK'cliauts  pour  faire  le  mal 
qu'il  devait  piiuir  eu  eux,  on  s'il  les  a  pré- 
destintis  au  supplice,  parce  qu'il  a  prévu 
qu'ils  feraieut  de  uianvaises  aciious.  Il  pose 
deux  principes  ;  l'un,  que  '  l'orj^nieil  est  le 
commenccHieut  de  tout  péché;  l'autre,  que' 
la  volonté  de  la  créature  raisounahle  ne 
peut  être  sans  quelque  amour,  et  qu'elle  ne 
peut  aimer  qu'elle  ne  se  poito  à  (luelque 
cliosc,  connue  à  l'objet  de  son  amour;  de 
sorte  qu'étant  établie,  comme  au  milieu  cn- 
ti-e  le  souverain  bien  pour  lequel  elle  a  été 
créée,  et  les  biens  int't'rienrs,  au-dessus  des- 
quels elle  est  élevée  ,  il  est  nécessaire  ou 
qu'elle  s'arrête  misérablement  aux  biens  in- 
férieurs, ou  qu'elle  se  repose  heureusement 
dans  le  bien  souverain  :  car  elle  est  entraî- 
née par  un  certain  amour,  soit  lorsqu'elle  se 
soumet  à  son  Créateur,  soit  lorsqu'elle  do- 
mine sur  la  créature.  Mais  comme  elle  est 
humiliée,  lorsqu'elle  s'élève ,  de  même  elle 
s'élève  par  son  humilité  ;  Dieu  donnant  sa 
grâce  aux  Immblcs,  tandis  qu'il  résiste  aux 
superbes.  Ce  n'est  pas'  que  Dieu  trouve  l'hu- 
milité dans  l'homme  avant  de  l'y  avoir  mise 
lui-même;  mais  en  lui  donnant  sa  grâce  il  le 
rend  humble.  Saint  Fulgence  conclut  de  tout 
cela,  que  l'orgueil,  qui  est  le  principe  de  la 
mauvaise  volonté,  n'étant  point  de  Dieu  ,  on 
ne  peut  pas  dire  non  plus  que  la  mauvaise 
action  soit  de  lui,  au  contraire,  qu'il  la  pu- 
nit justement  ;  et  qu'ainsi  il  n'a  point  pré- 
destiné l'homme  à  la  mauvaise  volonté,  puis- 
qu'il ne  devait  point  la  lui  donner,  et  qu'il  ne 
la  fait  pas.  Ne  faisant  rien  qui  ne  soit  dans 
l'ordre ,  comment  aurait-il  prédestiné  au  pé- 
ché qui  est  contre  l'ordre  ?  Nous  voyons  que 


13 


dans  les  saintes  Ecritures,  afin  qu'on  évite  le 
péché,  on  commande  la  charité  :  //  a  réglé 
et  ordonné  en  moi  In  charité,  dit  l'i'jpoux;  et  si 
on  y  *  fait  att(!ution  on  trouvera  que  la 
source  de  tout  péché  n'est  autre  chose  que 
l'amour  déréglé,  par  lequel  la  créatiu-e  rai- 
sonnable renverse  l'ordnî  que  Dieu  avait 
établi  dans  le  monde,  et  que  c'est  en  per- 
dant volontairement  cet  ordre  de  la  charité 
qu'elle  s'est  perdue  elle-uiême.  Or,  ce  n'est 
point  à  ce  renversement  que  la  créature 
raisoiuialjle  a  éti'  prédestinée  de  Dieu.  Sa  ° 
prédcslinalion  n'est  autre  chose  qu'une  pré- 
paration éternelle  des  œuvres  futures  dans 
laquelle  ou  ne  trouvera  aucune  cause  du 
mal,  parce  que  l'origine  du  péché  n'a  ja- 
mais procédé  de  Dieu.  Comme  il  lui  con- 
vient^ d'être  la  cause  de  toute  la  bonne 
action,  il  est  indécent  de  lui  imputer  la 
cause  d'aucune  mauvaise  œuvre.  D'ail- 
leurs, on  ne  peut  produire  quelque  raison 
qui  nous  porte  à  croire  (jue  Dieu  prédestine 
au  péché.  N'est -il  pas  écrit  au  contraire 
que  Dieu  n'a  pas  fait  la  mort,  qu'il  est 
juste  et  qu'il  a  aimé  la  justice?  Disons  donc 
que  Dieu  a  prévu  toutes  les  actions  des 
hommes,  bonnes  et  mauvaises,  parce  que 
.  rien  ne  peut  lui  être  caché  ;  mais  qu'il  n'a 
prédestiné  que  les  bonnes  ,  qu'il  a  prévu 
qu'il  serait  lui-même  dans  les  enfants  de  la 
grâce  ;  qu'à  l'égard  des  mauvaises  actions 
des  impies,  il  les  a  seulement  prévues; 
qu'en  conséquence,  il  a,  par  un  etiet  de  sa 
miséi'icorde,  prédestiné  les  bons  à  la  gloire, 
et  par  un  effet  de  sa  justice,  les  méchants 
aux  supplices.  Saint  Fulgence  prie  Monime  cap.  nvi. 
de  faire  attention  ''  à  l'endroit  du  neuvième 
chapitre  de  l'Épître  aux  Romains,  où  l'Apô-  n"'"".  '• 
tre,  pour  marquer  la  distinction  entre  les 
élus  et  les  réprouvés,  appelle  les  premiers 


C^p.  XXI, 


Ctp   xxii 


Saii. 


'Jap. 

XXIV. 


1% 


desti7iatos,  et  jusli/icat  vocalos,  et  gloriflcat  jiis- 
tificatos.  Ibid.,  caii.  xvi. 

*  Si  initium  peccali  requirilur,  nihil  aliud  nisi 
svperbia  invenilur.  Ibid.  cap.  xvn. 

'  Voluntas  creaturœ  ralionalis  sine  cjualicum- 
que  amore  esse  non  jiotest  :  nec  sic  potest  dili- 
gere  ut  amorem  suum  non  velit  ad  aliquid  rele- 
gare,  quœ  inter  summum  bonum  a  quo  creata 
est,  et  in/imum  bonum  cui  prœlata  est ,  medio 
quodam  loco  posita,  profecto  aut  in  infimo  bono 
necesse  est  miserabiliter  jaceat,  aut  in  summo 
bono  veraciter  feliciterque  requiescat.  Ibid., 
cap.  xvni. 

'  Neque  vero  Deus  hiimiles,  quibus  dal  gratiam, 
anle  datam  humiles  invenit  ;  sed  dando  gratiam 
humiles  facit.  Ibid.,  cap.  xvni. 

*  Peccali  initium  si  attend  lur,  puto  quod  nihil 


est  aliud  quam  ordinataruni  a  Deo  rerum  inor- 
dinata  rationalis  creaturœ  dilectio,  quœ  sponte 
perdendo  dilectionis  ordinem  perdidit  et  salutem. 
Iljid.,  cap.  SX. 

5  ^eque  enim  alia  est  ejus  prœdestinatio,  nisi 
futurorum  nperum  ejus  œterna  prœparalio,  in 
qua  nullius  causa  mali  poterit  inveniri.  quia  ex 
voluntate  Dei  nunquam  processit  origo  peccali. 
Ibid. 

^  Sicut  competit  Deo  bono  ut  causa  sit  totius 
boni  operis,  sic  incongruum  est  ut  impulatur  ei 
causa  cujuslihet  operis  mali.  Ibid.,  cap.  xxi. 

''  Sic  appareat  et  in  vasis  misericordiœ  non  ex 
ipsis  sed  ex  Deo  esse  quod  boni  sunt,  et  in  Viisis 
irœ.non  ex  Deo  sed  ex  ipsis  esse  quod  mali  sunt. 
Ibid.,  cap.  XXVI. 


14 


iiistoihe  générale  des  auteurs  ecclésiastiques. 


Cap.  ixTif. 


c-r».  lux. 


vases  de  misériconics.  les  secniids  vases  de 
colère.  «  Il  est  notoire,  dit-il,  que  l'on  ne  peut 
dire  de  Dieu  qu'il  soit  en  colère,  si  ce  n'est 
lorsque  l'iniquité  de  l'homme  a  précède.  Il 
l'est  encore  que  les  élus  sont  apjiclés  vases 
de  miséricorde,  et  non  vases  de  justice , 
parce  que  c'est  de  Dieu  et  non  d'eux-mê- 
mes qu'ils  sont  justes ,  au  lieu  que  les  ré- 
prouvés sont  méclianls  d'eux-mêmes.  »  Saint 
Fidgence  fait  voir  iiprès  cela  que,  les  mé- 
chants ayant  abandonne  Dieu  les  premiers 
en  se  livrant  à  leurs  mauvais  désirs,  Dieu 
les  abandoune  et  les  punit  avec  justice;  que 
leurs  péchés  sont  la  seule  cause  poui-quoi 
Dieu  les  prédestine  à  la  seconde  mort,  c'cst-à 
dire  aux  supplices  ;  qu'ils  sont  eux-mêmes  la 
cause  de  leur  première  mort,  qui  est  celle 
de  l'âme  et  qui  consiste  dans  le  péché  ;  que 
l'on  doit  dire  que  la  première  mort  de  l'iiom- 
me  vient  de  lui-même  et  la  seconde  de  Dieu  ; 
qu'ainsi  '  la  première  mort  est  la  cause  de  la 
seconde,  et  la  seconde  la  peine  de  la  premiè- 
re ;  que'  Dieua  prévu  les  mauvaises  actions 
des  pécheurs  ;  mais  que  ne  les  ayant  point 
préordonnées  ,  il  est  équitable  dans  la  peine 
qu'il  leur  destine.  Il  rapporte  un  lon^  pas- 
sage du  second  livre  de  saint  Au<,'uslin  sur 
le  baptême  des  enfants,  pour  montrer  que 
ce  Père  a  enseigné  constamment  que  l'or- 
gueil est  la  seule  cause  du  péclié  de  l'hom- 
me, et  qu'il  n'est  point  prédestiné  au  péché, 
mais  à  la  peine  due  à  son  péché.  Il  en  cite  un 
autre  du  premier  livre  sur  le  même  sujet,  où 
sr.inl  A:giistin  dit  nettement  qu'encore  que 
la  prédestination  ne  puisse  être  sans  la  pres- 
cience, la  prescience  peut  être  sans  la  pré- 
destination :  par  la  prédestination.  Dieu  pré- 
voit ce  qu'il  doit  faire  lui-même,  c'est  pour- 
quoi il  est  écrit  :  //  a  fait  les  choses  futures. 
Mais  il  peut  prévoir  celles  qu'il  ne  fera  pas  ; 
c'est  ainsi  qu'il  prévoit  les  péchés  des  hom- 
mes. Il  remarque  que  saint  .Vugnstin  n'ayant 
pu  répondre  aux  objections  que  quelques 
Gaulois  avaient  faites  contre  son  livre  de  la 
Prédestination,  parce  que  la  mort  ne  lui  en 
donna  pas  le  loisir,  saint  Prosper  y  suppléa, 


Ani!fU  do 
EccoiM  livre, 
k      MoDlme  , 

i»e.  î-.. 


montrant  dans  sa  réponse  ;\  la  quatorzième 
objection  des  Gaulois ,  que  l'infidélité  de 
ceux  qui  ne  croient  point  .'t  l'Kvaiigile  n'a 
point  pour  cause  la  prédestination  de  Dieu, 
qui  est  auteur  des  biens  et  non  des  maux  ; 
que  Dieu  a  bien  prévu  leur  infidélité,  mais 
que  sa  prescience  ne  leur  a  imposé  aucune 
nécessité  de  ne  pas  croire. 

4.  Les  ariens  prétendaient  que  le  sacri- 
fice du  corps  et  du  sang  de  Jésus-Christ  ne 
devait  être  ollert  qu'au  Père  seul  et  non  pas 
h  toute  la  Trinité.  C'était  une  suite  de  leur  er- 
reur sur  la  divinité  du  Verbe;  car  ne  recon-    c>p-  •"  •' 

n-. 

naissant  pas  le  Fils  pour  Dieu,  et  soutenant 
qu'il  était  d'une  substance  dillërente  du 
Père,  ils  devaient  nier  conséquemment  qu'il 
fût  digne  du  même  honneur  que  le  Père. 
Saint  Fulgencc,  voyant  qu'ils  ne  laissaient 
pas  de  se  llalter  d'avoir  la  même  foi  que  VÉ- 
glise,  et  que  celle  de  l'Kglisc  était  la  même 
par  laquelle  Abraham  plut  h  Dieu,  prouve 
que,  ce  patriarche  ayant  sacrifié  aux  trois 
personnes  de  la  Trinité,  nous  devons  en  faire  c«p.  t. 
de  même.  Il  prouve  la  même  chose  d'Isaac, 
des  Prophètes ,  et  de  l'Église  catholique  '  où 
le  sacrifice  salutaire  est  également  olïert  au 
Père,  au  Fils  et  au  Saint-Esprit,  c'est-à- 
dire,  à  la  sainte  Trinité;  comme  c'est  au 
nom  de  ces  trois  personnes  qu'elle  con- 
fère le  baptême.  Quoique  dans  la  prière  de 
celui  qui  offre  le  sacrifice,  il  ne  soit  fait 
mention  que  du  Père  seul,  il  n'en  résulte 
aucun  préjudice  pour  le  Fils  et  le  Saint- 
Esprit  .  parce  que  la  consommation  de  ce 
sacrifice  renferme  le  nom  de  ces  deux  per- 
sonnes, et  qu'encore  que  les  paroles  du  prê- 
tre s'adressent  nommément  au  Père,  l'obla- 
tion  se  fait  en  l'honneur  de  tonte  la  Trinité. 
L'Eglise  latine  faisait  en  ce  temps-là  une 
prière,  par  laquelle  elle  demandait  à  Dieu 
que  le  Saint-Esprit  descendit  sur  les  dons, 
c'est-;\-dire  sur  le  pain  et  le  vin,  pour  les 
changer  au  corps  et  an  sang  de  Jésus-Christ. 
Les  Grecs  ont  conservé  cette  prière;  mais 
ils  ne  la  récitent  qu'après  les  paroles  de  la 
consécration.  Les  Latins  la  disaient  tantôt 


'  Prima  igitur  mors  animœ  quam  sibi  liomo 
inlulit,  secunJœ  mortis  causa  esl  :  el  secuiula 
mors  quam  D  us  homini  reddidil  primœ  tnorlis 
est  pœna.  Ibid.,  rap.  xxvii. 

'  Peccata  itaqiie  liominum  cuncla  quidem  Deus 
in  pcccalonbus  pnisciril  fulura  :  cl  quia  ipse 
non  ea  prwdi'stinavil  fuciinda,  juste  prœdeslina- 
viljudicio  punienda,  lliid.,  «ip.  xxvn. 

'  Cdlltolici  fidèles  Siire  debent  omne  cujusiihet 
honorilicentiœ  el   salularis   sacrificii  obsequium 


cl  Patri  et  Filio  et  Spirilui  Snnrlo,  lioc  est  sanc- 
lip  Trinilali  ab  Ecclesia  pariler  exhiberi.  In  cu- 
jus  ulique  uomine  uno  manifestum  est  sanchim 
quoque  baptisnia  cetebrari.  Neque  enim  prtvju- 
dicium  Filin  cet  Spirilui  Sancio  cnmparalur, 
dum  ad  Palrispersonam  prccalioab  offcrenle  di- 
rigilur:  cnjus  consumnialin,  dum  Filii  cl  Spiri- 
lus  Sancl  complectilur  iiomen.  osUndil  nullum 
esse  in  TrinitJle  discrimen.  Fulg.,  lib.  II  ad  Uo- 
nim.,  eap.  v. 


[VI°  SIÈCLE.] 


CHAPlTltl':  I.  —  SAINT  FUI.GENCK  DE  lU'SPK. 


4  S 


IS  j.    XLVIM, 

lu. 


JoaD.    X[V, 
il. 


.■ivanl  ,  tiiiili'il  aprrs.  Nous  ne  la  liisoiis 
plus,  ot  à  s;i  plaie  nous  disons  aiissiirit  apiôs 
l'olilatioti  du  pain  el  du  vin  :  «  Venez,  sanc- 
tificalonr.  Dieu  élerncl,  bénissez  ce  sacrifice 

cif.  VI.  (pii  esl  prt''par(;  ù  votre  saint  nom.  »  Celte 
prière  Inurnissail  aux  ari(Mis  une  objection 
contre  la  divinité  du  Saint-Ksprit  ,  disant 
qu'il  était  moindre  que  le  Pore  et  le  Fils, 
l>uisqu'il  était  envoyé  par  eux.  Saint  Ful- 
i;ence  réjioud  ,  (|ue  si,  le  Saiut-Ksprit  est 
moindi'c  que  le  Père  et  le  Fils,  parce  qu'il 
est  envoyé  par  eux,  le  Fils  est  donc  aussi 
moindre  que  le  Père  et  le  Saiiil-Esprit,  puis- 
que nous  lisons  ([uc  le  Père  et  le  Saint- 
Esprit  l'ont  envoyé.  «Mais,  ajoutc-l-il ,  ni 
la  mission  du  Fils ,  ni  celle  du  Saint-Esprit 
ne  sont  locales  :  elle  sont  spirituelles ,  com- 
me l'est  aussi  la  venue  du  Père  dans  les 
cœurs  des  lidèles,  dont  Jésus-Christ  dit  dans 
l'Kvangile  :  Si  quelqu'un  m' aime,  il  gardera  ma 
parole  :  et  mon  Père  l'aimera,  et  notis  vioi- 
drons  à  lui,  et  nous  ferons  en  lui  notre  de- 

i ,,..  vir.  meure.  Il  montre  par  l'Ecriture  que  l'immen- 
sité est  un  attribut  commun  aux  trois  per- 
sonnes ;  que  toute  la  Trinité  concourt  à  la 
sanctification  de  l'Eucluiiistie  ;  que  l'invo- 
cation paiticulière  du  Saint-Esprit  mar- 
que souvent  les  dons  du  Saint-Esprit,  la  cha- 
rité, la  paix,  la  foi,  la  continence;  que,  ces 
dons,  pouvant  être  aufjmeutés  ou  diminués. 

Car.  V II.  ne  peuvent  être  la  même  chose  que  le  Saint- 
Esprit  qui  est  immuable  de  sa  nature  ;  et 
que  ce  sont  ces  dons  que  l'on  demande  pour 

c»p.  is.  tout  le  corps  de  l'Eglise  dans  le  sacrifice, 
n'y  en  ayant  point  d'occasion  plus  convena- 

cjp.  X.  ble,  que  lorsque  le  corps  '  et  le  sang  de  Jé- 
sus-Christ sont  offerts,  dans  le  sacrement  du 
pain  et  du  vin,  par  le  corps  même  de  Jésus- 

c»p.  "•  Christ  qui  est  l'Église  ;  que  c'est  pour  cela 
que  nous  demandons  que  la  même  grâce 
qui  a  fait  l'Eglise  le  corps  de  Jésus-Christ, 
en  fasse  persévérer  tous  les  memin-es  dans 
l'unité  par  les  liens  de  la  charité.  Ce  que 


nous  (li'iiiaMdons  dignenu'ut,  lorsque  nous 
demandons  (jue  cela  se  fasse  en  nous  par  le 
don  de  cet  Esjjrit,  qui  est  l'esprit  du  Père  et 
du  Fils ,  parce  que  la  sainte  et  naturelle 
unité,  égalité  ettharit(!  de  la  Triniliî,  qui  est 
un  s(nd  et  vrai  Dieu,  sanctifie  par  sou  una- 
nimité ceux  qu'elle  adopte.  Saint  Fulgence 
montre  que  sans  la  charité  les  autres  dons 
du  Saint-Esprit  sont  inutiles;  que  plusieurs  '  Cnp.u, 
ont  disd  ibué  leurs  biens  aux  pauvres,  aux- 
quels cela  n'a  servi  de  rien,  parce  qu'ils  se 
sont  perdus,  en  ne  se  mettant  point  en  peine 
d'acquérir  la  charilt;  qu'ils  devaient  uni(jue- 
mcnl  s'eû'orcer  d'avoir  ;  que  ceux-là  perdent 
le  Saint-Esprit  qui  se  séparent  de  l'unité  de 
l'Église;  qu'ainsi  la  grâce'  du  Saint-Esprit 
n'est  point  chez  tous  les  hérétiques;  que 
lems  sacrifices,  tandis  qu'ils  sont  héréti- 
ques, ne  peuvent  plaire  ;'i  Dieu  ;  que  l'on  ne 
peut  reconnaître  la  vertu  de  sanctification 
dans  les  sacrifices  de  ceux  qui  offrent,  étant 
séparés  de  l'unité  de  l'Eglise;  que  Dieu 
n'accepte  d'autres  sacrifices  que  ceux  de 
l'Eglise  seule,  parce  qu'elle  les  offre  dans 
l'unité  ;  que  les  hérétiques ,  en  quittant  le 
schisme  pour  revenir  à  l'unité  de  l'Égiisc, 
offrent  h  Dieu  une  hostie  d'une  odeur  agréa- 
ble ;  mais  que  c'est  la  charité  qui  fait  qu'ils 
reviennent,  et  qui  rend  leur  sacrifice  agréa- 
ble. Il  rapporte  quelques  passages  de  saint 
Augustin,  pour  faire  voir  que  par  le  Saint- 
Esprit  qui  nous  est  donné  par  l'imposition 
des  mains,  les  saints  Pères 'ont  entendu  la 
charité  qui  est  répandue  dans  nos  cœurs 
par  le  Saint-Esp'-it.  Monime  avait  aussi  de- 
mandé l'explication  de  ce  que  dit  saint  Paul 
dans  sa  première  aux  Corinthiens,  que  la 
virginité  est  une  chose  de  conseil,  et  non 
pas  de  précepte  :  il  pensait  que  la  virginité 
était  un  œuvre  de  surérogation,  et  y  rap- 
portait ce  qui  est  dit  du  Samaritain  de  l'É- 
vangile qui  donna  deux  deniers  à  l'hôte,  en 
lui  disant  :  Ayez  bien  soin  de  cet  homme,  et 


I    Cor.    vu 


'  Hcec  œdificalio  spiritaiis  nunquam  oppor- 
timitis  pi'titur,  quam  cuin  ab  ipso  Christi  cor- 
pore,  quod  est  Ecclesia,  in  sacrameiUo  panis  et 
calicis  ipsuin  Cliristi  corpus  et  sanguis  o/fertur. 
Ibiil.,  cap.  SI. 

-  Mulli  faciiUales  pauperibus  erogantes,  quia 
non  curaierunt  acquirendœ  char  itati  sludium 
impemlere,  res  quidein  suas  donaierunt,  quod 
ideo  nihil  eis  profiiit,  quia  seipsos  perdiderunt, 
vnii  acquirendo  charilatem  quant  ucquirere  de- 
buerant.  Ibid.,  cap.  ix. 

3  Uude  manifeslum  est  apud  oiunes  hœreticos 
Spiritus  Sancti  gratiim  non  cssc,  nec  eornia  sa- 


crificia,  quandiu  liœretici  sunt,  passe  Deoplacere  : 
neque  spiritulis  gratiœ  sanctificationem  sacri/i- 
ciis  eorum  tribut  qui  offerunt  ab  ecclesiastici 
corporis  unitale  disjuncti  :  solius  enim  Ecclesiœ 
Deus  delectatur  sacrificiis,  quœ  sacri/icia  Dco 
facit  imitas  spiritaiis.  Cap.  xi. 

'  Spiritus  autem  Sanctus,  quod  in  sola  catho- 
lica  Ecclesia  pcr  manus  imposilionein  dari  dici- 
tur,  inmium  hoc  intelligi  nifijores  nostri  volue- 
ruiil  quod  Àposlolus  ait  :  Quoninm  charitas  Dei 
diffusa  est  in  cordibiis  nostris  per  Spiritum  Sauc- 
tuiu  ijui  datus  est  nobis.  Ibid.,  cap.  xii. 


16 


HISTOIRE  GÉNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


tout  ce  que  vous  dépenserez  de  plus,  je  vous  le 
rendrai  à  mon  retour.  Saint  Fulgence  con- 
vient que  l'Apôtre  parle  en  cet  endroit  et  en 
d'autres  des  œuvres  desurérogation  ;  et  après 
avoir  allégué  ce  que  saint  Augustin,  saint 
Ambroise  et  Opiat  de  Miléve  ont  pensé  sur 
cette  matière,  il  dit  qu'il  importe  peu  en 
quel  sens  on  entende  les  deux  deniers  de 
surérogation,  parce  qu'un  même  passage  de 
l'Écriture  peut  avoir  divers  sens  tous  ap- 
prouvés, que  la  virginité  est  une  chose  de 
volonté  et  non  de  nécessité,  qu'on  peut  la  re- 
garder comme  une  œuvre  de  surérogation, 
de  même  que  le  travail  des  mains  que  saint 
Paul  s'imposait  pour  subvenir  à  ses  besoins, 
quoiqu'il  lui  eût  été  libre  de  vivre  de  l'Évan- 
gile, comme  les  autres  apôtres. 

Atê'ye  do  o.  U  était  parvcnu  à  saint  Fulgence  que 
«!•  >  M.»-  les  ariens,  voulant  s'autoriser  dans  leur  er- 
reur  par  les  premières  paroles  de  l'Kvan- 
gile  selon  saint  Jean  :  Le  Verbe  était  avec 
Dieu,  soutenaient  qu'autre  chose  était  d'ê- 
•>»•'•  tre  chez  quelqu'un,  ou  avec  quelqu'un,  et 
autre  d'être  dans  quelqu'un  ;  que  le  Fils 
était  avec  le  Père  ,  mais  qu'il  n'était  pas 
dans  le  Père.  Us  apportaient  pour  exemple 
un  habit  que  nous  disons  bien  être  avec 
nous,  lorsque  nous  le  tenons  en  main,  mais 
qu'on  ne  peut  dire  être  dans  nous.  Ce  Père 
fait  remarquer  l'indécence  de  la  comparai- 

c«p.  :.  «!  son  par  rapport  au  Verbe  de  Dieu.  Ensuite 
il  montre  que,  si  tout  ce  qui  est  avec  Dieu, 
est  extérieur  à  Dieu,  et  que  si  tout  ce  qui 
est  dans  lui,  lui  est  intérieur,  il  s'ensuit  que 
nous  sommes  plus  intimes  à  Dieu  que  son 
propre  Fils.  Car  il  est  dit  de  lui  :  //  était 
avec  Dieu  dès  le  commencement  ;  au  lieu  qu'il 

A,:.  xMii,  est  dit  de  nous ,  que  c'est  en  lui  que  nous 
avons  la  vie,  le  mouvement  et  l'être,  et  que 
DoB.i :.ic.  tout  est  de  lui,  par  lui,  et  en  lui.  Il  rapporte 
divers  passages  de  l'Écriture  où  ces  paro- 
les avec  et  dedans  se   prennent  indifférem- 

cap.  r:  >t  mcnt.  U  cst  dit  dans  saint  Jean  :  Je  prierai 

j«».  1 V,  mon  Père,  et  il  vous  donnera  un  autre  consola- 
leur,  savoir  l  Esprit  de  vente.  Vous  le  connaî- 
trez, parce  qu'il  demeurera  avec  vous  et  qu'il 
sera  dans  vous.  D'où  il  conclut,  que  lorsqu'il 
est  dit  que  :  LeVerbe  était  avec  Dieu,  c'est  com- 
me si  l'i^vangélislc  avait  dit  :  //  était  en  Dieu, 
parce  que  le  Fils  qui  est  le  Verbe-Dieu  dit 
que  non-seulement  le  Père  est  dans  lui,  mais 

4;us  III,  qu'il  est  lui-même  dans  le  Père  :  Ae  voyez- 
vous  pas  que  je  suis  dans  mon  Père,  et  que  mon 
Père  est  en  moi  ?  Il  est  vrai  que  nous  sommes 
dans  Dieu  et  avec  Dieu,  mais  ce  n'est  pas  de 


la  même  manière  que  le  Fils  unique  est 
dans  Dieu  et  avec  Dieu.  Il  est  dans  Dieu, 
comme  né  naturellement  de  Dieu,  c'est-â- 
dire  de  la  propre  substance  du  Père;  au  lieu 
que  nous  somimes  ses  enfants  par  grâce  et 
non  par  nature.  • 

§n. 

Livre  contre  les  Ariens. 

1.  Le  li\Te  des  réponses  aux  dis  objections  h*,^«M 
des  ariens  parait  être  le  premier  des  cents  'i^"^^»  -  =  ■ 
de  saint  Fulgence,  selon  l'ordre  des  temps. 

Il  le  composa  étant  à  Caitbage,  où  le  roi  Tra- 
samond  l'avait  fait  venir  de  Sardaigne  vers 
l'an  321.  Ce  prince,  qui  voulait  éprouver  son 
savoir,  lui  envoya  diverses  objections  contre 
la  foi  catholique,  avec  ordre  d'y  répondre 
promptement.  Elles  étaient  fort  longues,  et 
d'au  style  aussi  obscm-  que  barbare.  Le  saint 
les  réduisit,  les  divisa  par  articles ,  et  y  joi- 
gnit des  réponses  claires  et  solides. 

2.  Les  ariens  disaient  :  Les  noms  de  Père  ,  ««i»"»  » 

la       {■■emleie 

et  de  Fils  sont  difl'érents  :  leur  nature  est  •^""«■'ijt- 
donc  aussi  difl'érente.  Saint  Fulgence  répond 
que  la  difl'érence  des  noms  marque  en  Dieu 
la  distinction  des  personnes  ,  et  non  pas  une 
diversité  de  nature.  Les  noms  de  Père  et  de 
Fils  sont  des  noms  relatifs  qui  ne  séparent 
point  la  nature  de  celui  qui  engendre  de  la 
nature  do  celui  qui  est  engendré.  Ils  signi- 
fient au  contraire  une  même  nature  dans  le 
Père  et  le  Fils.  Cela  se  trouve  même  dans  les 
hommes  où  les  noms  de  père  et  de  fils  em- 
portent nécessairement  la  même  nature  dans 
l'un  et  dans  l'autre,  puisque  tous  deux  sont 
hommes,  quoique  l'un  soit  appelé  père,  l'au- 
tre fils.  Mais  l'un  est  appelé  père,  afin  qu'on 
connaisse  qu'il  a  engendré  uu  fils;  et  l'autre 
est  nommé  fils,  afin  qu'il  soit  connu  qu'il  est 
engendré  du  père.  Ainsi  cette  diversité  de 
noms  est  nécessaire  pour  la  distinction  des 
personnes,  chacun  de  ces  deux  noms  jjère  et 
fils  est  relatif.  Mais  il  n'y  a  qu'un  nom  pour 
marquer  la  nature  commune àl'un  et  àl'au- 
tre,  qui  est  celui  de  substance,  parce  que  leur 
substance  est  une  et  la  même.  Le  Fils  est 
Dieu  comme   le   Père   est  Dieu. 

N'est-il  pas  écrit,  ajoutaient  les  ariens,  que  Rl,^„„  \ 
la  génération  du  Fils  est  inctfable  ?  «  Cela  est  jmuoÔ"  W 

63. 

vrai,  répond  saint  Fulgence;  mais  si  l'on  ne 
peut  raconter  sa  génération,  ni  expliquer  de 
quelle  manière  elle  s'est  faite,  il  n'est  pas  écrit 
qu'on  ne  peut  pas  la  connaître.  De  ce  qu'on  ne     i«i.  L.n. 
peut  expliquer  une  chose,  il  ne  suit  pas  qu'il 


[VI"  SIÈCLE.] 

sûil  iiiipossiljlo  (le  siivoiiwnu'llc  elle   est.  (Jui 
[unil  (lire  tlo  Dieu  (oui  c(!  (lu'il  est  ?  l'cisoiiiio. 
Il  n'est  pas  néaimioins  permis  d'ignorer  qu'il 
cxislc.   Il  est  si  l'acile  de  le  connaKrc,  cpie 
"•'>"•    l'Apôtre  nous  assure  que  lea  pli ilos<i/)/ics  sont 
inexciisalilcs,  parce  qu'ayant  connu  Dieu,  ils  ne 
l'ont  point  glorifié  comme  Dieu,  et  ne  lui  ont 
point  rendu  tp-àces.  Couime  done  '  il  ne  nous 
est  pas  permis   d'ignorer  la  divinité  de  J6- 
sus-Ghrist,  quoique  nous  ne  puissions  l'expli- 
quer, la   connaissance  de   sa  génération  ne 
nous  a  point  été  refusée,  encore  que  nous 
ne  puissions  pas  en  faire  connaître  la  ma- 
nière. 
°r°'oi,°.       ^'  ^'^  objectaient  divers  passages,  où  le 
"•  ■"■«•  Fils  est  appelé  créateur ,  entre  autres  celui- 
111,  «r"'''   ci  :  Le  Seigneur  m'a  créé  le  commencement  de 
ses  voies.  Saint  Fulgcnce  répond,   que  cela 
doit  s'entendre  de  la  génération  temporelle 
du  Fils,  selon  laquelle  il  est  né  dp  la  Vierge, 
et  a  été  créé  le  commencement  des  voies  du  Sei- 
gneur, non  iiouv  donner  l'être  à  de  nouvelles 
créatures,  mais  pour  réparer  les  anciennes  : 
ce  qu'il  a  fait  par  ses  apôtres,  en  les  faisant 
eux-mêmes  le  commencement  de  cette  créa- 
tion, selon  que  l'apôtre  saint  Jacques  le  dit  de 
Jtcob.  1, 18.  Dieu  le  Père  :  C'est  lui  qui  par  le  mouvement 
de  sa  volonté,  nous  a  engendrés  par  la  parole  de 
vérité,  afin  que  nous  fussio7is  comme  des  prémi- 
ces de  ses  créatures.  En  distinguant  dans  Jé- 
sus-Christ les  -  propriétés  de   ses  deux  na- 
tures, la  nature  divine  et  la  nature  humaine, 
on  explique  comment  on  dit  de  lui  qu'il  est 
engendré,  et  qu'il  est  créé.  Il  est  engendré 
selon  sa  naissance  ineflable  du  Père;   il  est 
créé  selon  sa  naissance  humaine,  par  laquelle 
il  est  né  d'une  servante,  serviteur  lui-même, 
c'est-à-dire  qu'il  est  engendré  comme  Dieu  , 
et  créé  comme  homme. 
"c  oïlî       ^-    ^^'^'®    pourquoi ,   dites-vous ,    deman- 
daient les  ariens  aux  catholiques,  que  le  Fils 
est  né  de  la  substance  du  Père  ?  «  C'est,  ré- 
pond saint  Fulgence  ,  que  nous  ne  pouvons 
adorer  que  ce  qui   est  Dieu   substantielle- 
ment.  Or  nous  voyons  tellement  un  Dieu 
Père,  que  nous  croyons  aussi  un  Fils  et  un 
Saint-Esprit.  La  foi  qui  nous  enseigne  à  ado- 


CII.\PITRE  I.  —  S.MNT  FULGENCE  DE  RUSPE. 


n 


rcr  i^t  à  craiudrc!  un  Dieu,  ne  nous  enseigne 
pas  (ju'il  soit  im  pi'rsoiuicilcnu^nl,  ni  dislin- 
gu(!  ])ar  uiu!  diversité  de  substance,  de  peur 
(lu'cn  adorant  diverses  substances,  nous  ne 
t()mi)ions  dans  l'erreur  des  gentils  rpii  ado- 
rent plusiem's  dieux  :  ou  dans  l'erreur  de 
Sabeliius,  en  niant  avec  lui  l'existence  du 
Fils  et  du  Saint-Esprit,  et  la  Trinité  des  per- 
sonnes. 1)  Il  prouve  ce  que  la  foi  nous  en- 
seigne sur  ce  sujet,  par  un  grand  nombre 
de  témoignages  de  l'Ecriture,  remarquant 
sur  celui  d'Isaïe ,  où  il  est  dit  que  deux  sé- 
raphins répètent  jus([u'ii  trois  fois:  Saint, 
saint,  saint,  au  lieu  qu'ils  ne  disent  qu'une 
fois  :  Le  Seigneur  Dieu  des  armées ,  que  c'est 
pour  nous  apprendre  qu'il  y  a  en  Dieu  trois 
personnes,  et  une  seule  substance.  «  Car  k 
quoi  bon  ^,  dit-il,  répéteraient-ils  trois  fois: 
Saint,  s'il  n'y  a  pas  trois  personnes  en  Dieu? 
Pourquoi  ne  diraient-ils  qu'une  seule  fois  : 
Le  Seigneur  Dieu  ,  s'il  n'y  a  pas  en  Dieu  une 
seule  substance?  Il  faut  donc  ,  s'en  tenir 
à  la  règle  de  la  vraie  foi ,  par  laquelle  nous 
croyons  que  le  fils  de  Dieu  est  de  la  subs- 
tance du  Père,  c'est-à-dire  de  ce  que  le  Père 
est  lui-même;  qu'il  en  est  né  d'une  manière 
ineU'able  sans  commencement ,  et  qu'on  l'a- 
dore comme  vrai  Dieu  avec  le  Père.  » 

5.  Le  Fils,  disaient  les  ariens,  n'est  point    nfron^psia 

*-  CÎDqiiJunie  ou- 

égal  à  son  Père,  puisqu'il  est  engendré  ,  et  J"''""- 
que  le  Père  ne  l'est  pas.  Saint  Fulgence  ré- 
pond qu'il  faudrait  au  contraire  dire  qu'il 
n'est  pas  égal  au  Père,  s'ils  étaient  tous  les 
deux  non  engendrés.  Car  clans  deux  non 
engendrés,  la  divinité  est  ditférente  :  au  lieu 
que  dans  celui  qui  est  engendré  de  celui  qui 
n'est  pas  engendré  ,  l'unité  de  nature  se 
trouve  évidemment.  C'est  pourquoi  le  Fils 
de  Dieu,  étant  de  la  substance  du  Père,  ne 
peut  en  avoir  une  moindre  que  la  sienne, 
ni  une  différente.  Jésus-Christ  ne  marque-t- 
il  pas  son  égalité  avec  son  Père ,  lorsqu'il 
dit  :  Mon  père  et  moi,  nous  sommes  une  même  ^mn.  x,m. 
chose,  et  encore  :  Tous  honorent  le  Fils  comme  it'ii-  v,  23. 
ils  honorent  le  Père? 

6.  Les  ariens  insistaient  :  Autre  est  le  Père    Réionsos 
de  la  lumière,  autre  est  la  lumière.  Le  Père  U""' 


'  Sicut  ergo  Cliristi  divinitatem  ignorare  non 
debeinus,  licel  enarrarenun  possimus,  ila  dicini- 
talis  ejus  quainvis  nulli  suppetat  emirratio  non 
est  taintn  fidelibus  adempla  cognitio.  Lih.  Contra 
Àrian.,  pag.  53. 

*  Àgnoscatur  ilaque  in  Christo  proprie  tas 
ulriusque  nalurœ,  ut  sine  errore  possit  intelUgi 
et  creatus  et  genitus  :  genilus  quippe  est  secun- 

XI. 


dum  quod  de  Domino  inenarrabiliter  natus  est 
Doiiiinus.  Creatus  autem  secundum  humanum 
generationem,  qua  de  ancilla  natus  est  serius. 
Fiilg.,  Contra  Àrian.,  pag.  S7. 

3  Quid  est  ergo  quod  tertio  Sanctus  dicitur,  si 
non  trina  est  in  divinitate  persona  ?  Cur  semel 
Doaiiuus  D<!us  dicitur,  si  non  una  est  in  divini- 
tate substanlia  ?  Ibid. 


18 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


est  l'auteur  de  la  lumière,  le  Fils  la  lumière  : 
ils  ne  sont  donc  point  éfraux.  Saint  Fulgence 
répond,  que  le  Pore  et  le  Fils  sont  une  même 
lumière  substantiellement.  Il  le  prouve,  parce 
que  le  nom  de  lumière  renferme  nécessaire- 
ment celui  de  la  Divinité  ,  selon  que  le  dit 

1  jmo.  1,5.  saint  Jean  dans  sa  première  Épitre  :  Ce  que 
nous  vous  enseignons,  est  que  Dieu  est  la  lu- 
mière même.  D'où  il  suit  que  celui  qui  est 
Dieu ,  est  aussi  lumière  ;  et  que  celui  qui  n'est 
pas  lumière,  n'est  pas  Dieu.  «  Il  faut  donc 
croire,  dit-il,  que  le  fils  est  lumière  de  lu- 
mière, parce  qu'il  est  ne  Dieu  de  Dieu  :  car, 
en  voulant  nier  que  le  Père  soit  lumière, 
tandis  que  l'on  dit  que  le  Fils  est  lumière ,  ce 
serait  blasphémer  contre  le  Père.  Recon- 
naissons donc  que  le  Père  est  dans  le  Fils 
lumière,  et  le  Fils  dans  le  Père  lumière,  la 

jMn.  HT,  Lumière  disant  d'elle-même:  Je  suis  dans 

13. 

mon  Père,  et  mon  Père  dans  moi.  » 
Biprauiii  7.  Le  Père  est  autre  que  le  Saint-Esprit, 
jKiion,  i>.g.  puisque  le  Fils  dit  :  Mon  Père  vous  donnera  un 
ioM.  iK,  autre  consolateur.  Le  Fils  est  encore  autre 
lud.  T,32.  que  le  Père,  selon  qu'il  dit  lui-même  :  Il  y 
en  a  un  autre  qui  rend  témoignage  de  moi. 
Saint  Fulgence  répond,  que  le  mot  autre 
dans  ces  deux  endroits  est  mis  pour  distin- 
guer les  personnes  de  la  Trinité ,  et  non 
pour  marquer  entre  elles  une  diflerence  de 
nature  et  de  substance.  Si  le  Père  rend  té- 
moignage au  Fils  ,  on  ne  peut  douter  qu'il 
ne  soit  une  personne  distinguée  du  Fils;  s'il 
est  véritablement  son  Père,  il  est  donc  aussi 
de  môme  nature.  C'est  pourquoi  le  Fils  dit  : 
Mon  Père  et  moi ,  nous  sommes  une  même  chose. 
Il  appuie  sa  réponse  sur  le  décret  du  concile 
de  Nicée,  où  le  Fils  fut  dit  consubstanliel  au 
Père  ;  et  remarque  que ,  qaoique  ce  terme  ne 
.se  trouve  pas  dans  les  Écritures  ,  la  doctrine 
signifiée  par  ce  tenne  s'y  trouve;  qu'il  a  été  ' 
d'usage  dans  l'Église,  lorsqu'il  s'élevait  de 
nouvelles  erreurs,  d'employer  de  nouveaux 
termes  pour  les  combattre  ;  comme  on  a 
employé  le  mot  de  non  engendré ,  en  parlant 
du  Père,  pour  confondre  Sabellius  qui  ne 
voulait  pas  reconnaître  trois  personnes  en 
Dieu.  Il  ajoute  que  ses  adversaires  qui  don- 


bullièaie 


nent  aux  catholiques  le  nom  à'homousiens, 
parce  qu'ils  confessent  que  les  trois  person- 
nes de  la  Trinité  sont  cbnsubstantielles,  ne 
peuvent  refuser  d'être  nommés  triousiens , 
puisqu'ils  soutiennent  que  les  trois  pci-son- 
nes  de  la  Trinité  sont  chacune  d'une  subs- 
tance dillërente. 

8.  C'est  faire  injure  au  Père,  disaient  les 
ariens,  de  croire  que  le  Fils  lui  soit  égal ,  et  j«"o".  i 
de  lui  rendre  un  semblable  honneur.  «La  foi 
apostolique,  répond  saint  Fulgence,  ne  fait 

point  d'injure  i\  Dieu,  mais  elle  l'honore ,  en 
assiu-ant  que  la  substance  divine  ne  peut  ni 
êtie  changée,  ni  être  diminuée.  C'est  pour 
cela  qu'elle  enseigne,  que  le  Fils  est  égal  au 
Père,  parce  que  l'unité  de  substance  dans 
tous  les  deux,  conserve  à  chacune  de  ses 
personnes  la  plénitude  de  sa  perfection.  Ce 
Père  fait  le  même  raisonnement  à  l'égard  du 
Saint-Esprit,  disant  que  si  le  Seigneur  eût 
voulu  qu'on  le  regardât  comme  une  créature, 
il  n'aurait  pas  commandé  qu'on  le  joignît  à 
lui  et  au  Père  dans  le  sacrement  de  bap- 
tême :  Allez,  dit-il  à  ses  apôtres,  enseignez  m^" 
toutes  les  nations,  bnptisez-les  au  nom  du  Père, 
du  Fils  et  du  Saint-Esprit,  n 

9.  L'Écriture  dit,  en  parlant  de  la  généra-  ,f„'J;î^"'^ 
tion  du  Fils,  qu'il  a  été  engendré  du  sein  '^^"""'•  *• 
avant  l'aurore  ;  ce  qui,  disaient  les  ariens, 

ne  peut  s'entendre  que  d'une  naissance  char- 
nelle. Saint  Fulgence  répond,  que  le  terme 
de  sein  ou  de  ventre  ne  se  dit  de  Dieu,  en 
cet  endroit,  que  dans  un  sens  métaphori- 
que; et  que  l'Écriture  se  sert  souvent  de 
cette  figure,  lorsqu'elle  parle  de  Dieu,  com- 
me on  voit  dans  le  livre  des  Proverbes,  où 
nous  lisons  :  Les  yeux  de  Dieu  considèrent  P""-  "■> 
les  bons  et  les  mauvais  ;  que.  par  le  terme  de 
ventre,  on  doit  entendi'e  la  nature  divine;  et 
que  ces  mots  :  A  vant  l'aurore,  signifient  que 
la  naissance  du  Fils  est  éternelle,  et  qu'elle 
n'a  pas  commencé  dans  le  temps.  Encore 
donc  que  nous  confessions  que  le  Fils  est  né 
du  sein  de  la  Vierge  selon  la  chair,  nous  ne 
douions  pas  qu'il  ne  soit  né  engendré  du 
sein  du  Père,  c'est-à-dire  de  la  substance  du 
Père;  au  contraire  nous  confessons '  qu'il  est 


'  Mintm  est  quod  in  hnc  nomine  sonus  tan- 
tnm  a  qiiibiisdam  itttenditur,  ncc  dicli  intelligen- 
tUi  invrstigatur,  cum  pleraque  non  sint  antigui- 
Itis  dicta,  et  pro  tempornm  cnusnruiiiqtie  oppor- 
tunitatibus  professioni  fiUei  reperianlur  inserla. 
Sicul  iugeiiiliis  l'aler,  nusquam  in  Scripluris  ca- 
nonicis  legitiir,  et  tamen  secundum  fidei  verita- 
lem  ingritilus  prœdkatur  tidrersus  Snliellium ,  qui 


l'ait em  Filiumque  non  communione  substantiœ 
vniim  iutelligil,  sed  personali  singul<iritate  con- 
ftindit.  Fiil^'.,  lil).  Contra  Ariiin.,  p.ig.  63. 

'  Liret  ergo  conftteamur  Filium secundum  cnrnem 
ex  utero  Yirginisprocrealum.nnii  tamfn  nmbigi- 
mus  de  utero  Patrùi,  id  est  de  l'utri:)  subst4uilia 
genitum ,  imn  sic  confileniur  Filiiim  de  utero  Dci 
rerum   Vetim  nalum  esse,  sicul  de  Yirginis  utero 


[vi"  siÈCLt:.] 

ne'  du  sein  du  Vive,  vnii  Diou,  comme  il  est 
lie  vrai  homme  du  sein  de  la  Viern;e. 
.or<f>ii       10.  Il  u'ost  nas  iiormis  de  dire  que  Dieu 

mil      cl-  '  '_  .  * 

">.  w»  soit  composé  tle  trois  parties.  C'est  la  dcr- 
nii^-re  objection  des  ariens,  .'i  laquelle  saint 
Ful|:rence  répond  qne  l'Kglise  enseigne  avec 
vérité,  (ju'il  y  a  trois  personnes  en  Dieu,  et 
une  seule  substance.  Si  par  le  nom  de 
Djuicr.  Qiejj  Q,^  ,jp  jiojt  eniendre  que  le  Père  seul 
dans  l'Écriture,  où  il  est  dit,  que  le  Sei- 
gneur est  un  et  qu'on  ne  doit  servir  que  lui, 
il  s'ensuivra  qne  nous  ne  devons  au  Fils  au- 
cune marque  d'adoration,  ni  de  servitude, 
parce  que  tout  ce  qui  n'appartient  point  ;\  la 
nature  de  Dieu  seul,  ne  mi'rite  point  d'ado- 

ii.  ïcvi,  i-ation  de  notre  part.  Comment  donc  est-il  dit 
du  Fils,  que  les  anges  et  toutes  les  vertus  l'a- 
dorent et  le  louent  continuellement  dans  le 

•I.  iixi,  ciel?  Il  est  dit  encore  que  tous  les  rois  de  la 
terre  l'adoreront,  et  que  toutes  les  nations  le 
serviront.  Serait-il  adoré  des  hommes  et  des 
anges,  s'il  n'était  pas  de  la  substance  d'un 
Dieu?  Ce  Père  rapporte  un  grand  nombre 
de  passages  pour  prouver  la  divinité  du  Fils 
et  du  Saint-Esprit,  entre  autres  celui  delà  pre- 
"■'•  mière  Épître  de  saint  Jean,  où  il  est  dit  :  //  y 
en  trois  qui  rendent  tèmoiynage  dans  le  ciel,  le 
Père  ,  le  Verbe  et  le  Saint-Esprit,  et  ces  trois 
sont  une  même  chose.  Il  y  en  ajoute  un  de  saint 
Cj'priendans  son  Épitre  de  l'Unité  de  rt'fjlise, 
et  finit  sa  réponse  en  disant  que  nous  n'ado- 
rons pas  un  Dieu  composé  '  de  trois  parties, 
mais  que ,  conformément  à  la  règle  de  la  foi 
apostolique,  nous  confessons  que  le  Fils  est 
coéternel  h  son  Père,  né  de  lui  sans  commen- 
cement ,  parfait  comme  lui  et  d'une  puis- 
sance égale;  que  le  Saint-Esprit  est  Dieu, 
qu'il  n'est  diÛ'érent  ni  du  Fils  ni  du  Père,  et 
qu'il  n'est  confondu  ni  dans  l'un  ni  dans 
l'autre.  L'Esprit  du  Père  et  du  Fils  est  un  et 
le  même,  et  quoiqu'il  procède  tout  entier  du 
Père,  il  est  néanmoins  tout  entier  dans  l'un  et 
dans  l'autre,  sans  être  divisé  dans  les  deux, 
étant  inséparablement  commun  à  tous  les 

M  Pu:?.,  deux.  Avant  d'envoyer  cet  écrit  au  roi,  saint 
Fulgence  l'examina  avec  plusieurs  habiles 
gens.  Ce  prince  le  lut,  sans  en  être  touché. 
Mais  le  peuple,  à  qui  on  l'avait  communi- 


Cn.\PITRE  I.  —  S.MNT  FULGENCE  DE  RUSPE. 


d9 


que,  triompha  de  la  victoire  que  la  foi  catho- 
lique avait  remportée  sur  l'arianisme. 

§  m. 

Les  trois  livres  au  roi  Trasamond. 

1.  Trasamond,  voulant  éprouver  de  non-     oco.inmK! 

I  •        1  •  T^     t  ï     •  "*  livre*. 

veau  le  savoir  de  samt  Fulgence,  lui  envoya 
d'autres  questions  par  un  de  ses  officiers,  nom- 
mé Félix ,  avec  ordre  de  les  lire  seulement 
une  fois  devant  lui,  sans  lui  permettre  d'en 
prendre  copie.  Carie  roi  craignait  qu'il  n'in- 
sérât dans  sa  réponse  les  propres  paroles  de 
l'écrit,  comme  il  avait  fait  à  l'égard  des  ob- 
jections des  ariens,  et  que  tout  le  peuple  ne 
fiit  encore  une  fois  témoin  de  l'avantage  qu'il 
remporterait  sur  ceux  de  cette  secte.  Saint 
Fulgence  fit  d'abord  dillicidté  de  répondre  à 
un  écrit,  dont  il  savait  à  peine  le  contenu. 
Pressé  cependant  par  Trasamond ,  il  lui 
adressa  trois  livres  que  nous  avons  encore  , 
et  qu'il  composa  à  Carthage  quelque  temps 
après  le  précédent. 

2.  Il  commence  le  premier  livre  par  faii'e     Anaiy.o  du 

,      ,       n  1        ,    -,     ,     .     P'emior  livre, 

ressouvenir  ce  prince  de  la  façon  dont  il  lui  p«eo9. 
avait  ordonné  de  l'écrire,  témoignant  qu'il 
ne  s'était  rendu  à  ses  ordres ,  que  par 
la  crainte  qu'on  ne  l'accusât  d'un  dédain  or- 
gueilleux, ou  de  défiance  de  sa  foi.  ((  Car  cap.  i. 
je  ne  doute  point,  lui  dit-il,  Prince  très- 
clément,  que  vous  ne  sachiez  que  c'est  à 
peu  près  la  même  chose  parmi  les  chré- 
tiens de  renoncer  la  foi,  ou  de  ne  vouloir  pas 
la  défendre.  »  Il  témoigne  partout  un  grand 
respect  pour  Trasamond,  quoique  hérétique 
et  persécuteur  de  l'Église ,  et  le  loue  surtout 
de  son  application  à  s'instruire  de  la  religion. 
«  On  a  vu  rarement  jusqu'ici,  dit-il,  qu'un 
roi  barbare  occupé  du  gouvernement  de  ses 
états,  fût  touché  d'un  désir  si  ardent  d'ap- 
prendi-e  la  sagesse.  Ce  ne  sont  d'ordinaire  m. 
que  des  gens  de  loisir,  ou  des  romains,  qui  s'y 
appliquent  si  fortement.  Les  barbares  se  font 
gloire  d'ignorance ,  comme  si  elle  leur  était 
propre.  »  Mais  il  lui  fait  remarquer  que  la  in. 

recherche  de  la  vérité  n'est  un  grand  bien  que 
lorsqu'on  la   recherche  sincèrement.  Après  17. 

ce  préambule  il  remarque  que  presque  tou- 


verum  non  dubitamus  hominem  processisse.  Ibid., 
pag.  65. 

'  Non  ergo  ex  tribus  partibus  unum  colimus 
Deum,  sed  apostoticœ  fidei  regiilam  retinenles, 
perfectiim  et  consempiternum  Filium,  de  perfecto 
et  seinpiterno  Pâtre,  sine  initia  genitum,  et  potes- 
tate  non  imparem,  et  natura  fatemur  œqualem. 


Sunctwn  quoque  Spirilum  non  aliud  fatemur  esse 
quam  Deum,  nec  a  Filio,  nec  a  Pâtre  diversum,  nec 
in  Filio,  nec  iti  Paire  confustim.  Unus  est  enim, 
atque  idem  Patris  et  Filii  Spiritus,  totus  de  Pâtre 
procedens,  totus  in  utroque  consistens,  nec  est  di- 
visus  in  singulis,  quœ  inscparabiliter  est  utrius- 
que  communis.  Fulg.,  ibid.,  pag.  68. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Cap.  T. 


Cap.  Ti. 

Joio.  I,  1. 


Op.  Tii. 


C*p.  X,  i: 

X,    XI,  XII 
>MI. 


20 

les  les  h(?résies  ne  sont  venues  que  faute 
d'avoir  bien  compris  le  m^•sl^^p  do  l'Incarna- 
tion. Les  Lérétiqiies  qui  ont  erré  sur  ce  mys- 
tère, ou  ne  l'ont  pas  cru  comme  il  est,  ou  ne 
l'ont  pas  cru  du  tout.  Les  manichéens,  ne 
jiouvant  pas  s'imaginer  qu'au  Pieu  eiît  pris 
une  véritable  diair,  parce  qu'ils  la  croient 
naturellement  souillée,  et  d'un  mauvais  prin- 
cipe, ont  mieux  aimé  croire  que  la  chair  dans 
Jésus-Christ  n'en  avait  que  l'apparence,  plu- 
tôt que  la  réalité.  Il  leur  oppose  le  témoi- 
gnage de  l'apôtre  saint  Jean,  conçu  en  ces 
termes  :  Tout  esprit  qui  confesse  que  Jisus- 
C/trist  est  venu  datis  une  chair  véritable,  est 
de  Dieu.  Lt  tout  esprit  qui  ne  confesse  jxis  que 
Jésus-C/iri:t  est  venu  dans  la  chair,  n'est  jmnt 
de  Dieu  :  c'est  l'Antéchrist.  Photin  ne  niait 
point  que  Jésus-Christ  fut  né  d'une  Vierge, 
ni  qu'il  eût  pris  d'elle  une  véritable  chair; 
mais  il  sootenait  qu'il  n'était  pas  Dieu,  ne 
concevant  pas  qu'il  put  être  né  substantiel- 
lement de  Dieu  le  Père,  et  qu'il  se  fût  en- 
suite fait  chair.  Saint  Fulgence  fait  voir,  par 
ces  trois  premières  paroles  de  l'Evangile, 
selon  saint  Jean  :  Au  commencement  était  le 
Verbe,  et  le  Verbe  était  en  Dieu,  et  le  Verbe  était 
Dieu ,  que  la  naissance  du  Verbe  est  éternelle, 
qu'il  est  une  personne  distinguée  de  celle  du 
Père  et  de  la  même  substance.  Il  y  avait  d'au- 
tres hérétiques  qui  niaient  également  que  Jé- 
sus-Cliiist  bit  Dieu  et  homme  ;  et  d'autres 
qui  rejetaient  sm-  la  divinité  tout  ce  qui  doit 
se  rapporter  à  la  nature  humaine  dans  Jésus- 
Christ.  Pour  réfuter  toutes  ces  hérésies,  et 
établir  en  même  temps  la  foi  catholique  sur 
l'Incarnation,  ce  Père  entreprend  de  montrer 
qu'il  y  a  en  Jésus-Christ,  médiateur  de  Dieu 
et  des  hommes,  deux  natures  parfaites,  unies 
en  une  seule  personne.  Il  le  fait,  en  alléguant 
un  grand  nomhre  de  passages  de  l'Ecriture, 
où  l'on  voit  qu'il  y  a  trois  choses  en  Jésus- 
Christ  :  la  chair,  l'àme  raisonnable  et  la  divi- 
nité. Il  s'applique  pailicuhèrement  ù montrer 
qu'il  a  une  âme  raisonnable.  Il  demande  à 
ceux  qui  le  niaient ,  si  l'âme  n'a  point  été 
créée  de  Dieu ,  ou  si  elle  n'a  point  été  viciée 
parle  péché,  ou  si  elle  est  d'une  nature  plus 
vile  que  le  coips,  ou  euDn  si  Dieu  ne  pouirait 
pas  la  guérir  de  sa  blessure.  On  ne  peut  dire 
que  l'àme  n'ait  point  été  créée  de  Dieu,  ni 
qu'il  soit  impossible  à  Dieu  de  la  guérir  de  la 
phiie  qu'elle  a  rerue  par  le  péuhé.  Il  ne  se- 
rait pas  moins  alisurdc  d'avancer  qu'elle  est 
d'une  nature  inférieure  au  corps,  puisque 
c'est  elle  qui  lui  donne  la  vie.  Il  parait  aussi 


qu'elle  a  été  plus  blessée  par  le  péché  que 
le  corps,  puisqu'elle  était,  ii  raison  de  son 
intelligence,  plus  capable  do  résister  an  ten- 
tateur. D'où  il  suit  que  l'homme  entier  ayant 
été  blessé  par  le  péché.  Dieu  a  aussi  sauvé 
l'homme  entier,  en  le  prenant  :  afin  que  l'on 
coinuit  que  le  créateur  de  l'homme  on  ('-tait 
devenu  le  réparateur,  .\quoi  il  faut  ajouter, 
que  la  qualité  de  Médiateur  que  l'Écriture 
donne  à  Jésus-Christ,  suppose  nécessaire- 
ment qu'il  est  Dieu  parfait  et  homme  par- 
fait. Aussi  l'Évangéliste,  après  avoir  établi 
sa  divinité,  en  disant:  Au  commencement 
était  le  Verbe,  et  le  Verbe  était  en  Dieu,  et  le 
Verbe  était  Dieu,  établit  ensuite  son  huma- 
nité, en  ajoutant  :  Et  le  Verbe  aété  fuit  chair, 
et  il  a  habité  parmi  nous.  S'il  a  été  fait  chair, 
disaient  les  hérétiques,  il  n'a  donc  point  eu 
d'âme.  Saint  Fulgence  répond  que  l'Ecri- 
ture, en  parlant  de  l'homme  entier,  se  sert 
quehpiefois  du  nom  de  chair,  et  quelquefois 
du  seul  terme  d'«mf."  Toute  chair ,  àxl  Isaie , 
vei'ra  le  salut  de  Dieu,  c'est-A-dire  l'avènement 
du  Sauveur.  Et  Moïse  en  marquant  le  nom- 
bre des  descendants  du  Jacob  qui  entrè- 
rent avec  lui  en  Egypte,  dit  qu'Us  étaient  en 
tout  soicanteet  quinze  âmes.  D'ailleurs  Jésus- 
Chiist  parle  lui-même  de  son  âme  en  beau- 
coup d'endroits.  Et  saint  Pierre,  dans  les 
Actes  des  apôtres,  la  distingue  en  termes  ex- 
près de  son  corps. 

3.  Le  second  livre  à  Trasaraond  a  pour 
titre  :  De  l'Immensité  du  Fils  de  Dieu.  Mais 
saint  Fulgence  ne  laisse  pas  d'y  traiter  en- 
core de  la  réparation  du  genre  humain  par 
le  sang  de  Jésus-Christ,  d  Quel  homme,  dit-il, 
aurait  pu  être  le  médecin  du  genre  humain, 
tous  avant  tiré  leur  orisine  d'une  racine  cor- 
rompue?  Les  anges  ne  pouvaient  point  répa- 
rer la  chute  de  l'homme,  puisqu'eux-mèmes 
avaient  été  capables  de  tomber  par  leur  na- 
ture. Il  n'y  avait  donc  que  la  vertu  divine, 
c'est-à-dire  le  Fils  de  Dieu  qui  est  la  vertu 
et  la  sagesse  du  Père,  qui  piit  rétajjlir  l'hom- 
me après  sa  chute,  comme  il  a  empêché  par 
son  secours  la  chute  des  anges  qui  ont  per- 
sévéré dans  le  bien.  Le  Fils  étant  Dieu  par 
nature,  il  est  aussi  immense  et  éternel. 
Comme  le  Père  est  dans  le  Fils,  le  Fils  est 
dans  le  Père.  Cette  unité  naturelle  prouve 
l'égalité  de  ces  deux  personnes,  qui  est  telle 
que  l'iulini  a  engendré  l'infini,  et  que  l'in- 
liui  est  né  de  l'infini,  sans  que  le  Père  ait 
rien  perdu  de  son  immensité.  Le  Père  a  tout 
fait  par  le  Fils,  autrement  l'on  ne  pourra^ 


C«f.  w 


J  .n.  1, 


Cip.  ivt 


Alt.    11, 
3  .  31. 


Sfrn.nl     II 

yf.  s;i. 


C,.  1. 


[Vl'  SIÈCLE.] 

pas  dire  qno  le  Fils  est  la  vertu,  la  sagesse 
et  la  main  ilc  Diou,  ni  qiw  tontes  choses  ont 
été  faites  par  le  Fils;    ce  ipii  est  contraire  à 
rFcriluie  qui  lui  donne  les  noms  de  sagesse, 
de  vertu  et  de  main,  et  qui  nous  assure  que 
rien  tle  tout  ce  qui  est  fait  n'a  été  lait  sans 
lui.  Quelqu'un  dira  peut-être  :  Il  est  écrit 
que  le  Verbe  était  au  commencement,  mais 
non  pas  avant  le  commencement.  «Cette  ob- 
jection, dit  saint  Fulgencc,  ne  peut  tomber 
clans  l'esprit  que  de   ceux  qui  n'enleudcnl 
pas  la  force  du  terme  commencement,  qui 
doit  se  rendre  par  éternel,  cela  seul  devant 
passer  pour  princii)e    et  pour    commence- 
ment ,  qui  n'a  rien  de  préexistant.  Que  si 
l'on  objecte  que,  de  ce  que  le  Fils  s'appelle 
■•>>,  lui-même  le  commencement,  sa  naissance  doit 
aussi  avoir  un  commencement  ;  il  s'ensuivra 
que  le  Fils  doit  avoir  aussi  une  fin  ,  puis- 
'iS.  qu'il  dit  dans  l'Apocalypse  :  Je  suis  le  com- 
mencement tt  la  [in.  Alors  que  répondra-t- 
on à  ce  que   dit  saint  Jean   dans   sa   pre- 
.  V,  mière  Epitre  :   Le  Fils  est  le  vrai  Dieu,  et 
la  vie  éternelle  ?  Il  faut  donc  dire  avec  l'É- 
glise catholique  et  apostolique',  que  Jésus- 
Christ   est  nommé  la  fin ,   parce  qu'il  sei-a 
éternellement,  uon-sculoment  dans  la  suIj- 
stance ,  selon  laquelle  il  est  né  naturelle- 
ment éternel  du  Père ,  mais   encore  dans 
celle  qu'il  a  prise  dans  le  temps  de  sa  mère  ; 
et  qu'on  lui  donne  avec  vérité   le  nom  de 
principe,  parce  que,  selon  la  substance  di- 
vine, il  est  coéternel  à  celui  qui  l'a  engendré. 
On  peut  dire  encore  que  Jésus-Christ  est  le 
principe ,  parce  que  les  choses  qui  n'étaient 
pas,  ont  eu  par  lui  leur  existence;  et  qu'il  est 
la  fin,  parce  que  plusieurs  choses  qui  ont  com- 
mencé d'être,  ont  par  lui  d'être  toujours,  n 
On  objectait ,  qu'il  y  avait  aussi  des  créa- 
uAr  711,3.  tures  sans  commencement,  comme  Melchi- 
sédecli,  dont  il  est  dit  dans  l'Épitre  aux  Hé- 
breux, qu'il  a  été  sans  père,  sans  mère,  sans 
généalogie,  et  qu'il  n'a  eu  ni  commencement, 
ni  fin  de  sa  vie.  Saint  Fulgence  répond,  qu'il 
n'appartient  à  aucune  créature  d'être  sans 
commencement,  toutes  ayant  été  faites  de 
rien;  que  l'on  ne  doit  point  prendre  à  la  lettre 
ce  qui  est  dit  de  Meichisédech,  Adam  étant  le 
seul  d'entre  les  hommes  qui  n'ait  point  été 


CIIAPITHI':  I.  —  SAINT  FULGENCE  UE  RUSPE. 


21 


engendré  de  père  ni  mère  ;  que  c'est  pro- 
prement de  Jésus-ChrisI,  dont  Melchis('dech 
a  été  la  figure,  qu'il  est  dit,  qu'il  est  sans  père 
et  sans  mère  ;  puisqu'en  tant  que  Fils  de 
Dieu,  il  est  né  sans  mère  ;  et  qu'en  tant  que 
fils  de  l'Homme ,  il  est  né  sans  père.  Saint 
Fulgence  explique  ensuite  divers  passages  ,c.p. tm. 
de  l'Écritm-e  qui  paraissent  contraires  <i 
l'immensité  du  Fils,  en  disant  que,  quoi- 
qu'il soit  substantiellement  partout,  il  n'est 
pas  également  dans  tout;  qu'il  est  partout 
par  sa  puissance  ;  qu'il  n'est  pas  partout  par 
sa  grâce,  mais  seulement  dans  ceux  <i  qui  il 
la  donne,  et  en  qui  il  opère.  Que  l'Ecriture  u, 

établit  clairement  l'immensité  du  Fils,  lors- 
qu'elle dit  qu'il  est  la  splendeur  delà  gloire 
du  Père,  le  caractère  de  sa  substance,  et    s»i>.  m,  26 
qu'il  soutient  tout  par  la   puissance  de  sa     nbr.  1,3. 
parole  ;  que  s'il  est  dit  que  le  Fils  est  des- 
cendu du  ciel ,  ce  n'est  pas  par  un  mou- 
vement local,  en  sorte  qu'il  soit  tellement 
descendu  selon    la   substance    de  sa  divi- 
nité, qu'il  n'ait  plus  été  dans  le  ciel,  lors- 
qu'il est  descendu  sur  la  terx'c  ;  que  l'Écri-    caj.  «. 
ture  n'emploie  ces  façons  de  parler  à  l'é- 
gard de  Dieu,  que  pour  se  proportionner  h 
la  faiblesse  de  uotre  esprit  ;  qu'au  surplus  il    G.n«.  xi.ô. 
est  dit  également  du  Père,  qu'il  descendit 
pom-  voir  la  tour  de  Babel  :  et  du  Père  et      jr„„.  m-, 
du  Fils,  comme  aussi  du  Saint-Esprit,  qu'ils      '  '  ' 
feront  leur  demeure  dans  le  cœur  de  ceux 
qui  aiment  le  Fils.  Les  trois  personnes  de  la  • 

Trinité  viennent  et  s'en  retournent  d'une 
manière  qui  nous  est  incompréhensible,  et 
qui  marquent  de  leur  part,  non  un  mouve- 
ment de  lieu  en  lieu,  mais  les  effets  de  leur 
bonté  envers  les  hommes.  Quoique  remplis-  cip.  <i. 
saut  tout  par  leur  immensité,  il  est  dit  qu'ils 
viennent  chez  quelqu'un,  lorsqu'ils  daignent 
se  manifester  à  lui  :  et  qu'ils  s'en  éloignent, 
lorsqu'ils  cessent  de  lui  communiquer  la  lu- 
mière de  leur  amoui-.  Mais  Dieu  n'est  pas 
pour  cela  absent  localement,  lorsqu'il  aban- 
donne avec  justice  celui  qui  n'est  pas  digne 
de  le  posséder  :  comme  il  n'est  pas  présent 
localement  à  celui  qu'il  visite  par  un  effet  de 
sa  miséricorde,  lorsqu'il  l'en  a  rendu  digne  ; 
il  faut  juger  de  la  présence,  ou  de  l'avène- 
ment des  trois  personnes  de  la  Trinité,  com- 


'  Veritas  est  catholicœ  atque  apostolicœ  fidei 
relinenda,  quœ  sicut  Christum  propterca  finem 
nominal,  quia  non  solum  in  illa  suhstantia  qun 
natus  est  naturaliler  sempiternus  ex  Paire,  sed 
eliani  in  ea  quam  in  temporc  sumjtsit  ex  maire,  cré- 


dit sine  fine  perpetmim.  Sic  eum  ideo  juste  prœ- 
dical,  reracilerque  principium,  quoniam  in  dirina 
quam  liabet  subslantin,  genituri  seiiiper  asserit 
coictenmm.  Lib.  II  ad  Trasam.,  cap.  v. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


me  on  jupe  de  ce  qui  est  dit  de  leur  repos. 
Dieu  ne  se  reposa  point  après  avoir  créé  le 
monde,  comme  s'il  eût  beaucoup  fatigué  en 

cif  m.  le  créant.  La  création  s'est  faite  par  sa  vo- 
lonté seule,  ainsi  que  le  dit  le  Psalmiste  : 
Il  a  fait  tout  ce  qu'il  a  voulu,  dans  le  ciel,  sur 
la  terre,  dans  la  mer  et  dans  tous  les  al/lmes. 
La  venue  et  la  descente  de  Dieu  n'ont  donc 
rien  de  local ,  ces  façons  de  parler  ne  ser- 
vant que  pour  nous  faire  voir  que  Dieu  a 
bien  voulu  nous  faire  part  de  ses  grâces  et 
de  ses  lumières.  Saint  Fulgence  explique 
»  "•  dans  le  même  sens  le  terme  de  monter.  Il  est 
dit  dans  saint  Jean,  que  Jésus-Christ  répon- 

j<Mi>.<i,i7.  (jji  à  Marie  :  Ne  me  touchez  pas,  car  je  ne  suis 
pas  encore  monté  vers  mon  Père.  Mais  il  est 
uTiii  "."*■  ^^  aussi  dans  saint  Matthieu ,  que  Jésus- 
Christ  s'étant  présenté  devant  Marie  et  les 
autres  saintes  femmes ,  elles  lui  embrassè- 
rent les  pieds  et  l'adorèrent.  «  Comment,  dit 
ce  Père,  Jésus-Clirist  aurait-il  refusé  à  Ma- 
rie de  le  toucher,  sous  prétexte  qu'il  n'était 
point  encore  monté  à  son  Père,  et  lui  aurait- 
il  accordé  la  même  grâce  un  moment  après, 
si  l'on  devait  prcndi-e  à.  la  lettre  le  terme  de 
monter.  Jésus-Christ,  en  refusant  à  cette  fem- 
me de  le  toucher,  parce  qu'il  n'était  pas  en- 
core monté  à  son  Père,  la  reprenait  tacite- 
ment de  ce  qu'elle  croyait  inférieur  au  Père 
celui  qu'elle  pleurait  comme  mort  ;  et  en  lui 
permettant  quelque  temps  après  de  le  tou- 
cher, il  voulait  la  convaincre  de  la  vérité  de 

cip.  iiT,  sa  résurrection.  Dans  la  première  appari- 
tion il  a  insinué  à  Marie,  qu'elle  devait  le 
croire  égal  à  son  Père  ;  et  dans  la  seconde, 
qu'elle  ne  pouvait  point  douter  de  la  résur- 
rection du  corps  qu'elle  avait  vu  mettre  dans 
le  tombeau.  »  Il  montre  que  le  terme  élever, 
lorsqu'on  parle  de  Dieu  dans  les  saintes 
Écritures,  doit  s'expliquer  dans  le  sens  que 
nous  donnons  au  tenne  de  sanctifier  dans 
l'Oraison  dominicale.  Comme  nous  y  deman- 
dons, non  pas  que  Dieu  soit  sanctifié,  mais 
qu'il  nous  donne  la  grâce  de  sanctification, 
ou  que  son  nom  soit  sanctifié  dans  nous 
par  nos  bonnes  œuvres ,  de  même  lorsque 
nous  demandons  que  Dieu  soit  élevé,  nous 
demandons  de  l'être  nous-mêmes  par  le 
progrès  dans  l'intelligence  des  choses  divi- 


«  A'cmo  ascendit  in  cœlum,  nisi  qui  de  cœlo  des- 
cendit Filius  hominis  qui  est  in  cœlo  :  non  quia 
humana  Christi  subslnnlia  fuissel  uliique  di/Juiia, 
sed  qtioniam  unus  idcnique  Dei  Filius  alquf  ho- 
minis Filius  verus  Deu-f  ex  Pâtre,  sicul  homo 


nés.  Il  enseigne  que  par  la  vertu  do  Jésus-    '■"'■  ' 
Christ,  qui  guérit  l'hémorroïsse,  il  ne  faut 
cntendjc  autre  chose  que  la  guérison  mira- 
culeuse   de   cette  femme   par  la  vertu  de    ojuxt.  « 
Dieu,  et  non  pas  qu'il  sortit  du  Sauveur  une 
vertu  distinguée  de  lui,  n'étant  pas  conceva- 
ble comme  une  vertu  sort  d'une  vertu  ;  que      i»i 
sou  immensité  parait,  en  ce  que,  selon  l'E- 
criture, U  connaît  les  plus  secrètes  pensées    Jun.  n,: 
de  l'homme  ;  et  en  ce  qu'il  dit  lui-même  : 
Personnne  n'est  monté  au  ciel  que  celui  qui  est    ibib. u.l 
descendu  du  ciel,  non'  que  sa  nature  hu-  ] 

maine  soit  répandue   partout ,  mais  parce 
qu'étant  fils  de  Dieu  et  fils  de  l'homme  ,    jkd.  ni.i 
vrai  Dieu,  né  du  Père,  comme  il  est  viai 
homme ,  parce  qu'il  est  né  de  l'homme ,  il 
remplit  selon  sa  divinité,  qui  n'est  renfermée 
dans  aucun  lieu,  le  ciel  et  la  terre ,  quoi- 
qu'alors  il  fut  localement  sur  la  terre,  selon    cap. ivm. 
son  humanité.  Parla  distinction  de  ces  deux 
natures,  on  explique  comment  il  est  \Tai  de 
dire  que  Jésus-Christ  viendra  sur  les  nues  , 
que  toute  chair  le  verra  ,  qu'il  est  monté  au    ap<ic.i.i,i 
ciel  à  la  vue  de  ses  apôtres ,  et  qu'il  est  le    a.i  ,,■>■ 
Dieu  vrai  et  vivant ,  qu'il  habite  dans  les 
cœurs  des  fidèles  par  la  foi.  Saint  Fulgence    i  Tko  ».i,i 
tire  sa  dernière  preuve  de  l'immensité  du  i6.'  '  ' 
Fils  et  des  autres  personnes  de  la  Trinité, 
de  la  forme  du  baptême.  Selon  le  précepte 
du  Seigneur-,  le  baptême  doit  être  conféré 
au  nom  du  Père ,  du  Fils  et  du  Saint-Esprit. 
Si  donc  les  trois  personnes  de  la  Trinité    c«..j' 
sanctifient  dans  le  baptême,  il  est  évident 
que  le  baptême,  s'adniinistrant  dans  toutes 
les  parties  du  monde  en  un  même  temps, 
les  trois  personnes  y  doivent  être  présentes  ; 
et  dès  lors  on  ne  peut  constester  l'immen- 
sité au  Fils,  comme  au  Pore  et  au  Saint-Es- 
prit :  autrement  il  faudrait  ôler  le  nom  du 
Fils  de  la  forme  du  baptême. 

A.  Dans  le  troisième  livre  saint  Fulgence     An,!, 
revient  au  mvstère  de  l'Incarnation,  dont  "•  »  t">^- 

ition.l. 

il  avait  déjà  traite  avec  assez  d'étendue  dans  c.;- 
le  premier.  Il  y  attaque  surtout  ceux  qui 
enseignaient  que  la  Divinité  avait  souffert  : 
d'où  il  suivait  qu'elle  avait  été  détériorée  par 
son  union  avec  la  nature  humaine  dans 
Jésus-Clirist.  Le  but  de  ce  troisième  li\Te 
est  donc  de  montrer  qu'il  y  a  en  Jésus-Christ 


revus  ex  homine,  licet  secundum  veram  humani- 
Inlem  sunm  locntitcr,  tune  cssel  in  terra,  secun- 
dum dirinilnlmi  tainen,  quie  nullatcnus  loco 
conlinetur,  cwlum  totus  impkrel  et  terram.  Lit'.  I 
ad  Trasim.,  cap.  xvii.    . 


[Vl"  SIÈCLE.] 


niAPITRR  I.  —  SAINT 


deux  natures,  ilonl  l'uuo  qui  est  la  divinité 
il  l()uj(uii'S  été  impassible;  et  l'autre  qui  est 
la  nature  humaine,  a  soullert  la  mort;  et 
"•  que  CCS  deux  natures  sont  unies  en  Jésus- 
Clirist  en  une  seule  poi sonne,  chaque  iialuie 
conservant  les  proiiriétés.  »  Nous  croyons  , 
dit  ce  Père ,  que  le  Fils  de  Pieu  '  est  né  îivant 
tout  commencement,  de  la  substance  du 
Père,  qu'il  est  Dieu  do  Dieu,  et  Seigneur  de 
Seigneur;  qu'il  n'est  pas  de  rien,  mais  du 
Père;  et  qu'il  n'est  point  d'une  autre  nature, 
parce  qu'il  n'y  a  rien  eu  de  cocternel  ù 
Dieu,  qui  ail  pu  donner  naissance  au  Fils. 
Que  la  personne  du  Père  soit  autre  que  celle 
du  Fils ,  c'est  ce  que  le  Fils  déclare  en  plu- 
>'"'  •  sieui's  endroits  de  l'Evangile  :  Je  ne  suis  pas 
seul ,  dit-il,  7nuis  nwn  J'ire  qui  m'a  envoyé  est 
avec  moi  :  que  la  substance  du  Père  soit  la 
même  que  celle  du  Fils,  c'est  encore  ce  que 

loan.iii,»!,  Je  pjig  déclare  en  disant  :  Celui  qui  croit  en 
moi,  ne  croit  pas  en  moi,  mais  en  celui  qui 
m\i  envoyé  :  et  celui  qui  me  voit ,  voit  celui 
qui  m'a  envoyé.  Il  n'y  a  donc  qu'un  Fils  en- 

cai .  ni.  gendre  de  la  nature  du  Père ,  qui  est  appelé 
unique  ou  scid  engendré.  Comme  il  est 
insépai'ablc  -  du  Père,  à  cause  de  l'unité 
de  leur  nature,  il  ne  peut  être  confondu 
avec  le  Père  à  cause   de  la  propriété   de 

loan.  1, 12.  sa  personne.  Il  est  vrai  que  le  Fils  a  donné 
à   tous   ceux    qui   l'ont    reçu,    le    pouvoir 

cir.ii-.  d'être  faits  enfants  de  Dieu.  Mais  ce  ne 
sont  que  des  enfants  adoptifs  qui  n'ont  de 
commun  avec  le  Fils  unique  que  le  nom  et 
la  gloire;  mais  non  pas  la  nature  ni  la  di- 
V, v:.  gnité.  Étant  vrai  Dieu,  il  s'est  fait  homme; 
mais  en  prenant  la  forme  d'esclave ,  il  est 
demeuré  plein  de  grâce  et  de  vérité.  Devenu 
passible  par  son  Incarnation  et  sujet  à  la 
mort,  il  n'a  pas  senti  comme  Dieu  l'aiguillon 


FUÏ-r.ENCE  DF.  IIUSPE.  2:j 

delà  mort,  il  l'a  élcinto  elle-même.  C'est 
toutefois  le  seul  et  môme  Jésus-Christ'  quia 
fait  et  soull'ert  tout  cela,  ]virce  que  la  nature 
divine  et  la  luitiue  hinnaine  ont  dcuuMin;  dans 
un  et  même  ChrisI,  Dieu  n'ayant  point  ('té 
confondu  dans  l'homme,  mais  uni  à  l'hom- 
me ;  de  manière  qu'il  a  donné  dans  la  mê- 
me persoime  des  niar([iies  de  l'existence  de 
ces  deux  natures;  de  la  tlivinité  par  ses  mira- 
cles, de  l'humanité  par  les  infirmités  de  sa 
chair.  C'est  pourquoi  l'Apôtre  appelle  le 
seul  et  même  Jésus-Christ  crucifié ,  et  la 
sagesse  et  la  vertu  de  Dieu  :  Nous  prêchons ,  i  co..  1,23, 
dit-il,  JésHS-Cltrist  crucifié,  qui  est  un  scan- 
dale aux  Juifs ,  mais  qui  est  la  force  de  Dieu 
et  la  sagesse  de  Dieu  à  ceux  qui  sont  appelés. 
Le  commerce  de  notre  Uédemplion  deman- 
dait que  celui  qui  devait  en  être  le  niédialciu- 
fut  vrai  homme  et  vrai  Dieu ,  mais  de  ma- 
nière que,  les  deux  natures  étant  unies  en 
une  personne.  Dieu  ne  fût  pas  confondu 
dans  l'homme,  ni  l'homme  dans  Dieu.  Car 
aucun  homme  n'aurait  été  propre  pour 
vaincre  l'ennemi  du  genre  humain,  si  dans 
Jésus-Christ,  médiateur  de  Dieu  et  des  hom- 
mes, il  y  avait  eu  quelque  chose  de  moins 
que  l'homme,  ou  que  l'homme,  que  Dieu 
avait  pris ,  eût  été  consumé  par  son  union 
avec  la  divinité.  En  effet  la  nature  humaine 
ne  pouvait  être  consumée  dans  sa  répara- 
tion ;  puisqu'une  partie ,  c'est-à-dire  celle 
qui  est  condamnée ,  ne  sera  pas  consumée 
par  l'éternité  des  supplices.  Dieu  a  donc  été  ca;..  vu. 
fait  homme  sans  aucun  changement  de  sa 
substance  ;  et  on  ne  peut  pas  diie  qu'une 
partie  de  la  divinité  soit  demeurée  dans  le 
Père,  et  l'autre  dans  le  sein  de  la  Vierge. 
Le  Fds  est  demeui-é  dans  le  Père  tout  ce 
qu'il  était   pour   être  fait  dans  le  sein  de  la 


'  Credimus  Dei  Filium  ante  omne  prorsus  ini- 
tium  de  Patris  substantia  genilain,  Dcum  de  Deo, 
Dominum  de  Domino  ;  non  ex  nihilo,  quia  de  Pa- 
ire :  von  ex  alla  nalura,  quia  aliquid  fuit  coœ- 
lerniim  Deo,  iinde  origo  Filio  prœstarelur...  Ad 
liane  dislinctionem  géminée  personœ,  et  professio- 
nem  unius  subslantiœ  in  Pâtre  et  Filio  pcrdocen- 
dam,  ipse  Filius  dicit  :  Qui  crédit  in  uie,  non  cré- 
dit in  me,  sed  in  enm  qui  uiisit  lue  :  et  qui  vidct 
me,  videt  eum  qui  me  misit.  Lil).  111  ad  Trasimond., 
cap.  ni. 

*  Sicut  inseparabilis  est  unitate  naturœ,  sic  in- 
confusibilis  permanet  proprietate  personœ.  Ibid., 
cap.  ni. 

5  J7;iMS  idemque  Christus  Dei  et  hnminis  Filius 
qui  et  scmetipsum  exinanivit,  et  plenus  gratice  ve- 
ritatisque  permamit,  vere  passus,  passioni  non 


suhjaccns;  vere  mortmis,  mortem  non  sentiens 
sed  exstinguens.  Bœc  aulem  cnncta  unus  Christus 
et  gessit  et  pertulit,  qui  in  uno  eodrmque  Cliristo 
vera  divinitatis ,  veraque  humanilatis  nalura 
permansit,  dum  Dcus  non  confusus  homini,  sed 
unitus,  sic  in  una  persona  utriusqve  naturœ  per- 
manentis  indicia  demonstravit ,  vt  verus  Deus  et 
plenus  veris  dirinisque  virtutibus  in  homine  cla- 
reret  assumpto,  et  reritas  infirmilatis  l)umanœ  ve- 
rnm  plenumque  tiominein  monstraret  in  Deo. 
Propler  quod  beatus  Àpostohis  jinum  eumdemque 
Cliristum,  et  crucifixum prœdicat,  et  Dei  rirtutem 
sapientiamque  pronuntiat,  dicens  :  Nos  autem 
priEdicamus  Cliristum  crucifixuu),  Judîeis  quidem 
scandalum ,  ipsis  autem  vocatis  Christuui  Dei  et 
Dei  sapientiam.  Ibid.,  cap.  vi. 


24 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Cip.  rwt. 


Vierge  tout  ce  qu'il  n'était  pas.  Le  remède 
de  notre  infirmité  demandait  que  comme 
l'unilé  de  nature  '  demeure  dans  le  Père  et 
le  Fils,  l'unité  de  personne  demeurât  en 
Jésus-Christ;  et  que  comme  la  distinction 
personnelle  ne  fait  pas  deux  substances  dans 
le  Père  et  le  Fils,  la  distinction  des  deux 
natures  ne  fit  pas  deux  poi-sonnes  en  Jésus- 
Clirisl.  Et  encore,  que  comme  l'unité  de 
nature  ne  confond  pas  le  Père  avec  le  Fils, 
de  même  l'unité  personnelle  ne  confondit 
pas  l'homme  avec  le  Verbe;  et  que  de  même 
qu'à  cause  de  l'unité  de  nature,  le  Fils  uni- 
que ne  peut  jamais  être  séparé  du  Père  :  de 
même  aussi  à  cause  de  l'unité  de  personne , 
l'homme  ne  puisse  être  séparé  de  Uicu  qui 
se  l'est  uni.  Mais  cela  devait  se  faire  de  telle 
sorte  qu'encore  que  le  Christ  ne  puisse  être 
divisé  ni  confondu ,  le  seul  et  même  Christ 
fit  en  même  temps,  étant  véritablement  Dieu 
et  homme ,  ce  qui  appartient  à  Dieu  et  à 
l'homme.  L'Apôtre  marque  clairement  l'une 

iicor. iiti,  et  l'autre  nature,  lorsqu'il  dit  :  Encore  qu'il 
ait  été  cnici/ié  selon  la  faiblesse  de  la  chair, 
il  vit  néanmoins  par  la  vertu  de  Dieu. 

cp.  ii.i.  5.  Après  avoir  ainsi  établi  la  distinction 
des  natures  et  l'unité  des  personnes  en 
Jésus-Christ,  saint  Fulgence  répond  aux 
objections  de  ceux  qui  soutenaient  qu'en- 
core que  la  Divinité  soit  impassible  en  elle- 
même,  elle  avait  néanmoins  souffert  depuis 
sou  union  avec  la  chair.  Il  prouve  par  divers 

iiCf.r.1,13.  passages  de  lÉcriture,  qu'elle  est  égale- 
ment immuable  en  elle-même ,  et  unie  à 
l'homme  dans  Jésus-Christ;  que  n'étant  sus- 
ceptible d'aucun  changement  dans  le  Père, 
elle  n'en  peut  être  susceptible  dans  le  Fils  , 
le  temps  ne  pouvant  rien  ajouter  à  ce  qui 
est  immuable  de  sa  nature,  ni  en  rien  dimi- 
nuer. Il  montre  qn'ii  cause  de  l'unité  de  per- 
sonne, on  dit  de  Jésus-Christ  que  le  Sei- 
gneur de  gloire  a  été  crucifié,  et  l'Auteur  de 
la  vie  mis  à  mort.  Mais,  en  expliquant  ce  qui 
est  propre  à  chacune  des  deux  natures ,  il 


II«br.  I.  10, 
II. 


montre  que  lorsque  saint  Pierre  dit  dans  les 
Actes  que  Dieu  a  oint  de  l'Esprit  Saint  et  df 
force  Jésus  de  Nazareth ,  cela  doit  s'entendre 
de  la  nature  hvmiaiire,  elle  seule  étant  dési- 
gnée par  le  nom  de  Nazareth  où  en  effet 
elle  a  pris  sa  naissance.  11  distingue  encore 
les  autres  choses  qui  doivent  s'atlriltuer  à  la 
nature  humaine,  à  l'exclusion  de  la  divine. 
Les  pleurs  que  Jésus-Christ  versa  sur  La- 
zare; le  trouble  qu'il  ressentit  en  son  âme  h 
la  veille  de  sa  passion;  toutes  les  infirmités 
de  son  enfance ,  l'accroissement  de  son  âge 
et  de  sa  sagesse  :  tout  cela  appartient  à  la 
nature  humaine,  quoiqu'on  les  dise  de  Jésus- 
Christ  à  cause  de  l'unité  de  personne  dans 
les  deux  natures.  C'est  encore  de  la  nature 
humaine  que  l'on  doit  entendre  ce  qui  est 
dit  dans  l'Kpître  aux  Hébreux ,  que  Jésus 
qui  avait  été  rendu  pour  un  peu  de  temps 
inférieur  aux  anges,  a  été  couronné  de 
gloire  et  d'honneur  à  cause  de  la  mort  qu'il 
a  soufferte.  Dieu  par  sa  bonté  ayant  voulu 
qu'il  mourût  pour  tous.  Les  mouvements  de 
joie,  de  tristesse,  d'ennui,  de  crainte,  appar- 
tiennent visiblement  à  la  nature  humaine, 
de  môme  que  le  désir  que  Jésus-Christ  té- 
moigna de  manger  avec  ses  disciples  avant 
sa  passion;  mais  quoiqu'il  ait  eu  les  infir- 
mités de  notre  nature,  il  les  a  eues  volontai- 
rement, comme  il  a  souffert  volontairement 
la  mort.  C'est  ce  qu'il  témoigne  dans  saint 
Jean  lorsqu'il  dit  :  J'ai  le  /Muroir  de  quitter 
la  vie,  et  j'ai  le  jwuvoir  de  la  reprendre. 
Au  reste  ce  n'est  ni  dans  son  âme  ni  dans  sa 
divinité,  mais  dans  son  corps  seul  qu'il  est 
mort.  L'Évangile  le  dit  clairement  lorsqu'il 
rapporte  que  Joseph  d'.Vrimathie  demanda 
à  Pilate  d'enlever  le  corps  de  Jésus,  et  que 
Pilate  lui  ayant  permis,  il  enleva  le  corps 
de  Jésus,  l'embauma  et  l'ensevelit.  Néan- 
moins,  à  cause  de  l'unité  de  personne,  on 
doit  dire  que  Dieu'  n'a  jamais  abandonné 
l'homme  qu'il  a  pris  dans  le  aein  de  la 
Vierge,  ni  à  la  mort,  ni  dans  le  tombeau. 


Cap.  Ilii  M 

XtV, 


ITI. 


Cap.  III. 


Cap.  ixii. 


JoiD. \ti,;o. 


'  Hcec  enim  infirmitatis  nostrœ  medela  poscebat, 
ut,  sicnt  naturatis  unitas  in  Pâtre  manet  et  Filio, 
sic  personalis  unitas  manerel  in  Clirislo;  et  sicul 
personalis  dislinctio  dtias  non  focil  in  Paire  et 
Fiho  substantias,  sic  luituralis  discrelioduas  non 
faccret  m  Cliristo  ptrsonas;  ac  riirsus,  sicul  uni- 
las  7iaturalis  Palrem  non  confundit  et  Fitium, 
sic  unitas  personalis  hominem  mm  confunderel  et 
Verlium  :  cl  qurniadmodum  n  gcnitore  Dco  per 
uiiilaUni  nalurœ  nunqunm  srgrrgnri  polcst  uni- 
genilus  Filius,  sic  a  susceptore  Deo  per  vnilatem 
pcrsomr   nungiiam  poasri  lionio  scparari  suscep- 


tus;  sic  tamen,  ut  quamvis  Chrislus  nec  confundi 
possrt  aliqnando,  nec  dividi:  unus  tamen  atque 
idem  Cliristus ;  et  e.T  reritalr  pnssionis  hnnianw, 
quœ  noslrn  fucrant  redderct  :  cl  ex  verilale  im- 
]iassilnlitnlis  ditin(r,  quœ  sua  fueranl  Iribueret. 
Lit),  m  ad  Trasam..  cnp.  vni. 

'  Propter  unitaiem  verojersonee,  quoniam  Deus 
hominem  quem  ex  Virginis  utero  suscrpit ,  nec  in 
morte,  nec  in  sepulcro  deseruil,  propterea  Joan- 
nes  adjrcit  :  llii  er{;o  propter  pnrasopveii  Jiidn'u- 
ruin,  rpiia  jiixUi  crat  luuuuuientuin,  posueruDl  Jc- 
fuin.  I,il\  III,  rap.  xxv. 


[VI'  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  I.  —  SAINT  FULGENCE  DE  RUSPE. 


25 


C'est  pourquoi  rHvnni^t'IisIc  ajoute  que 
ibM.  (1.  Joseiili  mil  .h'sus  (huis  un  s(''puli'ro  tout  neuf 
oi'i  peisouue  n'avait  iMicore  t'té  mis.  Saiut 
i^lV.  ""'  Fu'gcnce  rapporte  plusieurs  passages  du 
Nouveau  Testament  qui  marquent  cette  uni- 
té de  personnes ,  et  ajoute  ([u'en  enns(5- 
quence  de  celte  unité,  on  dit  que  le  Fils  de 
Dieu  est  mort,  quoique  la  Divinité  soit  im- 
I5JII.  passible  en  elle-même.  Il  répète  une  seconde 
fois  que'  la  divinité  de  Jésus-Christ  n'a  point 
mu.  abandonné  son  corps  dans  le  sépulcre,  ni 
son  âme  dans  les  enfers,  et  que  c'est  sa  di- 
vinité qui  a  empèclié  la  corruption  de  son 
corps  dans  le  tomljcau,  comme  elle  a  empo- 
ché que  ràuio  ne  fût  sensible  à  la  douleur 
de  l'enfer  :  n'étant  pas  juste  qu'une  chair 
exempte  de  la  corruption  du  péché,  en  res- 
sentit dans  le  tombeau  ,  ni  qu'une  âme 
exempte  de  l'eschnaj^e  du  péelu»,  soullVit 
quelque  chose  dans  l'enfer.  Ou  ne  peut  pas 
dire  que  la  nature  humaine  h  laquelle  le 
Fils  de  Dieu  s'est  uni,  ait  été  tout  entière 
dans  le  tomlicau  ni  dans  l'enfer.  Jésus-Christ 
ne  fut  dans  le  tombeau  que  selon  sa  chair, 
et  son  âme  seule  descendit  aux  enfers.  Ce 
Père  finit  son  troisième  livre  par  une  récapi- 
tulation qui  renferme  ce  que  l'on  doit  croire 
siu-  l'Incarnation  du  Fils  de  Dieu,  et  par  un 
détail  des  erreurs  qui  se  sont  élevées  sur  ce 
mystère,  disant  que  tous  ceux  qui  y  persé- 
véreront jusqu'à  la  mort,  seront  infaillible- 
c.p.  xM.T,  ment  condamnés.  Il  dit  aussi  quelque  chose 
des  hérésies  qui  ont  attaqué  la  divinité  du 
Saint-Esprit,  et  montre  qu'il  est  vrai  Dieu, 
n'y  ayant  que  Dieu  seul  qui  puisse  sancti- 
fier dans  le  baptême,  répandre  la  charité 
dans  le  cœur  de  l'homme,  et  habiter  dans 
les  fidèles.  Il  prie  Dieu  de  rendre  le  roi 
Trasamond  attentif  à  la  parole  de  vérité  et 
de  l'éclairer  de  façon  qu'il  croie  au  Fils  de 
Dieu,  et  qu'il  honore  Notre-Seigneur  Jésus- 
Christ  de  la  même  manière  qu'il  honore  le 
Père.  Le  roi  admira  la  réponse  du  saint 
évêque,  mais  il  n'osa  plus  lui  faire  des  ques- 
tions. Un  évêque  du  parti  des  ariens  répli- 
qua à  l'écrit  de  saint  Fulgence.  Nous  n'avons 
plus  cette  réplique,  ni  la  réponse  que  le 
saint  lui  opposa,  dans  laquelle  il  montra, 
r»ig  Vil.,   selon  la  remarque  de  l'auteur  de  sa  Vie, 

ea[>.  ixill. 

1  Nec  carni  suœ  defuit,  cum  animam  suam  in 
inferno  dol  re  non  sineret,  nec  animam  suam  in 
inferno  deseruit,  cum  in  sepulcro  mmew  suam  a 
corruptione  servaret.  Dignum  namque  fuit  ut 
carnem  sepulcri  non  corrumperel  locus ,  quum 
peccati  non  corrupit  affectus;   et  animam  dolor 


que  ses  adversaires  avaient  été  vaincus  par 
son  premier  ('ciit,  c'cst-ù-dire  par  ses  ré- 
ponses anx  dix  objections  des  ariens,  et  que 
les  raisons  que  l'évêque  Pinta  lui  avait  oppo- 
sées étaient  tout  à  fait  vaines. 

§  IV- 

Lettres  de  saint  Fulgence  sur  le  vœu 

de  continence.  , 

1.  Une  jeune  femme  s'iilant  trouvée  ré-  „î?„7,'i',;j.''° 
duite  à  l'extrémité,  dans  une  maladie,  avait 
embrassé  la  pénitence  par  l'imposition  des 

mains  suivant  la  coutume  de  l'Église.  Le 
vœu  (le  continence  était  annexé  à  cette  sorte 
de  pénitence  ;  mais  la  femme,  pour  l'exécu- 
tion de  ce  vœu ,  dépendait  de  la  volonté  de 
son  mari.  Comme  il  était  jeune  lui-même  et 
qu'il  ne  croyait  point  pouvoir  vivre  dans  la 
continence,  voyant  que  sa  femme  avait  re- 
couvré la  santé,  il  consulta  saint  Fulgence 
sur  la  manière  dont  il  devait  se  comporter 
avec  elle.  Ce  Père  ne  nous  a  point  fait  con- 
naître ce  jeune  homme.  Il  parait  seulement 
qu'il  demeurait  en  un  lieu  assez  éloigné, 
puisque  les  mauvais  temps  de  l'hiver  l'a- 
vaient empêché  de  lui  faire  passer  sa  ré- 
ponse aussitôt  qu'il  l'aurait  souhaité.  Sa  let- 
tre est  aussi  sans  date.  Ainsi  l'on  ne  peut  en 
marquer  le  temps.  On  l'a  mise  toutefois  la 
première  de  celles  de  saint  Fulgence  dans 
l'édition  que  nous  suivons.  Le  jeune  homme 
lui  avait  demandé  quelles  règles  l'on  devait 
garder  dans  l'usage  du  mariage,  et  si  une 
personne  mariée  était  obligée  de  garder  un 
vœu  de  continence. 

2.  Sur  la  première  demande  le  saint  répond     Anaijsf  d« 

A  ^  celio     leltre, 

que  l'usage  du  mariage  non-seulement  n'est  fe  "•*■ 
point  mauvais  en  lui-môme,  mais  encore  qu'il  ,,  R*^'»'  "" 
est  permis,  et  que  selon  l'Apôtre  le  lit  nuptial  "«s'- 
est sans  tache  quand  le  mariage  est  traité 
avec  honnêteté;  que  le  même  apôtre,  en  ap- 
pelant devoir  conjugal,  l'obligation  que  les 
époux  contractent  à.  cet  égard,  fait  bien  voir 
qu'ils  ne  peuvent  se  refuser  mutuellement 
ce  devoir ,  et  qu'en  même  temps  ils  le  peu- 
vent sans  crime.  Mais  saint  Fulgence  dit  que 
l'usage  du  mariage  doit  avoir  pour  fin  la  gé- 
nération des  enfants',  et  non  le  plaisir;  que 

non  contingeret  inferni,  quam  servitus  nequivit 
tenere  peccati.  Ihiil.,  cap.  xxxi. 

2  Justilia  utendi  conjugii  hœc  est,  ut  non  cx- 
plendœ  lilndinis,  sed  suhslituendœ  prolis  obtentu, 
sibi  coitjuges  congruo  lempore  misceantur.  Fulg., 
Epist.  1,  pag.  145. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


pllr  tes  wcux. 


2G 

toutefois  ce  plaisir  n'est  pas  un  crime  sem- 
blalile  à  celui  de  l'adulli-rc  ;  mais  que  c'est 
toujours  un  poché  léger  qui  s'cflace  par  la 
prière  '  et  par  les  bonnes  œuvres.  11  veut 
qu'aussitôt  après  la  naissance  des  enfants,  on 
leur  procure  une  réj-'énératiou  spirituelle  ' 
par  le  sacrement  du  baplêmc.  Il  enseigne 
que  la  fidélité  dans  le  mariage  diminue  les 
fautes  que  l'on  y  commet  par  fragilité,  et 
qu'elle  en  obtient  le  pardon,  pourvu  qu'elle 
soit  accompagnée  des  œuvres  de  miséri- 
corde, qui  ont  tant  de  pouvoir  dans  la  reli- 
gion chrétienne,  et  qui  y  sont  si  essentielles 
que  non-sculcmcnt  ceux  qui  vivent  dans  le 
mariage,  mais  ceux  encore  qui  gardent  le 
célibat,  doivent  les  pratiquer  pour  recevoir 
la  récompense  ou  de  leur  fidélité  ou  de  leur 
virginité.  Il  met  la  fornication  au  nombre 
des  crimes  qui  fciment  l'entrée  du  ciel,  sur- 
tout dans  les  personnes  mariées. 

3.  A  l'égard  des  vœux  que  l'on  a  faits  à 
Dieu ,  saint  Fulgence  décide,  d'après  les 
écrivains  sacres,  que  l'on  ne  peut  se  dispen- 
ser de  les  accomplir.  Mais  il  soutient  que  le 
vipu  de  continence  fait  par  une  des  person- 
nes mariées  ne  peut  pas  o]>liger  l'autre,  ni 
dispenser  celle  qui  a  fait  vo:;u  de  lui  rendre 
le  devoir  conjugal,  parce  qu'il  n'est  pas  per- 
mis aux  personnes  mariées  de  faire  vœu  de 
continence,  n'ayant  pas  leur  corps  en  leur 
propre  pouvoir.  C'est  pourquoi  il  met  de  la 
diii'érence  entre  le  vœu  d'une  vierge  et 
d'une  veuve,  d'avec  les  personnes  mariées, 
disant  qu'il  est  libre  à  celles-là  de  faire  vœu 
de  continence,  mais  que  celles-ci  ne  le  peu- 
vent que  d'un  commun  consentement,  dans 
le  désir  d'otl'rir  à  Dieu  sur  l'autel  de  la  foi 
un  sacrifice  en  odeur  de  suavité.  Ces  prin- 
cipes posés,  il  conclut  que  si  les  personnes 
qui  l'avaient  consulté  s'étaient  engagées  una- 
nimement par  vœux  à  la  continence  ',  elles 
devaient  la  garder  ;  et  que  si  elles  se  sen- 
taient tentées  quelquefois  des  désirs  de  la 
chair,  elles  devaient  recourir  au  secours  de 
la  divine  miséricorde ,  pour  en  obtenir  la 
grâce  'de  résister  à  la  tentation  ;  mais  que 
s'il  n'y  avait  qu'une  des  deux  qui  eut  fait 


vœu  de  continence,  et  cela  sans  le  consen- 
tement de  l'autre,  elle  devait  regarder  ce 
vœu  comme  téméraire  ,  et  rendre  le  devoir 
avec  une  chaste  sincérité,  à  celle  qui  n'avait 
point  fait  vœu.  Il  leur  représente  à  l'un  et  à 
l'autre  la  nécessité  des  bonnes  oeuvres,  en 
leur  disant  que  s'ils  ne  peuvent  vivre  dans 
la  continence,  ils  ne  peuvent  se  dispenser 
de  faire  l'aumône,  de  pratiquer  la  justice,  de 
veiller  ;\  la  bonne  conduite  de  leurs  domesti- 
ques, d'élever  leurs  enfants  dans  la  crainte 
du  Seigneur,  et  d'être  plus  attentifs  à  leur 
donner  une  bonne  éducation ,  qu'à  leur 
amasser  des  richesses. 

§v. 

Lettres  à  Galla  et  à  Proha. 

l.  Saint  Fulgence  était  dans  son  second 
exil,  lorsqu'il  apprit  que  Galla,  fille  du  con- 
sul Symmaque ,  venait  de  perdre  son  mari 
qui  était  aussi  consul,  et  avec  lequel  elle 
n'avait  pas  vécu  un  au  entier.  Le  diacre  qui 
lui  apporta  cette  nouvelle,  lui  apprit  aussi 
que  Galla  avait  résolu  de  demeurer  veuve. 
Il  lui  écrivit  donc,  et  pour  la  consoler  de  la 
mort  de  son  mari,  et  pom*  l'instruire  des  de- 
voirs d'une  veuve  chrétienne.  Il  commence 
sa  lettre  par  l'éloge  des  vertus  de  son  mari, 
ne  doutant  point  que  Dieu  ne  l'eût  enlevé 
dans  la  Heur  de  son  âge  pour  le  faire  jouir 
d'un  bonheur  éternel.  Il  en  prend  occasion 
de  la  consoler  de  sa  mort,  lui  disant  avec 
l'Apôtre  qu'elle  n'avait  pas  lieu  de  s'attris- 
ter comme  font  les  autres  hommes  qui 
n'ont  point  d'espérance;  parce  que  la  mort 
ne  nous  enlève  point  les  fidèles,  mais  seu- 
lement ceux  qui  ont  vécu  en  ce  monde  dans 
les  ténèbres,  c'est-à-dire  dans  le  crime.  Car, 
les  hommes  de  cette  condition  ,  lorsqu'ils 
entendront  dans  les  sépulcres  la  voix  du 
Fils  de  Dieu ,  ne  ressusciteront  point  à  la 
vie  connue  les  justes,  mais  à  leur  condamna- 
tion. Il  lui  représente  que  Dieu  n'accorde 
point  son  royaume  suivant  la  ditl'érence  des 
âges,  mais  à  la  vertu  ;  qu'une  longue  vie  n'est 
point  précieuse  devant  ses  yeux,  mais  celle- 


L«nic- 


'  Conjiigalus  si  in uxore  sua,  naturali  duntaxat 
usu,  aliquantulum  intemperatus  exccdal,  non  so- 
litm  scilicel  gcneralionem  quœrens,  sed  aliquando 
libidini  carnix  obedicns;  hoc  quidem  sine  culpa 
non  fncit;  talii  autcm  culpa  cilius  bcnc  operanti 
atquc nranli  remillilur.  Ibid. 

'  Cum  nnla  fueril  proies  diluendam  celcrius  spi- 
rilali  generalione  non  ncgligat.  Ibid.,  pag.  146. 


'  Et  siquidem  continenliampari vorislis assensu, 
teniiremvcstrœdileclionis  ctim  Dei  timorc  servate: 
et  si  quando  carnisinfirmitas  mentem  piit.ial.ani- 
mus  ad  auxilium  divinœ  iniseralionis  occurrat, 
ncc  cédai  libidini.  Si  rero  continenliaw  unus  ves- 
trum  sine  alterius  rovit  asstnsu,  temerarie  sevo- 
vi-'fse  cngnoscul,  et  dcbitum  cnnjugi  casla  siiioe- 
rilalc  redhibcat.  Ibid.,  png.  119. 


CHAPITIIE  1.  —  SAINT  FULGENCE  DE  lUJSPE. 


[vr  SIÈCLE.] 

1;\  seule  que  l'on  a  passée  dans  les  bonnes  œu- 
vres, ne  fiit-clle  que  de  peu  de  durée.  Il  passe 
de  h\  au  devoir  des  veuves  et  après  lui  avoir 
dit  (juc  la  viryinilé  est  supérieure  eu  dignité  ' 
au  uiariape,  il  lui  fait  considiher  la  viduit(! 
où  elle  se  trouve ,  comuie  un  don  de  Dieu, 
<jui  veut  l'élever  par  degrés  à  ce  qu'il  y  a 
diMueillcur.  Il  roniaïquii  que  la  foi  et  les  nni- 
vres  de  miséricorde  iloul  les  chrélieus  doi- 
vent s'occuper  n'ont  lieu  qu'en  celle  vie,  et  non 
pas  en  l'autre  ;  que  Dieu  nous  donne  quel- 
quefois certains  biens  qui  ne  peuvent  par  eux- 
mêmes  nous  rendre  licureuxni malheureux, 
comme  sont  les  enfants,  les  richesses  cl  la 
santé  ;  que  c'est  pour  cela  qu'il  les  donne  aux 
bons  et  aux  méchants,  et  qu'il  les  ôle  quel- 
quefois aux  uns  et  aux  autres  ;  que  si  Job  a 
clé  heureux,  lorsqu'il  vivait  avec  justice  et 
piété  dans  l'abondance,  il  a  été  encore  plus 
heureux  et  plus  juste,  lorsqu'il  fut  réduit  à 
une  extrême  pauvreté  ;  que  l'Évangile  nous 
représente  deux  hommes,  dont  l'un  qui  était 
le  mauvais  riche,  a  été  malheureux  quoique 
comblé  de  richesses  et  dans  une  parfaite  san- 
té, et  l'autre  nommé  Lazare  était  heureux 
quoique  pauvre  et  couvert  d'idcères.  «  Ces 
sortes  de  biens,  continue  saint  Fulgence,  ne 
peuvent  donc  nous  rendre  véritablement  heu- 
reux par  l'usage  que  nous  en  faisons  ;  et  il 
est  toujours  avantageux  de  les  mépriser, 
quand,  dans  le  mépris  que  l'on  en  fait,  l'on 
a  en  vue  la  gloire  de  Dieu,  et  non  pas  de 
plaire  aux  hommes.  Il  en  est  de  même  du  ma- 
riage. On  peut  le  contracter  avec  une  bonne 
intention,  et  le  mépriser  de  même.  Susanne 
s'est  rendue  recommandable  par  la  chasteté 
conjugale.  Judith  et  Anne  l'ont  été  davantage 
en  vivant  dans  la  viduité  ;  mais  Marie  a  fait 
beaucoup  mieux  en  gardant  une  virginité  en- 
tière. »  Il  propose  à  Galla  l'exemple  de  ces 
deux  veuves  célèbres  par  lems  vertus,  l'une 
dans  l'Ancien  Testament,  l'autre  dans  le  Nou- 
veau ;  et  celui  de  Pi'oba  sa  sœur,  qui,  après 
avoir  consacré  à  Dieu  sa  virginité,  vivait  dans 
Rome  avec  tant  d'édification,  qu'il  semblait 


27 


qu'elle  avait  oublié  sa  naissance,  vivant  dans 
les  humiliations,  all'eclant  de  servir  tout  lo 
monde,  se  refusant  pour  ainsi  dire  le  néces- 
saire alin  d'en  noinrir  les  pauvres,  et  cmplo- 
yaul  i\  les  vêtir  ce  d(mt  elle  aurait  pu  se  vê- 
tir elle-même,  contente  de  ce  qu'il  y  avait  de 
plus  vil.  Il  luiconseille  donc,  qu'encore  qu'elle 
lui  soit  supérieure  par  l'excellence  de  la  vir- 
ginité, de  la  prendre  pour  compagne  dans  la 
pratique  de  toutes  les  autres  vertus  ;  de  mé- 
priser avec  elle  la  noblesse  de  son  exfraction, 
qui  est  le  foyer  de  l'orgueil  ;  de  s'appliquera 
la  prière,  au  jcilne  et  à  l'aumône  ;  mais  dans 
toutes  ces  bonnes  teuvrcs  d'éviter  la  vaine 
gloire,  on  cherchant  non  les  louanges  des 
hommes,  mais  de  plaire  ("i  Dieu  ;  enfin  de  ne 
pas  s'attribuer  à  elle-même  ses  bonnes  œu- 
vres, mais  à  la  grâce  de  Dieu.  ciSoyez  persua- 
dée", lui  dit-il,  qu'il  ne  peut  y  avoir  en  vous 
aucune  faculté  de  vouloir,  ni  de  faire  le  bien, 
si  vous  ne  l'avez  reçue  par  un  don  gratuit  de 
la  divine  miséricorde  ;  que  c'est  Dieu  qui  opè- 
re en  vous  le  vouloir  elle  parfaire  selon  qu'il 
lui  plaît.  En  vous  disant  néanmoins  que  vous 
ne  devez  rien  attribuer  à  votre  propre  vertu, 
je  ne  prétends  point  dire  que  vous  deviez 
vous  méfier  en  quelque  chose  de  la  bouté  et 
du  secours  de  Dieu.  11  est  fidèle  dans  toutes 
ses  paroles,  et  saint  dans  toutes  ses  œuvi'es. 
Il  ne  vous  refusera  pas  son  secours  dans  ce 
monde,  ni  la  récompense  dans  l'autre.  Ne 
cessez  pas  de  vous  entretenir  de  ses  divines 
paroles,  et  mettez  tout  votre  plaisir  dans  la 
lecture  des  livres  saints.  » 

2.  Saint  Fulgence  marque  dans  la  lettre  .u^"""  p"J'. 
dont  nous  venons  de  parler,  qu'il  en  avait  •^iph-'». 
écrit  '  une  à  Proba,  sœur  de  Galla.  Il  était 
donc  naturel  de  placer  celle-ci  la  première. 
Cette  illustre  vierge  avait  souvent  pressé  le 
saint  évêquo  ,  par  le  ministère  d'un  Serviteur 
de  Dieu,  nommé  Tutus,  de  lui  donner  quel- 
ques discours  en  l'honneur  de  la  virginité  , 
et  où  il  fût  aussi  parlé  de  l'humilité  chré- 
tienne. Le  saint  évêque  trouva  d'aboi'd  que 
cela  était  au-dessus  de  ses  forces  ,  considé- 


'  Àtlamen  a  muliere  mipta  mulier  innupta  et 
virgo,  non  parra  gradus  dignitatc,  discernilur. 
Fulg.,  Epist.  2,  pag.  134. 

'  Firmiler  Une  nullam  tihi  facullalem  inesse 
passe  bonœ  voluntatis  aut  operis,  nisi  id  gratuilo 
munere  dicinœ  miserationis  accepetis.  Scito  ergo 
Deum  in  te  opemri  et  velle  et  pcrftcere  pro  hona 

xoluntate Ncc  quia  dixi,  nihilte  deberepropnœ 

assignare  virtuti,  ideo  tibi  est  de  dicina  virlute  ac 
pictate   in   aliquo  diffidendum.  Fidelis  est  enim 


Deus  in  verbis  sttis,  et  sanctus  in  omnibus  opcri~ 
bus  suis  :  ncc  tibi  auxilium  den''gabit  in  hoc  sœ- 
culo,  nec  prœinium  subtrahet  in  futuro..  ..  Num- 
quam  cesses  a  divinis  eloquiis,  et  totain  delecta- 
tionem  cordis  tui  Scripturis  sanctis  indulge.  Fulg., 
Epist.  2  ad  Gallam,  pag.  161. 

3  Disponinms  de  jejunio  et  oratione  aliquid  scri- 
bere  ad  sororem  tuam  sanctam  Christi  cirginem 
Probam,  sicut  in  epistola  quam  ad  eam  nuper 
dedi  mea pollicitatio  continetur.  Ibid.,  pag.  139. 


HISTOIRE  GILNÉR.\LE  DES  AUTEURS  ECCLÉS1ASTIQLT:S. 


28 

rant  qu'il  n'y  a  rien  de  mieux  par  rapport 
au  corps  que  la  virpinilé,  ni  de  plus  suMime 
par  rapport  à  l'âme  qu'une  fidèle  humilité. 
Mais  dans  la  confiance  que  Proba  oblien- 
drait  elle-même  de  Dieu,  par  ses  prières,  la 
grice  d'exécuter  ce  qu'elle  demandait  de  lui, 
il  l'entreprit.  «  Celui,  lui  écrit-il,  qui  a  fait 
tout  ce  qu'il  a  voulu  ',  est  le  même  qui,  par 
un  don  gratuit  de  sa  grâce,  vous  a  consa- 
cré vierge  pour  lui-même ,  et  sa  grâce  est 
donnée  sans  aucun  mérite  précédent,  afin 
qu'on  lui  en  rende  de  continuelles  actions  de 
grâce ,  dans  une  pure  humilité  de  coîur. 
C'est  le  Fils  unique  de  Dieu,  et  le  Fils  unique 
d'une  Vierge,  le  seul  époux  de  toutes  les 
vierges  sacrées,  le  fruit,  l'honneur  et  le  don 
de  la  sainte  virginité.  Consenez  donc  avec 
soin  le  dépôt  qui  vous  a  été  confié;  et  jugez 
par  le  nom  même  de  vierge,  qui  vient  de 
celui  de  vertu,  du  mérite  d'un  si  grand  bien 
que  vous  avez,  parce  que  Dieu  vous  a  ac- 
cordé de  l'avoir ,  en  faisant  que  vous  lui 
consacriez  votre  virginité.  »  Saint  Fulgence 
fait  voir  que  le  don  de  la  virginité  lorsqu'il 
renferme  l'intégrité  de  l'âme  et  du  corps,  est 
plus  grand  que  tous  les  autres  dons,  sans 
prétendre  toutefois  que  le  mariage  soit  un 
mal.  Ali  contraire,  il  le  reconnaît  pour  l'ou- 
vrage de  Dieu,  et  l'appelle  même  un  don  de 
Dieu ,  quoiqu'il  le  croie  beaucoup  au-des- 
sous de  la  virginité.  Il  fuit  un  parallèle  des 
avantages  de  la  virginité  et  des  inconvé- 
nients du  mariage.  Il  montre  en  même 
temps  quelle  doit  être  la  vie  d'une  vierge 
pour  pouvoir  se  promettre  tout  le  bien  qui 
est  attaché  à  son  état.  Il  veut  qu'elle  fuie 
les  délices  du  siècle,  soit  dans  le  boire  ,  soit 
dans  le  manger,  soit  dans  les  vêtements  ; 
qu'elle  mortifie  sa  chair  par  des  jeûnes  et 
des  abstinences  modérés,  en  sorte  qu'elle 
en  soit  affaiblie,  et  non  pas  épuisée  ;  qu'eUe 
donne  aux  pauvres  ce  qu'elle  retranche  de 
ses  aliments  ;  qu'elle  cherche  uniquement  à 


plaire  à  Jésus-Christ  son  époux ,  et  non  pas 
aux  hommes  ;  qu'elle  se  garde  de  l'orgueil 
qui  est  le  commencement  et  la  source  de 
tous  les  péchés.  Il  marque  qu'il  y  a  deux 
sortes  d'orgueil  dans  les  personnes  qui  font 
profession  de  piété.  L'une  en  méprisant  la 
vie  des  autres ,  l'autre  en  attribuant  à  ses 
propres  forces  quelque  chose  de  leurs  bon- 
nes œuvres.  Il  dit  qu'une  vierge  qui  tombe 
dans  l'un  ou  l'autre  de  ces  excès  n'est  point 
une  vraie  vierge  de  Jésus-Christ  qui  n'admel 
à  son  lit  nuptial  que  les  humbles ,  et  qui  en 
chasse  les  superbes.  Il  conseille  donc  à  Pro- 
ba de  ne  jamais  se  comparer  aux  autres, 
mais  à  elle  seule,  et  de  s'occuper  tellement 
de  ses  propres  infirmités,  qu'eUe  ne  cherche 
.point  à  se  llatter  des  défauts  des  autres. 
Pour  lui  faire  sentir  le  danger  de  la  vanité , 
il  rapporte  une  partie  des  Psaumes  xxxvii 
et  XXIX.  Le  prophète  avait  dit  dans  celui-là  : 
Les  gémissements  de  mon  cœur  ne  vous  sonl 
point  cac/tcs,  o  mon  Dieu,  et  tous  mes  désirs  sont 
devant  vous.  «  Celui  qui  parlait  ainsi,  dit  sain! 
Fulgence,  avoue  qu'il  s'était  élevé  '  quel- 
quefois de  ses  forces  et  de  sa  santé,  lorsqu'il 
dit  dans  l'autre  Psaume  :  J'ai  dit  dans  mmt 
abondance ,  je  ne  serai  jamais  ébranlé.  Mais 
parce  qu'en  parlant  ainsi  il  avait  été  aban- 
donné de  la  grâce  divine  ,  et  qu'il  avait  suc- 
combé dans  son  infii-mité,  il  ajoute  en  re- 
coniuiissant  sa  faute  :  C'était ,  Seigneur ,  par 
un  pur  effet  de  votre  bonté  que  vous  m'aviez  af- 
fermi dans  l'état  florissant  oh  j'étais.  Atissitôt 
que  vous  avez  détourné  votre  visage  de  dessus 
moi,  j'ai  été  tout  rempli  de  trouble.  Et  afin  de 
montrer  que  nous  devons  sans  cesse  de- 
mander humblement  le  secours  de  Dieu , 
quoique  nous  l'ayons  déjà  eu,  il  ajoute  :  Je 
crierai  vers  vous.  Seigneur,  et  j'adresserai  à 
mon  Dieu  mes  prières.  Or ,  personne  ne  pi-ie 
et  ne  demande  quand  il  croit  qu'il  ne  lui  man- 
que rien  ,  ou  qu'il  croit  pouvoir  conserver  pai 
ses  propres  forces  ce  qu'il  a.  Au  contraire 


'  Yirginem  sacram  te  sibi  munere  gratuito  fe- 
cit,  qui  omnia  quiEcatmiue  voluit  fccit  :  a  quo 
ideo  gratia  nuUis  prœccdentibus  mentis  datur,  ut 
illi  semper  gratiarum  aclio  pura  cordis  humilitate 
reddatur.  Hic  est  autein  unigenitus  Dei  Filius, 
umgenitus  etiam  Virginis  filius,  unus  omnium 
sacrarum  sponsus,  sanctœ  rirginitaiis  fructus, 
decus  el  munu-t.  l-:pist.  3  ad  Probam.,  pag.  IGo. 

»  Islenitlem  quilwc  dicebat.falctursealiqurndo 
taiiquam  de  virlute  .<aniliilis  elaluin;  dicitenim 
in  alio  Psalnio  :  V^m  dixi  in  fihiindîiutia  luea,  uon 
niovebor  in  a;lenuini.  El  gmVi /toc  dicens,  adjuto- 
rio  divinœ  graliit  fueral  désertas,  sequilur  di- 


cens :  Domine,  in  bona  volunlale  tua  pr.'cslilisli 
docori  meo  virluleui  :  avorlisli  facieiu  luani  a  me 
et  factus  funi  nonturbalus.  Et  ul  oatenderet  adju- 
torium  divinœ  gratiœ  quamvis  jam  habilum  liu- 
mililer  esse  sine  inlcrniissione  poscendum,  Itoc 
quoque  subnectil  :  Ad  le,  Domine,  elaniatio  et  aJ 
Dcum  niinini  deprccabor.  Kemo  autem  depreca- 
lur  el  rogal  qui  non  aliquid  se  cognoscit  minn.<s 
habcre,  aul  quod  Itabel  suatanluni  polesl  virtutf 
servare.  tiiiisyHi.s  iijiturcl  hcnc/icium  rogal  et  ad- 
juloriiim  pugilat,  neccsse  csl  ul  el  cvidenliani  »■««• 
imhecilliltilis  el  egeslalisagnoscal.  l'ulg. ,  t'/iist.  3 
ad  Probam,  pag.  17*. 


GflAPITnE  I.  —  SAINT  FULGENCE  DE  RUSPE. 


Lpltro  fiiia- 
iTiimv  h  Hro- 
la,  {>ag.  17  i. 


[Vl'  SIÈCLE.] 

coliii  ([iii  (lomaiidc  du  secours  rocnmiait 
('■vidonimciil  ol  sa  lalMt-sso  nt  sa  pau\  rcli^.  » 
Sailli  l'^ilii;oiico  l'ait  voir  :\  l'rolja  que  les 
I)lus  ^aaiuls  saints  ne  sont  pas  en  co  monde 
sans  allliotions  ;  qn'ils  y  sont  souvent  agités 
de  prandes  tentations,  ii  cause  de  la  révolte 
de  la  ("liair  contre  l'esprit  ;  riuc  ce  n'est  pas 
riiuhistrio  ni  la  force  de  l'iiomiuo  qui  les 
délivre  de  la  loi  de  péché,  qui  est  dans  leurs 
membres,  mais  la  seule  grâce  '  du  Sauveur 
qui  ne  se  donne  qu'aux  humbles,  et  gra- 
tuiteuiout;  que  cette  grâce  est  tellement  don- 
née aux  humblc3  ,  qu'on  ne  peut  pas  même 
être  humble  sans  elle;  qu'elle  est  donnée  de 
Dieu  alin  que  nous  commencions  ii  être  hum- 
bles, et  que  nous  ne  cessions  pas  de  l'èlre  ; 
eiï  sorte  qu'elle  fait  que  nous  soyons  hum- 
!>les,  et  que  nous  persévérions  dans  l'humi- 
liîé  ;  qu'elle  ne  serait  jamais  elle-même  de- 
venue l'épouse  de  Jésus-Christ  par  l'intégrité 
de  sa  foi  et  de  sa  chair,  si  elle  ne  l'eût  aimé 
en  méprisant  le  vanités  du  siècle  ;  mais  aussi 
qu'elle  ne  l'aurait  pas  aimé,  s'il  ne  l'eût  jiré- 
veiuie  de  son  amour,  et  ne  lui  eut  encore 
donné  gratuitement  de  l'amour  pour  lui- 
même. 

3.  La  seconder  lettre  à  Proba  est  une  ins- 
truction sur  la  prière  et  la  componction  de 
cœur.  L'une  cl  l'autre  étant  un  don  de  Dieu, 
saint  Fulgence  exhorte  cette  vierge  à  les  de- 
mander à  Dieu  ,  comme  essentielles  à  un 
chrétien.  La  componction  de  co;ur  excite 
l'att'ection  de  la  prière,  et  une  humble  prière 
mérite  le  secours  de  Dieu.  La  componction 
de  cœur  fait  attenlion  à  ses  plaies;  la  prière 
demande  le  remède  de  la  santé.  Quelque 
avancés  que  nous  soyons  dans  la  vertu,  en 
ce  monde,  il  nous  reste  toujours  des  progrès 
h  faire  jusqu'à  ce  que  nous  soyons  arrivés  à 
la  possession  de  la  céleste  patrie.  Nous 
avons  toujours  des  ennemis  à  combattre  au 
dedans  et  au  dehors,  et  les  armes  les  plus 
propres  pour  les  vaincre,  sont  les  larmes,  la 
prière,  l'humilité  de  cœur.  Mais  ces  armes 


29 


sont  (les  dons  de  nien  ([ii'il  fiiiil  lui  deman- 
der; aucun  iKunme  ne  pouvant  ni  jinnser 
an  bien  ,  ni  le  faire  de  (pielque  naliire  qu'il 
soit,  sans  le  secours  gratuit  de  Dieu,  ainsi 
que  l'enseigne  l'ApiUrc  dans  son  Épitre  aux 
Philippiens.  Encore  donc  que  nous  ayons 
des  motifs  de  rendre  grâces  à  Dieu  pour  ses 
bienfaits,  nous  devons  toutclbis  le  prier  sans 
cesse  pour  obtenir  de  lui  de  nouvelles  grâ- 
ces ,  parce  que  tandis  que  nous  sommes  eu 
cclUi  vie,  comme  nous  ne  pouvons  être  sans 
péché,  aussi  ne  pouvons-nous  pas  rendre 
une  soumission  parfaite  à  ses  divins  com- 
mandements. 

4.  Saint  Fulgence   avait    écrit   une   troi-         itur»» 
siènie  lettre  à  Proba,  où  il  traitait  de  l'orai-  pe^du.!'""'"' 
son  et  du  jeûne.  Nous  ne  l'avons  plus.  Il  en 
dit  quelque  chose  dans  sa  lettre*  à  Galla. 

§  VI. 

Lettres  à  Eucjyppius,  à  Théodore  et  à 
Venantie. 

1.  La  lettre  à  Eugyppius  est  une  nfponse  i-ourc  an- 
celle  qu  il  en  avait  reçue,  et  un  remercî-  m E.,gv|,piu=, 
ment  du  présent  que  cet  abbé  lui  avait  en-  '"^" 
voyé.  Pour  mieux  lui  en  témoigner  sa  re- 
connaissance, il  lui  fit  présent  de  ses  trois 
livres  à.  Monime,  en  le  priant  de  lui  en  dire 
son  sentiment.  Il  parait  qu'il  pria  aussi  Eu- 
gyppius de  lui  faire  copier  quelques  livres 
dont  il  avait  besoin.  Toute  la  lettre  qu'il  lui 
éciivit  roule  sur  la  charité  qu'il  dit  n'être 
autre  chose  que  l'amour  même.  Il  n'eu  est 
pas  de  cette  vertu  comme  des  autres  affec- 
tions de  l'homme.  Il  peut  souhaiter  d'avoir 
beaucoup  d'argent  ou  autres  choses  tempo- 
relles, sans  en  avoir  en  effet.  Il  peut  souhai- 
ter même  certains  dons  spirituels,  comme 
celui  des  langues,  de  la  prophétie,  sans  les 
avoir  ;  mais  il  ne  peut  désirer  ni  aimer  la 
charité,  sans  l'avoir  en  même  temps.  Saint 
Fulgence  met  donc  le  domicile  de  cette 
vertu  dans  le  cœur  d'un  homme  de  bonne 


'  Ab  Imc  loge  peccati,  non  virtus  cujuslibet  ho- 
minis  fortis,  non  inditstria  sapientis,  sed  sola  li- 
bérât gfaiia  Sulvatoris,  quœ  non  nisi  huniilibus 
gratis  datur  :  Deus  eiiira  superbis  resistit,  lui- 
milibus  autem  dat  gratiam.  Verumlnmen  liœc  gra- 
tta sicut  nonnisi  huinilibus  datur,  sic  hinnilis 
homo  esse  non  potest,  nisi  delur.  Datur  enim  tit 
hiimiles  esse  incipiant,  et  datur  lit  huniiles  esse 
non  desinant.  Gratia  igitur  Dei  facit  nt  et  Inimi- 
les  simus  et  huniiles perseverare  possimus Ne- 
que  vero  fidei  veritate  carnisque  integritate  spiri- 


talitertalisponsomipsisses.si  non  eum  contempla 
vanitate  sœculi  dilexisses:  nec  tamen  eum  fuisses 
atiqualenus  dikctura,  nisi  fuisset  gratuita  sponsi 
dilectioneprœventa.  Dixiautem.  te prœventam  non 
solum  dilectione  qua  ille  te  dilexit.sed  eiiam  dilec- 
tione,  quam  tibi  gratis  ut  a  te  diligeretur,  infudit. 
Epist.  3  ad  Probain,  pag.  175. 

2  Disponimus  de  jejunio  et  oratione  aliquid 
scribere  ad  sororein  tuam  Probani.  EpUt.  2, 
pag.  139. 


30 


IlISTOinE  GÉNÉRALE  DES 


Ltinï 
Théodor«  , 
pif.  IS6. 


volontd.  Mais  il  ne  veut  pas  que  l'on  juge 
de  la  bonne  volonté  par  l'action  même;  l'in- 
tcnlion  de  celui  qui  apit  doit  décider  de  sa 
bonté;  parce  que  ce  n'est  pas  ce  que  fait  un 
homme,  mais  la  fin  pour  laquelle  il  agit, 
qui  fait  connaître  sa  volonté. 

2.  Un  sénateur  nommé  Tliéodore,  qui 
avait  été  consul  en  oOo,  s'était  donné  tout  à 
Dieu,  el  avait  embrassé  la  continence  avec 
sa  femme.  II  paraît  que  parmi  les  œuvres  de 
piété  qu'il  prati(juaif,  il  exerçait  particuliè- 
rement l'hospilalilé  ;  qu'il  avait  bien  reçu 
quelques  ecclésiastiques  qui  étaient  allé  de 
Sardaigne  à  Rome  ;  qu'il  s'était  entretenu 
avec  eux  de  saint  Fulgencc,  dont  la  réputa- 
tion était  grande  ;  et  qu'il  avait  même  té- 
moigné souhaiter  de  recevoir  quelques  let- 
tres de  sa  part.  Romulus  écrivit  aussi  à  saint 
Fulgence  pour  lui  faire  part  de  la  conver- 
sion de  Théodore,  et  du  désir  qu'il  avait  de 
recevoir  de  ses  lettres.  Ce  furent  là  les  mo- 
tifs qui  engagèrent  le  saint  Docteur  à  lui 
écrire,  quoiqu'il  no  l'eiît  jamais  vu.  111e  con- 
gratule d'avoir  rompu  tous  les  liens  qui  le 
tenaient  attaché  au  siècle,  et  d'avoir  foulé 
aux  pieds  un  monde  qui  le  foulait  lui-même 
à  ses  pieds  lorsqu'il  l'aimait.  Il  relève  l'avan- 
tage que  l'Église  lire  de  la  conversion  des 
grands,  en  ce  que  leurs  exemples  sauvent 
avec  eux  plusieurs  personnes.  «  Car,  encore  ', 
dit-il,  que  Jésus-Clirist  soit  mort  également 
pour  tous  les  fidèles,  et  qu'il  leur  ait  fait  part 
d'un  égal  bienfait  de  la  Rédemption  ,  puis- 
que, selon  r.\pôtre,  tous  ceux  qui  ont  été 
baptisés  en  Jésus-Christ,  ont  été  revêtus  de 
Jésus-Christ,  et  qu'il  n'y  a  maintenant  plus 


AUTEURS  ECCLKSIASTIOLTi:S. 

de  juif  ni  de  gentil ,  d'esclave  ni  de  libre , 
ni  d'homme,  ni  de  femme,  n'étant  tous  qu'un 
en  Jésus-Christ  ;  cependant  la  conversion 
des  puissants  du  siècle  contribue  beaucoup 
aux  conquêtes  et  aux  acquisitions  de  Jésus- 
Christ.  Si  la  crainte  qu'on  a  d'eux  en  fait 
trembler  plusieurs  ,  à  la  vue  de  leur  conver- 
sion plusieurs  recourent  à  la  miséricorde  di- 
vine. D'où  il  arrive  qu'ils  en  entraînent  beau- 
coup avec  eux  dans  la  voie  du  salut,  ou  dans 
leur  perte.  Les  grands  du  monde  doivent 
donc  s'attendre  à  être  punis  sévèrement,  si 
par  leurs  mauvais  exemples  ils  sont  aux  au- 
tres une  occasion  de  chute  ;  ou  à  de  grandes 
récompenses,  s'ils  leur  donnent  l'exemple 
d'une  sainte  vie.  Car,  qui  est  celui  qui  ne 
méprisera  pas  une  petite  maison  en  voyant 
un  sénateur  mépriser  un  palais  bâti  de  mar- 
bre? Qui  est  celui  qui,  pour  acquérir  les 
biens  célestes,  ne  méprisera  pas  les  terres- 
tres, en  voyant  un  consul  romain  se  hâter 
d'arriver  au  ciel  par  le  mépris  des  richesses 
temporelles?»  Saint  Fulgence  fait  remarquer 
que  c'est  en  lui  qu'a  été  accompli  cette  pa- 
role du  Piophète  :  Ce  changement  est  l'ou- 
vmge  de  la  droite  du  Très-Haut ,  et  que  com- 
me par  la  miséricorde  de  Dieu  qui  a  opéré 
en  lui,  il  avait  di'j.'i  appris  à  ne  point  se  glo- 
rifier dans  l'abondance  de  ses  richesses,  il 
lui  restait  encore  de  ne  point  se  confier  dans 
sa  propre  vertu,  ni  d'attribuer  à  ses  propres 
forces  le  mépris  qu'il  faisait  des  honneurs  du 
monde,  le  désir  qu'il  se  sentait  pour  le  ciel, 
et  le  plaisir  qu'il  trouvait  dans  l'accomplis- 
sement des  commandements  de  Dieu.  «Vous 
n'auriez  point  tout  cela^,  dit-il,  si  vous  ne 


'  Quamris  enim  CliriKltts  irqualiter sit prn  cunc- 
tis  lidelihus  mortnuf:  el  œquale  cunctis  benelicium 
redetiiptionis  iiiipenderit ,   diccnie  Apostolo  :  Qiii- 

ciiinque  in  Chrislo  bnptizati  cstis Omucs  ciiim 

vos  uniim  estis  in  Cliristo  Jcsii.  Galat.  ni,  27,  (rt- 
men  cotiversio  potenlium  sœcuii  mulltim  militai 
acquisitiotnbns  Chrinli...  in  taiium  tremore  p!u- 
rijiii  cnniremiscunt,  et  in  taiium  conrersionc  mnlli 
ad  aubsidium  ?»ixera()0"i.s  diiinœ  confugiunl.  lia 
(U  ul  qui  sunl  in  sœcuii  culmine  constiluti,  aul 
plurimos  secum  perdant,  aul  secum  mullos  in  via 
salulis  acquiranl.  Magna  taies  aul  poina  manel , 
si  multis  prœbeanl  malœ  imitalionis  laqueum; 
aul  gloria,  si  mullis  oslendanl  sanclw  conrersa- 
lionis  exemplum.  Quis  enim  non  parvam  despiciat 
cellam,  qunndo  senaUir  despicil  domum.  marmo- 
ratain?  (juis  «on  lerrena  ccmlemnens  ad  acqui- 
renda  ca'lcslia  sibi  co)isulal,  quando  ad  co'lum 
rnmanus  consul  Icrrenorum  corilemptu  fcslinal? 
Fulg  ,  Episl.  6  ad  Tlirod.,  pa;;.  ISG. 

'  ftœc  omnia  nullalonis  Itabercsnisi  a  Dca  mu- 


ncre  graluilœ  dnnalionis  accipercs  :  non  hoc  hn- 
mini  dal  nalura,  sed  gralia  :  non  hoc  ex  quali- 
lale  condilionis  hvniaiiœ  habetur  sed  ex  benigui- 
tatc  divinie  illuminalionis  acquiritiir...  Ilujus 
graliw  adjutorium  seniper  eslnobis  a  Deo  poscen- 
duin  :  sed  ne  ipsum  quod  poscimus,  noslris  viri- 
bus  assignenius  :  neque  enim  haberi  polesl  ipse 
sullem  oralionis  alferlu»,  nisi  divinilus  fuerit  at- 
IribulU'S.  Ul  crgo  desideremus  adjutorium  gratiœ, 
hoc  ipsum  quoque  opus  esl  gratiœ.  Ipsa  namque 
incipil  infundi ,  ul  incipinl  posci;  ipsa  quoque 
amplius  infundilur  ,  cum  poscenlibus  dalur.  (luis 
rero  polesi  graliam  poscere  nisi  relit?  Sed  nisi  in 
eo  Dcus  ipsam  rolunlalem  operelur,  relie  nulla- 
tenus  poteril  Propter  quod  beatus  Apostolus,  non 
solum  bona  opéra  hominum,  sed  eliam  bonam 
rolunlalem  Deum  in  mibis  operari  testatur,  di- 
cens:  Uinis  est  euim  qui  iipcratur  in  vobis  el  vclle 
et  pcrfitere  pro  Ixiua  voluiitate.  Kulj,'.,  Episl.  6  ad 
Theod.,  pag.  188. 


[Vl"  SIÈCLE.] 

l'aviez  reçu  gratuitomiMil  tU-  Dimi.  Ces  clio- 
ses  ne  sont  point  un  don  de  lu  nature,  mais 
do  la  p:r;\ce  ;  on  ne  les  possède  point  par  la 
qualitii  de  la  condition  humaine  ,  mais  on 
les  acquiert  avec  le  secours  de  la  lumière 
divine.  Nous  devons  le  demander  sans  cesse 
ù  Dieu,  et  ne  pas  même  attribuer  h  nos  pro- 
pres forces  la  prière  que  nous  faisons  A  ce 
sujet;  puisque  nous  ne  pouvons  pas  même 
avoir  le  désir  ou  raH'eclion  de  la  prière,  si 
Dieu  ne  nous  la  donne.  Or ,  désirer  le  se- 
cours de  sa  grâce,  c'est  l'ouvrage  de -la 
grâce  même  ;  elle  commence  â  nous  être 
donnée  alin  que  nous  commencions  par  la 
demander;  elle  augmente  dans  nous  à  me- 
sure que  Dieu  l'accorde  à  nos  prières.  Mais 
qui  peut  demander  la  grâce  s'il  ne  le  veut  î 
Et  toutefois  si  Dieu  n'opère  en  nous  la  vo- 
lonté même  ,  nous  ne  pouvons  vouloir.  C'est 
pourquoi  l'Apôtre  dit  que  Dieu  opère  en  nous 
non-seulement  les  bonnes  œuvres,  mais 
aussi  la  bonne  volonté.  »  Il  exhorte  Théo- 
dore à  la  pratique  de  l'humilité  chrétienne, 
à  laquelle  seule  la  vie  éternelle  est  promise  ; 
â  s'occuper  des  saintes  lectures  afin  d'ap- 
prendre dans  les  livres  saints  à  se  connaître, 
et  qui  il  devait  être;  et  à  faire  de  bonnes 
œuvres  devant  Dieu  et  devant  les  hommes. 
Il  lui  souhaite  et  à  sa  vénérable  mère,  de 
même  qu'à  sa  femme  qu'il  appelle  sa  sœur 
i\  cause  qu'ils  vivaient  en  continence,  la  pro- 
tection de  l'inséparable  Trinité. 
=op-       3.  Ce  fut  aussi  à  la  prière  d'un  de  ses 

V  f- 

i«s.  amis  nomme  Juniims  que  saint  Fulgcnce 
écrivit  à  Venantie.  Nous  n'avons  plus  la  let- 
tre de  Junilius  ;  nous  savons  seulement  qu'il 
y  saluait  le  saint  évèque  de  la  part  de  cette 
femme,  qii'on  ne  connaît  point  d'aillem-s.  La 
réponse  de  saint  Fulgence  est  intitulée]:  De 
la  Vraie  pénitence  et  de  la  réti'ibution  future.  Il 
y  pose  pour  principe  qu'aussitôt  cpie  la  cha- 
rité '  habite  dans  le  cœur  de  l'homme,  le  pé- 
ché ne  le  domine  plus;  et  qu'elle  fait  non- 
seulement  éviter  les  péchés  présents,  mais 
encore  pardonner  les  passés.  Il  taxe  d'im- 
piété et  de  sacrilège  les  pécheurs  obstinés  et 
endurcis,  qui,  à  la  vue  de  leurs  crimes  et 
d'une  longue  vie  passée  dans  les  désordres, 
se  persuadent  qu'il  n'y  a  point  de  miséri- 
corde à  espérer  pour  eux,  et  tâchent  de  le 
persuader  aux  autres  ;  ne  faisant  point  at- 


CII.\PITUE  I.  —  S.MNT  FULCENCE  DE  RUSPE. 


31 


tcnlion  à  ces  paroles  de  Jésus-Christ  :  Ce  ne  '-°=-  »■"• 
sont  point  les  saints,  inuis  tes  malades  qui  ont 
besoin  de  médecin,  u  Si  notre  médecin  est  ha- 
bile ,  dit  saint  Fulgence,  il  peut  guérir  tou- 
tes nos  inlhinilés  ;  si  noire  Dieu  est  niis('ri- 
cordieux,  il  peut  remcttn!  tous  nos  péchés. 
Cette  bonté  n'est  pas  parfaite,  qui  ne  sur- 
monte pas  tout  le  mal,  ni  la  médecine  par- 
faite ItH-squ'il  y  a  des  maladies  qu'elle  ne 
peut  guérir.  Quel  péché,  je  vous  prie,  peut 
être  irrémissible,  puisque  Dieu  est  propice  à 

toutes  nos  iniquités,  ainsi  que  le  dit  le  Psal-     pmi.ch,  i, 

î»  y,  *• 
miste?Ou  pouvons-nous  croire  qu'il  y  ait  en 

nous  dos  maux  incurables,  puisqu'il  est  dit 
que  le  Seigneur  guérit  toutes  nos  langueurs? 
Peut-être  dira-t-on  que  ceux-là  peuvent  être 
sauvés,  qui,  après  avoir  commis  des  péchés, 
méritent  d'en  obteuii-  le  pardon  par  le  bap- 
tême ;  mais  que  les  péchés  que  l'on  commet 
après  avoir  reçu  ce  sacrement,  sont  irrémis- 
sibles. Mais  n'est-ce  pas  h  des  baptisés  que 
l'apôtre  saint  Jean  disait  dans  sa  première 
Épitre  :  Mes  petits  enfants,  je  vous  écris  ceci  uo  .n, 
afin  que  vous  ne  péchiez  point  ;  que  si  néan- 
moins quelqu'un  pèche,  nous  avons  pour  avocat 
envers  le  Père,  Jésus-Christ  qui  est  juste.  Car 
c'est  lui  qui  est  la  victime  de  pi'opitiation  pour 
nos  péchés.  Quelque  grand  que  soit  donc  le 
péché,  Dieu  peut  le  remettre  k  celui  qui  se 
convertit  ;  mais  celui-là  se  ferme  la  porte  de 
1  indulgence  qui  désespère  de  la  rémission 
de  ses  péchés.  » 

Ce  Père  fait  consister  la  conversion  du  pé- 
cheur dans  deux  choses,  savoir,  qu'il  espère 
le  pardon  en  faisant  pénitence  de  ses  péchés, 
et  qu'il  fasse  pénitence  de  ses  péchés  dans 
l'espérance  du  pardon.  «  Car  souvent,  dit-il, 
l'ennemi  du  salut  ôte  l'espérance  à  celui  qui 
se  repent,  ou  la  pénitence  à  celui  qui  espère 
le  pardon.  Judas  fît  pénitence  de  son  péché, 
et  toutefois  il  perdit  le  salut,  parce  qu'il  n'es- 
péra point  que  Dieu  lui  ferait  miséricorde.  Il 
y  en  a  d'autres  qui  ne  craignent  point  la  jus- 
tice de  Dieu,  parce  qu'ils  espèrent  tout  de 
sa  bonté.  Leur  espérance  est  vaine  ;  c'est  de 
ceux-là  que  l'Apotre  veut  parler  dans  son 
Épître  aux  Romains,  lorsqu'il  dit  qu'ils  seront 
justement  condamnés  pour  avoir  dit  :  Pou?--  Rom.  m,  s. 
quoi  ne  ferions-nous  pas  le  mal  afin  qu'il  en  ar- 
rive du  bien  ?  Il  est  donc  évident  que  la  péni- 
tence est  vaine,  lorsqu'on  désespère-  de  l'in- 


'  Hœc  charitas  ulii  hahitare  cœperit,  non  per- 
mittit  doiiiinari  peccatiim ,  sed  cooperit  mxiltitu- 
dinein  peccatorum  :  nec  solum  prœsentia  peccata 


facil  ritari,  quin  etiam  prœterita  facit  omnia  re- 
hurari.  Idem.,  Episl.  7,  pag.  190. 
'  His  indiciis  eiidenter  agnoscimus  inanitcr  ho- 


33 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


dulgence  ;  et  que  c'est  inutilement  que  l'on 
espère  la  rémission  de  ses  fautes,  lorsqu'on 

KtKii.iiii,  n'en  fait  pas  pénitence.  »  Il  prouve  par  le  té- 
moignage d'Ézéchicl,  qu'il  n'y  a  aucun  temps 
dans  la  vie  où  l'homme  ne  puisse  se  convertir; 
en  sorte  qu'on  peut  dire  que  la  pénitence  n'est 
jamais  tardive  devant'  Dieu  à  qui  tout  est 
présent,  le  passé  comme  le  futur.  Si  la  lon- 
gue durée  des  péchés  était  capable  de  vain- 
cre la  miséricorde  de  Dieu,  Jésus-Clirist  ne 
serait  pas  venu  dans  le  dernier  âge  du  mon- 
de pour  en  ôter  les  pécliés,  et  le  sauver.  Il 
apporte  en  preuve  de  la  miséricorde  de  Dieu 
la  parabole  du  Samaritain,  et  dit  que  comme 
il  n'y  a  aucune  plaie  '  incurable  à  notre  Mé- 
decin, il  n'y  a  aucun  temps  où  la  médecine  cé- 
lestepuisse  manquer.  Dieu  se  réjouit  toujours 
de  notre  conversion',  et  il  n'y  a  point  de 
temps,  pendant  que  nous  sommes  en  cette 
vie,  qui  ne  soit  propre  à  notre  conversion. 
C'est  ce  qui  parait  par  ces  paroles  de  la  se- 

II  pti.  m,  coude  Ëpitre  de  saint  Pierre  :  Le  Seigneur  n'a 
point  retardé  l'accomplissement  de  sa  promesse, 
comme  quelques-uns  se  l'imaginent  ;  mais  ilnous 
attend  avec  jMtieme,  ne  voulant  point  qu'au- 
cun jjérisse,  mais  que  tous  retournent  à  lui  par 
la  pjénitence.  Cela  parait  encore  par  la  para- 
bole du  père  de  famille  qui  envoya  des  ou- 
vriers ;\  sa  vigne,  à  diverses  heures  de  la 
journée,  qui  marcpient  les  divers  degrés  de 
l'âge  de  l'homme,  dans  lesquels  Dieu  nous 
invite  à  la  pénitence  en  différentes  manières, 
par  les  tribulations,  par  les  infirmités,  afin 
qu'ayant  abusé  de  la  sauté  du  corps  pour  pé- 
cher, nous  apprenions  à  nous  en  abstenir 
dans  l'infirmité.  Saint  Fulgence  met  une  dif- 
férence entre  posséder  les  biens  de  cette  vie 
et  les  recevoir,  et  entre  soullrir  les  maux  de 
cette  vie  et  les  recevoir.  «  Ceux-là  seuls,  dit- 
il,  reçoivent  Jes  biens  en  cette  vie  qui  en  font 
leurs  délices,  et  y  mettent  leur  félicité  ;  ceux- 
là  reçoivent  les  maux  en  cette  vie,  qui  les 
souffrent  en  patience  dans  la  crainte  de  Dieu, 
et  dans  l'espérance  des  biens  éternels.  Il  ne 
veut  pas  que  la  patience  de  Dieu  envers 


EpisL  8  ad 


nous,  nous  soit  un  motif  de  difféier  notre 
pénitence  ;  au  contraire,  il  nous  exhorte  à 
nous  convertir  au  plus  tôt,  sans  différer  de 
jour  en  jour,  de  peur  que  la  colère  de  Dieu 
ne  vienne  à  fondre  sur  nous  inopinément.  » 

§  MI. 
Livre  de  la  Foi  orthodoxe  à  Donat. 

1.  Donat,  à  qui  est  adressé  le  livre  de  la  ou»iiin<iu 
Foi  orthodoxe,  que  l'on  met  pour  la  huitième  imrt  \  d». 
lettre  de  saint  Fulgence,  était  un  jeune  hom-  "^^  "  " 
me ,  qui ,  après  s'être  appliqué  à  l'étude  des  "'• 
lettres  humaines ,  faisait  son  occupation  or- 
dinaire de  la  lecture  des  livres  saints.  11  y 
cherchait  à  nourrir  son  âme,  la  ferveur  de  sa 
foi  le  mettant  au-dessus  des  plaisirs  du  corps. 
S'étant  trouvé  avec  des  ariens ,  ils  lui  pro- 
posèrent un  argument  par  lequel  ils  préten- 
daient montrer  que  le  Père  est  plus  grand 
que  le  Fils.  Donat  qui  n'était  pas  encore  as- 
sez instruit  dans  la  science  des  divines  Écri- 
tures ,  ne  put  répondre  à  la  difficulté  ,  mais 
il  en  demanda  la  solution  à  saint  Fulgence. 

2.  Ce  Père  le  loue  d  être  demeuré  ferme 
dans  la  foi,  sans  s'être  laissé  ébranler  par  la 
force  d'un  argument  dont  il  n'avait  pu  don- 
ner la  solution  ;  et  pour  le  mettre  en  état  de 
répondre  dans  la  suite  aux  dilficuJtés  que 
les  hérétiques  pourraient  lui  faire  sur  les 
mystères  de  la  Trinité  et  de  l'Incarnation, 
il  lui  en  donne  une  explication  exacte. 
«  Croyez  ,  lui  dit-il ,  que  la  sainte  Trinité , 
c'est-à-dire  le  Père  ,  le  Fils  et  le  Saint-Es- 
prit est  un  vrai  Dieu  ;  qu'elle  est  d'une  seule 
nature ,  d'une  seule  essence ,  d'une  seule 
toute-puissance  ,  bonté  ,  éternité  et  immen- 
sité; en  sorte  que  lorsque  vous  entendez  dire 
un  seul  Dieu  Père,  Fils  et  Saint-Esprit,  vous 
conceviez  qu'il  n'y  a  qu'une  nature  dans  la 
Trinité  ;  et  lorsque  vous  entendez  nouuner 
la  Tiinité,  vous  reconnaissiez  que  les  trois 
personnes  du  Père ,  du  Fils  et  du  Saint-Es- 
prit sont  une  même  divinité.  Car  il  y  a  trois 
persoimes,  le  Père,  le  Fils  et  le  Saiut-Esprit  : 


ca  livre,  piç. 


minem  pwnitrre,  si  dum  pœnitentia  geritur.indul- 
grnUa  desperatur.  et  frustra  indulgentiain  sperari 
sinepeccalorumpœnilentia.  Fulg.,£'pi«<.  7,pag.l92. 

'  l'œnileutia  numquam  estnpud  Deum  sera  ,  in 
cujus  conspeclu  !:emper  pro  prœKcnlibus  hubcntur 
tani  prœterild  quani  futura.  IhiJ.,  pag.  I'j3. 

'  Sicut  crgo  medicn  nostro  nulla  est  incuriihilis 
plaga,  ita  nec  in  aliquo  vulnere,  nec  in  aliquo 
lempore  cœlestis  polesl  dcficere  niedicina.  IbiJ. 

'  Semper  aulem  dcleclalur  coniersione  nosira  , 


nec  tempus  hominis  quaindiu  in  hac  vita  est,  po- 
suit,  quo  propiliari  conversa  non  possit  :  imo 
tempus  omne  prœsentis  rilœ  contersioni  nnstrœ 
cugiwscitur  députasse.  Bcatus  eniin  Petrus  dicit  : 
Non  lardât  Dumiiiu;-,  etc.  lliiJ.,  pag.  194. 

'  Très  enim  persona"  suni ,  Pater  et  Filius  et 
Spiritu^  Sanclus:  idco  Trinilas  dicitur.  Sed  una 
substanlia  est  Patris  cl  Fitii  et  Spirilus  SancH: 
ideo  ipsa  Trinilas  unus  Deus  veraciler  a  fidclibus 
prœdicalur.  Fulg.,  L:pisl.  8,  pag.  198. 


[VI"  SIÈCLE.] 

c'est  pour  cela  que  l'ou  dit  Triuili;  ;  mais 
C(unnic  il  n'y  a  qu'une  substance  du  l'ère, 
du  Fils  et  du  Saint-Esprit ,  c'est  pour  cette 
raison  que  la  Trinité  est  appelée  vérilaljje- 
nient  un  seul  l)i(;u  par  les  lidèles.  (Ju'il  y 
ait  trois  personnes,  c'est  ce  que  l'iM-.rilnre 

^  Jom.  ïi.i,  ilit  clairement  :  Je  ne  suis  pas  seul,  dit  le  Sau- 
veur dans  saint  Jean,  mais  mon  Père  qtci  m'a 
envoijè  est  avec  moi.  Et  en  parlant  du  Sainl- 

iMti.  KIT,  Esprit,  il  dit  :  Je  prierai  mon  Pt't-e,  et  il  mus 
donnera  un  autre  amsolateur,  savoir,  l'Esprit 
de  vérité.  Il  a  commandé  aussi  que  l'on  bap- 
tisât les  nations  au  nom  du  Père  ,  du  FWs  et 
du  Sainl-l']sprit.  On  ne  peut  pas  dire  néan- 
moins qu'il  y  ait  trois  dieux,  i\  cause  de  l'u- 
nité de  nature  des  trois  personnes.  Et  parce 
qu'il  ne  peut  y  avoir  de  diversité  dans  la  na- 
ture de  la  Trinité,  c'est  pouniuoi  il  y  a  dans 
les  trois  personnes  une  égalité  suLstantielle, 
à  raison  de  l'unité  de  leur  nature ,  quoique 
chacune  ait  ses  propriétés  distinctes.  »  Saint 
Fulgence  rapporte  divers  passages  de  l'Écri- 
ture sainte,  pour  montrer  que  la  Trinité  est 
un  seul  Dieu.  Mais  parce  que  les  hérétiques 
soutenaient  que  ces  passages  ne  s'enten- 
dent que  d'une  seule  personne  ,  il  les  presse 
par  ces  raisonnements  :  «  La  loi  de  Dieu  ne 
permet  point  aux  fldèles  d'adorer  deux  dieux  : 
il  faut  donc  qu'ils  croient  que  le  Père  et  le 
Fils  ne  sont  naturellement  qu'un  seul  Dieu  ; 
ou  qu'ils  ne  reconnaissent  point  le  Fils  pour 
Dieu,  ou  qu'en  le  reconnaissant  pour  Dieu  , 
ils  refusent  l'adoration  au  Père.  » 

Comme  les  ariens  ne  niaient  point  la  di- 
vinité du  Père,  mais  seulement  celle  du  Fils, 
il  allègue  contre  eux  ces  paroles  de  saint  Tlio- 

joan.  xï,!8.  mas  :  Mon  Seigneur  et  mon  Dieu.  11  fait  encore 
un  autre  argument  :  «  Si  le  Fils,  dit-il,  n'é- 
tait point  un  seul  Dieu  avec  le  Père,  il  ne  se- 
rait point  de  la  même  nature  que  lui  ;  et  s'il 
était  d'une  autre  nature  ,  il  serait  indubita- 
blement créature.  Or,  s'il  était  créature,  l'É- 
criture sainte  ne  nous  commanderait  pas  de 
l'adorer.  Il  y  a  plus ,  c'est  qu'elle  le  nomme 
I  joan.  V,  expressément  Dieu:  Nous  savons,  nous  dit 
saint  Jean,  Cfie  le  Fils  de  Dieu  est  venu ,  et 
qu'il  nous  a  donné  l'intelligence,  afin  que  nous 
connaissions  le  vrai  Dieu ,  et  que  nous  soyons 
en  son  vrai  Fils  ;  c'est  lui  qui  est  le  vrai  Dieu 
et  la  vie  éternelle.  Il  suit  de  là  que  le  Fils, 
selon  sa  nature  divine  ,  n'est  pas  moindre 
qrie  son  Père,  mais  égal  au  Père,  parce  qu'il 


CHAPITRE  I.  —  S.\INT  FULGENCE  DE  RUSPE. 


33 


est  tellement  vrai  Dieu  que  le  Père  ne  l'est 
pas  davantage.  Mais  parce  que  le  Fils,  né  do 
la  nature  de  Dieu  le  Père,  est  aussi  né  de  la 
nature  de  la  Vierge,  sa  mère,  et  qu'en  con- 
s(''((u<Mue  il  est  vrai  Dieu  et  vrai  homme,  ou 
doit  dire  de  lui  qu'il  est  égal  au  Père  comme 
Dieu  ,  et  comme  homme  inférieur  au  Père. 
Il  lui  est  égal  selon  la  nature  dans  laquelle 
il  est  le  ci'éaleur  des  aiig(!s  ;  il  lui  est  infé- 
rieur selon  la  nature  dans  laquelle  il  est  le 
rédempteur  des  hommes.  » 

3.   (I  La  vraie  foi,  dit-il,  nous  enseigne     Sniiodeia- 
aussi  que  le  Saint-Esprit  est  Dieu.  Comment  2i«''  ' 
pourrait-on  le  nier,  puisque  le  l'rophète  lui    p>^'-"^"', 
attribue  la  création  de  toutes  choses,  et  que  iP";|<:"'  »»• 
l'Apôtre  déclare,  que  nous  sommes  le  temple  *• 
du  Saint-Esprit,  en  la  même  manière  ,  que    '  '"'■•'"i  m 

^  et  VI,  vj. 

nous  le  sommes  du  Père  et  du  Fils?  Comme 
nous  avons  été  faits  à  l'image  de  la  Trinité, 
le  Sauveur  a  voulu  que  nous  soyons  renou- 
velés dans  le  baptême,  au  même  nom  de  la 
Trinité.  Ainsi  c'est  le  même  Dieu  Père,  Fils 
et  Saint-Esprit,  qui,  par  sa  toute  puissante 
bonté,  crée  les  hommes,  et  justifie  les  pé- 
cheurs par  sa  miséricorde  toute  gratuite.  » 
Saint  Fulgence  reconnaît  qu'il  est  si  essen- 
tiel de  nommer  les  trois  personnes  de  la  Tri- 
nité dans  l'administration  du  baptême,  qu'il 
déclare  que  ce  sacrement'  serait  nul,  si  l'on 
omettait  le  nom  du  Fils  ou  du  Saint-Esprit. 
Voici  les  règles  qu'il  donne  àDonat,  pour  lui 
apprendre  à  distinguer  l'erreur  d'avec  la  vraie 
foi  :  «  Il  n'y  a,  dit-il,  qu'un  Dieu  en  trois  per- 
sonnes, dont  la  nature  est  la  même.  Si  donc 
vous  voyez  quelqu'un  confesser  l'unité  de 
nature  du  Père,  du  Fils  et  du  Saint-Esprit, 
mais  néanmoins  soutenir  qu'il  n'y  a  aussi 
quune  personne,  regardez-le  comme  un  hé- 
rétique sabellien.  Si  vous  en  trouvez  quelques 
autres  qui  confessent  tellement  trois  person- 
nes ,  qu'il  veuillent  aussi  qu'on  reconnaisse 
trois  natures,  ne  doutez  pas  qu'ils  ne  soient 
ariens.  Si  quelqu'un  confesse  que  la  na- 
ture du  Père  et  du  Fils  est  la  môme,  et  qu'il 
enseigne  que  celle  du  Saint-Esprist  est  diffé- 
rente, en  sorte  qu'il  avoue  que  le  Fils  est 
égal  au  Père,  et  qu'il  dise  que  le  Saint-Es- 
prit est  seul  moindre  et  inférieur,  celui-là 
est  infecté  de  l'hérésie  de  Macedonius,  et 
doit  être  rejeté  comme  hérétique  par  tous 
les  fidèles.  »  Il  ajoute  que  pour  ne  point  tom- 
ber dans  les  hérésies  des  manichéens,  des 


'  Mysterium  autem  redemptionis  humanœ  mdla 
ralione  per/lcilur,  si  in  baplisiiw   cet  Filii,  vel 

XI. 


tipiritiLS  Sancti  Vncabutum  subtrahatur.    Fulg., 
Lpist.  8,  piig.  205. 


34 


HISTOIRE  GENÉHALE  DES 


photiniens,  des  ariens,  des  nestorieiis,  et  des 
eutycbéeiis  sur  rincarnalion,  il  faut  recon- 
naître qu'il  y  a  deux  natures  en  Jésus-Clirist, 
iHiies  sans  confusion  en  une  scide  personne  ; 
de  manière  que  la  nature  que  le  Fils  a  du 
Père  n'est  point  confondue  avec  celle  qu'il  a 
prise  de  la  Vierge  ;  que  Jésus-Christ  n'a  ja- 
mais eu  deux  personnes,  parce  que  c'est  le 
même  Dieu,  lils  unique,  qui  est  né  du  Père  se- 
lon la  divinité  ',  et  d'une  Vierge  selon  la  chair. 

Ps.1.  uni,  «C'est  le  Verbe  Dieu,  dit  il,  qui  est  né  de 
Dieu,  et  le  Verbe  qui  étant  fait  chair  est  sorti, 
C'est  le  comme  un  époux,  de  sa  chambre  nup- 
tiale, même  qui,  ayant  conservé  la  propriété 
des  deux  natures,  a  été  crucifié  selon  la  fai- 

Hcor.  xiii,  blesse  de  la  chair,  et  qui  vil  par  la  vertu  de 
Dieu.  »  Il  exhorte  Douât  à  s'appliquer  à  la 
lecture  des  saints  Pères,  pour  se  confirmer 
de  plus  en  plus  dans  la  doctrine  de  la  foi. 

§  vni. 

Livre  contre  le  Sermon  de  Fastidiosm. 


Lettre  da 
Vicinr  X  faÏDt 
FulgeDCe,[^ag. 
£68. 


livre  À  Vicier, 
fiç.  3(0. 


Cap.  II. 


1.  On  rapporte  au  retour  de  saint  Fulgence 
dans  sou  Eglise  de  Ruspo,  après  la  mort  de 
Trasamond  qui  arriva  en  523,  son  livre  con- 
ti'c  un  arien  nommé  Fastidiosus.  Cet  homme 
avait  d'abord  été  moine,  et  ensuite  fait  prê- 
tre ;  mais,  ayant  quitté  la  vie  monastique  et 
les  fonctions  de  prêtre  pour  mener  une  vie 
licentieuse,  il  avait  aussi  abandonné  la  foi 
catholique,  et  s'était  jeté  dans  le  parti  des 
ariens.  Il  en  soutint  ouvertement  les  erreurs, 
jusqu'à  les  prêcher  publiquement.  Un  de  ses 
discoui's  étant  tombé  entre  les  mains  d'un 
nommé  Victor,  celui-ci  l'envoya  à  saint  Fid- 
gence  avec  une  lettre  très-humble,  dans  la- 
quelle il  le  priait  de  réfuter  Fastidiosus,  se 
recommandant  en  même  temps  aux  prières 
du  saint  évêque  ,  qu'il  savait  s'intéresser  de- 
puis plusieurs  années  à  son  salut. 

2.  Les  catholiques  assuraient  que  la  Tri- 
nité était  indivisilile  et  inséparable.  Fastidio- 
sus qui  les  ajjpelait  homousicns,  en  inférait 
qu'il  fallait  dire,  selon  eux,  que  toute  la  Tri- 
nité était  incarnée,  qu'elle  avait  soullort  la 
mort,  qu'on  l'avait  mise  dans  le  tombeau. 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

qu'elle  était  descendue  aux  enfers,  et  res- 
suscilée  le  troisième  jour.  Saint  Fulgence 
fait  voir  que  la  Trinité  est  indivisible  et  dans 
ses  opérations  et  dans  sa  nature.  «  Elle  est 
indivisible  dans  ses  opérations,  dit-il,  puis- 
que toutes  les  trois  personnes  opèrent  insé- 
parablement, aucun  ouvrage  n'ayant  été  fait 
parle  Père,  sans  que  le  Fils  et  le  Saint-Esprit 
ne  l'aient  fait  aussi.  »  Il  rapporte  sur  cela 
un  grand  nombre  de  passages  de  l'Écri- 
ture. Un  des  plus  précis  est  celui  où  Jé- 
sus-Christ dit  dans  saint  Jean  :  Tout  ce  giie 
le  Père  fait,  le  Fils  le  fait  de  même.  Or  on 
voit  par  un  autie  endroit ,  que  ce  que  le 
Fils  fait,  il  le  fait  dans  le  Saint-Esprit,  dans 
lequel  il  dit  lui-même  qu'il  chassait  les  dé- 
mons. La  Trinité  est  inséparable  dans  sa  na- 
ture, puisqu'elle  est  une.  Il  est  certain  d'ail- 
leurs que  Dieu  est  charité,  et  qu'il  y  aurait  de 
la  folie  à  dire  que  la  charité  est  séparable  , 
puisque  c'est  elle  qui  lie  d'un  amour  insépa- 
rable ceux  qui  étaient  divisés  auparavant. 
Ce  Père  montre  ensuite  qu'il  n'y  a  que  le 
Verbe  qui  se  soit  incarné,  dire  que  la  Tri- 
nité entière  s'est  fuite  chair,  ce  serait  tom- 
ber dans  l'hérésie  des  salelliens,  qui  n'ad- 
mettaient en  Dieu  qu'une  seule  personne  et 
une  seule  nature.  «  L'Église  catholique,  dit-il, 
divinement  inspirée  *  et  instruite  de  la  vé- 
rité de  la  foi,  enseigne  qu'il  n'y  a  qu'une  na- 
ture de  la  Tiinité,  mais  aussi  elle  sait  donner 
il  chaque  personne  ce  qui  lui  est  propre.  Or 
elle  croit  que  c'est  le  Fils  seul  qui  s'est  fait 
homme  pour  nous  racheter.  La  raison  en  est, 
que  le  Fils  a  pris  un  corps  et  une  ànie,  non 
dans  l'unité  de  nature,  mais  dans  l'unité  de 
personne,  qui  n'est  pas  la  même  dans  le  Fils 
que  dans  le  Père  et  le  Saint-Esprit.  Comme 
donc  l'unité  de  personne  n'a  pas  fait  qu'il  y 
eût  deux  personnes  en  Jésus-Christ,  quoi- 
qu'il y  eût  deux  natures,  elle  n'a  pas  non 
plus  rendu  l'Incarnation  commune  à  la  sainte 
Trinité.  L'Incarnation  est  bien  l'ouvrage  de 
la  Trinité  ;  mais  elle  est  particulière  à  la  per- 
sonne du  Fils  qui  s'est  revêtu  seid  de  la 
chair.  »  Pour  donner  quelque  jour  à  ce  rai- 
sonnement, saint  Fulgence  dit,  qu'il  est  claii* 


Join.  T,  19. 


Cap.  IT. 


*  Non  confunditur  natura,  quant  Dei  Filius  ha- 
belex  Pâtre,  cuni  ea  nalura  quam  idem  Drus 
snmpsit  ex  Virgine.  Sed  nec  haliuit  Cliristus  duas 
aliqitnndo  pemonas,  quia  idem  Dfus  unigenilus  et 
sccundum diviuilatem  nains  esl  de  Paire,  cl  secun- 
dum  C'irnem  firoccssil  ex  Virgine.  Et  qui  y,erbuin 
Deux  7ialus  eut  de  Deo,  idem  Verbum  caro  facinm 
lanquaiu  sponsus  processil  de   tlialamo  siio.   Ipse 


unus  quiscrcata  utriusquepropriclate  natura; ;  et 
cnicifixiis  est  ex  iiirirmilale,et  vivil  ex  virlute  Dei. 
Fulg.,  Epist.  8,  piif;.  2(17. 

'  Catliolica  vero  Ecclesia,  divinilus  inspirala, 
teneiis  fîdei  verilalem,  sicut  norit  unam  ualuram 
sanclœ  Trinilatis  assercre,  ita  caulissime  sua  Iri- 
bnil  unicuiquc  personiF.  Fiilg.,  lib.  Contra  Fasli- 
diosuHi,  cap.  II. 


[VI'  SiÈttE.] 

(juc  l'unitë  de  nature  et  la  trinité  do  per- 
sonnes en  Dieu,  sont  niaM|iii''es  dans  ces  pa- 
Gones  I.  :c.  rôles  de  la  Gcni^-so  :  faismis  r/imnme  à  notre 
ii)iiif/c  et  rcssoii/ilaiice,  l'écrivain  sacré  ayant  à 
dessein  nicMé  le  sinyulioravec  le  pluriel,  l'un, 
pour  sij;niiier  l'unité  de  nature  dans  Dieu  , 
l'autre,  la  pliualilé  de  peisonnes.  L'imasc 
selon  laquelle  l'hounuc  a  (Hé  formé  uiarcjue 
l'iioiuuie  intérieur,  qui  renferme  trois  choses 
naturellement,  savoir  la  mémoire,  l'intel- 
ligence et  la  volonté  ;  et  encore  que  ces 
trois  clioses  ne  soient  pas  des  personnes 
subsistantes,  elles  se  trouvent  néanmoins  dis- 
tinguées l'une  de  l'autre.  L'application  qu'il 
fait  de  cet  exemple,  est  comme  la  pensée, 
qu'il  ap[)clle  notre  verbe,  a  besoin  pour 
être  manifestée  au  dehors  du  son  de  la  voix 
corporelle  :  de  même  le  Verbe  divin  a  été 
fait  chair,  pour  pouvoir  être  vu  des  yeux  du 
corps  et  manié  des  mains;  et  de  même  que 
la  voix,  dont  le  verbe  intérieur  est  com- 
me revêtu,  lui  est  propre,  quoique  les  au- 
tres facultés  de  l'âme  aient  part  à  sa  mani- 
festation ;  ainsi  le  Fils  de  Dieu  s'est  seul  in- 
carné, quoique  l'Incarnalion  soit  l'ouvrage  de 
toute  la  Trinité.  «  C'est,  dit-il,  le  Fils  seul  qui, 
dans  la  chair  qu'il  a  prise,  a  soutfert,  a  été 
mis  dans  le  tombeau,  et  est  ressuscité.  Uien 
de  tout  cela  ne  peut  se  dire  du  Père  ni  du 
Saint-Esprit,  parce  que  la  personne  du  Fils 
n'est  pas  la  même  que  celle  du  Père  et  du 
Saint-Esprit.  »  Saint  Fulgence  ajoute,  que, 
si  Fastidiosus  n'avait  pas  misérablement 
abandonné  cette  foi,  il  pourrait  encore  espé- 
rer le  salut  ;  mais  que  l'ayant  niée  et  de  vive 
voix,  et  par  ses  actions,  il  n'était  pas  surpre- 
nant que  ,  corrompu  dans  ses  discours  et 
dans  sa  conduite,  il  fût  devenu  rcanemi  de 
la  lumière. 

§  IX. 

Lettre  de  saâit  Fulgence  ri  Scwilas ,  et  à 
Ferrand,  diacre. 

Leiiro  do  1.  Un  nommé  Scarilias  s'élant  trouvé  à  ta- 
Mini  Fuigcn-  ble  chez  im  catholique  ,  qui  s'appelait  Even- 
tus,  la  matière  de  la  conversation  tomba  sur 
le  mystère  de  l'Incarnation.  Un  de  la  compa- 
gnie avança  que  ce  n'était  pas  le  Père,  mais 
le  Fils  qui  s'était  incarné.  Un  autre  dit  en 
général  qu'un  Dieu  en  trois  personnes  s'é- 
tait fait  chair  pour  nous  délivrer  de  la  servi- 
tude à  laquelle  nous  avions  été  réduits  par 
la  prévarication  d'Adam.  Après  qu'on  eût 
fini  sur  cette  matière,  mi  trcisièuie  •li'  qne 


CHAPITRE  I.  —  SAINT  FULGENCE  DE  RUSPE. 


35 


ce  n'était  pas  Dieu  qui  avait  créé  les  mou- 
ches, les  scorpions,  ni  les  autres  animaux 
venimeux;  mais  (|u'ils  élaieid  l'ouvrage  du 
di'-nion  depuis  sa  élude.  Tout  le  monde  s'op- 
posa à  celte  proposition ,  et  il  fut  convenu 
que  l'on  consulterait  saint  Fulgence ,  tant 
sur  cet  article,  que  sur  celui  de  l'Incarna- 
tion. Scarilas  lut  chargé  d'en  écrire  au  saint 
évoque ,  qui  lui  répondit  par  un  livre  qui 
est  intitulé  de  l'Incarnation  du  Fils  de  Dieu. 

2.  Saint  Ful"ence,  après  y  avoir  établi  les  „ /  uwçdo 

•-  .  ,      ,       riDcarn«lioD, 

mêmes  principes  que  dans  le  livre  precé-  p"6.*«ii. 
dent ,  décide  que  c'est  du  Fils  seul  que  l'on 
doit  dire  qu'il  s'est  incarné,  et  que  c'est  pour 
cela- que  l'Évangéliste  saint  Jean  a  dit  :  Nous  '""•  '■  "• 
avons  vu  sa  gloire  comme  du  Fils  unique  du 
Père,  étant  plein  de  grâce  et  de  vérité.  Le  Fils 
dit  lui-même  :  Dieu  a  tellement  aimé  le  mon-  Join.n'.i». 
de  qu'il  a  donné  son  Fils  unique ,  a finque qui- 
conque croit  en  lui  ne  périsse  point ,  mais  qu'il 
ait  la  vie  éternelle.  Car  Dieu  n'a  pas  envoyé  son 
Fils  dans  le  monde  pour  condamner  le  monde , 
mais  afin  que  le  monde  soit  sauvé  par  lui.  Ce- 
lui qui  croit  en  lui  n'est  pas  condamné,  mais 
celui  qui  ne  croit  pas  est  déjà  condamné,  parce 
qu'ilne  croit  pas  ati  nom  du  Fils  unique  de 
Dieu.  Le  Sauveur ,  comme  le  fait  remarquer 
saint  Fulgence,  se  nomme  trois  fois  Fils  en 
cet  endroit,  et  deux  fois  Fils  unique.  Il  assui'e 
en  même  temps  qu'il  a  été  envoyé  du  Père 
pour  sauver  le  monde.  «  Si  la  Trinité  ,  dit-il , 
fût  venue  elle-même  dans  la  chair,  le  Fils  ne 
se  dirait  pas  envoyé  du  Père.  Or  Jésus-Christ 
n'a  pu  mentir  :  il  faut  donc  croire  que  dans  la 
Trinité  une  personne  a  envoyé,  c'est-à-dire 
le  Père,  et  que  l'autre  a  été  envoyée,  c'est-à- 
dire  le  Fils.  Le  Père  a  envoyé  la  vérité  qu'il 
a  engendrée  ;  il  a  envoyé  la  sagesse  dans  la- 
quelle il  a  fait  toute  chose  ;  il  a  envoyé  le  Ver- 
be qu'il  a  produit.  »  Saint  Fulgence  veut  que 
l'on  distingue  deux  avènements  dans  le  Fils 
de  Dieu,  disant  qu'il  vient  autrement  lorsqu'il 
est  envoyé  du  Père,  et  autrement  lorsqu'il 
vient  avec  le  Père.  «  Lorsqu'il  vient  envoyé  du 
Père,  dit-il,  c'est  dans  une  nature  cjui  le  rend 
inférieur  au  Père,  et  même  un  peu  au-dessous 
de  la  nature  des  anges,  c'est-à-dire,  dans  la 
nature  humaine,  et  il  n'a  été  envoyé  qu'une 
seule  fois  de  cette  sorte  pour  la  rédemption 
du  genre  humain.  Mais,  lorsqu'il  vient  avec 
le  Père,  il  est  égal  au  Père,  et  on  ne  peut  dire 
combien  de  fois  il  est  venu  en  cette  manière, 
parce  qu'on  ne  peut  les  nombrer.  C'est  de  cet 
avènement  que  le  Fils  dit  dans  saint  Jean  :5«  Jû,h.  ut 
quelqu'un  m'aimr,  il  gardera  ma  parole,  et  mon 


HISTOIRE  GENERALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Sotte  da  lU 
rro  de  l'Iaur- 


Jmq.  1, 1,9, 


36 

Père  l'aimera,  et  nous  ciendronsù  lui  et  nous  fe- 
rons en  lui  notre  demeure.  Le  Saint-Esprit  est 
venu  aussi  sous  la  forme  d'une  colombe  ; 
mais  il  ne  lui  a  pas  été  uni  personnellement, 
n'ayant  pas  été  fait  colombe,  comme  le  Fils  a 
été  fait  chair.  La  figure  de  la  colombe,  sous 
laquelle  il  a  apparu  marquait  que  c'était  par 
lui  que  nous  devions  recevoir  la  charité , 
comme  ce  don  fut  marqué  dans  la  suite  par  les 
lang:ues  de  feu ,  sous  lesquelles  il  apparut  le 
jour  de  la  Pentecôte.  Si  la  Trinité  s'était  faite 
chair,  comme  par  la  participation  de  la 
chair  nous  sommes  faits  fri'res  de  celui  qui 
est  fait  chair,  dès  loi-s  nous  ne  serions  pas  seu- 
lement les  enfants  de  Dieu  le  Père,  mais  en- 
core les  frères  de  toute  la  Trinité.  C'est  une 
giande  absurdité  de  dire  que  le  Père  est  né 
dans  le  temps,  lui  à  qui  il  est  propre  de  tou- 
te éternité  de  n'être  point  né,  et  d'avoir  en- 
gendré. Il  est  donc  de  la  vraie  foi  de  croire 
que  ce  n'est  ni  le  Père  ,  ni  le  Saint-Esprit , 
mais  le  Fils  seul,  qui,  né  de  Dieu  le  Père,  est 
aussi  né  seul  de  la  Vierge  Marie.  Llncarna- 
tion  ne  lui  est  point  commune  avec  le  Père 
et  le  Saint-Esprit ,  quoique  d'une  même  na- 
ture, parce  que  la  personne  du  Fils  n'est 
point  commune  au  Père  et  au  Saint-Esprit.» 
Saint  Fulgence  dit  en  termes  exprès  que  le 
Saint-Esprit'  procède  du  Père  et  du  Fils,  et 
qu'il  lui  est  propre  de  n'avoir  point  engen- 
dré et  de  n'être  pas  né. 

3.  Sur  la  seconde  question  ce  Père  dit, 
que  l'Écriture  nous  assurant  que  Dieu  a  fait 
toutes  choses,  et  que  rien  n'a  été  fait  sans  lui, 
il  faudrait  donner  un  démenti  à  l'écrivain  sa- 
cré, si  l'on  voulait  soutenir  que  les  mouches, 
les  scorpions  et  autres  insectes  ne  sont  point 
l'ouvrage  de  Dieu.  »  C'est,  dit-il,  Dieu  qui  a 
formé  lui-même,  dans  le  temps  de  la  création, 
tous  les  animaux  que  la  terre  et  les  eaux 
produisent ,  comme  il  a  fait  les  cieux  ,  la 
terre  et  tout  ce  qu'ils  contiennent.  »  Il  mon- 
tre par  l'assemblage  des  parties  du  scorpion 
qu'il  n'a  rien  qui  ne  puisse  tourner  à  la  louan- 
ge du  Créateur;  que  le  venin  même  qu'on 
attribue  à  cet  animal  devrait  servir  de  leçon 


aux  hommes,  en  les  faisant  souvenir  qu'ils 
ne  sont  blessés  des  animaux  que  par  une 
suite  de  la  peiue  due  à  leurs  transgressions  ; 
que  cela  parait  visiblement ,  en  ce  que  les 
animaux  à  quatre  pieds,  les  plus  grands  et 
les  plus  forts,  comme  sont  les  chameaux, 
les  chevaux,  les  bœufs,  et  les  éléphants, 
sont  encore  soumis  à  l'homme,  tandis  qu'il 
est  quelquefois  ému  et  ébranlé  lui-même  par 
la  morsure  d'un  petit  insecte  qu'il  pourrait 
facilement   écraser  de   deux  doigts.   Saint 
Fulgence  dit  donc  qu'il  n'y  a  aucune  na- 
ture mauvaise,  soit  qu'elle  soit  animée ,  soit 
qu'elle  ne  le  soit  pas.  Qu'A  l'égard  des  in- 
sectes qui    s'engendrent   de   la    corruption 
des  chairs  et  des  fruits ,  on  peut  dire  que 
Dieu  ne  les  a  pas  formés  dans  les  six  pre- 
miers jours  de  la  création  .  mais  qu'il  a  don- 
né l'être  aux  choses  dont  ils  devaient  ensui- 
te être  formés.  Il  met  cette  diÛ'érence  entre 
les  péchés  des  justes  et  ceux  des  méchants, 
que  ceux-là  se  font  par*  la  nécessité  de  l'in- 
firmité, au  lieu  que  les  autres  sont  l'ellet  d'une 
mauvaise  volonté.  «  Dans  les  justes,  dit -il,  la 
volonté  de  pécher  n'est  pas  suivie  de  l'eflet  ; 
si  le  désir  du  péché  nait  d;ins  eux  par  infir- 
mité ,  il  est  surmonté  par  la  grâce  de  Dieu.  Les 
méchants,  au  contraire ,  privés  du  secours  de 
la  grâce,  divine  sont  précipités  par  leur  mau- 
vaise volonté  où  leur  mauvaise  cupidité  les 
entraîne.  C'est  pour  cela  que  les  fautes  des 
saints  sont  appelées  des  péchés ,  et  non  pas 
des  crimes,  péchés  pour  lesquels  ils  sont  tel- 
lement repris  et  châtiés  par  le  Père,  qu'ils  ne 
sont  point  condamnés  par  le  Juge.  Ce  n'est 
pas  que  la  correction  ne  soit  une  suite  du  ju- 
gement, mais  c'est  la  suite  d'un  jugement 
paternel,  par  lequel  Dieu  juge  et  châtie  mi- 
séricordieusement  ses  enfants  pour  les  sous- 
traire au  supplice  de  la  damnation  éternelle.» 
Il  compte  pour  un  péché  de?  justes  le  rire  de 
Sara,  qui  marquait  qu'elle  doutait  de  la  pro- 
messe que  l'Ange  lui  avait  faite  qu'elle  au- 
rait un  tils  ;  et  pour  un  crime  des  méchants 
l'orgueil  d'Agar  envers  sa  maîtresse. 
4.  Le  diacre  Ferrand  proposa  à  saint  Ful- 


Leiir»  t 


•  Proprium  est  Spirilus  Sandi  quod  nec  genuit 
ipse  necnatus  est.  Sed  de  genilore  geniloque  pro- 
cedil.  Fuit;.,  lib.  De  Incarnat.,  pag.  107  et  -408. 

'  Peccata  justorum  sunt  ex  nece-^sitateinfirmi- 
talis;  peccata  iniquorum  sunt  ex  inlentione  pessi- 
mœvoluntalis.  In  illis  .<tic  peccati  reperilur  esor- 
tus,  ut  non  subsequalur  effeclus.  Quia  ,  elSi  per 
infirmitalcm  nascilur,  ]ier  Dei  gralinm  superalur. 
Illos  auteni  gratiœ  privalos  auxilio,  précipitât 


mala  voluntas  quo  duxerit  prava  cupiditas.  Idto 
culpœ  snnclorum  peccata  dicuntur  esse,  non  cri- 
mina,  pro  qiUbus  sic  corripiuntur  a  Paire  et  non 
condemnanlur  a  Judice  :  quœ  taiiien  correptio 
perlinel  ad  judicium,  sed  pntermtm.  quo  Deus  /S- 
tio^  suos  miseticordiler  et  judicnt  et  flagellai,  eos 
a  supplicio  sempilcrnœ  damnaiionis  cripiat.Fulg., 
lilii  De  Incarnat.,  piig.  427. 


[Vl'  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  I.  —  SAINT  FULGENCE  DE  RUSPE. 


37 


p:cncc  uno  question  an  sujet  du  hiiplt-mo  d'im 
lOthiopion,  iY  celto  occasion.  Un  joun(i  liom- 
nic  de  cette  nation,  esclave  d'un  clircMicn ', 
venu  des  exti'(5uiitus  d'une  province  iiaibaro 
où  il  n'avait  ni  reçu  le  bapICme,  ni  été  dclai- 
ré  des  lumières  de  la  i,'râc(!  de  J('sus-Chrisl, 
avait  depuis  éïé  instruit  dans  la  relifiion  par 
les  soins  de  ses  maîtres  ;  on  l'avait  mené  à 
l'Eglise,  et  mis,  selon  la  coutume,  an  rang 
des  catliécura^nes.  Aux  approches  de  la  fêle 
de  l';\qnes,  il  fut  inscrit  entre  les  compétents, 
reçut  toutes  les  instructions  qui  regardent 
nos  mystères,  fut  exorcisé  après  le  scrutin 
solennel,  renonça  au  démon  ,  suivant  qu'il 
était  d'usage,  apprit  le  Symbole  parc(eur  cl 
le  récita  tout  haut  devant  le  peuple.  Après 
quoi  on  lui  donna  la  formule  et  l'explication 
de  l'Oraison  dominicale.  Instruit  de  tout  ce 
qu'il  devait  croire ,  et  comment  il  devait 
prier,  on  le  préparait  au  baptême,  lorsqu'il 
fut  saisi  d'une  grosse  fièvre.  Mais  comme  il 
restait  pou  de  jours  jusqu'au  Samedi-Saint, 
cjuoique  la  lièvre  augmentât  jusqu'à  le  met- 
tre en  danger  de  mort,  on  le  garda  pour 
être  baptisé  avec  les  autres.  A  l'heure  du 
baptême  solennel  il  fut  porté  à  l'Église,  pour 
y  être  régénéré  et  recevoir  une  vie  nouvelle. 
Mais  comme  il  n'avait  plus  ni  voix  ,  ni  mou- 
vement, ni  connaissance,  et  qu'il  ne  pou- 
vait répondre  aux  interrogations  du  prêtre  , 
on  répondit  pour  lui,  comme  on  fait  pour  les 
enfauts.  Il  reçut  donc  le  baptême,  et  mourut 
peu  de  temps  après,  sans  qu'il  donnât  aucun 
signe  de  connaissance  qu'il  eût  reçu  ce  sa- 
crement. i(  Je  demande  ,  dit  Ferrand  à  saint 
Fulgeuce,  ce  que  l'on  doit  penser  de  son  sa- 


lut? N'est-ce  pas  un  obstacle  pour  lui  h  la  vie 
éternelle  d'avoir  été  privc'^  de  l'usage  de  la 
voix?  Car  je  ne  vois  pas  comment  uno  per- 
sonne en  âge  de  raison  peut  être  justifiée 
par  la  confession  d'autrni,  cela  ne  convient, 
ce  me  seinltle,  qu';uix  enfants  qui  n'ont  que 
le  péclni  originel.»  A  celte  question  Ferrand 
en  ajoute  une  autre ,  savoir  si  cet  Éthiopien 
eût  été  sauvé,  quand  même  il  n'aurait  pas 
reçu  le  baptême;  ce  qu'il  avait  fait  précé- 
demment pouvant,  ce  semble,  lui  mériter 
la  grâce  de  l'expiation.  Il  demande  encore 
pourquoi  l'on  ne  baptisait  point  les  morts , 
dont  la  foi  et  la  dévotion  pour  le  baptême  ont 
ét('  connues  pendant  leur  vie,  et  qui  n'ont  pas 
recule  baptême  parce  qu'une  mort  précipitée 
les  a  enlevés  de  ce  monde.  Il  demande  enfin 
s'il  ne  nuisait  point  aux  baptisés  de  ne  pas 
manger  la  chair  du  Seigneur,  ni  de  ne  pas 
boire  son  sang,  quand  ils  mouraient  subite- 
ment entre  le  baptême  et  la  communion ,  le  j<„„,  „,  u. 
précepte  du  Sauveur  étant  précis  :  Si  vous  ne  mn.  xri, 
mangez  la  chai?-  du  Fils  de  l'homme,  et  ne  bu- 
vez son  sang,  vous  n'aurez  point  la  vie  en  vous. 
5.  Saint  Fulgence,  avant  de  répondre  à 
la  première  question  ,  montre  par  l'autorité 
de  l'Écriture,  que  la  foi  dans  les  adultes  doit 
précéder  le  baptême,  et  que,  soit  qu'ils 
soient  baptisés ,  soit  qu'ils  meurent  sans  l'a- 
voir été,  ils  seront  indubitablement  condam- 
nés, s'ils  n'ont  pas  cru.  Sur  ce  principe  il 
déclare  que  non-seulement  ceux-là  seront 
damnés  qui  meurent  sans  baptême ,  mais 
encore  tous  les  hérétiques;  parce  qu'encore 
qu'ils  aient  été  baptisés  selon  la  forme  de 
l'Église ,  ils  n'en  ont  pas  la  foi  ;  celle  qu'ils 


BépoDse  h 
la  pramlèra 
question. 


1  Religiosi  cujusdam  viri  famulus ,  œtate  ado- 
lescens,  colore  Mlhiops,  ex  uUimis  credo  barba- 
rœ  provinciœ  partibiiit,  xibisicco  solis  igneicalo- 
re  fascanlur,  addiiclus,  salutaris  lavacrinecdum 
fuerat  aspergine  mundalus.  aut  micante  Chrisli 
gratia  dealbatus.  Hic  ergo  dominorum  ftde- 
lium  diligentia,  sacramentis  ecclesiasticis  im- 
buendus ,  ad  Ecclesiam  traditur;  fit  ex  more  ca- 
tkecumenus.  Post  aliquanluin  nihilominus  tem- 
poris,  propinquante  solemnUate  Paschali,  inter 
competenles  offerlur,  scribitur,  eruditur.  Univer- 
sa  quoque  religionis  catholicœ  reneranda  mys- 
teria  cognoscens  atque  pcrcipieiis,  celebraio  so- 
lemniter  scrutinin  perexorcismum  contra  diabo- 
lum  vindicatur;  cui  se  renunliare  conslanler, 
fient  hic  coiisuetudi  poscebat,  auditiirus  Symbo- 
lum  profitetur.  Ipsa  iiisriper  sancti  Syinboli  verba 
memoriter  in  conspectii  fidelis  populi  clam  i-oce 
pronuntians ,  piatti  regulam  Doininicœ  orationis 
accepit.  Simulqtie  jnm  et  quid  crederet,  et  qnid 
oraret  intelligcns  ,  (xUxiro  baptismali  parabatur, 


cum  subito  violentis  invaditur  febribus  et  crescente 
lethali  infirmitate  turbatur.  Persuasit  dierum, 
brevitas  ut  ad  fontem  cum  cœteris  abluendus  dif- 
ferretur,  sive  potius  servaretur.  Hora  exoptata 
cunctis  advenerat  in  qiia  populus,  acquisitionis 
Redemptori  suo per  baptismum  consepultus,  vitam 
veterem  poneret  et  novam  resurrectionis  fidem 
innovatus  assumerct.  Tune  ille  in  extremô  halilu 
constitutus,  sine  voce,  sine  motu,  sine  sensu,  nihil 
valens  sacerdoti  interroganti  respondere,  defe- 
renlium  manihus  adportatur  ;  et  pro  eo,  v obis  quasi 
pro  infante  respondentibus,  mente  absentissimus 
accepit  baptismum,  qucm  se  accepisse,  post  pau- 
lulum  mortuus,  in  hac  prœsenti  arbitror  vita, 
nescieit.  Quœso  nunc  xilrum  nihil  ad  œternam 
beatitudincm  consequendam  vox  ablata  nocuerit... 
quomodo  namque  potuerit  œtas  illa  rationis  ca~ 
pax  aliéna  confessione  purgari,  non  video.  Nonne 
solos  parvulos  rite  credimus  offerentium  fide  sal- 
vari,  quos  originali  lantinn  novimus  iaiquitate 
damnari?  Ferrandus,  Epist.  11  adFulg, 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


38 

ont  n'dtanl  qu'une  foi  feinte,  et  la  charité 
n'étant  pas  en  eux  ;  c'est  pourcpioi  ils  ne  peu- 
vent être  appelés  fidèles ,  étant  plutôt  enne- 
mis de  rÉtîlise.  Ce  Père  décide  ensuite  que 
l'on  ne  peut  douter  du  salut  du  jeun(>  Ktliio- 
pien  :  ayant  eu  la  fui  et  le  sacrement  du 
baptême,  il  en  avait  aussi  reçu  l'eti'et.  «  Sa 
foi,  dit-il,  avait  précédé;  il  l'avait  confes- 
sée publiquement  eu  prononçant  le  Symbo- 
le. Rien  n'a  donc  pu  empêcher  qu'il  ne  reçut 
l'etlet  de  ce  sacrement  qui  consiste  dans  la 
régénération.  La  perte  de  la  parole  ne  lui  a 
pu  nuire,  puisqu'il  n'avait  pas  changé  de  sen- 
timent, n  Saint  Fulgence  apporte  en  exem- 
ple le  baptême  de  l'eunuque  de  la  reine  de 
Candace.  «  Tout  ce  que  le  diacre  Philippe  de- 
manda de  lui,  dit-il,  fut  de  croire  de  tout  son 
cœur.  La  confession  de  foi  de  l'eunuque  pré- 
céda, et  aussitôt  le  diacre  lui  administra  le 
baptême.  Pourquoi  donc  la  perte  '  de  la  parole 
aurait-elle  nui  à  ce  jeune  Éthiopien,  puis- 
qu'il l'heure  du  baptême  on  ne  devait  plus 
l'interroger  sur  la  foi  qu'il  avait  auparavant 
confessée,  en  récitant  le  Symbole?  La  con- 
fession des  autres,  continue  saint  Fulgence , 
ne  lui  aurait  servi  de  rien  à  cet  âge  ',  si  la 
sienne  n'avait  précédé  ;  au  lieu  qu'elle  lui 
a  servi',  parce  que  la  charité  de  ses  frères  a 
achevé,  en  répondant  pour  lui,  ce  qu'il  avait 
commencé  lui-même ,  en  croyant  et  en  con- 
fessant publiquement  sa  foi.  Comme  donc  il 
a  cru  quand  il  connaissait,  et  qu'il  a  reçu  le 
sacrement  étant  encore  en  vie,  quoique  sans 


Bom.  T,  It. 


Bépome 
Il        B«cooâe 


connaissance,  nous  disons  sans  crainte  qo'il 
est  sauvé  :  parce  que  telle  est  la  vertu  du  sa- 
crement de  baptême ,  qu'elle  elTace  non- 
seulement  le  péché  originel,  mais  encore 
tous  les  autres  péchés  commis  avant  cet 
régénération.  C'est  ce  que  dit  saint  Paul  : 
Par  le  jugement  de  Dieu  nous  avons  été  con- 
damnés pour  un  seul  péch'\  au  lieu  que  nous 
sommes  justifiés  par  ta  grâce  après  plusieurs 
péchés;  et  c'est  aussi  la  foi  des  fidèles,  aucun 
ne  doutant'  que,  le  péché  originel  étant  re- 
mis dans  le  baptême ,  les  péchés  de  la  vo- 
lonté propre  ne  soient  aussi  elTacés.  » 

6.  Sur  la  seconde  question  saint  Fulgence 
répond ,  qu'encore  que  cet  Éthiopien  eût  eu  <i"«»uon 
la  foi,  il  n'aurait  pas  été  sauvé  s'il  n'eut  reçu 
le  baptême,  parce  que  Jésus-Christ  nous  de- 
mande l'un  et  l'autre  pour  le  salut.  «Le  che- 
min, dit-il,  qui  conduit  est  la  confession  de  la 
foi  ',  mais  le  salut  est  dans  le  baptême.  Or , 
comme  dans  cet  âge  la  foi  ne  lui  aurait  servi 
de  rien  sans  le  baptême,  de  même  le  bap- 
tême lui  aurait  été  inutile  s'il  n'eût  pas  eu  la 
foi ,  et  s'il  ne  l'eût  confessée.  » 

7.  Il  dit  sm-  la  troisième  question  :  «  Nous 
ne  baptisons'  point  les  morts,  parce  que  tout  i<""""' 
péché,  soit  originel,  soit  actuel,  se  trouvant 
commun  à  l'àme  et  à  la  chair  ,  aucun  n'est 
remis  si  l'àme  est  séparée  de  sa  chair  , 
parce  que,  selon  saint  Paul,  chacun  doit  être 

jugé  suivant  ce  qu'il  a  fait  dans  son  corps , 
soit  le  bien,  soit  le  mal.  D'ailleurs  la  chair  ne 
peut  point  être  baptisée  sans  l'âme,  parce  que 


B^pooM  i 
U      lroi>iime 


'  Kon  hoc  vtique  fuit  hora  baptismatis  interro- 
gamlus,  quod  esl  anlea  in  Symboli  proniintia- 
lifiiie  confessus.  Hihilitaquc  illi  ad  œternain  bea- 
titudinem  consequ  ndam  vox  ablala  nocuit,  qui 
qu'tmdiu  potuil,  in  ipsa  fidei  confessione  perman- 
sit.  Fulg.,£|)iS<.  12,  pag.  221. 

*  Ideoisiiim  recte  dicimus  sine  dubitatione  sal- 
valum.  quia  et  intclligens  credidil,  et  quod  cre- 
didit  propria  confessione  firmavit  :  et  deinde  quam- 
vis  jam  non  intelliyens,  tamen  adliuc  vivens,  sa- 
cramentuni  sanctœ  regeneralionis  accepit.  Nam 
per  sancti  baptismatis  sacramentum,  illa  vita  est, 
peccttti  originalis  ne-Tibus  absoluta,  quœ  fucrat 
cjusdem  peccati  rinculis  obligala.  Et  quia  fanlu 
esl  virtus  sancti  baptismatis  ut  ubi  vitam  inre- 
nerit  in  qua  illud  originalis  peccati  vinculum 
solval,  omniaque  super  adjecta  repereril,  secun- 
dtp  nalii-iliitis  bene/icio  diluât,  juita  illud  Apos- 
toli  :  Àsnm  }\\(\\(Àam  ex  uao  in  conilcmnatioiicm, 
grati-T  aulem  ex  nuillis  delictis  in  jnslificnliono. 
digneillum  crcdimus'esse salvatum.  lliid.,  pag.  222. 

'  Illo  autem  originnli  peccain  dimisso,  (uncta 
peccata,  quœ  propria  rnluntale  conlra.rcrat,  di- 
missa  fuisse  nemo  fldelium  dubitat.  Fulg.,  Epist. 
12,  pag.  223, 


*  Via  salutis  fuit  in  confessione ,  salus  in  bap- 
tismale. Aani,  in  illa  œtale,  non  sulum  ei  con- 
fessio ,  sine  baptismale,  nihil  prodesset,  sed  nec 
ipsum  baptisma  non  credenti  neque  confitenti  nul- 
latenus  pro/iceret  ad  salulcm.  Ibid. 

'  Jlortuos  aulem  propterea  non  baptisamus , 
quia  omnc peccdlu m  sive  originale  sire  actuale, 
quia  simul  esl  aniinœ  cantique  commune,  nihil 
eorum  dimitlitur  si  n  sua  carne  anima  separetur: 
Onines  enira  nos  uianifestari  oportet  ant«  tribunal 
Christi,  ut  recipial  uuusquisque  propria  corporis 
proulgessit,  sive  bouiiin  sivc  nialum.  Caro  quoque 
sine  anima  non  potest  baptizari,  quia  nec  re- 
missionem  peccalorum  accipere,  nom  res  quœ 
non  vivit,  sicul  peccare,  ita  pœnitenliam  peccati 
hnbere  non  potest...  Igitur  et  si  fuit  cujusquam 
fiventis  volunlas  fidelisque  devolio;  qui  tamen 
defunrlus  est  sine  bapli.smntis  sacranunto,  ideo 
nwrtuus  baptizari  non  putuit,  quia  ab  illo  cor- 
pore  anima  cujus  fuit  volunlas  /idelis  devotioque 
discessit...  Illa  wystcria  quir  iihte  baptisma  in 
Ecclesia  gcruntur,  concipi  spiritalcm  hominent 
faciunl,  non  renasci.  Ibid.,  pag.  22t, 


CIIAIMTHE  I.  —  SAINT  FULGENCE  DE  IIUSI'E. 


I  liniolti.  Ml, 
35. 


la    quatrième 


[Vl''  SIKCLi:.] 

sans  l'ànie  clic  no  peut  recevoir  la  ri'niissioa 
(les  pdclu's  :  car  do  môme  que  ce  qui  est  sans 
vie  ne  peut  pcclicr,  de  niènie  aussi  ne  peut 
recevoir  le  pardon  du  ijcché.  Qnchpie  gran- 
de qu'ait  donc  é[é  la  volonté  de  i-cccvoir  le 
Ijaplônic,  si  l'on  vient  à  mourir  sans  l'avoir 
re(;u  ,  on  ne  peut  le  recevoir  apri'-s  la  mort , 
parce  que  l'âme  de  qui  iMait  celle  hotmc  vo- 
lonté est  séparée  du  corps.  Les  mystères  qui 
se  passent  dans  l'I'^glise  avant  le  baptême 
font  bien  concevoir  l'homme  spirituel,  mais 
ils  ne  le  l'ont  pas  rcnailre.  Ainsi  il  faut  s'en 
tenir  constamment  aux  canons  des  Pères  qui 
veulent  que  les  malades,  qui  ne  peuvent  ré- 
poudre pour  eux-mêmes,  soient  baptisés  sur 
la  foi  de  ceux  qui  témoignent  qu'ils  veu- 
lent l'être.  Les  Pères  ont  bien  conçu  que  ce- 
lui-là n'est  point  coupable,  qui  a  été  cmpê- 
cbé  par  la  perte  de  la  parole  de  témoigner 
sa  voloulé,  et  qui  n'a  rien  fait  d'ailleurs  pour 
marquer  qu'il  avait  changé  de  seuliuient .  » 
Il  veut  que  l'on  s'en  rapporte  d'autant  plus 
à  leurs  décisions,  que  l'Église  étant  la  co- 
lonne '  et  la  base  de  la  vérité  ,  elle  ne  peut 
rien  décider  que  de  vrai  par  rapport  ;\  l'ad- 
ministration des  saints  mystères  de  notre 
rédemption,  et  de  la  réconciliation  du  genre 
hvmiain. 

8.  A  l'égard  de  ceux  qui  meurent  avant 
d'avoir  reçu  le  corps  et  le  sang  de  Jésus- 
Cbrist,  saint  Fulgencc  dit  qu'il  ne  faut  point 
en  être  en  peine.  «  Que  fait-on,  dit-il,  dans 
le  sacrement  du  baptême,  sinon  que  ceux 
qui  croient  deviennent  les  membres  de  Xotre- 
Seigncur  Jésus-Christ,  et  que  par  l'unité  de 
l'Église  ils  appartiennent  à  son  corps  1  Puis 
donc  que  nous  sommes  tous  un  môme  pain 
et  un  même  corps,  chacun  de  nous  com- 
mence de  participer  à  ce  pain,  lorsqu'il  com- 
mence à  être  membre  du  même  corps,  c'est- 
à-dire  de  Jésus-Christ  ;  ce  qui  se  fait  dans  le 
baptême.  »  Ce  Père  apporte  en  preuve  an 
sermon  de  saint  Augustin  aux  nouveaux  bap- 
tisés. Après  quoi  il  conclut  que  l'on  -  ne  peut 
douter  en  aucune  façon  que  chacun  des  fidè- 
les ne  soit  participant  du  corps  et  du  sang 
de  Jésus-Christ ,  lorsqu'il  devient,  dans  le 
baptême,  membre  du  corps  de  Jésus-Christ, 


39 


et  que  l'on  ne  doit  pas  croire  que  celui-là  a 
été  privé  de  la  participation  du  pain  ou  du 
calice,  qui,  étant  dans  l'unité  du  corps  de  Jé- 
sus-Chi'ist,  est  sorti  de  ce  inonde  avant  d'a- 
voir mangé  ce  pain  et  bu  ce  calice.  C'est  en 
conséquence  de  cette  doctrine  que  l'on  a 
cessé  depuis  plusieurs  siècles  de  donner  mô- 
me aux  enfants  l'eucharistie  avec  le  bap- 
tême. 

9.  Le  même  diacre  Fcrrand  proposa  à 
saint  Fulgencc  cinq  autres  ([ucsiions ,  le 
priant  en  même  temps  de  lui  envoyer  le  li- 
vre de  la  Foi  à  Pierre,  la  lettre  à  Jean  de 
Tharse,  et  celle  à  Proba.  Le  livre  à  Pierre 
était  donc  déjà  écrit,  lorsque  Fci'rand  con- 
sulta saint  Fulgencc  pour  la  seconde  fois. 

10.  Fcrrand  demandait,  en  premier  lieu, 
si,  la  Trinité  étant  inséparable,  parce  qu'elle 
n'a  qu'une  même  nature,  une  même  opéra- 
tion, et  une  même  volonté,  on  peut  dire  que 
les  trois  personnes  sont  séparaljles.  Saint 
Fulgence  répond  que  la  Trinité  ne  serait  pas 
inséparable,  si  les  personnes  pouvaient  el- 
les-mêmes être  séparées.  11  fait  donc  voir 
que  tous  les  attributs  qui  conviennent  à  une 
des  trois  personnes,  conviennent  aussi  aux 
deux  autres,  à  l'exception  des  propriétés  re- 
latives, et  qu'ainsi  l'on  ne  peut  dire  qu'elles 
soient  séparables ,  de  même  qu'il  n'est  pas 
permis  de  les  confondre.  «  Qu'on  montre,  dit- 
il,  quelques  termes  qui  soient  tellement  pro- 
pres à  une  personne  qu'ils  ne  conviennent 
pas  à  une  autre.  Comme  il  n'est  pas  pos- 
sible d'en  trouver,  il  faut  convenir  que  les 
trois  personnes  sont  d'une  même  et  insé- 
parable nature,  si  l'on  en  excepte,  comme 
on  vient  de  vous  le  dire,  les  termes  relatifs  de 
Père  et  de  Fils  et  de  Saint-Esprit.  »  Il  cou- 
firme  sa  réponse  par  les  témoignages  de  saint 
Ambroise,  et  de  saint  Augustin,  qui.  confor- 
mément aux  livres  saints  ont  enseigné  c[ue 
les  trois  personnes  n'étaient  point  sépai-a 
blés,  parce  qu'elles  sont  unies  nécessaire 
ment  Tune  avec  l'autre  par  l'unité  de  nature. 

H.  La  seconde  question  de  Ferrand  était 
de  savoir,  si  l'on  peut  dire  que  la  divinité 
de  Jésus-Chi'ist  est  née,  qu'elle  a  souffert, 
qu'elle  est  morte,  comme  ou  dit  que  le  Fils 


Vlnir».  Ilh. 

x.\.\ii;hi.o«- 

cU*.  inif.  314, 
lam.  VU. 


^utre  Icltro 

(]a  Fcrrnnd  à 
Mlnt  Fulgen- 
cc,pa^.  'J)A. 


satat  Fulgro* 
ce  &  la  pre- 
)i  iùrc  »iues- 
1  on,ias.22J 


Béfonse  4 
la  secondo 
que^lioa,  pag. 
210. 


1  Quia  Ecclesia  veraeiter  columna  et  firmamen- 
tum  veritatis ab  Aposlolo  noncupalur,  quidquid se- 
cundiim  ipsius  Ecclesiœ  constituta  in  sanctis  inijs- 
teriis  redemptinnis  et  reconciliationis  humanœ, 
inlra  eain  datur  et  accipilur,firmaveritate  datiir^ 
firma  veritate  percipitur.  Fulg.  Epist.  12,  pag.  224. 

2  Arbiiror  nec  cuiquam  esse  aUquatcnus  ambigen- 


dum,  tune  tmumquemqtie  fidelium  corporis,  san- 
guinisque  dominici  participeiv-  fieri  quando  in 
baptismale  membrum  corporis  Cliristi  efjlcitur,  nec 
alienari  ab  illopanis  calicisve  consortio,  etiamsi, 
antequam  panem  illtim  comedat  et  calicembibal, 
de  hoc  sœculo  in  unitate  corporis  Christi  consti- 
tutus  abscedat.  Ibid.  pag.  227. 


40 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


de  Dieu  est  ne,  qu'il  a  souffert ,  qu'il  est 
mort.  Saint  Fulgence  répond  :  puisque,  se- 
lon Ferrand,  en  disant  que  la  divinité 
de  Jésus-Clirist  a  souil'ert,  on  sous-enteu- 
dait ,  dans  sa  chair,  cette  expression  ne  porte 
aucun  préjudice  à  la  foi  par  laquelle  l'É- 
glise catholique  croit  et  enseigne  que  la  di- 
vinité du  Fils  de  Dieu  est  impassible  et  im- 
muable. 11  rapporte  quelque  passages  de  l'E- 
criture, et  quelques  autres  de  saint  Augus- 
tin, de  Gclase,  de  saint  Ambroise  et  de  saint 
Léon,  pour  montrer  qu'on  s'est  quelquefois 
servi  de  termes  ou  semblables  ou  équiva- 
lents. 
Bfpcnu!  I       42.  Ferrand  demandait,  en  troisième  lieu, 

It     uois^èica 

qoMtion.pae.  si  l'âme  de  Jésus-Christ  connaît  parfaitement 
la  divinité,  et  s'il  se  connaît  lui-même,  en 
tant  qu'homme,  de  la  même  manière  que  le 
Père,  le  Fils  et  le  Saint-Esprit  se  connais- 
sent mutuellement.  Saint  Fulgence  répond, 
qu'il  serait  très-dur  et  entièrement  éloigné 
de  la  pureté  de  la  foi,  de  dire  que  l'àme  de 
Jésus-Christ  n'a  pas  une  pleine  connaissance 
de  sa  divinité,  avec  laquelle  nous  croyons 
qu'elle  n'a  fait  naturellement  qu'une  per- 
sonne ;  que,  selon  saint  Jean,  ime  des  préro- 

jmd.  iiM.  gatives  de  Jésus-Christ  est  que  Dieu  ne  lui 
donne  pas  son  esprit  par  mesure;  que  saint 
Ambroise  a  enseigné  clairement  que  l'àme 
de  Jésus-Christ  a  une  pleine  connaissance 
de  toute  la  divinité,  et  que,  si  l'on  disait  que 
l'àme  de  Jésus-Christ  n'a  pas  une  entière 
connaissance  de  sa  divinité,  il  faudrait  dire 
aussi  qu'elle  n'a  pas  en  elle  toute  la  sagesse 
et  toute  la  vertu.  Ce  Père  décide  donc  que 
l'on  peut  dire  que  l'âme  de  Jésus-Christ  a 
une  pleine  connaissance  de  sa  divinité  ;  mais  il 
ne  veut  pas  décider  si  l'on  doit  dire  que  l'àme 
de  Jésus-Christ  connaît  sa  divinité,  comme 
la  divinité  se  connaît  elle-même.  11  parait 
croire  que  l'àme  de  Jésus-Christ  connaît  au- 
tant que  la  divinité,  mais  non  pas  de  la  mê- 
me manière. 
Ré,„„„  t       13.    La  quatrième   question    regarde  la 

q.f.uVi.TprE!   prière  dans  laquelle  le  prêtre  disait  presque 

**'■  dans  toutes  les  Églises  d'Afrique  '  que  le  Fils 

règne  avec  le  Père  dans  l'unité  du  Saint-Es- 
prit. Cette  formule,  disait  Ferrand,  ne  sem- 


Tjle-t-elle  pas  mai-quer  que  le  Fils  règne  seul 
avec  le  Père,  et  que  le  Saint-Esprit  n'est  pas 
éternel?  Cela  serait  visiblement  contre  l'ar- 
ticle de  la  foi  par  lequel  nous  confessons  l'u- 
nité du  règne  du  Père,  du  Fils  et  du  Saint- 
Esprit.  Saint  Fulgence  lui  répond  :  «  l'Église 
catholique  ne  prie  pas  en  vain  le  Père  par 
le  Fils;  parce  que  le  Fils,  fait  homme,  est  le 
médiatem-  de  Dieu  et  des  hommes,  et  prêtre 
étemel  selon  l'ordre  de  Melchisédech  ;  qu'il 
est  entré  par  son  propre  sang  dans  le  sanc-  , 
tuaire,  c'est-à-dire  dans  le  ciel,  où  il  est  à  la 
droite  de  Dieu  et  prie  pour  nous.  C'est  donc 
parce  qu'il  est  en  même  temps  le  prêtre  et 
l'hostie,  que  nous  prions  le  Père  par  lui. 
D'où  vient  que  quelquefois  nous  disons  dans 
la  même  prière  '  :  Par  le  prêtre  éternel,  vo- 
tre Fils  Notre-Seigneur  Jésus-Christ.  »  Les 
ariens  qui  ne  pouvaient  s'empêcher  de  re- 
connaître que  l'Église  en  disant  Gloire  au 
Père  et  au  Fils,  le  confessait  Dieu  comme 
son  Père,  avaient  changé  cette  formule,  et 
disaient  :  Gloire  au  Père  par  le  Fils,  parce 
qu'il  ne  croyaient  pas  que  le  Fils  fût  Dieu. 
Comme  il  y  avait  encore  des  hérétiques 
qui  niaient  dans  Jésus-Christ  la  vérité  de 
la  chair,  les  saints  Pères  avaient  ajouté, 
avec  raison,  dans  cette  prière,  les  termes 
de  prêtre  éternel.  En  effet ,  lorsque  nous 
disons  que  nos  prières  sont  ofîertes  à  Dieu 
par  le  prêtre  éternel  Notre-Seigneur  Jé- 
sus-Christ, nous  confessons  en  lui  la  vérité 
de  la  chair  humaine.  Car  tout  pontife,  dit  ud.r.  r,  i. 
saint  PaiU,  étant  pris  d'entre  les  hommes,  est 
établi  pour  les  hommes ,  en  ce  qui  regarde  le 
culte  de  Dieu,  afin  qu'il  offre  des  dons  et  des 
sacrifices  pour  les  péchés.  «  Mais ,  continue 
saint  Fulgence,  lorsqu'après  avoir  dit  dans 
cette  prière  :  Votre  Fils,  nous  ajoutons  :  Qui 
vit  et  règne  dans  l'unité  du  Saint-Esprit,  nowsi 
faisons  mention  de  l'unité  de  nature  dans  le 
Père,  le  Fils  et  le  Saint-Esprit ,  comme  pour 
montrer  que  le  même  Jésus-Christ,  qui,  eu 
qualité  de  prêtre,  prie  pour  nous,  est  d'une 
môme  nature  avec  le  Père  et  le  Saint-Esprit. 
Ces  mêmes  paroles  '  :  Dans  l'unité  du  Saint- 
Esprit,  montrent  que  nous  croyons  l'unité 
de  nature  du  Saint-Esprit  avec  le  Père  et  le 


'  Quare  ergo  in  oraliotiibus  sacerdotum  :  Pcr 
.lesuin  Ctiristiim  Filiuin  tiium,  Uominum  noslniin, 
qui  tecuui  vivit  et  régnât  in  tiiiitate  Spiritus  Saiic- 
ti,  per  universas  pêne  Africœ  regiones  catholica 
dicere  consuevil  Ecclesia,  tanquam  solus  Filins 
cum  Pâtre  possideat  regtium  in  unitate  scilicet 
Spirilus  Sancli.  Fulp.,  lipist.  14,  pag.  257. 


'  Nam  bene  nosti,  nonnumqitam  dici:  Per  sacer- 
dotem  œlcrDum  Filiuin  luinn,  Doininum  nostruiu, 
Josum  Cliriftum.  Ibid.,  pag.  2.")8. 

'  Cm  m  vern  in  unitale  Spirilus  Sanrii  dieimus, 
unam  naluram  Spiritiis  Sancli  cum  Paire  Filio- 
que  monstramtis.  Ibid.,  pa);.  2U0. 


[VI"  SIÈCLE.] 

Fils.  Or,  runifd  de  nature  dans  ces  Irois  per- 
sonnes qu'est-cUe  iuitro  chose  qu'un  seul 
Dieu  en  trois  personnes;  et  que  signific-t- 
elle,  sinon  l'unitd  do  règne  dans  ces  trois 
personnes?  La  diversité  de  nature  peut 
marquer  la  diversité  de  puissance  dans  un 
règne  ;  mais  où  il  y  a  une  unité  naturelle  de 
règne,  là  est  aussi  une  même  puissance  de 
régner. 
«,>!'""■•  »       14.  Par  la  cinquième  question  le  diacre 

q..«iion,  fjg.  bcrrand  demandait  comment  on  devait  en- 
tendre ce  que  dit  saint  Luc,  eu  parlant  de  la 
Cène  du  Seigneur,  que  Jésus  prit  première- 
ment le  calice,  qu'il  le  donna  i\  ses  disciples,  et 

Lue. un,  n.  qu'ayant  pris  ensuite  le  pain,  il  dit  :  Ceci  est 
mon  coi-ps;  que  prenant  après  avoir  soupe  le 
calice,  il  dit  alors  :  Ce  calice  est  la  nouvelle 
alliance  en  mon  sang,  lequel  sera  répandu  pour 
vous.  Est-ce,  disait  Ferrand,  un  calice  donné 
deux  fois,  ou  sont-cc  deux  diflërents  cali- 
ces? Saint  Fulgence  répond  que  quelques 
interprètes  soutiennent  que  c'est  un  seul  et 
unique  calice  donne  une  seule  fois  par  Jé- 
sus-Christ à  ses  disciples  ;  et  que  c'est  par 
anticipation  que  saint  Luc  dit  d'abord  que 
Jésus-Christ  le  distribua  ;\  ses  apôtres  ;  mais 
que  selon  d'autres  le  même  calice  fut  donné 
deux  fois.  Ce  Père  convient  que  ces  deux 
interprétations  sont  catholiques  ;  et  il  pen- 
che beaucoup  pour  la  seconde,  dans  laquelle 
il  trouve  plusieurs  mystères,  entre  autres 
que  la  double  distribution  du  calice  signifie 
les  deux  Testaments  :  la  première  l'Ancien, 
et  la  seconde  le  Nouveau.  «  C'est,  dit-il,  pour 
cela  que,  dans  la  même  Cène,  Jésus-Christ  ' 
mangea  la  pâque  judaïque,  qu'il  était  néces- 
saire d'ofi'rir,  et  qu'il  donna  le  sacrement  de 
son  corps  et  de  son  sang,  qu'il  fallait  instituer 
pour  le  salut  des  fidèles.  Quoique  ces  deux 
Testaments  paraissent  diûërents  par  la  célé- 
bration des  sacrifices,  puisque  dans  l'un  on 
oilrait  un  agneau,  et  que  dans  l'autre,  Jé- 
sus-Christ, qui  était  figuré  par  cet  agneau, 
s'est  offert  lui-même  ,  la  foi  en  est  néan- 
moins la  même.  Car  il  n'y  a  qu'une  foi  ^  du 
Nouveau  et  de  l'Ancien  Testament.  Par  elle 
les  anciens  Pères  croyaient  les  promesses 
que  nous  croyons  aujourd'hui  accomplies 
en  nous.  « 


CHAPITRE  L  —  SAINT  FULGENCE  DE  RUSPE. 


41 


§X. 

Lettre  à  Jean  et  à  Vénérius. 

1.  Les   livres  do    Fausto  de    Riez  sur  la   ,    lhi„.i. 

Jean      cl     «0 

grâce,  ayant  été  rendus  publics  à  Constan-  J','j"'î,''^"„'|'j' 
tiuople ,  y  causèrent  beaucoup  de  bruit,  ou saMaiBoo. 
parce  qu'il  y  établissait  des  principes  tout 
contraires  à  la  doctrine  de  l'Eglise  sur  cette 
matière.  Jean,  archimandrite,  et  Vénérius, 
diacre,  envoyèrent  ces  livres  à  saint  Ful- 
gence. Ils  écrivirent  en  même  temps  aux 
évoques  relégués  en  Sardaigne  par  Trasa- 
mond ,  pour  leur  marriucr  ce  qu'ils  trouvaient 
de  mauvais  dans  l'ouvrage  de  Fauste.  Ils 
expliquaient  eux-mêmes  leur  doctrine  sur 
la  grâce  et  sur  la  prédestination.  Nous  n'a- 
vons plus  leur  lettre  ,  et  nous  n'en  connais- 
sous  le  contenu  que  par  ce  qui  en  est  dit  dans 
la  réponse  que  leur  firent  les  évoques  d'A- 
frique, par  la  plume  de  saint  Fulgence.  Quoi- 
qu'ils eussent  reçu  la  lettre  de  Jean  et  de 
Vénérius,  étant  encore  en  exil,  ils  ne  répon- 
dirent néanmoins  qu'après  leur  retour  en 
Afrique,  qui  arriva  aussitôt  après  la  mort  de 
Trasamond  qu'on  met  le  28  de  mai  323. 

2.  Il  n'y  eut  que  douze  évêques  qui  sous-  ^^f^^f,"""/^! 
crivirent  à  cette  réponse.  Saint  Fulgence  n'y  ^'jg;'»-  f"?- 
mit  pas  son  nom,  peut-être  parce  qu'il  avait 

déjà  répondu  en  particulier  à  Jean  et  à  Vé- 
nérius par  les  trois  livres  de  la  Prédestina- 
tion et  de  la  grâce,  qu'il  leur  avait  adressés, 
avant  de  leur  écrire  au  nom  des  évêques 
d'Afrique.  Car  ces  trois  livres  sont  cités  dans 
cette  lettre  ,  de  même  que  les  livres  contre 
Fauste,  que  saint  Fulgence  avait  écrits  à  leur 
prière. 

3.  Les   évêques  d'Afrique    témoignent  à   „;^„'';^',;,\.'''' 
Jean  et  à  Vénérius  que,  si  leur  lettre  les  avait 
réjoais,  elle  leur  avait  aussi  causé  de  la  tris- 
tesse ;  qu'elle  leur  avait  donné  de  la  joie, 

en  leur  apprenant  qu'ils  pensaient  saine- 
ment sur  la  doctrine  de  la  grâce  de  Dieu  ,  et 
causé  de  la  douleur,  en  leur  marquant  que 
quelques-uns  des  frères  voulaient  élever  le 
libre  arbitre  de  l'homme  aux  dépens  de  la 
grâce.  Ils  remarquent  que  Dieu  le  permet 
ainsi ,  afin  de  faire  connaître  davantage  la 
force  de  la  grâce,  parce  qu'on  ne  la  connaît 


'  Propterea  et  in  eadem  ccena  et  judaicum  pas- 
cha  comedit,  quod  oportebat  o/ferri,  et  sacramen- 
tum  corporis  sui  et  sanguiais  dédit,  quod  ad  sa- 
liUem  fidelium  oportebat  institui.  Fulg.,  EpistAi, 
png.  264, 


2  Quippe  una  est  fides  Novi  et  Veteris  Testa- 
menti.  Bœc  in  antiquis  Patribus  credebat  pro- 
missa,  quœinnobis  jam  crédit  impleta.  Ibid.,pag. 

268. 


42 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


point,  si  on  ne  l'a  reçue,  et  qu'on  la  combat 
tant  qu'on  ue  l'a  point  ;  parce  que  sans  elle  ' 
on  ne  connaît  aucune  vérité,  en  sorte  qu'il 
est  comme  nécessaire  que  l'homme  lui  ré- 
siste ou  par  paroles  ou  par  actions.  Car  l'ef- 
fet de  la  grâce  de  Dieu  dans  Tbomme  est 
qu'ayant  rcru  le  don  de  la  foi  et  de  la  charité, 
il  fasse  paraître  dans  ses  paroles  une  bonne 
doctrine  ,  et  qu'il  s'applique  à  faire  de  bon- 
nes (Ouvres.  C'est  donc  de  Dieu  que  nous 
vient  toute  la  grâce  de  la  bonne  doctrine  et 
des  bonnes  œuvres,  comme  c'est  de  lui  aussi 
que  nous  recevons  même  la  bonne  pensée  ; 
afin  que  nous  apprenions  à  nous  glorifier 
dans  le  Seigneur,  et  non  pas  en  nous-mô- 
^n^  Cor.  m,  mes;  puisque  c'est  lui  qui,  selon  l'Apùtre, 
nous  rend  capables  même  de  la  bonne  pen- 
sée. Les  évèques  d'Afrique  infèrent  de  là 
que,  s'il  y  en  a  quelques-uns  qui,  n'ayant 
pas  reçu  la  grùce,  ne  savent  pas  même  qu'ils 
ne  l'ont  point,  ceux  qui  ont  reçu  de  Dieu 
cette  grâce  ,  doivent  d'autant  plus  en  pren- 
dre la  défense  qu'ils  voient  qu'elle  n'est  pas 
donnée  à  tous,  lis  conviennent  qu'il  y  a  avant 
la  grâce  un  libre  arbitre  '  dans  l'homme  ; 
mais  ils  soutiennent  qu'il  n'est  pas  bon,  parce 
qu'il  n'est  pas  éclairé  ;  qu'ainsi  si  la  grâce 
n'est  point  donnée ,  on  ne  peut  pas  dire  que 
le  libre  arbitre  soit  bon.  Il  en  est,  disent-ils, 
du  libre  arbitre  sans  la  grâce,  comme  de  l'œil 
sans  la  lumière  ;  de  même  donc  cjuc  lœil  a 
un  besoin  continuel  de  la  lumière,  pour  qu'il 
puisse  même  apercevoir  la  lumière ,  de  mê- 
me aussi  le  libre  arbitre  de  l'homme  ne  peut 
pas  même  connaître  la  grâce  ,  si  celte  grâce 
divine  ne  lui  est  donnée  par  le  Saint-Esprit. 
Jean  et  Yéuérius  avaient  dit  dans  leur  let- 
tre qu'Ésaû  et  Jacob  n'étant  pas  encore  nés, 
celui-ci  avait  été  choisi  par  une  miséricorde 
toute  gratuite,  cl  celui-là  condamné  à  cause 


du  péché  originel,  par  un  juste  jugement  de 
Dieu  ;  mais  leurs  adversaires ,  c'est-à-dire 
les  semi-pélagiens  prétendaient  qu'Ésaii  était 
la  figure  du  peuple  j  uif,  qui  devait  être  con- 
damné pour  ses  mauvaises  œu\Tes  futures, 
et  que  Jacob  figurait  les  gentils,  que  Dieu 
devait  sauver  à  cause  des  bonnes  œuvres 
qu'ils  feraient  à  l'avenir.  Les  évèques  d'A- 
frique disent  qu'on  ne  doit  pas  rejeter  cette 
dernière  explication  ;  mais  aussi  qu'on  doit 
reconnaître  dans  Esaii  et  dans  Jacob  le  choix 
que  Dieu  fait  des  uns  par  une  bonté  toute 
gratuite,  et  la  réprobation  qu'il  fait  des  au- 
tres par  une  juste  sévérité.  C'est  pourquoi , 
ajouleut-ils ,  comme  il  est  certain  qu'Ésau 
a  été  un  vase  de  colère,  et  Jacob  un  vase 
de  miséricorde ,  on  doit  croire  certainement 
qu'Ésaii,  avant  d'être  condamné,  avait  mé- 
rité avec  justice  la  colère  de  Dieu,  et  que 
Jacob  pour  être  sauvé  a  reçu  gratuitement 
le  don  de  la  miséricorde  prévenante.  Donc  , 
celui-ci,  justifié  gratuitement  par  la  grâce  de 
Dieu,  a  été  destiné  â  la  gloire,  et  celui-là,  par 
une  juste  colère  de  Dieu,  a  été  préparé  à  la 
peine  ;  en  sorte  que  Dieu  a  montré  dans  Ja- 
cob la  miséricorde  de  sa  bonté  gratuite ,  et 
dans  Ésaii  le  jugement  d'une  juste  sévérité. 
4.  A  l'égard  des  enfants,  ils  enseignent  ' 
que  l'on  doit  s'en  tenir  A  la  règle  de  la  vérité 
catholique  :  savoir,  que  celui  qui  est  baptisé 
est  sauvé,  et  que  celui  qui  meurt  sans  bai>- 
tême  est  damné  à  cause  du  péché  originel. 
Ils  disent  sur  la  grâce  que  *  celui-là  n'en 
pense  pas  dignement  qui  croit  qu'elle  est 
donnée  â  tous  les  hommes ,  puisque  non- 
seulement  la  foi  n'est  pas  commune  à  tous, 
mais  qu'il  y  a  encore  des  nations  à  qui  l'I-;- 
vangile  n'a  point  été  annoncé  :  Commeiit,  dit 
r.\pôtre,  invoqueront-ils  celui  en  qui  ils  n'ont 
point  cru? £t  comment  o-oiront-ils  en  lui,  s'ils 


Sallo  i 
mIjsc. 


>  Ouandoquidem  ipsa  gralia  nullatenus  agnos- 
cilur  nisi  detur:  guœ  quamdiu  non  est  in  homine, 
lamdiu  necesse  est  ut  ei  aut  sermone  repugnet, 
aut  opère.  Episcopi  Afrieani ,  Episl.  ad  Joan. , 
pag.  270. 

'  Ànte  largitatem  quippe  gratiœ  est  in  homine 
qiiidcm  libertini  arbilrium,  sed  non  bonum,  quia 
non  illitminatum.  Proinde,  nisi  gratin  detur,  bo- 
mim  ipsum  arbilrium  non  liabetur.  Sic  namque 
est  ipsum  liberum  liomini^  arbitrium,  sicul  est 
oculus  sine  luce...  Sicut  ergo  corporis  oculus  sem- 
per  indiget  lumen  accipere,  ut  ipsum  lumen  possil 
aspicere;  sic  et  libero  arbitrio  hominis  nuUa  po- 
tesl  gratiœ  suffragari  cognitio,  nisi  detur  ipsius 
gratiœ  spirilalis  infusio.  \hU\.,  pag.  270. 

'  De  parvulis  vero  indubitanler  trnenda  est  ca- 


tholicœ  régula  veritatis  ;  quia  parvulus  qui  bap- 
iizatur,  gratuita  Dei  bonitate  salralur  ;  qui  vero 
sine  baptismale  nwritur,  propter  originale  pec- 
calum  damnalur.  Iliid.,  pajr.  272. 

*  De  gralia  vero  non  digne  sentit  quisquis  eam 
pulal  omnibus  hominibus  dari,  cum  non  solinii 
non  omnium  sil  fides,  sed  adhuc  nonnullœ  génies 
inieniantur  a4  qims  fidei  prœdicaiio  non  perve- 
nil.  Apnslolus  aulem  dicil:  Qiiomodo  iuvocabunt 
in  iniL'in  uon  crcdiilcruul  ?  elc.  Kon  ilaque  gralia 
omnibus  datur,  quandoquidem  ipsius  gratiœ  par- 
ticipes esse  non  possunl,  qui  fidèles  non  sunl.nec 
possunl  credere,  ad  quns  invenilur  ipse  fidei  au- 
dilus  minime  pervenisse.  Ipsa  vero  gralia  quibus- 
cunique  datur,  non  (equaliler  datur,  sed  seouii- 
lium  luciisuraiu  Uuuatioui?  Clirisli.  //ifj.,  pag.  :;7J, 


CIIAriTllE  I.  —  SAINT  FULGEN'CE  DE  RUSPE. 


E|.lo 


Sulle  da  I  !■ 


[VI'  SIÈCLE.] 

n'en  ont  point  entendu  jMrler?  Comment  en  en- 
tendront-ils jjarler,  si  personne  m  leur  prèclie? 
I,ii  grilcc  n'osl  ddiic  point  iloiini'e  i'i  Ions,  puis- 
(|ue  ceux-là  n'eu  pciivciil  èlio  p;iilici|);iiils, 
(|iii  uc  sont  point  lidMes,  et  que  ceux-là  ne 
peuvent  croire  à  qui  l'on  ne  trouve  point  que 
la  parole  de  la  foi  se  soit  fait  entendre.  La 
grùce  même  n'est  pas  donnée  également  à 
tous  ceux  à  qui  elle  est  donnée  ;  mais  elle 
est  donnée  à  chacun  de  nous  selon  la  mesure 
du  don  de  Jésus-Christ.  Le  salut  '  de  l'homme 
est  tellement  l'cU'et  de  la  miséricorde  de 
Dieu  qu'il  l'est  aussi  de  la  volonté  humaine, 
mais  eu  sorte  que  c'est  la  miséricorde  qui 
prévient  et  la  volonté  qui  suit.  La  seule  mi- 
séricorde de  Dieu  donne  le  commencement 
du  salut,  la  volonté  de  l'homme  y  coopère  ; 
la  miséricorde  en  prévenant  la  volonté  di- 
rige son  cours,  la  volonté  humaine  en  obéis- 
sant, suivie  toutefois  de  la  miséricorde,  court 
à  la  récompense.  Ils  disent  que,  pour  bien 
entendre  ces  paroles  de  l'Apôtre  :  //  fait  mi- 
séricorde à  qui  il  lui  plaît,  il  endurcit  qui  il 
lui  plaît,  il  faut  faire  attention  à  celles  qui 
suivent  :  Le  potier  n'a-t-il  pas  le  pouvoir  de 
faire  de  la  même  masse  d'argile  un  vase  destiné 
à  des  usages  lionorables,  et  un  autre  destiné  à  des 
usages  vils  et  tionteujv  ?  parce  qu'il  en  est  de 
Dieu  à  l'égard  de  la  masse  corrompue  des 
hommes  comme  du  potier  à  l'égard  de  la 
masse  d'argile.  C'est  une  grâce  que  le  potier 
fait  à  ce  vase  de  le  destiner  à  des  usages  ho- 
norables, c'en  est  une  que  Dieu  fait  à  l'hom- 
me qu'il  choisit  dans  sa  miséricorde.  Le  ju- 
gement qu'il  exerce  envers  celui  qu'il  endur- 
cit, c'est-à-dire  qu'il  abandonne,  est  juste 
parce  qu'il  le  traite  selon  ses  mérites.  Au 
reste  -,  quand  il  est  dit  que  Dieu  endurcit 
qui  il  lui  plaît,  ce  n'est  pas  qu'il  pousse  per- 
sonne au  mal,  seulement  il  ne  le  retire  pas 
de  son  iniquité. 
S.  Ces  évêques  concihent  ces  deux  en- 


43 


droits  de  l'Écriture  :  C'est  Dieu  qui  of/ire  en 
nous  le  vouloir  et  le  faire,  et  :  Si  voiis  voulez  et 
si  vous  m'écoutez,  vous  mangerez  les  biens  de  la 
terre,  par  celui-ci  :  Opérez  votre  salut  avec 
crainte  et  tremblement  :  car  c'est  Dieu  qui 
opère  en  vous  le  vouloir  et  le  faire  selon  qu'il 
lui  plaît.  Parce  que  l'homme  '  a  le  libre  ar- 
bitre, Dieu  lui  donne  des  préceptes  pour  les 
accomplir,  mais  sou  libre  arbitre  n'en  est 
pas  capable  s'il  n'est  aidé  de  Dieu.  De  cette 
manière  l'homme  connaît,  en  entendant  le 
précepte  qu'on  lui  fait,  qu'il  doit  agir,  mais 
qu'il  doit  à  Dieu  tout  le  bien  qu'il  veut  et 
qu'il  fait:  Que  Dieu,  dit  l'Apotre,  vous  appli- 
que à  toute  bonne  œuvre,  afin  que  vous  fassiez 
sa  volonté,  lui-même  faisant  en  vous  ce  qui  lui 
est  agréable.  Ils  regardent  comme  une  absur- 
dité ce  que  Jean  et  Vénérius  avaient  écrit 
que  les  semi-pélagiens  appelaient  vases  de 
miséricorde  ceux  qui,  en  ce  monde ,  pos- 
sédaient quelque  dignité  sécidière  ou  ec- 
clésiastique, et  vases  d'ignominie  les  clercs, 
les  mohies  et  les  laïques.  Ils  disent  que  ce 
ne  sont  pas  les  dignités  qui  ont  les  vases 
d'honneur,  mais  la  charité.  Sur  la  question 
de  la  prédestination,  ils  s'en  tiennent  à  ce 
qii'en  dit  saint  Paul,  savoir  que  tous  ceux-là 
sont  '  prédestinés  que  Dieu  veut  sauver,  et 
disent  que  l'Apôtre  n'emploie  le  terme  de 
tous  que  parce  que,  dans  les  deux  sexes,  il 
y  eu  aura  de  toutes  les  conditions,  de  toutes 
les  nations  et  de  tous  les  âges  qui  seront  sau- 
vés. «  Car  ,  ajoutent- ils  ,  la  volonté  du  Dieu 
tout  puissant  s'accomplit  toujours,  parce  que 
sa  puissance  n'est  sm-montée  en  aucune  ma- 
nière. Car  c'est  lui  qui  a  fait  tout  ce  qu'il 
a  voulu  dans  le  ciel,  sur  la  terre,  dans  la 
mer  et  dans  tous  les  abîmes ,  et  à  la  volonté 
duquel  personne  ne  résiste.  »  Ils  remarquent 
que  ce  n'est  que  des  adultes  dont  il  est  dit 
que  Dieu  vivifie  la  volonté  pour  la  rendre 
bonne  et  active,  afin  qu'ils  coopèrent  eux-mê- 


I']|ni|r.ll,f3. 


Uol.r. 
SI. 


'  Digne  ulrumque  tenelur  si  ordo  reclus  serve- 
lur  (liriaw  miscricordiœ  et  voluntatis  htimanœ, 
ul  nia  pru'veniul,  hwc  sequalur,  sala  Dei  miseri- 
cordii  inilium  saiulis  conférât;  fui  demde  volun- 
tas  kominis  coopcratrix  suœ  salutis  exsistat,  ut 
misericnrdia  Dei  pra'veniens  voluntatis  Irumanœ 
dirigal  cursum,  et  humana  voluntas  obediens, 
eadeni  miitcricordia  sul)se(juente  currat,ad  prœ- 
vium.  lîpiscoiii  Afiicaui,  Epist.  ad  Joan.,  pa^.  2TS. 

2  Deus  aut  m  obdurare  dicitur,  iton  quia  ad 
iniquitatem  compellit,  sed  cum  ab  iniqnitate  non 
eripit  :  quod,  qnia  jtislus  est,  juste  facit.  Ibid. 

3  Quonium  habet  homo  liberum  arbitrium,  au- 
dit pra'cepta  quœ  faciat:  scd  ad  implenda  prœ- 


cepta  liberum  arbitrium  idoneum  nullatenus  efp.- 
citur  nisi  divinilus  adjuvetur.  lia  fil  ut  se  operari 
debere  homo  cognoscat,  dum  prœceptum  accipit, 
et  Deo  se  sciât  semper  omne  bonum  debere,  quod 
vull  ac  facit.  Ibid.,  pag.  274. 

*  Omnes  autem  pnedestinati  ipsi  sunt  quos  vult 
Deus  salvos  fieri.  Qui  propterea  omnes  dicuntur, 
quia  in  ulroque  sexu  ex  omni  honiinuni  génère, 
grndu,  œtate  et  conditione  salvantur.  Semper 
quippe  voluntas  Dei  omnipolentis  impleiur,  quia 
polestas  ejus  nullatenus  vincitur  :  ipse  est  etiim 
qui  omnia  quœcumque  voluit  fecit  in  cœlo  et  in 
terra,  in  mari  et  in  omnibus  abyssis,  et  cujus  vo- 
luntati  nemo  resistit.  Ibid.,  pag.  271. 


44 


HISTOIRE  GÉXÉR.VLE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


mes  à  leur  salut  ;  mais  qu'à  l'égard  des  enfants, 
dans  lesquels  la  volonté  ne  peut  être  boni- 
fiée, il  faut  dire  qu'ils  sont  sauvés  par  l'opé- 
ration de  la  grAce  sainte.  Ils  enseignent  que 
le  libre  arbitre,  qui  était  sain  et  entier  dans 
le  premier  homme,  est  maintenant  comme 
ébranlé  par  sa  propre  infirmité  dans  les  en- 
fants de  Dieu,  mais  qu'il  est  relevé  et  forti- 
fié par  la  grâce  dont  Dieu  les  gratifie.  Ils  di- 
sent, sur  la  question  touchant  l'origine  des 
âmes,  ou  qu'il  faut  la  traiter  '  sans  aigreur,  ou 
n'en  point  parler  du  tout,  parce  que,  soit  qu'el- 
les viennent  par  propagation  ,  soit  qu'elles 
soient  créées  pour  chaque  corps,  ce  qui  n'est 
pas  clairement  exprimé  dans  les  saintes  Écri- 
tures ,  on  ne  doit  faire  de  recherche  sur  cette 
matière  qu'avec  beaucoup  de  précaution , 
surfout  à  cause  que  les  fidèles  peuvent  igno- 
rer ce  qui  en  est,  sans  courir  aucun  danger 
pour  la  foi,  mais  que  l'on  doit  croire  que  les 
âmes  de  tous  les  enfants  qui  naissent  con- 
tractent le  péché  originel,  et  que  le  sacre- 
ment du  saint  baptême  est  nécessaire  à  tous 
pour  rompre  le  lien  du  péché  d'origine.  Vou- 
lant ensuite  apprendre  à  Jean  et  à  Vénérius 
avec  quelle  chanté  ils  doivent  traiter  leurs 
adversaires,  ils  lem-  disent  :  Dememez  fer- 
mes et  inébranlables  par  la  grâce  de  Dieu  dans 
la  foi  véritable,  et  conservez-la  dans  toute 
sa  pureté.  Témoignez  à  ceux,  qui  sont  d'un 
sentiment  contraire  au  vôtre ,  une  charité 
sincère,  et  ne  désespérez  pas  de  leur  con- 
version; car  celui  qui  ignore  aujourd'hui  la 
vérité  sur  quelque  point  particulier,  la  con- 
naîtra peut-être  demain ,  Dieu  la  lui  faisant 
connaître.  L'Écriture  ne  dit-elle  pas  que  dès 
le  moment  que  Dieu  veut  une  chose ,  il  la 
peut  exécuter?  Adressons  lui  donc  nos  priè- 
res pour  eux ,  enfin  qu'il  opère  en  eux  la 
connaissance  des  vérités  qu'ils  contestent. 
Ayons  pour  eux  des  sentiments  de  charité  et 
d'amour  dont  Dieu  nous  tiendra  compte  et 
doit  nous  récompenser  un  jour,  pleinement 
convaincus  et  entièrement  persuadés  qu'au- 
cun de  ceux  qui  sont  écrits  dans  ses  décrets  ' 
éternels  pour  être  du  nombre  des  prédesti- 


nés, ne  périra  jamais  ,  mais  que  la  volonté 
de  Dieu  s'accomplira  pleinement  en  eux.  Dieu 
lui-même  les  sauvant  par  sa  grâce  et  les  fai- 
sant arriver  à  la  connaissance  parfaite  de  la 
vérité,  parla  lumière  qu'il  répandra  dans  leur 
esprit.  Ils  citent  le  passage  du  pape  Hor- 
misdas  en  faveur  de  saint  Augustin,  et  deux 
ouvrages  de  saint  Fulgence  sans  le  nommer  : 
savoir  ,  ses  trois  livres  de  la  Prédestination  et 
de  le  Grâce,  et  les  cinq  qu'il  avait  écrits  con- 
tre Fauste.  Ce  qui  fait  voir  qu'il  n'écrivit  cette 
lettre  au  nom  des  évêques  relégués  en  Sar- 
daigne  qu'après  leur  retour.  Car  il  était  lui- 
même  de  retour  dans  son  Kglise  lorsqu'il 
écrivit  ses  livres  de  la  prédestination  et  de  la 
grâce,  comme  le  témoigne  l'auteur  de  sa  vie. 

§  XI. 

Lettre  des  évêques  d'Afrique  aux  moines  de 
Scythie. 

\ .  Nous  avons  déjà  remarqué  que  les  moi- 
nes de  Scythie,  députés  à  Rome  pour  y  faire 
approuver  leur  proposition  :  Un  de  la  Trinité 
a  souffert,  n'ayant  point  trouvé  dans  cette 
Église  l'appui  qu'ils  en  espéraient,  s'avisè- 
rent de  consulter  les  évêques  relégués  en 
Sardaigne  par  Tiasamond,  roi  des  Vandales. 
Ils  leur  adressèrent  donc,  en  521,  un  écrit  en 
forme  de  lettre  sigm;  de  quatre  d'entre  eux  : 
Pierre  diacre,  Jean,  Léontius,  et  im  autre 
Jean.  C'était  comme  une  profession  de  foi , 
où  ils  déclaraient  que  sur  l'Incarnation  ils 
s'en  tenaient  à  la  décision  du  concile  de  Chal- 
cédoine,  admettant  deux  natures  en  Jésus- 
Christ  ,  unies  en  une  seule  personne ,  sans 
mélange  ni  confusion ,  et  sans  aucun  chan- 
gement. En  conséquence  ils  reconnaissaient 
que  la  sainte  Vierge  est  véritablement  mère 
de  Dieu.  Mais  ils  disaient  que,  la  chair  étant 
devenue  propre  à  une  personne  de  la  Trini- 
té, on  pouvait  dire  a^n'unde  la  Trinité  a  souf- 
fert, qu'il  a  été  crucifié  en  sa  chair,  et  non 
pas  en  sa  divinité.  Outre  le  concile  de  Chal- 
cédoine ,  ils  faisaient  profession  de  recevoir 
ceux  de  Nicée,  de  Coustantiuople  et  d'Éphèsc 


Sfilhi» 

ea  SaMii 
J.«ç.  î'7. 


'  Quwstionem  vero  animarum  aut  lacitam  de- 
bemus  relinquere,  aut  sine  contenlione  Iraclare  ; 
quia  sive  ex  propagine  venianl,  sive  novœ  singulis 
corporihus  fiant,  quod  sanctarum  Scripturariim 
auctoritas  n<m  manifeste  prouuntial,  cum  caulela 
débet  inquiri  :  maxime  qxiod  sine  fidci  deirimenlo 
potest  a  fidelibus  ignorari.  Jllud  prœcipiie  ohscr- 
vandum  est  et  tenendum  nascenlinm  parvulorum 
animas  nexu,  peccali  originalis  obstriclas.  omni- 


busque  necessarium  esse  sancti  baptismatis  sa- 
cramenlum,  quo  dirumpitiir  peccnli  originalis 
vincnlum.  Episc.  Afrii-.,  Epist.  ad  Joan.,  pag.  275. 
'  Scienles  quoniam  in  cnnspcctu  Dci  quisqui^ 
de  numéro  prœdestinalorum  fuerit,  non  peribit, 
et  in  oninibM.v  volunlas  Omnipolentis  implebitur, 
ut  per  gratiam  salri  fiant,  el  agnilionem  verUatis, 
Domino  illuminantr.  percipiant.  lbi<l. 


CHAPITRE  I.  —  SAINT  FULGENCE  DE  IIUSPE. 


'  :at»*       dii\ 
,  ,  ag.  SUi. 


[Vl'"  SIKCLE.] 

;ivcc  les  lettres  de  saint  Léon,  et  de  con- 
damner tous  ceux  qiu;  le  Sainl-Siôge  a  rôgn- 
lirii'iuout  comlainnùs.  Sur  la  niàce,  ils  sui- 
vaiiMil  la  doctrine  de  saint  Auf;ustin  ,  re- 
connaissant avec  ce  Pore  que  l'iiomnic  qui 
avait  d'abord  été  créé  avec  une  entière  li- 
luuté  de  faire  le  bien  et  le  mal,  élant  deve- 
nu par  son  péché  esclave  du  péché  mémo  , 
n'avait  pu  être  délivré  que  par  la  grâce  de 
Jésus-Christ  ;  que  sans  celle  grâce  il  ne  peut 
plus  penser  ni  désirùr  aucun  bien;  qu'elle 
le  fait  agir  ,  non  par  une  nécessité  de  vio- 
lence, mais  par  une  douce  insinuation  du 
Saint-Esprit  :  qu'ainsi  c'est  de  Dieu  que  vien- 
nent et  le  commencement  des  bonnes  pen- 
sées, et  le  consentcmeut  au  bien,  do  môme 
que  les  bonnes  actions.  Ils  appuyaient  celte 
doctrine  des  passages  des  Pères  et  des  con- 
ciles, et  tinissaient  par  xni  anathèmc  ;\  Pela- 
ge, A  Célcslius,  k  Julien,  A  leurs  sectaleurs, 
et  nommément  aux  livres  que  Fauste  de  Riez 
avait  écrits  contre  la  vérité  de  la  prédestina- 
lion. 

2.  Jean,  diacre,  porteui-de  la  lettre  des  moi- 
nes de  Scylhie,  la  rendit  aux  évoques  exilés, 
qui  chargèrent  saint  Fulgence  d'y  répondre 
on  leui-nom.  Quinze  d'entre  eux  souscrivirent 
à  cette  réponse.  Saint  Fulgence  la  commen- 
ce en  disant  que  le  salut  de  l'homme  en  cette 
vie  consiste  dans  une  foi  pure  ef  droite  en 
Dieu,  qui  opère  par  la  charité.  Puis,  après 
avoir  rapporté  quelques  passages  de  la  pro- 
fession de  foi  de  ces  moines  sur  l'Incarnation, 
il  établit  la  doctrine  des  deux  natures  unies 
en  une  seide  personne  en  Jésus-Christ,  mon- 
trant que  le  Fils  de  Dieu  s'est  non-seulement 
fait  chair,  mais  qu'il  a  pris  celle  chair  dans 
le  sein  de  la  Vierge  :  en  sorte  qu'il  est  vrai 
de  dire  que  la  bienheureuse  '  Marie  a  conçu 
et  enfanté  Dieu  le  Verbe  en  tant  que  fait  chair. 
«  C'est  le  même,  dit-il,  qui  est  Dieu  et  hom- 
me, la  nature  humaine  ayant  été  si  admi- 
rablement unie  au  Verbe,  lorsqu'il  s'est  fait 
homme,  qu'elle  n'a  point  une  seconde  per- 
sonne. Car  c'est  la  nature  humaine^  qui  a 
été  unie  à  la  divinité ,  et  non  la  personne. 


45 


Dieu  n'est  donc  ])oint  dans  Jésus-Christ , 
comme  il  était  dans  los  prophèlos  et  dans 
les  patriarches.  11  a  pris  l'iioiumo  onlier  pour 
réparer  en  lui  tout  ce  qu'il  lui  avait  donné 
dans  la  création.  »  Saint  Fulgence  dit  de  la 
chair ^  de  Marie,  qu'elle  a  été  une  chair  de 
pi'ché,  ayant  été  conçue  comme  los  autres 
hommes;  mais  que  la  chair  que  le  Verljo  a 
prise  dans  elle  n'a  eu  que  la  l'essemblance 
du  péché  ,  c'est-A-dire  la  mortalité.  Il  ajoute 
que  celle  bienheureuse  Vierge  n'esl  devenue 
more  de  Dieu  par  aucun  mérite  humain, 
mais  par  un  eûet  de  la  bonté  divine  ;  que 
Dieu  en  mourant  selon  la  chair  a  détruit  en 
nous  une  double  mort,  celle  du  corps  et  celle 
do  l'âme  :  l'une,  en  nous  faisant  ressusciter 
par  sa  grâce  de  la  mort  de  l'inGdélité;  l'au- 
tre, en  faisant  ressusciter  nos  corps. 

3.  Le  Verbe,  avant  de  se  faire  homme,  n'é-  f"""'''  '" 
tait  point  le  Christ.  Il  ne  l'a  été  que  lorsque,  '"'•■°' 
prenant  la  forme  d'esclave,  il  s'est  anéanti 
lui-même.  Au  contraire  la  chair  de*  Jésus- 
Christ  n'a  jamais  été  sans  le  Verbe,  ni  con- 
çue personnellement.  Elle  a  pris  dans  le  Ver- 
be-Dieu sou  commencement  personnel.  Ce 
n'est  point  la  Trinité  qui  s'est  incarnée,  c'est 
le  Fils  seul,  c'est- A-dire  une  personne' de 
la  Trinité,  Jésus-Christ,  Fils  unique  de  Dieu, 
qui  est  Dieu  sur  toutes  choses.  Dieu  parfait, 
et  homme  parfait.  «  C'est  pour  nous  en  con- 
vaincre, dit-il,  qu'il  a  ordonné  A  ses  apôtres 
d'aller  enseigner  les  nations  et  de  les  baptiser 
cm  nom  du  Père,  du  Fils  et  du  Saint-Esprit , 
nous  enseignant  par  cette  forme  du  baptême 
qu'il  a  prescrite  lui-même ,  que  nous  ne  de- 
vons point  séparer  les  natures  dans  le  Fils  , 
ni  croire  que  la  nature  humaine  n'ait  point 
eu  de  part  à  l'œuvre  de  notre  rédemption  , 
ni  admettre  deux  personnes  en  Jésus-Christ; 
puisque  c'est  le  môme  Fils  de  Dieu  Noire- 
Seigneur  Jésus-Christ  qui  a  créé  le  monde  , 
et  qui  a  répandu  son  sang  pour  nous.  C'est 
pour  cela  que  quiconque  est  régénéré  dans 
le  baptême  au  nom  du  Père ,  du  Fils  et  du 
Saint-Esprit,  est  baptisé  en  la  mort  et  au 
nom  de  Jésus-Christ,  afin  qu'il  paraisse  évi- 


'  Beata  Maria  Deum  Verbuni:  secundum  quod 
caro  faclum  est,  et  concepit  et  peperit.  Fulg.,  Epist. 
17,  rag.  290. 

*  Accessit  Deo  humana  substaïUia,  nonpersona. 
Ibid.,  pag.  291. 

'  Caro  Marice  quœ  in  iniquitatibus  humana  so- 
lemnitale  fuerat  concepta,  caro  fuit  utique  pec- 
cati,  quœ  Filium  genuit  in  simiUtudinem  carnis 
peccati.  Ibid.,  pag.  292t 


^  Sed  Verbum  illud  sine  carne  Deus  œtcrnui 
fuit,  caro  aulem  Christi  sine  Verbo  non  solum 
Christus  aliquando  non  fuit,  sed  nec  personaliter 
conceplu  fuit.  Ibid.,  pag.  293, 

5  Igitur  non  Trinitas,  sed  solus  Filius,  id  est 
una  ex  Trinitale  persona  Christus  Dei  Filius 
unicus,  ut  nos  salvos  faceret,  carne  conceplus 
et  natus  est  de  ventre  Virginis  matris,  Ibid., 
pag.  296.  ' 


46 


rriSTOiRE  GÉXÉnALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


demmcnf  que  nous  sommes  ensevelis  par  le 
bapti'me  avec  celui  au  nom  duquel  il  est 
constant  que  nous  sommes  baptisés.  »  Saint 
Fulgence  assure  que  telle  est  la  croyance  de 
l'Église  romaine,  le  sommet  de  l'univers;  et 
celle  de  tout  le  monde  clirélien,  ajoutant 
que  cette  Église  a  reçu  cette  foi  des  deux 
grandes'  lumières  saint  Pierre  et  saint  Paul, 
dont  elle  possède  les  corps,  et  qui  l'ont  l'un 
et  l'autre  illustrée  par  les  rayons  de  leur 
doctrine.  Saint  Pierre  dit  en  cflcl  dans  les 

Aci.  ii,3«.  Actes  des  apôtres  :  Que  chacun  de  vous  soit 
baptisé  au  nom  de  Jésus-Christ  jKivr  obtenir  la 

Bon,.  Ti,  3.  rémission  de  vos  jn-chcs.  Et  saint  Paid  :  Ne  sn- 
vez-vousjMS  que  nous  tous,  qui  avons  été  bapti- 
sés en  Jésus-Christ ,  nous  avons  été  baptisés  en 
sa  mor/?  Jésus-Christ  a  non-seulement  eflfacé 
nos  iniquités  par  sa  mort ,  mais  il  nous  a  en- 
core rendu  la  faculté  des  saintes  pensées  que 
Dieu  avait  accordées  au  premier  liommc  dans 
sa  création.  <(  Car  cetliomme,  dit-il,  qui  avait 
été  créé  exempt-  de  la  nécessité  de  pécher, 
étant  tombé  dans  le  crime ,  et  ayant  perdu 
par  sa  chute  la  santé  de  son  âme,  il  a  perdu 
en  même  temps  le  pouvoir  de  penser  iy  Dieu. 
Il  a  oublié  de  manger  son  pain,  et  étant  dé- 
pouillé du  vêlement  de  la  foi,  et  tout  cou- 
vert de  blessures  que  lui  avait  faites  la  con- 
cupiscence de  la  chair,  il  était  tellement  de- 
meuré accablé  sous  la  servitude  du  péché  , 
qu'il  n'aurait  jamais  pu  avoir  aucun  com- 
mencement de  bonne  volonté,  s'il  ne  l'avait 
reçu  de  Dieu,  qui  le  lui  donne  gratuitement. 
Par  la  chute  du  premier  homme  la  mort  est 
donc  entrée  dans  le  monde  avec  le  péché  ; 


et  l'un  et  l'autre  sont  passés  li  ses  descen- 
dants. Dire  ,  comme  faisaient  quelques-uns, 
que  les  enfants  ne  contractent  point  le  pé- 
ché originel,  c'est  nier  que  leur  chair  soit 
une  chair  dépêché,  ce  qui  est  contre  la  doc- 
trine expresse  de  l'Apùtre  ;  c'est  dire  qu'il  j"»"-  ' 
n'y  a  aucune  dillerence  entre  leur  chair  et 
celle  que  le  Fils  unique  de  Dieu  a  prise  dans 
le  sein  de  la  Vierge;  c'est  dire  encore  que  les 
enfants  n'ont  pas  besoin  du  secours  du  Sau- 
veur, et  c'est  tomber  conséquemment  dans 
l'hérésie  de  Pelage.  Si  les  enfants  naissent 
sans  péché,  il  n'y  a  rien  en  eux  (pii  puisse 
être  purifié  par  la  régém-ration  spirituelle, 
et  c'est  en  vain  qu'on  leur  confère  le  bap- 
tême pour  la  rémission  de  leurs  péchés.  Tou- 
tefois ce  baptême  est  donné  uniformément' 
aux  enfants  comme  aux  adultes ,  afin  que 
l'on  connaisse  qu'ils  ont  tous  la  tache  du  pé- 
ché originel.  C'est  la  foi  seule  du  Rédemp- 
teur, qui  nous  délivre  de  ce  péché  d'origine, 
et  il  nous  en  délivre  non  à  cause  de  la  foi 
qu'il  trouve  en  nous ,  mais  par  celle  qu'il 
nous  donne  :  car  la  foi  n'est  pas  de  nous , 
elle  est  un  don  de  Dieu.  Paul,  lorsqu'il  était 
un  blasphémateur  et  un  persécuteur',  n'a 
pas  été  aidé  delà  grâce  de  Dieu,  parce  qu'il 
voulait  croire  ;  mais  afin  qu'il  voulût  croire, 
il  a  reçu  le  don  de  la  grâce  prévenante, 
qui  trouva  dans  sa  volonté  non  pas  un  com- 
mencement de  foi ,  mais  le  blasphème ,  la 
cniauté,  les  outrages  et  l'ignorance  avec 
l'incrédulité.  Car,  depuis  que  le  premier 
homme  "  s'est  volontairement  souillé  par  le 
péché,  et  s'est  assujetti  en  péchant  à  mille 


'  Propterea  omnis  qui  in  nomine  Patris  et  Filii 
et  Spiritus  Sancti  sacrnmento  sanctœ  régénéra- 
tions alHuitur,  nonnisiin Christi  morte  ac  nomine 
baptizatur,  ut  eiidenler  apparent  illi  nos  conse- 
puttos  esse  per  baptismum  inmorte,  in  cujus  une 
constat  nomine  baptizatos.Qund,  duorum  magno- 
rum  luminarium,  Pelri  scilicel,  Paulique  vcrbis, 
tanquam  splendcntibus  radiis  illustrata,  eorum- 
quc  decorata  corporibus  romana,  quœ  mundi 
cacumrn  est,  tenet  et  docet  Ecclesia.  lolusque  cum 
ea  chrislianus  orbis.  Fui?.,  Epist.  17,  pag.  298. 

*  Peccans  itaquc  illc  qui  sine  peccandi  neccssi- 
tate  creatus  est,  in  co  quod  animœ  sanilalem  de- 
linquemln  perdidit,  ctiam  itla  cngitandi  quœ  nd 
Deum  pertinent,  amisit  prolinus  facullatem.  Ohli- 
lus  est  enim  manducare  panem  suiim,  et  expolia- 
lus  vestimenlo  ftdei  carnalinmque  conrupiscen- 
liarum  vulneribus  sauciatus,  sic  jacuil  nppressus 
ditione  peccali,  ut  nullalenus  aliqnod  bonce  ro- 
tuntatis  inilium  habere  poluissel,  nisi  hoc  Deo 
gratis  douante  sump&isset.  IMd.,  pag.  300. 

'  Quod  baptismalis  sacramenlum  idco  unifor- 


miter  infanlibus  mnjoribusque  confertur  vt  om~ 
nibus  originalis  inesse  peccati  mactila  cognosca- 
lur.  Ibid.,  pag.  303. 

'  Cm  m  ergo  Paulus  esset  blasphemus  et  perse- 
cutor  et  contumeliosus,  non  ideo  est  ndjiitus  Dei 
gratia,  quia  credtre  roliiit;  sed  ut  credere  rellet, 
donum  gralim  prœrenientis  acrepit,  quœ  in  ejus 
roluntate  non  aliqnod  credulilatis  initium,  sed 
blasphemium,  sœvitiam,  cnniumelias  et  ignoran- 
tiam  in  incrediilitale  reperit.  Iliiii.,  pag.  30G. 

'  Ex  quo  enim  primus  liomo  naluram  suam  vo- 
luntarie  viliarit.  atque  oppressif ,  ita  crcrit  in- 
firmilas,  ut  nisidirinœ  gratia-  medicamento  prw- 
vcnlurn  in  unoquoque  hominc  sanetur  atque  ad- 
juvelur  liberum  indesxnenter  arbitrium,  sit  qui- 
dem  liberum,  non  tamen  bonum  :  sit  liberum,  non 
tamen  rectum:  sit  liberum,  non  tnmen  sanum  : 
sit  liberum,  non  tamen  jiistum  :  el  quanlo  magis 
a  bonitale,  rectiindine.  sanitnte,  jusiitiaque  lilie- 
rum.  tanio  magis  nifi/ihVr,  perrersitatis.  infirmi- 
tatis  atqw  iniquitatis  mortifera  serritute  capli- 
tum  ;  Qui  enim  farit  peccaluni  fcrviis  esl  |ipri'ali, 


[Vl'  SIÈC/,E.] 

iiiliiinilrs,  sa  faiblossc  est  devenue  si  gran- 
de i[ii(',  si  lo  libre  arbitre  ilo  cbaqno  bonimo 
eu  pailiciilicr  n'esl  j^néri  cl  ii't>st  aiib'^  ]iai' 
celte  gi'Acp ,  il  peut  bien  être  libre,  mais  il 
110  sera  ni  bon,  ni  droit,  ni  sain,  ni  juste; 
et  plus  il  est  ainsi  atlrancbi  de  la  bonté,  de 
la  santé,  delà  droiture  et  de  la  justice,  plus 
il  est  asservi  et  sujet  i\  la  servitude  niorlello 
de  la  malice,  de  l'injustico,  de  la  faiblesse 
et  de  riuitjuité,  suivant  celte  parole  de  saint 

jMn.   vui,   j,.;in  ;  Celui  qui  iimwwt  le  péc/ié  est  esclafc  du 

n  rnr.  Il,  j)^cltè;c{  cette  autre  de  saint  Pierre:  Quicon- 
que est  vaincu ,  est  esclave  de  celui  qui  l'a  vain- 
cu. Ainsi,  tant  que  le  pécbé  n^gne  dans  l'bora- 
nie,  il  a,  A  la  vérité,  un  libre  arbitre,  mais 
qui  est  libre  sans  Dieu,  et  non  pas  libre  sous 
l'empire  de  Dieu;  c'est-à-dire  libre  de  la 
justice ,  et  non  pas  libre  sous  la  grâce  ;  et 
dès  lors  il  est  libre,  mais  d'une  liberté  misé- 
rable et  esclave,  n'ayant  ptiint  été  délivré 
pai"  la  grâce  toulc  gratuite  d'un  Dieu  qui  fait 

Bom.  viso.  miséricorde.  C'est  ce  que  saint  Paul  nous 
fait  entendre  clairement  par  ces  paroles  : 
lorsque  vous  étiez  esclaves  du  péc/té ,  vous  étiez 
dcms  une  fausse  liberté  à  l'égard  de  la  justice. 
Quiconque  donc  est  libre  à  l'égard  de  la  jus- 
tice ne  peut  point  faire  des  œuvres  de  justi- 
ce :  parce  que  tant  qu'il  est  esclave  du  pécbé 
il  n'est  capable  que  de  pécher.  Or  il  n'y  a 
que  la  grâce  de  Jésus-Cbrist  notre  libérateur 
qui  puisse  nous  délivrer  de  cette  servitude 
du  pécbé.  » 

^suiie,  lu;.  4.  Celte  liberté,  qui  ne  naît  pas  du  libre 
arbitre  de  l'homme,  mais  qui  est  donnée  par 
la  miséricorde  gratuite  de  Dieu,  prend  son 
commencement  de  la  bonne  volonté,  comme 
notre  vie  prend  le  sien  de  la  foi,  laquelle  ne 
naît  point  de  notre  volonté,  mais  nous  est 
donnée  par  le  Saint-Esprit.  C'est  cet  Esprit 
Saint  qui  forme  Jésus-Christ  dans  le  cceur 
des  fidèles  selon  la  foi,  comme  il  a  formé 
Jésus-Christ  selon  la  chair  dans  le  sein  de  la 
Vierge.  Loin  que  la  grâce  détruise  le  libre 
arbitre  ',  elle  le  guérit  ;  elle  ne  l'ûte  pas, 
mais  elle  le  corrige,  l'éclairé ,  l'aide  et  le 


ClTAPrmH  I.  —  SAINT  FULGKNCE  DK  IIUSPI-;. 


M 


conserve.  Saint  Fulgoncc  fait  voir  que  Dieu, 
en  donnant  la  foi  à  (|uelf|iies-uns  ,  lors((u'il 
la  refuse  ."i  d'autres,  ne  f:iil  pdinl  acceplidU 
de  persoime,  puisqu'il  use  à  l'i'gard  des  hom- 
mes, comme  un  potier  ;'i  l'égard  d'une  masse 
d'argile  dont  il  fait  tantôt  un  vase  d'honneur, 
el  lanlnt  un  vase  d'ignominie.  Il  avoue  que 
l'on  peut  dire  en  un  sens  que  l'bomme  peut 
croire  naturellement,  quoiqu'il  lui  soit  donné 
de  Dieu  de  croire  ;  étant  évident  qu'il  est 
créé  pour  croire ,  parce  que  par  la  foi  la  na- 
tiu'c  humaine  est  renouvelée  de  sa  vétusté  , 
cl  qu'il  est  même  contre  la  nature  de  l'hom- 
me de  ne  pas  croire  en  Dieu  ;  puisque  son 
incrédulité  ne  lui  vient  pas  de  la  création  , 
mais  de  la  transgression  volontaire  du  com- 
mandement de  son  Créateur.  11  enseigne  que 
lorsque  l'Apôtre  dit  qu'il  y  a  des  peuples 
qui  font  naturellement  ce  que  la  loi  com- 
mande, cela  doit  s'cnlendre  des  peuples  fi- 
dèles et  convertis ,  qui ,  sans  avoir  la  lettre 
de  l'Ancien  Testament,  en  exécutaient  les 
préceptes  par  la  grâce  du  Nouveau  ;  que  la 
coimaissance  de  Dieu ,  cl  la  foi  ne  servent 
de  rien  sans  la  charité  ;  et  que  si  Dieu  ne 
donne  pas  la  foi  à  tous,  il  faut  adorer  en  cela 
la  profondeur  de  ses  jugements  ,  se  conten- 
ter de  reconaîlre  qu'il  exerce  gratuitement 
sa  miséricorde  envers  ceux  qui  sont  sauvés; 
adorer  sa  justice  à  l'égard  de  ceux  qui  sont 
condamnés,  et  chanter  avec  un  cœur  contrit 
et  humilié  la  justice  et  la  miséricorde  du  Sei- 
gneur qui  nous  montre  dans  les  vases  de  co- 
lère, destinés  à  la  perdition,  que  nulle  ini- 
quité ne  peut  plaire  à  sa  justice,  et  qui  nous 
fait  sentir  dans  sa  conduite  envers  les  vases 
de  miséricorde  que  sa  bonté  peut  remettre 
tous  les  péchés  à  qui  il  lui  plaît.  En  expli- 
quant ces  paroles  de  saint  Paul  :  Dieu  veut  \  Ti™ 
qus  tous  les  hommes  soient  sauvés,  et  qu'ils  par- 
viennent à  la  connaissance  de  la  vérité  ,  il  sou- 
tient que  ceux-là  se  trompent  qui  prétendent 
que  saint  Paul  .suppose  en  cet  endroit  une 
volonté  générale  et  égale  de  sauver  tous  les 
hommes.   «  Ceux  qui  soutiennent,  dit-il  ^, 


et  a  quo  quisdevictus  est,  huic  et  servus  addictus 
est'?  Régnante  igitur  peccato,  habet  quidem  lihe- 
rwm  arbitrium,  sed  liberam  sine  Deo,  non  libe- 
rum  sub  Deo,  id  est,  liberum  juslitia,  non  lihe- 
rum  sub  gratia,  et  ob  hoc  pesslme  atque  scrvili- 
ter  liberum,  quia  non  rfratuito  miserentis  Dsi 
immere  liberatum.  Hoc  Àpostolus  evidenter  insi- 
nuât, dicens  :  Cum  enim  servi  essetis  peccati,  li- 
beri  fuistis  justitiae.  Servire  igitur  justitiœ  non 
potest  qui  jusLiliœ  liber  est:  quia  quamdiu  est 


peccati  servus,  nonnisi  ad  serviendum  peccato 
reperitur  idoneus.  Ab  isia  servilute  peccati  nemo 
liber  efficitur,  nisi  qui  liheratoris  Christi  gratia 
tiberatur,  ut  scilicel  liberalus  a  peccato  servus 
fiât  Deo.  Fui?.,  Epist,  17,  pag.  307. 

1  Gratia  humanum  non  auferlur,  sed  sanalur; 
non  adimitur,  sed  corrigitur,  illuminalur.  adju- 
vatur  atque  servaiur  arbitrium.  ibid.,  pag.  309. 

-  Illud  vcro  apostolicum  ubi  dicitur  d.'  Deo  : 
Oui  vult  omnes  homines  salvos  fieri  et  ad  aguitio- 


4S 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUT:S. 


que  celte  volonté  de  Dieu  regarde  aussi  bien 
les  réprouvés  que  les  élus,  n'entendent  point 
comme  il  faut  le  texte  de  TApôtre.  Us  ne 
font  point  assez  d'attention  à  cette  parole  si 
certaine  de  l'Écriture,  qui,  pour  nous  assurer 
de  la  toute  puissance  de  Dieu,  nous  dit  :  // 
a  fait  tout  ce  qu'il  a  voulu  dans  le  ciel ,  sur  la 
terre,  dans  la  mer  et  dans  tous  les  abîmes.  Qu'au- 
ront à  répondre,  ajoute-t-il,  ces  personnes 
qui  croient  que  la  volonté  de  Dieu  par  la- 
quelle il  veut  que  tous  les  hommes  soient 
sauvés,  est  égale  envers  ceux  qui  doivent  être 
rachetés,  et  envers  ceux  qui  doivent  être  dam- 
nés, lorsqu'on  leur  demandera  comment  il 
se  peut  faire  que  Dieu  veuille  que  tous  les 
hommes  soient  sauvés,  et  que  tous  cependant 
ne  le  soient  pas?  Répondront-elles  que  Dieu 
attend  la  volonté  de  l'homme,  afin  que  la 
récompense  soit  justement  donnée  à  ceux 
qui  veulent  le  bien ,  et  que  ceux  qui  ne  le 
veulent  pas,  soient  justement  condamnés  ?  >> 
Saiut  Fulgence  fait  voir ,  par  le  discerne- 
ment que  Dieu  fait  entre  les  enfants,  combien 
cette  réponse  est  frivole  ;  puisque  l'on  ue  peut 
pas  dire  que  le  bon  ou  le  mauvais  usage  de 
leur  volonté  soit  la  cause  ou  de  leur  salut 
ou  de  leur  damnation.  Si  Dieu,  pour  sauver 


les  hommes,  n'excite  ni  ne  change  leur  vo- 
lonté, mais  l'attend,  comment  donne-t-il  le 
salut  éternel  aux  enfants  qui  meurent  aus- 
sitôt après  le  baptême ,  sans  avoir  attendu 
ni  trouvé  en  eux  une  bonne  volonté  ?  Com- 
ment en  condamne -t-il  d'autres,  qui  sont 
morts  sans  baptême  ,  au  supplice  éternel , 
sans  avoir  trouvé  en  eux  aucune  faute  d'une 
mauvaise  volonté?  Il  appelle  ces  ennemis  de 
la  grâce,  non  les  défenseurs,  mais  les  trom- 
peurs du  libre  arbitre;  et  il  ajoute  '  :  «Quand 
donc  on  parle  de  tous  ceiLX  que  Dieu  veut 
sauver  ,  il  faut  l'entendre  de  manière  que 
nous  ne  nous  imaginions  pas  que  per- 
sonne ne  puisse  être  sauvé  que  par  la  volonté 
de  Dieu ,  ni  que  la  volonté  d'un  Dieu  tout 
puissant  puisse  n'être  pas  accomplie,  ou  que 
quelque  chose  en  puisse  empêcher  l'elJet  en 
quelque  manière  que  ce  puisse  être.  Car 
tous  ceux  que  Dieu  veut  qu'ils  soient  sauvés, 
sont  indubitablement  sauvés ,  et  personne 
ne  peut  être  sauvé  sinon  ceux  que  Dieu  veut 
qu'ils  le  soient,  et  il  n'y  en  a  aucun  qne 
Dieu  veuille  qu'il  soit  sauvé,  qui  ne  le  soit 
en  eil'et ,  parce  que  notre  Dieu  a  fait  tout 
ce  qu'il  a  voulu  faire.  Tous  ceux  donc 
que  Dieu  veut  qu'ils  soient  sauvés,  sont  ef- 


nem  veritatis  venire,  nonsicut  oportet  intelligunt, 
qtii  hanc  Dei  voluntatem  sicul  in  vasis  misericor- 
diœ,  sic  et  in  vasis  irœ  accipiendam  pulant,  mi- 
nus considérantes  veracissiinam  Scriplurœ  sen- 
tentiam,  qu<B  divinœ  commendans  omnipotentiam 
voluntatis  :  Omnia,  inqiUt,  quaecumque  voliiit  fe- 
fecit  in  cœlo  et  in  terra,  in  mari  et  in  omnibus  abis- 
sis...  Proinde  hi  qui  voluntatem  Dei  qua  omnes 
homines  vuU  salvos  fieri,  œqualent  circa  redi- 
mendos  et  damnandos  exislimant,  cum  inlerrogati 
fuerint  cur  velil  Deus  omnes  homines  salvos  fieri 
nec  tamen  omnes  salvi  fiant,  quid  re^pondebunt? 
An  itlud  quod  vestra  eos  dicere  testatur  epistola, 
quia  Deuscxspectat  hominis voluntatem , ut  œquum 
sit  in  volentibus  prœmium,  in  noientibus  autem 
justa  damnatio?  Sed  ut  prnlixitatcm  vitantes 
omittamus  alla  quœ  possunt  pro  veritate  fidei  huic 
pravœ  sententiœ  replicari,  intérim  testimonio  con- 
vincantur  atque  confundantur  non  loquentium 
hominum,  sed  tacentium  parvulorum..  In  eis  nam- 
que  nec  bona  voluntas  est,  ut  œquum  sit  in  vo- 
lentibus prœmium;  nec  mala.ut  sit  in  noientibus 
justa  damnatio.  Si  ergo  ad  salvandos  homines 
sicul  isti  volunl,  non  excitât,  neque  mutât,  sed 
exspectat  hominum  voluntates,  quomodo  infanti- 
bus  qui  baptisantur,  et  in  eadcm  infantia  moriun- 
lur,  dnnat  ceternam  salutem,  quoruyn  bonam  nec 
exspectat  nec  inienit  voluntatem? Item  alios  quo- 
mndo  sine  baptismale  morluns  œternis  cruciati- 
bus  dnmnat,  cum  in  eis  nullam  culpam  malir  vo- 
luntatis inieniat  ?  lliiil.,  paj.'.  318. 
'  Quocirca  itlos  omnes  qxtos  Deus  vuU  salvos 


fieri,  sic  intelligere  debemvs  ut  nec  aliquem  pute- 
mtts  salvum  fieri  pos.'ie  nisi  voluntate  Dei,  nec 
existimemus  voluntatem  omnipotentis  Dei,  aut  in 
aliquo  non  impleri,  aut  aliquatemus  impediri. 
Omnes  enim  quos  Deus  vult  salvos  fieri  sine  du- 
bitatione  salvantur,  nec  possunt  salvari  nisi  quos 
Deus  vult  salvos  fieri.  nec  est  quisquam  quem 
Deus  saivari  velit,  qui  non  salvetur  :  quia  Deus 
noster  omnia  quaecumque  voluit  fecit.  Ipsi  omnes 
iitique  salvi  fiunt  quos  omnes  vult  salvos  fieri  : 
quia  hœc  salus  non  illis  ex  humana  voluntate  tias- 
cilur  sed  ex  Dei  bnna  voluntate  prœstatnr.  Ve- 
rumtamen  in  his  omnibus  Iwminibus,  quos  Deus 
rull  salvos  faccre,  non  totum  oninino  genus  si- 
gnificatur  hominum,  sed  omnium  universitas  sal- 
randorum.  Ideo  autem  omnes  dicli  sunt,  quia  ex 
omnibus  hominibus  omnes  istos  divina  bonitas 
salvat,  id  est,  ex  omni  génie,  conditione,  œtate, 
ex  omni  lingua,  ex  omni  provincia.  In  his  omni- 
bus ille  sermo  twstri  Redemptoris  implelur.  quo 
ait:  Cum  exaltatus  fncro  a  terra,  omnia  traham  ad 
meipsum.  Quodrion  ideo  dixit  quia  omnes  omnino 
trahit,  sed  quia  nemo  snlvus  fil.  nisi  quem  ipse 
Iraxerit.  Sam  et  alibi  dicit:  Nemo  potest  vcnire 
ad  me,  nisi  Pater  qui  misit  me  traxcrit  eum.  Item 
alibi:  Onine  quod  dédit  mihi  Pater  ad  me  veniet. 
m  ergo  sunt  omnes  quos  vult  Deus  salvos  fieri  et 
ad  agnilionem  veritati»  venire.  Est  autem  fami- 
liari  divinis  eloqiiiis,  ul  omnes  nonnumquam  di- 
canl,  nec  tamen  omne  humanum  genus  in  ipsis 
omnibus  semper  inlelligi  debere  commoneant. 
Ibid.,  pag.  'Jùl  et  322. 


JoaD. 

ai. 


[Vl°  SIÈCLE.] 

lectivcmcnt  sativi's,  parce  qiio  ce  n'est  jininl 
par  leur  propre  viiloiiti',  mais  par  la  volmité 
de  Dieu  qu'ils  oMii'iuiciil  le  saliil.  Ainsi 
quaml  ou  parle  de  Idiis  les  Ikiiiuikîs  (pie 
Dieu  veut  sauver,  ou  lui  doit  jias  entendre 
absolunieul  et  eulit'reineut  tout  h;  K<'"if  1'"- 
niain,  mais  seulement  la  totalité  de  ceux  qui 
seront  sauvés,  que  l'Écriture  appelle  du 
nom  do  tous,  parce  que  c'est  d'entre  tous 
les  hommes  que  la  divine  l)onté  choisit  tous 
ceux  qui  sont  sauvés,  c'est-à-dire  qu'elle 
les  prend  de  toute  nation ,  de  toute  condi- 
tion ,  de  tout  Ape ,  de  toute  langue,  de  toute 
province.  C'est  dans  tout  cela  que  cette  pa- 
role de  nolie  Hédempleiir  est  accomplie  : 
Quand  on  m'aura  élevé  de  la  terre  je  tirerai 
tout  à  moi  ;  non  pas  qu'il  tire  absolument  à 
lui  tous  les  hommes  sans  exception  ;  mais 
parce  que  personne  n'est  sauvé,  sinon  ceux 
que  le  Fils  tire  h  lui.  Car  il  dit  encore  ail- 
leurs :  Personne  ne  peut  venir  à  moi,  si  mon 
Père  qui  m'a  envoyé  ne  le  tire.  Et  encore  : 
Tout  ce  que  mon  Père  m'a  donné  viendra  à  moi. 
Ce  sont  donc  là  tous  ceux  que  Dieu  veut 
sauver,  et  faire  venir  à  la  connaissance  de  la 
vérité.  » 

Saint  Fulgence  prouve  par  un  grand  nom- 
bre d'exemples  tirés  de  l'Écriture ,  que  le 
root  de  tous,  ou  totts  les  hommes,  ou  toutes  les 
nations,  ne  doit  pas  toujours  s'entendre 
d'une  totalité  entière,  absolue  et  sans  excep- 
tion :  «  Car  autrement,  dit- il,  on  serait  obligé' 
d'avouer  que  le  mensonge  se  trouverait  mê- 
me dans  la  parole  de  Dieu.  Il  est  dit  daus  le 
prophète  Joël  :  Je  répandrai  mon  esprit  dans 
les  derniers  jours  sur  toute  chair  ;  prophétie 
que  saint  Pierre  dit  avoir  été  accomplie  dans 
les  cent  vingt  personnes  sur  lesquelles  le 
Saint-Esprit  descendit  en  forme  de  langues 
de  feu.  Le  même  apùtre  disait  aux  Juifs  : 
Ad.  II,  38  8t  Faites  pénitence,  et  que  chacun  de  vous  soit  bap- 
tisé au  nom  de  Jésus-Christ  pour  obtenir  la  ré- 
mission de  vos  péchés,  et  vous  recevrez  le  don  du 
Saint-Esprit.  Car  la  promesse  a  été  faite  à 
vous  ,  et  à  vos  enfants ,  et  à  tous  ceux  qui  sont 
éloignés,  autant  que  le  Seigneur  en  appjellera. 


CriAPITHE  1.  —  SALNT  FUI.GENCE  DE  RUSPE. 


4!) 


iaSI.  11,29. 


Il  appelle  iloiu'  liiiis  cpiiconipio  est  appelé  du 
SeigiKMir.  Il  est  dit  dans  h's  Psaumes  que  ton-  ,  '""i-  ■•'>"• 
tes  les  nations,  que  Dieu  a  faites,  viendront, 
qu'elles  l'adoreront,  et  qu'elles  glorilieronl 
son  nom  ;  et  toutefois  Jésns-Christ  dit  t\  ses 
apôlres  :  Vous  serez  hais  de  toutes  les  nations  à  MjhIi.i.ïî. 
cause  de  mon  nom.  L'I'Jcriture  est-elle  donc 
contraire  à  elle-même  ?  A  Dieu  ne  plaise  ! 
Mais  elle  a  compris  sous  le  terme  de  tous, 
ceux  qui  dans  les  nations  devaient  se  con- 
vertir, et  glorifier  parleur  foi  le  nom  du  Sei- 
gneur; et  tous  les  incrédules,  qui,  dans  les 
mêmes  nations ,  devaient  persévérer  par 
leur  impiété  dans  la  haine  du  nom  de  Jé- 
sus-Christ. Nous  lisons  dans  l'Épltre  aux  coios..  1,10 
Colossiens ,  que  tout  a  été  créé  par  le 
Fils  daus  le  ciel  et  dans  la  terre,  les  cho- 
ses visibles  et  les  choses  invisibles  ;  et  au 
même  endroit,  qu'il  a  plu  au  Père  de  récon- 
cilier par  lui  toutes  choses  avec  soi,  ayant 
pacifié,  par  le  sang  qu'il  a  répandu  sur  la 
croix,  tant  ce  qui  est  dans  la  terre,  que  ce 
qui  est  dans  le  ciel.  Dira-t-on  que  Jésus- 
Christ  a  pacifié  tout  ce  qui  est  dans  le  ciel 
et  sur  la  terre?  S'il  en  était  ainsi,  il  faudrait 
de  deux  choses  l'une  :  ou  nier  que  le  diable 
ou  les  anges  ont  été  créés  par  Jésus-Christ, 
ou  dire  qu'il  les  a  réconciliés  par  le  sang  de 
sa  croix.  L'une  et  l'autre  de  ces  deux  proposi- 
tions sont  insoutenables,  et  il  n'y  a  pas  moins 
d'impiété  à  dire  que  le  diable  n'a  pas  été 
créé  par  Jésus-Christ,  qu'à  croire  qu'il  a  eu 
part  à  la  réconciliation  de  Jésus-Christ.  »  A 
l'occasion  de  ce  passage,  saint  Fulgence  don- 
ne une  autre  expfication  à  ces  paroles  de  l'A- 
pôtre :  Dieu  veut  sauver  tous  les  hommes  :  a  De 
même  qu'on  dit  que^  toutes  choses  ont  été 
créées  par  Jésus-Christ,  parce  qu'il  n'y  a 
rien  que  le  Père  n'ait  créé  dans  son  Fils  et 
par  sou  Fils,  de  même,  dit  ce  saint  évêque, 
on  doit  dire  que  tous  sont  réconciliés  avec 
Dieu  en  Jésus-Christ  et  par  Jésus-Christ,  parce 
qu'il  n'y  a  aucun  homme  qui  soit  réconcilié 
avec  Dieu  autrement  que  par  la  croix  de  Jé- 
sus-Christ. Par  cette  règle  ainsi  appuyée  sur 
l'autorité  des  divines  Écritures,  nous  devons 


'  Dicil  Dominus  per  prophetam  Joël:  In  novis- 
simis  diebus  etViimlam  de  Spirilu  ineo  super  om- 
nem  carueni.  Quod  in  cenlwm  viginti  hominibus, 
in  qtios  Spirilus  Sanctus  linguis  igneis  venil,  fac- 
tum  beatus  Pelrus  ostendit.  Si  ergo  hic  omiieni 
carnein  oinnes  oinnino  putareriinus  homines  in- 
telligi,  incipiet,  quod  absit,  mendax  œstimari  ser- 
mo  divinus.  Ibid. 

2  Omnia  ergo  per  ChrisCum  et  in  Christo  creata 

XI. 


siuit,  qtiia  nihilest  quod  non  per  Filiuin  et  in  Filio 
creaoerit  Pater.  El  omnia  per  ipsum  atque  in  ipso 
reconciliantur,q%iianullus  est  hominum  qui  sine 
cruce  Christi  reconviliationis  beneficium  conse- 
qualur.  Ex  hac  igiluf  régula,  quœ  cœlestibus  in- 
serta  nwnstratur  oraculis,  sicintelligamus  omnes 
homines  quos  vult  Deus  salvos  fieri,  ut  noveri- 
■mus  otnnes  qui  salcantur,  nonnisi  ex  ejus  gra- 
tuila  bonitate  salvari.  Ibid.,  pag.  312. 

4 


50 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


entendre  de  telle  sorte,  que  Dieu  veut  sauver 
tous  les  /lommes,  que  nous  sachions  que  de 
tous  ceux  qui  soûl  sauvés  il  n'y  en  a  pas  un 
qui  ne  soit  sauvé  par  la  bonté  gratuite  du 
Seig-neur.  ii  Saint  Fulgence  Onit  par  une  réca- 
pitulation de  ce  qu'il  avait  dit  sur  le  mystère 
de  l'incarnation  et  sur  celui  de  la  grâce.  «  A 
quoi  il  ajoute  que  Dieu  qui  a  créé  l'homme, 
lui  a  préparé  par  le  décret  de  sa  prédestina- 
tion, la  foi,  la  justification,  la  persévérance 
et  la  gloire  ;  el  (juc  quiconque  ne  reconnaît 
point  la  vérité  de  la  i)ré(lestination  par  la- 
quelle saint  Paul  dit  que  nous  avons  été  élus 
en  Jésus-Christ  avant  la  création  du  monde, 
ne  sera  point  du  nombre  des  élus,  et  n'aura 
point  de  part  au  salut,  s'il  ne  renonce  à  cette 
erieur  avant  de  mourir.  »  11  dit  néanmoins 
que  l'on  ne  doit  point  cesser  de  prier  pour 
ces  sortes  de  personnes ,  afin  que  Dieu  les 
éclaire  par  sa  grâce  qui  fait  fructifier  la  pa- 
role divine;  parce  que  c'est  en  vain  qu'elle 
frappe  nos  oreilles,  si  Dieu  par  un  don  spiri- 
rituel  n'ouvre  l'entendement  de  l'homme  in- 
tériem'. 

§  XII. 
Lettre  au  comte  Régin. 
.  J'"«/l       !•  Le  comte  Régin  avait  écrit  à  saint  Fui- 

comte    Brpia  *-' 

Jcum!"  ''"''  gence  pour  le  consulter  sur  deux  points.  Le 
premier  de  doctrine,  savoir  si  le  corps  de 
Jésus-Christ  était  corruptible  ou  s'il  était  de- 
meuré incori'uptible.  Le  second  de  morale, 
regardait  la  vie  que  doit  mener  un  homme 
engagé  dans  la  profession  des  armes.  Nous 
n'avons  jilns  la  lettre  de  ce  comte.  Saint  Ful- 
gence ne  lépondit  qu'à  la  première  de  ses 
questions,  la  mort  l'ayant  empêché  de  satis- 
faire à  la  seconde.  Régin  s'adressa  donc  au 
diacre  Ferrand  qui  l'instruisit  sur  ce  qu'il 
souhaitait  par  une  lettre  que  nous  avons  en- 
core. 
B«pni..(.  Je       2.  Ce  qui  avait  engagé  Régin  à  consulter 

lui  Fulccn-  .         _,     ,  ,  .,  ...     , 

»  Bi-sin,  saint  Fulgence  sur  la  corruptibilite  ou  Ini- 
corruptiliilité  du  corps  de  Jésiis-Clirist ,  était 
la  dispute  élevée  depuis  quelque  temps  en- 
tre les  eutycliéens  d'Orient,  les  uns  soute- 
nant que  le  corps  de  Jésus-Christ  avait  été 
incorruptible  dès  le  moment  de  sa  concep- 
tion; les  autres  qu'il  avait  été  corruptible 
avant  sa  passion,  et  qu'il  était  incorruptible 
depuis  sa  résurrection.  Saint  Fulgence  dis- 
tingue deux  sortes  de  corruption,  l'une  du 
péché,  qui  renferme  la  concupiscence  et  le 
péché  môme  ;  l'autre  du  corps,  qui  consiste 


>ali 
ce 
lii;.  323, 


dans  l'altération  sensible  dos  parties  du 
corps,  et  dans  sa  si'-paration  d'avec  l'âme. 
Ce  principe  posé,  il  répond  que  Jésus-Christ, 
ayant  pris  une  nature  sujette  à  la  mort,  a 
aussi  été  sujet  à  la  faim ,  à  la  soif  et  à  la  fa- 
tigue ,  qui  sont  des  faiblesses  inséparables 
d'une  nature  sujette  à  la  mort,  et  qui  cau- 
sent la  mort  même,  puisque  par  la  soif,  la 
faim  et  la  fatigue,  se  fait  la  dissolution  du 
corps  d'avec  l'àme.  Il  iijoute  qu'il  a  encore 
été  sujet  à  la  corruption  qui  consiste  dans 
la  mort,  puisqu'il  est  mort  réellement  ;  mais 
qu'il  n'a  point  essuyé  celte  autre  sorte  de 
corruption  qui  entraîne  une  si  grande  alté- 
ration des  parties,  que  le  corps  est  réduit  en 
pourriture  et  en  poussière ,  étant  ressuscité 
le  troisième  jour,  toutes  les  paities  de  son 
corps  entières;  que  depuis  sa  résurrection 
il  est  absolument  incorruptible  par  l'union 
inséparable  de  son  âme  avec  son  corps,  qui, 
par  la  gloire  dont  il  jouit,  est  comme  spiri- 
tualisé.  Il  cite  sur  cela  un  témoignage  de 
saint  Augustin  tiré  de  sa  lettre  à  Consentius. 
A  l'égard  de  la  première  sorte  de  corruption, 
il  soutient  qu'elle  n'a  eu  aucun  lieu  dans  Jé- 
sus-Christ, n'ayant  contracté  ni  péché  origi- 
nel, ni  péché  actuel  ;  que  pendant  sa  vie  mor- 
telle il  n'a  point  été  sujet  aux  passions  qui 
préviennent  la  l'aison  et  causent  des  trou- 
bles involontaires ,  et  que  s'il  a  quelquefois 
soufl'ert  les  impressions  de  la  tristesse  et  des 
autres  infiiinilés  de  notre  ftme,  c'a  été  vo- 
lontairement de  sa  part,  pour  nous  montrer 
qu'il  nous  prêterait  son  secours  dans  de  sem- 
blables ai'llictions  que  nous  soutirons  néces- 
sairement. 

§  XlII. 
Livre  de  la  Trinité  à  Félix. 

1.  Félix,  (jui  est  qualifii-  notaire,  se  trou-  p.iiJ*'"?,^', 
vait   souvent  avec    des    hérétiques   qui  tû-  f"'*""- 
chaient  de  l'engager  dans  leurs  erreurs.  Vou- 
lant non-seulement  éviter  les  pièges  qu'ils 

lui  Icndaioiit  à  cet  ellel,  mais  les  ramener 
lui-même  à  la  vérité  de  la  foi  catholique,  il 
pria  saint  Fulgence  de  l'instruire  exactement 
de  la  doctrine  orthodoxe  sur  la  Trinité.  Fé- 
lix avait  encore  spécifié,  ce  semble,  quelques 
autres  articles  sur  lesquels  il  avait  besoin 
d'instruction  :  car  outre  celui  de  la  Tjrinité , 
suint  Fulgence  traite  encore  de  ce  qui  re- 
garde les  anges  cl  l'homme. 

2.  «  La  foi  que  nous  voulons  vous  faire  con-     .  }-'J"  ■" 
naiire,  lui  répondit  le  saint  évoque,  est  celle  J^.'j,^*'"' 


[vr  SIKCLE.] 

par  qui  les  paliiafclms,  les  prophMcs  et  les 
apôtres  ont  été  justifiés,  et  les  martyrs  cou- 
ronnés; celle  (pio  la  sainte  Ef^lise,  répandue 
par  toute  la  terre  ,  a  professée  jusqu'ici,  et 
qu'ont  enseignée  successivement  les  évo- 
ques qui  se  sout  assis  à  Rome  dans  la  chaire 

cip.  1.  de  saint  Pierre,  ou  à  Anlioclio  ;  à  Alexan- 
drie dans  la  chaire  de  saint  Marc  ;  ;\  Éphèsc 
dans  la  chaire  de  saint  Jean,  et  ;\  Jérusa- 
lem dans  celle  de  saint  Jacques.  Contraignez 
donc  les  ariens,  les  douatistes,  les  nesto- 
riens  et  les  autres  hérétiques  de  communi- 
quer avec  ces  Eglises  auxquelles  les  ap(Mres 
ont  présidé.  Ils  ue  veulent  pas  y  consentir, 
parce  qu'étant  divisés  de  l'unité  de  l'Eglise 
par  leur  foi  erronée,  ils  ont  mieux  aimé  faire 
".  un  parti,  d  11  dit  encore  que  cette  foi  est  la  mê- 
me que  celle  dans  laquelle  Félix  avait  été  ré- 
généré autrefois  en  croyant  au  nom  du  Père 
et  du  Fils  et  du  Saint-Esprit.  11  explique  cette 
foi  en  disant  :  «  Le  Père  n'est  pas  le  Fils',  le 
Fils  n'est  pas  le  Père,  le  Saint-Esprit  n'est 
ni  Père  ni  Fils.  Étant  trois,  quel  est ,  je  vous 
pi'ie,  le  nom  unique  du  Père,  du  Fils  et  du 
Saint-Esprit,  dans  lequel  il  faut  que  uous 
soyons  baptisés,  sinon  le  nom  de  la  Divinité 
qui  ne  peut  être  triplé  ?  Car  encore  que  nous 
disions  que  le  Père  *est  Dieu,  que  le  Fils  est 
Dieu,  que  le  Saint-Esprit  est  Dieu,  nous  ne 
disons  pas  ti-ois  dieux,  parce  qu'il  est  écrit  : 

Deui.  ïi,».  Ecoute,  Israël,  le  Seigneur  ton  Dieu  est  un.  U 
est  donc  un  en  nature,  non  en  personne,  car 
autre  est  la  personne  du  Père,  autre  celle  du 
Fils,  autre  celle  du  Saint-Esprit.  Le  Père  n'est 
engendré  d'aucun,  le  Fils  est  engendré  du  Pè- 
re, le  Saint-Esprit  procède  du  Père  et  du  Fils. 
Ces  noms  relatifs  fout  la  Trinité,  les  essen- 
tiels ne  se  triplent  pas.  Toutefois  quelque 
nom  que  vous  prononciez  de  ces  trois  dans 
la  sainte  et  souveraine  Trinité,  il  signifie  une 


CHAPITRE  L  —  SAINT  FULC.ENCE  DE  IIUSPE. 


M 


mémo  chose,  parce  que  l'essenci'  (hi  l'ère;, 
du  Fils  et  du  Saint-Esprit  n'est  pas  dill'érentc. 
Si  elle  l't'tait,  le  Fils  ne  serait  pas  véritahle- 
mcut  engendré  du  Père,  et  le  Saint-Esprit 
no  procéderait  pas  du  Père  et  du  Fils.  Il  y  a  c«p.  m. 
donc  trois  coéternels,  consubstanticls  et  coes- 
sentiels.  Quand  on  a  demandé  aux  saints  Pè- 
res ce  qu'étaient  ces  trois,  ils  n'ont  pas  osé 
dire  que  c'étaient  des  essences,  des  substan- 
ces ou  des  natures,  de  peur  que  l'on  ne  crût 
qu'ils  avaient  diverses  essences,  ou  natures 
ou  substances;  mais  ils  ont  dit  trois  person- 
nes et  une  essence,  afin  que  l'unité  d'essence 
marquât  l'unité  de  Dieu,  et  que  les  trois  per- 
sonnes marquassent  la  Sainte  Trinité.  Cette 
Trinité  inséparable  et  immuable  n'admet 
point  trois  dieux  comme  elle  n'admet  point 
trois  essences,  ou  substances  ou  natures.  » 
Saint  Fulgence  allègue,  pour  prouver  la  Tri-  'J- 

nité  des  personnes  en  une  seule  nature,  les 
passages  que  l'on  rapporte  communément, 
et  il  en  use  de  même  pour  établir  la  divinité 
du  Fils  et  du  Saint-Esprit.  Et,  pour  faire  con- 
cevoir cette  unité  de  nature  en  trois  person- 
nes, il  donne  divers  exemples  tirés  des  choses 
créées.  «Tout  corps,  dit-il,  soit  grand,  soit  pe- 
tit, a  un  nombre  départies,  une  mesure  et  un 
poids;  il  ne  peut  être  sans  ce  nombre,  sans 
ce  poids  et  sans  cette  mesure,  et  là  où  se 
trouve  l'un  des  trois,  les  deux  autres  s'y  trou- 
vent nécessairement.  Dans  l'âme  de  l'hom- 
me se  trouvent  la  mémoire,  le  conseil  et  la 
volonté,  l'un  des  trois  ne  peut  être  sans  les 
deux  autres.  »  Il  cite  un  Père  qui  avait  mar- 
qué également  ces  trois  choses  dans  l'àme, 
en  disant  lorsqu'il  priait  Dieu:  «Que  je  me 
souvienne  de  vous,  que  je  vous  conçoive, 
que  je  vous  aime.  » 

3.  Sur  l'incarnation,  il  dit  qu'elle  n'appar- 
tient point  à  toute  la  Trinité,  mais  au  Fils 


Suite  da  li- 
vre de  la  Irl- 

Dite, 


•  Pater  Filius  non  est,  Filius  Pater  non  est, 
Spiritus  Sanctus  nec  Pater  nec  Filius.  Et  cum 
ires  sint,  quod  est,  rogo,  nomen  unum  Patris  et 
Filii  el  Spiritus  Sancti,  in  quo  nos  oporteat  bapli- 
zari.  nisi  illud  scilicet  nomen  deitatis  quod  tripli- 
cari  non  polest  ?  Quamvis  enim  dicamus  Patrem 
Dium,  Filium  Deum,  Spirituni  Sanctum  Deum, 
iamen  non  dicimus  très  deos,  quia  scriptum  est: 
Audi,  Israël ,  Domiaus  Deus  tuus  uuus  est.  Vnus 
est  igilur  Deus  in  nalura,  non  in  persona  ;  quia 
alia  est  persona  Patris,  alia  Filii,  alia  Spiritus 
Sancti.  Pater  a  nullo  est  genitus ,  Filius  a  Pâtre 
est  genitus,  Spiritus  Sanctus  a  Pâtre  Filioque 
procedens  est.  Ista  relativa  nomina  Trinitatem 
faciunt.  Essentiatia  vero  nullo  modo  triplican- 
lur;  quodlibet  de  his  nominibus  in  illa  sancta , 


summaque  Trinitate  dixeris.  unum  idemque  si- 
gni/icat.  ^on  est  diversa  Pati-is  et  Filii  et  Spiri- 
tus Sancti  essentia.  Quod  si  esset ,  nec  veraciter 
Filius  a  Pâtre  gigneretur ,  nec  Spiritus  Sanc- 
tus a  Pâtre  Filioque  procederet...  Ergo  sunt  tria 
quœdam  coœterna,  consubstantialia,  coessentia- 
lia.  Sed  cum  quœreretur  a  Patribus,  et  dicere- 
tur,  quid  tria  ?  ]\'ec  essentias,  nec  substantias,  nec 
naturas  dicere  ausi  sunt;  ne  aligna  forte  diversitas 
crederetur  essentiarum.  aut  naturarwn,  aut  sub- 
stantiarum  :  sed  dixerunt  très  personas,  unam 
essentiam  :  uti  una  essentia  declararet  Deum 
unum,  1res  autem  personœ  Sanctam  Trinitatem 
ostenderent.  Fulg.,  lib.  De  Trinit.,  cap.  ii  et  in, 
pag.  329  et  330. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


52 

c...  r,.        seul,  n'étant  pas  permis  de  croire  que  le  Pè- 
re ou  lo  Saint-Esprit  se  soient  faits  liomme, 
ni  ([uils  aient  sou(l'erl  comme  homme.  Il  ap- 
pelle mission  du  Saint-Esprit  son  apparition 
en  forme  de  colombe  et  de  langue  de  feu,  et 
il  met  cette  dill'érence  entre  la  mission  du 
Fils  et  celle  du  Saint-Esprit,  que  celle-ci  n'a 
été  que  pour  un  temps,  au  lieu  que  la  mission 
du  Fils  qui  consiste  dans  son  union  pei-son- 
nelle  avec  la  nature  humaine  durera  toujours. 
V,,:.      Il  enseigne  que  c'est  par  la  puissance  de  la 
Trinité  que  toutes  choses  ont  été  créées,  que 
les  anges  sont  les  premiers  et  les  excellents 
des  êtres  créés,  qu'une  partie  d'entre  eux 
sont  déchus  de  leur  état  pour  n'avoir  pas 
voulu  faire  la  volonté  de  leur  Créateur,  et 
qu'en  conséquence  de  leur  désobéissance  ils 
seront  punis  dans  les  flammes  éternelles, 
parce  cpi'il  était  en  eux  de  persévérer  dans  la 
béatitude  dans  laquelle  ils  avaient  été  créés, 
que  les  autres,  pour  s'être  attachés  à  leur 
Créateur,  ont  acquis  une  béatitude  encore 
plus  grande,  de  laquelle  ils  ne  pourront  ja- 
mais déchoir,  leur  volonté  étant  tellement 
fixée  au  bien  qu'il  ne  lui  est  plus  hbre  de 
vouloir  pécher,  ni  de  le  pouvoir.  Saiut  Ful- 
gence  dit  que  quelques  grands  et  doctes  per- 
sonnages ont  assuré  que  les  anges  étaient 
composés  de  deux  substances  :  l'une  qu'ils 
appellent  esprit  incorporel,  par  lequel  ils  sont 
sans  cesse  occupés  de  la  contemplation  de 
Dieu;  l'autre  corporelle  avec  laquelle  ils  ont 
de  temps  en  temps  apparu  aux  hommes.  Dieu, 
pour  réparer  la  perte  des  anges  tombés  du  ciel 
par  leur  désobéissance,  a  créé  l'homme,  en 
le  formant  de  corps  et  d'âme.  L'âme  de  l'hom- 
me est  raisonnable  et  immortelle.  Il  aurait  mê- 
me été  immortel  selon  le  corps,  s'il  n'eût  pas 
péché  ,  mais  en  punition  de  son  péché  son 
corps  est  devenu  sujet  à  la  mort.  Pour  le  ra- 
cheter, le  Fils  unique  de  Dieu  s'est  fait  chair, 
alin  défaire  les  fonctions  de  médiateur  entre 
Dieu  et  les  hommes.  Ce  n'est  donc  poiut  en 
.  lui-même  que  l'homme  doit  se  glorifier  s'il  est 
délivré,  mais  daus  le  Seigneur  de  qui  il  a  reçu 
tout  ce  qu'il  a.  «  Nous  ne  disons  point  pour 
cela  ',  ajoute  ce  Père,  que  le  genre  humain 
ait  perdu  son  libre  arbitre,  car  il  avait  sou 
libre  arbitre  avant  d'être  délivré  par  la  grâce 

•  Kechocdicimus,  quod  liberum  urbitrium  per- 
dideril  humanum  genus.  llabel  enim  antequam 
Ubereivr  gralia  SaUaloris,  ad  inalum,  non  ad 
bonuiii  proclive;  iiuapropUr  ipsuiii  liberum  arbi- 
trium  gratia  Uei  liberalur,  ulbonum  velit  et  pos- 
sit.  lia  entm  quUliim  ex  Pulribus  ail  quod  gralia 


du  Sauveur,  mais  alors  ce  libre  arbitre  était 
porté  au  mal  et  non  au  bien.  C'est  pourquoi 
il  a  i.esoin  d'être  délivré  par  la  grâce,  afin 
qu'il  veuille  et  qu'il  puisse  faire  le  bien,  se- 
lon ce  que  dit  un  des  Pères,  qu'il  faut  que  la 
grâce  prévienne  l'homme,  lorsqu'il  ne  veut 
pas  encore,  afin  qu'il  veuille;  et  qu'elle  le 
suive  lorsqu'il  veut,  afin  qu'il  ne  veuille  pas 
inutilement.  Ainsi  avant  que  l'homme  ait  la 
foi,  il  a  le  libre  arbitre,  mais  pour  le  mal;  et 
lorsqu'il  a  la  foi,  il  a  le  libre  arbitre  pour  lo 
bien  ,  mais  après  qu'il  a  été  délivré  par  la 
grâce  de  Dieu.  »  Il  distingue  avec  saint  Au- 
gustin la  grâce  des  deux   états,  en  disant 
qu'.\.dam,  avant  son  péché,  avait  une  grâce 
par  laquelle  il  pouvait  avoir  la  justice  s'il  l'eût 
voulu ,  mais  que  la  grâce  par  laquelle  les 
hommes  sont  rachetés  de  la  masse  de  perdi- 
tion est  plus  forte,  puisqu'elle  fait  que  l'hom- 
me veut  et  qu'il  veut  si  bien,  qu'il  aime  avec 
tant  d'ardeur  qu'il  surmonte  ,  par  la  volon- 
té de  l'esprit,  la  volupté  de  la  chair.  Il  en- 
seigne que ,  tandis  que  nous  sommes  en  ce 
monde,  nous  ne  pouvons  y  être  sans  péché, 
mais  qu'après  le  baptême  il  nous  reste  un 
moyen  de  les  etfacer  qui  est  la  pénitence  ;  que 
ceux-là  se  trompent  beaucoup  qui  croient  pou- 
voir commettre  impunément  des  péchés  sous 
prétexte  qu'ils  fout  quelques  aumûmes  aux 
pauvres,  qu'il  faut  faire  des  aumônes  ,  mais 
auparavant  quitter  le  vice.  Il  dit  aussi  quel- 
que chose  des  diflércuts  degrés  de  gloire  que 
les  hommes  posséderont  dans  le  ciel,  en  pro- 
portion des  mérites  qu'ils  se  seront  acquis 
par  leur  vertu  sur  la  terre.  Il  établit  com- 
me certain  que  tous  les  corps  des  hommes, 
soit  ceux  qui  ont  été  consumés  par  le  feu  ou 
dévorés  par  les  bêtes,  ou  engloutis  dans  les 
eaux,  ressusciteront  en  \m  moment,  chacun 
dans  leur  propre  sexe  ;  que  les  bons  jouiront 
dans  le  ciel  d'une  félicité  éternelle  avec  Dieu, 
et  que  les  méchants  seront  punis  par  des  sup- 
plices qui  u'aurout  point  de  fin. 

§XIV. 
Les  deux  livres  de  la  Rémission  des  péchés. 

{ .  L'auteur  de  la  Vie  de  saint  Fulgence  rap- 
porta à  son  Stecond  exil  ses  deux  livres  de  la 

Dei  prœveniat  nolentem  ut  velil  ;  subsequatur  vo- 
Icntem,  ne  frustra  relit.  Ac  sic  Iwmo  antequam  sit 
(idclis  habel  liberum  arbilrium  ad  malum  ,  habct 
fidelis  liberum  arbitriuni  et  ad  bonum,  gralia  Dei 
scilicet  liberatuin.  Fulg.,  lib.  De  Trinil. ,  cap.  x, 
pag.  336. 


Cip.  xn 


Ilt'IUlMii  D  ù  - 
pL'Ctié-,  ecnl' 
ven  Itn  Gil. 


[vr  SIÈCLE.]  CHAPITRE  I.  —  SAINT 

/Irmiasinn  des  pMiês.  Il  les  composa  pour 
rc'pondro  ii  la  consiillation  tl'iiii  homme  de 
pi^ti^  noinmi!  Enlhymius  qui  di^sirait  sa- 
voir qui  sont  ceux  h  qui  Dieu  louict  les  pé- 
chés eu  cette  vie,  et  si  par  sa  loiite-[)uissancc 
il  ne  les  remet  pas  quelquefois  aux  morts 
après  cette  vie. 

pre.""o"rhïr'o",       2.  Saiut  Fulgcuce  explique  dans  son  pre- 

"^Kiii'^T.  mier  livre  en  quoi  consiste  la  rémission  des 
péchés.  «Par  elle,  dit-il,  Dieu  arrache  de  la 
puissance  des  tén(Nbres  ceux  qu'il  transfère 
dans  le  roj-aume  de  son  Fils  ;  par  elle,  ils  sont 
délivrés  de  la  peine  éternelle  pour  jouir  d'u- 
ne joie  qui  n'aura  point  de  fin  ;  par  elle,  ils 
sont  déchargés  du  poids,  c'est-^-dire  du  pé- 
ché qu'ils  ont  contracté  dans  leur  naissance, 
de  même  que  de  ceux  qu'ils  ont  commis  dans 
leur  jeunesse.  Elle  est  telle  que,  pour  nous 
l'obtenir,  le  Fils  unique  de  Dieu  s'est  fait 
T.  bomme  et  a  rcipandu  son  sang.  »  Il  dit  que, 
pour  parvenir  à  la  rémission  des  péchés,  trois 
choses  sont  nécessaires  :  la  foi,  les  bonnes  œu- 
vres et  le  temps ,  en  sorte  qu'on  ne  peut  l'ob- 
tenir si  quelqu'une  de  ces  trois  choses  vient 
Ti.  à  manquer.  11  ne  laisse  pas  d'avancer  que 

la  seule  conversion  du  cœur,  quand  elle  est 
vraie,  peut  obtenir  de  Dieu  la  rémission  des 
péchés,  mais  de  la  manière  qu'il  s'explique 
dans  la  suite,  il  veut  que  cette  conversion  soit 
II.         accompagnée  de  pénitence,  en  quoi  il  s'auto- 

i>.i.xji,i-..  rise  de  ces  paroles  du  Prophète:  Si  vous  êtes 
convertis  et  si  votis  gémisse:  si<r  vos  fautes,  voiis 
serez  sauvés.  «  Ce  n'est  pas  sans  raison,  ajou- 
te-t-il,  que  l'Ecriture  dit  ces  deux  choses  né- 
cessaires pour  obtenir  le  salut  :  car  il  j-  en  a 
qui,  etl'raj'és  à  la  vue  de  leurs  péchés  en  gé- 
missent dans  la  prière,  et  qui  toutefois  ne 

Cap'!"'.  quittent  pas  leurs  mauvaises  habitudes.  Ils 
avouent  leurs  fautes,  mais  ils  ne  cessent  d'en 
commettre.  Ils  s'accusent  humblement  devant 
Dieu,  mais  ils  continuent  de  faire  les  mêmes 
péchés  qu'ils  ont  confessés  avec  humilité.  Ils 
demandent  un  remède  au  médecin,  et  ils  ren- 
dent leur  maladie  incurable  en  l'augmentant 


FULGENCE  DE  UUSPE.  53 

par  lein-s  désordres.  Mais  c'est  inutilement 
qu'ils  cherchent  h  apaiser  le  juste  Juge  par 
h'ur'S  paroh\s,  tandis  f|u'ils  irriloul  sa  colère 
parleMrsniauvaisesailions.Il  faut  donc  que  le 
pécheur  pleure  en  même  temps  ses  fautes  et  c»r.  tm. 
qu'il  se  convertisse.»  Ce  Père  mot  parmi  les 
pi'chés  dont  on  doit  faire  pénitence  ceux  que 
l'on  a  commis  par  ignorance,  en  quoi  il  s'auto- 
rise des  exemples  de  David  et  de  saint  l'atd, 
qui  ont  l'un  et  l'autre  demandé  pardon  des 
péchés  qu'ils  avaient  commis  par  ignorance.  - 
Il  met  cette  diflV-rence  entre  rimpi('té  et  l'ini- 
quité, que  l'impiété  renferme  ou  l'infidé'lité 
ou  une  foi  dépravée  :  en  ce  sens  les  infidèles  »" 

sont  des  impies,  parce  qu'ils  ne  croient  pas 
en  Dieu,  et  les  hérétiques  peuvent  aussi  être 
regardés  comme  impies,  parce  que  leur  foi 
n'est  pas  véritable.  L'iniquité  se  dit  de  tou- 
tes les  actions  qui  souillent  les  mœurs.  Ainsi, 
la  conversion,  pour  être  agréable  devant  Dieu 
doit  renfermer  en  même  temps  la  vraie  foi  et 
la  bonne  vie.  «  Mais  ce  n'est  que  dans  l'Église  im 

catholicpie  seule',  dit-il,  que  l'on  donne  et 
que  l'on  reçoit  la  rémission  des  péchés.  C'est  ,„ 

cette  Église  que  l'Époux  appelle  lui-même  son 
unique  colombe;  c'est  elle  qu'il  s'est  unique- 
ment choisie,  qu'il  a  fondée  sur  la  pierre,  à 
laquelle  il  a  donné  les  clefs  du  royaume  des 
cieux,  et  la  puissance  de  lier  et  de  délier  les 
péchés,  selon  que  la  Vérité  même  l'a  promis 
à  saint  Pierre,  en  disant  :  Vous  êtes  Pierre, 
et  sur  cette  pierre  je  biUirai  mon  hglise.  tjui-  i». 
conque  se  trouve  hors  de  cette  Église  qui  a 
reçu  les  clefs  du  royaume  des  cieux ,  n'est 
pas  dans  la  voie  du  ciel,  mais  dans  la  voie 
de  l'enfer,  soit  qu'il  demeure  sans  baptême, 
comme  les  païens,  soit  qu'il  l'ait  reçu  au 
nom  du  Père,  du  Fils  et  du  Saint-Esprit,  s'il 
persévère  dans  l'hérésie.  Car  encore  que 
quelqu'un  soit  baptisé  au  nom  de  ces  trois 
personnes,  soit  au  dedans,  soit  au  dehors  de 
l'Église,  il  n'acquerra  point  la  vie  éternelle 
par  le  mérite  du  baptême,  s'il  ne  finit  sa  vie 
dans  le  sein  de  l'Église  catholique.  Quicon- 


1  In  sola  ergo  Ecclcsia  catholica  datur  et  acci- 
pitur  remissio  peccatornm,  qnam  ipse  sponsus 
unam  esse  dicit  columham  suam ,  vnam  electam 
suam,  qiiam  super  pelrain  fundavit ,  cui  claves 
regni  cœloruvi  dédit,  ctii etiam poteslntem  lirjandi, 
solvendique  coitccssit,  sicut  bento  Pctro  veritas 
ipsa  veraciter  repromiltil,  dicens  :  Tu  es  Petrus, 
et  super  liaiic  petram  tPdifioabo  Ei'clesiam  ineam. 
Ab  hac  Ecclcsiii  quœ  claves  regni  cœlorum  accepit, 
quiaquis  foris  est ,  non  cœli  l'iam  graditur,  sed 
inferni;  non  snlnmsi  remaneat  sine  baptismopa- 
ganus,sed  eliam  Si  in  nominc  Palris  et  l'ilii  et 


Spiritns  Sancti  baptizatus  perseverel,  hœreti-cus. 
Neque  enim  per  baplismi  merilum  adipiscitur  -ve- 
ram  vitam,  si  quis  in  nomine  Patris  et  Filii  et 
Spirit^is  Sancti  sive  intra  Ecclesiam,  sire  extra 
Ecclesiam  baptizatus,  non  tamenintra  Ecclesiam 
catholicam  terminaril  hanc  vitam  :  neci'ivrt  per 
ecclesiastici  baptismatis  sacramenttim  qui  non 
tenuerit  ecclesiasticœ  fidei  cliaritatisque  consor- 
tium. Ille  enim  salralnr  sacramento  baptismatis, 
quem  intra  Ecclesiam  catlioUcam  vsque  ad  obi- 
tnni  prœsenlis  vitœ  tenuerit  unitas  charilatis. 
Fui},'.,  lib.  I  De  Rem.  pecca'.,  cap.  mx. 


54 


HISTOIIIE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Cjp-  XI*. 


XX11  tlxxiti. 


AnolT'c   du 
ffrn.iH     liTrp, 

Cip.  1. 


Jar   II,  t7. 


que  ne  gardera  pas  le  lien  de  la  foi  et  de  la 
charité  ne  vivra  point  par  le  sacrement  du 
baptême.  Celui-là  seul  sera  sauvé  par  ce  sa- 
crement, que  l'unité  de  la  charité  aura  retenu 
dans  l'Église  catholique  jusqu'à  la  mort. 
Néanmoins,  dans  le  siècle  présent,  les  justes 
et  les  pécheurs  sont  mêlés  ensemble  dans  l'É- 
glise catholique  '  par  la  communion  des  mê- 
mes sacrements  et  la  profession  de  la  même 
foi,  mais  non  pas  par  la  ressemblance  de  leurs 
mœurs  et  de  leur  conduite  :  en  sorte  qu'on 
peut  dire  que  les  méchants  y  sont  de  corps 
et  non  de  cœur  ;  qu'ils  en  professent  la  foi, 
mais  qu'ils  n'en  font  pas  les  œuvres.»  Il  trou- 
ve dans  l'arche  de  Noé  la  figure  de  l'Église 
catholique,  de  même  que  dans  la  maison  de 
Raab.  «  De  même,  dit-il ,  que  tous  ceux  qui 
ne  se  trouvèrent  ni  dans  l'arche,  ni  dans 
la  maison  de  cette  femme,  périrent;  ainsi 
tous  ceux  qui  ne  sont  point  dans  l'Église  ca- 
tholique périront  éternellement.  »  Sur  quoi  il 
rapporte  un  passage  de  saint  Cyprien,  qui  a 
dit  aussi  que  l'arche  était  la  figure  de  l'É- 
glise, et  l'eau  du  déluge  la  figure  du  baptê- 
me. Il  exhorte  donc  tous  ceux  qui  sont  hors 
de  l'Église  d'y  rentrer  au  plus  tôt,  en  leur 
promettant  le  pardon  de  leurs  péchés  s'ils  y 
rentrent  avec  une  vraie  foi  et  le  cœur  con- 
trit. Il  combat  en  passant  ceux  qui  niaient 
que  l'Église  eût  le  pouvoir  de  remettre  les 
péchés,  soutenant  qu'il  n'y  en  a  point  qu'elle 
ne  puisse  remettre;  et  que  le  péché  qu'elle 
n'aura  pas  remis  en  ce  monde  ne  pourra  pas 
être  remis  en  l'autre.  Selon  ce  Père,  le  pé- 
ché contre  le  Saint-Esprit,  que  l'Écriture  dit 
n'être  pas  rémissible,  est  l'impénitence  fi- 
nale. 

3.  Api-ès  avoir  établi  dans  le  premier  livre 
que  la  rémission  des  péchés  ne  s'accorde 
que  dans  l'Église  catholique ,  et  h  ceux  qui 
joignent  les  œuvres  à  la  foi,  parce  que  de 
même  que  la  foi  est  morte  sans  les  œuvres, 
ainsi  que  nous  l'apprend  saint  Jacques,  de 


Rom. 
SI. 


Rom. 
i». 


même,  selon  saint  Paul,  tout  ce  qui  ne  vient 
pas  de  la  foi  est  péché.  Il  entreprend  de 
montrer  que  la  rémission  des  péchés  n'est 
accordée'  qu'à  ceux  qui  en  ce  monde  ont 
fait  pénitence.  Saint  Pierre  dit  dans  sa  j"  p»"- 
seconde  Épitre,  que  le  Seigneur  n'a  point 
retardé  l'accomplissement  de  sa  promesse, 
comme  quelques-uns  se  l'imaginent  ;  mais 
qu'il  nous  attend  avec  patience,  ne  voulant 
point  qu'aucun  périsse,  mais  que  tous  retour- 
nent à  lui  par  la  pénitence.  Comme  ce  n'est  f'p.  "• 
seulement  que  dans  ce  monde  que  Dieu  nous 
attend  à  pénitence  ,  ce  n'est  aussi  que  dans 
ce  monde  que  la  rémission  de  nos  péchés 
nous  est  donnée.  Si  l'on  pouvait  faire  dans 
l'autre  une  pénitence  fructueuse,  cet  apôtre 
ne  dirait  pas  que  Dieu  attend  les  pécheurs 
avec  patience,  parce  qu'il  ne  veut  pas  qu'au- 
cun périsse.  «  Mais,  dit-il,  qui  sont  ceux  dont  il 
ne  veut  pas  la  perte  ?  Ce  sont  ceux  qu'il  a  con- 
nus dans  sa  prescience  et  qu'il  a  prédestinés 
pour  être  conformes  à  l'image  de  son  Fils. 
Aucun'  de  ces  prédestinés  ne  périt.  Car, 
gid  peut  }vsister  à  la  volonté  de  Dieu  ?  Ils  sont 
donc  prévenus  gratuitement  par  la  miséri- 
corde de  Dieu  avant  la  fin  de  leur  vie.  Leur 
cœur  est  touché  d'une  componction  humble 
et  salutaire  ;  Dieu  lui-même  les  convertit  et 
leur  inspire  des  sentiments  de  pénitence,  se- 
lon qu'il  l'a  ordonné  dans  les  desseins  éter- 
nels de  sa  miséricorde  entièrement  gratuite  à 
leur  égard,  afin  qu'étant  convertis  ils  ne  péris- 
sent point,  mais  qu'ils  aient  la  vie  éternelle. 
C'est  d'eux, sans  doute,  qu'il  faut  entendre  ces 
paroles  de  saint  Paul  :  Dieu  veut  que  tous  les 
hommes  soient  sauvés,  et  qu'ils  arrivent  à  la 
C07inaissance  de  la  vérité.  Car  du  moment  que 
celui  qui  a  fait  tout  ce  qu'il  a  voulu,  veut  ce- 
la, c'est-à-dire  que  les  élus  soient  sauvés,  il 
fait  toujours  ce  q>i 'il  veut,  sans  que  rien  puisse 
y  mcttie  obstacle.  Ainsi  ce  que  veut  la  vo- 
lonté immuable  et  invincible  du  Tout-Puis- 
sant, s'accomplit  en  eux  ;  et  comme  cette  vo- 


1  Timotlj.  it, 


'  Inlra  caihnlicam  quippe  Ecclesiam  in  prœ- 
setxli  sœculo  jusli  eliniqui  tcnenlur  admixli,  sa- 
cramenlorum  scilicet  communione ,  non  morum, 
id  est,  societate  creduUtatis,  non  similitudine  con- 
versationis.  Aon  ergo  corde  scd  corpore ,  quia 
profcssinne  non  opère.  Ibid.,  oap.  xvn*i,  jing.  374. 

'  Isl07'um  nemo  périt  :  voliiiitati  aut'-iii  pjus 
quis  rcsislit  ? /s<i  (inle  fmem  pnvsenliœ  vitœ  Dei 
miserimrdia  gratis  prœveniunlur;  ipsi  corde  con- 
Irito  et  humiltati)  snhibhlcr  coniptingunlur  :  cl 
ouinc»  ad  pœniUnliam  divino  minière  convcrtun- 
lur  :  (id  quam  sunl  divinilus prwdeslinuii  pcr  gra- 
tuilam  qraliam,  ut  conversi  non  perçant,  scd  ha- 


beanl  tilam  œlernam.  Hi  prncul  dubio  sunt  om- 
1105,  quod  secunduin  heati  Pauli  prœconixim  Deus 
vult  salvos  fieri  cl  iii  agiiitioncm  vi>ritati.<  venire. 
Utiia  enim  ille  hoc  viill  qui  omnia  quœcumqu^ 
voluit  fccil,  quod  vnU  sempcr  insupcrabililer  fa- 
cil.  Hoc  xtlique  in  eis  impiclur,  quod  omnipoten- 
tis  Vci  roliintas  incontmulahilis  cl  insuperabilis 
habrl  :  cujus  si  ut  mulari  roluntas  non  polcst  m 
disposUione ,  ila  nec  prohiheiur,  ncc  impeditur 
polcstas  in  opère  :  quia  ncc  n  qnilalem  illius  va- 
let quisquam  juste  reprelundcre,  ncc  misericor- 
diam  ipsius  polesl  aliquis  obviare.  Lib.  Il,  aip.  n, 
pag.  381. 


CHAPITRE  I.  —  SAINT  FUI.GEXCE  DE  RUSPE. 


Cap.  III. 
Sap.  T,  1, 


Sap.  III,  II. 


Cap.  r. 


Bccl.  T,  8. 


II  Cnr.  Ti| 


II    Cn, 
10. 


Cip.  VI, 


Psal.  I,  6. 
Galat.  YI,7. 


Cap.     VII, 

cl  VIII, 


[VI"  SIÈCLE,] 

loiité  divine  n'est  sujclto'à.  aucun  clmnge- 
niciit  dans  l'ordre  do  ses  rt'solutions  et  de  ses 
de.'^seins,  de  même  elle  ne  peut  être  ni  re- 
tardi5e,  nf  cmpèchiie  dans  leur  exécution  ; 
parce  que,  de  nn^nie  que  personne  ne  peut 
accuser  ni  reprendre  la  justice  de  ses  dé- 
crets, de  même  personne  ne  peut  mettre 
obstacle  aux  elTets  de  sa  miséricorde,  » 

■4,  Saint  Fuli^on^e  objecte  ([u'il  est  dit  dans 
le  livre  de  la  Satresse,  qu'au  jour  du  juj;c- 
ment ,  les  méchants  seront  surpris  d'éton- 
nement,  en  voyant  contre  leur  attente  les 
justes  sauvés,  eux  dont  la  vie  leur  par.iissait 
une  folie,  11  réjiond  que  l'on  ne  peut  en  infé- 
rer que  le  salut  doive  être  accordé  en  ce  jour 
à  ceux  qui  ont  passé  cette  vie  dans  les  cri- 
mes; mais  seulement  que  le  salut  que  les 
impies  n'avaient  poizit  espéré,  a  été  accordé 
aux  justes,  qui  l'avaient  mérité  dès  cette  vie 
par  leurs  vertus.  Les  impies  n'oht  point  de 
salut  à  espérer,  parce  que  selon  la  parole  du 
Sage  :  L'espérance  de  ceux  qui  rejettent  la  sa- 
gesse et  l'instruction,  est  vaine  :  leurs  travaux 
sont  sans  fruits,  et  leurs  œuvres  soiit  inutiles. 
L'Écriture  montre  assez  clairement  que  l'au- 
tre vie  n'est  pas  un  temps  de  pardon,  mais 
de  vengeance,  lorsqu'elle  nous  dit  :  Ne  dif- 
férez point  de  vous  convertir  au  Seigneur,  et  ne 
remettez  point  de  jour  en  Jour  :  car  sa  colère 
éclatera  tout  d'un  coup,  et  il  vous  perdra  au 
iourde  la  vengeance;  etl'Apûtre,  après  avoir 
marqué  que  cette  vie  est  le  temps  auquel 
nous  devons  travailler  à  notre  salut,  dit  que 
dans  l'autre  nous  paraîtrons  devant  le  tribu- 
nal de  Jésus-Christ,  pour  y  être  jugés  selon 
nos  œuvres.  D'où  saint  Fulgeuce  conclut 
que  la  vie  éternelle  ne  nous  sera  point  don- 
née dans  le  siècle  futur,  si  dès  celui-ci  nous 
n'avons  obtenu  la  rémission  de  nos  fautes  : 
parce  que,  dans  ce  jugement,  la  miséricorde 
ne  justifiera  pas  l'impie,  mais  la  justice  dis- 
tinguera le  juste  de  l'impie,  selon  qu'il  est 
écrit  dans  le  psaume  x*  :  Le  Seigneur  inten'oge 
le  juste  et  V impie.  Ne  vous  trompez  pas,  dit 
l'Apôtre,  l'homme  ne  recueillera  que  ce  qu'il 
aura  se>7ié.  Vous  ne  recueillerez  en  l'autre 
vie  que  ce  que  vous  aurez  semé  en  celle-ci. 
Ce  qu'il   exprime,   en  ajoutant  :  Car  celui 


qui  sème  dans  In  chair,  recueillera  dans  la 
chair  la  corruption  ;  et  celui  qui  sème  dans 
l'esprit,  recueillera  dans  l'esprit  la  vie  éter- 
nelle. Saint  Fulgcnce  rapporte  divers  autres     c«P'  ■«.  ». 

~  ^  '^  XI,  Xtl,XIIICt 

passages  de  la  .sainte  Lcrituie,  pour   mon-   »"• 
trer  qu'on   n'obtient  la   rémission   des   pé- 
chés qu'en  cette  vie,  et  cpae  tous  ceux  qui 
mourront  en  état  de  péché,  seront  damnés  : 
ce  qui  fait  voir  qu'il  ne  parle  que  des  péchés 
qifuionnent  la  mort  à  l'àme,  et  non  des  pei- 
nes qui  peuvent  rester  ft  expier  aux  justes. 
Il  cite  la  parabole  du  mauvais  riche  et  de 
Lazare,    qui    prouve   évidemment   qu'après 
cette  vie  les  bons  ne  peuvent  passer  au  lieu 
de  la  demeure  des  méchants,  ni  les  méchants 
an  repos  des  bienheureux.  Il  dit  qu'il  y  a       >v. 
cette  dillerence  entre  la  pénitence  des  élus 
et  des  réprouvés,  que  la  tristesse  de  ceux-là, 
qui  est  selon  Dieu,  produit  pour  le  salut  une 
pénitence  stable ,  en  sorte   qu'étant  péni- 
tents eu  ce  monde,  et  véritablement  conver- 
tis, le  salut  éternel  leur  est  donné  dans  l'au- 
tre ;  au  lieu  que  la  pénitence  de  ceux-ci  ne    iicr.  t.i, 
cesse  pas  même  dans  laulre  monde,  parce 
qu'ils  ne  l'ont  pas  faite  en  cette  vie.  Car  il 
ne  faut  pas  s'imaginer  que  tovis  ceux  qui 
confessent  leurs  péchés  en  obtiennent  la  ré- 
mission, lorsqu'ils  ne  les  confessent  que  de 
bouche;    Dieu,    qui    connaît    le    fond    des 
cœurs,  ne  faisant  point  attention  aux  paro- 
les. Saûl,  repris  par  Samuel,  confessa  son  ^i  »••?•  ^'i 
péché,  tout  saisi  de  crainte  :  cependant  il 
n'en  obtint  point  le  pardon,  parce  que  son 
cœur  n'était  pas  droit  devant  le  Seigneur,  La 
raison  qu'en  donne  ce  Père,  c'est   que   la 
confession  qu'il  avait  faite  de  son  crime  ', 
avait  pour  principe  la  crainte  du  châtiment 
qu'il  avait  mérité,  et  non  Ihorreur  du  crime 
qu'il  avait  commis,  «  Il  nchaïssait  point,  dit-il, 
son  péché,  mais  il  craignait  une  peine  qu'il 
ne  voulait  pas  souÛ'rir  :  il  ne  détestait  pas  son 
crime,  mais  il  était  saisi  de  crainte  à  la  vue 
de  la  vengeance  divine  qui  allait  tomber  sur 
sa  tête,  David  %  au  contraire,  repris  par  le 
prophète  Nathan,  confessa  son  péché  et  en 
obtint  le  pardon,  parce  qu'aussitôt  il  quitta 
le  désir  du  péché,  et  etlaça  par  la  pénitence 
celui  qu'il  avait  commis,  » 


'  Ad  Saiilem  increpandum  cum  propheta  Sa- 
muel advenisset,  ille  pcrterritus  peccatum  suum 
confessus  est,  nec  tamen  est  iiidulgentiam  conse- 
culus  :  qui,!  cor  cjus  non  erat  coram  Deo,  Illa 
enim  peccati  conl'cssio  ex  timoré  fuit  supplicii, 
non  ex  horrore  peccati.  Non  odivit  quod  fecerat. 
sed  timuit  quod  nolebat  :  nec  culpamsuam  con- 


fersione  culpavit ,  sed  ad  prœsens  divini  furoris 
percussus  terrore  contremuit.  Lib.  II  De  Rem. 
peccat.,  cap,  sv,  pag.  398. 

2  David  conversus  peccandi  protinus  abjecit  de- 
sideriitm,  et  pœnileiulo  ipse  suum  punivit  admis- 
sum.  Ibid. 


56 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


c«p.  «rr.  5.  «La  confession  des  péchés',  dit-il,  devient 

donc  utile,  lorsque  le  péclieur,  après  avoir 
confessé  ce  qu'il  avait  fait  de  mal ,  ne  le  fait 
plus  à  l'avenir,  et  lorsqu'il  s'applique  à  sur- 
passer par  ses  bonnes  œuvres  le  mérite  de 

Boai.  V,  !o.  ses  crimes  passés  :  afin  que,  selon  l'Apôtre, 
où  il  y  avait  eu  une  abondance  de  péchi\  il 
y  ait  une  surabondance  de  grâce.  »  Saint  Ful- 
gence  blâme  la  conduite  de  ceux  qui,  ne 
connaissant  pas  la  vertu  de  la  pénitence,  se 
repentent  tellement  de  leurs  fautes,  qu'ils 
n'en  espèrent  point  le  pardon,  et  dit  qu'en 
désespérant  de  l'obtenir,  ils  ne  font  qu'aug- 
menter leurs  péchés  ;  que  telle  fut  la  péni- 
tence de  Judas ,  que  ce  traître  eut  le  temps 
d'obtenir  la  rémission  de  son  crime,  et  que  Jé- 
sus-Clirisl  qui  est  mort  pour  les  impies  ne  lui 
aurait  point  refusé  le  bénéfice  du  pardon,  s'il 
ne  se  fût  ôté  à  lui-même,  par  sou  désespoir, 

iip.  XIII.  le  moyen  de  le  mériter.  Pour  prouver  en- 
core qu'il  n'y  a  que  cette  vie  où  l'homme 
puisse  opérer  son  salut  ,  le  saint  évéque 
rapporte  ce  qui  est  dit  dans  l'Évangile  des 
dillcrentes  heures  auxquelles  le  Père  de  fa- 
mille envoya  des  ouvriers  travailler  à  sa  vi- 
gne. Il  prétend  que  ces  ditlurentes  heures 
marquent  les  ditlërents  âges  du  monde  et 
des  hommes,  disant  qu'en  tout-  temps  de  la 
vie  présente,  tout  péclieur  véritablement 
converti  à  Dieu,  en  obtient  aussitôt  la  rémis- 
m.  sion  de  ses  péchés  ;  mais  aussi  que  person- 
ne ne  sort  avec  sécurité  de  cette  vie,  si 
avant  de  la  finir  il  ne  renonce  à  l'iniquité. 

§  XV. 

Des  trois  livres  de  la  Vérité,  de  la  Prédestination 
et  de  la  Grâce  de  Dieu. 

oct.jion  do  1.  Saint  Fulircnce,  de  retour  en  Afrique, 
(eriueu  521.  après  la  mort  de  Trasamond  arrivée  au  mois 
de  mai  de  l'an  523,  composa  trois  livres  pour 
établir  la  vérité  de  la  prédestination  et  de  la 
grâce  de  Dieu,  contre  ceux  qui  prétendaient 
Cip.>.  que  les  dons  delà  divine  bonté  dépendaient 
de  la  qualité  des  actions  des  iiommes  :  en  sorte 
que  Dieu  ne  leur  fit  aucune  grâce  qu'ils  ne 
l'eussent  méritée,  et  qu'il  n'eût  prévu  qu'ils 
la  mériteraient,  s'il  leur  conservait  la  vie.  Il 
adressa  ces  livres  à  Jean  et  à  Vénérius  qui  lui 


avaient  rapporté  les  mauvais  sentiments  que 
quelques-uns,  qui  faisaient  toutefois  profes-  " 
sion  de  la  religion  cathoiiiiue  ,  avaient  rela- 
tivement à  la  prédestination  et  sftr  la  grâce. 

2.  Dans  le  premier  livre,  ce  Père  se  propose  *"•'? 
de  montrer  que  la  prédestination  est  purement  ff-  '»* 
gratuite.  «  L'iiomme ,  dit-il,  avait  été  créé 
tel,  qu'il  pouvait  ou  pécher  ou  ne  pas  pécher 
par  sa  propre  volonté  :  c'est  pourquoi  il  a  été  Cip.  u 
justement  puni  pour  avoir  péché  volontaire- 
ment, n'ayant  été  contraint  de  pécher  par  au- 
cune nécessité  naturelle  du  corps  ni  de  l'âme. 
Par  ce  péché  volontaire  de  l'âme,  l'homme  est 
devenu  sujet  à  la  mort.  Tout  le  genre  humain 
a  été  enveloppé  dans  la  prévarication  du  pre- 
mier homme,  et  conséquemment  dans  la  ser- 
vitude à  laquelle  son  péché  l'avait  réduit.  Jé- 
sus-Cluist,  seul  médiateur  de  Dieu  et  des  hom- 
mes, a  été  exempt  de  cette  servitude,  dans 
laquelle  les  enfants  mêmes  sont  compris,  par- 
ce qu'encore  qu'il  soit  né  vrai  homme,  la  con- 
cupiscence de  la  chair  n'a  eu  aucune  part  à 
sa  naissance,  étant  né  du  Saint-Esprit.  Aussi 
sa  mère  est  demeurée  vierge  depuis  son  en- 
fantement, comme  elle  l'était  avant  de  l'avoir 
conçu.  Car  il  n'était  pas  convenable  que  Dieu 
qui,  en  créant  la  chair  humaine,  lui  avait ac- 
cordél'intégritcde  la  virginité,  l'otât  à  la  chair 
de  laquelle  il  voulait  naître.  Mais  afin  qu'il  y 
eût  une  surabondance  de  grâce,  où  il  y  avait 
eu  une  surabondance  de  péché,  Jésus-Christ 
n'a  pas  seulement  effacé  le  péché,  par  lequel 
le  premier  homme  a  souillé  toute  la  race,  mais 
il  a  fait  encore  que  tous  les  autres  péchés 
que  nous  commettons  de  nous-mêmes  sont 
remis  par  sa  grâce  à  ceux  qui  croient  en  lui. 
Par  le  jugement  de  Dieu,  dit  l'Apôlre,  nous 
avons  été  condamnés  pour  un  seul  péché,  au  lieu 
que  nous  sommes  justifiés  par  la  g  race  après  plu- 
sieurs /x-c/tés.  Celte  grâce  de  Dieu  par  laquelle 
nous  sommes  sauvés  n'est  donnée  à  personne 
en  vue  d'un  mérite  précédent,  comme  ce  n'est 
pas  non  plus  en  vue  des  mérites  que  Dieu  sé- 
pare les  uns  de  la  masse  corrompue,  tandis  ^ 
qu'il  y  laisse  les  autres.  La  bonté  de  Dieu  "''•■ 
toute  gratuite  éclate  dans  ceux  à  qui  il  fait 
miséricorde,  comme  la  justice  paraît  dans 
ceux  à  qui  il  ne  la  fait  pas,  parce  qu'étant 
coupables,  ils mérileni  d'être  punis.  »  L'argu- 


livre, 


Boin.  r,  16. 


'  Tune  ergo  prodesl  peccali  confessio,  si  con- 
fessiis  peccntum  quoi  mule  feccral,  ultra  non  fa- 
cUU  :  et  biiuoruiH  studio  njiernm  pnvIiTilorum 
criminum  mcrila  superare  coittendul  :  ut  secun- 
duin  Àpostoli  dicluin  ,  iibi  îiliiiiidavit  lU'iMaituui  , 
gii|n;rabuiiilitgraliii.  lliid.,  cuii.  .\\i,  |>U(;.  39a. 


'  In  quacnmque  rita'  prœsentis  a'iate  omnis 
iniquus ,  aut  in(pius  loto  corde  fueril  conrersus 
ad  Dcum,  staiiui  praterilvnim  omnium  remis- 
sionem  accipicl  pcccaloruin.  Ibiil.,  cap.  .wiu,  jMig. 
4UI. 


[vr  SIKCLE.] 


CFIAPITRE  I.  —  SAINT  FHF.r.ENCIi;  DK  UUSPE. 


r>7 


ment  sur  lequel  saint  Fulgence  presse  le  plus 
ponr  montrer  que  la  prédestination  est  pure- 
ment gratuite,  est  tiré  de  l'oxeinplc  des  en- 
fants dont  les  uns  mourants  aussilôt  après 
avoir  reçu  le  baptême  sont  sauvés,  et  les  au- 
tres prévenus  par  la  mort  avant  d'avoir  reçu 
Cip.  VI.  ce  sacrement,  sont  damnés.  Il  soutient  qu'il 
n'y  a  aucune  ditlV'rencc  de  mérite  (]ui  fasse 
que  lie  ilcux  enfants,  l'un  soit  choisi  et  l'autre 
réprouvé;  et  que  si  l'on  a  égard  à  la  volonté' 
des  parents,  ceux  qui  sont  chrétiens  ont  dé- 
siré avec  beaucoup  d'empressement  ([ue  letu' 
enfant  fut  baptisé,  et  (pie  toutefois  leur  lils 
étant  prévenu  parla  mort  avant  d'avoir  reçu 
le  baptême,  il  est  condamné  au  feu  éternel; 
tandis  qu'un  enfant  qui  est  né  de  parents  infi- 
dèles, et  quiconircleurvolonté  aété  conduit 
A  la  grâce  du  baptême,  est  fait  héritier  de  Dieu 
et  cohéritier  de  Jésus-Christ.  «  Qu'est-ce  que 
Dieu  ,  dit-il ,  avait  prévu  de  fulur  dans  ces 
deux  enfants ,  qui  devait  empêcher  que  la 
charité  paternelle  ne  pût  servir  de  rien  à  l'un, 
et  faire  qu'une  cruauté  ennemie  profitât  beau- 
coup à  l'antre  ?  Qui  est-ce  qui  peut  pénétrer  la 
profondeur  de  ces  jugements  de  Dieu? Mais 
aussi  qui  est-ce  qui  ne  reconnaîtra  pas  ici  la 
miséricorde  de  la  bonté  gratuite,  et  la  jus- 
tice de  la  divine  sévérité?  N'y  ayant  rien  de 
méritoire  dans  les  actions  de  ces  deux  enfants, 
ni  aucune  différence  de  cause  dans  leur  ori- 
gine, il  est  évident  qu'ils  ont  été  l'un  et  l'au- 
tre liés  par  les  liens  du  péché  originel  ;  mais  il 
n'est  pas  connu  pourquoi  ils  n'ont  pas  tous  les 
sM'.  deux  été  délivri'S.  Pourquoi,  dira  quelqu'un. 
Dieu,  n'a-t-il  pas*  fait  sentir  à  l'un  et  à  l'au- 


tre les  elfets  de  sa  miséricorde  graluilc,  [mis' 
qu'ils  étaient  coupables  d'un  môme  péché?  » 
Saint  Fulgencc  n'pond,  sans  vouloir  appro- 
foutlir  les  jugements  incompréhensibles  de 
Dieu,  que  ces  deux  enfants  ne  sont  ni  tous 
tieux  délivrés,  ni  tous  deux  condamnés,  par- 
ce que  Dieu  qui  ne  peut  ni  voidoir,  ni  faire  le 
mal,  a  voulu  par  une  juste  sévérité  que  l'on 
exigeât  de  l'un  sa  dette,  et  par  une  bonté 
gratuite,  que  la  dette  fut  remise  à  l'autre. 

3.  Ce  Père,  comparant  ensuite  la  cause  c^- 
des  enfants  qui  meurent  sans  baptême,  avec 
celle  des  adultes  qui  meurent  dans  l'inlidé- 
lité ,  n'y  trouve  point  de  ditl'ércnce  h  cer- 
tains égards.  «  La  cause  des  adultes  ',  dit-il, 
et  des  enfants  qui  achèvent  le  cours  de  la 
vie  présente  dans  l'intidélilé  avant  d'avoir 
reçu  le  baptême ,  est  la  môme  quant  à  la 
participation  du  péché  originel.  Les  uns  et 
les  autres  passeront  de  cette  vie  dans  le  feu 
éternel,  qui  est  préparé  au  diable  et  à  ses 
anges  ;  parce  que  la  cédule  par  laquelle  la 
malice  du  séducteur  les  tient  soumis  à  sa 
puissance,  n'a  pas  été  effacée  par  la  miséri- 
corde du  Sauveur.  Dieu  rendra  à  chacun  se- 
lon ses  œuvres  ;  en  sorte  que  non-seulement 
ils  brûlent,  à  cause  du  péché  originc^l,  dans 
le  feu  éternel,  où  les  enfants  mêmes  qui 
sont  morts  sans  avoir  reçu  le  baptême,  et 
qui  n'ont  ftiit  aucune  action  bonne  ou  mau- 
vaise, doivent  brûler;  mais  encore  ils  souf- 
frent, eu  punition  de  leur  mauvaise  volonté, 
des  peines  d'autant  plus  grandes,  qu'ils  ont 
ajouté  au  premier  péché  un  plus  grand  nom- 
bre d'iniquités  qui  leur  sont  propres,  »  11  dit 


*  Si  vero  parentum  consideretur  volunlas,  illi 
qui  christiani  sunt ,  ul  eorum  filius  baptizaretur 
sollicite  volueriinl,  instantissiine  concurrcrunt, 
quorum  tamen  filius  aniequam  haplizaretur  morte 
prœventus,  a-ternis  est  igiiibus  deputnlus  :  ille  ve- 
ro qui  de  inftdelibus  natus  esl,conlrarolunlatem 
parentum  perductus  ad  gratiam  baplismi,  factus 
est  hœres  Dei  et  cohœres  Chrisli.  Quid  in  liis  prœ- 
x'idit  Deus  futurum,  ul  uni  nihil  conferre  posset 
charilas  parentalis,  et  alteri  multum  crudelitas 
prodesset  hostilis  ?  Quis  istam  profundilatem  judi- 
ciorum  Dei  penelrare  valeat .'  Quis  non  tant'  n  hic 
et  misericordiam  gratuitœ  bonitalis,  et  justiliam 
divince  severitalis  agnoscat  ?  Ubi  enim  duorum 
parvulorum,  nec  in  actilnis  aligna  sunt  mérita, 
nec  in  origine  dissimilis  c(tusa,  manifestum  qui- 
dem  nobis  est  quod  ambo  fuerint  originalis  pec- 
cali  vinculis  obligati,  occuUumvero  cur  non  rim- 
bo  fuerint  absohiti.  Vulg.,  \ih. De PrœdesC,  chikxm, 
pag.  447. 

*  Dicet  aliquis  cur  non  ambobus  largilus  est 
Deus  graiuitam  misericordiam ,  cum  iinus  ambos 


rcatus  obstrinxerit?  Cui,  salva  incomprehensibili 
altitudine  judiciorum  Dei,  respondemus  ideo  non 
ulrumque  liberatum  ess'  vel  ulrumqiie  damna- 
tum ,  quia  Deus  qui  malum  nec  velle  polest  ali- 
quando  nec  facere,  ab  uno  jusla  seviritate  debi- 
tum  prœcepit  exigi.  altericcro  graluitn  jussit  bo- 
nitule  dimitti.  Ibid.,  rap.  xni,  pag.  448. 

'  Causa  vero  majorum  atque  parvulorum  qui 
sine  baptismale  cursum  vitœ  prœsentis  in  infide- 
litate  consummant,  quantum  attinet  ad  commu- 
nioncm  originalis  peccali,  una  est;  etexhacutri- 
que  ibunt  in  ignem  œternum  qui  paratus  est  dia- 
bolo et  angclis  ejus,  quiuineis  chirographum  quo 
sihi  eos  deceploris  nequiiia  suhdidit,  Salvatoris 
gratin  non  dclevit.  Sed  in  eo  est  majorum  causa 
detevior,  quia  rationis  utendœ  facultatc  percepta, 
respuiinl  aut  negligiint  regeneralionis  salutare  re- 
médium,  sine  quo  non  solum  regno  potiri  nequi- 
bunl,  quin  elinm  gravioribus  suppliciis  suhjace- 
bunt...  quanio  amplius  propria'  iniqvilalis  adji- 
ciunt.  Ibid.,  cap.  xiv,  pag.  449. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Cip.x<'> 


58 

qu'aucun  chrétien  ne  doit  douter  que  la  grâ- 
ce ne  prévienne  ceux  à  qui  le  péché  originel 
ou  les  péchés  actuels,  sont  remis;  que  ceux- 
là  se  trompent  beaucoup  qui  s'imaginent  que 
la  grâce  est  donnée  également  à  tous  les 
hommes;  que  les  saints  Pères  que  Dieu  a  il- 
luminés par  sa  griice  prévenante  afin  qu'ils 
crussent,  et  qu'il  a  ensuite  remplis  de  son 
esprit,  afin  qu'ils  enseignassent  aux  autres, 
suivant  en  toutes  choses  la  vérité  de  la  pré- 
dication apostolique,  ont  très-certainement 
connu  '  et  ont  donné  à  connaître  dans  leurs 
livres  et  dans  leurs  lettres  que  la  grâce  de  Dieu 
n'est  pas  généralement  donnée  à  tous  les  hom- 
mes, parce  que  Dieu  la  donne  gratuitement. 
Selon  le  saint   évéque,  la  grâce  dont  Dieu  ' 
fait  part  aux  vases  de  miséricorde ,   com- 
mence par  l'illumination  du  cœur  ;  elle  ne 
trouve  dans  l'hommo  aucune  bonne  volonté  ; 
mais  c'est  elle  qui  forme  la  bonne  volonté 
même.  «C'est  elle,  dit-il,  qui  nous  cherche  la 
première,  afin  que  nous  la  cherchions  ;  et  nous 
ne  pouvons  ni  l'accepter,  ni  la  rechercher 
par  nos  désirs,  si  elle-même  ne  produit  ce 
consentement  et  cette  recherche  dans  notre 
cœur.  Nul  homme  ne  peut  désirer  cette  grâ- 
ce ou  la  demander,  personne  même  ne  la 
pourra  connaître,  s'il  ne  la  reçoit  auparavant 
de  celui  qui  la  donne   avant   toute   bonne 
œuvre,  et  avant  même  toute  bonne  volonté, 
afin  qu'elle  prépare   la   bonne   volonté   de 
l'homme,  qu'elle  la  lui  inspire,  qu'elle  l'é- 
claire,  qu'elle  l'excite,  qu'elle  la  conserve  et 
qu'elle  la  perfectionne.  Ainsi,  pour  que  la 
grâce  de  Dieu  soit  connue  de  l'homme,  pour 
qu'elle  en  soit  aimée,  qu'il  la  désire  et  qu'il 
la  demande,  il  faut  qu'elle  soit  avant  toutes 
choses  donnée  à  cet  homme  qui  ne  la  con- 
naît point,  ne  l'aime  poiut,  ne  la  désire  cl  ne 
la  demande  point.  C'est  donc  celte  grâce 


PrOT.      Tlll 

». 


CaoU  ir,  S, 


Belir.  III.  l 
«11. 


elle-même  qui  se  fait  connaître,  qui  se  fait 
aimer  et  demander.»  Saint  Fulgence  appuie 
cette  doctrine  par  divers  passages  de  l'Kcri- 
ture,  en  particulier  par  ce  qui  est  dit  dans 
les  Proverbes,  que  c'est  le  Seigneu7'  qi/i  pré- 
pare la  volonté,  et  qui  nous  donne   consé- 
qucmment  le  commencement  de  la  foi,  selon     u,.  in 
que  Jésus-Christ  l'enseigne   lorsqu'il   dit  à 
l'Église,  dans  le  Cantique  des  cantiques  :  Vous 
viendrez,  et  en  commençant  par  la  foi,  vous  avan- 
cerez.CePèrc  ajoute,  que  c'est  une  chose  cer- 
taine et  dont  personne  ne  doit  douter,  que 
nous  ne  pouvons  ni  avoir  la  foi  ',  ni  croî- 
tre dans  la  foi  après  l'avoir  reçue,  si  celui 
que  saint  F'aul  appelle  l'auteur  et  le  consom- 
mateur (le  notre  foi,  ne  nous  donne  cette  foi 
précieuse,  ne  la  fait  croître  en  nous  après 
nous  l'avoir  donnée,  et  ne  la  mène  jusqu-'à  sa 
dernière  perfection,  après  l'avoir  ainsi  aug- 
mentée en  nous.  «  La  volonté  humaine',  dit-    c»r.  "m. 
il,  peut  bien  avant  que  d'avoir  la  foi  mériter 
par  eUe-même  le  châtiment  et  la  punition, 
mais  jamais  elle  ne  pourra  par  elle-même 
mériter  la  foi.  Et  afin  que  l'on  n'attribue 
point  Ri  différence  des  grâces  aux  mérites 
ou  aux  actions  humaines,   saint  Paul  nous      »«• 
enseigne  que  la  grâce  donne  elle-même  le 
commencement  des  mérites.  Il  y  a,  poui-suit- 
il,  diversité  d'oj/érations  surnaturelles,  tnais  il 
n'y  a  qu'un   Dieu,   gui  opère  tout  en  tous. 
C'est  un  seul  et  un   même  esprit  qui  opère 
toutes  ces   choses ,   distribuant  à  chacun    se- 
Ion  qu'il  lui  plaît.  »  Saint  Fulgence  fait  voir 
que  le  commencement  de  cette  grâce  salu- 
taire ne  consiste  donc  pas  dans  les  forces 
de  la  nature,  ni  dans  les  préceptes  de  la  loi, 
mais  dans  l'illumination   du   cœur  ;    parce 
que  les  préceptes  peuvent  bien  se  faire  en- 
tendre aux  oreilles  de  la  chair ,  mais  ils  ne 
peuvent  pénétrer  jusqu'aux  oreilles  du  cœur 


I  Cnr.  TU  t, 
E  gt  II. 


'  ni  enim  sancli  Patres,  apostolicœ  prwdicatio- 
nis  tenentes  per  omnia  verilatem  ,  certissime  ce- 
gnoverunt  cognoscendum  quod  libris  et  epistolis  re- 
liquerunt,  gratiam  Dei  non  omnibus  hominibus gc- 
neraliler  dari.  Iliil).,  caji.  xv,  pag.  450. 

'  Ista  gratia  quam  Deus  rasis  misericordiœ 
gratis  donat,  ab  illuminalUme  cordis  incipit,  et 
hominis  volunlatem  non  bonnm  invenit  ipsa,  sed 
facit;  atqxie  ul  eligalur,  ipsa  prius  eligil,  neque 
suscipitur  aul  diligitur.nisi  hoc  ipsa  in  corde  lio- 
minis  operelur.  Ergo  et  susceplio  et  desiderium 
graliœ  opiisipsius  eslgraliœ.  Islam  gratiam  nul- 
lus  liominum  desiderare  relposcere ,  sed  iiec  co- 
gnnsccrepoterit,  nisi  cam  prius  ab  illn  accipiat ; 
gui  eam  nullis  prœcedenlibns  operibus  aut  i  olun- 
talibus  bonis  ad  hoc  largitur,  ul  volunlalein  in 


gua  semper  maneat,  ipsa  prœparet,  ipsa  donet, 
ipsa  illuminet,  ipsa  excilel,  ipsa  conservel,  ipsa 
consumet.  Ul  ergo  gratia  Dci  cognoscatur  et 
diligatur,  desiderctur,  ac  posluletur,  prius  dona- 
tur  homiyii  non  cognoscenti,  non  diligenti,  non 
desideranli,  neque  postulanli.  Ipsaitaque  se  facil 
cognosci,  diligi ,  desiderari,  poslutari.  llùb.,  cap. 
XV  et  XVI,  png.  430. 

'  Cerlum  est  igitur /idem  in  nobisnec  esseposse, 
nec  cresccre,  nisi  illc  nobis  eam  Iribuat,  tribiilain 
augeat,  auclam  pcrficiat,  quem  auctorem,  con- 
summatnremque  fidei  apostolica  pro/itelur  auc- 
toritas.  Iliid.,  cap.  xvii,  pag.  452. 

*  Uumana  volunlas  priusquam  accipiat  pdem, 
punilioncm  per  seipsam  polesl  mereri,  non  fidem. 
Ibid.,  cap.  xvui,  pag.  453. 


CHAPITRE  I.  —  SAINT  FULGENCE  DE  RUSPE. 


[VI°  SIÈCXE.] 

si  la  grAce  spirituelle  ne  les  y  fait  entendre. 
C'est  elle  qniopoie'  et  la  liiniièicctle  saint, 
atin  que  l'iiommc  <[ii'cllo  prévient  connaisse 
que  les  préceptes  de  la  loi,  qu'il  écoutait 
non-seulement  sans  fruit,  mais  à  sa  condam- 
nation, lorsqu'il  n'avait  pas  le  pouvoir  de 
les  accomplir,  sont  saints,  justes  et  bons; 
mais  aussi  afin  qu'il  reçoive  la  charité,  par 
laquelle  il  puisse  aimer  et  pratiquer  ce  qu'il 
connaît.  Ce  Père  répète  ce  qu'il  avait  déjà 
dit  souvent,  que  la  jjrâce  n'est  pas  donnée  à 
tous,  et  la  raison  qu'il  en  donne,  c'est  que  la 
foi  n'est  pas  commune  à  tous. 

4.  Le  dessein  de  l'auteur  dans  le  second 
livre  est  de  montrer  que  le  libre  arbitre  est 
non-seidemcnt  dans  les  bons,  mais  encore 
dans  les  méchants;  avec  cette  différence  que 
dans  les  bons  il  est  aidé  et  élevé  par  la  grâce 
du  Rédempteur,  au  lieu  que  dans  les  mé- 
chants il  est  délaissé  et  puni  par  l'équité  et 
la  justice  d'un  Dieu  vengeur.  «  Dieu,  dit-il,  en 
nous  disant,  par  un  de  ses  Prophètes,  que  si 
nous  voulons  l'écouter,  nous  serons  7-assasiés 
des  bieju  de  la  (erre  ;  et  que  si  nous  ne  le  vou- 
lons pas,  et  si  nous  l'irritons  contre  'nous, 
l'é/jée  nous  dévorera,  marque  clairement  le 
libre  arbitre  de  l'homme,  et  que  le  vouloir 
et  le  non-vouloir  est  au  pouvoir  de  notre  vo- 
lonté. Mais  lorsque  l'Apôtre  dit  que  c'est 
Dieu  qui  opère  en  nous  le  vouloir  et  le  par- 
faire, selon  qu'il  lui  plaît,  il  montre  que  la 
volonté  de  l'homme  a  besoin  d'être  dirigée 
par  la  grâce  de  Dieu  pour  vouloir  le  bien,  et 
d'être  aidée  de  lui  pour  le  faire.  Eu  nous 
commandant  *  de  vouloir  le  bien,  on  nous 
montre  ce  que  nous  devons  avoir  ;  mais 
parce  que  nous  ne  pouvons  pas  même  avoir 
ce  vouloir  de  nous-mêmes ,   nous  sommes 


50 


avertis  de  le  demander  i\  celui  qui  nous  lo 
connnande  ;  et  nous  ne  pouvons  pas  même 
le  demander  à  Dieu,  s'il  ne  forme  dans  notre 
emur  la  volonté  de  le  demander.  »  Ce  Père  c.p.i. 
rapporte  un  grand  nombre  de  témoignages 
de  ri*;criture,  par  lesquels  il  parait  '  claire- 
ment que  le  libre  arbitre  de  l'honnne  est  de 
telle  nature  que,  soit  qu'il  s'agisse  de  com- 
mencer quelque  bien,  il  ne  le  peut  faire  s'il 
n'est  prévenu  de  la  grAce;  soit  qu'il  s'agisse 
de  l'achever,  il  ne  peut  encore  y  réussir  si 
la  grâce  qui  l'a  prévenu  ne  l'aide  jusqu'à  la 
fin.  Saint  Fulgence  fait  voir  que  c'est  aussi  "■ 
de  Dieu  que  nous  vient  le  dessein  et  la  vo- 
lonté de  prier;  que  la  volonté  de  l'homme  xnour. 
suit  toujours  la  grâce  de  Dieu  qui  la  précè- 
de ;  que  c'est  elle  seule  *  qui  a  rendu  Paul 
fidèle,  d'infidèle  qu'il  était;  que  Paul  a  tou- 
tefois cru  volontairement,  et  travaillé  volon- 
tairement à  l'œuvre  du  Seigneur  ;  mais  qu'il  \n. 
n'aurait  pu  ni  croire,  ni  travailler,  s'il  n'a- 
vait reçu  d'en  haut  le  don  de  la  grâce  qui  a 
travaillé  en  lui  et  avec  lui.  «  C'est  là,  dit  ce 
saint  évêque,  la  doctrine  des  Pères  catholi- 
ques '  ;  ils  l'ont  reçue  des  apôtres.  On  l'en- 
seigne sans  aucun  doute  dans  l'Église,  et 
elle  a  toujours  été  suivie,  par  les  évoques 
grecs  et  latins,  d'un  commun  consentement 
et  sans  partage,  confirmés  les  uns  et  les  au- 
tres, dans  ces  sentiments,  par  l'infusion  du 
Saint-Esprit.  »  11  ajoute  que  c'est  pour  la  dé-  stmi. 
fense  de  la  même  doctrine  que  saint  Augus- 
tin a  tant  travaillé  contre  les  pélagiens  et  les 
autres  ennemis  de  la  grâce ,  et  il  invite  ceux 
qui  désirent  sincèrement  le  salut  éternel  à 
lire  les  écrits  de  ce  Père.  Il  parait  extrême- 
ment surpris  de  la  comparaison  que  quel- 
ques-uns faisaient  du  don  de  la  grâce  avec 


'  Operatur  ergo  gratia  et  illuminationem  in  ho- 
minibus  et  salutem  :  vt  mandata  legis,  quœ  do- 
nec  liomo  implere  nonpoteral,  non  tantum  i/iuti- 
liter,  sed  etiam  damnabililer  audiehat,  adjutorio 
gratiœ  prœventus,  non  snlum  sancta  et  justa  et 
bona  esse  noverit,  verum  eliam  cfiaritatem  acci- 
piat,  qua  possit  et  deligere  et  implere  quoi  dixit. 
Ibiil.,  cap.  XX,  pag.  '454. 

*  Dum  ergo  pra-cipitiirnobis  ut  velinius,  osten- 
ditur  quid  habere  debcamus ;  sed  quia  id  ex  nobis 
habere  non  possumus,  admonemur  ut  a  quo  nobis 
datur  prœceptum  ,  ab  ipso  petamus  auxilium. 
Quod  lamen  non  possumus  poscere,  nisi  Deus  in 
iwbis  operetur  et  velle.  Fulg.,  lib.  Il  De  Prœdest. 
cap.  IV,  pag.  4fil. 

^  Ilis  aique  hujusmodi  leslimoniis,  quibus  tam 
nnvum  qvam  vêtus  refertum  est  iestamenlum, 
taie  esse  hominis  demonstratur  arbitrium,  ut  sive 


ad  inchoanda  quœ  bona  sunt  nihil  possit,  nisi 
ipsum  gralia  divina  prœvenerit,  sive  ad  perfi- 
cienda  nullatenus  sibi  sufflcerevaleat,  nisi  gralia 
qua  prœvcnitur,  eadem  jugiter  adjuvetur.  Ibid. , 
cap.  xvin,  pag.  463. 

'  Ut  esset  Paillas  ex  infideli  fidelis,  sala  gralia 
operala  est...  atque  ila  volunlarie  quidem  Pau- 
lus  credidil ,  volunlarie  abundnntius  illis  om- 
nibus laboravit  ;  sed  et  credere  ei  laborare  non 
posset,  nisi  desupcr  donum  gratiœ  in  se  ac 
secum  operanlis  acciperet.  Ibid.,  cap.  xvi,  pag. 
470. 

^  Bœc  ilaque  catholicorum  Patrum  aposlolicis 
instilulionibus  trodita  permanet  in  Ecclesiis  sine 
aliqua  dubitalione  doctrina,  quam  grœci ,  latini- 
que  ponti/ices,  Sancti  Spiritus  infusiune  firmati, 
uno  atque  indissociabili  semper  lenuere  conseimt, 
Ibid.,  cap.  xvni,  pag.  472. 


60 


HISTOIRE  GÉXKRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


les  dix  marcs  d'argent  que  le  père  de  fa- 
mille douna  à  ses  serviteurs,  pour  les  faire 

Lut  xn.ij,  profiter  pendant  son  absence,  ainsi  qu'il  est 
rapporté  dans  l'Évangile.  Il  leur  fait  voir  que 
cette  paraljûie  ne  peut  pas  même  autoriser 
leur  doctrine,  puisque  ce  père  de  famille  ne 
reçut  aucun  gage  de  ses  serviteurs,  et  qu'au 
contraire  Dieu  nous  donne  et  sa  grâce  et  le 
gage  du  Saint-Esprit,  comme  le  dit  l'Apô- 

iicor.  T,  t,  tre  dans  ses  Epitrcs.  Il  rejette  aussi  ce  que 
disaient  les  mêmes  ennemis  de  la  grâce,  que 
les  vases  d'honneur  dont  parle  l'Apôtre  mar- 
quent les  grands,  les  riches  et  les  puissants 

Rrb».  1,11  du  siècle;  et  les  vases  d'ignominie,  les 
clercs,  les  moines  et  tous  les  laïques.  11  sou- 
tient que  cette  idée  est  fausse,  et  que  saint 
Paul  a  parlé  des  prédestinés  et  des  réprou- 

ctf.an.  vos.  Il  dit,  à  cette  occasion',  «  qu'en  ce  mon- 
de il  n'y  a  point  dans  l'Église  des  dignités 
supérieures  à  celle  de  l'évèque,  ni  dans  le 
■  siècle  aucune  dignité  au-dessus  de  celle 
d'un  empereur  chrétien.  Mais  il  ne  faut  pas 
s'imaginer,  ajoute-t-il,  que  chaque  évêque 
soit  un  vase  de  miséricorde,  préparé  pour 
la  gloire,  dès  qu'il  est  élevé  à  la  dignité 
épiscopale.  Non,  mais  il  le  sera,  si,  plein  de 
sollicitude  pour  le  troupeau  commis  à  ses 
soins,  il  veille  continuellement  sur  lui  ;  s'il 
lui  prêche  la  parole  de  Dieu  ;  s'il  l'exhorte 
avec  instance,  à  temps  et  à  contre-temps  ; 
s'il  emploie  les  répréhensions,  les  prières, 
les  corrections;  s'il  instruit  avec  soin  et  une 
patience  infatigable,  et  qu'il  n'entreprenne 
point  par  une  orgueilleuse  usurpation  de 
gouverner  avec  un  esprit  d'empire  et  de  do- 
mination ;  mais  si,  au  contraire,  remph  de 
la  doctrine  et  des  écrits  des  apôtres ,  il  se 
rend  un  modèle  de  vertu  pour  toute  sorte  de 


personnes,  et  que  loin  de  regarder  comme 
un  sujet  de  joie  et  de  complaisance,  ce  com- 
ble de  grandeur  où  il  se  voit  élevé  pour  un 
peu  de  temps,  il  s'étudie  pai-  une  vraie  et 
sincère  humilité  à  donner  l'exemiilc  d'une 
vie  sainte  et  édifiante.  De  même  un  empe- 
reur '  n'est  pas  un  vase  de  miséricorde  des- 
tiné h  la  gloire,  parce  qu'il  a  reçu  la  souve- 
raine puissance  sur  la  terre  ;  mais  il  le  sera, 
si,  étant  élevé  sur  le  trône  de  l'empire,  il  vit 
dans  la  foi  orthodoxe  ;  si,  pénétré  d'une  vraie 
humilité  de  cœur,  il  soumet  et  fait  servir  à 
la  sainte  religion  le  faite  de  la  dignité  roya- 
le; s'il  aime  mieux  servir  Dieu  avec  crainte 
que  commander  h  son  peuple  avec  orgueil  ; 
s'il  modère  sa  sévérité  par  un  esprit  de  dou- 
ceur; si  sa  puissance  est  accompagnée  de 
honte;  s'il  se  l'ait  plus  aimer  que  craindre  ; 
s'il  songe  au  bien  de  ses  sujets  ;  s'il  exerce 
tellement  la  justice  qu'il  ne  néglige  la  mi- 
séricorde; si,  sur  toutes  choses, il  se  sou- 
vient qu'il  est  fils  de  la  sainte  mère  l'Eglise 
catholique,  et  qu'il  doit  faire  servir  sa  puis- 
sance à  lui  procurer  partout  le  monde  le  re- 
pos et  la  paix.  Car  l'attention  que  les  princes 
chrétiens  ont  poin-  le  bien  de  l'Eglise,  les 
rend  plus  grands  et  plus  Uorissants  que  les 
combats  pour  le  maintien  de  leur  puissance 
temporelle,  en  quelque  partie  du  monde  que 
ce  soit.  Ce  n'est  donc  point,  continue  saint 
Fulgence,  par  aucune  dignité  du  siècle  ou 
de  l'Église,  mais  par  la  foi  qui  opère  par  la 
charité,  que  chacun  devient  un  vase  d'hon- 
neur par  le  don  de  Dieu,  qui  fait  miséricor- 
de. Le  Sauveur  n'appelle  pas  heureux  ceux 
qui  possèdent  les  dignités  ou  séculières  ou 
ecclésiastiques,  mais  les  pauvres  d'esprit, 
ceux  qui  ont  le  cœur  pur,  qui  ont  faim  et 


>  Quantum  pertinel  ad  hujus  temporùi  vitam , 
constat  (plia  inEcclesia  uemo  pojitifice  polior,  et  in 
sœculo  nemo  christiano  impcraiore  celsiorinveni- 
tur.  Seil  non  ideo  quilihet  epUcopus  vas  miscri- 
cordiœ  puletur  in  gloriam  prœparatum,  qui  pon- 
li/icali  nnlitia  fiingitur;  sed  si  pro  grege  sibi 
credilo  sollicitits  semper  invigitct,  prœdicet  ver- 
bum,  inslct  opportune,  importune,  arguât,  obse- 
crel.  increpel.  in  omni  patieutia  et  doclrina;  nec 
sibi  dominatum  supcrbus  usurpare  contendal , 
sed  aposlolicis  informaliis  eloquiis,  exemphtm  se 
cunctis  exliibeat  ;  nec  si  ultius  altiludinis  cnlta- 
lum  sibi  gaudeat  temporale  fasligium,  sed  si  se 
humili  corde  fidelibus  prœbeal  bonœ  coniersalio- 
nis  exempluui.  Iliid.,  cap.  22. 

•  Clenienlissimus  quoque  imperalor  non  ideo 
est  vas  vtisericordia-  prœpnralum  in  gloriam, 
quia  apicem  tcrret>i  princtpalus  accepil,  sed  si  in 
impcriali  culmine  recta  jide  vivat,  et  vera  rordis 


humililate  prwditus ,  culmen  regiœ  dignitatis 
sanclœ  religioni  subjicial  ;  si  magis  in  timoré 
serviat  Deo,  quam  in  tumore  dominari  populo 
delcctetur  ;  si  in  eo  lenitas  iracundiam  miliget , 
omet  benignilas  potestatcm  ;  si  se  magis  diligen- 
dum  quam  metuendum  cunctis  exhibcal  :  si  suh- 
jcclis  !:atubriter  consulat  -.  si  juslitiam  sic  teneat 
vt  misericordiam  non  relinquat  :  si  prœ  omnibus 
se  snncta'  matris  Ecclesiœ  calholicœ  memineril 
plium,  ut  ejuspaci  atque  tranquillilali  per  wii- 
vcrsum  mnndum  prodesse  facial  suum  principa- 
lum.  Magis  cnim  cliriiitianum  regitur  ac  propa- 
gatur  imperium  ,  dum  ecclesiasticos  slatuit,  per 
universam  terram  consulilur,  quam  cum  in  parte 
quarumque  Icrrarum  pro  temporuli  securitate 
pugnalur.  Non  crgo  per  quamlibcl  saruliaul  Ec- 
clesiir  digniintem,  sed  per  ftdrm  quœ  per  dilectio- 
nrm  operalur.  vnusquisque  vas  in  honorem,  dono 
Uci  miHTanlis  elJicitur.  ll>iJ.  ,  cap.  xxu,  iiag.  477. 


CIIAPITIIE  I.  —  SAINT  FL'LGENCE  DE  RUSI'E. 


[Vl"  SIÈCLE.] 

soif  do  la  juslico.  l)ira-l-on  ([uc  rempL-rcui' 
Goiisluntin  t'iait  un  vase  do  misthicordo,  et 
(|ii'Aiit(iitii;  et  l'aiil  (''taieiit  des  vases  d'igno- 
iiiinie?  Que  J'em|iereui'  Tliéoduse  élail  un 
vase  de  miséricorde  destiné  à  la  {jloire,  et 
que  Jean  le  Tliébaïen,  moine  de  profession, 
sans  l'avis  duquel  il  ne  livrait  jamais  de  ba- 
taille, parce  (ju'il  le  reyaidail  comme  l'ora- 
cle de  Uieu,  était  un  vase  de  déshonneur? 
Il  n'y  a.  personne  ipi  oserait  nier  que  les 
saints  évèiines  Innocent  do  Rome,  Alhanasc 
d'Alexandrie,  llilaire  de  Poitiers,  Aui;ustin 
d'IIippone  et  un  içraud  nomln'C  d'autres  qui 
ont  l'ait  paraître  leur  zèle  pour  l'Église  dans 
la  défense  de  la  foi,  soient  des  vases  de  mi- 
séricorilc;  mais  y  aura-l-il  quelqu'un  d'assez 
ennemi  de  la  foi  et  de  la  charité  pour  oser 
appeler  vases  d'ignominie  Paul,  Antoine, 
Jean,  Hilarion,  Macaire  et  tant  d'autres  so- 
litaires- célèbres  par  la  pureté  de  leur  foi  et 
de  leurs  mœurs?  » 

S.  Saint  Fulgence  traite  encore  de  la  pré- 
destination dans  le  ti'oisième  livre  ,  où  il  fait 
voir  que  ceux  que  Dieu  a  prédestinés  à  la 
gloire  ,  le  sont  aussi  aux  bonnes  œuvres  par 
lesquelles  ils  doivent  mériter  cette  gloire.  Il 
dit  qu'il  est  important  d'instruire  les  fidèles 
de  ce  qui  regarde  cette  doctrine  ,  afin  que 
lorsque  l'on  connaît  que  la  prédestiualion  di- 
vine est  une  préparation  éternelle  de  la  grâ- 
ce, on  attribue  à  la  même  grâce  les  efi'ets  de 
cette  prédestiualion,  qui  sont  la  vocation,  la 
juslillcation  et  la  gloire.  Car  le  Seigneur  nous 
a  élus  en  Jésus-Christ  avant  la  création  du  mon- 


Gl 


de,  afin  que  nous  fussions  saints  et  irrépréhensi- 
btes  devant  ses  yeux.  «  La  certitude  ('■IitucIIc  ', 
dil-il,  de  cette  pi('destiiiatioii  divinr'  es!  si  as- 
surée, non-seulement  par  rapjjort  aux  œuvres 
qui  y  conduisent  ,  mais  encore  par  rapport 
aux  [leisonncs  qui  doivent  y  avoir  part,  qu'il 
ne  peut  arriver  que  quelqu'un  de  ceux  qui  ap- 
partiennent à  ce  nombre  heureux  perde  la 
grâce  du  salut  ;  de  même  qu'il  ne  se  peut 
faire  qu'aucun  de  ceux  qui  n'y  sont  pas  com- 
pris ,  y  ari'ivc.  Car  devant  Dieu  qui  sait  tou- 
tes choses  avant  même  qu'elles  arrivent ,  le 
nombre  des  prédestinés  n'est  ni  douteux  ni 
incertain  ,  comme  l'etlet  des  œuvres  qu'il  a 
ordonnées,  ne  peut  l'être.  Et  celui  qui  choisit 
et  adopte  les  élus  pour  ses  enfants  en  Jésus- 
Clirist,  en  doit  connaître  le  nombre  d'une  ma- 
nière certaine  et  assurée,  lui  qui  a  réglé  tou- 
tes choses  avec  mesin-e,  avec  nombre  et  avec  poids, 
ainsi  que  ledit  r  Écriture.  C'était  les  élus  que 
Dieu  promettait  à  Abraham  lorsqu'il  lui  di- 
sait :  /{egardez  le  ciel,  et  compte:  les  étoiles  si 
vous  le  pouvez  ;  c'est  aiiisi  que  Je  multiplierai  vo- 
tre race.  C'est  d'eux  dont  il  est  dit  dans  le  pro- 
phète Daniel  :  En  ce  temps-là  tous  ceux  de  vo- 
tre peuple  qui  seront  trouvés  écrits  dans  le  li- 
vre seront  sauvés.  C'est  à  eux  que  Jésus-Christ 
adresse  la  parole  quand  il  dit  :  Réjouissez-vous  -luc.  %,ia. 
de  ce  que  vos  noms  sont  écrits  dans  le  ciel.  C'est 
d'eux  qu'il  est  dit  encoie  dans  Daniel  :  Ceux  doi..  mi. 
qui  en  auront  instruit  plusieurs  dans  la  voie  de  ^' 
la  justice,  brilleront  comme  des  étoiles  dai^s  toute 
l'éternité.  C'est  d'eux  enfin  qu'il  est  dit  dans  le 
Psaume  cxivi",  maispris  dans  un  sens  spirituel: 


Sap.  XI,  21. 


GOD. 


Dàu. 


'  Cujus  prœdesiinationis  ila  manet  wterna  fir- 
niitas,  et  firma  œlernilas,  non  solum  in  dispesi- 
tione  operum,  verum  etiam  in  numéro  persona- 
ruin;  ulnec  de  illius pleailiidine  quispiam  saluiis 
œternœ  graliam  pcrdal,  nec  exlra  illius  numeri 
quantitalein  ad  donum  salutis  wternœ  perveniat. 
Deo  enim  qui  scit  omnia  anteqnam  fiant,  sic  non 
est  incerlus  prœdeslinatorum  numerus,  sicutdis- 
positorum  operum  diibUis  apiid  eum  non  inveni- 
tur  e/fecius.  Apud  se  habct  cerlissimumnumerum 
prœdeslinatorum  ille ,  qui  eos  in  adoptionem  filio- 
rum  per  Ckristum  prœdestinavil :  quia  iii  mensu- 
ra  et  numéro  et  {joudere  cuucta  disposuit.  Ipsos 
enim  promisit  Abraliœ  dictns  :  Respiue  iu  cœluiQ, 
et  uumera  stellas,  si  potes  diuumerare  eas,  et  di- 
xit.  Sic  erit  semeu  tuum.  Et  crtedidit  .\brabain  Deo, 
et  reputatum  est  ei  ad  justitiam.  De  his  dicitur  Do/- 
nieli  prophelœ  :  Et  in  tempore  illo  salvus  erit  po- 
polus  tuus  oiuuis,  qui  inveuietur  scriptus  in  libre. 
Ipsis  utique  Salvalor  noster  ait  :  (laudete  quia 
Domina  vestra  scripta  sunt  in  cœlis.  De  his  in  libro 
suncti  Danielis  dicilur  :  Qui  ad  juàtiliam  erudiuut 
uiultos,  fulgebuut  quiisi  ftellée  in  perpétuas  a'tcrni- 
tales.  Isli  spirilaliler  inleUigunlur  in  Psalmo,  ubi 


dicilur  de  Deo  :  Qni  numerat  multitudinem  stel- 
larum,  et  omnibus  eis  nomina  vocat.  Proinde 
qui  numerat  multitudinem  slellarum,  non  potesl 
suorum  ignorare  numerum  fUiorum.  Illi  ergo 
numéro  nec  aliquis  addilur ,  nec  aUquis  àe- 
miltitur;  quia  idem  numerus  secundum proposi- 
tu/m  Dei  prœdestinanlis  impletur.  fiam  quia  se- 
cundum propositum  voiunlulis  suœ  Deus  sanc- 
tos  suos  prœdcslinavit,  de  quo  scriptum  est  : 
Quia  omnia  qutecumque  voluit,  fecit  :  ita  ne- 
mo  polest  ejus  mutare  prœdeslinationcm,  sicut 
nullus  polest  ejus  vinccre  volitntalem.  Quod  si 
numerus  ille  certus  non  est  apud  Deum,  aut  divi- 
na  scientia  fallUur,  aiU  voluntas  divina  mulalur, 
aut  divina  virlus  advtrsila!e  qualibet  superalur. 
Quod  si  aliquid  horum  soU  pos.-iuiU  impii  dicere, 
aut  forte  nec  impius  aliquis  audet  hurum  dicere 
aliquid;  nemu  dicinani  prœdestinatiunem  neget  : 
Quandoquidem  illius  Dei  prœdestinalio  verapror- 
stis  asserilur,  cujus  et  scientia  irreprehensibilis, 
et  voluntas  incommutabilis,  et  virlus  insuperabi- 
lis  invenitur.  Fulg.,  lib.  111  De  Prœdest.,  cap.  iv  , 
pag.  183. 


62 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES, 


P..I.  ciLfi,  //  sait  le  nombre  prodigieux  des  étoiles ,  et  il  les 
cannait  toutes  jtar  leur  nom.  Celui  qui  coniple 
la  multitude  des  étoiles  ne  peut  ij^norer  le 

c«p.  t.  nombre  de  ses  enfants.  Or,  de  ce  nombre  nul 
n'est  retranche,  comme  nul  n'y  est  ajouté  ; 
parce  que  le  nombre  est  rempli  selon  le  dé- 
cret de  Dieu  qui  a  prédestiné  ses  élus.  Ainsi 
celui  dont  il  est  écrit  qu'iV  a  fait  tout  ce  qu'il 
a  voulu,  ayant  prédestiné  les  élus  selon  le 
décret  de  sa  volonté,  personne  ne  peut  chan- 
ger l'ordre  de  cette  prédestination,  comme 
personne  ne  peut  empêcher  l'efTet  de  sa  vo- 
lonté. Que  si  le  nombre  des  prédestinés  n'est 
pas  certain  et  assuré  de  la  part  de  Dieu,  il 
faut  donc  reconnaître  ou  qu'il  se  trompe 
dans  ses  connaissances,  ou  que  sa  volonté 
est  sujette  au  chanirement,  ou  que  sa  force 
et  sa  puissance  peuvent  être  surmontées. 
Mais,  comme  il  n'y  a  que  des  impies  qui 
osent  avancer  ces  choses,  et  qu'il  y  en  a 
même  parmi  les  impies  qui  n'oseraient  les 
soutenir,  que  reste-t-il  à  conclure,  sinon  que 
personne  ne  doit  nier  la  prédestination  divi- 
ne, puisqu'il  ne  peut  arriver  que  cette  prédes- 
tination de  Dieu  ne  soit  véritable  et  assurée, 
lui  dont  la  connaissance  est  certaine,  la  vo- 
lonté immuable,  et  la  puissance  invincible.  » 

Cap.  VI,  6.  «11  serait  très-mauvais  de  répondre  que 

si  la  prédestination  a  lieu,  nous  ne  devons 
ni  prier,  ni  veiller,  mais  faire  toutes  les  vo- 
lontés de  la  chair,  puisque  si  nous  sommes 
prédestinés,  nous  serons  infailliblement  sau- 
vés. Cette  réponse  ne  peut  être  apportée, 
parce  que  la  grâce  qui  nous  a  été  préparée 
par  la  divine  piédestination,  nous  est  donnée 
de  Dieu  afin  que  nous  veillions,  que  nous 
priions,  et  que  nous  ne  cherchions  point  à 
fBom.  iiii,  satisfaire  la  chair  dans  ses  désirs  déréglés. 
Or,  comment  se  pourrait-il'  faire  que  quel- 
qu'un reçût  la  grâce  et  qu'il  ne  fit  point  les 
œuvres  de  la  grâce,  elle-même  opérant 
en  lui  ?  Car  la  grâce  est  donnée  par  le  Saint- 

G.:tL  T,  s»  Esprit  ;  et  les  fruits  du  Saint-Esprit  sont  la 
"  "'  ckarité,  la  joie,  la  paix,  la  patience,  l'humanité, 

la  bonté,  la  foi,  la  douceur,  la  tempérance.  Ainsi 
donc  dire  :  Si  l'homme  est  prédestiné,  il  ne 
doit  ni  prier,  ni  veiller,  c'est  comme  si  on 
avançait  qu'une  prsonne  à  qui  Dieu  aiu-ait 

*  Quomodo  enim  fieri  potesl  ut  gratiam  quisque 
accipial  et  opéra  gratiœ,ipsa  gralia  in  se  opérante, 
non  facial?  C.ratia  quippe  per  Spiritum  Sanctiim 
dalur;  fructus  autem  Spiritus  est  cliarilas,  gau- 
dium,  pax,  touganiinitas,  etc.  Ibid.,  cap,  vi,  pag. 
485. 

•  Yolunlas  Omnipolenlis  nec  esse  e^^l in  cmmibus 


promis  une  longue  vie,  fond('e  sur  cette  p.i. 
rôle  :  l\e  veuillez  plus  chercher  les  choses  néces- 
saires à  la  vie,  ne  doit  rien  faire.  Nous  lisons 
que  Dieu  ajouta  par  sa  bonté  quinze  années  à  iv  r.oe.  t 
la  vie  du  roi  Ezéchias.  Ce  prince  sur  la  certitude 
que  Dieu  lui  avait  donné  de  prolonger  sa  vie, 
devait-il  pour  cela  dire  qu'il  lui  était  inutile  de 
boire  et  de  manger,  ou  de  penser  aux  autres 
besoins  de  la  vie  ?  Comme  donc  l'amour  de  la  ctp.  n;. 
vie  fait  chercher  les  choses  nécessaires  pour 
la  soutenir,  de  même  la  grâce  que  Dieu  nous 
a  préparée  par  sa  prédestination,  fait  que 
nous  travaillons,  que  nous  prions  et  que  nous 
veillons.  »  Ce  Père  ajoute  que  c'est  à  ceux  qui  v.n. 
nient  la  prédestination,  d'eu  eflacer  la  doctri- 
ne des  Épîtres  de  saint  Paul,  où  il  a  non-seu- 
lement enseigné  la  prédestination,  mais  en- 
core ordonné  de  la  prêcher  avec  confiance 
et  vérité. 

7.  En  s'expliquant  sur  cette  proposition  n. 

de  saint  Paul  :  Dieu  veut  que  tous  les  hommes 
soient  sauvés,  il  dit  premièrement  qu'il  est  né- 
cessaire' que  la  volonté  du  Tout-Puissant 
s'accomplisse  en  toutes  choses  ;  qu'ainsi  tout 
ce  que  veut  celui  à  la  volonté  duquel  rien 
ne  résiste,  ari-ive  ;  parce  que  la  puissance  de 
Dieu  étant  égale  à  sa  volonté,  il  ne  veut  rien 
qu'il  ne  le  puisse  faire.  Il  dit  en  second  lieu 
qu'il  y  a  bien  des  choses  que  Dieu  pourrait 
faire,  que  néanmoins  il  ne  fait  pas ,  mais 
qu'il  n'y  a  rien  qu'il  veuille  faire,  et  qu'il  ne 
fasse  pas.  Etant  donc  certain  que  tous  les 
hommes  ne  sont  pas  sauvés,  il  dit  qu'il  faut 
entendre  le  terme  de  tous  dans  la  proposi- 
tion de  saint  Paul,  en  ce  sens,  que  Dieu  veut 
qu'il  y  ait  des  hommes  sauvés  de  toutes  les 
nations,  de  tous  les  âges,  de  toutes  les  condi- 
tions, de  toutes  les  langues  :  «  Ce  qui  renfer-  x. 
me,  dit-il,  des  élus  d'entre  les  maîtres  et  d'en- 
tre les  serviteurs  ;  d'entre  les  rois,  et  d'entre 
les  soldats,  en  un  mot  de  toutes  sortes  d'état.» 
Il  prouve  que  Dieu  n'a  pas  voulu  le  salut  de 
tous  les  hommes  en  particulier,  puisque  se- 
lon l'Evangile  il  n'a  pas  voulu  le  faire  con-  Mtiii.xi,!i 
naître  à  des  hommes  qui  auraient  cru  en  lui, 
s'ilsl'eussentconnu.  «Que  si  l'on  répond, (iil-il,  cip.  n. 
que  le  Sauveur  n'a  pas  voulu  se  faire  connaî- 
tre h  quelques-mis,  parce  qu'il  connaissait  lui- 

impleatur.  Fit  ergo  quidquid  ille  voluerit,  cujus 
roluntali  nemo  resislit  :  nec  enim  potestas  Dei 
minor  est  quam  voluntas;  el  ideo  iiihil  inrenilur 
relie,  quod  non  possil  facere.  (Jiurdam  quidrm 
Deus  facere  posscl  el  nonfacit.  Mhil  eal  tanien 
quod  fieri  velil  aliquando,nec  faciel.  Ibid.,  cap.  ix, 
pag.  488. 


[VI"  RIliCLE.] 


CITAPITRE  I.  —  SAINT  FULGENCE  DE  IIUSPE. 


G3 


mriiii'  la  (liircU'  t\r  leur  fd'iir,  il  est  loiijdiirs 
vrai  que  Dieu  n'a  pas  voulu  lu  salut  do  tes 
'■       endurcis.  Comiuo  on  connaît  ceux  (ju(?  Dieu 
veut  sauver  par  la  cour.aissanco  qu'il  leur 
donne  de  son  Évangile;  on  connaît  aussi  ceux 
qu'il  ne  veut  pas  sauver  par  le  refus  qu'il  leur 
fait  de  la  piédiealion  decenièuie  Kvanyile.)) 
Saint  Fulgence  traite  ensuite  de  la  dill'érenco 
de  l'état  du  premier  homme  et  du  nôtre.  «  Le 
premier  liomme  avant  son  péché  jouissait, 
dit-il,    d'une  liberté  si  pleine  et  si  entière, 
qu'il  ne  sentait  rien  qui  lui  résistât.   11  était 
sain  et  heureux.  Il  avait  toutefois  besoin  du 
secoui's  de  la  grâce  ;  mais  cette  grâce  était 
telle  qu'il  pouvait  s'en  servir,  ou  ne  pas  s'en 
servir,  demeurer  avec  son  aide  dans  l'état 
de  droiture  et  de  justice  où  il  avait  été  créé, 
ou  abandonner  cet  état  par  sa  propre  volonté. 
Maisdepuis  le  péché,  le  libre  arbitre  del'liom- 
me  est  inlii'uie:  devenu  esclave  du  péché,  il 
a  besoin  d'une  grâce  prévenante  qui  le  dé- 
livre et  le  fortifie,  et  qui  le  rende  victorieux 
dans  les  combats  que  la  chair  livre  à  l'esprit.» 
"•        8.    Saint  Fulgence  examine  après  cela  la 
question  de  l'origine  de  l'âme,  sur  laquelle 
Jean  et  Vénérius  l'avaient  aussi  consulté.  Il 
y  avait  là-dessus  deux  opinions:  les  uns  di- 
saient que  l'âme  est  créée  et  mise  en  même 
temps  dans  le  corps  pour  qui  elle  est  créée 
'de  Dieu;  d'autres  soutenaient  que  l'âme  est 
'■     produite  par  la  propai;ation  comme  le  corps. 
Le  saint  évèque,  miitant  la  retenue  de  saint 
Augustin,  qui,  ayant  à  traiter  la  même  ques- 
tion, l'avaitlaissée  indécise  en  avouant  qu'elle 
était  au-dessus  de  ses  lumières,  se  contente 
défaire  voir  que  ces  deux  opinions  ont  l'une 
et  l'autre  leurs  difficultés  ;  qu'en  suivant  la 
première,  on  a  peine  à  concevoir  comment 
se  contracte  le  péché   originel,  mais  qu'il 
n'est  pas  plus  aisé  de  dii'e  comment  se  fait 
la  génération  des  âmes.  Il  se  borne  donc  à 
répondre  que  nous  devons  croire  que  l'ùme 
n'est  pas  un  corps,  mais  un  esprit  ;  qu'elle 
n'est  point  une  portion  de  la  substance  de 
'•     Dieu,  mais  une  créature  ;  qu'elle  n'est  point 
mise  dans  le  corps  comme  dans  une  prison 
pour  ses  péchés  passés ,  mais  qu'elle  y  est 
mise,  selon  l'ordre  de  Dieu,  pour  l'animer  et 
le  faire  vivre,  et  qu'étant  unie  à  la  chair,  elle 
contracte  le  péché  originel,  dont  elle  est  pu- 
rifiée par  le  baptême. 

§XVI. 

Du  livre  de  la  Foi. 
;  Il       1 .  On  met  parmi  les  ouvrages  que  saint  Ful- 


gence  composa  depuis  son  second  retour  en   f»' »  Piorr»  : 

.  P  .  ,.  '■"  "lï*'  l'on 

AliKiiic,  c  ('st-i'i-dae,  depuis  l'an  o^.'J ,  celui    5*'-  '^"''i)'" 

*  '  do    C4)     Ii\r0| 

(jui  est  intitulé  :  De  lu  Foi,  on  de  ta  Kîujk  de  p'i!-"'"- 
la  vraie  foi.  Il  est  adressé  à  un  laïque  nommé 
Pierre,  (jui,  allant  k  Jérusalem,  et  craignant 
d'être  surpris  par  les  hérétiques  dont  r(  Irient 
était  rempli,  souhaitait  avant  de  partir,  d'a- 
voir une  règle  de  foi  qui  eu  contint  tous  les 
articles,  afin  de  savoir  ce  qu'il  devait  croire, 
et  éviter  de  tomber  par  h'i  dans  les  pièges  des 
hérétiques.   Saint  Fulgencc  le  loue  de   son 
zèle  pour  la  pureté  de  la  foi,  en  lui  repré- 
sentant que  sans  cette  vertu  il  est  impossible 
de  plaire  à  Dieu,  la  foi  étant  le  fondement    '^"f-  '• 
de  tous  les  biens,  et  le  commencement  du 
salut  de  l'homme.  Il  lui  dit  de  se  souvenir 
en  quelque  lieu  qu'il  se  trouvera,  qu'il  a  été 
baptisé  au  nom  du  Père,  du  Fils  et  du  Saint- 
Esprit,   et  qu'il  doit  conséquemment  croire 
de  tout  son  cœur  que  le  Père  est  Dieu,  que 
le  Fils  est  Dieu,  que  le  Saint-Espiit  est  Dieu, 
c'est-à-dire,  que  la  sainte  et  ineffable  Trinité 
est  un  seul  Dieu.  «  Car,  ajoutc-l-il,  il  n'y  a 
qu'une  même  essence  ou  substance,  ou  na- 
ture du  Père,  du  Fils  et  du  Saint-Esprit, 
quoique  personnellement  le  Père  soit  autre 
que  le  Fils,  le  Fils  autre  que  le  Père,  et  le 
Sitint-Esprit  autre  que  le  Père  et  le  Fils.  »  Il 
prouve  l'unité  d'un  Dieu  en  trois  personnes 
par  ces  paroles  de  la  Genèse  :  Faisons  V liomme    Gecès.  i,  20. 
à  notre  image  et  ressemblance  ;  et  par  celles  d'I- 
saïe  qui  entendit  les  séraphins  crier  :  Saint, 
saint,  saint  est  le  Seigneur  Dieu  des  armées,     isai.  vi,3. 
«  Comme  nous  croyons,  dit-il,  que  le  Fils  seul 
est  né,  la  foi  catholique  nous  enseigne  aussi  .c^j..  n. 
qu'il  est  né  se  ul  selon  la  chair;  en  sorte  que  c'est 
le  même  Fils  de  Dieu,  Dieu  lui-même,  qui  est  né 
du  Père  avant  tous  les  siècles  selon  sa  nature 
divine,  et  né  dans  le  temps  selon  la  nature  hu- 
maine. Celte  double  naissance  est  d'un  même 
Fils  de  Dieu  ;  la  naisance  divine  selon  laquelle 
il  estcoéternel  à  son  Père;  la  naissance  hu- 
maine selon  laquelle  le  Fils  de  Dieu  s'est  a- 
néanti  en  prenant  la  forme  d'esclave  dans  le 
sein  de  sa  mère.  C'est  selon  cette  forme  qu'il 
a  été  crucifié,  mis  dans  le  tombeau  ;  qu'il  est 
ressuscité  et  monté  au  ciel  quarante  jours 
après  sa  résurrection,  d'où  il  viendra  â  la  fin 
des  siècles  juger  les  vivants  et  les  morts.  » 

2.  (I  Croyez  donc,  continue  saint  Fulgence,  ,„. 

que  le  Christ,  Fils  de  Dieu,  c'est-à-dire  une 
personne  de  la  Trinité,  est  vrai  Dieu,  en  sorte 
que  vous  ne  doutiez  pas  qu'il  ne  soit  né  de 
la  nature  du  Père.  Croyez  aussi  qu'il  est  vrai 
homme,  en  sorte  que  vous  ne  doutiez  pas 


64 


HISTOIRE  GÉNÉR.VLE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


qu'il  n'ait  une  chair  comme  tous  les  autres 
liommes,  et  non  pas  une  chair  d'une  nature 
iliUerente,  soit  céleste  ou  aéiieune.  Mais  en- 
core que  la  chair  de  Jésus-Christ  soit  de  mô- 
me nature  que  celle  des  autres  hommes,  elle 
a  toutefois  été  courue  et  est  née  sans  péché, 
ayant  une  origine  ditférente  de  celle  des  au- 
tres hommes.  Comme  il  est  né  selon  la  chair' 
dje  la  sainte  Vierge  Marie,  elle  est  aussi  vérita- 
blement mère  du  Fils  unique  de  Dieu.  Il  y  a 
donc  deux  natures  en  Jésus-Christ,  mais  unies 
en  une  seule  personne  sans  confusion  et  sans 
division.  C'est  par  le  Fils  seul  selou  la  chair 
que  nous  avons  été  réconciliés  :  mais  ce  n'est 
pas  par  lui  seul  selou  la  divinité.  La  Trinité 
nous  a  réconciliés  avec  elle-même  par  l'incar- 
nation du  Fils  qui  est  l'ouvrage  de  la  Trinité». 
Ci-l"iJ  3.  Après  avoir  instruit  Pierre  sur  les  mys- 

tères de  la  Trinité  et  de  l'Incarnation,  il  dit 
qu'il  doit  croire  que  tous  les  autres  êtres,  soit 
spirituels,  soit  corporels,  sont  l'ouvrage  de 
Dieu  qui  les  a  créés  de  rien  ;  que  les  êtres 
spirituels  et  intelligents  subsisteront  éteruel- 
lement  parla  volonté  du  Créateur;  qu'il  a 
créé  ces  êtres  de  telle  manière  qu'ils  fussent 
obligés  de  l'aimer  plus  qu'eux-mêmes,  les 
ayant  fait  ce  qu'ils  sont  sans  aucim  mérite 
précédent  de  leur  pari;  que  les  anges,  ayant 
été  créés  libres  et  en  pouvoir  de  mériter  leur 
béatitude  avec  le  secours  de  la  grâce,  ou  de 
déchoir  de  leur  état  bieuheureux  par  leur 
faute,  une  partie  a  été  conQrmée  dans  l'a- 
moiu-  de  Dieu  qu'elle  ne  peut  plus  perdre  ; 
et  l'autre  périra  par  une  aversion  volon- 
taire pour  Dieu,  qui  sera  punie  des  peines 
élerncUes;  que  l'homme,  qui  avec  la  liberté, 
avait  reçu  de  Dieu  dans  sa  création  le  don 
de  l'immortalité  et  de  la  félicité,  est  déchu 
de  cette  prérogative  par  sou  péché,  et  s'est 
assujetti  lui  et  toute  sa  postérité  à  la  mort  et 
au  péché;  que  Dieu  n'a  pas  néanmoins  per- 
mis que  toute  la  masse  du  genre  humain  pé- 
rit éternellement,  mais  qu'il  en  a  délivré 
plusieui-s  par  sa  grâce,  laissant  les  autres 


dans  l'étal  de  damnation  où  le  pi'ché  les 
avait  réduits;  que  le  commencement'  de  la 
bonne  volonté  et  de  la  bonne  pensée  ne  vient 
pas  de  nous,  mais  de  Dieu  qui  nous  le  donne  : 
ce  qui  parait  par  le  diable  et  ses  anges  ,  qui 
depuis  qu'ils  ont  été  précipités  dans  les  té- 
nèbres inférieures  par  suite  de  leur  chute, 
n'ont  pu  et  ne  pourront  avoir  aucune  bonne 
volonté.  11  enseigne  que  les  impies  comme 
les  justes  ressusciteront,  avec  cette  ditl'é- 
rence  que  les  justes  seront  changés,  et  que 
les  impies  ne  le  seront  pas;  c'est-à-dire,  que 
les  corps  des  uns  et  des  autres  ressusciteront , 
mais  que  les  corps  des  impies  ne  seront 
point  changés,  conservant  toujours  leur  cor- 
ruption et  leur  ignominie  ;  au  lieu  que  les 
corps  des  justes  deviendront  spirituels,  in- 
corruptibles et  glorieux;  que  Dieu  n'a  donné 
aux  hommes  que  le  temps  de  cette  vie  pour 
acquérir  la  vie  éternelle  et  pom-  faire  une 
pénitence  fructueuse,  et  que  la  pénitence, 
en  quelque  temps  de  la  vie  qu'on  la  fasse,  est 
utile  pour  la  rémission  des  péchés  quels 
qu'ils  soient,  pourvu  cpi'elle  soit  accompa- 
gnée d'une  douleur  sincère  d'avoir  péché, 
et  qu'on  renonce  de  tout  son  cœur  aux  pé- 
chés passés;  que  toutefois  la  pénitence  n'a 
d'etfet  que  dans  l'Kglise  catholique,  à  qui  Dieu 
a  donné  en  la  personne  de  saint  Pierre  le 
pouvoir  de  lier  et  de  délier;  qu'aucun  homme* 
ne  doit,  dans  l'espérance  de  la  miséricorde 
de  Dieu  demeurer  longtemps  dans  le  péché, 
puisqu'il  l'égard  même  du  corps,  personne  ne 
voudrait  être  longtemps  malade  dans  l'espé- 
lance  de  guérir  un  jour;  que  comme  la  miséri- 
corde de  Dieu  reçoit  et  absout  ceux  qui  se  con- 
vertissent, sa  justice  rejettera  et  punira  les 
endurcis.  «  Ce  sont  ceux-là  ,  poursuit-il,  dont 
il  est  dit  qu'ils  pèchent  contre  le  Saint-Esprit, 
et  qu'ils  ne  recevront  la  rémission  de  leurs 
pé.chés  ni  en  ce  moude  ni  en  l'autre.  Dieu, 
pour  nous  donuer  le  moyen  de  parvenir  à  la 
gloii'B,  a  institué  des  sacrements  eu  dillerenls 
temps.  Depuis  '  l'institution  du  baptême  au- 


*  Ista  causa  est  qua  Deus  factus  est  filius  Vir- 
ginis  Mariœ,et  Jlaria  Virgo  fada  est  maler  uni- 
gcniliDei.  Fulg.,  lib.  De  Fide,  cap.  u.  jjag.  508. 

'  Uonœ  quoquevoluntatisel  cugitalionis  inilium 
non  liomini  ex  seipso  nasci,  sed  divinilus  prœ- 
parari  et  Iribui  in  eo  Deus  evidenler  ostcndit, 
quod  neque  diahulus,  neqve  uliquis  angelorum 
ejiis  ex  qxto  ruinœ  illius  merilo  in  hancsunl  infe- 
riorem  delrusi  caliginem,  bonam  poluit  aut  po- 
teril  resumere  voluntalein.  Iliiil.,  pag.  Sll,  cap.  ui. 

'  Ahsqve  sacinniento  baptismutis,  prœter  eos 
qui  in  Ecclesia   caUwlica   sine  baptismale  pro 


Christo  sanguinem  fundunt,  nec  regnitm  cœlorum 
potest  guisquam  accipere,  nec  vitam  a'tcrnam. 
Quiasiie  in  calholica,  sive  in  hœresi  quacumqtie 
vel  schismale  quisquam  in  nomine  Pairis  et  FilH 
et  Spiritu.i  Sancti  bopli^mi  sacraiiientum  accepe- 
rit,  iutegrum  sacramentum  accipil;  sed  salulem 
quœ  virtus  est  sacramenti,  non  habebil  si  extra 
catlwlicinn  Ecclesiam  ipsum  sacramentum  habue- 
rit.  Ergo  ideo  débet  ad  Ecclesiam  redire  non  ut 
sacramenlum  baplismatis  iterum  accipial,  quod 
nemo  débet  in  qii"libcl  hominc  baptizato  repctcre  : 
sed  ut  in  socielate  catliolica  vitam  œlernam  ac- 


ClIAriTIll':  I.  —  SAINT  FULGKNCE  DE  lUJSPE. 


[Vl'  SIÈCLE.] 

cnii  ne  peut  nirivor  an  royaume  des  cicux, 
sans  recevoir  ce  sacronioiit  dans  l'Kglise  ca- 
tholique, ou  sans  rt'paiulre  sou  sang  pour  Jé- 
sus-Christ. Tout  homme  donc,  qui  reçoit  le 
baplc^nic  an  nom  du  Pi-rc,  et  du  Fils  cl  du 
Saint-Esprit,  soit  dans  la  foi  talliolii(ne  ,  soit 
dans  l'hérësie ,  soit  dans  le  schisme  ,  re- 
çoit à  la  vérité  le  sacrement,  mais  il  ne  re- 
çoit pas  le  salut  qui  est  la  vertu  du  sacre- 
ment, s'il  le  reçoit  hors  de  l'Kgliso  catholi- 
que. C'est  pourquoi  il  doit  retourner  à  l'É- 
glise catholique  non  pour  y  être  baptisé  une 
seconde  fois,  ce  qui  n'est  pas  permis;  mais 
pour  recevoir  la  vie  éternelle  dans  la  société 
catholique  ,  n'étant  pas  possible  d'acquérir 
la  vie  éternelle  sans  demeurer  dans  l'unité 
de  cette  Église,  quelques  grandes  aumônes 
que  l'on  fasse  ,  et  quand  même  on  répan- 
drait son  sang  pour  le  nom  de  Jésus-Christ. 
Il  en  est  de  même  des  œuvres  de  miséricorde, 
elles  ne  servent  de  rien  pour  le  salut  lors- 
qu'on les  fait  hoi-s  de  l'Église  catholique;  si 
ce  n'est  '  peut-être  qu'elles  diminueront  la 
force  des  tourments,  mais  elles  ne  placeront 
personne  au  rang  des  enfants  de  Dieu,  si  elles 
ne  sont  faites  dans  l'Église  catholitpe.  Le 
baptême  même  ne  sutht  pas  pour  le  salut, 
l'eùt-on  reçu  dans  l'Église  catholique,  si, 
après  avoir  été  baptisé,  l'on  vit  mal.  Ceux 
mêmes  qui  vivent  bien  doivent  s'appliquer 
aux  œuvres  de  miséricorde,  parce  qu'encore 
que  leurs  péchés  soient  légers,  ils  en  com- 
mettent quelques-uns  chaque  jour,  pour  les- 
quels les  justes  et  les  saints  doivent  dire  pen- 
dant tout  le  temps  de  cette  vie  :  Remettez- 
nous  nos  dettes,  comme  nous  les  remettons  à  nos 
débiteurs.  Et  parce  que  ces  sortes  de  péchés 
légers  se  commettent  même  dans  l'usage  des 
choses  permises,  c'est  pour  les  éviter  que  les 
humbles  serviteui's  de  Jésus-Chi-ist,  qui  sou- 


«.•S 


liaitcnt  de  servir  le  Seigneur  sans  empê- 
chements, fuient  le  mariage,  s'abstiennent 
de  la  chair  et  du  vin  autant  que  la  santé  du 
corps  le  leur  permet,  non  que  ce  soit  un  pé- 
ché d'avoir  une  femme  (car  c'est'  Dieu  qui 
a  institué  et  béni  le  mariage  dans  les  pre- 
miers hommes)  ou  de  boire  du  vin,  ou  de 
manger  de  la  chair;  mais  ils  agissent  ainsi 
parce  qu'ils  sont  persuadés  que  la  virginité 
est  piéférable  au  mariage,  et  que  l'absti- 
nence des  viandes  et  du  vin  rend  un  genre 
de  vie  plus  pure.  Les  secondes  et  les  troisiè- 
mes noces  ne  sont  pas  même  défendues, 
mais  elles  doivent  être  chastes ,  l'exci's  dans 
l'usage  légitime  du  mariage  n'étant  pas 
exempt'  de  péché  véniel.  Quant  à  ceux  qui 
ont  fait  vœu  de  continence,  s'ils  se  marient 
ils  commettent  un  crime  de  damnation  par 
le  violemeut  de  la  foi  qu'ils  ont  donnée  à 
Jésus-Christ.  Mais  ceux-là  posséderont  le 
royaume  dos  cieux  *  qui  est  promis  aux 
saints,  qui,  sachant  qu'une  chose  est  permise 
et  qu'eUe  peut  contribuer  au  progrès  d'une 
meilleure  vie  ,  font  vœu  librement  de  l'ob- 
server, et  l'obsen'ent  en  efJet  avec  fidéUté  et 
sans  retard.  Car  Dieu  rendra  la  récompense 
du  royaume  céleste,  qu'il  a  promis ,  à  qui- 
conque l'emplira  les  vœux  qu'il  lui  aura 
faits.  » 

4.  Saint  Fulgence  réduit  ensuite  tout  ce 
qu'il  a  dit  à  (juarante  articles  qu'il  estime 
être  autant  d'articles  de  foi.  Il  les  commence 
tous  par  ces  paroles  :  Tenez  pour  certain  et 
ne  doutez  nullement.  Voici  ce  qu'ils  contien- 
nent de  plus  remarquable  :  «  Nous  devons  te- 
nir pour  certain  que  le  Père  '",  le  Fils  et  le 
Saint-Esprit  sont  natm-ellement  un  seul  Dieu 
au  nom  duquel  nous  sommes  baptisés;  et 
que  la  sainte  Trinité  est  naturellement  un 
seul  et  vrai  Dieu  étemel  et  sans  commence- 


Arlîclos   do 
roi.poï.SJ. 


expiât...  qui  si  et  eleemosynas  largas  facial  et  pro 
nomine  Christi  etiam  sanguinem  fiindat,  pro  eo 
quodin  hac  vita  non  teiiuit  Ecclesiœ  cathoiicœ  uni- 
tatem,  non  habebit  œternam  salutem.  Ibid.,  pag. 
519. 

>  Sicut  sine  Ecclesiœ  cathoiicœ  societate,  nec 
baptisnms  alicui  potest  prn(tesse,nec  opéra  mise- 
ricordiœ,  nisi  forte  ut  mitius  torquealur,non  la- 
men  ut  inter  (ilios  Dei  deputetur  :  sic  intra  ca- 
tholicam  Ecclesiam  per  solum  baptismum  vita 
wterna  non  acquiritur,  si  posl  baptismum  maie 
vivatur.  Ibid.,  pag.  520. 

'  Conjugium  inprimis  hominibus  Deus  et  ins- 
tuit  et  benedixit.  Ibid.,  pag.  520. 

'  In  talibus  et  si  fuerit  aliquis  conjugalis  ex- 
cessus ,    qui   tamen    legitimum  non    violet    to- 

IX. 


rum,  habebit  nonnullum  sed  veniale  peccatum. 
Ibid. 

*  Tune  unusquisque  regnum  ccelorum  quod 
sanctis  promittitur,  possidebit,  si...  quodscit  esse 
licitum  et  ad  profectum  melioris  vilœ  pertinere 
cognoscit,  et  Ubenter  voveat  et  celeriter  reddat... 
Omni  enim  voventi  Deo  et  reddenti  quod  vovit, 
ipse  quoque  Deus  reddet  cœlestis  regni  prœmia 
quœ  promisit.  Ibid.,  pag.  52t. 

5  Firmissime  tene  cl  nullatenus dubites Patrem 
et  Filium  et  Spirilum  Sanclum  unum  esse  natu- 
raliter  Deum  in  cujus  nomine  baptizati  sumus... 
id  est  sanctam  Trinitatem  esse  solum  naturali- 
ter  verum  Deum...  sine  initio  sempiternum...  in- 
commutabilem...  rerum  omnium  visibilium  alque 
invisibilium  creatorem.  Ibid.,  pag.  521,  522. 


6U 


HISTOIRE  GKXÉHALE  DES 


ment,  immuable  et  crëateur  de  toutes  les 
clioses  visibles  et  invisibles  ;  que  la  nature 
du  Pt're.  '  du  Fils  et  du  Sainl-Espiit  est  une 
et  la  même,  mais  qu'U  y  a  trois  personnes  ; 
que  le  seul  Dieu  Fils,  c'est-à-dire,  une  per- 
sonne de  la  Trinité  est  Fils  du  seul  Dieu  Père, 
et  que  le  Saint-Esprit  qui  est  aussi  une  per- 
sonne de  la  Triuité  n'est  pas  du  seul  Père, 
mais  ensemble  l'Esprit  du  Père  et  du  Fils  ; 
que  le  même  Saint-Esprit'  qui  est  un  Espiit 
du  Père  et  du  Fils,  procède  du  Père  et  du 
Fils  ;  que  la  Trinité  est  un  Dieu  immense  par 
sa  vertu  et  uon  par  son  poids,  et  qu'elle 
comprend  toutes  les  créatures,  soit  corpo- 
relles, soit  spirituelles,  par  sa  vertu  et  par 
sa  présence.  Xousdevons' tenir  pour  certain 
qu'une  personne  de  la  Tiinité,  c'est-à-dire. 
Dieu  le  Fils  né  seul  de  la  nature  du  Père,  et 
d'une  et  même  nature  avec  le  Père,  est  né 
dans  la  plénitude  des  temps  d'une  vierL'e,  et 
que  le  Verbe  a  été  fuit  chair  ;  que  comme  il 
est  Dieu  parfait,  il  est  aussi  homme  parfait, 
ayant  pris  la  véritable  chair  du  genre  humain 
et  une  âme  raisonnable,  sans  péché;  qu'il  y  a 
en  Jésus-Christ  deux  natures  unies  insépara- 
blement, mais  sans  coid'usion:  la  nature  divi- 
ne, qu'il  a  en  commun  avec  le  Père,  selon  ce 
«ju'il  dit  :  Mon  Père  et  7noi  sommes  vnc  même 
chose ,  et  la  natuie  humaine,  selon  laqueUe  ce 
Dieu  incarné  dit  :  Mon  Père  est  plus  gi'and  que 
moi;qyni  le  Dieu  Verbe  fait  chair  n'a  qu'une 
personne  de  su  divinité  et  de  sa  chair;  que 
la  chair  de  Jésus-Christ  n'a  pas  été  concjue 
dans  le  sein  de  la  Vierge  avant  son  union 
avec  le  Verbe,  mais  dans  le  même  temps  ; 
que  le  Fils  unique  de  Dieu  fait  chair  s'est  of- 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

fert  pour  nous  en  sacrifice  à  Dieu  ;  lui  h  qui, 
avec  le  Père  et  le  Saint-Esprit,  les  paliiar- 
ches,  les  prophètes  et  les  prolres  ollVaienl  dos 
sacrifices  d'animaux  dans  TAncien  Testa- 
ment et  à  qui  dans  la  nouvelle  loi  la  sainte 
Eglise  catholique  ne  cesse  d'otl'rir  par  toute 
la  terre  le  sacrifice  du  pain  et  du  vin  ;  ipie  le 
Verbe  fait  chair  a  toujours  '  conservé  la  même 
chair  selon  laquelle  il  est  né  de  la  Vierge  ;  que 
c'est  dans  celte  chair  qu'il  a  été  crucifié,  qu'il 
est  mort,  qu'il  est  ressuscité,  qu'il  est  monté 
au  ciel,  qu'il  est  assis  à  la  droite  de  Dieu,  et 
qu'il  viendra  juger  les  vivants  et  les  morts  ; 
que  Dieu  est  le  souverain  bien;  qu'il  n'y  a 
rien  de  créé  qui  ne  soit  bon  de  sa  nature  ; 
que  le  mal  n'est  que  la  privation  du  bien. 
D'où  il  suit  qu'il  n'y  a  que  deux  maux  pour 
la  créaliue  raisonnable,  l'un  par  lequel  elle 
s'est  éloignée  volontairement  du  souverain 
bien  par  le  péché,  et  l'autre  qui  consiste 
dans  la  peine  éternelle  dont  elle  sera  punie 
malgré  elle.  Nous  devons  tenir  pour  certain 
qu'il  n'y  a  aucune  créature  qui  soit  de  même 
nature  que  le  Créateur  ;  que  l'état  des  saints 
anges  est  immuable,  en  sorte  qu'ils  ne  peu- 
vent déchoir  de  leur  béatitude;  que  les  es- 
prits célestes  et  l'homme  sont  les  seuls  à  qui 
Dieu  ait  accordé  la  raison  ;  qu'Adam  et  sa 
femme  ont  été  créés  sans  péché  et  avec  le 
libre  arbitre  par  lequel  ils  pouvaient  pécher 
ou  ne  pas  pécher  ;  qu'ils  ont  péché  par  leur 
propre  volonté  et  non  par  nécessité  ;  que  par 
leur  péché  la  nature  humaine  a  été  tellement 
changée  en  mal  qu'elle  est  devenue  l'esclave 
du  péché  et  de  la  mort  ;  que  tout  homme  qui 
est  conçu  par  la  voie 'ordinaire  du  mariage 


'  Firmissime  teiie  et  nullatenus  dubiles  Patris 
et  Fila  cl  SpirUus  Sancli  unam  quidem  esse  na- 
turam,  très  vcro  esseperson<is...solum  Deum  Fi- 
lium,  id  est,  unam  ex  Trinilate  personam,  solius 
Dei  l'atris  esse  Filium  ;  Spiritum  vero  Sanctum 
ipsum  quoque  unam  ex  Trinitate  personam  non 
solius  Patris,  scd  simul  Patris  et  Filii  esse  Spi- 
ritum. Ibid.,  pag.  S22,  523. 

*  Firmissime  tene  et  nullatenus  dubites  eum- 
dem  Spiritum  Sanctum,  qui  Patris  et  Filii  unus 
spirilus  est,  de  Pâtre  et  Filio  procedere...  Trini- 
tatem  Deum  immensum  esse  virtute ,  non  mole; 
et  omnem  creaturam  spiritulem  atque  corpora- 
lem  virtute  ejus  et  prœsentia  contineri.  Ibid., 
pag.  523. 

'  Firmissime  tene  et  nullatenus  dubites  unam 
ex  Trinitate  personam,  id  eut  Deum  Filium  qui 
de  natura  Dei  Patris  solus  natus  est,  et  uitius 
ejusdem  7mlurœ  cum  Pâtre  est.  ipsum  tn  pleni- 
tudine  temporis  de  Virgme  natum.  Yerbum  car- 
iiem  factum...  sicul  de  Deo pâtre pcrfectum  Deum, 
xta  de  Virgine  maire  perfeclum  hominem  geni- 


tum,  id  est  Verbum  Deum,  habentem  scilicet  sine 
peccato  veram  nostri  generis  carnem  et  animam 
rationalem...  Verbi,  quod  caro  factum  est,  duas 
naturas  inconfusibiliter  atque  inseparabiliter 
permanere  :  unam  divinam  quam  habet  cum  PO' 
tre  communem  ,  secundum  quam  dicit  :  Ego  et 
Pater  uiiuin  sumus;  alteram  kumanam  secundum 
quam  ipse  Deus  incarnatus  diril  :  Pater  major 
me  est.  Deum  Verbum  carnem  factum  unam  ha- 
bere  divinilatis  suœ  carnisque  personam...  Car- 
nem Christi  non  sine  ditinitate  conceptam  in  utero 
Virginis,  priusquam  susciperetur  a  Verbo  :  sed 
ipsum  Verbum  Deum  suœ  carnis  acceplione  con- 
ceptum.  Ibid.,  p,ig.  523,524  et  525. 

'  Firmissime  tene  Verbum  carnem  factum  eam- 
dem  humanam  carnem  semper  reram  habere,  qua 
de  Virgine  Verbum  Deus  natus  est,  qua  crucifixus 
et  mortuus  est,  qua  resurrexil  et  in  cœlum  as- 
cendil,  et  in  dextera  Dei  sedet,  qua  etiam  ventu- 
rus  est  judicare  vivos  et  mortuos.  Ibid.,  pag.  526. 

'  Firmissime  tene  non  solum  homines  jam  ra- 
tione  utenles,  verum  etiam  parvulos,  qui  sive  in 


CHAPITIŒ  I.  —  SAINT  FlJLdENCK  DK  UKSl'lS. 


[VI*  SIÈCLE.] 

naît  avec  lo  pdcliL^  oriifincl  ;  que  noii-seiilc- 
menl  ceux  (|iii  mil  rusaf;'e  de  raison,  mais 
oncorc  les  eiil'anls,  soit  qu'ils  ineiireiil  tians 
le  sein  de  leur  luèrc ,  soit  qu'ils  ineuront 
a[)rès  Ctrc  nés,  seront  punis  du  sup[)Iicc  du 
feu  éternel,  s'ils  sortent  de  ce  monde  sans 
avoir  reçu  le  sacrement  de  haplème  ;  parce 
qu'encore  qu'ils  n'aient  ])ninl  do  péclii's  pro- 
pres ils  ont  contracté  la  damnation  du  péché 
originel  par  leur  conception  et  Iciu-  nais- 
sance charnelle.  » 

5.  «  Nous  devons  croire  certainement  que 
Jésus-Christ  viendra  juger  les  vivants  et  les 
morts,  pour  glorifier  ceux  qu'il  a  justifiés 
gratuitement  par  la  foi  en  cette  vie,  et  à  qui 
il  a  accordé  la  persévérance  dans  la  foi  et  la 
charité  de  la  sainte  mère  l'Eglise,  pour  les 
rendre  semblables  aux  anges,  selon  qu'il  l'a 
promis,  et  les  faire  arriver  à  un  état  de  per- 
fection dont  ils  ne  pourront  jamais  déchoir; 
comme  il  viendra  aussi  pour  envoyer  le  dia« 
blc  et  ses  anges  dans  le  feu  éternel,  et  avec 
eux  les  hommes  injustes  et  impies;  que  la 
résurrection  de  la  chair  sera  commune  aux 
bons  et  aux  méchants,  avec  cette  ditlérence 
que  les  bons  seront  changés,  c'est-à-dire  que 
leurs  corps  deviendront  immortels  et  incor- 
ruptibles, au  lion  que  ceux  des  méchants  ne 
changeront  pas;  qu'excepté  ceux  (jui  don- 
nent leur  sang  pour  le  nom  de  Jésus-Christ, 
et  qui  par  là  sont  baptisés  dans  leur  sang, 
aucun  homme  n'aura  la  vie  éternelle  ,  s'il 
n'a  obtenu  la  rémission  de  ses  péchés  dans 
le  baptême;  qu'outre  le  baptême,  les  adul- 
tes doivent  encore  faire  pénitence  de  leurs 
péchés,  et  professer  la  foi  catholique  selon 
la  règle  de  la  vérité;  mais  que  le  baptême 
sutlit  pour  le  salut  aux  enfants  qui  ne  peu- 
vent croire  par  leur  propre  volonté,  ni  faire 
pénitence  pour  le  péché  qu'ils  ont  contracté 


67 


par  leur  naissance;  que  pcrsonnt^  ne  peut, 
eu  ce  monde,  faire  pénitence,  si  Dieu  no  l'a 

écliiirr-  et  converti  par  sa  misi^ricorde  gra- 
tuilt;;  que  l'iiouimc  peut  lire  les  livres  saints 
ou  entendre  la  ])ai()le  divine  de  la  bouche 
de  quelques  prédicateurs  que  ce  soit,  mais 
qu'il  ne  peut  obéir  aux  divins  commande- 
ments, si  Dieu  ne  le  prévient  par  sa  grâce 
de  manière  (pi'il  croie  de  cœur  ce  qu'il  en- 
tend des  oreilles  du  corps,  et  qu'ayant  reçu 
de  Dieu  la  bonne  volonté  et  la  vertu ,  il 
veuille  et  puisse  faire  ce  fjuc  Dieu  lui  com- 
mande; que  toutes  les  choses  passées,  les 
présentes  et  les  futures,  sont  invariablement 
connues  de  Dieu;  qu'ainsi,  il  a  conuu  avant 
tous  les  siècles  ceux  à  qui  il  devait  donner  sa 
grâce  par  la  foi  ',  sans  laquelle  personne  n'a 
pu  être  délivré  de  la  coulpe  du  péché  tant 
originel  qu'actuel,  depuis  le  commencement 
du  monde  jusqu'à  la  fin  ;  que  tous  ceux  que 
Dieu,  par  une  bonté  toute  gratuite,  fait  des 
vases '■'de  miséricorde,  et  qui  ont  été  pré- 
destinés de  Dieu  avant  la  création  du  monde 
pour  être  du  nombre  de  ses  enfants,  ne  peu- 
vent périr  :  de  même  qu'aucun  de  ceux  qu'il 
u'a  point  prédestinés  à  la  vie  étemelle  ne 
peut,  en  aucune  manière,  être  sauvé.  Car  la 
prédestination  est  la  préparation  du  don 
gratuit  par  lequel  l'Apôtre  dit  que  nous 
avons  été  prédestinés  pour  être  les  enfants 
adoptifs  de  Dieu  par  Jésus-Christ. 

Nous  devons  croire  fermement  que  le  bap- 
tême peut  être'  non-seulement  dans  l'Eglise 
catholique,  mais  encore  chez  les  hérétiques 
qui  baptisent  au  nom  du  Père  et  du  Fils  et 
du  Saint-Esprit  ;  que  toutefois  il  ne  sert  de 
rien  lorsqu'il  est  conféré  hors  de  l'Eglise, 
quoiqu'on  ne  doive  point  le  réitérer  ;  qu'ainsi 
tout  homme  *  qui  est  baptisé  hors  de  l'Église 
catholique  ne  peut  être  participant  de  la  vie 


uteris  matrum  vivere  incipiunt  et  ibi  moriuntur, 
sive  jam  de  matribus  nati  sine  sacramento  snncli 
baptismalis  quod  datur  in  nomine  Palris,  etc., 
de  hoc  sœculo  transeunt,  ignis  œterni  sempiterno 
supplicio  puniendos.  Quia,  etsipeccatum  propi-iœ 
actionis  nullum  habuerunt.  originalis  lamen  pec- 
cati  damnalionem  carnali  conceptione  et  nativi- 
(ale  Iraxerunt.  Ibid.,  pag.  527. 

Firmissime  tene  Deum  anle  omnia  sœcula 
scire  quibvs  esset  per  fidem  gratiam  largiturus, 
sine  qua  nemo  poluit  ab  initia  mundi  usque  in 
finem  a  realu peccati  iam  originalis  quant  actua- 
lis  absolvi.  Ihid.,  pag.  629. 

'  Firmissime  tene  omnes  quos  vasa  misericor- 
diœ  graiuita  bonitate  Deus  facit,  ante  conslitutio- 
nem  mundi  in  adoptionem  fiUorum  Dei  prœdtsti- 
natos  a  Dec  :  neque  perire  passe  aliquem  corum 


quos  Deus prœdestinavit  ad  regnum  cœlorum,  nec 
quemquam  eorum  quos  Deus  non  prœdestinavit 
ad  vitam,  ulla  passe  ralione  salrari.  Prœdesti- 
natio  enim  illa  gratuitœ  donalionis  est  prœpara- 
tio,  qua  nos  Àpostoius  ait  pr(edestinatos  in  adop- 
tionem filiorum  per  Jesum  Christum.  Ibid. 

3  Firmissime  tene  sacramentum.  baptismatis  non 
solum  intra  Ecclesiam  cailwlicam,  sed  etiam  apud 
hœreticos  qui  in  nomine  Patris  et  Filii  et  Spiri- 
tus  Sancti  baptizant,  esse  passe;  sed  extra  Ec- 
clesiam cathoUcam  pradesse  non  passe  :  ideo  et 
si  ab  hœreticis  in  nomine  Patris  et  Filii  et  Spi- 
ritus  Sancti  fuerit  datum,  venerabiliter  agnoscen- 
dum  et  ab  hoc  nullateiius  iterandum.  Ibid. 

'  Firmissime  tene  omnem  extra  Ecclesiam  ca- 
thoUcam baptizatum  parlicipem  fieri  non  passe 
vitœ  wternœ  si  ante  finem  vitœ  hujus,  catholicœ 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


éternelle,  si,  avant  la  fin  de  sa  vie,  il  ne 
rentre  dans  cette  Église  et  ne  s'y  incorpore. 
Car  nous  ne  voyons  point  au  temps  du  dé- 
luge qu'il  y  ait  eu  quelqu'un  qui  se  soit  sau- 
vé liors  de  l'Arche.  On  doit  donc  conclure 
de  là  que  non-seulement  '  tous  les  païens, 
mais  qu'encore  tous  les  juifs,  les  hérétiques 
et  les  schismatiques  qui  meurent  hors  du 
sein  de  l'Ét^lise,  sont  précipités  dans  les  flam- 
mes éternelles  préparées  au  diable  et  à  ses 
anges;  qu'encore  qu'un  hérétique  '  ou  un 
scbismatique  ait  été  baptisé  au  nom  du  Pè- 
re, du  Fils  et  du  Saint-Esprit,  qu'il  fasse  de 
grandes  aumônes,  et  qu'il  soutire  même  la 
mort  pour  le  nom  de  Ji'sus-Christ,  tout  cela  ne 
lui  est  d'aucune  utilité  pour  le  salut,  s'il  per- 
sévère dans  l'hérésie  ou  le  schisme,  qui  con- 
duisent à  la  mort.  Nous  sommes  encore  obli- 
gés de  croire  que  le  salut  n'est  pas  pour  tous 
ceux  qui  ont  été  baptisés  dans  l'Église  catholi- 
que, mais  pour'  ceux-là  seulement  qui,  après 
le  baptême  ,  vivent  bien,  en  s'abstenant  des 
vices  et  des  concupiscences  de  la  chair  ;  que 
les  justes  '  et  les  saints  ne  peuvent  être  en 
ce  monde  sans  péché  ;  qu'ainsi  il  est  néces- 
saire que  tout  homme  travaille  à  eU'acer  ses 
péchés,  jusqu'à  la  fin  de  sa  vie,  par  les  au- 
mônes, les  jeûnes,  la  prière  et  les  larmes; 
que  toute  créature  de  Dieu  est  bonne,  et  que 
si  les  serviteurs  de  Dieu  s'abstiennent  de  la 
chair  ou  du  vin,  ce  n'est  que  pour  mortiûer 
leur  corps,  et  non  pas  qu'ils  les  croient  im- 
mondes; qu'encore  qu'il  soit  mieux  de  vivre 
dans  la  continence,  le  mariage  est  bon,  et 
que  Dieu  a  institué  non-seulement  les  pre- 


mières, mais  encore  les  secondes  el  troisiè- 
sièmes  noces;  enfin  que  l'Église  catholique 
est  semblable  à  une  aire  '  dans  laquelle  les 
pailles  sont  mêlées  avec  le  grain  jusqu'à  la 
fin  des  siècles,  c'est-à-dire  les  bons  avec  les 
méchants  par  la  communion  des  mêmes  sa- 
crements; que  ce  mélange  se  rencontre  dans 
tous  les  états,  soit  des  clercs,  soit  des  moi- 
nes, soit  des  laïques  ;  qu'on  ne  doit  pas 
abandonner  les  bons  à  cause  des  méchants, 
mais  tolérer  les  méchants  à  cause  des  bons, 
autant  que  la  raison  de  la  foi  et  de  la  charité 
le  demande,  c'est-à-dire,  s'ils  ne  répandent 
point  dans  l'Eglise  les  semences  de  leur  per- 
fidie, ou  s'ils  n'excitent  pas  les  frères  à  des 
actions  mauvaises  par  leurs  pernicieux  exem- 
ples ;  étant  certain  qu'un  homme  qui  croit  et 
qui  vit  bien  dans  le  sein  de  l'Église  catholi- 
que ne  peut  être  souillé  par  les  péchés  de 
ceux  qui  vivent  mal,  pourvu  qu'il  ne  consen- 
te point  à  leurs  mauvaises  actions,  ou  qu'il 
ne  les  favorise  pas.  n 

6.    Saint   Fulgence  dit  à  Pierre  de  fuir,   ^.^^^ 
comme  une  peste  et  comme  un  hérétique,  J«  '•' 
quiconque  enseignera  contrairement  à  ces  '^ 
quarante  articles  de  foi.  On  en  trouve  un  qua- 
rante et  unième    dans  quelques  imprimés. 
Mais  les  manuscrits  n'en  comptent  que  qua- 
rante ,  et  le  saint  évéque  lui-môme  dit  en 
termes  formels  qu'il  a  conclu  son  traité  de 
la  Foi  après  le   quarantième  article,  ajou- 
tant que  le  loisir  ne  lui  avait  pas  permis  d'en 
mettre  davantage.  D'ailleurs  ,  ce  quarante 
et  unième  article  n'a  aucun  rapport  avecice 
traité.  Seulement,  il  y  est  parlé  ,  au  commen- 


Atlle> 
i 
ot  tu 


non  ftierit  redditus  atque  incorporatus  Ecclesiœ... 
iN'om  et  in  diebus  diluvH  neminem  legiinus  extra 
arcam  potuisse  nalcari.  Il)i(l.,  pag.  529. 

'  Firinissime  tene  non  solum  omnes  paganos 
sed  etiam  omnes  judœos  et  omnes  hœrelicos,  at- 
que schismaticos,  qui  extra  Ecclesiam  catholicam 
finiunt  prœsenlcm  vitam,  in  ignem  œlernum  itu- 
ros,  qui  paratus  est  diabolo  et  angelis  ejus.  Ibid., 
pag.  530. 

'  Firmissinie  tene  quemlibet  hœreticum  sive 
schismaticum  in  nomine  Patris  et  Filii  et  S/iiri- 
tus  Sancti  baptizatum,  si  Ecclesixe  catliolicœ  non 
fuerit  aggregatus ,  quantascumque  elcemosynns 
fecerit,  etsi  pru  Christi  nomine  etiam  sangninem 
fuderil,  nullatenus  passe  salvari.  Omni  enim  ho- 
inini  qui  Ecclesiai  culliolicw  non  lenet  unitnlem 
iieque  baptismus,  neque  eleemosyna  quamlibet 
copiosa,  neque  mors  pro  nomine  l'IirixH  suscepta 
pro/icere  poteril  ad  salutem,  quamdiu  in  eo  vel 
hœretica  vel  schisiiinlica  pravilas  persévérai  quw 
ducil  ad  morlem.  Ihid. 

'  Firmissime  (t;'c  non  omnts,  qui  inlra  Eccle- 
siVijH  callioUciim  bapUzantur,  accepluros  esse  vi- 


tam (eternam ,  sed  eos  qui  percepto  baptismale 
recte  viDunt,  id  est,  qui  se  abslinuerunt  a  vitiis  et 
concupiscentiis  camis.  Ibid. 

'  Firmissime  tene  etiam  justos  alque  sanclos 
homines  sine  peccalo  hic  neminem  vivere  posse  : 
semperque  omni  homini  esse  necessarium  el  pec- 
cata  sua  usque  in  finem  ritœ  prœsentis  eleemosy- 
nis.  jejuniis,  oratione,  vel  lacrymis  dihiere.  Ibid. 

»  Firmissime  lene  aream  Dei  esse  catholicam 
Ecclesiam  et  intra  eam  usque  in  finem  sœatli  fru- 
mento  mixlas  paleas  conlineri,  hoc  est  bonis  ma- 
los  sacramentoru)n  comnntnione  misceri  :  el  in 
omni  pi-ofessione  sive  clericorum ,  sive  monacho- 
rum,  sive  Inicorum  ,  esse  bonos  simul  et  malos  : 
ncc  pro  malis  bonos  deserendos.  sed  pro  bonis 
malos,  in  quantum  exigil  fidei  et  charitalis  ratio, 
lolerandos,  id  est,  sive  in  Eccksia  nullius  perfx- 
diœ  semiita  spnrgunt ,  vel  fralres  od  aliquod 
malum  opus  morlifera  imitatione  non  ducunl  : 
nec  posse  aliquem  intra  Ecclesiam  calholicani 
rerle  credentem,  beneque  viventem, aliéna  unquam 
maculari  peccalo,  si  cuiquam  peccanli  nec  con- 
senlionem  prœbeat,  nec  favorem.  Ibid. 


1.0  IlTro  dti 
Fol  roii'ro 
la,       u  u<>i 

Il  I  p  nil 0 9  f 
&3t. 


[vi°  SIÈCLE.]  CHAriTRE  I.  —  SAINT 

cpmcnl,  do  la  Tiinit(5  et  do  rincarnalion  : 
mais  cola  môino  ost  iino  prouve  qu'il  ne  doit 
point  faire  partie  du  livre  adresse^  A  l'ierro, 
où  ces  deux  articles  sont  traités  fort  aulon^'. 

§  XVII. 

Du  livre  de  la  Foi  contre  l'évcquc  Pinta , 
de  quelques  Homélies,  et  des  livres  contre 
Fabien. 

1.  L'aulcnr  de  la  Vie  de  saint  Fulqencc  ', 
en  parlant  des  trois  livres  que  ce  saint  adres- 
sa à  Trasamond,  dit  que  ce  prince  en  fut  si 
étonné,  qu'il  n'osa  pins  lui  faire  do  ques- 
tions; qu'un  évoque  arien,  nommé  l'inta, 
répondit  à  ces  trois  livres,  et  que  saint  Ful- 
gencc  lui  répliqua  par  un  ouvrage  particu- 
lier. Nous  avons  un  écrit  qui  porte  le  nom 
de  saint  Fulgence,  avec  le  titre  de  Réponse 
à  Pinta.  Mais  ce  ne  peut  être  celui  que  ce 
Père  composa  contre  cet  ëvèque  arien.  Saint 
Fulgence,  au  rapport^  de  l'auteur  de  sa  Vie, 
faisait  voir,  dans  sa  réplique  à  Pinta,  que 
les  ariens  avaient  été  terrassés  dans  ses  trois 
livres  ;\  Trasamond  ,  et  que  les  raisons  que 
Pinta  lui  avait  opposées  étaient  vaines.  On 
ne  voit  rien  de  tout  cela  dans  l'écrit  qui  nous 
reste;  il  n'y  est  parlé  ni  des  livres  à  Trasa- 
mond, ni  de  la  l'éponse  de  Pinta  ;  la  sainte  Écri- 
ture y  est  d'ailleurs  citée  d'après  une  version 
diU'érente  de  celle  que  saint  Fulgence  a  sui- 
vie dans  ses  ouvrages.  C'est  l'ancienne  Ita- 
lique que  suit  cet  auteur,  au  lieu  que  saint 
Fulgence  cite  ordinairement  l'Écriture  sui- 
vant la  version  Vulgate.  On  voit  aussi,  par 
l'explication  que  l'auteur  de  la  Réponse  à 
Pinta  donne  du  terme  consubstantiel,  qu'il  ne 
savait  pas  le  grec,  puisqu'il  dit  que  ce  ter- 
me '  signifie  une  seule  substance,  au  lieu  qu'on 
doit  le  rendre  par  de  même  substance.  Saint 
Fulgence  ne  serait  point  tombé  dans  cette 
faute,  lui  qui,  dès  sa  jeunesse,  avait  appris  si 
parfaitement  la  langue  grecque,  qu'il  la  par- 
lait comme  s'il  eut  été  élevé  en  Grèce.  Au 
reste,  cet  ouvrage  n'est  presque  qu'un  tissu 
de  passages  de  l'Ecriture,  rassemblés  sous 
différents  titres.  Dans  l'un,  on  rapporte  les 
passages  de  l'Écriture  qui  prouvent  l'unité 
de  Dieu;  dans  l'autre,  ceux  qui  marquent 
l'égalité  du  Père  et  du  Fils;  et  dans  les  sui- 
vants, ceux  qui  rendent  témoignage  à  la  di- 
vinité du  Fils  et  du  Saint-Esprit,  et  à  la  Tri- 


FULGENCE  DE  RUSPE. 


69 


nité  dos  personnes  en  Dion.  Il  finit  par  un 
précis  de  ce  que  la  foi  callioiiquo  enseigne 
sur  la  Trinité  et  sur  l'Incarnation. 

2.  Nous  avons  dix  sermons  parmi  les  vrais  somon.  .it 
ouvrages  do  saint  Fulgence.  Le  premier  est  «.p»;.  iio. 
inlilul(5  :  Des  Dispensateurs  ou  des  Économes 
du  Seirpicur.  La  matière  en  est  tirée  de  la 
parabole  de  l'ICvangilo,  où  il  est  dit  :  Qui  est  i."c.  m.u. 
le  dispensateur  fidèle  et  prudent  que  le  maître 
établira  sur  ses  serviteurs,  pour  distribuer  à 
chacun,  dans  le  temps,  la  mesure  de  blé  qui  lui 
est  destinée?  Saint  Fulgence  fait  voir  que  la 
qualité  de  dispensateur  appartenait  non-seu- 
lement aux  apôtres,  mais  qu'elle  appartient 
encore  aux  évoques  qui  sont  chargés,  par 
leur  ministère,  de  dislribuer  à  chacun  le 
pain  de  la  divine  parole,  figuré  par  la  mesu- 
re de  blé  dont  parle  ri'>angile.  Il  y  montre 
aussi  qu'il  n'est  personne  qui  ne  puisse  ac- 
complir le  précepte  de  l'aumône,  parce  que 
Dieu  ne  l'ordonne  que  suivant  les  facultés 
d'un  chacun,  et  que  dans  ceux  qui  n'ont 
rien,  leur  bonne  volonté  supplée.  Le  second  i-n;.  wi. 
sermon  traite  des  deux  naissances  de  Jésus- 
Christ.  Selon  la  première,  il  est  né  du  Père 
avant  tous  les  siècles.  Selon  la  seconde,  il 
est  né  de  la  Vierge  dans  les  derniers  temps. 
Il  fait  voir  que  l'Incarnation  est  une  grande 
preuve  de  l'amour  de  Dieu  pour  les  hommes  ; 
et,  comparant  le  premier  homme  avec  le  se- 
cond, c'est-à-dire  Adam  avec  Jésus-Christ, 
et  Eve  avec  Marie,  il  fait  voir  que  si  Adam  a 
souillé  le  monde  par  son  péché,  Jésus-Christ 
l'a  purifié  par  son  sang  et  par  sa  grâce  ;  et  que 
si  le  diable  s'est  servi  d'Eve  pour  nous  ôterla 
vie,  l'ange  est  venu  à  Marie  pour  lui  annoncer 
que  la  vie  nous  serait  rendue.  Le  troisième 
sermon  est  en  l'honneur  du  martyr  saint 
Etienne.  Le  saint  évoque  y  dit  que  la  chari-  55,. 

té  servit  d'armes  à  ce  soldat  de  Jésus-Christ , 
et  que  ce  fut  par  la  force  de  cette  vertu  qu'il 
vainquit  la  cruauté  de  Saul;  de  manière  qu'a- 
près l'avoir  eu  pour  persécuteur  sur  la  terre, 
il  mérita  de  l'avoir  pour  compagnon  de  sa 
gloire  dans  le  ciel.  Il  traite  trois  sujets  diffé-  y, , 

rents  dans  le  quatrième  discours  :  de  la  fête 
de  l'Epiphanie,  qu'il  appelle  Manifestation, 
parce  qu'en  ce  jour  le  Fils  de  Dieu  s'est  ma- 
nifesté aux  Mages  ;  de  la  mort  des  Innocents 
et  des  présents  que  les  Mages  offrirent  à  Jé- 
sus-Christ, lorsqu'ils  vinrent  l'adorer.  Il  dit 
que  si  le  Sauveur  s'enfuit  en  Egypte  pour 


Vita  Fulg.,  pag,  23. 
Ihid. 


'  Homos  namque  imus  ousia,  substantia  grœco 
seriHOne  appelhitur.  Pag.  535. 


70 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


éviter  1.1  fureur  d'Hérode,  ce  ne  fut  point 
par  aucune  crainte  humaine,  ni  par  aucune 
nécessité,  mais  par  une  dispcnsation  divine, 
afin  que,  dans  le  temps,  il  pût  être  attaché 
à  la  croix  sur  laquelle  il  devait  répandre  le 
sang  de  notre  rédemption;  que  ceux  qui 
doutent  de  la  divinité  de  cet  enfant  s'en  con- 
vaincront en  faisant  attention'  à  l'étoile  qui 
précéda  les  Majics,  et  leur  montra  le  che- 
min :  car  cette  étoile  n'avait  jamais  paru 
jusque-l.'i.  Cet  enfant  venait  de  la  créer  et  de 
la  députer  aux  Mages  qui  venaient  l'adorer. 
Il  ajoute  que  par  les  trois  présents  ditl'ércnts 
qu'ils  lui  oiïrirent,  on  peut  confondre  les  hé- 
résies qui  se  sont  élevées  sur  l'Incarnation, 
r.f.  ;„a.  parce  qu'ils  prouvent  que  Jésus-Christ  est 
vrai  Dieu,  \Tai  roi,  et  vrai  homme.  Le  cin- 
quième discours  est  sur  la  charité.  L'auteur 
y  enseigne  que  nous  la  devons  à  tous  et  en 
tous  temps ,  à  ceux  que  nous  connaissons  et 
à  ceux  que  nous  ne  connaissons  pas,  h  nos 
amis  et  même  à  nos  ennemis  ;  que  la  chari- 
té' s'augmente  dans  nous  à  mesme  que  la 
cupidité  diminue,  qu'elle  rend  libre  celui  que 
l'amour  du  monde  ne  tient  point  captif,  et 
qu'elle  est  la  racine  de  tous  les  biens,  comme 

M6.  la  cupidité  est  la  racine  de  tous  les  maux.  Le 
sixiènie,  qui  est  sur  saint  Cyprien,  nous  re- 
présente en  peu  de  mots  su  constance,  son 
zèle,  sa  vigilance  pastorale,  sa  charité  et  la 
grandem-  de  sa  foi.  Le  septième  a  pour  ti- 
tre :  Du  Larron  crucifié  avec  Jésus-Christ.  11 
n'est  ni  si  grave  ni  si  bien  soutenu  que  les 
précédents.  Le  huitième  est  sur  la  fête  de  la 

6C9.  Pentecôte.  L'auteur  s'y  fait  cette  objection  : 
«  Si  quelqu'un  vous  dit  :  Vous  avez  reçu  le 
Saint-Esprit,  pourquoi  ne  parlez-vous  pas 
toutes  sortes  de  langues?  A'ous  lui  répon- 
drez que  vous  parlez  toutes  sortes  de  lan- 
gues, parce  que  vous  êtes  dans  le  corps  de 
Jésus-Christ,  c'est-à-dire  dans  l'Kglise,  qui 
parle  toutes  sortes  de  langues.  »  Je  ne  sais  si 
cette  réponse  est  digne  de  saint  Fulgence. 

510.  Le  neuvième,  qui  est  un  éloge  de  saint  Vin- 
cent, martyr,  n'est  pas  de  saint  Fulgence, 
mais  de  saint  Augustin,  parmi  les  sermons 
duquel  il  se  trouve  dans  le  cinquième  tome 
de  la  nouvelle  édition,  au  nombre  276  ;  les 


premiers  mots  ne  sont  pas  toutefois  les  mê- 
mes dans  cette  édition  et  dans  celle  des  œu- 
vres de  saint  Fulgence;  mais  il  n'y'a  point 
de  différence  dans  le  reste  du  discours.  Le 
dixième  est  sur  ces  paroles  du  prophète  Mi- 
ellée :  Je  t'apprendrai,  â  homme  ,  ce  que  c'est 
que  le  bien,  et  ce  qui  t'est  utile,  c'est  d'agir  sui- 
vant la  justice,  et  d'aimer  la  miséricorde.  Saint 
Fulgence  veut  que  tout  homme  agisse  envers 
soi-même  comme  les  jugesde  la  terre  agissent 
envers  ceux  que  l'on  traduit  devant  leurs  tri- 
bunaux comme  coupables.  Ils  renvoient  l'in- 
nocent, et  punissent  selon  les  lois  ceux  qui 
sont  convaincus  du  crime.  «  Soyons  nos  pro- 
pres accusateurs,  continue-t-il,  examinons 
les  replis  les  plus  secrets  de  notre  cœur,  et 
condamnons  tout  ce  que  nous  avons  fait  de 
mal.  Punissons  nos  fautes  par  une  sincère 
pénitence.  Voilà  le  jugement  que  Dieu  veut 
que  nous  rendions  contre  nous-mêmes.  Il 
demande  encore  rpie  nous  fassions  justice 
aux  autres,  c'est-à-dire  que  nous  ne  leur  fas- 
sions rien  de  ce  que  nous  ne  voudrions  pas 
qu'on  nous  fît  ;  mais,  au  contraire,  que  nous 
leur  fassions  ce  que  nous  souhaitons  nous 
être  fait  à  nous-mêmes.  A  l'égard  de  la  mi- 
séricorde, on  peut  faire  voir  en  deux  maniè- 
res qu'on  l'aime  ;  l'une,  lorsqu'on  reprend 
celui  qui  pèche,  et  qu'on  lui  accorde  le  par- 
don quand  il  promet  de  se  corriger;  l'autre, 
lorsqu'on  donne  à  l'indigent  ce  dont  il  a 
besoin.» 

§  XMII. 
Des  livres  contre  Fabien. 


p.;.  511. 


Lw  lirrfi 
conirf  Fal' 


1.  Saint  Fulgence  s'étant  trouvé  avec  un 
arien  de  queUjuc  léputation,  nommé  Fabien,  »oip«iJ'ui. 
ils  entrèrent  en  dispute  sur  divers  points  de 
religion,  particulièrement  sur  la  Trinité  et 
sur  l'Incarnation.  Au  sortir  de  la  conférence, 
Fabien  répandit  dans  le  public  plusieurs  dis- 
cours sous  le  nom  de  saint  Fulgence,  disant 
qu'il  s'était  expliqué  de  cette  sorte  dans  l'en- 
tretien qu'il  avait  eu  avec  lui.  Comme  il  n'y 
avait  rien  de  vrai  dans  tout  ce  que  Fabien 
avait  attribué  à  saint  Fulgence.  ce  Père  en 
entreprit  la  réfutation  dans  un  long  ouvrage 


'  Hinescis  veram  hujHS  Pueri  deitalem,  aUende 
slKllaui  in  cœlo  fulgenlem,  Magu^  pra'cvd('nlc7n  et 
iler  igitoranlibus  oslcndcnlcm.  llu-c  slilta  nun- 
quniii  aille  (ijiparuil,  ijuia  iiunc  eaiii  Puer  isle  crea- 
vitel  mtigis  ad  se  l'enicnUbus  prœviam  dtpulavil. 
Fulg.,  Serm.  i,  pag.  501. 


•  Tniitum  rero  augetur  eharitas  gu€.nlmn  fueril 

iiiimiiiiiln  ciipiililas,  et  illuiii  faeil  clitirtias  .icin- 
per  liberum  guem  iwti  tenuerit  cupidilas  mundanu 
caplivuiii.  Charilas  est  raiti.r  omnium  bonoriim, 
cupidilas  est  nidix  omuiuii:  malorum.  HiTiu.  5, 
pag.  565. 


[vr  SIÈCLE.] 

qu'il  divisa  en  douze  livres.  Il  no  nous  en 
reste  que  des  frayraents,  qui  ont  été  donnés 
au  public  par  le  Père  Cliitllct,  et  iinprimi>s 
dans  le  recueil  des  Œuvres  de  saint  Ful- 
gence. 
ri.'*'iTr!       ^-  '■'''  premier  livre  avait  pour  litre  :  Du 

Tf,  1-E. .".  Trh-Ilaut,  du  Consolateur,  de  la  qualité  d'en- 
voyr,  de  docteur  et  de  juge.  Saint  Fulgoncc  y 
faisait  voir  que  le  Fils  est  Dieu,  Très-Haut, 
et  la  vie  comme  le  Père,  et  que  tout  ce  que 
le  Père  fait,  le  Fils  le  fait  aussi  ;  que  Dieu 
le  Père  peut  être  appelé  consolateur,  pnis- 

iic.r.  i,j,  que  saint  Paul  l'appelle  le  père  des  miséri- 
cordes, et  le  Dieu  de  toute  consolation  ;  que 
les  otlices  de  juge,  de  docteur  et  d'envoyé, 
conviennent  au  Père  et  au  Saint-Esprit,  quoi- 
que le  nom  d'ani^o  du  grand  conseil  se  dise 
proprement  du  Fils.  La  raison  qu'en  donne 
saint  Fulgence,  c'est  que  Dieu  le  Père  a  lui- 
même  annoncé  aux  hommes  la  venue  de 
son  Fils  pour  leur  salut,  ainsi  qu'on  le  lit 

A.io..iv,in.  dans  la  prophétie  d'Amos.  Il  montrait  dans 
le  même  livre  qu'il  y  a  deux  natures  en  Jé- 
sus-Christ unies  en  une  seule  personne  ;  en 
sorte  que  c'est  le  même  qui  est  Fils  de  Dieu 
et  Fils  de  l'homme;  que  l'erreur  des  nesto- 
riens,  condamnée  par  l'Éulise,  consiste  prin- 
cipalement en  ce  qu'ils  enseignent  qu'il  y  a 
en  Jésus-Cluist  deux  personnes,  comme  il  y 
a  deux  natures,  disant  qu'une  de  ces  deux 
personnes  appartient  au  Fils  de  Dieu,  et  l'au- 
tre au  Fils  de  l'homme. 

LWrfc'ond,  3.  Voici  cc  que  saint  Fulgence  enseignait 
dans  le  second  livre  :  Le  Saint-Esprit  gémit  ou 
demande  pour  nous  lorsqu'il  nous  inspire  de 
gémir  nous-mêmes  pour  nos  fautes,  et  de 
nous  adrçsserà  Dieu  ;  mais  on  ne  peut  pas 
dire  qu'il  gémisse  véritablement,  parce  qu'é- 
tant Dieu,  il  n'est  sujet  à  aucune  misère  qui 
lui  donne  lieu  de  gémir  :  Jésus-Christ,  néan- 
moins, prie  pour  nous  comme  homme  et  en  sa 
qualité  de  prêtre  ;  d'où  vient  qu'il  est  dit  dans 

I  josn.  11,1.  la  première  Épitre  de  saint  Jean  :  Nous  avons 
pour  avocat  auprès  du  Père,  Jésus-Christ,  qui 
est  juste.  Mais  si  Jésus-Christ  demande  com- 
me homme,  il  a  de  quoi  nous  donner  comme 
Dieu.  11  est  dit ,  dans  la  première  Épitre  de 

iipnr.1,13,  saint  Pierre,  que  les  anges  désii'ent  de  coiuiai- 
tre  le  Saint-Esprit  ;  et   dans  saint  Matthieu, 

M=iih..tti.i,  qu'ils  voient  continuellement  la  face  du  Père. 

"'  Serait-ce  que  le  Saint-Esprit  fut  plus  grand 

que  le  Père?  Non.  C'est  au  contraire  pour 
marquer  leur  égalité.  Les  anges  voient  con- 
tinuellement la  sainte  Trinité,  et  ils  souhai- 
tent toujours  de   la    voir,   parce   que   leur 


CHAPITRE  1.  —  SAINT  Fl'LCENCE  DE  RUSPE. 


71 


amour  ne  changeant  point  d'objet,  il  ne  peut 
cesser  de  se  porter  vers  lui,  comme  vers  lo 
bien  immuable.  Le  désir  des  anges  marque 
l'aclivili!  de  leur  amour. 

4.  Dans  le  troisième  livre,  l'auteur  distin-    ,.'•'"•  ""'■ 
guait  ce  qui  est  propre  à  chaque  personne  de  '■''• 

la  Trinité  d'avec  ce  qui  est  commun  aux  trois 
personnes.  «Il  est  propre  auPère,  dit-il,  d'en- 
gendrer, au  Fils  d'être  né,  au  Saint-Esprit  de 
procéder  du  Père  et  du  Fils;  mais  l'immen- 
sité est  un  attribut  commun  au  Père,  an  Fils 
et  au  Saint-Esprit;  les  trois  personnes  sont 
un  seul  Dieu;  mais  on  no  peut  pas  dire  que 
le  Père  soit  Dieu  du  Fils,  si  ce  n'est  à  raison 
de  la  nature  humaiue  à  laquelle  le  Fils  s'est 
uni.  Il  est  Père  du  Fils  selon  la  nature  divine, 
et  non  pas  son  Dieu.  Au  contraire,  Jésus- 
Christ  est  véritablement  notre  Dieu,  nous 
qui  sommes  chrétiens,  et  qui  ne  reconnais- 
sons point  d'autre  Dieu  que  lui  ;  mais  il  n'est 
pas  le  Dieu  des  manichéens,  qui  soutiennent 
qu'il  n'a  pas  donné  la  loi.  Il  n'est  pas  le 
Dieu  des  Juifs,  qui  au  lieu  de  le  regarder 
comme  un  Dieu  vivant,  plein  de  gloire,  le 
regardent  comme  un  homme  mort  depuis 
longtemps.  Il  n'est  pas  le  Dieu  des  ariens, 
qui  ne  le  croient  pas  un  Dieu  de  même  na- 
ture que  sonPère.  Il  n'est  pas  le  Dieu  de  tous 
ceux  qui  ne  pensent  pas  calholiquement.  » 

5.  Le  culte  que  nous  devons  à  Dieu,  faisait     ,  um  qo». 
la  matière  du  quatrième  livre.  Saint  Fulgence  5^2- 

y  faisait  voir  par  l'autorité  de  l'Écriture,  que 
le  Père,  le  Fils  et  le  Saint-Esprit,  sont  éga- 
lement adorables.  Il  y  distinguait  le  culte  de 
latrie  ou  d'adoration,  de  celui  de  dulie,  di- 
sant que  le  premier  ne  convient  qu'à  Dieu, 
et  que  le  second  peut  convenir  aux  créatu- 
res, selon  ce  que  dit  saint  Paul  ;  Assujettissez-  c.iia  v,  ;?, 
vous  les  uns  aux  autres  par  une  charité  vraiment 
spirituelle,  ■parce  que  Jésus-Christ  est  Dieu  et 
homme  tout  ensemble.  «  Lorsque,  dit-il, nous 
disons  de  lui  qu'il  est  Fils  de  Dieu,  nous  ne 
séparons  pas  l'humanité  de  la  divinité,  à 
cause  que  c'est  la  môme  personne  qui  est 
Dieu  et  homme.  D'où  vient  que  le  Sauveur  se 
dit  tantôt  Fils  de  Dieu,  tantôt  Fils  de  l'hom- 
me? Parce  que  c'est  le  même  qui  est  Fils  de  J«n.n,r. 
Dieu  et  Fils  de  l'homme.  Quoique  le  nom  nib-  '".'  's- 
d'Esprit  se  dise  quelquefois  du  Père  et  du 
Fils,  celui  du  Saint-Esprit  ou  d'Esprit-Conso- 
lateur estrései'vé  à  la  troisième  personne.  Le 
Saint-Esprit  est  Dieu  comme  le  Père  et  le 
Fils,  et  nous  sommes  le  temple  non-seule- 
ment du  Père  et  du  Fils,  mais  aussi  du  Saint- 
Espi'it,  en  sorte  que  nous  lui  devons  le  culte 


72 


HISTOIIIE  GENERALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


193. 


iota,  T,  19. 


me,  |i<s.  (,U2. 


LitTfl     fcp- 

liùme,     !■-. 
t>iu. 


I  l'clr.  1,12. 


Matib.zritl, 
10, 


Jo»n.      XVI, 
13. 


de  latrie  comme  au  Père  et  au  Fils.  De  là 
^^ent  que  l'Église  catlioliiiue  qui  est  le  tem- 
ple (le  la  sainte  Tiiuité,  ne  cesse  di-  lui  ollVir 
un  sacrifice  spirituel. 

6.  Saint  Fuliicnce  traitait  dans  le  cinquiè- 
me li\Te,  de  la  qualité  d'imat^e  donnée  au 
Fils,  montrant  qu'il  est  tellement  l'image  du 
Pore,  qu'il  est  aussi  de  même  nature;  que  le 
Fils  n'imite  pas  le  Père  dans  ses  œuvres,  et 
n'en  fait  pas  de  semblables,  mais  qu'il  fait  ab- 
solument les  mêmes  ,  ainsi  qu'il  le  dit  lui-mê- 
me dans  saint  Jean  :  Tout  ce  que  le  l'ère  fait, 
le  Fils  aussi  le  fuit  comme  lui.  Pour  donner  à 
Fabien  un  exemple  de  la  Trinité  dans  les 
choses  créées,  ce  Père  lui  proposait  l'âme  hu- 
maine, dans  laquelle  on  distingue  trois  clio- 
ses  :  la  mémoire,  l'intelligence  et  la  volonté. 

7.  Il  prouvait  dans  le  sixième,  que  le  Fils 
est  coéternel  au  Père  ;  que  le  Père  a  pu  l'en- 
gendrer sans  commencement,  parce  que  la 
natui  e  de  celui  qui  est  sans  commencement, 
n'ayant  pas  commencé  d'êlre,  n'a  pu  non 
plus  commencer  d'engendrer;  que  l'homme 
a  été  fait  à  l'image  non  d'une  seule  personne 
divine,  mais  de  toute  la  Trinité;  qu'il  y  a  en 
Dieu  trois  personnes  en  une  seule  nature  ; 
que  comme  le  feu  n'est  pas  antérieur  à  sa 
splendeur,  de  même  le  Père  n'est  pas  anté- 
rieur au  Fils  ni  au  Saint-Esprit;  que  la  sa- 
gesse, c'est-à-dire,  le  Fils,  est  la  splendeur 
de  la  lumière  éternelle  ;  qu'ainsi  ii  est  éter- 
nel lui-même,  n'y  ayant  point  de  splendeur 
delà  lumière  éternelle  qui  ne  soit  éternelle, 

8.  Dans  le  septième,  qui  avait  pour  titre  : 
De  l' Egalité  et  de  l'unité  du  Saint-Esprit  avec 
le  Père  et  le  Fils,  saint  Fulgence  établissait 
la  divinité  du  Saint-Esprit  par  divers  passa- 
ges de  l'Écriture.  Il  y  demandait,  ainsi  qu'il 
l'avait  déjà  fait  dans  le  second  livre,  com- 
ment on  devait  entendre  ce  que  dit  saint 
Pierre,  que  les  anges  désirent  de  pénétrer 
le  Saint-Esprit.  Pénétrer  en  cet  endroit  ne 
signilie  autre  chose  que  connaître ,  et  que 
l'on  ne  jjcut  douter  que  les  anges  qui,  se- 
lon l'Evangile ,  voient  toujours  la  face  du 
Père,  ne  connaissent  aussi  le  Saint-Esprit, 
qui  n'est  ni  moindre  ni  plus  grand  que  le 
Pèie.  11  est  dit  dans  saint  Jean  que  l'Esprit 
de  vérité  ne  parlera  pas  de  lui-màne;  mais 


qu'il  dira  tout  ce  qu'il  aura  entendu.  Saint 
Fulgence  dit  que  cet  endroit,  au  lieu  d'être 
contraire  à  la  divinité  du  Saint-Esprit,  mar- 
que qu'il  est  de  même  nature  avec  le  Père 
et  le  Fils;  qu'il  entend  le  Père  et  le  Fils  par- 
ler, comme  le  Fils  voit  ce  que  le  Père  fait , 
et  comme  il  dit  lui-même  :  Je  dis  ce  que  j'ai 
vu  dans  mon  Père.  Or,  par  cette  façon  de 
parler,  le  Fils  se  disait  égal  au  Père  ;  d'oii 
les  Juifs  prirent  occasion  de  le  vouloir  faire 
mourir,  parce  qu'en  disant  que  Dieu  était 
son  Père,  il  se  faisait  égal  à  Dieu. 

9.  Le  huitième  livre  était  intitulé  :  De  la 
Mission  du  Fils  et  du  Saint-Esprit.  Fabien 
avait  comparé  la  mission  du  Saint-Esprit  à 
celle  des  anges.  Saint  Fulgence,  pour  faire 
sentir  le  faible  de  cette  comparaison,  montre 
que  l'immensité  étant  un  attribut  du  Saint- 
Esprit,  puisque,  par  toute  la  terre,  on  baptise 
en  son  nom,  et  que  tous  les  fidèles  sont  scel- 
lés de  son  sceau;  c'est  une  preuve  qu'il  est 
Dieu,  et  tpi'ii  ne  passe  pas  d'un  lieu  à  un  au- 
tre comme  les  anges.  «Sa  mission, dit-il, est 
bien  ditl'éreute  de  la  leur.  Ils  sont  envoyés 
pour  faire  ce  qui  leur  est  commandé  de  la  part 
de  Dieu  ;  mais  le  Saint-Esprit,  comme  Dieu, 
comble  de  ses  g  races  et  de  ses  bienfaits  ceux 
qu'il  veut.  S'il  n'était  pas  de  même  nature 
et  de  même  puissance  que  le  Père  et  le  Fils, 
serait-il  nécessaire  pour  la  validité  du  bap- 
tême, de  le  nommer  avec  le  Père  et  le  Fils  ? 
Sa  mission  n'est  donc  autre  que  la  collation 
de  ses  dons.  Si  donc,  de  ce  qu'il  est  dit  en- 
voyé, on  en  infère  qu'il  passe  d'un  lieu  en 
un  autre,  il  faudra  dire  la  même  chose  du 
Père  et  du  Fils,  qui,  selon  l'Évangile,  vont 
et  font  leur  demeure  dans  celui  qui  garde 
leur  parole.  Mais  c'est  par  la  grâce  que  Dieu 
habite  dans  les  fidèles,  et  c'est  aussi  par  la 
commuiiicaliondes  dons  du  Saint-Esprit  que 
le  Saint-Esprit  nous  est  envoyé.  Lorsque 
nous  offrons  le  corps  et  le  sang  de  Jésus- 
Christ  *,  nous  demandons  ce  qu'il  a  deman- 
dé pour  nous,  lorsqu'il  a  bien  voulu  s'ollrir 
pour  nous;  savoir,  que  nous  soyons  un  tous 
ensemble,  comme  il  est  un  avec  son  Père. 
Et  lorsque,  dans  la  bénédiction  '  de  la  fon- 
taine baptismale,  nous  demandons  l'avéue- 
ment  du  Saint-Esprit,  nous  ne  demandons 


»re   nol- 


Ei'bc  , 


'  Boc  nobi.1  poscimus  cum  corpus  et  sanguinem 
Chrùti  o/leiiniti.^,  qitod  nobis  popnscil  quaiido  se 
pro  nobis  offcrre  dignalus  est  CItrislus.  Fiag.  28, 
hb.  VIII,  Conlra  Fabiau.,  pag.  619. 

'  ni  in  foHiisbi'.iiediclionc,  non  sic  miUi  petimus 


Spirilum  Sanchim  tanquam  localriii  ejus  posca- 
mus  uilic/Uum  ,  sed  in  Deo  l^alre scicnics Sipirilus 
Sancii  naturalitir  esse  origincm,  ab  ipso  Veo  l'a- 
trespirilalisdoni  poscimus  In rijil (item,  nominc  rjus 
nuncupante •  doua  ejujs.  Il)iii.,  Krag.  19,   png.  62 


irlh.n, 


[VI"  sifeci.E.]  aiAl'ITltlî  I.  —  SAINT 

pas  son  av(^noinont  local  ;  mais  sachant  qu'il 
tiro  natiii'ollcraent  son  orip;ino  du  Pi'rc,  nous 
(Icnianilons  au  Pl'vo  miMU{\  la  collation  des 
lions  (lu  Saint-l!]s[iiit,  en  nommant  ces  iloiis 
tlu  nom  mémo  du  Saint-Espril.  Il  faut  ontcu- 
drc  par  cos  dons,  les  sept  esprits  do  Dieu, 
que  saint  Joau  dit,  dans  son  Apocalypse,  être 
envoyés  par  toute  la  terre.  Toute  mission 
n'est  pas  toujours  apparition.  Le  Saint-Es- 
prit n'a  apparu  que  deux  fois  :  l'une  en  for- 
me de  colondjo,  l'autre  en  forme  do  lanf:;ues 
de  feu;  mais  il  est  envoyé  souvent  sans  qu'il 
paraisse.  La  mission  des  anges  n'est  pas  non 
plus  toujours  sous  une  figure  sensible;  ce 
n'est  que  quand  Dieu  leur  ordonne.  Le  dia- 
ble ne  fut  point  envoyé  h  Job,  il  lui  fut  seu- 
lement permis  de  le  tenter.  » 

iO.  Le  titre  du  neuvième  livre  est  :  De 
VInvocntion  de  la  Sainte  Trinité.  Fabien  ob- 
jectait que  toutes  les  oraisons  et  les  prières 
communes,  même  l'Oraison  dominicale,  s'a- 
dressaient cl  la  seule  personne  du  Père. 
Saint  Fulgence  n'en  disconvient  point,  mais 
il  soutient  que  la  Trinité  entière  est  honorée 
dans  l'invocation  d'une  seule  personne.  Il 
rapporte  quelques  passages  de  l'Écriture, 
dans  lesquels  il  prétend  trouver  qu'Abraham 
a  invoqué  en  même  temps  le  Père  et  le  Fils. 
Il  en  cite  un  où  saint  Etienne  invoque  Jésus- 
Christ  seul;  et  ajoute  que,  dans  les  prières 
que  nous  adressons  au  Père,  nous  concluons 
toujours  par  le  nom  du  Fils  et  du  Saint-Es- 
prit, comme  si  nous  disions  au  Père  de  nous 
accorder  par  son  Fils  ce  que  nous  deman- 
dons, comme  il  a  fait  par  son  Fils  que  nous 
fussions;  aussi  saint  Paul  assure,  d'une  voix 
prophétique,  que  quiconque  invoquera  le  nom 
du  Seigneur  sera  sauvé.  Il  donne  encore  l'ensei- 
gnement suivant  :  «  Bien  cpie  l'Incarnation 
soit  l'ouvrage  de  toute  la  Trinité,  on  ne  peut 
pas  dire  que  Jésus-Christ  soit  le  Fils  de  la 
Trinité  ;  mais  selon  sa  divinité  il  est  Fils  du 
seul  Père,  et  selon  son  humanité  Fils  de 
la  seule  Vierge  Mario;  le  nom  de  Jésus-Christ 
n'est  pas  le  nom  de  l'homme  seul,  mais  aussi 
le  nom  de  Dieu  ;  et  il  se  prend  néanmoins 
quelquefois  dans  l'Écriture  pour  marquer 
la  nature  divine  seule,  quelquefois  la  nature 
humaine  seule,  et  souvent  les  deux  ensem- 


FlILr.E.NCE  DE  RUSPE.  73 

ble;  la  sainte  Église  catholique  n'offre  point 
le  sacrifice  aux  personnes,  mais  ensemble 
j'i  toute  la  sainte  Triniti-,  et,  comme  lors- 
(pr(!l!o  adresse  ses  piières  i\  la  personne  du 
Père,  elle  invoque  en  môme  temps  toute  la 
sainte  Trinité  :  de  même  lorsqu'elle  sacrilio 
au  Père,  elle  sacrifie  aussi^'i  la  Trinité.  Lors- 
que, dans  nos  actions  de  grâce,  nous  nous 
adressons  au  Père  et  au  Fils,  alors  nous  con- 
sidérons le  Fils  selon  sa  divinité;  et  quand 
nous  rendons  griice  au  Père  par  le  Fils, 
nous  le  considérons  comme  homme.  Mais 
parce  qu'il  est  constant  qu'il  n'y  a  qu'une 
nature  de  la  sainte  Trinité  ',  c'est  avec  jus- 
tice que  les  fidèles  terminent  les  psaumes  et 
los  hymnes  par  ime  mènjc  glorification  du 
Père,  du  Fils  et  du  Saint-Esprit.» 

1 1 .  Dansle  dixième  livre  saintFulgence  con- 
tinuait  h  faire  voir  que  ce  qui  est  dit  de  la  per- 
sonne du  Père  dans  le  Symbole  des  apôtres, 
convient  aux  autres  personnes  de  la  Trinité  ; 
qu'ainsi,  c'est  du  Fils  comme  du  Père  qu'il  est 
dit  dans  ce  Symbole  qu'il  est  tout-puissant  et 
créateur  du  ciel  et  de  la  terre.  Il  définit  le 
Symbole  un  pacte  ou  abrégé  ^  de  la  doc- 
trine chrétienne,  et  ne  doute  pas  qu'il  ne  soit 
des  apôtres.  Il  ajoute  :  «  Comme  il  convenait 
de  confesser  non  -  seulement  le  mystère 
de  la  création,  mais  encore  celui  de  la  ré- 
demption du  genre  humain ,  ce  Symbole 
fait  aussi  mention  de  l'incarnation  du  Fils 
de  Dieu,  de  sa  naissance  de  la  Vierge  Ma- 
rie par  l'opiiratioa  du  Saint-Esprit  ,  de  sa 
mort,  de  sa  sépulture  et  de  sa  résurrection  : 
après  quoi  nous  faisons  profession  de  croire 
au  Saint-Espril,  qui  est  l'Esprit  du  Père  et  du 
Fils,  et  qui  pi'ocède  de  l'un  et  l'autre;  en  sorte 
que  le  symbole  rend  témoignage  à  la  divini- 
té du  Fils  et  du  Saint-Esprit  ,  comme  à  la  di- 
vinité du  Père,  en  montrant  que  le  Fils  et  le 
Saint-Esprit  tirent  leur  origine  naturelle  du 
Père.  ))  Il  fait  aussi  mention  de  la  sainte  Église 
catholique,  pour  nous  apprendre  qu'elle  est  la 
maison  de  Dieu,  la  cité  éternelle  du  Rédemp- 
teur; et  que  quand  l'on  n'est  point  dans  sa  so- 
ciété ni  uni  avec  elle,  on  n'obtient  point  la  ré- 
mission de  ses  péchés,  et  on  ne  parvient  point 
par  la  résurrection  de  la  chair  à  la  vie  éter- 
nelle, mais  au  supplice  d'une  mort  éternelle. 


jrnn.  IK,  J~i. 
Mallh,      il, 


Jrn 
M 
I», 


I.ivro  dlxiè. 
mn,  l'Og.  6^2. 


'  A'a?n  quia  unam  naturam  constat  esse  sanc- 
tœ  Trinilati-i,  dignum  est  ut  una  gloria  Patri  et 
Filio  et  Spiritui  Scincto  dicalura  fidelibus  inhym- 
nis  et  psaliiiis.  Fulg.,  lib.  IX  Contra  Fabian., 
frag.  3i,  pag.  642. 


'  Est  autem  symbolum  quoddam  verum  pactum 
veraque  coll'jtio  in  cujus  brevit.ate  totius  creduli- 
lalis  chrislianœ  summa  consista.  Lib.  X,  pag. 
632. 


74 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Ael.  Il,  ^<i. 

Act  iiii.i;. 
Ael.  I,  17, 
Ad.  xtx,  I. 


(,'iirJlior8  5iir 
la  i-riifcï«irn 
du  SalDI-K'. 
Iiil,  Hg.(C3. 


Le  dernier  fragment  du  dixième  livre,  est 
une  récipitulation  des  divers  ar<?uments  que 
saint  Fulgence  avait  apportés  dans  tout  l'ou- 
vra ixe,  pour  étal)lir  la  divinité  du  Saint-Esprit  : 
«  Les  œuvres  du  Père  et  du  Fils,  dit-il,  lui  sont 
communes,  c'est  lui  qui  a  alTermi  la  vertu  des 
cieux,  les  anges  désirent  de  le  connaître,  il 
est  descendu  sur  Jésus-Christ  au  moment  de 
son  baptême  ;  ce  sacrement  s'administre  en 
son  nom  comme  en  celui  du  Père  et  du  Fils, 
ou  plutôt  le  nom  de  ces  trois  personnes  est 
un  et  le  même.  C'est  lui  qui  nous  confère 
la  grAce  d'adoption,  nos  corps  sont  son  tem- 
ple, c'est  en  son  nom  que  Jésus-Christ  chas- 
sait les  démons  ;  enfin,  il  remplit  par  son  im- 
mensité le  ciel  et  la  terre.»  Ce  sont  là  les  preu- 
ves que  saint  Fulgence  apporte  de  la  divinité 
du  Saint-Esprit  ;  il  prétend  que  dans  les  en- 
droits du  livre  des.\ctes  des  apôtres,  où  il  est 
dit  que  plusieurs  avaient  été  baptisés  au  nom 
du  Seigneur  Jésus,  il  faut  entendre  sous  ce 
nom  '  les  trois  personnes  de  la  Trinité,  parce 
qu'il  ne  peut  y  avoir  de  ditl'erence  naturelle 
de  nom  dans  la  Trinité  où  la  nature  est  une, 
et  parce  que  saint  Pierre  qui  est  dit  avoir  bap- 
tisé au  nom  de  Jésus-Christ,  ne  pouvait  avoir 
agi  contre  la  doctrine  de  son  Maître,  qui  a 
ordonné  de  baptiser  au  nom  du  Père,  du  Fils 
et  du  Saint-Esprit. 

§XLX. 

Des  ouvrages  de  saint  Fulgence  que  nous  n'avons 
plus. 

1.  Hincmar,  archevêque  de  Reims,  et  Ra- 
Iramue,  moine  de  Corbie,  répondant  l'un  et 
l'autre  aux  objections  des  Grecs,  citent  deux 
passages  tirés  du  livre  des  Questions  sur  la 
procession  du  Saint-Esprit,  sous  le  nom  de 
saint  Fulgence.  Il  enseigne  dans  ces  deux  pas- 
sages, que  tout  ce  qui  appartient  à  la  nature 
divine  '  est  commun  aux  trois  personnes,  de 
telle  manière  que  chaque  personne  a  quel- 
que chose  qui  lui  est  propi-e  ;  c'est  le  propre 
du  Père  d'engendrer,  du  Fils  d'ôtreengendré, 


Alirislli. 


et  du  Saint-Esprit  de  procéder  du  Père  et  du 
Fil*.  Dans  toutes  ces  propriétés  il  ne  se  fait 
aucune  séparation  de  la  nature  divine,  elles 
ne  servent  qu'à  faire  connaître  les  personnes. 
Nous  n'avons  point  d'autre  connaissance  de 
ce  livre,  à  moins  que  ce  ne  soit  le  même  que 
ce  Père  composa  à  la  prière  du  prêtre  Abra- 
gila.  Celui-ci  était  intitulé  :  Du  Snint-Esprit , 
et  saint  Fulgence  y  faisait  voir  par  un  grand 
nombre  de  passages  de  l'Écriture,  que  le 
Saint-Esprit  est  un  seul  Dieu  avec  le  Père  et  le 
Fils.  Il  ne  serait  pas  surprenant  qu'il  eût  par- 
lé dans  cette  ouvrage  de  la  procession  du 
Saint-Esprit,  puisqu'il  en  parle  en  beaucoup 
d'autres  endroits.  Cependant,  Hincmar  etRa- 
tramne  '  citent  de  lui  un  livre  des  Questions 
sur  la  procession  du  Saint-Esprit.  On  peut 
donc  croire  que  ce  Père  avait  écrit  un  ou- 
vrage particulier  sur  cette  matière. 

2.  Saint  Isidore*  de  Séville  fait  mention 
d'un  livre  qui  contenait  le  rapport  de  ce  qui 
s'était  passé  dans  une  conférence  où  saint 
Fulgence  avait  disputé  sur  la  foi  en  présence 
du  roi  Trasamond.  Ce  livre  n'est  pas  venu 
jusqu'à  nous ,  non  plus  que  celui  du  Saint- 
Fsjjrit  adressé  à  Abragila,  et  dont  il  est  parlé 
dans  la  \'ie  de  saint  Fulgence. 

3.  Il  est  aussi  fait  mention  dans  cette  Vie 
d'une  excellente  lettre  de  ce  saint  évéque  imiitii-j"- 
aux  catholiques  de  la  ville  de  Carthage,  dans  f"';''*"L, 
laquelle  il  découvrait  tous  les  artifices  dont 
les  ennemis  de  la  foi  usaient  pour  les  sédui- 
re ;  de  deux  livres  où  il  traitait  du  jeune  et 
de  la  prière ,  pour  l'instruction  de  la  vierge 
Proba;  de  deux  lettres  écrites  au  nom  des 
évéques  relégués  en  Sardaigne ,  à  une  fem- 
me de  condition  nommée  Stéphanie,  et  dont 
un  arien ,  nommé  Fastidiosus ,  avait  trans- 
crit plusieurs  choses  dans  un  discours  qu'il 
avait  fait  contre  la  foi  catholique;  et  d'une 
lettre  à  un  évêque  nommé  Jean ,  apparem- 
ment de  Tarse,  où  saint  Fulgence  prouvait 
que  la  douceur  chrétienne  ne  permettait  pas 
de  livrer  un  coupable  aux  juges  séculiers; 
de  dix  livres  contre  Fabien,  et  de  sept  Hvres 


Lptire    atz 
CarlhariDoi» . 


LtTrM   eonlr^ 
Fah:fD,      eni  > 

trc  Faii.ti-,  «1 
contre    fm't. 


'  Sed  attende  quiddixeril  Christus  aijus  doctri- 
ttam  veraciler  lenuit  l'etrus.  In  nomine  quippe 
Patris  et  Filii  et  Spiritus  SancU  génies  baptizari 
debere  prœcepil.  Hoc  prœceptum  Peints  lenacissi- 
me  cuslodivil...  et  quod  docuit  bapdzari  in  nomi- 
ne Jcnu  Chrisli,  in  uno  bniitizaiil  nomine  Patris 
et  Filii  et  Spiritus  Sanili.  Niilla  esl  cnim  in  Tri- 
nilale  diversitas  naturalis  nominis,  ubi  cit  ipsa 
unilas  naturalis.  Ibid.,  lib.  X,  pag.  661. 

'  Sic  tutum  quod  est  ipsa  natura  commune  tri- 
bus invenilur  esse  personis,  ut  aliquid  lamen,  iii- 


veniatur,  quo  proprie  unaquœque  persona  nosca- 
tur.Samproprium  Patris  dicimus  esse  quod  genuit; 
propriu  m  dicim  us  Filii  esse  quod  soJiw  de  solo  Pâ- 
tre nalus  est;  proprium  Spiritus  Sancii,  quod  de 
Paire  Filioquc  procedit.  In  liis  vero  propriis  nul- 
la  est  nalurœ  separatio,  ned  qua-dam  pirsonalis 
agnilio.  Fulg.,  hb.  De  Spiritus Sancti  processione, 
pag.  663. 

»  Ibid. 

*  Isjilorus,  Uist.  nat.  de  Scriptor.  ecclesiast., 
cap.  XIV. 


F.iv    m.. 

.iirn    K.i  li- 


Soriiion  *iir 
U      Circoud- 


■lîimon  ^iir 
U  Puriflca- 
|)nn.  Il    n>'t 

;  de  8,iinl 
Fii'pen«,pos. 


rF.iti)i.iDio. 


Traité  de  la 

Prédestina- 

lioD  et  de     11 

erâcc,  j'a-.â, 

ID  Aji[  tnduc. 


[VI'  siÈCLK.]  CHAI'irilb;  I.  —  SAINT 

contre  Fiiusle  de  Riez.  Tous  ces  dcrits  sont 
perdus,  ù  la  n^serve  do  quel(incs  fragments 
des  livres  contre  Fabien,  et  de  ce  que  Fasti- 
diosus  avait  copié  des  lettres  A  Sti^plianie. 
Nous  avons  encore  perdu  son  vérital)le  traité 
contre  l'évoque  Pinta. 

4.  Il  avait  sans  doute  fait  beaucoup  plus 
de  discours  que  nous  n'en  avons  de  lui.  Ou- 
tre ceux  dont  nous  avons  parlé  plus  haut,  il 
y  en  a  un  sur  la  Circoncision,  qui  est  diicnede 
lui.  On  y  reconnaît  son  style  et  sa  doctrine , 
son  attention  h  prendre  la  défense  de  la  foi 
sur  la  Trinité  et  sur  l'Incarnation  en  toute 
occasion,  soit  contre  les  ariens,  soit  contre 
les  manichéens  ;  et  son  zèle  pour  l'unité  de 
l'Église,  qu'd  appelle,  comme  dans  ses  au- 
tres ouvrages,  la  maison  de  Dieu. 

5.  Le  sermon  sur  la  Purification  de  la 
Sainte  Vierge  est  moins  éloquent  que  le  pré- 
cédent :  d'ailleurs,  la  fête  de  la  Purification 
n'était  point  établie  en  Occident  du  vivant  de 
saint  Fulgence.  L'auteur  la  regarde  comme 
aussi  célèbre  que  celles  de  la  Nativité  de  Jé- 
sus-Christ, de  la  Circoncision  et  de  l'Epipha- 
nie ;  il  dit  que  quelques-uns  la  croyaient 
même  la  plus  illustre  de  toute  les  solennités 
de  l'année,  et  que  tous  les  fidèles  assistaient 
à  la  célébration  des  mystères,  tenant  un  cier- 
ge allumé  en  leur  main.  La  fête  de  la  Puri- 
iication  fut  établie  A  Antioclie  en  527,  l'an- 
née d'après  le  tremblement  de  terre  qui  ren- 
versa une  grande  partie  de  cette  ville  ;  mais 
on  ne  commença  à  la  célébrer  à  Constanti- 
nople  que  l'indiction  cinquième  du  règne  de 
Justinien,  c'est-à-dii-e  en  o4i,  d'où  elle  passa 
ensuite  dans  le  reste  du  monde  chrétien. 

[Le  cardinal  Mai  a  publié  tome  I  Biblio- 
thec.  Nou.,  pag.  494-490,  un  discours  sur  l'E- 
piphanie non  encore  édité  ;  il  l'a  trouvé  dans 
plusieurs  discours  manuscrits  du  Vatican, 
sous  le  nom  de  saint  Fulgence,  mais  il  ne  se 
pi'ononce  pas  sur  son  authenticité.] 

§XX. 

Des  écrits  faussement  attribués  à  saint 
Fulgence, 

1.  Théophile  Raynaud  s'estdonnéde  grands 
mouvements  pour  persuader  au  public  que 
le  traité  de  la  Prédestination  et  de  la  grcîce , 
que  l'on  regardait  depuis  longtemps  comme 
un  ouvrage  supposé ,  était  véritablement  de 
saint  Fulgence.  Mais  ses  raisons  n'ont  con- 
vaincu personne,  et  l'on  a  continué  démet- 
tre ce  traité  parmi  les  écrits  qui  portaient 


FULGENCE  DE  lllJSPE. 


73 


ù  faux  le  nom  de  ce  Père.  Il  n'est  pas  en  ef- 
fet vraisemblable  (pie  saint  Fulgence,  après 
avoir  composé  un  livre  sur  la  prédestination 
et  la  grAce,  pendant  son  exil  en  Sardaigue, 
comme  le  dit  Théophile  lleynaud,  en  ciU 
compose!  trois  autres  sous  le  même  titre,  aus- 
sitôt après  son  retour  en  Afrique,  pour  satis- 
faire aux  questions  que  Jean  et  Vénérius  lui 
avaient  proposées.  Ajoutons  que  la  doctrine 
de  ce  traité  est  contraire  à  celle  de  saint  Ful- 
gence sur  la  grâce  et  la  prédestination  ;  que 
l'auteur  possédait  même  si  peu  cette  matière, 
qu'il  raisoime  tantôt  en  demi-pélagien  ,  et 
tantôt  suivant  les  principes  de  saint  Augus- 
tin. Son  style  n'a  pas  non  plus  la  netteté  de 
celui  de  saint  Fulgence. 

2.  Des  quatre-vingts  sermons  qui  se  trou- 
vent dans  ['Appendice,  il  y  en  a  (jnelques-uns 
qui  sont  do  saint  Augustin,  et  qui  se  lisent 
sous  son  nom  dans  la  nouvelle  édition  de  ses 
œuvres.  On  ne  sait  point  de  qui  sont  les  au- 
tres, si  ce  n'est  que  la  plupart  paraissent  d'un 
autem"  africain  ;  ils  sont  précédés  d'une  pré- 
face, qui  est  sans  doute  de  celui  qui  a  fait  le 
recueil  de  ces  discours,  croyant  qu'ils  étaient 
de  saint  Fulgence;  c'est  une  fortchétive  piè- 
ce, tant  pour  les  pensées  que  pour  le  style. 

§  XXI. 

Jugement  des  ouvrages  de  saint  Fulgence.  Ca- 
talogue des  éditions  qu'on  en  a  faites. 

1.  La  vertu  et  le  savoir  de  saint  Fulgence 
le  rendirent  également  la  gloire  et  l'orne- 
ment de  l'Église  d'Afrique.  Vrai  disciple  de 
saint  Augustin  ,  il  ne  se  contenta  point  d'en 
épouser  les  sentiments,  il  en  imita  la  con- 
duite, et  il  fut  comme  lui  le  défenseur  de  la 
grâce  de  Jésus-Christ  contre  les  demi-péla- 
giens,  et  de  sa  divinité  contre  les  ariens.  Son 
style  est  moins  pur  et  moins  châtié  que  ce- 
lui de  son  maître;  mais  il  est  net  et  facile. 
Il  montre  partout  beaucoup  de  vigueur  et  de 
force  d'esprit,  soit  dans  ses  expressions,  soit 
dans  ses  raisonnements,  et  met  les  matières 
les  plus  abstraites  dans  un  si  beau  jour,  qu'il 
les  rend  inteUigibles  aux  esprits  les  moins 
pénétrants.  Toutefois,  soit  dans  la  crainte  de 
ne  les  avoir  pas  assez  développées,  soit  je 
ne  sais  par  quel  autre  motif,  il  les  explique 
souvent  de  ditlérentes  manières  ,  ce  qui  lui 
occasionne  des  redites  et  le  rend  trop  dill'us 
et  trop  abondant.  On  voit  par  plusieurs  de  ses 
écrits,  surtout  par  ce  qui  nous  reste  des  li- 
vres contre  Fabien,  qu'il  se  plaisait  dans  les 


Fiil 


Sprmon« 
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M. 


Jnptîfrent 
di*=  i^rrils  ito 
f.int  Fulgca- 


HISTOIUE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


îC*    HUtr«£rî. 


7G 

questions  épineuses,  et  qu'il  les  traitait  avec 
beaucoup  de  subtilité.  Quand  il  décide,  c'est 
toujours  en  s'appuyaut  sur  l'autorité  des  di- 
vines Écritures  dont  il  était  très-instruit.  Il 
alli'gue  aussi  les  témoignages  des  Pères,  par- 
ticulièrement de  saint  Augustin.  Il  donne  pour 
maxime,  et  il  la  suivait  lui-même ,  que  dans 
toutes  les  questions  '  qui  forment  quelque 
doute  par  leur  obscurité,  il  faut  s'en  tenir 
à  leurs  défmitions ,  Dieu  les  ayant  éclairés 
gratuitement  par  sa  grûce  prévenante ,  afin 
qu'ils  crussent  ;  et  les  ayant  ensuite  remplis 
de  son  esprit ,  atin  qu'ils  enseignassent  les 
autres. 

2.  Nous  ne  connaissons  point  d'édition  des 
Œuvres  de  saint  Fulgence,  plus  ancienne  que 
celle  de  Bâle,  en  1556;  on  en  fit  d'autres  en 
la  même  ville,  en  l.i66  et  1587  ;  à  Anvers,  en 
1374;  à  Cologne,  en  1G18;  à  Lyon,  en  1G33  , 
1632  et  1671,  avec  les  ouvragesdu  pape  saint 
Léon.  Ils  se  trouvent  aussi  dans  le  neuvième 
tome  de  la  Bibliothc'qw  des  Pères,  imprimée 
dans  cette  ville,  en  1G77.  Le  traité  de  l'In- 
carnation a  été  imprimé  séparément  dans  le 
vingt-septième  tome  de  cette  bibliothèque. 
Le  Père  Sirmond  donna  quelques  opuscules 
de  ce  Père,  eu  1G22  et  en  1643;  Caméra- 


rius,  en  1634,  et  le  Père  Chifflet,  en  1649  et 
1636 ,  en  ont  fait  de  même.  Le  livre  de  la 
Foi' adressé  à  Pierre,  a  été  inséré  dans  VAp- 
jicndice  du  sixième  tome  de  saint  Augustin. 
L'édition  la  plus  complète  est  celle  de  Paris, 
en  1G84,  in--4i>,  chez  Guillaume  Desprez.  L'é- 
diteur a  revu  les  ouvrages  de  saint  Fulgenco 
sur  plusieurs  manuscrits,  et  mis  au  bas  du 
texte  les  leçons  variantes  que  le  Père  ChifiQet 
lui  avait  communiquées,  après  les  avoir  ti- 
rées lui-même  de  la  bibliothèque  de  la  Char- 
treuse-aux-Portes,  dans  divers  manuscrits. 
Il  ne  manque  à  celte  édition  que  quilques 
notes  critiques ,  tbéologiques  et  historiques, 
et  plus  d'ordre  dans  l'arrangement  des  ou- 
vrages de  saint  Fulgence  :  car  on  n'y  a  suivi 
ni  l'ordre  des  temps,  ni  celui  des  matières; 
elle  est  d'ailleurs  assez  exacte,  en  bon  pa- 
pier et  en  beaux  caractères.  La  Préface  n'est 
point  de  l'éditeur;  on  y  voit  quels  sont  les 
véritables  ouvrages  de  ce  Père ,  eu  quel 
temps  ils  ont  été  écrits,  ceux  que  nous  n'a- 
vons plus,  et  ceux  qu'on  lui  a  faussement 
attribués. 

[L'édition  de  Paris  a  été  réimprimée  à  Ve- 
nise, en  1742,  in-folio,  et  dans  la  Palrologie 
latine,  tom.  LXV.] 


CH.4P1TRE  II. 


Saint  Rémi,  évêqac  de  Reims,  et  apôtre  des  Français. 

[Écrivain  latin,  535.1 


nii.  TerS    1  âQ 


1 .  Au  milieu  des  persécutions  que  l'Eglise  de 
Reims  eut  à  soutlVir  de  la  part  des  Huns  et 
des  Vandales,  Dieu,  par  un  effet  admirable  de 
sa  providence,  lui  préparait  un  soutien  et  un 
consolateur  daus  la  personne  de  saint  Rémi. 
Un  solitaire,  nommé  Montan,  qui  vivait  dans 
les  exercices  de  la  piété  aux  environs  de  la 
ville  de  Laon,  auiioura  sa  naissance  à  Gilinie, 
dont  l'âge  avancé  ne  lui  permettait  plus  d'es- 
pérer d'être  mère  :  mais  l'événement  justifia 
la  prédiction  du  solitaire.  Cilinie,  au  bout  de 
neuf  mois,  eut  un  fils  qui  fut  nommé  Rémi  au 


baptême.  Son  père  se  nommait  Emile.  Il  de- 
meurait dans  le  château  de  Laon,  où  il  prati- 
quait avec  Cilinie,  sa  femme,  toutes  sortes  de 
vertus.  Il  parait  qu'on  iieut  fixer  la  naissance 
de  saint  Rémi  vers  l'an  439,  puisque  dans  une 
lettre  qu'il  écrivit  en  512,  il  dit  qu'il  avait 
alors  cinquante-trois  ans  d'épiscopal,  et  que 
selon  l'opinion  commune  il  n'avait  que  vingt- 
doux  ans  quand  il  fut  élu  évoque  de  Reims. 
On  lui  donne  deux  frères  ;  l'un  nommé  Prin- 
cipe, qui  fut  évoque  de  Soissons  :  le  nom  de 
l'autre  n'est  pas  connu.  On  sait  seulement 


'  DijjUMii  est,  fratres  charissimi,  uf  in  singuHs- 
qnibusque  senlentiis  in  qtiibus  iiubilo  cujusdum 
obscurilatis  ambigiinus,  :-anctorum  Palntm  dcfi- 
nitionibus  hœreamus  :  quos  prmveniens  viisericor- 


dia  Dei  gratis  illuminavitut  crcderent,  et  sequr:'^ 
iiistruxi(  spiritalilcr  ut  docercnt.  Fulft.,  lib  I  !>'• 
l'nvdr.tl.,  cap.  .w,  ymg.  WO. 


ntlnn 


li    csl    fn't 
éifOqofl  de 

hi-iii.s ,     ^crb 
lia  ICI. 


Sa  rniidulfo 


[vi«  SIÈCLE.]  CIIAPITltE  II.  -.  SAINT  RÉ 

qu'il  s'cngaf^oa  dans  le  mariage,  et  qu'il  ciil 
pour  fils  saint  Loup,  qui  est  compté  parmi  les 
évoques  de  Soissoiis. 
2.  L'éducation  de  saint  llémi  répondit  ;'i  la 
"'  noblesse  de  sa  naissance,  et  h  la  piété  de  ses 
pore  et  mère.  Il  fit  des  progrès  considérables 
dans  1rs  lettres  humaines  et  dans  la  vertu. 
Souvent  il  se  dérobait  de  la  compagnie  de  ses 
proches  pour  vaquer  à  la  prière  et  ;\  la  lec- 
ture des  livres  saints,  se  retirant  à  cet  cQot 
en  un  lieu  secret  du  cliàteaii  de  Laon,  qu'on 
regardait  encore  du  temps  d'Hincmar  avec 
vénération.  L'amom-  de  la  perfection  le  por- 
ta ù  quitter  la  maison  paternelle  pour  aller 
vivre  dans  une  solitude  éloignée,  où,  n'ayant 
que  Dieu  pour  témoin,  il  s'abandonna  à  la 
ferveur  de  son  zèle,  redoublant  ses  jeûnes, 
ses  veilles,  et  ses  prières. 

3.  Ce  fut  de  cette  retraite  qu'on  le  tira  pour 
le  mettre  sur  le  siège  épiscopal  de  Reims,  va- 
cant par  la  mort  de  Bennade.  C'était  vers  l'an 
461,  dans  la  vingt-deuxième  année  de  son 
fige.  Les  canons  de  l'Eglise  demandaient  un 
âge  plus  avancé  pour  un  évoque  ;  mais  il  y 
a  des  vocations  extraordinaii'es,  et  l'Eglise 
ne  s'est  point  toujours  astreinte  à  ses  pro- 
pres lois.  Quoique  saint  Paid  défende  d'or- 
donner évêqueunnéophite,  on  ne  laissa  pas 
de  choisir  saint  Ambroise  pour  évoque  de  Mi- 
lan, dans  le  temps  qu'il  n'était  que  catéchu- 
mène. Dieu  justifia  le  choix  qu'on  avait  fait 
de  saint  Rémi  par  une  lumière  céleste  dont  il 
l'investit  au  moment  que  l'évêque  qui  le  con- 
saûrait  répandait  sur  sa  tête  l'huile  sainte. 

4.  Sa  conduite  pendant  son  éplscopat  fut  ad- 
mirable, étant  toujours  occupé  ou  à  la  prière, 
ou  à  la  méditation  de  l'Écriture,  ou  à  l'ins- 
truction de  son  peuple,  ou  à  la  conversion 
des  infidèles,  ou  à  combattre  les  hérétiques. 
On  le  comparaît  à  saint  Paul  pour  le  feu  et 


Sl'tnn.    lili, 
VIII      K,.l<l. 


MI,  ÉVftQUE  DE  REIMS.  77 

l'onction  do  ses  discours  :  car  il  était  iialunl- 
Innent  éloquent,  et  avait  l'esprit  i^xceilent. 
Il  faut  rapporter  ici  ce  que  saint  Sidoine  Apol- 
linaire en  dit  dans  une  lettre  à  Principe  de 
Soissons,  où  il  fait  l'éloge  de  ces  deux  frères  : 
«  J'ai  piis  plaisir,  lui  dit-il,  d'examinru'  avec 
quelle  tlignité  vous  remplissez  l'un  et  l'antre 
les  obligations  de  l'épiscopat.  La  maison  do 
l'ancien  pontife  Aaron  peut  à  peine  être  com- 
parée ;\  celle  de  votre  père.  En  approchant 
des  saints  autels,  vous  n'y  olfrez  point  un  feu 
étranger,  mais  l'encens  d'une  agréable  odeur 
avec  les  victimes  de  la  charité  et  de  la  chas- 
teté. Combien  de  fois  n'avez-vous  pas  enchaî- 
né parla  vertu  de  vos  discours  ceux  qui,  com- 
modes taureaux  indomptés,  refusaient  de  su- 
bir le  joug  de  la  loi  sainte  ?  Combien  de  fois 
n'avez-vous  pas  inspiré  l'amour  de  la  pureté  à 
d'autres,  qui  comme  des  animaux  lascifs,  s'a- 
bandonnaient aux  plaisirs  les  plus  infâmes  ? 
Combien  de  fois  n'avez-vous  point  porté  par 
vos    exhortations  les  pénitents  à  gémir  de 
leurs  fautes  devant  Dieu?  Combien  de  fois  n'a- 
vez-vous point  obligé  des  perfides  à  mettre 
bas  toute  dissimulation,  à  se  déclarer  pour 
la  saine  doctrine,  à  faire  publiquement  pro- 
fession de  la  vraie  foi,  à  suivre  la  voie   du 
salut,  et  à  espérer  la  vie  éterueUe,  en  les  fai- 
sant passer  du  schisme,  de  l'hérésie  et  de 
l'hypocrisie,  à  l'amour  sincère  de  la  vérité  ?  » 

3.  L'éloge  que  saint  Sidoine  fait  des  écrits  se=,crits, 
de  saint  Rémi,  dans  une  lettre  qu'il  lui  écri- 
vit, est  d'autant  plus  considérable,  qu'il  est  le 
seul  auteur  contemporain  qui  en  ait  parlé,  et 
que  ces  écrits  n'existant  plus,  nous  ne  pou- 
vons en  juger  par  nous-mêmes.  Saint  Sidoine 
n'en  marque  ni  les  titres,  ni  les  sujets  ;  il  se 
contente  de  dire  qu'Us  étaient  en  plusieurs  vo- 
lumes, et  qu'ayant  trouvé  moyen  de  les  avoir  ' 
par  un  homme  d'Auvergne  qui  gagna  par  ar- 


» 


'  Qtiidam  ab  Àvernis  Belgicam pelens,pnstqiiam 
Rhemos  advenerat ,  scribam  tuum  seu  bibliopolam 
prelio  ofpcio  re  demeritnm,  copiosissimn,  velis  no- 
lis,  declamalionum  luarum  schedio  emunxit.  Qui 
redux  nobis  atqiie  oppido  gloriabundus,  quippe 
perceplis  tôt  voluminibus  quidquid detiilerat ,quan- 
guam  mercari  paralis,  promunere  ingessit.  Curœ 
mihi  fuit,  iisque  quistudent,  cum  merilo  lecluri- 
remus.plurima  tenrre,  cinida  transcribere.  Om- 
nium assensu  pronnntiatum,  pauca  nunc  passe 
similia  dictari.  Elenim  rarus  aul  nuUus  est  cui 
meditaiuro  par  assl'tial  dispositio  per  causas,  po- 
sitio  per  litteras,  compnsitio  per  syllabas;  ad  hoc 
opriartunitas  in  eïemplis,  fidcs  in  testiinoniis,pro- 
prietas  in  rpilhelis,  urbanitasin  figuris.virlus  in 
argumenlis,  pondus  in  sensibus,  flumen  in  verbis, 
fulmen  in  clausulis.  Structura  vero  forlis  et,  flr- 


ma,  conjunctionumque  perfacetarum  nexa  cœsif 
ris  insolubilibus  :  sed  nec  liinc  minus  lubrica  et 
lœvis  ac  modis  onniibus  erotundata  :  quœque  lec 
loris  linguam  inolfensam  decenter  expédiai,  ne 
salebrosas  passa  juncturas,  per  cameram  palati 
volulala  balbutiai.  Tota  denique  liquida  prorsus  et 
ductilis,  veluti  cum  crysiallinas  cruslas,autony 
chintinas  non  impacto  digiius  ungue  perlabitur  : 
quippe  si  niliil  eum  rimosis  obicibus  exceptum 
tenax  fractura  removetur.  Quid  plura  ?  Xon  extat 
ad  pra'sens  vivi  honiinis  oratio  quam  perilia  tua 
non  sine  labore  iransgredi  qneat,  ac  supervadere. 
Unde  el  prope  suspicor  ,  Domine  papa ,  propter 
eloquium  exundans  atqne  inefj'abile  fvenia  sit  dic- 
toj  te  svperbire.  Sed  licet  bono  fulgens  ut  cons~ 
cientiœ,  sic  dielionis  ordinatissime  ;  nos  tibi  ta- 
men  minime  sumus  refugiendi,  qui  bene  scripta 


HlSTOmK  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


78 

pent  ou  autrement  le  secrétaire  de  saint  Ré- 
mi, tout  son  soin,  après  les  avoir  reçus,  fut 
(le  s'a])plir[uor  avec  ceux  de  ces  gens  qui  fai- 
saient profession  d'étude,  de  les  lire  et  de 
les  transcrire  ;  mais  qu'il  ne  se  trouva  per- 
sonne d'entr'eux  qui  écrivit  avec  autant  de 
grâce  et  de  perfection  qu'il  y  en  avait  dans 
l'oritrinal.  Il  loue  en  frénéral  la  justesse  de 
ses  discoiu^,  qui  se  soutenaient  partout  avec 
autant  de  solidité  que  d'agrément,  la  gran- 
deur de  ses  sentiments,  la  force  de  ses  ex- 
[M-essions,  la  convenance  des  exemples  qu'il 
rapportait,  la  fidélité  et  l'exactitude  des  té- 
moignages dont  il  appuyait  ses  raisons,  le 
choix  des  épilhètes,  la  grâce  et  la  politesse  des 
figures,  la  force  des  raisonnements.  11  ajoute 
que  les  paroles  y  coulaient  comme  un  Ueu- 
ve,  et  que  les  conséquences  portaient  coup 
comme  la  foudre  ;  que  chaque  partie  était 
lollcment  liée  l'une  avec  l'autre,  que  le  tout 
qu'elles  formaient  se  soutenait  parfaitement  ; 
que  la  structure  en  était  si  coulante,  le  style 
si  délicat  et  si  beau,  qu'on  pouvait  le  com- 
parer h  une  glace  de  cristal  Lien  polie,  sur  la- 
quelle l'ongle  coule  sans  sentir  la  plus  petite 
inégalité.  «  Que  dirai-je  davantage? contiimc- 
t-il,  il  n'y  a  point  dediscom-s  d'homme  vivant 
k  présent,  que  le  vôtre  ne  puisse  aisément 
éclipser,  et  peu  s'en  faut  qu'il  ne  me  vienne 
en  pensée,  pardonnez-moi,  seigneur  évêque, 
cette  expression,  qu'il  est  difficile  que  tant  de 
mérite  ne  vous  inspire  quelque  vanité.  Mais 
quand  même  la  pureté  de  votre  conscience, 
qui  égale  votre  éloquence,  vous  mettrait  au- 
dessus  des  atteintes  de  l'orgueil,  vous  ne  de- 
vriez pas  rebuter  les  louanges  que  nous  vous 
donnons,  puisqu'encore  que  nous  ne  soyons 
pas  en  état  d'écrire  rien  qui  mérite  d'être 
loué,  il  ne  nous  est  pas  libre  de  ne  pas  louer  ce 
qui  est  bien  écrit.  N'appréhendez  donc  pas 
à  l'avenir  notre  jugement,  qui  n'a  rien  de 
mordant  ni  de  satyrique  ;  et  si  votre  modes- 
tie vous  empêche  de  nous  faire  part  de  la  doc- 
trine renfermée  dans  vos  écrits,  où  nous  pou- 
vons trouver  de  quoi  nous  enrichir,  nous  ne 
négligerons  rien  pour  vous  les  enlever,  et 
nous  consentirons  volontiers  qu'on  aille  les 
prendre  jusques  dans  votre  cabinet,  fallût- 


il  ponr  cela  suborner  ceux  à  qui  vous  les  au- 
riez confiés.  )) 

G.  On  ne  peut  donc  douter  que  saint  Ré-  c«n«vii..  i 
mine  se  soit  rendu  célèbre  dans  les  Gaules,  *"!;• 
autant  par  sa  doctrine  et  par  son  éloquence 
que  par  sa  piété.  Mais  ce  qui  donna  le  plus 
d'éclat  à  son  épiscopat,  fut  la  conversion  du 
roi  Clovis  et  d'un  grand  nombre  de  Français. 
Ce  prince,  qui  était  fils  de  Childéric,  lui  avait 
succédé  dans  la  royauté  en  481,  étant  âgé 
d'environ  quinze  ans.  Dans  le  dessein  'd'étein- 
dre la  puissance  des  Romains  dans  les  Gaules, 
où  ils  dominaient  depuis  Jules-César,  il  livra 
bataille  à  Siagrius ,  gouverneur  des  Gaules 
pour  les  Romains,  qui  faisait  sa  résidence 
ordinaire  à  Soissons,  et  le  vainquit.  En  493, 
Clovis  -  épousa  Clotilde,  fille  de  Chilpéric,  et 
nièce  de  Gondebaud,  roi  des  Bourguignons. 
Elle  était  chrétienne  et  catholique,  quoique 
son  oncle  et  toute  la  nation  des  Bourgui- 
gnons fissent  profession  de  l'arianisme.  Clo- 
vis était  encore  païen  :  mais  il  ne  laissait  pas 
d'avoir  beaucoup  d'égard  pour  les  chrétiens, 
d'épargner  les  églises  et  d'honorer  les  saints 
évèques.  Le  premier  fruit  de  son  mariage 
avec  Clotilde  fut  un  fils.  Cette  princesse,  vou- 
lant le  faire  baptiser,  en  prit  occasion  d'ex- 
horter le  roi  à  quitter  le  culte  des  faux  dieux 
pour  n'adorer  que  le  créateur  de  l'univers. 
Son  discours  ne  persuada  point  Clovis  ;  mais 
il  ne  s'opposa  point  au  baptême  de  son  fils, 
qui  mourut  portant  encore  l'habit  blanc, 
c'csf-à-dire  dans  la  même  semaine  où  il 
avait  été  baptisé.  Le  roi,  touché  de  cette 
mort,  en  rejeta  la  cause  sur  le  baptême  que 
son  fils  avait  reçu,  disant  que  si  on  l'avait 
consacré  ù  ses  dieux  il  ne  serait  pas  mort.  Il 
eut  '  un  second  fils,  que  la  reine  fit  aussi 
baptiser,  et  nommer  Clodorair.  Quelque 
temps  après  il  tomba  malade  :  et  le  roi,  ne 
doutant  point  qu'il  ne  dut  mourir  comme  son 
frère,  fit  des  repioches  amers  à  Clotilde  de 
l'avoir  fait  baptiser  ;  mcais  l'enfant  guérit  par 
les  prières  de  la  mère.  Elle  ne  cessait  de 
presser  le  roi  de  renoncer  au  culte  des  ido- 
les, et  toujours  sans  succès,  jusqu'à  ce  que, 
se  trouvant  en  péril  d'être  entièrement  dé- 
fait par  les  Allemands  dans  la  bataille  do 


laudamus,  et  si  laudanda  non  scribinins,  quocirca 
desine  in  posterum  noslra  declinare  juilicia  quœ 
nil  mordax,  nihilque  niinanlur  increpnlorium. 
Alioqui  sidislulerii  noslram  sterililatem  facundis 
fœcundare  coUoquiis.  aucupabimur  nundittas  in- 
Volanlum;  el  uUro  scrinia  tua,  connivcnlibits  no- 


bis  ac  subornanlibus,  effraclorum  manus  arguta 
poptilabitur.  Siilonius,  Episl.  7,  lib.  IX. 

>  Gromir.  Turon.,  lit).  Il  Ilist.  Franc,  caii.  xxvi. 

'  Ibid.,  cap.  xxviu,  et  lib.  III.  cip.  xxix. 

•  Ibid.,  cap.  XXX. 


[VI°  SIÈCLE.] 


CHAPITHE  II.  —  SAINT 


Tolliiiic,  il  promit,  on  ëlcvaiit  los  yeux  au 
rirl,  fiup  si  Jt'sns-Clirist,  que  CInlihIc  diiçait 
(■'Iro  if!  Fils  du   Dieu  vivant,  lui  iloniiait  la 
vicloirc,  il  croirait  '  en  lui  et  se  ferait  bap- 
tiser  en    son    nom.  A  peine  avait -il  fait 
cette  promesse  que  les  Allemands,  tournant 
le  dos,  commenc(''ront  à  fuir  et  ;\  demander 
quartier.  Celait  la  quinzième  ainiëe  du  rè- 
gne de  Clovis,  etran^DOdeJiisus-Christ.  Au 
retour  de  cette  expédition,  qui  s'était  faite 
près  de  Cologne,  le  roi,  en  passant  ù  Toul, 
emmena  *  avec  lui  un  saint  prêtre,  nommé 
Védastus  ou  Woast,  atin  qu'il  l'instruisit  en 
chemin  et  le  préparât  au  baptême.  La  reine, 
de  son  côté,  fit  venir  saint  R(''iin',  qui  continua 
de  l'instruire,  en  lui  représentant  qu'après  le 
vœu  qu'il  avait  fait  si  solennellement,  il  ne 
pouvait  plus  se  dispenser  d'embrasser  la  re- 
ligion cbrctienne.  «  Je  ue  délibère  plus  là- 
dessus,  lui  répondit  le  roi,  mais  il  reste  une 
dilliculté,  qui  est  de  faire  agréer  le  cliange- 
ment  que  je  projette  h  mon  peuple  et  à  mon 
armée.  »  Il  assembla  donc  ses  soldats  et  les 
principaux  de  la   nation,    qui,    touchés   de 
Dieu,  s'écrièrent  d'une  voix  unanime,  qu'ils 
quittaient  de  bon  cœur  les  dieux  mortels,  et 
qu'ils  étaient  prêts  à  suivre  le  Dieu  immor- 
tel, que  le  saint  évéqiie  Rémi  prêchait, 
nnumojc       7_   On  prépara  tout  pour  le  baptême  du 
roi  et  des  Français,  et,  en  attendant,  saint 
Rémi  et  le  prêtre  Védastus  continuaient  de 
les  instruire,  leur  faisant  observer,  suivant 
la  coutume  de  l'Église,  quelques  jours  de 
jeiine  et  de  pénitence.  Plasieurs  évêques  se 
rendirent  à  Reims  pom"  cette  solennité,  qui 
fut  fixée,  non  à  Pâques,  comme  le  dit  Hinc- 
mar,  mais  à  la  Noël,  ainsi  que  le  marque  ' 
saint  Avite,  évêque  de  Vienne,  dans  sa  let- 
tre au  roi  Clovis.  On  avait* paré  magnifique- 
ment les  rues,  depuis  le  logis  du  roi  jusqu'à 
la  cathédrale,  qui  était  éclairée  d'un  grand 
nombre  de  cierges  composés  d'une  cire  mê- 
lée  d'essences  exquises,  qui  en  s'exhalant 
avec  la  fiamme  rendaient  une  odeur  mer- 
veilleuse. Saint  Rémi  alla  prendre  le  roi  à 
son  palais,  d'où  l'on  marcha  en  procession 


RÉMI,  ÉVÊQUE  DK  REIMS.  7» 

vers  l'Église,  le  clergé  précédait  avec  les 
croix  et  les  saints  Évamriles,  en  rhantantdes 
litanies.  L'évéque  conduisait  Clovis  par  la 
main,  suivi  de  la  reine  et  du  peuple.  Le  roi, 
frappé  de  cet  appareil,  dit  à  saint  Rémi  :  Mon 
père,  est-ce  ta  le  royaume  de  Dieu  que  vous  me 
jirumelle:?  Non,  ré[)ondit  le  saint  évèque,  ce 
n'est  que  le  commencement  du  chemin  pour 
y  arriver.  Dans  l'action  du  baptême,  il  lui 
dit  :  Baissez  la  tète,  fier  Sieambre  '',  adorez  ce 
que  vous  avez  brûlé,  et  brûlez  ce  que  vous  avez 
adoré,  lui  faisant  comprendre  par  là  qu'il  de- 
vait respecter  les  temples  du  Seigneur,  et 
jeter  au  feu  les  idoles  qu'il  avait  adorées  si 
longtemps.  Il  baptisa  ensuite  Albollède,  sojur 
du  roi,  et  plus  de  trois  mille  Français.  Le  roi 
avait  une  autre  sœur,  nommée  Lantilde, 
qui,  quelque  temps  auparavant,  avait  em- 
brassé la  religion  chrétienne,  mais  qui,  sé- 
duite par  quelques  hérétiques,  était  tombée 
dans  l'arianisme.  Saint  Rémi,  l'ayant  retirée 
de  l'erreur,  la  lui  fit  abjui-er;  puis  il  l'oignit 
du  saint  chrême,  et  l'admit  ainsi  à  la  com- 
munion de  l'Eglise. 

8.  Albollède  ne  survécut  pas  longtemps  ,  H'.';" 'î 
à  son  baptême.  Clovis,  qui  l'aimait,  fut  vive-  J;,';;j|'„'"op.' 
ment  touché  de  sa  moi-t,  ce  qui  engagea  ,1,'^'°"^^^', 
saint  Rémi  à  écrire  à  ce  prince  une  lettre  de  '"*" 
consolation  où  il  lui  représente  qu'Alboflède 
étant  morte  dans  des  sentiments  aussi  chré- 
tiens, il  y  avait  plus  de  sujet  de  se  réjouir  de 
sa  mort  que  de  s'en  attrister;  que  Dieu  ne 
l'avait  enlevée  de  la  terre  que  pour  la  placer 
dans  la  gloire,  et  lui  donner  la  couronne 
qu'elle  méritait  pom"  lui  avoir  consacré  sa 
virginité  ;  que  des  chrétiens  ne  doivent  point 
pleurer  celle  qui  a  mérité  d'être  la  bonne 
odeur  de  Jésus-Christ;  qu'elle  doit,  au  con- 
traii'e,  faire  leur  joie,  puisque,  par  le  crédit 
qu'elle  a  auprès  de  son  époux,  elle  peut  ob- 
tenir des  secours  à  ceux  qui  en  demandent. 
«  Ainsi,  mon  seigneur,  ajoutait  le  saint  évè- 
que, bannissez  tout  chagrin  de  votre  cœur, 
afin  que  votre  esprit,  jouissant  de  toute  sa 
tranquillité,  vous  continuiez  de  gouverner 
vos  États  avec  votre  sagesse  ordinaire.  Que 


*  Greg.  Turon.,  lib.  II   Hist.  Franc,  cap.  xxvi. 

'  Ibid..  in  Append.,  pag.  1340,  et  Bollaud.,  ad 
diem  6  fcbruarii. 

'  Igilur  qui  celeber  est  natalis  Christi,  sit  et 
vestri,  quo  nos  sciUcet  Christo,  quo  Christus  or- 
tus  est  mundo,  in  quo  vos  aniinam  Deo,  vitam 
]>rn>spniihii!i.  fnmam  posteris  cansecrastis.  Avitus, 
Kpist.  41,  tom.  Il,  Op.  Siimoiid.,  pag.  83,  84.  Le 
PÈreSirmond  qui  nous  a  donné  cette  lettre,  fait  cette 


remarque  ;  Ùocet  porro,  quod  hactenus  ignoravi- 
mus  in  vigilia  Natalis Domini  celebratum  Ctodovei 
baptisma,  non  in  vigilia  Paschœ  quod  Bincmarus 
Rhemensis  falso  sibi  et  rerum  nostrarum  scripto- 
ribus  persuaaerat.  Ibid. 

'  Gregor. ,   Turon. 

5  On  croit  que  les  Sicambres  ëtaieut  des  peuples 
au-delà  du  Rhiu,  et  compris  parmi  les  Français, 
dont  Clovis  était  roi. 


80 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


les  peuples,  dont  vous  êtes  le  chef,  et  dont 
le  couvernement  vous  est  confié,  ne  vous 
voient  point  dans  la  tristesse,  eux  qui  par 
vous  sont  accoutumés  A  vivre  dans  la  pros- 
périté. Soyez  vous-même  votre  consolateur, 
et  ne  permettez  point  que  le  chagrin  trouble 
la  sérénité  de  votre  àme.  Dieu  même,  le  roi 
du  ciel,  se  réjouit  d'avoir  appelé  à  lui  votre 
sœur  pour  la  placer  dans  sa  gloire  avec  les 
choîurs  des  vierges.  »  Saint  Rémi  recomman- 
dait à  Clovis  le  prêtre  Maccolus,  porteur  de 
sa  lettre,  disant  qu'il  serait  allé  lui-même 
tâcher  de  le  consoler,  sans  l'extrême  rigueur 
de  l'hiver.  Celte  lettre  est  sans  date. 
Lfitre  de       9.  Il  n'y  en  a  point  non  plus  à  la  seconde  let- 

Mlnl    «cm  4  •'  •  ,     :    ,       .     . 

ciois.  iihj.  ii-e  (me  le  saint  evêque  lui  écrivit,  mais  on  voit 
que  ce  prince  se  préparait  alors  a  la  guerre 
contre  les  Goths,  qui  occupaient  encore  une 
partie  des  Gaules,  qu'ils  infectaient  de  l'a- 
rianisme.  Ainsi  on  peut  la  rapporter  à  l'an 
506  ou  307.  Le  dessein  de  Clovis  fut  approuvé 
de  tous  les  Français.Mais  avant  de  l'exécuter, 
il  défendit  '  à  toute  son  armée  de  piller  les 
vases  sacrés  des  églises,  ni  de  faire  aucune 
insulte  aux  vierges  ou  aux  veuves  consacrées 
h  Dieu,  aux  clercs,  à  leurs  enfants,  à  leurs 
domestiques  ou  aux  serfs  de  rj]glise.  Saint 
Rémi  l'ai  donnait  des  avis  snr  le  gouverne- 
ment des  peuples  que  Dieu  soumettait  à  sa 
puissance.  «Choisissez-vous,  lui  dit-il, des  con- 
seillers qui  fassent  honneur  à  votre  dignité 
et  qui  soutiennent  votre  réputation.  Honorez- 
les  prêtres,  et  prenez  toujours  leujs  conseils. 
Le  bien  de  vos  états  dépend  de  la  bonne  in- 
telligence que  vous  entretiendrez  avec  eux. 
Relevez  et  soulagez  vos  peuples  et  vos  ci- 
toyens, consolez  et  secourez  les  affligés,  pro- 
tégez les  veuves,  nourrissez  les  orphelins  et 
faitesen  sorte  que  tousvos  sujets  vous  aiment 
et  vous  craignent,  que  toutes  vos  paroles  et 
vos  ordonnances  soient  accompagnées  de 
justice.  N'exigez  rien  des  pauvres  ni  des 
étrangers  ;  que  la  porte  de  votre  palais  soit 
ouverte  à  fous  ceux  qui  iront  pour  vous  de- 
mander la  justice;  que  personne  ne  sorte 
mécontent  d'auprès  de  vous;  que  les  grands 
biens  que  vous  avez  hérités  de  vos  ancêtres 
soient  distribués  de  façon  qu'ils  servent  à 
racheter  les  captifs  et  à  les  délivrer  de  la 
servitude;  que  tous  ceux  qui  se  présentent 
devant  vous  ne  s'aperçoivent  point  que  vous 
les  recevez  comme  des  étrangers.  Admettez 


lettre  it 
1  lut  ^ 


les  jeunes  gens  à  vos  parties  de  plaisirs,  trai- 
tez de  vos  affaires  avec  les  vieillards  si  vous 
voulez  régner  heureusement,  et  passer  pour 
un  prince  grand  et  généreux.  » 

10.  Clovis  en  étant  venu  aux  mains  avec 
Alaric  défit  son  armée  près  de  Veuille  en  Poi-  t*')"»'  _''" 
fou,  le  tua  lui-même,  conquit  presque  toute  JJ;',  ,1;",°''^ 
l'Aquitaine,  et  s'avan(;a  jusqu'à  Toulouse,  ',°,^.VL''"u* 
d'où  il  enleva  les  trésors  d'Alaric  qui  faisait  '•*•  "" 
sa  demeure  ordinaire  en  celle  ville.  C'était 
en  507  et  508.  Quand  la  guerre  fut  finie  avec 
les  Goths,  il  écrivit  une  lettre  circulati'e  aux 
évêques  des  Gaules  pour  les  avertir  de  répé- 
ter ce  qu'on  pouvait  leur  avoir  enlevé  pen- 
dant la  guerre,  et  même  de  demander  la  li- 
berté des  captifs,  soit  clercs,  soit  laïques.  Il  mit 
toutefoispourcondition, qu'ils  ne  répéteraient 
que  ceux  qu'ils  connaissaient,  et  que,  pour 
éviter  la  fraude,  ils  scelleraient  de  leur  an- 
neau les  lettres  qu'ils  écriraient  à  ce  sujet.  D 
finit  sa  lettre  en  se  recommandant  à  leui-s 
prières.  Il  parait,  par  la  lettre  '  sj-nodale  du 
premier  concile  d'Orléans,  qu'il  s'était  as- 
semblé par  ordre  de  Clovis.  Nous  n'avons 
plus  la  lettre  qu'il  écrivit  à  ce  sujet  aux  évo- 
ques de  son  royaume.  On  ti'ouve  dans  le  Spi- 
cilége  et  diinsV Appendice  des  Œuvres  de  saint 
Grégoire  de  Tours  un  diplôme  de  Clovis  pour 
la  fondation  du  mouastère  de  Mici  au  dio- 
cèse d'Orléans,  adressé  à  l'évêque  Euspice, 
dans  lequel  ce  prince  l'exhorte,  comme  évé- 
que  diocésain,  et  quelques  autres  du  royau- 
me dénommés  dans  ce  diplôme,  de  protéger 
ce  monastère  avec  ses  dépendances.  Ce  prince 
mourut  en  511,  dans  la  quarante-cinquième 
année  de  son  âge  et  la  trentième  de  son  rè- 
gne. 

11.  Quelque  temps  avant  la  mort  de  Clo-  „,„,'-'^;';;i"J 
vis,  saint  Rémi  avait,  à  sa  recommandation,  'IfJ'jî,"-,..',.''" 
élevé  à  la  prêtrise  un  ecclésiasti(]ue  nommé  j;^^  t.'i^J'X 
Claude.  Il  lui  arriva  de  tomber  dans  une  fau-  l°'^-^[^^°;, 
te  qui  ne  pamt  pas  assez  grande  à  saint  Ré- 
mi pour  méritej-la  déposition.  Il  se  contenta 

donc  de  le  réconcilier  à  l'I'^glise  par  la  péni- 
tence. Trois  évêques  des  Gaules:  HéracJe, 
évoque  de  Paris,  Théodose  d'Auxeire  et  Léon 
de  Sens  désapprouvèrent  sa  conduite,  pré- 
tendant qu'elle  était  contraire  aux  saints  ca- 
nons, et  se  plaignirent  ù  lui-même  par  une 
lettre  commune  de  ce  qu'il  s'était  relâché  à 
l'égard  de  Claude,  d'une  manière  qui  avilis- 
sait son  caractère.  Le  saint,  sensible  à  ces  rc- 


>  In  Appeiuiice  Operum  Gregorii  Tiiron. 
1327,  et  loin.  IV  Cuncil.,   pan.  1012. 


paj.'. 


»  ïom.  IV  Condl.,  pag.  1404. 


[Vl"  SIÈCLE.] 


CIIAPITaE  II.  —  SAINT  RÉMI,  ÉVOQUE  DE  REIMS 


proches,  criil  devoir  jtislifuu'  sii  conduile.  Il 
leur  (.écrivit  donc,  que  s'il  iiviiil  oi-doiiiic  piè- 
tre celui  pour  lequel  ils  l(5inoij^niiieiil  tant  de 
ini^pris,  ce  n'avait  cté  par  aucun  nuitif  d'in- 
térêt, mais  i'i  la  pricro  et  sur  le  téiuoij^na.ue 
d'un  grand  roi,  qui  méritait  bien  que  l'on  eût 
pour  lui  des  égards,  puisqu'il  était  et  le  pré- 
dicateur et  le  défenseur  de  la  foi  catiiolique 
dans  son  niyaumc  ;  qu'en  disant  (pie  ce  prin- 
ce avait  fait  élever  (>laude  à  la  préirise  contre 
les  canons,  ils  s'arrogeaient  eux-mêmes  l'au- 
torité du  Souvcrain-Pnntife,  pour  prononcer 
sur  une  matière  où  il  s'agissait  de  condamner 
le  procédé  du  maître  des  peuples,  et  le  père 
de  la  patrie,   et  le  vainqueur  des  nations  ; 
qu'à  l'égard  du  sacrilège  dont  Claude  était 
accusé,  il  les  avait  priés  de  trouver  bon  qu'il 
expiât  cette  faute  par  la  pénitence  ;  qu'en 
cela  il  n'avait  fait  que  suivre  les  règles  pres- 
crites dans  les  Ecritures  où  nous  lisons  que 
la  pénitence  délivra  les  Niuivites  de  la  ruine 
dont  ils  étaient  menacés;  que  le  saiut  Pré- 
curseur avertit  les  peuples  d'effacer  leurs  pé- 
chés par  de  digues  fruits  de  pénitence  ;  que 
saint  Jean,  dans  l'Apocalypse,  enjoignit  aux 
évèques  d'Asie  de  réformer  par  la  pénitence 
ce  qu'ils  avaient  fait  de  mal  dans  l'adminis- 
tration des  Eglises.  «  Mais,  ajoule-t-il,  il  me 
parait  par  votre  lettre,  que  vous  appréhendez 
plutôt  que  ce  prêtre  ne  se  convertisse  et  ne 
vive,  quoique  vous  ne  puissiez  ignorer  que 
le  Seigneur  a  dit  :  Je  ne  veux  point  la  mort 
du  pécheur,  mais  plutôt  qu'il  se  convertisse  et 
qu'il  vive.  N  'est-il  pas  plus  expédient  de  suivre 
la  volonté  du  Seigneur,  que  de  nous  en  écar- 
ter ?  Il  ne  nous  a  pas  établis  pour  dominer 
sur  les  peuples  avec  hauteur,  mais  pour  les 
conduire  avec  douceur,    et  plus  pour  édilier 
les  fidèles  que  pour  leur  faire  sentir  les  effets 
d'un  zèle  trop  violent  et  trop  amer.  »  Il  se 
plaint  de  ce  que  ces  trois  évêques  voulaient 
le  rendre  responsable  de  certains  etlets  qu'un 
nommé  Celse  avait  confiés  à  Claude,  et  de 
la  personne  même  de  Celse  qui  avait  dispa- 
ru. «  Vous  ne  me  demandez,  leur  dit-il,  des 
choses  impossibles  que  pour  avoir  occasion 
de  me  traiter  avec  plus  d'indignité,  et  vous 
poussez  la  raillerie  jusqu'à  me  reprocher  le 
nombre  de  mes  années  en  me  traitant  de  ju- 
bilé, parce  qu'il  y  a  cinquante-trois  ans  que 
je  suisévêcpje.  » 

12.  Il  ne  paraît  pas  moins  de  vigueur  dans 

la  lettre  que  saint  Rémi  écrivit  à  Foulques, 

évêque  de   Tongres.    En  voici   l'occasion  : 

L'église  de  Mouzon  avait  toujoui-s  été  de  la 

XI, 


81 

jinidiction  de  l'évêque  de  Reims.  Comme 
elle  conline  avec  le  diocèse  do  Tongres  ou  de 
Liège,  Foulques  ne  se  vit  pas  plutôt  en  pos- 
session de  son  si('ge,  que,  sans  se  donner  le 
loisir  d'en  examiner  les  di-uits,  il  onloiuui 
des  prêtres  et  des  diacres  pour  l'église  de 
Mouzon,  y  établit  un  archidiacre,  un  primi- 
cier,  et  s'ap[)ropria  certains  revenus  dépen- 
dants de  cctt((  église.  Saint  iténii,  informé  du 
procédé  de  Foulques,  l'en  reprit  vivement, 
mais  sans  s'écarter  des  règles  de  la  charité, 
ne  pensant  qu'A  obliger  ce  nouvel  évoque  à 
se  cout(înir  dans  les  bornes  de  sa  juridic- 
tion, et  à  se  conduire  avec  plus  de  prudence 
et  de  retenue.  Il  lui  représente  qu'au  lieu  de 
lui  faii'e  injure  en  usurpant  ses  droits,  il  au- 
rait dû  commencer  son  épiscopat  par  lui 
donner  avis  de  son  ordination  ;  que  si  avant 
d'être  élu  évêque,  il  ne  connaissait  point  les 
canons  de  l'Église ,  il  était  de  son  devoir  de 
s'en  instruire  aussitôt  après  son  élection; 
mais  que  s'il  en  était  instruit  dès  lors,  la 
faute  qu'il  avait  commise  en  faisant  des  or- 
dinations dans  un  diocèse  étranger ,  était 
beaucoup  plus  grande  ,  que  les  taxes  ou  les 
redevances  qu'il  avait  exigées  des  habitants 
de  la  ville  de  Mouzon  ou  de  ceux  qui  en  cul- 
tivaient les  terres,  marquaient  trop  d'avidité 
pour  les  biens  temporels,  et  que  cette  avi- 
dité donnait  lieu  de  croire  qu'il  recherchait 
plus  les  biens  de  l'Eglise  que  l'épiscopat. 
Enfin  il  lui  déclare  qu'il  a  déposé  les  prêtres 
et  les  diacres  qu'il  avait  ordonnés  contre  le 
prescrit  des  canons.  11  semble  vouloir  por- 
ter cette  affaire  au  jugement  des  évêques. 
Mais  peut-être  que  Foulques  ne  l'attendit 
pas,  et  qu'il  se  désista  de  ses  prétentions  sur 
le  spirituel  et  le  temporel  de  la  ville  de  Mou- 
zon et  de  son  territoire,  qui  dépendent  en- 
core aujourd'hui  de  l'archevêché  de  Reims. 

13.  Le  diacre  Hormisdas  ayant  été  élu 
pour  succéder  au  pape  Symmaque,  mort  le 
9  juillet  de  l'an  514,  saint  Rémi  lui  écrivit 
aussitôt  pour  le  congratuler  sur  son  exalta- 
tion. Nous  n'avons  plus  celte  lettre  ;  mais 
nous  avons  la  réponse  d'Hormisdas,  dans  la- 
quelle en  déclarant  saint  Rémi  son  vicaire 
et  son  légat  dans  tout  le  royaume  de  Clovis, 
qu'il  appelle  son  fils  spirituel,  il  le  congra- 
tule de  ce  que  par  un  eUet  extraordinaire  de 
la  grâce,  et  par  des  miracles  comparables  à 
ceux  qu'ont  faits  les  apôtres,  il  avait  depuis 
peu  converti  et  baptisé  ce  prince  avec  toute 
la  nation  des  Français. 

14.  Nous  apprenons  d'Hincmar  et  de  Flo- 

(j 


Lettre  iz 
fnini  R.-nil  au 
pape  florniis- 
d^s  :  elle  ost 
ferdue.  ïom. 
IV        Concii, 


Saint  KÉmi. 


82 


HISTOIRE  GENERALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


COBCI'f.  Tttll 

IV       C«u 


cooroDd    on   doard  qu'il  se  tint  un  concile  dans  les  Gaules 
OÙ  saint  Rémi  fut  invité  de  se  trouver.   Ce 
n'était  donc  pas  à  Reims,  puisque  c'aurait 
été   à  lui  à  inviter  les  autres.  Un  évèque 
arien,  qui  était  un  çri-and  sophiste,  et  si  rem- 
pli de  lui-même  qu'il  se  croyait  en  état  de 
confondre  les  évêques  catholiques  par  ses 
raisonnements  philosopliicpies,  était  de  l'as- 
semblée. .\ucun  des  évêques  présents  ne 
voulut  parler  avant  l'arrivée  de  saint  Rémi. 
Aussitôt  qu'il  parut,   tous  se  levèrent  par 
honneur,  .'i  la  réserve  de  l'évèque  arien.  La 
peine  suivit  de  près  son  insolence.  Comme 
le  saint  passait  devant  lui,  il  se  sentit  tout  à 
coup  frappé  d'une  paralysie  qui  lui  ôta  dans 
le  moment  l'usage  de  la    parole.   Tout  le 
monde  s'attendait  que  saint  Rémi,  ayant  fini 
de  parler  sur  la  matière  qui  faisait  le  sujet 
du  concile ,    l'arien  prendrait    la    parole  ; 
mais  il  ne  put  en  proférer  une  seule.  Alors 
reconnaissant  sa  faute,  il  en  demanda  par- 
don par  signes,  en  se  jetant  aux  pieds  du 
saint,  qui  lui  parla  en  ces  termes  :  «  Au  nom 
de  Notre-Seigneur  Jésus-Cbrist,  vrai  Fils  du 
Dieu  vivant,  si  vous  avez  véritablement  les 
sentiments  qu'on  doit  avoirde  sa  divinité,  par- 
lez et  confessez  hautement  ce  que  l'Église  ca- 
tholique en  croit.  »  A  ces  paroles ,  l'hérétique 
qui ,  d'aiicn  superbe  était  devenu    catholi- 
que humble  et  soumis,    confessa  publique- 
ment tout  ce  que  l'Église  catholique  croit  de 
la  divine  et  inséparable  Trinité  et  de  ITu- 
carnation  de  Jésus-Christ ,  promettant  qu'il 
ne  quitterait  jamais  cette   croyance.   C'est 
ainsi  que  saint  Rémi,  après  avoir  puni  cet 
homme  oigueilleux,  à  cause  de  son  infidé- 
lité, lui  rendit  par  la  vertu  de  Dieu  la  santé 
de  l'ûme  et  du  corps,  faisant  connaître  à 
tous  les  prêtres  du  Seigneur  qui  étaient  pré- 
sents, et  à  tous  ceux  qui  dans  la  suite  en- 
tendraient parler  de  cette  merveille,   com- 
ment ils  devaient  se  comporter,  tant  à  l'é- 
gard de  leurs  frères  qui  se  révolteraient  con- 
tre Jésus-Christ  ou  contre  son  Église,  qu'a- 
vec ceux  qui  reconnaissant  leur  faute,  re- 
tourneraient sincèrement  à  Jésus-Christ,  qui 


par  sa  bouté  a  daigné  se  faire  et  notre  pro- 
chain et  notre  frère. 

13.  Nous  ne  connaissons  point  d'autre  con- 
cile où  saint  Rémi  ait  assisté.  Mais  il  est  re- 
marqué dans  '  les  actes  de  la  Conférence  de 
Lyon,  qui  se  tint  vers  l'an  500,  que  l'exem- 
ple de  ce  saint  évêque,  qui,  après  la  conver- 
sion de  Clovis,  détruisait  partout  les  autels 
des  idoles,  et  étendait  la  foi  par  la  multitude 
de  ses  miracles,  excita  plusieurs  évêques  à 
s'assembler  pour  essayer  de  réunir  les  ariens. 
Il  mourut,  suivant  l'opinion  la  plus  commune, 
le  treizième  jour  de  janvier  de  l'an  53.3,  âgé 
d'environ  quatre-vingt-quatorze  ans,  dont  il 
en  avait  passé  soixante-douze  dans  l'épisco- 
pat.  Il  se  fit  un  grand  nombre  de  miracles  à 
son  tombeau,  où  son  corps  est  encore  au- 
jourd'hui tout  entier  dans  l'abbaye  de  son 
nom  à  Reims. 

16.  De  tous  les  écrits  de  saint  Rémi  il  ne 
nous  reste  que  les  quatre  lettres  dont  nous 
avons  parlé  ;  on  les  trouve  dans  les  Recueils 
des  conciles,  à  la  suite  des  ouvrages  de  saint 
Grégoire  de  Tours,  et  dans  l'Histoire  de  la 
métropole  de  Reims,  par  dom  Guillaume  Mar- 
lot,  prieur  de  Saint-Nicaise  *.  Ces  lettres  en 
supposent  d'autres,  et  on  ne  peut  guère  dou- 
ter qu'il  n'en  ait  écrit  à  saint  Sidoine  Apolli- 
naire, à  saint  Avite  de  Vienne,  et  à  d'autres 
grands  hommes  de  son  siècle  de  qui  il  en 
recevait.  On  a  dit  longtemps  qu'il  en  avait 
reçu  une  de  saint  Benoit  pour  le  prier  de 
s'employer  auprès  du  Seigneur,  afin  d'en 
obtenir  la  délivrance  d'une  jeune  fille  qui, 
depuis  son  enfance,  était  violemment  tour- 
mentée du  démon.  Mais  on  n'a  attribué  cette 
lettre   «^    saint   Benoit ,    que    sur  l'auloritë 
d'Hincmar,  qui  parait  n'avoir  pas  bien  pris 
la  pensée  de  Fortunat.  Cet  auteur  avait  rap- 
porté dans  l'histoire  de  la  vie  de  saint  Rémi, 
que  le  père  de  cette  fille,  qui  était  de  la  pre- 
mière condition,  et  allié,  ce  semble,  au  roi 
Alaric,  l'avait  conduite  à  Rome  au  tombeau 
de  l'apôtre  saint  Pierre   dans  l'espérance 
qu'elle  y  serait  guérie  ;  mais  que',  de  l'avis 
du  béni  serviteur  de  Dieu ,  qui  veillait  à  la 


'alal     Hé( 
S«     mort 
(11. 


1  Providente  Domino  Ecclesiœ  suœ  et  inspirante 
pro  salule  lolius  genlis,  cor  domini  Remigii,  qui 
ubique  altaria  deslruebat  idolorum  et  veram  fi- 
dem  potentfr  cum  multiludinc  signorum  ampli/i- 
cabal,  faclum  est  ut  episcnpi  plures  congrega- 
renlur,  si  fieri  possel,  ut  ariani,  qui  religionem 
chrislianam  scindebant.  ad  unilalem  passent  re- 
verli.  Tom.  IV  Concil.,  pag.  1318. 

*  Ou  les  trouve  aussi  dans  Gallaad,  avec  le  Tes- 


tament de  saint  Rémi,  tom.  X,  pag.  80S-808,  et  dans 
leloiucXXVdela  Palrologie latine,  d'aprisCalLiml, 
etd'aprc's  les  Actes  de  la  province  ecclésiastique  de 
Reims,  (idilés  par  ordre  de  M(;r  Gousset.  fl.'cdileur.J 
'  Tune  parentes  ejus  et  ipsius  benedicti  servi 
Dei  et  Àlarici  régis  Gotliorum  a/falibussuffragati 
cum  a-grola  sobole  ad  sanclissimum  H  migium 
antintHem  pervenerunt.  Fortunat.in  Vita  S.  Hemi- 
gii,  Mabillon.,  tom.  11  Annal,  pag.  61. 


CIIAriTUE  11.  —  SAINT  UÉMI ,  ÉVÈQUK  UE  UEIMS. 


3«lUt     Uc- 


[Vl"  SIÈCLE.] 

garde  de  ce  tombeau,  et  sous  la  protection 
d'Alaric,  roi  dcsGotlis,  il  l'aviiit  euimcndc  do 
Home  à  Reims,  pour  la  pr(''senler  à  saint  Ui5- 
nii,  qui  on  était  L'\èi]ue.  llincmar  a  l'ait  du 
mot  de  béni,  qui  dans  Forlunat  est  atljcctif, 
un  nom  appellaliret  propre.  Il  est  sans  ap- 
parence que  saint  Benoit  t'ùt  alors  en  assez 
grande  rc'pntaliou  de  miracles,  pour  qu'on 
lui  renvoyât  des  possédés,  qui  n'aui-aicnl  pu 
être  délivrés  au  tombeau  de  l'apôtre  saint 
Pierre  ;  il  est  môme  fort  douteux  qu'il  connût 
alors  saint  Réiui,  ni  qu'il  en  fût  connu,  puis- 
qu'il avait  tout  au  plus  vingt-sept  ans  lors  de 
la  mort  d'Alaric;  étant  né  vers  l'au  480,  et 
ce  prince  étant  mort  en  507. 

•17.  Nous  avons  deux  testaments  sons  le 
nom  de  saint  Uémi  ;  l'un  beaucoup  plus  long 
que  l'autre.  Le  premier  est  rapporté  dans  le 
septième  livre  des  Formules  anciennes  du  pré- 
sident lirisson ,  qui  l'avait  lire  des  écrits 
d'IIiucmar  et  de  Flodoard,  et  des  archives 
de  l'église  de  Reims.  11  doutait  si  peu  de  son 
authenticité,  que,  voyant  qu'on  ne  l'avait  en- 
core donné  que  traduit  en  français  par  M.  du 
Chcsne,  il  crut  rendre  service  aux  étrangers 
de  le  faire  imprimer  en  latin.  Dom  Guillaume 
Marlot,  grand  prieur  de  Saint-Nicaise,  nous 
a  donné  le  second,  qui  est  moins  orné  et  plus 
simple.  Ils  commencent  et  finissent  tous  les 
deux  de  la  même  manière ,  et  sont  signés 
des  mômes  téiuoius.  Saint  Rémi  dit ,  à  la  fln 
de  chacun,  qu'après  avoir  fait  et  signé  son 
testament,  il  avait  légué  à  la  Basilique  des 
saints  martyrs  Timothée  et  Apollinaire,  un 
plat  d'argent  du  poids  de  six  livres  pour  les 
fi'ais  de  son  tombeau.  Quelques  savants  ont 
contesté  ces  deux  testaments  sur  certains 
termes  qui  s'y  trouvent,  et  qu'ils  prétendent 
n'avoir  pas  été  en  usage  dans  le  siècle  de 
saint  Rémi ,  et  sur  ce  que  l'on  ne  trouve  ni 
dans  l'un,  ni  dans  l'autre,  ni  le  jour,  ni  le 
mois,  ni  l'année,  ni  le  nom  des  consuls  sous 
H.rici,  lesquels  ils  ont  été  faits.  Us  disent  encore 
cin'ons.'  qu'il  cst  liors  d'apparence  que  le  saint  évo- 
que ait  vanté,  comme  on  fait  dans  le  plus  long 
testament ,  les  miracles  qu'il  avait  opérés. 
Mais  on  soutient  qu'il  n'y  a  aucun  terme  dans 


83 


CCS  deux  pièces  qui  n'ait  été  on  usage  dans  le 
siècle  de  saint  Uémi,  ou  parmi  les  Français, 
ou  dans  les  États  voisins  ;  qu'il  faut  bien  que 
les  dates  voulues  par  les  lois  aient  été  mises 
dans  ces  deux  tcslamenls,  puisqu'elles 'sont 
rappelées  à  la  lin  ;  et  que  si  le  saint  évoque 
y  a  rapporté  les  miracles  que  Dieu  avait  opé- 
rés par  son  ministère,  il  n'a  rien  dit  de  plus 
que  saint  Paul,  qui  n'a  pas  cru  devoir  lais- 
ser ignorer  aux  fidèles  qu'il  avait  été  ravi  au 
troisième  ciel;  ni  que  saint  Romain,  qui,  au 
rapport  de  saint  Grégoire  de  Tours,  ne  fai- 
sait point  difliculté  de  raconter  les  guéri- 
sons  miraculeuses  faites  par  l'imposition  de 
ses  mains  et  par  la  vertu  de  la  croix.  Aussi 
les  plus  habiles  antiquaires  jeroivont  ces 
deux  testaments  sans  aucune  difliculté.  Dom 
Mabilion  *  les  cite  plusieurs  fois  dans  sa  Di- 
plu7natique  et  dans  ses  A7malcs.  Ils  sont  en- 
coi'e  cités  par  M.  Ducange.  Mais  ce  qui  met, 
ce  semble,  la  chose  hors  de  doute,  c'est  que 
les  églises  de  Reims,  de  Laon ,  d'Arras,  et 
plusieurs  autres  dénommées  dans  ces  testa- 
ments, jouissent  encore  aujourd'hui  de  tous 
les  biens  qui  leur  ont  été  légués  par  saint 
Rémi  ;  et  que  quand  on  a  voulu  les  leur  con- 
tester, elles  ont  été  maintenues  dans  leur 
possession  par  l'autorité  de  ces  testaments. 
Saint  Principe,  évéque  de  Soissons,  y  est  rap- 
pelé en  sa  qualité  de  frère  de  saint  Rémi , 
et  on  sait ,  par  saint  Sidoine  ,  qu'il  était  en 
efl'et  son  frère.  On  y  rappelle  aussi  Loup , 
évéque  de  Soissons  depuis  la  mort  de  son 
père,  et  le  prêtre  Agricola,  tous  deux  ne- 
veux de  saint  Rémi.  Ce  sont  eus  qu'il  fait 
ses 

Reims 

d'argent  d'une  grandeur  extraordinaire,  dont 
le  roi  Clovis  lui  avait  fait  présent  à  son  bap- 
tême, en  ordonnant  à  Loup,  son  neveu,  d'a- 
voir soin  qu'on  en  fit  un  encensoir  et  un  ci- 
boire en  forme  de  tour  ornée  de  difl'érentes 
figures,  et  que  l'on  y  gravât  trois  vers'  qu'il 
avait  lui-même  fait  graver  sur  un  autre  ci- 
boire ou  calice  qu'il  avait  légué  à  l'église  de 
Laon  .  Ce  ciboire  se  conserva  *  dans  l'église 
de  Reims  jusqu'au  temps  d'Hincmar,  oîi  on 


légataires   universels  avec   l'église  de 
.  Il  avait  donné  à  cette  église  un  vase 


GrcîOr.  Tu- 
r>noQHls  la 
Vitid  l'uliiiix, 
cap.  t,  j  a^'. 
U5I. 


Ul.c- 

Cill,. 


'  Peractum  Rhemis  die  et  consule  supradicto. 
Brisson.  de  FormuL,  pag.  770,  et  Marlot,  pag.  185. 

-  Mabilion,  tom.  1  Annal. ,  pag.  63.  dans  sa  Di- 
plomatique,  pag.  274  et  275;  et  Dugange,  verb.: 
Missoriuin. 

'  Quod  vas  ad  nostra  usque  tempora  perdura- 
vil  donec  fusum  in  redemplionem  datum  est 
christianorum,  ut  a  ministris  diaboli  liormanis 


redimeret  pretio  argentei  calicis,  quos  de  potes- 
lale  teiiebrarum  redemerat  effusus  sanguis  cali- 
cis, Christi  videlicet  passionis.  Hincuiarus,  in  Vila 
Remigii. 
'  Uauriat  hinc  populus  vitam  de  sanguine  sacro 
Injeclo  œtei'mis  qiiem  fudit  vulnere  Christus. 
Remigiusreddit  Domino  sua  vota  sacerdos. 
Uiucmarus,  ibid. 


u 


HISTOUIE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


LcCfttBfncn' 
•llril'Ué 


l'employa,  après  l'avoir  fait  fondre,  au  rachat 
des  captifs  faits  en  Champagne,  dans  l'iniip- 
tion  des  Normands.  La  foi  de  saint  Rémi  sur 
la  présence  réelle  du  corps  et  du  sang  de 
Jésus-Christ  était  clairement  exprimée  dans 
ces  vers,  par  lesquels  il  invitait  le  penple  '  à 
venir  puiser  dans  ce  calice  le  sang  que  Jé- 
sus-Christ avait  fait  couler  de  ses  plaies  pour 
lions  donner  la  vie. 

[Plusieurs  savants  doutent  que  les  dnnx 
testaments  soient  de  saint  Hémi.  Le  Pî-rc 
Suyskens,  dans  les  Acla  sanctomm,  parait 
avoir  démontré  que  le  pins  ample  est  une 
pièce  supposée.  L'abbé  Bye,  savant  bollaii- 
diste,  a  fortifié  les  preuves  du  Père  Suys- 
kens d'une  dissertation  intitulée  :  Réponse  aux 
Mémoires  de  M.  des  Roches,  Bruxelles,  1780, 
in-8.  L'abbé  Ghesquière  a  démontré  la  mê- 
me chose  dans  les  Acta  sanctoj-um  Bclgii  *.] 
18.  Villalpand  fit  imprimer  à  Rome,  1598, 
ie"i°'.!"'d«  sous  le  nom  de  saint  Rémi,  évéque  de  Reims, 
•"'•  un  commentaire  sur  les  Kpitresde  saint  Paul. 

D  l'avait  tiré  d'un  manuscrit  du  monastère  de 
Sainte-Cécile;  et  pour  constater  au  public  que 
ce  commentaire  portait  le  nom  de  saint  Ré- 
mi, évéque  de  Reims,  il  en  fit  dresser  un 
acte  par  un  notaire  delà  Chambre-Apostoli- 
que, et  mit  cet  acte  entête  du  Commentaire. 
Villalpand  ajoute  dans  sa  Préface  qu'il  avait 
vu  d'autres  manuscrits  dans  les  bibliothèques 
du  Vaticanet  du  Mont-Cassin,  où  ce  Com- 
mentaire était  aussi  attribué  à  ce  saint  évo- 
que. Saint  Sidoine  Ai)oliiiiaire  qui  avait  eu  en 
main  plusieurs  volumes  des  écrits  de  saint  Ri'-- 
mi,  ne  parle  que  de  discours  ou  de  déclama- 
lions.  Il  n'insinue  pas  même  qu'il  eût  expliqué 
quelque  partie  de  l'Éciiture;  et  ce  qui  fait  voir 
que  le  Commentaire  sur  les  Epitres  de  saint 
Paul  n'est  pas  de  lui,  c'est  que  l'auteur,  en 
interprétant  cesparolcsde  l'Epître  aux  Ephé- 
l;^^.ei.  t,  siens  :  entretenez-vous  de  psaumes  ,  d'hymnes 
et  de  cantiques  spirituels ,  cite  cet  endroit  du 


Tom.  VIII 
BIbl.  Hil., 
|.>g.  10S«. 


dix-neuvième  chapitre  de  la  Règle  de  saint 
Benoit,  que  saint  Rémi  n'avait  ni  vue  ni  pu 
voir  :  Appliquons-nous  tellement  à  psalmodier, 
que  notre  esprit  s'accorde  avec  notre  voix.  On 
cite  encore  dans  ce  Commentaire  d'autres 
écrivains  postérieurs  à  saint  Rémi ,  savoir  : 
Cassiodore,  saint  Grégoire  le  Grand  et  le  vé- 
nérable Rède.  D'ailleurs  le  manuscrit  de  la 
Bibliothèque  de  Sainte-Cécile  n'est  pas  d'un 
âge  à  faire  une  foi  entière  et  indubitable;  il 
n'est  que  de  l'an  10G7 ,  indiction  cinquième, 
plus  de  cinq'  cent  trente  ans  après  la  mort 
de  saint  Rémi.  Je  ne  sais  même  si  le  notaire 
Ugolin  a  été  exact  dans  son  certificat.  L'ins- 
cription du  manuscrit  porte  simplement  ', 
que  Rémi  étant  à  Reims  a  expliqué  les  Épl- 
trcs  de  saint  Paul  d'une  manière  claire  et  élé- 
gante. Ce  Rémi  n'est  point  qualifié  évéque. 
Il  faut  donc  entendre  cette  inscription  de 
quelque  autre  écrivain  du  même  nom  qui 
aura  demeuré  eu  cette  ville;  et  on  ne  peut 
mieux raiipliijuer  qu'à  Rémi,  moine  de  Saint- 
Germain  d'Auxerre ,  célèbre  par  plusieurs 
commentaires  sur  l'Ancien  et  le  Nouveau  Tes- 
tament, que  Foulques,  archevêque  de  Reims, 
appela  en  cette  ville  pour  y  enseigner  les  bel- 
les-lettres et  la  théologie  sur  la  fin  du  neu- 
vième siècle.  Villalpand  objecte  que  si  le 
Commentaire  sur  les  Épitres  de  saint  Paul 
était  de  Rémi  d'Auxerre  ou  de  quelque  moi- 
ne bénédictin,  il  aurait,  en  citant  la  Règle  de 
saint  Benoit,  qualifié  ce  saint,  son  maître  ou 
son  père  ,  et  n'aurait  pas  manque;  de  parler 
de  l'état  monastique  en  divers  endroits  où  il 
était  naturel  d'en  parler.  Mais  ces  attentions 
ne  sont  pas  du  goût  de  tous  les  écrivains.  Ils 
savent  témoigner  dans  l'occasion  leur  respect 
pour  leur  législateur,  et  leur  zèle  pour  leur 
état;  mais  ils  ne  rafl'eclenl  point  i\  tout  pro- 
pos. [Les  Commentaires  sur  les  Kpîtres  de 
saint  Paul  sont  reproduits  au  tome  CXXXI, 
col.  47  et  suiv.  de  la  Patroloyie  latine.] 


Bfcfrd., 

XIS. 


Tom. 

EiM. 


Vilt.lpi 

Dm.  «  I 
Plull. 
VU! 
P«t.  pig 


'  Ces  vers  se  trouvent  dans  le  tome  I.XV  de  la 
Patrologic  latine,  avec  l'épitaphe   du  roi   Clovis, 
qu'on  dit  avoir  été  composée  pur  saint  Hémi.  [L'é- 
I     diteur.) 

*  Voyez  Oudinj  Supplem.  ad  Boll.  pag,  135.  Ces 


observations  sont  tirées  dulDictionnaire  de  Felter, 
édition  de  M.M.  Simonin  et  Colloinbel.  ('tVdiïfur.y 
'  Remigius  Rhcuiis  exposuit  Epistolas  sancti 
Pauli  apostoli  scrmone  luculento.  Tom,  VIII  Bibl. 
Pat.,  pag.  888. 


[VI'  SliCLE.] 


CHAPITIIE  m.  —  EUGIPPIUS  ET  FEURAiND. 


85 


CHAPITRE  III. 

Engippins,  abbé  de  Lucullane  [avant  l'an  567],  et  Ferrand,  diacre  de 

Carthage  [vers  l'an  547. J 

[Écrivains  latins.] 


;  o„,  „„,,  1.  Eugippius,  célèbre  dans  l'Église  par  son 
'■vW-'  savoir  et  sa  |)iétii,  fut  d'abord  moine  dans  le 
monastère  de  Saint-Séverin ,  près  de  Favia- 
ues,  dans  la  Noriquo.  Ce  qui  le  piMsiiadc , 
c'est  qu'il  assista  ;\  la  mort  de  ce  saint  abbé 
en  -482  ;  qu'il  accompagna  '  son  corps  lors- 
qu'on le  transporta  eu  Italie  en  188,  et  qu'il 
raconte  diverses  choses  do  lui  dont  il  avait  été 
témoin.  Le  corps  de  saint  Séverin,  après 
avoir  demeuré  dans  le  duché  d'Urbin  jusque 
vers  l'an  493,  fut  porté,  à  la  prière  d'une  da- 
me napolitaiue  nommée  Barbarie,  au  châ- 
teau de  Lucullane,  entre  Naples  et  Pouzoles, 
où  l'on  bâtit  im  monastère  sous  le  nom  de 
Saint-Séverin,  pour  y  loger  ses  disciples, 
qu'Odoacre  avait  transportés  en  Italie  avec 
les  peuples  de  la  Norique,  en  488.  Marcien 
fut,  ce  semble,  le  premier  abbé  de  ce  monas- 
tère, et*  Eugippius  après  lui. 
Il  é«rii  I.       2.  U  arriva  sous  le  consulat  '  d'Imnortunus, 

ris    de    sa:  m  ^ 

'S°T«m  ?  c'est-ti-dire  en  309,  qu'un  laïque  de  qualité 
i.n.p.e,w.  adressa  h  un  prêtre  une  lettre  où  il  faisait  la 
vie  d'un  moine  d'Italie,  nommé  Basilice.qui 
s'était  sanctifié  dans  le  monastère  de  Titas, 
montagne  voisine  de  la  ville  de  Rimini.  Ce 
prêtre  communiqua  cette  lettre  à  plusieurs 
personnes  qui  en  tirèrent  des  copies.  Eugip- 
pius l'ayant  lue,  témoigna  à  quelques  servi- 
teurs de  Dieu  qu'il  ne  fallait  pas  laisser  dans 
l'oubli  les  grandes  actions  de  saint  Séverin. 
Le  laïque  qui  avait  écrit  la  vie  de  Basilice,  in- 
formé des  discours  et  des  désirs  d'Eugippius, 
lui  écrivit  aussitôt  qu'il  était  prêt  d'écrire 
aussi  celle  de  saint  Séverin,  s'il  voulait  lui 
fournir  des  mémoires.  Eugippius  dressa  des 
mémoires,  tant  sur  ce  qu'il  avait  appris  par 
des  témoins  oculaires  ou  digues  de  foi,  que 
sur  ce  qu'il  avait  vu  lui-même;  mais  il  sen- 
tait beaucoup  de  répugnance  à.  confier  une  si 
belle  matière  à  un  homme  du  monde,  qui  en 


la  chargeant  des  ornements  de  l'éloquence 
humaine,  oterait  la  connaissance  des  vertus 
du  saint  àlous  ceux  qui  n'étaiont((ue  peu  ou 
point  instruits  des  h(;lles-lcttros.  Il  pi'it  donc 
le  parti  de  les  envoyer  au  diacre  Paschase 
qui  les  lui  avait  demandés,  uniquement  pour 
les  lire.  Mais,  Eugippius  en  lui  envoyant  ses 
mémoires,  lui  écrivit  une  lettre  que  nous 
avons  *  encore,  dans  laquelle  il  le  priait  d'en 
composer  lui-même  l'histoire  de  saint  Séve- 
rin, sans  écouter  les  sentiments  que  son  hu- 
milité avait  coutume  de  lui  suggérer.  Il  le 
conjurait  par  la  même  lettre  de  ne  point  ou- 
blier dans  cette  histoire  les  miracles  que  Dieu 
avait  opérés,  soit  dans  la  translation  des  re- 
liques du  saint,  soit  à  Lucullane,  disant  qu'il 
pourrait  les  savoir  exactement  d'un  nommé 
Deogratias,  qui  en  était  fort  bien  instruit,  et 
qu'il  lui  envoyait.  Il  remarquait  qu'il  n'avait 
rien  mis  dans  ses  mémoires  qui  pût  faire 
connaître  ni  la  famille,  ni  le  pays  dont  saint 
Séverin  avait  tiré  sa  naissance,  parce  que 
son  humilité  lui  avait  toujours  fait  cacher 
aux  bommes  ce  qu'il  était  et  d'où  il  était  ; 
mais  que  son  langage  faisait  juger  qu'il  était 
né  latin.  Le  diacre  Paschase,  ayant  lu  les  mé- 
moires d'Eugippius,  jugea  qu'ils  étaient  di- 
gnes de  voir  le  jour  en  l'état  qu'il  les  avait 
mis  ;  que  l'éloquence  des  plus  habiles  ne 
pouvait  y  rien  ajouter;  que  le  style  simple 
et  facile,  dont  ils  étaient  écrits,  les  rendait 
bien  plus  capables  d'édifier  l'Église  ;  qu'ainsi 
il  ne  croyait  point  devoir  y  toucher.  Pas- 
chase en  donne  une  autre  raison,  qui  est  que 
l'on  rapporte  toujours  beaucoup  mieux  ce 
qu'on  a  vu  soi-même,  que  ce  qu'on  a  appris 
des  autres,  et  qu'Eugippius  ayant  été  disci- 
ple de  saint  Séverin ,  avait  plus  de  facihté 
que  personne  de  faire  connaître  les  vertus 
de  son  maître  dont  0  avait  éprouvé  la  soli- 


>  Vita  Severinl  apud  Bolland,  ad  diem  octavam       "'  Engipp.  Epist.  ad  Paschas.  Tom.  I  Jan.  Bol- 
januarii.  land.  pag.  184. 

*  Isidor.  De  Scriptor.  Eccles.,  cap.  xm.  »  Jbid. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


gij.flUS, 


dite  par  une  longue  suite  d'années.  Paschase 
prouve  l'ntililé  que  l'on  retire  de  l'histoire 
des  vies  des  saints,  par  l'impression  que  le 
récit  de  leurs  vertus  fait  sur  l'esprit  de  ceux 
qui  l'entendent,  et  par  l'attention  que  saint 
Paul  a  eue  de  faire  aux  Hébreux  un  élog-e 
raccourci  des  grands  bommes  de  leur  na- 
tion. Eugippius  suivit  le  conseil  de  Paschase, 
et  publia  la  vie  de  saint  Séverin  telle  qu'il 
l'avait  écrite,  et  que  nous  l'avons  aujour- 
d'hui. Elle  est  divisée  en  douze  chapitres, 
dont  le  dernier  renferme  l'histoire  de  la 
translation  de  son  corps  de  la  Norique  en 
Italie,  et  depuis  dans  le  monastère  de  Lu- 
cullane.  Les  liollandistes  ont  mis  à  la  tète  de 
cette  Vie  les  deux  lettres  d'Eugippius  et  de 
Paschase.  Elle  avait  été  donnée  avant  eux 
par  Yelsérus  et  par  Surius;  mais  ils  l'ont 
revue  sur  de  nouveaux  manuscrits.  [On  la 
trouve  au  tome  LXIl  de  la  Patrologie  latine, 
col.  H53-1200.]  Nous  l'avons  en  français  de 
la  traduction  de  M.  d'Andilly. 
BiEio  aïii-  3.  Saint  Isidore  '  de  Séville,  qui  parle  de 
cet  écrit  d'Eugippius,  lui  attribue  une  règle 
pour  les  religieux  de  son  monastère,  qu'il 
leur  laissa,  dit-il,  à  sa  mort,  comme  par  tes- 
tament :  uous  ne  l'avons  plus.  Mais  saint  Isi- 
dore ne  dit  rien  du  Recueil  tiré  des  œuvres 
de  saint  Augustin,  dans  lequel  Eugippius 
fait  des  extraits  des  sentiments  et  des  pen- 
sées de  ce  saint  Docteur,  dont  il  a  compo- 
sé un  ouvrage  divisé  en  trois  cent  trente- 
huit  chapitres.  Ce  Recueil  a  été  imprimé  en 
deux  tomes  .'i  Bâle ,  en  1542;  ;\  Venise, 
en  1343,  [et  dans  la  Patrologie  latine,  au 
tom.  LXII,  col.  349-1088,  avec  nue  observa- 
tion de  Basnage  sur  Eugippius].  Il  est  adres- 
sé à  la  vierge  Proba.  Cassiodore  '  et  Sige- 
bert  de  Gemblours  regardaient  cet  ouvrage 
comme  très-utile,  parce  qu'Eugippius  y  avait 
ramassé  ce  qu'on  aurait  eu  peine  de  trouver 
dans  une  bil)liothèque  entière.  Il  paraît  que 
Cassiodore  ne  jugeait  pas  moins  favorable- 
ment les  autres  écrits  d'Eugippius  ' ,  puis- 
qu'il en  conseillait  la  lecture  *,  disant  que, 
quoiqu'il  ne  fût  pas  fort  habile  dans  les  belles- 


'  Isidor.,  De  Scriploribus  eccles.,  cap.  m. 

'  Ca?sii)(i.  De  Divin,  lectionibits,  cap.  xxiii.  Si- 
gcbertus,  De  Scriitlorib.  ecclcsiasl.,  cap.  x.\xix. 

'  Le  Dictionnaire  de  Kellcr  signale  une  Vie  de 
saint  Augustin  deFavian  :ellc  est  inséii^c  daiisHol- 
lauilus  ooninie  étant  l'oeuvre  d'F.iigippiiis;  M.  Mi- 
gne  n'a  pu  trouver  cet  écrit.  fL'c'dilcur.) 

*  Convenu  ul  presbyleri  Eugippii  opéra  neces- 
sario  légère  debealis,  quem  nos  quoque  vidimus, 


lettres,  il  était  bien  rempli  de  la  science  de 
l'Écriture  sainte.  Cassiodore  l'avait  vu,  mais 
il  ne  dit  pas  en  quel  endroit.  Sigebert  dit 
qu'Eugippius  vivait  du  temps  de  Pelage  se- 
cond et  de  l'empereur  Tibère  Constantin, 
c'est-à-dire  vers  l'an  380.  Ce  qui  a  donné  lieu 
de  distinguer  l'Eugippius  dont  il  parle  de 
l'Eugippius  qui  écrivit,  en  5 il,  la  vie  de  saint 
Séverin,  et  qu'Isidore  de  Séville  met  sous 
l'empire  d'Anastase.  Mais  il  est  visible  que 
Sigebert  s'est  trompé,  puisque  Cassiodore, 
qui  avait  vu  l'Eugippius,  auteur  du  Recueil 
des  sentences  de  saint  Augustin,  le  môme  dont 
parle  Sigebert,  était  mort  avant  l'an  567, 
âgé  de  plus  de  quatre-vingt-treize  ans.  Il  est 
donc  inutile  de  distinguer  deux  abbés  du 
nom  d'Eugippius. 

4.  C'est  le  même  qui  a  composé  tous  les  ..^""i-,' 
ouvrages  dont  nous  venons  de  parler,  à  qui  î;„'d'4''Éo5Îj 
saint  Fulgence  adressa  un  traité  en  forme  '  "" 
de  lettre  sur  la  charité,  comme  potu-  le  re- 
mercier des  eulogies  ou  petits  présents  qu'il 
lui  avait  euvoyés,  et  à  qui  Ferrand,  diacre 
de  Carthagc,  écrivit  aussi  sur  l'unité  de  na- 
ture et  d'essence  en  Dieu,  et  sur  les  deux 
natures  en  Jésus-Christ.  On  a  imprimé  la  j„„_  _ 
lettre  de  Ferrand  dans  l'Appendice  des  OEu-  J°l'-'  '"f 
vres  de  saint  Fulgence. 

5.  Ses  autres  lettres  ont  été  imprimées  à 
Dijon,  en  1649,  par  les  soins  du  Père  Chif- 
llet;  et  depuis  dans  le  neuvième  tome  de 
la  Bibliothèque  des  Pères,  à  Lyon,  en  1G77. 
[Dans  Galland,  tome  XI,  pag.  317-398,  et 
dans  la  Patrologie  latine,  tome  LXV,  parmi 
les  Lettres  de  saint  Fulgence,  et  dans  le 
tome  LXMI,  où  l'on  trouve  les  autres  ou- 
vrages de  Ferrand,  d'après  Galland.]  Fer- 
rand se  nommait  aussi  Fulgence.  Victor  de 
Tunes  dit  qu'il  (lorissait  la  sixième  année 
après  le  consulat  de  Basile,  c'est-à-dire  en 
547.  Mais  nous  avons  fait  remarquer  qu'il 
était  en  relation  avec  saint  Fulgence  de  Rus- 
pc,  mort  en  533  ;  cl  il  faut  bien  que,  dès  cette 
année-là,  il  ait  été  en  réputation  de  savoir, 
puisque  ce  fut  à  lui  que  le  comte  Réginon 
s'adi'cssa  pour  apprendre  de  lui  de  quelle 


ùrum  quidem  non  vsqne  adeo  sœcnlnrihus  litleris 
criidiluin;  sed  Scriplurarum  divinnriim  leclione 
plcnissimitm.  Hic  ad  parenlem  noslram  Probam, 
virgincm  sacram,  ex  operibus  sancli  Aiiguslini 
vahie  beatissimi  quiViliones  ac  sentrniius  uc  di- 
versas  rcs  deporans  in  uno  corpore  nercssaria 
iiimis  dispensalionc  collgil,  et  in  trcccntis  Iri- 
genla  octo  capitulis  coUncavit,  Cassiodor.,  De  Di- 
vin, kclion.,  cap.  xxui. 


[vr  SIIX.LE. 


CHAPITRE  III.  —  EUr.IPPIUS  ET  FERRAND. 


87 


irriDd      au 

.11  lu      Hà'  ~ 
B.  Tom.  IX 

t. 


manière  devait  vivre  un  liiunnio  do  guerre  , 
n'ayant  pu  recevoir  d'insiruction  li'i-dessus 
de  sainl  Fulgeucc,  ;\  «jui  il  en  avait  écrit 
quelque  temps  avant  sa  mort. 

C).  Ferrand  tlonne  ;\  R(''L;inon  sept  refiles  ', 
qu'il  ro|::;arde  comme siillisaulcs  pour  rendre 
un  homme  de  guerre  spirituel  et  bon  chré- 
tien '.  La  première  est  de  croire  que  le  se- 
cours de  la  prAcc  de  Dieu  est  ni^cessairc  pour 
chaque  action,  comme  l'Apùlre  le  reconnaît 
lui-même,  lorsqu'il  dit  :  C'est  par  la  grâce  de 
Dieu  que  je  suis  ce  que  je  suis.  La  seconde  , 
de  faire  en  sorte  que  sa  vie  soit  un  miroir 
où  ses  soldats  voient  ce  qu'ils  doivent  faire 
eux-mêmes.  La  troisième  ,  de  ne  pas  souhai- 
ter de  commander  aux  autres  ,  mais  de  leur 
être  utile.  La  quatrième,  d'aimer  la  républi- 
que comme  soi-même.  La  cinquième,  de  pré- 
férer les  choses  divines  aux  choses  humaines. 
La  sixième,  de  n'être  pas  trop  juste,  c'est-à- 
dire  de  ne  pas  exercer  la  justice  avec  trop 
de  sévérité,  mais  de  la  tempérer  par  la  dou- 
ceur et  par  la  miséricorde.  La  septième,  de 
se  souvenir  qu'il  est  chrétien.  Quoique  ces 
règles  soient  claires  par  elles-mêmes,  Fer- 
rand ne  laisse  pas  cependant  de  les  expliquer 
avec  beaucoup  d'étendue.  Il  rappelle  à  la  pre- 
mière, par  laquelle  il  défend  àRéginon  d'at- 
tribuer à  ses  propres  forces  les  événements 
où  il  se  sera  conduit  avec  courage,  avec  sa- 
gesse et  avec  bonheur,  les  sentiments  d'hu- 
milité que  Moïse  tâcha  d'inspirer  au  peuple 
d'Israël,  à  la  veille  d'entrer  dans  la  Terre- 
Promise,  en  ces  termes  :  Ne  dites  pas  dans 
votre  cœur. 'c'est  ma  propre  vertu,  c'est  ma  pro- 
pre puissance  qui  m'a  fait  faire  une  si  grande 
action  ;  mais  vous  vous  souviendrez  du  Seigneur 
votre  Dieu,  parce  que  c'est  lui  qui  vous  donne 
la  force  de  faire  de  si  grandes  choses.  Et  ces 
paroles  du  Prophète  -.C'est  le  Seigneur  qui  ap- 
prend mes  7nains  à  combattre,  et  mes  doigts  à 
faire  la  guerre.  Il  fonde  la  seconde  règle  sur 
ce  que  l'exemple  d'un  chef  d'armée  a  iniîni- 
ment  plus  de  force  pour  porter  les  soldats  à  la 
vertu,  que  son  autorité  et  son  pouvoir.  «  Saint 
Jean-Baptiste ,  dit-il,  n'ordonna  point  aux  sol- 


dats qui  vinient  le  consulter  sur  leur  devoir, 
de  mettre  bas  les  armes  et  d'éviter  les  com- 
bats, de  ne  s'appliquer  qu'à  la  prière  ;  mais 
il  leur  dit  :  N'usez  point  de  violence,  ni  de 
fraude  envers  personne;  et  eonlcntc^vous  de  vo- 
tre paie.  Ces  avis  sont  également  pour  un 
général  d'armée.  Il  faut  qu'il  puisse  dire  à 
ses  soldats  avec  autant  de  vérité  et  de  con- 
fiance que  disait  Sanmél  à  ceux  qu'il  gou- 
vernait :  Me  voilà  présent;  qui  de  vous  peut 
m'accuser  de  lui  avoir  enlevé  son  bœuf  ou  son 
âne,  ou  de  m'étre  servi  de  mon  pouvoir  pour  lui 
nuire  ou  l'opprimer,  ou  de  m'étre  laissé  gagner 
par  des  présents?  Il  tant  aussi  qu'on  lui  répon- 
de, comme  les  Israélites  répondirent  à  ce  pro- 
phète :  Voui  n'avez  nui  à  aucun  de  nous,  vous 
n'avez  opprimé  personne ,  vous  n'avez  rien  reçu  de 
nos  )nai7is.  n  Ferrand  blâme,  dans  l'explication 
de  la  troisième  règle,  les  généraux  d'armée 
qui,  en  fatiguant  les  peuples  par  leurs  exac- 
tions, les  font  succomber,  et  ne  laissent  à 
leurs  successeurs  que  des  gémissements  et 
des  larmes.  Il  veut  donc  qu'ils  aient  égard  à 
la  situation  des  lieux  ;  que  non-seulement  ils 
ne  fassent  tort  à  personne,  mais  qu'ils  em- 
pêchent que  les  autres  n'en  fassent;  surtout 
qu'ils  veillent  à  ce  que  ceux  à  qui  ils  don- 
nent quelque  accès  auprès  d'eux,  ne  vendent 
point  les  grâces.  La  raison  de  la  quatrième 
l'ègle  est  que  Réginon,  en  aimant  la  républi- 
que comme  lui-même,  lui  procurera  autant 
qu'il  sera  en  lui  tous  les  avantages  qu'il  sou- 
haiterait pour  lui-même  :  la  paix,  la  tranquil- 
lité, l'abondance.  Il  rapporte  les  marques 
de  charité  et  d'amour  que  Moïse  et  David 
donnèrent  à  leurs  peuples,  en  demandant  à 
Dieu  de  pardonner  à  ces  peuples,  ou  de  fai- 
re tomber  sa  colère  sur  eux-mêmes.  Sur  la 
cinquième  règle,  il  dit  que  ce  comte  doit  em- 
ployer son  autorité  pour  faire  triompher  la 
foi  catholique;  et,  à  cette  occasion,  il  lui 
adresse  une  profession  de  foi,  où  il  fait  voir 
qu'il  n'y  a  qu'un  Dieu  en  trois  personnes  ; 
que  la  natm-e  divine  est  la  même,  sans  aucune 
ditférence,  dans  le  Père,  le  Fils  et  le  Saint- 
Esprit  ;  que  ce  ^  qui  distingue  les  personnes 


I  nefft  xr. 


31. 

H  Rc^.XLlf, 
17i 


'  Gratiœ  Dei  adjiHorium  tibi  necessarium  per 
actiis  singulos  crede  .  dicens  ciiin  Apostolo :  Gratia 
Dei  sum  id  quod  suru.  2.  Vita  tua  spéculum  sit 
uhi  milites  videanl  quid  agere  debeant.  3.  Non 
prœesse  appelas,  sed  prodesse.  4.  Diligc  rempu- 
blicam  sicut  teipsiim.  5.  Humanis  divinaprœpone. 
6.  Noli  esse  mullum  justus.  7.  Mémento  te  esse 
christianum.  Ferraud.,  Epist.  ad  Reginon.,  tom. 
IX  Bibi  Pat.,  pag.  494. 


^  La  fin  de  cet  Opuscule  a  été  donnée  par  Ang. 
Mai.,  dans  le  Spicilegium  rom.,  tom.  IV,  pag.  573- 
377.  f L'éditeur.) 

2  Ubi  hoc  tantummoJo  recipit  dislinctionem 
quod  ad  invicem  sibi  sunt,  Pater  scilicet  ad  Fi- 
lium,  Filius  ad  Patrem,  Spirilus  Sanctus  ad  eos 
de  quibus  et  cum  quibus  et  spiritîis  et  sanctus 
est,lut  ipse  soins  in  Trinitate  appelletur  Sanctus; 
propriumque  sit  Patris  generare,  proprium  Filii 


HrSTÛIRE  GÉNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


88 

divines,  est  le  rapport  qu'il  y  a  entr'elles,  du 
Père  au  Fils,  du  Fils  au  Père,  et  du  Saint-Es- 
prit au  Père  et  au  Fils  ;  parce  qu'il  est  propre 
au  Pèred'engcndrer,  au  Fils  de  naître,  et  au 
Saint-Esprit  de  procéder  des  deux,  comme 
étant  l'Esprit  du  Père  et  du  Fils;  que  le  Fils  en 
se  faisant  homme  a  tellement  pris  la  vérité  de 
notre  substance,  qu'il  n'a  pas  doublé  la  sin- 
gularité de  sa  personne,  en  sorte  qu'encore 
qu'il  y  ait  deux  natures  en  Jésus-Christ,  il 
n'y  a  qu'une  personne  ;  que  le  Seigneur  Jé- 
sus est  le  même  qui  est  nommé  Fils  dans  la 
Trinité  parfaite,  lorsque  nous  sommes  bapti- 
sés au  nom  du  Père,  duFilsctduSaint-Esprit; 
qu'il  est  en  même  temps  grand  et  petit,  im- 
passible et  passible,véritablement  et  propre- 
ment Fils  de  Dieu  le  Père,  véritablement  et 
proprement  Fils  de  la  Vierge  Marie,  médiateur 
de  Dieu  et  des  hommes  à  cause  des  deux  na- 
tures, dont  l'une  lui  est  commune  avec  Dieu, 
et  l'autre  avec  nous  ;  qu'il  n'a  pas  commencé 
d'être  Dieu  en  naissant  de  la  Vierge,  mais  qu'il 
a  pris  d'elle  une  chair  véritable  ;  qu'il  doit 
venir  juger  les  vivants  et  les  morts,  condam- 
ner les  incrédules,  sauver  ceux  qui  croient, 
si  toutefois   ils  ont  persévéré  dans  l'Eglise 
catholique,  et  s'y  sont  purifiés  de  leur  péchés, 
l'Eglise  '  catholique  étant  le  lieu  où  le  bon 
Médecin  guérit  nos  plaies.  Ferrand  exhorte 
Réginon  à  travailler  à  la  conversion  des  hé- 
rétiques qui  pourraient  se  trouver  dans  son 
armée,  et  à  répandre  les  semences  de  la  vé- 
rité dans  les  pays  où  la  vraie  religion  ne  se- 
rait point  connue,  s'il  se  trouvait  en  guerre 
avec  de  semblables  nations,  ou  qu'il  eût  be- 
soin d'y  conduh'e  ses  troupes  ;  d'être  exact  i 
tenir  sa  parole  et  son  serment,  soit  qu'il  s'a- 
gisse de  faire  grâce  à  l'ennemi,  ou  au  cou- 
pable, ou  d'accorder  aux  siens  la  récompen- 
se ;  mais  d'être  extrêmement  réservé  à  jurer, 
,  suivant  ce  précepte  de  l'Évangile  :  Ne  jurez 
en  aucune  sorte,  contentez-vous  de  dire  :  Cela 
est,  ou  :  Cela  n'est  pas;  de  consulter  en  toutes 
choses  la  sainte  Église;  d'être  obéissant  aux 
prêtres  du  Seigneur,  de  ne  rien  faire  sans 
leur  avis,  et  de  se  conformer  partout  aux 
lois  et  aux  canons  de  l'Eglise.  Il  lui  conseille 
de  suivre  *  les  usages  des  Eglises  où  il  se 
trouvera,  pourvu  qu'elles  professent  la  vraie 


foi,  de  peur  d'ofifenser  les  fidèles  de  ces  lieux 
par  l'obseiTation  de  quelques  rils  sacrés  qui 
leur  soient  inconnus.  La  sixième  règle  porte 
qu'il  ne  faut  pas  être  trop  juste,  c'est-à-dire 
qu'un  chef  ne  doit  par  toujours  sui\Te  la  ri- 
gueur de  la  justice  ;  mais  employer  tantôt  la 
sévérité  en  punissant  le  crime,  tantôt  les  me- 
naces et  quelquefois  le  pardon,  suivant  les 
différentes  circonstances  ;  dissimuler  certai- 
nes choses  ;  tolérer  quelques  abus,  en  punir 
d'autres  légèrement  ;  pardonner  quelques  fau- 
tes à  la  prière  des  prêtres.  «  Une  justice  rigou- 
reuse, dit-il,  rend  terrible  un  général  d'ar- 
mée ;  mais  quand  il  est  sévère  en  tout  temps 
en  et  toute  occasion,  il  ne  fait  que  des  infidè- 
les ;  au  lieu  qu'en  tempérant  la  rigueur  parla 
bonté  il  se  fait  aimer  ;  et  en  se  faisant  aimer 
il  fait  plus  de  bien  à  la  république  qu'en  se 
faisant  craindre.  »  Pour  expliquer  la  septième 
règle  :  Souvenez-vous  que  vous  êtes  chrétien,   il 
fait  un  parallèle  des  préceptes  de  la  loi  an- 
cienne avec  ceux  de  l'Évangile  :  La  loi  défen- 
dait de  tuer,  l'Evangile  défend  même  de  se 
fâcher.  La  loi  permettait  de  haïr  ses  enne- 
mis, l'Évangile  ordonne  de  les  aimer,  et  de 
prier  pour  ceux  qui  nous  persécutent,  ne  nous 
laissant  espérer  le  pardon  de  nos  fautes,  qu'à 
condition  que  nous  les  pardonnerons  à  ceux 
qui  nous  ont  offensés. 

7.  Il  semblait  qu'après  la  lettre  de  saint 
Léon  et  les  décrets  du  concile  de  Chalcédoine, 
l'hérésie  d'Eutychès  était  tellement  abattue, 
qu'il  n'était  plus  nécessaire  de  l'attaquer. 
Cependant  AnatoJius,  diacre  de  l'Église  ro- 
maine, cnL;ai:ea  Feirand  à  la  combattre  de 
nouveau.  Eutychès  niait  que  le  Verbe  eût 
pris  la  nature  humaine  dans  le  sein  de  Ma- 
rie toujours  vierge,  et  en  conséquence  qu'il 
fût  consubstantiel  à  sa  mère  ;  en  sorte  que, 
ne  reconnaissant  point  deux  natures  en  Jésus- 
Christ,  il  en  retranchait  absolument  une.  D  y 
en  avait  d'autres  qui  ne  pouvaient  se  persua- 
der xjiie,  n'y  ayant  qu'une  personne  en  Jésus- 
Christ,  il  fût  composé  de  deux  natures.  Ce  sont 
là  les  deux  erreurs  que  Ferrand  se  propose  de 
réfuter  dans  sa  lettre  à  Anatolius,  qui  est  sans 
date.  «S'il  était  vrai,  dil-il,  comme  le  disent 
les  hérétiques,  que  la  chair  du  Verbe  de  Dieu 
était  étrangère  à  celle  de  la  Vierge,  ce  serait 


ère  de   U 
fS-  602- 


nasci,  proprium  Spiritus  Sancti  de  nlroquc  pro- 
cedere.  Fi'Trumlws,  Epist.  ad  Iteginoii.,.  toiii.  IX 
Bibl.  Palrum.,  jiag.  <fl8. 

'  Calholica  Ecclesia  statio  est  ubi  vulnera  nos- 
ira  bonus  ilcdicus  sanat.  Iliiii.,  p.ng.  499. 


'  Tu  vero,  vir  sapiens,  Ecdesiw  ad  quant  per- 
veneris,  si  approbas  fidcm,  seqiicre  coiisuetudi- 
nem  :  nec  unurpcs  aliquam  sacri  ritus  facere  iw- 
vitatem.  Ibid.,  pag.  500. 


[Vl'  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  HT.  —  EUOn'PIUS  ET  FERRAND. 


8!) 


sans  raison  qno  l'on  assurerait  que  le  Fils  tlo 
Dieu  est  aussi  fils  de  l'iioranie.  Car  coniiueiit 
le  Fils  de  Dieu  serait-il  naturellement  le  lils 
de  riioniiue  s'il  ne  lirait  pas  son  origine  de 
riiouime  ?  Or,  il  ne  tire  pas  son  origine  do 
riuiiume,  si,  conçu  dans  le  sein  virginal  de 
Marie ,  il  n'a  pas  tiré  la  chair  de  la  chair 
même  ?  N'est-il  pas  dit  dans  l'Évangile  que 

jMiT.  ■,  II.  le  Vvrbe  a  été  fuit  chair  1  Si  vous  ujo  deman- 
dez d'où  il  a  ëté  fait  chair,  saint  Paul  vous 
Gai«t,  iT,  répondra  pour  moi  :  Lorsque  tes  temps,  dit  cet 
apôtre,  ont  été  accornplis.  Dieu  a  envoyé  son 
Fils   formé  (finie  femme.  Si  le  Vcrhc  a  éti'  fait 

Bom.i.s.  chair  d'une  femme,  il  est  induhilable  que  la 
chair  du  Verbe  a  été  prise  d'une  femme.  Mais 
poui'quoi  le  même  apûtre  dit-il  que  le  Fils 
de  Dieu  est  né  selon  la  chair  du  sang  de  Da- 
vid ?  Comment  serait-il  de  la  race  de  David, 
s'il  n'était  né  selon  la  chair  de  la  Vierge  Ma- 
rie, qui  était  elle-même  de  la  race  de  David  ? 
De  même  que  Marie  descendait  de  David,  de 
même  Jésus-Christ  tirait  son  origine  de  la 
G  lai  ni,  chair  de  David.  Saint  Paul  dit  encore  que  les 
promesses  de  Dieu  ont  été  faites  à  Abraham  et 
à  sa  race,  c'est-à-dire,  à  l'un  de  sa  race  qui  est 
Jésus-Christ. Quo  peut-on  dire  de  plus  évident, 
de  plus  clair  ?  L'Apôtre  ne  dit-il  pas  que  le 
Christ  est  de  la  race  d'Abraham,  comme  il 
avait  dit  qu'il  est  de  la  race  de  David  A  cause 
de  Marie  sa  mère  ?  C'est  à  ceux  qui  ne  veu- 
lent pas  reconnaître  que  le  Verbe  se  soit  fait 
chair  de  la  chair  de  Marie,  à  nous  apprendre 
comment  le  Christ  est  de  la  race  d'Abraham, 
et  comment  il  a  été  fait  delà  race  de  David.)) 
Ferrand  dit  ensuite  que  la  chair  de  Jé- 
sus-Christ est  entièrement  sainte,  ayant 
été  purifiée  par  son  union  avec  la  divinité, 
en  sorte  que  la  nature  de  notre  chair  se  trou- 
ve dans  la  chair  de  Jésus-Christ,  mais  non 
pas  la  coidpe  de  notre  nature.  Il  montre  qu'il 
était  de  la  justice  de  Dieu  que  l'auteur  de  la 
mort  fût  vaincu  en  Jésus-Christ  par  la  même 
chair  qu'il  avait  surmontée  dans  Adam,  et 
que  cette  chair  qui  était  sans  péché  mourût 
pour  nous  di'livrer  de  nos  péchés.  «  D'où  vient, 
dil-il,  que  saint  Paul,  traitant  du  mystère  de 
l'Incarnation  dansl'Epitre  aux  Hébreux,  dit  : 
ueir.  11  ^^  "^  *'^*^  P"*  rendu  le  libérateur  des  anges, 
"■  mais  de  la  race  d'A  brakam.  C'est  pourquoi  il 

a  fallu  qu'il  p'it  en  tout  semblable  à  ses  frères, 
pour  être  envers  Dieu  un  pontife  compatissant 
et  fidèle  en  son  ministère,  afin  d'expier  les  pé- 
chés du  peuple.  Or  comment  Jésus-Christ  au- 
rait-il pu  être  en  tout  semblable  à  ses  frères, 
s'il  leur  avait  été  dissemblable  en  substance  ? 


Et  comment  pouvait-il  leur  être  semblable 
en  substance,  si  ce  n'est  en  se  faisant  chair 
de  la  chair  mémo  do  Mario?»  Ferrand  mon- 
tre après  cela  que  l'unité  de  personne  dans 
Jésus- Christ  n'emporte  pas  l'uniti;  de  subs- 
tance. <(  11  est,  dil-il,  selon  l'.Vpôtre  médiateur 
de  Dieu  et  des  hommes  ;  il  est  donc  néces- 
saire qu'il  soit  Dieu  et  homme,  n'y  ayant 
point  de  uK'diateur  qu'entre  deux  personnes, 
elles  fonctions  de nii'diateur  étant  de  réunir 
les  personnes  divisées.  S'il  n'y  a  qu'une  na- 
ture en  Jésus-Christ,  elle  lui  est  conAaune 
avec  Dieu  le  Père,  ou  avec  les  hommes  :  car 
elle  ne  peut  être  commune  à  Dieu  et  aux 
hommes.  Or,  Jésus-Cluisl  est  d'une  même 
substance  avec  le  Père,  ou  consubstantiel, 
ainsi  que  parle  le  Concile  de  Nicée  :  il  y  a  donc 
une  substance,  ou  une  nature  en  Jésus-I^.hrist 
qui  lui  est  commune  avec  le  Père.  Mais  pour 
être  médiateur  entre  Dieu  et  les  hommes,  il 
ne  sntlit  pas  qu'il  soit  un  avec  Dieu,  il  faut 
encore  qu'il  soit  un  avec  les  hommes  :  Je  leur 
ai  donné  la  gloire  que  vous  m'avez  donnée,  di- 
sait le  Sauveur  à  son  Père  au  moment  de  sa 
passion,  afin  qu'ils  soient  un,  comme  nous 
sommes  un.  Je  suis  en  eux,  et  vous  en  moi. 
Comment  Jésus-Christ  est-il  dans  le  Père,  et 
comment  est-il  en  nous?  Il  est  dans  le  Père, 
parce  qu'il  n'y  a  qu'une  substance  du  Père 
et  du  Fils  :  il  est  dans  nous,  parce  qu'il  a  pris 
une  substance  de  même  nature  que  la  nôtre. 
On  ne  peut  donc  pas  dire  qu'il  n'y  a  en  lui 
qu'une  substance  :  il  y  en  a  deux,  une  dans 
laquelle  il  est  une  même  chose  avec  le  Père; 
l'autre  dans  laquelle  il  est  une  même  chose 
avec  nous.  »  Les  eutychéens  disaient  qu'il  n'y 
avait  qu'une  nature  en  Jésus-Christ  qui  était 
composée  de  la  divinité  et  de  la  chair:  Ferrand 
pour  montrer  l'absurditéde  cette  réponse,  dit 
qu'il  s'ensuivrait,  ou  que  cette  nature  ne  serait 
pas  la  nature  du  Père,  et  que  dès  lors  on  ne 
pourrait  pas  dire  que  le  Fils  lui  soit  consubs- 
tantiel ;  ou  que  si  c'est  la  nature  du  Père, 
la  Sainte  Vierge  est  non-seulement  la  mère 
du  Fils,  mais  encore  de  toute  la  Trinité. 

8.  Les  ariens  objectaient  ordinairement 
que  si  le  Fils  était  un  avec  le  Père,  il  suivrait 
de  là  que  le  Père  avait  souffert,  et  consé- 
quemment  la  divinité.  Ferrand  répond  avec 
les  catholiques,  que  le  Père  et  le  Fils  sont 
un  en  substance,  et  non  en  personne  ;  qu'il 
n'y  a  qu'une  nature  du  Père  et  du  Fils,  mais 
qu'autre  est  la  personne  du  Père,  et  autre 
la  personne  du  Fils;  que  le  Fils,  en  se  fai- 
sant homme,  a  tellement  pris  la  nature  hu- 


I  Tlmolb.  Il, 


90 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


maine  qu'il  ne  s'est  fait  qu'une  personne  de 
la  chair  et  du  Verbe,  ces  deux  natures  de- 
meurant disting-uécs  l'une  de  l'autre  ;  qu'ain- 
si, ce  n'est  pas  la  Trinité  qui  a  soull'ert,  mais 
le  Fils  seul,  qui  est  né  et  a  soutl'ert  selon  la 
nature  humaine  h  laquelle  il  s'est  uni.  «  Par 
la  naissance  de  la  chair'  en  Jésus-Christ,  dit-il, 
le  nombre  des  substances  a  augmenté  en  lui  ; 
mais  la  singularité  de  la  personne  est  de- 
meurée. D'où  vient  qu'encore  qu  autre  soit 
la  nat^ure  de  la  divinité,  et  autre  la  nature 
de  l'humanité,  il  ne  se  fait  pas  de  la  Trinité 
une  quaternité,  parce  que  la  Trinité  est  des 
personnes,  et  qu'il  n'en  est  demeuré  qu'une 
en  Jésus-Christ.  Il  suit  encore  de  là  que  Jé- 
sus-Christ est  un  et  toujours  un  à  cause  de 
la  singularité  d'une  personne,  qui  en  lui  ne 
peut  être  divisée  ni  sous-di visée,  ni  doublée, 
quoique  nous  croyons  qu'il  est  de  deux  na- 
tures et  dans  deux  natures.    C'est  selon  la 

iMi..  X,  30.    nature  divine  qu'il  dit  :  Mon  Père  et  moi  som- 
mes une  même  chose.  C'est  selon  la  nature  hu- 

joan.  I.  ,  maine  qu'il  dit  :  Mon  Père  est  plus  grand  que 
moi.  Parce  que  le  Fils,  selon  la  divinité,  n'est 
pas  créature',  mais  créateur;  il  est  un  de  la 
Trinité.  Et  parce  que  le  même  Fils  a  bien 
voulu  souflrir  selon  l'humanité,  on  peut  dire 
à  cet  égard,  qu'un  de  la  Trinité  a  soutfert.  » 
Par  où  l'on  voit  que  Ferrand  approuvait  la 
proposition  des  moines  de  Scythie  :  Un  de  la 
Trinité  a  souffert.  Il  croit  que  c'est  la  même 
chose  que  si  l'on  disait  :  Dieu  a  soufl'ert.  Il 
ajoute  que  cette  proposition  ne  renferme  au- 
cune ambiguïté,  parce  qu'il  n'est  personne 
qui  ne  sache  que  c'est  le  Fils  qui  a  souffert, 
ainsi  que  l'Evangile  le  déclaie  partout.  Il  con- 
vient que  l'Apocrisiaire  d'Eutychès  avança 
cette  proposition  dans  le  concile  de  Chalcé- 
doiuc,  et  qu'elle  y  fut  rojelée,  parce  que  les 
Pères  de  cotte  assemblée  firent  moins  d'at- 
tention à  la  proposition  en  elle-même  qu'au 


sens  dans  lequel  cet  apocrisiaire  la  prenait. 
11  donne  trois  raisons  poui-  lesquelles  quel- 
ques-uns doutèrent  de  la  catholicité  de  cette 
proposition.  La  première,  c'est  qu'il  leur  pa- 
rût qu'en  disant  qu'un  de  la  Trinité  a  souf- 
fert, on  distinguait  celui  qui  avait  soutfert  de 
la  Trinité  même,  comme  on  distingue  l'hom- 
me de  la  ville  où  il  demeure.  La  seconde,  de 
peur  que  l'on  ne  ciùt  que  la  substance  mê- 
me de  la  divinité  pût  devenir  passible.  La 
troisième,  dans  la  crainte  qu'un  sophiste,  qui 
demanderait,  quel  est  celui  de  la  'l'rinité  qui 
a  soutfert,  et  à  qui  on  répondrait:  C'est  le  Fils, 
n'en  inférât  de  cette  réponse,  ou  que  la  Trini- 
té est  une  trinifé  de  Fils,  ou  qu'il  est  le  Fils 
de  la  Trinité.  Il  fait  voir  que  ceux  qui  crai- 
gnaient qu'en  reconnaissant  Marie  pour  véri- 
tablement et  proprement  mère  de  Dieu,  on 
ne  fut  obligé  de  dire  qu'elle  était  consubs- 
tantielle  à  la  divinité,  craignaient  sans  fonde- 
ment, parce  que  celui  qui  naît  est  toujours 
consubstantiel  à  la  personne  de  qui  il  naît, 
et  que  le  Verbe  ayant  pris  de  Marie  une  sub- 
stance par  laquelle  il  lui  est  consubstantiel, 
c'est  ainsi  qu'il  est  né  d'elle.  On  peut  dire 
que  Marie  a  engendré' la  divinité  du  Fils, 
mais  incarnée,  parce  que  l'homme  mortel  ne 
pourrait  engendrer  la  divinité  éternelle  sans 
la  chair.  Mais  si  l'on  se  contente  de  dire  que 
Marie,  toujours  vierge,  a  proprement  engen- 
dré l'humanité,  et  non  pas  la  divinité,  il  pa- 
raîtra en  quelque  manière  qu'elle  a  engen- 
dré un  pur  homme  ;  qu'elle  n'a  pas  néan- 
moins engendré  de  cette  sorte,  puis  qu'elle 
a  engendré  proprement  le  Verbe  fait  chair. 
Il  faut  donc  confesser  que  Marie  est  vérita- 
blement la  mère  de  Dieu-Christ,  pour  ôter 
tout  soupçon  sur  la  réalité  de  la  chair  en 
Jésus -Christ.  Ferrand,  après  avoir  détruit 
l'hérésie  des  eulychéens,  revient  à  la  propo- 
sition des  moines  de  Scythie  :  Un  de  la  Tri- 


'  Crevit  ergo  per  nativitatem  carnis  in  Christo 
numerus  substanliarum,  singularilas  vero  per- 
sonœ  perseveravit.  hicirco  quannis  alia  sit  na- 
tura  divinilatis,  alia  humaiiitnlis,  non  sil  Irini- 
las  illa  qualernitas  ;  quia  personanim  est  trini- 
tas,  quœ  in  Christo  una  permansit.  Unus  est 
proinde  Ckrislus  et  semper  unus  propler  unius 
personœ  singularitalem,  qua-in  eo  nec  dividi,  nec 
subdividi,  nec  duplicari  polesl,  quamvis  ex  dua- 
bus  et  in  dunbus  credatur  esse  naturis.  Ferraud., 
Epist.,  ad  Anatol.,  Tom.  IX  Bibl.  l'ai.,  pag.    505. 

«  Fihus  ergo  secundum  divinilatem,  quia  non 
est  creatura  sed  creator,  unus  est  de  Trinitatc;  et 
quia  ipse  secundum  Itumanilalem  dignatus  est 
pâli,  propler  hoc  unus  de  Trinitatc  dicitur  passus. 


Taie  est  itaque,  qu-anlum  credo  :  Vnui  est  de  Tri- 
nitatc passus,  quale  est  dicere  :  Deus  est  passus. 
Ibid. 

'  lia  igitur  proprie,  sicut  veraciler.  Maria 
divinilatem  Filii  genuit,  sed  incarnatam  :  sine 
carne  enim  divinilatem  sempiternam  generare 
non  posset  homo  mortalis...  Si  dixero:  Maria 
semper  virgo  prnphe  genuit  humanitutem,  non 
proprie  genuit  divinilatem  ,  videbilur  suh  aliquo 
modo  honiineni  purutn  genuisse  quem  nullo  modo 
ita  gcnuil  quia  Yerbum  carnem  factum  proprie 
genuit.  Recte  ergo  dicimus  :  Maria  reraciter  est 
mater  Dei  Cliristi,  ut  non  essel  suspicio  phanla- 
siœ.  Fcrraud.,  ibid.,  pag.  508. 


[vi"  SIKCI.E.]  CnAPITRE  m. 

nitc  a  soii/p'vt.  Il  voiil  qu'avant  de  l'avancor, 
on  reconnaisse  qu'en  Dieu  il  n'y  a  qu'une 
nature  et  trois  personnes,  dont  une,  savoir 
le  Fils,  sans  cesser  d'cMre  Dieu,  s'est  fait 
lioninie,  est  ne',  et  a  soull'crt;  que  l'on  con- 
fesse que  le  Fils  ait  soull'ert  dans  la  nature 
qu'il  a  prise  de  sa  mère  seul  et  sans  le  Père 
et  le  Saint-Esprit;  et  non  pas  dans  la  nature, 
selon  laquelle  il  est  Dieu,  et  un  avec  le  Pî-rc 
et  le  Saint-Esprit;  que  l'on  ne  peut  dire  que 
la  divinitd  du  Fils  ail  souffert,  parce  que  c'est 
sa  chair  qui  a  soull'ert,  et  que  celle  cliair  ap- 
partient i\  la  personne  du  Fils,  qui  n'est  point 
commune  au  Père  ni  au  Saint-Esprit.  Il  veut 
que  l'on  confesse  encore  qu'il  y  a  deux  na- 
tures en  Jésus-Clirist,  et  que  l'on  fasse  pro- 
fession de  suivre  les  décrets  du  concile  de 
Chalcédoine  et  la  doctrine  de  la  lettre  de  saint 
Léon,  en  ajoutant  que,  par  l'incarnation  du 
Fils  de  Dieu,  la  Trinité  n'a  pasausmenté  en 
personnes,  parce  que  la  personne  du  Fils  est 
demeurée  dans  sa  singularité  après  l'union 
de  la  nature  divine  avec  l'humaine.  A  l'égard 
de  celui  qui  avancerait  que  la  bienheureuse 
Marie  a  proprement  engendré  Dieu,  Ferrand 
demande  qu'il  confesse  auparavant  que  la 
divinité  du  Fils  de  Dieu,  déjà  née  du  Père, 
n'a  pu  naître  proprement  qu'en  prenant  une 
chair  humaine  et  une  àme  raisonnable,  c'est- 
à-dire  l'homme  entier  et  parfait;  et  que  cette 
naissance  temporelle  n'a  point  donné  le  com- 
mencement à  la  divinité,  mais  à  la  chair,  qui 
n'a  commencé  d'être  qu'en  commençant 
d'être  unie  à  la  divinité. 
u-ue  «u  9.  Nous  n'avons  pas  en  entier  la  lettre  que 
JïSs^ajS'  Ferrand  écrivit  à  l'abbé  Eagippius  '.  Il  éta- 
blit, dans  ce  qui  nous  reste,  l'unité  de  sub- 
stance en  Dieu  et  la  trinité  des  personnes, 
en  opposant  sur  ce  sujet  la  croyance  des  ca- 
tholiques aux  erreurs  des  ariens.  Il  montre 
aussi  contre  les  nestoricns  qu'il  n'y  a  en  Jé- 
sus-Clu'ist  qu'une  seule  personne  de  Dieu  et 
de  l'homme,  et  contre  les  eutychéens,  que 
les  deux  natures,  la  nature  divine  et  la  na- 


EUGIPPIUS  ET  FEIIFIAND. 


91 


turc  humaine,  sulisistcnt  depuis  leur  union. 
iO.  Il  traite  la  môme  matière  dans  la  let- 
tre qu'il  écrivit  à  Sévère,  scholastiqiic  ou 
avocat  h  Couslanlinople.  Après  avoir  rap- 
porté les  erreurs  des  sabelliens  et  des  ariens 
sur  la  Trinité,  il  propose  la  croyance  de  l'É- 
glise apostolique,  disant  qu'elle  confesse 
contre  Sabellius,  trois  personnes  en  Dieu,  et 
coulre  Arius,  une  seule  substance  ou  nature, 
n  montre  aussi  que  Jésus-Christ  est  vérita- 
blement Dion,  et  pour  prouver  qu'il  n'y  a  en 
lui  ([u'une  seule  personne,  il  ;illègue  la  forme 
du  ba[)téme,  et  fait  ce  raisonnement  :  «  Si  la 
personne  do  Dieu  et  de  l'homme  en  Jésus- 
Christ  n'est  pas  une  et  la  même,  quelle  est 
donc  la  personne  que  l'on  nomme  dans  le 
baptême,  lorsque  l'on  nomme  le  Fils?  S'ils 
disent  que  c'est  la  personne  du  Fils  de  Dieu, 
comme  ils  ne  confessent  pas  que  le  Fils  de 
l'homme  soit  le  même  que  le  Fils  de  Dieu, 
il  suit  de  là  que  la  grrice  du  Médiateur  est 
ôtée  du  sacrement  du  baptême,  et  que  notre 
réconciliation  ne  se  fait  pas  dans  ce  sacre- 
ment, puisqu'elle  ne  peut  se  faire  sans  le 
Médiateur.  S'ils  disent  que  c'est  la  personne 
du  Fils  de  l'homme  cpje  l'on  nomme  dans  la 
forme  du  baptême,  ce  ne  sera  donc  pas  au 
nom  de  la  Trinité  que  nous  serons  baptisés, 
puisqu'on  ne  peut  pas  dire  que  la  Trinité  soit 
nommée  où  l'on  ne  nomme  pas  la  personne 
du  Fils  de  Dieu,  mais  seulement  celle  du  Fils 
de  l'homme.  »  Ferrand  rapporte  un  grand 
nombre  de  passages  qui  prouvent  qu'en 
Jésus-Christ  il  n'y  a  qu'une  seule  personne, 
quoiqu'il  y  ait  deux  natures.  «  Il  est  dit,  dit- 
il  ,  dans  saint  Jeao  :  Personne  nest  monté  au 
ciel  que  celui  qui  est  descendu  du  ciel,  savoir  le 
Fils  de  l'homme,  qui  est  dans  le  ciel.  Com- 
ment cela  se  peut-il  faire,  si  ce  n'est  pas  la 
même  personne  qui  est  descendue  du  ciel, 
et  qui  y  est  montée  ?  On  voit,  par  le  psaume 
Cix,  que  Jésus-Christ  est  Fils  de  David,  et 
Seigneur  de  David.  Cela  fait  voir  clairement 
qu'il  n'y  a  en  Jésus-Christ  qu'une  personne, 


Ldltro  i  S«. 
v^rn  Kclinla*. 
1lr{iie  h  Coni- 

lnntfno{il6. 
lOJ.HOO. 


Joan.  m,  13, 


'  Angélo  Ma'i  a  retrouvé  celte  Épître  et  l'a  p\i- 
bliée  dans  le  3=  volume  Scriptor.  veter.,  pag.  169- 
185.  Ferraod  j- expose  d'abord  nettement  l'iiérésie 
arienne  qu'il  réfute  en  détail, tandis  qu'il  y  combat 
sommi'.rement  plusieurs  autres  hérésies,  celles  des 
photiniens,  des  manichéens,  des  patripassiens,  des 
nestorieus,  des  eutychéens, dont  l'erreur  venait  de 
naître.  11  nous  fait  connaître  incidemment,  uu  nom- 
mé Adveutitius.  Celui-ci  avait  envoyé  un  discours 
arien  à  saint  Augusiin,  qui  en  fait  une  longue  ré- 
futation. Ferrand  rappelle  de  nouveau  que  le  Saint- 


Esprit  procède  du  Père  et  du  Fils;  il  dit  à  la  fin  de 
sa  lettre  que  Jésus-Christ,  le  Prêtre  éternel,  a  lui- 
même  enseigné  à  son  Église,  à  offririons  les  jours 
le  sacrifice  de  la  messe  pour  les  vivants,  pour  les 
morts  et  en  mémoire  des  martyrs.  Voici  ce  pas- 
sage ;  Christits  Ecclesiam  siiam  docuit  in  quoli- 
dianis  sacrificiis  hanc  custodire  regulatii  ut  pro 
peccaioribus  sive  adhuciu  terra  laboranlibus,  si- 
ve  jam  de  sœculo  recedenlibus  orationem  faciat, 
pro  martyribus  vero  gratiarum  déferai  actio- 
nem.  Ibid.,  pag.  183.  [L'éditeur.) 


92 


HISTOIRE  GÉNER.\LE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


autrement  il  ne  pourrait  être  en  môme  temps 
Fils  de  David  et  Scia^neur  de  David.  »  De  tous 
ces  passages  Ferrand  conclut  que  le  Verbe, 
en  se  faisant  chair  ',  a  uni  les  natures  et  n'a 
pas  doublé  la  personne  ;  qu'il  a  uni  les  na- 
tures de  façon  qu'elles  ne  sont  point  con- 
fondues et  ne  le  seront  jamais,  en  sorte  que 
la  divinité  n'a  point  été  changée  en  l'huma- 
nité, ni  l'humanité  absorbée  par  la  divinité; 
mais  que  chaque  nature,  demeurant  en  son 
entier,  faisait  les  fonctions  qui  lui  étaient 
propres,  se  faisait  connaître  par  ses  œuvres, 
et  était  appelée  de  son  nom,  sans  être 
distinguée  personnellemeut.  Il  combat  ceux 
qui  ne  reconnaissaient  qu'une  seule  na- 
ture en  Jésus-Christ,  depuis  l'union  de  la 
nature  divine  avec  la  nature  humaine.  Il 
montre,  par  l'exemple  de  l'homme,  qu'un 
composé  de  deux  natures  peut  bien  avoir  un 
nouveau  nom,  sans  que  les  deux  natures 
soient  confondues,  l'âme  spirituelle  de  l'hom- 
me n'étant  point  confondue  avec  son  corps, 
et  ces  deux  natures  étant  distinguées  l'une 
de  l'autre  depuis  leur  union.  «  S'il  n'y  a, 
ajoute-t-il,  qu'une  nature  en  Jésus-Christ,  ou 
elle  est  répandue  partout,  ou  elle  est  dans 
un  lieu  fixe  et  déterminé.  On  ne  peut  pas 
dire  qu'elle  soit  répandue  partout,  puisqu'il 
est  dit  que  Jésus-Christ  ressuscita  le  troisiè- 
me jour  d'entre  les  morts,  et  qu'il  monta  au 
ciel.  On  dira  encore  moins  qu'elle  est  fixée 
à  un  certain  lieu,  puisque  Jésus-Christ,  qui 
est  la  sagesse  de  Dieu,  pénètre  en  cette  qua- 
lité, et  remplit  tout  par  l'immensité  de  son  es- 
sence, disposant  tout  avec  douceur;  et  que, 
lorsqu'il  se  sépara,  selon  la  chair,  de  ses  dis- 
ciples, il  leur  promit  d'être  avec  eux  jusqu'à 
la  consommation  des  siècles.  Jésus-Christ  est 
doncpai'tout,  comme  Verbe  de  Dieu,  mais  il 
n'est  pas  partout  comme  homme,  c'est-à-dire 
selon  son  âme  raisonnable  et  sa  chair,  avec 
lesquels  il  est  un  tout.  » 

H .  Pelage  et  Anatolius,  diacres  l'un  et  l'au- 


tre de  l'Église  romaine,  informés  de  la  con- 
damnation des  trois  chapitres  dans  le  con- 
cile de  Constantinople,  écrivirent  à  Ferrand 
pour  le  prier  de  leur  marquer  ce  que  l'on 
devait  penser  sur  cette  atlaire,  après  qu'il 
en  aurait  délibéré  avec  l'évéque  de  Carthage 
et  les  autres  évêques  les  plus  éclairés  de 
l'Afrique.  11  paraît  qu'ils  ne  doutaient  pas 
que  la  condamnation  des  trois  chapitres 
n'eût  été  faite  par  la  suggestion  des  acé- 
phales contre  le  concile  de  Chalcédoine,  et 
la  lettre  de  saint  Léon.  Ferrand  fut  assez 
longtemps  sans  leur  faire  de  réponse;  mais, 
voyant  que  les  évêques  d'Afrique  ne  se  dé- 
claraient point,  il  répondit,  en  son  propre 
nom,  (ju'il  ne  lui  paraissait  '  point  expédient 
de  blâmer  ce  qu'avaient  fait  les  évêques  as- 
semblés à  Chalcédoine,  ni  d'examiner  de  nou- 
veau la  lettre  d'ibas,  qu'il  croyait  y  avoir 
été  approuvée,  de  pour  qu'en  formant  quel- 
que doute  sur  les  décrets  d'un  concile  reçu 
sans  aucune  difficulté  dans  toutes  les  Églises 
d'Orient  et  d'Occident,  il  ne  perdît  tout  à 
coup  son  autorité,  et  que  fous  ses  décrets 
touchant  la  foi  ne  fussent  révoqués  en  dou- 
te. «Tout  ce  qui  a  été  une  fois  arrêté,  dit-il, 
dans  le  concile  et  l'assemblée  des  saints  Pè- 
res, doit  toujours  demeurer  ferme  et  stable.  » 
Il  compare  l'Eglise  catholique  à  une  fontaine 
scellée,  qui  ne  peut  jeter  par  une  môme  ou- 
verture de  l'eau  douce  et  de  l'eau  amère,  et 
qui  conséquemment  n'a  pu,  par  la  bouche 
de  ses  évêques,  proférer  des  définitions  de 
foi,  et  approuver  dans  Ibas  une  doctrine 
contraire  :  «Ce  qu'elle  aurait  fait,  ajoute-t-il, 
si  la  lettre  de  cet  évêque  avait  été  favorable  à 
l'hérésie  de  Xestorius;  puisque,  non-seule- 
ment cette  lettre  n'a  pas  été  '  condamnée 
dans  le  concile  de  Chalcédoine,  mais  qu'elle 
y  a  été  reçue.  A[)pliqucrons-nous  à  nos  Pères 
cette  maléiliclion  du  Prophète  :  Malheur  à 
vous  qui  donne:  aux  ténèbres  le  nom  de  lumiè- 
re. On  dira  peut-être  que  leiu-  foi  était  or- 


lip*  et  1  Antl 


'  Carnem  suscipifiido  naluras  aditnavit,  non 
personam  duplicarii.  ?iaturas  plane  adumivil, 
sine  confusione  pcrmancnles,  et  in  sœcula  per- 
mnnsurœ.  Sic  eniin  adiinttvil,  ul  nec  divinilas  in 
humanilatem  mutarelur,  nec  humanitas  a  divi- 
nitntc  absorberelur ;  sed  ulraque  iidiuraincolu^ 
mis  custixlila  suis  offlciis  ulerelur,  suis  optribus 
agnosceretur,  suis  nominibus  rocarelur  :  verum- 
tamen  personis  propriis  von  di^tinguerelur. 
Epist.  ad  Sevfruiii,  pas.  511. 

'  Non  expedil  anliquorum  Palrum,  qui  Chalcc- 
dnnensi  noscunlur  interfuisse  concilio,  vilupe- 
rari  deliberalionem ,  relraclarijiidiciuni,  muUiri 


senlenticim,  ne  Synodus  venerabilù!  apud  omnes 
Ecclcsias  Oricnlis  eC  OccidenUs  ptr  annos  lam 
plurimos  sine  aliqua  dubitatione  /irmata,  perdal 
subito  rererentiam  xuam:  nec  possil  in  dejinilio- 
nibus  /idei  robur  inflcxibile  custodire,  si  cvrperit 
ex  âliqua  parle  fragilis  uul  reprelicnsione  digna 
conrinci  :  quidquid  scmel  slaluilur  in  concilio  el 
congrcgatione  sanctornm  l'utrum,  perpétuant  de- 
bel  oblinerc  jugiter  firmilatem.  Episi.  ad  l'elag., 
pag.  515. 

'  Epistolam  damnare  notuerunt,  imo  etiam 
suscipere  volucrunt.  rurrand.,  Epist.  ad  Pelag., 
pag.  515. 


[VI"  SIÈCLE.] 

thodoxe,  mais  qu'ils  ont  rpçn  mal  .'i-propos 
la  Icllro  d'Ibas;  mais  (jui  pciil  soiiUVir  une 
somlilahle  ri'[)orisi'?  Oiic  leur  aurait-il  servi 
d'anallK'inatiscr  Ncstorins  et  Eutycli6s,  s'ils 
avaient  reçu  une  lettre  qui  fill  favorable  aux 
blaspliùmcs  de  Nestorius?  S'ils  l'ont  rerue 
par  i;::nnranoe,  c'est  une  faute  qui  ne  va  pas 
moins  (ju'à  aucanlir  leur  nutorili'.  Mais  s'ils 
l'ont  reçue  avec  connaissance  de  cause,  et 
pensant  toutefois  le  contraire  de  cette  let- 
tre, ils  se  sont  rendus  coupaltles  du  crime  de 
fiction,  et  donneront  occasion  aux  ennemis 
de  la  foi  de  lus  accuser  d'avoir  favorisé  l'er- 
reur de  Nestorius,  en  même  temps  qu'ils  la 
condamnaient.  »  Ferrantl  soutient  donc  qu'il 
n'y  a  en  ni  ignorance  ni  dissinudalion  A  l'é- 
gard de  la  lettre  d'Ibas,  et  que,  n'y  aj-ant  au- 
cune partie  du  concile  de  Chalcédoine  digne 
de  repréhension,  on  doit  regarder,  comme 
l'ouvrage  du  Saint-Esprit,  tout  ce  qui  s'y  est 
passé.  Il  représente  les  évêques  de  ce  con- 
cile sortant  de  leur  tombeau  au  jour  de  la 
résurrection,  et  demandant,  en  présence  de 
Dieu,  à  ceux  qui  rejetaient  la  lettre  d'Ibas, 
<iuelles  raisons  ils  avaient  de  ne  la  point  re- 
cevoir comme  catholique.  «Serait-ce,  dit-il, 
parce  que  le  vénc'rable  Ibas  a  blâmé  saint 
("<yrilled'Alexaudrie?Mais  le  même  Ibas  a  fait 
connaître  qu'il  avait  depuis  communiqué  avec 
saint  Cyrille.  S'il  était  répréhensible  pour 
avoir  mal  parlé  de  saint  Cyrille,  n'est-il  pas 
digne  de  pardon  pour  s'être  réconcilié  avec 
lui?  Si  l'évêque  d'Édesse  et  les  autres  évêques 
orientaux  ont  censuré  les  chapitres,  ou  ana- 
thématismes  de  saint  Cyrille,  parce  qu'ils  ne 
les  entendaient  pas,  c'est  un  efl'et  de  l'infir- 
mité humaine  ;  mais  en  recevant  ces  chapi- 
tres, lorsque  saint  Cyrille  les  eut  expliqués, 
ils  ont  donné  des  marques  d'une  charité  vrai- 
ment sacerdotale,  sans  porter  aucun  préju- 
dice à  la  vérité.  S'il  y  a  quelques  endroits 
.dans  la  lettre  d'Ibas,  qui,  à  cause  de  leur 
obscurité,  semblent  contraires  aux  règles  de 
la  vraie  foi,  on  doit  s'en  rapporter  à  nous 
qui  avons  été  plus  en  état  que  personne  d'en 


CHAPITRE  m.  —  EUr.lPPIUS  ET.FEnRAND. 


«j;j 


bien  prendre  le  sens,  l'ayant  appris  de  la  bou- 
che nièuie  (le  celui  qui  a  dicte''  la  lettre.  J']n- 
fin  (]uelle  raison  aurions-nous  de  croire  que 
cette  lettre  puisse  favoriser  Nestorius,  dont 
l'auteur  a  anathématisé  de  vive  voix  cette 
hérésiarque  en  notre  présence ,  par  notre 
ordre,  et  de  manière  que  nous  l'avons  ouï? 
Il  a  de  plus  reçu  la  lettre  de  saint  Léon,  et 
il  a  souscrit  avec  nous  à  la  confession  de  la 
vraie  foi.  »  Forrand  ajoute,  que  si  l'on  croit 
que  l'erreur  de  Nestorius  soit  cachée  dans 
la  lettre  d'Ibas,  cela  ne  peut  nuire  ni  aux 
grands,  ni  aux  petits,  puisque  l'erreur  de 
Nestorius  fut  condamnée  publiquement  dans 
le  concile  de  Chalcédoine  ;  qu'on  ne  peut  non 
plus  alléguer,  pour  rejeter  cette  lettre,  les 
différents  d'Ibas  avec  saint  Cyrille,  puis  qu'ils 
se  sont  réconciliés  depuis,  et  qu'ils  sont  morts 
dans  la  communion  l'un  de  l'autre,  et  qu'en- 
suite de  leur  léconciliation,  Ibas  et  tous  les  au- 
tres évoques  orientaux  ont  été  renvoyés  dans 
leurs  sièges,  en  présence  de  l'empereur  Mar- 
cien,  et  du  Siége-Apostolique  '  qui  a  la  pri- 
mauté dans  toute  l'Kglise,  représenté  par  ses 
légats.  «Qu'est-ce  qui  sera  stable  ',  dit  Fer- 
rand,si  ce  que  le  concile  de  Chalcédoine  a  éta- 
bli est  révoqué  en  doute  ?  »  Il  cite  un  endroit  de 
la  lettre  de  Capréolus,  évéque  de  Carthage, 
à  l'empereur  Théodose,  et  une  autre  de  celle 
qu'il  écrivit  au  concile  d'Éphèse,  où  il  dit  qu'il 
n'y  aura  plus  rieu  de  stable  daus  les  choses 
divines  et  humaines,  si  l'on  examine  de  nou- 
veau ce  qui  a  été  décidé  depuis  longtemps 
dans  les  assemblées  des  évoques.  Il  avoue 
que  s'il  y  avait  eu  quelque  accusateur  de  la 
lettre  d'Ibas  dans  le  concile  de  Chalcédoine, 
il  aurait  peut-être  pu  '  appeler  du  jugement 
du  concile.  Mais  à  qui?  Il  n'y  avait  point  de 
juge  supérieur  dans  l'Église  ,  puisque  cet 
accusateur  avait  eu  devant  ses  yeux  les  lé- 
gats du  Siége-Apostolique,  avec  le  consente- 
ment duquel  tout  ce  que  ce  concile  a  défini 
doit  passer  pour  irrévocable,  comme  étant 
d'une  force  et  d'une  autorité  invincible.  Il 
ajoute,  que  si  l'on*  rétractait  ce  qui  avait 


*  Ibi  fuit  in  legalih  suis  Sedes  Apostolica,  pri- 
matum  tenens  universalis  Ecclesiœ.  IbiJ.,  pag.  516. 

*  Quid  erit  firmum,  si  quod  statuit  Chalcedo- 
nense  concilium  vocalur  in  ditbium  ?  Ibid. 

^  Si  tune  aliquis  accusator  Epistolœ,  cujus  ca- 
tholica  esse  dictatio  claruit,  ad  majora  judicia 
provocaret,  appellationi  forsilan  sccunduin  con- 
siietudinem  locns  pateret.  Sed  quo  irel  ?  Àut  ubi 
majores  reperiret  in  Ecclcsia  judices  ?  Ànle  se  ha- 
bens  in  legatis  suis  Àpostolicam  Sedem,qua  con- 


Sentiente,  quidquid  illa  deflnivit  eynodus ,  accepit 
robur  invictum-  Ibid.,  pajr.  316. 

*  Haheo  dicere  :  Si  relractenlur  ChalcedonensiS 
concilii  décréta,  de  Mcœna  synodo  cogitemus  ne 
simile  detrimentum  patiatur.  Universalia  conci- 
lia, prœcipue  illa  quibus  romance  Ecclesiœ  cojl- 
sensus  accessit,  secundœ  auctoritatis  locum  posl 
canonicos  libres  tenent.  Sicut  legentibus  Scriptii- 
ram  divinitus  inspiratam  non  licet  aliquid  repre- 
hendere,  quamvis  minime  valeant  altitudinem  cas- 


94 


HlSTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


élë  statue  dans  le  concile  de  Clialcédoinc,  il 
était  à  craindre  que  l'on  n'en  fit  autant  à 
ré},'ard  du  concile  de  Nicée;  que  les  conciles 
généraux,  ceux-hï  surtout  que  l'Eglise  ro- 
maine a  approuvés,  ont  une  autorité  que 
l'on  peut  appeler  la  seconde  après  celle  des 
livres  canoniques;  que  comme  il  n'est  pas 
permis  à  ceux  qui  lisent  l'tïcriturc  divinement 
inspirée,  d'y  reprendre  quelque  chose,  quoi- 
qu'ils ne  puissent  pas  pénétrer  la  profondeur 
des  oracles  célestes  :  de  même  il  n'est  per- 
mis à  personne  de  douter  de  la  vérité  des 
décisions  des  conciles,  confirmées  par  l'an- 
tiquité et  observées  par  la  postérité,  ni  de  re- 
fuser de  leur  obéir.  Il  continue  ainsi  :  «  Que 
sert-il  d'être  '  en  dispute  avec  les  morts,  ou  de 
ti'oubler  l'Église,  à  cause  des  morts?  Si  quel- 
qu'un claut  encore  en  vie  est  accusé  et  con- 
damné, et  qu'il  vienne  à  mourir  avant  d'avoir 
mérité  d'être  absous,  il  ne  peut  plus  être 
absous  par  le  jugement  des  hommes.  Au 
contraire  celui  qui  ayant  été  accusé  et  en- 
suite absous,  est  passé  au  Seigneur  dans 
la  paix  de  l'Église,  il  ne  peut  plus  être  con- 
damné par  le  jugement  des  hommes.  Ce- 
lui qui,  étant  accusé,  meurt  dans  le  sein  de 
l'Eglise,  avant  que  sa  cause  ait  été  exami- 
née par  les  évéques ,  il  doit  être  censé  ré- 
servé pour  le  jugement  de  Dieu,  de  manière 
qu'aucun  homme  ne  puisse  prononcer  une 
sentence  contre  lui.  Si  Dieu  lui  fait  donc 
miséricorde,  notre  sévérité  ne  pourra  lui 
nuire  ;  et  si  Dieu  lui  a  préparé  des  supplices, 
l'indulgence  dont  nous  usei'ons  à  son  égard 
ne  lui  servira  de  rien,  n  Ferrand  insistant 
sur  ces  paroles  de  saint  Paul  :  Ne  vous  élevez 
point  au-delà  de  ce  que  vous  devez  dans  les  sen- 
timents  que  vous  avez  de  vous-mêmes,  mais  te- 
nez-vous dans  les  bornes  de  la  modération,  dit 
qu'il  peut  être  permis  ii  des  particuliers  de 
dire  et  d'éci'ire  leurs  iieutiments,  tandis  qu'ils 


prêchent  la  vraie  foi  ;  mais  qu'ils  ne  doivent 
pas  obliger  les  autres  î\  les  signer,  ni  à  les 
embrasser  avec  une  soumission  aveugle  ;  que 
les  saints  docteurs  de  l'Église  à  qui  Dieu  ,  de- 
puis les  apôtres,  a  donné  le  talent  d'ensei- 
gner les  catholiques,  et  de  combattre  les  hé- 
rétiques, nous  ont  laissé  leurs  écrits,  sans  les 
avoir  fait  souscrire  de  personne  ;  que  c'est 
un  privilège  réservé  aux  livres  canoniques 
et  aux  décrets  des  conciles  généraux,  de  n'ê- 
tre ni  réfutés  ni  rejetés  de  personne,  mais 
d'être  embrassés  et  reçus  de  tout  le  monde. 
La  conclusion  de  la  lettre  de  Ferrand  est, 
que  l'on  ne  doit  admettre  aucune'  révision 
du  concile  de  Chalcédoine,  ni  des  autres  con- 
ciles semblables,  et  qu'il  faut  observer  en 
entier  ce  qu'ils  auront  décidé  ;  il  défend  d'ac- 
cuser les  morts,  de  susciter  à  leur  occasion  des 
disputes  entre  les  vivants  ;  et  il  veut  que  per- 
sonne ne  puisse  donner  à  ses  propres  écrits, 
en  obligeant  les  autres  d'y  souscrire,  une 
autorité  que  l'Église  catholique  ne  donne 
qu'aux  seuls  livres  canoniques. 

1:2.  Le  diacre  Ferrand  nous  a  laissé  une 
Collection  des  canons  des  conciles  tant  d'O- 
rient que  d'Occident.  C'est  une  des  plus  an- 
ciennes que  l'on  connaisse  parmi  les  Latins. 
Elle  est  composée  de  deux  cent  trente-deux 
canons,  dont  toutefois  il  ne  donne  pas  le 
texte  entier,  mais  seulement  le  sommaire  et 
l'extrait,  marquant  ù  la  fin  de  chacun,  de 
quels  conciles  ils  sont  tirés,  et  s'ils  se  trouvent 
dans  un  seul  ou  dans  plusiem-s  conciles.  11  y 
en  a  beaucoup  des  conciles  provinciaux  cl 
nationaux ,  d'Afrique,  de  Nicée,  d'.\ncyi'e, 
de  Laodicée,  d'.\ntioche,  de  Gangres,  de 
Sardique,  de  Constantinople;  mais  la  plupart 
sont  sur  des  matières  de  discipline,  ce  qui 
donne  lieu  de  croire  que  Ferrand  composa 
cette  Collection  par  ordre  de  Boniface  ,  évo- 
que de  Carthage,  aussitôt  après  le  rappel  des 


canûn« 
CODCiir!' 
remeols 
«rril.  de  1 
ruid. 


dei 
in 
Ju- 
do 


leslis  oraculicomprehendere  ;  sic  omnino  nec  ali- 
ter concilia  quœ  vetusta  l'irmovit,  et  ctistodivit 
devola  poslerilas,  obedieitliam  de  nobis  exigunt, 
nullum  relinquenles  dubitandinecessilatem.  Ibiil. 
'  Quid  prodest  cum  dormieiitibus  hnbere  certa- 
men,  aul  pru  dormienlibus  Ecctesiam  perlurhari  ? 
Si  quis  adliuc  in  corpore  morlis  hujus  accusalus 
et  dnmnalus,  antequum  mereretur  absohi  de 
sœculo  raptits  esl,  absolvi  non  potesl  ulterius 
huinano  judicio.  Si  quis  accnsalus  el  dbsoiutus, 
in  puce  Ecclesiœ  transivit  ad  Dominum,  condem- 
nari  non  potesl  humuno  judicio.  Si  quis  accu- 
satus,  ante  diem  saccrdotalis  examinis,  rcpCnlina 
vncalione  prœventus  est,  inlra  sinum  malris 
Ecclesiai  conslilulus ,  divino  inlclligendum  est 


judicio  reservatus.  De  hoc  nullus  homo  potett 
nianifestam  proferre  sentenliam  :  cui  si  Deus 
indulgentiam  dedil,  nihil  nocet  nostra  severilas ; 
si  supplicium  prwparavit ,  nihil  prodest  nostra 
benignilus.  Ibitl. 

'  Dignelur  ilaque  beaiitudo  veslra  très  istas 
régulas diligenter altcndire,  ut  concilii  Chalcedo- 
nensis  vel  similium  nulla  relractatio  pateat;  sed 
quœ  semcl  slatuta  suni,  iutfmerala  serventur: 
ni  pro  mortuis  fralribus  nulla  generentur  inter 
vivos  scandala;  ut  nullus  libro  suo  per  subscrip- 
tioiicsplurimoruuifdure  velil.  aucloritalem  quam 
solis  canonicis  libris  Ecclesia  deluM.  iUid. 
pag.  517. 


[VI'  siÈaE.]         CHAPITRE  IV.  —  AnTlIEN, 

ëv(^(liios  par  Hildciic,  pour  i'(H;il)lir  lu  ilisci- 
pliiic  dans  los  églises  il'Arriqiic.  11  cite  aussi 
dans  celte  Collection  les  épitrcs  ddcriitales 
des  papes,  nommément  de  saint  Sirice.  Celte 
CoUeclion  l'ut  im[iiiinéc  à  Taiis  en  1598, 
avec  celle  de  Cri'scoiiiiis;  en  lUOi),  avec  l'an- 
cien Code  de  l'Éj^lisc  romaine  par  Denys-le- 
Pelit;  et  en  IGGl  dans  la  Hiblollièque  du 
Droit  Canon  ancien,  par  Jull'elle,  en  deux 
volumes  in-fol.  La  Vie  de  saint  Fulgwice 
porte  daus  les  manuscrits  le  nom  de  Fer- 
rand  ;  mais  nous  avons  fait  remarquer  (jue  ce 
Ferrand  paraissait  être  un  des  disciples  du 
saint,  qui  l'avait  accompai^né  dans  ses  voya- 
ges ;  ce  qu'on  ne  peut  dire  du  diacre  de  Car- 
tilage. Ses  lettres  sont  écrites  avec  beaucoup 
de  feu;  mais  le  style  en  esl  aisé,  simple  et 
concis.  Celle  qui  esl  adressé  au  comte  Ilégi- 
non  fut  imprimée  à  Strasbourg  en  1516,  iu-8, 
sur  un  manuscrit  de  la  bibliotlii-que  d'Hir- 


LAURENT  DE  NOVARRE,  ETC. 


95 


sango.  Crcsconius,  dans  sa  Préface  sur  son 
Alirc(j(''  des  canons ,  ciic  la  Collection  de  Fer- 
rand. Avant  le  p6re  Chifllet,  Achillcs  Sta- 
lius  avait  donné  ù  Home  en  1578,  une  partie 
des  écrits  do  ce  diacre,  avec  nue  lettre  à 
Anselme,  arcli('véc|ue  de  Milan  ;  mais  cette 
lettre  ne  peut  être  de  Ferrand,  puisqu'Ansel- 
me,  évèque,  n'a  vécu  que  dans  le  ix°  siècle. 
C'est  aussi  sans  raison  iju'on  a  attribué  ii  Fi'v- 
raiid  trois  livres  de  Vigile  de  Tapso  contre 
les  erreurs  de  Nestoriusel  d'Eutycliès.  Nous 
avons  parlé  dans  l'article  de  saint  Fulgenco 
des  deux  lettres  que  Ferrand  lui  écrivit  ;  l'une 
au  sujet  du  baptême  d'un  Ethiopien ,  qui 
étant  cathécumène  avait  perdu  l'usage  de  la 
parole  et  la  présence  d'esprit,  en  sorte  qu'il 
n'avait  pu  répondre  dans  l'action  du  bap- 
tême; l'autie  toucliant  la  Trinité,  l'Incarna- 
tion, et  la  nécessité  de  participer  au  corps 
et  au  sang  de  Jésus-Christ. 


CHAPITRE  IV. 
Adrien,  Laurent  de  Novarre,  Marcellin,  Elpidins,  Gilles,  Orientius. 

[Écrivains  latins  du  M"  siècle.] 


Airin.  1.  On  ne  sait  point  au  juste  en  quel  temps 

Adrien  llorissait.  Ussérius  croit  que  c'était 
vers  l'an  533.  Ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est  qu'il 
est  plus  ancien  que  Cassiodore,  qui  parle  '  de 
lui  dans  un  de  ses  ouvrages,  où  il  le  joint  à 
Ticonius,  donatiste,  à  saint  Augustin,  à  saint 
Eucber,  et  à  Jumilius,  parce  qu'ils  avaient 
tous  donné  quelques  règles  pour  l'intelligence 
des  divines  Écritures,  et  expliqué,  par  diverses 
comparaisons,  ce  qui  paraissait  inintelligible. 
L'importance  de  ces  ouvrages  avait  engagé 
Cassiodore  à  les  recueillir  avec  soin.  Mais  il 
ne  dit  point  s'il  avait  tiaduit,  ou  fait  traduire 
de  grec  en  latin  ce  qu'Adrien  avait  fait  sur 
cette  matière.  Nous  ne  l'avons  aujourd'hui 
qu'en  grec,  sous  le  titre  à'Inti-oduction  à  la 
sainte  Écriture,  Marquandus  Fréhérus  la  fit 


imprimera  Augsbourg,  en  1601,  avec  les  no- 
tes de  David  Haschélius,  à  qui  cette  édition 
est  dédiée.  Elle  a  paru  depuis  dans  le  neu- 
vième tome  des  Critiques  sacrées  [de  Péarson, 
d'où  elle  a  passé  au  tome  XCVHI  de  la  Palro- 
logie  grecque,  avec  traduction  latine  des  édi- 
teurs, et  notice  tirée  de  Fabricius,  col.  1273- 
1311.]  Pbotius,  qui  avait  lu  cet  écrit  d'A- 
drien -,  dit  qu'il  est  très-utile  pour  ceux  qui 
commencent  à  étudier  les  divines  Écritures. 
Dans  les  éditions,  dont  nous  venons  de  par- 
ier, on  a  eu  soin  de  citer  à  la  marge  tous  les 
endroits,  soit  de  l'Ancien,  soit  du  Nouveau 
Testament,  allégués  dans  l'ouvi'age  d'Adrien. 
2.  Sigebert  de  Gemblours^  dans  son  traité 
des  Écrivains  ecclésiastiques  attribue  à  Lau- 
rent un  livre  intitulé  des  Deux  temps ,  dont 


Lauréat  do 
Novarre. 


'  Primum  est  posl  hiijus  operis  instituta  ut  ad 
introdiictores  Scripturœ  divinœ  quos  postea  refe- 
remus,  sollicita  mente  redeamus,  id  est,  Tico- 
nium  donalistam ,  sanctiim  Augustinum  de  doc- 
trina  christiana,  Àdrianum,  Eucherium  et  Jumi- 
lium,  quos  sedula  curiositate  collegi:  ut  quibus 
eral  similis  intenlio  inuno  corpore  adunati  coJi- 
ces  clauderentur.  Qui  modos  elocutionum  explana- 


tionis  causa  formantes,  per  exemplorum  diversas 
similitudines  intelligi  faciunt  quœ  prius  clausa 
manserunt.  Cassiod.,  lib.  De  Divin,  leclion.,  cap.  s. 

^  Lecta  est  Àdriani  lutroductio  in  sacram  Scriji- 
turam,  utilis  liber  m'  qui  ad  eam  primum  aggre- 
diunlur.  Phot.,  cod.  2,  pag.  3. 

'  Sigebert,  De  Script.  Eccles.,  cap.  cxx. 


96 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


le  premier  s'était  écoulé  depuis  Ad;im  jus- 
qu'à Jésus-Christ,  cl  dont  le  second  doit  durer 
depuis  Jésus-Christ  jusqu'à  la  fin  du  monde. 
Il  ne  dit  pas  quel  était  ce  Laurent,  se  conten- 
tant de  remarquer  que  la  douceur  de  ces  dis- 
cours lui  avait  fait  donner  le  surnom  do  Mil- 
lifluvs  ou  Mielleux.  Il  ajoute  qu'il  avait  fait 
aussi  des  homélies  ;  mais  il  n'en  marque  pas 
le  sujet.  Marfrarin  de  la  Bipne  qui  fait  Lau- 
rent évèque  de  Novarre  ,  dit  qu'il  fut  trans- 
féré de  cette  ville  en  celle  de  Milan,  dont  il 
le  compte  pour  le  vingt-cinquième  évèque. 
Il  conjecture  que  c'est  ce  Laurent  dont  En- 
uode  de  Pavie  a  fait  un  si  bel  éloge  dans  la 
Diction  '  ou  discouis  qu'il  envoya  à  Honorât, 
évèque  de  Novarre  pour  la  Dédicace  de  l'E- 
glise des  Apôtres.  La  Bigne  donne  à  ce  Lau- 
rent le  livre  des  Deux  tetitps ,  qu'il  intitule  : 
Homélie  sur  la  jxnittnce^  parce  qu'en  effet  elle 
roule  presque  entièrement  sur  cette  matière. 
Il  lui  en  donne  une  seconde  sur  l'aumône, 
qui,  dans  les  manuscrits,  porte  le  nom  de 
Laurent ,  et  qui  est  de  môme  style  que  le  li- 
vre des  Deux  temps.  Dom  Mabillon*  lui  en  at- 
tribue une  troisième  sur  la  Chananéc,  qu'il  a 
trouvée  jointe  dans  un  manuscrit  au  livre 
des  Deux  temps.  Il  adopte  la  conjecture  de  la 
Bigne,  et  l'appuie  d'une  autre  diction  d'En- 
nodè  pour  le  jour  anniversaire  de  l'installation 
de  Laurent  sur  le  siège  de  Milan.  Ennode  y 
loue  la  patience  de  cet  évoque  dans  les  per- 
sécutions qu'il  avait  eues  à  souffrir  de  la  part 
de  ses  ennemis,  et  dans  l'exil  où  il  avait  été 
envoyé  par  Odoacre  après  la  prise  de  Milan. 
Il  témoigne  que  son  retour  en  cetto  ville  lui 
avait  rendu  la  joie,  et  fait  tarir  les  larmes  de 
ses  habitants.  Ennode  dit  au  même  endroit 
que  Laurent,  dans  le  concile  de  Home,  assem- 
blé pour  l'all'aire  de  Symmaque,  réprima  par 
la  douceur  et  le  miel  de  ses  discours  l'impé- 
tuosité des  menaces  de  ceux  qui  avaient  en- 
trepris la  déposition  de  ce  pape.  Tout  cela 


«  Eiinod.  Diction.  2,  pag.  1736. 

*  Mdhinun.,  Aualect.,iiiie.  560,  cdit.  Par.  1723. 
'  Eniiodhis,  Diction.,  pag.  1732. 

*  IJomilia  de  Chananœa,  llabilloD.,  Analtcl., 
p.ig.  55. 

'  Peccatum  nwndi  quid  eut  ?  Diiiclum  Adam 
fer  traduceni  seniinis  ad  filios  deioluttun.  I.iiii- 
rent.,  hom.  de  Pœnil.,  tom.  IX  Bibl.  Fat.,  pag. 
4C5. 

*  Ex  illa  die  illaque  hora  qua  egressus  est  de 
Invacro,  ipse  tibi  (s  fons  jugis  et  diulurna  re- 
iiiissio.  Aon  opiis  Itahes  doctore ,  non  dcTlra  sa- 
ccrdotis.  Mox  vl  ascfndisti  de  sacro  fonte,  vesli- 
liis  es  veste  alba  et  unctits  es  unguenlo  mystico  : 


convient  à  l'auteur  de  l'homélie  sur  la  Cha- 
nanée.  Il  y  fait  mention  de  ses  adversaires  , 
et  s'y  plaint  de  ce  que  par  leur  malice,  lui  et 
ceux  de  son  parti  avaient  été  maltraités.  Le 
temps  et  le  lieu  où  il  pronon(;a  ce  discours 
marquent  que  ce  fut  au  retour  de  son  exil 
après  la  victoire  que  Tliéodoric  remporta  sur 
Odoacre.  Car  il  le  prononça  la  nuit*  et  dans 
la  place  publique.  Enfin  cette  homélie  à  toute 
la  fluuceur  de  style  que  Sigebcrt  relève  dans 
celle  des  Deux  tetnps  ou.  de  la  pénitence. 

3.  Dans  celle-ci  Laurent  distingue  deux     Ho.-»6;i 
sortes  de  péchés,  et  deux  manières  de  les  }*^"j;'.;^ï 
remettre  ;  le  péché  d'Adam  '  qui  est  passé  r-f-  ,  .♦ 

'  11  ID*D«  le  la 

par  la  voie  do  la  génération  à  tous  ses  des-  |;;'',X1„  J 
cendants  ;  et  le  péché  que  chacun  commet  J^°^  j"'' 
par  ses  propres  actions.  Ils  sont  remis  l'un 
et  l'autre  par  le  bajitéme  ;  mais  les  péchés 
propres  se  remettent  aussi  par  la  pénitence. 
L'auteur  appelle  le  péché  d'Adam  '  le  péché 
du  monde.  De  la  façon  dont  il  s'explique  sur 
la  vertu  du  baptême,  on  dirait  que  son  senti- 
ment est  qu'après  l'avoir  reçu  chacun  est 
devenu  à  soi-même  une  source  continuelle  de 
force  et  de  doctrine,  en  sorte  que  le  minis- 
tère des  prêtres,  et  le  secours  de  la  grâce 
ne  sont  plus  nécessaires.  «  Aussitôt,  dit-il', 
que  vous  êtes  sorti  des  sacrés  fonts,  on  vous 
a  revêtu  de  l'habit  blanc,  on  vous  a  oint  de 
l'onction  mystique,  puis  l'invocation  de  la 
sainte  Triuilé  ayant  été  faite  sur  vous,  il  est 
venu  sur  vous  une  triple  vertu  qui  vous  a 
rempli  d'une  doctrine  nouvelle.  Dès  lors 
Dieu  vous  a  constitué  votre  propre  juge  et 
votre  arbitre  ;  il  vous  a  donné  une  telle  con- 
naissance, que  vous  pouvez  apprendre  de 
vous-même  le  bien  et  le  mal,  et  distinguer 
entre  le  mérite  et  le  péché.  Et  parce  que,  de- 
meurant dans  les  liens  du  corps  et  de  ses 
membres,  vous  ne  pouvez  être  libre  du  pé- 
ché, ni  vivre  exempt  de  faute  après  le  bap- 
tême, il  a  mis  eu  vous-même  le  remède  dont 


fiicta  est  super  te  invocalio,  et  venit  super  le  trina 
virtus  quce  tas  novum  liac  nova  perfudit  doc- 
trina.  Exinde  teipsum  staluit  tibi  judicem  et  ar- 
bilriuui,  deditque  tibi  notitiam  ut  possis  ex  te 
discere  bonum  et  malum  ,  id  est  intcr  meritum 
et  peccatum.  Et  quia  non  paieras  mancns  in  mem- 
bris  corjiorisque  conipagc  liber  cxistere  a  pec- 
cato,  immunisque  a  noxa,  posl  baptismum  rc- 
medium  tuum  in  teipso  stotuit,  remissioncm  in 
arbilrio  luo  posuit  ut  non  qua-ras  sacerdotem 
cum  nécessitas  ftagi'  •ori/.j  sed  ipse  jam  ac  si 
scitus  per-^'picuusque  magister  errorcm  tuum  in- 
tra  te  entendes  et  peccatuni  luum  pœnitudine 
abluas.  Ibid.,  pag.  466,  467. 


[vi«  SIÈCLE.]         ADRIEN,  LAURENT  DE  NOVARRE,  MARCELLIN,  ETC. 


vous  avez  besoin,  laissant  la  rémission  Je 
vos  fautes  à  votre  libre  arbitre,  en  sorte  que 
dans  la  nécessité  vous  n'avez  pas  besoin  de 
recourir  au  prétie.  Mais  vous  pouvez  do 
vous-même,  comme  un  maître  expérimenté, 
corriger  l'erreur  qui  est  dans  vous,  et  cllacer 
votie  pécbé  par  la  pénitence.  Ainsi  que  la 
dureté  de  ccrnr,  le  désespoir,  la  paresse  ces- 
sent, la  fontaine  ne  tarit  jamais,  l'eau  est  au 
dedans,  l'ablution  est  au  pouvoir  du  libre 
arbitre,  la  sanctification  dans  l'industrie, la  ré- 
mission dans  l'ail iiudance  des  larmes  »  Mais 
Laurent  s'expliiiuo  dans  la  suite.  11  fait  voir 
au  pécheur  qu'en  vain  il  compterait  sur  ses 
propres  mérites,  sur  la  force  de  son  àme,  et 
la  vigueur  de  ses  entrailles  ;  qne  debout  au- 
jourd'hui, demain  il  tombera,  s'il  n'y  prend 
garde  ;  qu'il  veuille  ou  ne  veuille  pas,  que  son 
Ame  est  souvent  embarrassée  dans  les  fdets 
du  corps  ;  qu'elle  n'en  est  pas  délivrée  par 
elle-même,  à  moins  que,  secourue  de  la  grâce 
de  Dieu,  elle  ne  s'adresse  à  lui  par  la  péni- 
tence ;  en  sorte  qu'elle  puisse  dire  avec  le 
Prophète  :  Mon  ûme  s'est  échappée,  comme  un 
passereau  du  filet  des  pécheurs;  le  filet  a  été 
brisé  avec  le  secours  du  Seigneur,  et  j'ai  été  dé- 
livré. L'âme  était  arrêtée  dans  le  filet;  elle' 
s'en  est  échappée,  non  par  ses  propres  forces, 
mais  par  le  secours  divin.  C'est  dans  le  mémo 
sens  qu'on  doit  entendi'e  ce  que  Laurent  dit 
dans  le  même  discours,  immédiatement  après 
avoir  rapporté  ces  paroles  de  saint  Paul  : 
Qui  me  délivrera  du  corps  de  cette  mort?  «  La 
vie',  est  entre  vos  mains;  la  victoire  est  dans 
votre  libre  arbitre  :  si  vous  avez  voulu,  vous 
avez  vaincu  ;  si  vous  ne  voulez  pas,  vous  de- 
meui'erez  vaincu.  Celui  qui  veut  vaincre  fait 
des  ellbrts  :  celui  qui  désespère  perd  la  vic- 
toire. «Toutes  ces  façons  de  parler  n'excluent 
point  le  besoin  de  la  grâce;  elles  n'ont  pour 
but  que  d'animer  le  pécheur  à  travailler  à  la 
correction  de  ses  vices  et  à  faire  pénitence 
de  ses  fautes.  D'où  vient  qu'en  parlant  en- 
suite de  Zacbée,  il  dit  que  «  le  Seigneur  de- 
meura' chez  lui,  et  inspii-a  dans  son  âme  le  feu 
delà  foi,  et  la  seci-ète  ardeur  du  Saint -Esprit, 
de  façon  que,  brûlant  de  l'amour  de  Dieu  et 


'J7 

du  feu  de  la  foi,  il  ditù  Jésus-Clu'ist  :  Je  m'en 
vais  donner  la  moitié  de  mon  bien  aux  pauvres. 
Comme  s'il  avait  dit  :  Je  vois  maintenant,  je 
connais  ce  que  je  dois  faire.  Mon  Sauveur, 
c'est  de  vous  et  non  de  moi-même  que  vient  la 
correction  et  l'amendement  de  mes  mœurs.  » 
Laurent  cite  cet  exemple,  et  celui  de  la  fem- 
me pécheresse,  pour  engager  les  pécheurs  à 
ue  point  désespérer  de  leur  salut,  mais  à  re- 
courir à  Dieu  qui  est  toujours  prêt  à  les  re- 
cevoir. Quant  A  ce  que  dit  cet  auteur  qu'un 
baptisé  qui  tombe  dans  le  péché  après  le 
baptême  n'a  pas  besoin  de  recourir  au  prê- 
tre, il  ne  veut,  ce  semble,  dire  autre  chose, 
sinon  qu'il  sait  de  lui-même,  pour  l'avoir  ap- 
pris dans  les  instructions  qu'on  lui  a  données 
avant  le  baptême,  ou  dans  la  semaine  du 
baptême,  qu'il  est  obligé  de  faire  pénitence, 
et  que  la  pénitence  est  un  moyen  pour  ef- 
facer les  péchés  commis  depuis  le  baptême. 
C'est  ]iourquoi  il  ajoute  :  «  Ne  cherchez  plus  ' 
Jean-Baptiste;  n'allez  plus  au  Jourdain  : 
soyez-vous  à  vous-même  Jean-Baptiste.  » 

4.  Dans  l'Homélie  surl'aumùne,  Laurent  Hom.Mcsnr 
la  représente  comme  un  remède  ellicace  aux  ix  Bib.:'i'ai! 
plaies  de  notre  conscience,  et  capable  de 
rappeler  l'âme  des  portes  de  la  mort;  com- 
me la  racine  de  tous  les  biens ,  ajoutant 
qu'elle  comble  le  juste  de  mérites,  qu'elle 
absout  le  pécheur  de  ses  péchés,  et  le  sou- 
lage même  dans  ses  maladies.  Il  enseigne  que 
c'est  par  une  providence  particulière  que  tous 
les  hommes  ne  naissent  pas  également  dans 
les  richesses.  «  Ceux,  dit-il,  qui  en  abondent 
n'en  font  que  trop  souvent  un  mauvais  usage 
en  les  faisant  servir  à  leurs  passions  déré- 
glées. Dieu  a  mis  auprès  d'eux  les  pauvres, 
afin  qu'ils  leur  servent  comme  de  fontaine, 
où  ils  puissent  se  purifier  des  taches  de  leurs 
péchés.  ))  Il  explique  ces  paroles  de  Jésus- 
Christ  :  Lorsque  vous  donnerez  l'aumône,  que  1,^,11,  ,.,  3 
votre  main  gauche  ne  sache  point  ce  que  fait  vo- 
tre main  droite,  de  la  vaine  gloire  que  l'on 
doit  éviter  dans  les  œuvres  de  miséricorde , 
Dieu  en  devant  être  la  fin,  et  non  le  désir  de 
plaire  aux  hommes. 

0.  U  prononça,  comme   on  l'a  déjà  dit,     Hoir.éiiciur 


'  In  laqueo  hœrebat  anima,  ereptaest  nonisuis 
ciribus,  sed  dicino  prwsidio.  Ibid.,  pag.  467. 

*  Vita  in  manu  est,  Victoria  in  arbilrio  est.  Si 
voluisti,  vicisH.  Si  nolueris,  victus  relinqueris. 
Qui  mit  vincere  conaticr  tU  vincat,  qui  desperat 
amisil  Victoria  m.  Ibid. 

^  Mansit  apud  illum  Christus,  inspiravit  illi 
ignem  fidei,  Spirilus  Sancti  occuUum  ardorem , 
XI. 


ut  amore  Dei  et  calore  fidei  flagrans  talia  verba 
depromeret  :  Domiue,  eece  dimidium  bonorum 
nii;ûruiii  do  pauperibus...  lanquam  si  ita  diceret: 
Modo  vidi,  modo  cognovi  :  Saluator,  non  ex  me  , 
sed  ex  te  fada  est  correclio  mea.  Ibid.,  pag.  469. 
'  NoUte  jam  quœrere  Joannem  neque  Jorda- 
nem,  ipsc  tibi  esta  Baptista.  Ibid.,  pag.  467. 


98 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


6CTIU. 


.  outi»;».  son  discours  sur  la  Chanande,  la  nuil  '  et 
NMoii,  fs-  dans  la  place  publiijue.  Il  fait  voir,  par  les 
instances  réitérées  de  cette  femme,  que  l'on 
doit  toujours  demander  ^  Dieu  jusqu'à  ce 
que  l'on  ait  obtenu  l'etlet  de  sa  demande  ; 
mais  qu'il  ne  sufBt  pas  de  lui  demander  de 
bouche,  que  le  cœur  doit  aussi  faire  entendre 
sa  voix  ;  que  tous  les  lieux  sont  propres  à  la 
prière,  quand  on  sait  se  recueillir  en  soi-mê- 
me; la  place  publique,  le  bain  peuvent  nous 
servir  de  temple.  Ces  trois  homélies  sont 
d'uu  style  simple  et  coupé. 

6.  On  met  ordiuairement  -  le  comte  Marcel- 
liu  au  rang  des  écrivains  ecclésiastiques, 
parce  qu'il  a  renfermé  dans  sa  Chronique  plu- 
sieurs faits  intéressants  pour  l'Eglise.  Tri- 
thème  le  qualifie  de  chancelier  de  l'empereur 
Justinien.  11  parait,  par  Cassiodore,  qu'il  avait 
exercé  cet  emploi,  des  le  temps  que  Justinien 
n'était  que  patrice.  Cela  ne  l'empêcha  point 
de  s'appliquer  à  divers  ouvrages  pour  l'utilité 
publique.  Cassiodore  '  marque  quatre  livres 
de  géographie,  où,  comme  il  le  dit  ailleurs, 
Marcellin  '  faisait  la  descriplion  des  villes  de 
Coustantinople  et  de  Jérusalem,  avec  une 
grande  exactitude;  marquant  la  route  qu'il 
avait  suivie  en  allant  d'une  de  ces  villes  i\ 
l'autre.  Cet  ouvrage  n'est  pas  venu  jusqu'à 
nous.  Mais  nous  avons  sa  Chronique  précé- 
dée d'une  petite  préface,  où  il  dit  qu'il  l'a 
commencée  <i  la  première  année  de  l'empe- 
reur Théodosc,  et  conduite  jusqu'au  consu- 
lat de  Magnus,  c'est-à-dire  jusqu'en  .518,  ce 
qui  fait  un  espace  de  quarante  ans;  que  de- 
puis il  a  ajouté  à  sa  Chronique  seize  autres 
années,  à  commencer  depuis  la  première  de 
l'empire  de  Justin  jusqu'au  quatrième  con- 
sulat de  Justinien,  qui  fut  en  534.  Il  y  a  ap- 
parence qu'il  ne  conduisit  pas  plus  loin  sa 
Chronique,  et  qu'il  mourut  en  cette  année-là , 
n'étant  pas  vraisemblable  qu'il  eût  disconti- 
nué de  rapporter  les  principaux  événements 
du  règne  de  son  maître,  s'il  eût  vécu  plus 
longtemps.  Car  Justinien  ne  mourut  qu'en 


Dp 


566.  Aussi  la  Chronique  de  Marcellin,  dans 
l'édition  d'Anvers,  par  Antoine  Schnnhovins, 
chanoine  de  Bruges,  ne  va  que  jusqu'en  334. 
C'est  la  première  de  toute-.  Celle  de  Panvi- 
nius  s'étend  jusqu'à  la  dernière  année  de 
l'Empire  de  Justinien,  parce  qu'ily  a  compris 
la  continuation  de  la  Chronique  de  Marcellin 
par  quelque  auteur  inconnu.  Les  autres  édi- 
teurs en  ont  usé  de  même  ;  mais  en  faisant 
passer  le  tout  sous  le  nom  de  Marcellin. 
Le  Père  Sirniond  qui  a  donné  cette  Chronique 
plus  correcte  et  plus  entière  en  1619,  à  Paris, 
a  eu  soin  de  distinguer  ce  qui  était  de  Mar- 
cellin, et  ce  qu'on  y  avait  ajouté.  C'est  sur 
son  édition  qu'on  l'a  mise  dans  le  neuvième 
tome  de  la  Bibliothèque  des  Pères  à  Lyon,  en 
1677.  Elle  se  trouve  encore  dans  le  recueil  w 
des  œuvres  de  ce  Père,  à  Paris,  en  1696,  [et  i-«t 
dans  le  tome  LI  de  la  Patrologie  latine,  col. 
9i3.]  Il  est  parlé  dans  cette  Chronique  des 
assemblées  que  saint  Grégoire  de  Nazianze, 
maître  de  saint  Jérôme,  faisait  dans  l'Église 
deSaintc-Anastasie,  à  Coustantinople,  dans 
le  temps  que  les  ariens  s'étaient  emparés  de 
la  grande  église  de  cette  ville  ;  des  conciles 
de  Const<antinople,cn381  ;  d'Éphèse,  en'i.30; 
et  deChalcédoine,  en4ol  ;  dabrigandage  d'E- 
phèse en  449;  des  évêques  de  Rome,  Da- 
mase,  Sirice,  Anastase  et  autres  juscpi'à  Pe- 
lage ;  de  saint  Ambroise,  qui  y  est  appelé  la 
forteresse  de  la  foi;  de  saint  Jean-Chrysos- 
tôme  et  de  ses  successeurs  dans  le  siège  épis- 
copal  de  Constantinople;  de  Théophile  d'A- 
lexandrie; de  saint  Épiphane  et  de  plusieurs 
autres  évoques  d'Orient;  de  la  découverte  ' 
des  reliques  de  saint  Etienne,  premier  mar- 
tyr, par  un  saint  prêtre  nommé  Lucien  qui 
écrivit  en  grec  la  relation  de  cette  décou- 
verte ;  du  transport  de  ces  mêmes  reliques  à 
Gonstanlinoplc,  par  Eudoxie,  femme  de  Théo- 
dose; de  saint  Augustin;  de  l'invention  du 
chef  de  saint  Jean-Baptisto  par  deux  moines 
qui  étaient  allés  par  dévotion  à  Jérusalem  ; 
et  de  son  transport  à  Emèse,  où  il  fut  trou- 


Tom. 
SlnnuDi 

.  IX  Bi 


'  Scrmocinaixlihua  nobis  sommis  recesxil  a  vo- 
bis ;  nox  transfudil  se  in  diem.  0  convenlua  fo- 
rensis  !  Putest  cnim  in  hic  esse  conventus  Eccle- 
sia:  Fecil  nox  in  foro  Ecdesiam.  png.  53. 

*  Aiionyinus  Mellicensis  de  Scriplorib.,  Eccles., 
cap.  Lvi.  Mir.-Kus  de  Scriplorib.,  Eccles.,  oaii.  cxi.. 

'  llarcellinus  qualuor  libros  de  lewporum  qua- 
lilaiibus  et  posiiionilnis  locorum  pulclierrima 
proprielale  conficiens,  ilineris  sui  trumilem  lau- 
dabitiler  pcrcurrit.  Cassiodorii!',  Delnslitul.  div., 
cnp.  XVII, 


*  Idem  porro  Marcellimts  Conslanlinopolila- 
nam  civitnloii  et  urbem  riicrosolymitanam  minu- 
tissima  narralione  descripsit.  Cassiodorus  ,  ibid., 
cap.  xsv. 

»  I.ucinnus,presbijter,  vir  sanctus,  cui  revelavU 
Veiis,  /lis  con.'iulibns  Ilonorio  I,  et  Tlieodosio, 
locum  sepulchri  cl  reliquiantm  sancti  Siephani, 
primi  miirlyris ,  scripsit  ipsam  rcrelalionem 
grœco  sermone  ad  omnium  Ecctesiarum  perso- 
nas.  IMarri'l.,  in  Chronico,  nd  iio.  415. 


[xrsùxix.]         ADRIEN,  LAUllENï  DE  NOVAUlll 
vii  '  tic  nouveau  sous  le  pontifical  d'Uranius 


en  453,  par  le  prêtre  Marcelle;  de  saint  Pros- 
por  et  (le  SCS  écrits  ;  de  Gcnnadc  de  Cons- 
taniiudple,  et  do  ses  Commonlaires  sur  Da- 
niel; de  la  perséculion  des  Vandales  en  Afri- 
que ;  de  Jean  d'Antioche  et  de  ses  écrits  con- 
tre les  eutycliéens;  de  saint  Flavicn  et  de  sa 
constance  dans  la  foi;  delà  division  des  l\sli- 
ses  d'Orient  et  d'Occident;  des  brouilleries 
arrivées  dans  l'Église  de  Constantinople  à 
l'occasion  de  cette  proposition  :  Un  de  la 
Trinité  a  <;o)(/jcrt;  et  de  plusieurs  autres  faits 
qui  font  voir  que  le  comte  Marccllin  s'était 
intéressé  à  transmettre  à  la  postérité  ce  qui 
lui  avait  paru  de  plus  remarquable  dans  les 
événements  qui  avaient  quelque  rapport  <i 
l'histoire  de  l'i-ldise.  On  le  qualifie  comte  ^ 
d'Illyrie,  quoiqu'il  ne  se  donne  pas  lui-même 
ce  titre.  L'anonyme  de Méleth' le  fait  romain 
de  naissance. 

7.  Dans  les  Gaules,  RusticusElpidius  se  ren- 
dit célèbre  par  son  savoir  et  par  sa  piété. 
Quoique  diacre  de  l'Église  de  Lyon,  il  ne  lais- 
sait pas  de  s'appliquer  à  la  médecine.  La  ré- 
putation qu'il  s'acquit  dans  cet  art  le  fit  con- 
naître à  Théodoric,  roi  des  Ostrogoths,  qui 
voulut  l'avoir  auprès  de  lui.  Ce  prince  était 
arien,  mais  il  ne  refusait  point  son  estime  aux 
évoques  ni  aux  autres  ministres  de  l'Église 
catholique.  Elpidius  se  conduisit  h  la  cour 
avec  beaucoup  de  sagesse  et  de  modestie ,  ne 
faisant  rien  qui  fût  contraire  k  son  état.  Il  sut 
même  par  ses  bons  oûices  '  gagner  l'amitié 
et  la  conGance  du  roi ,  ce  qui  le  mit  en  état 
de  servir  ses  amis.  C'était  à  luiqu'Eunodede 
Pavie  se  croyait  '  redevable  de  la  bienveil- 
lance de  Théodoric.  Elpidius,  ayant  conçu 
le  dessein  d'embellir  Spolète,  en  réparant  les 
ruines  de  plusieurs  édifices  de  cette  ville,  ce 
prince  lui  en  accorda  la  permission,  en  rele- 
vant °,  dans  les  lettres  qu'il  lui  fit  expédier  à 
ce  sujet,  son  mérite  et  ses  longs  services.  El- 


MAliCICLLlN,  E'J'C.  !)9 

pidius  avait  une  maison  à  Arles  infestée  par 
les  démons.  Saint  Césaire' la  bénit,  et  aussi- 
tôt l'infestiition  cessa.  Nous  avons  une  lettre 
de  saint  Avit ,  évèque  de  Vienne  ;'i  Elpidius  , 
dans  "  laipielle  il  le  prie  d'employer  ses  ta- 
lents dans  la  médecine  jiourle  ri'tablissement 
du  lîls  d'un  seigneur  gaulois  nommé  Célcr; 
et  quatre  d'Eunode  de  Pavie,  où  l'iivè'que  lui 
parle  de  diverses  maladies  dont  il  était  aflli- 
gé.  Dans  l'une,  qui  est  la  quatorzième  du  neu- 
vième livre  ,  il  marque  que  Dieu  avait  permis 
qu'il  fût  dans  les  bonnes  grâces  de  'J'h('odo- 
ric  °,  afin  que  l'état  ecclésiastique  qui  était 
alors  dans  sa  décadence, no  péril  point  eu  tièrc- 
ment.  Dans  la  huitième  lettie  du  huitième  li- 
vre,il  loue'"  l'éloquence  d'Elpidius  et  sa  gran- 
de facilité  às'exprimer,  témoignant  beaucoup 
d'empressement  pour  recevoir  de  ses  lettres. 
«  Il  ne  trouva  pas,  dit-il,  d'autre  moyen  d'en 
avoir,  que  de  lui  en  écrire  lui-même,  ne  dou- 
tant pas  qu'Élpidius  ne  dût  y  répondre,  n  II 
ne  nous  reste  toutefois  aucune  lettre  d'Elpi- 
dius, ni  à  saint  Avit  de  Vienne,  ni  àEnnode  de 
Pavie.  Ce  dernier,  dans  la  vingt  et  unième 
lettre  du  neirvième  livre,  se  plaint  à  Elpi- 
dius de  ce  que  passant  à  Milan  il  ne  s'y  était 
point  arrêté,  et  qu'il  en  était  sorti  avec  au- 
tantde  rapidité  que  .s'il  eût  eu  les  ailes  d'Icare, 
sans  l'avoir  même  fait  saluer.  11  semble  lui 
reprocher  de  n'en  avoir  agi  ainsi  que  parce 
qu'à  l'exemple  de  ceux  qui  se  trouvent  tout 
à  coup  dans  la  faveur  des  puissants  du  siè- 
cle, il  avait  oublié  ses  amis. 

8.  On  a  imprimé  dans  la  Bibliot/irqne  des 
Pères,  dans  le  Recueil  des  poètes  chrétiens ,  à 
Bâle,  en  1562  ;  et  dans  le  Recueil  des  poé- 
sies attribuées  à  Lactance  et  à  Marbaudus, 
à  Leipsick ,  deux  poèmes  d'Elpidius  :  tous 
les  deux  sont  en  vers  hexamètres  " .  Le 
premier  est  composé  de  soixantedouze  vers 
cpii  forment  vingt-quatre  strophes,  chacmie 
de  trois  vers ,  où  l'auteur  traite  de  divers 


écrits  d'EI- 
pidiDS. 


'  noc  igitur  venerabile  caput  sub  Uranio  me- 
moratœ'Emisenœ  episcopo  civitatis  per  Marcellum 
presbyterum  coiistat  invenlum,  Vincomelo  et  Opi- 
linne  consulibus.  mense  februario  die  24,  média 
jejiuiiorum  paschaliiun  sepHinana.  Marcel.,  ibid. 
.1(1  ;iii.  loS. 

2  Miroeus,  ubi  supra,  cap.  cxl.  Cassiodor.,  ubi 
supra. 

3  Anonynius  Mellicensis,  cap.  LVi. 

*  Cyprianus,  in  Viln  Ctrsarii,  lib.  I,  num.  21. 

6  EÏinod.,  lib.  IX,  Epist.  14. 

«  Cassiodor.,  lib.  IV,  Epist.  20. 

'  Oyprian.,  in  Vila  Cœsarii,  ubi  supra. 

«  Avitus,  Epist.  35. 


'  Sein  quia  Deux  propiLius  Ubi  sic  graliaM  in- 
vicli  frincipis  cnntulit  ut  htimilitas  ecclesiaslica 
non  periret.  Eunodius,  lib.  IX,  Epist.  14. 

'"  Quibiis  modis  fraternitatemtuam  ad  scriben- 
dum  quave  arte  sollicitem,  quando  liomo  verbo- 
runi  locuples  in  me  siléntia  peregrina  custodis. 
Elegi  ut  te  loqui  loquendo  faciam  et  illam  Alli- 
cam  eruditionem  ad  epistolas  alia  garrulilatc 
producam.  Enuod.,  lib.  VIII,  Epist.  S. 

"  Ces  lieux  poèmes  se  trouvent  dans  le  tome  LXII 
de  la  Patrologie  latine  ,  après  la  Bibliothèque  des 
Pères  de  Lyon  ;  ils  sont  traduits  dans  les  Portas 
chrétiens,  par  M.  Félix  Clémeut,  Paris,  1837.  {I.'é- 
diteur.) 


mSTOIRE  GÉNÉRAI.E  DES  AUTEITIS  ECCLÉSIASTIQUES. 


100 

points  historiques  de  l'Ancien  et  du  Nouveau 
Testament,  maïqnant  en  même  temps  les 
mystères  sijfuiliés  dans  l'Aiitien  et  accom- 
plis dans  le  Nouveau.  Par  exem[»le,  après 
avoir  rapporté  dans  la  première  strophe  la 
séduction  d'Èvc,  dans  le  paradis  terrestre, 
par  le  serpent,  il  rapporte  dans  la  seconde 
l'annonciation  du  mystère  de  l'Incarnation 
faite  à  la  Sainte  Vierge  par  le  ministère  de 
l'ange.  Après  avoir  parlé  dans  la  septième 
de  la  confusion  des  langues  à  la  tour  de  Ba- 
bel, il  raconte  dans  la  suivante  comment,  au 
jour  de  la  Pentecôte,  saint  Pierre  et  les  au- 
tres apôtres  parlaient  diflérentes  langues. 
La  neuvième  comprend  l'histoire  de  la  vente 
de  Joseph  par  ses  frères.  La  dixième  marque 
de  quelle  manière  le  traître  Judas,  pousse  par 
un  mouvement  d'avarice  vendit  Jésus-Christ 
aux  Juifs.  11  fait  dausla  onzième  et  la  douziè- 
me le  parallèle  de  l'immolation  d'Isaac  avec 
le  sacrifice  de  Jésus-thiist  sur  la  croix.  11 
trouve  dans  la  treizième  et  la  quatorzième  du  ^ 
rapport  entre  la  manne  et  les  caillesdonnées 
miraculeusement  aux  Israélites,  et  les  sept 
pains  dont  Jésus-Christ  rassasia  quatre  mille 
hommes.  La  quinzième  et  la  seizième  com- 
parent Moïse,  montant  sur  la  montagne  de 
Siuaï  pour  y  recevoir  la  loi,  avec  Jésus-Christ 
prêchant  aux  peuples  sur  la  montagne.  Les 
huit  strophes  suivantes  renferment  diilerents 
points  d'histoire  du  Nouveau  Testament.  Le 
second  poème  traite  des  bienfaits'  de  Ji'sus- 
Christ  envers  les  hommes  en  commençant  à 
la  création  du  monde,  et  en  finissant  à  la 
mort  qu'il  a  soutl'ert  pour  notre  salut  sur 
l'arbre  de  la  croix.  11  y  ajoute  quelque  chose 
du  règne  des  bienheureux  dans  le  ciel,  com- 
me étant  une  suite  des  bienfaits  du  Sauveur. 
Quelques-uns  ont  cru  qu'Elpidius  avait  com- 
posé un  tioisième  poème  pom-  soulager  sa 
douleur  en  une  certaine  occasion  ;  mais  les 
deux  vers  sur  lesquels  ils  se  fondent  '  ne  le 

'  Bine  eliam  nostro  nugata  est  schéma  dolori, 
Gairula  mendcsis  fingens  satyromala  musis. 
FJpi.i.,  Carm.  de  Cliiifli  bcmficiis  ,  tom.  I.\  Bibl. 
Pair.,  png.  4C3. 

'  Voici   ce  que  dit,   d'une  manière  plus  exacte, 
doin  Ceillier  dans  uu  autre  volume  : 

Eu  parlant  d'Orient,  dans  le  seizième  volume 
de  cette  histoire,  p.  18»,  nous  avons  dit,  que  sui- 
vant l'opinion  la  plus  conimuni",  on  le  faisiiit  es- 
pnpnol  de  naissance,  et  évoque  d'KIvire  ;  et  nous 
n'avons  fait  mention  que  d'une  partie  de  son  poème 
imprimé  à  Anvers,  en  1600,  avec  les  n^^U^ 
tin  Uelrio. 

Il  faut  retoucher  ces  deux  a 


ffj  ton 


disent  pas  clairement.  En  tout  cas  ce  poème 
n'est  pas  venu  justju'à  nous.  On  trouve  h  la 
suite  des  deux  poèmes  d'Elpidius  cchii  que 
Sédulius  a  fait  en  vers  éh'  iaques;  c'est  une 
comparaison  de  l'Ancien  Testament  avec  le 
Nouveau.  Il  est  mis  dans  la  Bibliothèque  des 
Pèns  sous  le  nom  du  consul  Ast('rius,  et  il  y 
a  des  manuscrits  qui  l'attribuent  à  Claudien 
Mauunert.  Mais  Bède  en  fait  auteur  Sédulius. 
Si  on  l'a  mis  sous  le  nom  d'Aslérins,  ce  n'est 
apparemment  que  parce  qu'ayant  trouvé  ce 
poème  parmi  les  papiers  de  Sédulius  déjà  ^1^°' 
mort,  .\stérius  eu  fit  faire  des  copies,  comme  ' 
de  ses  autres  ouvTages  en  vers,  et  les  rendit 
publiques. 

9.  Saint  Césaire,  évéque  d'Arles,  idlant  à  i.>iw  gi 
Rome,  se  fît  accompagner  d'un  abbé  nommé 
Gilles,  gaulois  de  naissance,  qui  gouvernait 
un  monastère  dans  la  Gaule  Narbonnaise  ;  et 
du  prêtre  Messien  qui  lui  servait  de  secré- 
taire. L'abbé  Gilles  présenta  avec  Messien 
eu  son  propre  nom,  au  pape  Sjmmaque,  une  t»™.  i 
supplique  que  nous  avons  encoie,  dans  la-  ^°ù"'  ** 
quelle  ils  demandent  l'un  et  l'autre  que  l'É- 
glise d'Arles  soit  maintenue  dans  ses  privi- 
lèges qui  lui  avaient  été  accordés  par  le  Saint- 
Siège,  en  particulier  que  i'évèque  d'.Vix  fût 
tenu  de  venir  a  Arles  quand  il  y  serait  man- 
dé par  révoque  de  cette  ville,  soit  pour  les 
conciles ,  soit  pour  les  autres  affaires  ecclé- 
siastiques. Il  parait  que  cette  supplique  n'était 
que  pour  appuyer  celle  que  saint  Césaire 
avait  présentée  lui-même  à  Symmaque.  Ce  "■''• 
pape  lui  n'-pondit  par  une  lettre  datée  du 
H  juin  de  l'an  514,  où  il  confirme  les  pri- 
vilèges de  l'Église  d'Arles,  avec  pouvoir  ;\ 
saint  Césaire  d'assembler  les  évèqiies  des 
Gaules  et  d'Espagne  quand  il  en  serait  be- 
soin. » 
10.  Sigebert  de  Gemblours  met  Orientins',  , .'"'""";' 

"  '      f  «que     d  t 

ou,  comme  il  l'appelle,  Orentius,  parmi  les  ^Hi.rïVi! 
écrivains  ecclésiastiques  pour  avoir  composé  p,',",,jf.8Î 

Premièrement,  il  paraît,  par  les  Actes  du  saint, 
que  les  Bollundistcs  ont  donnas,  qu'il  était  cvôque 
d'Anch,  (Bolland,  ad  diem,  l  mai,  p.  Cl,  tom.  Il, 
Bilil.  Labb.,  p. 596);  qu'il  y  avait  encore  des  piïcns 
dans  sou  diocèse,  et  qu'il  en  convertit  un  ^raud 
nombre  ;  qu'Aélius  et  Littorius,  pi'nt'ranx  de  l'ar- 
mée romaine,  étJUit  venus  altaqurr  Thèodoric,  roi 
des  (lOths,  qui  remuait  alors  dans  la  ville  de  Tou- 
louse ;  ce  prince  iirien  qui  ne  se  sentait  pas  assez  de 
forces  pour  résister  aux  euuemis,  envoya  I'évèque 
Orient  en  ambassade  vers  ces  deux  (lènéraux  jiour 
traiter  de  la  paix  ;  iju'Aétius  le  re(;ut  hnuorable- 
ent  ;  mais  que  Littorius,  n'ayant  ténioi^'né  pour 
JljîViuo  du  mépris,  eu  fut  puni  par  ceux-là  mêmes 


[VI- SIÈCLE.]         ADRIEN,  LAURENT  DE  NOVARRE ,  MARGELLIN,  ETC. 


101 


un  poème  en  vers  hdroïqiios,  intitulé  :  Mi'- 
moirc  on  avortissciuciil  aux  tidcles.  I^'upiiiion 
lii  plus  coumiunc  l'ait  Orioiiliiis  cs[iaj;iiol  do 
naissance  et  évoque  d'Elvire.  On  trouve,  en 
cilet,  HU  évf^qup  tic  ce  nom  qui  souscrivit  en 
qualitû  d'évc'(|uo  do  ccllo  ville  au  coiicilo  de 
Tarragoue  en  ulC.  Il  i)ai'ail  d'ailleurs,  par 
Fortunat,  dans  la  Vie  de  saint  Martin  de 
Tours,  et  par  saint  Sidoine  Apollinaire,  dans 
la  douzic'iuc  lettre  de  sou  neuvième  livre, 
qu'Orientius  élail  espagnol.  Ce  qui  peut  em- 
barrasser, c'est  que  le  poème  que  nous  avons 
sous  le  nom  d'Orentius  est  en  vers  élégia- 
(pies,  c'est- ù-dirc  hexamètres  et  pentamè- 
tres, au  lieu  que  celui  dont  parle  Sigebcrt 
était  en  vers  hexamètres,  ou  comme  il  le 
dit',  en  vers  héroïques.  Mais  c'était  l'usage, 
ilans  le  siècle  de  Sigcbcrt,  c'est-à-dire  dans 
le  onzième  et  le  douzième  siècles,  que  l'on 


appelle  les  siècles  de  la  basse  latinité,  d'appe- 
ler vers  héroïques  tons  ceux  qui  n'étaient 
point  lyriques.  Le  poème  d'Orientins  renfer- 
me de  très-bejles  instructions  sur  les  devoirs 
de  l'homme  envers  Dieu  et  envers  le  prochain. 
Four  engager  l'homme  à  l'amoiu-  de  Dieu  , 
il  fait  voir  en  détail  de  combien  de  bienfaits 
Dieu  l'a  comblé,  tant  par  rapport  au  corps 
que  par  rapport  ti  ITime.  11  insiste  tellement 
sur  la  nécessité  de  cet  amour,  qu'il  assure 
que  Dieu  ne  demande  autre  chose,  et  qu'il 
sullit  à  l'homme  '  de  rendre  amour  pour 
amour.  U  règle  la  conduite  que  nous  devons 
tenir  à  l'égard  de  noire  prochain  sur  cette 
maxime  :  «  >ie  faites  pas  A  autrui  ce  que  vous 
ne  voulez  point  qui  vous  soit  fait  à  vous-mê- 
mes, et  faites  aux  autres  ce  que  vous  voudriez 
que  l'on  vous  fit.  d  II  s'explique  nettement  sur 
la  manière  dont  nous  ressusciterons,  disant  ' 


à  qui  il  avait  refusiî  1.1  paix,  c'est-à-dire  parles  Tou- 
lousaius,  eutru  les  iiiaius  île  ijui  il  élail  toiiibr'.  Ci/tte 
ambassade  que  l'un  met  vers  l'an  439,  soiill'rirait 
lieaucoup  de  dilTieiillés,  si  l'on  ne  savait  par  le  té- 
moignage de  Salvien  ',  q>ie  les  Goths  dans  leurs 
guerres  avec  les  Romains,  di!pult;rent  souvent  des 
évoques  catholiques  pour  leur  demander  la  paix. 
Les  auteurs  de  Xn  Nouvelle  Gaule  chrétienne-,  fout 
également  saint  Orient,  évèque  d'Aucli;  mais  ils 
préleudeut  que  ee  fut  en  323,  et  qu'il  gouverna 
celte  église  jusqu'en  3G4.1ls  se  fondent  sur  un  mo- 
nument qui  ne  paraît  être  que  du  xu=  siècle.  Les 
actes  produits  par  les  Uollandistes,  sont  plus  an- 
ciens; et  quoiqu'ils  ue  soient  pas  originaux,  on 
peut  s'y  arrêter  préférablemcnt  au  monument  de 
l'Église  d'Auib,  d'un  âge  postérieur. 

L'édition  du  Poème  d'Orient  par  Martin  Delrio, 
n'eu  coiupreud  que  le  premier   livre.  Outre   celle 
qui  parut  à  Anvers,  chez  Joachim  Trogner  eu  1599 
ou  1600,  on  eu  fit  deux  à  Salamanque,  l'une  eu  160-J, 
in-4,   chez  Antoine  Taberniel  ;  et  une  seconde  eu 
1641.  11  en  parut  une  troisième  à  Leipsick,  eu  lOul, 
in-8.  avec  les  notes  d'André  llivinus.  fuis  ce  poème 
fut  imprimé  dans  la  Biblotlièque  des  Pères  à  Colo- 
gne, en  1618,  et  dans  celle  de  Paris  et  de  Lyou.  Dom 
Martèue   ayant  recouvré  l'ouvrage  entier  dans  ua 
manuscrit  d'euviron  SOO  ans,  le  publia  avec  quel- 
ques autres  anciens  opuscules,  à  Rouen  en  1700, 
in-4.,  et  en  1717,  dans  le  cinquième  volume  de  ses 
Anecdotes.  Le  Poème  d'Orient  est  cité  par  Fortu- 
nat, de  Poitiers  ',  dans  le  livre  de  la  Vie  de  saint 
Martin,  et  par  Sigebert  de  Gemblours  ;  son  nom  se 
lit  à  la  tète  de  l'ouvrage,  dans  le  manuscrit  de  l'É- 
glise de  Tours,  d'où  ou  l'a  tiré  pour  le  donner  au 
public,  et  à  la  fin  du  second  livre''  ;  en  sorte  qu'on 
ne  peut  se  méprendre  sur  l'auteur.  Ce  second  livre 
est  une  invective  contre  la  vaine  gloire,  le  men- 
songe, la  gourmandise  et  l'ivrognerie   dont  il  fait 
une  peinture  capable  de  donner  de  l'horreur  de  ces 

1  Salïian..  lib.  VII  De  Providenlia. 

3  Gallia  CbrisliaDa  cova,  ton).  I,  j'ag.  'A'i. 

3  Marteo.  Prolog.  Id  poë:ii.  Onci.l.,  loin.  V  .^necdot,,  pag.  18. 


vices.  Il  fait  voir  l'incoDstanee  des  biens  temporels 
pour  lesquels  on  se  donne  tant  de  peines,  et  l'a- 
vantage qu'il  y  a  à  leur  préférer  des  biens  éter- 
nels. C'est  à  ce  sujet  qu'il  décrit  les  calamités  qui 
désolaient  les  Gaules;  les  incursions  des  barbares, 
les  guerres,  les  incendies,  la  famine.  Il  passe  de  là 
à  la  description  des  supplices  destinés  aux  méchants 
dans  l'enfer,  et  à  la  félicité  dont  les  justes  jouiront 
dans  le  ciel.  L'ouvrage  porte  le  titre  de  Commoni- 
torium  ou  d'avertissement. 

U  est  suivi  de  quelques  petites  pièces  de  poésie, 
qui  roulent  toutes  sur  des  matières  de  piété  :  sur 
la  naissance  du  Sauveur,  sur  les  divers  nomsqu'on 
lui  doune,  comme  de  Vertu,  de  Sagesse,  de  Verbe, 
d'Époux,  de  Fleur,  de  Pierre,  d'Agneau,  etc.  ;  sur  la 
Trinité,  sur  l'Incarnatiou.  Dans  une,  il  explique  les 
noms  propres  ou  impropres  qu'on  donne  à  .lésus- 
Chrisl.  On  t'appelle  Lion,  parce  qu'il  est  le  roi  des 
rois,  comme  le  lion  l'est  des  bêtes  féroces.  U  est 
nommé  Sagesse,  parce  qu'il  est  la  règle  de  la  vie  ; 
et  Doigt  de  Dieu,  à  cause  que  c'est  par  lui  que  la 
loi  de  Dieu  a  été  écrite.  Vient  ensuite  un  poème  de 
louanges,  où  l'auteur  entre  dans  le  détail  des  créa- 
tures qui  louent  Dieu;  puis  des  formules  de  prières 
au  nombre  de  vingt-quatre.  Le  manuscrit  de  Tours 
n'a  fourni  que  la  première  et  la  vingt-quatrième.  On 
ne  sait  ce  que  les  autres  sont  devenues.  La  Vie  ou 
les  actes  d'orient,  se  trouvent  dans  le  second  tome 
delà  Nouvelle  bildiolhèque  du  Père  Labhe  et  dans 
les  Dollandislcs  au  premier  jour  de  mai.  i> 

1  Conimonilorium  fidelibus  scripsit  métro  he- 
roico,  ut  mulceat  legcnlem  suavi  breviloquio.  Si- 
gebert., cap  XXXIV. 

-  Suljlcit  ut  Dominum  servus  amalus  âmes. 
Pag.  877. 

'  Ora;  color,  sanguis,  venœ,  cutis,  ossa,  capilli 
ut  nunc  lahunlur,  sic  ilerum  venient...totum  ade- 
rit,  toium  dicersa  ex  parte  coibit...  pars  volucri 
aut  pisci,  pars  lanialu  feris.  Ibid. 

4  Ul  prccaiores  viccens  Ortenllus  omnes, 
SsQCtorum  TCQiam  promercor  procibus. 


102 


HISTOIRE  ui:n!:rale  des  auteurs  ecclésiastiques. 


que  ce  sera  dans  le  même  corps,  avec  les 
mêmes  veines,  le  môme  sani;,  la  même  cou- 
leur, la  même  peau,  les  mêmes  os,  les  mê- 
mes cbevcux,  les  mêmes  membres,  soit  qu'ils 
aient  ëlë  réduits  en  poussière  dans  le  tom- 
beau, soit  qu'ils  aient  été  dévorés  par  les 
bêtes  ou  mancés  par  les  poissons,  en  sorte 
que  dans  le  même  corps  où  nous  avons  fait 
le  bien  et  le  mal,  nous  serons  ou  punis  ou 
récompensés  selon  le  mérite  de  nos  actions. 
Il  tire  des  preuves  de  la  résurrection,  de  la 
révolution  qui  se  fait  annuellement  dans  la 
nature,  où  nous  voyous  les  arbres,  qui  dé- 
pouillés de  leui-s  feuilles  pendant  l'hiver, 
paraissent  morts,  revivre  au  printemps  ,  et 
donner  des  fruits  eu  automne.  Ensuite  Orien- 
tius  invective  contre  les  vices  d'impureté, 
d'envie,  d'avarice,  et  finit  son  poème  par  les 
avantages  de  l'aumône,  montrant  qu'il  ne 
faut  pas  attendre  à  la  mort  pour  donner, 
parce  qu'alors  on  ne  donne  que  ce  qu'on  ne 
peut  plus  retenir.  Il  fait  auesi  l'éloge  de  la 


paix  qu'il  veut  que  nous  ayons  toujours  non- 
seulement  dans  la  boucbe,  mais  aussi  dans 
le  cœur,  fallùt-il  lui  sacrifier  nos  ressenti- 
ments. Il  semble  qu'il  manque  quelque  cho- 
se et  qu'Orientius  combattait  encore  les  pé- 
chés de  gourmandise,  de  paresse,  d'orgueil 
et  peut-être  quelques  autres,  mais  les  ma- 
nuscrits ne  portent  que  ce  que  nous  avons 
dans  les  imprimés.  Ce  poème  a  de  la  dou- 
ceur, les  vers  en  sont  coulants  et  les  matiè- 
res traitées  avec  beaucoup  de  netteté.  Mar- 
tin Delrio  le  fit  imprimer  à  Anvers,  en  1600, 
avec  des  notes  de  sa  façon  qu'il  soumet  à  la 
censure  de  la  sainte  Eglise  apostolique,  ca- 
tholique et  romaine.  On  l'imprima  depuis  à 
Salamanque,  en  1644,  avec  les  mêmes  notes, 
et  ensuite  dans  le  huitième  tome  de  la  lii- 
blothègue  des  Pères,  à  Lyon  en  1677  ;  [dans 
le  tome  X  de  la  Bibliollièque  de  Galland,  avec 
uue  notice,  et  dans  le  tome  LXI  de  la  Patro- 
lotjie  lutine,  d'après  Galland.] 


CH.VPITRE  V. 
Epipiane  scholastique  [écrivain  latin],  Thodore  lecteur  [écrivain  grec]. 

[Vers  l'an  535.] 


Ej)t;.banp 
icbAl  Astique. 


1.  Épiphaue,  que  l'on  a  surnommé  scho- 
lastique, apparemment  parce  qu'il  faisait  les 
fonctions  d'avocat,  était  itahcn  de  naissance, 
et  très-habile  dans  les  langues  latine  et  grec- 
que. Cassiodore,  qui  connaissait  ses  talents, 
l'engagea  '  à  traduire  en  latin  les  Histoires 
ecclésiastiques  de  Socrale,  de  Sosomène  et 
de  Théodoret,  afin,  dit-il,  que  la  Grèce  ne  se 
vantût  pas  de  posséder  seule  un  ouvrage  si 
admirable  et  si  nécessaire  à  tous  les  chré- 
tiens. Quand  Épiphane  les  eut  traduites, 
Cassiodore  en  fit  un  seul  corps  d'histoire  di- 
visé en  douze  livres,  à  qui  il  donna  le  nom 
d'Histoire  fri/xtrtite.  Mais  en  réduisant  en  un 
corps  les  histoires  de  Socrate,  de  Sosomène 
et  de  Théodoret,  il  ne  s'assujettit  point  à  les 
rapporter  en  leur  entier  et  dans  le  même 
ordre  qu'elles  avaient  été  écrites.  Il  prit  de 
chacune  ce  qui  lui  paraissait  meilleur,  citant 
à  la  marge  les  endroits  d'où  il  les  prenait, 

'  rasfiodor.,  Prwfat.iv  Pi.<!(or.(nparti7.,pag.l89. 
et  lit).  Inslit.  diiin.,  cap.  .\mi. 


avec  le  nom  d'auteur,  et  toujours  suivant  la 
version  d'Épipliane,  qui  parait  assez  fidèle  et 
assez  exacte.  On  avait  déjà  en  latin  les  deux 
livres  de  Vllistoire  ecclésiastique  d'Eusèbe, 
traduits  par  Rufin,  qui  y  eu  avait  ajouté  deux 
autres,  dans  lesquels  il  comprenait  ce  qui  s'é- 
tait passé  depuis  la  vingtième  année  du  rè- 
gne de  Constantin  jusqu'à  la  mort  du  grand 
Théodose,  c'est-à-dire  jusqu'à  l'an  395.  L'ilis- 
Joire  trijxirtite  servit  de  continuation  à  celle 
de  Hufin.  Le  scholastique  Epiphane  mit  aussi 
en  latin  les  Commentaires  de  Didyme  sur  les  u.i.di'.I^J; 
Proverbes  de  Salomon  et  sur  les  sept  Épitres  ''  ""  "  '" 
canoniques,  de  même  que  ceux  de  saint  Epi- 
phane sur  les  Cantiques.  Mais  il  ne  nous  res- 
te aucune  de  ses  versions,  si  ce  n'est  celle 
qu'il  fit  des  histoires  de  Socrate,  de  Soso- 
mène et  de  Théodoret  à  la  prière  de  Cassio- 
dore, et  celle  de  la  collection  des  A/y/VrM  si/- 
nodales  écrites  à  l'empereur  Léon,  l'an  438; 
pour  la  défense  du  concile  de  Chalcédoinc. 
Celle  collection,  qui  se  tro\ive  dans  le  qua- 
trième toiue  des  Conciles  du  Père  Labhc,  a 


ÉPIPHANE  SCHOLASTIQUE,  THKOnORE  LECTEUR. 


[vr  SIKCLE.] 

été  donnée  plus  correcte  et  avec  quelques 
iui^uKMilatuMis  par  M.  Baluzo,  sur  un  uia- 
lui.scrit  (le  lleauvais  et  siu'  un  aulre  ilo  l'Ab- 
bayo  de  Corbic,  tous  les  deux  très-anciens 
et  d'environ  huit  cents  ans. 
TModor.  2.  On  ne%ait  pas  d'où  était  Théodore,  qui 
;"'•  *"  a  aussi  travaillé  sur  l'histoire.  11  y  a  quel- 
ques preuves  qu'il  était  papiilaj^onien,  mais 
elles  ne  sont  pas  certaines.  11  lit  dans  l'Église 
de  Constantinoplc  les  fonctions  de  lecteur,  et 
il  parait  qu'il  ne  parvint  pas  à  un  plus  haut 
ilogré,  puisque  le  nom  lui  en  est  demeuré. 
Suidas  dit  qu'il  avait  écrit  l'histoire  de  l'E- 
glise depuis  Constantin  jusqu'à  Justinien  '  ; 
mais  il  faut  lire  .lusiin  au  lieu  de  Justinien, 
à  mohis  que  Tluodore  n'ait  écrit  quelque 
chose  de  plus  que  ce  que  nous  avons  de  lui. 
Il  composa  d'abord  une  Histoire  tripartite, 
qui  n'était  qu'une  compilation  de  Socrate, 
de  bosomène  et  de  Théodoret.  11  la  divise  en 
deux  livres,  dont  le  premier  commence  à  la 
vingtième  année  de  Constantin,  et  le  second 
tinit  à  l'Empire  de  Julien.  Cet  ouvrage  est  en 
manuscrit,  à  Venise,-dans  la  Bibliothèque  de 
Saint-Marc.  On  ne  l'a  pas  encore  mis  sous 
presse. Léo  Allatius  en  avait  eu  un  exemplaire, 
d'où  M.  de  Valois  a  tiré  un  grand  nombre  de 
dillérenles  leçons  pour  les  histoires  de  Socra- 
te, de  Sosomèue  et  de  Théodoret.  A  ces  deux 
livres,  Théodore,  lelecteur,  en  ajouta  deux  au- 
tres de  son  propre  fonds,  commençant  le  pre- 
miei'  où  Socrate  avait  fini,  et  conduisant  le  se- 
cond jusqu'au  règne  de  Justin  l'Ancien,  c'est- 
à-dire  jusqu'en  318.  Nous  n'en  avons  plus 
qu'un  extrait  publié  en  grec  et  en  latin  sous 
le  nom  de  Nicéphore  Calliste.  Il  suit  avec 
assez  d'exactitude  l'ordre  des  temps  jusqu'à 
la  mort  de  l'empereur  Anastase.  Mais  il  y  a 
moins  de  suite  dans  le  reste  de  l'ouvrage, 
qui  semble  être  un  nouvel  extrait  tiré  ou  de 
Théodore  même,  ou  peut-être  de  quelque 
auti-e  historien,  puisque  Théodore  y  est  cité 
lui-même.  Outre  l'extrait  de  Théodore,  fait 


103 

par  Nicépliore  Calliste,  on  rapporte  quelques 
endroits  cités  par   saint   Jean  Damascènc  , 
par  le  septième  concile  et  par  d'autres.  Dans 
le  passage  que  saint  Jean  Damascène  rap- 
porte du  quatrième  livre  de  Vllistoire  ecclé- 
siastique de  Théodore ,  cet  historien  met  fort 
au  long  un  événement  que  Victor  de  Tunes 
raconte  en  peu  de  mots  sur  l'année  498.  Un 
arien,  nommé  Olympius,  blaspliémant  dans 
le  bain  public  du  Palais  d'Hélène  à  Constan- 
tinoi)le  contre  la  Sainte  Trinité,  pc'-rit  aussitôt 
misérablement  par  la  main  d'un  ange,  qu'il 
vit  lui  verser  trois  seaux  d'eau  bouillante,  ou 
de  feu  sur  le  corps  ;  il  en  mourut,  quoiqu'il  fût 
alors  dans  un  bain  d'eau  l'ioidc.  On  lît^  un  ta- 
bleau représentant  ce  miracle  par  ordre  de 
l'empereur  Anastase,  et  on  le  mit  dans  le  lieu 
même  où  la  chose  était  arrivée.  Les  ariens, 
que  ce  miracle  fâchait  beaucoup ,  obtinrent 
d'Eutychien,  concierge  de  ce  palais ,  en  lui 
donnant  de  l'argent,  qu'il  ùtâl  le  tableau  sous 
prétexte  de  le  nettoyer.  Mais  Anastase  l'y 
fit  remetti-e.   Théodore   ajoute   qu'outre  le 
tableau  fait  par  ordre  de  l'Empereiu",  on  en 
voyait  un  autre  fait  par  Jean,  diacre  et  dé- 
fenseur de  l'Kglise  de  Saint-Étienne,  proche 
du  Palais  d'Hélène,   homme   extrêmement 
zélé  pour  la  foi  de  la  consubslantialifé  ;  qu'il 
y  avait  le  nom  et  même  la  demeure  de  tous 
ceux  qui  avaient  été  témoins  des  blasphè- 
mes d'Olympius  et  de  sa  mort,  en  particulier 
de  ceux  qui  avaient  soin  du  bain  ;  que  ce  ta- 
bleau se  voyait  encore  dans  le  temps  qu'il 
écrivait.  Théodore  dit  que  les  catholiques 
qui  ouïrent  les  blasphèmes  d'Olympius,  le 
voulaient  tuer  ;  mais  qu'ils  en  furent  empê- 
chés par  Magnus,  prêtre  de  l'Église  des  Apô- 
tres, qui  était  un  homme  admii-able  et  un 
vrai  servitem"  de  Dieu.  Cet  historien  avait 
marqué  l'année  du  miracle  et  le  nom  des 
consuls,  mais  saint  Jean  Damascène  a  omis 
l'un  et  l'autre,  disant  seulement  que  la  chose 
était  arrivée  sous  le  23  du  mois  de  décembre , 


»  Le  tome  VU  du  Spicilegium  romanum,  pag.  29 
et  32  de  la  préface,  coutient  en  grec  uu  fragment  sur 
la  cause  du  suhisme  des  studites  qui,  d'après  leur 
elief  Tlitiodore,  se  séparèrent  pour  quelque  temps 
des  patriarches  Tarasius  etNicéphore  ;  c'est  un  pré- 
cieux fragment  d'iiistoire  ecclésiastique.  Voir  Bou- 
uetty,  table  alphabétique  des  auteurs  profanes  et 
ecclésiastiques  découverts  par  Mai.  {L'éditeur.) 

2  Sub  hoc  consulatu  die  23,  mcnsis  decembris, 
lerribile  ingensque  miraculuin  contiyit  quod  om- 
nium aures  perculit...  Ubi  vero  res  isla  ad  impe- 
ratoris  Anaslasii  aures  pervenit,  jussit  ut  mira- 
cdlum  cûloribus  in  tabula  depiolor  in  superiori 


labri  parte  afflgereiur.  Porro  Jonnnes  quidam  dia- 
conus  et  sanctœ  illius  Ecclesiœ  Stephaniprimi  mar- 
tyrisnomine  dicatœ  defensor,  vir,  si  qiiis  alius,  se- 
lumprodogmate  consubstanlialitalis  luemlo  nus- 
quain  non  exserens,  ipso  quoqiie  non pingendam 
modo,  scdut  eorum  qui  illic  lavabunlur  nomina 
et  ubi  ipsorum  quisque  habitaret,  adscribendiun 
curavit;  insuper  et  illorum  qui  aqiias  minislra- 
bant  nomina  subjecit.  Atqui  hœc  quidem  imago  ad 
hoc  usque  tempus  rei  gestœ  fidem<  facit.  Dauias- 
ccu.,  Orat.  3,  de  imaginibus  ,  pag.  377,  e.r  Ilist. 
Eccles.  Theodor.,  tom.  IV. 


104 


msTomii:  générale  des  auteurs  ecclésiastiques. 


c'est-.'^-dire  le  jour  même  de  \oiil.  Le  fait 
est  encore  attesté  par  Tliéopliane,  par  Sui- 
das, et  il  est  rapporté  dans  l'Histoire  mélan- 
gée par  Adon  cl  par  Sigebert.  D  y  en  a  qui 
pr(''tcndent  qu'au  lieu  de  Théodore  on  doit 
lire  Théodorct  dans  le  texte  de  saint  Jean 
Damascène.  Mais  ils  n'ont  pas  fait  attention 
que  Théodoret,  étant  mort  avant  le  règne 
d'Anastase,  n'a  pu  rapporter  un  événement 
qui  se  passa  sous  ce  prince.  Il  faut  donc 
convenir  que  ce  miracle  a  été  rapporté  par 
Théodore,  le  lectciu-;  et  que  par  le  quatrième 
livre  de  son  Histoire,  d'où  saint  Jean  Damas- 
cène  dit  qu'il  l'a  lire,  on  doit  entendre  le 
second  des  deux  livres  qu'il  ajouta  aux  deux 
de  l'Histoire  tri/xirtite  qu'il  avait  composée 
à  la  prière  de  l'évéque  ou  d'un  prêtre  de 
Gangres  en  Paphlagonie,  en  se  servant  des 
histoires  de  Socrate ,  de  Sosomène  et  de 
Théodoret. 
c.qoiii»  ^-  On  peut  remarquer  ce  qui  suit,  dans  l'A- 
fr.J^rX:  hrégé  de  l'histoire  de  Théodore,  fait  par  Ni- 
loir.  de  Kéo.  céphore  Callisle  :  que  l'impératrice  Eudoxie, 
étant  allée  à  Jérusalem,  envoya  à  Pulchérie 
le  portrait  de  la  Sainte  Vierge,  peint  par  saint 
Luc  ';  que  Pulchérie  mourut  après  avoir  fait 
quantité  de  saintes  actions,  et  avoir  donné 
tout  son  bien  aux  pauvres;  que  l'empereur 
Marcién,  son  mari,  loin  de  désapprouver  son 
testament,  fournit  libéralement  les  fonds  né- 
cessaires pour  l'exécuter.  «  Du  temps  du  pa- 
triarche Gennade,  dit-il,  il  y  eut  un  peintre 
dont  la  main  sécha  en  punition  de  ce  qu'il 
avait  osé  peindre  le  Sauveur  sous  la  forme 
de  Jupiter;  on  le  doit  représenter  sous  une 
autre  ligure,  et  lui  faire  des  cheveux  clairs 
et  crêpés;  à  Constanlinople,  sous  le  pontifi- 
cat du  même  Gennade,  il  arriva  un  incendie 
donl  Marcien ,  économe  de  l'église ,  arrêta 
le  cours  avec  le  livre  des  Évangiles ,  par  ses 
prières  et  par  ses  larmes,  Deutérius ,  pour- 
suit-il, évoque  des  ariens  de  Conatantinople, 
au  lieu  de  dire  les  paroles  (jue  le  Sauveur 
nous  a  enseignées,  eut  la  hardiesse  de  dire, 
en  baptisant  un  homme  nommé  Barbas  '  : 
Barbas  est  baptisé  au  nom  du  Père,  par  le 


Fils,  dans  le  Saint-Fsprit  :  mais  que  l'eau 
qui  était  dans  les  fonts  s'écoula  à  l'heu- 
re même;  Barbas  s'enfuit  et  dit  à  tout  le 
monde  ce  qui  était  arrivé.  Timothée,  évo- 
que de  la  même  ville  pour  les  catholi- 
ques, ordonna  '  que  les  fidèles  réciteraient 
en  toutes  leurs  assemblées  le  Symbole  de 
Nicée,  au  lieu  qu'on  ne  le  récitait  aupara- 
vant que  le  jour  du  Vendredi-Saint,  lorsque 
l'évoque  instruisait  ceux  qui  devaient  rece- 
voir le  baptême,  n  Tliéodore  raconte  qu'il  y 
avait  sur  la  frontière  de  la  Perse  et  des  In- 
des un  fort  nommé  Tzundader  que  Cava- 
de,  roi  de  Perse,  souhaitait  de  réduire  à 
son  obéissance,  parce  qu'il  apprit  qu'il  y 
avait  dans  cette  forteresse  beaucoup  d'ar- 
gent et  de  pierreries.  Il  eut  d'abord  recours 
aux  enchantements  des  mages  et  à  la  magie 
des  juifs,  pourchasser  de  ce  lieu  les  démons 
qui,  à  ce  qu'on  disait,  gardaient  le  fort; 
mais  cette  tentative  n'ayant  pas  réussi,  de 
l'avis  de  quelques  personnes,  il  implora  la 
puissance  du  Dieu  des  chrétiens.  L'évéque, 
ayant  donc  assemblé  les'fidèles,  célébra  les 
saints  mystères,  y  participa,  les  distribua  au 
peuple,  chassa  les  démons,  par  la  force  du 
signe  de  la  croix,  et  mit  Cavade  en  posses- 
sion du  fort.  Ce  prince,  étonné  du  miracle, 
donna  à  l'évoque  le  premier  rang  que  les 
manichéens  et  les  juifs  avaient  tenujusque-l;i 
dans  la  Perse,  et  permit  h  ses  sujets  de  faire 
profession  de  la  religion  chrétienne.  Almon- 
dare,  pi'ince  des  Sarrazins,  ayant  embrassé 
la  loi  de  Jésus-Christ,  Scvèrelui  envoya  deux 
évêques  de  sa  secte  pour  l'engager  dans 
l'erreur.  Mais  ce  prince,  par  une  inspiration 
de  Dieu,  reçut  le  baptême  de  ceux  qui  sou- 
tenaient le  concile  de  Chalcédoinc;  et  comme 
ces  deux  évoques  le  pressaient  toujours 
d'embrasser  leur  doctrine,  il  usa  de  l'artifice 
suivant  pour  leur  eu  faire  voir  la  fausseté.  Il 
feignit  d'avoir  reçu  des  lettres  par  lesquel- 
les on  lui  mandait  que  saint  Michel  archan- 
ge était  mort.  Los  deux  évoques  lui  ayant  ré- 
pondu que  cela  n'était  pas  possible  :  «  Com- 
ment donc,  leur  rcplicpia-t-il,  Jésus-Clirist 


'  Pulcheriœ  Eudoxia  imaginem  llalris  Christi 
quamLucas  aposlolus  pinxerat  llicrosoltjmis  mi- 
Sil.  Tlieodor.,  Hb.  I  Uisl. 

'  Deulerius  episcoims  arianorum  Conslantino- 
poli  cum  Uarbartun  quemdam,  sicdictum,  hapli- 
zarel,  rcprobala  elcorrupla  dominica  Iradilione, 
ausus  est  inter  baplizandum  dicere  :  Uajilizatur 
Bnrl:a5,  in  nomino  l'.itris  fer  Filium  in  Sancto 
Siiiritu;  quo  dicta  aqua  in  colymhelhra  cvanitit. 


Barbas  vero  arrepta  fuga-  exivit,  et  miracuhim 
hoc  ciinclis  significavil.  Tlieodor.,  lih.  Il  Uisl. 

'  Timolhetis  ab  cnniris  rogatits  symholum  fidei 
trecentorumdecem  eloclo  Palntmpersingulas  sy- 
naxes  dici  curavit,  cum  anlea  semel  ttiiilum  in 
anno  in  Parasceva,  scilicel  dominicœ  passionis, 
tcmpore  quo  episcopus  caleckisabal,  recitatum  es- 
set.  IbiU. 


[vi"  SIÈCLE.]  HPIPHAXE  SCIIOI>ASTI0UE 

n-t-il  pu  mourir  sur  la  croix,   s'il  n'a  pas 
doux  iiiihiros,   puisqu'un  augo  no  saurait  ni 
mourir  ni  nu'me  soull'rirîi)  Lns  ôv('(jups,  ne 
pouvant  ri'|)li(iucr  h  cet  ai'guniont,  se  retirè- 
rent confus.  Deux  autres  évèqucs,  dont  l'un 
était  orthodoxe,  l'autre  arien,  entrèrent  un 
jour  en  dispute.  L'arien  savait  l'art   de   rai- 
sonner; mais  l'orlliodoxe  n'ayant  que  de  la 
piété  et  de  la  foi,  proposa  à  son  adversaire 
de  renoncera  la  dispute,  et  de  se  jeter  tous 
deux  dans  le  feu  pour  reconnaître  par  cette 
épreuve  lequel  des  deux  soutenait  la  vérité. 
L'arien  refusa  cette  condition  ;  mais  l'orllio- 
doxe se  jeta  dans  le  feu,  conféra  du  milieu 
des  flammes  avec  l'arien,  sans  sentir  aucune 
incommodité.  Théodore  parle  de  la  transla- 
tion d'un  grand  nombre  de  reliques  à  Cons- 
tantinople  ,  savoir  de  celles  de  saint  Timo- 
tliée,  de  saint  André,  de  saint  Luc,  de  saint 
Jean  Chrysostùme,  et  de  sainte  Anastasie.  L 
dit  qu'on  trouva,  dans  l'Ile  de  Chypre  ',  le 
corps  de  saint  Barnabe,  apôtre,  sous  un  ar- 
bre ;  qu'il  avait  sur  sa  poitrine  l'Évangile  de 
saint  Mathieu,   écrit  de   la   main    de   saint 
Barnabe  même  ;  que  les  habitants  de  cette 
ile  obtinrent  pour  ce  sujet  que  leur  Eglise 
ne  dépendrait  plus  de  celle  d'Antioche  ;  et 
que    l'empereur   Zenon    mit    cet  Evangile 
dans  l'église  de  Saint-Étienne ,  bûtie  dans 
l'enclos  du  Palais. 
Édiiions  iio       4.  h'Bistoire  de  Théodore ,  le  lecteur ,  fut 

110  lil>loiro.  . 

imprimée  à  Pans,  en  1544,  avec  celles  d  Eu- 
sèbe,  de  Socrate,  de  Sosomène  et  des  au- 
tres historiens  grecs,  par  les  soins  de  Robert 
Etienne,  mais  en  grec  seulement.  On  l'impri- 
ma en  grec  et  en  latin  à  Genève  en  1612,  et 
encore  à  Paris  en  1673,  de  la  version  et  avec 
les  notes  de  monsieur  Valois.  [Les  extraits 
I  qui  nous  restent  de  l'Histoire  Ecclésiastique 

de  Théodore,  sont  reproduits  d'après  Valois 
et  Suarez,au  tome  LXXXVI  de  la  Patrologie 
grecque,  col.  157-2280,  avec  deux  notices  : 
l'une  tirée  de  Mai',  Biblioth.  Nova,  tome  VI, 
p.  152  ;  et  l'autre  tirée  de  Fabricius  dans  la 
notice  de  Mai.  On  retrouve  la  Préface  que 
Théodore  avait  mise  à  la  tête  de  son  Histoire 


,  THI'OnonE  LECTEUR.  103 

ecclésiastique.    L'extrait   donné   par  Suarez 
dans  ses  notes  aux  ouvrages  de  saint  Nil, 
p.   614  ,  énumère  les  L'ujjositions  de  la  foi. 
Timoihée  compte  onze  expositions.  La  pre- 
mière est  celle  de  Nicée  ;  la  deuxième  celle 
d'Antioche  ;   la  troisième  est  celle  qui  fut 
présentée  ;'i  l'empereur  Constant   par  ceux 
qui  étaient  avec  Narcisse  dans  les  Gaules; 
la  quatrième  est  celle  qui  fut  envoyée  par 
Eudoxe  h  ceux    qui   étaient  dans   l'Italie. 
L'auteur   compte    trois   expositions  de   Sir- 
mium,   dont  la  première  fut  lue  h  Rimini 
après  le  consulat  d'Eusèbe  et  d'Hypatius.  La 
huitième  exposition  fut  faite  a  Sélcucus  par 
ceux   qui  étaient  avec  Acace.   La  onzième 
et  dernière  fut  faite  à  Constantinople,  avec 
l'addition  qu'on  ne  pouvait  point  dire  qu'il 
y  eût  en  Dieu  subsistance  et  essence.  Théo- 
dore ajoute   :  u  Ulphilas,  évéque  des  Gbths, 
souscrivit   d'abord  h  cette   Exposition,   car 
précédemment  il  avait  embrassé  la  foi  de 
Nicée,  suivant  en  cela  l'exemple  de  Théo- 
phile,  évéque  des  Goths,  qui  avait  assisté 
au  concile  de  Nicée  et  avait  souscrit  à  ses 
décrets.]  Le  président  Cousin  a  traduit  en 
français  l'Histoire  de  Théodore. 

5.  Aubert  le  Myre  '  met  Théodore,  le  lec-  En  ;.ie 
teur  dans  le  xiV  siècle,  disant  qu'il  vivait  vers  ''""  »  '■*"'■ 
l'an  1320;  ce  qui  est  une  erreur  grossière, 
puisque  saint  Jean  Damascène,  qui  écrivait 
dans  le  vm"  siècle,  cite  l'histoire  de  Théodore, 
ainsi  qu'on  l'a  dit  plus  haut.  L'opinion  com- 
mune est  qu'il  vivait  vers  l'an  520,  et  qu'il 
finit  son  Histoire  avant  le  cinquième  concile 
général,  c'est-à-dire  avant  l'an  533,  à  cause 
du  titre  de  sainte  mémoire  ^  qu'il  donne  à 
Théodoret,  dont  les  écrits,  ni  la  personne  ne 
furent  point  épargnés  dans  ce  concile.  Ce 
qui  le  prouve  mieux,  c'est  que  Théodore 
qui  parle  souvent  du  concile  de  Chalcédoine, 
ne  dit  rien  de  celui  de  Constantinople,  que 
nous  connaissons  sous  le  nom  de  cinquième 
général.  Aurait-il  oublié  ou  négligé  de  par- 
ler d'une  assemblée  où  il  se  passa  tant  de 
choses  remarquables  ? 


'  Reliquiœ  Barnabœ  apostoli  inventœ  sunt  in 
Cypro  sub  arbore  ceralen,  liabenles  sub  pectore 
ecangelium  Malthœi  mantiipsius  Barnabœ  scrip- 
tum  :  qua  occasione  Cyprii  viclores  i  vaserunt  ut 
Metrnpolis  ipsorum  liherum  habeat  episcopalum, 
nec  Antiocheni  episcopi  jurisdictionisubsit.  Evan- 


gelium  autem  illud  Zenon  in  Palalio  sub  atia  co 
rona  condit.  Tlieod.  lib.  [I  Hist. 

2  Vixit  autem  Theodorus  Anagnosles  sive  Lec- 
tor  sub  annxitn  millesimum  Irccenlesimum  vice- 
Si'mi/m.  Aubertus,  ia  Auctu aria,  cap.  ccccxxvu. 

■^  Tlieodoret.  V.Tles.  Proleg.,  pag.  20. 


106 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


CHAPITRE  VI. 

Sévère  de  Sozople,  Jean  de  Scythople,  Basile  de  Cilicie,  Jean  d'Egée,  Jean  et 
Epiphane  de  Constantinople,  [Épiphane  de  Chypre]. 

[Écrivains  grecs  Ju  vi«  siècle.] 


Sivcre 
Soiople. 


1.  L'hérésie  cutychdcnne  trouva  dans  Sé- 
vère un  si  zélé  défenseur,  qu'elle  l'a  regardé 
comme  son  second  fondateur.  Il  était  de  So- 
zople, ville  de  Pisidie.  Né  avec  '  un  esprit 
lurbident  et  inquiet,  on  le  vit  souvent  chan- 
ger de  sentiment  et  toujours  prêt  à  brouiller. 
La  première  religion  qu'il  suivit  *  fut  celle  du 
paganisme,  dont  on  prétend  '  qu'il  ne  se 
délit  jamais  entièrement.  De  Sozople  il  passa 
à  Béryte  pom-  y  apprendre  l'éloquence  du 
barreau  et  y  étudier  les  lois.  Il  ne  Lorna  pas 
1;\  son  application  ;  il  apprit  encore  la  magie. 
On  lui  en  lit  des  reproches.  Pour  s'en  mettre 
à  couvert,  et  éviter  les  châtiments  de  sa  vie 
déréglée,  il  reçut  '  le  baptême  à  Tripoli,  en 
Phénicie,  dans  l'Église  de  Saint-Léouce , 
martyr.  Mais  avant  que  la  semaine  de  son 
baptême  fût  écoulée,  il  renonça  à  l'Église 
catholique  dans  laquelle  il  l'avait  reçu,  et 
se  jeta  dans  le  parti  des  acéphales.  S'élant 
retiré  dans  un  monastère  composé  de  moi- 
nes de  cette  secte,  situé  entre  Maïume  et 
Gaza,  il  y  embrassa  l'état  monastique.  Les 
principaux  maîtres  qu'il  eut  dans  l'impiété 
eutychéenne  fuient  Marnas  ''  et  Uomain  qui 
gouvernèrent  successivement  le  monastère 
d'Éleuthérople  en  Palestine.  Etant  allé  °  à 
Alexandrie  avec  plusieurs  des  acéphales,  il 
y  mit  le  trouble  dans  l'Église.  Les  divisions 
qu'il  causa  parmi  le  peuple  allèrent  jusqu'à 
former  une  guerre  civile.  Mais  il  pensa  en 
être  la  victime,  et  il  ne  put  éviter  que  par 
la  faite  la  punition  qu'il  avait  méritée.  Les 
alexandrins  l'anathémalisèrent  avec  ceux  de 
sa  suite ,  et  prononcèrent  contre  eux  toutes 
les  censures  ecclésiastiques.  Il  parait  que 
Sévère  était  dès  lors  prélre  dans  sa  secte. 
Du  moins  l'était-il  '  quand  il  réfuta  l'écrit 
d'un  nommé  Lampécius,  prêtre  messalien. 


Nous  n'avons  plus  cet  om-rage.  Celui  de 
Lampécius  était  intitulé  :  Testament.  Sévère, 
obligé  de  sortir  d'Alexandrie ,  se  retira  * 
avec  les  siens  dans  le  monastère  de  l'abbé 
Néphale,  qui  avait  depuis  quelque  temps 
quitté  la  secte  des  acéphales  pour  se  réunir 
à  l'Église  catholique.  Les  disputes  qu'il  excita 
dans  cette  maison  l'en  firent  chasser  par  les 
moines  avec  beaucoup  d'autres  qui  suivaient 
les  mêmes  errem-s  que  lui.  C'était  en  310. 
La  même  année,  il  alla  à  Constantinople, 
autant  pour  chercher  de  l'appui  à  ceux  de 
sa  secte,  que  pour  se  plaindre'  des  mauvais 
traitements  qu'il  avait  reçus  de  la  part  des 
catholiques.  Plusieurs  de  ceux,  qu'il  avait 
séduits,  le  devancèrent  dans  cette  ville; 
d'autres  l'y  accompagnèrent,  faisant  en  tout 
près  de  deux  cents  '"moines  venus  d'Orient. 
L'empereur  Anasfase  le  reçut  avec  honneur, 
lui  et  ses  moines  qui,  se  sentant  appuyés  de 
la  puissance  impériale,  jetèrent  le  trouble 
dans  Constantinople.  Us  y  tenaient"  des  as- 
semblées particulières,  baptisaient  en  secret 
et  en  public  tous  ceux  qui  prenaient  parti 
dans  leur  secte.  Sévère,  qui  avait  "plusieurs 
fois  anathématisé  Pierre  Mongus,  ne  rougit 
point  alors  de  se  joindre  à  ceux  de  sa  com- 
munion ;  et  lorsqu'on  lui  en  faisait  des  re- 
proches ,  il  répondait  que  ce  n'était  point 
Mongus,  mais  Pierre  d'.\paméeà  qui  il  avait 
dit  analhème.  La  réunion  de  tous  ces  enne- 
mis de  la  vérité  avait  pour  but  de  ruiner  le 
concile  de  Chakédoine,  et  de  faire  déposer 
Macédonius  qui  en  prenait  la  défense.  Ma- 
cédonius  dit  "  anathème  à  tous  ceux  qui  se 
déclareraient  contre  ce  concile.  Dorothée, 
moine  d'Alexandrie  '\  composa  un  écrit  assoe 
cnllé  pour  soutenir  les  décrets  de  Ghalcédoi- 
ne,  et  le  présenta  à  Magna,  femme  du  frère  de 


III,  cap.  xxxui.  —  9  ibid.,  cap.  xliv.  —  '»  Toiii.  IV 
Concil.,  pag.  IU4.  -  "  Tom.  V  Concil.,  pag.  124. 
1!  Libérât.,  cap.  .\ix.  —  "  Tlieoplian.,  in  Chro- 
121.—  '  Photius,  Cod.  52,  pag.  41.  —  '  Evagr.,'lib.      nog.,  pag.  104.  —  "  Ibid. 


'  Tom.  V  Concil.,  pag.  121.  —  -  Ibid.,  pag.  40. 

—  '  Ibid.,  pag.  120.  —  '  Evagr.,  lib.  III,  cap',  xxxui. 

—  '  Liberalus,  caj).  xix.  —  ^  Tom.  V  Concil.,  pag 


SIÏVÈnE  SOZOPLE ,  JEAN  DE  SCYTHOPLE ,  ETC. 


[Vl*  SIÈCLE.] 

l'empereur  Anaslase,   qui  était  demeurée 
conslante  dans  la  foi  catliolique.  Nous  n'a- 
voHs  plus  ce  livre.  Anaslase  le  lut  ;  mais  le 
trouvant  plus  fort  et  mieux  ti'availh;  qu'il  ne 
le  pensait,  il  relégua  Dorothée  à  Oasis,  fai- 
sant des  railleries  sur  son  ouvrage,  parce  qu'il 
l'avait  intitulé  :  Tra(j(kUe  di'  l'clnf  présent  des 
choses.  11  arriva  en  311  une  sédiliou  à  Cons- 
tantinople  ù  roccasion  du  Trisagion.  Sévère, 
qui  était  alors  en  cette  ville,  écrivit  '  sur  ce 
sujet   à  Soierie  de  Césarée,  en  Cappadoce, 
piétcndaut  que  c'était  Macédonius  qui  avait 
excité  ce  luniulte.  Liljérat  ■  fait  mention  de 
plusieurs  autres  lettres  de  Sévère  contre  Ma- 
cédonius et  contre  le  concile  de  Chalcédoine. 
Il  y  en  avait  une  à  Flavion  d'Anlioche,  une 
à  Maronas,  lecteur,  une  troisième  aux  évé- 
ques  Élcusin  etEutychius,  et  une  quatrième 
à  Œcnménius,  avocat  d'Jsaurie.  Il  assurait 
dans  ces  lettres  que  si  l'on  voulait  auathé- 
matiser  le  concile  de  Clialcédoiue,  tous  les 
acéphales  se  réunii-aient  à  l'Église.  Flavieu 
d'Anlioche,  qui,  pour  apaiser  les  eutychéens 
irrités  contre   lui ,    avait    anathématisé    en 
■pleine  Église  ce  concile,  ne  laissa  pas  d'être 
déposé  par  les  eutychéens  mêmes  en  .t12. 
-Anaslase  en  étant  informé  envoya  aussitôt 
Sévère  s'emparer  du  siège  d'Anlioche  :  ce 
qu'il  fit  '  au  mois  de  novembre  de  la  même 
année.  Le  jour  de  son  ordination*,  il  ana- 
thématisa  le  concile  de  Chalcédoine,  et  dé- 
clara en  même  temps  qu'il  recevait  VHénoti- 
(fie  de  Zéuon  ;  qu'il  entrait  dans  la  commu- 
nion de  Timothée  de  Constantinople  et  de 
Jean  d'Alexandrie.  Il  mit  dans  les  Diptyques 
le  nom  de  Pierre  Mongus  ;  et  toutefois  il  re- 
çut à  sa  communion  Pierre  d'Ibérie  et  les 
autres  acéphales ,    quoiqu'ils  continuassent 
de  se  séparer  de  l'Église  d'Alexandrie.  Dans 
les  Synodiques  qu'il  envoya  aux  évêques  de 
son  patriarchat,  et  aux  autres  pour  leur  don- 
ner avis  de  sou  intronisation,  et  pour  leur 
demander  leur  communion,  il  anathémati- 
sait  ^  le  concile  de  Chalcédoine,  et  tous  ceux 
qui  enseignaient  qu'il  y  a  en  Jésus-Christ 
deux  natures,  avee  leurs  propriétés.  Ces  Sy- 
nodiques ne  furent  pas  reçues  de  tous.  Julien 
de  Bostres  en   Arabie,  Epiphaue  de    Tyr, 
et  quelques  autres  les  rejetèrent.  Les  Isau- 
res  *  dirent  anathème  à  Sévère  et  à  ceux  qui 
le  suivaient ,   reconnaissant  que  Xénaïas , 

•  Evagr.,  lib.  III,  cap.  xliv.  —  2  Libérât.,  cap.  six. 
—  '  Evagr.,  lib.  III,  cap.  sxxui.  —  >  Libérât.,  cap. 
XIX,  et  tom.  V  Concil.,  pag.  121.  —  '=  iCvagr.,  lili. 
Ui,  cap.  xxxni.  —  ^  /jjd.,  cap.  xxxi. 


I(»7 


évôtpie  de  Hiéraple,  les  avait  trompés,  on 
les  attirant  au  parti  des  eutychéens.  Sévère, 
pour  se  venger  de  ceux  (pii  refusaient  de 
s'unir  ;\  lui,  fil,  par  le  ministère  des  ulliciiU'S 
de  l'empereur  Anaslase,  charger  ''  de  chaînes 
et  bannir  en  divers  endroits  un  grand  nom- 
bre d'évêques,  d'ecclésiasti(]ues  et  de  moines. 
Deux  évêques,  Cosine  d'Epiphanie  et  Sévé- 
rien  d'Aréthuse,  choqués  des  lettres  synodi- 
ques de  Sévère,  se  séparèrent  de  sa  commu- 
nion, et  lui  envoyèrent,  à  Autiochemème,  im 
écrit  par  Icqnrl  ils  le  déposaient  de  l'êpis- 
copat.  Aurélius,  archidiacre  d'Epiphanie, 
pofteur  de  cet  écrit,  craignant  les  violences 
de  Sévère,  se  déguisa  et  prit  les  habits  d'une 
femme.  Il  parut  devant  Sévère,  ayant  un 
voile  qui  lui  couvrait  entièrement  le  visage, 
pleurant,  et  jetant  de  profonds  soupirs.  En 
cet  état,  il  lui  donna  l'acte  de  sa  déposition, 
comme  s'il  lui  eût  présenté  une  requête. 
Après  quoi  se  glissant  dans  la  foule,  il  se 
sauva  avant  que  Sévère  eût  pu  savoir  ce  que 
contenait  l'écrit.  Anaslase  informé  de  ce  qui 
s'était  passé,  ordonna  à  Asiatique,  comman- 
dant des  troupes  dans  la  Phénicie,  de  chas- 
ser les  deux  évêques  de  leurs  sièges.  Mais 
ce  prince,  sur  les  sages  remontrances  de  cet 
officier,  changea  de  sentiment.  L'évêque  Sé- 
vérien  signa  *,  en  536,  la  requête  que  Paul 
d'Apamée,  dans  la  seconde  Syrie,  présenta 
contre  Sévère  à  l'empereur  Justinien.  Élie 
de  Jérusalem,  pour  avoir  refusé  les  Synodi- 
qi/es  de  Sévère,  fut  déposé  ^  et  banui  à  Cuila, 
dans  l'Arabie  sur  le  bord  de  la  mer  Rouge. 
L'empereui"  Anastase,  étant  mort  en  318, 
Justin,  son  successeur,  commanda,  dès  '"  la 
première  année  de  son  règne,  que  l'on  arrêtât 
Sévère,  et  qu'onlui  coupât  la  langue,  en  hai- 
ne des  blasphèmes  qu'il  prononçait  chaque 
jour  contre  le  concile  de  Chalcédoine.  Vi- 
talien,  maître  de  la  milice,  et  Irénée,  comte 
d'Orient,  furent  chargés  de  l'exécution  de 
cet  ordre.  Mais  Sévère,  averti,  s'enfuit  d'An- 
lioche au  milieu  de  la  nuit.  Dans  une  lettre 
où  il  décrivait  la  manière  dont  ou  l'avait 
chassé  de  son  siège,  il  se  plaignait  de  la  ri- 
gueur avec  laquelle  Irénée  avait  exécuté  sa 
commission,  disant  que  cet  otlicier  avait  fait 
garder  tous  les  chemins  de  peur  qu'il  ne 
s'échappât.  Évagre  "  témoigne  qu'U  y  avait 
des  personnes  qui  assuraient  que  Vitalien 

"  Theophan.,  in  Chronog.,  pag.  107.  —  ^  Tom.  V 
Concil..  pag.  105.  —  «Tom.  VII  Concil,  pag.  89. 
'"  Evagr.,  lib.  lY,  cap.  iv. 
"  Ibid. 


108 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Ecrits  de 
SÉTère. 


avait  demandt*  la  langue  de  Sévère,  pour  se 
veneer  des  di-clamalioii';  qu'il  avait  faites 
contre  lui.  Environ  huit  ans  après  la  mort 
de  l'empereur  Justin,  c'est-à-dire  en  535, 
Sévère,  ayant  appris  qu'/Viitliime,  évéque  de 
Trébizonde,  avait  été  transféré  sur  le  siège 
de  Conslanlinople,  en  la  place  d'î-^piphane 
mort  cette  année-là,  vint  en  cette  ville  avec 
quelques-uns  des  principaux  de  la  secte  des 
acépbales,  savoir  :  Pierre,  chassé  d'Apamée, 
et  un  moine  syrien  nomiué  Zoara.  Ils  y  cau- 
sèrent beaucoup  de  désordres,  et  les  abbés 
catholiques  de  Constantinople  en  portèrent 
leur  plainte  au  pape  Au;apef.  Le  Pape  vint 
sur  les  lieux,  où  ayant  exyminé  les  plaintes 
formées  contre  Sévère,  il  le  '  condamna,  et 
avec  lui  Pierre  d'Apamée  et  Zoara.  On  ne 
sait  ce  que  Sévère  devint  depuis.  L'empereur 
Justinicn,  dans  une  constitution  adressée  au 
pati-iarche  Mennas,  ordonna  '  que  les  écrits 
de  Sévère  seraient  bridés,  et  défendit  de  les 
transcrire  sous  peine  d'avoir  le  poing  coupé. 
2.  Ils  étaient  en  très-grand  nombre,  com- 
me on  le  voit  parle  catalogue  qu'en  a  donné 
domMonlfaucon,  dans  celui  des'  manuscrits 
de  la  bibliothèque  du  chancelier  Séguier,  qui 
marque  sous  le  nom  de  Sévère,  patriarche 
d'Antioche  ,  chef  des  acéphales,  des  homé- 
lies.des  apologies  ,  des  ouvrages  de  contro- 
verse, des  lettres,  des  commentaires  sur  cer- 
tains endroits  de  ri'Àriture  ,  et  quelques  au- 
tres écrits.  Ses  homélies  furent  '  traduites  en 
syriaque  et  distribuées  en  trois  tomes ,  dont 
le  premier  eu  contenait  quarante-trois;  le  se- 
cond quarante-sept  ;  le  troisième  trente-cinq, 
en  tout  cent  vingt-cinij.  Anastasesinaïte  rap- 
porte "  l'explication  que  Sévère  donnait  des 
trois  jours  de  la  sépulture  du  Sauveur.  Il  com- 
mençait le  premier  au  moment  de  sa  mort, 
disant  que  son  âme  était  dès-lors  descendue 
aux  enfers,  qu'ainsi  l'on  pouvait  dire  que  dès 
cette  heure  ,  qui  était  la  neuvième  du  ven- 
dredi, Jésus-Christ  avait  été  dans  le  cœur  ou 
dans  le  sein  de  la  terre.  Il  restait  encore  trois 
heures  de  ce  jour,  depuis  la  neuvième  jus- 
qu'à la  douzième;  parce  que,  suivant  le  pré- 
cepte de  la  loi,  les  Juifs  comptaient  leur  jour 
de  fêle  d'un  soir  à  un  autre.  Depuis  le  soir 
du  vendredi  jusqu'au  coucher  du  soleil,  le 

'  Tom.  V  Concil.,  pa;;.  14.  —  >  Ibid.,  pag.  266. 
—  "  Bililiot.  Sogneriuna  ,  pag.  S3-68.  —  *  Asse- 
mani,  Bibliul.  Orient.,  pag.  i!)i,  loin.  I. 

'  Anaslas.  Syuaïla  .  Quœal.  152.  [Galland  a  pu- 
blié,au  tôine  .\I  de  sa  Uiblioth.  Script,  vet.  pag.  221- 
227,  cet  l'crit  sous  le  iioui  de  Concordanlia  Evan- 
gelislarum  circa  ea  quœ  in  sepulcro  Uomini  cou- 


corps  de  Jésus-Christ  demeura  dans  le  tom- 
beau; voilà  le  second  jour.  Il  y  resta  depuis 
le  soir  du  samedi  jusqu'au  lever  du  soleil  du 
dimanche;  voilà  le  ti-oisième  jour.  Quoique 
de  ces  trois  jours  il  n'y  en  ait  qu'un  d'entier, 
on  ne  laisse  pas  de  compter  trois  jours,  en 
prenant  une  partie  pour  le  tout.  Nicéphorc 
Calliste  avait  vu  deux*  lettres  de  Sévère,  l'u- 
ne à  l'empereur  Justinien,  l'autre  à  Théodo- 
ra,  sa  femme.  Il  y  a  des  auteurs  qui  lui  attri- 
bueut  un  li\  re  des  Itites  du  baptême  et  de  la 
communion,  à  l'usage  des  clu'éticns  de  Syrie, 
imprimé  en  syriaque  et  en  latin  à  Anvers,  en 
1572,  par  les  soins  de  Guido  Fabricius.  Mais 
cet  éditeur  lui  a  fait  porter  le  nom  de  Sévère, 
patriarche  d'Alexandrie.  Ce  qu'on  cite  des 
autres  écrits  de  Sévère  est  tiré  des  Chaînes 
sur  l'iùcriture,  ou  de  quelques  Recueils  des 
passages  des  anciens  ,  sous  le  nom  de  saint 
Jean  Damascène.  Galéus  cite  quelques-uns  de 
ses  discours  sm*  Isaïe.  Sévère  avait  composé 
un  livre  sous  le  titre  d'Ami  de  la  vérité,  mais 
où  en  ellél  il  s'appliquait  a  établir  l'erreur  et 
le  mensonge.  Il  y  réfutait  tous  les  témoigna- 
ges des  Pères  que  l'on  avait  coutume  d'ap- 
porter, pour  prouver  que  les  deux  natures 
sont  unies  indivisiblement  dans  Jésus-Christ 
en  une  seule  personne.  Il  en  apportait  d'au- 
tres qu'il  avait  corrompus  et  altérés.  A  l'é- 
gard des  passages  qu'il  n'avait  pu  corrom- 
pre ,  ou  auxquels  il  ne  pouvait  répondre  ,  il 
les  rejetait  comme  tirés  d'ouvragessupposés. 
Cet  écrit  était,  ce  semble,  pour  contre-ljalan- 
cer  celui  que  Jean  de  Césarée  avait  fait  pour 
la  défense  du  concile  deClialcédoine.  Comme 
Jean  s'autorisait  dans  cet  écrit  des  Pères  qui 
avaient  enseigné  une  doctrine  conforme  à 
celle  de  ce  concile,  Sévère  en  composa  un  au- 
tre ,  où  il  prétendait  montrer  que  l'évcque  de 
Césarée  avait  altéré  plus  de  deux  cents  pas- 
sages de  ces  Pères.  Les  monophysites,  répan- 
dus dans  l'Egypte  et  dans  l'Orient,  faisaient 
tant  de  cas  du  livre  de  Sévère  qu'ils  le  préfé- 
raient à  l'Evangile  de  saint  Jean,  et  qu'ils 
n'admettaient  aucun  témoignage  des  Pères 
avant  d'avoir  vu  ce  que  Sévère  en  avait  dit. 
Anasiase  sinaïte'  parle  fort  au  long  de  cet  ou- 
vrage, dont  il  rapporte  plusicui's  endroits.  Les 
Syriens  ont  "  encore  aujourd'hui  les  écrits 

gerunt.  Il  croit  qu'il  est  l'muvre  d'HésIcbius,  jirê- 
Ire  de  Jérusalem.  L'auteur  y  parle  aussi  du  salibal 
et  de  la  variété  des  cxeinpluires  de  l'Évaugile  selon 
saint  .Man.l 

"  Nieephor.,  lib.  XVII  Ilist.,  cap.  vin. 

■  AnastasiusSyuaïta  iii  Oilego,  ■\i[>.  Lxvii. 

'  Moriuus,  Prœfal.  ad  ordin.  Jacobilarum. 


[vi«  siKCLE.]  SfivftTlE  DE  SOZOPLE,  JE 

de  ce  faux  pnlriarclic  on  p;r;iii(l('  vimumu- 
lion,  jusf|ii';\  l'appeler  lii  liOiiclie  de  Ions  les 
doctotiis.  "Nous  aurons  lieu  de  parler  une 
seconde  fois  de  Sëvère  dans  l'article  des  Con- 
ciles cit!  Constanlinople  et  de  Jérusalem  où  il 
fut  condamne. 

[Angëlo  Mai  a  publié  plusieurs  ouvrages 
on  fragments  de  Sévère  d'Anlinclic.  Voici  ce 
qu'en  ilit  M.  lionnetly  '  :  —  1°  Fi'agments  de 
ses  écrits  contre  Julien  d'Halicarnassc  ,  en 
latin  {Spicilegium  ronianum,  tom.  X).  Sé- 
vère fut  un  de  ceux  qui  combattirent  avec 
le  plus  do  science  ce  Julien  d'IIalicarnasse, 
vers  510,  chef  de  la  secte  des  incorruptibles, 
qui  prétendaient  que  le  Christ  n'avait  pas 
soufl'ert  eb  n'était  mort  qu'en  apparence.  Le 
Cardinal  a  tiré  cet  ouvrage  d'un  codex  copte, 
avec  l'aide  d'un  maronite,  Franeois  Malié- 
sébo.  L'ouvrage  est  de  longue  haleine.  L'é- 
diteur a  tratluit  d'abord  le  commencement 
en  entier  (  1C9-194  ),  puis  il  s'est  contenté 
d'extraire  les  passages  où  étaient  cités  des 
témoignages  inconnus  des  Pères,  parmi  les- 
quels saint  Cyi'ille  et  le  pape  Jules  (194-201). 
—  2°  Fragments  grecs  qui  ne  se  trouvent 
pas  dans  la  Clinîne  des  Pères  grecs,  publiés 
en  grec  et  en  latin  ,  par  Junius  ,  à  Londres, 
éa  1637  ;  et  en  latinj,  ;i\  Venise,  en  1587  , 
par  Comilolus,  dont  le  Cardinal  relève  plu- 
sieurs erreurs  (201-7:28).  —  3°  Fragment 
d'une  lettre  à  celle  de  Théodore  (m.  722- 
728  ).  — 4°  Fragment  de  sa  lettre  à  Jean,  ar- 
chevêque d'Alexandrie,  de  la  secte  de  Théo- 
dore (728-729).  —  0°  Discours  prononcé  de- 
vant l'empereur  Anastase  I"qui  le  favorisait 
(728-730).  —  6°  Formule  de  la  vraie  foi,  a- 
dressée  à  l'ami  de  Dieu ,  l'empereur  Anas- 
tase ,  et  que  celui-ci  voulut  faire  passer  com- 
me une  loi  dans  l'Eglise  (731-738).  —  Tous 
ces  opuscules  de  Sévère  sont  remplis  de  l'hé- 
résie des  monophysites  dont  il  fut  le  soutien. 
Les  manuscrits  arabes  contiennent  un  bien 
plus  grand  nombre  de  fragments  de  cet  au- 
teur, et  sur  cette  erreur,  qui,  née  au  v°  siè- 
cle, est  encore  vivace  dans  l'Orient.  —  7° 
Fragments  de  ses  écrits  perdus,  en  grec  : 
S.  V.  IX  (725-741).  Les  fragments  donnés 
ici  sont  extraits  d'une  Chaîne  des  Pères  sur 
Isaïe  et  Ézéchiel.  —  8°  Quatre  homélies  tra- 
duites du  grec  en  syriaque  et  du  syriaque  en 
latin,  publiées  ici  en  latin  (742-750).  Le  sujet 
de  ces  homélies  est  :  une  sur  les  louanges 


AN  DE  SGYTIIOPLE,  ETC.  109 

de  saint  Antoine;  deux  sur  sainte  Droside, 
et  une  sur  saint  Tlialléiaiis.  11  n'y  a  rien  dans 
ces  opuscules  (juc  d'orthodoxe  et  d'édifiant. 
Les  homélies  de  Sévère  étaient  au  nombre 
de  128,  sur  lesquelles  43  ont  été-  perdues,  et 
les  autres  existent  en  syriaque  dans  la  Bi- 
bliothèque du  Vatican,  d'où  le  savant  Cardi- 
nal espère  les  tirer  et  les  publier;  elles  furent 
traduites  en  syriaque  par  Jacob  d'iulesse, 
suinonmié  le  Traducteur,  lequel  mourut  en 
710.  Il  existe  en  outre,  en  syriaque,  un  im- 
portant ouvrage  du  même  Sévère  contre  Ju- 
lien, évêque  d'Halicarnas.se,  chef  de  la  secte 
des  incorruptibles,  c'est-à-dire  de  ceux  qui 
soutenaient  que,  avant  sa  passion  et  sa  mort, 
le  corps  du  Christ  était  incorruptible  ;  on  y 
trouve  un  grand  nombre  de  textes  inédits 
que  M"'  Mai  nous  promet  de  publier.  —  9° 
Hornilia  de  sancta  Dcimatre  scmperqiœ  virgine 
Maria  (S.  R.  X.  212),  traduite  du  syriaque, 
éloignée  de  ces  explications  symboliques  ou 
flguratives  de  la  Bible,  mises  en  vogue  parles 
écrivains  protestants.  —  10°  Fragments  des 
Commentaires  sur  saint  Lue,  eu  grec  (Classis 
atwtoresX.  408-457  et 470-473).  —  11°  Com- 
mentaiie  sur  le  chap.  2  des  .\ctes  des  apôtres, 
la  Pentecôte  (457-470).  On  y  trouve  d'excel- 
lents passages,  tels  que  celui  contre  les  phan- 
tasiastes  et  les  manichéens  (412-5 14);  celui  où 
il  reconnaît  le  corps  et  le  sang  du  Seigneur 
cachés  sous  les  espèces  eucharistiques  (  438- 
439).  —  12°  Extrait  d'un  Commentaire  sur 
Z>ame/ (Script.  Veter  1.  30).  —  13°  Lettres 
à  Ammonius  le  scholastique  et  à  l'évêque 
Maron  (33-39).] 

3.  Jean  ^de  Scythople,  scolastique,  au  lieu  i,»"'!''''^'''' 
de  prendre,  comme  avait  fait  Sévère,  le  parti 
de  ceux  qui  avait  abandonné  l'Église,  écri- 
vit contre  eux,  nommément  contre  Eutychès 
et  Dioscore,  qui  refusaient  de  reconnaître 
deux  natures  en  Jésus-Christ.  Son  ouvrage, 
que  nous  n'avons  plus ,  était  distribué  en 
douze  livres.  11  l'avait  composé  à  la  prière 
d'un  patriarche  nommé  Julien,  que  l'on  croit 
être  le  même  qui  gouvernait  l'Eglise  d'An- 
tiochc  vers  l'an  476,  et  qui  mourut  de  douleur 
de  voir  cette  Église,  dont  il  était  légitime  pos- 
sesseur, ravagée  par  Pierre-le-Foulon,  célè- 
bre eutychéen  cpii,  appuyé  de  l'autorité  de 
Basilisque,  s'était  emparé  par  force  de  ce 
siège.  Jean  de  Scythople  écrivait  d'un  style 
pur  et  clair,  se  servant  de  termes  convena- 


'  T,ible  alphabétique  analytique,  etraisonnéed  es 
auteurs   découverts  et  édités  par  le  cardinal  Mai. 


[L'éditeur.) 
s  Photius,  Cod.  95,  pag.  250. 


110 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  ITES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


blés  à  son  omTage.  Il  combattait  fortement 
l'erreur,  et  n'abusait  point  îles  lémoig-nages 
de  l'Kcriture,  se  servant  de  raisonnements 
de  logique  quand  l'utilité  de  sa  cause  le  de- 
mandait.   L'auteur   qu'il   réfutait   dans  son 
écrit  n'avait  pas  mis  son  nom  au  sien;  il  s'é- 
tait caché  adroitement  sous  ce  titre  :  Trai- 
té contre  Nestorius,  dans  le  dessein  de  sur- 
prendre les  simples  et  de  les  engager  à  lire 
son  ouvrage  sans  méfiance.  Pliotius,  de  qui 
nous  avons  pris  tout  ce  que  nous  venons  de 
rapporter  de  Jean  de  Scythople,  conjecture 
.  que  l'auteur  du  Traitv  contre  Nestorius  était 
Basile  de  Cilicie,  parce  (pie  depuis  il  composa 
un  autre  écrit,  en  forme  de  dialogue,  contre 
l'ouviage  de  Jean  de  Scythople.   «  Ce  dialo- 
gue, ajoute  Photius,  était  digne  de  la  religion 
de  Basile,  c'est-à-dire  de  l'hérésie  des  euty- 
chéens  dont  Basile  était  partisan,  n  Jean  de 
Scythople  écrivit  aussi  avec  autant  d'érudi- 
tion '  que  de  piété  pour  la  défense  du  con- 
cile de  Chalcédoine.  Il  n'en  est  rien  venu  jus- 
qu'à nous. 
B«ic  de       4.  Il  ne  nous  reste  rien  non  plus  des  écrits 
de  Basile  de  Cilicie.  11  était  prêtre  de  l'Eglise 
d'Antioche  dans  le  lemps  que  Flavien  en  occu- 
pait le  siège,  etqu'Anastase  gouvernait  l'Em- 
pire. l\  avait  composé  une  flistoire  ecclésiasti- 
(/î/e  divisée ^ en  trois livies,  dont  le  premier  qui 
commençait  en  450 ,  époque  à  laquelle  Mar- 
cion  fut  élu  emperem-,  finissait  à  la  mort  de 
saint  Simplice,  évoque  de  Rome,  arrivée  eu 
483.  Le  second  renfermait  ce  qui  s'était  passé 
depuis  Zenon  jusqu'en  S18,  année  où  l'empe- 
reur Anastase  mourut.  Le  troisième  racontait 
l'élection  de  Justin  à  l'fc]mpire,  avec  quelques 
circonstances  du  commencement  de  son  rè- 
gne. Pour  preuve  des   faits  qu'il  avançait, 
Basile  rapportait  les  lettres  que  des  évoques 
s'étaient  écrites  mutuellement  :  ce  qui  cntlait 
beaucoup  sa  narration,  la  coupait,  en  inter- 
rompait le  fil,  et  la  rendait  obscure  et  em- 
barrassée. Ce  n'était  pas  là  son  seul  défaut: 
le  style  en  était  peu  poli  et  fort  inégal.  L'ou- 
vrage de  Basile  contre  Jean  de  Scythople  ne 
Viilait  pas  mieux,  il  était  écrit' d'un  style  bas, 
et  plein  de  fautes.  Ce  n'élail  presque  qu'un 
composé  de  sophismcs  et  d'invcclivcs.  Il  l'a- 
vait dédié  à  un  nommé  Léonce,  qui  lui  avait 
persuadé  de  l'cnlreprendrc.  Entre  les  inju- 
res dont  il  chargeait  Jean  de  Scythople,  Pho- 
tius fait  remarquer  qu'il  l'.ippelait  chicaneur  ; 

•  Pliotius,  Cnd.   23),   pag.  890.  —  '  Idem,  Cad. 
i2,  paft.  27.  -»  Iiiem,  Cod.  107,  pag.  282  et  283. 
Suidas,  ia  fasilio.  —  •  Phctius,  CoJ.  41,  pag.  27. 


qu'il  l'accusait  de  manichéisme  ;  d'avoir  ré- 
duit le  carême  à  trois  semaines  ;  d'avoir  per- 
mis qu'on  mangeAt  de  la  volaille  pendant  ce 
temps-là;  d'avoir   observé  des  cérémonies 
païennes  ;  d'avoir  trop  donné  à  ses  plaisirs  ; 
de  n'avoir  pas  altendu  pour  communier  que 
le  sacrifice  fût  achevé,  et  d'avoir  pris  les  saints 
mystères  aussitôt  après  l'Évangile,  pour  al- 
ler plutôt  se  mettre  à  table.  Basile  avait  di- 
visé son  ouvrage  en  seize  livres.  Les  treize 
premiers,  qui  étaient  en  forme  de  dialogue, 
combat  [aient  ce  que  Jean  avait  dit  dans  son 
premier  livi-e  contre  les  erreurs  d'Eulychcs 
et  de  Dioscore.  Les  trois  derniers  form.iient 
un  discours  suivi,  dans  lequel  Basile  attaquait 
ce  que  Jean  avait  dit  dans  ses  second  et  troi- 
sième livres.  Le  but  de  l'ouvrage  de  Basile 
était  de  combattre  l'union  personnelle  des 
deux  natures  en  Jésus-Christ,  et  de  montrer 
qu'il  est  nécessaire  d'admettre  deux  fils,  l'un 
fils  de  Dieu,  l'autre  fils  de  Marie.  C'était  se  dé- 
clarer ouvertement  pour  l'hérésie  de  Nesto- 
rius. Basile  toutefois  ne  le  nommait  pas;  mais 
il  louait  Diodore  de  Tarse  et  Théodore  de 
Mopsueste.  Il  ne  condamnait  pas  non  plus 
clairement  saint  Cyrille;  mais  il  disait  que 
Jean  de   Scythople,  contre  qui  il   écrivait, 
s'appuyait  principalement  sur  les  douze  cha- 
pitres ou  anathématismes  de  ce  Père,  parti- 
culièrement sur  le  douzième,  dans  lequel  il 
parle  de  Pieu,  comme  ayant  soufl'erlla  mort. 
Si  Basile  de  Cilicie  est  le  même  que  celui 
que  ''Suidas  dit  avoir  été  évoque  d'Irénople, 
il  faut  lui  atlribuer  encore  un  traité  contie 
Arcbélaiis,  prêtre  de  Colonia.  Suidas  n'en 
dit  pas  le  sujet  ;  mais  il  assure  que  ce  Basile 
ressemblait  à  celui  de  Césarée  en  esprit  et 
en  vertu  ;  ce  qui,  ce  semble,  est  une  preuve 
suffisante  pour  distinguer  le  Basile  dont  il 
parle,  de  Basile,  prêtre  d'.Vntiochc,  quoiqu'ils 
aient  été  l'un  et  l'autre  de  Cilicie;  l'un  par 
sa  naissance;  l'autre,  parce  qu'il  étaitévéquc 
d'Irénople,  ville  de  Cilicie. 

5.  Photius  '  parle  d'un  autre  historien  j,., 
nommé  Egée  qu'il  dit  avoir  été  pi'ètre,  et  de  **'' 
la  secte  des  nestoriens  ".  Il  avait  écrit  l'his- 
toire ecclésiastique  de  son  siècle  en  dix  li- 
vres, dont  les  ciuq  ]Hemiers  commençaient 
au  règne  du  jeune  Théodose  et  à  la  naissan- 
ce de  l'hérésie  de  Nestorius,  et  finissaient  à 
l'année  de  la  déposilion  de  Pierre-le-Foulon , 
c'est-à-dire,  en  477  et  478,  ou  peut-être  en 

'  Kviilpinniciil  il  y  n  ici  faute  des  oopistcs;  il  faut 
lirp  dos  oulyclKiou?.  Voypz  le  vol.  VIII,  pag.  HK,  et 
'•i-dcs?ou9,  pag.  Ml.  (L'édileur.J 


d'ft- 


[w  siiccLE.]  SliViÏRE  DE  SOZOPLE,  JEAN  DE  SCYTIIOPI.E, 


E'Iï:. 


111 


484  :  carPieiTC-le-Foulonfut  coniliunn(5  plus 
d'une  fois.  Le  style  de  Jean  d'I-^iii^o  ëlail  net 
et  fleuri.  En  parlant  du  concile  d'Eplièse,  il 
rapportait  exactement  ce  qui  s'y  était  passé, 
mais  il  faisait  voir  ;\  l'occasion  du  faux  con- 
cile tenu  en  la  mémo  ville,  appelé  onlinairc- 
ment  le  brigandage  d'Kphèse,  son  attache- 
ment pour  rh('>r<'sie,  on  donnant  des  éloges 
à  cette  asseiulilée,  i\  Dioscoi'(\  et  ;\  ses  secta- 
teurs. Il  hlâmait  au  conta-aire  le  concile  de 
Clialcédoinc,  dont  il  rapportait  aussi  les  actes. 
11  composa  '  mémo  un  écrit  exprès  pour  en 
combattre  les  décrets.  .\  l'égard  d(>s  cinq 
derniers  livres  de  ?,on  Histoire ,  Pliotiiis  ne 
nous  en  a  rien  appris,  parce  qu'il  ne  les  avait 
pas  lus.  Il  ne  nous  reste  des  écrits  de  Jean 
d'I'^géc  qu'un  seul  passage  lapporti!  dans  la 
cinquième  action  ^  du  second  concile  de  Ni- 
cée,  et  un  dans  le  second  livre  de  VHistoire 
de  Théodore,  lecteur,  qui  dit  que  Jean  d'l']gée 
était  de  la  secte  des  eutycbécns.  Il  rapporte' 
d'après  lui,  que  l'empereur  Anastase  tira  de 
Sévère  un  écrit,  par  lequel  il  lui  promettait 
avec  serment  qu'il  ne  condamnerait  point  le 
concile  de  Chalcédoine;  que  néanmoins  le 
jour  de  sou  sacre,  il  le  condamna  publique- 
ment dans  l'Église,  à  l'instance  de  ses  par- 
tisans, qui  étaient  comme  lui  de  la  secte  des 
acéphales. 

6.  Ce  prince  en  agit  tout  autrement  arec 
Jean  de  Cappadoce,  prêtre  de  Constantinople, 
et  syncelle  de  Timothée,  patriarche  de  cette 
ville.  Celui-ci,  qui  avait  été  substitué  .'i  Macé- 
donius  envoyé  en  exil  à  Gangres,  étant  mort 
le  3  avril  ol7,  Jean  de  Cappadoce'fut  ordon- 
né '  à  sa  place  le  24  du  même  mois.  Mais, 
avant  son  ordination,  Anastase  lui  fit  con- 
damner le  concile  de  Chalcédoine.  Le  peuple, 
au  contraire ,  lui  demanda  avec  de  grandes 
instances  d'anathématiser  Sévère.  Jean  ,  de- 
puis la  mort  d'Anastase  arrivée  le  9  de  juil- 
let 318,  n'eut  aucune  peine  à  satisfaire  le  peu- 
ple,Il  dit^  anatbème  à  Sévère  en  présence  de 
douze  évéques  ;  et  comme  il  n'avait  condam- 
né le  concile  de  Chalcédoine,  que  parce  qu'A- 
nastase  l'y  avait  contraint,  il  déclara  devant 
tout  le  peuple  assemblé  -dans  l'Église,  qu'il 
reconnaissait  tous  les  conciles  qui  avaient 
confirmé  la  foi  de  Nicée,  principalement  ceux 
de  Constantinople,  d'Eplièse  et  de  Chalcédoi- 
ne. Il  fit  plus,  à  la  demande  du  peuple ,  ilau- 

'  Photius.,  Cod.  S5,  png.  47.  —  ^  Tnm.  VII  Con- 
cil,  pag.  369.  —  3  Tlieodor.  Lector.  lib.  II. 

'  Theoplian.,  in  Chronog.,  pag.  112,  el  VirtorTu- 
ucns.,  inC/iroHi\,,p.'ig.  337. 


nouça  que  le  lendemain,  qui  était  le  seizième 
jour  de  juillet  518,  on  célébrerait  la  mémoi- 
re des  saints  évêques  qui  s'étaient  assemblés 
à  Cludcédoinc,  et  qui,  avec  ceux  de  Conslau- 
tiiiople  el  d'Eplièse,  avaient  contiinn'  In  Sym- 
bole de  Nicée.  Il  fit  mettre  dans  les  Diidyqnes 
les  noms  de  ces  trois  conciles  et  celui  de  Ni- 
cée, ensemble  les  noms  d'Eiiphémius  et  de 
Mac(''donius,  ses  préd(''cesscurs,  et  celui  du 
pape  saint  Léon.  Pour  autoriser  ce  qu'il  avait 
fait,  il  assembla  un  concile  de  quarante  évê- 
ques, qui  se  trouvaient  h  Constantiuo[ile.  Il 
y  fut  '  ordonné  que  la  mc'moirn  des  patriar- 
ches Eu|ihémius  et  Macédonius  serait  réta- 
blie; qu'on  annulerait  toutes  les  procédures 
faites  contre  eux,  et  que  l'on  dirai!  h  Sévère, 
faux  évoque  d'Aulioche  ,  nu  anatbème  l'ter- 
nel.  Ensuite  le  patriarche  Jean  écrivit  ;\  tous 
les  métropolitains,  pour  leur  faire  part  du 
résultat  du  concile,  dont  il  leur  '  envoya  les 
Actes,  les  priant  de  les  confirmer.  Il  nous 
reste  deux  de  ces  lettres,  l'une*  î^i  Jean,  pa- 
triarche de  Jérusalem;  l'autre  à  Épiphane, 
évêque  de  Tyr.  Elles  sont  très-courtes,  parce 
que  les  Actes  du  concile  qu'il  y  avait  joints 
suffisaient  pour  donner  une  pleine  connais- 
sance des  affaires  qu'on  y  avail  traitées.  En 
S19,  les  légats,  que  le  pape  Hormisdas  avait 
euvoyés  ;\  Constantinople  pour  la  réunion  des 
Églises  d'Orient  avec  celles  d'Occident,  étant 
arrivés,  Jean  de  Constantinople  reçut  le  For- 
mulaire qu'ils  devaient  faire  signer  à  tous 
ceux  qui  voudraient  se  réunir.  Il  voulut  d'a- 
boi-d  faire  son  acceptation  en  forme  de  lettre  ; 
mais,  après  quelque  contestation  avec  les  lé- 
gats, il  convint  de  mettre  seulement  '  une 
petite  préface  au  libelle  ou  au  Formulaire  tel 
que  le  Pape  l'avait  envoyé.  Il  déclarait  dans 
cette  préface  qu'il  était  entièrement  d'accord 
avec  le  Pape,  qu'il  recevait  les  quatre  conci- 
les, et  condamnait  tous  ceux  qui  avaient  con- 
trevenu en  quelque  manière  que  ce  fût  à 
leurs  décrets,  ou  qui  s'eflbrçaient  d'en  retran- 
cher la  moindre  syllabe.  Il  décrivit  de  sa  main 
le  Formulaire  du  Pape  et  le  souscrivit,  en  da- 
tant sa  souscription  du  28  de  mars  519,  sous 
le  consulat  de  Justin  et  d'Eutharie.  La  même 
année  il  écrivit  '"  au  pape  Hormisdas  pour  le 
congratuler  sur  la  réunion  des  Églises,  en  lui 
faisant  honneur  de  cet  ouvrage.  Dans  une 
autre  lettre,  datée  du  quatorzième  des  calen- 


'  Tom.  V  Concil  ,  pag.  179, 
IG2,    lfi3.  —  T  Ihid.,  pag.  lS(i. 
»  Toui.  IV  CodC!'/, pag.  14S0. 

10     ThWI        i.orr      I/.01 


182.  -  «  Ihid.,  pag. 
-  8  iMd.,pag.  186. 


1»  Ihid.,  pag.  1491. 


112 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Éplphane, 

Con>UntiOD- 
pi.    (K)  jpla< 


des  de  février,  sous  le  consulat  de  Vitalien  et 
de  Rustique,  c'est-à-dire  du  dix-ncuviôme  de 
janvier  de  l'an  320,  il  marquait 'au  Paiic  que 
la  fête  de  Pâques  devait  se  célébrer  cette 
année-là  le  19  d'avril.  Jean  mourut  vers  le 
même  temps,  ayant  occupé  le  siège  de  Cons- 
tantinople,  environ  trois  ans. 

7.  Son  successeur  fut  le  prCtre  Épiphane, 
son  sjTiceUe.  Il  fut  élu  par  l'empereur  Jus- 
Udetb'ii-'re.)  tin,  du  consentement  des  évéques,  des  moi- 
nes et  du  peuple.  .Avant  de  parvenir  à  l'é- 
piscopat  il  avait  été  chargé  de  l'instruction 
des  catécluimèncs  dans  l'église  de  Constan- 
tiuople.L'ApocrisiaircdeDorolliée,évôquede 
Tliessaloniijue,  ayant  demandé,  en  319,  aux 
légats  du  pape  Hoimisdas,  des  députés  pour 
recevoir  les  libelles  ou  souscriptions  au  for- 
mulaire de  ceux  qui  voudraient  accepter  la 
réunion,  Épiphane, n'('tant  encore  que  prêtre, 
fut  envoyé  avec  l'évêque  Jean,  un  des  légats, 
et  le  comte  Licinius.  Il  accepta  lui-même,  de- 
puis son  élévation  sur  le  siège  de  Constan- 
tinople,  les  conditions  de  la  paix  conclue  par 
Jean,  son  prédécesseur  ,  avec  le  pape  Ilor- 
misdas,  et  les  ratifia  dans  un  concile  qu'il 
tint  dans  sa  ville  épiscopale,  où  il  reçut  aussi 
les  décrets  de  Cbalcédoine.  Nous  avons  de  lui 


Vojei  l'«r* 
t<cle  du  paie 
HoriDUdvt 


en  latin  cinq  •  lettres  qu'il  écrivit  à  ce  pape, 
tant  pour  lui  donner  avis  de  son  ordination, 
que  pour  lui  déposer  sa  croyance,  et  lui  dé- 
clarer qu'il  condamnait  tous  ceux  dont  le 
Pape  avait  défendu  de  réciter  les  noms  dans 
les  Dyptiques.  En  523 ,  le  pape  Jean  étant 
venu  à  Constantinople',  le  patriarche  Épi- 
phane M'invita  à  faire  l'oUice  ;  mais  le  Pape 
ne  l'accepta  qu'après  qu'on  lui  eût  accordé 
de  s'asseoir  à  la  première  place.  Épiphane 
mourut  en  Tt'Aa.  [Les  lettres  à  Hormisdas  se 
trouvent  parmi  les  lettres  de  ce  pape,  tome 
LXXll  de  la  Patrologie  latine ,  col.  497,  307, 
523.  La  sentence  portée  par  Épiphane  et  par 
le  concile  assemblé  contre  Sévère  et  Pierre, 
se  lit  au  tome  LXXXVI  de  la  Patrologie  grec- 
que, col.  783-786,  d'après  Mansi,  tom.  VIII 
Concit.,  pag.  1137.  Assémani  énumère  qua- 
rante -  cinq  canons  parmi  les  œuvres  d'E- 
pipliane  de  Constantinople,  tora.  I  Biùl. 
orient. ,  pag.  619.  A.  la  suite  de  la  sentence 
rapportée  dans  la  Patrologie  grecque,  on  trou- 
ve une  exposition  des  préséances  des  patriar- 
ches et  des  métropohtains,  par  Épiphane  de 
Chypre.  Elle  est  publiée  d'après  Constant 
Porph.,  lib.  Il  De  Aulœ  Byzantitiœ  cœretnon., 
édit.  Bonn.,  tome  I,  pag,  791.] 


CH.VPITRE  VU. 


Saint  leso 
I*',  pap«,  en 
e23. 


Saint  Jean  I  [526],  saint  Félix  IV  [529],  saint  BonifaceII[531],  saint  Jean  II  [535] 
et  saint  Agapet  [  536],  évêqnes  de  Rome. 


1.  Le  pape  saint  Jean  1"  du  nom,  avait  suc- 
cédé à  Hormisdas,  le  treizième  d'août  de  l'an 
323,  après  une  vacance  de  scptjours.il  était* 
natif  de  Toscane,  et  fils  de  Constantius.  Son 
épiscopat  fut  de  deux  ans  neuf  mois  et  dix- 
sept  jours.  Il  arriva  en  325  que  l'empereur 
Justin,  par  un  grand  zèle  pour  la  religion 
chrétienne,  voulut  obliger  les  ariens  à  se  con- 
vertir, et  faire  consacrer  leurs  églises  à  l'u- 
sage des  catholiques.  Théodoric,roi(l'Ralie, 
qui  était  arien,  irrité  du  projet  de  Justin, 
menaça  de  traiter  de  môme  les  catholiques 
en  Italie,  et  de  la  remplir  de  carnage.  Il 
obligea»  donc  le  Pape  d'aller  lui-même  a 
Constantinople  pour  faire  révoquer  les  or- 


dres donnés  contre  les  ariens,  et  leur  faire 
rendre  leurs  églises.  Saint  Jean  y  alla  accom- 
pagné de  quatre  sénateurs,  qui  tous  avaient 
été  consuls.  Toute  la  ville  de  Constantinople 
alla  le  recevoir  jusqu'à  douze  milles,  avec 
des  cierges  et  des  croix.  L'empereur  Justin  se 
prosterna  devant  lui,  et  voulut  être  couronné 
de*^  main.  Le  Pape,  à  l'invitation  du  patriar- 
che Epiphane,  célébra  l'oflice  solennellement 
en  latin  le  jour  de  Pâques,  et  communiqua 
avec  tous  les  évoques  d'Orient ,  excepté  Ti- 
mothée  d'Alciandrie,  ennemi  déclaré  du  con- 
cile de  Cbalcédoine.  On  n'oublia  rien  dans 
Constantinople  pour  faire  honneur  au  Pape: 
la  joie  y  fut  universelle,  parce  que  les  an- 


<  Tom.  IV  Concil;  pap.  1521. 

'  Ibid.,   |.a).'.  1534,   1537,  1545,  1546,  1555. 

'  .MareelliniC/ironic,  ad  an.  525. 


'  Lib.  Pontifical.,  tom.  IV  Concil. 
»  Ibid. 


pag.  IGOO. 


[vi'  sifccr.E.]       CIIAPITllK  VII.  —  S.VTNT  JlîAN  I,  SAINT  FKLIX  IV,  ETC. 


1I.T 


cions  des  Grecs  assuraient   que  depuis   le 
grand  Constantin  et  saint  Sylvestre ,  on  ne 
se  souven.iit  pasijm!  le  Vicaii'e  de  saint  l'ierrc! 
fui  venu  tians  la  Clii"ïce.  Le  pape  .lean  avec  les 
(|uatre  sénateurs  qui  l'accompagnaient, ayant 
repn^senté  i\  l'empereur  Justin  le  péril  dont 
l'Ilalie  était  lueiuicée  au  cas  que  les  ordres 
qu'il  avait  doniu'-s  contre  les  ariens  l'iisscnl 
exécutés,  en  obtint  la  révocation,  et  par  k\ 
l'Italie  fut  délivrée.  Cependant  le  roi  Tliéo- 
doric  '  lit  mettre  en  prison  les  deux  plus  il- 
lustres sénateurs,  Symmaque  et  Hoëce,  son 
gendre,  accusés  l'un  et  l'autre  de  crimes  d'É- 
tat. Boëce  fut  arrêté  ;\  Pavie  et  mis  h  mort 
vers  l'an  32.5;  Symmaque  eut  le  mèuie  sort. 
Ce  prince  lit  encore  arrêter  le  pape  Jean  à 
sou  retour  avec  les  quatre  sénateurs  ;  appa- 
remment comme  complice  de  Boëce  et  de 
Symmaque,  c'est-A-dire,   de  vouloir  soute- 
nir   la   dignité  du  sénat  contre  les   entre- 
prises de  Tiiéodoric.    Mais  Théodoric,  crai- 
gnant   l'indignation    de    Justin ,    n'osa    les 
f.iire  mourir  :  il  se  contenta  de  les  tenir  en 
une  rude  prison  oii  le  pape  Jean  mourut  le 
27  mai  326.  Son  corps  fut  transporté  de  Ra- 
vcnne  à  Rome  ,  et  enterré  à  Saint-Pierre.  Il 
est  honoré  dans  l'Église  comme  un  martyr. 
Nous  avons  deux   lettres    sous    son   nom, 
que  l'on  regarde  comme  supposées  ^  La  pre- 
mière, qui  est  adressée  à  l'archevêque  Za- 
charie,  est  composée  des  paroles  des  lettres 
d'Innocent  I",  de  Zosime,  de  Symmaque,  et 
du  cinquième  concile  tenu  à  Rome  sous  le 
pontilicat  de  ce  dernier.  La  date  en  est  faus- 
se :  car  elle  est  du  quinzième  des  calendes 
de  novembre  sous  le  consulat  de  Maxime  et 
d'ÛIybrius  ,  c'est-à-dire  du  18  octobre  323. 
Or,  Olybrius  ne  fut  point  consul  cette  année- 
lù,  ce  ne  fut  qu'en  326.  La  seconde  est  aux 
évèques  d'Italie  qu'il  exhorte  à  défendre  la 
foi  catholique  contre  <!es  ariens,  et  à  consa- 
crer leurs  églises ,  comme  on  le  faisait  en 
Orient.  EUe  est  datée  du  troisième  des  ides 
de  juin  sous  le  consulat  de  Maxime  et  d'O- 
lybrius.  Cette  date  est  fausse,  puiscjue  Maxi- 
me et  Olybrius  ne  furent  pas  consuls  ensem- 
ble. Maxime  le  fut  en  523.  Mais  Jean  n'ayant 
été  fait  pape  qu'au  mois  d'août  de  cette  année, 
il  ne  put  écrire  eu  cette  quahté  le  troisième 
des  ides  de  juin,  c'est-à-dire  le  onzième  de 
ce  mois.  Il  faut  ajouter  que  cette  lettre  est, 


tiiiuuii'  1.1  précédente,  une  compilation  tirée 
en  [)arlie  (les  lettres  de  saint  Léon,  et  en  par- 
tie do  la  seconde  Kpitre  de  saint  Paul  aux  Cn- 
rinlliiiMis;  qu'elle  est  contraire  à  la  vérilc'"  de 
l'histoire,  en  ce  qu'elle  suppose  que  le  pape 
Jean,  au  lieu  de  demander  .'i  l'empereur  Jus- 
lin  la  rt'vocaliou  de  son  édit  contre  les  ariens, 
connue  Théodoric  l'en  avait  chargé,  aiuait 
au  contraire  contribué  à  l'exécuter,  en  fai- 
sant faire  lui-même  en  Italie,  ce  que  Justin 
avait   ordonné    de   faire   dans    l'Orient  ;   et 
qu'elle  tend  à  déshonorer  la  mémoire  de  ce 
pape,  en  le  faisant  passer  pour  un  homme 
de  mauvaise  foi.  Il  s'était  engagé  de  la  part 
du  roi  d'Italie,  A  empêcher  que  les  ariens  ne 
fussent  d('^pouillésde  leurs  églises  en  t)rienl; 
la  lettre  suppose  qu'il  fit  tout  le  contraire; 
que  non-seulement  il  ne  demanda  point  que 
les  églises  fussent  conservées  aux  ariens , 
mais  (ju'il  aida  à  les  leur  ûler  en  les  consa- 
crant à  Constantinople  et  ailleurs  pour  les 
catholiques.    D'ailleurs  on  fait  faire  au  Pape 
dans  celte  letlre  ce  raisonnement  ridicule  : 
«  J'ai  consacré  des  églises  des  ariens  à  Cous- 
tanliuople,  au  désir  de  Justin,  prince  catholi- 
que :  consacrez-en  en  Italie,  malgré  l'oppo- 
sition de  Théodoric,  prince  arien.»  Saint  Gré- 
goire de  Tours 'dit  qu'aussitôt  que  Jean  eut  été 
placé  sur  le  Saint-Siège  il  consacra  plusieurs 
églises  des  ariens  pour  les  catholiques  :  ce 
qui  irrita  tellement  le  roi  Théodoric  qu'il  en- 
voya des  gladiateurs  par  toute  l'Italie  avec 
ordre  d'égorger  tous  les  catholiques  qu'ils 
trouveraient.  L'anonyme  donné  par  M.  de 
Valois  à  la  suite  d'Amien  Marcellin,  raconte 
la  chose  autrement.  Il  dit  '  que  le  roi  Théo- 
doric, informé  de  l'édit  de  l'empereur  Justin 
pour  chasser  les  ariens  de  l'Empire,  envoya 
le  pape  Jean  à  Constantinople  pour  détour- 
ner ce  prince   de  l'exécution  de  cet  édit; 
mais  que  Justin  ayant  persévéré  dans  sa  ré- 
solution, Théodoric  fit  mettre  le  Pape  en  pri- 
son à  son  retour  à  Ravenne.  Il  semble  que 
dans  la  variété  des  opinions  sur  ce  fait,  il 
vaut  mieux  s'en  tenir  à  ce  qu'en  dit  Anastase 
le  Bibliothécaire,  qui  assure  que  le  Pape  ob- 
tint de  l'Empereur  ce  qu'il  lui  demanda  de 
la  part  du  roi  d'Italie,  et  que,  par  là,  celle 
province  fut  délivrée  des  maux  dont  Théo- 
doric l'avait  menacée. 

2.  Le  s\iccesseur  de  Jean  siu-  le  Sainl- 


IV,  i«l.o. 


•  Libérât.,  Pontifical.,  ibid. 
'  On  le  tniuve  Jau3   Mansi,  tom.  VIII,    col.  COS- 
G07.  (L'éditeur.) 

XI. 


'  Gregor.  Turonensis,  lib.  I  De  Gloria  martyr.. 
cap.  XL,  png.  7(J6. 
*  Ibid.  in  Notis.  cap.  xl,  lil).  I. 

8 


HISTOIIŒ  GÉNÉRALE  DES  AUTECTS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Siège  fut  Félix  IV,  du  '  pays  des  Samnitcs, 
fils  de  Castor.  Le  roi  Théodoric  le  choisit' 
après  une  mûre  délibér;Uion  :  car,  encore 
qu'il  ne  fût  point  dans  l'Église  catholique,  il 
ne  voulait  pour  évoques  que  des  personnes 
d'un  mérite  distingué.  Le  sénat  de  Rome  ap- 
prouva le  choix  que  ce  prince  avait  fait  de 
Félix.  Ainsi  il  fut  ordonné  le  12  juUlet  de  l'an 
556.  Théodoric  ne  survécut  que  trois  mois  au 
pape  Jean  ;  se  voyant  près  de  mourir,  il  fit  re- 
connaître pour  roi  des  Goths  AthSlaric  son  pe- 
tit-fds  qui  n'était  Agé  que  de  huit  ans.  Nous 
avons  '  une  de  ses  lettres  adressées  au  sénat 
de  Rome  dans  laquelle  il  témoigne  avoir  pour 
agréable  l'élection  qu'ils  avaient  faite  de  ce- 
lui que  Théodoric  avait  désigné  pour  évêque 
de  Rome.  Félix  mourut  après  trois  ans  et 
deux  mois  de  pontificat.  [Il  est  honoré  comme 
sain!.]  Il  avait  bûli  dans  Rome,  en  un  lieu  ap- 
pelé la  rue  Sacrée,  l'église  de  Saint-Cùme  et 
Saint-Damicn,  et  rebâti  celle  de  Saint-Satur- 
nin, mîirlyr,  qui  avait  été  consumée  par  les 
llamines.  Dos  trois  lettres  que  nous  avons  ' 
sous  le  nom  de  Félix  IV,  il  y  en  a  deux  qui 
sont  rejetées  Comme  apocryphes,  savoir  les 
deux  premières  :  l'une  est  adressée  ù  tous 
les  évoques,  l'autre  ù  Sabine.  Elles  sont  tou- 
tes les  deux  datées  du  consulat  de  Larapa- 
dius  et  d'Oreste  :  la  première  des  calendes 
de  mars,  c'est-;\-dire  du  1"  de  ce  mois  de 
l'an  530;  la  seconde  du  11  des  calendes  de 
novembre,  c'est-à-dire  du  21  octobre  de  la 
môme  année,  neuf  jours  après  la  mort  de 
Félix,  car  il  mourut  le  i2  du  même  mois. 
Ces  deux  lettres  ne  sont  que  des  lambeaux 
de  celles  de  Sirice,  d'Innocent,  de  saint  Léon, 
de  saint  Grégoire,  auxquels  on  a  joint  un 
long  passage  du  troisième  livre  des  Rois, 
et  qiielques  autres  tirés  du  premier  chapitre 
de  l'Ecclésiastique  et  de  l'Épître  aux  Ephé- 
siens.  La  troisième  a  passé  quelque  temps 
sous  le  nom  de  Félix  III,  parce  qu'elle  était 
datée  du  consulat  de  Boëce,  qu'on  suppose 
être  arrivé  en  487;  mais  il  n'arriva  qu'en 
510,  seul  temps  auquel  saint  Césaire,  à  qui 
cette  lettre  est  adressée,  était  déjà  évêque. 
Un  ancien  manuscrit  au  lieu  de  Boëce  porto 
Manorlius  qui  fut  consul  en  528,  la  vingt- 
cinquième  ou  même  la  vingt-septième  année 
de  l'épiscopat  de  saint  Césaire.  La  date  de 
la  lettre  du  pape  Félix  est  du  troisième  des 


noncs  de  février,  c'est-à-dire  du  troisième 
de  ce  mois.  Elle  confirme  un  règlement  que 
saint  Césaire  avait  fait  ou  plutôt  renouvelé, 
perlant  défense  d'élever  à  l'épiscopat  cens 
qui  n'avaient  pas  auparavant  servi  dans  le 
clergé.  Ce  règlement  était  appuyé  non-seu- 
lement sur  les  anciens  canons  de  l'Église,  et 
sur  l'autorité  de  saint  Paul  qui  défend  à 
Timolhée  d'imposer  l'-ghement  les  mains  à 
jKTsoitne;  mais  encore  sur  la  fâcheuse  expé- 
rience que  l'on  avait  que  quelques-uns  de 
ceux  que  l'on  avait  promus  au  sacerdoce, 
sans  les  avoir  auparavant  éprouvés  suflisam- 
ment,  avaient  mené  une  vie  toute  séculière 
depuis  leur  promotion.  Le  Pape  donne  aussi 
pour  raison  de  confirmer  ce  règlement,  la 
diflicullé  qu'il  y  a  d'enseigner  les  autres 
quand  on  ne  s'est  pas  doniié  le  temps  d'ap- 
prendre, et  do  savoir  commander  quand  on 
n'a  pas  appris  à  obéir. 

3.  .\près  la  mort  de  Félix  IV,  arrivée  le 
12  d'octobre  529,  on  élut  pour  lui  succéder 
Bonifacc  11',  Romain  de  naissance,  et  fils  de 
Sigisvult,  qui  était  de  la  race  des  Goths.  Il 
fut  ordonné  le  quinzième  jour  du  même 
mois  dans  la  Basilique  de  Jules  ;  mais  en  mê- 
me temps,  un  autre  parti  choisit  un  nommé 
Dioscore,  qui  se  fit  ordonner  dans  la  Basili- 
que de  Constantin.  Le  schisme  ne  dura  que 
vingt-neuf  jours,  Dioscore  étant  mort  le  dou- 
zième de  novembre  suivant.  On  croit  que 
le  roi  Athalaric  donna  occasion  à  ce  schis- 
me en  voulant,  à  l'imitation  de  Thi''odoric  , 
avoir  part  à  l'élection  d'un  pape.  Quoi  qu'il 
en  soit,  Boniface  fit  analhématiser  Dioscore 
après  sa  mort  ;  puis  ayant  assemblé  un  con- 
cile, il  y  fit  passer  un  décret  qui  l'autorisait  à 
se  désigner  un  successeur.  En  vertu  de  ce 
décret,  signé  des  évoques,  il  les  obligea  de 
reconnaître  le  diacre  Vigile.  Mais  ce  décret 
fut  cassé  dans  un  concile  qui  se  tint  quelque 
temps  après,  comme  étant  au  déshonneur 
du  Saint-Siège  et  contraire  aux  saints  ca- 
nons. Boniface  s'avoua  même  coupable  de 
ce  qu'il  s'était  nommé  pour  successeur  Vi- 
gile, et  brûla  en  présence  de  tous  les  évo- 
ques, du  clergé  et  du  sénat,  le  décret  qu'il 
avait  fait  passer  pour  s'autoriser  à  ce  sujet. 
Boniface  tint,  on  531,  un  concile  à  Rome,  où 
les  plaintes  d'Élienne  de  Larisse  fm-ent  exa- 
minées. Les  évéques  d'Afrique  lui  firent  une 


1   Tlm 


S^lm  Ro 
hco  II,  i-a'  ' 


•  Lib.  Poniif.,  tom.  IV  Concil.,  pag.  G19. 
>  Caâfioilur.,    lib.    III   Var.  Ejiist.  «5,  pag.  231, 
lom.  1  E<lil.  Vend.  an.  {li'i.  -  »  Iliid. 


♦  Toin.  IV  Concil.,  pag.  1G50  etseq.  [DansMausi , 
tom.  VIII,  col.  6u8-tiC9.] 
5  Lil>.  Ponlifical..  tom.  IV  Concil,  pag.  1682. 


[vi-  siKCLE.]       CllAPITRR  \U.  —  SAINT  JEAN  I,  SAINT  FÉLIX  IV,  RTC 

d('putalion  pour  obtenir  de  lui  iiuo  conslilu- 
tion  qui  obli:;cùt  IMvâquo  de  CarUiaj^e  do 
faire  tontes  choses  av(îc  le  conseil  du  Siége- 
Aposlolique.  lléparatus  était  alors  évoque  do 


l\l 


Cartilage.  Le  Pontitical*  met  la  mort  de  saint 
Bonifacc  au  17  d'octobre  de  l'an  531  ;  d'au- 
tres la  mettent  dans  le  mois  de  décembre  de 
la  même  année.  On  trouve  dans  les  Recueils 
des  conciles  une  lettre  de  ce  pape  h  Kula- 
lius,  évôcpie  d'Alexandrie,  par  laquelle  il  lui 
fait  part  de  la  réunion  de  l'évèque  de  Car- 
thage  avec  l'iiglise  romaine,  supposant  que, 
dès  le  temps  d'Aurèle,  évoque  de  cette  ville, 
l'Église  d'Afrique  n'était  plus  dans  la  com- 
munion de  celle  do  Rome.  Cela  seul  suffit 
pour  prouver  la  supposition  de  cette  lettre, 
puisqu'il  est  constant  que  rÉglisc  d'Afrique 
n'a  pas  cessé  nu  moment  d'être  unie  de 
communion  avec  les  papes  Bonif.icc  l",  Cé- 
lestin  et  tous  les  autres  qui  ont  gouverné 
l'Église  de  Rome  jusqu'à  saint  Bouiface  IL 
Pourne  rien  dire  des  lettres  de  saint  Léon  et 
des  autres  pa[)es  aux  évoques  d'.\frique,  il 
suftira  de  remarquer  ici  que  Symmaque  , 
qui  occupait  le  Saint-Siège  quelques  années 
avant  Boniface  II,  envoyait  tous  les  ans  aux 
évèques  d'Afrique  relégués  en  Sardaigue  par 
le  roi  Trasamond,  de  l'argent  et  des  habits. 
Non-seulement  il  leur  écrivit  *,  mais  il  leur 
envoya  encore  des  reliques  de  saint  Nazaire 
et  de  saint  Romain.  Il  faut  ajouter  que  l'on 
ne  connaît  aucun  évèque  d'Alexandrie  qui 
ait  porté  le  nom  d'Eulalius  ;  que  cette  lettre 
n'est  qu'un  tissu  mal  assorti  de  divers  en- 
droits de  celles  de  saint  Léon,  d'Hormisdas, 
et  même  de  saint  Grégoire,  postérieur  à  Bo- 
niface II,  et  que  l'imposteur  qui  l'a  fabriquée 
n'a  eu  en  vue  que  de  ternir  la  mémoire  de 
saintAugustiUjdesaintFulgence,  de  saintEu- 
gène  de  Carthage  et  de*  tant  d'autres  grands 
évèques,  qui  ont  souffert  dans  la  persécution 
des  Vandales,  en  les  faisant  passer  pour  des 
schismatiques,  et  conséquemment  indignes 
d'être  honorés  dans  l'Église.  Il  faut  porter  le 
même  jugement  de  la  requête  qu'on  sup- 
pose avoir  été  présentée  à  Boniface  II  par 
Eulalius,  dans  laquelle  il  excommunie  tous 
ceux  de  ses  prédécesseurs  ou  de  ses  succes- 
seurs, et  tous  autres  qui  auraient  attenté  ou 
qui  attenteraient  aux  privilèges  de  l'Église 
romaine.  Pouvait-ou  prêter  à  un  évèque  un 
langage  et  des  prétentions  plus  ridicules  ? 


Les  censures  d'Eulalius  sont  précédées  du 
Formulaire  qu'Hormisdas  fit  souscrire  pour 
la  réunion  ;  mais  il  n'y  est  pas  en  entier  ;  elles 
sont  suivies  d'un  long  fragment  de  la  lettre 
du  môme  Pape,  qui  fut  lue  dans  l'action  cin- 
quième du  concile  de  Constantinople'  ,  sous 
Mennas;  en  sorte  que  cette  requête  est  un 
ramas  de  ditféronts  morceaux.  La  date  seule 
en  prouve  la  fausseté,  puisqu'elle  est  du 
troisième  consulat  de  Justinien,  qui  n'arriva 
qu'après  la  mort  de  Boniface  IL  Mais  on  ne 
peut  former  aucun  doute  sur  la  lettre  de  ce 
pape  il  saint  Césaire  d'Arles.  Cyprien,  diacre 
de  cette  Église,  en  fait  mention  dans  la  Vie  ' 
de  ce  Saint.  C'est  d'ailleurs  une  réponse  ;\  la 
lettre  que  ce  saint  évèque  avait  écrite  i\  Fé- 
lix, prédécesseur  de  Bonifacc,  pour  le  prier 
de  confirmer,  par  l'autorité  du  Saint-Siège,  la 
doctrine  de  la  grâce  prévenante,  en  décla- 
rant que  c'est  elle  qui  nous  inspire  le  com- 
mencement de  la  foi  et  de  la  bonne  volonté. 
Saint  Césaire  se  crut  obligé  de  s'adresser 
l;\-dessus  au  Saint-Siège,  parce  que  quelques 
évèques  des  Gaules  soutenaient  que  l'on  de- 
vait attribuer  le  commencement  de  la  foi  à 
la  nature  et  non  pas' à  la  grâce.  Le  prêtre  et 
abbé  Arménius  fut  porteur  de  cette  lettre, 
qui  est  datée  du  huitième  des  calendes  de 
février,  sous  le  consulat  de  Lampadius  et 
d'Oreste,  c'est-à-dire  du  28  de  janvier  330.  Il 
parait,  par  le  commencement  de  cette  lettre, 
que  saint  Césaire  en  avait  écrit  deux  sur  le 
même  sujet,  l'une  à  Félix  IV,  l'autre  à  saint 
Boniface  II,  mais  avant  qu'il  sût  son  élévation 
au  pontificat,  pour  le  prier  de  presser  Félix 
de  lui  faire  réponse.  Elles  sont  perdues  tou- 
tes deux.  Le  pape  saint  Boniface  dit  dans  la 
sienne  que  les  Pères,  surtout  saint  Augustin  et 
les  Papes  ses  prédécesseurs,  ont  prouvé  avec 
tant  d'étendue  que  la  foi  même  est  un  don 
de  Dieu,  qu'il  n'ètaitpluspermis  d'en  douter, 
ni  à  lui  de  s'étendre  sm-  cette  matière;  d'au- 
tant que  Césaire  lui-même  avait  démontré  , 
cette  vérité  par  plusieurs  passages  de  l'Écri- 
ture rapportés  dans  sa  lettre  ;  qu'il  y  avait 
marqué  que  les  évèques  des  Gaules  assemblés 
en  concile  à  Orange,  étaient  convenus  unani- 
mement que  la  foi  par  laquelle  nous  croyons 
en  Jésus-Christ  est  conférée  parla  grâce  pré- 
veuaute  de  Dieu,  et  que,  sans  le  secours  de 
cette  grâce,  nous  ne  pouvons  rien  faire  de 
bon  selon  Dieu,  ni  le  vouloir,  ni  le  commen- 


'  Lib.  Pontifical.,  tom.   IV   Concil.,  pag.  i682. 
»  Apud  Eunod.,  lib.  II  Epist.  14. 


'  Tom.  V  Concil.,  pag.  iâl. 

*  Cyprian.,  iu  Vita  Cœsar.,  lib.  I,  num.  33. 


110 


IIISTOIRF-  GÉNf:RALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


ccr ,  le  Sauveur  ayant  dit  :  Sans  moi  vous  ne 
sauriez  rien  faire.  «11  est  donc  '  ceilain  et  ca- 
tholique, ajoute  le  p  ipe  Ronifacc,  que  dans 
tous  les  liieas  dont  la  foi  est  le  chef,  la  misé- 
ricorde de  Dieu  nous  prévient  lorsque  nous 
nevou]onspas,arniquenousvoulions;  qu'elle 
est  dans  nous  lorsque  nous  voulons,  et  qu'elle 
nous  suit  afin  que  nous  persévérions  dans  le 

loi.  LTui.  bien.»  Il  prouve  celte  doctrine  par  divers  pas- 
M«.<cii.  sages  de  l'Écrilure,  et  dit  qu'il  ne  peut  assez 
s'étonner  qu'il  y  ait  encore  des  personnes 
qui  pensent  coutrairciuent  ;\  cette  doctrine 
et  qui,  infectées  d'une  ancienne  erreur,  attri- 
buent à  la  nature  ce  qui  est  un  bienfait  de  la 

Rom.  11.  grâce  de  Jésus-Christ,  l'auteur  et  le  consom- 
mateur de  la  foi.  Il  laisse  à  saint  Césaire  de 
réfuter  lui-même  les  sentiments  erronés  con- 
tenus dms  une  lettre  qu'un  certain  prêtre 
lui  avait  communiquée,  ou  que  cet  évèque 
avait  ensuite  fait  passer  à  Rome,  espérant 
que  Dieu,  par  son  ministère,  changerait  telle- 
ment les  cœurs  des  ennemis  de  la  grâce, 
qu'ils  conviendraient  que  leur  changement 
provient  d'elle,  lorsqu'ils  se  sentiraient  dispo- 
sés à  confesser  ce  qu'ils  niaient  auparavant, 
c'est-à-dire  que  toute  bonne  volonté  vient 
de  la  grâce  et  non  de  la  nature. 

s. m  jmo      4,  Saint  Jean  II,  surnommé  Mercure,  romain 


uc  ■dol»i''Al  de  naissance,  lîls  de  Projectus  et  prêtre  du  ti- 


II 

IbaUtîc.    Ca-' 


Ld!!'îiL.  1.x  tre  de  Saint-Qément,  succéda  à  Boniface  II,  le 
eiVc  t^'.'is»!  22  janvier,  la  seconde  année  d'après  le  consu- 
lat d'Oreste  etdeLampadius,  c'est-à-dire  en 
532.  Quelque  temps  après  son  ordination,  un 
défenseur  de  l'Église  romaine  se  plaignit  à 
Atlialaric  que,  pendant  la  vacance  du  Saint- 
Siège,  quelques-uns  saisissant  avidement  la 
circonstance  du  temps  avaient,  pour  se  fai- 
re récompenser  des  brigues  qu'ils  faisaient 
pour  l'élection,  extorqué  des  promesses  sur 
les  biens  de  l'Église,  pour  lesquelles  ou  avait 
exposé  publiquement  en  vente  jusqucs  aux 
vases  sacrés.  Le  roi  voulant  remédier  à  ses 
abus  écrivit  au  pape  Jean  une  lettre  qui  de- 
vait être  commiuiiquée  à  tous  les  patriai-chcs 
et  aux  Églises  métropolitaines,  où  régnaient 
apparemment  les  mêmes  abus,  portant  que 
son  intention  était  qu'on  observât  un  décret 
du  sénat,  fait  du  temps  du  très-saint  pape  Bo- 
niface, par  lequel  il  était  dit  que,  si  quicon- 


que promettait  quelque  chose  par  sol-même 
ou  par  une  personne  interposée,  pour  obtenir 
un  évêché,  le  contrat  serai!  déclaré  nul*  avec 
restitution  de  ce  qui  aurait  été  donné,  .\tha- 
laric  permet  néanmoins  aux  olliciers  de  son 
palais,  de  prendre  jusques  à  trois  mille  sous 
d'or  pour  l'expédition  des  lettres,  lorsqu'il  y 
aura  de  la  dilliculté  touchant  l'élection  du 
Pape,  à  condition  que  les  olliciers  riches  n'eu 
prendront  rien  du  tout,  puisque  c'est  du  bien 
des  pauvres.  Mais  à  l'égard  des  autres  pa- 
triarches, lorsqu'il  sera  nécessaire  d'expé- 
dier aussi  dans  le  palais,  des  lettres  pour  leur 
élection,  les  officiers  pourront  prendre  jusgups 
à  deux  mille  sous  ;  mais,  pour  les  simples  évè- 
ques,  on  se  contentera  de  distribuer  au  petit 
peuple  cinq  cents  sous.  Q  permet  encore  à 
toutes  sortes  de  personnes,  pourvu  qu'elles 
soient  d'une  probité  connue,  de  citer  devant 
les  juges  des  lieux  ceux  qui  auront  reçu  de 
l'argent  pour-  une  élection,  accordant  au  dé- 
lateur la  troisième  partie  de  la  somme  que 
l'on  pourra  recouvrer.  Par  une  autre  lettre  *, 
adressée  au  préfet  de  Rome,  le  roi  ordonna 
que  son  édit  et  le  décret  du  sénat  contre  la 
simonie,  seraient  gravés  sur  des  tables  de 
marbre  que  l'on  placerait  à  l'entrée  du  par- 
vis de  Saint-Pierre. 

o.  Au  mois  de  juin  de  l'an  533,  l'empereur 
Justinien envoya  àRomeHypace,  archevêque 
d'Éphèse,  et  Démétrius,  évêqne  de  Philippcs, 
avec  uue  lettre  oîi,  après  avoir  assuré  le  pa- 
pe Jean  de  tout  le  respect  qu'un  fils  doit  à 
son  père,  et  du  désir  sincère  qu'il  avait  de 
voir  tous  les  évêqucs  dùrient  parfaitement 
unis  avec  le  Saint-Siège ,  il  lui  donnait  avis 
que  quelques  personnes,  mais  en  fort  petit 
nombre,  niaient  que  Jésus-Christ,  Fils  uni- 
que de  Dieu,  qui  est  né  du  Saint-Esprit  et 
de  Marie  mère  de  Dieu  toujours  vierge  ;  et 
qui  a  été  crucifié,  fut  un  de  la  sainte  et  con- 
substautielle  Trinité,  qu'on  dût  l'adorer  avec 
le  Père  et  le  Saint-Esprit,  que  le  même  fût 
consubslantiel  à  nous  selon  l'iiumanité  et 
consubstantiel  au  Père  selon  la  divinité.  11 
paraissait  à  l'Empereur  que  ces  sortes  de 
personnes  étaient  infectées  de  l'hérésie  de 
Xestorius,  distinguant  avec  cet  hérésiarque 
deux  fils  dans  Jésus-Christ,  le  Verbe  de  Dieu 


L.IU 

.'et  n 

COB-  \ 

r,.i. 


>  Cerlum  est  enim  alque  catholicum  quia  in 
omnibits  bonis,  quorum  caput  est  fuies,  noienles 
nos  adhuc  inisericordia  divina  prœvenial,  ut  ve- 
limus ,  insil  in  nnbis  cum  volumus ,  sequalur 
eliain  ul  in  fide  duremu^,  sicut  David  propheta 
dicil  :   Ueus   luous,  misericûrJia  cju.^  prtpvenict 


me.  El  alibi  :  Misericordia  vaen  cum  ipso  est.  El 
ilerum  :  Sliseriroriiin  ejus  subsoqiictur  me.  Et 
I'aulu%:  Quis  prior  dédit  ei,  et  relrilitiplur  illiî 
Qiiouiau)  ex  ipso  et  pcr  ipsum  et  iu  ipso  suul  om- 
nia. 
«  Ibid.  Epist.  Ifi. 


CHAPITRE  Vil.  —  SAINT  JEAN  1,  SAINT  Fl'lLIX  IV,  ETC. 


Ivi"  SIÈCLR.] 

et  le  Cliiisl.  Il  rccdiiiiall  que  lous  les  dvi^ques 
lie  l'Église  catholique  et  apostolique,  avec  les 
;iliiii''s  des  saints  monastères,  tenaient  une 
iloiliine  contraire  ;  et,  pour  niai(iner  (|iielie 
était  la  sienne,  il  fait  une  profession  de  foi 
dans  laquelle  il  déclare  que  Jésus-Cluisl,  Fils 
unique  et  Verbe  de  Uieu,  né  du  Père  avant 
lous  les  siècles  et  né  du  Saint-Esprit  et  de 
Marie  mère  de  Dieu  dans  les  derniers  temps, 
est  une  des  personnes  de  la  sainte  et  con- 
substantielle Trinité;  qu'il  nous  est  consubs- 
tantiel  et  passiljlc  selon  son  humanité,  et 
consubstanticl  au  Père  et  impassible  selon  sa 
divinité  ;  qu'il  est  véritablement  et  propre- 
ment Dieu,  et  qu'ainsi  la  sainte  et  glorieuse 
Vierge  Marie  est  proprement  et  véritable- 
ment mère  de  Uieu,  non  que  le  Verbe  ait 
pris  son  commencement  d'elle;  mais  par- 
ce qu'il  est  descendu  du  ciel,  et  qu'il  est  né 
d'elle  selon  la  chair.  11  ajoute  qu'il  reçoit  les 
quatre  saints  conciles  de  Nicée,  de  Cons- 
tantinople,  d'Ephèse  et  de  Chalcédoine,  assu- 
rant que  tous  les  évêques  d'Orient  en  faisaient 
de  même.  Après  quoi  il  prie  le  Pape,  pour 
ferm-U'  la  bouche  à  quelques  moines  qui  ne 
pensaient  pas  sainement  sur  la  foi,  de  lui 
adresser  des  lettres  et  au  patriarche  de  Cons- 
taulinoplc,  où  il  déclarerait  qu'il  les  recevait 
à  sa  communion,  et  tous  ceux  qa\  confes- 
saient les  articles  ci-dessus,  et  qu'il  condam- 
nait ceux  qui  ne  les  approuvaient  pas.  Le 
Pape,  dans  sa  réponse  qui  est  du  8  des  calen- 
des d'avril,  sous  le  consulat  de  Justinien  pour 
la  quatrième  fois ,  et  de  Paulin,  c'est-à-dire 
du  2o  de  mars  334,  loue  le  zèle  que  Justiuien 
témoignait  pour  la  foi,  et  son  respect  pour 
le  Saint-Siège.  11  approu\e  ensuite  sa  confes- 
sion de  foi,  disant  que  la  doctrine  qu'elle 
renferme  est  celle  que  tous  les  Pères  et  les 
évoques  de  Rome  ont  enseignée,  et  que  qui- 
conque en  professe  une  contraire  se  déclare 
lui-même  séparé  de  la  sainte  communion  et  de 
l'Église  catholique.  Le  Pape  parlait  princi- 
palement de  Cyrus  et  d'Euloge,  qui  avaient 
été  envoyés  à  Rome  du  monastère  des  acé- 
mètes,  pour  soutenir  que  Jésus-Christ  n'est 


117 


pas  un  de  la  Sainte  'J'rinité,  et  que  Marie  n'est 
pas  proprement  mère  de  Dieu.  Jean  II  fit  ce 

qu'il  pid  pourles  ian\encràla  saine  doclrine. 
mais  les  voyant  opiniâtres  dans  l'erreur,  il 
rehisa  de  les  admettre  à  sa  communion,  et 
les  sépara  de  l'I'iglise  catholique,  jusf[u'ii  ce 
qu'ils  en  eussent  embrassé  la  foi  et  condam- 
ne; leurs  erreurs,  en  piianl  toutefois  l'Empe- 
r(Mir  de  leur  accorder  sa  communion  et  sa 
bienveillance,  si,  à  l'avenir,  ils  voulaient  re- 
venir à  l'unité  de  l'Église.  Il  fait  l'éloge  d'Hy- 
pace  et  de  Démétrius,  envoyés  de  Justinien, 
mais  il  ne  dit  rien  des  présents  qu'ils  avaient 
apportés  à  l'apôtre  saint  Pierre  ,  qui  consis- 
taient en  un  vase  d'or  du  poids  de  cinq  livres , 
entouré  de  pierreries,  deux  calices  d'argent 
de  six  livres  chacun ,  deux  autres  de  quinze 
livres,  et  quatre  voiles  tissus  d'or.  0  y  en  a  qui 
ont  voulu  contester  ces  deux  lettres  :  celle  de 
Justinien  au  pape  Jean,  et  celle  de  ce  pape  à 
Justinien;  mais  outre  qu'elles  ne  renferment 
aucuu  caractère  de  supposition,  elles  sont  ci- 
tées l'une  et  l'autre  dans  des  monuments  que 
personne  ne  conteste ,  savoir  dans  la  lettre 
de  ce  même  pape'  aux  sénateurs  romains,  et 
dans  la  Constitution  ^  de  Justinien  à  Épiphane, 
patriarche  de  Constantinople. 

6.  Après  le  départ  des  députés  de  ce  prin-        Leiire  du 

^  ...  ,  1         r^pe  Jean  aux 

ce,  le  nape  sauit  Jean  écrivit  aux  sénateurs  de   sénaicurs  m- 

'  L        L  ^  m    iDS,        tO:il. 

Rome,  Aviénus  et  autres  dénommes  dans  iv  concu. 
l'inscription  de  sa  lettre ,  pour  les  instruire , 
suivant  leur  désir,  de  la  réponse  qu'il  avait 
faite  à  l'Empereur.  «Justinien  notre  Ois'  nous 
a  marqué,  leur  dit-il,  qu'il  s'était  élevé  une 
dispute  sur  ces  trois  questions,  savoir  :  Si 
Jésus-Christ  peut  être  appelé  une  personne 
des  trois  de  la  Sainte  Trinité;  s'il  a  souffert 
en  sa  chair,  la  divinité  demeurant  impassi- 
ble ;  et  si  la  Sainte  Vierge  Marie  doit  être 
.  nommée  proprement  et  véritablement  mère 
de  Dieu.  Nous  avons  approuvé  la  foi  de  l'Em- 
pereur comme  catholique,  et  montré  que  ce 
qu'il  a  dit  sur  chacune  de  ces  propositions 
est  conforme  à  l'Écriture  et  aux  Pères.  »  Le 
Pape  rapporte  ensmte  les  passages  de  l'É- 
criture et  des  Pères,  qui  autorisaient  ces 


»  Tom.  IV  Concil.,  pas.  1731. 

«  Justin.,  lib.  Vil  Cod. 

3  Justinianus  imperator,  filins  noster,  ni  ejtis 
Epislolœ  tenore  cognovistis  ,  de  kis  tribus  orta 
cerlamina  fuisse  significa  fil  :  Ulrum  unus  ex  Tri- 
nitate  Chrvstus  et  Dnus  nnstcr  dicipossil  ,  hoc  est 
una  de  tribus  personis  Sa)iclœ  Triiiitalis  sancta 
pcrsona  :  an  Deus  Chrislus  carne  perlulerit  iin- 
pussibili  Deilale  :  an  veraciter  et  proprie  maler 


DominÎDci  noslri  Maria  semper  Yirgo  debeat  ap- 
pellari.  Prohavimus in  his  calholicam  imperatoris 
fidem,  el  ita  esse  prophelis  et  aposlolicis  vel  pa- 
trum  exemplis  evidcnter  ostendiinus  nnuin  ex 
sancta  Trinitate  Chrislum  esse,  hoc  est  unum  de 
tribus  sanctœ  Trinitatis  personis  sanctam  esse 
personam  sive  subsistenliam  evidenter  ustendi- 
mus.  Joan.,  Episl.  ad  sénat.,  pag.  1751. 


118 


HISTOIRE  GENERALE  DES 


propositions.  Saint  Aufîustia  est  le  premier 
des  Pères  qu'il  cite,  disant  '  que  l'Eglise  ro- 
maine en  suit  et  en  observe  la  doctrine  sui- 
vant les  décrets  de  ses  prédécesseurs.  Après 
quoi  il  rapporte  des  témoignages  de  plusieurs 
autres  anciens  docteurs  de  l'Église,  des  deux 
saints  Grégoire  de  Nazianze  et  de  Nice,  de 
Proclnsde  Constantinople,  de  saint  Cyprien, 
de  saint  Cyrille,  de  saint  Léon,  de  Léporius 
et  de  Gélase.  Il  déclare  ensuite  que  l'Église 
romaine  a  condamné  les  moines  acémètes, 
qui  ont  paru  évidemment  être  dans  l'erreur 
de  Nestorius.  C'est  pourquoi ,  conformément 
au  canouf?  qui  défend  à  un  clirétien  de  par- 
ler ni  de  communiquer  avec  un  excommunié, 
il  avertit  les  sénateurs  de  ne  pas  leur  parler, 
et  de  n'avoir  rien  de  commun  avec  eux.  Le 
pape  Jean,  en  approuvant  la  proposition  de 
l'empereur  Justiuien,  qui  revenait  à  celle  des 
moines  de  Scytliie ,  ne  fit  rien  de  contraire 
à  ce  qu'avait  fait  Hormisdas,  son  prédéces- 
seur :  car  ce  pape  ne  condamna  ni  cette  pro- 
position, ni  ceux  qui  la  soutenaient .  Seule- 
ment il  témoigna  du  mécontentement  de  leur 
conduite  et  des  troubles  qu'ils  avaient  exci- 
tés dans  Rome. 
7.  Vers  l'an  534,  le  pape  saint  Jean  reçut  des 
Tni'  "tqucs  lettres  de  saint  Césaire  d'Arles  et  do  quelques 
t"^'t'k,èî.  autres  évoques  des  Gaules,  en  plaintes  con- 
ir  Hg.  i*i°t  tre  Conluméliosus,  évêque  de  Riez,  convain- 
''■^'-  eu  de  plusieurs  crimes,  de  son  prnpi'e  aveu. 

Le  Pape  écrivit  sur  cela  trois  lettres;  l'une  à 
saint  Césaire,  l'autre  aux  évéques  des  Gaules, 
la  troisième  au  clergé  de  Riez,  dans  les- 
quelles il  dit  qu'il  avait  interdit  Conlumélio- 
sus de  toutes  ses  fonctions,  et  ordonné  qu'il 
serait  renfermé  dans  un  monastère  pour 
faire  pénitence,  après  néanmoins  en  avoir 
demandé  lui-même  la  permission  aux  évo- 
ques, par  une  requête  où  il  confesserait  son 
péché,  la  requête  datée  du  jour  de  sa  de- 
mande, avec  les  noms  des  consuls.  Le  Pape 
charge  saint  Césaire  de  l'exécution  de  cet  or- 
dre, et  aussi  de  nonmicr,  en  la  place  do  Con- 
tuméliosus,  un  visiteur  pour  l'administraliou 
de  l'Église  de  Riez ,  à  condition  qu'il  ne  se 
mêlerait  que  de  la  célébration  des  saints  mys- 
tères, sans  loucher  ni  aux  ordinations  des 


LcMro  An 
Mint    Jrao    & 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

clercs,  ni  au  temporel  de  l'Église.  Jean  II 
joignit  à  sa  lettre  à  saint  Césaire  une  hste  des 
canons  contre  les  évêques  condamnés  par  les 
conciles  de  la  province  ;  savoir  le  septième 
chapitre  de  l'Kpitre  décrélale  du  pape  Sirice 
à  Hymérius  de  Tarragone  ;  le  25'  et  le  29'  des 
Canons  apostoliques  ;  le  quatrième  et  le  (juin- 
zième  d'Antioche,  et  le  neuvième  de  Nicée. 
A  la  suite  de  la  lettre  de  Jean  II  à  saint  Cé- 
saire d'Arles,  on  en  a  mis  une  autre  dont 
l'auteur  est  inconnu,  et  que  quelques-uns 
croient  être  saint  Césaire  même,  qui  porte 
en  tête  plusieurs  canons  sur  la  même  ma- 
tière ,  c'est-à-dire ,  contre  les  ministres  des 
autels,  coupables  do  queUpie  crime  capital. 
Pour  ce  qui  est  de  la  lettre  h  Valère,  attribuée 
à  Jean  II,  c'est  un  composé  de  fragments  ti- 
rés des  écrits  d'Ilhace  à  Varimade,  et  de  ceux 
de  saint  Léon.  Le  style  eu  est  diÛërent  de 
celui  des  lettres  du  pape  Jean,  et  la  date  des 
consuls  en  est  fausse  '. 

8.  Saint  Jean  eut  pour  successeur  saint  Aga- 
pet' romain  de  naissance,  fils  du  prêtre  Gor- 
dien ;  il  fut  ordonné  le  4  de  mai  de  l'an  535,  et 
tint  le  Saint-Siège  onze  mois  et  dix-huit  jours. 
Dès  le  commencement  de  son  poutificat  il  fit 
brûler  au  milieu  de  l'Église,  en  présence  de 
tout  le  monde,  les  formules  d'anathèmes  que 
le  pape  Boniface  II  avait  exigées  des  évoques 
et  des  prêtres  contre  la  mémoire  de  Dios- 
core,  son  compétiteur.  L'empereur  Justiuien 
ayant  appris  son  ordination,  lui  envoya  sa 
confession  de  foi,  avec  une  lettre  par  laquelle 
il  le  priait  de  conserver  dans  leurs  dignités 
ecclésiastiques  les  ariens  convertis;  et  de 
faire  son  Vicaire,  dans  l'Illyrie,  l'évoque  de 
Jusiinianée,  ville  deDaidanie,  que  ce  prince 
avait  fait  bâtir  auprès  du  village  où  il  était 
né. 

9.  Le  pape  saint  Agapet  répondit  à  l'empe- 
reur par  deux  lettres  ditférentes.  Dans  l'une  il 
approuve  la  confession  de  foi  que  ce  prince 
lui  avait  envoyée,  et  qui  était  la  môme  qu'il 
avait  envoyée  par  les  évoques  Hypace  et 
Déméirius;  il  y  déclare  encore  qu'il  ne  souf- 
frira point  que  Cyrus  et  les  autres  moines 
acémètes  soient  rétablis  dans  la  communion 
de  l'Église,  à  moins  qu'après  une  satisfaction 


Ibld   IT 


s»  - 


LctIrfS 
rnlnt  A^aT>ei 
Jti-titii.n, 


•  Ilem  sanctuit  Auguslxnns  cujus  docirinam  se- 
cumiiim  firccccssoriun  meoriiin  slatula  romana 
$equilur  et  serval  Ecclesia.  Ibid. 

*  Acœmetas  monachos  qui  nestoriani  evidenter 
npparueranl  romana  damnai  Ecclesia,  a  quibus 
vos  proplcr  canonem  qui  cum  excoinmimicalin 
chrhHanum  nec loquincc communicare perniiUit, 


admnnere  non  desino  ut  rorum  ctiain  simpHcem 
coUocutionem  vitetis,  nihiUjue  vobis  cuvi  eis  œs- 
limalis  esse  commune.  Iliiii.,  pag.  1751. 

»  lAh.  Pontif.,  tom.  IV  Concil  ,\ing.  1785. 

'  On  trouve  les  lettres  de  Jean  11  dans  Mansi , 
»niTi.  VIII,  col.  ■îOl-SIl,  et  dans  lo  lom.  LWI  de  la 
Palrotogie  latine,  eol.  n  et  suiv.  [L'éditeur  } 


CHAPITRE  VII.  —  SAINT  JEAN  I.  SAINT  FÉLIX  IV,  ETC. 


[Vl"  SIÈCLE.] 

canonique,  ils  n'aient  cnibrassi)  la  doctrine 
.-ipostoiiqne.  Dans  l'aiitro,  il  remercie  Jusli- 
iiicii  des  conipliiuents  de  congratiilalioa  (lu'il 
lui  avait  faits  sur  son  élévation  au  poiitilicat, 
cl  le  félicite  liii-nième  sur  ses  victoires  et  sur 
ses  conquêtes.  Il  loue  aussi  son  zèle  pour  la 
réunion  des  ariens  ;  mais  il  lui  représente  qu'il 
ne  doit  ni  ne  peut  rien  faire  contre  les  ca- 
nons des  Porcs  et  les  décrets  du  Siégc-Apos- 
toii(]ue,  qui  défentlent  de  promouvoir  aux 
ordres  les  hérétiques  réconciliés,  et  de  les 
conserver  dans  le  rang  qu'ils  occupaient 
avant  leur  réconciliation.  Il  ajoute  que  si 
ceux,  dont  ce  prince  lui  a  parlé,  souhai- 
tent d'embrasser  véritablement  la  vraie  foi, 
ils  doivent  se  soumettre  aux  règles  de  l'É- 
glise ;  et  que  s'il  leur  reste  de  l'ambition, 
c'est  une  preuve  que  leur  conversion  n'est 
pas  solide.  Justiuieu  avait  demandé  que  l'af- 
faire d'Etienne  de  Larisse  ,  qui  avait  imi>loré 
la  protection  du  Saint-Siège  sous  le  pontifi- 
cat de  Boniface,  au  sujet  d'un  jugement 
lendu  contre  lui  par  Epiphane  de  Constan- 
tinople,  fût  terminée  par  les  légats  du  Pape 
à  Constantinople  ;  Agapet  promet  d'en  com- 
mettre l'exécution  à  ceux  qu'il  devait  en- 
voyer incessamment  eu  cette  ville  ;  mais  il 
déclare  qu'il  recevait  dès  lors  à  sa  commu- 
nion Achille  pour  lequel  l'Empereur  s'était 
employé.  «Vous  excusez,  lui  dit -il,  l'évèque 
Epiphane  de  l'avoir  ordonné,  parce  que  ça 
été  par  votre  ordre  ;  mais  Epiphane  devait 
vous  représenter  lui-même  ce  qui  était  du 
au  respect  duSaiut-Siége,  sachant  avec  quel 
zèle  vouj  en  défendez  les  privilèges.  »  Il  re- 
met à  l'envoi  de  ses  nouveaux  légats  à  Cons- 
tantinople, de  faire  savoir  k  l'Empereur  sa 
résolution  sur  l'ordinxtion  d'Achille  qui  avait 
été  fait  évoque  de  Larisse  en  la  place  d'É- 
tienne,  et  sur  l'Evêque  de  Justinianée,  que 
Justinicn  demandait  pour  Vicaire  du  Saint- 
Siège  dans  riUyrie.  Cette  lettre  est  du  lo 
octobre  533. 

10.  Quelque  temps  auparavant,  il  en  avait 
écrit  une  aux  évéques  d'Afrique  à  cette  oc- 
casion. Ces  évêques,  assemblés  en  concile  au 
nombre  de  deux  cent  vingt-sept,  pour  tra- 
vailler au  rétablissement  de  l'ancienne  dis- 
cipline, négligée  et  presque  abolie  pendant 
les  persécutions  des  Vandales,  se  trouvèrent 
embarrassés  sur  la  manière  dont  il  fallait  re- 
cevoir les  évêques  ariens  qui  se  convertis- 
saient. Si  l'on  devait  les  laisser  dans  leurs 
charges,  ou  les  recevoir  simplement  à  la 
communion  laïque.  L'avis  commun  des  évê- 


liO 


qucs  fut  qu'on  ne  devait  pas,  en  recevant  les 
évêques  ariens  convertis,  les  conserver  dans 
leurs  dignités.  Mais,  avant  que  de  statuer  sur 
cette  afl'aire,  ils  crurent  devoir  consulter  le 
Saint-Siège.  Us  le  consultèrent  encore  sur 
cette  autre  question  :  Si  l'on  pouvait  laisser 
dans  le  clergé  ceux  qui,  étant  enfants,  avaient 
reçu  le  baptême  de  la  main  des  ariens.  Ils 
demandèrent  aussi  au  Pape  que  les  évoques, 
les  prêtres  et  autres  clercs  d'Afrique  qui 
passeraient  dans  le  pays  qui  est  au  del;\  de 
la  mer,  sans  lettres  testimoniales,  fussent 
traités  comme  hérétiques.  Le  diacre  Libérât, 
chargé  de  porter  h  Home  la  lettre  synodale 
des  évoques  d'Afi-ique,  ayant  été  contraint 
à  cause  de  l'hiver  de  retarder  son  voyage,  on 
reçut  en  Afrique,  avant  son  départ,  la  nou- 
velle de  la  mort  du  pape  Jean  II,  et  l'ordi- 
nation d'Agapet.  Ce  qui  obligea  lléparatus, 
évêque  de  Carthage  d'y  joindre  ime  lettre 
de  congratulation  pour  le  nouveau  Pape. 
Agapet,  dans  sa  réponse  à  la  Lettre  syno- 
dale des  évêques  d'Afrique,  les  félicite  d'être 
délivrés  des  mains  des  hérétiques ,  leur  té- 
moignant qu'il  avait  partagé  avec  eux  les  af- 
lliclions  et  les  maux  dont  ils  avaient  été  ac- 
cablés. Il  décide  qu'à  l'égard  des  évêques 
ariens  convertis,  il  faut  s'en  tenir  aux  an- 
ciennes règles  de  l'Eglise,  et  se  contenter 
de  les  recevoir  à  l'Église  catholique  en  quel- 
que âge  et  en  quelque  manière  qu'ils  aient 
été  infectés  de  l'hérésie  arienne,  sans  les 
admettre  dans  le  clergé,  ni  leur  y  conserver 
aucun  rang  ;  et  que,  pour  éviter  les  inconvé- 
nients de  la  vie  vagabonde,  il  convient  que 
les  évêques  et  les  autres  clercs  étrangers  ne 
soient  point  reçus  sans  montrer  par  écrit  la 
permission  de  leurs  supérieurs  ,  le  bon  ordre 
et  les  canons  le  voulant  ainsi.  Cette  lettre 
est  du  9  septembre  333.  Le  même  jour,  le 
pape  Agapet  en  écrivit  une  en  particulier  à 
Réparatus,  évêque  de  Carthage,  dans  laquelle 
il  reconnaît  sa  prééminence  sur  tous  les 
évêques  d'Aùique,  le  rétablissant  dans  tous 
les  droits  de  métropolitain,  que  ses  ennemis 
pouvaient  lui  avoir  ôtés. 

H.  îvousavons  deux  lettres  de  saintAgapet 
à  saint  Césaire  d'Arles.  Il  témoigne ,  dans 
la  première  qui  est  du  10  juillet  538,  qu'il 
était  entièrement  disposé  à  lui  accorder  ce 
qu'il  lui  avait  demandé  pour  le  soulagement 
des  pauvres,  mais  que  les  Constitutions  de 
ses  prédécesseurs  lui  défendant  d'aliéner 
les  fonds  de  l'Église  romaine,  sous  quelque 
prétexte  que  ce  fût,  il  ne  pouvait   y  coutre- 


Lcllrcs  t 

s-in(  Cr?airc 
d'Ares ,  pas. 
1738. 


V 


I2U 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


venir,  étant  oblitré,  pour  la  considération  du 
jugement  de  Dieu,  d'observer  inviol;il)lement 
tout  ce  qui  est  ordonné  par  l'autorité  d'un 
concile.  Il  y  joignit  le  canon  qui  défendait 
celle  aliénation,  afin  que  saint  Césaire  ne 
crût  point  qu'il  le  refusait  par  quelque  motif 
d'intérêt  et  d'attaclicment  aux  biens  tempo- 
rels. La  seconde  lettre,  qui  est  de  même  date, 
regarde  l'atl'aire  de  Contuméliosus.  Quoique 
jugé  par  les  évèques  de  France,  ce  dernier  en- 
suite d'une  lettre  du  pape  Jean  II,  avait  appe- 
lé au  Saint-Siège  de  leur  jugement.  Il  semble 
qu'il  se  plaignait  aussi  de  ce  que,  nonobstant 
son  appel,  les  évèques  mettaient  leur  sen- 
tence il  exécution.  Le  Pape  écrivit  donc  à 
saint  Césaire  qu'il  eût  mieux  fait  d'en  sus- 
pendie  l'exécution  jusqu'à  ce  que  la  cause 
de  Contuméliosus  eût  été  jugée  de  nouveau, 
ou  du  moins  de  lui  permettre  de  se  retirer 
de  lui-même,  sans  l'enfermer  dans  un  mo- 
nastère pour  y  subir  toute  la  sévérité  de  la 
discipline.  Il  veut  que  l'appel  ait  lieu,  pro- 
met de  déléguer  des  juges  pour  examiner 
ce  qui  s'était  passé  en  celte  allaire  de  la 
part  des  évèques,  et  ordonne  que,  jusqu'au 
jugement   qui    interviendra,  Contuméliosus 
demeure  suspens,  qu'on  lui  rende  son  bien, 
en  sorte  qu'il  ait  une  subsistance  sullisante, 
sans  pouvoir  toutefois  ni  disposer  du  bien 
de  l'Kglise,  ni  célébrer  la  messe,  et  que  l'on 
nomme  un  visiteur  à  sa  place  pour  l'adminis- 
tration de  son  Eglise. 
Lt,!r«"ini       12.  Épiphane,  patriarche  de  Constantino- 
ii'n.uoùio-    pie,  étant  mort  en  333,  l'impérabice  Tliéo- 
dora  lui  fit  donner  poursucccsseurAntbime, 
évêque  de  Trébizonde.  Quoiqu'il  passât  pour 
catholique,  il  était,  aussi  bien  que  celle  prin- 
cesse, ennemi  du  concile  de  Chalcédoine.  Son 
ordination  ranima  tellement  les  acéphales, 
que  les  principaux  de  cette  secte ,  savoir  : 
Sévère,  faux  patriarche  d'Antioche,  Pierre, 
chassé  d'Apaniée,  et  le  moine  Zoara  vinrent 
à  Constanliuople,  où  ils  tinrent  '  des  assem- 
blées particulières,  et  baptisèrent  plusieurs 
personnes.  Les  abbés  catholiques  de  cette 
ville  envoyèrent-  <i  Home  pour  avenir  le  pape 
Agapel  de  tous  ces  désordres,  ayaut'  parole 
de  l'Empereur  qu'il  ferait  exécuter  ce  qxie  le 
Pape  auiait  ordonné  canoniquement  contre 


ces  schismatiques.  Ce  prince  qui  avait  déjà 
repris  l'.^frique  sur  les  Vandales,  résolut  de 
reprendre  l'Ilalie  surThéodat,  roi  des  Goths. 
Celui-ci,épouvanté  des  menaces  de  Justinien, 
écrivit  '  au  Pape  et  au  sénat,  que  s'ils  ne  fai- 
saient en  sorte  de  détourner  l'Empereur  d'en- 
voyer une  armée  en  Italie,  il  ferait  mourir 
les  sénateurs  avec  leurs  femmes  et  leurs  en- 
fants. Agapef ,  obligé  de  se  charger  de  cette 
négociation,  et  n'ayant  pas  de  quoi   faire 
sou  voyage,  engagea  '  les  vases  sacrés  de 
l'Éslise  de  Saint- Pierre  pour  une  somme 
d'argent  qui  lui  fut  prêtée  parles  trésoriers 
du  prince,  et  dont  il  leur  donna  sa  promesse. 
En  arrivant  dans  la  Grèce  on  lui  présenta' 
un  homme  qui  ne  pouvait  ni  se  lever,  ni  par- 
ler. Le  Pape,  voyant  la  confiance  de  ceux  qui 
le  lui  avaient  présenté,  dit  la  messe,  prit  en- 
suite le  malade  par  la  main  et  le  fit  marcher 
en  présence  de  tout  le  monde  ;  puis,  lui  ayant 
mis  dans  la  bouche  le  corps  de  Xotre-Sei- 
gneur,  il  lui  rendit  l'usage  de  la  parole.  Il 
fit  son  entrée  à  Conslaniinople  le  2  février 
336,  accompagné  des  cinq  évèques,  ses  lé- 
gats, qu'il  avait  envoyés  l'année  précédente, 
et  de  qu('l(pies  clercs  de  l'Église  romaine, 
qu'il  avait  emmenés  avec  lui.  Il  reçut   avec 
honneur  '  ceux  que  l'Empereur  avait  en- 
voyés au -devant  de  lui,  mais  il  ne  voulut 
point  voir  le  nouveau  patriarche  Authime. 
Étant  ensuite  allé  rendre  sa  visite  à  Justinien, 
il  entama  l'allaire  qui  faisait  le  sujet  de  son 
voyage  ;  mais  il  ne  put  obtenir  de  détourner 
la  guerre  d'Italie  à  cause  des  grandes  dépen-  » 
ses  que  le  fisc  avait  faites  à  ce  sujet.  Agapel 
se  réduisit  donc  à  traiter  des  all'aires  de  reli- 
gion. Pressé  par  l'Empereur  et  par  l'Impéra- 
trice de  recevoir  la  visite  d'Antliirae,  il  y  con- 
sentit, ;\  condition  que  cet  évêque  donnerait 
une  confession  de  foi  calholiquc  par  écrit ,  et 
qu'il  retournerait  à  l'Église  de  Trébizonde, 
étant  impossible,  disait-il',   qu'un  évêque 
transféré  demeurAt  dans  le  siège  de  Constan- 
tiuople.  Les  piésents,  qu'on  lui  otfrit  en  secret, 
ne  purent  le  Uéchir,  non  plus  que  les  mau- 
vais traitemenls  dont  on  le  menaça.  Au  con- 
traire, il  vint  ;\  bout  de  persuader  à  l'Empe- 
reur de  faire  déposer  Anthime ,  qui  aima 
mieux  retourner  à  Trébizonde  que  de  faire 


'  Tora.  V  Concil.,  png.  22. 

'  Ibid.,  pag.  31. 

»  Ihid. 

*  Libérât.,  in  Breviar.,  c.ap.'xxi. 

'  Cassiodor.,  lib.  XII  Variar.  episl.  20,  pag.  183. 


'  Gicgor.,  lib.  III  Dialog.,  cap.  iii. 

■"  Libérât,  in  Breviar.,  cap.  .\xi. 

'  Impossibile  esse  aiebal  translatilium  hoini- 
nfm  in  ilta  sede  permanere.  Libcrut.  iu  Breviar., 
cap.  \xi. 


[VI'  SlhCLE.] 


CHAPITRE  VIII.  —  DENYS  LE  PETIT. 


121 


(iiivertoiuent  profession  de  la  foi  catholique. 
On  iHtil  '  i\  sa  place  Mennas,  que  le  Pape 
consacra  de  sa  main  dans  l'Église  de  Sainte- 
Marie.  Mennas  recevait  le  concile  de  Chalcd- 
doine,  ilolailcatliolicine,  et  connu  jiar  son  sa- 
voir eH'int('';;rité  de  ses  mrnurs.  Le  Pape  avait 
tenu  nn  concile  à  Constantinoplc  pour  juifcr 
Anthinie.  Il  en  marqua  le  résultat  h  Pierre, 
évè(]ue  de  Jihusalem  ,  par  une  lettre  syno- 
dale* où  il  dit  qu'Aiithime  ayant  usuipc  le 
siège  de  Constanlinople  contre  les  canons, 
et  refusé  de  quitter  l'erreur  d'Eutychès,  il 
l'avait  d(''claré  inditînc  du  nom  de  catliolique 
et  d'évèqne,  jusqu'à  ce  qu'il  reçût  pleine- 
ment la  doctrine  des  Pères.  «  Vous  devez, 
ajoute-t-il,  rejeter  de  même  les  autres  que  le 
Sainl-Si(''iie  a  condamn('es.  Nous  sommes  sur- 
pris que  vous  ayez  approuvé  l'injure  faite  ;\ 
l'Église  de  Constaulinople,  au  lieu  de  nous 
en  avertir;  nous  l'avons  réparée  par  l'ordi- 
nation de  Mennas,  qui  est  le  premier  '  de 
l'Eglise  Orientale  depuis  saint  Pierre,  qui  ait 
été  ordonné  par  les  maius  de  notre  Siège,  n 
Agapet  relève  cette  circonstance  comme  ca- 
pable de  donner  de  l'éclat  k  la  dignité  à 
laquelle  Mennas  avait  été  élevé  ,  non-seule- 
ment aux  dt'sirs  des  sérénissimes  empereurs; 
mais  du  consentement  unanime  du  clergé  et 
du  peuple.  Le  Pape,  pendant  son  séjour  à 
Constantinople ,  reçut  diverses  requêtes  qui 


furent  lues  dans  le  concile  que  .lustinien  fit 
tenir  en  cette  ville  le  second  jour  d<;  mai  '.VM'i. 
Agapet,  après  les  avoir  reçues,  les  commu- 
niqua c^  l'Empereur.  Il  y  en  avait  une  de  la 
part  des  évoques  d'Orient  et  de  Palestine 
qui  se  trouvaient  iï  Constautiuo|)le  :  et  une 
de  Marien ,  tant  en  son  nom  que  des  autres 
abbés  de  Constantinople ,  et  de  ceux  de  Jé- 
rusalem et  d'Orient  qui  étaient  venus  en  cette 
ville.  L'iuie  et  l'autre  c(uit(;uaient  des  plaintes 
contre  les  acéphales.  Mais,  avant  qu'on  eût 
pu  les  examiner,  il  tomba  malade  et  mourut 
le  22  avril  336.  Il  s'était  *  préparé  quel- 
ques jours  auparavant  à  retoiuner  en  Ita- 
lie, ayant  déclaré  le  diacre  Pelage,  son  Apo- 
crisiaire  auprès  de  l'Empereur.  Son  corps 
fut  transporté  de  Constantinople  k  Rome,  où 
il  fut  enterré  à  Saint-Pierre.  La  lettre  à  Au- 
thime  qu'on  lui  attribue  est  visiblement  sup- 
posée. Le  commencement  est  tiré  d'une  lettre 
d'Hormisdas,  et  presque  tout  le  reste  de  la 
lettre  quatre-vingt-dix-septièmede  saint  Léon. 
Elle  est  datée  des  calendes  de  mai ,  sous  le 
quatrième  consulat  de  Justinien  et  celui  de 
Théodat,  c'est-à-dire,  du  premier  mai  .53-4 , 
auquel  le  pape  Jean  II,  prédécesseur  d'Aga- 
pet,  vivait  encore.  [Les  lettres  du  pape  saint 
Agapet  se  trouvent  reproduites  dans  Mansi, 
tome  VIII,  col.  843-60  et  dans  le  tome  LXVI 
de  la  Patrologie  latine,  col.  31.] 


CHAPITRE  VIII. 


Denys  surnommé  le  Petit- 

[Écrivain  latin,  540.] 


1.  Denys,  surnommé  le  Petit  à  cause  de 
sa  taille,  était  moine  de  profession,  et  prê- 
tre de  l'Église  romaine.  Quoique  scythe  de 
nation,  il  avait  les  mœurs  et  la  politesse  des 
romains.  Peut-être  était-il  venu  à  Rome  étant 
encore  jeune  avec  les  moines  de  Scythie  , 
au  sujet  de  la  proposition  :  Un  de  la  Trinité 
a  sou/fert.  Il  savait  le  grec  et  le  latin  ,  possé- 
dait si  ^  parfaitement  ces  deux  langues  qu'il 
traduisait  également,  en  lisant,  le  grec  en 
latin  et  le  latin  eu  grec.  Son  application  à 

'  Tom.  V  Co/ici;.,  pag.  il, et  Lib.  in  Brevario , 
cap.  XXI.  —  '  Tom.  V  Coiieil.,  pag.  47. 

'  Et  hoc  diqnitati  ejus  additum  esse  credimus, 
quod  a  temporibuf  l'ctri  iiposluli,  nullum  alium 


l'étude  de  l'Écriture  sainte  lui  en  avait  acquis 
une  si  grande  intelligence,  que,  lorsqu'on  lui 
demandait  l'éclaircissement  de  quelque  diffi- 
culté, il  répondait  sur-le-champ,  quelqu'em- 
barrassée  cpie  fut  la  question.  Mais  ce  qui  lui 
faisait  le  plus  d'honneur,  c'est  qu'il  répré- 
sentait dans  sa  vie  toute  la  perfection  qu'il 
avait  apprise  dans  les  livres  saints.  Entre  ses 
vertus  on  remarquait  surtout  son  atTabilité  à 
l'égard  de  tout  le  monde ,  ne  refusant  point 
de  se  trouver  dans  les   conversations  des 

unquam  orientalis  Ecrlesia  s^lscepit  episcopum 
manihus  nnstrœ  sedis  ordiiiatum.  Ibid.,pag.  iiO. 

'  Libérât,  in  Brerinrio,  cap.  xxil. 

5  Casî'.orlor.,  l'b.  Dir.  instit.,  cap.  xxiu. 


122 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


personnes  du  siècle  ;  mais  il  s'y  faisait  admi- 
rer par  sa  modestie,  par  sa  retenue  et  par  sa 
douceur.  Son  humilité  était  si  grande,  qu'il 
aurait  cru  faire  un  crime  de  se  préférer  aux 
derniers  des  ser\ileurs  ,  quoiqu'il  fût  ditrne 
d'être  honoré  de  la  familiarité  des  princes. 
Il  avait  coutume  de  verser  des  larmes ,  lors- 
qu'il voyait  les  gens  du  monde  s'abandonner 
à  des  joies  indiscrètes  ;  mais  il  était  mortifié 
sans  sinandarité,  jeûnant  sans  faire  des  re- 
proches à  ceux  qui  ne  jeûnaient  point.  Lors- 
qu'il mangeait,  c'était  toujoui-s  avec  sobriété, 
usant  des  mets  les  plus  communs.  Sa  doc- 
trine était  puie  et  conforme  en  tout  aux  rè- 
gles des  Pères.  Cassiodore,  qui  connaissait 
son  mérite,  l'engagea  t\  enseigner  avec  lui  la 
dialectique,  à  quoi  ils  employèrent  l'unet  l'au- 
tre plusieurs  années.  Mais  cette  occupation 
n'empêcha  pas  Denys  de  travailler  <i  divers 
ouvrages  qui  ont  été  très-utiles  à  l'Église. 
Bède  le  Vénérable,  le  qualifie  '  abbé  de  la 
ville  de  Rome  ;  mais  ce  n'est  pas  une  preuve 
qu'il  ait  été  supérieur  d'une  communauté  mo- 
nastique :  car  on  peut  lui  avoir  donné  ce  nom 
ou  cette  qualiti-,  comme  on  la  donnait  en 
Orient  aux  simples  moines,  lorsqu'ils  s'étaient 
rendus  recommandablcs  par  leurs  vertus  et 
par  leurs  mérites  ;  au  lieu  que  ceux  que  nous 
appelons  abbés  et  supérieurs  étaient  connus 
chez  les  Grecs,  et  distingués  par  le  titre  d'ar- 
chimandriles  ou  d'hégumènes.  Il  moumt  en 
odeur  de  sainteté  vers  l'an  310.  Cassiodore, 
de  qui  nous  avons  pris  ce  que  nous  venons 
de  dire  de  Denys,  témoigne  '  espérer  d'être 
aidé  de  ses  mérites  et  de  ses  prières  auprès 
de  Dieu. 

2.  Le  plus  considérable  des  ouvrages  de 
Denys  le  Petit ,  est  le  Code  des  canons  qu'il 
composa  tant  des  conciles  d'Orient  que  d'Oc- 
cident. On  avait  déjcà  quelques  traductions 
Son  Code,  des  coucilos  tenus  chez  les  Grecs;  mais  elles 
étaient  fort  défectueuses.  Denys  en  fit  une 
nouvelle  renfermant  les  canons  apostoliques 
et  ceux  des  conciles  que  l'on  avait  insérés 
dans  le  Code  de  l'Église  grecque,  qui  com- 
prenait cent  soixante-cinq  chapitres.  Il  y  joi- 
gnit les  canons  du  concile  de  Chalcédoine,  et 
ceux  des  conciles  de  Sardique  et  d'Afrique 
qui  étaient  dans  les  anciens  Codes  de  l'Église 
romaine.  Il  fit  plus  :  afin  qu'il  ne  parût  point 
avoir  négligé  quelques  monuments  intéres- 
sants pour  la  discipline  ecclésiastique,  il  fit 
entrer  dans  son  Code  les  Décrétales  des  pa- 


pes depuis  Sirice  jusqu'à  Anastase  II.  Sa  rai- 
son de  commencer  à  Sirice,  fut  qu'il  ne  trou- 
va aucune  lettre  décrétale  des  Papes  avant 
son  pontificat.  Le  Code  de  Denys  fut  adopté 
par  l'Église  romaine  aussitôt  qu'il  parût,  et 
il  y  fut  regardé  comme  une  règle  de  la  dis- 
cipline ecclésiastique.  Mais  il  fut  quelque 
temps  sans  être  rcc^u  gém-ralcmcnt  dans 
toutes  les  Églises  d'Occident.  On  continua  en 
France  de  se  servir  de  l'ancienne  CoUection 
des  canons,  à  laquelle  on  avait  ajouté  des 
canons  tirés  des  conciles  des  Gaules.  Dans 
l'alfaire  de  Contuméliosus,  les  évêques  ne 
trouvaient  dans  leur  Code  sur  le  sujet  de  la 
déposition  d'un  évêque  accusé  de  crimes, 
qu'un  canon  du  concile  de  Nicée  et  quelques 
canons  des  conciles  particuliers  qui  s'étaient 
tenus  en  France.  Mais  le  pape  Jean  II,  con- 
sulté sur  cette  alTaire,  en  .").3i,  par  saint  Cé- 
saire  d'Arles,  joignit  ii  sa  réponse  des  extraits 
du  concile  d'Antioche,  dos  Canons  apostoli- 
ques et  des  lettres  du  pape  Sirice,  qui  étaient 
pris  du  Code  de  Denys  le  Petit.  Dans  l'alfaire 
dePrt'fextat,  le  roi  Cliilpéric  envoya  aux  évê- 
ques un  Recueil  de  canons  ,  auquel  on  avait 
ajouté  ceux  qui  portent  le  nom  des  apôtres. 
Ce  Recueil  n'était  donc  point  celui  de  Denys 
le  Petit,  autrement  il  aurait  été  inutile  d'y 
joindre  les  canons  attribués  aux  apôtres, 
puisqu'ils  y  étaient  insérés.  Mais,  en  803,  le 
pajjc  Adrien  \"  cnvoja  à Charlemagne  le  Code 
de  Denys  le  Petit,  et  depuis  ce  temps-la  il  fut 
reçu  dans  tout  le  royaume  avec  force  de  loi. 
Il  est  .'i  remarquer  que  ce  code  était  plus  am- 
ple que  celui  de  Denj's,  parce  qu'on  y  avait 
ajouté  les  Épitres  décrétales  des  papes  Hila- 
rus,  Simplice,  Ilormisdas  et  Grégoire.  Ce  Code 
ainsi  augmenté  fut  imprimé  à  Mayence  en 
1323,  et  h  Paris  en  1609,  sous  le  titre  de  Code 
de  l'Eglise  romaine.  Nous  lavons  encore  dans 
la  bibliothèque  canonique  de  Justel,  impri- 
mée à  Paris  en  1661  ;  mais  on  y  a  distingué 
ce  qui  appartient  au  Code  de  Denys  le  Petit 
d'avec  les  Prcrctales  qu'on  y  a  ajoutées  de- 
puis. [Les  frères  Ballérini,  De  Antiij.  collect. 
canon,  t.  Ill  0pp.  Leonis ,  ont  donné  une 
description  détaillée  de  la  collection  de  De- 
nys lo  Petit,  d'après  des  manuscrits.  Gal- 
land,  t.  I,  Sylloye  a  publié  cette  collection.] 
Le  Code  de  Denys  est  précédé  d'une  préface 
en  forme  de  lettre  adressée  à  Etienne,  évêque 
de  Salone,  à  qui  il  rend  compte  de  son  travail, 
marquant  qu'il  l'avait  entrepris  à  sa  sollicila- 


'  Be<la,  De  Tempor.  rat.,  cixp.  xlv. 


Ca^siodor.,  ubi  supra. 


Cjflc  d'  Te- 
rjîlo  l'e'ii. 


[vr  SiftCLE.] 

iion,  et  i\  celle  du  pièlro  Laurenl,son  ami.  Lo 
Code  commence  [)ar  les  canons  des  apôtres; 
suivent  ceux  do  Mcc'o,  d'Ancyre,de  Néocosa- 
rde,  de  Gaiij^res,  d'Anlioclie,  de  Laodicée  en 
riirygie,  de  Gonstanlinople,  de  Chalcëdoiue, 
de  Saidi([iio,  do  GarlhaiiO  ,  et  de  divers  con- 
ciles d'AtVi(iiie.  On  trouve  après  cela  la  let- 
tre du  Concile  péuéral  d'Afrique  au  pape 
Boniface,  celle  de  saint  Cyrille  d'Alexandrie 
au  sujet  des  exemplaires  authentiques  du 
Symbole  de  Nicée;  la  lultrc  d'Atticus  de  Gons- 
tanlinople, sur  le  même  sujet,  avec  le  Sym- 
bole de  Nicée  et  les  canons  do  ce  concile  ;  et 
la  lettre  du  concile  d'Afrique  an  pajie  Céles- 
tin.  L'édilion  de  Justi'l  met  après  cela  la  let- 
tre de  saint  Cyrille  d'Alexandrie  contre  Ncs- 
torius,  celle  de  ce  même  évéque  k  Nestorius 
avec  les  douze  anatliématismes ,  parce  que 
Denys  le  Petit  les  avait  l'une  et  l'autre  tradui- 
tes du  grec.  11  donne  ensuite  les  Epitres  dé- 
crétales  de  Sirice,  d'Innocent,  de  Zosime,  de 
Boniface,  de  Gëlestin,  de  Léon  I",  de  Gëlase 
et  d'Anastase.  Elles  se  trouvaient  toutes  dans 
le  Code  de  Denys;  en  sorte  qu'il  contenait  les 
Décrétâtes  des  Papes  depuis  l'an  383  jusqu'en 
■498.  Denys  adressa  cette  collection  particu- 
lière des  décrétales  à  Julien,  prêtre  du  titre 
de  Sainte-Anastasie,  par  une  préface  dans 
laquelle  il  fait  l'éloge  du  pape  Gélase,  comme 
étant  d'un  grand  mérite  devant  Dieu. 

3.  Nous  avons  déjà  remarqué  que  Yicto- 
rius  avait  trouvé  que  le  cycle  lunaire  des 
dix-neuf  ans,  dont  se  servaient  les  Grecs , 
était  plus  sur  que  ceux  des  Latins,  et  que  le 
multipliant  par  le  cycle  solaire  de  vingt-huit 
ans,  il  en  avait  fait  un  canon  pascal  de  cinq 
cent  trente-deu.t  ans.  Les  Grecs  avaient'  un 
semblable  cycle  longtemps  avant  Victorius, 
comme  on  le  voit  par  George  le  Sy  ncelle  qui  en 
attribue  un  de  cinq  cent  trente-deux  ans  à  un 
moine  égyptien  nommé  Anien;  etparPhotius 
qni  parle  d'un  cycle  de  cinq  cent  trente-deux 
ans,  composé  par  Métrodore,  le  même,  com- 
me l'on  croit,  que  la  Chronique  de  saint  Jé- 
rôme met  sous  le  règne  du  grand  Constan- 
tin. Ainsi  il  faut  ou  que  Victorius  ait  pris  son 
cycle  sur  celui  des  Orientaux,  ou  qu'il  se  soit 


GHAPITIIEVIII.  —  DEiNYS  LE  PETIT. 


123 


rencontré  avec  eux  dans  la  composition  de 
ce  cycle.  La  plupart  des  chronologistes  ont 
cru  (jue  Denys  le  Petit  n'avait  fait  que  re- 
loucher au  cycle  ])ascal  de  Victorius,  el  qu'il 
en  avait  fait  un  autre  de  quatre-vingt-quinze 
ans  pour  continuer  celui  de  saint  Cyrille  d'A- 
lexandrie, qui  Unissait  à  l'an  531,  de  Jésus- 
Christ.  Il  parait,  par  une  de  ses  lettres',  qu'il 
avait  fait  deux  cycles,  l'un  pour  continuer  celui 
de  saint  Cyrille,  qu'il  commençait  où  ce  Pcro 
avait  fini,  c'est-à-dire  en  332  inclusivement, 
celui  de  ce  saint  évéque  finissant  k  531,  com- 
me on  vient  de  le  dire.  Mais,  en  continuant 
ce  cycle,  il  en  changea  l'époque  ;  et  au  lieu 
du  nom  odieux  de  Dioctétien,  qui  avait  été  un 
cruel  persécuteur,  il  aima  mieux  mettre  le 
nom  de  Jésus-Christ,  et  compter  par  les  an- 
nées de  l'Incarnation.  Et  parce  que  ce  cycle 
de  quatre-vingt-quinze  ans  ne  suffisait  pas 
pour  qu'après  la  révolution  de  ce  nombre 
d'années,  toutes  les  nouvelles  lunes  el  toutes 
les  fêtes  mobiles  tombassent  au  môme  jour 
du  mois  et  de  la  semaine,  et  qu'après  l'écoa- 
lemcnt  du  cycle  de  quatre-vingt-quinze  ans, 
il  aurait  fallu  en  faire  toujours  un  nouveau 
d'un  pareil  nombre  d'années,  Denys  le  Petit 
en  composa  un  autre  de  cinq  cent  trente- 
deux  ans,  que  l'on  peut  regarder  comme  un 
cycle  perpétuel,  parce  qu'en  effet,  après  sa 
révolution,  toutes  les  nouvelles  lunes  et  toutes 
les  fêtes  mobiles  se  rencontrent  aux  mêmes 
jours  du  mois  et  de  la  semaine,  auxquels  elles 
se  rcncontraieut  à  la  premièje  année  de  ce 
même  cycle.  Denys  le  commence  à  l'ère  de 
l'Incarnation.  Mais  on  croit  qu'il  y  a  faute 
dans  son  calcul,  et  qu'il  a  prévenu  de  quatre 
ans  la  véritable  année  de  l'Iacarnation. 
4.  Denys  écrivit  deux  lettres  surlaPâque, 

•^  -1         '  Lollro  do 

l'une  à  l'cvêque  Pétrone,  en  523,  l'autre  à   P:"i'  ^"'  i» 

^  '  PAquo,     apud 

Boniface,  primicier  des  notaires,  en  326.  El-   ^■"'^"'■'".'îî; 

'    l  '  dis.  [ta?.    48o 

les  ont  toutes  les  deux  un  rapport  essentiel  p„,u,'îi„"iiJ; 
à  l'ouvrage  qu'il  composa  sur  la  même  ma-  IXyfm.  ''«p! 
tière,  surtout  la  première  qui  paraît  y  avoir  "'^' 
servi  de  préface  :  car  c'est  dans  celle-là  qu'il 
parle  de  ces  deux  cycles,  et  de  la  raison  qu'il 
eut  de  mettre  le  nom  de  Jésus-Christ'  à  la 
place  de  celui  de  Dioclétien,  que  saint  Cy- 


'  Vide  Pagi  Dissert,  de  Periodo  grœco-romana, 
tom.  1,  pag.  4,  5,  6. 

*  Hoc  monemus  quod  eyclus  iste  nonaginla 
quinque  annoruin,  qtiem  fecimus,  non  per  om- 
nia  in  seipsum  recertitur  :  et  ideo  post  eipedi- 
lionem  nonaginta  quinque  annorum,  non  ad 
quintuin  cyclum  aamii  Cyrilli,  qui  iiiccpit  ryclos 
siin^  ab  rtnvn  renfsimn  qiiinqunge.Hmo  tertio  Dio. 


cletiani,  quorum  quintum  cyclumnecessario  no- 
bis  prœposuimus.  sed  ad  nostrum  primuvi  cy- 
cliim,  quein  nos  ab  anno  ducentesiino  quadrage- 
siino  octavo  ejurdem  Diocleliatn  incepiinus,  lec- 
lor  accurrat.  IMd.,  pag.  6,  cl  Dionj-s.  Lpist.  ad 
Petron,  apuJ  Bueherium,  pag.  486. 

'  Nos  a  ducentesiino  quadragesimo  octavo  anno 
ejusdem  tyranni  potiusquam  principis  (Diode- 


124 


HISTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

quatorzième  de  la  lune  tombait  un  samedi, 


lille  d'Alexandrie  avait  mis  au  sien ,  suivant 
la  coutume  de  son  temps  et  de  son  pays.  Il 
dit  dans  la  môme  lettre,  qu'il  s'attacbcra  in- 
violablement  au  statut  du  concile  de  Nicée, 
qui  porte  qu'à  l'avenir,  pour  trouver  plus 
aisément  le  premier  jour  de  la  lune ,  et  en 
suite  son  quatorzième,  l'on  se  servira  du  cycle 
de  dix-neuf  ans,  nommé  en  grec  :  Ennea  de- 
cateride,  comme  le  plus  commode  de  tous  les 
cycles,  parce  qu'au  bout  de  ce  terme  les  nou- 
velles lunes  reviennent ,  h  quelque  chose 
près,  aux  mêmes  joui-s  de  l'année  solaire.  Il 
regarde  ce  statut  comme  l'ellet  de  l'inspira- 
tion de  Dieu,  et  remarque  que  tous  les  ca- 
tholiques qui  ont  depuis  écrit  sur  la  Pâque, 
s'y  sont  attachés,  sans  s'en  éloigner  en  au- 
cune façon.  Denys  remarque  ensuite  que  la 
PAque  devant ,  selon  l'ordi-e  de  Dieu,  se  cé- 
lébrer dans  le  cours  du  premier  mois ,  il 
est  important  de  savoir  en  quel  temps  com- 
mence ce  premier  mois,  et  en  quel  temps  il 
flnit.  Comme  la  loi  de  Moïse  ne  s'explique 
pas  nettement  sur  ce  point ,  les  Pères  de  Ni- 
cée ont  fixé  le  commencement  du  premier 
mois  au  renouvellement  de  la  lune  depuis  le 
huitième  des  ides  de  mars  jusqu'au  jour  des 
nones  d'aviil,  et  le  quatorzième  de  la  lune 
depuis  le  douzième  des  calendes  d'avril  jus- 
qu'au quatorzième  des  calendes  de  mai  ;  en 
sorte  que  le  premier  mois  ne  devait  jamais 
commencer  avant  le  huitième  des  ides  de 
mars,  c'est-à-dire  avant  le  huitième  de  ce  mê- 
me mois;  et  que  le  quatorzième  de  la  lune,  eu 
laquelle  on  devait  faire  la  Pâque ,  ne  devait 
point  se  trouver  avant  le  douze  des  calendes 
d'avril,  c'est-à-dire  avant  le  21  mars  :  parce 
que  le  mois ,  dont  le  quatorzième  de  la  lune 
se  trouverait  avant  le  21  mars,  devrait  être 
regardé  comme  le  dernier  de  l'année,  et  non 
pas  comme  le  premier.  La  remarque  que 
fait  ici  Denys  se  réduit  à  dire,  que  le  pre- 
mier mois  est  celui  dont  le  quatorzième  de  la 
lune  arrive  après  l'équinoxe  du  printemps, 
c'est-à-dire  le  21  de  mars  ;  et  que  si  ce  qua- 
torzième de  la  lune  arrive  avant  l'équinoxe  , 
on  doit  faire  la  Pàque  après  le  quatorzième 
de  la  luue  du  mois  suivant,  qui  sera  alors  le 
premier  mois  selon  la  disposition  de  la  loi. 
C'est  pour  cela  que  la  Pàque  ne  doit  jamais 
être  célébrée  ni  avant  le  22  mars,  ni  plus 
tard  que  le  23  avril.  Denys  ajoute,  que  si  le 


ce  qui,  dit-il,  arrive  une  fois  dans  quatre- 
vingt-quinze  ans ,  alors  on  doit  faire  la  PA- 
que le  lendemain,  dimanche;  c'est-à-dire  le 
onzième  des  calendes  d'aviil,  ou  le  22  de 
mai-s,  qui  sera  le  quinzième  de  la  lune.  Il 
rapporte  le  canon  de  Nicée  et  celui  d'An- 
tioche,  qui  défendent  de  célébrer  cette  fête 
avecles  Juifs,  qui  la  célébraient  toujours  le 
quatorzième  de  la  lune ,  en  quelque  jour  de 
la  semaine  que  ce  fût  :  et  un  passage  de  la 
lettre  de  saint  Léon  à  l'impératrice  Pulché- 
rie,  où  toutefois  il  n'est  point  question  du  dé- 
cret de  Nicée  sur  la  Pâque  ,  mais  sur  les  li- 
mites des  diocèses.  Il  fait  mention  de  la  lettre 
de  saint  Protère  sur  la  Pàque,  qu'il  avait, 
dit-il,  traduite  du  grec,  et  insérée  dans  son 
ouvrage  avec  plusieurs  arguments  qu'il  avait 
empruntés  des  Kgyptiens  qui  ont  travaillé 
sur  la  même  matière. 

5.  Outre  les  lettres  de  saint  Cyrille  à  Nés-  e/'f.t;','. 
torius  et  contre  Nestorius,  celle  de  saint  Pro-  '  '  "■ 
tère  au  pape  saint  Léon,  et  les  canons  du 
Code  de  l'Eglise  grecque,  Denys  traduisit  en 
latin  le  livre  de  saint  Grégoire  de  Nice,  inti- 
tulé :  De  la  Formation  de  l'homme.  Il  dédia 
cette  traduction  au  prêtre  Eugippius,  par  une 
lettre  que  nous  avons  '  encore,  où  il  fait  en 
peu  de  mots  l'éloge  de  saint  Grégoire,  et  où 
il  se  plaint  de  la  presse  où  le  mettaient  les 
fréquentes  conférences  qu'il  était  obligé  d'a- 
voir avec  les  savants  de  Rome.  Cette  version 
fut  imprimée  à  Cologne,  en  1573.  Elle  l'avait 
été  à  Bâlc  dès  l'an  13G2.  Mais  on  ne  trouve, 
ni  dans  l'une  ni  dans  l'autre  de  ces  éditions, 
la  lettre  à  Eugippius,  ni  la  Préface  de  saint 
Grégoire  de  Nice  sur  son  traité  de  lu  Forina- 
tion  de  l'homme.  Dom  Mabillon  a  inséré  ces 
deux  pièces  parmi  ses  Analectes.  Denys  tra- 
duisit encore  la  IVe  de  saint  Pacùme,  abbé, 
llosweide  lui  a  donné  |>lace  dans  son  Recueil 
des  vies  des  Peics,  imprimé  à  Anvers  en  1613 
et  1G28.  Les  deux  discoiu-s  de  saint  Proclus, 
évêque  de  Constaulinople,  l'un  à  la  louange 
de  la  Mère  de  Dieu  contre  les  blasphèmes  de 
Nestorius,  et  l'autre  pour  la  défense  d'Alba- 
nase  de  Perrha,  furent  aussi  traduits  en  la- 
tin par  Denys,  de  même  que  sa  lettre  ou  to- 
me aux  .arméniens. Ces  deux  discours  se  trou- 
vent parmi  les  Œuvies  de  saint  Proclus , 
imprimées  à  Home  en  1630;  et  la  lettje  aux 


tianij  inchnniiles,  noluimus  circulia  nnflris  me- 
moriii  l'i  impii  el  prrsccutoris  innecterc  :  sed  ma- 
gU   elegimus   ab   Jncamalione    Domini   nostri 


Jefu  ChriaU  (innoriim  tempora  pripnotare.  Ibid, 
'  Mal>illi)n.  Analecla,  pag.  59. 


SAINT  CKSAinR,  KVftoUE  D'AllLKS.  12:5 

les.  Dciiys  l'iiclrcssii  l'i  ruhlMÎGuudcnce.  Du- 
C!mj;o  la  III  iiiiprimcr  i'i  Paris  en  l()(i3,  iu-4°, 
<i  la  siiilc  (lu  ii-iili' liistnriqiie  tlii  clief  de  saint 
,I('an-I{a[)lisli".  l'I'oiis  les  oiiviviircs  ih;  l)(Miys  le 
PcUit  se  tidiiviMil  iiii  tome  LXVII  de  lu  l'alro- 


fvi»  siKCi.K.]         rilAriTUE  IX. 

Annénieiis  dans  la  mitUotlwquc  des  Porcs,  à 
Paris,  en  157.1,  cl  encnre  ailleurs.  Denys  dc^- 
dia  celle  dernière  Iraduelinn  ;"!  Féliiien.  La 
dernière  que  nous  eiinnaissions  de  Ini  est 
celle  de  riiisloiro  de  l'invenlion  du  clicl'  de 
sainlJcan-naplislc,  écrite  parl'abbc  Marseil-      logie  latine,  col.  0  cl  suiv.J 


CHAPITRE  IX. 
Saint  Césaire,  évêqiie  d'Arles. 


[Père  latin,  5i2.1 


10   .-Il  4iu; 
%ct;us. 


C;r  ar.  Vila, 
lili.  1,  niitii. 
:t  I..I».  I  Ac- 
l.ir.  Or.l.  S. 
)U-aoi:  icti . 
pJi-.l5;i. 


Il  oC  (IcTé 
4  ijiacoDai, 
la  [irâtrise, 
"-  4  l'épis- 
.  il,  en  501. 


ARTICLE  I". 

IIISTOIUE  DE  SA  VIE. 

1.  Ce  saint,  né  dans  le  territoire  de  Châ- 
lons-sur-Saône  en  470 ,  d'une  famille  distin- 
guée par  sa  vertu,  la  pratiqua  lui-même  dès 
sa  plus  tendre  jeunesse.  N'étant  âge  que 
d'environ  sept  ans,  il  se  sentait  déjà  tant  de 
compassion  pour  les  pauvres,  que  lorsqu'il 
en  rencontrait  de  mal  vêtus,  il  leur  donnait 
ses  habits  ,  disant,  lorsqu'il  retournait  à  la 
maison  paternelle,  que  les  passants  l'avaient 
dépouillé.  A  l'âge  de  dix-huit  ans,  il  pria  saint 
Sylvestre,  son  évêque,  de  lui  couper  les  che- 
veux, et  de  lui  changer  d'habit  pour  l'engager 
au  service  de  Dieu.  Ce  que  l'évêque  lui  ac- 
corda, l'admettant  en  même  temps  dans  son 
clergé.  Saint  Césaire ,  après  y  avoir  passé 
deux  ans,  poussé  par  le  désir  d'une  plus 
grande  perfection  ,  se  relira  secrètement  au 
monastère  de  Lérins,  pour  y  vivre  sous  la 
conduite  de  l'abbé  Porcaire.  Il  s'y  distingua 
par  ses  austérités  et  par  son  exactitude  A  rem- 
plir les  devoirs  de  l'état  monastique.  L'abbé 
le  jugeant  capable  d'emplois,  lui  donna  ce- 
lui de  cellérier  de  la  maison.  Quelque  temps 
après  iil'envoya  à  Arles  pour  le  faire  traiter 
d'une  maladie  que  ces  mortiticalions  lui 
avaient  causée. 

2.  Éonius,  qui  avait  succédé  à  saint  Syl- 
vestre dans  le  siège  de  l'Église  d'Arles,  était 
parent  de  saint  Césaire.  L'évêque  le  deman- 
da à  l'abbé  Porcaire,  l'ordonna  diacre,  puis 
prêtre,  et  le  chargea  ensuite  de  la  conduite 
du  monastère  d'une  île  voisine,  qui  se  trou- 


vait dépourvu  d'abbé.  Il  le  gouverna  pen- 
dant trois  ans,  au  bout  desquels  Éonius,  qui 
sentait  approcher  sa  fin,  déclara  à  son  cler- 
gé et  ;ï  son  peuple  qu'il  avait  jeté  les  yeux 
sur  saint  Césaiie  pour  son  successeur,  afin 
de  rétablir  la  discipline  ecclésiastique  qui 
s'était  relâchée.  A  la  mort  d'Éonius,  suint 
Césaire,  sachant  qu'on  voulait  le  mettre  sur 
le  siège  d'Arles,  se  cacha  dans  des  sépulcres. 
Il  en  fut  tiré  et  ordonné  évêque  de  cette  ville 
étant  âgé  de  trente  ans.  Ennode  de  Pavie  qui 
vivait  alors,  dit  '  que  saint  Césaire  brilla  sur 
le  chandelier  de  l'Église,  entre  les  évêques  de 
son  siècle,  comme  le  soleil  brille  entre  tous 
les  astres  du  firmament.  Il  fut  en  eô'etle  res- 
taurateuret  le  soutien  de  la  discipline,  le  père 
et  le  protecteur  des  orphelins ,  le  nourricier 
des  pauvres.  Sa  vie  fut  un  modèle  de  ver- 
tus. 

3.  La  première  chose  qu'il  régla  fut  l'Office 
divin.  Il  ordonna  que  les  clercs  chanteraient 
tous  les  jours  l'office  de  tierce,  sexte  et  noue 
dans  l'Église  de  Saint-Étienne ,  afin  que  les 
pénitents  el  les  autres  laïques  pussent  y  assis- 
ter. A  l'égard  de  l'office  de  prime,  on  ne  le 
disait  que  le  dimanche,  le  samedi  et  les  fêles 
solennelles.  Il  obligea  aussi  les  séculiers  à 
chanter  comme  les  clercs  des  psaumes,  des 
cantiques  et  des  hymnes  pour  les  empêcher 
de  causer  dans  l'église.  Les  uns  chantaient  en 
grec,  les  autres  en  latin,  soit  à  cause  deâ  étran- 
gers, soit'^parce  que  le  grec  fût  encore  en  usa- 
ge dans  ce  pays  oùles  Grecs  avaient  fondé  Mar- 
seille et  tant  d'autres  colonies.  Mais  il  exhor- 
tait ses  peuples  à  ne  pas  seulement  chan- 
ter de  bouche,  mais  à  conformer  leurs  pen- 


Nn  :,.!). 


Mnliillon. 
An'ia.  I,:,.  I, 
nu  m.  iS. 


Sa  cODduile 
pend,  ni     ïon 


C.'-ar.  V  I 


■jm    m. 


inj. 


ll'î;  C.^-■^a^. 


Casar. 


Ap;n'iid.  Aug, 
cl  :Uini'.  i:,^t 


'  Tu  cœteros  velut  soli$]magnitiidine  astris  mi- 
noribiis  comparala  transgredcris.  Ennod.,  lit).  IX 


Epist.  33,  pag.   1591. 
«  Fleury,  lib.  XXXI,  png.liS,  tom.  Vil. 


126 


HISTOIEE  GÉNÉRALE  TES 


Ci«ar 
llb.    I, 


Vlla, 

DlUDt 

37. 


« 

31. 


,  ViU, 

DUII). 


Nuoi.  31. 


Lili.  I, 
3z. 


sées  et  leurs  mœurs  aux  p.iroles  qu'il?  pro- 
nonçaient, et  à  rejeter  les  distractions  avant 
de  se  prosterner  pourl'oraison.  Pour  se  don- 
ner lui-même  tout  entier  à  la  lecture  et  à  la 
prédication,  il  se  déchargea  sur  des  écono- 
mes et  des  diacres  du  soin  du  temporel. 
Lorsqu'il  n'était  point  appliqué  .à  l'un  ou  à 
l'autre  de  ces  exercices,  ou  à.  la  méditation 
des  vérités  de  la  religion,  il  avait  auprès  de 
lui  un  lecteur  qui  lui  lisait  ou  les  Livres  saints 
ou  ceux  des  anciens  Pères.  Ces  lectures  con- 
tinuaient môme  pendant  ses  repas.  Il  prê- 
chait les  dimanches  et  les  fêles;  et  quand  il 
ne  le  pouvait,  il  y  suppléait  en  faisant  lire, 
par  des  prêtres  ou  par  des  diacres,  ses  pro- 
pres sermons  ou  ceux  de  saint  Ambroise  et 
de  saint  .\nc:ustiu.  Qudquf's  évoques  se  plai- 
gnirent qu'il  confiait  aux  piètres  et  aux  dia- 
cres le  ministère  de  la  prédication  ,  contre 
l'usage  du  temps.  II  leur  répomlit  :  «  S'ils  peu- 
vent lire  les  paroles  des  prophètes,  des  apô- 
tres et  de  Notre-Seigneur ,  ils  peuvent  bien 
lire  les  nôtres.  «  Souvent  il  faisait  lire  des  ho- 
mélies à  matines  et  ii  vêpres,  afin  que  person- 
ne ne  manquât  d'instruction.  Pour  en  don- 
ner à  ceux-mêmes  qui  n'étaient  pas  de  son 
diocèse,  il  envoyait  quelquefois  de  ses  ser- 
mons aux  évoques  éloignés,  soit  dans  les 
Gaules ,  soit  en  Italie  et  en  Espagne.  II  en 
donnait  encore  à  ceux  qui  le  venaient  voir. 
Il  n'y  avait  rien  d'affecté  dans  son  style  :  il 
était  simple  et  à  la  portée  de  ses  auditeurs. 
Il  disait  que  les  discours  trop  étudiés  n'é- 
taient bons  que  pour  les  savants,  et  n'aimait 
point  la  mauvaise  délicatesse  de  ceux  qui 
craignaient  plus  de  pécher  contre  la  pureté 
du  langage  que  contre  la  pureté  des  mœurs. 
Dans  ses  discours,  il  attaquait  les  vices  com- 
muns et  dominants,  s'altachant  particulière- 
ment à  détruire  les  restes  des  superstitions 
païennes,  c'est-à-dire,  les  sortilèges,  les  au- 
gures et  certains  honneurs  que  l'on  rendait 
aux  arbres  ou  aux  fontaines.  La  menace  la 
plus  terrible  dont  il  usait  quelquefois  pour 
rendre  les  peuples  attentifs  aux  vérités  qu'il 
leur  prêchait,  était  la  famine  prédite  par  un 
prophète,  et  qui  consiste  non  dans  la  disette 
de  la  nourriture  corporelle,  mais  dans  la  pri- 
vation de  la  parole  de  Dieu.  Il  n'ordonnait 
aucun  diacre  qu'il  n'eût  atteint  l'âge  de  trente 
ans  et  n'eût  lu  au  moins  quatre  fois  tous  les 
livres  de  l'Ecriture  sainte.  A  l'égard  des  per- 
sonues  du  siècle  qui  s'engageaient  dans  lo 

'  Fortun.,  lib.  V,  cap.  l. 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

mariaee,  il  ordonna  que,  trois  jours  avant  d'en 
user,  ils  recevraieut  dans  l'Église  la  bénédic- 
tion du  prêtre.  Sa  maison  fut  toujours  ouver- 
te ^  tous  ceux  qui  s'y  présentaient,  exerçant 
l'hospitalité  à  toute  heure  et  sans  distinc- 
tion envers  les  étrangers  clercs  ou  laïques. 
11  lit  môme  construire  un  logement  commode 
pour  les  malades  nécessiteux,  oùl'onfournis- 
,  sait  abondamment  à  leurs  besoins.  Pour  lui', 
il  contiima  depuis  son  épiscopat  le  même 
genre  de  vie  qu'il  avait  mené  étant  moine. 

4.  Tandis  qu'il  n'était  occupé  qu'à  remplir 
les  devoirs  de  l'épiscopat,  Licinien,  l'un  de 
ses  secrétaires,  fit  dire  au  roi  Alaric  qu'il  fai- 

I  sait  tous  ses  efforts  pour  soumettre  la  ville 
et  le  territoire  d'.\rles  aux  Bourguignons.  Le 
saint  évoque  faisait  tout  le  contraire,  priant 
jour  et  nuit  à  genoux  pour  la  paix  des  na- 
tions et  le  repos  des  villes  en  général.  Mais 
Alaric,  sans  se  donner  le  loisir  d'examiner 
si  l'accusation  était  fondée,  envoya  saint  Cé- 
saire  en  exil  à  Bordeaux.  C'était  vers  l'an 
505.  Pendant  qu'il  y  était,  le  feu  prit  dans 
la  ville,  et  le  peuple,  qui  connaissait  la  ver- 
tu du  saint  évêque,  accourut  vers  lui,  lui 
criant  de  l'éteindre  par  ses  prières.  Il  se  pros- 
terna en  oraison  devant  le  lieu  de  l'incendie 
qui  s'éteignit  aussitôt.  Le  roi  .\laric  reconnut 
son  innocence,  lui  permit  de  retourner  à  son 
Église,  et  ordonna  que  son  accusateur  serait 
lapidé.  On  élait  prêt  de  l'accabler  de  pierres, 
lorsque  le  Saint,  informé  de  la  sentence,  ob- 
tint par  ses  prières  qu'elle  serait  révoquée. 
A  son  retour  à  Arles,  le  peuple  vint  au-devant 
de  lui,  portant  des  cierges  et  des  croix,  et 
chantant  des  psaumes. 

5.  En  506,  saint  Césairc  présida*  au  con- 
cile qui  se  tint  à  Agde  dans  le  mois  de  sep- 
tembre. Il  s'y  trouva  vingt-trois  évêques  dont 
plusieurs  étaient  sous  la  domination  d'Ala- 
ric  :  ce  qui  donne  lieu  de  croire  qu'il  avait 
obtenu  permission  de  ce  prince  de  les  convo- 
quer en  concile.  L'année  suivante,  507,  il 
commença  à  bàlir  un  monastère  ;  mais  l'ou- 
vrage ayant  été  interrompu  par  le  siège  que 
les  Français  et  les  Bourguignons  mirent  de- 
vant Arles,  on  ne  put  le  finir  que  vers  l'an 
512.  Saint  Ccsairo  en  donna  la  conduite  à 
Césarie,  sa  sœur,  qu'il  avait  instruite  à  .Mar- 
seille dans  les  exercices  de  la  vie  monasti- 
que.11  composa  pour  elle  une  Règle  dont  uous 
parlerons  dans  la  suite. 

6.  Il  arriva,  pendant  le  siège  de  la  villo 

«  Tom.  IV  Concil.,  pag.  1381  cl  139*. 


<é    dctiut     t 
roi  Alaiic 


Il  •■•ti:l':« 
no  cog^llb  ea 
6M. 


CpMr.  Vitl. 
)lh.  I  ,  l:uiii. 
tS,  18,  31,  33. 


lICKl^CcSli 

d«  ooUTO&a. 


[vi*  SIÈCLE.]         CFIAPITRE  IX. 


SAINT  CfeAinii;,  ÉVftOUK  D'AIILES. 


Hii::i.  16. 


d'Arlos  parles  Français  cl  les  noiir2;iiii;nons, 
qu'un  jeune  clerc,   parent  de  saint  Ci^sairo, 
craignant  d'élre  pris  avec  la  ville,  descemlit 
de  luiit  par  le  ninr  avec  une  corde  et  se  ren- 
dit aux  einuMuis.   Les  Gotlis  qui  étaituit  de- 
dans ,  en  ayant  été  informes,  se  'étirent  sur 
le  saint  dvôque  avec  le  peuple  sikliticux  et 
les  juifs,  disant  qu'il  avait  envoyé  son  parent 
pour  livrer  la  ville.  Ils  ne  voulurent  point 
écouter  ses  dt'feuses,  le  tirèrent  de  la  uiai- 
son  de  l'Eglise,  et  le  gardèrent  dtroitement 
dans  le  Palais,   rejoins  de  le  jeter  la  nuit 
dans  le  Rhône,  ou  de  l'enferuier  dans  le  clià- 
teau  du  Germe,  qui  est  aujourd'hui  la  ville 
de  Beaucaire.  Mais  les  assiégeants  ayant  em- 
pêché le  passage  de  la  banpie  où  l'on  avait 
mis  le  saint  évèque,  les  Gotlis,  oblig(;s  de  le 
ramener,  le  cachèrent  si  bien  danslel'alais, 
qu'aucun  catholique  ne  pouvait  savoir  s'il 
était  en  vie'.Qucliiues  jours  aprè-s  on  décou- 
vrit, par  une  lettre  qu'un  juif  avait  jetée  du 
côté  des  enuemis,  que  ceux  de  cette  nation 
invitaient  les  assiégeants  à  planter  leurs  échel- 
les de  nuit  au  lieu  où  il  serait  de  garde,  i\  la 
charge  de  garantir  les  juifs  de  la  captivité  et 
du  pillage.   Le  juif,  auteur  de  la  lettre,  fut 
convaincu  et  puni ,  et  saint  Césaire  justifié 
et  mis  en  liberté.  Les  assiégeants,  ayant  été 
contraints  de  lever  le  siège,  les  Gotbs  firent 
sur  eux  un  grand  nombre  de  captifs,  dont  on 
remplit  jusqu'aux  églises.  Comme  ils  man- 
quaient de  vivres  et  d'habits,  le  saint  évèque 
y  pourvut  avec  l'argent  qu'Éonius,  son  pré- 
décesseur, av.iit  laissé  au  trésor  de  l'Église. 
n  ôta  même  celui  dont  les  colonnes  et  les 
balustrades   étaient  ornées ,  et  donna  jus- 
qu'aux encensoirs,  aux  calices  et  patènes,  en 
disant  :  «  Notre-Seigneur  a  fait  la  Gène  dans 
un  plat  de  terre,  et  non  avec  de  la  vaisselle 
d'argent  ;  on  peut  bien  donner  les  vases  pour 
racheter  ceux  qu'il  a  rachetés  par  sa  propre 
vie.  Ceux  qui  trouvent  mauvais  que  l'on  i-a- 
chète  les  serviteurs  de  Jésus -Christ  aux  dé- 
pens de  ses  vases,  ne  voudraient-ils  pas  eux- 
mêmes  être  rachetés  à  ce  prix,  si  le  même 
malheur  leur  arrivait?» 

7.  Saint  Césaire  fut  accusé  une  troisième 
fois,  et  mené  sous  bonne  garde  à  Raveune, 
par  ordre  de  ïhéodoric,  roi  des  Ostrogoths, 
auquel  la  ville  d'Arles  était  soumise.  Arrivé 
à  Ra venue,  il  alla  saluer  ce  prince  qui,  voyant 
un  homme  si  intrépide  et  si  vénérable,  se 
leva,  se  découvrit  et  lui  rendit  son  salut  avec 


127 

beaucoup  de  jiolitesse.  Après  l'avoir  entre- 
tenu sur  l'état  do  la  ville  d'Arles  et  les  Gotlis 
qui  y  demeuraient ,  il  le  renvoya  ,  disant  A 
ceux  de  sa  cour  :  «Dieu  punisse  ceux  qui  ont 
fait  faire  iiuilihuneut  un  si  long  voyage  h  un 
si  saint  homme.  J'ai  tremblé  à  son  entrée; 
il  a  un  visage  d'ange,  et  il  n'est  pas  permis  do 
penser  mal  d'une  personne  si  respectable.  » 
Le  roi  lui  envoya;i  son  Ingis  unbassiu  d'argent 
du  poids  de  soixante  livres  avec  trois  cents 
sols  d'or,  en  le  faisant  prier  de  s'en  servir 
pour  l'amour  de  lui.  Mais  le  saint  évoque 
fit  vendre  le  bassin  publicpiemenl,  et  délivra 
plusieurs  captifs;  ce  qui  engagea  les  séna- 
teurs et  les  riches  de  la  ville  à  lui  envoyer 
de  grosses  sommes,  pour  être  distribuées  par 
ses  mains. Il  guérit  dans  la  même  ville  le  fils 
d'une  veuve,  qui  s»rvait  sous  le  Préfet  du 
Prétoire,  et  qui,  avec  ses  gages ,  donnait  à 
sa  mère  de  quoi  subsister. 

8.  De  Raveune,  saint  Césaire  alla  à  Rome 
où  sa  réputation  et  le  bruit  de  ce  miracle 
l'avaient  précédé.  Le  pape  Symmaque,  qui 
occupait  alors  le  Saint-Siège,  c'est-à-dire  eu 
513,  lui  donna  le  Pallium,  et  permission  à 
ses  diacres  de  porter  des  dalmatiiiues,  com- 
me ceux  de  l'Église  romaine.  Car  les  dia- 
cres '  et  les  évêques  mêmes  ne  portaient 
encore  que  des  tuniques  à  manches  étroites. 
Le  Pape  confirma  encore  tous  les  privilèges 
de  l'Église  d'Arles,  dont  quelques  -  uns  lui 
étaient  contestés  par  l'Église  de  Vienne,  et 
chargea  saint  Césaire  de  veiller  sur  toutes 
les  affaires  ecclésiastiques  des  Gaules  et  d'Es- 
pagne, avec  pouvoir  d'en  assembler  les  évê- 
ques quand  il  le  jugerait  nécessaire,  et  d'em- 
pêcher qu'ils  ne  fissent  le  voyage  de  Rome 
sans  sa  permission. 

9.  Le  saint  évèque,  de  retour  dans  son 
diocèse,  versl'an  oI4,  continua  à  l'édifier  par 
sa  vie  et  par  ses  discours.  Il  y  tint  un  con- 
cile en  524,  et  assista  à  quelques  autres  qui 
se  tinrent  dans  la  suite,  savoir  :  au  concile  de 
Carpentras,  en  527  ;  à  ceux  d'Or£y]ge  et  de  Va- 
lence, eu  529  ;  et  au  second  concile  de  Vaison, 
tenu  le  7  de  novembre  de  la  même  année. 
Ses  infirmités  qui  le  faisaient  souvent  paraî- 
tre à  demi-mort,  s'augmentant  de  jour  en 
jour,  il  vit  que  sa  fin  approchait.  Alors  il 
demanda  à  ses  disciples  combien  il  y  avait 
jusqu'à  la  fête  de  saint  Augustin,  et  dit  : 

«  J'espère  en  Notre-Seigneur  que  ma  mort 
ne  sera  pas  éloignée  de  la  sienne,  car  vous 


Il  va  1  llo. 


Niun.  20. 


Tom.  IV 
Cnncîl.  j.af. 
1204,  I2ÎÔ, 
13UÙ,  lUIO. 


Il  rctouroo 
ft  Arics.  Sa 
inor(  on  -ilJ, 


'  Fleury.   lib.  XXXI  Ilisl.  ecclés.,  tom.  VU,  pag.       178.  Et  S.  Gregor.,  lib.  VII  Episl.  113. 


HISTOIRE  GKNÉllALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


ri««>LP«  d 
tkia    CtUin 


428 

savez  ',  combien  j'ai  toujours  aimé  sa  doc- 
trine très-catliolique.  »  Il  se  fit  transporter 
dans  le  monastère  des  filles  qu'il  avait  fondé 
trente  ans  auparavant,  saclianl  que  la  crainte 
de  sa  mort  les  jetait  dans  de  grandes  inquié- 
tudes, jusqu'à  leur  faire  perdre  le  sommeil 
et  la  nourriture.  Après  avoir  tàcbé  de  les 
consoler,  il  les  exhorta  à  garder  fidèlement 
la  règle  qu'il  leur  avait  donnée,  les  recom- 
mandant par  son  testament  et  par  ses  lettres 
aux  évèques  ses  successeurs,  au  clergé,  aux 
gouverneurs  et  aux  citoyens  de  la  ville  d'Ar- 
les, afin  qu'à  l'avenir  elles  ne  fussent  in- 
quiétées de  personne.  Leur  ayant  donné  sa 
bénédiction  et  dit  le  dernier  adieu,  il  re- 
tourna à  l'Église  méti-opolitaiuc,  et  mourut 
entre  les  mains  des  évèques,  des  prêtres  et 
des  diacres,  le  27  août  542,  la  veiUe  de  la 
fête  de  saint  Augustin.  Ses  vertus  le  firent 
regretter  de  tout  le  monde,  des  bons  et  des 
mauvais  chrétiens,  et  même  des  juifs.  Sa  vie 
fut  aussitôt  après  écrite  en  deux  livres,  dont 
le  premier,  qui  est  adressé  à  l'abbesse  Césa- 
rie,  la  jeune,  eut  pour  auteur  Cyprien,  évo- 
que de  Toulon,  avec  deux  autres  évèques, 
Firmin  et  Viventius.  Le  prêtre  Messien  et  le 
diacre  Etienne  écrivirent  le  second.  Ils 
avaient  tous  été  disciples  de  saint  Césaire 
et  témoins  de  ses  vertus  et  de  ses  miracles. 

ARTICLE  II. 

DES  ÉCRITS  DE  SAINT  CÉSAIRE  d'ARLES. 
§1- 

De  ses  sermons  recueillis  dans  /'Appendice  de 
ceux  de  saint  Augustin. 

1.  Nous  avons  vu  qu'aussitôt  que  saint 
Césaire  eut  été  élevé  à  l'épiscopat,  il  se  dé- 
chargea, à  l'exemple  des  apôtres,  de  l'adnii- 
nistiation  des  aflaires  temporelles,  sur  des 
diacres  et  des  économes,  pour  se  donner 
tout  entier  à  la  prédication  de  la  parole  de 
Dieu;  qu'il*ivait  les  fonctions  de  ce  minis- 
tère si  à  cœur,  que,  non  content  de  prêcher 
dans  les  assemblées  qui  se  faisaient  le  matin 
et  le  soir,  il  composait  encore  d'autres  dis- 
cours qu'il  envoyait  en  d'autres  provinces, 


pour  y  être  récités  par  les  évèques  qui  n'a- 
vaient pas  apparemment  enx-mèmcs  le  don 
de  la  parole.  On  ne  peut  donc  douter  qiTil 
n'ait  composé  un  très-grand  nombre  de  dis- 
cours, et  qu'encore  qu'il  nous  en  reste  beau- 
coup, la  plupart  ne  soient  perdus,  ou  attri- 
bués à  d'autres  auteurs.  Il  y  en  a  environ 
quarante  sous  son  nom  dans  la  liibliuthi'fjKe 
des  Pères,  et  cent  deux  dans  l'Appendice  du 
cinquième  tome  des  Œuvres  de  saint  Au- 
gustin, qui  comprend  ses  sermons.  M.  Baluze 
en  a  fait  imprimer  séparément  quatorze, 
qu'il  croyait  n'avoir  pas  encore  vu  le  jour, 
et  qui  ont  été  mis  dans  le  vingt-seplie- 
me  volume  de  la  Bibliothèque  des  Pères  de 
Lyon,  en  1677.  Il  s'en  trouve  encore  quel- 
ques-uns dans  les  Recueils  des  conciles,  et 
dans  celui  de  Barrali.  Mais  il  ne  faut  pas 
s'imaginer  que  ce  soit  autant  de  sermons 
dilTérents.  Les  Homélies  puljliées  en  1069  par 
M.  Baluze,  se  trouvent  parmi  celles  que  l'on 
a  mises  dans  VApjjendice  des  sermons  de  saint 
Augustin  ;  et  il  y  en  a  encore  beaucoup  de 
celles  qui  ont  été  imprimées  dans  le  huitiè- 
me tome  de  la  Bibliothèque  des  Pères.  U  en 
faut  dire  autant  des  Homélies  que  Barradi  a 
données,  et  qu'il  suppose  avoir  été  pronon- 
cées en  présence  des  moines  de  Lérins. 

2.  La  plupart  des  discours  de  ce  Père  ont 
été  attiibués  à  saint  Augustin,  quelques-uns 
à  saint  Ambroise,  et  d'autres  à  Eusèbe  d'É- 
mèse  *.  Les  auteurs  de  la  nouvelle  édition 
de  saint  Augustin  se  sont  donné  la  peine 
d'examiner  quels  étaient  les  véritables  ser- 
mons de  saint  Césaire,  et  ils  ont  été  guidés 
dans  ce  travail  par  les  règles  les  plus  solides 
de  la  bonne  critique,  fondée  sur  l'autorité 
des  manuscrits,  sur  la  conformité  du  style, 
l'usage  familier  de  certains  termes,  les  cir- 
constances des  temps  et  des  lieux,  et  sur  la 
doctrine  et  la  méthode.  Ces  deux  cents  homé- 
lies qu'ils  lui  attribuent,  ou  portent  son  nom 
dans  les  manuscrits,  ou  sont  de  son  style, 
qui  est  d'autant  plus  aisé  à  connaître,  qu'il 
lui  est  propre  et  singulier.  Il  est  simple,  net 
sans  aucune  all'ectation,  accommodé  à  la 
portée  des  moins  instruits.  Sa  doctrine  est 
partout  conforme  à  celle  de  saint  Augustin  ; 
ou  voit  dans  tous  ses  discours  la  même  mé- 


II)  OUI  «I 

•<lrll'U(>  i 
Au(:u>lin.      I 
S.     A  ml'ri>lM 
et  t   d  dulroa 


*  Confido  in  Domino  quori  meum  transilum  non 
longe  Uivisurus  est  ab  ipsius  :  qui  ut  ipsi  nostii, 
quantum  dilexi  ejus  catholicissimum  sensum  tan- 
tum  me  etsi  iliscrepanlem  meritis ,  minime  lamen 
reor  dislaniia  longior»  deposilionis  meœ  diem  ab 


ejusobitus  tempore  sequestrari.  Cœsar.  Vita,  lib.  II, 
nuiu.  35. 

'  Ou  encore  i\  un  EusM^e,  t'vôque  dans  los  riaii- 
l'^s.  \oycz Histoire  Ultéraire  de  la  France,  touic  II, 
I>ag.  301  cl  Buiv.  Le  tome  LXWI  de  la  Patrologie 


[vi"  SIÈCLE.]         CIIAriTlVE  IX.  —  SAINT  r.H.SAinR,  livftQUIî  D'AULl'^S. 


S.Tm.l.t/.ni 
V  Operurii 
AiirusliDi  in 
A)<^oii(l.  i.-i'^'t 


tliode  pour  les  commencer  cl  pour  les  Unir. 
Il  en  est  pon  où  il  ne  fasse  une  rc'capilnia- 
lion  de  ce  qu'il  avait  dit;  il  use  dans  quel- 
ques-uns do  certains  termes,  qu'on  ne  trouvo 
que  rarement  ailleurs,  mais  dont  il  se  sert 
dans  sa  Uèglo  pour  les  vicri,'es  de  son  monas- 
tère. Tel  est  le  mot  '  de  canava  pour  mar- 
quer le  cellier,  et  de  canavaria  pour  signifier 
le  coUtirier.  Enfin  ces  cent  doux  discours  ont 
un  rapport  visible  au  style,  aux  termes,  aux 
pensées  de  ceux  qu'il  lit  dans  les  conciles 
qu'il  convoqu  i  et  auxquels  il  présida.  Nous 
avons  remarqué  plus  liant  que  lorsque  sa  san- 
té ne  lui  ixuinetlait  pas  de  prèclier,  il  faisait 
lire  ou  ses  propres  discours,  ou  les  sermons 
de  saint  Ambroise  ou  de  saint  Augustin. 
Dans  ceux  qu'il  composait  lui-raôme,  il  em- 
pruntait quelquefois  non-seulement  les  pen- 
sées, mais  aussi  les  termes  de  ces  deux  Pè- 
res et  de  Fauste  de  Riez  ;  et  c'est  peut-être 
là  la  vraie  raison  pourquoi  les  copistes,  qui 
ne  trouvaient  pas  son  nom  à  la  tète  de 
ces  discours,  ont  attribué  ;ï  saint  Ambroise 
et  à  saint  Augustin  certains  discours  de  saint 
Césaire,  où  ils  remarquaient  les  termes  et 
les  pensées  de  ces  deux  saints  évèques.  Au 
reste,  ses  boraélies  furent  tellement  estimées, 
que  les  écrivains  qui  ont  vécu  depuis  y  al- 
laient puiser,  comme  il  avait  fait  lui-même 
quelquefois  dans  celles  de  saint  Augustin. 
C'est  ce  que  l'on  peut  voir  en  les  comparant 
avec  celles  de  saint  Éloi  et  de  Raban  Maur. 
3.  Le  premier  discours  est  sur  la  vocation 
d'Abraham  marquée  dans  le  douzième  chapi- 
tre de  la  Genèse.  L'auteur  y  pose  pour  princi- 
pe, ce  qu'il  répète  souvent  ailleurs,  que  l'An- 
cien Testament  a  été  la  figure  du  Nouveau,  et 
que  ce  qui  s'est  passé  alors  matériellement 
dans  la  personne  des  patriarches,  doit  se  fai- 
re spirituellement  en  nous;  qu'ainsi  le  com- 
mandement que  Dieu  fait  à  Abraham  de  sor- 
tir de  son  pays,  de  sa  famille  et  de  la  maison 
de  son  père,  marque  que  nous  devons  sortir 


42!) 

(le  nous-mêmes,  c'cstà-dire  do  nos  vices,  do 
nos  mauvaises  liahilutles,  pour  ne  plus  pren- 
dre do  i)laisir  que  dans  la  pratique   do  la 
vertu.  La  matière  du  second  discours  est 
prise  de  l'ordre  que  Dieu  doima  au  mènK! 
patriarche  de  lui  immoler  une  vache  ou  un 
bélier,  on  une  chèvre  de  trois  ans.  Saint  Cé- 
saire dit  que  toutes  les  nations  qui  croient  en 
Jésus-Christ  et  qui  y  croiront  un  jour,  sont 
enfants  d'.Vbraham,  non  en  naissant  de  lui 
selon  la  chair,  mais  en  imitant  sa  foi.  Il  se 
plaint  de  ce  que  toutes  les  fois  que  le  prêtre, 
en  célébrant  le  sacrifice,  avertissait  les  fidè- 
les d'élever  leur  cœur  en  haut,  il  y  en  avait 
peu  qui,  en  répondant  qu'ils  l'avaient  tourne 
vurs  Dieu,  le  fissent  avec  vérité  et  avec  con- 
fiance. 11  traite,  dans  le  troisième,  du  maria- 
ge d'Isaac  avec  Rébecca,  qu'il  dit  avoir  été 
la  figure  de  celui  de  Jésus-Glirist  avec  son 
Église.  Le  quatrième  est  touchant  les  deux 
enfants  que  Rébecca  portait  dans  son  sein, 
Jacob  et  Esaii.  Il  dit  que  comme  ces  deux 
enfants  '  luttaient  l'un  contre  l'autre  dans  le 
sein  de  leur  mère,  il  y  a  de  même  dans  l'É- 
glise deux  peuples  qui  sont  toujours  opposés 
les  uns  aux  autres,  les  bons  et  les  méclianis. 
«S'il  n'y  avait,  ajoute-t-il,  dansl'Église,  que 
des  bons  ou  des  méchants,  il  n'y  aurait  qu'un 
seul  peuple  :  mais  parce  que  l'on  trouve 
dans  l'Église  des  bons  et  des  méchants,  qui 
se  combattent  mutuellement,  savoir  les  hum- 
bles et  les  superbes,  les  chastes  et  les  adultè- 
res, les  miséricordieux  et  les  avares,  ils  sont 
deux  peuples  figurés  par  Jacob  et  Ésau.  Les 
bons  s'efforcent  de  gagner  les  méchants  pour 
les  engager  à  la  vertu;  les  méchants,  au 
contraire,  cherchent  la  perte  des  bons  eu  ta- 
chant de  les  engager  dans  le  mal.»  Il  trouve 
dans  ce  qui  se  passe  aujourd'inii  entre  les 
gentils  et  les  Juifs  l'accomplissement  de  cette 
prophétie  :  L'aîné  servira  le  puîné  ;  «  Car,  dit- 
il,  les  Juifs,  qui  sont  le  peuple  aine  '  figuri! 
par  Ésaii,  servent  évidemment  le  peuple  pnî- 


p«T.li). 


Sorm.3, 


'ïej;ii.  i, 
pag.  se. 


grecque,  col.  461-566 ,  contient  trois  notices  sur  Eii- 
sèbe  (l'Émèse;  2»  trois  discours  édités  eu  fiTec  et  eu 
latin  par  Jean  Chrétieu  Guillaume  Augusti;  seule- 
ment on  a  mis  par  mégarde  le  discours  sur  le  diable 
et  sur  l'eufer  parmi  les  écrits  d'Eusèbe  d'Alexandrie. 
Ibid.,  col.  383  et  suiv.  ;  3"  des  fragments  dogmati- 
ques recueillis  par  Augusti,  et  des  fraguieats  exé- 
gétiques  d'après  différentes  Cbaîues.  {L'éditeur.) 

'  C:esar.  Regul.  ad  virgin.,  cap.  xxs,  et  serra., 
In  Àppend.  August.  lit,  num.  2;  270,  num.  5  et  271, 
num,  1. 

*  Sicul  duo  parvuli  in  utero  Rebeccœ  collide- 
bantur,  sic  cl  in  ulcro  Ecclesiie  dun  sibi  pnpuli 

XI. 


jugiler  adversantiir.  Si  enim  aut  soli  mnli  aul  soH 
boni  esscnt,  unus  popiilus  esset  :  quia  vero  in 
Ecclesia  et  boni  inveniuntur  et  mali;  lanquaia 
in  ventre  spiritalis  Rebecc(B  duo  pnpuli  cnllidun  - 
tur,  humiles  scilicel  et  superbi.  ca.tti  et  adulteri, 
misericodes  et  cupidi.  Boni  enim  lucrari  voliint  ma- 
ins, mali  autem  extinguere  cupiunl  bonns.  Cœsar., 
Serm.  i,  pag.  21. 

'  Quomodo  ergo  populus  major  serviat  minori, 
qui  hoc  diligenter  attendit,  in  chrintianis  cel  in, 
Judœis  agnoscit.  Major  enim  et  senior  pupulus 
Judœorum  jtiniori,  id  est  populo  chrisliano  ser- 
vireprobatur;  dum  per  totum  mundum  librosdi- 

9 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


130 

né,  qui  sont  les  gentils  convertis  à  la  foi  de 
Jésiis-Ciirist,  lorsqu'ils  portent  partout  le 
monde  les  livres  de  la  loi  divine  pour  l'instruc- 
tion de  toutes  les  nations.  En  etl'et,  les  Juifs 
sont  dispersés  par  toute  la  terre ,  afin  que 
lorsque  nous  voulons  inviter  quelque  infidèle 
à  la  foi  de  Jésus-Christ  en  montrant  que  le 
Messie  a  été  annoncé  par  tous  les  prophètes, 
et  que  cet  infidèle  faisant  dilliculté  de  nous 
écouter,  en  soutenant  que  les  livres  de  la  loi 
divine  sont  de  nous  et  non  pas  du  Saint-Es- 
prit, nous  ayons  dans  le  moment  celte  répli- 
que certaine  à  leur  faire  :  Si  vous  doutez  de 
la  vérité  des  livres  qu'on  vous  allègue,  voilà 
les  livres  des  Juifs,  nos  ennemis,  que  nous 
n'avons  pu  ni  écrire  ,  ni  changer  :  lisez -les. 
Et  lorsque  vous  aurez  trouvé  dans  ces  livres 
la  même  chose  que  dans  les  nôtres,  rendez- 
vous,  ne  soyez  plus  incrédules,  mais  fidèles.» 
Sur  la  fin  de  ce  discours,  saint  Césairc  exhor- 
te ses  auditeurs  à  la  pratique  de  la  vertu,  par- 
ticulièrement dans  le  saint  temps  de  Carême, 
il  les  engage  surtout  <i  se  trouver  exactement 
auxollicesde  la  nuit',  de  tierce,  de  sexte  et 
de  none  ;  à  vivre  dans  la  continence  pendant 
tout  le  Carême,  et  même  jusqu'à  la  fin  de  la 
fête  de  Pâques,  c'est-à-dire  jusqu'après  TOc- 
tave  ;  adonner  aux  pauvres  ce  que  dans  un 
autre  temps  ils  auraient  dépensé  pour  leur 
dîner;  à  conserver  la  paix  avec  tout  le  mon- 
de, et  à  réconcilier  même  ceux  qui  étaient 
en  dissension  ;  à  recevoir  les  étrangers,  en 
ne  rougissant  pas  de  leur  laver  les  pieds,  un 
chrétien  ne  devant  pas  rougir  de  ce  que  Jé- 
sus-Christ a  fait;  à  faire  l'aumône  chacun 
selon  ses  facultés,  et  à  employer  une  partie 


vinœ  legis  ad  inslruclionem  omnium  genliumpor- 
tare  cognoscitur.  Ideo  eiiim  per  omnem  terram 
Judœi  dispersi  sunt,  ut  cum  aliquem  paganum  nd 
fidem  ChrUti  voluerimus  incitare,  et  ab  omnibus 
propketis  ipsum  Chrislum  esse  annuntiatum  tes- 
tamur;  et  ille  resistens  dixeril,  a  nobis  potius 
quam  a  Spiritu  Sancto  libros  divinœ  legis  esse 
conscriplos  ;  nos  habeamiis  unde  eum  rednrguere 
certa  rationepossimus  dicentes  ei  :  Si  de  meis  libris 
tibi  dubilatio  nascilur,  ecce  Judœorum  librns,  uti- 
queinimicorum  nostrorum,  {quos  certum  est,  quod 
ego  conscribere  vel  immuiure  non  putiU)  ipsos  re- 
Uge;  et  cum  in  ipsis  hoc  inveneris,  quod  et  in 
meis,  noli  esse  incredulus,  sed  fidtlis.  Ibid. 

'  Attenliust  amen  rogo  et  admoneo,  fralres, ut  ad 
vigilias  malurius  surgere  siudeatis,  ad  tertiam, 
ad  sextam,  ad  nonam  fideliler  veniatis.  CastHa~ 
tem  ante  omnia  per  lolam  quadragesiutam  et  us- 
quead  finem  Paschœ  etiam  cum  propriis  uxoribus 
custodile.Qiiodpransurieratis,paupcribuserogate. 
Paccm  et  ipsi  habetc,  et  qv"^  diimnles  agnoveri- 


S«rtn.e,7, 


r«s.  )j. 


du  jour  à  la  prière  et  à  la  lecture,  afin  de  pou- 
voir participer  dans  la  solennité  de  Pâques 
à  l'autel  du  Seigueur,  et  y  recevoir  son  corps 
et  son  sang,  non  à  sa  condamnation.  Le  cin- 
quième et  le  sixième  sermon  sont  sur  le  pa- 
triarclie  Jacob.  Saint  Césaire  remarque  que 
les  mariages  des  patriarches  se  sont  souvent 
contractés  auprès  des  puits  et  des  fontaines, 
qui  étaient  les  figures  du  baptême,  par  le- 
quel Jésus-Christ  devait  purifier  l'Église,  son 
épouse,  de  toutes  sortes  d'iniquités.  Les  trois 
suivants  contiennent  un  parallèle  entre  le  pa-  ]^-  "•  *» 
triarche  Joseph  et  Jésus-Christ,  dont  Joseph 
était  la  figure.  Il  dit  que  les  interprètes  ne 
s'accordaient  pas  sur  le  prix  de  la  vente  de 
Joseph  par  ses  frères;  que  dans  quelques 
versions  on  hsait  vingt  pièces  d'argent,  et 
dans  d'autres  trente.  Il  trouve  dans  celte  va- 
riété la  dilTéreuce  des  degrés  d'amour  que 
les  chrétiens  auraient  pour  Jésus-Christ  :  les 
uns  l'aimant  plus,  les  autres  moins.  Il  donne 
pour  raison  de  la  sévérité  dont  Joseph  usa 
envers  ses  frères,  qu'il  voulait  par  là  les  en- 
gager à  la  confession  de  leurs  crimes  et  à  en 
faire  pénitence.  Il  en  tire  une  moralité  pour 
la  correction  fraternelle,  disant  qu'à  l'exem- 
ple de  ce  patriarche,  nous  devons  tellement 
reprendre  ceux  de  nos  frères  qui  ont  péché 
contre  nous,  que  nous  cherchions  à  les  cor- 
riger de  leurs  fautes,  et  non  pas  à  satisfaire 
notre  haine.  Il  parait,  par  la  tin  du  huitième 
discours,  qui  est  le  troisième  sur  Joseph, 
qu'il  aurait  souhaité  s'étendre  davantage  sur 
ses  vertus,  mais  qn'il  abrégea  afin  de  donner 
aux  pauvres,  qui  étaient  pressés  de  travailler, 
le  temps  de  faire  leur  ouvrage.  Il  prêcha 


lis,  ad  concordiam  revocale.  Peregrinos  excipite, 
nec  vos  pigeât  eorum  pedes  abluere.  Son  erubes- 
cat  exerccre  christianus,  quod  implere  dignatus 
est  Chrislus.  Cum  bona  voluntnle  pauperibus  se- 
cundum  vires  vcslras  eleemosynas  erogate  :  liil.i- 
rciu  eniiu  datorcm  diligit  Deus. /mpedtnien/a  mun- 
di,  si  ad  integrum  non  poteslis  abgcindere,  vel  ex 
parte  aliqua  temperate,  ut  lectioni  vel  orationi 
possitis  insistere  :  ut  in  sancto  exceptorio  pec- 
toris  veslri  spiritale  rinum,  id  est,  verbum  Dei 
abundintius  reponentes,  repudiatis  omnibus  cri- 
minibus  atque peccalis,  cum  libéra  et  sincera  cons- 
cientia  Deo  servire possitis  :  et  cum  sancta  solem- 
nitas  paschalis  advenerit,  charitatem  non  solum 
cum  bonix,  scd  etiam  cum  malis  fideliler  retinen- 
les,  cum  gaudio  exsultalionis  mundo  corde  et  cas- 
to  corpore  ad  altare  Domini  possitis  nccedere,  et 
corpus  et  sanguinem  ejus  unusquisque  vesirum 
non  ad  judicium  animœ  sua;  merealur  acciprre. 
Ibid.,  pag.  22. 


(JIIAPirilK  ]\.    —  SAINT  CfeAlRE,  KVftOUE  D'ARLKS. 


[Vl"  SIÈCXE.] 

ilonc  ces  discours  eu  un  jour  ouvrier.  Lo 
lendouuiin  il  reprit  la  môme  iiiaticrn,  et  mon- 
tra ([uo,  ('(iniiiK!  aprî's  la  murl  de  Joscpli,  les 
Israi'liti's  se  niulliplièreiil,  ainsi  qu'il  (>st  dit 
dans  le  livre  de  l'Exode,  de  môme  les  chré- 
tiens se  sont  inuUipliés  aprrs  la  mnrt  do  Jé- 
sus-Christ. Il  enseigne  (pi'cilant  (li'livr('s  jiar 
lu  gr;\ce  du  baptême  de  tous  nos  péchés, 
nous  devons,  avec  le  secours  de  Dieu,  tra- 
vailler A  toutes  sortes  de  bonnes  œuvres, 
parce  qu'il  no  suQil  pas  que  le  creur  soit  vide 
de  maux,  si  on  ne  le  remplit  de  biens. 

4.  Le  dixième,  qui  a  pour  matière  les  dif- 
férents entre  les  Israélites  et  les  Ej^yptiens, 
fut  pi'ononcé  quelques  jours  avant  la  fête  de 
P;\ijucs.  On  y  voit  que  le  diable  no  persécute 
que  les  bons  et  non  pas  les  mauvais,  parce 
qu'ils  sont  ses  amis  et  qu'ils  font  toujours  sa 
volontiî;  qu'il  persécute  les  bons  par  le  mi- 
nistère des  méchants  ;  en  sorte  qu'il  est  vrai 
de  dire  que  le  diable  a  ses  ministres,  comme 
Dieu  a  les  siens  :  Dieu  par  les  hommes  sages 
fait  tout  ce  qui  est  bon;  et  le  diable  par  les 
mauvais,  fuit  tout  ce  qu'il  y  a  de  mal.  Il  y 
a  deux  discours  sur  Moïse.  On  peut  remar- 
quer dans  le  second,  que  l'on  ne  donne  le 
nom 'de  chrétiens  qu'à  ceux  qui,  étant  régé- 
nérés au  nom  de  Jésus-Christ,  sont  morts 
dans  l'Eglise  catholique  ;  et  que  tous  ceux 
qui  ne  sont  point  dans  cette  Église ,  mais 
dans  quelque  secte  particulière,  en  portent  le 
nom;  que  les  uns  sont  appelés  donatistes, 
les  autres  manichéens  ,  les  autres  ariens,  et 
d'autres  photiniens.  Dans  le  treizième  il  ex- 
plique ces  paroles  de  l'Exode  :  Le  Seigneur 
endiuxit  le  cœur  de  Pharaon.  Pourquoi,  di- 
saient quelques-uns,  l'iniquité  est-elle  imputée 
à  Pharaou,  puisqu'il  est  dit  que  le  Seigneur 
avait  endurci  son  cœur?  Avant  de  répondre, 
saint  Césaire  met  pour  principe  que  dans  un 
pécheur  le  désespoir  vient  de  la  considéra- 
tion du  grand  nombre  de  ses  péchés,  et  que 
du  désespoir  nait  l'endurcissement.  Il  sup- 
pose que  Pharaon  était  dans  ce  cas:  d'où  il 
infère  que  son  endurcissement  n'était  point 
lui  effet  de  la  puissance  de  Dieu,  qui  à  son 

'  In  Ecclesia  catholica  defuncti,  id  est,  Christi 
nomine  omnes  qui  nati  fuerint,  appellanlur  chris- 
tiani.In  hœreUcis  vero,  aliidonalistœ,  alii  mani- 
chœi,  alii  ariani,  aliipholiniani  dicuntur.  Cœsar., 
Serin,  il,  pag.  40. 

»  Quid  est  autem  quod  dixit  Deus  :  Ego  indurabo 
cor  ejus,  nisi  ciim  ab  illo  ablata  fuerit  gratia  mea, 
obdurabit  illum  nequitia  sua?  Et  ut  hoc  euiden- 
tius  possit  agnos:i,  aliqiuim  similitudinemde  ré- 
bus visibilibus  charilativestne  proponimus.SiciU 


131 

égard  no  fit  nutro  chose  que  de  le  laisser  dans 
l'état  où  il  l'avait  trouvé.  Dieu  aurait  pu  amol- 
lir son  (Meur,  en  le  chùliant  :  ce  qui  paiail  en 
ce  que  Pharaon  témoigna  du  re[>oiitir  toutes 
les  fois  que  Dieu  l'aflligea  ;  et  qu'il  retomba 
dans  son  endurcissement  autant  de  fois  que 
Dieu  le  d  ('livra  des  plaies  dont  il  l'avait  frappé. 
«  Quel  est  donc,  ajoute  saint  Césaire,  le 
sens''  de  ces  paroles  :  J'endurcirai  son  cœur, 
sinon,  lorsque  ma  grdce  lui  sera  ôtée,  son 
iniquité  l'endurcira?»  Pour  rendre  la  chose 
sensible ,  il  propose  cet  exemple  :  «  Toutes 
les  fois  que  l'eau  glacée  par  un  grand  froid 
reçoit  l'impression  de  la  chaleur  du  soleil, 
elle  reprend  sa  première  fluidité  ;  mais  aus- 
sitôt que  le  soleil  disparait  de  nouveau,  elle 
se  glace  et  s'endurcit  une  seconde  fois  :  do 
même  la  charité  de  plusieurs  se  refroidit  et 
se  glace  par  le  froid  des  péchés  ;  mais  lors- 
que la  chaleur  de  la  divine  miséricorde  sur- 
vient, cette  glace  causée  par  les  péchés  se 
dissout.  C'est  cette  chaleur  dont  il  est  dit  dans 
l'Ecriture  :  //  n'y  a  personne  qui  se  mette  à 
couvert  de  sa  chaleur.  » 

Le  quatorzième  est  touchant  les  espions 
des  Israélites  envoyés  dans  la  terre  promise, 
et  les  raisins  qu'ils  en  apportèrent.  Il  fut 
prêché  aux  approches  do  la  fête  de  Pâques; 
et  à  l'occasion  de  ces  raisins ,  saint  Césaire 
exhorte  son  peuple  à  se  préparer  par  les 
jeûnes,  les  veilles,  les  oraisons,  les  aumônes, 
et  par  une  pureté  de  corps  et  d'esprit,  à 
boire  le  cahce  du  salut  dans  cette  solennité. 
11  fait  voir  dans  le  quinzième,  que  la  sentence 
que  Dieu  prononce  quelquefois  contre  les 
pécheurs,  n'est  point  irrévocable,  lorsque 
ces  pécheurs  se  convertissent;  mais  aussi 
qu'il  leur  est  bien  plus  facile  de  guérir  leurs 
plaies,  quand  elle  sont  récentes,  que  lors- 
qu'elles sont  invétérées.  Dans  le  seizième  ser- 
mon, qui  regarde  l'entrée  des  Israélites  dans 
la  Terre-Promise,  ce  Père  montre  que  ce  fut 
avec  justice  qu'ils  en  chassèrent  les  Chana- 
néens,  soit  à  cause  qu'ils  en  étaient  illégiti- 
mement en  possession  ,  l'ayant  usurpée  sur 
les  descendants  de  Sem ,  fils  aîné  de  Noé , 

enim  quotiens  nimio  frigore  aqua  constringitur, 
solis  calore  superveniente  resolvitur,  etdiscedente 
eodem  sole  ilertim  obduratur  :  ita  nimirum  pec- 
catorum  frigore  refrigescil  charilas  multorum,  et 
veliit  glacies  obduranlur;  etciuti  eis  iterum  cator 
divinœ  misericordiœ  supervenerit,  resolvuntur; 
ille  utique  calor  de  quo  scriptuin  est  :  Nou  est  qui 
se  abscondat  a  calore  ejus.  Cicsar. ,  Serm.  12, 
pag.  46. 


.Sorm.  lA, 


Serm.  16, 
pa;.  61;. 


132  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

à  qui  elle  avait  été  donnée  en  partage  ;  soit      les  souffrances  des  justes  en  cette  vie,  seront   i««  s,r„ 

it  ils  s'étaient      récompensées  dans  l'antre,  et  les  supplices 


(j;.  «a. 


Sem».  1^,19, 


S/Tfn,  Sfl. 


Sirro.îl.!!, 
>ri.  il,  iv 
9»  et  ><s. 


,.r.  Il» 


.25, 


.'.Utib.  Ti,  3. 


à  cause  des  crimes  inouïs  dont 
souillés,  et  dont  Dieu  les  voulait  punir,  en 
s.rni.  n,  leurolant  cette  terre. L'ordre  queJosaédonna 
pour  le  passage  du  Jourdain,  et  le  renverse- 
ment des  murs  de  Jéricho  font  la  matière  du 
dix-septième.  Les  dix-huit  et  dix-neuf  regar- 
dent l'histoire  de  David.  On  y  voit  que,  le  joiir 
qu'ils  furent  prononcés  ,  on  avait  lu  dans  l'K- 
glise  quelque  chose  des  livres  des  Rois.  Suint 
Césaire   trouve    dans   les  trois  inclinations 
que  le  prophète  Elle  fit,  pour  ressusciter  le 
fds  de  la  veuve,  une  ligure  des  trois  immer- 
sions qui  se  pratiquent  dans  le  sacrement  du 
baptême  par  lequel  nous  ressuscitons.  11  y  a 
quatre  discoure  sur  Elisée.  Le  saint  remarque 
dans  le  premier,  que  si  ce  prophète  fit  dé- 
vorer par  deux  ours  quarante-deux  enfants, 
ce  fut  pour  imprimer  aux  anciens  du  respect 
pour  les  prophètes,  qu'ils  méprisaient  aupa- 
ravant. Dans  le  vingt-cinquième  qui  est  sur 
ces  paroles  :  Que  votre  main  gauche  ne  sache 
jmnt  ce  que  fait  la  droite  ,  il  en  fait  l'applica- 
tion aux  bonnes  œuvres,  particulièrement  à 
l'amuône,  voulant  qu'on  la  fasse  tellement  en 
public,  que  l'on  ne  cherche  point  à  s'attirer 
par  là  l'estime  des  hommes,  mais  seulement 
à  plaire  à  Dieu.  Il  explique  dans  le  même 
sens  ce  que  l'Evangile  ajoute  :  Lorsque  vous 
voudrez  prier,  entrez  en  un  lieu  retiré  de  voire 
tnaison.  Jésus-Christ  ne  défend  pas  les  prières 
publiques  où  tout  le  peuple  fléchit  les  genoux 
avec  l'évoque  ;  mais  il  nous  défend  tout  autre 
motif,  soit  dans  nos  prières,  soit  dans  nos 
jeûnes,  soit  dans  nos  aumônes,  que  celui  do 
nous  procurer  la  vie  éternelle.  Le  vingt-sixiè- 
me regarde  la  défense  qui  nous  est  faite  t/e  ne 
jiKfr  personne,  alin  ijae  nous  ne  soyons  pas 
..  vr,7.  jugés  nous-mômes.  «  Il  y  a  toujours  du  dan- 
ger, dit- il,  à  juger  notre  prochain  dans  des 
choses  qui  sont  connues  '  de  Dieu  seul  ;  c'est 
à  lui  qu'il  en  faut  laisser  le  jugement.  Mais 
nous  pouvons,  et  nous  devons  même  repren- 
dre nos  frères,  quand  leurs  fautes  sont  publi- 
ques et  notoires,  mais  avec  charité  et  avec 
amour,  haïssant  le  vice  et  non  le  pécheur.» 
f«r.n.  >7,  ]i    s'applique    dans  les    vingt- septième  et 


fflrtn.  26, 
|>a;.  IJD. 


''*■     .. 
^4,1111. -8,  HSi 


vingt-huitième  à  montrer  les  avantages  dont 


pensées 

dont  les  méchants  seront  punis  éternellement 
pour  les  plaisirs  passagers  dout  il  ont  joui 
dans  ce  uKuide.  Le  vingt-neuvième  traite  des 
deux  voies,  dont  l'une  mène  au  ciel .  l'autre 
en  enfer.  Saint  Césaire  y  dit,  que  non-seule- 
ment Jésus-Christ  nous  attend  dans  le  para- 
dis, mais  qu'il  nous  aide  encore  pour  y  aller; 
que  si  le  diable  sévit  contre  nous,  Jésus-Christ 
nous  console  ;  que  le  démon  ne  nous  otfre 
que  de  vaines  douceurs ,  dont  l'effet  est  de 
donner  la  mort  à  notre  àmc  ;  au  lieu  que 
Jésus-ChrisI ,  eu  nous  exhortant  à  la  vertu, 
nous  promet  une  félicité  éternelle. 

5.  Le  sermon  sur  cet  endroit  de  saint  Mal- 
thieu  :  Malheur  aux  femmes  qui  seront  grossies 
ou  nourrices  en  ce  temps-là,  est  une  compila- 
tion du  commentaire  de  saint  .\uguslin  sur 
le  psaume  trente  neuvième.  On  le  croit  avec 
assez  de  vraisemblance  de  saint  Césaire.  L'au- 
teur prouve  que  l'accomplissement  des  an- 
ciennes prophéties,  ne  nous  laisse  aucun  lieu 
de  douter  que  celles  qin  regardent  le  juge- 
ment dernier  ne  s'accomrilissent  aussi.  Le 
trentièm.e  porte  le  nom  de  saint  Cé.saire  dans 
deux  anciens  manuscrits.  Il  a  pour  malièrela 
parabole  des  dix  vierges.  Le  saint  en  Qt  un 
second  sur  le  même  sujet  pour  la  féie  des 
vierges.  Des  deux,Holsténius  n'en  a  fait  qu'un 
qui  est  imprimé  dans  l'Appendice  du  Code  drs 
règles  par  saint  Benoît  d'Aniane,  et  dans  I  •. 
Supplément  de  la  Bibrolhèque  des  Pères,  à 
Lyon  en  1G77.  Saint  Césaire  dit,  que  les  vier- 
ges, qui  avec  '  le  sccoiu's  de  Dieu  coiisers'ent 
leur  corps  chaste,  doivent  travailler  de  toutes 
leurs  forces,  avec  sa  grâce,  à  la  purelé  de  leu;- 
àmc,  en  évitant  les  longs  discours,  la  médi- 
sance, le  murmure,  l'euvie  et  l'orgueil;  ou 
obéissant  avec  humilité,  en  vaquant  ;\  la  priè- 
re, à  la  lecture;  en  se  levant  avec  ardeur  pour 
assister  aux  veilles  de  la  nuit,  soit  qu'elles  se 
fassent  dans  l'oratoire,  ou  en  tout  autre  lieu  ; 
en  consolant  les  aflligés,  en  reprenant  Io> 
désobéissants.  Les  trente-unième  et  trenl,-- 
deuxième  discours  sont  sur  ces  paroles  de  \'l'.- 
vangile  :  ]'enez,  les  bénis  de  mon  l'ère,  ]>osh'1<'z 
le  royaume;  retirez-vous,  maudits,  allez  au  feu 


ai, 


'  De  istit  rébus  quœ  sunt  Deo  notœ  et  nnbis  tn- 
cognitœ,  periculnse  nnslros  proxiinos  juilicamus. 
De  ipsis  enim  Doiiiinm;  dixit  :  Nolili'  jinlicare  ut 
non  jiidiceiniQi.  De  ilUs  vero  quœ  aperta  sunt  et 
publica  mala,  judicare  et  redarguere,  cum  cliari- 
lalc  liiine.i  et  a.mrc  r'  pi^v-i<r>^i^  et  debenius: 
oUio  habentes  non  ho,nincin,  sed  peccnlum.  de- 


«ar.,  Serm.  26.  pag.  121. 

'  Virginesquœ  inlegritatem  corpori.t,  Df.o  nuxi- 
lianle,  cii-stodiutU,  tolis  viribus  cum  Dei  adjnto- 
no  laborare  conlendatil,  verbusilatem  fiigere,  dc- 
tracliitncm,  murmuralionem  rcspuere,  etc.,  Cm- 
sar.,  Uom.  30,  paj;.  139. 


[VI'  siiiCLE.J  CHAPITRK  IX.   —  SAINT  CKSAIIIE,  ÉVÈQUE  IVARLKS. 


Prrni 
lU. 


<'to-ne/.  Saint  C(îpairc'  rcmarfjnp,  qu'aux  tor- 
iiR's  de  Jiisus-CInist,  nous  sommes  pii^ilesli- 
iK's  i\  la  itloire  du  ciel,  et  non  ])as  au  feu  do 
l'enfer,  qui  est  préiKin^  au  dc-nion  el  A  ses  an- 
cres, niiiis  non  |);is  l'uitius.  11  loinaniuc^  encore 
que,  quoi(jue  la  sentence  ([ui  coiulanmera  aux 
llauinics  (;lernellcs  les  catholiques  qui  n'au- 
ront pas  l'ail  de  lionnes  (vuvres,  regarde  éga- 
Icmcnl  les  juifs,  les  païens  cl  les  licTcliques; 
(pic  ceux-ci  toutefois  '  ne  seront  pas  appe- 
lés au  jujiement,  parce  qu'ils  sont  d(''j;'i  juges 
à  cause  de  leurincrëdulilé.  A  quoi  il  ajoute, 
(pie  ceux-uièniesqui  croient,  ne  doivent  point 
se  tlatter  d'obtenir  le  salut  par  leur  foi  seule, 
parce  qu'il  ue  suffit  pas  '  de  porter  le  nom 
de  chri5tien,  si  l'on  n'en  remplit  les  devoirs. 
Dans  le  trento-lroi^i^•nle,  il  fait  consister  la 
justice  parfaite,  à  ne  point  faire  aux  autres  ce 
que  nous  ne  voudrions  pas  qui  nous  fût  fait; 
à  souhaiter  à  tous  les  hommes,  ce  que  nous 
nous  souhaitons  à  nous-mêmes;  et  ;\  aimer 
pour  l'amour  de  Dieu,  non-seulement  nos 
amis,  mais  encore  nos  ennemis.  Il  ne  croit 
pas  qu'on  puisse  apjieler  '  paix  véritahlc, 
crile  qui  ne  nait  pas  de  la  racine  de  la  cha- 
rité. Parlant  dans  les  deux  suivants  sur  le 
miracle  fait  aux  noces  de  Cana,  où  l'eau  fut 
changée  en  vin,  il  dit,  que  le  plus  grand  mi- 
racle est  la  conversion  du  pécheur,  puisque 
l>ar  ce  changement  l'homme,  de  pourriture 
(pi'il  était,  est  élevé  à  l'état  des  anges,  et  tiré 
de  la  corruption  de  la  terre  pour  cire  placé 
dans  le  ciel.  Il  déclame  dans  le  treide-sixième 
contre  ceux  qni  ditféraient  leur  baptême,  pour 
continuer  à  vivre  dans  le  dérèglement.  Le 
trente-septième  contient  l'explication  de  ce 
passage  de  la  première  Epitre  aux  Corin- 
thiens :  Personne  ne  peut  poser  d'antre  fonde- 
ment que  celui  que  f  ai  mis,  quiest  Jésus-Christ; 
que  si  Von  bâtit  sur  ce  fondement  avec  de  l'or, 
lie  l'argent,  des  pierres  précieuses,  du  bois,  du 
fiin,  de  la  paille,' l'ouvrage  de  chacun  paraîtra, 
et  le  jour  du  Seigneur  déclarera  quel  il  est,  par- 
ce qu'Usera  découvert  par  le  feu.  Saint  Césaire 

'  Advertite  quia  regmim  cœlorum  nobis  prœ- 
desiinatum  est,  gehenna  autem  non  nobis  sed 
diabolo privparata  est.  Caesar.,  Ilom.  31,pag.  lit. 

'  Adjudiciumnon  ue/iiu/ij  nec  pagnni,  nec  hœ- 
relici  ,  nec  judœi  :  quia  de  ipsis  scriptum  est  : 
Qui  non  crédit  jam  jiidiciitu?  est.  Ibid. 

'  !\'ihil  prodestguod  aliquis  christianus  vocatwr 
ex  nomine,  si  hoc  non  ostendil  in  opère.  Ibid., 
l)ag.  142. 

'  Islo,  non  est  dicendn  pax  quœ  de  radiée  chari- 
tatir!  non  consurgil.  Ca>sar.,  Hom.  33,  paj,'.  159. 

■^  Illo  transitorio  igné  de  quo  divit  Aposlolus  : 


133 

dit  quo  ceux-l.'\  se  trompent  qui  s'imaginent 
qu'en  bAlissant  sur  le  fondement,  qui  est  Jé- 
sus-ChrisJ,  des  péchés  capitaux,  ces  péchés- 
là  mêmes  peuvent  être  puriliés  par  le  feu 
passagerdu  purgatoire.  Il  soidient  que  quand 
l'Apolrc  ajoute  :  (Juc  celui  dont  l'ouvrage  sera 
brûlé,  ne  laissera  pas  d'être  sauvé,  quoiqu'en 
passant  par  le  feu,  cela  ne  doit  's'entendre  (pie 
des  péchés  légers.  Il  fait  à  celte  occasion  une 
éniimération  de  ces  deux  sortes  de  péchés. 
Par  les  capitaux  il  entend  le  sacrilège,  l'ho- 
micide, l'adultère,  le  faux  témoignage,  le  vol, 
la  rapine,  l'orgueil,  l'envie,  l'avarice,  la  co- 
lère, quand  elle  dure  longtemps;  l'ivrogne- 
rie, quand  on  en  fait  une  habitude.  Tous  ces 
péchés  demandent  d'être  expiés  en  ce  mon- 
de par  une  longue  pénitence,  par  de  grandes 
aum(jnes,  et  en  cessant  de  les  commettre. 
Celui  qui  en  a  été  dominé  ne  peut  ^  être  pu- 
lilié  par  le  feu  passager.  Il  sera  tourmenté 
dans  les  llanmies  éternelles,  sans  qu'il  y  ait 
aucun  moyen  de  l'en  délivrer.  Ce  Père  suppo- 
se néanmoins  que  le  pécheur,  après  avoir  dé- 
testé ses  péchés,  aura  le  temps  d'en  faire  pé- 
nitence et  de  les  ellaccr,  soit  par  des  aumô- 
nes, soit  par  d'autres  bonnes  œuvres.  Il  met 
au  rang  des  péchés  légers,  d'excéder  au 
delà  du  besoin  dans  le  boire,  dans  le  manger, 
dans  le  parler,  de  refuser  durement  à  un  pau- 
vre importun  ,  de  dîner  étant  en  santé  lors- 
que les  autres  jeûnent,  de  se  lever  tard  pour 
assister  aux  prières  de  la  nuit,  d'user  du 
mariage  dans  d'autres  vues  que  d'avoir  des 
enfants,  de  négliger  de  soulager  les  prison- 
niers, ou  de  visiter  les  malades,  ou  de  récon- 
cilier ceux  qui  sont  en  discorde,  de  s'entre- 
tenir de  discours  fabuleux,  soitdansl'Église, 
soit  hors  de  l'ÉgUse.  Ces  péchés  et  une  infi- 
nité de  semblables,  dont  les  justes  même, 
en  ce  monde,  ne  sont  point  exempts,  sont  du 
nomljre  de  ceux  dont  l'Apcjlrc  dii  '  que  le  feu 
leur  servira  d'épreuve,  si  nous  ne  les  avons 
pas  effacés  en  cette  vie  par  les  œuvres  de  la 
pénitence,  par  les  prières,  par  les  jeûnes,  par 

Ipse  autPin  salvus  erit,  sic  tamen  quasi  per  ignem, 
non  capilalia  sed  minuta  peccata  purgantur.  Ca?- 
sar.,  Hom.  37,  pag.  185. 

^  Quicumqne  aliqua  de  istis  peccalis  in  se  domi- 
nari  cognoverit,  nisi  se  digne  anendaverit,  et  si 
habuerit  spalium,  longo  temporepœnilenliam  ege- 
rit;  et  Uirgas  ekemosynas  erogaverit  et  a  peccalis 
ipsis  abslinuerit;  illo  Iransilorio  igné  purgari  non 
poterit,  sed  œterna  illam  flamnia  sine  ullo  remé- 
dia cruciabit.  Ibid. 

'  Quidijuid  de  istis  peccntis  a  nobis  rcdcniplum 
noti  fuerit;  illo  igné  purgandum  est  de  auo  diril 


134 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


•.  IJÔ. 


&f  rm.  39| 


Serm.  «1, 
VI-  «H. 


les  aumônes,  et  surtout  en  remettant  les  of- 
fenses à  ceux  qui  ont  péclié  contre  nous.  Saint 
Césaire  veut  que  nous  travaillions  sans  '  cesse 
à  efl'acer  ces  péchés  même  léffers,  de  peur 
que  leur  grand  nombre  ne  vienne  enfin  à 
nous  précipiter  dans  l'abîme.  Comme  on  pou- 
vait lui  objecter,  qu'il  importait  peu  de  pas- 
ser parle  feu  du  purgatoire,  pourvu  que  l'on 
jouit  ensuite  de.  la  \ie  éternelle;  il  prévient 
cette  objection  et  répond  qu'elle  n'est  point 
fondée,  parce  que  le  feu  du  purgatoire  '  sera 
beaucoup  plus  difficle  à  soutenir,  que  tou- 
tes les  peines  que  l'on  peut  sentir  et  même 
s'imaginer  en  celte  vie.  Les  remèdes  qu'il 
prescrit  pour  les  péchés  légers  sont  de  les  ra- 
cheter, en  visitant  les  prisonniers,  en  récon- 
ciliant les  personnes  divisées,  en  jeûnant  les 
jours  marqués  par  l'Église,  en  lavant  les 
pieds  aux  étrangers,  en  assistaut  fi-équem- 
ment  aux  veilles,  en  donnant  l'aumône  aux 
pauvres  et  aux  passants,  en  pardonnant  à 
nos  ennemis.  Il  regarde  ces  pratiques  comme 
insuffisantes  pour  etlacer  les  pécliés  mortels, 
voulant  '  qu'on  y  ajoute  les  larmes,  les  gé- 
missements, de  longs  jeûnes,  d'abondantes 
aumônes;  qu'on  s'éloigne  de  soi-même  de  la 
sainte  table;  qu'on  passe  un  long  temps  dans 
le  deuil  et  la  tristesse,  et  qu'on  fasse  même 
une  pénitence  publique.  Il  fait  voir  dans  le 
trente-huitième  sermon,  que  la  charité  est  la 
racine  et  la  source  de  toutes  les  bonnes  œu- 
vres, et  que  d'elle  dépend  le  bon  usage  des 
biens  de  cette  vie.  Dans  le  trente-neuvième, 
il  montre  que  si  Dieu  est  miséricordieux  en- 
vers nous  dans  cette  vie,  il  nous  fera  sentir  en 
l'autre  les  ell'ets  de  sa  justice  ;  et  dans  le  qua- 
rantième ,  que  la  charité  est  la  fin  de  la  loi , 
puisque  si  l'on  a  la  charité,  l'on  possède  Dieu, 
et  qu'en  possédant  Dieu,  on  a  tout.  Il  fait 
une  fort  belle  antithèse  entre  les  biens  qui 
sont  produits  par  la  charité,  et  les  maux  qui 
sont  les  suites  de  la  cupidité  ;  en  avertissant 


Àposlolus  :  Quia  in  igné  revelabitur,  et  si  cujus 
opus  arserit  Uetrimentum  jiatietur.  Ibid. 

'  El  ideo  continuis  orationibus  et  frequenlibus 
jejuniU<  H  largioribus  eleemosynis,  el  prœcipue 
per  indiilgenliain  eorum  qui  in  nos  peccant,  assi- 
due redvmantur;  ne  forte  simul  collecta  cumulum 
faciant  el  demerganl  animam.  r.a,'sar.,  ibid. 

'  Sed  dicit  aliquis :  ^'on  pertinct  ad  me  quandiu, 
moras  habram,  si  lamen  ad  fitam  œtcrnam  per- 
renern.  Aci'io  hoc  dicit,  fraties,  quia,  ille  purga- 
torius  ignis  durior  erit,  quam  quidquid  polest  in 
hoc  sœculo  pivnarum  aut  cogitari,  aulvideri,  aut 
genliri.  lliid.,  p.ig.  18G. 

'  Pro  capitalibus  vero  crinniiibus  non  hoc  so- 


Sarm.  ii.t 
I.«I.iiO,Jl 


i«e.  m- 


les  justes  de  ne  point  présumer  de  leurs  mé- 
rites, et  les  pécheurs  de  ne  point  désespérer 
du  pardon  de  leurs  péchés,  mais  aussi  de  ne 
pas  différer  d'en  faire  pénitence. 

6.  Les  deux  discours  intitulés,  de  l'avéne- 
ment  du  Seigneur,  sont  pour  exhorter  les  fi- 
dèles de  se  disposer  à  célébrer  dignement 
le  jour  de  la  naissance  du  Saaveur ,  et  à  y 
recevoir  son  corps  et  son  sang.  D  leur  dit 
qu'ils  doivent  songer  à  orner  leurs  âmes 
d'autant  de  vertus,  «ju'ils  prendraient  de  soin 
d'orner  leurs  maisons,  et  de  se  parer  eux- 
mêmes  s'ils  avaient  à  recevoir  quekpie  roi 
de  la  terre  ;  qu'à  l'approche  de  cette  solen- 
nité comme  des  autres  de  l'année,  il  con- 
vient '  aux  personnes  mariées  de  vivre  dans 
la  continence ,  et  à  tous  de  racheter  leurs 
péchés  par  des  aumônes  ;  que  s'il  leur  est 
permis  en  ces  jours  de  fête  de  régaler  leurs 
amis  et  leurs  voisins ,  il  faut  que  ce  soit  par 
des  repas  sobres  et  modestes ,  en  sorte  qu'il 
reste  toujours  de  quoi  subvenir  aux  besoins 
des  pauvres  et  des  indigents.  L'homélie  sur 
l'Epiphanie  traite  des  dispositions  que  l'on 
doit  apporter  à  la  célébration  de  cette  fête. 

Nous  avons  trois  discours  de  saint  Césaire  smn.  tin 
sur  le  Carême.  Dans  le  premier,  il  conjure  «<W9' 
ses  auditeurs  de  se  rendre  de  bonne  heure 
pendant  tout  ce  saint  temps  aux  veilles  de  la 
nuit,  et  aux  heures  de  tierce,  de  sexte  et 
de  noue,  s'ils  n'en  sont  empêchés  ou  par 
inlirmité  ou  par  quelque  motif  qui  regarde 
l'utilité  publique ,  ou  par  quelque  raison 
importante  ;  de  ne  pas  se  contenter  des  lec- 
tiu'es  qui  se  faisaient  dans  l'Eglise,  mais  d'en 
faire  encore  de  [larliculières  dans  leurs  mai- 
sons; d'employer  les  quarante  jours  de  jeû- 
ne à  amasser  de  quoi  nourrir  leurs  âmes 
pendant  tout  le  reste  de  l'année;  de  déro- 
ber chaque  jour  quelques  heures  à  leurs  af- 
faires temporelles,  pour  ne  s'y  occuper  que 
de  Dieu.  Il  condamne  dans  le  second  le  jeu' 


lum  sufPcit;  sed  addendœ  sunt  lacrymœ,  gemitus, 
continuala  et  tongo  tempore  prolracta  jejunia, 
largiores  eleemosynm  erogandœ,  ullro  nos  ipsos 
a  communione  Ecclesiœ  renwrentes,  et  pacniteii- 
tiam  eliani  publicam  agentcs.  Ibid.,  png.  187. 

''  Qiiotidiescumque  aut  dits  natalis  Domini,  aut 
reliquœ  fe.ttivitules  advcniunt,  ante  plures  dies, 
non  solum  abinfelici  roncuhinarum  consortio,sed 
eliani  a  pro/iriis  uxoribus  abstinete.  Coesar.,  Honi. 
42,  p:if.'.  211. 

'  Tcmpns  quod  nobis  furiosus  tabula  /wrftM  so- 
lebal  auferre,  Icctio  divina  incipiat  occupare. 
CxsuT.,  nom.  45,  pag.  a.'iO. 


VI'  SIECLE. 


CHAPITRE  IX.   —  SAINT  GÉSAIUE,  ÉVÊQUE  D'AllLES. 


135 


do  cIl's  pour  lequel  on  fénioignait  trop  d'ar- 
deur, et  la  délicatesse  dans  les  nicls  ,  disant 
qu'il  no  servait  de  rien  d'avoir  jeûné  '  tout 
le  jour,  si  ensuite  on  accablait  son  âme  ,  ou 
par  un  exe^s  do  iionrrilure  ,  ou  par  des  ali- 
ments trop  délicieux.  Il  dit  dans  le  troisiè- 
me, que  nous  devons  jei"iner  de  manière  que 
nous  donnions  aux  pauvres  ce  rpie  l'on  nous 
aurait  dans  un  autre  temps  préparé  pour 
diner,  au  lieu  de  nous  en  réserver  le  prix. 
11  regarde  la  main  '  du  pauvre  qni  reçoit  des 
riches  comme  le  trésor  de  Jésus-Christ ,  qui 
met  dans  le  ciel  ce  qu'on  lui  donne,  de  peur 
qu'il  ne  périsse  sur  la  terre.  Il  ne  veut  pas 
que  ceux  qui  se  trouvent  réduits  à  la  der- 
nière pauvreté,  s'attristent  dans  l'impossibi- 
lité où  ils  sont  de  faire  eux-mêmes  Taumô- 
ne;  disant  qu'ils  en  remplissent  le  précepte 
par  la  bonne  volonté  qu'ils  ont  de  la  faire 
^7'k"û''  ^'''®  étaient  en  état.  On  voit  par  les  deux 
sermons  qu'il  a  faits  sur  les  litanies  ou  les 
trois  jours  des  Rogations,  que  cette  dévo- 
tion était  dès  lors  établie  dans  toutes  les 
églises  du  monde  ' ,  et  qu'on  les  regardait 
comme  des  jours  destinés  k  guérir  les  plaies 
de  l'âme  par  la  pénitence  et  par  la  prière. 
On  les  passait  dans  le  jeune  ',  dans  le  chant 
des  psaumes,  dans  l'oraison  et  dans  de  sain- 
tes lectures.  Le  repas  y  était  modique  ^ 
comme  en  Carême  ;  et  il  y  avait  chaque  jour 
dans  l'Église^des  assemblées  publiques  dont 
i«i,..io,sii,  personne  ne  pouvait  se  dispenser.  Des  cinq 
j'ii''scqr^'  discours  suivants  ,  il  y  en  a  deux  sur  la  fête 
des  martyrs,  un  sur  celle  des  vierges,  et  deux 
sur  la  dédicace  d'une  église,  ou  la  consé- 
cration d'un  autel.  Saint  Césaire  y  enseigne 
qu'on  peut  en  cette  vie  méiùter  la  félicité, 
mais  non  pas  la  posséder  ;  qu'on  peut  imi- 
ter non-seulement  les  martyrs ,  mais  Jésus- 


Christ  même,  en  pratiquant  les  vertus  do  pa- 
tience, de  douceur,  d'iunnilité  dont  il  nous 
a  donné  l'exemple;  que  beaucoup  do  per- 
sonnes peuvent  à  raison  de  leurs  infirmités 
s'excuser  de  jeûner,  de  veiller,  et  de  faire 
d'autres  œuvres  de  piété  comme  étant  ou 
au-dessus  de  leurs  forces  ou  de  leur  pouvoir  ; 
mais  qu'on  ne  peut  donner  d'excuse  légiti- 
me de  ne  point  aimer  Dieu,  ni  le  prochain  , 
après  le  précepte  qui  nous  en  est  fait  dans 
la  loi  ;  qu'il  ne  sert  de  rien  ;\  un  clerc ,  .'i  im 
moine,  à  une  religieuse,  d'être  chaste  de 
corps,  si  leur  cœur  est  livré  ti  l'impureté  ; 
qu'une  femme  chaste  et  humble  est  préfé- 
rable à  une  vierge  orgueilleuse;  qu'une  per- 
sonne qui  se  sent  la  conscience  '  chargée  de 
quelque  crime  doit  la  purilierpar  les  jeûnes, 
par  les  prières,  par  les  aumônes,  et  s'ap- 
procher, après  cette  préparation  ,  de  l'Eucha- 
ristie ,  n'y  ayant  pas  à  craindre  que  Dieu 
bannisse  du  banquet  éternel,  celui  qui,  pour 
la  correction  de  ses  mœurs,  s'éloigne  volon- 
tairement et  par  un  sentiment  d'humilité, 
de  l'autel  de  l'Église.  Il  était  défendu  à  ceux 
que  l'Église  excommuniait  pour  un  crime, 
de  boire  '',  de  manger,  de  parler  avec  les 
fidèles.  Mais  cette  excommunication  n'était 
point  irrévocable  ;  l'Église  recevait  dans  son 
sein  les  excommuniés,  quand  ils  avaient  sa- 
tisfait. C'était  l'usage  *  que  les  hommes  la- 
vassent leurs  mains  avant  d'approcher  de 
l'autel  pour  y  recevoir  l'Eucharistie  ;  les  fem- 
mes la  recevaient  sur  un  linge  bien  blanc 
qu'elles  tenaient  dans  leurs  mains. 

7.  Le  cinquante  -  quatrième  sermon  est 
sur  le  Symbole  et  sur  la  nécessité  des  bon- 
nes œuvres.  Saint  Césaire  le  commence  par 
des  termes  et  des  façons  de  parler  qui  ont 
beaucoup  de  rapport  au  Symbole  qui  porte 


iig. j  I. 


Serm.  6i 
r.  3»3. 


•  Nihil  prodest  tota  die  longum  diixisse  jej-w- 
iiium,  si  postea  ciboruin  suavitate  vel  niinietate 
anima  obruatur.  Ibid.,  pag.  231. 

^Maiius  pauperis]gazophylacium  esl  Christi,  qui 
quod  accipit,  ne  pereat  in  terra,  in  cœlo  reponit. 
Caesar.,  Serm.  46,  fiag.  233. 

'  In  isti^  tribus  diebtis,  quos  regulariler  in  loto 
mundo  célébrât  Ecclesia,  nullus  se  a  sancto  con- 
ventu  subducat.  Caesar.,  Serm.  XI,  pag.  297. 

'  Sine  dubio  peccalonun  suorum  vulnera  dili- 
git,  qui  in  istis  tribus  diebus  jcjunando,  orando 
et psallendo  medicamenta  sibi  spiritualia  non  re- 
quiril.  Cfesar.,  Serm.  48,  pag.  299. 

5  Conviviolanobis  eliam  quadragesimali  ordine 
prœparemus,  et  magis  legendo,  psallendo  vel 
urando.  animabus  nostris  spirituales  epiclasquam 
rorporales  requiramus.  Cœsur.,  Serw.  47,  pag.298. 


'  Vnusquisque  consideret  conscienliam  suam;et 
qiiando  se  aliquo  crimine  vulneratum  esse  cogno- 
verit,prius,  orationibus,  jejuniis  vel  elecmosynis 
studeat  mundare  conscienliam  suam  et  sic Eucha- 
risliam  prwsumat  accipcre...  Qui  eiiim  reatum 
suum  agnoscens,  ipse  se  humiliter  ab  altari  Ecclc- 
siœ  pro  emendalione  vitce  removere  voluerit,  ab 
œterno  illo  convivio  excommunicari  penitus  non 
timebit.  Caesar.,  Hom.  52,  pag.  376. 

'  Quidprojicitnr,  et  manducare  et  bibereetcum 
hnminibus  loqui  non  potest,  et  habet  spem  utite- 
rum  mertalur  ad  Ecclesiam  revocari.  Ibid. 

s  Omnes  liri  quando  ad  allare  accessuri  sunt 
lavant  manus  suas,  et  omnes  mulieres  nitida  ex- 
hibent linteamina  ubi  corpus  Christi  accipianl. 
Ibid. 


UISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Srnn.  tS| 


SiTin.  &6. 


J^eol .  -  ,  I6i 


13G 

le  nom  de  saint  Alhanase.  D  y  disting:ue 
ilaiiemcnt  les  deux  natures  en  Jésus-Christ, 
reconnaissant  qu'il  est  égal  à  son  Père  se- 
lon la  divinité,  et  moindre  que  le  Père  se- 
lon l'humanité  qu'il  a  prise  de  Marie  tou- 
jouis  vierge  avant  et  après  son  enfantement, 
cl  dont  la  vie  a  été  sans  aucune  tache  ni 
contagion  de  péché.  A  l'égard  du  Saint-Es- 
prit, il  déclare  que  nous  devons  croire  qu'il 
procède  '  des  deux,  c'est-à-dire  du  Père  et 
du  Fils.  Il  dit  aux  fidèles'  qu'ils  doivent  cha- 
que année   donner  aux  églises  et  aux  pau- 
M-es  la  dîme  de  tous  les  fniits  qu'ils  auront 
pu  recueillir.  Il  enseigne,  dans  le  cinquan- 
te-cinquième qui  est  sur  le  jugement  der- 
nier, que  les  péchés  passés  ne  nuisent  point, 
si  l'on  ne  prend  point  de  plaisir  aux  pré- 
sents; mais  il  s'explique  aussitôt  en  disant 
que  comme  il  ne  sutlit  pas  au  juste  d'être 
juste,  s'il  ne  persévère  dans  la  justice  jus- 
qu'à la  fin,  de  même  l'iniquité  ne  nuit  point 
au  pécheur,  si,  avant  demourir,  il  l'a  effacée 
ou  par  des  aumônes,  ou  par  la  rigueur  de 
la  pénitence.  L'homélie  qui  est  la  deux  cent 
cinquante-deuxième  dans  l'Appendice  est  en 
partie  de  saint  Augustin,  et  en  partie  de  saint 
'.;ésaire.  Il  établit  dans  le  cinquante-sixième 
il  nécessité  de  confesser  ses  péchés  ,  non- 
seulement  à  Dieu,  mais  encore  aux  hommes 
de  piété  et  craignant  Dieu.  Sur  ces  paroles 
de  l'iCpitre  de  saint  Jacques  :  Confessez  vos 
■unies  l'un  à  l'autre,  et  priez  l'un  pour  l'autre 
afin  que  vous  soyez  guéris,  il  dit  que  Dieu  nous 
a  ordonné  de  les  confesser,  non  qu'elles  lui 
fussent  inconnues,  mais  afin  que  les  confes- 
sant dans  ce  monde,  nous  n'en  recevions  pas 
la  confusion  dans  l'autre.  Il  réfute  l'erreur  de 
ceux  qui  rejetaient  les  péchés  des  hommes 
sur  les  constellations  ,  ou  sur  un  mauvais 
principe;  et  montre  que  quelle  que  soient 
les  attaques  du  démon,  il  est  en  notre  pou- 


voir', avec  le  secours  de  Dieu  ,  de  mépriser 
ou  d'acquiescer  au  mal  qu'il  nous  conseille. 
On  voit  par  le  cinquante-septième,   qu'on    5*™. n. 
disputait,  avec  beaucoup  d'animosité,  sur  le 
salut  de  celui  qui  meurt  aussitôt  après  avoir 
reçu  la  pénitence.  Saint  Césaire,  avant  de  dé- 
cider la  question,  distingue  trois  manières 
d'arriver  à  cette  pénitence  précipitée.  «  La 
première,  dit-il,  est,  quand  un  chrétien  ne 
commet  point  de  péchés  capitaux,  ou  qu'il  en 
fait  pénitence  aussitôt  après  les  avoir  com- 
mis, s'occupant  dans  la  suite  de  toute  sorte  de 
bonnes  œuvres,  et  rachetant  même  les  pé- 
chés légers  dans  lesquels  il  lui  arrive  de  tom- 
ber. Un  fidèle  de  ce  caractère ,  qui  meurt 
sans   avoir  auparavant   reçu  la  pénitence  , 
sort  heureusement  de  ce  monde,  parce  qu'il 
l'a  pratiquée  pendant  toute  sa  vie.  La  secon- 
de '  est  lorsqu'un  chrétien  a  commis  des  pé- 
chés légers  et  même  des  mortels,  mais  com- 
me par  ignorance  et  dans  l'espérance  d'en 
faire  pénitence,  sans  se  livrer  au  péché  avec 
dessein  de  n'en  faire  pénitence  qu'à  la  fin 
de  sa  vie  ;  s'il  la  demande  avec  de  grandes 
instances  et  beaucoup  de  gémissements  dans 
ces  derniers  moments,  fermement  résolu,  au 
cas  qu'il  revienne  en  santé,  de  passer  le  reste 
de  ses  jours  dans  les  travaux  de  la  péniten- 
ce, nous  pouvons  et  nous  devons  croire  que 
Dieu  lui  l'cmettra  ses  péchés,  selon  ce  qui 
est  dit  dans  Ëzéchiel  :  En  quelque  jour  que  le    Einin 
pécheur  se  Convertisse,  toutes  ses  iniquités  serotil 
mises  en  oubli.  La  troisième  est  celle  d'un 
homme  qui  vit  habituellement  dans  le  dé- 
règlement, espérant  que  la  pénitence  qui  lui 
sera  accordée  à  la  mort ,  ell'acera  tous  ses 
péchés.  Si  cet  homme  n'est  point  dans  une 
ferme  résolution  de  rendre  le  bien  d'autrui , 
de  pardonner  à  ses  ennemis  ,  d'effacer  ses 
fautes  par  ses  larmes  et  de  faire  d'autres  œu- 
vres de  pénitence  ,  au  cas  qu'il  survive ,  il  y 


•  Credatunusquisquefidelis  qiiod Films  œqualis 
est  Patri  secundum  divinitalem,  et  minor  est  Pa- 
trg  secundum  humanitalcm  carnis,  quant  denos- 
trn'assiinipHl,  id  est...  ex  Maria  Yirgine  quœ  vir- 
go  ante  parlum  et  virgopo^l  parium  semper  fuit, 
et  absque  conlagione  vel  macula  peccati  perdu- 
ravit...  Spirilus  vcro  Sanclus  ab  ulroque  proce- 
dens.  Cœsar.,  Hom.  54,  pas. 399. 

•  Décimas  annuis  singulis  de  omni  fruclu  quod 
colligilis  Ecclesiis  el  paupcribus  erogale.  Ibid., 
pag.  400. 

'  Dat  qvidem  ille  consilivm  ;  sed  Dec  avûciliante 
nostrum  est  rcl  eligerc,  vil  repudiare  quod  sugge- 
rit.  Cioar.,  Serm.  5fi,  pag.  416. 

•  Sccundus  moduv  csl  iupradictœ  pœnitenliœ, 


ut  eliamsi  aliquis  quamdiu  vixerit,  non  solum 
parva,  sed  forte  eliam  capilalia  commiltat  pec- 
cata;  el  lamen  mala  ipsa  ignoranler  quasi  spe 
pœnitentiœ  agat,  nec  idco  animam  suam  ad  pcc- 
cala  relevet,  ul  adillam  pœnitcntiam  se  reservet, 
et  in  Iransitu  suo  cum  grandi  humilitate  el  cor- 
dis  contrilione,  cum  rugitu  vel  gemitu  ipsam  pœ- 
nitcnliam  pelai,  et  hoc  definitis-fime  in  corde  suo 
deliberet,  ut  si  evaserit,  quamdiu  vixerit,  loto  cor- 
de el  lotis  viribus  fructuosam  pœnilenliam  agat... 
possumus  el  dcbcmus  credere  quod  ci  Dotninns 
omnia  dignelur  peccala  dimitlere,  secundum  il- 
lud  propheticum  .•PeceatoriiKjuacuniquc  die  coa- 
versiis  fiieril,  inuue  siniquitalps  ejus  oblivioni  tra- 
deutur.l'ttg.  419. 


CHAPITIIE  IX.  —  SAINT  CÉSAIRE,  HVÈQUE  D'ARLES. 


Soi  tu. 


Scrni.  60, 


[Vl"  SIÈCLE.] 

u  toute  apparence  qu'il  sera  du  nombre  do 
ceux  A  qui  Jdsus-Clirist  dira  :  Allez,  maudits, 
(liins  le  feu  éternel.  Si  un  lioininc  dispose  do 
cette  sorte,  uie  demande  la  pcnilence,  ajou- 
te saint  (.îésaire,'et  s'il  est  en  âge  de  la  rece- 
voir, je  puis  bien  '  la  lui  donner,  mais  je  ne 
puis  lui  donner  ime  entière  sécurité,  Dieu 
.«cul  connaissant  avec  (piols  sentiments  cet 
lionime  demande  la  pénitence.  » 

Les  sept  discours  suivants  traitent  aussi 
de  la  pénitence  et  de  la  rémission  des  pécliés. 
(JnoiqLie  saint  Césaire  ne  doute  pas  que  la 
pénitence  même  tardive  ne  soit  utile,  quand 
elle  est  accompagnée  de  douleur,  de  repen- 
tir, d'aumônes,  il  fait  voir  qu'il  y  a  autant  de 
danger  que  de  témérité  à  reculer  celle  que 
l'on  doit  l'aire  des  péchés  commis,  puisque 
personne  ne  peut  s'assurer  d'une  longue  vie; 
et  qu'un  grand  nombre  sont  morts  sans  avoir 
reçu  eu  ce  monde  le  remède  de  la  pénitence, 
<pi'ils  s'étaient  Haltes  de  recevoir  à  la  fin  de 
leur  vie.  Il  dit  à  ceux  que  la  grandeur  de 
leurs  crimes  fait  désespérer  du  pardon,  qu'ils 
ne  connaissent  point  la  toute-puissance  du 
Médecin  céleste.  Et  pour  leur  prouver  qu'il 
est  également  miséricordieux,  il  leur  apporte 
l'exemple  de  David,  de  Manassés  et  de  la  pé- 
cheresse de  l'Evangile,  à  qui  un  regret  sin- 
cère obtint  la  rémission  de  très-grandes  fau- 
tes. 11  ajoute  que  le  sacrilège  Achaz  aurait 
même  obtenu  le  pardon  des  siennes,  s'il  eût 
persévéré  dans  les  sentiments  d'humilité 
qu'il  témoigna  d'abord.  «  Qui  est  l'homme  , 
dit  ce  Père  à  ceux  qui  négligent  de  se  puri- 
lier  des  péchés  qu'ils  commettent  chaque 
jour,  qui  laisse  ses  chevaux  les  pieds  conti- 
imellement  dans  le  fumier?  N'avons-nous 
[)as  soin  de  nettoyer  nos  maisons  et  les  éta- 
ijles  où  nous  logeons  nos  bestiaux?»  C'est  là 
une  des  comparaisons  familières  de  saint  Cé- 
saire ;  il  en  apporte  souvent  de  semblables, 


137 

les  croyant  propres  .'i  faciliter  l'instruction 
des  peuples.  Il  les  exhorte  à  recourir  à  la 
confession  '  de  leurs  pi-ché-s,  pour  en  obte- 
nir le  pardon ,  et  airiver  au  port  ile  la  i)éni- 
tcnce,  comme  ceux  qui  se  trouvent  dans  un 
vaisseau  brisé  par  la  tempête,  recourent  à 
une  planche  pour  se  tirer  d'une  perte  inévi- 
table sans  ce  secours;  de  ne  point  se  fier' 
ni  sur  leur  Age,  ni  sur  leur  santé,  parce 
qu'on  travaille  toujours  trop  tard  à  son  salut, 
quand  on  est  incertain  de  vivre.  C'était  en- 
core l'usage  de  son  tcnqis,  que  *  les  person- 
nes des  deux  sexes  demandassent  la  péni- 
tence publique,  et  qu'elles  confessassent  leurs 
péchés  devant  toute  l'assemblée.  L  rend  grâ- 
ces h  Dieu  de  la  colère  que  les  pécheurs  té- 
moignaient dans  ces  occasions  contre  eux- 
mêmes.  Ils  paraissaient  couverts  de  ciliées, 
marquant  par  ce  vêtement  qui  est  composé 
de  poils  de  chèvre  et  de  poils  de  bouc,  qu'ils 
se  croyaient  hors  du  nombre  des  agneaux, 
c'est-à-dire,  des  tidèles.  Ce  Père  convient'' 
qu'il  était  en  leur  pouvoir  de  faire  secrète- 
ment pénitence  de  leurs  fautes;  mais  il  croit 
qu'ils  ne  demandaient  de  la  faire  en  public, 
que  parce  que,  considérant  le  grand  nombre 
de  leurs  péchés,  et  ne  se  jugeant  pas  en  état 
d'y  satisfaire  par  eux-mêmes,  ils  avaient  re- 
cours aux  prières  de  tout  le  peuple.  Deman- 
der la  pénitence  publique  ,  c'était  demander 
d'êti'e  excommunié  ;  aussi  chassait-on  de  l'É- 
glise ces  sortes  de  pénitents,  après  les  avoir 
couverts  de  ciliées.  Us  ne  demandaient  d'être 
excommuniés  que  par  ce  qu'ils  se  croyaient 
indignes  d'approcher  de  l'Eucharistie,  vou- 
lant qu'on  les  séparât  quelque  temps  du  saint 
autel,  afin  qu'ils  pussent  parvenir  avec  une 
conscience  assurée  à  l'autel  qui  est  dans  le 
ciel,  et  participer  même  en  cette  vie  au  corps 
et  au  sang  de  Jésus-Christ  après  s'être  "  pu- 
rifiés de  leurs  fautes  par  les  humiliations,  et 


S«riii.  61, 


'  Pœnitentiam  illi  darc  possum,  integram  se- 
curitatem  tiare  non  possum.  Deus  tamen  quiom- 
nium  conscientias  novit  et  imumqueinque  secun- 
dum  suum  meritum  judicabil,  ipse  scit  qua  fide 
aut  qua  iiUentione  uniini  pœnitentiam  pcliil.  Cae- 
sar.,  Ho  m.  57,  jiag.  410. 

'  Admuneo  et  contestor  til  qui  se  cognoscit  de 
littore  continenliœ,  tempestate  libidinis  in  pela- 
gum  lu.ruriœ  fuisse  jactutuin  et  castitalis  incur- 
risse  naufragiuiii,  peccatoruin  confessionem,  va- 
lut tabulam  fraclœ  nacis  velociter  appréhendât  : 
ut  per  ipsamde  abysso  ac  profundo  luxuriœ  pos- 
sit  evadere,  et  ad  portum  pœnitentiœ  perveiiire. 
C.Tsar.,  Hom.  61,  pag.  426. 

»  Kon  sanitali  credentium  csl,  non  œtati.  In  re- 


medium  salutis  suœ  semper  tardus  est,  qui  vilœ 
suœ  incertus  est.  Ibid.,  pag.  .127. 

'  Quotiescuwque  aliquem  de  fratribusvel  soro- 
ribus  nostris pœnitentiam  publiée  videmus  petere, 
magnam  in  nobis  ipsis  Deo  inspirante  compunc- 
tionem  divini  limoris  possumus  et  debemus  ac- 
cendere.  Cxsav.,  Hom.  62.  pag.  427. 

^  Et  ille  quidem  qui  pœnitentiam  publiée  acce- 
pit,  poterat  eam  secretius  agere  :  sed  credo  con- 
siderans  mullitudinem  peccatorum  suorum  videt 
se  contra  tam  gravia  mala  solum  non  passe  suffi- 
eere  ;  ideo  ailjutorium  totius popuU  cupit  expetere. 
Ibi.i. 

''  Et  hoc  attendue  qund  qui  pœnilenliam  petit, 
excowwmicari  se  suppUcat.  Denique  ubi  accepit 


138 


HISTOniE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


S«nn, 


Sens 
|«g.  »IJ. 


par  la  soustraction  de  ces  divins  mystères. 
Pendant  le  temps  de  leur  pénitence,  ils  s'abs- 
tenaient de  vin  et  de  chair,  et  ils  ne  devaient 
pas  même'  manger  de  viande  après  leur  ré- 
conciliation; mais  se  contenter  de  légumes, 
d'herbes  et  de  petits  poissons,  soit  lorsqu'ils 
mangeaient  dans  leurs  maisons,  soit  ailleui-s. 

"'  Ces  crimes  soumis  à  la  pénitence  publique, 
étaient  l'homicide,  le  faux  témoignage  et  le 
parjure,  les  sortilèges,  les  divinations  et  l'im- 

"•  pudicité.  Certaines  personnes  qui  se  persua- 
daient que  pour  aller  au  ciel  il  suffisait  de  ne 
point  faire  de  mal,  disaient  quelquefois  qu'el- 
les souhaitaient  d'être  trouvées  telles  à  la  mort 
qu'elles  étaient  sorties  des  eaux  du  baptême. 
Saint  Césaire  ne  disconvient  pas  que  celui- 
là  ne  soit  sauvé  qui  meurt  aussitôt  après  son 
baptême ,  sans  avoir  eu  le  temps  de  faire  de 
bonnes  œuvres;  mais  il  soutient*  qu'il  ne 
suffit  pas  à  celui  qui  a  vécu  plusieurs  années 
depuis  son  baptême,  de  n'avoir  point  fait  de 
mal,  et  que  c'est  pour  lui  un  grand  mal  de  n'a- 
voir point  fait  de  bien  en  ayant  eu  le  temps, 
et  de  n'avoir  pas  fait  de  progrès  dans  la  vertu. 
(1  Le  baptême',  dil-il,  a  évacué  en  nous  tous 
les  maux,  mais  nous  devons,  en  agissant  avec 
la  grâce  de  Dieu ,  nous  remplir  de  tous  les 
biens,  de  peur  que  contents  du  sacrement  du 
seul  baptême,  sans  nous  occuper  des  bonnes 
oeuvres,  l'esprit  immonde  qui  a  été  cliassé  de 

'■'•  nous  par  la  grâce  de  Jésus-Christ,  ne  revien- 
ne, et  nous  trouvant  vides  de  bonnes  œuvres 
n'amène  avec  lui  sept  esprits  plus  méchants 
que  lui,  et  que  le  dernier  état  de  cet  homme 
ne  devienne  pire  que  le  premier.  » 

'^■,  8.  Le  soixante-cinquième  discours  traite  de 
la  foi.  D'après  saint  Césaire  elle  tire  son  nom 


de  faire,  parce  qu'elle  est  le  soutien  et  la 
base  de  toutes  les  choses,  soit  divines,  soit 
humaines.  Pour  qu'elle  soit  entière,  elle  doit 
renfermer  la  croyance  de  l'accomplissement 
des  promesses  et  des  menaces  de  Dieu.  Mais 
elle  n'est  vraie  en  nous  que  lorsque  nous 
accomplissons  par  nos  œuvres  ce  que  nous 
avons  promis  de  vive  voix.  En  vain  dirions- 
nous  que  nous  croyons  ce  que  Dieu  nous  ap- 
prend de  la  béatitude  et  des  supplices  de 
l'autre  vie,  si  nous  ne  faisions  nos  efforts 
poui'  mériter  la  vie  et  éviter  la  mort  éter- 
nelle. L'activité  de  notre  foi  doit  paiaitre 
surtout  dans  l'accomplissement  des  promes- 
ses que  nous  avons  faites  dans  le  baptême. 
Ou  nous  y  a  demandé  '  si  nous  renoncions 
au  diable,  à  ses  pompes  et  à  ses  œuvres.  Et 
nous  avons  répondu,  nous  ou  nos  parrains, 
si  nous  étions  encore  enfants,  que  nous  y  re- 
noncions. Mais  si  nous  manquons  à  de  telles 
promesses,  peut-on  compter  que  nous  gar- 
derons celles  que  nous  faisons  aux  hommes? 
Le  prêtre  présentait  ^  à  celui  que  l'on  devait 
baptiser  un  papier  qui  contenait  la  formule 
des  renonciations  pour  le  souscrire  ;  ce  qu'il 
faisait  après  avoir  répondu  qu'il  renonçait  au 
démon,  à  ses  pompes  et  à  ses  œuvres.  Saint 
Césaire,  après  avoir  montré  dans  le  soixan- 
te-sixième, qu'il  ne  sert  de  rien  de  porter  le 
nom  de  chrétien,  si  l'on  n'en  remplit  les  de- 
voirs, les  détaille  en  ces  termes  :  «  Soyez  en 
paix  avec  votre  prochain,  et  travaillez  à  la  ré- 
tablir entre  ceux  qui  sont  en  discorde.  Fuyez 
le  mensonge,  évitez  lo  parjure  comme  la 
mort  éternelle.  Faites  l'aumùne  aux  pauvres 
suivant  vos  facultés.  Portez  "  vos  otirandes  à 
l'autel  pour  y  être  consaci'ées  :  car  un  hom- 


Sarm  . 


pœnitentiam,  cooperlus  cilicio  foris  ejicitur.  Ideo 
enim  se  excoinmunieari  rogat,  quia  ad percipierv- 
dam  Eucharistiam  Domini  indignum  esse  se  jw- 
dicat.  El  proplerea  aliquamdiu  se  ab  isto  altari 
alienum  vuU  fieri,  ut  ad  illud  altare  quod  in  cœlo 
est  inereatur  cinn  secura  conscientia  percenire. 
Propterea  se  a  communione  corporis  et  sanguinis 
Christi  quasi  reum  et  .impium  cuin  grawli  rêve- 
rentia  vult  removeri,  ut  per  ipsam  humilitatein 
tandem  aliquando  ad  communionein  inereatur 
sacrosincti  altaris  accedere.  Csesar.,  Hom.  62, 
pag.  428. 

>  Etian  reconciliatus  pœnitens,  ubicumque,  aut 
insuo,  aut  in  aliéna  convivio,  olera,  aut  legumina, 
aut  pùtciculos  invenirepotuerit,  aliam  carnem  non 
débet  accipere.  Ibid.,  pag.  429. 

'  Ipsi  soli  sufjlcit  talem  esse  qualis  de  baptismi 
sacrainento  processil,  qui  statiin  post  acceptum 
baptismum  de  hac  luce  migraveril,  nnn  habuit 
spnliun  in  quo  se  bonis  operibus  exerceret  ;   ilte 


vero  qui  longutn  tempus  Vivendi  et  cetatem  passe 
bene  operandi  habuit,  non  sufficit  ei  otiosum  esse 
a  malis,  si  eliam  a  bonis  volueril  esse  otiosM. 
CiEsar.,  Hom,  64,  pag.  452. 

'  Per  bapti-iinuin  vacuati  sumus  omnibus  ma- 
lis ;  sed  Dei  gratia  bene  agenda  debemus  repleri 
oinnibui  bonis.  Ibid. 

'  Interrogamur  in  baptismo  ulrum  abrenuntie- 
vius  diabolo,  pompis  et  aperihus  ejus:  tt  abre- 
nuntialuros  nos  voce  libéra  respondcmus  :  quud 
quia  infantes  per  se  minime pro/itcri possiinl,  pa- 
rentes ipsorumpro  eis  fidejussores  existunt.  Serin. 
65,  pag.  431. 

'  Quando  inlerrogatus  est  :  Abrenuntias diabolo, 
pompis  et  operibus  ejus .'  Tune  ei  sacerdos  subs- 
cribendum  pactum  obtulit.  (Jun)tdo  aulem  respon- 
dit  :  Àbrenunlio,  tune  subscnpsil.  Cajsar.,  Serm. 
65,  pag.  434. 

'  Anie  omniasecundum  vires  eleemosynas  pau- 
ptribus  exhibcle:  ohlationes  quw  in  allario  con~ 


CHAPITRE  IX.  —  SAirW  CKSAIHK,  !■  VÈQUE  IVAIILES. 


[VI"  SIÈCLE.] 

me  doit  roiipir  do  communier  de  l'ollVando 
il'aulrui,  quand  il  peut  en  fournir  lui-môme. 
Que  ceux  qui  sout  pu  pouvoir  fournissent  des 
cierges  ou  de  l'huile  pour  les  lumières.  Sa- 
chez par  cœur  le  Symbole  et  l'Oraisou  domi- 
nicale :  apprenez-les  à  vos  enfants.  Sachez 
que  vous  ii'pondrez  h  Dieu  de  ceux  que  vous 
avez  levés  des  fonts  du  baptême.  C'est  ])our- 
quoi  ayez-en  un  soin  égal  ù  celui  que  vous 
devez  avoir  de  vos  propres  enfants  ;  repre- 
nez-les, corrigoz-les,  afin  qu'ils  vivent  sobre- 
ment, chastement  et  avec  piété.  Vivez  vous- 
mêmes  de  façcm  que  vos  enfants,  en  vous 
imitant,  aillent  au  ciel  et  non  en  enfer.  Que 
ceux  qui  sont  préposés  pour  juger  des  dilli- 
cultés  et  des  procès,  le  fassent  avec  équité, 
qu'ils  ne  prennent  point  de  présents  pour 
opprimer  l'innocent.  Que  nul  ne  s'enivre,  et 
que  celui  qui  invite  un  antre  ;\  manger  ne  le 
presse  point  de  boire  au  deh^i  du  besoin,  de 
peur  qu'il  ne  perde  son  àmc  et  celle  de  celui 
qu'ila  invité.  Venez  à  l'église  chaque  diman- 
che. Si  les  malheureux  Juifs  observent  le 
sabbat  avec  tant  d'exactitude,  qu'en  ce  jour 
ils  ne  font  aucune  œuvre  terrestre  :  à  plus 
forte  raison  les  chrétiens  doivent-ils,  le  jour 
du  dimanche,  vaquer  à  Dieu  seul,  et  venir  à 
l'église  pour  le  salut  de  leurs  âmes.  Priez-y 
pour  vos  péchés,  n'y  causez  pas,  écoutez  avec 
attention  les  divines  lectures.  Rendez  aux 
églises  la  dîme  de  vos  fruits.  Que  celui  qui 
était  superbe  devienne  humble;  que  celui  qui 
volait  commence  à  donner  aux  pauvres  de  sa 
propre  substance.  »  Il  exhorte  ses  auditeurs  à 
abolir  entièrement  les  restes  d'une  supersti- 
tion païenne,  appelée  du.  petit  cerf,  qu'il  avait 
déjà  détruite  lui-même  en  bonne  partie  dans 
Arles  ;  mais  il  se  plaint  de  ce  qu'ils  en  prati- 
quaient une  autre,  qui  était  de  s'abstenir  de 
tout  travail  le  jeudi,  en  l'honneur  de  Jupiter, 
tandis  qu'ils  ne  faisaient  peut-être  aucune 
difficulté  de  travailler  le  dimanche. 
sem,  67,  Le  sermon  soixante-septième  est  sur  la  dis- 
r'ï.  138.  tinction  des  bons  et  des  mauvais  chrétiens. 
C'est  à  peu  près  la  même  chose  que  le  pré- 

secrentur  offerte.  Erubescere  débet  homo  idoneus 
si  de  aliéna  otHatione  communicaverit.  Qui  pos- 
sunt  aul  cerenlas  aut  nienm  qund  in  cicindilibns 
mittatur,  exibeanl.  Symbolum  vel  Oraiionem  do- 
minicam,  et  ipsi  lenete,  et  filiis  vestris  ostendite. 
Filins  quos  in  baptismo  excipitis,  sritote  vos  fide- 
jussores  pro  ipsis  apud  Deum  e.rtitisse.  Et  ideo 
tam  illos  qui  de  iwbis  nati  sunt  quam  illos  quos 
de  fonte  excipitis  semper  casliqate  atque  corri- 
gile,  ut  caste,  juste  et  sobrie  vivaiit....  Omni  die 
dominico  ad  ecclesinm  cnnrmite,  %>,.  ecclesia  slan- 


13'J 


cc'dcnl.  Le  soixante-huitième  est  adressé  aux  ^,^_^°^^-  "• 
compétents,  c'est-à-dire  à  ceux  qui  deman- 
daient le  l)apl6me.  Il  veut  qu'ils  s'y  prépa- 
rent on  pai-douiKuit  à  leurs  ennemis,  eu  res- 
tituant le  bien  d'autrui,  en  faisant  pénitence 
de  leurs  péchés,  en  usant  très-sobrement  de 
vin,  et  par  la  pratique  de  la  vertu.  Il  dit  à 
ceux,  qui  devaient  les  lever  des  fonts  du  bap- 
tême, de  les  engager  à  bien  vivre  et  par  leurs 
exemples  et  par  leurs  paroles  ;  puisqu'ils 
contractaient  pour  eux  un  pacte  avec  Jésus- 
Cluistdans  le  sacrement  de  baptême,  par  le- 
quel ils  promettaient  qu'ils  renonceraient  au 
d(''mon,  h  ses  pompes  et  à  ses  œuvres.  Il  y  a  sotm. 00,70, 
huit  discours  sur  la  charité  et  l'amour  cjue  7sJ  7'6,  'p.g'. 
nous  nous  devons  mutuellement,  même  a 
nos  ennemis.  On  y  trouve  plusieurs  endroits 
tirés  de  saint  Augustin.  L'auteur  donne  pour 
exemples  de  l'amour  des  ennemis  dans  l'An- 
cien Testament ,  le  patriarche  Joseph  qui 
combladebiens  et  de  caresses  ceux  qui  avaient 
voulu  le  mettre  à  mort;  le  roi  David,  qui  ne 
voulut  point  tirer  vengeance  de  son  ennemi 
qui  l'avait  maudit  en  face.  Il  dit  à  ceux  qui 
regardaient  l'amour  des  ennemis  au-dessus 
de  leurs  forces,  et  qui  ne  pouvaient  suppor- 
ter les  injures,  de  jeter  les  yeux  sur  les  tour- 
ments atroces  que  tant  d'hommes,  tant  de 
femmes,  tant  d'enfants  et  tant  de  jeunes  fd- 
les  délicates  ont  endurés  pour  le  nom  de  Jé- 
sus-Christ. Il  enseigne  '  que  l'amour  des  en-  p^,  ,,-2. 
nemis  n'est  pas  un  simple  conseil,  mais  un 
précepte  dont  personne  ne  peut  se  dispen- 
ser; que  pour  s'en  rendre  la  pratique  facile, 
il  ne  faut  que  se  souvenir  que  Dieu  veut  bien  ^.._ 

nous  pardonner  nos  fautes,  encore  qu'elles 
soient  incomparablement  plus  grandes  que 
celles  que  les  hommes  commettent  contre 
nous.  Il  est  vrai  que  les  plus  grands  saints, 
comme  Moïse  et  Élie,  ont  quelquefois  vengé  »i"- 
des  injures  ;  mais  c'étaient  des  injures  faites 
à  Dieu  et  non  à  eux-mêmes;  et  ils  ne  les  ont 
vengées  que  conduits  par  l'esprit  de  Dieu, 
qui  les  animait.  Saint  Césaire  ^  croit  coupa- 
bles d'un  grand  péché  ceux  qui,  se  trouvant 

tes  nolite  verbosari,  sed  lectiones  divinas  patien- 
ter audite....  et  décimas  de  fructibus  vestris  ec- 
clesiis  redditr.  Caesar.,  Serm.  66,  pag.  136. 

'  Dominus  in  Evangelio,  ut  inimicos  diligere  de- 
beamus,  non  dédit  co)isilium,  sed  prœceptum.  Cae- 
sar., Serm.  73,  pag.    453. 

^  Scivit  Spiritus  Sanctus  nonnuUos  homines  qui 
cum  ad  aliquos  honores  aul  divitias  undecumque 
acquisitas  pervenerint,  ila  parentes  suos  despi- 
ciunt  ut  eos  nec  vider e  dignenlur.  Quod  si  fece- 
rinl,  non  solum  peccatum,  sed  eliam  grave  cri- 


110 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURiS  ECCLÉSIASTIQUES. 


dans  l'abondance  ou  élevés  aux  honneurs, 
méprisent  leurs  parents  pauvres,  jusqu'à  re- 
fuser de  les  voir.  Il  veut  que  les  parents  pau- 
vres soient  les  premiers  dans  la  distribution 
des  aumônes.  La  raison  qu'il  en  donne  est 
(jiie,  si  nous  ne  donnons  pas  aux  autres  pau- 
vres, d'autres  leur  feront  la  charité;  mais 
que  si  nous  ne  la  faisons  pas  à  nos  pauvres 
jiarents,  il  est  ditlicile  que  d'autres  la  leur 
strm.1t,  fassent.  Il  prêcha  le  sermon  sur  l'obligation 
'■  ■'"■  de  payer  les  dîmes  des  fruits,  quelques  jours 
avant  la  Saint-Jean.  Il  les  regarde  comme  ' 
dues,  et  appelle  envahisseurs  du  bicnd'autriii 
ceux  qui  refusent  de  les  pa^-er.  Par  un  reste 
de  superstition  païenne,  on  avait  en  coutume 
à  Arles  de  se  laver  le  matin  ou  la  nuit  dans 
les  fontaines,  ou  dans  des  marais,  ou  dans 
des  Heures,  le  jour  de  la  Saint -Jean.  Saint 
Césaire  défend  cet  usage.  Il  s'élève  aussi 
contre  les  chansons  profanes,  disant  qu'il  est 
indécent  de  proférer  des  chants  dissolus  et 
amoureux  de  la  même  bouche  qui  reçoit  le 
corps  de  Jésus-Christ. 

y.  Saint  Boniface,  évêquedeMayence,  cite 
le  discours  soixante-dix-huitième  sous  le  nom 
de  saint  Augustin.  Mais  le  style  fait  voir  qu'il 
est  de  saint  Césaire.  L'auteur  y  traite  des  au- 
gures et  de  diverses  autres  superstitions  païen- 
nes, sur  les  jours  que  l'on  sortait  de  sa  maison 
on  qu'où  y  revenait.  «  Sans  vous  arrêter,  dit- 
il,  ù  de  semblables  observations,  contentez- 
vous  toutes  les  fois  que  la  nécessité  vous  obli- 
ge de  voyager,  de  vous  siguer  au  nom  de  Jé- 
sus-Christ, et  de  réciter  ou  le  Symbole  ou  l'O- 
raison dominicale.  Après  quoi  mettez-vous  en 
cliemin  avec  confiance  que  Dieu  vous  aide- 
ra, n  II  dit  que  quelques  bouues  œuvres  que 
l'on  fasse,  elles  sont  inutiles  au  salut  de  ceux 
qui  ajoutent  foi  aux  augures  et  aux  autres 
divinations;  qu'il  n'est  pas  permis  aux  chré- 
tiens de  prier  sur  les  foataines,  ni  d'avoir 
dans  leurs  campagnes  des  autels  ou  des  ar- 
bres où  l'on  vienne  faire  des  vœux;  que  ce 
n'est  pas  un  moindre  mal  de  n'oser  brûler  ces 
arbres  après  qu'ils sout  tombés;  que  c'en  est 
un  bien  plus  grand  de  manger  des  viandes 


offertes  aux  idoles;  qu'en  vain  celui  qui  en 
mange  voudrait  s'excuser  en  disant  qu'il  s'esl 
auparavant  muni  du  signe  de  la  croix; 
que  c'est  comme  s'il  faisait  le  signe  de  la 
la  croix  sur  sa  bouche,  et  qu'il  s'enfonçât  une 
épée  dans  le  cœur.  Il  invective  ensuite  contre 
de  semblables  abus  dans  le  soixanle-dix-neu-  ^' 
vième  discours,  principalement  contre  cer- 
tains remèdes  superstitieux  que  les  femmes  se 
communiquaient  les  unes  aux  autres  pour  la 
guérison  de  leurs  enfants.  «  Il  serait  beau- 
coup mieux  *,  leur  dit-il,  et  aussi  plus  salu- 
taire de  courir  à  l'église  dans  ces  maladies 
dangereuses,  d'y  recevoir  le  corps  et  le  sang 
de  Jésus-Christ,  de  s'oindre  elles-mêmes  et 
leurs  enfants  de  l'huile  bénite,  qui,  selon 
l'apùtre  saint  Jacques,  leur  procurerait  la  ré- 
mission de  leurs  péchés  et  la  santé  du  corps.  » 
Les  sermons  soixante-dix-neuvième  et  qua-  .«r 
tre-vingtième  tendent  i\  empêcher  le  peuple  de  '' 
sortir  de  l'église  après  la  lecture  de  l'Évangile 
et  avant  la  fin  de  la  célébration  des  mystères. 
Les  auteurs  de  la  vie  de  saint  Césaire  rap- 
portent qu'ayant  vu  un  jour  quelques-uns  des 
fldèles  sortir  de  l'église,  avant  qu'il  eût  prê- 
ché, il  les  arrêta  en  leur  disant  que  lorsqu'ils 
seraient  devant  le  tribunal  de  Jésus-Christ, 
il  ne  leur  serait  point  permis  de  se  conduire 
ainsi  ;  et  que  pour  couper  court  à  cet  abus, 
il  ordonna  de  fermer  les  portes  de  l'église 
aussitôt  après  qu'on  avait  lu  l'Évangile.  Le 
concile  d'.\gde,  que  ce  saint  présida,  défen- 
dit, par  un  canon  exprès,  aux  laïques  de  sortir 
de  l'église  avant  d'avoir  reçu  la  bénédiction 
de  l'évêquc  à  la  fin  de  la  messe.  Saint  Césai- 
re eulreprend  donc,  dans  ces  deux  homé- 
lies, de  montrer  que  les  chrétiens  ne  devaient 
point  sortir  de  l'église  les  jours  de  diman- 
ches '  et  de  fêtes  solennelles,  avant  que  l'on 
eût  fini  la  célébration  des  mystères.  L'abus 
n'était  pas  général.  Ceux  qui  avaient  de  la 
piété  restaient  jusqu'à  la  fin;  mais  d'autres, 
et  en  assez  grand  nombre,  peu  attentifs  au 
salut  de  leur  âme,  sortaient  au  moment  que 
l'on  avait  fini  les  saintes  lectures.  11  y  eu  avait 
même  qui  s'amusaient  à  causer  pendant  ce 


«««11», 


men  se  aimisixse  nondiibitent....  Si  quis  ergo  idn- 
nexis  est,  si  aliqiios  parentes  habueril  pauperes  : 
ipsis  prius  necessaria  Iribital,  et  sic  iiidigenlibus 
extraneis  elcemosi/n  im  [aciat  :  quia  reliquis  pati- 
perihus  si  lit.  non  dederUt.  dabit  niiiis  :  parentibus 
vero  tuis  pauperibiis.  si  tu  niliil  largitus  fueris, 
difficile  est  ut  nlius  largialur.  Cîesar.,  Serm.  76, 
ing.  458. 
'  Decimœ  ex  debilo  requirunlur,  et  qui  cis  dure 


nolueril  res  aliénas  invasil.  Cœsar.,  Serm.  77, 
pas.  IGI. 

'  (Jiiantum  reclius  et  snlnbrius  eral  ul.  ad  ec- 
clesiam  currerent.  corpus  et  sanguinem  Christi  ac- 
ciperent,  oleo  ben^dielo  se  et  suos  fidctiter  perunge- 
rent;  elsccundum  quodJacobus  aposlolus  dicil,  non 
solum  sanitalem  corporum,sedeliamremissinncm 
accipereni  prccalorum.  dî-'ar.,  Ilom.  79,  ptifr.  405. 

'  Kngo  vos,  fratres  ckarissinii,  ut  quoliens  aul  in 


ciiAi'iTiu-:  i\.  —  SAINT  ciisAïui':,  kvêquh:  D'AHLES. 


[VI*  SlfcCLE.J 

temps,  et  qui,  non  contents  de  ne  pas  écouler 
eux-môines  co  qu'on  lisait ,  cmiiôdiaiLMit  les 
antres  de  proliter  de  la  lecture.  Ils  se  se- 
raienl  rendus  imiius  cdupahles  eu  s'abstenunt 
de  l'assemblée.  Le  saint  leur  fait  renianjuer 
que  la  messe  ne  consiste  pas  dans  ki  lecture 
des  livres  saints,  mais  dans  l'oblation  des 
dons,  et  dans  la  consocralinn  du  corps  et  du 
sang  du  Seigneur.  nOn  peut  lire,  ilil-il, dans 
les  maisons  particulières  les  écrits  des  pro- 
pliMcs,  des  apôtres,  des  dvangélislcs,  ou  les 
entendre  lire  par  d'aulres,  mais  on  ne  peut 
voir,el  entendre  la  consécrationdiicorpsetdu 
sang  du  Sauveur  que  dans  la  maison  de  Dieu. 
Donc,  celui  qui  veut  célébrer  la  messe  en  en- 
tier i'i  l'avantage  de  son  âme,  doit  demeurer 
dans  l'église,  le  coi'ps  dans  une  postiirehum- 
ble,  et  le  cœur  contrit,  jusqu'à  ce  que  l'on 
ait  récité  l'Oraison  dominicale,  et  que  l'on 
ait  donné  la  bénédiction  au  peuple.  Si  pres- 
que tous  sortent  après  la  lecture  de  l'Évan- 
gile, ;\  qui  le  prêtre  dira-t-il  :  Elevez  vos 
cœurs  ?  Comment  cexxx  qui  sont  sortis  et  qui 
sont  de  corps  et  d'esprit  au  milieu  des  places 
publiques ,  répondront-ils  qu'ils  ont  leurs 
cœurs  élevés  vers  le  Seigneur?  ou  comment 
s'écrieront-ils  avec  une  crainte  mêlée  de 
joie  :  Saint ,  saint ,  saint ,  béni  suit  celui  qui 
vient  au  nojn  du  Seigneuri  ou  quand  on  réci- 


l/il 


tera  l'Oraison  dominicale,  qui  est-ce  qui  dira 
avec  humilité  et  vérité   :  /Icmetlez-nous  nos 
dettes,  comme  nous  les  remettons  à  nos  débiteurs'! 
Si  ceux  mômes  qui  demeurent  dans  l'église, 
lorsqu'on  fait  celle  piièr(;,  ne  remcttcnl  pas 
les  dettes  h  leurs  déijiteurs,  ils  trouvent  dans 
cette  oraison  non  un  remède,  mais  un  juge- 
ment contre  eux,  en  faisant  le  contraire  de 
ce  qu'ils  tlisent,  et  ne  cessant  de  rendre  le 
ma!  pour  le  mal  ;  en  vain  ils  crient  au  Sei-  ' 
gneur  :   Délivrez-nous  du  mal.  Si  ceux  qui, 
étant  dans  l'église  lors  de  la  récitation  de 
celte  prière,  se  trouvent  en  danger  de  n'en 
point  obtenir  l'etl'et,  parce  qu'ils  ne  veuleiil 
pas  accomplir  ce  qu'ils  ont  promis,  que  pen- 
seront d'eux-mêmes  ceux  qu'une  insalialile 
cupiditi's  ou  que  l'amour  de  ce  siècle  rctical  si 
enlrelacés,  qu'il  ne  leur  permet  pas  de  rester 
une  beure  entière  dans  l'église?  Ainsi,  qu'au- 
cun de  vous  '  n'en  sorte  qu'après  la  fin  des 
divins  mystères.  Celui  qui,  sans  l'attendre  ', 
ne  craint  et  ne  rougit  pas  d'en  sortir,  se  rend 
coupable  de  deux  fautes;  la  première,  en 
abandonnant  les  saints  mystères  ;  la  secon- 
de, en  attristant  le  prêtre  qui  les  célèbre,  et 
qui  s'intéresse  pour  lui.  La  bénédiction  '  que 
l'on  y  donne  au  peuple  n'est  pas  d'un  hom- 
me, quoiqu'elle  se  donne  par  son  ministère  ; 
et  on  doit  la  recevoir,  avec  autant  de  reron- 


die  dominico,  aul  in  aliis  majoribiis  festivita- 
tibus  missœ  fiunt.  nullus  de  ecclesia  discedat,  do- 
uée divina  mysteria  compleantur.  Et  quamvis 
multi  sint,  de  quorum  fuie  et  devotione  gaudeamus, 
sunt  lamcn  plures  de  sainte  animœ  suœ  minus 
cogitantes,  gui  leclis  dieinis  lectionibus,  statim 
de  ecclesia  foris  exeunl,  cum  tanien  etitim  dum 
ipsœ  lectioncs  leguntur  aliqui  ex  illis  ita  otiosis 
et  sœcularibus  fabulis  occupanlur,  ut  eas  necipsi 
audianl,  nec  alias  avdire  permillant.  Isli  laies 
minus  a  nabis  culparentur,  si  ad  ecclcsiam  non 
venirent.-.  Si  diligenter  attenderitis,  cognoscctis 
quia  non  tune  fiunt  missœ,  quando  divinœ  lectio- 
ncs in  ecclesia  recitantur ,  sed  quando  munera 
offerunlur,  et  corpus  vel  sanguis  Damini  canse- 
cratur.  Aam  lectianes  sive  praphelicas,  sive  apos- 
laiicas,  sive  cvangelicas  eliam  in  domibus  veslris 
aut  ipsi  légère,  aul  alias  legentes  audire  potestis: 
consecrationem  vero  corporis  vel  sanguinis  Do- 
mini  non  alibi  nisiindoino  Dei  audire,  rei  videre 
poteritis.  Ideo  qui  vull  missas  ad  inlegrum  cum 
lucro  aniniœ  tuœ  celebrare,  usquequo  Oratio  do- 
minica  dicatur  et  benediclio  populo  detur,  humi- 
liato  corpore  et  coinpunclo  corde  se  débet  in  ec- 
clesia contiuere.  Cum  enim  maxima  pars  papuli, 
imo  quod  pejux  est,  pêne  omnes,  recitatis  lectioni- 
bus, exeunt  de  ecclesia,  cui  dicturus  est  sacer- 
dos:  Snrsuui  corda?  Àut  quomodo  sursum  seha- 
bere  caria  re^jiondere  possunt,  qui  deorsum  in 
plaleis  et  corpore  siuiul  et   corde  discedunt?  Vel 


qualiter  cum  tremore  simulel  gaudio  clamahanl: 
Sanctus,  sauctiis,  panctiis,  benedictus  qui  veuit  in 
nomine  Dornini?  Àut  quando  Oralio  dominicu  di- 
citur,  quis  est  qui  humiliter  et  veraciter  claniet: 
Dimitte  uobis  débita  nostra  sicut  dimittiiuus  debi- 
toribus  nostris?  Cum  enim  eliam  illi  qui  in  ecrle- 
sia  se  continent,  si  non  dimiserint  débita  debilari- 
bus  ,  ad  judicium  magis  quam  ad  remedium  ora- 
tionem  dominicam proferunt  ex  arequam  implore 
non  probantur  in  opère  :  et  sine  causa  dieunt: 
Libéra  uos  a  malo.  Si  ergo  eliam  illi  periclilun- 
tur[qui  intus  su)it  si  implere  noluerinl  quod  pro- 
millunt,  quid  de  se  cogitant  illi  quos  aut  insn- 
tiabilis  cupiditas  aut  amor  sœculi  istius[ita  deli 
net  implicatas  ut  eos  unius  horœ  momento  sUire 
in  ecclesia  non  permittat?  Caesar..  Ilom.  80,  [iif. 
468. 

'  Nullus  ex  vobis  de  ecclesia  discedat,  7iisi  mm 
divina  mysteria  ad  inlegrum  fuerint  celebrata. 
Ibid. 

5  Qui  de  ecclesia  non  perexspectatis  missis  cita 
discedere  nec  metuit ,  nec  rubtscit;  dupliciler  se 
peccare  non  dubitet,  dum  divina  mysteria  deserit. 
et  sacerdatem  pro  se  sollicitum  contristat  et  de!<- 
picit.  Cfesar.,  Ham.  81,  pag.  470. 

'  Benediclio  vobis  non  ab  hamine  sed  per  honii- 
nem  datur,  grato  et  pio  animo ,  humiliato  cor- 
pore, et  corde  compuncto,  rorem  divir.œ  bencdic- 
tionis  accipile.  Ibid.,  pag.  471. 


142 


pic 


naissance  que  de  piété,  le  corps  humilié  et 
le  cœur  contrit,  comme  une  rosée  de  la  bé- 
nédiction divine,  n 

Saint  Césaire  exhorte  ses  auditeurs  à  faire 
part  à  leurs  voisins,  et  à  leurs  parents  qui 
n'auraient  pu  se  trouver  à  léglise,  des  ins- 
tructions qu'ils  y  ont  reçues,  disant  que  com- 
me il  serait  cou|ial)le  s'il  négligeait  de  les 
instruire ,  ils  le  seront  aussi  s'ils  négligent 
de  communiquer  aux  autres  ce  qu'ils  ont 
serm.gi,  appris.  Le  sermon  quatre-vingt-deuxième  est 

*^'""  une  instruction  sur  la  prière.  «  Ce  que  nous 
devons,  dit-il,  demander  à  Dieu  en  toultemps, 
pour  nous  et  pour  tous  les  autres,  est  que 
Dieu  daigne  nous  accorder  ce  qu'il  sait  être 
profitable  à  notre  ûme.  Mais  avant  toute  au- 
tre prière,  nous  devons  lui  adresser  l'Oraison 
dominicale,  n'étant  pas  douteux  qu'il  n'exau- 
ce une  prière  qu'il  a  lui-même  instituée,  w  H 
est  à  remarquer  dans  la  vie  de  saint  Césaire 
qu'il  obligea  les  laïques  à  chanter  à  haute 
voix  des  psaumes  et  des  hymnes,  <i  l'imita- 
s«rn.  8j,  tien  des  clercs.  Il  fut  longtemps  à  établir  cet 
usage  ;  mais  enfin  il  en  vint  à  bout,  comme 
i      m,i"'i'"''^„'^;  on  le  voit,  par  l'homélie  quatre-vingt-troisiè- 

"•  me  qu'il  fit  le  jour  de  rÉpiphanie.  Elle  roule 

entièrement  sur  le  chaut  des  Psaumes,  sur 
lesquels  il  fait  quelques  remarques  généra- 
les. Il  conjure  ses  auditeurs  de  conformer 
leurs  mœurs  à  la  sainteté  de  ces  cantiques, 
de  pratiquer  les  vertus  qui  y  sont  recomman- 
dées, et  de  fuir  les  vices  qu'ils  détestent.  Les 
deux  sermons  suivants  sont  sur  la  manière  de 

''"^v^i"'  psalmodier  et  de  prier.  Toutes  les  fois  que 
les  ministres  de  l'autel  avertissaient  les  fi- 
dèles '  d'incliner  leurs  tètes,  ou  de  lléchir 
les  genoux*,  tous  devaient  le  faire,  s'ils  n'en 
étaient  empêchés  par  quelques  infirmités  ; 
et  baisser  du  moins  la  tête  lorsqu'ils  ne  pou- 
vaient fléchir  le  genou,  pour  ne  pas  ressem- 
bler au  pharisien,  qui  debout  faisait  l'éloge  de 

sc'n..e6,«7,  ses  propres  mérites.  Les  six  sermons  suivants 

in-i'.».'  sont  contre  les  péchés  d'impureté  et  d'ivro- 
gnerie.Saint  Césaire  veut  qu'onlui  défère  ceux 
qui  se  rendraient  coupables  d'adultère  ou 
d'autres  crimes  semblables,  quand,  après  les 
avoir  repris  en  secret,  ilsne  se  corrigentpoint. 


fflSTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSL\STIQLT:S. 

11  répète  plusieurs  fois  que  l'usage  du  maria- 


ge, quand  il  n'a  pas  pour  fin  la  génônition 
des  enfants  est  un  péché  ;  qu'un  adultère  qui 
meurt  sans  avoir  cessé  son  mauvais  com- 
merce, et  fait  pénitence,  va  en  enfer;  qu'on 
doit  penser  de  même  de  ceux  qui  entretien- 
nent des  concubines  ;  que  ces  sortes  de  cri- 
mes ne  sont  pas  moins  défendus  aux  hommes 
qu'aux  femmes  ;  que  celui  ou  celle  qui  n'e<t 
pas  vierge,  ne  mérite  point  la  bénédiction 
nuptiale  ;  (pi'il  ne  peut  y  avoir  aucun  pré- 
texte de  violer  la  foi  du  mariage,  ou  de  vivre 
dans  l'incontinence,  parce  qu'il  n'y  en  a 
point  de  ne  pas  craindre  Dieu  qui  défend  ces 
crimes ,  et  qui  commaude  la  chasteté.  Il  ne 
croit  point  que  l'on  doive  communier  après 
les  accidents  qui  arrivent  même  invcîlontai- 
rement,  si  l'on  n'a  soin  d'en  témoigner  à 
Dieu  sa  douleur,  et  si  l'on  ne  se  purilie  par 
l'aumône  ou  par  quelque  jeûne  si  la  sauié 
le  permet.  Il  conseille  à  ceux  qui  se  sont  fait  p«j.  «a. 
nue  mauvaise  habitude  du  vin,  de  s'en  dé- 
faire petit  à  petit  comme  ils  l'ont  contractée. 
Comme  quelques-uns  disaient  qu'ils  ne  se 
souciaient  point  du  royaume  du  ciel,  et  qu'ils 
ne  désiraient  que  le  repos  éternel  :  il  leur 
répond  tpi'd  n'y  a  que  deux  endroits  '  où 
l'on  aille,  et  qu'on  n'en  connaît  point  un 
troisième  ;  que  celui  qui  n'aura  pas  mérité 
de  régner  avec  Jésus-Glu'ist,  périra  sans  au-  «s. 
cun  doute  avec  le  démon. 

10.  On  peut  faire  les  remarques  suivantes  s«rm.os, 
daus  les  onze  derniers  sermons  de  saint  Cé- 
saire, mis  dans  VApjjendice  des  Œuvres  de 
saint  Augustin.  Comme  il  y  a  des  pauvres  co- 
léreux et  orgueilleux,  avares  et  voluptueux, 
à  qui  la  pauvreté  ne  sert  de  rien  pour  le 
ciel,  il  y  a  aussi  des  riches  humbles  et  doux 
à  qui  les  richesses  ne  sont  point  un  obstacle 
au  salut,  parce  qu'ils  en  usent  sans  y  avoir 
d'attache  ;  c'est  par  l'orgueil  que  les  anires 
sont  tombés  du  ciel  dans  l'enfer  ;  Dieu  reçoit 
les  pécheurs  aussitôt  qu'ils  retournent  à  lui 
par  la  pénitence;  la  cupidité  n'est  jamais 
sans  orgueil,  ni  la  ciiarité  sans  humilité  ;  ce  s»™,  m. 
n'est  point  à  Dieu  que  nous  devons  nous  en 
prendre,  mais  à  nos  propres  iniquités,  lors- 


'  Quotiens  m  altario  oralur,  et  vos  iiiclinate 
capita  vestra...  non  vobis  sit  lahnriosum  capita 
inclinare.  Cœsar.,  Serm.  84,  pag.  475. 

*  Dum  fréquenter  allendo,  diacono  clamante: 
Flectaiiius  pimua,  maximam  partem  video  velut 
columnas  ereclas  stare  conspicio  ;  quod  christia- 
nis  non  expedit,  nec  licet:  non  enim  propter  nos, 
sed  propter  vosdiaconus  clamât...  Et  qui  pro  ali- 


qua  in/irmitate  non  potest  genua  ftectere,  vel  dor- 
sum  curvare,  vel  caput  non  pigeât  inclinare,  Id., 
Serm,  85,  pag,  476. 

'  yemo  sedecipiat,  duo  loca  sunt.et  tertius  non 
est  ullus.  Quicum  Christo  regnare  non  mcrueril, 
cum  diabolo  absque  ulla  dubitatione  peribil.  Cx- 
s;ir.,  Uom.  91,  pag.  495, 


Serin,  96, 
og.  B05. 

S.'riH.  97, 
[a?.  CUH. 


[VI"  SIÈCLE.]         CHAPITRE  IX.  —  SAINT  Cl': 

fjiKi  nous  sommes  affligtis  do  i,Mi(M'ros,  de  S(!- 
chcrcssos,  de  morlalilés  et  d'aiili'os  Ih'iuix, 
tels  qu'on  en  soullVit  ;\  Arles  dans  le  temps 
qne  les  Fiançais  en  firent  le  sii^gc  ;  les  peu- 
ples '  (int  droit  d'exijjtcr  do  leurs  pasteurs  le 

Son...  94,  pain  de  la  parole  divine  ;  et  ceux-ci  no  peu- 
vent le  leur  refuser  sans  injusiice  ;  ils  doivent 
aussi  l'otlrir  à  ceux  qui  en  ont  du  d(^goùt, 
et  les  presser  de  le  recevoir.  Les  (idèlcs  doi- 
vent entendre  cette  divine  parole  avec  res- 
pect et  dans  une  posture  diicentc,  assis,  ou 

s-™. os    debout,  et  non  pas  couchés  par  terre.  Les 

""'•  prêtres  ne  doivent  point  craindre;  de  prêcher 
la  vorilë  en  des  termes  durs,  lorsiju'il  en  est 
besoin,  pour  dmouvoir  les  pécheurs,  ni  de 
les  reprendre  avec  force.  La  parole  de  Dieu 
étant  la  lumière  et  la  nourriture  de  notre 
âme,  persoinic  ne  doit  se  dispenser  de  l'on- 
teudrc  ou  de  la  lire.  Dieu,  par  im  ellct  de 
sa  miséricorde,  a  permis  qu'en  ce  monde  la 
condition  des  hommes  fût  inégale,  qu'il  y 
eût  des  pauvres  et  des  riches,  afin  que  les 
uns  se  sauvassent  par  la  patience,  et  les  au- 
tres par  l'aumône  ;  ce  qne  les  riches  reçoi- 
vent des  pauvres,  est  beaucoup  au-dessus  de 

Sera.  98,  ce  qu'ils  leur  donnent  ;  ils  leur  donnent  inie 

;.  513.  '  ' 

pièce  d  argent,  un  morceau  de  pain,  un  vê- 
tement, et  ils  reçoivent  de  Jésus-Christ,  un 
royaume,  la  vie   éternelle,  la  rémission  de 
leurs  péchés  ;  les  riches  qui  refusent  la  sub- 
sistance  aux   serviteurs   de   Dieu,    occupés 
Sera.  99,  aux  veilles,  aux  lectures  saintes,  aux  prières, 
>  siu.       ressemblent  à  l'ormeau  et  autres  arbres  in- 
sorm.  100,  fructueux,  qui  n'ont  que  des  fouilles.  L'on 
peut  distinguer  trois  sortes  d'aumônes,  utiles 
toutes  les  trois  pour  le  salut,  dont  la  pre- 
mière  consiste   h  donner  aux    pauvres   ce 
qu'on  a  de  superflu;   la   seconde,  dans  le 
pardon  des  injures;  la  troisième,  dans  l'a- 
sorm.im,  mour  du  prochain;  néanmoins  l'aumône  ne 
suliit  pas  a  ceux  qui  vivent  dans  le  crime  ;  il 
est  nécessaire  pour   obtenir   le   pardon  de 
leurs  fautes,  qu'ils  quittent  l'habitude  du  pé- 
sot.i..io3,  ché,  et  qu'ils  changent  leurs  mœurs;  et  si 
"""■        l'on  ne  doit  point  désespérer  du  pardon  de 
ses  péchés,  on  ne  doit  point  non  plus  y  pei-- 


SAlllH,  ï^:vftOUE  D'ARLES.  U:i 

si'ivc'u'or  avec  S(icurilé,  mais  s'en  retirer  au 
plutôt  et  en  faire  pénitence.  L'on  peut  dire 
en  quehjue  sorte,  que  les  orgueilleux,  les 
envieux,  les  adultères  sont  possédés  du  dé- 
mon. Saint  Ci'saire  s'exprime  ainsi  ;ï  l'occa- 
sion d'un  (uiergumèue,  qui,  le  dimanche  pré- 
cédent, avait  épouvanté  les  fidèles  pendant 
la  célébration  des  mystères. 

§  n. 

Des  Homélies  de  saint  Césairc  recueillies  dans  la 
Ribliollihme  des  Pères,  et  par  M.  Baluze. 

1.  Des  quarante-six  homélies  imprimées 
sous  le  nom  de  saint  Césaire  dans  la  Biblio- 
thèque des  Pères,  il  y  en  a  vingt-trois'  que 


l'on  a  mises  dans  l'Appendice  du  ciiiquièrao 
tome  des  Œuvres  de  saint  Augustin,  parce  ^'"'"' 
qu'elles  portaient  son  nom,  soit  dans  d'an- 
ciennes éditions  de  ses  ouvrages,  soit  dans 
quelques  manuscrits.  Nous  venons  de  don- 
ner le  contenu  de  ces  vingt-trois  discours,  de 
même  que  des  quatorze  homélies  publiées 
par  M.  Baluze,  sous  le  nom  de  saint  Césaire, 
et  que  l'on  a  aussi  attribuées  quelquefois  à 
saint  Augustin.  Il  ne  reste  donc  à  parler  que 
des  vingt-trois  autres  sermons  ,  dont  toulo- 
fois  les  huit  derniers  ne  paraissent  pas  être 
de  saint  Césaire. 

2.  11  y  en  a  cinq  sur  la  Pâque,  dont  le  pre- 
mier paraît  imparfait.  Ce  saint  y  représente 
l'étonnement  et  la  terreur  dont  les  démons 
furent  frappés  à  la  descente  de  Jésus-Christ 
dans  les  enfers.  11  trouve  la  figure  de  la  Pà- 
que  et  du  baptême  dans  ce  qui  se  passa  à  la 
sortie  d'Israël  d'Égyte,  lorsque  Dieu  en  retira 
ce  peuple  par  le  ministère  de  Moïse.  En 
effet,  par  la  Pâque ,  qui  signifie  passage  , 
nous  passons  de  la  servitude  à  la  liberté , 
de  l'iniquité  à  la  justice,  de  la  mort  à  la  vie, 
de  la  coulpe  à  la  grâce;  et  nos  péchés  se 
trouvent  tellement  submergés  dans  le  baptê- 
me figuré  par  la  mer  Rouge,  qu'il  n'en 
reste  pas  un  seul.  Cette  fontaine  sacrée  ' 
nous  purifie  même  du  péché  d'origine  ,  du 
péché  de  notre  premier  père,  que  nous  con- 


Sormnns  dfl 
Il  IlibllolM- 
ijuedos  P£re^, 
CI  du  Hcenc.i 
an  M. Uoluzo, 
l.n|.ri  .1164  dons 
l'Ait  i>endlc0 
do  Halut   Au- 


Serm.  3,  i, 
E,  0,  7,  l.ii.., 
1\  billiolli. 
K(r.  ]  af.  8.'l 
el  Su.;, 


\«e    3J3. 


'  Qiiotiens  vobis  verbum  Dei  fuerit  tardius  prw- 
dkattiyin,  nolile  exspeclnre  ut  vobis  uUro  debea- 
mus  ingerere;  sed  etiam  vos  ipsi  quasi  rem  vobis 
jure  debilam.  fideliter  a  nohis  ac  sitienter  exigite. 
Ctesar.,  Hom.  94,  pag.  302. 

'  Les  liomijlies  de  la  Bibl'othèque  des  Pères  qui 
se  trouvent  dans  VÀppendice  de  saint  Augustin, 
sont  les  1,  2,  8,  9,  10,  11,  12,  13,  14,  15,  16,  17,  19, 
20,  21,  22,  23,  2i,   23,    S'!,   31,  37,  39.    Le?  quatorze 


de  M.  Baluze  sont  les  21,  28,  57,  60,  62,  65,  69,  73, 
74,  75,  81,  90,  91,  92  de  saint  Césaire  dans  l'Appen- 
dice de  saint  Augustin. 

3  Primuin  illud  originale  debitum  sacri  fontis 
unda  evacuavit.  Illud  siiigulare  delicluiii  jiriini 
parentis  interemit  ..  nec  jam  obnoxii  esse  possunt 
primœ  origini  secunda  nalivitale  nali.  Cipsur., 
Serm.  3  de  Pasclia,  pag.  823. 


HISTOmE  GiiNCIlALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


I"V.  «Si. 


lu 

tractons  en  naissant,  nous  y  sommes  entiè- 
rement nettoyés,  absous,  renouvelés:  en 
sorte  que  ceux  qui  reuaisscnt  dans  cette  eau 
salutaire  n'ont  plus  aucune  tache  île  leurpre- 
mière  naissance.  «  Jésus-Christ,  dil-il,  fipuré 
par  l'afrneau  pascal  de  la  loi,  est  le  vérilahlc 
airneau  '  que  nous  devons  manger  dans  une 
même  maison ,  c'est-à-dire  dans  l'unité  de 
l'Église.   Donc,  les  ariens  et  tous  les  autres 
hérétiques,  étant  séparés  de  l'Église,  ne  man- 
gent point  cet  agneau  dans  une  même  mai- 
son; et  dés  lors  ils  ne  peuvent  être  sauvés; 
comme  ceux-là  ne  le  furent  pas  qui  ne  se 
trouvèrent  point  avec  Noé  dans  l'arche  dans 
le  temps  du  déluge.  Mais  que  veut  dire  l'É- 
crituie  lorsqu'elle  nous  ordonne  de  manger 
l'agneau  pascal   avec  ses  pieds  ?  Sinon  que 
nous  devons  confesser  que  Jésus-Christ  est 
vrai  Dieu  et  vrai  homme;  qu'il  est  engendré 
de  Dieu  et  né  de  l'homme.  N'imaginons  rien 
de  corporel  dans  la  manière  dont  il  est  en- 
gendré du  Pure.  C'est  une  lumière  qui  pro- 
cède d'une  lumière.  Quand  vous  allumez  une 
lampe  auprès  d'une  autre  lampe,  le  feu  de  la 
seconde  est  le  même  que  celui  de  la  premiè- 
re. Si  vous  considérez  la  personne  dans  le 
Fils,  elle  lui  est  propre  ;  si  vous  faites  atten- 
tion à  la  nature ,  elle  lui  est  commune  avec 
le  Père.  D  vous  parait  deux  dammes  dans 
les  deux  lampes  ;  mais  ces  deux  feux  n'ont 
qu'une  même  nature.  Devenus  sujets  à  la 


mort  par  la  transgression  d'Adam,  Dieu,  en 
se  faisant  homme,  nous  a  rachetés  de  la  mort 
que  nous  méritions  par  une  mort  qu'il  n'é- 
tait pas  obligé  de  subir;  et  parce  qu'il  devait 
dérober  à  nos  yeux  le  corps  qu'il  avait  pris, 
et  le  placer  dans  le  ciel,  il  crut  nécessaire,  au 
jour  de  la  Cène  légale,  d'instituer  le  sacre- 
ment de  son  corps  et  de  son  sang,  afin  do 
perpétuer  la  mémoire  du  mystère  qu'il  avait 
oUert  une  fois  pour  notre  rédemption ,  et 
qu'il  nous  fût  toujours  présent  par  sa  grâce. 
C'est  pour(pioi  il  nous  assure  '  que  sa  chair 
est  véritablement  viande,  et  son  sang  un  vé- 
ritable breuvage  :  ce  dont  nous  ne  pouvons 
douter,  puisqiie  l'auteur  du  don  est  lui-même 
témoiu  de  la  réalité  et  de  la  vérité  de  ce  don. 
C'est  lui  qui ,  quoiiiue  prêtre  invisible,  con- 
vertit par  sa  puissance  secrète  les  créatures 
visibles  en  la  substance  de  son  corps  et  de 
son  sang,  en  disant  :  Prêtiez  et  mangez  :  ceci 
est  mon  corps;  et,  par  une  seconde  sanctifica- 
tion :  Prenez  et  buvez  :  ceci  est  mon  sang.  Com- 
me au  commandement  de  Dieu  les  cieux,  les 
mers  et  la  terre  sont  sortis  du  néant ,  par  une 
semljlable  puissance  ,  la  vertu  de  sa  parole 
ordonne,  et  l'etl'et  suit  aussitôt.  Peut-on  ti-op 
relever  la  grandeur  des  bienfaits  opérés  par 
l'eflicacité  de  la  bénédiction  divine  ?  Jugez 
par  ce  qui  s'est  passé  en  vous-mêmes,  vous 
qui  êtes  régénérés  en  Jésus-Christ,  qu'il  n'est 
ni  nouveau  ni  impossible  que  les  choses  tcr- 


*  Uic  est  ille  agmts  qiiem  in  una  domo  come- 
dere  ex  lege  prœopiiiiur.  Quiil  est  in  una  domo? 
Id  est  in  unitate  Ecclesiœ  jubemur  carnes  ejns 
assumere.  Ariani  ergo  et  divers(e  hœreticorum 
perversitates,  nnri  in  tuia  illnm  comedunt  dnmo. 
Quod  idco  sicut  in  diluvio  non  salvatus  est,  tiisi 
qui  inler  arcam  fuit  invenlus:  ila  dirersw  fidei 
homines  extra  Ecclesiœ  domum  non  hahenKs 
agnum  qui  est  Christus,  salci  esse  non  possunt. 
Cœsar.,  Ilom.  G  de  l'ascha,  lom.  l\  liibt.  tatr., 
pag.  824. 

^  Undc  mérita  cœlestis  confirmât  autoritas  : 
Quia  caro  inca  vcre  est  ciljus,  et  sangiiis  meus  vere 
est  polus.  Recédât  ergo  omne  infidelitatis  amhi- 
guum  quaitdoquiilein  qui  nuctor  est  muneris  ipse 
etiam  teslis  est  verttatis.  lyam  invisibilis  sacerdos 
visibiles  crealuras  in  substantiam  corporis  et 
tanguinis  sui,  terbi  sui  sécréta  potestate  conver- 
tit, ita  dicens  :  Accipile  et  édite  :  hoc  est  corpus 
meuui.  Et  sanctificatione  repetita:  Accipile  et  bi- 
bite,  liic  est  sanguis  meus.  Ergo  ad  nulum  prœci- 
pientis  Doinini,  repente  ex  nihilo  suhstilerunt  ex- 
celsa  cwloruni,  profunda  ftucluum,  vasla  lerra- 
rum.  Pari  potenlia  in  spirilualibus  èacramenlis 
verbi  prœcipit  virtus  et  rei  servit  cffcctus.  Quanta 
itaque  celebranda  bénéficia,  vis  divinœ  benediclio-^^^ 
nis  operalur  ;  quomodo  libi  novum  climpossibile  ^^ 


esse  7ion  debeat,  quod  in  Christi  substantiaiu  Ur- 
rena  et  mortalia  commutantur,  teipsuni  qui  jam 
in  Cliristo  es  regeneralus,  inlerroga,  dudum  alie- 
nus  a  vita,  peregrinus  a  misericordia,  a  sahUis 
via  inlrinsecus  exulabas.  Subito  iniatus  Christi 
tcgibus,  et  salutaribus  mysleriis  initiatus,  in  cor- 
pus Ecclesiœ  non  videiuio  sed  crcdendo  Iransisli, 
et  de  filio  perditionis  adoptivus  Dei  occulta  ficri 
puritate  meruisti...  Sicut  ergo  sine  corporaUsen.<u 
subito  novam  indulus  est  dignitaltm,  cl  sicut  hoc 
quod  in  te  Dcus  maculata  detersit,  ita  cum  revc- 
rendum  altare  cibis  satiandus  ascendis,  sacrum 
Dei  tui  corpus  cl  sanguinem  fide  respice,  honore 
mirare,  mente  conlinge,  cordis  manu  suscipe,  cl 
maxime  hauslu,  inleriori  assume...  Quod  corpus 
saccrdote  dispensante  tantum  est  in  exiguo  quan- 
tum esse  constat  in  toto.  Quod  cum  Ecclesiu  su- 
mil  fidelium,  sicut  plénum  in  universis  ,  ita  inle- 
grum  esse  prohalur  in  singulis...  Si  forte  esum 
punis  esuricntibus  apponeremus,  non  ex  toto  per- 
veniret  ad  singulos,  quia  particulalini  et  minuta- 
tim  portionem  suam  unusquisque  prœsumeret. 
De  hoc  vero  pane  cum  assumilur  nihil  minus  ha- 
bent  singuli  quam  unicersi.  Tolum  unus ;  totum 
duo;  totum  plurcs  sine  diminuUone  percipiunt: 
quia  benedictio  hujus  sacramenti  scit  dialribui  : 
nescit  dislributione consumi...  Quidautem  mirum 


vr  SIKCLli. 


]         ClLU'lTllE  IX.  —  S.UNT  CÉSA-IIIE,  ÉVftQlIE  D'ARLES. 


145 


rcslres  cl  pdrissaWci?  soient  cliangi's  en  la 
substance  de  Jësus-Clirisl.  Vous  aviez  depuis 
longtemps  perdu  le  droit  h  la  vie;  vous  n'a- 
viez point  do  part  h  la  miséricorde  ;  vous 
ëtiez  comme  exilés  de  la  voie  qui  conduit  au 
salut.  Aussitôt  que  vous  avez  été  initiés  aux 
lois  de  Jésus-Christ,  et  renouvelés  par  ses 
mystères  salutaires,  vous  êtes  passés,  non 
d'une  uuiilièro  visible,  mais  par  la  foi,  dans 
le  corps  de  l'Église,  et,  par  une  pureté  inté- 
rieure, vous  (Mes  devenus  de  fils  de  perdition 
enfants  adoplifs.  De  même  donc  que,  sans 
vous  en  apercevoir  par  les  sens  du  corps, 
vous  êtes  revêtus  subitement  d'une  nouvelle 
dignité,  et  purifiés  de  vos  taches  :  ainsi  lors- 
que vous  montez  à  l'auttil  pour  vous  y  rassa- 
sier des  viandes,  considérez  des  yeux  de  la 
foi  le  corps  et  le  sang  de  votre  Dieu ,  témoi- 
gnez del'étonncment  par  votre  respect,  tou- 
chez-le de  l'esprit ,  recevez-le  de  la  main  du 
cœur,  et  prcnoz-le  pour  vous  en  repaître  sur- 
tout intérieurement.  Le  corps  qui  vous  est 
donné  par  la  dispensation  du  prêtre  est  aussi 
grand  dans  une  partie  qu'il  l'est  dans  le  tout. 
Lorsque  l'assemblée  des  iidèles  le  prend,  il 
est  parfait  dans  tous,  et  chacun  le  reçoit  tojt 
entier.  En  quoi  il  se  trouve  bien  ditlerent  des 
autres  aliments  :  car  si  nous  présentions  un 
morceau  de  pain  à  plusieurs  personnes  qui 
eussent  faim,  chacune  d'elles  ne  le  mange- 
rait pas  en  entier ,  parce  qu'elles  se  le  divi- 
seraient par  parties  h  proportion  du  nombre 
de  celles  qui  en  mangeraient.  Mais  décevrai 
pain,  chacun  en  a  autant  que  tous  ensemble, 
un  seul  le  mange  tout  entier,  deux  le  pren- 
nent tout  entier,  plusiem-s  le  prennent  tout 
entier  sans  aucune  diminution,  parce  que  la 
bénédiction  de  ce  sacrement  peut  bien  être 
distribuée  ;  mais  elle  ne  peiit  être  consumée. 
Est-il  surprenant  que  Dieu  change  par  l'effi- 
cacité de  sa  parole,  ce  qu'il  a  créé  par  la 
même  parole  ?  Il  parait  même  que  le  miracle 
n'est  pas  si  grand  de  changer  en  mieux  ce  qui 
est  déjà  créé,  que  de  le  créer  de  rien.  Saint 
Césaire  rapporte  plusieurs  passages  de  l'É- 
criture pour  prouver  le  changement  du  pain 
et  du  vin,  au  corps  et  au  sang  de  Jésus-Christ  ; 
et  la  nécessité  qu'il  y  a  de  les  recevoir  dans 
le  baptême  pom'  avoir  la  vie  éternelle. 


Sorin.ll 


3.  Ce  saint  évoque  fut  prié  par  le  supérieur 
d'un  monastère,  de  faire  ifiie  exhortation  .\ 
ses  religieux.  Il  ne  se  lendit  qu'avec  quel- 
que sorte  de  répugnance  h  ses  instances,  sa- 
chant (pi'il  ne  pouvait  rien  dire  ;'i  ces  saints 
moines,  qu'ils  ne  missent  déj;ï  en  pratique. 
Il  se  contenta  donc  de  les  exhorter  à  persévé- 
rer dans  la  vie  édilianb;  qu'ils  menaient,  leur 
disant ,  d'après  l'Evangile,  que  le  salut  n'est 
promis  qu';\  ceux  qui  persévèrent  courageu- 
sement dans  le  bien  jusqu';"»  la  fin.  Il  remar- 
que qu'il  y  a  deux  édifices  et  deux  cités  que 
l'on  bâtit  dès  le  commencement  du  monde. 
«  L'une,  dit-il,  a  pour  architecte  Jésus-Christ; 
l'autre  le  démon.  L'une  est  b;ltie  sur  le  fon- 
dement de  l'humilité,  afin  qu'elle  puisse  s'é- 
lèvcr  d'une  manière  solide;  l'aulre,  qui  n'a 
que  l'orgueil  pour  base,  tombera  malheureu- 
sement. Les  humbles  bâtissent  avec  Jésus- 
Christ;  et  les  orgueilleux  avec  le  démon  :  car 
on  ne  dislingue  les  enfants  de  Dieu  et  les 
enfants  du  diable  que  par  l'humilité  et  par 
l'orgueil.  »  Saint  Césaire  conjure  ces  religieux 
de  s'attacher  fortement  â  cette  vertu,  et  d'en 
faire  la  compagne  inséparable  de  l'obéissance 
dont  ils  faisaient  profession.  Il  leur  représen- 
te que  l'orgueil  dans  un  laïque  est  un  pé- 
ché ;  mais  qu'il  est  un  sacrilège  dans  un  reli- 

^  Scr 

gicux.  Il  fit  un  autre  discours  à  la  prière  de  pag.  s»; 
l'abbé  de  Lérius,  dont  il  fait  un  grand  éloge 
sans  le  nommer.  Il  fait  aussi  l!éloge  de  ses 
moines  et  de  l'ile  de  Lérius,  d'où  il  dit 
qu'où  avait  tiré  un  grand  nombre  de  prêtres 
et  d'évèques.  Il  reconnaît  qu'il  y  avait  lui- 
même  reçu  l'éducation  et  la  nourriture  spi- 
rituelle et  corporelle  pendant  un  assez  long 
temps.  Témoin  ocidaire  des  vertus  qu'on  y 
pratiquait,  il  ne  demande  autre  chose  à  ces 
rehgieux  que  de  soutenir,  par  une  exacte  ob- 
servation de  leurs  devoirs,  la  grande  répu- 
tation qu'ils  s'étaient  acquise  presque  dans 
tous  les  endroits  du  monde,  depuis  l'Orient 
jusqu'à  l'Occident,  en  leur  faisant  remar- 
quer que  si  les  travaux  de  la  vie  monasti- 
que étaient  difficiles  à  supporter,  ce  n'était' 
que  lorsqu'on  ne  s'en  faisait  point  d'habi- 
tude ;  ou  pour  dire  plus  vrai ,  qu'on  ne  les 
croyait  impossibles,  qu'en  s'imagiuant  pou- 
voir en  venir  à  bout  par  les  seules  forces 


est  si  ea  qum  verbo  potuit  creare,  posait  verbo 
creata  coniertere  ?  Imo  jain  minoris  videlur  esse 
miracuU,  si  id  quod  ex  nihilo  agnoscilur  condi- 
disse,  jam  conditum,  in  melius  mutare  valeat, 
Ca>sar.,  ibid.,  hom.  7,  pag.  S25,  826. 
'  Sed  hœc  omnia  donec  in  consueludinem  mil^ 

XL 


tantur,  laboriosa  esse  videntur.  Et  ut  verius  di- 
cam,  tamdiu  iiiipossibilia  judicantur,  quamdiu 
huinanis  viribus  impleri passe  putanlur.  Cum  re- 
ro  o  Deo  oblineriel  per  Dei  gratiam  impleri  passe 
credunlur,  nec  dura,  nec  laboriosa,  sed  ieria  et 
suavia  corn  probantur.  Cœsar.,  Efom.  23,  pag.  845. 

10 


146 


HISTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Serm  r.Sfl, 
19, 30.  31.  3i, 


Scrm.W,ÎC, 
t»^-.  ton». 


de  la  nature.  «  Mais,  ajoule-t-il,  lorsqu'on 
croit  qu'ils  sont  supportables  avec  la  grâce 
de  Dieu,  et  qu'on  espère  l'obtenir,  dès  lors 
ces  exercices,  quelque  pénibles  qu'ils  parais- 
sent, deviennent  doux  et  légers,  et  cessent 
d'être  durs  et  pénibles.  » 

4.  Nous  avons  six  homélies  sur  les  devoirs 
de  la  vie  monastique.  Le  style  ne  permet 
point  de  douter  qu'elles  ne  soient  de  saint 
Césaire.  Il  marque  dans  la  deuxième  que  les 
moines  à  qui  il  parlait  habitaient  une  ile  voi- 
sine, apparemment  d'Arles;  puisque  le  mo- 
nastère, dont  il  était  abbé,  n'était  pas  éloigné 
«le  cette  ville.  Il  dit  au  commencement  de  la 
sixième  qu'il  l'avait  faite  à  la  prière  du  su- 
périeur de  ce  monastère.  Comme  il  ne  fait 
pas  la  même  remarque  dans  les  autres,  il  est 
à  croire  qu'il  ue  composa  celle-ci  que  depuis 
qu'il  fut  évèque  ;  et  qu'il  prononça  les  cinq 
autres  dans  le  temps  qu'il  était  abbé.  Ce  sont 
des  exhortations  à  la  charité,  à  l'humilité,  à 
l'obéissance,  à  la  pénitence  et  au  combat  des 
passions,  à  la  correction  des  mœurs,  au  mé- 
pris des  biens  et  des  plaisirs  du  monde,  à  la 
mortification  des  sens.  Rien  ne  lui  paraît  plus 
utile  que  la  pensée  du  jugement  dernier,  que 
le  souvenir  des  fautes  passées,  que  la  dou- 
leur de  les  avoir  commises,  que  la  crainte 
continuelle  d'en  commettre  à  l'avenir.  Il  con- 
seille aux  moines  l'assiduité  à  l'oraison  et  à 
la  lecture  ;  la  vigilance  sur  eux-mêmes  pour 
se  conserver  purs  et  chastes;  la  sobriété,  la 
douceur,  la  modestie,  la  sincérité  de  cœur, 
le  zèle  dans  le  service  de  Dieu,  la  soumis- 
sion à  la  volonté  non  -  seulement  de  leurs 
anciens  et  de  leurs  égaux,  mais  aussi  de  ceux 
qui  leui"  sont  inférieurs  en  âge.  Je  ne  sais  si 
ce  ne  serait  point  de  ces  homélies  que  veut 
parler  Gennade  ou  celui  qui  a  fait  un  supplé- 
ment au  Catalogue  des  hommes  illustres,  lors- 
qu'il dit  '  que  saint  Césaire  a  composé  divers 
opuscules  très-beaux,  très-agréables,  tiès- 
utiles  et  même  nécessaires  aux  moines.  Les 
trente-cinquième  et  trente-sixième  dansla^i- 
bliotkpque  des  Pères  sont  encore  des  exhorta- 
tions à  des  moines  et  à  des  clercs.  Saint  Cé- 
saire fit  le  dernier  à  la  prière  d'un  abbé.  Il 
fait  voir  dans  l'un  et  dans  l'autre  que  tous 
les  exercices  extérieuis  de  la  vie  spirituelle 
doivent  nécessairement  être  accompagnés 
d'humihté,  de  charité,  de  soumission,  parce 


•  Cœsarius  Arelatensis  scripsit  egregia  et  grata 
et  latUe  mo;iut7iis  necessaria  opuscvli  GiMiiiad. 
iu  Calalog.,  cap.  lxxxvi. 


que,  comme  la  chair  ne  peut  vivre  sans  l'âme, 
les  vertus  n'ont  point  de  véritable  vie  sans 
la  charité. 

o.  La  trente-huitième  homélie  est  intitu- 
lée :  Des  Douze  moyens  d'obtenir  la  7-émission 
de  ses  péc/iés.  Ce  n'est  qu'un  fragment  de 
quelque  traité  ou  instruction  spirituelle.  Ces 
moyens  sont  le  baptême,  la  charité  ou  l'a- 
mour, l'aumône,  l'abondance  des  larmes,  la 
confession  de  ses  crimes,  la  componction  du 
cœur,  la  mortification  du  corps,  la  correction 
des  mœurs,  l'intercession  des  saints,  les 
œuvres  de  miséricorde,  le  zèle  du  salut  du 
prochain,  le  pardon  des  injures,  le  martj're. 
Il  n'existe  aucune  preuve  que  cette  homélie 
soit  de  saint  Césaire.  La  trente-neuvième 
porte  le  nom  de  Félicitarius,  évoque  d'Arles, 
de  même  que  les  deux  suivantes.  Ce  peut 
être  une  faute  des  copistes,  qui  au  lieu  de 
Cfpsarius,  auront  mis  Félicitarius.  Elle  traite 
du  jour  du  jugement  dernier,  et  le  style  a  la 
simplicité  de  celui  de  saiut,  Césaire.  La  qua- 
rantième n'est  qu'un  tissu  de  passages  de  la 
sainte  Ecriture  sur  l'aumône.  On  trouve  dans 
la  quarante-unième,  qui  est  sur  les  dîmes,  ce 
qu'en  dit  saint  Césaire  dans  la  soixante-dix- 
septième  homélie,  pai'mi  ceUes  qui  sont  dans 
VApjKndice  des  Œuvres  de  saint  Augustin. 
Cette  homélie  ne  parait  pas  digne  de  saint  Cé- 
saire. La  quarante-deuxième  est  d'un  auteur 
plus  récent  que  lui,  puisque  l'on  y  cite  saint 
Grégoire.  La  quarante -troisième  et  la  qua- 
ranlc-(iuatrième  sont  attriliuécs  A  saint  Au- 
gustin. Mais  elles  ne  sont  ni  du  style  de  ce 
Père,  ni  de  celui  de  saint  Césaire  :  on  peut 
porter  le  môme  jugement  de  la  quaraule-cin- 
quième,  qui  est  une  exhortation  faite  â  des 
moines  et  par  un  moine.  La  quarante-sixième 
a  pour  litre  :  Doctrine  de  saint  Macaire,  pour 
ceux  qui  vivent  dans  les  monastères.  On  n'y 
voit  rien  du  génie  ni  du  style  de  saint  Cé- 
saire. 

A  la  suite  des  quatorze  Homélies  de  saint 
Césaire,  publiées  par  M.  Baluze,  on  eu  a 
mis  deux  dans  le  Supplément  de  la  Diblio- 
tlif'ijuc  des  Pères,  dont  la  première  est  contre 
les  personnes  mariées  qui  commettent  des 
adultères;  et  la  seconde,  sur  le  mépris  de  la 
vie  présente.  Celle-là  parait  avoir  été  prise 
de  la  seizième  hoiuéliedcsaint  Céfairc  sur  le 
même  sujet  :  celle-ci  est  luie  compilation  de 
divers  endroits  des  écrits  de  saint  Jérôme, 
de  saint  Augustin  et  de  saint  Grégoire  le 
Grand.  Elle  ne  peut  donc  être  de  saint  Cé- 
saire. 


S«rmoD) 
faatfemtat  «t. 
tnt'UisA  M.ol 
C6saira. 


S«rm.  18, 


Sorra.  35, 


S«riii.(lt,  II, 

it,  i^.  en. 


Strni.  (1,U. 


Ton.  XXVIl 
Bill.l><l.  1.:;. 
■M. 


Tôni.  VUI 
Bl'll'ih.  l'ii. 
|«t.  Ml. 


Ilrniillrsal- 
CAajiiro. 


11.  V  o?. 

-I.lu  Ap- 


101,1' 5. 


I-.I). 
IHS. 


257. 


[vi-  sikLE.]         CIIAPITRE  IX.  —  S.MNT  CÉSAIllE,  ÉVftQUE  D'ARLES 

§in. 


\M 


De  quelques  autres  homélies  que  l'on  a  attri- 
buées à  saint  Césaire. 

1.  II  y  a  iiliisicius  lioiiK'lics  ilans  l'Appen- 
dice du  ciiKiiiième  tome  tics  Œiivrcs  de  saint 
Augustin.  Elles  ont  quolquelbis  passé  sous 
le  nom  de  saint  Ci'saire,  maison  n'a  point  de 
preuves  solides  qu'il  soit  l'auteur  de  ces  lio- 
mc'lies.  Telles  sont  les  homélies  sur  le  serpent 
d'airain  et  la  verge  miracidensc  de  INIoïse  ; 
le  premier  verset  du  Psaume  cxxxv°,  et  le  troi- 
sième chapitre  des  Proverbes;  sur  la  femme 
forte,  et  sur  l'Église,  à  l'occasion  de  ce  qui 
en  est  dit  dans  le  trente-unième  chapitre  du 
même  livre  ;  sur  la  femme  pécheresse  dont 
U  est  parlé  dans  saint  Luc  ;  sur  ces  paroles 
du  douzième  chapitre  de  la  première  aux 
Corinthiens  :  Si  l'un  des  membres  souffre, 
tous  les  autres  membres  souffrent  avec  lui  ;  sur 
le  jeûne  ilu  Carême,  et  sur  le  jugement  der- 
nier. La  plupart  de  ces  homélies  se  lisent 
sous  le  nom  de  saint  Césaire  dans  quelques 
manuscrits  ;  mais,  en  d'autres,  elles  portent 
le  nom  du  saint  Augustin  ;  et  quoiqu'à  en 
juger  par  le  style  on  puisse  assurer  qu'elles 
ne  sont  point  de  ce  saint  Docteur,  on  n'y 
trouve  pas  non  plus  assez  de  conformité 
avec  celui  de  saint  Césaire,  pour  les  lui  at- 
tribuer avec  certitude. 

2.  Barrali  nous  a  donné  dix-huit  sermons 
de  saint  Césaire,  qu'il  dit  avoir  été  prononcés 
devant  les  moines  de  l'abbaye  de  Lérins.  Il 
y  en  a  plusieurs  de  ce  nombre  qui  se  trou- 
vent dans  le  sixième  tome  de  \a  Bibliothèque 
des  /•«•««  parmi  les  homélies  attribuées  à  Eu- 
sèbe  d'Emèse,  dans  le  huitième  tome  parmi 
celles  de  saint  Césaire,  et  dans  l'Appendice 
du  Code  des  rè(//es  par  saint  Benoit  d'Aniane. 
Barrali  donne  également  à  saint  Césaire  et 
à  Faiiste  de  Riez,  le  Discours  aux  moines, 
imprimé  dans  le  huitième  tome  de  la  Biblio- 
thèque des  Pères,  après  les  deux  livmsduLibi'e 
arbitre  et  de  la  Grâce.  Il  ne  peut  cependant 
être  que  de  l'un  des  deux  ;  et  il  y  a  toute  appa- 
rence qu'il  est  de  saint  Césaire  :  on  y  voit  son 
style  et  ses  maximes.  Il  y  parle  de  l'excom- 
munication monastique ,  qui  consistait  à  sé- 
parer un  frère  désobéissant  ou  de  mauvaises 
mœurs,  du  corps  de  la  communauté.  Rien  ne 
paraît  plus  triste  et  plus  fâcheux  à  ce  Père , 


que  de  mourir  dans  cette  séparation.  Il  dit 
dans  le  même  discours  que  Di(!ii  n'est  point 
facile  l'i  accorder  ses  grâces,  de  peur  que  les 
hommes  n'en  fassent  peu  de  cas.  La  cin- 
quième homélie  dans  Eusèbo  d'Émèsc,  qui 
fait  le  quatrième  sermon  dans  Barrali,  In  si- 
xième, la  neuvième  et  la  dixième  aux  moines 
paraissent  être  de  saint  Césaire  ;  toutes  ces 
homélies  sont  des  exhortations  A  la  pratique 
des  vertus  chrétiennes  et  des  observances 
monastiques. 

§IV. 

Des  Règles  de  saint  Césaire. 

1 .  Dans  le  Code  des  règles,  nous  en  trou- 
vons deux  de  saint  Césaire  imprimées  ensuite 
dans  le  huitième  tome  de  la  Bibliothèque  des 
Pères;  l'une  pour  des  religieux,  l'autie  pour 
des  religieuses.  Téride,  neveu  du  saint,  et 
abbé  d'un  monastère  dont  le  nom  ne  nous 
est  pas  connu,  écrivit  '  la  Règle  pour  les  re- 
ligieux sous  la  diction  de  son  oncle,  de  qui  il 
fut  chargé  de  la  répandre  en  divers  monas- 
tères. Saint  Césaire  écrivit  lui-même  celle  * 
pour  les  religieuses,  du  moins  cette  partie 
qu'il  appelle  Bécapitulation.  Le  saint  évêque 
commcnrait  à  bâtir  un  monastère  de  filles, 
lorsque  la  ville  d'Arles  fut  assiégée,  vers  l'an 
S07  ;  il  y  travaillait  même  de  ses  mains.  Mais 
les  barbares  en  ayant  ruiné  une  grande  par- 
tie pour  prendre  les  bois,  il  ne  put  l'achever 
qu'après  la  levée  du  siège.  Il  joignit  au  mo- 
nastère une  grande  éghse  partagée  en  trois  : 
le  milieu  dédié  à.  la  Sainte  Vierge;  un  des 
côtés  à  saint  Jean;  l'autre  à  saint  Martin.  Il 
fit  paver  toute  l'éghse  de  grands  coffres  de 
pierres  taillées  exprès  pour  la  sépulture  des 
religieuses.  Césarie,  sa  sœur,  fut  la  première 
supérieure  de  ce  monastère.  Elle  s'était  for- 
mée auparavant  dans  les  exercices  de  la  vie 
monastique  à  Marseille,  dans  un  monastère 
de  filles,  fondé  comme  l'on  croit  par  Cassien  ; 
mais  parce  que  les  règlements  qui  s'obser- 
vaient dans  les  différentes  communautés,  soit 
de  filles ,  soit  de  moines,  n'étaient  point  uni- 
formes, saint  Césaire,  pour  fixer  le  genre  de 
vie  de  son  nouveau  monastère ,  composa  la 
règle  qu'on  y  devait  suivre. 

2.  Elle  est  divisée  en  quarante-trois  ar- 
ticles, dont  voici  les  plus  remarquables.  Celle 
qui,  après  avoir  quitté  ses  parents  et  renoncé 


Tom.  VI  m 
MIolli.      Pal 

r«p.   eu 

«iq. 


tt 


ntelcs  do 
saint  C6salie 
pour  les  iiioi- 
na  et  pour  les 
roligieusos.    . 


Analisa  dé 
la  lêïle  l'our 
les  Reli^iou- 
scs.  Cod,  B(g. 
Ijoi',  14,  l.ail. 


'  Cod.  reg.,  part.  2,  pug.  54. 


»  Ibid.,  part.  3,  pag.  25. 


118 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


î.nioiti.VllI 
B>l>:i..r,.  Cal. 
j.^.   SU    et 

SC(|. 


N'tiin.  (f,49, 
ei  io  BËcapItu* 
lai.    Duin.  "im 


Hum,  ».•), 


au  monde,  s'iitait  engagée  à  vivre  dans  le  mo- 
nastère pour  y  éviter,  avec  le  secours  de  Dieu, 
les  occasions  du  péché ,  ne  pouvait  en  sortir 
jusqu'à  la  mort.  Aussi  l'éprouvait-on  pen- 
dant un  an  avant  de  lui  donner  l'habit.  Du- 
rant ce  temps,  elle  demeurait  sous  la  conduite 
d'une  des  ancienues,  qui  n'oubliait  rieu  pour 
s'assurer  de  la  vocation  de  sa  novice.  Après 
cette  épreuve,  il  était  au  pouvoir  de  la  supé- 
rieure de  lui  donner  l'habit  de  la  religion,  et 
de  lui  accorder  un  lit  dans  la  chambre  com- 
mune où  toutes  les  religieuses  couchaient. 
S'il  se  présentait  des  veuves  ou  des  femmes 
qui  avaient  quitté  leurs  maris,  apparemment 
de  leur  consentement,  on  ne  les  admettait 
pas  qu'elles  n'eussent  disposé  de  leurs  biens 
par  écrit,  afin  qu'à  l'avenir  elles  n'eussent 
plus  rien  en  propre.  On  en  usait  de  môme  à 
l'égard  des  filles  mineures.  Il  n'était  permis 
à  aucune  religieuse,  pas  même  à  l'abbesse, 
d'avoir  une  servante  à  soi  ;  mais,  dans  le  be- 
soin, elle  pouvait  se»faire  soulager  par  quel- 
qu'une des  jeunes.  On  recevait ,  mais  avec 
peine,  les  petites  filles  de  six  ou  sept  ans, 
pourvu  qu'on  leur  vil  des  dispositions  à  ap- 
prendre les  belles  -  lettres,  et  à  obéir.  Mais 
on  tie  prenait  point  des  pensionnaires  ,  soit 
qu'elles  fussent  de  qualité,  ou  non.  Le  choix 
du  travail  des  mains  ne  dépendait  pas  des  re- 
ligieuses; c'était  à  la  supérieure  de  le  pres- 
crire à  chacune  d'entre  elles,  suivant  qu'elle 
lo  trouvait  utile.  Aucune  n'avait  ni  chambre, 
ni  armoire,  ni  rien  qui  fermât.  Elles  cou- 
chaient toutes  en  diûerents  lits,  mais  dans 
une  même  chambre.  Les  vieilles  et  les  in- 
firmes avaient  une  autre  chambre  commune 
où  elles  demeuraient.  Les  lits  étaient  simples, 
sans  aucun  ornement  aux  couvertures ,  et 
leurs  habits  blancs.  Leur  coiti'urc  ne  pouvait 
excéder  la  hauteur  d'un  pouce  et  de  deux 
bgnes.  Jamais  elles  ne  devaient  élever  leur 
voix  en  parlant,  ni  causer,  ni  travailler  pen- 
dant la  psalmodie,  ni  sen-ir  de  marraine  dans 
le  baptême.  On  reprenait  celles  qui  venaient 
tard  à  l'Olfice  divin.  Si  elles  ne  se  corrigeaient 
pas,  après  avoir  été  averties  une  seconde  et 
troisième  fois, onles  séparait  de  la  communion, 
ou  de  la  table  commune.  On  séparait  aussi  de 
la  prière  commune  ou  de  la  taijle,cellesqui,au 
lieu  de  s'humilier  de  leurs  fautes,  entrepre- 
naient de  les  excuser  ou  refusaient  d'obéir. 
Chacune  devait  ser\ir  à  son  tour,  soit  à  la  cui- 
sine, soi  t  dans  les  autres  olUces|du  monastère, 
excepté  la  supérieure.  Le  travail  que  celle-ci 
prescrivait  pour  les  veilles  devait  être  de  telle 


nature  qu'il  n'empêchât  point  l'attention  à  la 
lecture  que  l'on  y  faisait  ;  ce  travail  n'étant 
permis  que  pour  ôter  l'envie  de  dormir  en  ces 
heures-là.  Si  quelqu'uned'ellesselaissaitaller 
à  l'assoupissement,  on  l'obligeait  à  se  tenir  de- 
bout pendant  que  les  autres  étaient  assises.  Le 
travail  ordinaire  était  en  laine.  Chaque  jour  «„„.  n, 
on  distribuait  à  chacune  la  tâche  qu'elle  de- 
vait remplir.  Toute  propriété  était  défendue,  t:. 
même  dans  les  habits.  On  gardait  le  silence 
pendant  les  repas,  afin  d'être  plus  attentif 
à  la  lecture.  C'était  à  celle  qui  présidait  à  la  „ 
table  commune  de  pounoir  aux  besoins  de 
chacune  ;  et  quand  il  était  nécessaire  de  de- 
mander quelque  chose,  ce  devait  être  plutôt 
par  signe  que  de  la  voix.  Après  Dieu  toutes  i-. 

devaient  obéir  à  la  mère  du  monastère.  Elles 
apprenaient  toutes  à  lire  et  à  écrire ,  et  fai- 
saient chaque  jour  deux  heures  de  lecture  , 
depuis  six  jusqu'à  huit  heures  du  matin.  Le  ' 

reste  du  jour  elles  travaillaient  à  divers  ou- 
vrages, ne  parlant  que  quand  il  en  était  be- 
soin. On  hsait  pendant  une  partie  du  travail  „_ 
qui  se  faisait  en  commun,  après  quoi  chacune 
méditait  ou  priait.  Celles  qui  possédaient 
quelques  biens  dans  le  monde,  les  offraient 
humblement  à  la  supérieure,  en  entrant  dans 
le  monastère ,  poui-  l'utilité  de  toutes  ;  mais 
comme  celles  qui  n'y  apportaient  rien  ne 
devaient  pas  y  chercher  ce  qu'elles  n'auraient 
pas  eu  dans  le  monde  ;  de  même  aussi  cel- 
les qui  apportaient  quelque  chose ,  ne  de- 
vaient pas  s'en  orgueiUir,  ni  en  prendre  oc- 
casion de  mépriser  les  autres. 

3.  La  /îèf/le  recommande  le  soin  des  in- 
firmes.  Elle  établit  un  proviseur  ou  intendant 
pour  les  atlàircs  du  dehors.  Elle  défend  sous  zi. 

des  peines  grièvesauxrefigieuscsparticuhè- 
res  de  recevoir  en  secret  des  lettres,  ou  des 
présents  de  qui  que  soit,  ni  d'en  envoyer, 
sans  la  permission  de  l'abbesse.  C'est  elle  qui 
ordonne  la  discipline,  c'est-à-dire,  la  llagel- 
lation,  même  en  présence  de  la  communauté, 
contre  celles  qui  se  trouveront  coupables 
de  fautes  publiques,  comme  d'avoir  usé  do  «. 

termes  injm-ieux  et  de  reproches  envers  leurs 
sœurs,  de  les  avoir  fiappées,  ou  d'avoir  volé 
quelque  chose  dans  le  monastère.  Elle  veut  j^ 
que  l'abbesse,  qui  doit  veiller  non-seulement 
au  salut  des  âmes ,  mais  encore  à  la  con- 
servation des  biens  du  monastère,  et  aux 
besoins  de  la  vie,  rende  politesse  pour  poli- 
tesse aux  personnes  du  dehors ,  et  qu'elle  ^ 
fasse  réponse  à  toutes  les  lettres  des  fidèles  ; 
et  que  celles  qui  sont  chargées  du  soin  du 


CITAPITnE  IX.  —  SAINT  CI^^SAIHE,  ÉVÊQUE  D'ARLES. 


33,  31 


[VI'  SIÈCLE.] 

vostiairc ,  fournissont  atix  sœurs  les  babils 
nécessaires  :  ils  daieiit  de  laine;  el  les  reli- 
gieuses les  faisaient  elles-mômes.  S'il  restait 
des  vivres  an  delà  du   besoin  journalier,  on 
les  enfermait  sous  la  clef.  Il  y  avait  une  ca- 
viste cliarj;ée  de  ilistribuer  le  vin  aux  sœurs 
suivant  leurs  besoins  ;  et  il  u'était  pas  permis 
à  celle  qui  en  avait  reçu  par  présent  de  le  dis- 
tribuer, ni  d'en  prendre  pour  elle-même. Non- 
seulement  on  accordait  les  bains  <i  celles  qui 
étaient  malades  ;  mais  encore  on  les  obligeait 
d'en  user  lorsque  les  médecins  l'ordonnaient 
ainsi  :  mais  on  ne  les  permettait  point  ;\  celles 
qui  étaient  en  santé.  Le  soin  des  infirmes 
était  confié  à  une  sœur  sage,  qui  savait  ac- 
corder l'observance  régulière  avec  la  charité 
et  la  condescendance  qu'on  doit  aux  malades. 
Si  la  nécessité  le  demandait,  et  la  supérieia-e 
le  jugeait  à  propos ,  on  faisait  une  cuisine 
à  part  pour  les  infirmes.  11  y  avait  aussi  des 
sœurs  chargées  du  soin  de  la  cave,  du  vestiaire, 
de  la  bibliothèque,  des  outils  nécessaires  à  dif- 
férents ouvrages  qui  se  faisaient  dans  le  mo- 
nastère.  Celles  qui  s'en  acquittaient  négligem- 
ment étaient  punies.  Lorsqu'il  arrivait  que 
l'abbesse  excommuniait  une  de  ses  religieu- 
ses pour  quelque  faute,  on  la  séparait  de  la 
communauté  ;  et  on  la  mettait  dans  le  lieu  que 
l'abbesse  ordonnait,  pour  y  vivre  avec  une  des 
sieurs  les  plus  spirituelles,  jusqu'à  ce  qu'elle 
eût  obtenu  le  pardon  par  sa  pénitence.  Mais 
lorsque  l'abbesse  ou  la  supérieure  avait  excé- 
dé en  traitant  avec  des  paroles  trop  dures 
celle  qui  avait  fait  une  faute,  elle  ne  devait 
point  lui  en  faire  d'excuse,  de  peur  que  cet 
acte  d'humilité  envers  une  personne  qui  lui 
était  soumise  ne  diminuât  son  autorité.  C'é- 
tait donc  à  Dieu  seul  qu'elle  devait  demander 
pardon  de  l'excès  qu'eUe  avait  commis. 

4. Outre  l'abbesse  qui  était  regardée  comme 
la  mère  du  monastère,  il  y  avait  deux  autres 
supérieures,  à  qui  toutes  les  religieuses  de- 
vaient obéir,  l'une  qui  avait  le  nom  d'inten- 
dante, l'autre  de  primicière.  11  n'était  permis 
à  personne,  soit  homme,  soit  femme,  d'en- 
trer dans  l'église  du  monastère,  si  ce  n'était  à 
des  évèques,  des  abbés  ou  des  religieux  de 
vertu  connue ,  pour  y  faire  leurs  pi'ières  ;  ou 
au  proviseur,  au  prêtre,  au  diacre,  au  sous- 
diacre  et  à  deux  lecteurs,  pour  la  célébration 
de  la  sainte  messe  ;  bien  moins  leur  était-il 
permis  d'entrer  dans  l'intérieur  du  monas- 
tère. L'évéque  le  pouvait  toutefois  en  cas  de 
nécessité,  de  même  le  proviseur,  et  les  ou- 
vriers pour  les  réparations  des  bidiments. 


149 


mais  toujours  de  l'agrément  de  l'abbesse.  Il 
y  avait  un  |)arloir  pour  recevoir  les  visites; 
l'abbesse  ne  devait  y  aller  qu'accompagnée 
de  deux  ou  (rois  somu's,  les  autres  avec  une 
aucieunc.  Il  était  défendu  de  donner  à  nian-  ««m.  jo, 
ger  àpcrsoinie,  pas  même  à  l'évéque  du  lieu, 
ni  au  proviseur  du  monastère.  On  le  pouvait, 
mais  rarement,  à  des  femmes  de  la  ville,  re- 
commandable»  par  leurs  vertus  et  par  leuraf- 
feclion  pour  le  monastère.  A  l'égard  des  fem- 
mes étrangères  qui  venaient  ou  pour  recher- 
cher leurs  filles,  ou  pour  rendre  leur  visite , 
il  était  au  pouvoir  de  l'abbesse  do  les  inviter 
à  manger.  Si  quelqu'un  voulait  voir  sa  fille,  n. 

ou  sa  parente,  on  ne  lui  refusait  pas  de  parler 
avec  elle,  pom'vu  que  ce  fût  en  présence  d'une 
ancienne. L'abbesse  ne  pouvait  se  dispenser  de 
manger  avec  la  communauté,  à  moins  qu'elle 
ne  fut  malade  ou  occupée  légitimement.  Il  3,. 
était  de  sou  devoir  de  prévenir  celles  qui, 
étant  d'une  faible  complexion,  ne  pouvaient 
soutenir  les  jeûnes  et  les  autres  austérités,  et  n,. 

qui  néanmoins  avaient  honte  de  lui  exposer 
leurs  besoins.  Pour  éviter  les  continuelles 
importunités  des  pauvres,  elle  devait  charger 
le  proviseur  de  leur  faire  distribuer  les  au- 
mônes que  le  monastère  était  en  état  de  faire. 
Comme  il  n'était  permis  à  aucune  religieuse 
de  donner  quelque  chose  du  monastère,  il 
leur  était  encore  défendu  de  rien  recevoir, 
même  de  leurs  parents,  qu'avec  la  permission 
de  l'abbesse,  ou  à  son  absence,  de  quelqu'au- 
tre  supérieure  de  la  maison.  Quand  ou  don-  3,. 

nait  des  habits  neufs  à  une  religieuse,  elle 
devait  rendre  les  vieux,  siellen'en  avaitplus 
besoin,  afin  de  les  donner  aux  pauvres,  ou  à 
des  novices.  Ces  habits  étaient  de  laine  blan- 
che. Il  n'était  pas  permis  d'en  porter  de  noirs 
ou  d'une  autre  couleur.  On  ne  gardait  aucun 
tableau  dans  l'intérieur  du  monastère,  et  on 
ne  permettait  aucune  peinture  après  les  mu- 
railles, ni  dans  les  chambres.  Les  ornements 
mêmes  de  l'église  n'étaient  que  de  laine  ou 
de  toile,  sans  broderie  ni  Ueurs;  seulement 
on  y  mettait  des  croix  de  couleur  noire  ou 
blanche.  Si  l'on  en  offrait  de  plus  précieux, 
on  les  vendait  au  profit  du  monastère,  ou  on 
les  faisait  servir  à  l'usage  de  la  basilique  de 
la  Sainte -Vierge.  Au  reste  il  était  expressé- 
ment défendu  aux  religieuses  de  recevoir  au- 
cun habit ,  soit  des  clei'cs ,  soit  des  laïques, 
fussent-ils  parents,  pour  les  teindi-e,  les  cou- 
dre, les  laver,  ou  les  garder,  sans  une  per- 
mission expresse  de  l'abbesse. 
o.  L'expérience  ayant  fait  connaître  à  saint      Bécif-iuia- 


130 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


'""■<™"T"°-  Césaire  que  cette  Rèqle  u'ctait  point  dans  sa 
î>t!îrJ' c.i5'  peifectiou,"  il  y  ajouta  une  seconde  partie 
lî"  wm!^?ii  ^o"s  le  litre  de  Récapitulation,  qui  conlieut 
r«;.'°8-!'6.''"'  diverses  additions  à  la  première  partie,  et 
quelques  cluingements.  Elle  est  composée  de 
viiigt-un  articles;  mais  on  convient  que  les 
deux  derniers  ont  clé  tirés  de  la  Règle  de 
saint  Benoît,  et  ajoutés  après  coup.  Les  six 
premiers  ne  prescrivent  rien  qui  ne  soit  dans 
la  R!-<jle.  Le  septième  marque  la  hauteur  des 
coill'ures,  ainsi  que  nous  l'avons  rapporté.  Il 
est  dit  dans  le  huitième,  que  lorsqu'il  se  pré- 
sentera une  postulante,  on  lui  lira  plusieurs 
fois  la  règle  dans  le  parloir,  et  qu'on  ne  l'ad- 
meltra  dansle  monastère  que  lorsqu'elle  aura 
promis  lihremcnt  d'accomplir  le  contenu  de 
la  Règle.  Le  neuvième  veut  que  l'abbesse  tien- 
ne les  clés  des  portes  pendant  le  repos.  Le 
dixième  lui  ordonne  de  pourvoir  aux  besoins 
de  ses  sœurs.  Il  est  dit  dans  le  douzième, 
qu'après  la  mort  de  l'abbesse,  les  religieuses 
doivent  choisir  pour  lui  succéder  celle  qui 
aura  le  plus  de  vertu  et  de  talent  pour  le 
gouvernement,  sans  avoir  égard  dans  leur 
choix,  ni  à  la  qualité  de  la  naissance,  ni  à  la 
parenté.  Le  treizième  est  une  exhortation  à 
l'observation  de  la  règle.  Il  est  défendu  dans 
le  quatorzième  de  rien  reli-ancher  de  cette  Ré- 
capitulation que  saint  Césaire  dit  avoir  écri- 
te et  souscrite  de  sa  main,  ni  d'y  rien  chan- 
ger; permettant  aux  religieuses  de  résister, 
en  ce  cas,  à  leur  abbesse,  avec  le  respect  con- 
venable; et  de  recourir 'aux  lettres  du  très- 
saint  l'ape  de  Rome,  pour  s'autoriser  dans  le 
maintien  de  l'observance.  Il  laisse  à  la  pru- 
dence de  l'abljcsse  de  régler  les  jeunes  depuis 
la  Pentecôte  jusqu'au  premier  jour  de  sep- 
tembre; mais  ilordonne  que,  tout  ce  mois  et 
celui  d'octobre,  les  religieuses  jeûneront  le 
lundi,  le  mercredi  et  le  vendredi;  et,  depuis 
le  premier  de  novembre  jusqu'à  Noël,  tous  les 
jours,  hors  les  fêtes  et  le  samedi.  Il  prescrit 
sept  jours  de  jeûne  avant  l'Epiphanie,  et  de- 
puis ce  jour  jusqu'au  Carême,  le  lundi,  le  mer- 
credi et  le  vendredi.  Au  jour  de  Noël  et  de 
l'Epiphanie,  les  veilles  se  continuaient  depuis 
la  troisième  heure  de  la  nuit  jusqu'au  jour; 
voilà  ce  que  contient  le  quinzième  article. 
Le  seizième  marque  ce  qui  regarde  les  repas 
et  la  quantité  de  mets  que  l'on  devait  ser- 
vir à  la  conununauté.  Dans  tous  les  jours  de 

'  Ex  noslro  pcrmissu  in  hnc  parte  cam  reve- 
renlia  et  gravitate  re!<istile,el  hwc  fieri  nuUa  ra- 
lione  jiermiltalis  :  .ixt  secundum  gacram  sanclis- 
simi  Papa:  urbis  Roinœ  vos  munire  in  omnibus 


jeûne  on  donnait  trois  portions,  et  deux  seu-  | 

lement  lorsque  l'on  dînait.  Aux  jours  des  [ 

grandes  fêtes  on  ajoutait  quelques  portions, 
soit  à  diner,  soit  à  souper.  En  été  comme  en 
hiver,  on  servait  deux  portions  à  diner  et 
trois  à  souper;  mais  les  jeunes  religieuses 
n'en  avaient  que  deux.  Jamais  on  ne  servait 
de  viandes  à  la  communauté.  A  l'égard  des 
inflrmes  on  leur  donnait  de  la  volaille,  et  non 
de  grosse  viande,  si  ce  n'est  que  dans  quel- 
ques maladies  désespérées  l'abbesse  crût  de- 
voir en  user  autrement.  Dans  le  dix-huitième 
article,  saint  Césaire  recommande  aux  reli- 
gieuses de  prier  pour  lui,  pour  ses  succes- 
seurs et  pour  les  fondateurs  du  monastère, 
dans  les  otiices,  soit  du  jour,  soit  de  la  nuit. 
Il  dit  dans  le  dernier  article  qu'il  avait  fait  fer- 
mer certaines  portes,  pour  une  plus  exacte 
clôture,  et  défend  de  les  ouvrir  à  l'avenir,  sous 
quelque  prétexte  d'utilité  que  ce  soit.  A  ces 
dix-neuf  articles  on  en  a  ajouté  deux  autres, 
tirés,  comme  nous  l'avons  dit,  de  laR'^glede 
saint  Benoit.  Le  premier  regarde  lacellerière 
du  monastère,  et  le  second  la  portière.  Telle 
est  la  Règle  de  saint  Césaire,  la  plus  ancienne 
que  l'on  connaisse  avoir  été  faite  pour  des  reli- 
ligieuses  cloitrées.  Césarie  la  jemie,  abbesse 
du  monastère  de  saint  Césaire,  la  communi- 
qua vers  l'an  356  à  sainte  Radégondc,  qui  la 
fit  pratiquer  -  et  la  pratiqua  elle-même  dans 
le  monastère  de  Sainte-Croix  qu'elle  avait 
fondé  à  Poitiers. 

6.  La  Règle  que  saint  Césaire  établit  pour  |„'*'^,';„''„'°' 
les  moines  est  moins  étendue.  Elle  porte  ^^  j,  \'^\ 
quelquefois  le  nom  de  Téride,  parce  que  ce  "' 
prêtre,  qui  était  disciple  du  saint  évéque, 
l'avait  écrite  sous  lui,  et  qu'il  avait  eu  ordre 
de  la  répandre  dans  les  provinces.  Elle  est 
divisée  en  vingt-six  articles,  dont  voici  le 
précis  :  On  ne  recevait  personne  dans  le  mo- 
nastère, qu'il  n'eût  dessein  d'y  persévérer 
jusqu'à  la  mort,  et  on  ne  lui  donnait  pas  l'ha- 
bit monastique  qu'il  n'eût  disposé  par  écrit 
de  tous  ses  biens,  soit  en  faveur  de  ses  pa- 
rents ou  du  monastère,  afin  quil  n'eût  plus 
rien  en  propre.  Si  ses  parents  vivaient  en- 
core, on  attendait  leur  mort  pour  l'obliger  à 
disposer  des  biens  qu'il  avait.  D  les  donnait 
alors  à  l'abbé,  ne  s'en  réservant  rien  ;  il  lui 
donnait  aussi  tout  ce  que  ses  parents  lui  en- 
voyaient. Si  toutefois  il  en  avait  besoin, l'abbé 

siudete.  C.Tsar.  iu  Rerapit.,  nuin.  13. 

»  Marlen..  Tom.  I  Anecd.,  pag.  4.  et  Fortunal., 
lit).  VIII,  pnp.  IV. 


CnAPITHE  IX.  —  SAINT  CIÏSAIHE,  ÉVOQUE  D'ARLES. 


nr     l'0:fice 


[vi°  siÈaE.] 

lui  en  laissail  l'iisncrc;  s'il  n'en  avait  pas  be- 
soin, on  en  liisposait  pourl'ulililiWIe  la  com- 
ininianté.  Tonti'lait  foninnin  dans  le  mon.is- 
lèrc.  Les  moines  n'iivaient  ni  chamlno  parti- 
culière, ni  armoire,  ni  rien  qui  fermât.  Tons 
(Icmenraient  ensemble  ilansnne  cliambrc.  Il 
leur  ('lait  (U'icnilu  de  jurer,  ni  ilo  maiuliro  per- 
sonne :  si  (juelqu'iin  était  trouvé  a  mentir,  on 
lui  imposait  une  pc'nitencc  réç;nlière.  11  n'é- 
tait pas  A  leur  ponvoirdc  se  cbnisir  un  travail 
particulier,  mais  ils  devaient  taire  celui  qui 
était  ordonné  par  le  snpé'rienr.  Il  leur  était 
défendu  de  parler  pendant  la  psalmodie,  de 
môme  que  pendant  le  repas;  et  alin  de  don- 
ner de  la  nourriture  ;\  l'âme  pendant  qne  le 
corps  prenait  sa  n'fection,  c'était  l'usage  de 
lire  pendant  que  les  antres  mangeaient.  L'en- 
trée dn  monastère  était  absolument  défen- 
due aux  femmes.  On  appelait  les  frères  aux 
divers  exercices  par  le  son  de  quelque  ins- 
trument. Ceux  qui  venaient  lard  étaient  pu- 
nis de  leur  paresse ,  en  recevant  sur  la  main 
jilusieurs  coups  de  férule.  Il  n'était  pas  per- 
mis de  répondre  lorsque  l'abbé,  ou  le  prévôt, 
ou  quelqu'un  des  anciens,  faisait  la  correc- 
tion. S'il  arrivait  que  deux  moines,  irrités  l'un 
contre  l'autre,  usassent  de  paroles  dures,  ou 
qu'ils  eussent  ensemble  quebiue  dispute,  ils 
devaient  se  demander  pardon  mutuellement 
avant  le  coucher  du  soleil,  dans  la  persua- 
sion que  la  prière  de  celui  qui  est  en  colère 
n'est  pas  reçue  de  Dieu,  et  qu'il  ne  lui  est  pas 
permis  de  s'approcher  de  la  sainte  commu- 
nion. En  tout  temps  les  moines  s'occupaient 
à  la  lecture  jusqu'à  l'heure  de  tierce,  ensuite 
ils  travaillaient  des  mains,  suivant  l'ordre  de 
l'abbé.  On  ne  devait  rien  faire  à  son  insu,  ni 
recevoir,  ni  écrire  des  lettres  sans  sa  permis- 
sion. C'était  à  lui  de  pourvoir  à  la  nourriture 
et  au  vêtement  de  ses  religieux,  étant  juste 
que  ceux  qui  ne  devaient  rien  avoir  en  pro- 
pre reçussent  de  leur  abbé  les  choses  néces- 
saires. On  devait  avoir  un  grand  soin  des  in- 
firmes, afin  de  leur  procurer  un  prompt  réta- 
blissement. 

7.  Saint  Césaire  exhorte  les  religieux  à 
s'acquitter  avec  joie  et  bonne  volonté,  des 
exercices  de  la  vie  monastique,  et  à  mettre 
leur  émulation  à  se  surpasser  les  uns  les 
autres  en  humilité,  en  charité,  en  patience, 
en  douceur,  en  zèle  pour  l'Oifice  de  Dieu  et 
dans  la  pratique  des  autres  vertus.  Il  règle 
ensuite  l'olfice  divin,  voulant  que  dans  les 
veilles,  depuis  le  mois  d'octobre  jusqu'à  Pâ- 
ques, ils  disent  deux  nocturnes  et  fassent  trois 


131 


fois  l'assemblée  jinur  la  prière,  ot  que,  dans 
l'iiilcrvalle  do  chacime,  un  d(!la  communau- 
té fasse  uiU!  leclure  en  présence  de  tous.  11 
manpie  dans  la  distribution  de  l'Otlice  les  ré- 
pons et  les  anlionncs  qu'on  devait  réciter, 
suivant  l'ordre  du  Psautier,  les  chapitaux  et 
les  psaumes  ;  il  met  douze  psaum(!s  [)Our  les 
samedis  et  les  diuianclu^s,  et  les  fêtes;, trois 
antiennes  et  trois  leçons  :  une  des  prophè- 
tes, une  de  l'Apôtre  et  une  de  l'iîlvangile.  Il 
ordonne  six  messes  ou  collectes,  c'est-à-dire 
dos  prières  communes  pour  chaque  dimanche 
de  l'année.  Depuis  Pâques  jusqu'au  mois  do 
septembre,  les  religieux  jeûnaient  le  mercre- 
di et  le  vendredi  seulement  ;  mais  depuis  le 
mois  de  septembre  jusqu'à  Noël  ils  jeûnaient 
tous  les  jours.  Ils  jeûnaient  aussi  les  deux 
semaines  qui  précédaient  le  Carême,  excep- 
té le  jour  du  dimanche,  jour  auquel  il  n'est 
pas  permis  déjeuner  à  cause  de  la  résurrec- 
tion du  Seigneur.  Le  jour  du  dimanche  était 
aussi  excepté  des  jeûnes  du  Carême.  Depuis 
lejourde  iVoël  jus(jiraux  deux  semaines  qui 
précédaient  le  Carême,  les  religieux  jeû- 
naient les  lundis,  les  mercredis  et  les  vendre- 
dis :  les  jours  déjeunes,  on  donnait  trois  por- 
tions et  deux  seulement  aux  joiu's  que  l'on  ne 
jeûnait  pas.  Il  était  défendu  d'avoir  auprès 
de  soi  de  quoi  boire  et  manger  hors  la  cham- 
bre commune  pour  la  réfection.  Celui  qui  se 
trouvait  excommunié  pour  quelque  faute  était 
renfeimé  dans  une  chambre ,  où ,  avec  un 
ancien,  il  s'appliquait  à  la  lecture  jusqu'à  ce 
qu'il  eût  obtenu  le  pardon.  La  volaille  et  la 
grosse  viande  étaient  défendues  à  ceux  qui 
se  portaient  bien;  mais  on  donnait  aux  infir- 
mes tout  ce  qui  leur  était  nécessaire.  A  la  fin 
de  cette  Règle,  saint  Césaire  exhorte  en  peu 
de  mots  ses  religieux  de  rendre  do  continuel- 
les actions  de  grâces  à  Dieu,  de  les  avoir 
retirés  du  monde  pour  les  appeler  au  port 
du  repos  et  de  la  religion  ;  de  penser  sans 
cesse  à  l'état  qu'ils  avaient  quitté  et  à  celui 
qu'ils  avaient  embrassé;  et  de  se  tranquilliser 
tellement  sur  leur  passé,  qu'ils  ne  s'occupas- 
sent que  de  leur  avenir,  en  se  persuadant  que 
les  péchés,  que  nous  avons  commis,  renais- 
sent pour  ainsi  dire  aussitôt,  si  nous  n'avons 
soin  tous  les  jours  d'en  faire  tarir  la  source 
par  nos  bonnes  œuvres. 

8.  On  a  mis  à  la  fin  de  la  Règle  de  saint 
Césaire  aux  religieuses,  une  exhortation  à   !«<-cod.°R 

^  pari.    3,    J., 

peu  près  semblable,  mais  beaucoup  plus  lon- 
gue. Le  commencement  est  entièrement  dans 
les  mêmes  termes.  Ce  qu'il  ajoute  est  pour 


Dlscf.ups 
aux    relîgicu- 


4S2 


HISTOIRE  GENERALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Lettre  l  O- 
ntnrio.  Co<l. 
II.),-.  Hri.  1, 
|3g.  31. 


les  engager  à  vivre  dans  la  sobri(5t(?,  à  n'ai- 
mer le  luxe,  ni  dans  les  vêtemeuts.  ni  dans 
les  repas  ;  mais  aussi  à  ne  point  alFecter  de 
s'iiabiller  tnip  pauvrement,  ni  ù  pousser  trop 
loin  leur  abstinence;  à  s'appliquer  à  la  lec- 
ture des  livres  saints  pour  tirer  de  ces  sour- 
ces divines  l'eau  du  salut  ;  à  se  rt^jouir  plu- 
tôt de  l'état  humble  de  la  religion  fpic  de  la 
noblesse  do  leur  extraction,  si  edcctivement 
elles  étaient  d'une  naissance  distinguée  dans 
le  monde  ;  à  joindre  ;\  la  lecture  et  à  la  priè- 
re le  travail  des  mains,  sachant  que  saint 
Paul  a  dit,  que  celui-là  ne  doit  point  manger 
qui  ne  veut  point  travailler;  à  bannir  de 
leur  chambre  tous  les  ornements  superflus, 
et  h  s'appliquer  tellement  à  conserver  lem* 
corps  pur,  qu'elles  évitent  toutes  les  occa- 
sions de  souiller  leur  ûme  par  le  péché.  Il 
est  remarqué  •  dans  la  vie  de  saint  Césaire, 
qpi'il  y  avait  des  religieuses  de  son  monas- 
tère qui  s'occupaient  à  écrire  en  belles-let- 
tres les  livres  saints. 

§  V. 
Des  Lettres  de  saint  Césaire. 

1.  Nous  mettons  au  nombre  des  lettres 
l'instruction  que  saint  Césaire  envoya  à  Ora- 
torio, abbesse  du  monastère  d'Arlue,  bâli 
sur  la  côte  de  la  mer,  par  Nazaire,  abbé  de 
Lérins.  Elle  est  en  effet  en  forme  de  lettre,  et 
porte  ce  titre  dans  le  Code  des  règles  de  saint 
Benoît  d'Anianc.  Le  saint  évèque  y  traite 
des  qualités  que  doivent  avoir  les  religieuses 
qui  sont  chargées  de  la  conduite  des  âmes. 
Elles  doivent  prendre  soin  du  temporel  des 
monastères,  mais  s'occuper  beaucoup  plus 
du  spirituel  ;  ne  doiuier  aux  atlaires  exté- 
rieures que  le  temps  nécessaire,  et  passer 
aussitôt  à  la  prière  ou  à  la  lecture;  se  ren- 
dre le  modèle  de  toutes  sortes  de  bonnes 
œuvres,  afin  d'engager  celles  qui  leur  sont 
soumises  à  les  pratiquer  ;  d'avoir  soin,  lors- 
qu'il est  besoin  de  donner  de  vive  voix  aux 
sœurs  queltjues  instructions,  de  ne  leur  pres- 
crire que  ce  dont  on  leur  donne  l'exemple. 
Il  veut  aussi  qu'une  supérieure,  avant  d'im- 
poser quelques  morlilicalions  à  sa  commu- 
nauté, éprouve  par  ellc-mèrae  si  l'austéiilé 
en  est  supportable  :  par  cxcuipie,  s'il  est  de 
la  piudence  de  leur  prescrire  des  jeûnes  ou 
des  abstinences  au  delà  de  la  /iègle  cl  de  la 
coutume.  Elle   doit  aussi,  lorsque  l'on   al- 

'  C.-csar.  VU.  lib.  r.nuro.  33. 


longe  la  psalmodie  plus  qu'à  l'ordinaire  dans 
l'assemblée,  se  trouver  la  première  à  l'égli- 
se et  n'en  sortir  que  la  dernière  ;  être  la  pre- 
mière au  travail  et  ne  le  quitter  que  la  der- 
nière; user  des  mêmes  aliments  et  de  la  mê- 
me table  que  la  communauté,  sans  en  affecter 
de  particuliers,  ni  de  mieux  apprêtés;  de 
n'affecler  point  non  plus  de  la  singularité 
dans  ses  babils,  et  de  ne  cluM-cber  à  surpasser 
les  autres  que  dans  la  vertu.  Saint  Césaire 
recommande  surtout  à  Oratorie  de  garder 
l'égalité,  soit  dans  la  distribution  des  tra- 
vaux, soit  dans  les  marques  d'amitié  et  de 
charité,  et  de  n'aimer  pas  plus  celles  dont 
les  façons  ou  le  visage  ont  plus  de  grice, 
mais  celles-là  seulement  dont  la  vie  est  plus 
vertueuse  ;  de  mêler  de  la  gravité  et  de  la 
douceur  daus  ses  discours  ;  de  ne  parler 
qu'autant  que  la  circonstance  du  temps  et 
des  affaires  le  demande  ;  de  donner  avec 
gaieté  à  celles  qui  représentent  leurs  besoins, 
et  d'adoucir  par  des  paroles  de  politesse  et 
de  bonté  ses  refus,  lorsqu'elle  ne  croira  pas 
devoir  leur  accorder  ce  qu'elles  auraient  de- 
mandé; de  prendre  avec  elle  deux  ou  trois 
des  sœurs  les  plus  parfaites,  lorsqu'elle  se 
trouvera  obligée  de  traiter  dans  le  particu- 
lier des  affaires  du  monastère;  enfin,  d'agir 
en  tout  pour  Dieu,  de  s'en  entretenir  et  de 
penser  souvent  à  lui. 

2.  On  croit  que  c'est  encore  à  Oratorie 
que  s'adresse  luie  autre  instruction,  qui  com- 
mence par  ces  paroles  de  l'Épitre  aux  Ro- 
mains :  0  profondeur  des  trésors  de  la  sagesse 
et  de  la  seience  de  Dieu!  Mais  ce  sentiment  ne 
paraît  point  soutenable,  puisque  cette  ins- 
truction est  mot  pour  mot  la  même  que  celle 
dont  nous  venons  de  parler,  si  l'on  en  excep- 
te une  trentaine  de  lignes  qui  en  font  le  com- 
mencement et  quelques  autres  qui  se  trou- 
vent vers  le  milieu.  11  est  donc  plus  vraisem- 
blable de  dire  qu'elle  s'adresse  à  quclqu'au- 
tre  vierge  consacrée  à  Dieu,  et  que  saint  Cé- 
saire se  servit  pour  l'instruire,  des  mêmes 
paroles  qu'il  avait  employées  daus  sa  lettre 
à  Oratorie.  11  fait  paraître  au  commencement 
de  celle  instruction  une  grande  humilité,  et 
n'omet  rien  pour  diminuer  l'idée  avanta- 
geuse que  sa  r(''putalion  avait  fait  concevoir 
de  lui  a  cette  vierge.  Il  y  avait  peu  de  temps 
qu'il  était  élevé  à  l'épiscopat  lorsqu'il  lui 
écrivit. 

3.  Il  nous  reste  deux  lettres  de  saint  Cé- 
saire à  Césarie  sa  sœur,  abbesse  du  monas- 
tère qu'il  avait  fondé  à  .\rlcs,  et  à  toutes  les 


LrltreAnpfl 

lltiço. 

II.WI 

1-art.    .1, 

l'«t- 

T..     01 

IDIH 

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Bil'l 

l'ai,  pig 

3o" 

Lrlt 
C»  jtlf. 

C]  al  ei. 


Ml    t 

nu. 


CHAPITRE  IX.  —  SAINT  CfeAlItK,  lîVftQOE  D'Ani.KS. 


[vr"  SlfXLE.] 

religieuses  do  sa  coinnniiiauti^.  Ci'sarie  s'oc- 
Ciii)alt  assidûment  de  la  leeluro  des  livres 
saints,  et  do  la  méditation  des  vërit(5s  qu'ils 
roiil'ciniPiit.  Connue  elle  élait  donc  parla  il  e- 
nient  inslrnih^  de  ses  devoirs,  ce  ne  l'ut  qu'a- 
vec peine  que  le  saint  évoque  lui  écrivit  sur 
ce  sujet,  et  dans  la  vue  seule  de  la  conduire 
à  uni!  plus  grande  perfection.  La  première 
chose  qu'il  lui  recommande  et  à  ses  reli- 
gieuses, est  de  savoir  quelle  est  la  volonté 
de  Dieu,  et  de  s'informer  exactement  de  ce 
qui  peut  lui  plaire  ou  lui  déplaire  ;  ensuite 
(le  combattre  foitemenl  contre  le  vice  de 
l'orgueil,  afin  qu'ayant  déraciné  cette  tète 
de  tous  les  péchés,  les  autres  soient  plus  fa- 
ciles .'i  détruire.  Il  lui  recommande  aussi 
cette  humilité  sincère  que  Jésus-Christ  nous 
a  enseignée  ;  de  ne  se  laisser  jamais  em- 
porter à  la  colère  ou  d'en  réprimer  les 
premiers  mouvements  aussitôt  qu'ils  com- 
mencent A  se  faire  sentir;  de  bannir  entiè- 
rement l'envie  ;  de  savoir  se  taire  et  parier 
î"!  propos,  parce  qu'il  est  des  temps  et  des  cir- 
constances où  il  n'est  point  permis  à  une  su- 
périeure de  se  taire  ;  d'éviter  toute  familia- 
rité avec  des  personnes  d'un  sexe  diil'érent, 
et  même  de  ne  s'en  souvenir  que  dans  une 
prière  très-pure  ;  de  ne  point  les  regarder  eu 
face,  à  moins  que  ce  ne  soit  des  prêtres  et  des 
lévites  d'une  vertu  éprouvée,  et  en  qui  l'a- 
mour de  la  charité  habite;  de  ne  pas  pren- 
dre plaisir  dans  la  douceur  de  la  voix  d'un 
lecteur,  de  peur  qu'il  n'en  rejaillisse  quel- 
que impression  fâcheuse  sur  les  autres  sens 
du  corps.  La  seconde  lettre,  excepté  le  com- 
mencement et  la  fin,  est  la  même  que  l'ex- 
hortation générale  aux  religieuses,  impri- 
mée dans  le  Code  des^  règles,  h  la  suite  de 
la  Règle  que  saint  Césaire  a  écrite  pour  des 
fdles.  Quelques-unes  disaient  qu'elles  n'a- 
vaient point  d'éloignement  pour  les  hom- 
mes, parce  qu'elles  voulaient  avoir  de  quoi 
vaincre.  Saint  Césaire  leur  dit  que  l'on  doit 
résister  de  toutes  ses  forces  contre  les  autres 
vices,  mais  qu'à  l'égard  de  l'impureté ,  le 
moyen  le  plus  sûr  est  d'en  fuir  l'occasion. 
Cette  lettre  a  été  imprimée  dans  le  huitième 
tome  de  la  BiOliot/ièque  des  Pères,  sous  le  ti- 
tre de  Lettre  à  certains  Germains ,  d'où  elle 
est  passée  dans  le  vingt-septième  volume  de 
la  même  bibliothèque,  mais  sans  ce  titre,  et 
avec  la  même  clause  qu'elle  a  dans  le  Code 
des  règles.  Saint  Césaire  y  dit  que  cetle  lettre, 
lorsqu'il  paraîtra  devant  le  tribunal  de  Jé- 
sus-Christ,  lui    servira   de    témoignage  de 


ir,.\ 


l'exactitude  avec  laquelle  il  avait  représen- 
té aux  lilles  do  son  monastère  les  devoirs 
de  leur  l'tat. 

•4.  A  la  suite  de  la  sixième  lettre  du  pape 
Jean  II,  à  saint  Césaire,  on  trouve  un  dis- 
cours très-pathétique  pour  l'exécution  des 
anciens  canons  sur  la  pénitence.  Quoiqu'il 
ne  porte  point  le  nom  de  saint  Césaire,  il 
n'est  presque  pas  douteux  qu'il  ne  soit  do 
lui.  On  y  reconnaît  son  génie,  son  style,  son 
zèle  pour  la  discipline  ecclésiastique.  Le  saint 
y  combat  particulièrement  ceux  qui  voulaient 
que  les  clercs  lUîposés  pour  les  mêmes  fautes 
qui  avaient  occasionné  la  déposition  de  Con- 
tuméliosus,  pussent  être  rétablis  dans  leur 
ministère.  Saint  Césaire  traite  cette  indtd- 
gencc  d'une  fausse  piété  et  d'une  fausse  mi- 
séricorde, parce  qu'il  n'est  pas  permis  de 
pardonner  à  un  coupable ,  dont  l'exemple 
peut  entraîner  un  grand  nombre  dans  le  dé- 
sordre. Il  s'autorise  en  cela  des  canons  de 
Nicée,  des  Églises  d'Afrique  et  des  Gaules, 
des  écrits  de  saint  Cyprien  et  de  saint  Chry- 
sostôme,  et  d'une  lettre  de  Fauste  de  Riez, 
sur  le  célibat  des  clercs,  qui  n'est  pas  venue 
jusqu'à  nous. 

5.  Nous  avons  parlé  dans  l'article  du  pape 
Symmaque  de  la  requête  que  saint  Césaire 
lui  présenta  pour  demander  la  condamnation 
de  plusieurs  abus  qui  avaient  cours  dans  les 
Gaules,  où  l'on  ne  faisait  guères  de  ditlicultés 
d'aliéner  les  biens  de  l'Église  et  même  de  s'en 
emparer  ;  et  où  l'on  admettait  souvent  dans 
le  clergé,  des  laïques,  sans  les  avoir  éprou- 
vés en  la  manière  prescrite  par  les  canons. 
Le  Pape  répondit  à  sa  recpiête  par  une  dé- 
crétale  datée  du  6  novemlire,  sous  le  consu- 
lat de  Probus,  c'est-à-dire  l'an  513.  Saint  Cé- 
saire, étant  à  Rome  la  même  année,  obtint 
par  une  seconde  requête  présentée  au  mê- 
me pape,  la  conservation  des  privilèges  de 
l'Église  d'Arles,  conformément  aux  règle- 
ments faits  par  saint  Léon,  comme  on  le  voit 
par  la  lettre  du  pape  Symmaque  aux  évê- 
ques  des  Gaules,  en  date  du  13  novembre 
513.  Par  une  autre  lettre  du  11  juin  514  ,  le 
même  pape  ordonna,  à  la  requête  de  l'abbé 
Egidius,  et  de  Messien  ,  notaire  de  saint  Cé- 
saire, que  ce  saint  évêquc  veillerait  sur  tou- 
tes les  affaires  ecclésiastiques  des  Gaules  et 
d'Espagne  ,  qu'il  en  assemblerait  les  évê- 
ques,  lorsqu'il  en  serait  besoin,  et  qu'ils  ne 
pourraient  venir  à  Home  sans  sa  permission. 
Il  ordonna  aussi  que  l'évêque  d'Aix  serait 
tenu  de  venir  aux  mandements  de  saint  Cé- 


dlreourit  do 
MiDt  C'Miret 
Ton.  IV  Con- 
oll.  pag.  tTtSt 


Hti]iiPtc?  do 
5<iiut  Cd^airo 
fM  [lape  Swn- 
nia']ue.  Toiii. 
IV.  Concil., 
pnf    1J57. 


IMd.    l^aç. 
1303   11   1310. 


151 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


saire,  soit  pour  les  conciles,  soit  pour  les  au- 
tres afTaires  ecclésiastiques. 
LeiireiBo.  6.  Quclqucs  aunées  auparavant,  c'est-à- 
i.«".'c;.°".'i,  dire  vers  l'an  306,  on  tint  à  .\gde  un  concile 
""^  '  de  plusieurs  évêques.  Ruricius,  évéque  de 
Limoges  fut  invité  à  s'y  rendre  ;  mais  soit 
que  la  lettre  d'invitation  ne  lui  eut  pas  été 
rendue,  soit  qu'il  eût  d'autres  raisons  de  ne 
point  se  trouver  à  cette  assemblée,  il  n'y 
vint  point.  Saint  Césairc,  qui  avait  présidé  à 
ce  concile,  eut  quelque  peine  de  n'y  point 
voir  l'évêque  Ruricius,  dont  il  respectait 
et  la  vertu  et  le  mérite.  Il  paraît  que  Ruri- 
cius lui  en  écrivit  une  lettre  d'excuse.  Mais 
saint  Césaire  ne  reçut  point  cette  lellre,  dont 
il  voulut  bien  rejeter  la  faute  sur  la  négli- 
gence du  porteur.  C'est  ce  qu'il  témoigne 
dans  celle  qu'il  écrivit  à  cet  évêque,  en  lui 
donnant  avis  que  l'on  avait  projeté  de  tenir 
un  autre  concile  à  Toulouse  l'année  suivante. 
Il  chargea  de  sa  leitre  le  prêtre  Capillutus 
qu'il  recommande  à  Ruricius,  en  disant  qu'il 
espérait  recevoir  de  lui  la  réponse  au  retour 
de  ce  prêtre. 
T.si.mfr.1       7    u  faut  mettre  parmi  les  écrits  de  saint 

Al*    -ami    C'.  A 

l'iro.    coj.   Césaire  son   Testament  adressé  aux  prêtres 

"■■s.    t»rt.  T,  r 

l'f.  53  et  aux  diacres  de  TEglise  d'Arles,  et  à  l'ab- 
besse  Gésarie,  qu'il  avait  lui-même  faite  su- 
périeure du  monastère  des  filles  établies  à 
Arles,  n  le  commence  en  souhaitant  la  pais  à 
cette  Église.  Après  quoi  il  déclare  qu'il  veut, 
qu'après  sa  mort,  le  monastère  de  Saiut-Jean, 
le  môme  que  celui  des  filles  qu'il  avait  fon- 
dé, et  dont  Césarie  était  supérieure,  demeure 
sous  la  puissance  de  l'évêque  d'Arles,  et  soit 
l'héritier  de  tous  ses  biens.  Et  dans  la  crainte 
que  quelques-uns  de  ses  parents  ne  vins- 
sent à  inquiéter  ce  monastère  ou  l'évêque 
son  successeur,  il  veut  que  n'ayant  possédé, 
étant  évéque,  aucuns  biens  de  sa  famille,  ils 
se  contentent  de  ce  qu'il  leur  avait  donné 
pour  les  reconnaître.  Il  prie  son  successeur, 
à  cpji  il  donne  le  nom  d'archevêque,  de  vou- 
loir bien  recevoir  de  lui  les  habits  dont  il  se 
revêtait  aux  fêtes  de  Pâques  ,  et  dont  on  lui 
avait  fait  présent.  Il  lui  lègue  aussi  quelques 
autres  vêtements,  lui  laissant  la  liberté  de 
distribuer  les  autres,  tant  à  ses  clercs,  qu'aux 
laïques,  peut-être  à  ceux  qui  l'avaient  servi. 
Il  ordonne  que  les  autres  donations  qu'il  pou- 
vait avoir  faites,  soit  par  letli'e  ou  de  vive 


voix,  aient  lieu.  Il  témoigne  un  grand  désir 
que  la  maison  du  sous-diacre  Auguste  serve  à 
loger  le  proviseur  du  monastère,  et  que  ces 
filles  n'aient  à  l'avenir  d'autre  proviseur,  et 
qu'il  n'y  ait  point  de  prêtres  pour  la  Basili- 
que de  Sainte-.Marie,  que  du  choix  de  l'ar- 
chevêque d'.\rles,  qu'il  conjure  par  la  sainte 
et  inséparable  Trinité  d'empêcher  que  ledit 
monastère  ne  soit  inquiété  dans  la  jouissance 
de  ses  biens,  de  ses  immunités  et  de  ses  pri- 
vilèges. Il  entre  dans  le  détail  de  certaines 
terres,  vignes  et  redevances  qu'il  lui  avait 
données,  voulant  que  si,  par  le  malheur  des 
temps,  ce  monastère  venait  à  être  détruit , 
tous  ces  biens  et  autres  qu'il  spécifie,  revien- 
nent à  la  mère  Église ,  de  qui  il  paraît  qu'il 
les  avait  tirés  avec  le  consentement  des  frè- 
res, c'est-à-dire  du  clergé,  pour  en  faire  do- 
nation à  son  monastère.  Il  fait  aussi  quel- 
ques petits  legs  à  l'abbesse  Césarie,  et  à 
quelques  autres  personnes,  recommandant 
tous  ses  domestiques  à  l'évêque  son  succes- 
seur. 

8.  On  ne  peut  guères  douter  que  le  nom- 
bre des  sermons  et  des  lettres  de  saint  Cé- 
saire n'ait  été  beaucoup  plus  grand  que  ce 
qui  nous  en  reste.  Les  lettres  de  plusieurs 
papes  qui  lui  sont  adressées,  supposent  clai- 
rement des  réponses  de  sa  part,  ou  qu'il  leur 
avait  écrit.  L  faut  dire  la  même  chose  des 
lettres  de  saint  Ruricius  de  Limoges,  d'En- 
node  de  Pavie,  et  de  saint  Avit  de  Vienne, 
adi'essées  à  ce  saint  évêque.  Nous  n'avons 
ni  celles  qu'il  leur  avait  écrites,  ni  les  répon- 
ses qu'il  devait  leur  avoir  faites.  Il  n'en  reste 
qu'uue  adressée  au  premier.  Nous  avons  aus- 
si perdu  la  lettre  que  saint  Césaire  écrivit  au 
pape  Félix  IV,  en  lui  envoyant  le  résultat  du 
second  concile  d'Orange,  tenu  en  529.  Par 
cette  lettre,  il  demandait  au  Pape  la  confir- 
mation des  décrets  de  ce  concile.  Félix  étant 
mort  pendant  qu'Arménius,  porteur  de  la 
lettre  de  saint  Césaire,  était  en  chemin  pour 
Rome,  Boniface  U,  à  qui  elle  fut  rendue,  fit 
ce  que  saint  Césaire  souhaitait  à  l'égard  du 
second  concile  d'Orange  par  une  lettre  da- 
tée du  23  janvier  530.  Quelques-uns  ont  at- 
tribué à  saint  Césaire  un  ouvrage  sur  la  grAce 
et  le  libre  arbitre.  Il  en  est  parlé  dans  l'article 
de  ce  saint'  ajouté  au  Catalogue  de  Gennade. 
Mais  l'auteur  de  cet  article  ne  dit  pas  que 


ftcrll 
ninr  O! 
qui  wnt 
dus. 


'•Ira 


'  De  gratia  quoque  et  libcro  arbilrio  edidil  tes- 
liinonia  diviiiarum  ScriiHuranim  cl  snndorum 
Pdirum  judiriis  munila,  ubi  doccl  hoiniiiem  uihil 
de  proprio  agere  buiii  passe,  nisi  eum  divina  gra~ 


lia  preveniril.  Quod  opus  eliam  papa  Félix  per 
suam  epislolam  roboravit,  et  in  lalius  promnl- 
gavit.  Ucuniul.  iii  Cal:il.,cap.  lxxxvi. 


[vi'sii:r.i.E.]        CHAPITRE  IX. 

saint  Ciisairo  ait  coaiposc  un  dcrit  exprès  sur 
cette  matière  :  mais  seulement  qu'il  avait 
recueilli  des  tt$moi;inag;cs  derKcriturc,  forti- 
fiés par  rautorité  des  l'ères,  pour  montrer 
que  riiomme  ne  peut  de  lui-même  faire  au- 
cuu  bien,  s'il  n'est  prévenu  de  la  grice  de 
Dieu.  Ce  qu'ajoute  cet  écrivain  que  le  Pape 
coiilirma  par  de  nouveaux  passages,  l'ou- 
vrage de  saint  Césaire,  fait  voir  ,  ce  semble, 
qu'il  faut  enleudre  par  cet  ouvrage,  les  dé- 
crets du  coucile  d'Orange  que  saint  Césaire 
avait  envoyés  à  Home  pour  y  ètrecontirmés, 
et  non  pas  un  écrit  particulier  de  ce  saint 
évéque  ;  si  ce  n'est  qu'étant  très-instruit  sur 
cette  matière,  et  fort  versé  dans  la  lecture 
des  écrivains  sacrés  et  ecclésiastiques,  il  ait 
lui  seul  fourni  la  matière  de  ces  décrets.  Il 
est  vrai  qu'on  n'y  cite  que  des  passages  de 
l'Écriture  ;  mais  il  est  certain  aussi  qu'ils 
sont  composés  des  propres  termes  des  Pères 
de  l'Église,  nommément  de  saint  Augustin; 
ainsi  que  Binius  '  l'a  remarqué  dans  ses  No- 
tes sur  ce  concile. 

§  VI. 

Jugement  des  écrits  de  saint  Césaire  :  éditions 
qu'on  en  a  faites, 

1.  Tout  plaît  dans  les  écrits  de  saint  Cé- 
saire. Le  style  en  est  uni,  net  et  simple  ;  les 
pensées  nobles,  mais  d'un  tour  aisé  ;  les  rai- 
sonnements solides  et  concluants;  les  exem- 
ples persuasifs,  et  toujours  à  la  portée  de 
ceux  pour  qui  il  écrivait.  Il  n'affecte  ni  ter- 
mes extraordinaires ,  ni  figures  trop  recher- 
chées. Son  éloquence  est  toute  naturelle. 
Quand  il  combat  les  vices  et  qu'il  exhorte  à 
la  vertu ,  il  se  contente  de  montrer  d'une 
manière  très-simple,  mais  pathétique,  la  lai- 
deur du  péché,  et  de  faire  l'éloge  de  la  vertu; 
de  donner  de  l'horreur  de  l'un  par  les  suites 
fâcheuses  qui  sont  inévitables  ,  et  d'inspirer 
de  l'amour  pour  l'autre  par  la  vue  des  biens 
qu'elle  procure.  Il  s'appuie  partout  de  l'au- 
torité de  l'Ecriture  qu'il  avait  étudiée  avec 
soin,  et  quelquefois  des  témoignages  des  Pè- 
res grecs  et  latins,  dont  il  avait  lu  les  écrits. 
On  voit  qu'il  s'était  particulièrement  arrêté  à 
ceux  de  saint  Augustin  ,  dont  il  fait  profes- 
sion d'êU-e  disciple.  Non-seulement  il  en  suit 
la  doctrine ,  il  en  emprunte  aussi  les  pen- 
sées et  les  termes,  et  quelquefois  des  endroits 
entiers  ,  auxquels  il  ne  fait  que  joindre  un 

'  Tom.  lY  Concil,  png.  1675. 


SAINT  CÉSAinn,  ÉVÊQUE  D'AULES. 


153 


exorde  et  une  pérfu-aison  pour  en  faire  un 
discours.  Mais  il  parait  qu'il  n'usait  de  celte 
liberté  que  quand  il  n'avait  pas  assez  de  loi- 
sir ou  assez  de  santii  pour  en  composer  de 
lui-même. 

2.  Les  Homélies   de  saint  Césaire,  après 
avoir  été  souvent  confondues  parmi  celles  de  cé'"i 
saint  Ambroise  et  de  saint  Augustin,  ont  été 
recueillies  dans  V Apjicndirc  Au  cinqaihmc  vo- 
lume  des  amvres  de  ce  Père  à  Paris,  en  1683, 
et  dans  l'édition  d'Anvers  ou  d'Amsterdam, 
en  1700.  Pour  les  distinguer  aisément  d'un 
grand  nombre   d'autres  homélies  dont  les 
auteurs  sont  incertaius,  l'on  a  mis  le  nom 
de  saint  Césaire  à  la  marge  de  chacune  des 
homélies  qui  sont  de  lui,  et  en  tête  les  rai- 
sons de  les  lui  attribuer.  Ce  recueil  contient 
cent  deux  homélies  de  saint  Césaire,  parmi 
lesquelles  se  trouvent  les  quatorze  que  M.  Ba- 
luze  fit  imprimer  à  Paris  en  1GG9  ;  la  plupart 
de  celles  que  nous  avons  dans  le  huitième  et 
le  vingt-septième  tomes  de  [aBibliothh/uedes 
Pères  à  Lyon,  en  1677  ;  et  quelques-unes  du 
premier  tome  de  la  Chronologie  des  saints  et 
Ao7nrnesi7/;«/?'es  de  l'abbaye  de  Lérins, par  Bar- 
rali  à  Lyon,  en  1613.  Les  autres  données  par 
Barrali  sont  des  discours  faits  à  des  moines  ;  et 
il  y  en  a  beaucoup  de  ce  genre  dans  les  huitiè- 
me et  vingt-septième  tomes  de  la  Bibliothèque 
des  Pères.  A  l'égard  des  discours  ou  lettres  à 
des  religieuses,  on  les  a  insérés  dans  le  Code 
des  règles,  imprimé  d'abord  à  Rome,  en  1661, 
puis  à  Paris,  en  1663,  et  ensuite  à  Lyon,  en 
1677,  dans  le  huitième  tome  de  la  Biblio- 
thèque des  Pères,  avec  les  Règles  de  saint  Cé- 
saire ,  tant  pour  des  religieuses  ,  que  pour 
des  moines.  La  Règle  pour  les  religieuses  se 
trouve  aussi  dans  les  Annales  du  Père   le 
Cointe,  sur  l'année  336,  avec  des  notes.  Elle 
fut  donnée  pour  la  première  fois  au  public 
par  Etienne  Moquot  à  Poitiers,  en  1621,  avec 
quelques  éclaircissements  de  François  Mei- 
nard  sur  certains  termes  de  cette  Règle  qui 
sont  très-obscurs.  Stellortius  la  fit  réimpri- 
mer à  Douai,  en  1626,  dans  sou  Recueil  inti- 
tulé :  Fondements  des  ordres;  et  BoUandus 
dans  le  premier  tome  des  Vies  des  saints  du 
mois  de  janvier.  Pour  ce  qui  est  du  Testament 
de  saint  Césaire,  il  se  trouve  dans  le  Code  des 
règles,  dans  V Histoire  des  archevêques  d' Arles, 
par  Saxi ,  dans  les  Annales  ecclésiastiques  de 
Baronius,  sur  l'an  308,  et  dans  celles  de  Fran- 
ce par  le  Père  le  Cointe,   sur  l'an  342.  Les 
Actes  ou  décrets  du  second  concile  d'Orange, 
auxquels  on  peut  dire  que  saint  Césaire  eut 


156 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


le  plus  de  part,  ont  été  Iradiiifs  en  fiançais 
et  imprimés  eu  cette  langue,  cliez  Piquet,  à 
Paris,  en  IGio,  par  les  soins  d'Audré  Dabil- 
lon. 

[Le  tome  XI  de  Galland  contient  les  14  ho- 
mélies publiées  par  Baluze ,  les  Règles  et 
quelques  autres  ouvrages.  On  trouve  dans 
la  l'atroloyie  latine,  tom.  LXVII,  col.  997,  les 


sermons,  les  homélies  ,  les  opuscules  et  les 
épîtres  de  saint  Césaire;  on  doit  cependant 
remarquer  qu'on  renvoie  les  sermons  au 
tom.  V  de  saint  Augustin  dans  VAppendire. 
Ses  sermons  ont  été  traduits  en  français  par 
l'abbé  Dujal  de  Villeueuve ,  Paris  ,  1760  ,  2 
vol.  in-12,] 


CHAPITRE    X. 


Saint  Benoît,  patriarche  des  moines  d'Occident. 

[543.) 


Nal*MDto 
de  e^lQt  Bo- 
u'M,  vprï  l'an 
im.  Son  édu. 
canon.  Annal. 
Bcncd.|jag.  3. 


1.  Saint  Benoit',  notre  législateiu-,  naquit 
vers  l'an  480,  dans  le  territoire  de  Norsie,  au- 
trefois ville  épiscopale  de  la  province  de  Va- 
lérie, maintenant  de  l'Ombrie,  dans  le  duché 
de  Spolète.  Saint  Grégoire  ne  dit  point  *  de 
quels  parents  il  était  né  ;  il  marcpie  seule- 
ment qu'il  était  de  condition  libre,  ce  que 
le  Martyrologe  de  Florus  entend  d'une  fa- 
mille noble.  Pierre  diacre  '  est  le  premier  qui 
nous  apprenne,  que  son  père  se  nommait 
Eutrope,  sa  mère  Abondantia,  et  son  aïeul 
Jiistinien  ;  d'où  quelques-uns  ont  inféré  que 
saint  Benoit  dcsccuiilait  de  l'empereur  Justi- 
nien  :  opinion  insoutenable,  puisque  ce  prin- 
ce était  Tluace  de  naissance,  de  basse  condi- 
tion, et  qu'il  ne  vint  au  monde  qu'après  saint 
Benoît.  Aussitôt  qu'il  fut  en  âge  d'apprendre 
les  belles-lettres,  on  l'envoya  à  Rome;  mais 
voyant  la^  corruption  de  ceux  cpii  les  étu- 
diaient avec  lui,  il  se  retira  secrètement  de 
cette  ville,  et  s'étant  dérobé  h  la  poursuite  de 
Cyrilla,  sa  nourrice,  qui  l'avait  suivi,  il  vint  à 
un  lieu  nommé  Sublac,  à  quarante  milles  de 
Rome  ,  où  il  s'enferma  dans  une  caverne 
fort  étroite.  On  rapporte  sa  retraite  A  la  pre- 
mière année  du  règne  de  Théodoric,  roi  des 
Goths  en  Italie ,  c'est-à-dire  à  l'an  494 ,  qui 
était  la  quatorzième  ou  la  quinzième  de  saint 
Benoit,  .\ussi  saint  Grégoire  dit  qu'il  était  en- 
core enfant,  et  l'abbé  Bertarius',  qu'il  avait  à 
peine  atteint  l'âge  de  puberté.  Ce([ui  est  vrai 
est  que  suivant  l'édit  de  l'empereur  Valenti- 
nien  le  Vieux,  il  n'était  pas  permis  aux  jeu- 


nes gens  qui  venaient  à  Home  pour  y  faire 
leurs  études  ,  d'y  demeurer  au  delà  de  leur 
vingtième  année. 

2.  Il  demeura  trois  ans  dans  la  caverne 
de  Sublac  ,  sans  que  personne  en  sût  rien  , 
excepté  un  moine  romain  qui  l'ayant  ren- 
contré auprès  de  cette  solitude  et  ayant  ap- 
pris son  dessein,  lui  promit  le  secret,  le  re- 
vêtit de  l'habit  monastique  et  lui  donna  tous 
les  secours  qui  dépendaient  de  lui.  Romain 
demeurait  dans  un  monastère  voisin  sous 
un  abbé  nommé  Théodat  :  mais  il  se  déro- 
bait quelquefois  et  portait  à  certains  jours 
ce  qu'il  se  retranchait  de  sa  portion  à  saint 
Benoit.  Comme  il  n'y  avait  point  de  chemin 
pour  arriver  h  sa  caverne  du  côté  du  mo- 
nastère de  Théodat ,  Romain  attachait  le 
pain  i\  une  longue  corde  avec  une  clochette 
pour  avertir  Benoît  de  le  prendre.  Vivant 
ainsi  dans  sa  grotte  sans  aucun  commerce 
avec  les  hommes  ,  il  ne  savait  pas  même 
quel  jour  il  était.  Il  arriva  que  la  fête  do 
Pâques  de  l'an  497,  un  prêtre  d'un  lieu  assez 
éloigné,  ayant  préparé  à  manger  pour  lui- 
même,  Dieu  lui  fit  connaître  par  révélation, 
le  lieu  où  était  son  serviteur  qui  mourait 
de  faim  ;  il  le  trouva  à  grande  peine  ;  mais  le 
saint  solitaire,  étonné  de  l'arrivée  de  cet  hôte, 
ne  voulut  point  lui  parler  qu'après  avoir 
fait  ensemble  la  prière.  Leurs  discours  rou- 
lèrent sur  les  choses  de  Dieu  et  du  salut.  Le 
prêtre,  après  en  avoir  parlé  quelque  temps, 
invita  Benoît  ;\  manger,  lui  disant  que  c'était 


Il    d^iiiftnr 

b'iir.  Ai 
BMiPd.  Ml 
M. Ion.  tom. 
lat:.  3.  cl  An 
ord.    S,    B( 

DC-i.      Idlll.     1 
r»r.  KU,  fel    I 


'  On  peut  voir  la  heUr  vAui\c  do  M.  de  Mouta- 
lenihnrt  sur  fii}\nt  nnioit,  nu  Imiio  fl,  livre  Kf  des 
Moines  d'Occident.  {L'éditeur.) 


*  «"îreg.,  lib.  Il  Vialog.^  enp.  i, 

3  Petr.,  lil».  De  VirisiUnHr.,  cap.  i. 

^  bertar.,  iu  liymuo  de  Sancto  Bencdiclo. 


CIIAPITHR  X.  —  SAINT  BENOIT,  PATRlAltCIIE. 


[vi'  siÈaE.] 

lo  jour  do  Pilques  auquel  il  no  lui  clait  pas 
permis  de  jeûner.  Ils  nianj^èrenl  ensemble  de 
ce  que  le  prêtre  avait  apportii  ;  et,  leur  repas 
fini,  le  prètro  retourna  ;\  son  éjj;lise.  Vers  le 
mémo  temps,  des  pâtres  trouvèrent  lienoît 
caché  dans  sa  caverne,  et  le  voyant  couvert 
d'une  peau  de  brebis  dans  des  broussailles,  ils 
le  prirent  pour  une  bètc  ;  mais  lors(ju'ils  con- 
nurent que  c'était  un  serviteur  de  Dieu  ,  ils 
le  respectèrent.  II  y  en  eut  même  plusieurs 
qui,  gagnés  par  ses  discours,  quittèrent  leurs 
mceurs  brutales,  et  embrassèrent  la  religion 
chrétienne.  Depuis  ce  temps-hï  il  comracnra 
à  être  connu  des  peuples  du  voisinage.  Plu- 
sieurs le  venaient  voir  et  lui  apportaient  de 
la  nourriture;  pour  les  remercier,  il  nourris- 
sait leurs  âmes  de  diverses  instructions  salu- 
taires. Le  démon  en  fut  envieux.  Un  jour, 
Benoît  étant  seul,  le  souvenir  d'une  femme 
qu'il  avait  vue,  excita  en  lui  une  tentation  si 
violente ,  qu'il  fut  près  de  quitter  sa  solitu- 
de. Mais  Dieu  secourut  son  serviteur.  Benoît, 
revenu  à  lui-même  et  rougissant  de  sa  fai- 
blesse ,  se  jeta ,  pour  éteindre  les  feux  de  la 
tentation,  dans  un  tas  d'orties  et  d'épines 
qu'il  aperçut  auprès  de  lui,  s'y  roula  long- 
temps à  nu  ,  de  sorte  qu'il  en  sortit  tout  en 
sang.  Le  fruit  qu'il  retira  de  cette  victoire, 
fut  que  depuis  il  n'eut  plus  de  pareilles  ten- 
tations à  combattre. 

3.  Son  nom  étant  devenu  fort  célèbre , 
plusieurs  quittèrent  le  monde  et  se  rangè- 
rent sous  sa  conduite..  A  quelques  distances 
de  Sublac,  il  y  avait  un  monastère  dont  l'ab- 
bé étant  mort,  tous  les  sutïrages  de  la  com- 
munauté se  réunirent  à  lui  donner  Benoît 
pour  successeur.  Les   religieux  vinrent  le 
trouver  et  le  pressèrent  avec  beaucoup  d'ins- 
tance de  se  charger  de  leur  conduite.  Il  le 
refusa  longtemps,  disant  que  leurs  manières 
ne  pourraient  s'accorder  avec  les  siennes  : 
mais  fatigué  par  leurs  importunités,  il  con- 
sentit enfin  à  être  leur  abbé.  Comme  il  vou- 
lait les  corriger  et  les  obliger  de  vivre  con- 
formément à  leur  état ,  ils  se  repentirent 
bientôt  du  choix  qu'ils  avaient  fait  de  lui, 
le  regardant  comme  un  homme  sans  expé- 
rience, peu  propre  à  conduire  les  autres,  dur 
et  sans  miséricorde.  Ils  dissimulèrent  néan- 
moins leur  colère  dans  les  commencements; 
mais  voyant  qu'il  ne  relâchait  rien  de  sa  sé- 
vérité, et  leur  paraissant  insupportable  de 
quitter  leurs  anciennes  habitudes ,  ils  pri- 
rent unanimement  le  parti  de  se  défaire  de 
lui  en  lui  donnant  du  vin  empoisonné.  Lors- 


irn 


qu'il  était  ^  table,  on  lui  présenta  à  bénir  le 
premier  verre  qui  était  pour  lui,  tous  sui- 
vant la  coutume  du  monastère,  tenant  en 
main  leurs  verres  pour  être  bénits  en  même 
temps.  Benoit  étendit  la  main  et  fit  le  si^^no 
de  la  croix  :  aussitôt  le  verre,  dans  lequel 
était  le  breuvage  de  mort,  se  cassa  comme 
s'il  y  eût  jeté  une  pierre.  L'homme  de  Dieu 
comprit  aussitôt  ce  que  c'était  ;  et  se  levant 
de  table,  il  dit  aux  moines,  d'un  visage  tran- 
quille :  ((Que  le  Dieu  tout-puissant  vous  par- 
donne ,  mes  frères  ;  pourquoi  m'avez-vous 
voulu  traiter  de  la  sorte  ?  ne  vous  avais-je 
pas  prédit  que  vos  mœurs  et  les  miennes  no 
pourraient  s'accorder?  allez  chercher  un  su- 
périeur qui  vous  convienne;  vous  ne  m'au- 
rez plus  à  l'avenir.  »  Leur  ayant  ainsi  parlé, 
il  retourna  dans  sa  solitude,  persuadé  qu'en 
restant  plus  longtemps  avec  des  religieux 
indociles,  non-seulement  il  ne  pourrait  les 
faire  changer  de  conduite ,  mais  qu'il  serait 
lui-même  en  risque  de  déchoir  de  sa  fer- 
vem". 

4.  C'était  vers  l'an  510.  De  retour  à  Su- 
blac, il  s'y  entretint  avec  lui-même  sous  les 
yeux  de  celui  qui  pénètre  les  secrets  du 
cœur  les  plus  cachés,  presque  toujours  occu- 
pé de  la  prière,  de  la  lecture  et  de  la  médi- 
tation des  livres  saints.  Ses  vertus  et  ses  mi- 
racles lui  attirèrent  tant  de  disciples  qu'il  bâ- 
tit douze  monastères,  en  chacun  desquels  il 
mit  douze  moines  sous  la  conduite  d'un  ab- 
bé soumis  à  sa  correction.  On  connaît  en- 
core les  lieux  et  les  noms  de  ces  monastè- 
res; mais  si  l'on  en  excepte  celui  de  Sublac 
et  celui  de  Sainte  -  Scholastique  ,  autrefois 
Saint-Côme  et  Saint-Damien ,  les  autres  ne 
sont  aujourd'hui  que  de  simples  oratoires. 
La  réputation  de  saint  Benoît  passa  d'abord 
à  Rome,  d'oîi  elle  s'étendit  dans  les  provin- 
ces les  plus  éloignées.  Les  plus  nobles  de 
cette  ville  et  les  personnes  de  piété  vinrent 
le  voir  dans  sa  solitude.  Quelques-uns  même 
lui  donnèrent  leurs  enfants  pour  les  élever, 
non  dans  la  science  des  arts  vains  et  inutiles, 
mais,  pour  les  former  dans  la  vertu  et  dans 
la  piété.  Équitius  lui  donna  son  fils  Maur,  âgé 
de  douze  ans,  et  le  patrice  Tertullus  son  fils 
Placide,  encore  enfant  :  deux  sujets  de  grande 
espérance.  Les  Actes  de  saint  Placide  rappor- 
tent ceci  à  l'an  S22. 

5.  Dans  cette  année  et  pendant  les  sui- 
vantes, saint  Benoit  opéra  plusieurs  merveil- 
les que  les  auteurs  de  sa  vie  ont  eu  soin  de 
rapporter.  Il  demeurait,  en  ô28,  dans  un  de 


II 

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HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


158 

ses  douze  monastères,  qui  avait  vue  sur  le  lac 

de  Sublac,  ou  qui  n'eu  était  pas  éloigné, 
lorsque  le  jeune  Placide  y  allant  puiser  de 
l'eau,  tomba  lui-même  dans  le  lac  dont  l'eau 
l'emporta  loin  de  terre,  environ  la  portée 
d'un  trait.  Saint  Benoit  ayant  eu  connaissan- 
ce de  cet  accident,  appela  Maur  et  lui  dit  de 
courir  vite  au  secours  de  cet  enfant.  Maur 
ayant  demandé  à  son  abbé  sa  bénédiction, 
ainsi  qu'il  était  dès  lors  de  coutume,  courut 
jusqu'à  l'endroit  où  l'eau  emportait  Placide, 
et  l'ayant  pris  par  les  cheveux  que  l'on  ne 
rasait  point  encore  alors  jusqu'à  la  peau,  il 
le  retira  sain  et  sauf  des  eaux.  Sitôt  qu'il  fut 
à  terre ,  il  regarda  derrière  lui,  et  voyant 
qu'il  avait  marché  sur  l'eau,  il  fut  étonné 
d'avoir  fait  ce  qu'il  n'aurait  jamais  osé  ten- 
ter. De  retour  dans  le  monastère,  il  raconta 
la  chose  à  saint  Benoît,  qui  attribua  ce  mi- 
racle, non  à  ses  propres  mérites,  mais  à  l'o- 
béissance de  son  disciple.  Maur,  au  contraire, 
l'attribuait  au  commandement  de  son  maître, 
soutenant  qu'il  ne  pouvait  pas  avoir  part  à 
une  chose  qu'il  avait  faite  sans  s'en  aperce- 
voir. Placide  décida  la  contestation ,  en  di- 
sant :  <c  Lorsqu'on  me  lirait  de  l'eau,  je  voyais 
sur  ma  tète  la  melote  ,  c'est-à-dire  le  man- 
teau de  l'abbé,  et  lui-même  qui  me  tirait.  » 
La  melote  était  une  peau  de  mouton  que  les 
moines  portaient  sur  leurs  épaules.  Placide 
avait  alors  environ  quinze  ans  :  d'où  vient 
que  saint  Grégoire,  en  parlant  de  cet  événe- 
ment miraculeux,  l'appelle  enfant.  Quelque 
temps  après,  saint  Benoit,  cédant  à  l'envie 
d'un  prêtre  d'une  église  voisine,  nommé  Flo- 
rentins, qui  s'imaginait  que  la  grande  répu- 
tation du  saint  abbé  nuisait  à  la  sienne,  lais- 
sa tous  ses  mnnastères  sous  la  conduite  des 
supérieurs  qu'il  leur  avait  donnés,  et  vint  à 
Cassin,  petite  ville  sur  le  penchant  d'une 
haute  montagne  dans  le  pays  des  Samnites. 
n  y  avait  sur  le  sommet  de  cette  montagne 
un  ancien  temple  d'Apollon,  que  les  paysans 
adoraient  encore  ,  et,  tout  autour,  des  bois 
consacrés  à  l'idole,  où  ils  faisaient  des  sacrifi- 
ces. Ce  fut  là  que  saint  Benoit  fixa  sa  demeu- 
re. 11  brisa  l'idole,  renversa  l'autel,  coupa  les 
bois ,  bûtit  un  oratoire  de  saint  Martin  dans 


le  temple  même  d'Apollon  ,  et  un  de  saint 
Jean  à  l'endroit  où  était  l'autel  des  idoles,  et 
se  mit  à  instruire  de  la  vraie  religion  tout  le 
peuple  d'alenlour.  11  travailla  après  cela  au 
logement  de  ses  religieux,  n'ayant  point  d'au- 
tre architecte  que  lui-même,  et  point  d'au- 
tres ouvriers  que  ses  moines.  On  met  la  fon- 
dation de  ce  monastère  vers  l'an  529.  En 
arrivant;  sur  le  Mont-Cassin,  il  y  trouva  un 
ermite  nommé  Martin,  qui  lui  céda  la  place. 
Ce  solitaire  avait  coutume,  dans  les  commen- 
cements de  sa  retraite,  de  s'attacher  avec  une 
chaîne  de  fer  afin  qu'il  ne  pût  aller  au  delà 
de  sa  longueur;  mais  il  ne  prit  plus  cette  pré- 
caution depuis  que  saint  Benoît  lui  eut  don- 
né cet  avis  salutaire  :  «  Si  vous  êtes  serviteur 
de  Dieu,  que  ce  soit  la  chaîne  de  Jésus-Christ 
qui  vous  tienne  attaché  et  non  pas  une  chaî- 
ne de  fer.  » 

6.  Le  nombre  de  ses  disciples  augmentant 
de  jour  en  jour,  saint  Benoit  leur  donna  une 
règle  qui  fut  trouvée  si  sage  que,  dans  la  suite 
des  temps,  on  la  reçut  dans  tous  les  monas- 
tères d'Occident  ;  elle  admet  sans  distinction 
les  enfants,  les  jeunes  gens  et  les  adultes, 
les  pauvres  et  les  riches,  les  nobles  et  ceux 
qui  sont  de  basse  condition,  lesesclaves  et  les 
libres,  les  doctes  et  les  ignorants,  les  laïques 
et  les  clercs.  Les  parents  rendaient  moines 
leurs  enfants  en  les  otl'rant  au  monastère; 
mais  les  adultes  s'engageaient  dans  l'état 
monastique  par  une  profession  volontaire. 
Ceux  -  là  pèchent  donc  contre  la  Règle  de 
saint  Benoît,  qui  ne  reçoivent  dans  leurs  mo- 
nastères que  des  nobles  àTexclusion  de  ceux 
qui  sont  d'une  condition  ou  basse  ouservile. 
On  voit  que  saint  Augustin  pensait  de  même 
là-dcssus,  et  que  son  sentiment  était  que  l'on 
ne  pouvait,  sans  un  grand  péché,  refuser' 
l'entrée  des  monastères  même  aux  esclaves, 
aux  gens  de  la  campagne  et  au  commun  du 
peuple,  pourvu  toutefois  que  ceux  qui  étaient 
en  servitude  eussent  obtenu  la  liberté  de 
leurs  maîtres.  La  raison  qu'il  donne  de  cette 
conduite  est  que  l'on  a  vu  souvent  des  per- 
sonnes de  ces  sortes  de  condition  se  rendre 
illustres  et  recommandaljlcs  par  leur  piété  et 
leurs  autres  grandes  qualités  :  Dieu  ayant 


liflru..   loi, 

1  AddiL   h' 
neiî.  [>«£.  St'> 


*  A'uîiC  leniunt  plerttmque  ad  liane  profissio- 
nem  servitutis  Dei  et  ex  conditione  sertili  ;  vel 
eliam  liherti,  vel  propler  hoc  a  dominii--  liberali 
site  Itbcrundi,  et  ex  vilarusticana,  et  plchcio  la- 
bnre^  tanto  utii/ue  felicius,  quanlo  furtius  edu- 
cati:  qui  si  non  admiUaiitur,  grave  deliclum  est. 
MuUi  enim  ex  eo  numéro  lere  magni  et,  imitandi 


eTlilcrunt.  Kam  propterea  infirma  mundi  elrgit 
Deus  ut  cnnfunderet  fortia,  et  stulta  mundi cicgil 
ut  confundtrcl  sapientes  ;  etignol>ilia  mundi  et  ea 
quœ  non  sunt,  tanquam  sint,  ut  ea  quœsunt  tva- 
cuentur  :  ut  non  glorirtur  omnis  carocoram  Dca. 
Aiiyust.,  De  Oper.  monach.,  cap.  xxu. 


[VI'  siKCLE.l  CHAPITRE  X.  —  SAINT 

choisi  les  moins  supcs  scion  le  monde  pour 
confondre  les  sages;  les  faibles  pour  con- 
fondre les  puissants;  les  plus  vils  et  les  plus 
nu^prisahlos  pour  dt'lniiie  ce  qu'il  y  a  de  plus 
grand,  afin  que  nul  homme  ne  se  glorifie  de- 
vant lui.  Il  ajoute  que  les  gens  de  la  campa- 
gne et  ceux  qui  sont  accoutumes  h  vivre  du 
travail  de  leurs  mains  sont  d'autant  plus  pro- 
pres à  l'étal  monastique  qu'ayant  été  élevés 
durement,  ils  en  peuvent  plus  aisément  sup- 
porter les  austérités.  La  Jtt'gle  de  saint  Benoit 
ne  fait  point  mention  des  frères  Convers, 
c'est-à-dire  des  religieux  qui  n'étaient  occu- 
pés qu'aux  ministères  extérieurs.  Ils  n'ont  été 
admis  dans  les  communautés  que  vers  le  xi° 
siècle. 

7.11  n'y  avait  pas  longtemps  que  l'on  avait 
commencé  à  bâtir  le  monastère  du  Mont-Gas- 
sin,  lorsque  le  patrice  Tcrtullus  y  vint  dans 
le  dessein  de  voir  ce  nouvel  édifice  ;  mais  plus 
encore  pour  y  voir  son  fils  Placide,  et  Maur 
que  saint  Benoit  y  avait  amenés  avec  lui. 
Quelques  historiens  le  fontaccompagnerdans 
ce  voyage  parplusieurs  nobles  romains,  nom- 
mément par  Boëce,  célèbre  par  ses  vertus, 
son  savoir  et  la  dignité  de  consul  qu'il  avait 
exercée  avec  éclat.  Mais  il  était  mort  dès  l'an 
523,  par  l'ordre  du  roi  Théodoric  qui,  sous  de 
fausses  accusations,  lui  avait  fait  souITrir  de 
grands  tourments,  et  ensuite  fait  trancher  la 
tête.  Tertullus  fit  une  donation  solennelle  des 
biens  qu'il  avait  aux  environs  de  ce  monas- 
tère, et  d'un  grand  nombre  de  terres  de  son 
patrimoine  dans  la  Sicile.  Il  paraît  qu'il  y 
avait  près  de  Cassin  un  monastère  de  filles  , 
sm-  lequel  saint  Benoit  avait  inspection  et 
autorité,  puisqu'il  en  excommunia  deux  pour 
quelques  fautes  qu'elles  avaient  commises. 
Mais  on  ne  sait  pas  si  ce  fut  là  que  sainte 
Scholastique ,  sa  sœur,  se  consacrai  Dieu,  ou 
dans  quelque  autre  maison  près  du  Mont- 
Cassin.  Saint  Grégoire  nous  apprend  seule- 
ment qu'elle  s'était  vouée  à  Dieu  dès  l'en- 
fance, et  qu'elle  vivait  dans  un  monastère 
proche  de  celui  de  son  frère. 

8.  On  rapporte  à  l'an  334  la  fondation  du 
monastère  de  Téracine,  danslaCampanie.  Il 
fut  bâti  sur  les  terres  d'un  homme  de  piété 
qui  avait  prié  saint  Benoit  de  lui  envojer 
quelques-uns  de  ses  disciples.  Il  en  envoya 
d'autres  en  Sicile  avec  saint  Placide  ;  d'au- 
tres en  Espagne  et  en  diverses  provinces. 
Saint  Placide  finit  ses  jours  par  le  mar- 
tyre que  lui  firent  soutlnr  les  Barbares, 
qui,  vers  l'an  541,  firent  une  irruption  dans 


loir.    I  An. 
Dttl      Doiiad  , 


BENOIT,  PATUlAltCIIE.  159 

la  Sicile.  On  a  imprimé  i  Messine,  en  1691, 
l'Histoire  de  l'invention  et  de  la  translation 
de  ses  reliques  et  de  celles  de  ses  compa- 
gnons. Elles  avai(!nt  été  trouvées  à  Messine, 
dans  l'Église  de  Saint-Jean-Baptiste,  dès  l'an 
1G88.  Nous  avons  les  Actes  de  leur  martyre; 
mais  on  convient  qu'ils  ont  été  interpolés. 
La  mission  de  saint  Maur  en  France  par 
saint  Benoît,  à  la  prière  d'un  é  vèque  du  Mans, 
est  attestée  par  Amalaire  et  par  Adrévald, 
moines  de  Fleury,  qui  vivaient  l'un  et  l'autre 
dans  le  neuvième  siècle;  par  une  charte  de 
Louis -le -Pieux,  où  saint  Maur  est  appelé 
abbé  de  Glanfeuille  et  disciple  de  saint  Be- 
noît, et  où  il  est  dit  que  ce  saint  l'avait  en- 
voyé en  France;  par  saint  Odon,  abbé  de 
Cluny ,  né  dans  le  neuvième  siècle  et  mort 
dans  le  dixième;  par  Adalbert,  évêque  de 
Prague ,  qui ,  dans  le  même  siècle  ,  fit  un 
voyage  en  France  pour  en  voir  les  plus  célè- 
bres monastères  ;  et  par  quantité  d'écrivains 
des  siècles  suivants.  L'inscription  trouvée  sur 
son  tombeau,  en  883,  porte  qu'il  était  venu 
en  France  sous  le  règne  du  roi  Tliéodebcrt, 
c'est-à-dire  vers  l'an  342.  Brouvérus,  dans 
le  livre,  des  Antiquités  de  Fulde,  dit  que  l'on 
conservait  dans  un  monastère  de  Tours  la  Rè- 
gle que  saint  Benoît  avait  écrite  de  sa  propre 
main,  et  qii'il  avait  donnée  à  saint  Maur  lors- 
qu'il l'envoya  en  France;  et  qu'à  la  fin  de 
cette  Règle  on  lisait  la  signature  de  ce  saint 
législateur  en  ces  termes  :  Code  du  pécheur 
Benoît,  qualité  que  les  hommes  de  piété  et 
même  les  évêques  prenaient  dans  le  sixième 
siècle. 

9.  Un  homme  de  condition,  nommé  Théo- 
probe, que  saint  Benoît  avait  converti  et  qui 
avait  beaucoup  de  part  à  sa  confiance,  étant  "''''•  i°E'  "^ 
un  jour  entré  dans  sa  cellule,  le  trouva  qui 
pleurait  amèrement,  mais  non  pas  dans  le 
temps  de  sa  prière  où  il  avait  coutume  de  ré- 
pandre des  larmes.  Il  s'arrêta  longtemps,  et 
voyant  que  celles  qu'il  versait  alors  venaient 
de  la  tristesse,  il  lui  en  demanda  la  cause. 
«Tout  ce  monastère  que  j'ai  bâti,  lui  répon- 
dit le  saint,  et  tout  ce  que  j'ai  préparé  avec 
beaucoup  de  travail  et  de  soin  pour  l'usage 
des  frères,  a  été  livré  aux  profanes  par  le  ju- 
gement de  Dieu.  A  peine  ai-je  pu  obtenir  le 
salut  des  personnes.  »  L'accomplissement  de 
cette  prophétie  se  vérifia  quarante  ans  après, 
lorsque  les  Lombards,  faisant  la  nuit  une  ir- 
ruption dans  le  monastère  du  Mont-Cassin, 
le  ruinèrent  entièrement. 

10.  Ce  fut  vers  l'an  541  que  saint  Benoît 


SlIntUrnotl 
prédit  Idrililiû 
du  inoiiaolèio 
Cns, 


IGO 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


«oirnii.1  B».  propbtilisa  de  la  sorte.  L'année  suivante,  il 
LT'  ÉfMd'  pr<''dit  les  calamités  qui  devaient  agiter  vio- 
lée, as-';,  lemmeut  la  ville  de  Home.  Bélisaiie  ayant 
quitte  ITlalie,  les  Gotliscn  devinrent  les  maî- 
tres une  seconde  fois,  sous  la  conduite  de  To- 
tila,  qui  était  devenu  leur  roi,  après  la  mort 
d'Hildibalde.  Totila  ayant  ouï  dire  que  saint 
Benoit  avait  l'esprit  de  prophétie,  voulut,  en 
passant  d;ins  la  Campanie,  s'en  convaincre 
par  lui-même.  11  vint  ;\  sou  monastère,  mais 
il  lui  fit  savoir  auparavant  qu'il  allait  venir. 
Pour  l'éprouver,  il  se  fil  précéder  d'un  de  ses 
écuyers  nommé  Higrgon,  à  qui  il  fit  prendre  la 
chaussure  et  les  habits  royaux  qui  étaient  de 
pourpre,  et  le  fit  accompagner  de  trois  sei- 
gneurs, qui  étaient  le  plus  ordinairement  près 
de  sa  personne,  nommés  Vult,  Uudéric  et  Bli- 
din,  avec  des  écuyers  et  un  grand  cortéj^e. 
Higgon  étant  ainsi  entré  dans  le  monastère, 
saint  Benoit  qui  était  assis,  l'ayant  aperçu 
de  loin,  lui  cria  :  «Mon  fils,  quittez  l'habit  que 
vous  portez,  il  ne  vous  appartient  pas.  n  Rig- 
gon  se  jeta  par  terre  épouvanté  d'avoir  vou- 
lu tromper  le  saint.  Tous  ceux  de  sa  suite  en 
firent  autant,  sans  qu'aucun  osât  approcher, 
après  qu'ils  se  furent  relevés.  Ils  retournè- 
nèreut  aussitôt  trouver  Totila,  à  qui  ils  racon- 
tèrent eu  tremblant  de  quelle  manière  leur 
tromperie  avait  été  découverte.  Alors  le  roi 
vint  lui-même  trouver  le  saint  abbé,  et  dès 
qu'il  le  vit,  il  se  jeta  par  terre  sans  oser  en 
approcher.  Saint  Benoit,  qui  était  assis,  lui 
dit  de  se  lever;  et  voyant  qu'il  n'osait,  il  ac- 
courut et  le  releva  lui-même.  Il  lui  reprocha 
sa  cruauté  ;  et  ce  priuce  lui  ayant  peut-être 
demandé  ce  qui  devait  lui  arriver,  le  saint 
lui  parla  en  ces  termes  :  «Vous  avez  jusqu'ici 
commis  beaucoup  de  mal,  et  vous  en  com- 
mettez tous  les  jours;  cessez  enfin  de  faire 
tant  de  crimes  et  d'injustices.  Vous  entrerez 
à  Rome,  vous  passerez  la  mer,  et  après  avoir 
régné  neuf  ans,  vous  mourrez  le  dixième.  » 
Tout  cela  fut  accompfi  dans  la  suite.  Totila 
fort  épouvanté,  lui  qui  était  la  terreur  des  au- 
tres, sortit  du  monastère,  après  s'être  recom- 
mandé aux  prières  de  l'homme  de  Dieu.  De- 
puis ce  temps-là  il  fut  beaucoup  plus  doux  et 
plus  liumain  :  ce  que  l'on  aperçut  particuliè- 
rement dans  le  siège  et  la  prise  de  Naples, 
où  il  traita  les  captifs  avec  une  bonté  (pic  l'on 
ne  devait  pas  attendre  d'un  barbare  et  d'un- 
ennemi.  Quelque  temps  après,  saint  Benoit 
s'enlretenanl  avec  l'évéque  de  Canose,  des 
ravjigcs  (Je Tolila,  cet  évêque  disait  en  parlant 
de  Rome  :  «  Ce  roi  la  rainera  en  sorte  qu'elle 


ne  sera  plus  habitée.  »  Saint  Benoit  lui  répon- 
dit :  (I  Non,  la  ville  de  Rome  ne  seia  point  dé- 
peuplée par  les  barbares  ;  mais  elle  sera  bat- 
tue de  tempêtes,  de  foudres  et  de  tremble- 
ments de  terre;  elle  s'aflaiblira  comme  un 
arbre  qui  sèche  sur  sa  racine.»  Saint  Grégoi- 
re rend  témoignage  à  l'accomplissement  de 
cette  prophétie,  disant  que  de  son  temps  la 
ville  de  Rome  ne  présentait  qu'un  spectacle 
atl'rcux,  ses  murs  étant  dt-truits,  ses  maisons 
renversées,  et  la  plupart  des  églises  ruinées 
par  des  tempêtes  et  des  tremblements  de 
terre. 

1 1 .  Le  môme  pape  nous  apprend  que  sainte  „,„,  "g" 
Scholastique  venait  une  foisl'an  voir  son  frère,  ^°  ,;,;-i,[;,' 
qui,  accompagné  de  ses  disciples,  allait  la  re-  J  ?\„'';,i.'^| 
cevoir  à  quelque  dislance  de  son  monastère  *'"'  "'' 
dans  une  métairie  dépendante  du  Mont-Cas- 
siu,  autant  pour  lui  éviter  la  peine  de  mon- 
ter sur  le  sommet  de  la  montagne,  que  parce 
que  c'était  déj;\  l'usage  que  les  femmes  n'en- 
trassent point  dans  les  monastères  d'hom- 
mes. Après  avoir  passé  la  journée  à  louer 
Dieu  et  à  s'entretenir  des  choses  saintes , 
ils  mangèrent  ensemble  sur  le  soir  dans  le 
même  lieu  où  ils  avaient  coutume  de  se  ren- 
contrer. Gomme  ils  étaient  encore  à  table  et 
qu'il  se  faisait  tard,  la  sainte  pria  son  frère 
de  ne  la  point  quitter  celte  nuit,  afin  de  pou- 
voir parler  ensemble  de  la  joie  céleste  jus- 
qu'au lendemain  matin.  Saint  Benoit  le  re- 
fusa, ne  croyant  pas  devoir  passer  la  nuit 
hors  de  son  monastère.  Le  temps  était  fort 
serein.  Sainte  Scholastique,  voyant  qu'elle 
ne  pouvait  lléchirla  volonté  de  son  frère,  fit  .^ 
Dieu  sa  prière  avec  tant  de  larmes  qu'elle 
obtint  ce  qu'elle  souhaitait.  Il  s'éleva  tout  à 
coup  un  orage  violent,  mêlé  d'éclairs,  de  ton- 
nerre, et  d'une  pluie  si  abondante  que  ni 
saint  Benoit,  ni  les  frères  qui  l'accompa- 
gnaient, ne  purent  mettre  le  pied  hors  de  la 
maison.  Le  saint  demeura  donc  malgré  lui, 
et  passa  la  nuit  avec  sa  s(eur  en  s'enlreteuant 
de  choses  spirituelles.  Le  lendemain  ils  re- 
tournèrent chacun  chez  soi.  Toutes  les  reli- 
gieuses n'observaient  pas  alors  une  chMure 
si  exacte  que  celles  qui  suivaient  la  règle  do 
saint  Césaire.  Il  y  en  avait  à  qui  il  était  per- 
mis de  sortir  quelquefois  pom*  des  causes 
raisonnables;  et  tel  était  apparemment  l'u- 
sage du  monastère  de  sainte  Scholasli(jue. 
Trois  jours  après  celte  entrevue,  sainl  Be- 
noit étant  dans  son  monastère,  et  levant  les 
yeux,  vit  l'ùine  de  sa  sci-ur  entrer  dans  le 
ciel  en  forme  de  colombe.  Ravi  de  sa  gloire, 


CHAPITRE  X.  —  SAINT  HRXOIT,  PATRlAnr.IlE. 


[Vl*  SifeCLE.] 

il  rfiiidil  grâces  à.  Dieu,  dc-dara  sa  mort  à 
ses  rclifiieux,  et  les  envoya  pniir  n|iporlerlo 
corps  l'i  son  monastère,  et  le  mettre  dans  le 
tondicau  qn'il  avait  pn'pnrë  pour  lui-même; 
afin,  dit  saint  Grégoire,  que  la  mort  ne  sépa- 
rât pas  les  corps  dont  les  esprits  avaient  tou- 
jours été  unis  en  Dieu.  Saint  Benoit  ne  sur- 
vécut pas  longtemps  à  sa  sœur.  La  mémo 
année,  qui  était  5-43,  il  prédit  sa  mort;\  quel- 
ques uns  de  ses  disciples  qui  demeuraient 
avec  lui,  en  leur  recommandant  le  secret  ;  et 
à  d'autres  plus  éloignés,  leur  donnant  des  si- 
gnes pour  la  connaître.  Six  jours  a  vaut  qu'elle 
arriv;Nt,il  fit  ouvrir  son  tombeau.  Aussitôt  il 
fut  saisi  d'une  lièvre  violente;  et  comme  elle 
allait  tous  les  jours  en  augmentant,  le  sixième 
jour  il  se  fit  porter'  dans  l'Oratoire,  se  pré- 
para ù  la  mort  en  recevant  le  corps  et  le  sang 
de  Jésus-Christ,  et  levant  les  yeux  et   les 
mains  au  ciel,  entre  les  bras  de  ses  disciples 
qui  le  soutenaient,  il  rendit  l'esprit  en  priant, 
le  samedi  21  de  mars  oi3,  la  veille  du  di- 
manche de  la  Passion,  environ  la  soixante- 
troisième  année  de  son  âge.  Il  fut  enterré 
dans  l'Oratoire  de  Saint-Jean-Baptiste,  qu'il 
avait  bâti  à  la  place  de  l'autel   d'Apollon. 
Quelques-uns  ont  avancé  sa  mort  jusqu'à  l'an 
530  ;  mais  ils  n'ont  pas  fait  attention  que  ce  ne 
fut  qu'en  542  qu'il  reçut  la  visite  de  Totila, 
comme  on  voit  par  Procope  dans  son  troisiè- 
me livre  de  la  Guerre  des  Goths.  Cet  auteur  dit 
encore  dans  le  quatrième,  que  Totila  mourut 
la  onzième  année  de  son  règne,  ladix-liuitiè- 
me  de  la  guerre  des  Goths,  c'est-à-dire  en  532, 
au  mois  d'août.  Or,  saint  Benoît  lui  avait  pré- 
dit qu'après  avoir  régné  encore  neuf  ans  il 
mourut  le  dixième.  Il  s'était  écoulé  un  espace 
de  neuf  ans  et  quelques  mois  entre  le  mois 
d'août  de  l'an  oo2  et  le  temps  de  la  prédiction 
de  saint  Benoît  ;  ce  qui  ne  s'est  pu  faire  qu'en 
mettant  au  mois  de  mai  de  l'an  342  l'entre- 
vue de  ce  saint  avec  Totila.  Au  reste,  quoi- 
qu'on ne  puisse  mettre  l'aunée  de  la  mort 
de  saint  Benoit  avant  l'an  342,  il  n'est  pas 

'  Sexto  die  in  Oratorium  deferri  voluW,  ubi 
exitum  suum  dotninici  corporis  et sanguinis  jht- 
ceptionecommiuiiuit.  Gregor.,  lib.  Il  Dialog.,  cap. 
xxxvu. 

*  Surrexit  in  monaslico  ordine  snnctus  Benedic- 
tus,  vir  Den  digiiiis,  Spiritii  Sancto  plenus...  iste 
in  religione  ferventissimus,  lîegulam  suis,  dictante 
Spiritu  Sdncto  ,prœscripsit,  et  ordinem  nionusti- 
ciim  jam  tune  vacillanteni  renovavit  et  firmavit. 
Anselin.  Havelb.  iu  Saxouia  episcop.  Toiu.  XIII 
Spicilegii,  pas,.  112. 

'  Hœc  a  sanctis  canonibus  antequam  Sanctus 

Xi. 


161 


logue. 


ais(ï  de  prouver  qu'elle  soit  arrivée  en  543, 
et  ce  n'est  que  par  des  conjectures  que  l'on 
avance  qu'elle  suivit  de  près  la  veiuie  du  roi 
des  Goths  au  Mont-Cassin. 

12.  Sa  mémoire  a  toujours  été  depuis  en        t:\Kf /.t 

,  >       '        ,•  1  1..'.     i-  .  it  "'"'  Benoît  : 

grande  vénération  dans  1  li,glise  ou  on  1  a  re-  ••  iitsi». 
gardé  comme  ^  un  homme  digne  de  Dic\i  et 
rempli  du  Saint-Esprit;  c'est  à  lui  que. l'or- 
dre monastique,  déjà  chancelant  en  Occident, 
est  redevable  de  sa  splendeur.  Il  en  renou- 
vela la  discipline,  la  fortifia  autant  par  son 
exemple  que  par  sa  Règle,  qui  a  été  louée 
dans  les  conciles  '  comme  ayant  été  dictée 
par  le  même  Esprit  qui  a  dicté  les  canons 
de  ces  assemblées  :  d'où  vient  qu'elle  est 
communément  appelée  la  Règle  sainte.  Elle 
est  l'ondée  principalement  sur  le  silence  et  la 
retiaite,  l'iiumilité  et  l'obéissance*. 

13.  Saint  Benoit  l'a  divisée  en  soixante- 
treize  chapitres,  précédés  d'une  préface  ou 
prologue,  dans  lequel  il  exhorte  ceux  qui  dé- 
sirent de  la  pratiquer,  à  demander  à   Dieu 
son  secours  par  des  prières  ardentes  et  réi- 
térées; à  sejpré parer  pour  entrer  dans  le  che- 
min qui  mène  à  la  vie,  par  les  mouvements 
d'une  foi  sincère,  et  par  la  pratique  des  bon- 
nes œuvres,  sans  lesquelles  on  n'arrive  ja- 
mais à  cette  vie  bienheureuse.  Il  veut  que, 
craignant  Dieu,  ils  ne  s'élèvent  point  de  va- 
nité à  cause  de  leur  bonne  vie;  mais  qu'en 
reconnaissant  que  tout  ce  qu'ils  ont  de  bien 
procède  de  la  grâce  du  Seig-neur,  ils  glori- 
fient Dieu  qui  produit  en  eux  les  bonnes  ac- 
tions, et  disent  avec  saint  Paul  :  C'est  par  la 
grâce  de  Dieu  que  je  suis  ce  que  je  suis.  Il 
déclare  que  sa  Règle  est  comme  un  école  où 
l'on  apprend  à  sei-vir  Dieu,  et  que  son  des- 
sein est  de  n'y  ordonner  rien  qui  soit  trop 
rude  et  trop  difficile;  mais,  parce  qu'il  pou- 
vait s'y  rencontrer  quelques  points  un  peu 
austères,  la  raison  et  la  justice  le  voulant 
ainsi  pour  pm'ifier  l'âme  de  ses  vices,  il  aver- 
tit qu'on  ne  doit  point  s'en  effrayer,  étant 
indubitable  que  l'on  trouve  toujours  l'entrée 

Spiritus  per  beatuni  Benedicttim  codem  Spiritu, 
quo  et  sacri  canones  cunditi sunt,X\e'^u\Am  mona- 
ckorum  ediderit,  de  hvjusmodi  sunt  décréta.  Con- 
o.W.  Durian.  2,  tom.  VI  Concil.  Harduini,  pag.  154, 
anno  874. 

*  La  Ri'gle  de  saint  Benoît  commentée  se  trouve 
daus  le  tome  LXVI  de  la  Palrologie  latine,  col. 
125,  avec  la  Vie  de  saint  Benoit  eu  grec  et  en  la- 
tin, les  opuscules  autbeutir|uos  et  suppose's  du  saint, 
et  les  monuments  qu'on  joint  à  ses_ouvrages.  (L'é- 
diteur.) 


M 


HISTOIRE  OÉXliRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Qo»lr«  sor- 
lei  d«  moine*. 


Cap.  I. 


Ouailles  et 
rnnellnn?  de 
VuUU  et  àf.'^ 
mfrts  5u|.É- 
r'O'TS  du  mo- 
Ul.tirc. 


C%p.  I'. 


162 

de  la  voie  du  salut  diroito,  lorsque  l'on  com- 
mence d'y  marclier.  «Mais,  ajoule-t-il,  à  me- 
sure que  l'on  fait  des  prosnès  dans  l'oliscr- 
vance  régulière  et  dans  la  foi,  le  cœur  ve- 
nant à  s'ouvrir  et  à  s'étendre  par  la  douceur 
incllable  de  l'amour,  on  court  avec  joie  dans 
le  chemin  des  commandements  de  nieu;  et 
si  l'on  persévère  à  pratiquer  la  doctrine  de 
Jésus-Christ  jusqu'à  la  nK)rt  dans  le  monas- 
tère, on  participera  parla  patience  aux  souf- 
frances du  Sauveur,  et  on  méritera  enûu  d'a- 
voir part  il  son  royaume.  » 

1-4.  .\près  ce  préambule,  saint  Benoît  com- 
mence sa  Hèyle  par  la  distinction  de  quatre 
sortes  de  moines.  La  première  est,  des  cé- 
nobites qxii  vivent  dans  une  communauté 
réglée  sous  la  conduite  d'un  abbé.  La  se- 
conde, des  anachorètes  ou  ermites,  qui  après 
s'être  éprouvés  longtemps  dans  un  monas- 
tère, se  retirent  dans  un  désert  pour  mener 
seuls  une  vie  encore  plus  parfaite  que  celle 
que  l'on  mène  dans  les  communautés.  La 
troisième  qui  est  très-pprnicieuso,  est  celle 
des  sarabaïtes,  qui  demeurent  deux  ou  trois 
ensemble,  ou  même  seuls,  vivant  .'i  leur  fan- 
taisie, sans  suivre  de  règle  et  sans  pasteur 
qui  les  gouverne.  Ils  témoignent  par  leur 
tonsure  qu'ils  se  sout  consacrés  à  Dieu; 
mais  ils  font  voir  par  leurs  actions  qu'ils  lui 
sont  aussi  infidèles  qu'ils  sont  encore  atta- 
chés au  monde.  La  quatrième  sorte  de  moi- 
nes comprend  les  girovagues  ou  vagabonds, 
qui  courent  continuellement  de  monastère 
en  mimastère,  sujets  à  leur  bouche  et  à  leurs 
plaisirs.  Ce  sont  les  pires  de  tous. 

15.  C'est  uniquement  pour  les  cénobites 
que  saint  Benoit  a  écrit  sa  Jîègle.  L'abbé 
choisi  pour  les  gouverner  doit  toujours  se 
souvenir  qu'il  est  chargé  du  gouvernement 
des  âmes,  et  qu'il  doit  en  rendre  compte  au 
jour  du  jugement,  où  se  fera  un  examen  ri- 
goureux de  sa  doctrine  etdel'obtiissance  de 
ses  disciples;  qu'il  doit  leur  enseigner  la  ver- 
tu, encore  plus  par  ses  actions  que  par  ses 


point  dissimuler  les  fautes  de  ceux  qui  pè- 
chent, et  toutefois  il  doit  se  contenter  de  re- 
prendre de  paroles  pour  la  première  et  se- 
conde fois  ceux  qui  ont  les  inclinations  plus 
nobles  et  l'esprit  plus  docile.  A  l'égard  des 
superbes,  des   désobéissants  et  des  opiniâ- 
tres, sa  conduite  doit  être  dilférente:  il  faut 
(fu'il  les  châtie  de  verges,  ou  de  quclqu  au- 
tre punition  corporelle,  sachant  que  l'insensé 
ne  se  corrige  point  par  de  simples  paroles. 
Il  est  aussi  de  son  devoir  de  s'accommoder 
aux  manières  de  ceux  qui  lui  sont  soumis, 
tâchant  de  gagner  les  uns  par  des  caresses, 
les  autres  par  des  réprimandes,  ceux-là  par 
des  exhortations.  Qu'il  ait  surtout  plus  d'at- 
tention au  salut  des   âmes   qu'aux  choses 
temporelles,  se  souvenant  qu'il  est  écrit  que 
rien  ne  manque  à  ceux  qui  craignent  Dieu. 
Il  no  peut  dans  des  allhiros  d'importance  se 
dispenser  d'assembler  la  communauté,  d'en 
proposer  le  sujet,  et  de  demander  l'avis  de 
chacun,  même  des  plus  jeunes,  parce  que 
Dieu  révèle  souvent  aux  jeunes  ce  qui  est 
mieux  :  mais  après  avoir  mûrement  examiné 
leurs  avis,  la  décision  doit  dépendre  de  lui, 
et  tous  sont  obligés  de  lui  obéir.  Dans  les 
moindres  choses  il  lui  sulUt  de  consuiler  les 
anciens.  Dans  l'élection  d'un  abbé,  la  com- 
munauté doit  avoir  égard  à  la  sagesse  et  à 
la  doctrine  du  sujet,  et  non  pas  an  rang  qu'il 
lient  dans  le  monastère.  L'obligation  où  il 
est  de  plus  profiter  que  de  présider,  demande 
qu'il  soit  docte,  et  qu'il  entende  bien  l'Écri- 
ture sainte,  afin  qu'il  puisse  tirer  des  ensei- 
gnements, tant  de  la  loi  ancienne  que  de  la 
nouvelle;  qu'il  soit  chaste,  sobre,  miséricor- 
dieux; qu'il  haïsse  les  vices,  et  qu'il  aime 
les  frères  ;  qu'il  les  reprenne  avec  prudence 
et  sans  excès;  qu'il  travaille  plus  à  se  faire 
aimer  qu'à  se  faire  craindre  ;  qu'il  ne  soit  ni 
turbulent,  ni  inquiet,  ni  trop  soupçonneux, 
parce  qu'autrement  il  ne  serait  jamais  en 
repos.  S'il  arrive  que  la  communauté  choi- 
sisse pour  abbé  une  personne  qui  en  dissi- 
paroles,  afin  qu'en  expliquant  de  vive  voix     mule  les  vices  et  les  désordres,  l'évoque  dio- 


aux  i)lus  inlelligciits  les  préceptes  de  l'Évan 
gile,  il  les  repn'scnle  par  ses  œuvres  à  ceux 
qui  sont  plus  simples  cl  plus  grossiers.  Il  ne 
doit  faire  acception  de  ])i!rsounes  dans  le 
monastère;  n'aimer  point  l'un  plus  que  l'au- 
tre, excepté  celui  qu'il  trouvera  le  plus  ver- 
tueux; ne  point  préférer  le  noble  à  celui  qui 
a  été  de  condition  sei-vile,  s'il  n'y  en  a  quel- 
que cause  raisonnable  :  étant  tous  un  en 
Jésus-Chri.^t,  soit  libres,  soit   esclaves;  ne 


césain,  ou  les  abbés  doivent  pourvoirai  mai- 
son de  Dion  d'un  dis])ensateur  plus  lidèlc  : 
car  c'était  à  l'évêque  ou  aux  abbés  à  ordon- 
ner celui  que  la  communauté  avait  choisi. 
Dans  quelques  monastères  le  prieur  ou  pré- 
vôt était  ordonne'  par  l'évêque,  ou  par  les 
abbés  qui  ordonnaient  l'abbé  nuhne  :  ce  qui 
lui  donnait  quelquefois  occasion  de  se  re- 
garder comme  un  second  abbé,  et  de  causer 
des  dissensions  dans  la  communauté.  Pour 


Cap.  III. 


VI"  sikc.i.E.] 

obvier  i\  cet  abus,  saint  Benoit  veut  que  l'aL- 
bi^ailon  son  pouvoir  l'entière  disposiliou  de 
son  monastère;  que  ce  soit  lui  qui  ('tablisso 
des  doyens  et  même  le  prieur,  pourvu  qu'il 
fasse  ce  choix  avec  le  conseil  dos  anciens. 
Le  prieur  est  chargé  par  la  Khjlc  de  faire 
avec  respect  tout  ce  que  l'abbé  lui  coninian- 
"•  le.  L'otlice  des  doyens  est  de  veiller  sur  dix 
moines,  soit  pendant  le  travail,  soit  pendant 
les  autres  exercices;  leurs  mœurs  et  leur 
capacité  iloivent  èlre  telles  que  l'abbé  puisse 
avec  assurance  leur  confier  luie  partie  de  sa 
charcre.  C'est  pourquoi  on  ne  doit  point  les 
choisir  selon  le  rangcpi'ils  tiennent,. mais  se- 
lon le  mérite  de  leur  vie,  leur  science  et  Iciu' 
sagesse. 

foci.  r^  .lu  10.  Outre  les  officiers  pour  le  gouvernement 
du  monastère,  la  lî('<jlc  en  marque  d'autres 
^'-  pour  le  service  ordinaiie.  Elle  veut  que  celui 
que  l'on  choisit  pour  cellérier  soit  sage,  d'un 
esprit  miîr  et  discret,  sobre,  et  qu'il  exerce 
avec  douceur  envers  toute  la  communauté, 
l'office  de  père  ;  qu'il  ait  soin  de  toutes  clioses, 
sous  les  ordres  de  l'abbé  ;  qu'il  donne  aux  reli- 
gieux les  choses  dont  ils  ont  besoin,  sans  les 
attrister,  en  les  rebutant  avec  mépris;  qu'il 
preime  soin  des  malades,  des  hôtes  et  des 
pauvres  ;  qu'il  traite  les  biens  du  monastère 
avec  le  même  respect  que  l'on  traite  les  vases 
qui  servent  au  saint  autel;  qu'il  ne  se  laisse 
aller  ni  à  l'avarice ,  ni  fi  la  prodigalité  ,  et 
qu'il  fasse  tout  avec  discrétion  et  avec  me- 
sure. Dans  les  grandes  communautés  on  lui 
donnait  des  aides,  afin  qu'il  pût  remplir  plus 
^^,1.  aisément  les  devoirs  de  sa  charge.  L'abbé 
commettait  à  quelqu'autre  de  bonne  vie  et 
de  bonnes  mœurs,  le  soin  tant  des  outils,  que 
des  habits  et  autres  choses  semblables,  dont 
il  retenait  lui-même  un  mémoire ,  pour  se 
souvenir  et  de  ce  qu'il  donnait,  et  de  ce  qu'il 
recevait ,  lorsque  les  frères  se  succédaient 
les  uns  aux  autres  dans  l'exercice  de  ces 
emplois.  La  propriété  était  défendue  à  tous, 
jusques  dans  les  moindres  choses,  un  livre  , 
.x-,M.  (les  tablettes,  un  poinçon  à  écru-e.  Mais  on 
leui'  accordait  l'usage  de  tout  cela. 

""',t',:î'""  l"?-  Celui  qui  se  présentait  pour  entrer  dans 
le  monastère  n'était  reçu  qu'après  que  l'on 

.|i.  i  .!•.  avait  éprouvé  sa  vocation.  On  le  laissait  pen- 
dant quatre  ou  cinq  jours  frapper  à  la  porte; 
on  lui  en  refusait  l'entrée  avec  mépris,  cl  on 


CHAPITRE  X.  —  SAINT  ISENdlT,   l'A'l'ItLXnCHE. 


If.:i 


ne  la  lui  accordait  que  lorsqu'il  persévérait 
couslaïunient  dans  sa  demande,  l'uis  on  le 
mellail  pour  ijuelques  jours  dans  le  logement 
des  hôtes,  ensuite  dans  celui  des  novices,  où 
il  méditait,  prenait  sou  repas  et  son  sommeil. 
On  confiait  sa  conduite   i^i   quelque  ancien 
propre  il  gagner  les  àmos,  qui  examinait  avec 
soin  tontes  ses  actions  pour  savoir  s'il  cher- 
chait Dieu  avec  sincérité  ;  s'il  se  portait  avec 
zèle  à  l'office  divin,   à  l'obéissance  et  aux 
autres  morliiicalions  humiliantes.   L'ancien 
l'avertissait  aussi  de  toutes  les  peines  qui  se 
rencontrent  dans  le  chemin  du  ciel.  Si,  après 
deux  mois  !e  novice  persévérait,  on  lui  lisait 
la  Iti-filc  par  ordre  et  de  suite,  en  lui  disant  : 
(i  Voilà  la  loi  sous  laquelle  vous  voulc/C  com- 
lialtre;  si  vous  pouvez  la  garder,  entrez  ;  si 
vous  ne  le  pouvez,  retirez-vous  librement.  » 
Au  bout  de  six  autres  mois,  on  lui  lisait  en- 
core la  Rèfjle,  et  une  troisième  fois  au  bout 
de  quatre  mois.  Après  un  an  de  persévérance 
on  le  recevait,  s'il  promellait  de  garder  tout 
ce  que  la  lH'çjk  ordonnait.  Il  faisait  sa  profes- 
sion dans  l'Oratoire,  en  présence  de  toute  la 
communauté,  promettant  la  stabilité,  la  con- 
version de  ses  mœurs  et  l'obéissance.  Il  ré- 
digeait par  écrit  sa  promesse,  ou  s'il  ne  savait 
écrire ,  quelqu'un  à  sa  prière  l'écrivait  pour 
lui,  mais  il  la  signait  de  sa  main  et  la  mettait 
sur  l'autel.  S'il  avait  quelques  biens,  il  les 
distribuait  aux  pauvres  avant  de  faire  pro- 
fession, ou  les  donnait  au  monastère  par  un 
acte  solennel ,  sans  se  réserver  rien  du  tout. 
Alors  on  le  revêtait  des  habits  du  monastère, 
et  on  gardait  les  siens  peur  les  lui  rendre, 
s'il  arrivait  qu'un  jour  il  en  sortit.  Néanmoins 
on  ne  lui  rendait  point  sa  promesse ,  que 
l'abbé  avait  soin  de  retirer  de  dessus  l'autel: 
elle  devait  être  gardée  dans  le  monastère.  Si     c>i..  lu. 
quelque  personne  noble  otirait  son  fils  à  Dieu 
dans  le  monastère,  et  que  l'enfant  fût  en  bas 
âge,  le  père  et  la  mère  faisaient  une  semblable 
promesse,  '  qu'ils  enveloppaient  de  la  palle 
ou  nappe  de  ï'aulel,  avec  leur  oiirande  et  la 
main  de  l'enfant.  Les  parents  ne  pouvaient 
rien  donnera  l'enfant,  mais  seulement  au 
monastère  par  forme  d'aumônes  ou  de  re- 
connaissance.   En   ce  cas,  ils   en    faisaieut 
nue  donation  authentique,  en  se  réservant, 
s'ils  voulaient ,  l'usufruit  pendant  leur  vie. 
Ceux  qui  étaient  pauvres  faisaient  simple- 


'  Si  quis  de  nobilihus  iiffetl  filiiim  xuiim  Deo 
in  wonasterio,  si  ipse  puer  miiture  wUitc  est, l'U- 
reiites  eji(s  faciant  pctilioncm  :  et  cum  ohlniione 


ipsam  pelitionem,  et  moiiiim  pueri  iiuoliant  in 
palla  altaris,   et  sic  cum  offerant.  Itcytil.,  cap, 

LIX 


164  HISTOIRE  GÉNÉllALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


Ca;.   u. 


Vins. 


tJïi.   VIII. 


ment  leurs  promesses  par  écrit,  et  présen- 
taient leur  enfant  et  leur  offiande  eu  présence 
de  témoins.  Si  quelqu'un  de  l'ordre  des  prê- 
tres demandait  d'être  reiju,  on  ne  le  recevait 
qu'après  l'avoir  mis  aux  épreuves  :  s'il  per- 
sévérait et  promettait  de  garder  la  Règle,  on 
l'admettait  dans  la  communauté,  où  ou  lui 
donnait  la  première  place  après  l'abbé,   par 
respect  pour  le  sacerdoce.  Aloi-s  il  faisait  les 
bénédictions  et  célébrait  la  messe,  mais  tou- 
jours avec  dépeudance  de  l'abbé,  étant  sujet, 
comme  les  autres,  à  la  discipline  régulière. 
On  accordait  un  rang  médiocre  aux  autres 
ecclésiastiques  ,  quand  après  leurs  épreuves 
ils  avaient  promis  de  garder  la  Règle  et  la 
stabilité.  Du  reste  chacun  tenait  dans  le  mo- 
nastère le  rang  de  sa  réception,  à  moins  que 
l'abbé  n'en  disposât  autrement,  eu  égard  au 
mérite  de  la  pei-sonue.  Ainsi  celui  qui  était 
veim  au  monastère  à  la  seconde  heure  du 
jour  tenait  un  rang  inférieur  à  celui  qui  était 
venu  à  la  première,  de  quelque  quaUté  et  de 
quelque  âge  qu'il  fùl.  Les  plus  jeunes  ren- 
daient honneur  aux  anciens,  en  les  appelant 
noriTies ,  c'est-à-dire  pères ,  se  levant  devant 
eux,  leur  cédant  la  place,  et  leur  demandant 
la  bénédiction.  Les  anciens   appelaient  les 
jeunes  leurs  frères.    Les  petits  enfants,  et 
ceux  qui  étaient  un  peu  plus  âgés  se  tenaient 
aussi  selon  leur  rang  dans  l'Oratoire.  Si  im  re- 
ligieux étranger  demandait  l'hospitalité  ,  on 
le  gardait  en  qualité  d'hùle  autant  de  temps 
qu'il  souhaitait,  pourvu  qu'il  se  conlenlùt  de 
l'ordinaire  qu'il  y  trouvait,  et  qu'il  ne  trou- 
blât point  le  monastère  par  ses  superlluités. 
S'il  reprenait  ou  remontrait  rpielque  ciiose, 
l'abbé  recevait  ses  avis;  et  si  l'on  était  édilié 
de  sa  conduite,  on  le  priait  de  demeurer  dans 
le  monastère,  et  il  était  au  pouvoir  de  l'abbé 
de  lui  donner  un  rang  un  peu  plus  élevé, 
s'il  l'en  trouvait  digne.  Mais  l'abbé  ne  devait 
jamais  admettre  un  moine  d'un  autre  monas- 
tère connu ,  sans  le  consentement  de   son 
abbé,  ou  sans  lettres  de  recommandation. 

18.  Voici  quelle  est  la  disposition  de  l'Of- 
fice divin,  tant  pour  le  jour  que  pour-  la  nuit  : 
((  Durant  l'hiver,  dit  la  Règle,  c'csl-i\-dirc  de- 
puis le  premier  jour  de  novembre  jusqu'à  Pâ- 
ques, on  se  lèvera  à  la  huitième  heure  de  la 
nuit,  c'est-à-dire  à  deux  heures.  L'abbé  lui- 
même  aura  soin  de  sonner  l'Oflice  divin,  ou 
de  conimetlre  cette  charge  à  un  religieux  si 
exact,  que  chaque  chose  se  fasse  à  son  heu- 
re. Ce  qui  restera  de  temps  après  les  veilles 
de  la  nuit ,  c'cst-à-dirc  après  l'oUicc  de  noc- 


turne que  nous  appelons  Matines,  sera  em- 
ployé par  les  religieux  à  apprendre  les  psau- 
mes, ou  à  les  méditer,  ou  à  qiu'hpie  lecture 
nécessaire.  Depuis  Pâques  jusqu'au  premier 
jour  de  novembre,  c'est-à-dire  pendant  l'été, 
on  disposera  l'heuie de  Matines  en  telle  sorte 
qu'on  puisse  commencer  Laudes  au  point  du 
jour.  Chatpie  jour,  à  Matines,  on  chantera 
douze  psaumes  qui  seront  précédés  du  qua- 
tre-vingt-quatorzième et  d'une  hymne  que 
saint  Benoit  nomme  ambrosienne ,  parce 
(pie  la  plupart  sont  de  la  composition  de 
saint   Ambroise.   Après  six  psaumes ,  tous 
les  frères,  étant  assis,  liront  l'un  après  l'au- 
tre trois  leçons',  à  chacune  desquelles  on 
dira  un  répons,  dont  le  troisième  se  ter- 
minera par  le  Gloria.  Ensuite  on  dira  six 
autres  psaumes  avec  Alléluia,  puis  une  le- 
çon de  l'Apôtre  que  l'on  dira  par  cœur,  avec 
le  verset  et  la  litanie,  c'est-à-dire  le  Kyrie 
eleison.  Ainsi  finira  l'office  de  la  nuit.  En  été, 
on  dira  le  même  nombre  de  psaumes,  mais 
comme   les  nuits  sont  plus  courtes,  on  ne 
hra  point  de  leçons  dans  le  livre  ,  et  au  lieu 
des  trois  leçons  ordinaires,  en  on  dira  une 
par  cœur  de  l'Ancien  Testament,  qui  sera 
suivie  d'un  répons  bref.  Les  leçons  des  Vi- 
giles ou  matines  seront  de  l'Ecriture  Sainte, 
de  l'.Vncien  et  du  Nouveau  Testament,  ou  des 
explications  qui  en  ont  été  faites  par  les  plus 
célèbres  docteurs  de  l'Église  et  les  Pères  or- 
thodoxes. Les  jours  de  dimanche  on  se  lè- 
vera |)lus  matin,  et,  après  avoir  chanté  six 
psaumes  et  le  verset,  tous  étant  assis,  on 
lira  quatre  leçons  avec  leurs  répons,  et  au 
quatrième  seulement,  celui  qui  chantera  di- 
ra le  Gloria,  au  commencement  duquel  tous 
se  lèveront  pour  rendre  hoimeur  à  la  Sainte 
Trinité.  Après  ces  leçons,  on  dira  par  ordre 
six  autres  psaumes  avec  leurs  antiennes  et 
leur  verset,  auxquels  on  ajoutera  quatre  au- 
tres leçons  avec  leui-s  répons.   Puis   trois 
cantiques  tirés  des  Prophètes,  et  quatre  le- 
çons du  Nouveau  Testament.  Après  le  qua- 
trième répons,  l'abbé  commencera  l'hymne  : 
Te  Deum  laudamus,  laquelle  étant  achevée, 
il  lira  la  leçon  de  l'Évangile,  à  la  fin  de  la- 
quelle tous  ayant  répondu  :  Amen,  il  ajoutera 
de  suite  l'hymne  :  Te  deccl  laus  ;  puis  la  bé- 
nédiction étant  donnée,  on  commencera  les 
Laudes.  » 

«Aux  fêies  des  saints  et  aux  autres  solen- 
nités, rollice  des  Matines  se  fera  comme  le  di- 
manche, excepté  les  psaumes,  les  antiennes 
cl  les  leçons  propres  du  jour.  S'il  arrive  qu'on 


Cap.  Tl 


[vi"  sii'icr.E.J 


CFTAriTRE  X.  —  SAINT  DENOIT,  PATniATtr.lTK. 


lOE 


so  soit  love  trop  Ind,  on  iil)i'(''p;cra  qiielquo 
clioso  (les  h'cjoiis  on  dos  vf'pons  pour  diro. 
toujours  les  Landes  au  point  du  jour.  Miiis 
on  usera  île  tontes  sortes  de  préciuilions 
pour  cmpiîchcr  que  cet  accident  n'arrive, 
et  celui  qui  en  aura  ('té  la  cause  par  sa  m'- 
plij^ence  en  fera  une  juste  satisfaction  dans 
l'Oratoire.  An\  /jiiides  du  Jiniaïu'.lie,  ou  dira 
les  psaumes  lxvi,  i,,  cwii,  lxii  avec  le  canti- 
qiio  :  /Jeneclicite  et  le  psaume  :  Laudaté;  une 
leron  de  r.\pocaI}'pse  par  cœur,  le  répons, 
une  iiynuie  tle  saint  .\nil)roise,  le  verset,  le 
cantique  :  licnedicius,  la  litanie,  et  l'on  linira 
It'i.»  Saint  Benoit  marque  en  détail  les  psau- 
mes que  l'on  devait  dire  clia(iue  jour  de  la 
semaine,  et  vent  qu'outre  les  psaïuncs,  l'on 
dise  un  cantique  tiré  des  PropliMes,  selon 
l'usage  de  ri'iglise  romaine'.  Il  veut  aussi 
que  celui  qui  pi-éside  au  chreur  dise  tout 
haut,  h.  la  fin  des  Matines  et  des  Vêpres,  l'O- 
raison dominicale  ,  afin  que  si  quelqu'un 
avait  quelques  peines  contre  un  autre ,  il 
soit  e.Kcité  ;\  pardonner  les  injures,  selon  la 
promesse  qu'il  en  fait,  lorsqu'il  dit  dans  cette 
prière  :  «  Pardonnez-nous  nos  oli'enscs,  com- 
me nous  les  pardonnons  à  ceux  qui  nous 
ont  otl'ensés.  »  Aux  autres  heures  de  l'Office 
il  suffira  de  dire  tout  haut  la  derinore  partie 
de  cette  oraison,  afin  que  tous  ensemble  ré- 
pondent :  Sed  libéra  nos  à  malo.  On  com- 
mencera les  heures  de  Prime,  de  Tierce,'  de 
Sexte  cl  de  None  par  le  verset  :  Deus  in  adju- 
toriiim.  Après  quoi  l'on  dira  l'hymne  propre 
à  chacune  de  ces  heures,  trois  psaumes,  une 
leçon,  le  verset  et  la  litanie,  et  on  finira.  Si 
le  nombre  des  religieux  est  assez  grand,  on 
les  chantera  avec  antiennes  ;  s'il  ne  l'est 
pas,  on  se  contentera  de  les  psalmodier.  A 
Vêpres,  on  dira  quatre  psaumes  avec  antien- 
nes, puis  une  leçon  de  l'Apôtre,  un  répons, 
une  hymne  de  saint  Ambroise,  le  verset,  le 
cantique  :  Magnificat,  la  litanie  ,  l'Oraison 
dominicale,  et  on  finira.  A  Complies,  on  dira 
trois  psaumes,  sans  les  chanter  et  sans  an- 
tiennes :  suivra  l'hymne  de  cette  heure,  une 
leçon,  le  verset,  la  litanie,  la  bénédiction,  et 
on  finira.  Saint  Benoît,  pour  marquer  la  fin 
de  chaque  Office,  se  sert  de  ces  paroles  : 


Cr,,.. 


Missœ  siiit  ou  missii'  fiant ,  c'esl-^i-dire  que 
l'Office  étant  achève!,  on  renvoyait  ceux  qui 
y  avaient  assisté.  Les  psaumes  ipTil  pres- 
crit pour  les  heures  du  jinir  et  de  l;i  nuit 
sont  les  mômes  que  nous  récitons  encore 
dans  notre  Ordre.  Il  avertit  que  si  la  distri- 
bution qu'il  a  faite  des  psaunu's  pour  les  Of- 
fices, tant  lie  la  nuit  que  du  jour,  ne  plaît 
pas  ti  quelqu'un,  il  peut  les  distribuer  au- 
trement, pourvu  que  chaque  semaine  on  di- 
se le  Psautier  en  entier,  contenant  cent  cin- 
quante psaumes;  et  que  tous  les]  dimanches 
on  le  recommence  à  Mutines.  «  C'est  le 
moins,  dit-il,  que  nous  puissions  faire,  puis- 
que nos  Pères  le  disaient  fout  entier  chaque 
jour,  selon  que  nous  l'apprenons  de  l'his- 
toire de  leur  vie.  n  Quoiqu'il  ne  prescrive 
point  d'autres  prières,  il  suppose  clairement 
que  les  religieux  s'appliquaient  d'eux-mêmes, 
en  certaines  heures,  i  l'oraison  mentale, 
lorsqu'il  dit  qu'elle  doit  être  courte  et  pure, 
si  ce  n'est  qu'on  la  prolonge  par  les  mouve- 
ments d'une  inspiration  particulière  et  de  la 
grâce  divine.  «  Mais,  ajoute-t-il,  en  com- 
munauté on  fera  toujours  l'oraison  courte, 
et  le  supérieur  ayant  fait  le  signe,  tous  se 
lèveront  ensemble  en  silence ,  après  avoir 
fait  la  révérence  à  Dieu.»  11  était  toutefois 
permis,  hors  le  temps  de  l'Ollice,  d'entrer 
dans  l'Oratoire  et  d'y  prier,  non  à  voix  haute, 
mais  avec  larmes  et  pureté  de  cœur.  C'est 
la  disposition  qu'il  demande  dans  ceux  qui 
prient.  «  Si,  dit-il,  lorsque  nous  voulons  par- 
ler de  quelque  chose  à  des  personnes  de  gran- 
de qualité,  nous  ne  le  faisons  qu'avec  humi- 
lité et  révih-ence,  combien  plus  devons-nous 
oll'rir  nos  prières  à  Dieu,  qui  est  le  Seigneur  de 
l'univers,  avec  une  profonde  humilité  et  une 
dévotion  toute  pure,  sachant  que  nous  no 
serons  pas  exaucés  pour  la  quantité  de  nos 
paroles,  mais  pour  la  pureté  de  nos  cœurs 
et  la  componction  de  nos  larmes.  » 

19.  Après  les  Oihces  divins,  le  reste  de  la 
journée  devait  être  employé  au  travail  des    !"«!. 
mains  et  à  la  lecture  des  bons  livres.  De-    cap.  xivnt, 
puis  Pâques  jusqu'au  premier  d'octobre,  les 
religieux,  sortant  le  matin,  travaillaient  h  ce 
qui  était  nécessaire,  depuis  la  première  bcu- 


TraTall    des 
maîDS,  et  loc- 


'  Canliciim  unumquodqtie  die  suo,  ex  Prophe- 
tis,  sicul  psallit  Ecclesia  romana,  dicnlur.  Plane 
agenua  matulinavel  vespcrtina  non  transeat  ali- 
quundo  nisi  in  uliinio  per  ordinem  Oratio  donti- 
nica,  omnibus  atidienlibus,  dicahir  a  prioreprop- 
ler  scandalorum  spinas  quœ  oriri  soient  in  mo- 
naslerio:  vl  convenli  peripsius  orationis  sponsio- 


nem,  qua  dicunt:  Dimitte  nobis  débita  uostra,  si- 
ciit  et  nos  liimittimus  debitoribiis  nostris,  purgent 
se  ab  hujusmodi  vitio.  Cœleris  vcro  agendis,  ulU- 
nia  pars  ejus  oralionis  dicalur,  ul  ab  omnibus 
respondentur  ;  Sed  libéra  nos  à  malo.  ReguL, 
cap.  xni. 


HISTOIRE  GKN'KRALE  DES  AUTEURS  ECCLKSIASTIQUES. 


IGU 

rc  jusqu'à  la  quatiicme,  c'csl-à-tlirc  depuis 
six   heures  jusqu'';»   dix  ;  après  ces  quatre 
heures  de  travail,  ils  s'occupaient  à  la  lec- 
ture jusques  vers  Sexte.  Après  Stxte,  se  le- 
vant de  table,  ils  reposaient  sur  leurs  lils  en 
silence.  Mais,  si  quelqu'un  voulait  lire,  on 
ne  l'en  enipèchnii  point,  pourvu  qu'il  le  fil 
sans  troubler  les  autics.  On  disait  iXone  plus 
tôt  que  de  coutume  au  milieu  de  la  huitième 
heure,  c'est-à-dire  à  une  heure  et  demie, 
puis  on  travaillait  jusqu'à  Vêpres:  ce  qui  fai- 
sait environ  sepl  heures  de  travail  par  jour, 
avec  deux  heures  de  lecture.  «  Que  si,  ajou- 
te saint  Benoît,  la  nécessité  du  lieu,  ou  la 
pauvreté,  oblige  les  religieux   à  recueillir 
eux-mêmes  leurs  fruits,  qu'ils  ue  s'en  attris- 
tent point,  parce  qu'ils  seront  véritablement 
moines,  lorscju'ils  vivront  du  travail  de  leurs 
mains,  comme  ont  fait  nos  pères  et  les  apô- 
tres. Que  tout  néanmoins  se  fasse  avec  me- 
sure, à  cause  des  faibles.  »  Mais  depuis  le  pre- 
mier^d'octohre  jusqu'au  commencement  du 
Carême,  ils  s'occupaient  à]Ia  lecture  jusqu'à 
la  seconde  heure  complète,  c'est-à-dire  jus- 
qu'à Imit  heures  du  malin.   Alors  on  disait 
Tierce,  puis  tous  travaillaient  jusqu'à  ^Vo/îp.- 
ce  qui  faisait  sept  heures  de  travail  tout  de 
suite. [Au  premier  coup  de  Noue,  chacun  quit- 
tait son  ouvrage  pour  se  tenir  prêt  aus(!cond 
coup.  Après  le  repas,  on  s'appliquait  à_la  lec- 
ture ou  à  apprendre  des  psaumes.  Eu  Carê- 
me, la  lecture  durait  depuis  le  matin  jusqu'à 
Tierce,  et  le  travail  depuis  neuf  heures  jusqu'à 
quatre  heures  après  midi.  Au  commencement 
du  Carême,  chacun  prenait  un  livre  de  la  Bi- 
bliothèque pour  le  lire  de  suite.  Pendant  les 
heuies  de  la  lecture ,  un  ou  deux  des  an- 
ciens, choisis  à  cet  etl'et,  faisaient  la  revue 
du  monastère,  pour  voir  si  quelqu'un  dor- 
mait ou  s'amusait  à  causer  et  à  interrompre 
les  autres.  Aux  jours  où  l'on  ne  jeûnait  pas, 
les  religieux,  aussitôt  après  le  souper,  s'as- 
sayaient  tous  en  un  même  lieu,  où  l'un  d'eux 
lisait  les  conférences,  ou  les  Vies  des  Pères, 
ou  quelque    autre  livre  d'édification;  mais 
non  pas  les  livres  de  Moïse,  ceux  de  Josué 
et  des  Juges,  ni  les  livres  des  Rois,  dont  la 
lecture    n'aurait   point   été   utile  en   cette 
heure-là.  Si  c'était  un  jour  de  jeûne,  on  fai- 
sait celte  assemblée  un  peu  après  les  Vèjjrcs, 
et  on  lisait  quatre  ou  cinq  feuillets,  autant 
qu'il  en  fallait  pour  donner  le  temps  à  ceux 


qui  étaient  occupés  à  ditTércnts  exercices 
pour  se  trouver  à  Compiles,  api'ès  lesquelles 
il  n'était  ])lus  permis  à  personne  de  parler, 
sinon  pour  quelque  ui'cessité,  ou  par  l'ordre 
de  l'abbé.  Le  dimanche,  tous  vaquaient  à  la 
lecture,  excepté  ceux  qui  étaient  chargés  de 
divers  offices.  S'il  s'en  trouvait  qui  ne  pus- 
sent méditer  ni  lire,  on  les  obligeait  de  faire 
quelque  ouvrage,  afin  qu'ils  ne  demeuras- 
sent pas  oisifs.  On  prescrivait  aussi  des  tra- 
vaux plus  faciles  à  ceux  qui  étaient  faibles 
et  délicats.  Ceux  qui  travaillaient  trop  loin 
de  la  maison  pour  revenir  à  TOratoiie  aux 
henires  accoutumées,  se  mettaient  à  genoux 
au  lieu  du  travail,  et  récitaient  leur  Office 
avec  crainte.  Ceux  qui  étaient  eu  voyage  le 
disaient  aussi  en  particulier  aux  hernies  pres- 
crites, comme  ils  le  pouvaient.  Personne  ne 
choisissait  son  travail,  il  était  imposé  par  les 
supérieurs  ;  et  ceux  qui  savaient  des  métiers 
ne  pouvaient  les  exercer  qu'avec  la  permis- 
sion de  l'abbé  et  en  toute  humilité.  Si  quel- 
qu'un d'eux  s'élevait  par  vanité,  prétendant 
être  habile  dans  son  art,  et  s'imaginaut  ap- 
porter quelque  utilité  au  monastère,  on  lui 
interdisait  l'exercice  de  son  art,  qu'il  ne  pou- 
vait reprendre  si  l'abbé  ne  le  lui  ordonnait 
de  nouveau,  après  avoir  reconnu  qu'il  était 
plus  humble  qu'aviparavant.  Si  l'on  vendait 
quelque  chose  de  l'ouvrage  des  artisans  du 
monastère,  ceux  qui  en  étaient  chargés  ne 
pouvaient  rien  retenir  du  prix  pour  eux,  ni 
l'augmenter  au  delà  de  la  valeur  par  un  es- 
prit d'avarice  :  mais  ils  étaient  obligés  de  don- 
ner ces  ouviages  un  peu  à  meilleur  marché 
que  les  séculiers,  afin  que  Dieu  fut  glorifié 
en  tout.  La  distinction  que  saint  Benoit  fait 
des  artisans  d'avec  ceux  qui  ne  l'étaieut  pas, 
montre  que  le  commun  des  moines  n'était 
que  de  simples  ouvriers,  et  que  les  plus  no- 
bles se  réduisaient  par  humilité  au  rang  ' 
du  plus  bas  peuple,  qui  n'avait  pas  besoin 
d'étude  pour  cntendie  la  langue  latine,  parce 
qu'elle  était  encore  vulgaire.  Ces  artisans 
étaient  simples  laïques,  il  parait  même  qu'il 
y  en  avait  peu  alors  qui  fussent  initiés  dans 
les  ordres  sacrés.  Mais  comme  on  recevait 
des  clercs  et  des|prêtrcs  dans  le  monastère,  et 
que  l'habit  était  commun  à  tous,  ils  n'étaient 
distingués  que  par  la  tonsure  '.  Les  minis- 
tres sacrés  avaient  les  cheveux  rasés  jusqu'à 
la  chair  :  les  autres  les  portaient  plus  longs. 


Ca)'.  ^1  II. 


'  l'Iciiii  ,   liv.     XX.MI    Ilist.    cccks, ,   jiag.    305, 
Umi.    Ml. 


'  M;il)illiiii,  tiiiii.  I  Annal.,  pag.  57. 


Ilahiu    do 

oiurs. 


[vr  siKcr.K.]  CIIAI'ITHE  X.  —  SAINT 

20.  On  (Iniiniiil  lies  liahils  ;uix  nidiiips  siii- 
vaiil  lii  (|ii;ilili-  (lu  pMvs  plus  ciiaud  nu  ]ilus 
;»p.  i.t.  fioicl.  Sainl  licnoii  estimu  (pic  dans  les  lieux 
tempérés  il  sullisail  que  chacun  eût  «ne  cu- 
cullo  et  une  tunique,  la  cucullo  plus  épaisse 
pour  riiiver,  plus  rase  pour  l'élé,  et  iiusca- 
pulairc  pour  le  travail.  C'était  depuis  long- 
temps riiabit  ordiuairc  des  pauvres  et  des 
gens  de  la  campagne.  11  ne  marque  point  la 
couleur  de  ces  v("'l(Mnonts;  mais  l'usage  an- 
cien est  que  la  cucuUi;  et  le  scnpulairc  fussent 
noirs,  et  la  tunique  blanche.  Elle  se  met- 
tait immédiatement  sur  la  chair.  La  cuculle 
avait  un  capuce,  et  enveloppait  les  épaules, 
descendant  sur  le  reste  du  corps.  Cet  habil- 
lement devint,  pour  sa  commodité,  commun 
à  tout  le  monde  dans  les  siècles  suivants  ;  et 
il  a  duré  dans  l'Europe  jusques  '  vers  le  xv" 
siècle.  Xon-seulcment  les  clercs  et  les  gens 
de  lettres,  mais  les  nobles  même  et  les  cour- 
tisans portaient  des  capuccs  et  des  chape- 
rons de  diverses  sortes.  Le  scapulaire  avait 
aussi  un  capuce.  Les  moines  s'en  servaient 
pendant  le  travail,  parce  que  dans  ce  temps 
ils  (jlaient  leur  cuculle,  qu'ils  reprenaient 
aussitôt  après  pour  la  porterie  reste  du  jour. 
A  la  suite  des  temps  les  moines  ont  porté  le 
scapulaire  ■  non-seulement  pendant  le  travail, 
mais  durant  tout  le  jour,  ne  se  servant  de  la 
cuculle  que  pour  les  Olfices  divins  et  de  sem- 
blables exercices.  Chacun  avait  deux  tuni- 
ques et  deuxcuculles,  soit  pour  changer  pen- 
dant la  nuit,  soit  pour  les  laver.  Ils  les  pre- 
naient au  vestiaire  commun,  et  y  remettaient 
les  vieilles.  Ils  y  en  prenaient  aussi  de  meil- 
leures que  celles  qu'ils  portaient  ordinaire- 
ment, lorsqu'il  leur  arrivait  de  sortir  du  mo- 
nastère :  mais  ils  étaient  obligés  après  leur 
retour  de  les  remettre  au  vestiaire  après  les 
avoir  lavées.  On  doiniait  aux  pauvres  les  ha- 
bits que  les  moines  rendaient  lorsqu'ils  en 
recevaient  de  neufs.  Les  étoffes  dont  on  les 
habillait,  étaient  celles  qui  se  trouvaient  dans 
le  pays  k  meilleur  pris.  L'abbé  était  chargé 
de  veiller  que  les  habits  ne  fussent  point  trop 
courts  pour  ceux  qui  devaient  s'en  servir, 
mais  d'une  juste  longueur.  Pour  ôter  tout 
sujet  de  propriété,  il  donnait  à  chacun  toutes 
les  choses  nécessaires,  c'est-à-dire,  outre  les 
habits  et  les  chaussures,  un  mouchoir,  une 
ceinture,  un  couteau,  une  aiguille,  des  ta- 
blettes et  un  poin(;;on  à  écrire.  La  garniture 


Cgip.xit'. 


nENOlT,  PATniAltCHE.  I(i7 

des  lits  consislail  eu  une  |)aillasse,  luin  cou- 
verlure  de  laine  et  un  clicvel.  Cliaciiu  iivait 
son  lit  ;  mais  les  moines  rouciiaieut  tous  en 
un  même  lieu,  au  moins  dix  ou  vingt  enscra- 
l)le,  si  la  communauté  était  nombreuse.  Une 
lampe  brûlait  toute  la  nuit  dans  le  dortoir  ; 
et  il  y  avait  t(nijours  quelque  ancien  dans 
chaque  chambre  pour  observer  la  conduite 
des  autres.  Us  dormaient  tout  vêtus,  m(;me 
avec  leur  ceinlure,  pour  être  toujours  pnMs 
i\  se  lever  pour  l'Olllce.  Les  jeunes  n'avaient 
point  leurs  lits  proclics  l'un  de  l'autre,  mais 
ils  étaient  mêlés  avec  ceux  des  anciens;  et, 
se  levant  pour  aller  ù  l'Olllce,  ils  s'éveillaient 
doucement  l'un  l'autre  pour  (jter  toute  ex- 
cuse aux  paresseux. 

21.  La  ^èjr^e  ordonne  pour  chaque  repas  D«i«iionr. 
deux  portions  cuites,  afiu  que  celui  qui  ne 
pourrait  manger  de  l'une  mangeât  de  l'au- 
tre ;  s'il  se  trouvait  des  fruits  ou  des  herbes 
nouvelles,  on  ajoutait  une  troisième  portion,  cap  ^««ii. 
le  terme  de  pulmentarium,  dont  elle  se  sert, 
signifie  proprement  des  légumes  cuits  en  étu- 
vées,  ou  des  grains  réduits  en  bouillie;  mais  il 
paraît,  par  les  Actes  de  sainte  Salaberge  et  Mohii.  lom. 
par  d'autres  anciens  monuments,  que  l'on  ,,,; '"'°  •  p'^" 
servait  aussi  aux  moines  des  œufs  et  du  pois- 
son. On  ne  leur  donnait  qu'une  livre  de  pain 
par  jour,  soit  qu'on  fit  un  repas  ou  deux. 
Lorsque  l'on  devait  souper,  le  cellérier  ré- 
servait la  troisième  partie  de  cette  livre  pour 
la  rendre  au  souper;  mais  il  était  au  pouvoir 
de  l'abbé  d'augmenter  la  portion  s'il  y  avait 
quelcpie  travail  extraordinaire.  La  livre  ro- 
maine était  de  douze  onces,  et  la  livre  mar- 
chande de  seize.  On  ne  doute  point  que  saint 
Benoit  n'ait  eu  une  mesure  particulière  pour 
ses  monastèi'es.  Ce  qui  le  prouve,  c'est  que 
Charlemagne  voulant  rétablir  la  discipline 
monastique  dans  les  monastères  de  France, 
envoya  au  Mont-Cassin  pour  en  rapporter  le  hj""""^!,'' 
poids  de  la  livre  de  pain  et  la  mesure  de  l'hé- 
mine  de  vin.  Si  ce  prince  eût  voulu  que  l'on 
se  servît  pour  l'une  et  pour  l'autre  de  lame- 
sure  romaine,  il  aurait  sans  doute  envoyé  à 
Rome,  et  non  pas  au  Mont-Cassin.  Quelques- 
uns  ont  cru  que  la  livre  à  l'usage  de  ce  mo- 
nastère était  de  trente  onces,  parce  que  celle 
que  l'abbé  Théodemar  envoya  à  Charlema- 
gne fut  estimée  dans  le  concile  d'Aix-la-Cha- 
pelle trente  sols.  Mais  il  est  plus  vraisem- 
blable qu'elle  no  pesait  que  quinze  onces  ou 


XXXIX,     pas, 
S13S17. 


'  Floriil.  apuil  MartHU.,  CommeiUar.  in  Rcgul., 
fa\\.  LV,  p;ig.  097. 


Marlcii.,  ibid.,  pau'.  702. 


1U8 


HISTOIUE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


Mal.lllni 
Pri'f.l.     1   I 

Brncd-rlln. 


environ.  Car  saint  Benoit  veut  que  la  livre 
de  pain  (|ii'on  dunii;iit  aux  roli^iciix  fut  de 
bon  poids.  A  l'égard  do  .riieuiine  de  vin,  l'o- 
pinion la  mieux  fondcîe  est  qu'elle  était  de 
dix-huit  onces.  On  en  donnait  douze  A  diner 
et  six  à  souper;  et  lorsqu'on  ne  faisait  qu'un 
repas,  on  la  servait  tout  entière.  Si  le  tra- 
vail ou  la  chaleur  l'exigeait ,  on  augmen- 
tait cette  mesure.  Au  reste  saint  Benoit  n'ac- 
corde l'usage  du  vin  que  dans  les  lieux  où  il 
en  croissait,  ou  bien  dans  les  monastères  qui 
avaient  le  moyen  d'en  acheter.  Il  défend  la 
chair  d'animaux  à  quatre  pieds,  hormis  ;\ 
ceux  qui  sont  ou  forl  faibles  ou  malades.  11 
défend  aussi  de  donner  aux  enfants  une  aussi 
grande  quantité  de  nomriture  qu'aux  person- 
nes âgées,  voulant  que  tous  évitent  les  excès. 
Depuis  le  jour  de  Pâques  jusqu'à  la  Pente- 
côte les  moines  dînaient  à  Sexle  et  soupaient 
le  soir  ;  mais  depuis  la  l^enlecôte  et  durant 
tout  l'été  ils  jeûnaient  le  mercredi  et  le  ven- 
dredi jusqu'à  Ao«e,  à  moins  que  le  travail  de 
la  campagne  ou  la  chaleur  excessive  ne  les 
eu  empêchât.  Les  autres  jours,  ils  dînaient  à 
Sexte,comine  dans  la  cinquantaine  de  Pâques. 
Depuis  le  troisième  de  septembre  jusqu'au 
commencement  du  Carême,  ils  mangeaient 
toujoujs  à  None,  et  pendant  le  Carême  ils  ne 
mangeaient  qu'à  i'hein-e  de  Vèp7'es,  qui  de- 
vait tellement  être  réglée  qu'on  n'eut  pas  be- 
soin de  lumière  durant  le  re[)as.  En  Carême 
chacun  otlïait,  de  son- propre  mouvement  et 
avec  la  joie  du  Saint-Esprit,  quelque  chose  de 
sa  portion  accoutumée,  c'est-à-dire,  qu'il  re- 
fusait à  son  corps  quelque  partie  du  boire, 
du  manger,  du  sommeil  cl  de  ses  entretiens  : 
mais  il  devait  déclarer  à  son  abbé  ce  qu'il  se 
proposait  d'oli'rir  à  Dieu,  atin  que  sa  mortifi- 
cation fut  )-(igl(!e  par  sou  ordonnance,  et  ai- 
dée de  ses  prières.  On  faisait  toujours  la  lec- 
ture pendant  le  repas,  et  le  lecteur  était 
choisi  chaque  semaine  dans  la  communauté; 
en  sorte  que  hvs  religieux  ne  lisaient  point 
chacim  à  leur  tour,  mais  ceux-là  soulemeul 
qui  pouvaient  édilier  ceux  qui  h.'s  écoulaient. 
Le  lecteur  semainier  prenait  un  coup  à  lioire 
et  un  peu  de  paiu  avant  do  lire,  soil  par  res- 
pect pour  la  Siiint(!  communion,  c'est-à-dire, 
pour  la  sainte  Eucharistie  qu'il  avait  reçue  à 
la  messe  ;  soit  de  peur  qu'il  n'eût  trop  de 
peine  a  soutenir  le  jeûne.  La  lecture  finie,  il 
prenait  sou  repas  avec  les  senniiniers  de  cui- 
sine et  les  serviteurs  de  table  :  car  les  moi- 
nes se  servaient  les  uns  les  autres,  et  aucun 
n'était  dispensé  de  servir  à  la  cuisine,  s'il 


1.0^  m  '!■• 
des:  Ici'tiMo»! 


Ca;-.   \x\FU 


n'en  était  empêché  par  maladie  ou  par  quel- 
que occupation  plus  utile.  Une  heure  avant 
le  re|)as,  les  semainiers  prenaient  chacini  un 
coup  à  boire  et  du  pain  sm*  leur  portion  ordi- 
naire, afin  qu'ils  eussent  moins  de  peine  en 
servant  les  religieux  pendant  le  repas.  Mais 
aux  jours  solennels  ils  dill'éraient  cette  petite 
réfection  jusqu'après  la  messe,  parce  qu'ils 
y  recevaient  avec  les  autres  la  sainte  Eucha- 
ristie. Celui  qui  sortait  do  semaine  nettoyait 
toutes  choses  le  samedi,  et  prenant  avec  lui 
celui  qui  devait  entrer  en  semaine,  ils  la- 
vaient eux  deux  les  pieds  à  tous  les  religiuux, 
et  rapportaient  au  cellérier  les  vases  de  leur 
oilice  nets  et  entiers,  que  le  même  cellérier 
mettait  de  nouveau  entre  les  mains  de  celui 
qui  entrait  en  semaine. 

22.  Saint  Benoit  veut  qu'on  serve  les  ma- 
lades comme  si  c'était  la  personne  même  de  Tm  viV'S"- 
Jésus-Christ  ;  mais  il  vent  aussi  que  les  ma- 
lades, considérant  que  c'est  pour  l'honneur 
de  Jésus-Christ  qu'on  leur  rend  service,  n'at- 
tristent point  les  frères  en  leur  demandant 
des  choses  non  nécessaires.  Il  y  avait  une 
chambre  particulière  pour  les  malades,  et  un 
religieux  craignant  Dieu,  diligent  et  soigneux 
pour  les  servir.  Ou  leur  permettait  l'usage  de 
la  viande  et  des  bains  toutes  "les  fois  qu'il 
était  à  propos  ;  mais  on  n'accordait  que  rare- 
ment le  bain  à  ceux  qui  étaient  en  santé, 
principalement  aux  jeunes.  Lorsqu'on  était 
averti  de  l'arrivée  de  quelque  hôte,  le  prieur 
ou  quelques  religieux  le  venaient  recevoir 
avec  toute  sorte  de  charité  et  de  respect.  On 
le  menait  ensuite  à  l'Oratoire,  puis  on  hii 
donnait  le  baiser  de  paix.  On  faisait  eu  sa  pré- 
sence quehjue  lecture  pour  son  édification. 
Le  supérieur  rompait  le  jeûne,  si  ce  n'en 
était  un  qui  fût  ordonné  par  l'Eglise.  L'ahbii 
dounait  à  laver  les  mains  à  l'hôte,  et  tant  lui 
que  toute  la  communauté  lui  lavaient  les 
pieds.  Après  quoi  l'abbé  mangeait  avec  lui, 
appelant  tels  frères  qu'il  lui  plaisait,  pourvu 
qu'il  laissât  toujours  à  la  communaut('  un  ou 
diîux  (les  anciens  pour  maintenir  la  discipli- 
ne. L'abbé  avait  sa  cuisine  et  sa  table  à  part 
pour  être  en  état  de  recevoir  les  hôtes  à  tou- 
te heure  sans  incommoder  la  comnuniauté; 
et  tous  les  ans  on  doimait  la  charge  de  cette 
cuisine  à  deux  frères  en  état  de  se  bien  ac- 
quitter de  cet  ollicc.  Il  y  avait  aussi  un  reli- 
gieux chargé  du  soin  de  la  chambre  des  hô- 
tes, oi'i  l'on  mettait  des  lits  eu  sullisance  et 
proprement  accommodés.  Mais  personne  no 
leur  parlait  sans  ordre,  excepté  cehii  qui  était 


[Vl'  SIÈCLE.] 

Cf.  .■>  (lostiné  h  les  recevoir.  Il  était  l'pnleraent  (1»5- 
feiulii  i\  tous  les  relin-joiix  de  recevoir,  sans 
l'ordre  Je  l'abbd,  ni  lettres  ni  présents  de  per- 
sonne, pas  même  de  leurs  parents,  et  de  sortir 
sans  sa  permission  de  l'enclos  du  monastère. 
Les  moines,  que  l'alihé  envoyait  dehors,  si; 
recommanilaient  à  ses  prières,  et  à  celles  do 
tons  les  frères.  On  faisait  toujours  commé- 
moration des  al)scnts  après  la  dernière  orai- 
son de  rOflice  ;  et  lorsqu'ils  étaient  de  retour 
ils  demeuraient  prosternés  dans  l'Oratoire 
sur  la  fin  de  chaque  heure  de  l'Ollice,  deman- 
dant i\  tous  les  frères  leurs  prières  pour  ob- 
tenir de  Dieu  le  pardon  des  fautes  qu'ils  pou- 
vaient avoir  faites  durant  leur  voyage.  Il  leur 
était  étroitement  di>fendu  de  rien  dire  de  ce 
qu'ils  avaient  vu  ou  entendu  au  dehors,  ces 
sortes  de  rapports  causant  beaucoup  de  mal. 
Pour  ôter  aux  moines  tout  prétexte  de  sortir 
du  monastère,  il  devait  être  bâti  de  telle  ma- 
nière qu'on  eût  au  dedans,  s'il  était  possible, 
toutes  les  choses  nécessaires,  l'eau,  le  jardin, 
le  moulin,  la  boulangerie  et  les  commodités 
pour  les  métiers  ditl'érents.  La  porte  était 
gardée  par  quelque  sage  vieillard,  qui  savait 
porter  une  parole  et  rapporter  la  r.'ponse. 
Sa  chambre  était  proche,  atin  que  les  surve- 
nants le  trouvassent  toujours  présent.  S'il 
avait  besoin  d'aide,  il  prenait  avec  lui  quel- 
que jeune  frère.  On  donnait  aussi  des  aides 
aux  autres  olliciers  du  monastère  qui  en 
avaient  besoin. 

23.  Il  n'était  pas  permis  à  un  religieux 
d'en  défendre  un  autre  ou  de  le  prendre  sous 
sa  protection,  fut-il  sou  proche  parent;  ni  de 
frapper  ou  excommunier  quelqu'un  de  sa  pro- 
pre autorité.  Cela  regardait  l'abbé  ou  celui  à 
qui  il  en  avait  donné  le  pouvoir.  Mais  tous 
avaient  soin  de  veiller  sur  la  conduite  des  en- 
fants, et  de  les  tenir  sous  une  boime  disci- 
pline jusqu'à  l'âge  de  quinze  ans.  Au  delà 
de  cet  âge,  personne  ne  pouvait  les  châtier 
sans  le  commauJeuient  de  labbc.  S'il  se 
trouvait  quelque  moine  désobéissant  ou  vio- 
lateur de  kl  Règle,  les  anciens  l'avertissaient 
en  secret  une  ou  deux  fois,  selon  le  précepte 
du  Seigneur.  S'il  ne  se  corrigeait  point,  on 
le  reprenait  publiquement  devant  tous.  Si, 
après  tout  cela ,  il  demeurait  incorrigible , 
on  l'excommuniait,  si  l'on  jugeait  qu'il  com- 
prit la  grandeur  do  cette  peine.  Mais  s'il 
était  endurci,  on  le  punissait  de  peines  cor- 
porelles, c'est-à-dire  de  jeûnes  ou  de  verges. 
Les  moindres  fautes,  comme  étaient  celles 
que  l'on  fiiisait  en  manquant  dans  quelque 


CUAPITHl':  X.  —  SAL\T  BENOl'l',  l'ATlU.VRGillC. 


iO'.i 


psaume  ou  autre  partie  de  l'Ollice,  étaient 
chàli(!es  l<Î!(èrenu>nl  lorsque  le  coupable  en 
faisait  satisfaction  devant  tous.  La  /t''/jle  ap-  ctp.  »i.v. 
pelle  excommunication  toute  séparation  de 
la  couununanlé,  et  celle  séparation  t'Iail  pro- 
porlionni'e  par  le  jugement  do  l'abbé  aux 
fautes  commises.  Celui  qui,  poui-  ipielipie 
faute  h'gèro,  était  privé  de  la  table  commu- 
ne, ne  commençait  point  de  psaume  ni  d'an- 
tienne dans  l'I^giisc,  et  ne  récitait  point  de 
leçon  jusqu'à  ce  qu'il  eût  satisfait.  Il  ne  pre- 
nait aussi  son  repas  qu'après  les  religieux,  à 
l'heure  et  en  la  quantité  que  l'abbé  ordon-  ,,,.. 
nait.  Mais  celui  qui  était  tomlié  en  do  gran- 
des fautes  devait  être  privé  tant  de  la  table 
commune  que  de  l'olHce  du  chœur.  Person- 
ne ne  lui  parlait,  et  il  était  séparé  de  tous, 
même  dans  le  travail,  persistant  dans  les  lar- 
mes de  la  pénitence,  et  considérant  cette  pa- 
role terrible  de  saint  Paul  :  Celui  qui  est  cou-  i  co  imh.  v. 
pable  (le  ce  crime  est  livre  au  démon  pour  mor- 
tifier sa  chair,  afin  rjiie  son  âme  soit  sauvée  au 
jour  du  Seigneur.  L'application  que  fait  ici 
saint  Benoit  de  ces  paroles  de  l'Apùtre,  donne 
lieu  de  croire  qu'il  parle  d'une  véritable  cen- 
sure ecclésiastique.  Il  ajoute  que  le  moine 
qui  est  excommunié  de  la  sorte  prendra  seul 
son  repas  en  la  quantité  et  à  l'heure  que 
l'abbé  aura  jugé  à  propos;  qu'il  ne  sera  point 
béni  de  ses  frères  et  qu'où  ne  bénira  poiut 
la  portion  qu'on  lui  donnera.  Il  n'était  per- 
mis à  aucun  religieux  de  parler  ni  d'écrire  à 
l'excommunié  sans  un  ordre  exprès.  Celui 
qui  faisait  le  contraire  subissait  la  même  pei-  c»i.  ix^i. 
ne  d'excommunication.  L'abbé  devait  avoir  j^,,,. 
un  grand  soin  des  excommuniés,  et  envoyer 
comme  en  secret  des  sages  anciens  pour  les 
exciter  à  une  humble  satisfaction.  S'ils  ne  se 
corrigeaient  point,  on  les  châtiait  avec  des 
verges,  et  enûa  on  les  chassait  du  monastè-  j,,,,., 
re,  de  peur  qu'ils  ne  corrompissent  les  au-  „,,.. 
très.  Celui  qui  était  excommunié  de  l'Oratoi- 
re et  de  la  table  commune,  poui'  quelques 
grandes  fautes,  satisfaisait  en  cette  sorte  : 
Prosterné  en  terre  devant  la  porte  de  l'Ora- 
toire, durant  la  célébration  du  service  divin, 
il  gardait  un  profond  silence  ;  mais,  se  tenant 
la  tète  contre  terre  et  le  corps  étendu  ,  il  se 
jetait  aux  pieds  de  tous  ceux  qui  en  sortaient, 
ce  qu'il  continuait  jusqu'à  ce  que  l'abbé  ju- 
geât qu'il  avait  satisfait.  Lorsque  l'abbé  lui 
commandait  de  venir,  il  se  jetait  à  ses  pieds 
et  à  ceux  de  tous  les  frères,  afin  qu'ils  prias- 
sent pour  lui.  Alors,  si  l'abbé  l'ordonnait,  on 
le  recevait  dans  le  chœur,  sans  néanmoins 


170 


IIISTOIIIE  Gl5Ni;:HALK  DES  AUTEUllS  ECCF.KSIASTIQUES. 


qu'il  lui  fiil  pormis  d'enlonncr  aucun  psau- 
me, de  lire  aucune  leçon  ou  de  faire  quelque 
autre  fonction  jusqu'à  ce  que  l'abbé  le  lui  eût 
permis.  A  la  fin  de  toutes  les  lieurcs  de  rOtQ- 
ce,  il  se  prosternait  à  la  place  où  il  était,  et 
satisfaisait  de  la  sorte,  jusqu'à  ce  que  l'abbé 
lui  ordonnât  de  ne  plus  continuercetle  satis- 
faction. C'était  aussi  à  l'abbc  de  prescrire  le 
temps  de  la  peine  imposée  ;\  ceux  qui  n'é- 
taient excommuniés  que  de  la  table  commu- 
Cjt.  nK.  ne.  On  recevait  de  nouveau  le  religieux  qui 
était  sorti  du  monastère  ou  qui  eu  avait  été 
chassé  par  sa  faute,  pourvu  qu'auparavant  il 
promit  de  n'y  plus  rctomljcr.  Ayant  été  ainsi 
reçu,  on  le  plaçait  au  dernier  rang  pour  éprou- 
ver son  humilité.  S'il  sortait  encore,  on  pouvait 
le  recevoir  jusqu'à  une  troisième  fois;  mais 
après  cela  la  porto  ne  lui  était  plus  ouverte. 

iiuiT.  Saint  Benoît  finit  sa  Règle  eu  disant  qu'il 
l'avait  dressée  pour  donner,  à  ceux  qui  la 
pratiqueraient ,  des  principes  d'iuie  vie  hon- 
nôtc  et  quelques  commencements  des  ver- 
tus religieuses;  qu'à  l'égard  de  ceux  qui  ten- 
daient à  la  perfection,  ils  en  trouveraient  les 
règles  dans  les  Conférences  àcCusûcii.  les  Vies 
des  Pères,  et  dans  la  /iègle  de  saint  Basile.  Il 
est  clair  qu'il  avait  puisé  lui-même  dans  ces 
sources  pour  se  perfectionner  et  pour  former 
la  liègle  qu'il  nous  a  laissée. 

Éiopedn  2i.  Elle  est  écrite  avec  beaucoup  de  net- 
cic-ostnigie.  tetc  et  de  prudence,  haïut  Gregou'e-le-Graud 
y  renvoie  '  ceux  qui  désirent  savoir  quelle 
a  été  la  vie  de  ce  saint  législateur,  disant 
qu'il  n'avait  pu  oascigner  aux  autres  que  ce 
qu'il  avait  pratiqué  lui-même.  Gùme  de  Mé- 
dicis,  grand  duc  de  Toscane,  la  lisait  assidue- 
mont.  Comme  on  lui  eu  demandait  un  jour 
la  raison  -,  il  répondit  (ju'il  en  trouvait  les 
préceptes  si  remplis  de  discrétiou,  qu'ils  lui 
paraissaient  très-propres  pour  lui  aider  à 
gouverner  ses  sujets.  Il  institua  même  uu 
ordre  de  chevaliers,  à  qui  il  donna  pour  rè- 
gle celle  de  saint  Benoît. 

L^riro  ei       2o.  La  /lèi/lc  cst  Ic  scul  monument  qui  nous 

rtaton  do  "^  ^ 

'i"',ul  reste  de  lui,  si  l'on  en  excepte  une  petite,  mais 
J'iL/n^Mi!'   '■cndre  exhortation  que  ce  saint  abbé  fit  à  ses 
religieux  pour  essuyer  leurs  larmes  au  mo- 


ment que  saint  Maur  quitta  h*  M(uit-Cassin 
pour  aller  dans  les  Gaules;  et  uu  billet  qu'il  lui 
écrivit  après  son  départ,  en  lui  envoyant  des 
reliques  renfermées  dans  un  coU'rc  d'ivoire , 
où  il  y  avait  eutr'aulres  trois  particules  de  la 
vraie  croix.  Il  est  remarquédansTlùstoire  que 
saint  Maur  emporta  aussi  avec  lui  un  exem- 
plaire de  la  Règle,  écrit  de  la  main  même  de 
sou  auteur,  avec  le  poids  de  la  livre  de  pain  et 
la  mesure  de  l'hc'minc  de  vin  que  la  Rî'gle  veut 
que  l'on  donne  par  jour  à  chaque  religieux. 

2G.  On  nous  a  donné  diverses  autres  pièces     *<«'i>  i*»»-! 
sous  le  nom  de  saint  Benoit,  qui  sont  com-  ï°*',.'  ^'•i, 

^     J  l'ffoolt»  Ton  1 

munément  rejelées  comme  supposées  et  }.^,  ,""'''^; 
écrites  plusieurs  années  après  sa  mort.  La 
première  est  une  lettre  adressée  à  saint  Ré- 
mi, archevêque  de  Reims,  pour  le  prier  de 
di'livrpr  une  possédée  du  démon,  en  ofl'ranl 
pour  elle  à  Dieu  le  saint  sacrifice.  Outre  que 
le  style  est  différent  de  celui  du  saint  abbé , 
on  convient  aujourd'hui  qu'il  y  a  faute  dans 
Ilincraar,  et  qu'il  a  mal  rendu  le  texte  de 
Fortunat,  le  premier  auteur  de  la  VVe  de  saint 
Rémi.  Fortunat  ne  dit  point  que  saint  Be- 
noît ait  envoyé  cette  possédée  à  saint  Rémi , 
mais  seidcmcnt  que  les  parents  de  la  fille,  qui 
s'étaient  présentés  au  tombeau  de  l'apôtre 
saint  Pierre  à  Rome,  voyant  qu'elle  n'y  avait 
point  été  délivrée,  étaient  passés  de  là  àReims 
avecdes  reconiuiaudations  du  béni  serviteur 
de  Dieu,  qui  veillait  à  la  garde  des  reliques 
de  cet  apôtre.  Ce  qui  fait  voir  clairement  l'er- 
reur d'IIiucmar,  qui  au  lieu  de  prendre  le 
mot  de  béni  pour  un  adjectif,  en  a  fait  le  nom 
propre  do  saint  Benoît.  La  seconde  pièce  est 
un  éloge  de  saint  Placide,  où  on  rélève  sa 
constance  dans  les  supplices  qu'il  eut  à  souf- 
frir pour  la  foi.  Il  fait  partie  de  la  Vie  de  ce 
saint  dans  Surius,  qu'on  dit  avoir  été  écrite 
par  le  moine  Gordien,  disciple  de  saint  Be- 
noit. Mais  le  grand  nombre  de  fautes  dont 
celte  IVecst  remplie  l'ont  fait  rejeter  comme 
une  pièce  sans  aucune  autorité,  et  composée 
longtemps  après  par  uu  imposteur  qui  s'est 
donné  la  qualité  de  disciple  de  saint  Benoit, 
et  fait  mal  à  propos  le  compaguou  de  saint 
Placide  dans  son  voyage  eu  Sicile. 


Molitllon. 
l'itn.  I  Aoiial. 
pjf.  61. 


Molli,  Ititd. 

r>g.  bc. 


'  Yir  Dri  liencdictus  scripsit  monachorum  Rc- 
gulam  diacrelionf.  prœcipuam,  scrmone  luculen- 
tam.  Cujwi  si  qiiis  iielil  subUUus  mores,  vilam- 
que  cognoscere, potcsl  in  cadcm  insliluUone  llc^ulaj 
omnes  mnijisli'rii  illiiis  actus  inrenire  ;  quia 
sanctus  vir  nnllo  modo  pnluil  aiiler  dnccre,  i/uam 
vixil.  lirfg.  lil).  Il  Dialog.,  cap.  xxxvi. 

5   Inlerrogalus-   Cosmiis!    de    Medicis    ma  g  nus 


Elritriœ  dux,  cur  assidue  I\ognlain  sancti  nenc- 
dicli  versarel  in  manibus  ,  rcupondii  i»tud  se  fa- 
ccrc  quod  scilicel  ex  lam  prudcntihus  snncli  Pa- 
Iris  prœscriplionibus  ad  populos  suœ  /idri  con- 
credilos  volds  nccommodala  média  cnpcrel.  Is 
est,  qui  suh  eadem  Hogula  Ordiurm  equilum  iiir- 
slituit.  lix  TliniiK«  (ialt'ti  lihro  nul  iiisscribiliir  :  fte- 
ligiosus,  cnp.  i. 


[vr  siKn,i;.|       CIIAITI'III';  XI.  —  KIMIIIICM,  PATltlAltCllK  D'ANIKHIIII.;,  ÎCTC 


171 


CHAPITRE   XI. 

Ephrcm  ',  patriarche  d'Antiochc  [vers  l'an  546],  saint  Barsannphc ,  anachorète 
[vers  l'an  550],  Enstathe  le  moine  [an  Vl  siècle]. 


É,.,. 


1.  Kplircm  -,  quoique  syrien  do  nation  et 
de  langage,  possédait  assez  bien  la  langue 
grecque.  Apr6s  avoir  passé  par  diverses  char- 
ges de  la  magistrature,  il  parvint  A  la  dignité 
de  comte  d'Orient.  Il  en  était  revêtu  dès  l'an 
526,  lorsque  la  ville  d'Antioche,  ou  du  moins 
la  plus  grande  partie  de  cette  ville,  fut  ren- 
versée par  un  tremblement  de  terre'  arrivé 
le  20  du  mois  de  mai,  qui  était  un  vendredi, 
vers  sept  heures  du  soir.  Plusieurs  person- 
nes furent  enveloppées  dans  les  ruines  de 
cette  ville,  cnlr'autrcs  le  palriarche  Eupbra- 
sius.  Les  grandes  libéralités  qu'Kphrcm  fit 
dans  cette  occasion,  à  ceux  d'Antioche  pour 
soulager  leur  misère,  les  Dt  penser  à  lui  pour 
remplir  le  siège  épiscopal  de  leur  ville ,  que 
l'on  nommait  '  déjà  Théopolis;  il  était  non- 
seulement  très -libéral  envers  les  pauvres, 
.  mais  il  avait  encore  un  grand  zèle  pour  la  re- 
ligion catholique,  dont  il  prit  la  déi'ense  par 
plusieurs  écrits  en  grec,  dont  Pholius  nous 
a  conservé  des  extraits  ^. 

2.  Il  ne  parle  que  de  trois  ouvrages  d'l'> 
phrem,  parce  qu'il  n'eu  avait  pas  vu  davan- 
tage; mais  il  suppose  clairement  qu'il  y  en 
avait  uu  plus  grand  nombi-e.  Les  trois  qu'il 
avait  vus  étaient  entièrement  pour  la  défen- 
se des  dogmes  de  l'Eglise,  en  particulier  du 
concile  de  Chalcédoine,  dont  les  eutychéens 
et  les  acéphales  ne  cessaient  de  combattre 
les  décrets  *.  Il  paraît  que  le  premier  livre 
était  un  recueil  de  diverses  pièces.  La  pre- 
mière lettre  était  adressée  à  un  nommé  Zé- 
nobius,  scholastiqne  ou  avocat  d'Émèse  ,  in- 
fecté de  l'hérésie  des  acéphales.  Éphrem  y 


vengeait  l'honneur  de  saint  Léon  et  de  sa 
lettre  à  Flavien  contre  les  termes  indécents 
de  ceux  de  celte  secte ,  et  y  soutenait  l'usage 
du  Tris'ujiun.  Zéuobius,  séparé  de  l'Eglise, 
prenait  pour  prétexte  de  son  schisme  de  ce 
que  l'on  avait  divisé  depuis  peu  cette   for- 
mule de  louange.  Mais  Ephrem  faisait  voir 
que  les  Orientaux  attribuaient  cette  louange 
à  Jésus-Christ ,  et  qu'ainsi  ils  ne  péchaient 
pas  lorsqu'ils  ajoutaient  à  ces  paroles:  Saint, 
saint ,  saint ,  celles-ci  :   Qui  est  crucifié  pour 
nous  ;  que  ceux  de  ConstanSinople  et  les  Occi- 
dentaux, raiiportanl  celle  louange  à  la  sainte 
et  consubstautiellc  Trinité,  ne  pouvaient  souf- 
frir que  l'on  ajoutât  :   Qui  est  crucifié  pour 
nous,  de  peur  qu'il  ne  parût  que  les  trois  per- 
sonnes divines  fussent  sujettes  aux  soull'ran- 
ces;  que  dans  plusieurs  églises  de  l'Europe 
on  mettait  à  la  place  de  ces  mots  :  Qui  est 
crucifié  pour  nous,  ces  autres  :  Sainte  Trini- 
té, ayez  pitié  de  nous.  D'où  il  concluait  que 
les  uns  et  les  autres,  s'accordaut  parfaite- 
ment dans  les  autres  dogmes  de  la  religion, 
on  ne  pouvait,  sur  ces  différents  usages,  qui 
ne  touchaient  point  au  fond  du  mystère  de 
l'Incarnation,  les  accuser  de  penser  différem- 
ment les  uns  des  autres  sur  ce  sujet.  Il  en 
concluait  aussi  que  l'on  avait  eu  raison,  de- 
puis un  certain  temps,  de  défendre  d'ajouter 
au  Trisagiun  ces  paroles  :  Qui  est  crucifié  pour 
nous ,  parce  que  les  hérétiques  acéphales , 
qui  prenaient  cette  proposition  en  un  mau- 
vais sens,  en  prenaient  aussi  occasion  de 
maltraiter  les  fidèles  catholiques.  Photius  re- 
marque qu'i^phrem,  dans  la  même  lettre  et 


•  On  ne  sait  pourquoi  l'auteur  doune  à  cet  iSvèque 
le  uom  do  saiut  ;  uous  l'avons  suiiiiriuié.  {L'éditeur.) 

2  Photius,  Coilic.  228,  pag.  77  i. 

s  Clironic.  Kdessen.,  tom.  1  Bibliotlt.  orient., 
pag.  41t. 

»  Fvagr.,  lib.  IV  Uist.,  cap.  VI. 

5  Phot.,  Cod.  228,  pag.  774. 

8  Angd'lo  Mai  a  pulilii';  eu  grec  dans  les  Classici 
auctores,  tom.  X,  uu  fragment  de  l'Apologie  du 
eoucile  de  Cliakédoine  et  de  l'Épitredu  pape  saint 


Léon:  ce  même  fragment  est  reproduit  avec  traduc- 
tion latine  au  tome  IV  de  la  Bibliotheca  Nova, 
pag.  G3.  Les  Scriptores  vetçres  du  même  t^dileur, 
tom.  VII,  eontienuentun  fragment  du  livre  III  Con- 
tre Se'vtre,  un  fragment  d'un  discours  sur  ces  paro- 
les de  l'Apôtre  :  Omnia  experlus  sum  absque  solo 
pecc«(o,  et  plusieius  fragments  du  Discours  sur  la 
perle.  Tons  ces  fragmenis  sont  réimprimés  au  tome 
LXWVI  de  la  Palroloqie  grecque,  col.  2099-2110, 
avec  une  Notice  tirée  de  Fabricius.  (L'éditeur.) 


172 


HISTCHHE  GliNl'jRALE  DES  AUTEUUS  ECCLÉSIASTIQUES. 


dans  SCS  autres  écrits,  compte  pour  le  cent 
soixante-sixième  canon,  celui  qui  est  le  se- 
cond du  premier  concile  de  Conslantinopic, 
avouant  qu'il  ne  sait  qui  pouvait  avoir  in- 
duit ce  Père  dans  cette  erreur.  Ephrem  re- 
marquait, dans  le  premier  chapitre  de  sa 
lettre,  où  il  entreprenait  la  défense  de  celles 
de  saint  Lfon,  tant  h  Flavien  qu'à  l'empereur 
Léon,  qu'il  ne  fallait  pas  comparer  ce  que  ce 
Pape  avait  dit  de  l'Incarnation,  avec  ce  que 
les  anciens  Pères  avaient  dit  de  la  Divinité, 
mais  avec  les  endroits  où  ils  ont  parlé  de 
l'Incarnation.  Après  quoi  il  démontrait  que 
saiut  Léon  a  reconnu,  dans  ces  deux  lettres, 
que  c'est  le  même  qui  est  Fils  de  Dieu  et  Fils 
de  riiomme  ;  en  sorte  que,  par  l'union  des 
deux  natures  en  une  seule  personne,  il  est 
passible  et  impassible,  immortel  et  sujet  à  la 
mort  ;  qu'il  y  a  condamné  nettement  Nesto- 
rius,  et  déclaré  qu'on  devait  le  priver  de  la 
communion  de  l'Église  pour  avoir  osé  dire 
que  la  Bienheureuse  Vierge  n'est  pas  mère 
de  Dieu,  mais  seulement  mère  de  Thomme, 
que  ce  saint  Pape  appelle,  dans  ces  lettres, 
en  termes  exprès,  Marie  mère  de  Dieu  ;  et 
cela  d'une  manière  plus  expresse  que  n'ont 
fait  avant  lui  les  Pères  de  l'Église.  Il  prou- 
vait, dans  le  second  chapitre,  que  les  expres- 
sions dont  saint  Léon  s'est  servi  pour  mar- 
quer la  ditférence  des  natures  et  des  opéra- 
tions, étaient  conformes  à  celles  de  saint  Gré- 
goire de  Nysse  ,  de  Jules  romain,  et  à  la  doc- 
trine de  saint  Cyrille;  qu'en  un  mol,  il  n'avait 
rien  dit  qui  marquât  (jue  les  natures  ne  fus- 
sent point  unies  en  une  seule  personne.  Il  fai- 
sait voir  dans  le  troisième  chapitre ,  que  les 
termes  employés  par  ce  pape  pour  marquer  la 
distinction  des  deux  natures  en  Jésus-Clirist 
ne  signifiaient  pas  qu'il  y  eut  deux  Fils,  mais 
seulement  deux  natures  unies  d'une  union  in- 
séparable, n'ayant,employé  sur  cette  matière 
que  des  façons  de  parler  usitées  dans  l'Écrilu- 
l'C  et  dans  les  Pères,  nommément  dans  saint 
Ignace,  dans  saint  Alhauase,  dans  les  deux 
tîrégoire  et  dans  saint  Basile.  Épbrem  rappor- 
lait,  dans  les  quatrième  et  cinquième  chapi- 
tres, les  diverses  expressions  de  ces  Pères  et 
quelques-unes  d'Isidore  de  Péluse,  montrant 
que  celles  que  les  hérétiques  censuraient 
dans  saint  Léon  étaient  toutes  semblables. 
s.iii.d«       3_  A  la  lettre  écrite  à  Zéuobius,   Ephrem 

prfinier  liTre  ■■ 

'l^t^it'i.'" '  en  joignait  plusieurs  autres,  dont  il  y  en 
avait  une  ;'i  l'empereur  Jiistinicn,  dans  la- 
quelle il  faisait  l'éloge  de  la  piété  de  ce 
prince  ;  une  touchant  les  moines  qui  demeu- 


raient dans  le  désert  ;  une  troisième  où  il 
faisait  voir  que  les  Actes  du  jugement  syno- 
dal d'Antioche  ne  renfermaient  rien  que 
d'exact  sur  les  dogmes  de  la  foi  ;  une  qua- 
trième adressée  à  .\nthime,  où,  après  avoir 
approuvé  la  sentence  rendue  contre  lui  dans 
ce  concile  d'Antioche,  il  témoignait  consen- 
tir qu'on  le  reçût  à  la  communion  de  l'Égli- 
se, pourvu  qu'il  condamnât  la  personne  d'Eu- 
tycbès  et  ses  erreurs;  une  cinijuième  à  Do- 
mitien,  sur  la  manière  dont  les  deux  natures 
sont  unies  en  Jésus-Christ,  montrant  qu'elles 
étaient  unies  eu  une  seule  et  même  person- 
ne, en  sorte  qu'elles  ne  faisaient  pas  deux 
personnes,  comme  Pierre  et  Paul  en  font 
deux.  Dans  la  sixième,  qui  était  à  Syncléti- 
que  de  Tarse,  il  rapportait  plusieurs  passa- 
ges des  Pères,  entr'autrcs  de  saint  Cyrille  et 
de  saint  Grégoire  de  Nazianze,  pour  montrer 
qu'eux  et  les  Pères  de  Chalcédoine  avaient 
reconnu  l'union  des  deux  natures  en  une 
seule  personne.  Dans  la  septième,  adressée 
à  Anthime,  évêquedeTrébizonde,  il  combat- 
tait l'eri'eur  d'Eutychès,  et  donnait  beaucoup 
de  louanges  à  Justinien,  comme  à  un  prince 
pieux  et  catholique.  Il  y  combattait  aussi  les 
évéques  du  faux  concile  d'Éplièse,  qu'il  ap- 
pelle un  brigandage,  disant  qu'ils  avaient 
enseigné,  comme  Eutychès,  qu'avant  l'union 
il  y  avait  deux  natures  en  Jésus-Christ, mais 
une  seulement  depuis  l'union.  La  huitième 
était  écrite  à  un  persan,  nommé  Brasès,  qui 
l'avait  prié  de  lui  expliquer  le  mystère  de  la 
sainte  tl  consubslaulielle  Tiinité  par  les  pa- 
roles seules  de  l'Écriture.  Eplirem  lit  ce  qu'il 
souhaitait  et  ne  produisit  dans  cette  lettre 
d'autres  passages  que  de  l'Ancien  et  du  Non- 
veau  Testament.  Mais  dans  la  neinièmo,  qui 
est  adressée  à  des  moines  dont  les  sentiments 
n'étaient  point  orthodoxes,  il  tâche  de  les  ra- 
mener à  la  saine  doctrine,  en  leur  montrant 
par  les  témoignages  des  saints  Pères,  les 
opérations  différentes  des  deux  natures  en 
une  seule  personne.  Il  y  ajoute  qu'il  sullil  de 
croire  que  Marie  est  mère  de  Dieu,  et  qu'elle 
est  demeurée  vierge.  La  dixi '"me  lettre  était 
la  Synodiqiie  d'un  concile  tenu  par  Ephrem 
coutre  Synclétique,  évoque  de  Tarse,  et  con- 
tre le  moine  Etienne,  son  syncelle ,  qui  s'é- 
taient tous  deux  laissés  entraîner  par  quel- 
ques écrits  dans  l'erreu:'  d'EuIychès.  U  l'tait 
marqui'danscette  lettre  qiie  Synclétique  avait 
été  contraint  d'abjurer  son  erreur  avant  la  lin 
du  concile,  où  l'on  avait  fait  voir  que  saint 
Cyiiile,  en  disant  qu'il  n'y  a  qu'une  nature  du 


[viVsiiVcxE.]      ClIAPlTnK  XI.  —  KPIIHEM, 

Vcrbo  incarné,  avait  prif?  le  Icnne  ilo  nnhtre 
pour  celui  de  personne;  qu'en  d'autres  en- 
dioils  de  ses  ('ciils  il  reconnaissait  ehiiieinout 
deux  natures;  el  que  telle  ('lait  la  dneirine  de 
l'l';i.;lisc.  Celte  lettre  était  suivie  d'une  autre 
A  Magnus,  ($vè([uc  do  B(5rée,  dans  laquelle 
É[»lneni  justifiait  la  doctrine  du  quatrième 
C(UK'ile  i;('néral,  c'est- i"i- dire  de  Gliali'doi- 
ne,  savoir  que  Jésus-Christ  est  compose;  de 
deux  natures  ;  et  montrait  que  l'on  n'avait 
fait  usage  de  cette  proposition  :  //  n'y  a  qu'une 
nnlnrc  du  Verhe  incarné,  que  contre  ceux  qui 
séparaient  les  natures,  et  non  pas  contre  ceux 
qui  les  distinguaient,  mais  en  reconnaissant 
qu'elles  étaient  unies  en  une  seule  personne. 
Il  y  avait  une  douzième  lettre  au  moine  Eu- 
noïus  sur  la  corruptihilitc  et  l'incoiruptihi- 
lité,  où  Eplirem  prouvait  que  les  Pères  s'ac- 
cordaient parfaitement  sur  cet  article;  et 
qu'ils  avaient  enseigné  unanimement  (pi'A- 
dam,  avant  sa  chute,  avait  eu  une  chair  in- 
corruptible, mais  qui  d'ailleurs  était  en  tout 
semblable  à  la  nôtre.  Ces  douze  lettres  étaient 
suivies  de  huit  sermons  ;  le  premier  sur  la 
fête  des  Prophètes;  le  second  sur  celle  de 
Noël;  le  troisième  sur  les  jeûnes  de  l'année; 
le  quatrième  pour  les  catéchumènes  ;  le  cin- 
quième sur  la  fête  de  saint  Michel  archange 
qu'on  célébrait  ù  Daphné,  faubourg  d'An- 
tioche  ;  le  sixième  sur  le  Carême  ;  le  septième 
sur  un  dimanche  de  Carême  ;  le  huitième  aux 
néophites  dans  les  quatre  premiers  jours  de 
leur  baptême. 

so^cni  II-       4.  Le  second  livre  d'Éphrem  contenait  qua- 
tre li  Ki.lircil),  ^  ^ 

i^iç.  -«li.  tre  traités.  Il  justifiait  dans  le  premier  traité 
certaines  expressions  de  la  lettre  de  saint 
Cyrille  à  Successus,  d'où  il  prenait  occasion 
de  combattre  l'hérésie  des  sévériens,  mon- 
trant que  ce  Père,  dans  cette  lettre  comme 
dans  tous  ses  autres  écrits,  reconnaissait  en 
Jésus-Christ  deux  natures  unies  sans  confu- 
sion en  une  seule  personne.  En  effet,  saint 
Cyrille,  pour  expliquer  l'union  des  deux  na- 
tures, se  servait,  dans  sa  lettre  à  Successus, 
de  l'exemple  de  l'homme,  où  le  corps  et 
l'âme,  qui  sont  deux  natures  différentes, 
sont  unies  en  une  seule  et  même  personne. 
Ephrem  confirmait  cette  doctrine  par  plu- 
sieurs passages  des  Pères,  nommément  de 
saint  Grégoire  de  Nazianze,  d'Eustathe  d'Au- 
tioche,  d'Anliochus  de  Ptolémaïde,  de  saint 
Cyrille,  dans  son  Commentaire  sur  saint  Jean, 


PATRUncWE  D'ANTIOCIIK.  ETC.  173 

et  dans  sa  lettre  h  Eidoge;  de  saint  Amphi- 
loque  d'Iconc,  et  de  saint  Ambroise,  Dans 
son  second  traité,  ÉpIirem  répondait  h  ces 
cinq  questions  du  scholasliiiue  Anatolius; 
la  première  :  Si  Jésus-Christ  est  encore  chair? 
la  seconde  :  Comment,  étant  descendu  d'A- 
dam ,  il  peut  être  immortel?  la  troisième: 
Quelles  preuves  l'on  peut  alléguer  que  saint 
Jean  l'évangélistc  ne  soit  pas  mort?  la  qua- 
trième :  Comment  Adam,  s'il  a  été  créé  im- 
mortel, a  pu  ignorer  ce  qm'  lui  était  utile  ?  la 
cinquième  :  Quel  est  le  sens  de  ces  paroles 
de  Dieu  :  Voilà  qu'Adam  est  devenu  semblable 
à  nous?  Sur  la  première  question,  il  prouve 
par  divers  passages  de  l'Ancien  Testament, 
que  J/'sus-Christ  a  eu  une  véritable  chair,  et 
par  divers  endroits  du  livre  des  Actes  des 
apôtres,  qu'il  l'a  conservée  depuis  sa  résur- 
rection. A  quoi  il  ajoute  que  le  sentiment  una- 
nime des  docteurs,  est  que  Jésus-Christ  est 
venu  dans  la  chair,  qu'il  y  est  encore,  et  qu'il 
doit  la  conserver  jusqu'à  son  second  avène- 
ment. Il  enseigne  sur  la  seconde,  que  Soit  que 
l'on  dise  qu'Adam  ait  été  créé  mortel  ou  im- 
mortel, il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  ce  n'est 
pas  Dieu  qui  a  fait  la  mort,  mais  que  l'hom- 
me'qui  est  libre  de  sa  nature ,  s'est  livré  lui- 
même  à  la  mort  par  son  péché,  pouvant  ne 
pas  mourir,  s'il  n'eût  pas  péché.  Il  répond  à 
la  troisième,  que  l'on  sait  par  tradition  '  que 
l'apôtre  saint  Jean  n'est  point  mort,  non  plus 
qu'Elie  et  Enoch,  en  disant  que  l'on  peut  ap- 
puyer ce  sentiment  sur  ce  que  Jésus-Christ 
dit  à  saint  Pierre,  qui  lui  demandait,  que 
deviendrait  cet  apôtre  :  Si  je  veux  qu'il  de- 
meure jusqu'à  ce  que  je  vienne,  que  vous  im- 
porte  ?  Que  l'on  ne  peut  pas  néanmoins  con- 
clure de  là  que  saint  Jean  soit  immortel,  mais 
seulement  inférer  qu'il  a  été  réservé  avec 
Enoch  et  Elle  pour  le  second  avènement  de 
Jésus-Christ.  Il  s'objecte  qu'Eusèbe  de  Césa- 
rée,  a  marqué  dans  son  Histoire  ecclésiasti- 
que, que  saint  Jean  a  vécu  jusqu'au  règne  do 
Trajan,  par  où  il  semble  fixer  le  temps  de 
la  mort  de  cet  apôtre.  Mais  il  répond  que  cet 
historien  ne  parle  que  des  années  que  saint 
Jean  est  resté  sur  la  terre  ;  que  l'Écriture 
marque  également  le  temps  qu'Enoch  a  vécu 
en  ce  monde,  et  que  de  môme  qu'on  ne  peut 
en  conclure  que  ce  patriarche  n'a  point  été 
transporté  avec  son  corps,  on  ne  peut  non 
plus  inférer  la  même  chose  de   saint  Jean 


'  Virginem  aulem  Joaniiem  sic   superesse,  ut 
Enoch  et  Eliam,  truditione  habemus,  et  quod  in 


Evangelio    habetur,   in   hune   sensum  trahitur. 
Eplirem  apud  Pliot,,  Cod.  229,  pag.  798. 


ni 


HISTOIRE  Gl'^NKRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


t 


sur  ce  quen  dit  Eusèbe  ;  qu'au  reste,  ceux 
qui  ont  laissé  par  écrit  l'histoire  de  la  vie 
et  des  actions  de  cet  apôtre,  racontent  qu'il 
disparut  tout  d'un  coup.  Nous  n'avons  plus 
ces  Actes.  Éphrcm  ajoute  que  cette  ques- 
tion n'appartient  pas  à  la  foi',  mais  qu'il 
est  toujours  avantageux ,  dans  ces  sortes 
de  disputes,  de  prendre  le  bon  parti.  Il  dit, 
sur  les  deux  autres  questions  d'Anatolius, 
qu'il  n'y  a  pas  lieu  de  s'étonner  qu'Adam, 
quoiqu'il  eut  été  créé  immortel,  n'ait  pas 
connu  ce  qui  lui  était  avantageux,  puisque 
la  même  ctiose  est  arrivée  au  diable  et  à 
ses  anges  qui  avaient  été  créés  immortels  ; 
qu'à  l'égard  de  ces  paroles  :  Voilà  qu'Adam 
est  devenu  semblable  à  nous,  elles  sont  une 
ii-onie  dont  Dieu  s'est  servi  pour  reprocher 
au  premier  homme  sa  faute  ;  que  l'Ecriture 
parle  souvent  de  semblables  reproches  que 
Dieu  fait  aux  péciicurs  ;  ou  que  si  l'on  veut 
ne  pas  prendre  ces  paroles  dans  ce  sens,  on 
peut  dire  que  Dieu  parlait  en  cet  endroit, 
suivant  la  fausse  imagination  d'Adam,  pour 
le  couvrir  de  honte  de  ce  qu'il  avait  osé  ten- 
ter de  devenir  semljlablc  à  lui. 

Le  troisième  traité  d'Ephrem,  renfermait 
un  grand  nombre  de  passages,  tirés  des  ou- 
vrages des  Pères  qui  ont  vécu  avant  le  con- 
cile de  Chalcédoine,  pour  montrer  que  le  dé- 
cret qui  fui  fait,  touchant  les  deux  natures 
et  l'unité  de  personne,  ne  contient  point  une 
doctrine  nouvelle,  puisqu'elle  est  la  même 
que  celle  que  tous  ces  anciens  écrivains  ont 
enseignée.  Il  citait  saint  Pierre  d'.Mexandrie, 
saint  Athanase,  saint  Basile,  saint  Cyrille  de 
Jérusalem,  les  trois  saints  Grégoire   de  Néo- 
césarée,  de  Xazianze  et  de  Nysse,  saint  .\m- 
philoque,  saint  Ambroise,  saint  Chrysostôme, 
saint  Épiphane,  Proclus,  Paul  d'Emèse,  Atti- 
cus  de  Constantinople,  et  saint  Cyrille  d'A- 
lexandrie. 11  citait  encore  les  livres  de  saint 
Denys  l'Aréopagite,  le  quatrième  livre  de  lu 
Foi  et  de  l'unité  d'IIilaire!,  évéque]  de  Caba- 
les ;  les  écrits  de  Cyriacus,  qu'il  disait  avoir 
assisté  au  concile  de  Nicée,  en  qualité  d'évc- 
que  de  Paphos  ;  quelques  lettres  du  pape 
Jules,  avec  un  livre  de  l'Union  de  la  divinité  et 
de  ta  chair  en  Jcsus-C/irisf,  et  un  traité  d'Ei'é- 
chlhius.  Mais  de  tous  ces  écrivains,  il  u'en 


connaissait  que  cinq  qui  se  fussent  servi  de 
cette  façon  de  parler  :  //  n'y  a  qu'une  nature 
du  Verbe  incarnée,  '  savoir  saint  Grégoire  de 
Néocésarée,  saint  Alhanase,  le  pape  Jules, 
saint  Cyrille  d'Alexandrie  et  Eréchthius.  Ce- 
pendant il  faisait  voir  qu'ils  avaient  reconnu 
les  deux  natures,  et  que  quand  ils  avaient 
dit  :  i'nc  nature  du  Verbe  incarnée,  ces  Pères 
avaient  pris  le  mot  de  nature  pour  celui  de 
personne.  Nous  avons  remarqué  ailleurs  que 
Léonce  de  Bysance  regardait  comme  suppo- 
sées les  lettres  qu'Ephrem  cite  du  pape  Jules,   , 
et  que  l'on  devait  porter  le  même  jugement  = 
du  Discours  sur  la  consubstantialité,  qu'il  al- 
lègue dans  le  traité  suivant.  Il  n'y  a  plus  de 
raison  de  lui  attribuer  le  livre  de  l'Union  des 
deux  natures  en  Jésus-Christ,  qu'on  ne  con- 
naît point  d'ailleurs.  Gennade  et  Honorius 
qui  parlent  de  Jules,  ne  lui  donnent  point 
cet  écrit,  et  il  ne  lui  est  attribué  par  aucun 
autre  écrivain  ,  avant  Ephrem    d'Anliochc. 
Dora  Contant  -  rapporte  un  passage  d'une 
cinquième  lettre  du  pape  Jules,   où  il  est 
parlé  de  l'union  de    la  divinité    de  Jésus- 
Christ  avec  son  humanité,  remarquant  qu'il 
était  tiré  d'un  traité  apologétique,  composé 
par  un  Arabe,  en  faveur  de  l'hérésie  des 
eutychéens;  et  qu'il  n'y  avait  pas  lieu  de  s'é- 
tonner que  l'auteur  l'eût  cité  comme   d'une 
cinquième  lettre  de  Jules,  parce  que,  sui- 
vant le  rapport  de  Léonce  de  Bysance,  les 
sectateurs  d'Apollinaire  en  avaient  composé 
sept  sous  le  nom  de  ce  pape.  Ephroni  conti- 
nue ,  dans  le  quatrième  traité  qu'il  compo- 
sa pour  retirer  de  l'erreur  certains  moines 
d'Orient  qui  croyaient  que  la  Divinité  avait 
souU'crt,  à  montrer  par  plusieurs  passages  des 
Pères,  qu'il  y  a  en  Jésus-Christ  deux  natures 
ditrérentes,  la  nature  divine  et  la  nature  hu- 
maine, et  qu'elles  ont  chacune  leurs  opéra- 
lion.  11  en  rapporte  un  d'Ephrcm  de  Syrie  , 
tiré  de  son  livre  de  l'Incarnation ,  et  de  son 
Discours  sur  la  perle  évangélique.  11  cite  aussi 
les  lettres  de  saint  Siméon  ,  qui  fut  tué  dans 
une  sédition  arrivée  à  Cion,  ville  de  l'ile  de 
Célébos ,   en  Asie  ;  une  de  saint  Baradat  à 
Basile,  évoque  d'Antioclie;  une  autre  adres- 
sée à  l'empereur  Léon  ;  cl  une  quatrième  de 
Jacques  à  l'évèquc  Basile. 


Vojri 


tcni. 

,   3.'. 


'  Vnnm  rernnaluiam  Yerbiincarnalam  contra 
^csl<lriuru  adiluccns  Ctjrillus,  non  lollil  divisio- 
nriii  naliirtinim,  scd  dualitalem  liijpostasi'um. 
l'hiil.,  |ln^■.  Kll.  Abittilur  nalura;  ni)nti)it:  jiro  liy- 
(Mii'Uii'i  Alhanabius  Kiii^lolu  t^d  Juliuuuiu  aposlu- 


tiiiii  liis  rrrfci's  ;  l'nam  appcUarr  decci,  ne  jiolius 
canfilcri  Verdi  iialuram  cl  hyposlasin  incarna- 
tam.  Iliiii.,  i>n^'.  81  i. 
*  Coulant.,  Episl,  décret,  in  Appcud.,  png.  82. 


Il 
l 


[vi°  SIÈCLE.]       CIIAPITHK  XI.  —  i;PIII)KM, 

iitfniccii.         5    pliolins   ne  rannorld  rien  ni  du  Inti- 

.1.0   (lr<i:i-  I  ■ 

'  "  ''""    sit'-nie  livro  d'I'.pliroiii  tr.\iitiui'lic,  ni  des  dis- 
couis  (|u'il  avait  vus  ilo  lui  :  ce  (jui  l'ail  que 
luuis  n'en  avons  aucune  connai.'^sance.  Vers 
l'an  53U  cet  i5vèque  lit  un  voyas^'c  en  Pales- 
tine avec  Eusèbe  ileCyziqno,  Hypacc  d'i'J- 
plièso  et  le  diacre  Pelade,  pour  ladi'position 
de  Paul  d'Alexandrie.  .\  sou  relour  ',  six  moi- 
nes oi'tliodoxes,  chassés  de  leur  Laurc    par 
l'abbé  Gélase,  vinrent  ;'i  Aiitiochc  lui  racon- 
ter ce  (pii  était  arrivé.  Ils  lui  montrèrent  les 
livres  d'.\nlipater  de  Bosrc.  Le  patriarche,  y 
ayant  lemarqué  les  erreurs  d'Origènc,  infor- 
mé d'ailleurs  de  tout  ce  que  les  origénistes 
avaient   fait  à  Jérusalem,  publia  une  lettre 
synodique,  par  laquelle  il  condamna  la  doc- 
trine d'Origène.  Le  moine  Nonmis  et  les  au- 
tres origénistes,  soutenus  de  quelques  évè- 
ques,  voulurent  contraindre  Pierre,  patriar- 
che de  Jérusalem,  d'ôter  des  diptyques  le 
nomd'l-lphrem  d'Antioche.  Pour  faire  cesser 
le  tumulte  que  Nounus   et  les  siens  avaient 
excité,  le  patriarche  Pierre  ordonna  secrète- 
ment aux  abbés  Sophrone  et  Gélase  de  lui 
présenter  une  requête,  où  ils  le  conjurassent 
de  ne  point  ûler  des  diptyques  le  nom  d'É- 
phrcm.  Ils  le  firent,  et  Pierre  envoya  leur  re- 
quête à  l'Empereur,  en  lui  marquant  les  dé- 
sordres que  les  origénistes  avaient  faits  à 
Jérusalem. 
fondam-       6.  Quclques  anués  après,  c'cst-à-dirB,  vcrs 
ire-  en  l'an  oiC,  Théodore    de  Cappadoce,  voulant 
venger  l'honneur  d'Origène,  et  diminuer  en 
même  temps  le  crédit  du  concile  de  Chalcé- 
'  doine,  entreprit  de  faire  condamner  Théo- 
dore de  Mopsueste  qui  avait  écrit  contre  Ori- 
gène,  et  qui  semblait  avoir  été  approuvé  par 
ce  concile.  Il  représenta  *  donc  à  l'empereur 
Jiistinien,  que  pour  ramener  tous  les  acé- 
phales, il  ne  s'agissait  plus  que  de  condamner 
Théodore  avec  ses  écrits,  et  la  lettre  d'Ibas  : 
parce  que  ce  qui  les  choquait  davantage,  dans 
le  concile  de  Chalcédoine,  était  qu'on  y  avait 
donné  des  louanges  à  Théodore  de  Mopsues- 
te, et  déclaré  Ibas  orthodoxe.  Ce  prince,  ne 
s'apercevant  pas  de  l'artifice  de  Théodore  de 
Cappadoce,  fit  publier  un  édit  en  forme  de 
lottie  adressée  à  toute  l'IOglise,  portant  con- 
damnation des  Trois-Chapitfes,  c'est-à-dire 
des  écrits  de  Théodore  de  Mopsueste,  de  la 


PATiUAUcnK  n'ANTinr.HK,  v:\r..  n.-. 

lettre  d'Ibas, et  de  l'écrit  de  Théodoret  con- 
Ire  les  douze  analhèums  de  sain!  Cyrille,  fin 
obligea  tous  les  évéqucs  à  y  souscrire.  Mucl- 
qucs-iins  en  firent  dilliculté  :  Épliiem  d'An- 
tioche fut  de  ce  immbre;  mais,  voyant  qu'on 
le  menaçait  de  le  chasser  de  son  siège ,  il 
y  souscrivit.  Il  inourui  quelque  temps  après, 
et  eut  poui-  successeur  Donmus.  Les  extraits 
que  Photius  nous  a  conservés  des  livres 
d'Éphrem  font  voir  qu'il  était  très -versé 
dans  la  leclurc  des  écrits  des  l'ères,  et  qu'il 
était  théologien. 
[7.  Saint  Barsanuphe  passa  quchiues  an-      saim  n„. 

'1  1  .  1       r,     .  .  (nnti(.lio,  un... 

nées  dans  le  monastère  de  Saint-Seridon,  si-  '■>'<•""■ 
tué  près  de  Gaza,  en  Palestine,  où  vécurent 
en  même  temps  que  lui,  Jean  le  prophète, 
le  bienheureu.x  Dorothée  et  saint  Dosithée. 
L'amour  de  la  contemplation  le  porta,  en 
3iO,  à  se  renfermer  dans  une  cellule  ccardie, 
afin  do  n'avoir  plus  de  commerce  qu'avec 
Dieu.  Ce  fut  là  qu'il  écrivit  un  traité  contre 
les  moines  qui  étaient  tombés  dans  l'origé- 
nisme.  Les  Grecs  avaient  tant  de  vénération 
pour  la  mémoire  de  ce  saint  qu'ils  mirent 
son  image  dans  la  grande  Église  de  Gons- 
tantinoplc,  près  de  celles  de  saint  Antoine  et 
d'Éphrem.  Saint  Barsanuphe  est  honoré  le  G 
de  février,  avec  la  qualité  de  premier  pa- 
tron, à  Oria,prcsdeSponto,  en  Italie,  où  ses 
reliques  furent  transférées  dans  le  lx"  siècle. 
Son  Office  se  trouve  au  même  jour  dans  les 
Synaxaires  des  Grecs.  Le  cardinal  Baronius 
a  inséré  son  nom  dans  le  Mm-tijrologe  ro- 
main sons  le  M  d'avriP.  La  doctrine  de  Bar- 
sanuphe sur  les  opinions  d'Origène,  d'Éva- 
gre  et  de  Didyme  se  trouve  au  tome  LXXXVI 
de  la  Patrolofjie  rjrecque,  avec  une  notice  de 
Galland  et  une  autre  de  Fabricius,  col.  887- 
902.  Galland  montre  que  saint  Barsanuphe 
a  écrit  son  traité  vers  l'an  SiO,  sous  le  pon- 
tificat d'Aurélien,  évèque  de  Gaza.] 

[8.  Eustathe  le  moine  est  un  écrivain  du  ki.-i.iic ;« 
VI'  siècle.  AngéloMaïa  publié  *  en  grec  une 
lettre  de  ce  moine  à  Timothée  le  scholasti- 
que,  probablement  le  faux  évoque  d'Alexan- 
drie. L'auteur  y  traite  des  deux  natures  con- 
tre Sévère,  monophysite.  C'est  un  savant  trai- 
té contre  les  monopbysifes.  Il  est  reproduit 
au  tome  LXXXVI  de  la  Patrologie  grecque, 
col.  901-942.1 


'  Vita  S.  S,ib;c,  pag.  3Gi  et  3G.';. 
-  r'acuLidu.-;,  lil).  IV,  cap,  iv;  Victor  Tiiii.  ad  an. 
519,  et  Fucuud.,  lib.  IV  ad  Jlociin.,  cap.  iv. 


^  Voyez  Vie  des  sainls par  r.odoscanl.  (L'éditeur.) 
*  ScriiJt.  celer,  nova,  coll.  toui.  Vit,  pa;;.  277  et 
291. 


176 


HISTOIRE  GÉNÉHALF,  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


CHAPITRE  XII. 
De  Procope  de  Gaza,  et  d'an  commentatenr  anonyme  snr  l'Octatenqne. 


[Vers  l'an  54C.1 


procopo  da       1.  Procope,  surnommé  de  Gaza,  d'une  ville 
"dTj''.r*D°éî  '^^  ^*^  nom,  en  Pliénicie,  où  il  faisait  sa  de- 
j'i>ui"""'i'"    lï't'ure,  se  rendit  célèbre  sous  les  règnes  de 
>*  u'Ûm'.  Justin  et  de  Justiuieu.  Il  était  sophiste  de 
profession,  c'est-à-dire,  rhéteur;  mais  il  pa- 
rait qu'au  moins  dans  ses  dernières  années 
il  se  donna  tout  entier  ;\  l'étude  de  l'Ecriture 
sainte.  Pour  en  acquérir  plus  facilement  Tin- 
lelligence,  il  lut  '  non-seulement  les  diver- 
ses versions  qui  avaient  cours  dans  l'Eglise, 
mais  aussi  les  commentaires  des  Pères  ortho- 
doxes sur  l'Écriture,  et  les  homélies  des  hom- 
mes de  piété  sur  le  même  sujet.  Il  mit  par 
écrit  ce  qu'ils  avaient  dit  de  particulier  dans 
leurs  explications  des  livres  saints,  copiant 
jnsqu'ù  leurs  propres  termes,  sans  s'embar- 
rasser si  leurs  explicatioas  étaient  confor- 
mes :   ce  qui  composa  un  volume  immense. 
11  l'abrégea  en  retranchant  ce  que  plusieurs 
avaient  dit  sur  une  même  matière,  lorsqu'ils 
s'étaient  rencontrés,  et  en  expliquant  en  peu 
de  mots  les  contrariétés  qui  se  trouvaient 
entre  eux.  Il  crut  que,  de  cette  façon,  l'on  au- 
rait dans  son  recueil  un  corps  parfait  de  com- 
mentaires, d'où  l'on  pourrait  tirer,   comme 
d'une  seule  source,  l'explication  de  toutes 
les  Écritures.  Pour  plus  grande  clarté  il  ajou- 
tait quelquefois  du  sien  à  ce  qu'il  avait  trouvé 
dans  les  autres,  mettant  toutefois  la  réussite 
de  son  travail  dans  le  secours  qu'il  attendait 
de  Dieu. 
Siti.nii.        2.  Nous  avons  de  lui  un  commentaire  très- 
ditlus  sur  l'Eplaleuque,  c'est-à-dire,  sur  les 
cinq  livres  de  Moïse-,  sur  Josué  et  sur  les  Ju- 
ges. On  avait  apparenmient  encore  son  Com- 
mentaire sur  le  livre  de  Uulli  du  temps  de  l'ho- 
«^'It  1*''.  t'"Si  puisque  cet  écrivain  enaltribue  un  à  Pro- 


cope surl'Octatcuque  :  ce  qui  comprend  né- 
cessairement le  livre  de  Rulh.  Le  même  Pho- 
tius  parle  de  son  commentaire  sur  les  livres 
des  Rois  et  des  Paralipomènes,  et  sur  la  pro- 
phétie d'Isaïe,  remarquant  qu'il  y  traitait  les 
matières  avec  autant  d'étendue,  que  dans  ce 
qu'il  avait  écrit  sur  l'Octatcuque,  sans  toute- 
fois faire  de  digressions  inutiles,  la  longueur 
de  ses  explications  ne  venant  que  de  ce  qu'il 
y  rapportait  souvent  les  divers  sentiments 
des  commentateurs  sur  une  même  chose.  Il 
s'en  faut  bien  que  ce  qtie  nous  avons  de  lui 
sur  les  livres  des  Rois  et  des  Paralipomènes 
soit  aussi  étendu  que  ses  autres  commen- 
taires. Ce  ne  sont  proprement  que  des  scho- 
lies,  dans  lesquelles  il  donne  en  peu  de  mots 
le  sens  de  la  lettre.  .\.ussi  Jean  Meursius  qui 
nous  a  donné  cet  ouvrage,  l'a  intitulé  :  Scho- 
lies;  ce  qui  donne  lieu  de  croire  que  ce  n'est 
qu'un  extrait  de  ce  qu'avait  vu  Pholius.  Le 
Commentaire  sur  /saie  est  dans  le  goût  de  ce- 
lui sur  rOctateuque.  Dans  l'un  et  dans  l'au- 
tre, Procope  explique  le  texte  en  divers  sens, 
et  marque  les  dillerences  des  versions  d'.\- 
quila,  de  Symmaque,  de  Théodotion  et  des 
autres.  11  les  marque  aussi  dans  son  commen- 
taire sur  les  Rois  elles  Paralipomènes,  où  il 
cite  souvent  Josèphe,  les  Septante,  le  texte 
hébreu,  l'interprétation  des  noms  hébreux 
d'Eusèbe  de  CJsarée,  un  dictionnaire  hé- 
braïque' et  les  élymologies  romaines  ou  la- 
tines. Ses  commentaires  sur  l'Eptatenquc  , 
sur  les  Rois  et  les  Paralipomènes  ne  sont  pas 
suivis,  et  quelquefois  il  n'explique  qu'un  ou 
deux  versets  d'un  chapitre  ;  mais  sur  Isaïe 
il  ne  laisse  presque  rien  passer. 
3.  II  pose  pour  principe  que  celui  qui  veut  ' 


f  ndioilf 


•  l'rocop.  Proleg.  Comvient.  in  Gencs. 

•  Le  Commenlaire sur  la  Genhc  avait  i\.é  donné 
en  latin  par  Gcsuor;  Maï  l'a  <li>iiué  en  pref  dans  le 
tiiiiic  VI  de  ses  Classici  auclorcs.  La  Chaîne  grec- 
que publiée  à  Leipsik  en  l'i'i,  contient  plusieurs 
variantes  et  plusieurs  fragments  inédits  snr  les  li- 
vres de  Moïse,  sur  Josué.  les  Juj,'C3,  les  llois  elles 
Paralipomènes.  Le  Commenlaire  sur  les  Proverbes 


et  le  Cantique  des  cantiques  a  été  publié  en  grec 
par  Maï.  Un  les  trouve  traduits  en  grec  et  en  latin 
au  tome  LXX.VVII  do  la  Patrologie  grecque,  coL 
1210-1780. 

'  /«  Tliecoc  t;i  (tictio:wiio  hebraico  expnnitur 
pulsalio  et  clangor  tubarum.  Hrocop.,  in  III  Ucg. 
e.ip.  XIV. 

'  Oporlet  eum  qui  operam  dalurus  est  Scrip- 


[VI'"  SlKf.l.K.I 


CKAPITIIK  XII.  —  l'ROCtlI'K  1)H(JAZA. 


rn 


s'ap|ili([ucr  à  l'étiido  de  ri']critiire  sainte,  no 
doit  point  regarder  ce  qui  est  dit,  comme  ve- 
nant de  lu  part  des  linminos,  mais  remonter 
pins  liant  et  croire  t'ermenicnt  fjiie  les  sacrés 
dogmes  qui  y  sont  dtablis  tirent  leur  ori^nne 
de  Dion  même  qni  nous  les  a  transmis  par 
le  canal  des  lioniines.  Il  dit  nettement  qne 
Moïse  est  l'auteur  du  livri;  ih;  la  (ienèsc;  et 
pour  donner  A  ce  législateur  tout  le  cr<''dit 
ni'cessaire,  il  fait  remarquer  qu'il  a  vu  Dieu 
même  autant  que  l'oeil  de  l'honune  en  soit 
capable,  et  ([ue  Dieu  lui  a  parlé'  l'ace  à  face, 
comme  un  ami  a  coutume  de  parler  ;\  son 
ami.  Il  ajoute  que  ce  législateur  avait  connu 
par  inspiration  divine  les  choses  passées,  les 
présentes  et  les  futures.  Il  combat  fort  au 
long  l'opinion  des  Grecs  toncliaut  l'éternité 
du  monde,  montrant  que  si  le  monde  est  éter- 
nel, par  une  suite  nécessaire,  on  doit  avouer 
qu'il  est  aussi  sans  principe  :  attribut  qui  ne 
convient  qu'à  Uicu  seul.  (]omme  Procope  avait 
de  la  figure  du  monde  une  idée  toute  difft'ren- 
te  de  la  nôtre,  il  ne  croit  pas  '  qu'il  y  ait  des 
antipodes ,  disant  que  s'il  y  en  avait,  Jésus- 
Christ  n'aurait  pas  manqué  d'aller  leur  prê- 
cher l'Kvaugile,  et  faire  à  leur  égard  ce  qui 
convenait  pour  le  salut  du  genre  humain.  On 
voit  que  de  son  temps  les  interprètes  ne  s'ac- 
cordaient pas  sur  l'époque  de  la  periràssion 
accordée  à  l'homme  de  manger  de  la  viande  ; 
mais  il  paraît  adopter  le  sentiment  de  ceux 
qui  enseignaient  qu'il  avait'été  permis  d'en 
manger  dès  le  commencement  du  monde  -. 
«  Il  n'est  pas  probable,  dit -il,  qu'Abel  eût 
offert  à  Dieu  des  sacrifices  d'animaux ,  dont 
il  aurait  eu  lui  -  même  horreur  de  manger  ; 
et  comment  dès  avant  le  déluge,  Dieu  au- 
rait-il fait  la  distinction  des  animaux  mon- 
des et  immondes,  s'il  eût  également  défen- 


du de  manger  de  tous.  Il  remarque  (pie  la  jj;^""'''"''' 
prophétie  faite  dans  le  livre  de  l'Kxodc,  tou- 
chant la  destruction  des  idoles,  ('lait  ac- 
complie lorsqu'il  écrivait,  puisque  ceux,  qui 
auparavant  les  adoraient  ii  genoux,  ne  ces- 
saient d'en  combattre  le  culte  ;  que  Dieu  ne 
révélait  pas  tout  li  ses  prophètes,  et  que  iMJ.iiaï. 
souvent  il  leur  cachait  des  choses  qu'il  leur 
était  utile  d'ignorer;  que  ,  selon  quelques 
interprètes,  Samuel  apparut  véritablement    iniii,.iR«j. 

,,11  1         .*        ,  .  1.     •       n     •  '"1''       XtTll', 

a  Saiil,  non  que  la  l'ythonisse  1  ait  fait  appa-  ^'e■»^■ 
railce,  mais  parce  que  Dieu  le  fit  voir  ;\  ce 
prince.  Procope  semble  approuver'  le  nii'ii- 
songe  ollicieux,  comme  valant  autant  que  la 
vérité,  par  la  bonne  lin  que  se  propose  ce- 
lui (]ui  le  dit.  «  Il  faut,  dit-il,  examiner  le  des- 
sein et  le  but  des  bons  et  des  nuichants,  et 
juger  par  là  de  la  bonté  ou  de  la  malice  de 
leurs  actions.  Peut-on  ne  pas  reprocher  h 
Ih.'rode  d'avoir  dit  vrai  dans  le  meurtre  de 
saint  Jcan-Captiste  ?  Et  ne  lui  eût-il  pas  été 
plus  utile  de  mentir,  après  avoir  juré  une 
chose  illicite,  que  de  commettre  ce  meur- 
tre?» C'est  ce  qne  dit  cet  auteur  pour  justifier 
la  manière  dont  Chusaï,  ami  de  David,  se 
conduisit  envers  Absalon  qui  s'était  révolté 
contre  son  père.  Procope  convient  que  quel- 
ques interprètes  désapprouvaient  la  dissimu- 
lation dont  Chusaï  usa  envers  Absalon,  en 
lui  otlrant  des  services  qu'il  semble  n'avoir 
pas  voulu  lui  rendre.  Pour  lui  il  croit  que 
l'on  peut  interpréter  en  bien  sa  conduite, 
parce  qu'il  avait  pour  but  de  maintenir  Da- 
vid dans  la  possession  de  ses  droits  et  de  ses 
états.  Au  reste  la  doctrine  de  Procope,  sur 
les  matières  agitées  dans  son  siècle,  est  très- 
orthodoxe.  Il  reconnaît  qu'il  n'y  a  en  Dieu 
qu'une  seule  substance  divine  ^  du  Père ,  du 
Fils  et  du  Saint-Esprit,  et  qu'une  opération. 


n    Beg. 
32  et  Hii|. 


turœ  sacrœ,  non  accipere  illa  quce  ibi  trnduntur, 
quasi  proveniant  ex  hominibus...  linnil^r  crcdat 
necesse  est  illa  sacrosancta  dogmaia  ex  ijjso  ori- 
ginem  suiiiere,  Deo,  et  inde  per  hoiiiiiies  quasi 
canales  ad  nos  promanare.  Procup.,  Prœf.  in 
Gènes. 

'  Nec  decet  ut  credamus  aliquam  terrain  infra 
nos  coli  noslro  orbi  oppositam  :  tiarn  si  antipodes 
forent,  cerle  Christus  eo  quoque  profectus  esset, 
et  cœtera  qiiœ pertinent  ad  salutem  humani  gene- 
ris  ibi  perfecisset.  lilem,  tu  Gènes.,  caji.  i,  pag.  19. 

^  Si  esus  carnium  non  in  usu  fuit,  quare  tra- 
ditiir  ovium  paslor  fuisse  Abelus  ?  Et  quare  vic- 
tiinis  ex  ovili  petiCis  placavit  Deuin,  si  ipse  illis 
vesci  aversabaiur?  ijuare  imperatur  Noacho  ut 
bina  et  bina  compellat  in  arcam  de  mundis  etim- 
mundis,  postea  vero  septem  et  septem  ?  Si  morla- 

XI. 


les  illius  sœculi  abstineant  carnium  esu.  qua  ra- 
tione  quœdam  munda,  quœdum  immunda  nuncu- 
pantur.  Idem,  ibid.,  paf<.  100. 

^  Ignorantes  mendacium,  quod  bonum  finetn 
pra-positum  habet,  veritati  œquipollere.  Bonorum 
enim  et  malorum  consilium,  et  scopus  inquiren- 
dus  est,  et  sic  inveniemus,  ulruin  bonum  an  ma- 
lum  sit.  Quis  enim  veritatem  Herodis.  in  cœde 
Joannis  Baptistœ,  non  merito  reprehenderet  ? 
Cum  enim  illicitam'  rem  jurasset,  satius  fuisset 
mentiri,  quem  ccedem  facere.  Procop.,  in  II  Reg., 
pag.  i;!9. 

*  Focit  Deus  fimianipntuui  :  quœ  non  obiter  in- 
terjecM  sunt  :  roluit  enim  ostendere  non  alium 
{■(vli  esse  opificem,  quam  eum  qui  jusserit  coclum 
fieri.  Haud  enim  alius  imperabat  et  alius  creabat: 
utrumque  prœstabul  Deus,  nempe  divina  subs- 


I 


478 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


En  sorte,  que  lorsqu'il  est/lit  dans  l'Eci  ilure  : 
(jue  le  firmament  soit  fait,  il  ne  faut  pas  s'i- 
maginer qu'il  y  ait  de  la  dilléreuce  entre  ce- 
lui qui  a  fait  le  lirmamont,  et  celui  qui  a 
commande  qu'il  se  fit  ;  d'où  vient  que  le  Fils 
dit  dans  l'Évangile  :  Mon  Père,  depuis  le  com- 
menremenl  du  monde  jusqu'aujourd'hui,  ne  cesse 
jmnt  d'agir,  etj'ayis  aussi  incessamment  comme 
lui  :  paroles  qui  marquent  une  opération 
commune  au  Père  et  au  Fils.  En  expliquant 
ce  que  Dieu  dit  à  Moïse  :  Prenez  de  l'eau  du 
fleuve,  répandez-la  sur  la  terre  sèclie,  et  tout  ce 
que  vous  aurez  puisé  du  fleuve  se  changera  en 
sang,  il  enseigne  que  le  Verbe  de  Dieu  était 
représenté  par  cette  eau  '  qui  marquait  que 
comme  l'eau  tirée  d'un  fleuve  est  de  même 
n;ilure  que  le  lleuve  même,  ainsi  le  Fils  est 
de  la  même  substance  que  le  Père,  c'est-à- 
dire,  qu'il  lui  est  consubslantiel,  étant  vie  de 
vie,  et  lumière  de  lumière.  Ce  qui  est  ajouté 
dcrcli'nsion  de  l'eau  sur  la  terre  signifiait  l'Iu- 
cariiation  du  Verbe.  Procope  dit  ailleurs  que 
Jésus-Christ  est  composé  '  de  deux  natures, 
l'une  divine  et  l'autre  humaine  ;  et  que  c'est 
selon  celle-ci'  qu'il  est  prêtre;  qu'encore 
qu'il  y  ait  deux  natures'  en  Ji'sus-Chiist ,  il 
demeure  néanmoins  un  et  indivisible  par  l'u- 
nion de  ces  deux  natures  ;  que  nous  suivons 
Jésus-Cluist' partout  où  il  nous  mène,  soit 
que  nous  nous  éloignions,  soit  que  nous  nous 
approchions.  Notre  premier  éloignemeut  se 
fait,  lorsque  nous  passons  de  l'infidélité  à  la 
foi  :  le  second,  du  vice  à  la  vertu  :  le  troi- 
sième, de  l'imperfection  ;\  la  perfection  do 
la  vie,  et  il  ne  faut  pas  s'imaginer  que  tout 
cela  se  fasse  en  nous ,  sans  le  secours  de 


Jésus-Christ,  puisqu'il  a  dit  lui-même  :  Sam 
moi,  mus  ne  jMuvez  rien  faire.  Procope  sur  le 
second  verset  du  chapitre  seizième  du  qua- 
trième livre  des  Rois,  où  nous  lisons  qu'A- 
chaz  consacra  son  lils,  le  faisant  passer  par 
le  feu,  suivant  la  superstition  des  idoles  des 
nations,  dit  que  l'on  voyait  encore  de  son 
temps  '  des  restes  de  celte  erreur  ;  et  que, 
dans  quelques  villes,  on  allumait  une  fois 
l'année  des  bûchers  au  milieu  des  places 
publiques,  et  que  non-seulement  les  enfants, 
mais  aussi  les  hommes  faits  passaient  au 
travei'S  de  ces  feux  et  dansaieut  autour;  et 
que  les  mères  dont  les  enfants  n'étaient  pas 
assez  forts  pour  passer  eux-mêmes  au  tra- 
vers de  ces  bûchers,  les  portaient  sur  leurs 
bras  au  milieu  des  flammes,  comme  pour  les 
purifier  et  les  garantir  de  maux. 

[4.  Le  tome  VI  des  Classiciauctores  de  Maï, 
renferme  un  abrégé  d'un  choix  d'exégèses  W.  m»' 
sur  la  Genèse,  par  Procope'.  Procope  nous 
apprend  lui-même  qu'il  avait  exécuté  deux 
grands  travaux  sur  la  Genèse  ;  dans  le  pre- 
mier, il  avait  rassemblé  sur  chaque  question 
les  citations  des  anciens  Pères  ecclésiasti- 
ques sans  y  rien  changer.  Dans  le  second 
qui  était  un  abrégé  du  premier,  il  se  con- 
tentait de  donner  uue  analyse  du  sentiment 
des  Pèies.  C'est  ce  dernier  travail  que  pu- 
blie ici  Mgr  Maï.  Il  renferme  des  données 
fort  importantes,  soit  comme  dogme,  soit 
comme  critique  biblique.  L'auteur  y  traite 
successivement,  et  avec  jjcaucoup  d'érudi- 
tion, de  la  nature  du  monde,  de  la  naissance 
de  l'homme,  de  son  libre  arbitre,  du  péché 
originel,  du  premier  homicide,  du  déluge, 


piii>ii< 


OuvrffM 
1" 


lanlia  Patris,  Filii  et  Spirilus  Sancli.  Ke  igilur 
lihiperegrinum  cideulitr  fi  ileinceps  audias  Filium 
Vei  corum  quœ  fada  sunl  esxe  opificem.  Inquit 
enim  :  Pater  meus  aj  Jioe  iisque  tempiis  operatiir, 
et  ego  operor.  Qiiod  ail  :  Ad  hoc  usque  tempo- 
ris,  etc.,  perpeiuilatcin  operis  vel  conlinuam  ope- 
rationcm  dénotai.  Verum  operatur  et  opeior, 
operationis  conniiunem  socielalem  edocent.  l'ro- 
cop.  in  Gènes.,  c.ip.  l,  p.ig.  22. 

'  Vnius  Dei  seriiio  representabatur  per  aquam 
quœ  cj  II  s  rei  S!'/»i""i.  Num  aqua  e  ftumine  accep- 
ta significavil l'ilium  ejusdem  cuin  l'aire  essf  sub- 
slanliœ,  id  esl  consubslanlialein.  Idem.,  in  Exod., 
cap.  IV  pag.  228. 

•  Kam  ex  diiabus  compoititus  esl  Chrislus  na- 
turis,  e.r  suhtdi  il  spi.'isa:  tiœc  humana,  illa  di- 
vina  c.s(.  Idem,  in  Exod.,  pag.  21l.i. 

'  Qitod  ti'rn  Filius,  nempe  Chrislus,  sacerdos 
dirilur,  intelligeeum  secundum  humanilalem  esse 
nai-erdolcm.  Mein,  ni  Gènes.,  cjip.  xv,  paR.  122. 

*  Licel  diiir  in  Chrislo  sinl  naluro',  lamcn  unus 


etindivisus  manet  utrisque  naluris  unitis.  Idem, 
in  Gènes., cap.  xvii,  pag.  132. 

'  Chrislum,  quocumgue  nos  ducat,  sive  receden- 
tessive  accedentessequimur.  Prima  aulem  discessio 
anobis  ab  inftdelitaU  adfidem  fil,  secunda  avitio 
ad  virtulem,  terlia  ex  imprrfeclione  ad  pcrfec- 
tioneni...  A'ec  vcro  dira  Christi  opt'm  fieri  cogi- 
landum  esl,  cum  ipseniet  :  Sine,  me  nou  quicquam 
agerc  potesti?,  dicat.  Idem,  in  i\um.,  pag.  393. 

'  Kt  filios  suos  traduxit  per  igiicm  :  videtur  si- 
gnificarespeciem  erruris  qui  ad  noslra  usque  tem- 
pora  percenit.  In  quibuidam  enim  urbibus  semel 
in  anno  accensas  jiyras  per  platcas  quidam  ins- 
pexerunl  et  per  iî/n.s-  Iransilienles  et  sallanlcs, 
non  pueros  modo,  scd  etiain  viros.  Infantes  on- 
tem  a  matribus  geslalos  per  flnmmam,  niinirum 
prnpter  depulsionem  nuiloruni,  el  luslraiionem. 
Idem,  lili.  IV  yîc!;.,cap.  xvnr,  [Kig.  311. 

'  Voir  les  Annnirs  de  philosophie ,  tome  X.MII 
de  la  Collection.  {L'àtitcur.) 


Ivi"  SIÈCLE.]  CnAlMTOE  XII.  — 

de  raccioisscnicnt  et  do  la  dispersion  du 
genre  liiiniain.  rroco[)e  vivait  au  vi"  siècle, 
c'est  doncla  docliine  de  ce  siècle  et  des  pré- 
cédents (lu'il  nous  représente;  on  y  trouvera 
en  outre  de  bonnes  leçons  du  te.vtc  grec  pui- 
sées dans  les  I/vxnjtles  d'Origène.  Nous  re- 
grettons que  le  savant  Cardinal  n'ait  pas  tra- 
duit cet  Opuscule  en.latin.  Le  môme  volume 
des  Clnssici  aiictorcs  renferme  des  fragments 
sur  le  Caulii.jue  des  cantiques.  Celte  explica- 
tion est  sculcmcnl  ascétique,  fort  inférieure 
au  Commentaire  sur  la  Genèse ,  aussi  il  n'est 
pas  certain  qu'elle  soit  de  Procope.  (348-378). 

Dans  le  neuvième  tome  on  trouve  :  1°  Une 
explication  sur  les  Proverbes,  c'est  une  e.xpli- 
cation  morale  et  mystique,  d'après  les  Pères, 
des  Proverbes  de  Salomon  en  grec  ;  2°  Une 
collection  des  commentaires  de  divers  Pères 
sur  le  Cantique  des  cantiques.  Les  pièces  dont 
Procope  donne  des  extraits  sont  :  d'un  ano- 
nyme, d'Apollinaire,  de  Cyrille  d'Alexandrie, 
de  Didyme,  d'Kusèbe  de  Césarée,  de  Gré- 
goire de  Nysse,  d'Isidore,  de  Rilus,  d'Origè- 
ne,  de  Philon  Carpathius ,  de  Procope  de 
Gaza,  de  Théodore!,  de  Théophile.] 

5.  Procope  a  imité  dans  ses  Commentai- 
res '  la  brièveté  et  la  beauté  de  ceux  de 
Théodoret  ;  mais  son  style  est  trop  poli  et 
trop  orné  pour  un  commentaire  qui  demande 
moins  de  travail  et  d'ornements.  Ceux  qu'il 
a  faits  sur  l'Eptateuque  ont  été  imprimés  en 
latin  à  Zurich  en  1553 ,  fol.  de  la  traduction 
de  Conrad  Clausérus,  qui  en  avait  trouvé  le 
teste  grec  dans  uu  manuscrit  de  la  Biblio- 
thècjue  d'Augsbourg.  Il  s'en  trouve  encore 
uu  en  cette  langue  dans  la  Bibliothèque  du 
Vatican,  et  un  dans  celle  de  Leyde.  C'est 
sur  le  même  manuscrit  que  Clausérus  a 
donné  en  latin  les  commentaires  de  Procope 
sur  Josué,  les  Juges,  les  livres  des  Rois  et  les 
Paralipomènes,  à  la  suite  des  commentaires 
snrlescinq  livres  de  Moïse.  Mais  en  1620,  Jean 
Mem'siusfit  imprimer  le  texte  grec  des  scho- 
lies  de  Procope  sur  les  Rois,  et  les  Paralipo- 
mènes à  Leyde,  in-4.  La  traduction  latine  est 
de  Lavalérus  et  d'Hambergérus ,  et  faite  com- 


PROCOPE  DE  GAZA. 


179 


me  les  précédentes  sur  le  manuscrit  d'Augs" 
bourg.  Nous  avons  aussi  en  grec  et  en  latin 
les  Commentaires  de  Procope  sur  le  prophète 
Isaïe,  imprimés  ;\  Paris,  en  io80,  sur  un  ma- 
nuscrit du  cardinal  de  la  Rochefoucault,  par 
Jean  Curlérius.  Le  mémo  commentaire  se 
trouve  marmscril  dans  la  Bibliothèque  du 
duc  de  Bavière,  à  Munich,  et  dans  la  Biblio-  o,„i„,i„.„ 
thèque  de  Saint-Marc,  à  Venise.  On  cite  un  liim.""""' 
autre  manuscrit  de  la  Bibliothèque  de  Leyde 
où  l'on  trouve  quelques  lettres  de  Procope 
de  Gaza.  Elles  n'ont  point  encore  été  ren- 
dues publiques.  A  l'égard  de  celles  qu'on  lit, 
sous  le  nom  de  Procope  sopliislc,  dans  le  Re- 
cueil grec  d'Aldus,  on  n'a  aucune  preuve 
qu'elles  soient  plutôt  de  Procope  de  Gaza, 
que  de  Procope  de  Césarée,  tous  les  deux 
ayant  porté  le  nom  de  sophiste'.  [Mais  les 
manuscrits  qui  les  contiennent  portent  ex- 
pressément le  nom  de  Procope  de  Gaza.] 
Photius  '  attribue  à  celui  de  Gaza  des  Méta- 
p/t7'ases  ou  exjilications  des  vers  d'Homère. 
L'éloge  qu'il  en  fait,  nous  donne  lieu  d'en  Turrhp.  er. 
regretter  la  perte.  Turrien  cite  ces  commen-  rS."lvf'°.°w 
taires  sur  les  Proverbes,  et  ils  sont  cités  par  "' 
Jean  Curtérius  dans  sa  Préface  sur  Isaïe  ; 
mais  ils  n'ont  pas  encore  été  mis  sous  presse,  '^"''  P'''- 
non  plus  que  le  Commentaire  sur  les  douze 
petits  prophètes,  que  l'on  dit  avoir  été  tra- 
duit par  le  Père  Garnier,  dans  le  dessein  de  ^^'^• 
le  rendre  public.  Gotfroid  Oléarius,  ayant 
trouvé  très-défectueuse  la  version  que  Con- 
rad Clausérus  à  faite  des  Commentaires  de 
Procope  sur  l'Eptateuque,  en  a  donné  une 
nouvelle  sur  un  manuscrit  grec,  qu'il  a  en- 
richie de  notes.  Nous  ne  savons  point  s'il  l'a 
fait  imprimer.  [La  plus  grande  partie  du  to- 
me LXXXVII  de  la  Palrologie  grecque  ,  col.  1 
pag.  20930,  contient  tout  ce  qui  nous  reste  de 
Procope.  Les  Œuvres  de  Procope  sont  divi- 
sées en  trois  parties  et  renfermées  en  trois  vo- 
lumes. La  première  partie  comprend  :  1°  Une 
notice  sur  Procope  tirée  de  Fabricius.  2°  Une 
dissertation  de  Jean  Chrétien  Gotlieb  Er- 
nesti  sur  les  Commentaires  de  Procope ,  pu- 
bliée ;\  Leipsik,  en  1783;  une  préface  de 


'  Maxime  ad  Thcodoreli  brevitatem,  venusta- 
temque  assurgit...  diciio  ab  eo  est  optime  quidem 
exculla,  sed  comptior  aliqiianto  quam  commen- 
tarii  prudiorem  formam  deceat.  Phot.,  Cod.  206, 
pag.  527. 

*  Viugt-deux  autres  épîtres  ont  été  publiées  en 
grec, eu  17 lu,  in-8,à  VenUe,el  Augélo  JUiï  eu  a  publié 
aussi  eent  trois  autres  en  grée  seulemeut,  parce 
que  leur  mérite  consiste  beaucoup  plus   dans  la 


pureté  et  la  finesse  du  style  que  dans  ce  qu'elles 
coutieuueut.  Ces  cent  trois  lettres  sont  traduites 
en  latin  au  tome  L.\.\.XVI1  de  la  l'atrologie.  col, 
2177-2792.  (Véditeur.) 

'  Est  item  liber  ejus  integer  homericonim  vei- 
suum  -Metapbrases  variis  dicendi  formis  coinmu- 
talœ,  quœ  summam  viii  cum  dicendi  factillatem, 
tiim  de<d(imitandi  rim  salis  qucant  ustendere. 
Piiot.,  Cod.  lUO,  pag.  338. 


180 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Mai'.  Viennent  ensuite  les  commentaires.  On  y 
trouve  d'abord  son  commentaire  sur  la  Genèse 
avec  la  traduction  de  Gesuer,  et  le  texte  grec 
publié  par  Mai ,  avec  plusieurs  leçons  et  frag- 
ments tires  de  la  Chaîne  de  Leipsi k;  2°  les  com- 
mentaires sur  l'Exode,  le  Lévitifpie,  les  Nom- 
]>res,  le  DeutérononiP,  le  livre  de  Josué,  les 
Juges,  les  livres  des  Rois,  les  Paralipomèues 
d'après  la  version  latine  de  Gesner  et  avec 
les  fragments  tirés  de  la  Chaîne  de  Leipsik  ; 
3°  le  commentaire  sur  les  Proverbes  de  Sa- 
lomon  avec  le  texte  grec  publié  par  Mai,  et 
unevei"sion  latine  donnée  par  les  éditeurs  de 
la  Patrologie. 

La  seconde  partie  contient  :  1°  le  commen- 
taire sur  le  Cantique  des  cantiques,  texte  grec 
d'après  Mai ,  et  version  latine  par  les  édi- 
teurs :  on  y  a  joint  des  fragments  de  ce  même 
commentaire  d'après  un  autre  manuscrit  ; 
2°  un  commentaire  sur  le  prophète  Isaïe,  d'a- 
près l'édition  de  Jean  Curtérius  ;  3°  les  épî- 
tres,  texte  grec,  d'après  Mai,  avec  une  traduc- 
tion laline  des  éditeurs  de  la  Patrologie.  Dans 
la  troisième  partie  on  reproduit  :  1°  Le  pané- 
gyrique de  l'empereur  Auastase;  ce  discours 
est  donné  en  grec  d'après  Villoisson,  tom.  II 
Anecd.  grœc,  pag.  28  et  suiv.  ;  2°  la  descrip- 
tion de  la  basilique  de  Sainte-Sophie,  d'a- 
près l'édition  de  Combéfis;  3°  la  Monodie 
ou  lamentation  sur  Sainte -Sophie  renver- 
sée par  un  tremblement  de  terre.  Elle  est 
reproduite  d'après  Iriartc,  Catalof/ne  des  ma- 
nuscrits grecs, in-ïoL,  pag.  264  et  suiv.  ,  Ma- 
drid, 1769.] 
commcDia-       c.  Ou  peut  joiudre  h  Procnpe  un  commen- 

ïcur  aDonymo  i  j 

!ur  lotiaico-   tatcur  anonyme  sur  l'Octateuque,  puisqu'au 

que.   Piioliu^,  .^  a        '   1  1 

Lod.  36,  pg.  rapport  de  Pliotius  il  écrivait  sous  le  règne 
de  l'empereur  Justin.  Son  ouvrage  était  in- 
titulé :  /.ivre  des  chrétiens,  ou  explication  de 
rUclali'uqiie.  On  ne  sait  qui  était  Pamphyle, 
à  qui  il  l'avait  dédié.  Le  style  en  était  bas, 
et  la  construction  au-dessous  du  commun. 
Avec  cela  l'auteur  avançait  quantité  de  pa- 
radoxes insoutenables  et  plusieurs  inepties 
qui  n'auraient  pas  dû  se  trouver  dans  un 
écrit  aussi  sérieux.  Il  disait  entre  autres  que 
le  ciel  et  la  terre  ne  sont  pas  d'uue  ligure 
ronde;  que  le  ciel  est  en  forme  de  voùlc  ou 
d'arc,  que  la  teire  est  [ilus  longue  d'un  côté 
que  de  l'autre,  et  liée  au  ciel  par  ses  extré- 
mités; que  tous  les  astres  se  meuvent  par  le 
ministère  des  anges,  et  plusieurs  auti«s  cho- 
ses semblables  :  ce  quia  fait  dire  à  Photius 
que  cet  anonyme  devait  être  plutôt  reganh- 
comme  un  hommcî  fabuleux  que  comme  un 


véritable  écrivain.  Il  parlait  de  la  Genèse  et 
de  l'Exode,  mais  seulement  en  passant,  s'é- 
tendant  beaucoup  sur  la  description  du  ta- 
bernacle. Il  parcourait  aussi  les  écrits  des 
prophètes  et  même  ceux  des  apôtres.  U  avan- 
çait que  la  grandeur  du  soleil  est  de  deux 
climats,  que  les  anges  ne  sont  point  dans  le 
ciel,  mais  au-dessus  du  firmament ,  et  qu'ils 
ont  leur  demeure  parmi  nous;  que  Jésus- 
Christ  montant  de  la  terre  au  ciel,  était  resté 
entre  le  ciel  et  le  firmament  ;  et  que  c'est  ce 
que  l'on  appelle  le  royaume  des  cieux.  C'est 
tout  ce  que  nous  savons  de  cet  ouvrage,  qui 
n'est  pas  venu  jusqu'à  nous.  Il  était  divisé 
en  douze  livres,  dont  les  six  premiers  étaient 
adressés  ii  Pamphyle,  le  septième  à  Anasla- 
se,  le  huitième  à  Pierre.  L'auteur  n'avait  dé- 
dié les  quatre  derniers  à  personne.  Il  assurait 
dans  le  septième,  que  les  cieux  ne  soulFri- 
ronl  point  de  dissolution.  Dans  le  huitième 
il  expliquait  le  cantique  d'Ezéchias,  et  ce 
qui  est  dit  de  la  rétrogradation  du  soleil.  U 
marquait  dans  le  même  livre  qu'il  avait  ex- 
pliqué le  Cantique  des  cantiques.  Ce  com- 
mentaire est  perdu. 

[7.  Choricius,  disciple  de  Procope  de  Gaza,  ^^  ^1.'',°'^''^ 
exerça  lui-même  l'art  de  rhéteur  sous  Justi-  '''" 
nien  le  Grand  ,  et  égala  son  maître  par  le 
nombre  et  l'élégance  de  ses  écrits.  J.  A.  Fa- 
bricius  en  a  publié  deux  dans  le  huitième 
volume  de  sa  Dibliothèqne grecque.  Le  premier 
est  un  discours  sur  la  mort  de  Procope  ;  la 
traduction  est  de  Wolf:  l'autre  est  sur  le 
général  Somnius;  la  traduction  est  de  Guil- 
laume de  Hertoge.  Harlès,  dans  la  nouvelle 
édition,  a  oublié  ces  deux  écrits  :  il  promet- 
tailde  les  donner  dans  les  suppléments;  mais 
les  suppléments  n'out  point  paru.  Villoisson, 
dans  le  tnme  11  des  Anecdota  grœca,  Venise, 
1781,  in-4°,  a  mis  au  jour,  un  discours  funè- 
bre sur  .Marie,  mère  de  Marcien  ,  évêque  de 
Gaza,  et  d'Anastase,  évêque d'Éleuthéropolis; 
et  un  autre  discours  ou  déclamation  d'un  ty- 
rannicide  qui  demande  une  récompense  pour 
avoir  tué  un  tyran.  Villoisson  a  enrichi  ces 
discours  de  noies  savantes  ;  ils  sont  précédés 
de  plusieurs  autres  fragments  extraits  de 
Miiraire  Chrysocéphalus.  Iiiarle,  dans  le  Ca- 
talugue  de  la  bibliothèque  de  .Madrid  ,  indi- 
que un  manuscrit  qui  contient  dix-neuf  dé- 
clamations inédites  de  Choricius  et  quelques 
aulrcs  écrits.  .Vngélo  Mai  a  publié  dans  le 
tome  V  du  Spiciieg.  roman.,  pag.  410-463; 
quel(]ues  déclamations,  des  descriptions,  des 
dictions,  une  ('•pilaphc  ou  oraison  d'un  jeune 


[vi«  SIÈCLE.]  CHAPITRE  XIII.  —  JOBHJS,  MOINE  D'OHIENT.  181 

liomniP,  un  païK'çyriqiio.  La  profaio  du  miV  ciili-o  autres  cliosos  cuii-iousns  la  dcsniplion 
uie\oluuie,pat;.  xxvii,  iTiireiinc  tiois  seiilou-  d'une  liorlo^o  cl  d'une  pcinUuc  de  la  ville 
CCS  do  Choricius.  Dans  ces  pai'ties  on  trouve      de  Gaza,  pag.  423.] 


CHAPITRE  XIII. 
Jobias,    moine     d'Orient. 

[Écrivain  grec  du  vi"  siècle.] 


iobtus  6eri> 
v«ll  .nnt  !• 
i4ntf  de  Jus* 
Udn. 


S«  <crll>. 
Fkol.  CmI. 
m,  pag.  &7S, 


Ce  qae  eon. 

tttnl  l«  livro 
rie  rlocerei- 
lln>  HlieLobl 


TroUlème 
litre,  ptg» 
6>S. 


1.  11  j'  a  toute  apparence  que  le  moine  Jo- 
bius  llorissait  sons  l'empire  de  Jnsliiiicu, 
puisqu'il  t'crivit  contre  Sévère,  faux  patriar- 
che d'.\ntioclie  et  chef  des  eutycbéens,  ana- 
thémalisé  plus  d'une  fois  sous  le  règne  de  ce 
prince.  Ce  qui  nous  oblige  encore  à  le  mettre 
vers  ce  temps-l<i,  c'est  qu'il  parle  des  écrits 
attribués  à  saint  Denys  l'Aréopagite,  dont  on 
n'avait  pas  ouï  parler  avant  la  Conférence 
des  catholiques  avec  les  sévériens,en  533. 

2.  Il  ne  nous  reste  rien  de  son  traité  con- 
tre Sévère;  mais  nous  avons  un  grand  nom- 
bre de  fragments  de  celui  qu'il  avait  intitulé  : 
De  l'Incarnation  du  Seigneur,  divisé  en  neuf 
livres.  Jobius  l'avait  entrepris  ù  la  prière  d'un 
homme  célèbre  par  sa  vertu,  qu'il  ne  nomme 
pas. 

3.  Dans  le  premier  et  le  second  livre,  s'é- 
tant  proposé  de  montrer  pourquoi  le  Fils 
s'était  fait  homme,  et  non  pas  le  Père  ou  le 
Saint-Esprit,  il  en  donne  pour  raison  que  le 
Fils,  portant  le  nom  à' Image  du  Père ,  il  con- 
venait qu'il  vînt  réformer  l'image  de  l'homme 
et  lui  rendre  la  raison  qu'il  avait  perdue,  de 
façon  qu'il  était  entièrement  penché  vers  les 
choses  charnelles  et  terrestres.  Il  appuie  cet- 
te preuve  sur  ce  que  le  Sauveur  s'était  trou- 
vé, aussitôt  après  sa  naissance,  dans  une 
étable,  entre  des  bœufs  et  des  ânes  ;  sur  la 
parabole  du  filet  jeté  dans  la  mer,  qui  prend 
toutes  sortes  de  poissons,  dont  il  dit  que 
l'homme  ne  diÛere  en  rien  depuis  que,  par 
le  péché,  il  est  devenu  comme  irraisonnable. 
Jobius  apporte  encore  d'autres  raisons  qui  ne 
paraissent  pas  plus  solides. 

A.  Il  en  donne  une  meilleure  dans  le  troi- 
sième livre,  en  disant  qu'il  était  convenable 
que  celui  qui  avait  créé  et  formé  l'homme,  le 
réformât  et  le  renouvelât  après  sa  chute.  Car, 
encore  que  le  Père  et  le  Saint-Esprit  soient 
créateurs  comme  le  Fils,  c'est  au  Fils  que  les 


divines  Écritures  attribuent  la  création  de 
toutes  choses,  comme  on  le  voit  dans  le  pre- 
mier chapitre  de  l'I-^vangile  selon  saint  Jean, 
et  dans  les  Epitres  de  saint  Paul  aux  Romains 
et  aux  Hébreux.  Il  demande  pourquoi  la  ver- 
tu, la  gloire  et  la  puissance  étant  une  et  la 
même  dans  la  Sainte-Trinité  ,  il  est  dit  dans 
l'Ecriture  et  dans  les  Pères  que  le  Père  a  tout 
fait  pour  le  Fils,  et  non  pas  que  le  Fils  a  tout 
fait  pour  le  Père.  Il  répond  que  c'est  parce 
que  le  Fils  est  appelé  la  droite,  le  bras,  la 
sagesse,  le  Verbe  et  la  puissance  du  Père. 
((  Mais  pourquoi,  ajoute  Jobius,  la  rédemption 
du  genre  humain  ne  s'est-clle  pas  faite  par  un 
ange  ou  par  un  homme?  «  A  quoi  il  répond  : 
Les  hommes  ont  tenté  plusieurs  fois  cette  ré- 
demption, comme  on  peut  s'en  convaincre 
par  les  soins  que  Moïse  et  les  prophètes  se 
sont  donnés  pour  procurer  le  salut  aux  Juifs; 
mais  que,  leurs  efforts  n'ayant  pas  été  capa- 
bles de  sauver  même  un  seul  peuple,  il  leur 
eût  été  impossible  de  racheter  tout  le  genre 
humain  et  de  lier  le  fort,  c'est-à-dire  le  dé- 
mon, qui  s'en  était  rendu  maître  ;  que  d'ail- 
leurs l'on  ne  voit  pas  comment  un  homme 
souillé  lui-même  aurait  pu  purifier  ceux  qui 
étaient  coupables  comme  lui;  que  la  rédemp- 
tion ne  convenait  pas  plus  à  un  ange,  à  qui 
il  n'appartenait  pas  de  mener  en  triomphe 
les  puissances  spirituelles,  puisqu'élant  de 
môme  nature  qu'elles,  il  n'aurait  pu  se  faire 
obéir.  Si  saint  Michel,  disputant  avec  le  dia- 
ble pour  le  corps  de  Moïse,  qui  était  un  hom- 
me juste,  n'osa  pas  le  condamner  avec  exé- 
cration, comment  un  ange  aurait-il  pu  nous 
rendre  enfantsadoptifs?L'autcurexamine,  en 
passant,  pourquoi  les  eaux  de  la  mer  llouge 
se  divisèrent  au  passage  de  Moïse,  d'Élie  et 
d'Elisée,  et  pourquoi  les  eaux  sur  lesquelles 
Jésus-Christ  marcha  ne  se  divisèrent  point.  La 
raison  qu'il  donne  de  cette  différence  est  que 


Joan,  xtlt. 
Rom,  xr,  36. 
Ilclir.  1,2. 


182 


HISTOIRE  GÉNliinALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


les  eaux  qui  se  divisèrent  au  passage  des 
prophètes  marquaieut  les  deux  parties  dout 
l'homme  est  composé,  le  corps  et  l'âme;  et 
que  celles  qui  ne  se  divisèrent  point  sous  Jé- 
sus-Christ signiliaient  l'indivisibilité  de  la  di- 
vinité. Cette  solution,  et  plusieurs  autres  sem- 
blables, justifient  le  jugement  que  l'iiotiusa 
porté  de  l'ouvrage  de  Jobius,  en  disant  que 
l'auteur  n'y  donnait  pas  des  solutions'  bien 
fortes  aux  dilliculti's  qu'il  se  proposait,  et  qu'il 
se  contentait  de  ce  qui  pouvait  satisfaire  en 
apparence,  sans  approfondir  la  vérité. 

ihifl.  [jj.  5.  Jobius  passe  à  une  autre  question  : 
Pourquoi  Dieu  n'a  pas  racheté  les  hommes 
par  sa  divinité  seule?  Il  en  donne  plusieurs 
raisons,  dont  la  meilleure  est  que  Dieu  ne 
nous  ayant  pas  rachetés  par  sa  divinité  seu- 
le, nous  devons  croire  qu'il  n'a  pas  du  le  fai- 
re. Il  montre  qu'encore  que  Dieu  soit  tout- 
puissant,  il  y  a  des  choses  qu'il  ne  peut  pas 
faire,  parce  que  ce  serait  un  défaut  ou  une 
imperfection  de  le  faire.  Par  celte  raison,  Dieu 
ne  peut  changer,  il  ne  peut  cesser  d'clre  bon, 
ni  faire  que  ce  qui  est  vrai  soit  faux.  L'auteur 
avance  que  la  rédemption  de  l'homme  est  une 
chose  plus  excellente  que  sa  création,  parce 
que  la  création  s'est  faite  parune  seule  parole, 
au  lieu  que  la  réformation  du  genre  humain 
ne  s'est  faite  que  par  l'opération  du  Créatem- 
môme  ,  qui  par  là  nous  a  donné  une  mar- 
que plus  particulière  de  son  amour  poumons, 

jwn.iii,  ic.  ainsi  que  le  dit  l'apotre  saint  Jean  :  Dieu  a 
tellement  aimé  le  monde  qu'il  a  donné  son  Fils 
unique  pour  ta  vie  du  monde.  Il  ajoute  que 
c'est  avec  raison  que  le  Verbe  s'est  fait  hom- 
me, et  que  cela  était  même  nécessaire  pour 
notre  salut,  puisque  tous  les  autres  moyens 
employés  jusque-là  avaient  été  inutiles.  Les 
prophètes,  les  princes  du  peuple,  les  mira- 
cles opérés  sous  leurs  yeux,  les  bienfaits  de 
Dieu,  ses  menaces,  les  supplices  dont  il  avait 
puni  les  pécheurs,  rien  de  tout  cela  n'avait 
pu  changer  eu  mieux  le  genre  humain.  Mais 
pourcpioi,  s'objecte  Jobius,  Dieu  a-t-il  permis 
que  l'homme  devienne  mauvais?  Que  ne  le 
créait-il  bon  nécessairement  ?  ou  enfin  que  ne 
le  faisait-il  semblable  aux  anges?  Il  résont  la 
première  objection  en  disant  que  si  Dieu  eut 
fait  l'homme  bon,  de  façon  qu'il  ne  pût  deve- 


nir méchant,  c'aurait  été  le  priver  de  son  libre 
arbitre,  et  conséqucmment  lui  ôter  le  moyen 
de  mériter.  Il  répond ,  à  la  seconde,  que  no- 
tre condition  aurait  été  plus  fâcheuse  qu'elle 
n'est,  si  nous  eussions  été  faits  semblables 
aux  anges,  qui,  depuis  leur  péché,  sont  sans 
espérance  de  leur  pardon,  puisqu'ils  ne  peu- 
vent en  faire  pénitence,  au  lieu  que  nous 
pouvons  obtenir  parnos  travaux  la  rémission 
de  nos  fautes.  «  Il  est  vrai,  ajoute-t-il,  que 
nous  tombons  facilement  dans  le  péché  ;  mais 
aussi  nous  nous  en  relevons  facilement.  Dieu 
nous  ayant  laissé  plusieurs  moyens  de  faire 
pénitence ,  et  donné  toute  notre  vie  pour 
la  correction  de  nos  mœurs  :  ce  qTi'ii  n'a 
pas  accordé  aux  anges.  »  Il  dit  encore  que 
ceux  qui  voudraient  que  Dieu  eut  créé  l'hom- 
me nécessairement  bon  réduisent ,  sans  y 
penser,  l'homme  à  la  condition  des  animaux, 
en  lui  ôtant  le  libre  arbitre,  parce  qu'il  n'ap- 
partient qu'à  une  nature  irraisonnable  d'agir 
nécessairement. 

G.  Jobius,  dans  le  seizième  chapitre  (car  F^.I34. 
il  avait  divisé  son  ouvrage  en  neuf  livres  et 
en  quarante-cinq  chapitrés)  se  proposait  cet- 
te question  :,Pourquoi  Dieu  a-t-il  fait  l'homme 
de  deux  parties  qui  ont  chacune  une  nature 
dillérenle?  Photius  remarque  que  Jobius  ne 
se  tirait  pas  bien  de  cette  dilBculté,  se  con- 
tentant de  rapporter  les  paroles  des  Pères, 
et  de  dire  qu'il  était  nécessaire  que  la  subs- 
tance terrestre  fût  ornée  par  l'union  d'une 
substance  spirituelle,  et  que  c'est  pour  cette 
raison  que  l'homme  est  composé  de  corps  et 
d'àme.  II  revenait  ensuite  à  la  question  de 
l'Incarnation,  et  demandait  pourquoi  le  Ver- 
be s'était  fait  chair.  «Ça  été,  répondait-il,  en 
partie  pour  nous  donner  l'exemple  de  la  ver- 
tu, en  partie  pour  nous  délivrer  de  la  servi- 
tude du  péché  et  nous  rétablir  dans  notre 
liberté,  et  eu  partie  afin  d'ellacer  le  péché 
qu'.\dam  nous  a  transmis  '  et  qui  avait  com- 
me eiïacé  en  lui  l'image  de  Dieu,  en  l'acca- 
blant d'une  foule  de  passions  charnelles.  » 
Jobius  citait,  à  cette  occasion,  un  passage 
d'une  homélie  de  saint  Grégoire,  surnommé 
le  théologien.  Il  remarquait,  après  cela,  que 
ce  qui  est  commun  aux  personnes  de  la  Sain- 
te-Trinité était  souvent  attribué,  dans  l'Écri- 


•  Non  ita  etiam  recte  in  solutionibus  procedit  : 
nain  ut  maxime  soliUiones  in  plerisque  vesliget: 
in  quihiii'dnm  intérim  solailliiiuie  apparct.  spe- 
cics  sati.ifacit,  ut  nikil  altius  ad  cerliorcm  veri- 
tatem  pcnclrcl.  l'hot.,  f  oJ.  232,  pag.  578. 


'  Ad  hwc  quandoquidem  Adam,  victus,  Dei  in  se 
imaginent  innumeris  carnù  passionibus  obruit, 
et  ad  posteros  noxam  tranumisit,  idcn  carnem 
Doniinus induit,  .lob.  apiid  IMn'l.,  piig.  r>!)l. 


[vi'  siicci^.] 


ClIAriTllE.  Mil.  — JUUIUS,  MOlNli  D'OnnîNT.  183 


ture,  h  uiiG  personne  en  parliculicr;  et  qu'en- 
core que  la  puissance  de  crder  fùtcomiinuie 
au  I*ère  et  au  Saint-Esprit,  l'Écriture  l'atlri- 
Jniail  au  Fils,  ciunme  elle  allrihuo  quelque- 
fois au  Pi'^rc  la  r('(louiptioii  (lu  jrcnro  humain, 
(pioiquc  ce  soit  le  Fils  qui  l'ait  opérée  en  se 
faisant  homme.  En  général,  le  Père  est  con- 
sidéré ,  dans  l'Ancien  ïestanient,  comme 
la  cause  première  de  toutes  choses;  le  Fils 
comme  la  chose  agissante;  le  Saint-Esprit 
comme  celle  qui  donne  k  l'être  sn  perfection. 
Jobius  s'étendait  beaucoup  à  montrer  que  le 
Saint-Esprit  donne  la  pcifeclion;  d'où  il  in- 
férait que  c'était  pour  cela  que  les  catéchu- 
mènes se  revêtaient  de  blanc  pendant  les 
sept  jours  qui  suivaient  le  baptême.  Il  mar- 
que en  peu  de  mois  tout  ce  qui  se  passait  à  leur 
égard.  «On  les  baptise  d'abord,  dit-il  ';  en- 
suite on  les  oint  d'huile  ;  puis  on  leur  fait 
part  du  précieux  sang,  après  quoi  on  les  ad- 
met i\  la  communion  du  pain,  n  II  établit,  par 
l'autorité  de  saint  Luc  et  de  saint  Paul,  l'u- 
sage de  donner  premièrement  le  sang  de  Jé- 
sus-Christ et  ensuite  son  corps,  en  remar- 
quant toutefois  que  le  même  apôtre,  en  d'au- 
tres endroits,  parle  du  pain  avant  de  parler 
du  calice,  et  que  la  coutume  de  l'Église  est 
de  présenter  aux  fidèles  premièrement  le 
pain  et  ensuite  le  vin.  Il  ne  faut  pas  s'éton- 
ner que  Jobius  'nomme  pain  et  vin  le  corps 
et  le  sang  de  Jésus-Christ,  puisqu'en  même 
temps  il  donne  le  nom  de  snng  précieux  h  ce 
qu'il  appelle  vin,  et  qu'il  nomme  corps  du 
Seigiicnr  '  ce  qu'il  avait  appelé  ;w/«,  imitant 
en  cela  les  façons  de  parler  de  l'Apôtre  dans 
sa  première  Lettre  aux  Corinthiens,  où  il  dit  : 
icor.  n,!6.  I\"cst-il  pas  vrai  que  le  calice  de  bénédiction 
que  nous  bénissons  est  la  communion  du  sang  de 
Jésus-Christ,  et  que  le  pain  que  nous  rompons 
est  la  communion  du  corps  du  Seigneur  ?  Car 
nous  ne  sommes  tous  ensemble  qu'un  seul  pain  et 
un  seul  coi'ps,  parce  que  nous  participons  tous  à 
vn  même  piain.  Jobius  remarque  que,  lors  de 
la  consécration  des  mystères,  on  tenait  aux 
deux  côtés  '  de  ceux  qui  les  célébraient,  des 
éventails  qui  étaient  la  vue  de  ces  m.ystères, 
afin  que  ceux  qui  devaient  être  initiés  ne 


s'attachassent  point  aux  choses  visibles,  mais 
qu'ils  élevassent  les  yeux  de  leur  esprit  au- 
dessus  de  tout  ce  qui  est  joint  ù  la  matière. 

7.  Le  dix-neuvième  chapitre  contient  les 
raisons  qui  ont  empêché  Moïse  de  parler  do 
la  création  des  anges.  L'une,  parce  qu'il  n'é- 
crivait que  pour  les  hommes  :  l'autre,  parce 
qu'il  voulait  faire  connaître  le  Créateur  de 
l'univers  par  ses  ouvrages  sensibles  ;  et  la 
troisième,  de  peur  qu'on  ne  crût  que  les  an- 
ges avaient  créé  le  monde,  s'il  eût  parlé 
d'eux  avant  de  parler  de  la  création  du 
monde  même  :  comme  en  cfFct  plusieurs  des 
Hébreux  ont  attribué  aux  anges  la  création 
de  toutes  les  choses  qui  sont  dans  le  monde. 
Il  semble  dire  que  c'est  pour  détruire  cette 
erreur,  que  Dieu  n'a  point  permis  que  les 
anges  apparussent  aux  hommes  pendant  les 
trois  premiers  âges  du  monde,  et  il  soutient 
qu'ils  n'ont  été  connus  des  hommes  qu'après 
les  promesses  que  Dieu  fit  à  Abraham  sur 
le  Messie,  qui  devait  naitre  de  sa  race.  Dans 
les  vingtième  et  vingt-unième  chapitres  qui 
composaient  le  quatrième  et  le  cinquième  li- 
vre,'Jobius  s'appliquait  à  faire  voir  qu'il  était 
plus  convenable  que  le  Fils,  qui  est  l'immua- 
ble et  naturelle  image  du  Père,  se  fit  homme 
pour  nous  racheter  et  nous  purifier  de  nos 
péchés. 

8.  Il  commençait  son  sixième  livre,  au 
chapitre  vingt-deuxième,  où  il  examinait 
cotte  question  :  Pourquoi  l'on  attribue  au 
Fils  les  qualités  de  créateur,  de  rédempteur 
et  de  juge  ?  Ce  qu'il  enseigne  sur  celte  ma- 
tière se  réduit  à  dire  qu'encore  que  ces 
qualités  conviennent  également  au  Père  et 
au  Saint-Esprit,  on  les  approprie  néanmoins 
par  excellence  au  Fils.  Il  traite  au  même 
endroit  du  rang  des  personnes  de  la  Trinité, 
et  après  être  convenu  que  cette  matière  sur- 
passe l'intelligence  humaine,  il  dit  qu'il  faut 
s'arrêter  à  l'instruction  que  Jésus-Christ  nous 
a  donnée  en  la  personne  de  ses  apôtres,  aux- 
quels il  disait  :  Allez,  enseignez  toutes  les  na- 
tions, en  les  baptisant  au  nom  du  Père,  du  Fils 
et  du  Saint-Esprit  :  «  Paroles,  dit-il,  qui  mar- 
quent bien  qu'en  parlant  des  personnes  de 


l'if.  tas. 


'  Primo  baplizamur,  deinde  ungvento  xingi- 
mur,  inde  prelioso  sanguine  digîiamur.  Sic  pror- 
sus  el  mos  est  hœe  adumbrans  :  abluit  primo 
aqua  eos  qui  consecrabanlur ;  mox  induit  el  cin- 
git; deinde  confert  olei  unctionem  et  tumsangui- 
ne  axpergit,  atque  ad  panis  sumptionem  adducit. 
Idcin,  pag.  395. 

'  Çum  corpus  dominictim  'in  sacra  mensa  pro- 


positum  est  :  ideo  qtii  ab  ttlroque  latere  sacris 
operantibus  adstant,  flabeUa  supra  oblata  ibi 
horrenda  mysteria  agitare,  ut  n-  sinant  initiâtes 
rébus  visis  inhœrere,  sed  eos  mentis  ouulis  supra 
onine  id,  quod  cum  maleria  conjunclunt  est,  sm- 
blalos,  l'aciunt  per  ea  quœ  videnlur  ad  invisi- 
bilem  contempla tionem  ascendere.  Job.,  pag.  607. 
=  Ibid. 


IRi 


HISTOIRE  GKNER.U,E  DES 


la  Trinité,  on  doit  mettre  en  premier  lieu  le 
Père,  en  second  lieu  le  Fils,  et  eu  troisième 
lieu  le  Saint-Rsprit,  sans  que  l'on  puisse  pré- 
tendre que  la  nature  divine  soit'  susceptible 
en  elle-même  de  supériorité  ou  de  sujétion, 
de  division  ou  de  singularité  :  parce  que  le 
nom  et  l'unité  se  disent  de  la  substance,  et  que 
la  divinité  est  au-dessus  de  toute  substance.» 
11  cite  en  cet  endroit  le  treizième  chapitre 
du  livre  des  Aoms  dicins,  sous  le  nom  de  saint 
■n.w-vi,.   Denys  rAréopasitc,  et  dit  en  parlant  du  nom 

<•»•  de  Saint  que  l'on  donne  à  chaque  personne, 

que  saint  Proclus,de  Constantinople,  ordonna 
que  le  Trisagion  serait  chanté  avec  cette  ad- 
dition :  Fvrt  et  immortel. 

'■•'•  "'•  y.  Sur  la  fin  du  sixième  livre,  et  dans  tout 

le  septième,  Jobius  traite  de  la  Trinité,  dont 
il  cherche  des  figures  dans  les  Psaumes  et 
dans  les  autres  parties  de  l'Écriture.  A  l'oc- 
casion des  mouvements  de  la  terre  dont  il  y 
est  parlé,  il  remarque  trois  changements  : 
l'un  qui  s'est  fait  de  l'idolâtrie  à  la  counais- 
sauce  du  vrai  Dieu  par  la  loi  ;  l'autre  de  la 
loi  à  l'Evanjiile,  qui  nous  a  donné  la  con- 
naissance du  Fils  et  du  Saint-Esprit  ;  ei  le 
troisième  qui  ne  se  fera  qu'en  l'autre  vie,  où 
nous  aurons  une  conuaissauce  parfaite  de 
la  Trinité,  autant  que  notre  nature  en  est 
capable.  Il  enseigne  que,  si  l'Écriture  ne 
nous  a  fait  d'abord  connaître  que  le  Père,  ça 
été  pour-  détourner  les  hommes  du  culte  des 
faux  dieux,  et  surtout  le  peuple  grossier,  les 
plus  inlelligcuts  ue  pouvant  douter  que  lors- 
qu'on nommait  Dieu  le  Père,  ce  terme  n'em- 
portât avec  soi  l'existence  d'un  Fils.  Il  montre 
par  plusieurs  raisons,  que  le  Père  ne  devait 
point  s'incarner,  et  en  donne  d'autres  qui  ex- 
pliquent pourquoi  le  Fils  ne  s'est  pas  fait 
homme  dès  le  commencement  du  monde.  Il  in- 
siste particulièrement  sur  ce  qu'il  n'était  pas 
convenable  d'apporter  un  si  grand  remède  aux 
maladies  des  hommes,  et  qu'il  en  fallait  qui 
les  guérissent  peu  à  peu.  Il  insisle  encore  sur 
le  danger  qu'il  y  aurait  eu  que  les  idolâtres, 
en  voyant  un  Dieu-Homme,  ne  s'opiniâtras- 
sent  davantage  dansleurcidte  superstitieux. 
Il  remarque  que  le  Sauveur,  eu  conversant 
parmi  les  hommes,  se  servait  de  paroles 
humbles,  pour  leur  cacher  les  rayons  de  sa 
divinité,  se  contentant  de  l'établir  par  ses 
œuvres  miraculeuses.  «Deux  motifs  l'engagè- 


AUTEUnS  ECCLESIASTIQUES. 

rent,  dit-il,  ;\  cette  conduite  :  l'un  pour  adou- 
cir l'esprit  des  Juifs,  l'aulie  pour  nous  donner 
l'exemple  d'humilité.  »  Jobius,  cite  du  martyr 
saint  Ignace,  le  passage  où  il  est  dit  que  le 
prince  de  ce  monde,  c'est-à-dire  le  démon,  ne 
connaissait  pas  la  virginité  de  Marie,  la  con- 
ception du  Sauveur,  ni  qu'il  dût  être  attaché 
à  la  croix.  Il  s'étend  sur  la  ditférence  de  la 
manière  dont  nous  connaissons  en  cette  vie  la 
Trinité,  d'avec  celle  donlcile  sera  connue  des 
bienheuieux  dans  l'autre  :  et  sur  les  raisons 
que  l'on  peut  alléguer,  pour  expliquer  com- 
ment il  y  a,  tant  dans  le  Nouveau  que  dans 
l'Ancien  Testament,  des  endroits  très-diffici- 
les a  entendre  :  toutefois  il  parait  croire  qu'il 
n'eu  est  ainsi,  que  parce  que,  s'ils  étaient  si 
faciles  à  comprendre  pour  tout  le  monde,  on 
en  aurait  moins  de  respect  et  de  vénération. 
«  D'ailleurs,  ajoute -t -il.  Dieu  ayant  obligé 
l'homme  depuis  sou  péché  à  un  travail  péni- 
ble, il  doit  l'employer  non-seulement  à  ga- 
gner ce  qui  est  nécessaire  pour  la  vie  du 
corps,  mais  encore  pour  celle  de  l'àme.  » 

10.  Il  se  propose  deux  questions  dans  le  '''î'  "'• 
huitième  livre.  La  première  est,  que  si  l'on 
prouve  qu'il  y  a  en  Dieu  une  personne  du 
Verbe,  parce  que  Dieu  ne  peut  être  sans 
raison;  comment  ne  suit-il  pas  de  là  qu'il  y 
a  dans  ce  Verbe  même  un  autre  Verbe,  et 
aussi  un  Verbe  dans  le  Saint-Esprit,  puis- 
qu'ils sont  Dieu  l'un  et  l'autre  'l  Photins  con- 
vient que  cette  objection  est  très-dillicile  à 
résoudre,  et  qu'encore  que  Jobius  y  ait  ré- 
pondu en  treize  manières,  il  ne  l'a  fait  que 
faiblement.  Il  ajoute  que  quand  ses  réponses 
seraient  capables  de  satisfaire  des  personnes 
qui  ont  de  la  piété  et  de  la  religion,  elles 
n'en  inspireraient  point  à  un  homme  con- 
tentieux ;  qu'au  contiaire,  elles  lui  donne- 
raient plutôt  occasion  de  tourner  en  raille- 
ries nos  saints  mystères.  L'autre  question  est 
de  savoir  pourquoi  le  Fils  et  le  Saint-Esprit 
procédant  également  du  Père,  l'un  est  ap- 
pelé Fils  et  l'autre  Saint-Esprit,  et  non  pas 
tous  deux  fils.  Il  répond  que  les  hommes  ex- 
priment comme  ils  peuvent  les  diirérences  des 
personnes  divines,  quoiqu'ils  ne  les  compren- 
nent pas  ;  qu'au  surplus,  l'usage  de  nommer 
génération  l'origine  du  Fils,  clprocession  celle 
du  Saint-Esprit,  et  d'appeler  l'un  Fils,  l'autre 
Saint-Esprit,  est  fondé  sur  l'Écriture  et  sur 


'  Ipsa  fecundum  se  divine  natura  neque  jircé- 
poni,  neque  siihjici  npla  rsl.  sed  supra  omuem 
lam  numeri,  iiuam  siiigiilarilalis  nolionem  co^ 


localur.  ^'umerus  siquiriem  et  ttnilas  de  sitbslan- 
tia  dicuntur  :  divinitas  vern  siibslanlinm  supcrut 
iinicersam.  Idem,  p.ig.  tiiiM. 


fvi"  srÈci.E.] 


CHAPITRE  XlII.  —  JOBIUS,  MOINR  D'ORIENT. 


\HÔ 


les  (.'ci'its  des  saints  Pi'tos,  qui  ont  parhi  ainsi. 

!■«. 0.1.  il.  Il  demande  tlans  le  neuvième  livre, 

comment  il  peut  ètic  vr'ai  ([iie  nous  soyons 
snjKM'ieurs  en  dignili'  anx  anges  par  la  gr;\ce 
que  nous  avons  acquise,  et  que  nous  leur 
serons  égaux  dans  le  temps  de  la  résurrec- 
tion? .\  quoi  il  répond  que  la  nature  humaine, 
depuis  qu'elle  a  été  unie  i\  la  Divinité  par 
l'incarnation  du  Verbe,  et  placée  à  la  droite 
du  Père,  surpasse  à  cet  égard  tous  les  anges 
en  dignité  ;  et  que  si  nous  devons  leur  être 
semblables  ;\  la  résurrection,  c'est  qu'alors 
le  genre  humain  ne  sera  plus  assujetti  .'i  la 
servitude  du  corps,  qui  sera  comme  spiritua- 
lisé.  11  trouve  dans  les  paraboles  de  l'enfant 
prodigue  et  des  cent  brebis,  la  figure  des 
auges  et  des  hommes,  disant  que  ceux-là 
sont  représentés  par  le  fils  aîné  du  père  de 
famille,  et  ceux-ci  par  l'oufant  prodigue.  La 
seconde  question  qu'il  se  propose  dans  ce 
livre,  est  de  savoir  comment  Jésus-Christ 
est  mort  pour  tous  les  hommes,  puisqu'il  y 
en  avait  une  infinité  de  morts  avant  sa  ve- 
nue. A  cela  il  répond  que  Jésus-Christ  a  non- 
seulement  prêché  l'Évangile  à  ceux  qui  vi- 
vaient de  son  temps,  mais  qu'il  est  descendu 
aux  enfers  pour  le  prêcher  aussi  aux  morts  ; 
et  que  ceux  d'cutr'cux  (pii  avaient  bien  vécu 
et  qui  ont  cru  en  lui  ont  été  sauvés.  Il  en 
donne  une  autre  raison,  qui  est  que  la  ré- 
surrection étant  le  terme  où  la  vertu  doit 
recevoir  sa  récompense,  et  la  croix  de  Jésus- 
Christ  donnant  toute  la  force  h  cette  résur- 
rection, il  suit  de  là  que  Jésus-Christ  est 
mort  pour  tous  ceux  qui  participeront  alors 
au  salut.  En  expliquant  après  cela  ces  pa- 

^^  M1111..K,  rôles  de  Jésus-Christ  :  Je  ne  suis  pas  venu 
appeler  les  justes,  mais  les  pécheurs  à  la  péni- 
tence, il  dit  qu'on  ne  doit  pas  croire  que  le 
Sauveur  se  soit  exprimé  ainsi,  comme  s'il 
eût  voulu  distinguer  la  multitude  des  hom- 
mes, partie  en  justes  et  partie  en  pécheurs, 
dont  il  aurait  négligé  les  uns  et  appelé  les 
autres,  puisqu'il  est  certain  qu'il  est  le  com- 
mun Sauveur  de  tous,  et  qu'il  les  a  tous  ap- 
pelés en,  leur  permettant  de  jouir  du  fruit 
de  la  rédemption,  et  d'embrasser  la  doctrine 


du  salut,  qu'il  a,  à  cet  elTet,  fait  annoncer 
dans  toute  la  terre.  Ensuite  il  tiaite  de  l'état 
dans  leipiel  les  anges  et  l'honmie  ont  été 
créés,  et  de  la  chute  d'une  partie  de  ces 
anges  et  de  celle  de  riininmo.  Puis  s'étant 
pro]iosé  d'examiner  pourquoi  Dieu  a  racheté 
riiduime  en  se  faisant  homme  |)Our  eux,  et 
n'a  pas  racheté  les  anges ,  il  en  donne  pour 
raison  que  l'homme,  étant  composé  de  deux 
natures,  l'une  spirituelle  et  l'autre  matérielle; 
celle-ci  étant  moins  parfaite  et  ayant  natu- 
rellement du  penchant  vers  le  mal ,  il  était 
raisonnable  que  Dieu  lui  prêtât  du  secours  et 
laperfectiomu\t;  qu'il  n'en  était  pas  de  même 
de  la  nature  dos  anges  qui  avait  été  créée 
parfaite.  «  Pourquoi,  demando-t-il  encore,  les 
anges  bons  et  mauvais  sont- ils  demeurés  ir- 
révocablement dans  l'état  qu'ils  ont  choisi 
dès  le  commencement ,  les  uns  dans  le  bien 
et  les  autres  dans  le  mal?  Pourquoi  le  Sau- 
veur a-t-il  dit,  que  le  feu  était  préparé  au 
diable  et  à  ses  anges,  encore  qu'il  y  ait  tant 
d'hommes  qui  devaient  être  punis?»  Il  répond 
à  la  première  question  :  «L'immutabilité  des 
anges,  dit-il,  dans  le  parti  qu'ils  ont  embrassé, 
vient  de  ce  qu'étant  d'une  nature  simple  et 
non  composée,  ils  nepeuvent  changer.  »  Il  dit 
sur  la  seconde,  qu'il  est  écrit  que  le  feu  est 
préparé  au  diable  et  à  ses  anges,  parce  qu'é- 
tant une  fois  pervertis  par  leurpropre  volonté, 
ils  ne  donnent  aucune  espérance  de  change- 
ment ,  au  lieu  que  l'homme  peut  changer  de 
mal  en  bien.  C'est  à  raison  de  l'endurcisse- 
ment du  diable  dans  le  mal  qu'on  nous  obli- 
ge dans  le  baptême  à  renoncer  à  Satan  et  à 
ses  œuvres,  afin  que,  conservant  la  haine  qui 
doit  être  entre  nous  et  lui,  nous  ne  nous  lais- 
sions pas  surprendre  par  ses  artifices.  Jobius 
se  propose  encore  quelques  autres  questions 
auxquelles  il  ne  répond  pas  plus  solidement 
qu'aux  précédentes  '.  On  voit  par  son  ouvra- 
ge qu'il  était  homme  à  s'embarrasser  de  beau- 
coup de  questions  inutiles,  mais  qu'il  n'avait 
pas  le  talent  de  les  résoudre  nettement,  et 
que  s'il  avait  de  l'érudition  et  de  l'intelligence 
dans  les  Livres  saints,  comme  Ip  témoigne 
Photius^,  il  n'en  faisait  pas  toujours  usage. 


'  Angélo  M.iï  a  publié  en  grec  un  autre  fragment 
ilu  même  ouvrage,  Classici  auctores,  tom.  X.pag. 
601-G04.  Ce  fragment  est  reproduit  avee  notice  tirée 
de  Faliricius,  au  tome  LSXXVI  de  la  Patrologie 
gfecqtte,  col.  3313-3319.  On  trouve  aussi,  ibid.  un 
autre  fragment  grec  d'une  Confession  de  foi  ortho- 
doxe de  Jùbius.  Gallaud  l'avait  donné  en  latin  au 
tome  XIII  de  sa  Bibliothèque,  p.  7U2.  Mai  l'a  publié 


en  grec  au  tome  .\  du  Spirilcgium  roma:uim, 
p.  132.  Plusieurs  autres  fragments  qu'on  lit  dans 
Photius  sont  au  tome  CIII  de  li  Patrologie  grec- 
que. [L'éditeur.] 

-  Rectw  religionis  est  amans,  et  diligentiœ  non 
conlemnenda',  atque  in  sacrarumprœterea  Scrip- 
tura.-um  commentatione  insigniter  exercitaius. 
Phot.,  Cod.  227,  pag.  578. 


186 


HISïOIllE  GKNHUALE  DES  AUTEUHS  ECCLÉSIASTIQUES. 


CHAPITRE  XIV. 


Cosme  d'Egypte,  snrnommc  indicoplenste. 

[Écrivain  grec  au  vi«  siècle.] 


Co-me.  nfà 
A  Ifxanilrie 
l'r..  r  in  To|  o- 

Ini».  II  Col. 
lect.  Palrum, 
MoDtrauc.  Fi. 
risils  1707. 
1«E-  '■ 


Sa  Topoprn- 
pbîe  cbrctifn- 
ne.  Lili,  II, 
p>e.  HO, 


T.Ibi  X,  pifi 
3J0. 


1.  Cosme,  surnommé  indicopleusle  de  sa 
navigation  dans  les  Indes,  était  égyptien,  né 
à  Alexandrie.  Il  fut  d'abord  marchand,  et, 
tout  occupé  de  son  négoce,  il  s'embarqua 
pour  aller  en  Klliiopie,  dans  les  Indes  et  les 
autres  pays  d'Orient,  où  il  espérait  faire  des 
gains  considérables.  Quoique  engagé  dans 
le  négoce  il  ne  laissait  pas  d'être  instruit 
dans  les  sciences,  autant  que  son  siècle  le 
permettait.  La  vue  d'un  état  plus  tranquille 
et  où  il  pourrait  vaquer  plus  sûrement  à  son 
salut  lui  lit  abandonner  son  commerce  pour 
embrasser  l'état  monastique.  Il  proQta  de 
son  repos  pour  composer  divers  ouvrages, 
dont  le  seul  qui  soit  venu  jusqu'à  nous  est 
intitulé  :  La  Topograp/ife  chrétienne. 

2.  Il  semble  marquer  l'année  en  laquelle 
il  la  composa ,  lorsqu'il  dit,  dans  le  second 
livre  de  cet  ouvrage,  qu'il  y  avait  vingt-cinq 
ans  qu'Élesban,  roi  des  Égyptiens,  avait  fait 
sonexpéditiou  sur  les  Homéritcs  :  celte  expé- 
dition arriva  en  522.  En  y  ajoutant  les  vingt- 
cinq  années  qui  s'étaient  passées  depuis , 
lorsque  Cosmc  écrivait  son  second  livre  ,  il 
s'ensuivra  qu'il  y  travaillait  en  3-47  sous  le 
règne  de  Jastinicn.  Ce  qui  rend  cette  épo- 
que ditlicile  à  soutenir,  c'est  que,  dans  le 
dixième  livre  du  même  ouvrage,  il  parle  de 
Théodose,  patriarche  d'Alexandrie,  qu'il  ap- 
pelle nouveau  schismatique,  comme  demeu- 
rant à  Constantinople ,  où  il  était  allé  après 
avoir  fait  un  séjour  fort  court  à  Alexandrie; 
et  de  Timothéc  ,  son  prédécesseur,  qui,  dit- 
il,  est  mort  depuis  peu.  Or,  ceTimolhée,  que 
Cosme  nomme  le  Jeune  pour  le  distinguer 
de  Timothée  Elure,  mourut  en  333  :  et  Théo- 
dose,  son  successeur  fut,  après  environ  un  an 
et  quatre  çaois  d'épiscopat ,  envoyé  en  exil , 
l'an  536,  pour  n'avoir  pas  voulu  souscrire  au 
concile  de  Chalcédoine.  11  paraît  donc  que 
Cosme  écrivait  son  onzième  livre  vers  l'an 
533,  puisque,  lorsqu'il  y  travaillait ,  Théo- 
dose n'avait  pas  encore  été  envoyé  en  exil, 
et  qu'il  s'était  seulement  retiré  à  Constanti- 
nople :  ce  qui  arriva  peu  après  son  ordina- 


tion, c'est-à-dire  en  535,  auquel  Timothée 
mourut.  Le  seul  moyen  de  lever  celte  con- 
trariété est  de  dire  que  Cosme  ayant  retou- 
ché plusieurs  fois  son  ouvrage ,  changea 
quelque  chose  dans  les  dates  des  endroits 
qu'il  retouchait  ;  qu'il  laissa  celles  du  onziè- 
me livre,  qu'il  avait  mises  d'abord,  n'aj'ant 
fait  aucun  changement  en  cet  endroit  ;  mais 
qu'ayant  retouché  son  second  livre,  il  y  mit 
une  nouvelle  date,  relative  au  temps  auquel 
il  y  fit  (juelque  addition. 

3.  Sa  Tupoyrap/tie  chrétienne  est  divisée 
en  douze  livres.  Piiotius ,  qui  en  parle  sans 
en  nommer  l'auteur,  dit  que  les  six  premiers 
livies  étaient  dédiésàun  certain  Pamphyle; 
le  septième  h  Anasthasc;  le  huitième  à  Pier- 
re, et  que  les  quatre  autres  n'élaieiU  adres- 
sés à  personne.  Cela  se  trouve  de  môme 
dans  nos  exemplaires.  Dom  Moutfaucon  nous 
a  donné  l'ouvrage  entier,  à  la  réserve  du 
dernier  feuillet  du  douzième  livre ,  sur  un 
manuscrit  de  Florence  qu'il  croit  être  du 
x"  siècle.  Il  en  cite  d'autres,  mais  impar- 
faits, un  de  la  Bibliothèque  impériale,  et  un 
de  la  Bibliothèque  de  Vatican.  Celui-là  ne 
contient  qu'une  petite  partie  de  la  Topographie 
chrétienne.  Le  douzième  livre  manque  dans 
l'autre.  [Le  tome  XI  de  la  Dibliotlihqitedes  an- 
ciens écrivains,  par  GiWanii,  reproduit  la  To- 
pographie  chrétienne  avec  une  notice  sur  Cos- 
me. Le  tout  à  reparu  dans  le  tom.  LXXXVIII 
de  la  Palrnlogie  grecque  ,  col.  9-476.  La  no- 
tice tirée  de  Galland  est  suivie  d'une  autre 
empruntée  à  Fabricius.] 

4.  Le  dessein  de  Cosme  dans  cet  ouvrage 
est  de  combattre  l'opinion  de  ceux  qui  don- 
nent au  monde  une  figure  spliérique,  et  qui 
conséquemmenl  admettent  des  antipodes.  Il 
croyait  avec  la  plupart  des  anciens  que  la 
figure  du  monde  était  plaie  ,  et  que  le  ciel 
fait  en  forme  de  voùle,  joignait  ses  deux 
extrémités  à  celles  de  la  terre.  Ceux  qui  pen- 
saient ainsi  tournaient  en  dérision  l'oiiinion 
contiaire  ,  qui  est  aujourd'hui  reçue  unani- 
mement, et  rendue  évidente  parles  démons- 


Ell«  est  di- 
r\tit  m  doQ. 
u  livres. 


Pbol.,  G' 11. 
36. 


Dc'ie'n  do 
ccl'>uii3fe. 


[vr  SIÈCLE.]  CHAPITRE  XIV. 

Initions  des  aslrononips.  Voici  de  quels  ar- 
guments Cosme  se  servait  pour  la  combattre  : 
<(Eii  siiiinosant  la  rondeur  de  la  ti>rre,  dit-il, 
il  faudrait  dire  qu'il  y  a  de  ses  habitants  qui 
sont  opposes  diamcitralemcnt.les  uns  aux  au- 
tres, et  qu'ils  marchent  pieds  contre  pieds  ; 
qu'il  en  est  de  même  des  pluies  qui,  dans  ce 
système,  doivent  tomber  les  unes  contre  les 
aiili'cs  ;  ce  qui  est  contre  la  droite  raison. D'ail- 
leurs l'Écriture  nous  représente  dans  Isaïe, 
le  ciel  en  forme  d'une  voiito  dont  les  extré- 
mités posent  sur  la  superficie  de  la  terre  ;  et 
dans  Job  comme  une  pierre  en  forme  de 
carré.  Elle  dit  encore  que  le  ciel  et  la  terre 
contiennent  toutes  choses  :  ce  qui  ne  peut 
être  vrai  eu  supposant  la  terre  d'une  figure 
sphérique,  car  alors  ce  serait  le  ciel  qui  con- 
tiendrait tout ,  et  la  terre  même,  n  Cosme 
ajoute  à  ces  raisons  que  le  tabernacle  que 
Moïse  construisit  par  l'ordre  de  Dieu,  était  la 
ligure  de  ce  monde.  «  Or,  dit-il,  ce  tabernacle 
était  un  carré  long;  le  monde  est  donc  cons- 
truit de  cette  manière.  »  Ces  raisonnements 
donnent  lieu  à  cet  auteur  de  parcourir  un 
grand  nombre  d'endroits  de  l'Écriture ,  par- 
ticulièrement de  la  Genèse,  de  l'Exode,  des 
Prophètes  et  des  Apôtres.  Il  propose  un  au- 
tre argument  qu'il  croit  sans  réplique  ,  qui 
est  que  Dieu,  dès  le  commencement,  a  pré- 
paré aux  hommes  des  demeures  tant  pour 
cette  vie  que  pour  la  future,  savoir,  la  terre 
et  le  ciel.  Or,  dans  la  supposition  que  la 
terre  est  ronde,  le  ciel  ne  peut  être  la  de- 
meure des  bienheureux  ,  n'étant  pas  possi- 
ble que  la  vie  bienheureuse  puisse  s'accor- 
der avec  la  volubilité  des  cieux  autour  de  la 
terre.  Ses  adversaires  répondaient  que  la 
terre  et  les  cieux  que  nous  voyons  seraient 
détruits  à  la  fin  des  siècles,  et  qu'alors  Dieu 
en  formerait  de  nouveaux.  Cosme  répliquait 
que  Jésus-Chrisfavait  été  introduit  dans  ces 
cienx  :  ce  qu'il  prouvait  par  un  grand  nom- 
bre de  témoignages  de  l'Écriture  et  des  Pè- 
res; et  que  c'était  là  aussi  que  l'on  devait 
inti'oduire  les  bienheureux.  En  disant  que 
le  monde  est  d'une  figure  plate ,  et  que  la 
superficie  de  la  terre  est  carrée  et  oblongue, 
il  dit  en  même  temps  que  sa  longueur  de 
l'Orient  à  l'Occident  est  le  double  de  sa  lar- 
geur, qu'il  prend  du  septentrion  au  midi.  Il 
avait  appris  cette  doctrine  d'un  vieillard  nom- 
mé Patrice. 

'  Cum  ipsorum  [Romanorum]  numismate,  om- 
nes  gentes  comniercium  exercent,  et  in  quovis 


—  COSÎME  D'i:r,YPTR. 


187 


5.  Toutes  les  preuves  qu'il  apporte  pour     ccqu'.i,. 
l'établir  se  réduisent  h  celles  que  nous  ve-  w.T.r'i;; 
nous  (h;  ihuiuer.  11  no   s'agit  donc  ])his  que   iTcom'iy" 
de  rapporter  ce  qu'il  y  a  d'intéressant  dans 
son  ouvrage.  Il  le  commence  par  l'invocation 
du  nom  de  Dieu  le  Père,  le  Fils  cl  le  Saint-   l^^  ''  ""'' 
Esprit,  reconnaissant  que  la  Divinité  adora- 
ble et  consubstantiello,  est  une  en  trois  liypos-    , 
tases  ou  personnes.  Il  enseigne  qu'avant  le     uh.  ii,p.ç. 
déluge  l'usage  de  la  chair  était  interdit;  et  "" 
que  si  on  lit  dans  l'Ecriture  qu'Abel  gardait 
les  troupeaux,  ce  n'était  que  pour  en  avoir  le 
lait  et  la  laine,  et  pour  offrir  à  Dieu  des  sa- 
crifices en  holocauste  de  ce  qu'il  y  avait  de 
mieux  dans  ses  troupeaux.  «  Mais  pourquoi, 
s'objecte-t-il,  Abcl  choisissait-il  les  brebis  les 
plus  grasses,  s'il  ne  devait  pas  en  manger?  »  A 
cela  il  répond  que  devant  être  brûlées  en- 
tièrement suivant  la  nature  de  ce  genre  de 
sacrifice,  les  plus  grasses  convenaient  beau- 
coup mieux.  Étant  à  Adules,  ville  maritime     i'j;.  uo. 
d'Egypte,  vers  l'an  322,  il  vit  à  l'entrée   de 
la  ville  une  chaire  de  marbre  blanc  précieux 
et  travaillée    avec  beaucoup  d'art,  sur  la- 
quelle il  y  avait  une  inscription  en  lettres  grec- 
ques, qui  renfermait  l'histoire  du  règne  de 
Ptolémée  fils,  d'un  autre  roi  du  même  nom 
et  delà  reine  Arsinoé.  Elesban,  alors  roi  des 
Axumites,  curieux  d'avoir  cette  inscription, 
donna  oi-dre  au  préfet  de  la  ville  d'Adulés 
de  la  lui  transcrire.  Celui-ci  en  chargea  Cos- 
me avec  un  autre  négociant  nommé  Mennas, 
qui  depuis  se  fit  moine  à  Raïthu,  et  qui  était 
mort  lorsque  Cosme  écrivait  son  livre.  Cosme , 
après  avoir  transcrit  l'inscription,  en  donna 
une  copie  au  préfet,  et  en  garda  ime  pour  lui. 
On  lisait  à  la  fin  de  cette  inscription  que  Ptolé- 
mée avait  dédié  cette  chaire  à  Mars,  la  vingt- 
septième  année  de  son  règne.  Cosme  croit 
■que  ce  prince  était  du  nombre  de  ceux  qui  ré- 
gnèrent après  Alexandre  le  Macédonien.  11      i.t. 
parle, de  l'Empire  romain,  comme  du  plus 
considérable  qui  ait  été  dans  le  monde  ;  mais 
ce  qu'il  relève  le  plus  enlui,  c'est  qu'il  est  le 
premier  qui  ait  embrassé  la  foi  de  Jésus-Christ. 
Cette  foi  fut  ensuite  portée  dans  la  Perse  par 
l'apôtre  Thadée,  comme  on  le  voit  dans  la 
première  Epitre  de  saint  Pierre,  où  il  est 
dit:  l'Eglise  qui  est  dans  Babylone,  vous  sa-       iPoir. r, 
lue.  Une  autre  prérogative  de  l'Empire  ro- 
main,  et  qui  marquait  bien  sa  puissance, 
était  que  toutes  les  nations  '  recevaient  ses 

loco  ah  extremis  terrœ  usque  ad  oppositos  fines, 
iliud    admittitur  :  mirantibiis    talem    monetam 


188 


HISTOIRE  GENERALE  DES 


monnaies,  et  qu'elles  s'en  servaient  dans  le 
commerce,  n'y  en  ayant  point  d'aussi  lielles 

p«;.  150.  dans  tous  les  autres  royaumes.  Cosme  croit 
que  les  antres  sont  employés  h  divei-s  offices 
corporels;  que  les  uns  meuvent  l'aii',  les  au- 
tres le  soleil,  quelques-uns  la  lune  et  les  as- 
tres, et  qu'il  y  en  a  aussi  qui  préparent  les 
nuées  et  les  pluies;  qu'Adam,  ayant  mangé 
du  fruit  défendu  le  sixième  jour  de  la  se- 
maine, vers  midi,  c'est  pour  cela  que  le  Sau- 
veur est  mort  le  même  jour  et  à  la  même 
,53_  heure,  pour  nous  racheter  ;  que  l'on  doit 
confesser  qu'il  est  Dieu  parfait,  et  homme 
parfait  ;  qu'il  y  a  des  archanges  administra- 
teurs députés  à  la  garde  de  chaque  nation  et 
de  chaque  royaume,  et  que  chaque  '  homme 
a  un  ange  gardien  :  ce  qu'il  prouve  par  cet 

Aci.  t:i,  1-.  endroit  des  Actes  où  les  apcMres,  en  parlant 
de  saint  Pierre  qu'ils  croyaient  dans  la  pri- 
son, dirent,  en  l'entend.inl  frapper  h  la  porte  : 
C'est  son  ange;  et  par  cet  autre  de  saint  Mat- 

^juiik.  mil,  thieu  :  Les  ayiges  de  ces  enfants  voient  sans  cesse 
la  face  de  mon  Père  qui  est  dans  le  ciel. 
lit.  nt,  6.  Il  croit  encore  que  les  anges  ont  été 
créés  en  même  temps  que  le  ciol  et  la  terre  ; 
que  Moïse  a  écrit  par  l'inspiration  du  Saint- 
Esprit;  qu'il  est  le  premier  écrivain  du  mon- 
de; qu'avant  lui  on  n'avait  pas  l'usage  des 
lettres;  que  c'est  Dieu  qui  les  lui  a  apprises 
sur  la  montagne  de  Sinaï.  En  quoi  Cosme  se 
trompe  évidemment,  puisqu'avant  que  Dieu 
donnât  la  loi  à  Moïse  sur  la  montagne  de  Si- 
naï, il  lui  avait  ordonné  de  mettre  par  écrit 
la  victoire  remportée  sur  les  Amaléciies,  ainsi 
qu'on  le  lit  dans  le  dixseptiôme  chapitre  de 
l'Exode.  Il  rapporte  sur  la  foi  d'autrui,  que 
les  Perses  célébraient  encore  chaque  année 
la  solennité  de  Mithra  ou  du  soleil  qu'ils  ado- 
raient comme  un  dieu,  en  mémoire  de  ce 
176.  qui  était.arrivé  sous  le  règne  d'Ézéchias,  à 
qui  Dieu  donna  pour  signe  de  sa  convalescen- 
175.  ce  la  rétrogradation  du  soleil.  En  pailant  de 
l'état  du  christianisme  dans  toutes  les  parties 


P-g.i-i. 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

du  monde,  il  dit  qu'il  y  avait  une  infinité 
d'églises  dans  la  Perse,  des  évoques,  un  grand 
nombre  de  chrétiens,  plusieurs  martyrs  et 
des  moines.  Il  assure  que  l'on  voyait  encore  JJk-  v,  i*-. 
de  sou  temps  les  vestiges  des  roues  des  cha- 
riots de  Pharaon,  depuis  Asserloin  jusqu'aux 
bords  de  la  mer  Rouge  où  son  armée  fut 
noyée;  que  pendant  que  les  Israélites  furent 
dans  le  désert.  Dieu  se  servit  du  repos  qu'ils 
y  avaient  pour  leur  faire  apprendre  les  let- 
tres, qu'il  avait  lui-même  enseignées  à  Moïse; 
qu'étant  sur  les  lieux  il  asait  vu  aux  endi'oits 
des  stations  ou  demeures  différentes  des  Hé- 
breux dans  ce  désert,  de  grosses  pierres  des- 
cendues des  montagnes,  sur  lesquelles  on 
voyait  écrit  en  lettres  hébraïques  :  Départ  d'un 
tel  endroit  par  une  telle  tribu,  en  tel  mois, 
telle  année  ;  que  les  voyageurs  de  son  temps 
avaient  coutume  de  faire  de  semblables  re- 
marques dans  les  hôtelleries  par  où  ils  pas- 
saient ;  que  les  lieux  où  les  Israélites  avaient 
passé  étaient  remplis  d'inscriptions  que  l'on 
voyait  encore;  qu'ils  avaient  commimiqué  l'u- 
sage des  lettres  aux  Phénicieus  leurs  voisins,  Ptg.  f^nx, 
dans  le  temps  que  Cadnius  régnait  à  Tyr; 
que  ce  prince  avait  communiqué  cet  usage  aux 
Grecs,  d'où  il  est  passé  à  toutes  les  nations. 
Il  remarque  '  que  personne  n'est  baptisé  sans  *'•• 
faire  auparavant  profession  de  croire  en  la 
Sainte-Trinité,  et  à  la  résurrection  de  la  chair; 
et  que  sans  le  baptême  aucun  n'est  admis  au 
nombre  des  fidèles  et  des  chrétiens  ;  que  Dieu 
n'a  fait  sa  demeure  dans  les  prophètes,  qu'en 
partie  et  qu'à  certains  égards  ;  mais  qu'il  est 
tout  entier,  pleinement  et  universellement  ^" 
dans  Jésus-Christ,  qui  est  né  de  Sem,  fils  de 
Xoé,  selon  la  chair.  Il  enseigne  que  David 
est  '  l'auteur  des  cent  cinquante  psaumes; 
qu'il  les  a  composés  par  l'inspiration  du  Saint- 
Esprit;  qu'ils  sont  en  vers,  et  propres  pour 
être  chantés  eu  musique  et,au  son  des  ius-  '"• 
trumenis.  D'après  Cosme  ^  Moïse  est  auteur  du 
Pentaleuque;  Josué  du  livre  qui  porte  sou 


cunclis  hominibus  alque  regnis  :  quia  in  aliis 
quihuxcumque  regnis  similis  non coinparel.  Cosm. 
lib.  Il,  pag.  148. 

'  Ohservnndum  porro  etiam  hnminem  quewH- 
bel  angelum  comilem  el  cuslodem  haberc.  Iliid., 
pag.  157. 

' /;i  tiita  Pcrtiili'  regione,  ecclesia;  infinitw 
sunl ,  episcopi  ileni  clmsli'viique  populi  magtio 
numéro,  martyres  multi,  monachi.  lib.  III,  pag. 
Hit. 

'  h'emo  hcplizalnr,  quin  prius  Sanctam  Trini- 
tem  et  nostrœ  carnU  resurreclionem  se  credere 
confitealur  :  alms   nec  cum  chrislianis  annume- 


ratur,nec  fidelis  esseprœdicatur.  Cosiiia;,  lib.  V, 
pag.  208. 

'  l'osi  Moysen  excitavit  Deus  Daridcm,  qui  U- 
hrutn  conriiiiuivil  cenlum  qninqunginta  psalmo- 
rum  a  Spiritu  Sancio  motus,  ut  mctrice  secundum 
hehraicœ.  linguœ  idinmn  carmcn  ederet,  ac  citm 
melodid  et  rytiimo,  inslruinenlis  rnnïs,  et  canli- 
cis,  ipsos  modularelur.  Ibi<i.,  lib.  .\,  pag.  22J. 

*  Pentaleuchum  Moyses  scripsil...  Jtsiis  simililer 
lihrum  suum...  .Siz/omm  item  proprioit  libros 
descripsit,  Proverbia,  Cantica,  Ecclesiasien,  Ibid. , 
pag.  2.J9. 


VI''  SlKCLi:. 


CIIAI'ITUI':  XIV.  —  CUSxMli  iJ'iaiYl'TI';, 


Llb.VI,|»6. 


!>■;.  !7i. 


LU..  Vil, 


nom;  Saloinon  tlos  Piovcrbos,  dcsC;inli<jiics 
et  de  rKcelL'siusle  ;que  saint  l'aulc'crivit  '  eu 
héliiou  ri'4iilic  ([ii'il  adressa  unx  llcbrenx, 
et  ((u'ollc  l'nt  traduite  en  f^rec,  on  |)ar  saint 
Luc  on  par  saint  Clément  ;  qne  saint  Matthieu 
composa  aussi  son  lOvangilc  eu  Iiébieu;  qne 
l'on  donnait  aux  nouveaux  baptisés  le  corps 
et  le  sang  de  Jésus-Christ;  que  quoicpie  les 
Juilslisent  Moise  et  les  prophètes,  ils  ne  com- 
prennent pas  ce  qui  a  été  pi-édit  du  premier 
avènement  du  Sauveur;  que  les  hérétiques 
qui  nient  que  la  nature  humaine  en  Jc'îsus- 
Cluist  soit  parfaite,  qu'elle  ait  une  àmc  rai- 
soniuible,  ou  qui  nient  qu'il  soit  Dieu  et  égal 
au  Père  ,  sont  déchus  du  salut  éternel , 
dont  l'espérance  réservée  à  ceux-là  seuls  qui 
croient  qu'il  n'y  a  qu'un  Dieu  en  trois  liypos- 
tases  ou  personnes,  du  Père,  du  Fils  et  du 
Saint-Esprit,  et  confessent  que  la  Sainte-Tri- 
nité est  tonsuljslanticlle,  et  d'une  égale  puis- 
sance et  dignité. 

7.  Après  avoir  cité  presque  tous  les  livres 
canoniques  dans  le  cours  de  son  ouvrage,  il 
déclare  qu'il  passe  sous  silence  les  Épitres 
catholiques,  disant  que  l'Eglise,  dès  les  pre- 
miers temps,  les  mettait  au  rang  des  Écri- 
tures douteuses.  La  preuve  qu'il  en  donne 
est  que  ceux  qui  ont  commenté  les  Livres 
saints,  n'ont  tenu  aucun  compte  de  ces  Epi- 
tres ;  que  ceux  qui  ont  dressé  les  canons 
des  divines  Écritures,  n'y  ont  point  mis  ces 
Epîtres,  et  qu'ils  les  ont  placées  parmi  les 
livres  d'une  autorité  incertaine,  savoir;  saint 
Irénée,  Eusèbe  de  Césarée,  saint  Athanase, 
saint  Amphiloquc  ,  et  Séverin  de  Cabale.  Il 
ajoute  que  plusieurs  disaient  qu'elles  étaient 
non  des  apôtres,  mais  de  quelques  prêtres 
particuliers;  qu 'Eusèbe  de  Césarée  assurait 
que  la  seconde  et  la  troisième  de  saint  Jean 
étaient  d'un  prêtre  de  ce  nom,  dont  le  tom- 
beau se  trouvait  à  Ephèse,  de  même  que  ce- 
lui de  saint  Jean  l'évangéliste  ;  que  cet  his- 
torien, de  même  que  saint  Irénée,  ne  recon- 
naissait que  la  première  de  saint  Pierre  et  la 
première  de  saint  Jean  ,  comme  étant  véri- 
tablement des  apôtres;  que  d'autres  admet- 
taient aussi  celle  de  saint  Jaccjues  ;  mais  que 
quelques-uns  les  recevaient  toutes;  qu'on 
n'en  trouvait  que  trois  chez  les  Syriens,  sa- 

•  Hebrœis  Paulus,  utpote  hebrœus ,  hebraice 
scripHt  :  in  Grœcam  vero  linguain  translata  ejus 
Epistola  fuit  vrl  a  Luca,  ut  fertur,  vel  a  Clé- 
mente, ximiliterque  Ecangelium  secundum  Mat- 
Iku'Uiii.  Ibid.,  pag.  2o3. 

*  Sucerdoles  precuntes  de  o/l'crcnlibus  pronun- 


IH'J 

voir  :  l'Epllre  de  saint  Jacques,  la  [iremièrc 
de  saint  Pierre  et  la  première  de  saint  Jean. 
Il  y  a  dans  tout  ce  discours  de  Cosme  peu 
d'exaclilude  ;  et  il  se  trouq)e  manifestemeut, 
lorsqu'il  dit  qu'aucun  des  anciens  n'avait 
conmienté  ces  Epitres.  Nous  avons  vu  que 
Didyme  les  avait  expliquées  tout  entières. 
Saint  Jérôme  le  dit  expressément.  Cassio-  c.xioii.  j» 
dore  1  assure  aussi,  et  ajoute  que  samt  Clé-  vén.pag.  mi. 
ment  d'Alexandrie  avait  commenté  la  pre- 
mière de  saint  Pierre,  la  première  et  la  se- 
conde de  saint  Jean,  et  celle  de  saint  Jac- 
ques ;  que  saint  Augustin  a  laissé  un  com- 
mentaire sur  celle-ci,  et  dix  sermons  sur  la 
première  de  saint  Jean.  Nous  n'avons  plus 
le  canon  des  Écritures  que  Cosme  attribue 
à  saint  Irénée,  si  toutefois  il  en  a  l'ait  un.  A 
l'égard  de  saint  Athanase,  il  fait  un  canon 
dans  sa  trente-neuvième  Épître  festale,  et  il 
y  met  les  sept  Epitres  catholiques  entre  les 
livres  dont  l'autorité  n'était  pas  douteuse. 
Il  est  surprenant  que  Cosme,  qui  cite  plu- 
sieurs fragments  de  ces  Épitres  festales  dans 
son  dixième  livre,  n'ait  pas  fait  attention  à  ce 
canon.  Quant  à  ce  qu'il  dit  que  ces  sept  Épi- 
tres n'étaient  point  reçues  généralement,  il 
pouvait  dire  la  même  chose  de  quelques  au- 
tres livres  de  l'Écriture  qui  enliu  ont  été  re- 
connus pour  canoniques,  de  même  que  ces 
Épitres,  par  un  consentement  unanime  de 
l'Église,  et  placés  dans  le  canon.  Cosme  re- 
marque que  le  prêtre,  après  avoir  prié  dans 
la  célébration  des  mystères  pour  les  fidè- 
les vivants  ,  priait  aussi  ^  pour  les  morts  , 
en  demandant  à  Dieu  de  leur  accorder  le 
repos,  et  de  ressusciter  leur  chair  au  jour 
qu'il  avait  résolu  de  le  faire,  suivant  ses  pro- 
messes qui  ne  peuvent  être  fausses. 

8.  Entre  les  Pères  dont  il  cite  les  ouvra-    Lit.. x.isg. 
ges,  pour  montrer  qu'ils  pensaient  comme 
lui   sur  la  figure  du  monde  ,  il    met  Phi- 
Ion,  évêque  de  Carpathie,  à  qui  il  attribue  un 
commentaire  sur  le  Cantique  des  cantiques,  et 
sur  l'ouvrage  des  six  jours  de  la  création. 
Philou  disait  dans  le  premier,  que  le  Fils  de 
Dieu'  avait  pris  l'homme  par  son  incai-na- 
tion  ;  mais  qu'en  échange,  il  s'était  depuis     Vnve,  lom. 
donné  ;'i  l'homme,  en  lui  donnant  sa  sainte   V'' *'"»'■  -"• 
chair  à  manger  à  la  communion.  Il  met  en- 

tiant...  pro  mortuis  vero  sic  :  Animœ  hujus.  Do- 
mine, requiem  concède,  ressuscitans  quoque  car- 
nem  ejus,  yua  die  decrevisti  secundum veras  tuas 
promissiones.   Lib.  Vil,  pag.  299. 

'  Filius  Dei  hominem  accepit,  ac  ipsi  postea  vi- 
cissini  sanclam   carncni    suum  comedcndam  ad 


\<M 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Plf.  J31. 


LIb.Xt, 
X14. 


Llli.  XII, 

isf.  Ï40. 


ccre  Théodose ,  successeur  de  Timotbce-le- 
Jcune,  dans  le  siège  d'Alexandrie,  et  Timo- 
thëe  lui-môme.  Il  rapporte  trois  passages  de 
trois  sermons  dill'érents  de  Thëodose,  et  six 
de  six  sermons  de  Tiniothée'.  Dans  le  qua- 
trième qui  fut  prêché  daus  l'Église  de  Quirin 
à  Alexandrie,  "Timothée  dit  de  Jésus  -  Chiist, 
que  parce  qu'il'  était  Dieu  et  homme  tout  en- 
semble, il  a  prouvé  l'un  et  l'autre  par  ses  œu- 
vres, en  sorte  que  cela  ne  pouvait  être  ignoré 
de  ceux  qui  en  étaient  témoins, a  II  a  donné, 
dit-il,  des  preuves  de  sa  di^^nité  en  guéris- 
sant les  lépreux,  en  rendant  la  vue  aux  aveu- 
gles, en  fortifiant  les  membres  des  paralyti- 
ques, et  en  donnant  la  vie  aux  morts.  C'est 
pourquoi  il  dit  avec  assurance  :  Mon  Père  et 
moi  sommes  une  même  chose.  Il  n'a  pas  voulu 
non  plus  laisser  ignorer  qu'il  était  homme, 
pour  détruire  l'erreur  de  ceux  qui  croient 
qu'il  n'a  eu  qu'un  corps  fantastique,  et  qu'il 
ne  s'est  incarné  qu'en  apparence.  Il  a  prou- 
vé qu'il  était  vraiment  homme,  en  s'assujet- 
tissant  à  toutes  les  passions  que  l'infirmité 
de  la  chair  entraîne  nécessairement  avec 
elle  et  qui  ne  sont  nullement  des  suites  du 
péché  :  comme  la  faim,  la  soif,  la  fatigue,  le 
sommeil.  » 

9.  Cosme  emploie  son  onzième  livre  à  fai- 
re la  description  des  animaux  les  plus  rares 
qu'il  avait  vus  dans  les  Indes  et  dans  l'Kthio- 
pie.  Il  y  parle  aussi  des  poissons  de  mer, 
entre  autres  du  dauphin  et  de  la  tortue, 
dont  il  dit  avoir  mangé  ;  et  de  quelques  ar- 
brisseaux qui  portent  des  graines  odoriféran- 
tes, comme  du  poivre  et  du  girolle.  Dans  le 
douzième  livre,  il  rapporte  les  noms  des  an- 
ciens écrivains  profanes  qui  ont  cité  quel- 
que chose  des  livies  de  Moïse  et  des  Pro- 
phètes. «Ceux,  dit-il,  qiii  ont  écrit  l'histoire 
des  Chaldéens,  ont  parlé  de  la  tour  que  les 
descendants  de  Noé  construisirent  avant  de 
se  disperser  dans  toutes  les  parties  du  mon- 
de. Ils  pouvaient,  continue-t-il,  parler  avec 
certitude  de  cette  tour,  puisqu'il  leur  était 


facile  de  la  voir  de  leurs  yeux  et  d'en  consi- 
dérer toute  la  structure.  »  C'est  aussi  dans 
les  Livres  saints  que  les  mêmes  écrivains 
Chaldéens,  les  Mèdes  et  lesPei-ses  ont  puisé 
ce  qu'ils  savaient  des  événements  arrivés  sous 
le  règne  d'Ézéchias,  du  temps  de  Jouas  et  de 
la  captivité  de  Babylone.  »  En  parlant  de  la 
version  faite  par  les  Septante,  il  dit  que  Pto- 
léméePhiladelpbe,  informé  parTryphonPha- 
lérus  de  ce  que  contenaient  les  livres  des 
Juifs,  conçut  le  dessein  de  les  faire  traduire, 
et  qu'i  cet  eflet,  il  envoya  demander  des  inter- 
prètes au  grand  prêtre  Éléazar  ;  mais  Cosme 
met  ici  Tryphon  au  lieu  de  Démétrius,  com- 
me lisent  Aristhée,  Philon,  Joseph  et  plu- 
sieurs autres.  On  ne  peut  pas  dire  qu'il  se 
soit  trompé  par  la  ressemblance  des  noms, 
puisqu'il  n'y  eu  a  aucune  entre  Démétrius 
et  Tryphon.  C'est  donc  de  sa  part  une  faute 
de  mémoire,  si  ce  n'est  qu'il  ait  eu  un  exem- 
plaire défectueux  de  cette  histoire. 

10.  Il  ne  faut  pas  omettre  ce  qu'il  dit  sur 
le  vingt-neuvième  chapitre  du  Deutéronome, 
où  nous  lisons  que,  pendant  les  quarante 
années  que  les  Israélites  furent  dans  le  dé- 
sert, leurs  vêtements  et  leurs  souliers  ne  s'u- 
sèrent point.  Cosme  soutient  que  cela  ne  doit 
point  se  prendre  à  la  lettre,  comme  le  veu- 
lent les  interprètes,  surtout  les  Juifs;  mais 
que  Moïse  ne  veut  dire  autre  chose  en  cet 
endroit,  sinon  que  rien  ne  manqua  aux  Israé- 
lites dans  le  désert ,  parce  que  des  mar- 
chands venus  d'ailleurs  leur  fournissaient 
les  choses  nécessaires.  «  Comment,  en  eflet, 
ajoute-t-il,  les  enfants  nés  dans  le  désert 
auraient-ils  pu  se  vêtir  et  se  chausser?  Il  n'y 
avait  aucune  proportion  entre  leurs  corps  et 
ceux  de  leurs  parents,  et  dès  lors  les  vête- 
ments et  les  souliers  de  ceux-ci  devenaient 
inutiles  à  leurs  enfants.  Comment  aussi  au- 
raient-ils pu  faire  chaque  jour  de  nouveaux 
pains  de  propositions ,  si  des  marchands 
étrangers  ne  leur  avaient  amené  des  blés?» 
Mais  quoique  le  raisonnement  de  Cosme  ail 


Pu-  x'. 


Llb.  V,  l^t. 


communionem  iribuit.  Philo  Carpalli  :  Comment. 
tîi  Canlic.  apud  Cosuiaui  ludkoplasl.,  lib.  X,  pag. 
329. 

>  Le  tome  III  du  Spicilegium  romanum,  pag. 
"09-"  12,  conlienl  uu  fragment  d'une  homélie  sur 
CCS  panilcs:  Jésus  autem  [aligaUts  est  itinere  et 
sedit.  Ce  frafimcnt  complète  celui  que  Cosme  avait 
piihlié.  (L'Mteur.) 

»  (,)uia  una  Deus  el  homo  ipse  est,  utrumque 
simul  ex  operibus  compruhalur,  ita  ut  spectalo- 
rihus  non  latere  possU.  Aiim  quod  natura  Deus 
sil  ex  operibus  el  signis  ostendilttr,  dum  leprosos 


mundat,  ccecos  illuminât,  paralilicos  roboral, 
mortuis  vitavi  elargilur:  quodque  maximum  est, 
diserte  et  cum  /iducia  dicit  :  Ego  el  l'alor  unuui 
suinus.  (Juod  autem  etiam  homo  sit,  neque  id 
iti  m  latere  rult  el  ignorari,  ut  eos  inde  prœver- 
lerel  et  frangeret  qui  eum  pkantastice  advcnisse 
putant;  dum  clare  et  aperle  passionibus  se  sub- 
dit:  at  quibus  passionibus  f  lis  scilicet  quwprop- 
ter  infirmitatem,  4ion  propler  peccatum,  carni 
familiares  sunt;  esuriem  dico,  sitim,  somuum, 
defatigationem.  Timoth,  Aloxaudr.  apud  Cosmam, 
lib.  X,  pag.  sa. 


11,  w. 


[Vl*  SIÈCLE.] 

quelque  vraisemblance,  il  faut  s'on  lonir  au 
scnlimcnt  conmiun,  qui  veut  que  ce  soil  par 
lui  niiraclo  que  les  viHcuinuls  et  K's  souliers 
des  Ildbreux  ne  se  soicut  pas  déchirés  pen- 
dant les  quarante  années  qu'ils  passèrent 
dans  le  désert.  Il  place  le  paradis  terres- 
tre dans  une  terre  qu'il  siqipose  être  au 
delà  de  l'Océan.  11  croit  que  le  père  de 
li'!  r^t. '"°'  s'^'n'  Jean-Baptiste  était  grand- prêtre.  Il  re- 
marque qu';\  Jérusalem  on  célébrait  la  nais- 
sance du  Sauveur  le  jour  de  l'Epiphanie, 
c'est-;\-direle6  de  janvier;  mais  que  l'Éjilise 
dès  les  premiers  temps  ,  craignant  qu'en  cé- 
lébrant ces  deu.'C  solennités  en  un  même 
jour,  l'une  ou  l'autre  ne  tombât  dans  l'ou- 
bli, ordonna  qu'à  l'avenir  l'on  mettrait  douze 
jours  d'intervalle  entre  la  fête  de  Noël  et  celle 
de  l'Epiphanie. 

II.  Avant  de  travailler  à  la  Topographie 
chrétienne,  Cosme  avait  fait  nn  traité'  de 
cosmographie  générale,  où  il  faisait  la  des- 
cription de  toutes  les  terres,  tant  en  deçà 
qu'au  delà  de  l'Océan.  Ce  qu'il  pouvait  y 
avoir  d'intéressant  dans  cet  ouvrage,  étaitce 
qu'il  y  rapportait  des  provinces  de  l'Ethiopie, 
de  l'Arabie  et  de  l'Inde,  sur  lesquelles  ni  Stra- 
bon,  ni  Ptoléméc,  ni  aucun  des  anciens  ne 
pouvaient  nous  donner  tant  de  lumières  que 
lui,  qui  avait  vu  tous  ces  lieux  par  lui-même, 
et  qui  en  avait  examiné  avec  soin  la  situa- 
tion, les  coutumes,  et  ce  qu'il  y  avait  de  rare 
en  plantes  et  en  animaux.  Ce  traité  n'est  pas 
venu  jusqu'à  nous  :  Cosme  l'avait  dédié  à  un 
de  ses  amis  nommé  Constantin.  Nous  avons 
perdu  aussi  ses  Tables  astronomiques  ^  qu'il 
avait  envoyées  au  diacre  Homologus.  11  mar- 
quait dans  ces  Tables  le  cours  des  astres  re- 
lativement au  système  qu'il  avait  adopté. 
Théophile  lui  avait  '  demandé  un  commen- 
taire sur  le  Cantique  des  cantiques.  Il  dit  lui- 


CHAPITIIE  XV.    —  COSiMIC  D'I^CYI'TI']. 


r.ii 


LiTrci   d« 
Cwma       qui 
It  ytrdus. 


ïnèiiie([iril  l'avait  achevé  avant  qu'il  eût  com- 
iiuMiié  son  liuitième  livre  de  In  Tnjmijraphie 
chrétienne  :  ce  commentaire  est  perdu.  Quel- 
ques-uns croient  apercevoir  dans  ce  qu'il  dit 
de  riïvangile  de  saint  Luc  au  cinquième  livre 
de  sa  Topogi-aphie ,  qu'il  avait  comn}cnlé  cet 
Evangile.  Nous  n'y  avons  rien  trouvé  qui 
puisse  appuyer  cette  conjecture.  Mais  il  pa- 
rait d'ailleurs  qu'il  avait  expliqué  cet  Évan- 
gile, puisqu'au  rapport  de  Cave  l'on  voit  en- 
core la  Préface  qu'il  avait  mise  à  la  tête  do 
ce  commentaire.  On  dit  que  l'on  conserve  de 
lui  dans  la  Bibliothèque  impériale  '  une  dis- 
sertation pour  prouver  que  la  figure  du  mon- 
de n'est  pas  ronde,  mais  plate  ;  et  dans  cel- 
les ^  du  Vatican  et  de  M.  Colbert,  un  com- 
mentaire sur  les  endroits  les  plus  difficiles 
des  Psaumes,,  avec  une  préface  où  il  exa- 
mine plusieurs  choses  nécessaires  pour  l'in- 
telligence des  Psaumes  ;  et  un  autre  com- 
mentaire sur  la  paraphrase  '  qu'Apollinaire 
a  faite  sur  les  mêmes  Psaumes.  Il  y  a  ap- 
parence que  la  Préface  sur  les  Psaumes  est 
la  môme  que  celle  dont  parlenf^r'risius  et 
Possevin,  puisqu'il  est  rare  qu'un  même  au- 
teur mette  deux  préfaces  difl'érentes  à  un 
même  commentaire.  Léon  Allatius'  donne  à 
CosmehChronir/ite d'Alexandiie  :  on  ne  sait 
sur  quel  fondement,  le  compilateur  de  cette 
Chronique,  ayant  écrit  sur  la  fin  du  règne  de 
l'empereur Héraclius  vers  l'an  630,longtemps 
après  la  mort  de  Cosme. 

12.  Le  style  de  Cosme  est  simple  et  peu 
châtié.  Il  traite  les  matières  sans  ordre  et  sans  '^'  '^'' 
méthode.  Tout  le  mérite  de  son  ouvrage  pa- 
raît consister  dans  la  candeur  avec  laquelle  il 
rapporte  les  choses  qu'il  avait  vues,  et  dont 
la  plupart  sont  très-intéressantes  pour  l'his- 
toire des  pays  qu'il  avait  parcourus. 


Lit.  V,  po;. 
3»;. 


des     ouvrages 


'  Àdeant  lectores  tomum  a  nabis  elaboratuin 
ac  Christi  amanli  Conslantino  nuncupatxim ;  ubi 
universa  terra  lalius  descripla  est,  tam  ea  quœ 
ultra  Oceanum  sita  est,  quam  hœc  cum  omnibus 
regionibus.  Cosmas,  lib.  I.pag.  113. 

*  Quœranlilem  tubulain  et  delineationem  uni' 
versi  et  aslrorum  molus  quam  nos  confecinuis 
ad  exemplum  organicœ  exterorum  spliœrœ,  at- 
quc  librum  quem  ea  de  re  editum  a  nobis  ad  re- 
ligiosissimum  diaconum  homologum  misimus 
evolvant.  IbiJ.,  pag.  114. 

'  Ego  vero  quoniam  Cantici  canticoriim  inter- 
pretationem,  Deo  juvante,  completitrus  eram, 
quam   cviinnunis    ac    mirabilis  'amicus    noster 


Theophilus  a  nobis  expetierat,  quemadmodum  et 
ipse  nosli,  liactenus  comperendinabam.  Nunc  au- 
tem  eo  absolulo  opère,  tuam  petHionem  implere 
ordiar.  Cosmas,  lib.  VIII,  pag.  300. 

*  Lambecius,  tom.  III,  Commentarior.  in  BibliO' 
lliecam  Cœsar. 

6  Ducangf  iu  Gloss.  mediœ  et  in/imce  grœcitatis, 
verbû  indicopleustes,  jjag.  516. 

^  Idem,  verb.  Fone,  pag.  1717. 

'  Léo  Allât,  De  Consensu  utriusque  Ecclesiœ  de 
Purgatorio,  pag.  9i2.  Vide  Prœfat.  Beruardi 
Montfaueoa  in  Cosmam;  Cave  verb.  Cosuias;  et 
Oudin,  tom.  I,  pag.  1414. 


192 


IIISTOmE  Gl':Nt:RALE  Ui:S  AUTEURS  ECCLLSIASTIQUES. 


CHAPITRE  XV. 

Silvérins  [538]  et  Vigile  [555],  papes. 


SIMrics 
éln  fpt  eu 
SM. 


PrcT.  .  lom. 
V  Contil.^-t. 
"!,    et    M<r- 

celUD.IoLliro* 

cir.      »d      AD. 


II  ni    frfU- 

jéd'.Dleili;-*!!- 
ee  iTe*;  it» 
(iollit. 


LiUtal.  il>i<l. 


i .  Les  Romains  ayant  appris  sur  la  fin  de 
l'an  5.36,  que  le  pape  Ap:apot  était  mort  à 
Consfantinople  ,  choisirent  pour  lui    succé- 
der Silvérius  sous-diacre,  fils  du  pape  Hor- 
misdas.  Anastase  parle  de  Silvérius  comme 
d'un  intrus  dans  le  Saint-Siège.  Ayant  ga- 
gné par  argent  le  roi  Théodal,  il  aurait  obli- 
gé le  clergé  de  Rome  de  le  choisir,  mena- 
çant de  mort  ceux  qui  lui  refuseraient  leurs 
sutliages.  Mais  Libérât,  auteur  du  temps,  et 
ainsi  plus  digne  de  foi  qu'.\jiâstase  qui  écri- 
vait  longtemps  après,    suppose  clairemeut 
que  l'élection  de  Silvérius  f\it  libre  et  cano- 
nique. Du  moins  est-il  certain  que  le  clergé 
et  le  peuple  romain  le  reconnurent  pour  leur 
évêquc   t'gitime.    Cependant    l'impératrice 
Théodorîr,  ayant  fait  appeler  Vigile,  diacre 
de  l'Église  romaine,  qui  était  demeuré  à  Con- 
stantinople  depuis  la  mort  du  pape  Agapet, 
arrivée  le  22  avril  de  la  même  aifliée  536, 
lui  fit  promettre  secrètement  d'abolir  le  con- 
cile de  Chalcédoine,  et  d'écrire  à  Théodose 
d'Alexandrie,  à  Anthime  et  à  Sévère,  pour 
témoigner  qu'il  approuvait  leur  foi ,  s'enga- 
geant,  à  ces  conditions,  de  lui  donner  sept 
cents  livres  d'or,  et  un  ordre  pour  Bélisaire 
qui  le  ferait  ordonner  pape.  Vigile  donna  à 
l'Impératrice  toutes  les  assurances  qu'elle 
souiiaitait.  Il  partit  donc  de  Constanlinople 
avec  un  ordre  adressé  a  Bélisaire,  et  avec  les 
sept  cents  livres  d'orque  Théodora  lui  avait 
données.  Mais  à  son  arrivée  à  Rome,  il  trouva 
Silvérius  en  possession  du  Saint-Siège.  11  prit 
donc  le  parli  d'aller  à  Ravennes  où  Uélisaire 
était  alors  avec  une  puissante  armée.  Vigile 
lui  montra  l'ordre  de  l'Impératrice,  lui  pro- 
mettant deux  cents  livres  d'or,  s'il  voulait  le 
faire  ordonner  pape  à  la  place  de  Silvérius. 
2.  Bélisaire,  après  avoir  pris  Naplcs,  s'a- 
vança vers  Rome,  qui  se  rendit  le  10  décem- 
bre de  l'an  536,  principalement  à  la  persua- 
sion de  Silvérius.  Mais  l'année  suivante  537, 
Viliges  que   les  Goths  avaient   choisi  pour 
leur  roi  ù  la  place  de  Théodat,  en  vint  faire 
le  siège.  Bélisaire  profita  de  cette  occasion 
pour  faire  réussir  les  desseins  de  Vigile;  et  il 
en  prit  deux  prétextes,  le  pieniier  fut  que 


Silvérius  était  accusé  d'intelligence  avec  les 
Goths;  et  le  second,  de  s'être  rendu  odieux  à 
l'impératrice  Théodora  eu  refusant  de  com- 
muniquer avec  Antilime,  patriarche  de  Corts- 
tantinople.  Le  premier  de  ces  prétextes  était 
une  calonmie  :  car  il  passait  pour  constant 
qu'un  avocat  nommé  Marc,  et  un  soldat  de 
la  garde  prétorienne  appelé  Julien,  avaient 
composé  sous  le  nom  de  Silvérius,  de  faus- 
ses lettres  adressées  au  roi  des  Golhs.  Aussi 
Bélisaire  n'insista  que  sur  le  second.  11  fit  ve- 
nir le  Pape  au  palais,  où  lui  et  sa  femme 
Antonine,  confidente  de  l'Impératrice,  s'ef- 
forcèrent de  lui  persuader  secrètement  d'o- 
béir à  cette  princesse,  de  renoncer  au  con- 
cile de  Chalcédoine  et  d'approuver  par  écrit 
la  doctrine  des  hérétiques,  c'est-à-dire,  d'An- 
thime  et  de   Sévère.  Silvérius  n'ayant  pas 
voulu  se  rendre  à  cette  proposition,  se  re- 
tira à  l'Figlise  de  Sainle-Marie-Sabine.  Béli- 
saire le  fit  inviter  une  seconde  fois  à  venir 
au  palais,  en  lui  promettant  sûreté  avec  ser. 
ment.  11  y  vint  ;  mais  demeura  inilexible.  On 
le  manda  une  troisième  fois,  et  quoiqu'il  vit 
qu'on  voulait  le  surprendre,  il  ne  laissa  pas 
de  venir,  après  avoir  recommandé  ses  all'ai- 
res  à.  Dieu.  Un  le  fil  entrer  seul,  et  depuis  ce 
moment  les  siens  ne  le  virent  plus. 

3.  Le  lendemain  Bélisaire  ayant  assemblé 
les  prêtres,  les  diacres  et  tout  le  clergé  de 
Rome,  leur  ordonna  de  se  choisir  un  autre 
pape.  Quelques-uns  balancèrent  sur  ce  qu'ils 
avaient  à  faire;  d'autres  résistèrent  en  fai- 
sant sentir  que  la  chose  n'était  point  propo- 
sable  ;  mais  l'autorité  de  Bélisaire  l'emporta. 
Vigile  fut  ordonné  pape  le 22  novembre,  el 
Silvérius  envoyé  en  exil  à  Patare,  ville  de  la 
province  de  Lycie.  Aussitôt  que  Vigile  eut  été 
ordonné,  Bélisaire  le  pressa  de  lui  payer  ses 
deux  cents  livres  d'or,  et  d'accomplir  la  pro- 
messe qu'il  avait  faite  à  l'impératrice  Théo- 
dora d'approuver  par  écrit  la  foi  d'.Vnliiime. 
Vii;ilc  ne  voulait  point  s'y  résoudre,  tant  par 
la  crainte  des  Romains,  que  par  avarice.   U 
arriva  cependant  que  l'évèque  de  l'alare  in- 
formé par  Silvérius  môme  des  mauvais  trai- 
tements qu'un  lui  avait  faits,  alla   trouver 


LHierat.. 
SU.  lUd. 


CnAPITRE  XV.  —  SILVI^.UIUS  ET  VIG1T,E,  PAPES. 


[Vl'  SIÈCLE.]  • 

l'empereur  Justinicn,  qu'il  menaça  du  juge- 
ment de  Dieu  pour  avoir  ainsi  chassé  de  son 
siège  le  tlief  d'une  si  grande  église,  disant' 
qu'il  y  avait  plusieurs  rois  en  ce  monde,  mais 
qu'il  n'y  avait  qu'un  pape  suj- l'iiglise  de  tout 
le  monde.  L'Empereur,  qui  ne  savait  rien 
des  oïdies  que  Théodora avait  donnés,  com- 
manda que  Silvi'rius  fût  renvoyé  ;\  Rome; 
que  l'on  informât  de  la  vérité  des  lettres 
qu'on  l'accusait  d'avoir  écrites  aux  Gotlis  , 
que  s'il  étaitcouvaiucu  d'en  être  l'auteui-,  il 
demeurât  évèqne  dans  quelipi'aiilro  ville  ;  et 
que  s'il  se  trouvait  qu'on  les  lui  eût  suppo- 
sées, il  fut  rétabli  dans  son  siège.  Le  diacre 
Pelage  que  le  pape  Agapet  avait  déclaré 
avant  de  mourir,  son  apocrisiaire  auprès  de 
l'Empereur,  étant  gagné  par  l'Impératrice,  fit 
tous  ses  efforts  pour  empêcher  l'exécution 
de  l'ordre  donné  par  Justinien,  et  le  retour 
de  Silvérius  à  Rome.  Mais  il  n'eu  vint  point 
à  bout;  ce  que  l'Empereur  avait  commandé 
fut  exécuté,  et  Silvérius  fut  reconduit  en 
Italie.  Vigile  en  fut  ell'rayé,  et  craignant  au 
retour  de  Silvérius  d'être  chassé  de  son  siè- 
ge, manda  ;"i  Bèlisaire  de  lui  livrer  Silvérius; 
qu'autrement  il  ne  pourrait  exécuter  ses  pro- 
messes. Ce  fut  de  cette  façon  que  Silv('uius 
tomba  entre  les  mains  de  deux  défenseurs  et 
de  quelques  autres  serviteurs  de  Vigile,  qui  le 
menèrent  dans  l'ilede  Palmaria,  où  Ils  le  lais- 
sèrent mourir  de  faim,  le  20  juillet  o38,  après 
avoir  tenu  le  Saint-Siège  pendant  deux  aus. 
4.  Nous  avons  deux  lettres  sous  son  nom , 
l'une  à  Vigile  qui  y  est  qualifié  faux  pape,  et 
l'autre  à  Amator,  évêque  d'Autun  ^.  Mais  on 
convient  qu'elles  sont  toutes  les  deux  sup- 
posées, et  de  la  main  de  Mercator.  Cela  pa- 
raît non-seulement  par  la  conformité  qu'elles 
ont  avec  son  style,  mais  encore  parles  dates 


193 


des  consuls, dans  lesquelles  cet  imposteur  s'est 
presque  toujours  trompé.  Celle  .'i  Vigile  est 
datée  du  consulat  de  Rasile,  (pii  ne  l'exerça 
point  sous  le  pontiticat  île  Silvérius:  l'autre 
du  consulat  du  Justinien  pour  la  cinquième 
fois,  et  de  Bèlisaire  qui  ne  fut  pas  non  plus 
consul  dans  le  temps  ([ue  ce  pape  occupait 
le  Saint-Si(''ge.  La  lettre  rt  \igile  est  un  re- 
proche continuel  de  son  ambition  ,  et  de  ce 
qu'il  était  parvenu  à  s'emparer  du  Saint- 
Siège  i'i  force  d'argent.  On  y  fait  prononcer 
contre  lui  et  contre  ses  complices  une  sen- 
tence d'anathème  et  de  déposition  par  Silvé- 
rius dans  un  concile  de  plusieurs  évoques. 
La  lettre  à  Amator  suppose  que  Silvérius  en 
avait  reçu  une  de  cet  évêque  dans  le  temps 
de  son  exil.  Silvérius,  dans  cette  réponse,  lui 
fait  im  détail  de  tout  ce  que  l'on  avait  fait 
pour  le  dépouiller  de  son  siège,  en  l'avertis- 
sant qu'il  avait  renouvelé  les  anciens  statuts 
qui  défendent  de  recevoir  en  témoignage, 
contre  les  évéques,  des  personnes  suspectes 
ou  ennemies.  11  parle  dans  la  même  lettre  du 
concile  qu'il  avait  assemblé  contre  Vigile;  et 
il  insinue  qu'il  l'avait  assemblé  comme  il 
avait  pu  dans  le  lieu  même  de  son  exil.  Le 
diacre  Libérât  ne  dit  rien  de  tout  cela,  et  l'on 
n'en  trouve  rien  ailleurs. 

5.  Après  la  mort  de  Silvérius,  Vigile,  pour 
accomplir  la  promesse  qu'il  avait  faite  à  l'im- 
pératiice  Théodora,  donna  à  Antonine,  femme  vconcii.pat, 
de  Bèlisaire,  une  lettre  pour  Anlhime  de  Cons- 
tantinople,  Thèodose  d'Alexandrie  ^  et  Sé- 
vère d'Antioche ,  où  il  leur  déclarait  qu'il 
tenait  et  avait  toujours  tenu  la  même  foi 
qu'eux  :  mais  il  les  priait  de  tenir  la  lettre 
secrète  ,  de  parler  de  lui  au  contraire  comme 
d'un  homme  qui  leur  était  suspect,  afin  qu'il 
put  achever  plus  sûrement  l'ouvrage  qu'il 


Vlîl.'ojpare 
en  :13X.  Lilo- 
rai.  iii  Bre>., 
cap.xxit. 


*  SedSilverio  venienie Pataram  venerabilis  epis- 
copus  civilatis  ipsius  venil  nd  Imperutorem,  et 
judicium  Dei  contestatiis  est  de  tantœ  sedis  epis- 
copi  cxpulsione,  multos  esse  dicens  in  hoc  mundo 
reges,  et  non  esse  unimi  sicut  ille  vnus  papa  su- 
per  Ecclesiam  lolius  mundi.  Liber,  in  Breviar., 
cap.  xxn,  tom.  V  Concil.,  pag.  773. 

*  Elles  sont  reproduites  dans  le  tome  LXVI  de 
la  Patrologie  latine,  col.  79  et  suiv.  avec  une  no- 
tice sur  Silvére,  tirée  du  l'onlifical.  (L'éditeur.) 

'  On  a  de  Théodose  d'Ale.xaudrie  quelques  frag- 
ments théologiques  rapportés  par  Mai,  Spicileg. 
rom.,  p.  711-721,  savoir:  l°im  fragment  de  la  lettre 
écrite  à  Sévère,  patriarche  d'Antioche,  lors  de  sa 
promotion  au  patriarchat  d'.ile.Kaudrie;  2»  uue  let- 
tre au  peuple  d'.Vlexandrie  pendant  son  exil  ; 
3°  une  lettre  sur  la  Trinité  et  contre  les  ariens. 

XL 


Ces  opuscules  reproduits  au  tome  LXXXVI  de  la 
Patrologie  grecque,  col.  277-286,  sont  remplis  des 
erreurs  des  nionophysites;  mais  on  y  trouve  un  beau 
passage  sur  la  présence  réelle  :  "  Si  quelqu'un  dit 
qu'il  y  a  passion,  mort  ou  corruption  dans  le  corps 
et  le  [irécieux  sang  du  Christ,  que  nous  élevons 
sur  l'autel  lorsque  nous  en  accomplissons  la  litur- 
gie en  commémoration  de  sa  mort  et  de  sa  pas- 
sion, qu'il  soit  anathème  :  Si  quis  dixerit,  in  sa- 
cra corpore  pretiosoque  sanguine  Christi,  quœ 
svper  altare  exlolHmus  dum  ipsorum  lilurginm 
perficiiuus,  mortem  ejus  ac  passionem  comine- 
morunles,  passionem  aut  mortem  aul  corruplio- 
nem  intervenire,  anathema  sit.»  Pairù\.,ibid.,  cul. 
282,  dans  la  lettre  au  peuple  d'Alexandrie.  Quel- 
ques autres  fragments  y  sont  reproduits  d'après 
Galland,  Maï  et  Cosmas.  [L'éditeur.) 

13 


Iflt 


ITTSTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECC  LEST  ASTIQUES. 


avait  commencé.  Lilvrat  qui  rapporte  ce  fait, 
ajoute  que  Viirile  joignit  à  cette  lettre  une 
confession  de  foi  dans  laquelle  il  rejetait  les 
deux  nature-;  en  Jésus-Clirist,  et  la  lettre  de 
saint  Léon,  soutenant  qu'on  ne  devait  pas 
dire  deux  natures  ,  mais  que  Jésus-Christ  est 
composé  de  deux  natures  ;  et  disant  ana- 
thème  à  ceux  qui  ne  confessaient  pas  une 
personne,  une  essence,  ou  qui  distinguaient 
celui  qui  avait  fait  des  miracles  d'avec  celui 
qui  avait  souffert.  Il  anatliématisait  en  par- 
ticulier Paul  de  Samosate,  Diodorede  Tarse, 
Théodore  de  Mopsueste,  et  Théodoret ,  avec 
tous  les  sectateui's  de  leur  doctrine.  Ayant 
ainsi  écrit  secrètement  aux  hérétiques  acé- 
phales, il  demeura  en  possession  du  Saint- 
ibid.    i;j.   Siège.  Mais  il  paraît  qu'ils  ne  lui  gardèrent 
point  le  secret,  puisque  sa  lettre  et  sa  pro- 
fession de  foi  tombèrent  entre  les  mains  de 
Libérât  qui  nous  les  a  conservées.  11  semble 
aussi  qu'elles  vinrent  à  la  connaissance  de 
l'empereur  Justinien. 
vigi^'i'"  ^f-       G.  Ce  priuce,  trouvant  mauvais  que  Vigile 
KToii?  V  ne  lui  eût  point  écrit  suivant  la  coutume , 
co_iicii.   pig.   a„ç;gjt,jt  après  son  élévation  au  pontilicat,  et 
n'eut  point  répondu  à  la  lettre  du  patriarche 
Mennas,  où  il  faisait  une  déclaration  de  sa  foi, 
lui  envoya  le  patrice  Dominique  avec  des 
lettres,  où  après  avoir  témoigné  son  atta- 
chement à  la  véritable  doctrine,  il  laissait 
entrevoir  quelque  méliance  sur  la  foi  de  Vi- 
gile et  sur  sa  conduite  à  son  égard.  Le  Pape, 
dans  sa  réponse ,  fait  l'éloge  de  la  piété  de 
l'Empereur,  et  de  son  attachement  à  la  foi  éta- 
blie dans  les  conciles  do  Nicée ,  de  Constan- 
tinople,  d'Ephèse  et  deChalcédoiue.  Ensuite 
il  déclare  lui-môme  qu'il  n'en  avait  point 
d'autre  '  que  celle  que  les  évéques  de  ces 
quatre  conciles  ont  professée,  et  que  saint 
Léon  et  ses  autres  prédécesseurs  ont  autori- 
s''C  par  leurs  lettres  et  par  leurs  décrets  ; 
qu'en  conséquence  il  analhiJmatise  tous  ceux 
qui  tiennent  une  doctrine  contraire,  nommé- 
ment Sévère  l'eutychéen,  Pierre  d'Apamée, 
Anthime  intrus  dans  l'Église  de  Constanli- 
nople,  Zoara,  Théodose  d'Alexandrie,  Cons- 


lanlin  de  Laoïlicée  et  les  autres  défenseurs  do 
l'hérésie  d'Eutychcs;  en  promettant  toutefois 
d'accorder  la  pénitence  et  la  communion  à 
ceux  d'entr'eux,  qui,  se  repentant  de  leurs 
égarements,  embrasseront  la  foi  établie  tant 
dans  ces  conciles  que  dans  les  lettres  des  évo- 
ques du  Siège  apostolique.  Il  ajoute  que  tous 
ces  hérétiques  ayant  été  déjà  suffisamment 
condamnés,  il  avait  cru  pouvoir  se  dispenser 
de  répondre  à  la  déclaration  que  Mennas  lui 
en  avait  donnée  dans  sa  lettre.  Après  quoi 
il  supplie  l'Empereur  '  dene  point  soulïrir  que 
les  privilèges  de  la  chaire  de  saint  Pierre 
soient  diminués  en  quelque  chose ,  par  les 
artifices  des  méchants  ;  et  de  ne  lui  envoyer 
que  des  personnes  catholiques  et  irréprocha- 
bles dans  leur  foi  et  dans  leurs  monirs.  Vi- 
gile chargea  le  patrice  Dominique,  porteur  de 
saletti-e,  de  quelques  commissions  secrètes 
pour  Justinien,  et  qui,  ce  semble,  regardaient 
les  moyens  de  pacifier  l'Église. 

7.  Le  Pape  chargea  aussi  le  palrice  Domi-  i«tic*i 
nique  d  une  lettre  pour  le  patriarche  Mennas,  ye.Mi. 
où  U  le  félicite  de  ce  qu'en  recevant  les  quatre 
conciles  généraux,  il  s'était  acquitté  de  la 
promesse  qu'il  avait  faite  au  jiape  .\gapet  le 
jour  de  son  ordination  ;  et  de  ce  qu'il  avait 
reçu  de  môme  les  lettres  de  saint  Léon,  di- 
sant que  rien  ne  pouvait  lui  faire  plus  d'hon- 
neur que  de  ne  point  s'éloigner  de  la  doctrine 
des  évoques  de  Rome.  Il  marque  que  les 
archives  de  l'Église  de  Constantinople  étaient 
remplies  des  lettres  que  saint  Léon  avait 
écrites  aux  évoques  de  Constantinople,  qui, 
de  leur  côté,  en  avaient  écrit  aux  papes.  En- 
suite il  confirme  l'anathème  que  Mennas 
avait  prononcé  contre  Sévère  d'Antioche,  et 
Pierre  d'Apamée,  contre  .\iitliimeet  les  autres 
schismatiqnes,  en  oO'iant  néanmoins  la  pé- 
nitence et  la  communion  à  ceux  qui  pren- 
draient le  parti  de  se  réunir,  parce  que  ' 
Notre  Sauveur  n'est  pas  venu  pour  perdre 
quelqu'un,  mais  pour  sauver  tous  les  hom- 
mes par  sa  bonté.  Ces  deux  lettres,  qui  sont 
datées  du  quinzième  des  calendes  d'octobre 
sous  le  consulat  de  Justinien,  c'est-à-dire  du 


'  lîœc  ergo  quœ  de  fi/le  n  palribus  sanctonim 
quatuor  sijnoiiorum  et  n  designalis  hcatœ  rccor- 
dalionis  papa:  Leonis  F,|ii.'lolis,  alque  a  supra 
tcriptoruin  noxlrorum  prwdrces.<nrum  coiislilulis 
sunl  veneruhililer  defmita,  per  nmnin  nos  se- 
quenles.  analheninlisamus  ros  quicinnque  de  l'idri 
ejus  exposilioiie  lel  recliludine,  aul  dispulnre, 
perverse,  aut  infideliter  dubitare  tenlaveriiU.  Yi- 


e\].,i:pist.  i,  pas.  316. 

»  Suppliciler  preramur  ut  nulliiis  subrepentis 
insidiis  priiitegin  Sedis  heati  Peiri  aposloli  chris- 
tianissimis  trmpnrihus  veslris  in  aliquo  permit- 
talis  imininui.  lliid.,  ii.nfr.  317. 

'  Quia  Ri'Ueniplor  noster  non  venil  aliquem 
p  rdcre,  sed  omnes  pro  sua  pietate  salvare. 
Eiiisl.  5,  pag.  319. 


CHAPITRE  XV.  —  SlLVKmUS  ET  VICILK,  PAI'IÎS. 


Lotir»    li 
ProfuluruM, 

.Uia|:ti«.ILId. 
I»!!.  Jll. 


B«luiO|  (ûiiit 
Couclt,     i&g. 


[Vl*  SIÈCLE.] 

m  septembre  Sifl,  étaient  souscrites  do  la 
main  du  pape  Vigile  ,  cl  iU\  cclit!  du  i)alrice 
Douiiiiiifiu^. 

8.  (Judiiiuc  N'i^ilc  ue  diil  pas  (Mii'  icf^a i'd('! 
cominepapc  l(''t;iliMU"  (MMuiaul  la  vie  doSilv(5- 
rius,  ou  uc  laiss;iit  pas  copcndaut  de  le  con- 
sulter de  divers  endroits.  Nous  avons  encore 
sa  n'ponse  il  Profiiturus,  évôfjnc  de   Uraj^ue 
en  Lusilanie,  dal('e   de  Home  le  tr(jisiènic 
des  calcTulos  do  juillet,  sous  le  consulat  de 
Jean  ,  c'est-ù-dire  le  29  juin  de  l'année  53G  , 
vingt-et-un  jours   avant  la  mort  de  Silvé- 
rius.  Les  collections  ordinaires  des  conciles 
lisent  Eutlicrins,  an  lieu  de  Prolulurus.  Mais 
M.  Baluze  montre,  par  le    témoignage  de 
plusieurs  anciens  manuscrits,  et  des  Actes 
du  concile  de  Drague,  cpi'il  faut  lire  Profu- 
turus,  qui  fut  en  cU'et  évèrjue  de  Brague. 
Celte  lettre  est  divisée  en  plusieurs  articles, 
qui  forment  autant  de  décrets.  ])ans  le  pre- 
mier. Vigile  condamne  ceux  qui,i\  l'imitation 
des  pi'iscillianistes, s'abstenaient  de  l'usage  de 
la  viande,  comme  défendue  et  mauvaise  par 
elle-même,  quoiqu'ils    alTectassent   de  s'en 
abstenir  sons  prétexte   de  dévotion,  et   les 
compare  aux  manichéens.  Il  montre  par  l'au- 
torité de  l'Écrilure  que  rien  de  tout  ce  que 
Dieu  a  donné  à  l'homme  pour  sa  nourriture, 
n'est  mauvais,  quand  on  le  prend  avec  ac- 
tions de  grâces;  et  il  ajoute  que  comme  on 
ne  doit  point  blâmer  une  abstinence  qui  est 
agréable  à  Dieu,  on  doit  condamner  celle 
qui  a  pour  motif  l'exécration  des  créatures 
du  Seigneur.  Il  ordonne  dans  le  second,  que 
le  baptême  solennel  s'administrera  suivant 
les  règlements  du  Siège  apostolique  ;  que 
l'on  se  conformera  à  l'usage  de  timles  les 
églises  catholiques,  qui,  à  la  fin  de  chaque 
psaume,  rendent  gloire  au  Père  et  au  Fils  et 
au  Saint-Esprit,  en  mettant  la  conjonction  et 
entre  chaque  personne  :  c'est  que  quelques- 
uns  n'en  mettaient  point  entre  le  Fils  et  le 
Saint-Esprit,  comme  si  ce  ne  fût  qu'une  seule 
personne.  Le  Pape  réfute  cette  erreur  par  la 
formule  du  baptême,  où,  suivant  le  précepte 
de  Jésus-Christ,  nous  invoquons  séparément 
le  Père  et  le  Fils  et  le  Saint-Esprit,  en  met- 
tant la  conjonction  et  entre  chaque  personne. 
Le  troisième  article  regarde  ceux  qui,  ayant 
été  baptisés  dans  l'Eglise,  avaient  reçu  un 
second  baptême  de  la  main  des  ariens,  et 
depuis  demandaient   de    levenir   à'  l'Église 
catholique.  Pour  instruire  Profuturns  de  ce 
qu'il  devait  faire  en  ces  occasions,  il  lui  en- 
voie les  règlements  ecclésiastiques  tii-és  des 


1! 


archives  de  l'Eglise  de  Rome,  par  lesqiu-ls  il 
pouirait  apprendre  ce  qui  avait  été  décidé 
sur  celle  matière,  poui'  cliariun  ordre  et  pour 
les   dill'crents   âges.   Il   l'avertit   iK'-autuoins 
qu'il  lui  sera   libre  de  diminiKM'  leur  pé'ui- 
tence  â  proportion  de  leur  ferveur,    en  lui 
faisant  remarquer  qu'il  ne  devait  pas  les  re- 
cevoir ])ai'  l'iinposilion  des  mains,  doni  on 
se  sert  pour  faire  descendre  le  Saint-Es[)rit, 
mais  par  celle  (juc  l'on  emploie  pour  récon- 
cilier les   pénitents  et  les  rétablir  dans  la 
sainte  communion.  Il  marque  dans  le  qua- 
trième, que  la  consécration  d'uiu!  nouvelle 
église  se  faisait  par  l'aspersion  tie  l'eau  bé- 
nite ou  exorcisée  ;  et  que  lorsqu'une  église 
était  rebâtie  sur  les  anciens  fondements,  il 
n'était  pas  besoin  de  la  consacrer  de  nou- 
veau;  qu'il  sullisait  d'y  célébrer  la  sainte 
messe.  Dans  le  cinquième,  il  désigne  le  on- 
zième des  calendes  de  mai  pour  le  jour  de 
la  Pâque   suivante,  et    dit  que  l'ordre  des 
prièi'cs  do  la  messe  est  toujours  le  même, 
excepté  quelques  petites  additions  que  l'on 
faisait  aux  join-s  solennels,  pour  en  faire  une 
mémoire  particulière;   c'est-â-dire  que  l'on 
ne  changeait  rien  au  canon  de  la  messe,  si 
ce  n'est  qu'après  le  Communicantes  on  faisait 
mémoire  delà  fête  du  jour  et  des  saints  que 
l'on  y  célébrait.  Il  ajoute  qu'il  envoyait  des 
reliques  à  Profuturus,  sans  marquer  de  quel 
saint  elles  étaient.  11  défend  dans  le  sixième, 
sous  peine  d'être  chassé  de  l'Église  de  Dieu, 
de   baptiser  en  une  seule    personne  de  la 
Trinité  ,  ou  en  deux  ,  ou  en  trois  Pères,  ou 
en  trois  Fils,  ou  en  trois  Saints-Esprits,  vou- 
lant que,  selon  l'ordre  de  Jésus-Christ,  le  bap- 
tême fut  conféré  au  nom  du  Père  et  du  Fils 
et  du  Saint-Esprit.  Le  septième  porte  qu'il 
n'est  pas  douteux  que  l'Eglise  romaine  ne 
soit  le  fondement,  la  forme  et  le  principe  des 
autres  églises,  qui,  ainsi  que  tous  les  fidèles 
le  savent,  ont  tiré  d'elle  leur  origine  :  parce 
qu'encore  que  tous  les  apôtres  aient  été  choi- 
sis de  la  même  manière ,  la  prééminence  a 
néanmoins  été  accordée  à  saint  Pioire  sur 
tous,  ce  qui  l'a  fait  nommer  Céphas,  comme 
étant  le  chef  et  le  prince  de  tous  les  apôtres; 
et  qu'il  est  nécessaire  que  ce  qui  a  précédé 
dans  le  chef,  suive  dans  les  membres  ;  qu'ain- 
si l'Eglise  romaine  a  la  primauté  entre  tou- 
tes les  églises  ;  qu'on  doit  lui  communiquer 
les  causes  qui  regardent  la   personne  des 
cvcques,  et  les  affaiies  importantes  de  l'É- 
glise ;  et  que  les  ap[)cllatiiuis  de  ces  mêmes  ■ 
causes  doivent  lui  être  réservées.  Ce  dernier 


196 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


article  qui  regarde  la  primauté  do  l'Eglise 
romaine  ne  se  trouve  point  dans  plusieurs 
anciens  manuscrits,  non  plus  que  l'arlicle 
précédent  où  il  est  parlé  de  la  forme  du  bap- 
tême. Ils  finissent  la  lettre  au  cinquième 
article  ,  à  la  fin  duquel  Vigile  fait  à  l'ro- 
futurus  un  compliment  semblable  à  celui  par 
lequel  se  linisseni  ordinairement  les  lettres. 
Mais  ces  deux  articles  se  lisent  dans  la  Col- 
lection qui  porte  le  nom  d'Isidore,  et  dans 
celle  des  conciles  du  Père  Lalibi;  :  on  ne  les 
BiiD»,  M  lit  point  dans  l'édition  de  M.  Baluze. 
i.«ire  t       9.  Ce  fut  aussi  avant  la  mort  de  Silvérius 

Minl    uéïa.ra 

vcoMiiHï'.   *ï^'^  ^^  ™'  Théodebert  écrivit  à  Vigile  pour 
"*•  le  consulter  sur  lu  pénitence  que  l'on  devait 

imposer  à  celui  qui  avait  épousé  la  femme 
de  son  frère.  Modéric,  ambassadeur  du  joi, 
fut  porteur  de  cette  lettre,  et  chargé  appa- 
remment de  la  réponse.  Nous  ne  l'avons  plus, 
mais  Vigile  écrivit  en  cette  occasion  à  suint 
Césaire,  évoque  d'Arles,  de  s'informer  de  la 
qualité  du  fuit,  et  de  la  disposition  du  péni- 
tent, pour  instruire  ensuite  le  roi  du  temps  né- 
cessaire à  une  telle  pénitence.  La  raison  qu'il 
eut  de  renvoyer  cette  adaire  à  saint  Césaire, 
fut  qu'il  était  à  propos  de  commettre  aux 
évèques  qui  étaient  sur  les  lieux,  la  mesure 
de  la  pénitence  et  l'ordre  que  l'on  devait  y 
garder,  afin  que,  eu  égard  à  la  disposition 
du  pénitent,  ils  pussent  aussi  accorder  l'in- 
dulgence. Vigile  chargea  saint  Césaire  de 
prier  Théodebert  d'empêcher  de  semblables 
désordres  à  l'avenir,  et  celui  et  celle  qui  s'é- 
taient ainsi  mariés,  de  continuer  d'habiter 
ensemble.  La  lettre  est  du  3  mars,  sous  le 
consulat  de  Jean,  c'est-à-dire  de  o38. 
Ai...Jio"'iM  *0-  ^^  suivante  est  datée  du  15  des  calen- 
ptg.  321.  des  de  novembre ,  après  le  consulat  de  Ba- 
sile, c'esl-cà-dire  du  18  octobre  5-43,  environ 
quatre  ans  depuis  la  mort  de  Silvérius.  Elle 
est  adressée  à  Auxanius,  successem*  de  saint 
Césaire  dans  la  chaire  d'Arles.  Cet  évêque', 
aussitôt  api'ès  son  ordination,  avait  envoyé 
à  Home  le  prêtre  Jean  et  le  diacre  Térède 
pour  en  donner  avis  au  pape  Vigile  ,  à  qui  il 
demandait  en  même -temps  le  pallium.  Le 
Pape,  quoique  disposé  à  lui  accorder  volon- 
tiers sa  demande,  voulut  auparavant  avoir  le 
consentement  de  l'Empereur,  pour  lui  mar- 
quer le  respect  qu'il  croyait  dii  à  sa  foi  et  à 
sa  piété.  Il  fait  dans  cette  lettre  l'éloge  de 
saint  Césaire,  invite  Auxanius  à  l'imiter  dans 
ses  vertus  et  dans  sou  attachement  aux  dé- 
crets du  Saiul-Siége.  Dix-huit  mois  après, 
ayant  reçu  les  ordres  du  roi  Childebert,  et 


obtenu  le  consentement  de  l'Empereur  par 
l'entremise  de  Bélisaire,  le  Pape  écrivit 
une  seconde  lettre  à  Auxanius,  datée  du 
11  des  calendes  de  juin,  la  quatrième  année 
après  le  consulat  de  Basile,  c'est-à-dire  le 
22  mai  oio,  par  laquelle  il  le  faisait  son  vi- 
caire dans  les  Gaules,  avec  toutes  les  préro- 
gatives attachées  à  cette  qualité  ;  l'une 
lui  donnait  pouvoir  d'examiner  et  terminer 
les  causes  des  évèques  du  royaume,  en  se 
faisant  assister  d'autres  évi^ques  en  nombre 
suflisanl,  à  condition  toutefois  de  renvoyer  au 
Saint-Siège  les  questions  de  foi  et  les  causes 
majeures,  après  les  avoir  instruites  sur  les 
lieux  ;  et  l'autre  obligeait  les  évèques  à  pren- 
dre de  lui  une  lettre  formée  lorsqu'ils  vou- 
laient sortir  du  pays.  Vigile  lui  recommande 
de  prier  pour  l'empereur  Jnstinien  ,  l'impé- 
ratrice Tliéodora  et  le  patrice  Bélisaire  ;  et 
d'employer  tous  les  moyens  qui  conviennent 
à  un  évoque  pour  entretenir  la  paix  entre 
l'Empereur  et  le  roi  Childebert.  Il  lui  accorde 
l'usage  du  pallium,  comme  il  avait  été  ac- 
cordé par  le  pape  Symmaque  à  son  prédé- 
cesseur, en  le  chargeant  de  faire  part  de  sa 
lettre  à  tous  les  évèques.  Par  une  autre  let- 
tre du  môme  jour,  le  Pape  donna  commission 
à  Auxanius  de  juger  l'atl'aire  de  Prétextât, 
en  prenant  avec  lui  un  nombre  compétent 
d'évêques.  Vigile  écrivit  en  même  temps  aux 
évèques  du  royaume  de  Childebert ,  et  à 
ceux  qui  avaient  coutume  d'être  ordonnés 
par  l'évêqne  d'Arles,  pour  les  exhorter  à  re- 
counaitre  .\uxanius  en  qualité  de  son  vicai- 
re, à  lui  obéir  et  à  prendre  de  lui  des  lettres 
formées  quand  ils  seraient  obligés  de  faire 
des  voyatres  un  peu  longs.  Il  déclare  sus- 
pens de  la  communion  de  leurs  frères  les 
évèques  qui  refuseront  d'obéir  à  celui  d'.\r- 
les,  et  de  se  trouver  aux  conciles  qu'il  aura 
indiqués,  voulant  qu'en  cas  d'inlirmité  ou 
de  quelque  autre  empêchement  légitime  ils 
envoient  de  leur  part  un  prêtre  ou  un  diacre. 
H.  Auxanius  n'ayant  occupé  que  très-peii 
de  temps  le  siège  épiscopal  d'.Arles,  on  élut  Jam^'îI 
pour  lui  succéder  Aurélien,  à  qui  le  pape  Vi-  "*' 
gile  accorda  le  même  pouvoir  qu'à  son  pré- 
di'cesseur,  et  aux  mêmes  conditions,  sur  le 
témoignage  avantageux  du  roi  Childebert, 
et  du  consentement  de  l'empereur  Jnstinien: 
c'est  ce  que  l'on  voit  par  les  lettres  qu'il  lui  en 
éciivit  et  aux  évèques  des  Gaules,  en  date  du 
dixième  des calendesdeseptembre,la  cinquiè- 
me année  après  le  consulnt  de  Basile,  c'est-à- 
dire  le  23  aoùl  de  l'an  5-iG. 


LfltrcS  / 
rtlltn 


CHAPITRE  XVI.  —  AHATOll,  POÈTE  CimÉTIEN. 


[VI*  SIÈCLE.] 

12.  Le  pape  Vigile  écrivit  beaucoup  d'au- 
tres Icltros,  et  quelques  trailt's  qui  out  rap- 
port h  l'Iiisldire  du  cluquièuie  cducilo  géné- 
ral, et  qui  en  font  méiue  partie;  ainsi  nous 
remettons  h  en  parler  en  cet  endroit.  Quoi- 
qu'il eût  proposé  la  tenue  de  ce  concile  pour 
terminer  les  difliculh's  i[u'il  y  avait  enlrelcs 
évèqucs  au  sujet  des  Trais-C/nipili-cs,  et  qu'il 
se  trouvât  alors  à  Constantinople ,  il  refusa 
d'assister  à  ce  concile  en  personne;  mais  il 


197 

lie  laissa  pas  de  se  conformer  c^  ce  qui  y  fut 
di'cidé  touchant  la  condaumalioa  di-s  Tniis- 
Cluipitixs.  Après  quoi  il  partit  d(!  Constanti- 
nople pour  l'evcnir  h.  llotuo,  et  mourut  de  la 
pierre  k  Syracuse,  en  Sicile,  le  10  de  jan- 
vier S33,  ayant  tenu  le  Saint-Siège  pen- 
dant seize  ans  et  demi ,  ;'i  compter  depuis 
la  mort  de  Silvérius.  [  Les  lettres  et  décrets 
de  Vigile  se  trouvent  au  tome  LXIX  de  la  Pa- 
trolûfjle  latine,  col.  9  et  suiv.] 


CHAPITRE  XVI. 
Arator,  poète  chrétien- 

[Écrivain  latin,  551.) 


Idld, 


1.  Pendant  que  Vigile  était  à  Rome,  le  6 
avril  344,  Arator  lui  présenta  dans  le  sanc- 
tuaire de  l'Eglise  du  Vatican,  son  poème 
des  Actes  des  apôtres,  composé  en  vers  hexa- 
mètres et  divisé  en  deux  livres.  11  se  trouvait 
là  ime  grande  partie  du  clergé  de  Rome  : 
c'est  pourquoi  le  Pape  en  fd  lire  sur-le-champ 
plusieurs  endroits ,  puis  donna  le  poëme  à 
Surgentius,  primicier  des  notaires,  pour  le 
mettre  dans  les  archives  de  l'Église.  Mais 
tout  ce  qu'il  y  avait  à  Rome  de  gens  de  let- 
tres ayant  prié  Vigile  de  le  faire  réciter  pu- 
bliquement ,  il  en  ordonna  la  lecture  dans 
l'Eglise  deSaint-Pierre-aux-Liens,  où  se  ren- 
dirent plusieurs  ecclésiastiques  et  laïques, 
tant  de  la  noblesse  que  du  peuple.  Aratoi' ré- 
cita lui-même  les  vers,  à  l'imitation  des  an- 
ciens poètes,  qui  avaient  contume  de  réciter 
publiquement  leurs  vers.  Il  le  fit  en  4  jours 
dill'érents,  parce  que  les  auditeurs  y  prenaient 
tant  de  plaisir,  qu'ils  l'engageaient  souvent 
à  répéter  les  mêmes  endroits  ;  en  sorte  qu'il 
ne  put  chaque  jour  lire  que  la  moitié  d'un 
livre.  Il  avait  été  comte  des  domesliques,  ou 
capitaine  des  gardes,  et  comte  des  choses  pri- 
vées, c'est-à-dire  intendant  des  domaines 
de  l'Empereur  ;  mais  ayant  renoncé  au  mon- 
de, il  avait  embrassé  l'élat  ecclésiastique,  et 
il  était  alors  sous-diacre  de  l'Église  romaine. 
C'est  ce  qu' Arator  lui-même  témoigne  dans 
une  des  deux  épîtres  dédicatoires  en  vers 
élégiaques,  adressées  au  pape  Vigile.  Il  y  re- 
connaît aussi  qu'il  l'avait  eu  pour  maiti'e 
dans  l'étude  des  dogmes  de  l'Église.  L'autre 
épitre  dédicatoire  est  à  Florien,  abbé  de  Ro- 


man-Moutier,  dans  laquelle,  faisant  allusion 
à  son  nom,  il  dit  qu'il  avait  ileuri  dès  sa  jeu- 
nesse en  donnant  aux  vieillards  des  précep- 
tes pour  les  conduire  dans  la  voie  du  ciel. 
Fortunat  parle  de  l'ouvrage  d'Arator  dans  la 
Vie  de  saint  Martin,  et  il  en  est  aussi  parlé 
dans  le  livre  des  Ecrivains  ecclésiastiques  de 
Sigebert  de  Gemblours. 

2.  Arator,  après  avoir  publié  son  poëme 
à  Rome,  l'envoya  dans  les  Gaules  à  un  de  ses 
amis,  nommé  Parthénius,  afin  qu'il  le  rendit 
aussi  public.  Nous  avons  la  letlre  qu'il  lui 
écrivit  sur  ce  sujet  :  elle  est  en  vers  élégia- 
ques. Parthénius  est  qualifié  dans  l'inscrip- 
tion, maître  des  Offices  et  patrice.  Le  Père 
Sirmond  l'a  fait  imprimer  le  premier  sur  un 
manuscrit  de  la  Bibliothèque  de  Reims,  à  la 
suite  des  œuvres  d'Ennode  de  Pavie,  d'où 
elle  est  passée  dans  le  dixième  tome  de  la 
Bibliothèqne  des  Pèi'es.  Le  poëme  sur  les 
Actes  des  apôtres  en  rend  tellement  l'his- 
toire qu'on  ne  laisse  pas  d'y  trouver  plusieurs 
circonstances  tirées  des  autres  livres  du  Nou- 
veau Testament.  11  y  en  a  même  de  l'Ancien, 
parce  que  l'auteur  les  croyait  nécessaires 
pour  donner  plus  de  suite  à  son  ouvrage.  Il 
semble  dire  que  saint  Pierre  et  saint  Paul  ' 
ne  souffrirent  pas  le  martyre  le  même  jour 
de  la  même  année,  mais  en  deux  années  dif- 
férentes :  opinion  qui  ne  lui  est  pas  parti- 
culière, puisqu'on  la  trouve  dans  Prudence 


'  Non  eadem,  tamen  una  dies,  annique  voluto 
Tempore    sacravit    repelilain  passio  liicem, 
Arat.,  lib.  Il,  lom,  J  Bibl.  Pat.,  pag.  141. 


Ri(;pbprt.  de 
Script.  Bc''\e^, 
cap.  xxxvliit 


Se!«  écrits. 
Tom.  X  BihI. 
Pal.  [aj.  125, 
et  tom.  Poet. 
cliriJl.  Basl- 
leiC,  an.  lotir.. 


198 


mSTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


et  dans  quelques  autres  anciens.  Maisie  pape 
Gélase,  dans  sondt-cret  sur  les  livres  apocry- 
phes, rejette  ce  sentiment,  soutenant  que  ces 
deux  apôtres  '  reçurent  la  couronne  du  mar- 
tyre à  Rome  en  même  temps  et  le  même  jour. 
Forlunat  trouve  de  l'éloquence  '  et  de  l'airré- 
mcnt  dans  le  poème  d'Arator:  il  faut  bien 
que  le  clerg:é  de  Rome  et  les  gens  de  lettres 
de  celle  ville,  devant  qui  il  le  récita,  en  aient 
jugé  de  même,  puisqu'ils  l'obligèrent  de  ré- 
péter souvent  les  mêmes  endroits,  tant  ils  y 
avaient  pris  de  plaisir;  mais  aujourd'hui  que 
nous  vivons  dans  un  siècle  plus  épuré,  on  ne 
trouvera  pas  les  vers  d'Aratorassez  coulants 
ni  assez  élevés.  Le  roi  Théodorlc,  qui  l'avait 


envoyé  en  députation  auprès  d'Athalaric,  roi 
des  Gollis,  le  fil  comte  des  domestiques  pour 
reconnaître  le  succès  avec  lequel  il  s'était 
a(îT[uiffé  de  son  ministère;  et  dans  la  lettre 
qu'il  lui  écrivit',  il  dit  qu'en  cette  occasion 
Aralor  avait  fait  usage  du  torrent  de  son 
éloquence. 

[Le?  lettres  et  les  deux  livres  des  .\ctes 
de  s  apôtres  se  trouvent  dans  la  Bibliotlwque 
des  anciens  écn'vaitis ,  par  Galland,  tome  Xll. 
Mais  kl  meilleure  édition  est  celle  d'Arntzen, 
avec  des  prolégomènes  et  des  notes,  176'J, 
in-8.  Elle  est  reproduite  au  tome  LXVUl  de  la 
J'atrologie  latine,  col  45  et  suiv. 


CHAPITRE   XVII. 

Pontien,  évêquc  d'Afriqne  [540],  et  Anrélien,  évêqne  d'Arles,  écrivains  latins 
[546];  nn  anonyme,  écrivain  grec. 


L<tin  d« 

PoQticn         ft 
}'f  1,  (,  A  rour 
Ju^tiai»n. 
Tftiti.  V  Cou- 
r.l.  («ï.    SU. 


1.  L'empereur  Justinien  ayant  composé 
un  ouvrage  pour  la  condamnation  des  Trois- 
Chapitres  ,  c'est-à-dire  des  écrits  de  Théodore 
de  Mopsueste,  de  ceux  de  Théodoret  et  de  la 
lettre  d'ibas  à  Maris  persan,  l'adressa  en 
forme  d'édit  ou  de  lettre  à  toute  l'Église, 
sous  le  titre  de  Confessisn  de  foi.  Les  évo- 
ques dWfrique  le  reçurent  comme  les  au- 
tres, et  trouvèrent  que  ce  prince  n'y  ensei- 
gnait rien  de  contraire  à  la  foi.  Mais  Ponlieii, 
l'un  d'entre  eux,  ne  pouvant  se  résoudre  à 
condamner  des  personnes  qui  étaient  mortes 
dans  la  communion  de  l'Église  et  don!  il 
n'avait  pas  vu  les  écrits,  fit  sur  cela  une  ré- 
ponse à  l'Empereur  où  il  disait  qu'il  crai- 
gnait beaucoup  que  sous  prétexte  de  con- 
damner Théodore  de  Mopsueste  ,  Théodoret 
et  Ibas,  l'on  ne  fit  revivre  l'hérésie  euty- 
chéenne:  «  Si  leurs  écrits,  ajoutait-il,  étaient 
venus  jusqu'à  nous,  et  qu'il  s'y  trouvât  quel- 
que chose  coutrc  la  règle  de  la  foi,  nous 
pourrions  en  juger,  sans  condamner  princi- 
palement ceux  qui  en  sont  auteurs,  puisqu'ils 


sont  morts.  Il  en  serait  autrement  s'ils  vi- 
vaient :  nous  les  condamnerions  avec  justi- 
ce, si,  étant  repris  de  leurs  erreurs,  ils  refu- 
saient de  s'en  corriger  et  de  les  condamner. 
Mais  maintenant  à  qui  ferions-nous  signifier 
la  sentence  que  nous  porterions  contre  euxî 
Que  nous  servirait-il  d'entamer  une  guerre 
avec  des  morts  ?  11  ne  peut  nous  revenir  au- 
cune victoire  du  combat  que  nous  leur  livre- 
rions. D'ailleurs  ils  sont  présentement  juges 
par  le  véritable  Juge,  de  la  sentence  duquel 
il  n'y  a  point  d'appel.  »  Pontien  supplie  donc 
TEmperenr  de  ne  jjoint  troubler  la  paix  de  l'É- 
glise, de  crainte  qu'en  cherchant  à  faire  cpn- 
damner  ceux  qui  sont  déj;\  morts,  il  ne  fasse 
mourir  plusieurs  vivants  qui  retuseront  d'o- 
béir à  ses  ordi-es,  et  qu'il  ne  se  voie  lui-niê- 
jne  obligé  de  rendre  compte  de  sa  conduite 
à  cet  égard,  à  celui  qui  viendi-a  un  jour  ju- 
ger les  vivants  et  les  morts.  [La  lettre  de 
Pontien  se  trouve  au  tome  LX\1I  de  la  Pa- 
trologie  latine,  col.  995.] 
2.  Quelque   temps  après ,  le  bruit  se  ré- 


S.Auiil 


'  Qui  Patihts  non  diverso,  sicttt  hœretici  gar- 
riunt,  sed  hiw  lempnre,  uno  codtmque  die  gln- 
riosa  morte  cuw  Pelro  in  urbe  Roma  cnronutus 
est.  Ola?.  iii  Décret. 

'  Surtis  iiposlolicw,  qiiœ  genta  vocanlur,  etac- 
tus  fiicuiiili)  eloquio  vales  sulcavit  Aralor.  l"or- 


tun.,  lit).  I  De  Vila  S.  Kartini. 

'  Sed  lit  mérita  tua  excmpli.<i  pntius  laudabili- 
bus  (isicramtts,  jurât  repclere  pnmposam  legnlin- 
nem  ijttiim  non  eommunibus  verbis,  sed  tnrrenli 
eloquenlia'  fliimine  peregisli.  Cassiml.,  lil>.  VU! 
Variar.  episl.  li. 


[Vl°  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  XVII.  —  PONTIEN,  AUHÉL1EN,  ETC. 


lîCJ 


Tj'^tio    J'Ar- 


Tont.  VCnn- 
:ll.pag.  IGS.i 


RCgle   do 
AiirilleD. 


pandil  dans  Ips  Gaulos,  (jiin  le  pajio  AiLfilc 
avait  l'ait,  tï  l'oLuasioii  des  'J'niis-('/iiijii/irs, 
quelque  chose  contre  les  décrets  des  papes 
ses  prëdécesseiirs,  et  contre  les  quatre  con- 
ciles généraux.  Saint  Aurélien,  cvèque  d'Ar- 
les, lui  en  écrivit  ;  et  ce  pape  pour  le  délioui- 
per  lui  fil  réponse  do  ne  point  se  troubler 
ni  lui  ni  les  autres  évêques  des  Gaules,  des 
fausses  lettres  et  des  fausses  nouvelles  qu'ils 
pourraient  recevoir;  et  d'être  assurés  (ju'il 
garderait  iuviolableniont  la  foi  de  ses  Pères. 
Il  ajoutait  :  «  Quand  l'Empereur  nous  aura 
cougédiés ,  nous  vous  enverrons  une  per- 
sonne qui  vous  instruira  de  tout  C(>  qui  s'est 
passé  :  ce  que  nous  n'avons  pu  faire  encore 
tant  à  cause  de  la  rigueur  de  l'hiver  qu'à 
cause  de  l'état  où  l'Italie  est  l'éduite.  »  Il 
charge  saint  Aurélien  d'engager  le  roiChiUle- 
Lert  à  empêcher  que  les  Goths  qui  étaient  en- 
trés dans  Rome  avec  leur  roi,  ne  tissent  rien 
dans  cette  ville  au  préjudice  de  l'Église,  sons 
prétexte  qu'ils  étaient  d'une  autre  religion: 
«  Car, disait-il -,  il  est  digne  d'un  roi  catlioli- 
que  comme  le  vôtre,  de  défendre  de  tout  son 
pouvoir  la  foi  et  l'Eglise  dans  laquelle  il  a  été 
baptisé.»  La  lettre  du  Pape  est  du  29  avril 
550.  Il  avait  reçu  celle  de  saint  Aurélien  le 
14  juillet  5i'J:  nous  ne  l'avons  plus. 

3.  Ce  saint  avait,  ainsi  qu'on  l'a  déjà  ditplus 
haut,  succédé  à  Auxaniusdans  le  siège  épis- 
copal  d'Arles  en  545.  Deux  ans  après  il  fonda, 
dans  la  même  ville,  un  monastère  pour  des 
hommes,  par  les  libéralités  du  roi  Cliildebert. 
Cette  fondation,  qui  se  fit  le  quinzième  des 
calendes  de  décembre ,  la  sixième  année 
après  le  consulat  de  Basile,  c'est-à-dire,  le 
17  novembre  547  ,  fut  confirmée  parle  pape 
Vigile,  ainsi  qu'on  peut  le  voir  par  une  lettre 
de  saintGrégoire  à  Vigile,  évè(pie  d'Arles.  On 
mit  dans  l'église  du  monastère  des  reliques 
de  la  vraie  croix  de  Notre -Seigneur  Jésus- 
Chvisl,  de  la  Sainte  Vierge,  de  saint  Jean- 
Baptiste,  de  saint  Etienne,  de  saint  Pierre  et 
de  saint  Paul,  de  saint  Jean,  de  saint  Jac- 
ques, de  saint  André,  de  saint  Philippe,  de 
saint  Thomas,  de  saint  Barlhélemi,  de  saint 
Matthieu  et  de  quatre  autres  apôtres,  de  saint 
Genès,  de  saint  Symphorien,  de  saint  Bau- 
dil,  de  saint  Victor,  de  saint  Hilaire,  de  saint 
Martin  et  de  saint  Césaire.  La  Règle,  que 
saint  Aurélien  donne  aux  religieux  de  ce 


Cod.  rogular 
pnj.  01. 


Num,  H. 
1-. 


nouveau  monastère,  est  divisée  en  cincpianlc- 
six  articles,  dont  voici  les  plus  remarqua- 
bles: Celui  qui  était  reçu  dans  le  monastèi'e  Num.  s 
ne  pouvait  jilus  eu  sortir  le  reste  de  ses  jours, 
et  la  clôture  en  était  si  exacte,  qu'il  n'était 
permis  à  aucun  laïque  d'entrer  dans  la  mai- 
son, ni  dans  l'église,  mais  seulement  dans  le 
parloir.  A  l'égard  des  femmes,  soit  religieu- 
ses, soit  séculières,  il  était  défendu  absolu- 
ment de  leur  parler,  etdelcur  [jcrmeltrel'en- 
tréc  de  l'Église,  fussent-elles  prochesparcntes 
de  l'abbé,  on  des  moines.  On  donnait  à  tous 
ce  qui  leur  était  nécessaire  pour  leur  vête- 
ment et  poin-  leur  nourriture  :  ainsi  tout  ce 
que  les  religieux  recevaient  de  leurs  parents, 
ou  de  leurs  amis,  restait  au  pouvoir  de  l'ab- 
bé, qui  en  disposait  ou  en  faveur  de  Celui  à 
qtd  on  l'avait  donné,  s'il  en  avait  besoin,  ou 
pour  l'usage  de  la  communauté.  Lorsqu'on 
leur  donnait  des  habits  neufs,  ils  rendaient 
les  vieux,  que  l'on  faisait  servir  ou  à  l'usage 
de  ceux  qui  étaient  nouvellement  reçus,  ou 
à  l'usage  des  pauvres.  Pour  éviter  le  vice 
de  propriété  ,  les  cellules  des  moines  ne  fer- 
maient point  à  clef,  et  ils  n'avaient  point 
d'armoires  où  ils  pussent  enfermer  quelque 
chose.  On  ne  recevait  point  il'cnfant  qui  n'eilt 
au  moins  dix  ans,  ni  d'esclave  qu'il  n'eût  été 
aflranchi,  et  qu'il  ne  fût  muni  de  lettres  de 
son  maître.  Ceux  qui  étaient  chargés  de 
quelque  otlice  en  recevaient  les  clefs  de  des- 
sus l'autel  ou  l'Evangile,  pour  les  faire  sou- 
venir qu'ils  devaient  rendre  compte  à  Dieu 
de  leur  ministère.  Les  ornements  de  l'au- 
tel ne  devaient  point  être  de  soie,  ni  d'or, 
ni  chargés  de  pierres  précieuses.  Pendant 
les  leçons  de  Matines,  les  religieux  s'occu- 
paient de  quelque  travail  manuel,  comme  de 
faire  des  cordes  ou  des  nattes,  afin  de  s'eui- 
pécher  de  dormir.  Mais  si  c'était  un  jour  de 
dimanche  ou  de  fête,  on  ordonnait  a  celui 
qui  se  trouvait  avoir  sommeil,  de  se  lever 
pendant  que  les  autres  étaient  assis.  Il  ne  leur 
était  pas  pci-mis  de  se  parler  en  secret,  sur- 
tout la  nuit,  ni  de  parler  à  un  excommunié, 
sinon  à  celui  que  l'abbé  en  aurait  chargé. 
Si  la  faute  d'un  religieux  était  de  nature  qu'il 
fallût  le  punir  de  verges,  on  ne  pouvait  lui 
en  donner  plus  de  trente-neuf  coups,  sui- 
vant la  loi  de  Moïse.  Aucun  ne  pouvait  être 
élevé  au  sacerdoce  ou  au  diaconat,  sans  le 


5,  4!>. 


3-,  2-, 


'  Dignum  est  enim,  et  catholico  sicut  est,  régi 
conveniens,  ut  ftdem  et  Ecclesiam  in  (/«a  Deus  il- 
lum  voluit  baplizari,  omni  debeat  virlute  defen- 


dere.   Vigil.,  Epist,  ad  Anrelian.,  toru.  V   ConciL, 
pag.  558. 


200 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Msbll.  lom, 
1ADQ..1  pagi 
11». 


consentement  de  l'abbé.  S'il  s'en  trouvait 
d'assez  méritant  pour  être  élevé  à  l'épis- 
copat ,  il  devait  sortir  seul  du  monastère , 
saus  prendre  un  moine  pour  compagnon. 
On  srardait  le  silence  à  table ,  et  l'on  ne 
manquait  jamais  de  faire  la  lecture  pen- 
dant le  repas,  afin  que  l'àme  et  le  corps  re- 
çussent en  même  temps  leur  nourriture. 
Hors  le  cas  de  maladie,  il  n'était  pas  permis 
à  l'abbé  de  man^jer  ailleurs  qu'au  réfectoire 
commun.  On  n'y  servait  jamais  de  viandes; 
mais  on  accordait  aux  infirmes  de  la  volaille, 
el  a  la  communauté  du  poisson  en  coitains 
jouis  de  fêtes,  ou  quand  l'abbé  le  trouvait  :i 
propos.  La  Règle  ne  prescrit  aucuns  jeunes 
depuis  la  Pentecôte  jusqu'au  1"  septembre, 
les  laissant  à  la  disposition  de  l'abbé.  Depuis 
ce  jour  jusqu'au  1"  novembre,  les  moines 
jeûnaient  trois  fois  la  semaine ,  le  lundi ,  le 
mercredi  et  le  vendredi.  Depuis  le  i"  no- 
vembre jusqu'à  Noël,  ils  jeûnaient  tous  les 
jours,  excepté  le  samedi  et  le  dimancbe  :  ce 
qui  s'observait  aussi  depuis  l'Épipbanie  jus- 
qu'à Pâques,  à  l'exception  des  grandes  fê- 
tes, du  samedi  et  du  dimanche.  Car  c'était 
l'usage,  non-seuleînent  en  Orient,  mais  aussi 
parmi  les  Gotbs,  de  rompre  le  jeûne  le  sa- 
medi et  le  dimanche ,  à  cause  de  la  sainte 
communion  que  l'on  recevait  en  ces  deux 
jours.  Depuis  Pâques  jusqu'à  la  Peutecùte  on 
Num.înri-j.  ne  jeûnait  que  le  vendredi.  Tous  les  moines 
apprenaient  à  lire  ,  et  lisaient  depuis  Prime 
jusqu'à  Tierce.  On  voit,  par  tous  ses  règle- 
ments, que  saint  AurcHicn  avait  devant  les 
yeux  la  Règle  de  saint  Benoit  et  de  saint 
7.  Césaire,  lorsqu'il  composa  la  sienne.  Cela 
parait  encore  plus  par  les  articles  où  il  dé- 
fend de  recevoir  et  d'écrire  des  lettres,  sans 
la  permission  de  l'abbé;  d'avoir  auprès  de 
:  ?.  10,  sou  Ut  de  quoi  manger  ou  boire  ;  de  jurer, 
de  donner  des  malédictions  à  iiersonne;  de 
mentir,  de  se  coucher  sur  sa  colère,  de  frap- 
per quelqu'un.  C'est  encore  d'après  la  Règle 
de  saint  Benoit,  qu'il  prescrit  l'oflice  de  Com- 
plies  inusité  auparavant  :  a  l'égard  des  au- 
tres oUlces,  il  a  suivi  un  ordre  tout  diÛ'érent 
de  saint  Benoit.  Il  met  beaucoup  plus  de 
psaumes.  Il  règle  la  longueur  des  leçons 
pour  chaque  nocturne  ,  sur  la  ditférence  du 
caractère  dont  les  Lecfionnaircs élawril  écrits, 
et  sur  la  dillérence  de  la  longueur  ou  de  la  Jjrié- 
velé  des  nuits.  S'il  arrivait  que  quelqu'un  des 
frères  mourût,  on  veillait  tour  à  tour  auprès 
du  corps  pendant  la  nuit  pour  l'aire  des  priè- 
res ;  cl  avant  del'entci'rer,  on  demandait  àl'é- 


Num. 
11,12,13, 


vêqueenquel  lieu  il  fallait  enterrer  le  mort' 
Si  l'évêque  refusait  de  le  dire,  alors  on  invi- 
tait des  clercs ,  de  quelque  église  que  ce  fût, 
pour  faire  les  obsèques,  et  on  leur  faisait 
quelques  petits  présents.  Saint  Aurélien  finit 
sa  Règle  par  ces  paroles  qui  marquent  bien 
son  humilité  :  Aurélien  pécheur  j'ai  institué 
cette  Règle  au  nom  de  Jésus-Christ.  A  la  suite 
de  l'Acte  de  fondalion  de  son  monastère,  on 
lit  une  partie  des  diptyques  ou  tables  sacrées 
qui  étaient  en  usase  longtemps  après  la 
mort  de  saint  Aurélien.  On  y  fait  mention 
des  fidèles  morts  el  vivants,  et  dans  la  mé- 
moire des  saints  on  fait  celle  des  martyrs  et 
des  confesseurs  ,  dont  il  y  avait  des  reliques 
dans  l'église  du  monastère. 

4.  Saint  Aurélien  donna  aussi  une  Règle 
à  des  religieuses.  Elle  est  divisée  en  qua- 
rante articles,  et  adressée  aux  vénérables 
sœurs  du  monastère  de  Sainte- Marie,  établi 
dans  la  ville  d'Arles.  Le  prologue  et  tous  les 
règlements  sont  les  mêmes,  et  presqpie  mot 
à  mot,  que  dans  la  Règle  pour  les  moines,  à 
l'exception  de  certains  endroits  qui  ne  con- 
venaient pas  à  des  filles,  tel  que  celui  qui 
parle  de  l'ordination.  On  a  joint  à  cette  Rè- 
gle une  lettre  de  Jean ,  évêque  d'Arles,  vers 
la  fin  du  vil'  siècle  ,  où  après  avoir  reconnu 
que  cette  Règle  a  pourvu  sulfisamment  à  ce 
qui  regarde  la  quantité  et  la  qualité  des  ali- 
ments et  des  habits,  il  défend  à  ces  filles  de 
boire  etde  manger,  soitavec  des  hommes,  soit 
avec  des  femmes  religieuses  ou  laïques,  pa- 
rentes ou  étrangères  :  en  leur  accordant 
toutefois  de  leur  ofliir  quelques  rafraîchisse- 
ments par  oIBce  de  charité.  Les  deux  Règles 
de  saint  Aurélien  se  trouvent  dans  le  Code 
dressé  autrefois  par  saint  Benoit  d'.\nianes, 
et  donné  au  public  par  Holsténius,  et  dans 
les  Annales  du  Père  le  Cointe  vers  l'an  348. 

o.  Dom  Ruinart  nous  a  donné,  d'après 
Fréhérus  et  Duchesne  ,  une  lettre  de  saint 
Aurélien  au  roi  Théodebert  :  ce  n'est  qu'un 
compliment  à  ce  prince  sur  ses  belles  quali- 
tés, en  particulier  sur  son  affabilité. 

6.  Au  mois  d'octobre  de  l'an  SAO,  saint 
Aurélien  assista  au  cinquième  concile  d'Or- 
léans ,  où  il  souscrivit  après  saint  Sacerdos 
de  Lyon  qui  y  présida.  Dans  quelques  ma- 
nuscrits la  souscription  de  saint  .\urélien 
est  avant  celle  de  saint  Sacerdos  :  ce  qui 
prouverait  qu'il  aurait  présidé  à  ce  concile. 
Suivant  l'inscription  que  l'on  trouva  sur  son 
tombeau  en  1308,  dans  la  chapelle  de  Saint- 
Nizier  à  Lyou ,  il  mourut  dans  cette  ville  le 


les.  IbiH.  j»s. 
39,  ptrl.  i. 


ibia.  i.»?.i-, 


MiDI  Auréllpn 
ft  Tb*oHfbcrl. 

1d         A[>|><0i1, 

G'fg.  Ti.  on, 


Il    «J-IHA 

eoDCilr  d  Or- 
letD».  Tom .  V 
Cnncil.  pa^. 
390  Sa  moil 
on  651. 


HoIUikI.    id 


CHAPITRE  XXm.  —  SAINT  VUTÎNTIOLE,  LÉON,  ETC. 


[Vl"  SIÈCLE.] 

ii»m  10  iiinii,  seizi^mf'  des  calendes  de  juillet ,  la  onzit^mo 
année  après  le  consulat  de  Justin,  c'cst-iï- 
dire  le  seizième  jour  de  juin 352;  car  Juslin- 
le-Jeunefut  consul  seul  on  ."liO.  .Villeursqu'j'i 
Lyon,  on  couiptail  ilepuis  le  consulat  de  Ba- 
sile qui  fut  consnl  ^ul  en  oil ,  et  le  dernier 
de  tous  ceux  qui  se  trouvent  dans  les  Fasles 
ro7nains. 

[Les  ouvrages  qui  nous  restent  d'Aiirélien 
sont  reproduits  aux  tome  LW'III  de  la  Pa- 
trologie  latine,  col.  3ii3  et  sniw,  d'après  la 
Co'/ec^f'oH  d"lIolsl(''ni  us.] 
onvm-da  7.  [Dans  le  tomo  II  du  Spicilegium  roma- 
niim,  pag.  1-28,  .\ng.  Maï  a  publié,  en  grec  et 
en  latin  quatre  fiagments,  historiques  qui  se 
rapportent  aux  règnes  de  Julien  ,  d'.\rcade  , 
de  Théodose  et  de  Justinien  de  ."{Gi  <à  365. 
Ces  extraits  historiques  ont  été  trouvés  par 


201 


le  Cardinal  sur  un  codex  palimpseste  de 
la  hibliotlièque  du  couvent  des  hasiliens  de 
Giotto-Ferrata.  L'auteur  parait  avoir  vécu 
sous  Justinien  qu'il  appelle  plusieurs  fuis  notre 
maître  ;  il  a  servi  de  guide,  ou  plutôt  a  été 
souvent  copié  par  Jean  Malalas  ,  dont  l'histoi- 
re se  trouve  dans  les  Historiens  byzantins.  Ces 
fragments  sont  précieux  en  ce  qu'ils  contien- 
nent plusieurs  faits  nouveaux,  rectilicnt  plu- 
sieurs autres  historiens  et  montrent  la  sour- 
ce où  ceux-ci  ont  puisé.  La  première  ligne 
donne  un  nouveau  témoignage  aux  miracles 
arrivés  loi-s  de  la  reconstruction  du  temple  : 
(I  ces  prodiges  ayant  été  annoncés  à  l'empe- 
reur Julien,  il  cessa  d'en  ordonner  la  réédi- 
lication.  »  Ces  fragments  sont  reproduits  au 
tome  LXXXV,  de  la  Patrologie  grecque-latine, 
col.  1806-1824.] 


CHAPITRE  XVIII. 

Saint  Viventiole,  évêqne  de  Lyon  [540]  ;  Léon,  archevêque  de  Sens  ;  Tro- 

janns,  évêqne  de  Xaintes;  saint   Nioétins,  évêqne  de  Trêves. 

[vers  l'an  566],  et  Mappinins,  évêqne  de  Reims  [550]. 

[Écrivains  latins.] 


1.  Nous  avons  déjà  parlé  plusieurs  fois  de 
saint  Yiveutiole,  soit  à  l'occasion  des  con- 
ciles où  il  a  assisté  ,  soit  en  parlant  du  mo- 
nastère de  Condat  ou  Condatiscon ,  où  il 
passa  une  grande  partie  de  sa  vie.  Son  savoir 
et  ses  vertus  le  firent  élever  au  sacerdoce  , 
et  ensuite  à  l'épiscopat.  Il  semble  que  saint 
Avit  de  Vienne  pressentit  qu'il  y  parviendrait 
un  jour,  lorsqu'en  le  remerciant  d'une  chai- 
se ,  dont  il  lui  avait  fait  présent,  il  lui  sou- 
haita en  i-econnaissance  un  siège  épiscopal. 
Ce  fut  sur  celui  de  Lyon  qu'on  le  plaça.  Il  y 
était  déjà  au  mois  de  mai  de  l'an  317,  puis- 
qu'il assista  en  qualité  d'évêque  de  Lyon  à 
la  dédicace  de  l'Église  d'Agaune ,  et  qu'il  y 
prononça  un  discours,  dont  il  ue  nous  reste 


plus  qu'un  fragment.  Au  mois  de  septembre 
de  la  même  année  ,  il  se  trouva  au  concile 
d'Épaone.  '  Il  en  tint  lui-même  un  à  Lyon 
avec  dix  des  évèqiies  de  cette  assemblée , 
qui  l'avaient  suivi.  Le  détail  de  ses  autres 
actions  n'est  pas  connu ,  non  plus  que  l'an- 
née, ni  le  jour  de  sa  mort.  Nous  avons  cinq 
lettres  de  saint  Avit  de  Vienne  qui  lui  sont 
adressées ,  mais  aucune  de  ses  réponses.  Il 
y  a  seulement  parmi  les  lettres  de  saint  Avit 
im  billet  de  saint  Viventiole  ,  par  lequel  il 
l'invite  à  la  solennité  de  saint  Just  '.  Ago- 
bard  ' ,  l'un  de  ses  successeurs ,  témoigne 
que  l'on  voyait  encore  de  son  temps,  c'est- 
à-dire  dans  le  ix'  siècle,  quelques-uns  de 
ses  écrits  qui  étaient  des  preuves  de  sa  doc- 


ATir.,Ep!.|. 
17,52,  51t,t>0, 
C4. 


Eplsl.  33. 


'  11  adressa  aux  é  vêques  de  la  province  de  Lyon  une 
lettre  assez  courte  pour  les  couvoquerau  concile  d'É- 
paone. On  trouve  cette  lettre  au  tome  LXVlIde  la 
Patrologie  latine,  col.  993.  (Elle  a  (-Xé  communi- 
quée d'après  uu  manuscrit  de  Toulouse. (l'e'i/ifeiir). 

*  YivenUolus  Ecclesiœ  Lugdunensis  episcopus, 


cujus  doctrinœ  fuerit,  non  solum  ipsius,  sed  et 
aliorum  de  eoscripta  testantur.  Agob.  DeJudaïc. 
siiperst.,  num.  i. 

3  Ou  le  trouve  dans  Galland,  tome  X,  et  dans  la 
Patrologie  latine,  tome  LIX,  parmi  les  QEuvresde 
saint  .'Vvit,  col.  272.  (L'éditeur.) 


202 


HISTOIRE  GÉNltllALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Léon,  areli>< 
S«as. 


Tom.  IV 
CoDcil.,  Me. 
17(9. 


ToiD.  V,[ac. 
303. 


Uld.,    Jif. 


Fn  Apprnd. 
Oftpr  (irrifor. 
Turou.      ]3g. 


Tom   V  Corj- 


triue  et  de  son  érudition.  Il  ajoute,  que  di- 
vers écrivains  en  avaient  fait  l'éloge,  mais  il 
ne  dit  point  en  quoi  ces  écrils  consistaient. 
2.  Léon,  archevêque  de  Sens,  n'ayant  pu 
se  trouver  au  second  concile  d'Orléans  qui  se 
tint  au  mois  de  juin  de  l'an  333,  y  députa  de 
sa  part  le  prêtre  Orbalus.  Mais  il  assista  au 
troisième,  qui  fut  tenu  dans  le  mois  de  mai 
de  l'an  538.  Il  y  en  eut  un  quatrième  dans  la 
même  ville  l'an  o-41.  Léon  ne  put  s'y  rendre, 
parce  qu'il  était  mal  alors  avec  le  roi  Cliilde- 
bert.  Ce  prince,  sollicité  par  le  peuple  de  Mc- 
Imi  d'y  érif^cr  un  évèché,  et  bien  aise  lui- 
même  de  distraire  cette  ville  du  diocèse  de 
Sens,  parce  qu'elle  était  de  son  royaume, 
écrivit  à  Léon  pour  lui  faire  part  de  la  re- 
quête des  habitants  de  Melun.  Léon  répon- 
dit à  ce  prince  avec  respect,  mais  avec  fer- 
meté, qu'il  ne  lui  convenait  pas  de  consentir 
au  démembrement  de  son  diocèse;  que  si 
ces  peuples  le  demandaient,  on  devait  les 
regarder  plutôt  comme  des  déserteurs  que 
comme  des  fidèles  ;  qu'il  était  du  devoir  d'un 
prince  de  ne  point  écouter  des  demandes  qui 
tendaient  ii  jeter  le  trouble  dans  l'Ë^dise,  et 
à  y  causer  des  scandales;  que  s'ils  alléguaient 
pour  prétexte  de  l'érection  de  ce  nouvel 
évêché,  qu'il  ne  faisait  pas  exactement  la  vi- 
site de  l'Église  de  Melun,  ou  qu'il  n'y  en- 
voyait personne  de  sa  part ,  ils  devaient 
savoir  qu'il  n'y  avait  point  en  cela  de  sa 
faute,  parce  que  les  chemins  lui  en  étaient 
fermés  de  tous  côtés;  que,  sans  cela,  il  ne 
manquerait  pas,  qnoiqu'âgé  et  infirme,  de 
faire  pour  l'Église  de  Melun  ce  que  les  saints 
canoiis  exigeaient  de  lui.  Il  avertit  Chil- 
deberl  que  si,  contre  les  canons,  queUpies 
évoques  entreprennent  d'établir  sans  son 
consentement  un  évéqne  à  Melun,  il  en  por- 
tera ses  [ilainles  au  Pape  ou  au  concile,  et 
qu'il  se  sépare;a  de  communion,  tant  d'avec 
ceux  qiii  auront  ordonné,  que  d'avec  celui 
qui  aura  été  ordonné.  Cette  lettre  se  trouve 
dans  le  Recueil  des  conciles  du  Père  Sirmoud , 
dans  la  Gaule  chrétienne  de  messieurs  de 
Sainte-Marthe ,  dans  l'Appendice  des  œuvres 
de  saint  Grégoire  de  Tours,  et  ailleurs.  [On  la 
trouve  dans  Galland,  tome  Xll,  pag.  30,  avec 
une  notice  sur  Léon.  Le  tout  est  reproduit 
au  tome  LXVllI  de  la  Pulnilogie  latine,  col. 
10  et  seq.]    Léon  était  mort  dès  l'an  549, 

•  Magna:  virlutis  fuit  bcalns    Trujanus  anlis- 
tes.  (îrcg.  Turou.  !ib.  De  Gloria  confessorum,  cap. 

LIX. 


'  Slatutum  novcris  ul  quicumque  se  bapliza-       V  Concil.,  pag.  378, 


puisqu'en  cette  année  Constitut ,  évêque  de 
Sens,  assista  au  cinquième  concile  d'Orléans. 

3.  Trojanus  ou  Tropliianus ,  évêque  de 
Xainles,  différent  d'un  évêque  dumèmenom 
qui  gouvernait  cette  Église  sous  Clovis  eu 
508 ,  nous  est  connu  par  l'éloge  que  saint 
Grégoire  de  Tours  '  fait  de  ses  vertus,  et  par 
une  lettre  qu'il  écrivit  à  Eumérius,  évêque 
de  Nantes,  qui  assista  au  (jualrième  concile 
d'Orléans  en  341.  Eumérius  lui  envoya  quel- 
ques diacres  de  son  Eglise  chargés  d'une 
lettre,  dans  laquelle  il  le  consultait  sur  ce 
que  l'on  devait  l'aiie  à  réf;ard  d'un  enfant  qui 
ne  se  souvenait  point  d'avoir  été  baptisé, 
mais  seulement  d'avoir  eu  la  tête  enveloppée 
d'un  linge,  comme  on  a  coutume  d'envelop- 
per celle  des  malades,  lorsqu'ils  reviennent 
à  la  santé,  de  peur  que  le  froid  ne  leur  occa- 
sionne une  rechute.  Trojanus  répondit ,  que 
si  ce  jeune  homme'  ou  tout  autre  que  lui  ne 
se  souvenait  point  d'avoir  été  baptisé,  il  de- 
vait l'être  sans  aucun  délai,  pourvu  toute 
fois  qu'on  ne  put  prouver  par  aucun  autre  té- 
moii:nage  qu'il  eût  reçu  le  baptême.  [La  let- 
tre de  Tiojanus  se  trouve  au  tome  LXVII  de 
la  l'atrolofjie  lutine,  col.  '.103.] 

4.  Saint  Grégoire  de  Tours  a  fait  aussi 
l'éloge  de  saint  Nicétius.  11  raconte  qu'il  vint 
au  monde  avec  un  cercle  de  cheveux  autour 
de  la  tête,  d'oii  l'on  jugea  dès  lors  qu'il  était 
destiné  à  la  cléricaturc.  Ses  parents  le  mirent 
fort  jeune  dans  un  monastère  situé  dans  les 
étals  du  roiThierri,  pour  y  être  instruit  dans 
les  lettres  et  dans  la  piété.  Ses  progrès  daus 
l'une  et  dans  les  autres  le  tirent  choisir  pour 
remplacer  l'abbé  qui  avait  pris  soin  de  son 
éducation.  On  ne  sait  pas  le  nom  de  ce  mo- 
nastère. Mais  ce  qui  l'ait  juger  qu'il  était  dans 
le  royaume  de  Thierri,  c'est  que  ce  prince 
avait  pour  Nicétius  une  vénération  parti- 
culière. En  327,  il  le  fit  ordonner  évê(|ue  de 
Trêves.  ClotaircI"  qui  avait  succédé  àThéo- 
debcri,  lils  de  Thierri,  exila  le  saint  évêque, 
qui  ne  revint  dans  son  église  que  sous  le  rè- 
gne de  Sigebcrt,  qui  avait  succédé  a  une 
partie  des  étals  de  son  père.  Saint  Nicétius 
assista,  en  333,  au  premier  concile  de  Clei"- 
monl,  et,  en  349,  à  un  autre  concile  qui  se  tint 
dans  la  même  ville.  11  s'était  trouvé  la  même 
année  au  cinquième  concile  d'Orléans  ;  et 
deux  ans  après,  c'est-à-dire  en  331,  il  fut 

tum  fuUsc  non  rccolil,  nec  ab  alia  persona  id 
facliim  fuisse  probatur,  baplinnium  absiiue  ulla 
dilalioue  pevcipiat.  Trojaii.  fpi.s.'.  ad  Eiinicr.,  tom. 


cil.       ULU, 


Tiojipnt  é- 

te..  S«  lt't<r>. 
Tom.  V  Cnn. 
cil.,  |>i(.  S7«. 


S>lDt  Me<- 

il  T'*»'-. 

Gr*«.   Toron. 
Vit..  Hd. 

uii.  ZTII. 


To  ti.  IV 
Cnoc  !.  pi|,'. 
tviî,  et  loin. 
V,  |X|t.  891, 
«Ot  el  >l  • 


CITAPITÏÏE  XVni.  —  SAINT  VIVRNTIOLE,  LÉON,  ETC.  203 

pour  leurs  reliques  nn  ni  frrnnd  respect  qu'ils 


)odn«  ntt«    , 
V   Coo- 

.  >3;. 


[VI*  SIKCLE.] 

présent  an  second  de  Paris,  où  l'on  examina 
l'allaire  de  SalFarac,  évoque  de  cette  ville. 
Il  en  convoqua  lui-inèuic  un  dans  la  ville  do 
'J'oul  au  sujet  de  (]uelqucs  insidles  (]u'il  avait 
reencs  île  certaines  personnes  contre  qui  il 
avait  prononcé  une  sentence  d'excommuni- 
cation pour  avoir  contracté  des  mariages  in- 
cestueux. Il  fit  aussi  paraître  son  zèle  contre 
les  erreurs  des  ariens  et  des  eutycliéens. 

3.  Nous  avons  de  lui  deux  lettres  '  sur  ce 
sujet,  dont  la  première  est  adressée  «  Clodo- 
sinde,  princesse  catholique,  et  dont  le  mari 
nommé  Alboin,  roi  des  Lombards,  était  in- 
fecté de  l'arianisme.  Ce  prince  s'était  fait  une 
grande  réputation  de  valeur  :  mais  il  s'in- 
quiétait peu  du  salut  de  son  âme  ,  l'ecevant 
tous  ceux  qui  étaient  capables  de  l'en  éloi- 
gner et  de  le  conduire  en  enfer,  c'est-à-dire, 
les  ariens  à  qui  il  ajoutait  foi.  Saint  Nicétius 
combat  leurs  erreurs  dans  sa  lettre,  montrant 
qu'il  n'y  a  qu'un  Dieu  en  trois  personnes  ^  ; 
que  c'est  pour  cela  que  Jésus-Christ  a  ordon- 
né de  baptiser  au  nom,  et  non  pas  aux  noms 
du  Père,  du  Fils  et  du  Saint-Esprit,  moulrant 
qu'il  n'y  a  qu'un  Dieu  et  non  pas  trois,  et  que 
le  Fils  est  Dieu  comme  le  Père.  Comme  les 
Goths  étaient  dans  les  mêmes  sentiments 
que  les  ariens,  il  les  combat  par  eux-mêmes, 
et  dit,  que  leur  conduite  ne  se  soutient  pas;  * 
puisque  d'un  côté  ils  ont  en  vénération  les 
douze  disciples  de  Jésus-Christ,  qii'ils  ont 


ne  font  [)oint  de  difliculté  de  les  enlever  fur- 
tivement, et  que  de  l'autre  ils  lâchent  d'a- 
néantir la  foi  (pie  ces  disciples  ont  prôchée, 
et  qu'ils  refusent  d'entier  dans  les  églises 
où  l'on  rend  un  culte  ii  leurs  ossements;  ou 
que  s'ils  y  entrent,  ce  n'est  qu'en  secret.  Il 
propose  un  second  argument  qui  était  enco- 
re plus  à  la  portée  de  ces  barbares,  en  le  ti- 
rant des  miracles  qui  se  faisaient  dans  les 
églises  des  catholiques,  au  lieu  qu'il  ne  s'en 
opinait  point  dans  celles  des  ariens.  «  Que 
le  roi  Alboin  les  envoie,  dit-il,  à  l'Eglise  de 
Saint-Martin  dont  on  fait  la  fête  le  11  no- 
vembre ;  s'ils  osent  y  entrer,  ils  y  verront 
encore  aujourd'hui  avec  nous  les  aveugles 
recouvrer  la  vue,  les  sourds  l'ouïe,  les  muets 
la  parole,  les  lépreux  et  tous  autres  malades 
la  santé.  I)  Il  les  renvoie  encore  €i  l'Eglise  de 
Saint-Germnin  d'Auxerre,  à  celles  de  Saint- 
Hilaire  et  de  Saint-Loup,  où  il  se  faisait 
journellement  tant  de  miracles,  qu'il  ne  pou- 
vait les  rapporter  tous,  Il  marque  en  parti- 
culier que  ceux  que  les  démons  possédaient 
et  tourmentaient,  en  les  tenant  suspendus 
en  l'air,  étaient  délivi'és,  et  confessaient  la 
sainteté  de  ces  évèques.  «  Opèrent-ils  les  mê- 
mes merveilles  dans  les  églises  des  ariens  ? 
Non,  parce  qu'ils  ne  permettent  pas  eux-mê- 
mes que  Dieu  et  ses  saints  y  habitent  :  un 
démon  n'en  exorcise  pas  un  autre.  Que  di- 


'  Les  lettres  et  les  opuscules  de  saint  Nicétius 
ont  été  recueillis  p.ir  Gallaud,  tome  XII,  pag.  7G9, 
avec  une  notice  sur  le  saint  évèque.Le  tout  est  repro- 
duit au  tome  LXVIII  de  la  Patrologie  latine.col.  361 
et  seq.  (L'édUeur.) 

'  jYec  dubites  très  in  personis,  nain  unus  in 
Trinilate  agnoscilur.  Et  ideo  ad  discipuloi  suos 
dixit  :  Ite ,  baptizate  ia  nomine  Patris,  et  l'ilii,  et 
Sptriius  Sancti  :  iti  nomine  dixit,  non  in  nomini- 
bus,  quin  imam  Deitatem  dixit  non  très.  Nicet., 
Epist.  ad  Clodosind.,  tom.  V  Concil.,  pag.  S'M. 

'  Quid  nos  ire  pcr  singula  necesse  est  ?  Ad  duo- 
decim  discipidos  quos  habuit,  veniamus,  quia  ipsi 
Gothi  hodie  ipsis  venerationem  impendunt,  et  re- 
liquias  eoritm  furtim  toUunt  :  sed  nihil  ibi  habent, 
quia  /idem  eorum  annullare prœsiimutil.  Quidest 
quod  in basilicis eorum  corpora  ipsoriim  hodie  ve- 
nerantur,  non  ingrediuntur  ?  Quid  est  quod  nihil 
ibidem  pra'sumereaudent,nisifurtive....Uic  siju- 
bel  addomiiiuni  Murtinum  per  festivitatemsuam, 
quam  undecima  die  facit  november,  ipsos  mit- 
lat  :  et  ibisi  audent  aliquid prœsumant,  tibi  cœcos 
hodie  illuminariconspicimus,  ubi  surdos  audilum, 
ctmutos  sanilatem  recipere.  Nam  quid  dicam  de 
leprnsis,  aut  de aliis  quam  plurimis.  qui  quanta- 
cumque  debilitute  percussi  sunt,  ibidem  per  sin- 
gulos  annos  alii  et  alii  sanantiir  ?  Fartasse  di- 


cam, confmgunt  vel  cœcos,  qui  cœci  a  nativitate 
esse  videntur.  Quid  dicam,  cum  inde  illiiminatos 
conspicimus,  et  ad  propria,  Deo  niiseranle,  sanos 
reverti  videmus?  Xum  quid  dicam  adhuc  de  do- 
mino Germano,  Hilario  vel  Lupo  episcopis?  Ubi 
tanta  mirabilia  hodie  apparent,  quantum  nec  di- 
cere  verbis  valeo  :  ubi  tributnnles,  id  est,  dœmo- 
nia  habentes,  in  aéra  suspensi  torquentur.et  do- 
minos quos  dixi  esse'confitentur?  Auniquid  in 
ecclesiis  eorum  sic  faciunl  ?  Kon  faciunt,  quia 
Deu-m  et  dominos  sanctos  ibi  habitare  non  sen- 
tiunl,  dœmon  dœmonem  non  exorcizat...  Quid  de 
domino  Remigio  et  domino  Hedardo  episcopis. 
quos  tu,  credo,  vidisti?  Non  possumus  lunla  ex- 
ponere,  quant  i  mirabilia  per  illos  Deum  videmus 
facere.  .iudisti  ab  avia  tua  domina  bonœ  memo- 
rie  Clodhilde,  qualiter  in  Franciam  venerit,  quo- 
modo  dominum  Chlodoveumad legem  catholicam 
adduxeril;  et  cum  esset  Itomo  astutissimus,  noluit 
acquiescere,  antequam  vera  agnoscerel.  Cum  ista 
quœ  supra  dixi,  probata  cognovit,  humilis  ad  do- 
mini  Martini  limina  cecidit,  et  baptizari  se  sine 
mora  permisit.  Qui  baptiznlus  quinta  in  hœre- 
licos,  .ilaricum  vel  Gundobaldum  reges,  fecerit, 
audisli;  qualia  bona  ipse  vel  filii  ejus  in  sœculo 
possederunt,  non  ignoralis.  Tom.  V  Concil.,  pag. 
835. 


204 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Letlro  de 
S.  Niciliot  i 
l'emi-erêuf 

JuïtlDICQ. 

Ti  m.  V  Com. 
Cil.  le;.  83:>. 


rai-je  de  saint  Rémi  et  de  saint  Médard  que 
vous  avez  vus,  comme  je  crois  ?  Il  n'est  pas 
possible  de  raconter  tous  les  prodiges  que 
Dieu  opère  par  eux  à  nos  yeux.  Vous  avez 
ouï  dire  à  votre  aïeule  Clotilde,  comme  elle 
vint  en  France  et  de  quelle  manière  elle 
convertit  le  roi  Clovis  à  la  religion  catholi- 
que. Comme  il  était  très-habile,  il  ne  vou- 
lut point  se  rendre  qu'il  ne  connut  la  vérité. 
Mais  ajant  été  témoin  des  miracles  dont  nous 
venons  déparier,  il  se  prosterna  humblement 
à  la  porte  de  l'Église  de  Saint-Martin  et  se 
fit  baptiser  sans  délai.  Vous  n'ignorez  pas 
les  avantages  qu'il  eut  depuis  son  baptême 
contre  les  rois  Alaric  et  Gondébaud  ,  héré- 
tiques; et  quels  biens  il  posséda  en  ce  mon- 
de, lui  et  ses  enfants,  n  Saint  Nicétius  con- 
jure Clodosinde  de  lire  cette  lettre  au  roi, 
son  mari,  et  de  travailler  de  tout  son  pou- 
voir à  sa  conversion,  en  la  faisant  souvenir 
<le  ce  que  dit  saint  Paul,  que  l'homme  infi- 
dèle recevra  le  salut  par  la  femme  fidèle. 

6.  Il  nous  reste  une  autre  lettre  de  saint 
Xicétius  à  l'empereur  Justinien  ,    dans  la- 
quelle il  l'exhorte  d'une  manière  très-vive, 
et  avec  toute  l'autorité  que  lui  donnait  son 
zèle  pour  la  religion   et  un   épiscopat  de 
près  de  quarante  ans,  à  renoncera  l'erreur 
qu'ilavait  embrassée,  sur  la  fin  de  son  règne. 
C'était  l'erreur  des  incorruptibles,    rejetons 
des   eutycliéens,  qui    enseignaient  que    le 
corps  de  Jésus-Christ  était  incon-uptible,  en 
sorte  que  depuis  le  moment  qu'il  avait  été 
formé  dans  le  sein  de  sa  mère,  il  n'avait  été 
susceptible  d'aucun  changement,  ni  d'aucune 
altération,  pasmciue  des  passions  naturelles 
et  iunoccnles,  comme  sont  la  faim  et  la  soif. 
Ce  prince,  pour  établir  cette  nouvelle  erreur, 
donna  un  édit  pour  la  faire  approuver  de 
tous  les  évêques  :  ceux  qui  refusèrent  furent 
maltraités.  Saint  Nicétius  lui  demande  pour- 
quoi il  prenait  la  défense  des  hérésies  de  Nes- 
torius  et  d'Eutychès,  après  qu'elles  avaient 
été  anathéniatisées.    Il  le  rappelle  à  la  foi 
qu'il  avait  professée  à  son  baptême,  où  il  avait 
reconnu  un  seul  Fils  en  deux  substances, 
avec  le  Père  et  le  Saint-Esprit,  et  non  pas 
deux  Fils.  II  prouve  par  les  paroles  de  Jésus- 
Christ  même  qu'il  n'est  qu'une  même  chose 
avec  son  Père,  et  prédit  àjustinicn  que  s'il  est 
trouvé  au  dernier  jour  dans  les  mêmes- sen- 
timents qu'il  professait  alors,  il  doit  s'atten- 
dre <i  descendre  dans  les  parties  inférieures 
de  la  terre.  Pour  l'engager  i'i  se  préserver 
d'une  fin  si  fâcheuse,  il  le  conjure  de  décla- 


rer i\  haute  voix  qu'il  renonce  à  l'erreur,  et 
qu'il  anathématise  Nestorius  et  Eutyehès,  en 
lui  déclarant  nettement  à  lui-même  que  tou- 
te l'Italie,  l'Afrique,  l'Espagne  et  la  Gaule 
analhématisaient  son  nom  depuis  la  publi- 
cation de  son  édit.  Cette  lettre  lui  fut  rendue 
par  un  prêtre  nommé  Laclance,  qui  était 
venu  dans  les  Gaules  visiter  les  saints  lieux, 
et  qui  était  allé  jusqu'à  Trêves. 

7.  Jusqu'en  1659,  on  ne  connaissait  point 
d'autres  écrits  de  saint  Nicétius  que  les  deux 
lettres  dont  nous  venons  de  parler;  la  pre- 
mière ,  écrite  vers  l'an  563  et  la  seconde 
vers  l'an  565.  Mais  dom  Luc  d'Achéri  donna 
dans  le  troisième  tome  de  son  Spicilége  deux 
petits  traités  qu'il  ne  doute  point  être  de 
saint  Nicétius,  tant  à  cause  de  la  conformité 
du  style  avec  ces  deux  lettres,  qu'à  cause 
du  témoignage  de  saint  Grégoire  de  Tours, 
qui  nous  apprend  que  ce  saint  fut  élevé  dès 
son  enfance  dans  les  exercices  de  la  vie  mo- 
nastique, et  que  ses  vertus  et  son  savoir  le 
firent    choisir   pour  remplir    les    fonctions 
d'abbé.  On  voit,  en  etfet,  que  l'auteur  de 
ces  deux  traités  vivait  en  communauté,  et 
qu'il  en  était  le  chef.  Il  y  a  des  manuscrits 
où  ils  portent  le  nom  de  Nicétas,  évoque 
des  Daces;  mais  dans  celui  de  Saint-Germain- 
des-Prés,  ils  sont  sons  le  nom  de  l'évcque 
Nicétius.  Il  parait,  par  le  commencement  du 
premier  traité,  que  le  saint  en  avait  fait  d'au- 
tres ;  mais  il  n'en  dit  pas  le  sujet.  Son  but, 
dans  cclni-ci,  est  de  faire  voir  l'utilité  des 
veilles  que  les  moines  passaient  ordinaire- 
ment dnnslechant  des  psaumes,  dans  la  lec- 
turcdes  livres  saints  et  dans  la  prière.  «  Dieu 
dit-il,  qui,  par  sa  providence,  a  pourvu  à  tous 
les  besoins  de  l'homme,  lui  a  donné  le  jour 
pour  travailler,  et  la  nuit  pour  se  reposer  de 
ses  fatigues.  Mais  combien  n'y  en  a-t-il  pas, 
ajoute-t-il,  qui  prennent  quelques  heures  sur 
leur  sommeil ,  soit  pour  plaire  à  ceux  qui 
sont  au-dessus  d'eux,  soif  pour  leur  intérêt 
particulier?  Si  l'on  ne  fait  pas  un  reproche  à 
ceux  qui  veillent  pour  se  procurer  les  ali- 
ments et  les  vêtements  nécessaires,  sera-tril 
permis  d'en  faire  à  de  saints  religieux  qui, 
pour  recevoir  de  Dieu  quehjues  récompen- 
ses, passent  une  partie  de  la  nuit  à  chanter 
ses  louanges,  à  le  prier  et  à  se  nourrir  de 
pieuses  lectures?  On  trouve  néanmoins  des 
hommes  qui  critiquent  ces  usages,  mais  ce 
sont  des  hommes  qui  sont  sans  religion  et 
sans  foi.  Connnent  des  actes  de  piété  pour- 
raient-ils être  du  goût  des  impies?  S'il  s'en 


TralU  d« 
ailDI  Nlcilnt 


Tfm.Iirfpl. 
dlcc.  t^.  1. 


C>p.  I. 


C>p. ii,Ii(. 
t. 


[VI*  SIÈCLE.]  CHAPITRE  XYIIl.  —  SAINT 

trouve  parmi  les  callinliqucs  qui  rp;^'anlpnt 
ces  veilles  coiiuiic  inuliles,  ce  sont  ou  îles 
paresseux,  ou  des  dormeurs,  ou  des  vieil- 
lards, ou  des  infirnies.  Si  ce  sont  dos  pa- 
resseux, qu'ils  rougissent  en  voyant  l'clope 
que  Salomon  donne  à  la  fourrai  pour  sa  dili- 
gence cl  son  exMClidide  au  travail.  Si  ce  sont 
des  dormeurs,  qu'ils  s'éveillcnt;'i  la  voix  doTl^ 
criture  ijui  menace  de  pauvreté  et  d'indii;cn- 
ce  ceux  qui  aiment  mieux  se  livrer  au  som- 
meil que  de  se  lever  pour  travailler.  Si  ce 
sont  des  vieillards,  c'est  h  tort  qu'ils  se  plai- 
gnent, puisipTon  ne  les  presse  point  d'assis- 
ter aux  veilles  :  leur  Age  néanmoins  ne  les 
dispense  point  de  prier  Dieu  avec  ferveur  ; 
et  s'ils  ne  peuvent  point  veiller  debout,  ils 
doivent  le  faire  étant  assis.  Si  ce  sont  des 
infirmes,  qu'ils  ne  reprennent  point  dans  les 
autres  ce  que  la  faiblesse  de  leur  corps  les 
empêche  de  faire  eux-mêmes,  et  que  pour 
suppléer  à  ce  défaut,  ils  se  souviennent  du 
Seigueur,  étant  couchés  sur  leur  lit  :  du 
moins  ne  doivent-ils  pas  regarder,  comme 
un  fardeau  trop  pesant,  do  donner  une  par- 
tie de  la  nuit  deux  fois  la  semaine,  c'est-à- 
dire  le  samedi  et  le  dimanche,  pour  l'em- 
ploj'er  au  service  de  Dieu,  et  afin  de  se  pu- 
rifier des  taches  qu'ils  auront  contractées 
pendant  les  autres  cinq  jours.  » 

Cp,  m,  Saint  Nicétius  montre  l'antiquité  des  veilles 
par  des  témoignages  tirés  d'Isaïe  et  des  Psau- 
mes de  David  ;  et  passant  de  l'Ancien  Testa- 
ment au  Nouveau,  il  fait  voir  l'usage  des 
veilles  par  l'exemple  d'Anne,  fille  de  Pha- 
nuel ,  de  Jésus  -  Christ ,  de  l'apôtre  saint 
Pierre  ,  de  saint  Paul ,  et  de  Silas  ,  que  l'on 
entendit   au  milieu  de  la  nuit  chanter  des 

c»j-  "•  hymnes  dans  la  prison.  Il  dit  sur  l'utilité  et 
la  douceur  des  veilles,  qu'on  la  sent  mieux 
par  la  pratique  qu'on  ne  peut  l'exprimer, 
parce  que  c'est  par  le  goût  que  l'on  juge 
combien  le  service  de  Dieu  est  doux  et  agréa- 
ble. Le  Prophète  met  la  félicité  de  l'homme 
en  ce  monde  h  méditer  jour  et  nuit  la  loi  du 
Seigneur.  Il  est  saus  doute  avantageux,  dit  le 
saint  évèque,  de  la  méditer  pendant  le  jour, 
mais  on  fait  le  plus  agréablement  et  plus  effi- 
cacement la  nuit,  où  l'esprit  n'est  point  oc- 
cupé d'une  infinité  de  soins  qui  l'occupent 
péhdantle  jour.  C'est  pourquoi  Nicétiusveut, 
qu'eu  veillant  des  yeux  nous  veillions  aussi 
du  cœur,  et  que,  dans  les  prières  que  nous 
faisons  à  Dieu,  l'esprit  accompagne  nos  paro- 
les. Il  exhorte  à  ne  prendre  de  la  nourriture 
au  repas  du  soir  qu'avec  médiocrité,  de  peur 


VIVENTIOLK,  Ll^JON,  ETC.  'iO.-j 

que  l'abondance  n'cmpôrho  l'altention  dans 
le  temps  des  veilles.  Sur  (|uoi  il  cite  ces  pa- 
roles d'un  évoque  qu'il  ne  nomme  pas  :  «  De 
même  que  la  fumée  met  en  fuite  les  abeilles, 
de  même  les  vapeurs  qui  viennent  d'une 
noui'riture  mal  digérée  chassent  les  dons  du 
Saint-Esprit.» 

8.  Dans  le  traité  du  Bien  de  la  nsalmodir  T"" '*  ■>" 
qu  il  promet  sur  la  fin  du  précédent,  il  dit  ,.  i''»'""":i». 
qu  on  ne  connaît  personne  avant  Moïse  qui  ail  '• 
chanté  à  Dieu  des  cantiques  ;  et  que  Moïse  est 
le  premier  qui  a  institué  des  clueurs  composés 
des  deux  sexes  pour  chanter  les  louanges  du 
Seigneur;  qu'après  lui,  Debbora,  femme  il- 
lustre ,  fit  les  mêmes  fonctions  ;  mais  que 
toutes  les  poésies  de  Moïse  ne  sont  pas  de 
même  genre  ;  et  que  celles  qu'il  composa  par 
forme  de  testament  quelque  temps  avant  sa 
mort  ne  contiennent  que  des  prédictions  fâ- 
cheuses pour  les  Israélites,  au  cas  qu'ils  vien- 
draient à  abandonner  le  Seigneur  leur  Dieu. 
Il  ajoute  que  depuis  l'on  vit  parmi  les  Israé- 
lites non-seulement  des  hommes,  mais  aussi 
des  femmes  remplies  de  l'Esprit  divin,  chan- 
ter les  mystères;  et  que  David  reçut  ce  don 
do  Dieu  dès  son  enfance,  en  sorte  qu'on  peut 
le  regarder  comme  le  prince  des  chantres  et 
comme  le  trésor  des  vers  faits  en  l'honneur 
de  Dieu.  Saint  Nicétius  remarque  qu'il  n'y  a 
rien  dans  les  Psaumes  qui  ne  tende  à  l'utilité, 
à  l'édificalion  et  à  la  consolation  du  genre 
humain,  de  quelque  condition,  de  quelque 
sexe  et  de  quelqu'àge  que  l'on  soit;  que  les 
enfants  y  trouvenl  du  lait,  les  jeunes  gens  de 
quoi  louer,  et  ceux  d'un  âge  avancé  des  leçons 
pour  régler  leur  vie;  que  les  femmes  y  ap- 
prennent la  pudeur;  que  les  orphelins  y  trou- 
vent un  père,  et  que  les  rois  et  les  juges  de 
la  terre  y  apprennent  ce  qu'ils  doivent  crain- 
dre; qu'enfin  les  Psaumes  renferment  tous 
les  préceptes  de  l'Évangile  et  tout  ce  que  les 
prophètes  ont  prédit  :  car  on  y  voit  la  géné- 
ration de  Jésus-Christ  selon  la  chair,  la  voca- 
tion des  Gentils  à  la  place  des  Juifs  ,  les  mi- 
racles du  Sauveur,  sa  passion  ,  sa  résurrec- 
tion, son  ascension  dans  le  ciel  où  il  est  à  la 
droite  du  Père,  son  second  avènement  et  le 
jugement  terrible  qu'il  prononcera  sur  les 
vivants  et  les  morts.  Ces  cantiques  que  chante  cap.n.pa?. 
l'Église  catholique  plaisent  à  Dieu  lorsqu'on  °' 
les  chante  pour  sa  gloire,  et  surtout  avec  une 
conscience  pure.  Le  saint  évêque  remarque  cap.m.pas. 
que  le  .Nouveau  Testament  a  eu  aussi  ses  can-  '°' 
tiques  ,  savoir  ,  celui  de  Zacharie  ,  père  de 
Jean-Baptiste,  et  d'Élizabelh,  sa  femme;  ce- 


206 


niSTOIllE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


lui  des  anges  à  la  naissance  du  Sauveur,  et 
celui  «les  enfants  a  l'onlréc  de  Ji^sus-Clirisl 
dans  la  \illc  de  iiTusalcui.  11  remarque  en- 
core que  l'usaire  était  dans  les  veilles  d'en- 
tremêler le  cliant  des  Psaumes  avec  la  prière 
et  la  lecture  des  livres  saints,  afin  d'engrais- 
ser, pour  ainsi  dire,  notre  Ame  par  celle  va- 
riétéde  mets  spirituels,  comme  onr<'jouitdes 
convives  par  la  diversité  des  aliments  qu'on 
leur  présente.  «  Ne  nous  contentons  donc 
pas,  dit-il,  de  clianter  de  bouche  ces  divins 
cantiques,  chantons -les  aussi  de  co::ur,  en 
nous  occupant  des  vérités  qu'ils  contiennent, 
sans  laisser  aller  notre  esprit  à  des  pensées 
étranfrcres.  Que  le  ton  môme  de  notre  voix 
n'ait  rien  de  ces  exclamations  de  théâtre, 
qu'il  convienne  à  la  sainteté  de  notre  reli- 
gion et  qu'il  soit  propre  à  exciter  en  nous  la 
douleur  de  nos  péchés.  Il  faut  toutefois  que 
nos  voix  s'accordent  et  ne  soient  point  dis- 
sonuantes,  et  que  l'on  se  rencontre  tellement 
dans  le  chant  et  dans  la  prononciation,  que 
tous  commencent  et  finissent  en  méinc  temps 
et  d'un  même  ton  de  voix,  à  l'imitation  des 
trois  jeunes  hommes  jetés  dans  la  fournaise, 
qui,  selon  le  témoignage  du  prophète  Daniel, 
chantaient  d'une  seule  bouche  ce  cantique  : 
Vous  êtes  béni,  Seiijiiciir  Dieu  de  nos  pères.  » 
Saint  Nicétius  est  d'avis  que  celui-là  se  taise 
dont  la  voix  ne  peut  s'accorder  avec  celle 
des  autres.  Mais  il  veut  que  quand  on  psal- 
modie, tous  le  fassent,  que  tous  prient  aussi 
à  l'heure  de  l'oraison  commune  ;  et  que  lors- 
que l'on  a  fait  le  signe  pour  la  lecture,  tous 
l'écoutent  avec  attention,  sans  s'appliquer  à 
des  prières  particulières,  qui  doivent  être 
renvoyées  à  un  autre  temps.  Il  trouve  une 
grande  utilité  à  faire  précéder  la  prière  de 
la  lecture,  parce  que  l'âme,  remplie  des  véri- 
tés qu'elle  a  ouïes,  s'en  occuitc  pendant  l'o- 
raison ;  et  pourmontrcr  combien  l'unanimité 
dans  la  prière  et  dans  tous  les  autres  exerci- 
ces de  piété  est  agréable  à  Dieu  et  dans  l'es- 
prit de  l'Église,  il  dit  que  c'est  pour  engager 
les  fidèles  à  cette  unanimité  que  le  diacre' 
les  avertit  ù  haute  voix  dans  l'église  du  mo- 
ment qu'il  faut  prier,  fléchir  les  genoux, 
chanter  des  psaumes    et    écouter  la  lec- 


ture. Nous  avons  deux  lettres 'de  Florien, 
abhé  de  Roman-Moutier,  adressées  à  saint 
Nicétius  avant  qu'il  fût  évêqiie  :  ces  lettres 
ne  sont  (jue  des  éloges  de  ses  veitus,  jiaiticu- 
lièremenl  de  sou  exactitude  à  remplir  tous 
les  exercices  de  la  vie  monastique.  Les  ré- 
ponses de  ce  saint  ne  sont  pas  venues  jus- 
qu';\  nous. 

9.  Vers  l'an  551,  saint  Nicétius,  étant  déjà 
évoque  de  Trêves,  reçut  quelques  insultes 
pour  s'être  opposé  à  desmariages  incestueux. 
Le  roi  'l'héohalde  indi(]ua  h  celte  occasion 
un  concile  AToul  auquel  il  invita  Mappinius, 
évêque  de  Reims.  Celui-ci  n'ayant  pas  reçu 
la  lettre  de  ce  prince,  ne  se  trouva  point  à 
l'assemblée.  Tliéohalde  lui  en  écrivit  une 
seconde  qui  fui  aussi  sans  effet,  jiarce  que 
Mappinius  la  reçut  trop  tard.  Mais,  fâché  de 
n'avoir'pas  été  invité  au  concile  par  saint  Ni- 
cétius même,  il  lui  en  fit  des  reproches  assez 
vifs  dans  une  lettre,  où  il  lui  disait  que  la 
concorde  et  la  bonne  intelligence  qui  doivent 
réf^'ner  entre  les  évêques,  exigeaient  de  lui 
cette  inviiation,  d'autant  qu'il  lui  convenait 
beaucoup  mieux  qu'au  prince  de  l'instruire 
du  sujet  de  la  convocation  de  celte  assem- 
blée. Il  ne  laissait  pas  de  témoigner  à  saint 
Nicétius  combien  il  était  sensible  aux  peines 
qu'on  lui  f  lisait;  ajoutant  qu'il  se  serait  ren- 
du à  Tout  dans  le  temps  marqué,  s'il  eût  re- 
çu assez  tût  les  lettres  du  roi,  sachant  bien 
qu'on  doit  obéir  à  ses  ordres  lorsqu'ils  ont 
pour  objet  le  bien  de  l'Église.  La  lettre  de 
Mappinius  se  trouve  dans  la  Collection  des 
conciles  du  Père  Labbe,  dans  les  Recueils  de 
Fréhérusct  de  Duchesne,  dans  VApiiendice 
des  œuvres  de  saint  Grégoire  de  Tours,  dans 
l'Histoire  de  la  métropole  de  Reims,  par  dom 
Marlot,  [et  dr.ns  le  tome  LXVIlIde  la  Putro- 
logie  latine,  col.  43,  4i.]  On  y  trouve  aussi 
une  lettre  ;\  Villicus,  évêque  de  Metz,  dans 
laquelle  Mappinius  loue  sa  grande  dou- 
ceur, son  zèle  et  sa  vigilance  pastorale.  Il  y 
dit'  que  ces  paroles  de  Jésus-Christ  à  saint 
Pierre  :  Paissez  mes  brebis,  ne  regardent  pas 
seulement  les  apôtres ,  mais  tous  ceux  qui 
sont  revêtus  de  la  dignité  épiscopale.  Il  prie 
Villicus  de  lui  marquer  le  prix  des  porcs  dans 


Mappltjlii-. 
évAtlue         i' 
Hriiii-  : 
lelirei.To: 
Coocll.,     ; 
«0.. 

DncLe^D*. 


Mirlol,  llb. 
II  Uld.  Rc 
iiiiii..  i«j. 
3li  el  MM). 


'  Iden  enim  el  diaconus  clara  voce  in  domo  Dei 
sancti  prœcimii  admonel  cunclos,  ut  sivc  orando. 
sive  iiillectenilis  geiiibus,  sive  in  psallendo,  sive 
in  lecltonibus  sollicite  audiendis,  unitas  srrvrliir 
ab  omnibus;  quia  unanimes  liomines  diligit  Deus 
et  in  sua  domo  cas  (ilicilliabilare.  tiicel.  De  Bono 
psalm.,  toiu.  III  Spicilcg.,  pag.  12. 


'  Une  ?pn!e  est  rapportée  dans  lo  tome  LXXlWc 
la  Palrologie  latine,  col.  917.  (L'éditeur.) 

'  Licel  sanclo  Pctro  hoc  a  Domino  dictum  lega- 
mus:  l'asie  ovos  lueas,  sed  ad  cunclos  gui  sacer- 
dotale funguntiir  ofjîcium  perlinet  pra-scns  sen^ 
tetilia.  Mappinius,  episl.  ad  Villicuni  Melensem, 
toiu.  I  Uisl.  Remens.,  lib,  2,  cap.  xx,  pag.  214. 


[vi«siKCLE.]  CHAPITRE  XIX.  —  CASSIODORE,  CIUNCELIEn,  ETC.  207 

<•  lorriloirc  de  Mclz,  afin  ilo  lui  piivnvorl'ar-  vinj,'t-(Ioiix  ans,  ri  (jii'il  iiioiinil  vrrs  I'an5fi0, 

Ci'ul   iiécossairo  pour  en  at'lictcr.  Ccito  loi-  apivs  l'aviiir  cmicliio  par  li's   lilx'raliti's  des 

tro.  dt«  mànn'  quo  la  pivcr'diMilo  ,  est  écrile  princes.  Ainsi  il  siiivécnt  h  saint  Xicdtius  (jiii, 

d'un  style  net  et  coulant.  On  dit  ijnc  Mappi-  suivant  l'opinion  commnnc,  mourut  vers  l'an 

nius  gouverna  l'iijjlise  de  Reims  pendant  5(JG. 


CHAPITRE  XIX. 

Cassiodore,  chancelier  et  premier  ministre  de  Théodoric,  roi  d'Italie, 
et  ensnite  abbé  de  Viviers. 

[Écrivain  latin,  500.] 


ARTICLE  I. 

HISTOIRE  DE  SA  VIE. 

^.  C'est  du  roi  'riK'odnrJL'  nièruo  que  nous 
apprenons  la  •j:ran(l(Mir  de  la  maison  de  Cas- 
siodore,  et  l'ancienuoté  de  sa  noblesse.  Ce 
prince  dit  qu'elle  était  '  ti-ès-illustre  autant 
par  les  dignités  de  la  robe,  que  par  la  pro- 
fession des  armes  ;  qu'elle  s'était  rendue  re- 
coramandable  soit  dans  l'empire  d'Oiieut, 
soit  dans  celui  d'Occident,  et  qu'elle  s'était 
distinguée  avec  éclat  dans  les  sénats  de  Cons- 
tanlinople  et  de  Rome.  Ses  biens  étaient  si 
considérables-  qu'elle  pouvait  mettre  sur 
pied  et  entretenir  des  armées  entières.  L'aïeul 
de  Cassiodore  qui  portait  le  même  nom,  fut 
revêtu  du  titre  d'illustre ,  dignité  considé- 
rable dans  l'Empire  romain.  Il  donna  des 
preuves  de  sa  valeur  en  délivrant  à  la  pointe 
de  l'épée  la  Sicile  et  l'Abruzze  de  l'invasion 
des  Vandales.  Son  père  eut  '  tout  ensemble 
les  dignités  de  tribun,  de  notaire  ou  secré- 
taire d'Etat  sous  l'empereur  Valentinien  El, 
ce  qui  lui  donnait  entrée  dans  les  conseils  et 
les  secrets  du  prince.  Ce  fut  aussi  sur  lui 
qu'il  jeta  les  yeux  pour  l'envoyer  en  am- 
bassade avecCarpilion,  fils  d'Aétius,  général 
des  armées  romaines,  vers  Attila,  roi  des 
.  Huns,  qui,  par  ses  victoires,  faisait  trembler 
tout  l'Empire. La  viergeProba,sreurde  Galla, 
fdie  de  Symmaqne,  était  encore  parente  de 
Cassiodore,  qtd  conscquemment  était  alliée 
à  ce  patrice  si  célèbre  par  sa  naissance,  son 
savoir,  sa  probité,  sa  foi  et  ses  autres  vertus. 


2.  Tels  furent  les  ancêtres  de  Cassiodore  S:.  n,u-ar. 
qui  vint  au  monde  dans  la  ville  de  Squillacci,  "o.'"'  '''° 
capitale  de  l'Abruzze,  sur  le  bord  de  la  mer 
de  Sicile.  Le  temps  de  sa  naissance  n'est  pas 
bien  certain  ;  mais  à  en  juger  par  les  grands 
emplois  qu'il  exerça  sous  Odoacre,  roi  des 
Hérules,et  ensuite  sous  Théodoric,  il  faut  la 
mettre  au  plus  tard  vers  l'an  4G!J ,  autre- 
ment il  faudrait  dire  qu'on  lui  aurait  confié 
les  principales  charges  de  la  cour  dès  l'âge 
de  treize  ou  quatorze  ans  :  ce  qui  est  sans 
vraisemblance.  Outre  le  nom  de  Cassiodore 
qui  paraît  avoir  été  propre  à  sa  maison,  il 
portait  aussi  celui  d'Aurèle  ;  et  il  prend  en- 
core dans  presque  toutes  ces  lettres  le  sur- 
nom de  sénateur,  auquel  il  joint  quelquefois 
la  qualité  de  préfet  du  Prétoire.  Né  dans  un 
climat  heureux*  pour  l'esprit  et  pour  les 
mœurs,  il  fit  de  grands  progrès  dans  toutes 
sortes  de  science  et  de  discipline.  Il  excella 
dans  la  grammaire,  la  rhétorique,  la  dialec- 
tique, la  musique,  l'arithmétique,  la  géomé- 
trie, l'astronomie,  les  mathématiques.  Il  don- 
na depuis  des  leçons  sur  ces  ditférents  arts; 
et,  voulant  joindre  la  pratique  à  la  spécula- 
tion, il  se  rendit  si  habile  dans  la  mécani- 
que qu'il  faisait  des  lampes  perpétuelles  qui 
s'entretenaient  d'elles-mêmes,  et  des  horlo- 
ges de  plusieurs  façons.  R  poussa  ses  re- 
cherches^ jusque  sur  l'agriculture,  et  sur 
l'art  de  découvrir  les  fontaines  et  les  sources 
cachées,  et  de  juger  de  la  qualité  de  l'eau 
avant  de  l'avoir  goûtée.  Son  traité  de  l'Ame 


'  Cassiodor.,  lih.  1  Varinr. 
2  Ibi'1.  etlib.  [\Epist.  23. 
'  Ibid. 


epist. 


'  Cassioiliir.,  lib.  XII  Variar.  cpist.  13. 
5  Cassiodor.  Institut,  divin.,  caj>.  xxx,  et  lib.  Xll, 
Epist.  14,  et  Hb.  111  Epist.  55. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Il  e«(  ftll 
eomlc  de*  do- 
maiots  ■près 
l'.B  4^0  par 
Ouoacre. 


ThéodorU 
l'emploie  u«  EU 
le  mioistire. 


208 

est  une  preuve  qu'il  savait  fort  bien  traiter 
cette  matière,  et  qu'il  était  aussi  instruit  de 
l'analomie,  dont  il  parle  dans  cet  ouvrage 
par  occasion.  Nous  verrons  dans  la  suite  avec 
quel  soin  il  s'appliqua  à  l'étude  des  livres 
saints.  Il  ne  parle  jamais  de  ses  maîtres, 
mais  il  en  avait  un  excellent  dans  la  per- 
sonne même  de  son  père,  que  le  roi  Théo- 
doric  représente  comme  un  homme  sage  et 
vertueux. 

3.  Odoacre,  devenu  roi  d'Italie,  après  avoir 
tué  Oreste,  et  déposé  Auguslule  en  476,  con- 
fia à  Cassiodore ,  dont  il  connaissait  le  mé- 
rite, la  dignité  de  comte  des  Revenus  parti- 
culiers :  et  afin  que  son  autorité  ne  fût  pas 
bornée  à  une  simple  intendance  sur  les  do- 
maines particuliers  du  royaume,  il  étendit  sa 
juridiction  en  lui  attribuant  la  connaissance 
des  excès  auxquels  la  brutalité  des  hommes 
les  emporte  quelquefois;  c'est-à-dire  qu'il 
confia  à  ses  soins  et  à  sa  vigilance  la  chas- 
teté des  vivants  et  la  sûreté  des  morts,  ainsi 
que  Cassiodore  '  lui-même  s'explique.  Il  s'ac- 
quitta de  cette  charge  importante  avec  une 
maturité' au-dessus  de  son  âge;  la  tempé- 
rance et  la  modération  furent  les  principes 
de  sa  conduite,  que  les  passions  de  la  jeu- 
nesse liC  dérangèrent  jamais.  Odoacre  le  fit 
ensuite  comte  des  Libéralités  royales';  et,  se 
voyant  paisible  dans  toute  l'Italie  en  488,  il 
lui  laissa  la  libre  admiuislraliou  de  la  Justice 
et  de  la  polico.  Odoacre,  après  plusieurs  vic- 
toires sur  les  Ru:;;ens,  peuples  de  la  Germa- 
nie, vers  la  mer  Baltique,  fut  attaqué  par 
Théodoric,  roi  des  Goths,  qui  lui  déclara  la 
guerre  à  la  sollicitation  de  rerapereur  Ze- 
non. Théodoric  gagna  sur  lui  trois  batailles, 
l'assiégea  dans  Ravenne,  et  feigi.ant  qu'O- 
doacre  avait  conspiré  contre  sa  personne,  le 
fit  mettre  à  mort  dans  un  -rand  festin  au- 
quel il  l'avait  invité  depuis  ia  paix  qu'ils 
avaient  faite  ensemble.  Celte  mort,  qui  arriva 
en  4'J3,  fut  scaisiblc  à  Cassiodore,  qui  ne  s'en 
consola  que  dans  l'espérance  qu'elle  le  met- 
trait en  liberté  de  renoncer  aux  aû'aires  pu- 
bliques. 

4.  Il  se  retira  sur  les  terres  qu'il  avait 
dans  la  Calabre.  A  peine  y  fut-il,  que  les  Si- 
ciliens, portant  impatiemment  le  joug  de 
leur  nouveau  roi,  coururent  aux  armes  pour 
le  secouer.  D'autres  peuples  suivirent  leur 
exemple,  et  la  guerre  était  prèle  à  slallumcr. 


lorsque  Cassiodore,  qui  ne  doutait  point  qu'il 
ne  dut  l'obéissance  à  Théodoric.  s'employa 
de  tout  son  pouvoir  pour  apaiser  cette  ré- 
volte dès  sa  naissance.  Il  en  vint  à  bout,  et 
cette  action  qui  n'avait  eu  d'autres  motifs 
que  la  charité,  lui  tint  lieu  d'un  grand  mérite 
auprès  de  Théodoric.  C'était  en  494;  ce  prince 
n'avait  alors  qu'environ  dix-neuf  ans;  mais 
ses  grandes  qualités  le  rendaient  digne  de 
l'Empire.  Pour  s'y  maintenir,  il  était  néces- 
saire de  s'assui'cr  de  la  paix  du  cùté  d'Anas- 
tase,  successeur  de  Zenon,  dans  l'empire  d'O- 
rient. Théodoric  jugea  donc  à  propos  de  lui 
écrire  une  lettre  fort  respeclueusc,  et  il  se 
servit  de  la  plume  de  Cassiodore.  Cette  let- 
tre eut  le  succès  que  le  roi  en  attendait  : 
nous  l'avons  encore  dans  le  recueil  '  des  let- 
tres de  Cassiodore.  Théodoric  lui  donna  en 
308,  le  gouvernement  de  r.\bruzzc  et  de  la 
Lucanie  ;  mais,  pom-  ne  point  se  priver  de 
l'avantage  qu'il  espérait  de  sa  présence*,  il 
le  rappela  à  la  cour  et  le  fit  questeur.  Cassio- 
dore était  oncore  jeune  alors ,  mais  le  roi 
n'en  avait  pas  moins  l'esprit  en  repos  au  mi- 
lieu des  soins  du  gouvernement,  parce  qu'il 
se  tenait  assuré  de  la  capacité  et  de  la  fi- 
délité inviolable  de  son  minisire.  Quelque 
temps  après  il  lui  donna  la  charge  de  grand 
maître  des  Offices  ou  du  palais,  puis  celle  de 
préfet  du  Piétoire.  et  enfin  la  dignité  de  pa- 
trice.  Cassi;;doie  était  déj;î  revêtu  de  cette 
dernière  dignité,  lorsque  ce  prince  lui  écrivit 
pour  le  rappeler  auprès  de  lui,  d'oùapparem- 
mcnt  quelques  affaires  considérables  l'avaient 
éloigné  pour  un  temps.  «Nous  prenons  tou- 
jours' un  extrême  plaisir,  lui  dit  Théodoric, 
à  voir  ceux  qui  ont  trouvé  moyen  d'enti-er 
dans  notre  estime  pour  leurs  glorieuses  ac- 
tions. Le  soin  qu'ils  ont  de  s'étudier  ^  la 
vertu  nous  répond  de  l'amour  et  du  zèle 
qu'ils  ont  pour  nous.  C'est  pourquoi  nous 
vous  invitons  de  venir  à  notre  cour,  afin 
qu'elle  reçoive  un  noiivcl  ornement  par  vo- 
tre présence,  et  que  vous  receviez  aussi  un 
nouveau  degré  de  gloire  par  les  regards  fa- 
vorables de  voire  prince.  Vous  méritez  qu'on 
vous  recherche  avec  cmpre^semcnt,  après 
que  vous  avez  mis  notre  règne  dans  une  si 
haute  réputation,  et  que  vous  lui  avez  pro- 
curé tant  de  gloire.  Vous  avez  orné  la  cour 
par  linlégrilé  de  voire  conscience.  Vous  avez 
procuré  aux  peuples  un  profond  repos.  Vous 


•  Cassioi].,  lib.  Y!  Fonn.  8.  —  '  Cassiodor.,  lib.  I 
Yariar.,    Epist.  4.—  »  Lib.  VI  Fonn.  7. 


'  Lib.  I  Yariar.  Epist.  \.    -  •  Lib.    I  Episl.  3. 
-  «  Lib.  L\  Epist.  24.  —  '  Lib.  III  Epist.  28. 


[Vl"  SIÈCLE.] 


CTTAPITRE  XIX.  —  CASSlonORK,  CIIANCEMKIl. 


209 


■u. 


avez  acquis  d'autant  plus  d'estime  dans  le 
monde,  qu'on  sait  que  vous  ne  vous  êtes  ja- 
mais vendu,  quol([U(^  prix  qu'on  vous  ait  of- 
i'eil  pour  acheter  votre  faveur  :  liàtez-vous 
doue  de  venir.  »  Il  parait  que  ïliéodoric  no 
l'appelait  avec  tant  d'empressement  que  pour 
riionorer  encore  du  consulat,  qu'il  exeri^a 
en  elli'tenSl'i.  Cassiodore,  après  avoir  passé 
par  tous  les  degrés  des  dignités  de  l'État  et 
de  la  cour,  ue  devait  plus  souhaiter  que  de 
goûter  en  repos  les  fruits  de  ses  études. 
Mais  Théodoric  ne  pouvant  se  passer  de  lui, 
le  lit  une  seconde  fois  t;i;nid  maître  du  pa- 
lais. Ce  prince  ,  jugeant  bien  que  ce  n'était 
plus  nue  charge  honorable  pour  Cassiodore 
api'ès  avoir  été  consul,  ue  voulut  pas  lui 
commander  conmie  roi  de  l'exercer,  mais  il 
l'en  pria  comme  ami  ;  et  Cassiodore  s'y  sou- 
mit :  il  l'exerçait  encore  lorsque  ce  prince 
mourut  en  5^3. 

5.  Atlialaric,  sou  successeur,  avait  au  plus 
dix  ans  lorsqu'il  commença  à  régner,  et  il  y 
avait  peu  d'apparence  que  les  Goths,  peuples 
belliqueux,  voulussent  obéir  aux  ordres  d'un 
enfant,  et  moins  encore  ;\  ceux  d'Amalason- 
the,  sa  mère.  Mais  cette  princesse,  qui  avait 
d'excellentes  qualités  et  un  génie  supérieur, 
sut  maintenir  les  peuples  dans  le  respect  et 
la  soumission.  Dès  la  première  année  du  rè- 
gne d'Athalaric ,  Cassiodore  écrivit  au  nom 
de  son  maître  à  l'empereur  Justin  pour  lui 
demander  sa  protection.  Il  écrivit  eu  même 
temps  au  sénat  et  au  peuple  de  Rome  pour 
leur  donner  part  de  son  élévation  au  trône, 
et  il  y  eut  des  ambassadeurs  envoyés  pour     peuples  souhaitaient  depuis  longtemps  la  pré- 


daicnt  les  côtes,  afin  de  n'âlre  point  à  char" 
ge  aux  provinces,  et  de  ne  point  épuiser  l'é- 
pargne. Atlialaric,  prenant  de  joui'  eu  jour 
plus  (1('  couliauco  eu  Cassiodore,  lit  ;\  sa  solli- 
citation plusieurs  actions  .de  piété,  de  justice 
et  de  sagesse.  Il  ordonna  en  particulier  que 
toutes  les  all'aires  (jui  legardaient  les  clercs 
de  l'Eglise  roniaitio  fussent  portées  devant 
le  l'ape,  qiù  serait  charm';  de  donner  des 
commissaires,  ou  de  ju';er  lui-même  les  pio- 
cès.  Les  paroles  de  ce  rescrit  sont  remarqua- 
bles de  la  part  d'un  [)riui;n  arien.  «  Nous 
sommes',  dit-il,  d'autant  plus  redevables  à 
la  divine  miijesté,  que  nous  avons  reçu  d'elle 
lie  plus  grands  biens  que  tout  le  reste  des 
hommes.  Il  est  vrai  que  nous  ne  pouvons 
rendre  à  Dieu  lien  qui  égale  ses  bienfaits. 
Cependant  il  veut  bien  nous  tenir  compte  de 
ce  que  nous  faisons  eu  faveur  de  ceux  qui  le 
servent.  C'est  pourquoi  ayant  mûrement  con- 
sidéré l'honneur  qui  est  dû  au  Siège  aposlo- 
li((ue,  nous  ordonnons  que  quiconque  est  de- 
mandeur contre  un  clerc  de  l'Église  romai- 
ne, se  pourvoie  d'abord  devant  le  bienheu- 
reux Pape,  afin  que  sa  Sainteté  en  ordonne.» 
U  fit  une  autre  ordonnance^pour  les  appoin- 
tements des  professeurs  de  grammaire,  de 
rhétorique  et  de  droit ,  dans  laquelle  il  di- 
sait :  «  Si  nous  enrichissons  les  comédiens  qui 
ne  servent  qu'aux  divertissements  ,  que  ne 
devons -nous  point  faire  pour  ceux  à  qui 
nous  sommes  redevables  de  l'honnêteté  des 
mœurs,  et  par  qui  sont  formés  les  esprits 
qui  servent  d'ornement  à  la  cour?»  Tous  les 


recevoir  les  serments  ordinaires.  Il  adressa 
une  quatrième  lettre  au  clergé  de  Home 
pour  le  remercier  de  ce  qu'il  avait  reçu  pour 
pape  FéUx  III,  que  Théodoric  avait  établi  sur 
la  Chaire  de  saint  Pierre  après  la  mort  de 
Jean.  Le  roi,  pour  ne  rien  oublier  de  ce  qui 
pouvait  l'all'ermir  sur  le  trône,  se  fit  encore 
recommander  aux  prières  des  évéques  ca- 
tholiques, quoiqu'il  fit  profession  de  l'héré- 
sie arienne  dans  laquelle  il  avait  été  élevé. 
Cependant  Théodat,  prince  du  sang  du  côté 
de  sa  mère,  entretenait  des  intelligences  se- 
crètes avec  l'empereur  Justinien,  successem- 
de  Justin  ;  et  il  avait  traité  avec  lui  pour  le 
reudi-e  maître  de  la  Toscane.  Cassiodore  dis- 
sipa tous  ses  mauvais  desseins  ,  et  non  con- 
tent de  payer  de  sa  personne  ,  il  entretint  à 
ses  dépens  les  ti-oupes  des  Goths  qui  gar- 


fecture  du  Prétoire  à  Cassiodore.  Atlialaric 
l'éleva  à  cette  dignité  en  334 ,  en  lui  faisant 
par'  lettres  des  excuses  obligeantes  de  ce 
qu'il  avait  élé  si  longtemps  à  satisfaire  là- 
dessus  les  empressements  de  ses  peuples.  Ce 
prince  écrivit*  en  même  temps  au  sénat  de 
Rome,  .'i  qui  il  disait  :  «  Il  semble  que  nous 
ayons  comblé  de  bienfaits  ce  grand  séna- 
teur, qui  possède  toutes  les  vertus  dans  un 
souverain  degré,  qui  est  si  riche  par  l'inno- 
cence et  par  l'intégrité  de  ses  moeurs,  et  qui 
est  déjà  rassasié  d'honneurs.  Cependant  si 
nous  pesons  son  mérite  ,  nous  jugerons  que 
nous  demeurons  encore  redevables  de  toutes 
les  dettes  dont  il  semble  que  nous  soyons  ac- 
quittés. Car  que  peut-on  donner  en  échange 
de  toutes  les  obligations  dont  on  lui  est  rede- 
vable, puisqu'il  est  la  gloire  de  nos  jours,  et 


'Lib.  VIllEpl■s^  24. 
M. 


■^ihii\.,  Epist.  21. 


»  Lib.  1X„  Epist.  24. 


Ibiil.,  Epist.  23. 
14 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


210 

tant  de  louanges  h  son  prince.  »  Mais  tandis 
que  les  peuples  et  les  rois  mettaient  leur  con- 
fiance eu  la  sagesse  et  en  l'exiituiencc  de 
Cassiodore,  lui  seul,  se  défiant  de  ses  forces, 
écrivait  au  Pape  et  aux  évoques'  pour  leur 
demander  le  secours  de  leurs  prières,  et  leur 
recommander  les  besoins  de  l'IOtat.  Les  ex- 
cès auxquels  Athalaric  s'abandonna  depuis 
qu'il  se  fut  soustrait  à  la  conduite  des  gou- 
verneurs qu'Amalasontlie  lui  avait  donnés. 


il  composa  dans  la  suite  son  livre  intitulé  : 
De  la  Miinière  d'enseigner  les  lettres  divines, 
qui  est  une  espèce  d'inlioduction  .'i  l'étude 
de  l'Ecriture  sainte.  Il  fut  plus  aisé  h  Cas- 
siodore de  pourvoir  aux  besoins  temporels 
des  Romains,  chez  qui  il  rétablit  l'abondan- 
ce, de  même  que  dans  la  Ligurie  et  d'autres 
provinces  qui  se  trouvaient  dans  la  disette. 
Il  fit  diminnerl'imposition  des  tailles  et  en  fit 
décharger  ceux  qui  avaient  été  réduits  .'i  la 
abrégèrent  ses  jours   qu"il  termina   la  neu-      pauvreté  par  des  années  stériles,  trouvant 


Lib.     XII 
E|Ul.  îi. 


vième  année  de  son  règne,  âgé  seulement  de 
dix-neuf  ans.  C'était  en  o3i.  Cette  princesse 
avait  déjà  pris  quelque  mesure  avec  l'em- 
pereur Juslinien  pour  se  i  étirer  à  Constau- 
linople;  mais  la  mort  d' Athalaric  lui  fit  chan- 
ger de  dessein,  et  penser  à  mettre  Théodat 
sur  le  trône,  pour  eu  partager  avec  lui  l'au- 
torité. Théodat  l'accepta  avec  joie,  et  il  vé- 
cut pendant  quelque  temps  avec  Amalason- 
the  dans  une  intelligence  qui  marquait  une 
confiance  mutuelle.  Mais,  ne  pouvant  plus 
surmonter  la  haine  qu'il  avait  conçue  depuis 
plusieurs  années  contre  cette  priuces.-e  dont 


que  c'était  une  conduite  cruelle  de  dem^in- 
der  des  subsides  à  ceux  qui  sont  eux-mêmes 
dans  la  nécessité  de  mendier,  et  de  les  for- 
cer de  donner  les  choses  dont  ils  ont  un 
pressant  besoin. 

7.  L'empereur  Justinien,  indigné  de  la 
mort  d'.\malason(he  se  pii'para  à  la  venger 
par  la  guerre  ([u'il  résolut  de  l'aire  à  Théo- 
dat. Il  dissimula  d'abord  le  dessein  de  son 
armement;  mais  Théodat,  ne  pouvant  dou- 
ter que  Juslinien,  aprèsavoir  réduit  la  Sicile, 
ne  poursuivît  plus  loin  ses  conquêtes,  lui  fit 
demander  la  paix  par  le  sénat  et  par  le  pa- 


II  fait  Tcn. 
dr«  le»  y-^t 
«•fr«<  dr  I  É- 
f)(c4  do  S«  nU 
t'iLire  CD  0.16. 


Procop.  de 
Bel'»  Go:b. 
ut;.     IV,     et 

Joniandcs, 
cap.  uz. 


Csssiodnrd 

Eeose  h  tlK* 
llr  de?  écoes 
&  Rome  j.our 
les  saintes  lot- 
irez. 


il  prétendait  avoir  été  maltraité,  il  la  fit  met-  pe  Agapet,  qu'il  obligea  pour  cet  ell'et  d'al- 
tre  en  prison  dans  un  château  au  milieu 
d'une  île  de  Rolsène  en  Toscane ,  où  il  la  fit 
ensuite  étrangler  lorsqu'elle  était  dans  le 
bain,  sur  la  fin  de  l'an  534,  ou  au  commen- 
cement de  la  suivante. 

6.  Cependant  les  troubles  qui  s'étaient  éle- 
vés dans  l'Église  depuis  le  concile  de  Chal- 
cédoine  duraient  toujours.  Cassiodore  et  dix 


1er  A  Coustantinople.  Le  Tape  se  mit  en  de- 
voir d'obéir  ;  mais,  manquant  d'argent  pour 
un  si  long  voyage,  il  ne  put  en  obtenir 
qu'en  donnant  en  gages  aux  trésoriers  de 
l'Épargne ,  les  vases  sacrés  de  l'Église  de 
Saiut-I'ierre.  Cassiodore  l'ayant  appris,  fit 
sentir  au  roi  l'indignité  de  cette  action,  et 
envoya  ordre  aux  trésoriers  de  rendre  les 


Lll..    XII, 
E|>lti.Stl. 


des  principaux  du  sénat,  prièrent  le  pape  vaisseaux  sacrés,  et  de  les  faire  rapporter 
Jean  de  s'expliquer  sur  les  difficultés  qui  avec  respect  par  les  maiiis  des  diacres.  Il 
occasionnaient  ces  troubles.  Le  Pape  leur  ordonna  encore  que  l'on  rendit  aux  procu- 
répondit,  et  après  leur  avoir  expliqué  ce  que  reurs  de  l'Eglise  de  Saint-Pierre  l'obligation 
l'on  devait  penser  sur  le  mystère  de  l'Incar-  du  Pape.  La  négociation  de  Constantinople 
nation,  il  leur  recommanda  de  n'avoir  aucu-  fui  sans  ell'et  :  les  armées  de  Juslinien  furent 
ne  communication  avec  les  acémètes,  parce  victorieuses  partout,  et  Théodat  déposé  par 
qu'ils  étaient  nestoriens.  Cassiodore  ayant  les  principaux  officiers  de  san  armée,  comme 
remarqué  pendant  son  séjour  à  Rome,  que  indigne  de  gouverner.  Vitigès  qu'on  lui  dou- 
l'on  s'y  portait  avec  une  ardeur  extrême  A  na  pour  successeur,  le  fit  tuer  près  de  Ra- 
l'étude  des  lettres  profanes,  et  qu'il  n'y  avait  venue,  où  il  se  relira  lui-même  pour  se  ]ué- 
point  de  maîtres  publics  destinés  à  ensei-  parer  à  la  guerre.  Cassiodore  fut  maintenu 
gner  les  saintes  Écritures,  pensa  à  établir  en  sous  ce  nouveau  roi  dans  la  charge  de  pré- 
cette  ville,  à  ses  frais,  des  chaires  de  profes-  fet  du  Prétoire;  mais,  après  en  avoir  rcm- 
seurs  dans  les  écoles  chréliemies,  afin  de  pli  quelques  mois  les  fonctions ,  il  prit  le 
procurer  par  là  le  salut  des  âmes.  Il  proposa  parti  de  se  retirer  dans  un  monastère, 
son  dessein  au  pape  Agapet  qui  avait  suc-  8.  il  avait  dt'jà  vécu  i)rès  de  soixante  et 
cédé  à  Jean  H,  en  îi33;  inaisles  guerres,  qui  dix  ans,  et  en  avait  passé  plus  de  cinquante 
commencèrent  dès  lors  h  désoler  l'Italie,  en  dans  les  emplois  les  plus  importants  de  la 
empêchèrent  l'exéculion.  Pour  y  suppléer,  cour  et  de  l'Ktat.  On  met  sa  relraile  vera 

l'an  539,  et  on  ne  peut  la  mettre  plus  tôt , 

,  j^j,j  j^i  EpUii.  2  3.  puisqu'en  538  il  faisait  encore  les  fonctions 


r..i..  ..doi« 

■«  rii.ic  daw 
tto  lnoDl^tèr•. 


I 


CHAPITRE  XIX.  —  CASSIOnonE,  CIIANnELIEIl. 


[Vl'  SlfXLE.J 

do  pr(4ct  du  PriUoire,  commo  on  le  voit  p;ir 
lii  villgt-dl'^lxi^u]c  loltro  du  douzii'iue  livre. 
Il  y  iiviiit  loufitcmps  qu'il  se  le^'aidait  com- 
me captif  iiu  milieu  des  engagements  liono- 
raliles  qui  l'allacliaiont  au  monde  :  les  mal- 
lieurs  de  l'Italie  lui  préseutèrcnt  une  occa- 
sion favorable  de  le  quitter,  pour  ne  i)lus 
penser  qu'à  son  salut  dans  le  repos  et  dans 
la  retraite.  Ceux  qui  l'ont  voulu  faire  passer 
pour  une  retraite  forcée,  n'ont  pas  fait  at- 
tention qu'il  n'avait  rien  .'i  craindre,  ni  de 
la  part  des  rois  d'Italie,  à  qui  il  avait  tou- 
jours été  très-utile  et  très-agréable;  ni  de  la 
part  des  peuples  qui  l'avaient  toujours  chéri 
comme  leur  père;  ni  de  la  part  de  l'empereur 
Justinien  qui  connaissait  parfaitement  son 
mérite.  Il  choisit  pour  se  retirer  un  monas- 
tère qu'il  avait  fait  bâtir  auprès  de  Squillacci, 
connu  sous  le  nom  de  Castel  dans  les  Let- 
tres *  de  saint  Grégoire  le  Grand,  et  sous  le 
nom  de  Viviers,  parce  que  Cassiodore  fit  un 
monastère  double  :  l'un  au  bas  de  la  mon- 
tagne pour  des  cénobites,  l'autre  pour  les 
ermites  sur  le  haut.  Il  faisait  lui-même  pro- 
fession de  la  vie  religieuse  dans  ce  monas- 
tère. Non-seulement  Paul,  diacre,  l'appelle 
moine*  dans  son  Histoire  des  Lombards,  mais 
il  se  met  lui-même  clairement  au  nombre 
des  moines,  lorsqu'il  dit  dans  sa  Préface  sur 
l'Explication  des  Psauriics  :  «  Dieu  nous  fasse 
la  grâce  d'être  semblables  à  des  bceufs  infa- 
tigables ,  pour  cultiver  le  champ  de  Notre- 
Seigneur  avec  le  soc  de  l'observance  et  des 
exercices  réguliers.  »  Il  établit  deux  sortes 
de  moines  dans  ce  double  monastère,  les 
uns  pour  mener,  à  Viviers,  la  vie  cénobitique; 
les  autres  pour  pratiquer  les  exercices  des 
anachorètes  dans  la  solitude  de  Castel.  Mais, 
avant  d'en  envoyer  dans  ce  désert,  il  avait 
soin  de  les  exercer  et  de  les  éprouver  dans 
le  monastère  de  Viviers.  Pour  donner  à  ses 
religieux  les  moyens  de  s'instruire  et  les 
rendi-e  capables  de  servir  ensuite  l'Église  par 
leurs  travaux  et  par  leurs  écrits,  il  fit  venir 
à  Viviers  la  nombreuse  bibhothèque  qu'il 
avait  à  Rome,  et  apparemment  encore  celle 
qu'il  s'était  faite  étant  à  Ravenne,  et  les  aug- 
menta toujours  depuis  tpnt  qu'il  vécut.  11  faut 
l'entendre  s'expliquer  lui-même  là-dessus  à  la 

»  Lib.  \U  Epist.  31,  33. 

*  Paul,  diac,  lib.  I,  cap.  xxv. 

'  Qui  mecuin  dialecticam  legit,  et  in  exemplo 
gloriosi  magisteni  plurimos  aiinos  vitam  sitam 
Domino prœstanle  transegit.  Cassiod.,  lib. /;w£if. 
divin.,  cap.  xxni. 


211 


fin  de  son  Vtwc  de  l'Institution:  «  II.Iloz-vous" 
dit-il,  mes  cliers  frères,  de  faire  de  gramis 
progrès  dans  la  science  des  saintes  Écritu- 
res, et  animez -vous-y  en  considérant  que 
c'est  pour  vous  remplir  do  doctrine  que  j'ai 
amassé  un  si  grand  nombre  de  livres,  et  des 
livres  si  bien  conditionnés  et  si  bien  choisis.» 
Il  enseignait  hii-mémc  ses  religieux  ;  mais, 
ne  sulUsant  pas  pour  un  aussi  pénible  tra- 
vail, à  cause  de  son  âge  avancé  et  de  diver- 
ses occupations  indispensables,  il  se  cher- 
cha un  excellent  collègue  dans  la  personne 
de  Denys  le  Petit.  C'est  le  sens  que  l'on  don- 
ne '  ordinairement  aux  paroles  de  Cassio- 
dore  ;  mais  il  parait  que  Denys  le  Petit  était 
mort  avant  la  construction  du  monastère  de 
Viviers,  et  qu'il  ne  survécut  pas  assez  long- 
temps au  changement  de  vie  de  Cassiodore 
pour  avoir  enseigné  ensemble  la  dialectique 
pendant  plusieurs  années.  En  effet,  Cassio- 
dore parle  de  Denys  comme  déjà  mort  dans 
son  livre  de  l' Institution,  qu'il  fit  peu  après  sa 
conversion,  ainsi  qu'il  le  témoigne  lui-même 
au  commencement  de  son  traité  de  VOrtho- 
graphe.  Il  faut  donc ,  ou  que  Denys  ait  en- 
seigné en  un  autre  temps  avec  Cassiodore, 
ou  qu'on  retarde  la  mort  de  Denys. 

9.  On  ne  voit  nulle  part  que  Cassiodore 
ait  prescrit  aux  moines  de  son  monastère 
l'observation  de  la  Règle  de  saint  Benoit. 
11  leur  recommande  de  garder  avec  soin  les 
Règles  de  leur  précepteur,  c'est-à-dire  de 
leur  abbé  *,  les  instituts  des  Pères  et  ceux 
de  Cassien  ',  en  les  avertissant  toutefois  de 
les  lire  avec  circonspection  dans  les  endroits 
où  cet  auteur  s'est  éloigné  de  la  vraie  doc- 
trine, et  qui  ont  été  réfutés  par  saint  Pros- 
per.  Il  ne  laisse  pas  de  se  rencontrer  très- 
souvent  avec  saint  Benoit  sur  divers  points 
de  l'observance  monastique,  marquant  com- 
me lui  sept  heures'  différentes,  destinées  à 
la  psalmodie  pendant  la  journée  ;  à  quoi  il 
joint  les  nocturnes  ou  les  veilles  de  nuit.  Il 
ordonne  aussi  le  chant  des  Compiles  pour 
terminer  '  toutes  les  actions  de  la  journée. 
Il  recommande,  comme  saint  Benoit  *  le  soin 
des  étrangers,  des  pauvres  et  des  malades, 
et  il  y  a  un  chapitre  entier  de  son  Institu- 
tion adressé  aux  religieux  chargés  du  soin 

*  Quapropter  omnes  quos  monasteriisepta  con- 
clandunt,ta7n  Patrum  régulas,  quam prœceploris 
proprii  jussa  sercale.  Ibid.,  cap.  xsiii. 

'  Ibid.,  cap.  XXIX. 

•  Id.  inPsal.  csvi,  vers.  164. 

'  Id.  in  Psal.  xcx.—  '  Ibid..  cap.  xxxn. 


Mort  de 
Casâîodor«>, 
.cisl'an  5G3. 


212 


HISTOIRE  GÉNÉHALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


^1 


Élog*  da 
Cissiodore. 


des  malades,  comme  il  y  en  a  dans  la  Règle 
de  saint  Benoît.  Il  est  donc  très-vraisembla- 
ble que  Cassiodoie,  ou  connaissait  cette  Rè- 
gle, ou  qu'il  était  informé  de  ce  qui  se  pra- 
tiquait dans  le  monastère  du  Mont-Gassin. 
Nous  n'avons  aucun  historien  du  temps  qui 
nous  apprenne  l'année  de  sa  mort.  11  nous 
assure  lui-même  qu'il  avait  quatre-vingt- 
treize  ans  lorsqu'il  mit  la  main  à  son  traité 
de  r Orthographe.  Si  donc  il  est  né  en  469, 
ce  fut  en  562  qu'il  composa  cet  ouvrage. 
Mais  ce  ne  fut  pas  le  dernier,  et  on  prétend 
qu'il  travailla'  depuis  à  un  calcul  ecclésias- 
tique pour  trouver  le  jour  de  Pâques,  les 
épaeles  et  les  indictions.  Du  moins  est-il 
certain  qu'après  avoir  achevé  son  livre  de 
i Orthographe,  il  eut  encore  assez  de  loi- 
sir pour  revoir  ses  premiers  ouvrages  et  y 
ajouter  quelque  chose ,  comme  on  le  voit 
dans  son  livre  de  l'Institution  où  il  parle 
de  celui  de  l'Orthographe  écrit  longtemps 
après. 

iO.  Mais  en  quelque  temps  qu'elle  soit  ar- 
rivée ,  il  y  a  tout  lieu  de  croire  qu'elle  fut 
j)récieuse  devant  Dieu.  Les  écrivains  du  vin' 
siècle  l'ont  qualifié'  bienheureux  ;  d'autres 
l'ont  placé  parmi  les  confesseurs  ',  disant 
c[u'après  avoir  beaucoup  brillé  par  la  sain- 
teté de  sa  vie  et  par  sa  science  dans  les  let- 
tres divines  et  humaines,  il  vivait  après  sa 
mort  par  les  miracles  qu'il  opérait.  11  a  eu 
cet  avantage*  entre  tous  les  docteurs  de  l'E- 
glise, d'avoir  été  honoré  des  plus  éminentes 
dignités  du  siècle ,  et  de  s'en  être  acquitté 
avec  toute  l'intégrité,  la  religion  et  la  piété 
imaginables,  ayant  toujours  défendu  la  cause 
de  l'Église  catholique  avec  fidélité  ,  quoique 
les  rois  qu'il  servait  tissent  profession  de 
l'arianisme.  Heureux  d'avoir  quitté  la  cour' 
et  les  affaires  du  monde  pour  se  disposer  par 
la  vie  pénitente  à  comparaître  devant  celui 
qui  examinera  si  sévèrement  la  vie  des  mi- 
nistres des  princes,  et  qui  les  jugera,  non 
par  les  raisons  d'État ,  mais  par  les  vérités 
de  son  Évangile,  dont  pour  l'ordinaire  ils  font 
si  peu  de  compte  1 


ARTICLE  n. 

DES    ÉCRITS    DE     CASSIODORE. 

§    1- 

Des  Lettres  de  Cassiodore. 

i .  Le  plus  considérable  des  ouvrages  de 
Cassiodore,  dans  le  temps  qu'il  était  chargé 
du  poids  des  aflaires  sous  les  rois  d'Italie,  est 
le  recueil  de  ses  lettres.  Ses  amis  furent  long- 
temps à  le  presser  d'en  faire  un  corps  et  de 
le  rendre  public ,  dans  la  persuasion  qu'il 
pourrait  être  utile  à  la  postérité  pour  la  con- 
naissance de  l'histoire  de  son  temps.  «  On 
accorde,  leur  répond-il,  neuf  années  entières 
aux  auteurs  jiour  composer  leurs  ouvrages, 
et  je  ne  puis  pas  même  trouver  des  moments 
pour  travailler  aux  miens.  Sitôt  que  j'ai  pris  la 
plume,  on  m'étourdit  à  force  de  clameurs,  et 
je  me  vois  pressé  de  tant  d'endroits  ,  que  je 
ne  puis  achever  tranquillement  ce  que  j'ai 
commencé.  L'un  me  fatigue  par  des  sollici- 
tations importunes,  l'autre  vient  m'accabler 
du  poids  de  l'extrême  misère  qui  le  presse; 
d'autres  mêmes  m'environnent  et  m'assiè- 
gent de  discours  séditieux  et  pleins  de  fureur. 
Parmi  tous  ces  embarras  qui  me  permettent 
à  peine  de  parler,  comment  voulez-vous  que 
je  trouve  le  loisir  de  dicter  et  d'écrire  avec 
politesse?  Des  inquiétudes  inexplicables  ne 
me  laissent  pas  le  moindre  repos  pendant  les 
nuits  ,  ayant  ;ï  donner  ordre  que  toules  les 
villes  soient  suftisamment  pourvues  de  mu- 
nitions de  bouche.  Ainsi  je  me  vois  contraint 
de  parcourir  en  esprit  toutes  les  provinces, 
et  de  prendre  garde  si  l'on  exécute  les  ordres 
que  j'ai  donnés.  »  Ses  amis  ne  disconvenaient 
point  que  son  temps  ne  fût  extrêmement  par- 
tagé par  tous  les  embarras  et  par  toutes  les 
inquiétudes  inséparables  des  charges  dont  il 
faisait  les  fonctions  avec  tant  d'assiduité  etde 
suffisance  :  «  Mais,  disaient-ils  ,  cela  ne  doit 
pas  vous  détourner  de  mettre  au  jour  ce  que 
nous  demandons  de  vous.  Rien  ne  vous  sera 


Lrllrt 

Cas»lutjor 


^„. 


netc, 

lia. 


«  Baron.,  ad  ann.  862. 

•  Jlujus  locum  firophetùe  beatus  Cassiodorus 
ita  déclarât.  Alcuiu.  in  Psal.  XL. 

>  Cassiodorus  confessor ex  senaloremonachus... 
fitœ  sanclilate  adiiiodum  effulgrns,  divina  et  lin- 
7nana  litUratura  pollens,  nonnulla  perulitia  Ec- 
clesiœ  Dei  digessit...  sepultus  in  miraculis  liiit. 
l'ulr.  De  Natal.,  yi^.  28u,  edit.  1519. 


*  Auctor  iste  {Cassiodorus)  inler  omnes  doeto- 
res  ecclesiasticos  dignilalum  sa'cularium  honore 
summa  cum  integrilate,  religioneque  et  pielate 
prœfulsit.  Quamvifenim  reges  yt/s  esseni  ariani, 
!;)«(•  lamen  fiilclissime  perpétua  tenore  catholicœ 
iVc/cstiT  parles  défendit.  Coch\.Episl.a4  Thomam 
Morum  Angliœ  cancel. 

'  Anliquus  commenlarius  in  Psalnos. 


[vi«  SIÈCLE.]  CHAPITRE  XrX.  —  CASSIODORE,  CHANCELIER. 


213 


Los   cloq 
•niicrs      11- 


plus  glorieux  que  d'avoir  donné  au  public  , 
parmi  tant  do  travaux  et  d'atlaires,  des  ou- 
vrages aussi  cliiiiios  d'iMn'  lus  (jup  les  vôtres.» 
Cassiiulnrn  n(^  pouvant  ri'sister  ;\  de  si  pres- 
santes instances,  couseiilit;'i  publier  le  recueil 
de  ses  lettres.  Il  semble  qu'avant  d'en  être 
sollicit(5,  il  les  avait  déji\  mises  en  ordre,  et 
qu'il  en  avait  même  retouché  nnc  bonne  par- 
tie ;  mais  qu'il  n'avait  pas  encore  doimé  la 
dernière  main  à  cet  ouvrage;  il  est  divisé  en 
douze  livres  qu'il  intitula:  Z>i'w?'ses,  soit  à  cause 
des  divers  sujets  et  de  la  variété  de  la  ma- 
tière, soit  à  cause  des  ditl'érentes  personnes 
auxquelles  elles  sont  adressées  ,  ou  au  nom 
desquelles  elles  ont  été  écrites  ,  soit  parce 
qu'ayant  été  oldigé  d'en  écriie  au  nom  de 
plusieurs  persoinies,  il  en  avait  varié  le  style 
suivant  la  condition  de  ceux  pour  qui  il  les 
écrivait  et  à  qui  il  les  adressait.  En  effet,  il 
y  en  a  à  des  rois,  ;\  des  empereurs,  h  des  sé- 
nateurs, à  des  évêqucs  et  à  de  simples  par- 
ticuliers, comme  à  des  architectes,  à  des  ou- 
vriers en  marbre ,  à  des  médecins ,  à  des 
juifs. 

2.  Les  cinq  premiers  livres  ne  contiennent 
que  les  lettres  du  roi  Tliéodoric,  et  on  y 
trouve  peu  de  chose  qui  intéresse  notre 
sujet.  Nous  ferons  toutefois  remarquer  que 
dans  la  seconde  du  premier  livre  où  il  reprend 
im  nommé  Théonius  chargé  de  fournir  à  la 
cour  la  pourpre  nécessaire  pour  les  vête- 
ments royaux  ,  ce  prince  fait  une  fort  belle 
description  de  la  façon  de  teindre  les  étoffes 
avec  la  pourpre,  en  expliquant  ce  que  c'est. 
«  On  en  a  trouva,  dit-il,  le  secret  à  Tyr  par  le 
moyen  d'un  chien,  qui,  pressé  parla  faim,  se 
jeta  sur  quelques  coquillages  que  la  mer 
avait  poussés  sur  le  rivage.  En  ayant  broyé 
quelques-uns  avec  les  dents,  on  vit  sa  gueule 
teinte  d'une  merveilleuse  couleur.  Ceux  qui 
en  furent  témoins  firent  usage  de  ces  co- 
quillages pour  teindre  des  étoffes.  L'animal, 
renfermé  dans  ces  coquillages,  conserve  son 
sang  six  mois  après  sa  mort  ;  et  pour  l'expri- 
mer après  un  si  long  temps ,  on  se  sert  de 
pressoirs  faits  exprès.  »  Il  marque  dansla  neu- 
vième lettre  adressée  à  Eusforge,  évêque  de 
Milan ,  de  faire  rétablir  dans  l'honneur  de 


l'épiscopat  l'évoque  d'Augusta  accusé  par 
ses  clercs  d'avoir  voulu  trahir  sa  patrie.  Les 
accusateurs  étant  du  clergé,  Théiidoric  no 
voulut  point  les  punir  lui-nièmc;  mais  il  les 
renvoya  h  l'évcque  de  Milan  ,  leur  métropo- 
litain, pour  leur  faire  leur  procès,  sachant 
que  cet  évêque  était  observateur  des  lois  do 
l'Eglise.  Ce  prince  dit  à  cette  occasion  '  qu'on 
ne  doit  pas  juger  légèrement  ceux  qui  sont 
élevés  à  une  dignité  aussi  considérable  que 
l'épiscopat,  et  qu'il  faut  à  peine  croire  d'eux 
les  crimes  les  plus  connus.  Cette  attention 
est  remarquable  dans  un  prince  arien.  11  y 
a  deux  endroits  dans  la  seizième  lettre  qui 
ne  le  sont  pas  moins  :  l'un  où  il  dit  qu'il 
comptait  entre  les  avantages  de  la  royauté 
le  bien  qu'il  pouvait  faire  par  humanité  et 
par  miséricorde  ;  l'autre,  où  il  avance  qu'un 
prince  augmente  ses  richesses  à  mesure  que, 
négligeant  l'argent  qui  ne  mérite  que  du 
mépris,  il  acquiert  les  trésors  de  la  réputa- 
tion, qui  sontplus  dignes  de  son  estime.  Il  dit 
dans  la  trentième  lettre,  que  le  devoir  d'un 
bon  prince  est  non-seulement  de  punir  le 
crime,  mais  d'en  retrancher  aussi  les  occa- 
sions. D  est  parlé  dans  la  trente-cinquième 
d'un  poisson  nommé  en  latin  rémora ,  qui 
arrête  les  vaisseaux  au  milieu  de  leur  navi- 
gation ;  et  d'un  autre  appelé  torpilla  ,  qui 
engourdit  la  main  du  marinier  cpii  le  tou- 
che, encore  que  ce  ne  soit  qu'avec  quelque 
instrument.  On  voit  par  la  trente-septième  , 
que  les  Goths  ne  doutaient  pas  qu'il  ne  fût 
permis  à  un  mari  de  mettre  à  mort  l'adul- 
tère qu'il  trouvait  avec  sa  femme  :  ces  peu- 
ples, comme  nous  l'avons  vu  dans  Salvien  , 
étaient  très-cliastes  ,  et  ennemis  de  toutes 
les  libertés  contraires  à  la  pudeur.  La  troi- 
sième du  second  livre  est  un  éloge  d'un  gau- 
lois nommé  Félix,  que  Théodoric  avait  élevé 
au  consulat,  et  de  son  père,  dont  les  mœurs, 
l'érudition  et  l'éloquence  l'avaient  fait  pas- 
ser pour  un  Caton.  Quoiqu'il  fût  mort  depuis 
plusieurs  années  ,  la  mémoire  de  ses  vertus 
était  encore  fraîche;  «parce  que,  dit  Théodo- 
ric, les  belles  qualités  d'un  homme  '  vivent 
encore  après  lui,  et  que  ce  qu'on  fait  de  glo- 
rieux ne  vieillit  point  avec  le  temps.»  La  hui- 


I.oltro    IS  , 
p»b-.  10. 


L.-Mro 
P"S- 11. 


I.rltre  33, 
|ag. 1«. 


Lcllrc   37, 
png.  n. 


Lettre  3,  liv. 
n,  pag.  S3. 


Lettre  S, 'ag. 
2ô. 


'  Nihil  in  lali  honore  fepiscopatus)  temeraria 
cogilalione  prœsumendnm  est,  ubi  si  proposito 
crcdiliir,  etiam  tacilus  ab  excessibus  excusatur. 
Manifesta  proindè  criiniiia  in  talibus  vix  capiunt 
fidem...  Sed  quoniam  et  ipsi  impugnatores  cleri- 
catus  vomine  fungebaiitur.ad  sanctitalis  vestrce 
judicitim  cuncta  transmisimus  ordinanda,  cujus 


est  œquilatem  nioribus  talibus  imponere,  quem 
novimus  traditioncm  ccctesiasticam  custodire. 
ïheodor.,  lih.  I  Ejnst.  9,  pa;;.  1. 

*  Bona  durare  nonint  post  liominem;  et  quud 
gloriose  gerilur,  fine  tcmporis  non  tenelur.  ThcO' 
dor.,  hb   II  Episl.  3,  i)ag.  23. 


214 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Ltitt 

il>id. 


Lritrî 


Ltlirt 
Ibid. 


Lrfire 
p.C-81. 


Lcllrc 


m,  p.E.  . 


Ullre 


tième  est  très-honorable  aux  évoques ,  que 
Théodoiic  dit  être  les  plus  propres  à  rendre 
la  justice  par  leur  équité,  qui  ne  sait  faire 
acception  de  personne.  Aussi  ce  prince  s'a- 
dressa-t-il  à  l'évèque  Sévère ,  pour  distri- 
buer des  sommes  considérables  à  ceux  qui 
avaient  soutlert  quelques  dommages  par  le 

'"•  passage  de  ses  troupes.  Il  appelle  dans  la 
dixième  letti-e  le  mai-iage  un  sacrement  ' , 
qu'on  ne  peut  profaner  sans  une  témérité  cri- 

'••  minelle.  Par  la  dix-septième  il  décharge  un 
prêtre  de  la  ville  de  Trente,  tiommé  Butiliem, 
du  paiement  de  ce  qu'il  devait  au  fisc  ;  mais 
il  défend  en  même  temps  de  faire  payer  à 
d'autres  ce  que  ce  prêtre  devait,  «  de  peur, 
dit-il ,  que  la  grâce  qu'on  fait  à  celui  qui  l'a 
méritée ,  ne  tourne  au  dommage  de  l'inno- 

1?,  cent;  ce  qui  fait  horreur  à  dire.»  Dans  la  let- 
tre dix-huitième  il  regarde  comme  une  cho- 
se messéante  à  un  évèque  il'ctre  convaincu 
publiquement  par  la  perte  d'un  procès,  d'eu 
avoir  entrepris  ou   souteim  qui  ne  fussent 

*■'•  pas  justes.  Il  dit  dans  la  vingt-septième  que 
les  rois  ne  peuvent  commander  à  personne 
d'embrasser  une  religion,  parce  que  l'on  ne 

">  croit  pas* par  contrainte.  Dans  la  vingt-neu- 
vième adi-essée  à  un  sénateur,  nommé  Adila, 
qui  avait  la  garde  des  terres  et  des  fiefs  de 
la  Sicile,  Thi'odoric  lui  recommande  de  veil- 
ler à  la  conservation  des  biens  que  1  Église 
de  Milan  possédait  dans  cette  ile,  disant  que 
la  paix  et  la  tranquillité  des  sujets  fait  la  gloi- 
re du  prince  ,  et  que  les  personnes  qui  ap- 
partiennent à  l'Eglise  ,  et  les  biens  qui  eu 
dépendent,  méritent  une  protection  particu- 
lière en  vue  de  Dieu  ,  qui ,  pour  cette  atten- 

3?,  tion,  nous  fait  miséricorde.  On  voit  par  la 
trente-huitième  ,  qu'il  mettait  au  rang  de 
ses  plus  grandes  richesses  le  pouvoir  qu'il 
avait  de  rendre  heureux ,  par  le  moyen  de 
ses  tiéoors,  une  infinité  de  misérables  ;  et, 
parla  première  du  troisième  livre,  qu'il  était 
persuadé  que  la  justice  rendait  les  rois  plus 
forts  et  plus  redoutables  h  leurs  ennemis.  Il 
était  aussi  persuadé,  comme  il  le  dit  dans 
la  onzième ,  que  rien  n'est  plus  glorieux  à 
un  roi  '  que  de  rendre  ses  sujets  heureux. 


et  de  n'accroître  sa  puissance  que  pour  aug- 
menter la  félicité  de  ceux  qui  lui  sont  sou- 
mis. La  quatorzième  est  adressée  à  l'évèque 
Aurigène,  à  qui  Théodoric  renvoie  la  suppli- 
que d'un  nommé  Julien  qui  se  plaignait  de 
ce  que  les  sujets  de  l'évèque  lui  avaient  en- 
levé son  bien.d  Si  l'exposé  est  vrai,  lui  dit-il, 
punissez-en  l'auteur  sans  délai  :  parce  que 
le  mal  s'augmente  quand  il  dure,  le  remède 
est  d'en  accélérer  la  correction.»  Il  dit  dans 
la  vingt-septième  qu'un  juge  n'est  digne  * 
de  son  nom  qu'autant  qu'il  observe  les  lois 
de  la  justice  d'où  il  le  tire  ,  l'orgueil  n'étant 
pas  propre  pour  lui  conserver  un  titre  qui 
n'est  fondé  que  sur  l'équité.  La  trente-sep- 
tième est  une  plainte  à  l'évèque  Pieire  sur 
ce  qu'il  retenait  la  portion  de  bien  qui  ap- 
partenait à  son  frère.  Théodoric  lui  dit  que 
c'était  à  lui,  en  sa  qualité  d'évèque,  de  ter- 
miner cette  affaire,  et  qu'en  cas  qu'il  le  re- 
fuserait, il  l'appellerait  à  son  tribunal.  Apro- 
nien,  du  nombre  des  illustres,  et  comte  des 
domaines  ,  avait  donné  avis  au  roi  Théodo- 
ric qu'il  était  arrivé  à  Rome  un  homme  qui 
avait  le  secret  de  trouver  des  eaux  et  d'en 
faire  venir  dans  les  lieux  les  plus  arides, 
afin  qu'on  puisse  ensuite  les  habiter.  Le  roi 
témoigna  beaucoup  de  joie  de  voir  durant 
son  règne  des  expériences  de  cet  art,  «  dont 
nous  lisons ,  dit-il ,  les  préceptes  dans  les  li- 
vres des  anciens.»  Il  donne  lui-même  lesmar- 
ques  d'où  l'on  peut  conjecturer  que  l'eau  et 
la  source  ne  sont  pas  éloignées;  savoir,  lors- 
que l'herbe  est  fort  verte,  que  les  arbres 
montent  à  une  hauteur  extraordinaire,  qu'il 
croit  dans  ce  lieu  des  joues,  qui  aiment  l'eau, 
des  cannes,  des  roseaux,  des  peupliers  et  des 
saules.  «  Une  autre  marque ,  ajoute-t-il,  est 
quand  après  avoir  exposé  à  l'air  de  la  laine 
sèclie  pondant  la  nuit,  et  l'ayant  mise  sur  la 
terre  en  la  couvrant  de  quelfjues  vaisseaux  , 
on  la  trouve  humide  le  matin  ;  ou  quand  le 
soleil  étant  levé  on  voit  voler  près  de  la  terre 
une  grande  quantité  de  petits  moucherons.  A 
l'égard  de  la  pi'ofondeur  de  la  source,  on  la 
conuait  en  observant  à  quelle  hauteur  s'élève 
une  certaine  vapeur  qui  sort  de  terre.  U  y  a 


LMIre  ItJ 


rH>  *'. 


Lrltre  IT| 

I«5-  »8. 


m.  5v. 


'  Nec  dissimulari  potest  vt  illiud  humani  gcne- 
ris  procreabile  sacra menlum  scelerata  temeritale 
profanetur.  Ibii!..  Epist.  10. 

*  Jleligioncm  imperare  non  possumus,  quia  ne- 
mo  cogilur  ut  credal  invUus.  Lib.  II  Epist.  27, 
pag.  31. 

'  Quid  enim  tam  regium,quam  fecisse  felicemt 
Bénéficia  siquidcm  sunl,  quœ  régna  sublimant  ; 


et  libcrtatis  Dominus  jugiier  potest  crescere  si 
sibi  subjectos  sludeal  ampliare.  Lib.  11  Episl.  11, 
pag.  41. 

'  Taindiu  judex  dicitur,  quamdiu  et  jicsliis  pit- 
tatur  :  quia  nonten  quod  ab  œquitate  sumitur, 
pcr  superbiam  non  lentlur.  Lib,  III  Epist.  27, 
p.ifj.  40. 


[Vl*  SIÈCLE.] 

encore  des  signes  auxquels  on  jupe  de  la 
quiililé  des  eaux  avant  de  les  avoir  éprou- 
vées. Car  celles  qui  jaillissent  du  coté  du 
lovant  ou  du  midi  ,  sont  douces,  claires,  lé- 
gères et  bonnes  pour  la  santé.  Celles  au 
contraire  qui  coulent  vers  le  couchant  ou 
le  septentrion  sont  fort  fraîches  ,  mais  trop 
pesantes  et  trop  épaisses.  »  Ce  prince  ordon- 
ne h  Apronicn  de  fournir  à  cet  homme  des 
deniers  de  l'Eparnuc  de  quoi  subsister,  et 
de  lui  chercher  pour  compaf^non  un  ouvrier 
habile  dans  les  mécaniques  et  dans  l'hydro- 
liqne,  qui  puisse  faii-e  monter  les  eaux  qu'il 
.KT.Vvrw'  ""™  découvertes.  Il  exhorte  dans  la  Ireute- 

*••  unième  du  quatrième  livre ,  l'évèque  Hmi- 

lien  A  achever  un  aqueduc  (jn'il  avait  entre- 
pris de  rétablir  par  l'autorité  royale  ,  disant 
que  par  cet  ouvrage  il  imitera  Moïse  qui 
tira  d'un  rocher  des  fontaines  abondantes 

pigM'.™  "'  V°^^'  étancher  la  soif  du  peuple  d'Israël.  Il 
dit  dans  la  quarante-deuxième  ,  qu'il  n'y  a 
point  d'orphelins  dans  les  états  d'un  bon 
prince  .  parce  qu'il  est  le  père  commun  de 
tous  ceux  qui  n'en  ont  point,  et  que  la  vraie 
noblesse  qui  '  n'est  contestée  de  personne  , 
est  celle  qui  vient  de  la  vertu  et  des  bonnes 

II,  'v""  !"'  ™'"-i'i's-  Il  ajoute  qu'on  ^  goûte  plus  agréable- 

"'•  °  ment  les  bienfaits  qui  n'ont  rien  coûté  à 
obtenir;  et  qu'une  loi  n'a  rien  '  de  trop  dif- 
licile,  quand  le  prince  est  le  premier  à  s'y 
soumettre. 

3.  Les  sixième  et  septième  livres  sont  com- 
posés de  ditl'érentes  formules,  soit  de  brevets 
et  de  provisions  des  charges  et  des  dignités 
de  la  cour  et  de  l'Etat,  soit  des  permissions  qui 
devaient  s'accorder  au  nom  du  roi.  La  pre- 
mière formule  est  du  consulat.  Les  suivan- 
tes sont  des  dignités  de  patrices ,  de  préfets 
du  prétoire,  de  préfets  de  Rome,  dont  la  ju- 
ridiction s'étendait  l'espace  de  cent  jets  de 
pierre  au  delà  de  cette  ville  ;  de  questeurs  , 
de  grands-maitres  du  palais,  de  comtes  des 
libéralités  du  roi,  de  comtes  de  sou  patri- 
moine, de  ceux  que  l'on  appelait  grands;  ce 
n'était  qu'un  simple  titre  d'honneur,  sans  au- 
cun appoinlement.  Il  y  a  aussi  beaucoup 
d'autres  formules  pour  des  dignités  moins 
considérables,  comme  de  celles  de  vicaii-es 
ou  lieutenants  de  Rome,  de  notaires  ou  se- 


CHAPITRE  XIX.  —  CASSIUDORE,  CHANCELIER. 


215 


Lrliro  ir,, 
pa^'.  78. 
Lollro  ta 


Livres  VI 

Cl  vu. 


crétaires,  do  référendaires  ou  maîtres  des 
requêtes,  de  pri'fets  des  vivres,  ou  déju- 
ges préposés  pour  fixer  le  prix  du  pain'et  de 
veiller  à  ce  qu'il  fût  bon  et  de  poids  ;  de 
comte  des  médecins,  ou  premier  médecin; 
de  consulaires  qui  étaient  envoyés  dans  les 
provinces  avec  une  autorité  presque  égale  à 
celle  des  consuls  ;  d'intendants  des  provinces,  ^ 
de  comte  des  Goths  ,  à  qui  il  appartenait  de 
terminer  les  affaires  que  ces  peuples  avaient 
avec  les  Romains  ;  de  ducs  de  la  Uh(Uie  ou 
du  pays  des  Grisons,  préposés  à  la  garde  des 
frontières  de  l'État  de  ce  côté-l;ï;  de  premier 
architecte  ou  surintendant  des  bâtiments;  de 
capitaines  du  guet,  soit  de  Rome,  soit  de  Ra- 
yonne, établis  pour  la  sûreté  des  citoyens; 
de  tribuns  des  plaisirs,  qui  étaient  chargés  de 
retrancher  des  spectacles  tout  ce  qui  pouvait 
être  contre  l'honnêteté;  de  défenseurs  des 
villes,  qui  en  étaient  comme  les  maires.  Dans  liI'  vr, 
la  formule  du  vicaire  de  Rome,  il  est  parle  m- 
d'un  prince  cardinal  de  Rome  qui  suivait  tou- 
jours le  roi.  Parmi  les  formules  des  permis- 
sions on  en  trouvait  de  dispense  d'âge,  que 
le  roi  accordait  pour  rendre  capables  d'agir 
et  de  contracter  ceux  qui,  n'étant  pas  en  âge 
de  le  faire  selon  les  lois,  avaient  toutefois  la 
prudence  et  la  maturité  nécessaires  pour  ce- 
la; d'autres  pour  rendre  valide  un  mariage, 
et  les  enfants  qui  en  étaient  nés  habiles  à 
succéder,  et  une  pour  légitimer  un  mariage 
contracté  avec  une  cousine  germaine,  ou  la 
fille  de  la  tante  maternelle.  La  plupart  de  ces 
formules  sont  semées  de  maximes  de  morale 
et  de  politique.  Il  est  k  remarquer  dans  la 
première  du  septième  livre,  que  lorsqu'il  s'a- 
git *  de  prononcer  sur  la  vie  des  hommes,  les 
juges  doivent  temporiser,  parce  qu'il  n'en  est 
pas  de  la  sentence  prononcée  en  cette  occa- 
sion comme  des  autres  que  l'on  peut  corri- 
ger avec  le  temps;  qu'd  faut  donc  que  le 
glaive  corrige,  s'il  est  possible,  tous  les  cou- 
pables par  la  crainte  qu'il  imprime;  mais 
que  l'innocence  y  trouve  du  secours,  les  lois 
ayant  autorisé  le  glaive  pour  se  défendre.  Il 
est  dit  dans  la  troisième,  qu'on  ne  défend 
pas  une  cause  par  la  force  du  bras,  mais  par 
l'évidence  du  droit. 

4.  Les  lettres  du  huitième  et  du  neuvième  3,  p^jç.'iot'"' 


Lil..  VU, 
fArm.  2,  fjlg. 
IU3. 


Ibid.,  roriTi 
3,  paf,  llll. 


1  Bœc  est  indubitata  noMlitas.  qtiœ  moribus 
probatur  ornata.  Lib.  V  Epist.  12,  pag.  "7. 

-  Dulciora  sunt  bénéficia  que  nullis  difficuUati- 
bus  obtinentur.  Kpist.  15,  pag.  78. 

'  Kulli  gravis  estjussio,  quœ  constringit  et  prin- 


cipetn.  Epist.  18,  pag.  79. 

*  Cunclator  esse  débet  qui  judicat  de  salute. 
Alia  scnlenlia  polcsl  corrigi:  de  vila  transactum 
non palilur  immutari.Lih.Wl,  form.l,  pag.  103, 


216 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


li\Tes  sont  toutes  du  roiAtlialaricà  l'excep- 
tion de  la  onzième  du  huitième  livre,  qui  est 
d'un  patrice.  et  adressée  au  sénat  de  Rome. 

','w.'  ^^  piince  dit  dans  la  dixième  que  les  glo- 
rieuses blessures'  sont  des  éloges  qui  n'ont 
pas  besoin  de  bouches  pour  les  publier; 
elles  sont  le  langage  propre  de  la  v.ileur 

'•<•■  quand  on  les  a  reçues  dans  le  combat.  Atha- 
laric  disait  à  un  ofiicier  qui  avait  servi  avec 
honneur  sous  Théodoric,  et  à  qui  il  donnait 
la  dignité  de  questeur  :  «  Donnez-moi  des 
marques  de  votre  fidélité  enm'avertis.sant  du 
bien  que  je  suis  obligé  de  faire,  et  élevez- 
vous  avec  courage  contre  les  entreprises  des 
méchants.  Un  bon  prince  permet  toujours 
qu'on  lui  parle  pour  la  justice;  au  contraire, 
la  marque  certaine  d'une  cruauté  tyranui- 
que,  est  de  ne  vouloir  point  entendre  parler 
des  lois  anciennes.  J'emploie  volontiers  ces 
excellentes  paroles  de  Trajan  :  Recevez  cette 
charge,  et  servez-vous  de  l'autorité  qu'elle  vous 
donne,  ou  jjour  la  république  et  pour  moi  si  Je 
gouverne  en  prince  équitable,  ou  pour  la  répu- 
blique contre  moi,  si  je  m'éloigne  de  mon  de- 
voir. Considérez  donc  ce  que  j'exige  de  vous, 
et  sachez  que  je  ne  crois  pas  pouvoir  me  per- 
mettre quoique   cliose   contre  la  justice.  » 

'■  -«•  Athalani_  disait  dans  une  autre  occasion  que 
le  règne  d'un  prince  reçoit  un  de  ses  plus 
grands  ornements  de  la  lionne  conduite  des 
juges  et  des  autres  officiers  qu'il  a  établis  ; 
que  comme  c'est  ce  qui  lui  fait  un  nom  célè- 
bre dans  toutes  les  nations,  c'est  aussi  ce  qui 
soutient  son  trône,  ses  ennemis  étant  sur- 
montés avec  plus  de  succès  par  les  bonnes 
mœurs  que  par  les  armes,  et  ceux  que  le  ciel 
prolègi;  ne  pouvant  avoir  d'ennemis  heureux. 

'■■'•  Il  parle  d'une  fontaine'  miraculeuse  dans  la 
Calabre,  appelée  Marcilliane,  dont  les  eaux 
croissaient  prodigieusement  la  nuit  de  Pâques 
lorsqu'on  commençait  à  donner  solennelle- 
ment le  baptême  suivant  l'ancienne  coutume. 
L'empereur  Justinicn  avait  recommandé  au 
roi  Théodat  certaines  religieuses  qui  se  trou- 
vaient hors  d'état  de  payer  les  tailles,  parce 
que  les  terres  pour  lesquelles  ou  les  Icui-  de- 
mandait avaient  été  ruinées  par  une  inonda- 
tion suivie  de  la  stérilité.  Le  roi  Théodat  ren- 


voya l'affaire  à  Cassiodore,  afin  qu'il  s'infor- 
mât du  dommage  que  l'inondation  avait  causé 
à  ces  fdles,  et  (ju'il  le  réparât  de  façon  qu'el- 
les pussent  tirer  quelque  utilité  de  leurs  ter- 
res. Il  lui  ordonna  aussi ,  à  la  demande  du 
même  prince,  d'empêcher  qu'une  dame  de 
qualité,  nommée  Véranilda,  qui  avait  quitté 
l'arianisme  pour  se  faire  cathoUque,  ne  fût 
maltraitée  par  ceux  de  sa  nation.  La  raison 
que  Théodat  rend  de  sa  conduite  à  cet  égard, 
est  que  Dieu,  tolérant  plusieurs  religions  dif- 
férentes en  ce  monde,  ne  pouvait  contrain- 
dre ses  sujets  à  une  seule. 

5.  Dans  le  dixième   livre  sont  comprises    ub.x,EpM. 
les  lettres  écrites  au  nom  d'Amalasonthe,  de     •■'**■''• 
Théodat,  de  la  reine  Gudéline,  sa  femme,  et 

du  roi  Vitigès.  Théodat  dit,  dans  celle  qu'il 
écrivit  au  sénat  de  Rome,  qu'il  avait  foutes 
choses  en  son  pouvoir,  mais  qu'il  ne  se  croyait 
rien  permis  que  ce  qui  était  digne  de  louange. 
La  vingt-septième  ,  qui  est  du  même  prince  ,       Kpui.  r, 
est  un  ordre  à  Sénator ,  préfet  du  Prétoire  ,   ^'^'  ' 
pour  soulager  les  provinces  affligées  de  la 
guerre  et  de  la  stérilité,  surtout  la  Ligurie  et 
le  pays  de  Venise,  en  faisant  distribuer  des 
blés  aux  peuples  de  la  campagne,  n'étant  pas 
juste  que  ceux  qui  cultivent  les  terres  et  dont 
les  travaux  avaient  rempli  les  greniers,  mou- 
russent de  faim.  Vitigès,  successeur  de  Théo-     Epui.  32  « 
dat,  en  écrivit  une  à  l'empereur  Justinien  ,     '^^' 
pour  lui  demander  la  paix,  et  une  aux  évo- 
ques de  ses  étals  poui-  leur  demander  le  se- 
cours de  leurs  prières. 

6.  Il  n'est  pas  difficile  de  reconnaître  au       U"«  n, 
style  des  lettres  dont  nous  venons  de  parler, 
qu'elles  sont  presque  toutes  de  Cassiodore, 
quoiqu'elles  portent  le  nom  des  princes  dont 

il  était  le  ministre.  Celles  des  deux  livres  sui- 
vants sont  écrites  en  son  nom  propre,  comme 
préfet  du  Prétoire,  excepté  la  treizième  du    uitr.ioSé. 

,.  .         ,  j  ...        ml  de  fioine. 

onzième  livre,  qui  est  au  nom  du  sénat  de 
Rome.  Il  joint  partout  le  nom  de  sénateur  à 
sa  qualité  de  préfet,  ce  qui  donne  heu  de 
croire  que  ce  nom  lui  était  propre  comme 
celui  d'.\urèle.  Ces  deux  livres  sont  précédés 
d'une  préface  dans  laquelle  il  dit  assez  claire- 
ment qu'il  était  auteur  des  lettres  contenues 
dans  les  dix  livres  précédents,  et  qu'après 


'  Vtdnera,  opinio  inseparabilis,  siiic  assertore 
prœcunium  ,  prupria  lingua  virtutis.  Lib.  VIII 
Epist.  in,  png.  120. 

'  Veniaiims  nd  illud  singulare  mttnu^ sanctum- 
que  miraculum:  nnm  cumdie  sacralœ  noctispre- 
cem  baplismati.1  cœpcril  sacerdos  effundere,  et  de 
ore   sancto  sermonum  fontes  emanare,  mox  in 


altum  unda  prosiliens  aquas  suas  non  per  mea- 
lus  soUtos  dirigil,  sedin  nltituilinem  ctimulumijue 
transmillit.  Erigitur  hrutum  rlementum  sponte 
sua,  el  quadam  devnlione  solemni  prirparat  se 
miraculix,  iil  sancli/icutio  wajestalis  possit  os- 
leiidi.  Lib.  VIII  Enist.  8,  pa?.  l31. 


[VI*  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  XIX.  —  CASSIOnOIlE,  CHA.NCELIER. 


217 


avoir  parle  en  la  personne  des  rois,  il  conve- 
nait <iu'il  parlilt  en  la  sienne  propre  clans  les 
deux  suivants.  Comme  on  aurait  pu  être  sur- 
pris qu'il  eut  écrit  si  pende  lettres  étant  pré- 
fet du  Prétoire,  il  eu  donne  pour  raison  qu'il 
avait  été   aidé  dans  les  fonctions  de  cette 
charpie  par  Félix,  homme  également  rccom- 
luandable  par  la  pureté  de  ses  mœurs,  par 
son  savoir  et  par  son  éloquence  ;  ce  qui  mar- 
que que  Félix  avait  partagé  avec  lui  le  soin 
d'écrire  les  lettres  et  de  faire  les  réponses  né- 
cessaires. La  première  des  lettres  de  Cassio- 
dore  est  adressée  au  sénat  de  la  ville  de  Ho- 
me, pour  le  prier  de  rendre  grâces  au  roi 
Athalaricet  à  la  reine  .\malasonthe,  sa  mère, 
de  ce  qu'ils  l'avaient  honoré  de  la  charge  de 
préfet  du  Prétoire.  Il  représente  cette  prin- 
cesse comme  partageant  son  affection  et  sa 
tendresse  maternelle  entre  le  j'eune  roi  Atha- 
laric,  son  fils,  et  ses  sujets  qu'elle  aimait 
comme  ses  propres  enfants,  comme  étant  d'un 
génie  supérieur  à  tout  autre,  et  en  vénération 
dans  tous  les  royaumes  et  dans  tous  les  états 
du  monde.  »  Sa  vue  ,  dit-il,  imprime  le  res- 
pect; sa  parole  charme  et  ravit  en  admiration. 
Quelle  langue  peut-on  nommer  qu'elle  ne 
sache  parfaitement?  Elle  parle  grec  aussi  pu- 
rement qu'on  parlait   autrefois  à  Athènes  ; 
elle  brillerait  parmi  les  plus  célèbres  ora- 
teurs latins  que  Rome  ait  produits  ;  elle  pos- 
sède toutes  les  richesses  et  toutes  les  beautés 
de  sa  langue  maternelle  ;   elle  surpasse  tous 
ceux  qui  excellent  en  quelque  art  ou  en  quel- 
que science,  ayant  une  parfaite  connaissance 
des  lettres  qu'elle  regarde  comme  un  orne- 
ment plus  riche  que  le  diadème  ;  elle  sait  ter- 
miner en  peu  de  mots  les  procès  les  plus  épi- 
neux, conduire  les  atl'aires  de  la  guerre  sans 
rien  perdre  de  sa  tranquillité  d'esprit,  garder 
et  faire  garder  aux  autres  un  grand  secret, 
quand  il  s'agit  des  aÛaires  qui  regardent  le 
bien  public ,  en  sorte  qu'on  voit  les  entre- 
prises exécutées  avant  qu'on  sache  qu'elles 
aient  été  résolues  dans  le  conseil.  »  Il  ajoute 
que,  ses  armées,  par  le  bon  ordre  qu'on  y  ob- 
servait, ont  été  la  terreur  des  peuples  voisins, 
et  qu'elles  ont  fait  sentir  leur  valeur  à  ceux 
qui  ont  osé  attaquer  leurs  frontières;  que  les 
Français ,  ces  conquérants  fiers   de  tant  de 
^^ctoires   remportées   sur  plusieurs  peuples 
barbares,  out  été  mis  en  désordre  dans  une 
grande  expédition,  et  qu'ayant  été  attaqués 


ils  n'ont  osé  risquer  luie  bataille  contre  les 
Gotlis,  quoi(pie  leur  coutume  soit  d'attaquer 
les  premiers  leurs  ennemis  et  de  couiii-  au 
combat  avec  ardeur.  Gassiodore  l'ait  dans  la 
même  lettre  l'éloge  du  patrice  Libère,  pré- 
fi't  des  Gaules. 

7.  Dans  la  lettre  suivante  qui  est  adresséeau 
pape  Jean,  Cassiodore  reconnaît  que  c'est  par 
sesjeûnes,  et  ceux  du  clergé, queles  peuples 
ontété  ou  délivrésou  préservés  de  la  famine, 
qu'ils  ont,  par  leurs  larmes  précieuses  devant 
Dieu,  banni  la  tristesse  publique,  et  que  c'est 
par  les  prières  des  saints  que  l'État  s'est  vu 
promptement  déchargé  d'un  fardeau  qui 
l'accablait.  Toutes  ces  considérations  don- 
nent la  confiance  à  Cassiodore  de  supplier 
le  l'ape  d'otirir  à  Dieu  ses  prières,  pour  la 
conservation  des  princes.  Il  lui  demande  de 
prier  en  particulier  pour  lui,  afin  que.  Dieu 
lui  ouvrant  l'esprit,  la  face  de  la  vérité  se  dé- 
couvre à  ses  yeux ,  de  peur  que  le  corps  et 
les  sens  ne  le  remplissent  de  ténèbres.  «  De- 
mandez, ajoute-t-il,  que  je  me  montre  dans 
les  fonctions  de  juge  un  digue  enfant  de  l'E- 
glise catholique.  Étant  le  père  commun,  vo- 
tre amour  n'a  point  de  bornes.  Il  est  de  vo- 
tre honneur  de  procurer  la  sûreté  et  le  repos 
aux  peuples  chrétiens  dont  la  garde  vous  a 
été  donnée  de  la  part  de  Dieu.  Nous  n'avons 
entre  nos  mains  qu'une  partie  des  affaires  ; 
mais  tout  généralement  vous  est  confié. 
Quoique  que  je  sois  juge  du  palais,  je  me 
ferai  toujours  gloire  d'être  votre  disciple, 
persuadé  que  je  fais  bien  lorsque  je  ne  m'é- 
loigne point  de  vos  règles.  C'est  donc  à  vous 
de  m'aider  de  vos  conseils  et  de  vos  prières. 
Rome,  qui  fait  l'admiration  de  tout  l'univers, 
doit  accorder  son  affection  à  ceux  qui  la  ré- 
vèrent. Sous  la  protection  des  saints  apôtres 
nous  n'avons  rien  à  craindre,  pourvu  que  le 
Pontife  qui  tient  leur  place  ne  nous  refuse 
pas  le  secours  de  ses  prières,  n  Cassiodore 
appelle  dans  cette  lettre  confession,  la  partie 
de  l'Église  où  l'on  avait  mis  sous  l'autel  les 
reliques  des  deux  apôtres  saint  Pierre  et 
saint  Paul. 

8.  Il  écrivit  aux  évêques  d'Italie  pour  les 
supplier  d'ordonner'  un  jeûne,  afin  d'obte- 
nir par  la  voix  puissante  de  la  pénitence  et 
de  l'humilité  ,  la  conservation  des  princes  et 
la  paix;  d'être  eux-mêmes  les  consolateurs 
des  veuves  et  des  orphelins,  contre  les  en- 


Lellri-  tu 
pifc'  Jpia, 
1»E.  IC2. 


Lettre  aux 
évoques  d'Ita- 
lie, paf.  163. 


'  Vos  deprecor  ut  indicto  jejunio  Domino  sup- 
plicttis  qui  vilam  principum  nostrorum  florenti 


regno  protendat,  et  i>onet  quieta  tempora.  Cas- 
siod.,  lib.  XI  Epist.  ',  pag.  163, 


218 


HISTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


.  treprises  des  horomes  violents,  sans  toute- 
fois renverser  les  lois  de  l'État  par  un  excès 
de  piété  et  de  tendresse;  de  donner  à  leurs 
peuples  des  avis  si  utiles  et  si  ellicaces,  qu'il  ne 
reste  plus  rien  à  faire  pour  les  jupes  du  siè- 
cle ;  de  bannir  de  cliez  les  clirétiens  l'avari- 
ce, les  larcins,  la  mollesse  et  tous  les  autres 
vices,  en  les  assurant  que  s'ils  ne  cessent 
point  de  prêcher  et  d'exhorter,  les  peines  et 
les  supplices  ne  cesseront  point.  Il  leur  de- 
mande de  lui  donner  en  amis  tous  les  avis 
qu'ils  jugeront  nécessaires  pour  sa  conduite. 
Amb^«''?ft  9.  Il  y  a  deux  lettres  à  Ambroise  du  rang 
*^'  "''  des  illustres,  et  ce  semble,  vicaire  de  Ro- 
me, dans  lesquelles  il  lui  recommande  de 
pourvoir  aux  besoins  publics,  et  surtout  de 
secourir  au  plus  tôt  le  peuple  romain,  qui 
était  dans  la  disette  des  choses  nécessaires  à 
la  vie.  ('  A  Dieu  ne  plaise,  lui  écrit-il,  que  je 
mange  jusqu'à  me  rassasier,  tandis  qu'il  y 
aura  un  seul  des  Romains  qui  aura  faim!  Je 
regarde  leur  indigence  comme  la  mienne 
propre.  Je  ne  saurais  me  réjouir  que  la  tris- 
tesse ne  soit  bannie  de  leur  ville.  » 
it,u,Yh>mt-  10.  La  lettre  à  Jean  est  pour  lui  notifier 
lier, i.E.  161.  qu'il. le  Créait  chancelier;  c'est  pourquoi  il 
l'avertit  des  devoirs  de  son  ministère  et  de 
sa  charge,  qu"il  appelle  une  espèce  de  mi- 
lice domestique.  C'était  aux  chanceliers  à 
présenter  au  préfet  ceux  qui  avaient  obtenu 
de  lui  audience,  à  leur  servir  d'iutcrprètc 
dans  le  Ijesoin  ,  et  h  exposer  leurs  requêtes. 
Ils  étaient  tenus  au  secret,  et  obligés  d'expé- 
dier gratuitement  les  ordonnances  des  pré- 
fets; leur  nom  venait  des  chanceaux  ou  des 
balustrades  faites  en  façon  de  treillis,  où  ils 
se  tenaient,  a  la  porte  des  princes  et  des 
préfets  du  Prétoire;  leurs  clôtures  étant  ou- 
vertes de  tous  les  côtés  et  percées  partout 
de  petites  fenêtres ,  on  les  voyait  de  tous  les 
endroits,  de  manière  que  ce  qu'ils  faisaient 
dans  leurs  chanceaux  ne  pouvait  êti-e  caché. 
u:tr,»i,.o.       11.  Les  tailles  ou  les  subsides  se  pavaient 

le«  jogps  des  .  .  ,  , . 

pro.iDce»,  ordinairement  en  trois  quartiers,  c  est  a-dire 
lie  quatre  mois  en  quatre  mois.  Cassiodore 
écrivit  en  53-4 ,  aux  officiers  des  provinces 
de  faire  payer  exactement  ces  tailles  aux 
temps  marqués,  et  de  lui  envoyer  chaque 
fois  des  registres  de  leurs  recettes  pour  les 
mettre  dans  les  Archives  de  l'État;  il  les 
avertit  en  même  temps  de  ne  point  abuser 


de  la  levée  de  ces  deniers  pour  satisfaire 
leur  avarice  par  des  voies  indirectes ,  qu'il 
appelle  une  industrie  détestable,  prometliint 
de  récompenser  ceux  qu'il  saurait  s'être 
comportés  avec  honneur  et  en  gens  do  bien. 
L'édit  qui  est  joint  à  cette  lettre  contient  plu- 
sieurs belles  maximes,  entre  autres,  qu'il  est 
inutile  que  ceux  qui  rendent  la  justice,  le  fas- 
sent gratuitement,  s'ils  permettent  à  ceux  qui 
les  servent  de  recevoir  de  l'argent,  et  qu'une 
loi  n'a  point  de  force,  lorsqu'elle  n'est  point 
soutenue  de  l'exemple  de  celui  qui  l'a  faite. 
n  écrivit  une  seconde  lettre  aux  juges  des  vt.  ite. 
provinces  pour  les  exhorter  h  rendre  la  jus- 
tice aux  peuples,  et  à  leur  faire  observer 
les  lois,  leur  enjoignant  de  lui  envoyer  tous 
ceux  qui  auraient  méprisé  leur  autorité,  et 
qu'ils  n'auraient  pas  eu  la  force  de  punir.  Il 
en  adressa  une  autre  au  chancelier  Béatus 
pour  lui  marquer  de  la  part  du  roi,  de  four- 
nir à  un  de  ses  domestiques  nommé  Davus, 
toutes  les  choses  nécessaires  au  rétablisse- 
ment de  sa  santé  sur  le  mont  Laclarius  où  il 
était  allé  pour  prendre  l'air. 

12.  Afin  de  contribuer  au  soulagement  des      Édu  r» 

^  Sier   le     pH 

peuples ,  il  fit  rendre  un  édit ,  dans  lequel  il  "•«  ,''"'*" 
spécifia  toutes  les  denrées,  avec  leur  prix, 
qui  était  tel  que  les  vendeurs  n'y  perdaient 
rien,  et  qu'ils  y  gagnaient  raisonnablement. 
Il  portait  une  amende  pécuniaire  pour  les 
contrevenants,  et  même  la  bastonnade,  pour 
mettre  un  frein  à  la  cupidité  par  la  crainte 
de  la  perte  du  bien  et  des  supplices  cor- 
porels ;  et  comme  ceux  qui  tenaient  les 
hôtelleries  prétendaient  que  cet  édit  ne  re- 
gardait que  les  citoyens  et  non  pas  les  étran- 
gers, à  qui  par  cette  fausse  interprétation  ils 
vendaient  les  vivres  au  delà  du  prix  fixé,  il 
en  donna  un  second ,  par  lequel  il  était  or- 
donné aux  hôteliers  de  se  conformer  au  pre- 
mier, sous  les  peines  qui  y  étaient  portées; 
l'amende  pécuniaire  était  de  six  sols  d'or. 
Un  geulilliommc,  envoyé  sur  les  lieux,  devait 
fixer  le  prix  des  choses ,  de  concert  avec  les 
bourgeois  et  l'évêque. 

13.  Vers  l'an  536,  le  sénat  de  Rome  écri-    ,  "f" 
vit  fi  l'empereur  Justinien.pour  le  prier  d'ac-  \J^,\7^ 
corder  le  paix  au  roi  Théodat.  Le  sénat  fait 
de  ce  prince  une  éloge  magnifique.  Je  faisant 
passer  pour  le  plus  savant  et  le  plus  sage 
des  rois  des  Romains.  «C'est,  ajoute-t-il',  la 


»  Ouod  si  adfiuc  minus  est,  bealorum  apostolo- 
rum  Pelri  atque  Pauli  petitio  sanctissima  cogite- 
lur:  iwm  qui  securilatem  romanam  sœpe  drfni- 


difse  prohanUir  ah  hoslibus,  gwd  eril  quod  eo- 
rum  nierilis  tester  non  trilmnt  jirindpatuJi.  Cas- 
fioil.,  lib.  XI  i:pist.  13,pag.  I(i7. 


[Vl'  SIÈCLE.] 


CMAPITllE  XIX.  —  CASSIODOllE,  CHANCELIEU. 


219 


Ullro  à 

(•AlKtil'SUÏ      01 

■ux  Ligi>riOD<i| 
f«S.  168. 


Grop.  Magn, 
lib,  III  Dul. 


I..-Mr.-.  ! 
Jraii  L[  h  Vl 
laljrn.       pa^ 

I7i  ir->. 


•LT-r  XII. 

Lettres  &  des 
cli^n-^cliers  el 
b  des  Juges  de 
pn- minces, 
p»f.  175. 


F.p;.i.  I,  a, 

3  ni. 


prière  que  nous  f;iit  Rome  par  la  bouche  do 
ses  sénaleurs,  et  si  cela  ne  vous  louche  pas, 
écoutez  la  voix  dos  bienliciirotix  apôlros 
Pierre  et  Paul,  qui  vous  ilouiaTuk'nl  j^ràcc 
poui'  une  ville  (pi'ils  oui  si  souvenl  di'fciuiuo 
contre  les  ennemis  qui  onl  été  assez  lémé- 
raires  pour  l'attaijuer.» 

1-4.  La  lettre  .'i  Gaiuliosus  contieul  une  fort 
belle  description  de  la  ville  do  Cûme  sur 
r.Vdda.  Dans  la  première  des  deux  que  Cas- 
sindorc  ('rrivit  aux  Liguriens,  il  leur  dit  que 
le  roi  Vitic;rs  hMirfaii  [iréseut  de  cent  livres 
d'or  |)our  subvenir  aux  besoins  des  peuples, 
principalement  des  citoyens  d'Asti ,  à  la 
charge  de  distribuer  cette  somme  suivant  les 
besoins  des  nécessiteux.  Il  parait  que  ce  fut 
à  l'occasion  de  la  famine,  qui  affligea  la  Li- 
gurie,  en  538  ;  elle  fut  si  cruelle  que  les  hom- 
mes s'cntremangeaient.  Deux  femmes  tuè- 
rent dix-sept  hommes  pour  s'en  nourrir  ;  el- 
les en  attaijuèrent  un  dix-huitième  qui  les  fit 
mourir  elles-mêmes.  Il  promet  dans  la  se- 
conde lettre  qu'il  fera  cesser  les  plaintes 
qu'on  lui  a  portées  sur  les  poids  et  mesures, 
en  punissant  sévèrement  ceux  qui  seront 
trouvés  en  contravention.  A  la  suite  de  ces 
deux  lettres  se  trouvent  plusieurs  formules 
de  ditïérentes  dignités ,  dont  les  préfets  du 
Préliiire  doimaiuul  les  provisions  au  nom  du 
roi.  Il  conférait  ordinairement  l'oDice  de  pré- 
torien le  jour  de  Noël.  Les  lettres  à  Lucius  et 
;i  Anatolius  regardent  les  appointements 
attachés  à  deux  de  ces  dignités. 

15.  Cassiodore  nous  apprend  dans  sa  let- 
tre à  Jean,  la  manière  de  faire  le  papier, 
dont  il  fait  voir  que  l'usage  est  infiniment 
préférable  aux  ccorces  d'arbres  sur  lesquel- 
les les  anciens  écrivaient.  La  lettre  qu'il 
écrivit  à  Vital ien  est  pour  lui  ordonner  de 
faire  payer  aux  Lucquois  et  aux  Calabrais 
le  cens  qu'ils  devaient  annuellement  en  ar- 
gent à  ta  ville  de  Rome,  au  lieu  des  bœufs 
et  des  porcs  qu'ils  lui  donnaient  auparavant. 
Il  finit  son  onzième  livre  par  une  formule  de 
pardon  accordé  à  plusieurs  personnes  déte- 
nues dans  les  prisons. 

IG.  Les  premières  lettres  du  douzième  livre 
regardent  le  maintien  de  la  police  dans  les  pro- 
vinces et  dans  les  armées;  et,  afin  de  mieux 
contenir  les  soldats  dans  leurs  devoirs,  Cassio- 
dore veut  que  tous  leurs  besoins  leurs  soient 
fom'uis,  en  sorte  qu'aucune  maison,  pas  même 
la  sienne,  ni  celle  du  roi,  ne  soient  dispensées 
(le  contribuer  à  leur  subsistance.  Lorsque, 
malgré  ces  précautions,  il  arrivait  que  les 


gens  de  guerre  faisaient  (pu-lquca  ravages 
dans  les  provinces,  il  le  réparait,  soit  par  la 
dimiiiulion  des  tailles,  soit  en  distribuant 
des  sommes  considc'rables.  Si  les  juges  des 
provinces  s'acqnitlaienl  mal  de  leurs  fonc- 
tions, après  les  avoir  avertis,  il  déclarait  à 
ceux  qui  avaient  amassé  de  l'argent  pour 
rachet(!r  leurs  crimes  par  de  grosses  som- 
mes, que  leurs  richesses  mal  acquises  ne 
leur  seraient  d'aucun  secours;  qu'au  con- 
traire il  serait  leur  persécuteur,  parce  qu'il 
ne  savait  i)as  remettre  des  fautes  pour  de 
l'argent ,  dans  la  pensée  où  il  était  que  ce  se- 
rait faire  un  trafic  du  crime.  Il  parle  dans  une 
autre  lettre  d'un  vin  odoriférant  qu'il  avait 
fait  acheter  pour  la  table  du  roi.  LesSuèves, 
ayant  fait  une  incursion  chez  les  Vénitiens, 
il  leur  fit  remjBttre  une  partie  des  tailles.  Il 
en  exempta  aussi  pour  un  temps  la  Ligurie, 
à  la  charge  que  les  habitants  l'apporteraient 
eux-mêmes  dans  lescotfrcs  du  roi  au  terme 
qu'il  leur  fixa.    Il   punissait  d'ailleurs  très- 
sévèrement  ceux  qui  négligeaient  de  payer 
les  tributs  dans  le  temps.  Et  parce  qu'il  sa- 
vait (]ue  les  bienfaits  des  princes  diminuent  et 
s'altèrent  en  passant  par  des  mains  étrangè- 
res à  moins  qu'elles  ne  soient  biens  nettes,  il 
prit  connaissance  de  la  manière  dont  se  fai- 
sait la  distribution  des  vivres  que  le  roi  avait 
accordés  aux   Romains,  et  donna   ordre  à 
Pierre  que  personne  n'en  profilât  que  les  vé- 
ritables Romains,  à  l'exclusion  des  esclaves  et 
de  tous  ceux  qui  n'avaient  pas  droit  de  bour- 
geoisie dans  Rome.  Ayant  été  informe  que  des 
officiers,  sous  le  nom  de  maîtres  des  comptes, 
retranchaient  aux  éghses  une  partie  des  li- 
béralités du  roi,  il  fit  donner  un  édit  qui  pri- 
vait des  honneurs  de  la  milice  et  de  la  no- 
blesse ceux  qui  à  l'avenir  commettraient  de 
semblables  fautes,  et  qui  portait  confiscation 
des  biens  qu'ils  avaient  acquis  par  ces  sortes 
de  voies,  qu'il  regardait  comme  des  atten- 
tats commis  contre  Dieu  en  la  personne  de 
ses  ministres.  Il  écrivit  à  Anastase,  chance- 
lier de  Lucauie  et  de  Calabre,  de  ne  plus  ti- 
rer, même  à  prix  d'argent,  des  blés  de  la 
ville  deRcggio,à  cause  de  la  stérilité  de  son 
territoire. 

17. Cassiodore  fait,  dansia  quinzième  lettre 
à  Maxime,  la  description  de  la  ville  de  Squil- 
lacci  sa  patrie,  et  des  viviers  qu'il  avait  fait 
creuser  au  pied  de  la  montagne  sur  laquelle 
était  situé  l'un  de  ses  deux  monastères,  appelé 
Castel.  Dans  la  dix-neuvième,  il  donne  ordre  à 
un  autre  Maxime,  vicaire  de  Rome,  de  prépa- 


E(il>t.  t. 


Epl<t.-. 
EpM.7  ol  I 


EpiM.  10 


Episl.  II. 


E[-lsl.  12, 
pag,  180. 


Epl!l.  14, 
pag.  182. 


Lettres  à 
Maxime,  pag. 
181-183. 


Episl.  13. 
paf.  183. 


220 


HlSTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEITIS  ECCLÉSIASTIQUES. 


rer  tout  ce  qui  diait  ndcossaire  pour  l'entrde 
r.f'.,t  »,  solennelle  du  roi  dans  cette  ville.  Il  ordonne, 
dans  la  vinfctienie  à  Thomas  et  à  Pierre,  tré- 
soriers de  l'Épargne,  de  faire  reporter  par 
les  mains  des  diacres  de  l'Église  de  Saint- 
Pierre  les  vases  sacrés'  que  le  pape  Agapet 
avait  été  obligé  d'engager,  et  de  rendre  en 
même  temps  aux  procureurs  de  cette  Église 
l'obligation  de  ce  saint  pape.  Cussiodore  dit 
qu'en  cette  occasion  le  roi  Tliéodat  rencliérit 
sur  la  piété  que  le  peuple  romain  avait  ad- 
mirée autrefois  dans  Alaric,  qui  ayant  su  que 
ces  mêmes  vaisseaux  sacrés  avaient  élé  pris 
dans  le  sac  de  Rome,  les  fit  reporter  en  cé- 
rémonie à  l'Église  de  Saint- Pierre  par  les 
mains  de  ceux  qui  les  avaient  enlevés. 
Di.„l^["/n^  18.  La  lettre  à  Déusdédit,  greffier  à  Ra- 
Hs- 1»3.  '  venne,  est  remarquable  par  le  détail  qu'il 
fait  des  avantages  et  des  devoirs  de  cette 
charge.  Par  leur  office,  les  greffiers  Pont  les 
gardiens  dépositaires  des  droits  de  tout  le 
monde.  Il  les  mettent  h  couvert  des  incen- 
dies, des  vols  et  de  la  négligence  des  parti- 
culiers. La  foi  publique  dont  ils  sont  autori- 
sés les  met  en  état  de  réparer  les  pertes 
d'un  cbacun  ,  en  sorte  que  l'on  peut  regar- 
der leur  armoire  comme  la  fortune,  le  refu- 
ge et  la  sécurité  de  la  république.  L'bérilier 
y  trouve  sans  beaucoup  de  peine  ce  que  ses 
ancêtres  lui  ont  conservé.  Comme  on  a  re- 
cours aux  actes  du  gretl'e,  on  peut  dire  en 
quelque  sorte  que  le  greffier  décide  plutôt 
les  procès  que  ceux  qui  sont  préposés  pour 
en  connaître.  Cassiodore  exhorte  donc  Déus- 
dédit .'i  remplir  avec  honneur  les  devoirs  de 
sa  charge,  sans  se  laisser  gagner  par  argent  ; 
àdonnerrt  ceux  qui  demandentdescopies  des 
actes  anciens  de  son  greffe,  maisftn'en  point 
faire  de  nouveaux;  il  lui  recommande  d'avoir 
soin  de  sceller  toutes  ses  expéditions  d'un  an- 
neau imprimé  sur  la  cire;  de  gardcraussiune 
si  grande  uniformité  dans  son  écriture,  que 
ses  copies  ne  diffèrent  en  rien  de  l'original. 
Lefire  h  19.  L'altération  des  saisons,  en  o.3(>,  lui 
ofi-i.  2ô,p.s.  ayant  fait  prévoir  quelques  révolutions  dans 
la  production  et  la  maturité  des  biens  de  la 
terre,  il  écrivit  à  Amliroise  de  faire  de  gran- 
des provisions  sur  les  récoltes  de  l'année 
précédente.  Sur  quoi  il  dit  :  ((  Les  hommes 

'  Quapropter  nostra  prcvceptione  commoniti, 
et  regia  jussione  securi,  sanciorum  fasa  cum 
obligalione  chirographi  acloribu.i  sancU  l'etri 
apnsloli,  sine  aliqua  dilalione  diffnndite.  Optala 
referantur  manibus  levilarum  miniileria  tnlo 
orbe  narrandd.  Huperatum  est  exemplum  qnod 


Eplil.  »7, 


sont  dans  de  grandes  inquiétudes  lorsqu'ils 
voient  l'ordre  des  choses  changé  :  car  il. 
n'arrive  rien  sans  cause,  et  le  monde  n'est 
pas  gouverné  ni  conduit  par  hasard,  mais 
par  les  sages  conseils  de  Dieu.  Si  donc  nous 
sommes  étonnés  lorsque  nous  remarquons 
que  les  rois  renversent  ce  qu'ils  ont  eux- 
mêmes  rétabli,  quand  ce  ne  serait  qu'un 
changement  dépende  conséquence,  comme 
lorsqu'ils  s'habillent  d'une  autre  manière 
qu'ils  n'ont  coutume  ;  quelle  doit  être  no- 
tre frayeur  et  notre  surprise ,  lorsque  nous 
observons  tant  de  changements  considéra- 
bles dans  le  premier  des  astres,  que  nous 
voyons  privé  de  sa  lumière  et  de  sa  chaleur; 
dans  la  lune  et  dans  les  étoiles";  »  La  stérilité  Kpit. 
eut  lieu, 'et  les  Vénitiens  s'étant  trouvés  dans  '"''  '"' 
la  disette,  il  leur  fit  distribuer  des  vivres,  et 
remettre  les  tributs,  regardant  comme  une 
conduite  cruelle  de  forcer  les  peuples  h 
donner  les  choses  dont  ils  ont  un  pressant  be- 
soin." Ce  serait,  continue-t-il,  vouloir  exiger 
des  larmes  pour  tribut,  que  de  charger  d'im- 
pôts un  peuple  qui  est  dans  l'impuissance  de 
les  payer.  »  11  paraît  que  le  Milanais  souffrit 
aussi  de  la  famine.  Cassiodore  y  fit  envoyer 
de  grandes  quantités  de  blés;  mais,  afin  que 
la  distribution  s'en  fit  avec  équité  ,  et  à  pro- 
portion de  l'indigence,  il  en  confia  le  soin  h 
Dacius,  évêque  de  Milan,  dont  il  connaissait 
la  vertu.  La  lettre  qu'il  lui  écrivit  sur  ce  su- 
jet est  suivie  d'un  édit  dans  lequel,  après 
avoir  fait  part  aux  Liguriens  de  la  victoire 
que  le  roi  avait  remportée  sur  les  Bourgui- 
gnons et  les  .\llemauds,  il  leur  dit  que  ce 
prince,  faisant  attention  à  leur  indigence, 
leur  avait  fait  remise  de  la  moitié  des  tributs 
et  ouvert  ses  greniers  pour  les  soulager. 

§n. 

De  ri/istoire  ecclésiastique  apjjelc'e  tripnr-lite, 
de  la  Chronique,  du  Cumput  pascal ,  et  de 
l'Histoire  desGoths. 

i.  L'Histoire  triparlite  est  ainsi  appelée,      c. -lu.fwi 

.11  .  '1  Mil"""  IB'"»"» 

parce  qu  elle  est  composée  de  celles  des  trois  mpnn».      ™ 
auteurs  grecs  Socrate  ,  Sozomène  et  Théo- 

doret.  Cassiodore  les  fit  traduire  tontes  les  Ci-im  rr». 

trois  en  latin  par  son  ami  Kpiphane,  afin  que  mptriii.  i«f. 

*  *     '  '  piig.  189. 

in  hisloria  nostra  magnn  intcntione  relitlimiis. 
Nam  cum  rex  Alaricus  urbis  lionuf  deprirdnliDiie 
satiat'is,  apostoli  l'elri  vasa  suis  defertiilihus 
exccpisset,  nwx  ul  rei  cnusam  habita  inlerrogn- 
tione  cognoril,  sarris  liminibus  deporlari  diri- 
pienlium  mnnibus  imperaril.  Kpisl.  iO,  png.  183. 


CIIAIMTRE  XLX.  —  CASSIODORE,  CHANCELIER. 


Lib.   IX. 
.  xxxtx. 


[Vl*  SIÈCLE.] 

l;i  Grince  ne  se  vantrit  pas  de  posséder  seule 
un  ouvrage  si  ailniiialjlc  et  si  lu'ccssaire  ti 
tous  lesclirotiens.  Lorsqu'elles  furent  tradui- 
tes, il  en  forma   un  seul    corps   d'histoire, 
divisé  eu  douze  livres,  choisissant  des  trois 
ce  qui  lui  paraissait  de  meilleur,  se  servant 
tantôt  de  l'une,  tanlùt  de  l'autre,  sans  répé- 
ter ce  qui  était  rapporté  par  plusieurs  de  ces 
hisluriens.  Pour  éviter  la  confusion,  après 
avoir  divisé  son  histoire  en  chapitres,  il  y 
mit  des  titres,  et  eut  soin  démarquera  cha- 
que chapitre  d'où  il  avait  tiré  ce  qu'il  y  ra- 
contait. Il  y  en  a  qui  ont  accusé  le  traduc- 
teur l'^piphane  de  n'avoir  su  ni  le  grec  ni  le 
latin,  et  de  s'être  mépris  dans  une  chose  es- 
sentielle   en    traduisant  le  mot  li'/iypostase 
par  celui  de  substance,  au  lieu  de  subsistance. 
Mais  si  l'on  ne  peut  disconvenir  que  le  style 
d'Kpiphane  ne  se  sente  de  la  barbarie  de 
son  siècle,  on  croit  pouvoir  assurer  qu'il  a 
rendu  l'original  grec  assez  exactement.  Aussi 
M.  de  Valois  ne  s'est  guères  éloigné  de  cette 
traduction  dans  celle  qu'il  a  donnée  des  trois 
historiens  grecs.  A  l'égard  du  terme  d'/iypos- 
tase,  si  Épiphane  ne  l'a  pas  rendu  exaciement 
en  latin,  c'est  une  faute  qu'on  ne  doit  point 
faiie  difliculté  de  pardonner  à  un  homme 
dont  la  profession  était  celle  d'avocat,  et  non 
pas  de  théologien.  Au  reste,  ce  n'était  pas  à 
Cassiodore  à  corriger»de  semblablas  fautes, 
puisque,  par  la  confiance  qu'il  avait  en  son 
traducteur,  il  pouvait  supposer  qu'on  lisait 
ainsi  dans  l'original  grec.  Il  y  aurait  plus  d'ap- 
parence de  lui  reprocher  d'avoir  suivi  Socra- 
te  dans  ce  qu'il  dit,  qu'à  Rome  on  jeùuait 
tous  les  jours  durant  trois  semaines  avant 
Pâques,  excepté  le  samedi  et  le  dimanche  ; 
puisqu'étant  en  Italie,  il  ne  pouvait  ignorer 
qu'à  Rome  le  Carême  ne  fut  de  six  semaines. 
Mais  il  est  évident  qu'il  y  a  faute  en  cet  en- 
droit ;  car  on  lit  de   suite   ces  paroles  :  On 
jeûne  à  Rome  tous  les  samedis,  et  à  plus  forte 
raison  les  samedis   du  Carême  ;  et  dans  un 
ancien  manuscrit  de  l'Abbaye  de  Lire    en 
Normandie,  de  même  que  dans  la  première 
édition  de  l'Histoire  tripartite,  au  lieu  de 
ti'ois  semaines  de  jeûne  avant  Pâques,  on  lit 
six  semaines.  Ajoutons  que  Cassiodore  a  pu 
laisser  le  terme  de  trois  semaines,  qui  se  trou- 
vait dans  l'Histoire  de  Socrate,  pour  ne  faire 
aucun  changement  dansle  texte  de  cetliisto- 
rien,  quoiqu'il  sût  parfaitement  qu'à  Rome  on 
jeûnait  pendant  six  semaines.  Cette  solution 
peut  servir  de  réponse  à  une  autre  difficulté 
que  l'on  fait  à  Cassiodore,  d'avoir  rapporté 


221 

sur  le  témoignage  de  Sosom^ne,  que  ni  l'é- 
vêque,  ni  aucun  autre  ne  prêchait  et  n'en- 
seignait publiquement  dans  l'Église  de  Ro- 
me. Il  a  exposé  de  bonne  foi  ce  qu'il  avait 
trouvé  dans  son  oiiginal  ;  pourquoi  lui  en 
ferait-on  un  reproche? 

2.  Cassiodore  nous  a  laissé  une  autre  his- 
toire, mais  extrêmement  abrégée,  sous  le 
nom  de  Chronique:  il  la  dédia  au  roi  Théo- 
doric  :  ainsi  il  la  composa,  étant  encore  dans 
les  embarras  du  siècle.  On  a  prétendu  qu'il 
n'avait  pas  apporté  à  cet  ouvrage  toute  l'exac- 
titude nécessaire,  et  qu'il  s'y  était  trompé 
dans  ce  qu'il  a  dit  des  consuls  depuis  l'em- 
pereur Tibère  jusqu'à  Dioclétien.  Àlais  qu'a- 
t-il  pu  faire  de  mieux  que  de  s'en  rapporter 
à  ceux  qui,  avant  lui,  avaient  traité  la  même 
matière  avec  l'aiiplaudisscment  du  public? 
S'il  a  mis  le  consulat  de  Junius  Brulus  une 
olympiade  plus|tôt  qu'il  ne  fallait,  c'est  pour 
avoir  suivi  Eusèbe,  qui  a  fait  la  même  faute. 
On  doit  même  rejeter  sur  les  copistes  celles 
qui  se  rencontrent  dans  ces  sortes  d'ouvra- 
ges, où  il  leur  était  aisé  de  changer  les  chif- 
fres, soit  par  ignorance,  soit  par  faute  d'at- 
tention. L'alfcctatiou  des  empereurs  à  retenir 
presque  toujours  le  consulat,  a  aussi  occa- 
sionné beaucoup  de  méprises  à  ceux  qui  ont 
traité  cette  matière.  Ils  ont  fait  un  au  '  de 
'consulat  de  ce  qui  en  faisait  plusieurs,  ne 
faisant  pas  attention  que  c'était  le  même 
prince  qui  retenait  le  consulat  plusieurs  an- 
nées de  suite.  Dom  Garet  a  eu  soin,  dans  la 
dernière  édition,  de  rétablir  les  consuls  sur 
les  anciens  auteurs  et  sur  les  tables  des  plus 
habiles  chronologistes.  Cassiodore  entreprit 
sa  Chronique  par  l'ordre  de  Théodoric  qui 
était  bien  aise  de  se  trouver  en  qualité  de 
consul  à  la  suite  de  tant  de  grands  hommes, 
qui  avaient  été  revêtus  de  la  même  dignité. 
Il  compte  depuis  le  commencement  du  monde 
jusqu'au  consulat  de  ce  prince  57:21  ans; 
depuis  Adam  jusqu'au  déluge  2243  ans;  de- 
puis le  déluge  jusqu'à  Ninus,premierroi  des 
Assyriens,  899  ans.  Après  les  rois  des  As- 
syriens, dont  la  monarchie  ne  dura  que  852 
ans,  il  met  les  rois  latins  du  nom  de  Latinus 
qui  fut  le  premier.  «  Ce  fut,  dit-il,  en  la  vingt- 
cinquième  année  de  son  règne  que  la  ville  de 
Troie  fut  prise.  Ce  prince  eut  pour  successeur 
Énée  qui  s'était  retiré  auprès  de  lui  après 


*  Qui  continuis  consularibus  fecerat  longum 
quevulam  et  sine  discrimiyte  anntim.  Pliu.  Pane- 
gyr.  Trajan. 


ClirflDlque 
do  Clytiodore, 

I.ig.  3.-,;. 


Cassiod, 
Frïf.inClro. 
□ic.  pag.  3ai. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Comimt 
jascxl  dfl 


la  prise  de  Troie,  et  h  qui  il  avait  donné  sa 
fille  en  niaiiapre.  Ces  princes,  au  lieu  de  la- 
tins, se  nommaient  romains  depuis  que  Uo- 
niulus,  qui  avait  bâti  Rome,  fut  monté  sur 
le  Irùne.  Leur  monartliie  finit  à  Tarquin-lc- 
Superhe,  sous  le  règne  duquel  l'ythagore  se 
rendit  recommandablc  par  son  savoir.  Aux 
rois  succédèrent  les  consuls:  ils  étaient  ordi- 
nairement deux,  mais  ils  n'avaient  le  gouver- 
nement de  la  république  que  pour  un  an.  Les 
premiers  consuls  furent  Junius,  Brutus  etTar- 
quinius  Collatinus.  Sous  le  consulat  de  Len- 
lulus  et  de  Marcellus,  Jules  César,  après 
avoir  vaincu  Pompée,  prit  le  nom  d'Empe- 
reur romain.  »  Cassiodore  en  compte  qua- 
rante-huit jusqu'à  Anastase,  qui  est  le  der- 
nier empereur  dont  il  parle  dans  sa  Chroni- 
que, qu'il  finit  par  le  récit  des  actions  les 
plus  éclatantes  de  Tbéodoric,  roi  d'Italie.  Ce 
prince  donna  en  mariage  sa  fille  Amalasonthe 
à  Eutharic  qui  fut  consul  en  519.  La  môme 
annéeThéodoric  fit  de  grandes  magniliccnces 
à  Rome  et  à  Ravcnne.  Cassiodore  ne  pousse 
pas  plus  loin  sa  Chronique.  Ce  qui  est  une 
preuve  qu'il  la  composa  en  cette  année. 

3.  Dans  le  dénombrement  qu'il  fait  au  com- 
mencement de  son  traité  de  l'Orthographe,  des 
ouvrages  qu'il  avait  composés  depuis  sa  con- 
version, Cassiodore  ne  dit  rien  du  Comput 
pascal  que  nous  avons  parmi  ses  œuvres. 
D'où  l'on  conjecture  qu'il  ne  l'avait  pas  en- 
core écrit  alors  ,  c'est-a-dire  en  oG2.  11  le  fit 
pour  trouver  le  jour  de  Pâques,  les  épactes, 
les  îndictions,  les  années  bissextiles,  le  cycle 
de  dix-neuf  ans.  Dans  ceComput  il  commence 
l'ère  chrétienne  à  l'incarnation  de  Jésus- 
Christ  et  non  pas  h  sa  naissance,  devançant 
ainsi  d'un  an  l'ère  vulgaire  qui  ne  com- 
mence qu'à  la  naissance  du  Sauveur. 

4.  Ce  fut  aussi  sous  le  règne  de  Théodoric 
que  Cassiodore  composa  l'Histoire  des  Goths 
divisée  en  douze  livres  :  nous  n'avons  plus 
cettehistoire;  c'étaitun  ouvraged'une  grande 
recherche.  Il  y  tirait  de  l'oubli  '  les  anciens 
rois  des  Goths  qui  n'étaient  plus  connus  ;  il  y 
rétablissait  la  race  royale  des  Amales  dans 

>  Telendil  se  eliam  Cassiodorus  in  anliquam 
prosapicm  noslraiii,  kclione  diScens  ,  quod  vix 
imijorum  nolilia  cana  relinebat.  Iste  regcs  Go- 
tltorum  longa  ohli:ione  celalos,  latibulo  vclusta- 
tis  cduxil.  Isic  Amalos  cuni  generis  .sm  clarilate 
resliluil  :  evidenter  osicndcns  in  dtcimam  septi- 
inam  progeniein  slirpemnos  liabere  regalem.Ori- 
ginein  gotliicam  liisturiain  fecit  esse  rouiaiiam, 
coltigeiis  quasi  in  unam  coronam  germen  ftori- 
dum,  quod  per  liberorum  campos  passim  fuerat 


lenr  premier  éclat  et  en  faisait  voir  dix-sept 
générations  entières  depuis  qu'elle  possédait 
le  sceptre  ;  il  y  avait  ramassé  en  un  corps  ce 
qui  était  épars  en  plusieurs  livres.  Jornandès 
ou  Jordanus,  évéque  de  Ra venue,  fit  un 
abrégé  de  cette  histoire  à  la  prière  de  Cas- 
telliiîs,  à  qui  il  le  dédia.  La  peine  qu'il  té- 
moigne' avoir  eue  dans  ce  travail,  peut  ré- 
pondre de  ce  qu'il  en  avait  coûté  à  Cas- 
siodore pour  faire  cette  Histoire:  et  de  b. 
capacité  de  son  génie,  qu'un  ouvrage  de 
cette  nature  ne  rebutait  pas  dans  le  temps 
qu'il  ét^t  chargé  des  plus  grandes  affaires 
du  royaume.  V Abrégé  de  Jornandès  est  dis- 
tribué en  soixante  cl:apilres  dont  le  dernier 
conduit  VHistoire  des  Goths  jusqu'à  la  mort 
de  Vitigcs,  leur  dernier  roi,  et  jusques  au 
mariage  de  Mathasonte,  sa  veuve,  avec Gei^ 
main,  frère  de  l'empereur  Justinien,  c'est-à- 
dire,  jusqu'en  l'an  540  ;  ce  qui  montre  que 
Cassiodore  mit  deux  fois  la  main  à  VHistoire 
des  Goths  ,  qu'il  n'avait  pu  conduire  d'abord 
que  juscju'au  règne  de  Théodoric  :  et  qu'il  la 
conduisit  depuis  au  delà  de  celui  de  Yitigès, 
puisqu'il  parle  d'un  fils  posthume,  né  de  ce 
prince  et  Ue  Mathasonte,  en  qui  les  maisons 
d'Amales  el  des  Anices  furent  réunies.  [L'ou- 
vrage de  Jornandès  a  été  donné  en  français 
sous  ce  titre  :  De  la  Succession  des  royaumes 
et  des  temps  et  de  l'origi'ne  des  actes  des  Goths, 
par  Jornandès  ;  traduction  nouvelle  par 
M.  Auguste  Savagner,  Paris,  Panckoucke, 
1842,  in-8.] 

§m. 

Du  Cominentaire  de  Cassiodore  sur  les  Psaumes. 

i.  Après  que  Cassiodore  se  fut  défait,  étant        ej  vi 

11,  -1  1  1  ,  Ufiip»     et     à 

à   Uavenne,  des  embari'as.  des  honneurs  et  i»""   •"■ 
du  som  des  atl'aires  séculières  qui  sont  ton-  ,'•  i"'"»"" 

^  Ici  l'siumes. 

jours  accompagnées  d'un  plaisir  nuisible,  il 
chercha  son  repos  et  sa  consolation  dans  la 
lecture  des  Psaumes.  Il  n'en  eut  pas  plutôt 
goùlé  le  miel  spirituel  qu'il  s'y  plongea  toui 
entier,  par  luvidité  d'en  rechercher  les 
mystères,  comme  il  arrive  à  ceux  qui  sont 

anle  dispersum.  Alhnlar.  rcx,  Epist.  25,  ad  Seiia- 
tum  urbis  Homtv.  pa^'.  145. 

•  De  brevialionc  Chronicorum,  suades  ut  nos- 
tris  verbis  (ttiodecim  Cassioduri  loluniina  de  ori- 
gine acluque  Getarum  ab  olini  usqtte  nunc  per 
generalionrs  regesque  descendenic,  in  unum  et 
hocparvo  lihcUo  coarcleni:  dura  salis  impcria  et 
tanquam  ab  eo  qui  pondus  hujus  operis  sciri 
nolU,  imposila.  Joruaudes,  Prxfat.  iu  Uist.  Go- 
thor.,  pag.  371. 


[Vl*  SIÈCLE.] 


CHAPITIIE  XIX.  —  CASSIOnORK,  CHANCELIER. 


223 


■r.  In  l'Ml. 
.  Iltl»g. 


poss(>(los  d'un  violpiit  ilcsir.   Et  pour  so  (16- 
ili)iiima;j:er  de  rainortmiie  ([ii'il  avait  l'iu'ou- 
Vi'u'  dans  les  occupations  du   sicde,  il  s'ap- 
pliqua à  se  remplir  agréablement  des  vérités 
salutaires  renfermées  dans  ces  divins  canti- 
ques. Il  trouva  d'abord  un  obstacle  dans  leur 
obscurité,  ce  qui  arrive  ordiuaircuieut  aux 
conmicnçants,  parce  que  le  sens  en  est  em- 
barrassé par  la  diversité  des  personnes  qui 
y  parlent,  et   voilé  par  des  paraboles  et  des 
tiguics.  Cela  l'obligea  de  recourir  aux  Com- 
mentaires de  saint  .\iigiislin;   mais,  y  ayant 
trouvé  une  abondance  infinie  de  matières, 
qu'il  compare  à  une  mer,  il  crut  i[ue  dans  la 
dilliculté  de  retenir  tout  ce  que  ce  Père  avait 
dit,  il  était  à  propos  de  l'abréger.  Toules  les 
explications  qa'il  avait  données  des  Psaumes 
étaient  divisées  dans  le  sixième  siècle   en 
quinze  décades  ou  quinze  parties  composées 
cliacnne  de  dix  psaumes.  Cassiodore  les  ren- 
ferma dans  un  seul  volume,  en  les  abrégeant, 
mais  il  ne  faut  pas  le   regarder  comme  un 
simple  abréviateur  de  saint  Augustin.  Il  dit 
lui-même  qu'il  ajouta,  à  l'abrégé  qu'il  en  fit, 
de  nouvelles  découvertes,  dont  il  rend  toute 
la  gloire  à  celui  qui  donne  la  vue  aux  aveu- 
gles,   la  parole    aux   muets   et  l'ouïe    aux 
sourds.  Il  se  servit  encore  de  ce  qu'il  avait 
trouvé  de  mieuxdans  les  écritsd'Ûrigène,de 
saint  Cyprien,  de  saint  Athanase,  de    saiut 
Hilaire,  de  saint  Ambroise,  do  Didyme,  de 
saint  Jérôme,  de  saint  Léon  et  de  quebpies 
autres.  C'est  la  remarque  que  le  vénérable 
Bède  fait  sur  ce  Commentaire  '  qu'il  appelle 
excellent.  Quoiqu'il  fût  renfermé   dans  un 
seul  volume,  Cassiodore  le  partagea  en  trois 
pour  la  commodité  de  ses  religieux  ;   et  il 
voulut  que  l'on  en  gardât  toujours  un  exem- 
plaire fort  correct  dans  la  bibliothèque,  afin 
que  s'il  s'était   glissé  quelques  fautes  dans 
les  autres,  on  put  recourir  à   celui-ci  pour 
les  corriger.  La  raison  qu'il  eut  de  préférer 
les  Commentaires    de  saint  Augustin,  c'est 
qu'outre  qu'il  trouvait  dans  son  abondance"^ 
une  grande  exactitude;!  traiter  les  matières, 
il  savait  qu'il  ne  donnait  jamais  prise  aux 

'  In  exposilione  Psalmorum,  quam  egregiam 
fecil  Cassiodorus,  diligenler  intuitus  est  quid 
Ambrosius,  quid  HiUtrius,  quid  Àuguslinus,  quid 
Cyrillus,  quid  Joannes,  quid  cœteri  Patres  dixe- 
runt.  Beda,  lib.  II,  in  Esdram,  cap.  vu. 

*  Est  eiiim  Àugustiniis  litteraruin  omnixim  ma- 
gister  egregius ;  et  quod  in  uberlale  rarum  est, 
cautissiinus  disputator.  Decurril  quippe  lanquani 
l'ons  purissimus,  nulla  fœce  poUuLus  :  sed  in  in- 
tegritate  fldei  perseverans ,  nescit  hœreticis  dore, 


!i(''réliques  ;  qu'il  no  leur  fournissait  ])oint 
d'armiîs  pour  défendre  leurs  erreurs;  ([u'il 
('•lait  parfailement  catlioliquc,  et  qu'il  biillait 
dans  l'Eglise  comme  un  liomme  éclairé  de  la 
lumière  céleste.  Il  ne  le  suivit  pas  toutefois 
dans  sa  manière  de  lire;  l'Iicriture.  Ce  l'ère 
s'était  servidans  son  explication  desPsaumes 
de  la  version  latine  faite  du  grec,  parce  qu'il 
n'avait  pas  encore  celle  que  saint  Jérôme  lit 
sur  l'hébreu.  Cassiodore  eut  recours  à  celle- 
ci  qui  t'tait  en  usage  dans  l'Église  romaine. 
Il  eut  de  plus  recours  aux  exemplaires  hé- 
breux, et  consulta  les  personnes  savantes 
dans  la  langue  hébraïque,  suitoul  pour  re- 
jeter les  versets.  Il  semble,  dans  un  endroit 
de  sa  Préface  '  dédier  son  ouvrage  au  Pape, 
en  le  désignant  sous  le  non  de  Père  apustuli- 
que,  terme  consacré  pour  signifier  le  Pape  ou 
du  moins  un  évoque  des  grands  sièges  ; 
mais  la  chose  n'est  pas  certaine.  Ce  Com- 
mentaire fut  le  premier  ouvrage  *  que  Cas- 
siodore composa  depuis  sa  conversion  ;  ainsi 
il  faut  le  rapporter  à  l'année  qui  suivit  la 
prise  de  Ravenne,  c'est-à-dire,  à  l'an  439  ou 
environ. 

2.  Il  fait  un  grand  éloge  des  Psaumes,  des 
beautés,  des  lumièi'es  qu'ils  renferment;  de 
la  douceur,  de  la  vertu  qu'ils  respirent;  de 
leur  utilité,  et  remarque  que  c'était  l'usage 
de  l'Église  de  les  chanter  aux  veilles  de  la 
nuit,  à  l'ollice  du  matin  que  nous  nommons 
les  Laudes  à  Prime ,  à  Tierce,  à  Sexte,  à 
iVûï?eet  à  Vêpres.  Après  quoi  il  fait  diverses 
observations  générales,  comme  pour  servir 
de  prolégomènes  à  son  Commentaire.\.s.  pre- 
mière est  sur  le  terme  de  prophétie  qu'il  dé- 
finit en  dilférentes  manières  ;  celle  qui  paraît 
la  plus  exacte  est  conçue  en  ces  termes  :  La 
prophétie  est  une  façon  de  parler  avec  gran- 
deur et  avec  vérité,  façon  qui  est  inspirée  de 
Dieu,  et  non  pas  inventée  ni  enseignée  pur 
les  hommes  :  Car  ce  n'ajjoint  été  par  la  vo- 
lonté des  hommes,  dit  l'apôtre  saiut  Pierre, 
que  les  prophéties  nous  ont  été  anciennement  ap- 
portées, mais  ça  été  par  le  mouvement  du  Saint- 
Espi'itquc  les  saints  hommes  de  Dieu  ont  parlé. 

unde  se  passent  aliqua  colluclnlione  dcfendere  : 
totus  cnlhuUcus,  tolus  orlhodoxus  invenilur.  et 
in  Ecclesia  Domini  suavissimo  nitore  resplen- 
dens,  superni  luminis  clarilate  radiatur.  Cassio- 
dor.  Prie  fat.  in  Psalm, 

3  Quocirca,  Pater,  apostolica  lua  invitatione 
provocatus  abyssos  divinas  ingrediar.  Ibid. 

^  Post  Coiiiiiieuta  PsaiLTii,  ubi  conversionis 
meœ  tempore  primum  studium  laboris  impendi. 
Prœf.  ia  Orthograpli. 


\\M.  flC»!- 
tloil.  l'r.urit. 
In  l'.-i  . 


Remarquer 
les  l*ïauii>tï. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQL'ES. 


UieroD.  in 
ElMh.  c«p. 
xxxr. 

Apad.  Cas- 
siod.  Pncr.  iD 

fMl. 


Auteur  àcf- 
Puiim«s  :  di- 
TPr^cs  maniè- 
res da  \tâ 
cbaoïer. 


224 

L'esprit  de  prophétie  n'est  pas  néanmoins 
inamissible,  et  quelquefois  le  Saint-Esprit, 
l'inspirateur  des  prophètes,  otl'cnsé  par  des 
péchés  même  de  fragilité  qu'ils  avaient  com- 
mis, se  relirait  d'eux,  et  ne  les  inspirait  de 
nouveau  qu'après  qu'ils  l'avaient  apaisé  par 
leur  pcnitence.  C'est  ce  que  saint  Jérôme 
montre  par  plusiears  manières  de  parler 
d'Ezéchiel.  Élizée  avoua  aussi  que  le  Sei- 
pneur  lui  avait  caché  la  douleur  de  cette  fem- 
me qui  vint  le  prier  de  ressusciter  son  fils. 
Mais  parce  que  Jésus-Christ  a  toujours  été 
exempt  de  péché,  le  Saint-Esprit  s'est  reposé 
sur  lui  invariablement.  Cassiodore  croit  que 
l'on  peut  mcllre  au  rang  de  ceux  ;\  qui  Dieu 
accorde  le  don  de  prophétie,  ceux  qui  ont 
reçu  de  lui  le  don  d'intelligence  pour  bien 
expliquer  les  divines  Eciilures. 

3.  Sa  seconde  remarque  regarde  les  di- 
vers instruments  que  l'on  employait  parmi  le 
chant  des  Psaumes,  les  dillcientes  manières 
de  les  chanter,  et  celui  qui  en  est  l'auteur. 
Il  met  au  nombre  de  ces  instruments  les 
harpes,  les  cymbales  et  les  trompettes. 
Quelquefois  l'on  chantait  les  Psaumes  avec  la 
voix  humaine  seule  ;  en  d'autres  occasions 
avec  les  seuls  instruments,  et  souvent  on 
mêlait  les  voix  humaines  avec  le  son  des 
instruments.  Cette  diversité  de  voix  et  de  son 
faisait  ensemble  des  accords  merveilleux  de 
musique,  qui,  selon  Cassiodore,  signifiaient 
que  toutes  les  langues  se  réuniraient  un  jour 
dans  une  même  foi  pour  composer  l'I'jglise  ca- 
tholique. «  On  trouve  souvent,  dit-il,  à  la  tête 
des  Psaumes  lesnomsd'Asaph,d'Idithun,des 
enfants  de  Coré,  et  de  quelques  autres,  non 
pas  que  ces  psaumes  fussent  d'eux,  comme 
quelques-uns  leprétendent,  mais  parce  qu'ils 
étaient  les  principaux  chantres  et  musiciens, 
comme  les  directeurs  de  la  psalmodie,  et  pré- 
posés sur  tout  ce  qui  devait  composer  cette 
sorte  de  mélodie.»  Cassiodore  cite  quelques 
passages  du  Nouveau  Testament,  où  les 
Psaumes  sont  indistinctement  attribués  à 
David  ;  d'où  il  infère  '  qu'il  en  est  seul  au- 
tçur  ;  ce  qu'il  prouve  encore  par  la  croyance 
commune  de  l'Éulise,  où,  lorsqu'il  s'agit  de 
chanter  quelques  psaumes,  le  lecteur  ou  le 


chantre  n'oserait  les  qualifier  autrement  que 
de  David,  quoiqu'ils  portent  en  tête  d'autres 
noms  ;  et  par  le  ti^moignage  de  saint  Augus- 
tin. .\  quoi  il  ajoute,  que  s'il  y  eu  avait  quel- 
ques-uns qui  fussent  véiitablement  d'.\saph, 
de  Moïse  ou  de  quelqu'autre  que  de  David, 
ils  seraient  cités  sous  leur  nom  dans  l'Écri- 
ture, comme  on  cite  les  Evangiles  sous  les 
noms  de  saint  Matthieu,  de  saint  Marc,  de 
saint  Luc  et  de  saint  Jean. 

4.  Il  remarque  en  troisième  lieu,  que  ces       coio««i. 
termes,  pour  la  m,  que  I  on  rencontre  sou-  ponr   u  oa, 
vent  dans  les  titres  des  Psaumes, peuvent  s  en-  i»» 
tendre  en  deux  manières  ;  la  première  pour 
marquer  qu'une  chose  est  conduite  à  sa  fin 

et  il  sa  peifection;  la  seconde,  que  cette  fin 
est  Jésus-Christ  même,  parce  que,  selon  l'A- 
pôtre, il  est  la  fin  de  la  loi,  et  qu'en  lui  nous 
trouverons  la  fin  et  la  consommation  de  no- 
tre bonheur,  ce  qui  doit  nous  le  faire  aimer 
comme  notre  souverain  bien.  Parlant  ensuite 
de  l'instrument  appelé  psahérion,  et  de  la 
signification  du  mot  à^psaume,  il  dit  que  le 
psaltérion  est,  au  rapport  de  saint  Jérôme, 
un  instrument  de  musique  creux,  fait  de  bois 
en  forme  de  delta,  qui  se  louche  avec  un  ar-  D.Diei,iii.  r, 
chet;  il  est  parlé  du  psalléi  ion  dans  Daniel,  et  ".rlirp."  n. 
dans  les  Paralipomènes. 

5.  Ensuite  Cassiodore  explique  la  différen- 
ce qu'il  y  a  entre  psaume,  cantique,  psaume- 
cantique  et  cantique-psaume.  Le  Psaume  est 
ce  qui  se  chante  sur  les  instruments  seuls; 
le  cantigue  ce  qui  se  chante  de  la  voix  natu- 
relle seule  ;  le  psaume-cantique  est  une  sym- 
phonie où  les  instruments  de  musique  com- 
mencent, et  où  les  voix  humaines  suivent;  le 
cantique-psaume  se  commence  par  Icsvoixhu- 
maines  en  chœur,  et  se  continue  par  les  ins- 
truments de  musique  qui  se  mêlent  aux  voix. 
Il  dit  que  de  la  diversité  de  ces  hymnes  vient 
la  dillcreiice  de  ces  inscriptions  et  des  litres 
que  l'on  trouve  ;\  la  tête  des  Psaumes.  Ils  en 
ont  d'autres  fondés  sur  certaines  actions  sin- 
gulières que  l'on  doit  expliquer  moralement. 
Tel  est  le  titre  :  Pour  les  jiressoirs  ;  et  cet  au- 
tre :  Le  premier  jour  de  la  semaine. 

6.  Par  le  terme  diapsalma,  saint  Jérôme 
entend  une  continuatiou  de  psalmodie,  parce 


eDtrpHyauRK-, 
MDtiquo  ,elc. 


Ce 

«luo 


que  e'i 


'  Unde  probatur  universos  Psalmos  non  mul- 
torum  exislere,  sed  lantum  ipsiux  D'ivid  quem  a 
Domino  conslal  esse  nomiimtum.  Usus  qunque 
Ecclesiœ  catholicœ  Spirilus  Sancli  inspiratione 
generaliler  et  immobiliter  lenet,  ut  qiiicumque 
eorum  cuntamiusfueril.  qui  diverse  nomiiieprœ- 
notanlur,   leclor  aliud  prœjudicare  non  audeat 


nisi  Psalmos  David.  Quod  si  essent  proprii,  id  est 
aut  Asaph  aul  Mnysi,  eorum  nomina  utique  prœ- 
dicarentur;  siciit  cl  in  Evangetiis  fit,  quando 
aul  Marci,  aut  Lucœ,  aut  ilattluvi,  aut  Jonunis 
vocabiilo  prnnuntiautnr.  Quodeliam  secutus  pa- 
riler  Auguslinus  congruenter  omnes  psalmos  di- 
cil  esse  Davidicos.  Cassiodor.,  Prœf.  in  Psal. 


CIIAIMTRE  XIX.  —  GASSIODOUE,  CHANCELIER. 


Cnmi'eiil  il 

Ji-.i-  -  1,1,11-1 
(1..U4  los  l',au- 


[Vl'  SIÈCLE.] 

«lue  ce  terme  signifie  en  h(''l)icu  ton Jdns. 
Saint  Augustin  le  prend  dans  un  sens  con- 
traire, disant  que  lorsqu'on  trouve  le  mot 
diapsalma  dans  l'iidbreu,  c'est  pour  marquer 
une  pause  ou  discontinualion  du  dianl.  Il 
semble  que  cette  explication  soit  plus  du  goîit 
de  Cassiodore  que  la  première. 

7.  Saint  Jérùnie  a  divisé  le  Psautier  eu  cinq 
livres,  en  quoi  il  a  été  suivi  par  beaucoup  do 
personnes.  Mais  saint  Hilaire  n'a  point  admis 
cette  division,  croyant  qu'il  était  plus  conve- 
nable de  ne  point  partager  les  Psaumes  en 
plusieurs  livres,  soit  parce  que  dans  l'iié- 
breu  ils  ne  forment  qu'un  seul  volume,  soit 
parce  que  dans  les  Actes  des  apôtres  il  n'est 
parlé  que  d'un  seul  livre  des  Psaumes.  Cas- 
siodore adopte  ce  sentiment;  et  s'il  a  divisé 
le  Psautier  en  trois  parties,  ce  n'a  été  que 
pour  la  commodité  de  ses  religieux,  alin  que 
trois  pussent  le  lire  en  même  temps.  Chacune 
de  ces  divisions  renfermait  cinquante  psau- 
mes, comme  il  le  marque  au  commencement 
de  sa  préface. 

8. 11  fait  remarquer  qu'il  est  parlé  de  Jésus- 
Christ  en  trois  manières  dans  les  Psaumes; 
qu'il  y  en  a  qui  ont  rapport  à  son  humanité; 
d'autres  à  sa  divinité,  le  déclarant  égal  et  co- 
éternel  au  Père  ;  et  quelques-uns  où  il  est  re- 
présenté comme  le  chef  et  la  tète  de  l'Eglise. 
Sur  quoi  il  renvoie  aux  règles  de  Ticbonius, 
ajoutant  qu'il  était  nécessaire  que  Jésus- 
Christ  fût  représenté  sous  ces  trois  aspects 
dans  lesPsaum<^p,  pour  nous  faire  connaître 
qu'il  y  a  en  lui  deux  natures,  l'iuie  divine, 
l'autre  humaine,  et  que  nous  fussions  en  état 
de  répondre  aux  hérétiques  qui  combattent 
sa  divinité  par  des  passages  qui  doivent 
s'entendre  de  sa  nature  humaine. 

9.  .\près  ces  remarques  générales,  Cassio- 
dore propose  la  méthode  qu'il  veut  suivre 
dans  tout  son  commentaire  :  savoir  qu'il  ex- 
pliquera le  titre  du  psaume,  qu'il  le  divisera 
en  toutes  ses  parties,  pour  éviter  l'embarras 
que  pourrait  causer  la  diversité  des  matières 
et  des  personnes  qui  se  rencontre  quelque- 
fois dans  un  même  psaume  ;  qu'il  l'expliquera 
ou  selon  le  sens  littéral  et  historique,  ou  se- 
lon le  sens  spirituel  et  prophétique;  qu'il  en 
fera  connaître  la  fin  et  le  but,  particulière- 
ment par  rapport  à  la  morale,  c'est-à-dire 
par  rapport  à  la  faite  des  vices  et  à  la  prati- 
que de  la  vertu  ;  qu'il  fera  des  observations 
sur  le  nombre  des  psaumes,  lorsqu'il  y  aura 
quelque  chose  de  mystérieux  renfermé  dans 
ce  psaume  ;  enfin  que  dans  le  sommaire  de 

XI. 


228 


Der6;o- 

qtifncAdff  rb* 
er  tur^,  en 
(anViil'Br  dit 
celte  desPiin* 


l'Écriture,  des 


chaque  psaume  il  se  proposera  quelques  hé- 
résies ;\  coudnittre. 

10.  Il   s'étend  beaucoup  A   relever   l'élo- 
quence des  livres  saints.    «  Le  langage  de 
ri'crilme,   dit-il,  est  chaste,  d'une  cerlitudo 
iut'aillilile,  d'une  vérité  ét(!rnellc  et  imnma- 
bie,  pure,  utile,  remplie  de  force  et  propre  à 
opérer  le  salut  comme  on  le  voit  parle  psau- 
me cxviii",  où  le  Piophète  dit  au  Seigneur  : 
Votre  parole  m'a  dunné  la  vie.   C'est  une  lampe   |'Ég1!'so."' 
qui  éclaire  mes  pieds,  et  une  lumière  qui  me  fuit 
voir  les  sentiers  oh  Je  dois  marcher.  Vraie  lu- 
mière,parcequ'ellenemucommandc  rien  qui 
ne  me  donne  la  vie,  qu'elle  ne  défend  que  ce 
qui  est  nuisible,  qu'elle  me  détourne  de  l'a- 
mour des  choses  terrestres,  et  me  persuade  de 
ne  m'atlacher  qu'aux  célestes.  Sous  des  paro- 
les Irès-communcs,  l'Ecriture  renferme   de 
profonds  mystères.  Mais  sa  simplicité  même  a 
de  la  grandeur.  Sa  vertu  est  telle  qu'elle  s'est 
fait  recevoir  dans  toutes  les  parties  de  l'uni- 
vers. Eu  deux  mots,  elle  nous  fait  connaître  la 
nature  inetlable  de  Dieu  :  Celui  qui  est,   dit 
Moïse  ,  m'a  envoyé.  Toutes  ses   paroles    sont 
remplies  de  sens,  quand  on  se  donne  la  peine 
de  les  approfondir.  Pcut-ou  douter  de  sou  élo- 
quence, puisque  la  vraie  '  éloquence  consiste 
à  exprimer  les  choses  en  des  termes  propres 
et  convenables  ?»  Il  dit  à  la  louange  du  livre 
des  Psaumes,  qu'il  n'y  a  point  de  sujet  de  con- 
solation que  les  hommes  n'y  puisse  trouver; 
que  c'est  un  trésor  cpii  profite  et  augmente 
toujours  dans  un  cœur  pur;  que  ceux  qui 
pleurent  y  trouvent  de  quoi  se  consoler,  les 
justes  les  motifs  solides  de  leur  espérance,  et 
ceux  qui  sont  en  péril  un  refuge  utile  ;  que 
lorsque  nous  les  chantons,  il  semble,  comme 
le  dit  saint  Aihanase  à  Marcellin,  que  les  pa- 
roles du  Saint-Esprit  deviennent  les  nôtres 
et  s'accommodent  à  tous  nos  besoins.  Cassio- 
dore avait  dit  auparavant,   en  parlant  de  la 
psalmodie  qui  se  fait  dans  les  veilles  :  «Pen- 
dant le  silence  de  la  nuit,  la  voix  des  hom- 
mes éclate  dans  le  chant  ;  et  par  des  paroles 
chantées  avec  art  et  mesure,  elle  nous  fait 
retourner  à  celui  de  qui  la  divine  parole  nous 
est  venue  pour  le  salut  du  genre  humain. 
Il  ne  se  forme  qu'une  seule  voix  de  tant  de 
personnes  qui  chantent,  et  nous  mêlons  no- 
tre musique  avec  les  louanges  de  Dieu  chan- 
tées par  les  anges,  quoique  nous  ne  puissions 


'  Eloquentia  siquîdem  estadunamquamque  rem 
conipetens  et  décora  locutio.  C.issiod.,  Prœfat. 
in  psalm.,  cap.  xv,  pag.  5. 

13 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


226 

pasles  cnlcndrc.  1)11  joint  à  ces  ('locres  celui  de 
l'Eglise  calbolique,  »  qui  seule, dit-il,  commu- 
nique la  vie  de  la  grûce  et  la  sanctificatiou, 
en  n^parant,  par  ses  sacrements,  le  genre  hu- 
main qui  s'était  perdu  par  ses  propres  fautes. 
Hors  d'elle  ,  comme  hors  de  l'arche  qui  en 
était  la  figure,  on  ne  peut  qu'être  submergé. 
Pure  dans  sa  doctrine,  elle  n'est  souillée  d'au- 
cune erreur,  quoique  nécessitée  à  vivre  en  ce 
monde  parmi  les  méchants.  Elle  est  plus  lui- 
sante que  le  soleil,  plus  blanche  que  la  neige, 
sans  aucune  tache  ni  ride.  »  Le  Commentaùs 
de  Cassiodore  est  divisé  en  douze  parties,  se- 
lon l'ordre  et  le  sens  des  Psaumes,  qui  repré- 
sentent Jésus-Clirist  et  son  ïlglise  en  ditfé- 
rents  états.  C'est  ce  qu'il  explique  en  douze 
petits  articles  pour  servir  de  Prolégomènes  à 
son  commentaire. 

§IV. 

Du  commentaire  sur  le  Cantique  des  cantiques 
attribué  à  Cassiodore. 

i>,^,!"ucln-  1-  A  la  suite  du  Commentaire  sur  les  Psau- 
1,^/°'  ^nV  ^"^^'  0"  ^  ™'s  di'iis  la  nouvelle  édition  un 
"»•  commentaire  sur  le  Cantique   des  cantiques 

qui ,  dans  plusieurs  manuscrits  et  dans  une 
édition  d'Allemagne,  ;\  Fribourg,  en  1338, 
porte  le  nom  de  Cassiodore.  Il  lui  est  aussi 
attribué  par  plusieurs  écrivains  qui,  dans  leur 
catalogue  des  auteurs  ecclésiastiques ,  ont 
donné  celui  des  Œuvres  de  Cassiodore.  Il  peut 
lui-même  avoir  douué  occasion  de  le  mettre 
sous  son  nom ,  en  disant  sur  la  fin  de  son 
(,  P;f^""^,|,°  Commentaire  sur  les  Psaumes  :  «  Examinons 
"■■•  à  présent  les  paroles  de  Salomon,  que  l'on 

sait  avoir  été  déjà  expliquées  par  divers  in- 
terprètes. 1)  Mais,  quoi(]ue  cet  ouvrage  né  soit 
pas  indigne  de  lui,  puisiju'il  y  en  a  peu  où  le 
texte  du  Cantique  des  cantiques  soit  expliqué 
avec  plus  de  netteté  et  de  précision,  il  y  a 
cependant  de  fortes  raisons  pour  croire  qu'il 
n'en  est  point  l'auteur.  La  première  est  que 
l'on  y  cite  les  explications  de  saint  Grégoire 
le  Grand  sur  les  Evangiles,  ouviagc  que  ce 
saint  ne  commença  que  depuis  qu'il  fut  élevé 


au  pontificat ,  c'est-.^-dire  depuis  l'an  392 , 
plus  de  quinze  ans  au  moins  depuis  la  mort  de 
Cassiodore.  La  seconde  se  prend  de  la  dilfé- 
rence  du  style.  La  troisième  du  silence  de 
Cassiodore  sur  cet  ouvrage,  dont  il  ne  dit  pas 
un  mot  dans  sa  préface  sur  le  livre  de  l'Ortho- 
grajj/te,  'où  il  fait  le  dénombrement  de  tous 
les  livres  qu'il  avait  composés  depuis  sa  con- 
version. S'il  eût  travaillé  surle  Cantique  des 
cantiques  iimnédiatement  après  avoir  expli- 
qué les  Psaumes ,  comme  on  veut  l'inférer 
des  dernières  paroles'  de  ce  commentaire; 
eùt-il  négligé  d'en  parler  et  de  placer  cet  ou- 
vrage dans  son  Catalogue,  immédiatement 
après  celui  qu'il  a  composé  sur  les  Psaumes? 
Une  quatrième  raison  est  que  Cassiodore  suit  vi«d«  i 
ordinairement  la  version  des  Septante,  ce  iv.w'-t 
que  ne  l'ait  pas  l'interprète  du  Cantique  des 
cantiques.  Il  faut  ajouter  que  ce  commenta- 
teur parle  si  clairement  des  deux  opérations 
en  Jésus-Christ,  et  les  prouve  avec  tant  de 
soin,  qu'on  peut  croire  qu'il  a  vécu  ou  du 
temps  de  la  naissance  du  monothélisme,  ou 
depuis  que  cette  hérésie  eut  fait  du  bruit  dans 
l'Église,  (i  Le  Seigneur,  dit-il,  opérait'  ce  qui 
était  convenable  à  la  divinité  ,  en  sorte  qu'il 
accomplissait  aussi  ce  qui  était  de  son  hu- 
manité, sans  cesser  de  faire  ce  qui  appar- 
tenait à  la  divinité  :  car  l'opération  de  la  di- 
vinité est  distinguée  en  Jésus-Christ  de  celle 
de  la  nature  humaine.  Avait-il  faim?  avait-il 
soif?  pleurait-il?  soutfrait-il  de  la  lassitude? 
enfin,  a-t-il  pu  être  crucifié  et  mourir?  C'était 
autant  d'opérations  de  la  nature  humaine. 
Mais  lorsqu'il  ressuscitait  les  morts  et  qu'il 
guérissait  les  malades,  lorsqu'il  se  ressuscita 
lui-même,  c'était  manifestement  autant  d'œu- 
vres  de  la  divinité.  » 

§  V. 

Du  livre  de  l'Institution  aux  lettres  divines. 

1.  Cassiodore,  sensiblement  touché  de  ce  oecasio»! 

qu'il   n'y  avait    point  à  Rome    de   maîtres  "'"■'° 
publics  destinés  à  enseigner  les  divines  Ecri- 
tures ,  pendant  que  les  auteurs  profanes  y         ci» 

Prif.  io 


•  llaclenus  quœ  ad  expositionem  Psalmorum 
perlinrre  videhunlnr,  decursa  sunt  :  nunc  Saln- 
monU  dicta  videamus,  quw  proprios  exposilurcs 
htthere  nosctiiitur.  Cassind.  inpsul.,  yiv^.  'nu. 

'  (Juin  sic  Dominus  npenibnlur  ea  quœ  divini- 
tatis  ernnl,  ul  nihiloiuuius  pcrficcret  e  i  quw  erant 
humnnitatis,  el  7wn  rctinquenl  ea  quœ  eraiil  di- 
vinilaiis.  Dtslincta   esl  cnim  operatio  in  ChrisCo 


divinitatis  et  humanilnlis.  Kam  quod  eSuriehal, 
qund  sitiebal,  quod  flebat,  quod  Inssabiilur,  quod 
ad  ullimuni  crucifigi  et  mori  paierai,  humaniln- 
lis opéra  iranl;  quod  i^ero  morlun.^  .luscilalial, 
quod  nmnilnis  inftrnunilihus  succurrrbat,  quod 
seipsuin  a  morluis  rtssuscilnbat,  evidentUsima 
tranl  opéra  divinilatis.  Comment,  in  Caul.  cant., 
cap.  V,  vcrc.  H,  pag.  497. 


[vi°  SIÈCLE.]  CHAPITRE  XIX. 

jm^iiui.  t.r.  (Haicnt  expliques  par  des  maiircs  très-célè- 
Lrcs,  fil  tout  son  possil)le,avec  le  saint  pape 
Agapet,  pour  établir  on  cette  ville,  h  ses  frais, 
des  chaiiTS  de  prol'cssouis  dans  les  écoles 
chrétiennes,  à  l'iniitalion  de  ce  qui  s'était 
pratiqué  autrefois  à  Alexandrie,  et  de  ce  qui 
se  pratiquait  encore  alors  dans  la  ville  de  Ni- 
sibo,  en  Syrie,  où  l'Hcriturc  sainte  était  ex- 
pliquée aux  juifs,  ce  (jui  devait,  à  plus  forte 
raison,  se  pratiquer  chez  les  chrétiens.  Mais 
les  guerres  funestes  et  les  troubles  de  l'Italie 
ne  lui  permirent  point  d'exécuter  un  si  loua- 
ble dessein,  comme  on  l'a  déjà  remarqué.  Ce 
fut  pour  y  suppléer  en  quelque  sorte  qu'il 
entreprit,  dans  les  premières  années  de  sa  re- 
traite, de  donner  une  introduction  à  l'étude 
de  récriture  sainte,  dans  le  livre  qu'il  com- 
posa sous  le  nom  d'Institution  aux  lettres 
divines.  Son  dessein,  dans  cet  ouvrage,  est  de 
donner  les  principes  de  la  science  de  l'I^cri- 
ture  sainte,  et  même  des  lettres  humaines  , 
non  en  suivant  les  lumières  de  son  propre 
esprit,  mais  en  s'attachant  à  la  doctrine  des 
anciens  Pères,  dont  les  commentaires  sur  les 
livres  saints  conduisent  efficacement ,  selon 
lui,  à  la  contemplaliou  de  Dieu.  Pour  garder 
quelque  ordre  dans  la  lecture  de  l'Écriture 
sainte,  il  pense  qu'on  doit  commencer  par 
apprendre  de  mémoire  tous  les  Psaiimes,  en 
les  lisant  dans  des  exemplaires  fort  corrects, 
de  peur  de  prendre  les  fautes  des  copistes 
pour  le  texte  même  de  l'Écriture;  il  exhorte 
aussi  à  apprendre  par  cœur  toute  l'Ecriture, 
disant  qu'il  avait  vu  des  personnes  devenues 
si  habiles  par  ce  moyen,  que  lorsqu'on  leur 
proposait  quelques  questions  sur  le  sens  d'un 
passage,  elles  en  citaient  plusieurs  autres 
semblables  dont  le  rapport  des  uns  aux  autres 
faisait  voir  comment  on  devait  les  entendre. 
«  En  etlet,  dit-il,  il  arrive  souvent  que  ce  qui 
est  obscur  dans  un  livre  de  l'Ecriture,  est 
énoncé  en  termes  plus  clairs  dans  d'autres, 
et  il  faut  expliquer  ce  qu'il  y  a  de  moins  clair 
par  ce  qui  l'est  davantage.  C'est  ainsi  que 
saint  Paul  a  fait  dans  son  Epitre  aux  Hébreux, 
où  il  explique  les  prophéties  de  l'Ancien  Tes- 
tament par  l'accomplissement  qu'elles  ont  eu 
dans  le  Nouveau.  »  Cassiodore  dit  ensuite 
que  l'on  doit,  après  avoir  acquis,  par  son 


CASSIODORE,  CHANCELIER.  2i>7 

propre  travail,  l'intelligence  de  l'Écriture  , 
consulter  les  saints  Pères  qui  l'ont  expli(piéc  ; 
savoir,  entre  les  Grecs  ,  Clément  d'Alexan- 
drie, saint  Cyrille,  évoque  de  la  ménu"  ville, 
saint  Chiysoslôme ,  saint  Grégoire  de  Xa- 
zianze  et  saint  Basile  ;  mais  parce  qu'il  écri- 
vait pour  des  Lalins,  il  marque  qu'il  parlera 
dans  la  suite  amplemmit  des  Pères  (jui  ont(!crit 
en  cette  langue.  Il  convient  que  quelques- 
uns,  sans  tous  ces  secours,  sont  devenus  sa- 
vants dans  l'Écriture  sainte,  et  il  dit,  d'a- 
près Cassicu  et  saint  Augustin,  (pie  des  per- 
sonnes en  ont  reçu  de  Dieu  l'intelligence  par 
de  ferventes  prières;  mais  il  est  d'avis  de 
suivre  '  la  voie  commune,  d'apprendre  et  de 
se  faire  instruire,  de  peur  de  tenter  Dieu,  ce 
qui  n'empêche  pas  qu'on  n'ait  recours  aux 
lumières  du  Saint-Esprit  et  qu'on  n'adresse 
à  Dieu  ces  paroles  du  Prophète  qui,  quoique 
déjà  si  éclairé,  lui  disait  :  Dunnez-moi  V intel- 
ligence, afin  que  j'apprenne  vos  commandements 
et  votre  sainte  loi.  Les  lumières  que  Cassio- 
dore avait  puisées  dans  l'Écriture  ,  soit  par 
son  travail,  soit  par  la  prière,  ne  l'empêchè- 
rent pas  de  coUationner ,  quoique  dans  un 
âge  déjà  avancé,  tout  l'Ancien  et  tout  le  Nou- 
veau Testament  sur  plusieurs  manuscrits.  Il 
imita  dans  cette  révision  ou  nouvelle  édition 
de  l'Ecriture,  ce  qu'avait  fait  saint  Jérôme 
pour  les  distinctions  des  versets,  les  points  et 
les  virgules,  et  il  fit  garder  autant  qu'il  put 
les  règles  de  l'orthographe ,  dans  un  temps 
où  elle  n'était  pas  encore  bien  réglée  chez 
les  Latins,  quoiqu'elle  le  fût  déjà  chez  les 
Grecs.  Il  s'appliqua  surtout  à  bien  rendre  le 
texte  du  Psautier,  des  Prophètes  et  des  Épî- 
tres  (le  saint  Pa(d,  parce  qu'il  s'y  rencontre 
de  plus  grandes  difficultés  que  dans  les  autres 
lisTes  de  l'Écriture. 

2.  Après  ces  remarques  générales,  Cas- 
siodore commence  son  livre  de  l'Institution 
par  indiquer  les  écrits  des  Pères,  que  l'on 
doit  lire  sur  chaque  livre  de  l'Octatcuque, 
c'est-à-dire  sur  les  cinq  livres  de  Moïse,  Jo- 
sué,  les  Juges  et  Iluth.  Saint  Basile  a  fait  neuf  î>p- 
homélies  sur  le  commencement  de  la  Genèse, 
qui  ont  été  traduites  en  latin  par  Eustathe. 
Saint  Ambroise  a  aussi  expliqué  l'ouvrage 
des  six  jours  ;  mais  Cassiodore  préfère  ce 


'  ticet  hmc  fuerint  stupenda  miracula.  et  om- 
nia  possibilia  credenlihus  approbentur,  non  nos 
tanten  dehere  talia  fréquenter  expelere,  sed  in 
usu  communis  doctrinœ  salins  permanere  :  ne 
cum  illa  quœ  sunt  supra  nos  audactcr  exquiri- 
vxus,  culpam   tentationis  contra  prœceplum  Do- 


PsmI.  CWIII, 


Premier  \o« 
lume. 


Écri(s  des 
Pères  qu'OQ 
dojl  lire  sur 
rOi^laleuque, 

609. 


mini  polius  incurrere  videamur...  Nam  et  David 
cum  esset  in  lege  Dominijugiter  ocrupatns  ,  lumen 
clamabat  ad  Dominum  dicens  :  Da  ruihi  iut<>l- 
lectum  ut  discam  mandata  tua.  Prœfat.  in  lib. 
Inslit.,  pag.  509. 


22« 


HISTOIRE  GÉNKHALE  DES 


Seco  i<l    ^o* 
lutnct 


Sur  k-.  Roi!, 
cap.  I,  pag. 
Eli. 


Tro  iiimt 
folunio. 

Sur  lei  Pio- 
pbète«.  up, 
III,  ^tg.  (Il, 


que  saint  Augustin  a  écrit  sur  ce  li\Te  en- 
tier, soit  dans  ses  ouvrages  conbe  les  mani- 
chéens, et  en  particulier  dans  ceux  qu'il  a 
écrits  contre  Fauste,  soit  dans  ses  livres  des 
Confessions  et  ailleurs.  Il  propose  à  lire  sur 
le  même  livre  ceux  que  saint  Ambroise  à 
faits  sur  les  Patriarches,  les  questions  de 
saint  Jérôme  sur  la  Genèse,  l'ouvratre  de 
saint  Prosper  divisé  en  cent  quarante-trois 
titres  et  les  Homélies  d'Ûrif;ène,  qu'il  dit  être 
très-éloquentes.  Mais  parce  que  ce  Père  avait 
été  condamné  depuis  peu  par  le  pape  Vigile, 
pourempécherqnc  ses  religieux  ne  s'égaras- 
sent en  les  lisant,  Cassiodorc  marque  les  en- 
droits dangereux  et  tous  ceux  qui  lui  parais- 
saient suspects  ;  il  détaille  le  nombre  de  tes 
homélies  sur  l'Octateuque ,  excepté  celles 
qui  étaient  sur  le  livre  de  lluth,  parce  qu'il 
ne  put  les  trouver;  pour  y  suppléer,  il  en- 
gagea le  prêtre  Bellator  à  faire  un  commen- 
taire sur  ce  livre;  ce  qu'il  fit  dans  un  ou- 
vrage divisé  en  deux  parties,  qui  fut  joint 
aux  Homélies  d'Origène,  sur  les  livres  pré- 
cédents. Cassiodore  fit  un  recueil  de  toutes 
ces  pièces,  qu'il  eut  soin  de  faire  relier  en- 
semble :  c'est  ce  qu'il  appelle  le  premier 
volume  de  sa  Bible,  qu'il  avait  partagée  en 
neuf. 

3.  Il  rassembla  dans  le  second  tout  ce 
qu'il  trouva  d'ex|)lications  sur  les  livres  des 
Rois  et  sur  les  Paralipomènes.  Il  plaça  à  la 
tête  de  ce  Recueil  quatre  homélies  d'Ori- 
gène; les  réponses  de  saint  Augustin  aux 
six  questions  de  saint  Siniplicien,  évêque  de 
Milan  ;  les  trois  questions  que  saint  Jérôme 
avait  envoyées  à  Aboudantius,  et  quelques 
autres  endroits  des  ouvrages  de  ces  deux 
Pères,  qui  ont  rapport  à  l'histoire  des  Rois, 
de  même  que  de  ceux  de  saint  Ambioise.  Il 
ne  tniuva  qu'une  seule  homélie  d'Origène  sur 
les  Paralipomènes,  et  parce  qu'il  n'avait  pas 
trouvé  ces  livres  ni  ceux  des  Rois  divisés 
par  chapitres  et  par  titres,  il  les  divisa  lui- 
même  en  mettant  un  titre  à  chaque  cha- 
pitre. 

4.  Le  troisième  volume  renfermait  tous 
les  Prophètes,  avecles  courtes  notes  de  saint 
Jérôme,  que  Cassiodore  dit  être  fort  utiles 
pour  les  commençants;  elles  étaient  suivies 
de  dix-huit  livres  du  même  saint  Jérôme  sur 
Isaïe,  de  six  sur  Jérémie,  de  quatorze  sur 
Ézéchiel,  do  trois  sur  Daniel  et  de  vingt  srr 
les  [leliîs  Proiihètes.  Cassiodore  y  juii^nit 
quatorze  honiéiios  d'Origène,  traduites  par 
saint  Jérôme.  U  dit  que  ce  Père  avait  com- 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

posé  vingt  livTes  sur  Jérémie,  mais  qu'il 
n'en  put  recouvrer  que  six,  quoiqu'il  eût  fait 
chercher  les  autres  avec  beaucoup  de  soin. 
11  ne  s'en  donna  pas  muins  pour  avoir  les 
Conmienlairesde  saint  Ambroise  sur  les  Pro- 
phètes, et,  n'ayant  pu  les  découvrir,  il  re- 
commanda à  ses  frères  de  les  chercher. 
Nous  n'en  avons  point  de  ce  Père,  et  on  ne 
sait  même  s'il  en  a  fait  ;  Cassiodore  ne  l'as- 
sure pas. 

5.  Le  quatrième  volume  était  composé  du       o^irum», 

*  ïbluiiie. 

Psautier  et  des  commentaires  de  saint  Hi- 
laii-e,  de  saint  Ambroise,  de  saint  Jérôme, 
de  saint  Augustin  ot  de  saint  Athanase  :  mais  !:'"  '"  ■'  "• 

~  lier,   oft,   IV, 

de  tous  ces  Pères,  il  n'y  avait  que  saint  Au-  i-t-'"»- 
gustin  qui  eut  expliqué  tous  les  Psaumes.  A 
l'égard  de  l'ouvrage  sur  les  Psaumes  adressé 
à  Marcellin,  Cassiodore  veut,  sans  doute, 
parler  de  la  lettre  de  ce  Père  à  Marcellin  ; 
aussi  ne  l'appelle-t-il  qu'un  petit  livre.  ;U 
parle  du  Commentaire  qu"il  avait  lui-même 
composé  sur  les  Psaumes,  reconnaissant  qu'il 
avait  beaucoup  emprunté  a  saint  Augus- 
tin. Il  y  faisait  voir  que  les  maîtres  des  scien- 
ces séculières  ont  enrichi  leurs  éciits  de  di- 
vers endroits  des  Psaumes.  Il  renouvelle 
l'ordre  qu'il  avait  déjà  donné  dans  sa  pré- 
face sur  les  Psaumes,  de  laisser  dans  la  bi- 
bliothèque le  volume  du  Psautier,  avec  les 
Commentaires,  pour  servir  à  corriger  les 
fautes  qui  pourraient  se  glisser  dans  les  dif- 
férentes copies  à  l'usage  des  frères.  Leur 
Psautier  était  divisé  en  trois  parties  ou  trois 
volumes  pour  leur  commodité. 

6.  Dans  le  cinquième  volume  étaient  les      Chi.k 
ouvrages  de  Salomon,  dont  le  premier  est  le 

livre  des  Proverbes,  qui  a  été  commenté  par  g^r t„ 

Didyme.  Epiphane,  ami  de  Cassiodore,  a  tra-  û\^r""iM- 
duit  ce  Commentaire  du  grec  en  latin.  Saint 
Antoine  appelait  Didyme  l'aveugle  clair- 
voyant, parce  que  la  privation  de  la  vue  ne 
l'avait  pas  empêché  «le  se  rendre  habile  dans 
la  plupart  des  arts  et  des  sciences.  Cassiodore 
dit  que  cela  lui  aurait  paru  impossible,  s'il 
n'avait  vu  lui-même  un  nommé  Eusèbe,  ve- 
nu d'Asie,  qui,  quoique  aveugle  dès  l'Age  de  ' 
cinq  ans,  avait  rempli  sa  mémoire  de  tant 
d'auteurs  et  de  tant  de  livres,  qu'elle  lui  te- 
nait lieu  de  bibliothèque  ;  il  les  possédait  si 
parfaitement,  qu'il  marquait  exactement  les 
endroits  ([u'il  en  citait,  et  il  était  si  instruit 
de  toutes  les  sciences,  qu'il  en  expliquait  tou- 
tes les  diflicuilés  avec  beaucoup  de  clarté. 
Cassiodore  apprit  de  lui  que  la  ligure  du  ta- 
bernacle et  du  temple  de  Jérusalem,  res- 


[vi"  SIÈCLE.]  CHAPITRE  XIX.  —  CASSIOnORE,  CnANCEURR. 


229 


lit'iie. 


L)es   Apto; 
fhp*,  tut. 


semblait  ti  cello  du  ciel.  Co  fut  sur  le  plan 
(ju'Eusi'l)!'  lui  on  (liiuna  ,  qu'il  lo  lit  dessiner 
il;iiis  un  i;riuul  livre.  Lo  vénoiiiblo  Itèdo  s'est 
réglé  sur  cette  peinture  du  temple  dans  le 
livre  qu'il  a  fait  du  Temple  de  Salomon.  Le 
niènui  Eiisèbo  découvrit  i\  Cassiodore  plu- 
sieui's  mystères  signifiés  par  les  ornenionls 
du  grand  prêtre  dans  l'ancienne  loi  ;  il  lui 
apprit  aussi  un  grand  nombre  d'anciens  ou- 
vrages dont  il  n'avait  point  ouï  parler.  Cassio- 
dore, en  reconnaissance  de  ce  service  ,  pria 
Dieu  de  taire  abandonner  à  Eusèbe  l'bérésie 
desnovatiens  dont  il  était  infecté,  et  de  lui 
faire  embrasser  la  vérité  de  la  foi  catholique. 
Il  conseille  délire  les  Conmientaires  do  saint 
Jérôme  et  ceux  de  Victorin ,  d'orateur  de- 
venu évêque,  sur  l'Ecclésiaste,  qui  est  le  se- 
cond livre  de  Salomon.  Le  troisième  est  le 
Cantiqnedcs  cantiques.  Ha  été  expliqné  par 
Origène  en  deux  homélies  que  saint  Jérôme 
traduisit  en  latin.  Rtifin  expliqua  aussi  le  Can- 
tique des  cantiques;  mais  seulement  jusqu'au 
quinzième  verset  du  second  chapitre.  Saint 
Epiphane  expliqua  ce  livre  tout  entier.  Ce 
commentaire  qui  était  très-court,  fut  mis  en 
latin  par  le  scolastique  Epiphane.  On  croit 
que  le  commentaire  que  Cassiodore  attribue 
ici  à  saint  Epi[)hane,  est  d'un  nommé  Phi- 
Ion,  que  ce  saint  évoque  ordonna  évêque  de 
Carpathe,  en  Chypre;  c'est  du  moins  à  lui 
que  Suidas  l'attribue,  et  non  pas;\  saint  Epi- 
phane. Cassiodore  lit  relier  en  un  seul  volume 
tous  ces  commentaires  avec  le  Cantique  des 
cantiques.  Il  remarque  que  saint  Jérôme 
croyait  que  le  livre  de  la  Sagesse  était  d'un 
savant  juif  nommé  Philon,  et  non  do  Salo- 
mon, comme  on  le  dit  ordinairement  ;  il  en 
parle  toutefois  ensuite  des  trois  livres  précé- 
dents, disant  que  le  prêtre  Bellator  l'avait 
expliqué  en  huit  livres,  et  que  saint  Augustin 
et  saint  Ambroise  en  avaient  aussi  dit  quel- 
que chose  dans  leurs  homélies.  A  l'égard  du 
livre  del'Ecclésiastique,  que  saint  Jérôme  dit 
être  l'ouvrage  de  Jésus,  fdsdeSirac,  Cassio- 
dore convient  qu'il  est  si  clair,  que  l'on  n'a 
pas  besoin  d'interprète  pour  l'entendre.  Il 
divisa  tous  ces  livres  par  chapitres  afin  d'en 
faciliter  la  lecture  aux  commençants. 

7.  Le  sixième  volume  était  intitulé  :  Des 
Agiographes.  On  y  trouvait  d'abord  le  livre 
de  Job  traduit  en  latin  par  saint  Jérôme  sur 
l'hébreu.  Cassiodore  remarque  après  ce  Pè- 
re, que  la  poésie,  devenue  le  langage  du 
Saint-Esprit,  et  la  dialectique  la  plus  exacte, 
sont  employées  dans  ce  livre.  Il  en  rapporte 


un  passage  pour  ]irouver  la  résurrection, 
dans  les  mémos  tenues  que  nous  le  lisons  dans 
hi  Vulgate.  On  avait  de  snn  temps  un  com- 
mentaire anonyme  sur  Job,  qu'il  Jugo,  par  la 
ressemblance  du  style,  être  de  saint  Ililaire; 
il  y  avait  aussi  des  notes  de  saint  Augustin 
sur  le  méiuo  livre.  Lo  prêtre  Bellator  lit  des 
commentaires  sur  les  livres  de  Tobie,  d'Es- 
thor,  de  Judith,  d'Esdras  et  desMachabées; 
savoir,  cimi  livres  sur  Tobie,  six  sur  Estlier, 
sept  sur  Judith,  et  dix  sur  les  deux  livres 
des  Machabées  ;  il  se  contenta  de  joindre 
aux  deux  d'Esdras,  deux  homélies  d'Origène 
qu'il  traduisit  en  latin. 

8.  D.ins  lo  septième  volume  qui  contenait 
les  quatre  Évangiles,  Cassiodore  indiquait  les 
auteurs  qui  les  ont  expliqués  avec  le  plus  de 
succès.  Il  nomme  sur  saint  Matthieu,  saint 
Jérôme,  saint  Ililaire  et  Victorin,  le  même 
qu'il  dit  avoir  commenté  le  livre  de  l'Ecclé- 
siaste; sur  saint  Luc,  saint  Ambroise;  sur 
saint  Jean,  saint  Augustin,  qui,  outre  ses  trai- 
tés sur  cet  évang(''liste,  a  fait  une  concorde 
des  quatre  Evangélistes.  Avant  lui,  Eusèbe 
de  Césarée  avait  fait  quelque  chose  de  sem- 
blable dans  un  ouvrage  intitulé  :  De  la  Diffé- 
rence, ou  des  varinticms  des  Évangiles.  Cassio- 
dore ne  désigne  aucun  interprète  sur  saint 
Marc. 

9.  Il  avait  trouvé  des  notes  sur  treize  Epî- 
tres  de  saint  Paul,  qui  étaient  si  estimées, 
qu'on  les  attribuait  au  pape  Gélase  :  «  Car 
c'est,  dit- il,  la  coutume  de  revêtir  de  l'auto- 
rité d'un  grand  nom  ce  qu'on  veut  faire  pas- 
ser pour  bon.»  Mais  ayant  lui-même  examiné 
ces  notes,  il  remarqua  qu'elles  étaient  infec- 
tées de  l'hérésie  pélagienne.  Pour  ne  point 
priver  ses  frères  de  ce  qu'il  y  avait  de  bon 
dans  cet  ouvrage,  il  retrancha  tout  ce  qui  lui- 
parut  mauvais  dans  l'explication  de  l'I^pître 
aux  Romains,  laissant  aux  plus  habiles  de 
ses  religieux  le  soin  de  corriger  l'explication 
des  autres  Ëpitres  sur  un  autre  commentaire 
anonyme  qu'il  avait  trouvé,  et  qui  n'était, 
comme  le  précédent,  que  sur  treize  Epitres 
de  saint  Paul.  Quanta  l'Épitre  aux  Hébreux, 
il  ne  trouva  rien  de  mieux,  pour  en  faciliter 
l'intelligence,  que  de  faire  traduire  les  tren- 
te-quatre homélies  de  saint  Clu-ysostôme.  Il 
employa  à  cette  traduction  son  ami  Mucien, 
qui  parait  être  le  même  Mucien ,  contre  qui 
Facundus  écrivit  sur  l'atfaire  des  Trois-C  ha  pi- 
tres. Cette  traduction  se  trouve  encore  dans 
quelques  bibliothèques  de  Paris.  Cassiodore 
fit  aussi  traduire  en  latin,  les  explications  de 


Toinmc. 
1«S.  iU. 


Diiiliè.ncvo- 
latnc. 


Dos  E|1rtpB 
des  !»iiôtrfl*, 
pair.  51V. 


230 


IIISTOraE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


saint  Cldmenl  d'Alexandrie  ?ur  la  première 
Épitre  de  ?aint  Pierre,  sur  les  deux  premiè- 
res de  saint  Jean,  et  sur  celle  de  saint  Jac- 
ques. Il  y  joignit  un  manuscrit  qui  contenait 
ce  que  saint  Augustin  a  écrit  sur  la  même 
Épitre  de  sainl  Jacques,  et  ce  qu'il  a  dit  sur 
la  première  de  saint  Jean  dans  dix  sermons, 
où  il  s'étend  particulièrement  sur  la  charité. 
Ayant  trouvé  presqu'en  même  temps  un 
exemplaire  du  commentaire  de  Didyme  sur 
les  sept  Épitres  canoniques,  il  le  fit  encore  tra- 
duire en  laliu  par  Épiphane.  Il  donna  encore 
à  ses  frères  des  noies  fort  courtes  sur  toutes 
les  Épitres  de  saiul  Paul.  On  attribuait  ces 
notes  à  saint  Jérùme.  Il  fit  venir  d'.Vfrique 
un  autre  commentaire  sur  les  mêmes  Epi- 
tres que  Pierre,  abbé  dans  la  province  de 
Tripoli,  avait  compose  des  seuls  passages  de 
saint  Augustin,  sans  y  rien  ajouter  du  sien, 
mais  avec  une  si  giande  liaison  des  passa- 
ges les  uns  avec  les  autres,  qu'il  semblait 
que  ce  fut  un  ouvrage  suivi  de  ce  Père.  11  se 
donna  beaucoup  de  mouvements  pour  trou- 
ver de  petites  remarques,  qu'on  disait  avoir 
été  faites  par  saint  Ambroise  sur  les  mêmes 
Épitres-;  mais  il  parait  qu'il  ne  put  les  dé- 
couvrir. Comme  toutes  ses  explications  n'é- 
taient pas  fort  étendues ,  il  en  fit  ramasser 
de  plus  amples;  savoir,  celles  qu'Origène 
avait  faites  sur  l'Epître  aux  Romains  en  vingt 
livres,  que  Rufin  réduisit  à  dix  en  les  tra- 
duisant ;  celles  de  saint  Augustin  sur  la  mê- 
me Épitre,  mais  qui  ne  sont  point  achevées; 
ses  questions  à  Simplicien  sur  celte  Épitre  ; 
ses  commentaires  sur  celle  aux  Galates,  et 
ceux  de  sainl  Jérôme  sur  la  même  Épitre, 
et  sur  celle  à  Philémon.  Il  fit  chercher  par- 
tout les  commentaires  qu'on  disait  que  saint 
Jérôme  avait  faits  sur  les  autres  Épitres  de 
saint  Paul,  sans  pouvoir  les  déterrer.  Il  en 
trouva  un  de  sainl  Chrysostôme  sur  ces  mê- 
mes Épitres,  qu'il  mit  dans  une  même  ar- 
moire avec  les  autres  manuscrits  grecs,  afin 
d'y  avoir  recours  lorsque  les  explications  des 
latins  ne  seraient  pas  assez  étendues.  Il  con- 
seille <»  ses  frères  de  ne  pas  négliger  les  ou- 
vrages des  modernes,  lorsqu'ils  ne  trouve- 
ront pas  de  quoi  se  satisfaire  dans  ceux  des 
anciens.  Telles  sont  les  remarques  de  Cas- 
siodore  sur  le  liuitième  volume. 

10.  Le  neuvième  et  dernier  volume  de  la 
bc.  Âiiô.de  Bible,  selon  le  partape  qu'il  en  avait  fait, 
iAiot«i(«e,  contenait  les  Actes  des  apôtres  et  l'.Apoca- 
lypse  de  saint  Jean.  Pour  avoir  un  commen- 
taire sur  les  Actes,  il  avait  fait  traduire  en 


Kratlèm» 


latin  par  ses  amis,  les  cinquante-cinq  homé- 
lies de  saint  Chrysostôme  sur  i  e  livre  qu'il 
avait  trouvées  en  grec.  Il  parait  qu'il  y  avait 
sur  l'Apocalypse  un  commentaire  de  saint 
Jérôme,  et  une  explication  couile  des  endroits 
les  jilus  dilliciles  par  Victoiin.  Il  faut  re- 
marquer que  Vigile,  évèque  africain,  avait 
écrit  sur  le  règne  de  mille  ans  dont  il  est 
parlé  dans  l'.^pocalypse ,  et  que  Tichonius, 
donaliste,  n'avait  pas  mal  réussi  à  expliquer 
certains  endroits  de  ce  même  livre.  Mais  parce 
qu'il  y  avait  d'autres  endroits  de  son  com- 
mentaire infectés  de  ses  erreurs,  Cassiodorc 
mit  des  marques  dans  cet  ouvrage  pour  dis- 
tinguer ce  qu'il  y  avait  de  bon  d'avec  ce  qui 
en  était  mauvais.  Il  dit  aussi  que  saint  Au- 
gustin a  expliqué  plusieurs  endroits  de  l'A- 
pocalypse dans  ses  li\Tes  de  la  Cité  de  Dieu, 
et  que  depuis  peu,  Primase,  évèque  en  Afri- 
que ,  l'avait  expliquée  eu  cinq  livres  avec 
exactitude,  et  qu'il  y  en  avait  joint  un  sixiè- 
me où  il  faisait  voir  ce  qui  rendait  un  hom- 
me hérétique. 

11.  Après  avoir  désigné  tons  les  commen-  j„,J/„Và"iî'. 
laleurs  que  l'on  pouvait  lire  sur  chaque  li-  '^J^,'.,".'' 
vre  de  l'Écriture  sainte  ,  Cassiodore  recueil- 
lit en  un  corps  les  écrivains  dont  les  ouvra- 
ges étaient  intitulés  :  Introduction  à   l'Ecri- 
ture,  parce  qu'ils  y  donnaient,  pour  ainsi 

dire  ,  la  clef  qui  en  ouvre  les  mystères  ,  et 
qu'ils  eu  découvraient  les  ditlercnls  sens. 
Ceux  qu'il  nomme  sont  Tichonius,  donatiste  : 
saint  Augustin,  dans  ses  livres  de  ta  Doctrine 
chrétienne;  Adrien,  Eucher,  et  Junilius.  évè- 
que d'Afrique.  Il  veut  que  si  ces  introduc- 
teurs ont  passé  quelque  chose ,  l'on  ait 
recours  aux  commentateurs  ;  qu'on  lise  avec 
soin  les  maîtres  catholiques  qui  ont  décidé 
les  questions  dilliciles;  que  l'on  aille  cher- 
cher, jusques  dans  les  lettres  des  Pères,  l'ex- 
plication qu'ils  y  ont  donnée  de  certains  en- 
droits ;  et  qu'enfin,  l'on  entre  souvent  en 
conférence  sur  les  dilhcultés  de  l'Écriture 
avec  des  vieillards  éclairés  et  consommés 
dans  l'étude.  11  convient  qu'il  avait  appris 
par  cette  voie  beaucoup  de  choses  et  en 
peu  de  temps;  ce  qu'il  ne  croyait  pas  fai- 
sable avant  de  l'avoir  expérimenté. 

12.  Il  parle  ensuite  des  (pialre  premiers   i,,"'"!""»!' 
conciles  généraux  qui  ont  allermi  les  fon-   p'*-"5- 
déments  de  notre  foi ,  qui  en  ont  établi  les 

vérités  ,  et  nous  ont  appris  à  nous  garantir 
de  la  mauvaise  doctrine  des  hérétiques.  Ces 
conciles  sont  ceux  de  Nicée  ,  de  Constanli- 
nople,  d'Éphèsc  et  de  Chalccdoinc.  Il  ne  dit 


[vi*  sikcLE.]  CIT.VPITRR  XIX.  —  CASSIODORE,  CIIANCELIEn 

rien  du  second  de  Constanfinoplo,  appch'  lo 


2;tl 


rait  on  chnnjfor  la  significalion  qui  a  sou- 
cinqui(''me  g(!ni''ral ,  parce  (lu'appaieinincnt  vciil  rappurt  à  qiicNiuo  clidsc  de  raystdriciix. 
il  écrivait  son  livre  de  l'Institution  avant  11  leur  iléleiul  encore  de  changer  les  noms 
l'an  353 ,  auquel  ce  concile  fut  tenu.  Il  mar-  par  d'aulres  synonymes,  ni  même  les  cxprcs- 
quc  qu'il  avait  t'ait  traduire  en  laliu  le  volu-  sions  '  qui  sont  contre  les  rendes  du  la  gram- 
me circulaire  du  concile  de  Chalcédoine  ;  maire;  la  raison  (pi'il  en  donne  est  que  ces 
c'est-à-dire  comme  il  l'explique  ,  le  volume  termes  nous  font  mieux  entendre  le  sens  de 
qui  renfermait  les  lettres  de  tout  le  monde,  l'Écriture  ,  qui  est  assez  belle  d'elle-même, 
ou  plutôt  celles  que  les  évêqucs  avaient  (-cri-  sans  emprunter  de  l'éclat  aux  arts  libéraux  ; 
tes  pour  la  contirmation  du  concile  de  Chai-  et  que  l'on  ne  doit  pas  regarder  comme  cor- 
cédoine,  et  que  l'empereur  Léon  avait  fait  roaipus  et  impropres,  des  termes  que  l'on 


recueillir  en  un  corps. 

13.  Cassiodore  donne  après  cela,  le  canon 
des  livres  de  l'Écriture  ,  en  remarquant  que 
saint  Jérôme  avait  traduit  sur  l'hébreu  tous 
les  livres  de  l'Ancien  Testament,  en  les  divi- 
sant par  versets  ,  afin  qu'il  fut  plus  aisé  de 
faire  en  lisant  sa  version  ,  les  pauses  et  les 
ponctuations  nécessaires  pour  en  compren- 
dre le  sens.  Il  rapporte  deux  autres  canons 
de  l'Écriture  ;  l'un  de  saint  Augustin  ,  et 
l'autre  selon  l'ancienne  version  ;  et  un  troi- 
sième ,  suivant  la  traduction  des  Septante. 
Saint  Augustin  voulait  que,  lorsqu'il  y  avait 
faute  dans  les  traductions  latines,  on  recou- 
rût au  texte  grec  ;  cela  engagea  Cassiodore 
à  procurer  à  ses  frères  un  exemplaire  grec 
de  l'Écriture ,  afin  que  rien  ne  leur  man- 
quât pour  en  acquérir  le  vrai  sens. 

14.  Après  avoir  donné  indistinctement  à 
tous  ses  frères  des  règles  pour  lire  utilement 
les  divines  Écritures,  il  s'adresse  aux  plus 
habiles  d'entre  eux  ,  qu'il  avait  chargés  de 
revoir  les  exemplaires  des  livres  sacrés,  et 
d'en  corriger  les  fautes.  Il  veut  que  pour 
s'acquitter  dignement  d'un  travail  si  impor- 
tant, ils  conservent  les  idiolismesou  les  pro- 
priétés de  la  langue  hébraïque  ou  grecque , 
et  les  manières  de  parler  qui  sont  consacrées 
dans  l'Écriture,  et  ne  sont  point  dans  l'u- 
sage commun.  II  les  renvoie  sur  cela  aux 
livres  que  saint  Augustin  a  faits  sur  les  cinq 
livres  de  Moïse,  celui  de  Josué,  et  celui  des 
Juges,  dans  lesquels  il  traite  des  différentes 
façons  de  parler  qui  sont  propres  aux  saintes 
Écritures.  Il  leur  défend  aussi  d'altérer  les 
noms  hébreux,  soit  d'hommes,  soit  de  lieux, 
comme  sont  ceux  de  Setli,  d'Llnoch,  de  Noé, 
de  Sion,  d'Oreb,  d'Hermon  et  autres  sem- 
blables ,  parce  qu'en  les  déclinant  on  pour- 

'  îiec  nia  verbn  tangenda  sunt,  qtiœ  interdum 
contra  artem  quidein  humanam  posila  r^periun- 
tur  ;  sed  auctoritate  muUontm  codicum  vindi- 
canltir  ;  corrumpi  siquidem  nequeunt,  quœ  ins- 
pirante Domino  dicta  noscuntur.  Cassiodor.  De 


sait  par  le  témoignage  de  plusieurs  manus- 
crits ,  être  ceux  que  Dieu  a  inspirés  aux 
écrivains  sacrés.  11  rapporte  plusieurs  expres- 
sions familières  aux  écrivains  sacrés,  et  mar- 
que comment  on  doit  les  entendre.  «  Laver 
ses  mains,  dit-d,  c'est  n'avoir  point  de  part 
à  quelque  chose.  Le  terme  ,  une  fois,  signifie 
résolution  constante  et  immuable:  celui  de 
jurer,  quand  il  est  attribué  k  Dieu,  veut  dire 
seulement  confirmer.  Le  terme  de  pieds  ,  se 
prend  [lour  l'action.  »  Il  fait  remarquer  que 
lorsque  des  noms  se  trouvent  employés  dans 
un  cas  ou  dans  un  genre  contraire  aux  rè- 
gles de  la  grammaire,  il  faut  les  conserver 
tels  qu'ils  se  trouvent  dans  le  plus  grand 
nombre  des  manuscrits  ;  que  si  toutefois  il 
se  trouvait  quelques  expressions  absurdes  , 
il  faudrait  les  corriger  ou  sur  la  version 
grecque  des  Septante  ,  revue  par  saint  Jé- 
rôme ,  ou  sur  les  traductions  latines  que  ce 
Père  a  faites  sur  l'hébreu.  Quant  à  l'ortho- 
graphe ,  il  renvoie  ses  frères  au  traité  qu'il 
avait  fait  sur  cette  matière  ;  ce  qui  pourrait 
donner  lieu  de  croire  qu'il  avait  fait  ce  trai- 
té avant  le  livre  de  V Institution:  mais  nous 
avons  déj-l  remarqué  que  Cassiodiore,  après 
avoir  composé  le  livre  de  l'Orthographe ,  re- 
vit tous  ses  ouvrages.  Il  put  donc  ajouter  à 
son  Institution  aux  divines  Ecritures,  ce  qu'il 
dit  ici  du  livre  de  V Orthographe,  où  il  fait 
mention  expresse  de  celui  de  l'Institution. 
Il  exhorte  ses  frères  à  poursuivre  le  travail 
qu'il  avait  commencé  sur  l'Ecriture  ,  et  à 
amasser  autant  qu'ils  le  pourraient,  des  trai- 
tés sur  ce  sujet.  11  dit  à  ceux  qu'il  avait  char- 
gés de  corriger  et  revoir  les  manuscrits,  d'i- 
miter la  main  de  l'écrivain ,  afin  que  rien 
n'en  gâtât  la  beauté,  et  de  considérer  atten- 
tivement" que  ce  qu'il  leur  confiait,  était  l'u- 

Institut.,  cap.  xui.  Slaneat  ubique  incorrupta  lo- 
culio  quœ  Deo  placuisse  cognoscitnr,  ita  ut  fui- 
gore  suo  niteat,  non  humano  desidcrio  carpenda 
subjaceal.  ibid. 
'  ConsidenUe  qualis  vobis  causa  commissa  sit; 


232 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


tilité  commune  des  clm'tiens  ,  le  trésor  de 
l'Église  et  la  lumière  des  unies, 
cbipiue       15.  n  fait  admirer  la  dnuceur  des  divines 

iri.p»:.  El».       , 

E«».eii«  Ecritures  ,  la  suite  des  événements  qu'elles 
nili'iTpèr'-''"  représentent,  l'utilité  de  ses  connaissances, 
la  solidité  de  sa  doctrine  ,  la  beauté  de  ses 
préceptes  et  de  ses  ordonnances.  Ensuite  il 
propose  à  SCS  frères  l.i  lecture  des  saints 
Pères  qui  ont  travaillé  à  la  défense  de  la  foi 
contre  les  hérétiques,  ou  à  maintenir  la  dis- 
cipline de  l'Église.  Les  ouvrages  qu'il  nom- 
me sont  les  treize  livres  de  saint  Hilaire  sur 
la  Trinité,  les  traités  de  saint  Amltroise  à 
l'empereur  Gratien;  les  quinze  livres  de 
saint  Augustin  sur  la  7'rinilc;  le  livre  de  la 
Foi ,  composé  par  l'évèque  Nicctius  ;  les  li- 
vi-es  des  Offices  de  saint  Ambroise  ;  ceux  que 
saiut  Augustin  a  composés  sous  les  titres  de 
la  Vraie  religion  ,  de  la  Doctrine  chrétienne  , 
du  Combat  chrétien,  du  Miroir,  de  la  Cité  de 
Dieu  ,  et  de  divers  autres  marqués  dans  le 
Catalogue  de  Possidius ,  auquel  Cassiodore 
ci..p.  ini,  renvoie.  Il  leur  conseille  aussi  la  lecture  de 
'""'  '  '  diverses  histoires ,  qui  ont  du  rapport  à  la 
religion  ,  comme  sont  les  livres  des  An- 
tiquités juives,  par  Joscphe,  que  l'on  peut  re- 
garder comme  un  second  Tite-Live  ;  ceux 
qu'il  a  écrits  sur  la  captivité  des  Juifs;  VHis- 
toire  Ecclésiastique  d'Eusèbc  avec  la  conti- 
nuation de  Rulfin  ;  celles  de  Socrate  ,  de 
Sozomène,  de  Théodoret,  d'Orose  et  de  Mar- 
cellin;  les  Chroniques  d'Eusèbe,  de  saint  Jé- 
rôme et  de  saint  Prosper,  avec  civile  de  Mar- 
cellin  ;  les  Catalogues  des  hommes  illustres 
de  saint  Jérôme  et  de  Gennade  de  Marseille. 
Cassiodore  avait  mis  tous  ces  livres  dans  sa 
bibliothèque,  avecles  traductions  latines  de 
ceux  qui  avaient  été  écrits  originairement  en 
grec.  Il  reconnaît  que  ce  fut  par  ses  soins 
que  l'on  traduisit  les  livres  des  Antiquités 
ck'p^  *"v''  y"'i'<?*  de  Josèphe.  Il  fait  l'éloge  de  la  plupart 
ixii.i.c.i.i.  (jgg  auteurs  dont  il  conseillait  la  lecture,  en- 
tre autres  de  saint  Hilaire,  de  saiut  Cyprien, 
de  saint  Ambroise,  de  saint  Jérôme,  do  saint 
Augustin.  Il  dit  de  saint  Cyprien  '  qu'après 
avoir  soutenu  dans  la  foi  par  ses  prédica- 
tions ceux  qui  chancelaient,  relevé  ceux  qui 
étaient  tombés,  et  conduit  jusqu'au  martyre 
les  confesseurs ,  il  était  devenu  lui-même 


marf\T,  afin  que  ses  actions  ne  fussent  pas 
au-dessous  de  ses  paroles.  Il  joint  à  ces  il- 
lustres écrivains  le  prêtre  Eiigyppius,  abbé 
du  monastère  de  Saint-Séverin,  proche  de 
Naples,  qui,  après  s'être  rempli  de  la  lectu- 
re de  l'Écriture  sainte  et  des  ouvrages  de 
saint  Augustin,  en  composa  comme  un  corps 
de  théologie,  divisé  en  trois  cent  trente- 
huit  chapitres,  réduisant  en  un  seul  volume 
ce  que  l'on  aurait  à  peine  trouvé  dans  une 
grande  bibliothèque.  Il  dédia  cet  ouvrage  h 
la  vierge  Proba,  la  même  à  qui  saint  Ful- 
gence  adressa  deux  traités  de  la  Virginité. 
Il  y  joint  encore  Denys  le  Petit,  dont  il  loue 
la  vertu  et  le  savoir. 

iG.  Afin  que  ses  religieux  fussent  à  cou- 
vert de  toute  surprise  de  la  part  des  héréti- 
ques, il  leur  ordonne  de  lire  encore  les  Actes 
des  conciles  d'ÉphèseetdeChalcédoineavec 
les  lettres  que  les  évêques  avaient  écrites 
pour  marquer  qu'ils  en  adoptaient  la  doc- 
trine et  les  décrets  ;  tous  ces  monuments 
étaient  entre  lem-s  mains.  Il  leur  ordonne  de 
rejeter  tout  ce  qui  a  été  fait  par  des  auteurs 
suspects,  qui  s'éloignent  des  règles  commu- 
nes et  de  la  doctrine  des  Pères,  regardant 
comme  l'origine  de  l'erreur  de  tout  aimer 
dans  un  auteur  suspect,  et  de  vouloir  défen- 
dre indistinctement  tout  ce  que  l'on  y  trouve, 
car  il  est  écrit  :  Eprouvez  tout,  et  approuvez 
ce  qui  est  bon. 

17.  La  cosmographie  ou  la  géographie 
pouvant  être  très-utile  à  ceux  qui  étudient 
l'Écriture  sainte,  parce  qu'elle  leur  donne  la 
faculté  de  connaître  la  situation  des  lieux 
dont  il  est  parlé  dans  les  livres  sacrés,  Cas- 
siodore recommande  à  ses  frères  de  lire  les 
meilleurs  géographes  dont  il  leur  avait  laissé 
les  écrits.  Il  nomme  l'orateur  Julius,  le  même 
apparemment  qui  fut  précepteur  du  fils  de 
l'empereur  Maximin.  L'ouvrage  que  Cassio- 
dore avait  de  lui  sur  la  cosmographie  était 
si  e.xact  qu'il  ne  laissait  rien  à  désirer  sur 
cette  matière.  Les  mers,  les  îles,  les  monta- 
gnes les  plus  fameuses,  les  provinces,  les 
villes,  les  fleuves,  les  peuples,  fout  cela  y 
était  détaillé.  Il  nomme  encore  la  description 
que  le  comte  Marcclliu  avait  faite  de  Cons- 
tanlinople  et  de  Jérusalem  ;  la  Fable  de  De- 


Ch4p.  : 
•I  ixiv, 

pour  fe  pM 
nmnir  c<.ii|| 
la  ktrtllqiii 


Cbip. 

1>«    la  tiifr^rf 
fr.ph  . 


l- 


ulilitas  chrislianorum,  thésaurus  Ecclesiœ,  iu- 
men  animarum.  Cassiod.,  De  Institut.,  cap.  xv, 
pa«.  ri)9. 

'  Quantos  illc  dubiiantes  non  pertulit  lahi,  lap- 
soi  vern  Hrmissimn.  prœdicalione  solidavit,  con- 


fessorcs  ad  martyrium  usque  perdu. ril  f  Et  ne 
minor  esset  prœdicationibus  suis,  ipse  quoque 
marlyrii  corona  decorntus  est.  Iliid.,  cap.  x\x, 
pnfr.  521. 


ùtt     ln«^rlii- 
U3. 


[VI'  siici.E.J  CHAPITRE  XIX. 

nys,  et  la  Géographie  de  Ploloradc  «  qui,  rlit- 
il.  parle  si  claiiemniit  do  tous  les  lieux  du 
monde,  qu'il  scuiLlo  en  la  lisant  qu'on  n'c>t 
iHrangcr  nulle  part.  Ainsi  demeurant  toujours 
dans  un  uiénie  lieu,  ce  qui  est  convenal)lo 
aux  moines,  continue  Cassiodore,  vous  i)ar- 
courez  en  esprit  ce  que  tant  de  différents 
auteurs  ont  recueilli  des  travaux  de  l(Mirs 
longs  voyages.  » 

18.  Ce  ne  fut  pas  assez  pour  lui  d'amasser 
un  grand  nombre  de  livres,  ni  d'en  marquer 
le  contenu  à  ses  disciples;  il  voulut  leur 
épaigner  la  peine  d'ouvrir  plusieurs  volu- 
mes, lorsqu'ils  n'auraient  besoin  que  d'un. 
C'est  pourquoi  il  écrivit  lui-même,  mais  en 
abrégé  et  on  lettres  rouges,  au  commeuce- 


Chip.  xxriii. 
D<  l'élud(  (Irs 
laltraï  humai- 
Ma,  ]»(.  &i«. 


Psal.  cxxrit, 

2. 


ment  de  chaque  volume,  ce  qu'il  contenait. 
A  la  tête  du  volume  où  l'Octatcnqne  était 
renfermé,  il  mit  les  trois  premières  lettres 
de  ce  nom  Oct.,  et  fit  la  m(^me  chose  .'i  l'égard 
des  huit  autres  volumes  de  sa  Bible. 

19.  Sachant  que  la  plupart  des  saints 
Pères  avaient  étudié  les  lettres  humaines,  et 
que  plusieurs  d'enir'eux,  comme  saint  Cy- 
prien,  Lactance,  Viclorin,  Optât,  saint  Hi- 
laire,  saint  Arabroise,  saint  Augustin,  saint 
Jérôme,  en  avaient  retiré  de  grands  avan- 
tages ;  que  Moïse  même  était  très-instruit 
dans  toutes  les  sciences  des  Égyptiens,  il 
conseille  l'étude  des  lettres  profanes  ii  ses 
religieux,  pourvu  qu'ils  le  fassent  avec  mo- 
dération, et  dans  la  vue  d'en  tirer  du  secours 
pour  l'intelligence  des  livres  saints.  Il  ajoute 
que  si  un  tempérament  froid  qui  glace  le 
sang  dans  les  veines,  comme  parle  Virgile, 
et  qui  assiège  le  cœur,  empêche  quelques 
frères  de  devenir  parfaitement  savants  dans 
les  lettres  sacrées  ou  dans  les  sciences 
humaines,  il  faut  qu'après  y  avoir  fait  un 
progrès  médiocre  qui  leur  serve  de  fonde- 
ment, ils  prennent,  selon  que  le  dit  le  même 
poète,  leurs  plaisirs  dans  les  champs  et  dans 
les  ruisseaux  qui  arrosent  les  plaines.  Ce 
n'est  pas  en  effet  une  occupation  contraire  à 
l'état  des  moines  de  cultiver  les  jardins,  de 
labourer  la  terre,  de  se  réjouir  de  l'abon- 
dance des  fruits,  puisqu'il  est  écrit  :  Vous 
vivrez  des  travaux  de  vos  mains^  et  en  cela 
vous  serez  bienheureux,  et  vous  vous  en  trouve- 
rez bien.  Il  indique  à  ces  sortes  de  religieux 
les  auteurs  qui  ont  écrit  touchant  la  maison 
rustique,  et  l'agriculture,  savoir  Gargilius, 
Martial ,  Columelle ,  Émilien.  Ils  avaient 
traité  de  la  manière  de  cultiver  la  terre, 
d'élever  des  abeilles,  de  nourrir  des  pigeons 


CASSIODORE,  CHANCRLIEU.  2,33 

et  mémo  des  poissons.  Cassiodore  avait  mis 
tous  leurs  ouvrages  dans  sa  bibliolhèi|uo.  Il 
trouvait  cet  avantage  dans  ces  sortes  d'exer- 
cices manuels,  que  l'on  en  pouvait  tirer  de 
quoi  noiu-iir  les  étrangers,  et  soulager  les 
malades. 

20.  La  situation  du  monastère  de  Viviers 
les  invitait  à  jiréparer  beaucoup  do  choses 
pour  les  étrangeis  et  ponr  les  pauvres.  Il  y 
avait  des  jardins  arrosés  do  pliisieur.s  ca- 
naux, et  le  voisinage  du  petit  fleuve  Pellèno 
fournissait  du  poisson  en  abondance.  Il  était 
aussi  très-facile  d'en  tirer  do  la  mer  qui 
était  au  bas  du  monastère,  et  de  le  conserver 
dans  les  réservoirs  que  Cassiodore  avait  fait 
creuser  dans  la  concavité  de  la  montagne.  Il 
avaitaussi  failconstruire  des  bains  pourl'usa- 
ge  des  infirmes,  et  avait  fait  conduire  à  cet 
etl'et  des  fontaines  d'une  eau  excellente  à  boire 
et  salutaire  à  ceux  qui  usaient  de  ces  bains. 
Il  trouva  le  moyeu  de  tirer  assez  d'eau  du 
lleuve  pour  faire  tourner  les  moulins  de 
Viviers  sans  les  exposej-  aux  inondations. 
Eu  sorte  que  les  religieux,  ne  manquant 
d'aucune  commodité  dans  l'enceinte  de  leur 
maison,  ne  devaient  point  être  tentés  d'en 
sortir.  Il  passe  de  la  description  qu'il  en  fait 
aux  écrits  de  Cassien,  dont  il  leur  conseille 
la  lecture  pour  connaître  cpiels  sont  les  vices 
que  l'on  doit  combatiro  dès  l'entrée  en  reli- 
gion. «  Cet  auteur,  dit-il,  dépeint  si  natu- 
rellement les  mouvements  déréglés  de  l'âme, 
qu'il  semble  faire  voir  à  l'œil,  et  même  tou- 
cher sensiblement  aux  hommes  leurs  pro- 
pres défauts  et  leurs  excès,  et  les  forcer  pour 
ainsi  dire  à  s'en  donner  de  garde,  au  lieu 
qu'auparavant  les  ténèbres  qui  les  environ- 
naient les  empêchaient  de  s'en  apercevoir.  )> 
Il  leur  dit  que  si,  après  s'être  suffisamment 
instruits  et  formés  dans  les  exercices  de  la 
vie  cénobitique,  ils  aspirent  à  quelque  chose 
de  plus  parfait,  ils  pourront  aller  mener  la 
vie  heureuse  des  anachorètes  dans  l'agréa- 
ble solitude  du  Mont-Castel,  qui  ressemblait 
fort  à  la  demeure  des  ermites,  quoiqu'enfer- 
mée  de  murailles. 

21.  Entre  tous  les  travaux  des  mains,  il 
donne  la  préférence  h  celui  de  transcrire  des 
livres,  pourvu  qu'on  les  transcrive  lisible- 
ment et  avec  exactitude.  La  raison  qu'il 
donne  de  cette  préférence,  est  que  les  moi- 
nes, en  lisant  et  relisant  si  souvent  les  saintes 
Écritures,  ce  qui  est  nécessaire  pour  les 
transcrire,  s'en  remplissaient  l'esprit  et  s'en 
instruisaient  eux-mêmes,   en  même  temps 


Chap.  Xftx. 
DefetIplIon'iQ 
mûifn  16  »  d-, 
V  vic.s,    I»;,*. 


Cliap.  XXX, 
Des  copiste* 
ou  antiquai- 
res, pag.  32.. 


234 


HISTOIRE  GÉNF:RAT,E  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 

d'huile;  cl  de  diverses  horloges  dont  les  unes 


qu'ils  répandaient  partout  la  doctrine  sacrée 
comme  une  semonce  céleste,  qui  fructifie 
dans  les  âmes.  U  donne  à  cet  art  tous  les 
éloges  qu'on  peut  lui  donner,  en  disant  que 
l'antiquaire  prêche  aux  hommes  delà  main 
seule,  qu'il  leuraimonce  le  salut  en  silence, 
qu'il  fait  la  guerre  au  démon  par  la  plume 
et  par  l'encre;  que  Satan  reçoit  autant  de 
blessures  qu'un  habile  copiste  écrit  de  paroles 
duSeigneur.  «Sanssortirdesa  place, dit-il,  il 
court  diverses  provinces  par  le  moyen  de  ses 
ouvragesquise  répandenten  divers  endroits; 
son  travail  est  lu  dans  les  lieux  saints;  les 
peuples  en  entendent  la  lecture,  et  appren- 
nent par  là  à  se  convertir  et  à  servir  Dieu 
avec  une  conscience  pure.  Je  n'ose  presque 
dire  qu'on  ne  peut  le  récompenser  dignement 
de  tant  de  biens  qu'il  procure  par  son  art, 
pourvu  toutefois  (ju'il  agisse  avec  une  grande 
pureté  d'intention,  et  non  par  ambition  ou 
par  cupidité.  L'homme,  par  le  moyen  de  cet 
art  multiplie  la  divine  parole;  on  écrit  avec 
trois  doigts  des  oracles  prononcés  par  toute 
la  Sainte-Trinité.  On  se  sert  de  cannes  et  de 
roseaux  pour  écrire  des  paroles  célestes, 
afin  d'employer  contre  le  diable,  ce  que  lui- 
même  fit  employer  par  ses  ministres  pour 
outrager  Jésus-Christ  dans  son  divin  chef,  à 
sa  passion.  Pour  ne  rien  laisser  à  dire,  les 
écrivains  imitent,  en  quelque  sorte,  Dieu 
même,  qui  a  écrit  sa  loi  de  son  propre 
doigt.»  Mais,  afin  que  les  religieux,  occupés 
à  transcrire  les  hvrcs,  s'acquittassent  avec 
exactitude  de  ce  travail,  et  qu'ils  pussent 
même  corriger  les  fautes  d'orthographe  qui 
se  seraient  glissées  dans  les  originaux,  il  les 
renvoie  à  plusieurs  anciens  auteurs  qui 
avaientécrit  surrortliographc,  et  dont  il  avait 
ramassé  les  ouvrages  dans  sa  bibliothèque. 
De  ce  nombre  était  Velif'-ïusLongus,  Gurcius 
Valérianus,  Pappirianus,  Adamantins,  .Mar- 
tirius,  Eutycliès,  Phocas,  Diomède  et  Tliéoc- 
tistus.  Il  donna  encore  h  ses  religieux  d'ha- 
biles ouvrieis  pour  leur  apprendre  à  lelier,  ù 
couvrir  les  livres,  et  à  en  enrichir  la  couver- 
ture, afin  que  le  dehors  répondît  h  la  beauté 
inestimable  des  sacrés  ('crits  qui  étaient  ren- 
fermés au  dedans.  Il  se  ilonna  lui-même  la 
peine  de  dessiner  les  dill'orentcs  manières 
des  couvertures  de  livres,  pour  que  chacun 
pùl  clinisir  celle  rpii  lui  plairait  davantage. 
Il  pourvut  aussi  son  monastère  de  lampes 
perpétuelles,  qui  conservaient  toujours  leur 
lumière,  et  se  nouriissaient  d'elles-mêmes 
sans  qu'on  y  touchai,  ou  qu'on   les   ronq)llt 


Cbnp.  IXXI. 
Dd    «olD   detl 


marquaient  les  heures  au  soleil,  les  autres 
par  le  moyen  de  l'eau  qui  imitait  le  cours 
du  soleil,  et  servait  pour  la  nuit  aussi  bien 
que  potir  le  jour. 

22.  Il  dit  à  ceux  qui  étaient  chargés  du 
soin  des  malades,  qu'ils  doivent  les  soulager  "^'_"'"'  '**' 
avec  beaucoup  de  soin,  dans  la  persuasion 
qu'ils  enrecevront  la  récompensede  celuiqui 
donne  les  biens  éternels  pour  les  biens  tem- 
porels; que  pour  mieux  remplir  leurs  olfi- 
ces,  il  est  h  propos  qu'ils  se  rendent  habiles 
dans  la  médecine  et  dans  la  pharmacie  ,  en 
étudiant  la  nature  des  simples  et  la  manière 
de  les  mélanger.  11  veut  néanmoins  qu'ils  ne 
mettent  pas  leur  confiance  dans  la  vertu  des 
herbes  ni  dans  les  conseils  humains  ;  parce 
qu'encore  que  la  médecine  soit  établie  de 
Dieu,  c'est  lui  qui  donne  la  vie.  Il  leur  con- 
seille de  lire  Vllerbier  de  Dioscoride ,  oii 
toutes  les  herbes  des  champs  sont  peintes 
avec  une  propreté  admirable  ;  et  ensuite  les 
ouvrages  d'Hypocrate ,  de  Galien  et  d'Au- 
rélius  Cœlius,  qu'il  leur  avait  laissés  dans  sa 
bibliothèque. 

23.  Lorsque  Cassiodore  écrivit  son  traité  ^^'V  '^"'' 
de  V Institution  Chalcédonius  et  Géronce  qu'il  ni.i^j,*;, 
qualitic  hommes  très-saints,  étaient  abbés  de  ?'."•"".  :«:^ 
ses  deux  monastères,  c'est-à-dire  de  Viviers 
et  de  Castel  :  il  paraît  même  qu'ils  en  furent 
les  premiers  abbés.  Mais,  quoique  ce  fussent 
deux  monastères  à  cause  desditl'érenls  exer- 
cices qu'on  pratiquait  dans  l'un  et  dans  l'au- 
tre, et  à  cause  des  deux  abbés  qui  les  gou- 
vei'uaient,  on  jouvait  en  quelque  sorle  les 
regarder  comme  un  seul  monastère,  parce 
qu'ils  étaient  renfermés  dans  la  même  clô- 
ture. Dans  l'exhorlalion  qu'il  fait  à  ces  deux 
abbés,  il  les  avertit  de  disposer  toutes  choses 
avec  tant  de  prudence  qu'ils  puissent, avecla 
grâce  de  Dieu,  conduire  leurs  religieux  fi  la 
possession  de  la  vie  éternelle  ;  il  leur  recom- 
mande d'exercer  surtoute  chose  l'hospilalité; 
de  soulager  les  pauvres  dans  tous  leurs  be- 
soins, d'instruire  dans  les  bonnesmœurs  les 
gensde  la  campagne,  qui  se  présenteraient  k 
eux  poin-  apiirendre  à  connaitn^  la  vérité  et  le 
chemin  du  salut  ;  d'éviter  eux-mêmes  l'oi- 
siveté ;  de  s'appliquer  à  la  lecture  des  divi- 
nes Ecritures  et  des  commentaires  des  plus 
célèbres  iloclcurs  de  l'IOglise  ;  de  lire  aussi 
les  Vies  des  Pères  et  les  Actes  dos  martyrs , 
pour  s'exciter,  à  leur  exemple,  k  la  pratique 
de  la  vertu,  sacliani  que  la  couronne  s'ac- 
corde non-seulement  k  ceux  qui  répandent 


[vi«  SIÈCLE.]  CHAPITRE  XIX.  —  CASSIODORE,  CHANGELIER. 


235 


leur  sang  pour  la  foi,  ou  qui  surmonteut  les 
tentations  de  la  chair  en  vivant  dans  le  cé- 
libal;  mais  aussi  ;\  tous  ceux  qui,  avec  le  se- 
cours de  Dieu,  nioiliiiout  leurs  passions  et 
croient  tout  ce  qu'il  faut  croire.  <i  Que  celui 
qui  pèche  moins,  dit  Cassiodore  ,  en  rende 
grâces  ii  Dieu,  qui  par  sa  miséricorde  l'a 
préservii  de  chutes  ])lus  fréquentes;  mais 
que  celui  qui  est  lonibé  plus  souvent ,  prie 
Dieu  continuellement,  sans  se  défendre  par 
de  mauvaises  excuses.  Rien  de  plus  insensé 
que  de  vouloir  en  imposer  ;\  celui  qu'on  ue 
peut  tromper.» 

24.  Cassiodorc  finit  son  livre  de  l'Institu- 
tion par  une  prière  qu'il  semble  n'avoir  dic- 
tée que  pour  en  donner  une  formule  ;\  tous 
ceux  qui  s'appliquent  .à  l'élude  et  à  la  lec- 
ture :  «  Donnez ,  Seigneur,  i\  ceux  qui 
lisent  et  qui  étudient,  l'avancement  et  le 
progrès.  Accordez  <i  ceux  qui  cherchent  l'in- 
telligence de  votre  loi,  le  pardon  et  la  rémis- 
sion de  leurs  péchés,  afin  que,  désirant  avec 
tant  d'ardeur  d'arriver  à  la  lumière  et  à  la 
claire  connaissance  de  vos  saintes  Écritures, 
nous  n'en  soyons  pas  empêchés  par  les  ténè- 
bres et  les  nuages  de  nos  fautes.  Attirez-nous 
à  vous  par  la  vertu  de  votre  toute-puissance. 
Ne  permettez  pas  que  nous  nous  égarions 
par  notre  propre  volonté,  après  nous  avoir 
rachetés  de  votre  sang  précieux;  ni  que 
votre  image  qui  est  gravée  en  nous  soit  dé- 
figurée ,  et  perde  la  beauté  de  ses  traits, 
qu'elle  ne  peut  conserver  si  vous  ne  la  dé- 
fendez des  insultes  de  l'ennemi.  Qu'il  lui  suf- 
lise  de  nous  avoir  blessés  mortellement  dans 
la  personne  d'Adam,  et  qu'il  cesse  d'em- 
ployer de  nouveaux  moyens  pour  nous 
surprendre  et  nous  tromper.»  Puis,  s'adres- 
sant  à  ses  religieux  :  «  Hâtez-vous,  leur  dit- 
il,  de  faire  de  grands  progrès  dans  les  scien- 
ces des  saintes  Ecritures.  Animez-vous  y  en 
considérant  que  c'est  pour  vous  remplir  de 
doctrine,  que  j'ai  amassé  un  si  grand  nom- 
bre de  livres  et  de  livres  si  bien  conditionnés 
et  si  bien  choisis.  » 

Le  témoignage  que  Cassiodore  se  rend  h 
cet  égard  ne  pouvait  être  suspect  à  des  per- 
sonnes qui  avaient  sous  leurs  yeux  la  riche 
bibliothèque  qu'il  leur  avait  formée  à  grands 
frais,  et  qui  étaient  témoins  du  soin  qu'il 
avait  pris  de  n'y  mettre  que  des  livres  utiles 
et  d'en  orner  tous  les  dehors  et  les  couver- 
tures. Il  est  de  tous  les  anciens  écrivains  ec- 
clésiastiques celui  qui  s'appliqua  le  plus  à 
faire  tleurir  les  études,  qui  tit  le  plus  de  dé- 


pense pour  amasser  dos  livres,  qui  se  donna 
le  plus  de  soin  pour  n'avoir  dans  sa  biblio- 
thèque que  des  exemplaires  comnls,  ([ui 
eut  le  plus  de  zulo  jjour  faire  copier  les  meil- 
leurs livres,  et  le  premier  qui  en  ait  fait  une 
occupalion  réglée  des  moines.  Cette  atten- 
tion, qui  a  produit  de  si  grands  avantages  à 
l'I'-glise  par  la  mul(i[)lication  des  manuscrits 
que  les  moines  des  autre  monastères  trans- 
crivirent depuis,  à  l'imitation  de  ceux  de  Vi- 
viers, était  surtout  nécessaire  dans  le  temps 
de  Cassiodore,  où  la  plupart  des  ouvrages 
des  anciens  auraient  péri  par  les  guerres 
dont  l'Ilalie,  la  Sicile,  l'Afrique  et  plusieurs 
autres  provinces  furent  affligées,  s'il  n'avait 
pris  la  peine  de  les  faire  transcrire. 

§VI. 

Traité  des  Sept  arts  libéraux,  dç  l'Oraison,  de 
l'Orthographe  et  des  Tropes  ou  des  figures. 

\.  Le  traité rfc's  Arts  libéraux  suivit  immé- 
diatement le  livre  de  l' Institution,  quoiqu'il 
eût  dû,  ce  semble,  le  précéder,  l'ordre  vou- 
lant qu'on  soit  instruit  dans  les  lettres  hu- 
maines avant  de  s'appliquer  à  l'étude  de 
l'Écriture  sainte.  Mais  Cassiodore  crut  devoir 
donner  la  première  place  au  livre  de  l'Institu- 
tion, h  cause  de  l'importance  de  la  matière  , 
qui  est  beaucoup  au-dessus  de  celle  qui  fait 
l'objet  des  Arts  libéraux.  Il  en  met  sept  dans 
son  traité  dont  chacun  fait  un  chapitre  par- 
ticulier, savoir  la  grammaire,  la  rhétorique, 
la  dialectique,  l'arithmétique,  la  musique,  la 
géométrie  et  l'astronomie.  Voici  ce  qu'il  dit 
sur  la  grammaire  :  «  Le  nom  de  grammaire 
vient  d'un  mot  grec  qui  signifie  lettre.  Cad- 
mus  fut  l'inventeur  des  lettres ,  mais  il  n'en 
inventa  que  seize  dont  il  fit  part  aux  plus  stu- 
dieux d'entre  les  Grecs,  qui,  par  la  vivacité  de 
leur  esprit,  inventèrent  les  autres.»  Cassiodore 
nomme,  entre  les  auteurs  qui  ont  écrit  le 
mieux  sur  la  grammaire,  Hélénus  et  Pris- 
cien,  auteurs  grecs,  Pah'mon,  Phocas,  Pro- 
bus,Censorinet  Donat,  grammairiens  latins. 
Il  s'arrête  à  ce  dernier,  comme  au  plus  mé- 
thodique et  plus  propie  pour  aider  les  com- 
meuçanls.  11  dit  ipi'il  avait  lui-même  fait  deux 
livres  de  Commentaires  sur  Donat,  et  que 
saint  Augustin  avait  aussi  écrit  sur  la  même 
matière.  Ce  qui  nous  reste  de  Cassiodore 
est  imparfait;  et  nous  n'avons  plus  le  traité 
de  saint  Augustin.  Cassiodore  parle  aussi 
d'un  Recueil  de  figures  au  nombre  de  quatre- 


Trail<i  de  I* 
Grammaire  , 
pag.  0^8,  cap. 


236 


HISTOIRE  GÉNFTRAI.E  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


De  larUto- 
rlqoe .  pig. 
S31,  cjp.  II. 


Dg  la  ilia- 
leeliqae,  paç. 
B36,  cap.  III. 


l'h:!.  m,  50. 


De  l'arllh. 
méllqii^,  ti«ir* 
BOX,  ca|.,  I  . 


vinp:t-dix-huit,  fait  par  un  nommé  Sacerdos  : 
ce  ftecueil  u'cst  pas  venu  jusqu'à  nous. 

2.  Il  dit,  en  parlant  de  la  rclhorique,  que 
trois  choses  font  l'orateur  ;  le  génie  naturel, 
l'art  et  l'exercice;  et  que  pour  remplir  la  signi- 
fication de  son  nom,  l'orateurdoil  enseigner, 
toucher  et  contenter  son  auditeur.  Il  expli- 
que toutes  les  parties  de  la  rhétorique,  et 
propose  à  ceux  qui  veulent  réussir  en  cet 
art  la  lecture  des  deux  livres  de  Cicéron, 
commentés  par  Marias  Yictorinns  ;  les 
douze  livres  des  Institutions  i\e  Quintilien,  et 
les  trois  volumes  de  Fortunalien,  où  cet  au- 
teur s'expliquait  avec  beaucoup  de  netteté, 
et  ne  disait  que  ce  qui  était  précisément  né- 
cessaire. Cassiodore  définit  la  rhétorique  : 
L'art  de  bien  dii-e. 

3.  Il  donne  trois  définitions  de  la  philoso- 
phie ;  la  première  en  disant  qu'elle  est  la 
science  des  choses  divines  et  humaines,  autant 
qu'il  est  possible  à  l'homme;  la  seconde,  en 
l'appelant  ['art  des  arts  et  la  discipline  des 
disciplines;  la  troisième,  en  la  mettant  dans 
la  ressemblance  de  l'homme  avec  Dieu  suivant 
que  cela  est  possible  à  l'homme.  Il  l'appi'lle 
encore  la  méditation  de  la  mort.  «  Cette  phi- 
losophie, dit-il,  convient  aux  chrétiens  qui, 
ayant  foulé  aux  pieds  les  vanités  du  siècle, 
doivent  imiter  ici  bas  la  vie  des  bienheureux 
dans  le  ciel,  afin  de  pouvoir  dire  avec  l'A- 
pôtre .■  Notre  conversation  et  notre  vie  est  dans 
le  ciel.  »  Il  remarque  que  les  premiers  philo- 
sophes n'avaient  point  donné  des  règles 
pour  les  syllogismes  ou  autres  raisonne- 
ments philosophiques  ;  qu'on  les  doit  à  Aris- 
tole,  qu'il  regarde  comme  le  plus  grand 
maître  de  la  dialectique.  Il  parle  des  neuf 
livres  de  Varron  sur  la  rhétorique  et  la  dia- 
lectique, de  l'inlroduction  de  Porphyre,  des 
sept  livres  de  Boëce  sur  celui  d'Arislote  qui 
a  pour  titre  :  De  l'Interprétation;  d'un  traité 
d'Apulée  dcMadaurcqui  était  aussi  intitulé  : 
De  l'Interprétation  ;  d'un  livre  de  Marins  Vic- 
torin  sur  les  syllogismes  hypothétiques,  et 
d'un  traité  deTullius  MarccUus  sur  le  même 
sujet.  Il  nous  apprend  qu'il  avait  lui-même 
composé  d'amples  commentaires  sur  le  livre 
de  l'Interprétation  d'Arislote,  et  un  livre  de 
la  Division. 

4.  Il  regarde  l'arithmétique,  la  musique, 
la  géométrie  et  l'astronomie  comme  autant 
de  parties  des  mathématiques,  en  mettant 


toutefois  l'arithmétique  pour  la  première, 
parce  que  les  autres  en  ont  besoin  pour  faire 
leurs  opérations. Il  rapporte, d'après  Josèphe. 
qu'Abraham  avait  le  premier  donné  aux 
Égyptiens  la  connaissance  de  l'arithmétique 
et  de  l'astronomie.  A  quoi  il  ajoute  que  les 
saints  Pères  ont  parlé  avec  éloge  de  ces 
deux  arts,  et  qu'ils  en  ont  persuadé  l'étude 
à  plusieurs,  parce  que  ce  sont  des  moyens 
de  nous  faire  passer  de  la  connaissance  des 
choses  corporelles  à  la  contemplation  des 
spirituelles.  Il  explique  avec  assez  d'étendue 
ce  qui  rega)de  l'arithmétique,  et  renvoie 
aux  différents  traités  qu'en  ont  fait  chez  lès 
Grecs  Nicomaque,  et  chez  les  Latins  Apulée 
de  Madaure,  et  Boëce  qu'il  appelle  homme 
magnifique.  Selon  lui,  Pythagore  estimait 
tant  l'arithmétique,  qu'il  avait  coutume  de 
dire  que  Dieu  avait  créé  toutes  choses  avec 
nombre  et  avec  mesure  ;  et  il  croit  que  ce 
philosophe'  avait  emprunté  cette  pensée  du 
livre  de  la  Sagesse  où  nous  lisons  :  Vous  ré- 
glez toutes  choses  avec  mesure,  avec  nombre  et 
avec  poids. 

?i.  C'est  nu  même  Pythagore  qu'il  attribue 
l'invention  de  la  musique,  sur  le  témoignage 
d'un  nommé  Gaudentius,  dont  il  avait  fait 
traduire  les  ouvrages  par  son  ami  Mucien. 
Ce  philosophe  en  conçut  l'idée  sur  le  bruit 
des  marteaux,  et  par  le  son  que  rendent  des 
cordes  tendues  lorsqu'on  les  touche.  Cas- 
siodore cite  divers  auteurs  qui  ont  tjaité  de 
la  musique,  entr'autres  Censorin,  Alipius, 
Euclide,  Ptolomée,  Albidus  et  saint  Au- 
gustin. Varron  qui  a  aussi  parlé  de  la  mu- 
sique lui  attribue  des  eflets  merveilleux,  en 
particulier  d'apaiser  les  mouvements  des 
esprits  violents  et  emportés  ;  ce  qui  revient 
à  la  remanjue  que  fait  Cassiodore  que  David 
délivra  Saiil  de  l'agitation  du  malin  esprit, 
par  l'harmonie  de  sa  harpe.  Il  rapporte 
qu'un  médecin  fort  habile  au  jugement  des 
anciens,  nommé  Asclépiade.  remit  un  fré- 
nétique en  sou  bon  sens  par  le  moyen  d'une 
symphonie.  Mais  il  veut  que  l'on  rejette 
comme  fabuleux  tout  ce  que  l'on  dit  de  la 
lyre  d'Orphée  et  du  chant  des  syrènes. 

G.  Il  d('finit  la  géométrie:  La  dimension  ou 
mesure  de  la  terre.  11  s'étend  peu  sur  cette 
partie  dont  il  se  contente  de  donner  les  prin- 
cipes, renvoyant  ceux  qui  voudraient  s'en 
instruire  plus  à  fond  h  ce  qu'en  ont  écrit  Eu- 


De  lu  m 
Un-  ta|.. 
lag.  Svb. 


l'a.L. 
rap.  ' 


"ini, 


'  Credo  Irahens  hoc  iniliuin   ah  illa  sfnlenlin 
jirnpitelali,  qnœ  dirit,  omnin  Dcnm  mensurn.nii- 


mcroel  poiirfere  disposnisse.  Cassiod.,  De  Arilh., 
cap.  IV,  piig,  5i3. 


[vi'  siKCLE.]  CHAPITRE  XIX.  —  CASSIOnORE,  CHANCELIER. 


Dra  Inilt 

|i«rii«sd«  ro* 

,  rai*uo,      pttgt 
Ml. 


Traité  de 


Des   Iropes 


clide,  Apollonius  et  Arcliim^de.  II  remarqno 
que  Boi'cc  avait  liacluit  on  latin  l'ouvrapfe 
il'Euclitlo.  11  dit  aussi  pou  do  cliosps  del'as- 
tronoiiiic  (pi'il  appcllo  la  loi  des  uslns,  parce 
qu'ils  ne  savent  se  mouvoir,  ni  s'arrôter  que 
selon  les  lois  (luc  le  Créateur  leur  a  pi-cscri- 
les  :  d'où  vient  que  l'on  regarde  comme  des 
événements  miraculeux  lorsque  le  soleil  s'ar- 
rêta pendant  trois  heures  par  l'ordre  de  Jo- 
sud  ;  qu'il  rétrograda  de  dix  degrés  sous  le 
règne  d'Ezédiias,  et  qu'il  fut  obscurci  pon- 
dant trois  heures  au  temps  de  la  Passion  du 
Sauveur.  Il  rejette  comme  contraires  à  la  foi 
les  connaissances  de  l'astrologie  judiciaire, 
et  cite  sur  cela  le  sentiment  de  saint  Basile  et 
de  saint  Augustin. 

7.  On  croit  (jne  le  traité  intitulé  :  De  l'Orai- 
son, où  Cassiodore  en  explique  les  huit  par- 
ties, c'est-ù-dire  le  nom,  les  cas,  les  déclinii- 
sons,  le  pronom,  le  verbe,  l'adverbe,  le  par- 
ticipe, la  conjonction,  la  préposition  et  l'in- 
terjection, est  un  des  deux  commentaires 
qu'il  dit'avoir  faits  surDonat.  Ce  qui  le  prou- 
ve est  le  rapport  que  ce  livre  a  avec  celui  de 
la  Gntmmnire,  et  le  titre  ûc  commetitaire  qu'il 
porte  dans  un  ancien  manuscrit  de  l'abbaye 
de  S.iint-Michel.  On  voit  aussi  que  Cassiodore 
y  répond  à  quelques  ditlicultés  que  l'on  fai- 
sait sur  certaines  expressions  de  Donat  à  l'oc- 
casion de  la  composition  des  noms.  L'autre 
commentaire  de  Cassiodore  n'a  pas  encore 
été  rendu  public. 

8.  Il  était  âgé  de  quatre-vingt-treize  -  ans 
lorsqu'il  composa  son  traité  de  l'Orthographe. 
Il  y  fut  engagé  par  ses  moines  qui  lui  avaient 
représenté  qu'en  vain  ils  auraient  appris  ce 
que  les  anciens  avaient  fait,  et  ce  qu'il  y 
avait  ajouté  lui-même,  s'il  ne  les  instruisait 
de  la  manière  dont  ils  devaient  transcrire 
leurs  ouvrages.  Il  leur  donne  donc  dans  ce 
traité  toutes  les  règles  de  l'orthographe.  Mai^, 
ne  voulant  pas  se  faire  honneur  d'un  ouvrage 
où  il  ne  faisait  qu'abréger  ceux  des  autres, 
il  nomme  les  auteurs  de  qui  il  avait  emprun- 
té, savoir:  Gnéus  Cornusus,  \'eiléiusLongus, 
CurtiusValérianus,Pappirianus,  Adamantins, 
Martirius,  Eutycliès,  Césellius,  Lucius  Céci- 
lius,  et  Priscieu,  le  grammairien.  Il  marque 
dans  des  chapitres  séparés  ce  qu'il  avait  pris 
de  chacun  de  ces  écrivains. 

9.  11  avait  mis  dans  uu  même  volume  trois 


237 

traités  de  Donat,  avec  le  Itocueil  des  tropcs  et 
des  figures  de  Saccrdos.  Ce  Tfeci^eiV  contenait, 
comme  on  l'a  déj;'i  dit,  quatre-vingt-dix-huit 
tropcs  et  autres  figures.  Cassiodore  dit  qu'elles 
n'étaient  pas  toutes  de  Sacerdos,  et  qu'il  y  en 
avait  de  Donat  ;  ce  qui  donne  lieu  de  croire 
qu'il  avait  choisi  dans  ces  deux  auteurs  de 
quoi  faire  un  autre  recueil,  ou  que  Sacerdos 
avait  puisé  lui-même  dans  le  livre  de  Donat. 
On  trouve  deux  livres  sur  cette  matière  dans 
les  éditions  de  Cassiodore  et  dans  celles  du 
viMK'rable  Bèdc.  Mais  par  un  anachronisme 
de  deux  cents  ans  ou  environ,  il  est  dit  dans 
toutes  les  éditions  de  Cassiodore,  excepté 
dans  celle  de  Nivelle  à  Paris,  en  1589,  qu'il 
avait  recueilli  ces  tropes  des  ('crits  de  Bède, 
que  l'on  a  confondu  avec  Sacerdos.  Il  est  bien 
plus  vraisemblable  que  Bède  a  pris  quelque 
chose  du  Recueil  de  Sacerdos  qu'il  trouvait 
avec  les  Œuvres   de  Cassiodore;  de  même 
qu'Isidore  de  Séville,  à  qui  l'on  donne  aussi 
un  livre  des  Tropes.QcXm  que  nous  avons  parmi 
les  écrits  de  Bède  se  trouve  dans  un  ancien 
manuscrit  de  l'abbaye  de  Fleury,  où  il  est 
attribué  à  Cassiodore  et  adressé  à  un  diacre 
nommé  Galertus.  Mais  il  est  certain  que  le 
Recueil  de  Cassiodore  s'adressait  non  à  ce 
diacre,  mais  aux  moines  de  Viviers.  D'ail- 
leurs il  est  fait  deux  fois  mention  de  saint 
Grégoire  le  Grand  dans  ce  traité;  et  on  sait 
que  Cassiodore  ne  vivait  plus  lorsque  ce  saint 
occupait  le  Saint-Siège.  A  quoi  il  faut  ajou- 
ter que  le  Recueil  de  Cassiodore  renfermait 
quatre-vingt-dix-huit  tropes,  au  lieu  que  le 
livre  qui  se  trouve  dans  le  manuscrit  de  Fleu- 
ry, et  parmi  les  œuvres  du  vénérable  Bède, 
n'en  contient  pas  la  moitié.  Pour  suppléer 
au  Recueil  de  Cassiodore  que  l'on  croit  perdu, 
le  nouvel  éditeur  de  ses  écrits  a  ramassé  un 
grand  nombre  de  tropes  et  de  figures,  qu'il 
a  trouvées  dans  son  Commentaire  sur  les  Psau- 
mes. Il  les  a  disposées  par  ordre  alphabéti- 
que ;  et  non  content  d'un  exemple  sur  chaque 
figure,  il  en  a  mis  quelquefois  plusieurs  pour 
l'utilité  du  lecteur  ;  en  sorte  que  le  nombre 
des  tropes  qu'il  a  recueillies  du  commentaire 
de  Cassiodore  et  de  quelques  autres  endroits 
de  ses  ouvrages,  passe  le  nombre  de  cent 
vingt.  Trope  est  une  figure  par  laquelle  la 
signification  naturelle  d'un  mot  est  changée 
eu  une  autre  qui  n'est  pas  propre.  On  lit,  par 


uu    fleuret  <Io 
CEcntur*. 


.aKiiod , 
Prjpf.  In  Mb. 
De  Onh.  pir. 
Ci7'.,  et  la  Mb. 
Do  Gniin  rap. 


Ca5siod»,  io 


'  Cujus  Donati  gemina  Commeuta  rcliquimus. 
Cussiod.,  De  Grainm.  cap.  I,  pag.  529. 
'  Ad  amanlissiinos  orthographos  discuUendos 


anno  œlatis  meœ  nonagesimo  tertio.  Domino  ad- 
juvante peneni.  Cussiod.  Pricfat.in  lib.  De  Orlho. 
p.ig.  574. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUl'EURS  ECCLÉSIASTIOUES. 


Psal.  ni,['is. 
n. 


En  quel 
tfmri»  et  à 
qutfne  occa- 
».ciD  u  traité 
•  M  fait. 


Anitlv«ft  Hrt 
ce  trnii  -,  clij- 
|,iTi.  I  l>ou.- 
quut  I  Aruo  c^l 
■lti«i  a|>pet£a, 


238 

exemple  dans  le  psaume  troisième  :  Levez- 
vous,  Si'igneiir;  S'iinyz-moi,  mun  Dieu,  (i  Ce 
n'est  pas,  dit  Cassiodore,  que  l'on  fasse  lever 
Dieu  comme  s'il  doimaitou  s'il  était  couché; 
mais  c'est  l'usage  de  l'Ecriture  de  se  servir  en 
parlant  de  Dieu,  dos  façons  de  parler  usitées 
parmi  les  hommes.  C'est  donc  dans  un  sens 
figuré  que  David  dit  à  Dieu  :  Levez-vous, 
pour  dire:  Venez  au  plus  tôt  à  mon  secours.» 

§  VII. 

Du  traité  de  l'Atne. 

1.  Cassiodore,  après  avoir  donné  au  public 
les  douze  livres  de  ses  Lettres,  se  promettait 
un  peu  de  repos,  lorsque  ses  amis  le  pressè- 
rent de  travailler  à  un  traité  de  l'Ame  et  de 
SCS  facultés.  Us  souhaitaient  qu'il  leur  apprît 
sur  ce  svijet  ce  que  l'on  en  trouvait  dans  les 
auteurs  sacrés  et  profanes.  Ce  traité  leur 
semblait  nécessaire,  parce  qu'ils  ne  pouvaient 
souQ'rir  de  se  voir  privés  de  la  connaissance 
d'une  substance  par  laquelle  l'homme  con- 
naît tant  d'autres  choses.  Us  ajoutaient  que 
pour  cire  instruits  de  co  qu'elle  est,  il  ne  fal- 
lait quela  consulter  elle-même  ;  et  que  pour- 
vu qu'on  l'interrogeât,  elle  ne  manquait  pas 
de  nous  répondre,  étant  toujours  au  milieu 
de  nous.  »  Les  sages,  disaient-ils,  ont  fait  aux 
hommes  un  précepte  de  l'élude  de  soi-même; 
corainenl  l'accomplir  si  nous  ne  connaissons 
pas  même  les  substances  dont  nous  sommes 
composés?  Nous  éludions  avec.  ap|)licalion 
le  cours  des  astres,  la  nature  des  éléments, 
la  cause  des  pluies,  des  tempêtes,  des  vents 
et  des  tremblements  de  terre,  les  raisons  de 
la  piofonileur  de  la  mer,  les  qualités  et  les 
vertus  des  plantes;  quelle  excuse  pouvons- 
nous  avoir  pour  nous  dispenser  de  rentrer 
en  nous-mêmes,  afin  d'étudier  et  d'appren- 
dre ce  qu'est  notre  âme?  »  Ce  sont-là  les  rai- 
sons des  amis  de  Cassiodgre  pour  l'engager 
au  traité  dont  nous  parlons  :  il  est  divisé  en 
douze  chapitres. 

2.  La  malii'ic  du  premier  chapitre  est  de 
savoir  pourquoi  l'âme  est  ainsi  ap|i(lie. L'au- 
teur déclare  que  par  le  nom  d'unie  il  n'entend 
que  celle  de  l'homme,  parce  que  la  vie  des 


bêtes  est  dans  le  sang  qui  leur  tient  lieu 
d'âme,  au  lieu  que  l'âme  de  l'iiomnie,  parce 
qu'elle  est  immortelle,  est  entièrement  dé- 
gagée du  sang;  ce  qui  la  faita])peler  anaima, 
c'est-à-dire  si'pnré  du  sang  ;  d'où  vient  qu'a- 
près la  mort  du  corps  elle  est  aussi  parfaite 
qu'auparavant.  D'autres  veulent  qu'elle  soit 
appelée  âme,  parce  qu'elle  anime  la  subs- 
tance de  sou  corps  et  qu'elle  le  vivifie.  Cas- 
siodore distingue  l'esprit  de  l'âme,  parce  que 
le  terme  d'es/ji-tt  est  un  terme  générique  qui 
se  dit  de  Dieu,  des  anges  et  des  puissances 
de  l'air,  comme  il  se  dit  de  l'âme.  II  fait  ve- 
nir le  mot  latin  anhuiis,  dont  on  se  sert  pour 
signifier  l'esprit,  du  mot  grec  anemos,  qui  si- 
gnifie vent,  à  cause  de  la  promptitude  de  ses 
pensées. 

3.  Il  enseigne  qu'au  sentiment  des  plus 
habiles  on  peut  définirl'âme  de  l'homme  une 
substance  particulière,  '  spirituelle,  créée  de 
Dieu,  capable  de  donner  la  vie  au  corps,  rai- 
sonnable et  immortelle,  et  qui  peut  se  tour- 
ner Teis  le  bien  ou  vers  le  mal  :  il  prouve  en 
particulier  toutes  les  parties  de  cette  défini- 
tion. Que  l'âme  soit  créée  de  Dieu,  il  n'y  a 
aucune  personne  sage  qui  l'ignore  ou  qui  en 
doute,  puisque  tout  ce  qui  existe  est  ou  créa- 
teur ou  créature;  l'âme  de  l'homme  n'a  pas 
la  vertu  de  créer,  au  contraire  elle  a  besoin 
de  Dieu  pour  exister;  et  elle  est  donc  créa- 
ture et  lient  de  Dieu  son  être.  Cassiodore  cite 
sur  cela  deux  passages  de  l'Écriture,  l'un  de 
l'Ecclésiaste,  l'autre  d'isaïe.  Il  montre  qu'elle 
est  spirituelle,  parce  que  tout  ce  qui  existe 
est  ou  esprit  ou  corps.  «  Il  est  évident,  dit- 
il,  que  tous  les  corps  sont  iJlendus  '  en  lon- 
gueur, en  largeur  et  en  profondeur;  on  ne 
conçoit  dans  l'âme  aucune  de  ces  trois  di- 
mensions :  elle  n'est  donc  pas  un  corps,  mais 
un  esprit.  Malgré  la  compagnie  du  corps  au- 
quel elle  est  unie,  et  qui  semble  l'appesan- 
tir, elle  pèse  avec  curiosité  les  dill'éicntes 
opinions  des  hommes,  elle  pense  aux  choses 
célestes,  elle  les  examine,  elle  souhaite  mô- 
me de  s'élever  aux  plus  sublimes  connaissan- 
ces de  son  Créateur;  toutes  ces  choses  ne 
peuv(!nl  convenir  (ju'â  une  substance  spiri- 
tuelle :  d'où  vient  qu'elle  est  avertie  dans  les 


Cip.  ii.D<- 
floItloD  d«  ri- 
me ;  *'le  esl 
S|ilnlaplle  cl 
Immoitelle. 


F.f.l.  \p,  T. 

lui,L>ii,ie 


•  Anima  hominisutveraciumdoclorum  consen- 
lit  auctorilas,  est  a  Ueo  crcaUi,  sjdriliilis,  pro- 
pri  ii/uc  substanlia,  stii  corporis  vivificalrijc,  ra- 
tioiiahilis  (/uidem  cl  immortalis,  sed  in  bunum 
maluinijnc  converlibilis.  Cassiod.  Z>c  Anima,  cap. 
II,  pag.  i95. 


*  Hanc  proinde  spirilalem  suhsianliam  proha- 
bilis  cl  uhsoluln  ratio  cnnfilttnr  :  quia  diim  iimnia 
ciirponitio  tribus  noveriinus  lincis  cuntineri,  ton- 
gituditte,  lalitudine,  prufunditale,  nihil  laie  pro- 
batur  m  anima  reperiri.  Ibid. 


[VI'  SIÈCLE. 


CHAPITRE  XIX.  —  CASSlOnOllE,  CIIANCKMEn. 


2.'J0 


divines  Écritures  de  mépriser  toutes  les  cho- 
ses visibles  et  scnsiliics  do  ce  monde.  La 
preuve  qu'elle  anime  et  vivifie  le  corps,  c'est 
qu'iuissitot  qu'elle  lui  est  unie,  elle  l'aime, 
elle  est  af!lif,'ée  de  ses  maladies,  elle  craint 
sa  dissolution  et  se  réjouit  de  sa  santé,  n 
r.assioilore  explique  counncniràme,  p.ir  son 
union  avec  le  coi'ps,  sent  seule  la  douleur  et 
le  plaisir  que  l'on  attribue  ordinairement  au 
corps,  et  couimcut  elle  a  des  perceptions  si 
ditl'érentcs  du  son,  de  la  lumière,  des  cou- 
leurs, des  odeurs  et  des  saveurs,  quoique  ce 
ne  soit  pas  elle  qui  senounissedes  aliments 
qui  lui  occasionnent  ces  sortes  de  sensations, 
et  qu'elle  ne  voie  et  n'entende  que  par  les 
organes  du  corps.  La  laison  qu'il  donne  de 
ce  qu'elle  s'afïlige  à  la  moindre  blessure  que 
reçoit  un  des  membres  de  son  corps,  '  c'est 
qu'elle  est  substantiellement  dans  toutes  ses 
parties.  «Si  elle  n'y  était  que  virtuellement, 
dit-il ,  elle  ne  serait  point  sensible,  lorsque 
l'on  couperait  un  des  membres  du  corps  : 
comme  le  soleil  ne  sent  rien,  lorsque  l'on  cou- 
pe ses  rayons,  en  les  empêchant  de  pénétrer 
en  quelque  endroit.  Elle  est  donc  toute  dans 
toutes  les  parties  de  son  corps;  et  on  ne  peut 
pas  dire  qu'elle  soit  plus  dans  l'une  que  dans 
l'autre.  Ce  qui  n'empêche  pas  qu'elle  n'agisse 
plus  fortement  en  uu  endroit,  et  plus  faible- 
ment dans  un  autre  ;  mais  elle  donne  la  vie  à 
tout  le  corps.  Qui  peut  douter,  continue-l-il, 
que  l'homme  soit  raisonnable,  quand  on  voit 
qu'il  traite  des  choses  divines,qu'il  connaît  les 
choses  hmaincs,  et  les  conduit  avec  sagesse, 
qu'il  apprend  les  beaux  arts?  C'est  en  cela 
qu'il  surpasse  tous  les  animaux,  qui  ne  sont 
pas  doués  comme  lui  de  la  raison.  »  Il  ap- 
pelle raison  l'action  de  l'esprit,  par  laquelle 
de  deux  choses  connues  nous  eu  inf-rons  nue 
troisième  qui  nous  était  auparavant  iucon- 


simple,  est  immortel  :  or,  l'àme  est  simple  de 
sa  nature;  elle  est  donc  imuiorl(,'lle.  »  Il  dit 
encore  :  «  Toute  nature  laisounable  qui  se 
meut  elle-même,  est  immortelle  :  l'âme  rai- 
sonnable se  meut  elle-même  ;  elle  est  donc 
immortelle.  »  Il  ajoute  ,  qu'étant  faite  à  l'i- 
mage de  Dieu,  il  n'est  pas  permis  de  penser 
qu'elle  soit  sujette  à  la  mort.  Ou  dira  peut- 
être,  comment  est-elle  semblable  à  Dieu, 
puisqu'elle  n'a  pas  le  pouvoir  de  créer  comme 
Dieu  des  êtres  immortels?  Cassiodore  répond 
par  cette  compaiaison  :  (i  La  peinture  qui 
-nous  ressemble,  peut-elle  imiter  ce  que  nous 
faisons  7  n  II  donne  pour  une  troisième  preuve 
de  l'immort-ilité  de  notre  âme,  le  plaisir  que 
nous  trouvons  à  penser  à  l'immortalité,  le  dé- 
sir que  nous  avons  de  nous  faire  une  réputa- 
tion qui  aille  au  del.'i  de  notre  vie,  la  crainte 
des  peines  éternelles  dont  nous  sommes  fi'ap- 
pés,  et  le  désir  d'une  immortalité  bienheu- 
reuse. Il  convient  que  l'âme,  quoique  immor- 
telle, ne  laisse  pas  d'être  susceptible  de  diver- 
ses passions,  comme  nous  l'éprouvons  tous 
les  jours  ,  parce  qu'elle  est  sujette  au  chan- 
gement tandis  qu'elle  est  unie  au  corps. 
«  Elle  n'eu  est  pas  même  exempte*,  dit-il, 
depuis  sa  séparation.  Elle  voit,  elle  entend  , 
elle  touche,  non  par  les  sensations  du  corps, 
mais  d'une  manière  spirituelle.  Il  serait  ab- 
surde de  dire  qu'elle  est  moins  libre,  dégagée 
du  corps,  que  lorsqu'elle  était  accablée  de  son 
poids.  »  Cassiodore  se  sert  de  cette  mutabi- 
lité ou  inconstance  de  l'âme,  pour  montrer 
qu'elle  n'est  point  une  portion  de  la  substance 
de  Dieu,  comme  quelques-uns  l'ont  avancé 
ridiculement.  11  ajoute  qu'elle  n'est  pas  non 
plus  une  partie  de  l'ange,  parce  que  l'ange 
n'est  pas  de  nature  à  être  uni  à  la  chair, 
comme  l'âme  qui  compose  un  tout  avec  elle. 
Il  rejette  l'opinion  de  ceux  qui  ont  cru  que 


nue.  C'est  encore  par  la  force  et  les  lumiè-      les   âmes    existaient  longtemps  avant   leur 


res  de  la  raison  que  l'on  a  inventé  les  lettres 
et  les  arts  divers  si  utiles  à  l'homme. 

Cassiodore  prouve  l'immortalité  de  l'àme 
par  le  raisonnement  qui  suit  :  n  Tout  ce  qui 
n'est  point  composé  de  plusieurs  parties,  mais 


union  avec  le  corps,  et  qu'on  doit  l'invention 
des  arts  aux  idées  qu'elles  en  avaient  avant 
cette  union,  et  dont  elles  se  sont  souvenues 
depuis. 

4.  Cassiodore  ne  croit  pas  que  l'âme  soit 


Ctijp.  m, 


'  Si  qtiod  fartasse  rulnus  acceperit.  statim  con- 
dolet,  quia  ubique  siibstanlialiter  inserta  est. 
Quod  si  virtus  ejiis  tantutn  essct,  incisum  digilum 
non  paierai  condolere  :  sicut  nec  sal  prohalur 
quid  quam  sentire  si  ejus  radins  secare  lentave- 
ris.  Tata  ergn  est  in  partiltussuis,  nec  alO/i  ma- 
jor, alibi  ntinor  est;  sed  alicubi  intensius:  alicubi 
reinissius  ;  ubique  tamen  vitali  intensione  porri- 
gitur.  IbiJ.,  pag.  596. 


•  Anima  vivit  in  se  pnst  hvjus  sœculi  amissio- 
nem,  sed  œqvali  mabilitale  quœ  UU  altribufa 
est.  Videt,  audit,  tangit,  ac  retiquis  sensibus  effi- 
cacius  valet  :  non  juin  ex  parlibus  suis  hœc  in- 
telligens,  sed  nwnia  spiritualiter  ex  loto  cognos- 
cens.  Àliaquin  obsurdum  est  putare,  minus  passe 
liberam  quam  mole  brulissimi  curporis  ingrava- 
tam.  Ibiii.,  pag.  596. 


240 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQLTIS. 


di  II  qiiiiit  de  la  nature  du  feu,  comme  quelques-uns  se 
itnmt,sH.  le  sont  ima<riné,  à  cause  de  sa  vivacité  et  de 
la  célérité  de  ses  mouvements;  il  pense  (ju'on 
doit  l'appeler  plutôt  lumière ,  et  il  en  donne 
deux  raisons  :  la  première ,  c'est  qu'elle  est 
l'image  de  Dieu,  qui,  selon  l'Apôtre,  demeure 
dans  une  lumière  inaccessible,  et  qui,  selon 
saint  Jean,  est  lui-même  une  lumière  qui 
éclaire  tous  les  hommes.  Il  tire  la  seconde  de 
la  clarté  et  de  l'évidence  des  idées  de  l'àme, 
qui  voit  les  choses  clairement  sans  le  secours 
d'aucune  lumière  extérieure.  Mais  il  convient 
que  la  lumière  de  l'àme  reçoit  des  accroisse" 
meuls  par  la  grâce  de  Dieu,  qui  lui  fait  com- 
prendre plus  facilement  des  secrets  même 
d'un  ordre  naturel, 
ciuf.  1»,  5.  Toute  forme  supposant  nécessairement 
deitme.  pv.  une  superficie,  et  consequemment  un  corps, 
et  le  corps  étant  de  sa  nature  solide  et  pal- 
pable, Cassiodore  soutient  que  l'dme,  qu'il 
avait  prouvé  plus  haut  être  spirituelle  de  sa 
nature,  n'a  point  de  forme.  Il  s'objecte  qu'il 
piiii.  11,6.  est  dit  de  Jésus-Christ,  qu'ayant  la  forme  de 
Dieu^  il  n'a  ]K)iut  cru  que  ce  fût  pour  lui  une 
usurpation  d'être  égal  à  Dieu.  A  quoi  il  ré- 
pond que  le  terme  de  forme  se  prend  en  cet 
endroit  pour  la  nature  même  de  Dieu.  Il  s'ob- 
jecte encore  que  l'Écriture  semble  attribuer 
des  membres  à  lame,  une  langue,  des  mains, 
des  doigts  ,  comme  on  le  voit  dans  la  para- 
bole de  l'Évangile,  où  l'âme  du  mauvais  ri- 
che prie  celle  du  Lazare  de  lui  apporter  une 
goutte  d'eau  au  bout  de  son  doigt  pour  ra- 
fraîchir sa  langue  brûlée  de  l'ardeur  des  flam- 
mes. Mais  il  soutient  que  l'Kcrilure  n'emploie 
ces  fa(;ons  de  parler  que  pour  s'accommoder 
à  la  grossièreté  de  notre  esprit,  et  pour  nous 
faire  connaître ,  par  les  choses  corporelles 
dont  nous  avons  l'usage,  les  choses  spiri- 
tuelles que  nous  ne  connaissons  pas  :  c'est 
dans  le  même  sens  qu'elle  donne  à  Dieu  des 
yeux,  des  oreilles,  des  mains,  et  d'autres 
membres  qui  n'appartiennent  qu'à  l'homme. 
Dm  «Dm  6  Cassiodore  distin''ue  les  vertus  morales 
',;;^';;'p",'J;  de  l'âme,  qui  sont  la  justice,  la  prudence,  la 
^,pic-5S8«i  force,  la  tempérance,  de  ses  vertus  ou  pro- 
priétés naturelles,  qu'il  divise  en  cinq  avec 
les  anciens  philosophes.  La  première  nous 
rend  les  choses  sensibles;  la  deuxième  or- 
donne certains  mouvements  aux  organes  du 
corps;  la  troisième  leur  commande  le  repos, 

'  Uoc  autem  tcraciter  fixeque  credendum  est, 
el  Deum  aniiunii  crearc,  et  occulla  qw^itam  ratiO' 
ne  juslissime  illis  imputare,  quod  primi  hominis 
peccato  leticanlur  vbnoxw...  Absqne  peccalo  sine 


lorsque  l'âme  veut  s'appliquer  avec  plus  d'at- 
tention; la  quatrième  anime  le  corps;  la  cin- 
quième est  l'appétit  du  bien  et  d\i  mal.  Il  en- 
seigne que  toutes  les  âmes  sont  semblables, 
et  que  si  elles  ne  font  pas  toutes  les  mêmes 
fonctions,  ni  dans  le  même  degré  de  perfec- 
tion ,  cela  ne  vient  que  de  ce  que  les  corps 
qu'elles  animent  ne  sont  pas  également  bien 
organisés  et  disposés;  les  uns  étant  faibles, 
comme  ceux  des  enfants;  les  autres  blessés 
en  quelque  partie,  ou  chargés  de  mauvaises 
humeurs,  comme  ceux  des  insensés.  C'est  ce 
qu'il  montre  par  l'exemple  du  feu,  qui  étant 
dans  le  fond  d'un  vase  fort  étroit  et  couvert, 
n'a  aucune  force  et  s'éteint.  Il  ne  veut  donc 
pas  que  l'on  dise  que  les  âmes  des  insensés 
soient  dilTérentes  de  celles  des  hommes  sa- 
ges et  raisonnables,  ni  que  l'on  pense  que 
les  âmes  des  enfants  croissent  avec  eux.  Ce 
n'est  pas  l'àme  qui  croit  dans  les  enfants, 
mais  la  raison,  à  mesure  que  l'âge  leur  don- 
ne un  plus  long  usage  de  la  réflexion. 

7.  Dieu,  selon  Cassiodore,  est  seul  auteur  tJ^'iS^ 
de  l'âme.  Il  la  donne  à  l'homme  par  le  souffle  ^"i*»- 
de  sa  bouche,  c'est-à-dire  par  son  comman- 
dement, n'étant  pas  permis  de  penser  que 
Dieu,  qui  est  un  être  tout  spiriliiel,  ait  une 
bouche  par  laquelle  il  ait  inspiré  la  vie  à 
l'homme.  Il  remarque  que  quelques-uns 
croient  que  les  âmes  des  enfants  sont 
engendrées  de  celles  de  leurs  parents,  de 
même  que  leurs  corps  sont  enprcndrés  de 
ceux  de  leurs  père  et  mère,  ajoutant  qu'ils 
avaient  donné  dans  cette  opinion  pour  expli- 
quer plus  facilement  la  doctrine  de  l'Église 
sur  le  péché  originel,  qu'elle  croit  être  trans- 
mis par  Adam  à  tous  ses  descendants.  Il  ne 
réfute  point  ce  sentiment,  et  semble  vouloir 
imiter  la  modestie  de  saint  Augustin  qui  ni> 
voulut  point  se  prononcer  sur  cet  article.  Il 
dit  néanmoins  que  l'on  doit  croire  ferme- 
ment et  sincèrement  que  Dieu  '  crée  les  âmes 
et  qu'il  leur  impute,  par  des  raisons  justes , 
quoi(jue  cachées,  le  péché  du premierhomme, 
dont  elles  sont  véritablement  coupables,  sj 
l'on  en  excepte  l'âme  de  Jésus-Christ  qui  a 
été  conçu  du  Saint-Esprit.  ((Lui,  dit-il,  qui  de- 
vait ellar er  les  péchés  des  autres,  n'eu  avait 
point  sans  doute  :  né  d'une  vierge,  il  n'a  rien 
tiré  d'Adam,  étant  venu  pour  détruire  le  pé- 
ché d'Adam  et  le  mal  qu'il  a  causé.  » 

dubio  vcnit  qui  erat  omnium  pecrata  aoluturus  : 
coiiceplus  mijslico  inspira  mine,  natus  ex  x-irgiite,  » 

nihil  de  Adam  traxit  qui  ut  Adœ  malum  vincert- 
lur,  adienil.  Ibid.,  cap.  \n,  pug.  ô'j'j. 


[VI'  SIÈCLE.] 


CIIAI'ITIIE  XIX.  —  C.\SSI0I)01U<;,  C'.HA.NCKMKll. 


2/.1 


Cap.  tx.Do 


<S.  1!  y  a\ail  des  iiliildsnplu's  (jui  jilaraifiit 
le  sit''u(!  (le  l'àiiie  dans  \e  cdMir,  où  se  l'or- 
mciilles  esprits  vitaux.  (Jassiodoio  cioit  (|ii'(in 
peut  le  uicllre  plus  vraiscmblaljlciui'iil  dans 
la  tCte,  d'où  l'iio  ciniduil  t'I  f;ouvi'iiic  l'iimu- 
lue.  Eiitie  plusieurs  iais(uis  (ju'il  eu  iloiuie, 
celle  qui  parait  la  meilleure  est,  que  lorsijue 
nous  votdons  penser  attentiveaient  à  quelque 
chose,  nous  sentons  que  cette  opération  se 
fait  dans  la  tête,  et  que  l'âme  pour  s'aiipli- 
quer  plus  l'ortenuMit,  l'einu',  pour  aiusidire, 
toutes  les  ouvertures  de  l'endroit  (piclle  oc- 
cupe, c'est-i\-dire,  tous  les  sens. 

y.  Il  lait  ensuite  la  description  des  princi- 
pales parties  du  corps  humain  et  de  tous  ses 
sens,  dont  il  marque  l'usage  et  les  i'oactiuns. 
11  en  prend  occasion  de  faire  admirer  la  tou- 
te-puissance de  celui  qui  l'a  formé  ,  et  dit 
que,  quelque  matériel  et  quelque  gâté  que 
soit  ce  corps  par  les  vices  auxquels  il  est  su- 
jet et  par  les  différentes  blessures  qu'il  a  le- 
çucs,  il  ne  laisse  pas  d'être  employé  dans  de 
très-nobles  fonctions;  que  c'est  le  corps  qui 
chante  les  célestes  cantiques,  qui  fait  les 
martyrs,  qui  reçoit  la  visite  de  son  Créateur  ; 
que  c'est  lui  encore  qui  a  reru  la  croix  vivi- 
iiantc  du  Rédempteur,  et  qu'il  devient  même 
le  temple  de  la  Divinité,  pourvu  qu'il  ne  don- 
ne point  retraite  aux  crimes. 

10.  11  donne  diverses  marques  auxquelles 
on  connaît  les  bons  et  les  mauvais  honmies: 
(1  Ceu.K-ci,  dit-il,  n'ont  jamais  de  joie  qui  ne 
soitmêlée  detrislesse;  aussitôt  quel'emporte- 
ment  impétueux  du  plaisir  les  abandonne,  ils 
tombent  dans  le  chagrin.  Tantôt  leurs  yeux 
sont  agités  au  delà  de  ce  qui  est  nécessaire, 
tantôt  ils  les  ont  fixes.  On  les  voit  rêveurs, 
changeants,  inconstants,  irrésolus,  inquiets, 
soupçonneux,  occupés  sans  cesse  à  s'infor- 
mer de  ce  que  les  autres  pensent  d'eux.  Ils 
commencent  des  discours  sans  les  achever  : 
ils  passent  continuellement  d'une  occupa- 
tion à  une  autre  :  et  lors  même  qu'ils  n'ont 
point  d'aflaires,  ils  en  paraissent  accablés. 
Ils  vivent  dans  des  frayeurs  continuelles , 
quoique  personne  ne  les  moleste  ;  leur  cons- 
cience leur  tient  lieu  de  sufiplice;  ils  sont 
leurs  propres  bourreaux ,  tandis  que  per- 
sonne ne  songe  à  leur  faire  de  la  peine.   Au 

'  Cum  fuerimus  liac  luce  exuti...  nihil  boni 
malique  faciemus,  sed  usqite  ad  tempus  judicii, 
aul  de prwteritorum  uctiium pracilate  inœreinur, 
aut  de  operationis  nostrœ  probilate  lœlainur. 
Cassiod.  De  Anitim,  cap.  xn,  pag.  603. 

»  Nam  et  distans   beutitudo  bonos  coniinet,  et 

XI. 


contraire,  celui  (pii  vit  dans  l'imioeencc  ' 
après  avoii'  surmonté  ses  passions,  sait  se 
fixer  et  s(!  borner,  il  est  maître  do  son  corps; 
il  u'olfeuse  personne;  il  pardonne  à  ceux 
([iii  l'ont  olleusé  ;  il  donne  des  marcpu-s  de 
charité  à  ceux  qui  le  haïssent;  nulle  tris- 
tesse ne  l'abat;  il  ne  craint  pas  la  mort, 
parce  qu'il  la  l'egardc  comme  le  commence- 
ment de  son  bonheur;  il  ne  s'échaulle  point 
à  contester;  il  est  véridiquc  dans  tous  ses 
discours  :  s'il  enseigne,  c'est  sans  arrogan- 
ce ;  il  est  libre  avec  humilité,  sévère  avec 
chaiité,  simple  dans  ses  vêtements,  sobre 
dans  le  boire  et  le  manger.  Sans  en  être 
averti,  l'on  n'a  pas  de  peine  à  reconnaître 
celui  que  Dieu  a  comblé  de  tant  d'avanta- 
ges. »  Cassiodore  ajoute  que  ce  n'est  pas 
seulement  parmi  les  hommes,  que  l'on  en 
trouve  de  ce  caractère,  qu'il  y  a  eu  aussi  des 
vierges  et  des  veuves  si  portées  à  l'observa- 
tion ifes  commandements  de  Dieu,  qu'elles 
ont  donné  de  grands  exemples  de  patience, 
surmonté  l'infirmité  de  la  chair  et  remporté 
la  couronne  du  maiiyie.  Pour  montrer  com- 
bien Dieu  favorise  ses  serviteurs,  il  rap- 
porte une  partie  des  miracles  opérés  par 
le  ministère  de  Moïse,  d'Elie  et  d'Elisée. 

11.  Il  définit  la  mort  :  La  séparation  de  l'â- 
me d'avec  le  co?-ps.  a  Dans  cet  état,  dit-il,  l'âme 
ne  fait  plus  ni  bien  ni  mal*  ;  mais  seulement 
elle  éprouve  jusqu'au  jour  du  jugement  la 
douleur  de  ses  mauvaises  actions,  ou  elle 
ressent  la  joie  du  bien  qu'elle  a  fait.  Mais 
au  jour  du  jugement,  ajoute-t-il,  nous  re- 
cevrons l'entière  récompense  de  nos  œuvres 
bonnes  ou  mauvaises,  chacun  à  proportion 
de  ce  que  nous  aurons  fait  de  bien  ou  de 
mal.  Ce  en  quoi  nous  serons  égaux^,  c'est 
que  nous  ressusciterons  tous  dans  un  âge 
parfait,  en  sorte  qu'on  ne  verra  plus  ni  en- 
fants ni  vieillards,  ces  diversités  d'âges  ve- 
nant d'un  changement  qui  n'aura  plus  de  lieu 
dansl'autre  vie.  »  11  fait  une  descriptioude  l'é- 
tat bienheureux  des  saints  dans  le  ciel,  et  des 
supplices  cpie  les  méchants  endureront  dans 
l'enfer.  Il  regarde  comme  inutile  d'examiner 
quelles  seront  les  causes  de  ces  supplices 
éternels  ;  mais  il  ne  doute  pas  qu'il  ne  puisse 
y  avoir  un  genre   de  tourments    qui  fasse 

impios  dispar  pœna  constringit.  /Etas  plane  om- 
nibus itna  alque  perfecla  fvivra  est:  nam  que- 
madmodum  ibi  eiit  minor,  iibi  non  crescilur?  Aut 
qtiure  senex.  ubi  non  dtficilnr?  Mutabilitalcs  islœ 
ad  inlerititm  tendunt.  L'num  est  quodcumque  per- 
pituum. ihk\. 

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003 

24â 


Livres      âo 

Caesiodorequi 
cent  perdu». 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTIÎURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

jusqu'à  nous.  Mais  M.  le  marquis  MallVï  nous 
a  donné  depuis  quelques  années  ses  com- 
mentaires sur  les  Épiti-es  et  les  Actes  des 
apôtres,  et  sur  l'Apocalypse. 


soiillVir  sans  cesse  les  damnés,  sans  aucu- 
ne diminution  de  leurs  rigueur.s,  et  que  Dieu 
ne  se  serve  à  cet  ellet  d'une  substance  pro- 
pre .'i  augmenter  le  sentiment  de  la  douleur 
sans  donner  la  mort.  «  De  combien  de  peines, 
dit-il.  notre  fimc  n'est-ellc  point  affliprce  en 
ce  monde,  el  toutefois  elle  ne  périt  point  ?  Ne 
voyons-nous  pas  de  certaines  montagnes  qui 
poussent  sans  cesse  des  llammes  et  qui  néan- 
moins subsistent  toujours?  La  salamandre 
se  nourrit  de  llammes  et  se  rétablit  par  la 
chaleur  du  feu.  On  voit  aussi  certains  petits 
vers  qui  se  nourrissent  dans  l'eau  bouil- 
lante. Qui  peut  donc  douter  que  le  feu  des- 
tiné au  supplice  des  mécliants  ne  doive  être 
élerncr?  »  Il  finit  son  traité  de  VAme  par  une 
très-belle  prière  où  il  reconnaît  qu'il  n'y  a 
rien  en  nous  de  digne  de  récompense  que 
Dieu  ne  l'y  ait  mis;  et  qu'il  est  infiniment 
plus  noble  de  le  servir  que  de  régner  sur  la 
terre,  puisque,  par  sa  grâce,  d'esclaves  nous 
devenons  enfants;  d'impies,  justes,  et  de  cap- 
tifs, libres. 


§  VllI. 


Des  livres  de  Cassiodore  qui  sont  perdus,  ou 
qu'on  lui  a  faussement  attribués. 

l.  On  voit'  par  la  Préface  de  Cassiodore 
sur  les  douze  livres  de  ses  lettres,  qu'il  avait 
fait  plusieurs  panégyriques  en  l'honneur  des 
rois  el  des  reines.  Il  ne  nous  en  reste  rien, 
ni  des  douze  livies  de  Y  Histoire  des  Goths  * 
dont  il  parle  au  même  endioit.  Il  avait  aussi 
composé  '  un  livre  de  la  Division,  une  com- 
pilation des  titres  '  et  des  sommaires  de  l'É- 
critnrc.  intitulée  Mémorial;  un  traité' *5 
Étytnoloyies,  ini  Recueil  de  la  Grammaire  de 
Donat  avec  des  commentaires  ;  un  Recueil  de 
traités  des  fi  (jures  composés  par  Sacerdos;  et  il 
avait  corrig»'  un  Commentaire  sur  t'Fpitre  aux 
Romains,  en  retranchant  '  tout  ce  qu'il  y 
avait  trouve  de  favorable  à  l'hérésie  péla- 
gienne.  Tous  ces  ouvrages  ne  sont  pas  venus 


2.  On  trouve  dans  la  Bibliothèque  de  Cam-  ,„Ç;^f^'.; 
bridge  deux  volumes  sous  le  nom  de  Cassio-  "«'<>'•• 
dore,  dont  l'un  est  intitulé:  Des  Offices  ecclé- 
siastiques, et  l'autre  :  Sentences  de  Cassiodore 
tirées  de  saint  Cypricn.  11  y  en  a  un  troisième 
dans  la  Bibliothèque  d'Oxford  sous  ce  titre: 
Étincelles  des  L'critures,  Pierre  des  Noëls  lui  at- 
tribue un  livre  sur  la  Trinité.  Mais  l'eu  n'a  au- 
cune preuve  que  Cassiodore  soit  auteur  d'au- 
cun de  ces  ouvrages.  Il  n'en  dit  rien  dans  son 
traité  de  l' (Jrtliograji/ie, oxi  il  donne  le  catalo- 
gue des  écrits  qu'il  avait  faits  depuis  sa  con- 
version ;  et  il  n'en  est  fait  mention  dans  au- 
cun des  écrivains  qui  ont  traite  des  auteurs 
ecclésiastiques  dans  le  sixième  ou  septième 
siècle.  11  n'y  a  pas  plus  de  fondement  de  lui 
attribuer  les  Vies  de  saint  Paphnuce,  de 
saint  Spiridion  et  de  quelques  autres,  rap- 
portées dans  la  première  partie  du  h'-gen- 
daire  de  Lipoman.  Elles  sont  de  Théodoref, 
de  Socrate  et  de  Sozomène.  C'est  par  erreur 
que  Gesner  a  dit  que  l'on  trouvait  sous  son 
nom  dans  la  Bibliothèque  de  l'abbaye  de 
Saint-Micliel, seize  livres  inlitulés:  De  Rerus- 
tica  ;  on  ne  peut  douter  qu'ils  ne  soient  de 
Columelle  qui  en  a  écrit  un  pareil  nombre 
sur  la  même  matière,  ainsi  que  Cassiodore  le 
dit  lui-iuéiuc  dans  le  chapitre  .xxviii  de  son 
Institution.  Nous  avons  fait  voir  plus  haut 
qu'il  n'était  point  auteur  du  Commentaire  sur 
le  Cantique  des  cantiques.  Quant  au  traité  de 
l'Amitié,  qui  porte  son  nom  dans  quelques 
manuscrils  et  dans  quelques  éditions,  il  est 
d'un  style  tout  différent  du  sien,  et  l'Écriture 
y  est  citée  selon  la  Vulgate,  que  Cassiodore 
ne  cite  jamais.  Il  est  attribué  i\  Pierre  de 
Blois  da[is  la  dernière  édition  de  ses  (cuvres. 
Les  deux  livres  des  Tropes  et  des  figures  im- 
primés sous  le  nom  de  Cassiodore ,  sont 
comme  on  l'a  déjà  dit,  d'un  écrivain  qui 
vivait  depuis  saint  Grégoire-le-Grand  qui  y 
est  cité. 


Slropbl«.  (4f. 
116.   odil.  |«* 


'  Dixinli  eliam  ad  commendalinnem  unitersi- 
lalis  fréquenter  rcfjinis  ac  regibus  laudes.  Cassio- 
(lor.  Pru-fat.  in  lib.  Variar.,  pag  2. 

>  Dundecim  lihris  Gollwrum  liisloriam  deflora- 
lis  priisperilalibus  condidisli.  U>\(\. 

»  l^iHiirum  nniniuin  rntiontm  in  meo  libro  dili- 
gentius  expUravi,  quem  de  Divisione  conijiosui. 
lUi-iii,  Uc  Uialccl.,  pag.  5*6. 


'  PosI  librum  quoque  tilulnrum  yueiu  de  di- 
vina  Scriplura  cnUcctum,  Meinorialent  volui 
nuncupari.  l'rn'fiU.  in  Orlograpti. 

'  Post  codicem  iu  quo  arles  Donati  cum  com- 
vtentis  suis  et  librum  de  etymologiis  et  alium  li- 
brum Sarerdoii.<i  de  schemalibus  coUegi.  Ibid. 

•  Pnsl  crpositionem  lîpistolw  ad  Itomanns, 
unde  pelagianœ  liereseos  pra citâtes  amovi.  lbi<l. 


[VI"  SIÈCLE.] 


CHAIMTIŒ  XI.X.  —  CASSlUDOltl-:,  CIIANCELIEK. 


243 


AHTICF^K  lir. 


DE  LA  DOCTKIXE  DE  CASSIODORE. 


iiM"ili»!""  ^-  "  '"•*  profonJour  des  divines  Écrilure?, 
dit  Cassiodore,  est  cach('c  sous  des  paroles  si 
communes,  qu'elles  '  sont  remues  générale- 
ment de  tons  les  hommes.  Que  ces  Ecritures 
soient  divines,  on  en  voit  la  preuve  par  ceux 
mêmes  qui  les  ont  écrites;  puisque  des 
hommes  qui  la  plup  u-t  n'étaient  pas  savants 
n'ont  pu  écrire  des  choses  si  élevées  et  éter- 
nelles ,  s'ils  n'avaient  été  remplis  de  l'es- 
prit divin.  Ce  qui  le  prouve  encore,  ce  sont 
les  prodiges  que  Dieu  a  faits  pour  autoriser 
nos  livres  saints  jusqu'ù  ce  qu'ils  ont  été  ré- 
pandus dans  tout  le  monde  et  reçus  dans 
toutes  les  parties  de  l'univers.  Quoiqu'une 
lumière  céleste  brille  -  dans  toutes  les  par- 
ties de  la  sainte  Écrituie,  et  que  la  vertu  du 
Saint-Esprit  l'éclairé  évidemment  de  ses 
rayons ,  cela  paraît  néanmoins  beaucoup 
plus  dans  les  Psaumes,  dans  les  l'crits  des 
prophètes  et  dans  les  épltres  des  apôtres.  On 
y  trouve  de  plus  profonds  mystères,  et  on 
peut  les  regarder  comme  la  forteresse  de 
toutes  les  divines  Écritnres.  Elles  sont  ap- 
pelées lumière  '  parce  que  Dieu  nous  les  a 
données  pour  dissiper  les  profondes  ténèbres 
de  l'aveuglement  des  hommes  et  parce  qa'h 
la  favem-  de  lem'  clarté  nous  dirigeons  nos 


pas  dans  le  chemin  qui  conduit  à  la  vie  bien- 
heureuse. Nous  devons  demander  à  Dieu  par 
des  piières  continuelles  '  nos  besoins,  et 
tout  ce  qui  est  expéilii'ul  [)our  notre  salut; 
mais  surtout  l'intelligence  de  ses  divines 
Écritures,  parce  que  plus  on  les  comprend, 
plus  l'ûme  trouve  de  plaisir  à  s'en  entrete- 
nir. Elles  ne  rrnt'ermenf  rien  '  d'inutile  ;  et 
si  l'on  en  prend  bien  le  sens,  il  n'y  a  rien 
qui  ne  nous  puisse  être  de  quelque  utilité. 
Pour  en  prendi-e  le  vrai  sens,  il  faut  lire  les 
commentaires  '  des  saints  Pères,  et  s'arrêter 
à  ce  qu'ils  ont  écrit  :  leurs  explications  nous 
servent  pour  ainsi  dire  d'échelle  pour  par- 
venir efticacement  à  la  contemplation  des 
vérités  que  le  Seigneur  nous  a  révélées 
dans  les  livres  saints.  Les  Pharisiens  inter- 
rogés par  Jésus-Christ  ',  de  qui  le  Messie 
devait  cire  fils,  et  eux  ayant  répondu  :  De 
David.  Comment  donc,  reprit  le  Sauveur, 
David  l'nppctle-t-il  en  esprit  son  Seigneur  dans 
la  psaume  cix  ?  »  Cassiodore  conclut  de  cet 
endroit  que  David  est  auteur  de  tous  les 
psaumes,  et  dit  que  l'usage  de  l'Eglise  qui 
croit  fermement  qu'ils  sont  en  effet  de  ce 
saint  roi,  est  que  ceux  qui  les  chantent  publi- 
quement doivent  les  intituler  :  De  David,  quoi- 
qu'ils portent  quelquefois  en  tète  d'autres 
noms. 

2.  Il  applique   aux  hérétiques  qui  ensei-     sur  \,  m 
guent  des   dogmes  contraires  '  à  ceux  de  """'i". 


'  Scripturœ  divUiie  sancta  profunditas  adeo 
communes  sermones  kabet,  ni  eam  universi  in- 
cunctantes  admiltant.  Eam  rêvera  esse  divinam 
hinc  m'ixime  datur  intelligi,  quod  indocti  siibti- 
lissima,  temporales  œterna  non  nisi  divino  re- 
pleti  Spiritii  potuisse  tradere  sentiuiitur.  Quoi 
miracula  jugiter  facta  suntdonec  Scriptura  ipsa 
mvndi  ambilum  divulgata  compleret.  Vnde  ad 
probalionem  pertinet  maximam  quia  lex  divina 
per  cunctas  mundi  partes  cognnscilur  fuisse  sus- 
cepta.  Cassiod.  Prœf.  in  Psal.,  \<ag.  6. 

'  Quamfis  omnis  Scriptura  divina  superna  luce 
resplendeat, et  in  ea  virlus  Spiritus  Sancti  eiiden- 
ter  irradiet,  in  Psalterio  tamen  et  Prophetis  et 
Epistolis  apostolorum  studium  maximum  laboris 
impendi  :  quoniam  mihi  visi  sunt  profundiores 
abyssos  commovere  et  quasi  arcem  tolius  Scrip- 
turœ divinœ atque iiltiludinem  gloriosissimam  con- 
tinere.  Cassiod.  Prœf.  in  Institut. 

^  Scriptvram  hene  appellivit  lucernam  ,  quœ 
humanis  usibus  data  est  et  ad  depellendam  noctis 
profundissimam  cœcitatem....  per  ipsam  siquidem 
dum  ad  vitœ  bonœ  cursum  instruimur ,  redis 
gressibus  ambulamus.  Cassiod.  in  psal.  cwiii , 
pag.  393. 

*  Quamvis  universa  quœ  expediunt,  continuis 
precibus  sinl  à  Domino  postulanda  ;  maxime  ta- 


men divinarum  Scripturarum  inteîlectus  jugiter 
expetendus  est,  qui  quanto  plus  percipitur,  tanto 
suaviorsanctis  mentibusinvenitur.ihld.  pag.  397. 

5  Nihil  vacuum  ,  inhil  otiosum  divinis  titteris 
continetur  ;  sed  semper  ad  iitilitatem  aliquam  dis- 
citur,  quod  recii->simis  sensibus  salubriter  hau- 
riatur.  Cassiod. ,  De  luatitul,  cap.  ssiv,  pag.  523. 

^  Quapropter.  dilectissimi,  indubitanter  ascen- 
da!!:us  ad  divinam  Scripturam  per  expositiones 
prnbahiles  Patrum ,  velut  per  quamdam  scalam 
visionis  ,  ut  eorum  sensibus  provecti  ad  cnntem- 
plationem  Bomini  efl'icaciter  perienire  mereamur. 
Cassiod.  Prœf.  in  Institut,  pag.  50S. 

'  In  Evangelio,  Pharisœis  ipse  Dominns  dicit: 
Ouomodo  ergo  David  in  Spiritu  vocat  euni  Domi- 
num.dieens:  Dixit  Dominus Domino  meo,  e<c.  Vnde 
probatur  universos  Psalmos  non  multorum  exis- 
tere,sed  tantum  ipsius  quem  a  Domino  constat  no- 
minalum.  Vsus  quoque  Ecclesiœ  catholicœ  Spiritus 
Sancti  inspiratione  generaliter  et  immobilitertenet 
ut  qnicumque  horum  cantandus  fuerit,  qui  di- 
verso  nomine  prœnotantur,  Itctor  aliud prœdicare 
non  audeat,  nisi  psalmos  David.  Cassiod.  Prœf.  in 
Psal.  cap.  ir,  pag.  3. 

*  Erraverunt  utique  a  ventre,  qui  contraria 
matri  dogmata  sunt  secuti,  nec  alvum  sanctam 
pia  dfvotione  cenerantur :  ipsi  enim  et  falsa  locuti 


244 


HISTOIRE  GKNÉR.VLE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


l'ÉçHse,  et  qui  manquent  de  respect  pour 
lessacrés  fonts  dans  lesquels  ils  ont  été  ré- 
générés, ces  paroles  du  psaume  Lvii  :  Ils  se 
sont  égarés  dès  (ju'ils  sont  sortis  du  sein  de  leur 
mère;  ils  ont  dit  des  choses  fausses  parce  qu'ils 
se  sont  éloignés  des  saintes  traditions  de 
l'Église.  A  quoi  il  ajoute  que  les  saints  Pères 
assemblés  dans  les  conciles  généraux  ' 
voulant  venger  l'injure  que  les  hérétiques 
font  il  la  foi,  les  ont  condamnés  par  divers 
décrets,  et  séparé  de  l'ICglise  par  le  glaive 
divin  les  iuventeius  de  nouvelles  hérésies, 
lorsqu'ils  les  ont  trouvés  obstinés  à  les  dé- 
fendre ,  posant  pour  règle  que  l'on  ne  de- 
vait plus  proposer  de  nouvelles  questions  sur 
la  foi,  mais  se  contenter  de  ce  qui  avait  été 
enseigné  par  les  anciens  Pères,  et  obéir  à 
leui-s  décrets  salutaires  sans  aucun  dégui- 
sement. «  C'est  de  cette  manière,  dit-il,  que 
ces  saintes  assemblées  ont  atfermi  les  sa- 
crements salutaires  de  notre  foi.  i> 

3.  ((  Lorsqu'il  s'agit  de  cette  foi,  ajoute 
Cassiodore,  l'homme  catholique,  quoiqu'a- 
gité  *  par  les  tribulations,  ne  sait  ce  que 
c'est  que  de  se  laisser  émouvoir  par  les  plus 
pressantes  nécessités.  Car  c'est  dans  la  sain- 
te règle  '  de  la  foi  catholique  que  consiste  la 
droiture  du  cœur;  la  iinesse  trompeuse  des 
hérétiques,  qui  est  toute  tortue,  et  qui  s'é- 
loigne beaucoup  de  cette  règle,  ne  peut  pas 
confesser  Dieu.  L'ardeur  de  la  foi  '  croit  à 
proportion  qu'on  diminue  le  feu  et  la  chaleur 


delà  concu[)iscence;  mais  lorsque  notre  foi 
est  tiède,  Dieu' s'endort  pour  aiusi  dire  à 
notre  égai'd  ;  au  lieu  qu'il  veille  dans  celui 
dont  la  foi  n'est  point  assoupie.  Si  nous  ces- 
sons de  penser  à  lui,  il  cesse  de  nous  défen- 
dre ;  on  en  voit  un  exemple  dans  ce  qui  ar- 
riva dans  la  barque  où  il  se  trouvait  avec 
ses  disciples.  11  dormait  pendant  que  leur 
foi  était  dans  la  langueur;  mais  aussitôt 
qu'elle  fut  ranimée,  il  s'éveilla  et  les  délivra 
du  danger.  » 

4.  «  La  vraie  définition  de  Dieu,  poursuit 
Cassiodore,  est  de  dire  '  qu'il  est  infini  dans 
ses  perfections  ;  c'est  une  vertu  inexplicable, 
une  j)iélé  incompréhensible,  une  sagesse 
ineffable.  Quelques  louanges  qu'on  lui  don- 
ne, elles  ne  seront  jamais  proportionnées  à 
la  grandeur  de  son  être  et  de  ses  perfec- 
tions, qui  n'ont  point  de  lin.  Le  Prophète 
disait  de  Dieu,  avec  vérité  :  Vous  êtes  de  toute 
éternité  '  et  dans  tous  les  siècles  ;  parce  qu'il 
n'y  a  rien  de  passé,  ni  de  futur  par  rapport 
à  Dieu  ;  tout  lui  est  présent,  le  passé  comme 
le  futur.  Ainsi,  lorsque  le  même  Prophète 
lui  dit  :  Soumiez-vous ,  Seigneur,  ce  n'est 
point  pour  le  faire  ressouvenir,  puisqu'il  ne 
peut  jamais  rien  oublier;  c'est  l'usage  de 
David  d'employer  '  dans  les  prières  qu'il 
fait  à  Dieu,  les  mêmes  façons  de  parler  que 
nous  avons  coutume  d'employer  lorsque 
nous  prions  les  hommes.  Nous  pouvons 
avoir  quelques  connaissances'  des  actions 


Sar  U  04(0. 
rt  d»  DltD. 


Ptal.ulKll, 

i. 


sunt  qui  ab  ejus  sanctis  Iraditionibus  erraverunt. 
Cassioil.  !ii  psal,  Lvn,  \ia?.  18t. 

•  Dicamuf  nunc  quemadmodum  universalia 
sanctaque  concilia  /idei  nostru:  salutaria  sacra- 
menla  sulidaierinl,  nam  saucti.'itinn  Paires  inju- 
rium  rectœ  /idei  non  ferentes ,  régulas  quoque 
ecclesiasiicas  ibidem  slaluere  maluerunl,  et  inveit- 
tores  novnrum  tiirresum  jierlinaces  divino  gladio 
perculcrunl ,  decernentes  nullum  nllerius  debere 
novas  incutere  quwstiones,  sed  proliatorum  vete- 
rum  auctorilale  cnnlenlos,  sine  dolo  et  per/idia  de- 
cretis  salutaribus  obedire.  Cassiod.,  De  Institut., 
cap.  n. 

'  Vir  cnlholicus  licet  importunis  tribulationibiis 
flucluet ,  in  parte  jidei  nescit  quibuslihet  necessi- 
tilibus  commoveri.  Cassind.  in  psal.  xxv,  [•afi.  81. 

'  Direcliu  cordis  est  fidci  catholicœ  sancta  ré- 
gula :  quia  Deum  confileri  non  potest  hœrelico- 
rum  dislorta  versutia.  Ul.  in  psa/.  cxvrn,  jia^'.  379. 

*  Tanlum  enim  crescil  calor  fidn ,  quantum 
de  flamma  subtraclum  fuent  corpornli.,l\iU]., 
pag.  390. 

»  Dormilare  dicilttr  Dominas  ,  quando  nos  in 
eju.t  fidr  Icpescimus  :  in  que  enim  non  dormit  fi- 
des,  rigilal  CUrLHus.  .Vom  si  nos  ab  ejus  conlem- 
plaiione  discedimus,  ipse  quoque  a  noslra  defen- 


sione  subtrahitur;  sicul  initia  navi  factum  est, 
quando  negligenlibus  discipulis Dominus  dormie- 
bttt  ;  sed  ubi  pdes  eorum  excitata  est,  Dominus 
quoque  de  somiio  surre.rit,  et  stalim  ab  eis  peri- 
ctila  marina  submovil.  Cussiod.  in  psal.  cxx, 
pag.  409. 

«  Sic  laudare  Domintim  ,  ut  quantum  est  ma- 
gnus,  non  œstimcs  e.rplicandum...  Sieut  nullo  loco 
clauditur:  itanec  cloquentia  qnamvis  amplissima 
ejus  possuiit  prœconia  terminari.  Virtus  incxpli- 
cabilis,  pietas  incomprelieusibilis,sapienlia  inef- 
fabilis,  cujus  i-era  de/initio  est,  (inem  in  sanctis 
laudibus  non  habere.  Id.  in  psal.  ccuv,  pag. 463. 

'  Tu  es  competenler  dicitur  de  Deo  ,  quia  non 
habel  prœleritum  nec  futurum.  M.  in  pMil.  uxxxix, 
pag.  290.  Mémento  illi  dicitur.  qui  nihil  aliquando 
potuit  oblivisci,  nom  enim  ut  ad  memoriam  rvdent 
divinilns  cnmmonetur  ,  ante  quem  omne  prœsens 
est  pneteritum  et  futurum.  Cassiod.  inpsal.c.xxai, 
pag.  428. 

*  Usus  est  Propheta;  fréquenter  per  humanas 
consuetvdines  Domino  supplicare.  Ca.^siod.  ihid. 

'  /It/u-s  ejus  ex  parle  altqua  quantum  tamen 
ipseconcedit,  potest  nolitia  noslra  comprehendere; 
subtandam  vero  ipsius  non  pra'vatel  indagare. 
Id.  in  psal.  cxLv,  pag.  4G7.   Deus  potest  dici  quod 


CHAPITRE  XIX. 


fnr  II  Tri- 
Bite. 


[Vl"  SIÈCLE.] 

de  Dieu,  lorsqu'il  vrut  hicii  ikhis  l'iicconlcr; 
in.iis  lions  ne  [louvoiis  jiai-veiiir  ;i  coiii|ir('ii- 
drc  quelle  est  su  nature  ;  et  il  nous  est  i)liis 
facile  de  dire  ce  qu'il  n'est  pas,  que  de  dire 
ce  qu'il  est,  cl  d'aiipiofoiidir  loule  l'élendiie 
de  son  être.  C'est  un  lrès-L;iaiid  [k'tIic'  '  de 
dire  que  quelque  chose  lui  soit  imiiossihle, 
lui  qui  a  le  souverain  pouvoir  de  faire  tout 
ce  (jui  lui  plaît.  Soit  qu'il  pardonne  au  pt5- 
cliour  ',  soit  qu'il  le  punisse,  cela  tourne 
également  à  sa  gloire,  parce  que  lorsqu'il 
pardonne  \  il  a  égard  à  la  créature  qui  est 
son  onvrapo  ;  et  quand  il  punit,  il  fait  alti'ii- 
tion  à  nos  niniivaisos  actions,  o 

5.  «  Nous  devons  croire,  continue  Cassio- 
dore,  avec  l'Église  catlioliqne,  que  Dieu  est 
un  *  en  trois  personnes;  le  Père  qui  n'est  point 
cngenilré.lc  Fils  qui  est  engendré,  et  le  Saint- 
Esprit  qui  procède  du  Père  et  ilu  Fils  ;  que 
cette  Sainte-Trinité  est  coéternelle,  égale- 
ment toute-puissante  ;  qu'en  JésusClirist  no- 
tre Sei2;iieur,  les  deux  natures,  la  divine  et 
l'humaine,  demeurent  unies  en  une  seule 
personne ,  chaque  nature  conservant  ses 
propriétés.  Tout  est  commun  aux  trois  per- 
sonnes ^  à  l'exception  des  noms.  Toutes  les 
atitres  choses,  c'est-à-dire  la  i.ature  ,  la 
puissance,  l'éternité  et  antres  semblables 
attributs  leur  sont  communs.  D'où  vient  que 


CASSIfJDt (lit:,  (.11  AXCELlEll . 


245 


l'Mciiliire  "  dit,  laiilôt  d'une  |icisc)niu!,  ce 
(jiii  est  coniiniiii  à  toute  la  'l'iinité  ;  tantôt 
du  Père,  ce  (]u'clle  attriliue  ailleurs  au  Fils; 
et  qu'elle  marque  aussi  quelquefois  que  plu- 
sieurs personnes  opèrent  ensemble.  Au  jour 
du  jugement,  les  ('lus  ent(Midroiit  de  la  bou- 
che du  Fils  :  ]hi('Z  les  bénis  de  mun  l'ère; 
et  les  réprouvés  :  Allez,  maudits,  au  feu 
éternel.  On  voit  en  cet  endroit  le  Père  pro- 
noncer un  jiigcMuent,  que  le  Fils  s'attribue, 
lorsqu'il  dit  :  Le  l'ère  ne  juqe  personne,  mais 
il  a  donné  tout  pouvoir  déjuger  un  Fils.  Mais 
en  un  antre  endroit,  le  Fils  déclare  qu'il 
agit  conjointement  avec  sou  Père  ;  ce  qui 
doit  aussi  s'entendre  du  Saint-Esprit.  11  est 
dit  '  du  Père,  qu'il  sau\e  les  homuu.'s;  mais 
cela  est  dit  aussi  du  Fils  et  du  Saint-Esprit. 
Ainsi,  l'égalité  en  l'unité  de  l'indivisible  Tri- 
nit.',  est  prouvée,  et  par  les  paroles  et  par 
les  actions.  » 

6.  (c  Le  Fils,  Dieu  éternel  et  immuable  ' 
dans  sa  nature,  a  daigné  prendre  la  notre 
pour  renouveler  le  vieil  homme,  le  rendre 
immortel  de  mortel  qu'il  était,  juste  de  pé- 
cheur, et  participant  de  son  royaume,  après 
qu'il  en  avait  été  exclu  ;  sa  bonté  l'ayant 
porté  à  ne  pas  soufi'rir  dans  ceux  qui  le  re- 
connaîtraient, la  perte  de  son  image,  que 
l'ennemi  cruel  avait  voulu  anéantir.  Il  n'y  a 


nonesl,  non  potest  comprehendi  quod  esi.  idem, 
in  psal.  r.xLii,  pag.  436. 

'  Uoc  in  Dco  gravissinvum  constat  esse  pecca- 
tum  ,  ut  qnidquam  illi  impossibile  dicatlir ,  qui 
summe  valet  efjicere,  quod  decernit  iinplere.  Id. 
in  psal.  Lxxvn,  pag.  231. 

*  rtrasqiie  res  sive  duin  pareil,  sive  dum  judi- 
cat,  ad  glorinm  Domini  perlinere  manifeslum  est. 
M.  inpsiil.  rxin,  pag.  307. 

'  Quuproider  miserelur  cum  s^iam  respicil  crea- 
turani,  ddiiuial  aittem  cum  nustra  opéra  intuelur. 
\A.  in  psal.  cxxxmi,  pag.  i44. 

*  Tu  (Ecclesia)  inoffense  cwicta  complecleris  : 
Patrem  quipite  docens  ingenitum  ,  FUium  yeni- 
tur)i ,  Spirilum  Sanctum  de  Pâtre  et  Filto  proce- 
dentem  ,  iiiiuiu  Dcnm,  Sanclam  prœdicans  Trini- 
tatem,  cnœternam  sibi  et  ccquulUer  omnipolenlem, 
Doiiiinumque  Christum  manentem  in  divinilate 
sua  et  carne  liumunilatis  assuiitptœ,  saiva  unius 
cujusqiip  naturœ  proprietate,  unarn  conliteris  esse 
personam.  Oassiotl.,  Prœfat.  in  Pif(/.,pag.  7. 

^  Scire  autem  dehemus  ad  distinguendas  declu- 
randfisque  personas  Sanctw  Trinilalis  sola  hœc 
nomiua  po.ise  sufficere.  Nam  cum  dixeris  :  Deus 
Paler ,  Deus  Filins,  Deus  Spiritun  Sunclus  ,  ple- 
nissime  Sanclœ  Trinitatis  visus  es  déclarasse  per- 
sonas. Ilœc  enim  noiidna,inSancta  Trinitate  sola 
svnl  pro/iria.  Cœtera  rero,  id  est  nalura ,  potes- 
tas,  œternilas,  omnipotenlia ,  et  his  similia  pro- 


banlur  esse  communia.  Ideui,  in  psal.  lxxi  , 
pag.  277. 

^  Illi  audieiU:  Venite,  beuedicti  Patris  moi;  islis 
vero  dicelur  :  Ite  in  ignem  feteriuun. /;(  ul  agnos- 
cereshoc  et  PaVrem  facere  quod  FiUus  operalur, 
hic  Patrem  dicil  inimicos  ejus  confundcre ,  quod 
Filium  constat  esse  facturum.  Ipse  enim  in  Eoan- 
gello  dicit:  l'aler  uuu  jmJicat  queimiuam:  sed  omne 
judicium  dédit  l'"ilio.  Sed  Pains  testimonio  Filii 
gloria  decenler  crponilur  :  iiani  et  alibi  de  unitale 
cooperalionis  dicitur  :  Pulr-r  meus  usque  modo 
operalur,  et  ego  operor  ;  quod  eliam  de  Spirilu 
Sancto  intelligi  debcrc  non  dubiuin  est.  Cuosiod. 
in  psal.  cxxxi,  pag.  431. 

■>  Et  gloriemuriu  laude  tua.  Et  intuere  quod  hic 
salvare  dicitur  Pater:  legilur  erium  et  Fiiium 
snlvare.  ut  est  illud  :  Venit  Filius  hominis  salvura 
farere  ipiod  perierat.  Prcedicatur  eliam  salvare 
Spirilum,  ut  est  illud  ad  Tilum  :  Salvos  nos  fecit 
per  lavaei-um  regenerationis  et  reMOvalionis  Spiri- 
tus  Saueti.  Sic  indirisibilis  Trinitalis  a-qualilas 
alque  unitas,  et  verbis  similibus  et  virtulibus  in- 
dicalur.  lu  psal.  cv,  pag.  343. 

"  Deus  enitn  œlernus  atque  incomniutabilis  in 
sua  nalura  permanens  dignalus  est  assuinere 
humanitalem  noslram,  ul  velcrem  hominem  inno- 
varet,  ni  de  mortali  fucerel  immoilalem  ,  de  pec- 
catore  jusluin  ,  de  alienalo  sui  regni  jubcret  esse 
parlicipem  :  ne   imagincm  suam  in  confilentibus 


246 


HISTOIRE  GÉNKRM.E  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


point  eu  d'intervalle  entre  l'union  des  deux 
natures.  Dansl'orifrine  '  mOme  de  l'Inrarna- 
tion  de  Notre-Seigneur  Jésus-CUiist,  la  sub- 
stance divine  a  été  unie  ;\  l'humanité,  comme 
l'auL'e  l'avait  prédit  à  la  Sainte  Vierge.  Ces 
deux  natures  '  sont  paifaites  et  unies  sans 
confusion  en  une  seule  personne  dans  Jésus- 
Chrisl.  Par  l'une  il  règne;  par  l'autre  il 
sert  :  la  première  a  créé  le  monde  ;  la  se- 
conde est  créée.  Celle  qui  a  pris  est  impas- 
sible ;  celle  qui  a  été  prise  est  passible  :  car 
nous  devons,  selon  la  doctrine  des  Pères, 
faire  tomber  les  opprobres  que  Jésus-Christ 
a  soutl'erts  sur  sa  natin-e  hum.àne  et  attribuer 
les  miracles  qu'il  a  faits  à  sa  nature  divine.  En 
dislint'uant  ainsi  par  l'esprit  les  deux  natures, 
nous  éviterons  les  erreurs  dans  lesquelles 
les  hérétiques  sont  tombés  au  sujet  de  l'In- 
carnation :  caria  divinité  s'est  tellement  unie 
à  l'humanité,  qu'elle  ne  peut  être  confondue 
avec  l'humanité;  ces  deux  natui-es  demeu- 
rent unies  sans  confusion;  quoiqu'après  la  ré- 
surrection l'écononie  de  l'Incarnution  ail  été 
glorifiée  ,  la  vérité  de  l'humanité  a  subsis- 
té. »  Cassiodore  rapporte  plusieurs  passages 
de  l'Écritui-c,  par  lesquels  ou  voit  que  le 
Sauveur,  pour  prous'cr  à  ses  disciples  qu'il 
était  véritablement  ressuscité,  s'est  laissé 
toucher  par  saint  Thomaj,  et  qu'il  a  mangé 
avec  eux  ;  après  quoi  il  ajoute  :  «Il  u'est  donc 
pas  permis  de  ne  pas  croire  deux  natures 
parfaites  et  unies  en  Jésus-Chiist  ,  puisque 
lui-même  l'a  pjouvé  eu  tant  de  manières.  » 


Ce  Père  cite  sur  cela  le  témoignage  de  saint 
Allianasc,  de  saint  Ililaire,  de  saint  .\m- 
broise,  de  saint  Augustin,  de  saint  Jérôme, 
de  saint  Cyrille,  de  saint  Léon  et  du  concile 
de  Chalcédoine.  Par  une  suite  nécessaire,  il 
enseigne  que  Jésus-Christ  '  est  seul  Fils  de 
Dieu  par  nature,  au  lieu  que  les  saints  ne  le 
sont  que  par  grâce  ;  qu'il  est  seul  sans  aucun 
péché,  et  que  c'est  p;ir  I  li  que  les  autres  ont 
été  purifiés  de  leurs  péchés  ;  que  c'est  pour 
cela  qu'il  déclare  que  la  chair  '  qu'il  a  prise 
dans  le  sein  de  la  Vierge  Marie,  et  qu'il  s'est 
rendue  propre  en  l'unissant  à  sa  divinité, 
est  une  chair  vivifiante  :  Je  vous  dis,  eii  vé- 
rité, si  vous  ne  mangez  la  chair  du  Fils  de 
iliomme,  et  ne  buvez  son  sang,  vous  n'aurez 
point  la  vie  en  vous.  «  Car  encore,  dit-il,  que 
cette  chair  soit  prise  de  la  nature  humaine, 
nous  ne  devons  pas  croire  qu'elle  soil  comme 
la  nôtre,  souillée  pai*  la  contagion  de  quel- 
ques péchés  :  c'est  une  chair  adorable,  sa- 
lutaire, vivifiante,  qui  remet  les  péchés  à 
cause  du  Verbe,  auquel  elle  a  été  unie.  Jé- 
sus-Christ s'est  oûert  en  sacrifice  *  pour-  tous 
les  hommes,  afiu  que  le  monde  reçut  par 
lui  lu  salut  qu'il  ne  méritait  pas  de  recevoir 
par  ses  propres  œuvres  ;  mais  on  peut  dire 
que  s'il  s'est  montré  *  aux  perfides,  il  ne 
leur  a  pas  été  donné,  leur  perfidie  ayant 
mis  un  obstacle  au  fruit  de  sa  rédemption.» 
Cassiodore  semble  dire  que  l'on  voyait  en- 
core de  son  temps  dans  la  ville  de  Jérusa- 
lem ',  la  plupart  des  instruments  qui  avaient 


i 


paleretur  perire pius,quam  annihilare  voluit  cru- 
delis  inimicus.  lu  psal.  cjx.  pag.  359. 

'  In  ipsa  incarnattonis  origine  Domini  Christi 
(licina  subslaii'ia  huiiiaiiUati  juncla  ,  atque  adu- 
nala  dtdaralur.  sicul  elab  angelo  Marin;  semper 
virgini  prophelalum  est:  Spintus  SaucUis  supcr- 
vt'uiet  iu  te  et  virlus  Altissinii  obrunibabit  tibi  : 
prnpterea  quod  uaseetur  est  te  sauctuiu,  vocabitur 
Filins  Dei.  Casfioil.  inpsat.  xxi,  pag.  C8. 

-  Duœ  naturœinconfusie  algue perfectœ  in  iina 
personit  siiut  posilœ  Domini Chrisli:  quaruinest 
ttna  quœ  régnât,  el  altéra  quœ  niinistrat  :  prima 
creatrix,  poslerior  creata  ;  et  ideo  quip  asuuniijsit, 
impasuihilis  ;  qxiœ  vero  est  assnmpta  ,  pasfibilis. 
i\am  sicut  Patres  monent  :  Vemus  injurias  rurni, 
miracula  Dirinitnti :  discernnmux  intellectu  tfUu- 
rax.  et  noxios  vitemus  errorrs.  Dirinitas  enini  sic 
sihi  hiinianitatem  ndunavil ,  ut  nullatoms  cum 
Itumanitate  confundi  possit ,  sed  utraque  iitcon- 
fusa  et  adunata  permanent.  Quia  lictl  incarna- 
tionis  diapensalin  post  resurrectionem  glorificata 
sit ,  lamen  in  liunuinitatix  reritate  iiermansit... 
yimium  exiliale  est  duas  7iaturas  perfectus  atgve 
adunalas  in  Christo  non  credere,  quas  toi  exem- 


plis  vnluit  de  seipsa  verilas  prœdicare.  \a  psal.  n, 
p.ng.  IG. 

'  Ille  fChristusJ  per  naturam  esl  Filins,  sanctx 
vero  per  grntiam.  Ille  sine  aliqiio  peccato ,  isti 
per  ipsum  n  pecialis  prohantur  exuti.  In  pwl. 
Lxxxviu,  pnfî.  2Sl. 

*  Yita  enim  nostra  quœ  rêvera  Deus  esl ,  qui 
carnem  sumptam  ex  Yirginf  Maria  sihi  univit 
lamque  pro/iriam  fecil  ,  rivifiratricem  eam  esse 
professas  est  ;  sicut  ait  in  i:vangelio  :  Amen,  amen 
dico  vobis,  nisi  inaiiiliH'avfrilis  carnem  l-'ilii  ho- 
uiinis,  el  bibei'ilis  cjus  «au^niiium  ,  non  babehifis 
in  Vobis  viUiui  U'ieniam.  Quœ  licrl  ex  humana 
natura  sumpta  sit,  non  tamen  eani  ut  nnius  ho- 
minis  ex  nobts  estimare  debemuspeccati  alicujus 
cniitngianc  pollutam.sed  udorabilem.salutiferam, 
riiifirntricvm,  quœ  peccata  tiimiitit,  propler  Ver- 
buin  cui  adnnala  esl.  lu  pful.  x.wiii,  piifî.  ii)\. 

'  Se  sacri/hium  proomnihus  ohtulil,  ut  salutem 
niniidux,  quant  suis  operibus  non  merebatur,  nc- 
ciprrel    In  psni.  i.,  pap.  I6i. 

*  Pcrfiilis  tnnlum  appnruit.  non  etinm  dntus. 
lu  i)?3l.  LX.\x:v,  pas.  273. 

'  Ista   quoque  Jerusalnn ,  quœ  adhuc  in  terris 


[VI*  SIÈCLE.] 


CHAPrmR  XIX.  —  c.vssinnnuiî;,  ciianceuiî». 


2« 


.'ftTvi  ;\  I.i  pasfsion  du  Siuivcui';  lu  pi(Mro  sur 
lai]U('llo  il  s'iUiiil  assis  loisqu'il  l'ul  iiit(M'r(if;i5 
pur  Pilate  ;  la  colonne  à  laquelle  on  l'ultii- 
rli;i  liusqu'uu  li!  tlai;ella  ;  la  couronne  d't'- 
pines  (|u'ou  lui  mit  sur  la  t(Me  ;  In  rospau  ou 
la  canne  dont  on  le  fiap[ia  sur  lutcle;  la 
croix  ilu  salut  ù  laquelle  il  fut  attaché;  la 
lance  dont  ou  lui  perçu  le  côté  ;  le  sépulcre 
où  on  le  mit  après  sa  mort.  1!  parle  aussi 
i\^i  la  table  sui'  laquelle  il  lit  la  Cène  avec  ses 
disciples,  et  leur  donna ,  ainsi  qu'à  nous  ,  la 
communion  de  son  corps  et  de  sou  sant;-  ;  de 
la  piscine  de  Siloé,  Oj^ure  du  sacré  baptême; 
du  cénacle  où  il  entra,  les  pnrtes  lermees, 
pour  se  luire  voir  h.  ses  disciples  ;  et  du  lieu 
de  sa  résurrection.  11  tire  de  tout  cela  diver- 
ses moralités,  l^aus  son  Commvnli'ivv  sur  le 
psaume  \\°,  il  s'exprime  plus  corrcctcracnt  que 
les  moines  de  Scylliie,  eu  disant  que  nous  de- 
vons croire'  que  le  Sauveur,  un  de  la  Trinité, 
asouQ'ert,  et  non,comuie  disaient  ces  moines: 
i'n  de  la  Trinité  a  souffert.  Il  ri'duit  a  deux 
points  '  les  instructions  de  l'Église  sur  la  con- 
duite de  notre  vie  :  le  premier,  à:  nous  ëloi- 
f^ner  tlu  mal,  parce  que  le  pécheur  ne  peut  pas 
<oul  d'un  coup  se  porter  à  la  praticjue  des 
vertus;  le  second,  i\  faire  le  bien  pour  l'amour 


duquel   nous   avons  cessé   de    faire   le    mal.     BorrÉ;ii«. 

7. 1/l'',L;lisC'i  ne  pmpoS''  rie^^  dit  (lassiodo- 
re  ,  qu'il  ne  soit  expinlient  de  croire.  Comme 
elle  est  répandue  '  par  toute  la  Icrrc,  ses  ju- 
gements s'exercent  aussi  dans  tout  l'univers. 
(Juoi(pie  fornuMî (le  diveises  nations  '■  comme 
une  couronne  de  dilléicntes  tleurs,  elle  est 
unique  et  ne  peut  être  divisée  à  la  volonté 
des  hommes  ;  semblable  k  la  tunique  '  qui 
couvrait  le  sacré  corps  de  Jésus-CInisl,  et 
qui  était  sans  couture  et  d'un  seul  tissu  de- 
puis le  haut  jusqu'en  bas,  elle  demeure  en- 
tière et  inviolable  par  une  stabilité  perpé- 
tuelle, li)ud('esur  la  force  de  son  unité.  C'est 
d'elle  que  la  vérité  a  dit  :  Ij:s  portes  de  l'enfer 
ne  prêonndront  point  contre  elle.  Jésus-Christ 
en  disant  'dans  le  psaume xxi°  :  Délivrez  mon 
ihite;  ou  à  la  lettre  :  Délivrez  mon  unique  de 
la  puissance  du  chien,  euleud  par  son  unique, 
l'Église  catholique,  afin  que  l'on  sache  que 
jiar  le  terme  d'unité,  il  a  réprouvé  toutes 
les  doctrines  nouvelles,  et  les  lonciliabu- 
Ics  des  méchants,  c'est-à-dire  des  héréti- 
ques, qu'il  compare  ici  à  des  chiens,  parce 
qu'en  etl'et,  après  être  sortis  de  l'Église  ca- 
tholique, ils  s'empressent  à  la  mordre  et  à 
la  lacérer.  Ceux-là  doivent  être   regardés  * 


est,  et  typum  gerit  illius  cœleslis  arcani,  in  se- 
cunda  dicisione  laudala  est;  merito  ubi  est  tan- 
larum  rerum  doinicilium  visuale  vUiuttim.  Ibi 
einm  piscinam  natatoriain  in  figura  sacri  baplis- 
iiuitis  ,  ut  ciirarct  in/irmos  desceiidens  angélus 
commovehat.  Ibi  Siloe  (impcrante  Domino)  cœci 
teni-bras  lavit,  et  damnatis  oculis  iucis  donares- 
tiluit.  Ibi  mensa  Ctiristi  ca'lestihus  plena  deliciis 
spiritualiler  saliiravil  apostolos  ;  et  ne  nos  ab 
illu  cœna  niinqueremur  inipasli,  sacer  calix  et 
communicationein  nobis  prœslilil  et  saiutem.  Ibi 
lapis  durissimus  vestigia  piiKedemploris  oslendil, 
quando  anle  Pilatum  judicem  con^tilit  audiendus. 
Ibi  coliimna  rcligati  in  se  Dowini  flagella  lesla- 
tur.  Ibi  spinea  curona  cernilur,  quam  idio  snlu- 
lari  Dowino  constat  impodlanx.  ul  totius  mundi 
aculei  collecti  frangerentur .  Ibiarundo  servatur, 
quœ  t-apul  Domini  perçus  it  ut  ipsum  esse  ini- 
livm  rerum  terris  omnibus  rduitiaret.  Ibi  crux 
illa  saiutis  et  gloriœ,  loci  yevercntiam  consecra- 
vit.  Ibi  manel  lancea,  quœ  la'.,:s  Domini  trans- 
foravit,  ut  nobis  illius  medicina  succurreret.  Ibi 
credenteshodie  ipsiuxsepulcra  vivificani.Ibi  resur- 
reclionis  locus  ad  cœlos  erehit  corda  lidelium.Ibi 
Si  n  nie  wonlium  prœcipwts,  ubi  residentibus  dia- 
cipulisi'i  cirnando  clausisjanuis  mirabiiiterSalva- 
tor  iniratii  ;  elcœlera  quœ  dives  illapatria  Domi- 
ni passione  promeruit.  lu  psal.  lxxxvi  ,  pat:.  iT^. 

'  Cum  credasunum  ex  Tri)iitatepassum.Cn^Mni\. 
in  psal.  XX,  pag.  ni. 

2  Dnobus  modis  vilam  nostratn  pia  mater  ins- 
tituil.  Primus  est  ut  mala  declinemus ,  quia  pec- 


calori  bonarum  rerum  repente  esse  non  polest 
appetitus.  Secundus,  ut  bona  faciamus,  propter 
quod  a  vilupcrabili  actione  cessavimus.  lu  psal. 
Lvi,  pug.  in. 

'  Ecclesia  nescit  loqui,  nisi  quod  expedit  credi. 
PrcEfat.  iu  Psal.  pag.  7. 

*  A'am  sicut  ubique  dilalata  est  Ecclesia  ,  ita 
per  orbem  propngata  sunl  ejus  sine  dubilatione 
judicia.  lu  psal.  civ,  pay.  3.36. 

s  Constat  enim  de  variis  nalionibus  Ecclesiam 
Dnmini  quasi  ex  diversis  ftoribus,  in  una  coronce 
specie  esse  formatam.  In  psal.  Lix,  pag.  188. 

"  Tunica  vero  illa  quœ  venit  ad  sortem  ,  quœ 
ejus  sanclilatem  corporis  ambiebat ,  quam  dicit 
Evongelista  desuper  contextam  fuisse  per  lotnm, 
caltioltca  probntur  Ecclet:ia^qn(P  nullatenus  hu- 
mano  discerpenda  dalur  arbitrio  ;  sed  intégra  at- 
que  inoiolabilis ,  divina  semper  largilate  prœsta- 
tur.  IpSa  est  contexla  desuper ,  quam  nemo  divi- 
dit  ,  nemo  disrwnpit  :  sed  perpétua,  stabililate 
firmissima  in  unilatis  suœ  robore  persévérât  ;  de 
qua  ipsa  Veritas  dicit:  Et  porliE  iuferi  non  prcEva- 
lebuut.  In  psal.  Xl.  pag.  70. 

■>  Primo  dixit  :  Eripu  auimam  lueam.  Modo  petit 
liberari  Ecclesia  quœ  est  illi  unica,  id  est  catho- 
lica,  ut  intelligatur  doclrinas  novas  et  conciUa- 
bula  perdilorum  uuitatis  rocabulo  respuisse  : 
hœreticos  kic  canibus  comparons,  qui  cum  de  pe- 
iielralibus  noslris  e.teunl,  Ecclesiam  Dei  mordere 
ac  laccrare  fc.'itinant.  In  psal.  xxi,  pag.  70.    • 

"  Ipai sunt  filii alieniqui  abEcclcsia  mairecalho- 
(tf()r!(m/((i6en(«rea;irnwei.Inpsol.(;xxxxiii,pag.i6i. 


248 


ISTOI    RE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


comme  des  enfants  étrangers,  qui  sonl  re- 
gardés comme  tels  par  l'Église,  mère  des 
catholiques.  Au  reste  ' ,  tout  ce  qui  se  fait 
hors  de  son  sein,  ne  peut  se  faire  pour  la 
gloire  du  Seigneur.  Il  est  dit  dans  le  psau- 
me ex  vil*  :  Nous  vous  bénissons  de  la  maison 
du  Seif/ncur  *,  c'est-à-dire  de  l'Eglise  catholi- 
que, de  laquelle  nous  recevons  le  baptême 
salutaire,  la  sainte  communion,  l'onction  pu- 
rifiante de  l'huile  sacrée,  et  toutes  les  vérita- 
bles bénédictions.  » 

Cassiodore  remarque  sur  cet  endroit ,  que 
c'est  avec  fruit  que  le  peuple  fidèle  reçoit  la 
bénédiction  du  Seigneur  par  la  main  des 
évéques;  et  sur  ces  autres  paroles  du  même 

p^i.  civil,  psaume  :  Rendez  ce  jour  solennel  par  une  assem- 
blée nombreuse  jusqu'à  la  corne  de  l'autel, û  d'il' 
que  l'on  doit  célébrcrles jours  de  fêtes  ordon- 
nées eu  l'honneur  du  Seigneur  et  des  saints; 
que  les  peuples  les  rendaient  très-célèbres 
par  de  nombreuses  processions  ,  qu'ils  ac- 
compagnaient de  sentiments  de  pieté  ;  que 
le  Psalmiste,  en  ordonnant  delessolenniscr 
jusqu'à  la  corne  de  l'autel,  semble  condamner 
ceux  qui  sortaient  de  l'Église  aussitôt  après 
la  lecture  de  l'Évangile,  parce  qu'en  etlét 
ils  n'approchaient  point  de  la  corne  de  l'au- 
tel, pour  y  recevoir  le  corps  et  le  sang  du 
Seigneur,  que  l'on  y  distribuait  dans  les  as- 
semblées solennelles. 

snries  roi.       8.    (1  L'éplscopat ',  dit  Cassiodore,  est  le 


suprême  degré  du  ministère  ecclésiastique.  'iJ^'"'''"'- 
L'évêque  est  a<[)[)i;U''sur-ins/tectcur,j>;ircc  que 
d'unsiéçe  élevé  il  garde  comme  pasteur  vigi- 
lant, avec  la  grâce  du  Seigneur,  le  troupeau 
qu'il  lui  a  confié.  C'est  pourquoi  le  nomd'éfé- 
que  n'est  pas  tant  un  nom  d'honneur  que  de 
travail,  par  l'oliiigation  où  est  l'évêque  de 
veiller  égalementsuilui-môme  comme  sur  le 
troupeau  dont  il  est  chargi'-.  C'était  aussi  l'u- 
sage de  l'appeler  7>(?re\  en  sorte  que  le  fils  de- 
venu évoque,  était  appelé  le  père  de  son  père, 
non  par  l'ordre  de  la  naissance,  mais  de  la 
dignité.  Les  prêtres 'nous  rendent  Dieu  pro- 
pice par  les  sacrifices  qu'ils  lui  ollrent  pour 
nos  péchés,  comme  la  Divinité  s'est  rendue 
propice  au  genre  humain,  quand  elle  nous  a 
donné  Jésus-Christ  pour  prêtre  et  pour  hostie 
tout  ensemble.  » 
9.  "Il  y  a,  poursuit  Cassiodore,  deux  sacre-     sor  «••  "• 

•  1  ',•  .7,1  »      1*  L      "^n"!!''      <** 

ments  qui  nous  délivrent'  de  la  mort;  1  un  est  kipnm»  n  <ic 

'  1     •  I         f»6oiI«De*  ;    le 

le  baptême,  dont  la  grâce  nous  conduit  à  la  i-tcbeorip.DM 
vie;  car  ce  n'est  pointparnosméritesquenous  •"«  * 
y  parvenons,  mais  nous  y  sommes  attirés  par 
le  bienfait  de  la  miséricorde  de  Dieu,  qui 
pour  empêcher  que  nous  n'en  soyons  chas- 
sés par  la  grandeur  de  nos  péchés,  atfermit 
nos  pas  en  nous  tendant  la  main,  comme  il 
fit  ;\  saint  Pierre  pour  le  sauver  du  naufrage. 
Le  baptême  nous  rétablit  dans  la  pureté  *  et 
dans  l'innocence  qu'avait  Adam  avant  son 
péché,  parce  qu'il  efface  non-seulement  en 


'  Cœterum  quidqiàd  extra  Ecclesiam  catholicam 
gerilur,  nequaquam  Dumiiii  laudibvs  applieatur. 
lu  ijsal.  cxvir,  pag.  37i. 

»  Benedicimus  vos  de  domo  Domini  ..  Ostenden- 
tes  Domini  benediclinnem  dévoue  plebiper  antis- 
tiles  salubrilcrdari.El  ne  hoc  dubilanler  accipe- 
res,  dixil  :  De  domo  Uoiniui ,  etc.  id  est  de  Eccte- 
sia  calholica,  unde  salutarc  bapirisma  vaiit,  unde 
communicatio  sancta  prncedil ,  unde  olei  sacrait 
■unclione  mundamur  ,  unde  omnis  denique  bene- 
diclio  rera  prœslalur.  In  psal.  cxvii,  pag.  376. 

'  Constiluite  diem  soleiniiein  ,  etc.  Psal.  cxvii , 
27  ,  id  est  deliberata  ciistodite  senlenlia  ,  diem 
solemnem  qui  honore  Domini  et  sanctorum  con- 
fessionc  sacratus  esl.  ^n  i.onfrcqueiilatioiiiluis,  id 
est,  processionihus  crebris ,  quas  populi  lurba 
condensai,  et  reddil  celeberrimas  riex'otione  festi- 
va.  (juod  vero  addil  :  t'sqne  ad  cornu  nltnris, 
prohibentur  aliqui  forsilan  fquod  miUlis  in  usu 
eslj  auilita  Erangelii  leclionc  dtscedere  :  nonenim 
ad  cornu  allaris  accedtint,  qui  communicalionis 
gratta  non  replcnLur.  Hoc  de  islo  altari  xisnali  , 
ntmihi  vidftur,  compeieuteraccipimiis,  quod  cor- 
pus et  snnguinem  Domini snlemni  nobis  freqiieii- 
talione  /arjidir.  Cassiod.  in   psal.  f.xvii,  pag.  37(i. 

'•  EpiscnpalHS  summus  in  licclesia  gradus  est. 
Episcopus  diclus  super  inspeclor,  eo  quod  Domini 


grcgem,  ipsius  gralia  suffragante ,  qua^i  paslor 
caulissinius  alla  sede  cu^lodiat...  Qunpropter  no- 
nien  istad  non  tam  honoris  est  quani  lahoris  : 
iMni  qui  alins  speculnndos  suscepil,  se  jugi  débet 
c.cciihationc  conspicere.  In  psal.  cviii,  pag.  3r>4. 

■'  Christus,  Dominus  dicitur  David,  secundum 
déliaient,  qua  creulor  esl  ipsius:  quod  ctiam  in 
hac  noslra  conversalione  liodiequc  conlingit ,  ul 
filius  episcopus  faclus,  patris  sui  pater  voceLur, 
non  nasceiûii  ordine ,  sed  honore,  lu  psal.  eu  , 
pag.  3I>8. 

^  Apte  dicimus  hoc  de  sacerdotibus,  quolies  per 
inimolala  sacrificia  peccalis  nostris  propUiam  fa- 
ciunl  Divinitalem...  quomodo  Divinilas  prnpiliata 
est  humano  gencri,  quando  nobis  et  saccrdotem 
et  hosliam  ipsum  contulilChrislum.  lu  psal.  lxui, 
pag.  199. 

'  Dii,o  sunt  sacramenta  liberalionis  noslrœ  : 
primum  quod  nos  per  munus  haptismalis  rfucit 
ad  ritam  :  non  rnim  illur  noslris  merilis  perve- 
nimus  ,  srd  ijisius  bénéficia  n>iserationis  aUrahi- 
viur.  Dcindc  ne  nos  cjindc  permittat  cxpelli,  qui 
gravihus  ittiis  probainnr  onerali...  ipse  grcssus 
nostros  non  sinil  rowmoreri  qui  manuni  suant 
l'rtro  ne  mcigrretur  e.tlen<lit.  In  psal.  i.xv  , 
pag.  2U3. 

"  Istud  lavacrum  quod  sic  abltiU  maculas  pec- 


CHAPITHH  MX.  —  CASSIODOUK.  CIIANCKLII-:». 


[vi"  SIÈCLE.] 

nniis  le  pdclid  oi'iirincl,  mais  encore  les  pé- 
clu'S  i|iic  nous  avons  commis parnotrc  propre 
volonté,  l.c  pérlié  (pie  nous  appelons  orii^i- 
nel,  provient  '  en  (pie^pie  sorte  notre  nais- 
sance, c'est-à-dire  que  nous  le  contractons 
dès  le  moment  que  nous  sommes  formés 
dans  le  soin  de  nos  mères.  Personne  n'en  est 
exempt;  les  entants  y  sont  sujets  de  même 
que  tout  le  reste  des  hommes  :  mais  enfin  ce 
péché  s'etlacc  parle  baptême.  C'était  l'usage 
autrefois  de  chanter  le  psaume  XLi'  à  ceux 
que  l'on  allait  baptiser  ,  afin  que  se  défai- 
sant de  tous  les  sujets  de  tristesse  que  le 
monde  fournit,  ils  se  hâtassent  d'aller  au  Sei- 
gneur avec  une  entière  pureté  de  cœur'.  Ce 
psaume  est  propre,  en  ell'et,  à  inspirer  do 
bons  désirs.  L'autre  moyeu  d'etfaccr  nos  pé- 
chés est  d'en  faire  pénitence,  de  les  pleu- 
rer '  et  de  s'en  donner  de  garde  à  l'avenir. 
La  pénitence  est  utile  dans  tous'  les  temps 
de  la  vie,  même  h  la  mort',  l'Évangile  nous 
apprenant  que  ce  fut  ;\  cette  heui-e  que  le 
larron  reçut  sur  la  croix  la  rémission  de  ses 
fautes.  Il  est  permis  de  demander  *  souvent 
à  Dieu  le  pardon  de  ses  péchés,  et  d'en  faire 
secrètement ,  et  dans  soi-même,  une  péni- 
tence continuelle.  Cette  sorte  de  pénitence 
n'empêche  point  qu'on  ne  puisse  être  promu 


2t9 


aux  ilill'é'rents  degrés  du  ministère  ecclésias- 
tii(iu';  mais  si  nous  la  faisons  piihliipicmonl 
l)ar  l'ordre  de  r(''vê(]uc,  son  jugL'iiu'nt  de- 
vant être  inviolable  et  diMiiiitif,  [larce  qu'il 
le  rend  au  nom  et  par  l'autorité  de  Jésus- 
Christ,  les  canons  nous  défendent  l'entrée 
dans  les  honneurs  occh'siasliipios.  » 

Le  psaimic  (jue  Cassiodore  dit  en  cet  en- 
droit pouvoir  être  répété  par  les  pécheurs 
qui  demandent  indulgence,  est  le  psaume  l''. 
Il  parait,  par  ce  qu'il  ajoute,  quelévèque  le 
récitait  sur  le  pénitent  qu'il  mettait  en  péni- 
tence publique.  Il  enseigne  que  les  plus 
saints  ^,  ne  pouvant  éviter  entièrement  le 
péché  en  ce  monde,  quoiqu'ils  y  vivent  avec 
beaucoup  de  retenue  et  de  dévotion,  il  est 
nécessaire  qu'ils  aient  recours  à  la  prière 
pour  obtenir  l'absolution  de  leurs  fautes  par 
la  miséricorde  de  Dieu.  Mais  il  entend  par 
ces  péchés  des  fautes  légères ,  comme  serait 
de  tenir  des  discours  inutiles,  de  trop  s'oc- 
cuper du  lendemain,  d'être  surpris  de  quel- 
ques pensées  peu  convenables ,  et  autres 
choses  semljlables.  Il  ajoute  qu'un  remède 
assuré  ''  contre  le  péché,  est  de  se  tenir  en 
la  présence  de  Dieu  ;  que  c'est  un  très-grand 
péché  "  d'être  occasion  à  quelqu'un  d'en 
commettre,  comme  ce  n'est  pas  un  petit  mé- 


catorwm,  salutiferi  baptismatis  cognoscitur  indi- 
care  purilatcm:  nbi  sic  omnia  et  originalia  de- 
licta,  el  propria  admissa  mundantur  ;  ut  itlœ  nos 
restituât  puritati  in  qua  priinus  Adam  noscitur 
esse  procreatus.  In  psal.  l,  pag.  160. 

'  Prœceniri  diciinus.  quando  aliquid  nos  anti- 
cipare  dignoscitur  ;  ni  est  illc  reatus  originalis 
peccati  qui  nos  antequam  nascamur ,  ub  ipso 
conceplu  reddit  obnoxios.  Unde  Prophela  :  Ex 
iniiinilatibus  conccptus  suiu  :  In  psal.  xv,  pag.  53. 
Oninis  viveus.  Psal.  c:xLn  ,  2.  llominem  significat 
gcneralem,  ubi  el  infanlum  rnta  cmcluditur,  qui 
originali  peccalo  nisi  aqoa  regenerationis  abluan- 
tur ,  obnoxii  sunt.  In  psal.  cxui ,  jiag.  4.'i7.  (Jua- 
propter  ah  originali  peccato,  unde  usque  ad  sœ- 
culi  finem  vivens  mitliis  excipitur.  In  psal.  xvui , 
pag.  Bl.  Opinione  qunque  fertur  aliquorum,  quod 
Creator,  sictit  de  corpore  noslro  semen  carnir; 
educil,  ila  el  rie  anima;  qualitate  anitnamnovam 
passe  qcnerari  ;  qualenus  originalis  Mius peccati, 
quod  calholica  con/itelur  Ecctesia  per  traducem 
Micli  rea  possit  ostendi,  nisi  dono  baptismatis 
fueril  absoluta.  Cassiuilor.  De  Anima,  cap.  vu  , 
pag.  :199. 

5  Jdi'o  hodieque  bunc  psulmum  boni  desiderii 
suasorem  alquei  istitulorem.  baptizandis  congrue 
décantât  Ecchsia  ;  quattnus  a  tristitia  hujusmodi 
olienati  ad  Dominum  tota  mentis  puritate  festi- 
veut    In  psal.  xxxxi,  pag.  135. 

'  Perfecta  po'nitentiavst  futuracavere  peccata, 
el  lugere  prœterita.  lu  psal.  l,  pag.  i(jO. 


'  Audiant  qui  pœnitentiam  agere  in  vitœ  suce 
termina  pravn  voluntate  desperant,  cum  in  evan- 
gclica  leclione  cognoscant  latroni  alfixo  jam  cruci 
■momcntanea  celeritate  subversum.  lu  psal.  lxxxv, 
pag.  275. 

5  Uunc  psalmum  licet  iterare,  nec  nobis  impe- 
dit  ad  honores  ecclesiasticos  expetendos  :  si  vero 
a  sacerdole  supra  nos  pœnilenliœ  voto  dicatur  ; 
guoniam  ex  persona  datur,  juste  a  canonibus 
vetamur  ultra  accedere.  Quidquid  enim  inChristi 
nomine  percipimus  .  inviolnbile  nobis  et  definili- 
vum  decet  esse  judicium.  Ita  fil  vt  pœnitentiam 
unumquemque  et  apud  se  liceat  agere,  et  quando 
per  sacerdotem  data  fuerit ,  non  nos  permittat 
ullerius  ad  ecclesiasticos  honores  accedere.  In 
psal.  L,  pag.  165. 

*  Num  et  sancti  viri  cum  devota  se  conrersa- 
tione  tractare  vidcantvr ,  tamen  culpas  ex  toto 
declinare  non  possunt,  quando  et  oliosus  sermo 
reatus  est  et  in  crastinum  cogitare  peccatum  est, 
incongrua  subito  cogitatione  compleri,  et  cœlera 
hujusmodi.  In  psal.  cxxix,  pag.  425.  Una  ergo  est 
securitas  in  hoc  sœculo  iHventi ,  jugiler  piis  pre- 
cibus  inclinari;  ut  qui  a  culpa  esse  non  Jiossu- 
mus  liberi,per  munera  pielatis  mereamur  ubsolvi. 
Ibid.,  pag.  424. 

'  j\am  qui  illum  {Deum)  semper  intuetur  acie 
mentis,  nullitenus  ad  delicta  coni^ertUur.  In  psal. 
XV,  pag.  49. 

*  Unde  apparet  gravissiinum  esse  peccatum 
quando  aliquis  occasionem  prœbuerit,  unde  alte- 


250 


HISTOIRE  GÉXl'RAI.E  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


rite  de  donner  avec  le  secours  de  Dieu,  un 
bon  exemple  aux  autres  ;  que  celui  qui  pè- 
che perd  la  grâce  du  Saint-Esprit",  que  la 
fragilité  liuniaiue  ne  peut  conserver,  lors- 
qu'elle pèche,  (i  D'où  vient,  ajoute-l-il,  que 
David  qui  avait  sans  doute  connu  qu'il  avait 
perdu  la  p-rAcc  du  Saint  Esprit,  disait  ti  Dieu  : 
licndcz-mni  la  joie  de  votre  (jrûce  salutaire? 
Il  disait  :  Rendez,  parce  qu'il  s'était  aperçu 
de  je  ne  sais  quel  déehoi  de  grâce,  dont  en 
elTct  on  déchoit  d'autant  qu'on  se  rend  ré- 
préhensihlc  dans  sa  conduite.  »  Cassiodore 
regarde  comme  une  suite  nécessaire  du  pé- 
ché originel  '  les  désirs  illicites  qui  naissent 
en  nous;  mais  il  dit  en  même  temps  que 
nous  ne  sommes  point  nécessités  d'y  con- 
sentir, et  que  les  saints,  au  lieu  de  s'y  lais- 
ser emporter,  les  répriment  avec  la  grâce  de 
Dieu  par  la  pureté  de  leur  coîur;  qu'au  sur- 
plus, ce  qui  se  trouve  de  défectueux  dans 
les  mouvements  déréglés  du  cœur  ou  du 
corps,  auxquels  on  n'a  point  consenti,  s'ef- 
face par  l'oraison  sainte,  c'est-iWire  par  l'O- 
raison doiainicale  et  par  le  signe  delà  croix. 
Il  dit  que  les  anciens  Pères'  ont  reconnu 
sept  moyens  de  nous  procurer  la  rémis- 
sion de  nos  péchés,  savoir  le  baptême,  le 
martyre,  l'aumône,  le  pardon  des  injures, 
le  soin  que  l'on  prend  de  convertir  ceux  qui 
sont  dans  l'égarement,  l'abondance   de  la 


charité  et  la  pénitence.  Il  en  ajoule  un  hui- 
tième, qui  est  la  communion  du  corps  et  du 
saug  de  Jésus-Clirist,  lorsqu'on  s'en  appro- 
che dignement. 

10.  Car  il  ne  doute  point  que  nous  ne  bu- 
vions *  son  sang  et  que  nous  ne  soyons 
nourris  de  son  corps  dans  l'Eucharistie,  et 
que  ce  ne  soit  à  la  sainte  communion  que 
l'on  doive  rapporter  ce  qui  est  dit  dans  l'É- 
criture :  Dieu  leur  a  donné  le  /xtin  du  ciel. 
L'homme  a  mangé  le  fjain  d"s  anges,  u  Jésus- 
Cluisl,  dit-il.  prêtre  éternel,  selon  l'ordre  de 
Melcbisédech  ",  a  consacré  son  corps  et  son 
sang  salutairement  dans  la  distribution  du 
pain  et  du  vin,  comme  il  le  dit  lui-même  : 
Si  L-ous  ne  mangez  la  chair  du  Fils  de  l'hom- 
me, et  ne  buvez  son  sang,  vous  n'aurez  point 
la  vie  éterndle.  Mais  l'esprit  de  l'homme  ne 
doit  rien  concevoir  de  sanglant,  ni  de  cor- 
ruptible dans  cette  chair  et  dans  ce  sang  ; 
mais  les  regarder  comme  la  substance  vivi- 
fiante et  salutaire  qui  a  été  faite  la  propre 
substance  du  Verbe  même,  par  laquelle  sont 
accordés  la  lémission  des  péchés  et  les  dons 
de  la  vie  éternelle.  C'est  dans  l'immolation* 
solennelle  du  corps  et  du  sang  de  Jésus- 
Christ,  et  non  dans  celle  des  animaux,  que 
consiste  le  sacrifice  de  l'Eglise;  et  elle  fait' 
le  sujet  de  l'assemblée  des  fidèles.  C'est  le 
corps   du    Verbe  fait  chair,  appelé   temple 


rius conscientia  pollualur :  sicul  necilla  rcsparva 
est,  qiiœ  juvanle Domino  bonisprœslal  exeinplum. 
In  ps.il.  Lxxin,  pa^'.  23't. 

>  l\^;^)|^e  dixit,  quia  sibi  nescio  quid  graliœ  se/i- 
seral  imniinutum  !  (Juoniam  ab  illa  gratia  salu~ 
tari  tanlum  quis  recedit,  quantum  se  rcprrliensi- 
hili  coïiversalwne  Iractavcrit.  Kam  cum  dicit: 
Rcdde  milii  la'litiam  salutaris  lui,  gratiam  se 
Sidrilus  Sancii  sine  dubio  amisissc  cognoveral , 
quum  fragilUas  humana  non  pniest  tiabere  ctim 
peccai.  lu  psal.  l,  pat;.  ll)2. 

2  Sunl  illicila  desideria,  quce  originalis  peccali 
necessitale  comniitlimus  ;  sed  in  eis  comensu  ani- 
mi  non  tencnntr  ,  in  islis  mens  heala  non  amhii- 
lal,  quœ  dono  Domini  cordis  probilale  superan- 
tur  ,  ut  vcrbi  gratia  ,  repente  pnlclirum  aliquid 
conrvpisrere,  cibiim  desideranter  expelere  ,  bonis 
odoribus  commoveri,  iniqua  subito  suggestione 
confnndi,  et  tiis  similia  quœ  oratione  sancta  et 
cruci  signnculo  dcstruunlur  :  Un  fit  ul  etpeccala 
sancti  suggestione  carnis  liabeant  ;  et  lamen  dum 
eis  minime  relaxatur  effectus,  ea  non  operari  ve- 
raciter  lestimeutur.  In  psal.  rxviii,  pag.  .378. 

'  Majores  noslri  sejitem  modis  peccala  nobis 
dimiili  possc  dixeriinl  :  primo,  per  hapli-sinum  : 
secundo  ,  per  passionem  martyrii:  tertio,  per 
eleemosynnm  :  quarto,  per  hoc  quod  remitlimus 
peccala  fralribus  noslris  :  qmnto,cum  converterit 
quis  peccalorem  ab  errore  viœ  suœ  :  sexto ,  per 


abundantiameliaritatis:  septimo,per  pœnilenliam. 
Addenda  qiioque  est  commu7Ucalio  corporis  et 
sauguinis  Oomini  nostri  Jesu  Christi;  cum  (amen 
digne  suscipilur.  lu  psal.  vi,  pag.  2i. 

*  Pancm  cœli  dédit  eis.  l'aucin  angolorum  man- 
dniMvil  Imino.  Toltim  ad  communionem  sacram 
conrenienler  referlur,  quando  et  rjus  sanguiiiem 
bibimus  ,  e(  de  ejus  corpore  saginumur.  In  psjil. 
i.xiv,  pafj.  20). 

'  Seqnilur  :  Tu  es  sacertlos  in  sternum  seciin- 
dum  ordineiu  .Melcliisedei-li.  ifoc  Prophela  promi- 
sisse  Filio  commémorât  l'atrem  :  cuienim  potcst 
reraciter  et  evidenter  aptari  yiisi  Domino  Saha- 
tori,  qui  corpus  et  sanguinem  suum  in  pani.s  et 
eini  erogatione  salutariter  consecrovit  !  Sicvl 
ipse  in  Erangelio  dicit  :  Nisi  inanducaverilis  cnr- 
M(!ni  l'ilii  liuMiiMis,  et  liihoritis  cjns  sniisnineni  non 
lialjcbili.s  vitiun  œtcrnuni.  Sed  in  ista  carne  ac 
sanguini  nU  cruentum,  nil  corruptibile  mens  hu- 
mana coneipiat;  sed  vivificalricem  subslontiam 
atque  salularem,  et  ipsius  Verbi  propriam  faetam, 
per  quim  jieccalorum  remissio  ,  el  adcrnœ  vitœ 
donn  prasiantur.  In  ps.il.  cix,  pay.  3o9. 

"  Sncrificium  sanclœ  Ecclesiœ  ,  non-  hoslia  pe- 
cudum ,  sed  iste  ritus  nccipiendus  est  qui  nunc 
ngilur  rorjioris  et  sanguinis  immolnlione  so- 
Icmni  quem  veninrum  prœvidebat.  In  pful.  xix, 
pag.  62. 

'  Uos  dicil  non  sanguine  pecudum  ,  aut  victi- 


[vi'siKCLE.]  CHAriTRE  MX.  —  CASSIOPOnK,  CTTANCEUER. 

dans  l'Ecriture,  que  l'iîglisc  ndoir  '  Ions  les 
jours,  loisqn'eilc  ^l5v^re  son  corps  el  son 
.sang  parmi  los  sacrements  do  ce  très-haut 
mystère.  » 

11.   «  Quoique  celle  Église  soit  une,  dit 


-irA 


Cassiodore,  elle  '  a  toutefois  divers  ollices 
dislinpuês  par  dittVrenls  degrés  d'honneur, 
et  dont  l'ordinalion  esl  aussi  dillerenle;  elle 
a  des  lecteurs,  des  sous-diacres,  des  dia- 
cres, des  prêtres  et  des  cvcqnes.  » 

12.  «  Par  le  péclié  d'Adam',  dil-il  encore, 
nous  avons  perdu  la  liberté  de  faire  le  bien, 
mais  elle  nous  reste  pour  faire  le  mal,  c'est-.''i- 
dire  pour  abandonner  notre  Créateur  et 
nous  porter  au  crime.  La  grâce  seule  de 
Jésus-Clnist  nous  peut  rendre  la  liberté  que 
nous  avons  perdue.  Ceux-là  écoulent'  avec 
soumission  la  loi  de  Dieu  et  de  ses  précep- 
tes, que  Dieu  fait  lui-même  écouter  ;  ceux- 
là  ont  des  désirs  saints  et  utiles  à  leur  salut, 
qui  les  re(;oivcnt  de  sa  main  bienfaisante  et 
libérale  :  car  depuis  que  la  nature  humaine 
a  été  corrompue  par  le  péché,  c'est  Dieu 
qui  met  dans  notre  libre  arbitre,  le  bien  qui 
s'y  trouve,  et  qui,  par  sa  bonté,  lui  donne 
de  le  pratiquer.  Sa  grâce,  qui  n'est  appelée 
ainsi  '  que  parce  qu'il  la  donne  gratuite- 
ment, est  la  grâce  de  Notre-Seigneur  Jésus- 
Christ.  C'est  elle  qui  prépare  notre  volonté, 


qui  nous  aide,  qui  nous  fortifie,  qui  nous 
couronne.  »  Pour  en  marquer  l'ellicacilé  , 
Cassiodore  la  compare  aux  llèclies  ai'jues  et 
Irès-puissantes  donl  il  est  parle'  dans  le  psau- 
me XLiv,  6:  «  Les  llèches  aiguës,  dit-il"  , 
sont  les  paroles  du  Sauveur ,  qui  percent 
d'une  manière  ulile  et  salutaire,  le  cnjur  des 
houunes.  Ces  llèches  bicsscnl ,  mais  pour 
guérir;  elles  frappent,  mais  pour  délivrer; 
elles  aballent,  mais  pour  relever.  Ces  flè- 
ches sont  très-puissantes,  parce  qu'aucune 
matière,  quelque  dure  ([u'elle  soit,  ne  leur 
résiste  ,  quand  Dieu  lus  lance  de  manière 
qu'il  veut  qu'elles  produisent  l'effet  qu'il  a 
résolu.!)  En  expliquant  le  psaume  L",  il  com- 
bat ainsi  les  demi  -  pélagiens  :  «  Lorsque 
vous  entendez  dire'  que  le  Seigneur  pré- 
vient, édifie,  conduit  et  éclaire,  sans  qu'au- 
cuns mérites  aient  précédé,  quel  commen- 
cement pouvez-vous  vouaattribuer  qui  vous 
soit  propre,  sinon  celui-là  seul  qui  attire  sur 
voire  orgueil  une  juste  condamnation  ?  Vous 
opposez  plusieurs  autres  passages  pour  prou- 
ver que  les  hommes  ont  d'eux-mêmes  le 
commencement  de  la  bonne  volonté,  pour 
recevoir  ensuite  le  secours  de  Dieu,  en  sorte 
que  ce  soit  nous  qui  soyons  la  cause  de  son 
bienfait,  et  non  pas  lui-même  :  ce  qu'il 
n'est  pas  permis  de  dire.  Si  le  commence- 


marum  consuctudine  congregandos,  sed  immola- 
lione  scilicet  corporis  et  sanguinis  sui  quœ liiima- 
nuni  genu^  loto  orbe  celebrala  salvavil.  lu  psal. 
XV,  pa^'.  48. 

'  Templtim  sanctutn  est  Domwi  heatw  [ncar- 
nationis  adventus ,  quem  etiam  nunc  quolidie 
adorât  Ecclesia,  dum  corpus  et  sanguinem  ipsiuii 
inter  summi  iiiysterii  sacramenta  vewratw  lu 
jisal.  i;xxxvn,  pag.  44."i. 

'  Distribuit  aulem  gradus  Ecclesiœ  qui  officia 
ejus  distincta  ordinatione  dixponit ,  suvt  eiiim  in 
illa  leclores,  sunl  subdiaconi,  sunt  diaconi ,  sunt 
presbyleri,  sunt  episcopi  ;  et  quainvis  nna  sit  Ec- 
clesia ,  officia  lamen  contiiiet  honorum  varietate 
distincta.  In  psal.  XLvii,  pag.  150. 

'  Esl  quidem  in  mnla  parte  execrahilis  littcrttts 
arbitra,  iit  prœvaricalor  Creatorem  deserat,  et 
ad  vitia  se  nefnnda  concertât.  In  bona  vero  parte 
arbitriiim  liberum  .idam  peccante  perdidimus  , 
ad  quod  nisi  per  Christi  gratiam  redire  nnn  pos- 
sumus,  dicente  Apostolo  :  Deus  est  cnim  fjui  ope- 
ratiir  in  vobis  et  velle  et  perficere  pro  bona  volun- 
late.  lu  psal.  r.wn,  p.ig.  a74. 

*  IIU  obedienter  atidiunt ,  quos  ipse  facit  au- 
dire:  illi  pruficne  cupiunt ,  qui  munus  dicinitatis 
accipiunt:  nam  post  litiatam  liumani  generis 
naturam  ,  liberi  arbilrii  salutiferam  partem  el 
Douiinus  tribuit,  ei  operationem  ipsiii^  sua  pie- 
tate  concedit.  In  psal.  L,  pag.  t61. 


*  Gralia  eiiim  dicitur  gratis  data:  Si  autem 
gratia  ,  ait  Àpostolus ,  non  ex  operilius,  alinquiu 
gratia  jam  nou  est  gratia.  Ipsa  est  quippe  Domi- 
ni  gralia,  quœ  nus prœpftrat,  adjuvat,  corroborai, 
et  coronal.  CassioJ.  in  psal.  lxxxiv,  pag.  271. 

^  Sagittœ  accutœ  sunl  verbaDomini  Salvatoris, 
hominum  corda  saluUiriler  infigenlia  ,  qute  ideo 
vulncrant  ut  sanent ,  ideo  perculiunt  ut  libèrent, 
ideo  proslernu7tt  ut  erigunt...  Pntcnlissimœ  quia 
nulla  mis  niatrria  quamvis  durissima  probalur 
ohsistere  ,  quando  eis  insitutn  est  effectuin  suœ 
volunlalis  implerr.  In  psal.  xxxxiv.  pag.  142. 

"  Cum  audinlis  prœrenire,  œdifîcare,  dirigere, 
et  erigere  Doiniiium.absolrere  et  iUnminare  nullis 
prœc  denlilius  merilis,  quid  ibi  proprium  cœpisse 
cognoscilis,  nisi  illud  Uintum  unde prn  veslra  .tu- 
perliin  juste  daivnemini  ?  Sed  diritis  forsitan  pro- 
phetam  Isaiani  sic  liberum  arbitrium  comprnhare: 
.'^i  volueritis  bona  terrte,  comedetis,  etc.  Sed  hœc 
el  his  similia  pcssima  intenlione  sentitis  ,  ut  cre- 
datis  homines  a  semelipsis  bonœ  voluntatis  ini- 
tium  sumere  ,  el  post  adjutorium  divinitatis  ac- 
cipere  :  ut  quod  dici  nef'as  est .  nos  scinius  causa 
ejus  beneficii.  non  ipse  sui...  Sia  nobis  essct  bonœ 
voluntatis  initium  ,  nos  magis  poneremus  funda- 
nienluw,  uhi  wdificaret  Dominus,  quod  certenulla 
potest  mentis  sanitas  approbare.  Qua  proplcr  de- 
sinite  asserere  quœ  non  potestis  implere.  In  psal. 
L,  pag.  161. 


252 


HISTOIRE  GKNKRALH  DES  AUTEUllS  ECCLESIASTIQUES. 


ment  de  la  bonne  volonté  venait  de  nous, 
nous  jetterions  nous-mêmes  les  fondements 
de  notre  salut,  afin  que  le  Seigneur  élevât 
au-dessus  de  l'édifice,  ce  qu'on  ne  peut  pen- 
ser ni  approuver  sans  folie.  C'est  pourquoi, 
cessez  de  vouloii'  établir  une  chose  impossi- 
ble. » 

Il  cite  contre  eux  ces  paroles  de  saint 
Paul  :  Qui  a  donné  à  Dieu  quelque  chose  le 
premier  jxiur  en  prétendre  i-écom/jense?  Ht  cel- 
les de  saint  Jacques:  Toute  grâce  excellente  et 
tout  don  parfait,  vient  d'en  haut,  et  descend  du 
Père  des  lumières,  «  à  qui,  reprend  Cassiodore, 
personne  '  ne  peut  otlVir  rien  de  bon,  s'il  ne 
l'a  auparavant  reçu  de  sa  miséricorde,  par- 
ce que  riiomme  '  n'a  rien  de  bon  que  ce 
qu'il  a  reçu  du  Seigneur,  qui  est  le  colla- 
teur  de  tous  les  Itiens,  et  qu'il  ne  peut  ni 
accomplir  ' ,  ni  même  commencer  le  bien 
sans  le  secours  d^e  Jésus -Christ.  Malheur 
donc  '  à  ceux  qui  donnant  trop  au  libre  ar- 
bitre, pensent  qu'il  est  en  son  pouvoir  de 
mériter  quelques  dons  de  Dieu.  C'est  Dieu 
qui  nous  donne  de  vouloir  le  bien,  et  qui 
l'accomplit  en  nous,  afin  que  nous  soyons 
dignes  de  ses  récompenses.  Qu'avez  -  vous, 
dit  l'Apôtre,  que  vous  n'ayez  reçu?  Si  vous 
l'avez  reçu,  pourquoi  vous  en  glorifier  comme 
si  vous  ne  l'aviez  pas  reçu  ?  Que  Ihérésie  pé- 
lagienne  cesse  de  renouveler  ses  calomnies. 
Nous  ne  pouvons  avoir  rien  de  bon  en  nous- 
mêmes,  si  nous  ne  l'avons  eu  de  Dieu.  Dans 
toutes  sortes  de  bonnes  actions ^  la  grâce 
de  Dieu  nous  prévient ,  et    afin   que  nous 


ayons  la  volonté  de  le  prier,  il  se  répand 
dans  nous  pour  former  cette  volonté.  Sa  vo- 
cation "  précède  tout  mérite;  elle  ne  nous 
trouve  pas  dignes,  mais  elle  nous  rend  tels  ; 
c'est  pour  cela  qu'elle  est  gratuite,  autre- 
ment elle  serait  juste.  C'est  la  bonne  volon- 
té de  Dieu  qui  nous  appelle  et  qui  nous  at- 
tire. Nous  ne  pouvons  rien  penser  ni  faire 
d'utile,  si  nous  ne  le  recevons  de  l'auteur 
de  la  bonté.  Il  n'y  a  point  de  dilférence  de 
méiite  dans  la  vocation;  elle  est  gratuite 
pour  tout  le  monde  "".  H  en  est  de  même* 
de  l'élection ,  personne  ne  peut  se  flatter 
d'avoir  été  choisi  pom-  ses  mérites,  pas  mê- 
me les  apôtres,  à  qui  Jésus-Christ  dit  dans 
l'Évangile  :  Ce  n'est  pas  vous  qui  m'avez  choi- 
si ;  c'est  moi  qui  vous  ai  choisis,  n 

Cassiodore  prenant  i\  la  lettre  ces  paroles 
du  psaume  lV  :  Vous  les  sauverez  pour  rien, 
dit  qu'il  est  constant  '  que  les  pécheurs  sont 
sauvés  pour  rien ,  parce  qu'il  ne  l'est  pas 
moins  que  la  conversion  leur  est  donnée  de 
Dieu  par  une  bonté  toute  gratuite.  «  Qu'a- 
vait, dit-il,  mérité  le  larron,  pour  entrer  si 
vite  dans  le  paradis?  Qu'avait  fait  le  publi- 
cain,  qui  sortit  du  temj)le  absous  tout  à  coup 
de  ses  péchés.»  Mais  il  n'exclut  pas  pour 
cela  les  travaux  de  la  pénitence,  comme  on 
l'a  vu  plus  haut.  Ce  qu'il  veut  dire,  c'est  que 
celui  qui  récompense  le  pénitent,  est  le  mê- 
me qui  lui  donne  la  volonté  de  se  conver- 
tir. 

13.  Il  enseigne  qu'après  la  mort  '",  l'Ame 
ne  sera  plus  sujette  aux  sensations,  qu'elle 


dlé  àe*  Mini. 
a,aot  I*  jnii( 
du    jucentnt. 


>  Nullus  Mi  quidquam  offert  primus  quod  bo- 
num  est,  nisi  hoc  cœlesti  munere  concedalur.  In 
ps.nl.  XX,  pag.  64. 

»  Xon  eniin  quidquam  ex  se  prnbi  humanilas 
hahet ,  nisi  quod  a  Domino  bonorum  omnium 
susceperit  largitore.  In  psal.  x,  pag.  40. 

'  Rêvera  soIujs  est  Chrislus ,  sine  quo  bonum 
aliquod  vcl  incipere ,  vel  implerc  imbeciltitas  hu- 
mana  non  prrrralet.  lu  psal.  xin   pag.  il. 

'  Vœ  iUis  qui  liane  rcgulam  déclinantes  in  ho- 
minis  putant  arbitrin  consistere ,  ut  mereatur  ad 
aliqua  Dei  munera  pcrvenire.  Ipse  enim  donat, 
ut  bona  velimus:ipse  perficit,  ni  ad  ejus  prœmia 
pervenire  possimus  :  quod  Aposlolus  lucidissime 
declaravit  .'Quid  antcm  liabfis  quod  non  acccpisti  ? 
Si  aiiteiu  arctipisti,  qiiiil  gloriaris  quasi  non  accc- 
peri.-;.  Desinal  rrgo  pelagiann  hicresis  redivivas 
suscilare  ailvmniai.  I^'iliil  boni  er  nobismelipsis 
habere  possumus  ,  nisi  hoc  a  Domino  sumpscri- 
mus.  In  psal.  LVin,  pag.  18j. 

'  In  omni  hnno  Domini  gralia  prœvenimur ;  et 
ut  vclimus  rogare,  ipse  se  dignulur  infundere.  In 
psal.  cxvui,  pag.  379. 


'  y'ocalio  Domini  omnc  merilum  praxcdit,  nec 
invenit  dignum  sed  facit  ;  iJto  enim  gratuita,  alio- 
quin  jusla  dicerelur.  Hiec  est  ergo  bona  volun- 
tas  ,  quœ  nos  vocal  et  allruhil;  nec  quidquam 
proficuum  valemu.i  cogilare  vel  facere,  nist  hoc 
acciiiinmtis  a  bnnitatis  autorc ,  sicul  Aposlolus 
dicil  :  Non  cnini  possnnius  cogitarn  aliquid  a  nobis 
quasi  ex  nubis  ,  s£d  suffirientia  noslra  ex  Ueo  est. 
In  psal.  V,  pag.  23. 

"  yuoriiani  vuliiit  mc,id  est.quoniam  me  elegit, 
qtti  gratis  vocal  universns.  In  ]>snl.  xvir,  pag.  5.'!. 

'  Sed  Vide  quid  ail  :  ICIfgisti.  ul  hanc  eleclionem 
nemo  suis  merilis  applicarel  :  sicul  ipse  in  Evan- 
gclio  di.xil  :  Non  vus  uiu  elegistis ,  8ed  ego  elrgi 
vos.  In  psal.  LXIU,  pag.  i!(9. 

"  ConsliU  ergopro  uiliilo  peccalores  salvos  fieri, 
quardo  crrtuiii  est  convcrsionem  gratuita  largi- 
lale  concedi.  In  psal.  lv,  pag.  m.  Quid  enim  me- 
ruit  latro  ul  sic  paradisum  relocUer  iutroiret  1 
(juiil  jniblicanus  qui  repcnle  dr  Icmplo  absolulus 
criril  ?  Ipse  drdil  confis.-:ionis  subilum  vottim, 
qui  donnvit  et  pnemium.  Ibid. 

"  Aam  eu  m  fuerimus  hac  luce  imperio  Creatorit 


CHAPITRE  XI\.  —  CASSloliOlli;,  ClIAXCKI.IKit, 


[Vl*  SIKCLE.] 

n'(^xci'C(î  qu'ù  cause  ilo  son  corps;  (jifalors 
clic  no  sera  môme  plus  ni  bien  ni  mai,  (|uc 
seuli'ini'nl    elle   i''i)rouveia    luu'  conlinnelle 
douleur  de  ses  mauvaises  actions,  ou  ([u'elle 
ressentira  de  la  joie  du  bien  qu'elle  aura  lait  ; 
qu'elle  demeurera  dans  cet    état  jusqu'au 
jour  du  jugement,  auqnel  nous  recevrons  la 
récompense  de  nos  univres  bonnes  ou  mau- 
vaises, quand  par  la  voix  du  Seigneur,  nous 
aurons  été  ou  n'qjrouvés  ou  admis  au  royau- 
me éternel.  Mais  il  semble  dire  eu  un  autre 
endroit,  ipie  la  gloire  des  âmes  des  saints 
est  suspendue  jusqu'au  jour   du  jugement 
dernier.  C'est  en  expliquant  ces  paroles  du 
psaume  XXIV"  :  Son  ûme  jouira  des  biens  dnns 
son  séjour:  «  La  félicité,  dit-il,  qui  est  promi- 
se aux  saillis  après  la  résurrect'on,  ne  sera 
pas  accordée'  aux  âmes  des  justes,  sitôt 
qu'elles  seront  dépouillées  du  corps,  ce  qui 
n'empêche  point  le  Propliôtc   de  dire  que 
l'âme  du  juste  demeurera  dans  la  jouissan- 
ce des  biens,  parce  que  les  âmes  des  saints 
se  repaissent  du  plaisir  de  l'espérance  très- 
certaine  qu'elles  ont  de  la  récompense  â  ve- 
nir, quoique  cette  récompense  soit  ditlerée.» 
11  dit  ailleurs  %  que  la  gloritication  de  Jésus- 
Christ,  môme  considéré  comme  chef  de  tous 
les  fidèles,  a  été  dilférée  pendant  celte  vie, 
et  que  la  gloire  de  tous  les  fidèles  est  en- 
core aujourd'hui  suspendue  jusqu'à  ce  qu'ils 
arrivent  i^i  la  récompense  de  la  résurrection. 
Mais  il  est  aisé  de  voir  que  Cassiodnre  ne 
parle  en  ces  endroits  que  de  la  félicité  par- 
faite, qui  est,  comme  il  le  dit  lui-même,  y;/'o- 
mise  aux  saints  après  la  résurrection.  «  Cette 
félicité,  poursuil-il,  empoi'te  nécessairement 
celle  du  corps  comme  celle  de  l'àme.  Les 
saints  n'en  jouissent  aujourd'hui  que  selon 
l'Ame  et  non  selon  le  corps,  qui  attend  sa 
récompense,  et  qui  ne  lui  sera  donnée  qu'a- 
près la  résiurection.  Ainsi,  leur  félicité  n'est 
pas  encore  consommée;  elle  n'est  pas  par- 
faite. Il  en  a  été  de  même  de  Jésus-Chrisl 
pendant  sa  vie  :  sa  glorification  n'a  été  ditïé- 
rce  que  par  rapport  à  son  coi-ps.»  Au  reste, 

exuli,  simul  corporis  appetitiones  et  imbecillitates 
ainittimus....  MMl  boni  malique  facienius ,  sed 
vsque  ad  tempns  judicii.aut  de  actuuin  pruritate 
mwremur,  aut  de  operalionis  noslrœ  probitate 
lœtemitr.  Cas?ioJ.  De  Anima,  cap.  xii,  pag.  Cl)3. 

'  Auiiiia  ('jus  in  bonis  Jemorabitur ,  quia  juslis 
honiinibus  exiitis  corporenonstatiin  perfecla  bea- 
titudo  datur.  quœ  sanctis  in  resiirreclione  promit- 
titur;  anitnam  tamen  ejus  dicit  [Propliela]  in  bonis 
passe  remorari,  quoniam  elsi  adlmc  prœniitt  illa 
sunpensa  sunt ,  quœ  ntc  oculus  hominis  vidit.... 


253 


Cassioilmt!  élait  si  persuadé  ([ne  les  saints 
jouissent  dès  à  présent  de  la  ndicité  dans  le 
ciel,  que  dans  son  livre  de  l' Inslitulion ,  il 
invoque'  Denys  le  Petit,  ne  doulant  point 
(pi'il  ne  l'iil  dans  la  gloire  ,  auliement  il 
n'auiait  [)innl  eu  recours  il  son  interces- 
sion. 


ARTICLE  IV. 

jugement  des  écuits  de  cassiodoue 
qu'on  en  a  faites. 


EDITIONS 


1.  'J'(mt  esl  intéressant  dans  les  ouvrages    ^ 
de  Cassiodore.  Ce  sont  on  des  maximes  de   ' 
la  plus  sage  politique,  ou  des  instructions  de 
morale  la  plus  pure,  ou  des  leçons  pour  s'a- 
vancer dans  la  connaissance  des  arts  libé- 
raux ,  ou  des  règles  pour  s'appliquer  avec 
fruit  à  l'étude  des  divines  Écritures,  ou  un 
narré  fidèle  d'un  grand  nombre  d'événements 
coiisidi'raliles  de  son  temps.  Il  fut  tout  â  la 
fois  grand  politique,  habile  philosophe,  sa- 
vant interprète  ,  excellent  orateur,  historien 
exact  et  bon  critique.  Ajoutons  qu'il  fut  aussi 
bon  théologien ,  puisqu'il  s'est  expliqué  sur 
la  plupart  de  nos  mystères,  d'une  manière 
qui  ne  laisse  rien  à  désirer.  Son  style  se  res- 
sent toutefois  de  la  barbarie  de  son  siècle  ;  ses 
lettres  surtout  sont  chargées  de  cadences, 
de  rimes,  de  pointes,  et  de  termes  qu'on  ne 
connaissait  point  dans  la  belle  latinité.  Mais 
la  fécondité  merveilleuse  de  pensées  qu'on 
y  trouve  ,  leur  noblesse,  leur  élévation,  le 
tour  fin  et  délicat  qu'il  leur  donne,  ctiaccnt 
en  quelque  sorte  ces  défauts.  Ses  Commen- 
taires en  ont  moins ,  parce  que  le  style  en 
est  plus  naturel  et  plus  coulant  :  son  traité  de 
l'Ame  est  écrit  avec  beaucoup  de  netteté  et 
d'érudition,  de  même  que  celui  de  l'Instifu- 
tion,  qui  sera  toujours  un  monument  précieux 
pour  tous  ceux  qui  désirent  s'instruire  dans 
la   science  de  l'Écriture  sainte,  ou  qui  ont 
intérêt  de  la  procurer  aux  autres. 

2.  Les  plus  anciennes  éditions  des  lettres 
et  des  autres  ouvrages  de  Cassiodore  sont 

modo  (amen  futiiri  prœmii  certissima  spei  delec- 
lalioiie  iiascuiilur.  lu  p<al.  x.'îiv,  pag.  78. 

s  Ui'pulisli  nns,  sir/niftcdt  distulisti  :  quia  et  ip- 
suni  ad  ghrificalwnem  suam  constat  esse  dilatum, 
cum  in  hac  rila  moraretur,  et  omnium  fidelium 
hodicque  gloria  suspendilur  donec  ad  resurectio- 
nis  prainia  veniatur.  In  psal.  cvii,  pag.  552. 

'  Intcneniat  pro  nobis  qui  nobiscum  ororc 
consueverat,ut  cujus  oralione  hic  sumus  suffulti, 
ejtis  nuHC  possimus  merilis  adjuvari.  Cassiod.  In 
Instil.,  cap.  xxni. 


('*    tcri'^    do 


ses  oiivr.'.^e 


254 


HISTOIRE  GÉNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


celles  de  Paris  eu  1589  et  1509  :  on  les  réim- 
prima à  Genève  en  1009  et  1050.  Les  éditions 
de  Paris  sont  de  Guillaume  Fournier,  pro- 
fesseui'  en  droit  à  Orléans,  qui  les  a  enrichies 
de  notes.  Brosséus  a  fait  celles  qui  se  trou- 
vent dans  les  éditions  de  Genève.  Doni  Jean 
Caret  en  fit  une  nouvelle  édition  qui  fui  im- 
primée à  Rouen  en  1679  ,  aux  frais  de  Bil- 
laine  et  de  Dezalliers,  libraires  de  Paris  ;  elle 
a  été  remise  sous  i)resse  à  Venise  en  1729  ; 
l'éditeur  a  mis  eu  lèle  la  Vie  de  Cassiodore, 
tirée  de  ses  propres  écrits,  et  une  dissertation 
où  il  entreprend  de  faire  voir  qu'il  a  été  reli- 
gieux de  l'Ordre  de  saint  Benoit.  Cette  dis- 
sertation est  suivie  de  divers  t('moit:na£;es 
que  plusieurs  auteurs  célèbres  ont  rendus  au 
savoir,  et  à  la  vertu  de  Cassiodore.  Les  douze 
livres  de  l'Histoire  tripartite  parurent  à  la 
suite  de  l'Histoire  d'Eusèbe,  traduite  et  con- 
tinuée par  RulUn,  chez  Frani^ois  Réynault, 
sausdate.  Il  fuient  mis  eu  français  par  Louis 
Cyanéus,  et  imprimés  en  cette  langue  en 
1508,  chez  Gille  Gourhin.  Panvinius  Onu- 
pbrius  dans  son  Appendice  sur  les  Fastes  con- 
sulaires à  Venise  eu  1558,  a  donné  la  Chro- 
nique de  Cassiodore  ;  ses  Commentaires  sur 
les  Psainiies  furent  aussi  imprimés  si'paré- 
ment  à  Paris  en  15^9;  maison  ne  leuia  pas 
donné  place  avec  les  autres  écrits  de  ce  Père 
dans  le  tome  XI  de  la  Dibliotlièque  de  Lyon. 
Il  y  a  une  édition  du  traité  de  /"^?He  avec  les 
douze  livres  des  lettres  à  Ausbourgen  1533, 


par  les  soins  de  Mariangélus  Accursius.  On 
peut  consulter  sur  fous  les  ouvrages  de  Cas- 
siodore ,  la  Préface  de  dom  Gare! ,  mais  sur- 
tout la  Vie  que  dom  Denys  de  Sainte-Marthe 
en  a  donnée  en  1094, A  Paris,  chez  Coignard. 
LcsCommentaires  sur  les  épîtres  des  apôtres, 
surleursactes  et  sur  l'Apocalypse,  ijui  avaient 
été  perdus  pendaut  plusieurs  siècles,    ont 
été  retrouvés  par  M.  le  mai  quis  Maffeï,  dans 
la  bibliothèque  publique  de  Vérone,  et  im- 
primés en  cette  ville  en  1732.  [  Les  tomes 
LXIX  et  LXX  de  la  J'utrologie  latine  contien- 
nent toutes  les  oiuvres  de  Cassiodore  publiés 
jusqu'à  ce  jour.  On  y  retrouve  les  commen- 
taires publiés  par  Malleï,  un  fragment  des 
auteurs  qui  existaient  ;"•.  l'époque  de  Cassio- 
dore d'après  Maï,  tom.  V  Spicileg.  roman. 
pag.  157-100.  C'est  un  supplément  au  chapi- 
tre XVI  du  livre  de  l'Institution  de  cet  auteur 
et  qui  prouve  que  le  chapitre  imprimé  est 
rempli  de  fautes.  C'est  un  service  rendu  que 
d'avoir  ainsi  rétabli  le  nom  des  auteurs  et  le 
titre  des  ouvrages  qui  existaient  au  temps 
de  Cassiodore.  Ang.  Mai  a  encore  publié  deux 
autres  fragments  qu'on  ne  trouve  point  re- 
produits dans  la  Patroloqie.  Le  premier  est 
un  supplément  au  livre  de  A  rt.  et  disripl.  lib. 
litt.;  il  se  trouve  au  tom.  III  des  Clnssici  nue- 
tores,  pag.  358,  3G4.  Le  deuxième  fragment 
est  tiré  d'un  discours  qui  est  attribué  à  Cas- 
siodore, Scriptor.  veter.  collectio,  pag.  43.] 


CHAPITRE    XX. 
Justinicn ,  empereur. 

lÉcrivaiu  grec,  luort  en  uCG.) 


de  jii&tiuiuti. 


1.  Jusiiuien,  fils  de  Sabbatius  et  de  liigli- 
niza  ou  Vigilantia,  naquit  dans  la  Dardanie 
vers  l'ail  'i83.  L'empereur  Jusliu,  souuuilo,  le 
fit  élever  avec  beaucoup  de  soin,  puis  il  l'a- 
dopta piuir  son  lils.  Eu  519,  il  le  nomma 
maître  de  la  milice,  et  l'envoya  en  Orient 
avec  une  aimée  (outre  les  Perses,  sur  les- 
quels il  cul  de  l'avantage.  Ayant  été  fait  con- 
sul en  521 ,  il  lit  représenter  à  grands  frais 
des  jeux  et  des  spectacles  pour  illustrer  son 
consulat.  Il  fui  ensuite  ('levé  à  la  dignité  de 
palrice.  En  527,  l'empereur  Justin  se  sentant 
près  de  sa  mort,  le  déclara  Auguste, et  le  lit 


couronner  avec  sa  femme  Théodora,  le  pre- 
mier jour  d'avril.  Justin  ("tant  luorl  quatre 
mois  ajirès,  Justinieii  se  trouva  chargé  seul 
du  gouvernement  de  l'Empire  ;  il  avait  qua- 
rante-cinq ans  lorsqu'il  y  parvint,  cl  en  r(''gna 
trenlc-iKuif.  Pendant  tout  s(ui  règne,  il  fit  pa- 
raître un  grand  zèle  pour  la  religion;  maisca 
zèle  ne  fut  pas  toujours  accompagné  de  pru- 
dence. Justiiiien  causa  beaucoup  de  maux  à 
l'Église  ])ar  son  impiii'tiide  et  ])ar  sa  curiosité 
sur  les  matières  de  la  religion.  On  le  met  or- 
dinairement au  nombre  des  écrivains  ecclé- 
siastiques ,   parce  (pi'il  a  laissé  quantité  de 


[Vl-  S1KC1.E. 


CHAPITRE  XX.  —  JLSTI.NIEN,  KMPKriEUll. 


255 


l^titj  lie 
iD-lliiicn  : 
Corp^dudroUi 


Proeop  Mb. 
Dt  Bll.  Pcr^. 
Mp.  ixiv, 
ttr,  el  Sui- 
its  in  Trtl>o> 


N0Te;ies  d« 
lu«tiotpQ. 


Ce  qu'elles 
MotlenDentda 

reiurqadljlc. 


inouiiiuciils  qui  concernent  la  loi  et  la  disci- 
pline de  l'Eglise,  ([noii|u'ils  soient  moins  son 
ouvratîc  f|iie  celni  des  plus  famenx  juris- 
consultes ,  et  des  principaux  olUciers  de  son 
Empire  ,  ou  des  évèques  qu'il  employa  à 
ce  travail. 

2.  Dès  le  commencement  de  son  rèpne,  il 
forma  le  desseiude  réformer  les  lois  romaines. 
A  cet  ellet,  il  fit  composer  un  code  des  cons- 
titutions choisies  des  empereurs  précédents. 
L'ordre  eu  fut  donné  en  528 ,  et  exécuté  en 
529.  Il  fit  ensuite  un  corps  de  tous  les  ou- 
vrages les  plus  utiles  des  anciens  juriscon- 
sultes, dont  toutefois  il  se  contenta  de  tirer 
des  extraits,  qu'il  fit  rant^er  sous  cert-ùns  ti- 
tres. Il  donna  A  ce  recueil  le  nom  de  Di- 
gestes ou  de  l'nndoctcs.  (.In  fut  trois  ani  à  le 
composer,  c'est-;\-dire  ,  depuis  le  13  de  dé- 
cembre de  l'année  530,  auquel  l'ordre  eu  fut 
donné,  jusqu'au  seizième  du  même  mois  de 
l'an  533  ,  qu'il  le  confirma  et  le  publia.  Ce  fut 
pour  servir  d'introduction  aux  Digestes  ({w'W 
tu  composer  les  quatre  livres  des  Institutes. 
Ayant  ensuite  fait  corriger  le  Code  des  lois 
choisies  des  empereurs,  publié  en  529,  il  en 
donna  en  334  une  édition  plus  parfaite  ,  qui 
est  celle  que  nous  avons  aujourd'hui.  Le  plus 
célèbre  des  jurisconsultes  qu'il  employa  à 
ces  ouvrages,  était  le  questeur  Tribonien, 
homme  très-savant,  mais  si  attaché  à  l'argent, 
que  les  historiens  du  temps  disent  qu'il  ven- 
dait la  justice ,  et  qu'il  faisait  ou  supprimait 
tous  les  jours  de  nouvelles  lois,  suivant  les 
intérêts  des  particuliers.  Justinien  le  consi- 
dérait autant  pour  son  savoir  que  parce  qu'il 
lellattait  disant  qu'il  ne  mourrait  point,  mais 
qu'il  serait  enlevé  au  ciel  en  corps  et  en  âme  : 
car  Tribonien  était  païen. 

3.  En  533  ,  Justinien  donna  plusieurs  lois 
pour  l'Eglise,  sous  le  titre  de  Novelles,  parce 
qu'elles  étaient  postérieures  à  la  publication 
de  son  Code.  Il  en  donna  d'autres  sous  le 
même  titre  pour  l'État,  tant  en  cette  année 
que  dans  lessuivantes  ;  nous  en  avons  en  tout 
cent  soixante-huit.  Le  moine  Mathieu,  dans  sa 
préface  sur  la  Collection  des  consfitutionsecclé- 
siastiques  grecques^  en  compte  cent  soixante- 
dix  de  Justinien  ,  ce  qui  fait  voir  qu'il  nous 
en  manque  deux  ,  encore  n'est-on  pas  sûr 
que  toutes  celles  que  nous  avons  sous  le  nom 
de  Justinien  soient  de  lui.  Voici  en  peu  de 
mots  ce  qu'elles  contiennent  d'intéressant 
par  rapport  à  la  discipline  de  l'Église. 

A.  Il  ne  devait  pas  y  avoir  dans  la  grande 
église  de  Constantinople ,  qu'on  appelait  de 


Sainte-Sophie,  au  deii'i  de  soixante  prêtres, 
de  cent  diacres,  de  quarante  diaconesses  , 
de  quatre-vingt-dix  sous-diacres,  de  cent  dix 
lecteurs,  de  vingt-cinq  chantres  et  de  cent  dix 
portiers.  Il  y  avait  plusieurs  clercs  qui,  mé- 
prisant les  églises  pour  lesquelles  ils  avaient 
été  ordonnés,  employaient  toute  la  protec- 
tion qu'ils  pouvaient  avoir  pour  passer  à  un 
clergé  plus  nombreux.  Cela  leur  est  défen- 
du, parce  qu'on  ne  pouvait  douter  que  leur 
démarche  n'eût  pour  motif  l'ambition  ou  l'in- 
térêt. Il  est  aussi  défendu  de  multiplier  le 
nombre  des  clercs  au  delrt  de  ce  qu'il  en 
faut  ordinairement  pour  le  service  de  \'E- 
glise.  Si  elle  a  du  superflu  après  avoir  fourni 
à  ses  besoins,  on  doit  l'employer  à  la  nour- 
riture des  pauvres,  ou  en  d'autres  œuvres  de 
piété.  Lorsque  quelqu'un  voulait  bâtir  un 
monastère,  il  ne  le  pouvait  cpi'auparavaut  il 
n'eût  fait  venir  l'évêque  du  lieu  pour  consa- 
crer l'endroit,  par  la  prière  et  en  y  planlaut 
le  signe  de  notre  salut ,  c'est-à-dire ,  une 
croix.  A  l'égard  de  ceux  qui  se  présentaient 
pour  être  moines,  avant  de  leur  donner  l'ha- 
bit monastique  ,  on  les  éprouvait  toujours 
dans  leur  habit  du  monde  ;  pendant  lequel 
temps  il  était  permis  à  ceux  qui  les  revendi- 
quaient comme  esclaves,  de  les  reprendre, 
pourvu  qu'ils  donnassent  des  preuves  du  do- 
•maine  qu'ils  avaient  sur  eux;  mais  les  trois 
ans  écoulés,  il  n'était  plus  permis  <à  personne 
de  les  tirer  du  monastè;  e.  Lesmoines  devaient 
demeurer  dans  une  même  maison  ,  man- 
ger ensemble,  et  coucher  en  un  même  lieu, 
mais  chacun  dans  un  lit  particulier,  afin  qu'ils 
se  fussent  mutuellement  témoins  de  la  régu- 
larité de  leur  conduite.  Il  était  toutefois  per- 
mis aux  anachorètes  d'une  vertu  éprouvée 
de  demeurer  seuls.  Quand  il  arrivait  qu'un 
moine  quittait  son  monastère  pour  mener 
une  vie  privée  ,  il  y  laissait  tous  les  biens 
qu'il  avait  apportés  en  entrant.  Un  homme 
ou  une  femme  qui  entraient  dans  un  monas- 
tère, pouvaient  disposer  de  leurs  biens  avant 
d'y  entrer  ;  mais  s'ils  y  entraient  sans  en 
avoir  disposé,  leurs  biens  appartenaient  au 
monastère ,  à  l'exception  de  la  quatrième 
partie  ,  qui  était  laissée  aux  enfants  ;  ou  de 
la  dot  de  la  femme  si  c'était  un  homme  ma- 
rié. Si  quelqu'un  quittait  son  monastère  pour 
passer  dans  la  milice  ou  à  un  autre  genre  de 
vie ,  il  ne  pouvait  reprendre  ce  qu'il  y  avait 
apporté,  ni  entrer  dans  d'autres  services  que 
celui  des  juges  de  provinces.  Un  moine  qui 
passait  d'un  monastère  à  un  autre  n'emportait 


fie.  IT.edit. 
Wr.  .^n  lO.'t 
apud  Vitrij. 


256 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTOURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

blii|nes.  Juslinien  renouvelle  la  défense  qu'il 


Nowl. 


rien  avec  lui  ;  et  on  ne  trouvait  pas  bon  que 
les  abbés  reçussent  les  moines  d'un  autre 
monaslère,  pour  ne  point  autoriser  une  vie 
vagabonde  et  inconstante.  Lorsqu'un  moine 
avait  mérilé  d'être  admis  au  clergé,  il  lui 
était  défendu  de  se  marier;  s'il  le  faisait,  on 
le  chassait  de  son  église  comme  ayant  désho- 
noré sa  première  profession.  C'était  à  l'évê- 
que  du  lieu  à  choisir  l'abbé  ou  l'abbesse 
d'un  monaslère  ,  et  dans  ce  choix  il  ne  de- 
vait point  avoir  égard  au  rang  ou  à  l'anti- 
quité ;  mais  seulement  au  mérite.  Les  ordi- 
nations des  évoques  et  des  autres  clercs 
étaient  réglées  par  les  canons.  Outre  les 
bonnes  mœui'S  et  la  bonne  réputation  ,  Jus 


avait  déj;i  faite  d'ordonner  dos  clercs  au  delA 
du  nombre  établi  par  la  fondation  dans  cha- 
que Église.  La  raison  qu'il  en  donne  est  que 
le  nombre  des  clercs  s'était  tellement  aug- 
menté que,  les  revenus  de  l'Église  ne  pou- 
vant sultire  à  leur  pension,  plusieurs  avaient 
été  obligés  d'hypothéquer  leurs  fonds  ou  de 
les  aliéner,  ce  qui  les  avait  réduits  à  l'indi- 
gence. Il  (it  une  autre  loi  portant  défense 
d'aliéner  les  biens  des  églises,  étendant  celte 
défense  aux  monastères  et  aux  hôpitaux.  Il 
déclara  qu'il  sciait  permis  aux  princes  et 
et  non  à  d'autres  d'échanger  contre  Ti^glise 
un  immeuble  d'égale  ou  de  plus  grande 
tinien  demande  que  celui  que  l'on  veut  or-     valeur;  que  l'emphytéose  des  biens  ecclé- 


donncr  n'ait  point  d'enfants,  et  qu'il  n'ait 
point  donné  d'argent  pour  acquérir  l'épis- 
copat  ;  qu'il  ail  au  moins  passé  six  mois  dans 
le  clergé  ou  dans  un  monastère,  qu'il  soit 
instruit  des   dogmes   de  l'Eglise  et  des  ca- 


s'il  veut  y  conformer  sa  vie.  La  peine  de 
celui  qui  était  parvenu  à  l'épiscopat  par 
simonie,  est  la  peiie  de  la  dignité  même 
que  l'on  avait  voulu  acquérir,  et  de  celles 
que  l'on  possédait  déjà.  Ceux  qui  avaient 
reçu  de  l'argent  étaient  obligés  de  le  res- 
tituer au  profit  de  ri:t;lise.  Que  si  l'on  for- 
mail  opposition  à  l'ordination  d'un  évoque,  , 
on  ne  j)Ouvait  pas  passer  outre  que  l'on  n'eût 
examiné  les  motifs  de  l'opposition.  Un  évo- 
que ne  peut  être  absent  de  son  diocèse  au 
delà  d'un  au.  Si  l'aliairc  intéresse  son  église, 
et  demande  ime  plus  longue  absence,  l'évo- 
que la  fera  poursui%Te  par  quelqu'un  de  son 
clergé.  Il  ne  peut  non  pins  venir  à  la  cour 
sans  le  congé  de  son  métropolitain  ni  avoir 
audience  de  l'Empereur  qu'il  n'ait  aupara- 
vant communiqué  son  affaire  au  patriarche 
de  Constantinople  nu  aux  apocrisiaires  de  la 
province.  Pour  ce  qui  est  des  prêtres  et  des 
autres  clercs,  on  ne  doit  point  en  ordonner 
qui  ne  soient  savants  et  de  bonnes  mceurs, 
qui  n'aient  été  mariés  qu'une  fois,  qui 
n'aient  point  do  coniubiues  ni  de  femmes 
veuves  pour  épouses.  Les  diacnnc^ses,  soit 
vierges  ou  veuves,  auront  passé  cinquante 
ans;  s'il  ariiveque  parquelque  nécessité  l'on 
en  ordonne  (le  plus  jeunes,  elles  entreront 
danstjnolipie  ninnaslèi-e.  Les  autres  demeu- 
reront seules,  ou  avec  leur  père,  leur  fils  ou 
leùis  frètes.  Les  clercs  qui  quitteront  leur  étal 
et  l'habit  de  la  cléricalure,  seront  réduits  à 
sei-vir  lesmagislrals  dans  leurs  fonctions  pu- 


I>e.  *L 


siastiques  ne  pourrait  être  perpétuelle  et 
qu'elle  serait  liornée  au  preneur,  à  ses  en- 
fants et  petits  enfants  ;  qu'on  pourrait  rece- 
voir en  usufruit  un  bien  ecclésiastique,  h  la 
charge  de  donnera  l'Eglise  un  immeuble  de 


nous,  et  qu'à  son  ordination  on  l'interroge      pareil  revenu,  et   que  l'un  et  l'autre  demeu- 


reraient à  l'Église  après  la  mort  de  l'usufrui- 
tier; qu'on  pourrait  hypothc-quer  les  biens 
de  l'Église  généralement,  mais  non  par  hy- 
pothèque spéciale;  qu'il  ne  serait  permis 
d'aliéner  les  vases  sacrés  que  pour  la  ré- 
demption des  captifs,  et  que  les  monastères 
où  il  y  avait  des  oratoires  et  des  autels  ne 
pourraient  être  vendus,  échangés  ou  donnés 
pour  être  tournés  à  des  usages  profanes, 
comme  il  s'était  pratiqué  en  Egypte,  nommé- 
ment à  Alexandrie  et  dans  quelques  autres 
endroits  de  l'Empire. 

5.  Justinicn  chargea  les  évêqucs  de  veil- 
ler à  l'exécution  d'une  loi  qui  regardait  la 
levée  des  Irihnls,  et  de  déclarer  les  magis- 
trats qui  feraient  leur  devoir,  et  ceux  qui  ne 
le  foraient  pas;  voulant  qu'après  que  la  loi 
qu'il  avait  donnée  à  cet  etfet  auiait  été  pu- 
bliée, elle  fût  gardée  dans  l'Église  avec  les 
vases  sacrés,  et  gravée  sur  des  pierres  pour 
être  allichée  aux  portiques  des  églises,  afin 
que  tout  le  monde  en  eût  connaissance.  Le 
serment  que  tous  les  gouverneurs  des  pro- 
vinces devaient  prêter  en  entrant  dans  leur 
chaigo  portail  oulr'antres,  qu'ils  jniaioni  par 
le  Dieu  toul-puissaint  et  son  Fils  unique 
Notre-Seigneur  Jésus-Christ,  par  le  Saint- 
Esprit  et  par  la  glorieuse  Marie,  mère  de 
Dieu  toujcuns  vierge,  par  les  (pialre  lOvan- 
giles  qu'ils  tenaient  en  main,  el  par  les 
saints  archanges  Michel  el  Cîabriel,  qu'ils 
parderaioni  lidélilé  à  l'empereur  Juslinien 
et  à  sa  femme  Théodora  ;  déclarant  en  outre 


No.fl. 
»>|.  bi. 


[VI'  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  XX.  —  .inSTIiNMEN,  EMPHREUR. 


qn'ilH  communiquaient  avec  la  Irès-saintc 
Kfiliso  lin  Dieu  catli(ilii|ue  et  a()ostoli([nc. 
No«i.ix,  Par  une  autre  lui,  co  prince  accorda  à  l'K- 
y:liso  romaine,  le  privilège  (ruiiiî  prescrip- 
tion de  cent  ans,  au  lieu  de  trente,  ([ue  les 
lois  précédentes  lui  avaient  donnée.  Celte 
prérogative  s'étendait  également  à  toutes 
les  églises  d'Occident  ;  et  Justinien  l'avait 
aussi  accordée  â  celles  d'Orient  ;  mais  la 
loi  qu'il  donna  ;'i  ce  sujet  fut  abrogée  depuis, 
et  il  réduisit  la  prescription  des  iiiens  de 
l'Église  à  quarante  ans.  il  avait  fait  bâtir 
dans  la  Dardanie  où  il  était  né,  une  grande 

ïi.p.g. -7.  ville  qu'il  nomma  la  première  Justinianà', 
pour  la  distinguer  des  autres  villes  auxquel- 
les il  avait  donné  son  nom.  Il  y  établit  un 
évêché  avec  la  qualité  de  métropole,  sou- 
mettant à  l'archevêque  de  ce  lieu,  les  deux 
Dacies,  la  seconde  Mysie,  la  Dardanie,  la 
province  de  Prévale,  la  seconde  Macédoine 

;vi,pig.  9f,  (,[  ja  seconde  Pannonie.  Soit  que  les  lois 
qu'il  avait  déjà  faites  pour  retrancher  le 
grand  nombre  de  clercs  inutiles,  et  qui  deve- 
naient à  charge  aux  églises  et  au  peuple, 
fussent  mal  observées,  ou  qu'il  crût  néces- 
saire de  prendre  d'autres  mesures  pour  dé- 
charger les  églises,  il  en  donna  une  nouvelle 
par  laquelle  il  défendit  d'ordonner  des  clercs 
pour  la  grande  Église  en  la  place  de  ceux 
qui  mourraient,  voulant  qu'au  cas  que  le 
nombre  s'en  trouvât  au-dessous  de  la  fon- 
dation ou  du  besoin,  on  en  prît  de  cetix  qui 
étaient  surnuméraires  dans  les  autres  égli- 

^^  xiii,p.E.  ggg_  j^jaus  la  Novi-lle  où  il  traite  des  causes 
de  la  dissolution  des  mariages,  il  en  distin- 
gue de  deux  sortes.  Il  appelle  les  premières 
ex  bona  gratia,  c'est-à-dire,  de  bonne  volonté, 
lorsqu'il  est  à  présumer  que  les  deux  parties 
consentent  à  la  dissolution  de  leur  mariage. 
Il  marque  plusieurs  cas  où  cela  pouvait  ar- 
river. Les  autres  causes  sont  de  rigueur, 
parce  que  la  dissolution  s'en  fait  contre  le 
gré,  ou  pour  le  crime  d'une  des  deux  par- 
ties, comme  lorsque  l'une  ou  l'autre  sont 
convaincues  ou  d'adultère,  ou  d'homicide, 
ou  de  poison,  ou  de  quelqu'autre  crime  de 
cette  nature.  Un  nommé  Théodore,  ayant 
été  envoyé  à  Constantinople  par  le  concile 
de  Carthage  de  l'an  535,  pom-  demander  à 
l'Empereur  la  restitution  des  biens  et  des 
droits  des  églises  d'Afrique  usurpés  par  les 
ariens  pendant  la  persécution  des  Vandales, 
ce  prince  ordonna  que  toutes  les  terres 
usurpées  sur  les  églises  d'Afrique  leur  se- 
raient restituées,  à  condition  de  payer  les 

XI. 


xixvir 

fOI. 


2.")7 

tributs.  Il  défendit  en  môme  temps  aux  lië- 
r('li<pies  de  baptiser,  et  d'avoir  ni  maisons 
ni  lieux  de  prières,  conservant  à  l'Églisf;  de 
Cartilage  tons  les  droits  et  immunités  dont 
«;lle  jouissait  aiiticfois. 

(i.  Il  permit  à  l'Église  de  la  Résurrection 
de  la  ville  de  Jérusalem,  de  vendre  les  mai- 
sons qu'elle  avait  dans  la  ville,  pour  pouvoir 
subvenir  aux  grandon  iliqK'uses  (pi'elie  fai- 
sait pour  exercer  rhos|)italit('^  envers  les  pè- 
lerins qui  y  allaient  de  toutes  les  parties  du 
monde.  Le  concile  de  Constantinople,  sous 
Memias,  en  536,  ayant  dit  anathème  à  An- 
thime,  à  Sévère,  à  Pierre  et  à  Zoara,  Justi- 
nien confu-ma  ce  jugement  par  une  consti- 
tution, où   il   leur   défendait   d'entrer  dans 
Constantinople,  ni  dans  aucune  ville  consi- 
dérable. 11  ordonnait  de  plus  que  les  écrits 
de  Sévère  seraient  brûlés,  avec  défense  de 
les  transcrire,  sous  peine  d'avoir  le  poing 
coupé.  La  même  loi  portait  défense  à  tous 
hérétiques,  principalement   aux   sectateurs 
de  Nestorius,  d'Eutychès  et  de  Sévère,  de 
troubler  la  paix  de  l'Église  par  des  assem- 
blées illicites,  et  l'administration  illégitime 
des  sacrements.    Ce  prince    trouvant    qu'il 
était  assez  dur  aux  enfants  de  se  voir  enle- 
ver leur  père  et  mère  par  la  mort,  sans  qu'il 
leur  en  coûtât  encore  de  l'argent  pour  les 
faire  enterrer,  pourvut  aux  frais  des  funé- 
railles ,    en   mettant    certaines    impositions 
sur  les  boutiques  de  la  ville  de  Constantino- 
ple. 11  destina  onze  cents  de  ces  boutiques  à 
fournir  ces  frais,  mais  il  les  exempta  pour 
cette  raison  de  toutes  les  autres  charges. Cha- 
que lit,  c'est-à-dire  chaque  corps,  lorsqu'on 
le  portait  en  terre,  devait  être  accompagné 
de  huit  religieux  qui  précédaient  le  convoi, 
en  chantant  des  psaumes,  et  de  trois  aco- 
lytes. Des  onze  cents  boutiques,  il  y  en  avait 
huit  cents  qui  fom-nissaient  les  fossoyeurs 
nommés  doyens  on  lecticaù'es  ;   ou  les  tirait 
de  tous  les  corps  de  métiers  à  qui  ces  bou- 
tiques appartenaient.  Les  trois  cents  autres 
boutiques  donnaient  seulement  de  l'argent 
pour  les  gages    ou  les  honoraires  des  re- 
ligieux et  des  acolytes  qui  faisaient  les  en- 
terrements.  Ainsi   il  n'en   coûtait  rien  ans 
parents,  si  ce  n'est  qu'ils  voulussent  d'eux- 
mêmes  ajouter  quelques  dépenses  extraor- 
dinaires pour  faire  les  funérailles  avec  plus 
de   pompe.   Il  régla  aussi   la   manière  de 
l'aliénation  des  biens  de  l'Église  et  du  paie- 
ment des  dettes,  et  permit  les  échanges  de 
biens  et  les  baux  emphytéotiques  entre  les 

n 


N..»f|.     XL, 

1  If  -.'1 1. 


221,     «c     LU-, 
pag. 2G0. 


2o8 


HISTÛIIIE  GÉNÉRALl::  DES  AUTEUnS  ECa.ÉSIASTIQUES. 


LU,    |«S, 


enlises,  pounu  que  tout  cela  se  fit  ]iar  un 
déciel  et  avec  connaissance  des  juges.  Il 
défendit  do  lien  exiger  des  nouveaux  clercs 
pour  leur  entrée  dans  le  clerfré  de  quelque 
église  que  ce  fiil,  periiK^llant  toutefois  de 
recevoir  ce  qu'ils  avaient  coutume  de  don- 
ner, lorsqu'ils  étaient  admis  au  clergé  de 
la  grande  Église.  Il  ordonna  que  lorsque  les 
clercs  quitteraient  réglise  qu'ils  desservaient, 
ils  seraient  dès  ce  moment  privés  des  émo- 
luments ordinaires,  et  que  l'ou  en  ferait 
jouir  ceux  qui  seraient  mis  A  leur  place. 
Quant  aux  fondateurs  des  églises,  il  ne  veut 
pas  qu'ils  puissent  y  mettre  des  clercs  de 


[JE. 


UCTII,  pair* 
!8I. 


causes  qui  regardent  les  religieux  ou  les  re- 
ligieuses ;  déclare  celui  qui  est  fuit  évoque, 
soustrait  à  la  puissance  paternelle,  et  ordon- 
ne que  dans  les  matières  civiles  les  clercs 
seront  traduits  d'al)ord  devant  le  tribunal  de 
l'évèque,  et  ensuite  devant  les  juges  laï- 
ques ;  que  si  c'est  une  cause  criminelle,  les 
juges  civils  en  connaîtront,  mais  qu'ils 
ne  pourront  condamner  le  cou|)able  qu'il 
n'ait  auparavant  été  déposé  par  son  évoque, 
h  qui  il  appartiendra  seul  de  connaître  des 
fautes  des  clercs,  lorsqu'elles  ne  mériteront 
que  des  peines  ecclésiastiques.  Il  donne 
aussi  pouvoir  aux  évêques  d'obliger  les  ju- 


leur  autorité  :  seulement  il  leur  accorde  le      ges  de  rendre  justice  aux  parties,  et  déjuger 


droit  de  les  présenter  à  l'évèque.  Four  ré- 
primer les  entreprises  des  schismatiqnes,  il 
fit  défense  de  célébrer  le  saint  sacrifice  <i 
Constanlinople  dans  les  oratoires  des  maisons 
particulières,  sinon  par  des  clercs  députés 
par  lo  patriarclie  de  cette  ville,  sous  peine 
de  confiscation  de  la  maison  où  l'on  aurait 
offert  le  sacrifice.  Il  y  a  une  constitution 
particulière  pour  rfiglise  de  Mysic,  qui  porte 
permission  à  cotte  Eglise  de  vendre  les  ter- 
res, les  maisons  et  les  vignes,  dont  les  reve- 
nus n'avaient  point  été  destinés  ù  certains 
usages  par  les  donateurs. 

7.  Par  une  autre  loi  do  l'an  .538,  Justinien 
défendit  de  bâtir   aucune   nouvelle  église, 
avant  que  l'évèque  eût  fait  sa  prière  au  lieu 
destiné,  et  qu'il  y  eût  planté  la  croix  en  pro- 
cession, poui'  rendre  la  cliose  publiipie,  et 
avant  que  le  fondateur   fût   convenu   avec 
l'évèque  du  fonds  qu'il  voulait  donner  pour 
le  luminaire,  les  vases  sacrés,  et  l'entretien 
des  ministres.  Celui  (|ui  rétablissait  une  an- 
cienne église  tombant  eu  ruine,  passait  pour 
fondateur.  La  même   loi  règle   la  manière 
dont  se  devait  faire  l'alii-nation  des  biens  de 
l'Eglise,  et  défend  aux  économes  d'envoyer 
aux  évoques  non  résidants  dans  leur  dio- 
cèse, de  quoi   subsister   à   Cunstautinople, 
s^ils  y  font  un  séjour  de  plus  d'une  année. 
1   Ce  prince  en  donna  une  aulie  pour  intorpn:- 
ter  celle  qui  dii^Mulail  aux  njoiues  de  dis- 
poser de  leurs  biens  en  faveur  de  ceux  qui 
étaient  entrés  en  religion  avant  que  cette 
loi  IVil  publi(;e.  Il  déclare  valables  les  dona- 
tions faites  avant  la  publication  de  celle  Lu  ; 
et  nulles  toutes  celles  <pii  se  sont  faites  de- 


même,  quand  les  juges  seront  suspects.  Par 
une  loi  de  l'an  541,  il  ôte  aux  femmes  hé- 
rétiques le  privilège  d'être  préférées  aux 
autres  créanciers  du  mari,  pour  la  répéti- 
tion de  leurs  dots  ;  et  par  une  autre  de  la 
même  année,  il  compte  l'bérésie  entre  les 
causes  légitimes  que  les  parents  peuvent 
avoir  de  déshériter  ceux  qui„  étant  catholi- 
ques, auraient  eu  droit  à  leur  succession.  Il 
y  en  a  une  autre  qui  abroge  la  Novcllc  par 
laquelle  il  avait  accordé  cent  années  de 
prescription.  Il  la  réduit  à  quarante,  à  ciiuse 
de  la  dillicullé  qu'il  y  aurait  de  trouver  des 
témoins  pour  un  si  long  espace  de  temps. 
Quoiqu'il  eùl  déjà  donné  plusieurs  consti- 
tutions au  sujet  de  l'aliénation  des  biens  de 
l'Église,  il  en  donna  une  nonvelle,  où  il 
traite  des  diverses  manières  dont  ces  biens 
peuvent  être  aliénés,  mis  en  emphytéose, 
donnés  à  loyer,  et  hypothéqués. 

8.  Nous  avons  trois  autres  lois  de  l'an 
Sil  ;  la  première,  qui  est  du  20  février, 
regarde  l'ordination  des  évêques.  Il  y  est  dit 
que  lorsqu'il  s'agira  de  l'élection  d'un  évo- 
que, les  clercs  et  les  premiers  de  la  ville  s'as- 
sembleront et  choisiront  trois  personnes; 
que  par  le  décret  d'élection  ils  feront  ser- 
ment sur  les  saints  Évangiles,  qu'ils  ne  les 
ont  choisis  par  aucune  vue  d'intérêt ,  mais 
unicjucnieut  à  cause  de  leur  mérite  ;  que  le 
consécraliMir  choisira  l'un  des  trois,  qu'eu- 
suite  il  lui  fera  donner  sa  profession  de  foi 
par  écrit,  puis  réciter  la  formule  de  l'obla- 
tiou,  celle  du  baptême  et  les  autres  prières 
solennelles,  que  l'iUn  devait  apparemment 
savoir  par  cœur  ;   qu'il  fera  aussi  serment 


NoTfl.Lll^l,    i 

ita.iii 

nmii 

ft- 

iat. 

ixm.. 

i-r. 

3tl. 

eu 

i»'- 

Sio. 

III,  ptg.  l?'.. 


tut,  pi'i 
311. 


puis,  posant  pour  principe  que  l'on  se  dé-  de  n'avoir  rien  donné  ni  promis  pour  être 

pouille  du  domaine  et  de  la  propi'iélé  de  évèque  ;  que  s'il  arrivait  qu'on  l'accusai,  le 

son  bitui  par  la  professinn   niuna^liqne.  11  cousécraleur  serait  obligé  de  faire  droit  sur 

renvoie   aux  évêques   la  connaissance  des  l'accusation,  et  même  de  poursuivre  d'ollice 


il  cxAti, 


[Vl"  SIÈCLE.] 

l'infornialion  dans  trois  mois,  si  l'accusateiir 
sf!  (h'sistait.  Il  est  ordonne  par  la  môme  loi 
(le  tenir  tons  les  uns  des  conciles  au  mois  de 
juin  ou  de  septembre,  pour  y  traiter  toutes 
les  mali^res  eccUSsiastiques.  Hors  le  temps 
des  eonciles,  l'évéquc  peut  être  accusé  de- 
vant le  métropolitain,  et  les  clei'cs  et  les 
moines  devant  révè([ue.  La  seconde  loi  est 
du  ISniars:  elle  porte  que  les  décrets  des 
quatre  conciles  généraux  de  Nicéc,  de  Cons- 
lantinojile,  d'Kplu'sc  et  de  Chalcédoine  au- 
ront la  même  force  que  les  saintes  Ecritures, 
et  tiendront  lieu  de  loi;  que  le  Pajie  est  le 
premier  de  tous  les  évêqnes,  et  après  lui, 
révè([uc  de  Constantinoi^le.  Elle  maïqne  la 
juridiction  do  l'évéque  do  Justiiiianée  sur 
ceux  de  Dacie,  de  Prévale,  de  Dardanie,  de 
Mysie ,  de  Pannnnie ,  comme  vicaire  du 
Saint-Siège,  suivant  la  détiuition  du  pape 
Vigile  ;  et  ajoute  que  l'évéque  de  Carthage 
et  les  autres  évèquos  jouiront  des  privilèges 
attachés  à  leurs  sièges  ;  que  leurs  biens  se- 
ront exempts  des  impositions  extraordinai- 
res ;  qu'on  ne  pourra  leur  opposer  que  la 
prescription  de  quarante  ans  ;  que  les  legs 
faits  h  Dieu  tourneront  au  proflt  de  l'église 
du  domicile  du  testateur;  que  l'évéque  sera 
en  droit  de  les  faire  exécuter;  qu'ils  ne  se- 
ront point  sujets  à  la  quarte  falcidie,  c'est-à- 
dire  à  la  quatrième  part  que  l'héritier  insti- 
tué pouvait  retenir  sur  les  legs  faits  par  le 
testateur;  et  que  les  administrateurs  d'hôpi- 
taux seront  mis  au  rang  des  tuteurs,  et  su- 
jets aux  mêmes  lois.  Elle  ordonne  encore 
que  celui  qui  a  commencé  à  bâtir  une  église 
ou  une  chapelle  sera  obligé  de  l'achever, 
mais  elle  défend  aux  hérétiques  d'en  bàlir  et 
aux  particuliers  de  leur  vendre  des  biens  où 
il  y  a  une  église  ou  une  chapelle  bâtie,  et 
aux  évèques  de  tester  du  bien  qu'ils  ont  ac- 
quis depuis  qu'ils  sont  élevés  à  l'épiscopaî. 
y.  La  troisième  loi,  qui  estplus  ample  que 
les  précédentes,  est  datée  du  1"  mai.  Après 
avoir  répété  ce  qui  avait  été  réglé  sur  les 
ordinations  des  évèques,  elle  ajoute  que  ce- 
lui que  l'on  choisit  pour  l'épiscopat  ne  doit 
pas  moins  avoir  que  33  ans  ;  qu'on  peut 
élire  un  laïque  à  condition  qu'il  sera  clerc 
pendant  trois  mois,  pour  s'instruire  avant 
son  ordination  de  la  discipline  ecclésiastique, 
et  de  tout  ce  qui  appartient  au  ministère 
quotidien  de  l'Église,  n'étant  pas  convena- 
ble que  celui  qui  doit  enseigner  les  autres 
reçoive  des  leçons  après  son  ordination. 
Elle  permet  qu'au  cas  que  l'on  ne  'trouverait 


CHAPITRE  XX.  JCSTIXIEX,  EMPEREUR. 


239 


pas  trois  personnes  qui  eussent  les  qualités 
requises,  de  n'en  choisir  qu'une  on  deux, 
voulant  que  si  ceux  (pii  ont  droit  d'élire  ne 
font  pas  leur  décret  dans  six  mois,  l'élection 
soit  dévolue  â  celui  qui  a  droit  de  faire  l'or- 
dination. Celui  qui  aura  été  ordoimé  contre 
ces  Wvules,  sera  chassé  du  siège  épiscopal, 
interdit  pour  un  an  ,  et  ses  biens  confisqués 
au  profit  de  l'église  dont  il  aura  été  élu  évé- 
qnc.  S'il  se  trouve  que  celui  qui  aura  formé 
o[)position  à  l'élection  d'un  (■vôque  soit  con- 
vaincu de  calomnie,  il  sera  hanui  de  la  pro- 
vince où  il  avait  son  domicile.  Elle  défend 
la  simonie,  sous  peine  de  déposition,  tant 
pour  celui  qui  donne  que  pour  celui  qui  re- 
çoit ou  qui  sert  d'entremetteur,  s'ils  sont 
clercs;  et  de  confiscation  de  la  somme  au 
profit  de  l'Eglise.  S'ils  sont  laïques,  ils  paie- 
ront le  double  A  l'Église  ;  et  toute  promesse 
faite  à  cet  égard  sera  de  nulle  valeur.  La  loi 
peiniet  néanmoins  de  donner  pour  la  consé- 
cration, suivant  les  anciennes  coutumes,  et 
non  au  delà.  Le  Pape  et  les  quatre  patriar- 
ches de  Constanlinople,  d'Alexandrie,  d'Au- 
tioche  et  de  Jérusalem,  pourront  donner  aux 
évèques,  et  aux  clercs,  à  leur  ordination, 
vingt  livres  d'or;  les  métropolitains  et  les 
autres  évèques  cent  sous  d'or,  et  trois  cents 
au  notaire  et  autres  otUciers  de  l'évéque 
consécrateur.  Les  clercs  pourront  aussi  don- 
ner, selon  la  coutume,  aux  ministres  de  l'é- 
véque, de  qui  ils  reçoivent  l'ordination, 
poLirvu  que  la  somme  n'excède  pas  le  revenu 
d'une  année.  Voilà  l'origine  des  Annales. 
Celui  cpii  est  ordonné  évêque  se  trouve  par 
cette  dignité  atfranchi  non-seulement  de 
toute  servitude,  mais  aussi  de  la  puissance 
paternelle.  Il  ne  peut  être  tuteur,  et  ce  pri- 
vilège est  eucore  étendu  aux  moines;  mais 
les  prêtres  et  les  autres  clercs  peuvent  l'être, 
s'ils  acceptent  la  tutelle  volontairement.  Ils 
ne  peuvent  néanmoins  prendre  des  fermes 
ou  des  commissions,  ni  se  charger  d'aucune 
atiaire  temporelle  ,  si  ce  n'est  pour  les  égli- 
ses :  ni  s'absenter  de  celle  où  ils  servent  qu'a- 
vec des  lettres  de  leur  métropolitain.  Il  leur 
est  encore  défendu  de  quitter  leur  ministère, 
pour  reprendre  l'état  séculier,  sous  peine 
d'être  privés  de  toutes  charges  et  dignités,  et 
d'élre  assujettis  au  service  des  villes.  Défense 
aux  évèques  et  aux  clercs  de  jouer  ou  regar- 
der jouer  aux  tables,  c'est-à-dire,  aux  dés, 
ou  d'assister  a  aucun  spectacle,  sous  peine 
de  trois  ans  d'interdit.  Il  n'est  permis,  pour 
quelque  cause  que   ce   soit,   d'appeler  les 


260 


HISTOIRE  (JKNÉUAL  UKS  ALTKUHS  ECCLÉSIASTIQUES. 


évoques  à  comparailre  malgré  eux  devant 
les  juges  séculiers.  Si  deux  évêques  d'une 
même  province  ont  ensemble  quelques  dif- 
ficultés, lisseront  jugés  par  le  mélro|iolitain 
assisté  des  autres  évêques  de  la  province, 
et  pourront  en  appeler  au  patriarche  seule- 
ment. Il  en  sera  de  même  si  un  particulier 
clerc  ou  laïque  a  une  allaire  contre  son  évê- 
que.  Le  métropolitain  ne  pourra  être  pour- 
suivi que  devant  le  patriarche.  Les  clercs  et 
les  moines  en  matiéie  civile,  seront  d'abord 
poursuivis  devant  l'évêque,  et  au  cas  que 
les  parties  acquiescent  au  juicemcnt,  il  sera 
mis  à  exécution  par  le  juge  du  lieu.  Si  l'une 
des  parties  réclame  dans  dix  jours,  le  juge 
examinera  la  cause  ;  s'il  continue  la  sentence 
de  l'évêque,  son  jugement  sera  sans  appel; 
s'il  l'infirme,  il  sera  permis  d'en  a])ppler 
suivant  la  coutume.  En  matière  criminelle 
il  sera  au  choix  de  l'accusateur  de  poursui- 
vre les  clercs  devant  l'évêque  ou  devant  le 
juge  séculier.  S'il  s'adresse  d'abord  à  l'évê- 
que, après  que  l'accusé  aura  été  convaincu 
et  déposé,  le  juge  séculier  le  fera  prendre, 
et  le  jugera  selon  les  lois.  S'il  commence  par 
le  juge,  l'accusé  étant  convaincu,  le  juge 
communiquera  le  procès  à  l'évêque,  qui  dé- 
posera l'accusé  s'il  le  trouve  coupable,  afin 
que  le  juge  séculier  le  punisse  suivant  les 
lois.  S'il  ne  le  trouve  pas  convaincu,  il  ditlé- 
rera  la  dégradation,  l'accusé  demeurant  en 
état,  et  fera  conjointement  avec  le  juge  rap- 
port du  procès  à  l'Empereur.  Pour  ce  qui  esl 
des  causes  ecclésiastiques ,  les  juges  sécu- 
liers n'en  doivent  pas  connaître.  C'est  aussi 
devant  l'évêque  que  l'on  doit  poursuivre  les 
économes  des  églises  et  les  administrateurs 
d'hopiiaux  pour  eu  qui  regarde  leur  Jliarge; 
mais  il  leur  est  permis  d'appeler  de  l'évêque 
au  métropolitain,  et  ensuite  au  patriarche  : 
c'est  que  ces  économes  et  ces  administra- 
teurs étaient  clercs.  Les  évêques  députés  et 
les  apocrysiaiies  des  églises  qui  foui  leur  ré- 
sidence dans  la  ville  royale,  ou  auprès  des 
métroiiolitains  et  des  patriarches,  ne  peu- 
vent être  poursuivis  pendant  le  temps  de 
leur  députation,  suivant  le  privilège  accordé 
à  tous  ceux  qui  sont  chargés  d'allaires  publi- 
ques. 11  n'est  point  permis  de  tirer  les  moines 
ni  les  religieux  de  leur  monastère  pour  com- 
parailre devant  lesjuges;  ils  doivenlse  défen- 
dre par  procmeur.  Défense  aux  clercs  d'a- 
voir des  femmes  étrangères,  et  aux  diaco- 
nesses de  deuHîurer  avec  des  hommes  sus- 
pects, et  aux  laïques  defuùe  des  processions 


sans  la  présence  de  l'évêque  et  de  son 
clergé,  et  sans  les  croix  de  l'Eglise.  Le 
reste  de  cette  loi  qui  est  composée  de  qua- 
rante-quatre chapitres  regarde  les  religieux 
et  les  religieuses.  L'abbé  doit  être  élu,  non 
pour  sou  antiquité,  mais  pour  sa  vertu,  et  il 
doit  être  choisi  par  les  moines  les  plus  sa- 
ges, qui  feront  serment  sur  les  saints  Evan- 
giles (le  n'avoir  aucun  égard  dans  leur  élec- 
tion à  l'amitié  particulière,  ou  à  quelqu'au- 
Ire  motif  de  cette  nature,  et  de  n'avoir  en  vue 
que  le  bien  du  monastère  et  le  maintien  de 
la  discipline.  Celui  qui  se  présente  pour  être 
religieux  ue  doit  en  recevoir  l'habit  qu'au 
bout  de  trois  ans,  après  lequel  temps  per- 
sonne ne  pourra  |)lus  le  répéter.  Les  moines 
doivent  demeurer  tous  dans  un  même  lieu, 
mais  coucher  dans  des  lits  dillerents.  S'il  y 
a  des  vieillards  ou  des  infirmes,  ils  pourront 
avoir  des  cellules  séparées,  éloignées  de  la 
demeure  commune.  La  même  chose  devra 
s'observer  dans  les  mouastères  de  filles  ; 
elles  auront  aussi  leurs  monastères  séparés 
de  ceux  des  moines.  Si  l'on  fait  un  legs  ou 
une  donation  à  une  personne,  à  condi- 
tion de  se  marier  ou  d'avoir  des  enfants, 
cette  condition  sera  censée  accomplie  par 
l'entrée  dans  la  cléricature  ou  daus  un  mo- 
nastère. Les  biens  de  celui  ou  de  celle  qui 
entre  dans  un  monastère,  appartiennent  de 
droit  au  monastère,  à  l'exception  de  la  légi- 
timité des  enfants  s'ils  en  ont.  L'entrée  en 
religion  résout  les  fiançailles  en  rendant  les 
arrhes,  et  même  le  mariage  en  rendant  à  la 
femme  ou  au  mari  ce  qu'on  en  aura  reçu. Dé- 
fense aux  parents  de  tirer  leurs  enfants  des 
monastères,  ni  de  les  déshéi'iter  pour  y  être 
entrés.  Les  ravisseurs  des  religieuses  ou 
des  diaconesses,  seront  punis  de  mort,  et 
leurs  biens  appliqués  à  l'église  ou  au  mo- 
nastère. Si  un  moine  passe  de  sou  monastère 
à  un  autre,  il  ne  pourra  en  rien  emporter,  et 
sera  puni  par  l'évêque.  Il  est  défendu  à  tout 
laïque,  princi[>alement  aux  gens  de  théâtre 
de  piendre  l'habit  de  religieux  ou  de  re- 
ligieuses par  dérision,  sous  peine  d'exil  et 
de  pujiition  corporelle.  Les  religieuses  peu- 
vent se  choisir  un  prêtre  ou  un  diacre 
pour  gérer  leurs  all'aires  ou  leur  porter  la 
sainte  conununion,  pourvu  que  l'évêque  de 
qui  elles  dépendeut  l'ait  approuvé  couune 
étant  d'une  fui  pure  et  de  bonnes  mœurs  ; 
mais  il  ne  sera  [luinl  permis  à  celui  qu'elles 
auront  choisi  de  deiueurer  daus  le  monas- 
tère. 


rvi°  SIKCLK. 


CIIAPITRK   XX.  —  JFSTIMEN,  EMPEREUR. 


201 


Nov.  r.tniii 


Cf  qu'il  ;  a 
du  rennniiia- 
lile  tliin5  le 
Code  de  J)i>- 
lîn.^n  sur  1rs 
niatière>  ccclc- 
Sl^ïliqucs. 


10.  Jiistinion  dnnno  ciumuc  iino  loi  pour 
le  lion  pnuvoninnent  dos  monastères,  dans 
laqnp[le  il  lôpoio  une  partie  dos  r(''j;lciuents 
qu'il  avait  dôji'i  faits  dans  les  précédentes. 
r,ollo-oi  dt'IVnd  aux  moines  de  sortir  de  lonr 
monasiore,  et  aux  SL^culiers  d'y  entrer,  vou- 
lant qn';\  cet  otVet  l'abbé  mette  à  la  porte  dos 
anciens  moines  d'une  probité  connue  pour 
enipoclier  l'un  et  l'autre.  Elle  leur  défend 
d'avoir  rien  en  ]in)pre,  et  veut  qu'après  (pi'ils 
auront  récité  tous  ensemble  r()liic(^  divin,  ils 
s'emploient  à  la  lecture  de  l'Écriture  sainte. 
Kilo  interdit  l'entrée  des  monastères  des 
femme*  aux  liommcs  sous  quol([ue  pr('texte 
que  ce  soit,  et  aux  femmes  l'enirée  des 
monastères  des  hommes.  Elle  excopte  le  cas 
de  sépulture  dans  les  monastères  de  filles, 
permettant  d'y  faire  entrer  des  fossoyeurs 
à  condition  que  les  religieuses  ne  paraîtront 
point  devant  eux,  et  qu'ils  seront  reçus  ;\  la 
porte  et  reconduits  parl'abbesse  avec  la  por- 
tière. Elle  enjoint  k  ceux  qui  sont  cliarg-és 
des  monastères  de  veiller  au  maintien  du  bon 
ordre  et  de  la  discipline.  Elle  règle  aussi  les 
pénitences,  voulant  qu'on  les  proportionne 
aux  fautes,  et  peimettant  de  cbasser  les  in- 
corrigibles. Ce  prince  défendit  les  assemblées 
particulières  des  hérétiques,  sous  peine  de 
confiscation  des  maisons  au  profit  de  l'Eglise. 
Il  rétablit  l'ancien  usage  des  divorces  par  le- 
quel il  était  permis  aux  personnes  maii('es 
de  se  séparer  d'un  consentement  mutuel, 
sans  aucune  autre  formalité,  en  se  donnant 
toutefois  l'un  et  l'autre  un  libelle  de  divorce. 
Il  défendit  sous  des  peines  très-rigoureiises 
de  faire  des  eunuques,  et  parce  qu'on  ne  le 
faisail  que  pour  les  vendre  plus  chèrement, 
il  déclara  libres  tous  ceux  qui  auraient  souf- 
fert celte  injure.  Il  accorda  aux  Juifs,  ou, 
comme  porte  le  texte,  aux  Hébreux,  la  per- 
mission de  lire  la  Bible  en  hébreu  et  en  latin 
suivant  l'hébreu,  mais  il  leur  défondit  de  se 
servir  d'une  autre  version  que  de  celle  des 
Septante  ou  de  celle  d'Aquila.  Quanta  ceux 
qui  étaient  de  la  secte  des  sadducéens ,  il 
leur  défendit  de  tenir  aucune  assemblée, 
parce  qu'ils  onseinnaient  qu'il  n'y  aura  ni 
résurrection  ni  jugement.  Il  parait  qu'il  les 
accusait  aussi  de  croire  que  ce  n'était  pas 
Dieu,  mais  les  anges  qui  avaient  formé  le 
monde  et  tout  ce  qu'il  contient. 

11.  Les  Aoivllcs  de  Justinien  réglaient, 
comme  on  vient  de  le  voir,  presque  toute  la 
discipline  ecclésiastique  de  son  temps.  Il  lit 
plus  dans  le  premier  livre  de  son  Code,  où  il 


s'oxplii|uo  sur  les  principaux  points  de  doc- 
lriu(ï  de  l'Eglise  calholiqiro.  coiutnençant  par 
ce  que  l'on  doit  croire  sur  la  Sainle-Tririité. 
Il  prend  pour  règle  le  symbole  de  Nicée,  or- 
donnant do  chasser  tous  ceux  qui  pensent 
coiitrairoment  i\  co  symbole,  et  do  rendre  les 
('•glises  h  tons  les  évoques  qui  (Mi  prfifessent 
la  foi,  suivant  en  cela  les  lois  faites  sur  ce 
sujet  par  les  empereurs  Gratien,  Théodose, 
\alontinieu  ot  ses  autres  prc'dé-cossein-s.  Il 
ordonne  do  brûler  les  livres  do  Porphyre  con- 
tre la  religion  chrétienne,  et  ceux  de  Nesto- 
rius  contre  le  mystère  de  l'Incarnation.  Il  dit 
auathome  à  Nestorius,  à  Eutychès,  .'i  Apol- 
linaire et  ù  leurs  sectateurs  ;  et  pour  donner 
des  preuves  de  sa  catholicité,  il  fait  une  pro- 
fession de  foi  qui  est  en  eQet  orthodoxe,  mais 
il  ne  s'explique  que  sur  la  Trinité  et  sur  l'In- 
carnation, parce  que  c'étaient  alors  les  ma- 
tières les  plus  contestées.  Quoiqu'il  eût  com- 
battu autrefois  la  propositiofi  des  moines  de 
Scylhie  :  Un  de  la  Trinité  a  souffert,  il  l'a- 
dopte ici,  en  reconnaissant  qa'iin  de  In  Tri- 
nité,  le  Verbe  de  Dieu,  s'est  incarné.  Mais  il 
ne  l'emploie  que  dans  l'Exposition  de  sa  foi 
au  pape  Jean.  Il  y  fait  profession  de  recevoir 
l'autorité  des  quatre  conciles  généraux,  en 
la  manière  que  l'Église  romaine  les  recevait. 
Il  traite  ensuite  des  privilèges,  des  biens  et 
des  droits  des  églises.  Sur  quoi  il  rapporte 
les  ordonnances  de  ses  prédécesseurs.  Puis 
il  passe  à  ce  qui  regarde  les  évéqties  et  les 
autres  clercs,  les  administrateurs  des  hôpi- 
taux, les  moines,  rapportant  sur  chacun  ce 
qui  en  avait  été  ordonné  par  les  empereurs, 
et  ce  qu'il  en  avait  dit  lui-même  dans  ses 
liescrits.  Dans  l'un  de  ces  rescrits  daté  du 
i"  mars  de  l'an  328,  adressé  à  Atarbe,  il  or- 
donne qu'à  la  vacance  du  siège  épiscopal  les 
habitants  de  la  \  ille  choisiiont  trois  personnes 
dont  la  foi  et  les  mœurs  soient  connues,  afin 
que  l'on  choisisse  le  plus  digne  ;  que  l'élu 
ne  doit  avoir  ni  enfants  ni  petits  enfants,  de 
crainte  que  les  soins  de  sa  famille  ne  le  dé- 
tournent du  service  de  Dieu  et  de  l'Église,  ou 
qu'il  ne  tourne  au  profit  des  siens  ce  qui  a 
été  donné  pour  les  pauvres  ;  fpi'il  ne  sera 
point  permis  aux  évéqucs  de  disposer  par 
testament,  donation  ou  autrement,  des  biens 
qu'ils  auront  acquis  depuis  leur  épiscopat,  si 
ce  n'est  qu'ils  les  aient  eus  par  succession 
de  leiu's  père  et  mère,  oncles  ou  frères  ;  qu'en 
ce  cas,  tout  le  reste  appai-liendra  a  leur  égli- 
se, étant  visible  que  ceux  qui  lui  ont  donné, 
l'ont  fait    en  considération   du    sacerdoce; 


Lih.  I  Cod. 
m.  3  De 
Episc.  les-  »2, 
pag.  46. 


262 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DKS 


im.hfK}, 


qu'après  la  mort  des  évoques  les  économes 
rendront  compte  de  ce  qu'ils  auront  laissé 
afin  de  l'appliquer  au  profil  des  églises;  que 
ces  économes  rendront  compte  chaque  an- 
née ù  l'évèque,  et  que  s'ils  meurent  avant 
de  l'avoir  rendu,  leurs  héritiers  en  seront 
tenus  ;  que  les  administrateurs  des  hôpi- 
taux ne  poujTont  disposer  de  ce  qu'ils  auront 
acquis  pendant  le  temps  de  leur  administra- 
tion; que  tous  leurs  acquêts  appartiendront 
aux  hôpitaux  qui,  avec  l'excédant  des  reve- 
nus n(''cessaircs  pour  l'entretien  de  ceux  qui 
sont  nourris,  seront  employés  à  acquérir  de 
nouveaux  fonds.  Ce  prince  défend  de  rien 
prcndi-e  pour  les  ordinations  de  tous  les  mi- 
nislros  de  l'Eglise,  évèques,  chorévècpjes,  vi- 
siteurs, prêtres,  etc.,  non  plus  que  pour  l'é- 
tablissement d'un  économe,  défenseur  de 
l'Eglise  ou  administrateur  d'hôpital,  sous 
peine  à  celui  qui  aura  donné  ou  reçu  à  ce 
sujet,  d'être  déposé  ou  privé  de  sa  charge. 
Il  veut  que  tous  les  clercs  chantent  dans 
chaque  église  les  offices  de  la  nuit,  du  matin 
et  du  soir,  c'est-à-dire  les  Mutines,  les  Lau- 
des et  les  Vêpres,  n'étant  pas  convenable  que 
les  clercs  consument  les  biens  de  l'Église  sans 
rien  faire,  et  qu'ils  portent  le  nom  de  clercs 
sans  en  faire  les  fonctions.  Il  dit  qu'il  est  ab- 
surde que  les  clercs  obligent  des  mercenai- 
res à  chanter  à  leur  place,  tandis  que  plu- 
sieurs laïques  assistent  aux  offices  par  dévo- 
tion, et  ordonne  à  l'évèque  de  chasser  du 
clergé  ceux  qui  ne  seront  pas  assidus  au  ser- 
vice pour  satisfaire  à  l'intention  des  fonda- 
teurs. 

12.  Le  second  rescrit  qui  est  adressé  h. 
Lpiphane,  patriarche  de  Constantinople,  et 
daté  du  21  lévrier,  regarde  la  résidence  des 
évoques.  Comme  leur  absence  était  cause 
que  le  service  divin  se  faisait  négligemment, 
que  les  églises  était  moins  bien  gouvernées, 
et  qu'ils  consumaient  en  frais  de  voyages 
leurs  revenus  ,  l'Empereur  ordonne  à  Épi- 
phane  de  notifier  à  tous  les  métropolitains 
de  sa  ([('-pendance,  que  ni  eux  ni  les  évèques 
d(!  leurs  provinces  ue  quittassent  point  leuis 
églises  pour  venir  à  Constantinople  sans  un 
ordre  particulier  de  la  cour,  quelque  atlaire 
qui  survint  ;  mais  qu'ils  eussent  à  envoyer 
un  ou  deux  de  leurs  clercs  pour  déclarer  les 
raisons  qu'ils  auraient  de  venir  en  cette  ville. 
«  Si  nous  trouvons,  ajoute  Justinien,  que 
leur  piésence  soit  nécessaire  ici,  nous  leur 
oi'donnerons  de  venir.  Celui  qui  conticvicu- 
dr.i  encourra  notre  indignation  et  ser;i  ex. 


AUTEUHS  ECCLÉSIASTIQUES. 

communié  par  vous,  si  c'est  un  métropoli- 
tain, et  par  son  métropolitain  s'il  n'est  qu'é- 
vcque.  Nous  ne  leur  imposons  point  de  pei- 
nes pécuniaires,  de  crainte  que  le  dommage 
ne  retourne  sur  les  églises.  »  Il  y  a  ensuite 
d'autres  lois  qui  regardent  la  séparation  des 
monastères  d'hommes  d'avec  ceux  dcsUlles, 
les  enfants  des  prêtres,  les  diacres  et  les 
sous-diacres,  lesdonation<  pour  causes  pieu- 
ses, l'élection  et  la  confirmation  d'un  abbé 
ou  d'une  abbesse,  l'enlèvement  des  filles, 
veuves  ou  diaconesses  consacrées  à  Dieu  et 
plusieurs  autres  matières  (|ui  concernent  la 
juridiction  ecclésiastique.  Il  ordonue.de  dé- 
poser un  évoque  qui  aura  réitéré  le  bap- 
tême, et  rapporte  sur  cela  les  lois  d'Honorius, 
de  Théodose  et  de  Valentinien,  de  même  que 
sur  la  défense  aux  chrétiens  de  contracter 
des  mariages  avec  les  Juifs  et  de  graver  ou 
peindre  le  signe  de  la  croix  sur  la  terre,  sur 
un  caillou  ou  sur  le  marbre.  Il  maintient  les 
immunités  ecclésiaslitjues,  et  le  di'oit  d'a- 
sile dans  les  églises,  conformément  aux  an- 
ciennes lois  de  ses  prédécesseurs. 

13.  En  oi6,  il  y  eut  à  Constantinople  quel- 
ques difl'érends  au  sujet  du  jour  de  Pâques. 
Le  peuple,  persuadé  que  ce  devait  être  le 
premier  jour  d'avril,  fil  le  dernier  jour  gras 
le  dimanche  4  février,  car  les  Grecs  com- 
mençaient leur  abstinence  après  le  dimanche 
que  nous  appelons  la  Sejsagésime,  et  qu'ils 
nommaient  le  dimanche  gras.  Mais  l'Empe- 
reur, mieux  informé,  ordonna  que  l'on  vendit 
encore  de  la  chair  toute  la  semaine  jusqu'au 
dimanche  suivant,  11  février,  ti  cause  que 
Pâques  ne  devait  être  (pie  le  8  avril.  Les  bou- 
chcr<  tuèieut  et  étalèrent,  mais  personne 
n'acheta  ni  ne  nuingea  de  vinnde.On  célébra 
toutefois  la  Pâque  au  jour  que  Justinieu  l'a- 
vait ordonné,  et  il  se  trouva  que  le  peuple 
avait  trop  jcinui  d'une  semaine.  Ce  qui  en- 
gageait les  Grecs  à  coniuiencer  le  Carême 
api'ès  le  ditnanchc  de  la  Sexagésime,  c'est 
qu'ils  ne  jeûnaient  point  les  Samedis  non 
jiIms  que  les  tlinjaiulies,  excepté  le  Samedi- 
Saini.  Mais  |)euilant  toute  la  semaine  de  la 
Sexagésime,  leur  abstinence  ne  consistait 
que  dans  celle  de  la  chair;  ils  man'jeaient 
des  luita^^es  et  des  (i>ufs,  nu  lien  que  depuis 
le  dimanche  de  la  (Juinquagésime,  ils  s'abs- 
tenaient non-seulement  des  œufs  et  des  lai- 
tages, mais  encore  du  poisson  et  de  l'huile. 
Ainsi  ce  n'était  jji-opicmeiil  ipi'en  celte  .se- 
maine qu'ils  eommenraieiit  le  jeune  rigou- 
reux du  C.iièine. 


C«  qu'il  fdit 
ta  «ujrl  d<i 
Ctrtme. 


Tl.i-oir  In 
Clirf>n'>Er>  ^"1 
nn.  5a6,  J  Ri'. 


[Vf  SIÈCLE.)  CHAPITRE  XX.  —  JUSTIXIEX,  KMI>KRRUR. 


263 


iU<     JustiiiPII. 

S>     n<or[    cQ 


14.  Nous  avons  plusieurs  autres  t'crits  de 
rpinpcrcur  Justiiiicu  ',  .«avoir,  un  long  /ùlit 
cimtre  Orit/èiw,  un  .■uitre  pour  la  coniiauina- 
tioii  lies  '/'rois-C/iapilivs,  adressé  en  forme  do 
lellrc  et  de  confession  de  foi  i\  toute  l'IOglise. 
Cet  édit  soutlVit  de  li-ès-grandcs  dillicullés, 
parce  qu'un  grand  nombre  d'évèques  refu- 
sèrent d'y  souscrire,  dans  la  persuasion  que 
c'i'tait  contrevenir  au  concile  deCliakédoiue. 
De  ses  deux  lettres,  l'une  est  au  concile  de 
Constantinoplc  sous  Mcnnas,  et  l'autre  au 
concile  tenu  en  la  même  ville  contre  les  Trois- 
Cliapitres.  Les  liistorieus  du  temps  -  ont  tlit 
de  ce  prince  qu'au  lieu  de  s'appliquer  à  la 
guerre  dans  le  temps  qu'il  en  ('tait  besoin 
pour  coni|uérir  l'Italie,  il  employait  la  plus 
grande  partie  de  son  temps  à  exaujiuer  les 
dogmes  des  chrétiens,  à  de  vaincs  spécula- 
tions et  à  des  curiosités  sur  la  nature  divine  ; 
qu'il  passait  une  partie  des  nuits  avec  les 
plus  vieux  évèques  à  feuilleter  les  livres  qui 
regardaient  la  religion.  Sa  curiosité  le  lit 
tomber  dans  l'erreur  des  incorruptibles,  et  il 
donna  sur  ce  sujet  un  édit  ^  où  il  disait  que 
le  corps  de  Jésus-Cluist,  dès  sa  naissance, 
n'était  susceptible  d'aucune  altération,  pas 
même  par  les  passions  naturelles  comme 
la  faim  et  la  soif;  de  manière  qu'avant  sa 
mort  comme  après  sa  résurrection,  il  man- 
geait sans  aucun  besoin.  Ce  prince  mourut 
la  quarantième  année  de  son  règue,  l'an 
366,  âgé  de  8i  ans.  Il  fit  bâtir  ou  réparer 


(iS  églises,  tant  h  Constanlinople  que  dans 
l'Asie  Mineure  et  les  autres  parties  de  l'Em- 
pire, 10  hôpitaux  et  "23  monastères.  Les  Grecs 
font  nii'uioire  de  lui  dans  leur  Mcnoluf/n  au 
2  août.  Ses  lois,  ses  édits  et  ses  lettres  sont 
d'un  style  grave  et  majestueux.  Nous  aurons 
occasion  de  ]i:iiler  encore  de  lui  en  faisant 
riiistoire  du  cinquième  concile  général  tenu  , 
à  Gonstantinoplit  en  533. 

13.  [Le  tome  LXL\  de  \a  l'alroloijic  latine  '  ■in™  .ic 
contient  avec  plusieurs  autres  écrivains,  les  "'""■ 
écrits  suivants  de  Justinieu  :  1°  le  livre  con- 
tre Oriiji'iK  en  grec  et  en  latin;  2°  la  Confes- 
sion de  la  véritable  foi  contre  les  Trois-Cliapi- 
trcs;  3°  la  lettre  au  saintsynode  contre  Théo- 
dore des  Alopsueste  ;i"  la  lettre  contre  les  dé- 
fenseurs de  ce  dernier.  Les  autres  écrits  re- 
hgieux  de  Justinieu,  ses  Nouelles,  sont  dans 
le  tome  LXXII  de  la  l'airologie  latine  au  sup- 
plément du  VI'  siècle.  Le  tomeLXXXVI  de  la 
Palruluyie  y!-er(ji/e,  col.  943-1132,  renferme 
une  notice  sur  Justinien  d'après  Cave,  le 
traité  contre  Origène,  l'épître  contre  Théo- 
dore de  Mopsueste,  la  constitution  contre 
Anlhime,  Sévère,  Pierre  et  Zoara,  d'après 
Mansi  ;  le  traité  contre  les  Monophysites  d'a- 
près Mai,  un  fragment  de  l'épître  à  Zode,  pa- 
triarche d'Alexandrie,  u'aprèsMaï,  un  décret 
de  Justinien  à  l'abbé  du  mont  Sinaï,  d'après 
Tischendorf.  Toutes  ces  pièces  de  Justinien 
sont  reproduites  en  grec  et  en  latin.] 


'  Le  tome  VII  Scriptor.  vêler,  collectio  de  M.iï, 
pap.  292-315,  contient  en  prec  le  traite  de  .lustinien 
contre  les  Monophysiles.  Ou  y  remarque  un  ëtla- 
taiit  témoi;.'nage  sur  l'ortliodoxie  ijerpétuelle  des 
poutifes  romain?,  taudis  qu'au  eoutraire  il  y  a  eu  tant 
dbérétiqut'3  sur  les  autres  sièges  pitriarebaux.  Le 
voici  en  grec  :  xXXi.  -i^v  ô.^Ôtiv  y.'/l  kX-nOu-if/  /J.;y.pl 
STJ/«^«ï  oispiÀscfav  (?i)|ày,  pag.  304.  Cet  opuscule,  dit 


Jl.Bonuetty,  est  eu  outre  précieux  parle  grand  nom. 
lire  de  passages  inédits  des  l'ères  qu'il  nous  fait 
connaître.  {L'e'diteur.) 

2  Procop.,  lib.  111   De  Belle  Goih.,  cap.   xxxv  et 
xxxiu  :  et  Anecdol.,  cap.  xvui. 

3  Evagr.   lib.    IV,    cap.  xxxix,  et  TheopUan.,  ad 
an.  536,  pag.  Ifi2. 


26-4 


HISTOIHE  GKNÉllALli:  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


CHAPITRE   XXI. 

Dacins,  évêqne  de  Milan;  Justinien  et  Jnsto,  évêqnes  d'Espagne;  Aprigins,  évêqne 
de  Badajoz,  [écrivains  latins]  ;  Arétas,  évêqne  de  Césaréc  ;  Agapet, 
diacie  de  Constantinople  ,  Constantin  le  diacre. 

[Écrivains  grecs,  vers  l'an  535.] 


Daciu»,  l'T.*. 
qus  de  MlliQi 


Dal.  ci['.  IV. 


Tom.  I   An. 
lut.,  \t£,  1  et 


1.  Ces  évêques  se  rendirent  recomman- 
dables  sous  le  règne  de  Justinien.  Dacins, 
évêque  de  Milan,  se  tronva  à  Constantinople 
vei-s  l'an  530 ,  lorsque  le  pape  Vigile  con- 
vint avec  ce  prince  que  personne  n'entre- 
prendrait rien  au  sujet  des  Fnts-C/inpitrcs, 
jusqu'à  la  décision  du  prochain  concile;  il 
fut  même  témoin  de  cette  convention  avec 
Mennas  de  Constantinople,  Théodore  deCé- 
sarée  et  quelques  autres  évêques  grecs  et 
latins.  On  rapporte  de  lui  qu'étant  à  Corin- 
tlie  il  délivra  une  maison  des  spectres  que 
les  démons  y  faisaient  paraître  et  qui  la  ren- 
daient déserte.  Ce  fut  à  lui  que  Cassiodore 
s'adressa  pour  distribuer  des  vivres  au  peu- 
ple dans  un  temps  de  famine.  On  lui  attribue 
une  CAroni^w  des  événements  remarquables 
arrivés  à  Milan.  Elle  n'a  point  encore  été 
imprimée.  Mais  don  Mabillon,  curieux  desa- 
voir si  elle  était  véritablement  de  Dacius,  et 
ce  qu'elle  contenait,  fit  écrire  sur  cela  au  bi- 
bliothécaire de  l'Église  métropolitaine,  qui 
répondit  que  cette  Chronique  était  écrilc  sur 
un  parchemin;  qu'elle  était  de  six  cents  ans; 
qu'elle  n'était  pas  toute  d'une  même  main 
ni  d'un  même  auteur;  que  la  première  par- 
tie était  de  Landufle-l'Ancien  ,  la  seconde 
et  la  troisième  de  Landulle-le-Jcune  :  d'où  il 
était  évident  que  Dacius  n'en  était  point  au- 
teur ;  que  l'on  trouvait  toutefois  son  nom  ;i  la 
tète  de  cette  Chronique,  mais  d'une  main  ré- 
cente ;  qu'il  n'y  était  fait  aucune  mention  de 
la  famine  arrivée  sous  le  pontificat  du  pape 
Silvérius,  qu'elle  n'allait  pointan  delùdu  viu° 
siècle,  et  finissait  au  xi' ,  à  l'an  1067. 

2.  Justinien  fui,  selon  Isidore  de  Séville, 
évoque  de  Valence  en  Espagne,  sous  le  rè- 
gne de  Théodius,  vers  l'an  535.  Il  avait  trois 
frères  nés  de  la  môme  mère  que  lui,  (pii  fu- 

i-idor.  D«   rent  tous  évêques  et  autcuis.  11  écrivit  un 
iitt'^.Iitrl'iî!  traité  ou  un  livre  contenant  diverses  lépon- 


iofl'olMI, 

.  ..'.lue  de  Vl- 
irnee. 


ses  aux  questions  d'un  nommé  Rustique; 
dont  la  première  était  sur  le  Saint-Esprit;  la 
seconde  contre  les  bonosiaques  qui  ensei- 
gnaient que  Jésus-Christ  n'était  Fils  de  Dieu 
que  par  adoption,  et  non  par  nature.  Il  faisait 
voir  dans  la  troisième  réponse  qu'il  n'est 
point  permis  de  réitérer  le  baptême  de  Jésus- 
Chrisî;  et  dans  la  quatrième  la  distinction 
qu'il  fallait  faire  du  baptême  de  saint  Jean 
d'avec  celui  de  Jésus-Christ.  La  cinquième 
était  pour  montrer  que  le  Fils  est  invisible 
comme  le  Père.  Cet  ouvrage  n'est  pas  venu 
jusqu'à  nous. 

3.  Mais  nous  avons  le  Commentaire  que 
Juste  son  frère,  évêque  d'Urgel,  a  fait  sur  le 
Cantique  des  cantiques,  dans  lequel  il  donne 
d'une  manière  très-claire  et  très-suivie  le 
sens  spirituel  de  ce  livre.  Il  en  fait  lapplica- 
lion  h  Jésus-Christ  et  à  son  Église,  que  Salo- 
mon  représente  sous  les  termes  d'époux  et 
d'épouse.  En  expliquant  ces  paroles  :  Ceux 
qui  gardent  les  murailles  m'ont  enlevé  mon  w 
manteau,  il  dit  cfuc  cela  s'est  accompli  quand 
les  ennemis  de  la  vraie  foi  ont  démoli  en- 
tièrement les  églises  ;  qu'ils  ont  bmié  les 
aidels  avec  les  saints  évangiles  et  les  autres 
livres  canoniques;  qu'ils  ont  mis  en  prison 
les  prètics  du  Sciuncur,  ou  qu'ils  les  ont 
condamnés  aux  mines;  el lorsqu'ils  ont  ôté  à 
l'Eglise  le  moyen  d'otl'rir  le  sacrifice,  de 
baptiser  cl  de  donner  la  communion  aux  fi- 
dèles. Il  mai(|ue  en  un  autre  endroit  qu'en 
renaissant  en  Jésus-Chrisl  dans  le  baptême,  le 
péché  originel  qui  nous  es!  communiqué  par 
la  gi'néralion,  est  effacé.  Juste  compte  deux 
cents  versets  dans  le  Canlicjue  des  cantiques; 
ce  qui  fait  voir  qu'il  n'était  point  divisé 
en  chapitres  dans  les  exemplaires  dont  il  so 
servait.  On  Irouveun  évêque  di-ce  nom  dans 
le  second  concile  de  Tolède,  et  on  ne  doute 
point  (jue  ce  ne  soit  celui  dont  nous  parlons. 


qae  dTifol. 


Tom.  IX 
Bltil.  l'st  l^ag. 
-31. 


Il,,l,  |Jg. 


Tv. 


[vi*  SIÈCLE.]         CHAPITRE  XXI.  —  DACIUS,  KVftQUE  DE  MILAN,  ETC. 


26S 


Son  C(n)iinenlairc(u\.  iiuprimé  ii  Ilagiicnaii  en 
lo20,  d'où  il  csl  passé  clans  \csOrtfinduj:ogra- 
p/tcs,  puisilaiis  le  tome  ix°  de  la  liUilinthèque 
des  Pcirs  de  Lyon.  Il  y  en  a  aussi  niio  édition 
i\  Haie  en  Saxe,  en  1G17,  par  Georges  Hosliiis, 
qui  y  a  joint  ileiix  lettres  sous  le  nom  île 
Juste,  l'une  ;iu  pape  Scrgiu.s  ;  et  l'antre  ii 
Juste,  diacie,  qui  l'avait  engagé  à  compo- 
ser ce  Cominentuire.  La  prcuii('>re  doit  être 
regardée  comme  supposée,  puisque  le  pape 
Scrgius  à  qui  elle  est  adressée  n'occupa  le 
Saint-Siège  que  sur  la  fin  de  l'an  C.S7,  plus  de 
cent  ans  après  la  mort  de  Juste  d'Urgel.Dans 
leSpicilége  de  don  d'Achéry,  où  cette  lettre 
se  trouve  ',  elle  est  inscrite  :  Au  pape  Si/rga, 
qui  est  apparennnent  le  même  que  Sergius. 
L'auteur  y  dit  ([u'il  lui  envoyait  un  Commen- 
taire qu'il  avait  fait  depuis  peu  sur  le  Canti- 
que des  cantiques.  Les  deux  autres  frères  de 
Justinien  se  nommaient  Nébride  et  Elpide. 
On  "ne  sait  d'où  ils  étaient  évêques,  ni  sur 
quel  sujet  ils  avaient  écrit.  On  voit  un  Né- 
bride,  évèque  d'Égar  ,  dans  le  second  con- 
cile de  Tolède. 

4.  Aprigins,  évêquc  de  Badajoz,  ville  de 
l'Espagne  dans  l'Estramadure  ,  homme  sa- 
vant et  éloquent,  fit,  vers  l'an  540,  un  com- 
mentaire sur  l'Apocalypse  de  saint  Jean,  d'un 
style  noble,  où  il  donnait  à  ce  livre  un  sens 
fort  spirituel.  Isidore  de  Se  ville  qui  l'avait 
lu,  dit  qu'Aprigius  lui  paraissait  avoir  mieux 
réussi  dans  l'explication  do  l'Apocalypse  que 
la  plupart  de  ceux  qui  avaient  écrit  avant 
lui.  Nous  n'avons  plus  ce  Commentaire,  mais 
LoaïsD,  dans  ses  notes  sur  le  Catalogue  d'Isi- 
dore, témoigne  avoir  vu  un  commentaire  ma- 
nuscrit sur  l'Apocalypse  écrit  en  lettres  go- 
thiques, composé  de  ceux  que  Victorin,  Isi- 
dore et  Aprigins  avaient  fait  sur  le  même  li- 
vre. Aprigins  composa  divers  autres  ouvra- 
ges, dont  nous  ne  savons  pas  même  les  titres. 
Il  tlorissait   sous  le  règne  du   roi  Théodius. 

3.  On  met  vers  le  même  temps  Arétas, 
évèque  de  Césarée  en  Cappadoce,  dont 
nous  avons  un  Commentaire  sur  l'Apoca- 
lypse *.  Je  ne  sais  pourquoi  quelques-uns  l'ont 


atliihué  ii  un  prêtre  de  la  môme  église, ni  la 
raison  que  d'autres  ont  eue  de  douter  si 
Arétas  en  avait  été  évè<pie,  pnis<in'il  dit  en 
termes  exprès  qu'André  '  l'avait  gouvernée 
avant  lui  ;  ce  qui,  ce  semble,  uianjue  claire- 
ment (ju'il  gouvernait  lui-môme  l'Eglise  de 
Césarée,  Inisipi'il  écrivait  son  Commentaire. 
Il  le  composa  sur  celui  d'André,  son  pré- 
décesseur, dont  il  rapporte  de  temps  en 
temps  les  explications.  Mais  il  eut  recours 
aussi  aux  écrits  dos  anciens  qui  avaient  cx- 
pli((U('  l'Apocalypse  en  entier  ou  en  partie.  Il 
cite  souvent  saint  Grégoire  le  théologien,  et 
Eusèbe  de  Césarée,  et  quelquefois  saint  Jus- 
tin, à  qui  il  donne  le  nom  de  Grand.  Il  donne 
le  sens  littéral  et  spirituel  de  ce  livre,  qu'il 
explique  d'un  bout  à  l'autre  avec  autant  de 
netteté  que  le  texte  le  permet.  Son  Commen- 
taire est  divisé  en  72  chapitres  ;  au  lieu  que 
l'Apocalypse  n'en  a  que  22  dans  nos  Bibles.  Il 
remarque  que  quelques-uns  ont  nié  qu'elle 
fût  de  l 'apôtre  saint  Jean  ;  mais  qu'il  n'y  a  pas 
lieu  d'en  douter,  en  la  comparant  avec  l'É- 
vangile et  la  première  Epitre  de  cet  apùtre; 
que  d'ailleurs  elle  lui  est  attribuée  par  saint 
Grégoiie le  théologien,  par  saint  Basile,  par 
saint  Cyrille,  par  Papias,  par  saint  Irénée  et 
par  saint  Hyppolite  qui  sont  des  témoins  di- 
gnes de  toi.  Au  verset  2  du  chapitre  I"  où 
saint  Jean  dit  qu'//  a  rendu  témoignage  de 
tout  ce  qu'il  a  vu,  quelques  exemplaires  ajou- 
taient: £t  tout  ce  qu'il  a  oui,  tout  ce  qui  est,  et 
tout  ce  qui  doit  se  faire  à  l'avenir:  c'est  la  re- 
marque d'Arétas.  Il  entend  par  les  sept  égli- 
ses auxquelles  l'Apôtre  adresse  la  parole, 
toutes  les  églises  de  l'univers  qui  sont  unies 
en  ce  monde  par  une  même  communion.  Il 
crte  les  paroles  que  l'on  attribue  à  saint  De- 
nys,  lorsqu'à  la  mort  de  Jésus-Christ  le  so- 
leil s'obscurcit.  Il  enseigne  que  nos  prières 
étant  présentées  à  Dieu  par  les  anges  qui 
veillent  sur  nous,  elles  en  deviennent  '  plus 
agréables  et  d'une  meilleure  odeur,  particu- 
lièiement  les  prières  des  saints  qui  sont  déjà 
bonnes  en  elles-mêmes.  Il  parait  prendre  à  la 
lettre  ce  qu'on  lit  dans  quelques  prophètes, 


'  La  lettre  au  pape  Sergius  et  l'explication  mysti- 
que sur  le  Cautique  d'  s  cantiques,  avec  une  notice 
sur  l'auteur  par  Fabricius,  se  trouve  au  toujeLXVn 
de  la  Patrologie  latine,  col.  961  etsniv.  {L'éditeur.) 

*  Voyez  l'article  que  D  Ceillier  consacre  de 
uouveau  à  Arétas  dans  le  volunie  XIX  de  l'an- 
cienne éditiou,  pas-  591-592,  xu  de  la  présente 
édition.  L'opinion  la  plus  vraisemblable  est  que 
Arétas  a  vécu  vers  la  fin  du   cinquième   siècle   ou 


au  conimenceuient  du  siècle  suivant.  {L'éditeur.) 
'   Andréas  qui  ante  me  Cœsareœ  Cnppudociie 

episcupalumlortisusest.  Conunent.  in  Apocal.cap. 

XXI.  i.ag.  7fil,  tom.  l\  Bibl.  Patr. 
*  .S'aHc(oru)7i  preces  Deo  ab  angelis  qui  nabis 

prœsunl  offeruninr  :    quœ  natura  quidem  bonw 

fragranliœ  sunt,  sed  melioris  fragrantiœ  eœ  red- 

duntur  per  angeli  qui  eus  porrigit  auxilum.  Cap. 

XXI,  pag.  700. 


206 


HISTÛinK  GKNKIIAI.R  DES  AUTEURS  ECCLÉSU\.STIQUES. 


que  le  jugement  dernier  se  fera  sur  la  terre, 
signifiée  par  la  vallée  de  Josaphat ,  parce 
qu'il  y  a  eu  plusieure  combats  donnos  dans 
cette  vallée.  Il  parait  encore  croire  que  l'Anté- 
christ viendra  des  pays  orientaux  de  la  Peree 
où  la  tribu  de  Dan  s'est  établie.  Ce  Commen- 
taire fut  imprimé  en  grec  à  Vérone  en  153^ 
et  13(58,  cl  à  Paris  en  1621 ,  avec  les  Cummcn- 
l'if.-r.j.  (g-^^g  d'Œcuménius,  fet  à  Oxford  en  iSiO 
dans  le  tome  Vlll  de  la  Chaîne  de  Chamer.] 
'".  Il  se  trouve  en  latin  dans  le  tome  IX  de  la 
Bibliothèque  des  Pères  i\  Lyon  en  1677,  de  la 
traduction  de  Maxime  Florentin,  moine  du 
Mont-Cassin.  Surins  nous  a  donné  au  13  no- 
vembre un  discours  lalin  d'Arétas  en  l'hon- 
neur des  saints  martyrs  Samone,  Carie  et 
Abibus. 
.r.^.TcoQs-  6.  L'on  a  mis  à  la  suite  du  Commentaire 
n.u.0,1,.  d'Arétas  dans  la  Bibliothèque  des  Pères ,  62 
avis  importants  donnés  à  l'empereur  Justi- 
nien,  par  un  diacre  de  l'ÉgUse  de  Constantino- 
ple  nommé  Agapet,  que  ce  prince  avait  sans 
doute  consulté  pour  savoir  de  quelle  maniè- 
re il  devait  se  comporter  dans  le  gouverne- 
ment de  l'Empire.  On  les  imprima  en  grec  et 
on  lalin  à  Venise  en  1309 ,  à  Bâle  en  1318, 
à  Herbonne  en  4603,  à  Franker  en  1608,  à 
Francfort  en  1639,  à  Leipsick  en  1669.  Ils 
ont  aussi  été  placés  dans  les  Orthodoxngra- 
pties,  dans  le  tome  II  de  VAuctuarium  de 
Fronton -le -Duc,  [dans  Banduri ,  Imjxrium 
orientale,  et  dans  Galland,  lome  XI,  p.  233, 
d'où  ils  ont  passé  dans  le  lome  LXXXVI  de 
la  Pafrologie  grecque,  col.  H33-H86,  avec 
notices  tirées  de  Galland  et  de  Fabricius.] 
Agapet  représente  à  Justinien  que  Dieu 
l'ayant  élevé  à  la  plus  sublime  dignité  de  la 
terre,  il  doit  l'honorer  avec  plus  de  zèle  que 
tout  !e  reste  des  hommes;  qu'étant  chargé  du 
gouvernail,  il  doit  veiller  à  ce  que  le  vais- 
seau de  la  république  ne  soit  point  brisé  par 
les  Uots  de  l'iniquité;  qu'en  tout  il  doit  vou- 
loir et  agir  de  manière  à  plaire  ù  celui  de 
qui  il  a  reçu  la  puissance  ;  que  pour  rendre 
Dieu  attentif  à  ses  demandes,  il  doit  l'être 
lui-même  à  celles  de  ses  peuples  ;  que  lors- 
qu'un particulier  pèche,  le  mal  en  retombe 
sur  lui  seul,  mais  que  toute  la  répu]jli(|ue  se 
ressent  des  péchés  du  prince  ;  qu'il  est  de 
son  devoir  de  ne  point  se  laisser  aller  aux 
discours  des  llatteurs,  et  d'écouter  au  con- 
traire avec  plaisir  ceux  qui  lui  donneront 
de  bons  conseils  ;  que  la  constance  est  une 
qualité  essentielle  à  un  prince  qui  ne  doit 
point  se  laisser  abattre  par  l'advei-sité,  ni 


élever  par  la  prospérité  ;  que  lorsqu'il  s'agit 
de  la  justice,  le  riche  et  le  pauvre  doivent 
être  traités  également,  et  qu'il  est  digne  de 
l'attention  d'un  souverain  que  les  ims  n'abon- 
dent pas  en  biens,  tandis  que  les  autres  sont 
réduits  à  la  mendicité  ;  que  pour  gouverner 
dignement,  il  faut  qu'il  se  rende  redoutable 
à  ses  ennemis  par  sa  vertu,  et  aimal)le  à  ses 
sujets  par  des  sentiments  d'humanité  ;  qu'il 
doit  traiter  ses  domestiques  comme  il  désire 
d'être  traité  de  Dieu  ;  que  n'ayant  personne 
en  ce  monde  qui  puisse  le  ciuilraindrc  à  l'ob- 
servation des  lois,  c'est  à  lui  à  s'en  faire  une 
obligation.  Agapet  l'exhorte  à  fuir  la  com- 
pagnie des  méchants,  parce  qu'en  les  fré- 
quentant il  est  comme  nécessaire  de  soutfrir 
et  d'apprendre  le  mal  ;  au  lieu  qu'en  vivant 
avec  les  bons,  on  apprend  à  les  imiter,  ou 
du  moins  à  se  corriger  ;  à  ne  confier  l'ad- 
ministration des  alfaires  qu'à  des  hommes 
de  probité,  comme  devant  rendre  compte  à 
Dieu  des  malversations  de  ses  ministres  ;  ii  ne 
se  regarder  comme  bien  atfermi  sur  le  trône 
que  lorsqu'il  aura  trouvé  le  secret  de  com- 
mander à  des  hommes  qui  lui  obéiront  vo- 
lontiers; à  récompenser  la  vertu,  afin  d'en- 
gager les  méchants  à  changer  de  voies  ;  à 
garder  l'équité  dans  ses  jugements  envers 
ses  amis  et  ses  ennemis  ;  à  plus  aimer  ceux 
qui  lui  demanderont  que  ceux  qui  lui  ofl'ri- 
ront  des  présents  ;  à  se  rendre  autant  supé- 
rieur aux  autres  par  la  grandeur  et  la  beau- 
té de  ses  actions  que  par  sa  dignité  et  par 
sa  puissance  ;  à  s'occuper  des  moyens  de 
plaire  à  Dieu  de  qui  il  a  reçu  le  sceptre  de 
l'Empire;  h  implorer  souvent  son  secours, 
persuadé  que  celui  qui  est  protégé  de  Dieu 
surmonte  aisément  ses  ennemis,  et  met  à 
couvert  ses  sujets  de  leurs  insultes  ;  à  imiter 
Dieu  dans  ses  largesses,  en  donnant  libéra- 
lement à  ceux  «pii  out  besoin  ;  à  faire  misé- 
ricorde à  ceux  de  qui  il  aurait  reçu  quel- 
ques injures,  se  souvenant  qu'il  demande 
lui-même  à  Dieu  pai-don  de  ses  fautes  ;  à 
considérer  que  si  les  particuliers  sont  dignes 
de  supplices  pour  leurs  mauvaises  actions, 
c'est  une  faute  à  un  prince  de  ne  pas  faire 
même  le  bien  ;  enfin  à  s'amasser  dans  le 
ciel  une  abondance  de  richesses  par  ses  bon- 
nes ojuvres,  en  se  souvenant  que  la  mort  ne 
respectant  point  la  splendeur  des  dignités 
mondaines,  il  sortira  un  de  cette  vie  pour 
aller  rendre  compte  en  l'autre  de  toutes  ses 
actions. 
7.  [Dans  le  septième  concile  général,  le- 


CHAPITRE   XXI.  —  riACIUS,  l'^VI^OITR  riK  MII,AN,  KTC. 


[m'  siècle.] 

nu  i"»  Nii'('(>,  l'nii  787.  pniir  l;i  ili^'cnso  de; 
saillies  iiiiauos,  on  lut  un  IVimnicnl  do  Coiis- 
tanlin,  diacre,  g;irdi(Mi  ili-s  cliarlos  et  ,jiii,'0 
des  canses  eccldsiasliqucs  do  l'i<'ulise  de 
Constanlinnple,  k  la  lonanpe  des  saints  mar- 
tyrs. Ce  Gonslanlin,  dont  aucun  auteur  ne 
donne  la  vie,  paraît  avoir  vécu  sous  Jusli- 
nien,  vers  le  vi'  siècle.  On  regrettait  vive- 
ment de  ne  pus  posséder  ce  magnifique  lé- 
raoignaii'e  de  la  foi  de  rKi^lise  ;  or,  c'est  pré- 
cisément ce  que  le  savant,  et  nous  pouvons 
le  dire ,  rinfatigal)le  et  heureux  cardinal 
Mai  a  découvert  dans  la  bibliothèque  du  Va- 
tican. Ce  panégyrique  est  comme  une  liis- 
tnire  sommaire  des  persécutions.  L'auteur  y 
expose  les  questions  posées  par  les  tribu- 
naux païens,  les  réponses  et  les  discussions 
des  martyrs  avec  leurs  juges  ;  les  diU'érents 
genres  de  tourments  qu'ils  ont  soufferts,  les 
généreuses  exhortations  des  martyrs,  leur 
condamnation  l'i  mort,  leurs  actions  de  grâ- 
ces, les  exhortations  qu'ils  adressaient  aux 
païens,  l'éloge  et  la  force  des  martyrs.  L'au- 
teur termine  par  une  exhortation  aux  fidè- 
les, par  la  dédicace  aux  martyrs  du  Christ. 
C'est  une  de  ces  découvertes  qui  doivent 
consoler  le  savant  éditeur  de  ces  travaux. 
Les  Annales  de  philosophie  ont  donné  une 
traduction  de  ce  précieux  discours  dans  leur 
tome  XI  (3"  série).  Le  traducteur  est  M.  Lo- 
rain.  Voici  comment  il  juge  celte  pièce  im- 
portante :  u  Une  composition,  à  laquelle  on 
faisait  l'honneur  de  la  citer  publiquement 
dans  un  concile  universel,  devait  avoir  une 
puissance  et  une  renommée  contemporai- 
nes. De  plus,  il  s'attache  à  cette  relique  re- 
trouvée ce  genre  de  puissant  intérêt  que 
l'on  applique  toujours,  indépendamment  des 
tftches  de  lu  forme,  aux  monuments  des  pre- 
miers siècles  de  ri']glise,  dans  ces  temps  où 
le  christianisme  était  si  fervent,  si  coura- 
geux, si  noble,  si  convaincu,  si  magnanime. 
Qui  n'a  pas  fait  celle  expi'rience  en  lisant 
les  l'èies?  Malgré  quelques  étrangetés  de 
style,  malgré  le  jeu  des  subtilités  grecques, 
et  quelques  métaphores  violentes  et  intra- 
duisibles, il  y  a,  dans  le  panégyrique,  du 
mouvement,  de  l'énergie,  de  l'élan,  une  for- 
me dramatique  et  animée.  Le  dialogue  en- 
tre les  juges  et  les  chrétiens  est  original  et 
s'élève  jusqu'à  l'éloquence.  Enfin,  comme 
étude  littéraire,  comme  expression  histori- 
que des  plus  hautes  pensées,  des  idées,  des 
passions,  des  mœurs,  du  style  d'une  épo- 
que grecque  et  clirétienne,  la  découverte  du 


267 


pauégyriipie  doit  .-illirci-  l'alIcrirMin  et  l'es- 
lime  des  hommes  instruits  (pii  aiiiieul  l'an- 
li(piité  et  les  grands  souvenirs  du  christia- 
nisme. )) 

8.  Voici  la  manière  énergique  dont  Cons- 
tantin réfute  le  sym))olisme  païen  :  «Que  ">'*""■ 
vous  aussi,  ilisent  les  martyrs,  et  par  ima- 
gination ou  par  allégorie,  vous  représentiez 
symboliquement  les  dieux  sous  la  forme  hu- 
maine, nous  le  comprenons;  mais  pourquoi 
vous  faites-vous  un  dieu  h  tète  de  chit^n  ;  un 
dieu  avec  des  cornes  ou  avec  des  pieds  d'ani- 
mal; un  dieu  moitié  homme  moitié  bcte;  un 
dieu  hermaphrodite  enfin, tandis  que  les  idées 
des  choses  divines,  alors  même  qu'où  veut  leur 
donucrune  forme  sensible,  doivent  conserver 
une  entière  dignité,  si  nous  ne  voulons  abso- 
lument compromettre  les  espérances  de  notre 
salut'?  Et  n'est-il  pas  impie,  et  tout  à  fait  in- 
digne d'hommes  raisonnables,  de  désigner 
Dieu  sous  de  honteux  symboles,  d'imposer 
l'aspect  d'un  chien  à  l'essence  excellente  et 
première,  et  d'alioyer  ainsi,  s'il  est  permis 
de  le  dire,  contre  la  Providence?  Pour  nous, 
dire  que  Dieu  est  plus  vieux  ou  plus  jeune, 
c'est  dire  une  chose  détestable  :  car  ce  lan- 
gage ne  convient  qu'aux  créatures  tempo- 
relles. Mais,  dans  l'essence  éternelle  et  qui 
n'a  poiut  commencé,  il  n'est  rien  qui  se 
puisse  mesurer  par  les  proportions  humai- 
nes; cl  encore  bien  que,  à  cause  de  l'infir- 
mité de  notre  nature,  nous  donnions  quel- 
quefois à  Dieu,  et  non  sans  convenance,  des 
noms  humains.  Dieu  n'en  est  pas  moins  au 
delà  de  tous  les  temps,  au-dessus  de  tout 
commencement  et  de  toutes  les  propriétés 
que  l'on  peut  concevoir  dans  les  choses 
créées.  Si  donc  nous  voulons  faire  un  noble 
et  sincère  usage  de  notre  raison,  nous  ne 
concevrons  pas  le  Père  sans  le  Fils,  ni  le 
Fils  sans  le  Père  ;  de  même  que  nous  ne 
concevons  pas  le  feu  sans  son  écla!,  ni  le  so- 
leil sans  ses  rayons,  pour  exprimer  des  cho- 
ses incompréhensibles,  autant  qu'il  est  pos- 
sible, sous  une  brève  image,  infiniment  en- 
core éloignée  de  la  vérité.  » 

9.  C'est  en  ces  termes  qu'il  fait  l'éloge  des 
martyrs  :  «  0  saintes  âmes  !  ô  corps  sacrés  ! 
ô  précieux  et  divin  trésor, plus  inestimables 
que  l'or  et  le  topaze!  0  demeures  du  Christ, 
habitacles  de  l'Esprit,  vases  des  vertus  !  Oui, 
vous  retrouverez  un  jour,  après  la  décom- 
position de  ce  misérable  mélange,  tout  ce 
qui  vous  appartenait  dans  les  éléments  maté- 
riels dont   se  formait  voire  corps  à  sa  nais- 


U^rul-.tlon 


ÉiO£0  Jos 
mThrs. 


268 


HISTOIRE  GÉNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


sance  ;  mais  vous  les  recouvrerez  sanctifiés 
par  la  récompense  immortelle  que  vous  au- 
rez reçue!  0  multitude  bienheureuse!  0 
splendeur  multiple  qui  éclate  comme  dans 
une  âme  unique  !  Quels  cliauts  de  tiiomplie 
vous  célébreront  dignement,  ô  vous  dont  la 
victoire  a  surpassé  les  forces  de  la  nature  ! 
De  quels  trophées  de  mémoire  éternelle,  de 
quels  [isaumes,  de  quels  hymnes,  de  quels 
cantiques  spirituels  ceindrons-nous  vos 
fronts,  comme  de  magnifiques  couronnes  im- 
mortellemcnt  fraiches  et  vertes.  Vous  avez 
honoré  vos  parents ,  selon  le  précepte  é\an- 
gélique  :  car  vous  avez ,  par  vos  soutl'ran- 
ces ,  effacé  la  honte  de  vos  ancêtres,  déli- 
vré vos  pères  du  déshonneur,  et  rendu  à  la 
nation  humaine  la  joie  à  la  place  du  deuil. 
Vous  avez  changé  la  terre  en  ciel ,  et  vous 
êtes  comme  l'ardent  serein  ,  comme  l'au- 
rore de  la  justice,  et  comme  des  étoiles  qui 
brillent  en  tout  lieu  ;  car  tous  les  pas  que 
vous  faites  sont  dans  la  voie  di'oite  des 
saints  commandements.  Ni  un  père  désolé, 
ni  une  mère  s'arrachant  les  cheveux,  ni  des 
enfants  poussant  des  cris  de  douleur,  ni  des 
parents  éplorés,  ni  des  amis  gémissants, 
rien  n'a  pu  amollir  votre  fermeté.  Vous  n'a- 
vez pas  seulement  combattu  avec  vos  persé- 
cuteurs ,  vous  avez  encore  lutté  avec  la  na- 
ture elle-même,  et  vous  avez  vaincu  cette 
invincible  nature  qui  fléchit  et  attendrit  jus- 
qu'aux bètes  féroces,  jusqu'à  la  cruauté  des 
leptiles  empoisonnés.  Vous  avez  vaincu  la 
nature  qui  commande  tyranniqucmont  à 
tous  les  êtres  vivants,  par  une  force  inté- 
rieure, partout  et  toujours  nécessaire.  Et 
cependant  vous  avez  formé  entre  vous,  ô 
martyrs,  une  parenté  léciproque  par  les 
liens  de  vos  communes  soulfrances,  et  vous 
vous  êtes  intimement  unis  en  mêlant  votre 
sang  au  sang  dans  une  communion  de  sup- 
plices. Ni  la  soif  des  richesses,  ni  l'amour 
des  félicités,  n'ont  atl'aibli  votre  amour  en- 
vers Dieu;  pour  vous,  la  probité  dans  la  foi 
a  remplacé  l'or,  et  l'esprit  d'humilité  vous  a 
tenu  lieu  de  toutes  les  richesses.  L'opprobre 
du  Christ  a  eu  plus  de  prix  à  vos  yeux  que 
les  trésors  du  monde  :  car  votre  regard 
s'est  attaché  sur  la  récompense  future,  et 
vous  saviez  bien  que  vous  possédiez  dans  les 
cieux  une  essence  supérieure  et  impérissa- 
ble. Au  lieu  des  vanités  de  la  gloire,  vous 
avez  choisi  l'ignominie  pour  le  Christ  ;  an 
lieu  des  joies  folles,  la  contrition  du  coMir; 
au  lieu  de  la  satiété  du  cœur,  la  continence. 


Vous  avez  la  beauté  du  corps  dans  la  mor- 
tification des  désirs  ;  et  votre  force  a  été  la 
charité  dans  la  faiblesse  et  la  mort.  » 

10.  «  En  quelques  heures,  vous  avez  ac- 
compli de  plus  péniljles  travaux  dans  la  vigne 
de  Dieu,  que  ceux  à  qui  l'on  donne  le  nom  de 
patriarches.  Vous  vous  êtes  placés,  par  vos 
œuvres,  au-dessus  de  votre  premier  père  : 
car  vous  avez  gardé  les  commandements  du 
Christ.  Vous  avez  oÛert  au  Seigneur  un  sa- 
crifice plus  saint  que  celui  d'Abel,  l'holo- 
causte  de  vos  âmes.  Aussi  avez-vous  été 
transportés  vers  une  immortalité  plus  belle 
que  celle  d'Hénoch,  sur  une  arche  plus  so- 
Hde  que  celle  de  Noé,  composée  qu'elle  est 
avec  les  matériaux  incorruptibles  de  la  ver- 
tu. C'est  dans  celte  arche  que  votre  âme 
s'est  préservée  de  réloulfemcnl  des  idoles. 
Abraham  a  reconnu  le  mystère  de  la  Trinité 
dans  son  type,  mais  voilé  encore  et  couvert 
d'ombre  ;  mais  vous,  dans  les  combats  que 
vous  avez  soutenus,  pour  la  Trinité,  vous 
vous  êtes  faits,  d'une  voix  retentissante,  les 
héros  éclatants  de  la  vérité.  Votre  sacrifice 
a  été  supérieur  à  celui  d'Isaac,  et  par  votre 
meurtre  vous  avez  accompli  un  rite  sacré. 
Par  la  sincérité  de  votre  but.  vous  avez  sur- 
passé la  vie  loyale  de  Jacob.  L'excellence  de 
votre  vie  a  été,  selon  le  saint  précepte,  sem- 
blable à  l'innocence  des  colombes.  C'est 
vous  qui  avez  bâti  l'Église,  comme  un  illus- 
tre édifice,  en  présentant  .'i  Dieu  le  Père  la 
pieuse  ofi'rande  de  vos  blessures,  et  en  im- 
molant sur  l'autel,  au  lieu  d'un  chevreau, 
l'humilité  de  votre  corps.  C'est  pourquoi 
vous  avez  reçu  de  Dieu  la  bénédiction,  c'est- 
à-diie  la  vie  éteruelle.  \'ous  avez  vaincu  Jo- 
seph en  chasteté,  vous  qui  avez  repoussé  la 
doctrine  des  faux  dieux,  doctrine  corrompue 
dans  ses  actes  comme  dans  ses  images,  et 
qui  avez  abondonné  à  des  tyrans  débauchés 
et  pervers  le  vêtement  qui  vous  enveloppait, 
c'est-à-dire  votre  corps.  Toutes  les  épreuves 
de  Job,  vous  les  avez  subies;  et,  de  plus 
que  lui,  vinis  avez  enduré  les  supplices  jus- 
qu'à la  mort  elle-même.  Vous  avez  eu  un 
plus  grand  honneur  que  Moïse  :  car,  après 
avoir  reçu  et  gardé  la  loi  de  grâce  et  de  vé- 
rité, vous  avez  traversé,  à  pied  ser,  l:i  mer 
de  l'idolâlrio  rougic  de  votre  sang,  el  vous 
êtes  arrivi's  dans  le  pays  de  promission, 
dans  la  céleste  Jérusalem.  El  déjà,  aupara- 
vant, vous  aviez  prouvé  vos  forces  à  vos  en- 
nemis par  le  grand  nombre  de  signes  el  de 
miracles  qui  avaient  éclaté  dans  le  désert, 


[vi-sitcLE.]         CHAPITRE  XXI.  —  DACIUS, 

c'est-'"i-(lir(5  (huis  la  vio  religieuse;  et  par 
votre  luoil,  vdiis  avez  ('cras('  el  ('((uille  sous 
vos  [iicils  les  serpents  insidieux  (|ui  [)onrsui- 
vaient  les  hoiuines  de  leurs  morsures  veni- 
meuses. .\u  lieu  de  la  robe  d'.Aaron,  faite  de 
iiiaiu  d'Iioiuuie,  vous  vous  êtes  rcv(Mus,  eoni- 
me  il  sied  aux  saints  ,  de  la  justice  du  (ilirist. 
Ce  n'esl  point  dans  le  sang  des  agneaux, 
mais  dans  votre  propre  sang,  que  vons  avez 
lavé  voire  peuple.  Au  bruit  de  vos  dogmes, 
comme  au  son  retentissant  de  la  trompette, 
sont  tombées  les  murailles  des  impies,  les 
villes  ennemies,  les  langues  parleuses  et 
la  vainc  sagesse  de  vos  adversaires,  et  vous 
avez  ét(^  plus  célcMires  que  le  clief  Josué. 
Vous  vous  êtes  montrés  encore  de  plus 
saints  et  plus  grands  ministres  de  Dieu  que 
Samuel  :  car  ce  n'est  pas  votre  mère  qui  vous 
a  otlerts  ;\  Dieu,  c'est  vous-mêmes  qui  vous 
êtes  donnés,  et  vous  ne  vous  êtes  pas  livrés 
pour  vivre,  mais  pour  mourir,  afin  de  vivre 
dans  l'éternelle  vie.  Ce  n'est  pas  avec  une 
fronde,  comme  David,  mais  avec  une  pierre 
réprouvée  par  les  bommes,  que  vous  avez 
fait  tomber  aux  pieds  du  Cbrist  le  symboli- 
que Goliath  intellectuel.  Après  avoir,  par 
vos  périls,  brisé  la  tête  du  démon  orgueil- 
leux, comme  des  triompbateurs  victorieux 
et  couronnes  de  leurs  brillants  exploits, 
vous  êtes  enfin  entrés  dans  les  portes  du 
ciel,  par  un  essor  plus  sublime  que  celui 
d'HIie  :  portés  par  vos  vertus  comme  par  un 
char  divin,  et  appuyés  comme  sur  des  ailes 
sur  la  force  de  vos  œuvres,  votre  ascension 
a  été  plus  facile  et  plus  durable  que  celle  du 
Prophète  assis  dans  son  char.  Et  mainte- 
nant, enfin,  avec  le  chœur  innombrable  des 
anges,  et  dans  l'immense  assemblée  des  pre- 
miers-nés des  hommes,  vous  présidez  aux 
chœurs  célestes  devant  le  véritable  taber- 
nacle. » 


S,  ÉVI'IOLIE  DE  MILAN,  ETC. 


2G9 


11.  ((  Aussi  n'nandr/.-vniiK  sur   vos  frères       l'rijro  um 
uiuî  part  de  la  s|il('nd(Mir  que  vous  pmsez 

dans  le  sein  th;  la  lumièr(!  spirituelle.  Car 
vous  êtes  préposés  à  l'égard  du  genre  hu- 
main tout  entier,  comme  les  tuteurs  des 
âuies,  les  méd(!cinsdcs  corps,  la  colonne  ilc 
la  toi,  la  consoniination  du  sacerdoce,  la  ré- 
mission des  péchés,  le  fondement  et  l'appui 
de  l'Église,  le  remède  des  maladies,  le  re- 
j)Os  des  voyageurs,  le  gouvernail  des  navi- 
gateurs, la  ressource  des  indigents;  vous 
soutenez  ceux  qui  combattent,  vous  relevez 
ceux  qui  tomheni,  vous  rendez  le  courage  à 
ceux  qui  se  ]iiaignent,  vous  guidez  ceux  qui 
s'égarent,  vous  gardez  ceux  qui  marchent 
dans  le  droit  chemin,  vous  êtes  la  consol-i- 
lion  des  affligés,  et  pour  tous  un  puissant 
secours  et  un  ferme  appui  d'inébranlable 
espérance.  » 

12.  «  Et  vous,  ô  brebis  saintes  qui  nous  Kiimriation 
écoulez,  si  nous  sommes  résolus  h  honorer 
dignement  les  martyrs,  soutenons  des  luttes 
pareilles  aux  leurs,  résistons  aux  séduisan- 
tes tlatteries  des  passions,  et  répandons  un 
déluge  de  larmes,  comme  ils  ont  versé  des 
ruisseaux  de  sang.  Que  le  jeûne  réduise  no- 
tre corps,  et  comprime  les  vils  instincts  de 

la  matière.  Que  les  ai-deurs  des  vices  soient 
étouffées  sous  l'inextinguible  lumière  des 
bonnes  actions.  Tranchons  pieusement  la 
tyrannie  de  l'impiété  et  du  péché  avec  le 
glaive  à  double  tranchant  de  la  doctrine  et 
de  la  vraie  foi ,  et  laissons  nos  lèvres  annon- 
cer librement  la  juste  loi  de  Dieu,  do  sorte 
que,  après  avoir  imité,  dans  tous  les  temps 
de  cette  vie,  les  luttes  des  martyrs,  nous 
obtenions  un  prix  égal  à  celui  qui  leur  fut 
donné.  » 

[La  l'atrologie  grecque,  tome  LXXXVIH, 
col.  .477-328,  reproduit  le  discours  du  diacre 
Constantin  avec  la  version  latine  d'Ang.  Mai.] 


270 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECGLESTASTIQUES. 


CHAPITRE   XXII. 

Zachavie ,  évêque  de   Mitiîène  [après  536J  ;  Théodore  et  Cyrille,  évêques 

de  Scythople. 

[Écrivains  grecs  du  vi«  sii'cle.li 


Zieliarlc, 
évCque  dt  Ui- 

ItlèDA      :       sf: 

«ni... 


Toui.  IV 

CiDCll.       JjJi^. 


l.Zachaiie,  surnomme scliolastiquc,  ou  avo- 
cat, de  la  profession  qu'il  en  faisait,  éliulia  les 
belles-leltresà  Alexandrie,  avec  le  philosoplie 
Amraonius.  Et.mt  passé  delà  àBérylc,  il  s'y 
appliqua  à  l'étude  de  la  jurisprudence.  Sa 
vertu  et  son  savoir  le  firent  ensuite  appeler 
au  gouvernement  de  l'Éulise  de  Mitili'uc.  Il 
assista,  en  qualité  d'évèque  de  cette  ville,  au 
concile  de  Constanlinople ,  en  530,  sous  le 
patriarche  Mennas,  et  fut  un  des  commissai- 
res députés  pour  chercher  Anthime,  lui  si- 
gnifier ce  ijui  avait  élé  fait  contre  lui,  el  le 
citer  à  comparaître  devant  le  concile  dans 
trois  jouis,  en  lui  offrant  le  pardon  s'il  vou- 
lait satisfaire  à  ce  qu'on  demandait  de  lui. 
On  ne  sait  combien  d'années  Zacliarie  sur- 
vécut à  ce  concile.  Nous  avons  de  lui  deux 
traités,  l'un  est  un  dialogue  sur  la  création 
du  monde,  dans  lequel  il  fait  voir  contre  les 
philosoplies  païens,  que  le  monde  n'est 
point  éternel,  qu'il  a  été  créé,  et  qu'il  peut 
être  détruit  à  la  volonté  de  celui  qui  l'a  for- 
mé de  rien  :  il  composa  ce]  dialogue,  étant 
encore  à  liérylc.  L'autre  est  une  rcfiilatiou 
du  sentiment  des  manichéens  sur  l'existence 
de  deux  principes,  l'un  bon,  l'autre  mau- 
vais. Le  premier  de  ces  traités  fut  imprimé 
à  Leipsick  en  lCo4,  en  grec  et  en  latin,  delà 
traduction  de  Jean  Tarin  avec  les  A'otes  de 
Barthins.  Il  se  trouve  aussi  dans  le  tome  I" 
de  VAuctiiarium  de  Fionlon-le-Diic,  et  avec 
la  P/iiloailic  d'(ti  ii;tMie,  inqiriinée  à  i'aiiscn 
1G18  et  10:2 i.  L'autre,  qui  a  été  traduit  par 
Turrien,  se  litautoine  \  des  Anciennes  leçons 
de  Canisius,  mais  seulement  en  latin.  On  les 
a  mis  tous  deux  dans  le  tuine  IX  de  la  Bi- 
bliothkpie  des  Pères  à  Lyon,  en  1077  ;  mais 
le  Dialogue  sur  la  création  du  monde  esl  de 
la  version  de  Gilbert  Génébrard,  professeur 
royal  de  la  lani^iuc  hébraïque  A  Paris.  [Ces 
deux  traités  se  Irouvenl  aussi  dans  Galland, 
tome  XI,  page  2UG,  et  dans  le  tome  LXXXV 


de  Vd  Pafrologie  grecque,   col.   1044,  d'après 
Galland.] 

Pour  montrer  que  le  monde  n'est  point 
éternel,  il  dit  que  cela  parait  évidemment 
par  sa  nature  même  qui  est  composée  de 
différentes  parties  sujettes  à  la  dissolution  ; 
ce  qui  ne  sérail  pas  s'il  était  éternel.  Il 
ajoute  qu'en  le  disant  coélernel  à  Dieu,  il 
faut  aussi  le  dire  égal  à  Dieu  en  honneur; 
ce  qui  est  impie,  puisqu'on  ne  peut,  sans 
impiété,  rendre  à  un  corps  matériel,  sensi- 
ble et  visible,  le  même  honneur  qu'à  un  être 
qui,  non-seulement  ne  peut  être,  à  cause  de 
son  infinité,  renfermé  dans  un  lieu,  mais 
qui  est  encore  supérieur  à  tous  les  êtres  que 
nous  connaissons.  Les  philosophes  païens 
répondaient  qu'eu  soutenant  le  monde  éter- 
nel, ils  ne  prétendaient  pas  qu'il  fût  pour 
cela  dans  le  même  degré  d'honneur  que 
Dieu.  «  L'ombre  du  corps,  disaient-ils,  estco- 
élernelle  au  corps,  et  toutefois  il  ne  s'ensuit 
pas  que  l'ombre  et  le  corps  soient  dignes 
d'un  honneur  égal.»  Zacbarie  répond  que 
cet  exemple  no  prouve  licn.  Premièrement, 
parce  que  l'ombre  suit  nécessairement  le 
corps,  qu'il  le  veuille  ou  non.  Or,  on  ne 
peut  dire  que  le  monde  soit  nécessairement, 
en  sorte  qu'il  existe  même  malgré  la  vo- 
lonté de  Dieu  ;  autrement  ce  serait  mal  à- 
propos  que  l'on  donnerait  à  Dieu  le  nom  de 
cause.  En  second  lieu,  ce  n'est  pas  le  corps 
sou!  qui  produit  l'ombre,  c'est  aussi  la  lu- 
mière, étant  nécessaire  pour  faire  ombre, 
que  le  corps  se  trouve  à  côté  de  la  lumière, 
de  façon  qu'il  se  trouve  entre  la  lumière  et 
l'ombre.  Les  philosophes  se  récriaient  sur 
la  beauté  de  l'univers,  sur  les  proportions, 
sur  l'harmonie  de  ses  parties.  Zacbarie  leur 
demande,  s'ils  ne  trouvaient  pas  en  particu- 
lier que  l'homme  l'ùt  dans  sa  consliuclion 
quelque  cho<e  d'admirable;  et,  passant  de  la 
figure  du  corps  aux  qualités   de  l'esprit,  Q 


[vi«  SIÈCLE.]     CIIAlMTItK  XXII.  —  Z.\C.II.MUJ 

leur  tleiuaiulc  encore  s'ils  ne  trouvuicnt  pas 
beaux  Soerale,  Platon,  Alcibiade  et  Aristote. 
Coiniuc  ils  ne  pouvaient  en  disconvenir,  il 
conclut  que,  tous  ces  ^'rands  luiminos  étant 
morts,  il  n'y  a  pas  plus  do  raison  d'attribuer 
au  monde  l'éternité,  qui  est  un  attribut  pro- 
pre et  essentiel  à  Dieu.  Le  traité  conlvi;  les 
Miinic/icens  est  tr^s-court  ;  mais  en  même 
teuii)s  très-métapbysiijue  et  très-eniljarrassé. 
Les  nianicbéens  admettant  deux  principes, 
l'un  bon  et  l'autre  mauvais,  il  fallait  néccs- 
saircnuMit  qu'ils  lussent  opposés.  C'est  dans 
celle  supposition  que  Zacliarie  vaisonne 
ainsi  :  «  Si  vous  dites  que  le  bien  est  une 
substance,  qu'il  est  un  principe,  qu'il  est  in- 
né, non  engendré  et  éternel,  il  faut  nécessai- 
rement que  vous  disiez  que  le  mal  n'est  point 
une  substance,  qu'il  n'est  point  un  principe, 
qu'il  est  engendré  et  temporel  :  car  si  le  bien 
elle  mal  avaient  toutes  ces  cboses  commu- 
nes, ils  ne  seraient  pas  contraires.»  Il  ajoute 
qu'ils  ne  peuvent  pas  même  dire  que  ces 
deux  principes  soient  contraires  en  substan- 
ce, parce  qu'il  n'y  a  rien  de  contraire  à  la 
substance,  si  ce  n'est  par  rapport  à  ses  mo- 
difications et  à  ses  accidents  :  d'où  vient 
qu'il  n'y  a  rien  de  contraire  à  Dieu  qui  est  le 
premier  et  le  seul  bien,  parce  qu'il  est  bon 
substantiellement,  et  qu'en  lui  les  modifica- 
tions et  les  accidents  n'ont  point  de  lieu. 

[On  trouve, dans  le  tome  X  delaScript.  vet. 
nova  cullect.,  pag.  332-360,  et  dans  le  tome 
LXXXV  de  h\  Pdtrolo'jie  grecque,  col.  1143- 
1178,  dix-neufchapitres en  syriaque, de  l'Bis- 
toire  ecclésiastique  composée  par  Zacharie  et 
qui  est  perdue,  avec  des  fragments  sur  les  ori- 
gines et  les  édifices  de  Home.  Le  même  ou- 
vrage est  traduit  en  latin,  <i  la  page  361-388. 
Les  fragments  commencent  à  la  mort  de  Xes- 
torius.  On  y  parle  ensuite  de  Dioscore,  de  Pro- 
tère,  de  Juvénal  et  de  Tliéodose,  de  Pierre 
ibérien,  qui  devint  évêque  de  Gaza,  du  moi- 
ne Salomon,  de  la  mort  de  Zenon  et  de  l'élé- 
vation d'Anastase.  Le  cliapitre  viii  traite  de 
la  vision  de  Jean  le  scbolastique,  frère  de  Do- 
nat,  au  sujet  de  l'empire  d'Anastase  ;  au  ix'= 
il  est  question  du  siège  de  la  ville  d'-\iaida 
en  Mésopotamie  par  les  Perses;  le  x"  parle 
du  rachat  de  cette  ville.  La  fondation  de  la 
ville  de  Dara,  Alarin  d'.\pamée,  l'éclipsé  de 
soleil  qui  ariiva  à  ceite  époque,  Ariane, 
femme  de  Zenon  et  ensuite  de  l'empereur 
Auastase  font  la  matière  des  chapitres  xi  et 
XVI.  Dans  celui-ci  l'auteur  raconte  le  martyre 
des  saints  confesseurs  homérites,  et  il  donne 


:,  KVKOI  E  |)H  .MITILIC.VE,  ETC.  271 

la  lettre  qu'écrivit  A  ce  sujet  Siméon,  évoque 
des  chrétiens  en  Peise,  à  Siméon,  ;,l,l,é  de 
Gabula,  la  sixième  année  de  Justin.  Le  xvii" 
chapitre  contient  un  prologue  de  saint  Mara 
ou  Marin,  évêque  d'Amida,  sur  l'Évangile  et 
sur  l'économie  de  Jésus-Christ  en  sonhicar- 
nalion.  Le  xviir'  traite  des  évc''netn('nts  qui 
curent  lieu  sous  l'empereur  Juslitiien.  Le  .\i.\." 
contient  un  extrait  de  l'Kpitrede  Juhen  à  Sé- 
vère et  de  l'Épitre  de  Sévère  à  Julien.  Maï 
fait  observer  que  les  deuxième  et  troisième 
livres  de  Vllistoire  d'Hvagie  contieimcnt 
plusieurs  fragments  en  grec  de  Vllistoire  ec- 
clésiastique de  Zacharie.  L'éditeur  a  donné  en 
syriaque  les  fragments  sur  l'origine  de  Home 
et  sur  ses  édifices,  mais  il  ne  les  a  pas  tra- 
duits en  latin  parce  qu'il  ne  les  croit  pas 
l'œuvre  de  Zacharie  ',  d  donne  cependant 
la  traduction  de  quelques  fragments  dans  la 
Préface  du  x=  volume.  Dans  l'énuméralion 
des  édifices  qui  ornent  la  ville  de  Rome,  on 
remarque  «  vingt-quatre  églises  des  apo- 
((  très,  deux  magnifiques  basiliques  où  habite 
((  l'Kmpereur.et  où  s'assemblent  tous  lesjours 
(lies  sénateurs;  quatre-vingts  grandes  sta- 
«  lues  des  dieux  en  or  et  soixante-six  d'i- 
ci voire;  quarante-six  mille  six  cent-trois  mai- 
(i  sous  ;  mille  sept  cent  quatre-vingt-dix-sept 
«palais;  mille  trois  cent  cinquante-deux 
«fontaines;  trois  raille  sept  cent  quatre- 
«  vingt-cinq  statues  d'airain  d'empereurs  et 
«d'autres  chefs;  vingt-cinq  statues  d'airain 
«offrant  !a  figure  d'Abraliam,  de  Sara  et  des 
«rois  delà  famille  de  David,  que  "Vcspasien 
«avait  apportées  à  Rome,  après  la  ruine 
«  de  Jérusalem,  avec  les  portes  et  les  au- 
«tres  monuments  de  cette  ville;  trente-et- 
«  un  théâtres;  deux  maisons  destinées  aux 
«accoucheuses,  quatre pourles  accouchées; 
«  deux  ceut quatre-vingt-onze  prisons;  deux 
«  cent-ciuquante-quatre  latrines  près  des 
«  lieux  destinés  aux  jeux  publics  ;  trente-sept 
«  portes  ;  le  tour  de  la  ville  a  vingt-et-un  mille 
«  six  cent  trente-six  pieds,  ce  qui  fait  quatre 
«  mille  pas,  etc.,  etc."» 

2.  [Théodore  succéda  à  Théodose,  évêque   i-^lTt'V. 
de  Scytople,  qid  avait  assisté  au  concile  de  Je-  g''r°|'ifL«i''^I; 
rusalem  tenu  sous  Pierre,  patriarche  de  cette   sïii.  '^    " 
ville,  contre  .\uthime  et  d'autres  hérétiques. 
Il  se  joignit  aux  oiigéuistes  dans  les  tumultes 
qui  eurent  lieu  après  la  mort  de  saint  Sabas. 


'  Pag.  388,  uote.  [L'éditeur.) 
'Voyez  Talili'  alpliabéliiiue  iles  auteurs  découverts 
pur  le  cardiual  Mai,  par  Buunetty.  (L'Éditeur.) 


212 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  ALTEUttS  ECCLESIASTIQUES. 


Scilbo|.l>. 


Eulh.  V.I.I- 
10...  11  M..- 
num.    Cotet., 


ye.  339. 


On  a  de  lui  un  écrit  sur  les  erreurs  d'Origène. 
Théodore,  levenu  à  de  meilleurs  scnlimenls, 
pn'seiita  cet  écrit  vers  l'an  ;")33  ;\  Justinienet 
iiux  patriarches  Eutychès,  Apollinaire,  Doui- 
ninus  et  Eustocbius.  Montraucon  In  publié 
d'après  un  luannsciil  de  la  Hibliollièfiiie  Cois- 
lin.  On  le  trouve  dans  le  tome  LX.XXVI  de  la 
Patrologie  grecque  d'après  Galland,  Biblioth. 
vet.  l'ut.,  tome  XI,  pag.  204.  Les  savants  ne 
s'accordent  pas  entre  eux  pour  décider  si 
Origène  a  vraiment  enseigné  toutes  les  er- 
reurs signalées  dans  cet  opuscule.] 

3.  Les  moines  de  la  Laure  de  saint  Sabas, 
ne  pouvant  soufTrir  que  les  évêques  de  Pa- 
lestine eussent  condamné  Origène,   eu  ap- 
prouvant les  actes  du  cinquième  concile  dans 
celui  qu'ils   tinrent  à  Jérusalem  en  354,  se 
séparèrent  de  la  communion  de  l'Église  ca- 
tholique. Quelques  etlbrts  que  fit  le  patriar- 
che Eustochius,    il  ne  put  les  ramener,  et  il 
fallut  employer  l'autorité  de  l'empereur  Jus- 
tinien,  qui    les  fit  chasser,  et   de  leur  Laure 
et  de  toute  la  province.  Il  mit  à  leur  place 
120  moines  catholiiiues,  du  nombre  desquels 
était  Cyrille,    surnommé  de  Scythople,  du 
nom  d'une  ville  de  Palestine,  où  il  avait  pris 
naissance.  A  l'âge  de  seize  ans,  il  commen- 
ça dans  cette  ville  même  à  pratiquei-  les  exer- 
cices de  la  vie  monasti(iue.  Il  en  sortit  quel- 
que temps  après  pour  aller  à  Jérusalem  visi- 
ter les  saints  lieux.  Sa  mère,  eu  partant,  lui 
ordonna  de  se  mettre  sous  lu  discipline  de 
saint  Jean-le-Silencieux,  qui,  après   l'avoir 
gardé  quelque  temps,  l'envoya  au  monastère 
de  saint  Euthymius;  il  y  fut  reçu  au  nombre 
des  moines  par  l'abbé  Léonce,  qui  avait  été 
chargé  du    gouvernement  de  ce  monastère 
vers  l'an  542;  il  passa  delà  dans  la  Laure  de 
saint  Sabas,  près  deTbécué,  qu'on  appelait 
la  nouvelle,  pour  la  distinguer  de  la  grande 
Laure,  qui  portait  aussi  le  nom  de  ce  saint.  Il  y 
avait  déjàdeuxansqu'ilydemeurait,  lorsqu'il 
entreprit  d'écrire  la  vie  de  saint  Euthymius  et 
celle  de  saint  Sabas.  Ainsi,  c'était  veis  l'an 
556,  puisqu'il  n'alla  dans  cette  nouvelle  Lau- 
re que  quelque  temps  après  la  tenue  du  cin- 
(]uièuie  concile  général  assemblé  à  Conslan- 
linople.  Il  avait  eu  pendant  ce  séjour,  le  moyen 
de  s'informer  des  circonstances  de  la  vie  de 
saint  Sabas,  auprès  de  ceux  qui  en  étaient 
instruits,  pour  en  avoir  été  témoins  oculaires, 


comme  il  avait  appris  celle  de  la  vie  de  saint 
Euthymius  dans  le  temps  qu'il  demeurait 
dans  son  monastère. 

4.  Nous  l'avons  dans  le  tome  II  des.^/onK- 
ments  de  l'Eglise  grecque,  imprimés  à  Paris, 
en  IC81,  par  les  soins  de  M.  Cotelier.  Saint 
Euthymius  naquit  sous  le  règne  de  l'empe- 
reur Valence,  d'une  manière  toute  miracu- 
leuse. Sa  mère  qui  se  nommait  Dionyse,  af- 
fligée de  se  voir  stérile,  alla  avec  Paul  son 
mari,  à  l'Église  du  martyr  saint  Polyeucte, 
qui  était  pioche  de  la  ville  de  Mélilène  sur 
l'Euphrate,  où  ils  faisaient  leur  demeure.  Us 
prièrent  l'un  et  l'autre  le  saint  mnrtyr  de 
leur  obtenir  de  Dieu  un  fils,  promettant  de  le 
consacrer  à  son  service.  Leurs  prières  furent 
exaucées.  Dionyse  conçut  et  enfanta  un  fils 
sous  le  quatrième  consulat  de  Gratien,  c'est- 
à-dire  en  375.  A  l'âge  de  trois  ans,  sa  mère 
le  consacra  à  Dieu  entre  les  mains  d'Olréius, 
évoque  deMélitène,  qui,  lorsqu'il  fui  en  état 
d'apprendre  les  lettres,  le  mit  sous  la  disci- 
pline d'un  bon  maître.  Euthymius  fut  ensuite 
mis  au  rang  des  lecteurs,  et  après  qu'on  l'eut 
fait  passer  par  tous  les  degrés  du  ministère 
ecclésiastique,   il  vint  à  Jérusalem  dans  la 
vingt-neuvième  année  de  son  âge.  Il  passa 
60  ans  dans  la  solitude,  et  mourut  âgé   de 
89  ans,  la  seizième  année  du  règne  de  l'em- 
pereur Léon,  c'est-.''i-dire  l'an  473.  Cyrille  re- 
marque que  saint  Euthymius,  ayant  lié  ami- 
tié avec  un  nommé  Tliéoctiste ,  qui  menait 
comme  lui  la  vie  solitaire,  ils  se  retiraient 
ensemble  '  chaque  année  dans  le  désert,  huit 
jours  après  la  fêle  des  Lumières,  c'est-à-dire 
de  rE|iiphanie,  et  qu'ils  y  demeuraient  jus- 
qu'au jour  de  la  fête  des  Palmes,  occupés 
pendant  tout  ce  temps  à  converser  avec  Dieu 
dans  la  prière  et  dans  la  méditation,  sans  au- 
cun commerce  avec  les  hommes;   que    ce 
temps  écoulé  ils  s'en  retournaient  chacun 
dans  leur  cellule  pour  se  préparer  à  la  fête 
de  Pâ(iues,  et  olfrir  i\  Jésus-Christ   ressusci- 
tant d'entre  les  morts,  les  présents  d'un  cœur 
pur,  infiniment  plus  précieux  que  l'or  que  les 
Mages  lui  olfrirent  à  sa  naissance  ;  que  saint 
Euthymius  ne  trouvait  pas  bon  que  les  moi- 
nes de  la  communauté,  et  surtout  les  jeunes, 
alfeclassent  de  se  distinguer  dans  le  monas- 
tère, en  jeûnant  plus  longtemps  qu'il  n'était 
d'usage  dans  la  communauté,  parce  qu'il 


Il  <rrll 
\\*     At      Mil 


verr  1  aa  Âb 


'  Quoi  annis  proficiscebantur,  oclavo  die  posl 
festum  I^uuiiuuiii  ,  separali  quidcm  ab  oiiini  hu- 
inano  cuntubcrmo,cum  Dcoaulem  sulo  versatiles 


per  precalionem  ;  et  lotum  lempus  quod  interce- 
debat  trnnsigenles  m  solitudine ,  doncc  adveniiset 
dies  festus  Palmarum.  Eulh.  Vila,  pag.  210. 


Il 


kl 


[vi*  sikcLE.]        CIIAPITIIE  XXll.  —  ZAC.HAHIK,  KVftgUK  UK  MITIFilNE. 


273 


pai'iiissail  qu'eu  cpliiilssiiivaioiit  leur  propre 
volouté,  et  (|u'il  y  avait  ilu  ilaiiperquc  la  va- 
uil(''  u't'iil  part  il  cetio  morlilitaliou.  Il  parle 
lie  la  perséciiliou  excili'e  par  les  luayes  de 
Perse  coulre  les  clirélieiis  sur  la  fin  du  réj;ne 
il'lsdegcrde,  et  du  baptùiuc  d'uu  [)riuee  des 
Sarrasins,  iiomuit'^  Aspéljèle,  h  ipii  ou  cliau- 
{jea  le  uoui  '  daus  ce  saereiuiuit,  eu  lui  diui- 
luuU  celui  de  l'ierrc.  11  dit  que  l'icrre,  évo- 
que des  Sarrasins,  ëtant  venu  voir  suint  Eu- 
tliyiuius,  eu  allant  au  concile  gémirai  d'E- 
plièse,  il  lui  conseilla  de  se  joindre  à  saint 
Cyrille  d'Alexandrie, et ;\  Acace  de  Mélitène, 
et  de  faire,  au  sujet  de  la  loi,  tout  ce  quij  ces 
deux  évèques  trouveraient  bon.  Dans  une 
grande  sécheresse  accompagnée  de  stérilité, 
les  peuples  voisins  de  la  Laure  de  saint  Eu- 
tliymius  sachant  qu'il  en  sortait  pour  se  reti- 
rer dans  le  désert  au  temps  accoutumé,  ac- 
coururent en  foule  au-devant  de  lui,  portant' 
des  croix  en  main,  et  chantant  de  bouche  et 
de  cœur  :  A'i/rie  eleison.  Il  s'excusa  de  prier 
pour  eux,  se  regardant  comme  un  pécheur; 
mais  ne  pouvant  se  refuser  à  leurs  instances, 
il  entra  avec  quelques  moines  dans  un  ora- 
toire, et  se  mit  à  prier  avec  larmes,  proster- 
né contre  terre.  Il  tomba  à  l'heure  même 
une  pluie  si  abondante  que  la  terre  en  fut 
imbibée,  et  que  les  ruisseaux  qui  s'étaient 
trouvés  à  sec,  recommencèrent  à  couler  en 
abondance.  Il  avait  soixante-quinze  ans  lors- 
(|ue  l'on  assembla  le  concile  deChalcédoine. 
Etienne  et  Jean,  deux  de  ses  disciples  qui  y 
avaient  assisté,  lui  en  apportèrent  les  décrets 
avec  diligence,  pour  savoir  s'illes  accepterait, 
voulant  se  régler  eux-mêmes  sur  sa  conduite. 
Ayant  reconnu  qu'ils  ne  contenaient  rien 
que  de  conforme  à  la  foi  catholique,  le  bruit 
de  son  acceptation  se  répandit  aussitôt  daus 
tout  le  désert,  et  tous  les  solitaires  auraient 
suivi  son  sentiment,  s'ils  n'en  avaient  été  dé- 
tournés parle  moine  Théodose, homme  d'une 
doctrine  et  de  mœurs  corrompues,  le  même 
qui  s-'empara  depuis  de  l'Église  de  Jérusa- 
lem, et  qui  engagea  l'impératrice  Eudoxie 
dans  l'hérésie  d'Eutychès.  Il  fît  son  possible 
pour  y  engager  aussi  saint  Euthymius,  en  le 
faisant  déclarer  contre  le  concile  de  Ghalcé- 
doine;  mais  le  saint  abbé  n'en  voulut  rien 


cette  assemblée,  était  la  même  qui  avait  été 
proposée  par  les  trois  conciles  précédents, 
savoir  :  de  Nicée,  de  r,onslanliun|ile  et  d'H- 
plièse  ;  et  ([ue  celui  de  Clialcédoiiie,  loin  de 
diiiHici  dans  les  dogmes  de  Nestorius,  recon- 
naissait deux  natures  en  Jissiis-Christ,  sans 
aucune  division  de  pcisoiuies,  suivant  la 
doctrine  de  saint  Cyrille.  Eudoxie,  sollicitée 
par  son  frère  \'alère  de  rentrer  dans  la  com- 
munion de  l'iiglise  catholique,  voulut  aupa- 
ravant avoir  la-dessus  l'avis  de  saint  Euthy- 
mius; et  sachant  qu'il  n'entrait  point  dans  '"■■e-s'i- 
les  villes,  elle  fit  b.ltir  une  tour  au  plus  haut 
du  désert  d'Orient,  à  trente  stades  de  sa  Lau- 
re vers  le  midi,  afin  de  pouvoir  l'y  entretenir. 
Le  saint  vieillard  qu'elle  avait  envoyé  cher- 
cher par  Cosme,  gardien  de  la  croix  avec  le 
chorévêque  Anastase,  vint  à  la  tour,  et  après 
avoir  donné  sa  bénédiction  à  l'Impératrice,  il 
lui  dit  :  «  Ma  tille,  prenez  garde  à  vous  dans 
la  suite;  les  malheurs  qui  vous  sont  arrivés 
en  Italie  (il  parlait  de  la  mort  violente  de 
l'empereur  Valentinien  son  gendre,  de  l'ir- 
ruption des  Vandales,  de  la  captivité  de  sa 
fille  Eudoxia  et  de  ses  petites-filles  emmenées 
à  Cartilage)  ne  sont  arrivés  que  parce  que 
vous  vous  êtes  laissée  séduire  k  la  malice  de 
Théûdose.  Quittez  donc  cette  opiniâtreté  dé- 
raisonnable, et  outre  les  trois  conciles  œcu- 
méniques :  de  Nicée  contre  Arius,  de  Cons- 
tantinople  contre  Macédonius,  et  d'Éphèse 
contre  Nestorius,  recevez  aussi  la  définition 
de  celui  de  Chalcédoine.  Retirez-vous  de  la 
communion  de  Dloscore,  et  embrassez  celle 
de  Juvénal  :  »  c'élait  le  patriarche  de  Jérusa- 
lem. Eudoxie  exécuta  tout  cela  comme  si  elle 
en  avait  reçu  ordre  de  Dieu  même.  Elle  re- 
tourna aussitôt  à  Jérusalem,  et  par  le  moyen 
des  prêtres  Cosme  et  Anastase,  elle  se  réu- 
nit au  patriarche  et  a  l'Église  catholique.  Son 
exemple  fut  suivi  d'une  grande  multitude  de 
moines  et  de  laïques.  Ce  fut  aussi  saint  Eu- 
thymius qui  engagea  un  célèbre  anachorète, 
nommé  Gérasime,  à  se  séparer  delà  commu- 
nion de  Théodose,  et  à  consentir  h  la  défini- 
tion de  foi  du  concile  de  Chalcédoine.  Géra- 
sime mourut  en  474.  Il  pratiquait  une  absti- 
nence si  rigoureuse  pendant  sa  vie,  que  pen- 
dant le  Carême  il  ne  prenait  '  d'autre  nourri- 


faire,  soutenant  que  la  doctrine  établie  dans      ture  que  celle  qu'il  recevait  en  participant 


'  Euthymius  Àspebetum  baptizat,  Pelruiii  Irans- 
nominnns.  Ibid.,  pag.  221. 

-  ConjXmt  ad  eum  muUitudo  numerum  exce- 
deiiS,  cruces  habentes  in  manihus  et  Kyrie  eleison 
de  more  non  tantum  are ,  sed  etiam  labiis  cordis 

XI. 


décantantes.  Euth.  Vita,  pag.  256. 

'  Ipsum  dicebant  tanli  fecisse  abstinentiam,  ut 
quadraginla  illns  dies  jejtinii  .vine  ciho  transi- 
geret ,  contentus  sola  sacranientorum  participa- 
tione.  Eiilh.  Vita,  pag.  278. 

18 


!•»£.  »M. 


Vie  Je  silot 
Salas. 


ÎM.  et  \'i-  s. 

Ml-x,lom.lll 
MoDOm  )  Co- 
Irl,  ^^.    â^t 


21C. 


'J74  iiisTomiî  gem:uale  des 

aux  saints  uiyslères.  Saint  Eutliymius  était 
mort  lies  l'aiinée  précédente.  Ce  fut  le  pa- 
friaitbe  Anasla^^c  qui  fil  ses  funérailles,  ac- 
conipagué  d'uiiCTaïul  nombre  de  clerc;;,  en- 
tre lesquels  étaient  Cluvsippe,  garde  de  la 
croix,  et  le  diacre  Fidus.  Celui-ci  s'étanl  em- 
barqué en  iTO  pour  porter  à  l'empereur  Ze- 
non les  lettres  deMartyriu?,  snccessenr  d'.\- 
nastase  dans  le  siéjre  de  Jérusalem,  lit  nau- 
frage la  nuit.  Se  voyant  en  danger,  il  invo- 
qua saint  Eiilhymius,  qui  lui  apparut  niar- 
cbaut  sur  la  mer,  lui  ordonna  de  retourner, 
et  d'aller  ensuite  ti  sa  Laure  pour  en  faire  un 
monastère.  Fidus  obéit,  raconta  à  Martyrius 
ce  qui  était  arrivé.  Le  patriarche  se  souve- 
nant de  la  prophétie  du  saint  sur  le  change- 
ment de  sa  Laure  en  monastère,  chargea  Fi- 
dus de  l'exécution.  Il  changea  en  réfectoire 
l'ancienne  église,  et  en  bâtit  une  nouvelle, 
où  Martyrius  transféra  de  ses  propres  mains, 
les  reliques  du  saint.  Cyrille  emploie  le  reste 
de  la  vie  de  saint  Euthymius  à  décrire  ce  qui 
se  passa  de  considérable  à  l'égard  de  ce  mo- 
nastère, et  des  abbés  qui  en  curent  le  gou- 
vernement. Il  parle  de  plusieurs  miracles 
opérés  par  l'intercession  du  saint,  comme 
en  ayant  été  témoin,  ou  comme  les  ayant 
appris  de  personnes  dignes  de  foi. 

S.  Les  mêmes  pei'sonnes  qui  l'avaient  en- 
gagé à  écrire  la  Vie  de  saint  Euthj-mius ,  le, 
pressèrent  de  donner  celle  de  saint  Sabas.  Ce 
dernier  vint  au  monde  en  439 ,  dans  une 
bourgade  du  territoire  de  Césarée  en  Cappa- 
doce ,  nommée  Mutalasque.  A  l'âge  de  huit 
ans  il  entra  dans  le  monastère  de  Flaviane , 
qui  n'était  pas  éloigné  du  liou  de  sa  nais- 
sance. Il  apprit  en  peu  de  temps  le  Psautier, 
et  tous  les  exercices  de  la  vie  monastique. 
Après  un  séjour  de  dix  ans  à  Flaviane,  il  ob- 
tint permission  de  son  abbé  d'aller  à  Jérusa- 
lem. Elpide  qui  gouvernait  le  monastère  de 
saint  l'assarion,  l'y  reçut.  De  là  il  passa  dans 
le  désert  où  demeurait  saint  Euthymius,  qui, 
le  trouvant  trop  jeune  pour  demeurer  avec 
les  anachorètes,  l'envoya  au  monastère  situé 
au  bas  de  sa  Laure,  et  dont  Thcoctisfc  était 
abbi'.  Sabas  se  dépouilla  entre  ses  mains  de 
tout  ce  qu'il  avait,  eu  se  donnant  tout  à  Dieu: 
il  se  livra  avec  ardeur  à  tous  les  exercices  de 
p. été,  se  trouvant  toujours  le  premier  à  l'é- 
glise, et  n'en  sortant  que  le  dernier.  Une  des 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

occupations  des  moines  était  d'aller  couper 
du  bois  dans  le  désert,  et  de  l'apporter  au 
monastère.  Sabas  plus  grand  et  plus  fort  que 
les  autres,  en  portait  trois  fois  davantage. 
Un  moine  nommé  Jean  ayant  obtenu  de  Thé- 
octiste  d'aller  ù  .\lesandrie,  régler  quelques 
allaircs  temporelles  de  ses  parents,  demanda 
Sabas  pour  l'accompagner.  Il  y  fut  reconnu 
par  son  père  et  sa  mère  qui  s'étaient  établis 
en  cette  ville  depuis  plusieurs  années.  Ils 
voulurent  l'obliger  à  changer  de  profession, 
et  voyant  qu'il  s'en  défendait  fortement,  ils 
le  prièient  d'accepter  du  moins  vingt  pièces 
d'or  pour  son  voyage.  Sabas  pour  les  con- 
tenter, en  prit  trois,  qu'il  remit  .'i  son  retour 
ù  l'abbé  Théoctiste.  A  l'âge  de  trente  ans,  il 
passa  dans  le  désert ,  où  il  demeurait  seul 
dans  une  caverne  :  mais  le  samedi  il  revenait 
au  monastère,  apportant  son  ouvrage  qui 
était  de  cimpianle  corbeilles.  Quelques  an- 
nées après  il  changea  de  demeure,  et  s'éta- 
blit dans  une  autre  caverne  ,  qui  se  trouvait 
près  le  torrent  de  Cédron.  Plusieui-s  étant 
venus  pour  se  mettre  sous  sa  discipline,  il 
dressa  au  milieu  du  torrent  un  petit  oratoire, 
et  un  autel  consacn-,  etlois.ju'il  venait  quel- 
que prêtre,  il  le  priait  d'y  ollVir  le  saint  sacri- 
fice, son  humilité  l'ayant  empêché  jusques-là 
de  rerevoir  l'oidination;  mais  quelque  temps 
après.  Sallusle,  patriarche  de  Ji-rusalem , 
l'ayant  envoyé  chercher,  l'ordonna  prêtre. 
11  vint  ensuite  '  à  la  Laure  du  saint,  en  dédia 
l'église ,  et  ayant  dressé  un  autel  dans  la 
conque ,  il  le  consacra  en  mettant  dessous 
plusieurs  reliques  des  i)lus  célèbres  martyrs. 
C'était  en  iOI,  la  première  année  du  règne 
d'Auastase,  et  la  cinquante-troisième  de  saint 
Sabas.  Daus  le  même  temps  il  reçut  dans  sa 
Laure  un  arménien  nommé  Jérémie,  avec 
ses  deux  disciples,  Pierre  et  Paul,  et  leur 
donna  un  petit  oratoire  avec  permission  d'y 
faire  l'olUce  en  leur  langue  le  samedi  et  le 
dimanche;  mais,  dix  ans  après,  voyant  qu'un 
grand  nombre  d'autres  arméniens  s'étaient 
joints  il  eux,  il  les  tranféra  de  leur  petit  ora- 
toire dans  l'Église  de  Théoctiste  que  Snlluste 
avait  dédiée,  et  leur  permit  d'y  faire  leur  of- 
fice. ;\  condlion  -  qu'après  qu'ils  auraient  lu 
l'Evangile  en  leur  langue,  ils  passeraient  dans 
l'Église  des  Grecs  au  temps  de  l'oblalion, 
pour  communiquer  avec  eux  aux  saints  mys- 


p«j.  -'.111 


'  Àrchiepiscopus  ad  Laurain  reuit ,  et  Eccksia 
Theoctista  dedirata,  sunclificulmn  allure  in  con- 
clia  n  Veo  cundila  defixil,  sub  nuo  plurimas  sanc- 


\was 


toruin  ac  victoriis  clarorum  martyrum  reliquii 
deposuil.  Vila  Sali.,  pa^.  217. 
'  Armenios  a  parvo  oratorio  Iranstulit,  ulpsai 


■C.  36.-:. 


iiii  SoUii 

ïnvdji;      i 

miiiTi  ur 
itasu   vers 
i'U.      II 


[VI"  siKCLE.]        CIIAPITIIK  XXM.  —  ZACIFAlt 

Ii'tos.  De  celle  manière,  Il's  arnu'iiii'iis  ciHci- 
biaicnt  st'piii'éraenl  la  piemic'io  [lartie  de  la 
messe  qui  esl  pour  riiistiuctidii ,  et  se  réii- 
iiissaieiil  pour  le  saerilice.  Quel([ues-uns  do 
ces  arméniens  cliantaieiit  le  Trisiigiun  avec 
l'acUlition  de  Picrre-Ic-Foiilon  :  Qui  est  ci'uci- 
fii'  j>niir  7mtis.  Le  saint  vieillard  leur  ordonna 
de  le  clianler  en  grec  sans  celte  addition, 
suivant  l'ancienne  tradition  de  l'Église  catho- 
lii]Me.  Il  ordonna  aussi  que  l'assembh'c  pour 
le  sacrifice  se  fcMit  le  samedi  dans  l'IOglise 
de  Théoolisle,  et  le  dimanche  dans  celle  de 
la  Mère  de  Dieu  ;  mais  que  dans  l'une  et  dans 
l'autre,  l'on  ferait  des  veilles  continuelles  de- 
puis le  soir  jusqu'au  malin,  les  jours  de  di- 
manche. Deux  ans  après,  c'est-à-dire  en 
493,  saint  Sabas  voyant  sa  Lanre  beaucoup 
augmentée,  bâtit  un  monastère  A  une  lieue 
de  li\,  en  un  endioit  iiommii  Castel.  11  les 
quitta  l'une  et  l'autre  pour  un  temps,  croyant 
devoir  céder  ;\  des  faux  frères ,  qui  s'étaient 
révoltés  contre  lui  au  nombre  de  soixante. 
Mais  sachant  qu'ils  s'étaient  retirés  près  de 
ïh<''uui'!  dans  des  cellules  abandonnées,  dont 
on  composa  depuis  la  nouvelle  Laure,  il  alla 
les  trouver,  et  les  ayant  gagnés  par  des  mar- 
ques de  sa  charité ,  il  leur  bAtit  une  église 
par  les  bienfaits  du  patriarche  Elie ,  et  leur 
donna  pour  supérieur  un  nommé  Jean  ,  le 
premier  de  ses  disciples.  Il  était  alors  dans 
la  soixante-neuvième  année  de  son  âge. 

6.  Elie  avait  succédé  à  Salluste  dans  le 
siège  de  Jérusalem,  en  493  ;  nous  avons  de 
lui  une  lettre  adressée  aux  moines  delà  Laure 
pour  les  assurer  que  saint  Sabas,  leur  père, 
n'avait  point  été  dévoré  par  des  lions  comme 
ses  ennemis  le  disaient.  Ce  patriarche  l'en- 
voya, vers  l'au  311,  à  Constautinople,  avec 
quelques  autres  abbés,  pour  résister  à  Sé- 
vère, et  aux  autres  hérétiques  qui  dominaient 
en  cette  ville  ù  la  faveur  de  l'empereur  Anas- 
tase.  La  lettre  qu'ils  présentèrent  à  ce  prince 
de  la  part  d'Élie  ,  portait  :  a  Je  vous  envoie 
l'élite  des  bons  et  fidèles  serviteurs  de  Dieu, 
des  supérieurs  de  tout  le  désert,  entr'autres 
le  seigneur  Sabas,  la  lumière  de  toute  la  Pa- 
lestine. »  Anastase  les  reçut  avec  bonté,  et 
leur  accorda  à  tous  ce  qu'ils  lui  demandèrent 
pour  l'intérêt  de  leurs  monastères  ;  puis  ,  s'a- 
dressant  h  saint  Sabas,  qui  lui  paraissait  com- 
me un  ange ,  il  lui  demanda  le  sujet  de  son 


li:,  P;vftQUE  DE  MITILI'LNE.  275 

voyage  :  «  Je  suis  venu,  lui  répondit  le  saint^ 
prcmièi'euicnl  pour  baiser  les  |)iedsd(!  votre 
[)ii'li''  ;  ensuilc  pour  vous  su|q)lierau  nom  de 
la  saiiib!  cili!  de  Jiirnsalein,  et  de  notre  saint 
arclievè(]ue,  de  donner  la  paix  aux  l'glises, 
et  de  ne  point  troubler  le  sacerdoce,  alin  que 
nous  puissions  jirier  lrani(uilleim.Mit,  jour  et 
nuil,  pour  votre  sérénité',  n  L'empereur  lui 
lit  (loiuirr  mille  sous  d'or,  et  sachanl  qu'd 
voulait  passer  l'hiver  à  Conslautinople,  il  or- 
donna ipi'on  le  laissât  entrer  au  palais  toutes 
les  fois  qu'il  se  présenterait ,  sans  se  faire 
annoncer.  Quelques  jours  après,  Anastase  l'os-^oo. 
l'ayant  fait  venir,  lui  dit  qu'Élie,  archevêque 
de  Jérusalem,  avait  seul  empèclu;  de  con- 
cert avec  Flavien  d'Autiochc,  que  les  décrets 
du  concile  do  Chalcédoine  ne  fussent  ana- 
thiimalisés  avec  celui  de  Sidon  ;  qu'il  avait 
de  plus  refusé  de  consentir  à  la  déposition 
d'Eiiphémius  et  de  Macédonius,  tous  deux 
nestoriens  ;  cpie  pour  ces  raisons ,  il  voulait 
qu'il  fût  chassé  de  son  siège,  et  qu'on  mît  à 
sa  place  un  homme  orthodoxe.  Il  lui  parla 
aussi  d'une  lettre  qu'Élie  lui  avait  écrite,  et 
où  il  disait  :  «  Nous  rejetons  toute  hérésie 
qui  a  introduit  quelque  nouveauté  contre  la 
foi  orthodoxe,  sans  recevoir  ce  qui  a  été  fait 
ù  Chalcédoine,  à  cause  des  scandales  qui  en 
sont  arrivés.  Il  croit,  ajouta  ce  prince,  nous 
avoir  trompé  par  là;  mais  nous  voyons  bien 
qu'il  est  le  défenseur  du  concile  de  Chalcé- 
doine, et  de  l'hérésie  de  Nestorius.  »  On  ne  j^ 
sait  en  quel  temps  Elie  avait  écrit  cette  lettre; 
mais  il  parait  que  ce  fut  avant  le  concile  de 
Sidon.  Saint  Sabas  répondit  qu'Élie  rejetait 
également  la  division  de  Nestorius,  et  la  con- 
fusion d'Eutychcs,  et  que  marchant  au  mi- 
lieu par  le  chemin  de  la  foi  catholique,  il 
suivait  la  doctrine  de  saint  Cyrille.  L'Empe- 
reur promit  qu'à  sa  considération,  il  n'ordon- 
nerait rien  contre  l'archevêque,  et  lui  ayant 
encore  donné  de  sa  main  mille  pièces  d'or  , 
il  le  renvoya  en  Palestine.  Saint  Sabas  em-  355^ 
ploya  l'argent  qu'il  avait  reçu  à  Constautino- 
ple ,  à  bâtir  une  église  eu  l'honueur  de  saint 
Cosmeet  de  saint  Damien,  dans  le  lieu  de  sa 
naissance,  prenant  à  cet  effet  sa  maisonpater- 
nelle.  Cependant  Flavien  d'Antiochefutchas-  j^^ 
se  de  son  siège,  et  Sévère,  chef  des  acépha- 
les, mis  à  sa  place.  Sévère  rejetait  le  concile  3as.:m 
de  Chalcédoine,  lecevait  le  faux  d'Éphèse,  et 


modiw  regulam,dialecto  armeniorum,  in  Eccle-  xibus  armenicaliiigua  inter  se  recitare  ;  tenipore 
sia  aDeo  constructa  exsequerenlur,  maiulavitque  aiUem  divinw  oblalionis  cum  iis  qui  grœca  Ungua 
Us  Evangelium  et  reliquam  officii  seriem  iasyiia-      utebautur  convenue.  Vita  Sab.,  pay.  204. 


276 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


foulenait  qu'après  l'incarnalion,  il  n'y  avait 
on  Jésus-CIirist  qu'une  nature.  L'empereur 
Auaslase,  voulant  le  maintenir  sur  le  siège 
(l'Anliochc,  y  envoya  des  officiers  avec  beau- 
eoup  d'argent ,  pour  gagner  le  peuple.  Sé- 
vère adressa  partout  ses  lettres  synodiques. 
I^lie  de  Jérusalem  fut  du  nombre  de  ceux 
qui  ne  voulurent  pas  les  recevoir.  Sévère  les 
lui  renvoya  avec  quelques  clercs  et  des  offi- 
ciers de  l'Empereur.  Saint  Sabas  l'ayant  ap- 
pris, vint  à  Jérusalem  avec  les  autres  abbés 
du  désert ,  et  chassa  de  la  ville  les  porteurs 
des  lettres  de  Sévère,  h  qui  les  moines  et  le 
peuple  assemblés  devant  le  Calvaire,  dirent 
1^.310.  auathème  à  haute  voix.  Anastase,  informé 
qu'Elie  avait  refusé  sa  communion  à  Sévère, 
en  fut  si  irrité,  qu'illc  chassa  de  Jérusalem,  et 
mit  A  sa  place  Jean,  fils  de  Marcien,  qui  pro- 
mit d'embrasser  la  communion  de  Sévère; 
mais  par  respect  pour  saiul  Sabas,  et  pour  les 
autres  pères  du  désert,  qui  le  supplièrent  de 
ne  point  recevoir  Sévère  à  sa  communion  et 

3'2-  de  ne  rien  faire  contre  le  concile  de  Cbalcé- 
doine;  il  manqua  à  sa  parole  ;  et  au  lieu  de 
communiquer  avec  Sévère  ,  il  dit  anatlièuic 
eu  pleine  assemblée  à  Nestorius,  à  Eutycliès, 
à  Sévère  ,  et  à  quiconque  ne  recevait  pas  le 

>u.  concile  de  Chalcédoine.  Tout  ce  qui  se  passa 
en  celte  occasion  ayant  été  rapporté  à  l'Em- 
pereur ,  il  prit  le  parti  d'envoyer  en  exil  le 
patriarche  Jean  ,  Théodose  et  saint  Sabas , 
les  deux  chefs  de  tous  les  moines.  Ceux-ci 
à  qui  la  nouvelle  en  fut  apportée  de  Jéru- 
salem, assemblèrent  tous  leurs  disciples,  et 
d'un  commun  consentement,  ils  écrivirent 
une  protestation  qu'ils  envoyèrent  ci  Anas- 
tase. Elle  était  eu  forme  de  requête,  et  por- 

311.  tait  en  substance  :  «  Le  Dieu  de  toutes  choses 
et  notre  Seigneur  Jésus-Christ,  Fils  unique 
de  Dieu,  vous  a  donné  le  sceptre  de  l'Empire 
pour  procurer  la  paix  à  toutes  les  églises  ; 
mais  surtout  h  la  Mèie  des  églises ,  en  la- 
quelle le  grand  mystère  de  notre  rédemp- 
tion à  été  accompli.  Nous  en  avons  reçu  la 
foi  par  la  croix  de  Jésus-Christ ,  par  sou  sé- 
pulcre ,  et  par  tous  les  lieux  saints  que  l'on 
adore.  Nous  l'avons  reçue  dès  le  commence- 
ment par  les  oracles  des  prophètes,  et  de  la 
Louche  des  apôtres  ;  nous  la  conservons 
entière,  et  nous  la  conserverons  toujours  par 
la  grâce  de  Dieu,  sans  nous  laisser  effrayer 
par  ceux  qui  la  combattent,  ni  emporter  par 
tout  vent  de  doctrine.  Vous  y  avez  été  nourri 
vous-iuèmc,  et  c'est  dans  cette  créance  (pie 

3IC.       vous  avez  reçu  l'Empire.  Il  est  donc  étonnant 


que  sous  votre  règne ,  il  se  soit  élevé  un  si 
grand  orage  contre  la  sainte  cité ,  dont  la 
suite  a  été  que  l'on  a  chassé  avec  violence 
les  évoques,  les  ministres  sacrés,  et  les  soli- 
taires, en  les  traînant  au  milieu  des  villes, 
et  des  lieux  impurs  et  profanes,  pour  les 
obliger  à  des  choses  qui  blessent  la  foi.  Si 
c'est  à  cause  de  la  foi  que  l'on' attaque  ainsi 
la  sainte  cité  ,  qui  est  l'œil  et  la  lumière  de 
tout  le  monde ,  comment  prétend-on  nous 
apprendre  notre  créance  cinq  cents  et  tant 
d'années  après  la  venue  de  Jésus-Christ  ?  Il 
parait  évidemment  que  la  réformation  que 
l'on  veut  introduire  dans  la  foi  ,  est  la  doc- 
trine de  l'Antéchrist,  qui  veut  troubler  la 
paix  des  églises.  L'auteur  de  tous  ces  maux 
est  Sévère  ,  dont  nous  rejetons  la  commu- 
nion, en  vous  suppliant  d'à  voir  pitié  de  Sion, 
la  mère  de  toutes  les  églises.  Fallut-il  souf- 
frir la  mort ,  jamais  on  ne  pourra  nous  obli- 
ger à  communiquer  avec  les  ennemis  de  l'É- 
glise ,  et  des  quatre  conciles  que  nous  rece- 
vons comme  les  quatre  Évangiles.  Pour  vous 
en  assurer,  nous  disons  anathème  à  Nestorius, 
qui  divise  Jésus-Chris! ,  et  à  Eutychès,  qui 
confonil  la  divinité  et  l'humanilé.  »  L'Empe- 
reur ayant  reçu  celte  déclaration ,  fut  con- 
seillé de  garder  le  silence  et  de  se  tenir  en 
repos,  i\  cause  que  Vitalien,  irrité  de  ses  par- 
jures, avait  recommencé  la  guerre.  Ainsi  le 
patriarche  Jean  demeura  paisible  sur  le  siè- 
ge de  Jérusalem. 

7.  Il  lie  le  tint  que  pendant  sept  ans  el 
neuf  mois,  depuis  l'an  517  jusipi'en  523,  au- 
quel il  mourut.  Pieire,  son  successeur,  et  les 
évéques  de  sa  dépendance,  prièrent  saint 
Sabas  d'aller  à  Conslantiuople  demander  à 
l'empereur  Justinien  une  remise  des  im- 
positions pour  la  première  et  seconde  Pa- 
lestine qui  avaient  été  ravagées  par  les 
Samaritains,  en  530.  Le  saint,  qiioiqu'âgé  de 
qualre-viiigt-freize  ans,  se  mit  en  chemin  au 
mois  d'aviil  de  l'année  suivante  531.  L'Em- 
pereur, que  Pierre  avait  informé  de  c6 
voyage,  envoya  au-devant  de  lui  ses  galères  ; 
avec  elles  sortirent  le  patriarche  Epiphane, 
Hypace,  évèque  d'Éphèse,  et  un  autre  évo- 
que nommé  Eusèbe.  Ils  prirent  saint  Sabas 
et  le  présentèrent  à  Justinien.  Ce  prince  à 
qui  Dieu  ouvrit  les  yeux,  apercevant  sur  sa 
tète  une  grande  lumière  en  forme  de  cou- 
ronne, courut  se  prosterner  devant  lui,  lui 
baisa  la  tète  el  reçut  sa  bénédiction.  L'Em- 
pereur lui  oU'rit  des  revenus  pour  la  subsis- 
tance de  ses  moines  ;    mais  le  saint  abbé 


!>■«.  3IC 


Slinl  Saba> 

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Pag    ;U3. 


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[vr  SIÈCLE.]        CIIAPITHE  XXII.  —  z.\cnAiui 

r('pondil  qiin  loiir  partagn  ôtait  le  Sciajneur; 
qu'il  lie  lui  (lomniulait  aulrc  riiosn  que  la  dé- 
cliarge  des  Irihiils  pour  les  lid6les  de  Pales- 
tine, et  le  rétaljlisseiiieiil  des  l'glises  hrùlées; 
un  secours  pour  les  clirotieus  ([uiavaieni  iSté 
pillés  et  réduits  c^  un  petit  nand)re;  l'établis- 
senieiit  d'un  hôpital  à. I(''rnsal('ni  pour  l(;s  ma- 
lades étranyeis;  ([u'il  le  [iriail  eucoi'e  d'ache- 
ver le  hàtimcnl  de  l'I'lglise  do  la  Mère  de  Dieu, 
commencé  par  le  patriarche  Elie,  et  de  l'aire 
construire  un  château  dans  le  désert,  au-des- 
sous de  ses  mouaslcres,  ;"!  cause  des  incur- 
sions des  Sarrasins.  «  Je  crois,  ajonta-t-il, 
qu'en  récompense  de  ces  bonnes  œuvres, 
Dieu  ajoutera  à  vos  états  l'Afrique,  l^ome  et 
le  reste  de  rcnipire  d'Houoriiis  (pie  vos  jiré- 
décesseurs  ont  perdu,  ù  la  charge  toutefois 
que  vous  délivrerez  les  églises  des  trois  hé- 
résies, d'Arius,  de  Nestorius  et  d'Origène.  n 
L'Empereur  lui  accorda  toutes  ses  deman- 
des, et  donna  tous  les  ordres  nécessaires  à 
cet  égard.  Un  jour  qu'il  en  doimait  au  ques- 
teur ïribonien,  saint  Sabas  qui  accompa- 
gnait ce  prince,  se  retira  à  l'écart  pour  réci- 
ter les  Psaimies  île  David,  et  les  autres 
prières  de  l'ollice  de  Tierce.  Jérémie,  diacre 
de  la  grande  Laure,  un  de  ses  disciples,  lui 
dit  :  «  Mon  père,  puisque  l'Empereur  est  si 
porté  à  accorder  vos  demandes,  pourquoi  le 
quittez-vous?  Mon  iils,  lui  répondit  le  saint 
vieillard,  ils  font  leur  devoir,  faisons  le  nô- 
tre. 1)  De  retour  en  Palestine  au  mois  de 
septembre  de  la  même  année  5^1,  il  puljlia 
à  Jérusalem  les  ordres  de  l'Empereur,  puis 
à  Césarée  eti\Scythople,  d'où  étant  revenu 
visiter  les  Saints-Lieux,  comme  pour  leur 
dire  adieu,  il  retourna  à  la  grande  Laure, 
où  il  tomba  malade  au  commencement  de  dé- 
cembre. Mais  sachant  par  révélation  qu'il 
mourrait  dans  peu  de  jours,  il  appela  les 
Pères  de  la  Laure,  et  leiu'  donna  pour  abbé 
Mélitas  de  Béryte,  l'exhortant  à  conserver 
les  traditions  de  ses  monastères,  qu'il  lui 
donna  par  écrit.  Il  demeura  quatre  jours 
sans  rieu  prendre  et  sans  voir  peisonne.  Le 
samedi  au  soir,  qui  était  le  cinquième  jour 
de  ce  mois  de  l'an  531.  il  demanda  et  reçut  ' 
la  communion,  après  quoi  il  espira,  en  di- 
sant ces  paroles  du  Psaume  :  Seigneur , 
je  recommande  et  remets  mon  nnte  entre  vos 
,   mains.  Il  était  âgé  de  94  ans.  Cyrille,  après 


;,  ÉVI>.OUE  DE  MITILI>-NK.  277 

avoir  fait  l'histoire  de  la  vie  do  saint  Sabas' 
fait  celle  des  révolutions  qui  arrivèrent  dans 
sa  LaïU'e,  sous  l'abbi'  Mi'litas  et  ses  succes- 
seurs. Il  rapporte  aussi  (piantilt-  de  miracles 
faits  par  l'intercession  du  saint  abbé. 

8.  iVest  aussi  do  lui  que  nous  avons  la      vodomini 

,  ,  ^  wnait-lo  Silon- 

Vie  do  sami  Jean,  dit  le  Silencieux,  impri-  ;',7'-  ,'■'""'; 

'  '  1  III    ninii,    ad 

lui'e  parmi  les  Actes  des  saints  de  JJollandus.  M^^pùdiJôS; 
au  1.'}  de  mai.  Le  saint  vivait  encore  lorsque 
Cyrille  de  Seythople  en  écrivit  l'histoire;  il 
marque  que  saini  Jean  avait  alors  cent  qua- 
tre ans,  et  ([U('  maigri'  ce  gi^and^ige,  il  avait 
toujours  le  visage  gai,  et  l'esprit  vif.  Il  était 
né  h  Nicople,  en  Arménie,  le  8  janvier  de 
l'an  loi,  de  parents  riches  et  chrétiens,  qui 
rélevèrent  dans  la  piété.  Api'ès  leur  mort, 
ayant  partagé  leur  succession  avec  ses  frè- 
res, il  se  consacia  ;\  Dieu  k  l'âge  de  di.K-huit 
ans,  et  bâtit,  dans  le  lieu  de  sa  naissance, 
une  église  en  l'honneur  de  la  Mère  de  Dieu, 
avec  un  monastère,  où  il  se  renferma  avec 
dix  autres  personnes  qui  pensaient  comm  ^ 
lui  i\  travailler  ;\  leur  salut.  Dix  ans  après,  Pag. 231. 
l'évèque  de  Colonie,  en  Arménie,  étant  mort, 
il  en  fut  choisi  évèipie,  et  consacré  malgré 
sa  résistance.  L'épiscopat  n'apporta  aucun 
changement  î'i  son  genre  de  vie.  Il  pi'atiqua, 
étant  évèque,  les  mêmes  austérités  qu'il 
avait  oliservées  dans  le  monastère.  Son 
beau-frère,  gouverneur  de  l'Arménie,  au 
lieu  de  le  seconder  dans  l'administration  de 
sou  diocèse,   y  mit  le  trouble,   empêchant  ^ 

les  ecclésiastiipies  de  s'acquitter  des  fonc- 
tions de  leur  ministère,  violant  le  droit  d'a- 
sile, et  commettant  diverses  violences.  Le 
saint  évêque,  obligé  d'en  porter  ses  plaintes 
à  l'empereur  Zenon,  lit  pour  cela  le  voyage 
de  Constantinople.  .A. vec  l'aide  du  patriarche 
Kuphémius,  il  obtint  justice  de  ce  prince, 
puis  ayant  mis  ordre  aux  aff'aires  de  son 
diocèse,  et  fait  agréer  sa  démission,  il  re- 
nonça à  l'épiscopat,  et  passa  en  Palestine 
pour  y  vivre  dans  un  plus  grand  repos. 
C'était  en  4fll,  la  dixième  année  depuis  son 
ordination.  Il  s'arrêta  dans  l'hôpital  de  Jé- 
rusalem où  il  demeura  longtemps,  priant 
Dieu  avec  larmes  de  le  conduire  en  un  en- 
droit propre  à  son  salut.  Dieu  lui  fit  connaî- 
tre que  ce  serait  dans  la  Lanre  de  saint 
Sabas.  Il  y  alla  :  le  saint  ablié  le  reçut  sans 
savoir  qui  il  était,  le  mit  sous  l'obéissance 


'  Cumqneclipstransegissel  qitatuornihil  sumev- 
do  et  ctim  inillo  congressus,  vespere  sabhali ,  pe- 
lita  communione  atque  accepta ,   postquam  pos- 


tremo  dixil  :   Domine  ,  in  manns  luas  commemlo 
spiritum  meum, animnm r'didilA'Hn Sab., pag.  3"J3. 


278 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


de  l'dconome,  qui  l'occupa  aux  emplois  les 
plus  bas  et  les  plus  pénibles.  On  le  cbarirea 
ensuite  du  soin  de  recevoir  les  hôtes  ;  pi'.is, 
saini  Sabas,  reconnaissant  en  lui  des  dons 
extraordinaires  de  Dieu,  lui  donna  une  cel- 
lule écartée,  pour  }•  vivre  dans  la  contempla- 
tion. Il  y  passa  trois  ans.  Durant  les  cinq 
premiers  jours  de  la  semaine,  il  ne  voyait 
personne,  ne  prenant  [las  même  de  nourri- 
ture ;  mais  le  samedi  et  le  dimanche  il  allait 
à  l'étrlise  avant  tous  les  autres,  et  en  sortait 
le  dernier.  Sa  ferveur  et  sa  componction 
étaient  si  grandes,  qu'il  ne  pouvait  retenir 
ses  larmes,  lorsqu'on  oHrait  le  sacrifice  ' 
non  sanglant.  Les  frères  en  étaient  dans  une 
confusion  mêlée  d'admiration,  en  voyant  en 
lui  ce  don  des  larmes,  et  ils  eu  louaient 
Dieu  de  qui  il  l'avait  reçu.  Les  trois  ans  de 
sa  retraite  écoulés,  il  fut  fait  économe  de  la 
Laure,  qui  reçut  par  son  ministère  de  grands 
p.f.  Ml,  accroissements.  Saint  Sabas  pensa  à  le  faire 
ordonner  piètre,  et  le  conduisit  à  cet  etl'et  à 
Élie,  patriarche  de  Jérusalem.  Sur  le  témoi- 
gnage qu'on  lui  i-endit  des  vertus  de  ce  so- 
litaire, il  voulut  l'ordonner  lui-mcmc  ;  mais 
le  saint  le  voyant  prêt  à  commencer  cette 
fonction,  demanda  à  lui  parler  eu  secret  ; 
alors  il  lui  découvrit  qu'il  était  évcque,  ci 
que  la  vue  île  ses  péchés  l'avait  obligé  à 
fuir  dans  la  solitude  pour  y  attendre  la  mi- 
séricorde de  Dieu.  Élie,  pour  favoriser  son 
humilité,  dit  ci  saint  Sabas,  que  ce  religieux 
lui  avait  fait  connaître  en  secret  certaines 
choses  qui  ne  lui  permettaient  pas  de  l'or- 
donner,  lui  recommandant  de  le  laisser  dans 
le  silence  sans  (ju'il  fut  inquiété  de  personne. 
Ce  saint  abbé  extrêmement  aflligé  de  l'avoir 
présenté  pour  être  élevé  au  sacerdoce,  pria 
Dieu  avec  de  grandes  instances  de  lui  faire 
connaître  ce  qui  l'en  avait  éloigné.  Il  l'niqtrit 
dans  une  vision  où  J)i(ïu  lui  révéla  que  Jean 
était  un  vase  d'élection,  qui  était  honoré  du 
caractère  épiscopal.  Saint  Sabas  se  plaignit 


à  lui  de  ce  qu'il  lui  avait  rr-cliéceqpi'il  était. 
Je^an  se  voyant  reconnu  voulait  quitter  la 
Laure  ;  mais  tout  ce  qu'il  put  obtenir,  fut 
que  le  saint  abbé  n'en  parlerait  à  pei-sonne. 
Four  lui,  il  se  renferma  dans  une  cellule, 
où  il  demeura  pendant  quatre  ans  dans  un 
parfait  silence  ;  il  n'en  sortit  qu'une  seule 
fois  pour  aller  à  la  dédicace  d'une  église 
proche  de  la  Lauie,  paru;  qu'il  ne  put  se 
dispenser  d'aller  saluer  le  patriarche  Elie 
qui  en  faisait  la  cérémonie.  La  révolte  qui 
survint  dans  cette  Laure,  ayant  obligé 
saint  Sabas  à  en  sortir  pour  se  retirer  du 
Coté  de  Scylhople,  le  biouheureux  Jean,âgé 
alors  de  cinquante  ans,  passa  d.ins  le  dé-  ^'" 
sert  de  Ruba,  où  il  demeura  neuf  années, 
n'ayant  de  convei-sation  qu'avec  Dieu,  et  ne 
vivant  que  des  fruits  et  des  racines  qu'il 
trouvait  dans  cette  solitude.  Saint  Sal>as  l'y 
vint  trouver,  et  le  ramena  à  sa  Laure,  qui 
jouissait  de  la  tranquillité  depuis  l'éloignc- 
ment  des  rebelles;  il  y  resta  même  depuis 
la  mort  du  saint  abbé,  et  il  y  était  encore 
lors(juc  Cyrille  vint  à  Jérusalem  pour  visiter 
les  Saints-Lieux.  Il  passa  de  là  ^  la  Laure  *"" 
de  saint  Sabas,  parce  qu'il  avait  reçu  ordre 
de  sa  mère  de  prendre  avis  du  bienheureux 
Jean  pour  ne  point  se  laisser  entraîner  à 
quelque  doctrine  pernicieuse.  Il  en  reçut  di- 
verses inslructions,  et  fui  témoin  de  quel- 
ques miracles  qu'il  opéra.  Il  eu  rapporte 
d'autres  sur  la  foi  d'aulrui.  Quant  aux  com- 
bats que  le  saint  avait  soulenus  pour  la  dé- 
fense do  la  vérité,  Cyrille  laissa  ii  d'autres 
le  soin  de  les  raconter.  Surius  n'avait  donné 
cette  Vie  qu'en  lalin  ;  Heuschéiiius  et  Pape- 
biock  l'oul  fait  imprimer  en  grec  et  en  latin. 
Nous  avons  aussi  en  ces  deux  langues  les 
Vies  de  saint  Eulhyiuius  et  de  saint  Sabas 
dans  les  iMimmuents  de  rk'giiar  grecque,  pnr 
M.  Colclii-r;  i-lles  sont  en  latin  seulement 
diins  Surins;  la  pieinièie  ;iu  iO  janvier', 
la  seconde  au  5  décembre.  ' 


'  Tanta  vero  et  aderat  compnnclio  ut  ipse  re- 
hemcnter  lairymnrrtur  in  (empare,  incruenti  sn- 
crificii,  cl  non  polcral  se  conlinere  :  adeo  ul  l'alres 


gui  lidclinnt  gratiam  lacrymarinn,  ohsIupeseereHt 
el  Inudarcnl  Deum  datorem  donorum.\Ha&.  Joau., 


[vi«  siÈciE.J     CITAPIinK  XXII!.  —  SAINT  GIVÉGENTIUS,  ARCilEVÈQUE,  ETC. 


279 


CHAPITRE  XXIII. 
Saint  Grcgentius  L554J,   archevêque  de  Taphar  ;  Nounosus  et  Eutychien. 

[Écrivains  grecs.] 


Ce   <]ti'.i 
ntt   ilo    5.1. n 


Tniii  VI. 
B'M.  Pol.ixii.'. 
lOll). 


pmcop.,  lib. 
1  De  Ilt-I. 
l'c  s   cap.  XT 


Lfl  Di.ilo;uc 
$oii<  la  nntn  de 
.■"lot  (îréfen. 
Iiit-p.^r.il(  uiio 
pièce     siippo- 


Ton..  VI 
Blbl.Hal.pa;! 
1113». 


1.  Saint  Grégentius  ne  nous  est  guère  con- 
nu que  par  un  Dialogue  qui  porte  son  nom  ; 
mais  dont  l'autorité  n'est  pas  l)icn  assurée. 
Il  y  est  tlil  qu'il  fut  archevi'quc  do  Tupliar, 
ville  célèbre  dans  l'Arabie  Heureuse  où  les 
rois  des  Homériles  faisaient  ordinairement 
leur  ileuunue;  (pi'il  gouverna  l'IIgiisc  de 
Taphar  dans  le  même  Icnqis  qu'.X'orauiius 
régnait  sur  ces  peuples  ;  que  ce  prince  fai- 
sait tout  par  le  conseil  de  cet  archevêque  ; 
qu'Abramiiis  mourut  la  Irenlicuic  année  do 
sou  règne,  et  que  saint  Gn'gcntius  le  suivit 
de  près,  ayant  occupé  aussi  pendaut  trenlo 
ans  le  siège  épiseopal  de  Taphar.  On  fait 
connueucor  le  règne  d'Abramius  '.i  la  défaite 
de  Duuaan,  par  Hicsbaan,  roi  il'Auxume  en 
l'^lliiopie,  c'est-à-dire,  î\  l'an  524  ;  et  on  rap- 
porte à  la  même  année  le  commencement 
de  l'épiscopat  de  saint  Grégentius,  ce  qui 
oblige  de  mettre  la  mort  de  l'un  et  de  l'autre 
en  534,  en  donnant  trente  ans  de  règne  à 
Abramius,  et  trente  ans  d'épiscopat  à  saint 
Grégentius,  selon  l'auteur  du  Di<i/u(juc'  ;  mais 
il  ne  s'accorde  point  avec  Procope  qui,  de- 
puis la  défaite  de  Duuaan,  usurpateur  du 
royaimie  des  Homérites,  leur  donne  plu- 
sieurs rois  jusqu'à  l'an  554. 

2.  Cette  raison  a  fait  regarder  ce  Dialogue 
comme  une  pièce  supposée  et  de  même  na- 
ture que  la  Dispute  que  nous  avons  sous  le 
nom  de  saint  Athanase.avec  Arius,  qui  est 
rejctée  de  tout  le  monde  comme  apocryphe; 
mais  il  y  en  a  encore  d'autres  preuves.  Her- 
bau,  qui  dans  le  Dialogue  prend  la  défense  de 
la  religion  juive  contre  le  christianisme,  de- 
mande à  saint  Grégentius  de  lui  faire  voir 
Jésus-Christ,  qu'il  disait  être  monté  au  ciel 
depuis  qu'il  avait  été  mis  à  mort  par  les 
Juifs.  Le  saint  évoque  croyant  que  de  ce  mi- 
racle dépendait  la  conversion  d'Herban  et  de 
ceu.v.  de  sa  suite,  se  met  en  prièie,  demande 
.1  Jésus-Christ  de  se  manifester  à  ce  peuple. 
O,  à  peine  le  roi  Abramius,  les  grands  sei- 
gneurs de  sa  cour,  eileschrétiens  qui  étaient 
présents,  eurent-ils  répondu  ;  Amen,  que  les 


portes  du  ciel  s'ouvrirent,  et  que  Jésus- 
Christ  apparut  à  toute  l'assemblée,  se  pro- 
menant sur  une  nuée  couleur  de  pourpre. 
Il  s'arréla  auprès  de  l'archevêque  sur  un 
bout  de  la  nuée,  n'étant  élevé  au-dessus  du 
peuple  qu'environ  de  deux  cents  coudées,  ce 
qui  le  rendait  visible  à  tous.  Herhan,  rempli 
do  frayeur,  étail  dans  le  siliuice  :  alors  il  vint 
une  voix  lie  la  part  du  Seigneur,  qui  s'adres- 
sait aux  Juifs  eu  ces  termes  :  C'est  à  la  prière 
de  l'archcvèqae  r/ue  j'apparais  à  vos  yeux,  moi 
que  vos  pires  07it  eruci/ié.  Tiuis  cnteudironl  cette 
voix  qui  les  remplit  de  frayeur;  mais  tous  ne 
virent  pas  Jésus-Christ;  il  fallut  le  ba|)téme 
pour  ouvrir  les  yeux  aux  Juifs.  Le  premier 
d'entr'eux  qui  le  reçut  eut  aussitôt  les  yeux 
ouverts.  Ce  nouveau  prodige  eut  plus  d'effet 
que  le  [uemier.  Tous  se  liient  baptiser,  et 
virent  ce  qu'ils  ne  voyaient  point  auparavant. 
Qu'appelle-l-ou  histoire  fabuleuse,  si  cells-là 
n'eu  est  pas  une?  Uieu  a  accordé  aux  apô- 
tres le  don  des  miracles.  Il  s'en  est  fait  un 
nombre  iidini  à  la  couversion  des  infidèles. 
Mais  ou  nu  lit  nulle  part  que  ceux  que  Dieu 
a  employés  à  ce  ministère  aient  prié  Jésus- 
Christ  de  se  faire  voir  à  ceux  qu'ils  entre- 
prenaient de  convertir.  Ils  parlaient  diverses 
langues,  ils  guérissaient  les  malades,  i-es- 
suscitaient  les  morts,  chassaient  les  démons, 
et  faisaient  d'autres  miracles,  qui,  selon  la 
promesse  de  Jésus-Christ,  devaient  accom- 
pagner la  prédication  de  l'Ilvangile.  Jamais 
aucun  d'eux  n'a  tenté  ce  que  l'auteur  du 
Dialogue  attribue  à  saint  Grégentius,  qui  ne 
pouvait  ignorer  que  Jésus-Christ  avait  refusé 
de  descendre  de  la  croix,  quoique  les  Juifs 
promissent  de  croire  en  lui  s'il  eu  descendait. 
Il  faut  ajouter  que  cet  auteur,  en  faisant 
parler  Herban  pour  la  défense  des  Juifs,  lui 
fait  tirer  avantage  du  37'  verset  du  troi- 
sième chapitre  de  Baruch,  que  l'archevêque 
avait  cité  sous  le  nom  de  Jérémie.  En  quoi 
il  se  trompe  doublement ,  parce  que  non- 
seulement  les  Juifs  ne  croyaient  pas  que  le 
livre  de  Baruch  fut  de  Jérémie  ;  mais  ils  ne 


Il.id. 
10113. 


HISTOIRE  GI'JNKRAI.E  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


M>ii»l(>  nom  (•« 
saint  GK-i;cii- 
lius. 


U»»'.Iib.V 

vas-  Il'I. 


*cr*  !o>  Siirr»- 
•III».  le*  Auxa* 
m  les  II  ■•• 
llo(n''"'"i'C''» 


280 

recevaient  pas  même  ce  livre  comme  cano- 
nique, ainsi  que  saint  Jérôme  nous  en  as- 
sure dans  sa  Pnfnce  sur  ce  proplièto.  Il  pa- 
rait au  surplus  que  l'on  n'a  intitulé  ce  Dia- 
logue du  nom  de  saint  Grégentius,  que  parce 
qu'on  suppose  qu'il  conféra  en  elïct  avec 
Herban,  docteur  juif  ;  mais  on  ne  peut  le  lui 
attribuer  on  l'état  que  nous  l'avons.  Il  y  est 
loué  en  50  endroits,  et  il  y  est  parlé  de  sa 
mort  cl  de  sa  sépulture.  C'est  donc  l'ouvrage 
d'un  anonyme  '  qni  sachant,  ou  feignant 
qu'il  y  avait  eu  une  dispute  sur  In  religion 
entre  cet  archevêque  et  Herban,  en  présence 
du  roi  des  Homérites,  l'a  rapportée  en  l'ajus- 
tant à  sa  façon.  L'ouvrage  est  divisé  en  qua- 
tre parties,  parce  que  la  dispute  continua 
pendant  quatre  jours.  Ou  l'imprima  à  Paris, 
en  1.586,  de  la  traduction  et  avec  les  notes 
de  Nicolas  Goulu,  professeur  royal  de  langue 
grecque,  ii  Paris  ;  Fronton-lc-nuc  lui  donna 
place  dans  le  tome  I"  de  son  Anrtmrium, 
imprimé  aussi  à  Paris,  en  1624.  On  le  trouve 
encore  dans  le  tome  I"  de  la  Bibliothèque 
grecque  et  latine  des  Pères,  de  la  même  ville, 
et  dans  le  tome  VI  de  la  Bihliot/ièqm  de 
Lyon,  [et  dans  le  tome  LXXXVI  de  la  Pa- 
trologie  grecque,  col.  021-782,  d'après  Gal- 
land,  Vefcr.  Patr.  hibl.  tome  XI,  p.  590.] 

3.  Lamhécius  met  entre  les  manuscrits  de 
la  Ribliotlièque  de  Vienne  un  Code  de  lois 
faites  par  saint  Grégentius  sous  le  nom  d'A- 
bramins,  roi  des  Homi-i'ites.  Ce  Code  qui  n'a 
pas  encore  été  rendu  public  est  divisé  en 
vingt-trois  titres.  Les  Grecs  en  parlent  dans 
leurs  Menées,  et  il  en  est  aussi  pailé  dans  le 
Dialogue  entre  ce  saint  archevêque  et  Her- 
ban. Le  premier  titre  traite  de  l'homir idc  ; 
le  second  des  enchantements,  du  faux  té- 
moignage et  du  vol  ;  le  troisième  de  la  for- 
nication ;  le  quatrième  de  l'adultère.  [M.  Mi- 
gne  a  reproduit,  tome  L.XXXVI  do  la  Patro- 
logie  grecque,  col.  .'Î67-021,  \es  Lois  des  Ho- 
mérites, d'après  lioissounade,  tom.  V.Awcd. 
gjv'c.,[).  63.  Ces  lois  se  trouvent  aussià  la  tin 
du  ]«'  vol.  dcVIfislnire  de  la  littérature  ara- 
be, par  de  Hamer.] 

4.  Nonnosus,  fils  du  prêtre  Abraham,  fut 
envoyé  par  l'ompereui- Justinieu  versCaïsus, 
commandant  dos  Sarrasins,  ensuite  vers 
Élesbaan,  roi  d'Auxume,  puis  vers  les  Ho- 
mérites.  il  faut  donc  mettre  sa  députation 

'  fiallaud,  lom.  .M,  DM.  tel.  l'ai.,  p.  xxu  <lc  lii 
p  lé  l'a  II.'  et  509,  ii'osi;  se  proïKniciT  sur  l'aïUlu'ulii  iti!, 
vuycz  l'ulrol.  grecque,  loin.  LXXXVI,  l'ol.  5G3  et 
siiiv.  (tVdifeur.) 


en  527,  qui  fut  la  première  année  du  règne 
de  Justinieu  ;  puisqu'r>lesbaan,  après  avoir 
défait  Dunaan,  roi  des  Homérites,  en  52i, 
ne  tarda  pas  .'i  embrasser  l'état  monastique, 
ainsi  qu'on  le  lit  dans  les  Actes  du  martyre 
de  saint  Arétas,  dont  le  fils  succéda  à  Éles- 
baan dans  le  loyaume  d'Auximie.  Le  but  de 
la  légation  de  Nonnosus  était  d'engager  Caï- 
sus  A  prendre  la  piéfo-  lure  et  le  gouverne- 
ment de  la  Palestine.  Nonnosus  réussit  dans 
sa  négociation  où  il  essuya  mille  dangers  de 
perdre  la  vie.  Caisus  vint  h  Constantinoplc, 
amenant  avec  lui  un  nombre  infini  de  ses 
sujets,  et  reçut  de  l'Empereur  le  gouverne- 
ment qu'il  lui  avait  fait  offrir.  Nonnosus  écii- 
vit  l'histoire  de  sa  légation.  On  l'avait  encore 
du  temps  de  Photius  (jui  en  donne  quelques 
extraits,  en  remarquant  qu'elle  était  rem- 
plie de  quantité  de  faits  incroyables  et  qui 
tenaient  beaucoup  du  fabuleux.  Nous  ne  l'a- 
vons jilus.  Il  y  parlait  d'une  certaine  espèce 
d'hommes  extrcuiomcnt  petits  et  tout  noirs, 
dont  la  nourriture  ordinaire  était  les  huîtres 
et  les  ])oissons  que  la  mor  jetait  dans  l'île 
qui  leur  servait  de  demeure. 

5.  Eutychien,  clerc  de  l'Église  d'Adan , 
dans  la  seconde  Cilicie ,  écrivit,  sous  l'em- 
pire de  Justinieu,  l'histoire  de  la  conversion 
et  de  la  pénitence  de  saint  Théophile  ,  éco- 
nome do  la  même  église.  Sou  évêque  l'ayant 
dépouillé  injustement  de  son  emploi ,  il  eut 
recoiM-s  au  démon  pour  y  rentrer;  et  lui 
donna  ;\  cet  oll'ot  un  billet  signé  de  sa  main 
et  scellé  de  son  sceau,  par  lequel  il  reniait 
Jésus-Christ  et  sa  mère.  Frappé  de  l'énor- 
mité  de  son  crime,  il  en  fit  une  sévère  péni- 
tence. Il  obtint  même  par dillV-reulos  prières 
h  la  Sainti'  \iorge  que  son  billet  lui  serait 
rcnilu  par  le  démon.  Eutychien,  pour  don- 
ner du  poids  à  une  histoii'e  si  extraordinaire, 
assui'o  tju'il  ('lait  m'  dans  la  maison  do  saint 
Tlu'ophile,  qu'il  l'avait  servi  dès  sou  bas  Age, 
et  qu'ayant  été  contiiniellement  auprès  de 
lui,  il  avait  vu  ou  ouï  tout  ce  qu'il  en  racon- 
tait. Nous  ne  connaissons  pi-rsonue  (]tn'  ait 
cité  cette  histoiri-  avant  saint  Pierre  Damien' 
et  saint  Reruanl.  Elle  l'a  été  depuis  par 
salut  Honavonture,  pai-  .Mbcrl-lo-Crand,  par 
Fidbort  de  Chartres,  et  jiai- quelques  autres. 
Surius  et  Bollandus  l'ont  insérée  dans  leurs 
Itccvcih  au  l  février.  On  la  trouve  en  grec  ' 

*  Damian.  Sitiu,  île  Snl.  Mariiv.  Bernard.  8orm. 
in  vr.rba  \pnsl.  ctalii.  Apnil  Boll.  «(/  diem  4  febr. 
•1  I.anil).,lil).  Vlll,;ia(<.  "«. 


Ploi.  Co^.l 
[.IJ.  6  01  .. 


dC'll  lli 

de    ta  !■■  fu- 
sion   lie    ? 
TUo|  bilr. 


CH.VPITIU']  XXIV.  —  JLINn.IlîS,  l'IllMASK,  ETC. 


[Vl*  SIÈCLE.] 

dans  los  iniiniiscrits  de  la  Bililiotliôqiic  im- 
périalc.  l.a  traduction  quo  nous  avons  est 
altiihut'P  i\  Paul  ,  diacri!  di;  l'ûfiliso  di;  Na- 
plcs,  le  in(Mno  qin,an  rapport  de  Sij;<d)nrt  de 
tioinlilours  ',  a  traduit  du  i^icc  on  latin  la 
Vie  de  sainte  Marie  d'l5f;ypto.  Si  le  roi  Char- 
les à  qui  Paul  dc'ilia  sa  ti'aduction,  est  (;har- 
lemaunc,  tiiuune  l'a  eiu  \'nssius,  on  ne  peut 
douter  de  l'antiquité  de  l'hislniro  de  la  con- 
vei'sionde  saint  'riiéopliile;  mais  je  ne  sais  si 
elle  en  doit  paraître  |)lus  aullienliipi(\  Les 
grands  colloques  que  l'on  fait  ternr  à  Tlico- 
pliile  avec  la  Sainte  Vici'ge  ,  mère  de  Dieu  ; 
l'appareil  avec  lequel  le  diable  se  montre  à 


281 


lui  par  l'culromise  d'un  juif  inaf,Mcicu  ;  l'ap- 
paiitinii  de  la  Sainte  Vie,ri,'e  tenant  en  main 
le  ljill(!t  qu'il  avait  ilonné  ati  dialjle;  et  plu- 
sieurs autres  circonstances  de  cette  histoire 
dniment  lieu  de  la  regarder  comme  ayant 
été  embellie  et  amplifiée.  Elle  est  plus  am- 
pli; dans  Mi'IaplirasIe  q  le  dans  la  traduction 
latine  du  tliacre  Paul  ;  Henschéuius  a  donné 
la  môme  histoire  eu  vers  hexamètres ,  qu'il 
conjecture  être  de  la  façon  de  Marbodns  qui, 
d'archidiacie  d'Angers  ,  fut  fait  évériue  de 
Rennes  en  Bretagne  dans  le  xi'  siècle.  [Ou 
la  trouve  au  tome  clxxi  de  la  l'utruloijie  la- 
tine, col.  Io93-1603.] 


CUAPITRE  XIIV. 

Jnnilius,  évêqne  d'Afrique  [550J  ;  Primase,  évêqne  d'Atirumct  [555J  ;  Bellator 
et  Mucien  [vers  le  même  temps], 

[Écrivains  latins] 


Jïriiniiis  : 


1.  Nous  ne  connaissons  Jnnilius  que  parce 
qu'il  en  est  fait  mention  dans  Cassiodore',  et 
par  l'éci'it  qu'il  a  composé  sous  le  titre  :  Des 
Parties  de  lu  loi  dii'ine.  C'est  une  espèce  d'iu- 
Iroduction  à  l'étude  de  l'Hcriture  sainte , 
adressée  à  Primase,  évèque  d'Adrumet,  ville 
de  la  province  de  Bysacène  eu  Afrique.  Ils 
s'étaient  '  trouvés  ensemble  à  Go'.istantino- 
ple  dans  le  temps  de  la  tenue  du  cinquième 
concile  général.  Comme  ils  s'entretenaient 
sur  des  matières  de  doctrine  ,  Primase  de- 
manda il  Junilius  s'il  ne  connaissait  person- 
ne parmi  les  Grecs  qui  fut  versé  dans  l'in- 
telligencc  des  livres  saints,  et  qui  eût  assez 
de  zèle  et  il'anleur  pour  en  instruire  les  au- 
tres. Junilius  répondit  qu'il  avait  vu  un  per- 
san nommé  Paul,  qui  avait  étudie  à  Nisibe  , 
on  il  y  avait  uue  école  publique,  où  l'on  ap- 
priMiail  l'I'lcriture  sainte,  comm(!  il  y  en  avait 
ailleurs  pour  apprendre  la  grammaire  et  la 
rhétorique  ;  qu'il  avait  la  de  ce  Paul  cer- 
taines règles  qu'il  avait  coutume  de  donner 
à  ses  disciples  pour  les  diriger  dans  leurs 
études  ,  voulant  qu'ils  sussent  avec  quelle 
méthode  ils  devaient  lire  l'i'xriture  ,  avant 


de  leur  eu  approfondir  les  mystères.  Primase 
pressa  Junilius  de  rendre  public  ce  qu'il 
avait  appris  de  Paul.  Il  le  fit  en  deux  livres 
qu'il  mit  en  forme  de  itialogue  entre  le  dis- 
ciple et  le  maître.  Le  disciple  propose  les 
questions,  le  maître  les  résout  *. 
2.  La  science  de  l'Écriture  est  divisée  en      Anaiy.o  do 

se?  trrîl-:  lili. 

deux  parties  dont  l'une  a  pour  objet  la  su-    i  (i«s  punies 

^  /      '^  •'  do  la  loi  divi- 

nerlicie  ou  l'écorce  de  l'Ecriture.  La  seconde   "•-■,  l'"'"-  x 

i  ^  ^  Bibl.  Pal.  pni;. 

Consiste  dans  la  connaissance  des  choses  2'•"■ 
mêmes  qu'elle  nous  enseigne.  La  connais- 
sance de  la  première  partie  se  réduit  à  cinq 
articles,  savoir  :  à  la  nature  du  livre  ,  à  Mtn 
autorité,  à  son  auteur,  à  la  manière  dont  il 
est  écrit,  et  à  l'ordre  dans  lequel  il  doit  être 
mis.  Junilius  entend  par  la  nature  du  livre  , 
ce  dont  il  est  composé  ,  c'est-à-dire  qu'il  est 
.  ou  historique,  ou  prophétique,  ou  figuré,  ou 
simplement  instructif.  L'historiipie  contient 
le  récit  des  choses  passées  :  il  y  en  a  dix-sept 
de  ce  genre  dans  le  canon  de  l'Kcriture  :  la 
Genèse,  l'Exode,  le  Lévitique,  les  Nombres, 
le  Deutéronome,  Josué,  les  Juges,  llulh,  les 
quatre  livres  des  Rois,  les  quatre  Evangiles 
et  les  Actes  des  apùtres.  Il  rejette  ^,  comme 


Cap.  t. 


'  Sigeb.  De  Script,  ecci.  cap.  69.  '   On   trouve  l'ouvrage  de  Junilius  dans  le  tome  X 

-  Ca-.^ind.  De  In^lit.,  ia|i.  x,  pas.  ot'i.  de  Gallaurl  etdans  li'  tome  LXVIII  de  \siPitrologie 

3  .liiuil.  Prœfal.  ad  Primas.,  tnm.X,  Bibliot.  Pat.  UiUne,  col.  u,  avec  la  notice  de  Gallaiul.  [L'éditeur.) 

pag.  340.  "  Quare  hi  libri  Paralipomenon   duo  ,  Job  I. 


282 


lllSTOmE  GK-NliRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


n'étant  pas  du  canon  ,  les  deux  des  Parali- 
pouiùnes  ,  celui  de  Job  ,  les  deux  d'Esdras  , 
le  livre  d'Esthcr,  les  deux  des  Macliabées 
el  celui  de  Judith.  La  raison  qu'il  en  donne, 
c'est  qu'au  lapport  de  saint  Jérôme  ces  li- 
vres n'avaient  pas  chez  lus  Hi'breux  la  même 
autuiité  que  les  précédents.  Il  déliuit  la  pro- 
cr-K-.  phélie  :  «  La  manifestation  '  des  choses  ca- 
chées ,  passées ,  présentes  ou  futures  ,  faite 
par  inspiration  divine  ;  »  et  compte  dix-sept 
livres  piopliétiques,  les  Psaumes,  les  quatre 
grands  Prophètes  et  les  douze  petits,  lemar- 
quant  que  l'on  doutait  beaucoup  '  chez  les 
Orientaux  de  la  canouicité  de  l'Apocalypse 
T  de  saint  Jean.  La  manière  d'écrire  prover- 
biale est,  selon  lui,  une  façon  d'écrire  tigu- 
rée  qui  dojme  autre  chose  à  entendre  que 
ce  qu'elle  signifie  à  la  lettre,  et  qui  donne 
des  avis  pour  le  présent.  C'est  de  cette  sorte 
que  sont  écrits  les  Proverbes  de  Salomon, 
l'Ecclésiaste  et  la  Sagesse  de  Syrach  ,  c'est- 
à-dire  l'Ecclésiastique.  Quelques-uns  ajoutent 
le  Cantique  des  cantiques  et  la  Sagesse.  C'est 
aussi  a  ce  genre  d'écrire  que  l'allégorie  a 
rapport,  parce  qu'elle  se  tire  ou  d'une  mé- 
iapliore  ,  ou  d'une  parabole  ,  ou  d'une  com- 
paraison, ou  d'une  manière  de  parler  pro- 
verbiale. La  simple  instruction  regarde  la 
".  foi  ou  les  mœurs  |iour  le  temps  présent.  II 
eu  est  traité  dans  l'Ecclésiaste,  dans  les  qua- 
torze épitres  de  saint  Paul,  dans  la  première 
de  saint  Pierre,  dans  la  première  de  saint 
Jean  ,  qui  sont  les  seules  que  Junilius  sem- 
ble recevoir ,  en  remarquant  toutefois  que 
plusieurs  reçoivent  aussi  les  cinq  autres  épî- 
tres,  qu'on  appelle  canonù/ues. 
""'■  3.  Il  distingue    divei-s   degrés   d'autorité 

dans  les  livres  de  l'Ecriture.  Ceux-là  sont 
d'une  autorité  parfaite,  qui  sont  du  nombre 
des  canoniques  ;  ceux  qui  ne  sont  pas  mis 
dans  le  canon  universellement,  mais  seule- 
ment par  plusieurs,  sont  d'une  moindre  au- 
torité ;  les  autres  qui  n'y  sont  mis  de  per- 
"•"'  sonne,  n'en  ont  aucune.  On  connaît  les  au- 
teurs des  livres  saints,  ou  par  les  titres,  ou 
par  le  commencement  de  leurs  ouviages  ; 
c'est  de  cette  sorte  que  l'on  connaît  les 
écrits  des  Prophètes  et  des  Apôtres.  Il  y  en 
a  d'autres  que  l'on  ne  connaît  que  par  les 


titres,  comme  sont  les  quatre  Évangélistes, 
et  d'autres,  par  la  tradition  des  anciens. 
C'est  par  cette  voie  que  nous  savons  que 
Moïse  est  auteur  duPenlateuque;  Josué,  du 
livre  qui  porte  son  nom;  et  Samuel,  riu  pre- 
mier livre  des  Rois.  Il  y  en  a  quelques-uns 
dont  les  auteurs  sont  entièrement  inconnus, 
comme  le  livre  des  Juges,  celui  de  Ruth,  le 
troisième  et  le  dernier  des  Rois  ;  ce  que  Ju- 
nilius croit  être  arrivé  par  un  effet  de  la  Pro- 
vidence, afin  que  l'on  ne  juge  point  de  l'auto- 
rité d'un  livre  par  le  mi'rite  de  son  auteur, 
mais  par  la  grâce  du  Saint-Esprit  (|ui  seul 
donne  autorité  aux  livres  canoniques.  Entre  '-^f- 
ces  livres,  ajoute-t-il,  quelques-uns  sont  écrits 
en  vers  hébreux,  comme  les  Psaumes,  le  li- 
vre de  Job,  l'Ecclésiaste  et  quehpies  endroits 
des  Prophètes  ;  les  autres  en  prose.  Si  ceux 
qui  sont  écrits  originairement  en  vers,  ne 
conservent  pas  la  même  mesure  dans  les 
traductions,  c'est  que  la  chose  n'est  pas 
possible,  si  l'on  ne  change  les  termes  et  la 
construction  de  l'original.  Pour  ce  qui  est 
de  l'ordre  des  livres  de  l'Écriture,  c'est  le 
môme  dans  Junilius  que  dans  nos  exemplai- 
res. Il  remarque  que  le  but  de  l'.Vncicn  Tes- 
tament est  d'annoncer  sous  des  ligures  ce 
qui  devait  arriver  dans  le  Nouveau  ;  et  que 
le  dessein  du  nouveau  est  de  nous  inspirer 
de  l'amour  pour  la  gloire  de  la  béatitude 
éternelle. 

4.  Après  avoir  expliqué  ce  qui  regarde 
l'extérieur  de  l'Ecriture,  il  passe  au  fond  des 
choses  qu'elle  enseigne,  en  remarquant 
qu'il  y  a  des  noms  qui  conviennent  à  l'es- 
sence, d'autres  qui  couviennentaux  person- 
nes de  la  Trinité  ;  qu'entre  ceux-ci  quelques- 
uns  les  marquent  précisément,  et  d'autres 
conséquemmeut,  parce  qu'ils  signifient  les 
opérations  qu'on  leur  attribue.  Les  noms 
qui  désitrucnt  l'essence,  sont  :  Dieu,  Sei- 
gne'ir,  Adaiiui,  SuOaol/i,  Helei  ou  Ilrloi.  Le 
terme  de  Tuut-Puissant,  se  lapportc  à  l'opé- 
ration et  se  dit  de  Dieu  couséqueinmeat;  ' 
parce  que  dès  lors  qu'il  est  Dieu,  il  est  font-  ' 
puissant.  Les  noms  de  J'rre,  de  Fils  et  de 
Snint-L'sj/rit  marquent  préci;séraenl  les  per- 
sonnes, qui  sont  aussi  quelquefois  désignées 
par  certaines  oiiéralions  qu'on  leur  aiti-ibuc 


Es'lrœ  duo,  Judith  I,  Ef!ther  I ,  Mnchahœnrum 
duo  non  inler  cnnoiiicas  Scripturas  cnrnnit  ? 
Quonwin  apud  Uehnros  i/uot/ue  super  liac  dijfc- 
rentia  lecipiebantur,  sicul  Uieronymus  cœUrit/ue 
teslanlur.  Juuil.  lib.  I,  cap.  ni. 


'  Prophetia  mt  rerum  latentiuin,  nul  prœsen- 
iium,  (ttil  fuhirarum  ex  dirina  inspiraliimc  wa- 
nifeslotin.  Iliiil.  nip.  iv. 

'  Cœtenim  de  Joniinis  Àpncalypsi  apudOrien(a~ 
lesadmodum  dubilatur.  lliiil. 


[VI*  SltaK.j 


CHAPITRE  XXIV.  —  JtlNlMUS,  PitIMASK,  ETC. 


283 


I  Cor. 
Lac*  )'• 


Ani'jse   du 

•«-oi>d    ;ivi«, 

J'  ppiiicnt  tlii 


Cp. 

!C.| 


('iMiiniimi'nionl  dans  rilciiliirc  ;  ([ti(ii(|ii'ollcs 
ildivtMil  iiiissi  s'(Mil(\ii(lr(i  lies  iiiilrcs  ])('rson- 
nos ,  comme  lorsqu'il  est  dit  dans  l'Kpitro 
aux  Coriiilliicns  :  ]'oiis  rtcs  le  temple  du  Si'iiil- 
L'uprit;  et  dans  saint  Luc  :  Le  S(ii»t-/:^!tjj)it 
si/rviendra  eu  enus.  La  grâce,  qui  on  ces  deux 
endroits  est  désignée  sous  le  nom  du  Saiiit- 
Lsprit,  lui  est  attribuée  nommément,  parce 
que  l'Écriture  nous  ne  le  représente  comme 
le  sanctillcateur  de  nos  ùmes,  et  comme 
l'auteur  des  dons  spirituels,  quoiqu'ils  soient 
égaleiuent  du  Pèn;  et  du  Fils.  D'où  vient 
que  Jésus-Christ  dit  aux  apôtres  :  Allez, 
lia/jlisez  toutes  les  ',:alw>i$  au  nota  du  l'ère  et 
du  Fils  et  du  Saint-L':tj)rit. 

5.  Junilius  traite  dms  le  second  livre,  de 
la  création  du  monde,  de  la  manière  dont 
Dieu  le  gouverne,  de  la  loi  naturelle  et  de 
la  loi  écrite  ;  des  accidents  qui  arrivent  aux 
clioses  naturelles,  et  de  ceux  de  la  volonté 

"  de  l'homme.  La  santé  et  la  maladie,  dit-il,  la 
vie  et  la  miu't  sont  des  accidents  qui  regar- 
dent les  choses  corporelles.  Les  bonnes  et  les 
mauvaises  pensées  sont  des  accidents  de  la 
volonté,  qui  toutefois  ne  lui  arrivent  pas 
sans  elle  ;  parce  qu'il  y  a  en  nous  m\  discer- 
nement naturel  du  bien  et  du  mal,  et  que 
nous  nous  portons  volontairement  vers  l'un 

I  ou  l'autre.  La  loi  nous  instruit  '  ;  mais  la 
grâce  nous  prépare,  nous  aide,  nous  fortifie, 
nous  couronne.  Ensuite  il  fait  voir  que  Dieu 
s'est  choisi  un  peuple  particulier  pour  le 
rendre  heureux  dans  le  siècle  futur,  et  à 
cette  occasion  il  traite  des  figures  de  la  loi 
et  de  l'accomplissement  des  prophéties  tou- 
chant Jésus-Christ.  11  traite  aussi  des  pro- 
phéties qui  l'egardenl  la  vocation  des  gentils, 
et  de  leur  accomplissement  ;  puis  il  se  fait 
cette  question  :  «  Qu'était-il  besoin  de  créer 
le  siècle  présent,  si  tout  ce  qui  s'y  fait  a  rap- 
port au  siècle  futur?»  Il  répond  que  Dieu  en 
a  ordonne  ainsi,  afin  que  les  bieidieureux 
eussent  lieu  de  glorifier  de  plus  en  plus  le 
Seigneur  qui  aide  les  bons  en  ce  monde 
pour  leur  faire  remporter  la  victoire  sur  les 


méchants,  et  qui,  dans  l'auli'c,  lécomiiensc 
leurs  victoires.  11  demande  encore  comment  caii 
l'on  prouve  que  les  livres  de  l'Église  catho- 
lique sont  divinement  inspirés'?  Sur  quoi  il 
dit  que  cela  se  prouve  ^  i)ar  leur  vérité'  nu"'- 
me,  par  l'ordre  des  choses  qui  y  sont  rappor- 
tées, par  l'accord  admirable  des  préce])tes 
qu'ils  renferment,  par  la  simplicité  do  leur 
style,  par  la  pureté  de  leurs  termes,  par  la 
qualité  et  la  condition  de  leurs  auteurs,  n'é- 
tant pas  possible  que  des  hommes  aient  écrit 
des  choses  divines,  que  des  personnes  gros- 
sières et  sans  éloquence  aient, sans  l'inspira- 
tion du  Saint-Esprit,  écrit  des  vérités  si  su- 
blimes. «  Le  succès  de  leur  prédication,  dit- 
il,  est  encore  une  preuve  de  la  vérité  de  ce 
qu'ils  ont  annoncé.  Leur  doctrine,  quoique 
lirèchée  par  des  gens  méprisables  et  en  pe- 
tit nombre,  a  été  reçue  de  toute  la  terre,  a 
redressé  les  sentiments  des  philosophes,  con- 
fondu ceux  qui  en  professaient  une  contraire. 
Enfin  l'accomplissement  des  prophéties  rap- 
portées dans  ces  livres  en  a  prouvé  évidem- 
ment l'autorité;  et  Dieu  l'a  confirmée  par 
des  miracles  continuels  jus(ju'à  ce  qu'ils  ont 
été  reçus  des  nations  infidèles.  11  n'est  plus 
besoin  aujourd'hui  de  prodiges  pour  leur 
donner  de  l'authenticité;  c'en  est  un  sullisant 
de  ce  qu'ils  sout  reçus  de  tout  le  monde.  » 
Junilius  montre  après  cela  que  la  foi  est  au- 
dessus  de  la  raison,  mais  qu'elle  ne  lui  est 
pas  contraire;  quoiqu'elle  nous  soit  néces- 
saire pour  comprendre  ce  que  les  lumières 
de  la  raison  ne  peuvent  atteindre. 

L'ouvrage  estécrit  avec  beaucoup  de  métho- 
de, et  d'uuemanièrc  très-claire  et  très-suivie. 

6.  Primase,  à  qui  il  est  dédié,  se  trouva  à 
Constantiuo[>le  dans  le  concile  que  le  pape  fjl.Tjrà» 
Vigile  y  tint  contre  Théodore  évéque  de  Gé-  ciia|«reT, 
sarée  en  531.  11  était  encore  en  cette  ville  eu 
533  lorsqu'on  y  assembla  le  cinquième  con- 
cile généial.  Quoiqu'invité  plusieurs  fois  d'y 
assister,  il  le  refusa  ;  mais  il  signa  avec  plu- 
sieurs autres  évoques  le  décret  que  le  Pape 
avait  présenté  à  l'empereur  Justinien,  dans 


rtiiiM' 

évPtuc      d'A- 


1  Ipsum  quidem  spontancum  moHun  lex  qui- 
dem  erudit  :  gratta  autem  prœparat ,  adjuvat , 
corroborait,  coronat.  .Iiuiil.  lili.  I.  oap.  xu. 

*  Vndeprobamus  libros  religiohis  nostrœ  divina 
esse  vispiratione  conscriiitos  f  Ex  multis,  quorum 
primum  est,  ipsius  Scripturœ  verilas  ;  ileinde  ordo 
rerum-,  consonanlia  prœceptorum,  modus  loculio- 
nis  sine  ainbUu  ,  purUasque  vcrborxim.  Additur 
conscribenliuui  et  prœdicantiuni  qualitas:  quod 
divina  ho  mines  ,  excelsa  viles,  iiifucuiidi  subtilia 
non  nisi  divino  repkli  Spiritu  tradidvssenl ;  tum 


prœdicationis  virl.us ,  yuain  dam  prœdicaretur 
{licet  a  paucis  dcspeclis)  obtiniiit.  Àccedunt  his 
teslipcalio  contrariorum,  ni  sibyllarum  vel  phi- 
losophorum  ,  expulsio  adversariorum ,  utilitas 
conse(iucHlium,  e.vilus  eonim  quœ  per  accepla- 
tiones  et  figuras  et  prœdictiones  ,  quœ  prœdicta 
sunl  ; adpostremiun,  miraculajugiler  factadonec 
Scrvplura  ipsa  citsciperetur  a  gentibus.  De  qua 
Iwc  nunc  ad  proximum  sufflcil  miraculum ,  quod 
ab  omnibus  suscepta  cognoscilur.  Junil. ,  lib.  Il  , 
cap.  XXIX. 


284 


HISTOIRE  GI:N1':RALE  des  auteurs  ECCLESIASTIQUES. 


<!r.  Corn. 
n)C0tidrC3* 


lequel,  cil  condarunant  les  erreurs  attribuées 
à  Tlu'odore  d",  Mopsueste,  ft  Tlioodorct  et  iï 
Ibas,  il  épargnait  lciu~s  poi-sonncs.  Ce  décret 
est  appelé  le  Constitutum  du  pape  Vigile.  Les 
évoques  qui,  après  la  décision  de  ce  concile, 
refusèrent  de  condamner  les  Tnns-Chnjjitres 
furent  maltraités.  Primase  fut  d'abord  relé- 
gué dans  un  monastère;  mais,  ayant  aban- 
donné la  défense  des  Trois-Cliapitres,  il  devint 
primat  de  la  Rysacènc,sa  province,  il  la  place 
de  Uoéce.  Mais  il  fut  ensuite  déposé  par  les 
scbismaliques  de  la  môme  province,  c'est-à- 
dire  par  les  défenseurs  des  Trois-Clwpitres. 
7.  Nous  avons  de  lui  un  commentaire  sur 
l'Apocalypse  cité  par  Cassiodore  ',  et  un  sur 
les  Épîtres  de  saint  Paul,  dont  Cassiodore 
ne  dit  rieo-.  On  n'en  trouve  rien  non  plus 
dans  Isidore  de  Séville  ;  mais  son  silence  ;\ 
cet  égard  ne  fait  pas  preuve,  puisqu'il  ne 
parle  pas  même  du  commentaire  de  Primase 
sur  l'Apocalypse.  Celui  qu'il  a  fait  sur  les 
Épitres  de  saint  Paul  est  tiré  en  partie  des 
écrits  de  saint  Augustin  et  de  saint  Âmbroise, 
et  du  commentaire  qui  porte  le  nom  de 
saint  Jérôme.  Il  fut  imprimé  séparément  à 
Lyon,  on  I3i3,  in-S»,  par  les  soins  de  Jean 
(îagncux,  tliénlogien  de  Paris,  qui  dédia  cette 
édition  au  roi  François  I".  Il  fut  réimprimé 
A  Bàle,  en  1544,  et  depuis  dans  le  tome  X  de 
la  /iiljliitl/ikjue  df:s  PèrfS  à  Lyon,  en  1677, 
avec  le  connroutaire  de  Primase  sur  l'.Vpo- 
calypse  '.  Celui-ci  est  adressé  k  Castor  qui 
l'avait  demandé  à  Primase,  et  il  est  divisé  en 
cinq  livres.  L'auteur  recounait  '  qu'il  a  com- 
posé ce  commentaire  de  divers  endroits  des 
écrits  de  saint  Augustin,  mais  surtout  de  l'ex- 
plication que  Ticbonius  le  doualistc  a  donnée 
de  r.Vpocalypsc  ;  en  rctrancbant  toutofuis  ce 
qu'il  y  disait  de  favoral)lc  h  sa  secte,  contre 
l'unité  de  l'Eglise  catholique  ;  et  beaucoup 
de  choses  inutiles  qui  ne  servaient  h  rien 
moins  qu'h  expliiiuer  le  texte  de  l'Apôtre. 
Nous  avons  paihi  ailleurs*  de  ce  cummen- 
tairc  de  Tichonius.  Celui  de  Primase  est  fort 
étendu.  A  l'imitation  de  saint  Auirustin  et 
de  Tichonius,  il  y  explique  l'Apocalypse  en 


un  sens  spirituel,  ne  considérant  dans  ce  livre 
que  deux  sociét(''s,  celle  des  bons  et  celle  des 
méchants,  la  récompense  des  uns  et  la  peine 
des  autres,  Jésus-Christ  et  sou  Église  ;  et 
quoiqu'il  donne  quelquefois  le  sens  de  la 
lettre  il  ne  s'altache  point  ;\  montrer  la  suite 
des  événements  que  .saint  Jean  a  eus  en  wie. 
Il  fait  à  la  fin  de  son  commentaire  une  ri^ca- 
I)itulation  de  tout  co  qu'il  y  avait  dit  ;  afin 
que  le  lecteur  puisse  plus  aisément  se  re- 
présenter le  plan  sur  lequel  roulent  toutes 
ses  explications. 

8.  Nous  apprenons  de  saint  Isidore  de  Sé- 
ville '  q>ie  Primase  avait  écrit  trois  livres  dcx 
Ilirésies,  où  il  expliquait  ce  que  saint  Augus- 
tin avait  laissé  imparfait  dans  son  ouvrage 
sur  la  même  matière;  faisant  voir  dans  le 
premier  ce  qui  rend  un  homme  hérétique; 
dans  le  second  et  dans  le  troisième,  à  quoi 
l'on  connaît  les  hérétiques.  Cet  ouvrage  est 
perdu.  Quelques-uns  ont  cru  le  retrouver 
dans  le  Pi-ffàcstinatus,  donné  au  public  par 
le  Père  Sirmond  en  1043  et  169G.  Mais  le 
dessein  de  l'ouvrage  de  Primase  et  sa  doc- 
trine sur  la  grâce,  qui  est  celle  de  saiut  Au- 
gustin, n'ont  rien  de  commun  avec  le  Prœ- 
dastinaliis,  dont  l'auletu'  *  était  infecté  de 
l'hérésie  pélagienne,  et  dont  le  dessein  a  été 
de  donner  une  suite  des  hérésies  depuis  Si- 
mon le  magicien  jusqu'aux  prédestinatiens; 
et  non  pas  de  montrer,  comme  a  fait  Pri- 
mase, ce  qui  fait  un  hérétiijue,  et  à  quoi 
l'on  reconnaît  qu'il  est  hérétique. 

9.  On   ne   connaît  le  prêtre  Rellator  nue     n'i.i.r:.» 
parce  que  1  on  en  lit   tiaus  les  écrits  de  Cas- 
siodore ;  car  il  ne  nous  reste  rien  de  cet  an- 
leur.  Il  avait  composé  '  un  commentaire  snr 

le  livre  de  Rulli,  divisé  en  deux  volumes, 
que  Cassiodore  joignit  au  Recveil  des  ou- 
vrages d'Origène  sur  l'Eptateuque,  expliiiué 
en  huit  'livres,  celui  de  la  Sagesse,  et  com- 
menté '  les  livres  de  Tobie,  d'Esther,  de  Ju- 
dith et  des  Macliabéi's.  Il  y  avait  cinq  livres 
sur  Tobic;  six  sur  Esther;  sept  sur  Judith, 
et  dix  sur  les  .Macliahées.  11  ne  fit  point  de 
commentaires  sur  Esdras  ;  mais  il   traduisit 


'  Cîissiniî.  De  Inxtil.,  c.ip.  ix,  pafr.  .'il.l. 

'  l'rim.is.  l'rœfdl.  in  Apocdl.  toiii.  X  liibliol. 
Pair.,  paf,'.  287. 

'  Voyez  tniii.  V,  ii.if,'.  104,  iKiuvoDe  i5(lilion. 

*  Les  Comiiienlaires  de  l'riiii.ise  se  lisent  nu 
tome  I.WIII,  (1)1.  im  lie  l.i  l'atrotogic  latine  avec 
uiio  iiiilii  e  psr  Cave.  {L'éilileitr.) 

'  l'riinasitis  componnil  scrnione  scUola^lico  de 
hœresibus  librus  1res   dircclos  ad   Forlunalum 


e/)i,«co/)H»i  ,  crplicnns  in  pis  i/und  nlini  hratu^l 
Aufiiislintis  in  lihrn  iKvresron  iwperfevlum  morte 
intervenienle  reliqiKral:  in  primo  oslenitrnx.i/nid 
hœreticum  faciai;  secundo  et  tertio  digerens,  (/iiirf 
iKrreticum    deinonstrcl.   Isiilor.     Dr  Viris  illust. 

Clip.  IX. 

6  Viiyez  liim.  XI,  pnp.  .UT  et  .'t3<. 
'  Cassiiiil.  De  Institut.,  cnp.  i. 
*  Ibid.,  inp.  V.  —  '  Ibid.,  cap.  vi. 


Miul 
t«ill). 


[VI*  SIÈCLE.] 


CIIAJ'ITIŒ  XXV.  —  FACUNDUS  KT  UUSTKJUE. 


28.') 


cil  laliii  les  doux  lioiiuUi(!s  grccijucs  d'dii- 
gèuo.  Cassiodore  parlo  de  cet  ccriviiiu  eu 
dos  Utuk.'s  fort  liduoralilcs,  ra[)|i('laiit  nu 
piôtro  '  lios-iuliKicux  et  sou  auii' . 


les  Trins-CItitpitirs.  Mu('ion  les  traitait  de 
si;liisuiali([U('s,  et  om])l()yait  contre  eux  les 
UH'uics  raisons  dont  saint  Aufrusliti  s'(;tait 
servi  coulrc  les  doiiatistes.  Nous  n'avons  de 


10.  Il  y  en  avait  un  autre  nomnid  Mucien      l'ouvrage   de  Mucien   que   ce  (jun  l'on  en 


qu'il  estimait  '  pour  son  (Hoipienec.  Ce  fut 
do  lui  dont  il  se  servit  pour  traduire  en  latin 
les  trente-(iualre  lioniélies  de  saint  Clirysos- 
tùme  sur  l'Kpilro  aux  Hébreux.  Nous  avons 
encore  cette  traduction  imprimée  à  Cologne, 
en  1530.  Ce  Mueien  est,  comme  l'on  croit,  le 


trouve  dans  la  n'ponsc  que  Facundus  y  a 
faite  :  car  on  ne  doute  point  (pu;  Mucien, 
dont  parle  Cassiodore,  ne  soit  le  même  que 
Mocicn  contre  lequel  Facundus  a  écrit.  Le 
temps,  le  nom,  la  profession  font  voir  que 
c'est  une  même  personne.  Le  changement 
fait  dans  une  lettre  de   son  nom  peut  venir 


mèmt'  qui  écrivit  contre  les  évoques  d'Afri 

que  qui  s'étaient  séparés  de  la  communion      de  l'inadvertance  des  copistes 

du  jKipe  Vigile  depuis  qu'il  avait  condamné 


CH.4PITRE  XXV. 

Facundus,   évêque  d'Hermiane  [547],  et  Rustique  diacre  de  Rome  [549]. 

[Écrivais  latins.] 


Farundiis 
d'HoiiiilaDe, 

d^-r.  ii.i'ur  dus 
Tiois'Lliaiiî. 
très. 


1.  L'empereur  Justinien,  après  avoir  en- 
voyé en  Afrique  son  édit  pour  la  condamna- 
tijii  des  Trois-CItapitres,  c'est-à-dire  des  écrits 
de  Théodore  de  Mopsueste,  de  ceux  de  Théo- 
doi-et  et  de  la  lettre  d'Ibas  ,  voulut  pour  lui 
donner  plus  de  crédit  engager  le  pape  Vigile 
qui  se  trouvait  ;\  Conslaulinople  en  .347,  à  les 
condamner.  Vigile  avant  de  se  rendre  ,  tint 
un  concile  d'environ  70  évêques,  qu'il  pria 
de  donner  chacun  leur  avis  par  écrit.  De  ce 
nombre  était  Facundus,  évêque  d'Hermiane, 
en  .\frique ,  dans  la  province  de  Bysaccne. 
Comme  il  avait  déj;\  composé  un  ouvrage 
pour  la  défense  des  Trois-Chnpitres,  il  donna  ' 
pour  réponse  l'extrait  qu'il  en  fit.  Les  autres 
évêques,  ayant  aussi  donné  leur  avis  par 
écrit,  le  Pape  donna  le  sien  le  11  avril  .348.  Il 
y  condamnait  les  Trois-Cha/jilres  ,  sans  pré- 
judice du  concile  de  Chalcédoiue,  et  à  condi- 
tion que  i)ersonne  ne  parlerait  plus  de  celte 
question  ni  de  vive  voix,  ni  par  écrit.  Le  dé- 
cret de  Vigile  ,  connu  sous  le  titre  de  Jiidi- 
culiiiit ,  ne  contenta  personne  :  mais  les  dé- 


fendeurs des  Troh-Chajiitres,  indignés  de  ce 
qu'il  les  avait  condamnés,  se  retirèrent  de  sa 
communion.  Facundus  qui  jusque-là  avait 
tenu  secret  son  ouvrage  pour  la  défense  des 
Trois-Chapitres,  le  rendit  public,  et  l'adressa 
même  à  l'empereur  Justinien. 

2.  Il  l'écrivit  dans  la  persuasion  où  il  était         oumpe 
que  1  ou  ne  pouvait  condamner  les    Trois-  >">"•    iii»"« 

/-!/         ■  .'1-1  ,.    .  ^"    douze    li- 

Lhapitres  qu  au  préjudice  de  la  foi  orthodoxe  "«=• 
et  de  l'autorité  du  concile  de  Chalcédoiue. 
C'est  ce  que  témoignent  clairement  saint 
Isidore  de  SéviUe  '  et  Victor  de  Tunes  ".  Son 
ouvrage  est  divisé  en  douze  livres,  et  chaque 
livre  en  plusieurs  chapitres.  Mais  cette  sou- 
division  n'est  point  originale  ,  elle  est  de  la 
façon  des  éditeurs  qui  l'ont  faite  pour  la  fa- 
cilité des  lecteurs. 

3.  Facundus  approuve  dans  son  premier 
livre  la  confession  de  foi  que  l'empereur  Jus- 
tinien avait  faite  à  Constantinople,  en  S33,  et 
avait  envoyée  dans  les  diverses  provinces  de 
son  empire,  remarquant  que  ce  prince  ne  pou- 
vait condamner  plus  nettement  les  hérésies 


Anulyïe  du 
premier  livie. 
£ditPiiris,act 
IC:iG,  (OUI.  Il 
O^er.  SinliOQ. 
di,  pag.  idO. 


'  Cassioil.  De  Institut.,  c.ip.  i.—  -  Ihid.,  cap.  iv. 
— '  Jliid.,  cap.  vin.—  '  FiKtund.  Prœfat.,  pag.  400. 

'  facundus  Henuiitnensis  episcopus  duodccim 
libros  jiro  defensione  Triuni  Capilulorum  scrip- 
sit .  quorum  f:lijlo  elicuit  jirœfata  Tria  Capitula  ùi 
prœscriplinne  aposioUcœ  fidei  et  Chalcedoncnsis 
synodi  impugnalioue    fuisse  dainnala.  Isidor.  De 


Viris  itlust.  cap.  xvui. 

*  Post  consutatum  Bcisiliianno  10,  lihri  duode- 
cini  Facundi  Uenniunensis  Erclcsiœ  episcopi  re- 
fulsere.  quibus  ecidentissinte  declaravit  Tria  Ca- 
pitula in  pra'scriptione  fidei  catholicœ  el  aposio- 
Ucœ concilii  CIvilcedonensis  fuisse  damnala, 
Victor  Tua.  iii  Clironico. 


286 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Op  ■■ 


de  Nesloriusel  d'Eut3-cliès  qu'en  reconnais- 
sant, comme  il  faisait,  qu'un  de  la  Trinité 
a  été  crucifié,  que  la  Sainte  Vierge  est  vérita- 
blement et  proprement  mère  de  Dieu,  et  qu'il 
y  a  deux  natures  en  Jésus-Christ.  Mais  il 
soutient  que  ce  soûl  les  eutychéens  qui  ont 
invenli'  la  condamnation  des  Troh-Cliajjitrcs 
pour  doiuicr  atteinte  à  l'autorité  du  concile 
de  Clialci'-doiue  ;  et  que  les  orijrénisles,  lâ- 
chés de  ce  que  l'Empereur  avait  condamné 
Origène,  s'étaient  joints  à  eux,  n'osant  atta- 
quer ouvertement  ce  concile.  Il  prouve  ce 
fait  par  l'aveu  de  Domitien,  évcquc  d'Aucyre, 
dans  une  lettre  au  pape  Vigile.  Le  diacre 
Lilu'rat  assure  la  même  chose.  Puis  conti- 
nuant à  s'adresser  à  l'Empereur  :  «  Les  ori- 
génistes,  dit-il,  du  nombre  desquels  était  ce 
Domitien*  ont  avancé  que  tous  les  euty- 
chéens, ennemis  des  décrets  du  concile  de 
Chalcédoine,  coinmmiiqneraienl  avec  rEjj;li- 
sc,  si  l'on  condamnait  la  lettre  d'Ibas,  en 
niant  que  ce  concile  l'eût  approuvée.  Ils 
avaient  en  cela  inlcntion  de  surprendre  les 
iunorants,  afin  que  lorsqu'on  montrerait, 
comme  il  est  très-facile,  '  que  le  concile  a 
reçu  cette  lettre,  nous  n'eussions  plus  rien 
à  ri'pondre  aux  eutychéens,  qui  accusent  le 
concile  de  ncslorianismo.  d 

Facundus  ajoute  que  c'est  sous  ce  faux 
prétexte  de  réunion  que  l'on  a  accordé  aux 
eutychéens  uon-sculeuiout  d'anathémaliser 
la  lettre  d'Ibas,  mais  encore  ses  approba- 
teurs ;  que  pour  s'opposer  à  cette  entreprise 
ils  commencèrent  par  expliquer  sa  foi  sur 
l'Incarnation  de  Jésus-Christ,  sachant  que 
c'est  la  coutume  des  eutychéens  d'accuser  de 
nestorianisme  tous  ceux  qui  défendent  lu 
vérité  contre  eux.  Il  dit  que  pour  se  justifier 


de  l'erreur  desnestoriens,  il  n'est  pas  néces- 
saire de  condamner  la  lettre  d'Ibas,  qu'il  suf- 
fit de  reconnaître  qu'un  de  la  Trinité  a  été 
crucifié  pour  nous,  que  la  bienheureuse  Ma- 
rie est  appelée  véritablement  et  proprement 
mère  de  Dieu,  et  qu'il  y  a  deux  natures  en 
Jésus-Christ,  la  nature  divine  et  la  nature 
humaine.  Il  y  avait  des  calholiqucs  qui  no 
voidaient  pas  que  l'on  dit  :  Un  de  la  Trinité 
a  souffvrt  ;  mais  :  Une  personne  de  la  Tri- 
nité. Facundus  convient  que  l'une  et  l'autre 
(!c  ces  propositions  ont  un  bon  sens  ;  mais 
que  la  dernière  n'exclut  pas  assez  formelle- 
ment l'erreur  de  Nestorius  ,  au  lieu  que  la 
première  est  plus  conforme  aux  faijons  de 
parler  de  l'Kcrilure.  Car  l'apùtre  saint  Jean, 
en  parlant  du  Père,  du  Fils  et  du  Saint-Es- 
prit, dit  :  Il  y  en  a  trois  qui  rendent  témoi- 
gnage dans  la  terre,  l'esprit,  l'eau  et  le  sang, 
dési^nant  le  Père  par  Vcsprit,  le  Fils  par  le 
sang,  et  le  Saint-Esprit  par  ['eau  :  Et  ces 
t7'ois,  ajoute-t-il,  sont  une  même  chose.  Puis 
donc  que  celte  proposition  :  Un  de  la  Trinité 
a  été  crucifié,  est  plus  conforme  au  langage 
de  l'Écriture,  que  celle-ci  :  Une  personne  de 
la  Trinité  a  été  crucifiée,  et  qu'on  no  doit  pas 
disputei'  sur  les  ternies,  quand  on  con- 
vient de  la  chose,  comme  le  dit  saint  Gré- 
goire do  Xaziaiize,  il  vaut  mieux  employer 
la  première  façon  de  parler;  d'autant  que  la 
seconde  est  d'un  usage  récent,  le  terme  de 
personne  n'ayant  commencé  à  être  employé, 
que  depuis  la  naissance  de  l'hérésie  de  Sa- 
bellius.  Facundus  remaniue  en  passant'  que 
quand  saint  Pierre  dit  dans  les  Actes  des 
apôlres  :  Faites  pénitence,  et  que  chacun  de 
vous  soit  baptisé  au  nom  de  Jésus-Christ,  pour 
obtenir  la  rémission  de  vos  péchés,  cela  ne  doit 


Cap.  III. 


'  Ut  cum  j)oslea,  i/nod  facillimum  erttl  sala 
gesloruni  prolalione,  suscejifa  fuisse  ab  illo  con- 
cilio  Jbœ  Eiiislolnmonslrarelur,  nil  jam  suiieres- 
sel  quod  ciitychianis  de  ncsloriano  dogmale sem- 
per  illitil  infamnnlibus  respondere  possemus. 
fiiiîuiiil.  lit).  1,  lap  II. 

'  Quod  auleiH  in  nomine  Domini  Jesu  M  qitos 
menioruvimns  hapli'ali  narraninr,  non  eo  crc- 
dendum  arhitrnr,  quia  non  in  noniinp  Palris  et 
Filii  cl  Spirilus  Sancti  baplizali  sunt,  lit  etiam 
in  ipsis  sercurehir  l'crbis  a  Domina  cimslilula 
forma  buptisiin;  sed  quia  hoc  eral  insinuandum 
quod  baplismo  noio  fuerint  baplizali;  snUkere 
judicalum  esl  ad  discrelioncm  ipxius  nori  baplis- 
ini  sohim  nome»  Domini  Jcsu  mcmorare.  quod 
neque  in  baplismo  Joannis,  ncquv  in  aliis  baplis- 
mis  juduici  rilui  inlcrscrebaiur.  Cœteruni  iUis 
sucratis  verl'ix,  id  esl  :  lu  uoiniiif  l'atii:-  «HKiliiel 


Spiritr.s  s.Tiii;li,  baplizali  mihi  videnlur.  Sec  me«- 
daciler  diclum,  quod  absil,  cxistimo :  Uaitizclur 
uiiusc[nisqMe  vcslnun  in  nouiiiir  .lesu  Cliristi,  aiil 
quia  baplizali sunl  quidam  innomiiic  Domini  Jesu, 
quoniam  cerlissime  in  nowiiie  Jcsu.  bnptizahant 
apiisloli,  et  si  non  in  solius  Domini  Jcsu.  id  est 
Filii  nomine  baplizabanl,  vcruin  cliam  in  l'alrùs 
cl  Spirilus  Sancli.  Ac  pcr  hoc  arbilror,  quod  cum 
baptisma  celebrarctur,  in  ipsis  quoque  sacratis 
i)erbis  servabatur  illa  forma  baplismi:  in  narra- 
lione  vcro  su/ficiebal,  ad  discrelioncm  aliorum 
baplismatum,  solius  Domini  Jcsu  faccre  luenlio- 
nem.  PropUrca  rcro  credo,  quod  de  omnium 
tritim  personarum  commemoratinnc,  Domini  Je- 
su nomen  ad  insinuanilum  novum  baplismum 
magis  assumplum  esl,  quoniam  ipsi  con^epelimur 
pcr  baplismum  in  »ior/em.  Faciuul.  lil>.  I,  va|i.  ui. 


fvi"  sif:r.i,E. 


CIIAIMTIIK  XXV.—  FAi:ilNI)rS  Ki'  IIIISI'IOI 


ii.S7 


s'(Mit(Mi(lri'  (|iip  ]i;ir  opiidsilioii  au  I)a;iir!iue 
(le  saint  Joaii  cl  aux  |)iii'iliraliiuis  di's  Juifs, 
et  non  par  cxclusinu  do  riiivocalion  des  au- 
tres personnes  de  la  Sainle-Trinil(';.  Il  ne 
donte  point  «[ue  ceux  dont  il  est  parlé  dans 
les  Actes  n'aient  été  baptisés  au  nom  du 
Père  et  du  Fils  et  du  Saint-Esprit,  et  que  les 
apiMres  n'jiienl  nliservi;  dans  l'adiniiiislratiou 
du  liaplème  la  l'ornie  prescrite  liaus  l'Kvan- 
gile  ;  mais  il  croit  qu'il  suffisait  X  riiistorien 
sacré  de  marquer  ce  jionveau  baptême  sous 
le  nom  seul  de  Jésus-Chrisl,  pour  le  distin- 
guer des  anties  liaptèmcs  ;  et  ([u'il  s'est  plu- 
tôt servi  du  nom  de  Jésus-Christ  que  des 
autres  personnes  de  la  Trinité,  parce  que 
nous  sommes  ensevelis  avec  lui  par  le  bap- 
noin.  V!,  4.  ti>rae  pour  mourir  au  pécln;.  Il  ne  comprend 
pas  comment  quelques-uns  qui  voulaient 
passer  pour  catliorKiuesen  condamnant  Nes- 
cip.  IV.  torius,  l'ei'usaient  île  diie  que  la  Sainte  Vierge 
est  véritablement  et  proprement  mère  de 
Dieu,  et  il  t'ait  voir  qu'elle  l'est  en  eÛ'et.  Il 
ajoute  qu'on  peut  dire  aussi  que  Dieu  est  le 
Père  d'nn  homme  crucifié,  sans  qu'il  suive 
delà  i{ue  la  divinité  ait  pris  naissance  d'une 
vierge,  ni  qu'elle  ait  été  crucifiée.  Sur  quoi 
il  cite  le  libelle  de  la  rétractation  de  Lépo- 
rius  que  les  évéques  d'Afrique  ne  voulurent 
point  admettre  à  la  communion  de  l'Église 
qu'il  n'eût  confessé  par  écrit  que  Jésus-Christ, 
Fils  de  Dieu,  est  ué  proprement  du  Saint-Es- 
prit et  de  la  Vierge  Marie,  Dieu  et  homme  ; 
chacune  des  deux  natures,  la  nature  divine 
et  la  nature  humaine,  conservant  ses  pro- 

^_        priétés  natm-elles.   Il  prouve  que  l'on  doit 
reconnaître  ces  deux  natures  en  Jésus-Christ 
et  qu'on  ne  doit  pas  dire,  comme  faisaient 
I  les  eutychéeus.  Une  nature  composée  de  la 

divinité  et  de  l'humanité;  parce  que  n'ayant 
qu'une  nature  quoique  composée  de  deux 
autres,  il  ne  serait  plus  consubstantiel,  ni  à 
no  us,  ni  à  son  Père. 
Pacundus  distingue  deux  partis  dans  la 
secte  des  eutychéeus  ;  les  ims  suivaient  tou- 
tes les  erreurs  d'Eutychès  :  c'étaient  piopre- 
ment  les  eutychéeus.  Les  autres  s'en  éloi- 
gnaient en  quelque  chose  ;  on  les  appelait 
acéphales,  ou  mouophysites,  parce  qu'ils 
n'admettaient  qu'une  nature  en  Jésus-Christ. 

VI.  Les  uns  et  les  autres  refusaient  de  recon^ 
naître  le  concile  de  Chalcédoine  où  leur  hé- 
résie avait  été    condamnée,  de  même  que 

^         dans  le  concile  d'Ephèse.  Facundus  allègTie 

'  Voyez  tom.  III,  pag.  380. 


contre  eux  l'auloriU'  de  ce  dernier  concile 
dans  Icipii'l  il  ilil  (pie  l'Esprit  de  Dieu  a  par- 
lé ;  ci't  aigunuMit  lui  parait  si'ul  suflisant, 
parce  (pie  ces  hénîtiques  faisaient  proftîssion 
de  suivie  la  doctrine  '  établie  i\  Ephèse.  Ils 
apportaient  tjuelques  passages  d'une  lettre 
du  pa[)e  Jules,  et  des  écrits  de  saint  Cyrille 
d'Alexandri(!,  pour  appuyer  leur  sentiment 
sur  l'unili;  di^  nature  en  Jiisus-Christ.  F'acuu- 
dus  répond  que  la  lettre  de  Jules  i'i  Prosdoce 
parait  une  pièce  supposée  ;  qu'à  l'égard  de 
saint  Cyrille,  il  est  hors  de  vraisemblance 
qu'il  ait  été  dans  deux  sentiments  contraires 
sur  l'incarnatiou  ;  que  quand  cela  serait,  il 
faudrait  plutôt  suivre  ce  qu'il  a  enseigné 
avec  le  concile  d'Ephèse  auquel  il  présida, 
que  ce  qu'il  a  dit  dans  des  écrits  particuliers; 
qu'enfin  les  Urientaux  qui  trouvaient  de 
l'ambiguïté  dans  quelques-unes  de  ses  ex- 
pressions, lui  ayant  fait  demander  par  Paul, 
évè([ue  d'Émèse,  s'il  confessait  que  Jésus- 
Christ  est  un  en  deux  natures.  Dieu  et  homme 
tout  ensemble,  il  témoigna  avec  joie  qu'il 
pensait  ainsi  ;  qu'en  conséquence,  il  écrivit 
une  lettre  à  Jean  d'Antiocbe,  où  il  disait  que 
Jésus-Christ,  Fils  unique  de  Dieu,  est  Dieu 
parfait  et  homme  parfait ,  composé  d'un 
corps  et  d'une  âme  raisonnable,  né  de  Dieu 
le  Père  avant  tous  les  siècles  selon  la  divi- 
nité ;  et  né  de  Marie  selon  l'humanité  dans 
les  derniers  temps  ;  consubstantiel  au  Père 
selon  la  divinité,  et  consubstantiel  à  nous 
selon  l'humanité. 

Les  eutychéeus  et  les  acéphales  disaient  cap.vi. 
que  de  même  que  la  nature  humaine  est 
composée  de  deux  natures,  savoir,  de  l'âme 
et  du  corps  :  de  même  aussi  la  nature  de 
Jésus-Christ  est  composée  de  la  divinité  et 
de  l'humanité  ;  qu'ainsi  on  doit  confesser 
qu'il  est  de  deux  natures,  mais  non  dans 
deux  natures.  Facundus  répond  que  la  com- 
paraison de  l'àme  et  du  corps  unis  en  cha- 
que homme  est  imparfaite,  parce  que  ces 
deux  parties  étant  de  leur  nature  faites  l'une 
pour  l'autre,  ne  font  qu'une  seule  nature 
qui  est  la  nature  humaine  ;  qu'on  peut  bien 
dire  que  l'âme  unie  à  la  chair  compose  une 
seule  nature  ;  mais  qu'on  ne  saurait  dire 
sans  blasplirme,  que  la  divinité,  qui  de  sa 
nature  est  inconvertible,  compose  une  seule 
nature  avec  l'humanité  ;  qu'il  n'y  a  qu'une 
chose  en  quoi  la  comparaison  de  l'âme  et 
du  corps  unis  puisse  avoir  lieu  ,  c'est  que 
comme  l'âme  et  le  corps  sont  unis  en  une 
même  personne,  la  nature  divine  et  la  na- 


S88 


ADpiitt.  Es- 
cbirid  ,      CA,  I 


Anilyae  du 
secoDd  lîTrci 
ptg.  440. 


Cap.  ■• 


HlSTOIllE  GÉNÉRALE  DES  AUTEUUS  ECCLÉSIASTIQUES. 

les  saints  Pères  de  l'E-rlisc,  noiumi^nient  par 
suint  Jean  Chrysostôme,  par  saint  Grégoire 
de  Nazianze,  et  après  sa  mort  par  Domnns 
d'Antioclip,  et  par  un  sj-node  entier  de  l'O- 
rient assenildé  en  celte  ville.  «  C'est  encore 
dans  la  vue  d'anéantir  le  concile  de  Chalcé- 


ture  liimiaine  sont  unies  en  une  seule  per- 
sonne. C'est  ce  qu'il  confirme  par  un  pas- 
sage de  saint  Augustin,  où  nous  lisons  ; 
«  Du  moment  (jue  '  Jésus-CIuist  a  commen- 
cé d'être  liomme,  il  n'a  point  été  autre  (pie 
Fils  de  Dieu,  et  Fils  unique,  et  Dieu  lui 


même,  à  cause  que  le  Verbe  qui  s'est  fait      doine  que  les  eulycliéens  ou  leurs  partisans 


honune,  est  Dieu;  en  sorte  qu'ainsi  que  cha- 
que liomme,  savoir,  l'ûine  raisonnable  et  le 
corps,  n'est  qu'une  personne  :  ainsi  Jésus- 
Christ  Verbe  et  homme,  n'est  qu'une  per- 
sonne. )) 

4.  Outre  l'édit  contre  les  Trois-Chapitres, 
Justinien  avait  composé  un  écrit  où  il  préten- 
dait montrer  qu'ils  étaient  condamnables. 
C'est  cet  ouvrage  que  Facundus  réfute  dans 
son  second  livre.  Pour  le  faire  avec  plus  de 


voulaient  faire  condamner  les  écrits  de  Théo- 
dorct  coiilie  saint  Cyrille,  parce  qu'en  ctl'el 
Théodoret  avait  assisté  à  ce  concile,  eu  part 
à  ses  décrets,  et  pris  la  défense  de  la  lettre 
de  saint  Léon  contre  Eutychès.  D'autres  que 
Tliéodoret,  ont  écrit  contre  saint  Cyrille  ;  mais 
les  acéphales  ne  les  ont  point  fait  analhéma- 
tiser,  parce  qu'ils  n'avaient  pas  été  présents 
au  concile  de  Chalcédoine. 

Venant  au  fond  de  la  lettre  d'Ibas,  Facuii-    Cip. 


liberti',  il'dissimule  que  ce  prince  eu  soit  l'au-      dus  montre  que  la  raison  piiiieipale  pour  la- 


teur,  et  suppose  partout  qu'il  est  de  la  façon 
des  acéphales,  qui,  pour  lui  donner  de  l'au- 
torité, l'avaient  publié  sous  le  nom  de  l'Em- 
pereur. Il  dit  qu'un  écrit  de  cette  nature  était 
absolument  inutile,  ou  plutôt  nuisible  à  l'E- 
glise dont  il  venait  troubler  la  tranquillité  par 
des  questions  aussi  vaines  que  dangereuses  ; 
qu'il  y  avait  de  l'irrévérence  à  vouloir  traiter 
de  nouveau  ce  qui  avait  été  statué  dans  le 
concile  de  Chalcédoine ,  dont  les  décrets 
étaient  reçus  depuis  environ  cent  ans  du  con- 
sentement de  toute  l'Église;  qu'il  était  aussi 
inutile  de  discuter  les  écrits  de  Théodore  de 
Mopsueste  mort  depuis  longtemps  dans  la 
paix,  c'est-à-dire  dans  la  communion  de  l'É- 
glise; que  s'il  y  avait  quelques  erreurs,  on 
devait  les  imputer  à  la  fragilité  humaine,  et 
ne  pas  s'emporter  contre  lui  avec  autant  de 
fureur  qu'on  le  faisait,  puisque  s'il  eut  encore 
été  en  vie  il  n'aurait  pas  même  été  permis 
de  le  condamner  qu'après  l'avoir  averti  une 
et  deux  fois,  et  en  cas  seulement  d'opiniâ- 
treté de  sa  part.  "  On  n'attaque  sa  mémoire, 
ajoule  Facundus,  que  parce  qu'il  est  parlé  de 
lui  avec  éloge  dans  la  lettre  du  vénérable 
litas,  reçue  comme  orthodoxe  dans  ce  concile. 
C'est  là  le  mowui  que  les  ennemis  de  cette 
ussembiéc  ont  trouvé  pour  en  détruire  l'au- 
torité. Mais  ils  n'ont  pas  fait  attention  que 
Théodore  a  aussi  été  loué  de  son  vivant  par 

'  Ex  quo  esne  hoiuo  cirpit,  non  aliud  cwpit  c.ise 
homo  </«(///!  Dii  Filiiix,  et  hoc  nniciis  jiroplcr 
Veuiii  Verlium,  qiiod  illn  susceplo  cnro  faclum 
esl,  uli(]He  Dtus:  ut  quemailiiiodum  est  una  per- 
tona  quiUbel  homo,  anima  scilicel  ralioiuilis  et 
caro:  ila  sil  una  prrsona  Christus,  ]'i'ibum  vl 
homo.  August.,  in  Enchir.,  cap.  ïxxvi. 


quelle  on  l'attaquait,  était  la  distinction  nette 
et  précise  qu'il  y  fait  des  deux  natures  en  la 
personne  de  Jésus-Christ;  qu'en  vain  ses  en- 
nemis prenaient  pour  prétexte  de  la  condam- 
ner, que  saint  Cyrille  y  était  maltraité,  puis- 
qu'ils ne  demandaient  pas  que  l'on  condam- 
nât tous  ceux  qui  ont  écrit  contre  saint  Cy- 
rille, comme  Gennade  de  Constantinople  et 
Isidore  de  Péluse  dont  la  réputation  était 
beaucoup  plus  grande  que  celle  d'Ibas;  qu'il 
était  visible  qu'ils  ne  cherchaient  qu'à  atl'ai- 
blir  parla  condamnalion  de  cette  lettre  l'auto- 
rité du  concile  de  Chalcédoine;  qu'on  ne  peut 
la  condamner,  parce  que  ce  concile  après 
l'avoir  examinée,  n'avait  pas  jugé  à  propos 
de  la  censurer;  et  que  d'entreprendre  le  con- 
traire, c'était  agir  contre  les  décisions  du 
pape  suint  Léon,  et  les  conciles  d'Orient  qui 
ont  déclaré  que  tout  avait  été  réglé  avec  tant 
de  sagesse  et  de  iirudence  dans  le  concile  de 
Chalcédoine,  qu'il  n'était  pas  permis  d'y  tou- 
cher, soit  en  y  ajoutant,  soit  en  y  retranchant 
quelque  chose.  «  Les  acéphales  disent,  ajoule 
Facundus,  qu'ils  attendent  la  décision  du 
pape  Vigile  qu'ils  ont  consulté;  mais  inutile- 
ment ;  le  Pape  ne  combattra  pas  les  décisions 
de  saint  [,éon  et  de  ses  autres  pi'édécesseurs 
qui  ont  aiqirouvé  le  concile  de  Chalcédoine. 
Ce  n'est  point  pour  détruire  *  les  sentiments 
de  ses  Pères,  mais  pour  les  soutenir  etlesdé- 

'  Quia  itle  non  in  destruclionem  palrrnm  sen- 
teiiliir,  scil  potius  in  defensionem  alqur  ultionem, 
primant  arcepil  et  nuiximam  potestiilem  :  nec 
aliquid  contra  rrrilatem,  sed  pro  veritate  plus 
r«'(f)i.s  .suis  consacerdotibus  potesl.  Funiiid.  lib. 

Il,  ra|l.  VI. 


[VI"  STKCt.E.] 


CITAPITRE  XXY.  —   FACUNniTS,  lUISTTQTTE,  ETC. 


280 


AbiIjtïc  <la 
>ic,  !)««.  4C1). 


Op.  I. 


fcnihc  qu'il  a  rcrii   la   prciiiioii!  et  la  jiliis 
grande  [iiiissancc;  n'ayant  iei;ii  comme  oiix 
de  pouvoir  que  pourla  vt'rilé,  et  non  contre 
la  vcritô.  »  Il  conjure  Justinion  d'an'éler  ces 
sortes  de  disputes,  en  lui  re[)résenlanl  que 
si  l'on  permet  une  fois  de  traiter  de  nouveau, 
ce  qui  a  été  dt'cidé  d'un  consentement  com- 
mun do  louleriOglisc,  il  n'y  aura  jamais  de  lin 
da)is  les  disputes.  Il  ra]iporte  quehpies  en- 
droits des  lettres  de  s;iiiit  I, ('on  dans  lesquels 
ce  saint  pape    approuve  tout  ce  qui  s'était 
fait  ù  Clinleédoine  sur  les  matières  de  la  foi. 
3.  11  entreprend  dans  le  troisième  livre  la 
justification  de  Tliéodtn-e  de  Mopsiiesle,  mon- 
trant qu'on  ne  peut  le  condamner  sans  ac- 
cuser d'erreur  le  concile  de  Chalcédoinc  qui 
non-seulement  ne  l'a  point  condamm-,  mais 
qui  a  souffert  la  lecture  delà  lettre  d'ibas  où 
il  est  parlé   de  Théodore  avec  éloge.  Il  fait 
voir  qu'encore  que  Théodore  ait  été  le  maître 
de  N'estorius,  il  était  d'un  sentiment  contraire 
sur  l'incarnation.  Ayant  défendu  la   loi  de 
l'Église  sur  cet  article  contre  Paul  de  Samo- 
sate,  il  l'avait  défendue  par  avance  contre 
Nestorius  ;  qu'il  est  clair  par  les  écrits  ciui 
nous  restent  de  Théodore,  qu'il  a  rejeté-  l'er- 
reur de  Nestorius;  le  symbole  déféré  par  le 
prêtre  Carisius  au  concile  d'p]phèse,  lui  est 
faussement  attribué,  et  quand  il  seraitde  lui, 
ce  que  le  concile  n'a  pas  décidé ,  il  n'a  pas 
été  condamné  avec  son  auteur.  S'il  y  a  quel- 
ques endroits  diliiciles  dans  ses  écrits,  ils  sont 
susceptibles  d'un  bon  sens  ;  c'est  sans  rai- 
son   qu'ils  l'on!  accusé  d'avoir   nié   que   la 
Sainte  Vierge  fût  mère  de  Dieu,  puisqu'il  dit 
en  termes  exprès  que  Dieu  le  Verbe  s'est 
uni  à  l'homme  dès  le  moment  qu'il  a  été  for- 
mé dans  son  sein;  ils  n'ont  pas  mieux  ren- 
contré en  l'accusant  d'avoir  enseigné  que  le 
Verbe  n'a  pas  habité  autrement  dans  la  na- 
ture humaine  qu'il  a  prise,  que  dans  plusieurs 
saints  et  dans  les  prophètes,  ce  qui  ne  faisait 
pas  une  uuion  personnelle  des  deux  natures, 
puisque  Théodore  en  parlant  de  cette  habi- 
tation dit  '  qu'elle  s'est  faite  d'une  manière 
non  commune,    mais   excellente,  selon   la- 
quelle nous  disons  que  les  deux  natures  ont 
été  unies  en  une  seule  personne.  Il  vient  en- 
suite il  l'autorité  de  saint  Cyrille  d'Alexan- 


drie, et  dit  ipie  ce  qu'il  a  repris  d;ms  TIh'o- 
dnre  de  Mopsueste  se  tiouve  avoir  ('té  ensei- 
gné et  par  le  pape  saint  Léon  dans  sa  lettre 
il  .luvénal  dcli'rusalem,  et  ])arsaint  Alhanase 
dans  son  troisième  livre  contre  les  ariens. 
Il  rappoi'te  un  grand  nombre  de  passages 
des  écrits  de  Théodore  qu'il  explique  dans 
un  sens  catholique. 

ti.  Dans  le  (|uatrième  livre,  il  demande  aux 
entyelu-ens  pourquoi  ils  suivaient  saint  Cy- 
rille dans  les  reproches  qu'il  avait  faits  à 
Théodore,  et  qu'ils  ne  h;  suivaient  pas  dans 
la  façon  oulrageantc  dont  il  avait  traite'' ^aillt 
Chrysostùme,  disciple  de  Théodore,  et  Dio- 
dore  de  Tarse,  qui  a  été  loué  par  les  Pères 
cl  par  lus  princes  catholiques,  et  qui  n'a  été 
condamné  que  par  les  apoUinaristes  et  par 
Julien  l'Apostat  :  «  Peut-être,  dit-il,  n'ont-ils 
épargné  ces  deux  grands  hommes  que  parce 
qu'ils  n'ont  point  assisté  au  concile  de  Chal- 
cédoinc ,  comme  par  une  raison  contraire 
ils  ont  condamné  Théodore  pai'ce  qu'on  y 
avait  lu  la  lettre  d'ibas  qui  parlait  de  lui  avec 
honneur.  »  Il  fait  voir  que  Théodore  ayant 
eu  sur  l'Incarnation  la  même  croyance  que 
Diodorc de  Taise,  son  maître  ,  ils  devaient  ou 
les  condamner  tous  deux  ou  n'en  condamner 
aucun  des  deux  ;  que  le  pape  Vigile,  ayant  ap- 
pris la  condamnation  des  Trois-C/iapifrcs,\d 
désappi'ouva  et  se  sépara  de  la  communion  de 
Mennas  de  Constantinople  qui  y  avait  sous- 
crit le  premier  ;  que  la  plupart  des  églises 
d'Occident  s'opposèrent  aux  entreprises  des 
acéphales  sur  ce  sujet,  ne  doutant  point  que 
leur  dessein  ne  fût  de  diminuer  le  crédit  du 
concile  de  Chalcédoine.  Facundus  prouve 
tous  ces  faits  par  des  monuments  authenti- 
ques. 11  y  eut  même  plusieurs  cvèques  d'O- 
rient, savoir  :  Zoële  d'Alexandrie,  Éphrem 
d'Antioche,  Pierre  de  Jérusalem,  et  même 
Mennas  de  Constantinople,  qui  refusèrent  de 
souscrire  ;  mais  l'Empereur  en  gagna  bon 
nombre,  les  uns  par  des  présents,  les  autres 
par  des  menaces.  Ceux  qui  résistèrent  cons- 
tamment furent  envoyés  en  exil.  Facundus 
rappelle  ce  prince  au  serment  qu'il  avait  fait, 
dans  le  baptême,  de  garder  inviolablemeut 
le  dépôt  de  la  foi,  et  les  évêques  prévarica- 
teurs à  l'obligation  que  leur  impose  le  minis- 


Analjfe  du 

r|Finlripriie    ii- 
Me,  |a.-.  COf. 


Caj).  r. 


'  Item  accusant  eum  illi  quod  sic  habitasse 
di.Terit  Deum  Verbum  in  ussumpta  hniuinis  na- 
tura.  sicut  habilavil  in  multis  sanctis  alqiie  pro- 
phtlis,  non  ut  adunalis  utriaque  naturis  una  fie- 
ret  ex  eorum  adunalione  persona.  Jpse  autem 

XI. 


dicit  evm  non  secundwm  communein  habitatio- 
nem  inhahilasse,  sed  juxtn  quantdam  excellenlem 
secundum  quant  etiam  ailtinari  dicimus  utrasque 
naturas  et  unam  juxla  iidunalionem  effectani 
esse  personam.  Facuud.  lib.  Ill   cap,  n. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


Ar.«!y^e  do 
einqutàino  lu 
Tre,  p«It>  I3t. 

Cap.  !• 


tère  de  détromper  les  princes  de  la  terre, 
loi-squ'ils  les  voient  engagés  dans  de  fausses 
démarches  par  les  arlitices  des  méchants. 

7.  Facundus  entreprend  de  montrer  dans 
le  cinquième  livre  que  la  lettre  d'Ibas  a  été 
rerue  et  approuvée  dans  le  concile  de  Chal- 
cédoiue,  dont  il  rapporte  la  déclaration  qui 
est  conçue  en  ces  termes  :  «  Suivant  ce  qui 
a  été  dit  par  les  révérendissimes  évéques, 
nous  connaissons  que  l'innocence  d'Iljas  a 
été  démontrée,  et  nous  remarquons  par  la 
lecture  '  de  sa  lettre  qu'il  est  orthodoxe  ; 
c'est  pourquoi  nous  jugeons  qu'il  doit  re- 
couvrer l'honneur  de  l'épiscopat,  et  son 
église  d'où  il  a  été  chassé  injustement.  Mais 
ces  paroles  sont  des  légats  du  Siège  apos- 
tolique qui" opinèrent  les  premiers.  Maxime 
d'.\ntioche  et  Eunomius  de  Nicomédie  fu- 
rent de  même  avis.  Justinien  avait  avancé, 
dans  son  édit  contre  les  Trois-Chapitres, 
qu'lbas  n'avait  osé  avouer  que  la  lettre  qui 

"•  portait  son  nom  fut  de  lui.  Les  eutychéens 
soutenaient  même  qu'il  l'avait  désavouée. 
Facundus  prouve  le  contraire  par  les  actes 
de  la  procédure  instruite  par  Pholius  de  Tyr 

'"•  et  Eustathe  de  Béryle.  Il  prouve  aussi  que 
Théodoret  et  ILas  avaient  pris  séance  dans 
le  concile  de  Chalcédoine  aussitôt  après  avoir 
.  dit  anathème  à  Nestorius,  ce  qui  se  fit  dans 
la  huitième  action,  et  non  pas  seulement 
après  la  condamnation  d'Eulychès  et  de 
Dioscore,  comme  le  soutenaient  les  acépha- 
les. Leur  but  en  cela  était  de  montrer  que, 
n'ayant  ni  l'un  ni  l'autre  souscrit  à  la  défini- 
tion de  fui  du  concile  de  Glialcédoine,  on 
n'en  pouvait  tirer  aucun  avantage  pour  les 

iT.  justiGer.  Mais  Facundus  fait  voir  que  saint 
Léon  n'a  pas  seulement  approuvé  cette  défi- 
nition de  foi,  mais  aussi  tous  les  actes  et 
tous  les  décrets  du  concile,  excepté  l'entre- 
prise d'Anatolius  de  Constantinople  sur  les 
sièges  patriarchaux   d'AhixanJric  et  d'An- 

»•  tioche  :  d'où  il  conclut  (pie  la  lettre  d'Ibas 
ayant  été  approuvée  si  solennemcnt,  il  n'é- 
tait plus  permis  d'exiger  qu'on  en  démontrât 
la  catholicité,  parce  qu'autrement  ce  serait 
en  vain  qu'on  assemblerai!  des  conciles,  et 
que  l'on  dirait  que  les  disputes  y  ont  été  ter- 
minées, puisqu'elles  seraient  interminables, 
si  on  voulait  toujours  les  examiner  de  nou- 
veau. 
Au.i,!e  dn      ^    Lg  concile  en  déclarant  orthodoxe  la 


•  Lecla  ejus  epist'ola,  cognoiiinuis  euin  esseor- 
tlwdoTum.  Facuiul.,  lili.  V,  cap.  i. 


slxlim*    liTTf, 


Ca^.  I, 


lettre  d'Ibas,  a  suivi  l'exemple  de  l'Écriture 
qui  juge  du  tout  parla  plus  grande  et  la  meil- 
leure partie  :  car  quoique  cet  évéque  eut 
une  mauvaise  opinion  de  saint  Cyrille  dont 
il  ne  connaissait  pas  bien  la  croyance,  cela 
ne  devait  pas  empêcher  le  concile  de  rece- 
voir sa  lettre  comme  orthodoxe,  puisqu'il  y 
reconnaissait  deux  natures  uuies  dans  Jésus- 
Christ  en  une  seule  personne  :  doctrine  que 
saint  Cyrille  enseignait  aussi,  encore  qu'en 
écrivant  contie  Nestorius,  qui  séparait  trop 
les  deux  natures,  il  n'ait  pas  assez  insisté  sur 
leur  distinction.  Il  ajoute  que  les  orientaux 
avaient  pensé  d'abord  de  saint  Cyrille  comme 
Ibas,  et  que  toutefois  cela  ne  l'empêcha  pas 
de  souscrire  à  leur  confession  de  foi,  lors- 
qu'il se  réunit  avec  eux,  et  que  les  orien- 
taux de  leur  cûté,  de  même  'ju'lhas,  approu- 
vèrent la  foi  de  saint  Cyrille  ;  parce  qu'ils 
s'accordaient  surle  capital  de  la  foi,  quoiqu'ils 
s'exprimassent  en  des  termes  dillércuts.  Fa- 
cundus compare  leur  dilférend  à  celui  qui 
avait  régné  auparavant  entre  les  Grecs  et 
les  Latins  au  sujet  des  trois  hypostases.  Ce 
ditlérend  ne  consistait  que  dans  les  termes, 
les  uns  et  les  autres  reconnaissant  trois  per- 
sonnes en  Dieu  et  une  seule  substance.  Ce 
qu'il  infère  de  cette  comparaison,  c'est  que 
les  gens  sages,  n'ayant  point  taxé  d'hérésie 
ceux  qui  n'admeltaient  qu'une  hypostase, 
ni  ceux  qui  eu  admetlaiciit  trois,  il  fallait 
garder  la  même  équité  envers  Ibas,  et  ne  pas 
juger  sa  lettre  hérétique,  à  moins  qu'on  ne 
prouv;\t  qu'elle  cnnlenait  le  nestorianisnie. 

9.  Il  est  vrai  qu'il  y  disait  qu'en  Jésus- 
Christ  il  n'y  a  qu'une  vertu;  mais  en  parlant 
ainsi  il  ne  niait  pas  qu'il  y  eût  deux  natures, 
mais  il  snulonait  qu'il  n'y  a  qu'une  persoii- 
111'.  (In  lil  dans  les  .\cles  des  apôtres  :  Toule  aci.iv.ss. 
/((  uiiiltitiide  de  ceux  qui  croyaient  n'était  qu'un 
cœur  et  qu'une  âme,  ne  pourrait-on  pas  dire 
aussi  (pi'il  n'y  avait  qu'une  verludans  la  per- 
sonne par  le  don  do  laquelle  celle  mullitudo 
n'était  qu'un  cœur  et  qu'une  âme  ?0n  objecte 
qu'lbas  avait  dit  que  la  condamnation  de  Nes- 
torius s'était  faite  sans  examen.  Facundus 
répond  qu'lbas  ne  l'a  point  désapprouvée, 
mais  qu'il  a  seulement  trouvé  mauvais  que 
l'on  n'eût  pas  attendu  les  orientaux.  11  con- 
vient au  surplus  qu'lbas  a  pu  se  tromper  dans 
le  jugement  de  Nestorius,  comme  Anatolius 
à  l'égard  de  Dioscore,  comme  saint  Athanaso 
A  l'égard  deTimothée,  disciple  d'Apollinaire, 
comme  le  concile  de  Palestine  et  le  pape  Zo- 
simc  i\   l'égard  de  l'élage  et   de  Céleslius 


AnaljMi  du 
Mfkliènc  li- 
vra, pas.  C^w 


Ci[>.  I. 


Caj.  II. 


CHAPITRE  XXV.  —  FAnrXDUS,  nUSTlQUR,  ETC. 


Ctp.  ir. 


,  n,  99. 


m.  Cko. 


•^l. 


[VI*  SIÈCLE.] 

mais  il  rejette,  comino  un  fait  avanctî  sans 
prcuvo,  ce  que  les  aci'pliales  liisaicnl  :  qii'I- 
bas  avait  6lé  conliaint  parle  concile  de  Chal- 
cëdoine  d'anathéuiatiscr  Neslorius,  et  qu'il 
l'avait  excusé  auparavant  ;  ce  fait  étant  d'ail- 
leurs détruit  sullisanunent  dans  la  lettre 
où  Ibas  accuse  Neslorius  d'avoir  écrit  des 
livres  pernicieux  et  qui  causaient  du  scan- 
dale, parce  qu'il  y  niait  que  la  bienheureuse 
Marie  fût  mère  do  Dieu.  Photius,  Eustalhe 
et  Uranius,  donnés  pour  juges  ;\  Ibas.,  le  soup- 
çonnaient si  peu  d'être  dans  les  intérêts  de 
Neslorius,  qu'ils  ne  se  pressèrent  jamais  de 
lui  dire  anathèmc.  Le  concile  de  Clialcé- 
doine  ne  crut  point  non  plus  que  la  mau- 
vaise opinion  qu'Ibas  avait  eue  de  saint  Cy- 
rille fut  une  raison  de  condamner  sa  lettre. 
Facundus  convient  qu'il  y  disait  que  le  tem- 
ple, et  celui  qui  y  habite,  est  un  seul  Fils, 
Jésus-Christ;  mais  il  montre  que  ces  paroles 
au  lieu  de  signifier,  comme  le  voulaient  les 
acéphales,  qu'autre  est  la  personne  du  tem- 
ple, et  autre  la  personne  de  celui  qui  y  habile, 
signifiaient  tout  le  contraire  ;  et  que  cette 
proposition  revenait  à  ce  que  Jésus-Christ  di- 
sait aux  Juifs,  en  ;iarlant  de  son  corps  :  Dé- 
molissez ce  temple,  et  Je  le  rétablirai  dans  trois 
jours.  Il  convient  encore  que  Théodore  de 
Mopsueste  est  loué  dans  cette  lettre;  mais  il 
soutient  que  ce  n'a  pu  être  une  raison  de  la 
condamner,  puisque  saint  Chrysostôme  et 
saint  Grégoire  de  Nazianze  ont  aussi  fait  l'é- 
loge de  Théodore. 

10.  Après  avoir  pris  la  défense  d'Ibas  et 
de  sa  lettre  dans  le  septième  livre  et  les  pré- 
cédents, il  passe  à  l'apologie  de  Théodore 
de  Mopsueste.  Il  la  fonde,  premièrement, 
sur  les  témoignages  de  Jean  d'Antioche  et 
des  évoques  d'Orient  assemblés  avec  lui, .qui 
après  avoir  examiné  les  propositions  que 
l'on  taxait  d'hérésie  dans  les  écrits  de  Théo- 
dore, trouvèrent  que  les  anciens  Pères  de 
l'Eglise  en  avaient  avancé  de  toutes  sembla- 
bles :  d'où  il  résultait  qu'on  ne  pouvait  con- 
damner Théodore,  sans  leur  porter  préju- 
dice, n  dit  en  second  lieu,  qu'on  alléguait 
mal  à  propos  contre  lui  le  témoignage  de 
saint  Proclus  ,  évêque  de  Constantinople  , 
puisque  cet  évêque,  dans  sa  réponse  h  Jean 
d'Antioche  et  aux  autres  évcques  d'Orient, 
avait  dit  nettement  que  dans  son  tome  aux 
Arméniens  il  n'avait  point  parlé  d'anathéma- 
tiser  Théodore,  ni  aucun  autre  après  sa  mort, 
et  qu'il  n'avait  pas  même  nommé  Théodore 
dans  cet  écrit.  La  troisième  pièce  qu'il  rap- 


291 


porte  est  ialcttur  de  Jt-an  et  de  son  concile  à 
rempeiPurTIiéodose-le-Jeunc.  Ils  y  fbntj'iilo- 
ge  de  Théodore  de  Mopsueste,  de  son  savoir, 
de  son  zèle,  de  sa  piété,  de  sa  sagesse  :  ver- 
tus qui  lui  avaient  attiré  et  l'estime  des 
évoques,  et  celle  du  Grand  Théodose  qui  ai- 
mait à  l'entendre  prêcher  et  à  s'entretenir 
avec  lui.  La  quatrième  preuve  de  Facundus  cjp.  ■». 
est  tirée  de  la  lettre  du  même  Jean  d'Antio- 
che et  de  son  concile  h  saint  Cyrille  d'Alexan- 
drie, dans  laquelle  ils  disent  :  «On  nous  a  aussi 
présenté  un  autre  tome  composé  des  extraits 
de  Théodore,  autrefois  évoque  deMopsue.-;e, 
que  l'on  voulait  faire  anatbématiser.  En 
ces  extraits,  nous  reconnaissons  qu'il  y  a  des 
passages  douteux,  et  qui  peuvent  recevoir 
un  autre  sens  que  celui  qu'ils  présen- 
tent; mais  il  y  en  a  de  plus  clairs.  A  l'égard 
de  ceux  qui  sont  obcurs,  nous  en  trouvons 
de  semblables  dans  les  anciens,  à  qui  la  con- 
damnation de  ceux-ci  porterait  préjudice.  A 
quelle  confusion  n'ouvi-e-t-on  point  la  porte, 
si  ou  permet  de  combattre  ce  qu'ont  dit  les 
Pères  qui  sont  morts  ?  Autre  chose  est  de  ne 
pas  approuver  quelques-uns  de  leurs  senti- 
ments ,  autre  chose  de  les  anatbématiser  , 
quand  on  n'étendrait  pas  l'anathème  sur  les 
personnes.  Quel  avantage  ne  donne-t-on 
point  aux  nestoriens,  si  l'on  condamne  avec 
eux  de  tels  évêques?  Ne  sait-on  pas  ce  qui  a 
obligé  Théodore  à  parler  ainsi,  pour  com- 
battre les  hérétiques,  lui  qui  était  le  défen- 
seur commun  de  tout  l'Orient?  C'est  la  né- 
cessité des  temps  qui  l'a  contraint  à  se  servir 
de  certaines  expressions ,  parce  qu'il  les 
croyait  plus  propres  pour  combattre  les  ad- 
versaires de  la  foi.  n  II  renvoie  à  la  réponse 
de  saint  Cyrille  au  concile  d'Antioche,  où  il 
défend  non-seulement  de  condamner  la  per- 
sonne de  Théodore,  qu'il  appelle  un  homme 
admirable,  mais  encore  ses  écrits,  regardant 
comme  un  crime  d'insulter  aux  morts,  même 
laïques,  à  plus  forte  raison  à  ceux  qui  ont 
flni  leurs  jours  dans  le  ministère  épiscopal. 
Ensuite  il  rapporte  la  lettre  sjmodale  de 
Domnus,  successeur  de  Jean  dans  le  siège 
d'Antioche,  où  il  invective  fortement  contre 
Eutychès  qui  avait  osé  anathémaliser  Théo- 
dore de  Mopsueste  et  Diodore  de  Tarse,  «  l^s  cap.  r. 
colonnes  de  la  vérité  ,  dit-il,  et  les  défen- 
seurs de  la  vraie  piété,  qui  ont  employé  leurs 
talents  à  combattre  tons  les  héréticfues.  » 
Et  parce  que  les  acéphales  objectaient  que  n. 

saint  Cyrille  avait  changé  de  sentiment  à 
l'égard  de    Théodore,   et  qu'après  l'avoir 


Facnnd.  lib. 
111,  cap.  Ti 
rag.  500,501, 
50!. 


292 


niSTOIRE  GÉXÉnALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


C«p.  TH. 


AniN'fl    4o 

tiCUYJèiiiv       It. 

*ie,  yiç   6'.6t 


Cap.  I. 


loué,  il  avait  depuis  écrit  contre  lui ,  Facun- 
dus  répond,  qu'en  supposant  saint  Cyrille 
contraire  à  lui-même,  sou  jujjement  ne  peut 
nuire  à  Théodore,  qu'ainsi  l'on  doit  s'en  rap- 
porter aux  Pères  qui  vivaient  du  temps  de 
Théodore,  plutôt  qu'à  saint  Cyrille,  étant  ;\ 
présumer  que  s'il  eut  été  suspect  d'hérésie, 
ils  ne  l'eussent  pas  dissimulé,  au  lieu  de  lui 
donner  des  louanges,  le  regardant  comme 
un  évoque  mort  dans  la  communion  de  l'É- 
glise, et  avec  l'honneur  de  l'épiscopat. 

11.  Facundus  répond  dans  le  neuvième 
livre  aux  passages  que  les  acépliales  objec- 
taient des  écrits  de  Théodore,  pour  montrer 
qu'il  avait  été  dans  les  erreurs  des  sahel- 
liens,  des  ncstoriens  et  des  manichéens.  Il 
montre  qu'on  ne  peut  l'accuser  d'avoir  en- 
seigné avec  Sabellius,  que  le  Père,  le  Fils  et 
le  Saint-Esprit  ne  font  qu'une  seule  et  même 
personne,  puisqu'on  expliquant  le  psaume 
XLiV,  il  dit  qu'il  est  de  la  piété  '  et  de  la  re- 
ligion de  tellement  glorifier  le  Fils  unique 
de  Dieu,  que  l'on  l'endc  aussi  au  Saint-Es- 
prit l'adoration  qui  lui  est  due.  Loin  d'en- 
seigner que  Jésus-Christ  est  un  pur  homme, 
il  confesse  clairement  qu'il  est  le  Dieu  de 
l'irnivers,  et  que  rien  n'est  comparable  à 
ce  qu'il  a  fait  ;  contrairement  ù  l'hi'résie 
de  Nestorius,  il  enseigne  que  Jésus  -  Christ  * 
n'est  qu'une  seule  personne  en  ses  deux  na- 


tures ;  qu'il  est  Dieu  et  homme'  par  nature,  cip. 
visible  selon  la  nature  humaine ,  invisible 
selon  sa  nature  divine  ;  Théodore  regar- 
dait comme  une  folie  de  dire  '  qu'il  y  a  deux 
Fils,  ou  deux  Christs,  ou  deux  Seigneui-s,  à 
cause  qu'il  est  de  deux  natures,  parce  que 
ces  deux  natures  sont  unies  en  une  seule 
personne  sans  confusion  ;  s'il  a  employé 
la  comparaison  de  l'homme  '  composé  de 
corps  et  d'ûme,  ce  n'a  été  que  pour  faire 
voir  l'uuité  de  personne  on  Jésus-Christ,  et 
non  pour  confondre  les  natures;  qu'au  reste, 
les  anciens  Pères  se  sont  servis  de  la  mê- 
me "comparaison  ;  on  ne  peut  l'accuser  d'a- 
voir voulu,  comme  les  manicliéens,  détruire 
l'autorité  des  prophéties,  puisqu'il  s'est  ap- 
pliqué dans  ses  ouvrages  à  en  faire  voir  l'ac- 
complissement en  Jésus-Christ. 

Facundus  établit  pour  règle,  que  c'est  par 
ces  passages  clairs  qu'il  vieirt  de  rapporter, 
que  l'on  doit  expliquer  ceux  qui  sont  obs- 
curs et  ambigus,  comme  il  est  d'usage  de  le 
faire  à  l'égard  des  autres  Pères.  Il  a  lui- 
même  besoin  d'explication  dans  ce  qu'il  dit 
sur  l'Eucharistie  :  car  en  voulant  excuser 
Théodore  de  Mopsueste  qui  avait  enseigné 
avec  quelques  anciens  que  Jésus-Christ  a 
bien  voulu  recevoir  l'adoption  des  enfants, 
lorsqu'il  a  reçu  la  circoncision  et  le  sacrement 
de  baptême,  il  soutient*  qu'on  peut  appeler 


'  Quid  iiaque  invenietur  majus  his  quœ  a 
Christo  fada  sunt  in  tanta  mtaidi  commutatione 
omnibus  agnoscenlibiis,  Deum  universorum  et 
pietalis  alque  virlutis  diligentiam  habere  festi- 
nantium,  et  glorificaïUium  quidem  Dei  unigeni- 
tum,  exhibenlium  vero  SancloSpirituicondignam 
adorationem.  Faciind.,  lib.  I.\,  cap.  r. 

-  Ventto  quoque  sequentin  ejusdem  psalmi  in- 
terprelans  dicit  :  Proiitcrca  unxit  te  Dciis,  Beus 
tuus.  De  Deo  vero  hœc  denuo  dici  manifeslum  est  : 
sed  quia  hiec  Deo  Palri  non  conveniunl  :  l'ropterea 
unxit  te  Ueus  Deus  tuus,  clarel  de  rcliquo  qtiud 
hoBC  deChrislodicanlur.  In  quo  mirabililer  etna- 
luras  diiisit,  et  personœ  unitatem  demnnslravit. 
Et  naturas  quidem  diiisit  in  eo,  quod  diversarum 
inlelligentiarum  declaralivas  voces  emisit.  Mul- 
tfi/m  enim  di/fert  ab  iiivicem  :  Sedes  tua,  Ueiis,  in 
siBcuUim  sa.'ciili,  et:  Propterea  unxit  te  Deus  Deus 
tuus.  l'nitatem  vero  ostendil  personœ,  ea  quœ 
diversa  sunt  colligens  in  unilalem  personœ.  Itiid. 

'  Dnminus  cnim  Chrislus  erat  quidem  ri  Deus 
et.^omo,  ulrumque secunduin  naturam  simililer  i 
ex  altero  quidem  apparens,  ex  aUero  vero,  ut 
pote  secundum  naluram  divinam,  invisibilis  ex- 
lan.1.  Il)id.,  cap.  u. 

'  Neque  enim,  si  duas  n/ituras  dicanivg,  nécessi- 
tas 710S  ulla  consiringit,  aul  duos  diiere  ftlios, 
aul  duos  homincs,  aul  iluni:  Cliristos  :  quoniam 
hoc  pulare  exlremœ  est  amntliui.  Ibid.,  cap.  m. 


»  Hoc  intérim  item  personu  idem  ipseinvenitur, 
nequaquam  cunfusis  nalurif.  sed  propter  aduna- 
tionem  quœ  fada  est  adsumpti  ad  assumriitem. 
Ihiil.  Ilinc  autem  cognoscantsemi-eutichiani.qun 
intenlione  dicatur  ab  aliis  Patribus,  quos  putanl 
in  duabus  Christum  negasse  naturis,  quia  sicul 
animii  et  corpus  unum  homincm  faciunt,  itn  ex 
divinilate  cl  huuinuilatc  unus  est  Chrislus.  iJuoU 
hoc  (ib  fis  non  ad  naturœ.  sed  ad  personœ  yolius 
nnituteni  dicalnr  :  quando  etiam  Theodorus, 
queni  nesloriunum  criu>inantes,  negare  tion  pos- 
sunl  in  duabus  Christum  prwdicasse  naluris,  hac 
utalur  simililudine,  quum  suœ  pulant  dementiœ 
conrenire.  Iliid.,  rap.  iv. 

'  Adoptionem  quoque  filiorum  suscepisse  Chris- 
tum, si  anliqui  dodores  Ecclesiœ  dixisse  mons- 
Irarcnlur,  nec  ipsi,  nec  oninis  Ecclesia,  quœ  taies 
doclorcs  habuit,  judicuri  deberet  hœrelica.  Amn 
siicrami'nlun)  adoplionis  suscipere  dignalus  eut 
Chriitus,  cl  quando  circumcisu^  esl,  et  quando 
bitptizatus  est:  et  potest  sacramenlum  adoplionis 
udopliii  nuncupari :  sicut  .facramcntum  corporùi 
cl  sanguinîs  ejus,  quod  est  in  pane  et  in  poculo 
eonsecrato,  corpus  ejus  et  sanguinem  dicimus, 
non  quod  proprie  corpus  ejus  sil  panis,  et  pocu- 
lum  sanguis:  sed  quod  in  se  mysterium  corpotis 
ejus,  siiitguini.sque  cunlineant.  Ilinc  et  ipsc  Do- 
minus  benedidum  panem  et  calicem,  quem  disci- 
pulis  tradidit,  corpus  et  sanguinen^  sxmm  t/'oco- 


[vi"  siÈaE.J  CHAPITRE  XXIV.  —  FACUNDUS,  IIUSTIQUK,  ETC. 


adopdonle  sacreinoiit  inôincd'adoplion,  com- 
me le  sacrement  du  corps  et  du  saiij^-  d(!  Jésus- 
Christ,  <|iii  est  dans  le  pain  et  le  calice  consa- 
crés, est  appelé  son  coi])s  (d  son  san^,',  non  (pio 
ce  pain  et  ce  calice  soient  pro[)i'ement  corps 
el  san;;;,  mais  parce  qu'ils  contiennent  le  mys- 
tère de  ce  corps  et  de  ce  sang.  ((  C'est  pour 
cela,  ajoute-t-il,  que  Jésus-Ciirisl  avait  ap- 
pelé le  pain  et  le  calice  qu'il  avait  bénits, 
son  corps  et  son  sanç;  ;  et  que  comme  l'on 
dit  fort  bien  que  les  lidèles  qui  reçoivent  le 
sacrement  du  corps  el  du  sang,  reçoivent  le 
corps  de  Jésus -Clirist  :  de  même  l'on  a  pu 
dire  que  Jésus-Christ  ayant  reçu  le  sacre- 
ment de  l'adoption,  a  reçu  l'adoption.') Pour 
prendre  le  vrai  sens  des  paroles  de  Facun- 
dus,  il  faut  remarquer  qu'il  y  a  deux  choses 
dans  l'Eucharistie,  le  sacrement  et  le  corps 
de  Jésus-Christe  et  que  l'esprit  peut  s'atta- 
cher au  sacrement  séparément  du  corps  de 
Jésus-Christ,  quoiqu'on  puisse  aussi  consi- 
dérer l'un  et  l'autre  comme  joints  ensemble. 
Le  sacrement  pris  séparément  n'est  pas  le 
corps  de  Jésus-Christ,  mais  il  le  coutienl;  et 
pour  nous  servir  des  termes  de  cet  auteur  : 
«  Le  pain  et  le  calice  (c'est-à-dire  cet  objet 
extérieur  qui  s'appelle  pain  et  vin  dans  le 
langage  commun),  n'est  pas  proprement 
corps  et  sang,  mais  il  contient  le  mystère  de 
ce  corps  et  de  ce  sang...,  »  en  sorte,  «  qu'on 
dit  fort  bien  que  les  fidèles  qui  reçoivent  le 
sacrement  du  corps  et  du  sang,  reçoivent  le 
corps  de  Jésus-Christ.  »  Facundus,  dont  le 
dessein  était  uniquement  de  justifier  cette 
expression  :  Jésus-Christ  a  reçu  l'adoption  des 
enfants,  ne  s'attache  qu'au  sacrement  sépa- 
rément du  corps  de  Jésus-Christ,  parce  qu'il 
n'y  avait  que  cette  considération  qui  fit  à  son 
sujet,  et  il  en  forme  ce  raisonnement  :  «  Le 
sacrement  de  l'adoption  peut  être  appelé «rfo/j- 
tion,  comme  le  sacrement  du  corps  et  du 
sang  de  Jésus-Christ,  qui  est  dans  le  pain  elle 
calice  consacré,  est  appelé  son  corps  et  son 
sang.  »  Or  Jésus -Christ  a  reçu  le  sacre- 
ment d'ado|)tiou  dans  sa  circoncision  et  dans 
son  baptême.  Ou  peut  donc  dire  qu'il  a  reçu 
l'adoption,  «  comme  on  dit  que  les  fidèles 
qui  reçoivent  le  sacrement  du  corps  el  du 
sang  de;  J('sus-Christ,  reçoivent  le  corps  de 
Jésus-Christ.  »    Ce  serait  mal  à  pro[ios  que 

vit.  Quorirca  siciit  Christi  /idetes  sacramentum 
corporia  el  saiiguiiUs  ejiis  accipienles  corpus  et 
sanguinein  Chrisli  recte  dicunlur  nceipere;  aie  cl 
ipse  Ckrislus,  soci'uinenluin  adnpiitjnni  filiuruM 
cnin  su-nepis^ct ,  puluil  reclr  diri  aduplumcin  ji- 


2t>3 

l'on  vnn'hMil  inférer  de  la  comparaison  ([u'il 
l'ait  cnlK^  le  sacrement  du  ba|)lèinc  et  le  sa- 
crement de  riùicharislie,  (pi'il  n'a  pas  cru 
à  la  présence  réelle  :  il  ne  nie  point  que  les 
lidèles  reçoivent  réellement  le  corps  et  le 
sang  de  Jésus-Christ;  au  contraire,  il  le  sup- 
pose, en  disant  que  ceux  ipii  reçoioenl  le  su- 
crciiicnt  du  corps  et  du  san(j,  reçoivent  le  corps 
de  Jésus-Christ;  mais  aussi  il  n'insiste  point 
sur  cette  vérité,  parce  qu'il  n'en  était  pas 
question.  Il  ne  s'agissait,  comme  on  vient 
de  le  dire,  que  de  moutrer  que  le  Sauveur 
en  recevant  le  baptême,  avait  reçu  l'adop- 
tion des  enfants  contenue  dans  les  sacre- 
ments, comme  les  fidèles  reçoivent  le  corps 
et  le  sang  de  Jésus-Christ  en  recevant  les  es- 
pèces visibles  du  pain  et  du  vin  qui  en  sont 
la  figure  et  le  saci-ement. 

Nous  joindrons  à  cette  explication  celle 
d'un  passage  d'Origène  que  nous  n'avons 
point  éclairci  dans  le  temps,  parce  qu'il  n'é- 
tait pas  entier  dans  l'édition  de  Génébrard, 
ni  dans  les  précédentes.  On  l'a  rétalii  dans 
la  nouvelle,  sur  l'autorité  de  deux  manus- 
crits, dontl'un  est  du  neuvième  siècle,  l'autre 
du  douzième.  «  Dieu  '  le  Verbe,  ditOrigène, 
n'appelait  pas  le  pain  qu'il  tenait  en  ses  mains, 
son  corps,  mais  la  parole  dans  le  mystère  de 
laquelle  ce  pain  devait  être  rompu.  Il  n'ap- 
pelait pas  non  plus  le  breuvage  visible,  son 
sang,  mais  la  parole  dans  le  mystère  de  la- 
quelle ce  breuvage  devait  être  répandu:  car 
que  peut  être  le  corps  et  le  sang  du  Dieu 
Verbe,  sinon  la  parole  qui  nourrit,  et  la  pa- 
role qui  réjouit  le  cœur  ?  n  A  prendre  cet 
endroit  d'Origène  dans  le  premier  sens  qu'il 
oU're  à  l'esprit,  on  dirait  qu'il  n'a  point  pen- 
sé sainement  sur  le  mystère  de  l'Eucharistie. 
Mais  si  l'on  prend  bien  sa  pensée,  on  verra 
qu'il  ne  s'est  point  éloigné  de  la  foi  de  l'É- 
glise sur  ce  sujet,  et  qu'U  l'a  lui-même  éta- 
blie  plusieurs  lois  dans  ses  écrits.  Il  distmgue^  n,  pas.  ;ô6. 
ici  avec  quelques  anciens,  trois  choses  dans 
l'Eucharistie  :  l'espèce  ou  apparence  exté- 
rieure et  sensible  ;  la  substance  intérieure 
et  cachée  qui  ne  s'aperçoit  que  des  yeux  de 
la  foi  ;  et  une  certaine  signification  mystique 
du  sacrement,  ou  un  lapport  que  l'Eucha- 
ristie a  avec  la  parole  de  Dieu.  Il  parle  de 
l'espèce  ou  apparence  sensible  quand  il  dit: 

liorum  suscepissp.  lliiil.,  cap.  v. 

'  Son  eniin  paiiem  illuin  visibilem  quem  tenebat 
iii  inanihus  corpus  xuuiii  diccbat  Deus  Verbuni, 
scd  vi'rbum  in.  cujus  myaierio  j'aeraL  punis  ille 
l'raiiijcndus.  Kcc  poluni,  iHum  visibilem  saunai- 


294 


mSTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


«  Dieu  le  '  Verbe  n'appelait  pas  son  corps, 
le  pain  visible  qu'il  tenait  en  ses  luains,  ut 
il  ne  disait  pas  non  plus  que  le  breuvage 
visible  fût  son  sang,  n  Quelques  lignes  au- 
paravant il  avait  marqué  la  substance  intd- 
rieure  et  cacbée  en  disant  '  :  «  Ce  pain  (jue 
Dieu  le  Verbe  dit  être  son  corps,  et  ce  breu- 
vage qu'il  confesse  être  son  sang  ;  »  Et  un 
peu  plus  bas  :  a  Jésus  fait  voir  ' ,  en  don- 
nant à  ses  disciples  ce  pain,  que  c'était  son 
propre  corps.  »  Et  encore  :  «  Il  enseignait 
ses  disciples  '  qui  avaient  célébré  la  fête 
avec  leur  Maître,  reçu  le  pain  de  bénédic- 
tion, et  mangé  le  corps  du  Verbe,  et  bu  le 
calice,  à  rendre  grâces  au  Père  pour  toutes 
ces  choses.  »  Enfin,  dans  cet  endroit,  il  donne 
aux  paroles  de  l'institution  de  l'Eucharistie, 
une  signification  mystique,  en  disant  que 
Jésus-Christ  appelait  le  sacrement,  la  pa- 
role qui  nourrit  ^  et  la  parole  qui  réjouit  le 
cœur  de  l'homme.  Saint  Augustin  distingue, 
comme  Origène,  trois  choses  dans  l'Eucha- 
ristie ;  l'espèce  extérieure  sous  la  figure  du 
pain  et  du  vin  ;  la  substance  intérieure,  qui 
est  le  corps  de  Jésus-Christ,  et  la  signification 
mystique  qui  représente  le  corps  de  Jésus- 
Christ  tout  entier,  c'est-à-dire  le  chef  avec 
ses  membres,  qui  s'appelle  corps  mystique 
de  Jésus-Christ.  C'est  dans  le  sermon  272, 
aux  nouveaux  baptisés,  qu'il  s'explique  ainsi  : 
«  Vous  avez,  leur  dit-il,  déj;\  vu  la  nuit  pré- 
cédente " ,  ce  que  vous  voyez  présentement 
sur  l'autel  de  Dieu,  c'est-à-dire  le  pain  et  le 
vin  ;  mais  on  ne  vous  a  pas  encore  dit  ce 
qu'étaient  ces  espèces,  ce  qu'elles  signifiaient, 
et  combien  celles  dnut  elles  sont  sncrement 
sont  grandes  et  excellentes.  »  Le  but  de  saint 
Augustin  est  donc  de  leur  apprendre  dans 
ce  discours  ce  que  ces  espèces  sont,  non  dans 
la  nature  ou  la  réalité,  puisque  ces  nouveaux 


baptisés  ayant  participé  à  la  table  du  Sei- 
gneur la  nuit  précédente,  qui  était  celle  de 
Pâques,  il  n'était  pas  possible  qu'on  ne  leur 
eût  expliqué  ce  qu'ils  y  avaient  reçu,  mais 
ce  qu'elles  sont  dans  leur  signification  mys- 
tique. C'est  pourquoi  il  ajoute:  «Ces  choses' 
sont    appelées    sacrement,    parce     qu'autre 
chose  est  ce  que  nous  voyons,  et  autre  chose 
ce  que  nous  concevons.  Ce  que  l'on  voit  a 
une  espèce  corporelle  ;  ce  que  l'on  conçoit 
a  un  fruit  spirituel.  Si  vous  voulez  donc  con- 
cevoir le  corps  de  Jésus-Christ,  (signifié  par 
le  sacrement,  et  auquel  les  espèces  ont  rap- 
port) écoutez  l'ap'itre  saint  Paul  :  Vous  êtes 
le  corps  de  Jésus-Christ  et  ses  membres.  »  C'est 
comme  si  ce  Père  leur  av;iit  dit'  :  Ces  choses 
sont  appelées  sacrement  parce  que  l'on  y 
voit  une  chose  et  l'on  y  en  conçoit  une  autre  : 
on  y  voit  le  pain,  on  conçoit  le  corps  de  Jésus- 
Christ  ;  mais  ce  corps  de  Ji^us-Clirist  qu'il 
faut  entendre  comme  la  chose  signifiée  par 
le  sacrement,  n'est  pas  le  seul  corps  naturel; 
c'est  le  corps  de  Jésus-Christ  tout   entier, 
c'est-à-dire  le  chef  et  les  membres  appelés 
le  corps  mystique.  Écoutez  ce  que  dit  l'A- 
pôtre :  Vous  êtes  le  corps  de  Jésus-Christ.  Or  ce 
rapport  que  vous  ne  trouvez  pas  entre  le  pain 
et  le  corps  de  Jésus-Christ  considéré  seul, 
vous  le  trouverez  entre  le  pain  et  le  corps  de 
Jésus-Christ  joint  à  ses  membres,  c'est-à-dire 
entre  le  pain  et  le  corps  mystique,  parce  que 
de  même  que  le  pain  visible  se  fait  de  plu- 
sieurs grains  réduits  en  un  corps,  de  même 
le  corps  mystifi\ie  do  Jésus-Christ,  qui  est 
l'Église,  se  fait  de  plusieurs  membres  réunis 
ensemble  sous  leur  chef  qui  est  Jésus-Christ. 
On  voitpar  là  qu'Origène  et  saint  Augustin 
ne  diUerent  entr'eux  dans  l'explication  de 
l'Eucharistie,  qu'en  ce  qu'Origène  dit  (ju'elle 
est  le  symbole  ou  le  sacrement  de  la  parole  do 


non  snnm  dicebal,  scd  verbum  in  cujus  myslerio 
potus  ille  fveral  effiindcndiis.  Nam  corpus  Dei 
Verbi  auL  saiiguis,  quid  aliud  esse  paient,  nisi 
verbum  quod  nulrit,  et  verbum  quod  lœlifical  cnr? 
Origcn.,  tract.  35,  in  Mallh.,  pag.  898;  éd.  de  l'.i- 
ris,  année  17in. 

1  Ibid. 

'  Panis  is(e  qucin  7Ji'u,s-  Vcrbutii  corpus  suum 
esse  fntetur,  verbum  est  iiutrilnrinm  aniniariim... 
et  polus  islc  queui  Deus  Verbum  sanguinein  suum 
fatetur,  verbum  est  potaiis  el  inebrians  corda. 
Ibid. 

'  Oslendit  quando  eos  (discipulosj  lioe  pane  nu- 
tril,  prnprium  esse  corpus.  Iliid.  [ing.  899. 

*  Deinde  docchat  discipulos  qui  festirilatem  cc- 
lebraveranl  cum  uiagislro  cl  acceperanl  benedic- 


timus  pnnem  et  maïutucaveranl  corpus  Verbi,  et 
biberanl  cnlicem,  gratiarum  aetionis  pro  his  om- 
nihns  bymnum  dicire  Patri.  Ibid. 
'  lliid.,  iibi  supra,  paf;.  898. 

•  //oc  quod  vidclis  in  altariDei,  eliam  transac- 
ta  nocte  ridislis  ,  sed  quid  esset,  quid  sibi  icllet, 
quam  mnguœ  rci  sacramentum  continvrcl  non- 
dum  audisds.  .\iij;risl.,sprm.  272,  img.  1103,  lom.  Y. 

"  /.s((f,  fralres,  idco  diruntur  sair.iinenla,  quia 
in  eis  alind  videlnr,  aliud  iniclligilur  :  quod  vide- 
tur  speciem  hiibel  corporatem,  quod  inlclligitur 
fructiim  habel  .^pirilalcm.  Corpun  ergo  Chrisli  si 
vis  inlelligere,  Aposlolum  audi  dicenlem  fidelibits: 
Vos  auteui  eslis  lorims  Cliristi  ot  nieiiilini. 

*  Voyez  tom.  III  de  la  Perpétuité  de  la  foi,  pag. 
13i. 


[Vl°  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  XXV.  ~  FACUNDUS,  RUSTIQUE,  ETC. 


diiiènie  livre, 
P«E.  îll. 


Cap. I, 


]1ion  ;  Pt  saint  Aiitjiistin,  qu'elle  est  le  sym- 
bole ou  le  sacicuient  du  corps  mystique  de 
Jésus-Christ  qui  est  l'église;  mais  ils  n'ont  ni 
l'un  ni  l'autre  favorisé  la  doctrine  contraire 
à  celle  de  la  présence  réelle  ;  au  contraire, 
ils  l'élalilissent  en  distinguant  la  substance 
intérieure,  le  tVuit  inté-rieur,  de  l'espèce 
cxti'rieure,  et  en  appelant  le  pain  corps  de 
Jésus-Christ,  cnrns  du  Verbe  de  Dieu. 

i-2.  Le  dixièmes  livre  est  encore  employé  à 
la  justification  de  Théodore  deMopsueste.  Eu 
supposant  qu'il  y  ait,  ditFacundus,  quelque 
chose  à  reprendre  dans  ses  licrits,  le  concile 
de  Clialcédoinc  a  pu  ne  pas  le  condamner,  ou 
parce  qu'il  a  ignoré  qu'il  y  eût  des  endroits 
blâmables  dans  ses  ouvrages,  ou  parce  qu'il 
a  cru  qu'ils  y  avaient  élt"  insérés  par  ses  en- 
nemis, et  qu'on  pouvait  leur  donner  un  bon 
sens.  On  voit  d'ailleurs  par  une  lettre  de 
Jean  d'Antioche,  que  Théodore  sachant  que 
l'on  reprenait  quelques  façons  de  parler 
dans  ses  écrits ,  les  avait  corrigés  de  lui- 
même,  ce  qui  prouve  que  s'il  s'était  quel- 
quefois trompé,  il  n'avait  point  été  opiniâtre 
dans  l'erreur,  ni  conséquenament  hérétique. 
Mais  au  vrai ,  les  endroits  que  l'on  lui  re- 
prochait, ne  contenaient  point  d'erreur; 
seulemeut  il  u'avait  point  parlé  avec  assez 
d'exactitude  et  de  circonspection;  mais  sup- 
posé même  qu'il  eût  avancé  des  propositions 
erronées,  Ibas  a  pu  le  louer  à  cause  de  son 
savoir,  et  qu'il  était  persuadé  que  ce  qu'il  y 
avait  de  défectueux  dans  les  ouvrages  de 
Théodore,  y  avait  été  mis  parles  hérétiques, 
et  qu'en  étant  informé,  il  l'avait  corrigé  lui- 
même.  Combien  de  louanges  n'a-t-on  pas  don- 
nées à  saint  Cyprien,  quoiqu'il  ait  soutenu  , 
et  en  particulier,  et  avec  sou  concile,  contre 
la  doctrine  de  l'Église,  que  l'on  devait  re- 
baptiser les  hérétiques? Théodore  ne  fut  pas 
même  accusé  dani;  le  concile  deChalcédoine; 
et  quand  on  l'aurait  accusé,  le  concile  n'au- 
rait pas  dû  condamner  un  homme  mort  dans 
la  commuuion  de  l'Église  ' ,  puisqu'il  n'est 
pas  même  permis  de  condamner  un  homme 
vivant  ,  mais  absent ,  qu'auparavant  on  ne 
l'ait  repris  et  averti  de  se  corriger  :  d'où 


295 

vient  que  les  évèquos  de  ce  concile  ,  voyant 
«pi'Ibas  avait  été  condamné  '  sans  être  en- 
tendu ,  s'écrièrent  :  k  Ils  ont  mal  fait  de  l'a- 
voir condamné  contre  les  canons.  Ce  qui 
est  fait  contre  un  absent  est  mal,  nous  le 
disons  tous.  Quand  en  effet  les  erreurs  de 
TlH'odorc  auraient  été  manifestes,  comment 
pourrait-on  s'assurer  qu'il  ne  les  avait  point 
r('tract('es  et  ne  s'en  était  pas  repenti,  du 
moins  à  la  mort  '?  Or  le  Seigneur  n'a  donné 
à  son  Eglise  aucun  pouvoir  sur  les  morts  ; 
elle  ne  peut  ni  les  lier  ni  les  délier.  Ce  n'est 
que  sur  les  vivants  qu'elle  exerce  son  auto- 
rité :  d'où  il  suit  qu'on  ne  peut  blâmer  le 
concile  de  Chalcédoine  de  n'avoir  pas  con- 
damné Théodore ,  quoiqu'il  le  crût  répré- 
hensible,  parce  qu'il  n'était  plus  sur  la  terre, 
le  seul  endroit  où  il  pouvait  le  lier.  Aussi  les 
saints  '  ont  décidé  que  n'étant  pas  au  pou- 
voir des  évêques  de  juger  ceux  qui  sont 
morts  avec  honneur,  il  en  fallait  réserver  le 
jugement  au  Juge  des  vivants  et  des  morts. 
On  n'a  jamais  condamné  saint  Athanase 
pour  avoir  excusé  saint  Denys  d'Alexandrie, 
l'un  de  ses  prédécesseurs  ,  qui  s'était  toute- 
fois exprimé  dans  des  termes  très-durs  au 
sujet  de  la  nature  du  Fils  de  Dieu,  qu'il  sem- 
blait dire  être  d'une  substance  différente  de 
celle  du  Père,  et  même  créature;  ni  saint 
Basile  pour  avoir  pris  la  défense  de  saint 
Grégoire  Thaumaturge,  dont  les  expressions 
pouvaient  paraître  favoriser  les  ariens  et  les 
sabelliens  ;  ni  saint  Hilaire  pour  avoir  justi- 
fié le  concile  d'Antioche  ,  dans  la  suppres- 
sion du  terme  de  consubstantiel,  et  des  ex- 
pressions peu  convenables  dans  le  concile 
de  Sirmium.  S'il  a  été  permis  à  ces  grands 
évêques  d'excuser  des  hommes  que  l'Eglise 
avait  constitués  en  dignité ,  pourquoi  ne  le 
sera-t-il  pas  d'excuser  aussi  Théodore?  Ses 
ennemis  ,  en  le  condamnant ,  sont  tombés 
dans  quatre  défauts  :  i°  ils  ont  anathématisé 
une  personne  morte  dans  la  paix  et  la  com- 
munion de  l'Eglise  ,  en  quoi  ils  ont  péché 
contre  les  sentiments  des  saints  Pères  et  le 
jugement  de  toute  l'Église  ;  2°  En  l'anathé- 
matisant  ils  ont  dit  anathème  à  tous  ceux 


Cap.  Tl. 


'  Si  autem  superstitem ,  non  ante  admrinilum, 
alqne  cnrrepttim  damnare  non  deberemus  absen- 
tem  :  quomodo  sancta  synodus,  tel  si  apud  eam 
Theodorus  accusaretur,  juste  damnare  mortvuin 
posset?  Lilj.  X,  cai).  iv. 

-  Propter  quod  i)i  ea/leni  sancta  synodo  pro  re- 
verendissimo  Iba  damaverunl  episcnpi,  sœpe  di- 
cenles,  maie  fecerunt  qui  eum  prœtercanonesdain.- 


nnverujit;  quœ  adversus  absentent  fada  sunt, 
evacuenlur.  Hœc  omnes  dicimtis.  Nemo  condem- 
nat  absentem.  Ibid. 

^  Quuprnpter  eliam  beali  Patres  de/inierunt, 
quia  non  nostrum  est  judicare  eos  qui  honorais 
defuncti  sunt,  sed  solius  judiw  vivorum  et  nwr- 
tuorum.  IbiJ, 


296 


HISTOIRE  GÉNÉKALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

séparés  de  la  communion  de  l'Église  et  obs-    ctf.. 


Vf.  m. 


Ci[i.  VMl. 


Am';se 
doiir  une 


qui  l'ont  approuvé,  et  même  à  rEj;lise  qui  a 
communiqué  avec  Théodore,  ce  qui  est  évi- 
demment contre  les  règles  de  la  justice  et 
contre  l'usage  de  la  discipline  ecclésiastique; 
3°  Ils  ont  généralement  condamné  tous  ses 
dogmes,  sans  faire  attention  qu'on  ne  pou- 
vait lui  refuser  d'avoir  pensé  en  beaucoup 
de  choses  comme  on  pense  dans  l'Église 
catholique  ;  -i"  Ils  ne  se  sont  pas  contentés 
de  condamner  ceux  qui  sont  de  son  senti- 
ment ,  mais  ceux-là  encore  qui  en  ont  été  , 
sans  distinction  de  ceux  qui  pouvaient  avoir 
changé  de  sentiment. 

13.  Dans  le  onzième  livre,  Facundus  rap- 
porte plusieurs  endroits  des  écrits  de  saint 
Eustathe  d'.\ntioche ,  de  saint  Athanase  ,  de 
saint  Ampblioque,  de  saint  Grégoire  de  Nys- 
se,  de  saint  Chrysostôme  et  de  saint  Cyrille 
d'Alexandrie,  pour  montrer  qu'ils  ont  em- 
ployé les  mêmes  expressions  que  l'on  re- 
prend dans  Théodore  de  Mopsueste.La  con- 
clusion qu'il  tire  de  ce  parallcle  est,  que  si 
l'on  excuse  uu  défaut  d'exactitude  dans  le 
langage  de  ces  anciens  écrivains,  parce  que 
vivant  (à  l'exception  de  saint  Cyrille)  avant 
la  naissance  de  l'hérésie  de  Nestorius,  ils  ne 
se  sont  pas  exprimés  avec  la  même  réserve 
qu'ils  auraient  observée,  s'ils  eussent  écrit 
depuis;  il  faut  avoir  le  même  égaid  pour 
Théodore  de  Mopsueste  plus  ancien  que 
Nestorius,  el  ne  pas  reprocher  au  concile 
lie  Chalcédoine  d'en  avoir  eu  pour  lui.  Il 
donne  pour  règle  que  (juand  on  trouve  des 
erreurs  dans  les  écrits  des  Pères,  on  doit 
les  excuser  par  la  bonne  intention ,  et  ne 
pas  les  croire  pour  cela  hérétiques  ;  parce 
qu'on  n'est  pas  héréli(jue  '  simplement  jiour 
s'être  trompé,  ou  par  ignorance  :  l'attache- 
ment seul  à  Teneur  rend  hérétique. 

14.  Continuant  a  établir  la  même  règle 
dans  le  douzième  livre,  il  fait  voir  qu'il  y  a 
beaucoup  de  diUerence  entre  des  hérétiques 


tinés  dans  leurs  erreurs,  et  des  catholiques 
qui  sont  dans  l'erreur,  ou  par  ignorance,  ou 
faute  de  bien  comprendre  les  choses ,  mais 
qui  demeurent  dans  une  entière  soumission 
h  l'Église.  «  Ce  n'est  pas,  dit-il,  l'ignorance* 
qui  reud  hérétique,  à  moins  qu'elle  ne  soit  ac- 
compagnée de  contumace  et  de  résistance 
obstinée  à  la  doctrine  de  la  vérité;  c'est  de 
soutenir  et  de  défendre  opiniâtrement  l'er- 
reur. Or ,  cette  opiniâtreté  '  ne  se  trouve 
point  dans  tous  ceux  qui  sont  dociles  à  la 
voix  de  l'Eglise,  qui  se  soumettent  à  son  au- 
torité, qui  sont  disposés  ii  apprendre  d'elle 
la  vérité,  quoiqu'à  cause  de  leur  incapacité, 
ils  n'aient  pu  encore  la  concevoir  ni  la  coa- 
naitre.  On  ne  doit  donc  point  les  appeler  hé- 
rétiques ;  cette  quahticalion  odieuse  ne  doit 
s'appUquer'  qu'a  ceux  qui  par  esprit  d'orgueil 
s'obtiuent  à  défendre  l'erreur,  qui  s'inter- 
disent à  eux-mêmes  les  moyens  de  connaî- 
tre ce  qu'ils  doivent  suivre  ;  qui  étant  aver- 
tis de  leurs  égarements  refusent  avec  mépris 
d'acquiescer  à  la  vérité  ;  et  qui  aiment  mieux 
être  séparés  de  l'Eglise  ,  ou  y  demeurer  ca- 
chés, que  de  changer  leuis  mauvais  senti- 
ments. I)  La  conséquence  qu'il  tire  de  celte 
distinction  est  que  Théodore  de  Mopsueste  , 
ayant  marqué  sa  docilité  par  la  rétractation 
qu'il  avait  faite  de  certains  endroits  de  ses 
écrits  qu'on  lui  avait  objectés  comme  repré- 
hensibles  ,  on  ne  doit  point  le  condamner 
comme  hérétique. 

Il  passe  de  là  à  l'autorité  du  concile  de 
Chalcédoine,  contre  laquelle  il  dit  qu'il  n'est 
plus  permis  de  revenir,  ni  d'examiner  de 
nouveau  ce  qu'il  a  décidé  ,  soit  à  l'égard  de 
la  lettie  d'Ibas  ,  soit  pour  toute  autre  chose 
qui  intéresse  la  foi  ;  ce  qu'il  prouve  par  di- 
vers passages  des  lettres  de  saint  Léon  ,  et 
par  l'édil  de  l'empereur  ft^arcieii  à  qui  l'on 
était  redevable  du  salut  de  l'Empire  et  de  la 


'  A'im  quia  non  ignnrantia,  scd  obstinalio  fn- 
cil  hœrcticum.  I.ib.  M,  cap.  vu. 

'  Scire  igitnr  dehemus,  quod  hœrelicum  non 
facial  ignoranlia,  qum  doclrinœ  rerilalis  eoiitii- 
inai^non  est,  xed  potius  ohstinata  dcfensio  fiitsi- 
talis.  Lili.  XII,  c-ap.  I. 

'  Quocirca  ownes,  qui  in  disciputatusunt  reri- 
lalis, et  semetipsos  rulioni  dociles,  el  subjcetos 
iiuclnrittili  prrrhenl  Ecclesiiv,  si  aliter  sapianl  de 
his,  quorum  (ide  mundaiilur,  vol propler  ineapa- 
cem  siiam  intrltigentiain,  tel  nnnus  rem  nniniiid- 
vertendo  qnam  opus  est,  impie  prociil  dvhio  lan- 
quam  hirrelicos  e.Tecrantiir.  Qui  euim  slatiiil  in 
corde  suo  firmus  hoc  credere,  quod  in  latibus 


dodrina  d  fides  habet  Eeclesiœ,  qiinmvis  non  per- 
ferte  oniiiin  de  iisdem  sapial  vel  loquatiir;  quia 
lumen  suœ  scietitid'  «on  concidil,  et  multa  in  qui- 
hus  errai  aul  dubitat,  ab  Ecclesia  rectiv  leneri 
non  dubitat,  ubi positus  relut  in  scola  reritatù!, 
quod  est  hœreticus,  sed  perficiendu^  potius  disci- 
jiulus.  Il)id. 

*  Non  igiltir  liœresis  dicenda  est,  nisi  rontra- 
diclio  superborum  pervicax,  quw  sibi  ne  aliud 
sapial  iiilerdiril.  ri  admonila  conlemnil  arquies- 
cere  lerilali.  Ilta  wagis  conlumaciler  ah  Eccle- 
sia separari  deliijil,  vel  in  ea  dolose  lalere  quam 
pravam  mulare  sentcntiam.  Ibid. 


C"r.  Ml. 


[vi*  SIÈCLE.]  ciiAi'rriit;  xxv.  —  facundus,  uustiquk,  ktc. 

]i;iix  de  l'église.  Il  prouve  oiicoreparr;iulorité      nalioii.  Fiicundiis  ëtail  mal 


iJ!J7 


lie  l'iiii  et  (le  l'autre,  ([ue  les  piiiiccs,  ilaiis  les 
matières  (|ui  concennMit  la  foi  ,  doivent  l'o- 
béissance et  la  soumission  aux  décisions  des 
('•vêques,  et  ne  doivent  point  en  nsnrper  les 
droits  ;  que  l'empereur  Léon  a  doinié  l'exem- 
ple de  cette  oliéissance,  de  même  qiu;  Mar- 
cien,  et  que  Zénou  ayant  entrepris  de  déci- 
der sur  la  foi  par  son  Hénotique ,  avait  intro- 
duit un  lourf  et  fâcheux  scliismc  dans  l'Iy^Ii- 
se,  dont  elle  fut  agitée  pendant  près  de  iiua- 
rante  ans,  savoir  depuis  le  pontificat  de  Fé- 
lix III  jusqu'à  celui  d'Hormisdas,  sous  lequel 
les  églises  d'Orient  se  réunirent  avec  celles 
il'Occident.  Facundus  prend  de  là  occasion 
d'instruire  Justinien,  en  lui  remontrant  avec 
heancoup  de  discrétion,  que  Zenon  n'avait 
donné  dans  ces  éfiaremenis  que  pour  avoir 
été  séduit  par  des  llatteurs  qui  lui  persua- 
daient qu'il  était  plus  sage  que  ses  prédé- 
cesseurs, et  que  tous  les  évoques  qui  avaient 
jamais  été.  Il  l'exhorte  à  suivre  l'exemple 
du  grand  Théodose  dans  sa  soumission  aux 
évêques,  en  lui  disant  que  ce  prince  ne 
croyait  point  acquérir  '  le  salut  éternel  par 
la  puissance  temporelle  qui  le  constituait  au- 
dessus  des  prêtres  du  Soigneur  ;  mais  par 
la  soumission  i{n'\\  devait  à  leurs  décisions , 
ajoutant  qu'd  y  avait  tout  lieu  de  croire  que 
s'il  y  avait  encore  un  évéque  du  zèle  et  du 
mérite  de  saint  Ambroise ,  ou  verrait  aussi 
des  Théodose. 

15.  Facundus  ne  se  contenta  pas  de  pren- 
dre par  écrit  la  défense  des  Trois-Chapitrcs; 
il  les  défendit  encore  de  vive  voix.  A'oyant 
qu'on  les  avait  condamnés  dans  le  concile  de 
Chalcédoine,  il  rompit  la  communion  avec 
les  évêques  qui  avaient  rendu  cette  senten- 
ce. Pour  l'en  punir,  Justinien  l'envoya  en 
exil.  On  n'en  sait  pas  le  lieu.  Ceux  qui  pen- 
saient comme  lui  l'envoyèrent  consoler; 
mais,  c'était  en  etl'et,  pour  l'engager  à  répon- 
dre à  un  écrit  de  Mucien  ou  Mocien,  dont  le 
but  était  de  montrer,  par  un  grand  nom- 
bre de  passages  de  saint  Augustin,  qu'il 
fallait  souti'rir  les  méchants  dans  l'Église, 
sans  se  séparer  de  leur  communion.  Mucien 
comparait  aux  donatisles  ceux  qui  dans  l'af- 
faire des  Trois  -  Chapitres  s'étaient  séparés 
d'avec  les  évêques  qui  avaient  ou  condamné 
ces  Trois-C/iapitres,  ou  souscrit  leur  coudam- 

'  Pie  admodum  credens,  et  sapienter  inleUigens, 
quod  non  ex  temporali  potestate,  qua  fuerat 
etiam  sarerdotihits  Un  prœponitus,  sed  ex  eo  per- 
venire  posset  ad  vitam,  quod  illis  erat  ipse  suft- 


iili'  Idi'sipic  l'ex- 
près arriva,  et  si  allàihii,  (piCncore  (|u'il  lijl 
dans  un  temps  de  jiMuie,  il  ne  [louvait  res- 
ter jusqu'à  la  troisième  heure  du  jour,  c'est- 
à-dire  jusqu'à  neuf  heures  du  matin  sans 
manger.  Il  entreprit  toutefois  de  réfuter  Mu- 
ciiîn  ,  mais  il  ne  put  le  faire  avec  beaucoup 
d'étendue,  parce  qu'il  n'avait  pas  les  livres 
dont  il  aurait  eu  besoin  pour  traiter  la  ma- 
tière comme  il  convenait.  C'était  vers  l'an 
ooo  ou  530. 

16.  H  s'applique  principalement  à  mon- 
trer que  Mucien  abusait  de  l'autorité  de 
saint  Augustin,  comme  Fauste  de  liiez  en 
avait  abusé  dans  ses  écrits  sur  le  libre  arbi- 
tre, faute  à  l'un  et  à  l'autre  d'entendre  les 
écrits  de  ce  Père  ;  qu'il  y  avait  beaucoup  de 
dilfércnce  entre  la  cause  des  donatistes  et 
celle  des  Trais-Chapitres  ;  que  du  temps  des 
donatistes  il  ne  s'agissait  que  du  schisme, 
au  lieu  qu'il  s'agissait  présentement  de  la 
foi.  Pour  montrer  doue  que  lui  et  les  autres 
évêques  d'Afrique  avaient  eu  raison  de  se 
séparer  de  communion  d'avec  les  évêques 
qui  avaient  condamné  les  Trois-Chapitres,  il 
dit  que  ceux-ci  ne  l'ont  pu  faire  qu'en  se 
joignant  aux  hérétiques  qui  ont  sollicité 
cette  condamnation  ;  qu'en  condamnant  le 
concile  de  Chalcédoine,  et  qu'en  anathéma- 
tisant  les  Pères  de  l'Église,  qui  ont  ou  com- 
posé ce  concile,  ou  approuvé  ses  décrets  ; 
et  que  dès  lors  s'étant  séparés  d'eux-mêmes 
de  l'Eglise,  on  ne  peut  reprocher  aux  évê- 
ques d'Afrique  de  n'être  plus  avec  eux  en 
communion.  Il  restait  à  Facundus  de  mon- 
trer que  ceux  qui  condamnaient  le  concile 
de  Chalcédoine  étaient  dès  là  même  séparés 
de  l'Église.  II  le  prouve  par  l'exemple  de  la 
condamnation  d'Acace,  évéque  de  Constan- 
tinople,  qui  entraîna  celle  de  presque  tous 
les  évêques  d'Orient,  soit  parce  qu'à  l'imi- 
tation d'Acace  ils  ne  recevaient  pas  le  con- 
cile de  Chalcédoine,  soit  parce  qu'ils  com- 
muniquaient avec  les  ennemis  déclarés  de 
ce  concile.  «La  sentence,  dit  Facundus,  que 
le  Saint-^iége  prononça  contre  Acace  et  con- 
tre les  autres  évêques  qui  en  recevaient  point 
les  décrets  de  ce  concile,  subsista  depuis  le 
pontificat  de  Félix  III  jusqu'à  celui  d'Hor- 
misdas, sans  qu'il  se  trouvât  personne  qui 
prétendit,  comme  Mucien,  qu'il  fallait  tolé- 

jectus.  Unde  credendum  est,  quia  si  nunc  Deus 
aliquem  Amhrosium  suscilaret,  eliam  Theodosius 
non  decssct.  Ibi'l.,  cap.  v. 


\inlv.n  ilo 
ce  llïrc.  Toni, 
n    Op    S:ri.i. 


298 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


rer  les  méchants  et  ne  point  rompre  la  com- 
munion avec  eux.  Est-ce  donc  que  l'on  n'avait 
pas  connaissance  des  écrits  (jue  saint  Augus- 
tin avait  composés  contre  les  donatistes? 
non;  mais  c'est  que  la  cause  des  donatistes 
n'était  pas  de  même  nature  que  celle  des 
Trois-Clidjiitres.  »  Facundus  ajoute  que  saint 
Hilaire  se  sépara  aussi  de  communion  d'a- 
vec ceux  qui  tentèrent  d'anéantir  l'autorité 
(lu  concile  de  Xicée,  et  que  plusieurs  autres 
évé(]ues  catlioliqu(!s  eu  lirenl  de  même.  II 
soutient  que  l'Église  d'Afrique  ne  s'est  point 
séparée  d'avec  les  ennemis  du  concile  de 
Clialcédoine,  mais  qu'elle  a  seulement  és'ilé 
de  communiquer  avec  ceux  qui  avaient  déjà 
été  séparés  de  l'Éf^lise  pour  leur  opposition 
à  ce  couc'le  ;  et  qu'il  y  a  plus  de  lieu  de  re- 
procher aux  évoques  d'Afrique  d'avoir  trop 
tardé  à  se  séparer,  que  de  l'avoir  fait  avec 
précipitation,  comme  Mucien  les  en  accu- 
sait. 11  rapporte  ce  qu'il  avait  dit  dans  le 
concile  que  le  pape  Vigile  assembla  h.  Cons- 
tantinople  en  o47  ;  la  sentence  d'excommu- 
nication que  ce  pape  prononça  contre  Men- 
nas  qui  avait  le  premier  souscrit  à  la  con- 
damnation des  Trois-Chapitres  ;  le  décret  de 
Vigile  appelé  Judicatum,  où  il  condamnait 
les  Trois-C/iapilres  sans  préjudice  du  concile 
de  Clialcédoine,  soutenant  qu'il  ne  s'était 
laissé  aller  à  la  publication  de  ce  décret  que 
par  des  motifs  purement  humains  ;  et  la  let- 
tre de  Sorcius  à  Boéllius  primat  de  la  pro- 
vince Bysacène,  où  il  dit  anatbènie  h  Eut}'- 
cbès  et  à  tous  ceux  qui  ne  reçoivent  point  le 
concile  de  Clialcédoine,  ou  qui  anatbémati- 
senl  la  lettre  d'ibas,  reçue  dans  ce  concile. 
11  convient  que  le  pape  saint  Etienne  ne 
rompit  point  la  communion  avec  saint  Cy- 
prien  et  quelques  autres  évèques  d'Afiique 
dans  la  dispute  sur  la  rebaptisation;  et  il  en 
donne  pour  raison  qu'il  n'était  intervenu 
jusques-là  aucune  sentence  d'excomumni- 
cation  de  la  part  du  Pape;  mais  qu'il  me- 
naça d'en  porter  une  contre  quiconque  ose- 
rait à  l'avenir  rebaptiser  ceux  qui  avaient 
été  baptisés  par  les  hérétiques;  ce  qui  sup- 
pose clairemeut  que  saint  Etienne  était  du 
sentiment  qu'on  pouvait  se  séparer  de  com- 
munion de  ceux  qui  erraient  dans  la  foi  ;  et 
qu'il  était  permis  de  demeurer  uni  avec 
ceux  qui  n'avaient  pas  encore  été  soumis  à 
l'aiiatliéme.  C'est  pourquoi  il  ajoute  :  «Quoi- 
que je  condamne  les  nestoricus,  parce  qu'ils 
sont  séparés  de  l'Église  par  l'anatlième,  je 
uc  condamne  pas  Théodore  de  Mopsuesle 


qui  n'en  a  pas  été  frappé  ;  vu  surtout  que 
suivant  la  doctrine  du  pape  G(Mase,  ou  plu- 
tôt du  concile  de  Home,  il  est  défendu  de 
condamner  après  leur  mort  ceux  qui  ont  liui 
leur  vie  dans  la  paix  de  l'Église,  étant  plus 
à  propos  de  les  laisser  au  jugement  de 
Dieu.  » 

17.  Facundus  traita  encore  la  question  des 
Trois-Cliapitres  dans  une  lettre  qui  a  été  d'a- 
bord donnée  par  dom  d'Achéry  dans  le  to- 
me 111  de  son  Sj/icilcr/e,  ensuite  par  le  Père 
Sirmond.  Elle  est  intitulée  :  De  la  fui  catho- 
lique. Ceux  qui  avaient  condamné  les  Trois- 
Chapitres  disaient  qu'ils  ne  laissaient  pas 
d'être  unis  dans  la  môme  foi,  dans  l'admi- 
nistr-Uion  du  baptême  et  dans  l'ordre  de  la 
célébration  du  saint  sacrifice,  avec  les  défen- 
seurs des  mêmes  T?'ois-Chapitres,  et  que  leur 
diirérend  à  cet  égard  ne  portait  aucun  pré- 
judice :\  la  foi  de  l'Église.  Facundus  sou- 
tient que  cela  ne  peut  être,  parce  qu'on  ne 
peut  condamner  la  lettre  d'ibas  où  la  foi  sur 
les  deux  natures  unies  en  une  personne  dans 
Jésus-Christ  est  nettement  exprimée,  sans 
approuver  le  dogme  des  eutychéens  et  des 
acéphales ,  les  principaux  moteurs  de  la 
condamnation  de  cette  lettre  :  et  consë- 
queramont  sans  enseigner  avec  lui  qu'il  n'y 
a  qu'une  nature  en  Jésus-Christ;  qu'en  vain 
ils  se  llattent  de  garder  le  symbole  de  l'É- 
glise catholique,  et  les  articles  de  foi  qu'il 
contient,  puisque  contrairement  à  l'article 
qui  réserve  au  Fils  de  Dieu  le  jugement  des 
morts,  ils  l'usurpent  eux-mêmes,  en  jugeant 
et  en  condamnant  des  évèques  catholiques 
morts  dans  la  communion  de  l'Église.  Il  les 
accuse  de  n'avoir  donné  dans  la  condamna- 
tion des  Trois-Chapitres  que  par  des  vues 
d'ambition  et  d'intérêt,  et  après  s'être  laissés 
corrompre  par  des  présents  et  des  promes- 
ses llaltcuses  de  la  part  des  moteurs  de  cette 
condamnation  ;  d'après  lui  l'atTaire  des  Trois- 
Chn/iilres  n'est  pas,  comme  le  disaient  quel- 
ques ignorants,  particulière  à  Ibas,  à  Théo- 
dore et  à  Théodore!  ;  elle  regarde  également 
tous  les  évèques  dont  la  doctrine  a  été  ap- 
prouvée clans  le  concile  de  Clialcédoine,  et 
tous  ceux  qui  depuis  sout  morts  dans  la 
communion  de  l'Eglise  catholique.  Il  leur 
demande  si  avant  de  condamner  ces  trois 
évèques,  on  les  avait  interrogés  pendant 
qu'ils  vivaient,  repris,  corrigés  et  avertis 
suivant  la  couliune  de  l'Église,  et  l'ordre  de 
la  discipline,  comme  on  en  agit  envers  Arius 
dans  le  concile  de  Nicéc,  envers  Maccdouius 


Lcllrc  de  Fa* 
CuDdab  poDr 
l«  d«fcti.-r  des 
Trou  •  Cliapl. 
Ires,  pie.  8ii, 
el  lom.  m 
Splcll.  L>acbe- 
htol. 


Gcn  ,  tT,  7- 


Jucement 
iiuo^  <iu  OD  en 


[vi«  SIÈCLE.]  CIIAPITIIE  XXIV. 

(liuis  le  concile  de  Constanlinoplc,  envers 
Nesloriiis  dans  celui  d'Epliose,  envers  Kiily- 
chès  et  Dioscore  tlans  le  coiu'ilc  de  C.liaki'- 
dnine.  Counne  ils  ne  pouvaient  rien  pronver 
de  semblable,  il  leur  oppose  les  actes  du  con- 
cile d'Anlioche  et  de  celui  de  Clialcédoine  où 
Ibas  ,  Tbéodore  de  Mopsueste  et  Tliéodorel 
ont  été  déclarés  orthodoxes,  et  où  le  premier 
et  le  dernier  ont  été  rétablis  en  conséquen- 
ce dans  leurs  sièges.  Il  leur  demande  encore 
si  le  concile  de  Clialcédoine  est  orthodoxe 
ou  non  :  «  Si  vous  répondez,  dit-il,  qu'il  est 
orthodoxe,  vous  êtes  donc  vous-mêmes  hé- 
rétiques, puisque  vous  condamnez  ce  qu'il 
a  approuvé  ;  vous  n'êtes  pas  moins  héréti- 
ques si  vous  répondez  que  ce  concile  n'est 
point  orthodoxe,  n  Ce  qu'il  dit  des  auteurs 
de  la  condamnation  des  Trois-Chaiiilrcs,  il 
l'applique  à  ceux  qui  leur  sont  unis  de  sen- 
timent et  de  communion.  Répondant  ensuite 
i\  ce  qu'ils  alléguaient  ,  qu'ils  otl'raienl  le 
même  sacrifice  que  les  défenseurs  des  Trois- 
Chdpitrcs,  il  leur  fait  l'application  de  ces  pa- 
roles de  Dieu  à  Caïn  :  6i  wus  offrez  bien, 
vous  en  serez  récompensé  ;  si  vous  offrez  mal, 
ruus  trouverez  aussitôt  la  peine  de  votre  péché. 
11  avoue  que  rien  n'est  préférable  à  la  paix, 
et  il  cite  sur  cela  ce  qu'en  dit  saint  Augustin  ; 
mais  il  dit  qu'on  ne  peut  l'avoir  avec  les  hé- 
rétiques ni  avec  les  schismatiques,  ni  avec 
les  Juifs,  ni  avec  les  païens;  qu'au  reste 
celte  paix  a  été  rompue'  par  les  auteurs  de 
la  condamnation  des  Trois-Chapitres,  et  qu'ils 
peuvent  en  y  renonçant  rétablir  cette  paix. 
18.  Nous  ne  savons  point  que  Facuudus 
ail  composé  d'autres  ouvrages.  On  voit  par 
ceiLX  dont  nous  venons  de  parler,  qu'il  écri- 
vait avec  beaucoup  de  feu  et  de  véhémence, 
et  qu'il  ne  laissait  rien  échapper  de  ce  qui 
regardait  son  sujet.  Il  donne  un  tour  à  ses 
raisonnements  qiii  les  rend  plausibles  ;  mais 
il  y  en  a  dont  il  est  aisé  d'apercevoir  le  fai- 
ble, autant  parce  qu'il  en  pousse  trop  loin 
les  conséquences,  que  parce  que  les  princi- 
pes n'en  sont  pas  solides.  Le  Père  Siimond 
lit  imprimer  en  1629  les  douze  livres  de  Fa- 
cuudus sur  cette  matière,  et  celui  qu'il  com- 
posa contre  Mucieu  ;  ils  furent  réimprimés 
en  1675  à  la  suite  d'Optat  de  Milève,  par  les 
soins  de  Philippe  le  prieur,  qui  y  ajouta  la 
lettre  intitulée  :  De  la  Foi  catholique,  qui 
avait  déjà  été  insérée  dans  le  tome  III  du 


FACUNDUS,  RUSTIQUE,  ETC.  2f)'J 

Spicilége.  Toutes  ces  pièces  ont  passé  dans 
le  tome  X  de  la  /iihlintliique  des  /'ères  de 
Lyon,  puis  dans  le  Ikcuril  des  o'uvres  du 
Père  Sirmond  il  Paris  en  iO'Jti,  [dans  le  tome 
XI  de  la  Bibliiith!'(pte  de  Galland,  et  de  là  dans 
le  tome  LXMI  tle  la  Putroluf/ie  lutine,  col.  521 
et  suiv.j 

l'J.  Facundus  ne  fut  pas  le  seul  qui  écri- 
vit contre  la  condamnation  des  Trois-C/ui- 
pitres  :  ils  trouvèrent  des  défenseurs  même 
dans  le  clergé  de  Rome.  De  ce  nomljre  fu- 
rent Rustique  et  Sébastien,  tous  detix  dia- 
cres de  cette  Église,  et  confidents  du  pape 
Vigile.  Ils  se  déclarèrent  contre  son  Judica- 
tum  dès  le  commencement  de  l'an  .'iiO,  et 
mandèrent  '  à  plusieurs  évoques,  entr'autres 
à  saint  Aurélien,  évèque  d'Arles,  et  à  Valen- 
linien,  évêque  de  Tomi  dans  la  Scythie,  que 
ce  pape  avait  abandonné  le  concile  de  Clial- 
cédoine. Ces  deux  évèques  lui  en  ayant  écrit 
pour  s'informer  de  la  vérité,  Vigile  répondit 
à  saint  Aurélien  qu'il  n'avait  rien  fait  contre 
les  décrets  de  ces  prédécesseurs,  ni  contre 
les  quatre  conciles  généraux  ;  qu'il  pouvait, 
comme  les  autres  évèques  des  Gaules,  s'as- 
siu'er  qu'il  garderait  inviolablement  la  foi 
des  Pères.  Il  se  justifia  aussi  des  calomnies 
de  Sébastien  et  de  Rustique  dans  sa  réponse 
à  Valentinien  de  Tomi,  en  le  priant  de  ne 
plus  recevoir  de  leurs  lettres,  parce  qu'il  les 
avait  déjà  séparés  de  sa  communion  ,  et 
qu'il  était  résolu  de  les  juger  canonicpement, 
s'ils  ne  venaient  bientôt  à  résipiscence.  En 
effet,  voyant  qu'ils  continuaient  à  le  calom- 
nier, il  rendit  contr'eux  une  sentence  '  con- 
çue en  forme  de  lettre,  et  adressée  à  eux- 
mêmes.  S'adrcssant  d'abord  à  Rustique,  il  le 
fait  souvenir  qu'il  avait  lui-même  demandé  la 
condamnation  des  Trois  -  Chapitres,  jusqu'à 
vouloir  que  l'on  déterrât  les  os  de  Théodore 
de  Mopsueste  poiu' les  brider;  qu'il  n'avait 
prononcé  son  Judicatum  qu'après  avoir  pris 
son  avis  ;  qu'il  l'avait  pressé  de  le  donner 
non-seulement  à  Mennas  à  qui  il  était  adres- 
sé, mais  qu'il  en  avait  fait  lui-même  des 
copies  pour  les  envoyer  en  Afrique  ;  que  le 
Samedi-Saint,  jour  auquel  le  Judicatum  fut 
publié  dans  l'Église,  il  y  avait  fait  ses  fonc- 
tions de  diacre,  et  dit  à  l'évêque  Julien  que 
l'on  n'avait  pu  mieux  faire.  Le  Pape  lui  fait 
encore  d'autres  reproches  ;  puis,  après  en 
avoir  fait  aussi  au  diacre  Sébastien,  il  lui 


Sfbullen  it 
nu.ll'iae, dia- 
cres do  Rome, 
leur  écrit  con- 
tr.<  la  condem* 
Dation  des 
Trois  •  Chapl* 
trcs. 


'  Tom.  V  Concil.,  pag.  558-559. 


'  Ibid.,  pag.  550. 


HISTOIRK  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


300 

dit  :  (1  Vous  '  avez  loué  publiquement  notre 
Judicatum  à  Constanlinoplp,  tlismt  en  pré- 
sence de  tout  le  clergé  qu'il  était  venu  du 
ciel,  et  que  vous  aviez  trouvé  à  Rome  les 
écrits  de  Tlicodore  de  Mopsuesle  remplis  de 
blasplièmcs.  Mal{,'ré  cet  aveu  et  l'altaclie- 
menl  que  vous  m'avez  témoigné  depuis  en 
continuant  de  faire  vos  fonctions  de  diacre, 
et  de  mander  à  ma  table  avec  Rustique,  vous 
avez  cliangé  de  conduite,  et  communiqué  ' 
avec  ceux  qui  ont  écrit  contre  le  Judicatum. 
D'où  il  suit  que  vous  êtes  comme  eux  excom- 
muniés suivant  les  canons.  Vous  vous  êtes 
encore  attribué  '  l'autorité  de  prêcher  ;  ce 
que  les  personnes  de  votre  ordi-e  n'ont  ja- 
mais fait  gans  la  permission  de  l'évêque. 
Vous  avez  écrit  faussement  par  toutes  les 
provinces  que  nous  avions  combattu  le  con- 
cile de  Chalcédoine  ;  d'où  il  est  arrivé  un 
grand  scandale,  parce  que  ceux  qui  ne  con- 
naissaient pas  votre  malice,  et  recevaient  vos 
écrits  comme  de  diacres  de  l'Eglise  romaine, 
y  ont  ajouté  foi  avec  simplicité.  Vous  avez  de- 
puis osé  avancer  dans  un  écrit  donné  à  l'Em- 
pereur, que  saint  Léon,  notre  piédécesscur. 
a  autorisé  les  erreurs  de  Théodore  de  Mop- 
sueste.  »  Vigile  ajoute  qu'il  les  a  attendus 
l'un  et  l'autre  dans  l'espérance  qu'ils  rentre- 
raient en  eux-mêmes  ;  qu'il  les  a  fait  avertir 
deux  fois,  sans  qu'ils  aient  voulu  l'écoutei-; 
que  contraint  d'en  venir  à  la  punition,  il  les 
déclare,  en  gémissant,  privés,  par  l'autorité 
de  saint  Pierre,  de  l'honneur  et  du  ministère 
du  diaconat,  leur  oll'rant  toutefois  le  pardon 
en  cas  de  résipiscence  de  leur  part,  à  la 
charge  qu'après  sa  mort  personne  ne  [Kjurra 
les  rétablir.  Il  parait  par  le  contenu  de  cette 
sentence  que  Sébastien  et  Rustique  avaient 


eu  égalemeut  part  à  l'écrit  préicnté  a  Justi- 
nieu  contre  les  J'rois-C/mpitres.  Il  n'est  pas 
venu  jusqu'à  nous  '. 

20.  Mais  nous  avons  celui  de  Rustique 
couti-e  les  acéphales  :  c'est  un  dialogue  qu'il 
composa  sur  ce  qu'il  avait  ouï  dire  de  la  dé- 
finition de  foi  du  concile  de  Chalcédoine, 
tant  à  Constantinople ,  qu'à  Alexandrie  et 
à  Antinous  dans  la  'Thébaïde.  Le  dessein  de 
l'auleur  est  de  montrer  qu'il  y  a  deux  natures 
eu  Jésus-Christ,  unies  en  une  seule  pei-son- 
ne,  en  sorte  que  c'est  le  même  qui  est  Fils  de 
Dieu  et  Fils  de  l'homme  :  c'est  ce  qu'il  prouve 
par  divers  raisonnements  et  par  plusieurs 
passages  de  l'Écriture  et  des  Pères.  Il  remar- 
que que  l'hérésie  de  Nestorius  ne  consiste  pas 
en  ce  que  cet  évèquea  appelé  Marie  mère  du 
Christ,  mais  en  ce  qu'il  a  nié  qu'elle  fût  mère 
de  Dieu  ;  et  que  pour  juger  de  ce  qu'il  y  a 
de  mauvais  dans  la  doctrine  de  Xestorius,  il 
faut  en  faire  un  parallèle  avec  les  lettres 
que  saint  Cyrille  a  écrites  contre  lui  ;  que 
n'y  ayant  jamais  eu  d'union  permanente  et 
indivisible  de  deux  natures  raisonnables  en 
une  seule  personne,  on  ne  peut  donner 
d'exemple  de  celle  qui  s'est  faite  de  la  nature 
himiaine  avec  la  nature  divine  en  Jésus- 
Christ;  que  l'incarnation  n'est  point  com- 
mune aux  Irois  personnes  de  la  Trinité,  mais 
à  celle  du  Fils  seulement  ;  que  le  Fils  ne  pro- 
cède pas  du  Saint-Esprit,  et  qu'on  '  ne  sait 
pas  bien  si  le  Saint-Esprit  procède  du  Fils 
comme  du  Père  ;  qu'on  ne  peut  '  point  dire 
que  l'on  adore  le  Fils  de  l'homme  avec  le 
Fils  de  Dieu,  la  coadoratiou  ne  se  disant 
que  des  trois  personnes  de  la  Sainte-Trinité  ; 
mais  que  comme  la  divinité  a  opéré  des  mi- 
racles par  la  chair,  elle  est  aussi  adorée  par 


Ici    Jlf    [ilt*lM. 

Ton..  X   niM. 
Ilr.  1*5.  JSO. 


'  Tom.  V  Concil.,  paR.  552.  —  »  Ibid.,  554. 

'  Àdjecislis  execranda  superbia,  qucc  nec  legun~ 
tur ,  nec  sine  sui  ponlificU  jussione  aliqunndo 
ordinis  vcslri  homines  prœsunipserunl  auclori- 
lalem  vobis  prœdicalionis  contra  omnem  consue- 
tvdinem  vindicare.  Ibid.,  pag.  554. 

*  Rustique  loinpiis.!  des  uolessurleconcile  (II!  Clial- 
cédoiue  où  il  établit  nue  couiparaisou  qui  seulTéru- 
dit  modcrue  entre  les  exemplaires  lalius  et  grecs  lie 
te  concile.  Ces  notes  ont  été  publiées  par  Baluze,  Coll. 
novaConcil. ,p:i(i.9:ii-lH2.  iJuin  l>ilra  les  a  reprodui- 
tes d'une  manière pluscorrecte  el  plus  complète (laus 
le  ijuatrièuic  volume  du  Spicikgium  solem.,  p.ip. 
192  ù  221.  11  parait  assez  vrai.-^emblable  que  Itusti- 
quc  Gt  ce  travad  de  couccrl  avec  Véréiuudus  dout 
il  cite  des  l'Xlrails.  Ces  notes,  au  nombre  de  sept 
'•eut  cioquaule,  louclicnt  à  tous  les  points  de  po- 
lémique, d'iiibloirc,  de  paléographie  que  pouvait 


soulever  nne  controverse  ardente  moins  d'un  siè- 
cle après  la  tenue  du  coucile  et  eu  présence  des 
originaux  conservés  daus  les  mou.istères  des  acé- 
mètes,  à  Couslautinoplc  et  à  Chalcédoine.  fL'e'di- 
teur.J 

'  Vtrum  tero  a  Filio  eodem  modo  qun  a  Paire 
procédai  SpirihisSanclus  uondum  perfeite  hulieo 
nalisfaclum.  lluslic.  Cont.  Aceph.  \»m.  \  liibl. 
Pat.,  p.ig.  ;n6. 

«  ^on  lied  dicere  :  Coadoralur  Filio  Dei  Filius 
hominis  :  non  nùm  coadoranlur  l'n  Sancla  Tri- 
nilale,  nisi  persona  lanlnmmodo ;  divinilas  vero 
aiiul  miracula  operala  esl  per  carnein,  sic  ado- 
ralur  per  carnem,  et  adoramus  omnes  crueein 
cl  per  ipsam  illum  cuju^  est  crux  :  non  lauien 
critcem  condorare  dicimur  Chrislo,  nec  per  hoc 
nna  esl  crucis  el  ChriHi  nnlura.  Ibid.,  pag,  369. 


[Vl"  SIÎXLE.] 


CHAPITRE  XXV.  —  FACUNDIIS,  TWSTIOUE,  RTC. 


30i 


la  cliiiir;  qu'on  prut  dire  qiio  nous  adorons 
Ions  la  croix,  cl  par  la  croix  celui  de  ([ui  est 
la  ci'oix;  mais  non  que  l'on  adore  la  croix 
avec  J(5sus-Ghrist,  parce  que  la  nature  de 
la  croix  n'est  pas  une  avec  la  nature  de  Jé- 
sus-Christ. <(  Nous  adorons  '  donc,  dil-il,  le 
corps  do  Ji'.sus-Clirist,  selon  qu'il  osl  l'crit 
dans  le  Psaume  xcviir  :  Ador-ez  l'cscnheau  de 
ses  pirds,  c'esl-A-dirc  la  terre  ;  non  que  nous 
adorions  le  corps  par  lui-même  ou  pour  lui- 
môme,  comme  s'il  était  Dieu,  mais  par  la 
chair  et  par  le  corps  ou  par  l'humanité  nous 
adorons  Dieu  qui  s'est  fait  chair.  Par  une 
semljlable  raison,  ri^£;lise  adore  sans  aucu- 
ne coiilradiction  par  toulc  la  terre,  la  croix 
et  les  clous  qui  ont  servi  d'instruments  à  la 
passion  de  Jésus-Christ,  ;\  cause  de  celui 
qui  a  été  percé  de  ces  clous  et  attaché  ù  cette 
croix.  ))  Rustique  fait  valoir  contre  les  acé- 
phales l'autorité  du  concile  de  Chalcédoine, 
disant  qu'elle  sutfit  seule,  ce  concile  ayant  ^ 
été  confirmé  de  toutes  les  Églises,  comme  il 
était  aisé  de  le  voir,  tant  par  les  lettres  cir- 
culaires sous  le  règne  de  Léon,  que  par  en- 
viron deux  mille  cinq  cents  lettres  des  évo- 
ques ,  sous  l'empire  de  Justin ,  après  le 
schisme  de  Pierre  d'Alexandrie  et  d'Acace 
de  Constantinople.  H  cite  un  discours  qu'il 
avait  fait  contre  '  les  acéphales  et  les  nesto- 
riens,  et  promet  *  un  traité  pour  la  défense 
des  Trois-Chapitres  ;  ce  qui  fait  voir  (jue  le 
Dialogue  dont  nous  parlons  est  antérieur  à 
ce  traité,  le  même  sans  doute  qu'il  présenta 


avec  Sébastien  !i  l'empereur  Justinien.  I^c 
Pitilnfiiie  contre  les  iici'/jliiiles  se  trouve;  dans 
V Aiilidiite  coii/ri'  tes  hérésies,  imiirinii-  à  Itàlc 
en  15^8;  dans  VJJérésiologie,  en  la  même 
ville  en  1550,  avec  les  Notes  de  Simlérus  ; 
dans  le  /leeneil  de  divers  éerits  des  Pi/res  leori- 
tre  Eiitijeiws  et  Nesttirius  à  Zurich  en  1571 , 
dans  le  tome  X  de  la  Bibliothèque  des  Pl;res 
h  Lyon  en  1677,  [dans  le  tome  XH  de  la  Bi- 
bliothèque de  Galland,  et  de  h'i  dans  le  tome 
lAVd  de  la  Patrologie  latine,  col.  1103  et 
suiv.].  Le  style  en  est  assez  net. 

21.  Victor  de  Tunes  dit  ''  que  les  d(''fen- 
seurs  des  Trois-C hojiitres,  s'étant  assemblés 
en  Rlyrie,  la  neuvième  année  après  le  con- 
sulat de  Basile,  c'est-à-dire  en  550,  ils  y  con- 
damnèrent Bénénatus,  évêque  de  la  pre- 
mière Justinienne ,  ennemi  déclaré  des 
Trois-Chupitres  ;  ce  qui  donne  lieu  de  croire 
qu'il  avait  publié  quelques  écrits  sur  cette 
matière  :  nous  n'en  avons  point  d'autres 
connaissances.  Il  ajoute  que  l'année  suivante 
551 ,  les  évoques  d'Afrique  condamnèrent 
dans  un  concile  le  pape  Vigile,  et  le  séparè- 
rent de  la  communion  catholique ,  parce 
qu'il  avait  condamné  les  Trois-Chupitres  ;  ils 
lui  otl'riront  toutefois  de  se  réconcilier  avec 
lui  au  cas  qu'il  se  repentît.  Nous  n'avons 
plus  les  lettres  qu'ils  envoyèrent  à  l'empe- 
reur Justinien,  par  Olympe  Magistrien,  dans 
lesquelles  ils  prétendaient  montrer  l'injus- 
tice de  la  condamnation  des  Trois-Chapilres. 


DénéiintUfl 
oit  avoir 
I  cniîlre  lu^ 
>U  .Cl,.|,i- 
I.  Lettres 
évéquos 
rriqiie. 


'  Nonne  scriplum  est  :  Et  aclorate  scabellum 
pedum  ejus?  hoc  vcro  est  terra.  Adoralur  enim 
corpus  quod  (le  terra  est  :  non  nt  per  semetipsum 
nut  proptcr  semetipsum  adorctur  ulDeus;  sed  ut 
per  corpus  et  per  carnem  sive  humanitatem  Deus, 
Verbo  qui  inhumunatus  est,  coadoretur...  et  clavos 
quibus  con/ixus  est  et  lignum  venerabilis  crucis, 
omnis  per  totum  munduin  Ecclesia  absque  ulla 
contradictione  adorât- \hiil.,  pag.  373. 

*  Sufjlceret  tibi  unica  auctorilas  synodi  univer- 


salis  quœ  numéro  superat  universas,  quœ  loties 
cunctarum  Ecclesiaruin  consona  sententia  confir- 
mata  est,  tam  per  encyclicas  epistolas  régnante 
Leone  quam'  per  llbellos  saccrdotum'  forsaii  duo- 
rum  millium  et  quingentorum,  imperantc  Jusli- 
no,  post  schisnia  Pétri  Alexaiidrini  et  Àcacii 
Constantinopolitani.  Ibid.,  pag.  382. 

'  Ibid.,  pag.  377. 

*  Ibid.,  pag.  331. 

5  Victor.  Tun.,  in  Chron.  ad.  an.  550. 


302 


HISTOIRE  GÉNÉRAI.E  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


CIIAPITUE    XXVI. 

Victor  de  Tunones  15661,  Libérât,  diacre  de  Carthage  [vers  556] 
Victor  de  Capone  [550]. 

[Écrivains  latins.] 


vkior  àt  1.  Yicloi-  de  Tunones  ou  Tunes  était  lui- 
fenstor  '  dw  mêmc  uH  zôlé  défenseur  des  Trois-C/iapi/res. 
ire...sesi£riis.  jj  racontc  '  que  la  quinzième  année  d  après 
le  consulat  de  B  .sile,  c'est-à-dire  en  .536,  il  fut 
Ijattu  et  mis  en  jirison,  puis  relégué  dans  le 
monastère  de  Mandia,  ensuite  à  Egée,  île  de 
Mauritanie,  en  troisième  lieu  à  Alexandrie, 
avec  Théodore  de  Cabarsusi,  qui  avait  pris 
comme  lui  et  plusieurs  autres  évèques  d'.Afri- 
que,  la  défense  d'Ibas  et  de  Théodore!.  Vic- 
tor et  Théodore,  étant  arrivés  à  Alexandrie, 
furent  mis  d'abord  dans  la  prison  prétorien- 
ne, puis  dans  celle  du  cliâteaude  Dioclétien. 
Ils  en  furent  tirés,  et  après  des  conféren- 
ces dans  le  prétoire  pendant  quinze  jours  de 
suite,  on  les  envoya  en  prison  dans  un  mo- 
naslèie  de  l'ordre  de  Tabcnnes,  qui  était  ù 
Canope,  à  douze  milles  d'.Uexandrie.  Saint 
Isidore  de  Séville  *  atlrihue  à  Victor  de  Tu- 
nes une  Chronique  qui  commençait  à  la  créa- 
tion du  monde  et  finissait  à  la  première  année 
du  règne  de  Justin-Ie-Jeune,  c'est-à-dire  en 
5f)G.  Nous  n'en  avons  plus  qu'une  partie  qui 
commence 'au  dix-huitième  consulat  doThéo- 
dose-le-Jeune,  c'est-à-dire  à  l'an  -444,  où  saint 
Prosper  avait  liiiila  sienne.  Victor  s'applique 
particulièrement  à  rapporter  ce  qui  appar- 
tient à  l'histoire  de  l'hérésie  eutychéenne,  et 
l'afTaire  des  Trois-Chapitres;  mais  il  met  aussi 
les  événements  considérables  arrivés  dans 
l'État  ou  dans  l'Éghsc,  en  les  plaçant  selon 
l'ordre  des  consulats.  Il  dit  en  parlant  de  la 
persécution  qu'Hunéric,  roi  des  Vandales, 
excita  en  Afrique,  que  ce  tyran  lit  couper  la 
langue  à  uu  grand  nombre  de  confesseurs, 
qui  ne  laissèrent  pas  de  consers'er  l'usage  do 
la  parole  [lendant  tout  le  temps  qu'ils  vécu- 
rent, et  que  la  plupart  d'entre  eux  étaient 

I  venus  à  Constantinople,  dont  les  habitants 

pouvaient  rendre  compte  de  cette  merveille. 

1  II  raconte  qu'un  arien,  nommé  Ulympius, 


blasphémant  dans  un  bain  d'eau  froide  con- 
tre la  Sainte-Trinité,  y  fut  consumé  par  un 
feu  du  ciel  dirigé  par  le  ministère  d'un  ange; 
qu'un  évoque  de  la  même  secte,  ayant  osé 
changer  la  forme  du  baptême  en  disant  :  Bar- 
las  le  baptise  au  nom  du  Père/xir  le  Fils  dans  le 
Saint-Esprit,  l'eau  qui  devait  servir  au  baptê- 
me disparut,  et  le  vase  dans  lequel  elle  était  se 
cassa;  ce  que  voyant  le  catéchumène  courut 
à  ri'glise  catholique  et  y  fut  baptisé  ;  qu'à 
Alexandrie  et  dans  toute  l'Egypte  Dieu  auto- 
risa par  un  miracle  les  décrets  du  concile  de 
Chalcédoine,  en  permettant  que  ceux  qui  ne 
voukiient  pas  le  recevoir  fussent  possédés 
des  démons,  qui  les  agitaient  si  violemment, 
que  privés  de  l'usage  de  la  parole  humaine, 
ils  jappaient  comme  des  chiens,  et  se  man- 
geaient les  mains  et  les  bras.  Il  donne  tout 
entière,  de  même  que  le  diacre  Libérât,  la 
lettre  que  Vigile  écrivit  à  Théodose  d'Alexau- 
drie,  à  Anlhime  de  Constantinople  et  à  Sé- 
vère d'Antioche,  où  il  leur  déclarait  qu'il  te- 
nait la  même  foi  qu'eux,  en  les  priant  dé  la 
tenir  secrète,  et  au  contraire  de  feindre  qu'il 
leur  était  suspect.  Il  met  la  naissance  du 
Sauveur  en  l'année  43  de  l'empire  d'.Vuî-niste, 
comptant  depuis  cinq  cent  vingt-sept  ans  jus- 
qu'à la  première  année  du  règne  de  Jiislin- 
le-Jeuue  où  il  finit  sa  Chronique.  Ainsi  il  y  a 
de  la  liiirércnce  entre  son  calcul  cl  le  notre, 
puisque  nous  mettons  le  commencement  ;du 
règne  de  ce  prince  en  566  auquel  Jusiinien 
son  prédécesseur  mourut  le  1  \  novembre. 
Nous  avons  la  Chronique  de  Victor  dans  les 
Anciennes  le^vns  de  Canisius  imprimées  à  In- 
golslad  en  1600  et  années  suivantes,  depuis 
à  Anvers  en  172.").  dans  le  Trésor  des  temps  de 
Scaliger,  [dansle  touieVIIde  Galland,  et  delà 
dans  le  tome  LXVIII  de  la  Patrologie  avec  la 
notice  de  (ialland.] 
2.  En  53o,  Réparât,  successeur  de  Boniface 


LlUrtl, 


'    VicUir  Tuu.  in  Citron,  ad  an.  556. 
*  Isidor.  De  Vir  illusl.  cap.  xxxviii. 


'  Victor  Tunou.,  lom.  1  Leclion.  Canis.  eUit.  An- 
tuerp.  au.  1723,  pag.  32i, 


[vi"  SIÈCLE.]     CHAPITRE  X\\\.  —  VICTOR  DR  TUNONKS,  LIRÉRAT,  ETC. 


303 


ier».ioCar.   (laiis  Ic  sië.LfC  dc  Ciii'Hiaf^e,  p|  les  autrns  (5vû- 
qiu's  d'Ariiquc  an  uombii;  de  deux  ceiil  dix- 
sept,  s'étaiit    assemblés  pour   travailler  au 
rétalilissement  de  la  discipliue,  crurent  qu'ils 
devaient  avant   toutes   clioses   consulter  le 
Saint-Siège  sur  la  manière  dont  on  devait  re- 
cevoir les  évèqucs  ariens  (pu  se  faisaient  ca- 
tholiques. Ils  d('']nilèrciit  ù  cet  ellct  deux  évo- 
ques, Caïus  et  Pierre,  et  un  diacre  do  l'l']glise 
de  Cartilage  nommé  Libérât.  Celui-ci  avait  ' 
déj;\  été  à  Rome  du  temps  de  l'aflaire  des 
moines  acémMcr.jSousle  pontificatdeJeauII. 
Il  fît  beaucoup  d'autres  voyages  depuis,  ;\  l'oc- 
casion des  Trois-Ckapitres,  dont  il  avait  pris 
la  défense;  ce  qui  lui  donna  lieu  de  recueillir 
quantité   de   monuments   qui   concernaieut 
VJ/istoire  de  l'/Icrcsie  dc  Nestorius  et  d' Euty- 
c/ics,  et  d'apprendre  plusieurs  faits  très-iuté- 
ressants,  soit  '  dans  les  conversations  parti- 
culières qu'il  eut  avec  des  personnes  d'auto- 
rité, soit  par  la  lecture  des  Actes  des  conci- 
les, soit  par  les  lettres  des  évéques  dont  il 
trouva  le  moyen  d'avoir  des  copies.  Il  eut 
aussi  communication  d'une //(s^iVe  ecclésias- 
tique traduite  nouvellement  du  grec  en  la- 
tin. Ce  fut  à  Alexandi'ie  qu'il  la  trouva,  mais 
il  ne  dit  point  qui  en  était  l'auteur.  De  retour 
de  ses  voyages  et  délassé  de  ses  fatigues,  il 
profita  dc  son  loisir  pour  faire  part  au  public 
des  connaissances  qu'il  avait  acquises,  et  en 
donna  une  suite  sous  le  titre  àc  Mémoire,  ou 
A' Abrégé  de  l'histoire  de  l'hérésie  àe  Nestorius 
et  d'Eutychès.  11  la  commence  à  l'ordination 
de  Nestorius,  c'est-à-dire  en  42  i,  et  la  con- 
duit jusque  vers  l'an  333.  Le  style  eu  est  très- 
simple  ,  et  même  inégal ,  parce  que  l'auteur 
s'assujettit  souvent  à  copier  les  auteurs  grecs 
et  latins  dont  il  avait  fait  des  extraits.  Mais  elle 
n'en  est  pas  moins  intéressante  à  cause  d'une 
quantité  de  faits  qu'on  ne  trouvepoint ailleurs. 
\n«iTse  de       3.  Elle  est  divisée  en  vingt-quatre  cliapi- 
iiiniiiuié:   très,  y  compris  la  préface.  On  v  voit  que  Nes- 

nioire      ou  f  -J  L  r  u  ±  ^ 

o'nc'ii^T'  torius  avait  puisé  les  principes  de  son  héré- 
up.  LIT.  gig  dans  celles  de  Paul  de  Samosates  et  d'A- 
pollinaire; que  le  prêtre  Anastase,  son  syn- 
celle  et  son  confident,  prêchant  un  jour  à 
Constantinople,  scandilisa  toute  l'assemblée 


en  disant  qu'on  ne  devait  pas  nommer  Marie, 
mère  de  Dieu;  que   Nestorius  fut  le  seul  qui 
ne  voulut  point   condamner  ce  blasphème; 
qu'au  coulraire  il  l'autorisa  jtar  ses  discours,     c.p.v.n. 
ce  qui  occasionna  de  grandes  disputes  dans 
l'Eglise,  et  la  tenue  du  concile  d'Éphèse  où 
Nestorius  fut   condamné    et  d(;posé.   Libé- 
rât parle  ensuite  de    la  division  qui  survint 
entre  saint  Cyrille  et  Jean   d'Anlioche,    de 
l'ordination  de  Maximien  de  Constantinople, 
et  de  la  réunion  de  Jean  et  des  autres  orien- 
taux  avec  saint  Cyrille;  des  lettres  que  ce  i. 
dernier  écrivit  pour  montrer  l'unité  de  Jésus- 
Christ  en  deux  natures;  des  mouvements  que 
les  défenseurs  de  Nestorius  se  donnèrent  au- 
près des  évêques  d'Arménie  pour  faire  con- 
damner les  écrits  et  les  personnes  de  Diodorc 
de  Tarse  et  de  Théodore  de  Mopsueste;  de 
ce  que  saint  Proclus,    successeur  de  Maxi- 
mien dans  le  siège  de  Constantinople.  répon- 
dit aux  Arméniens  qui  l'avaient  consulté  sur 
les  écrits  de  Théodore;  des  lettres  que  Jean 
d'Antioche  écrivit  pour  la  défense  de  cet  évo- 
que; de  l'accusation  formée  contre  Ibas,  évo- 
que d'Édessc,  par  ceux  de  son  clergé,  et  de 
leur  réconciliation  faite  par  le  ministère  de 
Photius  de  Tyr  ,   et  d'Eustathe  de    Béryte 
qu'on  leur  avait  donné  pourjuges.  Après  quoi       xi.xtih. 
il   marque  la  naissance   de  l'hérésie   euty- 
chéenne,  ses  progrès,  sa  condamnation  dans 
le  concile  de  Constantinople  sous   Flavien, 
qui  en  était  évêque  ;  les  violences  de  Dios- 
core  dans  le    brigandage  d'Éphèse  pour  la 
soutenir,  et  comment  elle  fut  anathématisée 
à  Chalcédoinc  avec  son  auteur  et  ses  parti- 
sans. Ensuite  il  entre  dans  le  détail  des  trou- 
bles qu'ils  causèrent  dans  l'Église  d'Alexan- 
drie infectée  plus  qu'aucune  autre  de  l'héré- 
sie eutychécnne.  Il  dit  aussi  quelque  chose 
de  VHénotique  de  Zenon,  et  des   persécu- 
tions que  Macédonius  souffrit  de  la  part  de 
l'empereur  Anastase. C'étaitl'usage 'à  Alexan- 
drie que  le  nouvel  évêque  veillât  auprès  du 
corps  de  son  prédécesseur,  mît  sa  main  droile         '"'  "' 
sur  sa  tête,  l'ensevelit  lui-même;  puis  met- 
tant à  son  col  le  pallium  de  saint  Marc  '  prit 
possession  de  son  siège.  Timothée  étant  mort. 


'  Liber,  m  Brev.,  cap.  xi. 

-  Id.  Prœfat.  in  Brev.,  toia.  V  Concil.,  pag.  740. 

'  Consuetudo  qiiidem  est  Alexandriœ  illum  qui 
defuncto  succedii  e.rcubias  super  defuncti  corpus 
agere,  manumque  dexieram  ejus  capili  sua  impo- 
nere,  et  sepulto  manibus  siiis  accipere  colla  suo 
beati  Marci  'pallium,  et  tune  légitime  sedere.  Li- 
bérai, in  Brev.,  cap.  xx. 


*  Le  tome  III  du  Spicilegium  romanum,  pag. 
7H-72I;  contient:  i"  un  fragment  de  la  lettre  écrite 
à  Sévère,  patriarclie  d'Autiocbe  ,  au  temps  de  sa 
promotion  au  patriarcbat  d'Alexandrie  ;  2»  une  au- 
tre lettre  du  même  au  peuple  d'Alexandrie  pendant 
son  exil  ;  3"  une  autre  letfre  du  même  sur  la  Tri- 
nité et  contre  les  ariens.  Ces  opuscules,  dit  M.  Bon- 
uetty,  sont  remplis  des  erreurs  monopbysites,  mais 


304 


HlSTOllŒ  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

d'avec  l'intilulation  de  la  lettre  dont  parle  le 


Théodose'  fut  ordonne  aussitôt  en  sa  place; 
mais  le  peuple  qui  n'avait  point  eu  de  part  h 
son  élection,  l'oinpi'clia  de  faire  les  funérail- 
les, le  chassa  del'Kiilise,  et  intronisa  Gaïen, 
qui  était  de  la  secte  dos  phanlasiastcs  ou  in- 
corruptibles. A  Conslantinoplc,  le  patriarche 
Epipbane  étant  mort,  l'impératrice  Théodora 
fit  transférer  sur  ce  siège  Antliime,  évoque 
de  Tréliizondc,  ennemi  du  concile  de  Chalcé- 
doine  de  même  que  cette  princesse.  Le  suc- 
cesseur de  Boniface  dans  le  Saint-Siège  fut 
Jean  II,  surnommé  Mercure,  h  qui  succéda 
Agapct,  archidiacre  de  l'Église  romaine.  11 
oliligea  Anthime  de  quitter  l'Église  de  Cons- 

Cr-  ""•  lantinople,  ii  qui  il  donna  pour  évèque  Men- 
nas,  en  le  consacrant  de  sa  propre  main 
dans  la  Kasilique  de  Sainte-Marie.  Quand  on 
eut  appris  à  Home  la  mort  du  pape  Agapet 
arrivée  dans  le  temps  qu'il  se  disposait  à  y 
retourner  de  Constanlinople.  on  lui  donna 
""'  pour  successeurSilvérius;  mais  l'impératrice 
Théodora  qui  favorisait  toujours  Anthime,  fit 
choisir  pour  pape  Vigile,  à  la  charge  qu'a- 
près sonélection  il écriraità  Anthime,  àTiiéo- 
dose  d'.Mexandric  et  à  Sévère  d'Antioche. 
Libérât  raconte  tout  ce  qui  se  passa  il  l'occa- 
sion de  l'élection  de  Vigile  de  la  part  de  l'im- 
pératrice, et  de  Bélisaire  qui  était  chargé  de 
la  procurer,  et  il  joint  ;\ce  récit  la  lettre  de 
Vigile  à  ces  trois  évoques  acéphales.  Nous 

voyM  r«ru-  l'avons  rapportée  ailleurs.  Nous  remarque- 
cie  vifiie.  j.Qjjg  seulement  ici,  que  c'est  sans  raison  que 
l'on  a  prétendu  que  le  sixième  concile  géné- 
ral a  déclaré  supposée  par  les  hérétiques  eu- 
tychéens  la  lettre  que  Libérât  rapporte  sous 
le  nom  de  Vigile.  Celle  dont  parle  le  concile 
était  -  adressée  ù  Jusiinien  et  à  Théodora; 
au  lieu  que  la  lettre  rapportée  par  Libérât  ' 
est  adressée  aux  seigneurs  et  christs,  Sévère, 
Anthime  et  Théodose,  ainsi  qu'on  lit  dans 
Victor  de  Tunes.  Libérât  ne  nomme  point  ces 
trois  évèques  dans  l'inscription  de  la  lettre. 
Il  met  simplement  :  Aux  seigneurs  et  christs; 
ce  qui  fait  toujours  une  ditlërence  essentielle 

on  y  trouve  lin  1>i\tu  passapte  sur  la  présence  réolle. 
"  Si  (luelqu'un  dit  qu'il  y  a  passion,  mort  ou  cor- 
niplioii  «I.ins  11' coiiis  Pl  11!  pn'i'ii'iix  siug  du  Clirisl 
que  ijous  élevons  .«ur  l'autel  lorsque  uous  en  ac- 
coniplisgous  la  litiir(,'ie  en  roiiiiuémoratiou  île  sa 
niort  et  de  sa  jiassion,  qu'il  suit  aiiathèuie  :  Si  quis 
dixerit  m  sacrn  corpore  pretiosoque  saitfiuine 
quie  super  allarc  erlnlUimis  duin  ipsoriim  lilnr- 
ijiam  perficimus,  mnricm  ijus  oc  passionem  com- 
meinordiiles  passioiiem  nui  murtefii,  aul  corrup- 
lioncm  iiilcrvenire  nnalhema  sil.  l'uj/.  710.  Ces 
passages  soûl  reproduits  au  tome  Lxxxvi  de  la  Pa- 


sixiènie  concile.  A  quoi  il  faut  ajouter  que 
Libérât  avait  dit  auparavant  que  Vigile  s'é- 
tait engagé  à  Théodose,  i\  .Xnthime  et  A  Se-  c»p. ^im 
vère.  Théodose  d'Alexandrie,  ayant  été  en- 
voyé en  exil,  Paul,  abbé  de  l'ordre  de  Taben- 
nes,  fut  élu  pour  lui  succéder.  Le  diacre  Pe- 
lage qui  le  connaissait  pour  orthodoxe  pril  sa 
défense  auprès  de  l'Empereur,  contre  quol- 
ques-ims  des  moines  qui  le  méprisaient.  11 
n'occupa  pas  longtemps  le  siège  d'.\lexan- 
drie,  ayant  été  exilé  à  Gaza  en  Palestine,  sous 
prétexte  qu'il  avait  eu  part  au  meurtre  du  dia- 
cre Psoïus,  dont  toutefois  Arsène  fut  con- 
vaincu. Zoïlefut  ordonné  à  sa  place.  Quelque 
temps  après,  le  diacre  Pélageque  l'Empereur 
avait  envoyé  à  Jérusalem,  étant  de  retour  à 
Constanlinople,  des  moines  de  cette  ville  le 
vinrent  trouver  avec  des  articles  extraits  des 
livres  d'Origène,  pour  l'engagera  se  joindre 
il  eux  pour  en  obtenir  la  condamnation  au- 
près de  Justinien.  Pelage  qui  n'aimait  point 
Théodore  de  Césarée,  parce  qu'il  était  un 
des  défenseurs  d'Origène,  s'employa  volon- 
tiers, et  obtint  avec  Mennas  de  Constanlino- 
ple une  sentence  contre  Origène,  et  les  en- 
droits de  ses  écrits  qu'on  avait  déférés.  Elle 
fut  envoyée  an  pape  Vigile,  à  Zo'ile,  patriar. 
che  d'Alexandrie,  à  Ephrem  d'.\ntioche,  et 
à  Pierre  de  Jérusalem,  qui  y  souscrivirent 
tous.  Théodore  de  Césarée  pour  venger  Ori- 
gène, entreprit  défaire  condamner  Théodore 
de  Mopsucste  qui  avait  beaucoup  écrit  contre 
Origène.  Il  allait  cet  effet  voir  Justinien,  qu'il  vie 

trouva  occupé  à  écrire  contre  les  acéphales; 
il  en  détourna  ce  prince,  lui  disant  qu'il  y 
avait  un  moyen  plus  court  de  les  ramener. 
«  Ce  qui  les  offense  le  plus,  dit-il,  dans  le 
concile  de  Chalcédoine,  c'est  qu'il  a  reçu  les 
louanges  de  Théodore  deMopsuesIe,  et  qu'il 
a  déclaré  orthodoxe  la  lettre  d'Ibas,  quoi- 
que nestorienne.  Si  l'on  condamne  Théodo- 
re avec  ses  écrits  et  la  lettre  d'Ibas,  ils  rece- 
vront le  concile  comme  corrigé  et  purgé  de 

Irnlngie  grecque,  ool.  277-216,  avec  quelques  frag- 
ments tirés  de  Uiillanil  et  de  Mai.  (L'éilitcur) 

'  Aiuilhtntn  libro  qui  dicilur:  .Menna!  nd  Vigi- 
liuin,  e/  qui  eum  /inxenml  sive  scripscrunl:  ana- 
tlicma  UlicUis  qui  dicunlur  facli  fuisse  a  Vigilio 
ad  Justiuidnum  cl  ad  Tlieodoram  divo"  memoriœ 
qui  suiil  dcuiDiisIrnli.  Art.  îi,  sext.  syiiodi. 

'  Doiiiiuix  et  chrislis  Dei  Salialuris  noslri 
cliariliile  cuiijunrlis  fralrihus  Theodosin,  Anlhi- 
iiin  et  Sereio  epinriipis,  Vigilius  episcopus.  Victor 
Tuii.,  iii  Citron. 

»  Sigeb.  De  Viris  illusl.,  cap.  xx. 


[vr  SIÈCLE.]       CFIAI'lTItK  XXVI.  —  VICTOll 

ce  (lu'il  avilit  (le  ([('rccliicux.  d  l/niiipcrcui' 
<[iii  110  s'a|)('rcevait  pas  di;  l'arlilicc,  doima  ;\ 
li'urs  prières  un  étlit  pour  la  coiulaiiinalion 
tics  'J'ritis-Chapitres,  oiirtMiiiant  dans  cot  odit 
Tlit'oddi'ot ,  ;\  cause  de  sou  c'cril  contre  les 
an;illi('Uialisuies  de  saint  Cyrille,  avec  Ilias 
et  Tlii'odore.  Libérai  termine  Ihsun /lis/ dire, 
disant  qu'il  était  inutile  de  s'élciulre  sur  les 
récompenses  que  l'on  donnait  à  ceux  qui  ap- 
prouvaient la  condamnalion  des  Trois-Chn- 
pitrcs,  et  les  mauvais  traitements  que  l'on 
faisait  souH'rir  à  ceux  qui  refusaient  de  les 
condamner.  Il  ajoute  seulement,  que  le  scan- 
dale lui  tel,  ([ue  Théodore  de  (lapiiadoce  di- 
sait lui-même  depuis,  que  Pelage  et  lui  mé- 
ritaient d'être  brûlés  vifs  pour  l'avoir  excité. 
Nous  avons  deux  éditions  du  Ih-eviuviuiii  de 
Libérât;  l'une  à  Paris  en  1073  avec  des  notes 
et  des  dissertations  du  père  Garnier;  l'autre 
dans  le  tomeV  des  Conciles  du  père  Labbe, 
page  740.  M.  Crabbe  l'a  donné  aussi  avec  un 
supplément  ou  appendice  ilans  le  tome  11  de 
son  édition  des  Conciles,  page  121 .  On  ne  trou- 
ve point  ailleurs  cet  appendice.  [Galland  dans 
son  tome  XH  a  reproduit  le  Bi-eviarii/m,  il  est 
aussi  dans  le  toui.  LXVUI,  col  903  et  suiv.de  la 
Palrologie  latine,  avec  notes  du  pèreGarnier.] 
Victor,  fv,-.      4.  Nous  ne  savons  autre  chose  de  Victor, 

qiid    de     (-a-  ^ 

nïL  ""'  sinon  •  qu'il  était  évêqne  de  Capouc,  et  qu'il 
composa  un  Cycle  pascal,  dans  lequel  il  pré- 
tendait que  Victorius  s'était  trompé,  en  mar- 
quant la  fêle  de  Pâques  de  l'an  433,  le  17 
d'avril,  au  lieu  qu'on  devait  la  céb'brer  le 
23  du  même  mois.  Le  vénérable  Bède -nous 
a  conservé  quelques  fragments  du  Cycle  de 
Victor.  Cet  écrivain  ayant  trouvé  par  hasard 
une  Harmonie  des  évangiles,  douta  d'abord 
si  elle  était  de  Tatien  ou  d'Ammonius;  mais 
il  se  déclara  pour  ce  dernier,  sur  des  raisons 
qui  n'étaient  point  solides  '.  Trouvant  quel- 
que embarras  dans  cette  Harmonie,  Victor  y 
ajouta  certaines  mar(jues  pour  distinguer  ce 
qui  appartient  à  chaque  évangile  ,  et  ce  qui 
est  dit  par  un  ou  par  plusieurs.  C'est  ce  qu'il 
explique  lui-même  dans  la  préface  qu'il  a 
mise  à  la  tète  de  cette  Harmonie,  que  l'on  a 
imprimée  dans  le  tome  II  de  la  Bibliottièqae 
des  Pères  à  Lyon  en  1677  [et  dans  la  Palro- 
logie latine,  tome  LXVIll.]  On  attribue  à  Vic- 
tor de  Capoue  la  traduction  de  quelques  pas- 
sages de  l'Épître  de  saint  Polycarpe,  qui  se 

'  Sigeb.  De  Viris  illust.,  cap.  xx. 
'  Beda,  De  Rat.  temp.,  cap.  xux,  et    tom.  11  De 
jEquinoct.  vernali. 


IH-:  Tl'XoXKS,  I.lUKll.Vr,  etc.  303 

trouvcul  dans  une  Chaîne  sur  les  quatre 
l'À'angiles,  ipie  Feiiard<!nt  avait  manuscrite. 
Il  les  en  a  tirés  pour  les  mettre  à  la  lin  du 
troisième  livre  de  sain!  Irént'e  contre  /rs  hé- 
résies, dont  il  donna  une  édition  à  Paris,  en 
l.">73.  [Ces  ])assages  se  trouvent  au  tome  de 
la  /'ii/nildi/ic,  ci-dessus  indiqué.  A  la  fin  du 
mèiu(!  volume  on  trouve  un  fragment  sur  le 
Cycle  jiascal ,  d'après  Uède  *.  Le  père  d(Jm 
Pitra  a  publié  au  tome  I  du  Spicilegiurn  so- 
Icsmense,  pag.  203  et  suiv.,  plusieurs  frag- 
ments inédits  des  ouvrages  de  Victor  de  Ca- 
poue ;  il  y  en  a  qui  sont  tirés  de  son  ouvrage 
intituli';  :  Schiilies  sur  la  Genèse,  qui  avait  été 
composé  à  l'imitation  d'Origène.  Parmi  ces 
fragments,  l'on  remarcpie  deux  passages 
de  saiut  Polycarpe,  extraits  de  son  livre  des 
Réponses ,  quelques  extraits  d'Origène,  qui 
nous  signalent  quatre  nouveaux  ouvrages 
de  ce  Père,  savoir  :  1°  un  ouvrage  intitulé  : 
n-zpifiii'^v  qui  contenait  au  moins  quatre  li- 
vres ;  2°  le  livre  de  la  Pùque  ;  3°  VEpitre  à 
Gobar  intitulée  la  onzième;  i"  l'Epître  à  saint 
Firmilien,  évêqne  de  Césarée.  Saint  Basile 
est  cité  pour  un  sermon  tout  à  fait  inconnu 
sur  les  dogmes  et  pour  un  autre  pareille- 
ment inconnu  sur  ces  paroles  :  Igneni  veni 
mittei'e  in  terrain.  On  trouve  ensuite  vingt- 
trois  fragments  de  Diodore  de  Tarse  sur 
l'Exode,  des  scholies  extraits  de  différents 
sermons  de  Sévérien  de  Cabales,  un  court 
extrait  du  livre  (/;/  Paradis  ou  des  Paroles  des 
vieillards  sur  l'humilité  de  Joseph,  et  enfin  un 
autre  fragment' sans  nom  d'auteur. 

Dom  Pitra  donne  ensuite  des  extraits  du 
livre  de  Victor  de  Capoue,  intitulé  :  Liber 
reticvlus  seu  de  uvca  Noe.  C'est  un  ouvrage 
tout  à  fait  nouveau,  dont  le  nom  même  était 
inconnu  et  ditUcile  à  comprendre.  Ces  frag- 
ments sont  suivis  d'une  Chaîne  sur  les  quatre 
évangélistes  ;  le  savant  bénédictin  pense  ce- 
pendant que  cette  Chaîne  est  plutôt  de  Jean, 
diacre,  que  de  Victor  de  Capoue.  Les  Capi- 
tules sur  la  résurrection  ont  été  cités  par  Jean, 
diacre,  et  par  l'abbé  Smaragde.  On  en  trou- 
ve un  extrait  dans  le  Spicilége,  pag.  34  de 
la  Préface.  Le  diacre  Jean  rapporte  un  frag- 
ment assez  long  sur  le  cycle  pascal,  com- 
posé par  Victor  de  Capoue;  on  le  trouve 
pag.  290  et  suiv.  du  Spicilége.] 


'  Voyez  tom.  Il,  pag.  492. 

*  Beda  vener.  De  Rat.    temp.,  cap.  xlix.  (L'édi- 
teur.) 


XI. 


20 


306 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


CHAPITRE  XXVIl. 

Saiut  Fortunat  [avant  l'an  576],  Easèbe  évêque  d'Antibes  [avant  l'an  573], 

saint  Germain  évêqne  de  Paris   [576] ,   Mérérius  évêqne 

d'Angonlême  [vers  l'an  570]. 

[ÉcrivainB  latins.l 


SainI    Fnt- 
luual,  É\^ue. 


i.  On  donne  communément  le  titre  d'évê- 
qiie  'A  'saint  Fortunat ,  quoiqu'on  ne  sache 
ni  le  lieu*  ni  le  temps  de  son  épiscopat.  Il 
était  '  né  à  Verceil,  d'où  il  passa  en  France, 
où  il  lia  amitié  avec  saint  Germain,  évêque 
de  Paris.  On  le  fait  auteur  de  la  Vie  de  saint 
Marcel,  évêque  de  cette  ville  ;  d'autres  la 
croient  de  Fortunat,  évêque  de  Poitiers  : 
rien  l.'i-dessus  de  bien  assuré.  Saint  Gré- 
goire de  Tours  la  cite'  sans  en  nommer  l'au- 
teur, au  lieu  ({n'en  parlant  de  celles  de  saint 
Séverin  de  Bordeaux,  de  saint  Aubin  d'An- 
gers, de  saint  Maurille  et  de  saint  Germain 
de  Paris,  il  en  fait  '  honneur  h  Fortunat  de 
Poitiers.  Saint  Grégoire  ne  croyait  donc  pas 
que  la  Vie  de  saint  Marcel  fût  de  p-ortunat 
de  Poitiers;  aussi  le  style  n'en  est  pas  le 
même  que  des  autres  vies  dont  nous  ve- 
nons (le  palier.  Jean  Muuérat,  dans  ses  notes 
sur  le  Martyrologe  d'Usuard  qu'il  donna  en 
l-iao,  marque  qu'il  passait  pour  constant, 
de  son  temps,  qu'elle  était  de  Fortunat,  né 
A  Verceil.  Il  la  composa  aux  instances  de 
saint  Germain,  évoque  de  Paris,  à  qui  il  la 
dédia.  Les  miracles  en  occupent  la  plus 
grande  partie,  et  les  faits  qu'il  y  raconte  ne 
sont  fondes  que  sur  ce  qu'il  en  avait  appris 
par  tradition.  On  la  trouve  dans  Surius  au 
1"  de  novembre.  La  conformité  du  style 
lui  a  fait  aussi  attriljuer  le  premier  ,livre 
de  la  Vie  de  saint  Ililuire,  évoque  de  Poi- 
tiers. On  en  donne  une  autre  raison  assez 
plausible ,  c'est  l'inexactitude  de  l'auteur 
dans  le  récit  de  plusieurs  faits  qui  étaient 
d'eux-mêmes  dignes  de  remarque.  Car  on 
n'y  dit  rien  du  concile  de  Bcziers,  de  l'af- 
faire de  Saturnin  d'Arles,  ni  de  ce  que  saint 
Hilaire  lit  à  Milan,  après  avoir  rétabli  la  foi 


dans  les  Gaules.  Ces  omissions  sont  plus 
d'un  étranger,  qui  ne  savait  les  choses  qu'à 
demi,  que  d'un  homme  qui  avait  demeuré 
longtemps  ;\  Poitiers,  et  qui  en  avait  été  fait 
évêque,  comme  nous  le  dirons  de  Venance 
Fortunat.  A  l'égard  du  second  livre,  qui  n'a 
aucune  liaison  avec  le  pi-emier,  il  est  de  Ve- 
nance Fortunat,  qui  le  composa  vraisembla- 
blement pour  suppléer  ft  ce  qui  manquait 
dans  le  premier  :  celui-ci  est  dédié  à  Pas- 
cencc,  évêque  de  Poitiers,  en  557,  à  la  priè- 
re de  qui  il  avait  été  composé.  C'est  au  mê- 
me évêque  que  Venance  Fortunat  adressa  le 
second  livre.  On  les  trouve  l'un  et  l'autre 
dans  la  nouvelle  édition  do  saint  Hilaire. 
dans  Surius  et  dans  Bollandiis,  au  3  janvier 
[et  dans  le  tome  LXXXVIII  de  la  Patrologie 
latine,  col.  -437,  d'apI■^s  l'édition  des  œuvres 
de  saint  Hilaire.  publiée  ;^  Paris,  en  1603.] 

2.   Bollandus  nousa  donné  au  22  du  même     eo^^i.jm. 
mois,  l'iiistoire  de  la  translation  des  corps  î^'itriÛ. 
des  saints  Vincent,  Oronce  et  Victor,  mar-    Boiunj.,  u 
tyrisés  ii  Gironne,  en  Espagne,  dans  la  pcr-  oir'pii.sM', 
sécution  de  Dioclétien.  Cette  histoire  poile 
le  nom  d'Eusèbe,  qui  se  dit  successeur  d'E- 
lhi''riiis,  évêqne  d'Anticias  ou  Anlimia.  Dom 
MabiUon  '  croit  <[ue  c'est  Antibes,  et  son 
opinion  parait  d'autant  mieux  appuyée  que 
l'on  trouve  un  Élliérius,  évêque  d'Antibes, 
qui  souscrivit  au  concile  qui  se  tint  à  Or- 
léans, en  5il ,  et  que  le  mot  .1  ntimid'  a  beau- 
coup ]>liis  de  rapport  rt  Antibes  qu'à  toute 
autre  ville.  Les  copistes  au  lieu  à'Antibicr, 
ont  pu  mettre  facilement  ytn//'»n('ff?.  Eusêbe 
composa  l'histoire  de  celle  translation  sur  ce 
qu'il  en  avait  appris  par  une  traililion  orale 
qui  s'était  conservée  depuis  le  temps  de  Mar- 
cellin,  évêque  d'Embrun,  jusque  vers  le  mi- 


'  Ueuanl..  in  Martyr.,  pafs.  .Tin 
'  <;rcg.  Tiinin.,  piig.  972. 


'  r.rcB.  Tiiron.,  iwg.  9:!2,I28I.  "J77,  211. 
'■  Mubil.  lib.  V  Annal.  Dened.,  pag.  U2 


[vi«  SIÈCLE.]        CnAPITRK  XXVII.  —  S.\INT 

lien  du    vi"  siècle  :  car  Kusi'.'he  ne    vivait 
plus  en  573,  comme  on  le  voit  par  le  qua- 
trième concile  de  Paris,  auquel  Optai,  évo- 
que (r,\nlilics,  souscrivit  en  celte  anm-e.  Ku- 
sèbe  ajoute  ;\  l'Ifislnire  de  lu  Irniislation  des 
murti/i-s,  que  s'élaul  rencontré  dans  un  con- 
cile avec  un  al)l)é  espajrnol,  qui  était  venu 
dans  les  Gaules   pour   l'utilité  des  Églises 
d'Espagne,  il  obtint  de  lui  les  Actes  de  leur 
martyre  ;  qu'eu  ayant  trouvé  le  style  trop 
grossier,  il  le  retoucha  pour  le  rendre  plus 
supportable.  C'était  sans  doute  leur  ùter  une 
partie  de  leur  mérite;  mais  Eusèbe  ne  pous- 
sait pas  ses  vues  si  loin  :  il  ne  chercbaitqu'à 
augmenter  le  culte  de  ces  saints,  en  donnant 
;\  leurs  Actes  \in  meilleur  air  qu'ils  n'avaient 
dans  l'original.  La  pureté  de  ses  intentions 
paraît  évidemment  dans  sa  façon  simple  et 
naturelle  de  raconter  les  cboses.  La  transla- 
tion, dont  il  a  fait  l'histoire,  n'est  pas  la  pre- 
mière ;  il  y  en  avait  eu  une  autre  longtemps 
auparavant,  d'Espagne  à  Embrun  :  il  en  est 
parlé  dans  les  Actes  mêmes  des  martyrs  ;  ce 
qui  fait  voir  que  nous  ne  les  avons  pas  tels 
qu'ils  était'ut  sortis  du  grefïe  de  Gironne. 
Ces  Actes  mettent  la  mort  de  Vincent,  d'Û- 
ronce  et  de  Victor  en  la  septième  année  de 
l'empire  de  Dioclélien  et  de  Maximien,  c'est- 
;\-dire  en  291,llulliu  étant  gouveincur  d'Es- 
pagne. 
SaiDi  G«r-       3.  La  mort  de  saint  Germain,  évè(]ue  de 
tivl,^"^"  Paris,  arriva  le  28  mai  de  l'an  .576  :  il  était 
né  dans  '  le  territoire  d'Autun  sur  la  tin  du 
v°  siècle,  vers  l'an  496;  Agrippin  qui  en  était 
évéque,  l'avait  élevé  au  diaconat  en  533, 
et  trois  ans  après  au  sacerdoce.  Il  y  avait 
dans  cette  ville  un  monastère  sous  le  nom 
de  saint  Symphoricn;   Nectaire,  successeur 
d'Agrippin,  eu  donna    le  gouvernement  à 
saint  Germain.  Ses  vertus  et  ses  miracles  le 
rendirent  bientôt  célèbre  :  il  prédit  la  mort 
au  roi  Théodebert,  et  '  elle  arriva  dans  le 
temps  qu'il  avait  marqué.  Le  siège  épisco- 
pal  de  Paris  étant  venu  à  vaqpier,  il  fut  choi- 
si pour  le  remplir  vers  l'an  ooo  :  la  piété  du 
clergé  '  et  du  peuple  de  cette  ville  reprit  un 
nouvel  éclat  sous  son  pontificat.  Il  tint,  en 
557,  un  concile  *,  où  avec  divers  évéques  du 


FORTUNAT,  EUSEBE,  ETC. 


307 


royaume  de  Cbildobert,  il  travailla  an  réta- 
blissenuMil  de  la  discipline   et  des  mœurs. 
En  559,  il  fit  la  dédicace  '  de  l'église  de  Sain- 
te-Cioix,  <|U(!  le  roi  avait  fait  bâtir,  et  lui  ac- 
corda un  privilc'^ze  irexcmption  :  cette  égli- 
se est  quelquefois  appelée  de  Saiut-VincenI  ; 
mais  depuis  la  mort  de  saint  Germain,  elle 
porta  son  nom,  comme  elle  le  porte  encore 
aujourd'hui.  Le  saint  donna  pour  abbé  au 
monastère  qui  en  dépendait,  un  religieux 
de  grande  vertu  ,  nommé  Dorothée ,   qu'il 
avait  eu  pour  disciple  dans  le  temps  qu'il 
était  lui-même  abbé  de  Saint-Symphoricn 
d'Autun.  Au  mois  de  novembre  de  l'an  566, 
il  se  trouva  au  second  concile  de  Tours  °,  où 
il  souscrivit  à  la  lettre  que  les  évêques  de 
cette  assemblée  écrivirent   à  sainte   Rade- 
gonde,  en  réponse  de  ceUe  qu'ils  en  avaient 
reçue.  Quelque  temps  après,  le  roi'  Cher- 
bert  ayant,  contre  les  règles  de  l'Église , 
épousé  Marcovèse  qui  portait  l'habit  de  re- 
ligieuse, et  ensuite  Méroflède,  sa  sœur,  du 
vivant   d'Ingoberge,  sa  femme,  saint  Ger- 
main l'excommunia  jusqu'à  ce  qu'il  eût  levé 
le  scandale  qu'il  avait  donné  par  cette  al- 
liance illégitime.  Il  assista  *,  vers  l'an  571,  à 
la  dédicace  de  l'église  de  Saint-Vincent,  du 
Mans.  En  573,  il  tint  un  concile  °  h  Paris, 
où  avec  les  évêques  qui  y  assistèrent,  il  cher- 
cha les  moyens  de  réconcilier  les  deux  rois 
Chilpéric  et  Sigebert  divisés  par  une  guerre 
civile  :  celui-ci  ayant  appelé  à  son  secours 
les  Barbares  d'au  delà  du  Rhin,  saint  Ger- 
main prévoyant  les  suites  fâcheuses  de  l'en- 
trée de  ces  troupes  dans  le  royaume,  écrivit 
à  la  reine  Brunehaut,  femme  de  Sigebert, 
pour  l'engager  à  porter  les   deux  rois  à  la 
paix  '". 
4.  Il  savait  que  cette  princesse  avait  beau-       Leur,  de 

.  ,  salai  Germam 

coup  de  pouvou'  sur  lesprit  de  son  mari,  et  àiareineB™. 
que  la  haine  qu'elle  portait  à  Frédegonde, 
femme  de  Chilpérii; ,  avait  grande  part  à 
cette  guerre  :  un  de  ses  ecclésiastiques, 
nommé  Gondulphe,  fut  porteur  de  cette  let- 
tre. Saint  Germain  y  décrit  en  des  termes 
très-touchants  les  misères  du  royaume  dé- 
chiré par  les  guerres  et  désolé  partout,  prin- 
cipalement aux  environs  de  Paris.  11  ne  dis- 


'  Mabil.,  tom.  I  Act.  Ordin.  S.  Bened.,  pag.  234. 

'  Ibid.,  pag.  236.  —  »  Fort.  lib.  Il,  caij.  x.  —  * 
Tom.  V  Condi.,  pag.  818.—  'Mabil.,  lib.  V  Annal., 
pag.  134-135.  —  6  Tom.  V  Concii,  p.ig.  863.  —  ' 
Greg.  Turon.,  lib.  IV  Hisl.,  cap.  xxvi.  —  *  Mabil., 
lib.  VI  Annal.,  pag.  139.  —  »  Tom.  V  Concii.,  pag. 
920. 


1»  On  trouve  au  tome  LXXII  de  la  Palrologie  la- 
tine ce  qui  uous  reste  des  écrits  de  saint  Germain, 
avec  une  notice  d'après  la  Gnllia  christ.,  sa  Vie 
par  Fortunat,  et  un  appendice  contenant  diffé- 
rents monuments  liturgiques  tirés  de  Mabillon,  de 
Muratori,  de  Martène.  {L'éditeur.) 


308 


HISTOIRE  GÉXÉKALE  DES 


simule  point  à  Brunebaut  que  le  bruit  était 
général,  que  c'était  par  sou  conseil  et  à  ses 
instances  que  Sigebcrt  faisait  la  truerre  ;  qu'il 
avait  peine  à  se   le  persuader,  la  rejetant 
plutôt  surl'énonnité  des  péchés  des  princes; 
mais  qu'il  était  de  riionneur  de  la  reine  de 
détromper  le  public  à  cet  égard,  en  portant  ef- 
ficacement le  roi  son  mari  à  donnei'  la  paix  à 
Chilpéric,  son  frère.  Il  insinue  qu'il  en  avait 
parlé  ou  écrit  à  l'un  et  à  l'autre,  sans  avoir 
pu    réussir   à  les   réconcilier,  parce    qu'ils 
s'excusaient   tous  deux    d'être  la  cause  de 
ces  divisions,  il  veut   donc  que  ce   soit  à 
elle  que  l'on  ait    obligation  de  la  paix  ;  et 
pour  l'engajçrcr  à  la  procurer ,  il  lui  repré- 
sente d'inicôlé   combien  elle  y  est  intéres- 
sée pour  elle-même  et  pour  ses  enfants,  une 
guerre  de  longue  durée  ne  pouvant  qu'être 
funeste  à  l'Klat  et  ii  ceiLx  qui  eu  sont  les 
maîtres  ;  et  de  l'autre,  coml)ien  est  bonteusc 
la  victoire  sur  un  fi-ère,  puisqu'elle  est  né- 
cessairement suivie  de  la  ruine  de  leur  pro- 
pre maison  et  de  l'héritage  que  leurs  parents 
leur  ont  laissé,  au  lieu  de  les  conserver  ;\ 
leurs  enfants,  il  lui  remet  devant  les  yeux 
que  Gain  pour  avoir  tué  son  frère  Abel,  en 
fut  puni  sévèrement  de  Dieu  ;  que  les  fières 
de  Joseph,  pour  lavoir  vendu  par  jalousie, 
devinrent  comme  ses  esclaves  ;  qu'Absalon 
fut  mis  à  mort  pour  avoir  tué  son  frère,  et 
tenté  d'ôter  le  royaume  à  David  son  père.  11 
la  conjure  par  l'exemple  de  la  reine  Esther 
de  s'employer  au  salut  du  peuple,  afin  de 
mériter,  comme  elle,   l'honneur  de   l'avoir 
sauvé,  et  de  réponcUc  de  façon  ù  sa  lettre, 
qu'il  ait  tout  lieu  de  s'en  ri^jouir.  Le  saint  évo- 
que avait  chargé  GondiUphe  de  dire  quel- 
ques autres  choses  à  la  reine,  mais  toutes  ses 
démarches  furent  inutiles  :  Sigebert  ne  vou- 
lut rien  écouter.  Il  vint  à  Paris  avec  sa  fem- 
me et  ses  enfants;  mais  comme  il  était  près 
d'en  partir  pour  aller  assiéger  Chilpéric  dans 
Tournay,  et  le  faiie  mourir  avec  toute  sa  fa- 
mille, saint  Germain,;'»  qui  il  ne  cacha  point 
son  dessein,  lui  dit  :  «  Seigneur  ',  Dieu  est  un 
grand  maître,  qui  ne   peut  approuver  ces 
haines  et  ces  vengeances;  et  si  outre  la  vic- 
toire vous  cherchez  à  répandre  le   sang  de 
votre  frèie,  vous  devez  appréhender  la  colère 
du  Tout-Puissant.  Si  au  contraire,  vous  épar- 
gnez la  vie  de  votre  frère,  vous  vivrez  et  re- 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

viendrez  victorieux.  »  Sigebert  méprisa  des 
avis  si  salutaires.  Mais  arrivé  près  de  Douai, 
il  fut  massacré  [lar  deu\  assassins  envoyés 
par  Frédégonde,  femme  de  Chilpéric.  C'était 
en  575.  Saint  Germain  *  mourut  le  28  mai 
de  l'année  suivante.  Chilpéric  qui  s'occupait 
quelquefois  de  poésie,  fit  son  épitaphe,  où  ' 
il  relève  son  zèle  pour  le  salut  de  son  peu- 
ple, et  l'amour  que  son  peuple  avait  pour 
lui.  11  parle  aussi  des  miracles  qui  se  fai- 
saient à  son  tombeau,  où  les  aveugles  re- 
couvraient la  vue,  et  les  muets  la  parole. 

o.  11  est  dit  '  au   commencement  d'une  g 
expHcation  de  la  liturgie,  donnée  en  1717 
par  dom  Martènc',  que  saint  Germain,  évc- 
que  de  Paris,  avait  écrit  sur  cette  matière. 
Tout  concourt  à  nous  persuader  que  celte  ex- 
plication même  est  de  ce  saint  évêque  :  1°  h 
quelle  fin  aurait-on  remarqué  dès  la  premiè- 
re ligne  de  cet  écrit  que  saint  Germaui  a 
traité  de  la  liturgie,  s'il  n'était  pas  de  lui,  ou 
si  ce  n'était  pas  un  abrégé  d'un   plus  long 
tiaité  (ju'il  avait  fait  sur  ce  sujet  ?  Il  est  assez 
ordinaire  aux  écrivains  qui  écrivent  sur  une 
matière,  de  remarquer  que  d'autres  l'ont 
déjà  fait  avant  eux;  mais  ils  font  du  moins 
connaître  qu'ils  entreprennent  quoique  chose 
de  nouveau  :  on  ne  dit  ici  rien  de  sembla- 
ble. On  marque  simplement  que  saint  Ger- 
main a  écrit  sur  la  liturgie,  comme  si  l'on 
voulait  dire  que  l'explication  suivante  est  de 
lui.  2°   Dom   Martène    l'a  trouvée  dans  le 
monastère    de  Saint-Syinphorieu  d'Aulun, 
ovi  saint  Germain  avait  été  établi  ablx-  par 
Nectaire,  évêque  de  cette  ville  :  il  était  na- 
turel que  l'on  eût  plus  de  vénération  pour 
les  écrits  de  saint  Germain  dans  ce  moîi.ns^- 
tère  que  dans  d'autres,  et  qu'on  les  y  con- 
servât avec  plus  de  soin.  3°  Cette  ex[ilica- 
tion  est  très-ancienne,  et  au  plus  taid  du  mi- 
lieu du  VI' siècle,  puisqu'on  y  voit  encore  les 
prièics  que  le  diacre  récitait  sur  les  caté- 
chumènes avant  de  les  faire  sortir  de  l'Église 
avec  les  infidèles  ;  usage  qui  ne  subsistait 
plus  dans  les  églises  de  France  au  vir  siè- 
cle, puisqu'alors  il  n'y  avait  plus  d'infidèles 
dans  cet  i;tat.  i"  Elle  a  été  composée  dans 
un  temps  où  la  liturgie  gallicane  n'avait  pas 
encore  fait  place  à  la  fiturgie  romaine  :  ce 
qui  arriva  sur  la  fin    du  vin*  siècle  ,  lors- 
que Gharlcmagne.  à  la  persuasion  du  pape 


LUi.r£i«  de 
Germl  n. 


'  ViU  Radeg.  et    Greg.  Turon.,  lib.  IV,  twg.  J9t 
*l  575. 

•  Mabil.,  lit',  VI  Atinal.,  p.i^-.  108. 


'  Ap>i(l  Aimoiniini,  lili.  III,  rn\i.  ivi. 
'  Germanus  episcopus  Parisiiis  scripsit  de  MiS' 
sa.  .Martel).,  loin.  V  Anecd.,  pag.  91. 


CHAFITIIE  XXVU.  —  SAINT  FORTUNAT,  EUSfOltl':,  RTH. 


Anil;>o  do 
co'lo  I  liirçic. 
limi.  V  Anof. 

P«g*  91  cl  léq. 


[VI"   SIÈCLE. J 

Adrien,  fit  ce  cli.iiic;cment  dans  les  c^gliscs 
de  son  niyaume.  fi"  La  durotiWlu  slyle  et  les 
tei'nies  Ijarbarcs  dont  elle  csl  ceniposéo,  sont 
encore  une  preuve  de  son  antiquité. 

(î.  Elle  est  divisëe  en  deux  parties  ,  dimt 
la  première  regarde  la  cu'li'liralion  de  la 
messe  :  on  la  commenrait  pai-  une  anticii- 
ue,  que  nous  appelons  Inlruït.  Pendant  que 
le  chœur  la  chantail,  le  célébrant  représen- 
tant la  personne  de  Ji-sus-Cluist ,  sortait  de 
la  sacristie  et  montait  à  l'autel,  où,  après 
que  le  diacre  avait  fait  faire  silence  ,  il  lisait 
la  proface  au  peuple  pour  l'avertir  de  se 
lu'éparer ,  en  se  puriliant  de  toute  mauvaise 
pensée,  ;\  écouter  la  parole  de  Dieu,  et  à 
célébrer  dignement  la  solennité  du  jour. 
Ensuite  il  saluait  le  peuple  en  disant  :  Que 
le  Seigneur  soit  lot/jours  avee  vous  ;  à  quoi  on 
répondait  :  L't  avec  votre  esprit,  afin  que  le 
célébrant  fut  d'autant  plus  digne  de  bénir 
le  peuple,  qu'il  recevait  lui-même  la  béné- 
diction de  tout  le  peuple.  Suivait  une  courte 
prière  que  l'on  disait  en  grec  et  en  latin 
pour  marquer  l'union  des  deux  ïestamenls  : 
c'était  le  Sanctus,  que  l'on  répétait  trois  fois  : 
l'évcque  commençait,  le  cbieur  poursuivait. 
Après  quoi  trois  enfants  chantaient  ensem- 
ble :  Kyrie  eleison,  comme  pour  désigner  les 
trois  âges  du  monde,  avant  la  loi,  sous  la 
loi,  et  sous  la  grâce.  L'on  ajoutait  le  canti- 
que de  Zacharie  :  Dvnedictus  Doininus  Deus 
Israël ,  qui  se  chantait  à  deux  clneurs.  Le 
lecteur  lisait  ensuite  les  prophéties ,  et  pour 
en  marquer  l'accomplissement ,  il  lisait  les 
endroits  des  Épltres  de  saint  Paul  qui  y 
avaient  du  rapport,  afin  que  l'on  vit  que  c'é- 
tait le  même  Dieu  qui  avait  parlé  dans  les 
pi-ophètes  et  dans  son  apôtre.  Au  temps  pas- 
cal on  lisait  les  Actes  des  apôtres,  l'Apoca- 
lypse, et  les  Actes  des  martyrs  aux  jours  de 
leurs  fêtes  :  c'était  un  motif  à  ceux  qui  les 
entendaient  lire  de  louer  Dieu  de  la  cons- 
tance qu'il  avait  accordée  k  ces  saints  dans 
leurs  soutfrauces.  Ces  leçons  finies ,  des  en- 
fants chantaient  le  cantique  des  trois  jeunes 
hébreux  dans  la  fournaise  ;  il  parait  qu'ils 
le  chantaient  par  manière  de  répons  ;  la  rai- 
son d'en  charger  des  enfants  était  d'imiter 
ce  qui  se  passa  à  l'entrée  triomphante  du 
Sauveur  à  Jérusalem,  où  des  enfants  chan- 
taient :  Hosanna,  fils  de  David.  Le  diacre 
venait  après  cela  précédé  de  sept  porte- 
chandeliers  avec  leurs  cierges  allumés,  Qgu- 


300 

res  des  sept  dons  du  Saint-Esprit.  Aussiifll 
(pu!  l'on  voyait  pai'aître  le  livre  du  saird 
Evangile,  le  clerg(''  chantait  à  voix  claire  le 
7'risii(/i(in  :  puis  U^  diacre,  montant  sur  l'am- 
bon  (pu  était  un  lieu  élevé  au-dessus  du 
chd'ur,  lisait  riivangilc.  Aux  prennères  pa- 
roles le  chdMir  répondait:  Gloria  tibi.  Domi- 
ne, pour  imiter  les  anges,  qui  à  la  naissance 
du  Sauveur  chantèrent  en  présence  des  pas- 
teurs :  Gloria  in  exeehis  Deo.  La  lecture  do 
ri%vangile  finie,  pendant  que  le  diacre  re- 
portait le  livre  de  l'Evangile  ,  le  chœur  ré- 
pétait le  Trisaijion  ,  non  en  grec  ,  comme  la 
première  fois,  mais  en  latin  :  Sanctus, 

7.  Alors  l'évêque,  lorsqu'il  avait  le  don  sunodoia 
de  la  parole,  faisait  un  discours  au  peuple  ox"^"'  '"^' 
pour  lui  expliquer  ce  qu'on  avait  lu ,  soit  de 
l'Ancien  ,  soit  du  Nouveau  Testament.  S'il 
n'avait  point  la  facilité  de  parler,  il  chargeait 
de  cette  fonction  quelqu'autrc  personne  ha- 
bile ,  ou  il  faisait  lire  par  les  prêtres  ou  par 
les  diacres  quelques  homélies  des  saints  Pè- 
res. Mais  il  devait  tellement  mesurer  ses  dis- 
cours ,  qu'ils  fussent  à  la  portée  des  plus 
grossiers,  et  qu'ils  ne  déplussent  point  aux 
plus  éclairés.  Les  catéchumènes,  les  juifs, 
les  hérétiques  et  les  païens  qui  désiraient 
de  s'instruire  pouvaient  assister  à  ces  dis- 
cours. Les  diacres  récitaient  sur  les  caté- 
chumènes les  prièi'es  accoutumées,  suivant 
l'ancien  rit  de  l'Eglise,  pendant  lesquelles 
l'évêque  demeurait  prosterné  devant  l'autel. 
Le  prêtre  disait  ensuite  une  collecte  :  puis 
les  diacres  ou  les  portiers  faisaient  soi'tir  de 
l'église  tous  ceux  qui ,  n'ayant  pas  encore 
reçu  le  baptême,  n'étaient  pas  initiés  aux 
mystères.  Ils  étaient  aussi  chargés  de  veiller 
qu'aucun  de  ceux  qui  n'étaient  pas  dignes 
de  participer  au  corps  et  au  sang  de  Jésus- 
Christ,  ne  restilt  dans  l'église,  lorsqu'on  le 
consacrait.  Pour  s'y  préparer  dignement, 
tous  les  assistants  demeuraient  dans  un  pro- 
fond silence  ,  formant  sur  leur  visage  le  si- 
gne de  la  croix,  afin  que  les  mauvais  désirs 
n'entrassent  point  par  leurs  yeux  ,  la  colère 
par  leurs  oredles  ,  et  qu'il  ne  sortit  de  leur 
bouche  aucun  mauvais  discours.  C'était  un 
ancien  usage  de  ne  point  célébrer  la  messe 
solennelle  ,  que  l'on  ne  mît  sur  l'aiïtel  la 
sainte  Eucharistie  consacrée  dès  le  jour  pré- 
cédent. Tout  le  peuple  étant  prosterné  ,  un 
diacre  apportait  le  corps  du  Seigneur  '  dans 
un  vase  en  forme  de  tour,  et  c'était  la  figure 


>  Corpus  vero  Doinini  iden  deferlur  in  turribus       quia  monumenlum  Domini  in  simililudinem  tur- 


310 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


que  l'on  donnait  ordinairement  .'i  ces  sortes 
de  vases,  parce  qu'on  était  persuadé  que  le 
tombeau  dans  lequel  le  corps  de  Jésus-Christ 
fut  mis  après  sa  passion  était  creusé  en  for- 
me de  tour.  «  On  consacrait  aussi  son  sang 
daus  un  calice,  parce  que  le  Sauveur  l'avait 
consacré  lui-même  dans  un  calice  la  veille 
de  sa  passion,  en  disant  :  \'oici  le  calice  de 
mon  sang,  le  mystère  de  la  foi,  gui  sera  rcj/an- 
du  jMur  plusieurs  pour  la  rémission  des  péchés  : 
car  le  pain  est  transformé  en  sou  corps ,  et 
le  vin  en  son  sang  ,  selon  qu'il  le  dit  lui- 
même  :  Ma  chair  esC  véritablement  viande,  et 
mon  sang  est  véritablement  un  breuvage.  Il  a  dit 
du  pain  :  C'est  7non  corps  ;  et  du  vin  :  C'est 
mon  sang.  Or  on  mélc  l'eau    avec   le  vin  , 
ou  pour  moûlrer  l'union  du  peuple  avec  le 
Seigneur,  ou  parce  que  l'eau  sortit  avec  le 
sang  du  côté  de  Jésus -Christ.  »   L'Euch.'t- 
ristie  se    consacrait  sur  une  palene  ,   sous 
laquelle  était  un  corporal  de  toile  de  lin , 
qui   posait   sur  une   nappe   aussi   de   lin  : 
tout  cela  en  imitation  des  linceuls  dans  les- 
quels on  avait  enveloppé  le  corps  du  Sau- 
veur dans  le  tombeau.  La  tour  qui  renfer- 
mait l'Eucharistie  était  couverte  '  d'étoile 
de  soie ,  et  ornée  d'or  et  de  pierreries ,  à 
l'exemple  des  voiles  qui  couvraient  le  taber- 
nacle.  Après    la  consécration   on   chantait 
trois  fois  :  Alléluia,  pour  marquer  ,  comme 
on  l'a  déjà  dit  du  Ayrie  eleison,  les  trois  âges 
du  monde.  On  récitait  ensuite  les  diptyques, 
c'est-à-dire  les  noms  des  fidèles   défunts; 
puis  pour  marque  d'une  mutuelle  charité  on 
se  donnait  le  baiser  de  paix.  Le  célébrant 
avant  de  rompre  et  de  mêler  la  sainte  Eu- 
charistie avertissait   le  peuple   d'élever  le 


cœur  vers  Dieu,  et  pendant  qu'il  la  rompait 
et  la  mêlait,  le  chœur  chantait  une  antienne, 
comme  il  avait  fait  lors  de  l'oblation.  L'au- 
teur remarque  *  qu'au  moment  de  la  frac- 
tion   de    l'hostie    quelques    anciens   Pères 
avaient  vu  comme  un  ange  de  Dieu  qui  avec 
un  couteau  coupait  les  membres  d'un  en- 
fant resplendissant  de  gloire,  et  qu'il  rece- 
vait son  sang  dans  un  calice,  Dieu  leur  ayant 
accordé  ce  prodige  ,  afin  qu'ils  assurassent 
avec  plus  de  fermeté  que  la  parole  du  Sei- 
gneur était  vraie,  lorsqu'il  disait  que  sa  chair 
était  une  nourriture  ,  et  son  sang  un  breu- 
vage. La  confraction  était  suivie  de  l'Orai- 
son dominicale  ,  et  de  la  bénédiction  que 
révoque  donnait  au  peuple,  cet  honneur  lui 
étant  réservé  par  les  canous  :  cette  bénédic- 
tion était  longue,  parce  qu'elle  était  compo- 
sée de  trois  oraisons,  an  lieu  que  les  sim- 
ples prêtres  n'en  récitaient  (ju'unc,  lorsqu'ils 
bénissaient.  Elle  consistait  dans  ces  termes  : 
Que  la  foi  et  la  charité,  et  la  communication  du 
corps  et  du  sang  de  Jésus-Chrit  soient  toujours 
avec  vous.  Ou  distribuait  après  cela  TEucha- 
rislie  au  peuple.  Pendant  ce  temps-là  le 
chœur  chantait  le  SjTnbole  ,  pour  exprimer 
sa  foi  sur  la  Trinité  :  le  Symbole  est  désigné 
ici  '  sous  le  terme  de  Trecanum  ;  c'était  ce- 
lui des  apôtres.  Dans  le  Missel  des  Mosara- 
bes  il  est  dit  qu'on  le  récitera  avant  la  com- 
munion :  la  liturgie  gallicane  le  met  après  ; 
on  lui  a  substitué  depuis  le  symbole  de  Cons- 
tantiuople.  L'.Vuteur  '  cite  la  lettre  de  saint 
Jude,  apôtre.  Il  remarque  que  '  saint  Mat- 
thieu fut  le  premier  qui  écrivit  l'Évangile  de 
Jésus-Christ,  et  qu'il  l'écrivit  eu  Judée  et  en 
hébreu;  que  les  autres  livres  du  Nouveau 


ris  fuit  scissum  in  pelra,  et  intus  leclum  ubipau- 
savit  corpus  dominicum,  unde  surrexit  nx  glo- 
riœ  in  iriumphum  ;  sanguis  vero  Chrisli  ideo  spe- 
cialiler  offertur  in  calice,  quia  in  taie  vasum 
consecratum  fuit  mysterium  Eticharistiie  pridie 
quain  paterelur  Duniinus,  ipso  dicente  :  Ilic  est 
calix  saiiguiuis  me\,  mysleriuin  fidei  qui  prn  iiiul- 
tis  effuiidetur  in  rL-missiouern  peccatonini.  l'unis 
vero  in  corpore,  et  vinum  transformalur  in  san- 
guine, dicente  Domino  de  corpore  suo:  Caro  cniiu 
mea  vere  est  oibus,  et  sanguis  iiicus  vere  est  po- 
tus.  De  pane  dixil  :  Hoc  est  corpus  uieum  ;  et  de 
vino  :  Ilic  sanpuis  meus.  Aqua  aulrm  ideo  misctur, 
vel  quia  decet  populo  unilum  esse  cum  Domino, 
vel  quia  de  lalere  Chrisli  incruce  sanguin  muno- 
vit  ri  aqua.  .Marten.,  loin.V  Ànecd.,  pap.  9.'). 
'  Scrico  auleui  ornalur,  aut  anro,vclgemmis, 
uia  Doniinus  Huisie  in  titbtrnaculo  fieri  vela- 
mina  ju.ssit  ex  aura,  iarinto,  et  purpura  corro- 
que  bis  linclo  et,  bysso  relorta  :  quia  omnia  illa 


mysteria  in  Chrisli  prœcesserunt  stigniaïa.  Ibid. 

»  Confractio  vero  et  commixtio  corporis  Dnmi- 
ni  Inntis  mysteriis  declnrala  anliquitus  sanctis 
Patribus  fuit,  ul  dum  sacerdos  oldalioncin  con- 
frangercl,  vidcbalur  quasi  angélus  Dei  membra 
fxtigenlis  pueri  cuUro  concœderr  ;  et  sanguiucm 
rjus  in  calicem  excipiendo  colligire,  ut  i-cracius 
direrent  vcrhum,  dicente  Domino  carnem  eju.'^  esse 
cibum  et  sanguiucm  esse  polum.  Ibid.,  pag.  9G. 

'  Trecanum  vero  quod  psalletur,  signum  est  cc^ 
Iholicœ  fidei  de  Trinitalis  credulilale  procedcre. 
Iliid. 

'  Quod  lestimonium  Judas  apostolus  frater  Ja- 
cobu,  in  Kiiislola  sua  commémorai.  Ibid.,  pni:.  91. 

'  Aius  vero  antc  pruphelia  pro  hoc  canlatur  in 
gru'ca  lingua.  quin  pru'dicalio  iVori  Teslamenli 
in  munao  per  qroca  lingua  processif,  excepta 
yiiillliirn  apostiilo,  qui  prinius  in  Judirn  lîvange- 
liuni  CUrisli  lichrais  litleris  edidil.  Ibid, 


[\T  SIÈCLE.]        CHAPITllE  XXVIl.  —  SAINT 

Testament  ont  ëté  écrits  en  grec ,  et  que 
c'est  en  cette  langue  que  l'évangile  a  été 
ainionci^  dans  tout  le  monde. 
s.ii'-dM.       8_  Hans  la  seconde  partie,  saint  Germain 
"•  donne  l'explication  et  l'origine  dos  antien- 

nes, des  répons  et  des  cantiques  cpie  l'on  ré- 
citait aux  Ollices  de  l'iîlglise.  11  y  traite  aussi 
des  ornements  à  l'usage  des  ministres  et  des 
rits  usités  dans  l'administration  des  sacre- 
ments. L'anlicnnc  est  ainsi  appelée ,  dit-il, 
parce  qu'on  la  dit  avant  le  psaume  qu'elle  an- 
nonce|:  c'est  pourcpioil'anticnnc  était  ordinai- 
rement un  verset  tiré  du  psaume  même  ;  on 
le  terminait  toujours  par  la  glorification  de 
la  Sainte -Trinité.  Le  répons  tire  son  origine 
du  cantique  que  Marie,  sœur  de  Moïse,  clian- 
ta  après  le  passage  de  la  mer  Rouge  :  Mario 
commençait  et  le  peuple  répondait.  Le  Sanc- 
tiispu  le  Trisagion  se  chantait  en  tout  temps  ; 
mais  en  Carême  on  ne  chantait  point  les 
cantiques  :  Benedictus,  et  :  Bencdicite  omnia 
opéra  Domini,  ni  \' Alléluia;  et  le  baptistaire 
demeurait  fermé.  Il  entrait  du  baume  dans 
la  consécration  du  saint  chrome,  c'était  une 
espèce  de  résine  qui  coulait  d'un  arbre  nom- 
mé lentisque  par  l'incision  de  son  écorce  : 
on  croyait  que  c'était  de  ce  bois  que  l'on 
avait  formé  la  partie  de  la  croix  où  les  mains 
du  Sauveur  furent  attachées  avec  des  clous. 
On  oignait  du  chrême  les  catéchumènes  et 
ceux  que  l'on  baptisait  :  ceux-ci  dans  leur 
baptême  étaient  vêtus  de  blanc.  Avant  de 
leur  administrer,  et  alors  qu'ils  étaient  au 
rang  des  compétents,  on  leur  faisait  appren- 
dre le  Symbole.  C'était  l'usage  de  couvrir  de 
rouge  le  livre  des  Évangiles,  comme  fignrc  du 
sang  de  Jésus-Christ.  Dès  le  milieu  de  la  nuit 
de  Pâques,  on  reprenait  tous  les  cantiques  de 
joie  que  l'on  avait  supprimés  pendant  le  Ca- 
rême, et  tout  le  peuple  tîdèlc  mangeait  l'a- 
gneau, c'est-à-dire  la  chair  et  le  sang  de  Jé- 
sus-Christ. Il  semble  que  pendant  le  temps 
pascal,  le  voile  qui  couvrait  la  tour  où  l'on 
réservait  l'Eucharistie  était  chargé  de  son- 
nettes, comme  autrefois  la  tunique  du  grand- 
prètie.  L'évèque  ne  se  servait  que  d'habits 
blancs  dans  l'administration  du  baptême  et 
dans  la  solennité  de  Pâques.  Le  pallium  ou 
rational  enveloppait  son  cou  et  descendait 
sur  sa  poitrine.  Les  aubes  à  l'usage  des  dia- 
cres devaient  aussi  être  blanches,  en  signe 

»  MabH.,  tom.  I  Act.  Ordin.  S.  Bened.,  pag.  2i2. 
'  Mabil.,  Annal.  Bened.,  pap.  137.  Aimon.,  lih.  III, 
cap,  u. 
'  Yales.,  Discept.  de  basil.,  pag.  33. 


FORTUNAT,  EUSfïIRE,  ETC.  3i< 

d(^  la  pureté  intérieure  :  ils  mettaient  par" 
dessus  une  étolc.  L'évèque  et  les  prêtres 
portaient  une  chasuble  vA  un  manipule  :  ils 
ceignaient  leurs  aubes  avec  un  cordon  blanc; 
mais  les  diacres  ne  ceignaient  pas  la  Peur, 
la  laissant  suspendue  et  flottante. 

0.  Forlunat'  fait  mention  d'une  lettre  de        un,c  d« 
saint  Germain  â  Flamir,  abbé  de  Chinon,  en    i-inM^'abw 
Touraine  ;  mais  il  ne  nous  apprend  point  ce 
qu'elle  contenait  :  il  dit  seulement  que  Dieu 
s'en  servit  pour  opérer  un  miracle. 

10.  On  met  encore  au  rang  des  écrits  de  Prwutom 
cet  eveque  le  l'nvuégc  qu  u  accorda  au  mo-  irH^^^  "•«^"■J» 
nastère  qui  porte  aujourd'hui  son  nom  dans  "'"i"- 
un  des  faubourgs  de  Paris.  Ce  Privilège  ' 
est  cité  par  Gillemar,  écrivain  du  xi"  siècle, 
et  rapporté  tout  entier  par  le  moine  Aimoïn: 
on  en  conserve  même  l'original  dans  l'ab- 
baye de  Saint-Germain,  où  il  est  écrit  sur 
l'écorce,  et  souscrit  de  saint  Gei'main ,  de 
saint  Nicée  ou  Nizier,  de  la  reine  Ultrogotte, 
des  deux  princesses  ses  filles  et  de  plusieurs 
évêques.  Il  porte  que  ce  monastère  sera 
exempt  de  toute  autre  juridiction  que  de 
celle  du  roi,  et  qu'il  aura  la  liberté  de  choi- 
sir son  abbé.  M.  de  Launoy  en  a  contesté 
l'authenticité.  Mais  M.  de  Valois  en  a  pris  la 
défense  ',  et  a  montré  que  le  roi  Childebert, 
qui  avait  obtenu  un  privilège  à  peu  près 
semblable  du  pape  Vigile,  pour  un  monas- 
tère qu'il  avait  bâti  à  Arles ,  et  pour  un  hô- 
pital qu'il  avait  fondé  à  Lyon,  pouvait  bien 
s'être  employé  pour  procurer  encore  de  plus 
grands  privilèges  à  l'abbaye  de  Saint-Vin- 
cent, aujourd'hui  Saint-Germain,  bâtie  dans 
sa  ville  capitale  et  auprès  de  son  Palais. 
Dom  Robert  Quatremaires  a  aussi  répondu 
aux  raisons  de  M.  de  Launoy  avec  tant  de 
solidité,  que  *  dom  Mabillon  s'est  cru  dispen- 
sé de  traiter  de  nouveau  cette  matière,  qu'il 
croit  hors  d'atteinte. 

H.  Il  est  parlé  clans  saint  Grégoire*  de        uc,(w\«!, 
Tours  et  dans  Fortunat,  de  Mérérius,  évê-  po^isme  :  spt 

'  '  écrits         soal 

que  d'Angoulême,  mais  il  n'y  est  rien  dit  de  !«'''"'• 
ses  écrits.  Si  l'on  en  croit  un  évrivain"  du 
XII'  siècle,  cet  évéque  joignait  à  une  grande 
éloquence  beaucoup  de  savoir  ;  et  il  avait 
même  composé  divers  ouvrages  qu'on  disait 
se  trouver  alors  dans  la  Bibliot/ièque  de 
Cluny  :  c'est  tout  ce  que  nous  eu  savons. 
On  met  la  mort  de  Mérérius  vers  l'an  570. 

'  Mabil.,  lib.  V  Annal.,  pag.  137. 

'■  Greg.  Tiuon.,  lib.  V,  pag.  37.  Fort.  fib.  III,  cap. 

IV. 

6  Labb.,  tom.  il  Nov.  biblioth.,  pag.  260, 


312 


HISTOIllE  GÉNl'^RALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


CHAPITRE  XXVHl. 

Saint   Ferréol   évêque    d'Uzès,   saint  Domnole  évêque    dn    Mans   [576], 

saint   Félix   évêqne   de  Nantes  L582J,  Chilpéric   roi 

de  France. 

[Écrivains    latins.] 


Saint  F«r. 
lértl.     é»*Tu»t 
dTii<.    t...... 

1*1*0  une  r*. 
pie  tiour  des 
moine:. 


Aoiij.c    do 


l.La  Règle  que  saint  Ferrt^ol  composa  pour 
le  monastère  d'hommes  qu'il  établit  à  Uzès, 
est  le  seul  motif  de  lui  donner  rang  parmi 
les  écrivains  ecclésiastiques.  Après  avoir  été 
élevé  en  cette  ville,  sous  les  yeux  deRurice, 
son  grand  oncle,  qui  en  était  évêque,  il  fut 
choisi  lui-même  pour  remplir  ce  siège  épis- 
copal,  vacant  par  la  mort  de  saint  Firmin, 
arrivée  en  333.  Il  trouva  beaucoup  de  Juifs 
dans  son  diocèse.  Dans  la  vue  de  les  ins- 
truire, il  mangeait  quelquefois  avec  eux,  et 
leur  faisait  des  présents.  Ses  ennemis  tour- 
nant eu  mal  sa  conduite,  le  rendirent  sus- 
pect au  roi  Chihlebert  qui,  sans  approfomlir 
la  chose,  lomanda  ù  Paris,  où  il  leretintpen- 
daut  trois  ans.  Convaincu  enfin  de  son  inno- 
cence, il  le  renvoya  k  son  Eglise,  chargé  de 
préseuls.  Quelque  temps  après  son  retour, 
le  saint  évêque  fit  construire  à  Uzès  un  mo- 
nastère d'hommes  sous  l'invocation  de  saint 
Ferréol,  martyr.  Il  y  avait  déjà  en  Occident 
plusieurs  règles  monastiques,  comme  celles 
de  saint  Gésaire,  de  saint  Benoit,  de  saint 
Aurélien.  Il  en  prit  diverses  pratiques,  et  en 
ajouta  de  particulières  pour  son  monastère  ; 
formant  du  tout  une  Rèçile  qui  porte  le  nom 
de  saint  Ferréol  ;  elle  est  citée  par  saint  Gré- 
goire de  Tours',  par  saint  Benoit  d'Agnane 
et  par  l'abbé  Trithôme.  Saint  Ferréol,  avant 
de  la  rendre  publique,  la  soumit  à  la  cen- 
sure de  Lucrèce,  évoque  de  Die,  à  qui  il  l'a- 
dressa. 11  marque  dans  la  Préface,  qu'il  avait 
Lâti  ce  monastère  dans  la  confiance  que 
les  serviteurs  de  Dieu,  à  qui  il  donne  ordi- 
nairement le  nom  de  religieux,  lui  obtien- 
draient par  leurs  prières  la  rémission  de  ses 
péchés. 
2.   La  première  vertu  qu'il   leur  recom- 


mande est  l'obéissance,  qu'il  appelle  le  fon-  i>  bw.  «, 
dément  de  toutes  les  autres.  Ensuite  il  leur  C'.d.  rgai'.," 
ordonne  un  grand  respect  pour  l'abbé,  vou- 
lant qu'ils  l'aiment  comme  leur  père  ,  et 
qu'ils  le  craignent  comme  leur  maître.  A  c»,-..  i-ti. 
l'égard  de  la  charité  mutuelle,  il  dit  qu'ils 
doivent  la  faire  piiraitre  dans  leurs  paroles, 
comme  dans  leurs  actions  ;  que  leur  cœur 
doit  être  exempt  de  haine  et  de  ressentiment 
et  qu'il  n'en  paraisse  aucune  marque  au 
dehors.  Il  n'était  permis  à  aucune  personne 
du  sexe  d'entrer  dans  le  monastère,  ni  aux 
religieux  de  leur  parler,  sans  la  permissiou 
de  l'abbé,  et  en  présence  de  deux  des  frères. 
Celui  qui  se  présentait  pour  être  reçu  dans  le 
monastère  était  un  an,  ou  du  moins  six  mois 
aux  épreuves,  avant  d'être  admis  dans  la 
communauté.  On  lui  lisait  la  R'-gle,  afin  qu'il 
connut  (jueis  étaient  les  engagements  qu'il 
voulait  contracter.  Mais  on  n'admettait  aucun 
esclave,  ni  aucun  moine  d'un  autre  monas- 
tère, sans  la  permission  de  son  abbé;  ni  un 
clerc  sans  l'agrément  de  son  évêque.  C'était  ji-m. 

une  obligation  à  un  moine  de  savoir  lire  et 
d'apprendre  le  Psautier  par  cœur,  fût-il  des- 
tiné, comme  il  était  '  alors  d'usage,  à  garder 
les  troupeaux.  Ouli'e  la  psalmodie  publique 
qui  se  faisait  en  commun,  chacun  oUïait  à 
Dieu  des  prières  et  des  louanges  en  parti- 
culier. Ou  n'exemptait  personne  des  veilles 
de  la  nuit,  si  ce  n'était  en  cas  d'infirmité  ou 
de  nécessité.  Us  avaient  tous  des  vêtements 
eu  sullisance  :  aucun  de  superllu.  Il  était  d'u- 
sage dans  plusieurs  monastères  ',  tant  en 
Orient  (]u'en  Occident,  d'y  instruire  des  ca- 
téchumènes, et  de  les  baptiser  :  saint  Ferréol 
le  retranche  dans  le  sien,  cl  ne  veut  pas 
même  que  ses  moines  servent   de  parrains 


'  Greg.  Tiiron.,  lib.  VI  tlisl.,  cap.  vu.  Boiindict. 
Aniaii.,  in  Conc.  reg.,  img.  9C.  :  Trillifiii.  lili.  De 
Proyr.,  monuch.,  cap.  v. 


'  M.iliil.,  lili.  V  Àniinl.,  piig.  130. 
'  .M.ibil.  Ubi  supra. 


[vi«  SIÈCLE.]         CIIAIMTliE  X.WIII.  —  SAINT  FEURKOL,  ÉVÈQUli,  KTC. 


:J13 


(l.iiis  le  baptême,  pour  leur  ôler  toutes  sortes 
de  liaisons  avec    les  parents  de   l'enfant. 
L'abbé  seul  avait  une  cluunbrc  séparée.  Aux 
jours  des    l'êtes  diîs  martyrs    on  lisait  leurs 
'■"r-  ^'  M.    .Votes.  Les  reliiïieux,  soit  au  dehors,  soit  au 
dedans  du  monastère,  ne  pouvaient  se  dis- 
penser de   va([uer   à   la   lecture   des   livres 
saints.  Ils  avaient  aussi  certaines  heures  pour 
le  travail  des  mains.   L'heure  de  la  lecture 
^^vl-  ('tait  depuis  le  matin  jusqu'à  Tierce.  Jusqu'à 
cette  heure  il   n'était    permis  ni  de  boire  ni 
de  manger.  L'usage  du  linge  sur  la  chair  nue 
était  défendu;  on  ue  permettait  pas  non  [)ius 
d'habits  odoriférans,  ni  qui  eussent  de  l'éclat 
s;i„.  dans  la  couleur.   Tout  devait   être  dans  la 
"  '"xvMi.    simplicité  et  la  modestie.  La  /(Vy/Zc  interdit  la 
chasse  aux  moines,    et   à  l'abbé  le  pouvoir 
lie  mettre  en  liberté  les  esclaves  du  monas- 
„„.ii.   1ère.  Il  était  obligéde  servira  la  cuisine  trois 
l'ois  l'année,  les  jours  de  Xocl,    de   Pâques, 
et  de  la  fête  du  patron  du  monastère,  c'est- 
à-dire,  de  saint  Ferréol  martyr,  et  de  laver 
souvent  les  pieds  aux  frères  et  aux  étran- 
gers, à  l'imilalion  de  Jésus-Christ,  et  pour 
,,v,x     donner  bon  exemple   aux   religieux.  Saint 
i'erréol  prescrit  diverses  pénitences  pour  les 
fautes,  et  ordonne  qu'au  premier  jour   de 
chaque  mois,  on  lise  sa  Règle  en  présence  de 
toute  la  communauté.  Saint  Benoit  d'Agnane 
l'a  insérée  dans  son  Code.,  et  le  père  Le  Cointe 
dans  les  .1  nnales  ecclésiastiques  de  France.  [Ou 
la  trouve  au  tome  LXV  de  la  Palrulogie  la- 
tine.] Il  parait  par  saint  Grégoire  '  de  Tours 
que  saint  Ferréol  avait  fait  un  recueil  de  ses 
lettres  à  l'exemple  de  saint  Sidoine  :  il  n'en 
est  venu  aucune  jusqu'à    nous.    11   faut,   ce 
semble,  le  distinguer  du  prêtre  Ferréol,  dont 
on  trouve  quelques  sentences  dans  un  livre 
iutitulé  :  De  Officio  rectoris  Ecclesiœ,  imprimé 
à  Cologne  en  1531. 
FMni  Dom.       3.  Nous   couuaissons  saint   Domnole  par 
r'MaMtTct  les  Actes  du  second  concile  de  Tours,  où  il 
.d'avi/rô   assista  en5G7,  en  qualité  d'évèque  du  Mans. 
11  avait  cte  auparavant  abbe    de  baïut-Lau- 
rent',  à  Paris.  Mais  Clotaire  l'eu  tira  pour  le 
mettre  sur  le  siège  épiscopal  du  Mans.  En- 


tre plusieurs  édifices  de.piél(;  ipi'il  lit  cons- 
truire pendant  son  épiscopat,  on  met  l'ab- 
baye de  Saint-Vincent,  où  il  l'ut  eutcrn-  après 
sa  mort  qui  arriva  le  1"  dcc(!iubre  ."iSl.  Il 
eut  part  à  la  lettre  que  le  concile  de  Tours 
écrivit  "  à  sainte  Iladegondc  en  confirma- 
tion du  monastère  qu'elle  avait  fondé  à  Poi- 
tiers, et  à  une  autre  lettre  circulaire  à  toute 
la  province  de  Tours,  pour  en  exhorter  les 
peuples  à  détourner  par  de  bonnes  œuvres 
les  maux  dont  ils  étaient  menacés.  On  les 
exhorte  entr'autrcs  choses  à  payer  '  la  dime 
de  tous  leurs  biens,  même  des  esclaves,  ou 
à  donner  à  l'évêque  pour  la  rédemption  des 
captifs,  le  tiers  d'un  so  d'or  pour  chacun'. de 
leurs  enfants,  au  cas  qu'ils  n'eussent  point 
de  serfs.  Les  Bollandistes  ont  donné  deux  Bc,ii..ddi.ra 
Vies  de  saint  Domnole;  l'une  écrite  par  un  boeaMi. 
prêtre  du  Mans,  contemporain  du  saint  ;  l'au- 
tre est  sans  nom  d'auteur  :  l'une  et  l'autre  font 
mention  du  chef  de  saint  Vincent,  martyr, 
et  d'une  partie  du  gril  de  saint  Laurent,  don- 
nés par  saint  Domnole  à  l'église  de  l'abbaye 
de  Saint-Vincent  du  Mans.  La  dernière  Vie 
rappelle  aussi  le  testament  que  le  saint  évo- 
que fit  en  faveur  de  la  même  abbaye  :  il  est 
adressé  à  tout  le  clergé  de  l'église  du  Mans, 
et  signé  de  trois  évêques,  saint  Domnole,  saint 
Germain  de  Paris,  et  Andonéus  d'Angers,  de 
sept  prêtres  et  cinq  diacres;  la  date  est  de  la 
onzième  année  du  règne  de  Chilpéric,  c'est- 
à-dire  de  l'an  372.  A  cetestameutsaint  Dom- 
nole joignit  un  codicille  rapporté  par  dom 
Mabillou  parmi  les  Actes  des  évoques  du  Mans.  ^^f'^''\'^^^-_ 
On  trouve  le  testament  dans  BoUandus  au  i  j-  <"»  «' 
16  de  mai,  et  dausle  Supplément  des  conciles 
de  France  par  M.  La  Lande.  [Tous  les  écrits 
qui  nous  restent  de  Domnole  se  trouvent  au 
tome  LXXIl  de  Va Palrologie  latine,  col.  629.] 

4.  Fortunat''  a  fait  de  saint  Féhx,  évêque  ^  SimtF«iu, 
de  Nantes,  un  éloge  accompli.  Illustre  par  ^^'^^'jy-  ^^ 
sa  naissance,  il  l'était  encore  plus  par  ses 
vertus,  par  son  éloquence  et  par  son  savoir. 
11  possédait  si  bien  la  langue  grecque,  qu'on 
eût  dit  qu'elle  lui  était  naturelle.  Il  était 
poète  et  orateur,  et  avait,   ce  semble,   fait' 


'  Greg.  Turon.,  lib.  VI  Ilist.,  cap.  vu. 

«  Id.,  ibid:,  c.np.  IX.  —  '  Tom.  V  Conciî.,  pag.  868. 

'  Comriinnemus  ut  Àbrahœ  documenta  seclan- 
tes,  décimas  in  omni  facultate  non  pigeât  pro  re- 
liquin  quœ  possidetis  consenandis  olferre...  Hor- 
lamur  ut  umtsquisque  de  suis  mancipiis  décimas 
persolvere  non  recusel...  quod  si  mancipia  non 
sint,  et  fuerint  aliqui  habenles  binos  aut  ternos 


filios,  per  unumquemque  singulos  tremisses  in 
episcopi  manu  concédât,  quod  possit  in  captivo- 
rum  redemptionem  conferri.  Tom.  V  CunciL,  pag. 
868  et  869. 

5  Fort.,  lib.  III,  cap.  iv-vni. 

"  Hoc  quoque  quod  delectabiliter  adjecistis  :  Me 
Dnmnœ  mea>  KLadigundas  muro  cliaritatis  inclii- 
sum  ;  scia  quidem  non  ex  mets  meritis,  sed  ex  ilUxts 


314 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Grflff, 

llb,  "■ 


en  vers  le  panégyrique  de  sainte  lladcgoude: 
w.inr»».  nous  ne  l'avons  pas.  Il  est  parlé  de  quelques- 
unes  de  ses  lettres  dans  saint  Grégoire  de 
Tours,  h  qui  elles  paraissaient  trop  pleines 
d'amertume  :  il  en  rejette  lu  faute  sur  ce  que 
ce  saint  les  avait  écrites  sans  avoir  été  bien 
instruit  du  sujet  qu'il  y  traitait.  Il  y  accusait 
d'ambition  le  frère  de  saint  Grégoire,  nommé 
Pierre,  qui  était  diacre  ;  et  disait  qu'il  avait 
été  tué  en  punition  de  ce  qu'il  avait  lui- 
même  tué  un  évêque  pour  parvenir  h  l'épis- 
copat.  Ces  lettres  ne  sont  pas  venues  jusqu'à 
nous.  Saint  Félix  était  marié  lorsqu'il  fut 
choisi  évéque  de  Nantes,  vers  l'an  541).  Il 
assista  au  troisième  concile  de  Paris  en  537; 
au  second  ^  Tours  en  366  ;  et  au  quatrième 
de  Paris  eu  573.  On  met  sa  mort  en  382,  et 
la  trente  -  troisième  de  son  épiscopat ,  qui 
était  la  soixante-dixième  de  son  âge,  étant 
né  vers  l'an  312. 
cuiréric,  5.  Je  ne  sais  si  l'on  doit  mettre  au  rang 
•«■«triis.  des  ecrivams  ecclésiastiques  le  roi  Cliilpcne, 
ii^'^'V"'""'  pour  un  fort  mauvais  traité  qu'il  composa 
"^^'  sur  des  matières  de  théologie,  et  qui  a  péri 

avec  son  auteur.  La  vanité  eut  plus  de  part 
dans  cet  écrit  que  le  zèle  de  la  religion.  Le 
dessein  de  ce  prince  était  d'y  établir  certains 
moyens  de  finir  les  difficultés  agitées  depuis 
longtemps  dans  l'Église  sur  les  mystères  de 
la  Trinité  et  de  l'incariialion  :  à  cet  etlet,  il 
concerta  un  Édit,  par  lequel  il  ordonnait 
qu'à  l'avenir  l'on  nommerait  la  Sainte-Trinité 
simplement  Dieu,  sans  distinction  de  per- 
sonnes, disant  qu'il  était  indigne  de  Dieu  de 
lui  donner  le  nom  de  personne,  dont  on  use 
en  parlant  des  hommes.  Il  soutenait  que  le 
Père  est  le  même  que  le  Fils  et  le  Saint- 
Esprit,  et  qu'au  langage  des  prophètes,  des 
patriarches  et  de  la  loi,  il  n'y  avait  point  de 
distinction  entre  le  Père,  le  Fils  et  le  Saint- 
Esprit.  Avant  de  publier  cet  Ixlit,  Cliilpéric 
le  montra  à  saint  Grégoire  de  Tours,  en  lui 
disant  qu'il  voulait  que  lui  et  tous  les  autres 
évéques  de  son  royaume  embrassassent  cette 
croyance  :  «  Quittez-la,  lui  répondit  le  saint 
évoque,  et  suivez  celle  que  les  docteurs  nous 


ont  enseignée  après  les  apôtres,  comme  saint 
Hilaire  et  saint  Eusèbe  de  Verceil  ;  croyez  ce 
que  vous  avez  vous-même  confessé  au  bap- 
tême. «Je  sais  bien,  lui  dit  le  roi  en  colère, 
quTIilaire  et  Eusèbe  sont  mes  plus  grands 
ennemis  en  cette  matière.  »  Saint  Grégoire 
lui  représenta,  qu'il  devait  craindre  d'oll'en- 
ser  Dieu  et  ses  saints,  et  ajouta  :  «  Ce  n'est 
pas  le  Père  qui  s'est  incarné,  ni  le  Saint- 
Esprit,  mais  le  Fils  :  c'est  lui  qui  a  soull'ert, 
et  non  pas  le  Père  ou  le  Saint-Esprit  ;  cette 
distinction  de  personnes  ne  s'entend  pas  cor- 
poiellement,  comme  vous  pensez,  mais  spi- 
rituellement. ))  Chilpc'iic  peu  satisfait  de  l'é- 
vêque  de  Tours,  fit  lire  son  écrit  à  Salvius , 
évêque  d'Alby,  qui  en  eut  tant  d'horreur,  que 
s'il  avait  pu  atteindre  au  papier,  il  l'aurait 
d('chiié.  La  résistance  de  ces  deux  évèques    RrocTuma. 

*  Iib.   VI,   cap. 

arrêta  le  roi,  et  le  fit  changer  de  dessem.  Ce  '<■■">■ 
prince  fit;  aussi  des  hymnes  à  l'imitation  de 
Sédulius,  des  Messes  ou  des  Collectps,  qui  ne 
furent  point  approuvées.  Saint  Grégoire  qui 
avait  vu  le  recueil  de  ces  hymnes  distribué 
en  deux  livres,  dit  qu'il  n'observait  point 
dans  ses  vers  la  quantité  des  syllabes,  met- 
tant des  longues  pour  des  brèves,  et  des 
brèves  pour  des  longues.  Nous  avons  vu  plus 
haut  qu'on  lui  attribuait  l'épitaphe  de  saint 
Germain ,  évêque  de  Paris ,  telle  que  le 
moine  Aimoïn  l'a  rajiportée.  D'autres  pré- 
tendent qu'elle  est  de  Fortunat,et  quelques- 
uns  qu'elle  n'est  point  si  ancienne.  La  flu  de 
Cliilpéric  fut  funeste  :  un  soir  au  retour  de 
la  chasse,  comme  il  descendait  de  cheval, 
s'appuyani  de  la  main  sur  l'épaule  d'un  de 
ses  courtisans,  un  assassin  le  perça  de  deux 
coups  de  poignard,  dont  il  mourut  à  l'ins- 
tant, après  avoir  régné  vingt-deux  ans,  de- 
puis l'an  362  jusqu'en  38'i.  On  dit  de  lui  qu'il  crrp.  hu. 
n'avait  jamais  aimé  personne  sincèrement  ; 
qu'aussi  il  ne  fut  aimé  de  personne,  ce  qui 
parut  bien  à  sa  mort  :  car  il  serait  demeuré 
sans  sépulture,  si  Malulphe,  évêque  de  Seu- 
ils, touché  de  compassion,  ne  lui  eill  rendu 
ce  dernier  devoir. 


consueludine,  quam  circa  cwiclos  novit  itnpendirr, 
colligalis.el  quantum  in  meu  prrsona  panegyricum 
poelice  langitis,  lantum  in  ejiis  laudis  hUloriam 
reiulistis.   Tamen  in  veslris  verbis  illud  relegere 


iiierui  qnnd  in  fjns  gralia  jam  percepi.  Sfd  qui 
de  me  panw  magna  depingilis,  quœro  de  magnis 
maxima  prœdicelis.  Ibid.,  caj).  iv. 


[vi-  SIÈCLE.]        CHAPITRE  XXIX.  —  SAINTE  IIADEUONDE,  HEINE,   ETC. 


315 


CHAPITRE  XXIX. 

Sainte  Radcgonde   reine  de  France  [587]  et  sainte  Césario   abbesse   de 

Saint-Jean  d'Arles. 

[ÉcrivaiDs  latine.] 


1.  Hemiaufroy,  roi  de  Turingo,  ayant  éié 
dôfaiteii  531  par  les  rois  Thierry  ut  Clolaire, 
la  ville  de  Turinge  qui  donnait  le  nom  au 
royaume  dont  elle  était  la  capitale,  fut  mise 
au  pillage  et  réduite  eu  cendres,  et  les  habi- 
tants furent  menés  en  esclavage.  Clolaire 
dans  ce  pillage  fît  mettre  en  sûreté  dans  sa 
lente,  une  nièce  d"Hermanfruy,  tille  de  Ber- 
lliaire  qui  avait  été  roi  d'une  partie  de  la 
Turinge,  et  mis  à  mort  '  par  Hermanfroy 
dans  la  vue  de  s'emparer  de  tout  le  royau- 
me. Elle  se  nommait  Iladegonde,  et  pouvait 
alorsavoir  douze  ans.  Clotaire  la  fit  conduire 
en  France,  '  élever  à  Athies,  maison  royale, 
en  Vermandois,  et  l'épousa  quand  elle  fut 
en  âge.  Les  délices  de  la  cour  n'atl'aiblirent 
point  sa  piété.  Elle  redoubla  ses  jeiiues,  ses 
aumônes,  ses  prières,  ses  austérités,  portant 
sous  ses  habits  précieux  le  cilice  pendant 
tout  le  Carême  ;  ce  qui  '  faisait  dire  au  roi 
qu'il  avait  épousé  une  religieuse  plutôt 
qu'une  reine  :  elle  en  avait  en  elTet  la  voca- 
tion, et  trouva  le  moyen  de  la  suivre.  Cette 
princesse  avait  un  frère  qui  avait  été  amené 
avec  elle  en  France  :  Clotaire  Tayaut  fait 
tuer  injustement  dans  le  temps  qu'il  prenait 
des  mesures  pour  se  retirer  à  la  cour  de 
Constantinople  auprès  d'un  de  ses  parents , 
elle  profita  de  cette  occasion  pour  qsitter 
son  mari,  et  vintàNoyon  prier  saint  Médard 
de  lui  couper  les  cheveux  ,  et  de  lui  donner 
l'habit  de  religieuse.  Sur  le  refus  qu'eu  fit  le 
saint  évêqiie,  parce  qu'elle  était  mariée,  et 
que  les  grands  de  la  cour  s'y  opposaient, 
elle  se  coupa  elle-même  les  cheveux  et  se 


couvrit  d'un  voile.  Saint  Médard  à  la  vue 
d'une  action  si  hi'roïque,  assuré  d'ailleurs 
du  consentement  de  Clotaire,  lui  imposa  les 
mains,  et  la  consacra  diaconesse,  quoiqu'elle 
n'eût  pas  encore  l'âge  requis  par  les  canons. 
2.  Sainte  Radegonde  se  retira  sur  une 
terre  que  le  roi  lui  avait  donnée  en  Poitou, 
où  elle  commença  à  vivre  d'une  manière 
beaucoup  plus  austère  qu'elle  n'avait  fait  jus- 
que-là, ne  vivant  *  que  de  pain  de  seigle  et 
d'orge,  d'herbes  et  de  légumes,  et  ne  buvaut 
que  de  l'eau  ;  son  lit  était  un  cilice  sur  de  la 
cendre.  Tous  ses  revenus  étaient  employés 
au  soulagement  des  pauvres,  qu'elle  servait' 
de  ses  mains.  Elle  portait  sur  la  chair  une 
chaîne  qu'un  saint  prêtre  nommé  Julien  lui 
avait  donnée;  en  échange,  elle  lui  faisait 
elle-même  des  habits.  Elle  passa  de  sa  terre 
à  Poitiers,  où  elle  fonda  et  bâtit  un  monas- 
tère par  l'ordre'  et  les  libéralités  du  roi  : 
elle  y  assembla  une  communauté  de  filles  à 
qui  elle  donna  une  abbesse,  de  qui  elle  vou- 
lut elle-même  dépendre  en  tout.  Sa  princi- 
pale occupation,  après  la  prière,  était  la  lec- 
ture :  elle  lisait'  les  écrits  des  Pères  grecs 
comme  ceux  des  Pères  latins,  tirant  de  ces 
sources  de  quoi  instruire'  les  religieuses 
du  monastère,  et  éclairciv  les  difficultés  qui 
se  rencontraient  dans  les  lectures,  qui  se  fai- 
saient en  commun.  Elle  attira  à  Poitiers  le 
prêtre Fortunat',  dont  elle  fit  son  aumônier  et 
son  directeur.  Cependant  le  roi  Clotaire  fei- 
gnit un  voyage  de  dévotion  à  Saint-Martin  de 
Tours  ;  mais  sou  véritable  dessein  était  d'al- 
ler à  Poitiers,  reprendre  sainte  Radegonde 


Kllf  Mlit 
un  monastire 
à  l'oiliers. 


'  Greg.  Turon.  lib.  III,  cap.  rv. 

'  Mabil.,  tom.   I  Àct.  Ord.  S.  Bened.,  pag.   319. 

'  Ibid.,  pag.  320,  et  Greg.  Turon.,  lib.  III,  cap.  vu. 

'  Greg.  Turou.,  ibid. 

5  Tom.  I  Aclor.,  pag.  320. 


•  Greg.  Turon.,  lib.  IX,  cap.  XLil. 
'  Fort.,  lih.  VllI,  cap.  I. 

8  Tom.  I  Aclor.,  pag.  328. 

9  Fortuu.,  lib.  VIII,  cap.  l. 


316 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 


el  la  lamener  à  la  cour.  Sur  l'avis'  qu'elle 
en  eut,  elle  ccrivit  à  saint  Germain,  cvcque 
de  Paris,  pour  le  prier  d'en  dissuader  le  roi 
Le  saint,  ayant  lu  la  lettre,  se  prosterna 
aux  pieds  de  Clotaire  ,  en  plcui-ant  devant 
le  tombeau  de  saint  Martin,  et  le  conjura  de 
la  part  de  Dieu,  de  ne  point  aller  à  Poitiers. 
Le  roi  se  laissa  llécbir;  mais  en  même  temps, 
il  se  prosterna  lui-même  aux  pieds  de  saint 
Germain,  le  priant  que  Hadegonde  obtint  de 
Dieu  le  pardon  de  ce  qu'il  avait  entrepris 
par  mauvais  conseil.  Le  saint  évoque  fit  à 
cette  occasion  le  voyage  de  Poitiers,  et  obtint 
sans  peine  de  la  reine  ce  que  le  roi  soubai- 
tait.  Ce  fut  sans  doute  en  celte  occasion 
que  saint-Germain  bénit'  Agnès  que  sainte 
Hadegonde  avait  fait  abbesse  de  son  mo- 
nastère. 
f^J'"\l,"ô»"'  3-  ^'ous  n'avons  plus  la  lettre  qu'elle  écri- 
Toureen566.  ^jj  ^^^^  évêques  assemblés  à  Tours,  en  566, 
pour  leur  demander  la  confirmation  de  ce 
monastère  et  de  la  discipline  qu'elle  y  fiii- 
.sail  observer  conformément  à  la  /{èyle  de 
saint  Césaire  d'Arles  ;  mais  la  réponse  du  con- 
cile est  parvenue  jusqu'à  nous.  Les  évêques, 
après  avoir  loué  son  zèle,  lui  accordèreut 
toutes  ses  demandes ,  en  ordonnant  '  que 
toutes  les  filles  de  leurs  diocèses  qui  se  se- 
raient retirées  dans  son  monastère  ,  n'au- 
raient plus  la  liberté  d'en  sortir;  tjue  celles 
qui  feraient  le  coutraiie,  seraient  excommu- 
niées et  anathématisées;  que  si  elles  venaient 
à  se  marier,  tant  elles  que  les  maris  sacri- 
lèges et  les  compfices,  seraient  sujets  à  la 
même  peine,  jusqu'à  ce  qu'ils  se  séparassent 
pour  faire  pénitence.  Les  évêques  du  concile 
obligèrent  leurs  successeurs  à  maintenir  cet- 
te discipline,  sous  peine  de  leur  en  répondre 
au  jugement  de  Dieu. 


Eii.a.m,r.       4  Quoique  sainte  Hadegonde  élit  déjà  des 


()«  du  hoi»  do 


i'  iv'n,J,TÙ'r   leliques  de  plusieurs  saints  dans  l'église  de 
ju5i.li.  gQjj  monastère  ',  elle  envoya  avec  la  permis- 

sion du  roi  Sigebert,  à  qui  Poitiers  apparte- 
nait, des  clercs  en  Orient,  pour  demander 
de  sa  part  à  l'empereur  Justin  du  bois  de  la 
vraie  croix.  Ce  prince  lui  eu  donna  un  mor- 
ceau, orné  d'or  et  de  pierreries,  avec  plu- 
sieurs reliques  des  saints,  et  des  livres  de 
l'Évangile  ornés  de  même.  Aussitôt  qu'elle 
sut  que  les  reliques  approcliaicut  de  Poitiers, 
elle  pria  Mérouée,  qui  en  était  évoque,  de 


ALTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

les  placer  dans  son  monastère,  au  chant  des 
Psaumes  et  avec  les  honneurs  convenables. 
L'évèque  n'eut  aucun  égard  à  ses  prières  : 
il  monta  à  cheval  et  alla  se  promener  à  sa 
maison  de  campagne.  La  sainte,  aflligée,  se 
pourvut  auprès  du  roi  Sigebert,  qui  chargea 
Euphrone,  archevêque  de  Tours,  de  faire 
cette  cérémonie.  11  porta  en  l'absence  de  l'é- 
vèque Mérouée,  les  reliques  dans  le  monas- 
tère avec  un  grand  appareil  de  cierges,  d'en- 
cens et  de  psalmodie.  Ce  fui  à  cette  occasion 
que  le  prêtre  Fortunat  composa  l'hymne  que 
nous  chantons  en  l'honneur  de  la  croix,  et 
qui  commence  par  ces  paroles  :  Vexilla  ré- 
gis prudcunt. 

0.  Quelques  mouvements  que  sainte  Ra-  mùu  '  ' 
degonde  se  donnât,  elle  ne  put  regagner  les 
bonnes  grâces  de  l'évèque  de  Poitiers  ;  ce 
qui  lui  fit  prendre  le  parti  de  se  mettre  sous 
la  protection  du  roi.  Elle  crut  aussi  devoir  n'.^Vx."!"! 
chercher  de  la  protection  à  son  monastère  .Momlvc... 
auprès  de  tous  les  évêques  de  France.  C'est 
pourquoi  elle  leur  adressa  son  testament  en 
l'orme  de  lettre,  dans  laquelle  elle  les  prie 
avec  larmes,  cl  au  nom  du  Père,  du  Fils  el 
du  Saint-Esprit,  d'employer  tout  leur  pou- 
voir pour  empêcher  qu'après  sa  mort,  les 
biens  qu'elle  avait  donnés  à  ce  monastère, 
de  même  que  ceux  qui  lui  avaient  été  lé- 
gués par  quelques  -  unes  des  sœurs,  et  qui 
lui  avaient  été  confirmés  par  les  rois  Cher- 
bert,  Gontran,  Chilpéric  et  Sigebert,  ne  lui 
fussent  ôtés  par  quelque  personne  que  ce 
fût,  soit  prince,  soit  évêque  ;  qu'.\gncs , 
qu'elle  avait  élevée  comme  sa  fille  et  fait 
bénil-  abbesse  de  ce  même  monastère,  ne 
fut  dépouillée  de  cette  qualité  que  pour  la 
conférer  à  une  autre,  et  qu'après  son  décès, 
les  sœurs  ne  fussent  privées  du  droit  de  se 
choisir  elles-mêmes  une  autre  abbesse.  Elle 
les  conjuiait  aussi  de  maintenir,  de  toute 
lem-  autorité,  les  autres  privilèges  de  cette 
maison  et  de  veiller  à  ce  que  la  Règle  de  saint 
Césaire  y  fut  exactement  observée,  et  sur- 
tout par  rapport  à  la  clôture.  Enfin,  elle  leur 
demandait  de  lui  accorder  la  sépulture  dans 
l'église  qu'elle  avait  commencé  à  bâtir  à 
Poitiers  sous  l'invocation  de  la  Sainte  .Mère 
de  Dieu,  et  où  plusieurs  des  sœurs  étaient 
déjà  enterrées.  Elle  signa  te  testament  de  sa 
propre  main,  et  le  mit  dans  les  aixhives  de 


'  BandoDivia  ou    Bandouiina,  in  Yila  S.  Radeg. 
*  Greg.  Turon.,  lih.  IX,  cap.  xui. 
'  Tom.  m  Concii,  pag.  8Î2. 


'  Uand.   iii  Vita  Radeg.,  nnni.  17,   18,  el  Grcg. 
Tiirou.,  lib.  1  De  Glor.  martyr.,  cap.  v. 


[VI'  sifccLE.]        CHAPITRE  XXIX.  —  SAINTE  nADEfiONnE,  HEINE,  ETC. 


l'c^glise.  Saint  Grégoire  île  Tours  l'a  insi'ré 
dans  lo  livro  X°  île  son  //istiiiri',  d'où  il  est 
jiassi'  dans  los  Itcciirih  (1rs  ajiiri/cs,  dans  les 
Aniidlcs  do  Bai'oiiiiis  et  dans  celles  d'Aqui- 
taine, par  Jean  liouchcl.  Il  est  dans  ce  der- 
nier recueil  souscrit  de  quelques  ëvfiques; 
ce  que  doni  Ruinart,  dans  ses  Notes  sur  saint 
Gréy;oire  de  Tours,  regarde  comme  une  ad- 
dition faite  après  coup.  Pour  obtenir  une  co- 
pie de  la  licfjle  de  saint  Césaire,  dont  il  est 
park^  dans  ce  tcslament,  sainte  Iladefjoude 
écrivit  ■\  saiutc  Césarie,  al)besse  de  Saint- 
Jean,  à  Arles.  Nous  n'avons  pas  cette  lettre. 


I.. Ha  ù 
faillie  Ci^4Aii 
à  «flinle  Haùi 
goado. 


317 

avait  (l(!  la  llhéralili'  des  rois  de  quoi  Caire 
rauinône,  nllc  Jni  rncoimnande  do  la  l'airo 
aliiMidaMiineul.  Puis,  venant  au  gouvernc- 
uirntde  son  nouveau  monastère,  elle  l'aver- 
tit de  n'y  recevoir  aucune  fdle,  à  qui  ello  ne 
fasse  apprendre  les  lettres  et  le  Psautier  par 
Cd'ur,  l'assurant  on  même  temps  que  l'ob- 
servalion  de  la  /{èyk  de  saint  Ccsaire,  dont 
elle  lui  envoyait  un  exemplaire,  lui  procu- 
rerait et  h  ses  filles,  la  possession  de  la  féli- 
cite éternelle.  Elle  lui  conseille  de  modérer 
ses  austérités,  disant  qu'une  abstinence  trop 
rigoureuse  la  mettrait  non- seulement  bors 
Mais  on  nous  a  donné  depuis  quelques  an-  d'i'tat  de  gouverner  sa  communauté ,  mais 
nées  la  réponse  de  sainte  C('sarie,  sur  nu  qu'elle  l'obligeiait  enfin  de  s'accorder  des 
manuscrit  de  M.  le  piésident  Bouliier.  soulagements  qui  tiendraient  quelque  chose 

,       6.  Celte  sainte,  quoique  de  même  nom      des  délices  du  siècle,  et  h  ne  pouvoir  plus 
'.  que  la  sœur  de  saint  Césaire,  en  est  dill'é-      suivre  les  heures  des  repas  prescrites  par  la 
rente.  Celle-b'i   était  morte  dès  avant  l'an 
524  ;  celle-ci  vivait  encore   après  l'an  .5tJ0. 
,   Mais  on  ne  peut  mettre  la  lettre  qu'elle  écri- 
vit à  sainte  Radegonde  plus  tard  qu'en  363, 
puisque  l'année  suivante  cotte  princesse  écri- 
vit aux  évèques  du  concile  de  Tours  pour  les 
prier  de   confirmer   l'établissement  de  son 
monastère  à  Poitiers  et  la  di?cipline  qu'elle  y 
faisait  observer  suivant  la  fièfj/e  de  saint  Cé- 
saire; ce  qui  suppose  clairement  que  sainte 
Césarie  lui  avait  déjà    envoyé  cette  Règle. 
Sa  lettre  à  sainte  Radegonde  est  une  exhor- 
tation ;\  la  pratique  des  vertus  religieuses, 
dont  la  première  est  de  demander  assidue- 
ment  à  Dieu  de  nous  enseigner  lui-même  à 


connaître  sa  volonté,  et  de  diriger  nos  pas 


/%/(',  qui  doit  lui  servir  de  modèle  en  tout  : 
<(  11  y  a,  ajoute-t-elle,  des  religieuses  tièdes 
et  négligentes  qui  s'imaginent  avoir  rempli 
toutes  les  obligations  de  leur  état,  quand 
elles  ont  quitté  l'habit  du  siècle  pour  pren- 
dre celui  de  la  religion.  Ce  changement  peut 
se  ftiire  en  un  moment  ;  mais  nous  devons 
employer  fous  les  moments  de  notre  vie  k 
travailler  avec  le  secours  de  Jésus-Christ  à 
la  correction  de  nos  mœurs.  »  Elle  insiste 
beaucoup  sur  le  danger  qu'il  y  a  pour  des 
religieuses  de  converser  familièrement  avec 
des  honnnes;  parce  qu'encore  qu'elles  ne 
se  sentent  coupables  de  rien,  elles  ne  i)Ou- 
vent  s'assurer  de  ne  point  contribuer  à  la 
perte  de  ceux  avec  qui  elles  conversen  de  la 


dans  la  voie  de  ses  commandements;  la  se-      sorte.  Elle  veut  qu'elle  ait  une  charité  égale 


coude,  d'écouter  avec  autant  d'attention  la 
parole  de  Dieu  lorsqu'on  lit  les  saintes  Écri- 
tures, que  les  grands  du  siècle  en  ont  lors- 
qu'on leur  fait  la  lecture  des  ordonnances 
des  rois  de  la  terre  ;  la  troisième,  de  rendi-e 
grâce  à  Dieu  des  bienfaits  qu'on  eu  a  reçus. 
Elle    lui    représente    que    quelqu'avantage 


pour  ses  sœurs,  et  qu'elles  s'entr'aiment 
elles-mêmes,  soit  qu'elles  soient  nées  riches 
ou  pauvres.  Cette  lettre,  qui  est  solidement 
écrite,  est  adressée  aux  saintes  Richilde  et 
Radegonde  :  ce  qui  donne  lieu  de  croire 
que  Richilde,  que  l'on  ne  connaît  point  d'ail- 
leurs, était  abbesse  du  monastère  de  Sainte- 


cpi'elle  puisse  retirer  de  la  Itèylc  de  saint  Ce-      Croix,  avant  que  sainte  Radegonde  en  eût 
saire  qu'elle  lui  avait  demandée,  elle  en  re-      donné  le  gouvernement  à  Agnès.  Fortunat  a 


tirera  beaucoup  plus  de  la  lecture  de  l'Evan- 
gile dont  la  doctrine  est  au-dessus  de  celle 
des  hommes,  et  infiniment  plus  précieuse  ; 
-mais  qu'elle  ne  doit  pas  s'arrêter  simplement 
à  ce  que  le  Sauveur  a  enseigné  ;  qu'il  est  en- 
core nécessaire  de  suivre  et  d'imiter  les 
exemples  qu'il  nous  a  donnés,  soit  de  pa- 
tience, soit  des  autres  vertus.  Sachant  qu'elle 


fait  '  en  peu  de  mots  l'éloge  de  sainte  Césa- 
rie. Sa  lettre  se  trouve  dans  le  premier  to- 
me des  Anecdotes  de  dom  Marténe,  à  Paris, 
en  1717, 

7.  En  S73  sainte  Radegonde  '  écrivit  de  ,.  Leiired» 
son  monastère  de  Poitiers  aux  deux  rois  eondê aii,"r.°3 
Chilpéric  et  Sigebert,  pour  les  engager  à   ?PV"°  "" 

,,  -t  .  .,  C     O  b7).  Sa    mort 

mettre  bas  les  armes  qu'ils  avaient  prises  '°°'"- 


'  Fort.,  lib,  Vlll,  cap.  iv. 


*  Band.  in  Vita  Radeg. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


318 

l'un  contre  l'autre.  Ses  lettres  que  nous  n'a- 
vons plus,  furent  aussi  inutiles  que  l'avaient 
été  les  instances  que  saint  Germain,  évoque 
de  Paris,  avait  faites  sur  le  même  sujet  au- 
près de  Frédégonde  et  de  Cliilp<^ric  son  mari. 
La  sainte  mourut  le  13  aoûl,  la  douzième  an- 
née du  règne  de  Childebcrt,  qui  est  l'an  587. 
A  la  nouvelle  de  sa  mort  '  saint  Grégoire  de 
Tours  se  rendit  à  Poitiers  et  la  trouva  dans  le 
cercueil ,  ayant  ses  religieuses  autour  d'elle 
au  nombre  d'environ  deux  cents,  dont  il  y 
en  avait  qui  étaient  des  princesses  de  sang 
royal,  d'autres,  fdles  de  sénateurs.  Saint  Gré- 
goire voyant  que  l'évcque  de  Poitiers  était 
absent  et  occupé  à  faire  la  visite  de  son  dio- 
cèse, flt  les  funérailles  ;  mais  après  avoir  mis 
le  corps  dans  la  fasse,  et  fait  la  prière,  il  se 
retira  sans  couvrir  le  sépulcre,  laissant  cette 


fonction  .'i  Mérouée,  évéque  du  lieu.  Elle  fut 
enterrée,  comme  elle  l'avait  soubaité,  dans 
l'église  de  Sainte-Marie,  aujourd'hui  deSain- 
te-Radegonde.  Mais  parce  que  celte  église 
n'avait  pas  encore  été  consacrée  par  la  bé- 
nédiction de  l'évèque,  saint  Grégoire,  de  l'a- 
vis de  plusieurs  personnes  considérables , 
consacra  un  autel  dans  cette  église,  persuadé 
que  Mérouée  ne  le  trouverait  pas  mauvais. 
Nous  avons  la  Vie  de  sainte  Rndegonde  par 
la  religieuse  Bandonivie.  dans  le  premier 
tome  des  Actes  de  l'Ordre  dcsaint  Benoit  :  elle 
avait  été  témoin  oculaire  de  la  plupart  des 
faits  qu'elle  raconte.  [La  vie  de  sainte  Rade- 
gonde  par  saint  Forfiinal  de  Poitiers,  le  Tes- 
tament de  la  sainte  et  le  décret  des  évéques 
se  trouvent  au  tome  LXXII,  col.  G31  et  suiv.] 


CHAPITRE  XXX. 

Saint  Gildas  abbé  de  Ruis,  saint  Fridolin  abbé  de  Saint-Hilaire  à  Poitiers 
[année  incertaine  dn  Vr  siècle]. 

[Écrivains  latins.) 


de  Mint  Gil' 
rfi..  Sun  rdu- 
caliot).  Il  est 
rail  prttre. 


1.  On  convient  qu'il  y  a  eu  deux  Gildas  en 
Angleterre  ;  l'un  surnommé  Albanie  qui,  né 
en  425,  fit  profession  de  la  vie  solitaire  près 
de  Glaston  ou  Glasscubourg,  jusqu'en5l2au- 
quel  il  mourut,  et  fut  enterré  dans  l'Église  de 
ce  lieu  ;  l'autre  surnommé  le  Sage,  et  quel- 
quefois Badonic,  parce  qu'il  vint  au  monde 
en  520,  qui  fut  l'année  de  la  victoire  qu'Ar- 
turus,  roi  des  Bretons,  remporta  sur  les  Sa- 
xone,  près  de  la  ville  de  Badon.  Ce  ne  fut  pas 
là  toutefois  le  lieu  de  sa  naissance,  '  mais  Ar- 
cluid  ou  Uunbritton  en  Ecosse.  Ce  Gildas  eut 
pour  père  un  nommé  Caunus,  lioniuie  de  dis- 
tinction et  de  piété,  qui  prit  un  grand  soin  de 
son  éducation.  Le  désir  de  se  former  de  plus 
en  plus  dans  la  vertu  l'engagea  à  se  raeltre 
sons  la  discipline  de  saint  llildut  ou  Eilut, 
abbé  au  pays  de  Galles,  qui  était'  Irès-babilc 
dans  les  sciences  divines  et  humaines  :  c'est 
à  lui  que  l'on  rapporte  l'établissement  de  la 
vie  monastique  en  Angleterre.   Gildas  eut 


'  Greg.  Turon.  De  Glor.  conf-,  cap.  cvi. 
•  Mabil.,  tom.  1  Acl.  Ord.  S.  Bentd.,  pag.  139  cl 
seq.    —  •  Ibid.,  ijug.  108. 


pour  condisciples  saint  Paul  et  saint  Samson 
qui  furent  l'un  et  l'autre  élevés  h  l'épiscopat 
dans  la  Gaule  Armorique,  le  premier  à  Léon; 
le  second  à  Dol.  11  fut  lui-même  élevé  au  sa- 
cerdoce. Son  zèle  pour  le  salut  des  âmes  le 
lit  passer  dans  la  province  septentrionale  de 
la  Grande-Bretagne,  où  il  convertit  un  grand 
nombre  de  païens  et  d'hérétiques  ;  puis  il 
passa  en  Irlande,  où  il  rétablit  la  pureté  de  la 
foi  et  de  la  discipline.  Il  y  bâtit  aussi  plu- 
sieurs monastères  dont  il  fit  autant  d'écoles 
pour  former  les  jeunes  gens  dans  les  sciences 
et  dans  la  vertu.  Ensuite  il  alla  â  Rome  visi- 
ter le  tombeau  des  ai>ùtres,  saint  Pierre  et 
saint  Paul;  et  de  là  h  Ravenne  où  était  celui 
de  saint  .\pollinaire.  Après  avoir  satisfait  à 
ses  dévotions,  il  vint  dans  les  Gaules,  et  fixa 
sa  demeure  dans  la  cote  méridionale  de  la 
petite  Bretagne,  près  de  Vannes,  où  il  bâtit 
le  monastère  de  Ruis  ,  qui  subsiste  encore 
aujourd'liui  sous  son  nom.  Il  y  mourut  dans 
une  heureuse  vieillesse  le  29  janvier,  on  ne 
sait  de  quelle  année.  Si  on  lui  a  donné  le  sur- 
nom de  IJadonic,  parce  qu'il  était  né  dans  le 
temps  du  combat   entre  les  Bretons  et  les 


CHAPITRE  XXX.  —  SAINT  (".ILDAS,  Anil|!:  DE  nUlS. 


[vr  SIÈCLE.] 

Saxons  auprès  de  la  villo  de  Badoii  ou  de 
la  nioutaRue  de  Badon  ;  ce  combat  s'i'tant 
doiinu',  suivant  les  t^crivains  aiii^Iais,  en  îilO, 
il  est  nocessaiir  (le  mellre  sa  mort  plus  tard 
que  r)G3, où  plusicuis  la  fixent,  puisqu'alors  il 
n'aurait  eu  que  cinquante-cinq  ans  :  ce  qui 
ne  se  peut  dire  d'un  homme  qu'on  convient 
être  mort  dans  uti  Age  avance^.  Ussérins  '  la 
recule  jusqu'en  570;  d'autr(>s  '■'  la  mettent 
après  l'an  581,  où  ils  prétendent  qu'il  com- 
posait les  ouvrages  que  nous  avons  de  lui. 
Ils  consistent  eu  quelques  canons  de  disci- 
pline, et  en  deux  discours  sur  la  ruine  delà 
Grande-Bretagne  et  sur  les  dérèglements  du 
clergé. 
,  f-"!',  ''■'       2.  Ouelques-ims  ont  contesté    ces    deux 

MIDI  (iililrii,  ^  X 

discours  à  saint  Giidas,  soit  parce  qu'ils  sont 
remplis  de  fautes  contre  la  vérité  de  l'his- 
toire, soit  parce  que  l'auteur  s'y  adresse  à 
plusieurs  princes  comme  s'ils  eussent  vécu 
dans  le  même  temps,  quoiqu'il  soit  certain 
qu'ils  se  sont  succédés  dans  le  gouvernement 
de  la  Grande-Bretagne  ;  soit  enfin  parce 
qu'il  ne  rend  pas  bien  les  termes  de  la  lan- 
gue du  pays.  Mais  on  peut  répoudre  que  des 
fautes  de  chronologie  dans  un  discours  ne 
sont  pas  toujours  des  preuves  de  sa  suppo- 
sition ;  que  les  cinq  princes  auxquels  il  s'a- 
dresse, pouvaient  avoir  en  même  temps  de 
l'autorité  dans  le  royaume,  sans  qu'ils  en 
eussent  tous  ensemble  la  principale,  ou  le 
titre  de  roi  ;  et  qu'il  n'est  point  aisé  de  mon- 
trer que  Gildas  se  soit  trompé  dans  la  signi- 
fication des  termes  du  pays,  puisque  la  lan- 
gue bretonne  a  eu  comme  les  autres  ses 
variations.  Au  fond,  comment  lui  contester 
des  discours  qui  sont  cités  sous  son  nom  par 
l'auteur  même  '  de  sa  Vie,  par  le  vénéra- 
ble '  Bède,  par  Alcuin,  et  par  un  grand 
nombre  d'écrivains  postérieurs,  parmi  les- 
quels on  peut  compter  Rapin  Thoiras,  dans 
le  premier  livre  de  son  Histoire  d'Angleterre, 
An.ijse  <io  3.  Le  premier  de  ces  deux  discours  est 
Sy'k't''  ^'^^"  ^'^  ruine  de  la  Grande  -  Bretagne ,  les 
mccurs  corrompues  dos  habitants,  leur 
mancjue  de  cœur  quand  il  fallait  aller  à  l'en- 

»  Usser.  De  Britan.  eccl.  prim.,  pag.  477,  90.S. 

*  Radulph.  de  Diceto  iu  Indiculo  viror.  illust., 
pag.  432. 

'  Mabil.,  tom.  I  Ad.  Ord.  S.  Bened.  ,  pag.  139, 
144,  et  BoUand,  ad  diem  29  januarii,  pag.  380. 

*  Legitur  in  libro  Gildi  BreUonum  sapientissi- 
vii,  quod  iidein  ipsi  Brettones  propter  rapinas  et 
aiaritiam  principum,  propter  iniijuitatem  et  in- 
justitiam  judicum,  propter  desidiam  et  pigritiam 
prœdicationis  episcoporum,  propter  luxwiam  et 


319 


I. 

pas.  ^0- 


ncmi,  leur  inclination  aux  guerres  civiles, 
leur  éloignement  pour  la  vérité  et  pour  la 
paix,  leur  penchant  au  mensonge.  On  ne 
consultait  plus  le  Seigneur  dans  l'éleclion 
des  rois  ;  on  élevait  ;\  cette  diguité  ceux  que 
l'on  connaissait  pour  les  plus  cruels.  11  suf- 
fisait à  un  roi  d'avoir  de  la  douceur  et  de 
l'amour  pour  la  vérité  pour  encourir  la  dis- 
grâce de  ses  sujets,  et  pom-  être  regardé 
comme  le  destructeur  de  l'Etat.  Telles  étaient 
les  dispositions  des  Bretons  lorsque  les  Pietés 
les  attaquèrent  et  les  vaincpiirent.  La  guerre 
fut  suivie  de  la  famine,  et  de  la  peste  qui 
dépeupla  tout  le  royaume.  Jusqu'à  l'année 
du  siège  du  mont  Badon,  que  Gildas  dit  être 
celle  de  sa  naissance,  la  Bretagne  avait  été 
sagement  gouvernée  :  les  rois,  les  évoques, 
les  ecclésiastiques,  les  monastères,  le  peu- 
ple, tout  était  dans  l'ordre.  On  le  renversa 
quelque  temps  après  si  ouvertement,  que 
les  nations  voisines  disaient  :  »  La  Bretagne 
a  des  rois,  mais  ce  sont  des  tyrans  :  elle  a 
des  juges,  mais  ce  sont  des  impies;  elle  a 
des  guerriers,  mais  ce  n'est  que  pour  des 
guerres  civiles,  n  II  décrit  les  crimes  horri- 
bles dont  Constantin,  Conan,  Vortipor,  Eu- 
néglns  et  Maglocus  s'étaient  souillés;  leurs 
meurtres,  leurs  sacrilèges,  leurs  adultères, 
leurs  parjures.  Il  leur  applique  les  reproches 
les  plus  vifs  des  prophètes  aux  rois  de  Juda 
et  d'Israël,  et  les  menace  de  la  colère  du 
Seigneur.  Il  rejette  l'amertume  et  Ja  diuelé 
de  ses  expressions  sur  la  nécessité  de  crier 
contre  le  vice,  et  d'invectiver  contre  les  pé- 
cheurs ,  témoignant  de  son  côté  un  désir 
très-ardent  de  les  voir  rentrer  en  eux-mêmes 
et  vivre  conformément  aux  lois  de  l'Évan- 
gile. 

Ses  invectives  contre  les  désordres  du  cler- 
gé de  la  Bretagne,  ne  sont  ni  moins  vives  ni 
moins  amères.  L'avarice,  la  supercherie,  la  la.. na. 
gourmandise  étaient  des  vices  communs 
parmi  les  ministres  de  l'Église.  Les  pasteurs 
ne  laissaient  pas  de  prêcher  quoique  rare- 
ment, mais  ils  vivaient  mal  :  ils  offraient 
quelquefois  le  sacrifice,  mais  avec  un  cu^ur 

malus  mores  populi,  patriam  perdiderunt.  Alcuin. 
Epist.  ad  Edith.,  tom.  I!  Lert.  Canisii ,  pag.  385. 
IiUer  alia  inemtrrahilium  seelerum  facta  quœ 
historiens  eorum  Breltonnm  Gildas  ftebili  ser- 
moue  describit,  et  hoc  addebat,  aut  numquam 
genli  Saxonum  sire  Anglorum  secum  Britanniam 
incolentium,  verbum  fidei  prœdicandum  commit- 
terent,  Beda,  lib.  I  Uistor.  Àiiglor.,  cap.  ïxn,  pag. 
15,  ton).  III. 


320 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


souillé  :  leur  vie  déréplée  ne  leur  pernieltait 
pas  de  reprendre  ni  de  corrii;er  les  pécheurs  : 
ils  n'enseifmaienlquefaiblenu'nt  l'obligation 
de  faire  l'aumône,  parce  qu'ils  ne  donnaient 
pas  eus -mêmes  une  obole  aux  pauvres.  Ceux 
qui  paraissaient  au  dehors  être  exempts  de 
défauts  grossiers,  ne  faisaient  point  de  diffi- 
culté de  donner  ou  de  recevoir  de  l'argent 
pour  l'épiscopat  ou  pour  la  prêtrise.  Quels 
secours  les  peuples  pouvaient-ils  attendre  de 
semblables  ministres,  plus  dignes  des  llam- 
mes  de  l'enfer  que  de  paraître  au  saint  au- 
tel ?  Gildas  convient  que  tous  n'étaient  point 
méchants  au  même  degré,  et  qu'il  y  avait 
des  évêques   et    des  prêtres   qui  n'étaient 
point  tachés  de  l'infamie  de  l'impureté,  qu'il 
y  en  avrfit  de  chastes  et  de  bons  ;  mais  il 
soutient  qu'ils  manquaient  de  zèle  et  qu'ils 
n'avaient  pas  assez  de  force  pour  défendre 
la  vérité  aux  dépens  de  leur  vie.  Sur  quoi, 
il  leur  met  devant  les  yeux,  la  constance  ad- 
mirable de  saint  Ignace,  évcque  d'.\ntioche, 
dont  il  cile  VÉpitre  aux  liomains  ;  et  l'exem- 
ple de  saint  Polycarpe,  évêque  de  Smyrne, 
et  de  saint  Basile,  évêque  de  Césarée,  qui, 
supérieurs  à  toutes  les  menaces  et  h  tous  les 
tourments,  défendirent  la  vérité  de  la  reli- 
gion jusqu'à  la  mort.  Il  rapporte  un  grand 
nombre  de  passages  de  l'Kcriture,  où  Dieu 
se  plaint  des  mauvais  pasteurs,  de  leur  in- 
dolence à  enseigner  les  peuples,  des  mau- 
vais exemples  qu'ils  leur  donnaient,  les  fai- 
sant périr,  faute  de  nourriture,  et  pour  ne 
pas  leur  montrer  par  leurs  actions  le  bien 
qu'il  fallait  faire.  Il  semble  dire  que  ceux-là 
ne  sont  ni  prêtres,  ni  évêques,  (]ui  ne  rem- 
plissent pas  les  fonctions  de  leur  ministère  ; 
mais  on  voit  par  ce  qui  précède  et  par  ce 
qui  suit,  qu'il  ne  veut  dire  autre  chose  sinon 
que,  ne  faisant  point  ce  qui  est  de  leur  char- 
ge, ils  en  sont  indigues,  et  qu'il  leur  serait 
plus  avantageux  de  la  céder  à  de  plus  di- 
gnes, qui  recherchassent   dans  l'épiscopat, 
non  le  moyen  de  s'enrichir,  mais  d'être  uti- 
les au  salut  des  peuples. 

Les  deux  discours  de  Gildas  furent  im- 
primés pour  la  première  fois  à  Londres  en 
152.J,  par  les  soins  de  Polyilore  Vergilc  qui 
y  joignit  une  piéface  de  sa  fai^-on.  L'édition 
de  Bâle  en  lo^^  n'est  qu'une  réimpression 
de  celle  de  Londres.  Il  en  parut  une  autre 
en  la  même  ville  en  1,"GS.  Josselin,  secré- 
taire de  Matthieu,  archevêque  de  Cantorbéry, 
la  procura.  On  leur  avait  donné  place,  dès 
J'an  1.j:J."),  dans  les  Orthodoxograp/ies  à  Bâle, 


où  ils  furent  réimprimés  dans  le  même  Re- 
cueil en  1569.  On  les  trouve  aussi  dans  les 
I/isldires  calésiaslù/iws  de  In  (irande-Iirefa- 
fjne,  et  dans  les  lii/iliut/m/ufs  dfs  Pf-rca,  fi  Pa- 
ris, à  Cologne  et  à  Lyon  ;  [dans  Galland,  toiiH- 
Xn,  page  191,  et  de  là  dans  la  Patinlogic  lati- 
ne, tom.  LXIX,  col.  327.]  On  a  oublié  dans  l'é- 
dition des  Pères  .•'i  Lyon  la  préface  que  Gil- 
das avait  mise  à  la  lêle  de  ces  deux  discours, 
dans  laquelle  il  disposait  ses  lecteurs  h  lire 
des  choses  aussi  affligeaules,  protestant  qu'il 
ne  les  avait  écrites  qu'après  une  délibération 
de  i)lus  de  dix  années,  et  lians  la  seule  vue  de 
déplorer  avec  les  gens  de  bien  la  ruine  de  sa 
patrie,  et  les  désordres  qui  l'ont  occasionnée. 
Il  donne  à  sou  écrit  le  litre  de  Ijttre.  La  dis- 
tinction que  l'on  en  a  faite  en  deux  discoure 
ne  parait  pas  être  de  lui  ;  la  fin  du  premier 
qui  est  liée  naturellement  avec  le  commen- 
cement du  second,  fait  voir  que  ce  n'était 
originairement  qu'un  seul  et  même  dis- 
cours, ou  une  seule  lettre  comme  il  l'ap- 
pelle. 

■4.  Nous  avons  encore  de  Gildas  quelques 
canons  ou  règlements  de  discipline  dans  un 
recueil  de  canons  à  l'usage  de  l'Église  d'Hi- 
bernie  ou  d'Irlande,  donné  par  dom  d',\ché- 
ry  dans  le  tome  IX  de  sou  S/)icilége  sur  un 
manuscrit   de   l'abbaye  de  Corbie.   Les  ca- 
nons que  l'on  y  trouve  sous  le  nom  de  Gil- 
das sont  au  nombre  de  huit,  dont  le  pre- 
mier  porte   qu'il   faut   réserver   à   Dieu    !e 
jugement   des   évêques,  des  prêti'cs   et  des 
abbés,  et  que  le  mieux  est  de  ne  juger  per- 
sonne; le  second,  que  l'abstinence  des  ali- 
ments  corporels  est  inutile  sans  la  charité; 
et  que   ceux  qui   ne  font  ni  de  longs  jeûnes 
ni  de  grandes  abstinences,  mais  qui  ont  le 
cœur  pur,  sont  préférables  h  ceux  qui  tirent 
vanité  de  leurs  mortifications;  le  troisième, 
que  la  vérité  est  recevable  de  quel(]ue  bou- 
che qu'elle  nous  vienne;  le  quatrième,  qu'on 
ne  doit  pas  condamner  les  princes  pour  des 
fautes  légères;  le  cinquième,    que   chacun 
doit  demeurer  dans  l'état  au(ju(>l  Dieu  l'a  ap- 
pelé. Les  clercs  Ii-landais  portaient  une  ton- 
sure toute  différente  de  ceux  de  l'Église  ro- 
maine ,  se  faisant  raser  la  tête  d'une  oreille 
à  l'aulie.  Saint  Gildas  remarque  (jue  ce  n'é- 
tait pas  seulement  dans  cet  usage  qu'ils  se 
distinguaient  des  romains;   mais   en  tout, 
jusquesdans  la  liturgie.  Ace  canon,  qui  est 
le  septième,  le  Recueil  où  il  se  trouve  en 
ajoute  un  de  saint   Patrice  qui  enjoint  aux 
Irlandais  de  porter  une  tonsui'e  semblable 


iil.i!i  fir  It  I 
i.ciplrt  I 
>c.     l.\  -,  - 


cil.  !..(,•.  «. 


[••(,!. 


{ 


[vi"  SIÈCLE.] 


CHAPITHE  XXXI.  —  JANUARIN,  PRÉTEXTÂT,  ETC. 


:i'2l 


colle  qui  triait  en  usago  dans  l'Érrlise  roniai- 
iu\  I.c  sixième  défend  h  ceux  qui  ont  le  pou- 
voir d'excommunior,  d'en  nser  avec  précipi- 
tation.   Le   lniili(''nio   est   contre    ceux    qui 
se   croient  ju.sle.s,    parce  qu'ils  ionl   quel- 
ques bonnes  œuvres,  mais  qui  ne  le  sont 
pas,  en  etl'et,  parce  qu'ils  manquent  do  cha- 
rité pour  leurs  frères.  Le  recueil  do  ces  ca- 
nons parait  avoir  été  foit  dans  le  luiitième 
siècle  par  un  clerc  nommé  Arbédoc.  Il  en 
rapporte  quantité  d'autres  tirés  des  divers 
conciles   d'Irlande,   on  particLilior  de   ceux 
qui  s'élaient  tenus  du  vivant  de  saint  Patrice. 
Le  huitième  sous  le  nom  de  Gildas  suppose 
que  ce  saint  abbé   avait  écrit   plusieurs  let- 
tres ;  nous  n'en  avons  aucune,  il  s'en  trouve 
des  fragments  ',  dans  un  manuscrit  de  la  bi- 
bliothèque de  M.  Gotton.  Baléus  *  lui  attri- 
bue un  livre  de  sermons  qu'il  dit  être  extrê- 
mement satyri(jues,  et  un  traité  île  l'Immor- 
talité de  l'âme.  Us  n'ont  pas  encore  été  ren- 
dus publics.  Il  y  a  quelques  autres  ouvrages 
dont  on  veut  qu'il   soit  auteur,    enli''autres, 
nue  Histoire  des  actes  des  Bretons;   maison 
soutient  ^  qu'elle  est   de  Xennius.  Ce  serait 
le  déshonorer  que  de  lui  attribuer  certaines 
prophéties  qui  portent  le  nom  de  Gildas.  Le 
poème  intitulé  :  Querulus,  que  quelques-uns 
lui  donnent  *  ne  peut  être  de  lui,  puisqu'il 


fut  adressé  h  Ilutilius  Nnmantius,  vers 
l'an  4l(t,  Innstemps  avant  la  naissance  de 
saint  Gildas.  Ce  poome  se  trouve  A  la  fin  des 
Ciimi'dies  do  Pl.uilo. 

").  Il  faut  tlire  ici  un  mot  de  saint  Fridolin 
que  Dempster  et  quelques  autres  mettent  au 
rauf,'  (les  écrivains  ecclésiastiques  :  il  était 
Irlandais  d'origine.  Ayant  pass('!  la  mor  il 
vint  s'établir  ù  Poitiers,  où  il  rétablit  le  mo- 
nastère de  Saint-IIilaire,  dont  il  fut  ensuite 
abbé.  De  Poitiers  °  il  passa  dans  le  royaume 
d'Austrasie  où  il  bâtit  divers  monastères  :  le 
dernier  fut  dans  une  ile  du  Rhin  proche  la 
ville  d'Augslz,  appelé  Sechinghen ,  qui  est 
aujourd'hui  un  Chapitre  de  chanoinesse.  On 
uicl  sa  mort  sur  la  tin  du  sixième  siècle.  Les 
écrits  qu'on  lui  attribue  sont  un  livred'A'.i/i'o;-- 
tations  ;  un  autre  d'A  vis  aux  moines  ;  un  d'Ins- 
truction aux  peuples  d'Augstz,  et  un  qua- 
trième rfcs /Ic^cs  de  suint  Ililaire  :  msiis  on 
n'apporte  "  aucune  preuve  que  ces  ouvrages 
soient  de  lui.  Il  n'est  parlé  de  Fridolin  dans 
aucun  des  anciens  qui  ont  travaillé  sur  les 
auteurs  ecclésiastiques.  On  sait  seulement 
par  le  témoignage  de  Gogon,  l'un  des  mi- 
nistres du  roi  Sigebert  en  363,  qu'il  était 
savant  et  que  son  savoir  était'  connu  dans  les 
palais  des  princes,  où  il  y  en  avait  apparem- 
ment quelques  monuments. 


^<i>Rt.  Illluiro 
1  l'nlllor?. 


CHAPITRE  XXXI. 

Januarin  moine  de  Saint-Anrélien  d'Arles  [après  l'an  553] ,  saint  Prétextât 

évêquc  de  Ronen  [586],  saint  Véran  évêqne  de  Cavaillon  [après  l'an 

589],  Antmonde  évêqne  de  Tonl  [à  la  fin  dn  VF  siècle]. 

[Écrivains  latins.] 


1.  Tout  ce  que  l'on  sait  de  Januarin,  c'est 
qu'il  avait  été  disciple  de  saint  Florentin, 
premier  abbé  du  monastère  que  saint  Auré- 
lien  fonda  à  Arles  par  les  libéralités  du  roi 
Childebert.  Il  semble  qu'après  la  mort  de 
saint  Florentin,  qui  arriva  en  333,  Januarin 


eut  quelque  part  au  gouvernement  de  ce 
monastère,  puisque  dans  les  diptyques  qui 
se  trouvent  ensuite  du  titi-e  de  fondation 
dans  le  Code  des  règles,  il  est  nommé  entre 
les  pères  '  et  les  instituteurs  de  cette  mai- 
son. Le  corps  de  saint  Florentin  ayant  été 


1  Cave,  Histor.  lilt.,  pag.  350. 

2  Ibid.  —  3  Ibid. 

'•  Labbe,  tom.  VIII  Bibl.  Pa(r.,  pag.  707. 
5  Mabil.,  lib.  Vlll  Annal.,  pag.  221. 

XL 


«  Boll.  ad  diem  6  mart.,  pag.  439. 
''  De  ctijvs  Fridnlini  doctrina  regum  sunt  or- 
nata  palatia.  Duchesne,  tom.  I,  pag.  844. 
»  Cod.  regul.,  pag.  69. 

21 


322 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 


transféré,  en  388,  de  l'Église  de  Sainte-Croix 
dans  celle  de  Saint-Pierre,  par  les  soins  de 
l'abbé  Constantin,  Januarin  flt  à  cette  occa- 
sion réi)itap]ie  de  ce  saint  qiiu  Ton  voit  en- 
core sur  son  tombeau.  Elle  est  composée  de 
trente-sept  vers  acrostiches,  dont  les  lettres 
initiales  forment  ces  mots  :  Florentinus  abbas 
hic  in  puce  ijuiescit.  Amen.  Januarin  ne  s'est 
point  oublié  dans  cette  épilaphe  :  il  s'y  re- 
commande aux  prières  du  saint,  de  même 
que  le  SLidplcur  qui  l'avait  gravée  et  qui 
avait  orné  le  tombeau,  et  deux  moines  du 
même  monastère.  Bénigne  et  Hilarin.  Baro- 
nius  a  rais  cette  épitaplie  dans  ses  Annules; 
Saxi,  dans  l'Histoire  des  évêques  d'Arles;  cl  le 
Père  Le  Cointe,  dans  les  Annales  de  France, 
sur  l'an  53  J. 
u.(!î,'"*.rci.t  2.  On  ne  peut  mettre  plus  tard  qu'en  534 
n»°cn:  ul  l'épiscopat  de  saint  Prétextât,  puisqu'en 
*"'"■  cette  année  il  souscrivit  au  troisième  con- 

cile de  Paris,  le  second  des  métropolitains. 
Sa  bonté,  ou  si  l'on  veut  sa  simplicité,  l'enga- 
gea dans  une  affaire  dont  il  eut  tout  le  temps 
de  se  repentir.  Il  avait  de  la  tendresse  pour 
Mérovée  qu'il  avait  autrefois  tenu  sur  les 
fonts  de  baptême;  gagné,  d'ailleurs,  par  des 
sollicitations  de  Bruueliaut,  veuve  de  Sige- 
bert,  roi  d'Austrasie,  il  les  maria  en  face  de 
l'Eglise,  quoique  Mérovée  fût  neveu  de  cette 
princesse  par  son  mari.  Ce  mariage  était  vi- 
siblement contre  les  canons.  Mais  ce  ne  fut 
pas  la  seule  faute  que  l'on  reprocha  à  Pré- 
textât ;  on  l'accusa  encore  d'avoir  marié 
Mérovée  contre  la  volonté  du  roi  Chilpéric, 
son  père.  Cité  devant  un  concile  de  qua- 
rante-cinq évêques,  qui  tenaient  leur  assem- 
blée dans  l'église  de  Saint-Pierre  à  Paris, 
aujourd'hui  Sainte -Geneviève,  il  s'accusa 
coupable,  suivant  en  cela  l'avis  des  évêques 
de  cour;  se  jeta  aux  pieds  du  roi,  et  dit  qu'il 
mettait  toute  son  espérance  en  sa  miséri- 
corde. Chilpéric  ordonna  aux  évêques  de  le 
déposer  de  l'épiscopat  :  tous  souscrivirent  à 
cette  sentence.  Prétextât  fut  mis  en  prison, 
et  de  là  envoyé  en  exil  à  une  de  ces  iles 
que  l'on  appelle  Jersey  et  Guernesey,  près  de 
Coutance  en  basse  Normandie.  Ce  fut  là 
qu'il  composa  certaines  formules  de  prières. 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

dont  saint  Grégoirede  Tours  dit  '  que  le  style 
est  assez  tolérable  et  convenable  eu  plu- 
sieurs endroits  à  ce  genre  d'écrire.  Il  y  a 
aiipaience  que  Prétextai  avait  travaillé  sur 
la  liturgie  :  nous  n'avons  plus  ces  prières.  On 
sait  seulement  que,  rappelé  de  son  exil  après 
la  mort  de  Chilpéric,  il  assista  en  383  au  se- 
cond concile  de  Mâcon,  qu'il  lit  lui-même  la 
lecture  de  ces  formules  en  présence  des  évê- 
ques ;  que  quelques-uns  les  approuvèrent,  et 
que  d'autres,  ce  semble,  on  plus  grand  nom- 
bre, ne  les  trouvèrent  pas  de  leur  goût  , 
parce  qu'il  n'y  avait  pas  suivi  les  règles.  Il 
fut  assassiné,  en  386,  dans  le  chu-ur  de  son 
Église  un  dimanche  au  milieu  de  l'office.  La 
reine  Frédégonde  fut  soupçonnée  de  ce 
meurtre,  parce  qu'on  ne  doutait  pas  qu'elle 
n'eût  été  le  premier  mobih^  de  la  condamna- 
tion de  Prétextât  sur  qui  elle  avait  déchargé 
une  partie  de  la  haine  qu'elle  portait  à  Bru- 
nehaut  dont  cet  évèque  était  ami.  L'Eglise 
l'honore  comme  martyr  au  24  février. 

3.  Parmi  les  évêques  qui  assistèrent  avec  4^"  J,"^; 
lui  au  second  concile  de  Màcon,  en  383,  on  jjjljj"  =  >" 
compte  saint  Vérau,  évoque  de  Cavaillon  ; 
il  était  né  vers  l'an  328.  En  387  il  leva  *  des 
fonts  de  baptême  le  lils  de  Cliildebcrt  II  ; 
deux  ans  après  le  roi  Gontran'Ie  nomma 
avec  deux  autres  évêques  pour  informer  de 
l'auteur  du  meurtre  de  saint  Prétextât.  La 
môme  année,  c'est-à-dire  en  589,  il  fit  '  ré- 
ponse avec  neuf  autres  évêques  à  ceux  du 
premier  concile  de  Poitiers,  au  sujet  des 
troubles  arrivés  dans  le  monastère  de  Sainte- 
Croix  en  la  même  ville,  approuvant  tout  ce 
qui  avait  éti-  fait  dans  cette  assemblée.  Nous 
avons  letlc  réponse,  dont  nous  aurons  lieu 
de  parler  ailleurs.  Nous  avons  aussi  sous  le 
nom  de  saint  Véran  un  petit  écrit  sur  la  con- 
tinence des  prêli-es',  ou  plutôt  l'avis  qu'il 
ouvrit  sur  ce  sujet  dans  (juelques  conciles  ; 
il  porte  qu'il  y  a  de  l'indécence  que  le  même 
clerc  fasse  les  fonctions  de  mari  et  de  prê- 
tre, et  qu'il  passe  du  lit  conjugal  à  l'autel, 
où  il  doit  offrir,  non-seulement  pour  ses  pé- 
cliés,  mais  aussi  pour  ceux  du  peuple.  «  Si 
le  prêtre  Sadoch,  dit-il,  refusa  *  de  donner  à 
IJavid  et  à  ceux  de  sa  suite  les  pains  de  pro- 


'  Prœlexlalus  nrationes  i/uus  in  exilio  positiis 
scalpsil,  coram  episcoiiU  recilavit.  Quœ  ijuilms- 
dam  placuerant,  a  quilntsdam  vero  quia  nitem 
minime  secutus  fueral.  reprcltendebanlur.  Stylus 
lamen  per  loca  ecclesiasUcus  et  ralionabilis  eral. 
Ciregur.  Turoii.,  lili.  VIII,  vint.  .\x. 

*  Ideiu,  lib.  IX,  cap.  iv. 


'  Ihid.,  lib.  VIII,  cap.  XXXI. 

'  Ibid.,  lib.    IX,  cap.  XLI. 

"  (Jn  le  trouve  au  lome  LXXII  ib'  la  Palrologie 
latine,  col.  TOI.  (L'i'dileur.) 

«  Si  sdccrdos  Sadoch  non  pnu.<t  panr.i  proposi- 
lionis  iradidit  quam  se  et  pueras  suos  David  jam 
lerlio  die  mundos  esse  a  mulieribus  fateretur , 


;  VI"  SIÈCLE.]        CHAIMTIIK  XXXII.  —  SAINT 

position  jusqu'A  ce  qu'ils  l'eussent  iissurd 
qu'ils  avaient  i^arili!  la  conlincnce  depuis 
trois  jours,  quel  est  le  piètre  qui  osera, 
après  les  souillures  des  passions,  consacrer 
la  chair  sans  tache  de  l'Aftiicau  qui  est  of- 
ferte pour  le  salul  du  monde?»  Saint  Vérau 
propose  aux  évèiiues  de  prendre  dans  les 
monastères  de  leurs  diocèses  des  moines  de 
vertu  et  de  probité  pour  remplir  les  fonc- 
tions de  clercs,  disant  qu'il  était  plus  utile  ;\ 
l'Eglise  d'avoir  un  petit  nombre  de  bons  mi- 
nistres, que  d'en  avoir  beaucoup  de  mau- 
vais, et  dont  la  conduite  déshonorait  le  mi- 
nistère ecclésiastique. 

4.  Aulmonde,  treizième  évêque  de  Toul, 
composa  sur  la  fm  du  vi»  siècle  quelques 
écrits  et  des  répons  en  l'honneur  de  saint 
Èvre,  l'un  de  ses  prédécesseurs,  pour  trans- 


AIINAIUE,  liTIENNE,  ETC.  32:{ 

mcllre  A  la  postérili'  la  mémoire  de  ses  ac- 
tions, et  rendre  [)lus  solennel  l'olUce  que  Ton 
faisait  dans  l'higlisc  érigée  sous  son  nom 
dans  un  des  faubourgs  de  la  ville.  Dom  Ma- 
billou  entend  par  ces  écrits,  la  Vie  de  saint 
Kvro.  Il  fait  les  rpuian|uos  suivantes  :  1"  il  est 
dit  dans  cette  \  ic  que  ce  saint  évèque,  étant 
à  ChiVlons-sur-Saônc  ,  trouva  trois  prison- 
niers dans  les  fers;  2°  qu'Adrien,  h  qui  il 
en  tlemanda  l'élaugissement,  le  lui  ayant  re- 
fusé, il  l'obtint  de  Dieu  par  ses  prières.  Se- 
lon Mabillon,  il  y  a  faute  dans  l'anonyme  qui 
a  donné  les  Actes  des  évêques  de  Toxtl  ;  pre- 
nant Adrien  pour  l'empereur  de  ce  nom,  il 
s'est  imaginé  faussement  que  saint  Èvre  vi- 
vait dans  les  commencements  du  ii"  siècle, 
tandis  ijne  par  Adrien  il  faut  entendre  le 
juge  (le  Cliàlons  ou  le  gouverneur. 


CIIAPITHK    XXXn. 

Saint  Aunaire  évêqne  d'Auxerre  [586 1,  Etienne  prêtre  d'Auxerre,  Sédatns 

évêque  de  Béziers,  saint  Yrieix  abbé  d'Atane  [591 1, 

Contran  roi  de  France  [593]. 

[ÉcrivalDS  latins.] 


s.iDt  An.       I,  Saint  Aunaire  ou  Aunacaire  assista  au 
dAuMrr..si  couclle  dc  Paris,  en  373,  au  premier  de  Mâ- 

lellre  au    prO-  i  '  l 

Bépoo''M°'d'E'-  ''O"'  ^"  ^^^'  ^*  ^  ^^  autre  qui  se  tint  en  la 
iieiin..  même  ville  quatre  ans  après.   Il   eut  part 

aussi  à  la  lettre  que  les  évêques  qui  se  trou- 
vaient auprès  du  roi  Contran,  écrivirent  aux 
évêques  du  premier  concile  de  Poitiers.  Nous 
avons  de  lui  quarante-cinq  décrets  '  qu'il  lit 
dans  un  concile,  où  il  avait  appelé  sept  abbés, 
trente-quatre  prêtres  et  trois  diacres.  Les  ac- 
tes de  ce  concile  sont  datés  de  la  dix-septiè- 
me année  du  règne  de  Chilpéric,  de  Jésus- 
Christ  578.  Aunacaire  en  fit  confirmer  les 
statuts  par  le  roi  Contran.  Le  même  évêque' 
régla  les  processions  que  l'on  devait  faire 
tous  les  jours  de  chaque  mois  dans  les  pa- 
roisses de  son  diocèse  :  la  ville  d'Auxerre 
qui  était  comptée  pour  la  première,  devait 
marcher  le  premier  jom-  ;  Appoigny  le  se- 


cond, et  les  autres  de  suite.  Il  désigna  aussi 
les  églises  d'Auxerre  où  les  processions  de- 
vaient se  terminer  :  «  Le  premier  jour  de 
janvier  à  Saint-Cermain ,  le  premier  de  fé- 
vrier à  Saint-Amatu  ou  Amateur,  le  premier 
de  mars  à  Saint-Marien,  et  ainsi  des  autres.» 
Il  régla  encore  la  manière  de  célébrer  les 
Vigiles  dans  l'Église  cathédrale  de  Saint- 
Etienne,  partageant  les  clercs  et  les  moines 
pour  faire  ces  fonctions  tour  <^  tour  :  il  y  a 
des  vigiles  marquées  pour  chaque  jour,  hors 
le  samedi.  Sa  vénération  particulière  pour 
saint  Amateur  et  pour  saint  Cermain,  lui  fît 
naître  le  dessein  de  faire  écrire  leur  Vie.  Il 
s'adressa  pour  ce  sujet  à  un  prêtre  nommé 
Etienne,  qui  était  venu  d'Afrique  dans  les 
Caules,  et  qui  fut  reçu  depuis  dans  le  clergé 
d'Auxerre.  Etienne  écrivait  en  prose  et  en 
vers.  Aunacaire  avait  déjà  eu,  ce  semble, 


quisimmaculatas  Agni  carnes  ad  salutem  mundi 
prœstitas,  post  passionwn  inqvinainenta  vel  etiam 
auUeal  consecrare  ?  Tom.  V  Concil.,  pug.  919. 


'  Tom.  V  Concil.,  pag.  906. 

*  Iliilor.  epiic,  Ànlisiodor. 

BibUolh,.  Labb.,  pag.  420,  421. 


cap.   XXIX,  tom.  I 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


3i4 

des  preuves  de  son  savoir  en  l'un  et  l'autre 
genre  d'écrire.  Voulant  donc  contenter  les 
esprits,  dont  les  uns  sont  portés  pour  la 
prose,  les  antres  pour  la  poésie,  il  écrivit  ' 
à  Etienne  de  mettre  en  prose  la  Fie  de  saint 
Amateur  et  on  vers  celle  de  saint  Germain. 
Etienne,  quoi(]iie  persuadé  de  son  incapaci- 
té, répondil^qu'il  ferait  ce  que  le  saint  évèque 
demandait  de  lui,  en  le  priant   humblement 
de  lui  pardonner  les  fautes  de  langage  qui 
lui  échapperaient,  et  la  rusticité  de  son  style  : 
c'est  sur  le   témoignage  de  ces  dcu.\  lettres 
que  les  Bollandistes  reconnaissent  le  prêtre 
Etienne  pour  auteur  de  la  Vie  de  saint  Ama- 
teur qu'ils  nous  ont  donnée  au  1"  mai  sur 
plusiem's  manuscrits.  Elle  est  mêlée  de  quan- 
tité de  traits  qui  appartiennent  à  l'Histoire 
de  saint  Germain,  écrite  par  le  prêtre  Cons- 
tance ;  mais  Etienne  les  a  mis  en  son  style 
qui  est  très-mauvais,  et  qui  n'a  rien  du  sim- 
ple et  du  naturel  que  l'on  doit  toujours  em- 
ployer dans  ce  genre  d'écrire.  On  ne  sait 
point  s'il  écrivit  en  vers  la  Vie  de  saint  Ger- 
juaiu,  comme  Aunacaire  l'en  avait  prié  :  ce 
qui  donne  lieu  d'en  douter,  c'est  que'  le 
moine  Eric  en  composa  une  dans  ce  goùt-l;\ 
vei-s  le  L\^  siècle,  à  la  prière  de  Lothaire, 
abbé  de  Saint-Germain  d'Auxerre.  On  trou- 
ve dans  le  cinquième  tome  '  des  Conciles  deux 
lettres  du  pape  Félage  à  Aunaire  :  car  c'est 
ainsi  qu'il  l'appelle.  La  première  est  datée 
du  o  octobre  de  la  septième  année  de  Ti- 
bère, à  compter  depuis  l'an  574,  qu'il  fut 
déclaré  César,  ce  qui  revient  à  l'an  580.  Le 
Pape  loue  Aunaire  du  désir  qu'il  avait  eu  de 
faire  le  voyage  de  Rome,  s'il  n'en  eût  été 
empêché  par  les  mouvements  des  troupes 
ennemies,  c'est-à-dire  des  Lombards  qui 
étaient  entrés  en  Italie.  Il  lui  reproche  dou- 
cement de  ne  s'être  pas  assez  intéressé  au- 
près des  rois  de  France  pour  les  engager  à 
prêter  du  secours  à  l'Église  de  Rome,  dans 
un  temps  où  elle  avait  tout  à  craindre  de  la 
part  de  ces  barbares,   et  il  l'exhorte  à  les 
empêcher  du  moins,  autant  qu'il  serait  eu 
lui.  de  faire  une  alliance  avec  eux.  Il  ajoute 
qu'il  lui  envoyait  les  reliques  qu'il  avait  de- 
mandées conjointement  avec  le   roi  Cliildc- 
bert  II.  Cette  lettre  dc  Pelage  était  une  ré- 
ponse à  la  lettre  qu'il  avait  '  reçue  d'Aunaire, 
et  qui  n'est  pas  venue  jusqu'à  nous.  Cet  évo- 


que en  écrivit  '  une  seconde  qui  est  encore 
perdue  :  il  donnait  avis  an  Pape  du  progrès 
que  la  religion  catholique  faisait  dans  les 
Gaules,  où  l'on  bâtissait  grand  nombre  de 
nouvelles  églises.  Pelage  lui  dit  dans''  sa  ré- 
ponse, que  puisque  lui  et  les  autres  évêques 
des  Gaules  avaient  une  même  foi  avec  l'É- 
glise de  Rome,  ils  devaient  aussi  s'intéresser 
par  leurs  prières  à  lui  procurer  la  paix  et 
la  tranquillité.  Cette  lettre  est  du  1"  novem- 
bre, la  cinquième  année  de  l'empire  de  Mau- 
rice, indiclion  ciiuiuièmc,  c'est-à-diie  de  l'an 
58G.  [Ces  dilitirentes  pièces  se  trouvent  avec 
une  notice  tirée  de  la  Gallia  cliristiatia,  au 
tome  LXXn  de  la  Patrolotjie  latine,  col.  759]. 

2.  Le  nom  de  Sédatus,  évèque  de  Béziers, 
se  lit  parmi  les  souscriptions  des  évêques  du 
concile  tenu  à  Tolède,  eu  589,  et  parmi  cel- 
les du  concile  de  Narbonne,  assemblé  le  1" 
novembre  de  la  même  année.  On  lui  attribue 
une  homélie  sur  l'Kpiphanie,  imprimée  dans 
le  onzième  tome  '  de  la  Bihlidth'pque  des  Pères 
[et  dans  le  tome  LXXII  de  la  Patrologie  latine, 
col.  7G!tetsuiv.].  Elle  est  d'un  style  simple  et 
net,  tel  qu'il  convient  à  des  homélies.  Sédatus 
explique  dans  un  sens  spirituel  les  trois  mys- 
tères que  l'on  célébrait  en  ce  jour:  l'adoration 
des  mages,  le  baptême  de  Jésus-Christ  et  le 
changement  de  l'eau  en  vin  aux  noces  de  Ca- 
na.  Il  explique  le  retour  des  mages  par  un  au- 
tre chemin,  de  la  conduite  dift"érente  que  nous 
devons  garder,  lorsque  nous  nous  conver- 
tissons à  Dieu.  L'orgueil  nous  a  fait  tomber, 
il  faut  nous  relever  par  l'humilité,  qui  seule 
peut  nous  faire  rentrer  dans  le  paradis,  d'où 
le  péché  de  vanité  nous  avait  exclus.  Le 
cent  trentième  sermon  dans  VAppendice  de 
saint  Augustin  porte  le  nom  de  Sédatus,  mais 
il  n'est  pas  du  même  style  que  le  précédent. 
Ce  n'est  qu'un  composé  de  plusieurs  frag- 
ments de  divers  sermons  ;  il  fut  prêché  le  1" 
janvier.  Le  cent  vingt-neuvième  dans  le  mô- 
me Appendice  est  encore  sur  les  calendes  de 
janvier,  et  du  même  auteur.  [Les  écrits  de 
Sédatus  qui  nous  restent  sont  dans  le  tome 
LXXII  de  la  Patrologie  latine,  col.  769  et  suiv. 
et  daus  le  tome  V,  part.  2%  col.  UX)1-1003.] 

3.  Ce  fut  saint  Nicel',  évèque  de  Trêves, 
qui  forma  saint  Yricix  dans  la  science  des 
saints  et  dans  l'intelligence  des  livres  sacrés. 
Après  l'avoir  suffisamment  instruit,  il  l'ad- 


SMili», 
évCque  de  bé- 
liers ;  »t-5 
«chu. 


Siio(  Yrirli 
•  'Ud'AUu: 
ta»  écriu. 


'  Aunar.  Epistola  apud   Bolland.,  toin.   I  .Mail, 
pag.  50. 
•  .Sli;i)li.  Epist.,  ibid. 
»  llulteau,  toui.  Il  Uist.  occid.,  iwg.  587,  588. 


»  Toiii.  V  Concil.,  pag.  934.  —  »  Ibid.  —  «  Toni. 
V  Concil.,  fm(j.  9:U.—  '  Ibid. 
»  T.iiii.  XI  JHbl.  Pat.,  piig.  nt!)8. 
»  Greg.  Turon.,  Yila  Pat.,  cap.  xvii. 


[VI"  SIÈCLE.!  CHAPITRE  XXXll.  —  SAINT 

mil  diins  le  clergé  et  l'ordoima  prêtre.  Jo- 
coude  son  père  tMant  mort,  il  s'en  retourna 
à  Limoges,  lieu  de  sa  naissance,  pour  con- 
soler IV'lagie,  sa  mère.  Au  bout  de  (incique 
temps,  il  embrassa  le  paiti  do  la  rclrailc,  et 
bûlit  le  monastère  d'Atane ,    connu  depuis 
sous  le  nom  de  Saint-Yrieix.  On  marque  • 
qu'une  de  ses  principales  occupations  était 
de  li-auscrire  des  livres,  dont  il  faisait  [iré- 
sent  aux  paroisses  voisines  de  son  monas- 
tère. 11  mourut  dans  le  mois  de  juillet  de  l'an 
391,  âgé  de  plus  de  quatre-vingts  ans.  Plu- 
sieurs années  avant  sa  mort,  il  écrivit  son 
testament  de  sa  propre  main  :  il  est  datij  de 
la  veille  des  calendes  de  novembre,  la  onziè- 
me année  du  règne  de  Sigebert  h  qui  Li- 
moges appartenait ,  c'est-à-dire  du  31  octo- 
bre 572.  Le  saint  déclare  dès  le  commence- 
ment, que  ce  testament  lui  est  commun  avec 
Pélagie  sa  mère,  saine,  comme  lui,  d'esprit 
et  de  jugement,  et  maîtres  de  leurs  biens  ; 
que  la  crainte  d'une  mort  imprévue  les  a 
portés  l'un  et  l'autre  à  disposer  de  leurs  pos- 
sessions, et  qu'ils  ont  fait  signer  ce  testa- 
ment par  un  nombre  compétent  de  témoins. 
Après  quoi  il  ajoute,  que  si  à  l'avenir  quel- 
qu'un entrepi'enait  d'y  donner  atteinte,  soit 
en  vertu  de  quelques  nouvelles  lois,  soit  à 
cause  de  quelque  loi  ancienne  qui  lui  aurait 
été  inconnue,  soit  pour  quelque  :iutro  i.iisun, 
il  entend  qu'il  vaille  du  moins  comme  un  co- 
dicille. Puis,  s'adressant  à  saint  Martin,  il 
l'institue  son  héritier  universel,  en  donnant 
toutefois  des  biens  considérables  h  son  mo- 
nastère d'Atane,  mais  ;\  la  charge  d'être  sou- 
mis à  la  basilique  de  Saint-Martin  de  Tours. 
Comme  il  avait  témoigné  -  choisir  sa  sépul- 
ture dans  l'oratoire  de  Saint-Hilaire,  il  con- 
jure le  prévôt  de  Saint-Martin  et  les  moines 
d'Atane  '  par  le  corps  et  le  sang  de  Jésus- 
Christ,  de  faire  célébrer  à  perpétuité  et  en 
tout  temps,  le  jeudi,  les  Matines  dans  ledit 
oratoire  et  ensuite  la  messe  en  l'honneur  de 
ces  deux  saints.  Il  entre  dans  le  détail  de 
tous  les  vases  d'or  et  d'argent,  des  voiles, 
nappes  et  autres  ornements  qu'il  lègue,  mar- 
quant le  prix  de  chacun;  et  donne  la  liberté 
à  un  grand  nombre  d'esclaves  des  deux  sexes 
mariés  et  non  mariés,  disant  anathème  à 


AUNAIIIE,  ETIENNE,  ETC.  323 

quiconque  s'opposera  ;'i  l'exécution  de  ses 
volontés  el  de  celles  de  IN'lagie  sa  mère, 
qui  souscrivit  aussi  ;\  ce  testament.  Les  té- 
moins, qui  y  souscrivirent,  sont  Alstidius  , 
Calpurnius,  Léon,  Nectaire;  el  Aideltiiis  ;  on 
le  trouve*  dans  les  Anaicctcs  de  dom  Mabil- 
lon,  à  la  suite  de  la  Vie  de  saint  Yrieix  écrite 
par  saint  Grégoire  de  Tours  el  ailleurs.  Ce 
saint  fait ''mention  d'un  second  testament  que 
saint  Yrieix  fit  qiiclqni's  jours  avant  sa  mort, 
par  lequel  il  établissait  saint  Martin  et  saint 
ililaire  pour  ses  héritiers  ;  nous  ne  l'avons 
pas  :  ce  n'était  apparemment  qu'une  confir- 
mation du  premier.  Saiut  Grégoire  de, Tours  " 
écrivit  la  Vie  de  saiut  Nicet  en  partie  sur  ce 
qu'il  en  avait  appris  de  la  bouche  de  saint 
Yi'ieix  qui  avait  été  son  disciple.  Ce  fut  en- 
core sur  son  témoignage  '  qu'il  rapi)orle  plu- 
sieurs miracles  de  saint  Julien,  martyr,  et  de 
saint  Martin.  [La  Vie  et  le  Testament  de  saint 
Yrieix  se  trouvent  parmi  les  nnivres  de  saint 
Grégoire  de  Tours,  au  tome  LXXI  de  la  Pa- 
trologie  latine,  col.  773  et  suiv.] 

4.  Le  second  concile  de  Màcon  en  585,  (lomran  roi 
avait  recommandé  l'observation  du  diman-  iç  f.  Tom.'  v 
che  qui  était  fort  négligée  ;  il  avait  défendu  ™i- 
de  plaider  ce  jour-là,  sous  peine  de  perdre  sa 
cause,  et  de  se  mettre  en  nécessité  d'atteler 
des  bœufs,  sous  peine  aux  pajsans  et  aux 
esclaves  de  coups  de  bâton.  L'intention  de 
ce  concile  était  que  l'on  passât  ce  saint  jour 
dans  le  chant  des  hymnes  et  des  louanges  de 
Dieu  ;  que  chacun  se  rendît  à  l'église  la  plus 
proche  de  sa  maison  pour  y  prier  avec  lar- 
mes, et  tendre  ses  mains  vers  le  ciel  pour 
en  recevoir  du  secours;  enfin  que  conformé- 
ment à  ce  qui  en  est  dit  dans  la  loi  et  dans 
les  Prophètes,  ce  jour  dans  lequel  nous 
avons  été  délivrés  de  l'esclavage  du  péché, 
fût  pour  nous  un  jour  de  repos  et  de  sancti- 
fication. Le  roi  Gontran,  dans  le  royaume 
ducpiel  ce  concile  avait  été  assemblé,  en 
confirma  les  canons  par  une  ordonnance 
datée  du  10  novembre,  la  vingt-quatrième 
année  de  son  règne,  c'est-à-dire  en  583.  Il 
s'arrête  piincipalement  à  ce  qui  regarde  la 
sanctification  du  dimanche  et  les  autres  so- 
lennités de  l'année,  voulant  que  les  évéques 
et  les  juges  de  son  royaume,  à  qui  son  or- 


•  Mabil.,  lib.  ■VIII  Annal.,  pag.  223. 

'  Grcg.  Turon.  in  Yita  Aredii,  eap.  xsxiv. 

'  Adjuramxi^  prœposilum  sancti  Martini  el  mo- 
nachos  Alanenses  per  corpus  et  saiiguineiii  Do- 
mini  nostri  Jesu  Christi,  ut  in  oratorio  sancti 
Uilarii  quinta  feria  omni  tempore  malurius  Ma- 


tiitiu.i  et  missa  sanctorum  domnorum  a  mona- 
chis  ibidem  revocelur.  Greg.  Turou.,  pag.  13 li. 

5  Mabil.  Analect.,  pag.  208. 

'  Greg.  Turon.,  lib.  X,  cap.  SXIX. 

"  lil.  De  Vitis  Pal.,  cap.  xvii. 

"  lil.  De  sanclo  Jul.,  cap.  xl. 


326 


HISTOmE  GÉNKOALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Grep.Tiiron.| 
lib.   IX,  up. 


Tom.  V  Con- 

ni.,  p«g.  553, 

et  hrtg.  Tu- 
roo..nl'.VIll 
ca]>.  xxA. 


donnance  est  adressée,  veillassent  soigneu- 
sement <'i  ce  qu'elle  fût  observée  dans  tous 
ses  points.  Il  dit  aux  évêques  qu'ils  ne  se- 
ront point  exempts  de  péché,  s'ils  négligent 
de  corriger  et  de  reprendre  les  prévarica- 
teurs, comme  lui-même  ne  se  croyait  pas  à 
couvert  de  la  colère  de  Dieu,  de  qui  il  avait 
reçu  le  royaume ,  s'il  manquait  de  sollici- 
tude envers  ses  sujets.  Il  représente  aux  ju- 
ges séculiers  la  nécessité  que  leur  imposent 
leurs  charges  de  suivre  exactement  les  rè- 
gles de  la  justice  et  de  l'équité,  dont  la  prin- 
cipale est  de  contenir  les  peuples  dans  leurs 
devoirs  à  l'égard  de  Dieu,  u  C'est  pour  cela, 
ajoute  ce  prince,   que  nous  ordonnons  de 
célébrer  les  jours  du  dimanche,  auxquels 
nous  honorons  le  mystère  de  la  résurrec- 
tion, et  toutes  les  autres  solennités  où  tout 
fe  peuple  s'assemble  dans  l'église  selon  la 
coutume.  Nous  voidons  qu'en  ces  saints  jours 
tous  s'abstiennent  de  tout  travail  corporel, 
hors  d'apprêter  à  manger.  dD  défend  même 
la  plaidoirie,  et  veut  que  les  prévaricateurs, 
s'ils  sont  du  nombre  des  clercs,  soient  punis 
suivant  les  canons;  et  que  s'ils  sont  laïques, 
on  les  punisse  selon  la  rigueur  des  lois  civi- 
les. Le  droit  d'asile  avait  aussi  été  confirmé 
par  le  huitième  canon  du  concile  dent  nous 
venons  de  parler  :  Contran  fut  le  premier  à 
l'observer  religieusement.  Célébrant  à  Châ- 
lons-sur-Saone,  la  fête  de  saint  Marcel,  lors- 
qu'il s'approchait  de  l'autel    pour  commu- 
nier, un  homme  s'avauça,  comme  pour  lui 
parler  ;  mais  dans  l'empressement  où  il  était 
de  faire  son  coup,  un  couteau  lui  tomba  des 
mains.  11  fut  arrêté  aussitôt ,  et  on  trouva 
qu'il  en  tenait  encore  un  autre.  Conduit  hors 
de  l'église  et  mis  à  la  torture,  il  confessa 
qu'il  avait  été  envoyé  pour  tuer  le  roi,  et 
que  l'on  avait  choisi  l'église  pour  cet  atten- 
tat, parce  qu'il  n'y  était  pas  gardé  comme 
ailleurs.  Il  déclara  les  complices,  qui  furent 
punis  de  mort;  mais  le  roi  lui  donna  la  vie, 
parce  qu'il  avait  été  pris  dans  l'église.  A  la 
suite  de  V Ordonnance  de  Contran,  on  a  mis 
dans  le  cinquième  tome  des  Conciles  un  long 
passage   de   saint   Grégoire   de  Tours,    qui 
contient  une  partie  du  discours  de  ce  prince 
aux  généraux  de  son  armée,  à  cette  occa- 
sion." Il  s'était  chargé  de  la  guerre  contre 
les  Espagnols,  et  il  avait  fait  entrer  sou  ar- 
mée dans  le  Languedoc,  se  promettant  d'en- 
lever toutes  ces  provinces  aux  Coths;  mais 
cette  guerre  ne  lui  fut  pas  avantageuse.  Ses 
troupes  contraintes  de  se  retirer,  firent  de 


grandes  pertes  ;  et   étant    rentrées  sur  les 
terres  de  France,  elles  y  continuèrent  le  pil- 
lage, comme  elles  avaient  fait  dans  le  pays 
ennemi.  Ce    n'était   partout   que  meurtres, 
que  brigandaires,  qu'incendies  ;   les  églises 
mêmes  ne  furent  point  épargnées.  Contran, 
indigné  du  mauvais  succès  de  l'entreprise, 
et  de  la  licence  des  soldats,  résolut  d'inten- 
ter le  procès  aux  généra  ;ix  mêmes,  qui  se 
réfugièrent  à  Autun,  dans  l'église  de  Saint- 
Symphorien.  Le  roi  y  vint  le  22  août  583, 
qui  était  le  jour  de  la  fête  de  ce  saint,  et 
nomma  quatre  évêques  avec  quelques  sei- 
gneurs de  sa  cour,  pour  faire  rendre  compte 
aux  généraux  de  leur  conduite.  Ils  sortirent 
de  leur  asyle  sur  la  parole  qu'on  leiu-  donna 
qu'ils  auraient  la  liberté  de  se  justifier.  Le 
roi  leur  fil  de  grands  reproches  sur  les  dé- 
sordres qu'ils  avaient  commis  ,  principale- 
ment sur  les  incendies  et  le  pillage  des  égli- 
ses, sur  la  manière  indigue  dont  on  avait 
ti'aité  les  reliques  des  saints  martyrs  pour 
emporter  l'or,  l'argent,  et  les  pierres  pré- 
cieuses de  leurs  châsses  ;  sur  les  mauvais 
traitements  qu'on  avait  faits  aux  prêtres  et 
aux  ecclésiastiques  ;  puis  il  ajouta  :  «  Faut-U 
s'étonner  si  nos  guerres  ont  des  succès  mal- 
heureux, elles  sont  plus  contre  Dieu  que  con- 
tre les  ennemis  de  l'État.  Nous  brûlons  les 
églises  que  nos  ancêtres  ont  bâties,  nous 
trempons  nos  mains  dans  le  sang  des  minis- 
tres de  l'autel,  pour  lesquels  ils  avaient  tant 
de  respect  et  de  vénération.  Je  suis  respon- 
sable à  Dieu  de  tous  ces  désordres,  et  pour 
en   détourner  le  châtiment,  je  n'épargne- 
rai pas  les  vôtres.  »  Celui  des  généraux  qui 
était  chargé  de  répondre  pour  tous  les  au- 
tres, montra  qu'il  n'y  avait  point  de  leur 
faute  dans  tous  ces  excès  ;  que  depuis  long- 
temps il  n'y  avait  aucune  discipline  dans  les 
armées  ;  que  le  soldat  était  eu  possession  de 
mépriser  les  ordres  des  ducs  et  des  comtes; 
et  que  s'il  arrivait  ;'i  quelqu'un  d'entr'eux 
de  vouloir  empêcher   le  pillage,  il   n'était 
point  en  sûreté  de  sa  vie  ;  que  si  l'on  entre- 
prenait de  faire  quelque  exemple  de  sévé- 
rité, aussitôt  il  s'élevait  une  sédition  dans  le 
camp  ;  qn'culin  la  trop  grande  bonté  du  roi 
empêchait  que  les  généraux  ne  fussent  maî- 
tres de  leurs  troupes  à  cet  égard.  Toute  la 
colère  du  prince  aboutit  à  déclarer  qu'à  l'a- 
venir on  punirait  de  nioil  tous  ceux  qui  con- 
treviendraient aux   ordonnances  qu'il  avait 
faites  pour  la  discipline  des   troupes.  Suit    ^^ 
dans  le  même  tome  des  Conciles,  le  traité  de  «"•• 


u.  VCo-  ■ 
(*(.  î'.J 


Gold^sl.loiiii 
1  CiQ!>l.  tni* 
|«r.  f.f.  IJ, 
tom.  Ill,  (t^'t 
603,  61^. 


[Vl*  SIÈCLE.] 

paix  entre  Gonti'jui  et  Gliilil(^berl  :  il  l'ut  pro- 
jette dans  la  ville  d'Audlau,  en  Alsace,  au- 
trefois ville  iinpôriiilo,  et  conclu  an  mois  de 
novembre  de  l'an  387,  en  pn'senro  dtî  plu- 
sieurs ëvèques  et  des  grands  du  parti  des 
deux  rois.  Le  but  de  ce  traité  fut  d'assurer 
la  succession  de  Contran  .'i  Childebert,  et 
d'ôlcr  tous  les  sujets  de  brouilleric  que  la 
mort  précipitée  do  Gliilpéric  avait  causée. 
Les  deux  rois  jurèrent  à.  la  fin  de  ce  traité, 
par  le  nom  du  Dieu  tout-puissant,  par  l'in- 
séparable Trinité,  et  par  le  terrible  jour  du 
jugement,  d'en  observer  tous  les  articles  qui 
peuvent  se  réduire  à  dix  ou  onze.  On  attri- 
bue au  roi  Gontran  quelques  autres  lois, 
mais  ce  ne  sont  que  des  canons  des  deux 
conciles  de  Màcon  ,  ou  des  fragments  de 
quelques  discours  de  ce  prince  rapportés  par 
saint  Grégoire  de  Tours.  Contran  était  fils 
de  Glotaire  I"  et  d'Ingondc.  A  la  mort  de 
son  père,  arrivée  en  361,  il  en  partagea  les 
États  avec  ses  trois  frères,  Charibert,  Sige- 


CJIAIMTRK  XXXIll.  —  PI^-LACK  I,  PAPE 


327 


FrMo-,-.,ln 
Clirnn  r«(i.n 
Almun,llli,]il 
cnp.  LUX, 


bert  et  Gliilpéric  1",  Il  mourut  le  28  de  mars 
de  l'an  .393,  et  fut  enterré  dans  l'église  de 
Saint-Marcel,  ;\  Gliftlons,  oi'i  il  avait  fondé  un 
monastère  ,  et  établi  la  psalmodii;  perpé- 
tuelle, comme  saint  Sigismond  avait  fait 
dans  le  monastère  d'Agaune.  Quelques  an-  Tnm.  vcir 
nées  avant  sa  mort,  il  avait  fait  assembler  '"  '  '"^'  "° 
un  concile  de  dix-sept  évéques  à  Valence,  à 
qui  il  demanda  la  confirmation  des  dona- 
tions faites  ou  k  faire  aux  Lieux-Saints,  soit 
par  lui,  soit  par  Clodeborge  et  Clodchilde 
ses  filles,  consacrées  à  Dieu,  Le  concile  lui 
accorda  ses  demandes,  nommément  à  l'égard 
des  donations  faites  aux  églises  de  Saint- 
Marcel,  de  Ghûlons,  et  de  Saint-Symphorien 
d'Autun  ;  il  défendit  sous  peine  d'anathème 
aux  évoques  des  lieux,  et  aux  rois,  de  rien 
ôter  ou  de  diminuer  de. ces  biens  à  l'avenir. 
Saint  Grégoire  de  Tours  attribue  à  ce  prince 
des  miracles,  même  de  son  vivant,  et  l'Eglise 
l'a  mis  au  nombre  des  saints. 


CHAPITRE  XXXIII, 
Pelage  r,  pape  [559], 


Pilaga,  dli, 
ère  de  l'Egli- 
se    Ttiniaino  , 

liao|)iet'nS:l6* 


IfMi'ne, 


1.  Pelage,  romain  de  naissance  ',  fils  de 
Jean,  qui  avait  été  vicaire  du  préfet  du  Pré- 
toire, fut  un  des  clercs  de  l'Eglise  de  Rome 
que  le  pape  Agapet  mena  avec  lui  à  Gons- 
tantinople,  en  536,  Gomme  il  se  disposait  à 
retourner  en  Italie  vers  le  mois  d'avril  de  la 
même  année,  il  le  déclara  *  son  apocrisiaire 
auprès  de  l'empereur  Justinien.  Pelage  as- 
sista au  concile  que  Mennas,  patriarche  de 
Constantinople,  tint  en  cette  ville  le  2  mai 
suivant.  Il  favorisa  autant  qu'il  dépendit  de 
lui  l'élection  de  Vigile,  que  l'impératrice 
Tliéodora  fit  mettre  sur  le  Saint-Siège  après 
la  mort  d'Agapet,  arrivée  le  22  avril  précé- 
dent; et  sachant  que  l'Empereur  avait  donné 
ses  ordres  pour  le  renvoi  du  pape  Silvérius 
à  Rome,  il  courut  eu  diligence  pour  empê- 
cher que  ces  ordres  ne  fussent  exécutés. 

2.  Vers  l'an  340,  ce  prince  l'envoya  ;\  An- 
'"5  tioche,  avec  commission  d'aller  à  Gaza  pour 

ôter  le  pallium  à  Paul  d'Alexandrie  et  le  dé- 
poser. Il  avait  avec  lui  Éphrem  d'Antioche, 


Pierre  évoque  de  Jérusalem,  |et  Hypace  d'É- 
plièse.  Paul  fut  déposé,  et  Zo'ile  mis  à  sa 
place.  Pelage  passa  d'Antioche  à  Jérusalem, 
d'où  il  vint  à  Gaza.  Après  son  retour  à  Gons- 
tantinople,  quelques  moines  de  Palestine, 
qu'il  avait  vus  en  passant,  lui  apportèrent 
des  extraits  des  livres  d'Origène,  le  priant 
de  leur  aider  à  en  poursuivre  la  condamna- 
tion auprès  de  l'Empereur.  Pelage  n'eut 
point  de  peine  de  se  prêter  à  leurs  désirs, 
parce  qu'il  était  opposé  à  Théodore,  évêque 
de  Césarée  en  Gappadoce  ,  qu'il  savait  être 
origéniste,  mais  qui  avait  beaucoup  de  cré- 
dit à  la  cour,  S'élant  donc  joint  '  au  patriar- 
che Mennas,  ils  poursuivirent  ensemble  la 
condiujination  d'Origène,  qu'ils  obtinrent 
d'autant  plus  aisément,  que  Justinien  *  ai- 
mait à  décider  sur  la  religion. 

3,  En  543,  Pelage  retourua  à  Rome,  après 
un  assez  long  séjour  à  Gonstautinople,  où  il 
s'était  acquis  '  une  grande  faveur  auprès  de 
l'empereur  Justinien,  L'année  suivante  346, 


relourDu 
^me  ot  Hé- 
Tollla. 


'  Tom.  V  Concil.,  pag.  787. 

-  Libérai,  in  Breviar.,  cap.  xxu. 


3  Liljer.  ibid.,  cap,  xxin,  —  *  IbUl. 

^  Procop,  lib,  111  De  Bello  Golh.,  cap.  xvi. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Il  écrit  cur 
Irs  Troj^CU- 
JiilfC--. 


II  «ffompa- 

Vi^ilfl  k  '  ans* 
lanllnoplo  en 
uU.  Il  est  é^u 
pajin  fn  55S. 
Sa  mort  en 
533. 


328 

Tolila  qui  avait  pris  Rome  par  intelligence 
le  17  décembre,  étant  venu  faire  ses  prières 
clans  l'Église  de  Saint-Pieirc,  Pelage  s'avan- 
ça vers  lui,  tenant  l'Évangile  entre  ses  mains, 
et  lui  dit  :  Seigneur,  épargnez  les  vôtres.  » 
Tolila  lui  répondit,  en  lui  insultant  :  »  Vous 
venez  '  donc  à  présent  en  posture  de  sup- 
pliant? —  C'est,  répartit  Pelage,  parce  que 
Dieu  m'a  soumis  à  vous  ;  mais,  Seigneur,  épar- 
gnez vos  sujets.  »  Le  roi  se  rendit  à  ses  priè- 
res, défendit  aux  Goths  de  tuer  pei-sonne,  et 
d'insulter  aux  femmes  ;  mais  il  leur  permit 
le  pillage. 

4.  Cependant  Théodore  de  Cësarëe  se  pré- 
valut de  l'absence  de  Pelage  pour  se  venger 
de  la  cond^mnalion  d'Origèue,  par  celle  des 

I  Trois-Chapitres.  L'édit  qu'il  avait  obtenu  de 
Justinien  sur  ce  sujet  étant  passé  jusqu'à 
Rome,  Pelage  et  un  autre  diacre  de  cette 
église,  nommé  Analolius,  '  écrivirent  à  Fer- 
rand,  diacre  de  Carthage,  de  délibérer  sérieu- 
sement sur  cette  affaire  avec  son  évêque,  et 
les  autres  évêques.  d'Afrique  les  plus  zélés 
et  les  mieux  instruits  ;  et  de  lui  faire  savoir 
ce  qu'ils  auraient  résolu  en  commun.  Pelage 
et  Anatolius  ne  dissimulaient  pas  dans  leur 
lettre,  que  la  condamnation  des  Trois-Cha- 
pitres n'eût  été  faite  par  la  suggestion  des 
acéphales  contre  le  concile  de  Chakédoine  et 
contre  la  lettre  de  saint  Léon  à  Flavien. 

5.  Pelage  fut  du  nombre  de  ceux  que  le 
pape  Vigile  amena  avec  lui  à  Constanlinople 
en  347.  Il  l'accompagna  aussi  à  son  retour 
en  353  ;  mais  Vigile  mourut  à  Syracuse  en 
Sicile  le  10  janvier  delà  même  année.  Après 
trois  mois  de  vacance.  Pelage  fut  élu  pour  lui 
succéder.  Soupçonné  d'avoir  eu  part  aux 
mauvais  traitements  qu'on  avait  fait  souUrir 
à  son  prédécesseur,  et  d'être  complice  '  de 
sa  mort,  il  ne  se  trouva  point  d'évêques  qui 
voulussentl'ordonner,  sinon  Jean,  évêciuede 
Pérouse,  et  Bonus  de  Férenliu  avec  André, 
prêtre  d'Oslie.  Cette  ordination  extraordinai- 
re, qui  se  fit  le  10  avril  333,  lui  attira  l'aver- 
sion du  peuple.  Il  y  eut  même  plusieurs  des 
plus  gens  de  bien ,  des  plus  sages  et  des  plus 
nobles  (jui  se  séparèrent  de  sa  communion, 
pour  le  soupçon  d'avuir  été  cause  de  la  mort 
de  Vigile.  Pour  s'en  purger,  Pelage,  de  l'avis 
du  patrice  Narsès  qui  commandait  pour  l'Em- 
pereur en  Italie,  ordonna  une  procession  ' 

'  Procop.,  lili.  m  fle  Bello  Golh.,  cnp.  xx. 
•  Faciiiiil.,  lil).  IV,  cap.  ni. 
9  Lib.  l'onlif.,  tom.  V  Concil.,  pag.  787.—  '  ftiid. 
'  Ou  lea  trouve  avec  \iue  uotice   par  Auasla:;e, 


solennelle  de  l'Église  de  Saint-Pancrace  à 
celle  de  Saint-Pierre,où('lantariivé  au  chant 
des  Psaumes  et  des  cantiques  spirituels,  il 
monta  sur  l'ambon,  et  tenant  les  saints  Évan- 
giles et  la  croixdenotreSeigneur  sursa  tête, 
il  jura  publiquement  qu'il  n'était  point  cou- 
pable du  ciime  dont  on  l'accusait,  et  qu'il 
n'avait  fait  aucun  mal  au  pape  Vigile  :  le 
peuple  parut  satisfait.  Après  quoi  Pelage  pria 
les  assistants  de  concourir  avec  lui  a  ban- 
nir la  simonie  des  ordinations,  depuis  le  der- 
nier degré  du  ministère  ecclésiastique  jus- 
qu'au premier,  afin  que  l'on  ne  promût  à  l'a- 
venir que  des  personnes  de  probité  connue 
et  instruites  dans  l'ouvrage  de  Dieu.  Il  donna 
en  même  temps  l'intendance  des  biens  de 
l'Église  a  Valcnliii,  sou  nutaiie,  homme  crai- 
gnant Dieu,  qui  lit  restituer  à  toutes  les  églises 
les  vases  d'or  et  d'argent  et  les  voiles  qu'on 
leur  avait  enlevés.  Il  avait  commencé  à  bâ- 
tir l'Église  des  apôtres  saint  Phili|)pe  et  saint 
Jacques  lorsqu'il  mourut  le  2  mars  339,  après 
trois  ans  et  dix  mois  de  pontificat. 

6.  Nous  avons  seize  lettres  '  sous  son  nom, 
dont  la  première,  qui  est  adressée  au  pape 
Vigile,  est  datée  du  consulat  de  Jean  et  de 
Narscs  :  date  qui  en  fait  seule  voir  la  suppo- 
sition, puisque  c'était  l'usage  alors  de  dater 
d'après  le  consulat  de  Basile,  qui  tombe  à 
l'an  341.  Ce  pape  ne  date  pas  autrement  les 
lettres  qui  sont  certainement  de  lui.  Depuis 
Basile,  on  ne  trouve  plus  de  consulats  suivis. 
C'est  pourquoi  la  manière  de  compter  chez 
les  Romains  par  les  consulats,  établie  depuis 
le  commencement  de  leur  république,  cessa 
en  cette  année,  et  on  compta  dans  la  suite 
par  les  années  du  règne  de  l'Empereur  et 
les  indictions,  en  y  ajoutant  pendant  quelque 
temps  les  années  qui  s'étaient  écoulées  de- 
puis le  consulat  de  Basile.  Cassiodorc  dans 
sa  Chronique  compte  jusqu'à  vingt  fois,  ou 
vingt  années  d'après  le  consulat  de  Basile.  Il 
faut  ajouter  que  la  lettre  qui  est  intitulée  : 
De  Pélatje  à  ^'if/ile,  n'est  qu'un  tissu  de  pas- 
sages do  la  trenlc-cin([uiènic  lettre  de  saint 
Léon,  et  des  traités  d'Itace  contre  Varimade. 
Le  dessein  en  est  de  montrer  que  le  Père  et 
le  Fils  ne  sont  qu'un  seul  Dieu. 

7.  La  seconde  let'rc  est  au  [latrice  Narsès, 
commandant  pour  l'Empereur  en  Italie.  Pe- 
lage le  prie  de  prêter  son  secours  h  deux  de 

des  fmamonts  de  lettres  et  les  lettres  npticrypheg 
an  Irmie  LXIX  de  la  Patrnlogie.  ool.  331  et  fiiiv. 
{i:<'dilrur.) 


Sf  leltrf> 
Tom  V  CoL- 
cil.  jmj.  IM. 


L«llro>  su 
Ivïirirf»  N»r- 
s^-.  p»p.    '91. 


[Vl"  SIÈCLE.] 

SCS  lëgnts,  Pierre,  prôlre,  cl  Projectiis,  no- 
taire do  l'Église  romaine,  qu'il  envoyait 
pour  proct^ilcr  contre  doux  évèqiics,  Thra- 
ciufi  et  Maximilien,  qui  troublaient  l'ordre 
des  églises  en  s'appro|)riant  tous  leuis  n;- 
veuus.  Il  représente  i\  Narscs  qu'en  aidant 
de  son  pouvoir  i\  réprimer  ces  deux  évoques, 
il  ne  doit  point  craindre  de  tomber  dans 
quelque  faute,  puisque;  les  lois  divines  et 
luimaincs  veulent  que  la  puissance  sécu- 
lière sévisse  contre  ceux  qui  troublent  ini- 
quement la  paix  de  l'Église,  et  qui  ne  lui 
sont  plus  unis.  Il  souhaite  qu'ils  soient  punis 
sur  les  lieux,  ou  qu'ils  soient  envoyés  à 
Rome  pour  y  recevoir  la  peine  due  à  leurs 

fij.  75!.  excès.  C'est  encore  à  Narsèsquela  troisième 
lettre  est  adressée.  Pelage  lui  dit  qu'il  ne 
doit  point  s'arrêter  aux  vains  discours  de 
ceux  qui  accusent  l'Église  d'exciter  une  per- 
sécution quand  elle  réprime  les  crimes  et 
cherche  i\  piocurer  le  salut  des  âmes;  qu'on 
ne  persécute  que  lorsqu'on  contraint  à  mal 
fmre  ;  qu'autrement  il  faudrait  abolir  toutes 

•  •  les   lois  divines  et  humaines  qui  ordonnent 

de  punir  les  méchants,  et  de  récompenser 
les  gens  de  bien  ;  qu'il  est  clair  par  les  Écri- 
tures canonicpies  que  le  schisme  est  un  mal 
qui  doit  être  réprimé,  même  par  la  puissance 
séculière;  et  qu'il  n'y  a  aacun  doute  que 
ceux-là  ne  soient  dans  le  schisme  qui  se  sont 
séparés  du  Siège  apostolique,  et  qui  s'effor- 
cent d'élever  un  autel  contre  l'Eglise  univer- 
selle. 11  cite  les  décrets  du  concile  de  Chalcé- 
doine  contre  les  schisraatiques.  et  ce  qu'en 
a  dit  saint  Augustin  lui-même  dans  son  Ma- 
nuel à  Laurent.  Ensuite  il  réitère  la  prière 
qu'il  avait  déjà  faite  à  Narsès,  d'envoyer  sous 
bonne  garde  à  l'Empereur  ceux  qui  faisaient 
de  semblables  entreprises  ;  le  faisant  sou- 
venir du  zèle  qu'il  avait  fait  paraître  pour  la 
religion,  lorsque  nonobstant  les  hostilités  des 
Goths  etdes  Frfincs  dans  i'Istrie  et  la  Vénétie, 
il  n'avait  pas  souffert  que  l'on  ordonnât  un 
évêque  à  Milan  jusqu'à  ce  qu'il  en  eût  écrit 
à  l'Empereur  et  reçu  ses  ordres;  et  avait 
fait  conduire  à  Ravenne  l'évêque  élu  et  ce- 
lui qui  devait  l'ordonner,  en  les  faisant  pas- 
ser l'un  et  l'autre  au  milieu  des  ennemis. 
Le  Pape  lui  fait  des  reproches,  mais  avec  po- 
litesse, de  ce  que  pouvant  réprimer  les  évê- 
ques  de  Ligurie,  de  Vénétie  et  d'Istrie,  il  les 


CIIAPIXnK   XXXIII.  —  PELAGE  I,  PAPE 


329 


laissait  se  glorifier  de  leur  rusticité  au  mé- 
pris du  Siège  apostolique  :  «  S'ils  avaient, 
ajoute-l-il,  quelque  dilliculté  sur  le  juge- 
ment du  concile  universel  qui  s'est  tenu  à 
C"nst;intiuo|)le  au  sujet  des  'frois-C/iojtitres, 
ils  devaicnl  suivant  l'usage  envoyer  au  Siège 
apostolique  quelques-uns  d'entr'eux  capa- 
bles de  proposer  leurs  raisons,  et  d'entendre 
les  nôtres  ;  et  non  pus  fermer  les  yeux  pour 
déchirer  l'Eglise,  qui  est  le  corps  de  Jésus- 
Christ.  »  Comme  il  savait  que  la  piété  du 
palrice  était  accompagnée  de  timidité,  il  le 
rassure,  en  lui  disant  qu'il  ne  doit  pas  ap- 
préhender d'user  de  son  pouvoir  contre  les 
schismaliques,  puisqu'il  y  a  '  mille  exem- 
ples et  mille  constitutions  qui  autorisaient 
les  puissances  publiques  à  punir  les  schis- 
matiques  non-seulement  par  l'exil,  mais  en- 
core par  la  confiscation  des  biens,  et  par  de 
dures  prisons.  Narsès  fit  ce  que  le  Pape  avait  p^  .^^ 
demandé  de  lui;  mais  les  scliismatiques, 
pour  se  venger  de  sa  conduite  à  leur  égard, 
l'excommunièrent.  Il  eu  écrivit  au  Pape  qui 
lui  témoigne  dans  sa  réponse ,  qui  est  la 
quatrième  lettre,  combien  il  est  sensible  à 
l'injure  qu'on  lui  a  faite.  Il  lui  fait  envisager 
cet  affront,  comme  un  etlèt  de  la  Providence 
pour  le  préserver  du  schisme  de  ces  évêques. 
En  même  temps  il  l'exhorte  à  punir  cet  at- 
tentat, et  à  envoyer  les  coupables  à  l'Empe- 
reur, nommément  Euphrasius,  l'un  des  évê- 
qiies  scliismatiques ,  qui  avait  commis  un 
homicide  et  un  adultère  ;  et  Paulin ,  évêque 
d'Aquilée,  qu'il  traita  d'usurpateur,  et  qu'il 
dit  devoir  être  privé  du  nom  et  du  rang  d'é- 
vêque  à  cause  de  sou  schisme  ;   c'était  l'évê-  „,_ 

que  de  Milan  qui  avait  ordonné  Paulin.  Com- 
me cette  ordination  était  contraire  aux  ca- 
nons. Pelage  presse  Narsès  dans  sa  cinquiè- 
me lettre  de  les  envoyer  tous  deux  sous 
bonne  garde  à  l'Empereui-;  parce  que  celui- 
ci  ne  pouvait  être  évêque,  ayant  été  ordonné 
contre  l'ancienne  coutume  ;  et  que  celui-là 
devait  être  puni  pour  avoir  fait  une  ordina- 
tion contre  les  rèt-des.  Pélasre  s'explique  „ 
plus  clairement  dans  une  autre  lettre  où  il  '"• 
dit  que  l'évêque  de  Milan  n'avait  pu  ordon- 
ner Paulin,  à  cause  qu'il  était  lui-môme 
schismatique  ;  et  que  d'aillems  pour  l'or- 
donner légitimement  il  aurait  fallu  qu'il  l'or- 
donnât dans  sa  propre  Eglise,  c'est-à-dire. 


'  Mille  alla  exempta  et  constituliones  sunt  qui- 
bus  eoidenter  agnoscitur,  ut  facienles  scissiiras 
in  sancla  Ecclesia,  non  solum  exUiis  sed  etiam 


proscriplione  reruni  et  dura  custodia  per  piibli- 
cas  polesUUes  debeanl  coerceri.  Epist.  3,  pag.  793. 


330 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


Lettre  aux 
é»ê^tic*  de 
ToïUDe,  p3^. 
791. 


dans  celle  d'Aqiiilée  :  parce  qu'encore  que 
l'ëvèque  de  Milan  et  celui  d'Aquiléc  eussent 
dû  se  faire  ordonner  par  le  Pape,  néan- 
moins à  cause  de  la  longueur  du  chemin, 
l'ancien  usage  était  qu'ils  s'ordonnassent 
mutuellement,  mais  à  condition  que  le  con- 
sécrateur  viendrait  dans  la  ville  du  consa- 
cré, soit  afin  qu'il  fut  plus  assuré  du  con- 
sentement de  l'Eglise  vacante  ,  soit  pour 
montrer  que  l'évêque  qu'il  consacrait  ne  lui 
serait  point  soumis.  Pelage  dit  dans  sa  lettre 
à  Narsùs  qu'il  n'a  jamais  '  été  permis  et 
qu'il  ne  le  sera  jamais,  d'assembler  un  con- 
cile particulier  pour  examiner  un  concile 
général,  mais  que  si  l'on  a  quelque  difficulté 
sur  ce  sifjet ,  l'on  doit  consulter  le  Siège 
apostolique  pour  lever  les  doutes  que  l'on 
pourrait  avoir  sur  ce  qui  a  été  décidé  dans 
le  concile  général. 

8.  Les  évèques  de  Toscane ,  Gaudèce, 
Maximilien,  Géronce,  Juste,  Térencien,  Vi- 
tal et  Laurent  avaient  écrit  au  pape  Pelage 
par  Jourdan,  défenseur  de  l'Église  romaine, 
dans  le  dessein  de  lui  faire  approuver  le 
schisme  qu'ils  avaient  fait  au  sujet  àes'T7vis- 
Cha/iilres.  Pelage,  étonné  d'une  semblable 
proposition,  la  rejeta  avec  d'autant  plus  de 
raison  que  ces  évèques  s'étaient  même  sé- 
parés de  la  communion  du  Pape,  dont  ils  ne 
récitaient  plus  le  nom  dans  les  sacrés  dip- 
tyques. Il  leur  fait  voir  par  le  témoignage  de 
saint  Augustin  que  le  foudement  de  l'Eglise 
étant  posé  sur  le  Siège  apostolique,  ceux-là 
sont  nécessairement  dans  le  schisme,  qui  ne 
veulent  plus  avoir  de  communion  avec  l'évê- 
que de  ce  Siège,  ou  qui  n'en  reconnaissent 
plus  l'autorité  :  «  Comment  donc,  ajoule-t-il, 
ne  croyez-vous  pas  être  séparés  de  la  com- 
munion de  tout  le  monde,  si  vous  ne  réci- 


tez '  pas  mon  nom  suivant  la  coutume,  dans 
les  saints  mystères,  puisque  tout  indigne  que 
j'en  suis,  c'est  en  moi  que  subsiste  à  présent 
la  fermeté  du  Siège  apostolique  par  la  suc- 
cession de  l'épiscopat?  Mais  de  peur  qu'il  ne 
vous  reste  à  vous,  et  aux  peuples  confiés  à 
vos  soins,  quelque  soupçon  sur  notre  foi,  je 
souhaite  que  vous  sachiez  que  je  conserve 
celle  que  le  concile  de  Xicée  a  confirmée  par 
son  autorité,  qui  a  été  établie  parla  doctrine 
des  apôtres,  et  expliquée  dans  les  conciles 
de  Constantiuople,  d'Éphèse  et  de  Chalcé- 
doine,  sans  y  avoir  rien  ajoute  ni  retranché  ; 
et  que  j'anathématise  quiconque  veut  affai- 
blir en  partie,  ou  révoquer  en  doute  la  foi 
de  ces  conciles,  ou  le  tome  du  bienheureux 
Léon,  évèque  du  Siège  apostolique,  confirmé 
dans  le  concile  de  Clialcèdoine.  Enseignez 
donc  avec  un  esprit  de  douceur,  comme  il 
convient  i  des  évèques,  ceux  qui  sont  dans 
l'ignorance,  et  employez  tous  les  moyens 
nécessaires  pour  les  retirer  de  l'erreur.  Si 
après  vos  avis  il  reste  du  doute  à  quelqu'un, 
qu'il  se  hâte  de  venir  à  nous,  afin  qu'ayant 
connu  la  vérité  par  nos  instructions,  il  ren- 
tre dans  l'unité  de  l'Église.  »  Cette  lettre  est 
du  15  des  calendes  de  mars,  la  quinzième 
année  après  le  consulat  de  Basile,  c'est-à- 
dire  du  16  février  356. 

9.  La  lettre  suivante  est  sans  date;  mais  il 
paraît  qu'elle  fût  écrite  en  même  temps  que  pj 
la  précédente,  puisqu'elle  y  est  jointe  dans 
les  anciens  manuscrits.  Le  pape  Pelage  l'a- 
dressa à  tout  le  peuple  de  Dieu,  engagé  ce 
semble, dans  le  schisme  avec  leurs  évèques. 
Il  y  f;iil  profession  de  recevoir  '  les  quatre 
conciles  généraux,  tous  les  canons  reçus  par 
le  Saint-Siège  et  les  lettres  de  ses  prédéces- 
seurs, depuis  le  pape  Célestin  jusqu'à  Aga- 


Letlrelteut 

le  leu^le    de 
!■■>{• 


'  JVec  licuil  aliqiiando  nec  Ucebil  particularem 
synodum  cintgref/are  :  scd  quolien  aliqxia  de  uni- 
rersdU  isynoilo  aliquibux  duhitatio  iinscilur,  ad 
rcrijiiendnm  deen  qiind  non  intelligiinl  rationem, 
ad  apostolicam  sedem  jiro  rccipicwla  rations  coii- 
vcniant.  Kjiist.  :i,  paj;.  104. 

*  (Juomodo  vos  ab  universi  orbis  cotnmunione 
separatos  ease  non  crfditis,  si  niei  inler  sacra 
mysleria  secundum  consurtudini'm  nominis  me- 
moriam  relicelU  in  quo  licet  indigna,  Aposlolicœ 
sedis  pet  successiontin  episcopaius  prasenli  lem- 
pore  videlis  consislere  firmilatem?  Epist.  6,  pag. 
701. 

'  Sed  et  canones  qu»s  Sedes  apostolicasuscrpit, 
sequor  et  venernr,  et  Deo  adjuvante  defendo,  ne- 
guc  vel  de  hac  professione  relicere,  aiil  discedere 
aliquando  promittv.  Lpislolas  eliam  bealw  rccor- 


dalionis  papw  Celestini,  Sixli,  et  prœ  omnibus 
beati  Leunis,  nec  non  eliam  successorum  ejus 
Uilarii,  Simplicii,  Felicin,  Getasii,  Ànastasii,  Syui- 
machi,  Donnisdœ,  Joanuis ,  Fcticis,  IJnnifacii, 
Joannis  allerius,  cl  Àgnpeti,  pro  defensionr  fi- 
dei  cathulicœ,  et  pro  firmitatc  supra  scriptnrum 
quatuor  synodoruin,  et  contra  hœreltcos,  tam  ad 
principes,  quani  ad  episcopos,  tel  quosliliet  alios 
per  Urientcni  et  Illyricum  alque  Ddrdaniam.alias- 
qne  prorincias  diversis  temiioribus  niissas,  invio- 
labiliter,  adjuvante  Christo  Vomino  noslro,  tue 
cuslodire  profiteur;  et  omîtes  quos  ipsi  damnavc- 
runt,  Itahere  damnalos;  et  quos  ipsi  receperunt. 
prœcipue  renerabiles  episcopos  Tlieodoretum  et 
Ibam,  nec  inter  orthodoxos  renerari.  Epist.  7, 
pag.  795. 


nuAPiTiiE  xxxm.  —  pelage  i,  pape. 


I.MIr 
79Ti 


Ff.  7.5. 


[Vl"  SIÈCI.P,.') 

pot,  cl  d'honorer  comme  orthodoxes  les  yi5- 
luirablcs  évoques  Tiiéodoret  et  Ibas,  témoi- 
gnant être  disposé  de  rendre  compte  de  su 
foi  ù  tous  ceux  qui  lehii  demundcraient  ;  se 
faisant  un  devoir  de  suivre  ce  que  l'apôtre 
saint  Pierre  a  ordonné  à  cet  égard.  11  recon- 
naît que  cette  foi  est  en  lui  par  la  miséri- 
corde de  Dieu;  el  il  la  croit  si  véritable  qu'il 
souhaite  delà  conserver  toute  sa  vie,  cl  d'ê- 
tre présenté  avec  elle  au  tribunal  de  Jésus- 
Christ  :  disant  anallirme  à  qui  pense,  croit  el 
proche  le  contraire. 
,  »  s,.       dO.  Les  deux  lettres  suivantes  sont  adres- 
•  '"^-   sées  à  Sapaudus ,  archevêque  d'Arles  :   la 
première  n'est  qu'une  lettre  d'amitié  par  la- 
quelle le  Pape  lui  témoigne  son  désir  d'être 
en  relation  avec  lui  ;  la  seconde  est  une  ré- 
ponse à  celle  de  Sapaudus.  Cet  évêqne  avait 
chargé  Félix,  porteur  de  sa  lettre  de  s'expli- 
quer de  vive  voix  sur  certaines  choses  avec 
le  Pape  :  on  ne  sait  de  quoi  il  était  question. 
Il  y  a  trois  autres  lettres  à  Sapaudus.  Dans 
l'une  Pelage  le  presse  de  lui  écrire  sur  sou 
iutrouisatiou,  comme  il  avait  fait  ù  ses  pré- 
décesseui's ,  et  d'engager  le  patrice  Placide 
son  père  à  envoyer  à  Rome  des  habits  el  des 
lits  pour  le  soulagement  des  pauvres  ,  et  à 
employer  pour   cet  etlet  les   revenus  des 
biens  que  l'Église  romaine  possédait  dans 
(.on.      les  Gaules.  Dans  l'autre  il  le  déclare  son  vi- 
caire dans  tout  ce  royaume,  à  l'exemple  de 
ses  prédécesseurs,  à  la  charge  de   remplir 
cette  place  conformément  aux  saints  canons, 
aux  règles  des  Pères  et  aux  décrets  du  Saint- 
Siège  :  il  ajoute  que  pour  honorer  sa  nais- 
sauce  et  son  mérite  personnel,  il  lui  accorde 
l'usage  du  pallium.  La  troisième  est  pour 
lui  recommander  les  Romains  que  la  crainte 
des  ennemis  avait  contraints  de  se  réfugier 
fil.'       on  France  :  il  le  fait  encore  souvenir  d'en- 
voyer à  Rome  des  habits  pour  les  pauvres. 
Toutes   ces  lettres  sont  datées   d'après  la 
quinzième  et  la  seizième  année  du  consulat 
de  Basile,  c'est-à-dire  de  l'an  So6  et  557.  La 
raison  qu'avait  le  Pape  de  presser  l'envoi 
des  habits  pour  les  pauvres,  est  que  par  les 
ravages  des  ennemis  l'Italie  était  réduite  à 
une  si  grande  extrémité  que  les  plus  hon- 
nêtes gens  et  ceux  qui  avaient  autrefois  du 
bien   n'avaient  plus   de  quoi  subsister  ni 
même  se  couvrir.  Le  Pape  priait  aussi  Sa- 
paudus de  lui  marquer  si  le  roi  Childebert 

,v 

'  Quirdam  capitula  extra  fidem  fuerunt  agilata, 
de  quibus  longum  est,  ut  epistolari  possint  com.- 


:m 


et  les  évoques  des  Gaules  étaient  contents 
de  sa  profession  de  foi, 

11.  Un  la  trouve  dans  la  Ictti'O  que  Pi;!age  ,„, ''"'cud'"- 
écrivit  le  11  décembre  de  l'au  .^j.'ifi  au  roi  '"'"•►■s-"»- 
Cliihlebert.  Ce  prince  lui  avait  envoyé  une 
ambassade  pour  lui  demander  des  reliques 
des  apcjlres  saint  Pierre  et  saint  Paul  et  de 
quelques  autres  martyrs,  et  en  même  temps 
la  (jualité  de  vicaire ,  et  le  pallium  pour  Sa- 
paudus. Ruffin,chef  de  cette  ambassade,  dit 
au  pape  (jue  quelques-uns  avaient  ri'pandii 
des  semences  de  scandale  ,  en  se  plaiguaiit  *"'• 

que  l'on  avait  donné  atteinte  à  la  foi  catho- 
lique. Il  pria  aussi  Pelage  ,  suivant  l'ordre 
qu'il  en  avait  du  roi  Childebert,  de  d(;clarer 
qu'il  recevait  en  tout  le  tome  ou  la  lettre 
de  saint  Léon  ù  Flavien,  ou  d'envoyer  lui- 
même  sa  confession  de  foi  :  le  Pape  répondit 
aux  trois  demandes  du  roi  par  trois  lettres 
ditlereutes.  Il  dit  dans  la  première,  que  de-  ■''" 

puis  la  mort  de  l'impératrice  Théodora,  il 
n'y  avait  plus  de  disputes  sur  la  foi  en  Orient; 
qu'on  avait  seulement  examiné  quelques  ar- 
ticles '  hors  la  foi ,  dont  l'explication  lui  pa- 
raissait trop  longue  pour  être  renfermée 
dans  une  lettre  ;  que  pour  lui  mettre  l'es- 
prit en  repos  à  lui  et  à  tous  les  évêques  des 
Gaules,  il  anathématisait  tous  ceux  qui  s'é- 
loignaient en  quelque  façon  que  ce  fût  de  la 
foi  que  le  pape  saint  Léon  avait  enseignée 
dans  ses  lettres,  et  que  le  concile  de  Chalcé- 
doinc  avait  suivie  dans  sa  définition  de  foi. 
Il  prie  donc  le  roi  et  les  évêques  de  son 
royaume  de  ne  faire  aucune  attention  aux 
vains  discours  que  répandaient  les  amateurs 
des  scandales  :  «  L'empereur  Justinien,  ajou- 
te-t-il ,  a  détruit  toutes  les  hérésies  tpii  jus- 
qu'à son  règne  avaient  à  Constantinople 
lems  évêques  et  leurs  églises  avec  de  grands 
revenus  et  quantité  de  vases  précieux  :  il 
leur  a  ôté  leurs  églises  et  donné  tous  leurs 
biens  aux  catholiques.  Ceux  qui  sont  demeu- 
rés dans  leurs  erreurs  s'unissent  entr'eux  et 
font  tout  leur  possible  pour  troubler  et  divi- 
ser l'Église  cathohque.  Pendant  tout  le  temps 
que  nous  avons  été  à  Constantinople,  ils  ont 
envoyé  ici  en  Italie  des  lettres  sous  notre 
nom,  où  ils  avançaient  que  nous  disions  que 
l'on  avait  altéré  la  foi  orthodoxe.  Mainte- 
nant ils  produisent  encore  contre  nous  des 
lettres  sans  nom  ,  afin  que  les  auteurs  n'en 
soient  pas  connus.  Ce  sont  surtout  les  nes- 

plecli  sermone.  Epist.  10,  pag.  798.  Il  paraît  que 
cela  s'cnteud  des  Trois-Chapitres. 


332 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


loriens  de  Constantinople,  qui  prétendent  en 
vain  n'être  pas  éloignés  du  sentiment  du 
concile  de  Chalcédoine  et  du  pape  Léon, 
puisqu'ils  ont  l'un  et  l'autre  condamné  Nes- 
torius  en  ce  qu'il  enseignait  deux  natures  sé- 
Ptf.  700.  parées  et  divisées.  Ici  même  ils  ont  tâché 
de  séduire  quelques  évoques  simples,  qui 
ne  savent  pas  les  premiers  éléments  de  la 
foi,  qui  n'entendent  pas  la  question,  et  ne 
comprennent  point  quel  grand  bien  c'est  de 
ne  pas  s'écarter  de  la  foi  catholique.  Ce  qui 
nous  a  fait  soull'rir  de  longues  persécutions 
à  Constantinople ,  c'est  que  nous  avons  té- 
moigné que  ce  que  l'on  avait  agité  dans  les 
alfairesde  l'Église  du  vivant  de  l'impératrice 
Théodora,  nous  était  suspect.  Pour  ce  qui 
est  de  l'empereur  Justinien  il  n'a  permis  en 
aucun  temps  que  l'on  violât  la  doctrine  éta- 
blie dans  le  concile  de  Chalcédoine  et  dans 
les  lettres  de  saint  Léon.  )i  Pelage  finit  cette 
lettre  qui  est  du  11  décembre  556,  en  disant 
qu'il  avait  déjà  envoyé  par  des  moines  de 
Lérins  les  reliques  des  saints  apôtres  et  des 
martyrs,  et  qu'il  envoyait  encore  par  Homo- 
bonus  sous-diacre  de  l'Église  romaine,  celles 
que  les  ambassadeurs  de  Childebert  avaient 
SOI.  demandées.  Il  marque  dans  la  seconde  let- 
tre qu'ayant  trouvé  dans  les  archives  de  son 
Église ,  que  ses  jirédécesseurs  avaient  ac- 
cordé aux  arclievcipics  d'Arles  la  cpialité  de 
vicaire  du  Pape  dans  les  Gaules,  et  le  pal- 
liiim,  il  accordait  l'un  et  l'autre  à  Sapaudus. 
La  troisième  lettre  contient  une  confes- 
sion de  foi  où  le  Pape  explique  fort  au  long 
les  mystères  de  la  Trinité  et  de  l'Incarna- 
«03.  tion.  Il  dit  sur  la  Trinité  qu'il  n'y  qu'un  Dieu 
en  trois  personnes ,  le  Père ,  le  Fils  et  le 
Saint-Esprit  ;  que  le  Père  est  tout-puissant , 
éternel,  non  engendré  ;  que  le  Fils  est  do  la 
substance  du  Père,  engendré  de  lui  avant 
tous  les  siècles,  sans  aucun  commencement  ; 
qu'il  est  égal ,  coéternel  et  cousubstantiel  à 
celui  qui  l'a  engendré  ;  que  le  Saint-Esprit 
est  tout-puissant,  égal  au  Père  et  au  Fils ,  et 
consubstantiel  à  l'un  et  à  l'autre;  qu'il  pro- 
cède du  Père  sans  commencement  de  temps, 
et  qu'il  est  l'Esprit  du  Père  et  du  Fils.  Il 
prouve  l'unité  de  nature  dans  les  trois  per- 
sonnes divines  par  la  forme  du  baptême , 
qui,  suivant  le  préceple  de  Jésus-Christ,  est 
administré  au  nom ,  et  non  pas  aux  noms 
du  Père ,  du  Fils  et  du  Saint-Esprit.  Puis 
venant  au  mystère  de  l'Incarnation,  il  con- 
fesse qn'unn  personne  de  la  Trinité,  c'est  à- 
dire  le  Fils  est  né  selon  la  chair,  en  prenant 


un  corps  dans  le  sein  de  Marie  par  l'opération 
du  Saint-Esprit  ;  que  cette  chair  a  été  animée 
d'une  âme  raisonnable,  et  qu'étant  véritable- 
ment né  de  la  Sainte  Vierge,  elle  est  véritable- 
ment mère  de  Dieu,  parce  qu'elle  a  enfanté  le 
Verbe  de  Dieu  incarné  ;  que  l'union  s'est  faite 
de  la  nature  divine  avec  la  nature  humaine  en 
une  seule  personne,  qui  est  celle  du  Fils;  en 
sorte  que  c'est  le  même  qui  est  Fils  de  Dieu  et 
Fils  de  l'homme  ,  consubstantiel  au  Père  se- 
lon la  divinité ,  consubstantiel  à  nous  selon 
l'humanité,  en  tout  semblable  à  nous  excepté 
le  péché;  que  les  deux  natures  depuis  leur 
union  sont  demeurées  indivisibles,  parce  qu'il 
n'y  a  qu'un  Clu'ist,  qui  est  en  même  temps 
Fils  de  Dieu  et  Fils  de  l'homme  ;  mais  aussi 
qu'elles  n'ont  été  ni  confondues  ni  changées 
l'une  en  l'autre  parcelle  union,  parce  qu'elles 
ont  chacune  conservé  toutes  leurs  propriétés; 
qu'à  raison  de  cette  union  personnelle,  nous 
disons  que  Jésus -Christ  a  souffert  dans  sa,- 
chair,  et  qu'il  est  impassible  selon  sa  divi- 
nité. Pelage  s'explique  aussi  sur  la  résurrec- 
tion des  morts,  en  disant  que  tous  ceux  qui 
sont  nés  d'.\dam  et  d'Kve,  ou  qui  en  naîtront 
jusqu'à  la  consommation  des  siècles,  res-su-s- 
citeront  dans  la  même  chair,  et  comparaî- 
tront devant  le  tribunal  de  Jésus-Christ  pour 
y  recevoir  la  récompense  ou  la  peine  éter- 
nelle qu'ils  auront  méritée  suivant  leurs  bon- 
nes ou  mauvaises  actions.  Dans  la  lettre  :\ 
laquelle  est  jointe  cette  confession  de  foi,  il 
dit  au  roi  qu'il  avait  déjà  déclaré  dans  une 
de  ses  autres  lettres,  qu'il  recevait  en  tout 
colhî  de  saint  Léon  à  Flavien.  11  y  a  une  pij.«c>i 
quatrième  lettre  de  ce  pape  à  Childebert,  où 
il  recommande  à  ce  prince  de  maintenir  Sa- 
paudus dans  SCS  droits  de  Vicaire  du  Saint- 
Siège  dans  les  Gaules.  11  parait  que  cet  évo- 
que s'était  plaint  à  Rome,  de  ce  que  sans 
égard  à  ses  droits,  le  roi  avait  voulu  le  faire 
juger  par  un  autre  évêque,  qu'il  avait  lui- 
même  ordonné. 

12.  Outre  ces  lettres,  Luc  Ilolstéuius  en  a 
donné  quelques  autres  sous  le  titre  de  Frag- 
ments^ parce  qu'il  n'y  en  a  aucune  qui  soit 
entière.  La  première  est  à  Jean,  patrice  :  le 
Pape  l'exhorte  à  ne  point  communiquer  avec 
les  schismatiques,  et  de  regarder  comme  il- 
légitimes les  ordinations  des  évèques  qui  se 
faisaient  parmi  eux.  La  raison  qu'il  en  donne, 
c'est  qu'ils  sont  séparés  de  l'Église  catho- 
lique, qui  est  une,  et  seule  fondée  sur  les 
apùtres,  par  qui  la  foi  a  été  répandue  dans 
toute  la  terre.  La  seconde,  à  Viatorel  à  Pan- 


Fntftmenlt 
de      (]tif1qu4« 

■  nitf»     |-ltr|tj 

An  pa|.«  P4lH 
fc,  ilg.WS. 


CllAIMTRli;  XXXIV.  —  JEAN  III  ET   PELAGE  U,  PAPES. 


Epl.c..1,,, 
7ïi. 


Par.  Sud. 


[Vl"  SIÈCLE.] 

crace,  est  aussi  pour  leur  inspirer  l'éloigne- 
meiit  dos  scliismaliijues,  disaiil  avec  saint 
Auiîusliii,  (ju'dii  peul  avec  sriri'ti'.  d{''loslcr 
tout  parti  que  l'on  sait  ne  point  communi- 
quer avec  l'Ef^Iise  universelle,  soit  qu'ils  s'en 
soient  séparés  par  simplicité  ou  par  igno- 
rance de  cause.  Il  répète  dans  la  troisième, 
au  patrice  Valérien,  une  partie  de  ce  qu'il 
avait  dit  au  patrice  Narsès,  touchant  la  con- 
duite de  l'Eglise  envers  ceux  dont  elle  pu- 
nit les  crimes  pour  les  obliger  à  rentrer  dans 
la  voie  du  salut;  ce  qui  nis  peut  passer  pour 
une  persécution.  Dans  la  ([uatrième,  il  don- 
ne avis  au  patrice  Céthégus,  qu'il  avait  or- 
donné tni  évéque  ;\  Catanue,  le  troisième 
jour  d'apros  son  arrivée  à  Rome  ;  mais  qu'il 
avait  dill'éré  pendant  un  an  l'ordination  de 
celui  de  Syracuse,  parce  qu'il  était  marié,  et 
qu'ayant  femme  et  enfants,  il  y  avait  du 
danger  que  les  biens  de  l'Eglise  n'en  souf- 
frissent du  préjudice  ;  que  voyant  toutefois 
que  ceux  de  Syracuse  n'en  voulaient  point 
élire  d'autre,  parce  qu'il  ne  s'en  trouvait 
point  dans  cette  église,  il  avait  cru  devoir 
passer  par-dessus  ces  considérations,  et  l'or- 
donner, après  lui  avoir  fait  donner  une  dé- 
claration de  ses  biens,  et  promettre  qu'après 
sa  mort,  il  ne  laisserait  rien  des  Liens  de 
l'Église  à  ses  parents,  ni  directement  ni  in- 
directement. U  consent  par  la  cinquième, 
qui  est  h  l'évèque  Éleufhère,  que  le  diacre 
Maxime  bAtisse  un  oratoire  dans  un  endroit 


333 


de  son  diocèse,  nommé  Pancelle ,  pour  y 
mettre  les  reliques  de  sainte  Cantiane,  mar- 
tyre, à  la  charge  (pic  personne  n'atu-a  '  ('((• 
enterré  en  ce  lieu  ;  que  Maxime  fondcia  c(,'tte 
église  en  lui  donnant  des  biens  sullisants, 
tant  en  terres,  qu'en  argent;  que  l'on  ne 
pourra  y  construire  un  baptislaire,  ni  nom- 
mer un  prêtre  cardinal  ou  en  titre  po\ir  la 
desservir;  mais  que  Maxime  sera  obligé, 
lorsqu'il  voudra  y  faire  célébrer  la  messe, 
de  demander  à  l'civèque  un  prêtre  .'i  cet  ef- 
fet ;  sans  qu'aucun  autre  qui  aura  ('lé  nom- 
mé par  lui,  puisse  célébrer  dans  celle  église. 
A  ces  conditions,  le  l'ape  permet  à  ?]leu- 
thère  de  la  consacrer,  mais  sans  messes  pu- 
bliques. Il  accorde  sous  les  mêmes  charges 
h  l'évèque  Astère  de  consacrer  l'oratoire  que 
l'abbé  "Vindimus  avait  fait  bâtir  dans  l'en- 
ceinte de  son  monastère,  près  des  murs  de 
l'Église  de  Salerne.  Les  fragments  des  cinq 
lettres  suivantes  regardent  des  alTaires  par- 
ticulières qui  ne  sont  pas  connues.  La  der- 
nière est  à  Laurent,  évoque  de  Centumcelle; 
le  Pape  l'exhorte  d'examiner  soigneusement 
la  vie  et  les  mœurs  de  trois  personnes,  dont 
l'une  devait  être  ordonnée  prêtre,  l'autre 
diacre,  et  la  troisième  sous-diacre  dans  la 
même  ville,  suivant  les  lettres  de  l'Empe- 
reur; et  d'avertir  le  prêtre  de  ne  jamais"^ 
célébrer  les  saints  mystères  sans  y  faire  mé- 
moire du  pape  et  de  l'évèque  diocésain. 


CHAPITRE  XXXIV. 
Les  papes  Jean  III  [572]  et  Pelage  II  [590. 


1.  Le  successeur  de  Pelage  dans  le  Saint- 
Siège,  fut  Jean  III,  surnommé  Catellin,  fils 
d'Anastase,  du  rang  des  illustres.  Il  acheva 


l'église  des  apôtres  saint  Philippe  et  saint 
Jacques  que  son  prédécesseur  avait  com- 
mencée, y  fit  ^  peindre  divei'ses  histoires  et 


'  Et  ideo,  frater  charissime,  si  in  tua  diœcesi 
memorala  constructio  jure  consistit,  et  nidhun 
corpus  ibidem  constat  humanum,  percepta  prius 
donatione  légitima  lel  possessione  itla  et  illa, 
prœstanies  liberos  a  fiscalibus  titulis  solidos  tôt, 
gestisque  municipalibus  allegatis,  prœdictum  ora- 
torium  absque  missis  piiblicis  solemniter  conse- 
crabis;  Ha  tamen  ut  in  eodem  loconec  futuris  tem- 
poribus  baptisterium  coyislruatur,  nec  presbyte- 
rum  constituas  cardinalem  ;  sed  quoliens  missas 
ibi  forte  maluerit,  a  dilectione  tua  noverit  pos- 
tulandum,  qualenus  nihil  taie  a  quolibet  alio  sa- 


cerdoteullatenus  prœsumatur.  l'ag.  809. 

-  Caieat  sibi  presbyter  ille  nunquam  se  sine 
noslri  et  lui  nominis  recitatione  sacra  mysteria 
celebrare.  Itid.  jiag.  810. 

'  Domnus  Pelagius  et  domnus  Joannes  novœ 
magnitudinis  Ecclesiam  apostolorum  a  solo  œdi- 
ficantes,  historias  diversas,  tum  in  musivo,  qtiam 
in  variis  coloribus  cum  sacris  pingentes  imagini- 
bus,  et  mine  usque  hactenus  a  nobis  venerantur. 
Adriau.  epist.  ad  Caroliim  Magnum,  tum.  V  Concil. 
pag.  788. 


334 


HISTOIRE  GI^NRRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


LIb.  Pon-, 
loir.  V  Ci.lic  1. 
1-»E.  «1». 


LU.  P.  m. 
lom  VCi>ne"i 
,.,5.  i.ll,»i:., 
PI  m  uoli*. 
I>*.  12!. 


Leilre  Tan- 
Mifieol  allrl- 
liuée  k  Jean 
III.    Ton.    V 

CODCII.       Jh^g. 
iU, 

[Lettre  véri- 
table et  eti'O- 
lé  ftur  l'ilep- 

uteuque.] 


II,iJ..l 


de  saintes  images,  partie  en  mosaïque,  par- 
lie  avec  dos  couleurs,  et  eu  lit  la  dédicace. 
U  augmenta  cl  rétablit  les  cimetières  des 
martyrs,  et  donna  ordre  que  tous  les  diman- 
ches l'église  de  Latraii  y  fournirait  le  pain, 
le  vin  et  le  luminaire.  Ce  fut  sous  son  ponti- 
ficat que  les  Hérules  tirent  des  ravages  dans 
la  Toscane  et  dans  d'autres  parties  de  l'Ita- 
lie; mais  Narscs  qui  commandait  pour  l'Em- 
pereur les  subjugua,  après  avoir  tué  leur 
roi.  Il  défit  aussi  les  Lombards  qui  étaient 
entrés  en  Italie  sous  la  conduite  de  leur  roi 
Alboin.  Jean  III  mourut  le  13  juillet  de  l'an 
572,  après  avoir  ordonné  en  deux  ordina- 
tions, au  mois  de  décembre,  trente-huit  prê- 
tres, treizç-  diacres  et  soixante-un  évêques. 

2.  Nous  avons  sous  son  nom  une  lettre 
aux  évêcpies  de  Germanie  et  des  Gaules, 
qui  fournit  elle-même  des  preuves  de  sa  sup- 
position. La  première  se  tire  de  la  date  qui 
est  du  14  des  calendes  d'août,  Justin,  consul 
pour  la  sixième  fois  et  Narsès,  c'est-à-dire 
du  10  juillet  572.  Or,  il  y  avait  déjà  cinq 
jours  que  ce  pape  était  mort,  et  depuis  l'an 
541  les  papes  ne  comptaient  plus  par  les  con- 
sulats. La  seconde  preuve  est  qu'on  y  avance, 
contre  le  sentiment  unanime  des  anciens, 
que  saint  Lin  et  saint  Clet  n'ont  été  que  des 
chorévêques,  qui  aidaient  saint  Pierre  dans 
le  ministère  épiscopal  en  tout  ce  qu'il  leur 
ordonnait,  sans  en  avoir  jamais  eu  l'autorité 
ni  la  dignité.  Une  troisième  preuve  est  que 
toute  celte  lettre  roule  sur  les  chorévêques, 
qu'elle  suppose  avoir  été  très-communs  dans 
l'Allemagne  et  dans  les  Gaules  ;  ce  qui  ne  pa- 
rait point  parles  histoires  du  temps. 'Ajoutons 
que  ce  n'est  qu'une  compilation  des  lettres 
du  pape  Innocent  I,  de  ceUes  qu'on  a  suppo- 
sées au  pape  Damase,  et  de  ceUes  de  Zosime, 
et  de  saint  Grégoire  le  Grand,  postérieur  à 
Jean  III.  Il  y  en  a  une  autre]  beaucoup  plus 
courle,  donnée  sous  le  nom  de  ce  même  pa- 
pe, par  Jean  de  Rose,  et  adressée  à  Édalde, 
archevêque  de  Vienne  :  celle  lettre  est  Sans 
date.  On  y  avance,  contre  la  vérité  de  l'his- 
toire, que  l'Église  de  Vienne  a  été  fondée 
par  un  disciple  de  saint  Paul,  et  que  c'était 
l'usage  à  Rome  de  partager  les  reliques  des 
apôtres,  au  lieu  que  l'on  se  contentait  d'en- 
voyer des  linges  qui  eussent  louché  le  plus 
près  leurs  corps.  Il  paraît  encore  qu'Kilaldc 
avait  de  l'inquiétude  sur  la  liturgie  qu'il  de- 
vait suivre,  comme  si  l'Église  gallicane  n'a- 
vait pas  eu  la  sienne,  ou  qu'elle  se  fût  peu 
embarrassée  delà  régler.  Le  contraire  parait 


par  le  concile  de  Vaison,  en  529.  [II  existe 
une  autre  lettre  de  Jean  III  :  elle  est  adres- 
sée à  Pierre,  évêque  de  Havenne,  et  par  la- 
quelle ce  pape  lui  accorde  l'usage  du  pal- 
lium.  Elle  se  trouve  dans  les  Misceilanea  de 
Baluze,  dans  Mansi,  tome  III.  On  trouve  les 
lettres  supposées  dans  la  Patrologie  latine, 
tome  LXXII.  Dom  Pitra  a  publié  dans  le  pre- 
mier volume  du  Spicikf/ivm  Sulesmense,  un 
exposé  sur  l'Hi'ptaleuque,  fait  par  Jean,  en- 
core diacre.  Le  savant  bénédictin  pense  qu'il 
est  question  du  Pape  qui  nous  occupe,  et  non 
d'un  autre  Jean  écrivain  du  ix*  siècle,  qui 
a  laissé  une  Vie  de  saint  Grégoire.  Cet  ex- 
posé contient  des  extraits  des  anciens  Pères 
sui'les  livres  de  Moïse,  de  Josué  et'des  Juges. 
On  y  trouve  cités  saint  Clément,  pape;  saint 
Polycarpc,  Ulpien  ,  Origène,  saint  Hippo- 
lyle,  saint  Pierre  d'Alexandrie,  saint  Ililaire 
de  Poitiers,  Tichonius,  Tliéodore  d'Antioche, 
saint  Basile,  Didyme,  saint  Grégoire  de  Na- 
ziauce,  Diodore  de  Tarse,  saint  Ambroise,  Sé- 
vérieu  de  Cabales,  saint  Jean  Cbrysostôme, 
Ruffin,  saint  Jérôme,  saint  Augustin,  saint 
Eucher,  saint  Victor  de  Capoue,  Pacatus, 
nom  ignoré  entièrement,  les  Pères  du  dé- 
sert, un  anonyme.  ] 

3.  La  mort  de  Jean  III  fut  suivie  d'une 
vacance  qui  dura  dix  mois,  après  laquelle 
on  élut  Benoit,  surnommé  Bonose,  romain 
de  naissance,  dont  il  ne  nous  reste  aucun 
écrit.  On  lui  donna  pour  successeur,  en  577, 
Pelage  II,  aussi  romain,  fils  de  Vinigilde.  Les 
Lombards  tenaient  alors  Rome  assiégée  ;  ce 
qui  fut  cause  qu'on  n'attendit  pas  l'ordre 
de  l'Empereur  pour  la  consécration  du  nou- 
veau pape.  Quelque  temps  après  son  élec- 
tion il  envoya  à  Coustantinople  Grégoire, 
diacre  de  TÉglise  romaine  et  depuis  pape, 
pour  demauder  du  secours  à  ce  prince  con- 
tre les  Lombards,  qui  ravageaient  l'Italie. 
Tibère  régnait  alors.  Il  avait  été  déclaré  n,, 
empereur  par  Justin  et  coui-onné  le  26  sep-  ^k.  in  mi. 
tembre  de  l'an  578.  Pendant  que  Grégoire  wp,*x"""  ' 
négociait  ce  secours  à  Coustantinople,  Pe- 
lage lui  écrivit  que  les  Lombards  conti- 
nuaient leurs  ravages  dans  l'Italie  contre  le 
serment  qu'ils  avaient  fait  de  s'en  abstenir  ; 
qu'il  fallait  donc  presser  l'Empereur  de  don- 
n<'r  en  cette  occasion  des  marques  de  sa 
bonté,  et  d'envoyer  du  moins  un  maître  de 
la  milice  ou  un  général  d'armée,  l'exarque 
de  Ravcnne  pouvant  à  peine  sutlire  à  la  dé- 
fense du  pays  qui  lui  était  confié.  Celle  let- 
tre est  du  4  octobre  584  :  la  suivante  fut 


Pria^e  n  : 
«p.     iellrc.    & 
Grvrnire    il  à 
AuDacair, 

iil..  l'cillC. 

lorn.VOncll. 


Jean 


3,|1,.  S.1. 


.]         CllAI'lTItl!;  WXIV.  —  JEAN  111  El'  l'ELAUE  11,  l'APES. 


ls  aiit 
d  1- 


[vr  SIECLE. 

l'icrite  le  5  du  nu-'mo  inois  de  I;i  soplii-ine 
imiu'i^  de  reiiiporcur  'rihèit-,  c'esl-;i-diro  de- 
puis qu'il  eut  élé  l'iiil  C(''s;ii-,  cl  ainsi  en  ."iSU. 
Elle  est  adrestiéc  à  Auuucairc,  évèqued'Aii- 
xerre,  que  PL'lay:o  prie  d'engager  le  roi  des 
FiaïKjais  ;\  secourir  Home,  et  de  le  détourner 
d'avoir  aucune,  intelligence  avec  ;les  Lom- 
bards. 11  y  en  a  une  seconde  à  cet  évêque  : 
nous  en  avons  parlé  ailleurs. 

4.  Élie,  patriarche  d'Aquilée,  qui  faisait 
sa  résidence  à  Grade,  et  les  autres  évèques 
d'Istrie  persévéraient  dans  le  schisme  pour 
la  défense  des  Truis-C/iupitres.  Le  Pape  sou- 
haitait ardemment  de  les  eu  retirer,  et  il 
leur  aurait  écrit  sur  ce  sujet  dès  le  commen- 
cement de  son  pontiticat,  si  les  hostilités  des 
Lombards  ne  l'en  eussent  empêché.  Aussi- 
tôt donc  que  l'exarque  Smaragde  eut  fait  la 
paix  et  rendu  la  Irauquillitc  à  l'Italie,  Pe- 
lage écrivit  à  ces  évêques  pour  les  exhorter 
de  se  réunir  à  l'Église.  Mais  afin  que  les 
mauvaises  impressions  qu'on  pouvait  leur 
avoir  données  de  sa  foi  ne  fussent  pas  un 
obstacle  à  cette  réunion,  il  leur  déclai'e 
qu'il  n'en  a  point  d'autre  que  celle  des  qua- 
tre premiers  conciles  généraux,  auxquels 
ses  prédécesseurs  avaient  présidé  par  leurs 
légats  ;  et  qu'il  recevait  en  tout  la  lettre  de 
saint  Léon  à  Flavien,  disant  anathème  à 
quiconque  euseignait  une  autre  doctrine. 
Il  les  presse  de  lui  envoyer  des  députés  de 
leur  part  pour  lui  exposer  leurs  doutes, 
avec  promesse  de  leur  témoigner  toute  sorte 
de  bonté,  et  de  les  renvoyer  quand  ils  le  dé- 
sireraient. Cette  lettre  fut  portée  en  Islrie  . 
par  Rédemptus,  évêque,  et  Quodvultdéus, 
abbé  du  monastère  de  Saint-Pierre  de  Rome. 
Tout  l'eBet  qu'elle  produisit,  fut  qu'Élie  et 
ceux  de  son  parti  envoyèrent  des  députés, 
avec  un  écrit  où  ils  ne  répondaient  point  à 
ce  que  Pelage  leur  avait  dit  sur  la  réunion 
et  sur  les  moyens  d'éclaircir  lem-s  doutes  ; 
eu  sorte  qu'il  parait  que  leurs  députés  n'a- 
vaient d'autre  commission,  que  de  porter 
leurs  lettres.  11  leur  eu  écrivit  une  seconde 
où  il  se  plaint  de  leur  procédé,  principale- 
ment de  ce  que  celles  qu'il  avait  reçues 
d'eux  étaient  infectées  de  diverses  erreurs, 
et  de  ce  qu'ils  y  avaient  allégué  plusieurs 
passages  des  Pères,  qui  ne  faisaient  rien 
à  la  question,  et  dont  il  paraissait  qu'ils  n'a- 
vaient pas  compris  le  sens.  Il  s'agissait  sur- 
tout des  passages  de  la  lettre  de  saint  Léon 


a35 


([ui  avait  approuvé  le  concile  do  Chalcédoine  : 
«Ce  pape,  disaient-ils,  a  trouvé  bon  tout 
ce  qui  s'est  l'ait  dans  ce  concile  ;  il  a  donc 
aussi  approuvé  tout  ce  qui  s'y  est  dit  en  fa- 
veur des  Trois- Chapitres.  »  Pelage  leur  ré- 
pond que  suint  Léon  n'a  approuvé  que  ce 
que  les  Pères  de  Chalcédoine  avaient  di'cidé 
sur  la  foi,  et  qu'il  a  été  persuadé  que  ce  qui 
regardait  les  personnes  de  Théodore,  d'Ibas 
et  de  Théodorel,  pouvait  être  examiné  de 
nouveau.  Il  rapporte  sur  cela  un  passage  de 
la  lettre  de  ce  saint  pape  où  il  confirmait  les 
décrets  de  Chalcédoine,  et  un  autre  de  sa 
lettre  à  Maxime,  évêque  d'.\ntioclie.  Il  eu 
allègue  ensuite  de  saint  Augustin  et  de  saint 
Cyprien,  pour  les  convaincre  qu'étant  hors 
de  l'Eglise  par  le  schisme,  ils  étaient  consé- 
queniment  hors  de  la  voie  du  salut.  C'est 
pourquoi  il  les  exhorte  de  revenir  au  plus  tôt 
à  l'unité  de  l'Église  catholique,  etd'euvoyer 
à  Rome  de  nouveaux  députés  pour  s'éclairer 
et  traiter  de  leur  réunion,  ou  de  s'assem- 
bler à  Ravenne  pour  y  entrer  en  conférence  t„„.  v  c„n. 
avec  les  autres  évêques,  promettant  d'y  en-  "'■•i'"?-"^- 
voyer  quelqu'un  de  sa  part  pour  y  tenir  sa 
place.  Cette  seconde  lettre  n'ayant  pas  eu 
plus  d'eil'el  que  la  première,  le  pape  Pelage 
leur  eu  écrivit  une  troisième  beaucoup  plus 
ample.  Saint  Grégoire  '  qui  n'était  alors  que 
diacre  l'appelle  un  livre,  et  il  parait  par  le 
témoignage  de  Warnéfride  -  dans  1'  Histoire 
des  Lombards,  qu'il  l'avait  lui-même  compo- 
sée. Pelage  commence  cette  lettre  par  le  dé- 
tail des  maux  qui  sont  les  suites  inévitables 
du  schisme  :  après  quoi  il  fait  voir  que  c'é- 
tait sans  fondement  que  les  évêques  d'Istrie 
s'imaginaient  que  tout  ce  qui  s'était  fait 
sous  l'empereur  Justinien  pour  la  condam- 
nation des  Trois-Chapitres,  tendait  au  ren- 
versement du  concile  de  Chalcédoine.  Ces 
évêques  objectaient  que  saint  Léon,  dans  sa 
78"  lettre  à  l'Empereur  de  ce  nom,  déclarait 
qu'il  n'osait  mettre  en  question  ce  qui  avait 
été  défini  dans  ce  concile. 

Ils  citaient  encore  d'autres  lettres  de  ce 
pape  où  il  disait  la  même  chose.  Pelage  en 
convient  ;  mais  il  soutient  que  saint  Léon  ne 
parlait  que  de  la  définition  de  foi  du  concile 
de  Chalcédoine,  et  non  des  causes  particuliè- 
res qui  y  forent  examinées.  11  le  prouve 
par  la  58"  lettre  de  ce  pape  à  Anatolius,  évê- 
que de  Constantinople,  à  qui  il  fait  voir  qu'il 
ne  pouvait  s'autoriser  du  privilège  par  le- 


'  c.reg.,  lib.  11  Epist.  36  ad  Episc.  Bibemiœ. 


*  Lib.  111  De  Gestis  Longob.  caj).  x. 


336 


HISTOIRE  GENERALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


quel  ce  concile  accordait  le  second  rang  à 
l'évêque  de  Constantinople,  puisqu'il  n'avait 
point  été  assemblé  pour  régler  le  rang  des 
évêques,  mais  uniquement  pour  terminer 
les  ditlicultés  qui  s'étaient  élevées  dans  l'K- 
H.E.CI9.  gijgg  jy  sujet  de  la  foi.  Pelage  donne  la  mê- 
me raison  à  ce  que  les  évêques  d'Istrie  ob- 
jectaient, que  suivant  les  lettres  circulaires 
d'un  grand  nombre  d'évèques,  il  n'était  pas 
permis  de  changer  une  syllabe,  pas  même 
la  moindre  leltre  des  décrets  de  Chalcé- 
«si.  doine.  Les  évêques  schismatiques  disaient 
encore  :  «  Nous  avons  appris  du  Siège  apos- 
tolique et  des  archives  de  l'Kglise  romaine,  à 
ne  point  recevoir  ce  qui  s'est  fait  sous  le 
règne  de  Justinien  contre  les  Trois-Chapi- 
Ires.  Norts  savons  aussi  que  dans  les  com- 
mencements que  cette  atl'aire  fut  agitée,  le 
Saint-Siège,  tenu  par  le  pape  Vigile,  et  les 
évêques  de  toutes  les  provinces  latines, 
s'opposèrent  fortement  à  la  condamnation 
de  ces  Trois-CImpitres.  »  Pelage  répond  que 
les  évêfpies  latins  n'entendant  pas  le  grec, 
ont  connu  trop  tard  l'erreur  dont  il  était 
question,  et  que  plus  ils  ont  eu  de  fermeté  <i 
la  défendre  jusqu'à  ce  qu'ils  connussent  la 
vérité  ,  plus  les  évêques  d'Istrie  devaient 
avoir  de  facilité  <i  les  croire  quand  ils  se  sont 
rendus  :  «Vous  auriez  raison,  ajoute-t-il,  de 
mépriser  leur  acquiescement,  s'ils  l'avaient 
donné  avec  précipitation  avant  d'être  bien 
éclairés;  mais  après  avoir  tant  souffert  et 
combattu  si  longtemps  jusqu'à  se  laisser 
maltraiter,  vous  pouvez  croire  qu'ils  n'au- 
raient pas  cédé  tout  d'un  coup,  s'ils  n'a- 
vaient reconnu  la  vérité.  »  Il  cite  l'exemple 
de  saint  Paul  qui  ne  se  converlit  qu'après 
que  Dieu  eut  permis  qu'il  résistât  longtemps 
à  la  vérité  ;  celui  de  saint  Pierre  qui  changea 
de  sentiment  et  de  conduite  sur  l'observa- 
tion des  cérémonies  légales;  celui  de  Dieu 
môme  qui  se  repentit  d'avoir  oint  Saiil  pour 
roi  dans  Israël  ;  et  dit  qu'il  '  n'est  pas  blâ- 
mable de  changer  de  sentiment,  mais  d'en 
changer  par  inconstance  ;  et  que  quand  on 
cherche  constamment  la  vérité,  sitôt  qu'on 
la  conuait,  on  doit  changer  de  langage. 

Élie  d'Aquilée  et  les  évêques  de  son  parti 
objectaient  que  saint  Léon  était  de  sentiment 
qu'on  ne  doit  point  condamner  les  morts; 
sur  quoi  Pelage  leur  dit  que  c'était  à  eux  à 

'  A'on  enim  mutatio  senteiitiir,sed  incomtantia 
sensus  in  culpa  est.  Quando  ergo  ad  cngnilionein 
recti.  iiilrntio  incoinmutaliili.i  permaucat.  quid 
obslat,  si  ignoranliam  sutim  deserens,  verba  pcr- 


produire  quelques  endroits  des  lettres  de  ce 
pape,  où  il  se  fut  expliqué  ainsi  ;  mais  que 
ceux  qu'ils  avaient  apportés ,  défendaient 
seulement  de  traiter  de  nouveau  la  défini- 
tion de  foi,  sans  défendre  en  aucune  façon 
de  condamner  les  morts  infldèles;  qu'au  «V- 
reste  il  ne  se  souvenait  pas  que  saint  Léon 
eût  traité  en  quelques  endroits  de  ses  écrits, 
la  question  si  l'on  doit  condamner  les  morts. 
Ensuite  il  prouve  qu'on  le  peut,  par  la  lettre 
de  saiut  Augustin  au  comte  Boniface,  où  il 
est  dit,  que  si  ce  que  l'on  objectait  conli-e 
Cécilien  était  vrai,  il  serait  permis  de  l'ana- 
tliématiser  quoicjue  mort  ;  et  par  l'exemple 
du  concile  d'Éphèse  qui  a  condamné  le^^m- 
bole  de  Théodore  de  Mopsueste  avec  sa  per- 
sonne. Ces  deux  faits  étant  bien  constatés, 
Pelage  rapporte  plusieurs  passages  des  écrits 
de  Théodore  pour  montrer  qu'étant  remplis 
d'erreurs  on  a  été  en  droit  de  les  condamner 
et  de  le  condamner  lui-même.  11  remarque 
en  passant  que  l'on  disait  qu'il  avait  com- 
posé plus  de  dix  mille  livres  ;  comme  quel- 
ques-uns pouvaient  répondre  que  l'on  dou- 
tait qu'ils  fussent  tous  de  lui,  il  passe  ii  d'au- 
tres preuves,  et  cite  la  requête  des  évêques 
d'Arménie  à  Proculus,  évêque  de  Constanti- 
nople contre  Théodore  de  Mopsueste,  où  ils 
le  disent  infecté  des  erreurs  de  Paul  de  Sa- 
mosate,  de  Photin  et  de  plusieurs  autres; 
les  lettres  de  Jean  d'Antioche,  de  saint  Cy- 
rille de  Jérusalem,  de  Rabbula,  évêque  d'E- 
dessc  ,  V/Jistoire  ecclésiastique  d'Hésychius, 
prêtre  de  Jérusalem,  et  la  loi  de  Théodose- 
le-Jeune,  et  de  Valentinien,  qui  tous  ont 
condamné  les  erreurs  de  Théodore  avec 
celles  de  Nestorius. 

11  traite  après  cela  de  la  lettre  d'ibas,  qu'il 
dit  être  toute  entière  contraire  aux  décrets 
du  concile  de  Chalcédoine,  montrant  qu'on 
ne  peut  la  soutenir  sans  condamner  égale- 
ment le  concile  d'Hphèse,  approuvé  par  ce- 
lui de  Chalcédoine.  Pelage  pour  prévenir 
l'objection  que  les  évêques  schismatiques 
auraient  pu  lui  faire  sur  ce  qu'Ibas  fut  recon- 
nu pour  catholique  dans  le  concile  de  Chal- 
cédoine, et  que  sa  lettre  n'y  avait  point  été 
condamnée,  répond  qu'ils  devaient  connaî- 
tre où  finissait  le  concile  de  Chalcédoine. 
((  Nous  savons  tous,  '  leur  dit-il,  que  dans  un 
concile  on  ne  fait  jamais  de  canons  qu'après 

mulet?  Pelag.  cpisl.  ad  Eliam.  Tom.  V  ConcU., 
pag.  C22. 

*  Omnes  namquc  novimus,  quod  in  synndn 
numquam  canones,  nisi  pcraclis  definilionilius  fi- 


cn. 


[W  SIÈCLE.]        CHAPITRE  XXXIV.  —  JKAN 

les  définitions  de  foi.  Prenez  garde  que;  la 
prolossion  do  foi  est  aciievi'c  dans  la  sixieiim 
uclioii  du  c'ontili"  de  Clialcodoine,  puisque 
dans  la  septième  on  dresse  les  canons,  et  que 
dans  les  actions  suivantes  on  ne  traite  que 
des  all'aires  particnliiMes.  Comme  vos  dci)u- 
tés  le  ri''vo(iuaicnt  en  doule,  nous  le  leur 
avons  fait  voir  en  plusieurs  exem[)laires.  Si 
l'on  examine  même  attentivement,  on  trou- 
vera que  les  canons  n'appartiennent  pas  à  la 
septième  action,  ainsi  (ju'on  le  cioit,  mais  ;\ 
la  sixième,  caron  n'y  amis  ui  la  date  du  jour 
ou  de  l'année,  ni  les  noms  des  présents  :  ce 
qui  montre  que  c'est  la  suite  de  la  même  ac- 
tion. On  voit  que  la  cause  de  la  foi  était  finie 
dans  la  sixième  action,  par  les  souscriptions 
des  évêques,  et  par  la  prière  qu'ils  font  à 
l'empereur  de  les  renvoyer.  Dans  ce  qu'ils 
règlent  ensuite  sur  les  atl'aires  particulières, 
il  n'y  a  point  de  souscriptions.  La  plupart 
des  exemplaires  grecs  du  concile  ne  contien- 
nent que  six  actions  avec  les  canons  ;  et  dans 
les  lettres  circulaires  à  Ijempereur  Léon.  Aly- 
pius,  deCésarée  enCappadoce,  dit  :  «Je  vous 
déclare  que  je  n'ai  point  lu  ce  qui  a  été  fait  à 
Chalcédoine  au  sujet  des  allaires  particuliè- 
res ;  et  Tlialassius,  mou  prédécesseur,  qui  as- 


III  KT  PKLAGlî  U,  PAPES. 


331 


sista  au  concile,  n('  nous  en  rapporta  que  la 
déliniliou  de  foi.  >  Il  infère  d(!  I.i  cpu^,  ce  qui  se 
lit  depuis  la  sixième  action  n'('tant  pas  de  la 
même  autorité,  on  ne  doit  point  hl.lmer  ceux 
qui  soumettent  la  lettre  d'Ibas  ■'i  un  nouvtil 
examen,  parce  qu'ils  la  croient  hérétique. 

Surlo  troisième  clia|)itre,  le  pape  dit  :  (iNous  cj 
ne  '  condamnons  point  tous  les  écrits  de  ïhéo- 
doret,  mais  seulement  ceux  où  il  combat  les 
douze  anathéuiatisuies  de  saint  Cyrille.  Nous 
recevons,  et  nous  lespectons  sa  personne  : 
quant  ;\  ses  autres  ouvrages,  nous  les  rece- 
vons et  nous  nous  en  servons  même  contre 
nos  adversaires.»  Les  évoques  d'Istrie  objec- 
taient que  Jean  d'Antioche  avait  donné  de 
grandes  louanges  dans  une  de  ses  lettres  à 
Théodore  de  Mopsueste.  Pelage  conteste  ce 
fait;  mais  en  le  supposant  vrai,  il  dit  qu'on 
doit  faire  plus  d'attention  à  ce  que  le  concile 
d'Éphèse ,  saiut  Cyrille  et  le  prêtre  Hésy- 
chius  ont  avancé  contre  Théodore,  qu'i'i  ce 
que  Jean  d'Antioche  a  écrit  en  sa  faveur.  11 
remarque  -  que  quelquefois  les  méchants  ont 
été  loués  par  les  bons;  qu'Eusèbe  de  Cé- 
sarée,  le  plus  célèbre  d'entre  les  historiens, 
a  loué  Origène,  le  plus  mauvais  de  tous  les 
hérésiarques  ;  que  saint  Grégoire  de  Nysse 


dei,nisi perfeclis  synodalibus  geslis  habeantur,ut 
servalo  ordine,  cuin  prius  synodiis  adi/idein  corda 
œdificel,  lune  per  régulas  cauonum  mores Ecclesiœ 
aclusque  coiuponat.  Vigilanti  ergo  cura  respicile, 
quœ  {leg.quia)  in  sexta  illiiis  actione  sanctœ  fidei 
professio  consummatur  :  moxque  in  seplima  ad 
inslUulioiiem  jam  lidelium  régula  canonum  figi- 
tur  ;  ulterioribus  vero  actioinbus  nihil  de  causa 
fidei,  sed  sala  negolia  privala  versanliir.  Quod 
cum  responsales  leslri  ila  esse  ambigerent,  curœ 
nabis  fuil  ex  prolatis  mullis  hoc  codicibus  de- 
monstrare ;  nos  lamen  hac  de  re  nunquam  dubi- 
tari  posse  credidimus,  quia  et  eadem  séries  sic  se 
insinuai,  ul  credi  aliter  cotitradicat.  Prinium  qui- 
dein,  quia  fsicut  dictuin  est)  dum  definila  fideire- 
gula  in  aclione  sexta  ostenditur,  ordo  causœ  in- 
dical,  ut  in  actione  suhjuncta  canoMim  forma  se- 
queretur.  Secundum  rero  est,  quia  et  in  actiunis 
sextœ  terininumjam  canonum  normaprœlibatur, 
dum  illic  a  principe  veneriibilibus  episcnpis  dici- 
tur  :  Aliqua  sunl  capitula  quœ  ad  honorem  ves- 
trw reverentice  vobis  reservavimus,  justumexisti 
mantes,  hœc  a  vobis  regulariter  per  synodum  sin- 
gula  firnari,  etc.  Prœlibatione  itaque  sextœ  ac- 
tionis  ostenditur,  quia  jure  constitutiones  cuno- 
num  non  nisi  in  septima  continentur.  Quid  enini 
supererat  quod  perfecla  fidei  professione  fieret , 
nisi  ut  quorunidam  fidelium  actiones  illicilas 
sancta  synodus  positis  regulis  judic  tret?  Quam- 
vis  si  solerter  aspicimus,  canorium  regulaspositas 
non,  sicul  putalur,  in  septima,  sedintexlas  sexcœ 
aclioni  invenimus.  ^am  cum  in  eisdem  consliiu- 
tionibus  sanciendis  non  dies,  non  iinperium  pvni- 


tur,  non  qui  résidèrent,  describuntur  :  procul  du- 
bio  cum  non  consueto  exnrdio  cœptœ  sunt,  quia 
prœcedenti  actioni  subnexa<  sunl  demonstralur. 
Quia  vero  in  aclione  sexta  fidei  causa  perficilur, 
ipsa  episcoporum  omnium  generali  subscriptione 
declaratur.  Kam  qui  post  subscripserunt  senten- 
tiam,  cwncla  quœ  de  fuie  agenda  fueranl,  finila 
testatisunt.  Unde  et  in  causis  post  specialibus, 
nudis  lantiiinnwdo  verbis  loquuntur;  atque  ea 
quœ  decernentes  dixerant,  nulla  supposita  sub-<- 
criptione  firmaverunl.  Qui  reverendissimi  epis- 
copi  ila  in  actione  sexta  omnia  quœ  de  fide 
agenda  fueranl,  cognuscebant  ;  ut,  sicul  illic  scrip- 
tum  est,  clamarent  :  Supijticamus.  dimitte  nos  ; 
pie  Imperator,  dimitte  nos,...  Aly plus  Leoni  Augus- 
te ait  :  Vestrie  pietati  siguilico,  quia  ea  quideiu 
quae  partlculariter  examinata  sunt  atque  gesla  a 
sanctis  episcopis  in  Cbalcedouensi  civitate  colleclis, 
non  legi.  Neque  enim  a  sanolae  memoriae  tuni; 
episccpo  Thalassio,  qui  interfuit  sancto  concilio, 
aliquid  liuc  amplius  est  allatura  ei  liis  quse  gefta 
noscuntur  ;  sed  tantummodo  definitionom  expo- 
sitam  ab  illo  sancto  concilio,  ab  eo  delatam  iu- 
spexi.  l'elag.,  pag.  629,  630,  631. 

'  Neque  enim  Theodoreti  omnia  scripla  damna- 
mus,  sed  sola  quœ  contra  duodecim  Cyrilli  capi- 
tula... scripsisse  mon.<lratur...ejus  et  personam  re- 
cipimus...  et  cum  synodo  Theodoreium  profilen- 
tem  recta  veneramur.  Alla  vero  scripta  illius  non 
solum  recipimus,  sed  eis  etiam  contra  adversa- 
rios  utimur.  Ibid.,  pag.  631  et  633. 

-  An  non  et  malos  a  bonis  aliquandn  laudatos 
novimus  !  Quid  namque  in  hœresiarcliis  Ori'gene 


338 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 


Le  un  t 

JoiD,    évoque 
do  conblantl- 


l'a  aussi  loué,  el  que  saint  Jérôme  avait  pour 
lui  tant  d'allcction,  qu'il  semble  avoir  été  son 
disciple.  »  Ce  pape  finit  sa  lettre  en  exhor- 
tant les  évèques  scliisinatiques  à  se  réunir 
aux  orthodoxes;  il  les  fuit  ressouvenir  qu'en- 
core que  saint  Cyprien  ait  été  dans  l'erreur 
sur  la  rebaptisalion ,  il  ne  s'était  point  séparé 
delà  communinn  de  toute  l'Éiilise,  et  il  prie 
le  Seigneur  de  leur  inspirer  le  désir  et  l'a- 
mour de  la  paix.  On  ne  voit  point  qu'Élie  ait 
embrassé  la  jiaix  avant  sa  mort,  qui  arriva 
quoique  temps  après.  Il  eut  pour  successeur 
dans  le  siège  d'Aquilée  un  nommé  Sévère, 
qui  prit  aussi  la  défense  des  Trois-C/inpitres. 
5.  En  589  il  y  eut  un  concile  à  Constantino- 
ple,  où  Grégoire,  patriarche  d'Antioche,  ac- 
cusé d^Kiceste  par  un  laïque,  fut  déclaré  in- 
nocent. Jean  surnommé  le  Jeûneur,  patriar- 
che de  Constantinople,  avait  convoqué  ce  con- 
cile, et  il  en  avait  pris  occasion  pour  se  don- 
ner le  titre  d'évcque  universel.  Sitôt  que  le 
pape  Pelage  eu  fut  informé,  il  cassa  tous  les 
actes  de  ce  concile,  excepté  ce  qui  regardait 
la  cause  de  Grégoii-e,  et  défendit  '  à  l'archi- 
diacre Laurent ,  son  nonce  auprès  de  l'em- 
pereur, d'assister  à  la  messe  avec  Jean.  11 
écrivit  encore  une  lettre  circulaire  ù  Jean  et 
à  tous  les  évêques  qu'il  avait  appelés  au  con- 
cile. Il  la  commence  ^  par  se  plaindre  de  la 
témérité  de  ce  patriarche,  qui,  contre  l'auto- 
rité du  Siège  apostolique  de  saint  Pierre,  à  qui 
seul  il  appartient  par  privilège  de  convoquer 
des  conciles  généi-aux  et  de  les  confirmer, 
en  avait  convoqué  un  sous  la  présomption 
qu'il  était  évêque  universel,  dont  en  eilet  il 
prenait  le  titre  dans  la  lettre  de  convocation. 
Ensuite  il  déclare  qu'il  a  cassé  par  l'auto- 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

rite  de  saint  Pierre  tout  ce  qu'ils  avaient  fait 
dans  leur  convenlicule,  ne  croyant  pas  que 
cette  assemblée  méritât  le  nom  de  concile. 
Il  établit  le  pouvoir  des  clefs  donné  à  cet 
apùtre,  et  la  nécessité  du  consentement  de 
l'évèque  de  Home  pour  la  tenue  des  conciles, 
défendant  à  ces  évêques  d'en  tenir  de  sem- 
blables à  celui  011  ils  s'étaient  trouvc's,  sous 
peine  d'être  privés  de  la  communion  du  Siège 
apostolique.  Il  déclare  que  les  prédécesseurs 
du  patriarche  Jean,  et  Jean  lui-même,  lui 
ont  souvent  écrit  de  leur  propre  main,  et  aux 
autres  évêques  de  Rome,  avec  protestation 
devant  Bien  de  ne  rien  entreprendre  jamais 
contre  le  Siège  apostolique,  et  de  n'usurper 
aucun  de  ses  privilèges,  consentantd'êtreaua- 
thèmes  s'ils  manquaient  à  leur  promesse  ;  que 
leurs  lettres  étaient  conservées  exactement 
avec  leurs  sceaux  et  leurs  signatures  dans  les 
archives  de  l'Église  de  Rome,  et  que  s'étant 
liés  eux-mêmes  par  le  lien  de  l'anathème 
pour  le  cas  de  prévarication  de  leur  part,  il 
lui  avait  paru  inutile  de  les  excommunier.  Il 
avertit  néanmoins  Ic^  patriarche  Jean  de  cor- 
riger au  plus  tôt  son  erreur,  s'il  ne  voulait  être 
excommunie!  et  privé  de  la  communion  du 
Siège  apostolique  el  de  tous  les  saints  évêques. 
n  Ne  faites',  ajoute-t-il,  aucune  attention  au 
nom  d'èvè(pie  universel  qu'il  a  usurpé  illi- 
cilement,  et  n'assistez  à  aucun  concile  qu'il 
aura  convoqué  sans  l'autorité  du  Saint-Siège, 
si  vous  voulez  persévérer  dans  la  commu- 
nion de  ce  siège,  et  dans  celle  des  autres  évê- 
ques. Aucun  des  patriarches  ne  s'est  donné 
un  titre  si  profane.  Si  le  souverain  patriar- 
che le  prenait,  il  ne  pourrait  le  faire  qu'au 
préjudice  des  autres  patriarches.  Mais  à  Dieu 


deterius,  el  quid  in  historiographis  inveniri  Eu- 
sebio  honorabilius  potcst  ?  El  quis  nostrum  ncs- 
cial  in  libris  suis  quanlis  Origenem  Eusebius 
prœconiis  alloUall...  An  non  el  Gregorius  Nynsiv 
episcopus  ..  magnis  Origenem  laudihus  pnvfcrl? 
An  non  elllieronymus...  lanlo  erga  Origenem  fa- 
vore  inlenditur,  ut  pêne  di^cipulus  ejus  esse  vi- 
deat-ur?  Ibid.,  pag.  C3.S  cl  634.  —  '  Grog.,  lib.  tV 
Episl.  \\\\],  xxxviii,  pag.  1187,  1191. 

'  Relalum  est  ergo  ad  AjioslolicamscdeinjJnan- 
nem  Conslanlinopolilanum  epUcopum  universd- 
lein  se  subscribcre,  rosque  ex  hac  sun  prd'suinp- 
tione  ail  synodum  conrocare  gtneralem,  cum  ge- 
neralium  synodoriim  couvnrandi  auctnrilas  Apo^- 
tholicœ  stdi  bcali  Pétri  siugulari  privilegio  sil 
tradila,  el  nuUa  unquam  synodus  rata  legatur 
quœ  Aposlolica  auctoritale  non  fuerilfnlta.  (Jtia- 
propter,  quidquid  in  prwdiilo  vestro  convenlienlo 
{quia  synodus  luUler  prœsumpta  esse  non  pnlvit) 
etatuUlis,ex  auctoritale sancli  Pétri  apostolorum  - 


principis,  el  Domini  Salvaloris  voce,  qtia  bea'to 
Pelro  polestatem  ligandi  atque  soliendi  ipse  Sal- 
valor  dedil,  qua-  eliam  potesliis  in  sticcessoribus 
ejus  indubitanler  transivit.  prœcipio  omnia  quœ 
ibi  slaiuislis,  etvana.  et  cassataesse,  itauldein- 
ceps  nunquam  nppareant,  »iee  venlilenlur.  Pclag. 
Epist.  ad  Juan.,  pag.  91!t. 

<'  Universaliliitisquoque  nomen  ,  quod  sibi  illici- 
te usurpavit,  nolileaUendere,  neccoculioneejiis  ad 
synodum,  abfq>ic  auctoritale  Sedisapostnlicir.  un- 
quam venite,  si  Aiioslolicœ  sedis  el  cictcrorum  epis- 
roparumcoinmunione  vullisfrui.  Kullus  enimpa' 
Iriarcharum  hue  lam  profano  vocubulo  unquam 
ulalnr  :  quia  si  suinmus  palriarclui  unirersalis  di- 
citur.pairiareharumnumenctrterisdcrugalur.Sed 
absii  a  fidelis  cujus  quam  mente,  hoc  sibi  rel  velle 
quem/iiam  arripcre,  unde  honorrm  fratrum  suo- 
ru  m  i  mniinuere  e.r  quanlttlacu  mque  parle  V  idealur. 
(iiiapropler  charitasvcstra  neminem  unquam  suis 
in  epislolis  universalem  nominel.  Ibid.,  pag.  949. 


[vi"  siKCLE.]         CHAI'JTllE  XX.\1\ .  —  JKAN 

ne  plaise  que  quelqu'un  s'altribuc  une  qua- 
lité qui  diminue  on  quclqiu'  paille  riu)nneur 
que  l'on  doit  rendre  i\  la  dignité  de  ses  frè- 
res. Que  personne  donc  d'entre  vous  ne  qua- 
lifie dans  ses  lettres  qui  que  ce  soil  d'évèque 
universel.»  Il  les  prie  de  s'intéresserpour  que 
l'honneur  du  clergé  ne  soufl're  point  d'altéra- 
tion de  leur  temps,  et  que  jamais  '  le  siège  de 
Home,  qui,  par  rinslilulioii  du  Seigneur,  est 
le  chef  de  toutes  les  Eglises,  soit  privé  ou 
dépouillé  de  ses  privilèges. 

Ces  évéques  avaient  consulté  le  pape  Pe- 
lage pour  savoir  de  combien  de  villes  épisco- 
pales  devait  être  composée  une  province. 
Le  Pape  répond,  qu'encore  que  celte  ques- 
tion ait  été  traitée  sullisammeut  par  ses  pré- 
décesseurs, il  cro}-ait  devoir  décider  qu'on 
peut  doimcr  le  titre  de  province  ;\  celle  qui 
a  dix  ou  onze  villes,  un  roi,  des  puissances 
inférieures,  un  évêque  avec  dix  sutl'ragants, 
ou  onze  évèques  pour  juger  toutes  les  causes, 
tant  des  évéques  mêmes,  que  des  prêtres  et 
des  villes  situées  dans  celteprovince.il  ajoute 
que,  si  dans  chaque  province  il  s'élève  quelque 
diUiculté  sur  laquelle  les  évéques  ue  s'accor- 
dentpas  entrceux,  elle  sera portèeenpremier 
lieu  au  siège  majeur;  en  second  lieu,  au  con- 
cile de  la  province  ;  mais  que  les  causes  majeu- 
res et  les  questions  difficiles  seront  portées, 
suivant  la  coutume,au  Siège  apostolique  Cette 
lettre  est  du  premier  de  mars  de  l'an  387. 

6.  Il  y  en  a  trois  autres  sous  son  nom  :  la 
première  à  l'archevêque  Bénigne,  où  l'on  dé- 
fend la  translation  des  évéques  d'une  église 
à  une  autre;  la  seconde  aux  évéques  d'Italie, 
où  il  est  défendu  de  recevoir  une  accusation 
contre  un  évêque  ;  et  la  troisième  aux  évé- 
ques d'Allemagne  et  des  Gaules,  où  il  est 
parlé  de  neuf  Préfaces  usitées  à  Rome  dans, 
la  célébration  des  divins  mystères.  Mais  on 
convient  que  ces  trois  lettres  ont  été  sup- 
posées par  Isidore,  et  qu'elles  ne  sont  qu'un 
tissu  de  passages  tirés  des  écrits  de  saint 
Augustin,  de  saint  Prosper,  d'Ennode  dePa- 
vie ,  des  papes  Zosime,  Hilaire,  Léon,  et  de 
quelques  autres. 

7.  On  a  mis  à  la  suite  de  ces  lettres  quel- 
ques décrets  qui  sont  cités  sous  le  nom  du 
même  pape  par  Yves  de  Chartres  et  par  Gra- 
tien.  Il  est  dit  dans  le  premier,  que  l'on  ne 
doit  pas  choisir  les  moines  pour  les  faire  dé- 


111  ET  l'ÉLAGE  11,  PAPES.  339 

fenscurs  de  l'Église, parce  que  les  fondions  de 
cette  charge  sont  très-diUërentes  des  exerci- 
ces de  la  vie  monastique,  u  Un  moiuc,  y  est-il 
dit,  doit  vivre  dans  la  retraite  et  dans  le  repos, 
occupé  de  la  prière  cl  du  travail  des  mains  ; 
le  défenseur  au  contraire  doit  connaître  do 
toutes  les  causes,  de  tous  les  actes  qui  regar- 
dent l'ICglise,  et  entrer  dans  tous  ses  procès. 
Ainsi  il  est  plus  i^  propos  d'élever  un  moine 
au  sacerdoce,  lorsiju'il  en  a  l'Age  et  le  mé- 
rite, que  de  le  mettre  défenseur.  »  Par  le  se- 
cond décret,  le  Pape  permet  h  l'évéque  Flo- 
renliii  d'ordonner  diacic  un  homme  qui,  après 
avoii-  perdu  sa  femme,  avait  eu  des  enfants 
de  sa  servante.  Cette  dispense  était  contre 
les  canons;  aussi  Pelage  ne  l'accorde  qu';'i 
cause  delà  disette  de  sujets  pour  le  clergé, 
disant  que  non-seulement  on  avait  peine  à 
en  trouver  qui  méritassent  d'être  ordonnés, 
mais  que  l'espèce  d'hommes  manquait  aussi. 
Il  veut  au  surplus  que  la  servante  soit  mise 
dans  un  monastère  pour  y  vivre  en  conti- 
nence. Le  troisième  décret  est  sur  l'ordina- 
tion d'un  évèqiie  pour  l'église  de  Carmes.  Le 
diacre  Elpidius  avait  été  choisi  d'un  consen- 
tement unanime  :  Pelage  veut  donc  qu'on  le 
fasse  au  plus  tôt  partirpour  Rome,  pour  y  re- 
cevoir l'ordination  épiscopale.  Dans  le  qua- 
trième, adressé  à  Cresconius,  il  défend  aux 
évoques  de  Sicile  d'exiger  plus  de  deux  sous 
des  paroisses  de  leur  dépendance,  et  d'obli- 
ger les  prêtres  ou  le  clergé  de  ces  paroisses 
de  leur  préparer  des  repas  au-dessus  de  leurs 
facultés.  Le  cinquième  et  le  sixième  sont  pour 
maintenir  l'usage  où  étaient  les  clercs  d'être 
jugés  par  des  juges  ecclésiasticpies,  confor- 
mément auxlois  civiles.  On  ne  peut  douter  que 
ces  décrets  ne  soient  très-anciens,  et  nous  ne 
voyons  rien  qui  puisse  empêcher  qu'on  ne 
les  croie  du  pape  Pelage  II.  Il  mourut  le  8 
fèvi'ier  de  l'an  590,    d'une  maladie  conta- 
gieuse qni  avait  commencé  à  Rome  au  mi- 
lieu du  mois  de  janvier  de  la  même  année. 
Son  pontificat  fut  de  douze  ans  et  près  de 
trois  mois,  pendant  lesquels  il  fit  divers  ou- 
vrages considérables,  dont  un  fut  de  rebâtir 
l'église  de  Saint-Laurent.  Il  orna  le  sépulcre 
de  ce  saint  et  celui  de  saint  Pierre  de  tables 
d'argent.  En  deux  ordinations  au  mois  de  dé- 
cembre,  il  ordonna  pour  l'Église   romaine 
quatre-vingt-deux  prêtres  et  huit  diacres; 


Lib.     PoD* 
lir.    10m.    V 

Concil.,    pag. 
9;iO, 


'  Orale,  fratres,  ut  honor  ecclesiaslicus  nostris 
diebus,non  evacxietur  :  nec  unquam Romana  sedes, 
quw  instituente  Domino  caput  est  omnium  eccle- 


siarum,  privilegiis  suis  usqiiam  careal  aiil  expo- 
lielur.  Ibid.,  pag.  950. 


340 


IIISTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


et  en  divers  lieux  il  ordonna  quarante-huit 
évêques  pour  les  églises  d'Italie.  [Le  tome 


LXXII  de  la  Patrologie  latine  reproduit  les 
lettres  et  les  décrets  de  Pelage  II ,  col.  701.] 


CHAPITRE  XXXV. 

Timothée  prêtre  de  Constantinople.  Anonyme  snr  la  réception  des  manichéens. 
Anonyme  qni  écrit  contre  les  manichéens. 

[Écrivains  grecs.] 


Timoibée,       \ .  On  nous  a  donné  plusieurs  fois  en  srrec 

prïtrc  de 

coosi«nt.T>o-  et  en  lalin  un  traité  intitulé  .'  De  la  Manière 
Monuni.coui.  différente  de  recevoir  ceux  qui  se  présentent  a 
la  sainte  Église  Catholique  et  Apostolique.  11 
poi'te  le  nom  de  Timothée,  prêtre  de  la 
grande  église  de  Constantinople,  et  garde  du 
trésor.  Jean,  prêtre  de  la  même  église,  l'avait 
prié  de  le  composer,  et  c'est  à  lui  que  ce 
traité  est  adressé.  On  n'y  trouve  rien  qui  en 
fixe  l'époque  :  seulement  il  paraît  certain 
que  Timothée  l'écrivit  avant  la  naissance  du 
monothélisme,  puisqu'il  ne  dit  rien  de  cette 
hérésie,  et  qu'il  finit  son  Catalogue  iiCoWaàcs 
acéphales ,  et  aux  diveises  branches  qui 
sont  sorties  de  cette  secte,  ou  de  celle  des 
ibid.pog.  eutychieus.  De  la  manière  dont  il  parie  du 
cinquième  concile  général  sous  l'empereur 
Justinien,  on  dirait  qu'il  écrivait  dans  le  temps 
où  il  y  avait  encore  beaucoup  de  dillicultés 
surla  réception  de  ce  concile.  Pour  lui,  il  en 
reçoit  tous  les  décrets,  et  lui  donne,  comme 
aux  quatre  précédents,  le  titre  de  concile 
universel.  • 

2.  Timothée  met  trois  classes  de  ceux  qui 
viennent  <i  l'Église  catholique  :  la  première 
est  de  ceux  qui  ont  besoin,  pour  y  entrer,  de 
recevoir  le  saint  baptême  ;  la  seconde  com- 
prend ceux  que  l'on  y  reçoit  sans  les  bapti- 
ser, et  en  les  oignant  seulement  de  l'huile 
sainte  ;  dans  la  troisième  sont  ceux  qui  ne 
reçoivent  ni  le  baptême,  ni  i'nnrtion  sainte, 
mais  qu'on  oblige  uniquement  d'aualhéina- 


Co  que  cn- 
llenl  le  lniil« 
de  Tlmoll-f-e. 
Ibl(l.,|.ag.3;7. 


tiser  leur  propre  erreur,  et  toutes  celles  qui 
ont  jamais  été  dans  l'Église.  Il  met  dans  la 
première  classe  les  tascodruges  ,  hérétiques 
de  Galatie,  ainsi  appelés,  parce  qu'ils 
avaient  coutume  dans  leurs  prières  d'appuyer 
un  doigt  de  la  main  droite  sous  leur  nez  ; 
les  marcioniles,  les  encratites,  les  valenli- 
niens,  les  basilidiens,  lesnicolaïtes,  les  mon- 
tanistes,  les  manichéens,  les  eunomiens,  les 
paulianisles,  les  photiniens,  les  melchisédé- 
ciens,  et  plusieurs  autres  dont  il  décrit  en 
peu  de  mots  les  erreurs.  Il  veut  même  que  p.p.  m. 
les  pélagicns  et  les  célestiens  soient  reçus 
dans  l'Eglise  par  le  saint  baptême,  disant 
qu'oufrc,leurs  erreurs  particulières,  ils  étaient 
encore  infectés  de  celles  des  neslorieus  et  des 
manichéens.  La  secotade,  selon  lui,  comprend 
les  quartodécimains,  lesnovatiens,  les  ariens, 
les  macédoniens,  les  apollinaristes.  Il  fait 
voir  en  détail  en  quoi  chacun  deux  errait 
contre  la  foi.  Les  méléciens,  les  nestoricns, 
les  euty chiens  et  les  acéphales  sont  de  la  troi- 
sième classe,  c'est-rt-dire  de  ceux  que  l'on 
se  contentait  d'obliger  à  anathémaliser  leurs 
erreurs  avant  de  les  recevoir  à  la  communion 
de  l'Eglise.  Il  donne  après  cela  le  détail  des 
dili'érentos  sectes  d'acéphales,  remarquant 
sur  les  marcianisli's,  ainsi  appelés  de  Mar- 
cicn  de  Trébi/.onde,  qu'ils  enseignaient  ipic 
la  communion  du  sacré  corps  et  sang  '  de 
Jésus-Ciuift,  notre  vrai  Dieu,  n'était  ni  utile 
ni  nuisible  à  ceux  qui  la  recevaient  digne- 


'  liera  sacri  corporis  et  sanguinis  Christi  veri  mm  sil  res  indifferens.  Proiiide  isli  ca  non  su- 

l)n  noslri  sanclam  perceplionrm,  nihil  aitjurare  wunl   cum  liinore  ac  /Me,  velul  vivifica,  et  lan- 

dirunt,  aul  lœdirc  eos  qui  digne  vel  indignf  com-  tjuam  quœ  sinl  ac  es.ic  credanlur  incarnait  llet. 

miinicuiil:  qnodque,  ob  id  solum.  nenio  unquam  TiiiKilli.  J)c  liccepl.  hwrct..  pii},'.  <03. 
separnri    d  lirai    ah    ecclcsinslicu    cmiiinuiiionc, 


[Vl°  SIÈCLE.] 

nuMit  ou  indignement;  qiie  celle  cliose  étant 
iiulill'érente,  on   no  devait  jam;iis   séparer 
(le  la  roininimion  ectlésiaslii|iie  ci'uxi|iiis'ap- 
prdcliaient  de  l'ault'l  dans  tic  mauvaises  dis- 
positions ;  et  qu'en  consé(juenccde  ces  prin- 
cipes, ils  ne  participaient  point  au  corps  et 
au  saug  de  Jésus-Christ  avec   foi   ni  avec 
crainte,  ne  les  legardant  |)as connue  vivifians, 
ni,  comme  ils  soûl  el  qu'on  les  croil,  le  corps 
p»8. 406.      et  le  sang  de  Dieu  fait  chair.  Il  compte  di- 
verses sectes  à  qui  l'on  donnait  le  nom  do 
hésitants,  à  cause  qu'ils  hésitaient  de  com- 
muniquer avec   1  liglise    catholiciuc,    |)arce 
qu'elle  avait  reçu  le  concile  de  Clialcédoine 
avec  le  môme  respect  que  les  trois  conciles 
4„_      précédents.  On  trouve  dans  le  Recueil  d'un 
certain  Nicon,  que  l'on  ne  conuait  pas  d'ail- 
leurs, une  partie  de  ce  traité.  Le  père  Com- 
be6s  l'a  donné  en  grec  et  en  lalin  dans  le 
second  tome  de  son  Auctuarium  avec  des 
notes  :  le  manuscrit  siu'  lequel  il  l'avait  fait 
imprimer  ayant  paru  défectueux  à  M.  Cote- 
lier,  il  en  fit  une  nouvelle  édition  sur  un 
autre  manuscrit  plus  correct.  Ce  traité  est 
eu  latin  dans  les  anciennes  Bibliothèques  des 
Pères,   et  en  grec  dans  le  Recueil  de  Meur- 
sius,  à  Leyde  en  1619.  [On  le  trouve  en  grec 
et  en  latin  dans  le  tome  LXXXVI  de  la  Putro- 
logie  grecque,  avec  une  notice  sur  Timothée, 
extraite  de  Fabricius,  col.  9-74.] 

3.  Les  recherches  exactes  qui  furent  faites 
des  manichéens,  tant  par  les  papes  saint 
Léon,  Gélase,  Symmaquc  et  Hormisdas,  que 
par  l'empereur  Justin,  Hunéric,  roi  des  Van- 
dales, et  Cabadc,  roi  de  Perse,  ne  laissent 
aucun  lieu  de  douter  que  quelques-uns 
n'aient  quitté  leurs  erreurs  pour  embrasser 
la  foi  catholique,  et  que  l'on  n'ait  dressé 
quelques  formules  de  la  manière  dont  on  de- 
vait les  recevoir  dans  l'Église.  Jacques  Tol- 
lius  nous  a  donné  de  longs  fragments  d'une 
de  ces  formules  sur  un  maaudcrit  de  la  Bi- 
bliothèque impériale,  en  faisant  remarquer 
que  le  commencement  et  la  fin  de  cette  for- 
mule ne  s'y  trouvent  point,  mais  qu'il  est 
facile  de  suppléer  à  ce  qui  manque  à  la  fin, 
par  VEucologe  et  le  Rituel  des  Grecs,  qui 
traitent  en  eliet  de  la  façon  de  recevoir  les 
manichéens  à  l'Église.  Il  remarque  aussi, 
d'après  Lambécius,  que  ces  fragments  peu- 
vent servir  beaucoup  à  peifectionuer  VUis- 
toire  de  l'hérésie  des  manichéens,  composée  par 
Pierre  de  Sicile,  imprimée  à  Jngolstad  en 
1604  par  les  soins  de  Mathieu  Radérus.  Il 
ajoute  que  cette  formule  est  du  double  plus 


Ctl.M'lTRli:  XXXV.  —  TIMOTKKK,  IMIÈTRK,  VAT..  ;),, 


ample  dans   le  manuscrit    .sur  l(;i|ucl  il   l'a 
donnée,  que  dans  l'édition  qu'on  en  avait  déjà 
faite  à  Paris.  Tollius  a  enrichi   son  (■(iitinn 
d'un  grand  nombre  de  noies,  qui  répandent 
beaucoup  de  lumière  sur  le  dogme  des  ma- 
nichéens, sur  leurs  auteurs,  sur  leurs  livres 
et  sur  les  cérémonies  usitées  dans  l'É"lise 
lors(iu'on  les  y  recevait.  Ils  commençaient 
par  aiiathi'maliscM'  toutes  les  extravagances 
et  les  erreurs  de  Manès,  disant  anathème  en 
particulier  à  ceux    qui   ne  reconnaissaient 
pas  que  Jésus-Christ  est  Uicu-Verbe  fait  hom- 
me, en  prenant   un  corps  dans  le  sein  de 
Marie,  mère  de  Dieu,  toujouis  vierge;  qu'il 
est  mort  véritablement  dans  la  chair,  et  qu'il 
est  ressuscité  le  troisième  jour.  Ils  anatlié- 
malisaieut  ensuite  ceux  qui  soutenaient  que 
le  malheureux  Manès  était  l'Esprit  consola- 
teur el  de  vérité,  que  le  Seigneur  avait  pro- 
mis d'envoyer  à  ses  disciples  ;  ceux  qui  en- 
seignaient que  les  hommes  sont  de  la  même 
substance  que  Dieu,  qu'elle  passe  d'un  corps 
à  im  autre,  et  ceux  qui  niaient  qu'il  fut  en  no- 
tre puissance  de  devenir  bons  ou  mauvais.  On 
les  obligeait  encore  de  condamner  tous  les 
livres  des  manichéens,  savoir  :  le  livre  des 
Epîtres  de  Manès ,  l'Évangile   qu'ils  appe- 
laient vivant,  le  Trésor  de  la  vie,  le  livre  des 
Mi/stcrcs,  dans  lequel  ils  s'eti'orçaient  de  ren- 
verser la  loi  et  les  prophètes,  VHeptalogue 
composé,  par  Agaplus,  le  livre  de  la  Sagesse 
dont  Aristocrite  était  auteur,  et  où  il  entre- 
prenait de  montrer  que  la  religion  des  Juifs, 
des  Grecs  et  des  Chrétiens  était  la  même  ;  le 
livre  des  Apocryphes,  et  un  recueil  des  paro- 
les et  des  faits  mémorables  de  Manès.  Enfin 
ils  disaient  anathème  à  quiconque  parle  mal 
de  la  Croix,  ou  qui  a  en  horreur  la  communion 
du  vénérable  corps  et  s^ng  de  Jésus-Christ, 
ou  qui  méprise  le  baptême  elles  saintes  ima- 
ges, ou  qui  rejette  les  qua'tre  Évangiles  elles 
Epitres  de  saint  Paul. 

Après  tous  ces  anuthèmes  prononcés  par 
celui  qui  se  présentait  pour  èlre  reçu,  ou  par 
un  inlerprète,  le  diacre  avertissait  le  peuple 
de  se  mettre  en  prière,  et  alors  le  prêtre  ré- 
citait une  oraison,  à  la  fin  de  laquelle  le 
peuple  répondait  amen.  Aloi-s  le  prêtre  met- 
tait le  nouveau  converti  au  rang  des  chré- 
tiens non  baplisés;  le  lendemain  il  lui  don- 
nait place  ixirmi  les  catêcbimiènes,  et  faisait 
sur-  lui  les  prières  avec  les  insufflations,  les  ="" 
exorcismes,  les  impositions  des  mains  ordi- 
naires. Ensuite,  il  bénissait  l'eau,  et  y  ré- 
pandait de  l'huile  sainte  par  trois  fois   en 


l'ag.  133. 


342 


HISTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


forme  de  croix  ;  après  quoi,  prenant  nu  bout 
de  ses  doigts  de  celte  buile  sacrée,  il  en  oi- 
gnait le  front,  la  poitrine  et  les  épaules  de 
celui  qu'il  allait  baptiser.  Un  diacre  ou  un 
lecteur  l'oignait  par  tout  le  corps  ;  ce  qui 
nr- 173.  étant  fait,  l'évêque  le  baptisait  en  disant: 
Un  tel  est  baptisé  '  au  nom  du  Père^t  du  Fils 
et  du  Saint-L'sprit,  le  plongeant  dans  l'eau, 
et  l'eu  retirant,  à  chaque  fois  qu'il  pronon- 
çait le  nom  d'une  de  ces  trois  personnes.  La 
cérémonie  du  baptême  achevée,  on  chantait 
le  psaume  qui  commence  par  ces  paroles  : 

n:.  Bienheureux  ceux  «  qui  les  iniquités  sont  re- 
mises. L'évêque  récitait  ensuite  une  prière 
dans  laquelle  il  demandait  à  Dieu  d'accor- 
der au  nouveau  baptisé  le  sceau  des  dons  du 
Saint-Esprit,  et  la  communion  du  corps  et 
du  sang  de  son  Christ.  Cette  oraison  finie,  il 
oignait  le  baptisé  de  l'huile  sacrée,  en  faisant 
un  signe  de  croix  sur  son  front  et  sur  ses 
yeux,  et  l'admettait  à  la  sainte  communion. 

"'■  Huit  jours  après,  l'évêque  lui  ôtait  les  habits 
blancs  qu'on  lui  avait  donnés  le  jour  de  son 
baptême.  On  ne  peut  douter  que  cette  for- 
mule n'ait  été  écrite  originairement  en  grec, 


puisqu'il  y  est  dit,  en  parlant  du  manichéen 
converti,  que  s'il  ne  sait  pas  '  le  grec,  il  ré- 
pondra ou  par  un  interprète,  ou  par  son  par- 
rain, s'il  est  encore  enfant.  Elle  servait  éga- 
lement à  la  réception  des  pauliiiens,  c'est-à- 
dire  de  ceux  qui  suivaient  les  erreui-s  de  Paul 
de  Samosate. 

[4.  Le  cardinal  Mai  a  publié  au  tome  IVde  la 
Bihliotheca  novn,  deuxième  partie,  p.  79,  les 
Disputes  du  manichéen  Photin  avec  le  chré- 
tien Paul,  texte  grec  et  version  latine.  Il  a  trou- 
vé ces  Disputes  dans  un  ancien  manuscrit  du 
Vatican.  D'après  le  titre,  ces  dialogues  ont  eu 
lieu  par  l'ordre  de  Justin  et  de  Justinien  Augus- 
te ,  c'est-à-dire  en  o27.  La  première  dispute 
est  sur  la  création  des  âmes  ;  la  deuxième 
est  sur  les  deux  principes  des  manichéens,  la 
troisième  est  sur  les  Écritures  du  Nouveau 
Testament;  viennent  ensuite  la  proposition 
de  Photin  et  la  réponse  de  Paul,  les  blasphè- 
mes du  manichéen,  les  propositions  du  chré- 
tien contraires  à  ces  principes.  Cet  écrit  est 
reproduit  au  tome  LXXXVIII  de  la  l'atrolugie 
grecque,  col.  529-578.] 


CHAPITRE   XXXVI. 
De  la  Chronique  d'Edesse  et  d'nne  antre  anonyme. 


ChrODlque 

I1D  auteur  îd- 

COUDU. 


l.  On  ne  sait  point  qui  est  l'auteur  de  la 
Chronique  d'Edesse,  ni  eu  quel  temps  il  a 
vécu  ;  mais  on  ne  peut  douter  qu'il  n'ait  été 
catholique,  puisqu'il  fait  profession  de  rece- 
voir les  quatre  première  conciles  généraux  , 
pj^cbroDiroti  et  qu'ij  rejette  ceux  qui  faisaient  dilliculté 
"*•  de  reconnaître  l'autorité  des  conciles  d'É- 

phèse  et  de  Chalcédoiue.  Il  ne  dit  rien  du 
cinquième  général ,  et  ne  pousse  pas  sa 
Chronique  au  delà  de  l'an  .^40  de  Jésus- 
Christ  :  ce  qui  donne  lieu  de  croire  qu'il  ne 
vivait  plus  lors  de  la  tenue  de  ce  dernier 
concile.  Peut-être  aussi  n'en  a-l-il  pas  l'ait 
mention ,  parce  qu'il  n'en  avait  rien  trou- 
vé dans  les  archives  de    l'Église    d'Edes- 


se ,  d'où  il  semble  avoir  tiré  tous  les  monn- 
menls  dont  il  s'est  servi  pour  composer  sa 
Chronique.  Car  il  en  emploie  la  plus  grande 
partie  à  faire  le  catalogue  des  évoques  de 
cette  ville,  et  à  rapporter  ce  qui  y  était  ar- 
rivé d'intéressant.  Il  se  sert  dans  son  calcul 
de  l'époque  des  Gi-ecs,  que  l'on  appelle  aussi 
des  Séleucides  ou  Syro-macédoniens ,  qui 
précède  l'ère  chrétienne  de  309  ans. 

2.  Selon  cette  Chronique  ,  la  ville  d'Edes- 
se commença  d'avoir  des  rois  à  l'an  180  de 
l'ère  des  Grecs  ,  c'est-à-dire  cent  vingt-neuf 
ans  avant  l'ère  vulgaire  de  Jésus-Christ,  qui , 
selon  la  même  Chronique,  naquit  l'an  309 
de  l'ère  des  Grecs.  Elle  parle  d'Abgar,  qui  fut 


C.  I.r 
eliroo  ritr 
tlrnt  ttr 
manju»!'; 

Bll.l.  •>•. 

l«f.  :»-. 


'  Baplizatur  talis  in  nomine  Patris,  et  Filii  et 
Spirilus  Sancti,  pa«.  173. 

*  i'hi  liœc  vel  ipse  dùrerit  qui  ad  Eccksiam  ac- 
ce$seril,  velper  inlerpretein,  si  grâce  loq^li  nes- 


cieril,  tel  per  susceptorem  suum  si  puer  fucrit, 
sacerdos  iterum  conveuienlia  adhibel.  Ibid.,  pug. 
11!). 


[vi-  SIÈCLE.]         ciuriTru::  xxxvi.  —  ciiiu 

Pag.  iJi,  le  dix-iicuvièmo  roi  d'Kilesse;  mais  elle  ne 
dit  rien  de  sa  prùtendue  lettre  à  Jésus-Christ. 
KUc  met  en  i202  de  l'ère  vidj^aire  une  inon- 
dation si  considi'rahle  i\  Kdesso,  que  le  pa- 
lais du  roi  et  l'éylise  de  la  ville  on  furent 
renversés,  et  qu'il  y  périt  environ  deux  mille 

3UJ.  hommes  ,  dont  plusieurs  furent  surpris  par 
les  eaux,  étant  endormis  dans  leur  lit.  Mâ- 
nes, chef  de  la  sotte  qui  porte  sou  nom,  vint 
au  monde  en  2i0.  Quoiqu'il  y  ait  eu  à  Édes- 

3.j;.  se  plusieurs  évèqiies  avant  Conon,  c'est  tou- 
tefois par  lui  que  l'auteur  commence  le  ca- 
talogue des  évoques  de  cette  ville.  Son  suc- 
cesseur fut   Saadès ,  qui  gouverna   depuis 

39J.  l'an  313  de  Jésus-Christ  jusqu'en  32i.  L'an- 
née suivante  on  tint  à  Nicéc  un  concile  do 
trois  cent  dix-huil  évoques.  Saint  Jac<iues  , 

3„j  évèque  de  Nisibe,  mourut  en  338.  En  351)  la 
ville  de  Nicomcdic  l'ut  détruite  par  un  trem- 
blement de  terre.  En  373  les  ariens  chas- 
sèrent de  l'église  d'Édessc  le  peuple  catho- 
lique, qui  trouva  le  moyen  d'y  rentier  en 
378.  En  381  il  se  tint  à  Constantinople  un 
concile  de  cent  cinquante  évoques.  En  394 
le  corps  de  saint  Thomas  apôtre  fut  tranféré 

401.  à  Édesse,  et  mis  dans  la  grande  église  qiie 
l'on  avait  dédiée  sous  son  nom.  En  413  Rah- 
bulas  fut  élu  évèque  d'Edesse  :  ce  fut  lui 
qui  bâtit  par  ordre  de  l'Empereur  l'éi^lise 
de  Sainl-Étienne ,  qui  était  auparavant  du 
Sabbath ,  c'est-à-dire  une  synagogue  des 
Juifs.  En  -i^l  saint  Jacques  souffrit  le  mar- 
tyre dans  la  persécution  de  Yararanes  ,  roi 
des  Perses.  L'auteur  de  la  Chronique  met  le 
concile  d'Éphèse  k  l'an  742  de  l'ère  des 
Grecs,  ce  qui  revient  à  l'an  431  de  l'ère  com- 
mune :  le  manuscrit  portait  7 14  ;  d'où  il  sui- 
vait que  ce  concile  ne  se  serait  tenu  qu'en 

(oa.  433,  contre  la  teneur  des  actes  mêmes  ;  mais 
celte  faute,  qui  venait  visiblement  de  la  part 
des  copistes,  a  été  corrigée  dans  l'imprimé. 
Sous  l'épisLopat  d'Iljas,  Sénator  donna  à  une 
des  églises  d'Édessc  une  grande  table  d'ar- 
gent, pesant  sept  cent  vingt  livres  ;  et  Ana- 
tolius,  préfet  de  la  milice ,  fit  couvrir  (l'ar- 
gent la  châsse  qui  renfermait  les  reliques  de 
saint  Thomas  apôtre.  La  réputation  du  pape 

m.  saint  Léon  s'étendit  jusqaes  dans  l'Osroën- 
ne,  de  même  que  celle  de  saint  Siméon  Sty- 
lile,  dont  la  Chronique  d'Edesse  met  la  mort 
en  439 ,  en  le  qualifiant  de  saint.  L'école 
établie  en  cette  ville  pour  l'instruction  des 
Perses  qin  embrassaient  la  religion  chré- 
tienne fut   supprimée  en   489.   L'empereur 

;„;.      Anaslase,  ennemi  du  concile  de  Chalcédoine, 


1>15.  (07. 


)NI(JUE  D'iiDESSE,  ETC.  343 

informé  que  l'on  en  avait  mis  les  Actes  dans 
la  châsse  de  sainte  Euphémie,  martyre  ,  les 
en  fit  tirer  en  SU  [)our  les  faire  brûler  ; 
mais  il  en  fut  détourné!  par  les  llammes  qui 
sortirent  de  celte  châsse,  lorsqu'on  l'ouvrit. 
Tliéophane  raconte  la  chose  un  peu  dinércm- 
mcnt.  Justinien,  plus  zélé  poui-  la  foi  catho- 
lique, fit  mettre  ce  concile  avec  les  trois  pré- 
cédents dans  les  sacrés  diptyques.  Sous  le 
règne  de  ce  prince,  Asclépius  évèque  d'IO- 
desse  chassa  les  moines  orientaux  et  leurs 
adhérents,  qui  refusaient  de  reconnaître  l'au- 
torité du  même  concile.  Quelques  années 
après,  cet  évèque,  voyant  que  sa  ville  épis- 
copale  avait  été  presque  détruite  par  une 
inondation,  en  fut  si  ellVayé  qu'il  se  retira  à 
Antioche ,  oi'i  il  mourut  au  bout  d'environ 
soixante  -  dix  jours.  C'était  la  quatrième 
fois  qu'Édesse  avait  été  ravagée  par  les 
eaux  :  la  première  fois,  sons  l'empereur  Sé- 
vère ;  kl  seconde,  sous  l'empire  de  Dioclé- 
tien  ;  la  troisième,  sous  Honoiius  et  Théo- 
dose ;  la  quatrième,  sous  Justin.  L'évoque 
Euphrésius,  auprès  de  qui  Asclépius  s'était 
retiré,  périt  en  326  dans  un  tremblement  de 
terre  qui  renversa  un  giand  nombre  de  mai- 
sons de  la  ville  d'Autioche.  La  Chronique 
d'Edesse  finit  par  le  récit  de  l'irruption  que 
Chosroës,  roi  des  Perses,  fit  sur  les  terres  des 
Romains  en  340,  sans  avoir  aucun  égard  aux 
traités  de  paix  qu'il  avait  faits  avec  eux. 
Suit  une  liste  des  rois  et  des  évêques  d'F^des- 
se,  tirée  de  la  Chronique  de  Ucnys. 

3.  On  en  trouve  une  à  la  suite  de  celle 
d'Ejiscbe  et  de  Marcellin,  qu'on  croit  avoir 
été  écrite  vers  les  commencements  du  vi'^siè-  pas-  ".«dii, 
cle,  parce  qu'elle  ne  conduit  le  catalogue  2"-i'»<i- 
des  empereurs  Romains  que  jusqu'à  Anas- 
lase ,  qui  régna  depuis  l'an  491  jusqu'en  r^g.  le. 
518.  Ce  n'est  qu'une  compilation  des  Chro- 
niques d'Africain,  d'Eusèbe,  de  Castor  et  de 
quelqueslautres  anciens,  que  l'auteur  a  mises 
en  latin,  et  souvent  sans  en  prendre  bien  le 
sens,  parce  qu'il  ne  savait  le  grec  que  très- 
imparfaitement  :  d'où  vient  qu'd  a  passé 
plusieurs  choses  intéressantes,  n'étant  pas 
assez  habile  pour  les  bien  rendre  en  sa  lan- 
gue. Pour  suppléer  en  quelque  sorte  à  ce 
défaut,  il  est  tombé  dans  un  autre,  en  mê- 
lant ses  conjectures  et  ses  propres  idées 
avec  ce  qu'il  avait  trouvé  dans  les  anciens 
chronologistes.  Son  ouvrage,  quoiqu'écrit 
d'un  style  barbare  et  peu  correct,  ne  laisse 
pas  d'avoir  sou  utilité  par  rapport  aux  ex- 
traits qu'il  y  rapporte  de  divers  ouvrages  qui 


Cl(roni(]us 
anoiivine- 

Ad  c;ilcem 
Clron.Euseb. 


344 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


n'existent  plus.  11  commence  sa  Chronique  k 
la  création  du  monde,  et  donne  de  suite  les 
générations  d'Adam  et  de  ses  enfants,  et  cel- 
les des  enfants  de  Noc,  marquant  le  partage 
qu'ils  firent  de  la  terre,  et  les  nations  qui  sont 
nées  d'eux.  D  rapporte  les  noms  des  diver- 
ses provinces  qui  furent  habitées  par  les 
enfants  de  Sem  ;  les  juges  des  Hébreux,  de- 
puis qu'ils  eurent  passé  le  Jourdain;  les 
rois  des  Romains  et  des  autres  nations;  ceux 
des  Juifs  et  des  Perses  ;  les  princes  des  prê- 
tres; les  rois  des  Assyriens,  de  Corinthc  et 
de  Macédoine,  des  Mèdes  et  des  Egyptiens  ; 
les  consuls  et  les  empereurs.  Il  dit  quelque 
cbose  des  persécutions  excitées  contre  VVi- 
glise  pas- Dioctétien;  de  l'invention  de  la 
Croix  de  notre  Seigneur  par  sainte  Hélène, 
mère  de  Constantin  ;  du  concile  de  Nicée  et 
de  son  s^^nbole  ;  de  la  ti-anslation  des  reli- 
ques de  saint  André  et  de  saint  Luc  à  Cons- 
tantiuople  ;  et  des  ravages  que  les  ariens  fi- 
rent dans  l'Église.  Il  compte  o50()  ans  depuis 
Adam  jusqu'à  la  naissance  du  Sauveur; 
donne  aux  mages  qui  vinrent  l'adorer  les 
noms  de  Bitliisarea,  de  Melchior  et  de  (la- 
thaspar.  Un  ne  sait  où  il  avait  appris  que  le 


roi  Ht'-rodes,  après  avoir  ordonné  de  mettre 
;\  mort  tous  les  enfants  au-dessous  de  deux 
ans,  envoya  ses  ministres  A  Zacharie  pour 
lui  demander  où  il  avait  caché  Jean,  son 
fils,  avec  menace  de  le  tuerlui-mèmo,  s'il  ne 
le  découvrait;  qu'ayant  refusé  de  le  faire,  Za- 
charie fui  misa  mort  à  la  pointe  du  jour,  étant 
auprès  de  l'autel;  qu'Elisabeth,  voulant  sous- 
traire son  tils  à  la  cruanté  d'Hérodes  ,  se 
sauva  dans  les  montagnes  ;  et  que,  ne  trou- 
vant pas  où  le  mettre  en  siireté,  elle  pria 
que  la  montagne  s'ouvrît  pour  la  recevoir, 
elle  et  son  fils  ;  ce  qui  fut  fait  aussitôt.  Il 
suppose  visiblement  un  autre  prodige,  sa- 
voir que  cette  montacae  se  rouvrit  pour  ren- 
dre saint  Jean,  puisqu'il  raconte  ensuite  la 
manière  dont  Hérodes  le  fit  décapiter.  Il  ap- 
pelle Bala  la  servante  qui  servait  de  portière 
chez  Caiphe,  prince  des  prêtres ,  et  avance 
plusieurs  autres  faits  semblables  qu'il  avait 
apparemment  puisés  dans  quelques  livres 
ai)t)cryphcs;  ce  qui  marque  son  peu  de  choix 
daus  les  matières  dont  il  composait  son  ou- 
vrage, mêlant  ensemble  le  bon  et  le  mau- 
vais. 


CHAPITRE  XXXYII. 

Julien  évêque  d'Halicarnasse ,  Pomitien  évêqno  d'Ancyrc  [écrivains  grecs] , 

Vérécnndns  évêqne  d'Afrique  [écrivain  latin] ,  Panl  le  Silentiaire  , 

Eustratius  prêtre  de  Constantinople  [écrivains  grecs] , 

Cogitosns  [591]. 


Jti])«n  d'U* 
licaroaue  :  %t* 


Lecli  Lit<er«i. 
in  Hr.or 
ctp.x  xLrfint 
De  ïectii,  ict. 
S. 


1.  L'empereur  Anastase  n'ayant  pu  enS'"^- 
*«'^">  Il  ji.éj.-  ggj.  Macédonius,  évéque  de  Constantinople, 
à  communiquer  avec  les  ennemis  du  concile 
de  Cbalcédoine,  bien  moins  encore  à  le  con- 
damner lui-même,  excita  contre  lui  les  moi- 
nes schismalii]ucs  et  les  magistrats  de  la 
viUe,  pour  l'attaquer  a\<,o  de  grands  cris  et 
des  injui'es  lorsqu'il  passerait  par  les  lues 
de  Constantinople.  Julien,  évêque  d'Halicar- 
nasse, et  le  moine  Sévère,  quoiqu'ennemis 
l'un  de  l'autre,  se  prêtèrent  également  au 
désir  du  prince.  Mais  après  la  mort  d',\nas- 
lase,  Justin,  son  successeur,  s'élant  déclan- 
pour  ceux  qui  recevaient  le  concile  de  Cbal- 
cédoine, fit  chasser  Julien  d'Halicarnasse  Je 


son  siège,  comme  ennemi  déclaré  de  ce  con- 
cile. Julien  se  relira  avec  Sévère,  chassé 
aussi  d'Antioclie,  h  Alexandrie,  où  ils  fuient 
bien  rcrus  par  Tiraothi'e,  évêque  de  celle 
ville.  Il  arriva  enlr'aulres,  pendant  leur  sé- 
jour A  Alexandrie,  unedispule  sm-  lacornip- 
liliilili'  du  corps  de  Jésus-CIirisl.  Julien  sou- 
tint l'incorruplibililé  contre  Sévère,  de  vive 
voix  el  par  écrit  ;  et  il  est  regardé  comme 
le  chef  de  la  secte  des  incoi'riqifiblcs,  qui 
n'i'tail  (]u'un  rejelon  de  l'hérésie  des  Euly- 
cliiiMis.  Julien  eciivil  aussi  un  Commentaire 
sur  Job;  il  ne  nous  en  reste  que  quelques 
Ir.ignie.nts  dans  une  Chaîne  grecque  sur  Job, 
imprimée  à  Londres  eu  1G37.  Julien  est  en- 


CITAPITRE  XXXVII. 


Domlllrtii 

■    :,r    d'»n- 


év*qiie  d  An- 
crils 


[VI*  SIÈCLE.] 

coro  cité  dans  une  Chaîne  grecque  snr  le 
xvii»  cliapitro  do  saint  Jean;  mais  comme  il 
n'y  est  point  ([nafilié  d'(''vè(|ue  d'Ilalirainas- 
se,  on  donte  qne  ce  soit  le  même  dont  nous 
parlons.  Ses  écrits  contre  Sévère  no  sont  pas 
venus  jusqu'iï  nous. 

2.  Farundus  '  nous  a  conservéïin  fragment 
du  libelle  ou  do  la  requête  qne  Domitieu 
adressa  au  pape  Vigile  au  sujet  de  la  con- 
damnation d'Origène.  On  y  voit  que  les  ori- 
génisles,  irrités  de  ce  qu'on  avait  condamné 
Origène ,  cherchèrent  h  s'en  venger  par  la 
condamnation  des  Trois-Chapitres.  Cela  leur 
réussit.  Mais  Domitien,  et  Théodore  Cappa- 
docicn,  surnommé  Escidas,  son  ami,  ne  pu- 
rent refuser  de  condamner  enx-mèmei^  Ori- 
gène, quoiqu'ils  en  fussent  les  principaux 
défenseurs.  Ils  acquirent  l'un  et  l'autre  tant 
de  crédit  k  la  cour,  qu'ils  devinrent  tous 
deux  archevêques,  Domitien  d'Ancyre,  -et 
Théodore  de  Césarée  en  Cappadoce  ;  Do- 
mitien avait  été  auparavant  "  abbé  de  Saint- 
Martyrius. 

3.  L'un  des  plus  obstinés  parmi  les  évê- 
ques  d'Afrique  à  défendre  les  Trois-Chapi- 
tres  fut  Vérécundus,  évêque  de  Jonque  dans 
la  Bysacène  :  il  mourut  '  en  So2  à  Chalcé- 
doiue  dans  l'asile  de  Sainte-Euphémie,  où 
il  s'était  réfugié  depuis  son  exil.  On  lui  at- 
tribue '  deux  petits  écrits  en  vers,  l'un  sur 
la  résurrection  et  le  jugement,  l'autre  inti- 
tulé :  De  la  Pénitence,  dans  lequel  il  pleurait 
ses  propres  péchés.  Loaisa  dit  ^  avoir  vu  ce 
dernier;  mais  on  ne  l'a  pas  encore  rendu 
public.  [  '  Dans  son  tome  IV  du  Spicileghnn 
Solesmense,  D.  Pitra  consacre  une  disserta- 
tion préliminaire  à  faire  connaître  Vérécun- 
dus. Les  renseignements  se  réduisaient  jus- 
qu'à présent  à  sa  signature  au  bas  d'une 
lettre  du  pape  Vigile,  à  une  courte  mention 
faite  par  le  pape  Adrien  1",  et  à  quelques  li- 
gnes de  Victor  de  Tunes  et  de  saint  Isidore  ; 
mais  des  recherches  minutieuses  ont  permis 
au  savant  bénédictin  de  donner  une  idée  as- 
sez complète  de  sa  vie  et  de  ses  écrits.  Prê- 
tre savant  et  versé  dans  l'Écriture  sainte  et 
les  traditions  des  Pères,  Vérécundus  consa- 
cra ses  veilles,  comme  saint  Jérôme,  à  com- 
menter les  saints  livres  pour  l'édification  du 
peuple  chrétien.  Il  eut  l'heureuse  idée  de 
choisir  un  sujet  rarement  ù'aité  :  les  canti- 


JULIEN,  DOMITIEN,  ETC.  3t5 

quos  bibliques,  chantés  de  son  temps  dans 
les  églises  d'Afrique.  Un  grand  intérêt  litur- 
gique s'allaciie  donc   tout  d'abord  a  la  s('rie 
de  CCS  prières  vém-rables,  qui  snnt  :  le  can- 
tique de  l'F^xodo,  celui  du  Deutéionome,  la 
prière  de  Jérémie,  l'hymne  des  trois  enfants, 
le  canli(iue  d'Ezéchias,  celui  d'IIabacuc,  la 
prière  de  Manassès,  le  cantique  de  Jouas  et 
le  chaut  triomphal  de  Débora  ,  que  l'on  ne 
rencontre  que  rarement  dans   les  anciens 
Lertionnaires.  Ces  cantiques  sont  reproduits 
d'après  l'antique  version  nommée  italique, 
qui  se  trouve  par  là  même  enrichie  de  frag- 
ments  depuis  longtemps  perdus.   Le  com- 
mentaire suit  la  métliode  familière  à  saint 
Augustin  ;  la  lettre  y  est  expliquée  souvent 
avec  rigueur,  mais  en  laissant  toujours  la 
place  la  plus  abondante  à  ces  applications 
allégoriques  et  morales  que  l'enseignement 
de  l'évêque  d'Hippone  a  consacrées.  On  y 
remarque   des    passages  précieux    sur  des 
points  importants  de  doctrine ,  tels  que  le 
purgatoire,  le  péché  originel,  la  justifica- 
tion, la  grâce,  les  prérogatives  de  l'Eglise, 
etc.  L'auteur  fait  allusion  à  des  faits  con- 
temporains, et  surtout  à  la  persécution  des 
Vandales,  vers  l'an  538.  Il  cite  de  savants 
auteurs  classiques  et  d'anciens  Pères,  saint 
Jean   Chrysostome  entre  autres,  saint  Jérô- 
me, dont  il  mentionne  les  versions  comme 
une  œuvre  récente  et  en  termes  remarqua- 
bles. Ce  commentaire  n'existe  que  dans  un 
seul  manuscrit  conservé  à  la  Bibliothèque 
de  l'Université  de  Leyde,  que  le  Gouverne- 
ment hollandais  a  généreusement  mis  à  la 
disposition  des  bénédictins  fi-ançais,  en  per- 
piettant  qu'il  fut  envoyé  jusqu'à  l'abbaye  de 
Solesmes. 

Vérécundus,  devenu  évêque  de  Jonca,  prit 
une  part  active  à  la  controverse  des  Trois- 
Chapitres,  et  se  rendit  à  Constantinople  vers 
530.  Il  partagea  tous  les  rudes  combats  du 
pape  Vigile  contre  les  fantaisies  théologi- 
ques de  Justinien.  Eu  touchant  à  cette  dis- 
cussion confuse  et  violente,  la  dissertation 
préliminaire  que  nous  résumons  jette  sur 
plusieurs  points  un  jour  nouveau.  Nous 
avons  surtout  remarqué  une  pièce  inédite 
de  la  plus  haute  importance.  C'est  une  sorte 
de  profession  de  foi,  savante,  raisonnée  et 
d'une  forme  très-solennelle,  que  le  pape  Vi- 


'  Facund.  lib.  I,  cap.  u.  et  lib.  IV,  cap.  iv. 

*  Vita  S.  Sali.,  num.  83. 

'  Victor  Turon.  in  Chronico. 

*  Appcnd.ad  IsidorumBe  Sc?-tpfor. Eecles., cap.  vi. 


5  Ibid.,  in  noti?. 

«  Tout  ce  qui  suit  est  tiré  de  VVnivers,  10  avril 
18S8. 


346 


inSTOTRE  GKXrÎRALE  DES  AUTEURS  ECCLfiSlASTIQUES. 


gile  paraît  avoir  piiblic-e  en  prenant  posses- 
sion du  Siéfie  apostolique,  comme  pour 
dissiper  les  légitimes  alarmes  que  son  élec- 
tion pouvait  donner.  Alors  le  j^rand  débat 
des  Trois -Clmijilns  s'ouvrait  à  peiue.  La 
cpiestion  s'y  trouve  posée  en  termes  qui  dif- 
fèrent de  la  solution  défmitive.  On  sera  ten- 
té d'y  voir  une  nouvelle  preuve  des  varia- 
tions reprochées  au  pape  Vigile.  Mais  le 
lecteur  impartial  reconnaîtra  que  ce  pape, 
une  fois  devenu  légitime ,  resta  constam- 
ment digne  de  sa  haute  élévation  ,  et  que 
dans  cette  controverse,  qui  troubla  les  meil- 
leurs esprits,  il  suivit  toutes  les  phases  de 
la  discussion  avec  une  prudence ,  une  me- 
sure et  une  justesse  que  l'astuce  des  Grecs 
ne  put  mettre  en  défaut  :  distinguant  tou- 
jours'les  principes  des  faits  elles  faits  des  per- 
sonnes, sauvant  l'orthodoxie,  et  en  condam- 
nant des  erreurs  incontestables,  gardant  les 
ménagements  dus,  par  exemple,  à  un  hom- 
me aussi  méritant  que  Théodoret,  surtout 
ne  permettant  jamais  la  moindre  atteinte  au 
concile  de  Chalcédoine  ,  qui  jusqu'au  bout 
fut  sourdement  attaqué  par  le  parti  domi- 
nant à  la  cour  de  Justinien.  Ce  parti,  fu- 
rieux de  ne  rien  obtenir,  en  vint  à  des  extré- 
mités inouïes  dans  l'histoire  des  persécu- 
tions de  l'Eglise.  Un  vieillard,  un  réfugié  que 
protégeait  un  droit  d'asile  réputé  inviolable, 
un  Pape  enfin  se  vit  assailli  par  une  soldates- 
que insolente,  que  commandait  le  neveu  de 
l'Empereur;  ces  forcenés,  le  tirant  par  les 
cheveux  et  la  barbe,  bii  firent  subir  mille 
brutalités,  et  un  autel  de  Saint-Pierre,  con- 
tre lequel  il  s'cHait  appuyé,  faillit  s'écrouler 
pendant  cette  lutte.  Demeuré  libre  un  mo» 
ment,  Vigile  ne  se  releva  que  pour  lancer 
l'excommunication  contre  le  patriarche  de 
Constantinople  et  les  auteurs  de  ces  violen- 
ces. I>e  nom  de  A'érécundus,  avec  ceux  de 
douze  autres  évêques  ,  figure  noblement  au 
bas  de  ce  grand  acte  de  vigueur  pontificale. 
Vérécundus  accompagna  encore  le  pape  Vigi- 
le dans  la  fuite  clandestine  qui  leur  permit  de 
se  retirer  A  Chalcédoine,  dans  l'église  même 
de  Sainte-Euphémie,  où  s'était  tenu  le  con- 
cile n-cumcnique.  Selon  le  témoignaue  d'un 
compatriote  et  d'un  contemporain,  Victor  de 
Tunes,  Vérécundus  exilé,  et  proscrit  par 
l'empereur  Justinien,  mourut  en  532  dans 
cet  asile,  peut-être  à  côté  du  pape  Vigile, 


qui  ne  tarda  pas  ix  recueillir  la  récompense 
de  son  courage  par  un  triomphe  éclatant  sur 
les  intrigues  du  palais. 

Ce  fut  probablement  dans  ces  dernières  cir- 
constances que  l'évèque  de  Jonca  exécuta  un 
abrégé  des  Actes  du  concile  de  Chalcédoine, 
dont  il  put  avoir  sous  les  yeux  les  titres  origi- 
naux. Cet  abrégé,  venu  jusqu'il  nous  et  tout  A 
faitinconnu,  figuredansle  volume  nouveau  du 
Spicilége.  Il  est  suivi  de  poésies  mentionnées 
par  saint  Isidore,  dont  la  forme  rliyllimique 
rappelle  exactement  les  poésies  de  Coinmo- 
dien,  et  d'un  certain  nombre  d'inscriptions 
africaines  récemment  publiées.  DomPitray 
joint  un  long  et  curieux  poëme  sur  le  juge- 
ment dernier,  attribué  à  Vérécundus  par 
Arévalo ,  à  tort  selon  toute  apparence.  Il 
méritait  toutefois  d'être  publié,  et  il  complète 
les  traditions  que  l'on  a  remarquées  dans  le 
poëme  de  Commodien,  insi-rées  au  premier 
volume  du  Sjiiciléf/e.  Ce  dernier  poëme  était 
mutilé  sur  la  fin.  Une  nouvelle  étude  du  ma- 
nuscrit unique  de  Middle-Ilill  a  permis  de 
restituer  presque  intégralement  les  quarante 
derniers  vers.  Le  savant  éditeiu-  donne  aussi 
les  Variantes  d'un  manuscrit,  par  lesquelles 
se  trouvent  restituées  et  corrigées  plus  de 
quatre  cents  vers  des  Instructions  du  même 
Commodien  ,  publiées  depuis  longtemps , 
mais  avec  des  imperfections  qui  les  rendaient 
inintelligibles.] 

4.  Paul ,  surnommé  Cyrus  Floms,  et  ap-  i...,i 
pelé  le  Silentiaire,  parce  qu'il  remplissait 
cette  dignité  daus  la  courdcl'emperem' Justi- 
nien, fit  en  vers  la  description  du  temple  de 
Sainte-Sophie,  que  ce  prince  avait  fait  bâtir 
à  Constantinople.  Ce  poëme  a  été  imprimé 
en  grec  et  en  latin  à  Paris  en  1670,  par  les 
soins  et  avec  les  notes  de  Charles  du  Fresne, 
à  la  suite  de  V Histoire  de  Cinname  [et  dans  le 
tome  XI  de  la  Collectinn  des  Historiens  de 
IJyzancc,  Venise,  et  dans  la  nouvelle  édition 
de  cet  ouvrage  imprimée  h  Bonn  en  1829, 
d'où  elle  a  passé  au  tome  LXX.Wl  de  la  Pa- 
trolofjie  grvcfji/e  avec  une  notice  tirée  de  Fa- 
britius,  col.  2111-2223.  On  trouve  à  la  suite 
la  description  de  l'ambon,  que  Paul  débita 
dans  la  maison  du  patriarche  après  le  grand 
poëme,  et  les  vers  sur  les  thermes  de  Pythias. 
On  les  a  tirés  de  Rrunck  ,  tome  III  Analerfa, 
p.  ill].  .Vgathias  le  Scolaslique  dit',  en  par- 
lant de  l'écrit  de  Paul  Cyrus,  qu'il  était  tra- 


Fiorui    :    se» 


'  Videntur  mihi  qiKv  île  temple  scripsit  tanlo 
majore  et  taborc  tlscienliarcfcrla,  quanta  cl  ar- 


giimenluni  ipsiiin  est  admirabiliuji.  Apath.  lib.  V 
De  Justin.,  pag.  106,  edil.  Vcuel.  an.  1729. . 


Eiislruliir, 
jirAtrp  do 

pl*  :  -c^fcrit-: 
too  Irailé  do 
rF.U(d(l>ne 
■  pris  celle 
re  ;  'opr. 
XXVII  Bill. 
F«l.,l..g.lfi. 


[\r  SIÈCLE.]  CHAPITRE  XXXVII.  — 

vaille  avec  autant  d'art  cl  ilt;  savoir,  (juc 
l'mivraiic  qui  en  faisait  le  sujet  était  admi- 
liiblo  ;  qu'il  y  relevait  reiuplacemcnt  de  ce 
temple,  la  justesse  de  ses  pioporlions ,  la 
beauté  de  ses  vestibules ,  descendant  jus- 
qu'au détail  des  divers  métaux  qu'on  avait 
employés  pour  l'orner.  II  lui  attribue  di- 
vers autres  écrits  qu'il  ne  nomme  pas,  mais 
qu'il  dit  être  dignes  d'éloges  et  d'estime. 
5.  De  la  manière  dont  Eustratius,  prêtre  do 
l'iiglise  de  Constantinople ,  parle  d'Euly- 
chius  qui  en  était  patriarche,  on  ne  peut 
douter  '  qu'ils  n'aient  été  contemporains. 
«Le  grand  Eutycbius,  archevêque  de  Cons- 
tantinople, m'est,  dit-il,  un  chef  sacré  et  res- 
pectable en  tout.  »  L'amour  qu'il  lui  portait 
l'engagea  à  en  écrire  la  Vie,  que  Surius  et 
Papebrock  ont  fait  imprimer  dans  leurs  Re- 
cueils au  mois  d'avril.  Mais  c'est  plutôt  une 
oraison  funèbre  qu'une  Vie  ordinaire  ;  te  qui 
est  encore  une  preuve  qu'Eustratius  la  com- 
posa quelque  temps  après  la  mort  d'Euty- 
chius,  arrivée  le  5  avril  38:2.  Nous  avons  de 
lui  un  autre  écrit  intitulé  :  De  VEtat  des  morts 
après  cette  vie.  Léon  Allatius  lui  a  donné  place 
dans  son  livre  rfw  Consentement  des  Eglises  d'Oc- 
cident et  d'Orient  sur  le  Ptu-r/atoire,  impnmé  à 
Rome  en  i6oo,  et  depuis  dans  le  tome  XXVII 
de  la  Bibliotlièque  des  Pères.  Eustratius  se  pro- 
pose trois  choses  dans  ce  traité  :  la  première, 
de  montrer  que  l'âme,  soit  des  bienheureux, 
soit  des  malheureux,  pense  et  agit  après 
qu'elle  est  séparée  de  sou  corps  :  c'est  ce  qu'il 
prouve  par  un  grand  nombre  de  passages  de 
l'Écriture  où  nous  lisons  que  les  saints  inter- 
cèdent pour  nous  ;  que  les  esprits  des  justes 
bénissent  le  Seigneur;  que  le  sang  des  mar- 
tyrs crie  vers  le  ciel  pour  demander  ven- 
geance contre  ceux  qui  l'ont  répandu  ;  que 
ceux  d'entre  les  morts  qui  meurent  en  J.-C. 
sont  bienheureux.  Tout  cela  ne  pourrait 
avoir  lieu,  si  les  âmes  séparées  de  leurs  corps 
s'endoi-maient  d'un  profond  sommed.  La  se- 
conde est  de  faire  voir  que  les  âmes,  qui  ont 
souvent  apparu  aux  hommes,  ont  apparu  dans 
leur  propre  subsistance  :  il  en  donne  pour 
preuve  l'apparition  faite  à  saint  Grégoire 
Thaumaturge,  dans  laquelle  saint  Jean  l'É- 
vangéliste,  sous  la  forme  d'un  vieillard,  lui 
découvrit  le  mystère  de  la  \Taie  religion,  aux 
instances  de  la  Mère  du  Seigneur,  qui  lui  ap- 
parut sous  la  tîgure  d'une  femme  ;  les  appa- 


.lULlEN,  DOMITIEN,  ETC.  ,'{47 

litionsdes  anges  faites  h  la  sainte  Vierge,  à 
Zacbarie,  i\  Gédéon,  à  Abraliam,  qui  étaient 
telles,  que  ceux  ;\  qui  ils  apparaissaient  sa- 
vaient l)i(;n  que  c'i'laicnt  des  anges.  Saint  p»e  a^i' 
Antoine  vit  aussi  l'âme  du  bienheureux  Paul 
au  milieu  du  chœur  des  patriarches  et  des 
prophètes.  Saint  Basile  représente  les  qua-  r,2. 

raute  martyrs,  comme  occupés  à  la  défense 
de  la  Cappadoce.  La  Vie  de  saint  Nicolas,  m. 

évêque  de  Myre,  rapporte  une  apparition  de 
ce  saint  à  l'empereur  Constantin  et  au  pré- 
fet Ahlabius,  pour  les  obliger  de  faire  sortir 
de  prison  trois  généraux  d'armées.  Mais  quel 
est  le  séjour  des  âmes  sorties  de  leurs  corps? 
Eustratius,  après  avoir  rapporté  sur  cela  quel-  390. 

ques  passages  de  saint  Basile,  de  saint  Gré- 
goire de  Nysse  et  de  saint  Athanase,  dit  que 
les  âmes  des  saints  sont  reçues  dans  le  ciel, 
et  que  celles  des  méchants  sont  vagabondes 
dans  l'air,  cherchant  un  lieu  de  repos,  et  n'en 
trouvant  point. 

La  troisième  question  qu'il  se  propose  est  38i. 

plus  intéressante,  savoirs!  les  âmes  des  dé- 
funts reçoivent  quelque  utilité  des  prières  et 
des  supplications  que  les  vivants  font  pour 
elles.  Il  établit  d'abord  l'usage  de  la  prière 
et  des  sacrifices  pour  les  morts,  par  l'auto- 
rité du  second  livre  des  Machabées,  de  l'é- 
pitre  de  saint  Paul  aux  Hébreux,  et  des  livres 
de  saint  Denis  l'Aréopagite,  par  le  Testament 
de  saint  Ephrem,  par  la  cinquième  cathé- 
chèse  mystagogique  de  saint  Cyrille  de  Jé- 
rusalem, par  le  discours  d'un  évêque  d'A- 
lexandrie qu'il  ne  nomme  point,  fait  exprès 
contre  ceux  qui  ne  voulaient  pas  que  l'on 
offrît  des  saci'itices  pour  les  morts  ;  et  par  un 
endroit  du  Commentaire  de  saint  Chrysos- 
tome  sur  saint  Matthieu.  Il  en  tire  cette  consé- 
quence, que  Dieu  ayant  prescrit  et  autorisé 
les  prières  et  les  sacrifices  pour  les  morts,  on 
ne  peut  douter  de  leur  utilité.  Photius  dit  ^ 
qu'il  avait  lu  dans  le  traité  d'Eustratius,  que 
Gamaliel,  maître  de  saint  Paul,  avait  cru  en 
Jésus-Christ,  et  reçu  ensuite  le  baptême,  avec 
Nicodème,  des  mains  de  saint  Jean  et  de  saint 
Pierre,  et  avec  le  fils  de  Gamaliel,  nommé 
Ahbus;  que  les  Juifs,  ayant  appris  le  bap- 
tême de  iXicodème,  le  maltraitèrent  si  violem- 
ment, qu'il  mourut  quelque  temps  après  de 
ses  plaies.  Eustratius  ne  rapporte  point  tous 
ces  faits  de  lui-même,  mais  comme  faisant 
partie  de  l'Histoire  de  l'invention  des  i-eliques 


'  Planius  hoc  ipsimmagnus  Eutychiiis  archie- 
piscopus  Conslantinopolitanus  cenerandum  mihi 


in  omnibus sacrumqiie  caput.  Eustrat.,  tom.  XXVIt 
Bibl.  Pat.,  pag.  372.—^  Pliot.  Cod.  171. 


348 


HISTOIRE  GÉNÉRAL  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


C'>eiln.*us 
ses  écrits. 


de  saint  Etienne,  de  Gamaliel  et  de  Nicodème, 
p;\r  le  prêtre  Lucien.  Le  même  Pliolius,  en 
donnant  le  précis  du  traité  d'Eustratius,  ré- 
duit à  trois  propositions  tout  ce  que  cet  au- 
teur prétend  y  établir  :  d'où  qiielijues-uns 
ont  conclu  qu'Eustratius  avait  composé  trois 
traités  sur  l'état  des  âme.s  après  cette  vie.  Il 
n'y  a  rien  de  tout  cela.  Ce  n'est  qu'un  seul 
traité,  où,  comme  nous  venons  de  le  dire,  il 
établit  que  les  âmes,  après  leur  dissolution 
d'avec  le  corps,  agissent  et  apparaissent  quel- 
quefois ,  et  que  les  prières  et  les  sacrifices 
leur  sont  utiles.  C'est  encore  sans  fondement , 
qu'on  tire  des  paroles  de  Photiiis  qu'Eustra- 
tius a  fuit  reloge  du  saint  martyr  Théodore  : 
il  n'en  est  rien  dit  dans  Pliotius.  Eustratius' 
cite  quelque  chose  du  discours  en  l'honneur 
de  ce  saint  martyr;  mais  il  le  cite  comme 
de  Chrysippus,  prêtre  de  Jérusalem.  II  cite  ^ 
encore  im  discours  du  patriarche  Eutychius 
sur  la  manière  dont  les  natures  inteUigentes 
sont  dans  un  lieu.  Nous  n'avons  plus  ce  dis- 
cours. D  servait  à  montrer  que  l'âme  est  spi- 
rituelle. Le  style  d'Eustratius  n'est  pas  bon  ; 
mais  il  est  clair. 

6.  Nous  mettons  Cogitosus  parmi  les  écri- 
vains du  VI'  siècle,  parce  qu'il  se  dit  neveu' 
de  sainte  Brigide ,  abbesse  de  Rildar  en  Ir- 
lande, à  sept  ou  huit  lieues  de  Dublin,  dans 
la  province  de  Leinster,  morte,  selon  Sige- 
bert,  en  518,  ou  en  521  selon  Martin  le  Po- 
lonais. Cogitosus  en  écrivit  la  Vie,  en  partie 
sur  ce  qu'il  avait  appris  de  la  sainte  '  par  les 
anciens  qui  l'avaient  vue,  et  eu  partie  sur  le 
témoignage  de  ses  yeux.  Ceux  cpii  veulent 
que  cet  auteur  n'ait  écrit  que  longtemps 
après  la  mort  de  la  sainte,  disent  qu'il  faut 
entendre  ce  témoignage  des  miracles  qu'il 
avait  vus  s'opérer  dans  l'église  qui  portait  le 
nom  de  Brigide  ;  et  que  ce  qui  fait  voir  en- 
core mieux  que  Cogitosus  n'a  vécu  que  dans 
lc3  siècles  postérieurs,  c'est  qu'ouli'e  la  bar- 
barie de  son  style,  propre  à  ces  siècles,  il 
parle  des  images  et  des  histoires  peintes  sur 


ET>tr.,  III. 


les  murailles  de  cette  église;  ce  qui  n'était 
point  en  usage  dans  les  églises  d'Irlande  au 
commencement  du  vi"-  siècle.  Mais  on  peut 
répondre  qu'on  ne  parlait  plus  la  langue 
latine  dans  sa  pureté  en  Irlande  dès  les  v" 
et  VI"  siècles,  comme  on  peut  le  voir  par  les 
Actes  des  conciles  que  nous  en  avons  rap- 
portés, et  par  quelques  écrivains  irlandais 
qui  ont  vécu  dans  ces  siècles  ;  qu'à  l'égard 
des  images,  on  en  voyait  dans  les  églises 
d'Orient  et  d'Occident  dès  les  V  et  vi'  siècles. 
L'image  d'Acace  de  Constantinople  se  trou- 
vait dans  presque  toutes  les  églises  de  cette 
ville.  Dans  une  qui  était  près  de  l'arsenal, 
cet  évêque  y  était  peint  à  l'endroit  le  plus 
apparent.  Théodore  remarque  que,  lorsque 
Timothée  Litrobulbe,  qu'Anastase  avait  fait  ^^^^ 
ordonner  évêque  de  Constantinople,  entrait  " '•"■ 
dans  les  églises,  il  en  faisait  ôter  les  images 
de  Macédonius,  avant  d'y  commencer  l'of- 
fice. Dans  un  concile  tenu  à  Tours  en  566, 
il  fut  ordonné  que  le  corps  de  notre  Seigneur, 
sur  l'autel,  ne  serait  point  mis  au  rang  des 
images,  mais  sous  la  croix.  Nous  avons  vu 
plus  haut  que  le  pape  Jean  III  fit  peindre 
plusiem'S  histoires,  partie  eu  mosaïque,  par- 
tie avec  des  couleurs,  dans  l'église  que  Pe- 
lage I,  son  prédécesseur,  avait  commencée. 
Ennn,quoiqu'on  puisse  entendre  des  miracles, 
faits  dans  l'église  de  Sainte-Brigide,  les  ver- 
tus de  la  sainte  dont  Cogitosus  dit  avoir  été 
témoin,  cela  peut  s'entendre  aussi  des  actes 
de  vertu  qu'il  lui  avait  vu  faire  avant  sa 
mort  :  car  il  y  joint  '  ensemble  les  miracles 
qu'elle  avait  faits  de  son  vivant ,  et  ceux 
qui  s'opéraient  à  son  tombeau  depuis  sa 
mort.  Ce  dernier  sens  est  d'autant  plus  rece- 
ble,  qu'il  se  dit  neveu  de  la  sainte.  Au  reste, 
la  Vie  qu'il  en  a  écrite  est  très-différente  de 
celle  que  Surius  en  a  donnée  au  I"  février. 
Celle  de  Cogitosus  se  trouve  parmi  les  an- 
ciennes leçons  de  Canisius  [et  dans  le  tome 
LXXIl  de  la  Patrologie  latine,  col.  773]. 


«    Toin.  X  Bibl.  Pat.,  pag.  378. 

'  Ibid.,  pag.  372. 

'  Orale  pro  me  Cogiloso  nepote  culpabili.  Vil. 
Brig.,  Ibid.,  pag.  424. 

*  Pauca  de  pluribus  a  majnribus  et  peritissi- 
mis  tradila,  sine  vtla  nmhiguitatis  caligine,  pa- 
tefacere  censeo.  Idem,  in  Prolog. 

'^  Non  solum  autem  in  sua  vila  carnali,  ante- 


(juam  sarcinam  dcponerel  carnis,  virlutes  pluri- 
mas  operata  est,  sed  largitas  divini  muneris  in 
suo  monasterio,  ubi  ejus  veiierabile  requiescil 
corpus,  semper  operari  virtules  non  cessai,  quas 
nos  virlutes  non  solum  audiviinus ,  sed  eliam 
oculis  nostris  vidimus.  Idem,  in  Vit.  Brig.,  pag. 
422. 


[VI»  SIÈCLE.] 


r.IIAPlTRE  XXXVni.  —  AGNELLUS,  GOUDIEN,  ETC. 


MQ 


CHAPITRE  XXXVIII. 

Agnellas  [vers  l'an  556],  Gordien,  Simplice  |570J  et  Colamba 
ou   Columbaii  [598]  ■ 

ll^crivains  Intiiis.l 


Agaciii.,  :       1.  Agnellus,  né  d'une  condition  noble  ot 
"«'niu>! ' o*n.'  très-riclie,  ayant  perdu  sa  femme,  omljrassa 
p il", rï'. 606-  l'état   ecclésiastiqne,   et  fut  fait   diacre  par 
l'archevêque  de  Ravenne.  Son  premier  em- 
ploi dans  cet   état  fut  de  prendre  soin  de 
l'église  de  Sainte-Agathe ,   en   cette  ville  ; 
mais    l'archevêque    Maximien    étant    mort 
vers  l'an  boo,  Agnellus  fut  choisi  pour  lui 
succéder.  Il  trouva  le  moyen,  par  la  mé- 
diation de  Narpès   qui  commandait  en  Ita- 
lie pour  l'empei'cur  Justiuien,  de  faire  réu- 
nir au  domaine  de  l'église  de  Ravenne  tous 
les  biens  des  Goths.  Lesiariens  avaient  cons- 
truit plusieurs  églises,  qu'ils  avaient  souillées 
par  leurs  cérémonies  :  Agnellus  les  purilia, 
en  }•  établissant  le  vrai  culte  de  Dieu.  On 
met  sa  mort  à  l'an  556,  ce  qui  parait  un  ter- 
me bien  court  pour  tant  de  belles  actions.  Il 
nous  reste  de    lui   une  lettre  à  Arménius, 
dans  laquelle  il  s'applique  principalement  à 
établir  contre  les  ariens  la  cousubstantialité 
du  Père  et  du  Fils.  Il  paraît  que  ces  héréti- 
ques faisaient  tout  leur  possible  pour  infec- 
ter Arménius  de  leurs  erreurs.  Un  nommé 
Martin,  qu'Agnellus  appelle  son  frère,  s'a- 
dressa à  lui  pour  donner  à  Arménius  les  ins- 
tructions nécessaires,  et  le  fortifier  dans  la 
foi.  La  première  chose  qu'il  demande  de  lui, 
est  de  croire  qu'il  y  a  un  Dieu  ;  et  la  seconde, 
de    savoir  ce  qu'est  Dieu.  Il  définit  Dieu, 
comme  Dieu  s'est  défini  lui-même  en  par- 
lant à  Moïse,  et  prouve  par  cette  définition 
que|Dieu  est  immuable,  éternel;  que,  comme 
il  a  toujours  été  Dieu,  il  n'a  jamais  cessé 
d'être  Père,  et  conséquemment,  que  son  Fils 
lui  est  coéternel.  Il  ajoute  que  du  Père  et  du 
Fils  '  procède  une  vertu,  c'est-à-dire  le  Saint- 
Esprit  ;    et  que    ces   trois   personnes  n'ont 
qu'une  même  nature,  ou,  comme  il  dit,  une 
même  puissance  de  subsister.  Il  compare  le 
Père  aune  fontaine,  et  le  Fils  à  un  lleuve  : 


sur  quoi  il  dit  que,  comme  l'on  ne  peut  point 
diviser  le  lleuve  de  la  fontaine  d'où  il  prend 
sa  source,  c'est  aussi  inutilement  que  les 
ariens  prétendent  diviser  le  Fils  de  Dieu 
d'avec  le  Père,  de  qui  le  Fils  tire  son  origine. 
Les  ariens  objectaient  ces  paroles  du  Fils  : 
Mon  l'ère  est  plus  grand  que  mui.  Agnellus 
dit  à  Arménius  de  leur  répondre,  que  le  Fils 
est  moindre  que  son  Père  selon  la  forme 
d'esclave,  dans  laquelle  il  s'est  anéanti  ;'mais 
qu'il  est  égal  à  son  Père  selon  la  forme  de 
Dieu.  Cette  lettre  se  trouve  dans  l'Antidote 
contre  les  hérésies,  à  Râle,  en  1528  ;  dans  le 
huitième  tome  de  la  Bibliothèque  des  Pères  à 
Lyon  [et  dans  le  tome  LXVII  de  la  Patrologie 
latine,  col.  385,  où  elle  est  reproduite  d'après 
Galland,  qui  la  donne  au  tome  XII  de  la  Bi- 
bliothèque des  anciens  Pères,  avec  une  notice], 

2.  On  ne  met  le  moine  Gordien  parmi  les 
écrivains  ecclésiastiques,  que  parce  qu'on 
le  suppose  auteur  des  Actes  du  martyre  de 
saint  Placide,  disciple  de  saint  Denoît  ;  mais  p"^-  si 
cette  opinion,  qui  a  eu  cours  pendant  quel- 
ques siècles,  est  aujourd'hui  rejetée  pres- 
qu'unanimement  :  il  ne  faut  que  lire  les  Ac- 
tes qui  portent  le  nom  de  Gordien,  pour  en 
connaître  la  supposition.  L'auteur,  qui  se 
donne  pour  compagnon  du  voyage  de  saint 
Placide  en  Sicile,  se  trahit  lui-même,  lors- 
qu'on marquant  le  nombre  des  Papes  qui 
ont  confirmé  les  donations  faites  par  Tertul- 
lus  en  Sicile,  il  en  compte  quarante-neuf 
depuis  Vigile  :  ce  qui  fait  voir  que  l'impos- 
teur vivait  sous  le  pontificat  de  Jean  VIll, 
qui  mourut  dans  le  mois  de  décembre  de 
l'an  882,  après  dix  ans  de  siège,  et  ainsi  près 
de  trois  cent  quarante-huit  ans  après  la  mis- 
sion de  saint  Placide  en  Sicile. 

3.  Le  troisième  aljbé  du  Mont-Cassin,  de- 
puis saint  Renoît,  fut  Simplice,  qui  succéda 
dans  celte  dignité  à  Constantin,  avec  lequel 


0»rdien,au* 
leitr  sufipn^é. 
Vide  Matiill. 
lih.  III  An- 
nal. p3g.  rc, 
lib.     IV. 


SimpHc*, 
allié  du  Mont. 
CassîH. 


*  Ex  Pâtre  Filiits,  ex  Paire  et  Filio  procedtt      Spiritus  Sanclus.  Agnell.  Epist  ad  Armenium. 


330 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


-'■"t.i"*''  il  avait  (^ti5  ëlevë.  Pierre  Diacre,  moine  du 

!°V'  ^'\?i!  nième  monas-tèro,  dit  que  Simplice  répandit 

AoIi'.'i.',''^*V  partout  la  liègk  de  saint  Benoît,  et  qu'il  en 

laur.î.      jj^if  une  partie  en  vers.  On  les  trouve  dans 

Haëftène,  ot  dans  le  Code  des  t-rr/les  imprimé 

à  Paris  en  1K63.  Simplice  mourut  vers  l'an 

î»"0,   après  avoir  gouverné  le  monastère  de 

Mont-Cassin  pendant  environ  dix  ans. 

coiumU:       4.  Columba     on    Columban ,    surnommé 

B^uiib.  III   l'Ancien,  pour  le  distinguer  d'un  abbé   de 

Mis!.,    •^p.  Il  '    *  '^ 

Miii.. ',,«p.  même  nom  qui  se  rendit  célèbre  dans  le 
\'n'  siècle,  Ijâlit  au  commencement  durègiie 
de  Justin-le-Jcune  le  monaslère  célèbre  de 
Dermarrli  en  Irlande,  d'où  il  était  oiiginairo. 
En  365,  voulant  se  soustraire  à  la  fureur  du 
roi  Dermici.us  qui  pensait  à  le  faire  mourir, 
il  passa  dans  la  Grando-Bretafinc,  où  il  prê- 
cha la  foi  aux  Pietés  septentrionaux,  séparés 
des  méridionaux  par  d'affreuses  montagnes. 
Il  établit  im  second  monaslère  dans  une  île 
de  la  Bretagne  nommée  lly  ou  IIii,  au  nord 
dellilande,  et  au  coucliant  de  l'Kcosse.  Ces 
deux  monastères  en  produisirent  plusieurs 
autres,  dont  celui  deHy  fut  toujours  le  chef, 


comme  le  plus  considérable.  Saint  Columba 
en  fut  abbé  ;  et  comme  il  était  prêtre,  ce 
monastère  fut  dans  la  suite  gouverné  par  un 
prêtre  qui  en  était  abbé,  et  à  qui  toute  la 
province  était  soumise,  même  les  évêques, 
par  un  usage  extraordinaire.  On  remar- 
que que  ses  successeurs  ne  se  conformaient 
pas  aux  autres  églises  pour  l'observation  de 
la  Pâ(jue  ,  parce  qu'étant  extrêmement  éloi- 
gnés du  reste  du  monde,  ils  n'avaient  point 
de  connaissance  des  décrets  que  les  con- 
ciles avaient  faits  sur  cette  matière.  Le  saint 
vécut  trente-quatre  ans  depuis  son  passage 
dans  la  Grande-Bretagne,  et  mourut  en  598, 
le  9juin,  auquel  l'Eglise  honore  sa  mémoire. 
Il  fut  enterré  dans  l'église  du  monastère 
de  Hy.  Wara'us,  dans  son  premier  livre  des 
Fo-imim  irlandais,  attribue  à  saint  Columba 
une  liègle  pour  ses  moines,  une  hjnnne  à 
la  louange  de  saint  Kieran,  abbé,  et  trois 
autres  sur  divers  sujets.  [Le  tome  LXVI  de 
la  Patrologie  lutine,  col.  997-993,  reproduit 
une  Ji(>gle  attribuée  à  saint  (Columban.] 


CHAPITRE  XXXIX. 
Saint  Martin  de  Dnmc  archevêque  de  Bragne. 

(Écrivain  latin  vers  l'an  580.] 


Siint  Mar- 
tin (-st  fait  ab- 
l'é  de  Du  nie, 
piiH  arcb'vC- 
que   de    Br.i- 


1.  Ce  saint  était  originaire  de  Pannonio. 
Élantencorejeune,ilfit  un  voyage  en  Orient, 
dans  le  dessein  de  visiter  les  Saints-Lieux. 
Use  rendit  si  habile  dans  les  sciences,  qu'au' 
jugement  de  saint  Grégoire  de  Tours,  il  sur- 
passait tous  ceux  de  son  siècle.  A  son  re- 
tour, il  passa  dans  la  Galice,  où  il  fut  chargé 
du  gfiuveriu'mont  du  monastère  de  Dume, 
et  ensuite  choisi  évèque  de  Braguc.  En  572, 
il  tint  un  concile  dans  l'éghse  de  sa  métro- 
pole avec  douze  évêques  des  deux  provinces 
de  Galice,  c'est-à-dire,  deBraguo  el  de  Lugo. 
Il  mourut  après  environ  vingt  ou  trente  ans 
d'épiscopat,  le  20  mars,  vers  l'an  580.  C'est 
à  lui  que  Fortunat  a  adressé*  les  premiejs 
vers  de  sou  cinquième  livre  ;   il  dit   de  lui 


qu'il  avait  hérité  le  nom   et  les  mérites  de 
saint  Martin  de  Tours. 

2.  Nous  avons  de  saint  Martin  de  Bragne 
une  Collection  de  canons  qu'il  adressa  h  Niti- 
gius,  évêque  de  Lugo,  le  même  qui  présida 
au  concile  tenu  en  cette  ville  en  572  par  les 
évêques  de  la  province.  Il  marque  dans  la 
Préface  de  cette  Collection,  que  les  canons 
faits  par  les  anciens  Pères  dans  les  conciles 
d'Orient,  ayant  d'abord  été  écrits  en  grec, 
ont  été  dans  la  suite  altérés,  tant  par  le  dé- 
faut des  traducteurs  latins,  que  parla  négli- 
gence ou  l'ignorance  des  copistes  ;  que  c'est 
pour  cette  raison  qu'il  a  travaillé  à  les  ren- 
dre plus  corrects,  soit  en  mettant  dans  une 
plus  grande    clarté  ce  que  les  traducteurs 


Écrits  do 
saint  Martin 
àf  llragi  e.  >a 
CDlleclioD  de 
caoonf. 


'  In  tanlum  se  litleris  iinbitit,  tit  viilH  secun- 
dns  suis  Irmporibits  Itubcretur.  <!reg.  Turon.,  lili. 
V,  Clip.  XXXVIII,  iiaf.'.  2i7. 


'  Martirii   inerilis   cum  Domine  nobilis  lnvres. 
l'orluual,  lili.  V,  uuuj.  1. 


[Vl°  SIÈCLE.] 

ont  rendu  oliscurt'mcnl,  soit  en  rt^liil)lissant 
les  textes  qu'ils  avaient  clianj,n's  avec  trop 
peu  de  précaution.  Sou  Recueil  est  divisé  en 
deux  parties,  dont  la  première  re|,Mrde  les 
évèques  cl  tout  le  clergé ,  la  seconde  les 
laïques.  Son  dessein  dans  cette  division  était 
de  mettre  les  lecteurs  en  étal  de  trouver 
sans  peine  les  canons  qui  les  intéres>ai(!nl  ; 
ils  sont  en  tout  au  nombre  de  quatre-vinj;!- 
quatre.  On  trouve  ;\  la  tèle  de  chacun  l'eu- 
droil  d'où  il  a  été  tiré,  c'est-à-dire,  des  con- 
ciles c(nnpris  dans  l'ancien  Code  de  l'I^glise 
inilverselle  ,  et  des  conciles  d'Espa^jne  que 
l'on  avait  tenus  jusqu'alors.  Le  premier  ca- 
non, qui  regarde  l'élection  d'un  évoque,  esl 
le  treizième  du  concile  de  Laodicée.  Le  se- 
cond est  le  quatrième  de  Nicée,  et  a  pour 
titre  :  De  l'Ordination  d'un  évèque.  Le  col- 
lecteui'  suit  la  même  méthode  dans  tout  le 
,  Ton.  V  Cou.  reste.  Sa  Collection  se  trouve  dans  les  divers 
Recueils  des  conciles,  et  dans  l'Appendice  du 
premier  tome  de  la  liibliollwque  canonique 
(le  Justel,  à  Paris,  en  ItiCl. 
Livr,>»j:i-       3.  Miron .  roi   de    Galice,  avait  isouvent 

i«o.    roi      de  .  ,  .  '  ■         1       1     •       ï  1 

o^i'  c  T prie  sauit  Martni  de  lui  donner  des  nislruc- 

X  H.M   l'ji.,    '.  .,  ,  .... 

m-i*i-  lions  sur  la  manière  dont  il  devait  se  con- 
duire. Le  saint  évêque  lui  adressa  pour  ce 
sujet,  vers  l'an  uCO,  un  traité  des  quatre  ver- 
tus cardinales,  qu'il  intitula  :  Formule  d'une 
vie  honnête.  On  l'a  imprimé  dans  le  dixième 
tome  de  la  Bibliothèque  des  Pères,  mais  sans 
l'Épître  dédicatoire  au  roi.  On  la  trouve 
dans  le  dixième  tome  du  Spicik'ge  de  doni 
Pig.  6»c.  Luc  d'Achéri.  Cet  évèque  dit,  en  parlant  de 
la  prudence,  que  celui  qui  possède  cette 
vertu  est  toujours  le  même,    mais  qu'il  sait 

I  s'accommoder  au  temps,  suivant  la  diver- 

sité des  atl'aires  et  des  circonstances.  Sur  la 
magnanimité  ou  la  foi'ce,  il  enseigne  que 
celui  qui  est  véritablement  magnanime,  ne 
croit  jamais  qu'on  lui  fasse  injure.  «  Il  dira, 
ajoute-t-il,  de  son  ennemi  :  «  11  ne  m'a  pas 
«  nui,  mais  il  a  eu  dessein  de  me  nuire  ;  »  et 
lorsqu'il  l'aui'a  en  son  pouvoir,  il  se  croira 
bien  vengé  d'avoir  été  en  état  de  se  venger.» 
Les  instructions  qu'il  donne  au  roi  sont  re- 
marquables. Il  lui  conseille  de  ne  laisser  ja- 
mais sortir  de  sa  bouche  aucune  parole  dés- 
honnèle,  et  démêler  tellement  l'enjouement 
avec  le  sérieux,  que  cela  se  fasse  sans  pré- 
judice de  sa  dignité  et  de  la  pudeur.  11  veut 


CnAPITRE  XXXIX.  —  SAINT  MARTIN  DE  DUME. 


arji 


aussi  que  le  sel  de  ses  discours  n'ait  rien  de 
mordant.  «  Soyez,  ajoute-t-il,  gracieux  en- 
vers tous;  ne  llattcz  personne;  soyez  fami- 
lier avec  peu,  et  équitable  envers  tout  le 
monde.  »  Il  lui  fait  remarquer  que  la  justice 
esl  une  loi  divine,  et  le  lien  delà  société  hu- 
maine ;  que,  pour  la  pratiquer,  il  faut  non- 
seulement  ne  rien  prendre  à  autrui,  mais 
encore  lui  restituer  i:e  qu'on  lui  aurait  ôti'-. 
11  ne  met  point  de  diirereuce  entre  assurer 
une  chose,  et  jurer  qu'elle  est  véritable; 
mais  il  ne  s'exprime  ainsi  que  par  ra|)[)orl 
au  roi,  dont  en  ell'et  la  parole  doit  tenir  lieu 
de  serment.  11  semble  encore  approuver  le 
mensonge  dans  des  occasions  pressantes, 
pourvu  qu'on  s'en  serve,  non  pour  assurer 
une  chose  fausse,  mais  pour  melti-e  à  cou- 
vert la  vérité;  il  parait  néanmoins  par  la 
suite,  qu'il  ne  veut  dire  autre  chose,  sinon 
qu'il  esl  permis  quehjuefois  de  taire  la  vé- 
rité. «  Lorsqu'il  y  a,  dit-il,  une  cause  hon- 
nête, le  juste  ne  publie  point  son  secret  ;  il 
tait  ce  qu'il  faut  taire;  il  dit  ce  qu'il  faut 
dire.  » 

4.  A  la  suite  de  ce  traité  on  en  trouve  un       i-i.re  d» 

^  Mii-urs, 

autre  dans  le  même  tome  de  la  Bibliothèque 
des  Pères,  intitulé  :  Des  Mœurs  :  c'est  un  tissu 
de  maximes  morales,  également  propres  à 
former  l'homme  dans  la  vertu,  et  dans  les 
devoirs  de  la  société  civile.  En  voici  quel- 
ques-unes, (c  Avertissez  vos  amis  en  secret  : 
faites  leur  éloge  en  public.  Ne  demandez 
point  ce  que  vous  refuseriez  à  un  autre  :  ne 
refusez  point  ce  que  vous  demanderiez  vous- 
même.  Servez-vous  plus  souvent  des  oreilles 
que  de  la  langue.  Lorsque  vous  voulez  dire 
quelque  chose  ,  dites-la  à  vous-même  avant 
de  la  dire  aux  autres.  »  Saint  Isidore  de  Sé- 
ville  ne  nomme  point  ce  petit  traité  ;  mais  il 
fait  mention 'd'im  volume  de  lettres  du  saint 
évêque,  dans  lesquelles  il  donnait  des  pré- 
ceptes pour  la  pratique  des  vertus  et  la  fuite 
des  vices  :  peut-être  que  ce  traité,  qui  est 
extrêmement  court,  n'est  en  effet  qu'une 
lettre  de  ce  recueil. 

5.  On  cite  de  saiut  Martin  un  livre  (/e /'O?'-  Amres 
gueil  et  de  l'humilité  ;  un  autre  de  la  Colère,   Manio.  ' 
adressé  à  l'évêque  Wictimirus;  un  troisième 

de  la  PCique  ;  une  lettre  à  l'évêque  Bouiface 
sur  les  trois  immersions  du  baptême  ;  et  une 
contre  les  superstitions.  [Le  tome  El  des 


1  Cuixis  quidem  ego  ipse  legi  librum  de  Diffe- 
reutiis  quatuor  virtutum;  et  aliud  volumen  Epis- 
tolarum,  in  quibus  hortatur  ad  vitœ  emendaUo- 


nem  et  conservationem  fidei,  etc.  \3i1lor.  De  Script, 
eccles.,  cap.  xxn. 


302 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


CIdssici  auctores  de  Mai,  pag.  379-384,  con- 
tient uu  fragment  d'un  ouvrage  de  saint 
Martin  ;  ce  fragment  est  sur  l'origine  des 
idoles'.] 

Le  cardinal  d'Aguirre  ',  qui  avait  trouvé 
tous  ces  écrits  dans  un  manuscrit  de  l'église 
de  Tolède  ,  s'était  engagé  à  les  rendre  pu- 
blics, avec  le  traité  intitulé  :  Formule  de  la 
vie  honnête,  et  un  ^and  nombre  de  senten- 
ces des  Pères  d'Egypte,  traduites  en  latin 
par  le  même  évêque.  Nous  ne  savons  pas 
s'il  a  tenu  sa  parole'.  Ces  sentences  des  Pè- 
res d'Kpypte  se  trouvent  '  dans  V Appendice 
des  Vies  des  Pères,  par  Rosveide.  La  plupart 
regardent  ceux  qui  pratiquent  les  exercices 
de  la  vig- monastique  ;  mais  il  y  en  a  aussi 
plusieurs  qui  peuvent  être  très-utiles  à  tous 
les  chrétiens  qui  veulent  se  perfectionner 
dans  la  vertu.  Voilà  tout  ce  que  nous  savons 
des  ou\Tages  de  saint  Martin.  Saint  Isidore 
de  SéviUe  dit  de  lui*,  qu'il  avait  enseigne  la 
foi  catLoIique  aux  Suèves  convertis  de  l'hé- 
résie arienne ,  atiernii  les  églises,  bâti  des 
monastères  ,  et  composé  des  livres  remplis 
de  préceptes  et  de  maximes  de  piét('.  Il  faut 
mettre  aux  nombre  de  ces  monastères  celui 


de  Dume  dans  la  Galice,  dont  il  fut  le  fon- 
dateur et  le  premier  abbé.  Dans  une  inscrip- 
tion en  vers  •  qu'on  lisait  dans  l'église  de 
ce  monastère  ,  on  lui  fait  l'honneur  d'avoir 
donné  par  son  ministère  la  connaissance  du 
vrai  Dieu  aux  peuples  d'Allemagne,  de  la 
Saxe,  de  la  Thuringe,  de  la  Pannonie,  de  la 
Bourgogne ,  de  la  Dacie ,  et  de  beaucoup 
d'autres  provinces.  Il  n'est  rien  dit  de  tout 
cela  dans  son  épilaphe  '' ,  mais  il  y  est  fait 
mention  du  lieu  de  sa  naissance ,  de  ses 
voyages  au  delà  de  la  mer,  de  son  établis- 
sement dans  la  Galice ,  et  du  soin  qu'il  prit 
du  culte  du  Seigneur ,  et  des  rits  sacrés  de 
l'Église.  [Les  écrits  de  saint  Martin  de  Dume 
sont  reproduits  au  tome  LXXll  de  la  Patro- 
logie  laitue,  col.  17-32,  d'après  Galland,  qui 
les  a  publiés  au  tome  XJi  de  sa  Bibliotlièque 
avec  une  notice  sur  l'auteur.  On  y  trouve 
sept  opuscules  ,  savoir:  1°  les  formules  de  la 
vie  honnête  ;  2°  l'écrit  sur  les  mcewrs;  3°  l'o- 
puscule contre  la  jactance  ;  4°  sur  la  superbe  ; 
5°  sur  l'humilité  ;  6°  sur  la  colère  ;  T  sur  la 
Pâque.  Us  sont  suivis  de  trois  petites  pièces 
de  vers.] 


CHAPITRE  LX. 


Entychins  [582]  et  Jean  le  Scholastiqtie  [575]  patriarches 
de  Constantinople. 


[Écrivains  grecs.] 


Euljcblu*! 
p«lri»irliO    à'i 

C«D^liiDl<lliJ- 
pl«. 


Vîu  Eiil.- 
chti  apu<1  Bol- 
lard,  ad  diciii 


1.  Eutycllius',  né  en  Phrygie  vers  l'an 
SI  2,  fut  envoyé  à  l'âge  de  douze  ans  à  Cons- 
tantiiiople  pour  y  étudier  les  belles-lettres. 
Dans  le  temps  qu'il  y  était  occupé,  il  conijut 
le  dessein  de  se  faire  moine.  L'évêque  d'A- 
masée,  en  ayant  été  averti,  le  mit  dans  son 
clergé,  et  le  lit  passer  par  tous  les  degrés  du 
ministère  ecclésiaslique,  jusqu'à  la  prêtrise 
inclusivement.  11  le  destinait  même  àl'épisco- 
pat;  mais  comme  il  changea  ensuite  de  volon- 

'  Voir  la  préface  de  Mai,  pag.  H. 

'  Kolitia  Concilior.  Itispan.,  pag.  !)2. 

'  Ils  ont  élé  publiés  par  Jean  Tamay  Salosar  dans 
son  martyrologe  espagnol,  loin,  il,  pag.  .'în-328.  De 
là  ils  out  passé  dans  le  tome  XII  de  la  Bibliotliè- 
que des  ancicus  l'èrcs  de  lialland.  (L'édileur.) 

*  l'ag.  7C6. 


té,  Eutychius,  reprenant  son  premier  dessein' 
embrassa  la  vie  monastique  dans  un  monas- 
tère de  la  ville  d'Amasée  :  il  avait  alors  trente 
ans.  Environ  dix  ans  après,  c'est-à-dire  en 
332,  l'évêque  d'Amasée,  se  trouvant  malade, 
le  députa  à  Coustantinople ,  pour  tenir  sa 
place  dans  le  cinquième  concile  géuéral.  Le 
patriarche  Menuas,  chez  (pii  il  logeait,  dit 
un  jour  à  son  clergé,  en  parlant  d'Eutychius  : 
Ce  moine  sera  mon  successeur.  Dans  une 

*  Isidor.  De  Script,  eccks.,  cap.  xxu. 

"  Tom.  X,  Bibl.  Pat.,  pag.  386. 

'  Ibid. 

'  Kulycliius  a  le  litre  de  salnl  parmi  les  Grecs  ; 
Baronius  recounait  qu'il  l«  mérite.  Voyez  Pnlrot. 
grecque,  lom.  LXXXIX,  col.  2270  et  2389.  {L'édi- 
teur,) 


[vi«  SIÈCLE.!    CHAPITRE  XL.  —  EUTYCHIUS  KT  JEAN  LE  SCHOL ASTIQUE. 


cfirS".'""..'.^    cniifériMico  qiio  l'on  tenait  en    présence  de 
l'eiupeieur  Justinien,  on   agita  la  question 
qiii  avait  rapport  à  celle  qui  devait  faire  la 
matière  du  concile,  savoir  si  l'on  peut  con- 
j.ii.,').!."'''   damner  les  morts.  Eutycliius  soutint  l'allir- 
mative,  et  la  prouva  par  l'exemple  du  roi 
Josias,  qui  fit  déterrer  et  brûler  les  os  des 
idolâtres.  Justinien,  et  la  plupart  de  ceux  qui 
étaient  présents,  furent  charmés  de  cette  ré- 
ponse, parce  qu'ils  pensaient  de  même.  Le 
patriarche  Mennas  étant  donc  mort  quelques 
jours  après,  l'Empereur  lui  donna  pour  suc- 
cesseur Eutychius  ,  de  l'aprément  du  clerf^é 
et  du  sénat  :  il  avait  quarante  ans,  lorsqu'il 
fut  ordonné  patriarche  de  Constantinople. 
eii.,'°iiin.33s!  Aussitôt  après  son  intronisation,  il  donna  au 
pape  Vigile  sa  profession  de  foi,  en  le  priant 
de  venir  présider  au  concile,  et  d'y  confir- 
mer la  paix  des  Églises  par  l'examen  et  le 
jugement  de  la  question  des  Trots-Chapitres. 
Le  Pape  ayant  refusé  de  s'y  rendre ,  Euty- 
chius tint  la  première  place  avec  Apollinaire 
d'Alexandrie,  et  Domnin  d'Antioche.  11  alla 
même  avec  ces  deux  patriarches  inviter  Vi- 
gile à  assister  à  la  seconde  session.  Sa  sous- 
cription aux  Actes  de  ce  concile  renferme 
sommairement  la  sentence  qui  fut  rendue 
iiK.''"'   contre  les  Trois-Chapitres.  L'Empereur  ayant 
voulu  obliger  le  patriarche  de  souscrire  en 
564  à  l'édit  qu'il  avait  publié  pour  la  dé- 
fense de  l'erreur  des  incorruptibles, Eutychius 
résista  fortement  à  ce  prince,  en  lui  remon- 
trant qu'il  suivait  de  cette  doctrine,  que  l'In- 
carnation n'avait  été  qu'imaginaire.  «  Com- 
ment, disait-il ,  un  corps  incorruptible  a-t-il 
été  circoncis,  ou  nourri  du  lait  de  sa  mère? 
Comment  a-t-il  pu  sur  la  croix  être  percé 
par  les  clous  et  par  la  lance  ?  On  ne  peut  le 
nommer  incorruptible ,  qu'en  ce  qu'il  n'était 
souillé  d'aucune  tache  du  péché ,  et  qu'il  ne 
fut  point  corrompu  dans  le  sépulcre.  »  Tous 
lesetfortsqu'Eutychius  fit  pour  désabuser  ce 
prince  aboutirent  à  le  faire  envoyer  en  exil. 
Un  se  saisit  de  lui,  lorsqu'il  venait  d'achever 
le  saint  sacrifice  ,  et  on  l'emmena  dans  un 
monastère,  dépouiUé  de  tout ,   excepté  de 
son  pallium.  [Le  cardinal  Mai  a  publié  deux 
fragments  sur  la  Pâque  et  sur  l'institution  de 
l'Eucharistie  (S.  V.  LX,  pag.  623-623.)  —Il 
parait  que  ces  fragments  appartenaieut  aux 
discours  qu'il  avait  composés  contre  toutes 


353 

les  hérésies  ,  au  rapport  d'Iùistratius  ,  qui  a 
écrit  sa   Vie.  Ces  deux  fragments,  quoique 
courts,  sont  très-importants,  dit  M.  Bonnetty, 
dans  sa  table  alphabétique  des  auteurs  di;- 
eouverls  par  le  cardinal  Mai.  En  elïel,  dans 
le  premier,  Eutychius  réfute   d'abord   les 
quartodécimains,  qui  célébraient  la  P;lque  à 
la  manière  judaïque;  puis  il  s'élève  contre 
les  aquariens  ou  hydroparastates ,  c'est-:"!- 
dire  ceux  qui  n'employaient  que  l'eau  dans 
le  saint  sacrifice  ,  et  qui  s'excluaient ,  com- 
me il  le  dit,  du  corps  et  du  sang  du  Sauveur. 
Il  enseigne  qu'il  faut  offrir  le  vin  mêlé  avec 
l'eau,  suivant  la  tradition  du  Sauveur,  et  ré- 
fute par  L'i  lesArméniensIschismatiques,  qui 
n'emploient   que  le  vin,  s'appuyant  sur  les 
fausses  traditions  de  leurs  ancêtres ,  qui  ne 
peuvent  être  comparées  à  la  tradition   ve- 
nue du  Seigneur  Jésus.  —  Dans  le  second 
fragment ,   Eutychius   s'élève   aussi   contre 
une  dangereuse  coutume  qui  existe  chez  les 
Grecs  et  les  Arméniens  schismatiques,  et  qui 
consiste  à  vénérer  la  matière  oUerte  pour 
l'Eucharistie,  mais  non  encore  consacrée: 
coutume  qu'a  si  souvent  blâmée  l'Église  ro- 
maine. —  Mais  ce   qui   surtout  nous  rend 
très-précieux  ce  second  fragment,  c'est  qu'il 
nous  a  conservé  un  témoignage  très-expli- 
cite du    grand   Athanase    sur   la  présence 
réelle  dans  l'Eucharistie  ;  il  est  tiré  de  son 
discours  aux  baptisés,  titre  qui  ne  se  trouve 
pas  dans  ses  œuvres  imprimées.  Voici  ses 
paroles  :  «  Le  baptisé  verra  les  lévites  por- 
tant le  pain  et  le  calice  du  vin,  et  prépa- 
rant la  table  sacrée  ;  avant  que  les  prières 
((  et  les  supplications  soient  commencées, 
il  n'y  a  que  le  pain   et  le   calice  ;  mais, 
dès  que  les  grandes  et  les  merveilleuses 
prières  sont  accomplies,  alors  le  pain  de- 
ce  vient  corps  et  le  calice  sang  de  Notre-Sei- 
«  gneur  Jésus-Christ  '.  n   Et  un  peu  plus 
loin  :  (I  Arrivons  à  la  confection  des  mystè- 
«  res  ;  là  est  le  pain,  là  est  le    caHce,    les- 
«  quels,  en  eflet ,  tant  que  les  prières  et  les 
((  supplications  ne  sont  pas  achevées  ,  con- 
te servent   simplement   leur   nature  ;    mais 
«  aussitôt   que   les   grandes  prières  et  les 
«  saintes  suppfications  sont  montées  au  ciel, 
«  le  Verbe  descend  dans  le  pain  et  le  calice, 
<(  et  son  corps  est  formé  -.  »  On  ne  peut  voir 
rien  de  plus  précis  que  ces  témoignages  qui 


>  '  0^;c    zohi  UAra-i   ftpunai   à/JTOus,  xai  itoznpto^  tôts   yiveroti  o  âupTOi   cûfia.' ,    xai  rb  mr-npto»    ai/J-c  «u 

oîvou,  xai  Tiôivra;  Si  riiv  fl^sànï^av  xai  Sîov  oûna  tV.£j(ai  y.jpiou  rt)iùi  Iri^oû  Xpi^tov.  Script.  veteres.    lom.    1\, 

xai  5siiTs<î  vivoïwi,  ^liô;  èïTiw  0  «,OT(Jî  xaî  To  TroTii.oioV  pag.  li^j.   Paliol.   grac.  toiu.   LX.WVl,   col.    2402. 

Wàv  (îè  57rtTsA£îeù(jiv  ai  /i£y«i«t  xai  6'xup.v.<:0u.l  sùz»'.  »  '  EÀOu/*-:v  irti  ri)»  Tsieiw»"  to,m  /iU77/i5ic^v    oOto,-  9 


XI. 


23 


334  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 

nous  donnent  la  foi  du  iv'  siècle,  saint  Atha- 
nase  ayant  été  consacré  archevêque  d'A- 
lexandrie en  326,  et  étant  mort  en  373.  Nous 
y  retrouvons  aussi  la  foi  du  vi'  siècle  par  le 
témoignage  d'Eutychius  ,  qui,  outre  la  cita- 
tiou  qu'il  fait  ici  d'Atlianase,  s'exprime  ainsi 
lui-même  ailleurs;  »  Le  Clirist  s'est  immoli; 
H  lui-même  mystiquement    dans  le  temps 
0  où,  après  la  Cène,  recevant  le  pain,  il 
u  rendit  grâce,  l'offrit  et  le  bénit,  se  mêlant 
«  lui-même  au  type;  semblablcment,  pre- 
n  nanl  le  calice  du  fruit  do  la  vigne,  et  ren- 
«  dant  grâces,  et  l'olfrant  à  Dieu  le  Père,  il 
(I  dit  :  Prenez,  mangez  ;  prenez ,  buvez  :  ceci 
«  est  mon  coi-ps;  ceci  est  mon  sang.  Tous  le- 
tt  çoivent  donc  le  saint  corps  et  le  précieux 
«  sang,  quoiqu'ils  ne  reçoivent  qu'une  par- 
«  tie  du  type,  car  il  est  divisé  indivisible- 
«  ment  entre  tous  à  cause  de  la  commix- 
«  tion.  '  »  —  Eutychius  explique  ensuite  ce 
mystère  par  l'exemple  d'un  cachet  dont  tou- 
tes les  empreintes  viennent  d'un  seul  t\-pe 
qui  demeure  immuable,  et  par  l'exemple  de 
la  voix  qui  est  une,  la  même  et  indivisible, 
soit  dans  celui  qui  parle  ,  soit  dans  l'air  qui 
la  transmet,  soit  dans  les  oreilles  de  tous 
ceux  qui  l'entendent;  puis  il  conclut  ainsi  : 
«  Que  personne  donc  ne  mette    en  doute 
«  qu'après  le  sacrifice  mystique  et  la  sainte 
Il  résm-rection  ,  l'incorruptible  ,  l'immortel , 
CI  le  saint  vivifiant  corps  et  sang  du  Sei- 
«  gneur,  enfermé  dans  les  types  par  l'œu- 
«  vre  du  Sacrifice,  que  personne ,  dis-je,  ne 
c(  mette  en  doute  que,  de  même  que  dans 
<i  les  précédents  exemples ,  il  n'imprime  sa 
«  vertu  aux  mêmes  types  et  ne  soit  en  réa- 
(1  lilé  tout   dans  chacun  de  ces   types.   Car 
i(  dans  le  corps  même  du  Seigneur  habite 
«  corporellement,  c'est-à-dire  substanlielle- 
«  ment ,  la  plénitude  de  la  divinité  du  Ver- 
«  be  de  Dieu.  Mais  la  fraction  de  ce  pain 
«  vénérable    signifie  la  mort  :   c'est  pour- 
«  quoi  il  a  été  appelé  la  Pàqite  désirée,  com- 
II  me  l'auspice  du  salut ,  de  l'immortalité  et 
«  de  la  science  parfaite  :  et  de  même  qu'à 
«  cette  époque  ils  sortirent  tous  de  la  Cène, 

âpzoi  xal  toDto  t6  Ttorripioi,  ôioy  oïmui  v-i^o-l  "«!  ixs»(«t 
•/r/iïasi,  ipCki.  liil  •  iz  âv  Si  ai  /xr/aiat  r^ai,  xal  ai 
ây(ai  c«»iac  àvaTre/ipeisi,  xaraCa^ysi  i  Aoyi;  e(f  rè»  Kp- 
TO»  xai  t4  Jioni^co»,  xai  -/ht-an  axiroû  «  nCi/ix,  Ibid. 

'  Ex//({aj  tauTo»  r&  ànirmtf ÔAo»  oàv  âîtaj  t4 

«yw»  CÙ/J.U  xai  TO  ti/iw»  ai/ia  nû  Kupisj  Sl/trtu,  xàv  « 
/«é,oo;  TOnTviï  Silnrai'  /itplynat  yào  à/AipUrvi  4»  ârt«ei, 
iti.  Tf,y  l/intîi'.  Clnssici  auclores,  loin.  X,  pag. 
490.  Palrol.grwc.  tuui.  LXX.WI,  rnl.  239S. 

'  Mr.iiif  ovj  à//j.i69i*a»  ixirw  ri  (Xj.fl-x,»TO»  /urà.  t*.v 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

«  et  se  rendirent  sur  la  montagne  des  Oli- 
(1  ves ,  avec  des  cantiques ,  aiusi  nous , 
H  après  la  participation  du  corps  et  du  sang 
i(  sacrés,  nous  rendons  grâces  et  nous 
Il  nous  retirons  chacun  dans  nos  demeu- 
II  res  *.  » 

Ces  fragments  si  précieux  font  désirer  que 
l'on  retrouve  un  jour  les  autres  discours 
d'Eutychius. —  [On  trouve  un  autie  fiagment 
aux  pages  488-493,  Classici  oiictores,  tom.  X. 
Tous  ces  diUi-rcnts  fragments  ont  été  re- 
cueillis par  Mai .  Bihliot/i.  nova  ,  tom.  IV  , 
pag.  34  et  suiv.  Ils  forment  le  discours  sur 
la  Pàque  et  sur  l'Eucharistie,  qu'on  a  ainsi 
presque  en  entier.  Il  est  reproduit  au  tome 
LXXXVI  de  la  Patrologie  grecque,  col.  2389- 
2402,  avec  une  traduction  latine  et  un  aver- 
tissement du  Cardinal.] 

2.  (m  ordonna  à  la  place  d'Eutychius,  Jean 
le  Scholastique,  syrien  de  naissance,  et  apo- 
cisiaire  d'Antioche.  Le  nouveau  patriarche 
assembla  quelques  évoques  pom-e.xaminer  les 
requêtes  présentées  contre  Eutychius.  Les  cri- 
mes dont  on  l'accusait,  étaient  de  se  servir 
d'onction,  de  manger  des  viandes  délicates, de 
prier  longtemps  à  genoux  (peut-être  les  di- 
manches). Cilé  par  trois  fois,  il  repondit  tou- 
jours que,  si  ou  le  jugeait  canoniquement,  et 
si  on  lui  rendait  son  clergé  et  sa  dignité,  il 
comparaîtrait  et  prendrait  ses  accusateurs 
mêmes  pour  témoins.  Ils  le  condannièrent  par 
défaut;  puis  on  le  transféra  dans  une  île  de  la 
Propoutide,  d'où  il  fut  contiiiitau  monastère 
d'Amasée,  qu'il  avait  gouverné  avant  d'êti'6 
évêque.  Il  y  demeura  douze  ans,  c'est-â-dire 
depuis  oG3  jusqu'en  n~to ,  auquel  Jean  le 
Scholastique  mourut  le  dernier  jour  d'août. 
Il  portail  le  nom  de  Scholastique,  parce  qu'il 
avait  fréquenlé  le  barreau,  étant  avocat  à 
Anlioche.  Il  fut  élevé  au  sacerdoce  dans  la 
même  ville,  où  il  Ot  aussi  les  fonctions  d'a- 
pocrisiaire.  Ce  fut  pendant  ce  temps-là  qu'il 
composa  une  Collection  de  canons  des  dix 
conciles  précédents.  Us  avaient  déjà  été  re- 
cueillis dans  l'ancien  Code  de  l'église  uni- 
verselle; mais  ils  y  étaient  sans  ordre.  D'ail- 

/ui'jSTixViy  Upoj/rfia.»  xai  TJ)»  à/iav  àyà»T««(v,  xal  à8à- 
varoy,  xc<(i  âytoy,  xat  ^uionohv  9ù/ia  xai  a'/ix  toO  Rue/ou, 
TcT{  ayrtTvnoi;  ivriQijJiîvov^  iiv  tùv  itpo-jtr/titv ^  tÀarrov 
X'jif  ^ùQupufiiviat  n»p'/.otr/fiLârttv  rÔLÇ  oUitaç  ivxitOfi.6fl, 
■/waOa.1  ot^va,u£({,  àAÀ  ôXov  iy  oXoti  lû^siïxcvdai*  èy  avrâ 
yàp  Tû  x-joixxdi  çûpcuTt  xarotxG?  Tràv  rb  n/ripùifAtt  xfii 
OtiriiTOi  rov  Ai'/ov  xai  ©loO  ffcauxrfxùf ,  ôitkp  iniv 
oùmiiùf.etv...  Classici  auct.  toui.  X,  pag.  491.  Pa- 
trol.,  ibid.  ac  supra. 


Jean  le?^' 

taUiqUC.      ; 
Iriirebe 
C«DIUOlln 


kriL- 


E.if.m..i\ 


I 


[VI"  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XL.  —  EUTYCHIUS 

leurs,  ce  Code  ne  renloriiinil  que  les  canons 
des  conciles  de  Nici.'e,  d'Ancyie,  de  Néocë- 
sarée,  de  Gangre,  d'Antioche,  de  Constan- 
tinople,  tl'l'-phèse  el  de  Clialcédoine.  Jean 
ajouta  dans  sa  Collection  les  canons  des  apô- 
tres, les  vingt-un  de  Sardique,  et  les  soixaute- 
liuil  de  VBjûtre  canonique  de  saint  Basile.  Il 
les  distribua  sous  cinquante  titres,  où,  sans 
garder  l'ordre  des  temps,  il  se  contenta  de 
suivre  celui  des  matières,  rapportant  de  suite 
les  divers  canons  sur  un  même  sujet,  pour 
la  facilité  des  lecteurs  :  ce  que  n'avaient  pas 
fait  ceux  qui  avant  lui  avaient  donne  des 
recueils  de  canons.  Le  pape  Nicolas  l"  cite 
la  Collection  de  Jean  le  Scholastique  dans 
sa  lettre  au  patriarche  Photius,  h  qui  il  dit  ' 
qu'il  est  surprenant  que  les  canons  de  Sar- 
dique lui  fussent  inconnus,  puisqu'on  les 
trouvait  parmi  les  cinquante  titres  dont  la 
Concorde  des  cations  était  composée.  Or  on  ne 
connaît  point  d'autre  Concorde  des  canons 
chez  les  Grecs,  qui  renferme  ceux  de  Sardi- 
que, que  celle  de  Jean  le  Scholastique.  Ce 
patriarche  fit  depuis  un  abrégé  de  cette 
Concorde,  intitulé  :  Nomocanon,  auquel  il 
ajouta,  sur  chaque  titre,  les  Novelles  de  l'em- 
pereur Justinien  :  ce  qui  prouve  qu'il  ne  mit 
la  main  à  cet  ouvrage  que  depuis  que  ce 
prince  eut  pris  le  gouvernement  de  l'empire, 
et  qu'il  fut  lui-même  monté  sur  le  siège 
épiscopal  de  Constantinople.  Balsamon*cite 
cet  abrégé  dans  ses  notes  sur  le  premier  ca- 
non du  concile  de  Constantinople  appelé  m 
Trtillo,  mais  sans  en  nommer  l'auteur.  Il  est 
attribué  à  ïhéodoret  dans  un  manuscrit  de 
la  Bibliothèque  du  Roi.  Mais  dans  tous  les 
autres,  le  Nomocanon  porte  le  nom  de  Jean  le 
Scholastique.il  est  d'aiBeurs hors  d'apparence 
que  Théodoret  eût  mis  dans  une  collection 
de  canons  ceux  des  apôtres  et  de  Sardique, 
que  les  Grecs  ne  recevaient  pas  encore  de 
son  temps,  et  qui  ne  se  trouvaient  pas  dans 
l'ancien  Code,  dont  on  se  servit  dans  le  con- 
cile de  Chalcédoine,  auquel  il  assista  lui-mê- 
me. EnQn,  le  style  du  Nomocanon  est  tout 
différent  de  celui  de  Théodoret.  Ces  deux 
collections  de  Jean  le  Scholastique  ont  été 
imprimées  à  la  tête  du  second  tome  de  la 


ET  JEAN  LE  SCHOLASTIQUE.  iiSo 

/Ji/)liiit/iè//nc  canonique  de  Justel,  A  Paris,  en 
lU()i.  Nous  n'avons  plus  sa  Catéchèse,  où  il 
établissait  le  dogme  catholique  de  la  sainte 
et  consubstantielle  Trinité.  Photius  dit  '(pi 'il 
la  composa  sous  le  règne  de  Justin-le-Jeuiic, 
indiclion  première,  c'est-i\-dire,  en  568;  et 
qu'elle  fut  depuis  réfutée  par  l'impie  et  im- 
bécile Pliilo])onus. 

3.  Après  la  moi-t  de  Jean  le  Schoiastiiiue,      "<"'  ■'■K"- 

lychiu"        en 

le  peuple  de  Constantmople  demanda,  avec  ^J;,„=     "" 
de  grands  cris,  le  retour  d'Eutychius.  L'em- 
pereur Justin  l'ayant  accordé,  le  patriarche 
remonta  sur  son  siège  le  3  octobre  577,  aux 
acclamations  de  foute  la  ville.  Comme  c'é- 
tait   un    dimanche,   il    célébra    la   messe  A 
Sainte-Sophie,  où  les  fidèles  s'empressèrent 
tellement  à  recevoir  la  communion    de  sa 
main,  qu'il  la  distribua  depuis  Tierce insqu.' à    v-u  r.ui;c!.. 
None,  c'est-à-dire  pendant  six  heures.  Quel-  «i"  diëm^'o 
que  temps  après  son  retour,   il  publia  un  "''"' 
écrit  que  nous  n'avons  plus,   où    il    disait 
qu'après  la  résurrection,  notre  corps  ne  se- 
rait plus  palpable,  mais  plus  subtil  que  l'air  : 
c'était  un  reste  des  erreurs  attribuées  à  Ori- 
gène.  Saint  Grégoire,  qui  était  alors  à  Cons- 
tantinople eu  qualité   d'apocrisiaire  ou  de 
nonce  apostolique,  se  crut  obligé  de  résister 
au  patriarche  :  ils  entrèrent  en  conférence  ' 
sur  ce  sujet.  Saint  Grégoire   lui  objecta  les       i.uc.  xur, 
paroles  de  Jésus-Christ  à  ses  disciples  :  Tou-  ^'' 
chez,  et  voyez  qu'un  esprit  n'a  point  de  chair 
ni  d'os.  Eatychius  répondit,  que  notre  Sei- 
gneur le  fit  pour  leur  ôter  le  doute  de  sa  ré- 
sunection.  «  Cela  est  surprenant,  reprit  saint 
Grégoire,  que  pour  ôter  le  doute  à  ses  disci- 
ples, Jésus-Christ  nous    ait    donné  heu  de 
douter.  »  Eutychius  ajouta,  que  le  corps  du 
Sauveur  était  palpable,  quand  il  le  montra 
à  ses  disciples;  mais  qu'il  devint  plus  subtil, 
après  qu'il  eut  confirmé  leur  foi.  A  cela  saint 
Grégoire   répondit  que,    suivant  l'Apôtre,    nt,n.v<,% 
Jésus-Christ  ressuscité  ne  meurt  plus  ;  d'où  il 
inféra  qu'il  ne  lui  est  arrivé  aucun  change- 
ment après  sa  résurrection.  Eutychius  ob-       ilw.xv, 
jecta  encore  qu'il  est  dit,  que  la  chair  et  le  '''"' 
sang  ne  posséderont  point  le  royaume  et  Dieu. 
La  réponse  de  saint  Grégoire  fut,  que  la 
chair  et  le  sang  se  prennent  dans  l'Écriture 


'  Quomodo  non  sunt  pênes  vos  canones  Sardicen- 
ses,  quando  inter  quinquagiiita  titulos  quitus 
Concordia  canonum  apud  vos  texitur,  ipsi  quo- 
que  reperiantur  ?  Nicolaus  1,  Epist.  ad  Photium. 

«  Nomocanou ,  quo  in  quinquagiiita  titulos 
leges  el  canones  redegit  el  reliqua  quœ  Justiniani 
Novellas,  quœ  exokverunl,  ut  quœ  in   imperio 


non  receplœ  sunt,  el  alias  quasdam  leges  ex  Di- 
gestis  ac  Codice  continent.  Balsam.  in  primum 
Can.  Concil.  in  Trullo.  [Voyez  sur  Jean  le  Scho- 
lastique l'addition  à  la  fin  de  ce  XI'  volume.] 

3  Pliùt.  Cod.  75,  pag.  163. 

'•  Gregùr.,  lib.  XIV,  Moral,  in  Job,  cap.  xxis, 


356 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


en  deux  manières:  ou  pour  la  nature  humaine 
en  elle-même;  ou  pour  la  corruption  du  pé- 
ché. Après  avoir  apporté  des  preuves  de 
cette  distinction,  il  conclut  que,  dans  la  uloire 
céleste,  la  chair  resterait,  mais  délivrée  des 
infirmités  de  cette  vie.  Eutj'chius  s'étant 
obstiné  dans  son  opinion,  saint  Grégoire 
rompit  tout  commerce  avec  lui.  L'empereur 
Tibère,  qui  avait  succédé  à  Justin  en  578, 
voulut  les  entendre  l'un  et  l'autre  sur  la  mê- 
me matière  ;  et  après  avoir  pesé  leurs  rai- 
sons, il  délibéra  '  de  faire  brûler  le  livre 
d'Eutj-chius.  Au  sortir  de  la  conférence,  tous 
deux  tombèrent  malades.  Saint  Grégoire  re- 
cou\Ta  la  santé  ;  mais  Eutychius  mourut 
quelque  telnps  après,  un  jour  de  dimanche, 
5  avril  582.  Ainsi  ce  fut  en  cette  amiée  que 
se  tint  la  conférence.  Quelques-uns  de  ses 
amis,  qui  étaient  allés  le  visiter,  rapportèrent' 
à  saint  Grégoire,  que  quelques  moments  avant 
sa  mort,  il  disait,  prenant  en  leur  présence  la 
peau  de  sa  main  :  Je  confesse  gue  nous  ressus- 
cilerons  tous  en  cette  chair  :  cet  aveu  fut  cause 
que  saint  Grégoire  ne  poursuivit  plus  l'er- 
reur dans  laquelle  Eutychius  avait  été  :  d'au- 


tant plus  qu'elle  n'avait  eu  que  peu  de  secta- 
teurs. Il  ne  nous  reste  de  ce  patriarche  '  que 
sa  lettre  au  pape  Vigile,  où,  après  avoirdécla- 
ré  qu'il  recevait  les  quatre  conciles  généraux 
et  les  lettres  des  Papes,  nommément  celles 
de  saint  Léon,  il  l'invitait  à  venir  présider 
au  concile  assemblé  pour  l'examen  et  la  dé- 
cision de  la  cause  des  Trais-Chapitres.  [Cette 
lettre  est  reproduite  au  tome  LXXXVl  de  la 
Patrologie  grecque,  col.  2501-2406,  d'après 
Mansi.]  Le  prêtre  Eustratius  fait  mention  ' 
d'un  discours  d'Eulychius  sur  la  manière 
dont  les  natures  raisonnables  sont  dans  un 
lieu,  et  il  en  rapporte  un  fragment.  Nous  ne 
savons  rien  autre  chose  de  son  livre  de  la  Ré- 
surrection des  morts,  que  ce  que  nous  venons 
d'en  rapporter  d'après  saint  Grégoire-le- 
Grand.  [La  Vie  de  saint  Eutychius,  par  Eustra- 
tius, est  reproduite  au  tome  LXXXVl  de  la 
Patrologie  grecque,  col.  2273-2.390.  Elle  est 
suivie  de  son  discours  sur  la  Pùque  et  sur 
l'Eucharistie  dont  nous  avons  parlé  plus 
haut,  et  est  précédée  d'une  notice  tirée  de 
Fabricius,  et  d'une  autre  tirée  des  Bollan- 
distes.] 


CHAPITRE    XLI. 
Grégoire  [593j  et  saint  Anastase  [598],  patriarches  d'Antioche. 

[Écrivains  grecs.] 


•  bbé  du  nioDl 
bina,  [tui*  [)a- 
trirrcte  d'AD- 
Un«be. 

E«if  r.  lit.  V 
UisL,  up.  VI. 


^.  Anastase  patriarche  d'Antioche  s'étant 
rendu  odieux  à  l'empereur  Justin,  autant 
pour  lui  avoir  refusé  de  l'argent  quand  il  lui 
en  avait  demandé,  que  pour  l'avoir  traité  de 
peste  du  genre  humain,  fut  déposé  de  l'é- 
piscopat  et  chassé  d'Antioche.  Ce  prince  le 
fit  remplacer  par  Grégoire,  qu'il  lira  à  cet 
effet  d'un  monastère  du  mont  Sin.i,  dont  il 
lui  avait  déjà  donné  le  gouvernement.  Gré- 
goire avait  pratiqué  la  vie  monastique  dès  sa 
jeunesse  dans  le  monastère  des  Byzantins, 
aux  environs  de  Jérusalem  ;  et  il  s'y  était  tel- 
lement distingué,  qu'il  en  avait  été  élu  supé- 
rieur, ayant  à  peine  de  la  barbe.  Il  fut  chargé 
depuis  de  gouverner  le  monastère  de  Pharan, 
d'où  Justin  le  lit  [lasserà  celui  du  monlSina. 
Pendant  qu'il  en  fut  abbé,  il  se  trouva  exposé 
à  de  grands  périls,  jusqu'à  souteuir  un  siège 

'  Gri-g.  Mil.  .\IV  Moral,  in  Jnh.,  coji.  xxrx. 
'  Greg.  ibid. 


de  la  part  des  Arabes  du  désert  ;  mais  il  sut 
si  bien  se  défendre,  qu'il  procura  à  son  mo- 
nastère une  paix  solide.  11  était  homme 
de  beaucoup  d'esprit,  d'une  grande  pénétra- 
tion, ferme,  courageux,  et  d'une  industrie 
merveilleuse  ;  ce  qui  le  faisait  réussir  eu  tou- 
tes ses enlreprises.  Ses  lib(''ialilés  étaient  si 
grandes,  que  toutes  les  fois  qu'il  paraissait 
eu  public,  il  avait  autour  de  lui  une  foule  de 
monde,  outre  les  personnes  qui  le  suivaient 
ordinairement.  Le  peuple,  faisant  plus  de  cas 
de  lui  que  de  tous  les  princes,  courait  pour  le 
vuirct  pour  l'entendre  parler  :  car  il  avait  tout 
ce  qui  était  nécessaire  pour  se  taire  aimer  et 
estimer  des  hommes  :  un  extérieur  agiéable, 
une  ailmirable  facilité  de  parler,  une  grande 
vivacité  d'esprit.  Quoique  d'un  naturel  ar- 
dent et  un  peu  porté  à  la  colère,  il  ne  lais- 


I 


'  1\ V  Concil. ,  pnR.  338 

*  liuslrat.  tmii    '*"■■  "-'^' 


l. ,  pnR.  338. 

.WVII  Dibl.  Vet.  Pair.,  pag.  372. 


4 


CHAPITRE  XI, I. 


[VI"  SIÈCLE.] 

sait  pas  d'avoir  boaucoup  de  iloiucur  cl  de 
modestie:  s'il  laissait  paiailro  quclciue  ('mo- 
tion, il  l'apaisail  aussitôt.  Il  oubliait  aisé- 
ment les  injures,  avait  une  grande  compas- 
sion pour  les  pécheurs,  et  le  don  des  larmes. 
La  pr(!niièro  année  de  son  pali'iarcliali  les 
hahitants  de  la  grande  Arménie,  ayant  se- 
coué le  joug  des  Perses  qui  les  maltraitaient 
au  sujet  de  la  religion  chrétienne,  députèrent 
à  l'cniperenr  .lusliu,  le  suppliant  de  les  rece- 
voir pour  sujets,  afin  qu'ils  pussent  servir 
Dieu  avec  plus  de  liberté.  Justin  les  reçut,  et 
traita  avec  eux.  Chosioëss'en  plaignit;  l'Eiu- 
poreur  ré;>ondit  qu'il  ne  pouvait  abamlonncr 
des  chrétiens  qui  avaient  recours  à  des  chré- 
tiens. La  guerre  s'alluma  entre  ces  deux 
princes.  Les  Perses  ravagèrent  les  terres  des 
Homains,  et  s'avancèrent  jusqu'à  Antiochc 
qui  fut  abandonnée  de  presque  tous  les  ha- 
bitants; le  patriarche  s'enfuit,  et  l'Empereur 
fut  tellement  consterné  de  tous  ces  événe- 
ments, qu'il  en  perdit  l'esprit  :  ceci  se  pas- 
sait vers  l'an  57:2.  Tibère  son  successeur  ré- 
tablit les  affaires  de  l'Empire  :  les  Perses  fu- 
rent vaincus, et  Cbosroës,  contraint  de  fuir  de- 
vant les  armées  romaines,  en  mourut  de  cha- 
K^g.iiKvi  m-in  en  589.  Grégoire,  accusé  sur  divers 
chefs  par  Astérius  comte  d'Orient,  se  justifia 
si  bien  qu'il  fut  renvoyé  absous.  Ce  comte 
périt  dans  un  tremblement  de  terre  arrivé  à 
Antioche  la  même  année  ;  mais  Grégoire 
s'en  sauva.  Quelque  temps  après,  l'empe- 
reur Maurice  le  chargea  de  ramener  au  de- 
voir l'armée  d'Orient  qui  s'était  révoltée.  On 
savait  l'autorité  qu'il  s'était  acquise  sur  les 
soldats  en  donnant  de  l'argent  aux  uns,  des 
habits  et  des  vivres  aux  autres,  lorsqu'ils 
avaient  été  enrôlés  et  qu'ils  avaient  passé  sur 
ses  terres.  Il  assembla  donc  les  principaux  de 
l'armée  à  Litarbe,  à  quinze  lieues  d'Antioche, 
et,  quoique  souffrant  d'une  indisposition  qui 
ne  lui  permettait  pas  de  se  lever  de  son  lit,  il 
les  harangua  avec  tant  de  force,  en  accompa- 
gnant son  discours  de  larmes,  qu'il  les  chan- 
gea en  un  moment. 
Son diswois       2.  «  Romains  autant  d'eflet  que  de  nom, 

aux        soldais     ,  i-i    •!      •)  •  •         j    • 

rom»in«.         leur  dit-u,  i  avais  cru  que  vous  viendriez  me 
E>-.e.  iib.vi  ■>  '      .  1.',   .       .        . 

iiiM  ,-ap.  III.   trouver  pour  me  communiquer  1  état  présent 

de  vos  affaires,  et  pour  prendre  avec  moi 
une  résolution  conforme  'i  l'affeclion  que  j'ai 
pour  vous,  et  dont  je  vous  ai  donné  des  as- 
surances dès  le  temps  que  j'apaisai  vos 
divisions,  et  que  je  prévins  les  mauvaises 
suites  qu'elles  pouvaient  avoir,  en  vous  en- 
voyant des  vivres.  Mais,  si  la  Providence  di- 


GIIEGOIIIK  ET  ANASTASE. 


357 


ville  lie  Ta  pas  |K'rmis,  c'est  peut-être  autant 
pour  faire  éclater  le  courage  des  Romains 
d;iiis  la  défaite  des  Perses,  que  pour  faire 
connaître  l'ardeur  du  zèle  dont  vous  brûlez 
pour  le  service  di;  l'Emiiire,  en  montrant  que 
la  colère  ou  la  haine  ipie  vous  avez  conçue 
contre  vos  généraux,  n'empêche  pas  que  vous 
ne  préfériez  le  bien  de  l'ICtat  <i  toute  autre 
considération.  Voyons  donc  maintenant  ce 
qu'il  y  a  à  faire.  L'Empereur  vous  offre  d'ou- 
blier le  passé,  et  regarde  le  zèle  et  le  cou- 
rage que  vous  avez  fait  paraître  dans  le  com- 
bat, comme  des  marques  certaines  d'un  re- 
gret sincère  de  votre  faute.  Il  vous  assure  de 
l'amnistie  et  des  eflets  de  sa  clémence,  en 
disant  que  s'il  a  plu  à  Dieu  d'accorder  la  vic- 
toire à  l'affection  que  vous  avez  eue  pour  le 
bien  de  l'Empire,  il  ne  peut  se  dispenser  de 
suivre  son  jugement.  Le  cteur  du  roi  est  dans 
la  main  de  Dieu;  il  le  tourne  comme  il  lui 
plaît.  Suivez  donc  mon  avis,  et  ne  laissez  pas 
échapper  l'occasion  qui  se  présente  :  elle  ne 
revient  plus  quand  elle  est  une  fois  partie, 
comme  si  elle  avait  dessein  de  se  venger,  par 
ce  moyeu,  du  mépris  qu'on  a  fait  d'elle. 
Imitez  l'obéissance  de  vos  ancêtres,  aussi 
bien  que  leur  valeur,  afin  qu'on  ne  puisse 
vous  accuser  d'avoir  dégénéré  d'aucune  de 
leurs  vertus.  C'est  par  cette  obéissance  et  par 
cette  valeur,  qu'ils  ont  réduit  l'univers  sous 
la  puissance  des  consuls  et  des  empereurs. 
Maulius  Torquatus  couronna  la  valeur  de 
son  fils,  et  punit  sa  désobéissance  :  car,  pour 
achever  heureusement  les  grandes  entrepri- 
ses, il  faut  que  la  conduite  des  chefs  soit  sui- 
vie de  la  soumission  des  soldats  :  sans  cet 
heureux  assemblage,  on  ne  saurait  jamais 
rien  exécuter  d'extraordinaire.  Croyez-moi  : 
sans  différer,  suivez  les  avis  d'un  évêcpie,  qui 
est  plus  propre  que  personne  à  ménager  la 
réconcihation  de  l'empereur  et  de  l'armée. 
Faites  voir  par  votre  promptitude  à  déférer 
à  mes  avis,  que  vous  n'avez  point  agi  par  un 
esprit  de  révolte,  mais  par  un  juste  ressen- 
timent des  mauvais  traitements  que  vous 
aviez  reçus.  Si  vous  refusez  de  revenir,  j'au- 
rai du  moins  satisfait  à  l'inclination  que  j'ai 
pour  vous  et  à  l'aftectien  qui  m'attache  aux 
intérêts  de  l'Empire;  mais  c'est  à  vous  à  con- 
sidérer où  se  terminent  ordinairement  les 
entreprises  des  rebelles  et  des  usurpateurs 
injustes  de  la  domination  légitime.  Comment 
sortirez-vousdecetembarras?  Il  n'est  paspos- 
sible  que  vous  demeuriez  unis.  Vous  ne  sau- 
riez avou-  de  vivres,  ni  jouir  des  autres  com- 


358 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


nioditës  que  la  mer  procure  à  la  terre,  sans 
prendre  les  armes  contre  les  chrétiens,  et 
sans  vous  porter  à  d'horribles  excès.  Quelles 
en  seront  les  suites?  Si  vous  vous  dispersez, 
la  justice  de  Dieu  vous  poursuivra  en  tous 
lieux.  Accordons-nous,  et  considérons  ce  qui 
est  plus  avantageux,  et  pour  l'État,  et  pour 
nous;  et  que  la  circonstance  de  ce  temps, 
consacré  à  la  mémoire  de  la  passion  et  de  la 
résurrection  du  Sauveur,  serve  à  notre  ré- 
conciliation. » 

Après  que  Grégoire  eut  parlé  de  la  sorte, 
les  soldats,  émus  comme  si  Dieu  les  avait 
touchés,  demandèrent  à  sortir  pour  délibérer 
ensemble  sur  ce  qu'ils  avaient  à  faire  ;  puis 
ils  vinrent  dire  à  l'évêque  qu'ils  se  remettaient 
entre  ses  mains.  II  leur  proposa  de  deman- 
der Philippique  pour  général,  suivant  l'in- 
tention de  l'Empereur;  mais  ils  répondirent 
qu'ils  s'étaient  engagés  par  un  serment  so- 
lennel à  ne  le  reconnaître  jamais.  Alors  Gré- 
goire leur  dit  sans  hésiter;  «  Je  suis  évèque 
parla  miséricorde  de  Dieu:  j'ai  le  pouvoirde 
lier  et  de  délier  sur  la  terre  et  au  ciel  ;  »  et 
il  leur  rapporta  les  paroles  par  lesquelles  le 
Sauveur  conféra  autrefois  ce  pouvoir  à  ses 
apôtres,  voulant  leur  faire  entendre  qu'il 
pouvait  les  absoudre  de  leur  serment.  Les 
soldats  y  consentirent.  Il  fit  des  prières  pour 
les  réconcilier  à  Dieu  ',  puis  il  leur  donna  le 
corps  de  notre  Seigneur;  et  ayant  fait  éten- 
dre sur  l'herbe  des  nattes  où  ils  s'assirent,  il 
les  traita  tous  à  souper,  quoiqu'ils  fussent  au 
nombre  de  deux  mille.  C'était  le  lundi  de  la 
Semaine-Sainte  ;  et  il  s'en  retourna  le  lende- 
main, après  être  convenu  avec  eux,  qu'ils  s'as- 
sembleraient dans  le  lieu  qui  leur  paraîtrait 
convenaljle.  Ils  vinrent  eux-mêmes  à  Antio- 
che,  où  l'évêque  avait  fait  ve  lir  l'hilipi  i  juc. 
Les  soldats  se  mirent  h  genoux  devant  ce  gé- 
néral, prenant  pour  intercesseurs  ceux  qui 
venaient  de  recevoir  le  baptême.  Ensuite  ils 
marchèrent  sous  sa  conduite  contre  les  Per- 


Aatrci 
coan. 


ses,  et  l'Empereur  voulut  que  Grégoire  les 
accompagnât.  Nicéphore  a  rapporté  '  ce  dis- 
cours de  Grégoire  d'après  Évagre,  mais  en 
y  changeant  les  termes.  [lise  trouve  dans  le 
tomeLXXXVllI  de  la  Patrologie  grecque,  col. 
1883-1880,  d'après  Galland.) 

3.  Nous  avons  un  autre  discours  du  même  Di««»ir.wr 
évêque,  sur  la  sépulture  de  Jésus-Christ,  et  «™?ÏÏkmt'" 
sur  les  femmes  qui  aclietorent  des  parfums 
pour  embaumer  son  corps.  Il  le  prononça 
dans  le  cimetière  qui  était  hors  de  la  ville 
d'Antioche.  Ce  n'est  presque  qu'un  tissu  des 
paroles  de  l'Évangile,  qu'il  paraphrase  en  y 
mêlant  de  courtes  explications.  Il  marque  ea 
un  endroit  les  cérémonies'  qui  se  prati- 
quaient au  baptême  ,  l'onction  sainte  et  la 
communion  du  corps  et  du  sang  de  Jésus- 
Christ  ;  en  un  autre,  que  la  divinité,  depuis 
son  union  '  avec  le  corps  et  l'âme  de  l'hom- 
me, ne  les  a  jamais  abandonnés,  pas  même 
le  corps  lorsqu'il  était  dans  le  tombeau,  où 
elle  le  garantit  delà  cori-uplion.  Ce  discours 
nous  a  été  donné  par  le  Père  Combefis  '  [et 
par  Galland,  t.  XII  de  la  Bibliothèque  des 
Pères.] 

[Le  cardinal  Mai  en  a  publié  un  sur  le  bap- 
tême de  ce  saint,  [.  Il  Bihlioth.  nova  Patrum, 
p.  5.53  et  suiv.  Mais  il  n'a  pu  découvrir  qu'une 
ancienne  version  de  ce  discours,  œuvre,  à  ce 
qu'il  croit,  d'Anastase  le  Bibliothécaire.  Il  a 
été  plus  heureux  pour  un  autre  seimon  sur 
les  paroles  :  Celui-ci  est  mon  fils  bien-aimé, 
en  qui  j'ai  mis  mes  complaisances.  Il  l'avait  dé- 
jà donné  en  grec  au  tome  X  des  Classiciauc- 
tores,  p.  560-570,  et  il  l'a  reproduit  en  grec 
et  en  latin  dans  la  Biblioth.  nova,  pag.  5fiO- 
570,  après  le  sermon  sur  le  baptême,  dont 
il  est  la  continuation  :  car  on  y  lit  au  com- 
mencement, que  l'orateur  avait  prêché  le  di- 
manche précédent  sur  le  baptême  de  Jésus- 
Christ,  et  qu'il  n'avait  pas  eu  le  temps  de 
finir;  mais  qu'il  allait  traiter  cette  même  ma- 
tière. Jeau  le  Moine,  qui  vécut  du  temps  do 


'  Cwn  autem  etiam  illi  in  hac  re  acquiescèrent 
supplicationibus  ac  precibus,  Detim  placavit,  et 
immaculatum  illius  corpus  porrigens,  eral  enim 
renerandissima  dies  dominica  Passioni  vicina, 
eunclos,  circiler  duo  millia,  ad  percipi  ndnm  do- 
minicam  cœnam  ohiter  in  grnmine  acrumbere  fe- 
cil,  ac  deinde  sequenti  die  reiersus  est.  Evagr.  lib. 
VI  Hist.,  cap.  XI  r. 

'  Niccph.  lib.  ,\VIII  Hist.,  oap.  .w. 

'  Ipue  regeneralns  Spirilus  Sancliunguenlo  un- 
gil.  Ipse  cnruin  nutricius  efjicilur  et  cibus.  Oreg. 
Hom.  inmulieres  unguent.:  toni.  I  Àucluarii Com- 


befis, pag.  846. 

*  Cum  sic  ergo  corpus  illius  a  morte  teneretur 
quemndmodum  voluit  corporis  Dominus,  aninui- 
quc  Salvatoris,  evangclizatura  animabus  carum 
redrmptinnem,  ocius  ahiissrl,  essrtque  ejus  Dei- 
tas  ulriquecnmes  inu.fquam  enin>  aliquandn  deitas 
post  unitmein  ahhumanilate  discessit],  qui»  eterat 
in  cœlis  adernique  impalibiliter  scpulcro,  suum 
ipsius  iiuinmenlnm  a  corruplione  serrans  in- 
nn.rium.  Ibid.,  pag.  329. 

'•  nouib.,  tom.  I  Àuctuar.,  p«g.  821,  Paris,  an. 
1(118.  Dibliotli.  vet.  Pat.  tome  .\II,  pag.  823  et  »e<i. 


[vr  SIÈCLE.] 

l'ompercnr  Ht'raclius,  cUe  un  passasse  du  der- 
nier discours'.  Mais  Loquicn  se  liompe  en 
l'altribunnt  ;\  saint  Griigoirc  de  Nyssc.  On 
pputy  roiuarqucr  une  tW's-belle  doctrine  sur 
la  divinilt-  et  j'hiinianilt'-  de  Jésus-Cbrist.  On 
y  trouve  aussi  parlaitomcnt  enseii;nde  la  pri'- 
sence  réelle  dans  l'Eucharistie  '.] 
Gr*çoiie«si  4. En  S93,  OrécTGire  fut  envoyé  h  Cliosroës, 
rno  m  53J.  roi  des  l'erses  .   qui  1  admira  ',  et  pour  la 

Si  mon.  *  ^ 

beauté  des  présents  qu'il  en  reçut,   et  pour 
la  sagesse   de   ses   conseils.   Ce  prince,  de 
son  côté,  lui  fit  présent  d'une  croix  enri- 
cbie  d'or  et  de  pierreries,  que  rinipéi'atrice 
Tbcodora,  l'eninie  do  Justinien,  avait  autre- 
fois donnée  à  l'église  de  saint   Serge  mar- 
tyr, et  que  Chosroës,  aïeul  de  celui-ci,  avait 
depuis  enlevée  avec  quantité  d'autres  tré- 
sors. Il  lui   donna  encore  une   autre  croix, 
avec    une    inscription  grecque  qui  portait, 
qu'ayant  obtenu  de  saint  Serge  (dont  il  avait 
ouï  dire  qu'il  accordait  tout  ce  qu'on  lui  de- 
mandait) la  défaite  de  Zadespras  son  enne- 
mi, il  avait  en  reconnaissance  fait  faire  cette 
croix  pour  être  envoyée  à  l'église  du  saint 
martyr.  Grégoire  ayant  reçu  ces  deux  croix, 
les  mit  en  ellet  dans  cette  église.  Chosroës  y 
envoya  depuis  d'autres  présents,  entr'autres 
une  patène  et  un  calice  à  l'usage  des  saints 
mystères,  une  croix  pour  être  dressée  sur  la 
sainte  table,  et  un  encensoir;  le  tout  d'or; 
avec  une  inscription  sur  la  patène,  où  il  di- 
sait, qu'encore  que  les  lois  du  paganisme  lui 
défendissent  d'épouser  une   chrétienne  ,   il 
avait  toutefois  épousé  Sira  qui  l'était,  dans 
l'espérance  que  la  dévotion  qu'il  avait  en- 
vers saint  Serge  lui  servirait  d'excuse  ;  qu'il 
avait  prié  le  saint  martyr  d'obtenir  à  Sira 
un  enfant ,  avec  promesse  ,  en  cas  qu'elle 
conçût,  de  donner  à  l'église  du  saint  la  croix 
que  cette  princesse  portait  au  cou  ;  qu'ayant 
su  qu'elle  était  enceinte,  il  avait,  au  lieu  de 
cette  croix,  qui  ne  valait  que  quatre  mille 
trois  cents  slatères,  envoyé  cinq  mille  statè- 
res,  avec  les  autres  présents  dont  nous  ve- 
nons de  parler.  Évagre  ,  qui  rapporte  tous 
ces  faits,  remarque  que  Dieu  tira  de  bons 

•  0pp.  S.  Joannis  Damasceui,  tom.  Il,  pag.  113, 
édit.  de  Lequien. 

*  Si  dixi'rit  Hoc  est  corpus  meuin  quod  pro  vo- 
bis  fraugitur  in  remissionem  peccatorum,  spéciale 
corpus  ab  ipso  vobis  ostensum,  spéciale  quod  ro- 
bis  sumptiim  esl  ejus  proprium  et  pro  vobis  con- 
tritiun.  Si  dixerit  :  Hio  est  sauguis  meus,  de  ejus 
qui  cobiscum  loquitur  sanguine  cugitate,  non  de 
alio  prœter  ipsum.  Patrol.  grœc,  tom.  L.KXXVlll, 
col.  1879.  (L'éditeur.) 


Cn.\PITRE  XLI.  —  r.RÉGOIRE  ET  ANASTASE. 


3o9 

discours  de  la  ])ouche  d'un  prince  païen, 
connue  autrefois  il  ])rédit  l'avenir  parla  bou- 
che de  Ualaam,  qui  était  un  faux  prophète. 
Grégoire,  en  ayant  obtenu  permission  de 
l'Empereur,  alla  visiter  les  solitudes  de  la 
frontière,  où  les  erreurs  de  Sévère  avaient 
fait  de  grands  progrès.  Il  convertit  des 
bourgs  entiers,  et  ramena  beaucoup  de  mo- 
nastères ;\  l'unité  de  la  foi.  Il  accourut  de 
là  '  pour  assister  .'i  la  mort  de  saint  Siméon- 
Stylite  le  Jeune;  mais  il  arriva  trop  tard.  Il 
mourut  lui-même  quelque  temps  après,  de 
la  goutte  dont  il  était  fort  tourmenté.  On  met 
sa  mort  en  59.3.  Évagre  finit  son  histoire  en 
disant  qu'il  avait  recueilli  en  un  volume 
quantité  de  lettres,  de  relations,  d'ordon- 
nances, de  harangues  et  de  disputes,  et  que 
les  relations  étaient  sous  le  nom  de  Grégoire, 
évcque  d'Antioche. 
5.  Quoiqu'Anastase  '  eût  été  chassé  d'An-     s.  >oa,ia.,, 

pal  ri  arc  ha 

tioche  par  lerapereur  Justin,  et  peut-être  dAmio-ije. 
encore  par  les  intrigues  de  Jean,  patriarche 
d'Alexandrie,  et  de  Jean  de  Constantinople, 
son  consécrateur,  qu'il  avait  taxés  dans  sa 
réponse  à  la  lettre  synodique  de  Jean  d'A- 
lexandrie, il  ne  laissait  pas  d'être  reconnu 
pour  patriarche  d'Antioche  par  l'Eglise  ro- 
maine. Saint  Grégoire-le-Grand  lui  envoya  ', 
comme  à  Grégoire,  la  lettre  synodale  qu'il 
écrivit  du  concile  qu'il  tint  à  Rome  en  591. 
11  écrivit  même  à  l'Empereur  pour  obtenir 
que,  si  on  ne  lui  permettait  pas  de  retourner 
à  son  siège,  on  l'envoyât  du  moins  à  Rome, 
avec  l'usage  du  pallium,  pour  célébrer  la 
messe  à  Saint-Pierre  avec  le  Pape.  Mais  Gré- 
goire étant  mort,  Anastase  rentra  dans  son 
église ,  vingt-trois  ans  après  qu'il  en  avait  été 
chassé,  c'est-à-dire  en  593.  Il  la  gouverna 
jusque  vers  l'an  598,  auquel  il  mourut  après 
avoir  occupé  le  siège  patriarcal  d'Antioche 
pendant  seize  ans  à  deux  reprises  :  premiè- 
rement onze  ans,  à  compter  depuis  561  jus- 
qu'à 572  qu'il  fut  chassé;  puis  cinq  ans,  de- 
puis son  rétablissement  en  593.  Saint  Gré- 
goire lui  écrivit  plusieurs  fois,  tant  pour  le 
consoler  dans  ses  adversités,  que  pour  le  con- 

3  Evagr.  lib.  VI  Hist.,  cap.  xviii  et  xxi,  et  Theoph. 
lib.  V  Hist.,  cap.  siv. 

'  Evagr.,  ibid.,  cap.  xxn-xxiv. 

'  Anastase  1  ou  l'Ancien  a  toujours  eu  le  titre  et 
les  honneurs  réservés  aux  saints,  comme  l'ont  dé- 
montré les  Bollaudistes.  Voyez,  tome  LXXXIX  de 
la  Patrologie  grecque,  col.  1299-1310.  On  a  eu  tort 
de  le  confondre  avec  Anastase  le  Siiiaïte,  qui  a  vécu 
plus  tard.  (L'édileur.) 

«  Greg.  lib.  IX  Epist.  21  et  27. 


360 


HISTOIRE  CÉXÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Se»  écriu. 
Di^c»<lI*  ■-■■r 
l'AnoOnrU- 
lion  et  I* 
TraofSeurt- 
tloD,  tnm-  I 
A  u  cl  ua  r)  t 
CoiDtieSK,;  ag. 
8.0. 


graluler  sur  son  retour  ;ï  Autioclie.  U  en 
parle  toujours  avec  resi)ect,  en  louant  sa 
charité  et  en  se  recommamlant  à  ses  prières. 
Il  marque  clairement  '  dans  ses  lettres,  qu'il 
en  avait  reçu  d'Anastasc,  et  que  ce  patriar- 
che avait  eu  le  désir  d'aller  à  Rome. 

6.  Anastase  était  trè?-hahile  dans  la  scien- 
ce des  divines  Écritures,  et  très-versé  dans 
la  langue  latine.  Ce  fut  lui  que  l'empereur 
Maurice  '  chargea  de  traduire  en  grec  le 
Pastoral  de  saint  Grégoire  pour  l'usage  des 
églises  d'Orient.  Dans  le  second  concile  de 
Nicée,  en  787,  on  lut  un  endroit  de  la  lettre 
d' Anastase  à  un  certain  scholastique  ou  avo- 
cat, dans  laquelle  il  distinguait  ^  l'adoration 
que  nou^  rendons  à  Dieu,  d'avec  celle  que 
nous  rendons  aux  anges  et  aux  hommes,  en 
ce  que  nous  ne  servons  que  Dieu  seul.  On  y 
lut  aussi  un  endroit  d'un  des  sermons  sur  le 
sabhat,  où,  parlant  du  culte  des  images,  il  di- 
sait '  qu'en  l'absence  de  l'Empereur  nous 
adorons  son  image  au  lieu  de  lui  ;  mais  qu'en 
sa  présence,  l'adoration  de  son  image  est 
superllue.  Nous  avons  encore  trois  de  ses 
discours,  donnés  par  le  Père  Combefis ,  et 
avant  lui  par  Meursius,  mais  seulement  en 
grec  :  deux,  sur  l'Annonciation  de  la  Sainte- 
Vierge  ;  et  un,  sur  la  Transfiguration  du  Sau- 
veur. On  voit  dans  le  premier,  que  la  fête  de 
l'Annonciation  se  célébrait  le  23  mars,  le 
même  jour  que  le  premier  homme  avait  été 
créé  :  car  Anastase  croit  que  Dieu  a  com- 
mencé l'ouvrage  de  la  création  le  20  mars,  à 
l'équinoxe  du  printemps  ;  et  il  en  conclut 
qu'il  était  convenable  que  Dieu  se  fit  chair 
pour  réparer  l'homme,  le  même  jour  qu'il 
l'avait  créé.  Il  cite  la  quarante- troisième 
oraison  de  saint  Grégoii'C  de  Nazianze ,  à 
qui  il  dit  que  l'on  donnait  le  nom  de  Théo- 
logien. Dans  le  second  discours,  il  donne 
plusieurs  fois  le  titre  de  mère  de  Dieu  *  à  la 


Sainte-Vierge,  assurant  que  le  Fils  unique  de 
Dieu  par  nature  '  a  pris  dans  elle  une  chair 
consubstantielle  à  la  nôtre.  U  demande,  dans 
le  discours  sur  la  Transfiguration,  pourquoi 
Jésu.s-Christ  ne  prit  avec  lui  que  trois  apô- 
tres? (1  11  n'était  pas  juste,  répond  Anastase, 
que  Judas  fût  spectateur  de  si  grands  mys- 
tères, ni  qu'il  fut  seul  exclu  de  ce  spectacle, 
de  crainte  que,  voyant  qu'on  lui  préférait  les 
autres  apôtres,  il  n'en  prit  occasion  de  tra- 
hir son  Maître.  » 

7.  Steuartius  a  fait  imprimer  cinq  autres 
discours,  que  personne  ne  dispute  à  Anas-  Toa> 
tase,  patriarche  d'Antioche.  Ils  ont  depuis  ""• 
été  réimprimés,  par  les  soins  de  M.  Basnage, 
dans  le  premier  tome  des  anciennes  Leçons 
de  Canisius.  Ces  cinq  discours  ne  font  qu'un 
corps  dont  le  titre  général  est  :  Des  Dogmes 
de  In  vraie  foi.  Dans  le  premier,  qui  est  sur 
la  Trinité,  il  dit  qu'il  avait  déjà  beaucoup 
écrit  cl  parlé  dans  les  églises  sur  les  dogmes 
de  notre  religion,  et  que  s'étant  appliqué 
des  sa  plus  tendre  jeunesse  à  n'avoir  siu-  la 
foi  d'autres  sentiments  que  ceux  des  saints 
Pères,  il  était  sûr  de  ne  s'être  pas  égaré  sur 
ce  sujet  dans  ses  écrits,  ni  dans  ses  discours. 
Il  avait  donc  peine  à  traiter  de  nouveau  des 
matières  sur  lesquelles  il  s'était  souvent  ex- 
pliqué ;  mais  il  lui  fallut  obéir  à  ses  amis  qui 
le  pressèrent  de  leur  expliquer  les  dogmes 
principaux  de  la  foi.  Il  commence  par  le 
mystère  de  la  sainte  Trinité,  montrant,  par 
les  premières  paroles  de  l'Évangile  de  saint 
Jean,  que  le  Verbe  est  Dieu,  et  par  celles-ci 
de  Jésus -Christ,  rapportées  par  le  même 
évangéliste  :  Si  je  ne  fais  pas  les  œuvres  de  j„ 
mon  Père,  ne  me  croyez  pas  ;  mais  si/e  les  fais, 
quand  vous  ne  voudriez  pas  me  croire,  croyez 
à  7nps  œuvres,  que  le  Fils  de  Dieu  est  con- 
substautiel  à  son  Père,  n'y  ayant  point'  de 
plus  forte  preuve  de  la  cousubstantialilé  du 


'  Indicat  mihi  suaiissima  sanetilas  vestrn, 
quodmecum,  si  fieriposset,sine  charla  et  calamo 
loqui  voluissel,  et  dolel  quod  nohis  Orientis  pcne 
et  Occidenlis  spatium  interjacet.  Greg.  lib.  VII 
Epis  t.  3. 

«  Idem.  lib.  X  Epist.  22. 

'  Sancli  Annstasii  episrnpi  Thcopoleos  epislola 
ad  quemdam  scholnslicum,  per  quam  respundit  : 
Nevio  o/fendalur  adnrationis  signi/icativne.  Adn- 
ramus  enim  Iwmiues  et  snnctos  angelos  :  non  la- 
men  servimus  itlis  :  Diiinimiiii  ciiini,  inquit  Mni- 
ses,  Deum  tiinni  lulorabis  ft  illi  soli  service..  Apud 
Boit.,  (iil  (liiiii  21  nprilis,  pîif;.  8.'i3. 

*  Smicli  l'alris  nostri  Anastasii  ad  Simennem 
epitcopum  Bostrw sermo  deSabbalho:  sicutenim, 


dum  abest  imperator,  imago  ejus  pro  ipso  ado- 
ratur  ;  cum  vero  jam  primens  fuerit ,  superfluum 
est,  di'serlo  primitivo,  ador  are  imaginem.  Ibid. 

"  l'uctn  es  nxater  non  puri  haminis,  aut  alictt- 
jus  prophetœ,aut  Deum  in  se  hospitem  habenlis; 
sed  vera  .Mater  magni  Dci  ac  Salvaloris  nostri 
Jcsu  Clirisli.  Anasias.  Serm.  i  in  ,l>i/imi(.  lom.  1 
Auclnarii  Comliefis,  pa;,'.  8ti;<. 

*  lluminum  opifcr  factvs  est  homo.  malrem 
sihi  ex  nnliis  cnmpnraiis,  ipue  uiiicus  per  nnluram 
Pei  l'ilius  carnem  in  en  nnbis  consubslantiaUm 
as!<umens.  Ibid.,  >'t  tmii.  VI  Ilibl.  Pal.  conciotml. 
Ciimhcfis. 

'  Alisolnla  dcmnnsirntio  rsl,  et  qiiœ  su/Pcit 
el  refelli  non  potest,  consubstantialitalis  eadem 


[VI'  sifccij;.]  CHAPITHE  XT.l.  —  GIII^: 

l'(''ie  et  du  Fils,  que  l'identik'  de  Umii-  oik'- 
lalion  :  car  il  n'est  pas  dit  que  le  Fils  l'ail 
lies  œuvres  semblables  ;\  celles  du  Père,  mais 
qu'il  fait  les  mêmes.  Il  prouve  aussi  que  le 
Saint-Esprit  est  consubstantiel  au  Père  et  au 
Fils  ;  qu'il  est  appelé  Esprit ,  parce  qu'il 
procède  du  Père  ;  au  lieu  que  le  Verbe  est 
appelt-  Fih ,  parce  qu'il  est  engendré  du 
Père;  mais  que  la  dillerence  d'origine  n'em- 
portant point  une  différence  de  nature,  le  P^- 
re,  le  Fils  et  le  Saint-Esprit  sont  d'une  même 
substance,  trois  personnes  en  un  seul  Dieu. 
Il  donne  pour  exemple  l'iiomme,  qui  est  un 
dans  sa  nature,  et  qui  est  toutefois  infini  en 
nombre.  «  De  même,  dit-il,  que  le  Père  est 
lumière  et  vie,  le  Fils  et  le  Saint-Esprit  sont 
vie  et  lumière  ;  d'où  vient  que  l'Écriture  dit 
l'un  et  l'autre,  tantôt  de  toute  la  Trinité,  tan- 
4ôt  de  chaque  personne  en  particulier.  Les 
noms  de  Seigneur  et  d'Esprit  sont  aussi  com- 
muns aux  trois  personnes,  comme  il  l'est  au 
Fils  et  au  Saint-Esprit  d'être  envoyé. La  dif- 
férence des  noms  n'est  pas  une  preuve  de  la 
(lilférence  de  nature.  Comme  le  Père  n'est 
pas  Dieu  précisément  h  cause  qu'il  est  Père, 
on  ne  peut  contester  la  divinité  au  Fils  parce 
qu'il  n'est  pas  Père  ;  il  en  est  de  même  du 
Saint-Esprit.  Mais  le  Père  est  Dieu,  le  Fils  est 
Dieu,  le  Saint-Esprit  est  Dieu,  parce  qu'il 
est  éternel,  incréé,  immuable,  incorrupti- 
ble, auteur  de  la  vie  et  créateur  de  toutes 
choses.  La  Trinité  n'admet  point  d'inégalité. 
S'il  est  dit  dans  l'Écriture  que  le  Père  est 
plus  grand  que  le  Fils,  cela  doit  s'entendre 
à  raison  de  l'origine  que  le  Fils  tire  du  Père, 
et  non  par  rapport  à  la  substance  qui  est  la 
même  dans  le  Père  et  dans  le  Fils.  On  peut 
dire  aussi  que  le  Fils  en  tant  qu'homme  est 
moindre  que  son  Père,  mais  non  en  tant 
cpi'engendré  de  lui  avant  tous  les  siècles,  n 
Anastase  n'examine  point  comment  le  Verbe 
est  engendré,  ni  comment  le  Saint-Esprit 
procède;  il  dit  que  ce  sont  des  questions 
qu'on  ne  peut  approfondir  sans  danger. 


GOinE  ET  ANASTASE.  301 

S.  Le  dessein  du  second  discours  est  d'é- 
lablir  riiiiineiisiU-  de  Dieu,  k  qui  quel- 
ques-uns vmiiaicnl  donner  des  bornes,  jns- 
qu'iï  préteiulr(!  qu'il  n'était  point  dans  ce 
monde.  Anastase  leur  fait  ce  raisonucineut  : 
((  L'opération  en  Dieu  est  inséparai)le  de  sa 
substance.  Il  opère  dans  tout  le  monde,  puis- 
qu'il l'a  créé,  et  qu'il  le  conserve  à  chaque 
instant;  il  est  donc  subslantiellcment  dans 
le  monde  entier.  Être  borné,  poursuit-il,  c'est 
le  propre  des  créatures  corporelles.  Dieu 
n'est  pas  créé,  ni  corporel  ;  il  ne  peut  donc 
être  borné,  ou  limité  par  certaines  bornes. 
D'ailleurs  il  est  écrit  que  l'esprit  du  Seigneur 
remplit  toute  la  terre;  que  l'on  ne  peut  point 
se  sauver  de  devant  sa  face  ;  que,  soit  que 
l'on  monte  dans  le  ciel,  il  y  est  ;  soit  que  l'on 
descende  dans  l'enfer,  il  y  est  encore. Un  dira 
peut-être  qu'il  est  indécent  que  Dieu  soit 
daus  des  lieux  ou  dans  des  créatures,  pour 
lesquels  l'homme  même  a  de  l'éloignemeut. 
Mais  il  n'y  a  rien  de  créé  qui  ne  soit  l'ou- 
vrage de  Dieu;  et  comme  les  rayons  du  so- 
leil ne  contractent  aucune  tache  en  passant 
par  des  lieux  infectés,  il  en  est,  à  plus  forte 
raison,  de  même  de  Dieu.  » 

9.  Anastase  fait  envisager  la  chute  du  pre- 
mier homme, commela  cause  de  touslesmaux 
et  commeToccasion  de  l'incarnation  du  Fils  de 
Dieu,  qui  ne  voulant  point  laisser  périr  l'hom- 
me qu'il  avait  formé,  s'est  fait  homme  lui- 
même  pour  le  racheter.  C'est  ce  que  cet  évê- 
que  se  propose  d'établir  dans  son  troisième 
discours.  Il  trouve,  dans  l'union  de  l'àme  avec 
le  corps,  un  exemple  de  l'union  de  la  divi- 
nité avec  l'humanité  en  Jésus-Christ  :  union 
qui  s'est  faite  sans  mélange  ni  confusion  des 
deux  natures,  le  Verbe  s'étantuni  tout  entier 
à  toute  la  chair  qu'il  s'était  formée  de  celle 
delà  Vierge,  et  à  l'âme  raisonnable,  sans  le 
secours  des  causes  ordinaires  de  la  généra- 
tion, et  par  la  seule  vei'tu  du  Très-Haut;  en 
sorte  qti'il  nous  est  consubstantiel  selon  son 
humanité.  «  Car  ce  qu'il  y  a  de  plus^  admi- 


D«our»»ur 
rineireon*. 

crt)t.,        ^.B^'. 

417. 


Di.-cour>  'iir 
l'incarnslioa  , 
I>as.  KO. 


Patris  et  Filii  operatio.  Quœ  enim  videt  Patrem 
facientem,  facit  Filius  :  non  qualia  facit.  sed  qitœ 
facit.  Anastas.  Orat.  1  De  Trinit.,  pap.  439. 

'  Eamdem  igitur  subslantiam  diciinus  sanctœ 
Trinilatis.Trinitateni  dicimus  non  subslantiarum, 
sed  personarum  :  ununi  Deiim  profitemur  non 
nutnero,  sed  natura  sed  natura.  iVon  enim  quod 
est  omnino  unum  numéro,  omnino  etiam  est  unum 
natura...  Homo  unvs  est  quidem  natura:  in/ini- 
tus  aiUem  numéro.  Ibid.,  pag.  440. 

-  Boc  est  in  hoc  mysterio  admirabile,  quod 
utrumque  eorum,qu(.v  coierunt,  proprietatem  na- 


turnlem  servat,  perinde  ac  si  per  se  solum  exis- 
teret,  non  facta  alterius  cum  aUero  unione,  cum 
alioqui  una  sil  hypostasis.  Chiistus  igitur  est 
quod  ex  unione  harum  naturarum  existit,  non 
habiludo,  sed  idipsttm,  quod  ex  his  substantiis 
constat  :  immo  ipsœ  substantiœ,  et  non  divina 
absqtte  humana,  neque  rursus  bumana  absque 
divina,  sed  uiriusque  inseparahilis  unio:quam 
non  dicimus  faclam  ad  imilalionem  liquidorum, 
quw  inler  se  mixta  in  aliud  quid  mutantur,  sed 
ad  similitudinem  proposilam  animœ  et  corporis, 
ex  quibus  animal  ralionis particeps  homo  consti- 


302 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


rable  dans  ce  mystère,  dit-il,  c'est  que  les 
deux  nature?  qui  se  sont  unies,  gardent  cha- 
cune leurs  propriétés  naturelles,  comme  si 
elles  n'étaient  point  unies,  quoiqu'il  n'y  ait 
qu'une  seule  personne.  Jésus-Christ  est  ce 
composé  qui  résulte  de  l'union  des  deux  na- 
tures :  union  si  inséparable,  que  la  nature  di- 
vine ne  peut  être  sans  la  nature  humaine, 
ni  celle-ci  sans  la  nature  divine  :  union  qui 
ne  s'est  point  faite  h  l'imitation  des  liqueurs 
qui  se  mêlent  ensemble,  et  composent  par 
ce  mélange  une  nature  toute  difTérente  ;  mais 
en  la  manière  que  l'union  de  l'âme  raison- 
nable avec  le  corps  constitue  la  nature  de 
l'homme.  jQuoique  les  natures  unies  en  Jé- 
sus-Christ soient  différentes,  cela  étant  né- 
cessaire pour  la  manifestation  du  mystère, 
il  n'y  a  qu'une  personne,  qui  est  celle  du 
Verbe  :  c'est  toujours  le  même  Fils  de  Dieu, 
même  après  l'Incarnation.  Encore  donc  que 
la  nature  qui  a  pris  chair  soit  difl'érente  de 
la  nature  qui  a  été  prise  par  le  Verbe,  ces 
deux  natures  ne  diffèrent  point  quant  .'i  la 
personne,  qui  est  la  même  dans  deux  natures 
différentes.  Telle  est  la  doctrine  de  tous  les 
théologiens  et  de  tous  les  docteurs  de  l'K- 
glise  catholique;  ils  enseignent  que  c'est  le 
même  qui  est  Dieu  et  Homme.  Nousadorons  ' 
un  seul  et  même  Christ,  qui  étaitDieu  avant 
l'incarnation,  qui  est  demeuré  Dieu  après 
l'incarnation,  qui  s'est  uni  à  une  substance 
différente  pour  sauver  ce  qui  lui  était  con- 
substantiel  selon  la  chair,  à  laquelle  il  s'est 
uni.  C'est  pourquoi  nous  reconnaissons  en 
lui  '  deux  générations  diQ'érentes  :  il  est  en- 
gendré autrement  de  son  Père,  autrement  de 
sa  Mère;  mais  c'est  toujours  le  même,  quoique 
engendré  différemment  ;  car  la  différence 
des  substances  unie?  forme  des  générations 
différentes;  si  admirables  néanmoins  l'une  et 
l'autre,  que  le  langage  humain  ne  peut  bien 


les  exprimer,  ni  l'intelligence  humaine  les 
comprendre.  »  Anastase  réfute  ceux  qui  di- 
saient que  la  Trinité  s'est  incamée,  et  montre 
par  l'autorité  de  l'Écriture,  qu'il  n'y  a  que 
la  personne  du  Fils.  Il  dit  assez  clairement 
que  le  Saint-Esprit  ^  procède  du  Fils.  Sur  la 
fin  de  ce  discours,  il  annonce  le  quatrième, 
qui  traite  de  la  passion  du  Sauveur. 

10.  (I  La  passion  du  Sauveur,  dit  ,\nastase, 
avait  été  prédite  parles  prophètes  longtemps 
avant  qu'elle  arrivAt;  et  elle  était  nécessaire 
autant  pour  la  gloire  de  Jésus-Christ  que  pour 
le  salut  du  genre  humain.  D'où  vient  qu'a- 
près sa  résurrection,  il  disait  .1  ses  disciples  : 
Toute  puissance  m'a  été  donnée  dans  le  ciel  et 
sur  la  terre  :  paroles  qui  montrent,  dans  les 
circonstances  où  il  les  prononça,  que  sa  mort 
sur  la  croix  était  la  cause  de  la  gloire  dont 
il  jouissait  après  sa  résurrection.  Mais  s'il  a 
souffert,  ce  n'est  que  selon  son  humanité. 
C'est  toutefois  Dieu  '  qui  a  souffeit,  mais  la 
divinité  est  demeurée  impassible.  Les  dou- 
leui  s  '  étaient  les  douleurs  de  la  chair  ;  les  mi- 
racles appartenaient  à  la  divinité;  mais  la  chair 
en  tirait  sa  gloire,  parce  qu'elle  était  la  chair 
du  Verbe  de  Dieu ,  qui  s'attribuait  aussi  les 
soutfrancesde  lachairàiaquelleils'étaituni.»  i 

11.  Anastase  commence  son  cinquième     DiKomid 
discours  par  les  preuves  de  la  mort  de  Jésus-  uon.p.'j.Téî. 
Christ  rapportées  dans  l'Évangile,  où  nous  u,  «.  ' 
lisons  que  les  soldats  rompirent  les  jambes 

dps  deux  larrons,  mais  qu'étant  venus  k  Jé- 
sus, et  l'ayant  trouvé  déj;\  mort,  ils  ne  lui 
rompirent  pas  les  jambes  ;  que  Joseph  ayant 
demandé  son  corps  pour  l'ensevelir,  Pilate 
s'étonna  qu'il  fut  mort  sitôt;  et  que  les  prin- 
ces des  prêtres,  pour  s'assurer  du  sépulcre  où 
on  l'avait  mis,  en  scellèrent  la  pierre,  et  y 
mirent  des  gardes.  Il  remarque  que  tous  ces 
témoignages  de  la  mort  du  Sauveur  ont  été 
mis  par  écrit  par  un  eflet  de  la  Providence, 


Mattb.xxv 
6^. 


tuilur...  Elsi  enim  sunt  diversœ  nalurœ  ex  quibus 
unitus  est  ad  manifcstationein  mysterii,  una  ta- 
men  est  hypostasis  :  eadem  enim  proprietas  hy- 
postasis  mansit  Filio  Hiam  incarnalo.  Fitiusenim 
rursus  est  etiam  secundum  carnem.  Quare  nalii- 
ra  quidem  di/ferunt  a^sumens  et  assumpta,  hypos- 
tasi  vero  minime.  Sic  dicimus  esse  tinam  hypns- 
tasim  nalurn  differcnlium,  omnibus  Iheologis  et 
Ecclesiœ  doctnribus  approhanlihus,  qui  euirdem 
afprnuinl  esse  Deum  et  hnminem.  Orat.  3,  pa»;. 
4.52. 

•  Unum  et  eumdem  Christum  adoramus  qui 
erat  anle  incarnutionem  Deus,  et  mansit  Deus 
posl  incarnationem.  Il)i(!.,  pag.  45t. 

•  Vnfle  duos  generaliones  esse  credimus  :  aliter 


namque  ex  Pâtre  genilus  est,  et  aliter  ex  Matre. 

Ibid. 

'  Ipse  a  quo  Spirilus  Sanetus  procedit.  de  ««ip- 
so teslimonium  veritati  prœhel,  qui  sripsum  et 
quod  in  se  est  cognoscit.  Ipse  cuini,  inquil  Eian- 
gclisla,  scicbat  (luiil  cssel  in  tiouiine.  Pag.  4.'i7. 

'  /;(  est  quidiin  Deus  qui  palilur,  non  capienle 
pasfioncm  dirinitate.  (Irat.  l,  i)ag.  450. 

'  Erant  pnsston^'s  prœcipue  quidem  et  iniprimis 
carnis  :  quatenus  vero  eas  sihi  adnbuebal ,  erant 
ejus,  qui  carnem  nssumserat  :  miracula  vero  ini- 
primis eranl  Dei  itrbi  :  simul  aulvm  cum  hix 
cnro  glnrificabalur,  quia  scilicct  Verbi  Dei  eral. 
Ibid.,  iwij.  461. 


CHAPITRE  XI,I.  —  OnÉGOlRE  ET  ANASTASE. 


[Vl"  SIÈCLE.] 

afin  que  l'on  ne  pût  douter  do  sa  résurrec- 
rpction,  attesti5e  d'ailleurs  par  l'ange  qui  ap- 
parut aux  femmes,  par  les  soldats  qui  f;ar- 
daient  le  sépulcre,  par  Icslinges  qui  envelop- 
paient son  corps,  et  qui  furent  trouves  dans 
le  tombeau,  par  de  fréquentes  apparitions  à 
ses  apôtres,  qui  eurent  la  permission  de  le 
louclier  et  de  manger  avec  lui,  et  la  joie  de 
le  voir  monter  au  ciel. 

12.  Le  discours  sur  les  trois  carêmes  porte 
dans  un  manuscrit  de  la  Ribliothèque  du  Roi 
le  nom  d'Anastase,  patriarche  d'Autiochn  ; 
mais  je  n'y  trouve  ni  son  style,  ni  son  génie. 
L'auteur,  pour  montrer  que  l'on  doit  faire 
deux  carêmes,  outre  celui  de  quarante  jours 
qui  précède  la  fête  de  Pâques,  emploie  l'au- 
torité d'un  livre  apocryphe  nommé  :  L'iti- 
néraire de  saint  Philippe,  livre  rempli  de  fa- 
bles; il  compte  sept  conciles  généraux  jus- 
qu'ici son  temps.  On  n'en  connaissait  que 
cinq  en  398,  qui  fut  l'année  de  la  mort  d'A- 
nastase. [Gallanil  a  publié  ce  discours  au 
tome  XII  de  la  Biblioth.  Pat.,  et  il  est  repro- 
duit dans  la  Patrnlngie  grecque,  tom.  LXXXIX, 
col.  1389-1398.  Gallaud  l'avait  pris  dans  Cote- 
lier,  tom.  III,  Monum.  eccles.  grcec,  p.  423.] 

13.  On  ne  peut  non  plus  lui  attribuer  les 
Réponses  aux  questions  des  orthodoxes,  don- 
nées en  latin  par  Gentien  Hervet,  sous  le 
nom  d'Anastase,  évêquede  Nicée,  et  en  grec 
et  en  latin  par  Gretser,  sous  le  titre  de 
Dux  rio",  c'est-à-dire  de  guide  du  chemin. 
On  y  cite  les  canons  du  concile  in  Trullo  tenu 
à  Consfantinople  en  692,  et  saint  Nicéphore, 
patriarche  de  cette  ville,  mort  en  828.  Il  est 
dit  dans  la  réponse  à  la  117°  question,  qu'il 
y  avait  sept  cents  ans  que  les  ariens  étaient 
chassés  des  lieux  saints. 

14.  Aubert  le  Mire  et  quelques  autres  at- 
tribuent à  Anastase-le-Jeune,  successeur  de 
celui  dont  nous  parlons  sur  le  siège  d'An- 
tioche,  Y  Abrégé  de  la  foi  imprimé  dans  les 
Bibliothèques  des  Pères,  de  Paris,  de  Cologne 
et  de  Lyon.  D'autres  en  font  une  compilation 
composée  partie  des  écrits  de  saint  Cyrille 
d'Alexandrie,  partie  de  ceux  d'Anastase 
d'Antioche.  Il  paraît,  en  effet,  que  l'auteur 
écrivait  depuis  la  condamnation  du  monothé- 
lisme  :  car  il  fait  une  question  exprès  sur  le 
nombre  des  volontés  en  Jésus-Christ,  et  dit 

'  Quoi  naturales  vohmtates  et  actiones  in  Chris- 
to  pro/iteris  ?  Duos  :  vnam  divinam,  alteram  hu- 
manam.  Quœ  est  voluntas  divina?  Purgarelepro- 
sos  ;  ul  serventur  omnes  homines  et  ad  veriiatis 
notitiam  pcrveniant.  Quœ  est  voluntas  humana  ? 


303 


net  '  qu'il  y  en  a  deux  :  l'une  divine,  et  l'au- 
tre humaine.  Il  admet  trois  hypostases;  mais 
il  déclare  (jue,  sous  ce  terme,  il  entend  la  per- 
soun(!  ;  confessant  qu'il  y  a  en  Dieu  trois  per- 
sonnes, et  une  seule  substance,  essence  ou 
nature.  Au  contraire,  il  admet  en  Jésus-Christ 
deux  natures,  et  uneseule  hypostaseou  per- 
sonne. Il  s'explique  clairement  sur  la  divinité 
du  Saint-Esprit,  mais  il  ne  le  fait  procéder 
que  du  Père.  [Cet  abrégé  est  au  tome  LXXXIX 
de  la  Patrologie  grecque,  col.  1399-1404,  parmi 
les  œuvres  d'Anastase  le  Patriarche,  dont  il 
est  question  dans  ce  chapitre.] 

15.  Évagre  '  dit  qu'Auastase,  lorsqu'il  se 
trouvait  dans  des  conversations  sérieuses, 
et  où  il  était  obligé  de  parler,  expliquait 
les  questions  les  plus  dilliciles  avec  autant 
de  subtilité  que  de  solidité  ;  que  l'empereur 
Justinien  ayant  écrit  pour  la  défense  de  l'er- 
reur des  incorruptibles,  Anastase  prit  contre 
ce  prince  la  défense  de  la  foi  dans  un  écrit, 
où  il  prouva  par  des  arguments  clairs  et  in- 
vincibles, que  le  corps  du  Sauveur  a  eu  ses 
propriétés  naturelles,  comme  les  corps  des 
autres  hommes,  qu'il  a  été  sujet  à  la  cor- 
ruption, et  que  cette  doctrine  est  celle  des 
apôtres  et  des  Pères.  Il  écrivit  la  même  cho- 
se aux  moines  de  la  première  et  de  la  se- 
conde Syrie,  qui  l'avaient  consulté  sur  ce 
sujet,  confirmant  sans  cesse  les  fidèles  dans 
la  résolution  de  défendre  la  vérité,  et  répé- 
tant chaque  jour  dans  l'Église  ces  paroles 
de  saint  Paul  :  Quand  un  ange  du  ciel  vous 
annoncerait  un  évangile  différent  de  celui  que 
nous  vous  annonçons,  qu'il  soit  anathème.  Ses 
remontrances  furent  écoutées  avec  respect, 
et  suivies  presque  généralement.  Comme  il 
apprit  que  Justinien  avait  dessein  de  l'en- 
voyer en  exil,  il  composa  un  discours  pour 
prendre  congé  des  habitants  d'Antioche. 
Tout  y  était  admirable  :  l'élégance  des  ter- 
mes, la  beauté  des  sentiments,  le  choix  des 
passages  de  l'Écriture  et  des  histoires  qu'il 
rapportait;  mais  il  ne  le  prononça  point, 
parce  que  Dieu  frappa  l'Empereur  d'une 
manière  invisible,  dans  le  moment  où  il  dic- 
tait l'ordre  pour  envoyer  Anastase  en  exil.  Il 
ne  nous  reste  rien  de  ces  écrits,  ni  du  discours 
qu'il  fit  '  ta  son  peuple  en  593,  lorsqu'il  ren- 
tra en  possession  de  son  siège  ;  le  P.  Labbe 

Potum  quœrere,  iter  facere,  fatigari.  Tom.  XI 
Bibl.  Pat.  Liigd.,  pag.  1046. 

-  Evagr.  lib.  IV,  cap.  iL-iLt. 

'  Nioeph.  lib  XVIIl,  cap.  LXiv,  et  Labb.  Biblioth, 
nova,  pag.  82. 


OwvrflCCS 
(I'Adqs  a^cqui 
sont  lej'lii^, 
ou    qui     n'odt 

fnf.  encore  él6 
mprinios. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


364 

dit  l'avoir  vu  manuscrit  dans  la  Biblioth^que 
du  Roi.  Anasfase  en  fit  un  '  autre  vei-s  le 
même  temps  sur  la  paix,  le  mercredi  de  la 
Semaine-Sainte;  il  est  manuscrit  '  dans  la  Bi- 
bliotlièque  Impériale  (de  Vienne).  Sa  lettre 
à  un  scolaslique  fut  citée  dans  la  quatrième 
action  du  septième  '  concile  général. On  y  cita 
aussi  son  discours  sur  le  Sabbal,  adressé  à 
Siméon  de  Rostres.  [Ce  fragment  est  rap- 
porté au  tome  LX.WIX  de  la  Patrolngie  grec- 
que, col.  1405-1406,  avec  un  fragment  de 
VÈpitre  à  Sergius,  ibid.  col.  1403-1408.] 
Saint  Maxime  '  parle  d'un  livre  d'Anaslase 
contre  Jean  P/iiloponvs,  dont  Grelser  nous  a 
donné  un.  fragment  dans  sa  préface  sur  le 
Guide  du  chemin.  Nous  n'avons  plus  ni  sa 
version  grecque  du  Pastoral  de  saint  Gré- 
goire, ni  aucune  des  lettres  qu'il  écrivit  à  ce 
Pape,  ni  le  discours  '  qu'il  fit  en  son  bon- 
neur.  Il  en  avait  fait  '  sur  la  Visitation  de 
Marie,  sur  le  dimanche  des  Rameaux,  sur  la 
décollation  de  saint  Jean,  et  un  à  la  louange 
de  saint  Nicolas.  On  les  trouve  manuscrits 
dans  la  Bibliothèque  du  Roi,  de  même  qiie 
la  dispute  des  évèques  chrétiens  avec  les 
Juifs,  dans  laquelle  Aphiodisien,  officier  du 
roi  de  Perse,  avait  été  constitué  pour  juge. 
Anastase  y  était  présent.  Mais  cette  Dispute 
est  remplie  de  contes  fabuleux,  indignes  de 
ce  patriarche.  D'ailleurs  Arénatus,  qu'on 
suppose  avoir  été  alors  roi  de  Perse,  ne  le 
fut  que  depuis  la  mort  d'Anastase.  Entre 
plusieurs  passages  des  Pères  sur  les  deux 
opérations  en  Jésus-Christ ,  cités  dans  le 
concile  de  Latran  en  649,  il  y  en  a  un  de 
l'écrit  d'Anastase  pour  la  défense  de  la  let- 
tre de  saint  Léon  i^i  Flavien,  où  il  dislingue  ' 
clairement  les  deux  natures  et  les  deux  opéra- 
tions, en  reconnaissant  toutefois  qu'il  n  'y  avait 
dans  Jésus-Christ  qu'une  seule  personne  (jui 
agissait,  la  même  étant  Dieu  et  homme.  L'hu- 
manité prenait  de  la  nourriture  et  croissait  ;  la 
divinité  ressuscitait  les  morts  :  Jésus- Christ 
faisait  l'un  et  l'autre.  Divers  '  manuscrits 
donnent  à  Anastase  une  Démonstration  publi- 
que, où  il  prouvait  qu'un  prêtre  ne  peut  être 

'  rbid.  —  «  Umb.,  lib.  VII,  pag.  168. 

'  Tora.  Vil  Concil.,  pag.  247  et  249,  Damasc.  Oral. 
2  et  3  De  imag.,  pag.  344-386. 

*  Ma.xim.  loin.  Il,  pag.  121,  123,  120. 

s  Laïul).  lib.  VIII,  pag.  423. 

'  Mlatius,  lil).  De  Simeuu.,  pag.  104.  Labbffus, 
Bihlioth.  mii,s.,  pag.  H2  et  1370. 

'  Sicut  enim  nulriri  et  cremeiUari  non  est  Dei- 
tatis,  ita  suscilare  morluos  non  est  humaiiiln- 
tis  :  ulraque  tamen  ejusdem  Deilalem  lemperan- 


jugé  par  un  laïque,  mais  seulement  par  un 
ëvêque.  Ils  citent  '  aussi  sous  son  nom  et 
sous  celui  de  saint  Jean  de  Damas  plusieurs 
questions  sur  la  foi,  des  églogues  ascétiques 
et  des  définitions;  mais  on  n'a  pas  d'autres 
preuves  que  tous  ces  écrits  soient  de  lui;  et 
il  y  a  apparence  qu'ayant  été  en  réputation 
de  savoir,  plusieurs  écrivains  postérieurs 
ont  pris  son  nom  pour  donner  cours  à  leurs 
propres  productions.  La  Bigne  compte  parmi 
les  écrits  d'Anastase  qui  n'ont  pas  encore  vu 
le  jotir,  deux  livTCS  de  la  Construction  de 
l'homme  ;  V Eloge  de  l'I-'gijpte;  un  traité  con- 
tre ceux  qui  disent  qu'il  y  a  trois  essences 
ou  natures  dans  les  personnes  divines,  et 
deux  livres  contre  les  Juifs.  Turrien  les  a 
traduits  en  latin;  mais  l'auteur  de  ces  deux 
li\Tes  vivait  longtemps  après  Anastase  pa- 
triarche d'Antioche,  puisqu'il  compte  huit 
cents  ans  et  davantage  depuis  la  prise  de 
Jérusalem  par  Tite  et  Vespasicn.  Le  traité 
qui  a  pour  titre  :  Contemplation  mystique  des 
souffi-ances  de  Jésus-Christ ,  parait  être  la 
même  chose  que  celui  d'.\nastase  leSinaïte, 
intitulé  :  De  la  passion  et  de  l'itn/xissibilité  de 
Jésus-Christ. 

16.  I^es  cinq  discours  sur  la  foi,  traduits  en 
latin  par  Turrien,  furent  imprimés  pour  la 
première  fois  à  Ingolstad  en  1616,  in-4»,  dans 
le  Supplément  de  Steuartius  aux  .Anciennes 
leçons  de  Canisius  ;  et  depuis,  dans  le  neuviè- 
me tome  delà  Bibliothèque  des  anciens  Pères, 
à  Lyon  en  1677,  et  dans  la  nouvelle  édition 
des  Leçons  de  Canisius,  à  .envers,  en  1723. 
Mais  dès  l'an  1336,  ils  avaient  été  traduits 
par  Tilmannus,  et  imprimés  à  Paris,  et  en- 
suite dans  les  Bibliothèques  des  Pères  pu- 
bliées en  cette  ville.  Meursius  donna  en 
grec  les  deux  discours  sur  l'Annonciation 
dans  le  recueil  de  ses  Mélanges  divins,  à 
Leydeenl619.NousIesavonsenlatin  dans  le 
neuvième  tome  de  la  Bibliothèque  des  anciens 
Pères  de  Lyon,  dans  le  sixième  de  la  Biblio- 
thèque des  Prédicateurs  du  Père  Combefis ,  et 
dans  le  premier  de  son  .Auctuarium,  [et  dans 
le  tome  .\II  de  Galland,  d'où  ils  ont  passé  au 

tix  humanilati,  ut  condecel,  non  in  conpusionem. 
sed  in  unUionem.  InconfusiB  ergo  (iuiv  quidem 
sunl  operaliones.sicuti  essentiœ.  Cnus  autcm  ope- 
rator,  Dcusparitcrqueelhomo  rxistens.  Ana^Uia., 
in  Concil.  Laleran.  Acl.  5,  pag,  308,  loui.  \  I  Labb. 
elloui.  III  WorduiHi,  pag.88u. 

s  Lauili.  lil).  111,  i)ag.  196,  Bihl.  Coislin.,  pag. 
in:;;  Labbîrus,  Bihlioth.  Nov.,  pag.  82. 

'■'  Lamb.  lib.  Vlll,  pag.  336;  lib.  V,  pag.  105. 


Vr  SIKCLE. 


CIIAPITIIE  XLII.  —  SAINT  GllWîOIRE  DE  TOUllS. 


305 


touio  LXXXIX  de  la  Palroloi/ie  (/ira/iie,  col. 
13()0-13'J8.]  On  y  trouve  aussi  le  discours 
sur  la  Traiisfif;iii'atii)n,  dn  nu'-iiio  que  dans  le 
neuvième  lonie  do  la  Jii/ilwi/iryne  <li's  ancicus 
Pères  de  Lyon,  et  dans  le  septième  volume  de 
la  Bibliothl'tjue  des  Prklicatenrs.  Il  manque 
quelque  chose  A  la  Ini  de  ce  discours. 


[Tous  les  écrits  de  saint  Anastasc  sont  re- 
produits au  tome  LXXXIX  de  la  Patroloijic 
l/rcci/iic,  col.  1288-l'*08,  avec  notices  liri'es 
de  (iailaiid,  de  Falnicius,  une  vie  de  saint 
Anastase  d'après  les  BoUandistes.] 


CHAPITUE  XLII. 


Saint  Grégoire  évoque  de  Tonrs  '   |595]. 


ARTICLE  PREMIER. 

HISTOIRE  DE  SA  VIE. 

1.  Il  faudrait  être  étranger  dans  l'histoire, 
pour  ignorer  combien  saint  Grégoire  de  Tours 
s'est  rendu  recommandable  dans  le  sixième 
siècle  de  l'Église  par  sa  vertu,  par  son  sa- 
voir et  par  le  grand  nombre  de  ses  écrits. 
L'auteur  de  sa  vie,  que  l'on  croit  être  saint 
Odon,  abbé  de  Cluni ,  et  qui  pouvait  en 
être  bien  instruit,  puisqu'il  avait  été  long- 
temps dans  le  clergé  de  l'Ëglise  de  Tours  ^, 
nous  apprend  qu'il  naquit  en  Auvergne  de 
parents  riches  et  nobles  ;  que  son  père  se 
nommait  Florent,  et  sa  mère  Armentarie  ; 
que  Léocadie,  son  aïeule,  descendait  du 
martyr  Vestius  Épagathus,  célèbre  par  sa  foi, 
qu'il  scella  de  son  sang  avec  les  autres  mar- 
tyrs de  Lyon,  ainsi  qu'on  le  lit  dans  le  cin- 
quième livre  de  l'histoire  d'Eusèbe  de  Cé- 
sarée.  On  met  la  naissance  de  Grégoire  au 
30  novembre  de  l'an  544.  Il  reçut  les  premiè- 
res teintures  de  la  vertu  et  des  sciences  de 
saint  Gai,  évêque  de  Glermonl,  son  oncle 
paternel.  Ensuite  il  passa  sous  la  discipline  ' 
de  saint  Avit,  successeur  de  saint  Gai,  qui, 
lui  trouvant  de  la  disposition  pour  les  scien- 
ces, lui  donna  des  maîtres  capables  de  le 
former.  Se  sentant  moins  d'attraits  pour  les 
poètes  et  les  autres  auteurs  profanes  que 
pour  les  écrivains  sacrés,  il  fit  peu  d'usage 
des  premiers,  se  contentant  d'en  *  prendre  ce 
qu'ils  avaient  de  bon,  sans  se  charger  la  mé- 

'  La  nouvelle  vie  de  saint  Grégoire  de  Tours 
par  Lévêque  de  Laravaillère,  Académie  des  inscrip- 
tions, tome  XXYl ,  pag.  598,  ne  laisse  rien  à  dési- 
rer pour  la  discussion  des  faits. 

*  Udo  in  Vita  r.regor.  Turon,  num.  1. 


Il    e'I    nr. 
t'rinnt;  di^iCie. 


Il  eti  fiil 
é>êi)uo  ie 

Tours    en  Wii 
ou  Itli, 


moire  de  quantité  de  fables  dont  ils  sont 
remplis. 

2.  Loisqu'il  fut  en  âge,  saint  Avit  l'or- 
donna "  diacre.  Frappé  des  merveilles  qu'il 
avait  ouï  raconter  de  saint  Martin,  il  s'en 
entretenait  sans  cesse,  parlait  continuelle- 
ment de  ce  saint,  faisait  partout  son  éloge. 
Sa  trop  grande  application  ;\  imiter  ses  ver- 
tus lui  causa  une  fâcheuse  maladie,  dont  ne 
croyant  pouvoir  guéi'ir  que  par  l'interces- 
sion de  ce  saint  évêque,  il  entreprit  le  voya- 
ge de  Tours,  où  il  recouvra  en  effet  la  santé, 

3.  Il  était  sorti  depuis  peu  de  cette  ville, 
lorsqu'Eupbronius,  qui  en  était  évêque,  mou- 
rut. Le  clergé,  la  noblesse  et  le  peuple  de- 
mandèrent Grégoire  pour  lui  succéder.  Tous 
connaissaient  son  mérite.  Ils  députèrent  à  la 
cour  de  Sigebert,  roi  d'Austrasie, pour  faire  ap- 
prouver leur  choix.  Grégoire  s'y  opposa,  mais 
Sigebert  et  Brunehaut  l'engagèrent  à  accepter 
l'épiscopat.  Il  fut  sacré  ^  par  Gilles,  évêque 
de  Reims,  le  22  août  S72,  suivant  l'autt^ur 
de  sa  vie,  ou  en  573,  selon  qu'il  le  dit  lui- 
même  dans  le  dixième  '  livre  de  son  histoire, 
où  il  met  son  élection  en  la  172*  année  de- 
puis la  mort  de  saint  Martin,  et  la  douzième 
du  règne  de  Sigebert,  ce  qui  revient  à  l'an 
573. 

4.  Le   poète   Fortunat  *   félicita   les   ci- 
toyens de  Tours  dans  un  poème  qu'il  leur  ip^cotai. 
adressa ,  où,  en  relevant  leur  bonheur ,   il 

fait  de  leur  nouvel  évêque  l'éloge  le  plus 
pompeux,  puisqu'il  le  compare  à  saint  Atha- 
nase ,   à  saint  Hilaire,   h  saint  Grégoire  de 

3  Ibid.  num.  6,  et  Fortunat,  lib.  V,  cap.  iv. 
'  Ibid.  num.  6.  —  ^  Ibid.  num.  7  et  S. 
6  Ibid.  num.  11  et  Fortunat,  lib.  V,  carm.  2. 
'  Gregor.,  lib.  .\,  num.  31,  pag.  538, 
'  Fortunat  ubi  sup. 


Sji  coDiluite 
leudaui     son 


366 


HISTOIRE  GENERALE  DES 


Nazianze,  à  saint  Ambroise,  à  saint  Martin, 
à  saint  Augustin,  à  saint  Césaire.  La  foi  et 
la  piété  du  clergé  ci  du  peuple  prirent  '  de 
nouveaux  accroisseiueuts  sous  la  conduite 
de  Grégoire.  11  étendit  ses  soins  jiisques  sur 
les  temples  matériels  du  Seigneur,  s'occu- 
pant  à  réparer  les  églises  ruinées  de  son 
diocèse  et  à  en  bâtir  de  nouvelles.  Il  rétablit 
entièrement  sa  cathédrale,  qui  était  l'ouvrage 
de  saint  Marlin.  Il  y  avait  peu   de  temps 
qu'il   était   évoque,  lorsqu'il  reçut  la  visite 
d'im  saint  solilaire,  nommé  Sénoch,  qui  s'é- 
tait établi  dans  un  oratoire  près  de  Tours, 
où  il  servait  Dieu  avec  trois  moines.  La  ver- 
tu de  Sénoch  lui  avait  attiré  la  confiance  des 
fidèles.  Ils  lui  apportaient  de  l'argent,  qu'il 
distribuait  aux  pauvres,  ou  qu'il  employait 
à  délivrer  ceux  qui  étaient  arrêtés  pour  det- 
tes. L'afflueuce  des  malades,  qui  venaient  à 
lui  pour  être  guéris,  lui  fit  prendre  la  résolu- 
tion de  ne  plus  voir  personne.  Saint  Grégoire 
lui  conseilla  de  no  s'enfermer  que  depuis  la 
Saint-Martin  jusqu'à  Noël  et  pendant  le  carê- 
me, suivant  l'usage  de  plusieurs  autres  soli- 
taires. Il  détourna  aussi  un  saint  moine,  nom- 
mé Léobard,  de  changer  de  demeure,  hr  re- 
montrant que  le  dessein  qu'il  en  avaii  était 
lin  artifice  du  démon.  Pour  l'en  convaincre, 
il  lui  envoya  '  les  livres  de  la    Vie  des  Pères 
et  V Institution  des  moines^  ce  semble,  de  Cas- 
sien,  dont  la  lecture  fixa  son  inconstance. 
Léobard  '  s'occupait  ù  tailler  des  pierres  dans 
la  montagne,  h  faire  du  parchemin,  et  quel- 
quefois à  écrire,  pour  se  délivrer  des  mau- 
vaises pensées. 
«i'c'fd!"".       ^-  ^^  ^"^"^^  saint  Grégoire  assista  au  con- 
ris«ns;7.       cile  que  Chilpéric  tinta  Paris  contre  Prétex- 
tât, évoque  de  Rouen.  U  fut  le  seul  qui  prit 
hautement  '  la  défense  de  l'accusé,  et  qui 
s'opposa  aux  exécrations  dont  le  prince  vou- 
lait qu'on  se  servît  en  déposant  Prétextât. 
Sa   fermeté    dans   cette  occasion  lui  gagna 
l'estime  de  Cliilpéiic,  quelque  fâclié  que  fut 
ce  prince  de  trouver  de  la  résistance  à  ses 
desseins.  Mais  ce  ne  fut  pas  la  seule  fois  qu'il 
en  éprouva  de  la  part  de  l'évéque  de  Tours. 
S'étant  avisé  "  quelque  temps  ajirL's  Je  faire 
un  édit  portant  ordre  de  nommer  la  sainte 
Trinité  sans  aucune  distinction  de  personnes, 
parce  qu'il  lui  paraissait  indigue  de  Dieu  de 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

lui  donner  des  noms  de  personnes  comme  ft  un 
homme,  saint  Grégoire  lui  remontra  qu'il  de- 
vait quitter  cette  doctrine,  et  suivre  celle  que 
les  docteurs  de  l'Église  nous  ont  enseignée 
après  les  apôtres;  qu'en  vain  il  s'imaginait 
que  le  nom  de  personne  était  indigne  de  Dieu, 
qu'il  ne  se  prenait  pas  dans  un  sens  corpo- 
rel, comme  il  le  pensait,  mais  spirituelle- 
ment. 

G.  La  même  année 577,  ou  selon  d'autres  en  ■'"'  •«"•* 
580,  on  fit  un  procès  au  saint  évéque  prévenu  i',^',.,*"^ 
d'avoir  '  accusé  la  reine  Frédégonde  d'adul- 
tère avec  Bertrand,  évèque  de  Bordeaux; 
l'accusât  on  fut  discutée  dans  le  concile  de 
Biaine,  et  saint  Grégoire  pleinement  justifié. 
Il  parle 'en  un  endioit  de  son  histoire  de 
deux  disputes  réglées  qu'il  eut  sur  la  divini- 
té du  Fils  avec  deux  ariens,  Agilan  et  Oppila, 
ambassadeurs  du  roi  d'Espagne  à  la  cour  de 
France.  Il  les  convainquit, maisnelesconverfit 
pas,du  moins  sur-le-champ;  ma  is.\gilan,  étant 
de  retour  en  Espagne  et  y  étant  tombé  ma- 
lade, embrassa  la  religion  catholique.  Il  eut  * 
une  troisième  conférence  sur  la  foi  avec  un  juif 
nonuué  Prisquc,  en  piéseuce  du  roi  Chilpé- 
ric. Le  juif,  accablé  par  une  foule  de  passa- 
ges des  psaumes  et  des  prophètes,  se  trouva 
muet  ;  mais  il  demeura  endurci. 

7.  Eu  588,  Childebert  envoya  '  saint  Gré-  "  '  '  •■n™,* 
goire  à  Gontran,  roi  de  Bourgogne,  pour  lui  '"  '"'• 
faire  ratifier  le  traité  d'Andelau,  fait  pour 
ôter  tous  les  sujets  de  brouiUerie,  que  la  moi  l 
précipitée  de  Chilpéric  avait  causés.  Ce  traité 
avait  été  fait  l'année  précédente,  le  27  no- 
vembre. Les  réponses  que  lui  fit  ce  prince 
marquent  clairement  qu'il  l'avait  envoyé  lui- 
même  quelque  temps  auparavant  en  ambas- 
sade vers  Childebert.  Ce  fut  aussi  sur  lui  que 
l'on  jeta  '"les  yeux  pour  pacifier  les  troubles 
que  Chrodielde  et  Basine  avaient  excités 
dans  le  monastère  de  Sainte-Croix  de  Poi- 
tiers, dont  elles  étaient  religieuses  ;  la  com- 
mission lui  en  fut  donnée  en  590  par  le  roi 
Childebert.  Il  rapporte  assez"  au  long  la  dis- 
pute qu'il  eut  avec  un  prêtre  de  son  clergé 
sur  la  résurrection  des  morts.  Il  répondit  h 
toutes  ses  objections,  et,  joignant  la  force  des 
raisons  à  l'autorité  des  divines  Écritures,  il 
le  ramena  au  sentiment  de  l'Église. 
8.  Vers  l'an  594,  il  fit  un  voyage  à  Rome,     , 


iiTi  i  n. 
mo  tn  594. 


'  Odo  in  vila,  uuui.  12,  13.  — 'Grcgor.  VitœPaU,  '  ld<>m,  lit).  V,  c.-ip.  xuv,  ctlib.  VI,  cap.   XL.   — 

cap.  XX,  pug.  1253.—  »  Ibid.  —  »  (;reg.  Turoii.lib.  «  Ideui,  lib.   VI,  cap.  v.   —    »   Ideiii,   lib  l.\,    cap. 

V,  cap.  XII,  et  lib.  Vit,  cap.  XVI.  —  '  Idem.  lib.  V,  XX.  —  "o  Lib.    .\,  cap.  XV.  —  "  Idem,  lil).  X,  lap. 

caj).  XLv.  —  «  Oregor.  Turou.  lib.  V,  oap.  L.  xni. 


CHAPITIIE  XLII.  —  SAINT  GUÉGOIIIE  DE  TOUllS. 


Ulilltéile 


[Vl'  SIÈCLE. J 

OÙ  saint  Grégoire,  élu  pape  depuis  quelques 
anuces,  le  rt\ut  avec  honneur.  11  l'introilui- 
sit  lui-môme'  dans  la  Confession  de  saint  Pier- 
re, où  l'ayant  laissé  en  prière,  il  se  retira  à 
côté,  en  attendant  qu'il  l'eiil  aclicvée.  Alors, 
considérant  d'uni'  [)art  la  taille  de  notre  saint 
évêque,qui  était  très-petite,  et  de  l'autre  les 
grâces  et  les  talents  dont  Dieu  l'avait  couihlé, 
il  dit  en  liii-uième ,  qu'il  était  surprenant 
que  Dieu  eût  renfermé  de  si  grands  dons 
dans  uu  si  petit  corps.  L'évéque  de  Tours, 
se  tournant,  le  visage  tranquille,  du  côté  du 
pape  :  «c  C'est,  lui  dil-il,  IcSeigneur  qui  nous  a 
faits  tels  que  nous  sommes,  nous  ne  nous 
sommes  pas  faits  nous-mêmes  ;  pour  lui,  il 
est  le  mémo  dans  les  petits  et  dans  les 
grands.  »  Le  Pape,  étonné  qu'il  eut  décou- 
vert sa  pensée,  l'eut  en  grande  vénération; 
et  pour  lui  en  donner  des  marques  et  hono- 
rer l'Église  dont  il  était  évéque,  il  lui  fit  pré- 
sent d'une  chaîne  d'or. 

9.  De  retour  en  sa  ville  épiscopale,  il  y 
mouiut  à  l'âge  de  cinquante-un  ans,  l'an 
595  ,  le  17  novembre,  après  vingt-deux  ans 
d'épiscopat.  L'auteur  de  sa  vie  ne  lui  en 
donne  que  vingt-un  :  ce  que  l'on  regarde 
comme  une  faute,  ou  de  sa  part,  ou  de  celle 
des  copistes.  Avant  de  mourir,  il  ordonna  sa 
sépullure  en  un  lieu  où  il  pût  être  foulé  aux 
pieds  par  les  passants,  et  où  l'on  ne  put,  à 
cause  du  besoin  public,  décorer  son  tombeau. 
Mais  le  clergé  de  Tours  lui  éleva,  depuis,  un 
mausolée  à  la  gauche  du  tombeau  de  saint 
Martin.  Les  écrits  qui  nous  restent  de  lui 
sont  :  VHistoire  ecclésiastique  des  Francs  en 
dix  livres  ;  sept  livres  des  Miracles,  et  un  hui- 
tième de  la  Vie  des  Pères.  Il  avait  fait  un 
Commentaire  sur  les  Psaumes,  dont  nous  n'a- 
vons plus  que  quelques  fragments,  et  un  Trai- 
té des  Offices,  qui  est  perdu.  Saint  Odon  relève 
en  lui  un  esprit  de  douceur,  des  mœurs  pures, 
une  égalité  d'humeur,  un  grand  zèle  pour 
la  religion,  une  charité  qui  s'étendait  jusques 
sur  ses  ennemis,  et  une  humilité  profonde. 

ARTICLE  n. 

DES  ÉCRITS  DE  SAINT  GRÉGOIRE  DE  TOURS. 
§1- 

L'Histoire  ecclésiastique  des  Français. 
i.  Ceux  qui  ^  dans  le  dernier  siècle  ont 


3G7 


travaillé  avec  le  plus  de  succès  sur  l'histoire 
de  France,  conviennent  que  c'est  à  saint  Gré- 
goire de  Tours  que  l'on  est  redevable  de  la 
connaissance  que  nous  avons  des  premiers 
rois  de  la  nation,  et  des  principaux  événe- 
ments de  leurs  règnes.  Ils  appellent  les  dix 
livres  de  ce  Pèio  le  fond  de  notre  histoire, 
el  ne  regardent  que  comme  des  commentai- 
les  sur  ces  livres,  ce  qu'ils  ont  écrit  sur  le 
même  sujet.  Il  neserait  pas  possible,  eu  effet, 
de  parler  des  commencements  de  la  monar- 
chie fran(;aise  sans  le  secours  de  cet  écri- 
vain,qui  a,  par-dessus  ceux  qui  ont  écrit  après 
lui,  cet  avantage,  qu'il  n'a  lien  mêlé  de  fa- 
buleux dans  son  histoire.  11  ne  fait  pas,  com- 
me eux,  descendre  les  Français  des  transfu- 
ges de  Troyes.  11  se  borne  à  rapporter  de 
leur  origine  ce  qu'il  en  avait  lu  dans  les  au- 
teurs contemporains,  Sulpice  Alexandre,  Re- 
né Profuturus  Frigéridus,  et  l'historiographe 
Orose.  Ce  dernier  est  connu,  les  deux  autres 
ne  nous  le  seraient  pas  sans  saint  Grégoin; 
de  Tours,  qui  les  cite. 

2.  Son  histoire,  dans  quelques  manuscrits, 
est  intitulée  :  Histoire  ecclésiastique  des  Fran- 
çais; en  d'autres.  Histoire  des  Finançais;  quel- 
quefois :  Faits  mémorables  des  Français,  et 
plus  souvent  Chroniques.  Le  premier  titre  est 
celui  que  l'on  a  gardé  dans  la  nouvelle  édi- 
tion, imprimée  à  Paris  par  les  soins  de  dom 
Thierry  Ruinart,  en  1699.  Elle  y  est  à  la  tète 
de  tous  les  ouvrages  de  saint  Grégoire,  ap- 
paremment parce  qu'elle  en  est  le  plus  con- 
sidérable ;  car  on  ne  peut  douter,  ce  semble, 
qu'elle  n'en  soit  le  dernier  selon  l'ordre 
des  temps,  puisque  ce  Père  y  rappelle  sou- 
vent ses  autres  écrits ,  et  qu'il  ne  la  cite 
nulle  part.  Il  faut  ajouter  qu'il  fait  dans  la  ^ 
conclusion  de  cette  histoire  l'énumération 
de  tous  ses  ouvrages.  Ou  pourrait  objecter, 
qu'en  parlant,  dans  le  trentième  chapitre  du 
livre  de  la  Gloire  des  Confesseurs ,  de  saint 
Austremoine,  il  dit  qu'il  avait  déjà  parlé  de 
ceux  qui  l'avaient  accompagné  dans  sa 
mission  en  France  ;  mais  cela  n'a  point 
un  rapport  nécessaire  avec  son  histoire  ec- 
clésiastique :  c'est  avec  le  chapitre  vingt-sep- 
tième du  même  livre,  où  il  avait  en  effet  dit 
quelque  chose  de  la  mission  de  saint  Martial 
de  Limoges.  Il  avait  aussi  parlé  de  saint  De- 
nis de  Paris  et  de  saint  Saturnin  dans  le  pre- 
mier livre  de  la  Gloire  des  Martyrs.  Quelques- 


l'hi.rotr»  ee. 
el6i'a.tlqiie<l0 
*«'lir     fin'-L'Ol. 

r^  de  Toum. 


Quel  es(  1o 

titre  de  celle 
hi-lotre.  En 
ti'  ol  leii]i>9 
de  ï  été 
(fiitc. 


•  Odo  in  vita  Gregor.  num.  24. 

'  Valois  et  Le  Coiute,  et  Prœf.  in  nov.  edit.  Greg. 


Turon. 
3  Lib.  X,  pag.  537. 


368 


HISTOIRE  GHNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Premier  li- 
ire  de   I  Uis- 


uns  ont  cru  que  saint  Grégoire  n'avait  pas 
donné  de  suite  toute  sou  histoire,  et  qu'il  n'en 
publia  d'abord  que  les  sis  premiers  livres. 
Ce  qui  rend  cette  opinion  probable,  c'est  que 
Frédégaire  n"cu  connaissait  pas  davantage, 
et  que  voulant  continuer  dans  sa  chronique 
l'histoire  de  ce  Père,  il  commence  à  la  mort 
de  Chilpéric,  où  finissent  ces  six  premiers  li- 
Tres.  On  cite  aussi  divers  manuscrits  qui 
n'ont  que  ces  six  livres  ;  mais  il  y  en  a  d'au- 
tres que  l'on  croit  de  la  tîn  du  sixième  siècle, 
où  l'on  trouve  un  fragment  du  septième  li- 
vre. Quoi  qu'il  en  soit,  cette  histoire  a  sou- 
vent été  altérée  par  les  copistes  ;  mais  nous 
l'avons  aujourd'hui  dans  sa  pureté,  le  texte 
en  ayant  été  revu  et  corrigé  sur  un  grand 
nombre  d'excellents  manuscrits. 

3.  Saint  Grégoire  la  commence  par  une 
'tt'^ul'iê  peintm-e  très-triste  de  la  décadence  des 
îî^!'i!°""'  beaux-arts  dans  toutes  les  villes  de  France. 
Les  persécutions  que  les  païens  et  les  héré- 
tiques avaient  faites  à  l'Église  n'étaient  que 
trop  connues  :  on  n'avait  point  oublié  les  guer- 
res que  les  princes  s'étaient  faites  mutuelle- 
ment: elles  se  rallumaient  tous  les  jours.  On  se 
souvenait  de  la  constance  des  martyrs  dans 
les  tourments  qu'ils  avaient  soufferts  pour  la 
foi.  On  avait  vu  des  gens  de  bien  fonder  et 
doter  des  églises,  et  des  perGdes  les  dépouil- 
ler ensuite  de  ce  qu'elles  avaient  de  plus 
précieux.  Mais  la  littérature  était  tombée  ;  il 
ne  se  trouvait  plus  personne  qui  fut  capable 
de  transmettre,  soit  en  prose,  soit  en  vers, 
tous  ces  événements  à  la  postérité.  La  plu- 
part en  gémissaient  ;  mais  personne  ne  se 
mettait  en  devoir  de  remédier  à  ce  désordre. 
L'ignorance  du  beau  langage  était  telle  que, 
s'il  se  fùl  trouvé  quelqu'un  qui  écrivit  avec 
élégance,  il  n'auiaitété  entendu  que  de  peu 
de  monde  ;  il  fallait  un  style  grossier  et  rusti- 
que, pour  se  faire  entendre  du  grand  nombre. 
Voilà  le  que  dit  ce  Père  dans  la  préface  de  son 
histoire. Ce  ne  fut  qu'au  défautde  quelquemeil- 
Pij.B.  «'.s,  leur  écrivain,  qu'il  l'entreprit. Il  convient  du 
peu  d'exactitude  et  de  la  barbarie  de  son  style, 
et  il  en  demande  excuse  à  ses  lecteurs.  Mais 
il  les  assure  de  sa  fidélité  à  rapporter  les 
dogmes  que  l'on  enseignait  dans  l'Kglise  ;  et 
afin  qu'ils  n'eussent  aucun  doute  sur  ses  sen- 
timents, il  fait  une  profession  de  sa  foi,  qui  est 
en  substance  la  même  que  celle  du  symbole 
de  Nicée  et  de  celui  de  Coustantinople,  mais 
plus  étendue.  11  y  dit  nettement  que  le  Saint- 
Esprit  procède  du  Père  et  du  Fils  ,  il  y  éta- 
blit  l'immortalité   de  rame   et  la  virgfliité 


Ml,  11^3,995 


perpétuelle  de  Marie,  et  avance,  sur  l'autori- 
té de  quelques  anciens  qu'il  ne  nomme  pas, 
que  r.4ntechrist  inti'oduira la  circoncision,  et 
qu'il  placera  sa  statue  dans  le  temple  de  Jé- 
rusalem, pour  y  être  adorée  de  ceux  qu'il 
aura  séduits.  C'est,  ajoute-t-il,  ce  que  le  Sei- 
gneur a  prédit  par  ces  paroles  :  Vous  verrez  luiu..  xin, 
l'abomination  de  la  désolation  dans  le  lieu  saint. 
Après  ce  préambule ,  il  donne  en  abrégé 
toute  la  suite  des  temps  depuis  la  création 
du  monde  jusqu'à  la  mort  de  saint  Martin, 
en  s'altachant  à  ce  qu'il  en  avait  trouvé  dans 
les  chroniques  d'Eusèbe,  de  saint  Jérôme. 
d'Orose  et  de  Victorius.  Quant  à  ce  qu'il  rap- 
porte des  premiers  apôtres  des  Gaules,  saint 
Photin,  saint  Trophime,  saint  Paul,  saint  De- 
nis, saint  Martial,  saint  Saturnin,  il  l'avait 
appris,  ou  de  leurs  actes,  ou  de  la  tradition 
des  peuples.  Son  premier  livre  contient  le 
récit  de  ce  qui  s'est  passé  pendant  l'espace 
de  cinq  mille  cinq  cent  quarante-six  ans. 

4.  Il  commence  le  second  ù  l'épiscopat  de  s^„j  |„„^ 
saint  Brice,  qui  succéda  à  saint  Martin  sur  '**'  "'■'■ 
le  siège  épiscopal  de  Tours  en  3'J7,  et  le  fi- 
nit à  la  mort  de  Clovis,  arrivée  en  oH.  Quel- 
ques critiques  en  ont  rejeté  le  premier  cha- 
pitre, ne  pouvant  se  persuader  que  saint 
Martin  ait  eu  pour  successem-  un  homme  que 
les  historiens  du  temps  ont  fait  passer  pour 
un  adultère,  et  coupable  de  plusieurs  autres 
crimes.  Mais  il  sullit  de  répondre,  que  l'Église 
de  Tours,  fondée  sur  une  tradition  cons- 
tante, reconnaît  saint  Brice  pour  un  de  ses 
évoques,  et  qu'encore  qu'il  ait  été  accusé 
de  diverses  fautes,  il  fut  néanmoins  déclaré 
innocent  par  le  pape  Zosime,  comme  on  le  ) 

voit  dans  sa  lettre  quatrième  à  Aurèle  de 
Carthage  et  aux  autres  évèques  d'Afri- 
que. Il  décrit  dans  les  chapitres  suivants  la 
peisécution  des  Vandales,  les  guerres  entre 
les  Saxons  et  les  Romains,  l'avènement  du 
roi  Clovis  à  l'empire  des  Français,  sa  con- 
version, son  baptême,  ses  ditl'érends  avec 
Gondebaud,  roi  de  Bourgogne,  et  avec  Ala- 
ric.  Il  donne  la  suite  des  évêques  de  Tours 
et  de  Clermont.  Il  parle  de  la  construction 
de  plusieurs  églises  considérables,  comme 
de  celles  de  Saint-Étienne  à  Metz,  de  Saint- 
Symphorien  à  Autun,  de  Saint-Martin  àTours, 
où  il  dit  que  la  leine  Crotechilde  ou  Clotildc 
se  relira  après  la  uKu't  de  Clovis,  pour  y  vi- 
vre dans  les  exercices  de  piété  auprès  du 
tombeau  de  saint  Martin. 

5.  Le  troisième  livre  comprend  ce  qui  s'est  ..^J""'  *"" 
passé  depuis  le  commencement  du  règne  ""  ' 


CHAPITRE  XLIl.  —  SAINT  URÉCOIRE  DE  TOURS. 


[vr  SIÈCLE.] 

dos  qufilrc  enfants  do  Clovis,  Thierry,  C1<1- 
doniir,  Cliilclcbcrt  et  Clotuire,  jusqu'à  la  mort 
de  Tliéodebcrt  ei;  .'iiS.  Saint  Grégoire  rap- 
pelle en  peu  do  mots,  dans  le  prolotjue  ,  les 
prospëritiis  dont  le  règne  de  Clovis  fut  ac- 
compagné, et  les  disgrâces  d'Alaric,  roi  des 
Visigolhs,  qui  était  arien,  pour  montrer  que 
Dieu  comble  morne  des  faveurs  temporelles 
les  princes  (jui  font  profession  do  la  vraie 
foi,  et  qu'il  permet  que  ceux  qui  en  sont  en- 
nemis soient  dans  l'adversité.  Ce  livre  est  in- 
téressant par  la  variété  dos  matières.  Outre 
ce  qui  reganle  les  enfants  de  Clovis,  il  traite 
des  rois  de  Thuriuge,  d'Espagne  et  d'Italie. 

'■'■'j'"  6.  Il  en  parle  encore  dans  le  quatrième  , 
où  il  dit  aussi  ipielque  chose  des  comtes  de 
Bretagne  ,  de  Iti  révolte  des  Saxons,  do  l'ir- 
ruption des  Lombards  en  Italie,  de  l'éléva- 
tion de  Justin  sur  le  trône  impérial,  et  de 
plusieurs  autres  événements  qui  paraîtraient 
éti'angers  i\  son  dessein,  s'ils  n'avaient  de  la 
liaison  avec  l'histoire  des  rois  de  France.  Ce 
livre  commence  à  la  mort  de  sainte  Glotilde, 
et  au  règne  de  Clotaire  ,  roi  d'Austrasie  , 
et  va  jusqu'i'i  la  mort  de  Sigebert,  son  fils  et 
son  successeur,  aaivée  en  573.  On  trouve 
encore  dans  ce  livre,  comme  dans  tous  les 
autres,  quantité  de  traits  de  l'histoire  ecclé- 
siastique, des  conciles  ,  les  vies  des  saints 
évèques  et  des  saints  solitaires,  les  fonda- 
tions de  monastères,  le  culte  des  saints  et 
de  lem'S  reliques  ;  en  sorte  qu'on  doit  regar- 
der cet  ouvrage  de  saint  Grégoire  comme 
une  histoire  ecclésiastique  et  civile. 

•''';<'  7.  Dans  la  préface  du  cinquième  livre, 
l'auteur  déplore  les  malheurs  de  l'État  et  des 
peuples,  causés  parles  guerres  presque  con- 
tinuelles entre  les  trois  fils  de  Clotaire,  Gon- 
Iran,  Chilpéric  et  Sigebert.  Clotaire  avait  eu 
un  quatrième  fils  qui  était  l'aîné  de  tous, 
nommé  Charibert.  Il  eut  le  royaume  de  Pa- 
ris ;  Gontran,  celui  d'Orléans  ;  Chilpéric,  ce- 
lui de  Soissons  ;  et  Sigebert ,  le  royaume 
d'Austrasie.  Les  deux  aînés  aimaient  la  paix  ; 
mais  Chilpéric  et  Sigebert  étaient  d'une  hu- 
meur trop  martiale  pour  le  repos  de  leurs 
sujets.  C'est  donc  à  eux  principalement 
que  s'adressent  ces  paroles  de  saint  Grégoire 
de  Tours  :  «  Plût  à  Dieu,  princes,  que  vous 
ne  fissiez  la  guerre  que  comme  vos  aïeux, 
et  que,  conservant  la  paix  entre  vous,  vous 
vous  rendissiez  redoutables  à  vos  voisins. 
Souvenez-vous  de  Clovis,  celui  qui  a  com- 
mencé à  conquérir  les  états  que  vous  possé- 
dez. Combien  a-t-il  défait  de  rois ,  dompté 
XI. 


369 


(le  iialions,  subjugué  do  pays?  Pour  venir  à 
bout  do  tout  cela,  il  n'avait  ni  or  ni  argent , 
au  lion  que  vous  avez  de  grands  trésors. 
Vous  avez  des  magasins  de  blé,  do  vin  ot 
d'Iiuilo,  de  l'or  et  de  l'argent  en  abondance. 
Il  ne  vous  manque  qu'une  chose,  c'est  la  paix, 
et  ce  défaut  vous  mot  dans  l'indigence  de  lu 
grâce  de  Dieu.  Pourquoi  l'un  de  vous  en- 
lève-t-il  ;\  l'autre  ce  qui  lui  appartient?  Fai- 
tes réflexion  à  ce  que  dit  l'Apotre  :  Si  vous 
vous  mordez  et  vous  dévorez  les  uns  les  autres,    coiai.  v,  i 
prenez  garde  que  vous  ne  vous  consumiez  les  uns 
les  autres;  et  à  ce  que  dit  l'historien  Orose, 
en  parlant  dos  Carthaginois,  que  tandis  qu'ils 
avaient  été  unis,  leur  ville  et  leur  l'épubli- 
que  avaient  été  florissantes,  et  qu'elles  n'a- 
vaiont   été  détruites ,   après  avoir  subsisté 
pendant  sept  cents  ans  ,  que  pour  s'être  dé- 
sunies. »  Ce  cinquième  livre  renferme  l'his- 
toire d'environ  cinquante-quatre  ans,  depuis 
le  règne  de  Childebert  second,  successeur  et 
fils  de  Sigebert,  jusqu'au  concile  de  Braine, 
où  saint  Grégoire,  accusé  par  Leudaste  d'a- 
voir mal  parlé  de  la  reine  Frédégonde,  se 
purgea  par  serment  de  cette  calomnie.  Un 
des  endroits  les  plus  intéressants  de  ce  livre 
pour  l'histoire  ecclésiastique  de  France  dans 
le  vi^  siècle,  est  le  détail  de  la  procédure  contre 
Prétextât,  évêque  de  Rouen.  Nous  en  avons 
donné  le  précis  dans  l'article  du  cinquième 
concile  de  Paris  en  377. 11  y  est  aussi  parlé  de 
la  persécution  que  les  ariens  firent  soufirir 
aux  chrétiens  d'Espagne  sous  le  règne  de  Lé- 
vigilde,  et  d'une  dispute  que  saint  Grégoire 
eut  avec  un  arien  sur  le  mystère  de  la  Trinité. 
8.  Le  sixième  livre  commence  à  la  sixième 
année  du  règne  de  Childebert  II,  c'est-à-dire 
à  l'an  381,  auquel  ayant  rompu  la  paix  avec 
Gontran  son  oncle,  roi  de  Bourgogne,  il  con- 
clut un  traité  d'alliance  avec  Chilpéric,  roi 
de  Soissons  ;   il  finit  à  la  mort  de  ce  dernier 
prince,  qui  fut  assassiné  en  584  à  Chelles, 
en  revenant  de  la  chasse.  Son  fils  Théode- 
bert  avait  été  tué  dans  une  bataille  en  576  ; 
Chilpéric,  persuadé  que  Gontran-Boson,  l'un 
des  deux  capitaines  qui  commandaient  l'ar- 
mée de  Sigebert,  était  auteur  de  cette  mort, 
résolut  de  la  venger.  Celui-ci  se  réfugia  dans 
l'église  de  Saint-Martin  à  Tours.  Le  roi,  en 
étant  informé  ,  fit  avancer  ses  troupes ,  et 
sommer  cette  ville    de  se  rendre.   Comme 
elle  n'avait  ni  garnison,  ni  munitions,  elle 
oQ'rit  de  se  soumettre  à  des  conditions  tolé- 
rables.  Rocolène,  l'un  des  généraux  de  Chil- 
péric, demanda  pour  première  condition  , 

24 


Shlème    II- 


Gtég.  Ilb.  V, 
cap.  At^. 


370 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 


Gre;.  llb.YI, 


Septième  )t- 
vie,  fȣ.  3JU. 


qu'on  lui  livrerait  sur-le-cliiimp  Gontr:in-Bo- 
soii.  Les  députés  de  la  ville  répoudirent  que 
la  chose  n'était  point  faisable;  que  l'église 
de  Saint-Martiu  était  un  asile  inviolable; 
qu'en  livrant  Boson,  on  iiiitcrait  le  saint  qui 
y  faisait  tous  les  jours  des  miracles,  et  qui 
le  jour  d'auparavant  avait  guéri  un  paraly- 
tique ;  que  s'il  entreprenait  de  profaner  ce 
lieu  saint,  que  les  Visigoths,  tout  hérétiques 
qu'ils  étaient,  avaient  respecté  dans  le  temps 
qu'ils  avaient  cette  ville  eu  leur  puissance, 
il  attirerait  peut-être  sur  lui  et  sur  le  roi 
même  la  malédiction  de  Dieu.  Ce  général 
menaça  la  ville  et  le  pays  des  dernières 
exlrénnités,  si  on  ne  lui  livrait  Boson  ;  et  sur 
le  refus  q^t'ou  en  fit,  il  commença  à  faire 
abattre  une  maison  qui  appartenait  ;\  l'église 
de  Saint-Martin.  Boson  ne  sortit  point  pour 
cela  de  son  asile.  Pour  l'en  tirer,  Chilpéric 
s'avisa  d'un  expédient  singulier ,  mais  qui 
ne  lui  réussit  pas.  11  écrivit  une  lettre  à  saint 
Martin  ,  où  il  lui  demandait  si  c'était  un  pé- 
ché de  tirer  par  force  Boson  de  l'église,  et 
le  priait  de  lui  répondre  là-dessus.  Le  dia- 
cre Baudegile,  chargé  de  porter  cette  lettre 
au  tombeau  du  saint,  y  mit  un  papier  blanc 
sur  lequel  il  espérait  que  saint  Martin  met- 
trait sa  réponse  :  mais  étant  retourné  au  bout 
de  trois  jours,  il  trouva  le  papier  sans  réponse 
et  sans  écriture.  Chilpéric  y  envoya  d'autres 
gens  pour  tirer  serment  de  Boson,  qu'il  ne 
sortirait  point  de  l'asile  sans  sa  permission. 
Hoson  le  jura,  tenant  la  nappe  de  l'autel. 

Il  y  avait  un  grand  nombre  de  juifs  dans 
le  royaume  de  Chilpéric.  Ce  prince  donna 
ordre  d'en  baptiser  plusieurs,  qu'il  tint  la 
plupart  sur  les  fonts  de  baptême.  Mais  ces 
juifs,  n'étant  lavés  que  de  corps  et  non  de 
cœur ,  retournèrent  pour  la  plus  grande 
partie  à  leur  perfidie. 

9.  Avant  de  commencer  le  septième  livre, 
saint  Grégoire  parle  de  saint  Salvi,  qui  après 
avoir  vécu  longtemps  dans  le  siècle,  le  quitta 
pour  s'enfermer  dans  un  monastère,  dont  il 
fut  élu  abbé  :  quelque  temps  après,  voulant 
vivre  dans  une  plus  grande  perfection,  il  de- 
meura seul  dans  une  cellule  écaitée,  où  il 
ne  laissait  pas  de  répondre  aux  étrangers  qui 
le  venaient  voir.  Ktant  tombé  malade,  l'accès 
de  sa  fièvre  fut  si  violent,  qu'il  passa  pour 
mort.  Un  le  lava,  on  le  revêtit,  on  le  mit  sur 
un  brancard,  et  on  passa  la  nuit  en  prières 
auprès  de  lui.  Le  lendemain  matin,  on  s'aper- 
çut qu'il  lemuail,  <t  qu'il  scniblail  s'éveiller 
d'un  pniloud  sommeil.  Il  ouvrit  les  yeux,  et 


AUTEmS  ECCLÉSIAS'nOLTES. 

levant  les  mains  au  ciel,  il  dit  :  «  Seigneur, 
pourquoi  m'avez-vous  renvoyé  en  ce  séjour 
.  ténébreux?  »  11  se  leva  pail'aitement  guéri, 
sans  toutefois  vouloir  parler  à  qui  que  ce  fût. 
Mais  trois  jours  après,  il  raconta  que  deux 
anges  l'avaient  enlevé  au  ciel  où  il  avait  vu 
la  gloire  du  paradis,  soit  en  songe,  soit  en 
vision  surnaturelle.  Saint  Grégoire  prend  Dieu 
à  témoin  qu'il  avait  ouï  cette  histoire  de  la 
bouche  même  d^sainl  Salvi,  qui  fut  ensuite 
tiré  de  sa  retraite  pour  être  fait  évêque  d'Al- 
bi,  où  il  mourut  en  583.  C'est  là  que  saint 
Grégoire  commence  son  septième  livre  ;  il  le 
finit  à  la  guerre  civile  que  les  Tourangeaux 
se  firent  la  même  année,  à  l'occasion  d'un 
enfant  qu'Austregisile  avait  tué,  et  dont  Si- 
charius  voulut  venger  la  mort.  La  famine  se 
fit  sentir  presque  par  toute  la  Gaule.  11  y  eut 
des  tremblements  de  terre,  des  signes  ex- 
traordinaires dans. le  ciel  ;  on  vit  les  arbres 
lleurir  pendant  l'hiver,  et  les  vignes  produire 
des  raisins,  mais  d'une  mauvaise  venue;  il 
parut  un  géant,  dont  la  taille  surpassait  de 
deux  ou  trois  pieds  celle  des  hommes  les  plus 
grands.  Une  femme  esclave,  qui  avait  l'esprit 
de  Python,  obtint  sa  liberté  par  les  grands 
profits  qu'elle  faisait  à  son  maitre.  Ceux  qui 
avaient  perdu  quelque  chose,  ou  souffert 
quelque  dommage,  venaient  à  elle;  ils  en 
apprenaient  le  nom  du  voleur  ou  du  malfai- 
teur, où  il  était  allé,  ce  qu'il  avait  fait  de  son 
vol,  où  il  l'avait  caché.  Ayant  gagné  beau- 
coup d'or  et  d'argent,  elle  se  vêtit  magnifi- 
quement; le  peuple,  quand  elle  paraissait 
en  public,  la  prenait  pour  une  divinité.  Saint 
Airic,  évêque  deVerdun, informé  de  ce  qu'elle 
faisait,  la  fit  venir,  l'exorcisa,  oignit  son  front 
de  l'huile  sainte;  le  démon  qui  la  possédait 
se  déclara,  mais  il  ne  voulut  point  sortir. 
Cette  femme,  abandonnée  à  elle-même,  se  re- 
tira auprès  de  la  reine  Frédégonde. 

lu.  Les  années  suivantes  furent  aussi  mar-  ,,""^';'5-'i't 
quées  par  des  événements  extraordinaii-es. 
Les  inondations  fréquentes  ravagèrent  les 
campagnes,  et  les  pluies  continuelles  rendi- 
rent l'été  semblable  à  l'hiver.  Deux  îles  de 
la  mer  fui-ent  consumées  par  le  feu  du  ciel 
avec  tous  les  habitants  et  tous  les  bestiaux. 
Les  eaux  d'un  étang  spacieux,  auprès  de  lu 
ville  de  Vannes,  furent  changées  en  sang  à 
une  aune  de  hauteur.  La  ville  de  Paris  fut 
jiresque  réduite  on  cendres,  à  l'exception  des 
églises,  et  des  maisons  quileur  appartenaient. 
Une  feuime  avait  pi<'dit  cet  incendie  trois 
jours  auparavant,  et  avait  averti  le  peuple  de 


CHAPITRE  XLIl. 


LUi.    I    Do 
îloria      Mar» 


[Vl'  SIÈCLE.] 

se  sauver  :  on  se  mo(iii;i  (rclh".  C'est  ce  que 
racoiilc  saint  Gn^goire  dans  le  liiiilii''me  livre, 
qu'il  coininence  an  voyaj;o  que  le  roi  Gon- 
tran  fit  à  Orléans  au  mois  de  juillet  de  l'an 
585,  et  qu'il  coniluil  jwsqu'A  la  moit  de  lAÎvi- 
pilde,  roi  d'Kspa^iie,  aiiivée  en  587,  la  dixiè- 
me année  de  son  règne.  11  y  parle  aussi 
du  second  concile  de  MAcon,  de  l'excommu- 
nication d'Ursicin,  évoque  de  Caliors,  pour 
avoir  re(;u  Gondebaud,  ennemi  déclan;  de 
Contran  ;  et  de  ^as:^assinat  de  l'rétextat,  évo- 
que de  Roueu.  L'esclave  qui  avait  faille  coup, 
avoua  à  la  question  qu'il  avait  reçu  de  la 
reine  Frédégonde  cent  sous  d'or  pour  faire 
cette  action,  cinquante  de  l'évcque  Méla- 
nius,  et  cinquante  de  l'archidiacre  de  Rouen. 
Sur  quoi  le  neveu  de  Prétextât,  tirant  son 
épée,  mit  en  pièces  l'assassin.  Molanius  avait 
été  mis  à  la  place  de  Prétextât  pendant  sou 
exil.  Frédégonde  le  rétablit  sur  le  siège  de 
Rouen  après  la  mort  de  cet  évêque. 

M.  Le  commencement  du  règne  de  Réca- 
rèdc,  fds  et  successeur  de  Lévigilde,  fait  ce- 
lui du  neuvième  livre,  qui  finit  aux  troubles 
excités  dans  le  monastère  de  Sainte-Croix  de 
Poitiers,  en  589,  par  Clirodielde,  fille  du  roi 
Cliérebert,  et  par  Basinc  sa  cousine,  fille  du 
roi  Chilpéric,  l'une  et  l'autre  religieuses  de  ce 
monastère.  Saint  Grégoire  donne  tout  le  dé- 
tail de  cette  atlaire,  avec  plusieurs  pièces  ori- 
ginales qui  regardent  l'établissement  de  cette 
maison  par  sainte  Radégonde.  Nous  aurons 
lieu  d'en  parler  au  long  dans  l'article  des 
conciles,  où  l'on  travailla  k  terminer  ces 
troubles  suivant  les  canons.  En  cette  année, 
le  dimanche  que  l'on  appelait  alors  Pàque 
close,  et  que  nous  appelons  l'octave  de  Pû- 
que  ou  Quasimodo,  il  tomba  une  pluie  si  pro- 
digieuse avec  de  la  grêle,  que  dans  l'espace 
de  trois  heures  l'on  voyait  couler  de  grands 
fleuves  par  les  plus  petites  ouvertures  des 
vallées;  les  arbres,  après  avoir  donné  leurs 
fruits,  fleurirent  de  nouveau  en  automne,  et 
produisirent  des  pommes  comme  auparavant, 
et  au  neuvième  mois  les  rosiers  fleurirent 
une  seconde  fois.  Mais  l'abondance  des  eaux 
causa  beaucoup  de  dommage  aux  moissons. 

12.  Le  dixième  livre  commence  à  la  quin- 
zième année  du  règne  de  Childebert,  de  Jé- 
sus-Christ 590.  Un  diacre  de  l'église  de  Tours, 
que  le  saint  avait  envoyé  à  Rome,  en  revint 
cette  année-là  avec  des  reliques  des  saints 
martyrs,  Paul,  Laurent,  Pancrace,  Chry- 
santhe,  et  de  quelques  autres,  que  le  pape 
Pelage  II  lui  avait  données.    Grégoire  rap- 


SAINT  GIlliGOIRE  DE  TOURS. 


371 


poila  (pie  l'année  précédente  589,  les  eaux 
(In  Tibre  s'étaient  tellement  (Millécs, qu'elles 
couvraient  la  ville  de  Home;  ce  qui  causa 
la  ruine  d'un  grand  nnndjre  de  maisons,  en 
particulier  des  greniers  de  l'Église,  et  la  plus 
grande  partie  des   blés  qui  y  étaient  en  ni- 
serve.  Au  mois  do  février  de  l'an  590,  le  pape 
Pelage  fut  emporté  par  une  maladie  conta- 
gieuse. Le  diacre  Grégoire,  élu  unanimement 
pour  lui  succéder,  fit  un  discours  au  peuple, 
à  qui  il  représenta  que  nous  devons  crain- 
dre au  moins  les  fléaux  de  Dieu  quand  nous 
les  sentons,  puisque  nous  n'avons  pas  su  les 
prévenir.  Il  le  finit  en  indi(iuant  une  proces- 
sion à  sept  bandes,  qui  devaient  se  rendre  le 
mercredi  suivant   à   Sainte-lMarie-Majeure. 
Saint  Grégoire  de  Tours  rapporte  ce  qui  se 
passa  à  l'élection  de  ce  saint  Pape,  le  détail 
de  la  procession  ou  litanie  qu'il  indiqua,  en 
remarquant  que  pendant  cette  procession, 
il  mourut   en  une  heure   quatre-vingts   de 
ceux  qui  y  assistaient  ;  mais  que  cette  cir- 
constance n'empêcha  point  le  nouveau  pon- 
tife d'exhorter  le  peuple,  et  de  prier  jusqu'à 
ce  que  la  maladie  fût  éteinte.  Il  passe  de  |là 
au  traité  que  Childebert  fil  avec  l'empereur 
Maurice,  et  à  son  expédition  contre  les  Lom- 
bards qui  étaient  entrés  en  Italie.  Il  donne 
la  suite  de  cette  guerre,  et  des  autres   que 
ce  prince  entreprit  depuis.  Ensuite  il  parle 
de  la  dispute  qu'ileut  lui-même  avec  un  des 
prêtres  de  son  église  sur  la  résurrection  des 
corps  ;  de  l'absolution  de  Chrodielde  et  de 
Basine;  de  l'emprisonnement  de  Gilles,  évo- 
que de  Reims;  de  la  sentence  de  mort  ren- 
due contre  lui,  pour  avoir  trempé  dans  une 
conspiration  contre  la  vie  du  roi  Childebert, 
et  des  variations  qu'il  y  eut  en  Occident  sur 
le  jour  de  la  célébration  de  la  Pâque  en  595, 
qui  fut  l'année  de  la  mort   de  Childebert. 
Plusieurs  dans  les  Gaules  célébrèrent  cette 
solennité  le  quinzième  de  la  lune.  A  Tours 
on  ne  la  célébra  que  le  vingt-deuxième  ;  et 
il  se  trouva  qu'en  ce  jour  les  fonts  miracu- 
leux d'Espagne  se  remplirent  à  l'ordinaire. 
Vers  le  même  temps,  on  'vit  dans  le  Gevau- 
dan  un  fanatique,  qui  se  disait  le  Christ.  Il 
avait  avec  lui  une  femme,  qu'il  nommait  Ma- 
rie. Il  guérissait  les  malades,  prédisait  l'ave- 
nir, le  tout  avec  le  secours  de  la  magie.  Plu- 
sieurs se  laissèrent  séduire.  Les  uns  lui  don- 
naient de  l'or  et  de  l'argent,  les  autres  des 
habits.  L'évêque  du  lieu  envoya  des  hommes 
résolus  et  vigoureux,  pour  savoir  de  lui  ce 
qu'il  prétendait  faire.  Un  d'eux,  feignant  de 


373 


mSTOIRE  GÉNÉRALE  DES  ALTEI'RS  ECCLÉSIASTIQUES. 


lui  baiser  les  genoux,  le  perra  de  son  coute- 
las. La  femme  de  ce  fanatique  avoua  dans 
les  supplices  tous  les  prestiges  dont  ils  s'é- 
taient sen-is  l'un  et  l'autre  pour  séduire  la 
populace.  A  Limogi^»*,  ])iusieurs,  pour  avoir 
méprisé  le  dimauciie,  et  fait  en  ce  saint 
jour  des  œuvres  sen'iles,  furent  consu- 
més par  le  feu  du  ciel.  Saint  Grégoire  fi- 
nit son  dixième  livre  par  le  Catalogue  des 
évoques  de  Tours,  avec  un  abrégé  de  leur 
vie.  Il  compte  pour  le  premier  saint  Gratien, 
qu'il  dit  avoir  été  envoyé  par  le  Pape,  la 
première  année  de  l'euipire  de  Dèce.  c'est- 
à-dire  eu  2'é'J,  et  ainsi  par  le  pape  Fabien. 
Il  marque  sur  Eustocbius,  cinquième  évo- 
que de  Tours,  les  jeûnes  et  les  veilles  qu'il 
avait  ordonnés  pour  certains  jours  de  l'an- 
née dans  son  diocèse  ;  après  quoi  il  fait  le 
détail  des  églises  qu'il  avait  lui-même  ré- 
parées, ou  construites;  des  reliques  dont 
il  avait  fait  la  translation;  des  oratoires  qu'il 
avait  consacrés;  des  ouvrages  qu'il  avait 
composés.  Il  met  en  piemier  lieu  les  dix  li- 
vres de  son  histoire,  quoiqu'ils  aient  été  écrits 
les  derniers.  Il  recommande  ;\  ses  succes- 
seurs d'en  avoir  un  grand  soin,  et  de  ne  pas 
permettre  qu'on  en  retranche  ou  qu'on  y 
ajoute  quelque  chose.  Suit  la  supputation 
des  temps,  depuis  la  créaliou  du  monde  jus- 
qu'à la  vingt-et-unième  année  de  son  épis- 
copat,  qui  comprend  selon  lui  l'espace  de 
5814  ans  :  ce  qui  montre  qu'il  suivait  le  cal- 
cul des  Grecs.  Mais  il  n'est  pas  toujours 
d'accord  avec  lui-même  sur  la  chronologie  , 
T..m.  op.  soit  qu'il  ait  suivi  des  calculs  différents ,  soit 
ytnA.,    pas.  qu'il  y  ait  fautc  dans  les  manuscrits.  Dans 

USA.  *  '^ 

celui  de  M.  Pilhou  ,au  heu  de  5814,  on  ht  5707. 


LiTTe  dft  U 
TiLiIra  dol 
Marljrra. 


Livre  de  la  Gloire  des  Martyrs. 

1.  Ce  traité  n'est  pas,  non  plus  que  l'his- 
toire des  Français,  placé  dans  la  nouvelle  ('di- 
tion  selon  l'ordre  chronologique;  saint  Gré- 
goire ne  le  composa  (ju'après  avoir  liui  le 
second  livre  des  miracles  de  saint  Martin , 
qui  y'  est  cité  deux  fois,  et  que  l'on  a  m'an- 
nu)ins  mis  à  la  suite  du  livre  de  la  Gloire  des 
Martyrs.  Mais  il  parait  que  l'éditeur  s'est  at- 
taché à  l'ordre  des  matières,  et  qu'il  a  cru 
plus  convenable  de  pailcr  dos  miracles  de 
Jésus -Christ,  et  de  la  gloire  des  martyrs, 
avant  de  raconter  les  mci-veilles  de  ceux  qui 

'  Greg.  lil).  De  Gloria  Martyr.,  [mg.  "13  et  81fi. 

'  Le  .Missel  Kiillicnu  et  lo  Xlis.-cl  (jullinnic  en  u^nge 

ou.\  vi"-'  et  Ml':  siècles,  expliquent  clairement  celte 


n'ont  rendu  témoignage  à  Jésus-Christ  que 
par  la  sainteté  de  leur  vie.  et  non  par  l'elfu- 
sion  de  leur  sang.  Ce  qui  engagea  le  saint 
évèque  à  composer  cet  ouvrage,  fut  le  désir 
d'édilier  l'Église  et  d'instruire  utilement  les 
fidèles,  en  leur  faisant  connaître  la  perfec- 
tion de  la  foi  par  l'exemple  de  ceux  qui  en 
ont  eu  une  parfaite.  Il  voulait  encore  les  dé- 
tourner de  la  lecture  des  fables  du  paganis- 
me, dont  les  poètes  ont  farci  leurs  vers.  Ce 
qu'il  en  dit,  quoiqu'en  peu  de  mots,  fait  voir 
qu'il  les  avait  lus,  mais  qu'il  en  avait  conçu 
du  mépris,  et  qu'il  craignait  d'en  être  répri- 
mandé et  puni  devant  le  tribunal  du  souve- 
rain Juge,  comme  l'avait  été  saint  Jérôme. 
Regardant  donc  tout  ce  que  les  poètes  ont 
dit  des  faux  dieux,  comme  des  choses  qui 
n'avaient  aucune  réalité,  il  prit  le  parti  de 
traiter  des  sujets  plus  solides,  et  de  puiser 
ce  qu'il  en  dirait,  dans  des  livres  dont  l'au- 
torité ne  pouvait  être  suspecte,  c'est-à-dire 
dans  les  évangiles  mêmes. 

2.  Ce  livre  est  divisé  en  cent  sept  chapitres,  cc  q.:i  ri 
dont  les  trois  premiers  sont  sur  la  naissance,  ii%r.d"'.-." 
les  nu  racles,  la  passion,  la  résurrection  et  I  as-  "i»t-  \it- 

*  d*    s      -e 

cension  de  Jésus-Christ.  L'auteur  rapportelà-  r."Mi.ic,|j 
dessus  ce  qu'on  en  lit  dans  l'Kcriture.  Mais,  ^^^'-'f  '-  "• 
à  l'occasion  de  l'étoile  qui  apparut  aux  ma- 
ges, il  raconte  sur  une  tradition  peu  fondée, 
que  les  pèlerins  qui  vont  à  Bethléem,  voient 
dans  un  puits,  qui  est  proche  de  la  caverne, 
cette  même  étoile,  lorsque  la  pureté  de  leur 
cœur  les  en  rend  dignes.  Il  est  le  premier 
des  anciens  qui  ait  dit  que  la  sainte  Vierge 
fut  après  sa  mort  enlevée  en  corps  et  en 
àme  dans  le  ciel*.  Pour  ce  qui  est  des  autres  ,,. 
circonstances  de  sa  mort,  il  les  avait  tirées 
de  l'écril  faussement  attribué  à  Méliton  de 
Sardes,  intitulé  :  Du  Passage  de  la  bienheureuse 
Marie.  Voici  encore  ce  qu'on  remarque  dans  y. 
ce  livre.  Sainte  Radégonde,  ayant  obtenu  de 
l'empereur  Justin  du  bois  de  la  croix,  le  plaça 
dévotement  dans  son  monastère  de  Poitiers, 
avec  quantité  de  reliques  des  saints  mar- 
tyrs et  confesseurs,  qu'elle  flt  venir  d'O- 
rient. Tous  li's  mercredis  et  vendi-edis,  on 
adorait  la  croix.  Celle  dévolion  attira  un 
grand  concoui's  de  peuple  à  l'église  de  ce  l 

monastère,  et  il  s'y  fit  plusieurs  miracles. 
Saint  Grégoire  en  rapporte ,  dont  il  |)rcud 
Dieu  à  témoin.  11  compte  quatre  clous  (jui 
servirent  à  attacher  le  Sauveur  sur  la  croix  ; 

crnyame.  Saint  flréfîoirc  n'est  donc  i>ns  le  piemier 
qui  en  ail  parlé.  {L'édileitr.) 


[VI"  SIÈCLE.] 

un  A  chaque  main  et  un  à  cIuuhk^  pied.  Des 

ctp.  Tr.  (iiiatie  L'Unis,  saiiile  IIiHi'iu;  en  jeta  un  dans 
la  mer  pour  la  rendre  plus  calme  ;  Constan- 
tin en  prit  deux  |iour  mettie  dans  le  mors 
de  sou  cheval;  il  lit  attacher  le  (lualrième  i\ 
son  casque  de  guerre.  La  lance,  le  roseau, 
la  couronne  d'épines,  et  la  colonne  à  laquelle 
le  Sauveur  fut  attaché  lorsqu'on  le  flagella, 
conimuniquaicnl  de  grandes  vertus  à  tout  ce 

"'•  qu'où    en  approchait,   (hi  montrait  encore 

la  lance  à  Jérusalem  sur  la  fin  du  vii°  siècle, 
ainsi  que  nous  l'apprenons  d'Adamnanus , 
moine  écossais ,  qui  écrivait  alors.  Quant 
à  la  tunique  sans  couture ,   saint   (-Irégoire 

VIII.  dit  qu'on  la  conservait  de  sou  temps  dans 

une  châsse  de  bois,  dans  la  ville  de  Galatée, 
ù  cent  cinquante  milles  de  Constantinople, 
en  une  église  nommée  des  Suints-Arc/taiiges. 
Elle  fut  apportée  en  France  sous  le  règne 
de  Charlemagne,  et  placée  dans  le  monastère 
d'Argenlcuil,  où  la  sœur  de  ce  prince  et  sa 

I.  fille    étaient  religieuses.  C'était  l'usage  en 

Orient,  que  loisqu'il  restait  beaucoup  de  par- 
licides  du  corps  de  Jésus -Christ  après  la 
communion,  l'on  envoyait  chercher  des  en- 
fants innocents,  de  ceux  qui  fréquentaient 
les  petites  écoles,  pour  les  leur  faire  consu- 
mer. Il  arriva  qu'un  certain  jour  où  l'on  cé- 
lébrait la  messe  dans  une  église  de  la  Sainte- 
Vierge,  on  fit  venir  avec  les  autres  un  en- 
fant Juif,  fils  d'un  vitrier.  Il  participa  au 
corps  et  au  sang  de  Jésus-Christ,  s'en  re- 
tourna fort  joyeux,  et  raconta  à  son  père  ce 
qui  s'était  passé.  Celui-ci,  oubliant  sa  ten- 
dresse paternelle ,  jeta  son  enfant  dans  sa 
fournaise,  qu'il  remplit  de  bois  plus  qu'à  l'or- 
dinaire, afin  que  le  feu  en  fût  plus  violent. 
La  mère,  infoi-mée  de  l'événement,  courut 
pour  délivrer  son  fils.  Mais  la  tlamme,  se  ré- 
pandant au  dehors  du  fourneau,  l'empêcha 
d'en  approcher.  Alors  jetant  à  terre  sa  coif- 
fure, elle  alla  parmi  la  ville  les  cheveux  é[iars, 
déplorant  son  malheur.  Les  chrétiens  acrou- 
rurent  au  bruit,  et  étant  venus  à  la  fournaise, 
ils  trouvèrent  l'enfant  qui  n'avait  reçu  aucun 
mal,  et  l'en  tirèrent.  Us  y  jetèrent  l'auteur 
du  crime,  qui  y  fut  aussitôt  consumé  et  ré- 
duit en  cendres.  On  demanda  à  l'enfant  com- 


CHAPITIIE  XLII.  —  SALNT  GIIEGOIRE  DE  TOURS. 


373 


ment  il  avait  t'té  garanti  du  feu  :  il  répon- 
dit qu'une  femme  ([ui  était  assise,  tenant  un 
enfant  entre  ses  bras,  dans  l'église  où  il 
avait  mangé  du  pain,  l'avait  couvert  de  son 
manteau  pour  le  préserver  des  llammes.  On 
instruisit  la  mère  de  l'enfant  dans  la  foi  ca- 
tholique, et  tous  deux  furiMil  baptisés,  avec 
plusieurs  Juifs  de  la  ville.  Il  parait  que  saint 
Grégoire  avait  pris  ce  lait  dans  l'hi.stoire 
ecclésiastique  d'I^vagre  où  il  est  rapporté, 
mais  plus  au  long  et  avec  quelque  dill'é- 
rencc.  On  peut  y  lemarquer  deux  choses 
considérables  :  la  première,  que  le  pain  que 
l'enfant  dit  avoir  reçu  dans  l'église,  est  ap- 
pelé par  saint  Griigoire  ',  le  corps  et  le  sang 
du  Seigneur  ;  la  seconde,  que  c'était  l'usage 
dès  lors  -  de  mettre  dans  l'église  l'image  de 
la  Vierge,  et  de  la  représenter  tenant  son 
fils  entre  ses  bras.  Il  ajoute,  que  s'étant  ren- 
contré dans  un  voyage  aufirès  d'une  mai- 
son qui  était  toute  en  llammes,  il  avait  élevé' 
contre  le  feu  sa  cioix  pectorale  où  il  y  avait 
des  reliques  de  la  sainte  Vierge  et  des  apô- 
tres, et  qu'aussitôt  le  feu  avait  cessé  d'agir. 
La  croix  pectorale  n'était  point  un  ornement 
particulier  aux  évèques;  l'usage  était  com- 
mun d'en  porter  au  cou,  remplies  de  reli- 
ques des  saints.  Le  saint  parle  d'une  fiole 
du  sang  de  saint  Jean-Baptiste,  recueilli  par 
une  dame  Gauloise  qui  se  trouva  à  Jérusa- 
lem lors  de  la  décollation  du  précurseur  de 
Jésus-Christ;  elle  la  rapporta  dans  sa  patrie, 
et  la  mit  dans  un  autel  qu'elle  fit  ériger  à 
Bazas  avec  une  église  à  l'honneur  de  saint 
Jean.  Il  parle  aussi  d'un  pouce  et  de  quel- 
ques autres  reliques  du  même  saint  ;  des 
guérisons  miraculeuses  de  lépreux,  lorsqu'ils 
se  lavaient  dans  l'endroit  du  Jourdain  où  le 
Sauveur  avait  été  baptisé  ;  d'une  statue  de 
Jésus-Christ  faite  d'ambre  jaune,  dans  la  ville 
de  Panéade  ;  d'une  image  du  même  Sauveur 
qui,  ayant  été  percée  par  un  Juif  avec  un 
dard,  rendit  du  sang;  d'une  apparition  faite 
à  un  prêtre,  dans  laquelle  il  lui  fut  ordonné 
de  couvrir  un  crucifix  qui  était  entièrement 
nu  :  d'où  l'on  croit  qu'est  venue  la  coutume 
de  peindre  les  crucifix  avec  un  périsome,  ou 
une  robe  qui  descend  jusqu'aux  pieds. 


El»;.,  Mil. 
IV  ,  fip. 
>.\xvl. 


Cap.  VI. 


'  Ad  participationem  gloriosi  corporis  et  sau- 
guinis  Dominici,  cum  aliis  infantibus  infans  ju- 
daus  accessit.  Greg.  lib.  ]  DeGloria Martyr. ,cni).  x. 

*  ilulier  quœ  in  basilica  illa  tibi  panent  de 
mensa  accepi,  in  cathedra  residens,  parvulum  in 
sinu  geslal  infanlem,  hœc  me paUio  suo,ne  ignis 
voraret,  operuU.  Ibid. 


3  Tune  extractam  e  pectore  crucem  elevo  con- 
tra ignem  :  mox  in  aspectu  .'■anctarum  reliquia- 
rum  ita  cunrius  ignis  obstupuit  ac  si  non  fuisset 
accensus.  Ibid.,  cap.  u.  Ilujus  beatœ  Virginis  re- 
liquiai  cum  sanctoruni  apostolorum  in  cruce  aii- 
rea  positas  exhibcbam.  Ibid. 


374 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Dd  marljre 
de*  ApA(r*>, 
|1S.  T,9,af, 
>zrii-xxsiii. 


VIUS.  Vil- 
libild,  Dnm.Sf 
3.  parte  m£cuI> 
3  Beoedictia. 


De  lalnt 
E'iTn^  et  de 
quelqu"'  aii- 
Ire»  ilarlrrs. 
lis-  '5*.  "P. 
XXtIT,  XSXT, 
lUTlII. 


3.  Saint  Grégoire  rapporte  après  cela  ce 
qu'il  savait  du  martyre  des  apôtres  saint  Jac- 
ques, saint  Pierre,  saint  Paul,  saint  Jean, 
saint  André,  saint  Thomas  et  saint  Barthé- 
lémi.  Il  dit  que  saint  Pierre  ordonna  aux 
clercs  de  porter  la  tonsure,  en  quoi  il  est 
suivi  des  écrivains  du  moyen  âge  ;  que  cet 
aptjlre  fut  enterré  dans  le  Vatican  ;  que  son 
tombeau  était  orné  de  quatre-vingt-seize  co- 
lonnes d'une  grande  beauté;  qu'il  y  en  avait 
quatre  à  l'autel;  ce  qui  faisait  cent  en  tout, 
sans  compter  celles  qui  soutenaient  un  ci- 
boire au-dessus  de  son  tombeau,  c'est-à- 
dire  un  tabernacle  en  forme  de  tour  qui  le 
couvrait  ;  que  les  linges  et  les  vêtements 
que  l'on  aJ)procIiait  de  ce  tombeau  en  rece- 
vaient une  vertu  qui  rendait  la  santé  aux 
malades  ;  que  saint  Paul  souifrit  le  martyre 
le  même  jour  que  saint  Pierre,  mais  seule- 
ment un  an  après;  que  saint  Jean,  après 
avoir  achevé  sa  carrière,  entra  tout  vivant 
dans  le  tombeau  ;  qu'il  se  fit  lui-même  cou- 
vrir de  terre  ;  qu'il  coule  encore  de  son  tom- 
beau une  manne  semblable  à  de  la  farine 
(on  lit  la  même  chose  dans  la  seconde  vie  de 
saint  Villibald,  écrite  dans  le  huitième  siè- 
cle); que  riiuile  qui  découle  de  celui  de  saint 
Andi-é  à  Patras,  où  il  soufl'rit  le  martyre,  a 
une  odeur  comme  un  composé  d'aromates  ; 
que  dans  le  lieu  où  saint  Thomas  fut  enterré 
d'abord,  il  y  a  une  lampe  qui  ne  s'éteint  ja- 
mais, sans  qu'il  soit  besoin  d'y  mettre  de 
l'huile,  ou  quelque  autre  liqueur. 

4.  Des  aptjtres,  saint  Grégoire  passe  aux 
martyrs.  11  commence  par  saint  Etienne,  dont 
il  dit  que  l'on  conservait  une  fiole  de  sang 
dans  l'église  de  Bouiges;  on  l'y  voit  encore 
aujourd'hui.  11  suit,  dans  ce  qu'il  dit  du  pape 
saint  Clément,  ct""  qu'on  en  lit  dans  les  actes 
qui  portent  son  nom,  mais  que  l'on  regarde 
comme  supposés.  11  fait  la  même  chose  à 
l'égard  de  saint  Chrysanthe.  11  convient  qu'il 
s'en  est  rapporté  h  la  tradition  des  fidèles 
en  ce  qu'il  raconte  de  saint  Jean,  évêque  et 
martyr,  parce  qu'il  n'avait  pas  les  actes  de 
son  martyre.  L'anonyme  donné  par  M.  de 
Vallois  avec  Ammicn  Marcellin,  est  préféra- 
ble à  tous  les  autres  qui  ont  écrit  sur  ce  su- 
jet. Pour  montrer  quelle  est  la  force  et  la 
vertu  de  la  foi  et  du  nom  des  chrétiens,  saint 
Grégoire  rapporte,  d'après  Prudence  dans 
son  livre  contre  les  Juifs,  intitulé  ordinaire- 
ment Apothéose,  ce  qui  arriva  ;■)  Dioclétien 
dans  le  temps  qu'il  s'occupait  à  faire  des  sa- 
crifices à  ses  dieux,  et  h  chercher  avec  Ics 


sacrificateurs  dans  les  entrailles  des  victimes 
la  connaissance  de  ce  qui  devait  lui  arriver. 
L'un  d'eux  s'écria  que  la  présence  de  quel- 
ques profanes  faisait  fuir  les  dieux,  et  con- 
jura l'Empereur  de  s'informer  s'il  n'y  avait 
pas  là  quelqu'un  qui  eût  été  baptisé  et  oint 
de  baume.  Alors  un  de  ses  officiers  se  pré- 
senta, et  jetant  ses  armes  à  terre,  professa 
à  haute  voix  qu'il  était  chrétien,  et  qu'il  n'a- 
vait Cessé  d'invoquer  le  nom  de  Jésus-Christ 
pendant  que  les  sacrificateurs  immolaient 
aux  faux  dieux.  Ce  prince  épouvanté  se  sau- 
va du  temple  à  son  palais,  sans  être  suivi  de 
pei'sonne.  Mais  tous  les  assistants,  pénétrés 
d'une  crainte  salutaire,  louèrent  et  glorifiè- 
rent Jésus-Christ  Notra-Seigneur,  en  levant 
les  yeux  et  les  mains  au  ciel.  Lactance  ra- 
conte à  peu  près  la  même  chose  dans  son 
livre  qui  a  pour  titre  :  De  la  mort  des  j^rsé- 
culeurs. 

5.  Le  poëte  Prudence  a  aussi  décrit  le 
martyre  de  saint  Cassien,  dont  saint  Gré- 
goire ne  dit  que  peu  de  chose.  En  général, 
il  s'applique  plus  dans  cet  ouvrage  à  recueil- 
lir les  miracles  qui  se  sont  opérés  aux  tom- 
beaux des  martyrs  dont  il  parle,  ou  par  l'at- 
touchement de  leurs  reliques,  qu'à  donner 
le  précis  de  leurs  actes.  11  mêle  dans  ce  ré- 
cit la  dispute  d'un  catholique  avec  un  arien 
sur  le  mystère  de  la  Trinité.  Apres  beaucoup 
de  paroles  et  de  raisonnements  de  part  et 
d'autre,  on  convint  de  l'épreuve  du  feu.  Elle 
réussit  en  faveur  du  catholique,  et  l'arien 
dcmcina  confus,  ayant  la  main  brûlée  jus- 
qu'aux os  pour  avoir  voulu  tenter  ce  que  le 
catholique  avriit  fait  sans  en  ressentir  aucun 
mal.  Il  y  rapporte  aussi  la  manière  miracu- 
leuse dont  un  prêtre,  nommé  Épachius,  fut 
puni,  poin-  avoir  osé  célébrer  les  saints  mys- 
tères après  avoirdéjeûné.  Il  pronon(;a  les  pa- 
roles de  la  consécration,  il  rompit  le  sacre- 
ment du  corps  du  Seigneur,  le  distribua  aux 
autres;  mais  il  ne  put  entamer  avec  ses  dents 
la  particule  du  saint  mystère  qu'il  avait  prise 
pour  lui ,  et  fut  contraint  de  la  jeter.  Ce 
traité  est  fait  sans  méthode.  Le  saint  n'y 
suit  point  l'ordre  des  temps.  Il  parle  des 
martyrs  selon  qu'ils  se  présentaient  à  sa  mé- 
moire, ou  qu'ils  étaient  placés  daas  son  ca- 
lendrier. 

§111. 

Livre  II  du  martyre,  des  miracles  et  de  la 
gloire  de  saint  Julien. 

1.  Ce  livre  est  une  suite  du  précédent; 


De  S.  Cal- 
fleuelde<]ocl. 
quea  autres 
martyr",   fait. 

Cap.XLiii. 


[vr  SIÈCLE.] 

m«'i)r»jfS.   aussi  lo  coinptc-l-oii  pour  le  second  delà 

Jollotli  ."A*  rc- 

'»•  Gloire  des  Martijrs.  Il  paraît  que  saint  Gré- 

goire do  Tours  ne  traita  sé[iai('in(!nt  do  saint 
Julien,  martyr  ;\  Brioude  en  Auvergne,  qu'à 
cause  de  la  quantité  des  miracles  opérés,  ou 
à  son  tombeau,  ou  par  son  inlercession.il 
avait,  ce  semble,  mis  à  la  tête  de  ce  livre 
les  actes  de  son  martyre,  le  tilrc  en  est  une 
preuve,  puisqu'il  porte  :  De  lu  passion,  des 
vertus  et  de  la  gloire  de  sairtt  Julien.  Il  est 
vrai  que  le  premier  chapitre  contient  en 
abrégé  l'histoire  de  la  passion  du  saint,  telle 
qu'on  la  trouve  dans  les  actes  ;  mais  ce  n'est 
qu'un  précis;  et  dans  deux  anciens  manus- 
crits ,  les  actes  sont  rapportés  en  entier, 
après  les  quatre  premières  lignes  de  ce  cha- 
p«t,  i»6s.  pitre.  Dom  Ruiu:!rt  les  a  mis  à  la  l\\\  des  teu- 
vres  de  saint  Grégoire.  Vers  l'an  302,  il  s'é- 
leva une  violente  persécution  contre  les  chré- 
tiens de  la  part  des  païens.  Saint  Julien  brû- 
lait de  zèle  pour  répandre  son  sang  en  l'hon- 
neur de  Jésus-Christ  ;  mais  sachant  que  la 
persécution  s'approchait  de  Vienne,  lieu  de 
sa  naissance,  aux  instances  de  saint  Ferréol, 
et  suivant  le  précepte  deTÉvangile,  ilse  sauva 
dans  une  autre  ville ,  où  il  demeura  caché 
quelque  temps.  C'était  à  Brioude  eu  .\uver- 
gne.  La  persécution  l'y  suivit,  et  il  y  soull'rit 
le  martyre  par  le  glaive.  Son  corps  resta  à 
Brioude  ;  mais  ou  envoya  sa  tête  à  Vienne, 
qui  fut  placée  dans  la  loême  église  où  était 
le  corps  de  saint  Ferréol. 

2.  Les  miracles  qui  s'opérèrent  au  tombeau 
de  saint  Julien  furent  suivis  de  la  conversion 
d'un  grand  nombre  d'idolâtres.  11  y  eut  des 
paralytiques  guéris,  des  sourds  qui  recou- 
vrèrent l'ouïe  ,  des  aveugles  à  qui  la  vue 
fut  rendue.  Pierre  ,  fière  de  saint  Grégoire  , 
fut  délivré  de  la  fièvre,  en  faisant  mettre, 
autour  de  son  cou,  de  la  poussière  qui  était 
proche  du  tombeau  du  saint.  Saint  Grégoire 
lui-même  fut  guéri  d'un  mal  de  tète  que  lui 
avait  causé  un  coup  de  soleil ,  en  répandant 
sur  sa  tète  de  l'eau  de  la  fontaine  où  les 
bourreaux  avaient  plongé  le  chef  de  saint 
Julien.  Ces  merveilles  tirent  naître  à  plu- 
siem's  le  désir  d'avoir  de  ses  reliques.  On 
en  transporta  à  Reims  et  même  en  Orient. 
Saint  Grégoire  en  apporta  à  Tours,  et  quoi- 
qu'elles ne  consistassent  que  dans  les  fran- 
ges de  la  nappe  qui  couvrait  le  tombeau  de 
saint  Julien,  elles  opérèi-ent  divers  miracles. 


CIIAriTIlE  XLII.  —  SAINT  GHI^XiOinE  DE  TOdHS. 


,•«7.5 


s.        Juli.r 
II,  «i.ii:. 


Cao;  xu. 


XTxii.xxxtr'i 


I.Wrt  do  II 
r.lotra  de» 
Confe.seum. 


Ce  que  con- 
fleiil  ce  livre, 


§iv. 

Livre  de  la  Gloire  des  Confesseurs. 

1 .  En  suivant  l'ordre  des  anciens  manus- 
crits, il  faudrait  mettre  ce  livre  lo  deinier; 
et  saint  Grégoire  l'appelle  lui-même'  le  hui- 
tième. Il  paraît  toutefois  qu'il  l'éci'ivit  après' 
la  Vie  de  saint  Martin,  et  quelques  chapi- 
tres' des  Vies  des  Pères.  Mais  il  peut  ne  l'a- 
voir compté  que  pour  1(î  huitième  ,  parce 
qu'il  l'avait  revu  et  corrigé  le  dernier  de 
tous,  à  l'exception  de  son  Histoire,  qui  est 
constamment  le  dernier  de  ses  ouvrages. 
On  voit  par  le  chapitre  quatre-vingt-quin- 
zième, cpii  a  pour  titre  :  De  saint  Médurd  de 
Soissons,  qu'alors  Charimir,  qui  eu  388  succé- 
da à  saint  Airic  dans  l'évêché  de  Verdun, 
était  référendaire  du  roi  Childebert  II.  Le 
livre  de  la  Gloire  des  Confesseurs  fut  donc 
écrit  avant  cette  année-là,  plus  de  trois  ans 
avant  le  dixième  livre  de  l'Histoire,  qui  ne 
Huit  qu'en  .^i'Jl  à  la  mort  de  saint  Yrieix,  ab- 
bé en  Limousin. 

2.  Saint  Grégoire  avait  commencé  son  li- 
vre de  la  Gloire  des  Martyrs  par  celle  de  p^s*»'- 
Jésus-Christ;  il  commence  celui  de  la  Gloire 
des  Confesseurs  par  un  chapitre  où  il  traite 
de  celle  des  anges.  Puis  il  raconte  les  mi- 
racles opérés  aux  tombeaux ,  ou  par  l'at- 
touchement des  reliques  d'un  grand  nom- 
bre de  saints  et  de  saintes,  évêques ,  abbés, 
solitaires,  prêtres,  reclus,  vierges,  femmes  , 
dont  il  rapporte  ordinairement  quelques  ac- 
tions de  piété,  avec  les  noms  des  lieux  où  ils 
se  sont  sanctifiés,  et  ont  travaillé  à  la  sanctifi- 
cation des  autres.  11  pouvait  avoir  eu  aisé- 
ment connaissance  des  merveilles  qu'il  rap- 
porte ,  parce  qu'elles  s'étaient  passées  la 
plupart  dans  diverses  provinces  des  Gaules, 
dans  la  Touraine  ,  dans  l'Auvergne  ,  dans  le 
Berry,  dans  le  Limousin  ,  dans  le  Périgord , 
dans  l'Angoumois  ,  dans  la  Saintonge  ,  dans 
le  Poitou.  Ce  qu'il  dit,  dans  le  chapitre  ving- 
tième, de  la  consécration  d'un  oratoire  est 
remarquable.  On  passait  la  nuit  ''  dans  le 
chant  des  psaumes  ;  le  malin  on  consacrait 
l'autel  ;  on  portait  dans  cet  oratoire  des  re- 
liques des  martyrs ,  au  milieu  des  cierges 
allumés  ;  les  reliques  étaient  couvertes  de 
nappes  et  de  quelques  autres  ornements. 
Les  prêtres  et  les  lévites  assistaient  à  la  cé- 


Cap.  vx, 


'  Greg.  Prœfat.  in  lib.  De  Glor.  Conf. 
'  Ihid.,  pag.  910.  —  3  Ibid.,  pag.  915,  926. 


*  Qua  diligenter  composila  et  altari  ex  more 
localo,  ad  basilivain  sanclam  vigiliis  noclem  unam 


376 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


rémonie  vêtus  d'aubes  ;  les  plus  honorables 
de  la  ville  et  le  peuple  s'y  trouvaient,  et  dans 
la  procession  qui  se  faisait  de  l'église  où  l'on 
avait  pris  les  reliques  à  l'oratoire  que  l'on 
devait  consacrer,  on  portait  beaucoup  de 
cip.  jji..  croix.  Il  dit ,  en  parlant  de  l'abbé  Maxime  , 
qui  s'était  retiré  à  l'Ile-Baibe  pour  y  vivre 
inconnu,  que  se  voyant  découvert,  il  prit  le 
parti  de  retourner  a  son  pays  ',  emportant 
avec  lui  le  livre  des  Évangiles  avec  un  ca- 
lice et  une  petite  patène,  le  tout  suspendu  à 
son  cou.  C'est  ce  que  saint  Grégoire  appelle 
le  ministère  quotidien ,  parce  que  Maxime 
était  prêtre,  et  qu'il  avait  besoin  de  tout  cela 
pour  la  célébration  des  saints  mystères.  11 
ajoute  qu^  comme  il  passait  la  Saône,  le  ba- 
teau fut  submergé  ;  mais  que  Dieu  n'ayant 
pas  voulu  laisser  périr  ce  qui  lui  appar- 
tenait, Maxime  fut  sauvé  du  naufrage  avec 
N^ir.  tout  ce  qu'il  avait  sur  lui.  Dans  le  trente- 
unième  cbapitre,  il  fait  mention  de  l'usa- 
ge où  étaient  '  les  prêtres,  même  en  voya- 
ge, de  se  lever  la  nuit  pour  vaquer  à  la 
prière.  Il  raconte  '  du  prêtre  Sévère,  qu'a- 
i.  yant  bâti  deux  églises  et  mis  dans  cha- 
cune des  reliques  des  saints,  il  avait  cou- 
tume tous  les  dimanclies  de  dire  la  messe 
dans  ces  deux  églises ,  quoique  assez  éloi- 
gnées l'une  de  l'autre,  et  d'en  orner  les  mu- 
railles de  Heurs,  daus  le  temps  des  lis.  On 
voit,  parce  qu'il  rapporte  un  peu  après,  que 
l'ancienne  manière  de  canoniser  les  saints 
était  d'élever  la  terre  de  leurs  tombeaux,  ce 


qui  se  faisait  par  degrés  ',  et  à  mesure  qu'ils  c  .-.  lv 
donnaient  par  des  miracles  des  preuves  de 
leur  sainteté.  C'en  était  une  grande  preuve, 
quand  le  tombeau  s'élevait  de  lui-même , 
comme  il  arriva  à  celui  de  saint  Droctovée, 
premier  abbé  de  Saint-Germain-des-Prés. 
Alors,  on  dressait  un  autel  sur  leur  tom- 
beau. 

3.  Deux  personnes  mariées,  qui  n'avaient  i.xr. 
point  d'enfants,  laissèrent  à  l'Eglise  leur 
succession.  Le  mari  mourut  le  premier,  et 
fut  enterré  dans  la  basilique  de  la  sainte 
Vierge.  La  femme  y  alla  pendant 'un  an  en- 
tier faire  de  fréquentes  prières,  célébrant 
tous  les  jours  la  messe  (c'est  le  terme  dont 
se  sert  saint  Grégoire  pour  dire  qu'elle  y  as- 
sistait), et  faisant  offrir  le  sacrifice  pour  la 
mémoire  de  son  mari,  persuadée  qu'il  en 
recevait  du  soulagement ,  à  cliaque  fois 
qu'elle  offrait  pour  lui  quelque  chose  au  Sei- 
gneur. Elle  fournissait  aussi  le  vin  pour  les 
sacrifices  qu'on  offrait  dans  celte  église  ; 
mais  quoiqu'elle  assistât  tous  les  jours  à  la 
messe,  elle  ne  communiait  pas  chaque  fois  : 
ce  qui  donna  lieu  à  un  sous-diacre  de  rete- 
nir le  vin  qu'elle  donnait,  et  d'y  suppléer  par 
du  vinaigre.  La  femme,  s'en  étant  aperçue 
en  un  jour  de  communion,  réprimanda  le 
sous-diacre,  qui  se  corrigea.  11  est  remar-  *•""• 
que  dans  l'article  de  saint  Simplice,  évêque 
d'Aulun,  que  voyant  un  jour  les  païens,  qui 
restaient  encore  dans  son  diocèse,  conduire 
parmi  les  campagnes  l'idole  de  Bérécynthia, 


ducentes  ;  mane  vero  venientes  ad  cellulam,  ai- 
tare  quod  erexeramus  sanctificavimus.  Rcriressi- 
que  ad  basUicam,  sanclas  ejus  iMartmi)  relùjUias 
cum  Satuniiiti  JuliaiUque  marlyruin  vtl  etiain 
beali  lUiiiii  exindc  solemniler  radianlibus  cereis 
crucibiis  que  admovimuK.  Eral  autem  sactrdoium 
aclevilarttm  ijtalbisvestibus  non  miiiimus  chorus 
el  civium  honnratorum  ordo  practarus ;  sed  et 
populi  sequenlis  ordinis  nwgnus  coiivenlus.Cnm- 
que  sancla  pignora,  palliis  ne  mappis  eiornaUt, 
in  excclsum  defcrremus,  perveniiiius  ad  oslium 
oratorii.  Lib.  De  Gloria  Confess.,  cap.  xx. 

'  Dum  Ararim  Iransire  cuperet,  nave  implela, 
demcrgilitr,  ac  ipsc  sacerdoa  pelago  operilur.  lui- 
bens  ad  collum  cum  Eviingelionim  lihro  ininiste- 
rium  quotidianum,  id  est  piilenulam  parram  cum 
calice.  Iliiil.,  cnp.  xxii. 

»  Qua  mansiorie  accepta  juxla  morem  sacer- 
dotum,  nocli'  ab  ulralu  suo  consurgens  orationi 
adalilil.  Ihid.,  cap.  xxxi. 

'  Severus  in  rure  donius  Serciaccnsis,  quod  in 
ejus  sessione  subsislchal,  Ecctesiam  œdificauit  ; 
exindc  itcrum  in  alia  rilla  (Uiud  irdificaitt  tcm- 
plum  Dei,  ulruutquc  tiimen  sanclorum  reliquiis 
communivil.  Cum  aulem  dies  Dominicus  adve- 


nisset,  celebratis  missis  in  «no  loco,  ad  alium 
pergebat.  Erut  ntitem  inter  ulrasque  Ecclesiaf: 
spatiuni  qunsi  millium  viginti.  Hoc  ei  opus  erat 
pcr  singulos  dies  Dominicos.  lbi<I.,  cap.  l. 

'  Qui  cum  mullorum  annorum  currxculoinhis, 
ubi  sepulti  suiit,  loculis  quiescerent,  scissum  nur 
per  pnvimenium  qxiod  cnlce  atque  comminula 
testa  qua^i  silice  durissima  fusum  erat,  uniiw 
sepulchri  cacunu  n  apparuit  :  quo  paululum  ele- 
valo,  lellus  scissa  apicem  ollerius palefecil,  illo- 
que  emicante,  seculus  est  tertius  tumulus  :  qui 
nunc,  juxla  inilium  ostensionis  suœ,  gradatim  éle- 
vant ur  super  terrain;  sed  7iunc  jam  prinius,  liber 
a  mole  tcrrenii,  liberum  se  prwstal  lisibus liuma- 
nis.  Duo  adhuc  sequunlur ;  sed  aniiiis  singulis 
proficiunt  ad  egresstiin.  IMd.,  cnp.  lu. 

'■  Mulier  vero  per  annum  inlegrum  ad  hoc  tem- 
pluin  drgcns  assidue  orationi  racabat,  célébrons 
quolidie  mifsarum  solcntnin ,  el  offcrens  oblatio- 
neni  pro  memoria  viri  :  non  diflisa  de  Domini  mi- 
sericordia,  quod  haberel  di'fu7iclus  requiem  :  in  die 
qua  Oomino  oblationeni  pro  ejus  anvnn  itclibas- 
sel,sciiiper  scxlarium  fViccli  fini  pru'hens  in  sa- 
crï/iciitm  basilica;  sancla;.  Ibid.,  cap.  lxv. 


[Vl*  SIÈCLE.] 

nionlde  sur  un  chariot ,  pour  la  conserva- 
tion de  leurs  champs  et  de  leurs  viçnes  , 
chantant  et  dansant  devant  ce  simulacre,  il 
pria  Dieu  de  dissiper  l'aveuglement  de  ce 
peuple  ;  cl  qu'aj-ant  fait  le  signe  de  la  croix 
sur  la  statue,  cette  divinité  fut  renversée  par 
terre,  sans  que  les  bœufs  qui  menaient  le 
chariot  pussent  se  mouvoir  de  leur  place  : 
ce  qui  occasionna  la  conversion  de  ces  infi- 
dMcs.  11  leur  était  ordinaire  de  porter  leurs 
faux  dieux  dans  les  campagnes  pour  les  ren- 
dre fertiles.  A  Reims,  dans  une  peste  qui 
désolait  la  ville,  on  porta  en  procession  le 
suaire  ou  la  nappe  qui  couvrait  le  corps  de 
saint  Remy,  et  la  calamité  cessa.  Celte  pro- 

cp.  ,,„,,  cession  fut  accompagnée  du  chant  des  psau- 
mes ;  les  cierges  '  que  l'on  portait  allumés, 
étaient  attachés  à  la  croix.  Saint  Ursin,  évô- 

.uii.  que  de  Bourges,  fut  enterré  dans  un  champ 

de  la  ville  '  avec  le  reste  du  peuple,  les  ha- 
bitants de  cette  ville  ne  sachant  pas  encore 
que  les  évêqiies  en  ces  occasions  méritaient 
des  attentions  plus  particulières  que  les 
simples  fîdMes,  qu'il  était  défendu  d'enter- 

u.Tri,,  rer  ailleurs  que  dans  les  campagnes.  Un 
homme  qui  avait  tué  son  frère,  fut  condam- 
né par  le  prêtre  pénitencier  t\  parcourir  les 
lieux  saints  pendant  sept  ans,  ceint  de  cer- 
cles de  fer.  Charlemagne  défendit  ces  sortes 
de  pénitences;  mais  on  ne  laissa  pas  d'en 
voir  des  exemples  depuis. 

icTin.  4.  Saint  Grégoire  raconte  qu'il  avait  ap- 

pris d'un  abbé,  qui  l'en  avait  assuré  même 
avec  serment,  qu'un  solitaire  faisait  cuire 
dans  un  chaudron  de  bois  les  légumes  et 
tout  ce  qu'il  préparait  à  manger,  soit  pour 
lui,  soit  pour  les  étrangers  qui  le  venaient 
voir,  et  que  le  feu  ne  l'endommageait  point, 
quelque  ardent  qu'il  fût.  En  parlant  des  ob- 
sèques de  sainte  Radégonde,  il  nous  apprend 
que  l'usage' était  de  faire  bénir  les  cime- 
tières ,  avant  d'y  enterrer  personne ,  et 
d'y  mettre  un  autel  où  l'on  ofi'rait  le  sacri- 
fice pour  les  morts  ,  mais  que  ces  bénédic- 
tions étaient  réservées  à  l'évêque  diocésain. 


CHAPITRE  XI.II.  —  SAINT  GRÉGOIRE  HE  TOURS. 


3-7 


ton        clercé, 


§v. 

Des  miracles  de  saint  Martin. 

1.  Les  miracles  que  saint  Martin  avait  faits 
do  son  vivant  ,  étaient  d'un  poids  d'autant 
plus  grand  pourall'ermir  la  foi  des  chrétiens, 
qu'il  s'en  faisait  tous  les  jours  de  nouveaux  à 
son  tombeau.  On  y  voyait  des  boiteux  guéris 
et  marcher  avec  liberté,  des  aveugles  recou- 
vrer la  vue,  des  possédés  délivrés  de  la  tyran- 
nie du  démon;  toutes  les  maladies  y  trouvaient 
leur  guérison.  Il  y  avait,  dès  avant  saint  Gré- 
goire ,  un  livre  de  la  vie  de  saint  Martin; 
Paulin  et  Sévère-Sulpice  avaient  aussi  écrit 
sur  ce  sujet,  l'un  en  vers  et  l'autre  en  prose  : 
mais  ils  n'avaient  pas  loat  dit,  et  il  s'était 
passé  beaucoup  d'événements  considérables, 
depuis  qu'ils  avaient  fini  leurs  ouvrages. 
Saint  Grégoire,  profitant  de  ce  qu'ils  avaient 
écrit,  composa  un  recueil  des  miracles  de 
saint  Martin,  qu'il  a  distribué  en  quatre  li- 
vres. 

2.  Si  ce  n'est  pas  une  faute  de  copistes, 
il  s'est  trompé  en  attribuant  h  saint  Paulin 
de  Xole  six  livres  en  vers  des  vertus  de  saint 
Martin.  L'auteur  avait  appris  une  grande 
partie  de  ce  qu'il  en  rapporte,  de  saint  Per- 
pétue ,  sixième  évéque  de  Tours  depuis 
saint  Martin  :  ce  ne  pouvait  donc  être  saint 
Paulin  de  Noie,  contemporain  de  ce  saint. 
Il  y  a  plus,  c'est  que  cet  écrivain  loue  sou- 
vent saint  Paulin  de  Noie.  Ces  six  livres  sont       vojei  i^ 

,  huitièmeTolii- 

attribues  dans  un  manuscrit  à  Paulin  de  Pe-  n,..  pag.  39oi 
rigueux.  Samt  uregou-e  commence  son  pre- 
mier livre  par  le  récit  des  merveilles  qui  ar- 
rivèrent le  jour  de  la  mort  de  saint  Martin, 
qu'il  met  à  la  quatre-vingt-unième  année  de 
son  âge,  sous  le  consulat  de  Césaire  et  d'At-    cnp  m. 
tiens,  au  milieu  de  la  nuit  d'un  dimanche. Elle 
fut  révélée  presqu'à  l'instant  à  saint  Se  vérin,      "■■ 
évéque  de  Cologne,   et  à  saint   Ambroise, 
évêque  de  Milan.  La   translation  de  ses  reli- 
ques par  saint  Perpétue,  l'un  de  ses  succès-     v  . 
sem-s,  fut  aussi  accompagnée  de  prodiges. 


P:i!ii;ler  li- 
vre (les  iiii'rt- 
rles  do  ?ainl 
Martin,     [a;;. 


'  Accensisque  super  cruces  cereis  alque  cerofe- 
ralibus,  dant  voces  in  canticis,  circumeunt  ur- 
bem  cum  vicis.  Ibid.,  cap.  lxxix. 

'  Oui  migrans  a  sœculo.incampo  interreliqua 
sepulchra  populorum  sepulturœ  locatus  est.  !\on 
enim  adkuc  populus  iUe  inteliigebat  sacerdotes 
Domiiti  venerari,  eisquevenerenliam  debitam  ex- 
hibere.  Ibid.,  cap.  lxxx. 

'  Quid  faciemus,  si  episcopus  urhis  non  adve- 
nerit  ?  Quia  locus  ille  quo  sepeliri  débet,  non  est 


sacerdotali  benedictione  sacratus.  Tune  cives,  et 
reliqui  viri  honorati  qui  ad  exsequias  beatœ  re- 
ginœ  convenerant,  imperant  parvitati  me  œ  die  en- 
tes :  Prœsume  de  charitate  fratris  tui,  et  benedic 
altare  illud.  Confidimus  enim  de  ejus  benevolen- 
tia  quod  molestum  non  ferai  si  feceris,  sed  inagis 
gratiam  referai.  Prœsume,  precamur,  ut  caro 
sanctœ  sepulturœ  reddatur.Et  sic  ab  Mis  injiinc- 
tus,  altare  in  cellula  ipsa  [sacravi.  Ibid.,  cap. 
cvi. 


378 


HISTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Saint  Grégoire  n'en  rapporte  qu'une  partie, 
parce  que  personne  ne  s'était  donné  la  peine 
de  les  mettre  par  écrit  ;  mais  il  entre  dans 
le  détail  des  miracles  qu'il  avait  vus  lui- 
même,  ou  qu'il  avait  appris  de  personnes 
dignes  de  foi.  Il  marque  le  nom,  l'âge,  la 
Car.'iitiKii.  qualité  des  muets,  desaveugles  etdesautres 
iuOrmes  guéris  au  tombeau  du  saint,  ou  par 
la  vertu  de  ses  reliques.  Le  roi  de  Galice, 
XI.  dont  le  fils  était  en  danger  de  mort,  envoya 

par  ses  amis  autant  d'or  et  d'argent  que  son 
fils  pesait  ;  mais  cette  oflVande  fut  sans  effet, 
parce  que  ce  prince  était  arien.  Il  embras- 
sa la  foi  de  la  consubstanlialité,  bâtit  une 
église  en  l'honneur  de  saint  Martin,  et  envoya 
de  nouveaux  députés  avec  de  plus  grands 
présents.  Ils  remportèrent  en  Galice  des  re- 
liques du  saint,  c'est-à-dire  une  partie  d'un 
manteau  de  soie  qu'ils  avaient  mis  pendant 
quelque  temps  sur  son  tombeau.  L'enfant 
fut  guéri,  et  les  peuples  se  convertirent.  La 
x'i.  reine  Ultrogothe,  pour  être  témoin  des  guc- 

risons  miraculeuses  qui  se  faisaient  à  Tours, 
après  avoir  passé  une  partie  de  la  nuit  et  du 
jour  en  prières  et  répandu  beaucoup  de  lar- 
mes, fit  son  offrande  et  célébrer  des  messes 
en  l'honneur  de  saint  Martin.  Dans  le  mo- 
ment même  qu'on  les  disait,  trois  aveugles, 
qui  depuis  longtemps  priaient  aux  pieds  du 
saint  évêque,  recouvrèrent  la  -NTie.  En  563, 
saint  Grégoire,  plusieurs  années  avant  qu'il 
fut  évêque  de  Tours,  y  fit  un  voyage  pour 
obtenir  au  tombeau  du  saint  la  guérison 
d'une  fièvre,  qui  ne  lui  laissait  plus  envisa- 
ger que  la  mort.  Ceux  qui  le  conduisaient, 
voulurent  souvent  le  faire  retourner  sur  ses 
pas.  Il  persévéra,  vint  à  Tours  et  fut  guéri. 
3.  Attaqué  en  573  de  la  dyssentcrie,  il  en 
fut  délivré  par  une  potion  où  il  avait  fait 
entrer  de  la  poussière  du  tombeau  du  même 
saint.  Il  ne  recourut  toutefois  à  ce  remède, 
qu'après  avoir  éprouvé  en  vain  tous  ceux  de 
la  médecine.  Justin,  son  beau- frère,  fut 
guéri  de  la  fièvre  en  buvant  un  verre  d'eau 
où  l'on  avait  délayé  quelques  particules 
d'un  cierge  qui  avait  été  allumé  sur  le.  tom- 
beau de  saint  Martin,  et  que  saint  Grégoire 
y  avait  pris  et  envoyé  au  malade.  Gonti-an 
Boson  évita  un  naufrage,  en  recourant  lui 
ou  les  siens,  à  la  protection  de  saint  Martin. 
Un  enfant  mort,  faute  de  nouriiture,  ressus- 
cita aussitôt  qu'on  eut  fait  toucher  ses  vête- 
ments au  tomhcHU  du  saint.  Il  vécut  long- 
temps depuis,  et  il  vivait  encore  lorsque 
saint  Grégoire  racontait  ce  miracle.  Le  jour 


Cty-    TXXIi, 


Src  nd  V.» 
1lt,faf.\ttH, 
Cap.  I, 


de  la  fête  de  saint  Jean,  pendant  que  tout  ci?-^'<<- 
le  peuple  assistait  à  la  messe,  une  servante 
alla  dans  un  champ  de  son  maître,  qui  était 
bourgeois  de  la  ville  de  Tours.  Dieu  la  pu- 
nit sur  le  moment  de  cette  prévarication, 
par  un  feu  qui  lui  dévorait  tout  le  corps  et 
la  chargeait  de  pustules.  La  honte  et  la  dou- 
leur l'engagèrent  à  recourir  à  l'intercession 
de  saint  Martin  ;  elle  passa  quatre  mois  pros- 
ternée à  son  tombeau,  et  en  fut  guérie.  Saint 
Grégoire,  ressentant  à  la  tempe  gauche  un  ' 
mal  si  violent,  qu'il  craignait  que  l'abon- 
dance de  ses  larmes  ne  lui  fit  sortir  l'oeil  de 
la  tète,  alla  faire  sa  prière  dans  l'église  de 
Saint-Martin  ;  puis  ayant  appliqué  le  voile, 
qui  pendait  devant  le  sépulcre  du  saint,  sm- 
l'endroit  de  la  douleur,  elle  se  dissipa  à  l'ins- 
tant. Trois  jours  après,  la  tempe  droite  fut 
attaquée  de  même  :  le  saint  employa  le  même 
remède,  qui  opéra  aussitôt.  Au  bout  de  dix 
jours  il  se  fit  ouvrir  la  veine,  croyant  que  son 
mal  était  venu  d'une  trop  irrande  abondance 
de  sang, et  qu'il  se ser  litdissipé  dans  le  temps, 
s'il  eût  pris  celte  précaution.  C'était,  comme 
il  le  remarque,  une  pensée  qui  lui  avait  été 
suggérée  parle  démon.  La  saignée  occasionna 
le  renouvellement  de  la  douleur  aux  mêmes 
endroits.  Il  courut  h  la  basilique  du  saint,  de- 
manda pardon  de  la  mauvaise  pensée  qu'il 
avait  eue ,  fit  toucher  à  ses  tempes  le  voile 
qui  couvrait  le  tombeau  de  saint  Martin,  et 
s'en  retoui-na  chez  lui  en  pleine  santé. 

4.  Le  vrai  moyen  d'obtenir  des  grâces  par  ^^^^^<:  ' 
la  médiation  de  ce  saint,  était  de  prier  avec  '"p'„L 
ferveur,  de  s'humilier  de  ses  fautes,  de  les 
pleurer,  d'en  demander  pardon,  d'en  gémir 
du  fond  du  cmur;  alors  la  joie  succédait  aux 
larmes  et  à  la  tristesse,  la  guérison  ii  la  ma- 
ladie, le  pardon  i\  la  faute.  C'est  ce  que  dit 
saint  Grégoire,  pour  l'avoir  vu  en  d'autres,  et 
expérimenté  en  lui-même.  Parmi  le  grand 
nombre  de  miracles  qu'il  rapporte,  nous  nous 
arrêtons  volontiers  à  ceux  qui  se  sont  opérés 
sur  lui-même  ;  l'incrédulité  ne  peut  raisonna- 
blement refuser  de  se  rendre  à  de  pareils  té- 
moignages. Comme  il  était  h  table,  un  jour 
déjeune,  à  l'heure  ordinaire  de  le  rompre, 
on  servit  un  poisson  ;  le  saint  le  bénit  parle  c.|.,i. 
signe  delacroix.il  arrivaen mangeant  qu'une 
arête  s'attacha  à  son  gosier;  elle  était  longue 
et  aigiie,  ce  qui,  outre  la  douleur,  lui  ùta  la 
facilité  de  parler,  et  empêchait  la  salive  do 
passer.  Tous  les  cll'orts  que  lit  l'évêque  pen- 
dant trois  jours,  soit  en  toussant,  soit  en  cra- 
chant, no  purent  lui  faire  rejeter  cette  arête. 


Cap.  VIII. 


QnalHèma 

ïlTTt,  p«?. 

1115. 

Cap.  Tiii. 


Ora)i«D  en 
l'koDDCur  de 
MIbI  Martin, 
pag.  lOtO. 


[Vf  SIÈCLE.]  CHAPITRE  XT,n.  —  SAINT 

Il  eut  recours  h  son  romi'do  ordinaire.  Il  se 
rendit  au  lonil)cau  de  saint  Martin,  et,  pros- 
terné sur  le  iiavt',  il  pria  le  saint  avec  lar- 
mes, lit  toucher  le  voile,  qui  couvrait  le  tom- 
beau, à  sa  gorge  et  ;\  toute  sa  tête;  dans  le 
moment  ,  il  se  trouve  débarrassé  de  l'aréle, 
sans  s'apercevoir  ilc  quelle  façon  elle  était 
sortie.  Il  raconte  sur  le  rapport  de  Florcn- 
lius,  l'un  des  envoyés  du  roi  d'Espagne  au 
roi  Chilpéric,  qu'un  enfant,  qui  était  fils  uni- 
que, avait  été  ressuscité  devant  un  autel  où 
il  y  avait  des  reliques  de  saint  Martin  ;  sur 
le  rapport  de  sa  propre  mère,  qu'ayant  été 
attaquée  d'un  mal  violent  à  la  jambe,  dans 
le  temps  qu'elle  le  mil  au  monde,  elle  en  fut 
guérie  trente-quatre  ans  après  an  tombeau 
du  saint,  quelque  temps  après  l'ordination 
de  son  fds  :  d'où  il  est  naturel  de  conclure 
que  saint  Grégoire  était  âgé  de  trente-quatre 
ans,  lorsqu'il  fut  élu  évoque  de  Tours.  Dans 
un  voyage  qu'il  fit  à  Cavaillon,  il  guérit  de 
la  ûèvre  l'évèque  de  Clermont,  en  lui  faisant 
bou-e  de  la  poussière  du  tombeau  de  saint 
Martin,  après  l'avoir  délayée  dans  de  l'eau. 
Il  s'en  servit  pour  la  guérison  de  plusieurs 
autres  malades  qu'il  trouva  en  son  chemin. 

5.  En  389,  Pallade,  évêquede  Saintes,  lui 
demanda  des  reliques  de  saint  Martin,  pour 
les  mettre  dans  l'église  qu'il  venait  de  faire 
construire  à  l'honneur  de  ce  saint  dans  sa 
ville  épiscopale.  Saint  Grégoire  eu  donna,  et 
au  bout  de  trois  mois  il  reçut  une  lettre  de 
Pallade,  où  il  l'assurait  qu'il  s'était  fait  dans 
cette  église  un  grand  nombre  de  miracles  ; 
que  trois  paralytiques  y  avaient  recouvré 
l'usage  de  leurs  membres,  deux  aveugles  la 
vue,  et  douze  fiévreux  la  santé.  Dans  le  temps 
que  Platon,  l'un  des  disciples  de  saint  Gré- 
goire, était  évéque  de  Poitiers,  le  feu  prit  à 
une  maison  voisine  de  celle  de  l'église,  et 
les  flammes  se  répandaient  déjà  sur  celle-ci, 
lorsque  Platon  élevant  contre  le  feu  une 
boite  où  il  y  avait  de  la  poussière  du  tom- 
beau de  saint  Martin,  arrêta  tout  à  coup 
l'ipapéluosité  de  cet  élément,  etfit  cesser  l'in- 
cendie. 

6.  Ces  quatre  livres  des  miracles  de  saint 
Martin  sont  suivis,  dans  la  nouvelle  édition, 
d'une  prose  et  d'une  oraison  en  l'honneur  de 
ce  saint  évêque.  La  prose  contient  un  précis 
de  sa  vie  ;  l'oraison  a  pour  but  d'obtenir  de 
Dieu  par  son  intercession,  et  par  la  considé- 
ration de  ses  miracles,  la  guérison  des  ma- 
ladies de  l'âme.  On  n'a  aucune  preuve  que 
l'une  et  l'autre  aient  jamais  fait  partie  de 


GRIÎGOlllE  DE  TOURS. 


."17!) 


ces  quatre  livres.  11  est  plus  vraisemblable 
qu'elles  ont  été  tirées  du  Traité  des  OIHces 
de  l'Eglise,  qui  n'est  pas  venu  jns(ju'à  nous. 

§VI. 

1 .  Il  parait  par  le  prologue  que  saint  Gré-  ^,.,  ^\.}',\'' 
goire  a  mis  à  la  tête  des  Vies  des  PÀres,  qu'il   hs-oh. 
ne   travailla  à  cet  ouvrage,  qu'après  avoir 
achevé  tous  ceux  où  il  s'était  proposé  de  re- 
cueillir les  merveilles  opérées  aux  tombeaux 

des  martyrs  et  des  confesseurs.  11  en  cite 
néanmoins  quelques  endroits  dans  le  livre 
intitulé  :  De  la  Gloire  des  Confesseurs  ;  et  dans 
sa  préface  sur  ce  traité,  où  il  fait  le  Catalo- 
gue de  ceux  qu'il  avait  déjà  composés  ;  il  met 
en  septième  lieu  le  livre  De  la  Vie  des  Pères, 
et  en  luiitième,  celui  De  la  Gloire  des  Confes- 
seurs. Au  contraire,  dans  le  dixième  livre  de 
son  histoire,  il  place  le  traité  De  la  Gloire  des 
Confesseurs  avant  les  Vies  des  Pires.  On  ne 
peut  guère  lever  cette  contrariété,  qu'eu  di- 
sant qu'il  avait  déjà  recueilli  quelques  vies 
des  Pères,  lorsqu'il  composa  le  livre  De  la 
Gloire  des  Confesseurs,  mais  qu'il  n'acheva  la 
Vies  des  Pères,  et  ne  la  mit  dans  l'ordre  où 
nous  l'avons  aujourd'hui,  qu'après  avoir  fini 
son  écrit  De  la  Gloire  des  Confesseurs. 

2.  Ces  Vies  sont  renfermées  dans  vingt  ,|„^J 3^°,  "J; 
chapitres,  mais  il  y  a  des  chapitres  qui  con-  ^;  Lo°i"uin.°' 
tiennnent  les  vies  de  plusieurs  saints.  C'est 

là  qu'ont  puisé  ceux  qui,  dans  les  derniers 
siècles,  ont  fait  des  collections  des  vies  des 
saints,  comme  Lippoman,  Surins,  Bollan- 
dns  et  quelques  autres,  ne  trouvant  point 
d'écrivains  plus  anciens  que  saint  Grégoire, 
ou  qui  leur  parussent  plus  dignes  de  foi.  Les  '-''''•  '• 
premiers  saints  dont  il  parle,  sont  saint  Lu- 
picin  et  saint  Romain  ;  ils  étaient  frères. 
Celui-ci  fonda  le  monastère  de  Condat  dans 
le  mont  Jura,  celui  de  Lauconne,  et  un  troi- 
sième que  l'on  nomma  depuis  Romain-Mou- 
tier,  dans  le  canton  de  Berne.  Les  deux  frè- 
res gouvernaient  ensemble  ces  monastères. 
Comme  ils  manquaient  souvent  du  néces- 
saire, saint  Lupicin  alla  trouver  Chilpéric, 
roi  de  Bourgogne,  qui  faisait  sa  demeure  à 
Genève,  pourlui  demanderde  quoi  faire  sub- 
sister ses  moines.  Ce  prince  lui  oÛ'rit  des 
terres  et  des  vignes.  Le  saint  les  refusa,  ne 
croyant  pas  qu'il  convînt  à  des  moines  de 
posséder  des  biens  temporels,  qui  ne  pou- 
vaient que  leur  donner  des  pensées  d'or- 
gueil. Chilpéric  leur  donna  donc  des  lettres, 
en  vertu   desquelles  ils  recevaient  chaque 


380 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


s.    lllld'.nf, 
L^p.  M. 


Sldon.    lik 


s.   Qnlnlicn, 
r3;i.  17. 


année  cent  boisseaux  de  blë,  trois  cents  me- 
sures de  vin,  et  cent  sous  d'or  pour  leurs  vê- 
tements. Saint  Romain  fut  enterré  à  quel- 
que distance  d'un  monastère  de  filles  appelé 
la  Baume,  et  saint  Lunicin  dans  l'église  du 
même  monastère.  11  se  lit  à  leurs  tombeaux 
plusieurs  miracles. 

3.  Saint  lllidius  avait  été  élevé  et  instruit 
dans  les  sciences  ecclésiastiques  par  saint 
Avit,  évêque  de  Clermont,  à  qui  il  succéda 
dans  l'épiscopat.  La  réputation  de  sa  sainteté 
le  fit  appeler  à  Trêves  par  le  tyran  Maxime, 
dont  la  fille  était  possédée  du  démon.  Il  la 
délivra. Maxime,  pour  reconnaître  ce  bienfait, 
lui  oûrit  beaucoup  d'or  et  d'argent.  Le  saint 
l'en  remercia  ;  mais  il  supplia  ce  prince  d'é- 
changer en  or  un  tiibut  que  la  ville  d'Auver- 
gne payait  en  vin  et  en  blé  :  ce  qui  lui  fut  ac- 
cordé, à  cause  de  la  rareté  de  ces  deux  es- 
pèces dans  l'Auvergne.  Il  fut  enterré  dans 
une  église  qu'il  avait  fait  bâtir,  et  qui  porte 
encore  le  nom  de  sain'.  lllidius,  ou  Allirc. 
Saint  Grégoire  rapporte  Uelui  divers  miracles 
dont  il  avait  été  témoin.  Il  raconte  de  saint 
Abraham,  qu'ayant  à  donner  à  manger  A 
l'évêque  de  Clermont  et  à  une  grande  com- 
pagnie le  jour  de  la  fête  de  saint  Cirique,  un 
moine  de  sa  communauté  lui  représenta  qu'il 
n'y  avait  pas  assez  de  vin  dans  le  monastère 
pour  tant  de  monde  :  le  saint  se  mit  en 
prières;  le  vin  se  multiplia  de  façon  que  tous 
en  eurent  abondamment.  Nous  avons  l'épi- 
taplic  de  ce  saint  par  saint  Sidoine  Appolli- 
naire,  qui  lui  altrilnie  plusieurs  miracles. 

4.  Dans  le  temps  que  les  Goths  occupaient 
la  ville  de  Rhodez,  saint  Quintien,  qui  en  était 
évêque,  fut  soupçonné  de  vouloir  la  livrer 
aux  Français.  Les  Goths,  pour  s'en  venger, 
résolurent  de  le  tuer  ;  mais  il  prévint  l'exé- 
culion  de  leur  mauvais  dessein  par  la  fuite. 
Enplirasius,  évoque  de  Clermont,  chez  (jui  il 
se  relira  avec  les  plus  fidèles  de  ses  servi- 
teurs, le  reçut  avec  beaucoup  d'humanité, 
lui  donna  des  terres,  des  vignes  et  des  mai- 
sons. Trois  mois  après,  Euphrasius  étant 
mort,  le  roiTliéodoric,  sachant  que  saint  Quin- 
tien avait  été  chassé  de  son  église  à  cause 
de  lui,  le fitordonner  évêque  de  Clermont.  Il 
était  savant,  mais  sa  vertu  le  rendait  encore 


plus  recommandable. Faisant  dansnne  grande 
sécheresse  les  processions  des  rogations  pen- 
dant les  trois  jours  qui  précèdent  r.\scension 
du  Sauveur,  au  troisième  jour  le  peuple,  qui 
avait  confiance  en  ses  prières,  lui  demanda 
de  leur  prescrire  une  antienne  à  chanter. 
L'évêque  se  prosterna,  au  milieu  de  la  place 
publique,  pria  longtemps  avec  larmes,  et  se 
levant  de  terre,  il  ordonna  pour  anticune  les 
paroles  que  Salomon  adressa  {l  Dieu  dans 
une  semblable  calamité.  L'humble  prière  de 
saint  Quintien  se  fit  entendre  du  Tout-Puis- 
sant, et  à  l'instant  il  tomba  une  pluie  abon- 
dante qui  arrosa  tout  le  pays. 

5.  Ce  que  saint  Grégoire  dit  de  plus  re- 
marquable de  saint  Portien,  est  qu'étant  es- 
clave d'un  barbare,  il  se  réfugiait  souvent 
dans  un  monastère  ,  pour  éviter  par  la  mé- 
diation de  l'abbé  les  mauvais  traitements 
de  son  maître  ;  qu'ayant  été  mis  en  liberté, 
il  fut  reçu  dans  ce  monastère,  puis  admis 
dans  le  clergé  ,  et  ensuite  fait  abbé  ;  qu'en 
523  ,  le  roi  Théodoric ,  qui  faisait  alors  la 
guerre  en  Auvergne,  accorda  à  saint  Por- 
tien, en  considération  de  ses  vertus  et  de 
ses  miracles  ,  la  liberté  de  plusieurs  captifs. 

6.  Saint  Gai  fut  du  nombre  des  captifs  ; 
mais  on  n'obtint  pas  sa  liberté,  parce  que 
le  roi  voulut  qu'il  le  suivit  dans  ses  voyages. 
D  était  do  Clermont.  Voyant  que  ses  parents 
pensaient  à  le  marier,  parce  qu'ils  n'avaient 
point  d'autres  enfants  ,  il  alla  au  monastère 
dcCournon,  à  six  milles  de  la  ville,  prier  l'ab- 
bé de  lui  couper  les  cheveux.  L'abbé  le  re- 
fusa, jusqu'à  ce  qu'il  eût  le  consentement 
de  ses  parents.  L'exprès  envoyé  à  cet  ell'et 
ayant  rapporté  que  son  père  y  consentait, 
l'abbé  lui  donna  la  tonsure  '  cléricale  ,  qui 
était  autrefois  la  même  pour  les  moines  que 
pour  les  clercs.  Les  abbés'  donnaient  com- 
munéiiuMit  la  tonsure  cléricale  ,  et  l'on  don- 
nait souvent  aux  moines  le  nom  de  clercs. 
Saint  Quintien  ayant  un  jour  oui  Gai  chanter, 
le  mit  dans  son  clergé.  Ses  belles  qualités 
le  firent  connaître  de  Théodoric  ,  qui  le  me- 
na avec  lui  ;'i  Cologne.  Saint  Gai,  indigné  des 
superstitions  païennes  qui  se  faisaient  dans 
un  temple  de  cette  ville  ,  y  mit  le  feu  ,  et  se 
sauva.  Les  païens  voulurent  le  tuer  ;  mais  le 


Il  p«'«iip. 
Ti,  le.i'. 


Mp.  s. 


'  Tune  ahbns  isia  nuntii.i  referenlibns  discrns, 
puerum  clericiim  fecil.  Grc^or.  De  Yitis  Pat.,  rnp. 

VI. 

'  Ex  hoc  aliisque  jmssim  Gregorii  locis  infert 
Thomassinus  abbales  olim  tonsuram  ckricalem 


conferrc  consucvissc,  eaiidemque  olim  fuisse  mo- 
nachorum  ac  clericonim  lonsuram,  monachos 
(lenique  sœpiiis  clericorum  nomine  fuisse  desi- 
gnalos.  Not.  iu  liuiic  locuiu,  pag.  1169. 


CHAPITRE  \I.I1.  —  SAINT  GllEGOlllE  DE  TOURS. 


s.    C.rttfU 
rp,  fvti;uo  il« 

Tr. 


s.    Nitifr, 
éH<}u«  Cil 

IJB,         «1. 


Vl'  SIÈCLE.] 

roi  les  apaisa.  Après  l;i  mort  de  saint  Qu'ri- 
tien,  saint  Gai  fut  clinisi  évôinu' de  Clerniont. 
On  comparait  sa  iloiicciir  dans  le  y:ouvcriie- 
menl  ù  celle  de  Moïse.  Il  soutirait  sans  se 
plaindre  les  injures  les  plus  atroces.  Voyant 
la  province  d'Arles  ravagée  par  la  peste  ,  il 
en  préserva  son  ilioci'^se,  en  onlnmiant  de 
longues  processions  au  milieu  du  Carèmo.  Il 
fut  pleuré  à  sa  mort ,  non-seulement  par  les 
CdMes  des  deux  sexes,  mais  aussi  par  les 
juifs ,  qui  assistèrent  à  ses  funérailles  avec 
des  llambeaux  allumés. 

7.  Vers  l'an  539,  saint  Grépnire  se  ren- 
dait recommandahle  par  sa  piété  et  ses  au- 
tres vertus.  Il  était  de  race  de  sénateurs,  et 
avait  été  quarante  ans  comte  d'.\utun  ,  ren- 
dant une  exacte  justice  à  chacun ,  et  pu- 
nissant les  malfaiteurs  avec  tant  de  sévérité, 
que  peu  échappaient  de  ses  mains.  Après  la 
mort  de  sa  femme  ,  nommée  Armentaire  ,  il 
fut  choisi  évêque  de  Langres.  On  marque 
parmi  ses  mortifications ,  que  tandis  qu'il 
faisait  servir  aux  autres  du  pain  de  froment, 
il  en  mangeait  d'orge,  et  qu'il  ne  buvait  que 
de  l'eau,  en  même  temps  qu'on  servait  du  vin 
aux  convives,  prenant  toutefois  des  précau- 
tions pour  empécliei'  qu'on  ne  s'aperçut  de 
celte  distinction.  Son  fils  Tétricus,  qui  fut  sou 
successeur,  voyant  le  grand  nombre  de  mira- 
cles qui  s'opéraient  à  son  tombeuu ,  trans- 
féra son  corps  au  milieu  de  l'abside  de  l'é- 
glise de  Saint-Jean,  qu'il  fit  bùtir.  Saint  Gré- 
goire assista  en  517  au  concile  d'Épaône  et 
au  premier  de  Lyon  ,  en  535  au  premier  de 
Clermont,  et  en  538  au  troisième  d'Orléans, 
par  le  prêtre  Evantius,  son  député. 

8.  L'évéché  de  Genève  étant  vacant,  ou 
jeta  les  yeux  sur  un  homme  de  condition, 
nommé  Florent,  pour  le  remplir.  Il  en  dit  la 
nouvelle  à  sa  femme  Artémie ,  qui  s'y  op- 
posa, disant  qu'elle  portait  dans  son  sein  un 
évêque.  Elle  mit  au  monde  un  fils,  à  qui  l'on 
donna  dans  le  baptême  le  nom  de  Nizicr.  Il 
fut  de  bonne  heure  instruit  dans  les  sciences 
ecclésiastiques,  admis  dans  le  clergé,  et  fait 
prêtre  à  l'âge  de  trente  ans.  A  l'étude  il  joi- 
gnait le  travail  des  mains.  Sacerdos,  évêque 
de  Lyon,  étant  mort  à  Paris  ,  Nizier  son  ne- 
veu fut  élu  pour  lui  succéder,  de  l'agrément 
du  roi  Childebert  et  du  peuple  de  la  ville.  Il 
était  extrêmement  chaste,  aimait  les  églises, 
faisait  beaucoup  d'aumônes,  et  vivait  comme 
vivent  les  vrais  serviteurs  de  Dieu.  Saint 
Grégoire  de  Tours,  qui  avait  été  sous  sa  dis- 
cipline étant  jeune  ,  raconte  de  lui  plusieurs 


3«i 


«.  Palrocle, 
ttlHt  cap.  IX. 


choses  dont  il  avait  ét(':  témnin.  11  en  rap- 
porte d'autres,  tirées  de  la  vie  du  saint, 
qu'KIliérins,  évêque  de  Lyon,  avait  fait  écrire 
par  un  clerc  de  son  église.  On  la  trouve 
dans  le  Paxlhius  illustratiis  du  père  Chidlct, 
et  dans  Bollandus  au  second  jour  d'avril. 
Saint  .Nizier  présida  au  concile  tenu  à  Lyon 
en  5G0. 

9.  Dans  les  chapitres  suivants,  saint  Gré- 
goire do  Tours  donne  la  vie  de  saint  Patro- 
cle,  à  qui  il  attribue  la  fondation  de  deux 
monastères  :  l'un  de  filles,  à  Néris;  l'autre 
d'hommes,  appelé  Colombiers,  dans  l'archi- 

p;  être  de  Montlucon  ;  de  saint  Friard  ,  re-  s.  Fri.rd  r.c- 
dus,  fiai  passait  tout  le  lour  à  chanter  les  i<">'  >''™> 
louanges  de  Dieu ,  h  prier ,  et  jï  travailler  des  ^'e-  '• 
mains,  pour  avoir  de  quoi  fournir  aux  besoins 
de  la  vie  ; — de  saint  Caluppan,  aussi  reclus  :  x,. 
il  fut  souvent  attaqué  par  les  démons,  qui 
lui  apparaissaient  sous  la  figure  de  serpents, 
mais  il  les  mettait  eu  fuite  parle  signe  de  la 
croix,  ou  en  prononçant  l'Oraison  domini- 
cale; —  de  saint  Émilien,  ermite,  et  de  l'abbé  ,,,. 
Biachion.  Le  premier,  ayant  quitté  ses  pa- 
rents et  tous  ses  biens  ,  se  retira  dans  la  fo- 
rêt de  Pontgibaud  en  Auvergne,  où  il  vécut 
seul  avec  les  bêtes  sauvages  ,  recevant  tou- 
tes ses  consolations  de  Dieu,  tiavaillant  con- 
tinuellement de  ses  mains  ,  ou  vaquant  à  la 
prière.  Il  mourut  à  l'âge  de  quatre-vingt-dix 
ans  ,  laissant  tout  ce  qu'il  possédait  à  Bra- 
chion.  Celui-ci,  ayant  obtenu  de  Rachinilde, 
fille  de  Sigivaldus ,  qu'il  avait  servi  étant 
jeune,  un  grand  terrain  ,  y  bâtit  un  monas- 
tère. Il  en  sortit  pour  aller  à  Tours,  où  il  en 
bâtit  deux  autres.  Il  était  doux  dans  ses  pa- 
roles, et  caressant,  mais  si  sévère  contre  les 
transgresseurs  de  la  règle  ,  qu'il  semblait 
quelquefois  être  cruel. 

10.  Les  premiers  exercices  de  piété  que      s  upitin, 

...  .  »  Vil  s.  Marlus,  s. 

saint  Lupicin  pratiqua  ,  tarent  de  demander  scu«ii,  cap. 
l'aumône  dans  les  maisons  des  gens  de  bien,  iv-' 
et  de  la  distribuer  ensuite  aux  pauvres.  De- 
puis il  s'enferma  dans  une  cellule,  où  il  ne 
vivait  que  de  pain  et  d'eau,  qu'on  lui  appor- 
tait par  charité.  Il  passait  le  jour  et  la  nuit  à 
chanter  des  psaumes.  Pendant  qu'il  en  chan- 
tait de  jour,  il  portait  sur  sa  tête  une  pierre 
si  grosse,  que  deux  hommes  auraient  eu  de 
la  peine  à  la  les'er.  La  nuit  il  s'appliquait 
des  pointes  sous  le  menton,  afin  de  s'empê- 
cher de  dormir.  Ces  mortifications  lui  occa- 
sionnèrent sur  la  fin  de  ses  jours  un  crache- 
ment de  sang.  Les  malades  accouraient  à  sa 
cellule,  et  il  les  guérissait ,  soit  en  les  tou- 


382 


HISTOmE  GltXltRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSTASTIQUES. 


chant,  soit  en  faisant  sur  eux  le  sipme  de  la 
croix.  11  prédit  sa  mort  trois  jours  avant 
qu'elle  arrivât;  pendant  cetintervalle  il  ouvrit 
sa  porte  .1  tous  ceux  qui  le  vinrent  voir,  et  leur 
donna  le  liaiser  de  cbarité,  en  se  congratulant 
d'être  au  moment  de  se  voir  délivré  des  em- 

op.  iir.  pêcbemenls  du  siècle.  Saint  Martius  fut  aussi 
célèbre  par  ses  vertus  que  par  ses  miracles  ; 
sobre  dans  le  manger,  il  faisait  de  grandes 
aumônes  ,  veillait  et  priait  souvent ,  rejetant 
les  mauvaises  pensées  aussitôt  qu'elles  nais- 
saient. Il  s'était  creusé  une  cellule  dans  le 
roc,  où  il  prenait  son  repos  après  le  travail 
des  mains  ;  là  il  recevait  de  temps  en  temps 
les  aumônes  de  quelques  personnes  de  piété- 
n y  assembla  des  moines,  qu'il  forma  dans  la 
perfection,  et  leur  bàlit  un  monastère  avec 

&,r  IV.        un  oratoire,  où  il  fut  enterré.  Saint  Sénoch 
en  avait  réparé  un  auprès  de  Tours,  où  l'on 
disait  que  saint  Martin  avait  fait  ses  prières. 
Il  invita   saint  Euphrune,  alors  évèque  de 
cette  ville,  à  en  venir  faire  la  bénédiction. 
Le  saint,  après  en  avoir  consacré  l'autel, 
ordonna  Sénoch  diacre.  Il  servit  Dieu  en  ce 
lieu  pendant  quelque  temps  avec  trois  moi- 
nes, vivant  dans  une  grande  austérité.  En 
Carême  il  augmentait  son  abstinence  ,  ne 
pienant  par  jour  qu'une  livre  de  pain  et  une 
livre  d'eau  :  encore  son  pain  n'était-il  que 
d'orge.  Il  allait  nu-pieds  ,  même  l'hiver ,  et 
portai!  une  chaîne  de  fer  aux  pieds ,  aux 
mains  et  au  cou.  Depuis  il  se  retira  seul  dans 
une  cellule,  où  les  fidèles  lui  apportaient 
souvent  de  l'argent,  qu'il  distribuait  aussitôt 
aux  pau\Tes.  Lorsque  saint  Grégoire  fut  ar- 
rivé à  Tours  ,  saint  Sénoch  vint  le  voir  ;  et 
après  l'avoir  salué  ,  il  retourna  dans  sa  cel- 
lule. Il  mourut  âgé  de  quarante  ans.  Comme 
on  célébrait  la  messe  sur  son  tombeau  le 
trentième  jour,  un  mendiant  qui  avait  les 
membres  retirés,  fut  guéri  en  baisant  le  drap 
mortuaire, 
s  ven.»s       n.  Saint  Venant  avait  été  marié  fort  jeu- 
ne;  mais  étant  venu  .'i  Tours,  les  mu-acles 
qui  se  faisaient  au  tombeau  de  saint  Martin, 
lui  firent  prendre  la  résolution  de   servir 
Dieu  dans  le  célibat.  Il  embrassa  donc  la  vie 
monastique  ,  où  il  fit  tant  de  progrès ,  que 
l'abbé  qui  lui  avait  donné  la  tonsure  et  l'ha- 
bit monastique ,  étant  mort ,  il  fut  mis  à  sa 
place.  Saint  Grégoire  rapporte  de  lui  plu- 
sieurs miracles,  disant  qu'il  en  avait  ouï  ra- 
conter un  plus  grand  nombre.  Nous  ne  ré- 
s.  Hiciuu»,   néterons  point  ce  que  nous  avons  dit  ailleurs 

T.*..i,   «p.   Je  saint  .Nicétnts,  evêque  de  Trêves,  samt 


Grégoire  joint  dans  un  même  chapitre  deux   l^^"*"'  " 
abbés,  Ursus  et  Léobat.  Ursus,  ayant  b.'iti  '""•' 
un  monastère  dans  le  diocèse  de  Tours  .  en 
un  lieu  nommé  Sénevière,  en  donna  le  soin  .'i  • 
Léobat,  et  en  bâtit  un  autre  A  Loches,  où 
avec  ses  religieux  il  travaillait  des  mains 
pour  subsister.  Dieu  lui  accorda  le  don  de 
guérir  les  malades  et  de  chasser  les  démons 
de  son  vivant  et  après  sa  mort. 

12.  11  accorda  la  même  grâce  à  sainte  Mo-  ^s*'»'»  *>- 
négonde,  recluse  à  Tours.  Elle  avait  eu  de  *'«• 
son  mariage  deux  filles  qu'elle  aimait  ten- 
drement. Dieu,  voulant  se  l'attacher,  lui  ôta 
ces  deux  objets  de  ses  complaisances,  ce  qui 
la  jeta  dans  l'accablement.  Elle  s'en  releva, 
dans  la  crainte  que  Dieu  ne  lui  fit  un  crime 
de  son  affliction  excessive;  mais  résolue  de 
quitter  le  monde  pour  toujours ,  elle  s'en- 
ferma dans  une  cellule,  où  une  jeune  ser- 
vante venait  lui  apporter  à  manger  ;  c'était 
de  la  farine  d'orge,  dont  elle  pétrissait  elle- 
même  son  pain  avec  de  l'eau  passée  au  tra- 
vers de  la  cendre.  Elle  vécut  longtemps  de 
la  sorte,  priant  sans  cesse  pour  ses  péchés 
et  pour  ceux  du  peuple,  jusqu'à  ce  que  se 
voyant  abandonnée  de  la  fille  qui  la  servait, 
et  ne  pouvant  plus  résister  aux  importunilés 
que  lui  causait  sa  réputation ,  elle  quitta  la 
ville  de  Chartres,  lieu  de  sa  naissance,  pour 
se  retirer  dans  une  autre  cellule  auprès  de 
Tours.  Elle  y  fit ,  comme  dans  sa  première 
demeure,  toute  son  occupation  de  la  prière 
et  de  la  contemplation  des  choses  divines, 
veillant  et  jeûnant  sans  cesse.  Son  mari,  in- 
formé des  merveilles  que  Dieu  opérait  par 
son  ministère,  la  vint  voir ,  et  la  ramena  à  n 

Chartres,  où  il  lui  laissa  la  liberté  de  conli-  j 

nuer  ses  exercices  de  piété  :  mais  après  quel- 
que séjour  en  cette  ville,  il  ne  put  lui  refuser 
la  faculté  de  retourner  dans  sa  cellule  à  Tours, 
à  cause  de  la  grande  dévotion  qu'elle  avait 
envers  saint  Martin.  11  se  forma  auprès  d'elle 
une  communauté  de  filles,  qui  cherchaient  à 
profiter  de  ses  exemples  et  de  ses  instruc- 
tions. Sa  nourriture  élait,  comme  on  l'a  dit, 
du  pain  d'orge  et  de  l'eau  ;  les  jours  de  fêtes, 
elle  buvait  un  peu  de  vin  mêlé  d'eau.  Son 
lit  consistait  dans  une  simple  natte,  qu'elle 
étendait  sur  la  terre  ou  sur  des  ais. 

Le  dernier  des  Pères  dont  saint  Grégoire  s.  uou.j, 
donne  la  vie,  est  saint  Léobard,  natif  d'Auver- 
gne. Pressé  par  ses  parents,  il  s'engagea  dans 
le  mariage,  quoiqu'il  ne  fiit  pas  seul  d'en- 
fants; mais  après  leur  mort, il  quitta  le  mon- 
de, et  alla  se  renfermer  dans  une  cellule  pro_ 


CHAPITRE  XLII.  —  SAINT  GUÉGOIUE  DE  TOURS. 


[Vl'  SIÈCLE.] 

cln;  do  Mannoulier,  pour  être  ii  poi'tëe  du 
toinliciiii  (le  sailli  Marliii.  Le  seul  mélier 
des  moines  de  Mariuoudei'  était,  comme  le 
témoigne  Sévère-Sulpice,  de  faire  du  par- 
chemiu.  Salut  Léohaid  s'en  occu[)a,  joi- 
gnant à  ce  travail  la  lecture  des  divines  Ecri- 
tures, surtout  des  psaumes  de  David,  (pi'il 
avait  appris  par  cœur  étant  jeune,  mais  qu'il 
avait  oubliés.  Un  des  moines  qui  demeuiaient 
avec  lui  ayant  eu  une  difliculté  avec  les  voi- 
sins, il  vint  eu  pensée  à  saint  Léobard  de 
changer  de  demeure.  Comme  il  s'en  ouvrit  ;\ 
saint  Grégoire  qui  était  venu  le  voir,  le  saint 
évoque  le  détourna  de  ce  dessein,  qu'il  lui  lit 
envisager  comme  une  tentation.  Il  était  d'une 
conversation  fort  douce,  priait  assidimient 
pour  les  rois  et  les  peuples,  et  pour  tous  les 
ecclésiastiques  craignant  Dieu.  Il  ne  laissait 
croître  ni  sa  barbe  ni  ses  cheveux,  pour  ne 
point  donner  dans  l'afl'ectation  de  quelques- 
uns  à  cet  égard.  Ses  jeûnes ,  ses  veilles,  ses 
travaux  l'ayant  épuisé,  il  pria  saint  Grégoire 
de  Tours  de  lui  apporter  les  eulogies ,  c'est- 
à-dire  du  pain  bénit,  ou  des  restes  de  ce  qui 
avait  été  ofifert  sur  l'autel  ;  il  en  mangea  et 
but  un  verre  de  vin,  après  quoi  il  prédit  le 
jour  de  sa  mort. 

§  VIU. 

Des  Commentaires  sur  les  Psaumes,  des  mira- 
cles de  saint  André,  des  Actes  de  saint  Ju- 
lien, et  de  l'histoire  des  sept  Dormants. 

i.  Dans  l'éuumération  que  saint  Grégoire 
fait  de  ses  ouvrages  ',  il  met  un  livre  de  Com- 
mentaires sur  les  Psaumes.  Il  ne  nous  en 
reste  que  trois  fragments  :  l'un  donné  par 
Thomasius  sur  un  manuscrit  du  Vatican,  où 
ce  Père  explique  dans  un  sens  figuré  les  di- 
vers titres  que  portent  les  Psaumes;  les  deux 
autres  ont  été  trouvés  par  dom  Mabillon  dans 
un  ancien  recueil  de  passages  sur  les  vices 
et  les  vertus.  On  conserve  ce  recueil  dans  la 
bibliothèque  de  Saint-Martiu  de  Tours.  Saint 
Grégoire  dit  en  général,  que  tous  les  psau- 
mes où  il  est  parlé  de  la  fuite  de  David,  et 
des  persécutions  qu'il  souffrit  de  la  part  de 
ses  ennemis ,  sont  des  figures  de  la  passion 
de  Jésus-Christ  ;  que  les  psaumes  qui  sont 
intitulés  :  Pour  la  fin,  s'entendent  de  la  per- 


;J83 


feclion  des  btunics  ceuvres;  que  ceux  dont 
le  litie  est  :  Pour  ceux  ([ui  seront  elumijvs, 
doivent  s'inliMpréter  du  changement  de  la 
synagogue  en  l'Église  de  Jésus-Christ.  Le 
dernier  des  deux  fragments  donnés  par  dom 
Mabillon,  paraît  être  la  conclusion  do  tout  h; 
conuuciilaire  ;  c'est  une  exhortation  à  la  pia- 
tique  de  la  vertu  et  à  la  fuite  des  vices.  Il  fi- 
nit par  la  doxologie. 

2.  L(;  livre  des  Miracles  de  l'apfMre  saint 
André  porte,  dans  un  manuscrit  de  l'abbaye 
de  Sainl-Germain-des-Prés  à  Paris,  le  nom 
de  saint  Grégoire  de  Tours.  Le  prologue  et 
l'i'iiilogue  sont  assez  de  son  génie  et  de  son 
stylo;  et  ce  qui  semble  décisif,  c'est  que 
l'auteur  dit  -  qu'il  était  né  le  jour  de  la  fcte 
de  cet  apôtre,  c'est-à-dire  le  30  novembre, 
qui  est  le  jour  de  la  naissance  de  saint  Gré- 
goire. Il  est  vrai  qu'il  ne  compte  point  ce  li- 
vie  parmi  ses  ouvrages;  mais,  outre  qu'il  a 
pu  le  composer  après  son  Histoire,  où  il  fait 
le  catalogue  de  ses  écrits,  il  pouvait  aussi  ne 
pas  regarder  le  livre  des  miracles  de  saint 
André  comme  son  propre  ouvrage,  puisque 
ce  n'est  qu'une  compilation  de  la  Vie  de  cet 
apôtre  imprimée  sous  le  nom  d'un  certain 
Abdias,  qui  se  disait  évoque  de  Babylone. 
D'un  gros  recueil  de  miracles  saint  Grégoire 
en  fit  un  petit,  où  il  n'a  rapporté  que  les  faits 
miraculeux  qui  lui  ont  paru  devoir  trouver 
croyance  auprès  des  lecteurs,  et  en  être  lus 
avec  quelque  satisfaction.  Ce  livre  est  divisé 
en  trente-huit  chapitres,  y  compris  la  pré- 
face et  la  conclusion,  qui  sont  tout  ce  que 
l'on  peut  attribuer  à  saint  Grégoire  dans  cet 
ouvrage  '. 

3.  Il  n'y  a  rien  de  lui  non  plus,  que  la  pré- 
face, dans  le  livre  du  Martyre  de  saint  Ju- 
lien ;  encore  n'est-on  pas  assuré  que  les  ac- 
tes qu'on  nous  en  a  donnés  dans  la  dernière 
édition,  soient  ceux  dont  saint  Grégoire  s'est 
servi,  et  dont  il  a  tiré  ce  qu'il  dit  de  ce  mar- 
tyr dans  le  livre  de  ses  miracles. 

4.  En  parlant  de  saint  Jean  l'Évangéliste 
et  de  Marie  Magdeleine,  enterrés  à  Éphèse, 
il  dit  *  que  l'on  y  voit  aussi  le  lieu  de  la  sé- 
pulture des  sept  Dormants,  et  promet  de  dire 
quelque  chose  de  leur  martyre.  Il  en  fait  un 
chapitre  ^  exprès,  où  il  raconte  qu'ayant  été 
menés  en  présence  de  l'empereur  Dèce,  ce 


Do»  miraclei 
dft  S.  Acdr6, 


LÎTro  du 

nisiljre  de  S. 

Julien,  Tjag. 
1366. 


I.'HisL.li-o 
dei  s  <pi  Doi- 


'  In  Psalterii  tractatim  librum  unum  com- 
mentalm  sum.  Lib.  \  Hist..  pag.  537. 

'  In  illiiis  natali  processi  ex  matris  utero.  Cap. 
xsxvni,  pag.  1264. 

'  l'"esseler,  InstU.  Pair.,  tom.   II,  pag.   906,  re- 


garde cet  ouvrage  comme  douteux,  sans  donner  de 
raisons  de  sou  doute.  (L'édileur.) 

'  Lib.  De  Gloria  Martyr.,  cap.  xxx,  pag.  734. 

5  Ibiil.,  cap.  xcv,  pag.  826. 


384 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

gue  à  la  vie  de  saint  Mauriile,  évêque  d'An- 


princp,  qui  avait  excité  une  cruelle  persécu- 
tion contre  l'Église,  essaya  en  diÛërentes 
manières  de  les  faire  renoncer  à  Jésus-Chrisl  ; 
les  trouvant  fermes,  il  leur  donna  du  temps 
pour  prendre  leur  parti  pendant  son  absence. 
Ils  se  retirèrent  dans  une  caverne,  d'oîi  l'un 
d'eux  sortait  tour  h  tour  pour  aller  clierclicr 
de  quoi  vivre.  Au  retour  de  l'Empereur,  ils 
demandèrent  ù  Dieu  de  les  délivrer  des 
mains  de  ce  persécuteur.  Us  furent  exaucés, 
et  s'endormirent  tous  sept  dans  le  Seigneur. 
Dèce,  l'ayant  appris,  fit  murer  l'entrée  de  la 
caverne,  afin  qu'ils  mourussent  de  faim  ;  mais 
un  chrétien,  voulant  conserver  leurs  noms  à 
la  postérité,  les  grava  sur  une  lame  de  plomb, 
qu'il  jeta.'dans  la  caverrc  avant  qu'on  l'eût 
fermée.  Saint  Grégoire  avait  tiré  ces  cir- 
constances de  leurs  actes,  qu'il  mit  lui-même 
en  latin  à  l'aide  d'un  interprète  syrien.  Il  pa- 
raît que  cette  traduction  n'est  pas  venue  jus- 
qu'à nous,  et  que  les  sept  Dormants  dont  on 
montre  les  reliques  à  Marmoutier,  sont  dif- 
férents de  ceux  qui  reposaient  à  Éplièse  du 
temps  de  siinl  Grégoire;  du  moins  ;]eurs 
noms  sont  enlièremenl  dillerents,  et  leurs 
actes  ne  s'accordent  point.  Ceux  que  ce  saint 
avait  traduits  en  lalin,  mettaient  leur  mort 
sous  Dèce  ;  ceux  que  nous  avons,  la  mettent 
sous  Dioclétien  et  Maximien.  A  la  tête  de 
ceux-ci,  on  lit  une  lettre  de  saint  Grégoire  à 
Sulpice,  archevêque  de  Bourges,  mais  elle 
n'est  point  du  style  de  ce  père.  Photius'  avait 
lu  les  actes  du  martyre  des  sept  Dormants: 
il  les  nomme  Maximilien,  Jamblique,  Mar- 
time,  Denys,  Exacustidien,  Antonin  et  Jean, 
et  met  leur  martyre  sous  Dèce.  Leurs  noms, 
dans  saintGrégoirc  de  Tours,  sont  Maximien, 
Malch,  Maitinien,  Constantin,  Denys,  Jean  et 
Sérapion.  Il  s'accorde  dans  le  reste  avec 
Photius.  Ils  racontent  l'un  et  l'autre  que 
sous  le  règne  de  Théodose  le  Jeune  les  sept 
Dormants  ressuscitèrent,  Dieu  ayant  renvoyé 
dans  leurs  corps  l'esprit  de  vie  ;  et  que  ce 
ce  miracle  arriva  pour  confondre  l'erreur 
des  sadducéens,  qui  se  renouvelait  dans  le 
pays.  Saint  Gri'goire  est  le  premier  des  Ld- 
lius  qui  ait  parlé  de  cet  événement. 

§  VIII. 
Des  Vies  de  saint  Mauriile,  de  saint  Yrier  ou 
Yrieix,  et  de  quelques  autres  écrits  attri- 
bués à  saint  Grégoire  de  Tours. 

u  vif  «cS.       1.  On  voit  par  la  lettre  qui  sert  de  prolo- 


l'ag.  I2TI. 


gers,  que  celui  qui  écrivit  cette  vie,  se  char- 
gea aussi  d'écrire  celle  de  saint  Aubin,  évê- 
que de  la  même  ville.  Or,  il  est  dit  dans  un 
manuscrit  do  l'abbaye  de  Percy  en  Bourgo- 
gne, d'environ  huit  cents  ans,  que  la  vie  de 
saint  Aubin  fut  écrite  par  saint  Grégoire,  évê- 
que de  Tours;  il  est  donc  naturel  de  lui  at- 
tribuer encore  celle  de  saint  Mauriile.  Mais 
il  n'y  a  pas  de  doute  que  la  note  du  manus- 
crit de  Percy  ne  soit  fautive,  et  que  l'auteur 
de  ces  vies  n'ait  vécu  longtemps  après  saint 
Grégoire,  quoiqu'il  en  prenne  le  nom.  Il  dit 
dans  sa  lettre,  qui  est  adressée  à  saint  Ger- 
main, évêque  de  Paris,  que  ce  prélat  exi- 
geait de  lui  qu'il  rétablît  dans  leur  pureté 
les  Vies  de  saint  Mauriile  et  de  saint  Aubin, 
écrites  par  Fortunat,  et  qui  se  trouvaient  al- 
térées par  la  négligence  et  la  malhabileté 
des  copistes.  Comment  saint  Grégoire  de 
Tours,  qui  était  contemporain  de  Fortunat, 
pouvait-il  parler  ainsi?  Rajoute  que,  Fortu- 
nat ayant  raconté  dans  ces  vies  plusieurs 
faits  qui  pourraient  paraître  incroyables  aux 
infidèles,  il  les  supprima.  Etait-ce  là  le  ca- 
ractère de  saint  Grégoire?  N'eu  a-t-il  pas  ra- 
conté lui-même  un  grand  nombre  dont  les 
fidèles  mêmes  ne  font  poiut  difficulté  de  dou- 
ter? On  croit  donc  avec  vraisemblance  que 
l'auteur  de  ces  deux  Vies  est  celui  que  Rai- 
non,  évêque  d'Angers,  chargea  de  les  corri- 
ger vers  le  commencement  du  dixième  siè- 
cle, et  que,  pour  donner  plus  de  poids  à  son 
travail,  il  a  emprunté  le  nom  de  saint  Gré- 
goire de  Tours. 

2.  Surius  nous  a  donné  une  antienne  qui, 
dans  son  manuscrit,  porte  le  nom  de  saint 
Grégoire.  Elle  est  à  l'honneur  de  saint  Mé- 
dard,  et  de  saint  Gildard  son  frère,  tous  deux 
éïêques.  C'est  si  peu  de  chose,  qu'on  aurait 
pu  se  dispenserde  l'attribuer  à  saint  Grégoire. 
Celui-ci  parle  souvent  de  saint  Méùard,  de  sa 
mort,  de  ses  reliques,  de  ses  miracles.  licite 
même  un  livi'e  '  des  merveilles  de  ce  saint 
évêque  ;  mais  il  ne  dit  point  qu'il  ait  écrit 
quelque  chose  de  lui. 

3.  Nous  avons  deux  Vies  de  saint  Yrieix, 
abbé  en  Limousin,  données  toutes  deux  au 
public  par  dom  Mabillou  :  l'une  sur  un  ma- 
nuscrit de  l'abbaye  de  Gall,  dans  le  quatrième 
tome  de  ses  Aîialectes;  l'autre  dans  le  pre- 
mier volume  des  actes  de  l'ordre  de  saint 
Benoît.  Celle-ci  est  d'un  style  plus  simple  et 


etd«u(D[  <• 


Vl.d. 
Y.UI<, 
li-3. 


«  l'buliiis,  Cod.  27;i,  png.  1399. 


•  Greg.,  lib.  De  Gloria  Conf.,  cap.  xcv. 


rVI*  SIÈCLE.] 

plus  naturel  que  la  première,  et  moins  char- 
gée de  miracles  ;  elle  eu  finit  le  narre  à  ce- 
lui qui  se  lit  aux  obsèques  du  saint.  (1  sem- 
ble donc  qu'on  ne  peut  la  regarder  comme 
un  abrégé  do  l'autre,  qui  est  beaucoup  plus 
longue,  et  qu'elle  doit  plutôt  passer  pour 
originale.  La  plus  longue  est  attribuée  à  saint 
Grégoire  dans  le  manuscrit  de  saint  Gai,  et 
c'est  pour  cela  qu'on  l'a  imprimée  A  la  suite 
des  œuvres  de  ce  Père  ;  mais  il  est  hors 
d'apparence  que  saint  Grégoire,  ayant  donné 
la  vie  de  saint  Yrieix  dans  le  dixième  livre 
de  son  Histoire,  l'ait  donnée  encore  eu  par- 
ticulier. D'ailleurs,  on  ne  voit  nulle  part  que 
ce  saint  évêque  ait  été  sur  la  fin  de  ses  jours 
visiter  le  tombeau  de  saint  Yrieix.  Ce  saint 
était  mort  en  591,  saint  Grégoire  mourut  en 
595  :  or,  l'auteur  de  cette  vie  avait  '  vu  de 
ses  yeux  les  monuments  des  njiracles  opérés 
par  saint  Yrieix  depuis  sa  mort,  c'est-à-dire 
im  grand  nombre  de  chaînes  de  toutes  fa- 
çons, que  ceux  qui  avaient  été  délivrés  de 
la  captivité  par  son  intercession,  avaient  ap- 
portées à  son  tombeau. 
erttt  *°lîri-  *•  Saint  Grégoire,  en  parlant  des  actes  que 
™jto»s.ert.  piiate  envoya  à  Tibère  pour  lui  rendre 
compte  de  ce  qui  s'était  passé  à  la  Passion 
et  depuis,  dit*  qu'on  les  voyait  encore  de 
son  temps.  Ils  étaient  très-communs  daus  le 
second  siècle  ;  ceux  que  nous  avons  sont 
supposés.  Le  catalogue  des  manuscrits  du 
roi  d'Angleterre  marque  '  de  semblables  ac- 
tes sous  le  nom  de  saint  Grégoire,  distri- 
bués en  quatorze  livres,  et  tirés  tant  des 
Évangiles  que  des  écrits  des  Pères.  On  ne 
I  sait  ce  que  c'est  que  cet  ouvrage.  Saint  Gré- 

goire, dans  sa  préface  sur  le  livre  de  la 
Gloire  des  martyrs,  promet  de  parler  des  mi- 
racles de  Jésus -Christ;  il  le  fait  en  peu  de 
mots  et  en  trois  petits  chapitres.  S'il  eût  fait 
un  ouvrage  tel  que  l'annonce  ce  catalogue, 
aurait-il  oublié  d'en  parler  dans  l'énuméra- 
tion  de  ses  écrits,  ou  ne  l'aurait-il  composé 
que  sur  la  fin  de  sa  vie  ?  Peut-être  a-t-on  at- 
tribué à  ce  saint  évêque  les  Actes  de  Piiate, 
qu'il  dit  que  l'on  voyait  de  son  temps  ;  l'er- 
reur serait  grossière.  Nous  ne  dirons  rien 
de  la  vie  de  saint  Nicolas,  dont  Messieurs  de 
Sainte-Marthe  font  auteur  saint  Grégoire  de 
Tours.  Il  est  visible  que  c'est  une  faute  d'im- 


CHAPITRE  XLII.  —  SAINT  GllKGOiaR  DE  TOUIIS. 


:i85 


pression,  et  qu'au  lieu  de  Nicolas  il  faut  lire 
Nicet,  dont,  en  eflet,  saint  Grégoire  a  donné 
la  vie.  A  l'iîgard  des  Gestes  ou  [""aits  mémo- 
rables des  Fran(jais  et  de  Dagobcrt,  on  con- 
vient que  l'auteur  est  un  moine  de  saint  De- 
nis, qui  écrivait  après  saint  Grégoire. 

§  IX. 

De  quelques  ouvrages  de  saint  Grégoire  qui  son/ 
pei'dus. 

1.  Vi\\\.rfi\(is  Commentaires  sur  les  psaumes.  Trjiis  do* 
nous  avons  perdu  le  traité  des  Offices  de 
l'Église,  que  saint  Grégoire  met*  lui-même 
au  nombre  de  ses  ouvrages  dans  le  dixième 
livre  de  son  histoire.  Il  avait  encore  mis" 
une  préface  à  la  tète  d'un  traité  des  Messes, 
composé  par  saint  Sidoine  Apollinaire.  Nous 
n'avons  ni  la  préface,  ni  le  traité.  La  perte  do 
sa  traduction  des  actes  du  martyre  des  sept 
Dormants  est  moins  considérable  ,  puisqu'il 
nous  en  a  donné  l'extrait  dans  son  livre  '  de 
la  Gloire  des  martyrs.  On  cite  un  manuscrit 
de  la  Bibliothèque  de  Vienne ,  qui  contient 
l'histoire  de  Glovis  et  de  ses  enfants,  par  saint 
Grégoire  de  Tours;  mais  ce  n'est  apparem- 
ment qu'une  compilation  de  ce  que  ce  Père 
a  dit  de  ces  princes  dans  son  Histoire  géné- 
rale des  Français. 

ARTICLE  m. 

DOCTRINE  DE  SAINT  GRÉGOIRE  DE  TODRS. 

1.  Quelques  soins  queles  apôtres  desGaules  gj°^;'^  ^'^ 
se  fussent  donnés  pour  détruire  entièrement 
les  superstitions  païennes  avec  le  culte  des 
idoles,  elles  se  maintini'ent  encore  longtemps. 
La  plus  commune  était  celle  de  mettre  en 
usage  certaines  pratiques  pour  connaître 
l'avenir.  On  n'avait  plus  recours  au  vol  des 
oiseaux,  ni  i  l'examen  des  entrailles  des 
victimes  ;  la  religion  chrétienne  et  les  lois 
des  Empereurs  ne  souffraient  rien  de  sem- 
blable. On  imagina  une  espèce  de  divina- 
tion d'autant  moins  odieuse,  qu'on  la  cou- 
vrait du  prétexte  de  religion.  C'était  d'ou- 
vrir quelque  livre  de  l'Écriture,  et  de  tirer 
du  premier  verset  de  la  page  qui  se  présen- 
tait une  assurance  de  ce  qui  devait  arriver. 
Mais  cette  façon  même  de  chercher  dans 


'  Pag.  1308.—  '  Greg.  lib.  I  Eist.,  cap.  xxui. 

'  De  Jesu,  Christi  gestis  libri  XIY,  ex  Evange- 
liorum  et  sanclorum  Patrum  libris  excepti.  Bib. 
Reg.  Àngl.,  pag.  122. 

XI. 


'  De  cursihus  eliam  ecclesiasticis  unum  librum 
condidi.  Greg.  lib.  X  Hist.,  cap.  xxxi. 
5  Ibid.,  lib.  Il,  cap.  sxn. 
'^  De  Gloria  Martyr.,  lib.  I,  cap.  xcv. 

23 


HISTOIRE  GftNKRALE  DES 


386 

l'avenir  n'était  pas  inconnue  aux  païens  ;  on 
ne  fit  qu'en  changer  d'objet.  Spuilicn  ra- 
conte qae  l'empereur  Adrien  angmait  quel- 
quefois de  l'avonir  par  le  premier  vers  qu'il 
rencontrait  à  l'ouverture  des  poésies  de  Vir- 
gile. Nous  avons  rapporté  les  canons  des 
conciles  d'Agde  en  506,  du  premier  d'Or- 
léans en  511,  de  celui  d'Auxerre  en  585,  où 
cette  espèce  de  divination  est  défendue. 
On  l'appelait  le  sort  des  saints.  Saint  Gré- 
goire en  a  mis  dans  son  histoire  plusieui's 
exemples,  sans  s'expliquer  sur  ces  soi-tes  de 
pratiques,  ni  témoigner  qu'elles  eussent  été 
défendues  dans  quelques  couciies.  Le  pre- 
mier qu'il  rapporte  '  est  du  roi  Glovis.  Ce 
prince,  ayant  passé  la  Loire  vers  l'an  500, 
envoya  des  présents  au  tombeau  de  saint 
Martin,  avec  ordi-e  à  ceux  qui  les  portaient 
de  prendre  garde  aux  paroles  de  l'Écriture 
que  l'on  chanterait  à  l'ottice,  lorsqu'ils  entre- 
raient dans  l'église.  Rien  de  plus  heureux 
que  ce  qu'ils  entendirent  :  le  chœur,  quand 
ils  entrèrent,  chantait  à  haute  voix  ce  verset 
du  Psaume  xvii'  :  Vous  m'avez  donné  des  for- 
ces poui-  combattre,  et  vous  avez  mis  sous  incs 
pieds  ceux  qui  s'élèvent  contre  moi.  Vous  m'a- 
viez fait  voir  le  dos  de  mes  ennemis,  et  vous  avez 
exterminé  ceux  qui  me  haïssaient.  Aussitôt 
ils  se  mirent  à  genoux  pour  rendre  grâces  à 
Dieu  d'un  si  bon  augure,  et  après  avoir  fait 
leurs  otl'randes  au  tombeau  du  saint,  ils  s'en 
retournèrent,  pleins  de  joie  et  d'espérance, 
rendre  compte  au  roi  de  ce  qu'ils  avaient 
entendu.  Clovis  présenta  la  bataille  à  Alaric, 
le  tua  et  mit  son  armée  en  déroute.  En  536, 
Charibert  et  Gontian',  fils  du  roi  Clotaire, 
étant  allés  en  Auvergne  pour  contenir  dans 
le  devoir  Chramne  leur  fière,  le  menacè- 
rent, en  cas  qu'il  refusât  de  se  soumettre, 
de  lui  livrer  bataille,  disant  qu'ils  en  avaient 
ordre  de  leur  père.  Chramne,  usant  de  stra- 
tagème, les  contraignit  de  prendre  en  grande 
hâte  le  chemin  de  Bourgogne,  les  y  suivit, 
assiégea  et  prit  Châlon,  et  s'approcha  de  Di- 
jon. Le  jour  qu'il  arriva  devant  celle  ville 
était  un  dimanche.  L'évèquedu  lieu,  iKiminé 
Tétricus,  et  les  autres  ecclésiastiques,  cu- 
rieux de  savoir  ce  qui  arriverait  à  ce  prince 
rebelle,  qu'ils  ne  traitaient  point  cependant 
en  ennemi,  mirent  de  coniert  trois  livres 
sur  l'autel,  les  Prophéties  ,   les  llpitres  de 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

saint  Paul  et  les  Évangiles,  en  convenant 
que  chacun  lirait  à  la  m»sse  l'enilroit  sur  le- 
quel il  serait  tombé  à  ron\crture  du  livre. 
Le  livre  des  Prophètes  fut  le  premier  que 
l'on  ouvrit;  les  premières  paroles  qui  se  pré- 
sentèrent étaient  celles-ci  :  Parce  que  ma  vi-  '"'' 
Qne,  au  lieu  de  porter  de  bons  raisins,  n'en  a 
produit  que  de  mauvais,  j'en  arracherai  la  haie, 
et  elle  sera  exposée  au  pillage,  .\yant  ensuite 
ouvert  les  Épiires  de  saint  Paul  ,  on  lut  : 
]'ous  savez  bien  vous-tnémcs  que  le  Jour  du  Sei-  „'<;,^! 
gneur  doit  ven  ir  comme  un  voleur  de  nuit  ;  car,  '" 
lorsqu'ils  diront  :  i\ous  voici  en  paix  et  en  li- 
berté, ils  se  trouveront  surpris  tout  d'un  coup. 
On  vint  après  cela  au  livre  des  Évangiles,  tpii 
portait  :  Quiconque  n'écoufe  point  mes  paroles, 
sera  semblable  à  un  homme  insensé  qui  a  bâti 
sa  7naison  sur  le  sable,  /m  pluie  est  tombée,  les  „"':' 
fleuves  se  sont  débordés,  les  vents  oyit  soufflé,  et 
sont  venus  fondre  sur  cette  maison,  et  elle  a  été 
renversée,  et  la  ruine  a  été  grande.  On  augura 
mal  du  sort  de  Chramne.  Ce  prince,  après 
avoir  obtenu  miséricorde  de  son  père,  se  ré- 
volta une  seconde  fois  contre  lui,  lui  livra 
une  bataille ,  la  perdit ,  et  contraint  de  se 
sauver  dans  une  chaumière,  il  y  fut  brûlé 
vif  avec  sa  femme  et  ses  deux  filles ,  par 
ordre'  de  Clotaire.  Nous  avons  parlé  plus 
haut  de  ce  que  fit  Chilpéric  pour  connaître 
si  Gonlran-Boson  n'avait  point  tué  son  fils 
Théodebert.  Nous  ajouterons  ici  que  Méro- 
vée,  voulant  connaître  s'il  parviendrait  au 
trône  ',  mit  trois  livres  sur  le  tombeau  de 
saint  Martin  ,  le  Psautier ,  les  Rois  et  les 
Evangiles,  et  que,  veillant  toute  la  nuit,  il 
pria  le  saint  de  lui  apprendre  ce  qui  lui  de- 
vait arriver  ;  qu'au  bout  de  trois  jours  qu'il 
passa  de  suite  en  jeunes,  en  veilles  et  en 
prières,  il  s'approtha  du  tombeau  et  ouvrit 
le  livre  des  Rois,  dont  le  premier  vei-set  de 
la  page  qu'il  trouva  portait  :  Parce  que  vous 
avez  quitté  le  Seigneur  votre  Dieu  fiour  suivre 
les  dieux  étrangers,  il  vous  a  livré  aux  mains 
de  vos  ennemis.  L'endroit  du  livre  des  Psau- 
mes fut  :  La  prospérité  oli  vous  lis  avez  éta- 
blis leur  est  devenue  un  piège  :  Vous  les  rtccî 
renversés  dans  le  tcmfis  qu'ils  s'élevaient,  t'itm- 
niint  sont-ils  tomlfi'S  dans  la  dernière  désola- 
tion ?  Ils  oui  manqué  tout  d'un  coup  ;  ils  ojit 
jx'ri  à  cause  de  leur  iniquité.  Il  trouva  dans 
l'Évangile  :  Vous  savez  que  la  Pàque  se  fait 


IX.  9.    qu, 
■eoian. 


'  Grp«.  lili.  Il  //iVi/.,  cap.  xxwn. 
*  Tiruf.'.  lili.  I\  ,  laii.  XVI. 


«  fiiip.  Tnriii).  lili.  IV,  cap.  .XX. 
'  M.  lib.  Y,  cap.  Iiv. 


ClIAl'ITllE  XTJI.  —  SAINT  (lIlKdOIHE  DE  TOURS. 


[VI'  SIKCLE.J 

dans  deux  jours,  et  que  le  Fils  de  l'homme  sera 
lirré  ]wnr  être  crucipc.  Mi5iovëe,  ne  voj'ant 
rien  f|iio  do  fimoslo  dans  ces  réponses,  se 
mil  à  pleurer.  Sa  mort  suivit  de  près,  ayant 
eus  Iralii  et  assassiné  par  les  liabilanis  de 
Térouanne ,  qui  lui  avaient  otlert  une  re- 
traite dans  leur  pays,  et  les  clefs  de  leur 
ville.  Ces  sortes  de  diviiialions,  après  avoir 
été  en  usai;e  pendant  plusieurs  siècles  mal- 
pré  la  défense  des  conciles ,  furent  entîn 
abolies  '  par  le  tmisième  capitulaire  de  Cliar- 
lema^^ne,  en  78'.). 
Dwiiii*  .la       2.  Dans  le  symbole  crue  saint  Grégoire  a 

J>.u.-C;l,r,.l.  .  •'  :       ,  .T-     .     •  -1 

«.vvio,.  .1,1  mis  au  commencement  de  son  Histoire ,  il 
pjro  «  du  confesse  (rue  Jésus-Christ'  est  le  Verbe  du 
nduvtru.  Père,  par  qui  toutes  choses  ont  ete  faites; 
que  le  Saint-Esprit  procède  du  Père  et  du 
Fils,  auxquels  il  est  consubstantiel  en  na- 
ture, égal  en  toule-puissance  ,  coéteruel  en 
essence;  que  la  sainte  Trinité  subsiste  dans 
la  distinction  des  personnes,  celle  du  Père 
étant  autre  que  celle  du  Fils,  et  celle  du  Fils 
autre  que  celle  du  Saint-Esprit;  mais  que 
ces  trois  personnes  ont  une  même  divinité  , 
une  même  puissance,  une  même  essence  ; 
que  la  bienbeureuse  Marie  est  demeurée 
toujours  viercfe  après  son  enfantement  '  com- 
me auparavant  ;  que  l'âme  est  immortelle, 
sans  qu'elle  soit  une  partie  de  la  divinité; 
entln  tous  les  articles  de  foi  qu'ont  confessés 
les  Pères  de  Nicée.  «  Ce  n'est  point,  dit-il,  le 
Père  *  qui  s'est  fait  cbair,  ni  le  Saint-Esprit, 
mais  le  Fils  ,  afin  que  celui  qui  était  Fils  de 
Dieu  devint,  pour  la  rédemptiou  du  genre 
humain,  fils  de  l'homme  et  naissant  d'une 


387 


Vierge.  Ce  n'est  pas  non  [lius  le  Père  qui  a 
sotill'ert,  ni  leSainl-Espril,  mais  le  Fils,  afin 
que  celui  qui  avait  pris  chair  dans  W.  monde, 
fût  de  mènu'  olVert  pour  le  monde.  Au  reste, 
quand  on  emploie  le  nom  de  personne  pour 
marquer  la  Trinité,  ce  n'est  pas  dans  un  sens 
corporel,  mais  s[)iritucl.  d 

3.  Nous   ne  connaissons   aucun  écrivain 
ecclésiastique  avant  saint  Grégoire  de  Tours, 


A«*fimjilinn 

^•^    b     taiolu 

VI.TS.1    ;     .e, 

.,,..,  K  •  i>  1  1     .       Imigei,  celles 

qui  ait  dit  en  termes  "  aussi  formels  que  lui,   o«      a-'"- 


que  la  sainte  Vierge  ressuscita  aussitôt  après  Atsires. 
sa  mort,  et  qu'elle  fut  enlevée  en  corps  et 
en  âme  dans  le  ciel,  pour  y  jouir  à  jamais 
de  la  félicité  avec  les  justes.  Ce  sentiment 
prévalut  tellement  dans  les  églises  d(^  France 
au  siècle  suivant,  que  l'on  fil  mémoire  de 
cette  assomption  dans  l'ollicc  de  la  messe, 
ainsi  qu'on  le  voit  dans  le  troisième  livre  de 
la  Liturgie  Gallicane.  Dès  le  vi"  siècle,  on 
exposait  °  son  image  dans  les  églises,  où 
elle  était  représentée  assise  ,  tenant  un  en- 
fant entre  ses  bras,  c'est-à-dire  son  fils.  C'é- 
tait aussi  l'usage  d'y  mettre  l'image  '  de  Jé- 
sus-Christ peinte  sur  des  tables  ,  el  de  l'at- 
tacher dans  les  maisons  particulières.  Il  ar- 
riva qu'un  juif,  qui  en  avait  vu  une  dans 
une  église,  la  détacha  et  l'emporta  dans  sa 
maison  dans  le  dessein  de  la  brûler.  Avant 
d'en  venir  à  l'exécution  ,  il  la  perça  d'un 
dard  ;  aussitôt  le  sang  '  coula  de  l'endroit 
avec  tant  d'abondance  ,  que  les  habits  du 
juif  en  furent  couverts.  Craignant  que  son 
crime  ne  fût  connu ,  il  cacha  l'image.  Mais 
les  chrétiens,  suivant  les  traces  du  sang  ré- 
pandu, allèrent  dans  sa  maison,  et  l'ayant 


de  4 


'  Vt  nullits  in  Psalterio,  vel  in  Evangelio,  vel 
in  aliis  rébus  sortirr  prcrsnmat,  nec  dioinatioves 
aliquas  observare.  Capil.  3,  cnp.  iv. 

'  Credo  Cliristum  /iuHc  Verbum  esse  Patris,  per 
quem  fada  sunt  oinnia...  Credo  Spiritum  Sanc- 
tum  a  Pâtre  et  Filio  processisse...  œqualem  et 
semper  cum  Pâtre  et  Filio  coœternum  Deum, 
consubstantialein  nalura,  œqualem  omnipotentia, 
consempiterniim  essenlia.  Credo  hanc  Trinitatem 
sanctam  in  distinctione  subsistcre personarum,  et 
aliam  quidem personam  Patris,  aliam  Filii,  aliam 
Spiriltis  sancti  ;  in  qua  Trinitate  unam  deitatem, 
unam  potentium  ,  imam  essentiam  esse  confiteor. 
Greg.  lib.  1  Hist.  in  Prologo. 

'  Credo  beatam  Mariam,  ul  virginem  anle  par- 
tum  ,  ita  virginem  et  post  partum.  Credo  ani- 
mam  immortalem,  nec  tamen  partent  habere  di- 
vinitatis  :  el  omnia  qxiœ  a  trecentis  decem  et  octo 
episcopis  Mceœ  consiitula  sunt,  credo  fideliter. 

*  lion'Pater  adsumpsit  carnem,  neque  Spiritus 
Sanctus,  sed  Filitis;  ut  qui  crat  Dei  Filius  .  ipse 
ad  redemplionem  hominis  lilius  huberelur  et 
Virginis.  Kon  Paler  passus,  neque  Spiritus  Sanc- 


tus, sed  Filius  :  ut  qui  carnem  adsumpserat  in 
■mundo,  ipse  ojferretur  pro  nnmdo.  De  personis 
non  corporaliter,  sed  spiritaliter  sentiendum  est. 
Id.  lib.  V,  cap.  XLV. 

»  Diiuculo  levaverunt  apostoU  cum  lectulo  cor- 
pus ejus.  posueruntque  illud  tu  monumento,  et 
custodiebant,  ipsum  adventum  Domu  iprœstolan- 
tes.  Et  ecce  adstitit  eis  Dominus,  su-'eptumque 
corpus  sanctum  in  nube  deferri  jussil  in  naradi- 
suni,  ubi  nunc  resumpta  anima,  cum  eleclis  ejus 
exultans,  œlernilatis  bonis  nullo  occasuris  pne 
perfruilur.  Id.  lib.  I  De  Gloria  Martyr.,  cap.  iv  el 

IX. 

'  Mulier  quœ  in  ba.'^ilica  illa,  uhipaneni  demen- 
sa  accepi,  in  cathedra  residcns,  parculum  in  sinu 
gestat  infantem,  hœc  me  paliio  suo,  ne  ignis  vo- 
raret,  operuil.  Ibid.,  cap.  s. 

'  Ut  ejus  iChristi)  imaginem  ad commemoratio- 
neni  virttitisin  tabulis  visiiilibus  pictam  per  ec- 
clesias  et  domos  adfigunt.  Ibid.,  cap.  xsii. 

"  De  lulnere  ubi  imago  Iransfossa  fuerat,  san- 
guis  cl]lu.vil.  Ibid. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Egh-Pf  ; 
leur»  dédira* 
Ce»,  leurs  or> 
iipiiii^nu,  le 
re^ptct  qu'oQ 
leur  nadait. 


388 

trouvée  dans  un  coin  de  sa  chambre,  ils  la 
rapportèrent  à  l'église.  Saint  Jean  Daiuascè- 
ne,  dans  son  troisième  discours  sur  les  ima- 
ges, raconte  qu'un  Sariasin  ayant  percé  d'une 
flèche  la  statue  de  saint  Théodoie  martyr  à 
Damas,  le  sang  sortit  de  la  plaie.  On  conser- 
vait encore  dans  les  églises  les  images  '  des 
apoires,  et  afin  que  les  fidèles  ne  s'y  trom- 
passent point ,  on  mettait  au  bas  de  chaque 
tableau  le  nom  de  l'apôtre  qu'il  représen- 
tait. On  en  usait  de  même  à  l'égard  des 
images  des  autres  saints.  Les  églises  étaient 
en  dedans  soutenues  de  colonnes  ornées  de 
maibre  '  et  de  diverses  peintures  à  la  mo- 
saïque. ,• 

■4.  Quand  on  en  bâtissait  de  nouvelles, 
l'évèque  les  consacrait';  il  en  consacrait 
aussi  l'autel,  y  mettait  des  reliques  des  saints, 
célébrait  la  messe  ,  et  finissait  la  cérémonie 
par  la  prière.  On  fêtait  *  annuellement  le 
jour  de  leur  dédicace,  celui  de  la  translation 
de  quelques  reliques  considérables ,  et  le 
jour  de  l'ordination  des  grands  évéques.  Les 
murailles  des  églises  étaient  ornées  de  ta- 
pisseries', et  leurs  portes  de  voiles.  C'était  ° 
un  usage  paimi  les  gens  de  piété  de  baiser 
les  portes  des  églises  avant  d'y  entrer,  et 
cet  usage  était  beaucoup  plus  ancien  que 
saint  Grégoire  de  Tours.  Elles  avaient  le 
droit  d'asile',  surtout  celle  de  Saint-Martin 
à  Tours  ;  ce  droit  s'étendait  jusqu'aux  parvis 
des  églises,  aux  maisons  des  évêques,  et  à 
tous  les  lieux  renfermés  dans  leurs  encein- 
tes :  extension  nécessaire  pour  ne  pas  obli- 


ger les  réfugiés  à  demeurer  toujours  dang 
l'église,  où  plusieurs  choses  nécessaires  à  la 
vie,  comme  de  dormir  et  de  manger,  n'eus- 
sent pu  se  faire  avec  bienséance.  Ils  avaient 
permission  de  faire  venir  des  vivres  dans  leur 
asile,  et  c'aurait  été  violer  l'immunité  ecclé- 
siastique que  de  les  en  empêcher.  On  don- 
nait à  l'église  principale  le  nom  de  cathé- 
drale', d'ancienne,  de  mère,  de  grande.  Il 
y  avait  des  églises  desservies'  par  un  seul 
clerc.  Si  on  y  répandait  '"  le  sang  humain, 
elle  était  interdite  ;  il  appartenait  A  l'évoque 
de  connaître  du  délit,  et  de  punir  ceux  qui 
l'avaient  comznis  ,  en  le  privant  de  la  com- 
munion de  l'Église.  Saint  Grégoire  nous  a 
conservé  les  dimensions,  ou  plutôt  le  plan 
entier  de  celle  que  saint  Perpétue,  son  pré- 
décesseur, fit  bâtir  sur  le  tombeau  de  saint 
Martin  ;  elle  avait  "  cent  soixante  pieds  de 
longueur  sur  soixante  de  large,  et  quarante- 
cinq  pieds  depuis  le  pavé  jusqu'A  la  voùle. 
Le  presbytère  était  percé  de  trente-deux  fe- 
nêtres, et  la  nef  de  vingt;  ce  qui  faisait  en 
tout  cinquante-deux.  La  nef  et  le  presbytère 
étaient  ornés  de  cent  vingt  colonnes.  Il  y 
avait  huit  portes,  trois  dans  le  presbytère, 
cinq  dans  la  nef. 

5.  Lorsqu'on  apportait  des  reliques  à  quel- 
que église,  on  allait '- au-devant  avec  des 
cierges  allumés  et  des  croix  pour  leur  faire 
honneur. L'évèque  les  faisait  mettre  d'abord" 
sur  l'autel ,  puis  il  L's  plaçait,  ou  sur  l'au- 
tel ",  ou  dans  la  cavité"  de  l'autel,  ou  dans 
quelque  lieu  élevé  à  l'opposite  du  presby- 


*  Videns  autem  scppius  in  oratorio  Htteran  su- 
per iconicas  apnslolorum  reliquorum<iue  saiicto- 
rum  esse  conscriptus,  excinpluvit  eoi  in  codice. 
Greg.  Yil.  Pat.,  tap.  .xii. 

'  Agrœcula  Cabillonensis  episcopus  Ecclesiam 
fiibricavit,  quant  columnis  fuleivii,  variavit  mar- 
innre,  musivo  depitixil.  (!reg.  lib.  Y,  cap.  xlv. 

*  Ad  beuedicendiim  Ecclesiam  acccssi,  sacravi 
altare,  decerpsi  fila  de  linleo  sancli  Mcelii,  locavi 
in  templo  ;  dictis  missis,  facta  oratione,  discessi. 
Id.  Yit.  Pal.,  cap.  vni,  num.  7. 

*  Lib.  Il  Ilisl.,  cap.  xiv,  cl  lib.  vi,  cap.  xi. 

*  Lib.  De  Gloria  Confess.,  cap.  lv,  et  lib.  1  De 
Uirac.  S.  Martini,  cap.  lui. 

«  Id.  lil).  IV  De  Mirac.  S.  Marlini,  cap. \]\;Cl\ry- 
nostoui.  Uom.  30  ;  in  2  ad  Corinlh.;  Prudentius  in 
hymno  de  S.  Laurenlio  ;  Patilin.  in  nataliC',  de 
.S.  Felice.  Foituiiat.  lib.  IV,  De  Vila  S.  Martini.— 
'  (Jrep.  lib.  I.\  Hiil.,  cap. m  et  i.xxvni  ;  lib.  De  Gloria 
Confess.,  laji.  lxvii  ;  lil..  IV  Hisl.,  cap.  u,  m  cl  iv. 

»  Lib.  V  Ilisl.,  cap.  iv  :  lib.  Il  De  Mirar..  S. 
Martin.,  rnp.  xxv,  not.  4;  lib.  Il  Ilisl.,  cap.  xvi  j 
lib.  III  De  Mirac.  S.  Martini,  c;i[<.  xiv. 

*  Lib.  I  De  Gloria  Martyr.,  cap.  lxiv. 


'"  Sauciantur  mnlti  gladiis,  respergilur  sancto 
httniano  cruore  basilica,  oslia  jacitlis  fodiuntur 
et  cnsihus,  algue  ad  ipsuni  sepulclirum  ttla  ini- 
qua  desœviunl.  Quod  dum  vii  niitignlur,  locus 
oflicium  perdidit,  dnnec  ista  oninia  ad  Régis  tio- 
tiliam  peri-enirent  ;  hi  rero  ad  ]iriTsenliani  prin- 
cipis  properantes,  non  recipiuntur  in  graliam  : 
sed  ad  episcopum  loci  itlius  remitti  eos  jussum 
est,  ut  si  de  hoc  facinore  culpahiles  invtniren- 
tur,  non  convenienter  sociarentur  cemmunioni 
Lib.  V  Hi.tt.,  cap.  ixxill. 

"  Lib.  Il  Hi.<<l..  cap.  xiv. 

"  Episcopus  comnionel  populum  cvm  accensis 
cereis  ad  porlam  tisque  procedere...  dehinc  su- 
btatas  reliquias  usque  ad  snnctam  ecclesiam  cum 
magïw  honore)  drportnl.]  De  miraculis  S.  Julia- 
ni,  cap  XXXIII.  Mane  autem  facto,  sacerdos,  ad- 
monitis  riiibus,  cum  crucibus  et  cereis  ad  ocrur- 
sum  sanclarum  reliquiarum  dcrnlissimus  pmpe- 
rat.  Lib.  I  De  Gloria  Martyr.,  cap.  xuv. 

"  Lib.  IX,  cap.  vi,  et  lib.  De  Mirac.  S.  Juliani, 
cap.  XXXIV. 

'*  Lib.  Il  De  Gloria  Martyr.,  cap.  xx»iv. 

"  Vit.  Pat.,  cap.  15,  num.  I. 


CHAPITIIK  XLll.  —  SAINT  GRÉGOIRE  DE  TOUIIS. 


[Vl«  SIÈCLE.] 

tèrc  '.  Mais  ces  reliques  ne  se  voyaient  point 
à.  nu;  elles  (!liii(Mit  orilinairemont  renfer- 
ini^cs  dans  des  cliilsses  ',  surtout  i[uand  c'é- 
tait des  ossements  ;  car  ou  appelait  reliques 
(les  saints,  non-seulement  leurs  corps,  mais 
leurs  vêtements ,  les  linges  ' ,  les  nappes 
que  l'on  mettait  sur  leurs  tombeaux ,  les 
rierges  et  les  lampes  (jiie  l'on  y  allumait , 
la  poussière  que  l'on  eu  tirait,  les  Heurs  et 
les  herbes  qui  leur  avaient  touché  ,  l'eau 
d'une  fontaine  où  l'ou  avait  lavé  quelqu'un 
de  leurs  membres.  La  manière  de  vérifier 
les  reliques  des  saints,  lorsqu'on  manquait 
de  preuves  de  leur  authcuticité,  était  *  d'ex- 
poser au  feu  les  linges  ou  les  draps  qui  les 
enveloppaient,  et  de  demander  à  Dieu  dans 
des  prières  publiques  ,  que  ces  linges  ou 
draps  fussent  consumés  par  les  flammes  en 
cas  que  les  reliques  ne  se  trouvassent  pas 
véritables.  S'ils  résistaient  au  feu  ,  on  ne 
doutait  plus  de  la  vérité  des  reliques.  Les 
personnes  de  piété  "  se  munissaient  dans  de 
longs  voyages  de  quelques  reliques  des 
saints,  ne  fût-ce  que  de  la  poussière  de  leurs 
ossements  ou  de  leurs  tombeaux,  et  elles  en 
recevaient  du  secours  dans  les  divers  dangers, 
soit  lorsqu'elles  se  trouvaient  attaquées  par 
des  voleurs,  ou  exposées  au  naufrage. 

6.  On  adorait' le  bois  de  la  vraie  Croix  deux 
fois  la  semaine,  le  mercredi  et  le  vendredi. 
Plusieurs  anciens  parlent  des  clous  trouvés 
avec  la  croix  du  Sauveur;  mais  aucun  ne  dit 
si  clairement  que  saint  Grégoire,  '  que  ces 
clous  étaient  au  nombre  de  quatre,  deux  pour 


380 


attacher  les  mains,  et  deux  pour  attacher  les 
pieds.  On  employait  le  signe  de  la  croix  dans 
le  sacrement  de  la  confirmation,  que  l'on  con- 
férait encore  alors  avec  le  bai)tème  :  car  il 
est  dit  que  saint  lU^ny,  ayant  fait  faire  ;\  Glo- 
vis  sa  profession  de  foi,  et  confesser  un  Dieu 
tout-puissant  en  trois  personnes ,  le  bapti- 
sa au  nom  '  du  Père',  du  Fils  et  du  Saint- 
Esprit,  et  qu'ensuite  il  l'oignit  en  faisant  le  si- 
gne de  la  croix  sur  lui.  Le  roi  Récarède  ', 
ayant  quitté  l'arianisme,  fut  réconcilié  avec 
l'Eglise  calholiqueeu  recevant  le  signe  de  la 
croix  avec  l'onction  du  saint  chrcîme.  C'était 
encore  l'usage  général  de  l'Eglise  de  bénir  '" 
avec  le  signe  de  la  croix  les  sacrés  dons  que 
l'on  ollVait  sur  l'autel,  et  ce  que  l'on  servait" 
à  table.  Il  y  avait  même"  au-dessus  de  l'au- 
tel une  croix  qui  y  demeurait  en  tout  temps; 
elle  était  quelquefois  travaillée  avec  beau- 
coup d'art,  et  de  matière  précieuse. 

7.  En  577,  qui  était  la  seconde  année  du 
règne  de  Childebert,  et  y  eut  une  dispute  sur 
la  Fàque.  Rome  avec  l'Orient,  suivant  le  cal- 
cul" des  Alexandrins  et  de  Denis  le  Petit,  la 
célébra  le  25  avril.  L'église  de  Tours  et  quel- 
ques autres  de  Gaule  la  firent  le  14  des  ca- 
lendes de  mai,  c'est-à-dire  le  18  avril,  selon 
le  cycle  de  Victor;  d'autres  avec  les  Espa- 
gnols la  célébrèrent  le  21  mars,  le  jour  mê- 
me de  l'équinoxe.  Il  se  trouva  par  l'événe- 
ment que  l'Église  de  Tours  avait  fait  la  Pâque 
au  jour  qu'on  devait  la  faire,  parce  que  les 
fonts  miraculeux  d'Espagne  se  remplirent  le 
18  avril.  Les  évêques  delà  Gaule  furent  divisés 


Dlfflctilléj 
tOT  la  l'Ai|ue  ; 
Fcnis  tiapris. 
maii\  mjracu- 
l«ui  en  Ei. 
pajno. 


'  Lib.  VU  Hist.,  cap.  xxsi. 

'  Tum  Mummolus  elevari  ad  parietem  scalam 
jubet,  eraiil  enim  reliquiœ  in  sublimi  parietis 
contra  aliarium  in  capsula  recondilœ,  diaconum 
suum  scandere  prœcepit;  qui  per  gradus  scaii- 
dens  scalœ,  apprehendens  capsam,  tremore  con- 
cussus  est.  Ibid. 

»  Greg.  Turou.,  pag.  1013,  961,  895,  1040,  388, 
128$,  879. 

*  Missale  Remense  antiquum ,  in  append.  Op. 
Crpg.,  pag.  1.166. 

»  Pater  meus  nuper  junctus  conjugio  voluit  se 
sanctorum  reliquiis  communire,  pelivilque  a  quo- 
dam  sacerdote  ul  ei  a Uq nid  de  eiidem  indulgeret, 
qiio  scilicet,in  viam  longinquam  abiens,  lali  prœ- 
sidio  tutaretur.  Tune  inclusos  in  lupino  aureo 
sacros  cineres  circa  eum  posuit;  sed  ignarus  vir 
nominum  beatorum,  referre  solitus  eralse  a  mul- 
tis  tune  erulitm  periculis  ;  natn  et  violentias  la- 
tronwn  et  pericula  fluminum  sœpius  se  evasisse 
horum  virtulibus  lestabatur.  Greg.  lih.  \De  Gloria 
Martyr.,  cap.  lixxiv. 

'  Çrux  Dominica  quœ  ab  Uelena  Àugusta  re- 


perta  est  Hierosolymis,  quarta  et  sexta  feria  ado- 
ratur.  Lib.  De  Gloria  Mart.,  cap.  v. 

■"  Clavorum  Dominicorum  quod  quatuor  fuerint, 
hœc  est  ratio  :  duo  sunt  affixi  in  palinis,  et  duo 
in  plantis.  Ibid.,  caji,  vi. 

^  Igitur  rex,  omnipolentem  Deumin  Trinitate 
confessus,  baptisatus  est  in  nomine  Patris,  et  Filii, 
et  Spiritus  Sancti,  delibalusque  sacro  chrismate 
cum  signaculo  crucis  Chnsti.    Lib.  11  Hist.,  cap. 

ÏXXl . 

"  Richandus  intelligens  veritatem,  se  catholicœ 
legi  subdidil,  et  accepto signaculo  beatœ  crucis  cum- 
clirisinatis  unctione,  credidit  Filium  Dti  œqualem 
Patn.  Ibid.  lib.  I\,  cap.  xvii. 

">  Ventumque  est  ut  sanctwn  munus  juxta  mo- 
rem  catholicum  signo  crucis  superposito  benedi- 
ceretur.  Vit.  Pat.,  c:ip.  xvi,  nuin.  2. 

•1  Lib.  III  De  ilirac.  S.Martin.,  cap.  i. 

"Peiutebat  autem  super  ipsum  allare  crux  ho- 
locrysa  eleganti  opère  facta.  De  Mirac.  S.  Julian., 
cap.  iLiii. 

'»  Greg.  lib.  V,  cap.  xvii. 


390 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Kiicliari^li''. 
loF  Morts. 


en  390  '  sur  la  même  solennité.  La  plupart, 
suivant  le  cycle  de  Victor,  la  célébrèrent  le 
7  des  calendes  d'avril,  quinzième  de  la  lune, 
c'est-à-dire  le  26  de  mars,  les  autres  le  2 
d'avril,  le  vingt-deuxième  de  la  lune,  crai- 
gnant de  faire  la  Fàqiie  avec  les  Juifs,  s'ils  la 
faisaient  le  quinzième  jour  de  la  pleine  lune. 
A  Tours,  on  la  fît  le  vingt-deuxième  de  la 
lune,  et  il  se  trouva  encore  qu'en  ce  jour  les 
fonts  baptismaux  se  remplirent  en  Espagne. 
C'était  en  une  ville  uommée  Osser  ou  Oser,  ;\ 
quelque  distance  de  Séville.  Les  fonts  baptis- 
maux, qui  étaient  composés  de  marbre  orné 
de  sculptures,  se  remplissaient'  d'eux-mêmes, 
et  quoique,  l'eau  s'élevât  au-dessus  des  bords 
du  vaisseau,  et  qu'on  la  vît  Uotter  de  côté  et 
d'autre,  elle  ne  s'extravasait  pas;  l'évèque  la 
sanctiliait  parles  exorcismes  et  par  l'infusion 
du  saint  chrême;  après  quoi  les  fidèles  en 
remplissaient  des  vases  qu'ils  emportaient  en 
leurs  maisons  pour  en  arroser  leurs  champs 
et  leurs  vignes;  en  quelque  quantité  qu'ils  en 
prissent,  les  fonts  ne  diminuaient  point  ;  mais 
l'eau  commençait  à  décroître  aussitôt  que  le 
premier  enfant   avait  reçu  le  baptême;   et 
tous  étant  baptisés,  elle  s'écoulait  sans  que 
l'on  sût  comment,  comme  on  ne  savait  pas 
non  plus  de  quelle  manière  elle  avait  rempli 
les  fonts  baptismaux.  Il  y  eu  avait  '  aussi  à 
Embrun  dans  le  Dauphiné;  mais  l'eau  ne  se 
comblait  pas  comme  dans  ceux  d'Osser  en 
Espagne. 

8.  La  nuit  de  la  veille  de  Pâques  où  l'on 
administrait  le  baptême  solennel,  on  célé- 
Jirait  les  divins  mystères,  marqués  dans  saint 
Grégoire  sous  le  nom  *  de  messe  ;  aux  au- 
tres jours  on  les  célébrait  '  le  matin,    \ers 


l'heure 'de  tierce,  c'est-à-dire  à  neuf  heures. 
Le  célébrant  devait  être'  à  jeun,  et  les  assis- 
tants "  dans  le  silence.  Un  diacre  était  chargé 
de  les  en  avertir.  On  disait  la  messe,  non- 
seulement  '  les  dimanches,  mais  aussi  les 
jours  de.fêtes  '"  des  martyrs,  et  quelquefois 
en  l'honneur  des  autres  saints"  qui  n'avaient 
pas  répandu  leur  sang  pour  la  foi,  ou  en  ac- 
tions de  grâces  pour  la  d.  livrance  "  d'une 
ville,  ou  pour  le  repos"  des  défunts.  Le  saint 
prêtre  Séverin  disait  "  deux  messes  chaque 
dimanche,  mais  dans  deux  églises  dillëren- 
tes,  et  fort  éloignées  l'une  de  l'autre.  Il  était 
contre  les  canons"  d'en  dire  trois,  fut-ce  sur 
trois  autels  ditférents.  Les  jours  de  diman- 
che, on  commençait  la  messe  par  la  lecture  " 
des  prophéties,  des  évangiles  et  des  épitres 
de  saint  Paul  ;  ce  qui  faisait  trois  leçons.  Aux 
fêtes  des  martyrs  ",  on  en  ajoutait  une  qua- 
trième qui  était  tirée  de  leurs  Actes.  Ces  le- 
çons "  finies,  lorsque  le  moment  d'otfrir  le 
sacrifice  était  arrivé,  le  diacre  allait  prendre 
le  vase,  en  forme  de  tour,  où  l'on  conservait 
le  sacrement  du  corps  du  Seigneur,  et  le  met- 
tait sur  l'autel.  Il  paraît  qu'il  prenait  celte 
tour  dans  un  lieu  séparé  de  l'Eglise,  c'est-à- 
dire  dans  le  sacraire.  L'usage  qu'on  faisait  du 
sacrement  qu'elle  contenait,  était  d'en  mêler 
les  espèces  avec  celles  que  l'on  consacrait  de 
nouveau.  Le  célébrant,  après  avoir  prononcé 
les  paroles  sacrées  ",  rompait  le  sacrement 
du  corps  du  Seigneur,   en  mangeait,  et  le 
donnait  pour  être  distribué  aux  autres.  Tous 
ne  communiaient  pas  chaque  fois  qu'ils  as- 
sistaient au  saint  sacritîce;  luie  femme  même 
de  piété,  qui  le  fit  olfrir  chaque  jour  pendant'" 
un  au  pour  le  repos  de  l'âme  de  son  mari, 


'  Lit).  .\,  cap.  xini. 

>  Mirum  diciu.  piscinam  quam  reliquerant  va- 
cuatn,  reperiunt  pUnaiii  et  Un  cumulo  alliorc  rc- 
{erlam,  ulsokt  supra  ara  modiorum  Irilicum  ad- 
gregari  :  tidpasi/i/e  liuc  illuc  lalices  fliictuare  , 
Jiec  parlent  in  diversam  defluere.  Tune  cum  e.Tnr- 
cismo  sai.ctificatuiii,  roimpersiim  desuprr  cliris- 
ina  omnis  populus  pro  d' volume  havrit,  et  vas 
plénum  dorni  pro  satvahone  reporta'.,  agros  vi- 
neasque  as]}ersione  .<aluherrima  lulaturus.  El  cum 
exinde  nmltiludo  (uitphoraruin  sine  collecta  nu- 
méro haurialur,  nunquam  lawen  vel  cuniulum 
viinuil  :  licet  uhi  infans  jiriiints  inlinctus  ftieril, 
mox  aqua  reducilur,  et  Ixiptizatis  omniinis,  lym- 
phis  in  se  reversi-i,  ut  inilio  produnlur  nescio, 
ita  et  fine  claudunlur  ignaro.  Liti.  I  De  Gloria  Mar- 
tyr., cap.  XXIV. 

'  Lit).  De  Gloria  Cnnf,  cnp.  LXix. 

'  Lit).  Il  Di   Gloria  Mar/7/r.,  cnp.  xsxiv. 

'  Lit).  I  De  Gloria  Martyr.,  cap.  xc. 


'  Yil.  Pal.,  cap.  vin.  nura.  11. 

'  Lih.  1  De  Gloria  Martyr.,  cap.  lxxxvu. 

»  Lib.  Vil  llist.  Franc.,  cap.  vui.  — '  Ibid. 

'"  Lit).  De  Gloria  Martyr.,  cap.  xxxvi. 

u  Ibid.,  cap.  (.xxv.—  "  Lih.  De  Gloria  Martyr., 
cap.  xui.  —  "  Lib.  IV,  cap.  XL,  et  iiti.  De  Gloria 
Conf.,  cap.  LXV.  — "  Ihid.,  cap.  L.— '»  Lib.  V,  cap. 
L.  —  "  Lib.  IV  Bisl.  Franc,  cap.  xvi.  —  "  Lit).  I 
De  Gloria  Martyr.,  cap.  lxxivi. 

"  Lecta  passione  cum  reliqui.^  leclionibus  quas 
canon  snrerdolulis  inve.rit,  tem]ius  od  sttcrificium 
offerettdum  advenif,  ucceptnque  turre  diaconus  in 
qua  iiiy.iterinm  Dominici  corporis  hahtbatur,ferrt 
co'iiil  ad  nstinm,  iiigressusque  templum  ut  eam 
altari  superponeret.  Ibiii. 

"  Expltcitis  verbis  sacris,  confracto  Dominici 
corporis  sncrameulo,el  ip.'ie  sumpsil,  et  aliis  dis- 
tribuil  edendum.  Itiiil.,  rnp.  lxwvii. 

">  Mulier  per  annum  integrum  ad  hoc  templum 
degen^,  assidue  oralioni  va,calat ,  célébrons  quo- 


CIIAPITIIE  XLII.  —  SAINT  (iHÉGOlHE  DE  TOLHS. 


[Vl°  SIÈCLE.] 

et  qui  fournissait  ;\  cctellel  le  vin  ni^cessaire, 
s'abstenait  tle  temps  en  temps  de  la  sainte 
communion.  Saint  Gi'Cfi;oire  pailo  '  souvent 
des  messesqui! l'on célébiait pour losdiH'unls, 
de  celle  en  particulier  qui  se  disait  pour  eux 
le  Irenlièmc  jour  depuis  leur  mort.  Los  mes- 
ses enriionncui'des  saints  avaient  leurs  prc- 
faces'paiticulières;dansl'éfj;lisedo Tours,  tous 
ceux  qui  assistaieat  à  la  messe  cliantaionl  ' 
à  haute  voix  l'oraisou  dominicale,  à  la  ma- 
nière des  Orientaux.  Quand  le  crime  n'était 
pas  constaté,  il  était  '  à  la  liberté  des  lidèles 
de  s'approcher  de  l'autel  poui'  communier  ; 
l'évoque  s'en  rapportait  en  ce  cas  à  la  cons- 
cience de  chacun,  laissant  la  chose  au  ju- 
gement de  Dieu  et  des  saints.  Les  laïques  re- 
cevaient de  sa  main  une  particule  de  l'Eu- 
charistie, et  s'en  communiaient  eux-mêmes. 
C'eslainsi  que  Cautinus,  évèque  de  Clcrmont, 
en  usa  envers  le  comte  Eulalius,  accusé  de 
parricide  sur  un  bruit  public,  mais  dont  cet 
ollicier  se  prétendait  innocent.  On  voit  par 
cet  endroit  de  saint  Grégoire  de  Tours,  que 
l'on  désignait  l'Eucharistie  sous  la  seule  es- 
pèce du  pain;  que  l'on  ne  donnait  pas  tou- 
jours l'Eucharistie  sous  une  forme  certaine, 
et  que  l'on  communiait  sous  une  seule  es- 
pèce, quoique  l'ordinaire  fût  de  communier 
sous  les  deux,  comme  il  le  déclare,  lorsqu'il 
dit  que  nous  prenons  notre  propre  condam- 
nation, quand  nous  recevons  le  corps  et  le 
sang  de  Jésus-Christ  avec  une  conscience 
souillée  par  le  péché.  Sanctum  Doinini  cor- 
pus et  sanguinem  ctim,  simus  actu  polluti,  ad 
jiidicium  sumimus.  Lib.  I  De  Gloria  Martyr., 
cap.  uoxvi. 


391 


9.  Ceux  mômes  qui  ne  communiaient  pas 
étaient  obligés  au  jeOnn  '  jusqu'après  la 
m(!sst!  les  jours  de  dini.uiche.  On  nommait  ' 
ainsi  le  prcnnier  jour  de  la  semaine  ('u  l'hon- 
neur de  la  résurrection  de  Notrc-Seigneur. 
En  ce  jour  le  peuple  assistait  ■"  aux  veilles 
de  la  nuit,  et  aux  laudes,  c'est-à-dire  à  l'of- 
Oce  du  matin.  On  le  choisissait  aussi  pour  la 
consécration"  des  évoques.  Toutes  œuvres  ' 
serviies  y  étaient  défendues.  Les  gens'"  ma- 
riés devaient  le  passer  dans  l;i  continence, 
et  dans  le  clianl  des  louanges  de  Dieu.  Les 
fidèles  n'approchaient  de  la  communion  " 
qu'après  la  fin  de  la  messe.  Tous  buvaient 
le  sang  de  Jésus-Christ  dans  un  même  ca- 
lice ;  au  lieu  que  chez"  les  ariens,  il  y  avait 
un  calice  pour  les  rois,  et  un  autre  pour  le 
peuple.  C'était  la  coutume  de  s'abstenir  du 
travail  "  des  mains  dès  le  soir  du  samedi, 
par  respect  pour  le  dimanche  suivant  ;  elle 
durait  encore  dans  le  ix°  siècle  ;  eu  sorte 
que,  depuis  le  coucher  du  soleil,  il  n'était 
pas  même  permis  de  faire  du  pain.  Le  jour 
du  jeudi  saint  ''',  on  lavait  les  autels  et  les 
tombeaux  des  saints;  l'eau  qui  y  avait  servi 
guérissait  souvent  les  malades. 

10.  L'élection  des  évoques  se  faisait  "  du 
consentement  du  clergé  et  du  peuple  ;  mais  ^"*" 
ils  ne  pouvaient  être  consacrés  qu'avec  '^  la 
volonté  du  roi.  On  portait  l'acte  de  l'élection 

au  roi,  qui  en  conséquence  écrivait  au  mé- 
tropolitain pour  lui  donner  et  à  ses  compro- 
vinciaux  le  pouvoir  de  consacrer  l'élu.  Cette 
disposition,  qui  se  trouve  en  beaucoup  d'en- 
droits "  des  ouvrages  de  saint  Grégoire,  est 
conforme  au  dixième  canon  du  cinquième 


Jnur  du  Dl- 
manrtio,  corn- 
mp  on  le  (•ne- 
I  Util. 


Les  Mi- 
nistres do  l'E- 


tidv'  missarum  solemnia,  et  o/ferrns  oblationem 
pro  memoria  viri  :  non  diffisa  de  Domini  miseri- 
cnrdia,  quod  haheret  defunclus  requiem  in  die 
qua  Domino  obiulionem  pro  ejiis  anima  delibas- 
set,  semper  sextarium  gazeli  vini  prœbens  in  sa- 
criftcium  basilicœ  sanctw.  Sed  subdiaconus  ne- 
quam  reservans  gulœ  gazetum  ,  acetum  vehe- 
vientissimum  offerebat  in  calice,  muliere  7wn  tem- 
per  ad  communicandi  graliam  accedente.  Lib.  De 
Gloria  Conf.,  cap  lxv. 

•  Pag.  182,  947,  948,  1227. 

'  Pag.  1016,  1047. 

'  Lib.  1!  De  Mirac.  S.  Martini,  cap.  xxx. 

'  Tune  episcopus  Cautinus  permisit  eum  (Eu- 
lalium)  cum  cœteris  speclare  solemnia.  Verum 
ubi  ad  comniimicandum  ventum  est  et  EuUilius 
ad/iltariuni  accessi.^'set,  ait  episcopus  :  Rumor po- 
puli  parricidam  te  esse  proclamât.  Ego  vero 
utrum  perpetraveris' hoc  scelus,  an  non.ignoro  : 
idcirco  in  Dei  hoc  et  beati  nwrtyris  Juliani  sta- 
tuo  judiciù.  Tu  vero  si  idoneus  es,  ut  adseris, 


accède  propius  et  sume  tibi  eucharistiœ  particu- 
lam,  atque  impone  ori  tuo;  eril  enim  Deus  res- 
pector  conscientiœ  luœ.  At  ille,  accepta  Eucharis- 
tia,  communicans  abscessit.  Lib.  X,  ca[i.  vin. 

s  Lib.  111  Hist.  Franc,  cap.  xv.  —  «  Lib.  1,  cap. 
XXII.  —  '  Lib.  111,  cap.  XV  De  Mirac.  S.  Juliayii  ;  cap. 
IX  et  lib.I  De  Mirac.  S.  Martini,  cap.  iv  et  lib.  III, 
cap.  XXII.—  s  Lib.  IV  Hist.,  cap.  xxxv. 

«  Lib.  11  De  Mirac.  S.  Martini,  cap.  XL. 

'"  Ibid.,  cap.  xxiv. 

"  Mutier  vidua  expletis  celebratisque  missis  ac- 
cessit ad  poculum  salutare.  Lib.  Il  De  Mirac.  S. 
Martini,  cap.  lxv. 

"  Consueludo  arianorum  est  ut  ad  altarium  ve- 
nientes  de  alio  calice  rcgcs  communicent,  et  de 
alio  populus  minor.  Lib.  III  Hist.  Franc,  cap. 
.XXXI.  — >»  Lib.  m  De  Mirac.  S.  Martini,  cap.  xixi. 

•»  Ibid.  lib.  Il,  cap.  Li,  et  lib.  III,  cap.  xxxiv. 

'S  Vit.  Pat.,  «ail.  xvn. 

i«  Ihid.  et  li'i.  I.\  Hist.,  cap.  XXIII. 

"  Charimerem  referendarium  cum  consensu  ci- 


392 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


concile  d'Orléans,  où  nous  lisons  :  «  Il  n'est 
point  permis  d'acheter  l'dpiseopat  ;  mais  l'é- 
vêque  doit  être  consacré  par  le  métropoli- 
tain et  ses  comprovinciaux,  suivant  l'élec- 
tion du  clergé  et  du  peuple,  avec  le  consen- 
tement du  roi.»  Marculphe  nous  a  conservé  ' 
des  actes  d'élections  faites  par  le  peuple ,  et 
présentés  au  roi,  et  des  décrets  donnés  en 
conséquence  par  les  rois  pour  la  consécra- 
tion de  l'élu.  Il  ne  laissait  pas  d'arriver  quol- 
quefois  que  les  rois'  cassaient  les  élections 
faites  par  le  clergé  et  par  le  peuple ,  soit  à 
cause  qu'elles  n'étaient  point  unanimes,  soit 
parce  que  la  personne  élue   ne  leur  était 
point  agréable  ;  il  y  en  eut  même  qui  pas- 
sèrent de  la  cour  au  siège  épiscopal  par  la 
seule  autorité  du  roi,  et  sans  attendre  les 
suffrages  du  clergé  et  du  peuple  ;  mais  le 
nouvel  évêque  les  leur  demandait  en  arri- 
vant dans  son  église.   Cette  discipline,  qui 
n'était  point  connue  dans  les  premiers  siè- 
cles ,  s'établit  insensiblement  sur  la  fin  du 
sixième.  Les  évéques  s'y  opposèrent,  comme 
on  le  voit  par  le  cinquième  concile  de  Paris 
en  614,  dont  le  premier  canon  porte,  qu'à  la 
place  d'un  évêque  mort  on  ordonnera  celui 
qui  sera  choisi  par  le  métropolitain  avec  ses 
comprovinciaux,  le  clergé  et  le  peuple  de  la 
ville,  et  gratuitement.  Mais  le  roi  Clotaire  II, 
dans  son  édit  pour  l'exécution  des  canons 
de  ce  concile  ,  apporta  cette  modificatiou  k 
celui  dont  nous  venons  de  parler  :  <i  L 'évêque 
i;lu  par  les  évéques ,  le  clergé  et  le  peuple  , 
sera  ordonné  par  ordre  du  prince  :  que  s'il 
est  tiré  du  palais,  il  ne  sera  ordoimé  que  pour 
son  mérite.  »   Saint  Grégoire  ne  fait  aucune 
mention  d'évêques  transférés  d'un  siège  n  un 
autre,  si  ce  n'est  de  ceux  qui,  étant  chassés 


de  leurs  églises  par  les  hérétiques,  étaient 
envoyés  pour  gouverner  celles  qui  se  trou- 
vaient vacantes  :  ce  que  l'Église  a  toujours 
approuvé.  Mais  il   nous  apprend  que  les 
évéques    se   désignaient   quelquefois    leurs 
successeurs  avec  l'agrément  du  roi,  et  que 
ce  fut  de  cette  sorte  que  saint  Nizier  fut  fait 
évêque  de  Lyon,  saint  Sacerdos  l'ayant  '  de- 
mandé, dans  une  maladie,  -.m  roi  Ghildebert, 
qui  y  consentit.  Maurilon,  évoque  de  Cahors, 
prévoyant  les  diflicultés  qu'il  y  aurait  dans 
l'élection  de  son  successeur  ' ,  choisit  lui- 
même  Ursicin,  qui  avait  été  référendaire  de 
la  reine  Ultrogothe.  Félix,  évêque  de  Nantes, 
se  trouvant  en  danger  de  mort ,  appela  '  les 
évéques  de  son  voisinage,  et  les  supplia  de 
consentir  au  choix  qu'il  avait  fait  de  Burgun- 
dion  son  neveu  pour  remplir  sa  place.  Les 
évéques  ayant  donné  leur  agrément,  Bur- 
gundion  alla  prier  saint  Grégoire  de  venir  à 
Nantes  pour  son  ordination.  Le  prélat  refusa 
d'y  aller ,  disant  qu'il  ne  pouvait  consacrer 
évêque  Burgundioa  ,  tant  parce  qu'il  n'avait 
pas  l'âge  requis  par  les  canons,  que  parce 
qu'il  u'était  pas  permis  de  donner  un  suc- 
cesseur  à  un  évêque  de  son  vivant.    Tou- 
tefois ,   comme  il  y  avait  des  exemples  du 
contraire  ,   il  conseilla   à  Burgundion ,  qui 
n'était  pas  encore  dans  le  clergé,  de  com- 
mencer par  se  faire  tonsurer  ;  de  se  faire 
ensuite  ordonner  prêtre,  et  de  se  rendre  as- 
sidu à  l'église  ;  puis  l'assurant  qu'après  cela 
il  lui  serait  facile  d'être  élevé  à  l'épiscopat 
après  la  mort  de  son  oncle.  Ce  n'est  pas  que 
l'on  parvînt  au  sacerdoce  sans  avoir  passé 
par  les  degrés  inférieurs  du  ministère  ecclé- 
siastique. Saint  Grégoire  dit  le  contraire  à 
Burgundion  :  «  Mon  lils,  lui  dit-il,  il  est  écrit 


vium  rcgalU  decrevit  auloritns  fieri  aacerdotem. 
I.il).  IX  //lit.,  cnp.  xxMi.  Decedente  urbis  Treveri- 
cœ  sacerdole ,  eum  fNicetiumJ  ad  rpiscopnlum 
jiissil  accersiri  Theudoricus  rex,  cunique  dato 
consensu  popvli  ac  décréta  régis  ad  ordinanduiu 
fi  viris  summo  apud  regem  lionore  jinvditis  ad- 
ducebatur.  Vil.  Pal.,  '■ap.  xvn,  nuin  ).  Plcno  ré- 
gis el  popiili  suflragio  Sictlius  episcopns  Lugdu- 
nensis  ordiuatus  fiiil.  Ibid.,  cap.  vni,  nuin.  3. 

'  In  Append.  op.  Greg.,  png.  1354. 

'  Prwf.  in  op.  Greg. 

'  Rogo  ul  Is'icedus  preshyler  nepns  meus  eccle- 
siœ  Lugdunensi  subtiluahir  episcnpus.  Resipondil 
rex  Childeberlus  ;  fiât  volunlas  Dei.  El  sic  plcno 
régis  el  populi  suflragio  episcopus  Lugdunensis 
ordinatus  fuit.  Vit.  Pal.,  cap.  vm,  iiuiii.  3. 

'  Lib.  V  Iltsl.,  cap.  ,\Liii. 

•  Félix  episcopus  Nanneticœ  civitatis  graviter 
œgrotare  cœpit.  Time  vocatis  ad  se  episcopis  qui 


propinqui  erant,  supplicat  ut  consensum  quem 
in  Burgundionem  nepotrm  suum  fecerat,  suis  sub- 
scriptuinibus  roborarent.  Quod  cum  fnclum  esset, 
eum  ad  me  dirigunt.  Eral  lune  Hurgundio  quasi 
annorum  viginti  quinque.  (Jui  veniens  rogal  ut 
accvdens  usque  !^annelas  episcopum  eum  in  lo- 
cum  avunculi  sni  qui  adhuc  supersieserat,  tonsu- 
ratum  consccrarc  deberem.  (Juod  ego  abnui,  quia 
canonihus  non  conrenire  cognovi.  Consilium  ta- 
nicn  privbui  dicens  :  llabemus  in  canonibus  scrip- 
tum,  fili,  7ion  passe  quemquam  ad  episcopatum 
accederr,  nisiprius  ecclcsiasticos  gradus  régula- 
ritvr  sortiatur  ;  tu  ergn  rei  ertcre  illuc,  et  pete  u( 
i]isc  ijui  te  elegit  debeal  lonsurare.  Cumque  pres- 
bylerii  honorem]  acceperi.i,  ad  fcclesiani  assiduus 
esto,  el  eum  ewn  Deus  migrare  voluerit.  tune 
facile  episcopalem  gradum  ascmdes.  Greg.,  lib.  VI, 
cap.  .w. 


[vr  SIÈCLE. 


CHAPITRE  XLll.  —  SAINT  GRllGOIHE  DE  TOURS. 


393 


dans  les  canons,  que  personne  ne  peut  arri- 
ver à  l'iSpiscopal,  h  moins  qu'il  ne  passe  par 
tous  les  degrés  occlôsiuslicjues.  n  El  s'il  ne 
nomme  en  cet  endroit  que  la  prêtrise  ,  il 
ninniue  ailleurs'  le  lectorat.lo  sous-diaconat 
et  le  diaconat.  La  consécration  d'un  ëvéque 
appartenait  de  droit  au  métropolitain  de  la 
province  ;  mais  on  ne  suivait  pas  toujours 
cette  loi  à  la  rigueur.  Saint  Avit  '  de  Cler- 
mont  fut  sacré  à  Metz  par  ordre  du  roi  Sige- 
bcrt,  et  saint  Grégoire  à  Reiras  '  par  Gilles  , 
évèquc  de  cette  ville.  L'on  n'en  tît  des  re- 
proches ni  à  l'un  ni  ii  l'autre.  On  coupait 
les  cheveux  à  ceux  que  l'on  admettait  dans 
le  clergé  ;  mais  dans  les  premiers  siècles 
leur  tonsure  n'était  point  en  forme  de  cou- 
ronne ;  ce  ne  fut  que  vers  le  sixième  ;  du 
moins  n'en  trouve-t-on  rien  dans  les  anciens 
écrivains  ecclésiastiques  avant  saint  Gré- 
goire ,  qui  raconte  '  que  saint  Nicétius,  évê- 
que  de  Trêves,  parut  dès  sa  naissance  des- 
tiné à  la  cléricature  ,  parce  qu'il  vint  au 
monde  avec  une  ceiuture  de  cheveux  autour 
de  la  tête.  Ce  qui  montre  que  vers  l'an  300, 
auquel  saint  Nicétius  vint  au  monde,  la  ton- 
sure cléricale  en  forme  de  couronne  était 
en  usage.  C'en  était  un  de  baiser'  la  main 
des  évêques,  parce  qu'ils  conféraient  le  Saint- 
Esprit  par  l'imposition  de  leurs  mains.  Les 
rois  les  envoyaient  souvent 'pour  être  leurs 
médiateurs  chez  les  princes  avec  qui  ils 
étaient  en  guerre  ;  ils  les  '  députaient ,  ils  les 
invitaient  '  à  manger.  Ceux  que  l'on  élevait 
à  l'épiscopat  étant  mariés ,  se  séparaient  ' 
de  leur  femme  ;  et  pour  éviter  tout  soupçon 


d'incontinence,  plusieurs  clercs  avaient  leurs 
lits  dans  la  chambre  '"  même  où  l'évèque 
couchait.  Outre  les  fonctions  épiscopales  , 
ils  étaient  comme  les  autres  clercs  astreints 
à  la  récitation  dus  heures",  que  nous  appe- 
lons canoniales.  11  y  avait  des  monastères 
soumis  i\  leur  juridiction  ",mais  il  yen  avait  " 
aussi  d'exempts.  Il  y  avait  de  certaines  cau- 
ses dont  les  évoques  seuls'*  connaissaient,  à 
l'exclusion  des  juges  laïques. 

11.  Les  causes  des  évêques  étaient  exa- 
minées dans  les  conciles  ;  mais  on  les  as- 
semliiait  ordinairement  par  ordre,  ou  du 
moins  avec  l'agrément '*  du  roi.  Contran  en 
indiqua  "  un  pour  savoir  la  cause  de  la  mort 
de  Prétextât,  évêque  de  Rouen ,  qui  avait 
été  poignardé  en  586,  dans  le  chieur  de  son 
église  ,  un  jour  de  dimanche  ,  au  milieu  de 
l'otlice.  On  ne  sait  si  ce  concile  s'assembla. 
On  en  assemblait  '''  lorsque  la  foi  se  trouvait 
en  péril ,  ou  qu'il  s'élevait  quelque  hérésie 
nouvelle,  ou  lorsqu'il  s'agissait  de  la  réforme 
des  mœurs  et  de  la  discipline.  Ce  fut  dans 
un  concile  que  saint  Grégoire  "  se  purgea 
de  l'accusation  formée  contre  lui ,  d'avoir 
mal  parlé  de  la  reine.  Comme  le  principal 
témoin  était  uu  sous-diacre  ,  les  évoques  le 
rejetèrent ,  disant  qu'on  ne  devait  pas  croire 
un  inférieur  contre  un  évêque.  S'il  arrivait 
qu'un  évêque  fût  condamné  dans  le  concile, 
il  pouvait  "  en  appeler  au  saint  Siège.  Mais 
il  paraît  qu'il  en  demandait  la  permission 
au  roi. 

12.  Les  peines  que  les  conciles  ordonnaient 
contre  les  coupables  ,  étaient  ordinairement 


Cf usure-  fr- 
rl'^sia'iîqoes. 
■  □iL'rdils. 


'  Lector  decem  annis  fui  ;  t)»  subdiaconatus  of- 
fiào  quinque  annis  ministravi  ;  diaconalui  vero 
quindecim  annis  mancipatus  fui;presbyterii  ho- 
nore jam  viginli  annis  polior.  Cato  presbyter 
apiul  Greg.,  lib.  IV  Hist.  Fianc,  cap.  vi. 

'  Lib.  IV,  cap.  XXIV. 

•  Fort.  lib.  V,  carm.  2. 

*  Mcelius  cum  partu  fuisiet  effusus,  omne  ca- 
puJ  ejus,  ut  est  consuetudo  nasceixtium  infantum, 
a  capillis  nudum  cernebatur  :  in  circuitu  vero 
modicorum  pilorum  ordo  apparuit,  ut  putarei 
ab  eisdem  coronam  clericorum  fuisse  signatam. 
Greg.  Vit.  Pat.,  cap.  xvii,  num.  1. 

'  In  Prologo,  lib.  11,  pag.  42. 

«  Lib.  IX  Hist.,  cap.  xx.  —  '  Ibid.,  cap.  xxxvni. 

»  Lib.  Vin,  cap.  )  et  m. 

'  Apud  Arvernos  post  Stremonium  primus  épis- 
copus  Urbicus  fuit,  ex  senatoribus  conversus , 
uxorem  habens  ;  quœ  juxta  consiietudinem  ec- 
cUsiasticam,  remota  a  consortio,  religiose  vive- 
bat.  Lib.  I,  cap.  xuv. 

*'  Reversusque  domum  sacerdos  cœnœ  discu- 


huit.Qua  exacta,  in  strato  sua  quievit, habens  circa 
leclum  suum  rnultos  lectulos  clericorum.  Lib.  VI, 
cap.  XXXVI. 

"  Nulla  prorsus  de  Deo  erat  mentio  ,  nullus 
omnino  cursus  memoriœ  habebatur.  Lib.  V,  cap. 
XXI.  Saiut  Grégoire  parle  de  deux  évêquef  déré- 
glés, Salùnius  et  Sagittaire.  La  note  sur  cet  en- 
droit porte  :  Sic  vocabantur  horae  canonicœ.  Ho- 
die  dicereinus  :  Nulla  erat  eis  cura  recitandi  bre- 
viarii. 

"  Lib.  l.\,  cap.  XL. 

"  Vit.  Pat.,  cap.  vni,  num.  S. 

"  Lib.  L\,  cap    xx. 

"  Sine  nostra  scientia  synod^ile  concilium  in 
regno  nostro  non  agatur.  Sigebert,  111  Epist.  ad 
Vesiderium,  pag.  1352. 

<«  Lib.  IX,  cap.  xi  —  "  Ibid. 

<«  Greg.,  lib.  V,  cap.  50. 

"  At  illi,  euin  adhuc  propitium  sibi  regem  esse 
7ios.«en£,  ad  eum  accedunt  implorantes  se  injustt 
reniolos,  sibique  Iribui  licentiam  ut  ad  Papam 
urbis  Romœ  accedere  debeant,  Lib.  V,  cap.  ixi. 


HISTOIRE  GÉNl':nALE  DES  AUTEURS  ECCLfelASTIQUES. 


39  i 

l'excommunication.    Lciulasfe ,  vconvaincu  ' 
dans  le  concile  de  Draine  d'avoir  calomnie 
saint  Grégoire ,  fut  excommunié  de  toutes 
les  églises.  Cliarii)ert  fut  '  excommunie  par 
saint  Germain  ,  évcque  de  Paris ,  pour  deux 
mariages  contractés,  du  vivant  de  son  épouse 
légitime ,    avec  deux   sœurs ,  Mérollède   cl 
Marcovèse.  Celle-ci  mourut  quelque  temps 
après  son  mariage  ;  sa  mort  fut  regardée 
comme  une  punition  du  mépris  qne  Chari- 
bert   avait    fait  de  l'excommunication  por- 
tée contre  lui.  Saint  Nicet  ',  évèque  de  Trê- 
ves, refusa  de  célébrer  les  saints  mystères 
en  présence  du  roi  Théodehert ,  qu'il  avait 
séparé  de  la  communion  pour  ses  crimes.  Il 
en  sépara  '  aussi  souvent  le  roi  Clotairc , 
sans  se  mettre  en  peine  de  l'exil  dont  ce 
prince  le  menaçait.  C'était  l'usage  que  les 
excommuni('s'  sortissent  de  l'église   lorsque 
l'on  commençait  l'oblation.  A  Paris '.l'église 
de  Saint-Denys  ajant  été  profanée  par  des 
meurtres  et  du  sang  répandu ,  on  cessa  de 
faire  l'office,  et  les  coupables  furent  excom- 
muniés jusqu'à  ce   qu'ils  eussent  satisfait. 
A  Aix',  l'évéque  Francon  se  voyant  injuste- 
ment condamné  par  le  roi  Sigebert ,  qui  lui 
avait  ôté  une  terre  de  l'Église,  et  l'avait  con- 
damné à  une  amende  de  cent  sous  d'or,  se 
prosterna  en  prières  devant  le  tombeau  de 
saint  Métrias,  et  dit  :  «  Grand  saint,  on  n'al- 
lumera point   ici  de  himinaire  ,  et  on  n'y 
chantera  point  de  psaumes,  que  vous  n'ayez 
vengé  vos  serviteurs  de  vos  ennemis,  et  fait 
rendre  à  l'Église  les  biens  usurpés  par  vio- 
lences. B  Après  avoir  ainsi  parlé  avec  effu- 
sion de  larmes,  il  jeta  des  épines  sur  le  tom- 
beau ,  et  ayant  fermé  les  portes  de  l'église  , 
il  en  mit  encore  à  l'entrée.  Léon,  évéque 
d'Agde,  sous  la  domination  des  Goths  ',  vou- 
lant attirer  la  vcngcnce  divine  sur  le  comte 
Gomacliaire  ,  arien ,  qui  avait   usurpé  une 
terre  de  l'Église ,  el  menacé  de  maltraiter 
l'évéque,  vint  à  l'église  de  Saint-.\ndré  ,  se 
prosterna  en  prières  ,  célébra  les  vigiles  ,  et 
passa  la  nuit  à  psalmodier  et  à  répandre  des 


futc»  t  CCh, 
qol         étalri  ' 

■tm 


laimes.  Le  matin,  il  s'approcha  des  lampes 
qui  pendaient  à  la  voûte  de  l'église  ,  el  avec 
un  l)àton  qu'il  tenait ,  il  les  cassa  toutes,  en 
disant  :  «  On  n'allumera  point  ici  de  lumière, 
jusqu'à  ce  que  Dieu  se  venge  de  ses  enne- 
mis, et  rende  les  biens  de  sa  maison.  » 

13.  Un  seigneurnommé  Dacco,  ayant  quitté 
le  service  du  roi  Cbilpéric,  fut  pris  par  le  duc  "^ 
Dracolen.  qui  le  mena  au  roi,  après  lui  avoir  "°^'"°/^', 
promis  avec  serment  qu'il  ne  serait  point  at- 
tenté à  sa  vie.  Dracolen,  contre  sa  promesse, 
persuada  à  Cbilpéric  de  faire  mourir  Dacco. 
Celui-ci,  voyant  qu'ilnepouvait  éviter lamort, 
demanda  '  la  pénitence  à  un  prêtre,  à  l'insu 
du  roi,  et  fut  exécuté  après  l'avoir  reçue.  On 
voit  en  cette  occasion  la  confession.'!  l'article 
de  la  mort,  et  la  pénitence  secrète,  Dacco 
n'étant  plus  en  état  de  l'accomplir  publique- 
ment. Un  y  voit  encore  que  l'on  n'accordait 
pas  la  pénitence  sacramentelle  à  ceux  qui 
étaient  condamnés  à  mort,  puisqu'il  la  fallut 
cacher  au  roi.  Cet  usage  dura  en  France  jus- 
qu'au règne '"de  Charles  M.  Le  référendaire 
Marc,  qui  avait  amassé  de  grands  trésors  par 
des  voies  injustes,  se  voyant  dangereusement 
malade,  se  coupa"  les  cheveux,  demanda  la 
pénitence,  et  l'ayant  reçue,  mourutaussilôt. 
On  voit  par  le  douzième  canon  du  concile 
d'.Agde,  qu'on  avait  coutume  en  France  de 
couper  les  cheveux  à  ceux  qui  étaient  en  pé- 
nitence. 

li.  On  les  coupait  aussi  à  ceux"  qui  quit- 
taient le  siècle  pour  entrer  dans  des  monas- 
tères. Sainte  Papule,  voyant  que  ses  parents  " 
s'opposaient  au  dessein  qu'elle  avait  de  se 
faire  religieuse,  passa  dans  le  diocèse  de 
Tours,  où  elle  entra  dans  un  monastère 
d'hommes,  après  s'être  coupé  les  cheveux,  et 
avoir  pris  un  habit  d'homme.  Elle  s'y  rendit 
si  recommandable  par  ses  vertus,  que  l'abbé 
étant  mort,  les  moines  jetèrent  les  yeux  sur 
elle  pour  en  faire  leur  abbé;  elle  le  refusa. 
Son  séjour  dans  ce  monastère  fut  de  trente 
ans  ;  mais  trois  jours  avant  sa  mort  elle  se  fit 
connaître.  Les  moines  la  mirent  entre  les 


Monltlts. 


<  Lib.  V,  cap.  L.   —  '  I.ili.lV,  cnji.  sivi, 

'  A'on  hic  hodie   missarum  solemiiia  cnnsum- 

mabunlur,  iiisi  prirali  commimione  prius  ahs- 

eedant.  Vit.  Pat.,  cap.  xvn,  lumi.  2. 

*  Sed  et  Clolharitim  regcm  Mcetius  pro  injus- 
tis  operibus  fwpius  eiconimunicavit,  cxiliumquc 
to  minitante  nunquam  cul  lerrilus.  Ibid. 

•  Ibid.—  '  Lib.  V.cnp.  xxxiu. 

'  Lib.  De  Gloria  Conf.,  rnp.  lxxi. 

«  Lit..  I  De  Gloria  Martyr.,  cap.  lxxix. 

»  Jlle  Dacco  cum  vinctus  ilttineretur  el  eerneret 


se  penilus  non  erofunim,  a  presbytero,  rege  net- 
cieiitc,  pœmtevliam  accepit.  Qua  accepta  .  inter' 
fecttis  est.  Lib.  V,  cap.  xxvi. 

«0  Mabil.,  Sœcul.  m.  Bénédictin.,  part.  1,  nuui. 
24. 

"  Marcus  referendarius...  subito  lalerxs  dolore 
detenlus  capvt  tolondil,  alque  pœnilentiam  acd- 
picns.  spiritum  exhalavit.  Lib.  \\.  cap.  26. 

"  GrcK.  lib.  De  Gloria  Conf.,  cap.  xvi. 

'»  Ibid. 


[Vl"  SIÈCLE.] 

mains  dos  femmes,  pour  lui  rendre  les  de- 
voirs ordinaires  do  la  sépulture.  Les  femmes 
n'entraienl  point  dans  les  monastères  d'iinm- 
mes,  pas  même  '  dans  leurs  églises.  Il  en 
était  de  mémo  des  hommes  à  l'égard  des  mo- 
nastères de  filles.  La  clôture  dans  le  monas- 
tère de  sainte  Radégonde  a  Poitiers  était  si 
exacte,  que  l'on  ne  permit  point  aux  hom- 
mes d'y  entrer  pour  l'enterrer;  on  en  *  en- 
leva le  corps  hors  du  monastère,  pour  le 
porter  dans  une  église  de  la  ville  ;  et  les  re- 
ligieuses, i\  qui  leur  règle  défendait  di;  sor- 
tir, se  mirent  sur  les  murs  et  sur  les  tours, 
où  elles  continuèrent  à  pleurer  et  ii  gémir 
sur  la  mort  de  leur  ancienne  abhcsse.  Les 
abbesses  ',  comme  les  abbés,  étaient  bénites 
par  les  évoques.  Quelquefois  on  observait  * 
dans  un  même  monastère  d'hommes  plu- 
sieurs règles  à  la  fois,  comme  celles  de  Cas- 
sien,  de  saint  Basile  et  de  quelques  autres. 

R..r  1^.  Bol,  15.  Quoique  le  roi  Gontran  eût  deux  filles, 
Chlodoberge  et  Clotilde,  il  choisit  '  pour  son 
successeur  Ghildebert  son  neveu, iparce  que, 
selon  le  soixante-deuxième  article  de  la  loi 
salique  publiée  par  le  roi  Clovis  vers  l'an 
■487,  non-seulement  la  succession  ti  la  cou- 
ronne ne  regardait  pas  les  RUes  ni  les  fem- 
mes, mais  elles  n'avaient  '  aucun  droit  aux 
terres  des  nobles  de  la  nation,  ni  même  à 
tontes  les  terres  de  conquête,  telles  qu'é- 
taient presque  toutes  celles  de  la  monarchie 

"  française  en  deçà  du  Rhin.  Saint  Grégoire  de 

Tours,  ni  Frédégaire  son  abréviateur,  ne 
disent  rien  de  Pharamond,  que  l'on  regarde 
ordinairement  comme  celui  qui  a  jeté  les  fon- 
dements de  la  monarchie  française;  mais  ils 
parlent  de  ''  Claûgion,  de  Mérovée  et  de  Chil- 
déric,  à  quiils  donnent  poursuccesseur  Clovis, 
qui,  le  premier,  forma  '  un  royaume  de  toutes 
les  provinces  des  Gaules,  dont  il  transmit  la 
possession  à  ses  descendants.  Lorsque  ce 
prince  eut  persuadé  aux  soldats  de  le  recon- 
naître pour  leur  roi,  ils  rélevèrent  sur  un' 
bouclier,  cérémonie  ordinaire  chez  les  Fran- 
çais dans  le  couronnement  de  leurs  rois;  ils 
lui  rendirent  leurs  hommages,  et  se  soumi- 
rent à  sa  domination.  Ils  pratiquaient  une 
autre  cérémonie  dans  le  détrônement  des 
rois,  qui  était  de  leur  couper  les  cheveux,  et 

'  Vil.  Pat.,  cap.  i,  num.  6.  —  '  De  Gloria  Conf., 
cap.  cvi.  —  »  Lib.  IX,  cap.  xui.  —  *  Lib.  X,  caj.. 
XXIX.  —  *  Lib.  V,  cap.  xvui.  — "  Histoire  de  France 
par  le  père  Dauiel,  Tom.  1,  pag.  9. 

'  Greg   lib.  II,  cap.  ix,  x,  xi.  xn. 

'  Ibid.,  cap.  xxvn.  —  '  Lib.  II,  cap.  XL. 


CHAPITRE  XLII.  —  SAINT  GRKGUIRE  DE  TUUIIS. 


395 


de  les  engager  dans  leclcrgé.Chararic'",  dé- 
trôné par  Clovis,  fut  aussitôt  ordonné  prêtre, 
et  son  fils  (lia'T(\  Le  pères'eninitiiiiant  quel- 
que temps  après  avec  son  fils  de  leur  malheur 
commun,  ce  jeune  prince,  pour  le  consoler, 
lui  dit  :  «Ces  cheveux  que  l'on  m'a  coupés  ne 
sont  que  des  feuilles  et  des  branches  d'un 
arbre  vert  ([ui  repoussera  avec  le  temps;  et 
il  ne  tiendra  pas  à  moi  (jue  celui  qui  nous  a 
mis  en'cet  état, 'ne  périsse  bientôt.»  Clovis,  à 
qui  ces  paroles  imprudentes  furent  ra[)por- 
técs,  envoya  sur-le-champ  couper  la  tête  à 
ces  deux  malheureux  princes. 

IG.  Saint  Grégoire  rapporte".'!  l'empire  de  c™  '»"• 
Décela  missmn  des  sept  evêoues  (lui  nrê-  ■!•  i« '■  i  tir . 
chèrent  la  foi  de  Jésns-Chrisi  dans  les  Gau-  ''"'»'• 
les.  Saint  Gatien  fut  évêque  de  Tours,  saint 
Trophime  d'Arles,  saint  Saturnin  de  Tou- 
louse, saint  Denis  de  Paris,  saint  Austremoine 
de  Clermont,  saint  Martial  de  Limoges;  mais 
il  reconnaît  que  la  foi  y  avait  été  prêchée  au- 
paravant, puisqu'il  y  met"  des  martyrs  dans 
la  persécution  d'Antonin.  Il  dit  ailleurs  ",  en 
parlant  de  saint  Saturnin,  qu'il  avait  été  or- 
donné par  les  disciples  des  apôtres  ;  ce  qui 
parait  le  mettre  en  contradiction  avec  lui- 
même,  puisque  du  temps  de  Dèce  il  n'y  avait 
plus  de  disciples  des  apôtres.  Mais  on  avait 
coutume  de  donner  cette  qualité  à  ceux  qui 
professaient  la  même  doctrine  que  les  apô- 
tres avaient  enseignée  à  Rome  ". 

ARTICLE    IV. 

JUGEMENT  SUR    LES  ÉCRITS  DE  SAINT  GRÉGOIRE  DE 
TOURS  ;  ÉDITIONS  QU'ON  EN  A  FAITES. 

1.  Après  ce  que  nous  venons  de  rapporter  p.^'Siroi'îo 
des  éciits  de  saint  Grégoire,  on  ne  peut  dou- 
ter de  leur  utilité.  Ils  ont  des  défauts,  on  en  * 
convient;  mais  ils  ne  sont  pas  d'assez  grande 
importance  pour  décréditer  un  si  saint  évê- 
que, ni  détourner  de  la  lecture  de  ses  ouvra- 
ges. Ses  expressionssont  dures,  dit-on,  et  peu 
correctes,  son  style  bas  et  rustique,  on  ne 
peut  le  lire  sans  dégoût  et  sans  ennui  ;  il  cite 
des  histoires  apocryphes,  il  en  donne  pour 
certaines  qui  ne  le  sont  pas  ;  il  avance  com- 
me vrai  ce  qui  est  faux  ;  il  relève  des  faits 
peu  intéressants,  et  charge  sa  narration  de 

'"  Ibid.,  cap.  XLi.  —  "  Lib.  I,  cap.  xxvrn. 

"  Ibid.,  cap.  XXVI. 

"  De  Gloria  Martyr.,  cap.  XLvni. 

"  Voyez  le  tom.  VIII,  pag.  12.5,  notes  3,  4  et  5. 
Voyez  aussi  le  supplément  à  la  fin  de  ce  volume, 
(Léditewr.) 


396 


HISTOIHE  GKNÉnAI.E  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


circonstances  inutiles;  il  est  tombé  dans  di- 
verses erreurs  de  chronologie  ;  enfin,  cré- 
dule jusqu'à  l'excès,  il  donne  pour  miracles 
des  événements  fort  ordinaires  :  voilà  ce 
qu'objectent  contre  les  écrits  de  saint  Gré- 
goire, ceux  qui  veulent  en  allaiblir  l'auto- 
rité •. 

2.  Mais  la  rusticité  de  style  qu'ils  lui  repro- 
chent, était  moins  la  sienne  que  celle  de  son 
siècle.  Ne  dit-il  '  pas  qu'alors  les  lettres 
étaient  non-seulement  tombées  en  France, 
mais  qu'il  n'y  avait  même  personne  qui  s'y 
appliquât,  ni  qui  fût  en  état  de  conserver  à 
la  postérité,  soit  en  vers,  soit  en  prose,  des 
événements. qui  méritaient  de  lui  être  trans- 
mis;  que  les  bons  auteurs  n'étaient  entendus 
que  de  peu  de  personnes,  et  que  tout  ce 
qui  n'était  pas  écrit  d'un  style  grossier  et 
rustique,  était  au-dessus  de  l'intelligence  de 
la  multitude  ?  Il  s'excuse  lui-même  en  vingt 
endroits  sur  la  grossièreté  de  son  discours; 
et  nous  devons  l'en  croire,  quand  il  nous  as- 
sure que  ce  n'est  que  dans  la  vue  de  servir 
le  public,  qu'il  a  surmonté  la  répugnance 
qu'il  se  sentait  pour  écrire,  avouant  qu'il 
n'en  avait  pas  les  talents.  Qu'on  lise  les  lois, 
les  lettres  et  les  diplômes  des  rois  de  son 
siècle,  on  n'y  trouve  pas  un  style  plus  no- 
ble, ni  plus  élevé,  ni  plus  correct,  ni  une  la- 
tinité plus  pure.  On  doit  même  dire  qu'il  a 
poussé  son  humilité  trop  loin,  en  se  disant 
peu  instruit  des  beautés  de  la  langue  dans 
laquelle  il  écrivait.  Il  y  a  dans  ses  écrits  un 
grand  nombre  d'endroits  où  l'on  voit  qu'il 
avait  profité  de  la  lecture  des  auteurs  de  la 
bonne  latinité,  et  qu'il  n'était  pas  même 
étranger  à  la  langue  grecque,  à  laquelle  il 
a  quelquefois  recours,  pour  en  tirer  l'étymo- 
■  logie  de  certaines  expi'essions  latines.  For- 
tunat,  qui  connaissait  sa  capacitc",  loue  '  son 
éloquence  et  son  érudition.  Quiconque  aura 
lu  ses  écrits  sans  préjugé,  ne  pourra  pas  ne 
point  estimer  sa  sincérité  et  sa  naïveté  dans 


le  récit  des  faits,  ni  disconvenir  qu'il  ne  les 
rapporte  avec  quelque  sorte  d'agrément. 

2.  Nous  ne  voudrions  pas  garantir  tons  les 
miracles  qu'il  rapporte;  mais  il  y  aurait  aussi 
de  la  téméiité  à  les  rejeter  sans  distinction. 
Il  faut  suivre  en  cela  la  règle  de  saint  Au- 
gustin, qui  aimait  ^  mieux  croire  que  les 
événements  miraculeux,  que  l'on  racontait  de 
son  temps,  surpassaient  la  porti'C  de  ses  lu- 
mières, que  de  les  accuser  de  fausseté,  ou 
de  les  mettre  sur  le  compte  de  quelque  per- 
sonne trop  crédule.  Il  assure  'qu'il  s'en  fai- 
sait un  si  grand  nombre  de  son  temps,  qu'il 
n'était  ni  aisé  de  les  connaître  tous,  ni  de  ra- 
conter tous  ceux  qu'on  connaissait.  L'Église 
dans  le  sixième  siècle  n'en  avait  pas  moins 
besoin  que  dans  le  cinquième,  soit  pour  pro- 
curer la  conversion  des  infidèles,  soit  pour 
atlermir  la  foi  des  fidèles.  Les  nations  bar- 
bares avaient  tellement  inondé  l'Europe, 
qu'il  ne  se  trouvait  prosqu'aucun  pays  à 
couvert  de  leur  domination  ;  c'était  ou  des 
païens,  ou  des  ariens,  dont  la  plupart  n'é- 
taient chrétiens  que  de  nom.  En  vain  au- 
rait-on tenté  de  leur  faire  changer  de  reli- 
gion par  l'autorité  des  divines  Pllcritures,  ou 
par  des  raisonnements;  il  fallait  des  miracles. 
Clovis,  au  milieu  de  la  prospérité,  ne  pense 
point  à  quitter  ses  dieux;  il  est  délivré  d'un 
danger  imminent  par  un  miracle,  aussitôt  il 
se  fait  instruire  dansla  vraiefoi,il  l'embrasse. 
Totila,  roi  des  Goths,  inflexible  aux  prières 
des  évêques  qui  le  conjuraient  de  cesser  ses 
hostilités,  peu  sensible  aux  infortunes  d'une 
infinité  île  malheureux  qu'il  persécutait 
cruellement,  s'adoucit  à  la  vue  d'un  miracle. 
11  en  fallait  pour  empêcher  les  simples  de  se 
laisser  si'duirc  par  les  artifices  des  héréti- 
ques, qui  employaient  tantôt  les  caresses, 
tantôt  les  menaces  et  les  supplices,  pour  les 
obliger  à  quitter  l'Église  catholique.  Les  mi- 
racles étaient  nécessaires  surtout  contre  l'hé- 
résie des  sadducéens ,  qui  se   renouvelait 


5;<  rrfdolia 
fUil-r-Me    et* 


'  Voyez  Saint  Gn^iioire  de  Tours  cinns  le  tome  I 
de  la  Défense  de  l'Hglise,  par  l'abbé  r.orini,  pag. 
581.  Cet  habile  critique  veiipc  ce  saint  évêqiie  de* 
caloMinies  que  lui  ont  imputée.'  quelques  histo- 
rieni?  imidernes  :  il  finit  son  travail  par  le  .juge- 
ment qu'a  porté  pnr  l'Histoire  des  l'Yancs  M.  de 
Barante.  dans  la  Bingraphie  universelle  de  Mi- 
chaud  :  «  Ce  qu'on  y  remarque  toujours,  c'est  un 
caractiTe  de  bonne  foi  et  un  jiiKeuient  libre  et 
courapi'ux  des  princes  faibles  et  féroces  qui  mê- 
laient leurs  noms  aux  malheurs  de  la  France,  n 
(lyditeur.) 

'  Vw    diebm    nostris ,   quia  periit  litlerarum 


studium  a  nohis,  nec  reperilur  in  pop^ilis.  gui 
gesia  prirsenlia  promvlgare  posait  m  pagiiiis. 
l'rologn  in  lib.  X  lliH.,  pa;,'.  2. 

"  Flurens  in  sludiis...  dulcis,  facuruie.  Fort.  lib. 
V,  carm.  13  et  2:t. 

'  iîallem  faleri  res  ittas  esse  aUinres.  quant  ut 
a  me  poasint  atliitgi,  qnnm  lemrre  definire  illa 
falsa  miractila,  aul  ab  hominc  nïmii  creduio  cf- 
ficln.  Aug. 

'  Tarn  multa  etiam  istit  temporibus  fiunt  tiit- 
racula.ut  nec  omnia  cngnoscere,  née  en,  qutr  co- 
gnoscimus,  enumerare  possimus.  Aug.  lib.  I,  Re- 
tract.,  uuiu.  T,  pag.  20. 


CHAPITRE  XLIl.  —  SAINT  GRKGOIRE  DE  TOURS. 


[Vl*  SliCLE.] 

alors.  Au  reste,  saint  Grégoire  de  Tours  n'est 
pas  le  seul  qui  ait  fuit  un  recueil  des  miracles 
arrivés,  soit  de  son  temps,  soit  dans  les  siè- 
cles antérieurs.  Saint  Gréf^oire-le-Grand  en 
composa  un.divisi'  en  (|uatrc  livres,  où  il  rap- 
porte les  événements  miraculeux  oi)érés  jiar 
ï'iutercession  des  saints  d'Italie.  Victor  de 
Vite  raconte  aussi  les  prodi;;cs  que  Dieu  opéra 
en  Afrique  pour  la  couiiiiuation  de  la  foi  or- 
thodoxe. Les  évéques  catholiques  qui  eurent 
une  conférence  k  Lyon  avec  les  évéques 
ariens,  en  présence  du  roi  Gondebaud, 
étaient  si  assurés  que  Dieu  ne  leur  refuserait 
pas  des  miracles  pour  a[ipuyer  la  vérité  qu'ils 
défendaient,  qu'ils  ollVirent  à  ce  prince  de 
remettre  la  décision  de  leur  cause  à  saint 
Just  '  :  Si  nos  raisons  ne  peuvent  les  convaincre, 
lui  dirent  ces  évéques,  nous  ne  douions  point 
que  Dieu  ne  confirine  notre  foi  par  un  miracle. 
Ordonnez  que  7ious  allions  tous  au  tombeau  de 
saint  Just,  que  nous  l'interrogions  sur  notice  foi, 
et  Boniface  (évèque  arien)  sur  la  sienne,  et 
Dieu  prononcera  ce  qu'il  approuve  par  la  bou- 
che de  son  serviteur.  Nous  avons  rapporté  ail- 
leurs que  saint  Nicet ,  évèque  de  Trêves', 
renvoyait  '  Alboin,  roi  des  Lombards,  aux  mi- 
racles qui  se  faisaient  tous  les  jours  dans  les 
églises  de  Saint-Martin,  de  Saint-Germain 
d'Auxerre,de  Saint-Loup  de  Troyes,  de  Saint- 
Remide  Reims,  de  Saint-Médard,  et  que  ce 
prince,  après  en  avoir  été  témoin,  se  con- 
vertit. Si  les  miracles  n'avaient  pas  été  as- 
surés, les  évéques  y  auraient-ils  renvoyé  des 
princes  barbares  ou  ariens,  pour  les  con- 
vaincre de  la  vérité  de  noire  religion?  En 
quelque  nombre  que  soient  ceux  que  rap- 
porte saint  Grégoire,  il  faut  conveuir  qu'il  a 
été  plus  modéré  en  ce  genre,  que  plusieurs 
écrivains  des  vies  des  saints.  Il  se  contente 
d'en  rapporter  un  ou  deux  de  chaque  saint 
dont  il  parle  ;  il  ne  s'étend  que  sur  ceux  cjui 
se  faisaient  au  tombeau  de  saint  Martin,  et  à 
celui  de  saint  Julien  de  Brioude.  Il  avait  été 


397 


témoin  de  la  plupart,  ou  les  avait  appris  de 
gens  qui  lui  paraissaient  dignes  de  foi.  Sou- 
vent il  |)rend  Dieu  A  témoin  de  la  vérité  des 
fails  qu'il  raconte.  Il  ne  voulut  '  pas  ajouter 
foi  l'i  ce  qu'on  lui  avait  dit  do  l'huile  qui  bril- 
lait dcvanl  la  vraie  Croix  dans  l'église  de 
Sainte -Croix  de  Poitiers  sans  diminuer, 
quoiqu'on  y  puisât  pour  en  euqiorler  dans 
les  maisons,  qu'il  n'eût  vu  le  miracle  de  ses 
yeux.  Il  piit  *  la  mémi' précaution  pour  s'as- 
surer de  plusieurs  autres  prodiges,  avant  de 
les  transmettre  à  la  postérité.  S'il  n'a  pas 
toujours  lapporté  des  miracles  éclatants, 
c'est  qu'il  s'était  proposé  de  rendre  compte 
principalement  de  ceux  '  dont  les  autres 
écrivains  n'avaient  point  parlé,  et  qui  étaient 
demeurés  comme  inconnus.  On  convient 
qu'il  donne  quelquefois  pour  miraculeuses 
des  guérisons  qui  ne  pouvaient  être  que  l'ef- 
fet des  causes  naturelles;  mais  elles  pou- 
vaient être  aussi  une  suite  de  l'intercession 
des  saints.  Il  suffit  qu'elles  aient  été  opérées 
à  leurs  tombeaux,  ou  k  la  suite  de  l'attouche- 
ment de  leurs  reliques,  pour  qu'on  ne  puisse 
accuser  saint  Grégoire  de  nous  avoir  donné 
pour  de  vrais  miracles  ce  qui  n'en  était  pas. 
4.  Les  fautes  de  chronologie  qu'on  lui 
reproche  ,  regardent  d'anciennes  histoires,  ^iT  ■'" 
qu'il  avait  tirées  de  ceux  qui  avaient  écrit 
avant  lui.  Il  est  plus  exact  dans  les  faits  ar- 
rivés de  son  temps;  aussi  la  plupart  de  nos 
annalistes  français  n'ont-ils  fait  que  le  co- 
pier, en  donnant  un  peu  plus  d'ordre  que  lui 
aux  divers  événements  qu'il  raconte.  Joseph 
Scaliger ,  Nicolas  le  Fêvre .,  précepteur  de 
Louis  XIII ,  Jean  Chifflet ,  Monsieur  Biguon  , 
les  messieurs  de  Sainte-Marthe,  ne  connais- 
saient point  d'historien  ti'ançais  plus  fidèle  , 
plus  exact ,  ni  plus  ancien  que  saint  Gré- 
goire de  '  Tours;  ils  l'ont  appelé  la  lumière 
de  l'Eglise  de  France  autant  par  son  érudi- 
tion ,  que  par  sa  sagesse  et  la  sainteté  de  sa 
vie,  et  le  prince  des  historiens  de  la  nation. 


Fanion     (fe 
cliroTioIflgio. 


«  Tom.  IV  Concil.,  pag.  1321. 
«  Tom.  V  Concil..  pag.  833. 

•  Lib.  I  Mirac,  cap.  v. 

*  Lib.  Il  Mirac.  S.Mart.,  cap.  xxxu. 

'  Àliqua  de  sanclorum  miraculis ,  quœ  haete- 
nus  lalueriint,  pandere  desideraris.  Greg.  Prolog. 
iû  lib.  I  Mirac. 

'  Magna  Gregorio  gnitia,  qui  in  tanto  negleetu 
hisloriœ  anintuin  ad  hœc  scribenda  appulit...  nos 
neque  meliorem  neque  vetustiorem  in  Historia 
Francorum  habtmus.  Joseph  Scaliger,  lib.  VI  De 
emendal.  temporum.  Gregorius  Turonensis  epis- 
copus  diligenlissimus  hisloriai  nostrce  scriptor 


et  antiquissimus.  Faber  in  Schediasmate.  Grego- 
rius Turonensis,  quo  digniorem  Itistoricum  non 
habemus,  multis  in  lacis  a  Marculfo  lucem  acci- 
pit.  Biguon,  Pnrf.  in  Marculf.  Formulas.  Sanctus 
Gregorius  antiquissimus  et  ftdelissimus  Franco- 
rum liistoricus.  Chiffletius  iu  Dis(;iiisilioue.  Sanc- 
tus  Gregorius, Ecclesiœ  gallicanœ  lumen,  de  histo- 
ria ecclesiastica  rebusque  Francicis  bene  meritus. 
SamuKirtliani  iuGallia  Christiana.Grfporium,  qjiem 
historicorum  nostrorum  principem  agnosco  et 
lande  dignissimum  judico.  Valesius,  Prœf.  ad 
tome  H  Rerum  Francicarum. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIOUES. 


Il   M. 


Edition    i!o 


398 

5.  A  l'ëfrard  de  sa  doctrine,  elle  ne  s'é- 
loigne en  lien  de  celle  de  l'I-^glise.  Nous 
avons  vu  comment  il  s'expliquait  sur  le  mys- 
tère de  la  Trinité  et  de  l'Incarnation ,  sur 
l'immortalité  de  l'âme.  Il  n'est  pas  moins 
orthodoxe  sur  le  mystère  de  la  Grâce,  dont 
il  enseigne  la  nécessité  ',  et  sur  le  péché  ' 
originel ,  qu'il  dit  nous  être  remis  par  le 
baptême. 

6.  Son  Histoire  des  Français  fut  imprimée 
séparément  à  Paris  en  1561,  chez  Guillaume 
Morel,  avec  la  chronique  d'Adon  de  Vienne; 
à  Bàle  en  4568,  chez  Pierre  de  Perne,  par 
les  soins  de  Matthias  Illyricus;  à  Paris  en 
1610,  chez  Nicolas  du  Fossé,  avec  diverses 
pièces  qui 'regardent  l'Histoire  de  Touraine, 
elles  deux  livres  de  l'Histoire  de  Geoffroy, 
duc  de  Normandie,  par  Jean,  moine  de  Mar- 
moulier  ;  à  Hanaw  en  1013  ,  dans  le  Recueil 
des  monuments  de  l'histoire  de  France,  par 
Marqiiard  Fréhérus  ;  à  Paris  en  1636  ,  dans 
le  premier  volume  des  Historiens  français  , 
par  André  Duchesne.  Antoine  Dadin  lit  im- 
primer en  1679,  à  Toulouse,  chez  Jean  de  la 
Pesche ,  un  volume  entier  de  notes  et  d'ob- 
servations sur  l'Histoire  de  saint  Grégoire. 
Nous  n'avons  point  d'éditions  séparées  des 
livres  de  la  Gloire  des  Mai-tyi's  et  des  Corifes- 
seurs;  mais,  en  1623,  on  en  détacha  la  vie  de 
saint  Gai ,  évéque  de  Clermout ,  qui  fut  im- 
primée à  Francfort  en  un  volume  in-12.  Jé- 
rôme   Clicthoue    ayant    recueilli    quelques 
opuscules  de  ce  Père ,  les  fit  mettre  sous 
presse  à  Paris  chez  Jean  Marchant,  en  loll, 
en  un  volume  in-4.  Cette  édition  comprend 
les  quatre  livres  des  Miracles  de  saint  Martin, 
le  traité  de  la  Gloire  des  Martyrs ,  celui  des 
miracles   de    saint   Julien ,  avec   quelques 
autres  monuments.  Josse  Bade  publia  en  la 
même  ville,  l'année  suivante  1512  ,  les  dix 
livres  de  l'Histoire  des  Français,  avec  la  chro- 
niijue  d'Adon  de  Vienne,  en  un  volume  in-fol. 
On  y  trouve  aussi  les   Vies  des  Pères,  et  le 
traité  de  la  Gloire  des  Confesseurs.  Tous  ces 
ouvrages  furent  réimprimés  à  Paris  en  1522, 
par  le  même  imprimeur.  Guillaume   Morel 
qui  ,  en  1561 ,  avait  donné  les  dix  livres  de 
l'Histoire  des  Fraiirais,  publia  en  1563  les 
deux  traités,  l'un  de  la  Gloire  des  Martyrs, 


l'autre  de  la  Gloire  des  Confesseurs.  Ces  deux 
traités  ,  avec  tous  les  autres  écrits  de  saint 
Grégoire,  excepté  son  Histoire  et  les   lies 
des  Pères,  furent  publiés  à  Cologne  chez  Ma- 
terne Cholin  en  1583,  in-8.  L'Histoire  et  les 
deux  livres  de  la  Gloire  des  Martyrs  et  des 
Confesseu7-s  parurent  la  même  année  ii  Paris, 
avec  le  Recueil  des  anciens  auteurs  ecclé- 
siastiques, par  Laurent  la  Barre.  Jusques-lft 
on  n'avait  pas  eu  tous  les  ouvrages  de  saint 
Grégoire  dans  un  même  volume  ;  on  les  in- 
séra tous  dans  le  tome  VII  de  la  Bibliothèque 
des  Pères,  à  Paris  en  1589,  d'où  ils  sont 
passés  dans  celles  de  Cologne  ,  de  Paris  et 
de  Lyon.  L'édition  de  Jean  de  Balesdens,  en 
1640  à  Paris ,  n'est  pas  si  complète  ,  puis- 
qu'on n'y  trouve  pas  les  dix  livres  de  l'His- 
toire. La  dernière  et  la  meilleure  de  toutes 
est  celle  de  dom  Thierry  Ruinart,  à  Paris 
chez  Muguet  en  1699,  in-fol.  L'éditeur,  avant 
de  la  mettre  au  jour,  avait  revu  et  corrigé 
le  texte  de  tous  les  ouvrages  de  saint  Gré- 
goire sur  un  grand  nombre    de  manuscrits 
de  France  et  d'Italie,  et  sur  les  anciennes 
éd liions  dont  nous  venons  de  parler.  C'est 
ce  qu'il  nous  apprend  dans  une  longue  pré- 
face, où,  après  avoir  fait  voir  la  nécessité 
d'une  nouvelle  édition,  il  donne  le  catalnuue 
des  écrits  de  saint  Grégoire ,  tant  de  ceux 
qui  sont  venus  jusqu'à  nous,  que  de  ceux 
qui  sont  perdus  ;  marquant,  autant  qu'il  est 
possible,  le  temps  et  l'occasion   de  chacun. 
Il  montre  contre  le  Père  Le  Cointe,  qu'il  n'y 
a  rien  dans  les  dix  livres  de  l'Histoire  des 
Français  qui  ne  soit  de  ce  Père  ;  et  pour  don- 
ner plus  de  jour  à  certains  endroits  dilliciles, 
il  entre  dans  le  détail  de  tout  ce  qui  peut 
servir  à  la  connaissance  de  l'ancien  gouver- 
nement des  Français  ,  de  leurs  mœurs,  de 
leurs  usages,  de  la  façon  dont  se  faisaient 
les  proclamations  des  rois,  les  élections  des 
évêques,  leur  ordination ,  celle  des  autres 
clercs  ;  de  la  manière  dont  on  célébrait  la 
liturgie,  dont  on  administrait  les  sacrements, 
dont  on  récitait  l'ollice  divin.  Il  traite  aussi  des 
droits  et  des  immunités  des  églises.  Il  fait 
l'apologie  de  saint  Grégoire,  accusé  de  trop 
de  crédulité  ;  ensuite  il  donne  divers  éclair- 
cissements sur  ce  qui  regarde  Frédégaire, 


'  Bonœ  eliam  volunlati  noslrœ  ipse  salubrem 
effectum  indulgeal,  quia  nisi  ipse  (rdifiraverit  do- 
muni,  in  tuiium  Itiboranl  qui  atlificant  eam.  LU). 
I  Ilisl.  Franc  ,  cap.  xiv.  Sinl  lucra  vcslra  divinœ 
majvslatis  graliw...  El  hoc  ipsum  a  Dumini  est 
misericordia  poscendum ,    non  propria   virlule 


qnœrendum.  Lib.  De  Gloria  Conf.,  cap.  cxii. 

'  Sutficit  salis  ine  nb  ohgmali  peccalo  baptis- 
mr)  satulari  scwel  ablulum  fuisse.  IMt.  V,  lap. 
XXXIX.  AoH  potesl  Sunclus  Spirilus,  idtm  Deus,  m 
peclore  fanatico  el  originalts  crimiuis  labe  iiifcclu 
descendcre.  Ibid.,  cap.  xliv. 


[Vl*  SIÈCLE.] 


CIIAIMTIIE  XLIII.  —  MARIUS  D'AVANCHES,  ETC. 


39a 


son  abréviateiir.  Celte  préface  est  suivie  de 
la  Vie  du  saint  tiv(^quo  par  saint  Odon,  alibd 
de  Cluni ,  et  des  témnijifiiages  avaiila:,'eiix. 
rendus  à  saint  Gn'j,'oiic  par  les  ('crixaiiis 
qui  ont  eu  occasion  de  parler  do  lui.  Dom 
Ruinart  donne  après  cela  les  Annales  de 
France,  tirées  des  anciens  auteurs,  de  saint 
Grégoire  et  de  Frédégaire  ,  et  les  conduit 
depuis  l'an  2o3juS(iu'à  Cliarleniagne.  11  joint 
aux  dix  livres  de  l'Histoire  des  Français,  l'a- 
brégé que  Frédégaire  a  fait  des  six  premiers 
livres,  puis  sa  chronique,  avec  ses  quatre 
continuateurs.  L'Appendice  aux  ouvrages  de 
ce  Père  contient  un  grand  nombre  de  mo- 
numents qui  y  ont  du  rappoit,  ou  qui  peu- 
vent répandre  des  lumières  sur  l'histoire  de 
France,  sur  son  ancienne  liturgie,  et  sur  la 


saint  Grégoire  de  Tours,  et  le  supplément 
de  Frédégaire ,  et  les  a  fait  im|)rimer  avec 
des  notes  de  sa  façon,  ;\  Paris  on  1008,  2  vol. 
in-S.  [M.  llenii  Hortlier  a  fait  paraître  une 
traduction  nouvelle  de  l'Histoire  ecclésias- 
tique dos  Francs,  2  vol.  in -8,  chezDidot; 
Paris  I8(i().  Elle  est  suivie  d'un  sommaire  des 
autres  ouvrages  de  saint  Grégoire  précédée 
de  sa  Vie  écrite  au  x'  siècle,  par  Odon,  abbé 
de  Cluni.  En  1857,  il  avait  publié  chez  Jules 
Renouard  les  livres  des  Miracles  et  autres 
opuscules  de  Grégoire  de  Tours,  revus  et 
collationnés  sur  de  nouveaux  manuscrits  et 
traduits  pour  la  société  de  l'Histoire  de  Fran- 
ce, texte  et  traduction  française  en  regard. 
Sauvigny  avait  donné  une  traduction  de  Gré- 
goire de  Tours  dans  ses  Essais  historiques 


langue  usitée  alors  dans  les  Gaules.  [L'édi-  -  sur  les  moeurs  des  Français,  1783  et  suiv., 


tion  de  Dom  Ruinart  a  été  reproduite  avec 
des  améliorations,  des  corrections  etde  nou- 
velles notes  dans  le  Recueil  des  Historiens  de 
France,  par  Dom  Bouquet,  tome  II ,  et  dans 
le  tome  LXXI  de  la  Patrologie  latine,  dans 
un  meilleur  ordre  :  les  notes  qui  étaient  à 
la  fin  sous  le  nom  d'additions  sont  mises  ici 
à  lem-  place  naturelle.  L'Histoire  des  Francs, 
souvent  éditée,  l'a  été  encore  d'une  manière 
parfaite  en  183(5-1841,  à  Paris,  deux  tomes 
in-8,  par  J.  Guadet  et  N.  R.  Taranne,  avec 
une  traduction  française  en  regard,  avec 
des  notes  et  des  observations.] 

Monsieur  de  Maroies  ,  abbé  de  Villeloin, 
a  traduit  en  français  l'Histoire  de  France  de 


10  vol.  in-8  et  in-4.  L'histoire  de  France  écrite 
par  Grégoire  de  Tours,  avait  été  traduite,  pour 
la  première  fois,  par  Claude  Bonnet,  Paris 
1610,  in-8.  lia  paru  en  Allemagne,  eu  183'J, 
deux  ouvrages  sur  saint  Grégoire,  l'un  du 
docteur  Rriès,  Z)e  ftrj/.  Tiirun.  episcop.,  Vita 
et  scriptis,  Breslau  ,  chez  Hirt  ;  l'autre  du 
docteur  Lobell,  piofesseur  à*  Bonn,  Grégoire 
de  Tours  et  son  temps,  Leipsick  ,  chez  Broc- 
kaus.  Le  premier  de  ces  ouvrages  est  une 
critique  de  Grégoire ,  historien ,  le  second 
est  une  peinture  complète  du  temps  de  Gré- 
goire, pour  laquelle  l'auteur  a  emprunté  ses 
couleurs  aux  œuvres  mêmes  de  saint  Gré- 
goire.] 


CHAPITRE    XLIII. 

Marins  évêqne  d'Avanches  [596],  Tétérins  clerc  de  l'Église 

d'Anxerre,  Rotérins  historien. 


L'histoire  ne  nous  fournit  aucun  détail  de 
la  vie  de  Marius.  Nous  savons  seulement 
qu'il  naquit  à  Autun  vers  l'an  332;  qu'à 
l'ûge  d'environ  quarante-trois  ans  il  fut  élu 
évêque  d'Avanches,  ville  de  Suisse  dans  le 
pays  de  Vaux,  en  373,  et  qu'il  assista  au 
second  concile  de  Màcon  ,  assemblé  en  583 
par  l'ordre  du  roi  Contran.  Le  siège  épisco- 
pal  d'.\vanches  ne  subsiste  plus  ,  il  a  été 
transféré  à  Lausanne.  Le  seul  écrit  qui  nous 
reste  de  Maiius,  est  une  Chronique  abrégée 
depuis  l'empire  d'Avitus  en  433,  oîi  finit 
celle  de  saint  Prosper,  jusqu'au  mois  de  sep- 


tembre 581.  Il  est  surprenant  qu'il  ne  l'ait 
pas  poussée  plus  loin,  puisqu'il  ne  mourut 
qu'en  596,  dans  la  soixante-quatrième  année 
de  son  âge.  Il  prend,  à  l'imitation  de  saint 
Prosper ,  les  consulats  pour  époques  des 
faits  qu'il  rapporte,  ne  commençant  à  mar- 
quer les  indictions  qu'en  l'an  523,  auquel 
Flavius  Anicius  Maxime  fut  consul.  Sa  Chro- 
nique contient  principalement  ce  qui  s'est 
passé  dans  le  royaume  de  Bourgogne  vers  le 
lac  de  Genève  et  lesconfinsd'Agaune.  Elle  met 
en  363  l'éboulement  d'une  grande  monta- 
gne dans  le  Valais,  qui  causa  la  ruine  de  plu- 


400 


HISTOIRE  GÉNÉR.ME  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

Amateur,  évêquc  dAuxerre,  en  avait  trans- 


TéUriiH, 
clttt   <tc     I  K- 

itrre. 


sieurs  endroits,  et  fit  enfler  si  prodigieusement 
leseaux  du  Rhône,  qu'elles  rebroussèrentjus- 
qu'à  Genève  ;  le  pout  et  lesraoulins  de  vette 
■ville  furent  renversés,  plusieurs  églises  et  vil- 
lages furent  détruits,  et  un  gmnd  nombre  de 
personnes  noyées.  Monsieur  Dnchêne,  quia 
inséré  cette  Chronique  dans  son  Recueil  des 
historiens  fraui;ars,  y  a  '  joint  l'ouvrage  d'un 
inconnu,  qui  en  est  une  continuation.  Elle  va 
jusqu'à  la  quarantième  année  de  Clotaire  II,  la 
quatorzième  de  l'empire  d'Hcraclius,  c'est-à- 
dire  jusqu'à  l'an  023.  DomRuiuartàplacédans 
l'Appendice  '  des  œuvres  de  saint  Grégoire 
de  Tours,  ce  que  cet  anonyme  dit  de  la  mort 
funeste  de  Brunehaut  reine  de  France,  femme 
de  Sigebert,  roi  d'.\ustrasie,  parce  que  per- 
sonne ne  l'a  mieux  circonstanciée  :  de  la 
manière  dont  il  la  rapporte,  elle  fait  hor- 
reur; et  toutefois  il  fait  passer  Clotaire,  le 
seul  auteur  de  celte  mort,  pour  un  prince 
humain  et  débonnaire.  [La  Chronique  de 
Marius  a  été  réimprimée  dans  le  tome  II  du 
Recueil  des  historiens  de  France  par  dom 
Bouquet  ;  dans  Gallaud  avec  une  notice  , 
tome  XII,  d'où  elle  a  passé  dans  le  tome  LXXII 
de  la  Patrologie  latine,  col.  791  à  802  avec  la 
continuation.]  On  attribue  avec  quelt[iie  vrai- 
semblance à  Marius,  évéque  d'.Vvanches,  la 
Vie  de  saint  Sigismond ,  rapportée  par  les 
Bollandistes  au  '  premier  jour  de  mai  ;  elle 
est  assez  du  style  de  sa  chronique ,  et  les 
faits  sont  racontés  à  peu  près  de  même  dans 
ces  deux  écrits;  il  y  a  néanmoins  des  varia- 
tions dans  les  noms  propres,  mais  elles  peu- 
vent venir  de  l'inadvertance  des  copistes. 

2.  C'est  encore  au  premier  de  mai  que  les 
Bollandistes  parlent  d'une  relation  des  mi- 
racles que  Dieu  opérait  à  Auxerre  par  les 
reliques  des  saints  martyrs  Cyr  et  Julitte. 
Ils  avaient  souffert  à  Antioche  ;  mais  saint 


porté  les  reliques  dans  son  église ,  ayant 
trouvé  le  moyen  de  les  avoir  dans  un  voyage 
qu'il  fit  en  Orient  avec  un  homme  de  con- 
dition nommé  Savin  :  c'est  ce  que  dit  Télé- 
rius  dans  la  préface  de  sa  relation.  Il  se  don- 
ne dans  l'inscription  le  titre  de  Sophiste, 
terme  qui  signifie  qu'il  joignait  à  l'étude  de 
l'éloquence  la  profession  de  philosophe; 
mais  il  se  qualifie  aussi  serviteur  des  saints 
dont  il  rapportait  les  miracles  :  d'où  il  est 
naturel  de  conclure  qu'il  était  un  des  clercs 
qui  desservaient  l'église  où  leurs  reliques 
reposaient,  c'est-à-dire  de  l'église  d'Auxerre. 
Nous  n'avons  de  lui  que  la  préface  de  son 
ouvrage,  trouvée  dans  un  manuscrit  '  de  la 
bibliothèque  Barberine  à  Rome.  Mombri- 
cius  l'avait  déjà  donnée  dans  son  second 
tome,  mais  moins  complète.  On  ne  sait  point 
en  queUc  année  Tétérius  écrivait  ;  .il  parait 
seulement  que  ce  fut  depuis  que  l'on  eut 
transféré  à  Nevers  le  bras  de  saint  Cyr,  puis- 
qu'il parle  de  cette  translation. 

3.  On  n'est  pas  mieux  informé  du  temps 
où  a  vécu  Rotérius,  dont  le  nom  ne  nous 
serait  pas  même  connu  ,  s'il  n'en  était  fait 
mention  dans  la  vie  '  de  saint  Sévère  d'Agde, 
écrite  dans  le  vu"  ou  vin'  siècle.  Cet  écrivain 
donne  à  Rotérius  une  histoire  des  règnes  de 
diverses  nations  étrangères ,  dans  laquelle 
il  décrivait  les  ravages  que  les  Huns,  sous  la 
conduite  d'Attila,  leur  roi,  avaient  causés 
dans  les  Gaules ,  principalement  à  Agde , 
qu'ils  avaient  détruite.  Cette  histoire  était 
écrite  d'un  style  noble  et  coulant  ;  il  n'en 
est  rien  venu  jusqu'à  nous.  Catel ,  dans  son 
histoire  du  Languedoc  ,  fait  Rotérius  auteur 
de  la  vie  de  saint  Sévère,  ce  qui  n'est  pas 
vraisemblable ,  puisque  cette  vie  contient 
l'éloge  même  de  Rotérius  et  de  ses  écrits. 


6a      tijoanie, 
M>étud«i,»i  a 


CHAPITRE   XLIV. 
Dyname  patrice  [601]. 


1.  Il  semble  par  saint  Grégoire  de  Tours, 
que  la  ville  '  d'Arles  ait  donné  naissance  à 
Dyname.  Après  s'être  rendu  habile  dans  les 
lettres  humaines  ,  il  s'engagea  dans  le  ma- 
riage avec  Euchérie ,  dont  il  eut  deux  fils. 

•  Duch^ne,  tom.  I,  pag.  216. 
'  Greg.  Turon.,  Append.,  1351.—  '  Tom.  1,  pag.  86. 
^  Tom.  I   Maii  liolland.,  pag.  51,  Dum.  8,  e(  ai 
diem  iGjunii,  jiag.  20,  uum.  17,  18. 


Le  premier,  nommé  Évance,  fut  envoyé  en 
ambassade  par  le  roi  Childebert  II  vers 
l'empereur  Maurice,  en  788 ,  avec  Hodégi- 
silde  et  le  duc  Grippon  ;  mais  il  fut  '  fui' 
dans  une  émeute  populaire  à  Carlhage,  où 

»  Mabil.,  in   Ord.  S.  Benedicti,  tom.  I,  pag.  S6i 

cl  scq. 
*  Greg.  Turon.,  lib.  X,  cap.  n. 
'  Greg.,  lib.  X,  cap.  n. 


[VI°  SIÈCLE. 


CHAPITRE  XLIV. 


I    doviout 
riipiii  ri-, 


ils  avaient  relAché  pour  att(!iulr(i  un  veut  l'a- 
voialile.  Dès  l'an  581,  Dynamo  avait  olo  fuit 
pouveiiicur'  do  la  l'mvcnco,  avec  la  dignité 
de  Patrice, qui  était  allectôe  alors  aux  gouver- 
neiiis  de  n<)urs,>oj;iic  etù  ceux  de  la  Provence. 

2.  Il  ahusa  de  son  autorité  pour  mettre 
successivement  sur  le  siège  épiscopal  d'Uzès, 
après  la  mort  de  saint  Ferréol,  arrivée  eh 
581,  .\lbin  '  qui  avait  été  préfet ,  et  le  dia- 
cre Maicel.  Il  mit  aussi  le  trouble'  dans 
l'église  de  Marseille,  dont  il  fit  chasser  deux 
fois  révoque  Tiiéodore.  Ses  violences  lui 
firent  perdre  les  bonnes  grâces  du  roi  Cliil- 
debert  ;  mais  le  roi  Gontran  *  les  lui  fit  ren- 
dre quelque  temps  après. 

3.  Dynamo  changea  de  conduite,  et,  dans 
la  vue  de  vivre  chrétiennement,  il  demanda' 
au  pape  saint  Grégoire  des  avis  et  des  livres 
pour  son  instruction.  Il  dota  des  monastères", 
et  se  chargea  du  soin  du  patrimoine  de  saint 
Pierre  dans  la  Provence;  ce  qu'il  fit  depuis 
l'an  303  jusqu'au  mois  de  septembre  de  l'an 
S9o,que  saint  Grégoire  envoya 'eu  Gaule  le 
prèti-e  Candide  pour  le  gouverner  :  mais,  pour 
marquer  à  Dyname  sa  reconnaissance,  il  lui 
envoya' une  croix  où  il  y  avait  de  la  limaille 
des  chaînes  de  saint  Pierre,  et,  aux  quatre 
extrémités,  des  particules  du  gril  de  saint 
Laurent.  Dyname,  depuis  ce  temps-là,  quit- 
ta le  monde  avec  Aurèle  pour  vivre  dans  la 
retraite,  où  il  s'occupait  des  merveilles  que 
Dieu  avait  opérées  par  les  saints,  et  du  soin 
de  les  transmettre  à  la  postérité.  Ce  fut  dans 
ces  pieux  exercices  qu'il  mourut  en  601,  n'é- 
tant âgé  que  de  cinquante  ans.  Quelques- 
ims   ont  '  prétendu  qu'après  avoir  renoncé 
aux  charges  séculières,  il  avait  été  fait  prê- 
tre de  l'église  de  Marseille,  puis  évêque  d'A- 
vignon, et  qu'il  n'était  mort  qu'en  627,  après 
vingt-deux  ans  d'épiscopat;  mais  son  épita- 
phe,   composée  par  son  petit-fils,   ne  lui 
donne  que  cinquante  ans  de  vie  ;  elle  ne  dit 
rien  ni  de  sa  prêtrise  ni  de  sou  épiscopat,  et 
la  lettre  que  saint  Grégoire  écrivit  à  Aurèle 
sur  la  mort  de  Dyname  ne  permet  pas  de  la 
mettre  plus  tard  qu'en  600  ou  601,  puisque 
cette  lettre   est   de   ce  temps-là.  Ce  saint  '° 
pape  y  prie  Dieu  de  consoler  Aurèle,  qu'on 


DYNAME,  PATRICE.  401 

croit  avoir  été'    l(i  fiènî  de  Dynamo,  et  do 
le    i)r(il(''ger    contre    les    malins    es[)rits   et 
contre   la  malice  des    hommes.   «  Vous  ne 
devez  pas,  ajoule-l-ii,   être  surpris,  si  vous 
avez    à   soutenir    les  coutradiclions    et    les 
lioubles  il(!  quelques  ennemis  ijui  cherche- 
ront à  vous  traverser  après  la  mort  de  votre 
frère;  il  fiiut  vous  résoudre  à  supporter  les 
maux   de   la  part  des  hommes,  dans  une 
terre  qui  est  ('tianfière  pour  vous,   si  vous 
voulez  jouir  des  véritables  biens  dans  votre 
patrie,  c'est-à-dire  dans  la  terre  des  vivants. 
La  vie  présente  est  un  voyage  en  pays  étran- 
ger, et  le  voyageur,  (pii  soupire  après  sa  pa- 
trie,   se  regarde   dans  le  lieu  de  son  exil 
comme  dans  un  lieu  de  supplice,  quelque 
agrément  qu'il  puisse  y  ajouter  ;  mais,  pour 
vous,  Dieu  a  permis  qu'outre  les  soupirs  et 
les  gémissements  qu'exprime  de  votre  cœur 
l'amour  de  votre  patrie  à  laquelle  vous  as- 
pirez, l'oppression  que  vous  souffrez  de  la 
part  des  liommes  vous  fasse  encore  gémir. 
Vous  devez  regarder  cela  comme  un  effet  de 
la  conduite  de  Dieu  sur  vous,  qui,  en  même 
temps  qu'il  vous  attire  à  lui  par  l'amour  qu'il 
vous  inspire,  permet   que   le   monde   vous 
chasse,  vous  repousse  et  vous  donne  de  l'é- 
loignement    pour    lui    par   les   tribulations 
qu'il  vous  suscite.  Continuez  donc  à  exercer 
l'hospitalité,  appliquez-vous  à  la  prière  avec 
larmes,  faites  plus  d'aumônes  qu'auparavant, 
quoique  vous  ayez  toujours  pris  beaucoup 
de  plaisir  à  en  faire  d'abondantes.  » 

L'épitaphe  de  Dyname  lui  est  commune 
avec  Eucliérie  sa  femme  ;  ils  furent  enterrés 
l'un  et  l'autre  dans  l'église  de  Saint-Hippo- 
lyte  à  Marseille.  L'âge  d'Euchérie  n'est  pas 
marqué  ;  mais  il  est  dit  que  Dyname  mou- 
rut après  "  dix  lustres,  c'est-à-dire  à  cin- 
quante ans.  Son  petit-fils  se  nommait  Dy- 
name comme  lui  ;  il  dit  que  ce  fut  par  ordre 
de  son  père  qu'il  composa  cette  épitaphe. 

A.  Pendant  sa  retraite,  Dyname  composa    ^  ''■\^""J'J 
la  vie  de  saint  Mari  ou  Marins,  abbé  de  Bo-  sonsuio. 
dane   ou  Benon,  au  diocèse  de  Sisteron  en 
Provence,  mort  vers  le  milieu  du  sixième 
siècle.    Nous    n'en  avons  plus  aujourd'hui 
qu'un  abrégé,  donné  par  les  BoUandistes  au 


'  Greg.,  lib.  VI,  cap.  vu.—  '  Id.,  lib.  X,  cap.  vn. 
—  '  Ibid.,  cap.  XI  et  xxiv.  —  '  Id.,  lib.  IX,  cap.  xi. 

5  Greg.  M.,  lib.  \\\,Epi$t.  36.  —  «  Id.  lib.  VI, 
Episl.  6.— '  Id.,  lib.  Vil,  Epist.  33.  — «  Id.,  lib.  111, 
Epist.  33.  —  *  Gallia  cliristiaua  nova,  tom.  I,  799, 
867.  —  1»  Greg.,  lib.  IX  Episl.  7U. 

"  Dynamius  hic  nain  pariterque  Eucheria  con- 

XI. 


junx,  Marlyris  Hippolyti  limina  sancta  tenent... 
Luslra  decem  felix  tulerat  posl  terga  maritus, 
Cum  dedil  liavc  sedcm  morte  sttprema  dies...  Dy- 
namius pana  lacrymanshœc  carmina  fudi,  ^o- 
mcn  uvi  referens,  pâtre  jiibeitte,  nepos.  Duchêue, 
toiu.  I,  pag.  519. 


26 


402 


HISTOIRE  GHXÉllALE  DES 


27  janvier,  et  par  dom  Mabillon  dans  le  pre- 
mier tome  des  Actes  de  l'ordre  de  saint  Be- 
noit. Cette  vie  était  chartréc  de  miracles. 
L'abrévialeur,  craignant  d'ennuyer  le  lec- 
teur, crut  devoir  '  en  supprimer  une  partie; 
peut-être  avait-il  aussi  en  vue  de  rendre  plus 
courtes  les  leçons  du  bréviaire  :  car  l'abrégé, 
tel  qu'on  nous  l'a  donné,  a  été  tiré  d'un  an- 
cien bréviaire  où  il  était  divisé  en  neuf  le- 
çons. Dom  Mabillon  *  a  joint  à  cet  abrégé 
une  espèce  d'bomélie  qui  (onlient  le  récit 
de  plusiem-s  miracles  faits  à  ForcuKjuier,  où 
le  corps  de  saint  Mari  lut  transféré  sur  la  tin 
du  IX'  siècle,  ou  au  commencement  du  x". 
L'auteur  d|^  cette  homélie  était  bénédictin  et 
moine  d'un  monastère  de  cette  ville,  comme 
on  le  voit  par  l'allusion  qu'il  fait  au  chapitre 
LTiii  de  la  règle  de  saint  Benoit,  où  ceux  qui 
en  font  profession  promettent  à  Dieu  et  au 
saint,  dont  on  a  les  i  cliques  dans  le  monas- 
tère, la  conversion  de  leurs  mœurs  et  la  sta- 
bilité. Sigebert  '  de  Gemblours  fait  mention 
de  la  Vie  de  saint  Mari  écrite  par  Dyname. 
Il  écrivit  aussi  celle  de  saint  Maxime,  abbé 
de  Lérins,  et  ensuite  évéque  de  liiez;  il  l'a- 
vait faite  assez  courte,  faute  de  mémoires  ; 
mais  Urbique,  l'un  des  successeurs  de  saint 
Maxime,  lui  en  ayant  fourni  de  plus  amples, 
il  travailla  de  nouveau  cette  Vie,  qu'il  mit  «-n 
foime  de  panégyrique,  afin  qu'on  la  lût  tba- 
que  année  au  jour  de  la  fêle  du  saint.  Surius 


AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 

l'a  rapportée  au  27  novembre,  et  Barali  au  ' 
second  tome  de  la  Chronolo<:ie  des  Ilommes 
illustres  de  l'abbaye  de  Lérins.  Celte  seconde 
Vie  est  adressée  à  l'évêque  Urbique,  à  qui 
Dyname  proteste  qu'il  n'avancera  rien  que 
sur  des  relations  authentiques.  C'est  de  celte 
Nie  qu'on  a  tiré  la  matière  des  hymnes  fai- 
tes en  l'honneur  de  saint  Maxime,  imprimées 
dans  la  Chronologie  de  Lérins.  Fréhérus  et' 
Duchesne  nous  ont  donné  deux  lettres  de 
Dyname  :  la  première  est  adiessée  à  an  de 
ses  amis,  à  (jui  il  témoigne  le  plaisir  qu'il 
avait  de  recevoir  des  siennes;  la  seconde 
à  Villicus,  évèque  de  Metz,  auprès  de  qui  il 
s'excuse  d'avoir  tant  tardé  à  exécuter  une 
commission  dont  il  l'avait  chargé.  Étant 
jeune,  il  se  mêlait  de  faire  des  vers;  Fortu- 
nat,  à  qui  il  en  envoya,  les  trouva  '  de  son 
goût.  A  sou  tour,  il  lui  adressa  deux  poèmes, 
dans  lesquels  il  l'invitait  de  venir  à  la  cour 
du  roi  d'Austrasie.  Fortunat  y  demeurait 
pour  lors,  et  Dyname  à  Marseille,  qui  était 
une  des  villes  de  son  gouvernement.  Dyname 
n'a\ait  pas  mis  son  nom  à  la  tête  de  ses  vers, 
mais  Fortunat  l'y  reconnut.  Il  ne  nous  en  reste 
aucun.  Le  style  de  Dynamo  est  trop  étudie, 
ce  qui  le  rend  souvent  obscur  et  embarrassé. 
[Les  deux  lettres  avec  notice  par  Fabri- 
cius,  la  vie  de  saint  Marins  et  celle  de  saint 
Maxime,  sont  reproduites  dans  le  tome  LXXX 
de  la  Patrologie  latine,  col.  23-40.] 


CHAPITRE  XLV. 

Saint  Fortnnat  évêqne  de  Poitiers,  Bandonivie  religieuse  de  Poitiers 

[sur  la  fin  du  VP  siècle.] 


Etudes  ôc  For- 


i.  Paul  Diacre  '  fait  naître  Fortunat  dans 
le  voisinage  de  Généra,  ville  d'Italie  dans  le 
Trévisan.  Il  ne  dit  rien  de  sa  famille  ;  mais  il 
ajoute  qu'il  fut  élevé  h  Ravcnnc,  et  qu'il  y 
étudia  avec  succès  la  grammaire,  la  rhéto- 
rique et  l'art  poétique.  Fortunat  eut  moins 
de  goiit  pour  la"  philosophie;  mais  il  prit 
quelque  teinture  de  la  juiis|uudence.  Dans 
un  âge  fort  avancé,  il  n'avait  encore  lu  au- 
cun des  écrits  des  Pères  de  l'Eglise.  Il  y  ' 


avait  à  Havenne  une  basilique  en  l'honneur 
de  saint  Paul  et  de  saint  Jean,  et  dans  cette 
église  un  autel  de  saint  Martin,  devant  le- 
quel nn  allumait  une  lampe  pour  donner  du 
jour.  Foi'tunat  et  Félix  sou  ami,  qui  étaient  l'un 
et  l'autre  tourmentés  d'une  grande  douleur 
aux  yeux,  prirent  de  l'huile  de  cette  lampe, 
s'en  trottèrent  \cs  yeux,  et  furent  guc'ris  sur- 
le-champ.  Depuis  ce  lemps-lA,  Fortunat  fut 
si  rempli  de  vénération  pour  saint  Martin, 


'  Vila  Marii.  nuiii.  .\,  toui.  I,  art.  edit  Venet., 
pag.  ion.  —  '  lliid. 

»  Sigelj.,  De  Viris  illust.,  cap.  cxiv.  —  *  l'.ig.  IJO. 

•  Frelii.Tus,  Ilisl.  Franc,  toui.  1,  jmg.  195;  Du- 
chesne, tom.  I,  pag.  859. 


"  Forlunal,  lili.  VI,  cap.  XI  et  Xll. 
'  P.iulus,  lib.  li  Uùt.  Longoliard.,  num.  23. 
»  Fortunat,  Carm.,  lib.  \,cl  lib.  1  De  Vila  Uaf' 
Uni. 
»  Paulus  ubi  supra. 


CIIAPITIIK  XLV.  —  SAINT  FOIITIINAT  DE  l'OITIEUS,  ETC. 


si    fail 
I        de 


[Vl"  SlfeCLE.] 

qu'il  abandonna  l'Ilalic  pour  passer  en  Fran- 
ce, au  tombeau  du  saint  ëvûque.  Il  fit  ce 

voyniïP  quoique  N'mps  avant  que  les  Lom- 
bards fissent  une  irniiillon  en  llalie,  et  ainsi 
avant  l'an  5(18.  Félix  ne  le  suivit  point,  par- 
ce qu'il  avait  clé  fait  évéque  de  Triivise. 

2.  Fortunat  prit  sa  roule  par  le  royaume 
d'Anstrasie,  où  il  fut  bien  reru  par  le  roi  Si- 
geberl;  il  y  était  en  505.  Son  esprit,  son  sa- 
voir et  sa  vertu  le  firent  chérir  de  [ilusieurs 
grands  de  la  cour,  et  de  plusieurs  saints  évo- 
ques; mais  il  lia  une'  amiliii  partictdière 
avec  Sii;(iald,  à  qui  le  roi  avait  donné  com- 
mission de  défrayer  Fortunat,  et  de  le  con- 
duire partout  où  il  souhaiterait  d'aller.  Après 
quelipie  séjour  i\  la  cour  de  Sigcbcrt,  il  alla  à 
Tours  pour  satisfaire  sa  dévotion  envers  saint 
Martin.  Il  y  fit  connaissance  avec  saint  Eu- 
phrone,  évéque  de  cette  ville,  et  depuis  avec 
saint  Grégoire,  qui  en  fut  élu  évéque  en  373. 
ne  Tours  il  vint  à  Poitiers  auprès  de  sainte 
Radégonde,  qui,  ce  semble,  l'avait-  demandé 
au  roi  Sigebert  pour  avoir  soin  de  ses  affai- 
res. Elle  le  fit,  en  effet,  son  aumônier  et  son 
chapelain  ;  mais  avant  de  recevoir  le  sacer- 
doce, Fortunat  s'y  était  préparé  par  l'étude 
de  la  science  ecclésiastique,  qu'il  avait  négli- 
gée jusqu'à  son  arrivée  à  Poitiers. 

3.  Le  siège  de  cette  ville  étant  devenu  va- 
cant par  la  mort  de  saint  Platon,  l'un  des 
disciples  de  saint  Grégoire  de  Tours,  Fortu- 
nat fut  choisi  pour  le  remplir.  Platon  avait 
été  fait  '  évéque  de  Poitiers  en  592,  il  mourut 
en  599  ;  Fortunat  était  donc  fort  avancé  en 
âge  lorsqu'il  parvint  à  l'épiscopat,  étant  né 
au  plus  tard  vers  l'an  530.  Saint  Grégoire  de 
Tours  ne  le  qualifie  jamais  que*  de  prêtre, 
parce  qu'il  était  mort  avant  que  Fortunat 
fût  évéque  ;  mais  Baudonivie  ^ ,  religieuse 
de  Sainte-Croix  à  Poitiers,  Paul  Diacre,  et  Si- 
gebert de  Gemblours,  lui  donnent  la  qualité 
d'évéque  ;  en  quoi  ils  ont  été  suivis  par  le 
moine  Aimoin  et  par  d'autres  écrivains  pos- 
térieurs. On  ne  sait  point  de  combien  d'an- 
nées fut  son  épiscopat.  L'église  de  Poitiers 
l'honorait  comme  saint  dès  le  viii'  siècle. 
Paul,  diacre  d'Aquilée ,  passant  par  cette 

'  Vita  Forlunati  a  Brovero,  cap.  m. 

'  Yita  Forlunali  a  Brovero,  ibid. 

'  Ruinart  in  nolis  ad  lih.  IV  De  Miraculis  S. 
Martini,  cap.  xxxii,  pag.  1133. 

*  Oreg.  Turon.,  pag.  995,  1016,  1017. 

»  Mabil.,  Act.  Ord.  S.  Bened.,  tom.  I,  pag.  309  ; 
Sigebert,  De  Vir.  illust.,  cap.  slv  ;  Paulus,  Hint. 
Longob.,  lib.  XI,  uuqi.  23  ;  Aymon.,  lib.  111  De  Gest. 
Franc.,  cap.  xui. 


403 


ville,  alla  prier  sur  son  lomljcau  ;  et  pour 
ne  point  laisser  ignorer  ses  vertus  à  la  pos- 
térité, il  en  fit  l'éloge  dans  ime  ('pitaplic 
qu'il  C(unposa  à  Poitiers  même,  ù  la  [)rière 
d'Afier,  abin'  de  Sain'.-Hiiaire,  où  Fortmiat 
avait  été  inhumé.  Il  y  relève  "  la  beauté  de 
son  génie  ,  la  pénétration  de  son  esprit,  la 
douceur  de  ses  vers,  et  le  service  qu'il  a  ren- 
du ;\  l'i^glise  en  écrivant  les  vies  de  ceux 
qui  l'avaient  édifiée  par  l'éclat  de  leur  sain- 
teté, et  congratule  la  France  de  conserver 
un  si  précieux  dépôt.  Le  titre  de  coryphée 
des  poètes,  qu'il  lui  donne,  ne  peut  se  soute- 
nir qu'en  le  comparant  aux  autres  poètes  de 
son  siècle. 
4. Le  plus  considérable  des  ouvraircsdeFor-     t^ccm  te 

°  poésies     dlvl. 

lunat  en  veis  est  un  recueil  de  poésies  sur  di-   *«  "  ""'om- 

*  vres.  Livre  I, 

vers  sujets  ;  il  est  divisé  en  onze  livres,  et  dé-  ',°i"\  ^  „  '"• 

J  '  L.ioth.      Pal., 

dié  à  saint  Grégoire,  évéque  de  Tours,  qui  le  f5^,'i„''f 'ij^" 
lui  avait  demandé.  Il  eut  de  la  peine  à  consen-  «"i"-  '«n. 
tir  à  le  rendre  public,  parce  qu'il  avait  com- 
posé les  poèmes  qui  y  sont  rapportés,  ou  eu 
voyageant  au  milieu  des  barbares,  ou  au  mi- 
lieu des  neiges,  ou  en  d'autres  temps  où  le 
froid  et  la  fatigue  rendaient  sa  veine  poétique 
presque  froide  et  languissante  ;  aussi  il  le 
prie  de  garder  ce  recueil  pour  lui  seul,  ou 
de  ne  le  communiquer  qu'à  des  amis  sages 
et  prudents.  Le  premier  livre  commence  par 
un  poème  en  l'honneur  de  Vital,  évéque  de 
Ravenne  ;  il  est  suivi  de  Celui  que  Fortu- 
nat composa  à  l'occasion  de  l'église  que  le 
même  évéque  avait  bâtie  dans  la  même 
ville  sous  l'invocation  de  saint  André,  et  où 
il  avait  mis  des  reliques  de  saint  Pierre  et 
de  saint  Paul,  de  saint  Sisinue  ,  de  saint 
Alexandre,  de  sainte  Cécile  et  de  quelques 
autres  martyis.  Il  y  en  a  un  sur  la  cellule 
bàlie  à  l'endroit  où  saint  Maitin  avait  donné 
une  partie  de  son  manteau  à  un  pauvre 
pour  l'en  revêtir  ;  un  sur  la  dédicace  de  l'é- 
glise de  Saint- Vincent,  où  un  possédé  du  dé- 
mon avait  été  délivré,  aussitôt  qu'on  eut 
apporté  dans  cette  église  les  reliques  du 
saint  martyr.  Les  autres  sont,  ou  des  des- 
criptions d'églises,  de  lieux  et  de  rivières, 
ou  des  éloges  de  Léonce,  évéque  de  Bor- 

^  Ingénia  clarus,  sensu  celer,  ore  suavis,  eu- 
jus  dulce  melos  pagina  mnlta  cnnit,  Fortunatus 
apex  i-alum,  venerabilis  aciu,  Àusonia  nalus,  hoc 
tumulatur  humo.  Cujus  ab  ore  sacro  sanclorum 
gesta  priorum  Discimus  :  hœc  monstrant  carpere 
lucis  iter.  Feiix  quœ  tantis  decoraris,  Gallia,  gem- 
iiiis.  Luinine  de  quarum  nox  tibi  tetra  fugit.IIos 
modicos  feci plebvio  carminé  lerxus,  ISe  tuus  in  po- 
puUs,  Suncte,  lateret  honor.  Yila  Fort-,  pag.  .526. 


4n.i  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIOraS 

dcaux.  n  avait  renouvelé  régli«c  de  Saint-Eu 
liopc,  et  fait  peiiulie  diverses  images'  sur  les 


murailles  ;  il  en  avait  bâti  d'autres  tout  à  neuf, 
une  entr'autres  en  l'honneur  de  la  sainte 
Vierge,  où  il  avait  nii?  '  les  vases  nécessai- 
res pour  conserver  le  corps  et  le  sang  de  Jé- 
sus-Christ. 
L.c  Ml,  5  Qn  r^  j^jg  jjins  le  second  livre  l'hvmne 
Pange  lingiia  au  nombre  des  poèmes  de  For- 
tunat,  quoiqu'il  v  ait  plus 'de  raison  de  l'at- 
tribuer à  Claudien  Mamert  ;  les  six  autres 
premiers  poëmes  de  ce  livre  sont  en  l'hon- 
neur de  la  Croix  ;  le  quatrième,  le  cinquième 
et  le  sixième  sont  acrostiches  :  le  dernier  est 
figuré  eij-forme de  croix,  et  tous  lestroisont 
demandé  beaucoup  d'art  et  d'attention.  For- 
tunat  y  dit  nettement  *  qu'il  adore  la  croix  en 
tout  temps,  qu'il  la  regarde  comme  le  gage 
certain  de  son  salut  et  qu'il  la  porte  avec  lui 
comme  sou  refuge  dans  ses  besoins.  11  y  a 
toute  apparence  qu'il  composa  ces  poëmes 
ii  l'occasion  du  bois  de  la  Croix  que  sainte 
Radégonde  obtint  de  l'emperenr  Justin  pour 
son  monastère  de  Poitiers.  11  en  faut  excepter 
le  troisième  poëmc,  qu'il  lit  pour  une  église 
de  Tours  que  saint  Grégoire  avait  dédiée 
sous  le  titre  de  la  Croix.  A  l'égard  du  Vexilla 
Régis ,  personne  ne  doute  que  cette  hymne 
n'ait  été  faite  pour  la  cérémonie  de  Poitiers  ; 
les  deux  dernières  strophes  ne  sont  pas  les 
mômes  dansFortunat  que  dans  l'ollice  de  l'E- 
glise ;  il  y  a  aussi  quelques  changements  dans 
la  seconde.  La  plupart  des  autres  hymnes 
ou  poëmes  du  second  livre  sont  a  la  louange 
de  plusieurs  saints  évèques,  comme  de  saint 
Saturnin  de  Toulouse,  de  saiut  Mamice  et 
de  ses  compagnons,  de  saint  Hilaire  de  Poi- 
tiers, de  saint  Mcdard  de  Noyon  ;  les  autres 
sont  sur  divers  sujets.  Le  dixième  est  un 
éloge  du  zèle  et  de  la  piété  du  clergé  de 
Paris,  et  le  onzième  une  description  de  l'é- 
glise de  celte  ville.  Fortunat  la  compare  au 
temple  de  Salomou,  disant  qu'elle  le  sur- 
passait, en  ce  que  les  ornemenis  de  ce  tem- 
ple n'étaient  que  matériels,  au  lieu  que  l'é- 

'  Sumpsil  iiiiiigincds  paries  simulandn  figuras, 
t/uœ  neque  trcln  prius,  liiuc  iiwdo  picla  vilcnt. 
Forluiiiil.,  lili.  I,  Carm.  13. 

«  iluneribusi/ue  piis  dotasti  altaria  Chrisli, 
Cum  lua  fiisa  fcrunl  risceru  sancta  Dri.  Sam 
cruor  el  corpus  Doiinni  Itbamina  sunimi,  nie  iiii- 
nisleriutn,  te  Iribuente  ïenit.  Ibid.  Carm.  \:>. 

»  \  iiJe  loin.  X,  [.ag.  35.1. 

*  Crux  mihi  cer(a  sntux,  Crui  est  quant  sempcr 
adoro,Crux  Domini  meaim.Crux  niilii  refugium. 
J.il..  Il,  lliJinii.U. 


plise  de  Paris  était  teinte  du  sang  de  Jésus- 
Christ  ;  il  remarque  qu'elle  prenait  '  jour  par 
des  fenêtres  vitrées.  Il  coniimsa  son  poème 
en  l'honneur  du  clergé  de  Paris ,  lorsque 
saint  Germain  en  était  évèque.  C'était  dès 
lors  l'usage  que  les  ministres  de  l'autel  fus- 
sent vôtus  de'  blanc  dans  leurs  fonctions. 
Launebodc  avait  bâti  une  église  ii  Toulouse 
en  l'honneur  de  saint  Saturnin  :  Fortunat  re- 
lève dans  le  neuvième  poème  cette  œuvre 
de  piété  et  l'attention  continuelle  de  ce  saint 
homme  à  nourrir  les  pauvres  et  à  les  vêtir  ; 
en  quoi  il  dit  qu'il  était  secondé  par  sa  fem- 
me, qui  vivait  également  dans  les  exercices 
de  la  vertu.  Le  douzième  est  sur  un  baptis- 
tère que  saint  Sidoine,  évêque  de  Mayence, 
avait  fait  construire  ;  le  poète  y  reconnaît 
que  Dieu,  par  les  '  eauxméiiicinales  du  bap- 
tême, noius  rachète  de  la  mort  du  péché 
que  nous  avons  contracté  par  notre  origine. 
Le  même  évêque  avait  bâti  une  église  de 
Saint-Georges:  Fortunat  fait  dans  le  treizième 
poème  l'éloge  de  ce  martyr,  en  insinuant 
qu'il  était  mort  par  le  supplice* du  feu,  après 
avoir  auparavant  souHert  la  prison,  la  faim, 
la  soif,  le  froid  et  divers  autres  mauvais  trai- 
tements pour  la  foi  de  Jésus-Christ.  Il  rap- 
porte dans  l'éloge  de  saint  Hilaire  les  vic- 
toires qu'il  avait  remportées  sur  les  ariens, 
et  de  vive  voix,  et  par  écrit  ;  dans  celui  de 
saint  Médard,  plusieurs  miracles  opérés  à 
son  tombeau.  11  fait  saint  Maurice' chef  de 
la  légion  thébéenne.  [A  la  fia  du  111°  livre 
de  l'édition  de  Luchi,  réimprimée  dans  le 
tome  L.V.VXVIll  de  la  J'atrotogie  latine,  on 
trouve  une  pièce  de  vers  en  l'honneur  de 
saint  Martial  :  Les  principales  traditions  du 
Liniousiu  sur  le  compagnon  de  saint  Pierre 
et  l'apùtre  de  l'Aquitaine.  Ce  poème  est  tiré 
d'un  manuscrit  du  commencement  du  Xii' 
siècle,  qui  renferme  un  passionnairc  et  porte 
ce  titre  :  Vers  de  Fortunat  sur  la  vie  de 
saint  Martial,  a/n'itre  du  Christ.  Les  éditeurs 
des  Anecdotes  liltci-aircs  avaient  di'jA  pu- 
))lié  ce  poème,  Rome,   1783,  vol.  IV,  pag. 

'  Prima  capit  radins  vitrcis  oculala  senculhs. 
Ui'ul.,  Ilymii.  II.  —  "  tlli  jum  senio,ta»ien  hi  bene 
veslibus  albtnl.  IMd.,  Ilyiun  10. 

'  Traxil  ongoiiecem  de  semint;sed  Pater  orbis 
Purgacil  medicis  crimina  mortis  aquis.   Iliiii. 

//l/HI».,    12. 

'  Carcere,  cnde,  famé,  vinclis,  siti ,  frigore, 
pamwis,  Coufessus  Christum  ,  duxil  ad  astra 
caput.  Iliid.,  Ilijmn.  13. 

•yiio,  pic  ilauriti,  dtictor  legionis  opimm,  Tra- 
xisli  fortes  subderc  colla  viros.  Ibid.,  llymn.  15. 


CHAPITHK  XLV.  —  SAINT  F(tHT[JNAT  DE  POITIKRS,  ETC. 


[VI"  SIÈCLE.] 

433.  Ces  vers  avaient  6US  envoyés  de  Roino 
cil  lOfiO  au  piTO  nonavciiliiic-Saiiil- Aiiia- 
lilo,  par  l'liilip[)e  ilo  Itulx'is,  cliaiidino  ar- 
chiviste de  Saint-Jean-de -Latran,  qui  les 
avait  tirés  d'un  manuscrit  sur  parclie- 
uiin  très -ancien,  leni'erinant  un  passion- 
naire  ou  sancloral  dans  lt;([uel  on  lit  C(!s 
vers  de  Fortuuat  en  tète  de  la  légende  de 
saint  Martial,  ])ar  Aurélien.  Le  père  Bona- 
venture  a  public  ces  vers  dans  son  picaiior 
volume  sur  saint  Martial,  sans  savoir  qu'ils 
fussent  de  Fortuuat.  L'abbé  Uouard,  dans 
un  voyage  l'ait  à  Rome  au  mois  de  juillet 
1853,  a  trouvé  ces  mêmes  vers  à  la  Biblio- 
thèque du  couvent  de  la  Minerve  dans  ini 
vieux  manuscrit  que  le  savant  Bicmond , 
général  des  Dominicains,  allirmait  remon- 
ter au  viii°  siècle  ou  au  plus  tard  au  IX^ 
Comme  ces  trois  manuscrits,  de  Florence, 
de  Saint-Jeaii-de-Latrau  et  de  la  Mineive  of- 
frent quelques  légères  variantes,  en  les  cor- 
rigeant l'un  par  l'autre,  M.  l'abbé  Arbellot, 
dans  sa  dissertation  sur  l'apostolat  de  saint 
Martial,  Paris,  Victor  Didron,  1833,  1  vol. 
in-8,  pag.  73  ,  est  arrivé  à  donner  une  édi- 
tion irréprochable.  Ces  vers  l'ont  mention 
de  la  race  de  saint  Martial  de  la  tribu  de 
Benjamin,  de  sa  prédication  à  Rome  a\ec 
saint  Pierre,  de  son  apostolat  égal  à  celui  de 
saint  Pierre,  de  sa  mission  dans  les  Gaules 
et  de  sa  sépulture  A  Limoges.  Sont-ils  au- 
thentiques ?  Sont-ils  sortis  de  la  plume  de 
Fortuuat  ?  «  Mais  ,  dit  M.  Arbellot ,  pour 
donner  un  démenti  au  titre  qu'ils  portent 
sur  un  manuscrit  qui  date  du  commence- 
ment du  xii°  siècle,  il  faudrait  de  très-gra- 
ves raisons,  il  faudrait  démontrer  claire- 
ment que  ces  vers  ne  sont  pas  dans  le  style 
de  Fortunat  et  qu'ils  ne  portent  pas  son  ca- 
chet litléiaire.  Or,  bien  loin  de  la,  ces  vers 
portent  tellement  sa  marque,  que  des  sa- 
vants italiens,  tels  que  Bandini  qui  les  a  dé- 
couverts dans  la  bibliothèque  de  Florence, 
monseigneur  .^maduziii  qui  les  a  publiés  h 
Rome  eu  1783,  l'illustre  cardinal  Luchi  qui 
les  a  insérés  dans  son  édition  romaine  de 
Fortunat  en  1786,  n'ont  pas  émis  le  moin- 
dre doute  sur  leur  authenticité.  C'est,  en  ef- 
fet, le  geure  de  Fortunat  ;  c'est  le  style  du 
VI''  siècle,  c'est  la  facilité  de  ce  poète  qu'on 
a  appelé  avec  raison  le  dernier  des  poètes 
latins.  C'est  sa  manière,  c'est-à-dire  une 
certaine  jH-éteution  à  l'élégance  (|ui,  ne  sait 
pas  toutefois  se  débairasser  d'une  certaine 
rouille,  d'un  certain  embarras  de  construc- 


403 


lion,  qu'elle  emprunte,  sans  s'en  diuiter,  à 
la  barharii!  de  son  siècle.  D'ailleurs,  ces 
vers  se  trouvent  dans  un  luanuscrit  de  la 
plus  haute  anti(iuité,  conservé  dans  les  ar- 
chives de  Saint-Jean-de -Latran  ;  on  les  lit 
encore  dans  ua  manuscrit  du  couvent  de  la 
Miut'rve  que  le  savant  Bréniorul  attribue  au 
viir'  siècle  ou  au  plus  tard  au  ix".  Croi- 
ra-1- on  que  ces  vers  aient  été  composés 
sous  le  nom  deForlunat,du  vii'siècleau  ix"? 
Mais  à  celle  époque  tout  à  l'ail  barbare,  on  ne 
savait  pas  faire  des  vers  d'une  telle  éh'gaucc 
et  d'une  pareille  latinité.  Ces  vers  portent  le 
cachet  d'une  époque  latine,  d'une  époque  où 
l'on  (Hiuliail  encore  Virgile  etCicéron.uDans 
V Appendice ,  le  savant  auteur  compare  les 
vers  de  c^  poëmc  avec  les  autres  œuvres  do 
Fortunat;  11  y  remarque  les  mêmes  pensées, 
les  mêmes  tourimres  de  phrases,  les  mêmes 
expressions  rares  et  particulières  à  ce  poète.] 
(j.  Le  troisième  livre  est  composé  de  trente- 
sept  lettres,  partie  en  vers,  partie  eu  prose; 
elles  sont  presipie  toutes  à  des  évoques  avec 
qui  il  était  lié  d'amitié.  Il  traite  dans  le  neu- 
vième du  mystère  de  la  résurrection  ;  c'est  de 
là  que  l'on  a  tiré  la  première  strophe  du  répons 
que  l'on  chante  dans  les  processions  le  jour 
de  Pâques,  et  qui  y  est  répétée  par  manière  de 
refrain;  elle  commence  par  ces  mots  :  Salve 
fcsla  dies.  Dans  la  dixième,  il  relève  l'industrie 
de  Félix  de  Nantes,  qui  avait  su  aplanir  une 
montagne  pour  changer  le  cours  d'une  ri- 
vière, et  donner  pur  là  aux  peuples  le  moyen 
de  vivre,  en  leur  donnant  des  terres  à  culti- 
ver. Il  parle  dans  la  onzième  des  forteresses 
que  Nicet,  évêque  de  Trêves,  avait  construi- 
tes sur  les  bords  de  la  Moselle.  Il  fait  dans 
la  quatorzième  la  description  du  pays  Mes- 
sin, et  des  deux  rivières  dont  il  est  arrosé,  la 
Moselle  et  la  Seille;  il  représente  la  ville  de 
Melz  comme  bien  fortifiée.  La  vingt-neuvième 
est  un  éloge  de  saint  Ayric,  évêque  de  Vei-- 
dun,  qui,  avec  les  dépenses  qu'il  faisait  pour 
le  soulagement  des  pauvres,  trouvait  encore 
le  nio}ende  rétablir  les  anciennes  églises  et 
d'en  bâtir  de  nouvelles.  Il  loue  aussi,  dans  la 
trentième,  son  savoir  et  son  assiduité  à  ins- 
truire son  peuple.  On  voit  par  la  trente- 
deuxième,  que  l'abbé  Paterne  l'avait  prié  de 
corriger  un  livre,  qu'il  parait  que  Fortunat 
avait  écrit  de  sa  propre  main,  et  où  il  s'était 
glissé  des  fautes  qu'd  avoue  lui  être  assez 
ordiiuiires.  Il  était  du  côté  de  Nantes,  lors- 
([u'il  écrivit  à  Drucon,  diacre  de  l'église  de 
Paris;  cette  lettre  est  la  trente-deuxième, 


Llvn 
Même, 


-406 


mSTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Les  trois  suivantes  sont  aussi  h  des  diacres, 
et  ne  sout  que  des  lettre*  d'amitié. 
irifmj"  îîgi       "'•  Ou  trouve  dans  le  quatrième  livre  vingt- 
*'*■  huit  épitaplies,  dont  les  dix  premières  sont 

pour  divers  évêques  de  France,  les  autres 
pour  des  personues  de  conditions  différen- 
tes. Il  y  en  a  une,  qui  est  la  vingt-cinquième, 
pour  la  reine  Tliéodécliikle,  femme  de  Clia- 
ribert  ;  il  en  est  parlé  dans  saint  Grégoire  ' 
de  Tours. 
qi.um7  ^"  ^'  ^''  première  lettre  du  cinquième  livre 
"'•  est  adressée  à  Martin,  évêque  de  Dume  en 

Galice.  Il  était  dans  ce  pays-là,  lorsqu'on  y 
apporta  au  roi  Théodémir  des  reliques  de 
saint  Martin  de  Touis,  et  ce  fut  lui  qui  don- 
na aux  Sùèves  de  Galice  la  règle  de  la  foi.  For- 
tunat  lui  décerne  pour  ce  sujet  de  grandes 
louanges,  l'appelant  apôtre  de  la  Galice,  et 
le  prie  d'intercéder  tant  pour  la  reine  Radé- 
gonde ,  et  Agnès  abbessc  de  Poitiers,  que 
pour  lui,  auprès  de  saint  Martin.  Cette  lettre 
est  en  prose  ;  mais  la  seconde  au  même  évê- 
que est  en  vers.  Fortunat  y  marque  les  pays 
où  les  apôtres  avaient  annonce  l'i^vangile; 
saint  Pierre  à  Rome,  saint  André  en  Adiaïe, 
saint  Matthieu  en  Ethiopie,  saint  Thomas  en 
Perse,  saint  Barthélemi  dans  les  Indes,  saint 
Paul  en  Illyrie  et  en  Espagne.  Il  suivait  en 
cela  l'opinion  de  plusieurs  anciens.  Il  fait 
honneur  à  saint  Martin  de  Tours  d'avoir  été 
l'apôtre  des  Gaules,  sans  dire  qu'il  en  ait  été 
le  premier.  Fortunat  parle  dans  la  même  let- 
tre du  monastère  de  Poitiers,  et  de  la  règle 
de  saint  Césaire  qui  y  était  établie  ;  il  recom- 
mande à  l'évoque  Martin  Agnès,  qui  en  était 
abbesse,  et  sainte  Radi'gonde,  qui  l'avait 
fondé.  La  troisième  lettre  est  aux  citoyens  de 
Tours,  qu'il  congratule  sur  le  choix  qu'on 
avait  fait  de  saint  Grégoire  pour  leur  évê- 
que; il  le  compare  à  saint  Athanase,  h  saint 
Basile,  et  aux  plus  grands  évè(|ues  des  siè- 
cles précédents.  Il  en  fait  encore  l'éloge  dans 
les  trois  distiques  qui  viennent  ensuite  ;  il  pa- 
raît qu'on  l'avait  prié  de  les  faire  pour  être  ré- 
cités pendant  l'ollice  au  jour  de  la  naissance, 
ou  peut-être  de  l'ordination  de  saint  Grc-gcire. 
La  cinquième  regarde  la  conversion  des  juifs, 
faite  par  le  ministère  d'Avit,  évêque  de  Cler- 
raont  ;  elle  est  suivie  de  l'éloge  de  cet  évè- 

'  Lib.  IV  IliH..  caji.  xxvi. 

'  In  veiterabilihvs  famviis,  operator  opime , 
Cfiiideccl  ul  setnpi.r  laus  tuu,  Christc,  sonet,  liis- 
piruiis  (i)iiiiiuiii,  roluiii  effeclunniue  miimtraus, 
El  shie  qiio  iiullum  prœvatct  ense  bonutn...  I.u- 
mine perspicuo  facuiittanspiclora  radiwi,  Vt  po- 
pulis  geneycnl  visverasoiula  fiileiii.\À\>.\.Epist.j. 


que ,  mais  Fortunat  y  reconnaît  qu'on  ne 
peut  louer  les  ministres  de  Jésus-Christ  dans 
la  conversion  des  peuples,  sans  louer  Jésus- 
Christ  même  qui  inspire  '  la  bonne  volonté, 
qui  donne  le  parfaire,  et  sans  qui  il  ne  se  fait 
rien  de  bien,  puisque  c'est  lui  qui  remplit  de 
ses  lumières  les  prophètes  et  les  prédica- 
teurs, afin  qu'ils  engendrent  la  foi  dans  le 
cœurde  ceux  qui  les  écoulent.  Cette  foi  con- 
siste à  croire  '  qu'il  n'y  a  qu'un  Dieu  en  trois 
personnes,  le  Pèie,  le  Fils  et  le  Saint-Esprit, 
qui  ont  un  même  droit,  une  même  puissance. 
Abiaham,  qui  connaissait  que  ces  trois  per- 
sonnes étaient  égales  en  tout,  et  ne  faisaient 
qu'un  même  Dieu,  lava  les  pieds  à  trois,  et 
n'adora  et  ne  pria  qu'un  seul.  Fortunat  s'é- 
tait proposé  de  composeï-  un  acrostiche  qui 
fût  en  autant  de  lettres  que  Jésus-Christ  a 
passé  d'années  sur  la  terre,  et  de  renfermer 
dans  ce  poème  l'histoire  de  la  création  de 
riiomme,  de  sa  chute  et  de  sa  rédemption; 
cela  ne  lui  fut  point  aisé,  mais  il  en  vint  à 
bout.  Il  l'envoya  à  Syagrius,  évêque  d'Autun, 
à  qui  il  écrivit  une  lettre  en  prose  pour  lui 
leudre  compte  de  son  travail,  et  de  la  ma- 
nière de  lire  cet  acrostiche.  Les  autres  let- 
tres n'ont  rien  d'intéressant  ;  la  plupart  sont 
adressées  à  saint  Grégoire  de  Tours,  pour  le 
remercier  des  présents  qu'il  en  avait  reçus, 
ou  pour  lui  recommander  des  personnes 
qui  allaient  ti  Tours. 

9.  Les  douze  poèmes  du  sizième  livre  sont  un»  ^in 
presque  tous  sur  des  matières  profanes.  Le 
second  est  l'épilhalame  du  roi  Sigebertetde 
Brunehaut.  Fortunat  le  composa  pour  le 
jour  même  de  leurs  noces,  qui  furent  célé- 
lirées  en  5(35;  ainsi  il  était  dès  lors  en  Aus- 
trasie  dans  la  cour  de  ce  piince.  Le  quatrième 
est  remarquable  par  les  louanges  qu'il  y 
donne  au  roi  Charibert,  ou  Caribert;  saint 
Grégoire  de  Tours  n'en  avait  publié  que  les 
vices,  sui'Iout  sou  incontinence,  qui  le  Ut  ex- 
communier par  saint  Germain,  évêque  de 
Paris.  Fortunat  relève  ses  vertus,  le  faisant 
passer  pouiMin  prince  sage,  modéré,  équita- 
ble, zélé  pour  lajiistice  et  l'observation  des 
lois,  libéral,  honnête,  l'oracle  de  son  con- 
seil, amateur  des  lettres,  et  qui  parlait  aussi 
facilement  le  latin  que  le  français.  Le  sixième 

^  Est  Dcus,  alla  fides,  unus  lrinus,ct  triims 
vnits.  l'frsonis  prnpriis  slal  tribus  uiitis  nprr... 
i\((»i  Voter  il  (jenilus  qtiuquf ,  Siinctiis  S]iir\ius 
idcir  ;  Sic  tribus  est  iinuin  jus,  npus,  urdo,  Ihro- 
mis...  fAbrahntiii  Trcs  ivlct  injutilcs,  uttum  vene- 
riitus  adorai,  Inum  tuce  rogat,  1res  quoque  pelv9 
lavai.  Uiid.,  Epist.  5. 


[vi"  sifxi.E.]        CHAPITRE  XLV.  —  SAINT 

("st  1111  t'-ln^o  de  Rprlliocliililo,  de  su  modes- 
lie,  de  sa  prudence,  de  son  amour  pour  les 
pauvres. Le  scpli^me  regarde  le  mariage  de 
Oîilsiiindo  avee  C.liilpc^ric  :  elle  ('l:iil  lilie  d'A- 
thaiiagilile,roi  dcs^'isigotlls  en  Ks[iaL;iie  ;  elle 
quitta,  comme  sa  sœur  Brunchant.riuh'ësie 
arienne  pour  embrasser  la  foi  catholique. 
um  .fp.  10.  Tout  ce  qu'il  y  a  de  plus  intt'ressant 
M>.  dans  le  septième  livre,  composé  de  trrînte-un 

poëmes,  est  le  parallèle,  qu'il  fait  dans  le 
douzième,  des  sages  et  des  savants  du  pa- 
ganisme avec  les  vrais  chrétiens.  Il  n'est 
resté  !\  ceux-là  qu'une  vaine  réputation  ; 
ceux-ci  jouiront  d'une  félicité  éternelle  dans 
le  ciel,  et  seront  même  honorés  sur  la  terre, 
parce  qu'il  '  n'y  a  point  de  salut  à  espérer, 
point  d'honneur  solide  et  permanent,  qu'en 
se  rendant  par  la  vertu  agri'able  à  Dieu, 
qui  est  un  en  trois  personnes.  On  peut  encore 
remarquer  ses  deux  distiques  sur  la  brièveté 
de  la  vie.  Tout  passe  dans  un  momcul,  nous  ^ 
devons  donc  nous  attacher  aux  biens  qui  ne 
périssent  jamais  ;  soyons  (jquitables  envers 
tous,  cultivons  la  paix,  aimons  Jésus-Christ  : 
cherchons  des  délices  dont  nous  puissions 
jouir  éternellement. 
Lure  hui-  11.  Il  fait,  dans  le  premier  poëme  du  hni- 
"I-  '  tième  livre,  le  détail  du  lieu  de  sa  naissance 

et  de  ses  ditt'érentes  demeures ,  jusqu'au 
temps  où  il  s'attacha  au  service  de  sainte  Ra- 
dégonde,  dont  il  décrit  la  vie,  telle  qu'elle  la 
menait  dans  le  monastère  de  Poitiers.  Il  parle, 
dans  le  second,  de  la  peine  qu'il  avait  de 
quitter  cette  sainte  pour  aller  rendre  visite  à 
saint  Germain  de  Paris.  Le  troisième  est  un 
hymne  sur  la  nativité  de  Notre-Seigneur.  Le 
quatrième  et  le  cinquième  sont  ;\  la  louange 
de  Jésus-Christ,  de  sa  sainte'  Mère,  qu'il  ap- 
pelle Mère  de  Dieu,  et  en  l'honneur  de  la 
virginité,  qui  seule  a  été  digne  de  '  mettre 
au  monde  le  Tout-Puissant,  et  qui  est  si  ex- 
cellente en  elle-même,  que  les  expressions  ' 
manquent  pour  en  exprimer  tout  le  mérite. 
Fortunaty  fait  une  description  admirable  de 
l'assemblée  des  saints  dans  le  ciel,  où  il 


FORTUNAT  DE  POITIKRS. 


407 


donne  la  première  place  i\  la  sainte  Vierge, 
puis   aux  patriarches,  aux   prophètes,  aux 
apôtres,  aux  martyrs  et  aux  vierges.  Il  mar- 
que les  •■ndroits  où  il  croyait  qu'(-laienl  morts 
les  apôtres  et  les  cvangi'listes  et  la  plupart  des 
martyrs  les  plus  connus;  saint  Pierre  et  saint 
Paul  à  Rome,  saint  Jean  i\  l'iphèse,  saint  An- 
dr(''  en  Achaïe,  les  deux  saints  Jacqiu^s  dans  la 
Terre-Sainte,  saint  Philippe  à  llii'iaple,  saint 
Thomas  h  Édesse,  saint  Barthélémy  dans  les 
Indes,  saint  Matthieu  àNaddaver,  lieu  à  pré- 
sent inconnu,  saint  Simon  et  saint  Jiide  dans  la 
Perse,  saint  Marc  et  saint  Luc  en  Kgypte,  saint 
Cyprienen  Afrique,  saint  Vincent  en  Espagne, 
saint  Alban  en  Bretagne,  saint  Victor  ;ï  Mar- 
seille, saint  Genès  à  Arles  de  même  que  saint 
Césaire,  saint  Denis  à  Paris  saint  Symphorien 
A  Autun,  etc.  Il  confesse  que  Dieu,  en  se  fai- 
sant homme,  n'a  pas  été  changé  en  la  chair 
dont  il  s'est  revêtu;  mais  qu'il  a  pris  des 
membres  humains  sans  aucun  "  changement 
de  sa  part,  ne  s'étant  incarné  que  pour  être 
vu  comme  homme  parmi  les  hommes.  Jésus- 
Christ  est  un  en  deux  natures, et  vrai  dans  cha- 
cune, c'est-à-dire  vrai  Dieu  et  vrai  homme, 
égal  à  sa  mère  par  son  humanité,  égal  à  son 
père  par  sa  divinité.  Il  n'a  rien  confondu  de 
ce  qui  lui  appartenait,  mais  il  s'est  uni  tout 
ce  que  nous  avions,  excepté  le  péché  ;  c'est 
du  Père  qu'il  lire  sa  divinité,  comme  de  sa 
mère  son  humanité.  Très-haut  par  son  origine 
du  Père,  anéanti  par  celle  qu'il  tire  de  samère, 
il  est  moindre  que  son  Père  par  la  naissance 
qui  le  rend  égal  à  sa  mère.  Fortunat  rapporte 
les  prophéties  et  les  figures  qui  annonçaient 
la  venue  de  Jésus-Christ,  et  montre  qu'elles 
ont  été  accomplies  en  lui.  Il  donne  à  la  sainte 
Vierge   les  plus  magnifiques  titres,  comme 
d'autel  de  Dieu,  d'ornement  du  paradis,  et 
-de  gloire  du  royaume  céleste;  à  quoi  il  ajoute 
qu'elle  sera  bénie  à  jamais,  et  son  nom  tou- 
jours honoré.  Il  dit  dans  le  sixième  poëme, 
que  les  récompenses  promises  aux  vierges 
tiennent  '  le  premier  rang  après  celles  qui 
sont  dues  aux  apôtres,  aux  prophètes  et  aux 


'  Est  tamen  una  sains,  pia,  maxima,  dulcis  et 
ampla  Perpehio  trino  passe placere  Deo.  Lib.  VI, 
Hymn.  12. 

'  Vita  brevis  honiinum,  fugiunt  prœsentia  re- 
rum:  Tu  cote  qutv  potins  non  moritura  manent. 
Erige  justitiam,  cote  pncem,  dilige  Christnm.  Ex- 
pele  dctici<(s.  guas  sine  jine  géras.  \h'ul. ,  Ilymn.  27. 

'  Inde  Dei  genilrix,  pia  Virgo  Maria  coruscat. 
Lib.  VIII,  Hymn.  4. 

*  Virginitas  {dix,  quœ  partuest  digna  Tonan- 
tis.  Ibid. 


"  Virginitas  felix,  nuUis  œqtiandaloquelis.Uiid. 

"  Kon  Deus  in  carnem  est  versus,  Deus  accipit 
artus,Non  se  permutans,  sedsibi  membralevans: 
Cujus  non  poleral  deitas  per  aperta  videri,  Vela- 
nien  sninpsit,  carne  videndus  homo  Unus  in  am- 
babns}iatnris,  rerusinipsis,  /Equalis  matri  hinc 
par  drildlc  l'alri;  No>i  sua  confundens,  silii  nos- 
tra,  sed  omnia  neclens  (Juem  sine  peecntn  gignit 
iilerque  virum...  De  Pâtre sublimis,  de  denitrice 
huinilis.  Lib.  Vlll,  Hymn.  5. 

'  Intir  aposlolicas  actes  sacrosqxie  prophelas 


HISTOIRE  GI^NÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Livre    neo* 
679. 


LlTre  dlxiè- 

ire,  pBg^>  583, 


408 

martvrs.  Les  six  suivants  sont  A  la  louange 
de  sainte  HadëLrondo,  et  les  douze  derniers 
en  l'honneur  de  saint  GrL'goirc  de  Tours.  On 
voit  par  le  neuvième,  que  la  sainte  employait 
les  prémices  des  fleurs  du  printemps  à  en  ' 
orner  les  autels;  par  le  onzième,  qu'elle  s'en- 
fermait pendant  un  mois  chaque  année  avant 
la  fête  de  Pâques,  pour  s'y  préparer.  Parmi 
les  poëmes  adressés  à  saint  Grégoire,  il  y  a 
une  lettre  par  laquelle  Forlunat  lui  recom- 
mande la  cause  d'un  prêtre  qui  avait  besoin 
de  sa  protection. 

12.  L'éloge  qu'il  fait  de  Chilpéric  dans  le 
neuvième  livre  est  si  général,  qu'il  ne  sutlit 
pas  pour.détruire  les  mauvaises  impressions 
que  les  historiens  du  temps  ont  données  de 
ce  prince,  et  il  faut  dire  la  même  chose  de 
celui  qu'il  fait  de  la  reine  Frédégonde,  son 
épouse.  Fortunat  fit  les  épitaphes  des  deux 
tUs  de  Chilpéric,  Dagobert  etClodobert,  dont 
le  premier  expira    auprès  du  tombeau    de 
saint  Médard,  où  on  l'avait  porté  dans  l'es- 
pérance d'obtenir  sa  guérison,  et  fut  enterré 
à  Saint-Denis;    le  secondent  sa  sépulture 
dans  l'église  des  saints  Crépin  et  Crépinien. 
Les  sixième  et  septième  poëmes  sont  une  ré- 
ponse à  la  lettre  que  saint  Grégoire  de  Tours 
lui  avait  écrite  en  vers.  Le  neuvième  est  un 
éloge  de  Sidoine,  évèqiie  de  Mayence.  Dans 
le  seizième,  il  fait  celui  du  général  Clirodin. 
13.  Le  dixième  livre  commence  par  l'ex- 
plication de  l'Oraison  dominicale:  le  style  en 
est  beaucoup  plus  uet,  plus  coulant  et  plus 
naturel  que  celui  des  autres  écrits  de  Fortu- 
nat en  prose,  ce  qui  donne  lieu  de  croire  que 
c'est  un  des  discours  à  son  peuple,  où  il  ne 
cherchait  qu'à  l'instruire.  «  Il  n'appartenait 
qu'au  Fils  de  Dieu  de  nous  apprendre  a  bien 
prier  le  Père,  puisque  *  le  Père  est  tout  en- 
tier dans  le  Fils  par  l'unité  de  substance,  et 
qu'ainsi  le  Fils  connaît  mieux  le  Père,  que 
ne  l'ont  connu  les  patriarches  ni  les  prophè- 
tes. Nous  appelons    Dieu   notre  Père  dans 
celte  prière,  parce  qu'en  renaissant  dans  les 
eaux  sacrées  du  bapléine,  nous  devenons  les 
enfants  de  Dieu,  non  par  natu  re,  comme  l'est  ' 
Notre-Seigneur  Jésus-Christ,  qui  est  né  de  la 
substance  du  Père,  mais  par  adoption  et  par 
grâce.  Nous  ne  disons  point  au  singulier  mon 

Proxima  marlyribus  prœmia  virgo  tenet.  Ibiil., 
llymn.  G. 

'  At  vos  non  vnbii,  sfd  Chrislo  fertis  otloreu, 
lins  qurn/ur  primitias  a'I  pia  templudalis,  Texis- 
lis  rnriix  nllnri'i  frsln  curoiiis.  Ilii.l..  Ilijmi. 
9. 

'  l'ilius  enim,  in  i/uo  Pater  est  lotus  unilnln 


Père,  mais  au  pluriel  noire  Père,  parce  que 
nous  ne  devons  pas  prier  pour  nous  seuls, 
mais  en  général  pour  tous  nos  frères,  dont 
nous  ne  devons  jamais  nous  séparer,  étant 
tous  les  membres  d'un  même  corps,  qui  est 
l'Eglise  de  Jésus-Christ.  Mais  pour  avoir  droit 
d'appeler  Dieu  notre  Père,  il  est   nécessaire 
r]ue  nous  croyions  en  Jésus-Christ,  et  que 
nous  le  reconnaissions  pinir  ce  qu'il  est,c'est- 
.Vdire  vrai  Dieu  et  vrai  homme  ;  Dieu  n'est 
donc  point  le  père  des  ariens,  des  juifs,  des 
pliotiniens,  des  manichéens,  des  saljelliens, 
ni  des  autres  hérétiijues,  qui  n'ont  pas  une 
foi  pure  en  Jésus-Christ.  Pour  nous  qui  con- 
fessons sur  ta  terre  que  Jésus-Christ  est  fils 
de  Dieu,  nous  avons  un  Père  dans  le  ciel.  En 
disant  (jue   votre  nom  soit  sanctifié,  nous  ne 
prétendons  point  que  l'on  puisse  ajouter  à  la 
sainteté  de  Dieu;  nous  demandons  seulement 
que  son  nom  soit  béuiet  loué  continuellement 
partout  en  toutes  sortes  de  langues,  et  que 
ceux-là  même  qui  sont  encore  dans  l'infidé- 
lité, le  connaissent,  pour  louer  et  bénir  son 
saint  nom.  Lorsque  nous  prononçons  ces  pa- 
roles :  Que  votre  règne  arrive,  elles  ne  doi- 
vent pas  nous  induire  à  douter  que  Dieu  ait 
toujours    régné  partout,  et  que  son  règne 
soit  éternel,  mais  nous  faire  souhaiter  que 
le  royaume  qu'il   nous  a  promis   nous  soit 
accordé  par  Jésus-Christ  notre  médiateur; 
en  sorte  que  nous  ne  mettions  notre  espé- 
rance ni  dans  les  richesses,  ni  dans  aucune 
chose  créée.  De  même,  quand  nous  deman- 
dons que  sa  volonté  soil  faite,  ce  n'est  pas  que 
quelqu'un  puisse  résister  à  sa  volonté,  ou 
empêcher  que  le  Tout-Puissant  ne  fasse  tout 
ce  qu'il  veut  ;  la  fin  de  cette  prière  est  que  la 
volonté  de  Dieu  soit  accomplie  en  nous,  et 
qu'il  en   procure  lui-même  l'accomplisse- 
ment, parce  que  notre  adversaire  s'opposant  à 
nos  bons  désii-s,  nous  ne  pouvons  les  accom- 
plir en  faisant  la  volonté  de  Dieu,  s'il  ne  nous 
aide  de  son  secours.  Mais  quelle  est  la  vo- 
lonté de  Dieu?  Elle  nous  est  marquée  dans 
le  Déralogue  ;  Jésus-Christ  nous  l'a  enseignée 
dans  son  Évangile.  Cette  volonté  pous  étant 
connue,  nous  n'avons  plus   d'excuse   pour 
nous  dispenser  de  la  faire.  Jésus-Christ  disait 
;\son  Pèie  :  «  Que  votre  volonté  se  fasse,  et 

suhsInnliiT,  non  confuMone  personœ,  suhjectum 
liabehal  hoc  nosse.  Lili.  I,  nuiii.  I. 

'  Sed  licet  non  simus  de  eo  Pntre.sic  Filii.quo- 
wniln  persona  Dntuini  nnstri  Jrsii  Chrisli,  quia 
illr  de  ipsius  suhslaiilin  nains  est.  nos  aulem  rfi- 
giiiilus  est  creure  de  terra:  allamen,pcr  gratiam 
Vnigenili,  nos  effici  meruimus  adoplivi.  Ibiil. 


[vi-  SIÈCLE.]        CHAPITRE  XLV.  —  SAINT  1> 

11(111  la  mienne.  »  Comment'  donc  l'homme 
pousset-il  son  orj;ueil  jusqu';'!  dircque  lu  vo- 
loulo  qu'il  a  du  bien  lui  vient  de  lui-mûme,  et 
non  pas  lie  Dieu?  Si  la  bonne  volonté  est  de 
riioiuuie.sans  qucDieulalni  ait  inspiiiM!,  (lue 
le  chrétien  dise  donc  dans  l'oraison  domini- 
cale :  Que  ma  volonté  se  fasse,  puisqu'elle  est 
bonne.  Mais  à  Dieu  ne  plaise  que  qucitiu'un 
le  présume  ainsi;  qu'il  prie  au  contraire  ((ue 
la  volonté  de  Dieu  se  fasse  dans  l'homme,  et 
non  la  volonté  de  l'homme,  qui  n'a  pas  le 
bon  vouloir  si  Dieu  ne  le  lui  inspiie,  selon 
t'Mimi  qu'il  est  écrit  :  Mon  Dieu,  votre  misévicurde 
me  préviendra.  Ce  n'est  donc  pas  la  volonté 
ile^l'homme  qui  prévient  Dieu;  c'est  Dieu  qui 
prévient  l'iiomme,  lors  même  qu'il  ne  veut 
pas.  Fortunat  prouve  celte  vérité  par  divers 
passages  des  épiiresde  saint  Paul.  Il  est  ad- 
mirable que  Dieu,  après  nous  avoir  ensei- 
gné dans  les  trois  demandes  précédentes  à 
ne  soubaiter  que  des  biens  spirituels,  nous 
apprenne  dans  la  quatrième  à.  en  demander 
de  temporels,  en  disant  :  Donnez-nous  notre 
pain  quotidien  ;mais  c'est  que  ce  pain  quoti- 
dien nous  est  nécessaire  en  cette  vie  pour 
en  acquérir  une  éternelle.  Ce  pain  n'est  pas 
seulement  celui  qui  est  destiné  à  la  nourri- 
ture de  notre  corps;  c'est  encore  celui  qui 
nourrit  notre  âme,  c'est-à-dire  Jésus-Christ 
même.  La  demande  suivante  -.Remettez-nous 
nos  dettes,  est  non-seulement  pour  en  obtenir 
la  rémission,  mais  aussi  pour  nous  entrete- 
tenir  dans  des  sentiments  d'humilité  ;  ce- 
lui-là n'ayant  pas  sujet  de  s'élever,  qui  prie 
pour  le  pardon  de  ses  péchés.  Nous  ne  pou- 
vons l'obtenir  qu'en  pardonnant  aux  autres; 
c'est  une  loi  que  nous  nous  imposons  nous- 
mêmes,  eu  disant  :  Comme  nous  les  i^emet tons 
à  nos  débiteurs.  Mais  pourquoi  au  sortir  du 
baptême  et  de  la  communion  du  corps  de  Jé- 
sus-Christ, demandons-nous  que  nos  péchés 
nous  soient  remis,  si  ce  n'est  parce  qu'à  rai- 
son de  notre  faiblesse  nous  ne  pouvons  con- 
server notre  innocence,  si  Dieu  ne  daigne 
nous  garder  par  sa  grâce?»  L'explication 
de  la  dernière  demande  est  restée  ina- 
chevée. Suivent  trois  lettres  en  prose  à  un 

•  Et  homo  quare  tam  superbusest,  ut  volunta- 
tem  siH  ex  se  esse  dicat  ad  boyium,  et  non  potius 
Dei  esse  imcnus  lestelur  ?  Quod  si  bona  voluntas 
ex  homine  eut  sine  Dei  inspiralione,  dicat  ergo 
Christianus  in  oralione,  Fiat  voluntas  men,  quo- 
niam  hona  est.  Sed  absit  ut  hoc  aliquis  confileri 
piasumal;  immo  magis  deprecelur  ut  fiât  volun- 
tas Dei  in  homine,  non  voluntas  liominis,  quœ 
bonum  velie  non  habel,  nisi  Dominus  inspirel, 


UllNUNAT  DE  POITIEHS,  ETC.  409 

seigneur  de  lu  cour,  nommé  Numulènc. 
dont  deux  sont  pour  le  consoler  de  lu  mort 
de  sa  tille;  puis  une  autre  à  l'église  de  Tours, 
que  saint  Cirégoire  venait  de  rétablir;  ensuite 
le  récit  de  plusieurs  miracles  ()])i;rés  par 
saint  Martin  ;  deux  poèmes  à  la  louange  du 
roi  Childebert  et  de  la  reine  Brunehaut  ;  la 
description  d'un  voyage  que  Fortunat  avait 
l'ait  sur  la  Moselle  depuis  Metzjusiju'à  An- 
deruach  dans  l'évêché  de  Cologne  ;  un  poème 
en  l'honneur  d'une  église  où  l'on  révérait 
particulièrement  l'archange  saint  Gabriel , 
et  où  il  y  avait  des  reliques  de  saint  Georges, 
de  saint  Cosme  et  de  saint  Damien  ,  et  d<! 
quelques  autres  martyrs;  un  à  la  louange 
d'Armentarie,  mère  de  saint  Grégoire,  qu'il 
compare  à  la  mère  des  Machabées ,  soit 
pour  sa  vertu  ,  soit  pour  le  nombre  de  ses 
enfants  ;  un  au  comte  Sigoald,  où  il  fait  l'é- 
loge de  l'aumône  ,  parce  que  ce  seigneur 
était  chargé  d'en  distribuer  de  la  part  du 
roi  Childebert.  On  y  voit  aussi  que  Sigoald 
avait  fait  un  pèlerinage  au  tombeau  de  saint 
Martin  pour  la  santé  de  ce  prince.  Les  au- 
tres poèmes  sont  sur  diverses  matières. 

iA.  Le  onzième  livre  contient  vingt-cinq  ,„J;''"s.°"'* 
petits  poèmes,  qui  sont  ou  des  remercîments 
à  sainte  Radégonde  ou  à  l'abbesse  de  son 
mouastère ,  pour  des  présents  que  Fortunat 
en  avait  reçus  ,  ou  des  compliments  sur  le 
jour  de  leur  naissance.  11  marque  dans  le 
quatrième,  qu'd  s'était  joint  à  Agnès  pour 
engager  la  sainte  à  boire  un  peu  de  vin  dans 
ses  intiimités ,  et  qu'il  l'avait  pressée  sur  ce 
sujet,  par  la  considération  de  l'avis  que  saint 
Paul  avait  donné  h  Timothée  dans  un  cas 
semblable.  Il  leur  adressa  deux  autres  poè- 
mes, où  il  fait  la  description  de  deux  de  ses 
voyages.  Tous  ces  poèmes  sout  précédés  de 
l'explication  du  Symbole  ,  qui  est  dans  le 
même  goût  que  celle  de  l'oraison  domini- 
cale. Il  enseigne  '  avec  les  anciens  Pères  , 
que  les  apôtres  composèrent  ensemble  ce 
symbole  avant  de  se  séparer,  afin  que  la 
règle  de  la  foi  qu'ils  prêcheraient  en  diffé- 
reuls  pays  se  trouvât  la  même  partout. 
»  Elle  est  appelée  Symbole ,  dit  Fortunat , 

juxta  illud:  Deu3  meus,  misericordia  ejus  praeve- 
niet  me.  Ergo  non  voluntas  hominis  prœvenit 
Denm,  sed  Dei  vnsericordia  prwvenit  hominem 
non  volenlem.  Lib.  X,  nuiu.  1. 

>  Adhuc  in  unoposili  apostoli  hoc  inlerseSym- 
bolum,  unusijuisque  quod  se)isit  dicendo,  condi- 
dcrunt.  ut  discedentes  ab  invicem  hanc,  regulam 
per  onines  génies  œqualiler  prœdicarent.  Lib.  XI, 
uuiu.  1. 


410 


HISTOIIIE  G!':N1-:IIALE  des  auteurs  ECCLESIASTIQUES. 


parce  qu'ils  conférèrent  ensemble  sur  la  ma- 
nière de  la  rédifrer  ;  et  Jugement,  parce  que 
par  elle  on  juge  de  la  droiture  de  la  foi.  Nous 
y  faisons  d'abord  profession  de  croire  en 
Dieu,  terme  qui  signifie  une  substance  éter- 
nelle :  car  Dieu  est  sans  commencement , 
sans  fin  ,  simple ,  incorporel ,  incouapiéhen- 
sible.  Nous  l'appelons  Père,  parce  qu'il  a 
véritablement  un  Fils  qui  est  de  même  na- 
ture que  lui,  et  qui  lui  est  égal  en  tout.  En 
vain  chercberail-on  comment  s'est  faite  cette 
génération  :  elle  est  inconnue  aux  anges  , 
comme  elle  la  été  aux  prophètes;  le  Père 
seul  en  connaît  la  manière,  avec  le  Fils  qu'il 
a  engendré  :  nous  devons  la  croire  ,  et  non 
pas  l'approfondir.  Le  nom  de  Jésus  signifie 
sauveur  en  hébreu  ;  celui  de  Christ ,  oint  ; 
l'un  et  l'autre  se  disent  de  Jésus-Christ,  parce 
qu'il  est  notre  Sauveur,  et  qu'il  a  été  oint 
Pontife  éternel.  Nous  disons  qu'il  est  Fils 
unique,  à  cause  qu'il  l'est  en  efi'el,  et  qu'il 
n'a  rien  qui  le  puisse  faire  comparer  avec 
les  créatures,  qui  ne  sont  que  parce  qu'il  les 
a  tirées  du  néant.  Les  hommes  sont  appelés 
fils  de  Dieu  par  grûce  et  par  adoption ,  Jé- 
sus-Christ est  Fils  de  Dieu  par  nature;  né 
du  Père  avant  tous  les  siècles,  il  est  né  de 
Marie  dans  les  derniers  temps,  sans  avoir 
contracté  aucune  tache  de  péché,  ayant  été 
conçu  dans  le  sein  de  sa  mère  par  l'opération 
du  Saint-Esprit,  qui  a  été  le  créateur  de  sa 
chair  :  ce  qui  prouve  la  divinité  du  Saint- 
Esprit.  Il  a  soutfert  sous  Ponce-Pilate  ,  dans 
toutes  les  circonstances  que  les  prophètes 
avaient  marquées  longtemps  auparavant.  Sa 
mort  a  été  notre  salut ,  sa  croix  la  marque 
de  son  triomphe.  Il  a  choisi  ce  genre  '  de 
suppHce ,  pour  nous  délivrer  du  péché  ori- 
ginel, qui  était  la  source  de  tous  nos  maux. 
C'est  avec  raison  que  les  apôtres  ont  mis 
qu'il  était  mort  sous  Ponce-Pilate,  afin  que 
le  temps  de  sa  passion  fût  certain  et  incon- 
testable. Sa  descente  aux  enfers  n'emporte 
aucune  ignominie  ;  y  en  a-t-il  pour  un  prince 
qui  entre  dans  les  prisons  ,  non  pour  y  res- 
ter, mais  pOur  en  faire  sortir  ceux  qui  y  sont 
détenus?  Jonas,  renfermé  trois  jours  dans  le 
ventre  de  la  baleine ,  figurait  le  temps  que 
Jésus-Christ  devait  demeurer  dans  le  tom- 
beau. Il  en  est  sorti  le  troisième  jour,  suivant 


les  oracles  des  prophètes,  qui  ont  aussi  pré- 
dit son  ascension  et  sa  gloire  dans  le  ciel. 
En  disant  que  nous  croyons  au  Saint-Esprit, 
nous  achevons  la  confession  de  la  foi  en  la 
sainte  Trinité  ,  reconnaissant  qu'il  y  a  un 
Père,  un  Fils,  et  un  Saint-Fsprit ,  que  nous 
exprimons  en  termes  dilforents  ',  pour  mar- 
quer la  distinction  des  personnes.  Nous  fai- 
sons aussi  profession  de  croire  qu'il  n'y  a 
qu'une  seule  Église,  comme  il  n'y  a  qu'une 
foi,  qu'un  baptême  ;  la  rémission  des  péchés, 
ne  doutant  point  que  Dieu,  qui  a  pu  former 
l'homme  d'une  masse  de  boue,  ne  puisse 
le  purifier  de  ses  péchés  ;  et  la  résurrection 
de  la  chair,  prédite  par  les  prophètes,  n 

Quehiues-uns  croyaient  que,  parles  vi- 
vants qui  seront  jugés  au  dernier  jour,  il 
faUait  entendre  les  justes  ,  et  par  les  morts 
les  pécheurs;  d'autres,  ceux-là  qui  seront 
encore  en  vie  lors  du  second  avènement  du 
Sauveur,  et  ceux  qui  auront  déjà  subi  la 
mort  et  seront  ensevelis.  Fortunat  croit  que, 
par  les  vivants  et  les  morts,  il  faut  entendre 
les  âmes  et  les  corps,  parce  qu'ils  seront 
également  jugés. 

15.  Saint  Germain  '  gouvernait  encore  u.  <ii..ir. 
l'église  de  Paris,  lorsque  Fortunat  composa  v.f  j,  ^n 
ses  quatre  livres  de  la  Vie  de  saint  Martin  ;  s»'- 
c'était  donc  avant  le  vingt-huitième  de  mai 
de  l'an  57G,  auquel  saint  Germain  mourut. 
Ils  sont  écrits  en  vers,  à  la  réserve  de  l'épllre 
dédicatoire,  qui  est  en  prose;  elle  est  adres- 
sée à  saint  Grégoire  de  Tours  ,  à  qui  il  rend 
compte  de  son  travail.  Ce  saint  l'avait  prié 
de  mettre  en  vers  la  vie  qu'il  faisait  de  saint 
Martin  ;  mais  il  s'y  prit  trop  tard.  Fortimat, 
sans  attendre  l'ouvrage  de  saint  Giégoirc, 
eut  recours  à  celui  de  Sévère-Sulpice,  à  ses 
Dialogues  et  au  livre  de  la  Vie  de  saint  Martin, 
qui  sont  tous  en  prose  :  Fortunat  en  fit  (jua- 
tre  livres  en  vers.  Paulin  de  Périguoux  avait 
fait  la  même  chose  avant  lui  ;  mais  Fortunat  ', 
qui  ne  l'ignorait  pas,  quoiqu'il  semble  le 
confondre  avec  saint  Paulin  de  Noie,  voulut 
apparemment  satisfaire  sa  dévotion,  en  tra- 
vaillant sur  la  même  matière.  Il  donne  de 
suite  toutes  les  circonstances  marquantes  de 
la  vie  de  saint  Martin  ,  ses  combats  avec  les 
hérétiques,  ses  voyages  pour  le  bien  de  l'E- 
glise ,  ses  miracles ,  son  respect  pour  les 


'  Ergo  ail  hoc  elegil  Chrisluf  principale  suppli- 
cium  ,  lit  hominein  absolveret  originnli  pecctilo, 
qund  eral  principale  tormcntum.  Ibiii. 

'  Ul  fiai  distinctio  personanim,  vocabnla  sc- 
cernunlur.  Ibid, 


^  Inile  Piirisiiicam  placiilc  prripcrntiis  ad  arcem, 
(Jtiam  modo  Gennanus  régit.  Lib.  IV,  pa).'.  G12. 

'  Intercède,  precar,  retiiam.  rir  adepte  eoro- 
niim...  Inter  et  ipse  Deum  alque  reum  medialor 
adesto.  Ibid. 


CHAPITRE  XI.V.  —  SAINT  FOUTUNAT  DE  PolTIKllS,  ETC. 


[Vl*  SIÈCLE.] 

prôtros  qui  les  lui  faisait  piéfcivu-  aux  mis  , 
ses  prëdiclions,  les  atlaqu(!s  (ju'il  eut  à  souf- 
frir de  la  part  des  démons  dont  il  fut  tou- 
jdurs  victorieux,  sa  charité  envers  les  pau- 
vres et  les  captifs,  ses  discours  de  piété  ,  les 
visions  dont  Dieu  le  favorisa,  son  pouvoir 
sur  les  éléments  et  sur  lui-même.  11  finit  sa 
Vie  en  le  suppliant  d'être  sou  intercesseur 
aupri'^s  de  Dieu,  et  de  lui  servir  même  de 
médiateur,  pour  en  obtenir  le  pardon  de  ses 
péchés  ;  puis,  s'adressanl  à  son  propre  ou- 
vraf^e,  il  lui  ordonne  d'aller  d'abord  A  Tours, 
où  reposaient  les  reliques  de  saint  Martin  ; 
de  passer  de  là  ;\  Paris,  dont  l'évcque  était 
saint  Germain;  puis  à  Reims,  où  était  le 
tombeau  de  saint  Rémi  ;  ensuite  à  Noyon  , 
lieu  de  la  sépulture  de  saint  Médard  ,  et  de 
continuer  son  chemin  par  l'Austrasie ,  la 
Souabe,  le  Tyrol,  l'État  de  Venise,  et  par  di- 
verses villes  d'Italie  jusqu';")  Ravenne.  Sans 
doute  que  Fortunat  avait  dans  tous  ces  en- 
droits des  personnes  avec  qui  il  était  lié  d'a- 
mitié, et  à  qui  il  était  bien  aise  de  commu- 
niquer ce  (|u'il  avait  écrit  en  l'honneur  de 
saint  Martin.  Ces  quatre  livres  ne  lui  coû- 
tèrent que  deux  mois  de  travail;  aussi  con- 
vient-il qu'ils  n'ont  pas  toute  l'exactitude 
qu'il  aurait  pu  leur  donner,  en  mettant  plus 
de  temps  à  polir  ses  vers. 
Po«ni8  sur  16.  Dès  l'an  531,  Thierry,  roi  d'Austrasie, 
i'e  Ir'Tbarin-  après  avoir  vaincu  Hermaufroy,  roi  de  Thu- 
ringe,  s'était  rendu  maître  de  tout  le  pays  ; 
la  ville  de  Thuringe  qui  en  était  la  capitale  et 
donnait  le  nom  au  royaume,  avait  été  prise, 
mise  au  pillage  et  réduite  en  cendres,  et  les 
habitants  avaient  été  emmenés  en  esclavage. 
En  553,  Clotairo  se  soumit  les  Saxons  et  les 
Tliuringiens,  et  en  se  les  soumettant  il  mit 
tout  à  feu  et  à  sang  dans  la  Thuringe.  La  des- 
truction de  ce  royaume  fait  le  sujet  du  poëme 
de  Fçrtunat  ;  il  y  fait  parler  sainte  Radégonde, 
nièce  d'Hermanfroy ,  et  la  représente  pleurant 
la  perte  d'un  État  qui  lui  avait  donné  nais- 
sance ,  et  celle  de  tous  ses  plus  proches  pa- 
rents enveloppés  dans  la  ruine  de  leur  pays. 
17.  Le  poëme  suivant  est  à  la  louange  de 
l'empereur  Justin  le  Jeune  et  de  son  épouse 


ill 


ge,  jag.  613. 


Ju?lin  le  Jeu. 
no,  cl  à  Ana- 


l'inipiM-atricc  Sophie.  Fortunat  loue  ce  prince 
sur  la  pureté  de  sa  foi,  sur  son  attachement 
aux  décrets  du^concile  de  Ghalcédoinc,  et  sur 
le  rappel  des  évoques  exih's  pour  avoir  pris 
la  dcU'cnse  de  la  vérité.  Il  semble  faiie'  hon- 
neur particulièrement  ;\  l'impératrice  Sophie 
du  présent  envoyé  à  sainte  Rad('!gonde;  c'é- 
tait un  morceau  considérable  d(!  la  vraie 
croix,  et  il  n'oublie  pas  de  nianiuer  combien 
grande  était  la  vénération  de  cette  sainte 
pour  ce  bois  précieux,  qu'elle  adorait  en  fai- 
sant des  vo'ux  à  Dieu  pour  la  prospérité  de 
ceux  qui  le  lui  avaient  envoyé.  Suit  un 
poëme  à  Artachis,  cousin  germain  de  sainte 
Radégonde,  sur  la  mort  d'Hermanfroy,  son 
oncle  et  père  d'Artachis  :  Thierry,  roi  d'Aus- 
trasie, l'avait  fait  jeter  du  haut  d'une  muraille 
dans  un  fossé,  où  il  avait  expiré  sur-le-champ. 

18.  Ce  sont  là  tous  les  écrits  de  Fortunat 
recueillis  par  Rrowère,  et  imprimés  dans  le 
dixième  tome  de  la  Bibliothèque  des  anciens 
Pères. ie  ne  sais  pourquoi  l'on  n'y  a  pas  inséré 
une  épigramme  à  la  louange  du  roi  Childebert 
n,  donnée  en  1673  par  dom  Mabillon  sur  un 
manuscrit  de  l'abbaye  de  Saint- Vannes  de 
Verdun,  deux  ans  avant  la  un  de  l'impres- 
sion de  cette  Bibliothèque;  elle  est  en  qua- 
torze vers  élégiaques,  qui  ne  sont  que  des 
jeux  de  mots.  Fortunat  s'y  nomme,  et  recom- 
mande à  ce  prince  un  nommé  Audulphe. 
[Un  trouve  cette  épigramme  dans  le  tome 
LXXXVllI  de  la  Patrologie  latine,  col.  334  et 
suiv.] 

19.  Entre  les  Vies  des  saints  ^  qu'il  com- 
posa, nous  connaissons  celle  de  saint  Ger- 
main '  évéque  de  Paris,  imprimée  dans  ' 
Surius,  dans  Bollandus  et  dans  le  premier 
tome  des  Actes  de  l'ordre  de  saint  Benoît, 
traduite  en  français  par  Jean  Jallery,  curé 
de  Villeueuve-Saint-Georges  au  diocèse  de 
Paris,  et  mise  sous  presse  en  cette  ville  en 
1623  ;  celle  de  saint  Aubin  évêque  d'An- 
gers ',  qui  se  trouve  encore  dans  Surius  ^, 
dans  Bollandus  et  dans  le  premier  tome  des 
Actes  de  l'ordre  de  saint  Benoît;  celle  de 
saint  Paterne,  évéque  d'Avranches,  qu'il  l'é- 
crivit à  la  prière  de  Marcien,  abbé  d'Ansion, 


rliU.  roc,  Til  ; 

cl  on. 


Ej  Igrammo 
&  la  Toiiaago 
de   CbJlOobert 

n. 

V^lilloa-, 
Ar.iVct,,  (l 'P. 
3«7,  edil. 
1723.  et  lom, 
1,  Aoalect,, 
1  Qg,  366, 


Vies  des 
S.iim-  compo- 
sées prr  For- 

tJD-t, 


>  Regina  posceiHe  sibi  Radegttnde  Toringa,  Prœ- 
iuilnptalœ  muiiera  sacra  crucis..  glorin  suinma 
tibi,rerumsalor  alque  redemptnr,  quod  tenct  au- 
gustnin  celsa  Snpliia  gradiim...  Per  te  crux  Do- 
minitotum  sibi  vindical  orhein.  .  Hune  piostrata 
loco  supplex  Radegundis  adorât,  El  restro  impe- 
rio  tempora  longa  rogat...  A'ec  inbis  pereat  quod 
Radeguvdis  amat...  Assiduo  cantu  quœ  pulvere 


fusa  precatur,  Temporibus  largis  ut  tibi  constet 
apex.  Pag.  614. 

'  Les  Vies  des  saints  écrites  par  Fortunat  se 
trouvent  au  tome  FjXXXVIII  Je  la  Patrol»gie  la- 
tine, toi.  437  et  suiv,— 3Greg.  Turon,,  lili.  V,  Hist., 
cap.  vni, —  *  Surius  et  Bolland,,  ad  rfiem  28  maii. 

s  Greg.,  Turou.  De  Gloria  Conf.,  cap,  xcvi, 

6  Ad  diein  1  martii. 


412 


HISTOIRE  Gi:Xi:ttALE  DES 


aujourd'hui  Suinl-Jouin  en  Poitou  :  nous  l'a- 
vons à  Ja  lin  du  second  loine  des  Actes  de 
doniMabillon,  et  au  16  avril  des  Bollandistes. 
Surius  n'eu  a  donné  qu'un  abrégé  qu'on 
croit  avoir  été  fait  pour  servir  de  leçons  dans 
l'office  du  saint.  La  vie  de  sainte  lladéj^onde 
est  divisée  en  deux  livres  dans  le  premier 
tome  des  Actes  bénédictins  :  le  premier  est 
de  Forlunat,  plus  au  fait  que  personne  des 
actions  de  cette  sainte;  le  second  de  Baudo- 
nivie,  relif^ieuse  du  monastère  de  Poitiers, 
qui  crut  devoir  rendre  publiques  plusieuj-s 
circonstances  que  Forlunat  avait  omises.  Le 
Père  Labbe  a  fait  imprimer,  dans  le  second 
tome  '  de  £a  Bibliothèque  des  Manuscrits,  une 
vie  de  saint  Arnaud,  évêque  de  Rliodez.  Su- 
rius en  avait  déjà  donné  une  partie  au 
quatrième  jour  de  novembre,  sous  le  nom 
de  Forlunat  :  elle  est  assez  de  son  style  ; 
mais  on  ne  peut  la  lui  attribuer  qu'en  sup- 
posant que  Fortunat  avait  passé  par  lUiodcz 
dans  le  cours  de  ses  voyages,  puisque  l'au- 
teur de  cette  rie  '  dit  avoir  été  témoin,  avec 
toute  la  ville,  d'un  miracle  fait  au  tombeau 
du  saint.  On  donne  encore  à  Forlunat  un 
abrégé  delà  vie  de  saint  Rémi,  qu'on  lit  dans 
Surius  au  1'^'  octobre,  et  la  Vie  de  saint  Mé- 
dard,  évéque  de  Noyou;  nous  l'avons  dans 
dans  le  tome  VIII  du  Spiciléije  de  dom  d'A- 
chéry,  et  dans  les  bollandistes  au  8  juin  :  elle 
fut  écrite  sous  le  règne  '  de  ïhéodebert,  pe- 
tit-fils de  Sigebert.  Un  auteur  du  \V  siècle  ' 
attribue  à  Fortuuat  la  Vie  de  saint  Gildard, 
et  de  saint  Médard  son  frère.  Elle  a  été  in- 
connue aux  écrivains  des  siècles  précédents  ; 
mais  après  le  témoignage  de  saint  '  Grégoire 
de  Tours,  nous  ne  pouvons  douter  que  Fortu- 
nat u'ait  travailli^à  une  Vie  de  saint  Sévcriu, 
quoiqu'elle  ne  soit  pas  venue  jusqu'à  nous.  La 
Vie  de  saint  Maurille,  évéque  d'Angers,  n'est 
pas  de  Fortunat,  comme  l'a  cru  Tritlième, 
trompé  par  une  lettre  faussement  attribuée 
à  saint  Grégoire  de  Tours,  où  il  est  dit  que 
Fortunat  avait,  à  sa  prière,  retouché  les  Vies 
de  saint  Aubin  et  de  s;iint  Maurille;  uiais 
de"  Rainon,  évêque  d'Angers  dans  les  tum- 

«  Pag.  474.  —  «  Ibid.  pag.  480.  —  '  Tum.  VIII 
Spicil.,  pag.  H96.  —  '  MaUil.,  AnaUcla,  fol.,  pag. 
222.  —  "  fireg.   l)e  Gloria  Conf.,  cnp.  ilv. 

*  Tillftinoiil,  llisl.  eccles.,  louie  X,  pag.  784. 

'  Ces  Actes  se  trouvent  au  tome  L.\XXVIII  de  la 
Palrologic  laitue,  col.  a75  et  suiv.,  avec  une  ai)- 
précialioii  île  iloiu  Lucbi,  ijiii  esi  assez  d'avis  de 
le»  attribuer  i  Kortiiual,  à  cause  <lu  style,  à  cause 
delà  li.iisou  de  l'auteur  avec  saint  llcriuaiu  de  l'a- 
ris,  el  du  ijuu  applii;atiou  couliuuuUe   &  composer 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

mencemenls  du  x'  siècle.  On  n'a  rien  de  bien 
assuré  sur  l'auteur  de  la  Vie  de  saint  Marcel 
évéque  de  Paris;  les  uns  l'atlribuent  à  For- 
tunat de  Poitiers,  d'autres  à  un  évéque  Ou 
même  nom,  dont  le  siège  épiscopal  n'est  pas 
connu.  Saint  Grégoire  de  Tours,  parlant  du 
cette  Vie,  la  cite  saus  dire  de  qui  elle  était, 
ce  (ju'il  ne  fait  pas  quand  il  cite  quelque  ou- 
vrage de  Fortunat;  elle  est  d'ailleurs  d'un 
style  plus  simple  et  plus  naturel  que  n'est 
celui  de  Fortunat  de  Poitiers.  Cette  ditl'é- 
rence  de  style  qui  se  remarque  dans  l'an- 
cienne Vie  de  saint  llilaire,  évêque  de  la 
mémo  ville,  fait  qu'on  en  attribue  le  premier 
livre  à  Fortunat,  que  nous  venons  de  dire 
être  l'auteur  de  la  Vie  de  saint  Marcel,  et  le 
second  a  Fortunat  de  Poitiers,  qui  l'aura  fait 
comme  en  supplément  â  ce  qui  mancjuait 
dans  le  premier  livre  :  ils  portent  l'un  et 
l'autre  le  nom  de  Forlunat.  A  l'égard  des 
Actes  de  saint  Denis,  évé(jue  de  Paris,  dont 
M.  Bosquet  fait  auleui-  Forlunat  de  Poitiers, 
ils  paraissent  écrits  sm-  la  lin  du  vu'  siècle 
ou  au  commencement  du  suivant  ;  on  en 
juge  ainsi  parleur-  conformité  avec  la  Vie  de 
saint  Gaudence,  évêque  de  Novare,  écrite 
sous  le  règne  de  Pépin-lc-Bref,  qui  com- 
mença en  752  '.  On  ne  voit  pas  sur  quel 
fondement  ou  a  donné  à  Forlunat  "la  Vie  de 
saint  Lubin,  évêque  de  Cliarlres  :  elle  n'est 
point  de  son  style  ;  c'est  vraisemblablement 
l'ouvrage  de  quelque  clerc  de  celle  église 
qui,  pour  contribuer  au  culte  déjà  établi,,'au- 
ra  écrit  sa  vie  et  ses  miracles,  afin  qu'on  put 
eu  faire  le  récit  au  jour  de  sa  fête.  Cette  Vie 
se  trouve  dans  le  premier  tome  defe  Actes  de 
l'ordre  de  saint  Benoît,  dans  le  second  de  la 
Bibliothèque  du  Père  Labbe,  en  partie  dans  le 
recueil  deM.Duchène,toute  entière  dans  les 
Bollandistes  au  1-4  mars  [dans  le  t.  LXXXVUI 
de  lu  l'atruluijie  latine,  col.  ooO  et  sui^.] 

'■20.  (^utre  la  Vie  de  saint  Sévcriu,  dont 
saint  "  Grégoire  de  Tours  fait  honneur  à 
Forlunal,  nous  avons  perdu  les  hymnes  qu'il 
avait  compusécs  pour  toutes  les  fêles  de  l'au- 
uée.  Paid  Diacre  '  el  Sigebert  '"  en  font  mon- 
des Vies  de  saints.  [L'éditeur.)  —  «  Greg.  Turou., 
De  (ihrin  Conf.,  cap.  xlv. 

*  J-'ortunatus  Marliiii  riUim  quatuor  libris  he- 
roico  vcrsu  intexuil,  el  mulla  alia,  maxiniei/ue 
ftijmnos  singularum  fesliKilulum,  et  prcrcipuc  ad 
an.icos  versiculos,  nuUi  poetiiruw  secundus,suuvi 
el  diserlo  Kcrmone  coiitposmt.  l'aulus  Uiacoiiue, 
Jlist.  ioiigohnrd.,  Iib.  Il,  iiuni.  2:J. 

'"  Scriiisil  metrice  hymnos  singularum  festivi- 
lalum.  Sigeb.,  De  Virù  illusl.,  cap.  iv. 


CHAPITRE  XÎ.V.  —  SAINT  FORTl^NAT  DE  POITIERS,  ETC. 


[VI*  SlfecLE-l 

lion,  ot,  par  la  nianii-rc  dont  ils  en  pailonl, 
on  voit  que  CCS  liynincs  liaient  on  f^rand 
nombre;  Tritlième  '  en  comptait  jiisrju';\ 
soixante-tlix-sepl.  Il  s'en  trouve  parmi  ses 
poi'mes,  entre  aulies  poui'  les  fêtes  de  Noël, 
(le  Pâqnes,  de  la  Sainte-Croix  ;  mais  elles  pa- 
raissent étrangt'res  an  recueil  dont  parle  Paul 
Diacre,  et  semblent  faire  partie  de  ses  livres.  Il 
parait  aussi  que  l'on  doit  distinguer  les  des- 
criptions que  Fortunat  l'ait  dans  ses  poëmes 
de  quelques-uns  de  ses  voyap;es,  d'avec  l'i- 
tinéraire que  Sigcberl  •  lui  attribue  ;  il  était 
en  vers  et  contenait  le  détail  de  ce  qu'il 
avait  vu  ou  fait  dans  le  voyage  qu'il  fit  d'I- 
talie dans  les  Gaules,  en  passant  par  le 
royaume  d'Austrasie.  Cet  écrit  n'est  pas  ve- 
nu jusqu';\  nous  ;  mais  il  nous  en  a  été  don- 
né une  idée  dans  sa  lettre  h  saint  Grégoire, 
et  à  la  fin  de  son  quatrième  livre  de  la  Vie 
de  saint  Martin.  Platine  le  fait  auteur  d'un 
traité  intitulé  l'Art  de  7-cgne}\  adressé  au  roi 
Sigebert  ;  nous  n'avons  rien  sur  ce  sujet  dans 
les  écrits  qui  nous  restent  de  Fortunat.  Le 
Spicilége  de  dom  d'Acbérj  en  cite  un  sous  le 
titre  de  Mediefas  Fortunati  ;  mais  ce  n'est 
qu'un  recueil  de  ses  poëmes  auquel  l'on 
a  donné  ce  titre.  Nous  avons  remarqué  ail- 
leurs qu'on  ne  pouvait  attribuer  à  Lactance 
i^vide  ^lom.  le  poëme  qui  a  pour  titre  Du  Phénix,  puis- 
qu'il y  était  parlé  d'Apollon  comme  d'une 
divinité  véritable,  et  Du  Phénix  comme  d'un 
prêtre  admis  aux  mystères  de  ce  faux  dieu. 
Ces  raisons  sufl:sent  pour  ne  pas  le  donner 
à  Fortunat,  à  qui  Barthius  et  quelques  au- 
tres l'ont  attribué. 

21.  Fortunat  était  un  de  ces  génies  heureux 
à  qui  il  en  coûte  peu  pour  dire  de  belles  cho- 
ses ;  outre  cette  facilité  surprenante  qui  rè- 
gne dans  ses  vers,  on  y  trouve  une  simplicité 
facile  qui  ne  bande  point  l'esprit,  et  surtout 
une  grande  douceur.  Il  fait  toujours  voir 
quelque  chose  de  nouveau,  rarement  il  est 
copiste;  il  ne  se  copie  pas  lui-même;  il  est 
presque  toujours  original.  On  ne  laisse  pas 
de  distinguer  aisément  les  vers  qu'il  faisait 
sur-le-champ,  sans  elfort  et  sans  méditation, 
d'avec  ceux  auxquels  il  apportait  plus  d'é- 
tude ;  ceux-ci  sont  plus  tleuris  et  remplis  de 
plus  d'agrément,  il  y  a   dans  ceux-là  quel- 


Juïement 
des  tciirs  lie 
Fflriunal. 


qu'obscurité  et  moins  d'harmonie.  La  des- 
cription (pi'il  fait  de  son  voyage  par  eau  de 
Metz  \  Andernach,  fait  voir  que  son  vrai 
talent  était  d'écrire  en  ce  genre.  On  lui  re- 
proche avec  raison  plusieurs  fautes  contre 
la  prosodie  et  contre  la  pureté  de  la  langue 
latine,  souvent  il  fait  brève  '  une  syllabe  qui 
est  longue  de  sa  nature,  d'un  verbe  passif  il 
eu  fait  un  actif,  d'un  singulier  il  en  fait  un 
pluriel  ;  il  défigure  les  mots,  en  retranche 
ou  y  ajoute,  suivant  le  besoin  de  la  mesure 
de  ses  vers.  Les  éditeurs  ont  mis  h  la  suite 
de  ses  poëmes  un  givuid  nombre  d'exemples 
de  ces  sortes  de  licences  poétiques.  Ses 
écrits  en  prose,  tels  que  sont  ses  préfaces 
et  ses  lettres,  sont  d'un  style  dur  et  embar- 
rassé', il  est  beaucoup  plus  clair  et  plus  doux 
dans  ses  ouvrages  dogmatiques  :  c'était  le 
génie  de  son  siècle,  d'embrouiller  quand  on 
voulait  écrire  avec  éloquence. 

[Quelques  petites  pièces  adressées  à  sainte 
Railégonde  et  k  sainte  Atmès  sur  un  repas, 
sur  des  fleurs,  sur  des  châtaignes,  sur  des 
œufs  et  des  prunes,  sur  du  lait  et  d'autres 
friandises  ont  fourni  à  MM.  .\mpère,  Guizot 
et  Thierry  l'occasion  de  calomnier  Venance 
Fortunat.  Ces  historiens  ne  voient  en  notre 
poêle  qu'un  homme  adonné  aux  plaisirs  de 
la  table.  Rien  n'est  plus  faux  que  cette  as- 
sertion. Quand  on  lit  Fortunat,  on  sait  à 
quoi  s'en  tenir  sur  son  goût  pour  les  frian- 
dises. Il  a  plu  aux  historiens  que  je  viens  de 
citer  de  donner  ce  nom  au  goût  que  le  poète 
accuse  pour  le  pain,  le  lait,  le  beurre  et  les 
autres  mets  du  même  genre.  Ajoutons  que  le 
nombre  des  pièces  badines  composées  par 
Fortunat  est  extrêmement  restreint,  compa- 
rativement au  reste  de  ses  poésies.  Quoi  qu'en 
disent  ces  critiques,  on  chercherait  en  vain 
dans  ses  opuscules  théologiques  de  quoi  le 
charger  sur  le  fait  de  l'incontinence  ;  on  y 
lencontre  quelques  métaphores  en  tout  temps 
permises  à  tous  les  écrivains  et  employés 
par  eux  sans  qu'ils  soient  devenus  pour  cela 
justiciables  d'aucune  censure.  La  malveil- 
lance seule  a  pu  entendre  au  propre  ce  que 
Fortunat  ne  dit  qu'au  figuré.  Enfin,  l'erreur 
capitale  de  MM.  Ampère,  Guizot  et  Thierry 
est  de  voir  un  évoque  dans  le    poète  qui 


'  Ilijmnorum  septitnginta  liher  septem  unus  qui 
incipit  :  Àgnoscat  nmne  sacrUnm.  Tritliem.,  De 
Script,  eccles.,  cap.  ccxiic. 

'  Scripsit  metrice  Hodœporicum  suum.  Sige- 
bert, iibi  supra. 

'  A  producit  in  anachoreta.  TUcit  bestola  pro 


bestiola:  caligosus  pro  caliginosus  :  celehratura 
pro  celebranda;  butyr  pro  butyrum  ;  debaccho 
pro  dehacchor  ;  duces  pro  dux;  mirari  passive; 
fumulare  pro  faniulnri:  urgnet  pro  urget  \  mis- 
cam  pro  iiiiscebo  :  pcrferor  pro  pcrfero  ;  prœco- 
niandus  pro  prœconandus,  etc. 


HISTOIRE  GKNKRAT^E  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


4U 

adressa  des  poi^sies  badines  A  sainte  Radé- 
gonde  et  à  sainte  Agnès;  Forlunat  n'était  pas 
même  prêtre  quand  il  écrivait  ;  il  ne  le  de- 
vint vraisemblalilement  qu'en  587,  après  la 
mort  des  deux  saintes;  mais  il  était  piquant 
d'accuser  un  prélat  de  la  légèreté  du  reste 
très-innocente  d'un  intendant,  et  c'est  ce  que 
ces  historiens  ont  fait'.] 
Édiuor»  le  22.  Le  quatrième  poëme  de  son  huitième 
hvre  se  trouve  dans  le  second  Recueil  des 
poètes  chrétiens,  par  Georges  Fabricius,  avec 
quantité  d'autres  de  ses  poésies  tirées  de 
ses  autres  livres  ;  on  l'a  aussi  inséré  dans  le 
Chauir  ou  Corps'  des  poètes  latins.  Son  ex- 
plication (^  l'Oraison  dominicale  et  du  Sym- 
bole se  trouve  dans  les  Orthndoxosraphes 
en  1553,  1569,  et  dans  la  Bibliothèque  des 
Pères,  à  Paris,  en  1575.  On  trouve  aussi  plu- 
sieurs de  ses  poésies  avec  les  hymnes  de 
Prudence  en  un  volume  in -4,  imprimé  à 
Wittemberg  on  1313,  et  avec  celles  de  Ju- 
vencus,  de  Sédulius  et  d'Ara lor,  ù  Bàle  en 
1337,  par  les  soins  de  Théodore  Puiman.  Le 
poëme  sur  la  résurrection,  qui  est  le  neu- 
vième du  troisième  livre,  parut  à  Paris  en 
1616,  avec  les  annotations  de  Cassandre;  à 
Wittemberg  en  1627,  avec  les  notes  de  Bu- 
chner,  et  en  beaiuonp  d'autres  endroits.  11 
y  en  a  une  édition  avec  le  commonlaire  de 
Buschius,  où  l'on  n'a  marqué  ni  le  lieu  de 
l'impression,  ni  l'année,  Les  deux  derniers 
poèmes  du  onzième  livre,  qui  regardent  les 
voyages  de  Forfunat,  se  lisent  à  la  suite  des 
ouvrages  de  saint  Sidoine,  par  Élie  Vinet  en 
1332,  et  dans  celle  de  Jean  Savaron  en  1598. 
Jean  Marchant  mit  sous  presse,  à  Paris,  en 
1511,  les  quatre  livres  de  la  Vie  de  saint 
Martin ,  en  y  joignant  ce  que  Sévère-Sul- 
pice  a  écrit  sur  le  même  sujet,  et  quelques 
opuscules  de  divers  écrivains.  Outre  les  édi- 
tions latines  de  la  Vie  de  sainte  Radégonde, 
dont  nous  avons  parlé,  il  y  en  a  une  en  fran- 
çjiis,  à  Poitiers  en  1327,  de  la  traduction  de 
Jean  Bouchet.  Toutes  ces  éditions  de  For- 
tunat  sont  incomplètes  ;  la  première  où  l'on 
ail  recueilli  tous  ses  hymnes  est  de  Ca- 
gliari  en  Sardaigne.  en  1573.  On  en  fit  une 
seconde  en  la  même  ville  l'année  suivante 
1374,  qui  fut  remise  sous  presse  :\  Venise  eu 
1378,  puis  à  Cagliari  en  1384,  ensuite  à  Co- 
logne en  1600;  ces  deux  dernières  renfer- 
ment l'explication  de  l'Oraison  dominicale  et 

'  Note  de  la  3"  édition  de  Uorbaclier,  tome  l.\, 
pag.  350  [L'cdileur.)  —  '  Tom.  II,  pag.  488. 


du  SjTubole.  Avec  le  secours  de  toutes  ces 
éditions  et  de  plusieurs  manuscrits,  Browé- 
rus  en  entreprit  une  nouvelle,  qui  vit  le  jour 
pour  la  première  fois  à  Mayence  en  1603 
avec  des  notes  de  sa  façon,  ensuite  en  1617; 
c'est  celle  que  l'on  a  suivie  dans  les  Biblio- 
thèques de  Paris  en  1624  et  1644,  et  de  Lyon 
en  1677.  L'éditeur  a  mis  en  tète  la  Vie  de 
Fortunat,  et  les  témoignages  que  les  écri- 
vains postérieurs  ont  rendus  à  sa  capacité, 
avec  le  dénombrement  de  ses  ouvrages. 
Quelques  soins  que  Browérus  se  soit  donnés 
pour  perfectionner  son  édition,  elle  parut 
imparfaite  au  père  Labbe,  son  confrère,  ijui 
en  promit  une  nouvelle.  Il  est  mort  sans 
avoir  tenu  sa  parole.  [La  meilleure  édition 
des  écrits  de  saint  Fortunat  est  celle  qu'a 
donnée  Mich.-Ang.  Luchi,  bénédictin  de  la 
Congrégation  du  Mont-Cassin,  Rome,  1786- 
87,  en  deux  parties,  in-4,  avec  préface  et  pro- 
légomènes. Elle  est  reproduite  dans  le  tome 
LXXXVIII  de  la  Putrologie  latine.  La  pre- 
mière partie  contient  l'édition  de  Browérus, 
la  deuxième  donne  les  Vies. On  y  lit  aussi  \'£x- 
jjûsitiun  de  la  fui  catholique,  trouvée  sous  le 
nom  deFortunatdansun  manuscrit, et  publiée 
par  Muratori,  Anecdot.,  tom.  II,  Milan,  1608, 
pag. 212-217,  et  réimprimée  dansGalland,  Di- 
blioth.,  tom.  XII,  pag.  317-318.  Cette  expo- 
sition ne  fait  qu'exposer  le  Symbobe  connu 
SOIS  le  nom  de  saint  Athanase.  Les  auteure 
de  l'Histoire  de  la  France  littéraire  la  refu- 
sent à  Fortunat,  à  cause  de  la  netteté  du 
style  ;  Luchi  partage  ce  sentiment.  Voyez 
Patrolog.  latine,  ibid.,  col.  583  et  suiv. 

Un  Appendice  nous  donne  des  vers  incon- 
nus aux  premiers  éditeurs.  Il  contient  des 
vers  adressés  à  Radégonde  et  à  Agnès  ;  ils 
oui  été  trouvés  dans  un  manuscrit  de  la  Bi- 
bliothèque royale  par  M.  Guérard,  et  publiés 
par  lui  dans  le  tome  XII  des  Notices  sur  les 
ntumtscrits. 

La  seconde  pièce  est  tirée  dn  tome  IX  du 
Spiciteg.  rom.  de  Mai.  C'est  une  épigramme 
sur  Theudichilde. 

Les  poèmes  de  Fortunat  ont  été  édités  à 
Cambrai  dans  la  collection  Poetœ  ecclesias- 
tici,  chez  Hurez,  in-I2,  1822.  Quatre  de  ses 
hymnes  ont  été  traduites  en  français  dans  les 
Poètes  chrétiens,  par  M.  Félix  Clément.] 

23.  Baudonivie,  qui  nous  a  donné  un  sup-      u.iùe^.i 
ph'ment  k  la  lie  de  samle  Radégonde  écrite  !'»ni«»;  S" 

^  ^  étrilf.  Vie  d« 

]MV  Fortunat,  était  religieuse  du  monastère  ""■''  ,'^'": 
que  celte  sainte  reine  avait  fondé  à  Poitiers,  s.''Bfn?dfc'°' 
et  elle  avait  été  élevée  sous  ses  yeux.  Témoin  •"••  ^''•- 


[vr 


SIIXXK. 


CIIAriTHE  XI.Vl.  —  lÔVAGRK  ni^:PIPII.\NIE,  ETC. 


oculaire  qu'elle  était  de  plusieurs  de  ses  gran- 
des Mctioiis,  et  instruite  on  par  la  sainte,  ou 
par  d'autres,  do  ce  qu'elle  n'avait  pas  vu  cllo- 
méme,  l'abbesse  Dédimie  et  les  autres  reli- 
gieuses de  la  couimnnaulé  la  cliarp;èi'onl  de 
mettre  par  écrit  ce  qu'elle  savait  de  sainte 
Hadégonde  ;  elle  s'en  détendit  sur  sou  inca- 
pacité, mais  il  fallut  obéir.  Il  n'y  a  rien  au- 
dessus  des  sentiments  d'humilité  et  de  mo- 
destie qu'elle  fit  paraître,  et  dans  son  refus, 
et  dans  son  obéissance.  Elle  avait  en  main 
la  Vie  que  Fortunat  avait  composée  ;  mais 
elle  savait  aussi  que  cet  homme  apostolique, 
c'est  ainsi  qu'elle  l'appelle  ,  n'avait  passé 
sous  silence  un  grand  nombre  de  circons- 
tances édifiantes  de  la  vie  de  sainte  Radé- 
gonde,  que  pour  n'être  pas  trop  diffus.  Elle 
s'attacha  donc  uniquement  ;\  rapporter  les 
fiiits  qu'il  avait  omis,  et  à  ne  rien  ri'péter  de 
ce  qu'il  avait  rapporté  ;  c'est  pourquoi  elle 
passe  tout  ce  qui  regarde  sa  naissance  et  son 
mariage  avec  le  roi  Clotaire.  Ce  qu'elle  re- 
lève le  plus  en  elle,  est  l'exemple  qu'elle 
domiait  à  ses  sœurs  dans  le  temps  même 
qu'Agnès  était  leur  abbesse.  Jamais  elle 
n'ordonnait  rien  qu'elle  ne  l'eût  fait  la  pre- 
mière. Si  elle  recevait  la  visite  de  quelque 
serviteur  de  Dieu,  aussitôt  elle  l'interrogeait 
sur  son  genre  de  vie;  et  si  elle  apprenait  de 
hii  quelqu'exercice  de  piété  qu'elle  n'eût  pas 
encore  mis  en  pratique,  elle  l'y  mettait  d'a- 
bord, et  exhortait  les  autres  à  en  faire  de 
même.  Elle  établit  dans  son  monastère  l'u- 
sage de  lire  la  parole  de  Dieu  pendant  le 
repas  de  la  communauté.  Baudonivie  rap- 
porte plusieurs  miracles  que  la  sainte  fit 
de  son  vivant,  et  d'autres  qui  s'opérèrent 
après  sa  mort  à  son  tombeau,  ou  par  l'attou- 


chement  du  cilice  qu'elle  portait  ordinaire- 
ment. Le  récit  i[u'ellc  en  fait  est  si  grave,  si 
simple  et  si  naturel,  qu'on  ne  peut  refuser 
d'y  ajouter  foi.  L'abbesse  Dédimie,  à  qui  elle 
adressa  son  ouvrage,  avait  succédé;  h  Leu- 
bovère  dans  le  gouveru(!ment  du  monastère 
de  Poitiers,  et  celle-ci  à  .\gnès,  qui  en  fut  la 
première  abbesse  sous  sainte  Radégonde.  Il 
ne  parait  par  aucun  endroit  que  Baudonivie 
ait  occupé  cette  place.  Elle  remarque  que, 
lorsqu'on  portait  en  terre  le  corps  de  la 
sainte,  les  ministres  chantaient  Alléluia  ', 
et  que  les  religieuses,  de  dessus  les  murs  du 
monastère,  ne  répondaient  à  ce  chant  de 
joie  que  par  des  lamentations.  C'était  l'usage 
autrefois  de  chanter  Alléluia  dans  les  obsè- 
ques, et  il  subsiste  encore  aujourd'hui  par- 
mi les  Grecs,  surtout  dans  les  funérailles  des 
prêtres.  Elle  remarque  aussi  que  c'était  la 
coutume  des  monastères  '  aux  environs  de 
Poitiers,  de  venir  dans  cette  ville  le  jour  de 
la  fête  de  saint  Hilaire,  et  d'y  célébrer  les 
veilles  jusqu'à  minuit,  qu'à  cette  heure  tous 
les  abbés,  à  la  tète  de  leur  communauté , 
s'en  retournaient  à  leur  église  réciter  l'of- 
fice de  la  nuit.  Parmi  les  miracles  qu'elle 
-raconte,  celui-ci  est  remarquable  :  les'  ma- 
lades qui  allaient  au  tombeau  de  la  sainte, 
y  recouvraient  la  sauté,  fussent-ils  désespé- 
rés, aussitôt  qu'ils  avaient  bu  un  verre  d'eau 
dans  lequel  le  gardien  du  sépulcre  avait 
trempé  une  partie  de  lu  nappe  qui  était  au- 
dessous.  [On  trouve  au  tome  LXXII  de  la 
Patrologie  latine,  col.  651  et  suiv.,  la  Vie 
de  sainte  Radégonde  par  Fortunat,  et  sa 
continuation  par  Baudonivie.  La  Vie  écrite 
par  Fortunat  se  trouve  aussi  dans  le  tome 
LXXX\1II  de  la  Patrologie  latine.] 


CHAPITRE   XLVI. 

Évagre  d'Epiphanie  historien  ecclésiastique  [après  l'an  593J, 
Jean  d'Asie  on  d'Éphèse. 


1.  On  ne  peut  mettre  la  naissance  d'Éva- 
gre  plus  tard  qu'en  333,  puisqu'en  542  il 

'  Gemitumpro alléluia  reddebant.Vit.Rad.,-p.'ilîi. 

^  Et  quia  mos  est  in  festivitate  beati  Hilarii  re- 
liqtiis  nionasteriis  circiimcirca proj:imis  quœsunt 
ibi,  usque  in  mediani  noctem  vigilias  celebrare  : 
de  média  nocte  itmisquisque  abbus  cum  suis 
fralribus  ad  smim  rêver titw  monasterium  cur- 
sum  celebrare.  Ibid. 


étudiait  la  grammaire*  dans  les  petites  éco- 
les. Ce  fut  en  cette  année  que  la  ville  d'A- 

^Quis  inale  habens.quamvis  vila  dei:peralus,si 
pallain  subteriorem  custos  ejusJem  sacri  sepul- 
chri  intinxit  in  calice  aqiiœ ,  et  dédit  ei  febrici- 
tanli  poculinn  ,  non  statiin  ut  bibit  ante  sacrum 
ejus  sepulchrum.  morbus  recessit?  Iliid.,  i)ag.  317. 

>  Evag.,  lib.  IV,  cap.  ssvi. 


HlSTOmF.  GÏ^XÉRALE  DES  AUTEl'RS  ECCLÉSIASTIQUES. 


416 

pâmée,  se  voyant  à  la  veille  d'être  ravagée 
parCbo'îroës.roi  des  Perses,  chercha  son  sa- 
lut dans  un  morceau  de  la  vraie  Croix,  dont 
elle  était  dépositaire.  Il  était  de  la  frrandenr' 
d'une  coudée,  enfermé  dans  une  châsse  de 
bois  ornée  d'or  et  de  pierreries  ;  trois  prê- 
tres en  avaient  la  srarde.  Les  habitants  d'A- 
pamée  le  considéraient  comme  leur  plus  sur 
rempart,  et  on  le  montrait  tous  les  ans  en  pu- 
blic à  un  jour  marqué.  Craiiinant  donc  la  per- 
fidie du  roi  de?  Perses,  ils  prièrent  Thomas, 
leur  évoque,  de  leur  montrer  la  Croix,  pour 
l'adorer  encore  une  fois  avant  de  mourir. 
L'évéque  marqua  le  jour  auquel  on   ferait 
cette  cérémonie,  afin  que  les  peuples  d'alen- 
tour eusîÇnt  le  temps  de  s'y  rendre.  Les  pa- 
rents d'Évaffre',  qui  étaient  d'l!!piplianie, 
ville  de  Syrie  en  .\sie  sur  le  Farfar,  s'y  rendi- 
rent avec  les  autres  et  l'y  menèrent.  Aussitôt 
qne  Thomas  eut  découvert  la  Croix,  et  qu'on 
eut  commencé  à  la  porter  par  toute  l'église, 
on  vit  au  lambris  une  grande  lumière  qui  sui- 
vait la  Croix  à  mesure  qu'on  avançait  ;  l'évo- 
que semblait  lui-même  être  suivi  d'uni  grand 
feu  qui  éclairait  sans  brûler.  Cette  merveille 
dura  autant  que  la  cérémonie,  et  fut  regar- 
dée comm.e  un  présage  de  la  conservation 
de  la  ville.  En  effet,  Chosroës  se  cententa  d'en 
tirer  de  grandes  sommes  d'argent,  et  d'en- 
lever le  trésor  de  l'église;  mais  il  y  laissa 
le  bois  de  la  Croix  h  la  prière  de  l'évêque. 
En  mémoire  du  miracle,  on  mit  un  tableau 
dans  le  lambris  de  l'église,  qui  le  représen- 
tait, pour  l'apprendre  a  ceux  qui  n'en  avaient 
pas  été  témoins. 
iirpéqoHin       2.  Évagre  ,  après  avoir  étudié  les  belles- 

le  barreau  ;  Il  r         '       l 

,e  u.ii..t.  lettres,  s'appliqua  à  l'étude  du  droit,  et  fit 
les  fonctions  d'avocat  à  .\nlioche  ,  d'où  lui 
est  venu  le  nom  de  Scolastiqne.  Il  se  maria 
en  cette  ville  avec  une  jeune  fille  ;  mais  la 
joie  de  ses  noces  fut  troublée  par  un  événe- 
ment tragique.  C'était  le  jour  de  la  nouvelle 
lune*,  auquel  tous  les  habitants  d'Antiocbe 
avaient  coutume  de  faire  des  réjouissances 
publiques,  et  d'interiompre  à  cet  etfet  leiu's 
occupations  ordinaires.  A  la  troisième  heure 
de  la  nuit,  un  tremblement  de  terre,  accom- 
pagné d'un  bruit  horrible  ,  ébranla  tonte  la 
ville,  renversa  ijuanlilé  de  maisons,  et  ruina 
plusieurs  parties  de  l'église.  Quelques  anni'cs 
après,  la  ville  d'Antiocbe  ayant  été  atteinte 
par  une*  maladie  contagieuse  qui  avait  ré- 


gné pendant  l'espace  de  cinquante-deux  ans 
presque  par  toute  la  terre,  en  se  répandant 
tour  h  tour  dans  les  ditt'érentes  parties  do 
l'univers ,  Evagre  y  perdit  sa  femme,  quel- 
ques-uns de  ses  enfants,  de  ses  parents  et 
de  ses  esclaves.  Il  était  alors  dans  la  cin- 
quante-huitième année  de  son  âge;  ainsi 
c'était  vers  l'an  .'598.  Il  avait  été  lui-même 
attaqué  de  cette  maladie  étant  dans  ses  pre- 
mières éludes;  il  la  décrit  au  long,  assurant 
qu'on  n'en  avait  jamais  vu  de  semblable,  ni 
de  si  longue  durée. 

3.  Plusieurs  années  auparavant,  c'est-A-    ,''|'.*.""'; 
dire  vei-s  l'an  589  ,  Grégoire,  évêque  d'An-  ;;;;;i;    ;|' 
tioche  ayant  été  accusé  '  de  divers  crimes ,   "^,'_"" 
Astérius,  comte  d'Orient,  fut  chargé  d'exa- 
miner l'atl'aire,   et  après  lui  le  comte  Jean 
qui  lui  avait  succédé.  Celui-ci,  au  lieu  d'agir 
en  juge,  se  déclara  partie  ,  en  atBchant  pu- 
bliquement que  si  quelqu'un  voulait  accuser 
l'évoque  ,  il  recevrait  sa  plainte.  Grégoire 
appela  à  l'empereur  et  au  concile  ;  ce  qui 
l'obligea  de  faire  un  voyage  à  Constanli- 
nople  ;  il  mena  avec  lui  Évagre  pour  lui  ser- 
vir de  conseil,  comme  il  s'en  servait  ordi- 
nairement. L'aflaire  fut  examinée ,  et  termi- 
née à  l'avantage  de  l'évêque. 

4.  Il  est  vraisemblable  que  ce  fut  à  An-  n  '"  ' 
tioche  qu'Lvagre  écrivit  son  Histoire  ecclé-  i.^^'-"; , 
siastique,  cette  ville  étant  devenue  son  séjour  j_'^'^^- 
ordinaire.  Il  la  finit  en  la  douzième  année 
du  règne  de  l'empereur  Maurice,  c'est-à-dire 
en  ?>93.  Ce  prince,  pour  l'en  récompenser, 
lui  "accorda  deux  charges,  celle  de  trésorier 
de  1  Empire,  ou  de  questeur,  et  celle  de  pré- 
fet. Il  y  a  donc  toute  apparence  qu'Évagre 
vécut  encore  quelques  années  depuis  qu'il 
eut  achevé  son  histoire.  Ce  fut  lui  qui  donna 
avis  A  l'évêque  Grégoire  de  la  maladie  de 
saint  Siméon-Stylite  le  Jeune;  il  avait  été 
le  voir,  et  avait  éprouvé  par  lui-même  (|ue 
ce  saint' prédisait  l'avenir,  et  connaissait  les 
pensées  secrètes. 

5.  L'histoire  d'Évagre  est  divisée  en  six     ,^',7, ' 
livres;  il  la  commence  où  Socrate  et  Théo-   f^*^^'",- 
dorcl  ont  fini  la  leur,  c'est-t'i-diie  au  concile   '"'• 
d'Ephèse  ,  où  Neslorius  fut  condamné   en 
431  ,  et  la  conduit,  comme  on  vient  de  le 
dire,  jusqu'à  la  douzième  année  du  règne 
de  l'empereur  Maurice,  dont  on  fixe  le  com- 
mencement au  treizième  d'août  593.  11  se 
servit  de  celles  qu'avaient  composées  avant 


'  l'rocop..  De  liello  Persico,  cap.  v.  —  «  Evag.,       *  /tW.,lib.  IV, cap.  xxix.  —  »Evag.,  lit).  V,  caii.  vu. 
lib,  IV,  cap.  XXVI.  —  »  Evag.,  lib.  V,  cap.  vui.  —      —  «Evag.,  liu.  VI,  cap.  ixiv.  —  '/d.,lbid.,cap.  xxni. 


[Vl"  SIÈCLE.] 


CIIAIMTHK  XLVI.  —  ÉVACJHE  D'KPIPHANIE. 


•417 


lui  Piisciis,  Kiistliatc  d'Isiiiplmnip,  Zacliaric, 
l'iDcopo  et  Jean.  Ce  deinier   Icriiiiiiail    la 
sienne  h  la  seplicine  année  de  Justin  l'An- 
ticn,  c'os(-i\-diio  en  tt'-l'i.  Los  douze  cliapilics 
du  premier  livre  île  l'Hisloirt!  d'hh'agre  re- 
gardent ce  qui  se  passa  dans  le  concile  d'É- 
phèse  et  depuis  contre  Nestorius,  la  déposi- 
tion d'Eutyrliès  dans  un  concile  de  Cons- 
tanlinople  sous   Fhivion  ,  évéque   de   celte 
ville,  et  son  rdlalilisscment  dans  le  Brigan- 
dage d'Éplièse.    11  remarque  que  s'il   s'est 
élevé  des  disputes  dans  l'Eglise  an  sujet  de 
la  foi,  elle  n'en  a  point  été  altérée  ;  que  Ions 
les  catlioliijuos  étaient  d'accord  sur  les  points 
fondamentaux  de  la  religion,  tous  adorant 
la  Trinité,  tous  rendant  gloire  à  l'unité,  tous 
confessant  que  le  Verbe  est  Dieu,  et  qu'ayant 
été  engendré  avant  tous  les  siècles,  il  a  pris 
une  seconde  naissance  dans  le  sein  de  sa 
mère  ;  que  les  dilUcultés  qu'il   y  a  eu  sur 
ce  sujet  ont  éclairci  la  vérité,  et  relevé  par 
occasion  l'éclat  de  l'Eglise.  11  donne  ensuite 
la   vie    miraculeuse  de    saint    Siméon  Sty- 
lile  l'Ancien,  celles  de  saint  Isidore  de  Pé- 
luse,  de  Synésius,   évéque  de  Cyrène,   de 
saint  Ignace  martyr,  et  de  la  translation  de 
ses  reliques  sous  l'empire  de  Théodose.  Il 
môle  à  l'histoire  de  l'Église  quelques  événe- 
ments profanes  :  l'iiTuption  d'Attila  en  Ita- 
lie, les  guerres  dans  cette  province  et  dans 
la  Perse,  l'embellissement  de  la  ville  d'Au- 
tioche,  le  mariage  de  Théodose  avec  Eu- 
doxie,  le  voyage  de  cette  princesse  h  An- 
tioche  et  à  Jérusalem,  où  elle  fonda  des  mo- 
nastères et  des  laures.  Évagre  prend  occa- 
sion de  ces  établissements  pour  décrire  le 
c.p.  1x1.   genre  de  vie  des  moines  de  la  Palestine.  Les 
uns  vivaient  en  communauté,  sans  posséder 
en  propre  quoi  que  ce  fût ,  pas  même  leurs 
habits  :  un  se  servait  un  jour  d'une  tuni- 
que et  d'un  manteau,  dont    un    autre    se 
servait  le  jour  suivant,  ainsi  la  tunique  et  le 
manteau  étaient  à  tous,  ou  plutôt  nétaient 
à  aucun.  La  table  était  commune  ,  on  n'y 
servait  rien  de  délicat  :  les  herbes  et  les  lé- 
gumes en  faisaient  tout  l'appareil  :  encore 
n'en    mettait-on    qu'autant    qu'il   en  fallait 
pom-  satisfaire  la  nécessité  de  la  nature.  Ils 
priaient  aussi  en  commun  le  jour  et  la  nuit, 
s'imposant  d'ailleurs  hors  le    temps  de  la 
prière  un  travail  si  continuel,  qu'ils  étaient 
sur  cette  terre  comme  des  morts  qui  n'ont 
point  encore  de  tombeaux,  Ils  passaient  quel- 
quefois deux  ou  trois  joui's  sans  manger; 
quelques-uns  ne  mangeaient  que  le  cinquiè- 

XI. 


me  jour;  d'auti'es  s'enfermaient  seuls  dans 
des  cellules  si  basses  cl  si  étroites,  ((u'à  peine 
ils  pouvaient  s'y  tenir  (liîhout  ou  s'y  coucher. 
Il  y  en  avait  qui  s'cxposaiciil  pr(;s(|u('  mis 
aux  aideursdu  soleil  et  à  la  rigueur  du  froid. 
Quelques-uns  ,  mais  en  petit  nombre,  après 
s'être  élevés  ]iar  le  long  exercice  des  vertus 
au-dessus  des  passions,  retournaient  dans 
les  villes ,  où  ils  feignaient  d'avoir  per- 
du l'espiit  pour  vaincre  la  vaine  gloire , 
que  Platon  dit  être  la  tunique  que  les  plus 
sages  ôtent  la  dernière.  Le  premier  livre 
finit   i\.   la    mort   de   l'empereur  Théodose. 

6.  Le  second  commence  à  l'élévation  de     sofomi   r. 

vre,  cap.  i   et 

Marcien  à  l'Empu-e.  Evagre  raconte  comment  "i- 
il  y  parvint,  les  soins  qu'il  se  donna  pour  la 
convocation  du  concile  de  Chalcédoine,  cequi 
se  passa  dans  ce  concile,  et  il  n^oublie  pas 
le  décret  qui  y  fut  fait,  portant  que  le  siège 
archiépiscopal  de  Constanfinople  ,  ou  de  la 
nouvelle  Rome,  aurait  la  prérogative  sur  les 
autres  sièges  orientaux,  parce  que  la  nouvelle 
Rome  tient  le  second  rang  après  l'ancienne. 
Il  parle  après  cela  de  diverses  séditions  ar-  ck.  iv  ei 
rivées  à  Alexandrie  et  à  Jérusalem,  des  sté- 
rilités, des  ftimines  et  des  maladies  conta- 
gieuses qui  afiligèi'ent  les  deux  Phrygies , 
les  deux  Galaties,  la  Cappadoce  ,  la  Cilicie, 
la  Palestine  et  plusieurs  autres  provinces, 
de  la  mort  de  Valentinien  et  de  Marcien,  de 
la  prise  de  Rome,  du  massacre  de  saint  Pro- 
tère  évéque  d'Alexandi'ie ,  de  l'élection  de 
Timothée  Élure ,  et  de  sou  bannissement 
par  ordre  de  l'empereur  Léon  ,  du  règne 
d'Anlhémius ,  d'Olybrius  et  de  quelques 
autres  en  Occident ,  de  la  mort  de  Léon ,  et 
de  son  successeur  à  l'Empire.  Evagre  fait  en  m,,, 

cet  endroit  un  abrégé  des  actes  du  concile  de 
Chalcédoine,  et  finit  par  là  son  second  livre. 

7.  Il  remarque  au  commencement  du  troi-  Trouèmo 
sieme,  que  lempereur  Zenon  ne  lut  pas  plu-  «q. 
tôt  en  possession  de  l'autorité  souvei-aine, 
qu'il  se  plongea  dans  les  plus  sales  débau- 
ches, s'imaginant  follement  qu'il  n'y  avait 
que  les  personnes  de  basse  condition  qui 
dussent  rougir  de  leurs  crimes  et  les  cou- 
vrir du  voile  des  ténèbres  ;  que  les  princes 
ont  droit  de  les  commettre  en  public  et  aux 
yeux  des  hommes.  Ce  n'est  pas ,  ajoute  cet 
historien  ,  par  le  commandement  que  l'on 
exerce  sur  les  autres  ,  qu'on  mérite  le  titre 
d'empereur;  c'est  par  celui  qu'on  exerce  sur 
soi-même,  par  l'empire  que  l'on  prend  sur  ses 
passions,  par  l'émiuence  de  ses  vertus,  par 
le  bon  exemple  que  l'on  donne  aux  peuples, 

27 


418 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


Zenon  étant  devenu  odieux,  même  à  ses  pro- 
clies,  à  cause  de  ses  excès,  Bapilis(iue  s'eui- 
para  de  l'empire  ,  rappela  Tiniotliée  Elure  , 
condamna  le  concile  de  Clialccdoine,  ren- 
dit à  l'église  d'Alexandrie  le  titre  de  patriar- 
chaie,  que  ce  concile  lui  avait  ôté.  Il  ne  lais- 
sa pas  de  condamner  Nestorius  et  Eutyciiès; 
mais  il  défendit  toutes  disputes  à  l'avenir 
sur  ce  sujet,  et  toute  convocation  de  conciles. 
Son  règne  ne  fut  pas  long.  Zenon,  rétabli 
surletrùne,  donna  un  édil  d'union,  dont  on 
fit  la  lecture  dans  l'église  d'Alexandrie,  et 
alors  tous  les  liabitants  se  réunirent  à  l'É- 
glise catholique.  Cet  édit  d'union  ,  appelé 
Hénotiquc,  qui  était  adressé  'i  fous  les  évo- 
ques et  à  fous  les  peuples  d'Alexandrie,  d'E- 
gypte, de  Libye  et  de  la  Penlapole,  causa 
beaucoup  de  troubles  dans  les  l"-glises  d'O- 
rient, parce  qu'encore  qu'il  contint  une  doc- 
trine catholique  en  apparence,  il  y  avait  un 
venin  caché,  qui  consistait  en  ce  qu'on  n'y 
recevait  pas  le  concile  de  Chalcédoine  comme 
les  trois  précédents,  et  qu'il  semblait  au  con- 
traire lui  attribuer  des  erreurs.  Plusieurs  évo- 
ques y  souscrivirent ,  d'autres  le  rejetèrent. 
Pierre  le  Foulon,  rétabli  sur  le  siège  d'An- 
tioche,  signa  VHcnotujui',  et  dit  anatlième  au 
concile  de  Chalcédoine  ;  Martyrius  de  Jérusa- 
lem, et  Pierre  Mongus,  évoque  d'Alexandrie, 
en  firent  autant.  Acace  de  Constantinople  , 
pour  avoir  coiiimimiqué  avec  eux,  fut  séparé 
delà  communion  du  pape  Félix.  La  sentence 
du  Pape  fut  suivie  d'un  schisme  de  la  part 
des  Églises  d'Orient  ;  la  division  y  fut  si  gé- 
nérale, qu'il  n'y  avait  presque  plus  de  com- 
c»p.  m.  munion  des  évoques  entre  eux.  Evagre  en- 
tre, à  ce  sujet,  dans  quelijues  détails;  après 
quoi  il  passe  aux  alfaires  de  l'Empire  sous  le 
règne  d'Anastase  ;  il  parle  de  la  défaite  des 
Isauriens,  de  l'accord  fait  entre  les  Scénites, 
peuple  barbare,  et  les  Romains;  de  la  prise 
de  la  ville  d'Abida  en  Méscipotaniie  par  les 
Perses,  de  la  fondation  de  celle  de  Daras  ]iar 
l'empereur  Anasiase,  ainsi  nommée,  parce 
que  Darius  avait  été  défait  en  ce  lieu  par 
Alexandre,  fils  de  Philippe,  roi  de  Macé- 
doine; de  la  muraille  (pie  le  même  prince 
lit  construire  dans  la  'i'hrace  :  elle  était  de 
quatre  cent  vingt  '  stades,  s'étendait  d'une 
mer  à  l'autre,  et  servait  i"i  fermer  le  passage 
aux  étrangers  qui  se  répandaient  dans  l'Em- 
pire, soit  par  le  Pont-Euxin,  soil  par  les  Pa- 
lus-Méotides,  11  réfute  en  peu  de  mots  les  ac- 

'  La  staiJc  est  de  cent  viugl  pas  p<!onW-lriques. 


cusations  que  Zosime  avait  formées  contre 
l'emjjereur  Constantin,  nommément  d'avoir 
établi  le  premier  l'impôt  nommé  chrysuryyre, 
qui  se  levait  sur  les  personnes  de  basse  con- 
dition, et  même  sur  les  femmes  débauchées, 
et  d'avoir  fait  périr  misérablement  Crispe  son 
fils.  Sur  le  piemicr  chef,  il  dit  qu'il  est  hors 
de  vraisemblance  qu'un  prince  aussi  libéral 
que  Constantin,  ait  imposé  un  tribut  si  in- 
fAme.Sur  le  second,  il  allègue  le  témoignage 
d'Eusèbe  de  Césaréc,  auteur  contemporain, 
qui  ne  pai-le  de  Crispe  qu'avec  éloge;  ce 
qu'il  n'aurait  pas  fait,  si  Constantin  eût  en 
quehiue  raison  de  faire  mourir  un  fils  qu'il 
avait  fait  César.  Il  justifie  aussi  les  motifs 
qu'eut  Constantin  d'embrasser  la  religion 
chrétienne,  et  montre  que,  depuis  son  éta- 
blissement, l'Empire,  au  lieu  de  déchoir, 
s'était  accru. 

8.  Après  la  mort  d'.\naslase,  Justin,  natif  O""!' 
de  Thrace,  se  revêtit  de  la  robe  impériale.  «i- 
11  eut  pour  successeur  Jusiinien  son  neveu. 
Les  principaux  événements  du  règne  de  ces 
deux  princes  sont  rapportés  dans  le  quatrième 
livre  d'Évagre.  Ils  furent  l'un  et  l'autre  dé- 
fenseurs du  concile  de  Chalcédoine.  Justin 
fit  arrêter  Sévère,  évêque  d'Autioche,  parce 
qu'il  disait  anathème  à  ce  concile;  mais  l'é- 
vêque  parvint  a  se  soustraire  par  la  fuite.  La 
ville  d'Autioche,  sous  le  règne  de  ce  prince, 
fut  désolée  par  des  incendies  et  par  des  trem- 
blements de  terre;  Éplirem,  comte  d'Orient, 
la  soulagea  dans  sa  détresse.  Les  habitants, 
par  reconnaissance,  le  choisirent  pour  leur 
évêque.  Ébranlée  deux  ans  et  demi  après  par 
un  second  tremblement  de  terre,  la  ville  chan- 
gea son  nom  en  celui  de  Théopolis,  et  reçut 
de  grands  bienfaits  de  la  part  de  Justin.  Ua 
moine  nommé  Zosimas,  à  qui  Dieu  avait  ac- 
corde; le  don  de  prévoir  l'avenir,  connut  ce 
tremblement  de  terre  au  miment  où  il  arri- 
va, quoiqu'il  fût  lui-uiême  très-éloigné  d'Au- 
tioche. Comme  il  allait  un  jour  à  Césarëe, 
menant  avec  lui  un  àne  qui  lui  portait  son 
bagage,  un  lion,  qui  se  rentonira  sur  le  che- 
min, enleva  l'àne,  le  conduisit  dans  une  forêt, 
elle  mangea.  Zosimas  qui  l'avait  suivi,  dit  au 
lion  :  (I  Je  ne  saurais  plus  continuer  mon  voya- 
ge, n'étant  ni  assez  jeune,  ni  assez  fort  jiour 
porter  mon  bagage;  si  tu  veux  donc  que  je 
poursuive  mon  chemin,  il  faut  que  tu  m'ai- 
des. »  Le  lion  s'ajjprocha  en  le  caressant, 
comme  pour  lui  oll'iir  son  service.  Le  moine 
mit  son  bagage  sur  le  dos  du  lion,  qui  le 
mena  jusqu'à  la  porte  de  Césarée.  C'est  là 


[VI*  SIÈCLE.] 

peiit-ôtrc  une  de  ces  histoires  où  Casaubon  ' 
(lit  iiii'Kvagre  a  t(''moipiu' liop  do  crt'diililL^. 
Il  av;ince,   d'api^s  l'iiisloiioii  l'itudix',  ([iie 
les  Maures  sont  desceiulanlsdcsGcrgési'cns, 
des  Jébiiséens  et  îles  autres  nations  vaincues 
par  Josué,  et  qu'avant  de  riiiitler  leur  pays, ces 
peu|iles  avai(Mit  fail  graver  sur  deux  colon- 
nes lie  marbre  blanc,  proche  d'une  l'onlaine, 
Cip.  mil    cette  inscription   :   «  C'est  nons  qui  avons 
(Hé  chassés  de  notre  pays  par  Jésus  le  vo- 
leur, fils  de  Xavé.  <t  II  parb;  de  la  prise  de 
Home  et  de  l'invasion  de  l'Italie  parïhéodo- 
ric,  et  du  retour  de  cette  province  sous  la 
dominationdeJustinien,  parla  valeur  du  gé- 
néral liélisaire;  de  la  conversion  des  Hern- 
ies et  de  quehiues  autres  peuples  barbares  rt 
la  foi  chrétienne;  de  la  contîance  du  géné- 
ral Narsès  en  la  protection  de  la  sainte  Vierge; 
de  la  ruine  delà  ville  d'Aulioclio;  de  la  ma- 
nière dont  la  ville  de  Sergiopole,  assiégée 
par  les  Perses,  fut  secourue  par  saint  Serge 
martyr,  dont  on  y  conservait  les  reliques 
dans  une  châsse  couverte  d'une  lame  d'ar- 
gent; des  églises  construites  par  l'empereur 
Justinien,  particulièrement  de  celle  de  Sainte- 
Sophie,  dont  il  donne  les  dimensions  en  ces 
xjs.       termes  :  «  La  longueur  depuis  la  porte  qui  est 
vis-à-vis  de  la  voûte  au-dessous  de  laquelle 
on  otlVe   le  sacrifice  non  sanglant,  jusqu'à 
l'endroit  où  l'on  offre  ce  sacrifice,  c'est-à- 
dire  jusqu'à  l'autel,  est  de  cent  quatre-vingt- 
dix  pieds;  la  largeur  du  septentrion  au  midi, 
de  cent  quinze  pieds,  la  hauteur  depuis  la 
clef  du  dôme  jusqu'au  pavé,  de  cent  quatre- 
vingt  pieds;  la  largeur  de  chaque  voûte  est 

de (le  nombre  manque  dans  le   texte), 

et  la  longueur,  de  l'orient  à  l'occident,  de 
deux  cent  soixante  pieds  ;  la  largeur  de  l'ou- 
verture par  où  le  jour  entre,  est  de  soixante- 
quinze  pieds;  le  dôme  est  élevé  sur  quatre 
piliers  ;  aux  deux  côtés  de  la  grande  voûte, 
c'est-à-dire  de  la  nef,  sont  des  colonnes  de 
marbre  de  Tliessalie,  qui  soutiennent  des 
galeries  qui  ont  des  colonnes  semblables; 
c'est  de  ces  galeries  que  l'impérati-ice  assiste 
à  la  célébration  des  mystères  aux  fêtes  so- 
lennelles. Les  coloniffes  qui  sont  du  côté  de 
l'orient  et  de  l'occident,  sont  placées  de  telle 
sorte,  qu'il  n'y  a  rien  qui  borne  la  vue  ;  les 
galeries  hautes  sont  soutenues  par  des  co- 
lonnes et  par  des  voûtes,  qui  donnent  à  tout 
l'ouvrage  une  beauté  achevée  :  il  y  a,  outre 


CHAPITUK  XLVI.  —  lîVAGRn;  D'EPIPHANIE. 


'  Casaubon,   ExerciCat.,  13,  mmj. 
nium.  pag.  258. 


31,  ad  Daro- 


A\9 
cela,  deux  galeries  du  côté  de  l'occident,  et 

desveslihidesdeméincari-liiloctMie.»  Hvagre 
raconte  que  dans  le  temps  qu'Kpiplianc  était 
patriarche  de  Constantinople,  comme  il  était 
resté  un  jour  une  grandi;  quantité  de  pains 
consacrés,  il  envoya,  suivant  la  coutume, 
quérir  des  enfants  innocents  dans  les  i)eti- 
tes  écoles,  pour  les  faire  consommer,  et  que 
parmi  ces  enfants  il  se  trouva  le  fils  d'un  ver- 
rier juif.  Ses  parents  lui  ayant  demandé  à  son 
retour  jtourquoi  il  revenait  si  lard,  il  leur  dit 
ce  qui  s'était  passé,  et  ce  qu'il  avait  mangé 
avec  les  autres.  Le  père  en  fureur  lia  son  fils 
et  le  jeta  dans  sa  fournaise.  La  mère  affligée 
le  cberchait  par  toute  la  ville  :  au  bout  de  trois 
jours  elle  vint  à  la  porte  de  la  verrerie,  appe- 
lant l'enfant  par  son  nom.  Il  répondit  du  four- 
neau, et  la  mère,  ayant  rompu  les  portes,  le 
trouva  debout  au  milieu  du  feu,  sans  qu'il  eût 
reçu  aucun  mal.  On  lui  demanda  comment  il 
avait  été  pn'servé  de  l'activité  des  llammes; 
il  dit  qu'une  dame  vêtue  de  pourpre  venait 
souvent  apporter  de  l'eau  pour  les  éteindre,  et 
qu'elle  lui  donnait  à  manger  quand  il  avait 
faim.  La  mère  et  le  fils  furent  baptisés,  et  celui- 
ci  mis  dans  le  clergé.  Mais  le  père,  ayant  re- 
fusé de  se  faire  chrétien,  fut  pendu  au  quar- 
tier de  Sycé  par  ordre  de  l'empereur  Justi- 
nieu,  comme  homicide  de  son  fils.  Nous  avons 
déjà  rapporté  uiie  histoire  à  peu  près  sem- 
blable, et  remarqué  qu'au  temps  de  Nicé- 
phore  Calliste,  c'est-à-dire  dans  le  quatrième 
siècle,  la  coutume  de  donner  aux  enfants  les 
restes  de  l'Eucharistie  durait  encore  à  Cons- 
tantinople. Le  quatrième  livre  de  l'Histoire 
d'Évagre  finit  par  un  précis  des  actes  du 
concile  de  Chalcédoine. 

9.  Il  commence  le  cinquième  par  l'avéne- 
ment  de  Justin  le  Jeune  à  l'Empire.  Quoique 
déréglé  dans  ses  mœurs,  ce  prince  conserva 
la  foi  de  l'Église  sans  y  donner  aucune  at- 
teinte ;  il  publia  même  un  édit  pour  le  rap- 
pel des  évêques  exilés  sous  le  règne  de  Justi- 
nien son  oncle;  mais  depuis  il  chassa  Anas- 
tase  du  siège  d'Antioche.  On  mit  à  sa  place 
Grégoire,  dont  nous  avons  parlé  plus  haut. 
Justin  eut  des  guerres  à  soutenir  contre  les 
Perses;  ses  revers  le  firent  tomber  dans  une 
frénésie  qui  lui  ôta  le  jugement.  Tibère,  son 
successeur  à  l'Empire,  en  rétablit  les  affai- 
res. Justin,  avant  de  quitter  la  dignité  im- 
périale, l'en  avait  revêtu,  et  dans  un  moment 
lucide  que  Dieu  lui  accorda  alors,  il  dit  à  Ti- 
bère :  «Ne  vous  laissez  point  éblouir  par  l'é- 
clat de  la  robe  de  pourpre,  ni  par  la  magni- 


Cr)[),  MXV. 


Nicopiior., 

lib.     xva, 

CAp.  XXY. 


Liv'B  cin- 


420 


HISTOIBE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Cap    -tx'* 


Litre  sît'ê- 
fne.  cap.  l  et 


ficence  de  ces  ornements  qui  frappent  les 
sens.  J'ai  été  assez  imprudent  pniir  m'y  lais- 
ser prendre,  et  par  la  je  me  suis  attiré  de 
grands  maux;  réparez  mes  fautes  parla  dou- 
ceur de  votre  pouvcrnomont.  ))  Puis,  envisa- 
geant les  magistrats  qui  étaient  présents  : 
«  Gardez-vous  bien,  ajouta-t-il,  de  suivre  leurs 
conseils,  ce  sont  eus  qui  m'ont  mis  dans  l'é- 
tat où  vous  me  voyez.  »  Il  dit  encore  d'autres 
choses  qui  excitèrent  l'admiration  des  assis- 
tants, et  qui  leiu-  tirèrent  les  larmes  des  yeux. 
Tibère  vainquit  les  Perses,  leur  enleva  des 
trésors  immenses,  et  retourna  dans  ses  l'ta'.s 
cliargé  de  gloire.  Chosroès,  ne  pouvant  sur\  i- 
vrci'il'iufapiic  d'une  retraite  honteuse,  mou- 
rut misérablement,  laissant  son  royaume  à 
Hormisdas  son  fils.  Tibère  ne  régna  que  qua- 
tre ans.  Maurice,  qui  avait  été  général  de  ses 
armées,  lui  succéda.  Son  élévation  au  trône 
fiit  précédée  de  divers  présages  de  sa  future 
grandeur;  Évagre  en  rapporte  plusieurs  ;  nous 
donnerons  celui-ci  :  Une  nuit  que  Maurice 
présentait  de  l'encensa  Aniioclie  devant  l'au- 
tel de  la  sainte  Vierge,  dans  l'église  qu'on 
appelle  église  de  Justinien,  le  voile  de  l'au- 
tel parut  tout  en  feu  ;  comme  il  s'en  montrait 
très-surpris,  l'évèque  Grégoire  qui  était  pré- 
sent, l'assura  que  c'était  un  signe  par  lequel 
Dieu  lui  faisait  de  magnifiques  promesses. 
Évagre  donne  à  la  fin  de  son  cinquième  livre, 
un  catalogue  dos  histoiicns  sacrés,  ecclésias- 
tiques et  profanes,  où  il  reconnaît  que  Moïse 
est  le  plus  ancien  auteur  que  nous  ayons. 

10.  Le  sixième  livre  commence  à  la  pre- 
mière année  du  règne  de  Maurice,  et  finit  à 
la  douzième,  c'est-à-dire  à  l'an  593.  Ce  prince, 
non  content  de  porter  la  couronne  impé- 
riale, s'en  rendit  dipne  en  se  remplissant  l'es- 
prit et  le  cfcur  des  vertus  qui  doivent  carac- 
tériser un  empereur.  11  dt'fit  les  Perses, 
donna  retraite  dans  ses  États  au  jeune  Chos- 
roès, fils  d'Hormisdas,  le  traita  comme  son 
propre  fils  et  le  rétablit  dans  ses  Ktats.  Ce- 
lui-ci, en  reconnaissance  des  faveuis  qu'il 
avait  reçues  du  ciel  par  l'intercession  des 
saints  martyrs,  fit  de  grands  présents  aux 
églises.  En  même  temps Naaman,  prince  des 
Sarrasins,  embrassa  la  foi  avec  toutes  les 
personnes  de  sa  suite.  Au  sortir  du  baptême 
il  fit  fondre  inie  Vénus  d'or  dont  il  donna  la 
matière  aux  pauvres.  Évagre,  en  finissant 
son  histoire,  dit  qu'il  avait  recueilli  dans  un 


dEvif  r«. 
CD  a  Tallcs. 


autre  volume  quantité  de  lettres,  de  rela- 
tions, d'ordonnances,  de  harangues  et  de 
disputes,  et  que  les  relations  étaient  sous  le 
nom  de  Grégoire,  évéque  d'Antioche.  Ce  re- 
cueil n'est  pas  venu  jusqu'à  nous  :  on  croit 
qu'il  renfermait  nn  discours  de  Grégoire  à 
l'empereur  Maurice  sur  la  naissance  de  son 
fils  Théodose. 

11.  Le  style  d'Évagre  n'est  pas  sans  '  agré- 
ment :  il  a  de  l'élégance  et  de  la  politesse; 
mais  il  est  quelquefois  t)-op  diffus,  et  coupé 
par  des  digressions  qui  font  perdre  la  suite 
de  son  discouis.  L'avantaue  que  cet  histo- 
rien a  sur  la  plupart  de  ceux  qui  ont  écrit 
avant  lui,  c'est  qu'il  n'a  donné  aucun  lieu 
de  le  soupçonner  dans  sa  foi.  Robert  Etien- 
ne fit  imprimer  le  texte  grec  de  son  Histoire 
h  Paris,  en  1544,  sur  un  m.'inuscrit  de  la  Bi- 
bliothèque du  Roi.  Chrisloiihorson  le  mit  en 
latin,  et  le  donna  en  ces  deux  langues  à  Ge- 
nève, en  1612,  avec  l'histoire  de  Théodoret. 
L'(''dition  grecque  et  latine  de  Paris,  en  1673 
est  de  Henri  de  Valois.  [Elle  a  été  réimpri- 
mée à  Cambridge,  en  1720,  avec  des  notes 
de  Héading  ;  cette  édition  a  été  reproduite  à 
Turin  en  1748,  et  à  Venise  en  1765,  avec  les 
histoires  ecclésiastiqnesd'Eusèbe,de  Socrate, 
de  Théodoret ,  de  Sozomène  h  Oxford ,  en 
1845,  dans  le  tome  LXXXVl  de  la  Pafrologie 
latine,  avec  une  notice  tirée  de  Fabricius, 
col.  2405-29001.  Nous  l'avons  en  français  de 
la  traduction  de  M.  le  président  Cousin. 

12.  L'histoire  de  l'Église  n'a  pas  moins  à     j»nii«>i( 
attendre  que  la  Patrolonie  des  investigations  »"°r  la  i»  d'.' 
auxquelles  se  livre  depuis  plusieurs  années 
l'infatigable  M.  Cureton  sur  la  collection  si 

riche  dos  manuscrits  de  Nitri:i,  acquis  par 
le  Musée  britannique.  Nous  en  donnions  la 
preuve  à  propos  des  D'ttres  jxiscnles  de  saint 
Athanase.  .Aujourd'hui  nous  annonçons  l'ap- 
parition récente  d'un  texte  fort  curieux  qui 
sort  des  presses  d'Oxford,  et  nous  indiquons 
par  avance  le  caractère  tout  spécial  de  ce 
document  inc-dit  qui  va  compléter  les  anna- 
les des  Eglises  d'Ûrieut  pendant  une  période 
courte,  il  est  vrai,  mais  très-agitée. 

Jusqu'à  ces  derniers  t«>mps,  on  savait  peu 
de  choses  sur  le  rôle  qna  joué  au  vi«  siècle 
Jean  d'Éphèse  ou  d'Asie,  évêquc  d'ailleurs 
célèbre  des  jacobites  de  r,\sie  intérieure,  et 
on  ne  connaissait  de  son  ouvrage  d'histoire 
ecclésiastique  que  des  fragments  tirés  par 


•  Stylus  Evagrii  non  ingralus,  tamelsi  inler- 
(iufn  redundare  quodam  modo  videatvr  :  certe  in 


docirinœ  veritate  cceteris  historicis  accuratior 
est.  l'iiiil.,  coii.  29. 


[vi«  sifccxE.]  CIIAPITUK  XLVI. 

Assc^mnni,  de  la  r.liroiiitiuo  de  Denys  de  Tel- 
nialiar  cl  de  celle  de  Itar-lléhi'a'us.  L'érudi- 
tion chrétienne  va  èlre  en  posscssiim  de  la 
parlie  la  plus  importante  de  cet  ouvrage  de 
l'écrivain  uionopliysite  ;  le  texte  syriaque  est 
publié  par  M.  Curelon  qui  se  pi'opose  d'en 
donner  lui-même  une  traduction  an},daise 
avec  une  introduction  qui  résumera  tout  ce 
que  l'on  sait  do  l'auteur.  Celte  importante 
publication  a  paru  sous  le  titre  suivant  :  Tlie 
tliird  finrt  iif  t/ie  ccclesinsliail  historij  uj  John- 
bishop  of  E'phesiis  ,  now  first  éditai  bij  Vil- 
liam  Cureton,  Oxford,  1853,  1  vol.  gr.  in-4. 
Plusieurs  indices  font  reconnailrc  dans  l'au- 
teur de  rouvrafj;e  syriaque,  nommé  «  Jean 
évèque  d'Éplièse,  n  le  même  Jean  d'Hphèse 
ou  d'Asie  au(iuel  les  écrivains  syriens  en  réfè- 
rent fortsouvent.  Le  titi-ed'évéqued'Asiequ'il 
prend  lui-même  dans  son  histoire  se  justitie 
parla  déuouiiuation  de  diocèse  d'Asie  don- 
née à  la  juridiction  des  évéques  d'iîphèse, 
ville  qui  a  été  capitale  des  provinces  occiden- 
tales de  l'.Ysie.  En  d'autres  endroits,  Jean  se 
nomme  lui-même  «  briseur  des  idoles  »  et  ce- 
lui «  qui  est  au-dessous  des  païens.  »  C'est  bien 
le  même  personnage  qu'Évagre  cite  comme 
son  compatriote  et  son  parent  :  le  terme  au- 
jourd'hui connu  de  sou  histoire  coïncide 
avec  la  période  sur  laquelle  Évagre  a  dii  le 
consulter.  Jean,  qui  était  natif  d'Amad  euMé- 
sopolamie,  a  écrit  en  syriaque  son  ouvrage 
historique  tiui  a  pour  titre,  dans  la  langue 
originale,  le  seul  mot  d'Eccb'^siastique ,  et 
qu'il  désigne  à  la  fln  du  premier  livre  par 
par  les  termes  «  d'Histoire  de  l'Église,  n  Le 
texte  récemment  publié  est  intitulé  :  troisiè- 
me partie,  parce  que  Jeau  avait  écrit  aupara- 
vant un  ouvrage  sur  l'histoire  ecclésiastique 
en  deux  parties  et  en  douze  livres.  Cet  ou- 
vrage, qui  commençait  au  temps  de  Jules- 
César,  aboutissait  à  la  sixième  année  du  rè- 
gne de  Justin  le  Jeune,  neveu  de  l'empereur 
Jiistinicn,  c'est-à-dire  à  l'an  882  de  l'ère 
d'Alexandrie,  371  de  Jésus-Christ.  Dans  la 
troisième  partie  de  son  ouvrage,  distribuée 
en  six  livres,  Jean  manifeste  l'intention  de 
poursuivre  la  même  histoire  pour  l'instruc- 
tion de  la  postérité.  L'espace  de  temps  dout 
Jean  a  traité  l'histoire  d'une  manière  sans 
doute  plus  développée  s'étend  jusqu'à  l'an 
896  des  Grecs,  l'auoS-T  du  Seigneui-.  Comme 
cette  dernière  date  est  la  plus  récente  que 
M.  Cureton  ait  rencontrée  dans  le  texte  tout 
entier,  on  a  lieu  de  croire  que  l'auteur  n'a 
pas  conduit  sou  travail  au  delà  d'un  terme 


EVAGRE  D'EPIPHANIE. 


421 


de  quatorze  ann(''es  (.■i71-.">8.')).  Il  y  a  beaucoup 
d'imv^alilés  ilans  la  composition,  parce  que 
les  cha[iilros  des  dill'éreiits  livrets  ont  été  ré- 
digés à  plusieurs  époques,  puis  retouchés  et 
arrangés  dans  leur  ordre  présent.  L'auteur, 
au  chapitre  xxx  du  livre  I''',  s'excuse  ii  ce  su- 
jet, en  faisant  retondjer  sur  les  [)ersécutious 
auxquidlesil  a  été  eu  butte  pour  ses  opinions 
théologiques,  les  répétitions  et  les  contradic- 
tions qu'on  pourra  découvrir  dans  son  livre. 

Malgré  ces  réserves  préalables,  on  ne  peut 
méconnaître  le  prix  du  document  mis  au  j(jur 
par  M.  Cureton:  ilfournit  un  supplément  fort 
utile  aux  faits  déjà  connus  touchant  plusieurs 
all'aires  célèbres  dans  l'histoire  de  l'Église 
orientale ,  et  spécialement  dans  celle  de 
Constaulinople  ;  il  parle  d'événements  jus- 
qu'ici entièrement  ignorés  en  Europe.  Il  est 
vrai  que  Jean,  qui  est  monophysite  déclaré, 
écrit  avec  un  esprit  de  parti  très-marqué,  et 
qu'en  quelques  occasions  il  se  montre  trop 
crédule;  cependant  son  récit  emprunte  un 
intérêt  considérable  à  cette  circonstance 
qu'il  a  été  non  -  seulement  contemporain, 
mais  encore  témoin  oculaire  des  faits ,  et 
même  acteur  principal  dans  plusieurs  des 
scènes  qu'il  décrit.  C'est  assez  dire  que  les 
défenseurs  de  la  science  religieuse  auront  àte- 
nir  compte  des  assertions  de  l'auteur  syrien, 
et  à  contrôler  sérieusement  les  déductions 
que  la  critique  moderne  prétendra  en  tirer. 

Un  mot  sur  l'authenticilé  du  texte  com- 
plétera cette  courte  notice  :  L'édition  de  M. 
Cureton  se  fonde  principalement  sur  un  ma- 
nuscrit syriaque  qui  provient  de  la  collection 
apportée  d'Egypte  en  Angleterre,  en  i8i3, 
par  M.  Tattam,  et  qui  se  compose  de  139 
feuilles  in-4,  écrites  à  deux  colonnes  d'une 
main  très-ferme.  Ce  manuscrit  est  complété 
en  quclijues  chapitres  par  un  autre  manus- 
crit du  même  fonds,  qui  porte  une  date  ser- 
vant à  tixer  l'âge  de  tous  les  deux.  Comme  il 
est  constant  que  les  deux  volumes  ont  été 
copiés  par  la  même  main,  on  peut  ajouter 
foi  a  l'indication  qui  est  consignée  à  la  On  du 
second,  et  d'après  laquelle  ils  ont  été  exécu- 
tés une  centaine  d'années  après  l'achève- 
ment de  l'ouvrage;  on  lit,  en  etlet,  à  la  fin 
du  second  manuscrit  :  «  Que  le  copiste  Per- 
gonna  a  tîni  sa  tâche  au  mois  ador  de  l'an 
999  des  Grecs,»  c'est-à-dire  au  mois  de  mars 
de  l'an  688  de  l'ère  chrétienne.  Nous  avons 
donc  sous  les  yeux  un  texte  tiré  d'un  des 
manuscrits  anciens  et  authentiques  portés  au 
X'  siècle  de  la  Syrie  dans  le  désert  de  Scété. 


422 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


Enfin,  ce  qui  ajoute  à  l'éclat  de  la  nouvelle 
publication  de  M.  Curelon,  due  à  la  lihéia- 
lité  de  l'université  d'Oxford,  c'est  l'emploi 
d'un  caractère  syriaque  gravé  tout  exprès 
pour  cette  édition;  des  types  nouveaux  ont 
été  calqués  sur  les  lettres  anciennes  de  l'es- 
pèce dite  esti-aïujelo,  qui  sont  usités  dans 
tout  le  fonds  des  manuscrits  originaux  de 
Nitria.D.>  la  sorte,  l'imprimerie  académique 
d'Oxford  est  à  même  de  reproduire  les  mo- 
numents de  la  littérature  syriaque  avec  des 
caractères  plus  grands  et  plus  simples,  que 
les  types  en  usage  qui  ont  été  tirés  de  l'écri- 


ture plus  moderne  et  plus  cursive.  employée 
surtout  par  les  Maronites.  Les  amis  de  l'éru- 
dition et  de  la  paléocrrapliie  orientales  sau- 
ront gré  aux  directeurs  de  la  belle  imprime- 
rie d'Oxford,  d'avoir  consacré  un  corps  spé- 
cial de  caractères  à  cette  littérature  chré- 
tienne de  la  Syrie  dont  l'étude  va  renaître 
dans  les  écoles  savantes  de  l'Europe.  On  n'a- 
vait rien  tenté  de  semblalile  depuis  que  la 
I'ropaf;ande  a  fait  exécuter  les  grands  carac- 
tères estrangelo,  qui  ont  servi  avec  succès  à 
l'impression  des  Acta  Murlijrum  Orientalium 
vers  le  milieu  du  siècle  passé  '. 


CHAPITRi:  XLVIl. 
Saint  Léandre  évêque  de  Séville  |603J,  Jean  abbé  de  Biclar  L590J. 

[Écrivains  lalius.l 


s.  u»-'rc,       1.  Saint  Léandre,  fils  de  Sévérien  et  de 
'xrtcrtr.n  Turtuve,  frère  aine  de  saint  Isidore  de  Sé- 
11  utrmtnÉ-  \ille,   naquit  à  Cartliagène  en  Espagne;   le 
mariage  de  Sanclia,  sa  tante  paternelle,  avec 
Théodoric,  roi  des  Ostrogotlis,  fournit  une 
preuve  delà  no])lesse  de  son  extraction.  Dès 
sa  jeunesse  il  embrassa  la  profession  monas- 
tique, qu'il  pratiqua  longtemps;  ensuite  il  fut 
mis  sur  le  siège  épiscopal  de  Séville.  Il  l'oc- 
cupait vers  l'an  58:2,  lorsqu'Herménégilde, 
fils  de  Lévigilde,  roi  des  Visigolhs  en  Espa- 
gne, vint  faire  sa  résidence  en  cette  ville. 
Ingunde,  femme  d'Herménégilde,  était  ca- 
tholique. Elle  pressa  son  mai'i  d'embrasser 
la  même  foi  :  il  s'en  défendit;  mais  instruit 
par  saint  Léandre,    il  quitta  l'avianisme,  et 
reçut  à  la'  conluniation  le  nom  de  Jean. 
Lévigilde  son  père  ayant  appris  sa  conver- 
sion, s'en  vengea  sur  les  catholiques,  ban- 
nissant les  uns,   dépouillant  les  autres  de 
leurs  biens;  plusieurs  furent  mi'*  en  pris(ui, 
où  ils  périrent  de  faim  ou  jiar  divers  sup[ili- 
ces;  grand  nombre  d'évéques  furent  relé- 
gués, les  églises  privées  de  leurs  biens  et  de 
leurs  ijriviléges. 

2.  Herménégilde,  informé  que  In  roi  sou 
père  envoûtait  à  sa  vie,  chercha  de  l'appui 
dans  la  cour  de  Constantinople.  Il  y  envoya 

'  Tout  ce  qui  regarde  Jean  d'Asie  est  emprunli; 
aux  Annales  de  Philosophie,  louic  VIII,  h"  séné, 
pa((.  21U-2i3.  C'est  l'ii'uvre  de  M.  F.  .Nùve.  (l'édi- 
teur.) 

'  Dum  chrisinaretur ,  Joannes  est  roritatus. 
liren.  Tiiiiiii.,  lil>.  V,<"i|i.  xwix. 

"  Jyilur  cum  llrrmi'iisgildus  sulaliu  /cfdi.-  iwi. 


dfur  &   Conï' 
linople. 


saint  Léandre  pour  demander  du  secours  à 
l'empereur  Tibère,  et  en  même  temps  il 
traita  avec  le  gouverneur  du  peu  de  troupes 
que  ce  prince  avait  en  Espagne.  Toutes  ses 
précautions  furent  inutiles  :  Lévigilde  cor- 
rompit le  gouverneur  par  une  somme  de 
trente  mille  sous  d'or,  et,  ayant  marché  con- 
tre son  fils,  le  contraignit  de  se  réfugierdans 
une  église,  d'où,  après  l'avoir  fait  dépouiller 
de  tout,  il  l'envoya  en  exil  à  Valence  :  c'était 
en  383.  Saint  Léaudie,  arrivé  à  Constantino- 
ple, y  trouva  un  nouvel  empereur,  Tibère 
(■tant  mort  le  14  d'août  582.  après  avoir  dé- 
claré César  Maurice  commandant  de  ses  ar- 
mées. On  ne  sait  point  quel  fut  le  succès  de 
son  ambassade  :  il  parait  seulement  par  saint 
Gréiioire  de  Tours,  que  l'empereur  proté- 
gea' Herménégilde;  mais  cet  historien  con- 
vient que  sa  révolte  contre  son  père  était  il- 
légitime et  contre  la  loi  de  Dieu,  le  cas  de 
l'hérésie  n'étant  pas  un  motif  suffisant  .'i  un 
fils  pour  attaquer  son  propre  père,  moins 
encore  pour  chercher  A  le  faire  mourir.  Saint 
Léandre  lia  une  amitié  particulière  A  Cons- 
tantinople avec  saint  Grégoire,  qui  fut  depuis 
pape,  et  qui  y  faisait  alors  les  fonctions  d'a- 
pocrisiairc  ou  de  nonce  apostolique.  Cette 
amitié  élai  t  fondée  non-seulement  '  sur  la  con- 

peratoris  patrem  ad  se  cum  exercitu  venire  co- 
gnovit,  cnnsilium  iniil  qualitcr  repelleret  atitne- 
cnrvl  :  nescicns  miser  Judiciun)  sibi  imiiiiiicre  di- 
limiiii,  ijiii  ri/iitra  gcnitorein  i/tiutnlibel  htereticuin 
Idlia  ciKjUnrcl    ll'iil.,  cap.  xi.iil. 

*  Isiil.,  Ue  Sirip.    erclcs..  cip.  xwiii.  Iticlar  in 
l'Uronicu  ad  an.  liH'J. 


[vi»  SIÈCLE.]     CHAriTin':  xlvii.  —  saint 

lorinik^  de  la  lansueclde  l;i  itiofL-ssioninonas- 
li<|iie  qirils  suivaient  l'un  et  l'antre,  luiiissur 
celle  des  inieuis  et  des  ineliiialintis.  Va)  l'ut  à 
la  piière  de  saint  Li^aiulre  que  saint (ii(''gi)ire 
composa  ses  commentaires  sur  le  livre  de 
Job.  Il  lui  envoya  depuis  le  pallium,  mais  ;\ 
ccuidilion  (juil  ne  s'en  serviniit  (jue  lorst|u'il 
ccl(5brerait  la  messe. 
ii.>i  rn-       3.  L'évèuue  de  Sévillc,  de  retour  dans  su 

TOJf   en     *\il  *  , 

CD  .i8v.  ville  épiscopale,  éprouva  avec  les  autres  évo- 
ques catlioliijues  la  fureur  ilu  roi  Lévit^ilde. 
Ce  prince  venait  de  faire  mourir  son  iils 
Herménégilde,  qu'il  n'avait  pu  ramener  à  la 
perfidie  arienne.  Il  envoya  en  exil  saint 
Lcandre  qui  l'en  avait  détaché  ,  mais  sou 
exil  ne  fut  pas  de  longue  durée  :  car  Lévi- 
gilde  étant  tombé  malade  la  même  année 
586,  et  se  voyant  à  l'extrémité,  lit  venir  le 
saint  évèque,  lui  recommanda  son  Iils  Réca- 
rède  qu'il  laissait  pour  successeur,  le  priant 
de  lui  faire  ce  qu'il  avait  fait  a  son  frère 
Herménégilde,  c'est-à-dire  de  le  faire  catho- 
lique. La  chose  arriva  de  même  :  Hécaréde 
se  fit  instruire,  et  ayant  l'econnu  la  vérité, 
il  reçut  le  signe  de  la  croix  avec  l'onction 
du  saint  chrême,  c'est-à-dire  le  sacrement 
de  confirmation. 
iipp.!ido       4,  Saint  Léandre  donna  avis  de  cette  con- 

au  rond  10   de 

swiie.msoo.  vei'sion  au  pape  saint  Grégoire,  par  une  let- 
tre qu'il  lui  écrivit  en  590,  pour  le  féciliter 
sur  son  élection.  La  même  année,  il  tint  un 
concile  à  SéviUe  avec  sept  auties  évêques. 
11  mourut  en  003,  et  eut  pour  successeur 
saint  Isidore  son  frère,  qui  l'a  mis  dans  son 
Catalogue  des  écrivains  ecclésiastiques,  avec 
une  liste  de  ses  ouvrages. 
Ses  Ecrits.  5.  Le  premier  cst  '  coutre  les  ariens;  saint 
Léandre  le  composa  pendant  son  exil,  c'est- 
à-dire  en  086.  Il  était  divisé  en  deux  livres, 
dans  lesquels  il  faisait  paraître  qu'il  élnit 
très-instruit  dans  la  science  des  divines  écri- 
tures, découvrant  tous  les  subterfuges  des 
ariens,  confondant  leurs  erreurs  avec  beau- 
coup de  force  et  de  solidité,  montrant  ce 
que  l'Église  catholique  enseigne  contre  eux, 
et  en  quoi  elle  dilïere  des  sectes  hérétiques 
dans  sa  doctrine  et  dans  ses  mystères.  Cet 
écrit  n'est  pas  venu  jusqu'à  nous.  Nous 
avons  aussi  perdu  un  autre  petit  ouvrage  où 
il  rapportait  les  objections  des  ariens,  et  y 
joignait  des  réponses;  plusieurs  lettres  au 
pape  saint  Grégoire,  une  sur  le  baptême, 
une  autre  à  son  frère  pour  montrer  qu'on 

'  Iskl.  llispaleus.,  I^f  Siry<(.  <'((7t's.,  caji.   xxvui. 


LKANDltE  DE  SEVILLK,  ETC.  A23 

ne  doit  pas  craindre  la  mort,  et  grand  nom- 
bre de  lettres  familières  aux  évoques  ses 
confrèies.  Il  avait  encore  travailb-  aux  otli- 
ces  de  l'Kglise,  fait  deux  éditions  des  Psau- 
mes avec  des  oraisons ,  et  composé  des 
chants  agréables  pour  les  prières  et  pour  les 
Psaumes  que  l'on  disail  dans  la  céhibration 
d(;s  saints  mystères.  On  a  pris  de  là  occa- 
sion de  lui  attribuer  la  liturgie,  ou  la  messo 
mozarabique,  qui  est  l'ancienne  liturgie  d'Es- 
pagne. Quelques-uns  en  ont  fait  auteur  saint 
Isidore  son  frère.  Ils  peuvent  y  avoir  contri- 
bué l'un  et  l'autre  ;  mais  ils  ne  l'ont  point 
faite  en  l'état  que  nous  l'avons  aujourd'hui, 
puisque  leurs  noms  se  lisent  dans  le  canon 
de  la  messe  avec  ceux  de  saint  Ililaire,  de 
saint  .\tbanase,  de  saint  Ambroise,  de  saint 
Augustin  et  de  saint  Fulgence.  Le  cardinal 
Xiniénès  fit  imprimer  cette  liturgie  à  Tolède 
en  1504;  elle  se  lit,  mais  imparfaite,  dans  le 
vingt-septième  tome  de  la  Bib/iollièf/ne  des  an- 
cicnsPères.  [Le  tome  LXXXV  de  la  Patrulogie 
latine  et  le  suivant  comprennent  les  liturgies 
raozarabiques  longtemps  usitées  en  Espagne. 
Le  premier  volume  comprend  le  missel  mixte, 
d'après  l'édition  du  père  Leslée,  jésuite,  qui 
y  a  joint  de  longues  notes.  Voici  la  division 
de  l'ouvrage  :  1°  Préface  en  forme  de  dis- 
sertation par  le  père  Leslée  ;  2°  Calendrier 
mozarabique  ;  3°  Le  missel  divisé  en  deux 
parties  :  le  dominical ,  et  le  sanctoral  ou 
fête  des  saints  ;  les  principaux  chants  y  sont 
notés.  — A  la  suite  on  trouve  un  Appendice 
cfui  contient  une  messe  de  saint  Pelage,  com- 
posée vers  930,  un  ancien  calendrier,  un  ca- 
lendrier gothique  espagnol.  Une  table  des 
matières  termine  le  volume.  Le  suivant  com- 
prend le  bréviaire  gothique  d'après  l'édition 
d'Ant.  Lorenzana,  archevêque  de  Tolède;  en 
voici  les  principales  divisions  ;  i°  Préface 
de  Lorenzana  ;  2°  Le  calendiier  et  le  bré- 
viaire gothique;  3°  Le  psautier;  4°  Les  canti- 
ques ;  5°  Les  hymnes  ;  G°  Les  heures  canoni- 
ques ;  7°  Le  commun  des  saiuts  ;  8°  Le  sanc- 
toral ou  office  des  saihts.] 

6.  Il  nous  reste  de  saint  Léandre  une  let-   ^?»  ui-<,  \ 
tre  à  sa  sœur  Florentine,  intitulée  :  Institu-  ^f^     p»^- 

'  iif^.   pari.   3, 

tion  des  Vierges  et  du  inépris  du  monde.  Ho!s-  r-s-  »',  'i- 
ténius  l'a  donnée  dans  le  Code  des  lîèijles  de 
saint  Benoit  d'Auiane,  à  Paris,  en  1663, 
d'où  on  l'a  fait  passer  dans  le  douzième  tome 
de  la  Bibliothèque  des  anciens  Pères  [ei  dans  le 
tome  LXXXU  de  la  Patrologie  latine,  col.  871 
et  siiiv.  Elle  est  piécédée  ici  d'une  notice 
par  Cave].  Florentine  avait  demandé  à  son 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Cip. 


434 

frère  quelle  succession  il  lui  laisserait  en  mou- 
rant ;  saint  Léaudrc,  y  ayant  fait  réliexion, 
ne  trouva  rien  qui  fiit  digne  d'elle  dans  la 
possession  des  biens  de  la  terre,  parce  qu'ils 
sont  tous  péri^^sables.  Comme  elle  avait  fait 
profession  de  virginité,  il  lui  parut  que  ce 
qu'il  pouvait  lui  laisser  de  meilleur,  était  de 
lui  suggérer  le  moyen  d'augmenter  la  ré- 
compense qu'elle  devait  attendre  de  sa  vir- 
ginité, en  lui  apprenant  à  s'attacher  entiè- 
rement à  Dieu,  qui  est  l'héritage  des  justes 
et  l'époux  des  vierges.  «  Ce  n'est  pas  penser 
sagement,  lui  dit-il,  que  de  préférer  le  monde 
qui  a  été  racheté  par  le  sang  de  Jésus-Christ, 
à  Jésus-Cririst  même  ;  celui  qui  rachète  est 
plus  estimable  que  ce  qu'il  rachète.  Les  vier- 
ges ont  cet  avantage  ,  qu'elles  sont  telles 
qu'elles  ont  été  formées  des  mains  de  Dieu. 
Le  premier  homme  ne  s'est  perdu,  et  avec 
lui  tout  le  genre  humain,  qu'en  ne  voulant 


vue  des  jeunes  hommes  dont   les  mœurs 
ne  sont  point  chastes  ;  ils  ne  peuvent  faire 
sur  votre  cœur  et  votre  imagination  que  des    c«i  .m. 
impressions  dont  les  suites   sont   toujours 
dangereuses,  soit  de  jour,  soit  de  nuit.  On 
doit  aimer  les  hommes  pour  Dieu  dont  ils 
sont  l'ouvrage,  et  non  pour  la  beauté  du 
corps.  A  l'égard  du  boire  et  du  manger,  il        "• 
en  faut  user  modérément,  et  non  au  delà  du 
besoin ,    ni  rechercher  des  mets    sans  les- 
quels on  peut  vivre.  Si  la  faiblesse  de  la 
santé  exige  des  soulagements,  que  l'esprit    dm.  m 
ne  se  relâche  en  rien.  Daniel  n'eut  que  du 
mépris  pour  les  mets  qu'on  lui  servit  de  la 
table  du  roi  :  il  vécut  de  légumes.   Quand    cup  ». 
vous  aurez  à  parler  à  un  homme,  que  ce 
soit  en  présence  de  deux  ou  tiois  de  vos 
sœurs.   Jésus -Christ  n'eût  pas  parlé  seul 
avec  la  Samaritaine,  si  ses  apôtres  n'eus- 
sent été  obligés    de  s'absenter  pour  aller 


plus  être  ce  que  Dieu  l'avait  fait.  Les  vierges     acheter  de  quoi  manger  ;  ils  n'eussent  pas 


sont  la  première  portion  du  corps  de  l'E 
glise. Quelle  gloire  n'ont-elles  point  à  espérer 
dans  le  siècle  futur,  pour  n'avoir  pris  con- 
seil ni  de  la  chair,  ni  du  sang,  et  pour  s'être 
conservées  pures  de  toute  corruption?»  Saint 
Léandre  entre  dans  le   détail   de  tous  les 
avantages  de  la  virginité,  et  des  dangers  aux- 
quels s'exposent  celles  qui,  par  de  valus  or- 
nements ,  cherchent  à  plaire  aux  hommes. 
Il  convient  que  le  mariage  a  aussi  ses  pré- 
rogatives, ne  fût-ce  que  celle  d'engendrer  des 
vierges,  et  de  faire  naître  des  enfants  pour 
le  ciel  ;  mais  il  soutient  que  les  dangers  en 
sont  très-grands  et  en  grand  nombre ,  soit 
pour  cette  vie,  soit  pour  l'autre.  Il  en  fait  la 
description  ;  après  quoi  il  donne  à  Floren- 
tine et  aux  vierges  qui  vivaient  avec  elle  en 
communauté,  une  règle  de  vie  qu'il  distri- 
bue en  vingt-un  chapitres,  dont  voici  le  pré- 
cis. Fuyez  la  conversation  des  femmes  en- 
gagées dans  le  mariage,  elles  ne  vous  par- 
leront que  des  objets  de  leur  amour  et  de 
leurs  désirs  ;  en  vain    elles  parailront  ap- 
prouver  votre    institut,  ce  ne  sera  qu'une 
feinte  de  leur  part  pour  vous  séduire  plus 
aisément  :   et  pour  vous  inspirer  leurs  sen- 
timents.  Fuyez  également  toute  familiarité 
avec  les  hommes  ,  quelque  réputation  qu'ils 
aient  de  probité  ;  de  fréquentes  visites  de 
leur  part  leur  feront  tort  et  à  vous.  C'est 
un  mal  de  donner  lien  aux  autres  d'en  prMi- 
scr  de  nous,  et   deux  personnes  de  dill'é- 
renl  sexe  ne  sont  pas  ensemble  sans  danger; 
mais  évitez  avec  beaucoup  plus  de  soin  la 


non  plus  été  surpris  de  le  voir  seul  avec  une 
femme,  si  sa  coutume  n'eut  été  contraire. 
Partagez  votre  temps  entre  la  prière  et  la  lec- 
ture. Si  vous  travaillez  des  mains,  ou  si  vous 
prenez  votre  repas,  qu'une  autre  vous  lise 
quelque  chose  pendant  ce  temps-là.  Cher- 
chez dans  la  lecture  de  l'Ancien  Testament 
un  sens  spirituel,  surtout  dans  le  Cantique 
des  cantiques,  qui  est  une  flgure  de  l'amour 
de  Jésus -Christ  pour  son  Église,   et  dans 
rileptateuc(ue  ' ,  c'est-à-dire  les  cinq  livres 
de  Moïse,  et  ceux  de  Josué,  des  Juges  et  de 
Ruth  que  l'on  défendait  autrefois  aux  per- 
sonnes trop  charnelles,  comme  pouvant  leur 
être  plus  nuisibles  qu'utiles.  Proportionnez 
les  jeûnes  à  la  force  du  tempérament  et  à 
la  violence  des  passions;  le  jeûne  est    un 
moyen  de  dompter  la  chair  et  de  la  soumet- 
tre a  res[)rit.  Si  vos  inlirmités  ne  vous  per- 
mettent point  d'observer  un  jeûne  si  rigou- 
reux, vous  ne  pécherez  point,  mais  vous  re- 
garderez comme  au-dessus    de  vous  celles 
que  l'infirmité  ne  dispensera  pas  de  la  loi. 
Au  reste,  que  celle  qui  par  sa  santé  est  en 
état  de  la  suivre,  ne  se  scandalise  point  des 
égards  que  l'on  doit  avoir  pour  celles  qui  se 
portent    moins   bien  ;   que  celles  -  ci  .1  leur 
tour    s'humilient    pour  leur    infirmité ,    et 
qu'elles  aient  de  la  douleur  de  ne  pouvoir 
faire  ce  (]ue  font  les  autres.  L'excès  dans  le 
vin  est  un  crime  mortel  :  une  viertre  donc 


<   Aiilrefiiis  lu  livre  de  Itiitli  ne  faisiiit 
celui  lie»  Jugos. 


1(11  uu  iivec 


CHAPITRE  XLVIl.  —  SAINT  LÉANDRE  DK  SÉVILLE,  ETC. 


[Vl"  SIKCLE.] 

qui  est  en  sant^,  fera  bien  de  s'en  al)Sfenir; 
celle  qui  est  d'une  santé  faible  ou  malade, 
peut  en  user  avec  la   niodt'ration  que  saint 
Paul  prescrit  i\  Tiinotliée   :   elle  doit  aussi 
user  du  bain  unicpieincnt  pour  le  rétablisse- 
ment de  sa  santé,  tout  autre  motif  le  rend 
dangereux,  surtout  quanti  on  le  prend  pour 
avoir  la  chair  plus  belle.  La  joie  que  donne 
une  bonne  conscience,  est  celle  qu'elle  doit 
chercher  ;  les  joies  mondaines  ne   doivent 
pas  être  de  son   goût  ;   la  tristesse  qui  est 
selon  Uieu  leur  est  préférable  ,  c'est  celle- 
li\qui  rend  heureux  et  qui  mérite  des  con- 
solations. Saint  Léandre  veut  que  sa  sœur 
ait  im  amour  égal  pour  toutes  ses  sœurs, 
sans  distinction  de  personne,  la  qualité  do 
sei'vante  de  Jésus-Christ  étant  commune  à 
toutes,  toutes  étant  baptisées   et  recevant 
ensemble  le  corps  et  le  sang  de  Jésus-Christ  ; 
mais  A  l'égard  des  besoins,   il  lui  conseille 
de  les  proportionner  aux  infirmités  de  cha- 
cune, donnant  plus  à  celle  qui  a  de  plus 
grandes  infirmités,  les  biens  demeurant  en 
commun  k  toutes.  S'adressant  h  sa  sœur  en 
particulier,  il  l'exhorte  à  conserver  en  tout 
temps  une  égalité  d'âme,  soit  daus  l'adver- 
sité, soit  dans  la  prospérité  ,  dans  la  pau- 
vreté et  dans  l'abondance,  à  fuir  les  titres 
d'honneur,  k  se  regarder  comme  la  servante 
de  toutes.  La  mère  de  Jésus-Christ,  dit-il,  n'é- 
tait riche  que  dans  le  Seigneur,  et  Josepli,son 
époux,  réduit  à  gagner  sa  vie  en  travaillant 
à  des  '  ouvrages  en  fer.  Il  ne  permet  ni  ne 
défend  à  Florentine  l'usage  de  la  viande, 
sachant  qu'elle  était  d'une  santé  faible  ;  mais 
il  ordonne  à  celles  qui  se  portent  bien  de 
s'en  abstenir  ;  il  est  d'avis  qu'elle  passe  le 
reste  de  ses  jours  dans  le  monastère  oii  elle 
était  entrée,  parce  qu'encore  qu'elle  y  ren- 
contrât quelq'ue  sujet  de  tristesse  par  la  dis- 
corde ou  les  murmures  qui  pouvaient  y  naî- 
tre, elle  y  trouverait  toujours  des  exemples 
de  vertu  à  imiter.  La  vie  commune  des  mo- 
nastères a  pris  son  origine  dans  les  premiers 
fidèles  ,  qui  avaient  tout  en  commun  ;  cette 
vie  est  préférable  à  la  vie  privée  que  mènent 
certaines  -lierges  qui  demeurent  seules  dans 
les  villes ,  où  elles  ne  laissent  pas  d'être  oc- 
cupées de  plaire  par  la  propreté  de  leurs 
habits,  et  des  soins  de  lem'  ménage,  qui  les 
détournent  des   choses  de  Dieu.  Il  appelle 
vol  ce  qu'une  religieuse  possède  en  propre  à 
rinsu  de  la  communauté,  parce  que  tout  de- 


42,j 


vaut  être  en  commun,  l'une  ne  doit  pas  s'iip- 
proprier  ce  qui  appartient  également  aux 
autres.  S'il  est  permis  aux  hommes  charnels 
de  jurer  pour  ôter  tout  soup(;on  île  fraude, 
il  ne  l'est  pas  aux  personnes  spirituelles: 
lors  même  qu'elles  sont  assurées  qu'elles 
disent  vrai ,  elles  doivent  se  contenter  de 
dire  :  cela  est,  ou  cela  n'est  pas  ;  tout  ce  qu'elles 
ajouteraient  de  plus ,  ne  pourrait  venir  que 
du  malin  esprit.  «  N'atTectez  point  de  parler 
{\  une  de  vos  sœurs  en  particulier,  à  l'exclu- 
sion des  autres  :  ce  qu'il  est  utile  ù  l'une  de 
savoir,  ne  l'est  pas  moins  à  toutes.  Si  ce  que 
vous  lui  dites  est  bon  ,  pourquoi  ne  pas  le 
communiquer  aux  autres?  S'il  est  mauvais  , 
vous  ne  devez  ni  le  penser,  ni  le  dire  h  per- 
sonne. Saint  Léandre  finit  sa  règle  en  con- 
jurant sa  sœur  de  persévérer  dans  l'état 
qu'elle  avait  embrassé  ,  et  après  être  sortie 
de  sa  famille  et  de  son  pays,  à  l'imitation 
d'Abraham,  de  ne  pas  regarder  derrière  elle 
à  l'exemple  de  la  femme  de  Loth,  de  peur  que 
ses  sœurs  ne  voient  en  elle  ce  qu'elles  de- 
vront éviter. 

7.  Nous  ne  répéterons  point  ici  ce  que 
nous  avons  dit  ailleurs  du  discours  que  fit 
saint  Léandre  sur  la  conversion  des  Goths  : 
il  fait  partie  du  troisième  concile  de  Tolède, 
tenu  en  389.  [Il  est  reproduit  d'après  Mansi 
au  tome  LXXII  de  la  Patrologie  latine,  col. 
894  et  suiv.]  Le  saint  évêque  souscrivit  le 
troisième  aux  décrets  de  ce  concile,  en  qua- 
lité de  métropolitain  de  la  province  Bétique. 

Son  style,  quoique  concis  et  sentencieux, 
est  fort  net.  On  a  mis  à  la  fin  de  sa  règle  une 
épitaphe  qui  lui  est  commune  avec  son  frère 
saint  Isidore  et  sa  sœur  Florentine  ;  ils  étaient 
tous  trois  enterrés  dans  un  même  endroit, 
saint  Isidore  au  milieu  des  deux.  [Cette  épi- 
taphe se  lit  daus  la  Patrologie  latine,  ibid. 
col.  893]. 

8.  Jean  de  Biclar  eut  part,  comme  saint 
Léandre,  aux  persécutions  que  le  roi  Lévi- 
gilde  fit  soufi'rir  aux  catholiques  d'Espagne. 
H  était  de  la  ^  nation  des  Goths,  né  àScalabe 
ou  Santaren,  dans  la  province  de  Lusitanie. 
Étant  jeune,  il  alla  à  Constantinople,  d'où, 
après  s'être  rendu  habile  dans  les  lettres 
grecques  et  latines,  il  revint  en  Espagne  au 
bout  de  dix-sept  ans ,  dans  le  fort  de  cette 
persécution.  Lévigilde  voulut  l'obliger  â  em- 
brasser l'hérésie  arienne  ;  et  le  trouvant 
ferme  dans  la  foi  catholique,  il  le  relégua  à 


Cip.  XX. 


Dis<'our>  de 
S.  LéaoJr'! 
tur  la  convPr- 
ïion  de  Goths. 
.lutrement  de 
snD  stylo  S>  a 
épilaplm 


Cod.  Reeiil. 
P'g.  108,  paît. 
3. 


Jpan  de  Bi- 

rlar.  ^OS 

tcrils. 


Cerle  faber  {errarius  fuisse  legilur.  Cap.  xiv. 


*  IsUi.,  De  Script,  eccles.,  cap.  xxxi. 


i26 


HISTOIRE  GKNÉllAL  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Tom.  I, 
LoclioD.    Ca- 


Darcelouc.  Jean  \-  passa  dix  anni'es,  pen- 
dant lesquelles  il  eut  beaucoup  à  souUVir  des 
artifices  et  de  la  violence  des  ariens.  Ensuite 
il  fonda  un  monastère  dans  les  vallées  des 
Pyrénées,  nommé  Biclar,  où  ayant  assem- 
blé une  communauté,  il  lui  donna  une  règle 
très-utile,  non-seulement  ;\  ses  moines,  mais 
à  toutes  les  pei'sonncs  qui  craignent  Dieu. 
Nous  n'avons  plus  cette  règle.  L'abbé  Jean 
fut  depuis  élu  évèque  de  Girone.  L'année  de 
sa  mort  est  incertaine.  Il  nous  reste  de  lui 
une  Chronique  abrégée,  qu'il  composa  pour 
continuer  celle  de  Victor  de  Tunone,  com- 
mençant ;ï  la  première  année  de  Justin  le 
Jeune,  q*"ii  est  l'an,jGG,  et  finissant  à  la  hui- 
tième de  l'empereur  Maurice,  et  à  la  qua- 
trième du  roi  Récarède,  c'est-à-dire  à  l'an 
589.  Canisius  l'a  donnée  parmi  ses  Leçons 
anciennes  imprimées  à  Ingolslad,  et  depuis  à 
Anvers  par  les  soins  de  Basnage,  [et  dans 
le  tome  Xn  de  la  Bibliothèque  de  Galland, 
avec  une  notice.  Le  tome  LXXII  de  la  Pufro- 
logie  latine  reproduit  cette  édition,  qui  est 
beaucoup  plus  correcte  que  celles  de  Cani- 


sius et  de  Basnage.  Galland  s'est  servi  du 
préférence  de  l'édition  donnée  par  Scaligcr 
en  !606,  à  Amsterdam,  dans  le  T/wsaurus 
tem/jorum.  Il  cite  deux  autres  éditions,  l'une 
de  François  Schott,  Hispania  illustratn,  lora. 
lY;  l'autre  du  cardinal  d'Aguirre,  Concil. 
Jlig/jan.,  tom.  IL]  On  trouve  dans  cette  chro- 
nique la  suite  des  empereurs,  des  rois  d'Es- 
pagne et  des  papes,  et  les  faits  les  plus 
remarquables  arrivés  dans  l'Ktat  et  dans 
l'Église.  Jean  de  Biclar  parle  de  l'assem- 
blée des  évêqucs  ariens  tenue  à  Tolède  par 
ordre  du  roi  Lévigilde,  où  il  fut  ordonné  que 
les  catholiques  qui  passeraient  de  l'Église 
dans  la  secte  arienne,  ne  seraient  point  re- 
baptisés ;  qu'on  se  contenterait  de  leur  impo- 
ser les  mains,  et  de  leur  donner  Ja  commu- 
nion. Il  fait  aussi  mention  du  concile  assem- 
blé en  la  même  ville  sous  le  roi  Récarède,  où 
ce  prince  présenta  sa  profession  de  foi,  et  où 
se  fit  la  réunion  des  Goths  à  l'Église  catho- 
lique, après  qu'ils  eurent  abjuré  leurs  er- 
reurs. 


CHAPITRE  XLVUI. 


Jean  le  Jeûnenr  patriarche  de  Constantinople  [595]  [écrivain  grec],  Licinien 

évêqae  de  Carthagène  [584J,   Sévère  étfêqce  de  Malaga  [vers 

le  même  temps]  [écrivains  latins]. 


Jp.in  le  JoiV 
neiir,  [lat 


1.  Six  jours  après  la  mort  du  patriarche 
é'Iî'de'Toi's    Eutychius,  arrivée  le  5  avril  582,  ou  élut 

lnnliiio;le,  in  ** 

pour  lui  succéder  sur  le  siège  de  Constan- 
tinople, Jean,  diaci'c  de  la  grande  église  de 
cette  ville,  surnommé  le  Jeûneur.  La  réputa- 
tion de  savoir  et  do  vertu  qu'il  s'était  acquise, 
réleva  à  celle  dignité,  qu'il  remplit  en  vrai 
pasteur,  employant  tous  ses  levenus  et  tous 
ses  soins  aux  besoins  do.  son  troupeau,  ])on- 
danl  qu'il  se  refusait  iï  lui-même  les  commo- 
dités de  la  vie,  et  vivant  dans  une  abstinence 
conlinuiiUe  et  dans  un  jeûne  très-rigoureux, 
d'où  lui  vint  apparcmuient  le  siu'iiom  de  Jeû- 
neur, il  est  qualifié  de  moine  dans  un  dis- 
cours sur  la  pénitence,  dont  on  le  fait  au- 
teur; et  Jean  Diacre,  qui  écrivait  dans  le 
ix°  '  siècle,  le  qualifie  de  môme.  Sa  vie  dure 


et  pénilcute  pendant  son  épiscopal ,  semble 
être  une  troisième  preuve  qu'il  avait  fait 
profession  de  la  vie  monastique  avant  d'être 
admis  dans  le  clergé  de  Constantinople  par 
le  patriarche  Eutychius.  Les  Grecs'  le  font 
originaire  de  cette  ville  ,  et  ajoutent  qu'il 
y  exerça  d'abord  le  métier  de  sculpteur. 
Dans  un  concile  tenu  h  Conslantinople  en 
SSn,  Jean  prit  le  litre  d'évéque  universel  ;  le 
pape  Pelage  II  en  ayant  été  informé  ",  cassa 
les  actes  de  ce  concile,  et  défendit  à  l'archi- 
diacre Laurent,  qui  était  son  nonce  auprès 
de  i'Einiierptir,  d'assister  i\  la  messe  avec  le 
patriarche  Jean.  Nous  verrons  dans  l'ai-licle 
de  saint  Grégoire ,  successeur  de  Pelage , 
([uelles  fiH-ent  les  suites  de  celte  alfaire.  Elle 
n'cnqièciia  pas  que  saint  Grégoire  n'adres- 


'  Jn.iiinc8l)iac,lil).  \\\DcVitnS.Greg.,n\\m.'\. 
*  Méiitjcs  nu  K>iijii(l  jciiii-  (U  Fcjili'iiibn:,  on  l'His- 


toire iin>n.isli(|nr  il'Orieiil,  lib.  IV,  ciip.  xvu. 
>  fireu-,  lil).  V,  Liiisl.  ;8. 


[vC  SIÈCLE.]        CHAPITRE  XLVIII.  —  JEAN 

sAt  i^i  Jean,  comme  aux  auties  patriarches 
d'Orient,  les  lettres  synodales  du  loiicile  qu'il 
avait  assemblé  à  Home  en  îiill.  Deux  ans 
après  il  lui  écrivit  une  lettre  en  particulier, 
pour  Ini  recommander  Sabinien ,  iju'il  en- 
voyait en  qualité  do  son  nonce  ù  Constanli- 
nople.  11  lui  avait  écrit  deux  autres  lettres 
au  sujetd'un  prêtre  nommé  Jean,  et  de  ijuel- 
qnes  moines  d'Isaurie  accusés  d'hérésie , 
dont  l'un,  qui  était  prôtre  et  se  nommait 
Anasiase  ,  avait  reçu  des  coups  de  bâton 
dans  l'église  de  Constantiuople.  Le  patriar- 
che Jean  répondit  qu'il  ne  savait  ce  que  c'é- 
tait ;  sur  quoi  saint  Gréifoire  lui  dit  dans  la  ' 
lettre  dont  il  avait  chargé  Sal)inien  :  «  J'ai  été 
fort  surpris  de  la  réponse  que  vous  m'avez 
faite  ;  si  vous  dites  vrai,  qu'y  a-t-il  de  pire 
que  de  voir  les  serviteurs  de  Dieu  ainsi  trai- 
tés, sans  que  le  pasteur  qui  est  présent  en 
sache  rien  ?  Mais  si  vous  le  savez,  que  répon- 
sip,>,  II.  drai-je  à  cela,  tandis  que  l'Écriture  dit  :  La 
bouche  qui  ment  tue  /'«m<?  ?  Est-ce  là  qu'abou- 
tit votre  abstinence?  Ne  vaudrait-il  pas  mieux 
voir  entrer  de  la  chair  dans  votre  bouche, 
que  d'en  voir  sortir  un  discours  faux  où  l'on 
se  joue  du  prochain?  Dieu  me  garde  d'avoir 
de  vous  cette  pensée.  Ces  lettres  portent 
votre  nom  ;  mais  je  ne  crois  pas  qu'elles 
soient  de  vous  :  elles  sont  plutôt  de  ce  jeune 
homme  qui  est  auprès  de  vous  ,  qui  ne  sait 
encore  rien  des  choses  de  Dieu,  qui  ne  con- 
naît pas  les  entrailles  de  la  charité  ,  et  que 
le  monde  accuse  de  plusieurs  crimes.  Si 
vous  continuez  à  l'écouter,  vous  n'aurez 
point  de  paix  avec  vos  frères.  »  On  voit  par 
une  autre  lettre*  de  ce  pape  ,  que  Jean  con- 
tinua jusqu'à  sa  mort  de  prendre  le  titre  de 
patriarche  universel;  car  cette  lettre  est  du 
1"  janvier  de  l'an  395  ,  et  Jean  mourut  au 
mois  de  septembre  de  la  même  année,  après 
treize  ans  et  cinq  mois  d'épiscopat.  L'em- 
pereur '  Maurice  lui  avait  prêté  une  somme 
considérable ,  dont  Jean  lui  avait  fait  une 
obligation  qui  portait  hypotlièque  sur  tous 
ses  biens  ;  mais  après  sa  mort  ce  prince  ne 
trouva  chez  lui  qu'une  couchette  de  bois, 
une  mauvaise  couverture  de  laine ,  et  un 
manteau  tout  usé.  Admirant  la  vertu  du  pa- 


UE  CONSTANTINOPLE,  ETC.  i27 

triarche,  il  déchira  l'obligation  ,  et  fit  porter 
au  palais  ces'  pauvres  meiiliies,  dont  il  fai- 
sait plus  de  cas  que  de  l'or  et  de  l'argent.  Il 
couchait  sur  ce  petit  lit  pendant  le  Carême. 

2.  Saint  Isidore  de  Séville  n'attribue  '  d'au-  kt  u  d« 
très  écrits  a  Jean  le  JeTineiir,  qu  une  lettre  sur  •""■ 
le  baptême  à  saint  Léandre,  son  frère  et  son 
prédécesseur  sur  le  siège  épiscopal  de  cette 
ville,  dans  laquelle  Jean  ne  disait  rien  de 
nouveau,  et  ne  faisait  que  lapporter  les  sen- 
timents des  anciens  sur  les  trois  immersions. 
Nous  n'avons  plus  cette  lettre,  mais  on  nous 
a  donné  d'autres  ouvrages  sous  le  nom  de 
Jean,  savoir  :  une  homélie  assez  longue  sur 
la  pénitence,  la  continence  et  la  virginité, 
une  sur  les  faux  prophètes  et  les  faux  doc- 
tcm's,  un  pénitenliel  et  un  discours  où  il 
prescrivait  l'ordi-e  que  l'on  doit  garder  dans 
la  confession  de  ses  péchés.  Les  deux  home-  ^><><:  '.<»"• 
lies  sur  la  pénitence  et  sur  les  faux  prophè- 
tes ont  souvent  été  imprimées  parmi  celles 
de  saint  Chrysoslome,  mais  on  est  enfin  con- 
venu qu'elles  ne  sont  point  de  lui  ;  le  style 
de  la  seconde  est  bas  et  rampant,  l'auteur  ne 
savait  pas  même  sa  langue  naturelle,  ou  du 
moins  il  en  ignorait  les  règles,  puisqu'on  y 
trouve  plusiem-s  fautes  contre  la  grammaire. 
Elle  ne  peut  donc  faire  honneur  ni  à  saint 
Chrysoslome  ni  à  Jean  le  Jeûneur  :  la  pre- 
mière vaut  beaucoup  mieux.  Dom  Montfau- 
con,  qui  a  cru  avec  Vossius  et  Fearson  qu'elle 
était  de  Jean,  ne  l'a  point  mise  dans  son  édi- 
tion des  œuvres  de  saint  Chrysoslome  ;  mais 
elle  se  trouve  dans  le  premier  tome  de  celle 
de  Morel,  et  dans  le  septième  de  celle  de  Sa- 
vilius.  Le  Pénitenticl  a  été  imprimé  par  les 
soins  du  père  Morin,  à  Paris  en  1631,  sous 
le  nom  de  Jean  le  Jeûneur.  Ce  père  doute 
toutefois  qu'il  soit  de  ce  patriarche,  parce 
qu'on  y  rencontre  plusieurs  choses  qui  sont 
d'un  siècle  postérieur  au  sien.  On  ne  connais- 
sait pas,  en  effet,  dans  le  vi=  siècle  trois  ca- 
rêmes dans  l'Église,  communs  aux  laïques  et 
aux  clercs  :  un  avant  la  fête  de  saint  Phi- 
lippe, un  avant  la  fête  des  douze  apôtres,  le 
troisième  avant  Pâques.  L'auteur  du  Péiii- 
tentiel  les  *  marque  tous  trois  ;  il  vivait  donc 
après  le  vi°  siècle.   Il  est  parlé  de  ces  trois 


'  Greg.,  Epist.  53,  lili.  III. 

»  Greg.Jib.  VII,  E7)is(.  4. 

'  Theophyl.,  lib.  VII,  cap.  vi. 

*  loannes  Grœco  eloquio  edidil  de  sacrameiito 
taplismalis  rescniduin  ad  beiUiv  recordalionis 
doininum  inetim  el  piu'decesaorem  Lcandrum  aii^ 


tislitem.  In  quo  nihil  proprium  ponit,  sed  tan- 
tuinmodo  antiquorum  Patrum  replient  de  trina 
mersione  senteiiUas.  Isid.,  De  Script,  écoles.,  cap. 
x.wi. 

'  Decernimus   aulem  sœcularibus  ut  a  carne 
abslini'iint  dudbus  quadragesimLi,  sancli  scilicei 


428 


HISTOIRE  G1';NI':IIALE  des  AUTEUllS  ECCLESIASTIQUES. 


éTèqus        dti 

Ses  «cnls. 
Isidor.  de 
Scrir-E-eles., 
cap.  JtiiA. 


carêmes  dans  un  '  traité  qui  porte  le  nom  d'A- 
nastasc  le  Sinaïte,  mais  ijui  n"en  iicut  être 
puisqu'il  fut  écrit  après  le  '  septième  concile 
général,  c'est-à-dire  après  l'an  787,  sur  la 
fin  du  VIII'  siècle.  Le  Pénitentiel  attribué  à 
Jean  le  Jeûneur  peut  être  du  même  temps. 
Le  père  Morin  doute  éjxalement  que  l'autre 
opuscule  qu'il  a  fait  imprimer  sous  le  litre 
de  Méthode  de  confesser  ses  péchés  à  son  jière 
spirituel,  soit  du  patriarche  de  Constantino- 
ple  ;  il  penche  <i  croire  que  ce  n'est  ([u'un 
extrait  du  Pénitentiel  rédigé  en  une  instruc- 
tion familière,  ce  qui  a  beaucoup  de  vrai- 
semblance. Les  Grecs  du  moyen  âire  n'ont 
pas  laissé  d'attribuer  ces  deux  opuscules  à 
Jean  le  Jeûneur,  comme  on  le  voit  par  di- 
vers manuscrits  grecs  qui  portent  son  nom  ; 
Lambécius  en  cite  plusieurs  dans  le  qua- 
trième hvre  '  de  sa  bibliothèque.  [Le  tome 
LXXXVUI  de  la  Patrologie  grecque  reproduit 
le  Pénitentiel,  le  sermon  sur  la  Confession 
et  la  Pénitence,  le  sermon  sur  la  Pénitence, 
la  Continence  et  la  Virginité,  col.  188'J  et 
suiv.] 

3.  Xous  ne  savons  de  Licinien  que  ce  que 
saint  Isidore  de  Séville  nous  en  a  appris.  Il 
était  évèque  de  Carthagèue  ,  et  savant  dans 
les  saintes  Ecritures.  Entre  plusieurs  lettres 
qu'il  écrivit,  il  y  en  avait  une  sur  le  sacre- 
ment '  de  baptême,  d'autres  à  l'abbé  En- 
trope,  qui  fut  depuis  évèque  de  Valence. 
Saint  Isidore  ajoute  qu'il  n'avait  pas  con- 
naissance d'autres  fruits  de  son  travail  et 
de  son  industrie;  que  Licinien  lleurit  sous 
l'empire  de  Maurice,  qu'il  mourut  à  Cons- 
tanlinople  empoisonné,  comme  ou  le  croyait, 
par  ses  ennemis,  ce  qui  ne  pouvait  nuire  à 
son  àme,  puisqu'il  est  écrit  :  Quand  le  juste 
mourrait  d'une  mort  précipitée,  il  sera  dans  le 
repos.  Il  nous  reste  une  lettre  de  Licinien  au 
pape  saint  Grégoire,  dans  laquelle  il  lui  té- 
moigne combien  il  était  content  de  la  lec- 
ture de  son  livre  des  Règles,  c'est-à-dire  de 
son  Pastoral  :  saint  Léandre  l'avait  fait  con- 
naître aux  Églises  d'Espagne.  Licinien  trouve 
dans  ce  livre  d'excellents  préceptes  sur  la 
pratique  de  toutes  sortes  de  vertus,  non-seu- 
lement pour-  les  évêques,  mais  pour  ceux 


même  à  qui  le  gouvernement  des  âmes  n'est 
pas  conlié,  et  une  doctrine  qui  s'accorde 
parfaitement  avec  celle  des  plus  fameux  doc- 
teurs de  l'Église,  saint  Hilaire,  saint  .\m- 
broise,  saint  Augustin,  saint  Grégoire  de  Na- 
zianze  ;  ce  qu'il  prouve  en  rapportant  les 
termes  de  quelques-uns  d'entre  eux,  en  par- 
ticulier de  saint  Hilaire,  de  saint  Ambroise 
et  de  saint  Augustin;  mais  comme  ce  saint 
pape  défendait  dans  ce  livre  d'ordonimr 
évèque  un  homme  sans  science,  Licinien 
dit  avec  beaucoup  d'humilité  ,  que  dans  ce 
cas  on  aurait  dû  l'exclure  de  l'épiscopat , 
puisqu'il  se  reconnaissait  du  nombre  des 
ignorants,  et  qu'il  faudrait  en  exclure  beau- 
coup d'autres  qui  n'avaient  pas  les  talents  que 
saint  Grégoire  demande.  «Ne  suflirait-ilpas, 
ajoute-t-il,  pour  être  élevé  à  ce  degré  d'hon- 
neur, de  savoir  Jésus-Christ,  et  Jésus-Christ 
crucifié?  iii  cela  nesutlit  pas,  je  ne  vois  point 
qui  pourra  être  évèque,  en  supposant  néces- 
saires toutes  les  quahtés  que  vous  exigez  dans 
votre  livre  pour  l'épiscopat.»  Il  marque  que 
l'on  avait  soin  dans  l'église  d'Espagne  d'ex- 
clure du  sacerdoce  les  bigames  ;  mais  dans 
la  frayeur  que  lui  avait  causée  le  Pastoral  de 
saint  Grégoire  ,  il  le  prie  de  lui  écrire  quel- 
ques mots  de  consolation,  craignant  que  le 
manque  de  sujets  ne  l'ait  engagé  à  ordonner 
prêtres  ceux  qui  n'avaient  pas  peut-être 
toutes  les  qualités  requises.  11  s'excuse  sur 
le  besoin,  disant  que,  si  l'on  ne  voulait  or- 
donner que  ceux  qui  en  sont  dignes  par  la 
réunion  de  tous  les  talents  qui  forment  de 
grands  évêques,  la  foi  ne  serait  plus  prè- 
chée,  ni  le  baptême  administré  (l'Apotre 
toutefois  ordonne  l'un  et  l'autre.)  11  faudrait 
aussi  faire  cesser  la  célébration  des  saints 
mystères,  qui  ne  se  fout  que  par  les  prêtres 
et  les  ministres  de  l'Hglise.  Saint  Léandre, 
évèque  de  Séville,  avait  fait  voir  à  Licinien  les 
jl/ora/e.'i  de  saint  Grégoire  surJob.s.ans  lui  don- 
ner le  temps  de  les  lire  :  il  prie  donc  le  Pape  de 
les  lui  envoyer,  parce  qu'il  n'était  pas  con- 
tent des  homélies  d'Origène  sur  ce  sujet , 
mises  en  latin  par  saint  Hilaire  de  Poitiers, 
Il  lui  demande  aussi  ses  autres  ouvrages  de 
morale,  dont  il  faisait  mention  dans  sou  Pas- 


I.  Cor. 


Philippi  et  sanctorum  duodecim  apostolorum.  In 
magnn  autem  qtiadragesima  si  fieri  pntest  a  pis- 
cibus  sœculares  ahslinebunt  prwler  sabbalha  et 
dominicas...  oleo  vero  monachi.  I'<ruit. ,  pag. 
89. 

'  Aiiafl.  Siuaïln.  Traclatu  de  tribus  quadrage- 
siiiiis,  loiu.  III  ilonumenlor.  Cotelerii,  pag.  420. 


•  Id  servalum  ftnl  a  sanctis  patribus  et  seplem 
cnnciliis  generatibus.  Ibid.,  pag.  430. 

»  Uinlii'iius,  lit).  IV,  pag.  196,  etlih.  V,  pag.23fi, 
.'t  lib.  VIII,  pag.  472. 

'  Cnjus  Liciniani  nonnull(U  legimus  epislolas ; 
de  sucnimenti)  denique  baplismatis  unain.  Isid., 
!ib.  De  Scriph  eccks.,  cap.  xxil. 


[VTT"  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT 

toral.  Il  finit  pn  ces  termes  :  ((  Que  Pien  con- 
serve en  Sidilé  vol re^  cou ronnf  \tonr  rinslriic- 
tion  de  l'Église.  »  C'était  un  litre  d'honnenr 
que  les  évéqncs  donnaient  au  Pape,  comme 
on  le  voit  par  saint  Aiii;iistin  et  piiisimirs 
anciens,  nommément  par-  Kniinde  dans  une 
de  ses  lettres  au  pape  Symma(juc.  La  lettre 
de  Licinicn  se  trouve  dans  le  second  livre  des 
lettres  de  saint  Gréiîoire  ,  où  elle  est  la  cin- 
quante-(]uatri('Mno.  [On  la  trouve  aussi  dans 
le  tome  L.XIl  de  la  Patrolngic  latine,  col.  681) 
et  suiv.  avec  deux  autres  lettres  éditées  d'a- 
près les  manuscrits  de  Tolède.  La  première 
est  écrite  par  Licinicn  et  Sévère  le  Petit  nu 
diacre  Epipliane  ;  on  y  montre  que  les  anges 
et  les  ihnes  douées  de  raison  sont  des  es- 
prits, et  qu'ils  n'ont  pas  de  corps.  On  prouve 
cette  vérité  par  l'Écriture  ;  on  y  réfute  le.s  ob- 


OnÉGGIRE  LE  fiRAND,  PAPE.  42-.) 

jfictions.  Les  témoignages  de  saint  Jérôme, 
de  saint  Augustin,  de  Claudien  qu'on  qua- 
lifie d'homme  très-disert  et  qui  a  écrit  trois 
livres  sur  l'incorporalité  de  l'âme,  sont  invo- 
qui's.  La  seconde  lettre  est  adressée  à  Vin- 
cent, évèque  de  l'iled'Iviça,  autrement  Klju- 
sus.  Elle  est  contre  ceux  qui  croyaient  que 
des  lettres  étaient  tombées  du  ciel  sur  le 
tombeau  de  saint  Pierre  h  Homo.] 

■4.  Sévère,  évèque  de  Malaga,  ami  et  col- 
lègue de  Licinien,  fleurit  et  mourut  sous  le 


Stvir».  h:. 
(]iie  do  Mul.f 
Ku    Si>s    icrits 

rcïnc  de  1  empereur  Maurice.  Il  écrivit  un    ''■■'"'■•      "" 

.     ,  i>:ripfor.    Ec- 

petit  traite  contre  Vincent  de  Saragosse,  qui     ' 
avait  quilté  l'Eglise  catholique  pour  passer 
dans  le  parti  des  ariens,  et  un  livre  sur  la 
virginité  à  sa  sœur,  intitulé  :  l'Anneau.  Ces 
deux  écrits  sont  perdus. 


des. 


CHAPITRE   XLIX. 
Saint  Grégoire  le  Grand,  pape  et  doctenr  de  l'Église  [6041. 


f'Iro  CD  -*!'. 
kio  éJuca- 
<0D. 


ARTICLE  I". 


HISTOIRE  DE  S.\  VIE. 


1.  La  ville  de  Rome  fut  le  lieu  de  la  nais- 
sance de  saint  Grégoire  ;  son  père  se  nom- 
mait Gordien  ,  et  sa  mère  Sylvie.  Ils  étaient 
l'un  et  l'autre  également  considérables  par 
la  noblesse  de  leur  naissance  et  par  la  sain- 
teté de  leur  vie.  Gordien  était  du  nombre 
des  sénateurs,  mais  il  renonça  aux  dignités 
du  siècle  pour  embrasser  l'état  ecclésias- 
tique. On  dit  '  qu'il  fut  fait  diacre  régio- 
naire,  c'est-à-dire  l'un  des  sept  diacres  car- 
dinaux, qu'on  nommait  régionaires  à  cause 
que  Rome  ayant  été  partagée  en  sept  quar- 
tiers ou  régions ,  cbacim  de  ces  diacres 
avait  soin  dans  son  quartier  des  pauvres 
et  des  hôpitaux  appelés  diaconies.  Sylvie  se 
retira  dans  un  monastère  proche  le  portique 
de  saint  Paul ,  nommé  Celle-Neuve.  Saint 
Grégoire  ,  par  un  etfet  de  sa  piété  et  de  sa 

•  Incolumem  coronam  vestram  ad  eriidiendam 
Ecclesiam  suam  sancla  Trinitas  Dcus  conserrare 
dignetur.  Licwi.,  Epist.  ad  Greg.  Papani,  tome  11, 
pag.  622.  (iVorœ  edit.', 

'  Erigalparvulos  implorata  toronœ  veslrœ  mi- 
seratio.  Eunod.,  lib.  IV,  Epist.  22,  ad  Symmachum 
Papam. 


tendresse  envers  son  père  et  sa  mère,  Attirer 
leurs  portraits  ,  que  l'on  conserve  encore  à 
Rome  avec  le  sien  dans  une  petite  chapelle  de 
Saint-André.  On  ne  donne  que  des  conjectu- 
res sur  l'année  de  sa  naissance,  et  elles  se  ré- 
duisent h  la  fixer  en  540.  Dès  son  enfance  il 
fut  instruit  *  avec  tant  de  soin  dans  toutes 
les  disciplines  et  dans  tous  les  arts  libéraux, 
qu'il  n'y  avait  personne  qui  ne  lui  cédât 
en  érudition  dans  Rome.  D  avoue  ^  toutefois 
qu'il  ne  savait  pas  le  grec  ;  mais  ses  lettres, 
surtout  la  quarante-cinquième  du  treizième 
livre,  font  voir  qu'il  avait  très-bien  étudié 
les  lois.  D'un  esprit  et  d'un  jugement  mûr, 
dans  *  un  âge  peu  avancé  ,  il  écoutait  avec 
attention  les  paroles  sentencieuses  des  an- 
ciens, et  lorsqu'il  entendait  dire  des  choses 
dignes  d'être  retenues,  il  les  gravait  profon- 
dément dans  sa  mémoire.  Il  mettait  '  son  plai- 
sir à  converser  avec  les  vieillards,  pour  pro- 
fiter de  leur  sagesse. 

2.  Les  Lombards  venaient  de  ravager  l'I- 

'  Joan.   Diac,  lib.  IV  De  Greg.    VU  ,  nuin.   43, 
et  Baronius  ad  an.  604. 
'  Paiilus  Diac,  num.  2. 
5  Greg.,  lil).  VII,  Epist.  32. 
^  Joan.  Diac,  lib.  1,  num.  3. 
'  Greg.,  Dialogo  1,  cap.  ix. 


% 


430 


HISTOmE  GÉNI^.RALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


i,r«i.ord.R^  talie,  en  dépouillant  les  églises,  tuant  les 
prêtres  et  les  evéqucs,  et  laissant  paitout  des 
marques  de  leurcriiautii  et  Je  leur  avarice, 
lorsque  saint  Grégoire  fut  obligé  de  prendre 
part  aux  atl'aires  de  la  république.  On  lui 
donna  la  charge  de  '  préteur,  c'est-à-dire  de 
principal  magistrat  de  la  ville  pour  la  justice 
civile.  Ce  fut  pendant  qu'il  exerçait  cette 
charge,  qu'il  souscrivit,  avec  plusieurs  per- 
sonnes de  qualité,  à  la  confession  de  foi  que 
Laurent,  évêquc  de  Milan,  avait  présentée 
au  pape  pour  la  condamnation  des  Trois- 
C/iapitres.  Ce  pouvait  *  être  vers  l'an  374, 
dans  les  premières  années  de  l'épiscopat  de 
Laurent,  sous  le  pontiikat  de  Benoit  sur- 
nommé 'Bonose.  Quelqu'éloigné  que  saint 
Grégoire  fut  du  luxe  et  du  faste,  il  se  crut 
obligé,  pour  faire  honneur  à  sa  charge,  de 
porter  '  des  habits  de  soie  tout  brillants  d'or 
et  de  pierreries.  Il  avait  dès  lors  résolu  de  se 
donner  à  Dieu  ;  mais  il  se  persuadait  qu'il 
pouvait  le  servir  également  au  milieu  des 
grandeurs  et  des  embarras  du  monde  :  ainsi 
différa  - 1  -  il  longtemps  son  eutière  conver- 
sion. 11  s'accuse  de  cette  faute  dans  im  en- 
droit de  ses  '  écrits. 

3.  Étant  devenu,  parla  mort  du  sénateur 
Gordien  son  père ,  possesseur-  des  grands 
biens  de  sa  famille,  il  '  en  fonda  six  monastères 
en  Sicile,  leur  donnant  des  terres  et  des  fonds 
autant  qu'il  était  nécessaire  pour  la  subsis- 
tance des  religieux.  Il  en  établit  un  septième 
k  Home  dans  sa  propre  maison,  sous  le  nom 
de  Saint-André,  qui  existe  encore.  Il  était  oc- 
cupé par  des  moines  grecs  du  temps  de  Jean 
Diacre,  après  l'avoir  été  par  des  religieux  de 
saint  Benoit;  il  appartient  présentement  aux 
Camaldules.  Ce  dernier  monastère  fut  celui 
qu'ilchoisit  pour  le  lieu  de  sa  retraite.  D  y  prit 
l'habit  monastique,  et  vécut  premièrement 
sous  la  tliscipline  del'abbe  Hilarion, puis  sous 
l'abbé  Maximien,  qui  fut  quelque  temps  après 
fait  évéque  de  Syracuse.  Il  pourrait  paraî- 
tre suiprenant  que  saint  Grégoire  ait  choisi 
sa  propre  patrie  pour  y  vivTC  caché,  si  l'on 


Il  qDille  le 
monde  it  .0 
retire  dan5  ua 


ne  savait  que,  toute  l'Italie  étant  alors  dans 
le  trouble  par  les  ravages  des  barbares,  il 
n'était  pas  sur  de  demeurer  partout  ailleurs 
qu'ù  Rome,  défendue  et  protégée  par  les 
apôtres  saint  Pierre  et  saint  Paul,  comme 
saint  Grégoire  le  répète  souvent  dans  ses 
lettres.  Il  est  inutile  de  s'étendre  beaucoup 
à  montrer  qu'il  fit  véritablement  profession 
de  la  vie  monastique,  puisqu'il  assure  lui- 
môme  °  qu'il  a  eu  pour  supérieur  dans  le 
monastère  de  Saint-André  l'abbé  Valentin,  et 
qu'il  dit  ailleurs  qu'il  avait  vu  Maxime  moine 
lorsqu'il  l'était  lui-même';  siint  Grégoire  de 
Tours,  et  Jean  Diacre,  sont  formels  là-des- 
sus. La  règle  qu'il  professa  fut  celle  de  saint 
Benoit  :  on  pourrait  en  apporter  un  grand 
nombre  de  preuves;  mais  il  sullit  de  remar- 
quer que  les  religieux  qu'il  envoya  pour  con- 
vertir l'Angleterre,  poitèrent  avec  eux  cette 
règle,  et  qu'ils  l'y  établirent  :  or  ils  étaient 
du  monastère  de  saint  André,  où  ils  vivaient 
avec  saint  Grégoire,  et  pratiquaient  une 
même  i  ègle.  Eussent-ils  porté  avec  eux  une 
autre  règle  que  celles  qu'ils  suivaient?  Saint 
Grégoire  s'appliqua  tellement  à  mortifier  son 
corps  par  le  jeune  '  et  par  l'étude  des  livres 
saints,  qu'il  s'all'aililit  l'estomac,  et  qu'il  tom- 
bait en  syncope  s'il  ne  prenait  souvent  de  la 
nourriture.  Ce  qui  l'affligeait  le  plus,  était  de 
ne  pou  voir  jeûner  le  samedi-saint,  jour  auquel 
tout  le  monde  jeûnait  ^,  même  les  enfants. 
Il  demanda  A  Dieu  avec  beaucoup  delîirmes'", 
de  pouvoir  jeûner  au  moins  ce  saint  jour. 
Quelque  temps  après  il  se  sentit  fortifié,  et  ne 
pensa  plus  ni  à  la  nourritui-e,  ni  à  la  mala- 
die. Sa  nourriture  ordinaire  était  des  légu- 
mes crus  "  que  sa  mèi-e  Sylvie  lui  fournis- 
sait; elle  les  lui  envoyait  trempés  dans  une 
écuelle  d'argent,  qu'il  fit  un  jour  donnera 
un  pauvi'e,  n'ayant  plus  autre  chose  en 
main. 

4.  Passant  par  le  marché  de  Rome,  où 
l'on  avait  exposé  en  vente  des  marchandises 
arrivées  depuis"  peu,  il  aperçut  des  escla- 
ves d'une  blancheur  et  d'une  beauté  singu- 


de.  Ariklax. 


•  Greg.,  lib.  IV,  Epist.  2. 


'  .Mabil.,  Mus.  Italie,  loiiie  1,  p.ig.  11. 
»  Paulus  L)inr.,  nuiii.  ^. 

*  Prœfat.  Moral,  in  Job. 

'  ijreg.  Turun.,  lil).  X,  rap.  i;  Joan. Diac,  lib.  I, 
auiii.  5,  et  Paulus  Uiai;.,  niim.  5. 

•  Silere  non  debeo  quoi  de  hoc  vira,  abbalc 
quondam  meo,  revtrendisitimo  Valentino  narrante 
agnoii.  Greg.,  lib.  I  Dialog.,  cap.  iv.  J!ic  mihi  in 
mottaflerio  posilo  valde  fainiliaris  juitgcbatur. 
Ibiii.,  Ijb.  III,  cap.  xxxvjii.  ^aln  quidam  mecum 


in  monasterio  frater  Antonius  nomine,  vivehal. 
Ibiii.,  lib.  IV,  cap.  XLvii.  Filium  suum  nowine 
Maximum,  quem  ipse  jam  monachus  monaclnim 
vidi.  Ibid.,  cap.  xxxviii. 

^  Greg.  Turon.,  lib.  X,cap.  I;  Joan.  Diac,  lib.  I, 
mim.  5,  6  cl  7. 

'  Joau.  Uiiic,  lib.  1,  num.  7.  —  •  Ibid. 

•o  Greg.,  Diatogo  3,  cap.  xxxiu. 

>i  Joan.  Diac,  ubi  sup.,  uuin.  9. 

>*  Joau.  Diac,  lib.  I,  num.  21  ;  Ucda,  lib.  Il  lli.tl. 
Angl.,  cap.  I. 


.  i  Con- 


[vil'  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT 

lièrcs.  11  ileniaiula  an  iiiairhaiitl  (|ui  les  avait 
auienrs  pour  1rs  vt-iulie,  df.  ([uc]  pays  ils 
étaient,  et  d'où  ils  venaient.  «De  l'Ile  de  Bre- 
tagne,ri'pondil-il,  dont  tous  les  lia bilanls  sont 
beaux  de  visagi\et  aussi  hicn  faits.  »  «  Ca'.h  in- 
sulaires sont-ils  chriîtiens?»  demanda  saint 
Grégoire.  «  Non,  répliqua  le  marchand,  ils 
sont  encore  païens.  »  «  (juel  dommage,  dit  le 
saint  en  soupirant,  que  de  si  beaux  visages 
soient  sous  la  puissance  du  démon!))  En  in- 
terrogeant encore  le  marchand,  il  apprit 
qu'ils  étaient  de  la  nation  des  Anglais.  Ce 
nom  lui  parut  convenable  à  ces  peuples,  à 
cause  qu'en  latin  il  s'en  faut  peu  qu'il  ne  si- 
gnifie un  ange,  et  que  ces  Anglais  lui  parais- 
saient d'une  beauté  angélique.  11  sut,  par  la 
suite  de  sa  conversation  avec  le  marchand, 
que  ces  jeunes  esclaves  étaient  de  la  province 
de  Dcïri,  à  présent  dans  le  duché  d'York. 
Aussitôt  il  alla  trouver  le  pape  Benoît,  le  pria 
d'envoyer  dans  la  Bretagne  des  ministres  de 
!a  "parole  de  Dieu,  et  s'otl'rit  lui-même.  Le 
l'ape  y  consentit;  mais  le  peuple  romain, 
averti  du  départ  de  saint  Grégoire,  se  plai- 
gnit à  haute  voix  de  l'éloiguement  d'un  hom- 
me si  nécessaire  à  la  ville,  et  demanda  son 
rappel  en  criant,  lorsque  le  Pape  passait  pour 
aller  k  l'église  de  Saint-Pierre  :  Vous  avez  of- 
fensé saint  Pierre,  vous  avez  détruit  Rome  en 
laissant  aller  Grégoire.  Benoit  étonné  de  ces 
cris,  envoya  promptemeut  des  courriers  pour 
le  rappeler.  Il  avait  déjà  fait  trois  journées, 
et  il  pressait  ses  compagnons  d'avancer,  pré- 
voyant ce  qui  arriverait;  mais  contraints  de 
prendre  quelque  repos,  à  l'heure  de  midi,  à 
cause  de  leur  lassitude,  ils  furent  devancés 
par  les  courriers  qui  les  obligèrent  de  retour- 
ner. 

5.  S.  Grégoire,  de  retour  à  Rome,  continua 
à  gouverner  son  monastère.  Le  Pape,  voyant 
ses  progrès  dans  la  vertu,  l'ordonna  l'un  des 
sept  diacres  de  l'Église  romaine ,  soit  pour 
lui  servir  à  l'autel,  soit  '  pour  lui  venir  en  aide 
dans  l'administration  des  affaires  ecclésias- 
tiques, qui  avaient  besoin  de  reprendre  une 
uouveUe  face  ;  car  les  diacres  avaient  alors 
la  principale  part  au  gouvernement  de  l'É- 
glise après  l'évèque.  Quelque  temps  après,  le 
pape  Pelage  II,  qui  avait  succédé  à  Benoit, 
mort  le  30  juillet  de  l'an  377,  l'envoya  à  Cons- 
tantinople  en  qualité  d'apocrisiaire,  ou  de 
nonce  apostolique.  C'était  vers  l'an  378,  ou 


Il  r<M-lo 
nu  j/uliiuictio 
Kii'v.hiu.  .  ri 
la  rail  charger 
do  .inliiiiutil, 
en    ,»i. 


GUÉGniIlE  LE  GRAND,  PAPE.  4.31 

du  moins  l'annt'e  suivante,  lorsque  Tibère, 
après  la  mort  de  Justin,  gouvernait  seul 
l'Enqjire.  Il  était  'd'usage  que  les  Papes  eus- 
sent toujours  un  nonce  à  la  cour  impériale  ; 
et  quand  ils  y  inaui|uaient,  les  empereurs  en 
faisaient  des  plaintes.  Saint  Grégoire  emme- 
na 'avec  lui  [)lusieurs  moines  de  sa  commu- 
nauté, pour  continuer  avec  eux  les  exercices 
de  la  vie  monasfi(iuc,  (d  s(;  remettre  parleur 
compagnie  de  l'agitation  des  atfaires  tempo- 
relles. 

6.  Eutychius,  patriarche  de  Constantino- 
ple,  avec  (jui  sa  charge  l'obligeait  de  com- 
muniquer souvent,  était  dans  l'erreur  au  su- 
jet de  nos  corps  après  la  résurrection,  croyant 
qu'alors  ils  ne  seraient  plus  palpables,  et 
qu'ils  deviendraient  plus  subtils  que  le  vent 
et  que  l'air  le  plus  pur;  il  avait  même  publié 
un  écrit  pour  établir  son  sentiment.  Saint 
Grégoire  lui  résista,  ne  croyant  pas  devoir 
soutl'rir  que  cette  hérésie  s'établit  sous  ses 
veux  dans  la  ville  impériale,  d'où  elle  pour- 
rait se  lépandre  facilement  dans  tout  l'em- 
pire. Il  eut  avec  le  patriarche  des  conféren- 
ces particulières,  et  une  où  l'empereur  Tibère 
fut  présent.  Ce  prince,  ayant  pesé  les  rai- 
sons alléguées  de  part  et  d'autre,  résolut  de 
faire  brûler  le  livre  d'Eutychius.  Ce  patriar- 
che, au  sortir  de  cette  conférence,  tomba 
malade,  et  se  voyant  à  l'extrémité,  il  dit  *,  en 
prenant  la  peau  de  sa  main  en  présence  de 
ses  amis  :  «  Je  confesse  que  nous  ressuscite- 
rons tous  en  celte  chair.  »  Il  mourut  leo  avril 
582,  et  l'empereur  Tibère  le  3  août  de  la 
même  année;  ce  qui  fait  voir  que  ce  fut 
aussi  en  cette  année  que  saint  Grégoire  eut 
avec  Eutychius  les  conférences  dont  nous 
venons  de  parler.  Il  nous  en  a  donné  l'abrégé 
dans  ses  Morales  sur  Job,  en  expliquant  ce 
passage  :  Je  serai  de  nouveau  environné  de  la  j,,i,.,  x.t 
peau  qui  me  couvre.  Pendant  qu'il  était  encore  fi'irJ.',',',.  -.i 
àConstantinople,  il  s'y  répandit  le  bruit  qu'on  ™n.,  i.'i,, 
y  semait  de  nouvelles  erreurs,  par  lesquelles 
on  enseignait  qu'il  était  permis  de  séparer 
les  personnes  mariées  sous  prétexte  de  re- 
ligion; que  le  baptême  n'efi'açait  point  entiè- 
rement les  péchés;  qu'après  avoir  fait  péni- 
tence de  ses  fautes  pendant  trois  ans,  on 
pouvait  s'abandonner  au  désordre  tout  le 
reste  de  sa  vie  sans  crainte  d'oll'enser  Dieu, 
et  que  si  l'on  forçait  ceux  qui  tenaient  de 
semblables  doctrines  à  prononcer  anathème 


'  Greg.  Turon.,  lib.  X,  cap.  ii. 
«  BeUa,  lib.  II  HisL.  cap.  i. 


s  Joan. 
»  Greg. 


Diac,  lib.  I,  mim.  26, 
Dialogo  14,  cap.  xxix. 


432 


HISTOIRE  GKNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Il  rompo't 
ses      UoraLes 


contre  quelques-uns  de  ces  articles,  cet  ana- 
tlième  ne  les  lierait  pas.  Théoctiste,  sreur  de 
l'empereur  Maurice  successeur  de  Tibère, 
fut  accusée  d'être  de  cette  nouvelle  secleavec 
plusieurs  autres  personnes;  mais  saint  Gré- 
goire proteste  '  qu'ayant  vu  celles  à  qui  on  im- 
putait une  si  mauvaise  doctiine,  il  n'avait  re- 
connu en  elles  aucune  des  erreurs  qu'on  leur 
imputait;  que  mi-prisant  les  bruits  qu'on  ré- 
pandait coutre  leur  r(^putation,  il  avait  tâclié 
de  désabuser  le  public  prévenu  à  leur  désa- 
vantage, et  que  pour  cela  il  leur  avait  donné 
part  à  son  amitié.eu  même  temps  qu'il  prenait 
soin  do  les  défendre  contre  leurs  accusateurs. 
7.  11  employait  tout  le  temps  que  ses  af- 
faires liîi  laissaient  libre,  à  étudier  l'Écri- 
ture, et  t^  en  donner  aux  autres  l'intelligence. 
Saint  Léapdrc,  évèque  de  Séville,  était  alors 
à  Constantinoplo  pour  le  service  du  prince 
Herménégilde,  fils  de  Lévigilde,  roi  des  Vi- 
sigotlis  en  Espagne.  Il  lia  une  amitié  très- 
étroite  avec  saint  Grégoire  qui,  à  sa  prière  ' 
et  aux  instances  de  ses  frères,  composa  ses 
Explications  morales  sur  Job.  Saint  Grégoire 
sut  aussi  se  faire  aimer  des  plus  grands  de 
la   cour    et  des  plus  grands    évêques   d'O- 
rient, entre  autres  d'Euloge,  patriarcbe  d'A- 
lexandrie :  les  empereurs  mêmes  le  respec- 
taient.  Maurice  l'estima  jusqu'à  '  le   faire 
parrain  d'un  de  ses  enfants.  11  était  donc  en- 
core à  Constantinople  en  583,  Constantine 
qui  avait  épousé  Maujice  en  582  au  mois 
d'août,  n'ayant  pu  avoir  d'enfants  plus  tôt 
qu'au  mois  de  mai  583.  11  y  était  même  en 
584,  comme  on  le  voit  par  une  '  lettre  que 
lui  adressa  le  pape  Pelage,  datée  du  4  octo- 
bre de  cette  année. 
Il  re»i.ni       8.  De  retour  à  Rome  vers  l'an  585,  il  fut 
obligé  de  se  cliarger  du  gouvernement  de 
son  monastère  de  Saint-André  à  la  place  de 
Maximien,  élu  depuis  peu  évêque  de  Syracu- 
se. C'est  ce  qu'il  est  naturel  de  conclure  d'un 
fait  qu'il  raconte  dans  le  quatrième  "  livre 
de  ses  Dialogues.  11  y  avait  dans  ce  monas- 
tère un  religieux  nommé  Juste,  fort  liabile 
en  médeciue.  Juste  étant  tombé  malade,  dé- 
couvrit à   son  frère,  nommé  Copieux,  qui 
exerçait  la  médecine  dans  la  ville,  et  qui 
l'assistait  dans  sa  maladie,  qu'il  avait  cacbé 
trois  pièces  d'or.  La  cbose  étant  venue  à  la 


ft  Uonie  en 
r.jr..  est  fait 
t\u     de    S. 


connaissance  de  la  commnnauté,  on  chercha 
dans  toutes  les  boites,  et  on  trouva  enfin  les 
trois  pièces  cachées   au    fond    d'une  boite 
remplie  de  drogues.  Saint  Grégoire,  saisi  de 
douleur  de  voir  qu'on  avait  commis  une  si 
grande   faute    contre    la    règle   qui  défend 
aux  moines  d'avoir  rien  en  propre,  défendit 
au  prieurde  son  monastère,  appelé  Précieux, 
de  permettre  à  qui  que  ce  fût  d'aller  voir  le 
malade  sous  prétexte  de  le  consoler,  excep- 
té à  son  frère,  à  qui  il  avait  ordonné  de  lui 
répondre,  s'il  demandait  pourquoi  on  l'aban- 
donnait ainsi ,   que  ses  frères  l'avaient  en 
horreur,  à  cause  de  l'argent  qu'il  avait  ca- 
ché, afin  qu'il  sentit  sa  faute  et  la  pleurât  du 
moins  à  l'article  de  la  mort.  La  chose  arriva 
comme  saint  Grégoire  l'avait  prévu.  Juste 
étant  près  de  mourir,  pria  qu'on  assemblât  les 
frères,  mais  on  lui  refusa  cette  grâce,  et  on  lui 
en  dit  la  raison.  Dieu  le  toucha  dans  ce  mo- 
ment, et  il  mourut  dans  les  gémissements 
de  la  pénitence.  Le  saint  abbé,  qui  n'avait 
usé  de  cette  sévérité  que  pour  donner  un 
exemple  i\  la  communauté,  poussa  la  chose 
plus  loin,  et  pour  imprimer  davantage  la  ter- 
reur et  déraciner  le  vice  de  la  propriété  ,  il 
commanda  qu'on  fit  uue  fosse  dans  le  fumier, 
qu'on  y  portât  le   corps  du   mort,  et  qu'on 
jetât  sur  lui  les  trois  pièces  d'or,  en  même 
temps  que  tous  les  frères  crieraient  :  Que  ton 
argent  périsse  avec  toi ,   et  qu'ensuite  on  le 
couvrit  de  terre.  Le  corps  de  Juste  demeura 
ainsi  pendant  trente  jours,  au  bout  desquels 
saint  Grégoire,  touché  de  compassion,  dit  au 
prieur  de  commencera  oll'rirle  sacrifice  pour 
lui,  et  de  continuer  durant  trente  joui-s  ù 
otl'rir  l'hostie  salutaire,  pour  obtenir  son  ab- 
solution et  sa  délivrance.  Saint  Grégoire  mar- 
que °  encore  plus  clairement,  dans  un  dé- 
cret du   concile  de   Latran  ,  qu'il  avait   été 
abbé  du  monastère  de  Saint-André. 

y.  Cela  ne  l'empêcha  pas  d'aider  le  pape 
Pelage  II  en  plusieurs  affaires  ecclésiasti- 
ques ;  il  en  fut  le  seoétaire  comme  saint  Jé- 
rôme l'avait  été  du  pape  Damase,  et  on  con- 
vient que  les  trois  lettres  au  sujet  de  la  con- 
daumation  des  Trois-Chapitres,  adressées  A 
Elle,  archevêque  d'Aquilée,  et  aux  évèqucs 
d'Istrie,  sous  le  nom  de  ce  pape,  sont  du 
style  de  saint  Grégoire.  Paul  Diacre  les  lui 


Il  ml 

*er  re  K 
Irt». 


>  Greg.,  lib.  XI,  Epis/.  4.'>. 

•  (Jreg.,  Prœfat.  iii  Job,  uinii.  1  et  2. 

•  Grcg.  Tiiroii.,  lib.  X,  cap.  l. 

•  Jouii.  Diiài-.,  lib.  I,  cap.  xxxu. 


»  Lib.  IV  Dialog.,  cap.  Lv. 

'  Qiiam  sit  necessarium  monasleriorum  quieti 
connincere...  anleactum  uos  offlcium  quoii  in  re- 
gimine  monaslerii  cxhibuimus  informai.  Greg. 


l'iniH'Jai'Oii 

itinrt  (l>i  l*3[io 
Féli^i  11,  ou 


Eicebkl.ix, 


S.  Gr^gnl.» 
e«i  élu    i>a|'Vt 


[vu"  sitcLE.]        CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT 

alliilme  ilans  le  troisic'iuo  livro  do  l'IIistniro 
des  Lombards,  en  cemarnuant  (]ii'il  n'était 
que  diacre  lorsqu'il  les  ëcrivit. 

10.  An  mois  de  novembre  de  l'an  58t>,  le 
Tibre  s'enlla  '  si  [irodigiensement  i[ii'il  passa 
par-dessus  les  murailles  de  la  ville  de  Ho- 
me, inonda  plusieurs  quartiers,  renversa 
un  fi^rand  nombre  d'édifices  considérables, 
et  fit  tomber  les  greniers  de  l'Eglise  ;  ce 
qui  entraîna  la  perle  de  plusieurs  milliers 
de  muids  de  blé  qui  y  étaient  eu  réserve,  et 
occasionna  la  disette  dans  Rome.  L'inonda- 
tion fut  suivie  d'une  grande  quantité  de  ser- 
pents (jui  vinrent  se  jeter  dans  le  Tibre;  il  en 
parut  un,  entre  autres,  comme  une  longue  et 
grosse  poutre.  Ces  serpents  furent  emportés 
dans  la  mer,  où  l'eau  salée  et  la  grande  agita- 
tion les  firent  uiouiir;  mais  les  vagues  les  reje- 
tèrent sur  le  rivage  où  ils  se  pourrirent,  et  cor- 
rompirent ensuite  l'air  par  la  puanteur  qu'ils 
répandaient.  On  croit  que  ce  fut  la  cause  de 
la  peste  dont  Rome  fut  désolée  quelque  temps 
après,  c'est-à-dire  au  milieu  de  janvier  de 
l'année  suivante  590.  Le  pape  Pelage  II  fut 
attaqué  des  premiers,  et  ce  fléau  de  Dieu, 
selon  la  menace  du  prophète  Ézéclnel,  se  tît 
d'abord  sentir  dans  le  sanctuaire,  d'où  le 
mal  se  répandit  sur  toute  la  ville.  Le  Pape 
moui-ut  le  8  février  de  la  même  année,  après 
douze  ans  et  près  de  trois  mois  de  pontificat. 

H.  L'Eglise  ne  pouvant  demeurer  sans 
pasteur,  le  clergé,  le  sénat  et  le  peuple  ro- 
main élurent  ',  d'un  consentement  unanime, 
le  diacre  Grégoire.  Il  s'en  défendit,  se  croyant 
indigne  de  cette  place,  et  craignant,  en  pre- 
nant le  gouvernement  de  l'Église,  de  rentrer 
dans  la  gloire  du  monde  qu'il  avait  quitté. 
Les  empereurs,  depuis  qu'ils  eurent  recon- 
quis l'Italie  sur  les  Gotbs,  prenaient  beau- 
coup de  part  A  l'élection  des  papes;  le  dé- 
cret de  l'élection  d'un  Souverain-Pontife  n'a- 
vait lieu,  qu'autant  qu'il  était  confirmé  par 
l'Empereur,  et  qu'il  y  donnait  son  agrément. 
Saint  Grégoire,  qui  comptait  sur  l'amitié  que 
Maurice  lui  avait  témoignée  à  Constanlino- 
ple,  lui  écrivit  pour  le  conjurer  de  ne  point 
approuver  le  choix  qu'on  avait  fait  de  lui; 
mais  Germain,  préfet  de  Rome',  préviut  son 
courrier,  et  l'ayant  fait  arrêter  et  ouvrir  ses 


GRÉGOIRE  LE  GRAND,  PAPE.       /,:t.3 

lettres,  il  envoya  h  l'Empereur  le  décret  d'é- 
leclion.  Maurice  rendit  grâces  à  Dieu  de  ce 
qu'il  lui  donnait  occasion  de  rendre  jusiico 
au  mérite  d'une  personne  qu'il  chérissait;  il 
conlirma  le  décret  tl'éleclion  ,  et  ordonna 
de  mettre  au  plus  tôt  Grégoire  en  posses- 
sion de  la  chaire  de  saint  Pierre.  Le  saint, 
informé  qu'on  avait  intercepté  ses  lettres  A 
l'Empereur,  et  jugeant  que  ce  prince  donne- 
rait une  réponse  contraire  à  ses  désirs,  se 
fit  '  enlever  de  Rome  par  des  marchands, 
d(''guisé  et  enfermé  dans  une  manne  d'osier, 
puis  il  alla  se  cacher  dans  des  bois  et  dans 
des  cavernes  ;  mais  il  fut  découvert  ',  ramené 
h  Rome,  et  consacré  solennellement,  dans 
l'église  de  Saint-Pierre,  le  3  septembre  5'JO. 
Nous  avons  ^  encore  la  profession  de  foi  qu'il 
fit  dans  cette  cérémonie.  Un  diacre  de  saint 
Grégoire  de  Tours,  qui  s'était  trouvé  à  Rome 
lors  de  la  mort  du  pape  Pelage,  et  qui  avait 
été  témoin  de  l'ordination  de  saint  Grégoire, 
en  raconta,  à  son  retour  en  France,  toutes 
les  particularités. 

1 2.  Il  était  d'usage  que  '  les  papes,  au  com- 
mencement de  leur  pontificat,  envoyassent 
aux  patriarches,  pour  marque  de  commu- 
nion,  une  lettre  qu'on  appelait  synodale, 
parce  qu'ordinairement  ils  l'écrivaient  à  la 
suite  de  quelque  assemblée  des  évêques  voi- 
sins ;  les  patriarches  et  autres  évêques  des 
grands  sièges  en  écrivaient  de  semblables 
au  Pape.  Saint  Grégoire  tint  un  concile  an 
mois  de  février  de  l'an  591,  d'où  il  écrivit  " 
ses  lettres  aux  quatre  patriarches  d'Orient, 
à  Jean  de  Constantinople,  à  Euloge  d'A- 
lexandrie, à  Grégoire  d'Antioche,  à  Jean  de 
Jérusalem,  et  à  Anastase  d'Antioche.  La 
raison  d'en  adresser  aux  deux  patriarches 
d'Antioche,  et  de  nommer  même  Grégoire 
avant  Anastase,  était  que  Grégoire  possé- 
dait depuis  longtemps  l'église  de  cette  ville, 
qu'Auastase  ne  l'y  troublait  pas,  qu'il  était 
lié  de  communion  avec  tous  les  évêques  d'O- 
rient et  d'Occident,  et  qu'en  refusant  de  le 
reconnaître,  le  Pape  aurait  troublé  la  paix 
de  l'Église.  Il  ne  pouvait,  d'ailleurs,  s'empê- 
cher d'écrire  à  Anastase,  qu'il  savait  avoir  été 
dépouillé  "  injustement  de  son  siège  ;  il  avait 
même  écrit  '"  à  l'empereur  que,  si  on  ne  lui 


Il  lient  un 
concile,  eo 
591:  enviie, 
en  Opicnl  .ïes 
lourei  syno- 
dale-. 


'  fireg.  Turon.,  lib.  X,  cap.  i,  et  Greg.,  lib.  III 
Dialog.,  cap.  xix. 
'  Joan.  Diac,  lib.  I,  num.  xixix. 
•  Greg.  Tiirou.,  lib.  X,  cap.  i. 
'  Paulus  Diau.,  uum.  II. 

XI. 


»  Greg.,  lib.  I,  Epist.  21,  et  lib.  VU,  Epist.  4;  et 
Martyr.  Roman,  ad  diem  3  septemb. 

6  Joau.  Diac  ,  lib.  Il,  num.  2.  —  '  Greg.,  lib.  IX, 
Epist.  o2.  —  «  Greg.,  lib.  1,  Epist.  4  et  25. 

»  Greg.,  lib.  I,  Epi$t.  26.-  '»  Id,,  lib.  I,  Epist.  2S. 


rii 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Con(!ullc  âe 
«alc(  Grcgoire 

l'ODliticat,   iD 
5?0. 


434 

permettait  pas  d'y  rentrer,  il  lui  fût  du 
moins  libre  de  venir  à  Rome  avec  l'usage 
du  palliuui,  pour  célébrer  la  messe  ^  Saint- 
Pierre  avec  le  Pape.  Dans  ces  lettres,  saint 
Grégoire  déclare  qu'il  reçoit  les  quatre  pre- 
miers conciles  généraux,  et  qu'il  porte  le 
même  respect  au  cinquième,  rejetant  toutes 
les  personnes  que  ces  conciles  ont  rejetées, 
et  recevant  toutes  celles  qu'ils  ont  reçues: 
c'était  condamner  ouvertement  les  Trois- 
Chapitns.  Nous  verrons  dans  la  suite  com- 
Lieu  de  mouvements  il  se  donna  pour  ré- 
duire ceux  qui  refusaient  d'en  souscrire  la 
condamnajion. 

13.  Le  premier  changement  que  saint  Gré- 
goire fit  dans  la  maison  du  Pape,  fut  d'en 
retrancher'  les  laïques  qui  avaient  coutume 
de  la  composer.  Il  ne  voulut  auprès  de  lui 
que  des  clercs  et  des  moines,  soit  pour  le 
servir ,  soit  pour  en  composer  son  conseil  : 
de  ce  nombre  furent  Pierre,  diacre,  avec  le- 
quel il  composa  ses  Dialogues  ;  Patérius,  qui 
fit  depuis  une  compilation  de  ses  ouvrages  ; 
Jean  ,  défenseur  de  l'église  romaine  ,  qu'il 
envoya  en  Espagne  pour  rétablir  Janvier 
dans  le  siège  épiscopal  de  Malaga  ;  Augus- 
tin ,  prieur  du  monastère  de  Saint-André  ; 
Mellite  ,  dont  il  se  servit  pour  la  conversion 
des  Anglais  ;  Marinien,  moine  du  même  mo- 
nastère, h  qui  il  donna  l'archevêché  de  Ra- 
venne;  Probe  et  quelques  autres  dont  il 
connaissait  la  vertu  et  le  savoir.  Il  menait 
avec  eux  la  vie  comnmnc  ,  sans  rien  négli- 
ger des  devoirs  de  sa  dignité,  11  invitait  sou- 
vent les  pauvres  h  sa  table,  et  n'y  admettait 
que  rarement  les  riches  ;  et  afin  que  ceux-là 
fussent  assistés  avec  plus  de  soin,  il  ne  con- 
fia l'administration  du  patrimoine  de  l'Kglise 
qu'à  des  ecclésiastiques,  se  persuadant  que, 
n'ayant  point  de  famille ,  ils  adopteraient 
plus  aisément  les  pauvres.  Tandis  que  sa 
santé  le  lui  permit,  il  nourrissait  son  peuple 
de  la  parole  de  Dieu.  Il  nous  reste  un  grand 
nombre  de  ses  homélies  sur  divers  endroits 
de  l'Évangile,  et  sur  le  prophète  Ezécliiel. 
Il  retrancha  *  plusieurs  choses  de  l'Ordre  ro- 
main donné  par  le  pape  Gélase,  et  y  lit  quel- 
ques changements.  Il  ordonna  des  stations 
et  des  processions  dans  le  même  ordre  qu'on 
les  a  observées  depuis.  Il  perfectionna  le 


chant  ecclésiastique ,  fonda  une  école  de 
chant,  fit  dresser  un  antiphonaire  qui  com- 
prenait tout  ce  qui  se  chaulait  en  notes  à  la 
messe,  augmenta  le  luminaire  cl  K-  nombre 
des  ministres ,  fit  des  règlements  touchant 
les  ornements  dont  ils  seraient  revêtus  en 
servant  à  l'autel  ;  enfin  il  n'omit  rien  de  ce 
qui  était  nécessaire  pour  célébrer  les  saints 
mystères  avec  une  pompe  convenable. 

14.  Aprèsavoir  réglé  sa  maison  et  l'Eglise 
particulière  de  Rome,  il  étendit  sa  sollici- 
tude pastorale  sur  les  églises  de  Sicile  qui 
lui  étaient  soumises  plus  particulièrement 
que  les  autres ,  parce  qu'elles   étaient  du 
nombre  des  suburbicaires  que  le  concile  de 
Nicée  '  déclare  dépendre   de   l'évêque  de 
Rome  ,  suivant  l'ancienne  coutume.  Il  aver- 
tit les  évêques  de  celte  île  de  tenir  des  con- 
ciles tous  les  ans,  et  nomma  '  le  sous-diacre 
Pierre  ,  qui  avait  l'administration  du  patri- 
moine de  saint  Pierre  en  Sicile,  pour  prési- 
der à  ces  assemblées  eu  qualité  de  son  lé- 
gat. Informé  qu'Autarit,  roi  des  Lombards  , 
avait  défendu  que  les  enfants  de  celle  nation 
fussent  baptisés  dans   l'église  catholique  à 
la  fête  de  Pâques  590  ,  il  écrivit  '  à  tous  les 
évêques  d'Italie,  après  la  mort  de  ce  prince, 
arrivée  le  3  septembre  suivant,  d'avertir  les 
Lombards  doul  les  enfants  avaient  été  bapti- 
sés par  les  ariens ,  de  les  faire  réconcilier  à 
la  foi  catholique,  pour  éviter  la  colère  de 
Dieu,  qui  continuait  à  se  déclarer  par  une 
grande  morlalité.  Il  prit  aussi  soin  des  égli- 
ses d'Afrique,  troublées  encore  par  les  restes 
des  manichéens  et  des  doualisles.  Genuade 
était    alors    patrice    et   exarque   d'Afrique. 
Saint  Grégoire  l'exhorta  '  à  réprimer  forte- 
ment ces  hérétiques,  disant  qu'ils  ne  man- 
quaient jamais  de  s'élever  contre   l'Église 
quand  ils  en  trouvaient  l'occasion.  Les  guer- 
res avaient  ruiné  plusieui-s  églises,  de  ma- 
nière qu'elles  ne  pouvaient  plus  entretenir 
de  prêtres  pour  administrer  '  la  pénitence 
aux  mourants,  et  le  baplême  aux  enfants  ; 
il  les  unil  à  d'autres  églises  qui  n'avaient 
pas  tant  soull'erl.  Il  prit  la  défense  des  mo- 
nastères* contre  les  vexations  des  évêques , 
et  pourvut ,  autant  qu'il  fut  en  lui ,  aux  né- 
cessités spirituelles  de  ceux  mêmes  qui  s'é- 
taient séparés  de  l'Église,  ou  par  l'hérésie, 


Son  alUD* 
lion  |iuui  us 
K;ll>eftda  dr* 
bor>,  «D  .'9 1 . 


I  Joan.  Diac,  lil>.  Il,  uum.  li. 

•  Ihiii.,  iiuiii.  n  et  S('(|. 

•  Coiicil.  Mcan.,  cuii.  (i. 
»  Orfig.,  hb.  I,  lîjiùlC.  1. 


»  I(i.,  Episl.,  lib.  I,  Epist.  n,  elJoau.  Diac,  lib. 
Il,  iiiiin.  50. 
«  (;rug.,  lib.  I,  Epist.  72. 
'  Id.,  lib.l,  Epist.  8 eH5.-"  M,  ihiii.,  Epist.  12. 


[vir  SIÈCLE.]        CIIAI'ITHE  XLIX.  —  SAINT 

ou  par  le  schisme,  voulant  qu'on  hasarcl;\t  ' 
plutôt  quelque  chose  en  recevant  les  iiéré- 
ti(|U(>s  :\  la  comimuiinn,  lorsqu'ils  iloiuande- 
raiout  ;'(  être  rcconciliiîs,  que  do  les  cllarou- 
chcr  par  trop  de  rii;iieur.  11  usa  surtout  de 
condescendance  ;\  l'égartl  de  ceux  que  l'af- 
faire des  Trois-Clinpitres  avait  engages  dans 
le  schisme  ;  il  fit  môme  tîciater  sa  douceur 
envers  les  juifs  ,  en  écrivant  *  ;\  l'dvèque  de 
Terracine  de  leur  laisser  la  liberté  de  s'as- 
sembler dans  le  lieu  qui  leur  avait  été  ac- 
cordé de  son  consentement,  pour  v  célébrer 
leurs  fêtes.  Tous  ces  faits  sont  datés  de  la 
première  année  du  pontificat  de  saint  Gré- 
goire. 
iHombcma.       J5    La  sccoudo  lul  proscuta  des  aftaires 

laite   *    c.ni^o  A 

nùik'""  on   heaucoup  plus  diliiciles  h  soutenir ,  à  cause 
'"'•  de  la  guerre  des  Lombards,  et   des  maux 

qu'elle  causa  k  1  Italie.  Romain  ,  patrice  et 
exarque  de  Ravenue  ,  voulant  profiter  de 
quelque  mésintelligence  qu'il  voyait  entre 
les  Lombards,  avait  rompu  brusquement  la 
paix,  et  pris  ensuite  plusieurs  de  leurs  villes, 
nommément  Pérouse,  par  la  trahison  du  duc 
Maurision  qui  y  commandait  pour  le  roi 
Agilulphe.  Ce  prince  ne  fut  pas  longtemps 
sans  se  plaindre.  Ariulfe,  duc  de  Spolète, 
vint  jusqu'à  Rome  à  la  tête  d'une  bonne  ar- 
mée ,  pour  attirer  Romain  au  combat  ;  mais 
celui-ci,  n'osant  se  mettre  en  campagne  de- 
vant un  ennemi  si  formidable,  laissa  faire 
aux  Lombards  tant  de  désordres ,  que  saint 
Grégoire  '  en  tomba  malade  de  chagrin.  Il 
informa  l'archevêque  de  Ravenne  du  danger 
où  était  Rome  ,  afin  qu'il  portât  l'exarque  à 
faire  la  paix;  et,  pour  en  facihter  la  conclu- 
sion ,  il  offrit  de  fournir  des  sommes  consi- 
dérables. D'un  autre  côté,  Agilulphe  pressait 
la  restitution  de  Pérouse,  et  des  autres  pla- 
ces dont  Romain  s'était  saisi.  Voyant  qu'on 
ne  voulait  point  y  entendre,  il  sortit  de  Pavie 
avec  une  puissante  armée,  mit  le  siège  de- 
vant Pérouse ,  la  prit ,  fit  trancher  la  tête  à  Mau- 
rision, et  marcha  droit  à  Rome,  laissant  par- 
tout des  marques  de  sa  fureur  et  de  sa  ven- 
geance. Saint  Grégoire  expliquait  alors  à 
son  peuple  la  prophétie  d'Ézéchiel  ;  mais  il 
fut  obligé  d'interrompre  le  cours  de  ses  ho- 
mélies sur  ce  prophète  ,  pour  donner  les 
ordres  nécessaires  à  la  défense  et  à  la  con- 
servation de  la  ville,  encom-ageant  les  offi- 


gri':g(jiiik  lk  grand,  pape. 


4.35 


ciers  et  les  soldats,  pourvoyant  aux  besoins 
des  pauvres ,  soulageant  les  blessés  ,  conso- 
lant les  veuves  qui  pleuraient  leurs  maris 
tués  par  les  Lombards,  et  les  pères  et  mères 
(jui  venaient  de  perdre  leurs  enfants.  Il  dé- 
crit les  hostilités  de  l'armée  ennemie  dans 
la  dernière  homélie  sur  Ezéchiel,  et  dans 
une  letli'e  '  à  l'empereur  Maurice.  La  ville 
de  Rome  ne  fut  pas  prise  ;  les  ennemis,  con- 
tents d'une  somme  considérable  d'argent , 
se  retirèrent.  On  met  ordinairement  cet 
événement  en  o9.ï  ;  mais  l'exarque  de  Ra- 
venne ayant  pris  Pérouse  en  39:2,  il  n'est  pas 
croyable  qu'.\gilulphe  ait  tardé  si  longtemps 
à  se  venger,  et  à  reprendre  les  places  qu'on 
lui  avait  enlevées  de  mauvaise  guerre. 

IG.  La  même  année  392,  l'empereur  Mau-   ^  „      '^'"' 

^  v  do  I  empereur 

rice  avait  fait  publier  un  édit ,  portant  dé-  "ê"lés",„iTi; 
fense  ii  ceux  qui  auraient  exercé  des  char-  ?,lj,  '^l''î,'j'',î 
ges  puliliques,  d'entrer  dans  le  clergé  ou  fi'»°ai'ie"»"i° 
dans  des  monastères,  et  à  tous  ceux  qui  '^533!°'"°''' 
étaient  marqués  à  la  main  comme  soldats 
enrôlés,  d'embrasser  la  vie  monastique.  Saint 
Grégoire,  à  qui  l'Empereur  fit  rendre  cet  édit 
par  un  de  ses  écuyers  nommé  Longin,  ne 
put  dans  le  moment  faire  de  réponse  ,  parce 
qu'il  était  malade;  il  attendit  jusqu'au  mois 
d'août  de  l'an  393.  Il  approuva  dans  sa  let- 
tre la  première  partie  de  l'édit,  qui  défen- 
dait de  donner  place  dans  le  clergé  à  ceux 
qui  étaient  obligés  de  rendre  compte  de 
quelque  administration,  disant  que  ces  sor- 
tes de  gens  voulaient  plutôt  changer  d'em- 
ploi que  quitter  le  siècle,  et  qu'ils  ne  s'en- 
gageaient dans  la  cléricature,  qu'afin  de 
jouir  des  privilèges  des  clercs,  et  pour  s'en- 
richir des  biens  de  l'Église.  L'édit  même  de 
ce  prince  était ,  à  cet  égard  ,  conforme  aux 
canons  et  aux  décrets  '  de  plusieurs  papes  ; 
mais  saint  Grégoire  trouve  étrange  l'autre 
partie  de  l'édit,  qui  fermait  l'entrée  des  mo- 
nastères aux  olticiers  et  aux  soldats,  qui  y 
trouvaient  une  retraite  où  ils  pouvaient  faire 
pénitence,  et  combattre  les  vices  et  les  mau- 
vaises habitudes  auxquelles  ils  s'étaient 
livrés  étant  dans  les  armées.  Il  ne  laissa  pas, 
après  avoir  représenté  ses  raisons  à  l'Em- 
pereur, d'envoyer  ^  son  édit  dans  tous  les 
endroits  de  la  chrétienté,  suivant  les  ordres 
qu'il  en  avait  reçus. 

17.  Sur  la  fin  de  cette  année  593,  ou  au       luherchs 


«  Greg.,  lib.  I,  EpUt.  U.  —  '  Ibid.,  Epist.  35. 
»  Greg.,  lib.  II,  Indict.  10,  Epist.  32. 
*  Lib.  V,  Epist.  40. 


'  Voyez  la  lettre  du  pape  Innocent  l'^'^à  Victrice, 
évê(jue  de  Rouen. 
8  Greg.,  lib.  111,  Epist.  65. 


436 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


do  tfr»<  ii«i  commencement  de  la  suivante  ,  saint  Gré- 

11  r«ln  Ij,  eo 

193011  Mi.  goire  cbercba  quelque  repos  dans  la  ichaile, 
pour  y  respirer  un  peu  api-ès  tant  d'agita- 
tions. Il  choisit  pour  cet  ellet  son  monastère 
de  '  Saint-André,  ne  croyant  pas  devoir  s'é- 
loigner de  Rouie  dans  ces  temps  fâcheux  où 
sa  présence  était  nécessaire.  Ce  fut  pendant 
cette  retraite  qu'il  composa  ses  Dialogues 
avec  Pierre  diacre,  son  disciple  et  son  se- 
crétaire. Il  écrivit  aussi  plusieui-s  lettres  sur 
les  ditlërentes  atlaires  de  TÉglise.  L'ordina- 
tion de  Maxime,  évèque  de  Sulone,  lui  don- 
na de  grandes  inquiétudes  ;  il  avait  été  mis 
en  possession  de  cette  église  à  main  armée. 
Saint  Grégoire,  qui  ne  savait  pas  que  son 
élection,  quoique  peu  canonique  ,  avait  été 
confirmée  par  l'empereur  Maurice,  lui  dé- 
fendit de  célébrer  la  messe.  Maxime  fit  lacé- 
rer publiquement  la  lettre  du  Pape,  qui  s'en 
plaignit  à  l'Empereur,  comme  d'une  injure 
faite  au  Saint-Siège.  Maxime  eut  ordre  d'aller 
à  Rome  rendre  compte  de  sa  conduite  :  il  le 
refusa.  La  fin  de'  cette  allaire,  qui  dura  sept 
ans,  fut  qu'il  se  purgerait  par  serment  de- 
vant Marinien  ,  archevêque  de  Ravenne  ; 
qu'il  ferait  pénitence  de  sa  désobt'issance, 
et  que  ,  prosterné  en  terre,  il  demanderait 
miséricorde.  .\u  milieu  des  chagrins  que 
Maxime  lui  occasionna,  il  reçut  de  la  conso- 
lation par  la  conversion  de  certains  peuples 
de  Sardaigne  nommés  Barbaricins,  qui  jus- 
ques-li\  avaient  été  idolâtres.  Il  avait  em- 
ployé à  cet  ouvrage  salutaire  l'évèque  Félix, 
et'  Cyriaque,  abbé  de  Saint-.Vndré.  Zabar- 
da,  duc  de  Sardaigne,  contribua  beaucoup 
au  changement  de  ces  peuples,  parce  qu'il 
leur  oITrit  la  paix  a  condition  qu'ils  se  fe- 
raient chrétiens,  llospiton,  leur  chef,  fut  le 
premier  qui  se  soumit  au  joug  de  l'Evangile; 
plusieurs  suivirent  son  exemple.  Vers  le 
même  temps,  saint  Grégoire,  ayant  appris  ' 
que  la  reine  Tliéodelinde  s'était  séparée  de 
la  communion  de  Constante  nouvellement 
élu  évèque  de  Milan,  sur  ce  que  trois  évè- 
ques  de  la  province  lui  avaient  persuadé 
que  Constance  s'était  obligé  à  condamner 
les  Trois  -  Chapitres ,  écrivit  à  cette  piin- 
cesse,  pour  l'engager  à  agréer  l'ordination 
de  l'évèque  de  Milan  ;  il  se  contenta  dans 
sa  lettre  de  louer  les  quatre  premiers  con- 

'  Mabil.,  Analecla.  loin.  IV,  jing.  497. 

•  Greg.,  lib.  I.\,  Episl.  79,  80,  81. 

»  Orcg.,  lib.  IV,  Episl.  23,  24,  25. 

•■  /(/.,  lib.  III,  Episl.  29,  30,  31. 

»  Ureg.,    lib.  V,    Epiit.   43.;   ibiJ.,   F.pist.   18,  et 


ciles  généraux,  sans  parler  du  cinquième. 
Il  en  écrivit  une  autre  à  Constance,  pour  être 
montrée  par  lui  aux  trois  évèques,  dans  la- 
quelle il  déclarait  que  la  profession  de  foi 
qu'il  avait  reçue  de  lui,  selon  la  coutume, 
ne  faisait  aucune  mention  des  Trois-Chapi- 
trcs  :  ;\  quoi  il  ajoutait  qu'il  conservait  la  foi 
du  cinquième  concile,  sans  oser  rien  oter  ni 
ajouter  à  sa  définition. 

18.  Jean  le  Jeûneur,  p:i!riarche  de  Cons-  Démtw. 
tantinople  ,  avait  pris  le  titre  d'évêque  œcu-  ,";'/"" 
ménique  ou  universel,  dès  le  mois  de  juin  p^'";""',' 
de  l'an  589,  dans  un  concile  tenu  la  même  j,7,„",^„' 
année  en  cette  ville  :  ce  qui  avait  donné  su- 
jet au  pape  Pelage  de  casser'  les  actes  de 
cette  assemblée.  Dans  plusieurs  "  requêtes 
présentées  au  Pape  dans  le  concile  de  Chal- 
cédoine,  on  lui  donna  la  qualité  d'évêque 
universel.  Paschasin  la  lui  donna  aussi  dans 
le  discours  qu'il  prononça  en  présence  des 
évêques  du  concile  ;  mais  saint  Léon  ni  au- 
cun des  papes  ses  successeurs  ne  voulurent 
s'en  servir,  de  peur  que,  par  ce  titre  fastueux 
et  téméraire,  ils  ne  parussent  s'attribuer  seuls 
l'épiscopat ,  et  l'ôter  à  tous  leurs  fières.  Le 
patriarche  Jean  pensait  tout  autrement;  en 
envoyant  à  saint  Grégoire  les  actes  d'un  ju- 
gement qu'il  avait  rendu  contre  un  prêtre 
accusé  d'hérésie  ,  il  prit  presqu'à  chaque  li- 
gne la  qualité  de  patriarche  œcuménique. 
Le  saint  Pape,  pour  garder  l'ordre  delà  cha- 
rité fraternelle,  lui  en  fit  parler  deux  fois 
par  le  diacre  Sabinien,  son  nonce  à  Consfan- 
linople;  ensuite  il  lui  en  '  écrivit,  puis  à 
l'empereur  Maurice  et  à  l'impératrice  Cons- 
tantine.  Il  défendit  à  Sabinien  *  d'assister  à 
la  messe  avec  Jean;  et  parce  qu'il  ne  dou- 
tait point  que  les  patriarches  d'Alexandrie 
et  d'Antioche  ne  dussent  s'intéresser  à  ré- 
primer la  prétention  de  C(!lui  de  Constanti- 
nople  ,  il  leur  écrivit  une  '  lettre  commune. 
Tous  ces  mouvements  furent  inutiles  :  Jean 
conserva  '"  le  litre  d'évêque  œcuménique 
jusqu'à  .sa  mort,  qui  arriva  en  593.  Cyriaque, 
son  successeur",  envoya  sa  lettre  synodale  à 
saint  Grégoire.  II  semble  qu'il  y  prenait  aus- 
si le  titre  d'œcuméniquc,  puisque  ce  Pape 
dit  dans  sa  lettre  à  .\nastaîc  d'Antioche  , 
qu'il  n'avait  pas  "  voulu,  à  cause  de  ce  litre 
profane,  rompre  l'unité  de  l'Église,  en  re- 

Aclione   3    Concit.    Chalc,    pag.    396,    400,    405. 
•  Greg.,  lib.  V,  Episl.   19. 
'  Greg.,  lib.  V,  Episl.  18,  20,21.-  •  Episl.  19. 
»  Ibi.).,  Episl.  43   —  >»  Greg.,  lib.  VII,  Episl.  4. 
"  lbi<l.,  Episl.  5,  6.  —  "  Ibid.,  Episl.  27. 


^  de 

oire 


CIIAPITRK  XLIX.  —  SAINT  C.Itl'XininK  LE  (illAM),  PAPE. 


Il  l'iivolo 
Jd.  i>.i5<lnn- 
Dairos  en  An- 
lïlfiorrp,  eu 
sac,  897, 


[vu'  siÈcu:.] 

jotanl  lu  lettre  et  les  nonces  de  Cyriaque. 
Saint  Grt5goirc  tint  nn  concile  à  Home  en 
SOri.où,  après  divers  règlements  de  disci- 
pline, on  jugea  l'atlaiie  des  prêtres  Jean  et 
Allianasc.  Le  premier  dtail  prêtre  de  Clial- 
ccddine  ;  le  second,  prêtre  et  moine  dn  mo- 
nastère de  Tanmac,  ou  de  Saint-Mile  en  Ly- 
caonie.  Celui-ci  était  accns('  d'avoir  parlé 
contre  la  délinilion  ilu  concile  d'I'^plièse  ;  ce- 
lui-là d'enseigner  l'hérésie  des  maicianisles. 
Ils  avaient  l'un  et  l'autre  été  condamnés  par 
des  juges  que  Jean  de  Conslanlinople  leur 
avait  donnés  ;  mais  s'étant  pourvus  par  ap- 
pel au  Saint-Siège,  ils  furent  renvoyés  ab- 
sous ,  parce  qu'on  les  trouva  orthodoxes  ,  et 
qu'il  fut  prouvé  par  les  actes  mêmes  du  pro- 
cès que  le  patriarche  avait  envoyés  ^  Rome, 
que  les  accusateurs  de  Jean  ne  connaissaient 
pas  l'hérésie  dont  ils  l'avaient  accusé.  Saint 
Grégoire  écrivit'  sur  ce  sujet  au  patriarche 
Jean  ,  à  l'Empereur,  et  à  Théotiste,  parent 
de  ce  prince. 

19.  En  596  il  exécuta  le  projet  qu'il  avait 
formé  depuis  longtemps,  d'envoyei'  des  mis- 
sionnaires en  Angleterre.  Il  choisit  pour  su- 
périeur de  cette  mission  Augustin,  prieur  ou 
prévôt  de  son  monastère  de  Saint-André  de 
Rome,  ù  cjui  il  donna  pour  compagnons  plu- 
sieurs autres  religieux,  avec  ordre  de  lui 
obéir  comme  à  leur  abbé.  Quelque  temps 
auparavant  il  avait  fait  acheter  par  Candide, 
recteur  du  patrimoine  de  saint  Pierre  dans 
les  Gaules  ,  un  certain  nombre  d'esclaves 
anglais  âgés  de  dix-sept  à  dix-huit  ans,  et 
les  avait  fait  élever  dans  les  séminaires  des 
monastères,  afin  qu'ils  pussent  être  utiles  à 
cette  mission.  Augustin  et  ses  compagnons 
partirent  de  Rome  au  mois  de  juillet,  munis 
de  diverses  lettres  de  recommandation  pour 
les  évêques  de  Gaule,  chez  qui  ils  devaient 
passer.  Le  Pape  en  avait  aussi  écrit  à  la 
leine  Brunehaut ,  et  aux  deux  jeunes  rois 
Thierry  etlhéodebert.  Mais  à  peine  les  mis- 
sionnaires avaient  fait  quelques  jours  de 
chemin  qu'ils  pensèrent  à  s'en  retourner,  dé- 
goûtés par  la  diiiiculté  du  voyage,  et  désespé- 
rant de  réussir  à  convertir  une  nation  dont  ils 
n'entendaient  pas  même  la  langue.  Ils  ren- 
voyèrent Augustin  cl  Rome,  pour  représenter 
toutes  ces  difticultés  à  saint  Grégoire  ;  mais 
ce  saint  Pape,  qui  savait  par  une  longue  ex- 
périence que  les  œuvres  de  Dieu  sont  sou- 
vent traversées  par  les   conseils  des  liom- 


\[a 


mes,  le  renvoya  chargé  d'une  '  lettre,  où  il 
leur  ordonnait  de  poursuivre  leur  ouvrage 
avec  toute  la  ferveur  et  toute  la  diligence 
possibles,  sous  la  protection  et  sous  la  con- 
duite du  Seigneur.  Cette  lettre  est  du  23 
juillet  .')96.  Ayant  donc  continué  leur  route 
et  traversé  toute  la  Gaule ,  ils  arrivèrent 
dans  la  Grande-Bretagne,  aux  côtes  de  la 
province  de  Kent,  et  prirent  terre  dans  l'île 
de  Tanet.  Ils  étaient  au  nombre  de  quaran- 
te. Augustin  députa  vers  le  roi  quelques-uns 
des  principaux  de  sa  ti'oupe  avec  ses  inter- 
prètes, pour  lui  exposer  le  sujet  de  leur 
voyage.  Le  roi  les  écouta  tranquillement, 
et  leur  ordonna  de  demeurer  dans  l'île  où 
ils  étaient ,  jusqu'à  ce  qu'il  pût  aller  les  en- 
tendre et  conférer  avec  eux  :  car  il  avait  dé- 
jà ouï  parler  de  la  religion  chrétienne.  Son 
nom  était  Éthelberf.  Quelque  temps  après  il 
vint  à  l'île  de  Tanet ,  et  manda  Augustin 
avec  les  siens  ;  mais  il  ne  voulut  leur  don- 
ner audience  que  dehors  et  au  grand  air , 
parce  qu'une  ancienne  prédiction  lui  faisait 
craindre  que,  s'il  les  écoutait  à  couvert  dans 
une  maison,  ils  ne  le  surprissent  par  quel- 
que opération  magique.  Ils  arrivèrent  en 
procession,  portant  une  croix  d'argent,  et 
l'image  du  Sauveur  en  un  tableau ,  et  chan- 
tant des  litanies,  pour  demander  à  Pieu  leur 
salut  et  celui  du  peuple  pour  lequel  ils  étaient 
venus.  Ethelbert  les  ayant  fait  asseoir,  Au- 
gustin lui  annonça  l'Évangile,  en  lui  décla- 
rant que  le  seul  zèle  du  salut  de  ce  prince 
et  de  toute  sa  nation  les  avait  fait  venir  de 
Rome  dans  la  Grande-Bretagne.  Tout  le  suc- 
cès de  cette  première  prédication  fut  que  le 
roi  permit  aux  missionnaires  de  s'établir 
dans  la  ville  de  Doroverne  sa  capitale,  au- 
jourd'hui Cantorbéri,  en  leur  laissant  la  liber- 
té d'attirer  à  la  religion  chrétienne  tous 
ceux  à  qui  ils  pourraient  la  persuader.  Éta- 
blis dans  cette  ville,  ils  commencèrent  à  y 
pratiquer  la  vie  des  apôtres,  s'appliquant 
continuellement  au  jeune  et  à  la  prière,  et  ne 
recevant  de  ceux  qu'ils  instruisaient,  que  les 
choses  nécessaires  à  la  vie.  Aux  environs 
de  la  ville,  à  l'orient,  était  une  église  en 
l'honneur  de  saint  Martin.  C'était  là  que  la 
reine  avait  coutume  de  faire  les  exercices 
de  sa  religion  ;  les  missionnaires  en  firent 
aussi  le  lieu  de  leur  assemblée  et  de  leurs 
prédications,  avec  la  permission  du  roi. 
Plusieurs  anglais  emLiassèrent  la  foi  ;  le  roi 


'  Greg.,  lib.  VI,  Epist.  15,  16,  17. 


«  Lib.  VI,  Epist.  SI. 


438 


HISTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


lui-même  crut,  et  fut  baptisé.  Son  exemple 
en  attira  un  p:rand  nombre  ;  mais  ce  prince 
ne  contraignait  personne  ,  se  contentant  de 
témoigner  plus  d'amitié  à  ceux  qui  se  fai- 
saient baptiser.  Alors  il  permit  Je  rétablir  les 
ancienneséglises(carle'  nom  de  Jésus-Clu-ist 
avait  autrefois  été  connu  chez  les  Bretons, 
au  lieu  que  leur  pays  était  demeuré  impéné- 
trable aux  Romains)  ;  et  il  donna  aux  mission- 
naires dans  sa  capitale  un  lieu  pour  établir 
un  siège  épiscopal,  avec  des  biens-fonds  en 
suffisance.  Augustin,  voyant  de  si  heureux 
commencements,  passa  en  France,  afin  de  se 
faiie  ordonner  évèque  par  saint  Virgile,  ar- 
chevêque ii'.\rles,  selon  l'ordre  qu'il  en  avait 
reçu  du  Pape;  après  quoi,  étant  de  retour  en 
Angleterre,  il  baptisa,  ti  la  fête  de  Noël  de 
l'an  597,  plus  de  dix  mille  .\nglais.  Il  envoya 
à  Rome  le  prêtre  Laurent  avec  le  moine 
Pierre,  deux  de  ses  compagnons,  pour  infor- 
mer saint  Grégoire  de  tout  ce  qui  s'était 
passé,  et  pour  le  consulter  sur  plusieurs  dif- 
ficultés qui  se  présentaient  dans  l'établisse- 
ment de  cette  nouvelle  Église.  Le  Pape  per- 
mit à  Augustin,  qui  était  seul  évèque  en  An- 
gleterre, d'ordonner  lui  seul  d'autres  évè- 
cfues,  le  dispensant  à  cet  égard  des  anciens 
canons,  qui  ordonnent  que  l'évèque,  qui 
en  consacre  un  nouveau,  sera  assisté  de 
deux  autres  évoques.  11  renvoya  Laurent  et 
Pierre,  et  avec  eux  plusieurs  autres  ouvriers 
évangéliques,  dont  les  plus  connus  sont  Mel- 
lite.  Juste,  Paulin  et  Rufinien,  tous  moines. 
Ce  fut  '  par  eux  qu'il  envoya  à  Augustin  des 
livres,  des  vaisseaux  sacrés,  des  ornements 
d'église  et  le  pallium,  avec  une  lettre  pour 
l'encourager  au  travail,  et  l'avertirde  ne  point 
s'enorgueillir  des  miracles  que  Dieu  opérait 
par  son  ministère,  et  une  autre  pour  le  roi 
Éthelbert,  qu'il  congratulait  sur  sa  conver- 
sion et  sur  celle  de  ses  sujets.  Le  Pape  éta- 
blit Augustin'  métropolitain  sur  douze  évê- 
qucs  qu'il  lui  ordonna  de  consacrer  pour  di- 
vers endroits,  nommément  pour  la  ville 
d'York,  si  elle  embrassait  l'Évangile,  vou- 
lant que  cet  évèque  fût  aussi  métropolitain 
de  douze  évèques  qui  recevraient  l'drdin.i- 
tiou  de  lui.  Augustin  fonda  près  de  Cantor- 
béri  le  monastère  de  Saint-Pierre  et  Saint- 
Paul,  dont  il  fit  abbé  Pierre,  l'un  des  dépu- 


tés qu'il  avait  envoyés  à  Rome.  Il  mit  aussi 
des  moines  dans  sa  cathédrale,  et  vécut 
avec  eux  dans  la  pratique  des  exercices  mo- 
nastiques, conformément  *  aux  ordres  de 
saint  Grégoire.  Nous  donnerons  un  plus  long 
détail  des  suites  de  cette  mission  dans  l'ana- 
lyse des  lettres  de  ce  Père. 

20.  Il  eut  un  nouveau  sujet  de  joie  au  com- 
mencement de  la  huitième  année  de  son  pon- 
tificat, par  la  conversion  des  idolâtres  de 
l'ile  de  Corse;  Pierre,  évèque  d'.^léria,  en 
fut  le  principal  ministre.  Saint  Grégoire,  in- 
formé du  succès  de  ses  travaux  apostoliques, 
lui  permit  '  l'érection  d'un  évêché  dans  la 
Corse,  lllui  envoya  aussi  une  somme  d'argent 
pour  acheter  des  vêtements  à  donner  à  ceux 
qui  recevaient  le  baptême ,  c'est-à-dire  des 
robes  blanches,  qu'on  portait  après  avoir  été 
baptisé.  Cette  conversion  fut  suivie  de  celle 
de  plusieurs  juifs  dans  le  voisinage  de  Gei^ 
genti.  Le  Pape,  craignant  qu'un  trop  grand 
délai  n'apportât  quelque  changement  dans 
les  nouveaux  convertis,  commanda  '  qu'on 
leur  donnât  le  baptême  à  quelque  dimanche 
ou  à  quelque  grande  fête,  pourvu  qu'aupa- 
ravant on  leur  eût  fait  faire  une  pénitence  et 
une  abstinence  de  quarante  jours.  Cette  pé- 
nitence était  pour  éprouver  leur  bonne  vo- 
lonté, et  pour  leur  faire  essayer  les  rigueurs 
de  la  vie  chrétienne,  afin  qu'après  l'avoir 
embrassée,  ils  ne  pussent  se  plaindre  de  la 
dureté  de  ses  lois. 

21.  Saint  Grégoire  travaillait  depuis  long- 
temps h  faire  une  paix  stable  entre  les  Ro- 
mains et  les  Lombards.  11  avait  à  cet  elfet 
employé  le  crédit  de  l'empereur,  négocié 
par  lettres  et  par  députés  à  la  cour  du  roi 
Agilulphe  et  de  la  reine  Tliéodelinde.  Ro- 
main, exarque  de  Ravenne,  s'y  était  toujours 
opposé,  par  pur  entêtement,  n'ayant  ni  as- 
sez de  valeur,  ni  assez  de  force  pour  faire 
tête  au  roi  des  Lombards.  Cependant  la  paix 
se  fit,  et  on  eu  fut  "  redevable  aux  soins  de 
l'ablic'  Probus  et  do  Théodore,  administrateur 
de  Ravenne.  Agilulphe  signa  et  jura  la  paix 
de  bonne  foi:  mais  Ariulfe,  duc  de  Béné- 
veut,  ne  la  voulut  jui-cr  qu'à  certaines  con- 
ditions, sous  lesquelles  il  se  promettait  d'op- 
primer un  jour  les  Romains.  Les  Lombards 
pressèrent  saint  Grégoire  de  jurer  aussi  cette 


ConTrrï.on 
iti  Cnfti  cl 
àe*  Juifii,  cl 
Wt. 


S.  Gr^oir« 
Jiiocuro  It 
[«ii  ivcc    ks 

en. 


'  Brilannorum  inaccessa  Romanis  loca,  ChrLstn 
vero  subdila.  Tertulliaii.,  lib.  Advers.  Judœns, 
cap.  VII. 

<  Bcd.,  lib.  I  Hisl.  Angi,  cap.  xxx. 


»  Crrp.,  lib.  Il,   Ëpisl.  05,  et  Bcil. 
j.\t\.  -  *  Grci;.,  lib.  Il,  Epist.  61. 


(irc){.,  lib.  VI,  EpixI.    22.-  « 
—  '  Greg.,  lib.  IX.,  Epist.  98. 


Ibid 


lib    I,  c.ip. 
,  Epist.  21, 


CHAPITHE  XLIX.  —  SAINT  CnÉGOIllE  LE  GRAM),  PAPE. 


[Vir  SIÈCLE.] 

paix,  mais  il  le  refusa,  disant  qu'il  n'était 
qiie  niéiliateiir  entre  le  roi  et  l'exarque;  il 
promit  toutefois  de  la  faire  signer  en  sou 
nom  par  un  évoque  '  ou  par  un  aicliidiacre. 
«'.elte  paix  ne  fut  pas  de  longue  durée. 
L'exarque  romain  ayant  une  seconde  fois 
rompu  la  paix  ',  le  roi  Agilulplie  donna  or- 
dre au  duc  Ariulfe  et  aux  Lombards  de  'Tos- 
cane, de  fatiguer,  par  des  courses  continuel- 
les, les  villes  de  Home  et  de  Havenne.  Le  re- 
tour de  quelques  '  schismatiques  h  l'unité  de 
l'Église,  servit  de  lénitif  h  la  douleur  que 
causait  au  Pape  l'infraction  de  la  paix;  mais 
cette  réunion  ne  fut  pas  aussi  entière  qu'elle 
aurait  pu  l'être,  par  l'opposition  de  l'évèque 
de  Caprite  et  de  quelque  autres  obstinés  k 
la  défense  des  Trois-Chapitres. 
Maudirs  i!«  22.  Cependant  saint  GréRoire  fut  attaqué 
lO'i.  violemment  de  la  goutte  aux  pieds,  ce  qui  1  o- 

bligeait  de  garder  '  le  lit,  pouvant  à  peine 
rester  levé  pendant  trois  heures  et  célébrer  la 
messe.  Sa  maladie  était  quelquefois  moindre, 
quelquefois  excessive  ,  mais  jamais  si  faible 
qu'elle  cessât,  ni  si  forte  qu'elle  le  fit  mourir; 
d'où  il  arrivait  qu'il  était  tous  les  jours  pro- 
che de  la  mort,  et  qu'il  en  était  tous  lesjours 
repoussé  et  rejeté.  «Que  devons-nous  faire, 
disait  -  il  *  dans  ces  douleurs  ,  sinon  nous 
souvenir  de  nos  péchés,  et  rendre  grâces  â 
Dieu,  puisqu'il  nous  purifie  en  affligeant  cette 
chair  qui  nous  a  tant  fait  pécher?  La  peine 
présente,  si  elle  nous  convertit,  est  la  fin  de 
la  faute  précédente  ;  sinon,  c'est  le  com- 
mencement de  la  peine  suivante.  Il  faut  donc 
bien  prendre  garde  à  ce  que  nous  ne  pas- 
sions d'an  tourmenta  d'autres,  et  considérer 
la  bonté  de  Dieu  qui  nous  menace  de  la 
mort,  que  nous  méritons,  sans  nous  la  don- 
ner, pour  nous  imprimer  une  crainte  salu- 
taire de  ses  jugements.  Combien  de  pécheurs 
sont  demeurés  plongés  dans  leurs  crimes 
jusqu'il  la  mort,  sanssoufl'iir  seulement  un 
mal  de  tète,  et  ont  été  tout  d'un  coup  frap- 
pés et  livrés  au  feu  de  l'enfer?»  Ses  infirmi- 
tés corporelles  ne  raleutisfaient  point  son 
zèle  pour  la  défense  de  la  foi.  Il  lisait,  étant 
malade,  les  écrits  que  saint  Euloge,  patriar- 
che d'Alexandrie,  avait  composés  contre  les 
agnoïtes,  qui  attribuaient  l'ignorance  à  Jé- 


439 


sus-Christ,  abusant  de  certains  passages  de 
l'Evangile,  où  il  parie  comme  s'il  eût  ignoré 
(]uelqiic  chose.  Quoiqu'il  n'eût  rien  trouve 
(pie  (l'admirable  dans  l'ouvrage  de  ce  pii- 
triarche,  il  voulut  avoir  part  à  la  gloire  qu'il 
s'était  acquise,  en  prenant  la  défense  de  la 
saine  doctrine,  et  ajoutant  '  ses  réflexions  et 
de  nouvelles  preuves  à  celles  de  saint  Eu- 
loge. Ayant  appris,  quelque  temps  après, qu'il 
s'élevait  un  scandale  à  Thessalonique,  à 
cause  que  Luc,  prêtre,  et  Pierre,  refusaient 
de  recevoir  les  décrets  du  concile  de  Chalcé- 
doine,  il  en  écrivit  aussitôt  â  Eusèbe,  arche- 
vêque de  cette  ville,  pour  l'exhorter  à  faire 
rentrer  les  deux  opposants  dans  le  devoir. 

23.  Le  5  avril  601,  saint  Grégoire  tint  un  c„l'e,i',|°S'Ho°. 
concile  à  Rome,  où  se  trouvèrent  vingt-et-im  "'=''=°^'"- 
évêques  et  seize  prêtres.  11  y  fit  une  consti- 
tution en  faveur  des  moines,  où  il  dit  qu'ayant 
lui-même  gouverné  des  monastères,  il  sait  ' 
combien  il  est  nécessaire  de  pourvoir  à  leur 
repos.  Cet  endioit  foime,  ce  semble,  une 
preuve  sans  réplique  que  saint  Grégoire  avait 
été  abbé  du  monastère  de  Saint-André  avant 
de  monter  sur  le  Saint  -  Siège.  La  môme 
année  il  écrivit  â  Éthérius,  évêque  de  Lyon, 
et  à  '  Arégius  de  Gap,  pour  les  exhortera 
tenir  un  concile  contre  la  simonie.  Il  leur  re- 
commandait, dans  la  même  lettre,  plusieurs 
moines  qu'il  envoyait  en  Angleterre  pour 
soutenir  la  mission  qu'Augustin  y  avait  com- 
mencée. Il  écrivit  la  même  chose  à  Virgile, 
évéque  d'Arles. 

2-i.  Quoique  ses  grandes  infirmités  lui  ôtas-  p,e„d"d'„°'ré- 
sent  l'espérance  d'une  longue  vie,  il  entre-  F"qaf'"es'.. 
prit  de  réparer  les  basiliques  de  Saint-Pierre  s!°-ïïuil  À 
et  de  Saint-Paul.  Dans  ce  dessein,  il  donna 
ses  ordres  au  sous-diacre  Sabin  défaire  abat- 
tre dans  le  pays  des  Brutiens  tous  les  bois 
nécessaires,  et  de  les  faire  embarquer  pour 
Rome.  La  paix  qui  durait  encore  entre  les 
Romains  et  les  Lombards,  était  un  temps  fa- 
vorable pour  cette  entreprise.  Comme  il  fal- 
lait faire  conduire  ces  matériaux  par  les 
terres  de  l'obéissance  d'Arogès,  duc  de  Bé- 
névent,  à  qui  le  roi  des  Lombards  avait  don- 
né ce  duché,  saint  Grégoire  le  '  pria  de  le 
trouver  bon,  et  de  faire  même  contribuer 
ses  sujets  à  voiturer  les  poutres  destinées  à 


'  (".reg.,  lib.  IX,  EpUl.  98. 
'  Paulus  Diac,  lib.  IV  Hisl.  Longob.,  eap.  21. 
24,  25. 
«  Greg.,  lib   IX,  Epist.  9  et  10. 
'  Greg.,  lib.  X,  Epist.  33. 
»  Lib.  XI,£pist.  30.  -  •  Lib.  X,  Epist.  39. 


'  Quant  sit  necessarium  motiusteriorum  quieti 
conspicere...  anlecctum  nos  officium,  quod  in  re- 
gimine  cœncbii  exhibuimus  informât.  Tome  V 
Concil.,  pag.  1607. 

9  Greg.,  lib.  W.EpiSl.  55,  56,  57. 

»  Greg.,  lib.  XU,  Epist.  20. 


MO 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Mort   de 

lVni|.rrour 
M.iortcp,  rn 
li'i .'.  N<iaf«  de 
S.  Grcpoirc  à 
Lon'lanlino- 
VlCi  en  603. 


ce  bâtiment.  Il  écrivit  sur  le  même  sujet  à 
M;uircncc,  grand-maitre  de  la  gondarnierie 
pour  les  Homuius;  mais  sou  entreprise  fut 
traversée  par  la  guerre  qui  recommença  '  en 
Italie  la  même  année  602.  Il  gémit  devant 
Dieu  des  malheurs  de  cette  province,  et  in- 
téressa ses  amis  à  lui  demander  la  patience 
dans  de  si  rudes  et  si  continuelles  é[)reu- 
ves.  La  seule  consolation  qu'il  reçut  fut  le 
retour  de  quelques  évêques  qui  avaient  fait 
schisme  avec  l'Église  catholique  au  sujet 
des  Trois-Chapitres,  entre  autres,  de  Firmin, 
cvêque  de  Trieste  dans  l'Istrie.  D'un  autre 
côté,  les  Églises  d'Afrique,  dont  la  plupart 
des  clercs  ne  vivaient  pas  selon  les  canons, 
lui  donnèrent  beaucoup  d'inquiétudes.  Il  eut 
aussi  à  réprimer  des  scandales  dansl'IUyrie. 
La  reine  Brunehaut  et  le  roi  Théodoiic  lui 
envoyèrent  des  ambassadeurs  pour  diverses 
all'aires,  en  particulier  sur  la  paix  qu'ils  vou- 
laient faire  avec  l'Empire. 

25.  Phocasenpritles  rênes  le  23  novembre 
602.  Maurice  n'était  pas  encore  mort;  mais 
le  nouvel  Empereur  le  fit  massacrer  le  27 
du  même  mois,  et  avec  lui  ses  enfants  et  son 
frère.  Saint  Grégoire  qui,  sous  le  règne  pré- 
cédent, avait  discontinué  d'envoyer  des  non- 
ces à  Constantinople,  parce  qu'ils  y  avaient 
été  regardés  de  mauvais  œil  à  la  cour  impé- 
riale, à  cause  de  la  contestation  survenue  au 
sujet  du  titre  d'œcuménique,  y  en  envoya 
ini  sous  Phocas,  avec  une  lettre  *  pour  ce 
prince,  dans  laquelle  il  le  suppliait  d'ajouter 
foi  à  ce  que  le  diacre  Boniface,  son  nonce, 
lui  dirait  de  l'état  déplorable  de  l'Italie,  et  de 
la  ville  de  Home  assiégée  depuis  trente-cinq 
ans  par  les  Lombards,  et  continuellement 
exposée  à  leurs  insultes.  Il  n'épargnait  'pas 
1i;r  louanges  ;\  Phocas,  soit  afin  do  l'adoucir, 
soit  afin  de  le  rendre  favorable  àl'Ki^lise  ro- 
maine, soit  afin  de  lui  a])prendre  parle  bien 
(ju'il  disait  de  lui,  ce  qu'il  était  obligé  de 
faire.  Cette  lettre  est  du  mois  de  juin  de  l'an 
003,  environ  six  mois  après  l'avénouiont  de 
Phocas  à  l'Empire.  Les  images  de  ce  prince 
et  de  sa  femme  Léonlia  ayaut  '  été  appor- 
tées à  Rome  dès  le  mois  de  mai,  le  Pape  les 
avait  fait  placer  dans  la  chapelle  de  saint  Gé- 
sarius,  au  dedans  du  palais.  11  fit  de  nouvel- 
les '  instances  pour  obliger  le  patriarche  de 


Constantinople  ii  renoncer  au  titre  d'œcumé" 
nique;  mais  la  chose  ne  réussit  qu'après  sa 
mort,  lorsque  Boniface  fut  monté  sur  la 
chaire  de  saint  Pierre.  Phocas  qui  avait  conça 
pour  lui  de  l'amitié  pendant  sa  nonciature, 
et  qui  n'était  pas  content  du  patriarciie  Cy- 
riaque  *,  fut  fort  aise  de  trouver  l'occasion  de 
le  mortifier  en  le  dépouillant  de  ce  vain  li- 
tre. 

26.  On  voit,  dans  les  églises  de  Saint-Pierre  «'•mo 

,  ?■     Grwolro, 

et  de  Saml-Paul  à  Rome,  deux  tables  de  "  «"• 
marbre,  sur  lesquelles  sont  gravées  les 
donations  que  saint  Grégoire  fit  à  ces  basili- 
ques pour  l'entretien  du  luminaire.  Les  do- 
nations faites  i\  Saint-Paul  sont  datées  du 
25  janvier  604.  Il  mourut  le  12  mars  de  la 
môme  année,  accablé  par  ses  infirmités  et 
par  son  application  continuelle  aux  affaires 
de  l'Église  ;  il  fut  enterré  sans  aucune  pompe, 
selon  qu'il  l'avait  ordonné  %  au  bout  de  la 
galerie  de  Saint-Pierre,  devant  une  salle  où 
saint  Léon  et  quelques  autres  papes  étaient 
inhumés.  Son  pontificat  fut  de  treize  ans, 
six  mois  et  dix  jours.  On  conserva  avec  son 
corps  son  pallium,  le  reliquaire  qu'il  portait 
au  cou  et  sa  ceinture.  Le  reliquaire  était 
d'argent  et  fort  mince.  11  s'était  "  fait  peindre 
dans  le  monastère  de  Saint-André  avec  son 
père  et  sa  mère,  pour  retenir  les  moines 
dans  la  ferveur  de  l'observance  par  la  vue 
de  son  portrait.  Il  avait  la  taille  belle  ;  son  vi- 
sage tenait  île  la  longueur  de  celui  de  son 
père,  et  de  la  rondeur  de  celui  de  sa  mère. 
Sa  bai-be  était  médiocre,  ses  cbeveux  noirs 
et  frisés;  chauve  sur  le  devant ,  avec  deux 
petits  toupets;  la  couronne  grande.  Son  front 
était  beau,  sa  physionomie  noble  et  douce, 
ses  mains  belles.  11  avait  pour  habit  une  pla- 
nète chiUaigne  sur  une  dalmatique,  portant 
de  |)lns  le  [)allinm  entortillé  simplement 
autour  des  épaules,  et  pendant  sur  le  côté. 
De  la  main  gauche  il  tenait  l'évangile,  cl  de 
la  droite  il  faisait  le  signe  de  la  croix.  C'est 
ce  que  nous  appionons  de  Jean  Diacre,  son 
bistorien,  qui  avait  apparemment  vu  le  por- 
trait de  saint  Grégoire.  Il  n'aurait  pas  été  si 
facile  de  peindre  ses  vertus,  son  l'-galitt'  d'â- 
me dans  la  prospiirité  connue  dans  l'adver- 
sité, son  zèle  ardent  pour  la  gloire  de  Dieu, 
sa  charité  tendre  et  atlentive  pour  son  peu- 


'  l'.nnlus  Dinf,,  Uist.  Longoh.,  lit).  IV,  oap.  ix. 

'  \.\h.  XMI,  F.pist.  48. 

'  Joiiii.  Drnc,  lit).  IV,  nuiii.  2!^. 

*  Siinocalla,  lib.  VIII,  cap.  xv. 


"  f;rog.,  lib.  XllI,  F.Jiisl.  tO. 
G06,  paf(.  2. 
''  .loni).  Dino.,  lib.  IV,  luiiii. 
•  Id.,  iiuin.  8;i,  81. 


"  Baron.,  ad  an. 


68. 


CHAPITRE  XUX.  —  SAINT  GRÉGOIRE  LE  GRAND,  PAPE. 


[vu'  SifXLE.] 

pic,  son  humilitë  profonde,  sa  modestie,  sa 
leiupérance,  sa  prudence  et  tant  d'autres  bel- 
les qualités  dont  il  fut  orné.  Saint  IKIpplionse, 
évèijue  de  Tolètle  ',  a  dit  de  lui  (jn'il  avait  sur- 
passé saint  Antoine  en  sainteté,  saint  Cyprien 
en  éloquence,  saint  Aiignslin  en  sagesse,  et 
qu'il  avait  possédé  dans  un  degré  si  éminent 
les  vertus  des  plus  grands  liommes,  que 
l'antiquité  n'en  pressentait  aucun  qui  pût  lui 
être  comparé.  Le  titre  de  Grand,  qu'on  lui 
donne  communément  dans  l'Eglise,  sullit 
seul  pour  faire  son  éloge  '. 
stsEeriis.  17.  Lcs  écrits  qu'il  a  composés  sont  trente- 
cinq  livTcs  sur  Job,  deux  livres  sur  la  pro- 
phétie d'Ézéchiel,  deux  livres  sur  les  Évan- 
giles ;  le  Pastoral,  quatre  livres  de  Dialo- 
gues et  un  grand  nombre  de  Lettres  divi- 
sées en  quatorze  livres.  Les  commentaires 
sur  le  premier  livre  des  Rois,  sur  le  Cantique 
des  cantiques,  et  sur  les  sept  psaumes  de  la 
pénitence,  quoique  de  saint  Grégoire  pour  la 
plus  grande  partie,  ne  peuvent  lui  être  attri- 
bués dans  l'état  où  ils  sont  aujourd'hui.  On 
ne  peut  aussi  le  regarder  comme  seul  au- 
teur du  Sacramentaire  qui  porte  son  nom  :  il 
n'a  fait  qu'augmenter  et  réformer  celui  du 
pape  Gélasc  '. 

ARTICLE  11. 

DES  ÉCRITS  DE  S.\INT  GRÉGOIRE. 
§1- 

De  ses  livres  de  morale  sur  Job. 
-  nrvfoire       1.  Le  premier  des  ouvrages  de  saint  Gré- 


4*1 


r:r    Job.  vor» 

ran  :a2. 


goiie,  suivant  l'ordre  des  temps,  est  son  ••■>fi"»»  '•• 
commentaire  sur  Job.  Il  ne  l'entreprit  pas 
do  lui-même  ;  ce  fut  à  la  prière  '  de  saint 
Léandre,  évè(pie  de  Séville,  et  nu.x  instances 
réitérées  des  moines  de  son  monastère  de 
Saint-André,  qu'il  avait  menés  avec  lui  à 
Constauliiiople,  lorsqu'il  y  alla  en  qualité  de 
nonce  du  pape  Pelage.  ,\près  avoir  donné 
aux  affaires,  dont  il  était  chargé,  tous  les 
soins  que  demandait  son  ministère,  il  em- 
ployait le  reste  de  son  temps  en  de  saintes 
lectures,  et  de  salutaires  entretiens  avec  eux  ; 
c'est  ce  qu'il  appelait  ^  respiier  en  la  com- 
pagnie de  ses  frères,  et  reprendre  tous  les 
jours  une  vie  nouvelle.  En  le  priant  de  leur 
expliquer  le  livre  de  Job,  ils  demandèrent  ' 
qu'après  leur  avoir  découvert  les  profonds 
mystères  qui  y  sont  cachés,  il  leur  exposât 
le  sens  allégorique  de  l'histoire,  et  qu'en  ti- 
rant ensuite  dos  moralités,  il  leur  apprit  la 
manière  de  les  mettre  en  pratique  pour  la 
conduite  de  la  vie  chrétienne,  de  fortiûer 
des  témoignages  et  des  autorités  de  l'Ecri- 
ture les  vérités  qu'il  leur  exposerait,  et  en 
cas  que  les  passages  qu'il  leur  rapporterait 
fussent  obscurs,  d'y  ajouter  une  explication 
particulière  pour  les  éclaircir.  Saint  Gré- 
goire '  avoue  qu'ayant  considéré  la  gran- 
deur et  la  ditîiculté  de  cet  ouvrage  que  jus- 
ques-là  personne  n'avait  entrepris,  il  en  fut 
effrayé  ;  qu'il  se  ti-ouva  accablé  de  lassitude, 
et  succomba  sous  sa  pesanteur  ;  mais  qu'ayant 
levé  les  yeux  de  l'esprit  vers  le  souverain 
distributeur  de  toutes  les  grâces,  il  fut  incon- 
tinent persuadé  que  ce  que  ses  frères  de- 


'  Ita  enim  cunctorum  merilorum  claruit  per- 
[eclione  subliniis:.  ut  exclusis  omnibus  illuslrium 
virorum  rationibus,  nihil  illi  simile  demonstret 
antiquilas.  Vieil  enim  sanclitale  Antonium,  elo- 
quentia  Cyprianum,  sapientia  Augiistinum  Hil- 
deplioDs.,  De  Script,  eecles.,  cap.  i. 

*  Un  passage  altéré  du  Poljj^ratique  de  Jean  de 
Salisbury  avait  f.iit  accuser  saint  Grégoire  de  l'in- 
cendie Je  la  bibliotlièque  Palatine,  fûudée  par  Au- 
guste, c'est-à-dire  de  tout  ce  qu'elle  conteuait  en 
ouvrages  d'ancienne  littérature.  Cette  erreur  a  été 
souvent  réfutée.  On  a  démontré  i]ue  la  bibliothè- 
que d'Auguste,  brûlée  sous  Néron,  rétablie  par  Do- 
niitien  et  consumée  de  nouveau  sous  Commode, 
n'existait  point  par  conséquent  sous  saint  Gré- 
goire. Le  pillage  de  Rome  par  Alaric,  et  plus  tard 
par  Genséric  et  Totila,  avait  dépouillé  cette  capi- 
tale du  monde  de  tout  ce  qui  lui  restait  de  plus 
précieux.  On  a  imputé  également  à  saint  Grégoire 
la  dégradation  des  monuments  antiques  de  Rome, 
ce  Pape  voulant,  par  cette  censure,  ôter  à  la  vue 
des  fidèles,  des  objets  de  scandale  et  de  profana- 


tion. Mais  ces  mutilations  ou  cavités  que  l'on  re- 
marquait dans  la  plupart  des  édifices,  étaient  plu- 
tôt louviage  des  étrangers  attirés  à  Rome  de  tou- 
tes les  parties  du  monde  chrétien.  Ils  arrachaient  les 
ornements  et  attaches  de  bronze  servant  à  fixer  les 
pierres  de  taille,  ou  enlevaient,  pour  y  chercher 
quelques  pièces  de  monnaie,  les  vases  que  les  an- 
ciens architectes  mêlaient  dans  la  construction  de 
leurs  voûtes  pour  les  rendre  plus  légères.  Ce  sys- 
tème était  bien  éloigné  de  l'esprit  de  saint  Gré- 
goire, qui  recommandait  à  ses  missionnaires  en  An- 
gleterre de  ne  point  démolir  les  temples  païens  et 
de  se  contenter  de  les  purifier.  (L'éditeur. J 

'  Dom  Pitra  a  annoncé  qu'il  ferait  paraître  plu- 
sieurs pièces  liturgiques  et  métriques  de  saint  Gré- 
goire le  Grand.  (L'Editeur.) 

'  Greg.,  Prœfat.in  Job.,  seu  Epist.  ad  S.  Lean- 
dru  m. 

»  Ibid. 

«  Ibid. 

■>  Ibid. 


442 


HISTOIRE  GÉNKRALE  DES 


tel 


mandaient  de  lui  dans  des  vues  aussi  pures, 
ne  pouvait  être  impossible.  Il  tommeni^a  '  à 
leur  expliquer  de  vive  voix  les  premiers 
chapitres  de  ce  livre,  puis  il  dicta  des  ho- 
mélies sur  le  reste.  Ayiiiit  eu  depuis  plus 
de  loisir,  il  repassa  tout  l'ouvrage;  il  y  ajou- 
ta beaucoup  de  choses,  en  retrancha  quel- 
ques-unes ,  en  laissa  d'autres  sans  y  tou- 
cher, et.  mettant  tout  dans  un  meilleur  or- 
dre et  en  un  même  style,  il  en  fit  un  com- 
mentaire suivi,  divisé  en  trente-cinq  hvres, 
qu'il  partagea  en  six  volumes. 
oli'-'"'  ^'  ^  nous  fait'  remarquer  qu'il  y  avait 
des  choses  qu'il  traitait  en  peu  de  mots  se- 
lon la  vélité  de  l'histoire,  d'autres  dont  il 
recherchai!  les  sens  allégoriques  et  figurés, 
quelques-unes  dont  il  ne  tirait  que  la  seule 
morahté,  d  autres  enfin  qu'il  expliquait  en 
ces  trois  manières.  «  Nous  établissons  *,  dit- 
il,  d'abord  riiistoire  comme  le  premier  fonde- 
ment de  notre  discours  ;  ensuite  par  le  sens 
allégoiique  nous  élevons  le  bâtiment  de  la 
foi,  et  par  la  moralité  nous  embeUissons 
tout  cet  pdifxe  spirituel,  comme  avec  des 
ornements  el  des  peintures  ;  quelquefois 
nous  omettons  l'explication  de  l'histoire, 
quand  elle  est  claire,  afin  de  venir  plus  tôt 
aux  endroits  obscurs  ;  il  y  en  a  aussi  qui  ne 
peuvent  s'expliquer  littéralement,  parce  que 
si  on  les  prenait  à  la  lettre,  au  lieu  d'ins- 
truire ceux  qui  les  lisent,  ils  les  jetteraient 

Job.  n,  13.  dans  l'erreur.  Telles  sont  ces  paroles  :  Sons 
qui  sont  courbés  ceux  qui  supportent  la  terre. 
Job,  sans  doute,  n'ajoutait  pas  foi  aux  vai- 
nes fables  des  poêles  qui  croyaient  que  le 
globe  de  la  terre  était  soutenu  sur  les  épau- 
les d'un  géant.  Il  dit  encore  au  fort  de  son 

job.Tîi.ii.  affliction  :  Mon  Ame  a  c/ioisi  la  susj>ension,  et 
mes  os  la  mort.  Personne  ne  se  peisuadera 
qu'un  homme  d'un  si  grand  mérite,  cl  qui 
reçut,  dès  cette  vie,  le  prix  de  sa  patience 
de  la  main  du  Juge  éternel,  ait  résolu,  parmi 
tant  de  maux,  de  finir  sa  vie  par  une  mort 
pleine  d'infamie  et  de  désespoir.  »  Saint 
Grégoire  rapporte  plusieurs  autres  passages 
du  livre  de  Job  qui  ne  peuvent  être  enten- 
dus dans  un  sens  lillTTal,  et  cnnclut  qu'il 
est  nécessaire  de  leur  donner  qucli[ue  au- 
tre sens  plus  juste  et  plus  convenable.  11 
ajoute  •  qu'il  y  en  a  d'autres  qu'on  doit  ex- 
l)liquer  litléralemenl  pour  conserver  la  vé- 
rité de  l'histoire,  et  que  comme  l'Écriture  a 


.\UTEURS  ECCLÉSI.\STIQUES. 

des  endroits  obscurs  pour  exercer  les  esprits 
des  savants,  elle  en  a  de  clairs  pour  ins- 
truire les  simples.  Il  met  du  nombre  de  ceux 
qu'on  doit  prendre  à  la  lettre  celui-ci  :  Je  n'ai  „i°J;,""'' 
point  refusé  aux  pauvres  ce  qu'ils  demandaient, 
je  n'ai  point  fait  attendre  les  yeux  de  la  veuve, 
je  n'ai  point  mangé  mon  jjain  tout  seul  ;  maie 
j'en  ai  fait  jxirt  au  pupille.  Je  n'ai  point  mé- 
prisé les  jMSsants  qui  étaient  mat  habillés,  ni 
les  pauvres  qui  étaient  nus  ;  mais  leurs  c<^tes 
que  j'ai  couvertes  m'ont  donné  des  bénédictions, 
et  leurs  corps  ont  été  réchauffés  ])ar  les  toisons 
de  mes  brebis  dont  je  les  ai  revêtus.  En  effet,  si 
on  voulait  donner  un  sens  allégorique  à  ces 
paroles,  on  anéantirait  toutes  les  œuvres  de 
miséricordeque  ce  saint  homme  a  pratiquées. 
Suint  Grégoire  suit  ordinairement  *  dans  ce 
comi'ientaire  la  version  que  saint  Jérôme 
avait  faite  du  livre  de  Job,  et  qu'il  appelle  la 
nouvelle;  mais  lorsqu'il  en  est  besoin,  il  cite 
aussi  l'ancienne.  La  raison  qu'il  en  donne, 
c'est  qu'étant  assis  sur  le  Siège  apostolique, 
qui  se  servait  de  l'une  et  de  l'autre  version, 
il  était  raisonnable  qu'il  eût  recours  à  fou- 
tes les  deux  pour  autoriser  ce  qu'il  avançait 
dans  cet  ouvrage.  Quoiqu'il  l'eut  commencé 
dès  l'an  582,  et  l'eut  bien  avancé  pendant  son 
séjour  à  Constantinople,  il  n'y  mit  la  dernière 
main  que  depuis  qu'il  fut  pape.  Ce  fut  dans 
ce  temps-là  qu'il  l'envoya  à  saint  Léandrc  *, 
non  qu'il  crût  que  ce  fût  une  chose  digne  de 
lui  être  présentée,  mais  parce  qu'il  la  lui 
avait  promise.  Il  lui  demande,  dans  la  lettre 
qu'il  lui  écrivit  à  ce  sujet,  et  que  l'on  a  mise 
à  la  tête  de  tout  l'ouvrage  dans  la  nouvelle 
édition,  de  n'y  pas  chercher  les  feuilles, 
c'est-à-dire  les  ornements  superflus  des  pa- 
roles, que  l'Kcriture  interdit  aux  interprètes 
en  leur  défendant  de  planter  du  bois  dans 
le  temple  du  Dieu  lout-puissanl. 

3.  Aussitôt  que  ce  Commentaire  eut  été  ,„„„  J;,";; 
rendu  public,  on  s'empressa  d'en  avoir  des  [J,,,.'^"'"""'"" 
copies,  il  y  eut  même  des  évoques  qui  le  fi- 
rent lire  publiquement  aux  ollices  de  la  nuit, 
entre  autres  Marinien,  archevêque  de  Ra- 
venne.  Saint  On-goire  en  eut  de  la  douleur 
par  unetlVl  de  l'humble  sentiment  qu'il  avait 
de  ses  ouvrages.  Il  écrivit  donc  à  Jean',  sous- 
diacre  de  cette  église,  de  détourner  Marinien 
de  la  lecture  de  ses  commentaires  sur  Job 
dans  les  assemblées,  disant  qu'ils  n'étaient 
pas  assez  à  lu  portée  du  peuple,  et  qu'ils 


'  Greg.,  Prœfal.  in  Job.,  seu  Episl.  ad  S.  Lean- 
drum. 


•  Ibid.  -  >  Ibid.  -  '  Ihid.  -  «  Ibid. 
■>  Greg.,  fil).  XII,  £>is(.  2*. 


«  Ibid. 


Preinièra 
r'iodu  Corn* 
'DIairo  sur 
!■,      loni.    I, 

Il    laii^ien.' 
.  l-ns, laf. 


[vu*  siècLE.]       CHAPITllE  XLIX.  — SAINT 

IHUiviiient  plutôt  nuire  i'i  ilos  iuiditciirs  jicu 
instruits,  quo  lour  piolilor.  Il  lui  coiisoilla  ilo 
l'aire  lire  de  pi  ëféreuce  des  counnentairessur 
les  Psaumes,  comme  étant  fort  propres  à  ins- 
pirer la  bonne  morale  aux  séculiers.  11  par- 
lait apparemment  des  commentaires  de  saint 
Augustin,  ou  de  quelqu'autre  père,   sur  les. 
Psaumes  :  car  on  ne  voit  pas  qu'il  en  ait 
composé  lui-même.  D'ailleurs  il  dit  '  en  gé- 
néral à  Jean  de  Uavenue,   qu'il  ne  souhai- 
tait pas  qu'on  publiât  dans  le  monde  pendant 
sa  vie,  ce  qui  était  échappé  de  sa  bouche  ou 
de  sa  plume.  L'exemplaire  que  saint   Gré- 
goire avait  envoyé  ;\  saint  Léandre  s'étant 
trouvé  égaré  après  la  mort  de  saint  Isidore, 
son  frère,  Taïon,  évêque  '   de  Sarragosse, 
vers  le  milieu  du  vu"  siècle,  fut  envoyé  à 
à  Rome  par  Chindasvinte,  roi  des  Yisigotlis 
en  Espagne,  pour  en  avoir  une  autre  copie, 
qu'il  obtint  avec  assez  de  peine.  Quelques- 
uns  ont  trouvé  mauvais  que  ce  saint  Pape 
ail  employé  tant  d'allégories  et  tant  de  mo- 
ralités daps  cet  ouvrage;  mais  ils  n'ont  pas 
fait  attention  que  le  dessein  de  l'Esprit-Saint 
dans  ce  livre  est  de   nous  donner,    en   la 
personne  de  Job,  un  exemple  singulier  de 
patience  dans  les  adversités,  et  un  modèle 
des  vertus  chrétiennes,  et  que  saint  Grégoire 
ne  s'y  est  pas  tellement  appliqué  au   sens 
moral,  qu'il  ait  négligé  le  littéral.  Les  Hé- 
breux ne  le  mettaient  point  parmi  les  livres 
historiques    de   l'Écriture,   mais  parmi   les 
agiographes,  c'est-à-dire  cens  dont  la  lec- 
ture édiQe  davantage. 

4. Dans  la  préface  générale  sur  son  Commen- 
taire, saint  Grégoire,  après  avoir  proposé  les 
dififérents  sentiments  sur  l'auteur  du  livre  de 
Job,  que  quelques-uns  attribuaient  à  Moïse, 
dit  qu'il  est  fort  inutile  de  rechercher  en 
quel  temps  Job  a  vécu,  et  qui  a  composé  le 
livre  qui  porte  son  nom,  puisque  les  fidèles 
ne  doutent  point  qu'il  ne  soit  l'ouvrage  du  ' 
Saint-Esprit  qui  en  a  inspiré  la  pensée  à 
l'auteur,  et  qui  s'est  servi  de  sa  plume  pour 
faire  passer  jusqu'à  nous  des  actions  de  ver- 
tu que  nous  puissions  imiter.  Ce  qui  lui  pa- 
rait le  plus  vraisemblable  sur  ce  sujet,  est 
que  Job,  qui  a  soutenu  les  grands  eilbrts  de 


GRÉGOIRE  LE  GRAND,  P.VPE.  443 

ce  coiul)al  spirilnol.a  *  éciit  lui-même  l'his- 
toire de  sa  victoire;  (pi'on  ne  doit  pas  être 
détourné  d'embrasser  ce  sentiment,  parce 
qu'il  est  parlé  de  Job  dans  ce  livre  en  troisiè- 
me personne  :  Joh  a  dit,  Job  n  souffert,  ceux 
qui  ont  écrit  les  Livres  saints  ayant  coutume 
de  parler  d'eux-mêmes,  comme  s'ils  par- 
laient des  autres.  Cela  se  voit  dans  Moïse, 
qui  dit,  au  chapiti-e  I"  des  Nombres  :  Moïse 
(Huit  lupins  doux  qui  fût  sur  la  terre;  et  dans 
saint  Jean  l'Évangéliste:rt'/!<«-/àe<aiV  ledis-  .J"'"-  '" 
ciple  que  Jésus  aimait.  Il  montre  ensuite  que 
Dieu  nous  a  proposé  l'exemple  de  Job,  pour 
nous  ùter  toutes  excuses  dans  nos  pr(îvarica- 
tions  :  «  Un  homme  sans  loi  l'a  observée,  n'y 
a-t-il  pas  là  de  quoi  confondre  la  dureté  et  la 
malice  de  tous  ceux  qui,  étant  sous  la  loi,  ne 
l'observent  pas?  Sa  patience  a  mis  le  comble 
à  ses  vertus;  après  le  témoignage  que  Dieu 
lui  a  rendu  de  n'avoir  point  péché  dans  ses 
paroles,  il  y  aurait  de  la  témérité  à  reprendre 
ses  discours,  comme  trop  rudes  et  peu  mesu- 
rés, et  quelquefois  trop  flatteurs  pour  lui.  »Le 
saint  Docteur  trouve  dans  la  réconciliation 
des  amis  de  Job  avec  lui,  la  figure  du  retour 
des  hérétiques  à  l'Église. «Les  sacrifices  des 
hérétiques  ne  peuvent,  dit-il,  être  agréables 
à  Dieu,  s'ils  ne  sont  offerts  pour  eux  par  les 
mains  de  l'Église  universelle,  afin  qu'ils  re- 
çoivent le  salut  par  les  mérites  de  celle-là 
même,  contre  laquelle  ils  ont  si  souvent  lancé 
leurs  paroles  envenimées  et  pleines  d'erreurs  ; 
c'est  pourquoi  il  est  dit  qu'on  oûiait  pour  les 
amis  de  Job  sept  sacrifices,  parce  que,  quand 
les  hérétiques  reconnaissent  cet  Esprit-Saint 
qui  communique  les  sept  dons  de  grâce,  et 
qu'ils  le  reçoivent  en  eux-mêmes,  ils  sont 
comme  purifiés  par  sept  oblations  différen- 
tes. Job,  en  recevant  deux  fois  autant  de 
biens  qu'il  en  avait  perdus,  nous  figure  le 
double  avantage  que  l'Église  recevra  dès 
cette  vie  pour  récompense  de  ses  travaux 
dans  la  conversion  des  gentils  et  des  juifs,  et 
après  cette  vie,  dans  la  béatitude  de  l'àme 
et  du  corps.  »  Après  ces  préliminaires,  saint  L;t..  i.  pn. 
Grégoii-e  vient  au  texte  de  Job,  qu'il  expli- 
que en  trois  manières  :  dans  le  sens  littéral, 
dans  le  moral  et  dans  l'aUégorique.  «Le  lieu 


»  Greg.,  lib.  Xlt,  Epist.  24. 

'  Prœfat.,  edil.  in  lih.  Job.,  pag.  21. 

'  Sed  quis  hcec  scripserit  value  supervacne  quœ- 
rilur  :  cvm  tamen  auctor  libri  Spirilus  Sanctiis 
fidelUer  credatur.  Ipse  igilur  hœc  scripsit.,  qui 
scribenda  diclavit  Ipse  scripsit.  qui  et  in  illius 
opère  inspirator  ej:tUil,  et  per  scribetilis  vocem 


imitanda  ad  -nos  facta  transmisit.  Greg.,  Prœfat., 
in  lib.  Joh. 

'  Arbitrari  tamen  verius  possumus  quod  idem 
heatiis  Job  qui  cerlamina  spiritalis  pugnœ  susti- 
nuit,  eliam  consummatœ  suœ  victoriœ  gesta  nar- 
ravit.  Ibid. 


n\ 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


m.. 

3". 


Pt.Trnl,  in 
II,    pf. 


33. 


LiUIlipp. 


de  kl  demeure  de  Job  est  marqué  :  //  y  avait 
un  homme  dans  la  terre  de  Uns,  pays  habité 
par  des  infidèles,  afin  que  ce  lui  fût  un  plus 
grand  sujet  de  louanires  d'avoir  été  bon  par- 
mi les  méchants.  L'Écriture  in;irque  le  nom- 
bre de  ses  enfants  :  lient  sept  fis  et  trois  fil- 
les; et  elle  ajoute  qu'il  était  fort  soigneux 
d'offrir  des  sacrifices,  et  fort  libéral  envers 
les  pauvres,  pour  nous  donner  une  idée  de 
la  grandeur  de  sa  vertu,  puisqu'il  ne  s'atta- 
chait point  aux  biens  de  la  terre  par  la  con- 
sidération de  tant  d'enfants.  Plus  attentif  à 
leur  donner  une  sainte  éducation  qu'A  leur 
amasser  des  richesses,  il  dépensait  encore 
son  bien  pbur  les  purifier  de  leurs  péchés, 
en  oil'rant  des  holocaustes  pour  eus  lorsque 
les  jours  des  festins,  qu'ils  se  donnaient  les 
uns  aux  autres,  étaient  passés.  Offrir  un  ho- 
locauste, c'est  brûler  entièrement  l'hostie  que 
l'on  immole.  Nous  offrons  donc  un  holocauste, 
lorsque  notre  esprit  est  tellement  embrasé  du 
feu  de  componction,  qu'il  lirùlo  entièrement 
notre  cœur  sur  l'autel  de  l'amour  divin,  et 
consume  toutes  les  impuretés  de  nos  pensées, 
qui  sont  comme  les  fautes  de  nos  enfants.  » 

L'Écriture  sainte  ne  se  contente  pas  do 
nous  faire  connaître  les  vertus  des  saints  , 
elle  nous  découvre  aussi  quelquefois  leurs 
fautes ,  afin  que  ,  nous  représentant  dans 
leurs  victoires  ce  que  nous  avons  à  imiter, 
elle  nous  fasse  aussi  connaître  dans  leurs 
chutes  ce  que  nous  avons  i^  craindre. 

Elle  dit,  en  parlant  des  saints  anges,  qu'é- 
tant venus  se  présenter  devant  le  Seigneur, 
Satan  se  trouva  aussi  avec  eux;  et  encore 
qu'ils  voient  sans  cesse  la  face  de  Dieu, 
comment  peuvent-ils  contempler  Dieu  sans 
cesse,  et  être  envoyés  quelquefois  pour  le 
salut  des  hommes?  Pour  rc-poudre  i\  cette 
question,  il  ne  faut  que  faire  attention  k  la 
subtilité  et  à  l'excellence  de  la  nature  angé- 
lique  ;  les  anges  ne  s'éloignent  jamais  de  la 
présence  de  Dieu  jusqu'à  cire  piivi'-s  de  la 
joie  de  le  contempler  inlérieuremont,  puis- 
que, s'ils  ]  erdaient  la  vue  bienheureuse  de 
leur  Créateur,  lorsqu'il  les  envoie,  il  ne  leur 
serait  pas  possible  de  n'pandre  sur  les  aveu- 
gles cette  lumière  qu'ils  auraient  perdue  en 
s'éloignanl  de  Celui  qui  en  est  la  source.  Ils 
assistent  donc  en  la  présence  de  Dieu  en 
même  temps  qu'il  les  envoie,  parce  qu'en  tant 
qu'ils  sont  renfermés  dans  un  espace  certain, 
et  ne  sont  pas  en  tous  lieux,  il  est  vrai  qu'ils 
parlent  et  qu'ils  s'éloignent  ;  mais  en  tant 
()ur'.  Dieu  leui  est   toujours  intérieurement 


présent,  il  n'en  est  pas  moins  vrai  qu'ils  ne 
s'éloignent  jamais  ;  ainsi  ils  voient  toujours  le 
visage  de  Dieu,  et  ils  ne  laissent  pas  de  venir 
à  nous,  parce  qu'ils  sortent  pour  cela  du  ciel 
selon  leur  présence  locale,  et  cependant  ils 
conservent  toujours  en  eux-mêmes,  par  une 
intérieure  contemplation ,  le  Dieu  du  ciel 
d'auprès  de  qui  ils  étaient  partis.  Il  est  dit 
que  Satan  se  présenta  aussi  devant  le  Sei- 
gneur, ce  qui  n'est  point  aisé  à  comprendre, 
puisque  selon  l'Kvangile,  il  n'y  a  que  ceux  Maii.,v,8. 
qui  ont  le  cœur  pur  qui  verront  Dieu  ;  mais 
il  faut  remarquer  qu'il  est  seulement  écrit 
q>ie  Satan  se  trouva  devant  le  Seigneur,  et 
non  qu'il  le  contempla;  il  ne  se  présenta  de- 
vant la  Majesté  Divine  qu'afin  d'en  être  vii, 
et  non  de  la  voir.  Il  parut  en  la  présence  de 
Dieu,  mais  Dieu  ne  parut  pas  en  la  sienne  ; 
un  aveugle  est  éclairé  des  rayons  du  soleil,  vk.  m. 
mais  il  ne  voit  point  le  soleil  qui  l'éclairé. 
Dieu  dit  ii  Satan  :  D'on  viens-tu?  Dieu  parle  n- 

aux  anges,  lorsqu'il  leur  fait  connaître  inté- 
rieurement sa  volonté  ;  et  les  angos  parlent 
;\  Dieu,  lorsque  haussant  leur  vue  au-dessus 
d'eux-mêmes,  ils  s'élèvent  vers  lui  par  des 
transports  ineffables  de  louanges  et  d'éton- 
nement.  A  l'égard  du  démon.  Dieu  lui  parle 
en  quatre  manières  :  lorsqu'il  le  reprend  de  "• 
ses  injustices,  qu'il  propose  contre  lui  la 
justice  de  ses  élus,  qu'il  lui  permet  de  tenter 
leur  innocence,  ou  qu'il  lui  défend  de  les 
tenter.  11  lui  parle  en  la  première,  lorsqu'il 
lui  dit  ici  :  D'où  viens-tu?  parce  qu'il  le  re- 
prend de  ses  injustices.  Le  diable  parle  à 
Dieu  en  trois  manières,  savoir  :  lorsqu'il  lui 
expose  ses  actions,  ou  qu'il  accuse  l'inno- 
cence des  élus  par  de  faux  crimes,  ou  qu'il 
demande  permission  de  les  tenter.  Il  expose 
ses  actions  aux  yeux  de  Dieu,  qi:and  il  dit  : 
J'ai  fait  le  tour  de  la  terre.  Il  accuse  l'inno- 
cence des  élus,  quand  il  dit  :  !\"avez-vous pas 
environné  comme  d'nne  forte  haie  sa  jvrsonne  et 
sa  maison  ?  Il  demande  de  tenter  leur  inno-  «. 
conce,  quand  il  dit  :  Etendez  votre  main  sur 
Ini.  Le  démon  n'a  de  pouvoir  de  nous  tenter, 
qu'autant  que  Dieu  lui  en  donne.  La  volonté 
de  Satan  est  toujours  injuste;  mais  la  puis- 
sance qui  lui  est  donnée  ne  l'est  jamais, 
parce  que  Dieu  ne  lui  permet  qu'avec  équité 
d'exécuter  ce  qu'il  désire  avec  injustice.  Le 
sens  de  ces  paroles  :  Satan  sortit  aussitôt  de 
devant  le  Seigneur,  ne  renferme  rien  de  con- 
traire i\  l'immensité  de  Dieu  :  elles  signifient 
seulement  que  le  démon  qui  était  auparavant 
lié,  parce  qu  il  n'avait  pas  le  pouvoir  de  nuire         •«■ 


LiU 
1.5.  7». 


[vir  SIÈCLE.]        CILVPITRE  XLIX.  —  SAINT 

A  Job,  fut  en  quelque  sorte  déchaîné  contre 
lui,  tit's  (ju'il  ohtiul  pciuaission  dv  le  lentcr.  » 
Sur  ce  qui  csl  dit,  t\n'un  jour  que  les  /ils 
et  les  filles  de  Job  buvaient  et  niaugeciienl  clans 
la  viaison  de  leur  frère  aîné,  saint  Gi'égoire 
remarque  qu'il  y  a  de  certains  temps  i)lus 
propres  et  plus  favorables  au  démon  pour 
tenter  les  liommes  ,  comme  sont  les  grands 
repas,  qui  ne  se  font  guère  sans  quelque 
péché  ;  (ju'il  se  sert  aussi  du  relâchement 

;.  des  supérieurs  pour  tenter  les  simjjjes,  et 
que  c'est  alors  qu'il  reçoit  plus  de  pouvoir 
pour  leur  nuire  ;  qu'en  etlet  il  commença  ses 
combats  contre  Job,  lorsque  ses  enfants  se 
régalaient  chez  leurfrère  aiué.  Eu  cxplii[uant 
ce  qui  est  dit  de  Job,  qu'(7  se  leva  cl  déchira 
ses  habits,  et  qu'ayant  rasé  les  cheveux  de  sa 
tète,  il  se  prosterna  contre  terre  pour  adorer 
Dieu,  il  observe  que  l'insensibilité  de  cœur 
n'est  pas  le  juste  degré  de  la  vraie  vertu; 
qu'il  faut  également  éviter  les  deux  excès  de 
l'impatience  et  de  l'insensibilité  ;  que  Job, 
par  l'amour  qu'il  devait  à  son  prochain,  té- 
moigna de  l'affliction  à  la  perle  de  ses  en- 
fants, et  que  pour  ne  pas  manquer  à  l'amour 
qu'il  devait  à  Dieu,  il  lui  adressa  ses  prières 
au  plus  fort  de  sa  douleur.  Afin  de  modérer 
ses  larmes  par  la  patience,  il  considère  quel 
il  était  en  venant  au  monde;  et,  pom-  la  con- 
server, il  examine  quel  il  sera  en  sortant  du 
monde,  c'est-à-dire  mi.  Frappé  par  la  perte 
de  ses  biens  et  de  ses  enfants,  il  change  ses 
afflictions  en  louanges  :  Le  Seigneur  me  l'a- 
vait donnée  le  Seigneur  me  l'a  ûté;  que  son  nom 
soit  béni,  surmonlant  par  sa  soumission  et 

ni,  son  humilité,  l'orgueil  de  son  ennemi.  Lors- 
que Dieu  permet  l'affliction  de  ses  élus,  ce 
n'est  pas  toujours  pour  les  punir  de  leurs 
fautes,  c'est  souvent  pour  l'accroissement  de 
leurs  mérites;  et  en  même  temps  qu'il  parait 
les  abandonner  aux  tentations,  il  les  pro- 
tège en  ne  souffrant  pas  qu'ils  soient  tentés 
au-dessus  de  leurs  forces.  La  vertu  de  Job 
n'était  d'abord  connue  que  de  Dieu,  qui  la 
rendit  publique  pour  être  imitée  de  tous;  il 
fallait  pour  cela  qu'il  souffrît  la  tentation, 
autrement  il  n'aurait  pu  donner  aux  autres 
de  si  grands  exemples  de  patience  :  Je  l'a- 
bandonne entre  tes  mains,  dit  Dieu  à  Satan, 
7nais surtout  gaj'deson  âme; de  sorte  que  Job 
était  comme  retenu  dans  le  cœur  de  Dieu 
par  sa  main  toute-puissante,  en  même  temps 
qu'il  était  livré  entre  les  mains  du  démon. 
Garder,  en  cet  endroit,  est  la  même  chose  que 
n'oser  attaquer.  Satau,  après  avoir  enlevé 


GREGOIRE  LE  GRAND,  PAPE.       443 

à  Job  ses  biens,  ses  enfants,  sa  santé,  sans 
avoir  pu  In  vaincre,  ralta(pia  d'une  manière 
plus  cuclu'e,  eu  eniployaul  contre  lui  sa  fem- 
me et  SCS  amis;  mais  leurs  paroles  ollensan- 
tes,  et  leurs  douleurs  excessives,  du  moins 
en  apparence,  opérèrent  un  effet  tout  con- 
traire à  leurs  desseins.  Celui  qui  veut  conso-  '"'e-  "i- 
1er  un  affligé,  doit  mettre  des  bornes  à  la  dou- 
leur qu'il  lui  fait  paraître,  de  crainte  qu'au 
lieu  d'adoucir  l'esprit  de  son  ami,ilnele  [)orte 
jusqu'au  désespoir  par  l'excès  de  l'aûliction 
qu'il  lui  témoigne  pour  compatir  à  la  sienne. 

Il  y  a  dans  la  suite  de  l'histoire  de  Job  des  pa-         lu--  iv, 
•'  '       pi~.  11.2. 

rôles  qui  ne  sont  conformes  ni  à  la  raison,  ni 
à  la  piété  ;  telles  sont  celles-ci  :  Périsse  le  jour 
auquel  je  suis  né,  et  la  nuit  dans  laquelle  on  a 
dit  :  Un  homme  est  conçu.  Peut-on  en  effet 
souhaiter  qu'un  jour  qui  n'est  plus,  périsse? 
Saint  Grégoii  e  conclut  de  là  que  Job  ne  nous 
exprime  point  littéralement  ses  pensées  en 
cet  enchoit,  et  que  celui-ci  est  du  nombre 
de  ces  contradictions  apparentes  qui  se  ren- 
contrent dans  la  lettre  de  l'Ecriture,  et  qu'on 
doit  lever  en  leur  donnant  un  sens  spirituel. 
D  croit  donc  que  ces  malédictions  ne  par- 
taient pas  de  la  chaleur  d'un  esprit  ému,  qui 
se  laisse  emporter  à  maudire  des  choses  jus- 
tes et  vérilables;  mais  que,  considérant  que 
ses  amis,  qui  ne  recherchaient  que  les  pros- 
pérités temporelles,  jugeaient  de  ses  dispo- 
sitions par  les  leurs,  il  fit  éclater  au  dehors 
une  voix  pleine  de  douleur  contre  de  sem- 
blables dispositions,  comme  s'il  eût  dit  :  Pé- 
risse cette  espérance  trompeuse  ;  que  ce  jour 
et  cette  lueur  de  fausses  promesses  se  cou- 
vrent .d'épaisses  ténèbres.  Quand  la  pros- 
périté du  monde  nous  rit,  c'est  comme  le  pog.  m. 
jour;  mais  ce  jour  se  change  en  nuit, 
parce  que  souvent  la  prospérité  temporelle 
conduit  aux  ténèbres  des  tribulations. 

Les  saints  ont  toujours  plus  appréhendé  la  '■  '  -v.  r«p. 
prospérité  que  l'adversité,  parce  qu'ils  sa- 
vaient que,  quand  l'esprit  est  attiré  par  les 
charmes  de  quelqu'objet  agréable,  il  se  ré- 
pand facilement  au  dehors;  au  lieu  que, 
quand  l'homme  extérieur  se  trouve  affligé, 
l'intérieur  se  porte  avec  plus  de  liberté  à 
rentrer  en  soi-même,  pour  y  rechercher  les 
biens  véritables. 

o.  Saint  Grégoire  commence  la  seconde   ^  seconde  par. 
partie  de  ses  Morales  au  troisième  verset  du   t^'-  1S2'. 
cinquième  chapitre  de   Job.   Il  y  explique 
mystiquement  ce  que  Job,  sa  femme  et  ses 
amis  signiiient.  Job,  percé  de  plaies,  est  la 
figure  du  Sauveur  percé  de   clous  sur  la 


446 


HISTOIRE  GÉNÉRAI.E  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


pf.  :ii. 


croix  ;  sa  femme,  de  toutes  les  personnes  char- 
nelles qui  dans  l'É^'Iise  servent  au  tentateur 
des  hommes  dansl'exi'cution  de  ses  artitices 
et  de  ses  méchancetés  ;  les  amis  de  Job,  sont 
leshérétiques  qui  font  injure  à  Dieu,  lorsqu'ils 
le  veulent  défendre  contre  les  bons  et  les  ca- 
tholiques. Mais  lorsque  le  texte  est  suscepti- 
ble de  quelque  autre  sens,  il  le  donne.  11  dit  h 
ceux  qui  pourraient  avoir  quelque  doute  sur 
LiKvii,  les  discours  de  Job,  dont  plusieurs  parais- 
saient sortir  des  bornes  delà  patience,  qu'ils 
doivent  les  peser  dans  la  juste  balance  du 
commencement  et  de  la  fin  de  son  histoire, 
où  Dieu  lui  donne  également  des  louanges  : 
ce  qu'il  n'iiurait  pas  fait,  s'il  eût  été  répré- 
hensible  en  quelque  chose.  N'as-tu imyit  con- 
sidéré mon  serviteur  Job,  dit  Dieu  au  démon 
joi,.  i,«.  dans  le  premier  chapitre? //n'a /x»s son semWn- 
ble  sur  la  terre.  C'est  un  homme  simple  et  juste, 
quicrainiDieuetqui  fuit  lemal.E\,aipià»l'a\o\r 
éprouvé  en  tant  de  manières,  il  reprend  dans 
le  quarante-deuxième,  qui  est  le  dernier,  ses 
Job.  i.\  7.  amis,  en  leur  disant  :  Ioî/s  n'avez  jms  bien  parlé 
devant  moi,  ainsi  que  l'a  fait  mon  serviteur  Job. 
Saint  Grégoire,  dans  l'explication  de  ces 
ui.vui,  paroles  du  septième  chapitre  :  La  vie  de 
'''■'"  l'homme  est  comme  une  milice  sur  la  terre, 
dit  que  l'ancienne  version  au  lieu  de  tni- 
lice,  lit  tentation  ;  mais  que  ces  deux  mots 
forment  une  même  idée,  parce  que  la  ten- 
tation n'est  autre  chose  que  cette  fâcheuse 
guerre  que  nous  avons  à  soutenir  continuel- 
lement contre  les  ennemis  de  notre  salut. 
Notre  nature,  tombée  volontairement  de  l'é- 
tal d'innocence  dans  laquelle  Dieu  l'avait 
formée,  se  trouve  dans  la  misère  et  dans  la 
corruption  ;  en  sorte  qu'elle  trouve  en  elle- 
même  sa  peine  et  son  mal,  par  le  change- 
ment continuel  auquel  elle  est  exposée.  Si 
elle  veut  s'élever  par  ses  désirs  aux  choses 
sublimes,  elle  en  est  aussitôt  repoussée  par 
sa  mutabilité,  et  elle  retombe  misérablement 
en  elle  -  même.  II  est  vrai  que  l'homme  ne 
manque  point  de  moyens  de  vaincre  la  ten- 
tation ;  mais  à  peine  a-t-il  retranché  ce  que  son 
infirmité  avait  fait  naître,  que  cette  même  in- 
firmité engendre  de  quoi  retrancher  de  nou- 
veau ;  c'est  ainsi  que  sa  vie  est  une  milice 
ou  un  combat  continuel.  Paimi  le  plus  bril- 
lant éclat  de  ses  vertus,  l'homme  se  trouve 
toujours  dans  l'obscurité,  tantôt  par  l'impor- 
tun souvenir  de  ses  péchés,  tantôt  par  les 
nuages  des  suggestions  du  malin  cspiit,  tan- 
tôt par  le  relâchement  de  sa  ferveur.  Tri  qui 
a  léprimc   en    lui-même  les  mouvements 


d'impureté,  ne  laisse  pas  d'avoir  encore  l'i- 
magination toute  fatiguée  des  sales  impres- 
sions qui  lui  en  restent,  parce  qu'il  se  sou- 
vient, quoique  malgré  lui,  de  ce  qu'il  a  fait 
volontairement.  11  soutire  maintenant  comme 
une  peine,  ce  qu'il  considérait  autrefois 
comme  un  plaisir  ;  et  parce  qu'il  craint  avec 
raison  de  retomber  dans  les  péchés  qu'il  a 
surmontés,  il  mortifie  son  corps  par  une  abs- 
tinence si  sévère,  qu'il  en  devient  tout  défi- 
guré. Ceux  qui  le  voient  louent  sa  vie  aus- 
tère ;  ces  louanges  lui  inspirent  de  la  va- 
nité, ce  qui  le  jette  dans  deux  extrémités, 
ou  de  retomber  dans  les  feux  de  l'impudici- 
té,  en  voulant  rétablir  son  visage  par  l'abon- 
dance des  viandes,  ou  detomberdansla  vaine 
gloire,  s'il  continue  ses  abstinences.  Un  autre, 
considérant  quel  péché  c'est  que  le  menson- 
ge, prend  la  résolution  de  n'en  dire  jamais  ; 
mais  parce  qu'il  arrive  souvent  qu'en  disant 
la  vérité  on  décrie  le  prochain,  la  crainte 
de  le  blesser  le  fait  retomber,  sous  couleur 
de  piété,  dans  le  vice  de  déguisement  et  de 
dissimulation  dont  il  avait  voulu  s'éloigner. 
Quoique  autre,  tout  embrasé  d'amour  pour 
son  Créateur,  s'étudiera,  par  l'assiduité  de 
son  oraison,  à  détacher  absolument  son  âme 
de  toutes  les  pensées  de  la  terre,  et  à  l'éle- 
ver au  calme  assuré  de  la  paix  intérieure  ; 
mais  souvent,  lorsqu'il  s'efforce  d'y  arriver, 
les  images  des  choses  basses  et  terrestres  le 
repoussent  et  le  rabaissent  :  ses  yeux,  qui 
ne  jetaient  de  regards  que  pour  pénétrer 
cette  lumière  céleste,  s'obscurcissent  par  les 
nuages  des  fantômes  corporels  que  les  sens 
lui  représentent,  de  sorte  que  son  Ame,  las- 
sée par  les  obstacles  qui  naissent  de  sa  pro- 
pre infirmité,  ou  languit  dans  une  Iflche  pa- 
resse, s'il  s'abandonne  A  l'oraison,  ou  voit 
s'épaissir  devant  ses  yeux  la  noire  fumée  de 
ces  fantômes  corporels  qui  s'y  élève  ,  s'il 
persiste  longtemps  dans  la  prière.  Job  avait 
donc  raison  de  dire  :  La  vie  de  l'homme  est 
U7ie  tentation  sur  la  terre  ;  mais  il  n'en  a  pas 
moins  de  comparer  nos  jours  à  ceux  d'un 
mercenaire,  qui  souhaite  que  son  temps  fi- 
nisse bientôt,  afin  d'obtenir  le  prix  de  ses  pei- 
nes et  de  son  travail,  parce  qu'en  eflet  l'hom- 
me sage  considère  la  vie  présente  comme  un 
chemin,  et  non  comme  sa  patrie  ;  comme  le 
temps  de  ses  travaux,  et  non  de  sa  récom- 
pense; et  se  cioit  d'autant  plus  éloigné  du 
prix  éternel  auquel  il  aspire,  qu'il  lui  larde 
davantage  d'arriver  ii  la  fin  de  sa  vie  mor- 
telle.  Job  ajoute  :  Je  n'épargnerai  point  ma 


Pif.  iit. 


CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT  GIIKGOIUE  LE  GHANI),  PAPE. 


I.il.lX,  |o?. 


I'<.  i07. 


[vu*  siÈaE.] 

bouche  ;je  parlerai  dans  la  douleur  pressante 
de  mon  esprit.  La  douleur  de  l'espril  fail  ludu- 
voir  la  lauf^ue  pouz'  coiubalti'C  s(in  péclié  par 
la  voix  d'uue  sincère  coiift^ssion  ;  mais  sou- 
Ycnt  les  réprouvés  confessent  leurs  péchés, 
sans  se  motlre  en  peine  de  les  pleurer;  les 
élus  au  contraire  ont  soin  d'ell'acer  par  les 
larmes  d'une  sévère  pénilenco  les  pécln'-s 
dont  ils  s'accusent.  Celui  qui  raconte  simple- 
ment son  mal,  et  qui  refuse  de  le  pleurer,  ne 
fait  que  découvrir  sa  plaie  au  médecin,  mais 
il  n'y  applique  pas  le  remède  salutaire  de  la 
douleur  de  l'esprit;  ainsi  il  n'y  a  que  la  con- 
trition du  cœnr  qui  puisse  faire  salulairement 
sortir  de  la  bouche  la  confession  des  péchés. 

Dieu  est  très -sage  et  très  -  puissant 

s'il  vient  à  moi ,  je  ne  le  verrai  point  ;  s'il 
s'en  éloigne,  je  n'en  saui'ai  rien.  «  L'hom- 
me exclu  des  joies  intérieures  en  jiunition 
de  son  péché,  a  perdu  la  vue  de  l'àmc,  et 
ne  sait  plus  où  le  conduisent  les  pas  in- 
certains de  ses  mérites.  Souvent  il  attribue 
à  la  colère  de  Dieu  ce  qui  est  un  pur  etfet 
de  sa  grùcc,  et  souvent  ce  qu'il  considère 
comme  une  grâce  n'est  qu'un  effet  de  sa  co- 
lère. Quelquefois  il  regarde  les  dons  de  faire 
des  miracles,  comme  des  grâces  singulières; 
cependant  ces  dons  le  font  tomber  par  or- 
gueil, lorsqu'il  veut  s'en  prévaloir.  Il  consi- 
dère aussi  d'ordinaire  les  tentations  et  l'adver- 
sité comme  un  effet  de  la  colère  divine  ;  tou- 
tefois, ce  sont  CCS  mêmes  tentations  qui  l'o- 
bligent h  veiller  avec  plus  de  circonspection 
pour  se  maintenir  dans  la  vertu.  Qui  ne  se 
croira  bien  avec  Dieu,  quand  il  est  comblé 
des  faveurs  du  ciel  ;  quand  il  reçoit  ou  le 
don  de  prophétie,  ou  la  science  pour  ins- 
truire les  autres,  ou  la  vertu  de  guérir  les 
maladies?  Néanmoins  il  arrive  le  plus  sou- 
vent que,  quand  l'âme  se  relâche  par  une 
fausse  confiance  dans  sa  vertu,  l'ennemi, 
qui  est  toujours  prêt  à  la  surprendre  ,  la 
perce  d'un  trait  imprévu  ;  ainsi  ces  mêmes 
faveurs  qui  l'approchaient  de  Dieu  pour  un 
temps,  sans  qu'elle  prit  soin  de  s'y  conser- 
ver, sont  cause  qu'elle  en  demeure  éloignée 
pour  toute  l'éternité.  Qui ,  d'ailleurs ,  ne 
se  croira  abandonné  de  la  grâce  de  Dieu, 
lorsqu'après  avoir  donné  quelque  solide  té- 
moignage de  son  amour  pour  la  pureté,  il 
soutire  de  nouveau  les  tentations  de  la  chair, 
que  ses  pensées  déshonnêtes  ne  sorteni  point 
de  son  esprit,  et  que  ces  images  impures  et 
criminelles  lui  remplissent  sans  cesse  l'ima- 
gination ?  Cependant,  quand  toutes  ces  ten- 


i'n 

talions  ne  font  que  le  peiner  et  le  fatiguer, 
cl  qu'elles  ne  le  surmontent  point,  il  est  hors 
de  doule  qu'au  lien  de  le  faire  mourir  par  un 
consenlemenl  iinpu(li(pi(',  elles  le  maiiili(!n- 
nent  dans  l'humilité,  parce  que  l'âme,  recon- 
naissant sa  faiblesse  dans  le  fort  des  tenta- 
tions, met  tout  son  recours  dans  l'assistance 
divine,  et  perd  toute  confiance  en  ses  pro- 
pres forces  :  de  sorte  qu'il  arrive  qu'elle  est 
plus  étroitement  unie  à  Dieu  par  la  chose  mô- 
me qui  la  faisait  gémir,  craignant  d'en  être 
fort  éloignée.  Nous  sommes  donc  incapa- 
bles de  reconnaître  quand  nous  nous  appro- 
chons de  Dieu  ou  quand  nous  nous  en  éloi- 
gnons, tant  que  la  fin  des  choses  douteuses 
n'est  point  arrivée,  puisque  à  l'égard  des  ten- 
tations, il  est  incertain  si  elles  nous  tuent, 
ou  si  elles  nous  éprouvent,  et  que,  pour  les 
dons  de  Dieu,  on  ne  peut  non  pins  savoii- 
s'ils  servent  seulement  de  récompenses  tem- 
porelles à  ceux  qui  seront  abandonnés  pour 
l'éternité,  ou  bien  s'ils  nous  soutiennent  du- 
rant cette  vie  pour  nous  conduire  à  celle  qui 
est  h  venir.  » 

6.  La  troisième  partie,  composée  de  six 
livres,  comprend  l'explication  du  douzième 
chapitre,  depuis  le  sixième  verset  jusqu'au 
vingtième  verset  du  vingt-quatrième  chapi- 
tre. Saint  Grégoire  y  est  moins  diflus  que 
dans  les  deux  parties  précédentes.  Voici  com- 
ment il  explique  le  quatorzième  verset  du 
chapitre  douzième  :  Si  Dieu  détruit,  il  n'y  a 
personne  qui  édifie  ;  s'il  renferme  un  homme,  il 
n'y  a  pei'sonne  qui  le  puisse  élargir.  »  Dieu  dé- 
truit, quand  il  abandonne  le  cœur  de  l'hom- 
me ;  il  édifie,  quand  il  le  remplit  des  dons 
de  sa  grâce  :  car  il  ne  le  détruit  pas  en  le 
surmontant  et  l'abattant  par  l'elTort  de  sa 
puissance,  mais  seulement  en  s'en  retirant, 
puisqu'il  sutlit  à  l'homme,  pour  se  perdre, 
d'être  abandonné  de  son  Créateur.  D'où 
vient  qu'il  arrive  souvent  que  les  cœurs  des 
auditeurs  n'étant  pas  remplis  de  sa  grâce, 
en  punition  de  leurs  fautes  ,  c'est  en  vain 
que  le  prédicateur  les  instruit  et  les  exhorte; 
et  la  bouche  de  celui  qui  parle  est  comme 
muette,  si  celui  qui  inspire  les  paroles  qui 
se  font  entendre  au  dehors,  ne  crie  au  de- 
dans du  cœur  ;  ce  qui  fait  dire  â  David  dans 
im  psaume  :  Si  le  Seigneur  ne  bâtit  lui-même 
une  maison ,  c'est  en  vain  que  travaillent  ceux 
qui  lu  bâtissent.  Et  il  ne  faut  pas  s'étonner 
si  un  simple  prédicateur  n'est  pas  écoulé 
d'un  co'ur  réprouvé,  puisque  Dieu  trouve 
quelquefois  de  la  résistance  dans  les  mœurs 


Trois 
partie  de: 
Mies  -iir 
lit    3CC. 


M-ma 
s  Mo' 
Joli, 


LU..  XI, 
3Tu. 


r,al.  126.1. 


448 


HISTOIRE  GÉNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


LU:   XII 

r.  3J«- 


l'âf.lOT. 


dépravées  de  ceux  à  qui  il  parle  lui-même. 
Gain  fut  averti  de  la  propre  bouche  de  son 
Diou,  et  toutefois  il  ne  fut  point  cliangé,  parce 
qu'en  pMnition  de  son  crime,  Dieu  l'avait  déj;'i 
intérieurement  abandonné,  lorsqu'il  le  repre- 
nait à  l'extérieur,  pour  le  convaincre  et  le 
rendre  inexcusable.  C'est  avec  raison  qu'il  est 
dit  ensuite  :  S'il  renferme  tin  homme,  il  n'y  a 
personne  qui  le  puisse  élargir;  car  que  fait  un 
homme  qui  vil  mal,  sinon  de  former  une  pri- 
son à  sa  propre  conscience,  en  sorte  que  la 
corruption  de  son  cœur  le  presse,  lors  même 
qu'il  n'y  a  personne  pour  l'accuser  ?  Ainsi, 
quand  Di.eu,  par  nu  juste  jugement,  l'aban- 
doune  à 'son  aveuglement  et  à  son  iniquité,  il 
est  comme  renfermé  en  soi-même,  sans  en 
pouvoirphis sortir,  parce  qu'il  n'a  pas  mérité 
la  grâce  de  trouver  les  voies  de  se  délivrer. 
Le  saint  Docteur  explique  des  opérations 
de  la  grâce  le  verset  suivant  :  S'il  retient  ses 
eaux,  toutes  choses  demeureront  à  sec;  et  s'il 
les  lâche,  elles  bouleverseront  toute  la  terre. 
«  On  voit  en  effet  tous  les  jours  que  quand 
la  terre  du  cœur  de  l'homme  reçoit  l'infusion 
de  cette  eau  divine,  celui  qui  auparavant  se 
vengeait  avec  violence  des  injures  tpi'il  avait 
reçues,  les  supporte  ensuite  avec  une  admi- 
rable patience  ;  que  celui  qui  auparavant  ra- 
vissait le  bien  d'autrui,  donne  libéralement 
le  sien  propre;  que  celui  qui  auparavant 
abandonnait  son  corps  à  toutes  sortes  de  vo- 
luptés, le  mortifie  par  l'abstinence;  et  que 
celui  qui  auparavant  ne  pouvait  se  résoudre 
à  aimer  même  ceux  dont  il  était  laimé,  en 
vientjusqu'à  cette  charité  parfaite  qui  lui  fait 
aimer  ses  ennemis  mêmes;  alors  ou  peut 
dire  que  cette  terre  est  bouleversée  par  l'in- 
fusion de  cette  divine  rosée.  Pensez- vous 
qu'un  homme,  étant  mort,  puisse  revivre  de 
nouveau?  Les  saints  parlent  quelquefois  com- 
me en  doutant  des  choses  dont  ils  sont  le 
plus  assurés,  pour  s'accommoder  aux  fai- 
bles, et  se  servent  de  leur  langage,  afin  de 
pouvoir  ensuite  fortifier  leurs  cœurs  infir- 
mes ;  c'est  pruirquoi  Job,  après  avoir  parlé 
de  cette  manière  douteuse,  fait  aussitôt  pa- 
raître la  fermeté  de  sa  foi  sur  la  résurrection 
future,  en  ajoutant  :  J'attends  maintenant,  à 
chaque  jour  que  je  combats,  l'heure  de  mon 
chanqement;  puis,  pour  montrer  ce  qui  se 
passera  alors,  il  dit  :  Vous  m'ap/xllerez,  et  je 
vous  répondrai.  L'homme  répond  à  Dieu  qui 
l'appelle  dans  ce  changement  général,  au- 
quel étant  délivré  de  cette  vie  de  corruption, 
il  se  présente  dans  un  état  incorruptible  de- 


vant Celui  qui  est  aussi  incorruptible;  et 
parce  que  l'homme  ne  saurait  ressusciter  de 
lui-même,  et  qu'il  n'y  a  que  la  toute-puis- 
sance divine  qui  puisse  opérer  cet  etfet,  il 
ajoute  :  Vous  tendrez  votre  main  droite  à 
l'ouvrage  de  vos  nujins,  comme  s'il  disait  en 
termes  plus  clairs  :  Votre  créature,  dans  l'é- 
tat de  corruption  et  de  misère  où  elle  est  n''- 
duite,  ne  prétend  pouvoir  arriver  à  cet  état 
d'incorruplion,  que  dans  l'espérance  d'y  être 
élevée  par  votre  main  toute-puissante,  et  d'y 
être  affermie  par  la  protection  de  votre 
grâce.  Je  sais  que  tnon  liêdempteitr  est  vivant. 
Job  ne  dit  pas  Créateur,  mais  Rédempteur, 
afin  de  nous  mieux  marquer  celui  qui,  après 
avoir  créé  toutes  choses,  s'est  fait  homme 
pour  nous  racheter  de  la  servitude,  et  nous 
a  délivrés  de  la  mort  éternelle  que  nous 
avions  tous  méritée.  Les  infidèles  n'en  croi- 
ront peut-être  autre  chose,  sinon  qu'il  a  été 
fouetté,,  moqué,  souffleté,  couronné  d'épi- 
nes, et  qu'enfin  on  l'a  fait  mouru-;  mais,  moi 
je  crois  avec  une  foi  certaine,  et  je  confesse 
hautement  que  mon  Rédempteur,  qui  est 
mort  entre  les  mains  des  juifs,  est  vivant 
après  sa  mort.  Je  sais  qu'au  dernier  jour  je 
ressusciterai  de  la  terre,  parce  que  le  Seigneur 
accomplira  en  nous  une  résurrection  pareille 
à  celle  qu'il  a  fait  premièrement  paraître  en 
sa  persoime.  Je  serai  de  nouveau  environné  de 
ma  peau  :  expression  par  laquelle  Job  ôte 
tout  le  doute  qu'on  pourrait  avoir  d'une  vé- 
ritable résurrection.  Saint  Grégoire  donne 
en  cet  endroit  l'abrégé  des  conférences  qu'il 
eut  à  Constantinople  avec  le  patriarche  Eu- 
tychius,  qui  était  dans  l'erreur  au  sujet  de 
la  résurrection  des  corps,  s'imaginant  qu'ils 
deviendraient  impalpables,  et  plus  subtils 
que  l'air  et  le  vent.  Il  rétracta  son  erreur, 
étant  au  lit  de  la  mort,  où  tenant  en  pré- 
sence de  ses  amis  la  peau  de  sa  main,  il  dit 
hautement  :  Je  confesse  que  nous  ressusciterons 
en  cette  chair,  ioh  lève  toutes  les  ditiicuités 
qui  pourraient  rester  dans  l'esprit  sur  ce 
sujet,  lorsqu'il  ajoute  :  Je  verrai  Dieu  dans 
ma  chair  ;je  le  verrai  moi-même,  et  non  pas  un 
autre,  et  mes  yeux  le  regarderont,  n 

7.  Dans  la  quatrième  partie,  qui  comprend 
l'explication  de  la  fin  du  xu\°  chapitre  jus- 
qu'au XXXII'"  inclusivement,  saint  Grégoire 
continue  à  montrer  que  Job  nous  a  ligure, 
et  par  son  nom,  et  par  ses  soutlrauccs,  celles 
de  notre  Sauveur,  et  de  son  corps,  qui  est 
l'Eglise,  :  car  le  nom  de  Job  signifie  af/Ugé  ; 
or  personne  ne  l'a  plus  été  que  celui  dont  il 


[.■C  t  3 


1X--  «■■• 


P«S     -.67. 


i-artr,  II: 

XVII,       11» 


CIIAPITRE  XT.IX.  —  SArVT  GnÉGOlRR  LE  CRANn,  PAPE. 


''L1tl,4. 


l'ag.  ta:. 


1.11..  i  VI 


pu}.  1,!0. 


[vu"  SIÈCLE.] 

est  éciit  dans  Isaïe  :  //  a  /m-lè  nos  langueurs, 
et  il  a  siiii/fcrl  nos  douleurs  et  nos  tnaludies.  Il 
y  coiitiiuie  aussi  i\  faire  voir  que  les  amis 
de  Jiii)  rppi'(''siMilent  les  luM'oti(iiics,  (iiii,  en 
voulant  preiulie  en  main  les  inti'ièls  de 
Dieu,  l'ollensent  vth'ilableinent.  Il  Ir.iile  du 
nombre  des  animes,  montrant  qu'il  y  en  a 
d'établis  de  Dieu  pcuir  le  gouvernement 
des  nations  et  des  empires,  et  que  dans  les 
divers  intérêts  de  ces  états,  qui  sont  quel- 
quefois opposés,  ils  n'agissent  que  selon  la 
souveraine  éqnil(!  et  la  volonté  divine.  Job 
avait  dit  en  parlant  de  Dieu  :  6V',s-  snhlats  ne 
sont-ils  pas  en  grand  nomire?  Saint  Grégoi- 
re, qui  entend  par  1;\  les  anges,  dit  qu'ils 
sont  sans  nombre  k  l'égard  de  la  connais- 
sance de  l'esprit  luimain,  qui  ne  sait  pas 
de  combien  est  composée  cette  grande  mul- 
titude de  l'armée  céleste  dont  il  est  parlé 
dans  Daniel  ;  mais  que  le  nombre  des  citoyens 
du  ciel  est  tout  ensemble  et  déterminé  et  in- 
défini, afin  qu'il  paraisse  que  ce  qn'il  est  très- 
facile  à  Dieu  de  compter,  est  souvent  innom- 
brable aux  bommes.  (i  Les  anges  sont  appelés 
les  soldats  de  Dieu,  parce  qu'ils  combattent 
contre  les  puissances  de  l'air.  On  peut  aussi 
entendi-e  d'eux  ce  qui  est  dit  ensuite  :  Les 
colonnes  du  ciel  tremblent,  et  sont  dans  l'èjjou- 
vante  au  moindre  signe  de  sa  volonté;  parce 
qu'encore  qu'ils  voient  Dieu  sans  cesse,  ils 
tremblent  d'une  respectueuse  frayeur  en  le 
contemplant;  mais  cette  frayeur  est  plutôt 
un  mouvement  d'admiration  que  de  crainte. 
Dieu  se  jettei-a  sur  lui  et  ne  l'épargnera  pas. 
Toutes  les  fois  que  Dieu  corrige  un  pécbeur 
par  ses  lléaux,  il  ne  se  jette  pour  ainsi  dire 
sur  lui  que  pour  l'épargner  ;  mais  quand  le 
pécheur  continue  à  l'ofienser  nonobstant  ces 
tléaux,  alors  ce  n'est  pas  pour  l'épargner 
que  Dieu  se  jette  sur  lui,  c'est  pour  le  punir. 
L'oreille  qui  m'entendait  me  donnait  des  béné- 
dictions, et  l'œil  qui  voyait  rendait  témoignage 
en  ma  faveur.  Job,  en  parlant  ainsi,  fait  assez 
connaître  quel  il  a  été  dans  ses  actions  et 
dans  ses  paroles  :  car  l'on  n'est  pas  encore 
parfait  dans  ses  actions,  quand  on  pèche 
dans  ses  paroles;  et  l'un  n'est  pas  digne  de 
louange  dans  ses  paroles,  quand  on  ne  con- 
firme pas  par  ses  actions  ce  que  dit  la  langue. 
Se  voyant  donc  pressé  par  les  aigres  invec- 
tives de  ses  amis,  il  se  justifie  en  ces  deux 
boses,  disant  que,  par  ses  paroles  et  par  ses 
actions,  il  a  attiré  à  bon  droit  la  vénération 
de  ceux  qui  l'ont  \n  et  qui  l'ont  entendu. 
Par  ses  paroles  il  entend  les  instructions  sa- 

XI. 


449 

lulaires  qu'il  avait  données.  Il  marque  ses 
actions  en  ajoutant  :  Je  soulageais  la  nécessité 
du  pauvre  gui  m'appelait  à  son  secours,  et  de 
l'orpliclin  (pli  n'avait  point  de  protecteurs;  j'at- 
tirais des  liénrdictions  de  celui  qui  était  prés  de 
périr,  et  je  consolais  l'âme  de  la  veuve.  Ce  sont 
là  de  grandes  (euvres  de  miséricorde,  de  dé- 
livrer le  pauvre  de  sa  niisèi'e,  d'assister  l'or- 
phelin, de  secourir  celui  qui  est  près  de  pé- 
rir, de  consoler  le  cfeurde  la  veuve.  C'est  le 
propre  des  saints  de  cacher  tout  le  bien  qu'ils 
font,  pour  ne  pas  tondier  dans  le  vice  de  la 
vaine  gloii'c;  mais  il  est  des  occasions  où  ils 
sont  comme  forcés  de  faire  de  bonnes  œu- 
vres devant  le  monde,  ou  de  raconter  eux- 
mêmes  devant  les  hommes  celles  qu'ils  ont 
faites  :  mais  alors  ils  ne  le  font  que  dans  le 
désir  que  leur  père  céleste  en  tire  sa  gloire, 
et  non  pas  eux-mêmes.  Job  ajoute  :  J'exami- 
nais avec  gi^and  soin  les  causes  que  je  n'entendais 
pas,  pour  nous  apprendre  qu'il  ne  faut  ja- 
mais juger  des  choses  avec  précipitation,  de 
crainte  d'en  juger  témérairement  et  avant 
de  les  avoir  bien  examinées,  et  ne  nous 
laisser  pas  émouvoir  aux  moindres  choses 
que  l'on  nous  rapporte,  en  ajoutant  trop  de 
foi  à  ce  qui  se  dit  sans  être  prouvé.  Ceux  qui 
m'écnutaient,  attendaient  toutes  7nes  paroles 
comme  des  sentences,  et  étaient  dans  le  silence 
et  l'attention  pour  recevoir  mes  conseils.  Ils 
n'osaient  rien  ajouter  à  mes  paroles,  et  elles 
dégouttaient  sur  eux.  Ce  terme,  dégouttaient , 
figure  le  vrai  et  le  juste  tempérament  de  la 
prédication,  et  comment  la  grâce  des  exhor- 
tations chi'étiennes  se  doit  proportionner  aux 
besoins  et  A  la  capacité  de  chacun  de  ceux 
qu'on  veut  instiuire.  Comme  par  ce  qui  est 
dit  précédemment,  ils  n'osaient  rien  ajouter  à 
mes  paroles,  on  loue  le  respect  et  la  soumis- 
sion des  auditeurs,  ce  qui  suit,  et  elles  dé- 
gouttaient sur  eux,  nous  représente  la  ma- 
nière sage  dont  les  docteurs  catholiques  s'ac- 
quittent du  ministère  de  la  prédication  :  car 
celui  qui  instruit  les  autres  ne  doit  leur  rien 
dire  qui  soit  au-dessus  de  leur  intelligeni  e 
et  de  leur  portée,  et  ne  pas  témoigner,  en 
prêchant  aux  ignorants,  des  choses  trop  éle- 
vées, et  qui  ne  peuvent  leur  être  utiles,  qu'il 
a  plus  de  soin  de  paraître  que  de  profiter  à 
ceux  qu'il  enseigne.  J'ai  fait  accord  avec  tnes 
yeux,  que  je  ne  penserais  pas  seulement  à  regar- 
der une  plie.  L'âme  étant  une  substance  invi- 
sible, n'est  point  sensible  par  elle-même  aux 
plaisirs  des  choses  terrestres  et  corporelles  ; 
mais  comme  elle  est  intimement  unie   au 

29 


LU,.  XX, 


LIb.    XXI, 
las. 678, 


450 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


corps,  les  sens  lui  sont  comme  des  ouvertu- 
res et  des  passages  par  où  elle  sort  eu  quel- 
que manière  au  dehors.  La  vue,  l'ouïe,  le 
goùl,  l'odorat,  le  touclier,  sont  comme  divers 
canaux  par  lesquels  l'àme  se  porte  aux  ob- 
jets extérieure,  ce  sont  comme  des  fenê- 
tres par  où  elle  regarde  les  choses  sensibles 
et,  en  les  retrardant,  elle  les  désire.  C'est  ce 
81.^"*°'  "■   qui  a  fuit  dire  au  prophète  Jérémie  :  La  mort 
a  monté  par  nos  fenilrcs,  elle  est  entrée  dans 
nos  maisons.  Quiconque  regarde  inconsidéré- 
ment par  ces  fenêtres  corporelles,  est  sou- 
vent attiré  contre  son  gré  par  de  dangereu- 
ses délectations,  et  se  trouvant  insensible- 
ment gagpé  par  des  désirs  illicites,  il  com- 
mence à  vouloir  ce  qu'il  ne  voulait  pas.  Job 
qui,  en  juge  très-équitable,  présidait  sur  tous 
ses  sens,  regardait  de  loin  le  péché  avant  qu'il 
y  pût  tomber,  et  fermait  les  fenêtres  de  son 
corps  ;\  la  mort  spirituelle,  de  crainte  d'en 
être  surpris.  Afin  donc  de  se  conserver  tou- 
jours chaste,  il  fait  un  accoi'd  avec  ses  yeux 
de  ne  point  regarder  des  beautés  qu'il  crai- 
gnait d'aimer,  encore  qu'il  ne  les  eût  pas 
regardées  à  mauvais  dessein.  En  etlet,  le 
poids  de  la  chair  qui  nous  attiie  sans  cesse 
en  bas  est  d'une  pesanteur  si  prodigieuse, 
que  quand  l'image  de  quelque  beauté  ter- 
restre a  pénétré  par  les  yeux  jusque  dans  le 
co^ur,  il  faut  de  grands  efl'orts  et  de  grands 
combats  pour  l'en  etfacer.  Le  moyen  de  n'a- 
voir rien  d'impur  dans  sa  pensée,  est  de  ne 
point  regarder  ce  qu'il  n'est  point  permis  de 
désirer.  Job  ajoute  :  Quelle  part  Dieu  pren- 
drait-il de  moi  là-haut?  comme  s'il  disait  :  Si 
je  laisse  souiller  mon  âme  par  des  pensées 
impures,  je  ne  pourrai  jamais  être  l'héiitage 
de  Celui  qui  est  l'auteur  et  le  principe  de 
toute  pureté  :  car  tous  les  biens  que  l'on 
peut  avoir  sont  inutiles,  s'ils  ne  sont  soute- 
nus devant  Dieu  par  le  témoignage  de  la 
chasteté,  n 
t.rti'°.'°'m°       8.  «  Après  que  les  amis  de  Job  eurent  par- 
îii.'"'  '"'•   lé,  un  jeune  homme  nommé  Héliu  dit  :  Je 
répmidrai  aussi  à  mon  tour,  et  je  ferai  con- 
naître ma  science.  Le  parti  des  présomptueux 
n'est  pas  tant  d'être  savant  que  de  le  paraî- 
tre, el  tous  leurs  discours  vont  plutôt  à  faire 
une  vaine  ostentation  de  sagesse,  qu'à  la 
posséder  en  eifet  ;  les  saints  prédicateurs, 
au  contraire,  se  contentent  de  contempler, 
dans  le  secret  de  leur  cœur,  le  don  de  lu- 
mière qu'ils  ont  reçu  de  Dieu,  ils  le  goûtent 
au  dedans,  où  ils  l'ont  recju,  cl  non  au  div 
hors  où  ils  sont  oblijjés  de  le  uianit'estcr  :  et 


lois  même  qu'ils  sont  obligés  de  le  manifes- 
ter, comme  ils  agissent  toujours  par  le  mo-     ''*?•"'• 
tif  de  la  charité  qui  les  anime,  ils  ne  ressen- 
tent de  joie  que  du  profit  qu'eu  tirent  leurs 
auditeurs,  et  non  de  l'applaudissement  et  de 
l'estime  que  cet  éclat  attire  sur  eux.  Écoutez,  ^^^t^'^ 
sages,  mes  paroles,  et  twis,  savants,  soyez  at- 
tentifs à  ce  que  je  dis.  Il  faut  être  bien  pré- 
somptueux pour  se  figurer  qu'il  n'y  a  que 
les  sages  et  les  savants  qui  soient  dignes 
d'entendre  ce  que  nous  disons.  Un  vrai  pré- 
dicateur de  la  sagesse  en  parle  bien  difl'é- 
remment,  sachant  qu'il  est  redevable  aux 
savants  et  aux  ignorants.  Le  présomptueux 
ne  veut  être  écouté  que  des  savants  et  des 
sages,  parce  qu'il  ne  prêche  pas  pour  ren- 
dre sages  ses  auditeurs  ;  mais  il  en  clierche 
qui  le  soient  déjà,  afin  de  faire  éclater  de- 
vant eux  avec  vanité  sa  capacité  et  sa  doc- 
trine. Il  ne  pense  pas  tant  à  instruire  qu'à 
paj'aître.  Il  n'est  point  inquiet  si  ceux  qui 
l'ccoutent  en  deviendront  meilleurs  et  plus 
justes,  mais  s'il  en  sera  estimé  plus  habile  et 
plus  savant.  Dieu  n'écoutera  point  en  vain,  et  pjr'^j?"^ '* 
le  Tout-Puissant  examinera  la  cause  de  chacun 
en  jjurticulier.  L'Écriture  marque  ici  deux 
choses  :  l'une,  que  Dieu  n'écoute  pas  eu  vain 
ceux  qui  crient  à  lui  ;  et  l'autre  qu'il  regarde 
ceux  qui  soulfrent.  11  ne  faut  pas  croire  que 
Dieu  nous  néglige,  lorsqu'il  dilfère  de  nous 
écouter;  souvent  il  arrive  qu'il  exauce  nos 
désirs,  lorsqu'il  ne  nous  en  accorde  pas  si- 
tôt l'cllet,  et  que  les  choses  dont  nous  de- 
mandons proniptcment  l'accomplissement, 
trouvent  dans  le  retardement  un  succès  plus 
heureux  et  plus  favorable.  .Nos  prières  sont 
exaucées,  en  cela  même  que  Dieu  semble 
ditl'érer  de  les  exaucer  ;  nos  désirs  s'éten- 
dent à  mesure  que  Dieu  semble  les  négliger, 
et  en  croissant  de  la  sorte,  ils  se  fortifient  et 
deviennent  capables  de  recevoir  leur  véri- 
table accomplissement.  Le  travail  du  com- 
bat est  prolongé,  afin  que  la  couronne  de 
la  victoire  en  soit  plus  riche  et  plus  glo- 
rieuse. Quand  donc  le  Seigneur  n'exauce 
pas  proniptcment  les  siens,  il  les  attire  véri- 
tahlcmcnl  à  lui,  lorsqu'il  seujble  qu'il  les  re- 
pousse ;  c'est  un  médecin  intérieur  el  spiri- 
tuel, qui  retranche  dans  le  fond  de  l'Ame 
toute  la  corruption  qu'il  n'y  peut  soutl'rir, 
qui  fait  sortir  toute  la  pouirilure  de  noire 
c(i;ur  par  le  feu  de  la  tribulatiou,  et  qui  gué- 
rit d'autant  mieux  les  maladies  spirituelles, 
qu'il  ('toute  moins  la  voix  des  malades.  //    lu.  xxvri, 
considère  ce  qui  est  au-dessous  de  tous  les  cieiw,   ""*' 


(vil"  SIÈCLE.]     CHAPITRE  xux.— SAINT  r.niî;r,oiRK  i,R  r,nA\n,  pape. 


/«rii 


et  sa  lumière  s'étend pisqu'aux  extrémités  de  la 
terre.  Dion,  qui  gouverne  les  clioscs  supiê- 
mcs,  n'al):iiulonno  pas  les  inférieures,  et  le 
soin  qu'il  prend  des  grandes  choses  ne  l'empê- 
che point  do  descendre  jusqu'aux  inoiiulres. 
Celui  qui  est  présent  partout  et  partout  ésal 
dans  ses  dm'i'rontes  opérations,  n'est  jamais 
diU'ércnt  de  lui-même.  Il  regarde  également 
toutes  choses,  et  il  règle  tout  également  ; 
étant  toujours  présent  partout,  il  n'est  ren- 
fermé dans  aucun  lieu,  et  il  n'est  point  ca- 
pable de  changer  par  la  diversité  dos  choses 
sur  lesquelles  il  étend  ses  soins.  Il  y  en  a 
plusieurs  qui,  entendant  parler  des  merveil- 
les que  les  apôtres  ont  opérées,  et  n'en 
voyant  point  de  semblables  dans  l'Ëglise,  s'i- 
maginent que  Dieu  lui  a  retiré  sa  grâce,  ne 
ps.i.  II,  10.  considérant  point  qu'il  est  écrit  :  Vous  m'as- 
sistez à  jn-ojios  dans  mes  besoins  et  daiis  mes  af- 
flictions. Dans  ces  premiers  temps,  l'Église 
avait  grand  besoin  du  secours  des  miracles 
pour  s'établir,  et  se  fortifier  contre  les  maux 
et  les  persécutions  dont  elle  était  alors  com- 
battue; mais  depuis  qu'elle  a  si  glorieusement 
dompté  l'orgueil  de  l'infidélité,  elle  ne  de- 
mande plus  de  siunes  extraordinaires  ni  de 
miracles,  mais  seulement  des  vertus  et  de 
bonnes  œuvres,  quoiqu'elle  ne  laisse  pas  en- 
core à  présent  de  faire  paraître  quelques  mi- 
racles par  plusieurs  d'entre  ses  fidèles,  dans 
les  occasions  où  ils  sont  nécessaires  pour 
son  bien  et  son  avantage.  La  diversité  des 
langues,  dit  saint  Paul,  est  un  signe,  non 
pour  les  fidèles  ,  mais  pour  les  infidèles  ; 
quand  donc  il  se  rencontre  qu'ils  sont  tous 
fidèles,  il  n'y  a  plus  de  nécessité  pour  les 
miracles.  » 
siiièmfpnr.  Q.  LaslxièmB  partie  comprend  l'explication 
xxvui,  pȔ.  du  reste  du  livre  de  Job,  depuis  le  vingt-hui- 
tième livre  jusqu'au  quarante-deuxième  qui 
est  le  dernier.  Le  Seigneur,  répondant  à  Job  du 
milieti  d'un  tourbillon,  luidit  :  Qui  est  celui  qui 
mêle  des  sentences  parmi  des  discours  imperti- 
nents ?  (I  Si  .Job  eût  été  dans  un  état  de  santé 
et  de  prospérité,  Dieu  lui  eût  parlé  d'un  lieu 
plein  de  calme  et  de  tranquillité  ;  mais  comme 
il  adressait  son  discours  à  une  personne  acca- 
blée de  douleur  et  d'affliction  par  la  perte  de 
ses  biens,  la  mort  de  ses  enfants,  les  plaies 
dont  son  corps  était  couvert,  les  paroles  im- 
pertinentes de  sa  femme,  et  parles  discours 
injurieux  de  ses  amis,  il  est  dit  qu'il  lui  parla 
du  milieu  d'un  tourbillon  et  de  la  tempête. 
Car  lorsque  Dieu  touche  intérieurement  le 
cœur  de  ses  serviteurs  par  un  sentiment  de 


compoMcliiiii,  il  l(!ur  paiicd'iine manière  bien 
dilli'rc'nte  dccelli!  dont  il  le  fait  lorsqu'il  les 
châtie  par  la  rigueur  de  ses  Ih-aiix,  pour  em- 
pêcher qu'ils  ne  s'élèvent  de  vaine  gloire.  La 
première  s'insiunn  doucement  dans  l'âme, 
pour  la  faire  avancer  dans  le  chemin  de  la  ver- 
tu; et  l'aulre  r('"piiuie  et  détruit  fortement  eu 
elle  ce  (jui  l'onipôche  d'y  avancer;  l'une  lui 
apprend  ce  qu'elle  doit  rechercher,  et  l'autre 
ce  qu'elle  doit  craindre.  Dieu  avait  résolu  de 
rendre  au  double  h  Job  ce  qu'il  avait  perdu  ; 
et  pour  empêcher  que  sa  victoire  ne  le  fit 
tomber  sousl'épée  mortelle  de  la  vanité,  ou 
de  la  complaisance  eu  lui-môme,  il  le  reprend 
ici  sévèrement,  pour  lui  conserver  la  vie  de 
l'àme,  en  le  tenant  dans  l'humilité  :  Saviez- 
vous,  lui  dit-il,  quand  vous  deviez  naître,  et 
connaissez-vous  le  nombre  de  vos  jours?  Connais- 
sez-vous l'ordre  du  ciel,  et  en  marqucrez-vous 
bien  les  raisons  sur  la  terre  ?  Dieu  parle  ainsi  à 
l'homme, afin  de  lui  apprendre  qu'il  ne  se  con- 
naît pas  soi-même;  que  sachant  qu'il  ne  se 
connaît  pas,  il  craigne  ;  que  craignant,  il  s'hu- 
milie et  ne  présume  rien  de  soi;  que  ne  pré- 
sumant rien  de  soi,  il  ait  recours  à  l'assistance 
de  son  Créateur,  et  qu'étant  mort  pour  avoir 
mis  sa  confiance  en  lui-même,  il  revienne 
à  la  vie  en  recherchant  le  secours  de  celui 
qui  l'a  formé.  Alors  Job,  répondant  au  Sei- 
gneur, lui  dit  :  Je  sais  que  vous  pouvez  tout,  et 
que  nulle  pensée  ne  vous  est  cachée  ;  c'est  pour- 
quoi j'ai  parlé  comme  un  insensé,  et  j'ai  dit  des 
choses  qui  surpassaient  infiniment  ma  connais- 
sance. Notre  sagesse,  en  comparaison  de  la 
sagesse  souveraine,  n'est  que  folie  :  Job  avait 
parlé  sagement  aux  hommes,  mais  ayant  en- 
tendu les  oracles  de  la  bouche  de  Dieu,  il 
reconnaît  encore  avec  plus  de  sagesse  qu'il 
n'est  point  sage.  » 

10.  Saint  Grégoire  finit  ses  Morales  sur 
Job,  en  conjurant  tous  ceux  qui  les  liront  de 
ne  pas  lui  refuser  le  secours  de  leurs  prières 
devant  le  tribunal  du  souverain  Juge,  et  de 
vouloir  bien  prendre  soin  de  laver  par  l'eau 
de  leurs  larmes,  toutes  les  taches  qu'ils  au- 
ront remarquées  dans  son  cœur  en  lisant  ses 
écrits.  Les  réflexions  que  nous  en  avons  rap- 
portées, suffisent,  ce  semble,  pour  donner 
au  lecteur  une  idée  de  ce  commentaire,  et 
pour  le  mettre  en  état  de  juger  de  l'édifica- 
tion qu'en  peuvent  tirer  ceux  qui  aiment  à 
s'instruire  dans  la  science  des  saints.  C'est 
pour  ceux-là  principalement  que  ce  Père  a 
composé  cet  ouvrage;  aussi  ne  s'y  est-il 
point  emljariassé  d'approfondir  la  lettre  de 


Lib.XXIX, 

put'.  'J54. 


Lll).  XXXV, 
pas.  UiS, 


Conclusion 
drs  Morsios 
sur  Jot).  Ju^o* 
nient  sur  Gfit 
ouvrage. 


452 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Iles  «or   Eïr- 
chlcl   MDi  da 


OoécriM'i 

5<4  homélien 
tendant  qw'n 
les  [.rCcl>«if. 
S»  présure 
dt§;tril  daus 
■(^i.Iusçruids 
Irouiilej, 


l'Écrilare,  ni  d'y  parler  avec  ëlcgaace  et  avec 
la  dernière  exactitude;  il  s*v  est,  comme  il 
le  *  dit  lui-même,  peu  arrête  aux  paroles, 
afin  de  s'attacher  davantage  aux  choses. 

§11- 

Des  Homélies  sur  le  prophète  Ézèchiel. 

i.  On  met  ordinairement  les  homélies  de 
saint  Grégoire  sur  la  prophétie  d'Ezéchiel  en 
395,  mais  il  scrohlc  qu'on  doit  les  avancer  de 
trois  ans,  elles  rapporter  à  l'an  592;  car  il 
est  certain,  par  le  témoignage  de  Paul  Diacre, 
qu'il  les  prononça  '  dans  le  temps  qu'Agi- 
lulfe,  roi  âes  Lombards,  sortant  de  Pavie  où 
il  faisait  sa  résidence  ordinaire,  vint  avec 
une  armée  puissante  reprendre  Pérouse,  et 
s'avança  jusqu'à  Rome  dont  il  Dt  le  siège  : 
or,  cela  arriva  en  392,  la  même  '  année  que 
Romain,  patrice  et  exarque  de  Ravenne, 
avait  pris  Pérouse  sur  les  Lombai'ds,  Agi- 
lulfe  s'étant  *  aussitôt  mis  en  campagne  pour 
reprendre  les  villes  que  Romain  avait  prises 
sur  lui  contre  la  foi  des  traités.  Dès  le  com- 
mencement de  son  pontificat,  saint  Grégoire 
avait  fait  plusieurs  homélies  sur  les  Évangi- 
les ;  mais  on  ne  les  a  placées  qu'après  celles 
qu'il  fit  sur  Ézèchiel,  pour  garder  l'ordre  des 
li\Tes  de  l'Écriture. 

2.  L'on  écrivait  °  ses  homélies  pendant 
qu'il  les  prononçait.  Les  Romains,  charmés 
de  l'entendre,  voyant  qu'il  ne  lui  serait  pas 
possible  de  leur  expliquer  tout  le  prophète, 
le  conjurèrent  '  de  leur-  donner  l'explication 
de  la  dernière  vision  ;  mais  dans  le  temps 
qu'il  se  disposait  ;"!  satisfaire  leurs  désirs,  il 
reçut  la  nouvelle  que  le  roi  .\gilulfe  avait 
passé  le  Pô  pour  venir  faire  le  siège  de  Rome. 
Cela  ne  l'euipôcha  pas  de  commencer  son 
explication,  et  d'entrer  dans  la  profondeur 
des  mystères  cachés  sous  cette  vision  pro- 
phétique, mais  en  avouant  qu'au  milieu  des 
agitations  et  des  soius  que  cette  nouvelle  lui 


causait,  il  n'aurait  osé  entreprendre  un  ou" 
vrage  si  dillicile,  si  la  grâce  du  ciel  et  l'ar- 
deur des  désirs  de  ses  auditeurs  ne  l'eussent 
soutenu.  Saint  Jérôme  '  s'était  autiefois  ex- 
cusé de  commenter  ce  même  prophète,  sur 
le  trouble  que  lui  avaient  occasionné  les 
nouvelles  de  la  désolation  de  Rome  et  de 
l'Occident  par  les  barbares.  Voici  comment 
saint  Grégoire  décrit  celle  qui  arriva  dans  le 
temps  qu'il  expliquait  ICz('cliiel '.  «  Qu'ya-t-il 
encore  dans  le  monde  qui  puisse  nous  plaire  ? 
Nous  ne  voyons  que  tristesse,  nous  n'enten- 
dons que  gémissements.  Les  villes  sont  dé- 
truites, les  forteresses  ruinées,  la  terre  est 
réduite  en  solitude,  et  ces  petits  restes  du 
genre  humain  sont  continuellement  battus 
des  fléaux  de  Dieu.  Nous  voyons  les  uns  en- 
traînés en  captivité,  les  autres  mutiles,  les 
autres  tués.  Rome  même,  autrefois  la  maî- 
tresse du  monde,  nous  voyons  où  elle  est 
réduite;  accablée  de  douleurs,  abandonnée 
par  ses  citoyens,  insultée  par  ses  ennemis, 
pleine  de  ruines.  Où  est  le  sénat?  Où  est  le 
peu[ile?  Que  dis-je,  des  hommes?  les  édifices 
mêmes  se  détruisent,  les  murailles  tombent. 
Où  sont  ceux  qui  se  réjouissaient  de  sa 
gloire  ?  où  est  leur  pompe  et  leur  orgueil  ? 
Autrefois  ses  princes  et  ses  chefs  se  répan- 
daient par  toutes  les  provinces  pour  les  pil- 
ler, les  jeunes  gens  y  accom'aient  de  tous 
côtés  pour  s'avancer  dans  le  monde  ;  main- 
tenant qu'elle  est  déserte  et  ruinée,  persomie 
n'y  vient  plus  chercher  la  i'orlune.  Il  n'y  reste 
plus  de  puissants  capables  d'opprimer  les 
autres.  »  Saint'  Bernard  relève  la  présence  et 
la  liberté  d'esprit  de  ce  suint  Pape,  au  milieu 
de  tant  de  troubles  et  d'agitations,  et  en 
même  temps  l'élégance  et  l'exactitude  de  ses 
explications. 

3.  Saint  Grégoire  eut  recoui-s  à  celles  que 
saint  Jérôme  eu  avait  failes,  mais  il  ne  les 
adopta  point  d'une  manière  servile  ;  il  pense 
même    assez  souvent  dilféremment  de  ce 


Il  »>«[  »fn1 
du  Cftiiin 
latr«  d«  ta)Dt 
JérAnJC. 


'  Vnde  cl  ipsa)n  loquendi  artem...  scrvare  dcs- 
pexi...non  melacismi  collisionem  fugio,non  hnr- 
barismi  confusionem  derito.  (Jre;;.,  Prœfat.  Mo- 
ral, in  Job-,  Epist.  missoria  prwvia. 

«  Paiilns   Diac,  lib.   IV  Uist.  longobard.,  lap. 

VIII. 

»  r.rcp.,  lib.  V,  Lpht.  40;  lib.  IX,  Kpisl.ÂH. 

'  Statim  Ticino  egressus  rex  Pcrusiiim  peliil... 
hujus  régis  advciUu  in  tanlum  beatus  Oregorius 
papa  exlerritus  est,ui  ab  cxpositione  templi ,  de 
quo  Ezecliicl  scripseral,  dcsislerel.  Pniilus  Djac, 
lib.   IV   HiM.  Longobard.,  rap   mil 

»  Joan.  U;ai;.,  lil>.  IV,  uuui.  69,  70. 


"  r.refr.,  PriT'/ar  lib.  Il  in  Ezèchiel,  et  Joan.  Diac, 
lib.  VI,  nuni.  "G. 

■  Hieronjui.,  Epist.  ad  Eu^toch.,  prœpxa  com- 
ment. inSzechiel. 

"  e.rc;.'..  lib.  XI  in  Ezèchiel.  Ilom.  6. 

'  Oliaidio  urhi.i  et  barbaricus  ensis  cixHtim  cer- 
ricibns  imminebot.  fiumquid  tamen  istud  lerruit 
beaium  papam  Gregorium  giiominus  sapitnliaiii 
scribcrcl  in  olio  !  Eo  nempe  tempnris  obscurissi- 
niam  et  extremam  partem  Ezechielis  tam  diligenr 
ter  quam  elcganter  exposuit.  Bernard.,  De  Con- 
sideratione,  lib.  I,  cap.  ix. 


Soi  honii^' 
llos  tout  au 
Moniltio        d» 

Jii^oniriit  sur 
cos    lioiiiAllos. 


Ce  im'oHes 
cOQttnnenl, 
loni.  I,  ttag. 
1174. 


Ji  an.  I,  :!i. 


Gcnesi 
XUX,    10. 


[vil»  siixLE.]     chapithe  XLrx 

l'i'io,  ol  qiiclqiiofnis  il  lo  ri'fiilp,  iiiiiis  avec 
beaucoup  ilo  modcslie,  et  saus  le  nouimei-. 
4.  Ses  homélies  sut-  l'',/,('cliiel  sont  au  uoui- 
brc  de  vingt-iieux,  les  imprimés  et  les  uia- 
miscrits  n'en  maniuent  pas  clavaiUago.  KUes 
furent  huit  ans  après  '  recueillies  en  deux 
livres;  le  premier  en  conlieut  douze,  et  h» 
second  dix,  dans  lesquelles  le  saint  Pape  n'ex- 
plique qu'un  chapitre  de  la  dernière  vision 
d'I'Jzéchiel.  C'est  h;  quarantième,  dont  il  ne 
donne  même  l'explication  que  jusqu'au  qua- 
rante-huitième verset;  après  quoi  il  dit  à 
ses  auditeurs  :  «  Personne  *  ne  doit  trouver 
mauvais  si  je  cesse  après  ce  discours.  Vous 
voyez  tous  que  nos  atTliclions  sont  aug- 
mentées, le  glaive  nous  environne  de  toutes 
parts  ;  les  uns  reviennent  ayant  les  mains 
coupées,  nous  apprenons  que  les  autres  sont 
pris,  et  les  autres  tués.  Quand  on  ne  peut 
plus  vivre,  comment  peut-on  expliquer  les 
mystères  de  l'Écriture?  Que  reste-t-il  donc, 
sinon  de  rendre  grâces  avec  larmes  à  celui 
qui  nous  frappe  pour  nos  péchés?  «Saint  Gré- 
goire envoya  ses  vingt-deux  homélies  à  l'é- 
vèquc  Marien,  qui  les  lui  avait  demandées. 
Le  style  n'en  est  pas  élevé,  mais  il  convient 
à  des  discours  pour  tout  un  peuple.  Saint 
Grégoire  commence  ordinairement  par  éta- 
blir le  sens  de  la  lettre,  comme  le  fondement 
des  autres  ;  mais  il  s'applique  plus  particu- 
lièrement au  sens  mystique  et  moral,  faisant 
venir  à  son  secours  les  endroits  de  l'un  et 
l'autre  Testament,  qu'il  croit  les  plus  propres 
à  éclaircir  son  texte. 

5.  La  première  homélie  traite  de  la  pro- 
phétie en  général,  de  ses  diCTérentes  ma- 
nières et  des  temps  auxquels  elle  peut  avoir 
rapport,  au  passé,  au  présent  et  au  futur  ; 
car  la  prophétie  ne  regarde  pas  nécessaire- 
ment l'avenir,  mais  seulement  les  choses  ca- 
chées, en  quelque  temps  qu'elles  soient  ar- 
rivées. «  On  trouve  une  prophétie  du  passé 
dans  ces  paroles  de  la  Genèse  :  Au  commen- 
cement Dieu  créa  le  ciel  et  la  terre  ;  du  futur, 
dans  celle  d'Isaïe  :  Une  vierge  concevra  et 
enfantera  un  fils,  et  une  du  présent,  dans 
ce  que  dit  saint  Jean  aux  juifs  :  Voilà  l'a- 
gneau de  Dieu,  voilà  celui  qui  efface  les  péchés 
du  monde.  La  vérité  des  événements  passés 
sert  de  preuve  aux  événements  futurs.  Moïse, 
après  avoir  raconté  ce  qui  s'est  fait  au  com- 
mencement du  monde,  prédit  ce  qui  se  fera 
dans  la  suite  :  Le  sceptre  ne  sera  point  ôté  de 


SATNT  GniÔGOUIE  I,K  GRAM),  l'AI'lî. 


4S3 


Juda,  jusqu'à  ce  que  vienne  Celui  qui  doit  être 

ennii/é,  et  il  sera  l'attente  dfs  u/t/ions.  Il  eu  use 
ainsi,  afin  ([u'en  voyant  raccouiplissement 
do  cette  prophétie,  nous  ne  doutions  point 
de  la  vérité  des  choses  qu'il  a  rapportées 
comme  déjà  arrivées.  Au  reste,  Dieu,  en  ac- 
cordant î^i  quelqu'un  le  don  de  prophétie,  ne 
lui  (l(5couvre  pas  pour  cela  tout  ce  qui  doit 
arriver  :  ce  don  est  souvent  borné.  Elisée 
ne  savait  pas  le  sujet  du  cliagrin  de  la  Suna- 
mite,  c'est-à-dire  la  mort  de  son  tils.  Dieu 
en  use  ainsi,  afin  que  le  prophète,  se  voyant 
privé  de  certaines  connaissances,  sache  que 
celles  qu'il  ajui  sont  données  d'en-haut.  Dans 
la  seconde  homélie,  saint  Grégoire  donne 
l'explication  des  cinq  premiers  versets  de  la 
prophétie  d'Ézéchiel,  et  il  emploie  les  six 
homélies  suivantes  à  expliquer  le  premier 
chapitre  tout  entier,  où  Ezéchiel  marque  l'an- 
née, le  mois  et  le  jour  où  il  eut  la  vision  ex- 
traordinaire qui  s'y  trouve  rapportée.  Il  en 
fut  si  frappé,  qu'il  tomba  le  visage  contre 
terre  ;  mais  l'Esprit-Saint,  étant  entré  en  lui, 
l'atiermit  divinement,  en  sorte  que,  s'étant 
relevé,  il  se  trouva  assez  de  forces  pour  se 
tenir  sur  ses  pieds  :  c'est  la  matière  de  la 
neuvième  homélie,  et  le  commencement  du 
second  chapitre  d'Ézéchiel.  L'ordre  que  Dieu 
garde  à  l'égard  de  son  prophète  est  admira- 
ble :  il  lui  fait  voir  d'abord  comme  une  image 
de  sa  gloire,  afin  de  l'humilier  et  de  l'abattre  ; 
ensuite  il  lui  pai'le  pour  le  relever;  puis,  en  lui 
envoyant  son  Saint-Esprit  avec  une  grâce  su- 
rabondante, il  le  relève  et  l'atiermit  sur  ses 
pieds.  S'il  ne  se  présentait  à  notre  esprit 
quelque  chose  de  l'éternité,  jamais  nous  ne 
tomberions  le  visage  contre  terre  par  le 
mouvement  d'une  véritable  pénitence  ;  mais 
lorsque  nous  sommes  tombés,  la  voix  du 
Seigneur  nous  console,  afin  que  nous  nous 
levions  pour  faire  de  bonnes  œuvres  :  ce 
que  toutefois  nous  ne  pouvons  faire  par  no- 
tre propre  vertu.  C'est  son  Esprit  qui  nous 
remplit,  qui  nous  fortifie,  qui  nous  fait  te- 
nir fermes  sur  nos  pieds,  afin  qu'après  avoir 
été  prosternés  contre  terre  par  le  regret  de 
nos  fautes,  nous  soyons  fermescà  l'avenir  dans 
la  pratique  des  bonnes  œuvres. Mais  pourquoi 
celui  qui  parlait  déjà  ;\  Ézéchiel,  lorsqu'il  était 
abattu,  ne  lui  permet-il  de  parler  que  lors- 
qu'il s'est  relevé  ?  C'est  qu'il  y  a  des  choses 
que  nous  devons  écouter  étant  pi-ostcrnés 
contre  terre,  et  d'auties  étant  debout.  Dieu 


IV  Ilcj.  IV, 


Vng.  im. 


•  Grcg.,  Prœfal.,  in  EzeckicL 


l.ili.  Il,  Ilnin.  in,  iiay.  1130. 


434 


HISTOIRE  GENERALE  DES  AUTEURS  IXCLESIASTIQUES. 


parle  à  celui  qui  est  abattu,  aiin  qu'il  se  lève, 
et  il  parle  à  celui  qui  est  debout,  pour  lui 
commander  d'aller  porter  sa  parole  aux  hom- 
mes :  car  on  ne  doit  pas  nous  donner  l'au- 
torité de  prêcher  aux  autres,  lorsque  notre 
propre  faiblesse  nous  tient  encore  couchés 
par  terre,  de  crainte  qu'étant  ainsi  faibles, 
nous  ne  détruisions  par  nos  œuvres  ce  que 
nous  pourrions  établir  d'ailleurs  par  nos  pa- 
roles. Les  trois  homélies  suivantes  contien- 
nent l'explication  du  troisième  chapitre  et 
Er«W(i,  fin  commencement  du  quatrième.  Fils  de 
l'homme,  votre  ventre  se  nourrira  de  ce  livre 
que  je  vous  donne,  et  vos  entrailles  en  seront 

p.g.  UM.  remplies.  U  y  en  a  plusieui-s  qui  lisent,  et 
qui  en  lisant  ne  se  nourrissent  point  :  beau- 
coup entendent  la  vois  du  prédicateui-,  mais 
après  l'avoir  entendue,  ils  se  retirent  aussi 
vides  qu'auparavant.  Ils  mangent  en  appa- 
rence, mais  leurs  entrailles  ne  sont  point 
remplies,  parce  qu'encore  qu'ils  reçoivent 
dans  leur  esprit  l'intelligence  de  la  divine 
parole,  ils  négligent  de  la  faire  entrer  dans 
leur  cœur  comme  dans  leurs  entrailles,  lors- 
que, l'oubliant  à  l'heure  même,  ils  n'ont  pas 
soin  de  pratiquer  ce  qu'on  leur  a  fait  enten- 
dre. Ils  mangent  et  ne  sont  point  rassasiés, 
quand,  en  même  temps  qu'ils  écoutent  les 
paroles  du  Seigneur,  ils  désirent  et  les  biens 
I58Î.  du  siècle  et  sa  gloire.  Je  vous  ai  donné,  dit 
Eiethiei,  le  Seigneur  à  Ézéchiel,  pour  sentinelle  à  la 
maison  d'Israël.  Dieu  déclare  que  celui  qu'il 
envoie  prêcher  est  comme  une  sentinelle, 
parce  que  celui  qu'on  charge  du  soin  des 
autres  est  ainsi  nommé,  afin  que  la  force 
du  nom  même  qu'on  lui  donne  lui  fasse  con- 
naître ce  qu'il  doit  faire,  étant  toujours,  par 
l'élévation  de  son  esprit,  comme  en  un  lieu 
élevé  pour  veiller  sur  eux,  et  les  tenir  en  sû- 
reté :  car  on  ne  met  point  une  sentinelle  en 
un  lieu  bas,  mais  on  la  place  sur  quelque  hau- 
teur ,  afin  qu'elle  puisse  découvrir  de  loin 
tout  ce  qui  vient.  Quiconque  est  donc  établi 
sentinelle  sur  la  maison  du  Seigneur,  doit 
être  élevé  au-dessus  des  autres  par  sa  piété, 
afin  qu'il  soit  en  état  de  les  servir  par  la  lu- 
mière de  sa  prévoyance,   Le  Seigneur  dit 

lud.  jo.  ensuite  au  Prophète  :  Si  le  juste  abandonne 
sa  justice  et  commet  l'iniquité,  je  mettrai  dc- 

Pis.  \m.  vant  lui  une  pierre  d'ac/ioppenient  ;'il  mourra, 
fiarce  que  vous  ne  l'avez  pas  averti.  Les  juge- 
ments de  Dieu  sont  terribles  ;  après  avoir 
attendu  longtemps  le  retour  de  celui  qui  a 
péché,  lors(|u'il  voit  qu'.ui  lieu  de  se  con- 
veitir  il  méprise  sa  patience,  il  lui  préseule 


une  occasion  de  tomber  encore  d'une  chute 
plus  mortelle  :  car  un  péché  qu'on  ne  se 
hâte  pas  d'efiacer  par  la  pénitence,  peut  de- 
venir, par  un  juste  jugement  de  Dieu,  la 
cause  d'un  nouveau  péché,  parce  que,  l'a- 
veuglement du  pécheur  venant  à  croître,  ce 
second  péché  est  comme  engendré  par  le 
premier  ;  en  sorte  que  l'accroissement  des 
vices  est  déjà  en  lui  comme  un  commence- 
ment de  supplices  :  car  il  arrive  quelquefois 
que  le  même  péché  soit  péché,  la  peine  du 
péché,  et  la  cause  du  péché.  »  Les  dix  autres 
homélies  sont  une  explication  de  la  vision 
qu'eut  Ezéchiel  d'une  ville  bâtie  sur  une 
montagne,  et  tournée  au  midi.  Saint  Gré- 
goire avoue  que  ce  qu'on  en  lit  dans  le  qua- 
rantième chapitre  de  ce  prophète  est  très- 
ditiicilc  à  comprendre  ;  c'est  pourquoi,  ne 
s'arrèlant  presque  point  au  sens  littéral,  il  pu.  13m. 
en  donne  de  mystiques,  en  expliquant  cette 
vision  de  Jésus-Christ  et  de  son  Église,  de 
la  vie  active  et  de  la  contemplative. 

§m. 

Dss  Homélies  sur  les  Évangiles. 

i.  Jean  Diacre  ',  dit  que  saint  Grégoire  ,„  "fVJir. 
régla  les  stations  à  Rome,  c'est-à-dire  les  5i,'"j/„;"*" 
églises  où  se  devait  faire  l'ollice  chaque  '~' 
jour,  soit  dans  les  basiliques,  soit  dans  les 
cimetières  des  martyrs,  c'est-à-dire  les  égli- 
ses où  reposaient  leurs  reliques;  que  ce  fut 
dans  ces  solennités  qu'il  fil  ses  quarante  ho- 
mélies sur  les  évangiles;  que,  tant  que  sa 
sauté  le  lui  permettait,  il  prêchait  lui-même, 
mais  que,  lorsqu'il  n'en  avait  pas  la  force,  il 
faisait  lire  ses  propres  homélies  par  quelque 
autre.  Elles  furent  toutes  reçues  avec  tanl 
d'applaudissements,  que  l'on  en  fit  quantité 
de  copies;  mais  comme  elles  ne  se  trouvèrent 
pas  suffisamment  fidèles,  saint  Grégoire  fui 
oiiligé  de  les  retoucher.  Il  en  fit  en  même 
temps  un  recueil  qu'il  partagea  en  deux  li- 
vres, dont  le  premier  renferme  les  vingt  ho- 
mélies qu'il  avait  dictées  à  ses  secrétai- 
res ;  le  second,  les  vingt  qu'il  avait  pronon- 
cées lui-même.  Il  les  envoya  à  Secondin, 
évêque  de  Taormine  en  Sicile,  avec  une  * 
lettre  dans  laquelle  il  se  plaint  en  quelque 
façon  de  ce  qu'on  lui  avait  enlevé  ses  dis- 
cours avant  qu'il  les  eût  corrigés.  Il  compare 
l'avidil»'  de  ces  copistes  à  celle  des  gensalfa- 

1  Lilt.  II,  iinin.  18.  -  '  lin-p.,  Episl.  ad  Secund. 
i'rwfal.,  in  Etang.,  yan-  li'ii. 


CHAPITHE  XMX.  —SAINT  (îUliGdlItE  I.K  r.liAM),  l'.vPE 


[Vir  SIÈCLE.] 

mes,  qui  s'empressent  de  nianjçer  les  viandes 
îivant  (|ii'eiies  soient  bien  cuites.  C'était  faire 
l'éloge  (le  ses  auditeurs;  mais  il  se  rabais- 
sait beaucoup  Ini-inèuic,  en  comparant  ses 
homélies  ;\  des  viandes  i\  demi  cuites.  11  aver- 
tit Secondin  de  ne  point  trouver  i\  redire  au 
défaut  d'ordre  qui  se  rencontrait  dans  le  re- 
cueil de  ses  liomélics,  parce  qu'on  y  avait 
eu  égard  aux  temps  auxquels  il  les  avait  ou 
prêcbées  ou  dictées,  et  non  ;\  la  suite  de  l'é- 
vanjïile  dont,  en  etl'et,  il  avait  e.vpliqué  tan- 
tôt un  endroit,  tantôt  un  autre,  sans  on  don- 
ner une  explication  suivie.  11  le  prie  de  cor- 
riger tous  les  autres  recueils  qu'il  tiouvera, 
sur  celui  qu'il  lui  envoyait,  et  dont  on  con- 
servait un  exemplaire  dans  les  archives  de 
l'Église  pour  contenter  ceux  qui  désireraient 
en  l'aire  tirer  des  copies.  Il  ne  sera  pas  inu- 
tile de  remarquer  ici,  qu'aux  jours  des  sta- 
tions marquées  par  saint  ("irégoire,  on  lit  en- 
core aujourd'hui   presque  tous  les  mêmes 
eudi-oits  de  l'Évangile  qu'il  y  avait  expliqués, 
tant  l'Église  est  exacte  à  conserver  ses  an- 
ciens usages.  Il  y  a  toutefois  quelque  chan- 
gement pour  les  dimanches  de  l'Avent;  mais 
peut-être  cela  vient-il  de  la  faute  des  copis- 
tes, qui  ont  mis  le  second  pour  le  premier, 
et  le  troisième  pour  le  second  '. 
Homfiie.       2.  La  première  homélie  est  sur  le  vingt- 
%rf,      |,ag.  unième  chapitre  de  sauit  Luc.  bamt  Gregon-e 
s,s,',,^",'i,.'  la  fît  dans  l'église  de  Saint-Pierre,  le  second 
dimanche  de  l'Avent.  Les  guerres,  les  pestes, 
les   tremblements  de  terre  qui  ravageaient 
l'Italie  et  plusieuis  autres  provinces,  lui  don- 
naient lieu  de  croire  que  le  temps  du  juge- 
ment dernier  arrivait.  Il  prit  donc  occasion 
de  toutes  ces  calamités  pour  disposer  son 
peuple  à  se  préparer  à  ce  jour  terrible,  dont 
le  Seigneur  ne  nous  a  ôté  la  connaissance, 
qu'afln  qu'une  crainte  salutaire  nous  le  fasse 
envisager  toujours  comme  fort  proche,  La 
seconde  fut  prononcée  dans  la  même  basili- 
que le  dimanche  de  la  Quinquagésime.  Elle 
est  sur  le  dix-huitième  chapitre  de  saint  Luc, 
où  nous  lisons  que  Jésus-Christ,  ayant  pris 
à  part  ses  douze  apôtres,  leur  prédit  sa  pas- 
sion, et  qu'étant  piès  de  Jéricho,  il  guérit  un 
aveugle.  11  compare  à  cet  aveugle  le  genre 
humain  qui,  chassé  par  le  péché  du  premier 


Luc.  XVIII, 
3t. 


455 

homme  des  joies  ilu  paradis,  cl  IoiuIm''  dans 
les  téuMiies,  est  iHlair(i  par  la  présence  de 
son  Sauveur,  atin  (]u'ii  marche  dans  le  che- 
min de  la  vie  par  ses  bonnes  u;uvres,  et  qu'il 
goûte,  comme  par  avance,  les  joies  que  cause 
la  vue  de  la  lumière  éternelle.  La  troisième 
est  sur  ces  paroles  de  Jésus-Christ  dans  saint 
Matthieu  :  Celui-là  est  mon  frère,  ma  sœur  et 
nia  mère,  qui  fait  la  volonté  de  mon  Père  qui 
est  dans  les  cieux.  Elle  fut  récitée  dans  la  ba- 
silique de  sainte  Félicité,  martyre,  le  jour  de 
sa  fête.  Saint  Grégoire  fait  l'application  de 
ces  paroles  à  cette  sainte,  qui,  de  servante 
qu'elle  était  de  Jésus-Christ  par  sa  foi,  en 
devint  la  mère  en  la  confessant.  La  quatriè- 
me a  pom'  matière  l'ordie  que  le  Sauveur 
donna  à  ses  apôtres  d'aller  prêcher  l'Évan- 
gile, excepté  chez  les  Gentils  et  dans  les  vil- 
les des  Samaritains  :  elle  fut  prêchée  dans 
l'église  du  martyr  saint  Etienne.  Saint  Gré- 
goire remarque  que  Jésus-Christ,  après  avoir 
donné  le  pouvoir  de  prêcher  et  de  faire  des 
miracles,  nécessaires  alors  pour  la  conver- 
sion des  peuples,  ajouta  :  Donnez  gratuite- 
ment ce  que  vous  avez  reçu  gratuitement;  croyant 
cet  ordre  nécessaire,  parce  qu'il  prévoyait 
qu'il  y  en  aurait  à  l'avenir  qui  feraient  un 
commerce  de  la  prédication,  et  qui  cherche- 
raient à  contenter  leur  avarice  dans  l'usage 
qu'ils  feraient  du  don  des  miracles.  Il  traite 
à  cette  occasion  des  diverses  espèces  de  si- 
monie, et  croit  que,  pour  que  celui  qui  con- 
fère les  ordres  sacrés  en  soit  exempt,  il  doit 
non-seulement  ne  point  recevoir  d'argent 
pour  l'ordination,  mais  ne  pas  même  y  re- 
chercher quelque  faveur  humaine.  Il  dicta 
la  cinquième  pour  être  prononcée  dans  l'é- 
glise de  saint  André  au  jour  de  sa  fête.  La  vo- 
cation de  saint  Pierre  et  de  saint  André  à  l'a- 
postolat, fait  le  sujet  de  ce  discours  :  ((  Pierre 
et  Audré  abandonnent  leurs  filets  pour  sui- 
vre le  Sauveur,  des  le  premier  mot  qu'il  leur 
dit;  ils  ne  lui  avaient  pas  encore  vu  faire  de 
miracles;  ils  ne  l'avaient  pas  même  ouï  par- 
ler de  la  récompense  de  la  vie  éternelle; 
toutefois,  dès  le  premier  commandement 
qu'il  leur  fait,  ils  ([uittent  tout  ce  qu'ils  pos- 
sèdent. Combien  de  miracles  n'a-t-il  pas  fait 
éclater  à  nos  yeux?  de  combien  de  fléaux 


Mmi. 
iC  cl  Mq. 


Malt.  x.S. 


l 


'  11  paraît  plus  vraiseuiHable  que  les  copiste? 
n'ont  eu  aucune  part  à  ce  cliangeineut.  Cet  usa^re 
ijui  subsistait  au  temps  de  saint  Grégoire,  a  conti- 
nué nu  moins  jusqu'au  temps  de  Charlemagne  ,  et 
même  jusqu'au  xi\  f  siècle.  Dans  ces  premiers  temps, 
on  lisait  au  premier  dimauclic  le  lexte  Uc  saint  Mat- 


thieu sur  l'entrée  de  Jésus-Christ  à  Jérusalem;  on  y 
lut  ensuite  le  commencement  de  l'Évangile  selon  S. 
Marc.  C'est  ce  qui  reculait  aux  deux  dimanches  sui- 
vants les  évangiles  qu'on  a  depuis  rapportés  au  pre- 
mier diuiainhe  et  au  second.  Note  de  Tricalet  dans 
la  BiOliotli''iiLe  porlalive  des  Pires.  {L'i'ditcur.} 


456 


HISTOIRE  GÉNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


Hom.  7. 
9,10,   IS. 

lus-  itse. 


et  î«q. 


ne  nous  afflige-t-il  point?  Combien  de  mena- 
ces n'eniploie-t-il  pas  pour  nous  effrayer? 
Après  tout  cela,  nous  le  méprisons,  nous 
uéiilisreons  de  le  suivre  lorsqu'il  nous  ap- 
pelle. On  dira  :  Qu'ont  abandonne  ces  pè- 
cbeurs,  puisqu'ils  ne  possédaient  rien?  Mais 
il  faut  considérer  en  cela  plutôt  l'affection 
avec  laquelle  ou  donne  à  Dieu  ce  qu'on  a, 
que  la  chose  même  qu'on  lui  donne.  Celui- 
là  donc  a  beaucoup  quitté,  qui  ne  s'est  rien 
réservé.  Pierre  et  .\ndré  ont  même  renoncé 
au  désir  de  posséder  quelque  chose.  »  La 
sixième  fut  préchée  le  troisième  dimanche 
de  l'Avenl,  dans  l'église  des  saints  martyrs 
Pierre  et  Varcellin.  Saint  Grégoire  y  expli- 
qua l'endroii  de  l'Evangile  selon  saint  Mat- 
thieu, où  il  est  dit  que  saint  Jean,  ayant  ap- 
pris en  prison  les  œuvres  miraculeuses  de 
Jésus-Christ,  lui  fit  demander  par  ses  disci- 

3.  pies  :  Etes-vous  celui  qui  doit  venir  ?  «  Ce  n'est 
pas  que  saint  Jean  doutât  que  Jésus-Christ  fut 
le  Messie,  puisqu'il  l'avait  montré  aux  Juifs, 
et  qu'il  l'avait  baptisé  ;  mais  il  voulait  savoû- 
si,  étant  venu  pour  sauver  les  hommes,  il 
mourrait  pour  eux,  et  descendrait  jusqu'aux 
enfers  pour  en  délivrer  ceux  qui  y  étaient 
en  captivité,  afin  que,  mourant  avant  Jésus- 
Christ,  il  put  annoncer  sa  venue  dans  ces 
lieux  souterrains,  comme  il  l'avait  annoncée 
sur  terre.  »  Ou  a  marqué,  à  la  tète  des  autres 
homélies,  les  églises  et  les  jom-s  où  elles  fu- 
rent prononcées  ;  ce  qu'il  est  bon  de  remar- 
quer pour  connaître  les  différentes  stations 
établies  par  saint  Grégoire.  U  y  eu  a  pour 
les  basiliques  de  la  Sainte-Vierge,  de  saint 
Sylvestre,  de  saint  Pierre,  de  sainte  .\gnès, 
de  saint  Félix  martyr,  de  saint  Paul,  de 
saint  Jean  de  Latran,  de  saint  Laurent,  de 
saint  Jean-Baptiste. 

»,  3.  Dans  la  septième  homélie  pour  le  qua- 
trième dimanche  de  l'Avent,  saint  Grégoire 
donne  l'explication  du  témoignage  que  saint 
Jean  rendit  à  Jésus-Christ,  et  qu'il  se  rendit 
à  lui-même,  en  confessant  qu'il  n'était  pas 

15  le  Christ,  ni  Elie  ,  ni  piophète  ,  mais  seule- 
ment la  voix  de  celui  qui  crie  dans  le  désert. 
Sur  quoi  ce  saint  Pape  le  loue  de  ce  qu'il 
trouvait  sa  joie  dans  l'accroissement  du  vrai 
Messie  et  son  propre  abaissement ,  et  dit , 
qu'en  refusant  de  passer  pour  le  Chiist,  il 
devint,  par  l'Iiumble  connaissance  de  sa  fai- 
blesse ,  un  des  plus  nobles  membres  de  Jé- 


13, 


sus-Christ  et  enfant  de  Dieu.  Il  ajoute  que 
saint  Jean,  en  niant  qu'il  fût  Élie,  ou  un 
pnqihètc  ,  ne  disait,  rien  contre  la  vérité , 
parce  qu'eucore  qu'il  eût  l'esprit  et  la  vertu 
d'Élie  ,  il  était  différent  de  lui  personnelle- 
ment ,  et  qu'il  n'était  point  un  prophète  de 
la  manière  dont  l'avaient  été  les  anciens, 
qui  avaient  prédit  Jésus-Christ  longtemps 
avant  son  avènement,  au  lieu  qu'il  le  mon- 
ti-ait  à  ceux  qui  voulaient  le  voir.  La  huitiè- 
me est  sur  la  naissance  du  Sauveur,  dont 
l'hîstoire  est  rapportée  dans  le  second  cha- 
pitre de  saint  Luc.  Cette  homélie  est  fort    ^'-  "•  ' 
courte,  parce  que,  l'usage  étant  à  Rome  de 
dire  '  trois  messes  le  jour  de  Noël  en  difl'é- 
rentes  églises ,  il  restait  peu  de  temps  pour 
l'explication  du  mystère.  La  neuvième  re- 
garde la  parabole  des  cinq  talents,  qui  sert 
dévangile  au  joui-  de  la  fête  de  saiut  Syl- 
vestre. «  Il  n'est  personne  qui  n'ait  reçu  de 
Dieu  quekpie  talent,  l'un  l'intelligence,  l'au- 
tre le  don  de  la  parole  ;  celui-là  des  riches- 
ses, celui-ci  la  connaissance  de  quelque  art, 
un  autre  la  faveur  des  personnes  puissantes. 
Ce  sont  autant  de  moyens  de  se  rendre  utile 
aux  autres,  ei  autant  de  talents  dont  Dieu 
demandera  compte,  il  le  demandera  à  celui 
qui,  élaut  en  pouvoir  auprès  d'uu  homme 
riche,  n'en  aura  pas  profite  pom-  soulager  la 
misère  du  pauvre.  »  Saint  Grégoire  explique 
dans  la  dixième  l'évangile  que  nous  lisons 
le  jour  de  l'Epiphanie.  11  y  fait  sentir  l'affreux     "•"  ' 
aveuglement  des  juifs  qui  méconnaissent  Jé- 
sus-ClirisI,  tandis  que  les  nations  infidèles, 
et  même  tous  les  éléments,  lui  rendent  té- 
moignage. Il  y  réfute  aussi  l'hérésie  des  pris- 
ciUianistcs  ,  qui  enseignaient  que  les  astres 
présidaient  à  la  naissance  des  hommes.  Dans   ,,  "'"'■ 
la  onzième,  qui  est  une  explication  de  la  pa- 
rabole du  trésor  caché  dans  un  champ,  il 
fait  en  peu  de  mots  l'éloge  de  sainte  .\gnès, 
dont  on  célébrait  la  fête  avec  beaucoup  de 
solennité.  La  douzième  est  encore  pour  la 
même  fête  :  il  y  explique  la  parabole  des  dix 
vierges.  Sur  ces  paroles  :  Veillez,  jiarce  que    ^  »'•"• 
vous  ne  savez  ni  l'heure  ni  le  jour  ,  il  rapporte 
l'histoire  d'un  nommé  Chrysaorius  ,  homme 
superbe,  avare  et  voluptueux,  qui ,  se  ti-ou- 
vant  à  riieure  de  la  mort  ,  vit  autour  de  lui 
les  malins  esprits  sous  des  figures  noires  cl 
atlreuscs,  qui  s'empressaient  de  le  conduire 
en  enfer.  Il  demanda  quelques  heures  de  dé- 


'  ()uia,  Inrgicnlc  Domino,  Hlissarum  snlcmnia 
UT  ItoUie  cclebialuri  liumus,  loijui  tlin  Oc  evun- 


gclica   Icclione    von    possiinius.    Ilom. 
HUti 


»,    pog. 


CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT  GRÉCOIRE  LE  CillAXI),  PAPE. 


noilH'lioS 

11,  is,  ic.  n, 
18,  i:i,  so, 
!•«.  U5i. 


Jii.  II.  \,  n. 


[Vir  SlfcCLK. 

lai,  mais  il  ii't'ii  put  obtenir,  et  mourut.  Saint 
(ii(''i;()irc  elle  le  mCiuo  fait  dans  le  ([uatrir'me 
[\\iv  lie  ses  l)ialof;ues.  Il  traite  encore  tie  la 
vigilance  dans  la  treizième  lioun-lie  ,  qui  a 
pour  matière  ce  que  tlit  Jésus-Christ  dans 
i.iic.iri,r<.  salut  Luc  :  Aye:  dans  vos  mahis  des  lanijics  iir- 
dcnli's,  parce  que  le  Fils  de  l'homme  viemlra  à 
l'heure  que  vous  ne  penserez  pas.  L'iivangile 
m<u-que  trois  veilles  ditférenles ,  ou  trois 
heures  auxquelles  le  Seigneur  peut  venir, 
c'est-à-dire  à  chacun  des  diltorents  âges  de  la 
vie.  Sur  cela  saint  Crénoire  déclare,  qu'on  ne 
doit  point  se  désespérer  pour  le  temps  passé, 
puisque  c'est  pour  nous  convaincre  de  la  pa- 
tience admirable  avec  laquelle  Dieu  nous  at- 
tend, qu'il  nous  dit  que,  s'il  vient  ù  la  secon- 
de veille  ou  à  la  troisième ,  et  qu'il  nous 
trouve  veillant,  nous  serons  bienheureux. 

4.  La  quatorzième  homélie  est  sur  l'évan- 
gile du  second  dimanche  d'après  Pâques, 'où 
Jésus-Christ  donne  des  marques  distinctives 
du  bon  pasteur  d'avec  le  mercenaire.  «  Ces 
marques  ,  selon  saint  Grégoire  ,  ne  s'aper- 
(;oivent  Lien  que  dans  les  temps  de  troubles 
et  d'agitations  :  pendant  la  paix  le  merce- 
naire, comme  le  bon  pasteur,  veille  à  la  gar- 
de de  son  troupeau  sans  le  quitter  ;  mais  si 
le  loup  vient ,  s'il  se  présente  quelqu'un  qui 
persécute,  qui  opprime  les  fidèles,  c'est  alors 
qu'on  distingue  le  vrai  pasteur  d'avec  le  mer- 
cenaire. Celui-ci  s'enfuit,  non  de  corps,  mais 
de  co:'ur  ,  n'ayant  pas  la  foice  ni  le  courage 
de  soulager  son  peuple,  et  de  le  défendre 
contre  l'ennemi  qui  le  maltraite;  au  lieu  que 
celui-là  résiste  courageusement  au  loup  ,  à 
l'injustice,  pour  en  délivrer  ses  ouailles.  »  La 
parabole  des  semences,  rapportée  dans  l'é- 
vangile du  dimanche  de  la  Sexagésime ,  fait 
le  sujet  de  la  quinzième  homélie.  Saint  Gré- 
goire y  fait  voir  que,  comme  il  est  néces- 
saire au  laboureur  d'attendre  en  patience 
que  la  terre  produise  ses  fruits,  nous  ne  pro- 
duisons nous-mêmes  aucun  fruit  de  bonnes 
œuvres,  si  nous  ne  supportons  avec  patience 
les  défauts  de  notre  prochain.  Cela  lui  don- 
ne occasion  de  rapporter  un  exemple  de  pa- 
tience dont  lui-même,  avec  toute  la  ville  de 
Rome,  avaient  été  témoins.  C'est  celui  de  saint 
Servule  ,  qui ,  paralytique  de  tout  son  corps 
dès  sa  jeunesse,  rendait  grâces  à  Dieu  au 
milieu  de  ses  plus  grandes  douleurs  ,  chan- 
tant des  hymnes  jour  et  nuit  en  son  hon- 
neur, ce  qu'il  continua  de  faire  jusqu'à  sa 
mort.  Quoiqu'il  n'eût  point  appris  à  lire  ,  il 
savait  par  cœur  la  sainte  Kciiture,  pour  l'a- 


457 


Liir 
cl  5cq 


voir  ouï  lire  souvent  à  de  pieux  religieux 
(|u'il  rcciîvait  chez  lui  ,  parlag('ant  avec  (!ux 
les  aumônes  i[u'ou  lui  faisait  sous  un  porti- 
que (]ui  est  sur  le  chemin  (|iii  conduit  à  l'é- 
glise de  Saint-Clément.  Il  dit  dans  la  seiziè- 
me, qui  est  sur  l'évangile  du  premier  diman- 
che de  Carême,  qu'on  no  peut  cnliMidrc  sans 
quelque  horieur,  (|ue  le  diable  ail  eu  le  pou- 
voir et  l'insolence  d'enlever  le  Fils  de  Dieu 
oii  il  lui  plaisait ,  tantôt  sur  le  haut  du  tem- 
ple, tantôt  sur  une  montagne  ;  mais  que,  si 
l'on  considère  ce  que  Jésus-Christ  a  bien 
voulu  soull'rir  de  la  part  des  juifs  et  des  sol- 
dats qui  le  crucifièrent,  il  ne  sera  plus  éton- 
nant que,  s'étant  laissé  attacher  à  une  croix 
par  les  membres  du  démon,  il  ait  permis  au 
démon  même  de  le  transporter  d'un  lieu  à 
un  autre.  «  Ce  n'a  donc  point  été  une  chose 
indigne  de  lui  d'être  tenté  delà  sorte, lui  qui 
était  venu  au  monde  pour  être  tué  de  la 
main  des  hommes;  il  était  juste  qu'il  vain- 
quît nos  tentations  par  ses  propres  tenta- 
tions ,  comme  il  était  venu  vaincre  notre 
mort  par  la  sienne.  »  Saint  Grégoire  ne  comp- 
te dans  le  Carême  que  trente-six  jours  d'abs- 
tinence et  de  jeûne,  en  ôtant  les  dimanches, 
où  l'on  ne  jeûnait  point  ;  ce  qu'il  regarde 
comme  la  dixième  pai-tie  de  l'année ,  que 
nous  donnons  à  Dieu  en  nous  mortifiant  à 
cause  de  lui  ;  mais  il  veut  que  cette  absti- 
nence soit  accompagnée  d'aumônes  ,  et  que 
nous  donnions  aux  pauvres  ce  que  nous  nous 
retranchons  à  nous-mêmes.  La  dix-septième 
homélie  fut  faite  dans  l'église  de  Latran  en 
présence  de  plusieurs  évoques  ;  c'est  pour- 
quoi le  Saint  y  entre  dans  le  détail  des  prin- 
cipaux devoirs  des  pasteurs  envers  leurs 
peuples.  Il  veut  qu'ils  vivent  d'une  manière 
si  pure,  que  tous  ceux  qui  s'approchent  d'eux 
en  rapportent  la  saveur  de  la  vie  éternelle  ; 
qu'ils  donnent  à  chacun  les  avis  et  les  aver- 
tissements convenables  ;  que  leur  zèle  soit 
accompagné  de  douceur.  Il  leur  fait  de  vifs 
reproches  de  ce  que  plusieurs  d'entre  eux 
ne  faisaient  aucune  difUculté  de  vendre 
les  ordinations,  et  de  ce  qu'affectant  une  vie 
sainte  aux  yeux  des  hommes  ,  ils  ne  rougis- 
saient pas  de  commettre  aux  yeux  de  Dieu 
des  fautes  considérables  ;  de  ce  que  la  plu- 
part, s'adonnant  aux  soins  et  aux  aûaires 
du  siècle,  négligeaient  le  ministère  de  la  pré- 
dication. Ne  pouvant  assez  déplorer  des  abus 
qui  déshonoraient  si  fort  l'Eglise,  il  emprun- 
te, pour  les  pleurer,  ces  paroles  de  Jérémie  : 
CommrnI  l'or  s'est-il  obscurci?  Comment  a-t-il 


Jcrem., 


458 


Lsment,  ir, 


Lnr.   ^,  1 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESlASTlQUh!^. 

Marie.  La  vinpft-deuxième,   dans   celle  de 


Grt;.  M..ral., 
Mh.      .XXIII, 


Jom.  VIII, 

fi. 


Luc.  m,  1. 


l'ag.  1511, 
1013. 


rond.  Hoiiiô* 
II»  31,32.23, 
2>,  »,  se,  37, 

Marc.    .XVI, 
i. 


changé  sa  couleur  qui  était  si  belle?  Comment 
les  pierres  du  sanctuaire  out-ellcs  clé  dis/jersées 
aux  coins  de  foutes  les  rues  ?  Il  rejette  sur  les 
mauvais  livèques  la  cause  des  calamitiSs  pu- 
bliques, et  les  menaces  du  terrible  jugement 
de  Dieu.  Il  prit  pour  matière  de  cette  homé- 
lie l'endroit  de  l'Évangile  selou  saint  Luc, 
où  il  est  dit  que  le  Seigneur  choisit  soixan- 
te-douze autres  disciples ,  qu'il  envoya  de- 
vant lui  deux  h  deux  dans  toutes  les  villes. 
«  Ces  disciples,  étant  de  retour,  dirent  à 
Jésus-Christ,  avec  quelque  sentiment  de  vai- 
ne gloire ,  que  les  démons  mêmes  leur  étaient 
assujettis  par  la  vertu  de  son  nom.  Le  Sei- 
gneur ,  p;)ur  abaisser  l'enllure  qui  s'était 
élevée  dans  leurs  cœurs,  leur  dit  :  Qu'il  voyait 
satan  tomber  du  ciel  comme  un  éclair,  voulant, 
par  la  chute  et  la  condamnation  de  celui 
qui  est  le  maître  de  tous  les  superbes  ,  leur 
apprendre  combien  ils  devaient  appréhender 
relèvement  de  la  vainc  gloire.  »  Cette  homé- 
lie finit  par  une  prière  dans  laquelle  le  saint 
Pape  demande  que  les  évéques  soient  aux 
yeux  de  Dieu,  qui  les  a  choisis  pour  pasteurs 
des  peuples,  ce  qu'ils  étaient  dans  la  bou- 
che des  hommes.  Des  trois  homélies  suivan- 
tes, l'une  est  sur  l'Evangile  du  dimanche  de 
la  Passion,  l'autre  sur  celui  du  dimanche  de 
la  Scptuagésime,  et  la  troisième  sur  celui 
du  samedi  des  quatre-temps  de  décembre. 
Il  entend  par  les  dill'érentes  heures  auxquel- 
les le  père  de  famille  envoya  des  ouvriers  à 
sa  vigne ,  les  divers  dges  des  hommes  ;  et 
par  le  denier  qui  fut  donné  en  salaire  aux 
ouvriers,  le  royaume  du  ciel.  «Tous  reçurent 
ce  denier,  c'est-à-dire  une  même  récompen- 
se, quoique  leur  travail  eut  été  illégal,  parce 
que  le  royaume  des  cieux  est  toujours  un 
don  de  la  bonne  volonté  de  notre  Dieu  ù  l'é- 
gard de  ceux  qui  ont  liavaillé  longtemps, 
comme  à  l'égai'd  des  autres  qui  n'ont  tra- 
vaillé que  peu  de  temps.  Il  y  aurait  donc  de 
la  folie  h  l'homme  de  se  plaindre  de  Dieu 
pour  ce  qui  dépend  de  sa  bonti- ;  il  doit  se 
tenir  heuieux  d'avoir  sujet  d'espérer  une 
place  dans  le  royaume  des  cieux  ,  n'y  fiit-il 
que  des  derniers.  » 

5.  Le  second  livre  comprend,  comme  on 
l'a  déjà  dit,  les  vingt  homi'lies  (pie saint  Gré- 
goire prêcha  lui-même.  La  vingt-unième  est 
sur  l'Evangile  du  dimanche  de  PAcpies  ;  elle 
fut  prononcée  dans  la  basilique  de  Sainte- 


saint  Jean  appelée  Constantine  ;  elle  est  sur 
l'évangile  du  samedi  d'après  Pâques.  La  vingt- 
troisième,  sur  celui  du  lundi  de  P'iques  Saint 
Grégoire  y  établit  deux  vérités  importantes  : 
la  première,  qu'à  la  fin  du  monde  les  Juifs 
se  convertiront   :\  la  foi  chrétienne  ;  la  se- 
conde, que  pour  célébrer  dignement  la  fêle 
de  Pâques,  il  ne  sulfît  pas  d'y  recevoir  le 
corps  et  le  sang  de  Jésus-Christ  de  bouche, 
si  l'on  ne  pratique  en  même  temps  des  oeu- 
vres de  piété  et  de  miséricorde,  si  l'on  ne  fait 
pénitence  de  ses  péchés,  et  si  l'on  n'en  quille 
l'habitude.  Il  y  établit  encore  la  nécessité 
d'exercer  l'iiuspitalilé  envers  les  étrangers, 
par  l'exemple  des  disciples  d'Emmaiis,  qui 
contraignirent  Jésus-Christ  de  demeurer  avec 
eux,  parce  qu'il  était  tard.  «  Us  mettent  '  la 
taljle  devant  lui,  ils  lui  présentent  à  manger, 
et  reconnaissent  dans  la  fraction  du  pain, 
pour  leur  Dieu,  celui  qu'ils  n'avaient  point 
reconnu  lorsqu'il  leur  expliquait  les  divines 
Ecritures.  »  Ce  Père  explique  de  Tliglise  mi- 
litante et  de  l'Église  triomphante,  les  deux 
pèches  miraculeuses  que  Jésus-Christ  fit  faire 
à  ses  apôtres,  l'une  avant  sa  passion,  l'autre 
après  sa  résurrection.  «Dans  la  première  ils 
prirent  tant  de  poissons,  que  les  lllels  se  rom- 
pirent ;  ce  qui  figurait  la  rupture  de  funité, 
et  les  schismes  qui  se  forment  dans  l'Église 
par  la  diversité  de  doctrines.  Dans  l'autre  ils 
ne  se  rompirent  point,  quoiqu'ils  fussent  rem- 
plis de  cent  cinquante-trois  grands  poissons, 
parce  que  la  sainte  Eglise  des  élus,  figurée 
par  celte  pèche,  se  reposant  danr  rétcrncUe 
paix  de  celui  (pii  l'a  formée,  ne  peut  plus 
être  déchirée  par  aucunes  dissensions.  Ce  fui 
saint  Pierre  qui  tira  le  filet  sur  le  rivage, 
parce  que  le  soin  de  l'Église  lui  était  spécia- 
lement confié.  i>  Cette  homélie  est  sur  l'évan- 
gile du  mercredi  de  Pâques.  Dans  la  vingt- 
Cinquième,  que  saint  Grégoire  prononça  le 
jeudi  de  la  même  semaine,  il  insiste  sur  la 
nécessité  de  la  persévérance  dans  les  bonnes 
(Buvres,  à  l'exemple  de  Marie-Magdeleine, 
(]ui,  pour  être  restée  seule  ù  chercher  Jésus- 
Clirist,  fut  aussi  la  seule  A  qui  il  se  fit  voir. 
Saint  Grégoire,  dans  toute  cette  homélie,  ne 
fait  (pi'une  même  personne  île  la  femme  pé- 
cheresse, de  Marie  so-ur  de  Lazare,  et  de  Ma- 
rie-Magdeleine ;  pitisienis  savants  les  dis- 
linuuenl,  et  en  font  trois  saintes  différentes. 


Joit.  XI, 1. 

I.tir.  xxiT, 

1. 


l-H-  'SI*. 


P«f.   1 MS. 


Paf.  161.'. 


Joan.xxl,!. 


'  ifrnanw  ponunt  ciliosofferunt,  cl  Deum,  qvrm 
in  Sciiiiliirn'  snmc  erposilianc  mm  cngnoviTaiil, 


in   panis  fractionc   cogtwsrunt.    Unni.    2:i     |inR. 
1.139.  t 


]       CHAPITllK  XMX.  —  SAINT  GRWiOIRE  Lli  C.llANU,  PAPE. 


[vil*  SIÈCLE 

Il  montre  dans  la  vingt-sixi^me,  qui  est  pour 

jo.„.  »T,  11-  (liuianclie  ilc  l'octave  de  Pi'niucs,  que  Jésus- 

Cliiist,  ('tant  sorti  du  sein  de  sa  méie  sans 

rompre  le  sceau  de  sa  virginité,  a  bien  pu, 

fus.  1M3.  après  sa  n'surrection,  entrer  dans  le  lieu  où 
les  disciples  étaient  assemblés,  quoiiiue  les 
portesfussent  fermées,  de  peur  des  juifs;  que 

i'«p.  iô;.-.  c'est  de  nous  particulièrement  qu'il  est  dit  : 
Heureux  sont  ceux  qui  ont  cru  sans  avoir  vu, 
parce  qu'en  eflet,  sans  avoir  vu  Jésus-Christ 
dans  la  cliair,  nous  croyons  en  lui  par  une 
foi  vive  et  animée  de  bonnes  œuvres  ;  que 
ce  ne  fut  pas  sans  raison  que  Dieu  permit  le 
doute  de  saint  Thomas  ;  cet  apôtre,  convaincu 
par  l'attouchement  des  plaies  du  Sauveur, 
était  destiné  à  guérir  en  nous  les  plaies 
de  l'infidélité  ;  ainsi  son  incrédulité  a  plus 
servi  à  ratïermissement  de  notre  foi,  que  la 
facilité  à  croire  des  autres  apôtres.  Il  ne  lais- 
sait pas  d'y  avoir,  du  temps  de  saint  Grégoi- 
re, des  clii'étiens  qui  doutaient  que  nos  corps 
dussent  un  jour  ressusciter.  Après  leur  avoir 
demandé  s'il  est  plus  difficile  à  Dieu  de  ra- 
nimer un  corps  que  de  créer  le  monde  entier 
de  rien,  il  leur  donne  divers  exemples  de  faits 
natirrels,  qui  sont  des  images  de  la  résurrec- 
tion future,  entr'  autres  celui  des  semences 
qui,  jetées  en  terre,  y  meurent,  s'y  pourris- 
sent, puis  se  reproduisent  dans  leur  germe. 
juan.xT,  La  vingt-septième  est  sur  le  précepte  de  l'a- 
mour du  prochain,  et  sur  la  prière.  Quoique 
Dieu  nous  ait  fuit  un  grand  nombre  de  com- 
mandements, ils  sont  tous  fondés  sur  la  cha- 
rité, et  en  sortent  comme  d'une  seide  racine; 
sans  la  charité,  on  ne  les  accomplit  pasvéri- 

Fiig.  i:ico.  tablement.  Il  fit  cette  homélie  dans  l'église 
de  saint  Pancrace,  au  jour  de  la  fête  de  ce 

Psr.  I5M.  saint  martyr.  Les  fidèles  y  étaient  venus  en 
foule  ;  les  genoux  en  terre  devant  son  tom- 
beau, ils  frappaient  leur  poitrine,  ils  priaient 
avec  larmes.  «Faites  attention  à  vos  prières, 
leur  dit  ce  Père  ;  voyez  si  vous  demandez 
au  nom  de  Jésus-Christ,  c'est-à-dire,  si  vos 
prières  ont  pour  fin  les  joies  du  salut  éternel. 
Dans  la  maison  de  Jésus-Christ  vous  ne  le  cher- 
chez pas  lui-même,  si  vous  ne  lui  demandez 
que  des  choses  tempore'les.  L'un, 'dans  sa 
prière, demande unefemme,  l'autre  unemé- 
tairie,  celui-là  un  habit,  celui-ci  des  aliments. 

Mail.  vT,  Lorsque  ces  choses  manquent,  il  faut  les  de- 
mandera Dieu  ;  mais  souvenez-vous  qu'il  vous 
ordonne  de  chercher  premièrement  le  royau- 
me et  la  justice  de  Dieu,  et  qu'il  vous  promet 
toutes  ces  autres  choses  comme  par  surcroît. 

vsg.ic.66.     Les  auties  conditions  de  la  prière  sont  do 


i.-l!) 


pardonner  ;'i  nos  ennemis,  et  de  prier  mémo 
pour  eux,  (juelques  dommages  iju'ils  nous 
aient  caus(''s.  »  11  pronoinja  la  vingt-huitième 
homélie  dans  l'église  des  saints  martyrs  Né- 
rée  et  Acliillée,  le  jour  de  leur  tète.  L'évan- 
gile qu'on  y  lisait  était  tiré  du  quatrième  cha- 
pitre d(!  saint  Jean,  où  nous  lisons  ipie  le  fils 
d'un  ollicier  fut  guéri  ù  Gapharnaùm  par  la 
parole  seule  de  Jésus-Christ,  quoiqu'absent. 
Saint  Grégoire  demande  pourquoi  le  Sauveur, 
invilé  d'aller  guérir  ce  malade,  refuse  d'y 
aller,  au  lieu  qu'il  ne  fit  aucune  dilUculté  de 
se  transporter  dans  la  maison  du  Centenier 
pour  rendre  la  santé  à  son  serviteur.  Il  ré- 
pond que  Jésus-Christ  en  a  usé  ainsi, pour  cou- 
foudre  notre  orgueil,  qui  fait  que  nous  respec- 
tons dans  les  hommes,  non  l'image  de  Dieu, 
mais  les  honneurs  et  les  richesses,  au  lieu  que 
nous  devrions  considérer  ce  que  nous  som- 
mes, et  non  pas  ce  que  nous  avons.  Pour  don- 
ner à  ses  auditeurs  du  dégoût  du  monde  et 
de  ses  vanités,  il  fait  une  vive  description 
des  calamités  dont  les  provinces  étaient  aflli- 
gées,  et  de  l'inconstance  des  biens  et  des 
plaisirs  du  siècle. 

6.  La  vingt-neuvième  est  une  explication 
de  l'évangile  qu'on  litle  jourde  l'Ascension. 
Jésus-Christ,  avant  de  monter  au  ciel,  or- 
donna à  ses  apôtres  d'aller  prêcher  l'Evangile 
à.  toutes  les  créatures.  «  Il  ne  prétendait  pas 
sans  doute  qu'ils  dussent  l'annoncer  à  des 
bêtes  brutes  ou  à  des  choses  insensibles; 
mais,  parce  que  toutes  les  créatures  qui  sont 
dans  le  monde  ont  été  faites  pour  l'homme, 
et  qu'il  n'y  a  point  de  créature  qui  n'ait  quel- 
que chose  de  commun  avec  l'homme,  sous  le 
nom  général  de  créatures,  Jésus-Christ  a  en- 
tendu l'homme.  Il  peut  aussi  avoir  eu  en 
vue  les  gentils;  cai-  après  avoir  dit  à  ses 
apôtres  :  N'allez  point  vers  les  gentils,  il 
leur  commande  de  prêcher  sans  distinction 
à  toutes  les  créatures,  juifs  ou  gentils.  »  La 
trentième  est  sur  l'évangile  de  la  fête  de  la 
Pentecôte.  Saint  Grégoire  y  explique  com- 
ment le  Saint-Esprit  descend  sur  nous,  com- 
ment il  demeure  en  nous,  eu  quelle  manière 
il  prie  pom- nous,  comment  il  nous  enseigne 
intérieurement.  «  D'une  même  '  substance 
avec  le  Père  et  le  Fils,  il  est  dit  qu'il  prie  pour 
les  pécheurs,  parce  qu'il  les  fait  prier,  en  leur 
en  inspirant  le  désir  et   la  volonté.  Il  vient 

'  Qui  ttniii»  substantiœ  cuni  Paire  et  Filin  exo- 
rari-  pro  delinqxn  nlibus  perhihetur,  quia  eos  quos 
rcpkl  cToranles  faiil.  Ilom.  30,  pag.  157li, 


Uorn.  29, 
30, :jl, 32,3:1, 
3^,  pat;,  13  9. 


14,  «te. 


400  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


I.  i:..r.   Il 
i  cl  !iq. 


dans  le  cœur  de  quelques-uns,  mais  il  n'y  de- 
meure pas;  p.nrce  que,  contrits  de  leurs  pè- 
ches, ils  le  reçoivent  avec  respect;  le  temps 
de  la  teutalion  vient,  ils  oublient  leurs  bons 
propos ,  ils  retombent  dans  leurs  pëcliés,  le 
Saint-Esprit  se  retire.  »  Il  fait,  d'après  saint 
Paul,  le  dt-nombroment  des  dons  du  Saint- 
Esprit  ;  et  pour  montrer  de  quelle  force  et 
de  quel  courage  les  apôtres  furent  remplis 
après  l'avoii'reru,  il  éiablit  un  parallèle  de  ce 
que  saint  Pierre  fut,  lorsqu';\  la  parole  d'une 
servante,  il  renia  Jésus-Christ,  et  de  ce  qu'il 
était  lorsqu'il  dit  avec  fermeté  aux  magistrats 
des  Juifs,  qui  voulaient  l'empêcher  de  prê- 
cher l'Évaii.uile  :  «  Il  faut  plutôt  nb('irà  Pieu 
qu'aux  hommes.  »   La  trente-ct-unième  est 
Luc.iiii.f.  sur  la  parabole  du  Gguier.    «  Le  père  de  fa- 
mille, étant  "venu  trois  ans  de  suite  pour  y 
chercher  du  fruit,  et  n'y  en  trouvant  point, 
ordonna  de  le  couper.  Ces  trois  années  peu- 
vent siguifier  les  trois  états  ou  âges  dilTércnts 
dans  lesquels  Dieu  a  fait  connaître  aux  hom- 
mes ce  qu'ils  lui  devaient,   et  ce   qu'ils  de- 
vaient à  leur  prochain,   sans  que  la  plupart 
aient  fait  ni  l'un  ni  l'autre  avant  la  loi,  sous 
la  loi  et  sous  la  grâce.  Il  les  a  instruits  avant 
la  loi.  par  la  connaissance  naturelle;  sous  la 
loi,  en  leur  donnant  des  préceptes  par  le  mi- 
nistère de  Moïse;  sous  la  grâce,  en  les  ins- 
truisant lui-même.  »  Saint  Grégoire  explique 
dans  la  trente-deuxième,  qu'il  prononra  dans 
l'église  des  saints  Processc  et  Martinieu,  mar- 
tyrs, ce  que  c'est  que  de  renoncer  à  soi-mé- 
,1, 25.  me  pour  suivre  Jésus-Christ;  dans  la  trente- 
troisième,  qui  fut  prôchée  dans  l'église  de 
Saint-Clément  le  vendredi  des  quatre-temps 
Tii,  30.    de  septembre,  ce  qui  se  passa  pendant  le 
repas  que  le  pharisien  Simon  donna  k  Jésus- 
Christ.  Il  confond  encore  dans  celte  homélie 
la  femme  pécheresse  à  qui  ses  péchés  furent 
remis,  avec  Marie-Magdeleine,  sœur  de  La- 
zare et  de  Marthe.  11  remarque,  au  commen- 
cement de  la  trente-quatrième, qu'il  prêcha, 
le  troisième  dimanche  d'après  la  Pentecôte, 
dans  l'église  de  Saint-Jean  et  de  Saint-Paul, 
que  les  chaleurs  de  l'été  étaient  très-contrai- 
res ù  sa  santé,  ce  qui  l'empêchait  de  prêcher 
aussi   souvent   qu'il   l'aniait   souhaité.   Ses 
forces  étant  revenues,  il  fil  un  assez  long 
"■•  '•    discours  sur  l'évangile  de  ce  jour,  où  il  est 
dit  que,  les  publicains  et  les  gens  de  mauvaise 
vie  se  tenant  auprès  de  Ji'-sus  pourl'écouler, 
les  phaiisiens  cl  les  docteurs  de  la  loi  en 
niunnuraient.  Il  montre  que  ceux  qui  sont 
véritablement. justes,  sont  pleins  de  r (inqias- 


sion  pour  les  pécheurs,  mais  qu'ils  ne  lais- 
sent pas  de  les  traiter  avec  dureté,  lorsqu'ils 
les  voient  persévérerdansleurspc-chés.  Pour 
expliquer  ce  qui  est  dit  ensuite,  (ju'i/  y  mim 
plus  de  joie  dans  le  ciel  [tour  un  seul  jKcheur 
qui  fait  pénitence,  que  pour  quatre-vinqt-dix- 
neuf  jvMes  qui  n'en  ont  pas  besoin,  il  fait  la 
comparaison  <le  cette  joie  avec  celle  que  res- 
sent un  officier  lorsqu'il  voit  un  soldat,  après 
la  faiblesse  qu'il  a  eue  de  prendre  la  fuite, 
revenir  avec  ardeur  à  l'ennemi,  et  l'atta- 
quer avec  intn'pidité.  L'olHcier  reçoit  en 
cette  occasion  plus  de  plaisir  du  retour  d'un 
tel  soldat,  qu'il  n'en  a  de  la  constance  de 
ceux  qui  n'ont  jamais  lâché  pied.  Selon  saint 
Grégoire',  la  vraie  pénitence  consiste  à  pleu- 
rer ses  péchés,  et  à  n'en  plus  commettre  ; 
car  celui  qui  pleure  ses  péchés  passés,  et  qui 
en  commet  de  nouveaux,  ou  ne  fait  pas  une 
vraie  pénitence,  ou  ne  sait  en  quoi  elle  con- 
siste. Euetlet,  que  sert-il  de  renoncer  <i  la 
volupté,  si  on  se  livre  à  l'avarice?  Il  rapporte 
la  conversion  et  la  pénitence  d'un  homme  fort 
riche,  nommé  Yictorin,  qui,  après  avoir  pleuré 
continuellement  ses  péchés  dans  la  retraite 
pendant  plusieurs  années,  entendit,  comme 
il  était  en  prières,  une  voix  du  ciel  qui  lui  dit 
que  ses  péchés  lui  étaient  l'cmis. 

7.Saint  Grégoire  prêcha  la  trente-cinquième 
homélie  dans  l'église  de  saint  Mennas,  mar- 
tyr. Il  y  explique  toutes  les  persécutions  que 
les  prédicateurs  de  l'Évangile  et  les  défen- 
seurs de  la  vérité  devaient  soulfrir  de  la  part 
des  ennemis  de  Jésus-Christ,  selon  qu'il  est 
rapporté  dans  le  vingt-et-unième  chapitre  de 
saint  Luc;  mais  il  remarque  que  le  Sauveur, 
en  les  avertissant  de  ce  qu'ils  auraient  i\  souf- 
frir, les  assurait  de  son  secours,  en  promet- 
tant de  leur  donner  une  sagesse  i'i  laquelle 
personne  ne  pourrait  résister,  et  qu'il  appor- 
tait un  grand  adoucissement  à  le\n' peine  par 
l'espérance  de  la  résurrection.  Il  dit  à  ses  au- 
diteurs, qu'encore  que  l'Église  fût  en  paix, 
ils  avaient  lieu  de  mériter  la  couronne  du 
martyre,  non  en  répandant  leur  sang,  mais 
en  souHVant  les  injures,  en  aimant  ceux  dont 
ils  étaient  haïs,  en  recevant  avec  patience 
tous  les  événements  fâcheux.  Il  donne  pour 
exemple  de  patienceuuabbé  nonnné' Etienne, 
des  environs  de  Uiéti,  qui,  après  avoir  re- 
noncé   A   tout  ce  qu'il  possédait  dans  le 


'  Pœiiilentidm    ngerc  est,  cl  perprirata  mala 
pliiiigrrc,  cl  plniiijeiiild  non  pcrpclrtire.  llnni.  31, 


Luc.  \v,  R. 


l'a;.  leiK. 


noni6lln5 
M,  3f..  31,  a», 
S9  rt  (0,  pi|  ■ 
1612. 


CHAPITRE  XLIX.  —SAINT  GRliGOIRE  LE  GRAND,  PAPE. 


Mail.-^xt,!. 


Pas<  I6t2. 


[vu"  SIKCLE.] 

monde,   s'exerça   tellement  à  celte  vertu, 

qu'il  comptait  pour  ses  amis  tous  ceux  qui 
lui  t'aisaioul  quelques  iiisuUes.  Dans  la  tieulc- 
sixicuie  liomi'lie,  qui  est  pour  le  second  di- 
manche d'après  la  Pentecôte,  il  donne  l'ex- 
plication de  la  parabole  des  conviés  qui  s'ex- 
cusent de  V(Miir  au  festin  du  pon;  de  famille, 
lien  fait  dois  classes,  mettant  dans  la  pre- 
mière les  avares,  dans  la  seconde  les  curieux, 
dans  la  troisième  les  voluptueux  ;  il  distin- 
gue aussi  ceux  qui  vinrent  au  feslin  après  y 
avoir  élé  invités,  de  ceux  que  l'on  '  força  d'y 
venir.  Il  entend  par  ces  derniers,  ceux  à  l'é- 
gard desquels  Dieu  use  de  différentes  afflic- 
tions pour  les  détacher  des  plaisirs  et  des 
honnems  du  monde,  qu'ils  aiment  avec  trop 
d'ardeur;  iljes  frappe  par  l'adversité,  il  per- 
met qu'ils  languissent  dans  de  longues  ma- 
ladies, qu'ils  se  laissent  abattre  par  les  in- 
jures, alln  que,  convrJncus  par  eux-mêmes 
que  le  monde  n'est  qu'affliction  et  qu'incons- 
tance, ils  se  repentent  de  s'y  être  attachés, 
et  se  convertissent  à  Dieu.  Dieu  nousaiipelle 
en  ditférentcs  manières,  par  lui-même,  par 
ses  anges,  par  les  patriarches,  par  les  pro- 
phètes, par  les  apôtres,  par  nos  pasteurs,  par 
nous-mêmes,  quelquefois  par  des  miracles, 
souvent  par  des  tribulations,  d'autres  fois 
par  la  prospérité,  d'autres  fois  par  l'adver- 
sité. Que  personne  ne  méprise  sa  vocation, 
de  peur  qu'après  s'être  excusé  d'eutrerdans 
la  salle  du  festin,  la  porte  ne  lui  en  soit  fer- 
mée quand  il  voudra  y  venir.  La  trente-sep- 
tième fut  prêchée  dans  l'église  de  saint  Sé- 
bastien, au  jour  de  sa  fête.  Saint  Grégoire  en 
emploie  une  bonne  partie  à  faire  l'éloge  de 
Cassius,  évèque  de  A'arni,  qui  vivait  avec 
tant  de  pureté,  qu'il  offrait  presque  chaque 
jour  le  saint  sacrifice,  s'otlVant  lui-même  à 
Dieu  à  la  même  heure  avec  tant  de  componc- 
tion, qu'il  fondait  en  larmes.  H  explique  de 
l'Église  ce  qui  est  dit  des  noces  qu'un  roi 
m  de  son  fils.  Dans  son  sein,  comme  dans  la 
salle  du  festin,  se  trou\ent  des  bons  et  des 
mauvais;  des  personnes  qui  ont  la  robe  nup- 
tiale, d'autres  qui  n'enont  point,  c'est-à-dire 
qui  sont  privées  de  la  charité,  qui  est  appelée 
robe  nuptiale,  parce  que  c'est  par  la  charité 
seule  que  le  Fils  unique  de  Dieu  s'est  uni  les 
âmes  des  élus.  C'est  le  sujet  de  la  trente-hui- 
tième homéhe,  où  saint  Grégoire  prouve  par 
des  exemples  tirés  de  sa  propre  famille,  qu'il 

'  Quidam  vero  sic  locantur,  ul  etiain  compel- 
lantur.  IIom.SG,  in  Eoang. 


401 

y  a  beaucoup  d'appelés,  mais  peu  d'élus.  La 
trente-neuvième  contient  l'exiilicalion  des 
malheurs  que  J''sus-Chris[  prcjdit  à  Jérusa- 
lem, aprèsipi'il  l'eut  regardée  eu  pleurant  sur 
elle.  Saint  Grégoire  ne  s'étend  que  peu  sur 
le  sens  de  la  lettre,  qui  était  connu  de  Ions 
ceux  qui  savaient  que  cette  ville  avait  été  dé- 
truite par  Vespasien  et  Tite;  mais  il  s'étend 
sur  le  sens  moral,  considérant  dans  la  ruine 
de  Jérusalem  celle  des  hommes  charnels, 
qui,  tout  occupés  des  plaisirs  sensibles,  ne 
prévoient  point  les  maux  dont  ils  sont  mena- 
cés, et  ne  font  point  attention  aux  ditférentes 
manières  dont  Dieu  les  visite  pour  les  enga- 
ger ;\  rentrer  dans  les  voies  du  salut.  La 
quarantième  est  une  explication  de  la  para- 
bole du  mauvais  riche  et  de  Lazare.  «  L'Évan- 
gile ne  marque  point  le  nom  de  ce  riche, 
mais  seulement  celui  du  pauvre  ,  contraire- 
ment aux  usages  du  monde,  où  l'on  connaît 
beaucoup  plus  les  noms  des  riches  que  ceux 
des  pauvres.  Il  n'en  est  pas  de  même  de  Dieu, 
qui  connaît  les  humbles,  et  qui  ne  connaît 
pas  les  supei'bes.  Peut-être  que  ce  mauvais 
riche  aurait  pu  s'excuser  de  n'avoir  pas  sou- 
lagé Lazare,  s'il  ne  l'eut  pas  vu  exposé  sous 
ses  yeux,  et  portant  le  fardeau  de  la  pauvreté 
et  de  la  misère  ;  mais  Dieu  voulut  exercer 
en  même  temps  deux  sortes  de  jugements, 
et  sur  le  même  sujet,  lorsqu'en  mettant  de- 
vant la  porte  du  riche  un  homme  si  couvert 
d'ulcères  et  si  nécessiteux,  il  aggravait  par 
cette  vue  même  la  condamnation  de  celui  qui 
n'avait  aucune  pitié  de  son  frère,  et  qu'en 
exposant  tous  les  jours  aux  yeux  du  pauvre 
cet  homme  riche  et  impitoyable,  il  mettait 
sa  vertu  de  plus  en  plus  à  l'épreuve  :  car 
quelle  tentation  n'est-ce  pas  pour  un  pauvre 
qui  meurt  de  faim,  de  voir  devant  ses  yeux 
un  homme  riche,  qui  vit  dans  les  délices  et 
dans  l'abondance?  Mais,  par  un  juste  juge- 
ment de  Dieu,  il  arriva  un  changement  bien 
étrange  ;  le  riche  devint  le  suppliant  de  La- 
zare, et  il  put  à  son  tour  envier  la  table  de  ce 
pauvre,  lui  qui  l'avait  vu  auparavant  souf- 
frant de  la  faim  et  accablé  de  misère  couché  à 
sa  porte.  Ce  riche,  qui  avait  refusé  de  donner 
les  miettes  qui  tombaient  de  sa  table,  désire 
à  son  tour  une  goutte  d'eau,  et  ne  peut  l'obte- 
nir. »  Saint  Grégoire  veut  que  les  riches  trem- 
blent au  milieu  de  leur  prospérité  temporelle, 
de  peur  qu'elle  ne  soit  toute  la  récompense 
qu'ils  aient  à  attendre,  et  que  le  souverain 
Juge,  qui  leur  accorde  en  ce  monde  les  biens 
extérieurs,  ne  les  prive  des  intérieurs  dans 


Lue.  XIX, 


Luc.  XVI, 


Pjj.  IC5: 


463 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEl"RS  ECCLËSIASTIOFES. 


DiseoDMfnr 

la       RIATUitU, 

1^.  lUI. 


Ex0Cli|p|, 

lXXtll,ll. 


l'antre;  que  nous  cherchions  dans  les  pan- 
\Tes,  en  leur  faisant  l'anitK'ine,  des  interces- 
seurs auprès  de  Dieu  ;  que,  s'il  y  on  a  quel- 
ques-uns d'entre  eux  dont  les  mœurs  sont 
rcprëhensibles,  ce  n'est  pas  un  motif  pour 
leur  refuser  la  nourriture  dont  ils  ont  be- 
soin, mais  une  raison  de  les  aider  encore 
d'une  antre  manière,  en  les  corritjeant  de 
leurs  d(5fauts  par  de  salutaires  rt^primandes. 
8.  On  a  mis  A  la  suite  desliomt-iies  surles 
évangiles,  celle  que  saint  Gréifoire  fit  au  peu- 
ple de  Home  en  590,  quelques  jours  après  la 
mort  du  pape  Pelage  :  la  peste  qui  l'avait 
emporlf'-  continuait  de  sévir  avec  une  grande 
violence.  Saint  Grégoire  composa  sur  ce  su- 
jet un  discours  que  saint  Grégoire  '  de  Tours, 
Jean  et  Paul  Diacre  nous  ont  conservé.  Il 
commence  ainsi  :  «  Nous  devons  craindre  du 
moins  les  lléaux  de  Dieu  lorsque  nous  les 
sentons,  puisque  nous  n'avons  pas  su  les  pré- 
venir lorsque  nous  en  étions  menacés.  Que 
la  douleur  qu'ils  nous  causent  nous  ouvre  la 
porte  à  une  vraie  conversion,  et  que  la  peine 
que  nous  endurons  brise  la  dureté  de  nos 
cffiurs.  Voilà  que  tout  le  peuple  est  frappé 
du  glaive  de  la  colère  de  Dieu,  et  que  tous 
sont  enlevés  par  une  mort  subite.  Elle  n'at- 
tend pas  la  maladie,  et  ne  donne  pas  au  ma- 
lade le  temps  de  languir  ;  elle  prévient  et 
enlève  le  pécheur,  sans  lui  laisser  le  loisir  de 
recourir  aux  larmes  de  la  pénitence.  Con- 
sidérez en  quel  état  celui-là  parait  devant  le 
Juge  terrible,  qui  n'a  pas  eu  le  temps  de  pleu- 
rer ses  péchés.  Ce  n'est  pas  une  partie  des 
habitants  qui  périt  ;  tous  tombent  à  la  fois, 
les  maisons  demeurent  vides,  les  pères  et 
les  mères  voient  mourir  leurs  enfants  ;  ceux- 
ci,  contre  l'ordre  naturel,  meurent  avant  ceux 
dont  ils  devaientétre  les  hérétiers.  Recourons 
donc  aux  gémissements  de  la  pénitence,  tan- 
dis que  nous  pouvons  expier  nos  fautes,  sans 
attendre  le  moment  d'être  frappés.  Rappe- 
lons-nous le  souvenir  de  nos  égarements,  et 
e(l'arons-les  par  l'amertume  de  nos  larmes. 
Celui  qui  crie  par  la  Ijouclie  de  son  prophète  : 
Je  ne  veux  jmnt  la  mort  du  pécheur,  ninis  je 
demande  ijv' il  reconvertisse  et  qu'il  vive,  nous 
l'ail  naiire  la  confiance  au  milieu  de  nos  crain- 
tes. Que  personne  donc  ne  désespère  à  cause 
de  l'énormité  de  ses  crimes  :  une  pénitence 
de  trois  jours  a  suffi  pour  effacer  les  péchés 


dans  lesquels  les  Ninivites  avaient  vieilli  ;  le 
larron  effaça  les  siens  à  l'heure  même  de  sa 
mort.  Celui  qui  nous  avertit  de  l'invoquer, 
nous  fait  assez  connaître  qu'il  veut  pardon- 
ner à  ceux  qui  l'invoquent.  »  A  la  suite  de  ce 
discours,  saint  Grégoire  ordonna  des  litanies 
ou  processions  générales,  et  la  cessation  de 
tous  les  travaux  de  la  campagne  et  de  tout 
commerce  pour  le  mercredi  suivant. 

§IV. 
Du  Pastoral  de  saint  Grrégoire. 

i.  Aussitôt  que  saint  Grégoire  eut  été  élu 
pape ,  plusieui-s  de  ses  amis  lui  écrivirent 
pour  l'eu  féliciter.  Jean,  archevêque  de  Ra- 
venue  ,  mêla  à  ses  compliments  des  repro- 
ches' sur  ce  qu'il  s'était  caché  pour  éviter 
l'épiscopal,  lui  qui  avait  tant  de  talents  pour 
en  remplir  dignement  les  fonctions.  Ces  re- 
proches donnèrent  occasion  à  saint  Grégoire 
de  composer  un  ouvrage  sur  le  devoir  des 
évêques,  où,  en  expliquant  ce  qu'il  pensait 
sur  la  grandeur  et  l'importance  de  leur  char- 
ge, il  justifie  sa  résistance  à  l'accepter.  C'est 
le  Pastoral,  si  célèbre  depuis  dans  toutes  les 
églises  d'Orient  et  d'Occident.  Saint  Léan- 
dre,  évêque  de  Séville,à  qui 'saint  Grégoire 
l'envoya,  le  baisa  en  le  recevant ,  et  le  ren- 
dit public  dans  toute  l'Espagne.  L'empe- 
reur Maurice  en  demanda  une  copie  à  Ana- 
tolius,  diacre  de  l'église  Romaine,  nonce  à 
Constanlinople,  qu'il  fit  traduire  en  grec  par 
Anastase ,  patriarche  d'Antioche  :  ce  qui  le 
rendit  commun  en  Orient.  Alfred,  roi  d'An- 
gleterre ,  sacré  à  Rome  en  872  ,  le  traduisit 
en  langue  saxonne  pour  les  Saxons  occiden- 
taux qui  étaient  sous  sa  domination,  croyant 
leur  faire  en  cela  un  grand  présent,  comme 
on  le  voit  par  la  préface  qu'il  mit  à  la  tôle 
de  sa  traduction,  dont  on  montre  encore  des 
exemplaires  dans  les  bibliothèques  d'Angle- 
terre. La  version  grecque  d'Anastase  ne  sub- 
siste plus.  Il  semble  même  que  Photius', 
qui  écrivait  dans  le  ix"  siècle,  ne  la  connais- 
sait pas,  puisque,  en  donnant  de  gr-inds 
éloges  au  pape  Zachaiie  pour  avoir  fait  tra- 
duire en  grec  les  Dialogues  de  saint  Grégoi- 
re et -plusieurs  antres  livres  il  ne  dit  rien  de 
la  traduction  du  Pastoral.  On  le  proposa 
après  les  saintes  Écritures  et  les  canons  des 


P«»toril 
6erit  ta  t-9fl. 
Estime  qu'où 
CD  f>ll. 


'  Crcg.,  Tiiron.,  lit).  X,  cnp.  i  ;  l'aulus  Diacou., 
lili.  ill  Uisl.  Longobard.,  cap.  xxv;  Joan.  Uiacon., 
lil).  I,  nuuL.  42. 


«  <iri(.'.,  Kpisl.  ad  Lcaiidrum,  pog. 

'  Priifnl.  cditor. 

»  l'bot.  Cad.  :i52,  pag.  1399. 


CIIAIMTRE  XI.IX.  —  SAINT  GRI^COITIE  LE  fiRANn,  PAPE. 


Analyse  de 
la      preiiiiôro 

Ïarlii',      toiii. 
I,  fag.  I. 


Cap.  I. 


Oiéc,  V,  1, 


Cap.  ITT. 


[vil*  siftrxF..] 

coiuilos,  dans  le  concile  de  Mayonco,  eu 
81.'{',  h  tous  les  évoques,  pour  y  apprendre 
la  manière  de  conduire  leurs  églises  el  leurs 
peu|)les.  Celui  de  lleims  de  la  même  année; 
fit  lire  h  haute  voix  [)lusieiii's  endroits  du 
Pastoral,  afin  que  les  pasteurs  de  cette  égli- 
se sussent  comment  ils  devaient  vivre  et 
avertir  ceux  ijui  étaient  sous  leur  conduite. 
Les  évèques  du  troisième  concile  de  Tours 
ne  croyaient  pas  qu'il  leur  fût  plus  permis 
d'ignorer  le  Pastoral  que  les  canons.  Aussi, 
Hincmar- ,  archevêque  de  Reims  ,  dit  que 
de  son  temps  ,  lorsqu'on  ordonnait  les  évè- 
ques, on  leur  mettait  ce  livre  entre  les  mains, 
ainsi  que  le  code  des  sacrés  canons,  et  ((u'on 
leur  faisait  promettre  de  l'observer.  Saint 
Grégoire  dit  i[u'il  l'écrivit  au  commencement 
de  son  ponlilicat,  c'est-à-dire  en  590. 

2.  Il  le  divisa  en  quatre  parties,  dont  la 
première  est  sur  la  vocation  à  l'épiscopat,  afin 
que  celui  qui  y  est  appelé,  examine  avec  quel- 
les dispositions  il  y  vient;  la  seconde,  sur  les 
devoirs  d'un  pasteur  appelé  légitimement  au 
sacerdoce  ;  la  troisième,  sur  les  Instructions 
qu'il  doit  donner  à  son  peuple;  et  la  qua- 
trième, sur  les  fréquentes  réllexions  qu'il  est 
obligé  de  faire  sur  sa  propre  conduite,  pour 
s'humilier  des  fautes  qu'il  peut  avoir  commi- 
ses dans  le  gouvernement  des  âmes. 

3.  <c  S'il  n'est  point  permis  à  un  homme 
d'enseigner  un  art  qu'il  n'a  point  appris, 
quelle  témérité  ne  serait-ce  point  à  un  igno- 
rant de  se  charger  du  ministère  pastoral,  vu 
que  le  gouvernement  des  âmes  est  l'art  des 
arts  et  la  science  des  sciences?  Les  pasteurs 
sont  les  yeux  des  peuples  :  si  ceux  qui  gou- 
vernent manquent  de  lumières,  ceux  qui  leur 
sont  soumis  ne  peuvent  que  tomber  dans 
l'égarement.  Il  s'en  trouve  quelques-uns  qui 
sont  instruits  dans  la  loi  du  Seigneur,  mais 
dont  les  mœurs  ne  répondent  point  à  leur 
savoir,  qui  détruisent  par  leurs  actions  ce 
qu'ils  établissent  de  bouche.  C'est  d'eux  qu'il 
est  dit  dans  un  prophète  :  Les  mauvais  pi'è- 
tres  sont  devenus  à  ceux  sur  qui  ils  étaient  obli- 
ges de  veille?-,  ce  que  sont  les  fiiéges  aux  oi- 
seaux ;  parce  que  personne  ne  nuit  plus  dans 
l'Eglise,  que  celui  qui,  vivant  mal,  retient  un 
nom  et  un  rang  qui  ne  conviennent  qu'cà  une 
vie  sainte.  Jésus-Christ,  qui  était  venu  non- 
seulement  pour  nous  racheter,  mais  aussi 
pour  nous  enseigner,  nous  a  appris,  en  fuyant 
la  royauté  que  les  hommes  lui  otlraient,  à 


fuir  les  faveurs  et  les  grandeurs  du  siècle; 
et  en  allant  volontiers  â  la  croix,  ;\  aimer  les 
adversités.  L'homme  s'oublie  dans  les  gran- 
deurs et  dans  la  ])rosp(;rité;  il  icvient  ;'i  lui- 
même,  (piand  il  se  trouve  dans  l'abjection  el 
dans  les  disgrâces.  Saiil,  à  qui  la  considéra- 
tion de  sa  propre  indignité  avait  fait  fuir  la 
(jualité  de  roi,  ne  Itifiit  pas  plus  lot,  que  son 
c(eur  s'entia  d'orgueil.  Dès  que  David  ne  fut 
plus  dans  l'allliction,  il  s'oublia  jusqii'h  faire 
mourir  le  mari  d'une  femme  pour  laquelle  il 
avait  conçu  un  amour  criminel.  La  multitude 
des  occupations  inséparables  de  la  charge  de 
pasteur  distrait  souvent  son  esprit  jusqu'à 
un  tel  point,  que,  se  troublant  et  se  confon- 
dant, il  se  trouve  hors  d'état  de  bien  faire 
chacune  en  [)articulier.  Celte  distraction  ex- 
térieure lui  fait  môme  oublier  ce  qui  se  passe 
au  dedans  de  lui;  il  pense  h  tout,  excepté  à 
lui-même.  Embarrassé  de  tant  d'occupations 
qu'il  rencontre  en  son  chemin,  il  ne  se  sou- 
vient plus  de  l'objet  vers  lequel  elles  doivent 
tendre.  Cessant  ainsi  de  chercher  Dieu  qui 
était  sa  fin,  en  acceptant  l'épiscopat,  il  ne 
fait  plus  de  réflexions,  ni  sur  ses  pertes,  ni 
sur  ses  fautes.  »  Voilà  ce  que  dit  saint  Gré- 
goire, pour  ôter  aux  imparfaits  la  présomp- 
tion d'entrer  dans  des  charges  qu'ils  ne  pour- 
raient remplir,    et  à    ceux  qui  chancellent 
dans  les  heux  même  les  plus  unis,  le  désir 
de  s'engager  à  marcher  sur  le  bord  d'un  pré- 
cipice. Mais  il  y  en  avait  d'autres  à  qui  l'a- 
mour du  repos  faisait  fuir  la  conduite  des 
âmes,  dont  toutefois  ils  étaient  capables  par 
leurs  talents  el  par  la  pureté  de  leur  vie.  Il 
dit  à  ces  derniers  que,  n'ayant  pas  reçu  de 
Dieu  ces  talents  pour  eux  seuls,  mais  aussi 
pom-  les  autres,  ils  se  privent  eux-mêmes, 
en  ne  songeant  qu'à  leur  utilité  particulière, 
des  biens  qu'ils  voulaient  s'approprier  à  l'ex- 
clusion de  toute  autre  personne.  «  Si  Jésus- 
Christ  demanda   à  saint  Pierre  pour  preuve 
de  son  amour,  qu'il  prît  le  soin  de  paître  ses 
brebis;   comment  ceux   qui,   possédant  les 
vertus  nécessaires  à  cet  emploi,  refusent  de 
s'en  charger,   peuvent-ils  se  flatter  d'aimer 
celui  qui  en  est  le  souverain  pasteur?  Des 
pei'sonnes  de  ce  caractère  se  rendent  aussi 
coupables  en  se  refusant  au  saint  ministère, 
qu'ils  auraient  pu  faire  de  profit  en  l'accep- 
tant. Ceux  qui  refusent  d'y  entrer  par   un 
sentiment   d'humilité,   s'ils   sont   véritable- 
ment humbles  aux  yeux  de  Dieu,  n'iront  pas 


Cili.  IV. 


JOjTI,  <ï,  IC, 


Cap.  VI. 


Prœf.  edU. 


Hiutmur,  Prwfat.  in  opuscula. 


HISTOIUE  GÉXÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Cap.  riii. 


I   ïl  noUi. 
m,   I. 


464 

jusqu'à  refuser  opiniâtrement  les  charges 
dont  ils  peuvent  s'acquiller  avec  succès  : 
car  on  ne  doit  point  regarder  comme  vrai- 
ment humble  celui  qui,  connaissant  que  Dieu 
l'appelle  ii  la  conduite  des  âmes,  méprise 

c.p.  TU.  son  ordre  en  refusant  de  s'y  soumettre.  11  y 
en  a  même  en  qui  on  ne  peut  Màmer  le  dé- 
sir du  ministère  de  la  prédication.  Si  Jéré- 

ji«,n. .,  6.  mie,  étant  envoyé  de  Dieu,  se  défendit  hum- 
blement d'aller  où  on  l'envoyait,  sur  sa  dif- 
ficulté de  parler,  et  sur  ce  qu'il  n'était  encore 

i»i.v.,8.  qu'un  enfant;  Isaïe,  au  contraire,  voyant 
Dieu  en  peine  de  trouver  un  homme  pour 
l'envoyer  prêcher,  se  présenta  devant  lui, 
en  disant».  Me  voici,  envoyez-moi.  Moïse  re- 
fusa d'abord  la  conduite  du  peuple  de  Dieu, 
en  ne  considérant  que  sa  propre  faiblesse  ; 
mais,  s'appuyant  depuis  sur  le  secours  de 
celui  cpii  lui  commandait,  il  se  soumit  avec 
humilité.  « 

4.  A  ceux  qui,  ne  cherchant  dans  l'épisco- 
pat  qu'à  satisfaire  leur  ambition,  s'autori- 
saient de  ces  paroles  de  saint  Paul  :  Si  quel- 
qu'un dcsire  l'épiscoput,  il  désire  une  fonction 
sainte,  saiut  Grégoire  répond  :  saint  Paul, 
après  avoir  loué  ceux  qui  ont  ce  désir,  les 
épouvante  aussitôt,  en  ajoutant  qu'il  faut 
qu'un  évèque  soil  impréhensihlc ;  il  louait  le 
désir  de  l'épiscopat  dans  un  temps  où  les  évo- 
ques étaient  les  premiers  que  l'on  conduisait 
au  martyre;  ainsi  celui  qui  ne  souhaite  pasl'é- 
piscopatdans  le  dessein  de  travailler  pour  la 
gloire  de  Dieu,  mais  seulement  en  vue  d'être 
honoré  des  hommes,  ne  recherche  pas  l'épis- 
copat dont  parle  l'apôtre.  «  En  ell'et,  ajoute  le 
saint  Pape,  on  ne  peut  pas  dire  que  ce  soit 
aimer  le  sacré  ministère  en  hi  manière  dont 
saint  Paul  l'entend,  que  de  n'y  chercher  qu'à 
dominer  sur  les  autres,  qne  de  vains  hon- 
neurs, que  l'abondance  de  toutes  choses.  Ce 
Père  découvre  l'ilhision  dans  hujiiellc  tom- 
bent la  plupart  de  ceux  qui  désirent  les  char- 

c>p.  II.  ges  ecclésiastiques.  «  Ils  se  flattent,  en  les  re- 
cherchant, de  la  fausse  vue  du  bien  qu'ils 
se  proposent  d'y  faire;  mais  ce  n'est  qu'un 
voile  dont  ils  couvrent  leur  ambition  se- 
crète; ils  s'imapinent  aimer  dans  une  bonne 
action  ce  qu'ils  n'y  aiment  point  véritable- 
ment :  d'où  vient  qu'aussitôt  qu'ils  ont  ob- 
tenu ce  qu'ils  souhaitaient,  ils  oublient  aisé- 
ment toutes  les  belles  idées  du  bien  qu'ils 
s'étaient  proposés  de  faire.  Le  remède  à 
celte  illusion  est  de  se  juger  soi-même  par 
les  actions  de  sa  vie  passée.  Celui  qui  n'a  pu 
se  conlenler  du  bien  qu'il  avait  tout  entier 


pour  lui  seul,  ne  pourra  vaincre  l'avarice, 
lorsqu'il  deviendra  le  dépositaire  des  biens  à 
employer  pour  le  soulagemeut  des  pauvres. 
La  maxime  générale  pour  le  saint  ministère, 
est  que  celui  qui  a  les  vertus  nécessaires  pour 
la  conduite  des  âmes,  l'accepte  quand  on  l'y 
force  ;  mais  que  celui  qui  ne  les  a  pas  ne 
s'y  laisse  jamais  engager,  quand  même  on 
l'y  voudrait  contraindre.  Mais  quel  est  celui 
que  l'on  peut  forcer  à  se  charger  de  la  con- 
duite des  autres? U  faut  que  ce  soit  un  hom- 
me d'une  vertu  éprouvée,  au-dessus  des 
avantages  et  des  disgrâces  du  siècle,  d'une 
complexion  assez  forte  poursoulenir  le  poids 
de  sa  charge,  libéral  envers  les  pauvres,  in- 
dulgent autant  que  l'équité  et  la  justice  le 
demandent,  compatissant  envers  les  faibles, 
assidu  à  la  prière,  et  exempt  de  toutes  les 
imperfections  figurées  par  les  défauts  corpo- 
rels qui,  suivant  la  loi  de  Moïse,  excluaient 
du  sacerdoce.  » 

5.  (1  Le  premier  soin  de  celui  qui  se  trouve 
élevé  à  l'épiscopat  par  les  voies  canoniques 
et  légitimes,  est  de  dégager  son  cœur  et  son 
espiit  des  créatures.  Soyez  pur,  dit  un  pro- 
phète, vous  qui  avez  à  porter  les  vases  du  Sei- 
gneur;  car  ceux-là  proprement  portent  les 
vases  du  Seigneur,  qui,  en  vivant  saintement, 
se  chargent  de  conduire  jusques  dans  les  ta- 
bernacles éternels  les  âmes  de  leurs  frères. 
Il  doit,  en  second  lieu,  exceller  au-dessus  de 
tous  les  autres  dans  la  pratique  des  vertus, 
afin  que  sa  vie  toute  sainte  soit  comme  une 
voix  continuelle  qui  enseigne  aux  autres  à 
bien  vivre.  La  parole  pénètre  le  cœur  bien 
plus  aisément,  lorsqu'elle  est  soutenue  par 
Iss  actions,  et  qu'en  même  temps  que  l'on 
prescrit  aux  autres  ce  qu'ils  doivent  faire  en 
les  instruisant,  on  leur  en  rend  la  pratique 
facile  par  l'exemple.  Comme  il  ne  doit  se 
proposer  clans  ses  discours  que  l'édification 
et  l'utilité  des  autres,  la  prudence  et  la  dis- 
crétion doivent  régler  ses  paroles  et  son  si- 
lence; non-seulement  il  ne  doit  rien  dire  do 
mauvais  à  ceux  à  qui  il  parle,  mais  ce  qu'il 
leur  dit  de  bon,  il  le  doit  dire  avec  mesure  et 
avec  ordre,  sans  ennuyer  ses  auditeurs  par 
la  longueur  indiscrète  de  ses  discours.  Il  doit 
tellement  s'abaisser  par  un  sentiment  de 
compassion  vers  ses  inférieurs,  qu'en  pre- 
nant soin  de  ceux  qui  sont  faibles,  il  ne  re- 
tranche rien  de  «on  apfilication  à  Dieu.  La 
contemplation  élevait  saint  Paul  jus(pi'au 
troisième  ciel;  sa  sollicitude  pastoiale  le  ra- 
baissait jusqu'à  régler  l'état  des  personnes 


Cip.  I. 


In  wcrn J"  p.r» 
Ut,  |jg.  U. 


Caj>.  1. 
I.al.  LU,  II. 


Dip.   M. 


Cap.  III. 


Cap.  IV, 


[vil»  SIÈCLE.]      CIIAPITIIE  XLIX.  —  SAINT  GRÉr.OIllE  LE  GRAND,  PAl'K. 


465 


encore  cbarnellcs.  S'il  arrive  qu'en  écoulant 
les  k-ntulluns  des  Ames  faibles,  il  eu  reijoivo 
liii-UH^nie  (|iielqno  impression,  il  ne  iaiil  puinL 
qu'il  se  trouble,  puisque,  par  un  ellet  de  la 
Providence,  il  sortira  d'autant  plus  aisément 
de  ses  propres  tentations,  que  sa  charité  le 
porte  A  écouter  celles  des  autres,  et;\  travail- 
ler à  les  eu  ilélivrcr.  Qu'il  re|,Mrde  comme 
ses  égaux  tous  ceux  qui  ,font  bien,  et  qu'il 
s'élève  avec  tout  le  zèle  que  la  justice  peut 
inspirer  contie  les  vices  de  ceux  qui  l'ont 
mal  :  c'est  ainsi  que,  sans  avoir  éf^ard  h 
l'honneur  qui  est  dû  à  sa  dignité,  il  vivra 
avec  les  bons  comme  avec  ses  égaux,  et 
qu'il  ne  craindra  pas  d'user  de  toute  l'auto- 
rité attachée  à  cette  même  dignité  contre 
ceux  dont  les  mœurs  sont  déréglées.  Il  est 
nécessaire  que  ceux  qui  gouvernent  se  fas- 
sent craindre  de  ceux  qui  leur  sont  soumis; 
mais  c'est  quand  ils  leconnaissent  qu'ils  ne 
craignent  pas  Dieu.  Saint  Pierre  ne  permet 
pas  à  Corneille  de  se  jeter  à  ses  pieds,  parce 
qu'il  savait  qu'il  était  bon  et  craignant  Dieu. 
Ix'cez-vous,  lui  dit-il,  ne  faites  point  cela,  je  ne 
suis  (ju'un  homme  comme  vous.  Mais,  lorsqu'il 
trouve  en  faute  Aaanie  et  Sapliire,  il  fait  écla- 
ter contre  eux  sa  puissance.  Le  pasteur  doit 
aimer  son  peuple,  mais  sans  mollesse  ;  il 
doit  le  reprendre,  mais  sans  aigreur;  il  doit 
avoir  du  zèle,  mais  sans  emportement;  il 
doit  avoir  de  la  douceur,  mais  sans  trop  d'in- 
dulgence. La  justice  et  la  clémence  doivent 
se  trouver  tellement  unies  en  lui,  qu'il  n'y 
ait  rien  dans  sa  fermeté  qui  ne  soit  capable 
de  gagner  ceux  qu'il  conduit,  et  rien  dans  sa 
douceur  qui  leur  puisse  faire  perdre  le  res- 
pect qu'ils  lui  doivent.  C'est  aux  séculiers  à 
régler  les  aû'aires  du  siècle  ;  l'occupation  du 
pasteur  a  un  objet  plus  relevé,  qui  est  le  sa- 
lut des  âmes.  11  peut  néanmoins  s'engager 
quelquefois  par  charité  et  par  compassion 
dans  les  affaires  séculières,  mais  ne  jamais 
témoigner  d'ardeur  pour  les  rechercher,  de 
peur  que  cet  empressement  ne  le  fasse  des- 
cendre de  la  contemplation  des  choses  les 
plus  relevées  à  l'atl'ection  des  plus  basses.  Il 
est  même  certaines  occasions  oii  les  pasteurs 
doivent  se  répandre  au  dehors  pour  procu- 
rer à  leurs  peuples  les  nécessités  de  la  vie 
présente  ;  ils  travaillent  alors  avec  plus  de 
succès  à  leur  avancement;  au  lieu  que  les 
peuples  auraient  quelque  droit  de  se  dégoû- 
ter de  la  parole  de  leur  pasteur,  s'il  négli- 
geait le  soin  qu'il  doit  avoir  de  les  secourir. 
6.  (I  Mais,  en  s'acquitlant  de  ses  fonctions, 
XI. 


il  ne  doit  point  se  laisser  toucher  du  désir 

de  |)laiic  aux  hommes,  parce  ()ue  celamonr- 
pro[ire  rengagerait  iurailliblciuonl  dans  des 
comlesccudances  basses  et  honteuses  ;  seu- 
lement il  doit  souhaiter  d'être  bien  dans  l'es- 
prit de  ses  peuples,  afwi  de  pouvoir  les  en- 
gager plus  aisément  à  aimer  la  vérit(;.  C'est 
danscettedisposilion(ju'était  saint  Paul,  lors- 
qu'il disait,  d'une  part,  qu'il  fâc/mit  de  plaire 
à  tons  en  toutes  choses  ;  et  de  l'autre,  que  s'il 
roulait  plaire  aux  hommes ,  il  ne  serait  [MS 
serviteur  de  Jésus-  Christ.  Il  y  a  des  fautes 
qu'il  faut  dissimuler  par  prudence,  mais  en 
faisant  connaître  qu'on  a  bien  voulu  les  dissi- 
muler, afin  que  ceux  qui  en  sont  coupables, 
se  voyant  ilétouveris,  aient  honte  de  retom- 
ber dans  les  mêmes  fautes.  Dieu  dissimula 
ainsi  les  crimes  de  la  Judée,  mais  en  lui  fai- 
sant connaître  qu'il  les  avait  vus.  Il  y  a  d'au- 
tres fautes,  même  toutes  visibles,  que  l'on 
doit  tolérer  à  cause  de  l'indisposition  de  ceux 
qui  les  commettent.  Une  plaie  que  l'on  ou- 
vre avant  le  temps,  devient  plus  dangereuse 
par  l'inllammation  que  celte  incision  y  cause. 
Un  remède  appliqué  à  contre-temps  devient 
inutile  ;  il  perd  toute  sa  force  et  sa  vertu.  Il 
y  a  des  fautes  secrètes  qu'il  faut  tâcher  de 
découvrir  avec  adiesse,  en  jugeant  de  ce 
qui  est  caché  dans  le  cœur  du  pécheur  par 
les  dehors  de  sa  conduite  ;  c'est,  suivant  le 
langage  de  l'Écriture,  percer  la  muiaille  ou 
co'ur,  y  faire  une  brèche  pour  y  découvrir 
les  abominations  qui  s'y  font.  11  y  a  d'antres 
fautes  que  l'on  doit  corriger  avec  douceur, 
parce  qu'elles  sont  des  fautes  ou  d'igno- 
rance ou  de  faiblesse.  Celles  qui  sont  de 
malice  demandent  des  corrections  rudes  et 
fortes,  afin  que  celui  que  l'on  instruit,  ne 
connaissant  pas  encore  l'énormité  de  sou 
péché,  la  comprenne  par  la  véhémence  de 
la  correction;  mais,  comme  il  est  ditUcile  de 
tenir  un  juste  milieu,  et  que  la  chaleur  de 
l'invective  porte  quelquefois  à  l'excès,  il  est 
nécessaire,  dans  ces  occasions,  que  le  pas- 
teur recoure  lui-même  au  remède  de  la  pé- 
uitence,  pour  obtenir  de  Dieu,  par  ses  lar- 
mes, le  pardon  des  fautes  que  le  zèle  pour 
la  défense  de  ses  intérêts  lui  a  occasionnées. 
Tous  ses  devoirs  étant  marqués  en  détail 
dans  les  Livres  saints,  il  ne  saurait  trop  les 
lire  et  les  méditer.  » 

7.  «Al'égard  des  instructions  qu'un  évoque 
doit  à  son  peuple,  il  est  nécessaire  qu'il  s'ac- 
commode et  se  proportionne  aux  qualités  et 
aux  dispositions  de  ceux  qui  l'écoutent;  au- 

30 


1.  Cor.  z, 


fî.llFtt.  f,  10. 


Isaî.  tni, 


Ezecliieli 

TIII,  S. 


Cap.  I. 


Trosièm» 
païUc,  pag. 
34. 


46G 


HISTOIRE  Gi':Ni':i\ALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIOCES. 


Cap. 


Cap.  III. 


Iicment  il  arriverait  que  ce  qui  profilerait 
:uix  nus,  serait  nuisible  aux  autres  :  au  lieu 
qu'en  se  proportionnant  à  leurs  besoins  et  à 
leur  portée,  chacun  trouve  dans  ses  instruc- 
tions ce  qui  lui  est  propre.  Autre  est  celle 
que  l'on  doit  donner  aux  hommes,  et  autre 
celle  qu'il  faut  donner  aux  femmes.  On  doit 
prescrire  aux  hommes  quelque  chose  d'as- 
sez grand  pour  exercer  leur  vertu,  et  aux 
femmes  cpielque  chose  de  facile,  pour  les 
gagner  à  i)ieu  par  la  douceur.  Une  correc- 
tion sévère  remet  les  jeunes  gens  dans  le 
bon  chemin  ;  un  avis  donné  avec  humilité 
aux  vieillards  les  fait  rentrer  dans  le  devoir. 
Les  pau\yes,  n'élant  que  trop  affligés  de  leur 
misère,  méritent  d"étre  consolés;  mais  les 
riches  étant  ordinairement  superbes,  il  faut 
les  rabaisser,  en  leur  donnant  de  la  crainte 
et  de  la  frayeur  ;  plus  ils  s'estiment  grands 
et  au-dessus  des  autres  h  cause  des  biens 
passagers  qu'ils  possèdent,  mieux  on  fait  de 
leurparieravec  empire  et  autorité.  Aussi  saint 
Paul  ne  dit  pas  à  son  disciple  Timothée  de 
prier  les  riches  de  n'être    point   oigueil- 
leux,  ni  mettre  leur  confiance  dans  leurs  i-i- 
chesses,  mais  de  le  leur  ordonner.  Ce  n'est 
pas  qu'il  ne  faille  quelquefois  user  envers 
eux  de  douceur,  comme  lorsque  l'esprit  d'or- 
gueil les  possède  si  fort,   qu'ils  en  devien- 
nent presque  fous.  On  peut  encore,  lorsqu'on 
veut  les  reprendre,  commencer  par  quel- 
ques paraboles  éloignées  ;  convaincus  sou- 
vent par  le  jugement  qu'ils  rendent  eux-mê- 
mes, ils  se  trouvent  engagés  à  changer  de 
conduite  :  c'est  ainsi  qu'en  usa  le  prophète 
Nathan  ù  l'égard  de  David ,  qu'il  était  ve- 
nu trouver  pour  le  reprendre  de  son  cri- 
me. La  tristesse  et  la  joie  peuvent  venir,  ou 
des  objets  qui  nous  frappent,  ou  de  l'hu- 
meur naturelle.  Si  l'on  a  donc  i\  instruire  des 
gens  gais,  il  faut  leur  représenter  la  tristesse 
profonde  que  cause  la  damnation  éternelle  ; 
aux  mélancoliques,  la  joie  parfaite  que  Dieu 
nous  promet  dans  son  royaume,  et  aux  uns 
comme  aux  autres,  que  les  inclinations  nalu- 
rellesn'étantpasfort  éloignées  des  vices,  ceux 
qui  sont  gais  doivent  appréhender  de  tomber 
dans  la  débauche;  les  mélancoliques,  dans  la 
colère.  L'instruction  qui  convient  à  ceux  qui 
sont  dans  la  dépendance,  ne  convient  pas 
toujours  h  ceux  qui  sont  dans  les  charges  et 
les  dij^nilés.  Recommandez   aux  premiers 
une  soumission  hnuililc,  une  obéissance  en- 
tière, le  tout  en  vue  du  Sri.LMicur;  cl  aux  se- 
conds, d'user  modérément  de  leur  autorité, 


de  ne  point  excéder  dans  leurs  commande- 
ments, et  de  ne  point  irriter  ceux  qui  leur 
sont  soumis  ;  à  ceux-là  de  prendre  garde  que 
la  vue  des  fautes  de  lem-s  supérieurs  ne  les 
porte  à  s'élever  contre  eux  avec  audace  ;  à 
ceux-ci,  d'être  vigilants  et  circonspects.  Di- 
tes aux  serviteurs  d'avoir  toujours  devant 
les  yeux  la  bassesse  de  leur  condition,  et 
aux  maîtres  de  se  souvenir  que  Dieu  ne  les 
a  point  faits  d'une  autre  nature  que  ceux 
qui  les  servent.  Exhortez  ceux  qui  sont  sa- 
ges selon  le  siècle  'i  oublier  ce  qu'ils  savent, 
pour  apprendre  la  science  des  saints;  et  ceux 
qui  sont  simples,  à  apprendre  ce  qu'ils  ne 
savent  pas,  et  h  se  seivir  de  leur  simplicité, 
que  le  monde  appelle  folie,  comme  de  la 
voie  la  plus  courte  pour  arriver  à  la  vraie 
sagesse.  Le  seul  moyen  de  réduire  des  per- 
sonnes d'une  humeur  hautaine  et  impudente, 
est  d'user  envers  elles  de  réprimandes  ai- 
gres et  fortes.  Il  n'en  est  pas  ainsi  de  celles 
qui  sont  retenues  et  modestes;  la  moindre 
parole  de  douceur  est  capable  de  les  faire 
rentrer  dans  leur  devoir.  Le  défaut  des  ar- 
rogants est  d'être  pleins  de  présomption  par 
rapport  à  eux-mêmes  et  du  mépris  pour  les 
autres  ;  celui  des  timides  est  de  ne  connaî- 
tre que  leur  infirmité ,  ce  qui  souvent  les 
jette  dans  une  espèce  de  désespoir.  On  peut 
corriger  les  premiers  en  leur  montrant  qu'ils 
ont  mal  fait  ce  qu'ils  croient  avoir  bien  fait, 
afin  qu'au  lieu  de  la  gloire  qu'ils  pensent 
avoir  méritée,  ils  reçoivent  une  confusion 
salutaire  ,  et  remettre  les  timides  dans  le 
bon  chemin  en  leur  représentant  quelques- 
unes  de  leurs  bonnes  œuvres,  afin  que  celte 
approbation  qu'on  leur  donne  fortifie  en  eux 
le  désir  de  bien  faire,  et  qu'ils  s'aperçoivent 
qu'on  ne  leui-  parle  du  mal  qu'ils  ont  com- 
mis, que  pour  les  exhorter  à  n'en  plus  com- 
mettre.» 

8.  <(  Autres  sont  les  avis  adonner  aux  per- 
sonnes impatientes,  autres  ceux  qu'ont  h  re- 
cevoir les  personnes  patientes.  II  faut  dire  ;\ 
celles-là,  qu'en  se  laissant  aller  si  facilement 
à  rimpctuiisilé  de  leur  esprit,  il  est  à  crain- 
dre qu'elles  ne  s'emportent,  même  contre 
leur  gré,  dans  beaucoup  de  désordres  fâ- 
cheux ;  (ju'en  s'abandonnant  à  des  mouve- 
ments violents  qui  les  mettent  comme  hors 
d'elles -mêmes,  il  est  difficile  qu'elles  con- 
naissent ensuite  le  mal  qu'elles  ont  fait  pen- 
dant leurs  emportements;  que  l'impatience 
l'ail  perdre  la  charité,  qui  est  la  mère  des  ver- 
tus ;  qu'elle  porte  à  l'arrogance  ;  enfin,  que 


C4(,.    ». 


CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT  (JIII'GOIRE  LE  GRAND,  PAPE. 


Cap.  XI, 


r)     etiii,:'^. 


fvii'"  sif:f.i.E.l 

la  \'(ii'ité  dit  aux  iSlus  :  Vous  posséderez  vos  âmes 
dans  la  patience.  Les  avis  c^  donner  aux  per- 
sonnes patientes  sont,  qu'en  souHViuit  exté- 
rieurenieiil  le  mal  ({u'oii  leur  fait,  elles  doi- 
vent prendre  jfarde  d'en   couc(!voir  du  res- 
scnlinieut  dans  leur  cceur;  qu'elles  doivent 
s'applicpier  h  aimer  ceux  qu'elles  sont  obli- 
gt5cs  de  supjiorler ,  et  {MouHer  toute  don- 
leur  qui  pourrait  les  exciter  ;\  se  venger  des 
injures  qu'elles  ont  reçues.  Les  envieux  doi- 
vent être  traités  dilleremment  de  ceux  qui 
veulent  du  bien  k  tout  le  monde.  11  faut  dire 
à  ceux-ci,  qu'il  ne  leur  suffit  pas  de  louer 
les  actions  vci'tiicuses  des  autres,  ([u'ils  doi- 
vent aussi  les  imiter;  et  h  ceux-là,  qu'il  n'y 
arien  de  |)lus  mallieureux  au  monde,  qu'un 
homme  qui,  s'allliyeant  tlu  boulicur  daulrui, 
devient  plus  méchant  par  la  douleur  qu'il 
en  conçoit  ;  que  c'est  par  l'envie  que  la  mort 
est  entrée  dans  le  monde  ;  que  ce  vice  détruit 
tout  ce  qu'il  y  a  de  bon  et  de  louable  dans 
lin  homme  ;  ce  qui  a  lait  dire  au  Sage,  que 
quand  le  cœur  est  sain,  la  chair  est  pleine  de 
santé  et  de  vie,  mais  que  V envie  fait  pourrir 
jusqu'aux  os.  A  l'égard  des  personnes  sim- 
ples et  naïves,  on  doit  les  avertir  que,  com- 
me elles  évitent  utilement  de  tiomper  les 
autres  par  des  mensonges,  elles  doiveut  aussi 
avoir  soin  de  ne  dire  la  vérité  que  lorsqu'il 
est  utile  de  la  dire,  et  ajouter  à  la  vertu  de 
sincérité  celle  de  la  prudence,  parce  qu'il 
peut  arriver  que  la  vérité  qu'elles  diiaient 
<i  contre -temps,  soit  préjudiciable  à  quel- 
qu'un. Il    faut   r(  présenter   aux  personnes 
doubles,  que  la  crainte  qu'elles  ont  d'être 
découvertes  fait  qu'elles  cherchent  toujours 
de  mauvaises  excuses  pour   se  défendre  ; 
que,  suivant  l'Écriture,  on  est  d'autant  plus 
en  repos  et  en  sûreté,  qtt'on  est  plus  sincère  dans 
tout  ce  que  l'oufait,  et  que  c'est  avec  lésâmes 
simples  que  Dieu  prend  plaisir  à  s'entretenir.  » 
U.   «  On  doit  parler  d'une  manière  à  ceux 
qui  se  portent  bien,  et  d'une  autre  à  ceux 
qui  sont  malades.  Il  faut  porter  les  premiers 
à  faire  servir  la  santé  de  leur  corps  au  salut 
de  leur  âme  par  la  pratique  des  bonnes  œu- 
vres ;  et  consoler  les  seconds,  en  leur  disant 
qu'ils  ont  d'autant  plus  de  sujet  de  se  regar- 
der comme  les  enfants  de  Dieu,  qu'il  les  châ- 
tie et  les  afiligeidavantage  ;  que  s'il  n'était  pas 
dans  la  disposition  de  leur  donner  l'héritage 
du  ciel  après  les  avoir  châtiés,  il  ne  leur  en- 
verrait pas  des  atilictions  pour  les  instrui- 
re; que  si  les  enfants  du  siècle  soutl'rent  tant 
de  travaux  et  de  peines  pour  les  biens  de  la 


/.fi7 


terre  ,  on  ne  peut  liop  en  souiïrir  pour  ac- 
quérir un  héritage  qui  ne  se  perdra  jamais; 
que  les  peines  et  les  ;iinictious  conlrihuenl 
à  la  sauté  de  l'âme  ,  en  ce  qu'elles  la   l'inil 
leiitrer  en  elle-iru'-me  ;  et  que  Jc-Hus-Cliiist, 
qui  lave  nos  pi'clii's  dans  l'eau  du  baptême, 
a  soult'cri  de  plus  grandes  alflictions ,  telles 
(pie  les  calomnies  ,  les  outrages  ,  et  la  mort 
même  ,  lui  qui  donne  la  vie  aux  morts.  Il  y     ^"p-  "'"■ 
a  encore  de  la  différence  dans  l'instruction 
que  l'on  doit  donner  à  ceux  que  la  crainte  des 
châtiments  engage  à  bien  vivre,  et  celle  qui 
convient  à  cenx([ue  leur  endurcissement  rend 
incorrigihles.  11  faut  remontrera  ceux-là  que, 
tandis  qu'ils  ne  seront  mus  que  par  la  crain- 
te, ils  ne  goûteront  point  la  douceur  de  la 
vi'aie  liberté  ;  que  nous  devons  faire  le  lii(ni 
pour  lui-même,  et  que  l'on  se  rend  coupa- 
ble devant  Dieu  par  le  seul  désir  de  comniel- 
tre  le  péché.  Pour  ce  qui  est  des  endurcis, 
il  faut  les  reprendre  avec  d'autant  plus  de 
force,  que  leur  endurcissement  les  a  rendus 
plus  insensibles ,  et  leur  témoigner ,  avec 
quelque  sorte  de  mépris ,  qu'on  désespère 
de  leur  salut  ;  et  toutefois  leur  remettre  soi- 
gneusement devant  les  yeux  les  sentences 
les  plus  sévères  que  Dieu  a  prononcées  dans 
ses  saintes  Écritures,  afin  que  la  considéra- 
tion des  peines  éternelles  les  ramène  à  la 
connaissance    d'eux-mêmes.  La   discrétion  «iv. 

doit  régler  nos  paroles,  mais  nous  ne  devons 
point  nous  en  interdire  l'usage;  parce  qu'il 
y  a  un  temps  de  se  taire,  et  un  de  parler  : 
c'est  donc  un  défaut  d'être  trop  tacituiue  , 
et  c'en  est  un  autre  d'être  trop  grand  par- 
leur; il  faut  garder  un  milieu.  Le  sage  se  lui-    r  c:cs.s«, 
jxi  jusqu'à  ce  qu'il  soit  temps  de  parler ,  c'cfI- 
à-dirc  jusqu'à  ce  qu'il  voie  une  occasion  ru'i 
il  sera  mieux  de  parler  pour  rendre  service 
au  prochain,  que  de  garder  le  silence.  Être 
trop  réservé  à  se  plaindre  dans  les  disgrâ- 
ces, c'est  s'exposer  à  ressentir  plus  vive- 
ment la  douleur  dans  son  cœur.  Nous  som- 
mes obligés  de  témoigner  à  ceux  qui  nous 
font  du  tort,  le  sujet  que  nous  avons  de  nous 
plaindre  d'eux  ;  celte  plainte  les  empêchera 
de  nous  nuire  à  l'avenir,  et  diminuera  la  vi- 
vacité de  notre  affliction.  Il  faut  remontrer 
aux  grands  parleui's  les  désordres  oii  ils  sont 
capables  de  tomber  en  se  laissant  aller  à  la 
multiplicité  des  paroles,  le  compte  qu'ils  ren- 
dront ,  au  jour  du  jugement ,  de  leurs  paro- 
les inutiles,  c'est-à-dire,  proférées  sans  une 
juste  nécessité ,  ou  sans  qu'ils  s'y  proposent 
aucune  véritable  utilité.  » 


•4C8 


IIISTUIIIK  GKNi:ilALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Tip.   Vf  rt 
suu. 


10.  Saint  Grégoire  exairinc  ensuite    de 
quelle  manière  il  faut  instruire  ceux  qui  sont 
lents  à  faire  le  bien,  et  ceux  qui  le  font  avec 
précipitation;  ceux  qui  sont  doux,  et  ceux 
qui  sont  sujets  à  la  colère  ;  les  humbles  ,  et 
les  orgueilleux;  ceux  qui  sont  arrêtés  h  leur 
sens,  et  ceux  qui  sont  changeants  et  légers; 
les  personues  sobres  ,  et  celles  qui  sont  su- 
jettes :i  latrourmaudise  ;  ceux  qui  font  vo- 
lontiers l'aumône,  et  ceux  qui  ravissent  le 
bien  d'autrui.  «La  règle,  dans  la  distribution 
des  aumônes ,  est  de  donner  h.  ceux  qui  ont 
besoin,  et  à  proportion  de  leur  besoin  ;  de 
ne  point  affliger  l'esprit  de  ceux  qui  deman- 
dent, eif  différant  trop  de  leur  donner;  de 
ne  point  rechercher  une  louange  passagère 
de  la  part  de  ceux  i\  qui  l'on  donne  ,  ou  qui 
sont  présents  ;  de  savoir  tellement  modérer 
ses  aumônçs,  qu'on  ne  se  mette  pas  soi-mê- 
me dans  l'occasion  de  tomber  dans  l'impa- 
tience, en  manquant  du  nécessaire  pour  avoir 
trop  donné  ;  de  racheter  tellement  ses  iui- 
qiiités  par  l'aumône  ,  qu'on  n'en  commette 
pas  de  nouvelles,  parce  qu'autrement  ce  se- 
rait traiter  avec  Dieu  comme  si  sa  justice 
était  vénale,  et  s'imaginer  qu'eu  lui  donnant 
de  l'argent  après  l'avoir  olfensé  ,  ou   peut 
acheter  de  lui  l'impunité  de  ses  crimes.  La 
manière  la  plus  utile  de  corriger  ceux  qui 
ravissent  le  bien  d'autrui,  est  de  leur  fiiirc 
compicndre  combien  cette  vie  est  courte  et 
passagère,  et  de  leur  rapporter  les  exemples 
de  ceux  qui ,  après  avoir  mis  tout  en  œus're 
pour  s'enrichir  en  ce  monde,  n'ont  pu  y  jouir 
longtemps  de  leurs  richesses,  n  Ce  Père  veut 
qu'on  fasse  sentir  h  ceux  qui  donnent  de 
leur  bien,  et  ne  cessent  toutefois  de  prendre 
celui  d'autrui,  qu'il  y  a  bien  de  la  dillorence 
entre  faire  des  œuvres  de  mis(;ricorde  pour 
racheter  ses  péchés ,  et  commettre  des  pé- 
chés pour  faire  ensuite  des  œuvres  de  misé- 
ricorde ;  que  des  œuvres  faites  de  la  sorte 
ne  peuvent  être  appelées  des  œuvres  de  mi- 
séricorde, parce  que  la  racine  amère  et  em- 
poisonnée de  la  violence  et  de  la  rapine  ne 
peut  produire  le  doux  fruit  de  la  charité. 
Suivent  les  instructions  pour  ceux  qui  sont 
querelleurs,  et  pour  ceux  qui  sont  paisibles, 
«n  faut  dire  à  ceux-li\  que,  tant  qu'ils  ne  se- 
ront point  unis  par  la  charité  avec  le  pro- 
cliiiin,  ils  ne  pourront  faiie  aucune  action  , 
ni  ofïrir  aucun  sacrifice  à  Dieu  ,  qui  lui  soit 
agréable;  et  à  ceux-ci ,  qu'il  y  a  une  ditlV'- 
rence  entre  la  paix  de  la  terre  et  celle  du 
ciel;  que  celle-là  n'est  qu'un  vestige  de  cette 


paix  intérieure  qui  doit  durer  éternellement  ; 
qu'il  ne  faut  pas  trop  s'y  attacher,  de  crainte 
que  cet  amour  ne  rende  l'Ame  criminelle , 
parce  que  plus  on  tire  de  satisfaction  des 
choses  présentes  ,  moins  on  a  d'ardeur  pour 
les  éternelles,  qui  sont  plus  éloignées. —  Pour 
ceux  qui  sèment  des  discordes,  et  pour  ceux 
qui  sont  pacifiques;  — pourceuxqui  n'ont  pas 
l'intelligence  des  Livres  saints,  et  pour  ceux 
qui  la  possèdent,  mais  n'en  parlent  pas  avec 
assezde  respect  et  de  soumission;  — pour  ceux 
qui,  ayant  le  talent  d'annoncer  aux  autres  la 
parole  de  Dieu,  n'osent  le  faire  par  un  excès 
d'humilité,  et  pour  ceux  qui  entreprennent 
de  la  prêcher  sans  en  être  capables.  Il  faut 
faire  comprendre  aux  premiers,  qu'en  refu- 
sant de  nourrir  les  peuples  atTamés  de  la  pa- 
role de  Dieu  ,  ils  font  autant  de  mal  que  si , 
ayant  de  l'argent  dans  leurs  cotfres,  du  blé 
dans  leurs  greniers,  ils  négligeaient  d'en  as- 
sister les  peuples  dans  une  pressante  fami- 
ne ;  que  celui  à  qui  le  père  de  famille  avait 
confié  un  talent  poiu"  le  faire  valoir  ,  en  fut 
privé  pour  n'en  avoir  pas  fait  usage  ;  qu'Isaïe, 
s'étant  (ù  dans  son  ministère ,  en  fut  repris 
fortement.  On  doit  remontrer  aux  autres, 
qu'en  s'ingérant  avant  le  temps  dans  un 
exercice  qui  passe  leurs  forces,  ils  se  ren- 
dent incapables  de  le  remplir  aussi  digne- 
ment qu'ils  auraient  pu  faire  ,  s'ils  avaient 
attendu  un  temps  plus  propre  ,  et  qu'ils  se 
fussent  l'endus  plus  capables.» 

11.  «  n  y  en  a  qui  réussissent  dans  la  re- 
cherche lies  biens  de  ce  monde ,  d'antres 
qui ,  n'y  n'ussissanl  pas  ,  se  laissent  abattre 
par  les  disgrâces.  On  doit  avertir  ceux  qui 
prospèrent,  de  ne  pas  s'attacher  A  des  biens 
qui  i)érisscnt ,  et  de  ne  pas  changer  les  se- 
cours que  Dieu  leur  donne  pour  arriver  au 
ciel,  en  des  obstacles  qui  les  empêcheraient 
d'y  parvenir;  et  ceux  qui  ne  prospèrent  pas, 
de  considérer  que  Dieu,  en  ne  les  abandon- 
nant pas  ;\  leiu's  désirs,  les  ti'aite  avec  la 
même  bonté,  qu'un  médecin  fait  un  malade 
à  qui  il  refuse  bien  des  choses  qu'il  croit 
contraires  h  sa  santé.  L'avis  à  donner  aux 
gens  mariés  ,  est  de  se  rendre  tellement  les 
devoirs  mutuels,  qu'en  cherchant  à  se  plaire 
l'un  il  l'autre,  ils  songent  sérieusement  à  ne 
point  déplaire  ;\  Dieu  ;  de  supporter  avec 
douceur  les  mécontentements  et  les  déplai- 
sirs qu'ils  reçoivent  réciproquement;  de  s'en- 
tr'aider  à  se  sauver  ,  et  de  considérer  que  , 
n'ayant  été  unis  ensemble  fpie  pour  avoir 
des  enfants,  ils  ne  doivent  point  altérer,  par 


c.,. 


[vir  siKCLK.J      CIIAPITai']  XLIX.— SAINT  GRlir.OIIlli;  LE  GRAND,  l'APE. 


401} 


Cap.  XXIX. 


la  rcclierche  du  la  voluplc' ,  la  sainteté  de 
l'iiiiiou  conjugale.  Saint  l'aul  on  disant  : 
l'oKf  ivitur  la  fornication,  qiw  cluique  homme 
vive  avec  sa  femme ,  et  chaque  femme  avec  son 
tnan\  n'a  pas  tant  donnii  une  règle  pour  des 
personnes  saines,  ([ne  i)roposé  des  remèdes  à 
des  malades;  qu'il  n'a  pas  l'ail  un  cnmiuau- 
dement  ;\  ceux  qui  sont  debout ,  mais  ollerl 
une  litière  ;\  ceux  qui  tombent,  pour  les  em- 
pêcher de  se  briser  contre  terre.  En  ajou- 
tant :  Ce  que  Je  vous  dis  ,  c'est  par  imlulgenn  , 
il  insinue  qu'il  y  a  faute  ,  mais  faute  qui  se 
remet  d'autant  plus  aisément,  qu'elle  con- 
siste moins  à  faire  ce  qui  serait  absolument 
défendu,  (ju'A  ne  se  modérer  pas  assez  dans 
l'usage  de  ce  qui  est  permis.  Ceux  qui  ue 
sont  point  engagés  dans  le  mariage  doivent 
se  rendre  d'autant  [ilus  fidèles  à  suivre  la  loi 
de  Dieu  ,  qu'ils  sont  plus  dégagés  des  soins 
des  choses  du  monde.  S'ils  se  trouvent  ten- 
tés par  la  chair  avec  danger  de  se  perdre  , 
ils  ont  le  port  du  mariage  où  ils  peuvent  se 
retirer  :  car  ils  n'otl'ensent  pas  Dieu  en  se 
mariant,  pourvu  qu'ils  n'aient'  pas  fait  vœu 
d'entrer  dans  un  état  plus  relevé.  La  fuite 
de  l'occasion  est  le  remède  qu'il  faut  pres- 
crire ;\  ceux  qui  sont  tombés  dans  des  pé- 
chés de  la  chair.  On  doit  représenter  à  ceux 
qui  ont  vécu  sans  y  tomber ,  les  récompen- 
ses que  Dieu  leur  réserve,  alin  qu'eu  les  en- 
visageant souvent,  ils  surmontent  plus  aisé- 
ment les  ditlicultés  des  tentations.  Ceux  qui 
gémissent  pour  des  péchés  d'actions,  doivent 
faire  en  sorte  que  rien  ne  manque  à  leur 
pénitence,  puisque  rien  n'a  manqué  à  leur 
péché.  Il  y  a  trois  choses  qui  contribuent  à  la 
consommation  du  péché  ,  savoir  la  sugges- 
tion ,  la  délectation  et  le  consentement.  La 
première  vient  de  notre  ennemi ,  la  seconde 
se  passe  dans  notre  chair,  et  la  troisième 
dans  notre  esprit.  L'ennemi ,  qui  tâche  tou- 
jours de  nous  surprendie  ,  nous  suggère  le 
mal  ;la  chair  se  laisse  aller  au  plaisir  qu'elle 
ressent  ;  l'esprit ,  emporté  par  ce  plaisir  ,  y 
donne  son  consentement.  Ceux  qui  pleurent 
les  péchés  de  pensées  ,  doivent  examiner 
dans  lequel  de  ces  trois  degrés  de  pécbés  ils 
sont  tombés  ,  ahn  qu'ayant  reconnu  la  na- 
ture de  leur  chute ,  ils  versent  autant  de 
larmes  qu'il  leur  faut  pour  s'en  relever.  11 
est  aussi  du  devoir  de  ceux  qui  les  instrui- 


'  Sine  culpa  ad  conjugium  veiiiiml,  si  lamen 
necdum  mcUora  voierunl.  circ^.,  Pastor.3.  part., 
cap.  xivn. 


sent,  do  ne  pas  les  jeter  dans  l'abattement 
par  une  trop  givinde  tei-nsur  :  car  souvent 
Dieu  ,  plein  de  miséricorde  ,  remet  d'autant 
plus  facilement  à  l'àme  les  péchés  de  pen- 
sées ,  qu'il  n'a  pas  permis  qu'elle  les  mit  à 
exécution;  et  l'àme  se  dégage  aussi  d'autant 
plus  aisément  de  ces  sortes  de  péchés,  qu'elle 
s'y  trouve  moins  fortement  engagée,  puis- 
qu'elle n'en  est  pas  venue  jusqu'à  les  ac- 
complir. 11  arrive  quelquefois  à  des  pécheurs 
de  pleurer  leurs  péchés  sans  les  quitter  ,  et 
à  d'autres  de  les  quitter  sans  les  pleurer. 
Ceux-là  sont  comparés  dans  l'Écriture  à  des 
chiens  qui,  après  avoir  vomi  ce  qui  les  char- 
geait au  dedans  ,  retournent  à  ce  qu'ils  ont 
vomi ,  et  se  gorgeut  de  nouveau.  Ceux-ci, 
quoique  ne  péchant  plus  ,  ne  sont  pas  puri- 
hés  des  péchés  qu'ils  ont  commis ,  s'ils  ne 
les  pleurent  :  d'où  vient  que  saint  Pierre  di- 
sait aux  persoimes  efl'rayéesde  leurs  anciens 
désordres  :  Fuites  pénitence ,  et  que  chacun  de 
vous  soit  baptisé.  Avant  de  leur  parler  du  bap- 
tême, il  leur  parle  des  larmes  de  la  péniten- 
ce, pour  leur  apprendre  qu'ils  devaient  se 
laver  dans  les  eaux  de  leui's  larmes,  pour 
achever  ensuite  de  se  purilier  dans  celles  du 
baplème.  Quant  à  ceux  qui  juslifieut  leurs 
désordres  ,  il  faut  leur  faire  entendre  qu'ils 
pèchent  souvent  plus  par  l'approbation  qu'ils 
donnent  à  leurs  mauvaises  actions  ,  que  par 
leurs  actions  mêmes,  puisque,  en  les  com- 
mettant ,  il  n'y  a  qu'eux  qui  font  le  mal ,  au 
lieu  qu'en  les  louant,  ils  mettent  en  danger 
tous  ceux  qui  les  écoutent  d'en  commettre 
de  semblables.  » 

12.  Le  reste  des  instiuclions  de  s.iint  Gré- 
goire regarde  ceux  qui  tombent  dans  le  pé- 
ché, ou  par  surprise,  ou  avec  délibération  ; 
ceux  qui  tombent  dans  de  petites  fautes,  et 
ceux  qui,  tâchant  d'éviter  les  plus  petites, 
tombent  quelquefois  dans  de  grandes  ;  ceux 
qui  ne  veulent  pas  commencer  de  faire  le 
bien,  et  ceux  qui  n'y  persévèrent  pas  ;  ceux 
qui  font  le  mal  en  secret  elle  bien  en  public, 
eiceux  qui,  se  cachant  pour  faire  lebien,|don- 
nenl  occasion  d'avoir  mauvaise  opinion  d'eux 
pur  leur  conduite  extérieure.  Le  saint  Pape 
croit  qu'il  est  souvent  plus  dangereux  de  tom- 
ber dans  une  petite  faute,  que  d'en  commettre 
une  plus  grande  ;  la  raison  qu'il  en  donne  est, 
que  l'on  est  plus  facilement  convaincu  du  mal 
qu'il  y  a  dans  une  grande  f;:ute,  et  qu'ainsi 
on  s'en  corrige  plus  aisément,  au  lieu  que, 
ue  reconnaissant  presque  point  de  mal  dans 
les  fautes  légères,  on  continue  à  les  com- 


1.  Idr.   lir. 


Cap. 


I 


470  HISTOIRE  GKNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 

Illettré,  et  avecd'aulanl  plus  de  danper  poiirle 
salut,  que  riiabilude  aux  petites  fautes  con- 
duit à  n'avoir  pas  uièuie  dlioireurdes  gran- 
Cif.  i«T.   des.  il  dit  que,  lorsqu'on  a  assez  de  vertu 


pour  être  au-dessus  du  désir  des  louanges, 
on  commet  une  injustice  à  l'égard  du  pro- 
chain, en  cacliant  à  ses  yeux  une  bonne  œu- 
vre dont  il  aiuait  pu  être  édifié  ;  qu'on  en 
commet  une  autre  en  ne  cacliant  pas  aux  yeux 
des  hommes,  autant  qu'on  le  peut,  ce  qui 
peut  être  mal  pris  ou  mal  expliqué,  parce 
qu'on  donne  occasion  à  ceux  qui  sont  sujets 
a  interpréter  les  choses  en  mal,  de  s'en  au- 
toriser comme  d'un  exemple  pour  tomber 
dans  le  p^ché  même. 

13.  Après  toutes  ces  instructions  particu- 
lières, saint  Grégoire  en  donne  de  générales, 
qui  regardent  piincipalement  les  pasteurs. 
'1  Lorsqu'ils  ont  à  louer  les  vertus  auxquelles 
ils  veulent  porter  leurs  auditeurs,  ils  doivent 
prendi'e  garde  à  ne  pas  leur  donner  occasion 
de  tomber  dans  les  vices  opposés  :  ainsi,  eu 
exhortant  les  avares  à  donner  largement  de 
lem's  biens,  ils  ne  doivent  point  autoriser  la 
profusion  excessive  des  prodigues  ;  et  d'un 
autre  côté,  ils  doivent  exciter  avec  tant  d'a- 
dresse les  prodigues  à  user  d'économie,  que 
les  avares  n'en  deviennent  pas  plus  attachés 
à  leurs  trésors.  11  en  est  de  même  de  toutes 
les  autres  vertus  qui  ont  des  vices  contraires. 
Une  autre  maxime  est  que,  lorsqu'une  âme 
l'st  travaillée  en  même  temps  de  deux  vices 
dont  l'un  est  moins  considérable  que  l'autre, 
il  faut  alors  s'appliquer  à  guérir  celui  des 
deux  qui  est  le  plus  près  de  donner  la  mort; 
et  si  on  ne  peut  le  gui'-rir  sans  empêcher 
l'autre  de  sefortificr,ondoitlaissersefoitili('r 
l'un,  pour  remédier  plus  facilement  à  l'autre. 
Un  homme,  en  commettant  des  excès  dans  le 
manger,  est  vivement  pressé  et  presque  vain- 
cu par  l'impureté.  Appréhendant  les  suites 
de  ce  combat,  il  retranche  de  sa  nourriture; 
mais  son  abstinence  lui  devient  im  sujet  de 
vaine  gloire.  Il  est  visible  qu'il  y  a  en  cet 
homme  un  vice  qu'on  ne  saurait  détruire 
sans  en  laisser  se  fortifier  un  autre.  Que  faire? 
11  faut  soulfrir  que  les  mouvements  d'orgueil 
se  fortifient  en  lui  ci  l'occasion  de  son  abi^ti- 
ncncc,  puisqu'ils  ne  lui  ùtcnt  pas  la  vie,  de 


crainte  que  l'impureté,  qui  est  une  suite  né- 
cessaire de  sa  gourmandise,  ne  lui  donne  la 
mort.  Il  est  encore  d'une  grande  importance  cp.  »i- v 
à  un  pasteur  de  ne  rien  dire  dans  ses  instruc- 
tions qui  soit  au-dessus  de  la  portée  de  ceux 
qui  l'écoutent,  de  crainte  que  leur  esprit, 
étant  trop  fortement  appliqué,  ne  se  lasse  et  - 
ne  se  dégoûte.  Le  pasicnr  doit  donc  cacher 
les  choses  trop  relevées,  lorsqu'il  parle  devant 
plusieurs,  et  ne  les  découvrir  qu'a  un  petit 
nombre  de  personnes.» 

1-4.  «  Il  doit  surtout  veiller  avec  grand  soin  <i"""* 
sur  lui-même,  de  crainte  qu'après  avoir  ins-  «°"- 
truit  et  édifié  les  autres  par  ses  paroles  et 
ses  actions,  il  n'en  prenne  ?ujet  de  s'élever. 
Au  premier  mouvement  df  complaisance  qu'il 
éprouve,  il  doit  s'appliquer  à  considérer  ses 
faiblesses,  et  à  regarder  non  le  bien  qu'il  a 
fait,  mais  celui  qu'il  a  négligé  de  faire,  afin 
que  son  cceur  étant  comme  abattu  parle  sou- 
venir de  ses  faiblesses,  il  se  fortifie  et  s'affer- 
misse davantage  dans  la  vertu  aux  yeux  de 
Dieu,  qui  seul  inspire  les  sentiments  d'une 
humilité  véritable.» 

V. 

Des  Dialogues  de  Saint  Grégoire. 


1.  Une  faut  que  lire  ces  Dialogues  pour 
se  convaincre  qu'on  ne  peut  les  attribuer  à 
d'antres  qu'A  saint  Grégoire.  On  y  voit  en 
effet,  que  celui  qui  les  a  composés,  était' 
moine,  dans  le  monastère  qu'il  avait  fondé; 
qu'il  en  avait  été  '  supérieur,  envoyé  à'  Cons- 
tautinople  pour  y  faire  les  fonctions  de  nonce 
apostolique,  puis  élevé  sur  le  '  Saint-Siège, 
et  que  dans  ce  poste  même  il  avait  fait  au 
peuple  romain  diverses  '  homélies  sur  les 
Évangiles.  Si  tous  ces  traits  ne  conviennent 
point  à  ce  saint  Pape,  je  ne  sais  .'i  qui  ils  pour- 
raient convenir.  Ajoutons  qu'il  rapporte  plu- 
sieurs événements  miraculeux  dans  ces  '  Dia- 
logues,qu'il  dit  avoir  déjà  rapportés  dans  ses' 
homélies  ;  que  ses  frères,  c'est-à-dire,  les 
religieux  qui  demeuraient  auprès  de  lui,  le 
prièrent  "d'écrire  les  miracles  des  Pères,  ou 
des  personnes  illustres  en  piété  qui  avaient 
llcuri  de  son  temps  en  Italie,  et  que  ce  fut 
pour  les  satisfaire  qu'il  écrivit  à  Maximien, 


Salrl  Gri- 
poltx  fft 
leur     de 


'  In  prologo   Ditilofj.,  et  lit),  lit,  cnp.  xxxiii, 

lit).   IV,   (-np.  XXI,  XXXVIIl,  XLVII,  l,v. 

'  Ilialotj.,  lit).  IV,  (Nij).  Lv. 
'  IJuilog.,  lit).  111,  lap.  xxxvi. 
*  Lib.  IV,  cap.  lvh. 


1^   Litl.  IV.  CTp.  XIV.  XV,  XVI,  XIX,   XXVII. 

"  l.il).  1  Ditilog.,  cnp.  vu  ;  lih.  III,  cap.  vi. 
'■  l.il).  IV,  rap   XIV,  llom.  37,  'M. 
"  Lil..  lit,  Epi-st.  51. 


[vu- SIÈCLE.]      GIIAPIÏHt;  Xl.lX.  —SAINT  Gni'lCOmK  \.K  (JUAxM),  PAPK. 


i7l 


évèqiie  de  Syracuse,  île  lui  maudcr  au  plus 
tôt  ce  ([u'il  savait  de  plusieurs  saints  porson- 
uiges,  nomiuéuient  de  l'abbé  Xuniiose.  Il  est 
parle  de  ce  Nounose  dans  le  premier  '  livre 
dos  Dialogues,  et  ce  qui  y  on  est  dit  est  cons- 
fatt' parle  téuioi;^'uai;ode  rcvè([uc  RIaxiniien. 
Peut-on  donc  rcvoquer  eu  doute  que  ce  li- 
vre soit  de  saint  Grégoire  îPatérius,  qui  nous 
a  laissé  un  recueil  de  passages  tirés  des  écrits 
do  ce  Saint  dont  il  avait  été  secrétaire,  en' 
cite  quelques-uns  empruntés  des  Dialogues. 
Ils  lui  sont  attribués  par  saint  Ildéphonse', 
archevêque  de  Tolède,  par  Honorius  d'Au- 
tun,  par  le  vénérable  Bède,  pai'  Paul  et  Jean 
Diacre,  qui  ont  l'un  et  l'autre  écrit  la  vie  de 
saint  Grégoire.  Pliotius,  qui  les  cite  '  sous 
le  titre  de  Viesdcn  Pères  d'Italie,  dit  qu'ils  con- 
tiennent de  bonnes  instructions,  et  que  les 
Grecs  se  trouvant  privés  de  la  lecture  de  ces 
Dialogues,  parce  qu'ils  n'entendaient  pas  le 
latin,  le  pape  Zacharie,qui  occupait  le  Saint- 
Siège  eu  7 il,  les  traduisit  en  grec.  Zacharie 
avait  succédé  à  Grégoire  III,  et  celui-ci  à  Gré- 
goire il  mort  en  731  ;  mais  Photius  les  dis- 
tingue l'un  et  l'autre  de  l'auteur  des  Dialo- 
gues, en  disant  qu'il  les  avait  écrits  cent  soi- 
xante-cinq ans  avant  que  Zacbarie  fùtPape. 
Son  calcul  toutefois  n'est  pas  exact,  puisque 
saint  Grégoire  n'a  pu  écrire  ses  Dialogues 
plus  tôt  qu'en  593;  ce  qui  ne  ferait  que  cent 
cinquante-huit  ans  jusqu'à  la  mort  de  Zacha- 
rie, arrivée  en  732.  Le  pape  Adrien,  qui  rem- 
plit le  siège  pontitîcal  vingt  ans  après  Zacha- 
rie, attribue  les  Dialogues  au  même  Gré- 
goire qui  a  écrit  sur  Job,  qu'il  distingue  de 
Grégoire II,  en  donnant^ a  celui-ci  le  double 
titre  de  second  et  déjeune. 

2.  On  objecte  que  '  Cedrène  donne  les 
Dialogues  à  Grégoire  II ,  et  que  Georges 
Scholarius  a  pensé  de  même  ;  mais  Cedrène 
n'ayant  écrit  que  dans  le  xii°  siècle,  et  Scho- 
larius daus  le  w" ,  leur  témoignage  n'est 
point  recevable  contre  celui  des  écrivains 
des  vii%  VIII'  et  ix"  siècles,  qui,  écrivant  la 
plupart  en  Occident,  étaient  plus  au  fait  de 
ce  qui  s'y  était  passé  que  les  Grecs.  D'ail- 
leurs, ces  Dialogues  étaient  connus  avant  le 
pontificat  de  Grégoire  11,  puisque  Patérius, 


contemporain  de  Grégoire  I",  en  fait  usage 
dans  ses  Recueils,  el  que,  suivant  le  témoi- 
gnage de  ^  Paul  Diacre,  ils  furiMit  envoyés  a 
Théodelinde,  reine  des  Lombards,  par  saint 
Grégoire  même.  On  objecte  encore  (pi'il  n'est 
pas  vraisemblable,  ([u'un  homme  d'un  aussi 
grand  mérite  qu(!  saint  Grégoire,  ait  rempli 
ses  écrits  de  tant  de  visions  et  de  miracles. 
Sur  ce  pied -là,  il  faudra  donc  aussi  rejeter 
les  quarante  Homélies  sur  les  lîvangiles  , 
puisqu'il  y  en  a  onze  où  il  rapporte  des  évé- 
nements miraculeux,  qu'il  a  pour  la  plupart 
répétés  dans  ses  Dialogues;  il  faudra  reje- 
ter *  plusieurs  de  ses  lettres,  et  môme  ses 
Morales  '  sur  Job,  où  il  parle  souvent  de  mi- 
racles opérés  par  les  petites  clefs  qui  avaient 
touché  au  tombeau  de  saint  Pierre,  et  de 
ceux  que  les  religieux,  qu'il  avait  envoyés 
en  Angleterre,  y  avaient  faits  ;  il  faudra  aussi 
mettre  au  rang  des  apocryphes  quantité  d'é- 
crits de  TerluUien ,  de  saint  Gyprien  ,  de 
saint  Athanase,  de  saint  Hilaire,  de  saint 
Sévère-Sulpice,  et  un  grand  nombre  de  Vies 
de  saints  et  d'Actes  de  martyrs,  comme 
ceux  de  sainte  Perpétue  et  de  sainte  Féli- 
cité, de  saint  Fructueux,  et  les  Histoires  d'É- 
vagre,  de  Procope,  d'Agatbias,  puisque  dans 
tons  ces  monuments  il  est  parlé  de  visions 
et  de  miracles  :  néanmoins  on  n'a  jamais 
contesté  à  Tertullien  les  livres  de  l'Idolâtrie 
et  des  Spectacles,  ni  à  saint  Gyprien  ceux 
de  la  Mortalité  et  des  Tombés  dans  la  per- 
sécution, ni  à  saint  Sulpice- Sévère  ses  Dia- 
logues, ni  à  saint  Athanase  la  Vie  de  saint 
Antoine,  ni  l'authenticité  des  Actes  de  sainte 
Perpétue.  Combien  de  visions  et  de  faits  mi- 
raculeux dans  les  livres  de  l'Ancien  et  du 
Nouveau  Testament  ?  On  convient  qu'ils  sont 
attestés  par  des  écrivains  inspirés  de  Dieu, 
et  que  dès  lors  nous  ne  pouvons  refuser  d'y 
ajouter  foi  ;  mais,  à  considérer  les  faits  en 
eux-mêmes,  la  plupart  ont  moins  de  vrai- 
semblance que  ceux  que  rapporte  saint  Gré- 
goire. Y  en  a-t-il  dans  le  colloque  d'Eve  avec 
le  sorpen;,  dans  le  changement  de  la  femme 
de  Lolh  en  une  statue  de  sel,  dans  les  dis- 
cours qu'on  fait  tenir  à  l'ânesse  de  Balaam? 
Jésus-Christ  n'a-t-il  pas  dit  :  Celui  qui  croit 


'  Cap.  \n.~- Patérius  in  c3.-ç.iJosue;  in  Malth. y 
cap.  Lxsxu  ;  in  Joan.,  cap.  xxxiv. 

'  lldofous.  De  Scrip.  Eccles.,  cap.  i;  Honorius, 
lib.  111  De  Siripl.  Ecctcs.,  cap.  xxxu;  Beda,  lib.  Il 
Histor.,  cap.  i. 

»  Pliotius,  Cod.  252. 


5  Tom.  VU  Concil,  pag.  922,  949,  938,  956,  947. 

6  Cedren.,  ton).  I,  pag.  4S6  ;  Scholarius,  Exposit. 
pro  Conc.  Florentino,  cap.  v,  section.  16. 

■J  Paul  Diac,  lih.  IV  Uislor.  Longobard. ,e.a]>.\. 

8  Lilj.  XI,  Episl.  28. 

9  Lib.  X.WIl  Ejcposil.  in  Job.,  cap.  vi. 


472 


HISTOTRE  GÉNÉRALE  DES  AUTCUllS  ECCLESIASTIQUES. 


nie1c«  que 
S-  GrV'goire  jr 
oUflm. 


en  moi  fera  les  œuvres  que  je  fais,  et  en  fera 
encore  de  plus  grandes?  Lo  temps  de  ces  pro- 
diges est  celui  où  il  s'agissait  de  convertir  A 
la  foi  des  barl)ares,  des  idolâtres,  des  hcié- 
liques.  Im  diversité  des  Itinyues  est,  dit  l'Apô- 
lic,  un  signe,  7wn  pour  les  fidf-ies,  mais  jjour 
les  infdèles.  Sur  la  lin  du  V  siècle,  et  pen- 
dant une  bonne  partie  du  vi",  l'Ilalie ,  la 
France,  l'Espagrne,  et  plusieurs  autres  pro- 
vinces d'Occident,  avaient  cté  en  proie  aux 
Barbares,  aux  Gotlis,  aux  Ostroi^otlis,  aux 
Visigotlis,  aux  Lombards,  tous  ennemis  de 
la  religion  catbolique.  Elles  étaient  encore 
la  plupart  infectées  de  restes  d'idolàlrie  ; 
l'AngleleïTe  ne  connaissait  point  d'autre  culte 
que  celui  des  idoles.  Dieu,  pour  la  consola- 
lion  de  son  Église,  suscita  dans  ces  deux 
siècles  - 1;\  de  saints  évêques  et  d'autres 
saints,  qui  se  rendirent  célèbres  par  leurs 
vertus  et  leurs  miracles.  Saint  Grégoire , 
pressé  par  les  personnes  qu'il  avait  auprès 
di^  lui,  lecueillil  tout  ce  qu'il  put  apprendre 
do  leurs  belles  aciions,  pour  en  conserver 
la  mémoire  à  la  postérité. 

3.  Mais  il  avait  surtout  en  vue  de  confir- 
mer la  foi  des  faibles  sur  l'iinmoilalité  de 
l'âme  et  sur  la  résurrection  des  corps,  dont' 
plusieurs,  même  parmi  les  catholiques,  dou- 
taient. Il  avoue  avec  beaucoup  d'humilité, 
qu'il  avait  lui-même  eu  des  doutes  autrefois 
sur  ce  sujet.  Or,  rien  n'était  plus  propre  â 
appuyer  la  foi  de  l'immorlalité  de  l'âme  et 
de  la  résurrection  des  corps,  que  les  miracles 
et  les  prodiges  opérés  aux  tombeaux  des 
saints.  Saint  Augustin  avait  eniployi'  le  mémo 
moyen  dans  ses  livres  '  de  la  Cité  de  Dieu, 
où,  après  avoir  japporlé  grand  nombre  de 
guérisons  opérées  par  les  reliques  de  saint 
l'Uiennc  et  des  autres  saints,  il  conclut  que 
ces  miracles  rendent  témf)ignage  â  la  foi, 
qui  enseigne  la  résurrection  des  morts.  Ils 
étaient  aussi  très-utiles  pour  la  conversion 
des  païens,  qui,  n'élant  alors  pour  la  iiliiparl, 
surtout  en  Italie,  que  des  serfs  rustiques  on 
des  soldats  barbares,  se  laissaient  persua- 
der plutôt  par  des  faits  merveilleux ,  que 
par  des  raisonnements  mélapliysi(]uos. 

4.  An  reste,  saint  (îrégoire  ne  rapiinile 
dans  ses  Dialogues  qiu'  les  faits  (pi'il  croyait 


les  mieux  prouvés,  après  avoir  pris  toutes 
les  précautions  nécessaires  pour  s'en  assu- 
rer. 11  en  avait  vu  lui-même  quelques-uns  ; 
il  avait  appris  les  autres,  ou  de  saints  évo- 
ques, ou  (le  saints  moines,  ou  do  supérieurs 
de  monastères,  ou  de  gens  de  condition  ;  il 
n'en  raconte  point  sur  des  bruits  populaires. 
Aussitôt  qu'il  eut  achevé  cet  ouvrage,  il  en 
fit  présent  il  la  reine  '  Théodelinde  ,  qui , 
comme  on  le  ci'oit,  s'en  servit  pour  la  con- 
version des  Lombards  ses  sujets,  dont  les 
uns  étaient  ariens,  les  autres  païens.  La  plu- 
part des  miracles  rapportés  dans  ces  Dialo- 
gues avaient  été  opc'rés  ou  sur  ceux  de  cette 
nation,  ou  eu  leur  présence  ;  en  sorte  qu'il 
était  aisé  de  savoir  parmi  les  Lombards  si 
ces  faits  miraculeux  étaient  véritables  ;  puis- 
qu'ils ne  pouvaient  être  fort  anciens,  ces 
peuples  n'étant  entrés  en  Italie  que  depuis 
vingt-cinq  ù  trente  ans.  L  fallait  donc  que 
saint  Grégoire  les  crût  de  notoriété  publique 
pour  les  leur  raconter. 

■'5.  Rien  ne  marque  mieux  l'applaudisse- 
ment avec  lequel  ces  Dialogues  furent  re- 
çus, que  les  ditlérentes  versions  que  l'on  en 
fit.  Nous  ne  répéterons  point  ce  que  nous 
avons  dit  de  celle  du  pape  Zacharie  avant 
l'an  752.  Sa  version,  qui  était  grecque,  fut 
traduite  en  arabe  avant  l'an  800;  on  la  con- 
serve, écrite  sur  du  parchemin,  parmi  les 
manuscrits  d'Orient  dans  la  Ribliothèque  du 
Roi.  L'auteur  de  cette  traduction  était  un 
religieux  nommé  Antoine ,  qui  demeurait 
dans  le  monastère  de  Saint-Siméon.  Au  )X* 
siècle,  Alfred  le  Grand,  roi  d'Angleterre,  fit 
traduire  les  mêmes  Dialogues,  avec  le  Pas- 
toral de  saint  Grégoire,  en  son  langage 
saxon,  par  Verfroy,  évoque  de  Worchester. 
Celle  version  se  trouve  â  Cambridge  dans  le 
collège  de  Saint -Benoît.  On  lit  dans  l'His- 
toire de  Charles  VI,  que  '  Jean  de  France, 
duc  do  Berry,  avait  aclielé,  le  9  juillet  1400, 
les  Dialogues  de  saint  Grégoire  niiscn  fran- 
çais, pour  le  prix  de  quinze  écus  d'or,  pri- 
sés soixante  sous  parisis. 

G.  Saint  Grégoire  dit  dans  le  quatrième* 
livre,  qu'il  y  avait  trois  ans  et  plus  qu'un 
l'ail  qu'il  racfinle  était  arrivé  pendant  l'hor- 
rible ppsie  qui  ravagea  Rome  eu  5'.K);  ainsi 


Ce*  Diolti- 

gOW  ï^n'  l'ICB 

reçus  *i'in. 
putlie. 


Il,  fnreil 

I.9J  ;  k   <ioel-  : 
le  ocfflMiin 


'  Miilli  cnim  de  resurrectionc  duliilantes,  sicnt 
el  nos  aliquando  ftiimns.  Hrig.,  lt«m.  LMii»  Evan- 
gi'lia.  Quia  mullua  iiitia  sanclœ  Ecclesiœ  gre- 
inium  ro>i<litut(>s  de  vila  nninue  posl  mnrlem 
carnis  pcrpendo  dubilare.  UU.  III  Dialog.,  ea\\. 
xxxvui. 


»  Aupust.,  lili.  1!  ne  Cirit.  I)ei,  r.ip.  ix. 

'  I';iiiliis  Iti.Tc,  lili.  IV  tlisl.  loiigobard.,  cnp.  y. 

'  UW\.  lie  f.liailes  VI,  tmii.  I,  piif.'.  82. 

'  Iii  (d  ijtinrjve  uiorlnlitdlr  qtiiv  nnlt  Iricnninm 
txunc  urhfiii  rrhcminli^siiiiu  clade  vaslaïU.  Lit. 
IV,  cnj).  ,\.\vi. 


]      CIIAPITHE  XUX.  — SAINT  GRKGOIRE  LE  P.HANn,  PAPE. 


[Vir  SIKCLE 

donc  il  l'écrivait  dans  la  quatiit-mc  année 
lie  son  pontificat,  c'cst-!\-dirfi  en  593.  11  ex- 
|ili([U(>  dans  les  '  ternies  suivants  l'occasion 
(ie  cet  ouvrage  ;  «  lin  jour,  me  trouvant  ac- 
cablé par  riui[)orlinulé  de  iiuol(iues  gens  du 
monde,  qui  exigent  de  nous  en  leurs  allaires 
ce  (]ue  nous  ne  leur  devons  poiut,  je  me  re- 
tirai dans  un  lieu  écarté,  on  je  pusse  consi- 
dérer librement  tout  ce  qni  me  déplaisait 
dans  mes  occnpations.  »  Ce  lieu  de  retraite  * 
était  son  monastère  de  Saint-André.  II  con- 
tinue :  <i  Comme  j'y  étais  assis  depuis  quel- 
que temps  et  dans  un  morne  silence,  mon 
cher  fils  le  .diacre  Pierre,  qui  m'était  uni  par 
le  lien  de  l'amitié  depuis  sa  première  jeu- 
i;esse,  et  s'était  fait  le  compagnon  de  mes 
études  sur  l'Ecriture  sainte,  se  présenta  à 
moi  '.  Me  voyant  dans  l'affliction,  il  me  de- 
manda si  j'en  avais  ï|uelqne  nouveau  sujet. 
Je  lui  répondis  :  Ma  douleur  est  vieille  par 
l'habitude  que  j'en  ai  formée,  et  nouvelle  en 
ce  qu'elle  augmente  tous  les  jours.  Je  me 
souviens  de  ce  que  mou  âme  était  dans  le 
monastère,  au-dessus  de  toutes  les  choses 
jiérissables,  uniquement  occupée  des  biens 
célestes,  sortant  de  la  prison  de  son  corps  par 
la  contemplation,  désirant  la  mort ,  que  la 
plupart  regardent  comme  un  supplice,  et'l'ai- 
mant  comme  le  moment  de  son  entrée  dans 
la  vie  et  de  la  récompense  de  son  travail. 
Maintenant,  ù  l'occasion  de  ma  charge  pas- 
torale, je  suis  chargé  d'affaires  séculières, 
et  après  m'être  répandu  au  dehors  par  con- 
descendance, je  reviens  plus  faible  en  mon 
intérieur.  Le  poids  de  mes  soufl'rances  aug- 
mente par  le  souvenir  de  ce  que  j'ai  perdu; 
mais  à  peine  m'en  souvienl-il  :  car,  à  force 
de  déchoir,  l'âme  en  vient  jusqu'à  oublier 
le  bien  qii'elle  pratiquait  auparavant.  Pour 
surcroît  de  douleur,  je  me  souviens  de  la 
vie  de  quel<iues  saints  personnages  qui  ont 
entièrement  (quitté  le  monde,  et  leur  éléva- 
tion me  fait  mieux  connaître  la  profondeur 
de  ma  chute.  Je  ne  sais,  répondit  Pierre, 
de  qui  vous  voulez  parler  ;  car  je  n'ai  pas 
ouï  dire  qu'il  y  ait  eu  en  Italie  des  gens 

'  Prologo  in  Dial.,  tom.  11,  pag.  1,50. 

«  Mabil.  tom.  IV,  Ànalect.,  pag.  497. 

•  El  non  pas  «  J'avais  près  de  inoi  le  diacre  n 
etc.,  comme  l'a  traduit  D.  Ceillicr.  Le  latin  porte  : 
CuiH  a/ptctus  valde  et  diu  lacitus  sederem.  dilec- 
tissinius  fiHus  meus  Pi  Iriis  diaconus  adfuil;  et 
la  tradufliougrecciue  ;  Kf-O^Jo^évou/iov...  7ra,5siri)  /jLOt. 
Grv'.  m.  0pp.  m,  pag.  119-  lôO  ,  édit.  Migue. 
{L'éditeur.] 

'  La   langue  latine   était  déjà    fort    corrompue 


473 

d'une  vertu  extraordinaire,  t\u  moins  qui 
aient  fait  des  miracles.  »  Saint  (iri'goire  lui 
dit  alors  :  »  Le  jour  ne  me  sullirait  pas,  si 
je  voidais  raconter  ce  que  j'en  sais,  soit  par 
moi-même,  soit  par  des  témoins  d'une  pro- 
bité et  d'une  fidélité  reconnues.  »  Pierre  le 
pria  de  lui  raconter  quelques-uns  de  ces 
faits,  pour  l'édilication  de  ceux  qui  sont  plus 
touchés  des  exemples  que  de  la  doctrine. 
Saint  Grégoire  y  consentit,  et  ajouta  :  «  Pour 
ôter  tout  sujet  de  doute,  je  marquerai  â  cha- 
que fait  ceux  de  qui  je  l'ai  appris  ;  en  quel- 
ques-uns je  rapporterai  leurs  propres  paro- 
les, en  d'autres  je  me  contenterai  d'en  ren- 
dre le  sens,  parce  que  leur  langage  serait 
trop  '  rustique,  d 

7.  L'ouvrage  est  divisé  en  quatre  livres, 
dans  lesquels  saint  Grégoire  continue  son 
dialogue  entre  lui  et  Pierre.  Il  commence  le 
premier  par  la  vie  et  les  miracles  de  saint 
Honorât,  abbé  d'un  monastère  qu'il  avait 
établi  à  Fondi,  qui  est  aujourd'Jmi  une  ville 
épiscopale  de  la  Campanie  en  Italie.  Il  avait 
sous  sa  conduite  environ  deux  cents  moines, 
auxquels  il  servait  de  modèle  dans  la  prati- 
que de  toutes  les  vertus  religieuses.  IJ  mou- 
rut vers  l'an  530.  —  Saint  Libertin,  l'un  de 
ses  disciples,  et  prévôt  du  même  monastère 
du  temps  de  Totila,  roi  des  Goths,  se  rendit 
célèbre  par  sa  patience.  —  La  vertu  d'un 
moine  de  ce  même  établissement,  à  qui  était 
confié  le  soin  du  jardin,  était  si  grande,  que 
les  serpents  lui  obéissaient.  —  Saint  Équice 
fut  Père  de  plusieurs  monastères  dans  la  Va- 
lérie, aujourd'hui  l'Abbruzze  ultérieure.  Se 
trouvant  fatigué  dans  sa  jeunesse  de  rudes 
tentations  de  la  chair,  il  s'appliqua  à  l'orai- 
son avec  plus  d'assiduité.  Ses  prières  furent 
exaucées,  et  depuis  il  ne  ressentit  plus  au- 
cune tentation  semblable.  Outre  le  soin  des 
monastères  d'hommes  et  de  filles,  il  se  char- 
gea de  l'instruction  des  peuples,  allant  dans 
les  villes  et  les  bourgades,  et  dans  les  mai- 
sons particulières.  Félix,  homme  de  qualité 
de  la  province  de  Nursie,  lui  demanda  un 
jour  comment  il   osait  prêcher  sans   avoir 

dans  la  bouclie  du  peuple,  en  sorte  que  ces  ex- 
pressions auraient  été  indécentes  dans  un  ouvrage 
sérieux.  Fleury,  liv.  XXXV  Hist.  Eccle'siast.,  pag. 
83,  tom.  VIII. 

'  Le  met  hortnlanus,  qui  se  trouve  dans  le  texte, 
n'est  pas  un  nom  propre,  comme  l'a  cru  D.  Ceil- 
lier;  c'est  ce  que  prouve  la  traduction  grecque  où 
nous  lisons,  col.  163,  tom.  111,  édit.  Migne  :  ôj  tij  t*!» 
ToO  KiiTou  p^ovriJa  ^v  jtsïiijrsu/icvoj.  (L'éditeur.) 


Ll^rc  rre* 
nier  dr^  Ûii • 
liipu,".  \:t:. 
1T,(|,  lo:ri.  II. 


Cai'. 


Mi 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Cap. 


Ti'i,  ti.  % 
XI,  >ll. 


d'oiilro  sacré,  ni  de  permission  de  l'cvèque 
de  Rome.  Saint  Équice  lui  répondit  qu'il  s'é- 
tait fait  à  lui-même  ces  objections;  mais  qu'un 
jeune  homme  lui  ayant  apparu  la  nuit  et  lui 
ayant  appliqué  une  lancette  sur  la  langue, 
en  lui  ordonnant  en  même  temps  d'aller  prê- 
cher, il  ne  pouvait  plus  s'empêciier  de  par- 
ler de   Dieu.  Le  bruit  de  ses  prédications 
étant  venu  jusqu'à  Rome,  les  clercs  de  cette 
Eglise  remontrèrent  au  Pape  qu'il  fallait  em- 
pêcher ce  rustique  et  cet  ignorant  de  prê- 
cher, et  le  faire  amener  à  Rome,  afin  qu'il 
apprit  à  connaître  ce  que  c'est  que  la  disci- 
pline ecclésiasiique.  Le  Pape  envoya  Julien, 
défenseur  de  l'Église  romaine,  avec  ordre  de 
l'amener  avec  honneur.  Saint  Écjuice,  voyant 
Julien,  rendit  grâces  à  Dieu,  qui  le  visitait 
par  le  ministère  du  Souverain-Pontife  ;  et 
ayant  appelé  ses  frères,  il  fit  préparer  ce 
qui  était  nécessaire  pour  le  voyage.  Julien,  se 
trouvant  fatigué,   refusa  de  partir  le  jour 
même  de  son  arrivée;  sur  quoi  saint  Éijuice 
lui  dit  :   <i  Vous  m'atiligez  ;  si  nous  ne  par- 
tons aujourd'hui,  nous  ue  partirons  point,  n 
En  eQ'et,  le  lendemain  au  point  du  jour,  ar- 
riva un  courrier  avec  une  lettre  a  Julien, 
portant  défense  de  tirer  le  serviteur  de  Dieu 
de  son  monastère.  Julien,   s'élant  informé 
de  la  cause  de  ce  changement,  apjjiit  que  le 
Pape  avait  été  elfrayé  en  vision  peulant  la 
nuit ,    pour    avoir    donné    ordre    d'amener 
l'homme  de  Dieu.  On  met  la  mort  de  saint 
Équice  vers  l'an  340.  —  Il  y  avait  auprès  de 
la  ville  d'Ancône  une  église  sous  le  nom  de 
Saiut-Étienne,  dont  un  mansionnaire,  nom- 
mé  Constance,  avait   la   garde.  C'était  un 
homme  détaché  de  toutes  les  choses  de  la 
terre,  et  qui  n'avait  d'all'ection  que  pour  les 
biens  célestes.  La  sainteté  de  sa  vie  était 
connue  au  loin.  Un  jom-  que  l'huile  man- 
quait dans  cotte  église,  il  remplit  d'eau  tou- 
tes les  lampes,  y  mit  des  mèches  à  l'ordi- 
naire et  les  alluma;  aussitôt  elles  se  mirent 
à  brûler  comme  s'il  y  eût  eu  de  l'huile.  — 
Marcellin,  évêque  d'Ancône,  arrêta  un  in- 
cendie que  l'on  avait  tenté  inutilement  d'é- 
teindre, en  se  faisant  placer  par  ses  domes- 
tiques à  l'opposite  des  flammes.  —  Nonnose, 
abbé  du  mont  Soracfe,  ne  trouvant  pasmoyen 
de  l'aire  déiilacer  un  roclicr  d'un  lieu  où  il  l'-tait 
besoin  de  faire  un  jardin  pour  l'usage  de  ses 
frères,  recourut  à  Dieu,  et  passa  la  nuit  en 
prières  sur  le  lieu  même.  Le  malin,  les  frè- 
res étant  venus,  trouvèrent  que  le  rocher 
s'('lait  l'Ioigué,  el  leur  avait  laissé  un  long 


espace  pour  y  planter  un  jardin.  —  L'abbé 
Anasfase,  Boniface,  évéque  de  Férente,  For- 
tunat,  évêque  de  Todi,  firent  aussi  divers 
miracles,  de  même  que  Martyrius,  moine  de 
la  province  de  Valérie,  et  le  prêtre  Sévère. 
—  C'était  l'usage,  dans  cette  province,  d'im- 
primer le  signe  de  la  croix  sur  les  pains, 
avant  de  les  mettre  au  four  ou  sous  la  cen- 
dre, eu  sorte  qu'ils  paraissaient  coupés  en 
quatre. 

8.  Le  second  livre  contient  l'histoire  de  la 
vie  de  saint  Benoit,  depuis  son  enfance  jus- 
qu'à sa  mort.  Devenu  célèbre  par  ses  vertus 
et  ses  miracles,  il  lui  vint  do  toules  parts  un 
grand  nombre  de  disciples,  pour  qui  il  b.Mit 
douze  monastères,  mettant  en  chacun  douze 
moines  sous  un  supt'iieur.  Les  plus  nobles 
de  Rome  lui  donnèrent  leurs  enfants  à  éle- 
ver. Équitius  lui  confia  son  fils  Maur,  et  Ter- 
tuUus  son  fils  Placide,  encore  enfant.  Cédant 
à  l'envie  d'un  prêtre  nommé  Florent,  il  se 
relira  avec  quelques-uns  de  ses  moines  sur 
une  montagne  appelée  Cassin,  dans  le  pays 
des  Samnites,  où  il  bâtit  un  treizième  mo- 
nastère. Il  avait  laissé  les  douze  autres  sous 
la  conduite  des  supérieurs  qu'il  leur  avait 
donnés.  On  voyait  encore  à  Cassin  un  ancien- 
temple  d'Apollon,  el,  tout  autour,  des  bois 
consacrés  à  son  idole,  où  les  paysans  fai- 
saient des  sacrifices.  Saint  Benoit  brisa  l'i- 
dole, renversa  l'autel,  coupa  les  bois  consa- 
crés, et  dans  le  temple  même  d'Apollon  bâ- 
tit un  oratoire  de  saint  Martin,  et  un  de  saint 
Jean,  à  l'endroit  où  était  l'autel  de  l'idole, 
et  par  ses  instructions  il  attira  à  la  foi  tous  les 
peuples  du  voisinage.  Le  démon  s'en  vengea 
par  diverses  prévarications  dans  lesquelles 
il  engagea  les  moines  de  Cassin  ;  mais  elles 
servirent  à  faire  connaître  que  saint  lieuoit 
avait  reçu  de  Dieu  le  ilon  de  prédire  l'avenir, 
et  de  découviir  les  choses  les  plus  cachées. 
Le  roi  Totila,  vofulant  éprouver  ce  qui  en 
était,  envoya  un  de  ses  écuyei-s  nommé  Rig- 
gou,  à  qui  il  fit  prendre  sa  chaussure  et  ses 
habits  royaux,  et  le  fit  accompagner  de  trois 
seigneurs  qui  étaient  ordinairement  le  plus 
près  de  sa  personne,  avec  des  écuyers  et  un 
grand  cortège;  pour  lui,   il  s'arrêta  assez 
loin  du  monastère,  et  manda  qu'il  allait  ve- 
nir. Riggf>u  étant  eniré,  saint  Benoît,  qui 
était  assis,  lui  cria  de  loin  :  «  Mon  lîls,  ijuit- 
tez  l'habit  que  vous  portez,  il  ne  vous  ap- 
partient pas.  I)  Riggon  cl  tous  ceux  qui  l'ar- 
cnmpagnaienl  se  jclèrenl  par  terre  tout  ef- 
frayés, cl,  sans  oser  approcher,  ils  relour- 


SrcondlU:e 
i>.  Uiilogoc», 
1  »f.  J0-. 


[vu»  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT  GlU'aiUIItK  I.K  (iLlAM),  PAPE. 


Ho 


Cn[).  IV, 


XVII. 
Clip,  x^xit 


T'O^sième 
Hvro  des  Uia- 
lo;:ucs,  psç. 
S18. 


m'-i'ont  vers  Tolihi,  ù  qui  ils  racontèrent  en 
tremblant  comment  ils  avaient  été  décon- 
xi-rts.  Le  roi  vint  lui-mèinc,  et  se  jota  aux 
[lieds  du  Saiiit,  qui  l'oxliorta  à  mettre  lin  à 
ses  injustices.  Il  lui  prédit  qu'il  entrerait 
dans  Rome,  qu'il  passerait  la  mer,  et  qu'a- 
|irès  avoir  régne  neuf  ans,  il  mourrait  le 
dixième.  11  prédit  aussi  A  l'évèquc  Caiiosa 
(jue  la  ville  de  Rome  serait  battue  de  tem- 
pêtes', de  foudres  et  de  tremblements  de 
terre,  en  sorte  qu'elle  s'afiaililirait  comme 
lin  arbre  qui  sèciie  sur  sa  racine.  Dieu  lui 
fit  connaître  la  ruine  de  son  monastère  do 
Gassin,  quarante  ans  avant  qu'elle  arrivât. 
Il  accorda  h  ses  prières  la  résurrection  d'un 
enfant;  il  lui  lit  voir  l'àme  de  sa  sœur  en- 
trant au  ciel  en  forme  de  colombe,  et  celle 
de  saint  Germain,  évêque  de  Gapoue,  portée 
par  les  anges,  sous  la  forme  d'une  splièie 
ou  d'un  globe  de  feu.  L'année  même  de  sa 
mort,  il  la  prédit  à  quelques-uns  de  ses  dis- 
ciples, en  donnant  à  cejjx  qui  étaient  absents 
et  éloignés,  des  signes  pour  la  connaître.  La 
veille  de  sa  mort,  il  s'y  prépara  en  recevant 
le  corps  et  le  sang  de  Notre-Seigneur.  Le 
jour  qu'elle  arriva,  deux  moines,  dont  l'un 
était  dans  le  monastère  et  l'autre  en  était 
éloigné,  eurent  la  mémo  vision  :  ils  virent 
un  chemin  couvert  de  tapis,  et  éclairé  d'une 
intinité  de  llambeaux,   qui   s'étendait  vers 
l'orient  depuis  le  monastère  jusqu'au  ciel. 
Un  pei'sonnage  vénérable  y  paraissait,  qui 
leur  demanda  pour  qui  était  ce  cliemin.  Ils 
dirent  qu'ils  n'en  savaient  rien.  «  C'est,  leur 
dit-il,  le  chemin  par  où  Benoît,  le  bien-aimé 
de  Dieu,  esi  monté  au  ciel.  »  Il  se  fit  des 
miracles  dans  la  caserne  même  de  Sublac 
qu'il  avait  habitée.  Une   femme   qui   avait 
perdu  l'esprit,  y  étant  entrée  sans  le  savoir 
après  avoir  couru  jour  et  nuit  les  montagnes 
et  les  vallées,  les  liois  et  les  campagnes,  en 
sortit  parfaitement  guérie,  et  conserva  jus- 
qu'à la  mort  sa  présence  d'esprit.  Au  reste, 
ce  ne  fut  pas  seulement  par  ses  miracles  que 
l'homme  de  Dieu  se  rendit  célèbre  dans  le 
monde  ;  il  y  acquit  aussi  de  la  réputation 
par  sa  doctrine,  dont  il  a  laissé  des  monu- 
ments dans  sa  Règle,  qui  est  en  même  temps 
un  t(''mo:gnege  de  la  sainteté  de  sa  vie,  puis- 
qu'il n'a  pu.  enseigner  autrement  qu'il  n'a 
vécu. 

9.  Il  est  fait  mention  dans  le  troisième  li- 
vre de  plusieurs  grands  évêques  et  de  quel- 
ques papes.  Après  que  les  Wandales  eurent 


emmené  en  Afrique  plusieurs  captifs  de  la 
ville  de  Noie,  saint  Paulin,  n'ayant  rien  à. 
donner  à  une  pauvre  veuve  ipii  lui  deman- 
dait de  ipioi   racheter  son  lils,  se  lit  esclave 
pour  lui,  après  avoir  été  agréé  en  celle  qua- 
lité par  le  gendre  du  roi  de  ces  barbares. 
Si  ce  trait  de  charité  est   du  grand   saint 
Paulin,    comme  saint    Grégoire   semble   le 
dire,    il   s'est   glissé  visiblement  une  faute 
dans  le  texte  de  cette  histoire,  oîi  l'on  aura 
mis  les  Wandales  pour  les  Goths,  qui  en  ef- 
fet firent  des  incursions  en  Italie,  et  prirent 
la  ville  de  Noie  en  -410.  Les  Wandales  rava- 
gèrent aussi  l'Italie;   mais  ce  ne  fut  qu'en 
431,  l'année  de   la   mort  de  saint  Paulin. 
Saint  Augustin,  qui  parle  souvent  de  lui,  ne 
dit  rien  de  cette  captivité  volontaire,  non 
plus  qu'Uranius  son  panégyriste.  On  peut  eu 
faire  honneur  à  son  successeur,  qui  se  nom- 
mait aussi  Paulin,  et  sous  lequel  il  est  fort 
possible  que  les  Wandales  aient  pillé  Noie 
ou  les  environs. — Le  pape  JeanI",  envoyé 
en  ambassade  à  Constantinople  par  Théodo- 
ric  roi  d'Italie,  rendit  la  vue  à  un  aveugle  à 
l'entrée  de  cette  ville,  en  mettant  la  main 
sur  ses  yeux,  en  présence  de  tout  le  peuple 
qui  était  venu  au  devant  de  lui.  —  Agapet, 
que  Thcodat,  roi  des  Goths,  obligea  aussi 
d'aller   à  Constantinople,    étant  arrivé   en 
Grèce,   ou  lui  présenta  un  homme  qui  ne 
pouvait  ni  parler,  ni  se  lever  de  terre.  Il  de- 
manda à  ses  parents,  qui  le  lui  avaient  ame- 
né, s'ils  croyaient  qu'il  pût  le  guérir.  Ils  ré- 
pondirent qu'ils  en  avaient  une  ferme  espé- 
rance, vu  la  puissance  de  Dieu  et  l'autorité 
de  saint    Pierre.  Alors  le  Pape  se  mit  en 
prières  et   commença  la   messe,    api'ès  la- 
quelle, sortant  de  l'autel,  il  prit  le  boiteux 
par  la  main,  le  leva  de  terre,  le  fit  marcher 
à  la  vue  de  tout  le  peuple  ;  puis,  au  moment 
où  il  lui  mit  dans  la  bouche  le  corps  de  No- 
tre-Seigneur. sa  langue  fut  déliée.  —  Dacius, 
évéque  de  Milan,  étant  obligé  d'aller  à  Cons- 
tantinople pour  la  cause  de  la  foi,  passa  à 
Corinthe.  Comme   il   avait   une  nombreuse 
suite,  il  demanda   qu'on   lui  préparât  une 
maison  assez  vaste  qu'il  aperçut  de  loin; 
mais  les  habitants  voulurent  l'en  détourner, 
en  lui  disant  que  le  diable,  depuis  plusieurs 
années,  s'en    était  mis  en  possession.  L'é- 
vèque  répondit  que  c'était  pour  cela  même 
qu'il  voulait  y  loger.  R  fut  éveillé  au  milieu 
de  la  nuit  par  un  liruil  confus  de  voix  de 
toutes  sortes  d'animaux.  Alors,  reconnais- 


Caj^i  II 


476 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 


sant  que  c'était  l'antique  ennemi,  il  éleva  la 
voix,  en  lui  disant  :  «  C'est  loi,  malheureux, 
qui  as  dit  :  Je  m'élèverai  au-dessus  des  nuées  tes 
plus  élevées,  et  je  deviendrai  semblable  au  Très- 
i..i,i.T,ii,  Haut. Ton  orjrueil  ta  rendu  semblable  aux 
porcs  et  aux  souris,  et,  pour  avoir  voulu  être 
semblable  à  Dieu,  tu  es  semblable  aux  bé- 
tfs.  I)  A  cette  voix,  le  démon  se  relira  con- 
cap.T.       fus;  et  depuis,  la  maison  fut  habitable.  Le 
roi  Totila,  voulant  s'assuier  si  Sabin,  évèque 
de  Canosa,  avait,  comme  on  le  disait,  l'es- 
prit de  prophétie,  l'invita  à  cet  effet  à  diner, 
refusa  de  s'asseoir  avant  lui,  et  lui  donna  la 
droite.  Comme  le  domestique  destiné  à  le 
.'^ervir  lui  iftésentait  une  coupe  où  il  y  avait 
du  vin,  le  roi  avança  doucement  la  main,  et, 
prenant  la  coupe,  la   présenta  lui-même]  à 
Saiiin,  croyant  qu'il  ne  s'en  apercevrait  pas. 
L'homme  de  Dieu  reçut  la  coupe,  et,  quoi- 
qu'il ne  vit  point  celui  qui  la  lui  avait  pré- 
.«entée,  il  dit  :  Vive  la  main  elle-même.  Le  roi, 
se  voyant  découvert,  rougit;  mais  il  fat  Lien 
aise  d'avoir  trouvé  dans  le   saint  évèque  ce 
»••        qu'il  cherchait.  —  Le  même  prince  entrant 
dans  Narni,  Cassius,  qui  en  était   évèque, 
vint  au  devant  de  lui.  Totila,  lui  voyant  une 
couleur  de  visage  extrêmement  haute,  et  ne 
sachant  pas  qu'elle  lui  fut  naturelle ,    crut 
qu'elle  était  l'eflet  du  vin.  Dieu  le  ilélrompa 
bientôt;  car  un   de  ses  écuyers  ayant  été 
possédé  du   démon,  en  pleine  camiiagne,  à 
la  vue  de  toute  l'armée,  on  courut  aussitôt 
à  l'évêque,  qui,  par  ses  prières  et  par  le  si- 
gne delà  croix,  chassa  aussitôt  le  démon. — 

II.  Frigidien,  évèque  de  Lucqucs,  changea  par 
ses  prières  le  lit  de  la  rivière  de  Serchio,  que 
l(îs  habitants  n'avaient  pu  détourner  après 
de  longs  et  pénibles  travaux.  —  Sabin,  évè- 
({ue  de  Plaisance,  ordonna  aux  eaux  du  Pô, 
qui  désolaient  la  campagne,  de  rentrer  dans 
leur  lit;  elles  obéirent  dans  le  moment.  Il 
avait  chargé  de  cet  ordre  un  de  ses  diacres, 
qui  n'en  fit  que  rire.  Le  saint  évèque  envoya 
chercher  un  notaiie,  à  qui  il  dicta  l'oidre  en 
ces  termes  :  .Sabin,  serviteur  de  Aotre-Scigneur 
Jésus-Christ  ;  avertissement  au  Pô  :  Je  te  com- 
mande, au  nom  de  Jésus-Christ  Notre-Sriyneur, 
de  ne  plus  sortir  de  ton  lit  dans  ces  endroits-là, 
et  de  nejMint  endommager  les  tei-i-es  de  l' Église. 
Il  ajouta,  en  parlant  au  notaire  :  «  Allez,  écri- 
vez cet  ordre,  et  jetez-le  dans  le  fleuve.  »  Le 
notaire  obéit,    et  les   eaux   se  relirèrenl  à 

„  l'instant.  —  Saint  Cerbone  de   Populoniùm 

avait  donné  l'hospitalité  à  des  soldats;  pen- 
dant qu'ils  étaient  dans  sa  maison,  sui-vin- 


AUTEURS  ECCLÉSL\STIQUES. 

rent  des  Golhs.  Cerbone,  craignant  pour  la 
vie  de  ses  hôtes,  les  cacha.  Le  roi  Totila,  en 
ayant  été  averti,  fit  prendre  l'évêque,  et 
l'exposa  à  un  ours  furieux,  en  présence  de 
son  armée;  mais  cet  animal,  oubliant  sa  fé- 
rocité, vint  lécher  les  pieds  de  Cerbone;  ce 
qui  jeta  tous  les  assistants  et  le  roi  même 
dans  l'admiration.  —  Il  y  avait  auprès  de 
Spolète  un  serviteur  de  Dieu,  nommé  Isaac, 
que  Dieu  favorisait  du  don  des  miracles.  Un 
jour,  des  pèlerins  se  présentèrent  à  lui  a 
demi  nus,  pour  en  obtenir  de  quoi  se  cou- 
vrir mieux.  Le  Saint  les  laissa  lui  exposer 
leurs  besoins;  puis,  appelant  un  de  ses  dis- 
ciples, il  lui  dit  en  secret  d'aller  dans  la  fo- 
rêt voisine ,  et  d'apporter  les  habits  qu'il 
trouverait  dans  le  creux  d'un  arbre.  Le  dis- 
ciple obéit,  rapporta  les  habits,  et  les  donna 
à  Isaac.  Alors  il  appela  ces  étrangers,  et 
leur  dit  :  Prenez,  voilà  de  quoi  vous  vêtir.  » 
Ils  reconnurent  que  c'étaient  les  habits  qu'ils 
avaient  cachés  eux-mêmes,  et  s'en  allèrent 
confus.  —  Le  moine  Martin,  s'étant  retiré 
dans  le  creux  d'un  rocher,  obtint  de  Dieu 
qu'il  y  coulerait  une  fontaine,  qui  ne  fourni- 
rait de  l'eau  que  lorsqu'il  en  aurait  besoin. 
Le  démon,  pourl'en  chasser,  introduisit  dans 
la  caverne  un  serpent,  qui,  pendant  que  le 
Saint  priait,  se  plaçait  devant  lui,  et  qui  de 
même  s'étendait  auprès  de  lui  quand  il  se 
couchait  pour  prendre  du  repos.  Martin  eut 
cette  compagnie  pendant  trois  ans.  Quel- 
quefois il  mettait  la  main  ou  le  pied  dans  la 
gueule  du  serpent,  en  lui  disant  :  «  Si  tu  as 
reçu  le  pouvoir  de  me  nuire,  je  ne  t'en  em- 
pêche pas.  »  Le  démon,  vaincu  par  la  con- 
fiance du  Saint,  se  désista,  et  le  serpent  se 
retira  sur  la  montagne.  —  Environ  à  qua- 
rante milles  de  Rome,  il  y  avait  un  jeune 
moine,  nommé  Benoit,  qui  vivait  séparément 
dans  une  cellule.. Les  Goths,  l'ayant  trouvé, 
du  temps  de  Totila  leur  roi,  résolurent  de  le 
brûler  avec  sa  cellule  ;  mais  le  feu  ne  con- 
suma que  ce  qui  était  autour.  Fâchés  de  n'a- 
voir pas  réussi,  ils  jetèrent  Benoit  dans  un 
four  où  l'on  avait  mis  le  feu  pour  cuire  du 
liain,  et  en  fernièi-onl  l'eiitri'-i'.  Benoit  y  resta 
jusi|u"au  lendemain,  sans  que  lui  ni  si's  ha- 
bits en  fussent  endommagés.  —  Quarante  : 
paysans  ayant  refusé  de  manger  des  viandes 
otlèrtcs  aux  idoles ,  les  Lombards  les  tuè- 
rent, comme  ils  en  tirent  encore  mourir 
d'autres,  <jui  ne  voulurent  point  adorer  avec 
eux  la  tête  d'une  chèvre  qu'ils  avaient  sacri- 
fiée au  démon.  —  Un  de  leurs  évéques,  qui 


Cif.  zir. 


[vii'siÈci.K.l      (^.IIAPITRK  XLIX.  —  SAINT  GRl'lf.OinE  LE  ORANn,  PAPE. 


477 


('lait  arien,  s'dtaiU  emparé  ù  main  armée 
d'une  église  dans  la  ville  de  Spolète,  devint 
aveugle  dans  le  moment  même  où  il  y  en- 
tra, en  sorte  qu'il   fallut  le  reconduire  cliez 
lui.  Ce  miracle  oliligea  les  Lombards  ;\  res- 
pecter les  lieux  qui  appartenaient  anx  ca- 
c.p.  x^x,<.   Ilioliques.  —  Dans  la  persécution  des  Wan- 
dales,  en  AtVi(]ue,  leur  roi  iinnéricfit  couper 
la  langue  à  plusieurs  évèqnes,  qui  ne  laissè- 
rent pas  de  parler  librement,  sans  se  ressen- 
tir de  ce  supplice.  Saint  Grégoire  rapporte 
ce  lait   d'après  un  ancien  évèque,  de  (pii  il 
l'avait  appris  lorsqu'il  était  nonce  apostoli- 
que i\   Conslantinople.  11  ajoute   qu'un  do 
ceux  qui  avaient  conservé  l'usage  de  la  pa- 
role a[)rès  avoir  eu  la  langue  coupée,  étant 
tombé  dans  un   péché   d'impureté,   perdit 
ausssitot  La  liberté  de  parler  par  un  juste 
vixvr.      jugement  de  Dieu.  —  L'abbé  Maximien,  qu'il 
avait  eu  avec  lui  en  cette  ville  pendant  quel- 
que temps,  ayant  repris  le  chemin  de  Home, 
fut  battu  d'une  furieuse  tempête  sur  la  mer 
Adriatique;  le  vaisseau  sur  lecpiel  il  était 
prit  eau  avec   tant  d'aljondance,  que  lui  et 
ceux  qui  l'accompagnaient,  n'attendant  plus 
que  la  mort,  se  donnèrent  le  baiser  de  paix, 
et  reçurent  le  corps  et  le  sang  de  Jésus- 
Christ;  toutefois  ils  anivèrent  à  bon  port  à 
Crolone,  le  neuvième  jour  après  la  tempête, 
quoique  depuis  ce  temps  le  vaisseau  n'eut 
pas  désempli  d'eau;  mais,  aussitôt  que  Maxi- 
mien en  fut  sorti,  le  vaisseau  coula  A  fond, 
iixni.     — Les  Lombards  ayant  pris  un  diacie,  dans 
le  dessein  de  le  faire  mourir,  un  prêtre  de  la 
province  de  Nm-sie,  nommé   Sanctule,   qui 
était  connu  d'eux,  vint  leur  demander  sa  li- 
berté et  sa  vie.  Ils  le  refusèrent,  mais  ils 
consentirent  à  le  lui  confier,    à  la  charge 
que,  s'il  s'échappait,  ils  le  feraient  mourir  à 
sa  place.  Sanctule  accepta  la  condition,  et, 
voyant  les  Lombards  endormis,  il  pressa  le 
diacre  de  se  sauver;  le  diacre,  après  quel- 
que résistance,  prit  la  fuite,  et  Sanctule  de- 
meura  au  même    endroit;    les   Lombards, 
voyant  qu'il  avait  laissé  échapper  le  prison- 
nier, le  condamnèrent  lui-même  à  mon.  Ils 
lui  déférèrent  le  choix  du  supplice;  mais  il 
leur  répondit  qu'il  était  entre  les  mains  du 
Seigneur,   qu'ils  pouvaient  le  faire  mourir 
de  la  manière  qu'il  permettrait.  Ils  résolu- 
rent de  lui  trancher  la  tête.  Sanctule,  con- 
duit au  supplice,  environné  de  gens  armés, 
se  mit  en  prières,  puis  tendit  le  con  au  bour- 
reau ;  mais,  après  que  ce  barbare  eut  levé 
le  bras  pour  donner  le  coup,  il  devint  roide 


Kccles.  V, 


l'I  imuiohile.  Ceiuiracle  fut  suivi  d'im  antre. 
Sanctule  gnéiit  le  Lombard  et  lui  rendit 
l'usage  de  son  bras,  après  Ini  avoir  l'ait  pro- 
mettre qu'il  ne  s'en  servirait  jamais  pour 
metlre  à  mort  des  chrétiens.  —  llédemptus,  c.p.  v„..„ 
évèque  de  Férenle,  fut  averti  dans  une  vi- 
sion, par  le  saint  Marlyr  Eulychiiis,  des  ra- 
vages que  les  Lombards  devaient  faire  en 
Italie. 

10.  Le  but  du  qualrième  livre  est  d'all'er-     ,,„  „,,,„„ 
mir  la  foi  de  quelques  pei'sonnes,  qui  don-   i'„'To.''°' °;'' 
talent  de  l'immortalité  de  l'âme  et  de  la  ré-  ^''' 
sin-rection  des  corps.  Comme   ils  pouvaient     ^.^^ 
avoir  été  induits  dans  cette  erreur  par  ces 
paroles  du  livre  de  l'Ecclésiaste  -.Les  hnmtnrs 

,       ,  ,  I.cclcilast. 

meurent  comme  les  Odes,  et  leur  sort  est  fart  i-(jnl,  '"■  '''■ 
il  fait  voir  que  Salomon ,  dans  ce  livre, 
avance  certaines  choses  par  manière  de  ques- 
tion, et  qu'il  en  décide  d'autres  par  les  bi- 
mières  de  la  raison  et  de  la  foi  ;  qu'il  parle 
quelquefois  au  nom  d'une  personne  encore 
attachée  anx  plaisirs  du  monde,  et  plus  sou- 
vent au  nom  d'un  homme  sage,  qui  ne  dit 
rien  que  de  confoime  h  la  vérité  et  anx  rè- 
gles delà  morale  la  plus  pure.  L'homme  sen- 
suel et  terrestre  dit  dans  le  cinquième  cha- 
pitre :  //  me  semble  qnHl  est  bon  que  l'honinie 
mange  et  boive,  et  qu'il  jouisse  de  lu  joie  qui  est 
le  fruit  de  son  travail.  L'homme  vertueux 
dit  dans  le  septième  :  //  vaut  mieux  aller  à  „^^  ^,„  ,_ 
une  maison  de  deuil  qu'à  une  maison  de  festin  ; 
et  il  en  marque  l'utilité,  en  disant  :  Lorsqu'on  „,.j 
va  à  une  maison  de  deuil,  on  est  averti  de  la  fin 
de  tous  les  hommes  ;et  celui  qui  est- encore  en 
vie,  est  excité  àpenser  ce  qu'il  feï-a  un  jour,  et 
ce  qui  doit  lui  arriver.  Le  libertin  dit  :  La  mort 
de  l'homme  est  la  même  que  celle  des  bêtes,  et 
leur  condition  est  éqale.  Comme  l'homme  meurt,     „  , 

j  '        y^flfï.   III, 

les  bêtes  meurent  aussi  ;  les  uns  et  les  autres  res-  "• 
pirent  de  même,  et  l'homme  n'a  rien  au-dessus 
de  la  bête.  Le  Sage  détruit  ce  sentiment,  C!i 
disant  :  Qu'a  le  sage  de  plus  que  l'insensé,  et 
qu'a  aussi  le  pauvre  de  plus  que  lui,  sinon  qtc'il 
va  au  lieu  oh  est  la  vie?  Par  ces  paroles,  Salo- 
mon fait  voir  que  le  sage  a  quelque  chose 
non-seulement  au-dessus  de  la  bête,  mais 
encore  au-dessus  de  l'homme  imprudent, 
puisqu'il  va  au  lieu  de  la  vie,  où  l'insensé  n'en- 
tre point  ;  que  l'on  ne  peut  pas  dire  que  la 
mort  de  l'homme  soit  la.  même  que  celle  de 
la  bête,  puisque  celle-ci  ne  vit  plus  après  sa 
mort,  au  lieu  que  l'honmic,  môme  après  sa 
dissolution,  vit  encore  dans  la  meilleure  par- 
tie de  lui-même,  qui  est  son  âme.  Pour  ren- 
dre son  immortalité  sensible  aux  hommes  les 


HISTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


478 

plus  grossiers,  il  rappoile  les   apparitions 
de  plusieurs  âmes,  qui  se  firent  ou  dans  le 
temps  de  leur  séparation  d'avec  le  corps,  ou 
quelque  temps  aprf's.  Saint  Benoit  vit  au  mi- 
lieu de  la  nuit  l'àme  de  saint  Germain,  évêque 
de  Capouc,  selever  dans  le  ciel  sous  la  for- 
me d'un  globe  de  feu.—  Le  moine  Grégoire, 
quoique  dans  un  monastère  fort  éloigné  de 
celui  où  demeurait  Spécieux  son  frère,  vit 
son  àme  au  moment  où  elle  sortit  de  son 
corps.  11  raconta  sur-le-champ  sa  vision  ù  ses 
confrères,  alla  au  monastère  de  Spécieux,  et 
le  trouva  déjà  enterré.  —  Le  prêtre  Nursiu 
vit  à  riieuie  de  sa  mort  les  apôtres  saint  Pierre 
et  saint  Paul,  qui  l'invitaient  à  venir  avec  eux 
daasle  cieîi — SaintJuvénal  etsaiut  Kleulhère 
apparurent  à  Probus,   évêque  de  Rièti,  au 
moment  de  sa  mort.  —  Tarsillc,  tante  de  saint 
Grégoire,  étant  arrivée  a  une  émiuente  sain- 
teté, Félix,  qui  avait  été  Pontife  de  l'Église 
romaine,  lui  apparat  dans  une  vision,  où  il 
lui  montra  la  place  qu'elle  devait  occuper 
dans  la  gloire  céleste,  en  lui  disant  :«  Venez, 
et  je  vais  vous  recevoir  dans  celte  demeure 
de  lumière.  »  Aussitôt  après,  Tarsille  tomba 
malade  d'une  fièvre,  qui  la  réduisit  à  l'ex- 
trémité. Étant  près  d'expirer,  elle  vit  Jésus 
qui  venait  à  elle.  Alors,  s'adressant  aux  per- 
sonnes qui  étaient  autour  de  son  lit,  elle  leur 
dit  à  haute  voix  :  »  Retirez-vous,  je  vois  Jé- 
sus qui  vient.  »  Comme  elle  avait  les  yeux  at- 
tachés sur  le  Sauveur,  son  âme  sortit  de  son 
corps,  et  à  l'instant  une  odeur  très-agréable 
se  répandit  dans  toute  la  chambre.  —  Trois 
ans  avant  que  saint  Grégoire  écrivit  son  qua- 
trième livre  des  Dialogues,  il  y  avait  i'i  Homo 
un  enfant  accoutumé  à  blasphémer  le  nom 
de  Dieu  ;  il  tomba  malade,  et  les  malins  es- 
prits lui  apparurent.  Etl'rayé,  il  cria  à  son 
père  d'empêcher  qu'ils  ne  lui  fissent  du  mal. 
Le  père,  voyant  son  fils  tremblant,  lui  de- 
manda ce  iin'il  voyait.  Il  répondit:  «DesMau- 
res  sont  venus  qui  veulent  m'enlever.  »  Ayant 
lait  cette  réponse,  il  blasphéma,  et  mourut 
dans  le  moment.  —  Saint  Grégoire  prouve 
par  les  miracles  qui  se  font  aux  tombeaux 
des  martyrs,  après  les  opprobres  qu'ils  ont 
reçus  de  leurs  persécuteurs,  que  le  mérite 
de  ['Cime  ne  se  fait  pas  toujours  connaître  au 
moment  même  de  sa  sépaiation  d'avec  le 
j-oips.  —  11  ne  doute  pas  que  ceux  qui  sont 
"    parfaitement  justes  en  sortant  de  ce  monde, 
ne  jouissent  tout  d'abord  de  la  félicité  éter- 
nelle ;  mais  il  croit  qu'elle  est  différée  i\ceux 
il  qui  il  manque  quelque  degré  de  cette  par- 


faite justice.  Il  ajoute,  qu'encore  que  les  jus- 
tes jouissent  dès  aujourd'hui  de  la  gloire, 
elle  augmentera  i\  leur  égard  au  jour  du  ju- 
gement par  celle  qui  sera  accordée  au  coij.s 
après  la  résurrection  ;  que,  comme  il  est  de 
la  justice  de  Dieu  de  récompenser  les  bons 
dans  le  ciel,  sa  justice  exige  aussi  que  les 
méchants  soient  punis  dans  l'enfer;  qu'il  est 
aussi  facile  que  le  feu  matériel  agisse  sur 
l'âme,  qu'il  l'est  que  l'âme  soit  renfermée 
dans  un  corps.  —  Il  avait  appris  de  Julien, 
défenseur  de  l'Église  romaine,  qu'un  soli- 
taire d'une  grande  vertu  avait  eu  révélalion 
de  la  mort  du  roi  Théodoric,  et  vu  ce  prince 
jeté  dans  la  fournaise  par  le  pape  Jean  et  le 
patriceSymmaque,qu'ilavait  maltraités  pen- 
dant son  règne.  —  Il  enseigne,  surrauloiité 
de  la  parabole  du  mauvais  riche  et  du  La- 
zare, qu'en  l'autre  vie  les  bons  connaissent 
les  bons,  et  les  méchants  les  méchants  ;  que 
quelquefois  l'âme,  à  la  sortie  du  corps,  re- 
connaît ceux  avec  qui  elle  a  péché,  et  ceux 
qui  ont  été  les  compagnons  de  ses  bonnes 
œuvres  ;  sur  quoi  il  rapporte  l'exemple  d'un 
saint  moine  nommé  Jean,  qui,  en  ex[)irant, 
appela  Ursus,  moine  d'un  autre  monastère, 
qui  en  cflèt  mourut  à  la  même  heure,  comme 
ou  l'apprit  après  s'en  être  informe  exacte- 
ment. —  Il  en  rapporte  deux  autres  pour 
preuves  de  l'immortalité  de  l'àme,  l'un  d'un 
religieux  apjielé  Pierre,  l'autre  d'un  nommé 
Etienne,  qui  était  un  homme  de  qualité. 
Tous  deux  moururent  et,  après  avoir  vu  les 
supplices  de  l'enfer,  ressuscitèrent.  Pien-e 
se  retira  dans  un  désert,  où  il  vécut  dans  une 
si  grande  pénitence,  que  si  sa  langue  ne  di- 
sait pas  qu'il  avait  été  en  l'autre  monde , 
l'austérité  de  sa  vie  le  disait  assez.  Saint 
Grégoire,  en  parlant  de  l'état  où  l'âme  se 
trouve  après  la  mort,  dit  que,  quand  elle  n'est 
pas  assez  pure  pour  entrer  aussitôt  dans  le 
ciel,  elle  est  retenue  dans  quelque  lieu  où 
elle  achève  d'expier  ses  fautes,  et  où  elle 
peut  être  soulagée  par  les  prières  des  fidèlos, 
et  principalement  par  le  sacrifice  de  la  mes- 
se, pourvu  qu'en  cette  vie  elle  ait  miirité 
cette  grâce  par  ses  bonnes  œuvies.  Ce  fiil  par 
ses  grandes  aumônes  que  le  diacre  Paschasc, 
qui,  pour  avoir  pris  la  défense  de  l'antipa- 
pe Laurent  contre  Symmaque,  avait  été  mis 
en  puigaloire,  en  fut  délivré  par  les  piièros 
de  Germain,  évêque  de  Capoue.  La  faule  de 
Paschase,  n'étant  poiut  un  péché  de  malice, 
mais  d'ignorance,  pouvait  être  purifiée  après 
sa  mort.  —  11  n'y  a  rieu  d'assuré  sur  le  lieu 


C>p.  UTIII. 


[vii'siKCLK.J      CHAPITRE  XLIX.  — SAINT 

ilo  rciircr;  mnis  l'ICcrilure  semble  le  placer 
sons  lit  icno. 
Cip.  ii.v.  Comme  la  juie  des  bons  ne  liniia  point, 
anssi  les  supplices  des  mécliants  n'auront 
poinl  (!o  fin.  Si  l'on  dit  qm-  Dieu  n'a  menacé 
les  pécheurs  d'une  peine  éleinollo  (juc  poul- 
ies obliger  <1  s'abstenir  de  pécher,  il  faudra 
(lire  aussi  qu'il  nous  a  fait  de  fausses  pro- 
messes pour  nous  attirer  à  la  vertu.  11  pa- 
rait, dira-t-on,  peu  conforme  h  la  justice  de 
punir  par  un  supplice  qui  n'aura  point  de 
fin,  une  faute  qui  est  finie  et  qui  a  des  bor- 
nes; mais  il  faut  faire  attention  que  Dieu 
n'a  pas  égard  seulement  à  l'action  du  pé- 
ché, mais  encore  à  la  disposition  du  cœur 
de  l'homme,  qui  est  telle,  que  s'il  avait  à 
vivre  sans  fin,  il  pécherait  sans  fin;  ainsi 
donc  il  est  de  la  justice  exacte  du  souverain 
Jujie  que  ceux  qui,  pendant  leur  vie,  n'ont 
jamais  voulu  être  sans  péché,  ne  soient  ja- 
mais sans  supplice  après  leur  mort.  On  dira 
encore  que,  lorsqu'un  esclave  fait  des  fautes, 
son  maître  ne  le  fait  battre  que  pour  le  corri- 
ger, et  que  les  pécheurs  livrés  au  feu  de  l'en- 
fer ne  pouvant  se  corriger,  il  est  inutile  de 
les  faire  brûler  éternelloment.  Saint  Gré- 
goire répond  que  Dieu,  étant  juste,  ne  cesse 
de  venger  les  crimes,  pour  ne  pas  manquer 
à  sa  justice;  qu'au  surplus  les  supplices  des 
damnés  augmenteront  la  reconnaissance  des 
bienheiueux,  qui  verront  en  Dieu  avec  plus 
de  plaisir  le  bonheur  qu'ils  possèdent,  en 
considérant  dans  les  damnés  les  supplices 
qu'ils  ont  évités  par  un  bienfait  de  la  grâce 
divine.  Mais  si  les  bienheureux  sont  saints, 
comment  ne  prient-ils  pas  pour  les  damnés? 
Dieu  qui  écoute  les  prières  de  ceux  qu'il  ai- 
me, les  exaucerait  sans  doute.  Les  saints 
prient  pour  leurs  ennemis,  répond  ce  saint 
Pape,  lorsqu'ils  peuvent  les  convertir  et  leur 
procurer  une  pénitence  qui  produise  en 
eux  des  fruits  de  salut.  Mais  les  damnés 
ne  pouvant  plus  se  convertir  ni  faire  une 
pénitence  salutaire,  les  prières  que  les 
saints  feraient  pour  eux  seraient  inutiles  ; 
et  de  là  vient  que  nous  ne  prions  ni  pour 
le  diable  ui  pour  les  mauvais  anges,  que 
nous  savons  être  condamnés  à  des  suppli- 
L,  ces  éternels.  —  Saint  Gi'égoire  pense  qu'il 

y  a  de  l'avantage  pour  ceux  qui  ne  sont 
point  chaigés  de  péchés  mortels  en  mou- 
rant, à  être  enterrés  dans  une  église,  par- 
ce que  leurs  proches,  en  y  venant  et  en 
voyant  leurs  tombeaux,  sont  portés  à  prier 
pom-  eux;  mais  qu'à  l'égard  de  ceux  qui 


GRKGOIHK  \.E  GIIANI),  PAPIv  ^79 

meurent  en  péché  mortel,  la  sépulline 
qu'on  leur  accorderait  dans  une  église,  no 
lerait  qu'augmenter  leur  condamnât  ion;  c'est  '^''-  '"• 
ce  qu'il  prouve  par  divers  exemples.  L'évé- 
que  de  liresse,  ville  située  dans  l'état  de  Ve- 
nise, avait  accordé  pour  de  l'argent  la  si'- 
luillure  dans  l'église  au  patrice  Valérien, 
mort  dans  de  mauvaises  habitudes  qu'il  n'a- 
vait jamais  voulu  corriger.  La  même  nuit 
qu'il  y  fut  enterré,  saint  Faustin,  martyr, 
apparut  au  gardien  de  cette  église,  et  lui 
donna  ordre  d'avertir  l'évêque  de  jeter  de- 
hors le  cadavre  de  Valérien,  sous  peine,  en 
cas  de  refus,  de  mourir  lui-même  dans  trente 
jours.  Le  gardien  n'ayant  point  voulu  se 
charger  de  la  commission,  même  après  une 
seconde  monition,  l'évêque,  qui  se  portait 
bien  en  se  couchant,  fut  trouvé  mort  le  1  ii- 
demain  matin  du  trentième  jour. 

ARTICLE   III. 

DES  LETTRES  DE  SAINT  GnÉOOIRE. 

§!• 

Lettres  du  premier  Livre. 

\.  On  préfère  ordinairement  les  lettres  des  «-■''"?"■« 
grands  hommes  à  leurs  autres  écrits,  parce  s!' gJ!' oi'r/.' 
qu'elles  en  font  beaucoup  mieux  connaître  le 
génie,  et  les  qualités  de  l'esjjril  et  du  co'ur. 
Saint  Grégoire  s'est  si  bien  dépeint  dans  les 
siennes,  qu'on  n'a  aucune  peine  à  y  trouver 
le  portrait  qu'en  ont  fait  ses  historiens.  On 
y  voit  sa  prudence  admirable  dans  le  gou- 
vernement de  l'Église,  sa  sollicitude  pasto- 
rale, son  zèle  pour  l'unité ,  sa  grandeur 
d'âme  dans  les  adversités,  sa  tendre  cTinrilé 
envers  les  indigents  et  les  malheureux,  sa 
fermeté  dans  le  maintien  des  lois,  sa  pro- 
fonde humilité,  et  toutes  les  autres  vérins 
qui  l'ont  rendu  recommandable.  Le  [regis- 
tre de  ses  lettres  ne  contient  que  celles  qu'il 
écrivit  étant  pape.  On  les  a  distribuées  en  qua- 
torze livres  dont  le  dernier  est  impaifait, 
c'est-à-dire  qu'il  ne  renferme  que  les  lettres 
écrites  pendant  les  six  dei'niers  mois  du 
pontificat  de  saint  Grégoire,  au  lieu  que  les 
autres  contiennent;  chacun  les  lettres  d'une 
année  entière;  le  premier  celles  de  l'an  590, 
le  second  celles  de  391,  et  ainsi  de  suite  jus- 
qu'au 12  mars  de  l'an  604,  ce  qui  fait  treize 
ans  et  six  mois,  à  commencer  au  mois  de 
septembre  de  l'an  390,  auquel  il  fut  consa- 
cré, et  à  finir  au  12  mars  604.  Elles  sont  da- 


480 


HISTOIRE  GI-INKRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQU'ES. 


premier  Uvre^ 
^t.  OC. 


K[Isl.  I, 


tées  des  indictions,  qui  étaient  un  nombre 
de  quinze  années.  Celte  faron  lic  compter 
était  en  usage  '  dès  le  temps  de  saint  Am- 
broise,  et  même  auparavant;  mais  saint  Gré- 
goire est  le  premier  des  Papes  qui  s'en  soit 
servi  dans  ses  lettres.  Il  est  aussi  le  premier 
des  évoques  '  de  Rome  qui  ait  employé  la 
formule  de  serviteur  des  serviteurs  de  Dieu, 
et  ses  successeurs  l'ont  prise  de  lui,  pour 
imiter  son  liumilité.  Mais  cette  formule  n'é- 
tait pas  nouvelle  ;  on  la  trouve  dans  quel- 
ques lettres  de  saint  Augustin  et  de  saint 
Fulgence.  Saint  Ildophonse  '  ne  compte  que 
douze  livres  de  lettres,  et,  c'est  peut-être 
sur  son  témoignage  que  dans  les  anciennes 
éditions  ou  u'eu  compte  pas  davantage  ;  mais 
aussi  on  y  compte  deux  fois  le  second,  et 
deux  fois  le  septième,  ce  qui  revient  au  nom- 
bre de  quatorze. 

2.  Toutes  les  lettres  du  premier  livre  sont 
de  la  neuvième  indiction,  c'est-à-dire  de  l'an 
590.  C'était  l'usage  des  Papes  d'avoir  un  vi- 
caire dans  la  Sicile,  dont  les  églises  étaient 
plus  particulièrement  soumises  au  Sainl- 
Siége,  parce  qu'elles  étaient  du  nombre  des 
suburbicaires,  que  le  sixième  canon  de  Ni- 
cée  assujettit  ii  l'évêque  de  Rome,  suivant 
l'ancienne  coutume.  Saint  Grégoire  nomma 
pour  cet  oflice  le  sous-diacre  Pierre,  qui 
avait  l'administration  du  patiimoine  de  saint 
Pierre  en  cette  ile.  Il  en  donna  avis  aux  évè- 
ques,  en  leur  ordonnant  de  tenir  des  conci- 
les chaque  année  à  Syracuse  ou  à  Catane, 
pour  le  règlement  des  affaires  ecclésiasti- 
ques de  la  province,  pour  le  maintien  de  la 
discipline,  et  sur  les  moyens  à  prendre  pour 
subvenir  aux  besoins  des  pauvres.  Piei-re  de- 
vait présider  ii  ces  assemblées,  comme  légat 
du  Saint-Siège.  Il  parait  qu'il  n'y  avait  pas 
encore  de  métiopolitain  dans  la  Sicile.  Jus- 
tin en  était  alors  préleur.  Un  des  devoirs  de 
sa  charge  était  d'envoyer  ;"i  Rome  la  provi- 
sion de  blé;  l'hiver  approchait,  et  il  n'avait 
encore  rien  envoyé.  Saint  Grégoire  lui  écri- 
vit pour  lui  représenter  que,  si  cette  ville  ve- 
nait, par  sa  négligence,  A  manquer  de  blé 
dans  un  temps  où  elle  n'en  |iouvait  tirer 
d'ailleurs,  bloquée  comme  elle  l'étiiil  parles 
Lombards,  il  serait  coupable  de  la  mort  de 
tout  un  grand  peuple.  —  Il  se  plaignit  à  Paul, 
scolastique,  qui  l'avait  félicité  sur  son  élé- 
vation ,  de  ce  qu'on  l'avait  mis  hors  d'é- 


tat de  jouir  du  repos  qu'il  désirait;  à  Jean 
de  Constantinople,  de  ce  q\i'il  ne  l'aimait  pas 
selon  la  règle  de  la  charité,  puisqu'il  n'avait 
pas  empêché  qu'on  lui  imposât  la  charge  de 
l'épiscopat,  qu'il  avait  voulu  lui-même  fuir; 
et  à  Théotiste,  soîur  de  l'Empereur,  de  ce 
qu'on  l'avait  chargé  de  plus  de  soins  qu'il 
n'en  avait  étant  laïque,  n  L'orage  de  la  ten- 
tation m'a  jeté,  lui  dit-il,  dans  les  alarmes  et 
les  frayeurs.  Quoique  je  ne  craigne  rien  pour 
moi,  je  crains  beaucoup  pour  ceux  dont  je 
suis  chargé.  L'Empereur  doit  s'imputer  tou- 
tes mes  fautes  et  mes  négligences,  jmnr 
avoir  confié  un  si  grand  ministère  à  une  per- 
sonne si  faible.  »  Les  lettres  au  patrice  Nar- 
sès,  et  à  Anastase,  patriarche  d'Antioche , 
sont  aussi  des  réponses  aux  compliments  de 
félicitation  qu'ils  lui  avaient  faits  sur  son 
élection.  Il  dit  à  ce  dernier  :  «  Quand  vous 
me  nommez  la  bouche  et  le  flambeau  du  Sei- 
gneur, quand  vous  dites  que  je  puis  être 
utile  à  plusieurs,  c'est  le  comble  de  mes  ini- 
quités de  recevoir  des  louanges,  au  lieu  des 
châtiments  que  je  mérite.  Je  n'ai  point  de 
termes  pour  vous  marquer  de  combien  de 
soins  je  suis  accablé  dans  la  place  que  j'oc- 
cupe. »  — L'église  de  Formies  était  tellement 
désolée  par  le  malheur  des  temps,  que  le 
peuple  et  le  clergé  étaient  réduits  presque  .'l 
rien.  Saint  Grégoire,  pour  doqner  à  Bacaude, 
qui  en  était  évéque,  le  moyen  de  se  soute- 
nir, unit  ;\  l'église  de  Formies  celle  de  Min- 
turue,  avec  tous  ses  revenus  et  tous  ses  pri- 
vilèges. —  L'abbé  du  monastère  de  Saint- 
Théodore,  dans  le  voisinage  de  Païenne,  en 
Sicile,  s'était  plaint  de  ce  que  les  habitants 
d'une  terre  de  l'Église  romaine  voulaient 
s'emparer  d'un  bien  appartenant  à  son  mo- 
nastère; saint  Grégoire  écrivit  au  sous-diacre 
Pierre,  son  vicaire  dans  cette  province,  d'aller 
sur  les  lieux,  et  d'abandonner  la  prétention 
do  l'Eglise  romaine,  danslccas  oii  le  monas- 
tère serait  eu  paisible  possession  depuis 
quarante  ans.  —  Il  reçut  une  requête  do  la 
part  des  juifs,  qui  fendait  A  les  laisser  en 
possession  d'une  synagogue  qu'ils  avaient  à 
Terracine;  sur  quoi  il  écrivit  aux  l'vêqnes 
Bacaude  et  Agnellus  de  voir  si  celle  synago- 
gue était,  comme  on  le  lui  avait  dit,  si  pro- 
che de  l'église,  que  les  voix  des  juifs  se  mê- 
lassent avec  celles  des  chrétiens,  lors(]u'ils 
chantaient  en  môme  temps;  que  s'il  en  était 


Cap.  ». 


'  Aiiibro?.  I  Class.,  Epist.  23,  num.  16. 
•  Jnau.  Uiac,  lili.  Il,  iiiini.  I. 


*  lldopbotis.,  De  Scriplor.  Eccles.,  caii.  i. 


[vu*  SIÈCLE.]      CHArrrnK  xlix.  —  saint  ORi^inomE  lk  ghand,  pape. 


/iSl 


ainsi,  ils  eussent  à  dtîsigaor  un  aiilii^  ciulroil 
aux  juil's  ilaus  la  inôiuo  villo,  où  ils  |>iiss(MiI 
avec  liberté  piatiquer  leurs  C(5réiuoiiies, 
avec  défense  toutelbis  d'avoir  des  esclaves 
chrétiens.  — Jean,  évèque  d'Orviéto,  s'op- 
posait à  ce  que  l'on  dit  des  messes  et  entcr- 
i;U  les  morts  dans  le  monastère  de  Saint- 
Georges;  Agapet,  qui  eu  était  abbé,  s'en 
plaignit  à  saint  Grégoire,  qui  défendit  à  Jean 
de  vexer  k  l'avenir  ce  monastère  en  quoi  que 
ce  fût.  —  Il  défendit  aussi  à  Dominique,  évè- 
que  de  Civita-Veccbia,  de  troubler  la  veuve 
deZémarclius  dans  les  fonctions  d'une  charge 
([ue  son  mari  avait  exercée,  et  qui  lui  était 
nécessaires  pour  soutenir  sa  famille. 

3.  La  lettre  à  Démétrius,  évèquc  de  Na- 
ples,  est  pour  l'exhorter  à  recevoir  avec 
beaucoup  de  douceur  ceux  qui,  après  avoir 
eu  quelques  doutes  sur  la  foi,  demandaient 
à  être  reçus  dans  l'Église  catholique.  —  Sur 
l'avis  qu'où  lui  donna  que  l'église  de  Popu- 
lonium  était  tellement  aliundonnée,  qu'on  n'y 
administrait  ni  la  pénitence  aux  mourants, 
ni  le  baptême  aux  enfants,  il  écrivit  h  Bai- 
bin,  évéque  de  Roselle ,  de  prendi'e  soin  de 
cette  église,  en  qualité  de  visiteur,  d'y  éta- 
blir un  prêtre  cardinal  et  deux  diacres,  et 
trois  prêtres  dans  les  paroisses  de  la  campa- 
gne. On  nommait  cardinaux  les  évèques,  les 
prêtres  et  les  diacres  titulaires  et  attachés  à 
nue  certaine  église,  pour  les  distinguer  de 
ceux  qui  ne  les  servaient  que  pour  un  temps 
et  par  commission.  —  Sévère,  évêque  d'A- 
quilée,  était  à  la  tète  des  schismatiques  qui 
refusaient  de  condamner  les  Trois-Ckapitres: 
le  Pape  lui  ordonna  de  venir  à  Rome  avec 
ceux  de  son  parti,  suivant  l'ordre  de  l'Empe- 
reur, pour  assister  au  concile  qui  devait  s'y 
tenir  sur  ce  sujet.  —  Autharit,  roi  des  Lom- 
bards, avait  défendu  que  les  enfants  de  sa 
nation  fussent  baptisés  dans  l'Église  catho- 
lique à  la  fête  de  Pâques  de  l'an  3'JO.  Dieu 
l'en  punit,  et  il  mourut  au  mois  de  septem- 
bre suivant.  Cependant  les  évèques  ariens 
baptisèrent  ces  enfants.  Saint  Grégoire  écri- 
vit une  lettre-circulaire  à  tous  les  évèques 
d'Italie,  et  il  les  chargeait  d'avertir  les  Lom- 
bards dont  les  eufants  avaient  reçu  le  bap- 
tême de  la  main  des  ariens,  de  les  faire  ré- 
concilier à  la  foi  catholique,  pour  éviter  la 
colère  de  Dieu,  qui  se  manifestait  par  une 
grande  mortalité.  «Avertissez,  leur  dit-il, 
tous  ceux  que  vous  pourrez,  et  faites  votre 
possible  pour  les  attirer  A  la  foi  par  la  per- 
suasion, et  leur  procurer  la  vie  éteruelle,  adu 
XI. 


E|.isl.  !'J,Cl 
lib.  II,  F.,ist. 
18  cl  £0. 


(juc,  loi'sf[ue  vous  paraîtrez  devant  le  Soii- 
veiaiu  ,Iui;i>,  vous  puissiez  lui  pn'scntei'  les 
fruits  de  votre  sollicilude  pasloi'ale.  —  Il  or-  "(.im.  ik, 
donna  au  sous-diacre  Pierre  de  donner  à  un 
nommé  Marcel,  enfermé  au  monastère  de 
Saint-Ailrien  de  Palcrme  pour  faire  péni- 
tence, et  à  son  valet,  les  vêtements  et  la  nour- 
riture nécessaires;  promettant  de  lui  pas- 
ser en  compte  tout  ce  qu'il  aurait  jugé  ti  pro- 
pos de  l(!ur  doinier.  Il  le  chargea  encore  do 
mettre  les  prêtres  dans  les  églises  vacantes 
de  la  Sicile,  de  prendre  à  cet  effet  les  sujets 
les  plus  dignes,  soit  du  clergé,  soit  des  mo- 
nastères, et  de  les  envoyer  à  Rome,  après 
s'être  informé  de  leurs  mœurs. 

4.  Dès  le  pontificat  de  Pelage  II,  Honorât, 
archidiacre  de  l'église  de  Salone ,  s'était 
plaint  du  traitement  que  lui  faisait  Natalis, 
sou  évêque,  pour  se  venger  de  ce  qu'il  l'em- 
pêchait, en  sa  qualité  d'archidiacre,  de  don- 
ner à  ses  parents  les  vases  sacrés  confiés  à 
sa  propre  garde.  Le  pape  Pelage  avait  dé- 
fendu i\  Natalis  d'en  conserver  du  ressenti- 
ment contre  Honorât,  ou  de  le  faire  prêtre 
malgré  lui.  Natahs,  sans  avoir  égard  à  cette 
défense,  déposa  Honorât  dans  un  concile  de 
sa  province,  et  mit  en  sa  place  un  autre  ar- 
chidiacre qui  lui  était  plus  dévoué,- puis  il 
ordonna  prêtre  Honorai.  Celui-ci  se  plaignit 
à  saint  Grégoire,  à  qui  Natahs  écrivit  aussi 
pour  justifier  sa  conduite.  Le  Pape  lui  fit  ré- 
ponse en  ces  termes  :  «  Les  actes  que  vous 
m'avez  envoyés  de  votre  concile,  au  sujet  '.le 
la  condamnation  de  l'archidiacre  Honorât, 
ne  sont  propres  qu'à  fomenter  vos  dilférenJs, 
puisque,  en  même  temps  que  vous  le  dépo- 
sez du  diaconat  comme  indigne,  vous  l'êle- 
vez  malgré  lui  à  la  prêtrise.  C'est  pourquoi 
nous  vous  avertissons  de  le  rétablir  dans  sa 
fonction;  et  s'il  reste  entre  vous  quelque  dif- 
férend, qu'il  vienne  ici ,  sur  l'avertissement 
qu'il  recevra,  el  envoyez  de  votre  côté  quoi- 
qu'un pour  plaider  votre  propre  cause.  » 
Dans  sa  réponse  à  Honorât,  il  lui  ordonne  de 
continuer  ses  fonctions  d'archidiacre,  et  de 
finir  ce  scandale,  s'd  était  possible';  sinou,  de 
venir  incessamment  à  Rome,  où  Natalis  de- 
vait aussi  envoyer  une  personne  bien  ins- 
truite. Natalis  n'obéit  point;  ce  qui  obligea 
saint  Grégoire  de  lui  écrire  une  seconde  let-  ^'""'  '" 
tre,  dans  laquelle,  après  lui  avoir  fait  des  re- 
proches de  ce  qu'occupé  à  ses  plaisirs,  il 
abandonnait  le  soin  de  son  troupeau,  ne 
s'appliquant  ni  à  la  lecture,  ni  à  la  prédica- 
tion, il  lui  ordonne  de  rétablir  Honorât,  sous 

.'il 


LU>.  I, 
EfSl.  IJ. 


Lil,.  11, 


482 


mSTOIllE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


peine  d'être  privé  de  l'usage  du  pallium,  et, 
en  cas  d'opiniâlrelé,  de  la  participation  du 
corps  et  du  sang  de  Jésus-Ciirist,  et  luème 
de  l'ëpiscopat.  Quant  à  celui  que  Nalalis 
avait  ordonné  archidiacre  au  iiréjudiced'Ho- 
noral,  saint  Grégoire  le  dépose  de  celte  di- 
gnité, avec  menace,  s'il  continuait  d'en  faire 
les  fonctions,  de  le  priver  de  la  sainte  com- 
^ib.  n,  Ef,  munion.  Il  chargea  de  l'exécution  de  ces  or- 
dres le  sons-diacre  Anionin,  qu'il  envoyait 
pour  administrer  le  patrimoine  de  saint  Pierre 
en  Dalmalie,  et  lui  donna  deux  letti-es,  l'une 
pour  les  évoques  de  la  province,  h  qui  il  fai- 
ib-d.,  Epiii.  sait  part  de  cette  allairc,  l'autre  pour  le  pré- 
iwd.,K..i!i.  fet  Jobin,*(ju'i]  priait  do  ne  point  protéger 
Nalalis  contre  la  justice.  Natalis  se  soumit 
enfin  aux  ordres  du  Pape,  et  corrigea  ses 
mceurs.  Néanmoins,  il  lui  écrivit  une  lettre 
où  il  prétendait  justifier  sa  conduite  précé- 
dente, alléguant,  pour  autoriser  ses  dépen- 
ses de  table,  divers  passages  de  l'Écrilnre 
ibid.,  Kiisu  mal  appliqués.  Saint  Grégoire  lui  fil  sentir 
doucement  dans  sa  réponse,  que  les  festins 
que  Natalis  appelait  repas  de  charité ,  n'é- 
taient pas  de  la  nature  de  ceux  qu'on  l'accu- 
sait de  donner.  Au  surplus,  il  remit  à  l'arrivée 
de  ses  députés  à  juger  son  dillérend  avec  ll(Uio- 
rat;  mais  cet  évêquemourutavantladécisiou. 
5.  Dans  diverses  lettres  à  Anthime,  sous- 

2».  diacre  et  recteur  des  patrimoines  d'Italie, 

saint  Grégoire  le  charge  de  soulager  plu- 
sieurs personnes  qui  se  trouvaient  dans  le 
besoin  à  cause  des  calamités  publiques  ;  de 
donner  à  des  religieuses  de  la  ville  de  Noie 
quarante  sous  d'or,  deux  sous  d'or  ;\  un  prê- 
tre nommé  Paulin,  qui  demeurait  dans  le 
monastère  de  Saint-Érasme,  à  côté  du  mont 
Soracte,  et  deux  li  deux  moines  servant  un 
oratoire  de  Saint-Michel,  dans  le  château  de 
LucuUan  ;   —  d'oH'rir  ù  Patéria ,    tante  du 

31.  saint,  quarante  sous  d'or  pour  la  chaussure 
de  ses  domestii(ues,  et  quatre  cents  Lois- 
seaux  de  blé  ;  ù  Palatine,  veuve  d'Urbicus, 
vingt  sous  et  trois  cents  boisseaux  ;  ;\  Vi- 
vienne,  veuve  de  Félix,  autant  ;  —  de  don- 

(9.  ner  trente  sous  d'or  par  an  à  Palatine,  fem- 
me du  rang  des  illustres,  ruinée  par  les 
guerres  continuelles;  —  d'empêcher    que 

^,  les  pauvres  fussent  opprimés,  et  le  fils  de 

la  veuve  Sirica  réduit  en  servitude  ;  —  et 
de  faiio  restituer  a  la  veuve  Théddora  la 

„,  maison  de  Pétrone  son  mari.  —  Il  lui  or- 

^,  donna  de  plus  de  réprimer  l(!s  moines  vaga- 

bonds, ou  qui  s'élaient  mariérs,  et  les  clercs 
qui,  après  avoir  embrassé  l'état  monaauquo, 


voulaient  retourner  dans  le  clergé  d'où  ils 
étaient  sortis;  — d'empêcherles  femmes  d'ha- 
biter avec  des  moines,  et  les  abbés  de  recevoir  f-v'"-  ">• 
les  enfants  dans  les  monastères  avant  l'âge  de 
dix-huit  ans.  Ce  règlement  à  l'égard  des  en- 
fants ne  regardait  que  les  monastères  de 
certaines  lies,  celle  entre  autres  qu'on  ap- 
pelle aujourd'hui  de  Sainte -Marie,  et  une 
nommée  Palmariu,  du  côté  de  Terracine. 
Anthime  fut  aussi  chargé  de  faire  délivrer 
à  l'abbé  Félix,  dont  le  monastère  était  situé 
dans  ces  îles,  cinq  cents  livres  de  plomb. 

C.  Au  mois  de  février  de  l'an  391 ,  saint  Gré- 
goire assembla  un  concile  à  Rome,  d'où  il  ccri-  "• 
vit  une  lettre-circulaire  aux  quatre  patriarches 
d'Orient.  Il  y  en  a  cinq  nommés  dans  l'inscrip- 
tion ,  parce  que ,  encore  qu'un  nommé  Gré- 
goire lut  en  possession  du  patriarchat  d'.\n- 
tioche,  lePape  reconnaissait  aussi .\uaslase,  ■ 
que  Justin  avait  chassé  de  ce  Siège.  Les  au- 
tres patiiarches  étaient  Jean  de  Constanli- 
uople,  Euloge  d'Alexandrie  et  Jean  de  Jé- 
l'usalem.  Il  témoigne  dans  cette  lettre  com- 
bien l'épiscopat  lui  était  ti  charge,  parce 
qu'il  ue  se  croyait  pas  assez  fort  pour  en 
remplir  tous  les  devoirs.  U  en  fait  le  détail 
à  1)011  près  comme  dans  sou  Pastoral  ;  puis 
il  donne,  suivant  la  coutume,  sa  profession 
de  foi,  qu'il  réduit  aux  matières  contestées 
alors;  déclarant  qu'il  recevait  et  révérait  les 
quatre  conciles  généraux  comme  les  quatre 
évangiles;  qu'il  portait  le  môme  respect  au 
cinquième,  où  la  lettre  qu'on  disait  être  d'I- 
bas  avait  été  condamnée  comme  remplie 
d'erreurs,  où  Théodore  avait  été  convain- 
cu de  diviser  la  personne  du  médiateur 
de  Dieu  et  des  hommes,  et  où  les  écrits 
de  Théodoret  èontre  saint  Cyrille  avaient 
été  réprouvés.  U  ajoutait  :  «  Je  rejette  tou- 
tes les  personnes  que  ces  vénérables  con- 
ciles ont  rejetées,  et  je  rc^-ois  toutes  celles 
qu'ils  honorent  :  que  celui  qui  pense  autre- 
ment qu'ils  n'ont  pensé,  soit  anallième  ;  mais 
que  Dieu  donne  sa  paix  à  celui  qui  embrasse 
la  foi  qu'ils  ont  enseignée.  »  —  Il  écrivit  en  ..^  j;_ 
particulier  à  Anaslase  d'Anlioche,  pour  lui 
faire  jiart  de  la  douleur  que  lui  causait  la 
charge  iprun  lui  avait  imposée,  et  pour  lui 
recommander  Boniface ,  défenseur  de  l'É- 
glise romaine,  (pii  devait  lui  rendre  ses  let- 
tres. —  Dans  celle  qu'il  adressa  à  Sébastien,  .«. 
évé(]iu!  de  Rliisinie,  il  dit  qu'il  avait  deman- 
dé à  l'Empereur  de  permettre  à  Anaslase  do 
venir  j\  Rome  avec  l'usage  du  pallium,  pour 
célébrer  avec  lui  lu  messe  A  Saint-Piene.  — 


[vil'-  srKCi.E.]      CHAPITRE  XI.IX.  —  SAINT  GllÉlKlIllK  LE  GHANI),  PAl'K. 

r,i-i  M.       Ayant  appris  qu'Arislobule    voulait  mctlin 
eu  prcc  une  de  ses  lettres,  celle  apparetn- 


/.S3 


ment  qu'il  avait  (^ciite  aux  quatre   patriar- 
ches, il  le  pria  de  ne  point  s'attacher  aux 
=»•  termes,  mais  au  sens.   Il  envoya  ;\  Andi'(;, 

du  rani;;  des  illustres,  une  clef  dans  laquelle 
I  on  avait  enfermé  de  la  limaille  des  chaines 

de  saint  Pierre.  Il  l'assure  que  ces  sortes  de 
clefs  opéraient  ordinairemeut  des  miracles, 
et  il  l'exhorte  ;"!  la  porter  à  son  cou  pour  en 
.11.  être  sancliiié.  —  11  lit  un  semblable  présent  i 

Jean,  qui  avait  été  consul,  patrice  et  quas- 
ar leur.  —  Sa  lettre  à  Philippe,  maître  de  la 
milice,  est  pour  lui  recommauder  les  all'ai- 
res  de  l'Italie.  Il  lui  dit  que,  s'il  a  accepté 
l'épiscopat,  c'a  été  pour  lui  obéir  et  ne  point 
"•  résister  ;\  la  volonté  de  Dieu.  — Le  patrice  Ho- 
main,  exarque  d'ilalie,  retenait  depuis  long- 
temps à  Havenue  Blandus,  évèque  d'Orla  ; 
ce  qui  rendait  cette  église  déserte,  et  y  oc- 
casionnai! de  grands  maux  ,  parce  que  le 
troupeau  était  sans  pastmir,  et  que  les  en- 
fants mouraient  sans  baptême.  Il  le  prie 
donc,  ou  de  consentir  A  ce  que  la  cause  de 
cet  évoque  soit  examinée  dans  un  concile 
pour  qu'on  le  punisse  s'il  est  coupable,  ou 
de  le  renvoyer  à  son  église,  s'il  le  croyait 
innocent. 
Erisi.  3.,       7.  Nous  avons  deux  lettres  de  saint  Gré- 

tt    Mb.     XI,  .         ,    ,,  .  ,  •  u  < 

«pisi.30oi  .1.  gon-e  a  Venauce,  qm,  après  avoir  embrasse 
l'état  monastique,  l'avait  quitté  ,  s'était  ma- 
rié, et  exerçait  la  charge  de  chancelier  d'Ita- 
lie ;  elles  sont  l'une  et  l'autre  pour  l'exhor- 
ter ti  reprendre  l'habit  et  la  profession  qu'il 
avait  abandonnés.  «  Si  mon  zèle  ,  lui  dit-il , 
vous  est  suspect ,  j'appellerai  toute  l'Eglise 
en  conseil,  et  je  souscrirai  sans  peine  .'i  ce  qui 
sera  décidé  d'un  commun  consentement.  » 
Venance  ne  se  convertit  point  ;  mais  le 
saint,  le  sachant  à  l'extrémité,  écrivit  à  Jean, 
évèque  de  Syracuse ,  de  le  presser  de  nou- 
veau de  reprendre  son  premier  état,  sous 
peine  d'être  condamné  éternellement  au  ju- 
K.  gement  de  Dieu.  — Un  juif,  nommé  Joseph, 
s'était  plaint  au  Pape  de  ce  que  Pierre,  évè- 
que de  Terracine  ,  après  avoir  chassé  ceux 
de  sa  nation  d'un  heu  où  ils  avaient  coutu- 
me de  s'assembler  ,  voulait  encore  les  chas- 
ser d'un  autre  endroit  où  il  leur  avait  per- 
mis de  tenir  leurs  assemblées.  Saint  Grégoi- 
re, trouvant  qu'il  y  avait  de  l'injustice  dans 
le  procédé  de  Pierre  ,  lui  ordonna  de  faire 
cesser  ces  plaintes,  et  de  laisser  au  juifs  la 
liberté  de  s'assembler  au  lieu  où  il  avait  per- 
mis qu'ils  s'assemblassent  :   «  Car  c'est,  lui 


dit-il,  piirla  douceur,  la  bonté,  les  exhorta- 
lions,  (pi'il  faut  appeler  les  infidèles  à  la  re- 
ligion chrétienne,  et  non  jias  les  en  éloigner 
par  les  menaces  et  la  terreur.  » 

8.  En  élablissaut  le  sous-diacre  Pierre  son  ei.i.i.3o, 
vicaire  dans  la  Sicile,  il  lui  donna  ses  ins- 
tructions par  écrit.  Il  l'avertit  depuis  de  les 
relire  souvent,  et  d'avoir  grand  soin  que  les 
évêqties  ne  se  mêlassent  point  d'all'aires  sé- 
culières, si  ce  n'es!  qu'il  fût  besoin  de  pren- 
dre la  défense  des  pauvres;  d'empêcher  que 
les  officiers  de  l'Eglise  romaine  ne  vexassent 
personne,  soit  par  rapport  aux  biens,  soit 
par  rapport  aux  esclaves  ;  de  restituer  ce 
qu'il  croirait  avoir  été  enlevé  injustement  ; 
de  n'employer  jamais  la  force  pour  mainte- 
nir les  droits  de  l'Église;  de  s'appliquer  à  se 
faire  aimer  par  son  all'abilité  envers  tous,  et 
de  (h'iouiuer  les  évèques  de  venir  à  Puuno 
au  jour  de  son  intronisation,  en  remettant 
ce  voyage,  s'il  leur  paraît  nécessaire,  à  la 
fête  de  saint  Pierre,  prince  des  apôtres.  — 
Il  lui  ordonna  de  rassembler  dans  le  menas-  41. 
tère  de  Saint-Théodore,  à  Messine,  tous  les 
moines  que  l'incursion  des  barbares  avait 
dispersés  parmi  la  Sicile,  et  de  leur  donner 
un  supérieur  capable  de  les  conduire.  — 
Par  un  abus  dont  Pierre  avait  averti  saint  Gré-  "■ 
goirc,  on  diminuait  aux  paysans  sujets  de 
l'ÉL;lise  le  prix  du  blé  dans  les  temps  d'abon- 
dance. Le  Pape  lui  répondit  :  «  Nous  vou- 
lons qu'on  les  paie  toujours  suivant  le  prix 
courant,  sans  déduire  le  blé  qui  périt  par 
les  naufrages;  nous  défendons  de  leur  faire 
fournir  le  blé  h  plus  grande  mesure  que  celle 
qui  entre  dans  les  greniers  de  l'Église,  et  de 
les  oljliger  h  payer  au  delà  du  prix  de  leur 
Ijail  ;  et  aiin  qu'après  noire  mort  on  ne  puisse 
les  cliarger  de  nouveau,  vous  leur  dounei'ez 
une  assurance  par  écrit,  qui  portera  la  som- 
me que  chacun  d'eux  devra  payer.  A  l'é- 
gard de  ce  que  le  recteur  du  patrimoine  pre- 
nait sur  ces  menus  droits,  nous  voulons  que 
vous  le  preniez  sur  le  prix  du  bail.  Veillez  A 
ce  qu'on  n'use  point  de  faux  poids  en  rece- 
vant les  paiements  des  fermiers.  S'il  s'en 
trouve  de  faux,  faites-les  rompre  et  meitcz-en 
d'autres.  11  nous  est  aussi  revenu  que  nos 
paysans  sont  vexés  dans  le  paiement  du  pre- 
mier terme  de  leurs  rentes  ;  en  sorte  que, 
n'ayant  pas  encore  vendu  leurs  fruils,  ils 
sont  obligés  d'emprunter  à  gros  intérêls. 
Donnez-leur  des  fontte  de  l'église  ce  qu'ils 
ont  emprunté  à  des  étrangers,  et  vous  les 
recevrez  d'eux  peu  à  peu,  selon  qu'ils  en 


484 


HISTUIKE  GKNÉUAL  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


B|>|.|.  U, 


auront  le  moyen,  de  peur  que  les  denrées 

qui  leur  «illiraicnl  pour  s'acquitter  ne  suffi- 
sent pas,  si  en  les  pressant  on  les  oblige  de 
les  vendre  à  vil  prix.  »  Il  réforme  ensuite 
les  droits  excessifs  attaclii;s  aux  mariages 
des  paysans,  et  les  réduit  h  un  sou  d'or  mê- 
me pour  les  riches,  et  h  quelque  chose  de 
moins  pour  les  pauvres,  voulant  que  cette 
j'cdevaiice  tournât  au  profit  du  fermier,  sans 
entrer  dans  les  comptes  de  l'I-lalise.  11  donne 
à  Pierre  pour  r('>gle  générale  de  ne  point 
souiller  les  coft'res  de  l'Église  par  des  gains 
sordides.  Le  droit  qu'on  exigeait  pour  les 
mariages  était  purement  seigneurial,  et  une 
sorte  de  tribut  sur  ces  paysans  qui  étaient 
demi-serfs.  Il  veut  qn'à  l'avenir  les  enfants 
des  entrepreneurs  héritent  do  leurs  pères, 
à  l'exclusion  de  l'Église,  et  que  s'ils  sont  en 
bas-âge,  on  leur  dounc  des  personnes  sages 
qui  aient  soin  d'eux  et  de  leurs  biens  ;  que 
l'on  punisse  les  coupables ,  non  par  des 
i.mendes  pécuniaires,  mais  par  des  peiues 
corporelles ,  en  donnant  toutefois  à  leur 
compte  un  salaire  à  ceux  que  l'on  emploiera 
pour  les  punir;  que  l'on  renferme  dans  les 
monastères  1ns  plus  pauvres,  les  prêtres  et 
les  clercs  tombés  dans  quelque  faute,  en  les 
obligeant  à  aider  ces  monastères  de  leurs 
propres  biens,  parce  qu'il  est  juste  qu'ils 
contribuent  ;\  l'entretien  de  ceux  qui  pren- 
nent soin  de  les  corriger.  Depuis  trois  ans 
on  avait  fait  une  loi  aux  sous-diacres  dans 
toute  la  Sicile  de  vivre  dans  la  continence, 
suivant  rpie  cela  se  pratiquait  dans  l'Église 
de  Rome.  Saint  Grégoire  trouve  cette  loi 
dure  pour  ceux  qui  s'étaient  engagés  dans 
le  ministère  sans  se  croire  obligés  i\  la  con- 
tinence. Il  n'impose  donc  aucune  peiue  aux 
prévaricateurs  ;  mais  il  défend  de  les  promou- 
voir à  un  degré  supérieur  :  voulant  que  dans  la 
suite  les  évoques  n'ordonnent  pour  sous-dia- 
cres, que  ceux  qui  promettront  de  vivre  daus 
le  célibat.  R  règle  dans  la  même  lettre  di- 
verses atl'aires  particulières,  et  fait  plusieurs 
donations  en  forme  de  charité. — Dans  une 
autre  adressée  au  même  Pierre,  il  lui  or- 
donne de  donner  chaque  année  au  fils  de 
Godiscalque,  pauvre  et  aveugle,  vingt-qua- 
tre boisseaux  de  blé,  douze  de  fèves  et  vingt 
mesures  de  vin.  — 11  y  en  a  une  qui  regarde 
les  dépenses  qu'il  devait  fiiire  h  la  dédicace 
d'une  église  de  la  Sainte-Vierge  diuis  le  mo- 
nastère de  l'abbé  Marinien  :  «  Parce  que 
celle  maison,  lui  dit-il,  est  pauvre,  nous  de- 
vons contribuer  aux  frais  de  la  cérémonie. 


Vous  donnerez  donc,  pour  être  distribués 
aux  pauvres,  dix  sous  d'or,  trente  amphores 
ou  mesures  de  vin,  deux  cents  agneaux  (les 
anciennes  éditions  disent  deux  cents  bois- 
seaux de  blé),  deux  orques  ou  vases  d'huile, 
douze  moutons  et  cent  poules,  ii  Ce  qui  fait 
voir  qu'on  faisait  aux  dédicaces  des  églises 
des  distributions,  qui  approchaient  des  aga- 
pes des  premiers  siècles.  —  Par  une  autre 
lettre,  il  ordonne  à  Pieire  de  donner  à  un 
nommé  Pasteur,  qui  avait  mal  aux  yeux, 
vingt-trois  boisseaux  de  blé  et  onze  de  fèves, 
pour  lui,  sa  femme  et  deux  enfants.  —  Il  lui 
écrivit  de  donner  le  soin  des  procès  et  des 
autres  aflaires  extérieures  du  monastère  de 
l'abbé  Jean  h  quelque  séculier,  afin  que  les 
moines  pussent  rendre  leur  culte  à  Dieu 
dans  le  repos,  et  que  les  biens  qui  leur  ap- 
partenaient ne  dépérissent  point  ;  —  de 
prendre  sous  sa  protection  Cyriaque  et  sa 
femme,  qui  de  juifs  s'étaient  faits  chrétiens; 
—  d'empêcher  les  évèques  de  Sicile  de  venir 
à  ilome  avant  l'hiver ,  mais  d'y  faire  trans- 
porter à  temps  les  blés  nécessaires,  et  môme 
au  delà  de  la  quantilé  ordinaire,  parce  que 
la  moisson  avait  été  peu  con»idérable  h  Ro- 
me, —  et  de  faire  restituer  à  l'Église  de 
Taormine  tout  ce  qui  lui  avait  été  enlevé 
par  les  officiers  de  l'Église  de  Rome. 

9.  Les  évoques  chassés  de  leurs  sièges 
par  les  Barbares  cherchaient  des  asiles  jus- 
que daus  rillyrie.  Saint  Grégoire  écrivit  une 
lettre-circulaire  aux  évoques  de  cette  pro- 
vince ,  pour  les  exhorter  ii  recevoir  leui-s 
confrères,  a  leur  fournir  toutes  les  choses 
nécessaires  à  la  vie,  en  déclarant  toutefois 
que  ces  évêques  dépouillés  n'auront  aucune 
autorité  dans  les  églises  qui  leur  donneront 
retraite,  et  qu'ils  se  contenteront  d'y  rece- 
voir leur  subsistance.  — Sur  les  plaintes  que 
lui  firent  quelques  juifs  d'Italie,  de  ce  que, 
lorsqu'ils  allaient  ;\  Marseille  pour  leur  tra- 
fic, on  y  baptisait  un  grand  nombre  des 
leurs,  plus  par  force  que  par  persuasion  ,  il 
en  écrivit  à  Virgile,  évê(pie  d'Arles,  et  à  Théo- 
dore, évêque  de  Marseille.  «  Je  loue,  leur 
dil-il,  votre  intention  ,  et  je  ne  doute  pas 
qu'elle  ne  snit  fondée  sur  l'amour  que  vous 
portez  à  Notre-Seigneur;  mais,  si  elle  n'est 
réglée  par  l'Écriture,  je  crains  qu'elle  ne 
nuise  à  ceux  mêmes  que  vous  voulez  sauver, 
et  que ,  venant  au  l)a])tême  par  nécessité, 
ils  ne  retournent  avec  plus  de  danger  h  leur 
première  superstition.  Conlenlcz-vous  donc 
de  lus  prêcher  cl  de  les  instruire,  pour  les 


Epi-u  c;. 


Kfirl.  (8. 


M  ol  6?, 


Couiil.  Ni. 
fii'ii.  Can.  .t  ; 
A.alli  ,na, 
in;  II  Tuioo. 
C-.n.  12. 
EiiUl    53. 


[vu"  SIÈCLE.]        CIIAIMTHE  XLIX. 

éclairer  et  los  convcilir  solidement  :  vous 
en  recevrez  la  récompense,  cl  avec  la  grclco 
de  Dieu,  vos  exhortations  les  coniliiiront  à 
la  réjfénéralion  de  la  vie  nouvelle.  »  —  La 
lettre  ;\  Tlioodore,  duc  nu  pri'IVl  de  Sardai- 
gne,  est  pour  le  prier  de  faire  nieltre  en  ar- 
bitrage une  dilTiculté  qu'un  de  ses  officiers 
avait  avec  Julienne,  abbcsse  du  monastère 
de  Saint-Vitp,   an  sujet  d'une  terre  (pii  en 
dépeutlait.  Il  le  prie  aussi  d'empêcher,  au- 
tant que  les  lois  de  la  justice  le  demande- 
ront, la  cassation  d'un  testament  fait  par  le 
gendre  de  Pomptnane,  qui  avait  fait  de  sa 
maison   un  monastère.  —  Celle  au  diacre 
Honorât  est  une  plainte  contre  les  vexations 
de  Théodore,  maiire  de  la  milice  dans  la 
Sardaij;ne.  Saint  Grégoire  charge  ce   diacre 
de  faire  hVdcssus  des  remontrances  auxEm- 
pcrem's,  parce  que  Théodore  avait  agi  con- 
tre la  disposition  de  leurs  édits.  —  Il  ordon- 
na aux  moines  du  IMont-Christ  d'obéir  à  Ho- 
rose,  leur  abbé,  comme  à  lui-même  ;  —  au 
défenseur  Symmaque  de  bâtir  un  monastère 
dans  la  Corso  ;  de  corriger  les  moines  de  ce- 
lui de   Gorgone,  et  d'empêcher  les  pi'êtres 
de  Corse  d'avoir  chez  eux  des  femmes,  à 
l'exception  de  leurs  mères  et  de  leurs  siKurs  : 
quelques  manuscrits  ajoutent  leurs  femmes; 
ce  qui   prouverait  qu'on    n'observait  point 
dans  l'Ile  de  Corse  ce   qui   avait  été  réglé 
dans  divers  conciles  touchant  la  cohabita- 
tion des  prêtres  avec  leurs  femmes.  —  Il 
manda  à  Félix,  évêque  de  Siponto,  de  visi- 
ter l'église  de  Canose,  où,  faute  de  prêtres, 
on  ne  donnait  ni  la  pénitence  aux  mourants, 
ni  le  baptême  aux  enfants  ;  d'y  ordonner  au 
moins  deux  prêtres  pour  avoir  soin  des  pa- 
roisses de  la  campagne,    pourvu    qu'il  en 
trouvât  qui  fussent  dignes  de  ce  ministère  ; 
—  à  Jean,   évêque  de  Sorrento,   de  trans- 
porter les  reliques  de  sainte  Agathe  mar- 
tyre dans  le  monastère  de  Saint  Etienne,  si- 
tué dans  l'ile  de  Caprée  ou  Capri,  à  la  charge 
de  les  placer  dans  un  endroit  où  personne 
n'ait  eu  jusque-là  sa  sépullnre;  —  à  l'évèque 
Sévère,  d'ordonner  pour  l'église  de  llimini 
celui  que  le  peuple  aura  choisi  d'une  voix 
mianime  ;  sinon,  de  promouvoir  à  l'épisco- 
pat  celui  que  le  porteur  de  sa  lettre  lui  in- 
diquera. —  L'élection  tomba  sur  Gcléati- 
nus.  Le  Pape  ne  voulut  point  l'agréer  ;  il  or- 
donna au  clergé  et  au  peuple  de  Rimini  de 
procéder  au  plus  tôt  à  l'élection  d'un  évêque, 
en  leur  représentant  le  danger  qu'il  y  avait  à 
laisser  si  longtemps  leur  Église  sans  pasteur. 


SAINT  OllÉGOIllE  LE  GRAND,  l'APE. 


■483 


10.  Des  quatre  lettres  ix  Janvier,  ëvéquo    ei.i.i.  02. 
de  Cagliari  eu  Sardaignc,  il  y  en  a  une  où 
saint  Grégoire  le  prie  de  prendre  la  défense 
d'une  veuve  de  piété,  nommée  Catclla,  et  do 
terminer  lui-même  ses  procès,  sans  qu'elle 
fût  obligée  de  recourir  aux  tribunaux  sécu- 
liers. Il  lui  recommande  dans  la  seconde  de       i-j. 
terminer  par  des  arbitrages  les  affaires  de 
Fompéiane. — La  tioisiènie,  qui  est  aussi  en       r,v, 
faveur  de  Gatella,  est  peu  ditl'ihente  de  la  pre- 
mière. —  11  dit  à  Janvier  dans  la  quatrième        fa. 
de  réprimer  l'ambition  du  diacre  Libérât,  de 
le  mettre  pour  cet  clfet  le  dernier.de  tous  les 
diacres,  et  qu'au  cas  cependant  où  il  donne- 
rait dans  la  suite  des  marques  d'une  plus 
grande  soumission,  il  pourra,  s'il  le  veut,  le 
faire  cardinal,  c'est-â-dire  le  fixer  au  service  de 
son  Église,  pourvu  qu'il  obtienne  de  son  évê- 
que des  lettres  dimissoriales.  —  On  voit  des       oo. 
preuves  de   son  désintéressement  dans  sa 
lettre  à  Félix,  évêque  de  Messine,  à  qui  il 
dit  :  «  Nous  devons  abolir  les  coutumes  que 
nous  savons  être  à  ctiarge  aux  églises,  afin 
qu'elles  ne  soient  point  obligées  d'apporter 
quoi  que  ce  soit  en  ce  lieu,  d'où  elles  de- 
vraient plutôt  recevoir.  A  l'égard  des  autres 
clercs,  vous  devez  leur  envoyer  tous  les  ans 
ce  qui  est  établi  pour  l'usage;  mais  pour 
nous,  nous  vous  défendons  de  nous  rien  en- 
voyer à  l'avenir.  Nous  n'aimons  pas  les  pré- 
sents, et,  quoique  nous  ayons  reçu  les  pal- 
mes que  vous  nous  avez  envoyées,  nous  les 
avons  fait  vendre  pour  vous  eu  renvoyer  le 
prix.  Dispensez-vous  du  voyage  de  Rome  ; 
mais  ne  nous  oubliez  pas  dans  vos  prières, 
afin  qu'éloignés  par  la  dislance  des  lieux, 
nous  soyons  unis  en  esprit  par  les  liens  de 
la  charité.  »  —  Il  y  avait  quelques  person-        Ta. 
nés  en  Sicile  qui  se  disaient  défenseurs  du 
Siège  apostolique,  et  qui  sous  ce  titre  com- 
mettaient des  exactions.  Saint  Grégoire  aver- 
tit les  évêques  de   n'en  reconnaître  aucun 
qui  ne  fût  muni  d'une  lettre  de  sa  part,  ou 
du    recteur   du  patrimoine   de   l'Église   de 
liiime. 

11.  L'Église  d'Afrique  était  encore  infestée  74, 
par  les  l'estes  des  manichéens  et  des  dona- 
tistes.  Saint  Grégoire  eut  recours,  pour  le:^ 
réprimer ,  à  Gennade  ,  patrice  et  exarque 
de  cette  province.  11  le  chargea  eu  même 
temps  d'avertir  les  évêques  d'Afrique  de  ne 
pas  choisir  leur  primat  d'après  le  rang  qu'il 
tenait,  sans  tenir  compte  du  mérite,  parce 
que  Dieu  n'a  point  égard  au  rang  élevé  des 
personnes,  mais  à    leur  bonne  vie;  de  les 


486 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Flfnrj, 

xxxv, 

VIII, p.! 


tom. 
t.  32. 


£|ilsl. 


avertir  aussi  que  le  primat  ne  doit  point  de- 
meurer dans  des  villages,  mais  dans  la  ville 
qu'ils  choisiront,  afin  qu'il  soif  plus  en  état 
de  résister  aux  donatistcs.  C'est  que  la  cou- 
tume de  NumiJie  était  de  prendre  pour  pri- 
mat le  plus  ancien  évoque  selon  le  rang 
d'ordination,  et  souvent  c'était  l'évêque  d'un 
village,  ou  nn  homme  peu  capable.  Le  Pape 
ajoutait  :  «  Si  quelqu'un  des  évèques  de  Nu- 
midic  veut  venir  vers  le  Saint-Siège,  per- 
mettez-le, et  empêchez  qu'on  ne  s'y  oppose. 
Ce  sera  pour  vous  une  granilc  gloire  aujirès 
de  Dieu,  si  par  votre  moyen  les  églises  dis- 
persées se  j-éunisseut.  »  —  Dans  une  autre 
lettre,  il  donne  de  grandes  louanges  à  Gen- 
uade  de  ce  que,  dans  ses  opérations  militai- 
res, il  se  proposait  non  l'cirusion  du  sang  hu- 
main, mais  l'agrandissement  de  l'Église  cl 
de  la  religion  chrétienne  ;  il  lui  rend  grûces 
d'avoir  repeuplé  plusieurs  endroits  considé- 
rables du  patrimoine  de  saint  Pierre,  qui 
manquaient  d'habitant?,  en  y  en  appelant 
des  provinces  voisines.  — Dans  une  troisième 
lettre,  il  lui  recommande  un  nommé  Dro- 
culfe,  qui  était  passé  du  parti  des  Lombards 
daus  celui  des  Romains.  —  La  lettre  à  Gau- 
diosus,  maître  de  la  milice  d'.\frique,  est  en7 
core  une  lettre  de  recommandation  en  fa- 
veur d'un  nommé  Hilairc,  que  le  Pape  en- 
voyait pour  procurer  du  soulagement  au.K 
pauvres. — Les  évèques  de  Numidie,  voyant 
iju'il  leur  avait  défendu  de  suivre  leurs  an- 
ciennes coutumes  au  sujet  de  l'élection  d'un 
primat,  lui  représentèrent  qu'ils  étaient  dans 
l'usage,  depuis  saint  Pierre,  de  prendre 
pour  primat  le  plus  ancien.  Saint  Grégoire, 
révoquant  ce  qu'il  avait  ordonné  à  cet  égard, 
leur  accorda  leur  demande,  à  la  charge  de 
ne  point  élever  ù  la  dignité  de  primat  les 
évoques  qui  avaient  été  donatistes.  —  Il  en- 
joignit à  Léon,  évècpie  en  Corse,  d'aller  vi- 
siter l'église  d'Alérie  ',  qui  était  comme  aban- 
donnée depuis  la  mort  de  son  évoque  ;  d'y 
établir  dans  les  paroisses  de  la  campagne 
ib's  prêtres  et  des  diacres,  autant  qu'il  en  se- 
rait besoin.  Il  y  transféra  depuis  Martin, 
évêque  de  Tainatcs  ou  Tamie,  ville  telle- 
ment ruinée  par  les  guerres,  qu'il  n'avait 
plus  d'espérance  d'y  retourner.  C'est  pour 
cela  qu'il  est  dit  qu'il  l'établit  cardinal,  com- 
me y  devant  rester  toute  sa  vie.  —  Il  donne 
avis  de  cette  translation  au  clergé  et  au  peu- 
ple d'Alérie,  disant  qu'il  ne  leur  avait  donné 

"  Le  tcjlc  porte  Saonensit  ecclesiœ,  (L'iditcur.) 


lui-même  Martin  pour  évêque,  que  parce 
qu'ils  avaient  négligé  d'en  choisir  un.  —  Il  Epui.«i 
reprocha  au  clergé  et  au  peuple  de  Benagna 
leur  lenteur  h  se  donner  un  pasieur;  en  at- 
tendant qu'ils  ne  se  fussent  déterminés  sur 
le  choix  qu'ils  en  devaient  faire,  il  leur  en- 
voya le  prétie  Honorât  pour  avoir  soin  de 
leiu-  Église.  —  Il  écrivit  à  Laurent,  évêque  "• 
de  INIilan,  d'envoyer  une  personne  avec  qui 
on  pût  finir  la  contestation  mue  entre  eux 
au  sujet  d'une  somme  d'argent  que  l'Église 
de  Milan  répétait  sur  celle  de  Rome.  —  Fé-  »'• 
licissime  et  Vincent,  diacres  de  l'Église  de 
Lamige,  s'étaient  plaints  au  Pape  d'une 
grave  injustice  commise  à  leur  égai-d  par 
Argentius,  leur  évêque,  qui,  de  plus,  di- 
saient-ils, avait,  pour  de  l'argent,  confié  des 
églises  à  des  donatistes.  Saint  Grégoire  écri- 
vit au  moine  Hilaire  son  cartulaire,  qu'il 
avait  envoyé  en  Afrique,  d'avoir  soin  que 
les  évèques  assemblassent  un  concile  où  l'af- 
faire fût  examiuée,  et  de  se  charger  de  faire 
exécuter  leur  jugement.  Le  cartulaire  n'était  ««n,  «n 
alors  que  secrétaire  gardien  des  chartes;  >».  '  '  '' 
mais  il  avait  juridiction  dans  les  provinces 
où  il  était  envoyé. 


§11- 
Livre  second  des  Lettres  de  saint  Grégoire. 

l.  Le  second  livre  renferme  les  lettres  que 
saint  Grégoire  écrivit  pendant  la  dixième  in- 
diction, en  la  commençant  au  mois  de  sep- 
tembre de  l'an  591,  c'est-à-dire  à  la  se- 
conde année  de  son  pontificat.  —  Il  écri- 
vit A  Pierre,  notaire,  de  pourvoir  aux  né- 
cessités des  moines  de  Tropfea,  s'il  savait 
qu'ils  fussent  exacts  au  service  de  Dieu  et 
à  l'observation  de  leur  règle,  et  de  leur  céder 
une  petite  terre  dont  ils  avaient  besoin;  — 
;\  Project,  évêque  de  Narni,  de  profiter  de 
l'occasion  de  la  mortaIiti>  pour  exhorter  son 
peuple  à  la  pénitence,  et  les  gentils  à  la  foi 
catholique;  —  à  Vélox,  maître  de  la  milice, 
de  conférer  avec  Maurilius  et  Vitalien  sur  les 
moyens  de  s'opposer  aux  desseins  qu'Ariulfe, 
roi  des  Lombards,  paraissait  avoir  d'attaquer 
Rome  ou  llavenne.  —  Il  fit  donner  en  pro- 
pri(''t('  .'i  une  communauté  de  religieuses,  qui 
demeuraient  dans  le  monastère  d'Eiiprépice, 
le  jardin  qui  avait  appartenu  autrefois  an 
prêtre  Félicien.  —  Il  ordonna  A  l'évoque  de 
Messine  de  s'assurer  d'une  dot  siiflisante  pour 
la  desserte  d'une  église  bâtie  en  l'honneur  des 
sainls  Etienne  et  Pancrace,  avant  do  la  con- 


Krii<l.  t, 
llb.   U. 


KlM.  .■. 


]        CHAPITRE  XLIX.  —  SALNT  GIlliGOIllE  LE  GRAND,  l'Al'H. 


[VII°  SIÈCI-K 

Episi,  F.  sacrer.  — F.;i  loLtro  nu  clergé,  aux  no))lcs  et 
au  peuple  de  Naples,  cslpuur  leur  orilouner 
de  choisir  au  plus  lût,  cl  unaniuicmcul,  un 
c'\c(iuo  ;\  la  place  de  Déaiétrius,  déposé  de 

'•  ri'jiiscopat  pour  ses  crimes.  — Il  ('lalilil  Maxi- 

uiieu,  évèque  de  Syracuse,  son  vicaire  sur 
toute  la  Sicile,  avec  pouvoir  de  terminer  sur 
les  lieux  les  moindres  causes,  se  réservant 
les  causes  majeures  et  les  plus  dilliciles; 
mais  il  iléclara  (pie  cette  prérogative  serait 
attachée  à  sa  personne,  et  nou  à  son  siège. 

10.  —  Ensuite  il  lui  écrivit  de  transférer  Paulin, 

évoque  de  Taur  en  Cahibrc,  au  siège  vacant 
de  Lipari,  malgré  sa  répugnance,  avec  or- 
dre au  clergé  de  cette  Eglise  de  lui  obéir.  — 

'  '  11  voulut  toutefois  que  Paulin  prit  soin  de 

visiter  l'Eglise  de  Taur,  autant  de  fois  qu'il 

"■  le  jugerait  nécessaire.  —  Informé  qu'il  y  avait 

en  Sicile  im  prêtre  que  sa  vie  rendait  digne 
de  l'épiscopat,  il  ordonna  à  Maximien  de  le 
faire  venir  en  sa  présence,  et,  après  l'avoir 
examiné  et  trouvé  capable  de  remplir  cette 
dignité,  de  l'envoyer  à  Rome  pour  l'y  faire 

5'-  ordonner.  — Il  lui  écrivit  encore  de  consoler 

un  abbé  nommé  Eusèbe,  et  apparemment 
de  lever  l'excommunication  que  cet  évêque 
avait  portée  avec  trop  de  précipitation  con- 

'  •  tre  lui.  Mais  l'abbé  refusa  de  rentrer  dans  la 

communion  de  Maximien;  ce  qui  fit  peine  à 
saint  Grégoire,  qui  le  reprit  de  son  orgueil, 
et  ne  laissa  pas  de  lui  faire  donner  cent  sous 
d'or  par  le  sous-diacre  Pierre. 

s-  2.  Il  représente  à  l'évêque  Candide  que, 

les  l'ègles  de  la  charité  lui  interdisant  d'ajou- 
ter affliction  à  affliction,  il  ne  devait  pas  re- 
fuser à  un  de  ses  clercs,  qu'une  maladie  avait 
mis  hors  de  service,  les  secours  que  son  Eglise 
accordait  à  ceux  à  qui  la  santé  permettait  de 

ociio.  s'acquitter  de  leurs  fonctions.  —  Le  clergé 
et  le  peuple  de  Naples  souhaitaient  d'avoir 
Paul  pour  évêque  ;  le  Pape  promet  de  le  leur 
accorder,  apiès  qu'ils  auront  éprouvé  son 
zèle  et  sa  capacité  pour  le  salut  des  âmes. 

11.  — Il  ordonna  à  ceux  de  Népi  en  Toscane 
d'obéir  h  Léonce,  qu'il  leur  envoyait  pom' 

12.  prendre  soin  de  leurs  alla  ires;  à  Castor,  évo- 
que de  Himini,  de  consacrer  l'oratoire  qu'une 
femme  de  piété  y  avait  bâti  en  l'honneur 
de  la  sainte  Croix,  pourvu  qu'elle  l'eût  sulfi- 

13-  samment  doté;   —  à   Importunus,    évêque 

d'Attclane,  de  donner  le  soin  d'iuie  paroisse 
de  son  diocèse  au  prêtre  Dominique,  avec 
les  fruits  que  l'on  avait  recueillis  pendant  la 
dixième  indiction,  c'est-à-dire  en  51)1  ;    — 

'*•         et  à  Jean,  évêque  de  Velletri,  de  transférer 


i87 


son  siège  épiscopal  en  un  lieu  plus  sûr,  et 
plus  à  couvert  des  incursions  des  Barbares. 
—  Ayant  été  avei'ti  que  Paul,  (pi'il  avait  ei.iii.  n. 
agréi'  p(uir  évêque  deNaples,  pensait  à  quit- 
ter cetli!  ('glise,  il  l'exhorta  à  y  deineurei',  et 
il  continuer  ses  soins  envers  son  troupeau, 
en  l'assurant  que  le  diacre  Pierre,  dont  il  lui 
avait  rendu  un  bon  témoignage,  n'avait  rien 
;i  craindre  de  la  part  de  ceux  qui  voulaient 
lui  nuire.  — Il  confirma  l'ordination  de  Jean,  22 ei  2\ 
évêque  de  la  première  Justinienuc  dans  l'Il- 
lyrie,  le  constitua  vicaire  du  Saint-Siège,  et 
lui  accorda  l'usage  dupallium.  Dans  la  lettre 
qu'il  lui  écrivit  sur  ce  sujet,  il  lui  recom- 
mande d'user  d'une  telle  modération  envers 
ceux  qui  lui  sont  soumis,  qu'il  s'en  fasse  plus 
aimer  que  craindre;  de  punir  les  fautes  en 
père;  de  s'appliquer  tout  entier  à  gagner  les 
âmes  à  Dieu;  de  se  souvenir  qu'on  n'est 
point  pasteur  pour  se  reposer,  mais  pour 
travailler;  de  n'admettre  dans  le  ministère 
ecclésiastique  que  ceux  qui  en  sont  dignes, 
et  de  ne  rechercher  dans  les  ordinations  au- 
cun intérêt  temporel,  mais  la  seule  gloire 
de  Dieu.  —  On  voit  par  la  lettre  à  Bènéna-  25. 
tus,  évêque  de  Misène,  que  saint  Grégoire 
voulait  que  l'évêque  fût  pris  dans  le  clergé 
de  la  ville  même,  si  cela  était  possible,  et 
que  l'évêque  élu  vînt  à  Rome  se  faire  or- 
donner, avec  le  décret  d'élection,  signé  de 
tous,  et  les  lettres  du  visiteur  qui  avait  pris 
soin  de  l'église  vacante  et  présidé  à  l'élec- 
tion. —  Il  envoyait  ordinairement  des  évê-  Episi.se, 
ques  pour  visiteurs,  afin  qu'ils  fissent  dans  '  '"' 
les  églises  dont  l'évêque  était  mort,  les  fonc- 
tions réservées  aux  évêques. 

3.  L'empereur  Justinien  avait  fait  bâtir  si. 
une  église  sur  le  mont  Sina,  sous  l'invoca- 
tion de  la  Sainte  Vierge,  à  l'usage  des  moi- 
nes qui  vivaient  sur  cette  montagne  dans  le 
mépris  des  plaisirs  et  des  richesses  du  siè- 
cle, et  dans  ujie  continuelle  méditation  de 
la  mort.  Leur  vertu  attirait  la  curiosité  des 
étrangers,  qui  allaient  les  voir  pour  en  être 
édifiés.  Ruslicienne,  dame  de  grande  con- 
dition, qui  faisait  sou  séjour  à  la  cour,  fit 
part  à  saint  Grégoire  du  dessein  qu'elle 
avait  d'aller  visiter  les  Saints-Lieux  ;  elle 
tarda  quelque  temps  de  l'accomplir,  et  en- 
fin elle  en  fit  le  voyage.  Le  saint,  qui  lui 
avait  fait  il'abord  des  reproches  de  ce  qu'elle 
avait  tardé  de  se  mettre  en  chemin  pour  le 
mont  Sina,  lui  en  fil  ensuite  de  ce  qu'elle 
en  était  revenue  avec  trop  de  précipitation, 
sans  avoii'  pris  le  loisir  de  contempler  la 


488 


Lll).  IV 
i'I.  M. 


HISTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

de  ses  infirinilés  de  corps  et  d'esprit,  en  lui 


Lib.    V 


Lih, 
i.M.  Il 


II. 


vertu  de  tant  de  solitaires,  et  de  goûter  les 
douceurs  de  la  retraite.  Il  ajouta  qu'il  crai- 
gnait qu'elle  n'eût  pas  porté  d'autres  yeux 
que  les  yeux  du  corps  dans  ces  S:iints- Lieux, 
sans  ouvrir  ceux  du  cœur  aux  objets  édi- 
fiants, puisque  leur  vue  n'avait  point  luinni 
de  son  co;ur  l'amour  de  la  ville  de  Gonstan- 
">  tinople  et  de  là  cour.  —  11  l'exhorta  à  venir 
visiter  le  tombeau  de  saint  Pierre  A  Home, 
l'assurant,  qu'avec  la  protection  de  ce  prince 
des  apôtres,  elle  n'avait  rien  à  craindre  des 
armées  qui  inondaient  l'Italie.  Uiisticienne 
fit  beaucoup  de  présents  et  de  charités  aux 
églises  et  .aux  pauvres.  —  Elle  envoya  à 
saint  Grégoire  dix  livres  d'or  pour  le  rachat 
des  captifs,  des  voiles  pour  orner  le  tombeau 
de  saint  Pierre,  et  des  aumônes  pour  le  mo- 
Efi'll'ii'î'"'  nastère  de  Saint-André.  Saint  Grégoire  em- 
ploya le  crédit  qu'elle  avait  auprès  de  l'Em- 
pereur, pour  traverser  les  mauvais  desseins 
d'un  nommé  Béator. 

''■  4.  Il  ordonna  à  Etienne,  cartulaire  qu'il 

avait  envoyé  en  Sicile,  de  faire  renfermer 
deux  moines  qui  s'étaient  sauvés  de  leur  mo- 
nastère, dont  l'un  s'était  marié,  et  l'autre 
avait  repris  rhabit  séculier  ;  et  parce  qu'un 
certain  prétie  voulait  introduire  de  nouvel- 
les coutumes  dans  ce  monastère  contre  la  vo- 
lonté de  l'abbé,  il  charijea  Ktienne  de  l'en 

Epi-i.ij,  empêcher.  —  Il  y  avait  dans  les  leries  de  l'É- 

ti      lili.     v.  '  "' 

Kfisi.  :u.  giise  un  grand  nombre  de  juifs  qui  ne  vou- 
laient pas  se  convertir.  Saint  Gi-égoire  écri- 
vit a  Pierre,  son  vicaire  en  Sicile,  d'envoyer 
des  lettres  par  toutes  ces  leircs,  avec  pi-o- 
messe  de  diminuer  les  renies  a  ceux  qui  se 
convertiraient,  en  sorte  que  celui  qui  payait 
un  sou  d'or  aurait  une  remise  du  tiers,  et  que 
celui  qui  en  payait  trois  ou  quatre,  eu  paie- 
rait un  de  moins.  Il  ne  craignait  point  que 
cette  diminution  de  ses  revenus  fût  inutile, 
parce  qu'au  cas  même  où  les  juifs  ne  se  con- 
vprliiaient  pas  assez  sincèrement,  leuis  en- 
fants seraient  baptisés  avec  de  meilleures 
Efin.  33.  dispositions.  —  Léon  ,  évéque  de  Catane  , 
avait  été  accusé  de  plusieurs  crimes.  Saint 
Grégoire  fit  faire  la-dessus  diverses  informa- 
tions, dont  aucune  ne  chargea  cet  évùque; 
mais,  pour  ne  laisser  aucun  doute  sur  son 
innocence,  il  le  fit  jurer  devant  le  tombeau 
de  saint  Pierre  qu'il  n'était  coupable  d'au- 
cun (les  trimes  dont  on  l'accusait  ;  après 
quoi  il  écrivit  à  Justin,  préteur  de  Sicile,  de 
lui  donner  toutes  sortes  de  mar([ues  de  cha- 
3..  rite  et  do  respect.  —  Il  ôla  à  Caslnrius  l'ad- 

minislraliou  do  l'Église  de  llimiui,  à  cause 


réservant  une  modique  pension  sur  les  re- 
venus de  cette  Église,  dont  il  commit  le  soin 
.'i  Jean,  évèque  de  Havenne.  —  Il  établit 
Jean,  évoque  de  Lissitane  en  Dalmatie,  chas- 
sé de  son  siège  par  les  ennemis,  évèque  car- 
dinal de  Squillace  en  Italie ,  à  condition  de 
retourner  à  sa  première  église,  si  elle  recou- 
vrait sa  liberté.  —  A  la  requête  de  l'abbé 
Luminosus,  il  exhorta  Castorius,  évoque  de 
Rimini,  ii  laisser  à  la  communauté  du  mo- 
nastère situé  dans  la  même  ville  le  choix  de 
sou  abbé,  tout  en  lui  confirmant  U'  droit  d'or- 
donner celui  qui  aurait  été  élu  d'un  commun 
consentement.  Il  lui  défendit  aussi  de  faire 
l'invenlaiie  des  biens  de  ce  monastère  après 
la  mort  de  l'abbé,  ou  d'en  prendre  quelque 
partie  que  ce  fût  pour  les  donner  à  son  Eglise, 
ou  d'y  célébrer  des  messes  publiques ,  de 
peur  que  le  concours  des  peuples  ne  trou- 
blât le  repos  des  moines,  et  que  l'entrée  des 
femmes  ne  fût  pour  les  plus  simples  une  oc- 
casion de  chute  et  de  scandale.  —  Il  donna 
avis  de  ce  règlement  à  l'abi)é  Luminosus, 
atin  de  le  tranquilliser  ii  l'avenir  sur  les  usur- 
pations qu'il  craiLTuait  de  la  part  de  son  évo- 
que.—  Il  écrivit  à  Lucille,  évèque  de  Malte, 
d'obliger  ses  clercs  de  payer  à  l'Église  le 
cens  des  terres  qu'ils  tenaient  d'elle  en  Afri- 
que. —  11  unit  les  églises  de  Cumes  et  de 
Misène  qui  étaient  voisines  l'une  de  l'autre, 
dépeuplées  qu'elles  étaient  par  le  malheur 
des  temps,  et  en  donna  le  soin  à  Bénélatus. 
Cette  union  ne  subsista  pas  longtemps  :  ces 
deux  églises  eurent  dans  la  suite  chacune 
un  évéque,  comme  auparavant. 

5.  Jean,  évéque  de  Ravenne,  avait  écrit 
plusieurs  lettres  à  saint  Grégoire,  qui  n'avait 
pu  y  répondre  aussitôt,  à  cause  qu'il  était 
tombé  malade.  La  première  chose  qu'il  re- 
commande à  Jean  dans  sa  réponse,  est  do 
porter  llomain,  exarcpie  de  Havenne,  ù  la 
paix ,  s'ollranl  d'en  traiter  lui-même  avec 
Ariulfe,  duc  de  Spolèle.  Il  lui  dit,  en  second 
lieu  ,  qu'Arigis ,  duc  de  Bénévenl ,  s'était 
joint  à  Ariulfe,  et  qu'il  en  voulait  à  la  ville 
de  Naples,  qu'il  fallait  compter  pour  perdue, 
à  moins  que  l'exarque  n'y  envoyât  prouipte- 
ment  un  commandant  pour  la  défendre.  — 
11  parai!  que  l'exarque  n'en  fit  rien,  puisque, 
par  une  aiilro  lettre,  saint  Grégoire  ordonna 
aux  soldats  de  Naples  d'obéir  au  tribun  Cous- 
tanlius,  qu'il  envoya  lui-même  pour  com- 
mander dans  celte  ville. —  Jean  de  Havenne 
lui  avait  proposé  d'envoyer  quelque  aumône 


Ep    I    3'. 


CHAPITRE  XI.IX.  —  SAINT  GRlÎGOinK  LE  GRANn,  PAPE. 


i.ii..  lit, 

EfM.  56. 


lliia.,  E|li^l. 


1,1..  III, 


» 


[vn"  SifecLE.] 

à  Si^vi'tp,  palriarclic  dos  iSn^quos  schisniali- 
qucs  d'istiic.  «  Vous  ni!  park'iit'Z  pas  ainsi, 
lui  n![ioiul  io  Pa|)0,  si  vous  saviez  les  prc- 
scuts  qu'il  envoie  !\  la  cour  contre  nous  ; 
quand  uichne  il  ne  le  ferait  pas,  nous  devons 
l'aire  la  cliarilii  il  ceux  qui  sont  fidèles  à  l'K- 
gliso,  avant  de  la  faire  ;\  ses  adversaires.  » 
Il  dit  qu'il  vaut  donc  mieux  racheter  les  cap- 
tifs qu'on  avait  enicvds  de  la  ville  de  Fano, 
et  envoyer  à  cet  ctlet  Claude,  abbé  do  Saint- 
Jean  de  Classe  près  de  Ravenne,  avec  quel- 
que aryent.  Jean  lui  avait  encore  proposé 
de  réitérer  une  ordination.  Saint  Grégoire 
répond  (|u'il  n'est  pas  plus  permis  do  réité- 
rer l'ordination  que  le  baptême;  mais  que, 
si  quelqu'un  est  parvenu  au  sacerdoce  char- 
gé d'une  faute  légère,  il  doit  en  faire  péni- 
tence, et  demeurer  dans  l'ordre  qu'il  a  reçu. 

—  Onel<[iie  temps  après,  Jean,  sous  prétexte 
du  séjour  que  les  Empereurs  avaient  fait  à 
Ravenne,  et  de  la  résidence  que  les  exar- 
que y  faisaient,  voulut  se  distinguer  non- 
seulement  des  autres  évèques,  mais  aussi 
des  métropolitains,  en  portant  le  pallium, 
même  dans  les  processions.  Saint  Grégoire 
l'en  reprit.  —  Jean  lui  répondit  par  une  let- 
tre fort  soumise  eu  apparence,  mais  où  il 
soutenait  son  dioit  prétendu,  et  celui  que 
ses  prêtres  et  ses  diacres  s'attribuaient  de 
porter  même  h  Rome  les  manipules,  c'est-à- 
dire  une  serviette  que  les  prêtres  et  les  dia- 
cres portaient  lorsqu'ils  servaient  à  l'autel. 

—  Le  l'ape,  peu  content  de  cette  réponse, 
lui  écrivit  une  lettre  où  il  lui  disait,  en  par- 
lant des  processions  :  «  Comment  se  peut-il 
faire  que,  dans  ce  temps  de  cendres  et  de 
cilices,  au  milieu  des  gémissements  du  peu- 
ple, vous  portiez  par  les  rues  cet  ornement, 
que  vous  vous  défendez  d'avoir  porté  dans 
la  salle  secrète  de  l'Église  '?  Vous  devez  vous 
conformer  à  l'usage  de  tous  les  métropoli- 
tains, ou  montrer  un  privilège  du' Pape,  si 
vous  prétendez  en  avoir.  Nous  avons  fait 
chercher  exactement  dans  nos  archives,  et 
nous  n'avons  rien  trouvé.  Nous  avons  inter- 
rogé ceux  qui  ont  été  nonces  de  nos  prédé- 
cesseurs ù  Ravenne,  et  ils  ont  nié  absolu- 
ment que  vous  l'ayez  ainsi  pratiqué  en  leur 
présence.  Notre  clergé  nie  aussi  ce  que  vous 
attribuez  au  vôtre  à  l'égard  des  manipules  ; 
nous  le  permettons  néanmoins  à  vos  pre- 
miers diacres,  mais  seulement  quand  ils  vous 
servent.  »  Cette  lettre  fut  sans  elTet  :  Jean 
employa  la  médiation  de  l'exarque  et  du 
préfet  d'Italie  pour  soutenir  sa  prétention. 


489 


—  Saint  Grégoire,  ayant  appris  que  les 
arcbevèciues  de  Haveiiue  avaient  porté  le 
])allium  aux  processions  des  fêles  de  saint 
Jean-Baptiste ,  de  saint  Pierre  et  de  saint 
Apollinaire,  premier  évoque  de  cette  ville, 
accorda  A  Jean,  par  ])rovisioii,  de  le  porter 
h  ces  trois  fêtes,  et  au  jour  de  son  ordina- 
tion ;  mais,  sans  observer  cette  restriction, 
il  continua  de  le  porter  en  tout  temps  hors 
do  r(5glise.  —  Sur  cela  le  Pape  lui  écrivit 
une  IcHlrc  très-forte,  où  il  lui  reprochait  de 
faire  voir  par  sa  conduite,  qu'il  mettait  l'hon- 
neur de  l'épiscopat  dans  l'ostentation  exté- 
rieure, et  non  pas  dans  l'intérieur,  c'est-à- 
dire,  dans  la  pureté  des  mœurs. —  Dans  une 
autre  lettre  il  se  plaint  de  ce  qu'il  avait  ôtd 
aux  moines  leur  demeure  pour  y  loger  des 
clercs,  et  même  des  laïques,  et  lui  ordonne 
de  rétablir  les  choses  dans  leur  premier 
état. 

6.  Dominique  évèque  de  Carthage,  en  écri- 
vant à  saint  Grégoire  pour  le  féliciter  sur 
son  élection,  lui  demanda  la  confirmation 
des  pi'iviléges  de  son  église.  Le  Pape  lui  ré- 
pondit que,  comme  il  défendait  ses  propres 
droits,  il  conservait  aussi  à  chaque  Église  les 
siens.  11  lui  dit  beaucoup  de  choses  sur  la 
charité,  qu'il  appelle  la  mère  des  vertus,  el 
qui  a  le  double  don  de  réunir  les  esprits  el 
les  cœurs  divisés,  et  de  conserver  l'union  où 
elle  la  trouve.  —  On  l'avait  informé  que 
Maximien,  évêque  de  Pudentiane,  ville  de 
Numidie  qu'on  ne  connaît  point  aujourd'hui, 
avait  permis,  pour  de  l'argent,  d'établir  de 
nouveau  un  évêque  donatiste  dans  le  lieu 
même  de  sa  résidence.  Saint  Grégoire  écri- 
vit sur  cela  à  Colomb,  évêque  dans  la  même 
province,  d'assembler,  aussitôt  après  l'arri- 
vée du  cartulaire  Hilaire,  un  concile  général 
pour  examiner  cette  atlaire,  avec  ordre  de 
déposer  Maximien,  s'il  se  trouvait  convaincu 
du  fait.  Il  était  nécessaire  d'agir  avec  vigueur 
en  cette  occasion,  parce  que  l'hérésie  des 
donatistes  prenait  tous  les  jours  de  nouveaux 
accroissements  dans  la  Numidie,  où,  pour 
de  l'argent,  ils  obtenaient  la  liberté  de  re- 
baptiser plusieurs  catholiques.  —  Dans  une 
autre  lettre,  il  charge  Colomb  d'étoutfer  ce 
mal  dès  sa  naissance.  —  En  même  temps  il 
prie  Gennade,  exarque  de  Numidie,  de  pro- 
téger cet  évêque  en  tout  ce  qui  concernerait 
la  discipline  ecclésiastique.  —  Il  écrivit  di- 
verses autres  lettres  à  Colomb ,  qui  mar- 
quaient la  confiance  qu'il  avait  en  lui,  et 
dans  lesquelles  il  le  chargeait  de  veiller  à  ce 


l.il..  v, 
Eplit.  M. 


IMd.,  Ei/I«l. 


LU,.  V, 
Kjiitt.  I. 


Efin. 


Lil..  II, 
7. 


Er 

Lib. 

IV, 

K|. 

I.i!.. 
^l.  7 

IV, 

El 

I.ib, 

-1.  r 

VI, 

Ep 

Lil.. 
ît.  2, 

VU, 

190 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


LIb.XII, 
EplU.  9  M  iS. 


I.lb.  1 
EpUI.  W. 


Lit..   I 
Eplil.  r,l. 


i."s.  VIII,  qu'il  n'v  eût  point  de  simonie  dans  le?  or- 

E.  wl.  I  '.  .         .    ^ 

dinalions,  et  qu'on  n'ôlevàt  point  aux  ordres 
sacrés  les  jeunes  grens.  —  Il  fit  l'union  de 
l'église  des  Trois-Tabernes,  qui  était  ruinée, 
à  celle  de  Velletri,  en  donnant  à  Jean  le  pou- 
vcmement  de  l'une  et  de  l'autre,  cl  le  pou- 
voir de  disposer,  selon  les  règles,  du  patri- 
moine de  ces  deux  églises.  —  Sa  lettre  à 
tous  les  évéques  regarde  l'allaire  des  Trois- 
Chapitres.Cei^l  pourquoi  il  faut  supposerqu'el- 
les'adi'esse,nouà  tousles  évèiYucsdu  monde, 
mais  à  ceux-là  seulement  qui  refusaient  de 
condamner  les  Trois-C liapitres  ;  d'où  vient 
que  dans  iin  manuscrit  ancien,  elle  a  pour 
titre  :  A  tous  les  défenseurs  des  Trois-C hapi très. 
Ils  avaient  écrit  au  pape,  pour  se  plaindre 
des  persécutions  qu'on  leur  faisait  souilVir. 
Saint  Grégoire  leur  témoigne  qu'il  avait  reçu 
leurs  lettres  avec  plaisir,  mais  qu'il  en  au- 
rait beaucoup  plus  de  leur  refour  à  l'unité 
de  l'Église  ;  que  les  persécutions  dont  ils  se 
plaignaient  ne  pouvaient  leur  être  utiles , 
parce  qu'ils  ne  les  soutiraient  pas  pour  la 
vérité  ;  que  la  condamnation  des  Trois-Cha- 
pitres  n'avait  porté  aucune  atteinte  à  la  foi, 
et  que,  dans  le  cinquième  concile  général, 
où  il  en  fut  question,  on  ne  traita  que  des 
personnes,  dont  une ,  savoir  Théodore  de 
Mopsueste,  avait  donné  lieu  à  sa  condamna- 
lion  par  ses  écrits,  qui  étaient  évidemment 
contraires  à  la  vraie  foi.  U  ajoute  qu'ils  rai- 
sonnaient mal  en  disant  que  l'Italie  n'avait 
été  si  fort  maltraitée,  à  l'exclusion  des  au- 
tres provinces,  que  parce  qu'elle  avait  erré 
en  condamnant  les  Trois-C hapitres;  qu'au 
contraire  les  calamités  qu'elle  souffrait 
étaient  une  preuve  de  l'amour  que  Dieu  lui 
portait,  selon  qu'il  est  écrit  :  Le  Seigneur 
châtie  celui  qu'il  aime.  Pour  les  détromper, 
il  dit  qu'il  leur  envoie  le  livre  que  Pelage, 
son  prédécesseur,  avait  écrit  sur  cette  ma- 
tière; par  où  il  faut  entendre  la  septième 
lettre  de  Pelage,  et  la  troisième  ;\  Ilélie  et 
aux  autres  évéques  d'Islrie.  Celle-ci,  ainsi 
que  l'assure  Paul  Diacre,  était  l'ouvrage  de 
saint  Grégoire  même. 

7.  Licinicn,  évéque  de  Carlliagène  en  Es- 
pagne, ayant  lu  son  Pastoral,  en  conçut  une 
grande  idée,  parce  qu'il  en  trouvait  la  doc- 
trine conforme  à  ce  qu'avaient  enseigné,  sur 
le  devoir  des  évoques,  les  saints  et  les  an- 
ciens docteurs  de  l'Kglise  ;  mais  il  crut  s'a- 
percevoir que  ce  saint  Pape  poussait  trop 
loin  le  s;ivoir  qu'il  exigeait  de  celui  qu'on 
doit  promouvoir  à  l'épiscopat.  Sa  raison  était 


KlIX.  SI. 


que  l'on  ne  trouvait  pas  toujours  des  sujets 
qui  eussent  beaucoup  de  capacité,  et  que  si 
l'on  ne  voulait  point  se  relâcher  sur  ce  point, 
il  n'y  am-ait  quelquefois  ni  prédicateur,  ni 
ministre  du  baptême  ,  ni  prêtre  pour  of- 
frir le  sacrifice.  Il  pria  donc  saint  Grégoire 
d'examiner  si,  en  certains  cas,  on  ne  pou- 
vait pas  employer  dans  le  ministère  des  per- 
sonnes dont  la  science  se  réduisait  à  savoir 
Jésus-Christ,  et  Jésus-Christ  ci-ucifié.  11  lui 
demanda  aussi  ses  homi-lies  sur  Job  ;  il  par- 
lait dans  sa  lettre  de  celle  que  le  Pape  avait 
écrite  à  saint  Léandre,  évêque  de  Séville, 
sur  les  trois  immersions  du  baptême. 

§  ni. 

Livre  troisième  des  Lettres  de  saint  Grégoire. 

1.  Les  lettres  du  troisième  livre  sont  de  la 
onzième  indiction,  c'est-.Wire  de  l'an  592. 
Saint  Grégoire,  ayant  appris  de  l'abbé  Jean 
le  lieu  où  l'on  conservait  la  tunique  de  saint 
Jean,  écrivit  h  cet  abbé  de  faire  en  sorte  que 
l'évêque  qui  possédait  cette  reliipie  l'appor- 
tât à  Home  eu  cérémonie,  accompagné  de 
son  clergé.  Jean  Diacre  dit  que  c'était  la  tu- 
nique de  saint  Jean  l'Évangéliste  ;  qu'elle 
était  de  son  temps  dans  l'église  de  Constan- 
tin, aujourd'hui  Saint-Jean  de  Latran ,  et 
qu'elle  y  faisait  beaucoup  de  miracles.  Saint 
Grégoire  approuva  par  la  même  lettre  le 
choix  que  l'abbé  Jean  avait  fait  de  Boniface 
pour  prévôt  de  son  monastère.  —  En  celte 
même  année  592,  Adrien,  évéque  de  Thè- 
bes,  se  voyant  persécuté  par  les  évéques  ses 
confrères,  comme  par  des  ennemis,  vint  à 
Rome  pour  y  trouver  de  l'appui  et  se  faire 
rendre  justice.  —  Il  avait  déposé  deux  dia- 
cres de  son  Église,  nommés  Jean  et  Come, 
l'un  pour  un  péché  d'impureté,  l'autre  pour 
avoir  mal  administré  les  biens  de  l'église. 
Pour  s'en  venger,  ils  le  poursuivirent  devant 
rKmpercur  pour  des  causes  civiles  et  crimi- 
nelles. Le  premier  crime  dont  ils  l'accusè- 
rent fut  de  n'avoir  pas  déposé  Etienne,  dia- 
cre de  la  même  Eglise  de  Thèbes,  quoique 
sa  vie  infâme  ne  lui  fut  pas  inconnue;  le  se- 
cond, d';ivoir  empêclii'  <[u'on  ne  baptisât  des 
enfant!^  qui,  en  ellel,  ('laienl  miu-ts  depuis 
sans  baptême.  Ll-lmpereur,  suivant  les  ca- 
nons, renvoya  Adrien  devint  Jean,  évoque 
de  Laj'isse,  son  mcMropolitain.  Les  témoins 
prouvèrent  bien  la  niauv.iise  conduite  du  dia- 
cre i;tieime,  mais  non  qu'Adrien  en  eut  été 
informé;  ils  ne  prouvèrent  pas  non  plus  qu'il 


-  ILIb. 
Eplil.  1. 


Io.li.  M-. 
t0T<.  Lik  111, 
nain.  »7. 


[vil»  siÈcxE.]        CHAPITllE  XLIX.  —  SAINT  GRliGOIUE  LE  fillANn,  PAPE. 


491 


eût  empêclië  de  baptiser  lies  enfants,  et  ils  ne 
doposèreiit  sur  ce  lailciue  d'après  le  rapport 
des  luèros  dont  les  maris  avaienl  été  cxconi- 
niunios  pour  leurs  crimes.  Il  lui  prouvé  d'ail- 
leurs que  les  entants,  qu'on  disait  être  morts 
sans  baptême,  l'avaient  rcru  i\  Iléniélriade. 
Jean  de  Larisso  ne  laissa  pas  de  condamner 
Adrien  sur  ces  deux  chefs.  Celui-ci  appela 
de  cette  sentence  à  l'Empereur,  c'était  Mau- 
rice; mais  Jean,  sans  avoir  ét^ard  à  son  ap- 
pel, le  fit  melire  en  prison,  où  il  le  coutrai- 
Ji^nit  de  donner  par  écrit  son  aciiuiesccmeut 
à  sa  sentence ,  tant  pour  le  criminel  que 
pour  le  civil.  Adrien  donna  cet  acquiesce- 
ment en  termes  ambigus,  qui  lui  laissaient 
ouverture  à  sa  justiticalion.  Il  fit  donc  pour- 
suivre son  appel  devant  l'Empereur,  et  por- 
ter tous  les  actes  de  la  procédure  faite  par 
Jean  de  Larisse.  Maurice  commit,  pour  exa- 
miner cet  appel,  Honorât,  diacre  de  l'église 
romaine,  et  nonce  à  Constantiuople,  avec 
un  de  ses  principaux  secrétaires,  nommé 
Sébastien.  Le  procès  ayant  été  exactement 
discuté,  Adrien  fut  renvoyé  absous.  On  ob- 
tint toutefois  un  second  ordre  de  l'Empereur 
par  lequel  l'aO'aire  fut  renvoyée  à  Jean,  cvê- 
que  de  la  pi-emière  Justinienne,  primat  d'Il- 
lyrie  et  vicaire  du  Saint-Siège.  Adrien  ne  fut 
pas  plus  chargé  dans  cet  examen  que  dans  le 
précédent,  et  toutefois  le  primat  Jean  le  con- 
damna et  le  déposa  de  l'épiscopat.  L'évèque 
de  Thèbes  en  appela  au  Pape,  et  signifia  son 
appel  à  Jean  de  Justinienne,  qui  promit  d'en- 
voyer des  gens  à  Rome  pour  soutenir  son 
jugement.  Adrien  s'y  rendit  en  personne,  et 
se  plaignit  à  saint  Grégoire  des  injustices 
qu'il  avait  souffertes  de  la  part  de  Jean  de 
Larisse  son  métropolitain,  et  de  Jean  de 
Justinienne  son  [irimat.  —  Le  Pape  attendit 
longtemps  leurs  députés,  mais  voyant  que 
personne  ne  comparaissait  pour  eux,  il  exa- 
mina les  actes  des  procédures  faites  à  leur 
tribunal,  et  s'élant  convaincu  que  leurs  sen- 
tences étaient  aussi  irrégulières  dans  la  for- 
me qu'injustes  dans  le  fond,  il  cassa  la  sen- 
tence du  primat,  en  le  condamnant  à  trente 
jours  de  pénitence,  pendant  lesquels  il  serait 
privé  de  la  sainte  communion,  sous  peine 
d'être  puni  plus  sévèrement,  s'il  n'obéissait. 
11  se  réserva  à  examiner  plus  amplement 
comment  il  devait  être  puni,  pour  avoir  abu- 
sé du  pouvoir  qu'il  avait  dans  l'Illyrie, 
comme  vicaire  du  Saint-Siège.  A  l'égard 
de  Jean  de  Larisse,  il  aurait  mérité  d'é- 
ti-e  privé   de  la  communion   du   corps  de 


Notre- Seigneur,  pour  avoir  méprisé  l'ad- 
munilion  ilu  papi;  P('lage,  par  laquelle  il 
exemptait  de  la  juridiction  de  l'évèque  de 
Larisse  Adrien  et  son  église;  mais  saint  Gré- 
goire se  contenta  de  renvoyer  leurs  contes- 
tations à  la  décision  des  nonces  (ju'il  avait  à 
Constantiuople,  supposé  que  ces  contesta- 
tions fussent  de  moindre  conséquence,  ou  de 
se  les  réserver,  si  elles  étaieut  plus  considé- 
rables; en  attendant,  il  rétablit  Adrien  dans 
son  siège,  avec  ordre  à  Jean  de  Larisse  de 
restituer  àl'église  de  ïlièbes,  sans  délai,  tous 
les  biens  sacrés  ou  profanes,  meubles  ou  im- 
meubles, qu'on  l'accusait  de  retenir,  et  dont 
il  lui  envoya  le  mémoire.  Adrien  se  réconci- 
lia avec  ses  accusateurs.  —  Saint  Grégoire,  i^.'  '•^'• 
craignant  qu'il  n'y  eût  cpielque  prévarication 
dans  cet  accord,  envoya  sur  les  lieux  un 
diacre  de  l'église  Romaine,  pour  savoir  ce 
qui  en  était.  —  Il  fit  aussi  rappeler  Florent,  '• 
évéque  de  Raguse,  parce  qu'il  avait  été  en- 
voyé eu  exil  sur  des  accusations  non  prou- 
vées et  sans  avoir  été  jugé  par  le  concile  de 
la  province;  —  mais  avant  de  le  rétablir,  il  ^• 
ordonna  que  sa  cause  serait  examinée  par 
les  évêques,  et  son  innocence  reconnue. 

2.  Il  consentit  à  ce  qu'Agnel,  évéque  de  '■''"■ 
Fondi,  ville  ruinée  par  les  guerres,  accep- 
tât l'évéchéde  Terracine,  sans  toutefois  sup- 
primer le  titre  de  l'église  de  Fondi,  et  sans 
décharger  Agnel  du  soin  qu'il  en  avait  pris 
auparavant.  —  Ceux  de  Naples  avaient  choisi  '  >• 
pour  évéque  Florent,  sous-diacre  de  l'église 
de  Rome,  qui  ne  pouvant  se  résoudre  d'al- 
ler à  Naples,  prit  la  fuite  pour  éviter  l'épis- 
copat. Saiul  Grégoire  en  fut  affligé;  mais,  ne 
voulant  pas  laisser  cette  église  sans  évéque, 
il  écrivit  à  Scholastique,  juge  de  Campanie, 
d'assembler  les  principaux  ou  le  peuple  de 
Naples,  pour  procéder  avec  eux  à  l'élection 
d'un  autre  évéque  ;  à  quoi  il  ajouta  :  «  Si  vous 
ne  trouvez  personne  dont  vous  puissiez  con- 
venir, choisissez  du  moins  trois  hommes  dont 
la  droiture  et  la  sagesse  soient  connues,  et 
les  envoyez  ici  au  nom  de  toute  la  commu- 
nauté ;  peut-être  trouveront-ils  à  Rome  quel- 
qu'un capable  d'être  votre  évéque.  »  Voilà 
un  exemple  d'élection  par  compromis.  La 
lettre  du  Pape  n'eut  aucun  effet.  —  Il  en  écri-  33. 
vit  une  autre  quelque  temps  après  à  Pierre, 
sous-diacre  de  Campanie,  pour  presser  le 
peuple  de  Naples  de  députer  deux  ou  trois 
d'entre  eux  à  Rome,  pour  y  choisir  un  évé- 
que au  nom  de  toute  la  ville.  Il  le  chargea, 
par  la  même  lettre,  de  les  avertir  d'apporter 


.i'J2  HISTOIRE  GKNKllALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES 

tout  le  vestiaire  de  l'évèque,  et  l'arirent  né- 
cessaire pour  sa  dépense,  parce  qu'il  devait 
être  consacré  à  Rome,  et  en  partir  pour  N'a- 
pies.  Paul,  évêque  de  Népi,  avait  pris  soin  de 
l'église  de  Naples  pendant  la  vacance  du 
siège;  comme  il  souhaitait  de  s'en  retourner 
dans  sa  propre  église,  le  Pape  le  lui  accorda, 
en  donnant  onlre  au  sous-diacre  Pierre  de 
lui  faire  délivrer,  aux  dépens  de  l'église  de 
Naples,  cent  sous  d'or,  et  un  petit  orphelin 
Epi"  si.ei.   à  son  choix,  c'est-à-dire,  un  esclave. —  For- 


tunat  fut  enfin  ordonné  évêqiie  de  Naples; 
ce  fut  lui  qui  consacra  le  monastère  de  l'ab- 
besse  Grfiticuse.  Il  souscrivit  au  concile  de 
Rome  en  595.  —  Saint  Grégoire  donna  en 
toute  propriété  ;\  l'abbesse  Flore  un  terrain 
sulUsant  pour  bâtir  un  mouastère.  —  Les 
ariens  s'étaient  emparés  d'une  église;  le 
Pape,  avant  de  la  rendre  aux  catholiques,  la 
consacra  de  nouveau,  et  y  mit  des  reliques  ' 
de  saint  Séverin,  dont  elle  portait  le  nom. 

3.  Après  la  mort  de  N'atalis,  évèque  de  Sa- 
lone,  saint  Grégoire  écrivit  au  sous-diacre 
Antonii),  recteur  du  patrimoine  de  Dalmatie, 
de  veiller  fi  l'élection  d'uu  nouvel  évèque, 
et  d'avoir  soin  qu'il  se  fit  ordonner  à  Rome. 
Il  l'avertit  de  prendre  garde  surtout  que  les 
présents  ni  les  recommandations  n'aient 
aucune  part  dans  cette  élection,  parce  qu'il 
serait  dillicile  que  l'élu,  après  sou  ordina- 
tion, ne  se  prêtât  aux  volontés  de  ceux  qui 
auraient  appuyé  son  élection,  ce  qui  ne  man- 
querait pas  de  porter  préjudice  à  cette  éirli- 
se,  et  de  troubler  l'ordre  ecclésiastique.  Il 
veut  donc  qu'il  n'ait  attention,  dans  le  choix 
d'un  évèque,  qu'à  la  bonne  vie  et  aux  bonnes 
mœurs.  —  Il  fit  déposer  l'abbé  Secondin, 
convaincu  de  crimes,  et  ordonnera  sa  place 
Théodose,  que  la  communauté  du  monastère 
de  Saint-Martin  demandait.  —  Ayant  appris 
que  Laurent,  évèque  de  Milan,  avait  sans  au- 
cune raison  excommunié  le  prêtre  Magnus, 
il  leva  l'excommunication ,  permit  à  Ma- 
gnus de  faire  ses  fonctions  et  de  communier, 
laissant  à  sa  conscience,  s'il  se  sentait  cou- 
pable de  quelque  faute  secrète,  de  l'expier 
en  secret.  Laurent  était  mort  lorsque  saint 
Grégoire  écrivit  à  Magnus  ;  c'est  pourquoi  il 
le  chargea  d'averlir  le  clergé  et  le  peu])le  de 
procéder  unanimement  àrélecliiui  d'un  évè- 
que. Le  choix  tomba  sur  Conslantius,  diacre 
de  la  même  église  de  Milan.  Le  prêtre  Ma- 
gnus fut  chargé  de  porter  le  décret  d'élection 
A  saint  Grégoire,  qui,  voyant  qu'il  n'était  pas 
souscrit,  craignit  qu'il  n'y  eût  de  la  surprise. 


—  Il  envoya  donc  Jean,  sous-diacre  de  l'é- 
glise romaine,  à  Milan,  avec  une  lettre  pour 
le  clergé  et  le  peuple,  où  il  leur  prescrivait 
les  règles  qu'ils  devaient  suivre  dans  l'élec- 
tion d'un  pasteur;  —  et,  parce  que  plusieurs 
Milanais  s'étaient  réfuiriés  à  Gênes  pour  se 
soustraire  aux  mauvais  traitements  des  Lom- 
bards, il  envoya  Jean  à  Gènes,  avec  ordre 
de  les  faire  assembler,  et  en  cas  qu'ils  s'ac- 
cordassent unanimement  à  l'élection  de  Cons- 
lantius, de  le  faire  consacrer  évêque  de  Mi- 
lan par  les  évoques  de  la  province,  suivant 
la  coutume.  —  Les  habitants  de  Rimiui  l'a- 
vaient pressé  de  leur  donner  pour  évèque 
Castorius;  saint  Grétioire  eut  peine  à  y  cou- 
sentii-,  parce  qu'il  le  trouvait  trop  simple  pour 
gouverner  cette  église  ;  Castorius  en  tomba 
même  malade  de  chagrin.  Le  Pape  le  retint 
donc  à  Rome,  et  commit  Léonce,  évècjue 
d'Lrbiu,  pour  avoir  soin  de  l'église  de  Ili- 
mini.  —  Il  donna  ordre  â  Marinien,  abbé  de 
Palerme,  et  à  Bénénatus,  recteur  du  patri- 
moine de  cette  ville,  de  s'informer  de  la  con- 
duite de  l'évèque  Victor,  et  en  cas  qu'ils 
le  trouvassent  coupable  des  fautes  dont  on 
l'accusait,  non-seulement  de  le  priver  de  la 
communion  du  corps  et  du  sang  de  N'otrc- 
Seigneur,  mais  de  l'enfermer  encore  dans  un 
monastère  pour  y  faire  pénitence. —  Il  en- 
voya au  patricc  Dynamo  une  petite  croix,  où 
il  avait  fait  enchâsser  de  la  limaille  des  chaî- 
nes de  saint  Pierre  et  du  gril  de  saint  Lau- 
rent. —  Il  conlirma  la  donaliou  que  le  prê- 
tre Jean  avait  faite  par  teslament  pour  l'é- 
tablissement d'un  monastère,  où  il  transféra 
une  communauté  de  filles  dout  Bonne  était 
abbesse.  — 11  écrivit  à  Libertin,  préfet  de  Si- 
cile, de  réprimer  laltcntat  d'un  juif,  nommé 
Nasas,  qui  avait  osé  élever  un  autel  sous  le 
nom  du  prophète  Élie,   et  porté  par  ses  sé- 
ductions sacrilèges  plusieurs  chrétiens  à  y 
venir  adorer.  Nasas  achetait  aussi  des  escla- 
ves chrétiens,  au  mépris  des  lois,  et  il  avait 
gagné  par  argent  le  gouverneur  précc'ilcnl, 
nommé  Justin,  qui  l'avait   laissé  impuni.  — 
Le   Pape  prie  le  préfet  de  vérifier  tous  ces 
faits,  et  de  le  punir  de  peines  corporelles. — 
Félix,  défenseur,  avait  une  esclave  qui  sou- 
haitait   se  faire  reli.i;ieuse.   Saint   Grégoir4^ 
chaigea  le  sous-diacre  Pierre  d'examiner  s.i 
vocation,  et,  s'il  la  trouvait  bonne,  de  racln-- 
ter  cette  esclave,  et  de  la  mettre  dans  un 
monastère  entre  les  mains  de  personnes  gra- 
ves. 
4.  Sur  les  plaintes  qu'on  lui  porta  qu'un 


Epltl.  ». 


Bpisl. 


ir,,H. 


[vw  SIÈCLE.]        CHAPITRE  XLIX.  —  S.UNT 

iioinmi^  Fëlix  avait  violô  une  vierge,  il  or- 
diiiiri.i,  ou  qu'on  roblijicâl  do  l'i^pouser,  on 
i|ii*iipi'('s  l'avoir  puni  corpoicUcuicnt,  ou 
r(Mifcrui:'il  dans  un  inonastèio  pour  (pi'il  y 
fil  p('nitiMice,  sans  pouvoir  en  sortit'  à  moins 
de  sa  permission.  Le  plaignant  était  un  dia- 
cre (pii  avait  contracté  des  dettes  poiu-  se 
laiheter  des  mains  des  barbares;  comme  il 
se  trouvait  liors  d'i'tat  de  les  aciiuillei-,  saint 
Grégoire  donna  ordre  au  notaire  Patilaléon 
de  les  payer.  — Celui-ci  fut  aussi  chargé  de 
faire  avec  Félix,  évèque  de  Sipoute,  un  in- 
ventaire de  tous  les  meubles  de  cette  église, 
et  de  le  reporter  à  Rome.  —  Saint  Grégoire 
n'était  pas  content  de  cet  évèque,  à  qui  il 
impidait  en  quelque  sorte  la  faute  de  son 
neveu  Félix,  pour  n'avoir  pas  veillé  sur  sa 
conduite.  Il  le  rendit  donc  responsable  de 
l'exécution  de  la  sentence  qu'il  avait  rendue 
contre  lui.  — André,  évèque  de  Tarente,  avait 
eu  une  concubine  avant  d'être  admis  dans  le 
saint  ministère.  Il  fut  soupçonné  depuis  d'a- 
voir eu  un  commerce  avec  elle.  Le  fait  n'é- 
tait pas  certain.  Saint  Grégoire  donna  com- 
mission ù  Jean,  évèque  dcGallipoli,  de  s'en 
informer,  et,  s'il  le  trouvait  vrai,  d'interdire 
André  de  ses  fonctions.  Il  y  avait  d'autres 
plaintes  contre  cet  évèque,  entre  autres  d'a- 
voir fait  frapper  cruellement  à  coups  de  bâton 
une  femme  du  nombre  de  celles  qui  étaient  im- 
matriculées, c'est-à-dire,  qui  étaient  nourries 
et  entretenues  aux  dépens  de  l'Église.  Pour 
ce  fait,  saint  Grégoire  lui  ordonna  de  s'abs- 
tenir pendant  deux  mois  de  la  célébration 
des  saints  mystères.  —  Ses  lettres  à  Adéo- 
dat,  primat  de  Numidie,  et  à  Théodore,  évè- 
que de  Lilybée,  sont  pour  les  exhorter  à 
n'admetti'e  au  sacerdoce  que  des  personnes 
d'ûge  et  de  probité. 

5.  On  avait  commencé  un  baptistère  dans 
l'église  du  monastère  de  Saint- .\ndré,  ce  qui 
était  contre  l'usage  des  monastères,  et  y  ap- 
portait cpielques  troubles.  Saint  Grégoire 
écrivit  donc  à  Secondin,  évèque  de  Taormi- 
ne,  de  le  détruire,  et  de  bâtir  à  la  place  un 
autel  pour  y  célébrer  les  saints  mystères.  — 
Il  écrivit  à  Eutychius,  évèque  de  'l'indaro 
dans  la  Sicile,  de  continuer  à  travailler  à  la 
conversion  des  idolâtres,  en  l'assurant  qu'il 
avait  écrit  au  préteur  de  Sicile  pour  le  pro- 
téger dans  cette  bonne  œuvre.  L'église  de 
Bénagna  dans  l'Ombrie  était  sans  prêtres  et 
sans  évèque  ;  le  Pape  chargea  Chrysanthe, 
évèque  de  Spolète,  de  pourvoir  à  ses  besoins, 
et  daller  en  attendant  administrer  le  bap- 


GltlîlGOlRE  LE  GRAND,  PAPE.  49'i 

tème  aux  enfants.  —  Cependant,  le  graml  ki,i- 
écuyer  de  l'empereur  iMaurice  ajiporta  à 
R(Mne  une  loi  (jui  dc-feudait  de  recevoir,  soit 
dans  le  clcigc-,  soit  dans  les  monastères,  au- 
cun de  ceux  qui  étaient  engagés  dans  les 
charges  publiques,  ou  qui  avaient  pris  quel- 
que engagemeiildans  la  milice.  Ces  derniers 
étaient  aisés  â  reconiiaitre,  parce  qu'ils  por- 
taient une  marque  imprimée  sur  la  main. 
Saint  Grégoire  reçut  cet  édit  dans  un  temps 
où  il  était  malade,  ce  qui  l'empêcha  d'en 
écrire  aussitôt  à  l'Empereiu".  Il  dit,  dans  la 
lettre  qu'il  lui  écrivit  depuis,  qu'il  ne  désap- 
prouvait pas  que  ce  prince  eût  défendu  de 
donner  place  dans  le  clergé  :\  ceux  qui 
étaient  ojjligés  de  rendre  compte  de  quelipie 
administration,  et  qui  avaient  exercé  des 
charges  publiques,  parce  qu'il  savait  que  la 
plupart  d'entre  eux  ne  s'engageaient  dans  la 
cléricature  que  par  ambition  et  par  avaiice; 
mais  il  trouva  étrange  qu'on  fermât  l'entrée 
des  monastères  aux  gens  de  guerre,  qui 
avaient  si  grand  besoin  de  pénitence,  parce 
que  c'était  leur  fermer  l'entrée  du  ciel.  Il  de- 
mande donc  à  l'Empereur  que  ce  qui  leur 
avait  été  permis  jusque-là,  le  fût  encore  à 
l'avenir.  Il  convient  qu'il  y  en  a  plusieurs  qui 
peuvent,  sous  un  habit  séculier,  mener  une 
vie  religieuse,  mais  aussi  que  la  plupart  ne 
peuvent  être  sauvés  s'ils  n'abandonnent  tout  ; 
à  quoi  il  ajoute  que  la  puissance  souveraine 
a  été  donnée  aux  princes  sur  tous  les  hom- 
mes, afin  que  ceux  qui  tendent  à  la  vertu, 
soient  aidés  et  secondés  par  eux;  que  l'édit 
nouvellement  publié  paraissait  contraire  à 
cette  disposition,  puisqu'il  déclarait  nette- 
ment, qu'après  qu'on  s'était  enrôlé  dans  la 
milice  séculière,  il  n'était  plus  permis  d'en- 
trer dans  la  milice  de  Jésus-Christ,  à  moins 
d'avoir  accompli  le  temps  du  seiTice,  ou  d'a- 
voir été  refusé  pour  faiblesse  de  complexiou. 
Il  représente  à  ce  prince  les  grandes  faveurs 
dont  Dieu  l'avait  comblé  en  le  faisant  passer 
par  tous  les  degrés  d'honneur,  de  notaire, 
c'est-à-dire  secrétaire  d'iitat,  de  comte,  de 
capitaine  des  gardes,  de  césar,  d'empereur; 
le  pouvoir  qu'il  lui  avait  accordé  sur  les  prê- 
tres et. sur  lesévèques  :  d'où  il  conclut  qu'il 
ne  pouvait  sans  ingratitude  détourner  ses 
soldats  du  service  de  Celui  de  qui  il  avait 
reçu  tant  de  bienfaits.  Il  lui  représente  en- 
core, qu'aucun  de  ces  prédécesseurs  n'avait 
fait  inie  semblable  ordonnance;  qu'il  était 
dur  de  défendre  d'abandonner  le  siècle,  lors- 
'•que  ce  siècle  était  sur  sa  fin;  que  si  l'on  dou- 


mSTOlRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSL\STIQLT:S. 


uti:'.  it. 


El.. 


Lit'.  Vl.l, 


•104 

tiiit  qu'il  y  eût  des  soldais  qui  se  fissent  moi- 
nes avec  une  droite  intention,  il  était  en  état 
d'en  citer  pliisieui-s  de  son  temps  qui  avaient 
vécu  avec  tant  d'édification  depuis  leur  con- 
yersion.  que  leur  sainteté  avait  éclaté  par  des 
miracles.  Il  conjure  donc  l'Empereur,  ou  de 
chanper  cette  loi,  ou  de  la  modérer  par  une 
nouvelle  interprétation,  l'assurant  que,  bien 
loin  d'affaiblir  parla  ses  armées  qui  combat- 
tent contre  les  ennemis  de  l'État,  il  les  forti- 
fiera, en  rendant  plus  nombreuses  les  ar- 
mées du  Sei<rneur,  dont  les  prières  sont  les 
armes  les  plus  puissantes  et  les  plus  redou- 
tables. Mais,  pour  marquer  combien  il  était 
soumis.aux  puissances  delà  terre  :  «J'ai  en- 
voyé, Tui  dit-il,  votre  ordonnance  dans  tou- 
tes les  parties  du  monde,  après  avoir  pris  la 
liberté  de  vous  représenter  qu'eUe  ne  s'ac- 
corde pas  avec  la  loi  du  Tout-Puissant;  ainsi 
je  me  suis  acquitté  de  ce  que  je  devais  des 
deux  côtés.  J'ai  obéi  à  l'Empereur  en  pu- 
bliant son  édit;  et  je  ne  mesuispas  tù,  lors- 
qu'il a  fallu  soutenir  les  intérêts  de  Dieu.  » 
S.  Grégoire  eut  recours  aussi  aux  personnes 
qui  avaient  le  plus  de  crédit  ù  la  cour,  nom- 
mément  à  Théodore,  qui  était  le  premier 
médecin  de  Maurice.  Il  avoue  dans  sa  lettre, 
que  Julien  l'Apostat  avait  donné  un   édit 
semblable  ;  mais  il  ne  croit  pas  que  ce  prin- 
ce, ennemi  de  Dieu,  doive  servir  de  modèle 
à  des  empereui-s  chrétiens.  —  Soit  que  Théo- 
dore eût  employé  son  crédit  auprès  de  l'Em- 
pereur, soit  que  ce  prince  eût  été  frappé  des 
remontrances  de  saint  Grégoire ,  il  modéra 
sa  loi  dans  la  suite,  en  permettant  de  rece- 
voir les  soldats  à  la  profession  religieuse, 
après  les  avoir  éprouvés  par  un  noviciat  de 
trois  ans.  —  La  dernière  lettre  du  troisième 
livre  est  à  Domitien,  évéque  de  Mélitine  et 
métropolitain  d'Arménie,  qu'il  congratule  de 
ce  qu'il  s'appliquait  à   l'élude   des   divines 
Écritures,  et  de  ce  qu'il  avait  prêché  la  foi  à 
l'empereur  des  Perses.  Quoifpie  ce  prince 
n'en  eût  pas  profité,  il  assure  Domilien  qu'il 
ne  sera  pas  moins  récompensé  de  ses  tra- 
vaux :  un  Élliinpien  entre  noir  dans  le  bain, 
et  il  en  sort  noir;  le  baigneur  toutefois  reçoit 
le  prix  du  bain.  Il  cite  l'eiLplication  spiri- 
tuelle qu'il  avait  donnée  du  rapt  de  Dina, 
rai)porté  au  chapitre  xxxiv  de  la  Genèse,  et 
soutient  qu'on  peut  entendre  ainsi  cet  en- 
droit de  l'Écrilure  sans  déroger  à  la  vérité 
de  l'bistoire. 


§1V. 

Livre  quatrième  des  Lettres  de  saint 
Grégoire. 

Après  que  Constantius  eut  été  élu  et  con-    K^M.t^ 
sacré  d'un   consentement  unanime  évoque 
de  Milan,  saint  Grégoire  l'en  félicita  ,  en  lui 
donnant  les  avis  nécessaires  pour  la  condui- 
te de  cette  église ,  et  en  lui  envoyant  le  pal- 
lium.  Constantius,  de  son  côté,  avait  envoyé 
au  Pape  sa  confession  de  foi ,  selon  la  cou- 
>tume.  Il  n'y  avait  point  parlé  des  Trois-Clia- 
pitres  ;  mais  trois  évêques  de  sa  province, 
cherchant  vraisemblablement  h  se  séparer 
de  lui,  firent  courir  le  bruit  qu'il  s'était  obli- 
gé par  écrit  à  condamner  les  Trois-C/iopitres, 
et  sous   ce  prétexte  quittèrent  sa  commu- 
nion. Ils  persuadèrent  aussi  à  la  reine  Théo- 
delinde  de  s'en  séparer;  elle    était   veuve 
d'Autarit,  roi  des  Lombards;  depuis  la  mort 
de  ce  prince,  elle  avait  épousé  Agilulfe,  duc 
de  Turin,  qu'elle  convertit  à  la  foi  catholi- 
que avec  toute  la  nation  des  Lombards.  Saint 
Grégoire,  informé  du  procédé  de  ces  trois 
évêques ,  écrivit  en  même  temps  deux  let- 
tres à  Constantius.  Dans  la  première ,  qui 
était  pour  lui  seul,  il  l'assure,  qu'encore  que 
Théodelinde  se  soit  séparée  de  sa  commu- 
nion, parce  qu'elle  avait  été  trompée  ,  il  sa- 
vait de  bonne  part  qu'eUe  ne  tarderait  pas 
à  y  rentrer  ;  qu'il  lui  avait  écrit  sur  ce  su- 
jet ;  qu'à  l'égard  des  trois  évêques ,  il  ne 
doutait  pas  qu'ils  ne  dussent  se  repentir  de 
ce  qu'ils  avaient  l'ail,  aussitôt  qu'ils  auraient 
reçu  sa  lettre.  Le  Pape  déclarait  dans  la  se- 
conde, qui  était  écrite  pour  être  montrée  aux 
évêques  schismatiques ,  qu'il  n'avait  été  fait 
aucune   mention  des   7'ruis-C/iapitrcs  entre 
lui  et  Constantius.  Il  y  protestait  en  sa  cons- 
cience ,  qu'il  conservait  la  foi  du  concile  de 
Chalcédoine ,  sans  oser  rien  ôlcr  ni  ajouter 
à  sa  définition  ,  disant  anathèmc  à  quicon- 
que  croyait  plus  ou  moins  que  ce  que  ce 
concile  avait  décidé.  Il  ajoutait  :  «  Celui  Iqui 
n'est  pas  content  de  cette  déclaration ,  n'ai- 
me paj  tant  le  concile  de  Chalcédoine,  qu'il 
ne  liait  l'Église  notre  mère,  n  —  Saint  Gré- 
goire avait  adressé  i\  Constantius  une  troi- 
sième lettre  pour  la  reine  Théodelinde  ;  — 
mais  cet  évèque,  sachant  que  le  Pape  y  par- 
lait du  cinquième  concile  général-,  ne  jugea 
pas  à  propos  de  la  rendre  A  cette  princesse , 
dans  la  crainte  de  la  scandaliser.  —  Sa  con- 
duite fut  approuvée  de  saint  Grégoire  ,  qui 


[vil*  SIÈCLE.]       CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT 

lui  envoya  une  autre  lettre  pour  Tlit5odeliii- 
(1(\  011,  so  contenliint  de  louer  les  quatre 
lireuiiers  conciles,  il  ne  disait  rien  du  cin- 
iiuième  ;  mais  il  exiiorlail  cette  reine  ;ï  écri- 
re incessaïuincnl  à  Con.stautius  pour  lui  té- 
nioigner  qu'elle  agréait  son  ordination  ,  et 
([u'elle  embrassait  sa  communion.  Ces  let- 
tres, de  même  que  toutes  celles  du  ijuatriè- 
me  livre  ,  sont  de  la  douzième  indiction  , 
c'est-i\-dire  de  l'an  593.  —  Le  Pape,  en  par- 
lant du  concile  de  Conslantinople,  que  quel- 
ques-uns, dit-il,  nomment  le  cinquième,  di- 
sait i\  Constantius  :  u  Vous  devez  savoir  qu'il 
n'a  rien'  décidé  contre  les  quatre  précé- 
dents; car  on  n'y  a  point  traité  de  la  foi, 
mais  seulement  do  quelques  personnes,  dont 
il  n'y  arien  dans  le  concile  de  Chalcédoine; 
seulement ,  après  avoir  fait  les  canons ,  on 
agita  quelque  dispute  sur  ces  personnes  ,  et 
on  l'examina  dans  la  dernière  action.  »  ,\in- 
si  saint  Grégoire  ne  comptait  pour  actes  du 
concile  de  Chalcédoine  que  les  sept  premiè- 
res actions  ,  qui  comprenaient  la  définition 
de  foi  et  les  canons,  regardant  tout  le  reste 
comme  des  allaires  particulières  ,  et  sans 
conséquence  pour  ri<]glise  universelle.  — 
Les  citoyens  de  Brescia  voulaient  obliger 
Constantius  de  déclarer  avec  serment  qu'il 
n'avait  pas  condamné  les  Trois- Chapitres. 
Saint  Grégoire  lui  écrivit  sur  cela  :  «  Si  vo- 
tre prédécesseur  ne  l'a  pas  fait ,  on  ne  doit 
pas  vous  le  demander;  s'il  l'a  fait,  il  a  faus- 
sé son  serment ,  et  s'est  séparé  de  l'Église 
catholique ,  ce  que  je  ne  crois  pas.  Mais 
pour  ne  point  scandaliser  ceux  qui  vous  ont 
écrit ,  envoyez-leur  une  lettre  ,  où  vous  dé- 
clariez avec  anathème  que  vous  u'alfaiblis- 
sez  en  rien  la  foi  du  concile  de  Chalcédoine, 
que  vous  ne  i-ecevez  point  ceux  qui  l'aflai- 
blisseut,  que  vous  condamnez  tous  ceux  qu'il 
a  condamnés,  et  justifiez  tous  ceux  qu'il  a 
justices.  Quant  au  scandale  qu'ils  prennent 
de  ce  que  vous  ne  nommez  pas  à  la  messe 
notre  confrère  Jean,  évèque  de  Ravenne ,  il 
faut  vous  informer  de  l'ancienne  coutume , 
et  la  suivre.  Sachez  aussi  s'il  vous  nomme  à 
l'autel  :  car,  s'il  ne  le  fait  pas,  je  ne  vois  rien 
qui  vous  oblige  à  le  nommer,  »  C'était  donc 
l'usage  alors  de  nommer  à  l'autel  les  évé- 


GRÉGOIRE  LE  GRAND,  PAPE.        'M 

ques  vivants  des  grands  sièges,  comme  nous 
y  nommons  le  Pape. 

2.  L'n  iiomuik'^  l']tiennc  avait  déclan;  en  KjI.i.j. 
inouranl  qu'il  voulait  (|ue  l'on  prit  sur  sa 
succession  les  fonds  nécessaires  pour  réta- 
blissement d'un  monastère  ;  ses  héritiers 
ayant  ni'gligé  d'exécuter  sa  volonté  à  cet 
égard,  saint  Grégoire  écrivit  ;\  Janvier,  évè- 
que de  Cagliari,  de  les  y  contraindre ,  en 
leur  donnant  l'année  pour  terme.  —  Il  lui  ''" 
ordonna  aussi  de  députer  un  homme  de  pro- 
biti;,  tiré  de  son  clergé  ,  pour  prendre  soin 
des  monastères  de  filles,  en  sorte  qu'elles 
ne  fussent  plus  obligées  à  l'avenir  de  sortir 
pour  vaquer  à  leurs  propres  affaires  ;  vou- 
lant (lue.  si  quelqu'une  était  loinljée  dans 
une  faute  considérable,  il  la  fit  renfermer 
dans  un  autre  monastère  de  filles  dont  la 
vie  fut  plus  austère  ,  pour  y  faire  pénitoiico 
dans  les  jeûnes  et  la  prière.  Il  lui  ordonna 
encore  de  tenir  chaque  année  deux  conci- 
les, et  de  faire  mettre  en  liberté  les  esclaves 
de  juifs  qui  se  réfugiaient  dans  l'église  en 
vue  d'cmljiasser  la  foi  catholique.  Les  prê- 
tres de  l'ile  de  Sardaigne  marquaient,  à  l'i- 
mitation des  Grecs  avec  qui  ils  étaient  en 
relation,  les  enfants  baptisés,  sur  le  front, 
avec  le  saint  chrême.  Les  évêques ,  à  qui  ce 
droit  appartenait ,  suivant  l'ancienne  tradi- 
tion de  l'Église  ,  marquaient  une  seconde 
fois  les  enfants  sur  le  front  avec  le  saint 
chrême,  lorsqu'ils  leur  donnaient  la  confir- 
mation. Saint  Grégoire,  trouvant  de  l'abus 
dans  cette  double  chrismalion  sur  le  front , 
la  défendit^  et,  pour  conserver  aux  évêques 
leurs  droits  ,  il  ordonna  que  les  prêtres  ne 
marqueraient  plus  sur  le  front  avec  le  saint 
chrême  les  enfants  baptisés  ,  et  qu'ils  se 
contenteraient  de  leur  faire  l'onction  sur  la 
poitrine,  afin  que  les  évêques  leur  fissent 
ensuite  celle  du  front.  —  Ayant  appris  de-  se 
puis,  que  quelques-uns  avaient  été  scanda- 
lisés de  cette  défense,  il  permit  aux  piètres 
de  faire  aux  baptisés  l'onction  du  chrême 
sur  le  front ,  au  défaut  des  évêques  ,  disant 
qu'il  ne  l'avait  défendu  d'abord,  qu'eu  égard 
à  la  coutume  ancienne  de  l'église  de  Rome, 
qui  réservait  cette  chrismation  à  l'évêque. 
On  voit  par  là  que  les  usages  étaient  dillé- 


'  De  illa  lamrn  synodo  quœ  in  Constantinopoli 
■pnstmodum  fada  est,  quœ  a  multis  quinta  noini- 
naiur,  scire  vos  vulo  quia  nihil  contra  quatuor 
sanctissimas  synodos  conslitueril,  vel  senserit  ; 
quippe  quia  in  ea  de  personis  tantummodo,  non 


autem  de  fide  aliquid  gestum  est,  et  de  his  per- 
sonis de  quibus  in  Chalcedonensi  concilio  niltil 
conlinctur  ;  sedpost  expresses  canones  fada  con- 
tenlio,  et  exlrema  actio  de  personis  ventila  ta 
est.  Gr    eg.lib.  IV,  Epist.  39. 


496  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 

irnts  sur  ce  point  enlre  les  églises  d'Occi- 
dent, comme  ils  le  sont  encore  entre  les 
Grecs  et  les  Latins. 
Epi-'i.  10.  3.  Il  dofeuilit  aux  dvêqnes  de  Dalmatie  de 

choisir  sans  son  tousenlement  un  évcquc 
pour  Saloue,  leur  accordant  néanmoins  pour 
cette  fois  ce  pouvoir,  pourvu  (pie  tous  les 
suÛ'rages  se  réunissent  sur  une  même  per- 
sonne, et  que  ce  ne  fiil  pas  un  nommé  Ma- 
xime, dont  on  lui  avait  dit  beaucoup  de  mal. 

'•  —  Il  était  d'usage  dans  l'Église  de  Rome  de 
partager  en  quatre  les  revenus,  dont  une 
partie  était  pour  l'évèque,  une  autre  pour  le 
clergé,  la  troisième  pour  les  pauvres,  et  la 
quatrième^.pour  la  réparation  des  bâtiments 
de  l'Église.  Les  évoques  de  Sicile  suivaient 
ausssi  cet  usage,  mais  seulement  pour  les 
revenus  anciens  de  leurs  églises,  et  ils  tour- 
naient à  leur  usage  particulier  tous  les  nou- 
vi-aux.  Saint  Grégoire  chargea  Maximien  de 
Syracuse  de  les  obliger  ;\  faire  quatre  parts, 
tant  des  nouveaux  que  des  anciens  revenus 
de  l'Église,  et  d'en  faire  une  distribution 
conforme  aux  canons.  Il  le  chargea  aussi 
d'empêcher  que  l'on  ne  choisît  pour  abbé 
d'un  monastère  un  clerc  attaché  à  quelque 
église  particulière,  et  qui  ne  fût  pas  moine, 
ou  de  l'obliger,  en  cas  qu'il  eût  été  choisi 
abbé,  de  quitter  l'église  à  laquelle  il  était 
attaché ,  pour  vivre  dans  le  monastère  et 
y  faire  les  fonctions  d'abbé  ;  de  veiller  à 
ce  que  l'on  fit  des  inventaires  des  biens  de 
l'église  après  la  mort  de  l'évèque,  et  que  ces 
inventaires  se  tissent  gratuitement  ;  de  faire 
défrayer  les  visiteurs  des  églisffs,  avec  les 
clercs  de  leur  suite  ;  d'empêcher  qu'on  ne 
choisit  pour  abbesses  de  monastères  de  fil- 
les, des  personnes  moins  âgées  que  d'onvi- 

u.  ron  soixante  ans;  —  de  punir  le  crime 
d'un  homme  qui  iivait  enlevé  la  femme  d'un 

u.  autre,  et  l'av.nit  vendue  ;  —  de  recevoir  dans 

son  église  le  diacre  Félix,  qui  était  revenu 
ù  l'unité  de  l'Église,  après  s'en  être  séparé 

„.  pour  la  cause  des  Trois  -  Chapitres  ;  —  de 

faire  rendre  à  Enplus  les  biens  de  sa  mère, 
qu'Eusanius  son  père  avait  retenus  étant 
évoque  ,  et  dont  il  n'avait  point   disposé  , 

II.  étant  mort  sans  testament.  —  Il  ordonna  à 
Janvier  de  Cagliari  de  seconder  Théodosie 
dans  le  dessein  où  elle  était  de  faire  de  sa 
maison  un  monastère  ;  —  au  diacre  Cyprien 
de  ramasser  les  vases  sacrés  que  divers  prê- 
tres d'Italie  avaient  emportés  avec  eux  dans 
leur  fuite  en  Sicile,  et  de  les  remettre  entre 
les  mains  des  évêques  des  lieux  où  ils  les 


!(. 


AUTEURS  ECCLÉSIAS'nQUES. 

retrouverait,  afin  de  pouvoir,  au  retour  de 
la  paix,  les  rendre  à  qui  ils  appartenaient; 

—  à  Félix,  évêque  de  Siponte,  de  restituer, 
des  denit.'rs  de  l'Église,  douze  sous  d'or  à 
celui  qui  avait  délivré  pareille  somme  poui" 
le  rachat  du  clerc  Tribun. —  Il  donna  a  l'abbé 
Maur  et  à  ses  moines  l'église  de  Saint-Pan- 
crace, afin  qu'ils  y  fissent  l'ollice  divin  sur 
le  tombeau  du  saint  martyr,  à  la  charge 
aussi  d'entretenir  un  prêtre  pour  la  célébra- 
tion des  saints  mystères.  Ce  prêtre  est  ap- 
pelé étranger,  par  opposition  au  prêtre  car- 
dinal, qui  était  fixe,  et  attaché  particulière- 
ment à  la  desserte  d'une  église,  au  lieu  que 
l'étranger  n'était  que  pour  un  temps  ;  il  était 
nourri  dans  le  monasière,  d'où  il  recevait 
aussi  de  quoi  sullire  aux  autres  besoins  de 
la  vie. 

4.  Les  ariens  s'étaient  emparés,  sous  les 
rois  goths,  de  l'église  de  Sainte-Agathe,  où 
ils  tenaient  leurs  assemblées,  et  l'avaient  en- 
richie de  plusieurs  donations.  Cette  église 
ayant  été  rendue  aux  catholiques,  saint  Gré- 
goire commit  l'acolyte  Léon  pour  prendre 
soin  des  revenus  qui  y  étaient  attachés,  et 
pourvoir  à  ses  réparations  et  aux  luminaires. 

—  En  permettant  aux  évoques  de  Dalmatie 
d'élire  un  évêque  pour  Salone,  il  avait  exclus 
nommément  Maxime  ;  ils  le  préférèrent  tou- 
tefois à  l'archidiacre  Honorât,  qui  avait  été 
élu  par  le  clergé  de  Salone.  Maxime  obtint 
un  ordie  de  l'Empereur  qui  confirmait  son 
élection,  et  le  fit  exécuter  à  maius  armées. 
Saint  Grégoire,  informé  de  ces  violences, 
lui  écrivit  pour  lui  déclarer,  qu'il  tenait  pour 
subreptice  ou  pour  faux  l'ordre  de  l'Empe- 
reur :  «  Car,  dit-il,  nous  n'ignorons  ni  vo- 
tre vie  ni  votre  âge,  et  nous  savons  l'inten- 
tion de  l'Empereur,  qui  n'a  pas  coutume 
de  se  mêler  des  affaires  des  évèques,  pour 
ne  pas  se  charger  de  nos  péchés.  Nous  ne 
pouvons  donc  nommer  ordination  une  ci-ré- 
monie  qui  a  été  faite  par  des  excommuniés; 
et  jusqu'à  ce  que  nous  sachions  par  les  let- 
tres de  l'Hlmpereur  ou  de  notre  nonce,  que 
vous  avez  été  ordonné  véritablenuMit  par  son 
commandement ,  nous  vous  défendons ,  à 
vous  et  à  vos  ordinateurs,  de  faire  aucune 
fonction  sacerdotale,  ou  d'approcher  du  saint 
autel ,  jusqu'à  notre  réponse  ,  le  tout  sous 
peine  d'auathèinc.  d  — Il  manda  à  Vcnance, 
évêque  de  Luna  ou  la  Magra,  d'empêcher  que 
les  juifs  n'eusseul  à  eux  des  esclaves  chré- 
tiens, mais  de  permettre  à  ceux  des  chré- 
tiens qui  cultivaient  les  terres  des  juifs,  de 


E|i-i.  n. 


[vil»  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XI.IX.  —  SAINT 

loin-  (Ml  payer  Ips  redevances  onliiiaires.  — 
Epiii. -'S.  11  [laiait  ([lie  cet  i'vi'i|iie  iiiaminait  de  fer- 
nielc^  ou  qu'il  avait  allaiic  i'i  iin  peuple  dif- 
ficile, puisque,  comme  il  ne  pouvait  le  ré- 
duire à  vivre  suivant  les  r6gles  de  la  disci- 
pline, le  Pape  fut  obligé  de  le.  faire  seconder 

!<,îi.  par  Constanlius,  évèquc  de  Milan. —  On  voit 
par  les  lettres  qu'il  écrivit  ;\  Hospiton,  duc 
des  Barbaricicus,  et  ù  Zabarda,  duc  de  Sar- 
daigne,  combien  il  s'intéressait  à  la  conver- 
sion de  ces  peuples,  qui  étaient  cnc|^-e  ido- 

u.  latres.  —  Ils  occupaient  une  partie  de  la 
Sardaigne  ;  c'est  pourquoi  il  pria  les  nobles 
et  les  propriétaires  des  terres  de  cette  île, 
de  ne  point  empècbcr  la  conversion  des 
paysans  qu'ils  occupaient  ti  les  cultiver.  «  Ils 
vous  sont,  leur  dit-il,  confiés  pour  vous  ser- 
vir dans  vos  intérêts  temporels ,  afin  que 
vous  pi'ocuriez  à  leurs  âmes  les  biens  éter- 
nels :  s'ils  font  leur  devoir,  pourquoi  ne  fai- 
tes-vous pas  le  vôtre?  »  Il  envoya,  pour  con- 
vertir ces  paysans,  Félix,  évéqiie  en  Italie, 
et  Cyriaque,  abbé  de  Saint-Audié  de  Home, 
parce  que  les  évoques  de  Sardaigne  n'étaient 
pas  assez  zélés,  jusque  -  là  que  Janvier,  évo- 
que de  Gagliari,  ni  ,'tropolilain  de  la  province, 
avait  des  serfs  de  sa  propre  église  qui  étaient 

se.  encore  païens.  Saint  Grégoire  lui  en  fit  des 

reproches,  ajoutant  dans  sa  lettre  :  «  Si  je 
puis  trouver  un  évêque  de  Sardaigne  qui  ait 
un  paysan  païen,  je  l'en  punirai  sévèrement; 
et  si  ce  paysan  demeure  obstiné  dans  son 
infidélité,  il  faut  le  charger  d'une  si  forte 
taille,  qu'elle  l'obiige  à  entendre  raison.  »  Il 
se  plaint  encore  ;\  Janvier  de  ce  qu'en  Sar- 
daigne on  rétablissait  en  leurs  fonctions  des 
clercs  qui ,  étant  dans  les  ordres  sacrés , 
étaient  tombés  dans  des  péchés  de  la  chair  : 
ce  qu'il  défend  absolument ,  comme  con- 
traire aux  saints  canons,  quand  même  ces 
clercs  auraient  fait  pénitence.  Pour  parer 
à  cet  inconvénient,  il  veut  que  l'on  examine 
avec  soin  si  ceux  que  l'on  ordonne  ont  gardé 
la  continence  pendant  plusieurs  années,  s'ils 
ne  sont  point  bigames,  s'ils  sont  affection- 
nés à  l'aumône  et  à  la  prière.  Il  le  charge 
de  communiquer  sa  lettre  à  tous  les  évé- 

j7.  ques  de  sa  dépendance.  —  Dans  une  autre 

lettre,  il]lui  ordonne  d'établir,  pour  adminis- 
trateurs des  hôpitaux ,  des  personnes  de 
bonne  vie  et  d'industrie,  qui  fussent  clercs 
et  exempts  de  la  juridiction  séculière,  afin 
que  les  magistrats  n'eussent  aucun  prétexte 
de  les  molester,  ni  de  piller_les  biens  des  pau- 
vres; d'obliger  ces  administrateurs  de  lui 
XI. 


GRÉfiOIllE  LE  GRAND,  PAPE.  497 

rendre  compte  h  certains  temps ,  en  sorte 
qu'ils  ne  disposassent  de  rien  h  son  insu  ;  de 
priver  de  la  communion  celui  qui  avait  ac- 
cusé de  crimes  le  prêtre  Kpi[)liane,  s'il  ne  se 
trouve  point  en  étal  de  prouver  ce  qu'il  avait 
avancé  contre  lui;  de  punir  d'abord  cor- 
porellement ,  puis  de  mettre  en  pénitence 
le  clerc  Paul ,  convaincu  de  nombreux  ma- 
léfices, et  coupable  d'avoir  quitté  l'état  clé- 
rical pom'  s'enfuir  en  Afrique  ;  de  s'oppo- 
ser à  l'abus  qui  se  glissait  de  prendre  de 
l'argent  pour  les  ordinations ,  les  maria- 
ges et  la  bénédiction  des  vierges;  de  réta- 
blir dans  la  communion  des  saints  mystères 
ceux  qu'on  en  avait  piivés  pour  avoir  épousé 
des  filles  sorties  de  leurs  monastères,  pourvu 
toutefois  qu'ils  aient  fait  pénitence  de  ce  cri- 
me. Il  remarque  que,  sui\'ant  les  canons,  il 
n'était  point  permis  de  communiquer  avec 
ceux  qui  étaient  excommuniés. 

5.  L'impératince  Constantinc  lui  avait  de-  t^p'"-'"- 
mandé  le  chef  de  saint  Paul  ou  quelque  au- 
tre partie  de  son  coips,  pour  mettre  dans 
l'église  que  l'on  bâtissait  à  l'honneur  de  ce 
saint  apôtre  dans  le  palais  de  Constantino- 
ple.  Saint  Grégoire  lui  fit  réponse  qu'il  ne 
pouvait  ni  n'osait  faii-e  ce  qu'elle  lui  ordon- 
nait, parce  que  les  corps  des  apôtres  saint 
Pierre  et  saint  Paul  étaient  si  redoutables 
par  leurs  miracles,  que  l'on  ne  pouvait  en 
approcher,  même  pour  prier,  sans  être  saisi 
d'une  grande  crainte;  que  son  prédécesseur, 
ayant  voulu  changer  un  ornement  d'argent 
qui  était  au-dessus  du  corps  de  saint  Pierre, 
quoique  à  une  distance  d'environ  quinze 
pieds,  eut  une  vision  terrible.  «  Moi-même, 
ajoute  le  Pape,  j'ai  voulu  opérer  qùelcpie 
amélioration  près  du  corps  de  saint  Paul  : 
comme  il  fallut  creuser  un  peu  plus  à  fond 
auprès  de  son  sépulcre,  le  supérieur  du  lieu 
trouva  quelques  os,  qui  néanmoins  ne  tou- 
chaient pas  au  tombeau,  et  les  transporta 
en  un  autre  endroit  ;  eh  bien  !  il  en  mourut 
subitement,  après  une  triste  apparition.  Mon 
prédécesseur,  voulant  faire  quelque  répara- 
tion près  du  corps  de  saint  Laurent,  comme 
on  fouillait  sans  savoir  précisément  le  lieu 
où  il  était,  on  ouvrit  tout  d'un  coup  le  sé- 
pulcre ;  mais  les  moines  et  les  mausionnai- 
res  ou  gardiens  de  l' église,  qui  y  travaillaient, 
mom-urent  tous  dans  l'espace  de  huit  jom-s, 
pour  avoir  vu  le  saint  corps,  quoiqu'ils  n'y 
eussent  pas  touché.  Sachez  donc'.  Madame, 

'  Cognoscat  autem  tranquiUissima Domina  quia 

32 


498 


HISTOIRE  GENERALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


que  la  coutume  des  Romains,  quand  ils  don- 
nent des  reliques  des  saints,  est  de  ne  pas 
touclier  aux  corps,  mais  de  mettre  seule- 
ment dans  une  boîte  un  linge  que  l'on  dé- 
pose auprès  du  corps  saint  ;  qu'ensuite  on 
l'en  retire,  et  l'enferme  on  avec  la  vénération 
convenable  dansl'église  que  l'on  doit  dédier, 
et  il  s'y  fait  autant  de  miracles  que  si  l'on  y 
avait  transféré  le  corps.  Voici  ce  qui  arriva 
du  temps  de  saint  Léon, d'heureuse  mémoire  : 
les  Grecs  doutant  de  la  vertu  de  ces  reliques, 
ce  Pape  se  fit  apporter  des  ciseaux,  et  cou- 
pa le  linge,  d'où  il  sortit  du  sang,  ainsi  que 
le  rapportent  nos  anciens.  Non-seulement  à 
Rome,  mais  dans  tout  l'Occident,  on  regarde 
comme  uni  sacrilège  de  toucher  aux  corps 
saints  ;  c'est  pourquoi  nous  sommes  fort 
sui'pris  de  la  coutume  qu'ont  les  Grecs  d'en- 
lever les  os  des  saints,  et  nous  avons  peine 
à  le  croire.  Quelques  moines  de  leur  pays, 
étant  venus  ici  il  y  a  environ  deux  ans,  dé- 
terraient de  nuit  des  corps  morts,  dans  un 
champ  près  de  l'église  de  Saint-Paul,  et  ser- 
raient les  os  ;  étant  pris  sur  le  fait  et  inter- 
rogés exactement  pourquoi  ils  le  faisaient, 
ils  confessèrent  qu'ils  voulaient  emporter  ces 
os  en  Grèce  comme  des  reliques.  Cet  exem- 
ple nous  a  fait  d'autaut  plus  douter  s'il  est 
vrai,  comme  on  le  dit,  que  l'on  transpoi-te 


eflcctivement  les  os  des  saints.  »  Saint  Gré- 
goire ajoute  qu'au  temps  du  martyre  de 
saint  Pierre  et  de  saint  Paul ,  des  fidèles 
venus  d'Orient  répétèrent  leurs  corps ,  en 
qualité  de  leurs  concitoyens  ;  on  conduisit 
ces  corps  il  deux  milles  de  la  ville,  et  on 
les  plaça  dans  les  catacombes;  plusieurs 
de  ces  Orientaux  s'étant  mis  en  devoir  de 
les  tirer  de  là,  il  survint  une  tempête  mêlée 
d'éclairs  et  de  tonnerre  qui  les  contraignit 
de  se  désister  de  leur  entreprise  ;  alors  les 
Romains,  à  qui  Dieu  avait  accordé  cette 
grâce,  sortirent  de  la  ville,  tirèrent  les  corps 
des  catacombes  et  les  transférèrent  au  lieu 
où  ils  sont  aujourd'hui.  Il  en  conclut  qu'il  y 
aurait  de  la  témérité,  non-seulement  à  tou- 
cher à  ces  corps,  mais  même  à  les  regarder; 
que  le  commandement  que  lui  faisait  l'im- 
pératiice  ne  venait  point  d'elle,  mais  de  ceux 
qui  voulaient  lui  faire  perdre  à  lui-même  les 
bonnes  grâces  de  cette  princesse.  11  refusa 
aussi  d'envoyer  à  Constantine  le  suaire  de 
saint  Paul  qu'elle  avait  demandé  ;  la  raison 
de  ce  refus  était  que,  ce  suaire  étant  avec  le 
corps,  il  n'était  pas  plus  permis  de  le  tou- 
cher que  d'approcher  du  corps  ;  mais  afin 
de  ne  pas  frustrer  son  pieux  désir,  il  lui  pro- 
mit de  lui  envoyer  incessamment  quelque 
particule  des  chaînes  que  saint  Paul  avait 


Rovianis  consuetudo  non  esl,  quando  sanctorum 
reliquias  dant,  ut  quidquam  taiigere  prwsumant 
de  corpore;  sed  lanlum  in  pixide  brandcum  mil.- 
titur,  atque  ad  sacratissima  corpora  Sai  iloritm 
ponitur.  Quod  levatum  in  Ecclenia  quw  est  dedi- 
candn,  débita  cum  vem  ratione  recondilur  ;  et  tan- 
tœ  per  hoc  ibidem  virtutes  fiunt,  ac  si  illiic  spe- 
cialiter  eorum  corpora  defcrunlur.  L'nde  conligit 
ut  biata:  recordationis  Leonis  Papœ  tcmpore,  si- 
cul  a  majoribiis  tradilur,  dum  quidam  Gra-ci  de 
talibiis  reliqtiiis  duliiltirenl,  prœdictMs  Pontifex 
hoc  iiisum  brundeum,  altatis  forficibus,  incidcrit, 
et  ex  ipsa  incisione  sanguis  e^liixerit.  In  Romanis 
namque  vel  totius  Occidentis  parlibus  omnino 
intolerubile  est  atque  sacrilegnm,  si  sanctorum 
corpora  tangcre  quisqnam  fortasse  voluerit.... 
prit  qua  rc  de  Crwcorum  consuetudine,  qui  ossa 
levare  sanctorum  se  asscrunt,  vehementer  mira- 
viur,  et  vix  credimus.  Nam  quidam  monuihi 
Gra'ci  hue  antc  biennium  vcnientcs,  noclurno  si~ 
lentio,  juxla  Ecclesiam  sancti  Pauli,  corpora 
morluorum  in  camp  j  jacentia  effodiebant.  alquc 
eorum  ossa  recoudehant,  servantes  sibi  dum  re- 
cédèrent. Qui  cum  detecli,  et  cur  hoc  faccrenl  di- 
ligcnlir  fuexient  discussi,  coufcssi  sunt  quod  illa 
ussa  ad  Grœciam  essenl  tanquam  sanctorum  rc- 
liquiiis  portaturi.  Kx  quorum  crfmplo,  sicut 
prndirlum  est,  major  nobis  dubiclas  nata  est, 
ulrum  vcrum  sit  quod  Iciure  viracil(r  oS!>a  sanc- 
torum (licuntur.  Vc  corporibus  vcro  bealorum 


apostolorum  quid  ego  dicturiis  sum,  dum  constel 
quia  eo  tcmpore  quo  passi  sunt,  ex  Oriente  fidè- 
les venerunt,  qui  eorum  ciriiora  sicut  civium 
suorum  repclcrcnt  f  quœ  ducta  usque  ad  secvn- 
dum  urbis  millinrium,  in  loco,  qui  dicitur  rata- 
cumbas,  collocata  sunt;  sed  dum  ea  exinde  le- 
vare omnis  eorum  mulliludo  conveniens  nitere- 
tur,  ila  eos  ris  tonitrui  atque  fulguris  nimio  metu 
Icrruit  atque  dispersit,  ut  tnlia  dcnuo  nullalenns 
attentare  prwsumcrent;  lune  aulem  excuntesRn- 
mani,  eorum  corpora,  qui  hoc  ex  Domini  pietale 
meruerunt,  letarerunt,  et  in  loris  quihus  nunc 
sunt  condita,posuerunt...Sudjrium  vero  quod  si- 
mililcr  transmitti  jussistis,  cum  corpore  ejus  esl, 
quod  ita  tangi  non  polesl,  sicut  nec  ad  (orpxtë 
illius  accedi:  sed  quia  sercnissimœ  Dominw  tam 
religinsum  deMderium  esse  vacuum  non  débet,  de 
catenis  qtias  ipsc  sanctus  Paulus  aposlolus  in 
eollo  et  in  manibus  gestavil,  ex  quibus  mulla  mi- 
racula  in  populo  demonslrantur ,  parlem  ali- 
quam  robis  transmitterc  festinabo,  si  tamenhanc 
lolhre  limnndo  prwraluero:  quia  dum  fréquen- 
ter ex  catenis  cisdem  multi  venicntes  bencdittiO' 
nem  petunt  lit  parcum  quid  ex  limatura  acci- 
piaitt,  assistil  s<icerdns  cum  lima,  et  atiquibul 
]icteiilibus  ita  concile  ntiquid  de  catenis  ipsis  ex- 
culilur,  nt  mnra  nulla  sit  ;  quibnsdam  rcro  pc- 
lenlilius,  iliu  per  calenas  ipsas  ducilur  lima,  et 
tanien  ut  aliquid  indeexeatnon  obtiiielur.liTe^., 
lil>.  IV,  Episl.  30,  ad  CoiisUuitiuam  Aii{j(uslau]. 


[vii«  SIÈCLE.]      CIÎAIMTRE  Xl.IX.  —  SAINT  GllKCOIIlK  l.E  GRAND,  PAPE. 


'r!)() 


portées  au  cou  et  aux  mains,  cl  ([ni  faisaient 
l)Cancoup  lic  miracles,  si  Idulcfois  il  pouvait 
en  emporter  tpiel']ue  chose  avec  la  lime  : 
«  Car  ou  vient  souvent ,  dit-il,  demander  de 
cette  limaille;  l'évèque  prend  la  lime,  et 
quelipu^l'ois  il  eu  tire  dos  particules  en  un 
moment,  quelquefois  il  lime  longtemps  sans 
rien  tirer.  » 
K|i>r.  31.  G.  L'amitié  que  saint  firégoire  avait   pour 

Théoilore,  médecin d(!  l'Empereur,  ne  se  bor- 
nait point  h  un  simple  commerce  de  lettres, 
ni  i"!  des  bienséances  humaines  ;  elle  avait  un 
objet  plus  solide,  qui  était  son  salut.  Il  reçut 
de  lui  une  somme  d'argent  pour  le  soulage- 
ment des  pauvres  et  le  radial,  des  captifs. 
Après  l'en  avoir  remercié,  il  lui  reproche  cha- 
ritablement de  ce  que,  toujours  occupé  d'af- 
faires temporelles,  il  ne  prenait  pas  le  loisir 
de  lire  les  divines  Ecritures,  (ju'il  appelle  les 
paroles  du  Rédempteur,  et  la  lettre  de  Dieu 
tout-puissant  ;\  sa  créature.  «  Si  vous  étiez,  lui 
tlit-il,  (Uoigné  de  la  cour,  et  qu'il  vous  vînt  une 
lettre  de  la  part  de  l'Empereur,  vous  n'auriez 
point  de  repos,  vous  ne  vous  coucheriez  pas 
sans  l'avoir  lue.  L'Empereur  du  ciel,  le  Sei- 
gneur des  homn;es  et  des  anges  vous  a  en- 
voyé des  lettres  où  il  s'agit  de  votre  vie,  et 
vous  n'avez  aucune  ardeur  pour  les  lire.  Etu- 
diez, je  vous  en  conjure,  et  méditez  tous  les 
jours  les  paroles  de  votre  Créateur,  d  Ensuite 
il  lui  recommande  Narsès,  et,  pour  lui  don- 
ner lieu  de  penser  quelquefois  à  lui,  il  dit 
qu'il  lui  envoie  june  cane  avec  deux  de  ses 
petits,  qui  étaieui  apparemment  remarqua- 
bles par  leurs  plumages  ou  par  quelque  au- 

31.  tre  endroit.  —  Le  patrice  Narsès  l'avait  prié 

de  le  recommander  à  Théodore.  Saint  Gré- 
goire  l'assm-a   qu'il   s'était   acquitté  de   sa 

»o.  commission  ;  —  Mais  il  n'eut  aucun  égard 

à  la  letti-e  que  le  scolastique  Marcel  lui 
écrivit  en  faveur  de  Maxime,  élu,  contre  les 
règles,  évêque  de  Salone,  et  déclara  que,  si 
Maxime  osait  célébrer  les  saints  mystères, 
il  le  priverait  de  la  communion  du  corps  et 

,,,  du  sang  de  Jésus-Christ.  —  Il  défendit  à 
l'abbé  Valentin  de  donner  entrée  aux  fem- 
mes dans  son  monastère,  comme  on  disait 
qu'il  l'avait  fait,  et  de  permettre  à  ses'moi- 
nes  de  se  donner  des  commères  spirituel- 

,3  les.  —  Il  parait  par  sa  lettre  ù  Boniface, 

homme  de  la  première  qualité,  qu'il  lui  en 
avait  écrit  plusieurs  autres  sur  des  matièi'es 
de  religion,  sans  qu'il  l'eût  pu  faire  changer 
de  sentiment.  Il  le  presse  devenir  à  Rome 
avec  ceux  qui  étaient  comine  lui  dans  le 


doute,  promellanl  de  les  convaincre,  ou  de 
les  laisser  retourner  en  liberté. 

§  V. 
Livre  cinquième  des  Lettres  de  Saint  Grégoire. 

\.  Toutes  ces  Lettres  sont  de  la  treizièuK! 
indiclion,  c'est-à-dire,  de  l'an  394.  Dans  celle 
qui  est  adressée  ;"i  Venance,  évoque  de  Luua, 
saint  Grégoire  lui  ordonne  de  déposer  pour 
toujours  un  prêtre,  un  diacre  et  un  sous-dia- 
cre, coupables  de  péchés  d'impureté,  et  de 
leur  accorder  la  communion  seulemeut  par- 
mi les  laïques,  après  qu'ils  auraient  l'ait  péni- 
tence. Il  ajoute  qu'il  lui  envoie  un  habit  pour 
une  femme  qu'il  devait  baptiser,  et  un  exem- 
plaire de  sou  Pastoral  pour  le  prêtre  Columb. 
—  Dans  une  autre  lettre  à  Venance,  il  lui  ilit 
d'examiner  s'il  était  vrai  que  le  prêtre  Satur- 
nin, dépq^é  pour  crime,  eût  célébré  depuis 
sa  déposition;  qii'en  ce  cas,  il  lui  interdit  la 
communion  du  corps  et  du  sang  de  Jésus- 
Christ  jusqu'à  la  mort,  où  il  recevrait  seule- 
ment le  viatique  ;  que  si  le  fait  n'était  point 
vrai,  et  que  Saturnin  eût  faitpéuilencc,  il  lui 
accordât  la  communion  parmi  les  laïques.  — 
La  lettre  à  Constantius,  évêque  de  Milan,  est 
encore  pour  punir  quelques  ministres  de  l'É- 
ghse  qui  s'étaient  rendus  coupables  de  gran- 
des fautes. —  Celle  à  Dominique,  évêque  de 
Garthage,  est  un  éloge  du  zèle  qu'il  faisait 
paraître  contre  les  donalistes  ;  mais  saint 
Grégoire  y  désapprouve  le  décret  du  concile 
d'Afrique,  portant-privation  de  biens  ol  de 
dignités  contre  les  évêques  négligents  à  lé- 
sister  à  ces  hérétiques.  Il  regarde  ce  décret 
comme  contraire  à  la  charité  qui  doit  unir  les 
évcquos,  et  qui  par  celte  union  les  met  plus 
en  élal  de  s'opposer  ii  l'erreur.  — Ayant  ouï 
dire  qu'un  médecin  nommé  Anastase  se  con- 
duisait mal,  il  écrivit  à  Victor,  évêque  de  Pa- 
leime,  de  lui  défendre  l'entrée  d'un  monas- 
tère de  filles.  —  Sa  lettre  au  diacre  Cyprien, 
recteur  du  patrimoine  de  Sicile,  est  pour  l'en- 
gager à  travailler  à  la  conversion  des  mani- 
chéens et  des  juifs  qui  demeur.iient  sur  les 
terres  de  l'Église.  Il  veut  qu'il  diminue  les 
rentes  à  ceux  qui  se  convertiront,  et  qu'il  les 
en  avertisse.  —  Il  lui  écrivit  encore  au  sujet 
de  l'élection  d'un  prêtre  de  Syracuse,  après 
la  mort  de  Maximien  ;  le  prêtre  Trajan  lui 
paraissait  être  celui  sur  qui  tomberait  la  plus 
grande  partie  des  suflrages,  mais  il  ne  le 
croyait  pas  propre  pour  gouverner  celle  éali- 
se  ;  il  aurait  mieux  aimé  Jean,  arclùdiacie  de 


Bpisl.  3. 


500 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 


Catane.  Il  dil  donc  à  Cyprien  de  faire  là-des- 
sus ce  qui  serait  possible,  ne  doulaut  pas  que 
Léon,  évêque  de  Cataue,  ne  cédai  ce  sujet  à 
l'église  de  Syracuse;  car  les  clercs  étaient 
tellement  attachés  à  une  église  particulière, 
qu'on  ne  pouvait  les  en  tirer,  même  pour 
les  faire  évèqucs  sans  l'agrémenl  du  diocé- 
sain. 
Ep.si.  is-13.       2.    Jean,    patriarcbc   de   Conslantinople, 
ayant  rendu  un  jugement  contre  un  prêtre 
accusé  d'hérésie,  eu  envoya  les  actes  à  saint 
Grégoire,  dans  lesquels  il  prenait  presque  à 
chaque  ligne  le  litre  de  patriarche  universel. 
Le  saint  Pape,  pour  garder  les  règles  de  la 
correction  fraternelle,  lui  fit  dire  deux  fois 
par  son  nonce  de  s'abstenir  de  ce  titre  fas- 
tueux ;  puis  il  lui  en  écrivit  une  assez  longue 
lettre,  datée  du  premier  janvier  de  l'an  ot)o, 
qu'il  commence  en  ces  termes  :  u  Vous  vous 
souvenez  de  quelle  paix  jouissaient  les  égli- 
ses lorsque  vous  avez  été  élevé  à  l'honneur  de 
l'épiscopal,  et  je  ne  sais  comment  vous  osez 
prendre  un  nouveau  nom  capable  de  scan- 
daliser tous  vos  frères.  Ce  qui  me  surprend 
extrêmement,  c'est  que  vous  ayez  voulu  fuir 
l'épiscopal,  et  que  maintenant  vous  en  vou- 
liez user  comme  si  vous  l'aviez  recherché 
par  un  motif  d'ambition.  Vous  vous  décla- 
riez indigne  du  nom  d'évêque  ;  à  présent, 
vous  l'ambitionnez  de  telle  façon  que,  mé- 
prisant vos  frères,  vous  voulez  le  porter  seul. 
Pelage,  mon  prédécesseur  de  sainte  mémoi- 
re, vous  écrivit  sur  ce  sujet  des  lettres  très-for- 
tes, où  il  cassa  les  actes  du  concile  que  vous 
aviez  tenu  en  la  cause  de  notre  frère  l'évèque 
Grégoire,  et  défendit  à  i'arcliidiaci-e  qui  était 
son  nonce  auprès  de  l'Empereur,  d'assister  à 
la  messe  avec  vous.  Depuis  qu'après  sa  mort 
je  suis  appelé  au  gouveinemeut  de  ri'^glise, 
je  vous  en  ai  fait  parler  par  mes  autres  non- 
ces, et  maintenant  par  le  diacre  Sabinien, 
auquel  j'ai   défendu   d'assister  à  la  messe 
avec  vous  ,  en   cas  que  vous  continuiez  à 
prendre  ce  vain  titre  ;  et,  parce  qu'il  faut 
loucher  les  plaies  doucement  avec  la  main 
avant  d'y  porter  le  fer,  je  vous  prie,  je  vous 
conjure,  je  vous  demande  avec  toute  la  dou- 
.■;eiir  possible,  de  résister  à  ceux  qui  vous 
lîatlent  et  qui  vous  attribuent  ce  nom  plein 
d'extravagance  et  d'orgneil.  n  II  plaint  le 
sort  de  Jean,  de  n'avoir  jni  jusijue-I.-^   être 
rappelé  à  des  sentiments  d'humilité,  lui  qui 
n'avait  été  élevé  à  l'épiscopal  que  pour  en- 
seigner l'humilité  aux  autres,  et  lui  lepn;- 
sente  a\cc  force  ks  suites  lâcheuses  que  sa 


AUTELTÎS  ECCLÉSI.\ST10UES. 

vanité  pouvait  produire,  soit  en  troublant  la 
paix  de  ri;i;lise,  soit  endivisani  les  membres 
de  Jésus-Christ,  taxant  de  nouveauté  le  li- 
tre qu'il  all'eclait  de  prendre,  puisque  en  ef- 
fet ni  les  prophètes,  ni  les  apôtres,  ni  aucun 
dos  saints,  ne  s'étaient  rien  attribué  de  sem- 
blable avant  la  loi,  sous  la  loi  et   sons  la 
grâce.  Il  ajoute  qu'il  savait  apparemment 
que  le  concile  de  Chalcédoinc  offrit  cet  hon- 
neur aux  évêques  de  Rome,  en  les  nommant 
universels  ;  mais  qu'aucun  ne  l'a  voulu  rece- 
voir, de  peur  qu'il  ne  semblât  s'attribuer 
seul  l'épiscopal  et  l'ôter  à  tous  ses  frères. 
Après  l'avoir  exhorté  â  prendre  des  senti- 
ments plus  humbles,  il  promet  de  lui  répon- 
dre sur  l'aflairc  des  prèlres  Jean  cl  Atha- 
nase.  —  Cependant  Jean,  patriarche  de  Cons- 
tuntinoplc,  avait  engagé  l'Lmpereur  à  écrire 
â  saint  Grégoire  en  sa  faveur.  Sabinien,  nonce 
en  cette  ville,  se  chargea  de  faire  passer  â 
Rome  la  lettre  de  ce  prince,  sans  s'aperce- 
voir de  l'artifice  du  patriarche.  Le  Pape  le        i". 
lui  découvrit  en  lui  disant  :    (i  Jean  espère 
autoriser  sa  vaine   prétention,   si  j'écoule 
l'Empereur,  ou  l'irriter  contre  moi,  si  je  ne 
l'écoute  pas  ;  mais  je  marche  le  droit  che- 
min, ne  craignant  en  cette  affaire  que  Dieu 
seul.  Ne  craignez  rien  non  plus,;  méprisez 
pom'  la  vérité  tout  ce  qui  paraît  grand  en  ce 
monde,  et  vous  confiant  en  la  grâce  de  Dieu 
et  au  secours  de  saint  Pierre,  agissez  avec 
une  grande  autorité.    Puisqu'ils  ne  peuvent 
nous  défendre  des  épées  de  nos  ennemis,  et 
qu'ils  nous  ont  fait  perdre  nos  biens  pour  sau- 
ver l'Ktat,  c'est  une  trop  grande  honte  qu'ils 
nous  fassent  encore  perdre  la  foi  par  le  con- 
sentement que  nous  donnerions  à  ce  titre 
criminel.  »  Saint  Grégoire  traite  celte  contes-      Fitiir.,iii. 
talion  de  question  de  foi,  parce  qu'elleclive-   rBisi.Efci*». 
ment  la  foi  ne  permet  pas  de  reconnaître  un   pig.'  s;.      ' 
seul  qui  soit  évêque,  et  duat  les  autres  ne 
soient  que  les  vicaires;  et  il  prévoyait  les 
suites  funestes  de  l'ambition  des  évêques  de 
Conslantinople,  qui  n'a  que  trop  éclaté  dans 
les  siècles  suivants.  —  Saint  Grégoire,  en  ré-       Ki.ii.s*. 
pondant  h  la  lettre  que  l'empereur  Maurice 
lui  avait  éciite,  loue  son  zèle  pour  la  paix  ; 
mais  'ne  doutant  pas  que   ce  prince   n'eilt 
été  surjiris  par  le  patriarche  Jean,  il  le  lui 
fait   coimaîtrc,  en  lui  disant  que,  sous   un 
cxtc'-rieur  iuorlifi('',  il  cachait  un  esprit  enllé 
d'orgiu'il,  et  des  dents  de  loup  sous  la  faco 
de  brebis.   «  La  conduite  et  la  jirimaulé  de 
toute  l'Église  a  été  donnée,  ajoutc-l-il,   à 
saint  Pierre;  toutefois  on  ne  l'appelle  pas 


[vil"  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XLIX.  —SAINT  CRKOOIRE  LE  GRAND,  PAPE. 


apôlro  universel.  Tdiile  l'Europe  est  livrée 
aux  barbares,  les  villes  sont  détruites,  les 
forlcresses  ruinées,  les  provinces  ravagées, 
les  terres  incullcs,  les  idolâtres  maîtres  de 
la  vie  des  fidèles  ;  cl  les  évoques,  qui  de- 
vraient pleurer  prosternés  sur  la  cendre, 
clierclient  de  nouveaux  titres  pour  contenter 
leur  vanité.  Est-ce  ma  cause  particulière  que 
je  défends  ?  n"est-cp  pas  celle  de  Dieu  et  de  l'I*]- 
!;lise  universelle?  Nous  savons  que  plusieurs 
évoques  de  Constantinople  ont  été  non-seule- 
ment hérétiques,  mais  hérésiarques,  comme 
Nestorius  et  Afacédonius.  Si  donc  celui  qui 
remplit  ce  siège  élait  évêque  universel,  toute 
l'Eglise  tomberait  avec  lui.  Pour  moi,  je  suis 
le  serviteur  de  tous  les  évêques,  tant  qu'ils 
vivent  en  évêques  ;  mais  si  quelqu'un  élève 
sa  tête  contre  Dieu,  j'espère  qu'il  n'abaissera 
pas  la  mienne  avec  le  glaive.  .\yez  donc  la 
boulé  de  juger  vous-même  cette  affaire,  ou 
d'obliger  Jean  ;\  quitter  sa  prétention.  Pour 
obéir  à  vos  ordres,  je  lui  ai  écrit  avec  humi- 
lité et  avec  douceur  ;  s'il  veut  m'écouter,  il  a 
en  moi  un  frère  entièrement  dévoué  ;  sinon,  il 
aura  pour  adviu'sairc  celui  qui  résiste  aux 
superbes. I) 
Episi.  21.  3.  Il  écrivit  aussi  à  l'impératrice  Constan- 
linc,  pour  l'exhorter  à  continuer  de  s'oppo- 
ser aux  entreprises  du  patriarche,  qu'il  dé- 
peint comme  un  vrai  hypocrite,  et  pour  se 
plaindre  de  la  protection  que  l'Empereur  lui 
accordait,  ainsi  qu'à  Maxime  de  Salone.  «  Il 
est  bien  triste,  dit-il,  que  l'on  souffre  patiem- 
ment celui  qui  veut  être  appelé  seul  évêque, 
au  mépris  de  tous  les  autres.  Son  orgueil  ne 
nous  fait-il  pas  voir  que  l'avènement  de  l'an- 
techrist  est  proche  ?  Je  vous  prie,  au  nom 
de  Dieu  tout-puissant,  de  ne  pas  permettre 
que  votre  règne  soit  souillé  par  la  vanité 
d'un  seul  homme  ;  ne  consentez  en  aucune 
façon  à  ce  titre  pervers,  et  ne  me  méprisez 
point  dans  celle  alt'aire  ;car  encore  que  je  le 
mérite  à  cause  de  la  grandeur  de  mes  pé- 
chés, saint  Pierre  n'en  a  point  qui  puissent 
lui  attirer  un  tel  traitement  sous  votre  rè- 
gne. ))  Il  rapporte  ensuite  les  raisons  qu'il 
avait  eues  de  s'opposer  à.  l'élection  de 
Maxime  pour  l'église  de  Salone,  et  la  ma- 
nière dont  il  avait  puni  sa  désobéissance  ;  et, 
parce  rpie  rEmporeurlui  avait  écrit  de  rece- 
voir Maxime  avec  honneur,  il  témoigne  être 
prêt  à  obéir  à  ce  prince,  mais  en  ne  dissi- 
mulant pas  qu'il  lui  paraissait  dur  de  rece- 
voir honorablement  un  liomme  prévenu  de 
tant  de  crimes,  et  de  voir  les  causes  des  évè- 


501 

ques  réglées  auprès  de  l'Empereur  par  le 
crédit  des  autres.  «  S'il  en  est  ainsi,  dit-il, 
que  fais-je  dans  cette  église?  »  —  Il  était  de 
l'inlérôt  de  tiuis  les  i)atriarch('s  de  réprimer  la 
prétention  do  celui  de  Constantinople  :  c'est 
pourquoi  saint  Grégoire  écrivit  une  lettre 
commune  à  saint  Eulogc  d'Alexandrie  et  à 
saint  Anastascd'Antioche,  pour  les  exciter  à 
confondre  unanimemenl  l'orgueil  de  Jean.  Il 
reprend  cette  contestation  dès  son  commen- 
cement, racontant  tout  ce  que  Pelage  et  lui 
avaient  fait  pour  empêcher  ce  patriarche  de 
s'attribuer  le  titre  d'évèque  universel,  sans 
avoir  pu  y  réussir.  «  Ne  donnez,  leur  dit-il, 
jamais  ce  titre  à  personne  dans  vos  lettres, 
de  peur  qu'en  accordant  à  un  autre  un  hon- 
neur qui  ne  lui  est  pas  dû,  vous  ne  vous  pri- 
viez vous-mêmes  de  celui  qui  vous  est  dû. 
N'ayez  sur  ce  sujet  aucun  mauvais  soupçon 
de  l'Empereur  ;  il  craint  Dieu  et  ne  fera  rien 
contre  les  préceptes  de  l'Évangile,  ni  contre 
les  saints  canons.  Encore  qu'éloigné  de  vous 
par  de  longs  espaces  de  terre  et  de  mer,  je 
vous  suis  uni  de  cœur,  et  j'ai  confiance  que 
vous  êtes  dans  les  mêmes  sentiments  à  mon 
égard.  Unissons-nous  donc  pour  combattre 
dans  cet  homme  le  mal  de  la  vanité  qui  le 
domine,  afin  de  le  délivrer  de  son  ennemi, 
c'est-à-dire  de  son  erreur  :  le  Tout-Puissant 
nous  aidera  de  son  secours.  Si  l'on  permet 
à  Jean  d'user  du  titre  d'évèque  universel, 
on  dégrade  tous  les  patriarches  ;  et  quand 
celui  qu'on  nomme  évêque  universel  tom- 
bera dans  l'erreur,  il  ne  se  trouvera  plus  d'é- 
vèque qui  soit  demeuré  dans  la  vérité.  Soyez 
constants  à  garder  vos  Églises  telles  que  vous 
les  avez  reçues  :  préservez  de  cette  corruption 
tous  les  évêques  qui  vous  sont  soumis,  et 
montrez  que  vous  êtes  véritablement  pa- 
triarches de  l'Église  universelle.  S'il  survient 
quelque  adversité,  demeurons  unanimes, 
montrons  même  en  mourant  que  ce  n'est 
pas  notre  intérêt  particulier  qui  nous  fait 
condamner  ce  titre.  Comme  nous  n'avons 
reçu  notre  rang  que  pour  prêcher  la  vérité, 
il  est  plus  sûr  de  l'abandonner  pour  elle, 
s'il  est  besoin,  que  de  le  conserver.  » 

î.  Romain,  exarque  de  Ilavenne,  était  ac- 
cusé de  protéger  certaines  filles  qui,  après 
avoir  porté  longtemps  l'habit  et  le  voile  de 
religieuses ,  s'étaient  mariées.  Saint  Gié- 
goirc  liy  en  écrivit,  pour  le  détourner  de 
prendre  part  au  crime  dont  ces  personnes 
s'(Uaient  souillées,  ajoutant  que  les  intérêts 
de  Dieu  ne  lui  permettent  pas  de  le  laisser 


£(iiii.  ta. 


502 


mSTOIRE  GÉM-.RALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Epi=i.  31.  impuni.  —  On  voil  par  la  letlie  aux  fermiers 
du  patrimoine  de  saint  Pierre  dans  les  Gau- 
les, que  ce  patrimoine   consistait  plus  en 

"  fonds  de  terre  qii'en  argent.  —  Celle  au 
scholastique  Sévère  est  pour  le  prier  d'en- 
gager l'exarque  de  Ravcnne  à  faiie  la  paix 
avec  Agilulpbe ,  roi  des  Lombards ,  pour 
empêcher  la  ruine  totale   de  plusieurs  îles 

''•  et  de  divers  autres  endroits.  —  Il  y  en  a  une 
à  Forlunat,  évoque  de  Xaples,  où  saint  Gré- 
goire le  charge  de  dédier  un  monasti'-re  en 
l'honneur  de  saint  Pierre  et  de  saint  Michel 
archange,  et  d'y  envoyer  des  prêtres  de  son 
église  pour  la  célébration  des  saints  mystè- 
res, eu  réservant  toutefois  aux  moines  les 

"■  oblalions  des  fidèles.  —  11  envoya  un  exem- 
plaire des  Évangiles  à  Élie,  prêtre  et  abbé 

=>»•  d'Isaurie.  —  L'empereur  Maurice  avait  en- 
voyé aux  pauvres  de  Rome,  par  un  de  ses 
officiers,  trente  livres  d'or.  Le  Pape  l'en  re- 
mercia, en  l'assurant  qu'elles  avaient  été  fi- 
dèlement distiibuées  aux  évèques  chassés 
de  leurs  sièges  par  les  Lombards,  aux  pau- 
vres, et  aux  rchgieuses  qui,  fuyant  de  diver- 
ses provinces  pour  éviter  les  mauvais  traite- 
ments des  barbares,  étaient  venues  à  Rome 
chercher  du  secours  et  un  asile.  Saint  Gré- 
goire mil  dans  des  monastères  celles  qui  pu- 
rent y  trouver  place;  les  autres  demeuraient 
ù  paît  et  vivaient  fort  pauvrement.  Il  dit  en- 
core à  l'Empereur  qu'on  avait  distribué  la 
paie  aux  soldats,  ce  qui  avait  fait  cesser  les 
murmures,  et  attiré  des  actions  de  grAces, 
et  des  vieux  pour  la   prospérité  de  son  rè- 

10.  gne.  —  Dans  une  autre  lettre  à  ce  prince, 
il  se  plaint  de  ce  qu'il  avait  traité  de  simpli- 
cité sa  confiance  aux  paroles  d'Ariulfe,  roi 
des  Lombards;  c'était  l'accuser  de  sottise 
sous  un  nom  plus  honnête  :  «  J'avoue,  lui 
dit-il,  que  je  le  mérite  ;  car,  si  j'avais  été 
sage,  je  ne  me  serais  pas  exposé  ù  ce  que  je 
souffre  ici  au  milieu  des  armes  des  Lombards. 
A  l'égnrd  de  ce  que  j'ai  dit  d'.Ariull'e,  qu'il 
était  disposé  h  traiter  de  la  paix  avec  la  Ré- 
publique et  de  faire  alliance  avec  elle,  non- 
seulement  on  ne  me  cioif  pas,  mais  ou 
m'accuse  de  mensonge.  Je  passerais  volon- 
tiers sous  silence  cette  moquerie,  si  je  ne 
voyais  la  servitude  de  ma  patrie  croître  h 
tous  moments;  mais  je  suis  sensiblement  af- 
fligé de  ce  que,  faute  do  croire  mes  avis,  on 
laisse  augmenter  excessivement  les  (brccs 
des  ennemis.  Pensez  de  moi.  Seigneur,  tout 
le  mal  qu'il  vous  plaira,  mais  ne  prêle/.  ]ias 
facilement  l'oreille  à  tout  le  monde  sur  l'in- 


Soirtm. 
llli.  I, car.  16. 


térêt  de  l'État  et  la  perte  «le  l'Italie;  croyez 
aux  ell'ots  plus  qu'aux  paroles.  Ne  vous  lais- 
sez point  aller  si  aisément  au  mépris  pour 
les  évèques  par  la  puissance  terrestre  que 
vous  avez  sur  eux  ;  mais  soyez  tellement 
leur  maître,  que  la  considération  de  celui 
dont  ils  sont  les  serviteurs  vous  porte  à  avoir 
pour  eux  du  respect.  Ils  sont  quelquefois 
appelés  dieux  daus  l'Éciilurc,  et  quelque- 
fois anges.  »  il  rapporte  l'exemple  du  grand 
Constantin,  qui,  ayant  reçu  des  libelles  d'ac- 
cusation contre  des  évèques,  les  brûla  en 
présence  d'autres  évèques,  en  leur  disant  : 
«  Vous  êtes  des  dieux  établis  par  le  VTui 
Dieu  ;  allez  juger  entre  vous  vos  propres  af- 
faires, parce  qu'il  n'est  pas  digne  que  nous 
jugions  des  dieux;  »  et  l'exemple  des  empe- 
reurs païens,  qui,  n'adorant  que  des  dieux 
de  bois  et  de  pierre,  ne  laissaient  pas  de 
porter  du  respect  à  leurs  prêtres. 

5.  Saint  Grégoire,  sachant  que  les  évê-  Bpin  w 
ques  de  Sardaigne  nédigeaient  d'instruire 
quelques  idolâtres  qui  se  ti'ouvaient  dans 
cette  île  ,  y  envoya  un  des  évèques  d'Italie  , 
qui  convertit  plusieurs  de  ces  infidèles.  Le 
juge  continua  d'exiger  de  ces  nouveaux  con- 
vertis le  droit  que  lui  payaient  ceux  qui  sa- 
crifiaient aux  idoles ,  pour  en  avoir  la  per- 
mission. Le  Saint  lui  en  fit  des  reproches, 
auxquels  ce  juge  ne  fit  d'autre  réponse  ,  si- 
non qu'il  avait  acheté  sa  charge  bien  cher, 
et  qu'il  ne  pouvait  la  payer  que  par  de  tels 
moyens.  Il  fil  à  l'impératrice  Constantine  des 
plaintes  sur  cela  ,  comme  aussi  sur  ce  que 
l'île  de  Coree  était  tellomeul  accablée  d'im- 
positions ,  que  les  habitants  avaient  peine  à 
y  satisfaire  en  vendant  leurs  enfants,  ce  qui 
les  obligeait  d'abandonner  l'Empire  et  de 
recourir  aux  Lombards,  de  qui  ils  ne  pou- 
vaient rien  souU'rir  de  pire.  Il  se  plaignit  en- 
core de  ce  qu'un  nommé  Etienne,  cartulaire 
de  la  nuirine ,  s'emparait  des  biens  de  cha- 
cun ,  mol  tant  des  panonceaux  aux  terres  et 
aux  maisons  sans  connaissance  de  cause.  Il 
conjure  cette  princesse  de  s'employer  au- 
près de  l'Empereur  pour  faire  cesser  les  gé- 
missements de  ceux  que  l'on  opprimait  ain- 
si. —  Il  se  plaignait  lui-même  des  mauvais  u. 
traitements  de  l'exarque  de  Ilavenne  ,  <lans 
une  lettre  à  Sébastien  ,  évêque  de  Sirmiinu. 
«  Sa  malice,  lui  dit-il,  l'emporte  sur  l'hosli- 
lilé  des  Lombards,  et  nous  sommes  mieux 
traités  pur  les  ennemis  qui  nous  tuent ,  que 
par  les  olliciers  de  rEm]iire  ,  dont  les  rapi- 
nes et  les  fraudes  nous  consument  d'inquié- 


[vu»  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT  GHÉGOinE  LE  OHAND,  PAPE. 


')0.3 


ludcs.  »  L'évèquo  SiUjasIion  nvait  refiisi^  nii 
(H'ûclid  qu'Anasta.so  ,  palriaiclie  d'Anlioclic, 
lui  avait  oU'eil.  Saint  (in^oiro  l'on  loue  ;  mais 
il  le  prie  ,  pour  le  cas  où  il  voudrait  à  l'ave- 
nir prendre  soin  de  quelqii'I'j^lise  par  un 
niotil'de  c'liaril(''  pour  ses  fi'èros  ,  d'en  ])ren- 
dre  une  dans  la  Sicile,  où  il  y  on  avait  de 
E,.iM.  »8.  vacant(!s.  —  Il  refusa  d'ordonner  évéque  un 
prêtre  nommé  Jnan,  parce  qu'il  ne  savait 
pas  le  Psaulier  ,  jugeant  par  ce  défaut  qu'il 
était  peu  soii,'noux  dos  choses  do  son  iniriis- 
'•  1ère.  —  Sa  lettre  à  Pierre  et  à  Provideulius, 

évoques  d'islrie,  est  pour  les  inviter  à  venir 
à  Rome,  où  il  promet,  avec  le  secoiu's  de 
Dieu,  de  les  Siitisfaire  tollciuont  sur  leurs 
doutes ,  qu'ils  n'auront  aucune  peine  à  se 
réunir  ii  l'Eglise  catholique.  Il  leur  déclare 
par  avance  qu'il  n'a  pas  d'aulrc  foi  que  celle 
qu'ont  enseignée  les  (juatre  premiers  con- 
ciles généraux,  et  saint  Léon  son  prédéces- 
seur. 

S3.  6.  Deux  grands  abus  régnaient  dans  les 

Gaules  et  la  Gei'raanie,  savoir  la  simonie,  el 
l'ordination  dos  néophytes.  Saint  Grégoire, 
en  écrivant  à  Virgile  ,  cvêque  d'Arles  ,  lui 
recommanda  la  réformation  de  ces  abus.  Il  le 
lit  aussi  son  viciûre  dans  les  Églises  de  l'o- 
béissance de  Childebert ,  sans  préjudice  du 
droit  des  métropolitains ,  et  lui  envoya  le 
pallium,  avec  ordre  de  ne  s'en  servir  que 
dans  l'éghse  et  pendant  la  messe,  k  S'il  ar- 
rive, lui  dit-il,  que  quelque  évêque  veuille 
fau'B  un  long  voyage,  il  ne  le  pourra  sans 
votre  agrément.  S'il  survient  quelque  ques- 
tion de  foi,  ou  quelque  autre  allaire  dillicile, 
vous  assemblerez  douze  évéques  pour  la  ju- 
ger ;  si  elle  ne  peut  être  décidée,  vous  nous 
en  renverrez  le  jugement,  après  l'avoir  exa- 

i.i.  minée.  —  Le  Pape  donna  avis  à  tous  les 

évoques  des  Gaules  qui  se  trouvaient  dans  le 
royaume  de  Childebert,  des  pouvoirs  qu'il 
avait  accordés  à  Virgile  d'Arles,  çn  leur  or- 
donnant de  lui  obéir,  de  venir  au  concile 
quand  il  les  y  appellerait,  et  de  ne  point 
faire  de  grands  voyages  sans  sa  permission. 
—  Il  écrivit  aussi  au  roi  Childebert,  pour 
lui  marquer  qu'à  sa  demande  il  avait  accor- 
dé le  pallium  à  l'évèque  d'Arles  ,  et  pour  le 
prier  d'appuyer  cet  évêque  dans  la  réforma- 
tion de  la  simonie  et  de  l'ordination  des 
néophytes.  Il  en  rend  l'abus  sensible,  en  di- 
sant à  ce  prince  que,  puisqu'il  ne  donnait  le 
commandement  de  ses  armées  qu'à  des 
gens  dont  il  connaissait  la  valeur  et  l'cxpé- 
l'ience  ,  il  était  contre  le  bon  ordre  de  con- 


fier l'i'piscopat  à  dos  personnes  sans  vertu 
et  sans  science,  rpii  n'avaioni  pas  encore  fait 
les  premiers  exercices  de  la  milice  spirituel- 
le. L'Austrasie,  où  régnait  Childebert,  s'é- 
tendait fort  avant  au  delà  du  Rhin  ;  c'est 
jiour  cola  que  saint  ("irégniie  joint  dans  ses 
i(Mlros  la  Germanie  à  la  Gaule.  —  Il  accor- 
da l'usage  du  pallium  à  Marinien,  évéque  de 
llavenne,  à  la  charge  de  ne  le  porter  que 
dans  Ravenne  seule,  de  s'en  revêtir  à  la  sa- 
cristie avant  de  monter  à  l'autel,  et  de  le 
mettre  bas  dans  la  même  sacristie  au  retour 
do  la  célébration  des  mystères.  —  11  l'ac- 
corda aussi  à  Jean,  évêque  de  Corinthe  ,  en 
lui  recommandant  d'exiiipcr  la  simonie  dans 
toutes  les  Églises  de  sa  dépendance.  —  Sa 
lettre  aux  évoques  d'Achaïe  est  sur  le  même 
sujet.  Il  Iftur  fait  remarquer  qu'il  n'est  guère 
possible  que  celui  qui  a  été  ordonné  pour 
de  l'argent ,  n'en  demande  aux  autres  pour 
les  ordonner  ;  qu'ainsi  il  faut  attaquer  ce 
mal  dans  sa  source,  en  n'ayant  aucun  égard 
à  l'argent  ou  à  la  faveur  dans  les  ordina- 
tions, mais  seulement  au  mérite  et  à  la  ver- 
tu des  sujets. 

§  VI. 
Livre  sixième  des  Lettres  de  saint  Grégoire. 

\.  Elles  sont  de  la  quatorzième  indiction  , 
qui  était  la  sixième  année  de  son  ordination, 
c'est-à-dire,  de  l'an  S9o.  Jean,  évêque  de 
Ravenne  ,  était  mort  au  mois  de  février  de 
la  même  année,  après  avoir  fait  un  testa- 
ment qui  causait  du  pi'éjudice  à  son  église. 
Les  prêtres  et  les  diacres  s'en  plaignirent 
au  Pape,  qui  écrivit  à  Marinien,  son  succes- 
seur ,  qu'il  fallait  distinguer  dans  ce  testa- 
ment les  biens  de  l'église  de  Ravenne  et 
ceux  que  Jean  avait  acquis  pendant  son 
épiscopat ,  d'avec  ce  qu'il  possédait  en  pro- 
pre avant  d'être  évoque  ;  qu'il  n'avait  pu 
disposer  des  premiers,  mais  seulement  de 
ceux-ci,  pour\T.i  encore  qu'il  n'en  eût  pas  fait 
d'abord  une  donation  à  son  église.  Il  déclare 
qu'à  l'égard  de  ce  que  Jean  avait  donné  à  un 
monastère  q\i'il  avait  bâti  près  de  l'église  de 
saint  Apollinaire,  il  voulait  que  cette  donation 
suiisistât  en  son  entier, non  parce  qu'il  en  fai- 
sait mention  dans  son  testament,  mais  parce 
qu'il  lui'avaitpromisde  son  vivant  qu'ill'agrée- 
rait.Xous  avons  vu,  ou  nous  verrons  plus  loin, 
à  l'occasion  des  conciles  d'Agdeetd'Epaone, 
((ue  les  anciens  faisaient  une  distinction  en- 
tre les  biens  propres  aux  ecclésiastiques  ,  et 


i;,„  I, 


504 


mSTOinE  GÉNIÎRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


af»i.  «n  506,  les  biens  qu'ils  lecevaioiil  de  l'i^disn  en  leur 
Ei'""°"  •"  qualité  de  clercs  :  ils  pouvaient  donner  ceiix- 
là,  mais  il  ne  leur  était  pas  permis  de  dis- 
poser de  ceux-ci  en  faveur  de  leurs  héri- 
tiers ;  c'était  l'église  où  ils  servaient  qui  en 
béiitait.  —  Gomme  il  y  avait  de  la  dilliculté 
dans  l'élection  de  Marinicn  ,  à  la  place  du- 
quel l'exarque  voulait  faire  élire  l'archidia- 
EpL-i.  i.  cre  Donat ,  on  allé^na  à  saint  Grégoire  que 
Marinieu  ne  pensait  pas  bien  du  concile  de 
Ciialcédoine.  Mais  le  l'ape,  qui  le  connaissait 
poui'  avoir  vécu  longtemps  avec  lui  dans  le 


qu'on  envoie  avec  eux  un  prêtre  pour  les 
baptiser  en  cas  de  maladie  dangereuse.  Saint 
Grégoire  préparait  ces  jeunes  Anglais  pour 
la  mission  qu'il  voulait  envoyer  en  Angle- 
terre.—  La  simonie  régnait  dans  l'Épire,  epi«i  «. 
comme  dans  beaucoup  d'autres  provinces. 
Il  en  écrivit  aux  évoques  Théodore,  Démé- 
trius  ,  Philippe  ,  Zenon  et  Alcissonus  ,  pour 
les  exhorter  à  n'avoir  égard  dans  les  ordi- 
nations qu'au  mérite  des  personnes.  —  En  9. 
donnant  lepalliumà  Ponus,  évoque  de  Mes- 
siue,  il  lui  dit  de  ne  s'en  servir  que  dans  les 


monastère,  écrivit  au  clergé  et  au  peuple      lieux  et  dans  les  temps  où  son  prédécesseur 


de  Ravenne  que  la  foi  de  Marinieu  était  pu- 
re, et  qu'il  recevait  le  concile  de  Ciialcédoi- 
ne avec  le  même  respect  que  les  trois  pré- 
cédents. 

2.  Il  y  avait  déjà  plusieurs  années  que  le 
patrice  Dinamius  gouvernait  le  patrimoine 
de  saint  Pierre  dans  les  Gaules ,  lorsque 
saint  Grégoire  en  chargea  le  prêtre  Candide. 
D  écrivit  au  roi  Childebert  et  à  la  reine  Brii- 
nehaut,  pour  le  leur  recommander.  Dans  sa 
letti-e  à  celte  princesse,  il  la  loue  de  la  bon- 
ne éducation  qu'elle  avait  donnée  au  roi 
Childebert  son  Ois,  qu'elle  avait  eu  soin  de 
faire  instruire  dans  les  principes  de  la  foi 
catholique  ;  il  l'exhorte  à  l'aire  plus,  en  l'en- 
gageant par  ses  exhortations  à  la  pratique 
des  bonnes  œuvres.  II  dit  au  roi  qu'il  est 
autant  au-dessus  des  autres  rois,  que  les 
rois  sont  au-dessus  des  autres  hommes  ;  qu'il 
n'est  pas  étonnant  qu'il  soit  roi,  puisqu'il  yjen 
a  aussi  d'autres,  mais  que  ce  qui  fait  sa  gloi- 
re, c'est  d'être  catholique,  ce  que  les  autres 
rois  ne  méritent  pas.  «  Vous  avez,  ajoute-t-il, 
tout  ce  dont  les  autres  rois  se  font  honneur; 
mais  ils  n'ont  pas  ce  l>icn  principal  que  vous 
avez,  cl  en  cela  vous  les  surpassez.  Faites 
que,  comme  vous  leur  êtes  supérieur  par  la 
pureté  de  votre  foi,  vous  soyiez  aussi  au-des- 
sus d'eux  par  vos  bonnes  actions,  en  vous  ren- 
dant favorable  ù  vos  sujets ,  et  en  ne  les  pu- 
nissant jamais  sans  connaissance  de  cause  , 
lorsqu'ils  vous  paraîtront  avoir  fait  quelque 
faute.  Nous  vous  avons  envoyé  des  clefs  do 
saint  Pierre,  où  il  y  a  du  fer  de  ses  chaînes, 
pour  les  porter  A  votre  cou,  comme  un  pré- 
servatif de  tous  maux.  »  —  Lorsque  le  piê- 
Irc  Candide  fut  arrivé ,  il  lui  recommanda 
d'acheter  des  babils  pour  les  pauvres,  et  de 
jeunes  .\nglais  depuis  l'Age  de  dis -sept  à 
dix-huit  ans  ,  pour  les  mettre  dans  des  mo- 
nastères et  les  instruire  nu  service  de  Dieu  ; 
mais,  parce  qu'ils  étaient  païens ,   il  veut 


s'en  était  servi,  et  de  joindre  à  cet  ornement 
extérieur  la  pratique  de  la  vertu.  —  Il  dé- 
fendit à  Fortunat ,  évêquc  de  Naples ,  de 
laisser  traduire  ses  clercs  devant  les  tribu- 
naux séculiers,  voulant  que ,  s'ils  avaient 
quelque  affaire,  il  en  prit  lui-même  connais- 
sance, ou  du  moins  qu'elles  fussent  jugées 
par  des  arbitres  agréés  de  lui.  —  La  lettre 
à  Montanas  el  à  Thomas,  serfs  de  l'église 
de  ISome,  est  une  déclaration  de  la  liberté 
qu'il  leur  accordait;  en  conséquence,  il  leur 
permet  de  jouir  des  legs  que  le  prêtre  (îau- 
diosus  leur  avait  faits  par  testament. 

3.  Jean ,  patriarche  de  (^onslantinoplc , 
avait  envoyé  à  Home  des  députés  avec  des 
lettres,  où  il  prétendait  montrer  qu'Atha- 
nase,  prêtre  et  moine  du  monastère  de  Saint- 
Mile  eu  Lycaonie,  et  les  moines  ses  confrè- 
res ,  avaient  parlé  contre  la  définition  du 
concile  d'Kphèse  ;  pour  le  prouver,  il  avait 
chargé  ses  députés  de  certains  articles,  com- 
nu'  extraits  du  même  concile,  portant  ana- 
thème  à  qui  dirait  que  l'iune  d'Adam  mou- 
rut par  sou  péché,  el  que  le  diable  entra 
dans  le  cunir  de  l'homme.  Il  avait  aussi  en- 
voyé un  livre  trouvé  dans  la  cellule  d'Atha- 
nase,  qui  contenait  des  hérésies.  Saint  Gré- 
goire, ayant  examiné  ce  livre,  y  découvrit 
des  dogmes  des  manichéens  ;  mais  il  y  re- 
marqua aussi  que  celui  qui  avait  fait  des  no- 
tes sur  ce  livre  pour  en  montrer  les  erreurs, 
était  tombé  dans  l'hérésie  pélagienne ,  et 
qu'il  reprenait  comme  hérétiques  des  ju-o- 
)>osilions  catholiques,  entre  autres  celle-ci  : 
L'àmv  d'Adam  mourut  j^iar  son  jkcIic,  Ayant 
examiné  le  concile  d'Ephèse,  et  n'y  ayant 
rien  trouvé  de  semblable,  il  lit  apporter  de 
llavcune  tni  exein]ilaire  1res -ancien,  qui  se - 
trouva  entièrement  ciuifornu^  à  celui  de  Ho- 
me. II  fil  entendre  aux  députés  de  Jean  do 
Cousiantiuople,  que  cette  proposition  :  L'Ame 
d'Adiim  nidiinit  i>iir  son /x'r/it',  ne  devait  pas 


F.p 

10,   17 


[vil"  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XLÎX.  —  SAINT 

s'expliquer  de  la  ninil  de  l'âme  dans  sa  sulis- 
tnucc,  en  sorte  qu'elle  eût  cessé  de  vivre  par 
le  péché  ;  mais  de  la  perte  (lu'elle  avait  faite 
de  l'innocence  et  de  la  béatitude;  et  que,  si 
Pelage  avait  soutenu  que  l'àmc  d'Adam  n'é- 
tait point  nuirte  par  son  péché,  ce  n'était  que 
pour  montrer  que  nous  n'avions  pas  été  ra- 
chetés par  Jésus-Ciirist  :  erreur  que  l'on  con- 
damna dans  le  concile  d'Éplièse.  Saint  Gré- 
j^oire,  après  avoir  fait  un  détail  de  tout  cela 
à  Narsès,  lui  dit  :  «  J'ai  examiné  avec  soin 
le  concile  d'Éphèse,  et  n'y  ai  rien  trouvé  tou- 
chant Adelphius,  Sava  et  les  autres,  qu'on  dit 
y  avoir  été  condamnés.  Nous  croyons  ijue, 
comme  le  concile  de  Chalcédoine  a  été  falsifié 
en  un  endroit  par  l'Église  de  Constantinople, 
on  a  fait  quelque  altération  semblable  au 
concile  d'Ki)hèse.  Clicrchez  donc  les  plus  an- 
ciens exemplaires  de  ce  concile ,  mais  ne 
croyez  pas  aisément  aux  nouveaux;  les  La- 
tins sont  plus  véridiques  que  les  Grecs  :  car 
nos  gens  n'ont  pas  tant  d'esprit,  et  n'usent 

I  iS'  point  d'impostures.  » —  Il  ajoute,  qu'à  l'égard 
(lu  prêtre  Jean,  accusé  de  l'hérésie  des  mar- 
ciauistes  par  des  personnes  qui  avaient  avoué 
ne  pas  savoir  ce  que  c'était  que  cotte  héré- 
sie, il  avait  trouvé  sa  profession  de  foi  or- 
thodoxe, et  en  conséquence,  cassé  la  sen- 
tence rendue  contre  lui  par  les  juges  que  le 
patriarche  de  Constantinople  lui  avait  don- 
nés. Saint  Grégoire  écrivit  sur  ce  sujet  à  ce 
patriarche,  à  l'empereur  Maurice,  etàThéoc- 
tiste,  parent  de  ce  prince. 

4.  Sur  l'avis  qu'il  reçut  que  Piménius,  évo- 
que d'Amalfi  dans  la  Campanie,  ne  résidait 
que  rarement  dans  son  église,  et  que  son 
mauvais  exemple  était  suivi  par  plusieurs  au- 
tres, il  écrivit  au  sous-diacre  Anthcraede  l'o- 
bliger à  la  résidence,  suivant  les  canons;  s'il 
ne  se  corrigeait  pas,  de  le  faire  mettre  dans 

■  vu,  iiu  monastère,  et  de  lui  mander  tout  ce  qu'il 
aurait  fait  en  cette  occasion.  —  Anthème , 
dans  une  autre  lettre,  est  appelé  défenseur  : 
c'était  un  clerc  destiné  à  exécuter  les  ordres 
du  Pape  pour  l'utilité  des  pauvres.  —  Mari- 
nien  avertit  aussi  saint  Grégoire,  que  quel- 
ques-uns du  clergé  et  du  peuple  de  Ravenne 
se  plaignaient  de  ce  qu'on  voulait  juger  à 
Rome  un  dillerend,  qui  était  entre  l'église 
de  Ravenne  et  Claude,  abbé  de  Classe.  Ce 
Pape  répondit,  que  ceux  qui  se  plaignaient 
n'étaient  point  au  fait  des  canons,  qu'ils  di- 
saient avoir  été  violés  en  cette  occasion  ; 
que  Claude  avait  eu  droit  de  se  pourvoir 
par  devant  le  Saint-Siège,  parce  qu'ayant  été 


GREGOIRE  LE  GRAND,  PAPE.  .-)03 

traité  injustement  par  l'évèque  d(\  Ravenne, 
pri'ih'cesseur  <l(!  Marinicn,  il  avait  droit  de 
suspecter  encore  son  successeur;  qu'au  sur- 
plus l'Eglise  de  Ravenne  n'avait  pas  de  pri- 
vihîges  plus  étendus  que  celle  de  Constanti- 
nople, dont  l'évèque  Jean  avait  renvoyé  au 
Saint-Siégc  l'alfaire  qu'il  avait  avec  le  prê- 
tre Jean. —  Il  déclara  à  Maxime,  usurpa-  :ei'|i.2'>' 
leur  de  l'i'glise  de  Salone,  qu'il  eût  à  venir 
i  Rome  dans  le  délai  de  ti'cnte  jours,  et  h 
s'abstenir  de  la  sainte  communion  jusqu'à 
ce  que  son  afl'aire  eût  été  décidée,  confor- 
mément aux  canons. —  Ceux  de  Salone  soup-  «'■•. 
çonnani  saint  Grégoire  d'agir  contre  Maxime 
par  une  haine  particulière,  le  Pape  se  jus- 
tifia, en  protestant  qu'il  était  prêt  à  le  lais- 
ser en  possession  paisible  de  cet  évêché.  s'il 
pouvait  montrer  qu'il  y  fût  parvenu  sans  si- 
monie, et  sans  être  coupable  des  crimes  qui 
éloignent  de  l'épiscopat.  —  Il  protesta  aussi 
au  clergé  et  an  peuple  de  Zara,  qu'il  n'agis- 
sait dans  cette  affaire  que  par  zèle  pour  la 
justice  ;  et  en  attendant  que  la  cause  fût  fi- 
nie, il  leur  ordonne  de  se  séparer  de  la  com- 
munion de  Maxime,  et  de  ne  pas  recevoir 
les  saints  mystères  de  la  main  de  ceux  qui 
communiquaient  avec  cet  intrus. —  Il  manda  js. 
à  l'évèque  Candide  d'ordonner  prêtres,  avec 
le  consentement  de  l'abbé,  les  moines  qu'il 
trouverait  que  leur  piété  et  leurs  bonnes 
mœurs  rendraient  dignes  d'être  élevés  au 
sacerdoce  ;  —  h  Marinien,  de  ne  rien  entre-  jn. 
prendre  sur  les  monastères  de  son  diocèse 
contre  la  disposition  de  son  prédécesseur; 
—  à  Secondin,  de  se  hilter  de  procurer  la  3o_ 
paix  avec  le  roi  Agilulplie,  et  de  faire  de  sa 
part  des  reproches  à  Marinien,  de  ce  qu'ayant 
des  habits,  de  la  vaisselle  d'argent,  des  celliers 
remplis  devin,  il  ne  donnait  rien  aux  pauvres. 
«  Qu'il  ne  croie  pas,  dit-il,  qu'il  lui  suffise 
de  lire,  de  prier  et  de  se  tenir  en  retraite, 
s'il  n'est  libéral  envers  les  pauvres,  et  ne 
fait  des  bonnes  ceuvres  de  ses  mains  ;  autre- 
ment, il  n'a  qu'un  vain  titre  d'évêque.»  —  On  „|_ 
répandit  de  nuit  à  Ravenne  un  libelle  dilia- 
niatoire  contre  Castorius,  notaire  et  nonce  du 
Saint-Siège.  Saint  Grégoire  écrivit  sur  cela  à 
Marinien  qui  en  était  évêque,  au  clergé  et  au 
peuple  de  la  ville,  pour  déclarer  à  l'auteur  de 
ce  libelle,  qu'il  eût  à  soutenir  publiquement 
les  faits  avancés  contre  Castorius,  sous  peine 
d'être  privé  de  la  communion  du  corps  et  du 
sang  de  Jésus-Christ,  et,  même  d'être  frappé 
d'analhème,  s'il  lui  arrivait,  après  cette  dénon- 
ciation, de  participer  aux  saints  mystères.  — ■ 


506 


niSTOIlŒ  GÉNl'^RALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Eii>i.  :i.\  Satliant  qu'on  aviiit  iK'glij^é  les  ordres  iiu'il 
avait  donnés  pour  la  conversion  des  juifs  et 
des  païens,  il  les  renouvela,  en  ordonnant 
à  Fortunat,  t^vêque  de  Naples,  d'empêcher 
que  les  esclaves  juifs  ou  païens  qui  témoi- 
gnaient le  désir  de  se  faire  clirélicns,  fus- 
sent vendus  par  leurs  maîtres,  et  de  les  faire 

"■         mettre  lui-même  en  liberté. — Il  ordonna  aussi 
à  Léon,  évèque  de  Calane,  de  mettre  en  li- 
berté les  esclaves  qu'il  saurait  avoir  été  cir- 
•    concis  par  les  Samaritains,  sans  rendre  mê- 
me à  ceux-ci  ce  que  les  esclaves  leur  au- 

3'-  raient  coûté  ;  —  et  à  Colomb,  évêque  de  Xu- 

inidic,  de  veiller  ;ï  ce  que  les  enfants  ou  les 
domestiques  des  catholiques  ne  fussent  pas 

31  11 01.  rebaptisés  parles  donatistes.  —  S'étant  in- 
formé exactement  des  jours  auxquels  l'évo- 
que de  Ravenne  portait  le  pallium  dans  les 
processions  publiques  ,  il  régla  que  Mari- 
nien  ne  s'en  servirait  qu'à  la  messe  et  aux 
quatre  processions  solennelles. 

»6.  3.  Il  exhorta  Félix,  évèque  de  Pisaure,  à 

retirer  sa  chaire  épiscopale  du  monastère 
de  l'abbé  Jean,  et  à  ne  plus  y  célébrer  de 
messes  publiques  ;  trouvant  bon  néanmoins 
qu'il  y  eiivoyût  un  de  ses  prêtres,  pour  y  cé- 

»a.  lébrer  les  saints  mystères.  —  Un  homme 

marié,  nommé  Agalhon,  ayant  témoigné  h 
saint  Grégoire  son  désir  de  pasfcr  le  reste 
de  ses  jours  dans  la  retraite,  le  suint  écrivit 
à  Urbicus,  abbé  de  Sainl-Hcjmès  à  Falerme, 
de  le  recevoir  dans  son  monastère,  mais  à 
condition  que  la  femme  d'Agathon  embras- 
serait aussi  le  parti  de  la  retraite,  parce  qu'il 
n'était  pas  décent  que  l'une  des  parties  unies 
par  le  mariage  quittât  le  siècle  et  que  l'au- 

»'•  tre  y  demeurât.  —  Il  envoya  h  Pallade,  évê- 
que de  Saintes  dans  les  Gaules,  dos  reliques 
pour  la  consécration  de  quatre  autels,  sa- 
voir ,  de  celles  de  saint  Pierre ,  de  saint 
Paul,  de  saint  Laurent  et  de  saint  Panciace 
qu'il  avait  demandi-es.  Pallade  avail  lui- 
même  fait  bâtir  celte  église,  et  il  y  avail  mis 

to.  treize  autels.  —  Il  envoyji   aussi  des  reli- 

ques de  saint  Pierre  et  de  saint  Paul  ;\  la 
reine  Ri'uuehaut  par  le  prêtre  Leupario,  qui 
était  venu  exprès  a  Rome  [loui'  ce  sujet. 

5"-  (j.  Augustin  et  ses  compagnons  en  étaient 

partis  vers  le  mois  de  juillet  de  l'an  r)'jri. 
Après  quelques  journé(îs  de  chemin,  ils  ri'- 
solurent  de  ne  pas  passer  plus  avant,  décou- 
ragés par  la  dilHculté  qu'on  leur  lïiisait  en- 
trevoir dans  la  conversion  des  Anglais.  Ré- 
solus donc  de.relnurner  à  Rome,  ils  renvoyè- 
lent  AuL  Mslin  pour  prier  sainl  Grégoire  do 


ne  pas  les  exposer  â  im  voyage  plein  de  pé- 
rils ,  et  dont  le  succès  était  inceilain.  Le 
Pape  renvoya  Augustin  avec  une  lettre  à  ses 
compagnons,  où  il  leur  ordonnait  de  lui 
obéir  comme  à  leur  abbé,  et  d'exécuter  leur 
entreprise  sans  écouter  les  discours  des  gens 
malintentionnés,  les  assurant  qu'il  souhai- 
terait pouvoir  travailler  lui-même  avec  eux 
à  celte  bonne  o-uvre.  —  Il  écrivit  en  même 
temps  il  divers  évêques  pour  les  leur  recom- 
mander :  à  Pelage,  évêque  de  Tours,  suc- 
cesseur de  saint  Grégoire  ;  à  S'rénus,  de 
Marseille;  à  Virgile,  d'Arles;  h  Didier,  de 
Vienne;  à  Sj'agrius,  d'Autun;  à  Protais, 
d'Aix,  et  ;\  Etienne,  abbé  de  Lérins.  Il  loue 
cet  abbé  du  bon  ordre  qu'il  entretenait  dans 
sa  congrégation,  et  le  remercie  des  cuillères 
et  des  assiettes  qu'ils  lui  avait  envoyées  pour 
l'usage  des  pauvres.  —  Il  chargea  aussi  Au- 
gustin de  lettres  de  recommandation  pour 
le  patrice  Arigius,  pour  les  rois  Théoderic 
et  Tliéodebeit,  et  pour  la  reine  Brunehaut. 
Il  disait  dans  sa  lettre  h  ces  deux  princes, 
qu'il  avait  ordonné  à  ses  missionnaires  de 
mener  avec  eux  des  prêtres  du  pays  le  plus 
proche  d'.\ngleterre,  par  lesquels  ils  pussent 
connaître  le  génie  de  la  nation,  et  se  faire 
aider  dans  leur  ministère.  Dans  celle  qu'il 
écrivit  il  l'empereur  Maurice  par  des  évêques 
d'Afrique,  il  l'exhortait  â  punir  ceux  qui  con- 
trevenaient aux  lois  qu'il  avait  établies  dans 
cette  province  contre  les  donatistes,  qui  con- 
tinuaient d'engager  dans  leur  secte  les  ca- 
tholiques à  prix  d'argent;  en  sorte  que  la 
foi  se  vendait  publiquement  en  Afrique. 

Î5  Vil. 
{.iiTe  septicme  des  jMtrcs  de  saint  Grégoire, 

I.  Tontes  les  lettres  de  ce  livre  furent 
('criles  depuis  le  mois  de  septembre  de  l'an 
S'.Kl,  ([ui  ('lait  la  quinzième  indiclion.  Une 
femme  se  plaignit  ù  saint  Grégoire  de  ce  que 
son  mari,  qui  était  clerc  de  l'église  de  Na- 
ples, l'avait  quittée  sous  prétexte  qu'elle  n'é- 
tait pas  de  condilion  libre.  Le  contraire  fut 
pinuvé  :  c'est  pcnucpioi  le  Pape  onlonna  ;\ 
Fortunat ,  évê((ue  de  Naples,  d'obliger  le 
mari  de  cette  fcnnue  ;\  la  reprendre,  sans 
chenlier  à  l'avenir  aucune  raisiui  de  s'en  sc;- 
parer.  —  Cyriaque,  ayant  été  élu  patriarche 
de  Constanlinople  après  la  mort  de  Jean  dit 
le  Jeiïneur,  envoya  au  Pape,  suivant  la  con- 
tnnu-,  sa  lettre  synodale  conlenanl  sa  profi-s- 
sion  de  foi.  L'empereur  Maurice  lui  écrivit 


T.fM.  r.i, 


SI,  H",  Ï9. 


[vu"  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XU\.  —  SAINT  GRÉr.OIRE  LE  GUANT),  PAPE. 


507 


31,  33. 


sur  celte  éleclion  ;  les  trois  ('■vèiiuos  Pierre, 
Doniiticn  et  Eljiidiiis,  qui  avaient  ordonne' 
(lyriaque,  eu  donnèrent  aussi  avis.  Saint 
(iréf,'oire  reçut  très-bien  Georges  prêtre,  et 
Théodore  diacre,  porteurs  de  ces  lettres,  et 
il  les  eût  retenus  plus  longtemps  i\  Rome,  si 
la  proximité  de  l'hiver  ne  les  eût  obligés  de 


de  ri';glisc.  11  qualifie  d'/wnreusc  mvuioire 
Jean  son  prédécesseur  :  ce  qui  fait  voir  que 
les  disputes  qu'il  avait  eues  avec  lui  sur  le 
titre  d'évèque  universel,  n'empêchaient  pas 
qu'il  ne  rendit  justice  à  ses  vertus  après  sa 
mort.  —  Dans  sa  réponse  aux  évèrjues  qui 
avaient  ordonné  Cyiiaque,  il  les  reprend  de 


s'en  retou)-ner.  Il  les  chargea  de  deux  lettres  ce  qu'au  jour  de  celle  ordination,  ils  avaient 
pourCyriaqiie  :  l'une  publique,  pour  répon-  crié  :  Rêjouissoiu-nouf  en  ce  jour  rjti'a  fuit  le 
drc  à  sa  lettre  synodale;  l'autre  familière,  Seif/neur,  cette  application  de  l'Kcriture  ne 
remplie  de  témoignages  d'amitié  :  car  ils  devant  pas  se  faire  à  la  louange  d'un  hom- 
s'étaient  connus  particulièrement  dans  le  me  vivant  sur  la  terre;  mais  il  l'excuse  par 
temps  qu'il  était  nonce  à  Constantinople.  Il  le  transport  de  joie  qui  l'avait  produite.  Il 
dit  dans  la  première,  ([u'encore  qu'on  puisse      les  exhorte  à  prier,  non-seulemeut  pour  Cy- 

riaque,  mais  aussi  pour  la  conservation  et 
la  prospérité  de  la  famille  impériale. 

2.  Par  sa  lettre  à  l'abbesse  Respecta,  saint 
Grégoire  lui  donne  toute  l'autorité  dans  le 
monastère  de  Saint-Cassien,  h  l'exclusion  de 
l'évèque  diocésain  et  de  tout  antre  ecclé- 
siastique, avec  le  pouvoir  pour  les  religieu- 
ses de  ce  monastère  de  se  choisir  une  ab- 
besse  ;  mais  il  réserve  à  l'évèque  de  bénir  la 
nouvelle  abbesse,  de  célébrer  la  messe  dans 
l'église  du  monastère  au  jour  de  sa  dédi- 
cace, de  commettre  pour  les  autres  jours  de 
l'année  un  prêtre  pour  la  célébration  des 
saints  mystères,  et  de  corriger,  soit  l'abbesse, 
soil  les  religieuses,  suivant  les  canons,  si 
elles  tombent  dans  quelque  faute  notable.  — 
Il  accorda  à  Fortunat,  évêque  de  Fano,  la 
permission  qu'il  lui  avait  demandée  de 
vendre  les  vases  sacrés  de  son  église  pour  le 
rachat  des  captifs  ;  et  afin  que  personne  ne 
le  soupçonnât  de  fraude  dans  cette  vente,  il 
voulut  qu'elle  se  fit  en  présence  de  Jean  dé- 
fenseur. —  Pendant  que  Georges  prêtre,  et 
Théodore  diacre,  députés  de  Cyriaque,  pa- 
triarche de  Constantinople,  étaient  à  Rome, 
ils  avancèrent  en  présence  de  quelques  dia- 
cres de  l'Église  romaine,  que  Jésus-Christ, 
étant  descendu  aux  enfers,  en  avait  délivré 
tous  ceux  qui  l'avaient  reconnu  pour  Dieu. 
Saint  Grégoire  ne  fut  averti  qu'ils  pensaient 
ainsi,  qu'après  leur  départ  pour  Constanti- 
nople. Il  leur  écrivit  donc  pour  les  détrom- 
per, etleurfaiie  voir  que  Jésus-Christ  n'avait 
délivré  de  l'enfer  que  ccux-li  seuls,  qui 
avaient  cru  en  lui,  et  qui  pendant  leur  vie 
avaient  gardé  ses  préceptes,  parce  que,  si 
la  loi  seule  avait  été  suffisante  pour  sauver 
dans  la  loi  ancienne,  et  avant  l'incarnation, 
cet  état  aurait  été  préférable  à  l'état  de 
grâce,  où  nous  ne  pouvons  espérer  le  salut 
que  par  une  foi  vive  et  animée  par  de  bon- 


aimei'  le  repos,  le  travail  est  préférable  quand 
il  peut  tourner  au  salut  de  plusieurs;  que  la 
dignité  d'évèque  est  inséparable  de  soins  et 
d  inquiétudes,  parce  qu'il  n'est  pas  possible 
de  bien  gouverner  le  vaisseau  dont  on  s'est 
chargé,  sans  s'occuper  h  prévoir  les  tempê- 
tes qui  peuvent  le  submerger,  ou  sans  tra- 
vailler à  les  dissiper,  lorsqu'elles  se  sont 
élevées;  qu'il  doit  néanmoins  tellement  tem- 
pérer ses  soins,  qu'il  n'en  soit  point  accablé. 
11  approuve  sa  confession  de  foi  ;  mais  il  dit 
qu'elle  ne  suffit  pas  pour  la  conservation  de 
la  paix  des  cœurs  ;  qu'il  doit  encore  renon- 
cer au  titre  d'évèque  universel,  qu'il  avait 
apparemment  mis  dans  la  lettre  synodale, 
puisque  saint  Grégoire  dit  en  avoir  été  scan- 
dalisé. Il  lui  écrivit  depuis  plusieurs  autres 
lettres  contre  cette  prétention.  11  ajoute  : 
u  Entre  ceux  que  vous  dites  avoir  été  con- 
damnés par  les  conciles  généraux,  vous  nom- 
mez un  certain  Eudoxe,  dont  le  nom  n'est 
point  connu  parmi  les  Latins,  ni  dans  les 
conciles,  ni  dans  les  livres  que  saint  Épi- 
phane,  saint  Augustin  et  saint  Philastre  ont 
écrits  sur  les  hérésies;  mais,  si  quelqu'un 
des  Pères  catholiques  l'a  condamné  ,  nous 
le  condamnons  aussi  avec  vous.  Les  eudo- 
xiens  furent  condamnés  dans  le  premier 
concile  de  Constantinople;  mais  l'Eglise  ro- 
maine n'a  pas  reçu  jusqu'à  présent  les  actes 
de  ce  concile,  elle  n'en  reçoit  que  la  défini- 
tion de  foi  contre  Macédonius.  »  Dans  la  se- 
conde lettre,  saint  Giégoire  recommande  à 
Cyriaque  le  prêtre  Jean  et  le  moine  Alhanase, 
l'assurant  qu'ils  étaient  l'un  et  l'autre  d'une 
doctrine  orthodoxe.  —  Il  félicita  l'empereur 
Maurice  sur  le  choix  qu'il  avait  fait  de  Cy- 
riaque pour  patriarche  de  Constantinople , 
disant  qu'il  en  connaissait  le  mérite,  et  qu'il 
s'était  rendu  digne  de  celle  dignité  par  son 
expérience  dans  le  maniement  des  aUaires 


El.l»c,  7. 


K],i.i.  n 


j08 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


r.pi'f.  17. 


ncs  œuvres.  Il  appuie  celle  doctriue  de  di- 
vers passages  de  l'Écrilurc,  et  d'un  endroit 
du  livre  de  Phila?tre  sur  les  ln'rcsies,  où  il 
met  au  nombre  des  hérétiques  ceux  qui  di- 
sent que  Notre-Seigaeur  descendit  aux  en- 
fers, qu'il  y  annonça  sa  divinité  à  tous  ceux 
qui  y  étaient  détenu?,  afin  que,  croyant  en 
lui,  ils  fussent  sauvés. 

3.  Maxime,  usurpateur  de  l'évèché  de  Sa- 
lone,  averti  plusieurs  fois  par  le  Pape  de 
venir  ii  Rome,  s'en  était  excusé  sur  divers 
prétextes.  Le  clergé  et  le  peuple  de  Salone 


1.1.    VIII, 


l'envoyer  A  Rome  pour  y  être  consacré.  — 
Il  avait  été  autrefois  d'usage  que  les  évê-  IEiui.  a. 
ques  de  Sicile  vinssent  à  Rome  tous  les  trois 
ans;  saint  Grégoire,  voulant  les  soulager,  re- 
mit ce  voyage  à  chaque  cinquième  année, 
et  en  fixa  le  jour  k  la  fête  de  saint  Pierre, 
afin  qu'ils  la  ci'-lébrassent  avec  lui. 

4.  La  sœur  d'un  nommé  Catellus,  après       ^• 
avoir  été  fiancée  à  Etienne,  s'était  retirée 
dans  un  monastère  de  la  ville  de  .Naplcs  pour 
s'y  consacrer  h  Dieu  ;  celui-ci  prétendit  être 
en  droit  de  conserver  la  maison  et  les  meu- 


communiquaient  avec  lui,  à  deux  ou  trois     blés  de  sa  fiancée.  Catellus  en  porta  ses 


i:',iO,  21. 


personnes  près;  une  partie  du  clergé  et  du 
peuple  de  Jadéra  ou  Zara,  en  Dalmatie,  avait 
embrassé  sa  communion,  l'autre  l'avait  re- 
jetée. Sabinien,  leur  évoque,  avait  d'abord 
été  du  nombre  des  premiers;  mais  ensuite 
il  abandonna  Maxime,  et  touciié  de  regret 
d'avoir  pris  son  parti,  il  voulait  renoncer  à 
l'épiscopat  pour  faire  pénitence  dans  un 
nKmasIère.  Saint  Grégoire  lui  écrivit  deux 
lettres  sur  ce  sujet  :  dans  l'une,  il  lui  mande 
de  venir  à  Rome  avec  les  évèqucs  qui,  apr^s 
avoir  été  favorables  à  Maxime,  avaient  aban- 
donné son  parti,  et  leur  promet  l'absolution 
de  la  faute  qu'ils  avaient  faite  on  celle  occa- 
sion; dans  l'autre,  il  lui  déclare  qu'il  le  rece- 
vait en  sa  communion  et   en   ses  bonnes 
grâces,  et  l'exhorte  à  reprendre  la  conduite 
de  son  église,  et  de  faire  rentrer  dans  le  de- 
voir tous  ceux  qui  s'en  étaient  écartés.  Il  y 
y  en  a  une  troisième,  où  il  lui  dit  de  sur- 
monter par  sa  patience  la  haine  que  Maxime 
lui  portait,  pour  s'être  sépan!  de  lui.  Il  dé- 
cide dans  la  même  lettre,  que  Sabinien  ne 
devait  plus  admettre  aux  fonctions  sacerdo- 
tales un  prêtre  qui  ('tait  tombé  dans  un  cri- 
me. —  Il  rélablil  dans  son  grade  et  dans  ses 
fonctions  un  diacre  nnnimé  Martin,  qui  étant 
accusé  de  plusieurs  fautes,  avait  prouvé  son 
innocence,   particulièrement  en  l'alteslanl 
par  serment  sur  le  tombeau  de  saint  Pierre, 
prince  des  apôtres.  L'inscription  de  la  lettre 
((u'il  lui  écrivit  sur  ce  sujet,  le  nomme  abbé  ; 
mais  il  pr.rait  qu'il  y  a  faute,  car  il  n'est  pas 
vraiseud)lable  qu'un  abbé  fit  dans  son  mo- 
nastère les  fonctions  de  diacre,  et  qu'il  en 
occupât  la  place.  —  Sur  les  inslances  réité- 
rées de  Caslorius,  évêque  de  Rimini,  ;\  qui 
sa  santé  ne  permellait  pas  de  faire  sesjj^c- 
lions,  il  reçut  sa  démission,  et  permit  rélcc- 
tion  d'un  autre  évoque  pour  cette  ville,  en 
chargeant   Marinien,  évêque   de   Ravenne, 
d'examiner  le  mérite  de  l'élu,  et  ensuite  de 


plaintes  à  saint  Grégoire,  qui  ordonna  .-^For- 
tunat,  évêque  de  Naples,  et  à  Anthémius 
défenseur,  de  faire  restituer  le  tout  sans  au- 
cun délai.  — 11  ordonna  aussi  an  prêtre  Can- 
dide, recteur  du  patrimoine  de  saint  Pierre 
dans  les  Gaules,  de  racheter  quatre  frères 
qui  étaient  détenus  par  des  juifs  en  qualité 
d'esclaves  à  Narbonne.  —  Grégoria,  l'une 
des  dames  de  la  chambre  de  l'impératrice, 
s'était  confessée  avec  beaucoup  de  soin  de 
tous  ses  péchés;  mais  incjuiète  si  Dieu  les  lui 
avait  pardonnes,  elle  écrivit  à  saint  Grégoire 
qu'elle  ne  cesserait  de  l'importuner,  jusqu'à 
ce  qu'il  l'eût  assurée  qu'il  savait  par  révéla- 
tion que  ses  péchés  lui  élaienl  remis.  Le 
Saint  tâcha  de  la  consoler  par  l'exemple  de 
la  femme  pécheresse,  qu'il  confond  avec 
Marie  sonir  de  Marthe,  et  lui  dit,  qu'aimant 
Dieu  comme  elle  le  faisait  avec  autant  de 
ferveur  que  cette  fcîmme,  il  avait  confiance 
que  l'on  pouvait  aussi  lui  appliquer  cette  sen- 
tence de  Jésus-Christ  :  licnuamp  de  {jcr/iés  lui 
so)}t  remis,  parce  qu'elle  a  lieniicoiip  aiinc. 
«  Mais  pour  ce  qui  est,  ajoule-t-il,  de  vous 
assurer  qu'il  m'a  été  révélé  que  vos  péchés 
vous  sont  pardonnes,  vous  nie  demandez  une 
chose dillioile  et  inulile  :  dilliiile,  parce  que 
je  suis  indigue  d'avoir  des  révélations;  inu- 
tile, parce  que  vous  ne  devez  point  être  sans 
inquiétude  an  sujet  de  vos  pécht^s  Jusqu'à  la 
fin  de  votre  vie,  où  vous  ne  pouriez  plus  les 
pleurer.  La  sécurité  est  la  mère  de  la  négli- 
gence :  il  faut  que  vous  soyez  en  crainte 
peiulaut  le  peu  de  temps  de  celte  vie,  pour 
airiver  à  la  sécurité-  et  à  la  joie  l'teruelles.  » 
5.  La  lettre  de  saini  Gn'-goire  à  Théoclis- 
te,  sœur  de  l'Empereur,  est  poin-  la  congra- 
tuler sur  son  application  à  la  lecture  des 
Livres  saints,  et  à  la  niéditalion  de.s  v(''rilés 
de  la  religion.  Elle  avait  (pielquefois  le  don 
des  larmes.  Le  Pape  lui  dit  d'examiner 
quelle  en  est  la  cause;  si  elles  viennent  do 


[vir  SitCLK.] 


CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT  OREGOIIIE  l.K  T.RAND,  PAPE. 


503 


la  iiainio  des  peines  cHeinelles,  ou  du  di'lai 
(les  n'-ioinpenses  célestes;  parée  qnv  ,  Idis- 
qu'oii  csl  altéré  du  désir  de  voir  Dieu  ,  on 
est  d'abortl  frappé  de  crainte ,  puis  enllam- 
Mié  d'amour.  Alors,  celle  (jui  ]tleurail  dans 
la  crainte  d'être  livrée  aux  su[iplices  ,  ]ilcu- 
le  aussi  de  ce  que  l'on  diU'ère  à  lui  donner 
place  dans  le  l'oyaume.  Il  recommande  à 
TJM'oetisIe  de  soigner  l'éducation  des  jeunes 
l^rinces  ilonl  elle  s'était  cluir^éc  ,  et  d'aver- 
tir les  eunuques  commis  à  leur  garde   de 
leui'  inspirer  des  sentiments  d'un  amour  uni- 
tnel,(^t  d(!  l)onté  envers  les  peuples.  Il  la  re- 
mercie des  ti'enle  livres  d'or  qu'elle  lui  avait 
envoyées,  dont  il  dit  qu'il  a  employé  la  moi- 
tié i\  raclieter  plusieurs  personnes  nobles 
que  les  Lombards  avaient  fait  captives  dans 
la  ville  de  Crotoue  un  an  auparavant ,   et 
l'autre  moitié  à  procurer  des  couvertures  de 
lit  ù  des  religieuses  qui  soull'raient  beaucoup 
du  froid  dans  les  rigueurs  de  l'iiiver.  «  Elles 
sont,  dit-il,  au  nombre  de  trois  mille,  et  re- 
çoivent quatre-vingts  livres  par  an  des  biens 
de  saint  Pierre.  Mais  qu'est-ce  que  cela  pour 
mie  si  grande  multitude ,  principalement  en 
cette  ville  ,  où  tout  est  fort  cher?  Au  reste  , 
elles  mènent  une  vie  tellement  sanctiliée  par 
rabstinencc  et  par  les  larmes,  que  nous  leur 
devons  sans  doute  notre  conservation ,  en- 
tourés que  nous  sommes    des   glaives  des 
Lombards.»  Saint  Grégoire  envoya  à  Tliéoc- 
tiste  une  clef  qui  avait  touclié  au  corps  de 
saint  Pierre  ,  c'est-à-dire,  où  il  y  avait  de  la 
limaille  de  ses  chaînes  ;  et  pour  en  relever 
le  prix ,  il  rapporte  un  miracle  fait  par  l'at- 
touchement de  cette  clef.  UnLombard,  l'ayant 
trouvée  dans  une  ville  au  delà  du  Pô  ,  n'en 
tint  aucun  compte  ,  tant  qu'il  ne  vit  en  elle 
qu'une  clef  de  saint  Pierre;  mais  la  croyant 
d'or ,  il  se  mit  en  devoir  de  la  rompre  pour 
s'en  servir  à  d'autres  usages.  Aussitôt  le  dé- 
mon se  saisit  de  lui,  et  au  lieu  de  porter  son 
couteau  sur  cette  clef ,  il  se  l'enfonça  dans 
la  gorge  ,  et  périt  sur-le-champ.  Autharit , 
roi  des  Lombards ,   était  présent   avec  un 
grand  nombre  de  pejsonnes  de  la  secte  des 
ariens.  Tous  furent  saisis  de  crainte,  sans 
qu'aucun  osât  lever  de  terre  la  clef  que  ce 
Lombard  avait  laissée  tomber  en  mourant. 
Le  roi  fit  appeler  un  nommé  Minulfe  ,  qui , 
quoique  Lombard,  était  catholique,  trés-as- 
sidu  à  la  prière,  et  bienfaisant  envers  les 
pauvres.  Minulfeprit  la  clef:  Autharit,  éton- 
né du  miracle,  en  fit  faire  une  semblable 
d'or ,  et  les  envoya  toutes  deux  à  Rome  au 


E^il.il 


[lape  Pilage,avec  1(ï  l'écit  de  cet  événement 
miiarideux.  — Saint  Grégoire  lit  aussi  jin!- 
sent  d'une  clef  où  il  y  avait  de  la  limaille  des 
chaînes  de  saint  Pierre,  h  Théodori;,  médecin 
de  l'empereur  Maurice.  Théodore  avait  en- 
voyé plus  d'une  fois  à  Rome  de  grosses  som- 
mes pour  les  pauvres  cl  le  rachat  des  captifs. 
G.  Dans  une  lettre  à  Anastase  ,  prêtre  de 
J('rusalem  ,  saint  Grégoire  le  charge  de  tra- 
vailler A  réconcilier  son  évoque  avec  le  su- 
périeur du  monastère  de  Néas,  sifu('!  dans  la 
même  ville,  remarquant  qu'il  était  ordinaire 
de  voir  l'évèque  de  Jérusalem  en  contesta- 
tion avec  le  supérieur  de  cette  maison.  — 
Il  pria   Dominique ,  évoque  de    Carlhagc , 
d'aider  un  abbé  à  contenir  ses  moines  dans 
le  devoir,  et  d'empêcher  les  autres  évoques 
d'Afrique  de  les  appuyer  dans  leurs  désor- 
dres. Ils  étaient  tels,  que  lorsque  l'abbé  vou- 
lait les  corriger,  ils  sortaient  du  monastère, 
et  couraient  de  province  en  province,    no 
suivant  d'autre  règle  que  leurs  passions.  — 
Ce  saint  Pape,  répondant  àEuloge  d'Alexan- 
drie, qui ,  en  parlant  de  la  chaire  de  saint 
Pierre  ,  prince  des  apôtres,  avait  dit  que 
cet  apôtre  y  était  encore  assis  dans  ses  suc- 
cesseurs, s'explique  en  ces  termes  sur  cette 
chaire  ,  et  sur  la  primauté  de  saint  Pierre  : 
«  Quoiqu'il  y  ait  plusieurs  apôtres,  le  siège 
du  prince  des  apôtres  a  prévalu  seul  pour 
l'autorité  ,  à  cause  de  sa  primauté  ,  et  c'est 
le  siège  du  même  apôtre  en  trois  lieux  :  car 
il  a  élevé  le  siège   où  il  repose,  et  où  il  a 
fini  sa  vie  présente  ;  c'est  Rome.  Il  a  orné 
le  siège  où  il  a  envoyé   l'Évangéliste  son 
disciple  ;   c'est   Alexandrie.  Il  a  all'ermi  le 
siège  qu'il  a  occupé  sept  ans,  quoique  pour 
en  sortir  ;  c'est  Anlioche.  Ainsi  ce  n'est  qu'un 
siège  du  même  apôtre,  dans  lequel  trois  évo- 
ques président  maintenant  par  l'autorité  di- 
vine :  d'où  vient  que  je  m'attribue  tout  ce 
que  j'entends  dire  de  bien  de  vous.  Si  vous 
en  entendez  dire  de  moi,  vous  pouvez  aussi 
vous  l'attribuer,  parce  que  nous  sommes  un 
en  celui  qui  a  dit  :  Qu'ils  soient  un  comme  nous 
sommes  un.  »  Il  témoigne  ùEuloge  qu'il  avait 
eu  dessein  de  lui  envoyer  des  pièces  de  bois  ; 
mais  que,  ne  sachant  combien  il  eu  avait  be- 
soin, il  avait  eu  honte  d'en  envoyer  peu,  et 
n'avait  pu  lui  en  envoyer  beaucoup,  faute  de 
vaisseaux  propres  à  les  porter. 

§  VIII. 
Livre  huitième  des  Lettres  de  saint  Grégoire. 

1.  Sui- la  uouvelle  des  progrès  que  la  foi     Ei,isi.  i. 


Joan.  XTit* 


510 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Epl<l 


Etiii.  n.- 


catholique  faisait  parmi  les  idolâtres  de  l'ile 
de  Corse  par  le  minist^re  de  Pierre  qui  en 
était  évêque,  saint  Grégoire  lui  écrivit  pour 
l'exhorter  à  continuer  ses  travaux  apostoli- 
ques, en  lui  marquant  de  mettre  en  péni- 
tence pendant  quelques  joui-s  ceux  de  cette 
Ue  qui,  après  avoir  été  autrel'ois  du  nombre 
des  Tidèles,  avaient  embrassé  le  culte  des 
idoles,  afin  de  leur  donner  le  temps  de  pleu- 
rer leurs  fautes,  et  de  persuader  à  ceux  qui 
n'avaient  pas  encore  été  baptisés,  que  l'on 
ne  doit  point  adorer  des  statues  de  bois  ou 
de  pierre.  Il  lui  envoya  en  même  temps  cin- 
quante soijs  d'or  pour  acheter  des  habits 
blancs  à  ceux  qui  devaient  être  baptisés , 
c'est-à-dire,  aux  pauvres  :  car  c'était  l'usage 
de  les  dépouiller  de  tous  leurs  habits  avant 
de  les  baptiser,  et  de  les  revêtir  entièrement 
de  blanc.  —  Il  ne  put  s'empêcher  de  verser 
des  larmes  en  lisant  dans  la  lettre  d'Anas- 
tase ,  patriarche  d'Antioche  ,  le  détail  des 
maux  dont  il  était  accablé  dans  sa  vieillesse. 
Pour  l'en  consoler,  il  le  fait  ressouvenir  qu'il 
occupait  la  chaire  de  saint  Pierre,  à  qui  Jé- 
sus-Christ dit  ces  paroles  :  Lorsque  vous  serez 
vieux,  un  autre  vous  ceindra  et  vous  mènera  où 
vous  ne  voudrez  pas.  Il  tâche  de  le  fortifier 
encore  contre  les  hérésies  qui  s'élevaient, 
dont  les  auteurs  s'efforçaient  d'énerver  tou- 
tes les  vérités  établies  dans  les  écrits  des 
prophètes,  des  évangélistes  et  des  Pères,  en 
lui  faisant  espérer  le  secours  de  Dieu  pour 
les  combattre  et  les  renverser.  Ces  deux  let- 
tres et  les  suivantes  sont  de  la  première  in- 
diction, c'est-à-dire  de  l'an  597. —  Il  défendit 
à  Douinus,  évêque  de  Messine,  de  rien  exi- 
ger pour  le  lieu  de  la  sépulture  des  nifu'ts, 
disant  rpie  si  les  Sichimites  ne  voulurent 
rien  recevoir  pour  la  place  où  Abraham  en- 
terra sa  femme  Sara,  à  plus  forte  raison  les 
évêques  doivent-ils  offrir  ce  service  gratui- 
tement. —  Dans  sa  lettre  à  Venance  de  Luna, 
il  détaille  font  ce  que  devait  fournir  celui  qui 
fondait  un  monastère  ;  mettant  entre  autres 
choses  un  calice  d'argent  pesant  six  onces, 
et  une  patène  d'argent  pesant  deux  livres. 
Les  patènes  dans  les  premiers  siècles  étaient 
grandes  et  épaisses,  parce  qu'on  y  mettait 
les  oblations  des  fidèles. 

2.  La  môme  année  que  l'empereur  Mau- 
rice donna  une  loi  portant  défenses  à  ceux 
qui  étaient  engagés  dans  la  milice,  ou  sujets 
à  rendre  des  comptes,  d'embrasser  la  vie 
monastique  ou  cléricale,  saint  Grégoire  l'en- 
voya partout  pour  êlic  observée  ;  mais  ayant 


depuis  obtenu  qu'elle  fut  modérée,  il  crut 
devoir  l'envoyer  de  nouveau  aux  évêques 
d'Italie,  d'IUyrie  et  de  Sicile,  parce  qu'ils 
dépendaient  de  l'Empereur.  Dans  la  lettre- 
circulaire  qu'il  leur  écrivit  à  ce  sujet,  il  les 
exhorte  à  ne  pas  recevoir  avec  trop  de  pré- 
cipitation ceux  qui  sont  chargés  d'affaires 
temporelles,  de  crainte  qu'ils  ne  mènent 
une  vie  séculière  sous  l'habit  ecclésiastique. 
Il  ajoute  :  «  Que  s'ils  se  présentent  dans  les 
monastères,  il  ne  faut  les  y  recevoir  qu'a- 
près qu'ils  auront  rendu  leurs  comptes,  et 
que  si  les  gens  de  guerre  veulent  faire  pro- 
fession de  la  vie  monastique,  on  doit,  avant 
de  les  admettre,  examiner  soigneusement 
leur  vie,  et  les  éprouver  suivant  la  règle  pen- 
dant trois  ans  dans  leur  habit  sécuHer;  que 
l'Empereur  consent  qu'ils  soient  reçus  à  ces 
conditions.  i>  Les  trois  années  de  probation 
étaient  di\jà  ordonnc'cs  par  les  Novelles  de 
Juslinien  ;  mais  saint  Grégoire  n'y  obligeait 
que  les  gens  de  guerre ,  se  contentant  de 
deux  ans  à  l'égard  des  autres,  pourvu  que 
pendant  ce  temps  l'on  examinât  avec  soin 
leur  vie  et  leurs  mojurs  :  «  Car  si  les  hommes 
n'engagent,  dit-il,  qui  que  ce  soit  à  leur  ser- 
vice sans  l'éprouver,  combien  doit-on  s'en  as- 
surer davantage  pour  le  service  de  Dieu  !  »  11 
donna  avis  à  Amos,  patriarche  de  Jérusalem, 
qu'un  nommé  Pierre ,  acolyte  de  l'Église 
romaine,  avait  pris  la  fuite  pour  éviter  la 
peine  que  ses  fautes  méritaient  suivant  les 
canons,  et  le  pria  de  l'arrêter  s'il  allait  en 
cette  ville  ou  dans  les  environs,  et  de  le 
renvoyer  à  Rome  sous  boime  garde. —  Et  alin 
que  Pierre  n'abusât  point  dos  choses  sain- 
tes ,  saint  Grégoire  avertit  Amos  qu'il  lui 
avait  interdit  la  communion  du  corps  et 
du  sang  de  Notre-Seigneur  jusqu'à  son  re- 
tour, à  moins  d'être  réduit  à  l'extrémité 
par  maladie.  —  H  y  a  deux  de  ses  let- 
tres pour  contraindre  une  religieuse  qui 
avait  quitté  son  monastère  ,  à  y  rentrer. 
Par  une  autre,  il  confirme  la  transaction 
passée  entre  Candide,  abbé  du  monastère 
de  Saint -André  à  Rome,  et  Maurentius, 
maître  de  la  milice,  au  sujet  des  biens  que 
Jean,  frère  de  Maurentius  et  moine  do  ce 
monastère,  avait  laissi-s  en  mourant.  —  Il 
établit  un  corps  de  défenseurs,  à  qui  ildoiuia 
la  qualité  de  régionnaires.  Outre  le  soin  des 
pauvi-es,  (jui  était  leur  occupation  princi- 
pale, ils  veillaient  à  la  di'fense  dos  biens 
et  dos  droits  do  l'Eglise;  souvent  on  les 
envoyait  dans  les  provinces  pour  y  prcn- 


NoTo:I.  r. , 
filt.  A\l;  Ko- 
TCll.  I^.t,  cip. 
XIXV. 


Llb.X, 


8,  0. 


[vil*  SIÈCLE.]      CIIAPITRK  XI.IX.  —  SAINT 

di-o  soin  dii  palriuioiiio  de  s;iiiil  Pierre. 
Bpisi.  is.  ;{  Il  y  jiviiit  pr^s  do  llavciine  un  monus- 
tiTC  d(''di(;  j'i  saint  Jean  et  à  saint  l-llieniio, 
dont  Claude,  ami  de  saint  Gn'goirc,  était 
al)b('  :  on  le  nommait  Classe.  Comme  il  avait 
souttcrt  beaucoup  de  vexations  de  la  part 
des  évèques  de  Havennc,  le  Pape,  qui  savait 
par  sa  propre  cxpi'-rionce,  combien  il  cMait 
nécessaire  de  pourvoir  au  repos  dos  moines, 
défondit  ;\  Marinion,  évéque  de  Ravenne,  et 
il  SCS  successeurs,  de  lieu  diminuer  dos  biens, 
terres,  revenus  ou  titres  de  ce  monastère, 
voulant  que,  s'il  survenait  quelque  dillërend 
entre  l'église  de  Havennectie  monastère  de 
Classe,  on  clioisît  des  abbés,  ou  d'autres  ar- 
bitres craignant  Dieu ,  pour  le  terminer 
promptement  en  présence  des  saints  Evan- 
giles. Il  ordonna  qu'après  la  mort  de  l'abbé, 
son  successeur  serait  clioisi  par  le  consente- 
ment libre  et  unanime  de  la  communauté, 
et  tiré  de  son  corps  ;  que  s'il  ne  s'y  en  trou- 
vait point  de  capable,  on  le  prendrait  dans 
les  autres  monastères  ;  que  l'élu  serait  or- 
donné sans  fraude  ni  vénalité  ;  qu'après  son 
élection,  on  ne  pourrait  commettre  à  un  au- 
tre le  gouvernement  du  monastère,  sinon  en 
cas  que  l'abbé  fût  coupable  selon  les  canons; 
que  l'on  ne  pourrait  ôter  à  l'abbé  aucun  de 
ses  moines  malgré  lui,  pour  gouverner  d'au- 
tres monastères,  ou  pour  entrer  dans  le  cler- 
gé ;  mais  que,  si  le  nombre  des  moines  était 
plus  que  suffisant  pour  l'otHce  divin  et  le  ser- 
vice du  monastère ,  l'abbé  pourrait  oflrir 
pour  le  service  de  l'Église  ceux  (ju'il  en  croi- 
rait digues,  fi  la  charge  que  celui  qui  aurait 
passé  à  l'état  ecclésiastique,  ne  pourrait  plus 
demeurer  dans  le  monastère,  ni  y  exercer 
'  aucune  autorité.  11  ordonna  aussi  que  l'in- 
ventaire des  biens  et  dos  titres  du  monas- 
tère, se  ferait  par  l'abbé,  aidé  par  d'autres 
abbés,  et  non  par  des  ecclésiastiques  ;  et  que 
toutes  les  fois  que  l'abbé  de  Classe  désire- 
rait de  faire  le  voyage  de  Rome  pour  l'uti- 
lité de  son  monastère,  il  n'en  serait  pas  em- 
pêché par  l'évêque  de  Ravenne.  Il  assm'e 
Marinien  que  l'abbé  Claude  le  verra  volon- 
tiers dans  son  monastère,  sachant  que  sa 
visite  ne  lui  sera  point  à  charge  ;  mais,  parce 
que  son  prédécesseur  y  avait  causé  de  gran- 
des dépenses  sous  prétexte  d'hospitalité,  il 
dit  en  général  que  les  évéques  de  Ravenne, 


GRKGOIRK  LE  GRAND,  PAPE.  .Ml 

en  rendant  A  ce  monastère  des  devoirs  de 
charité,  ne  doivent  point  lui  être  inconi- 
iiKulos  par  leurs  dépenses.  —  Il  lui  écrivit 
une  sccondo  lettre  ,  pour  lui  recomman- 
der l'abbé  Claude  qui  revenait  de  Rome. 
4.  Ayant  appris  ([u'à  Tcrracinc  plusieurs 
refusaiont  de  monter  la  garde  sur  les  mu- 
railles dans  un  temps  d'hostilités,  il  manda 
;\  révoque  du  lieu  d'y  obliger  tout  le  monde, 
même  les  clercs,  de  quelqu'église  qu'ils  dé- 
pendissent. —  Il  s'était  glissé  un  abus  par- 
mi les  diacres  de  Catane,  qui,  voyant  ceux 
de  Messine  se  sei-vir  d'une  espèce  de  chaus- 
sure particulière  aux  évoques,  en  mettaient 
aussi.  Saint  Grégoire  le  leur  fit  défendre, 
disant  que  si  ceux  de  Messine  en  usaient, 
c'était  par  concession  du  Sainf-Siége,  h  l'ex- 
clusion de  tous  les  autres  diacres  de  Sicile. 
—  Sa  lettre  à  Eulogc  d'Alexandrie  est  nv 
marquable.  Cet  évêque  lui  avait  demandé 
les  actes  de  tous  les  martyrs,  recueillis  par 
Eusèbe  de  Césarée.  «  Je  vous  rends  grâces 
de  m'avoir  instruit,  lui  répondit  saint  Gré- 
goire, car  avant  votre  lettre  je  ne  savais  pas 
si  ces  Actes  avaient  été  recueillis;  et  à  l'ex- 
ception de  ce  qu'on  en  trouve  dans  les  li- 
vres du  même  Eusèbe,  c'est-à-dire,  dans  son 
Histoire  ecclésiastique  ,  je  ne  sache  point 
qu'il  y  en  ait,  ni  dans  les  archives  de  notre 
Eglise,  ni  dans  les  bibliothèques  de  Rome, 
sinon  quelque  peu  recueilli  en  un  volume. 
Nous  avons  les  noms  de  presque  tous  les 
martyrs,  distribués  par  chaque  jour,  et  ras- 
semblés en  un  livre,  et  nous  célébrons  des 
messes  en  leur  honneur.  Mais  ce  volume  ne 
nous  apprend  point  le  détail  de  leurs  souf- 
frances :  ou  y  voit  seulement  leurs  noms,  le 
lieu  et  le  jour  de  leur  martyre.  »  Ce  n'ôlait 
donc  qu'un  calendrier  ou  martyrologe,  et 
vraisemblablement  celui  qui  porte  le  nom  de 
saint  Jérôme.  Ce  témoignage  de  saint  Gré- 
goire répand  beaucoup  de  doutes  sur  les 
Actes  que  uous  avons  aujourd'hui  sous  le 
nom  de  plusieurs  martyrs  de  l'Église  de  Ho- 
me, comme  de  saint  Clément,  de  saint  Jean 
et  de  saint  Paul,  de  sainte  Agnès,  de  sainte  Cé- 
cile, et  d'un  grand  nombre  d'autres  dont  nous 
avons  déjà  parlé.  Ceux  de  sainte  Cécile  sup- 
posent qu'elle  soutirit  à  Rome  dans  le  temps 
que  saint  Urbain  en  était  évêque;  c'était  donc 
sous  l'empire  d'Alexandre,  successeur  d'Hé- 


Ei.  I.  m. 


Vide   frtm. 


'  Voyoz,  sur  cette  assertion  ili;  D.  Ceilliin-,  ce  qui       note  S,  pus.  'i'JO  à  :iôt,  et  pag.  4ir,,  noie  3.  (t'édi' 
en  a  été  ilil,  loin,  l",  iisj;.  357,  noie  I,  et  pag.  358,       leur.) 
note  4  ;  toui.  Il,  piig.  102  à  lOC;   tom.  III,  pag.  40, 


542 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


liogabale  :  or,  Alexandre  ne  pei-sécuta  ja- 
mais les  cbrétiens.  Il  les  souUrait,  ainsi  que 
le  témoigne  '  Laiiipiidiiis  son  liislorien,  c'esl- 
à-diie,  qu'il  les  laissait  daus  une  rutièrc  li- 
berté au  sujet  de  la  religion  :  ce  qui  n'est 
point  surprenant,  puisqu'on  croit  que  Mani- 
mée,  sa  mère,  qui  avait  tout  pouvoir  sur  son 
esprit,  était  cliriMienne.  Coininenl  accorder 
cette  liberté  qu'il  donnait  aux  ciirétiens,  avec 
ce  qu'on  lit  '  dans  les  Actes  de  celte  martyre, 
que  le  pape  saint  Urbain,  ayant  été  condam- 
né deux  fois  à  la  mort,  était  obligé  de  demeu- 
rer caché  liors  de  Home,  parce  que,  si  on 
l'eût  trouvé,  on  l'eut  l'ait  brûler?  Il  faut  ajou- 
ter que  ces  Actes  sont  remplis  de  miracles 
extraordinaires,  et  d'autres  événements  qui 
Episi.  3c.  ont  peu  d'apparence  de  vérité.  —  Saint  Gré- 
goire fit  aussi  part  à  Euloge  d'Alexandrie  des 
nouvelles  qu'il  avait  reçues  de  la  conversion 
i^cs  Anglais,  dont  plus  de  dix  mille  avaient 
:rté  baptisés  à  la  fête  de  Xoél.  Euloge  lui  avait 
aussi  fait  part  de  la  conversion  des  héréti- 
ques d'Alexandrie,  et  de  l'union  parfaite  qui 
régnait  dans  celte  Église.  Saint  Grégoire  l'en 
congratula  ;  mais,  parce  qu'en  lui  écrivant 
il  avait  dit  que ,  suivant  ses  ordres ,  il  ne 
donnait  plus  au  patriarche  de  Constantino- 
ple  le  titre  d'évcque  universel  :  «  Je  vous 
piie.  lui  dit  le  Pape,  d'ùter  ce  terme  dV- 
donner.  Je  sais  qui  je  suis,  et  qui  vous  êtes  : 
\ous  êtes  mon  fi-ère  par  votre  place,  et  mon 
pcre  par  votre  vertu.  Je  ne  vous  ai  rien  or- 
donné ;  je  vous  ai  seulement  reprc-seuté  ce 
qui  m'a  semblé  utile  :  encore  ne  l'avez-vous 
pas  observé  exactement,  car  j'avais'  dit  que 
vous  ne  deviez  donner  ce  titre,  ni  à  moi,  ni 
à  aucun  autre  ;  cependant ,  au  commence- 
ment de  votre  lettre,  vous  me  le  donnez  à 
moi-même.  Je  voudrais  me  distinguer  parla 
vertu,  non  par  des  paroles,  et  je  ne  tiens 
point  à  iionucur  ce  qui  déshonore  mes  frè- 
res. Otons  les  mots  qui  enllent  la  vanité  et 
blessent  la  charité.  » 

31.  5.  Il  écrivit  à  Secondin,  évêque  de  Taor- 

mine,  d'empêcher  que  des  laïques  s'empa- 
rassent d'un  monastère  de  la  dépendance  de 
celui  de  Caslel ,  fondé  par  Cassiodore,  mais 
d'avoir  soin  qu'on  y  envoyât  des  moines, 
afin  que  l'intention  des  fondateurs  fût  suivie. 

>i.  —  Jean,  évêque  de  Scillitane,  s'était  emparé 
de  quelques  héritages  du  monastère  de  Cas- 
tel,  sous  prétexte  que  l'abbé  les  lui  avait 
donnés.  Saint  Grégoire  l'obligea  de  les  ren- 


dre, avec  défense  de  toucher  aux  droits  de 

ce  monastère  ;  mais  en  l'esbortant  à  veiller 

sur  la  conduite  des  moines.  —  Pour  recon-     tpia.  n. 

naître  le  présent  que  Léonce  lui  avait  fait  de 

l'huile  qui  découlait  de  la  croix  du  Sauveur, 

et  du  bois  d'aloès,  il  lui  envoya  une  clef  dans 

laquelle  il  y  avait  de  la  limaille  des  chaînes 

de  saint  Pierre. 

§IX. 
Livre  neuvième  des  Lettres  de  saint  Grégoire. 

{.  Les  premières  sont  du  mois  de  septem-  i. 
bre,  indiction  deuxième,  ou  308,  et  sont 
adressées  à  Janvier,  évoque  de  Cagliari,  en 
Sardaigue.  Il  était  alors  fort  avancé  en  Age, 
mais  aussi  facile  à  émouvoir  que  s'il  eût  été 
plus  jeune;  sensible  aux  injures,  faible  et 
facile  à  se  laisser  entraîner  h  de  mauvais 
conseils.  Irrité  contre  un  particulier,  il  en- 
voya, un  dimanche  au  matin,  renverser  sa 
moisson  et  y  passer  la  charrue  ;  ensuite  il 
chanta  la  messe,  puis  il  alla  lui-même  arra- 
cher les  bornes  du  même  champ.  Saint  Gré- 
goire eut  peine  à  croire  à  un  tel  excès;  mais 
s'en  étant  assuré  par  l'abbé  Cyriaque  qui 
l'avait  appris  sur  les  lieux,  il  en  fit  à  Janvier 
une  sévère  réprimande,  et  excommunia  pour 
deux  mois  ceux  dont  il  avait  suivi  les  conseils 
en  cette  occasion.  —  Il  écrivit  à  Vital,  défeu-  *• 
seur  de  Sardaigne,  de  mettre  cette  sentence  ;\ 
exécution  et  de  faire  réparer  le  tort.  —  Il  dé-  '■ 
fendit  au  même  évêque  de  rien  exiger  pour 
le  lieu  de  la  sépulture,  lui  permettant  seule- 
ment de  recevoir  ce  qu'on  otTrirait  pour  le 
luminaire.  —  Janvier  ayant  témoigné  du  re-  *• 
pentir  de  sa  faute,  saint  Grégoire  l'assura 
que  les  reproches  qu'il  lui  avait  faits  au  sujet 
de  la  moisson  renversée ,  ne  venaient  d'au- 
cune aigreur,  mais  d'une  charité  fralernelle. 
Il  le  Ct  souvenir,  qu'en  qualité  d'évêque,  il 
était  chargé,  non  du  soiu  des  choses  terres- 
tres, mais  de  la  conduite  des  âmes;  qu'il 
devait  y  mettre  toute  son  application,  et  ne 
penser  qu'à  leur  avantage,  afin  qu'il  ne  por- 
tât point  devaut  Dieu  le  simple  nom  dévè- 
que,  qui,  sans  les  mérites,  ne  servirait  qu'à 
sa  condamnation. —  Un  des  juifs  de  Cagliari,  e. 
s'étant  fait  chrétien,  s'empara,  dès  li>  lende- 
main de  son  baplême,  c'est-à-dire  le  jour  de 
Pâques,  de  leur  synagogue,  et  y  mit  inic 
image  de  la  Sainte  Vierge,  une  croix ,  ct 
l'habit  blanc  qu'il  avait  reçu  eu  sortant  des 


Lampridius,  wi  vHa  Alexand.,  pag.  121,  131.  '  Apud  Surium  ad  diem  22  nocemb. 


[vu'  sifccLE.]       ClIAl'ITHl!:  XLIX.  —  SAINT 

foiils.  Saint  Giëgoirc  loua  Janvier  de  n'avoir 
pas  consenti  à  cette  vinloiice,  et  l'exliorla 
à  faire  ôter  l'iina  ,o  cl  la  croix  avec  la  vénc- 
ralioii  qui  leur  clail  ihic,  et  à  rendre  la  sy- 
nagogue aux  juifs,  disant  (|nc,  comme  les 
lois  ne  leur  permettaient  pas  do  bâtir  do  nou- 
velles synagognes,  elles  ne  souHVnicnl  jias 
non  plus  qu'on  les  troublât  dans  la  posscs- 
'•''''■  '•  sion  des  nnci(Mincs.  —  Il  déclara  nul ,  en 
vertu  des  lois  impériales  ,  le  testament  do 
deux  ahbesscs,  parce  que,  ne  possc'-dant  rien 
en  piopro  depuis  qu'elles  avaient  embrassé 
l'état  monastique,  il  leur  était  défendu  de 
disposer  des  biens  qu'elles  avaient  apportés 
au  monastère.  On  disait,  pour  la  défense  de 
leur  testament,  que,  quoique  abbesses,  elles 
n'avaient  pas  porté  l'iiabit  monastique.  Saint 
Grégoire  réponcl  que  le  défaut  d'habit  n'a- 
vait pas  invalidi'  leur  engagement,  et  ne  pou- 
vait porter  préjudice  au  monastèi-e  qu'elles 
avaient  gouverné  pendant  plusieurs  années; 
mais  que  l'évêque  qui  les  avait  ordonnées 
ou  bénites  était  en  faute,  pour  leur  avoir 
donné  la  bénédiction  dans  un  autre  liabit 
que  celui  du  monastère.  Après  avoir  donc 
pris  l'avis  de  son  conseil  et  des  personnes 
doctes  de  Rome,  il  ordonna  à  Janvier  de 
faire  restituer  au  monastère  tout  ce  qu'elles 
avaient  donné  ailleurs. 

'■  2.  Sa  lettre  h  Vincent  et  A  quelques  au- 

tres évêqiies  de  Sardaigne.  est  pour  les  ol)li- 
ger  à  célébrer  la  Pâque  au  jour  marqué  par 
leur  métropolitain,  et  à  ne  point  entrepren- 
dre de  longs  voyages  sans  sa  permission.  Il 
en  exce[]te  le  cas  où  ils  auraient  avec  lui 
quelques  contestations  ;  alors  il  veut  qu'ils 

^-  aient  recours  au  Saint-Siège.  —  Jean  ,  évo- 

que de  Caprite  ou  Caorla  ,  voulant  se  réunir 
avec  son  peuple  à  l'Église  romaine,  présenta 
sa  requête  à  Callinique  ,  successeur  de  Ro- 
main dans  l'exarchat  d'Italie.  Celui-ci  la  com- 
muniqua à  Justin,  homme  très-éloquent ,  en 
qui  il  avait  confiance  ;  mais  ,  comme  il  était 
schismalique,  il  détourna  l'évêque  de  Caorla 
de  la  réunion.  Le  peuple ,  qui  la  souhaitait, 
envoya  au  Pape  demander  un  autre  évèqiie  ; 
sur  quoi  saint  Gi'égoire  écrivit  à  l'exarque, 
qu'outre  que  l'ordre  de  l'Empereur  toucliaut 
les  scbismatiques  avait  été  surpris ,  et  ne 
portait  pas  qu'où  rejetterait  ceux  qui  vou- 
draient se  réunir,  mais  seulement  qu'on  n'y 
forcerait  pas  ceux  qui  ne  le  désireraient 
point.  11  pria  Callinique  d'éloigner  Justin  de 
son  conseil,  tant  qu'il  resterait  dans  le  schis- 
me, parce  qu'il  ne  mancfuerait  pas  de  conti- 
XI. 


CIIÉGOIUE  LE  GRAND,  PAPE.  Mi 

nuer  de  s'opposer  à  la  réunion  de  ceux  de 
son  parti.  —  En  même  tenqis  il  ciiargea  Ma-  ^''''"'  '"' 
rinien  ,  ihéque  de  llaveniie  ,  d'exhorter  l'é- 
vêque de  Caorla  à  se  réunir  à  l'iîglisc  et  ;'i 
son  peuple,  voulant  qu'en  cas  de  refus  il 
ordonnât  un  autre  évêijue  pour  cette;  ville  , 
et  qu'il  comptât  l'ile  de  Caorla  dans  sa  pro- 
vince ,  jusqu'à  ce  que  les  évoques  d'istrio 
fussent  revenus  à  l'unité  catholique.  Il  le 
chargea  aussi  de  finir  l'allaire  de  Maxime  de 
Saloue,  en  jirenant  pour  adjoint,  s'il  en  était 
besoin,  Constantius,  évêque  de  Milan. 

3.  La  reine  Brunehaut  avait  demandé  le  m, 
pallium  pour  Syagrius ,  évêque  d'Autnn. 
Saint  Grégoire  y  consentit  d'autant  plus  vo- 
lontiers, qu'il  avait  des  obligations  à  cette 
princcssepour  la  bomie  réception  qu'elle  avait 
faite  à  Augustin  ù  son  passage  pour  l'An- 
gleterre. Il  savait  d'ailleurs  que  l'Empereur 
trouvait  bon  qu'il  accordât  le  pallium  à  cet 
évêque  ;  mais  il  y  avait  deux  obstacles  à  le- 
ver avant  de  l'envoyer  :  l'un  ,  que  Syagrius 
ne  l'avait  pas  demandé  lui-même  ,  suivant 
l'ancienne  coutume  ;  l'autre  ,  que  celui  qui 
était  venu  à  Home  pour  le  recevoir,  se  trou- 
vait engagé  dans  le  parti  des  scbismatiques. 
Il  y  en  avait,  ce  semble,  encore  un  troisiè- 
me, qui  était  que  la  reine  ne  l'avait  pas  de- 
mandé par  elle-même,  mais  seulement  par 
son  envoyé,  comme  si  elle  eut  appréhendé 
que  saint  Grégoire  ne  l'accordât  pas  à  ses 
prières.  Le  Pape  l'adressa  au  prêtre  Can- 
dide, recteur  du  patrimoine  de  saint  Pierre 
dans  les  Gaules,  afin  que  Syagrius  le  reçut 
de  sa  main,  après  le  lui  avoir  demandé  avec 
quelques  évêques  de  sa  dépendauce.  Toutes 
ces  formalités  sont  marquées  dans  la  lettre 
à  la  reine  Brunehaut.  Saint  Grégoire  la  prie 
ensuite  de  s'intéresser  à  bannir  du  royaume 
la  simonie  dans  les  ordinations,  et  à  répri- 
mer les  scbismatiques,  qui,  sous  prétexte  de 
défendre  le  concile  de  Chalcédoine,  cher- 
chaient à  se  soustraire  aux  règles  de  la  disci- 
pline ecclésiastique,  et  à  vivre  à  leurliberté, 
se  confiant  plus  dans  leur  ignorance  que 
dans  les  lumières  de  l'Eglise  universelle  et 
des  quatre  patriarches.  Il  rapporte,  qu'ayant 
demandé  à  celui  que  la  reine  avait  envoyé 
à  Rome  pourquoi  il  était  séparé  de  l'Église, 
il  avait  avoué  qu'il  n'en  savait  rien,  et  qu'il 
lui  avait  paru  n'entendre,  ni  ce  qu'il  soute- 
nait, ni  ce  qu'on  lui  disait.  Il  exhorte  encore 
Brunehaut  à  abolir  les  restes  d'idolâtrie  qui 
se  trouvaient  dans  les  États  des  jeunes  rois 
Tliéodebert  el  Théoderic,  dont  l'un  régnait 

J3 


514 


HISTOIRE  GKNÈRALE  DES 


en  Austrasie  et  l'autre  en  Bourgogne.  Dans 
ces  deux  Étals,  mais  plus  encore  dans  la  Ger- 
manie, jusqn'où  s'étendait  le   royaume  de 
Tlu'odeberl,  il  y  avait  un  i;rand  nombre  de 
clirélicns  qui,   tout  en  fioijucntant  les  égli- 
ses, ne  laissaient  pas  de  rendre  un  culte  aux 
démons,  immolant  aux  idoles,  honorant  des 
arbres,  et  sacrifiant  des  léles  d'animaux;  ce 
qui  déplaisait  à  Uieu,  et  excitait  sans  doute 
sa  colore  sm-  les  peuples  désolés  par  les  in- 
cui-sions  des  barbares.  Il  marque  que  le  prê- 
tre Candide  lui  remettra  de  sa  part  le  livre 
qu'elle  avait  demandé. 
Epi.i.iî.         4.  Un  homme,  venant  de  Sicile,  dit  à  saint 
Grégoire  que  quelques-uns  des  Grecs  et  des 
Liitins  murmuraient  des  divers  règlements 
qu'il  avait  faits  pour  la  réformalion  de  l'of- 
fice, et  disaient  :  Comment  prétend-il  abais- 
ser l'Église  de  Constantinopie,  lui   qui  en 
suit  en  tout  les  coutumes?  «  Je  lui  ai  deman- 
dé, dit  saint  Grégoire,  quelles  étaient  ces 
coutumes;  il  m'a  répondu:  Vous  avez  or- 
donné de  dire  alléluia  à  la  messe  hors  du 
temps  pascal;  vous  faites  marcher  les  sous- 
diacres  sans  tunique  ;  vous  faites  dire  Kyrie 
eleison;  vous  dites  l'Uraison  dominicale  in- 
continent après  le  canon.  Je  lui  ai  répondu 
qu'en  tout  cela  je  n'imitais  aucune  éghse  ; 
car,  à  l'égard  de  Valleluia,  on  dit  que  c'est 
saint  J(''rùme  qui  a  introduit  ici  l'usage  de  le 
chauler  du  temps  du  pape  Damase,   à  l'imi- 
tation de  l'Église  de  Jérusalem  ;  c'est  pour- 
quoi nous  avons  plutôt  retranché  quelque 
chose  en  cela  dans  notre  Église  à  la  coutume 
que  les  Grecs  y  avaient  introduite,  qui  était, 
ce  semble,  de  chanter  alléluia  aux  enterre- 
ments et  pendant  le  carême.  Quant  anx  sous- 
diacres,   l'ancienne  coutume  éiait  qu'ils  ne 
pnrUisscnt  que  l'aube,  comme  il  |)arait   par 
vos  Églises,  qui  n'ont  pas  rec^u  celle  coutu- 
me des  Grecs,  mais  de  l'Église  romaine  leur 
mère.   S'ils  marchent  revêtus  de  tuniques, 
cela  vient  d'un  de  vos  évoques,  je  ne  sais 
lequel,  qui  les  a  fait  marcher  ainsi.  Nous  ne 
(Usons  pas  Kyrie  eleison  comme  les  Grecs  : 
chi.'zeux,  lousie  disent  ensemble;  chez  nous, 
il  n'y  a  que  les  clercs,  le  peuple  répond  seu- 
lement, et  nous  disons  autant  de  fois  C/irisIe 
eleison,  que  les  Grecs  ne  disent  point  du  tout. 
Dans  les  messes  quotidiennes,  nous  passons 
sous  silence  certaines  choses  (jue  l'on  a  cou- 
tume de  dire,  et  nous  ne  disons  que  Kyrie 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

eleison  et  Christe  eleison,  en  le  chantant  avec 
plus  de  lenteur.  Nous  disons  l'Oraison  domi- 
nicale aussilijt  après  le  can.n,  parce  que  la 
coutume  des  apôtres  était  de  n'en  point  dire 
d'autre  pour  la  consécration  du  corps  et  du 
sang,  cl  il  m'a  paru  peu  convenable  d'y  dire 
une  prière  composée  par  un  savant,  et  de  ne 
pas  dire  celle  que  Xotre-Seigneur  a  composée 
lui-même.  Chez  les  Grecs,  fout  le  peuple  dit 
l'Oraison  dominicale;  chez  nous,  il  n'y  a  que 
le  prêtre.  En  quoi  donc  avons-nous  suivi  les 
coutumes  des  Grecs?  Nous  n'avons  fait  que 
rétablir  nos  anciens  usages,  ou  en  introduire 
de  nouveaux  que  nous  cioyons  utiles.  Faites 
entendre  toules  ces  choses,  soit  ;\  Calane,  soil 
à  Syracuse,  à  tous  ceux  que  vous  savez  avoir 
mui'muré  sur  nos  changements.  Pour  ce 
qu'ils  disent  de  l'Église  de  Constantinopie, 
personne  ne  doute  qu'elle  ne  soit  soumise  au 
Saint-Siège,  comme  l'empereur  et  l'évoque 
de  la  même  ville  le  déclarent  continuelle- 
ment; néanmoins,  si  cette  Eglise  on  quelque 
autre  a  quelque  chose  de  bon,  je  snis  prêt  à 
imiter  dans  le  bien  mes  inférieurs  mêmes  : 
ce  serait  une  sottise  de  faire  consister  la  pri- 
mauté dans  le  dédaiu  d'apineudre  ce  qui  est 
meilleur.  »  Saint  Grégoire,  en  disant  dans 
cette  lettre  que  les  apôtres  ne  disaient  point 
d'autre  prière  dans  la  consécration  que  l'O- 
raison dominicale,  n'exclut  pas  les  paroles 
de  l'Kvangite  qui  en  conliennent  l'institu- 
tion. On  voit  en  effet  par  saint  '  Justin,  qui 
touchait  au  siècle  des  apôtres,  que  dès  lors 
le  célébrant,  ayant  rc(,;u  le  pain  et  le  calice, 
faisait  de  longues  prièies,  qui  étant  ache- 
vées, lepeuplefidèle  s'ccriaitd'une  commune 
voix  :  Amen.  Amalaire  ',  dans  son  traité  des 
OlUces  ecclésiastiques,  avait  conclu  de  cet 
endroit  de  saint  Grégoire,  que  l'oraison  do- 
minicale sutlisait  pour  la  consécration  du 
corps  et  du  sang  Jésus-Christ  ;  mais  il  se 'ré- 
tracta deptjis. 

5.  La  lettre  i\  Secondin,  serviteur  de  Dieu  Rp'"'- 
et  reclus,  ne  peut  être  attribuée  à  saint  Gré- 
goire dans  l'état  où  elle  se  trouve  aujour- 
d'hui, et  on  ne  peut  douter  qu'elle  n'ait  été 
corrompue  cl  altérée,  ou  par  Isidore  Merca- 
tor,  auteur  des  fausses  décrélales,  on  par 
quelque  autre  écrivain  du  huitième  siècle.  Le 
style,  en  plusieurs  endroits,  en  est  dilTérent 
de  celui  de  saint  Grégoire,  et  il  y  a  des  dé- 
cisions qui  sont  toutes  contraires  à  la  doc- 


«  Justin.,  Apolog.  H,  png.  OS,  ly. 

•  Aiiinlur.,  IJli.  IV  De  Offic.  ecclcs.,  cup.  XX \f. 


Mabillou.,  in  Ordinein  Roman.,  ciip.  xn. 


E|.in 


[vu»  sitcLE.]      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT 

liino  conslanlc  de  ce  Père  et  des  itiicicns  con- 
ciles; telle  est  celle  qui  regarde  les  clercs 
qui  ont  fait  pt'iiilciice  aprî-s  leur  chute.  La 
UUde  (lit  '  c|ir<iii  |)(Uit  les  i<''tal)lir  dans  leurs 
fondions  et  dans  leur  î^iade;  saint  Giéjioire 
<''tublit  une  disciiilinecontiaiie  dans  un  grand 
nombre  de  ses  '  lettres,  et  on  ne  voit  nidle 
part  qu'il  se  soit  relàcht'  sur  ce  point.  Il  faut 
ajouter,  qu'en  pailant  jï  Secondin,  il  se  sert 
de  ces  ternies  :  l'otre  Sainteté.  Il  les  employait 
en  écrivant  à  des  évêqnes,  ou  à  des  abbés 
qui  étaient  lionorés  du  sacerdoce,  mais  non 
pas  en  écrivant  à  de  simples  moines,  ou  à 
des'  abbés  qui  n'étaient  pas  praires.  Cette 
foule  de  [lassaues  allégui's  pour  monlrerque 
l'on  peut  rétablir  les  cleics  après  leur  chute, 
lors(]u'ils  en  ont  fait  pénilencc,  est  entière- 
ment déplacée;  siiint  Grégoire  n'était  guè- 
res  en  état,  accablé  commme  il  l'était  des 
douleurs  de  la  goulte  lorsqu'il  écrivait  cette 
lettre,  del'alonger  par  des  cilalious  inutiles 
et  hors  de  propos.  Mais  ces  additions  ou  al- 
térations ne  doivent  pas  faire  rejeter  absolu- 
ment cette  lettre,  puisqu'elle  est  du  nombre 
des  cinquante-quatre  lettres  de  saint  Gré- 
goire que  Paul  Diacre  envoya  à  Adélard,  abbé 
de  Corbie.  Paul  lisait  dans  cette  lettre  l'eu- 
dioit  où  il  est  parlé  des  images  du  Sauveur 
et  de  la  sainte  Vierge,  Mère  de  Dieu.  Cet  en- 
droit fut  cité  aussi  *  dans  le  concile  de  Rome, 
et  par  Adrien  I"  dans  sa  lettre  à  Charlema- 
gne  pour  la  défense  du  second  concile  de 
-Xicée  ;  mais  il  manque  presque  dans  tous  les 
manuscrits. 
53.  6.  Les  clercs  de  l'église  de  Corne  faisaient 
diiSculté  de  quitter  le  schisme  pour  se  réu- 
nir, disant  que  le  Papeleur  était  si  peuaft'ec- 
tionné,  qu'il  soutirait  que  l'Église  romaine 
retînt  des  biens  qui  leur  appartenaient.  Saint 
Grégoire,  informé  de  leur  disposition  par 
Constantius  évêque  de  Milan,  lui  écrivit  que, 
quand  même  l'Église  romaine  aurait  un  droit 
acquis  sm-  les  fonds  de  terre  que  ces  clercs 
répétaient,  il  voulait  bien  les  leur  abandon- 
ner, pourvu  qu'ils  revinssent  à  l'unité  de 
l'Église.  —  Il  fit  donner  aux  juifs  de  Palerme 
le  prix  des  synagogues,  et  autres  bâtiments 
et  terrains  qu'on  leur  avait  eidevés  injuste- 
ment, avec  ordie  de  leur  restituer  leurs  li- 


GRÉGtURK  LE  GRAND,  PAPE.  815 

vres  et  leurs  ornements,  ne  croyant  pas  pou- 
voir leur  faire  rendre  leurs  synagogues  mô- 
mes, parce  que,  encore  qu'elles  subsistas- 
sent, ri'vèque  Victor  les  avait  consacn-es 
pour  servir  d'églises,  et  que  ce  qui  était  une 
fois  consacré,  ne  devait  plus  retourner  entre 
les  mains  des  juifs.  —  Li;  primai  de  la  pro-  Eiift.tPi 
vince  Bysacène  élant  accusé  d'un  crime, 
l'Empeieur  ordonna  par  deux  fois  qu'il  se- 
rait jugé  par  le  Pape,  suivant  les  lois  cano- 
niques; mais  Théodore,  maître  delà  milice, 
à  qui  le  primat  avait  d(jun(''  dix  livres  d'or, 
empêclia  l'exécution  de  l'ordre  du  prince. 
Saint  Grégoire,  voyant  qu'on  s'opposait  au 
jugement,  ne  voulut  pas  prtnulre  connais- 
saute  tle  l'allaiie.  L(!  primai  lui  imi  ('crivit,  et 
ne  fit  aucune  dilhculté  de  reconnaître  qu'il 
était  soumis  au  Saint-Siège  ;  sur  quoi  le  Pape  ' 
dit  dans  la  lettre  à  Jean  de  Syracuse  :  «  Je 
ne  sais  quel  évêque  n'y  est  pas  soumis,  lors- 
qu'il se  trouve  en  faute,  quoique,  hors  de  ce 
cas,  tous  les  évèques  soient  égaux  °  selon  les 
lois  de  rimmilité.  »  — 11  ordonna  aux  dé-  co. 
fenseuis  du  patrimoine  de  l'Église,  d'empê- 
cher que  les  évoques  ne  demeurassent  avec 
des  femmes,  si  ce  n'est  avec  celles  que  les 
canons  permettent  ;  c'est-à-dire  avec  la  mère, 
la  lanle,  la  sœur,  et  autres  qui  ne  peuvent 
être  suspectes,  et  de  les  exhortera  faire  su- 
bir la  même  loi  aux  clercs  de  leur  dépen- 
dance. Il  vent  toutefois  qu'ils  n'abandonnent 
point  les  femmes  qu'ils  pouvaient  avoir  épou- 
sées avant  leur  ordination,  mais  qu'ils  les 
gouvernent,  en  gardant  toutes  les  règles  de 
la  chasteté.  Illeurpropose  l'exemple  de  saint 
Augustin,  qui  ne  voulait  pas  même  de  pa- 
rentes dans  sa  maison;  mais  sans  les  obliger 
à  l'imiter. 

7.  Récarède,  roi  des  Goths,  en  Espagne,  c'- 
avait eu  dessein  de  faire  part  h  saint  Gré- 
goire de  la  conversion  de  ses  peuples,  qui 
étaient  ariens,  dans  le  temps  même  qu'elle 
arriva;  mais  ne  l'ayant  pu  que  plus  de  trois 
ans  après  à  cause  de  divers  incidents,  il  s'ex- 
cusa de  ce  retard  par  une  lettre,  en  lui  en 
voyant  des  présents  pour  l'église  de  Saint- 
Pierre,  qui  consistaient  en  un  calice  d'or  orné 
de  pierreries,  et  en  le  priant  de  l'honorer  de 
ses  lettres,  qu'il  appelle  des  lettres  d'or.  U 


'  Pag.  968. 

'  Lib.  IV,  Epist.  26  ;  lib.  V,  Epist.  3  eU  -,  Lib. 
Vil,  Epist.  12;  lib.  Vin,  Epist.  24. 

3  Lib.  11.  Epist.  36;  lib.  Itl,  Epist.  3;  lib.  VI, 
Epist.  48. 


*  Tom.  VI  Concil.,  pag.  1462,  et  tom.  VU,  pag.  9Gi. 

5  Si  qxM  culpa  in  episcopis  iuvenitur,  nescio 
quis  et  episcopus  subjectus  non  sit.  Cum  vero 
culpa  non  exiijit,  omnes  secundum  ralionem  hn- 
milUalis  œquales  sunt.  Episl.  59,  lib.  IX, 


âi6 


UISTOIIIE  GKNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Ei.i!l.l.O. 


lui  rccomoianda  aussi  saiul  Léaudre,  évêque 
de  Séville.  —  Saint  Gréfioire  euvoya  au  roi 
Récarcde  une  petite  clef  où  il  y  avait  ilu  1er 
des  chaînes  de  saint  Pierre,  et  une  croix  qui 
renfermait  du  Lois  de  la  vraie  croix  et  des 
cheveux  de  saint  Jean-Baptiste,  et  une  autre 
clef  de  saint  Pierre.  11  joi^rnit  à  ces  présents 
une  lellre,  dans  laquelle  il  relève  avec  de 
grands  éloges  le  zèle  que  ce  prince  avait 
montré  en  procurant  la  conversion  desGoths 
ses  sujets,  qu'il  dit  toutefois  être  l'ouvrage 
de  la  droite  du  Tiès-Haut.  Quelque  précieux 
que  fût  le  présent  qu'il  avait  fait  à  ^l'église 
de  Saint-Pierre,  saint  Grégoire  dit  qu'il  tirait 
son  principal  mérite  de  celui  qui  l'avait  fait, 
comme  te  fut  la  personne  d'ALel  qui  rendit 
ses  sacrifices  agréables  à  Dieu.  Il  loue  aussi 
Ilécarède  de  la  constitution  qu'il  avait  faite 
contre  les  juifs,  et  de  sa  fermeté  à  refuser 
une  grande  somme  d'argent  qu'ils  lui  offraient 
pour  en  obtenir  la  révocation;  mais,  crai- 
gnant que  l'eimemi  ne  prît  occasion  de  ces 
actes  de  vertu  pour  lui  inspirer  de  la  vanité, 
il  l'exhorte  à  conserver  avec  soin  les  senti- 
ments d'une  vraie  humilité,  et  d'y  joindre  la 
pureté  de  corps,  et  une  grande  modulation 
dans  le  gouvernement  de  ses  États.  Il  marque 
qu'il  envoie  le  pallium  ^  Léaudre,  autant  en 
considération  de  son  mérite,  que  de  l'an- 
cienne coutume;  à  (|uoi  il  ajoute  qu'il  n'avait 
point  demandé  à  l'Empereur  le  traité  fait  en- 
tre ses  prédécesseurs  et  l'empereur  Justinien, 
comme  il  l'en  avait  chargé,  parce  qu'il  savait 
que  les  archives  de  Gonstantinople  avait  été 
consumées  par  les  flammes,  et  qu'il  était  plus 
naturel  de  chercher  ce  traité  dans  celles  de 
son  royaume. 

8.  Sur  les  plaintes  qu'on  lui  avait  faites 
de  la  conduite  de  Lucilius,  évèquc  de  Malle, 
il  ordonna  k  Jean  de  Syracuse  de  prendre 
avec  lui  quatre  évèques,  d'examiner  ensem- 
ble les  accusations  formées  contre  Lucilius, 
et  de  le  déposer  de  l'épiscopat,  en  cas  qu'il 
fût  convaincu  de  crimes;  de  déposer  aussi 
les  prêtres  et  les  diacres  ses  complices,  et  de 
les  envoyer  dans  des  monastères  jkiui-  faire 
pénitence  ;  de  priver  de  la  communion  du 
corps  et  du  sang  de  Notre-Seigneur  les  la'i- 
ques  qui  auraient  particiiié  au  mèuK?  crime, 
cl  de  ne  leur  rendre  la  communion  qu'après 
une  pénitence  dont  il  le  laissa  maitie  de  ré- 
gler le  temps  et  la  manière.  Il  accepta  le  cas 
de  danger  do  mort,  auquel  il  ne  devait  point 
leur  refuser  le  vi.ilii|ii('.  —  11  (-crivil  à  \'i- 
lal,  dél'enscui'  de  Surdaignc,  de  luire  en  sor- 


E!>M.  (û. 


K|.iM.  C7, 
79,  SU,  81. 


te  que  personne  ne  se  mêlât  des  affaires  de 
monastères  d'hommes  ou  rie  filles,  à  l'excep- 
tion de  l'évèquo  du  lieu  ;  —  à  Janv'ier  de  Ca- 
gliari,  d'invectiver  fortement  contre  les  ido- 
lâtres, les  devins  et  les  magiciens,  et  en  cas 
qu'ils  persévérassent,  de  contraindre  par  les 
châtiments  corporels  ceux  d'entre  eux  qui 
étaient  esclaves,  h  se  corriger;  d'enfermer 
et  de  mettre  en  pénitence  ceux  qui  étaient 
de  condition  libre,  afin  que  la  crainte  des 
peines  fît  sur  eux  une  impression  salu- 
taire; —  à  Eusèbe  de  Thessaloni(]iie,  et  h 
quelques  autres  évèques  qui  étaient  invités 
à  se  rendre  à  Gonstantinople,  de  ne  consen- 
tir en  aucune  manière  â  ce  que  le  patriarche 
de  cotte  ville  prit  le  titre  d'é'vèque  universel, 
et  de  ne  rien  faire  dans  le  concile  qu'on 
pourrait  y  assembler,  qui  fut  préjudiciable  c'i 
quelqu'un,  ou  contraire  aux  anciens  canons. 
9.  Saint  Grégoire,  vaincu  par  l'importu- 
nité  de  l'exarque  Galliniqne,  qui  lui  écrivait 
continuellement  pour  Maxime  de  Salone, 
renvoya  cette  atl'aire  à  Marinicn  de  Ravenne, 
le  chargeant  d'examiner  si  l'ordination  de 
Maxime  était  canonique,  et  de  prendre  avec 
lui  à  cet  ell'el  Constanlius,  évèquc  de  Milan, 
à  qui  saint  Grégoire  en  écrivit  aussi.  Maxi- 
me, sachant  l'ordre  du  Pape,  se  rendit  i\  Ra- 
venne. Castoiius,  cartulaire  de  l'Église  ro- 
maine, s'y  rendit  avec  cette  commission  : 
«  Si  Maxime,  en  étant  requis  devant  le  corps 
de  saint  Apollinaire,  di'clare  par  serment 
qn'il  n'est  point  coupable  de  simonie  et  des 
autres  crimes,  et  s'il  fait  pénitence  de  sa  dé- 
sobéissance, vous  lui  donnerez,  pour  le  con- 
soler, la  lettre  que  nous  avons  écrite  â  son 
adresse.»  Gastoiius  ayant  déclaré  sa  com-  inan.fn. 
mission,  Maxime  se  prosterna  sur  le  pave  ma. 
au  milieu  de  la  ville,  en  criant  :  «J'ai  péchë 
contre  Dieu  et  contre  le  bienheureux  pape 
Grégoire;  »  et  diMucnra  ainsi  en  posture  de 
pénitent  pendant  trois  lieures.  L'exarque 
Calliuique,  Castorius  et  l'évéque  Mariuien  y 
accoururent  ;  et  Maxime,  s'étanl  relevé,  té- 
moigna encore  devant  eux  de  grands  senti- 
ments de  pénitence.  Un  le  mena  au  corps  de 
saint  Apollinaire,  où  il  jura  qu'il  était  inno- 
cent de  tout  ce  qu'on  lui  avait  reproché  tou- 
chant rimpurcté  et  la  simonie. —  Alors  le  Kr-i.  u.-.. 
caitnlaire  Castorius  lui  donna  la  lettre  du 
Pape,  par  laquelle  il  lui  rendait  la  commu- 
nion et  ses  bonnes  grâces,  et  lui  accordait  lo 
pallium,  à  la  charge  d'envoyer  quelqu'un 
pour  le  recevoir,  suivant  la  coiituino.  Ce  fut 
ainsi  que  se  termina  celle  ull'uire,  le  vingt- 


[vil"  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT  dlKOOIRE  LE  GRAND,  l'APK. 


817 


six  aoi\t  de  l'an  599.  Lo  Papo  avait  laissé  i\ 
Mariiileii  1(!  jngi'iiifMil  de  la  |)('Miil(<n(t'  (|iie 
Maxime  tlcvait  faire,  poiii-  avoii'  cûli'liri'  la 
uipsse  ëtnnt  exconimuiiio. 
T.t'it.M.  |Q_  L'abbc  Probiis  ,  cjuc  saint  Gr(''s.':oirc 
avait  envoyé  doimis  loii|,'temp.s  à  .\^ilul|iiic, 
l'di  lies  Loinbaids,  lit  avec  lui  un  traité  de 
paix  pour  (pielipie  temps,  c'est-à-dire  une 
trêve.  Tbéodorc,  maire,  ou  l'un  des  prinei- 
]iaiix  majiislrals  de  Ravenne,  y  avait  bean- 

'^ '■  coup  conij'ibué.  —  Saint  Grégoire  l'en  re- 
mercia ,  en  l'avertissant  qii'Ariulfe  n'avait 
point  juré  la  paix ,  comme  le  roi  l'avait 
promis,  mais  seulement  sous  une  con- 
dition qui  marquait  de  la  fraude  de  sa 
part.  Il  ajoutait  que  les  envoyés  du  roi  à 
Home  l'avaient  beaucoup  pressé  de  souscrire 
le  traité  ;  mais  que,  pour  n'être  pas  respon- 
sable des  infractions  qu'il  prévoyait,  et  de- 
meurer toujours  médiateur  entre  le  roi  et 
l'exarque,  il  s'en  était  excusé  en  otfrant  seu- 
lement de  faire  souscrire  un  évêque  ou  un 

">*•  archidiacre.  —  11  ordonna  à  Fortunat,  évê- 
que de  Naples,  d'empêclier  qu'à  l'avenir  on 
n'accoi'dàt  le  lop:ement  aux  soldats  dans  les 
monasl^res  de  filles,  et  de  travailler  effica- 
cement à  rétablir  la  concorde  entre  les  ci- 

"'^-  toyens  de  sa  ville  épiscopale.  —  Ayant 
appris  que  Séréuus,  évêque  de  Marseille, 
indiffné  de  voir  quelques  personnes  adorer 
les  images  de  son  église,  les  avait  brisées  et 
jetées  dehois,  il  loua  le  zèle  qu'il  avait  té- 
moigné en  empêchant  que  ce  qui  était  fait 
de  la  main  des  hommes  ne  fût  adoré;  mais 
il  le  re[)rit  d'avoir  brisé  ces  images,  qu'on 
met,  dit-il,  dans  les  églises,  afin  que  ceux 
qui  ne  savent  pas  lire,  voient  sur  les  murail- 
les ce  qu'ils  ne  peuvent  pas  apprendre  dans 
les  livres.  «  Vous  deviez,  ajoute-t-il,  les  gar- 
der, et  détourner  le  peuple  de  pécher  en 
adorant  la  peinture.  »  Sérénus,  doutant  que 
la  lettre  fût  de  saint  Grégoire,  en  négligea 
les  avis.  Il  ne  laissa  pas  de  marquer  au  Pape 
qu'il  l'avait  reçue,  et  d'entreprendre  de  jus- 
tifier ce  qu'il  avait  fait  à  l'égard  des  images. 

Lib.  XI,  —  Saint  Grégoire  lui  fit  réponse  que  l'abbé 
Cyriaque,  qui  lui  avait  rendu  sa  première 
lettre,  était  homme  hors  de  tout  soupçon  ; 
qu'il  était  inouï  que  jamais  aucun  évêque  eût 
brisé  des  images;  que  cette  considération 
seule  aurait  du  le  retenir,  afin  de  ne  pas  pa- 
raître seul  pieux  et  sage,  au  mépris  de  ses 
frères.  «  Mais  on  dit,  ajoute  le  Pape,  qu'en 
brisant  ces  images,  vous  avez  tellement  scan- 
dalisé votre  peuple,  que  la  plupart  se  sont 


Epi  M.  1,1 


séparés  de  votre  communion.  Il  nuit  les  rap- 
peler, et  leur  monder  par  ri'k'riture  sainte 
qu'il  n'est  pas  permis  d'ailorcr  ce  qui  est  fait 
de  main  d'homme  ;  puis  ajouter  que,  voyant 
l'nsagfî  légilime  des  images  tourné  en  adora- 
tion, vous  en  avez  été  indigné,  et  les  avez 
fait  briser.  Vous  ajouterez  :  Si  vous  voulez 
avoir  des  images  dans  l'église  pour  voire 
insiruclion,  comme  c'est  pour  cela  qu'on  les 
a  faites  anciennement,  je  vous  le  permettrai 
volontiers.  Ainsi  vous  les  adoucirez,  et  les 
ramènerez  h  l'union.  Si  quelqu'un  veut  faire 
des  images,  ne  l'en  empêchez  pas;  défendez 
seulement  do  les  adorer.  La  vue  des  histoi- 
res doit  exciter  en  eux  la  componction  ;  mais 
ils  ne  doivent  se  prosterner  que  pour  adorer 
la  sainte  Trinité.  Je  vous  dis  tout  ceci  par 
l'amour  que  j'ai  pour  l'Kglise  ;  non  pour  af- 
faiblir votre  zèle,  mais  pour  vous  encourager 
dans  votre  devoir.  » 

11.  Dans  les  Gaules,  on  conférait  les  or-  E,îei  w.. 
dres  sacrés  par  simonie,  eu  sorte  que,  sans 
examiner  les  mœurs,  l'on  ne  jugeait  di- 
gne que  celui  qui  offrait  de  l'argent,  et  qui 
pour  cela  même  en  était  plus  indigne.  H  y 
avait  aussi  des  ambitieux  qui  se  faisaient 
couper  les  cheveux  sitôt  qu'un  évêque  était 
mort,  et  qui  de  laïques  devenaient  tout  d'un 
coup  évoques.  Les  clercs  conlinuaient  en- 
core d'avoir  chez  eux  d'autres  femmes  que 
celles  qui  sont  exceptées  par  les  canons  ;  il 
semble  même  que  l'on  néghgeait  de  tenir 
chaque  année  des  conciles,  quoique  cela  eût 
été  ordonné  si  souvent.  Saint  Grégoire  se  plai- 
gnit de  tous  ces  abus  à  quatre  des  principaux 
évêques  de  ce  royaume,  Syagrius  d'Aulun, 
Éthérius  de  Lyon,  Virgilius  d'Arles  et  Didier 
de  Vienne.  Il  leur  repiésenta  que,  comme 
l'on  devait  amener  au  saint  autel  celui  qui, 
quoique  recherché,  s'en  éloignait,  il  en  fal- 
lait reléguer  bien  loin  celui  qui  s'empressait 
de  lui-même  d'y  monter  ;  que  ceux  (pii  achè- 
tent les  dignités  ne  songent  plus  à  celle  pa- 
role divine  :  Vous  avez  -reçu  gratuitement,  don-  ma»,  s, 
nez  (/rafuitement ;  que  le  troupeau  ne  peut  *' 
recevoir  aucun  avantage  de  celui  qui  ose 
prendre  la  place  de  mailie  avant  d'avoir  été 
disciple,  et  que,  quelque  mérite  qu'ait  un 
homme,  il  est  nécessaire  qu'il  soit  exercé 
aux  fonctions  ecclésiastiques  dans  tous  les 
ordres  diôërenis,  avant  d'être  promu  à  l'é- 
piscopat;  qu'en  vain  on  alléguerait  la  coutu- 
me, puisque  ce  qui  est  mauvais  doit  être  cor- 
rigé, et  non  pas  pris  pour  exemple;  que  l'on 
doit  maintenir  en  visrueur  les  canons  qui  dé- 


318  HISTOIRE  GÉNI'.RALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


fendent  aux  clercs  engagés  dans  les  ordres 
sacrés,  de  loger  avec  dos  feuinics  ûfran- 
gères.  Il  les  fait  souvenir  des  anciens  règle- 
ments touchant  la  tenue  annuelle  des  conci- 
les, et  veut  que,  toute  excuse  cessant,  ils 
s'assenibleut  à  la  diligence  de  Syagrius  et 
de  l'abbé  Cyriaque,  pour  remédier  h  tous 
ces  abus.  Le  Pape  charge  Syagrius  de  la  te- 
nue du  concile,  par  préférence  aux  évêqucs 
d'Arles  et  de  Lyon,  à  cause  de  l'allcction 
Eii.i.  108.  que  le  ^oi  et  la  reine  lui  portaient  ;  —  c'est 
pourquoi  il  lui  écrivit  en  particulier,  pour 
lui  recommander  le  soin  de  ce  concile.  Il  le 
remercia  en  même  temps  des  bons  otlices 
qu'il  avait  rendus  à  l'évèque  Augustin,  et  lui 
envoya  en  reconnaissance  le  palliumqu'il  de- 
mandait depuis  longtemps.  Pour  en  soutenir 
la  dignité,  il  donna  à  l'église  d'Autunle  pre- 
mier rang  dans  la  province,  sans  préjudice 
10'-  de  Lyon  qui  en  était  la  métropole.  —  lUécri- 
vit  à  Arégius,  évéque  de  Gap,  de  se  trouver 
au  concile  que  Syagrius  devait  assembler, 
eu  lui  accordant  par  la  même  lettre,  ainsi 
qu'à  son  archidiacre,  l'usage  des  dalmati- 

109.  ques.  —  Les  plaintes  qu'il  fait  dans  la  lettre 
à  la  reine  Brunehaut,  sont  ù  peu  près  les 
mêmes  que  dans  celle  qu'il  adressa  aux  qua- 
tre évéques.  Il  prie  cette  princesse  d'ordon- 
ner la  tenue  du  concile  pour  remédier  aux 
abus  des  ordinations,  et  de  donner  un  édit 
portant  défense  aux  juifs  d'avoir  des  cscla- 

i!o.  ves  chrétiens.  —  Sa  lettre  aux  rois  Thierry 
et  Théodebert  est  sur  le  même  sujet.  Il  s'y 
plaint  de  plus  de  ce  que  les  terres  de  l'Église 

iM.         payaient  des  tributs.  —  Didier,  évêque  de 

Vienne,  prétendait  que  le  Saint--Siége  avait     jj^re  dixième  des  Lettres  de  saint  Grégoire. 


fendent  de  mettre  un  év/^que  h  la  place  d'un 
autre,  de  son  vivant.  Il  n'y  avait  pas  eu  d'au- 
tre raison  de  mettre  uu  évoque  ;\  Turin  du 
vivant  d'Ursicin,  que  parce  qu'il  avait  été 
emmené  en  captivité  par  les  Lombards.  — 
La  lettre  qu'il  écrivit  à  saint  Léandre,  évê- 
que de  Séville,  est  une  réponse  à  celle  que 
saint  Grégoire  en  avait  reçue.  Il  en  fit  la  lec- 
ture en  présence  de  plusieurs  personnes  sa- 
ges et  vertueuses  qui,  touclié'es  des  senti- 
ments d'humilité  et  de  grandeur  d'âme  que 
saint  Léandre  y  faisait  paraître,  ne  purent 
lui  refuser  leur  amitié  et  leur  estime,  quoi- 
qu'elles ne  le  connussent  point  de  visage.  Le 
Pape  se  plaint  dans  la  sienne  du  fardeau  de 
l'épiscopat,  disant  qu'en  montant  au  dehors, 
il  était  déchu  au  dedans,  et  qu'accablé  de 
cette  dignité  onéreuse,  son  Ame  contrainte  à 
s'appliquer  aux  choses  terrestres,  était  pres- 
que réduite  .'i  la  stupidité.  U  la  finit  en  mar- 
quant qu'il  lui  envoyait  le  pallium,  pour  s'en 
servir  pendant  la  céléliration  des  saints  mys- 
tères. 

12.  Le  neuvième  livre  des  Lettres  de  saint 
Grégoire  finit  par  celle  que  saint  Golomban, 
abbé  de  Luxeuil,  lui  écrivit  au  sujet  des  dif- 
ficultés qu'on  lui  faisait  sur  le  jour  de  la  cé- 
lébration de  la  Pâque.  Nous  aurons  lieu  d'en 
parler  ailleurs.  L'auteur  de  la  Vie  de  sainte 
Salaberge  assure  que  saint  Grégoire  répon- 
dit aux  difficultés  que  saint  Colomban  lui 
avait  proposées.  Cette  réponse  n'est  pas  ve- 
nue jusqu'à  nous. 

§X. 


Cnnrll. 
Ltigd  0    can* 


Eflsl     121. 


116. 


autrefois  accordé  quelques  privilèges  à  son 
église,  entre  autres  l'usage  du  pallium.  Saint 
Grégoirefit  chercher  dans  les  arciiivesdo  l'é- 
glise dellome,  et  n'y  ayant  rien  trouvé,  il  ré- 
pondit A  Didier  qu'il  devait  lui-même  faire 
des  recherches  parmi  les  titres  de  la  sienne, 
et  en  cas  qu'il  trouvât  quelque  pièce,  la  lui  en- 
voyer pour  l'instruire  de  ses  droits. — Il  confir- 
ma, à  la  prière  de  Yirgilius,  évêque  d'Arles, 
les  privilèges  que  le  pape  Vigile  avait  autie- 
fois  accordés  à  un  monastère  d'hommes  situé 
dans  l'enceinte  de  cette  ville.  —  Il  s'en'ploya 
auprèii  des  deux  rois  Thierry  et  Théodebert, 
et  de  Syagrius  d'.\u(un,  pour  faire  resliluer 
à  Ursicin,  (';vêqu(!  de  'l'urin,  quelques  églises 
de  son  diocèse  qu'on  lui  avail  ôlt-es,  et  poui" 
le  faire  rétablir  lui-même  dans  son  siège, 
dont  il  avait  été  destilué  sans  aucun  sujet, 
et  coutiit  la  disposition  des  canons,  qui  dé- 


{ .  Saint  Grégoire,  après  avoir  fait  déposer 
Lucillus,  évêque  de  Malte,  chargea  Romain, 
défenseur  en  Sicile,  de  faire  resliluer  à  l'é- 
glise de  Malte  tout  ce  que  Lucillus  et  Pierre 
son  fils  en  avaient  emporté.  Il  permit  à  Tra- 
jan,  abbé  d'un  monastère  de  Syracuse,  choisi 
pour  remplacer  Lucillus,  de  mener  avec  lui 
quatre  ou  cinq  moines  de  sa  comnmnauté, 
pour  lui  servir  de  consolation  dans  uu  pays 
élranger,  mais  avec  l'agn'ment  de  l'évêquc 
diocésain,  c'est-à-dire  de  Jean  de  Syracuse; 
d'emmener  aussi  quelques  jeunes  esclaves 
qu'il  avait  achetés  de  son  argent,  et  d'em- 
porter les  livres  el  les  autres  choses  qu'il 
avait  ou  reçues  de  son  père,  ou  achetées  de- 
puis qu'il  n'était  plus  abbé,  voulant  cpie  loul 
ce  qu'il  avail  acquis  pendant  qu'il  était  abbé, 
demeurât  au  monastère,  à  qui  cela  apparie- 


Ël'Isl.  10, 


[vil-  SliiCLE.]       HUAI'IÏIVI 

iKiil  lie  tlioil.  Celte  lettre  csl  de  l'an  590,  in- 
<liction  111°.  —  La  môiiie  aiindc,  ayant  appris 
i|u'iin  évoque  lie  Sicile,  noniiné  Hasilc,  fai- 
sait les  fonctions  tic  |)rociir('ur  dans  le  bar- 
reau, où  il  s'occupait  ;\  défendre  des  cau- 
ses connue  l'un  des  dcu'niers,  ou,  selon  d'au- 
Ires,  qu'il  rendait  aux  prétoires  des  services 
tels  qu'on  pont  en  alleiulre  du  dernier  des 
otlicicrs,  ce  qui   Ic^  retulait  méprisalik;,  il  lui 
lit  ordonner  par  Romain,  défenseur,  de  quit- 
ter la  Sicile  dans  quatre  jours,  pour  l'empê- 
cher de  déshonorer  plus  longtemps  le  sacer- 
doce. —  11  obligea  des  religieux  du  terriloire 
de  Palermc  à  payer  les  tributs  qu'on  exi- 
geait d'eux. — Secondin,   évoque  de  Taor- 
niiue,  avait  (Hé  chargé  parle  Pape  d'exami- 
ner l'aU'aire  de  la  femme  d'un  nommé  Li'on, 
qui,  se  voyant  soupçonnée  d'adultère  par  son 
nuiri,  l'avait  quitté  et  avait  pris  l'habit  de  re- 
ligieuse, puis  é'iait  retournée  avec  son  mari, 
sans  avoir  auparavant  consulté  son  évèquo. 
Cette  femme  avait  en  cela  fait  trois  fautes  : 
la  première,  en  se  séparant  de  son  mari  sans 
aucune  formalité;  la  seconde,  en  changeant 
d'habit;   et  la  troisième,   en  revenant  avec 
son  mari  avant  que  Secondin  eût  examiné 
l'atl'aire,  suivant  les  ordres  qu'il  en  avait  re- 
çus de  saint  Grégoire.  Pour  la  punir,  il  la 
sépara,  elle  et  sa  famille,  de  la  communion. 
Sur  les  plaintes  qu'en  lit  le  mari ,  après  s'ê- 
tre assuré   par  serment  que  sa  femme  ne 
lui  avait  pas  été  infidèle,  le  Pape  ordonna  à 
Secondin  de  rendre  la  communion  A  la  fa- 
mille de  cette  femme,  et  de  ne  pas  tarder  à 
la  lui  rendre  à  elle-même. 

2.  Saint  Eidoge  d'Alexandrie  avait  mandé 
à  suint  Grégoire  que  des  moines  de  Pales- 
tine devaient  aller  à  Rome  pour  savoir  ce 
qu'il  pensait  de  l'hérésie  des  agnoïtes,  c'est- 
à-dire,  de  ceux  qui  attribuaient  l'ignorance  à 
Jésus-Christ,  abusant,  poLir  soutenir  leur  er- 
reur, des  passages  de  l'Kvangile,  où  il  parle 
comme  s'il  ignorait  quelque  chose  ;  et  que  le 
diacre  Anatolius,  son  nonci;  à  Constantino- 
ple,  l'avait  prié  de  lui  en  écrire,  et  de  lui 
demander  aussi  son  sentiment  sur  celte  doc- 
trine. Le  Pape  lui  répondit  que  ces  moines 
n'étaient  point  venus  à  Rome  ,  qu'ils  étaient 
allés  à  Conslautiuople,  et  qu'il  fallait  que  son 
interprète  eût  mal  l'eudu  le  sens  de  la  lettre 
d'Anatolius,  puisqu'il  avait  envoyé  à  cenonce 
depuis  longtemps  une  réfutation  de  l'hérésie 
des  agnoïtes  par  les  témoignages  des  Pères 
latins.  l\  lémt}igne  sa  satisfaction  à  saint Eu- 
ojje  de  l'unanimité  des  Pères  grecs  et  latins 


XLl.V.  —  SAINT  GRftOOIRl!;  LE  GRAND,  PAI'E. 


519 


dans  la  défense  d'une  même  doctrine,  et  dit 
qu'en  lisant,   dans  l'ouvrage  qu'il  lui  avait 
envoy(',  les  passages  des  Pères  grecs,  il  lui 
semblait   lire  ceux  des  Pères  latins,  tant  il  y 
avait  de  conformité  dans  leurs  sentiments,  et 
dans  la  façon  de  les  exprimer.  —  Dans  une 
autre  lettre,  il  confirme  les  réponses  que  le 
même  i)atriarche  d'Alexandrie  avait  df)nnées 
aux  passages  dont  les  agnoïtes  abusaient, 
savoir  :  que  Jésus-Christ  avait  cherché  des 
figues  hors  de  la  saison;  qu'il  dit  qu'il  igno- 
rait le  jour  et  l'heure  du  jugement  ;  qu'il  dit 
;\  la  Vierge  sa  mère  :  (tn'jj  n-t-il  entre  vous  et 
moi  ?  Mon  heure  n'est  pas  eneore  vernie  ;  qu'il 
disait,  parlant  du  Lazare  mort  :  Oh  l'aeez- 
voiis  m/s?Il  donne  sur  ces  passages  les  expli- 
cations de  saint  Augustin,  entendant  avec 
ce  Père,  par  le  figuier  sans  fruit,  la  synago- 
gue, qui  n'avait  que  les  feuilles  de  la  loi  : 
car,  en  prenant  ce  texte  à  la  lettre,  on  serai* 
obligé  de  dire  que  Jésus-Ghiist  avait  été  le 
plus  ignorant  de  tous  les  hommes,  qui  sa- 
vent fous  le  temps  auquel  le  figuier  porte 
son  fruit.  A  l'égard  de  l'heure  et  du  jour  du 
jugement,  Jésus-Christ  ne  le  connaissait  pas 
comme  homme,  mais  il  ne  pouvait  l'ignore)- 
comme  Dieu  consnbstantiel  ii  son  Père.  On 
peut  dire  encore  qu'il  parlait  en  cette  occa- 
sion à  la  manière  des  hommes,  comme  lors- 
que Dieu  disait  à  Abraham  :  Je  commis  main- 
Iciwnt  (/ne  vous  craignez  Dieu.  Voici  le  sens 
de  ces  paroles  à  sa  Mère  :  Qu'y  a-t-il  entre 
vous  et  moi?  Mon  heure  n'est  pus  eneore  venue  ; 
c'esf-iï-dire  :  «  Pour  le  miracle  que  vous  de- 
mandez de  moi,  je  ne  vousi-econnais  point, 
n'ayant  point  le  pouvoir  de  le  faire  dans  la 
nature  que  j'ai  reçue  de  vous;  mais  lorsque 
l'heure  de  ma  mort  sera  arrivée,  je  vous  re- 
connaîtrai pour  ma  mère,  parce  que  c'est  de 
vous  que  je  tiens  la  nature  qui  me  rend  mor- 
tel.» Si  l'on  infère  de  ces  paroles  de  Jésus- 
Christ  aux  sœurs  du  Lazare  :  Oh  l'avez-vous 
mis?   qu'il  ne   connaissait  pas  le   lieu   de 
sa  sépulture,  il  faudra  aussi  inférer  de  ce 
que  Dieu  dit  h  Adam  :  Adam,  ou  ètes-vous? 
que  le  Seigneur  ne  savait  pas  en  quel  lieu 
Adam  s'était  caché  après  son  péché.  Saint 
Grégoire  ajoute  que  les  agno'ïtes,  étant  dans 
les  mêmes  principes  que  les  nestoriens,  ne 
pouvaient,  sans  entrer  en  contradiction  avec 
eux-mêmes,  se  déclarer  pour  les  eutychiens, 
dont  ils  faisaient  en  effet  partie.  Il  dit  en- 
suite que  sa  santé  ne  lui  avait  pas  encore 
permis  de  répondre  à  l'objection  que  son 
nonce  à  f'.ousiantinople  prévoyait  qu'on  pour- 


Epl-t.3). 


Knrr.  xi, 

1',  ot  XIII, Hl'; 
.lo.-in.  II,  A,  et 
XI,  :!,, 


Gct!.22,12. 


520 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


rail  lui  faire  sur  ce  que  Jésus-Christ,  quoi- 
que éternel,  a  bien  voulu  se  soumettre  au 
temps,  et  qu'étant  immortel  il  s'est  soumis 
à  la  mort;  qu'ainsi  la  sagesse  de  Dieu  s'est 
chargée  de  notre  ignorance,  pour  nous  déli- 
vrer de  l'ignorance.  Il  avcitit  saint  Euloge 
qu'on  manquait  à  Rome  de  bons  interprètes 
grecs;  que  ceux  qui  y  étaient,  n'cnlendant 
pas  bien  le  sens,  voulaient  toujours  tradui- 
re mot  à  mot,  en  sorte  qu'on  avait  beaucoup 
de  peine  à  entendre  leurs  traductions. 
EpiM.  iî.  3.  Saint  Grégoire  ne  voulait  pas  que  l'on 
rompît  la  paix  avec  ceux  qui  refusaient  de 
recevoir  le  concile  de  Chalcédoiue;  mais, 
pour  ôter  fe  scandale  qu'ils  pouvaient  don- 
ner aux  fidèles,  son  sentiment  était  qu'on  les 
obligeât  d'anatliématiser,  entre  toutes  les  hé- 
résies, spécialement  celles  de  Sévère  et  de 
43.  Nestorius.  —  Lorsque,   dans  un  monastère 

de  filles,  il  n'y  en  avait  point  de  capable  pour 
être  alibesse,  il  en  envoyait  d'ailleurs,  à  la 
Cl.  demande  de  l'évêque  diocésain.  —  11  ne  fai- 

sait point  d'union  de  monastères  de  ditférents 
diocèses,  sans  avoir  aussi  l'agrément  des 
c;.  évèques  diocésains.  —  De  son  temps,  le  pcu- 

l)le  avait  encore  droit  de  sull'rage  dans  l'é- 
lection des  évèques;  mais  il  se  croyait  lui- 
même  en  droit  d'exclure  de  l'épiscopat  les 
sujets  qu'il  en  jugeait  indignes,  ou  parce 
qu'ils  ne  vivaient  pas  assez  chastement,  ou 
parce  qu'ils  étaient  usuriers,  ou  pour  d'au- 
to- très  défauts.  —Eu  .599,  l'Italie  fut  affligée 
de  la  peste,  mais  elle  fit  de  plus  grands  ra- 
vages encoie  dans  r,\friqiie.  11  écrivit  sur 
cela  à  Dominique,  évêque  de  Carthage,  pour 
lui  représenter  que  Dieu  ne  nous  punit  par 
ces  sortes  de  fléaux  temporels,  que  pour 
nous  faire  mériter  par  notre  patience  des 
biens  éternels.  Il  veut  qu'il  se  serve  de 
ce  motif  pour  consoler  les  peuples  frappés 
"•  de  cette  plaie.  —  Informé  que  les  termes 
durs  dont  il  s'était  servi  en  reprenant  Op- 
portuuus  pour  certaines  fautes  qu'il  avait  fai- 
tes, l'avaient  jeté  dans  la  tristesse  et  dans 
l'accaMemenl,  il  essaya  d'apporter  quelque 
lénilifrt  sa  douleur,  en  l'assurant  qu'il  ne  lui 
avait  parlé  ainsi  que  dans  la  vue  de  son  sa- 
lut, et  non  par  aucun  sentiment  d'aigreur. 

§XL 
Livre  onzième  des  Lettres  de  saint  Grégoire. 

Après  la  mort  de  Conslantiiis,  évOque  de 
Milan,  arrivi'e  l'an  fiOO,  le  clergé  et  le  peu- 
ple de  cette  ville  élinent  pfiurlui  succéder  le 
diacre  Dcusdedif.  Saint  Grégoire  ne  connais- 


sait que  son  visage ,  et  non  pas  ses  moeurs. 
Une  consentit  donc  à  son  élection,  que  dans 
la  supposition  que  sa  vie  passée  était  exemple 
de  reproches  qui  le  pussent  exchue  selon 
les  canons,   et  qu'il   était    propre  pour  le 
gouvernement  et  le   maintien  de  la    disci- 
pline. Mais  il  assura  ceux  de  Milan  qu'il  ne 
consentirait  jamais  à  l'ordination  de  celui 
que  les  Lombards  avaient  i  hoisi,  parce  qu'il 
ne  croyait  pas  que  l'on  pût  donner  à  saint 
Ambroise  un  successeur  élu  par  des  héré- 
tiques ;  qu'au  reste  ils  n'avaient  rien  à  crain- 
dre de  ces  barbares,  puisque  les  terres  de 
l'église  de  Milan  n'étaient  point  sous  la  do- 
mination des  ennemis,  mais  en  Sicile,  et  en 
divers   autres  pays   sujets   de  l'Empire.  — 
Pour  éviter  tout  relardeiueiit,  il  envoya  aus- 
sitôt le  notaiie  Pantaléon  avec  la  commis- 
sion de  faire  sacrer  Deusdedit.  Celte  lettre  et 
les  suivantes  sont  de  l'an  (>()0,  indiction  iv*. 
—  La  lettre  à  Conon,  nouvellement  élu  abbé 
de  Lérins,  est  une  instruction  sur  la  manière 
dont  il  devait  gouverner  ce  monastère.  «  Que 
les  bons,  lui  dit-il,  vous  trouvent  doux,  et  les 
méchants  sévère;  gardez  un  tel  ordre  dans 
vos  corrections,  qu'il  paraisse  que  vous  aimez 
les  personnes,  et  que  vous  haïssez  les  vices.de 
peur  que,  si  vous  prétendez  agir  autrement, 
vos  corrections  ne  se  changent  en  cruauté, 
et  que  vous  ne  perdiez  ceux  que  vous  vou- 
lez corriger,  et  qu'en  enfonçant  le  fer  trop 
avant  dans  la  plaie,  vous  ne  nuisiez  à  celui 
que  vous  vous  empressez  de  soulager.  Mêlez 
dans  vos  corrections  la  sévérité  avec  la  dou- 
ceur, afin  que  l'amour  détermine  les  bons  \ 
se  tenir  sur  leurs  gardes,  et  que  la  crainte 
apprenne  aux  méchants  à  aimer  leur  de- 
voir. ))  — Il  écrivit  au  président  de  Sardaignc 
de  travailler  avec  l'évêque  Victor  à  la  con- 
version des  barbares  qui  restaient  dans  cette 
île,  et  à  leur  procurer  le  baptême. — Un  lec- 
teur de  l'église  de  Cagliari,  nommé  Kpi- 
phane,  s'était  proposé  de  faire  de  sa  maison 
un   monastère  d'hommes.  Janvier,    évêque 
de  cette  villi\  s'y  opposa,  parce  que  colle 
maison  était  contiguë  A  un  monastère  de  fil- 
les. Saint  Grégoire  l'approuva  dans  son  op- 
position; mais  il  trouva  bon  que,  les  filles 
étant  transférées  ailleurs,  les  moines  pris- 
sent leur  place,  ou  s'établissent  dans  un  au- 
tre monastère  devenu  viicant. 

2.  Les  nouvelles  qu'il  reçut  de  la  conver- 
sion des  .\nglais  lui  causèrent,  ainsi  qu'à 
tous  les  fidèles  de  la  ville  de  Home,  une  joie 
inexprimable.  Il  en  félicila  .\ngustin,  par  qui 


Ei>l!l.  3. 


[vif  Riî:ci.E.]      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT  GRliGOlilE  Li-:  GliAND,  PAPE. 


521 


Flcn;», 


Dieu  avait  op(5ré  cette  meiveillc;  mais,  clc 
crainte  que  la  graiulciir  des  miracles  faits 
par  son  niinistèi'e,    dans  la   conversion  do 
ictle  nation,  ne  lui  fut  une  occasion  de  s'ou- 
l.lier,  il  le  lit  ressouvenii'  que,  quand  les  dis- 
ciples disaient  à  leur  divin  Maître  :  Scigm-xr, 
en  votre  nom  les  dcmonsmémes  noitssont  soumis, 
il  leur  réiKuulit  :  i\c  vous  en  rejouissez  jios,  ré- 
jouissez-vous jjlulôt  de  ce  que  vos  noms   sont 
écrits  au  ciel.  «  Les  noms  de  tous  les  élus  y 
sont  écrits,  néanmoins  ils  ne  font  pas  tous 
des  miracles;  or,  les  disciples  de  la  vérité  ne 
doivent  pas  se  réjouir  d'un  bien  passager  et 
particuliei'  pour  eux,  mais  du  bien  qui  leur 
est  commun  avec  tous,  et  dont  ils  se  réjouis- 
sent éterucllcmont.  C'est  pour  cela  que  le 
Seigneur  rappelle  ses  disciples,  de  la  joie 
[iarticulière  que  leur  causait  le  don  des  mi- 
racles, il  la  joie  éternelle  en  leur  disant  : 
/ié/ouissez-vous  de  ce  que  vos  noms  sont  écrits  au 
ciel.  »  Saint  Grégoire  veut  donc  que,  tandis 
que  Dieu  agissait  ainsi  au  dehors  par  le  mi- 
nistère d'Augustin,  il  se  jugeât  lui-même  sé- 
vèrement au  dedans,  et  qu'il  s'appliquât  à 
se  bien  connallre  lui-même.  «  Si  vous  vous 
souvenez,  lui  dit-il,  d'avoir  oITensé  Dieu  par 
la  langue  ou  par  les  œuvres,  ayez  toujours 
ces  fautes  présentes  à  l'esprit,  pour  répii- 
mer  la  gloire    qui   s'élèverait    dans    votre 
cœur,  et  songez  que  ce  don  des  miracles  ne 
vous  est  pas  donné  pour  vous,  mais  pour 
ceux  dont   vous   devez   procurer  le   saint. 
Moïse,  ce  grand  serviteur  de  Dieu,   étant, 
après  tant  de  miracles,  arrivé  à  la  Terre  pro- 
mise. Dieu  lui  reprocha  la  faute  qu'il  avait 
faite  trenle-huit  ans  auparavant,  en  doutant 
s'il  pourrait  tirer  de  l'eau  d'une  roche.  Com- 
bien donc  devons-nous  trembler,  nous  qui 
ne  savons  pas  encore  si  nous  sommes  élus? 
Vous  savez  ce  que  dit  la  vérité  même  dans 
I,  riOvangilc  :  Plusieurs  me  viendront  dire  en  ce 
jour-là  :  Seigneur,  nous  avons  prophétisé  en 
votre  nom  ;  nous  avons  chassé  les  démons  et  fait 
plusieurs  miracles;  et  je  leur  déclarerai  que  je 
ne  les  ai  jamais  connus.  Je  vous  parle  ainsi 
pour  vous  humilier;  mais  votre  humilité  doit 
être  accompagnée  de  confiance  :  car,  tout  pé- 
cheur que  je  suis,  j'ai  une  espérance  certai- 
ne (jue  tous  vos  péchés  vous  seront  remis, 
puisque  vous  avez  été  choisi  pour  procurer 
la  rémission  aux  autres,  et  donner  au  ciel  la 
joie  de  la  conversion  d'un  si  grand  peuple,  n 
Rien  ne  prouve  mieux  la  vérité  des  miracles 
d'Augustin,  que  ces  avis  si  séiieux  de  saint 
•'•  Grégoire.  — Le  Pape  avait  appris  de  la  bou- 


che du  prêtre  Laurent  et  du  moine  Pierre,    "•'  -^*',\!' 

^  ^      loin.       Vlll, 

qui  étaient  revenus  d'Angleterre  à  Rome,  les   i"«-  ■'"• 
soulagements  et  les  marques  d(!  cliarité  que 
Ik'itlic  ou    AldiJjerge,    reine   d'Angleterre, 
avait  doiMiés  à  Augustin.  Il  l'en  remercia  par 
une  lettre,  où  il  la  compare  à  sainte  Hélène,      •'■i'"  -"'• 
mère  de  Constantin,  «  dont  Dieu  s'est  servi, 
dit-il,  pour  exciter  les  Romains  à  la  foi  chré- 
tienne, comme  nous  avons  conliance  qu'il  se 
servira  de  vous  pour  faire  sentir  les  elfets  de 
sa  miséricorde  aux  Anglais.»  Berthc,  comme 
on  l'a  déjà  remanpié,  était  française,  et  fille 
du  roi  Gliérébert.  Elle  n'avait  épousé  Ëthel- 
bert,  qui  était  païen,  qu'à  condition  de  con- 
server le  libre  exercice  de  sa  religion,  et  elle 
avait  emmené  avec  elle  un  évèipie  nommé  Lui- 
dard.  Elle  n'avait  pas  d'aboid  travaillé  à  la 
conversion  de  son  mari;  mais  elle  y  travailla 
ensuite  efficacement   avec  Augustin,  parce 
qu'elle  était  très-instruite.  Saint  Grégoire  l'ex- 
horte à  afl'ermir  Éthelbert  dans  le  zèle  de  la 
religion,    et  à  réparer  ainsi  le  long  temps 
qu'elle  avait  différé  de  travailler  à  le  conver- 
tir.   Il  la  prie  encore  d'exciter   son  époux 
à  procurer  l'entière  conversion  de  ses  su- 
jets, en  l'assurant  que  ses  bonnes  œuvres 
étaient  non-seulement  connues  à  Rome,  oîi 
l'on  priait  avec  ardeur  pour  sa  conservation, 
mais  en  divers  lieux,  età  Constautinople,  où 
on  les  avait  portées  jusqu'aux  oreilles  de 
l'Empereur. 

3.  Quoiqu'accablé  d'infirmités,  il  pensait  à  n. 
soulager  les  douleurs  de  ses  amis.  Ayant  donc 
appris  que  Marinien,  évêque  de  Raveune, 
l'un  des  moines  de  son  monastère,  qu'il  avait 
retenus  auprès  de  lui  dans  le  commence- 
ment de  son  pontificat,  était  malade  d'un  vo- 
missement de  sang,  il  fit  consulter  les  plus 
habiles  médecins  de  Rome,  et  lui  envoya  leur 
avis  par  écrit.  Ils  ordonnaient  tous  le  repos  et 
le  silence.  Ni  l'un  ni  l'autre  ne  paraissant 
possibles  tant  que  Marinien  demeurerait  à 
Ravenne,  saint  Grégoire  lui  écrivit  de  com- 
mettre des  personnes  qui  pussent  célébrer 
les  messes,  prendre  soin  de  l'évêché,  exer- 
cer l'hospitalité,  gouverner  les  monastères, 
et  de  venir  à  Rome  avant  l'été,  Ini  offrant  en 
même  temps  de  prendre  soin  de  sa  santé,  au- 
tant qu'il  en  serait  capable  :  «  Car,  ajoute- 
t-il,  les  médecins  disent  que  l'été  est  fort 
contraire  à  votre  maladie,  et  il  est  très-im- 
portant que  vous  retouiniez  en  santé  à  votre 
église;  ou,  si  Dieu  vous  appelle  à  lui,  que  ce 
soit  entre  les  mains  de  vos  amis.  Si  vous  ve- 
nez, amenez  peu  de  gens,  parce  que  vous 


322 


HISTOraE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


demeurerez  avec  moi  dans  l'évèdié,  et  que 
cette  église  vous  fournira  les  secours  néces- 
saires. Au  reste,  je  ne  vous  dissuade  pas, 
mais  je  vous  défends  expressément  d'entre- 
prendre de  jeûner,  les  médecins  étant  d'avis 
que  le  jeûne  est  très-contraire  à  ce  mal  ;  je 
vous  le  permets  seulement  cinq  fois  l'année 
ou  aux  prandes  solennités.  Vous  devez  aussi 
vous  abstenir  des  veilles,  et  faire  prononcer 
par  un  autre  les  prières  que  l'on  a  coutume 
de  réciter  en  bénissant  le  cierge  pascal  dans 
l'église  de  llavcnne,  et  commettre  aussi  à 
quelque  autre  les  explications  de  l'Évangile, 
Ef il, <o.  que  les  évèques  font  à  Pâques.  —  Dans  une 
autre  lettre, 'saint  Grégoire  lui  défend  encore 
de  jeûner;  mais,  au  lieu  que  dans  la  lettre 
précédente  il  avait  restreint  à  cinq  jours  de 
l'année  la  permission  qu'il  lui  donnait  de 
jeûner  quelquefois,  il  lui  accorde  dans  celle- 
ci  un  ou  deux  jours  par  semaine,  en  cas  que 
sasanlé  fût  rétablie. 

37  4.  En  Sicile,  lorsqu'il  arrivait  que  quel- 

qu'un eût  une  difficulté  avec  un  clerc,  le  dé- 
fenseur romain  la  faisait  terminer  h  son  tri- 
bunal. C'était  agir  contre  la  disposition  des 
canons;  c'est  pourquoi  saint  Grégoire  lui  or- 
donna de  laisser  aux  évoques  la  connaissance 
des  aliaircs  des  clercs,  ou  pour  les  décider 
eux-mêmes,  ou  pour  commellii;  des  juges; 
lui  laissant  toutefois  la  liberté  d'èlru  média- 
teur, lorsqu'un  clerc  ou  un  laïque  aurait  un 

il.  procès  avec   l'évêque.  —  Il   se    plaignit   à 

Rusticienne  patrice,  de  ce  qu'en  lui  écrivant 
elle  se  qualifiait  plusieurs  fois  de  sa  ser- 
vante. «  Comment,  lui  dit-il,  pouvez-vous 
vous  appeler  ma  servante,  vous  dont  j'étais 
vassal  avant  l'épiscopat,  et  qui,  par  les  char- 
ges de  l'épiscopat,  suis  devenu  le  serviteur 
de  tous?  Je  vous  prie,  au  nom  de  Dieu  tout- 
puissant,  que  ce  terme  de  servante  ne  se 
trouve  plus  dans  les  lettres  que  vous  m'écri- 
vez. A  l'égard  des  présents  que  vous  avez 
envoyés  à  saint  Pierre,  ils  ont  été  reçus  en 
présence  de  tout  le  clergé,  et  suspendus  en- 
suite dans  l'église.  Je  vois  par  vos  lettres 
que  vous  souhaitiez  qu'on  les  portât  en 
procession  à  l'église  de  Saint -Pierre  en 
chantant  des  litanies;  cela  ne  s'est  point 
fait,  parce  que  vos  présents  sont  arrivés  avant 
votre  lettre.  »  Celaient  des  voiles  pour  l'or- 
nement des  autels,  et  pour  couvrir,  ce  sem- 
ble, la  boite  où  l'on  conservait  le  corps 
de  Jésus-Christ.  Il  la  remercie  des  aumô- 
nes qu'elle  avait  envoyt'cs  au  monastère 
de  Suinl-André,  qui  était,  dit-il,  aussi  bien 


gouverné,  que  si  cet  apôtre  en  ciil  été  abbé. 
5.  Saint  Grégoire,  ayant  appris  quelque 
temps  après  que  Théoctiste  patrice,  so^ur  de 
l'Empereur,  était  accusée  de  quelques  er- 
reurs, et  qu'elle  sentait  vivement  un  repro- 
che si  injuste,  lui  écrivit  une  lettre  de  con- 
solation, où  il  lui  représente  que,  quand  ou 
a  dans  le  ciel  le  témoin  de  sa  vie,  on  ne  doit 
pas  craindre  le  jugement  des  hommes  sur  la 
terre  ;  que  les  bons  ne  peuvent  éviter  ici-bas 
d'être  mêlés  avec  les  méchants,  et  que,  com- 
me plusieurs  louent  les  bons  au  delà  de 
leurs  mérites.  Dieu  pennet,  pour  les  humi- 
lier, que  les  méchants  les  calomnient.  "Vous 
ne  devez  donc,  ajoute-t-il,  vousenaflfligeren 
aucune  manière;  mais,  parce  que  vous  pou- 
vez faire  cesser  ce  murmure,  je  crois  que  ce 
serait  un  péché  de  le  négliger.  Nous  devons 
mépriser  le  scandale  de  ceux  que  nous  ne 
pouvons  contenter;  mais,  quand  nous  le  pou- 
vons arrêter  sans  pécher,  nous  le  devons.  »  II 
conseille  à  Théoctiste  d'appeler  en  secrel  les 
principaux  de  ceux  qui  murmuraient  contre 
elle,  de  leur  rendre  raison  de  sa  créance,  et 
d'anathématiser  devant  eux  les  errcuis  qu'ils 
lui  imputaient.  «  S'ils  croient,  lui  dit-il,  que 
votre  analhème  n'est  pas  sincère,  vous  devez 
même  y  ajouter  le  serment,  sans  croire  cette 
satisfaction  indigne  de  votre  rang,  puisque 
nous  sommes  tous  frères,  créés  et  rachetés 
par  un  même  Maître.  Saint  Pierre  ayant  reçu 
le  pouvoir  délier  et  de  délier,  et  de  faire  des 
miracles,  n'opposa  point  son  autorité  à  ceux 
qui  se  plaignaient  de  ce  qu'il  était  entré  chez 
Corneille,  et  ne  leur  dit  point  que  ce  n'était 
point  aux  ouailles  à  reprendre  leur  pasteur; 
mais  il  les  apaisa  en  leur  rendant  humble- 
ment raison.  Si  le  prince  des  apc'ities,  qui 
opérait  tant  de  prodiges  et  de  miracles,  en  a 
agi  ainsi,  ^  plus  forte  raison,  nous  qui  som- 
mes pécheurs,  devons-nous,  lorsqu'on  nous 
reprend,  apaiser  ceux  qui  nous  reprennent, 
en  leur  rendant  avec  humilité  raison  de  no- 
ire conduite.  Quand  j'étais  à  Constanlinople, 
jilusicurs  (ju'on  accusait  sur  de  tels  chefs  ve- 
naient souvent  me  trouver;  or,  je  proleste 
eu  ma  conscience  que  je  n'ai  jamais  rien 
trouvé  en  eux  des  erreurs  (|u'on  leur  impu- 
tait :  c'est  pourquoi  je  m(''prisais  ces  dis- 
tours, je  recevais  familièrement  ces  person- 
nes, et  m'appliquais  à  les  défendre  contre 
leurs  persécuteurs.  On  disait  qu'ils  rom- 
paient les  niiiriagessous  prétexte  de  religion  ; 
qu'ils  soutenaient  que  le  baplènic  u'ôlait  pas 
eutièrcmcnl  les  péchés,  cl  que,  si  quelqu'un 


E|i<i.  a. 


CHAPITRE  XUX.  —  SAINT  GRKGOIRK  LE  GRAND,  PAPE. 


[VTI'"  SlfccI.E.J 

liiisail  pdnitcnce  pendant  trois  ans,  il  pou- 
vait ensuite  s'abanilonncr  au  poché;  eiiliu, 
que  si  on  les  conliaii;nait  d'anatliémaliser 
(piolqu'une  de  ces  ciTOurs,  ils  prétendaient 
(jne  cet  anatli^iue  ne  les  oMigCiiit  pas.  S'il  y 
a  des  gens  ilaiis  ces  sentiments,  il  est  certain 
qu'ils  ne  sont  pas  chrétiens;  je  les  anathé- 
matise,  moi,  et  tous  lesévèqucs  catholiques, 
et  toute  l'Eglise,  parce  qu'ils  pensent  et  par- 
lent contre  la  vérité.  »  11  réfute  toutes  ces 


.^23 


en  avait  reçue.  11  y  loue  la  l'ii  d'IIézychius, 
qui  lui  i)araissait  si  pure,  qu'il  ne  doutait 
pas  qu'il  ne  lût  du  nombre  de  ceux  qui  tra- 
vaillent a  l'édification  de  l'Eglise  figurée 
par  l'arche  de  iNoé.  Il  le  loue  encore  de  ce 
qu'il  n'admettait  dans  les  ordres  sacrés  (jue 
lies  personnes  oithodoxes;  mais  il  en  rend 
grâces  à  Dieu  et  h  l'empereur  Maurice,  si 
zélé  pour  la  foi  catholique,  que  les  héréti- 
ques n'osaient  ouvrir  la  bouche  sous  son  rè- 


errem-s  l'une    après   l'auli-e,  montrant  par      gne.  La  simonie  ne  laissait  pas  d'avoir  grand 

1»  .  .-  »  _  _  -i  '     1  _  1>M  ,.  •! 1  - ; .. -I    :_  ....    ,1..  ....   l..r.    .<rt-Kf.rto   /-VAT'îaMf     r»t"i    1  'r»n  flicnit 


l'autorité  de  l'Kcriture  que  le  mariage  est  in- 
dissoluble, ce  qui  n'empêche  pas  que  les 
deux  parties  ne  puissent  d'un  commun  con- 
sentement faire  profession  de  continence; 
d'où  vient  que  l'on  a  quelquefois  pris  des 
hommes  mariés  pour  leur  coidler  le  gouvcr 


cours  dans  les  églises  d'Orient,  où  l'on  disait 
que  i^eisonne ne  parvenait  aux  ordres  sacrés 
qu'en  donnant  de  l'argent.  Saint  Grégoire 
conjure  Hésychius  de  retrancher  cet  abus, 
s'il  avait  lieu  i  Jérusalem,  et  d'oll'rir  à  Dieu 
cette  marque  de  son  zèle  pour  prémices  d  • 


nement  de  l'Église.  Il  prouve  de  même  qu'il      son  épiscopat.  Il  l'e.xhorte  encore  à  user  de 


n'y  a  aucun  péché  qui  ne  soit  eilacé  par  le 
baptême,  figuré  par  la  mer  Rouge,  où  tous 
les  Égyptiens  furent  engloutis  sans  qu'il  en 
échappât  un  seul  ;  que,  s'il  était  permis  après 
trois  ans  de  pénitence  de  s'abandonner  au 
Ad  Gain,  péché,  saint  Paul  ne  dirait  pas  :  Celui  qui 
sème  dans  sa  chair,  recueillera  de  la  cliair  la 


toute  sa  prudence  pour  apaiser  certaines  dil- 
ficultés  qui  naissaient  de  temps  en  temps  en- 
tre son  église  et  celle  de  Néas.  Il  y  a  un  en- 
droit dans  cette  lettre  où  saint  Grégoire  sem- 
ble dire  que  celui  '  qui  est  ordonné  par  si- 
monie, ne  l'est  pas  véritablement  ;  mais  ce 
n'est  pas  là  sa  pensée.  Il  veut  dire  seulement 


M. 


n,p.u..i,  con-uption  et  la  mort;  et  saint  Piene  :  //  leur  que  cette  ordination  n'est  point  légitime,  et 

est  arrivé  ce  qu'on  dit  d'ordinaire  /lar  un  pro-  que  celui  qui  est  promu  de  cette  sorte  peut 

verbe  véritable  :  Le  chien  est  retourné  à  ce  qu'il  toujours  être  déposé,  quand  même  il  aurait 

avait  lui-même  vomi,  et  le  pourceau,  après  avoir  joui  plusieurs  années  de  l'honneur  de  l'cpis- 

été  lavé,  est  retourné  dans  la  boue  pour  s'y  vau-  copat.  —  11  écrivit  à  Anatole,  son  nonce  à 

trer  de  nouveau.  11  ajoute  :  on  ne  peut  douter  Gonstautinople,  qu'il  ne  fallait  point  déposer 

qnela  vertu  de  pénitence  ne  soit  très-clUcace  Jean,   évêque  de  la  première  Justinienne,  à 

contre  le  péché;  mais  ce  n'est  que  quand  elle  cause  qu'un  mal  de  tète  le  mettait  hors  d'é- 


eststable  et  persévérante,  puisqu'il  est  écrit  : 
I  ^2.  Celui  qui  persévérera  jusqu'à  la  fui,  sera  sauvé.  » 
11  s'arrête  peu  à  réfuter  la  troisième  erreur, 
parce  qu'il  fallait  n'être  pas  chrétien,  pour 
croire  qu'où  pouvait  par  de  vaines  subtilités 
éluder  la  foi'me  des  anathèmes  de  l'Église. 
.\ussi  répètc-t-il  qu'il  n'a  trouvé  personne  à 
Gonstautinople  qui  soutint  ces  erreurs.  <iJe 
ne  crois  pas  même,  ajoute-t-il,  qu'il  y  en  eût, 
car  je  les  aurais  reconnus;  mais  plusieurs 
fidèles  brûlent  d'un  zèle  indiscret,  et  sou- 
vent font  des  hérésies  en  poursuivant  de  pré- 
tendus hérétiques.  C'est  pourquoi  il  faut 
avoir  égard  à  leur  faiblesse,  et  les  apaiser 


tatde  faire  ses  fonctions;  mais  lui  donner  un 
administrateur,  la  maladie  n'étant  une  rai- 
sou  de  déposition,  ni  pour  cet  évéque,  ni 
pour  qui  que  ce  fût.  —  Agathosa  s'était 
plainte  a  saint  Grégoire  de  ce  que  son  mari 
s'était  fait  moine  sans  son  consentement  dans 
le  monastère  de  l'abbé  Urbicus.  Pour  s'as- 
surer de  la  vérité  du  fait,  le  Pape  commit 
Adrien,  notaire  de  Palerme,  avec  ordre  de 
l'informer  si  cette  femme  n'avait  pas  consenti 
à  la  retraite  de  son  mari,  et  si  elle  n'avait  pas 
promis  elle-même  de  changer  d'état.  Dans  ce 
cas,  il  veut  que  le  mari  reste  dans  le  monas- 
tère, et  que  l'on  contraigne  la  femme  ii  ac- 


par  raison  et  par  douceur.  Us  sont  sembla-      complir  sa  promesse.  Il  veut  encore  qu'il  soit 

permis  au  mari  de  persévérer  dans  l'état  mo- 
nastique ,  si  sa  retraite  a  été  précédée  du 
crime  de  fornication  de  la  part  de  sa  femme  ; 
mais,  dans  la  supposition  que  la  femme  n'au- 


bles  à  ceux  dont  saint  Paul  disait  :  Je  leur 
7-ends  témoignage  qu'ils  ont  en  effet  du  zèle  pour 
Dieu  ;  mais  c'est  un  zèle  qui  n'est  point  selon  la 
science,  n 

6.  La  lettre  à  Isacius  ou  Hésychius,  succes- 
seur d'Amos  sur  le  siège  patriarchal  de  Jé- 
rusalem, est  une  réponse  à  la  synodique  qu'il 


'  Talium  sacerdotiimt  in  sacerdotio  non  depu- 
lalur.  Epist.  46,  lib.  .\1. 


Ei.iti.n. 


524 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


rait  point  commis  ce  crime,  et  qu'elle  n'au- 
rait point  consenti  an  clianpemcnt  d'état  de 
son  mari,  il  ordonne  qn'il  lui  sera  rendu,  de 
peur  que  la  conversion  do  l'une  des  parties 
ne  soit  une  occasion  de  perte  pour  l'autre. 
Il  convient  que  les  lois  humaines  autorisaient 
l'une  des  deux  à  dissoudre  le  mariage  mal- 
gré l'autre  pour  cause  de  religion  ;  mais  il 
soutient  que  la  loi  de  Dieu  ne  le  permet  (Sas, 
et  qu'excepté  le  cas  de  fornication,  il  n'est 
jamais  permis  au  mari  de  quitter  sa  femme, 
parce  que,  depuis  la  consommation  du  ma- 
riage, ils  ne  font  plus  qu'un  corps  et  qu'une 
chair.  Cette  raison  de  saint  Grégoire  fait  ^oir 
qu'en  disairt  que  le  mariage  ne  peut  être  dis- 
sous pour  cause  de  religion,  il  l'entend  d'un 
mariage  consommé  :  ce  qui  n'est  pas  contrai- 
re à  la  pratique  de  l'Kglise,  qui  permet  la  dis- 
solution d'un  mariage  non  consommé,  quand 
l'une  des  deux  parties  veut  entrer  en  religion. 
7.  Il  ordonna  aux  évoques  de  Sicile  d'iudi- 
61.  quer  deux  litanies  ou  processions    par  se- 

maine, pour  demander  à  Dieu  d'être  déli- 
vrés de  l'invasion  des  barbares,  et  d'exhor- 
ter à  cet  effet  les  peuples  à  la  pratique  des 
bonnes  œuvres.  —  Il  fit  à  Didier,  évéque  de 
Bi.  Vienne,  de  vives  romonlrances  sur  ce  qu'il 

enseignait  la  grammaire  dans  lesacadémies, 
et  }'  expliquait  les  auteurs  profanes;  ne 
croyant  pas  qu'il  lut  de  ladignilé  d'un  évo- 
que de  chanter  d'une  même  boucheles  louan- 
ges de  Jésus-Christ,  et  celles  de  Jupiter.  Il 
ne  croit  '  pas  même  que  cette  profession 
convienne  à  uu  laïque  de  piété.  A  la  suite  de 
cette  lettre,  on  en  trouve  plusieurs  à  divers 
autres  évoques  des  Gaules,  à  Virgile |d 'Arles,  à 
ÉthériusdeLyon,  àArigiusde  Gap,  aux  rois 
ec'rMtî;  Thierry,  Théodebert,  Clotaire,  et  à  la  reine 
Brunehaut,  pourla  convocation  d'un  concile, 
où  l'on  travaillât  à  bannir  la  simonie  des  ordi- 
nations. Il  mande  à  Élhérius  de  Lyon  qu'il 
n'avait  trouvé  aucun  écrit  de  saint  Irénéedans 
les  archives  de  l'Eglise  romaine.  Les  progrès 
que  la  foi  faisait  dans  l'Angleterre  deman- 
daient des  prédicateurs  en  plus  grand  nom- 
bre, que  saini  Grégoire  n'en  avait  envoyé. 
Il  fit  donc  paitii  pour  ce  pays-ià  quelques 
moines  avec  le  prêtre  Laureut  et  l'ahbiS  Âlel- 
litus,  à  qui  il  donna  des  lettres  de  recom- 
mandation pour  les  évoques  de  Tclon  dans 
la  province  d'Arles,  de  Marseille,  de  Chalon- 
sur-Saône,  de  Metz,  de  Paris,  do  Rouen  et 

'  Et  qunm  grave  nefanrtumquf  sit  rpisœpis 
canere  quoé  ncc  laico  rehgiuso  convenial,  ipse 
considéra.  Episl.  'M,  lili.  XI. 


ei,  C3 


d'Angers.  Ce  n'était  pas  que  les  missionnai- 
res dussent  passer  chez  tous  ces  évoques; 
mais  c'est  que  ceux  qui  n'étaient  point  sur 
leur  route  ne  laissaient  pas  de  pouvoir  les 
servir  beaucoup  par  le  crédit  qu'ils  avaient 
auprès  des  rois  Thierry,  Théodebert  et  Clo- 
taire, à  qui  le  Pape  les  avait  aussi  recom- 
mandés en  leur  écrivant  pour  la  convoca- 
tion d'un  concile  contre  la  simonie. 

8.  Augustin,  en  envoyant  à  Home  le  pré-  ' 

tre  Laurent  pour  demander  de  nouveaux 
missionnaires,  le  chargea  d'un  mémoire  où  eiI"  ci- 
il  proposait  diverses  dillicultés  ;'i  saint  Gré- 
goire; ce  saint  y  répondit  par  la  même  voie. 
Elles  sont  distribuées  en  onze  articles.  Par 
le  premier,  Augustin  demande  de  quelle  ma- 
nière les  évoques  devaient  vivre  avec  leurs  uicrreç.  i. 
clercs,  et  comliien  il  fallait  faire  de  portions 
des  biens  de  l'Église,  ou  des  oblations  des 
fidèles.  Saint  Grégoire  répond,  qu'il  est  d'u- 
sage de  faire  quatre  portions  de  tous  les  re- 
venus de  l'Église;  la  première  pour  l'évo- 
que et  sa  famille,  à  cause  de  l'hospilalité;  la 
seconde  pour  le  clergé  ;  la  troisième  pour  les 
pauvres;  la  quatrième  pour  les  répaiations. 
11  ne  prescrit  point  de  règles  générales  sur 
la  vie  que  les  évoques  doivent  mener  avec 
lem-s  clercs  ;  mais,  parce  qu'Augustin  avait 
été  instruit  dans  la  vie  monastique,  il  lui  dit 
de  ne  point  se  séparer  de  ses  clercs,  mais 
d'établir  dans  la  nouvelle  église  des  Anglais 
la  vie  commune  de  l'Église  naissante,  où  per- 
sonne n'avait  rien  en  propre.  Il  demande  dans 
le  second  si  les  clercs  qui  ne  peuvent  garder 
la  continence,  peuvent  se  marier,  et  si,  après  uwnf.  ». 
s'être  mariés,  ilsdoivent  retourner  dans  le  siè- 
cle. .\  cela  saint  Grégoire  répondque  lesclercs 
qui  ne  sont  pas  dans  les  ordres  sacrés,  et  qui 
ne  peuvent  garder  la  continence,  doivent  se 
marier  et  recevoir  leurs  gages  hors  de  la  com- 
munauté; mais  qu'en  fournissant  à  leurs  be- 
soins, il  faut  avoir  soin  qu'ils  vivent  selon  la 
règle  de  l'Eglise,  qu'ils  chantent  les  psaumes, 
et  que  leurs  mœurs  soient  pures;  qu'i\  l'égard 
de  ceux  qui  vivent  en  commun,  il  n'y  a  point 
de  portions:!  faire  pour  l'hospitalité,  ni  pour 
les  pauvres,  tout  ce  qui  reste  après  avoir  pris 
le  nécessaire  devant  être  employé  en  onivres  imm-s.  >. 
pies.  La  troisième  porte  :  La  foi  étant  une, 
pouiquoi  les  coutumes  des  églises  sont-elles 
si  dill'érentes?  A  Home,  la  manière  de  célé- 
brer les  messes  n'est  pas  la  même  que  dans 
les  Gaules.  «  Vous  savez,  rc'poud  saint  Gré- 
goire, la  coutume  de  l'I-lglise  romaine  où 
vous  avez  été  élevé;  mais  je  suis  d'avis  que 


CHAPITRE  XLIX.— SALNT  GRÉr.OIllE  LE  GRAND,  PAPE. 


lo'crio^,  b, 


[vil"  SIÈCLE.] 

si  vous  trouvez,  soit  dans  l'l']^lise  nunainc, 
soit  clans  celle  des  Gaules,  soit  dans  qncl(|ue 
autre,  quelque  chose  qui  soit  plus  agréable 
!\  Dieu,   vous  le  clioisissiez  avec  soin  pour 
l'élablii'  dans  la  nouvelle  I\L;lise  des  Aniçlais  ; 
car  nous  ne  devons  pas  aimer  les  choses  à 
cause  des  lieux,  mais  les  lieux  i\  cause  des 
bonnes  choses.  Choisissez  donc  de  toutes 
les  Kglises  les  [uallipies  saintes,   |iieiises  et 
•  solides,  et  l'aites-eu  un  lecucil  à  l'usage  des 
Anglais.  »  Le  quatrième  regarde  le  vol  fait 
à  l'Kglise.  La  rt^ponse  de  saint  Grégoire  est, 
ipie  celui  qui  aura  dérobé  quelque  chose  h 
l'Mglise,  doit  être  puni  selon  la  qualité  de  la 
personne,  mais  toujours  avec  une  charité  pa- 
ternelle qui  ait  pour  but  de  corriger  le  cou- 
pable, et  de  lui  faire  éviter  les  peines  de 
l'ciifer.  Si  celui  qui  a  volé  a  du  bien,  il  faut 
le  punir  d'une  autre  manière  que  celui  quia 
volé  n'ayant  rien;  il  y  en  a  d'autres  qu'il  faut 
punir  plus   légèrement,  d'autres  plus  sévè- 
rement ;  les  mis  par  une  amende  pécuniaire, 
les  autres  par  des  peines  corporelles.  Il  faut 
obliger  le  voleur  à  restituer  la  chose  déro- 
bée, mais  sans  augmentation,  afin  qu'il  ne 
semble  pas  que  l'Église  veuille  profiler  de 
sa  perte.  La  question  pi-oposée  dans  le  cin- 
quième article,  est  de  savoir  si  deux  frères 
peuvent  épouser  les  deux  sœurs.  Celle  du 
sixième  est  touchant  les  degrés  de  consan- 
guinité  qui   empochent  le   mariage.    Saint 
Grégoire  répond,  que  deux  frères  peuvent 
épouser  les  deux  sœurs,  puisqu'il  n'y  a  rien 
dans  l'Écriture  qui  soit  contraire  à  cette  dis- 
position ;  que  la  loi  romaine  permet  les  ma- 
riages des  cousins  germains,  mais  que  l'É- 
glise les  défend,  comptant  ce  degré  de  con- 
sanguinité [lour  le  second,  en  même  temps 
qu'elle  permet  de  se  marier  au  troisième  et 
au  quatrième  ;  que  c'est  un  crime  d'épouser 


elle  eu  tolère  fpielques-uns  par  douceur,  clic 
en  dissimule  d'autres  par  certaines  consiiië- 
rations,  pour  les  corriger  plus  facilement  ; 
mais  il  faut  avertir  tous  ceux  qui  vieniieul  :\ 
la  foi,  de  s'abstenir  de  ces  coujimctious  illi- 
cites; et  s'ils  y  tombent  ensuite  avec  con- 
naissance, il  faut  les  priver  de  la  commu- 
nion du  corps  et  du  sang  du  Seigneur. 

9.  Dans  le  huitième  article,  Augustin  Ar-     •"Hmf  l 
mande  s'il   (Uait    besoin,  dans   l'ordinaliou 
d'un  évèque,  qu'il  se  fit  assister  de  plusieurs 
évoques,  lorsqu'il  ne  pouvait  en  avoir  que 
dilticilomenl  ;\  cause  de  la  trop  longue  dis- 
tance   des   lieux.    Saint  Grégoire  répond  : 
(I  Dans  l'église  des  .Vnglais  où  vous  êtes  en- 
core seul  évêque,  il  faut  bien  que  vous  en 
ordonniez  sans  être    assisté  d'autres  évo- 
ques ;  mais  quand  il  viendra  des  évoques  des 
Gaules  ,  ils  assisteront  comme  témoins  de 
l'ordination.  A  l'égard  des  évoques  que  vous 
ordonnerez  en  Angleterre,  nous  prétendons 
qu'ils  ne  soient  point  éloignés,  en  sorte  que 
rien  ne  les  empêche   de  s'assembler,  pour 
en  ordonner  d'autres,  au  nombre  de  trois 
ou  quatre  ,  comme  dans  le  monde  on  assem- 
ble des  personnes  d('jà  mariées  pour  pren- 
dre part  h  la  joie  des  noces.  »  Saint  Grégoiie 
fait  cette  comparaison,  parce  qu'il  regarde 
l'ordination  d'un  ëvéque  comme  un  mystère 
par  lequel  l'homme  est  uni  à  Dieu.  Il  dé- 
clare à  Augustin,  dans  sa  réponse  à  la  neu-     imc  log.i, 
vième  question,  qu'il  ne  lui  attribue  aucune 
autorité  sur  les  évêques  des  Gaules  au  pré- 
judice de  l'archevêque  d'Arles  qui,  depuis 
longtemps,  avait  reçu  le  pallium  "des  Papes 
ses  prédécesseurs.    «  Si  donc,  lui  dit-il,  il 
vous  arrive  de  passer  en  Gaule,  vous  devez 
agir  auprès  de  lui  pour  corriger  les  évêques, 
et  l'exciter  s'il  n'était  pas  assez  fervent   : 
nous  lui  avons  écrit  de  concourir  avec  vous 
la  femme  de  son  père  ou  de  son  frère,  c'est-      PO'ir  cet  effet  ;  mais  vous  n'av'ez  point  de  ju- 
à-dire,  sa  belle-mère  ou  sa  belle-sœur,  et  que      ridiction  sur  les  évêques  de  Gaule,   et  ne 


ce  fut  pour  avoir  repris  Hérode  d'un  ma- 
riage de  cette  nature,  que  saint  Jean-Bap- 
tiste eut  la  tête  tranchée.  Il  dit  dans  sa  ré- 
ponse au  septième,  qu'un  grand  nombre 
d'Anglais  ayant  contracté  avant  leur  con- 
version des  mariages  illicites,  il  fallait  les 
avertir  de  se  séparer,  par  la  crainte  du  ju- 
gement de  Dieu,  sans  néanmoins  les  priver 
de  la  communion  du  corps  et  du  sang  de 
Notre-Seigneur,  de  peur  qu'il  ne  parût  qu'on 
les  punissait  de  ce  qu'ils  avaient  fait  par 
ignorance  avant  d'être  baptisés  :  car  eu  ce 
temps  l'Église  puuit  avec  zèle  quelques  abus, 


pouvez  les  réformer  que  par  la  persuasion 
et  le  bon  exemple  :  car  il  est  écrit  dans  la 
loi,  que  celui  qui  passe  dans  la  moisson 
d'autrui  ne  doit  pas  y  mettre  la  faucille. 
Quant  aux  évêques  de  Bretagne,  nous  vous 
en  commettons  entièrement  le  soin,  pour 
instruire  les  ignorants,  fortifier  les  faibles  et 
corriger  les  mauvais,  n  C'étaient  les  évêques 
des  Bretons,  anciens  habitants  de  l'ile,  chré- 
tiens depuis  longtemps,  mais  tombés  dans 
l'ignorance  et  la  corruption  des  mœurs.  Saint 
Grégoire  envoya  à  Augustin  des  reliques  du 
martyr  saint  Sixte,  qu'il  lui  avait  demandées 


Biut,  \Atii, 


FIciTry,  11- 
vre  XX.WI, 
lirm.  VllJ, 
pa^.  210. 


"26 


HISTOTRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


10. 1 


Id  eno^. 


f  oiu-  les  exposer  à  la  vdnéiation  des  fidèles 
d'un  certain  endroit,  à  la  place  des  rcliqries 
d'un  autre  Sixte  que  ce  peuple  disait  avoir 
été  aussi  martyr,  mais  sans  en  avoir  de  preu- 
ves solides.  Le  Pape  dit  à  Augustin,  pour  le 
cas  où  il  ne  se  ferait  point  de  miracles  au 
tombeau  de  ce  Sixte,  et  que  les  anciens  ne 
se  souviendraient  pas  d'avoir  ouï  raconter  à 
leurs  ancêtres  les  actes  de  son  martyre,  de 
fermer  le  lieu  où  il  reposait,  et  d'empèclier 
les  fidèles  de  continuera  lui  rendre  un  culte. 
Cet  article  de  la  lettre  de  saint  Grégoire 
manque  dans  la  plupart  des  manuscrits  et 
dans  V Histoire  d'Angleterre  du  vénérable 
Bèdc,  où  Je  reste  de  la  lettre  se  trouve. 

10.  La  dixième  difficulté  était  de  savoir  si 
l'on  devait  baptiser  une  femme  enceinte,  et 
combien  de  temps  après  ses  couclies  elle 
était  obligée  de  s'abstenir  de  l'entrée  de  l'é- 
glise; si  elle  devait  s'en  abstenir  aussi  dans 
d'autres  temps  à  cause  de  certains  accidents 
naturels,  et  s'éloigner  de  la  sainte  commu- 
nion. Saint  Grégoire  répond  que  l'on  peut 
baptiser  une  femme  enceinte,  puisque  la  fé- 
condité est  un  don  de  Dieu  ;  qu'on  peut  en- 
core la  baptiser  aussitôt  qu'elle  est  délivrée, 
et  l'enfant  d'abord  après  sa  naissance,  s'il  y 
a  danger  de  mort  ;  qu'il  n'y  a  point  de  temps 
réglé  après  les  couches,  où  la  femme  doive 
s'abstenir  d'entrer  dans  l'église,  ce  qui  en 
cA  dit  dans  l'Ancien  Testament  devant  s'en- 
tendre dans  un  sens  mystérieux  ;  quelle  ne 
doit  pas  non  plus  se  l'interdire  dans  le  temps 
de  ses  acydents  naturels,  puisqu'ils  ne  peu- 
vent être  imputés  à  péché,  et  que,  par  la 
môme  raison,  elle  peut  s'approcher  de  l'Eu- 
charistie en  ces  jours-là,  quoiqu'elle  soit 
louable  si  elle  s'en  prive  par  respect  ;  mais 
il  veut  que  les  maris  s'abstiennent  de  leurs 
femmes  tant  qu'elles  sont  nourrices;  à  quoi 
il  ajoute,  qu'elles  ne  peuvent  pas  se  dispen- 
ser de  nourrir  elles-mêmes  leurs  enfants, 
l'usage  contraire  n'ayant  été  introduit  que 
pour  favoriser  l'incontinence.  Il  croit  que 
les  illusions  nocturnes,  quand  elles  n'ont 
point  été  occasionnées  par  des  péchés  de 
pensées  le  jour  précédent,  ne  doivent  em- 
pêcher ni  de  communier  ni  d'odiir  le  sa- 
crifice. Augustin  crut  qu'il  était  néces- 
saire d'instruire  sur  tous  ces  points  l'église 
naissante  des  Anglais;  mais  il  ne  voulut  s'a- 
vancer sur  aucun  sans  avoir  auparavant 
consulté  celui  qui  l'avait  envoyé.  Saint  Bo- 
B.nifM.  nifacc,  archevêque  de  Mavcncc,  avant  oui 
parler  de  ce-  que  saint  Grégoire  dit  dans 


s  et  îcq. 


cette  lettre  que  l'Kglise  permet  de  se  marier 
au  troisième  degré  de  consanguinité,  la  Cl 
demander  aux  archivistes  de  l'Église  romaine 
qui  ne  la  trouvèrent  pas;  ce  qui  l'obligea 
d'en  écrire  à  Xorthelme,  archevêque  de  Can- 
torbéii,  qui  l'avait  sans  doute  dans  les  ar- 
chives de  son  église,  puisque  le  vénérable 
Bède,  qui  écrivait  vers  le  môme  temps,  l'a 
rapportée  dans  ses  ouvrages.  Le  pape  Za-  «»«• 
charie  en  cita  un  passage  dans  le  concile  de  «w» 
Rome  de  l'an  7i3. 

11.  Vers  le  même  temps,  Quirice,  évêquc  niw.i.; 
d'Ibéric,  proche  le  Pout-Euxin,  envoya  A  Ro- 
me, au  nom  de  tous  les  catholiques  de  la 
province,  consulter  le  Saint-Siège  si  l'on  de- 
vait baptiser  les  évèqucs  et  les  peuples  qui 
quittaient  l'hérésie  nestorienne  pour  rentrer 
dans  l'ICglise  catholique,  ou  s'il  fallait  se  con- 
tenter de  leur  profession  de  foi.  Saint  Gré- 
goire lui  répondit  :  n  Nous  avons  appris  des 
anciens  Pères,  que  ceux  qui  ont  été  bapti- 
sés dans  l'in-résie  au  nom  de  la  Trinité,  sont 
reçus  au  sein  de  l'Kglise  par  l'onction  du 
chrême,  ou  par  l'imposition  des  mains,  ou 
par  la  seule  prefession  de  foi;  d'où  vient 
qu'en  Occident  on  reijoit  les  ariens  par  l'im- 
position des  mains,  et  en  Orient  par  l'onc- 
tion ;  les  monophysites  et  les  autres  par  la 
seule  profession  de  foi  ;  parce  que  le  saint 
baptême  qui  leur  a  été  administré  chez  les 
hérétiques  reçoit  en  eux  la  foixc  de  les 
purifier,  lorsqu'ils  reçoivent  eux-mêmes, 
ceux-là  le  Saint-Esprit  par  l'imposition  des 
mains,  et  ceux-ci,  la  grâce  de  leur  réunion  à 
l'Eglise  en  faisant  profession  de  la  vraie  foi. 
On  appelait  monophysites  ceux  qui  ne  re- 
connaissaient qu'une  nature  en  Jésus-Christ, 
comme  les  eutychiens.  Mais  à  l'égard  des 
hérétiques  qui  ne  sont  point  baptisés  au 
nom  de  la  Trinité,  comme  les  bonosiens  qui 
ne  croient  pas  Jésus-C'irist  Dieu,  et  les  ca- 
taphryges  qui  croient  (jue  Montan  est  le 
Saint-Esprit,  il  ne  faut  pas  craindre  de  leur 
réitérer  le  baptême,  puisqu'ils  ne  l'ont  pas 
reçu,  celui  qu'ils  ont  reçu  ne  pouvant  passer 
pour  vrai  baptême,  parce  qu'il  n'a  pas  élu 
conféré  au  nom  de  la  Trinité.  Les  nestoriens 
au  contraire  sont  baptisés  au  nom  de  la  Tri- 
nité ;  mais  ù  cause  qu'à  l'imitation  des  per- 
fides juifs,  ils  ne  croient  point  l'incarnatinn 
du  Fils  unique  de  Dieu,  il  faut  leur-  appren- 
dre que  le  même  Jésus-Christ  est  le  Fils  uni- 
que de  Dieu  et  tout  à  la  fois  fils  de  l'homme, 
et  les  obliger  de  confesser  publiqucnicnt 
celte  vérité,  d'anathématiscr  Xcstorius  avec 


lit  1 

ADgl. 


fvM"  sikt.E.T      CIIAPITmî  XLIX.  —  SAINT 

tous  SOS  soclalcuis,  v\  de  promollre  de  re- 
cevoir tuus  les  conciles  f|iie  ri!L;lise  riM^iit. 
Aldis  vdiis  (levez  les  admellri^  siiiis  (lilliciillé, 
leur  cdiiseivaiil  inriue  le  laiij;  (jifils  avaient 
dans  leiii's  éj^lises.  pour  les  ramener  plus  l'u- 
cilement.»  Saint Git'^oire  appuie  sa  réponse 
di^  tontes  les  preuves  nécessaires  pour  tUa- 
liiir  le  mystère  de  l'Incarnation  confie  les 
nesloricns,  afin  que  l'évèquo  (Jiiirice  eût  en 
main  de  quoi  les  convaincre,  s'il  en  était  be- 
soin. 
'!"■'•  12.  Ililarns,  sons-diacre  de  l'église  de  Na- 
lilos,  avait  calomnié  Jean,  diacre  delà  même 
église,  sans  que  Pascliase,  qui  en  était  évè- 
que,  se  fût  mis  en  devoir  de  pniiir  le  calom- 
nialcur.  Saint  (irégoire  en  écrivit  à  Anthé- 
mius,  qui,  en  sa  qualité  de  défenseur  et  de 
recteur  du  patrimoine  de  l'IOglise  dans  la 
Campanie,  aurait  dû  s'inti'rcsser  dans  cette 
allaire.  Il  le  reprend  vivement  de  sa  négli- 
gence, et  le  charge  d'avertir  Pascliase  de  pri- 
ver Ililarns  des  fonctions  de  son  ministère, 
et  après  l'avoir  fait  frapper  publiquement  de 
verges,  de  l'envoyer  en  exil,  afin  que  celte 
pmiition  servit  d'exemple  aux  antres.  Il  le 
cliarge  aussi  d'exhorter  de  sa  part  Paschase 
à  être  plus  attentif  aux  devoirs  de  sa  charge, 
et  d'élablii'  dans  sa  maison  des  ollicicrs  pro- 
pres ;\  exercer  l'hospitalité,  et  i'i  juger  lesaf- 
■'•  faires.  —  Théodore,  lecteur  de  l'église  de 
Thessalonique,  envoyé  à  Rome  par  Eusèbe 
son  évèqne,  confia  à  nn  moine  nommé  An- 
dré les  papiers  dont  il  était  porteur,  parce 
(ju'il  le  connaissait  depuis  longtemps.  Ce 
moine,  par  un  excès  de  folie  ou  de  malice, 
corrompil  tellement  la  Icllre  d'Eusèbe  au 
Pape,  que  tout  çutre  qui  l'aurait  lue,  aurait 
pensé  qu'Eusèbe  n'était  ni  orthodoxe  ni  même 
doué  de  l'usage  de  sa  raison.  Il  fit  plus  ;  il 
composa  divei's  discours  sous  le  nom  de  saint 
Grégoire,  qui  no  pouvaient  que  le  déshono- 
rer :  il  semble  même  qu'il  affectait  d'y  parler 
grec.  Le  saint  avertit  de  toutes  ces  choses 
l'évèque  de  Thessalonique,  en  le  priant  de 
faire  supprimer  ces  discours,  s'il  lui  en  tom- 
bait quelques-uns  entre  les  mains,  avouant 
qu'il  n'entendait  pas  le  grec,  et  qu'il  n'avait 
écrit  aucun  ouvrage,  en  cette  langue.  11  lui 
recommande  encore  d'exiger  une  confession 
de  foi  du  prêtre  Luc,  dont  on  disait  la  doc- 
trine suspecte. 

13.  Outre  la  lettre  particulière  qu'il  écri- 
vit ;\  Augustin  pour  l'éclaircissement  dcsdif- 
ficullés  qu'il  lui  avait  proposées,  il  lui  en 
adressa  une  qu'il  devait  rendre  publique, 


oni'T.nmE  le  cHANn,  pape. 


r,9.i 


parce  (pi'elle  regardait  l'i'lablissemenl  d(  s 
évèchés  en  Angleterre.  Le  Pape  y  dit  :  «  La 
nonvelle  I''glis(!  tics  .Anglais  se  ti'onvanl  éta- 
lilie  [)oui'  la  gloire  de  Dion,  par  son  secours 
et  par  vos  travaux,  nous  vous  accordons  l'u- 
sage du  pallium  seiUemcut  pour  la  céh'ljra- 
tion  des  messes,  à  la  charge  d'élahlir  douze 
évê(iuesqnivous  s(!ront  soumis;  en  soi'leiitii" 
l'évèque  de  Londres  soit  toujours  à  l'avenir 
consacré  par  son  propre  concile,  et  reçoive 
le  pallium  du  Saint-Siège.  Vous  enverrez  pour 
évèqne  à  York  celui  (jue  vous  jugerez  à  pro- 
pos, à  condition  que,  si  cette  ville  et  les  lieux 
voisins  reçoivent  la  parole  de  13ieu,  il  ordon- 
nera aussi  douze  l'vèques,  etsera  métropoli- 
tain. Nous  nous  ])roposons  de  lui  donner  h; 
pallium,  et  nous  voulons  qu'il  soit  soumis  a 
votre  conduite  ;  mais,  après  votre  mort,  il 
sera  le  supéiieur  des  évèques  qu'il  aura  or- 
donnés, sans  dépendre  en  aucune  manière 
de  l'évèque  de  Londres.  Le  rang  entre  l'é- 
vèijue  de  Londres  et  celui  d'York  se  réglera 
suivant  l'ordination,  et  ils  agiront  de  concert 
p"our  le  bien  delà  religion.  Outre  les  évèques 
ordonnés  par  vous  et  pai-  celui  d'York,  nous 
voulons  aussi  que  tous  les  évèques  de  Breta- 
gne vous  soient  soumis,  en  sorte  qu'ils  ap- 
prennent de  votre  bouche  et  do  vos  exemples 
ce  qu'ils  doivent  croire  et  pratiquer.  »  Saint 
Grégoire,  inquiet  du  succès  du  voyage  de  e,ei,isi. -c. 
l'abbé  Mcllitus,  lui  écrivit  pour  lui  faire  part 
de  ses  inquiétudes,  et  le  charger  de  dire  à 
Augustin,  aussitôt  après  son  arrivée  en  An- 
gleterre, de  ne  point  faire  abattre  les  temples 
des  Anglais,  mais  seulement  les  idoles  qui  y 
étaient,  et  de  se  contenter  de  faire  de  l'eau  bé- 
nite, d'en  arroser  ces  temples,  d'y  dresser  des 
autels,  et  d'y  mettre  des  reliqnes  :  car  «  si  ces 
temples  sont  bien  bâtis, il  faut,  dit  le  Pape,  les 
faire  passer  du  culle  des  démons  au  service 
du  vrai  Dieu,  afin  que  cette  nation,  voyant 
que  l'on  conserve  les  lieux  auxquels  elle  est 
accoutumée,  y  vienne  plus  volontiers  ;  et 
parce  qu'ils  sont  dans  l'usage  de  luer  beau- 
coup de  bœufs  dans  les  sacrifices  qu'ils  of- 
frent aux  démons,  il  faut  accommoder  à  cet 
usage,  dans  l'intérêt  de  leurs  âmes,  quelque 
solennité,  comme  celle  de  la  dédicace  de 
ces  temples  changés  en  églises,  ou  la  fête  des 
martyrs  dont  on  y  met  des  reliques,  en  leur 
permettant  de  dresser  des  tentes  tout  autour 
avec  des  branches  d'arbres,  et  d'y  célébrer  ain- 
si la  fête  par  des  repas  modestes  ;  qu'au  lieu 
donc  d'immoler  des  animaux  au  démon,  ils 
les  tuent  pour  les  manger,  et  rendent  grâces 


528 


HîSTOraE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


EriM.ii. 


à  Dieu  qui  les  rassasiera  de  ces  viandes.  En 
leur  laissant  quelques  ri-jouissaiices  sensibles, 
il  sera  plus  aisé  de  leur  insinuer  les  joies 
intérieures  ;  car  il  n'est  pas  pos.^ibled'ùter  à 
des  esprits  inflexibles  toutes  leurs  coutumes 
A  la  fois.  On  ne  parvient  pas  d'un  saut  en  un 
lien  élevé  ;  on  y  monte  pas  ;\  pas.  C'est  ainsi 
que  Dieu  eu  agit  avec  le  peuple  d'Israël.  Il  se 
fit  d'abord  connaître  à  lui  dans  le  temps  qu'il 
était  en  Egypte,  et,  parce  que  ce  peuple 
s'était  accoutumé  à  sacrifier  aux  idoles,  il 
le  laissa  dans  l'usage  d'immolerdesanimaux, 
mais  en  le  faisant  changer  d'objet,  en  sorte 
que  ce  qu'ils  ollYaient  auparavant  aux  idoles, 
ils  l'ofl'rissent  au  vrai  Dieu.  »  Celte  lettre  est 
du  quinzième  des  calendes  de  juillet,  la  dix- 
neuvième  année  du  règne  de  l'empereur 
Maurice,  la  dix-huitième  depuis  son  consu- 
lat, indiction  quatrième,  c'est-à-dire,  du  dix- 
septième  de  juin  de  l'an  GOl. 

§xn. 

Livre  douzième  des  Lettres  de  saint  Grégoire. 

^.  Le  comte  Anion  souhaitant  de  cons- 
truire un  oratoire  dans  son  châtean  ,  saint 
Grégoire  donna  commission  à  Passivus,  visi- 
teur du  diocèse  dans  lequel  ce  château  se 
trouvait,  de  consacrer  cet  oratoire,  après 
avoir  examiné  soigneusement  s'il  était  suf- 
fisamment fondé,  et  d'y  établir  un  prêtre 
cardinal,  c'est-à-dire  un  chapelain,  pour  y 
célébrer  la  messe  autant  de  fois  que  le  comie 
le  demanderait,  ou  que  le  concoui's  du  peu- 
ple l'exigerait.  Il  spécilie  toutes  les  condi- 
tious  de  la  fondation,  entre  autres,  que  per- 
sonne n'ait  été  inhumé  dans  l'endroit  où 
l'oratoire  devait  être  construit.  Cette  lettre, 
de  même  que  les  suivantes,  est  de  l'indic- 
tion  cinquième,  l'an  COl.  — Après  la  mort 
de  Claude,  abbé  de  ClassCj  les  moines  priè- 
rent saint  Grégoire  de  leur  donner  pour  su- 
périeur le  moine  Coustanlius.  Le  saint  le 
refusa,  parce  que  c'était  un  homme  qui  ai- 
mait la  propriété ,  et  qui  faisait  voir  par  sa 
conduite  qu'il  n'avait  point  le  ca-iir  d'un 
moine.  Ils  choisirent  donc  le  lellérier  d'un 
autre  monastère,  nomin(''  Maur  ,  dont  ils  (li- 
saient beaucoup  de  bien.  Saint  Grégoire , 
avant  de  l'approuver,  ordonna  à  Jean,  sous- 
diacre  de  Havenne,  de  s'informer  de  la  vie 
et  des  qualités  de  Maur,  pour  le  faire  en- 
suite ordonner  abbé  par  l'évéque  Marinien , 
et  de  prier  cet  évéqnc  de  lAcher  de  bannir 
la  propriété  de  ce  monastère  ,  disant  que  si 


elle  y  persévérait,  il  n'y  aurait  ni  concorde, 
ni  charité  :  car  qu'est-ce  que  la  vie  monas- 
tique, sinon  le  mépris  du  monde  ?  Et  com- 
ment peut-on  dire  qu'on  le  méprise  ,  quand 
on  aime  l'argent  ?  Il  le  chargea  en  même 
temps  de  retirer  tous  les  écrits  de   l'abbé 
Claude.  C'était  un  recueil  de  ce  qu'il  avait 
ouï  dire  à  saint  Grégoire  sur  les  Proverbes  , 
le  Cantique ,  les  livres  des  Rois ,  et  l'Hepta- 
teuque.  La  raison  qu'il  eut  de  les  retirer, 
fut  que,  se  les  ayant  fait  lire  par  l'abbé  mê- 
me, il  trouva  qu'il  avait  altéré  son  sens  en 
beaucoup  d'endroits.  Il  donna  encore  com- 
mission  au    sous-diacre   Jean    d'empêcher 
qu'on  lut  publiquement  à  Ravenne  ses  Com- 
mentaires sur  Job  aux  veilles  de  la  nuit;  di- 
sant qu'il  ne  verrait  qu'avec  peine  ses  écrits 
devenir  pubhcs  de  son  vivant;  qu'il  valait 
mieux  lire  dans  l'église  les  Commentaires 
sur  les  Psaumes,  apparemment  ceux  de  saint 
Augustin  ou  de  saint  Ambroise.  U  témoigne 
du  déplaisir  de  ce  qu',\natolius  ,  son  nonce 
il  Constanlinople,  avait  donné  à  l'Empereur 
un  exemplaire  de  son  Pastoral,  et  de  ce  qn'A- 
nastase  ,  patriarche  d'.\utioche,  l'avait  tra- 
duit en  grec.  Dans  la  troisième  partie  de  ses 
Commentaires  sur  Job  ,  à  l'endroit  où  il  est 
dit  :  Je  sais  que  mon  Rédempteur  est  viviwt , 
l'exemplaire  de  Marinien  de   Ravenne  ne 
s'accordait  pas  avec  l'original  que  l'on  ton- 
seivait  dans  l'archive  de  l'Église  i-omaine. 
Saint  Grégoire  dit  au  sous-diacre  Jean  d'y 
faire   suppléer   les   quatre   mots   qui  man- 
quaient, et  dont  le  défaut  pouvait  causer  de 
l'embarras  aux  Icsteurs. 

2.  Il  reçut,  pendant  le  cours  de  l'an  Gl)l, 
diverses  plaintes  contre  des«évêques  d'Afri- 
que et  d'ailleurs,  dont  les  uns  étaient  accu- 
sés de  simonie,  les  autres  de  cruauté  envers 
le  clergé,  ou  d'autres  crimes.  Mais  avant 
d'en  punir  aucun,  il  députait  des  évoques 
pour  s'informer  du  vrai.  Si  ces  plaintes  I  li 
causèrent  du  chagrin,  il  eut  beaucoup  de 
joie  du  retour  de  Firmin,  évoque  d'istrie  ,  il 
l'unité.  —  Comme  il  savait  que  cet  évéque 
mancpiait  de  plusieurs  choses  nécessaires, 
il  l'assura  qu'on  ne  l'abandonnerait  iii>int 
dans  ses  besoins  ,  et  il  lui  envoya  en  alteii- 
dant  un  habit.  —  U  écrivit  à  Deusdedit , 
évcque  de  Milan,  que  l'on  ne  devait  iioiiit 
iiKjuiéter  les  héritiers  de  Conslantius  son 
prédécesseur,  sur  les  legs  qu'il  leur  avait 
faits  par  testament,  parce  qu'il  était  au  pou- 
voir d'un  évoque  de  donner  les  biens  qu'il 
avait  acquis  avant  sou  épiscopal,  quoi(iu'il 


Kplll.  «0. 


L-JC.    Ml], 


Ëllol.   T,  3. 


[vil»  sitcLE.]      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT 

ne  prtt  <lisposf'r  de.  cnux  dont  il  avait  fait 
l'acquisilidii  ('laiil  l'voiitio. —  Le  paliice  Ve- 
nantiiis  l'avait  piic-  lio  lui  doiuipr  uno  expli- 
catiiin  alli'goiiipio  dti  c(>rfaiiis  laits  de  Sam- 
son.  H  s'on  excusa  sur  son  di'laut  do  sanlù  , 
proniellaiit  loul(>fois  tie  l'aire  ce  ([u'il  souliai- 
lail,  en  cas  (pril  se  Ironvât  assez  de  forces 
pour  cela. — 11  lit  envoyer  à  un  autre  Vc- 
nanlius,  évè([ue  de  l'ih-onse,  dcîs  haiiils  tl'lii- 
ver,  pour  le  !;aianlir  du  froid  dont  il  soid- 
frait  Iteanconp. — Su  lellre  A  Eidoge,  pa- 
triarche d'Alexandrie,  est  pour  lui  recom- 
mander quelf[nes  mono[)hysites  nouvelle- 
ment couveitis ,  qui  étant  dans  le  dessein 
de  venir  à  Itome  ,  craiu:naient  (pielque  vio- 
lence lie  la  ]iart  île  ceux  dont  ils  avaient 
abandonné  les  erreurs.  L'un  d'eux ,  qui 
était  moine,  disnil  (lu'il  avait  (Icm(niré  dans 
un  monastère  fondé  par  ses  parents  ,  et  de- 
mandait que  l'on  ohlinfeàt  les  hérétiques  qui 
y  étaient  restés,  ou  d'en  sortir ,  ou  de  se 
réunir  à  l'Hylise  catl)oli(iuo.  Saint  Grétioire, 
sans  rien  décider  là-dessus ,  remet  le  tout  à 
la  prudence  d'Eulogc,  et  ci  son  zèle  pour  la 
gloire  de  Dieu. 

§xni. 

Livre  treizième  des  Lettres  de  saint  Grégoire. 

\.  Ces  Lettres  sont  do  l'an  602,  indiction 
sixième ,  la  treizième  année  depuis  son  or- 
dination. Ayant  appris  en  cette  année  qu'à 
Rome  même  quol[ues-uns  semaient  des  er- 
l'eurs  qui  tenaient  des  superstitions  juives, 
défendant  de  travailler  le  samedi ,  et  de  se 
baigner  le  dimanche  ,  il  adressa  un  mande- 
ment aux  citoyens  romains,  dans  lequel  il 
fait  voir  que  nous  devons  prendre  dans  un 
sens  spirituel  ce  qui  est  dit  dans  l'i^criture 
de  l'observation  du  sabbat,  et  qu'il  y  avait 
même  sons  la  loi  certaines  choses  qu'il  était 
peimis  de  faire  en  ce  jour  ;  ce  qu'il  prouve 
par  ces  paroles  de  Jésus -Christ  aux  Juifs  : 
Y  a-t-il  quelqu'un  de  vous  qui  ne  délie  son 
bœuf  ou  son  âne  le  jour  du  sabbat,  et  ne  les  tire 
de  l'ùlable  pour  les  mener  bûire?l[  ajoute  que, 
s'il  faut  garder  à  la  lettre  le  précepte  du 
sabbat,  il  faut  donc  aussi  observer  la  cir- 
concision ,  contre  la  défense  de  saint  Paul  ; 
mais  «  l'un  et  l'autre  ,  dit-il  ,  n'est  plus  ob- 
servé que  spirituellement.  A  l'étjarddu  bain, 
si  on  veut  le  prendre  par  volupté  ,  nous  ne 
le  permettons  en  aucun  temps;  mais  si  c'est 
par  néicssité,  nous  ne  le  défendons  pas  mê- 
me le  dimanche:  aulrement,  il  ne  faudiait 
XI. 


GRÉGOIllE  LE  GRAND,  PAPlî.  320 

pas  en  ce  jour  se  laver  h^  visaj^e  ;  et  s'il 
est  permis  d'y  lavm-  celle  |)ailie  du  corps, 
pour(|uoi  pas  le  tout?  Si  l'on  doit  s'abs- 
tenir, le  dimanche,  du  travail  terresirc , 
et  en  consacrer  tout  le  temps  à  s'appli- 
([uer  à  la  prière,  c'esf  pour  expier  les  né- 
gligences des  six  aulres  jours  de  la  se- 
maine. »  Quand  il  unissait  des  monastères 
siliiés  en  dillérenls  iliocèses,  il  le  faisait  sans 
pri'judice  de  la  juridiction  d(îs  évèques.  lia- 
sile  ,  évèque  de  Capoue  ,  informé  qu'il  vou- 
lait unir  le  monastère  de  Crateras  ,  qu'il  di- 
sait ètie  de  son  diocèse,  ii  un  autre  qui  était 
dans  la  ville  do  Na]>li's,  s'y  opposa.  Le  cier- 
ge'' de  Xaples,  qui  appuyait  celte  union,  sou- 
linl  que  Crateras  n'avait  jamais  été  de  la  dé- 
pendance de  l'Eglise  de  Capoue.  La  contes- 
tation ne  finissant  point ,  saiul  Grégoire 
nomma  des  commissaires  ,  et  comme  il  ré- 
sulta de  leur  rapport  que  les  prétentions  de 
Basile  n'étaient  point  fondées,  l'union  eut 
lieu.  —  11  pei'mit  au  moine  Adéodat,  qui, 
avant  de  s'engager  dans  cette  profession, 
avait  fait  une  donation  verbale  de  ses  biens 
au  monastère  où  il  était  entré;  de  la  ratifier 
ensuite  par  écrit;  voulant  que  celle  dona- 
tion demeurât  ferme  et  stable,  quoiqu'elle 
n'eût  été  mise  par  écrit  que  depuis  qu'Adéo- 
dat  s'était  fait  moine,  parce  qu'il  n'y  avait 
point  de  loi  qui  défendit  le  contraire,  et  que 
par  cette  nouvelle  donation  il  n'avait  fait 
que  constater  la  première.  —  11  parait  par 
la  lettre  à  Janvier  ,  évèque  de  Cagliari ,  que 
les  abLesses  des  monastères  héritaient  de 
leurs  parents ,  et  on  ne  trouve  rien  dans  le 
droit  romain  qui  soit  contraire  à  cette  dis- 
position; mais  cela  était  défendu  par  la  Piè- 
gle  de  saint  Benoit,  et  par  celle  qui  est  in- 
titulée du  Maître. 

2.  Quelque  grande  que  fût  l'inQrmité  d'un 
évèque  ,  ou  n'on  mettait  un  autre  à  sa  place 
que  de  son  consentement ,  et  alors  on  avait 
soin  de  pourvoir  à  ses  besoins  des  revenus 
de  son  église,  tant  qu'il  vivait.  —  Saint  Gré- 
goire accorda  à  la  demande  de  la  reine 
Bruuehaut  divers  privilèges  pour  les  deux 
monastères,  l'un  d'hommes,  l'autre  de  lîUes, 
et  l'hôpital  qu'elle  avait  fondés  à  Autun;  et 
afin  que  les  évèques  du  lieu  ne  supprimas- 
sent pas  quelque  jour  ces  décrets,  il  lui  con- 
seille de  les  faire  insérer  aux  actes  publics  , 
et  de  les  conserver  dans  les  archives  roya- 
les, comme  ils  étaient  dans  celles  de  Home. 
Le  Pape  parle,  dans  la  même  lellre,  d'un 
évèque  nommé  JVIennas,  qu'il  avait  renvoyé 

3i 


Kl.ijI.  2. 


Re;.  S.  lic- 
nediLt.  cap. 
L-CTr,  et  reir. 
Magisl,  n.  c". 


Epist. 


530 


HISTOIRE  GÉNIÎRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQIT.S. 


;ibsous,  après  lui  avoir  fait  prtnivpi-pnn  inno- 
cence parscriueiil  sur  le  corps  de  saint  Pierre; 
de  la  manière  de  pourvoir  à  la  desserte  d'une 
église  dont  l'dvèque  l'Iait  habituellement  ma- 
lade ,  et  de  l'exclusion  que  les  canons  don- 
nent aux  bigames  pour  les  ordres  sacrés.  — 

Efisi. -.  Dans  sa  lettre  au  roi  Thierry,  il  dit  quelque 
chose  des  privilèges  qu"il  avait  accoi'dés 
aux  monastères  et  à  l'hôpital  d'Autun.  — 

8.  Ces  privilèges  font  la  matière  des  trois  let- 

tres suivantes,  dont  la  première  est  adres- 
sée à  Sénateur,  prêtre  et  abbé  de  rhô]iital , 
la  seconde  à  Thalassia  abbesse,  et  la  troi- 
sième à  Lupon,  prêtre  et  abbé  de  l'église 
de  Saint-Martin,  dans  le  faubourg  d'Autun. 
C'était  un  monastère  d'hommes,  qui  subsis- 
tait encore  [h  l'époque  de  la  révolution]  sous 
la  règle  de  saint  Benoit. Ces  privilèges,  tels 
qu'ils  sont  rapportés  dans  ces  lelti-es,  doi- 
vent paraître  incontestables  à  toute  person- 
ne non  prévenue.  Saint  Grégoire  en  fait 
mention  dans  sa  lettre  à  la  reine  Brunehaut; 
ils  se  trouvent  en  mêmes  termes  dans.plu- 
sieurs  manuscrits  du  Vatican  ;  ils  sont  cités 
dans  la  Vie  de  saint  Hugues,  moine  d'.-Vu- 
tun,  écrite  dans  le  x'  siècle.  Flodoard  '  as- 
sure que  ,  du  temps  de  Charles  le  Chauve  , 
Pardule  ,  évêquc  de  Laon  ,  voulant  dresser, 
par  ordre  de  ce  prince,  un  privilège  pour 
le  monastère  d'Origny,prit  pour  modèle  ce- 
lui que  saint  Grégoire  avait  accordé  à  la 
reine  Brunehaut.  Quelques-uns  trouvent 
trop  sévères  les  peines  qu'il  décerne  contre 
les  violateurs  de  ces  privilèges.  En  etlet ,  il 
les  déclare,  s'ils  sont  rois  ,  évéques ,  juges  , 
déchus  de  leurs  dignités,  privés  de  la  com- 
munion du  corps  et  du  sang  de  Jésus-Christ, 
et  dignes  des  peines  éternelles,  s'ils  ne  font 
pénitence.  Mais  peut-être  que  la  reine  Bru- 
nehaut l'avait  prié  d'apposer  ces  clauses  à 
ces  privilèges ,  comme  le  roi  Cliildebert  de- 
manda aux  évoques  du  quatrième  concile 
d'Orléans  de  défendre  sous  peine  d'être 
frappé  d'un  anathème  éternel  ,  et  d'être  re- 
gardé comme  meurtrier  des  pauvres,  h  tou- 
tes sortes  de  personnes ,  de  quelque  dignité 
et  condition  qu'elles  fussent,  de  toucher  aux 
biens  que  ce  prince  avait  donnés  à  l'hôpi- 
tal de  Lyon.  On  peut  ajouter  que,  par  ces 
clauses,  saint  Grégoire  ne  prétendait  point 
s'attribuer  une  juridictiou  sur  les  puissan- 
ces séculières ,  en  les  menaçant  de  dépo- 
sition ,  mais  seulement  les  nn'naccr  de  la 

«  Fludiwrd.,  lib.  III  Uiilvi.  iiemcns.,  caji.  xwii. 


punition  divine,  même  en  ce  monde.    \u      condi. a 

*  TfïUo.    i.    Il 

reste ,  ces  menaces  se  trouvent  éL'ulenient   «i^'<c<:. 
dans  le  privilège  d'Origny,  et  dans  plusieurs   J^;  ' 
conciles.  Ces  privilèges  portent  ,  qu'après   "°v,',i|., 
In  mort  de   l'abbé  ou  du  piètre  de  l'hôpi-   •°"*' 
tal,   le  roi   choisira  le  successeur,  du  con- 
sentement des  moines,  mais  gratuitement  ; 
en   sorte   qu'il    ne  recevra   rien   de    l'élu  , 
ni  par  lui-même,  ni  par  quelque  personne 
interposée  ;  qu'en  cas  de  plaintes,  l'abbé  ne 
pourra  être  déposé  par  lévéquc  d'Autun, 
que  celui-ci  ne  soit  assisté,  pour  le  jni;er, 
de  six  autres  évèques  ;  qu'il  ne  pourra  lui- 
même  être  élu  évêque  de  cette  ville  tout  en 
demeurant  abbé  ,  de  peur  qu'il  ne  détourne 
à  son  profil  les  biens  de  l'hôpital  ;  et  que 
l'évèque  ne  pourra  ,sans  son  consentement, 
prendre  quelques-uns  de  ses  moines  pour 
les  promouvoir  aux  ordres  ecclésiastiques. 
—  Les  privilécres  pour  le  monastère  de  Sain-     Eiim.h. 
te-Marie,  dont  Thalassia  était  abbesse  ,  sont 
absolument  les  mêmes  que  pour  l'hôpital. 
Après  la  mort  de  l'abbesse,  le  roi  devait  en  _i 

nommer  une  auli-e  du  consentement  des  re- 
ligieuses ,  el  gratuilement.  Il  était  égale- 
ment défendu  à  l'évèque  ù  .\utun  de  la  dé- 
poser, qu'il  ne  fût  assisté  de  six  évéques 
pour  la  juger  canoniquement.  —  La  même  ,0. 
chose  devait  se  praliijuer  à  l'égard  de  l'ab- 
bé du  monastère  de  Saint-Martin. 

3.  Nous  avons  déjà  vu  plusieurs  fois  que        u. 
saint  Grégoire  voulait  que  l'on  se  conleutàt  de 
prêcher  et  d'instruire  les  ji^ifs,  pour  les  éclai- 
rer et  les  convertir  solidement,  .\yant  donc 
reçu  des  plaintes  de  la  part  de  ceux  de  Na- 
ples ,  qu'on  les  empêchait  de  célébrer  leurs 
fêtes,  il  écrivit  à  l'évèque  Paschase  de  leur 
laisser  le  libre  exercice  de  toutes  les  céré- 
monies qu'eux  cl  leurs  ancêtres  avaient  pra- 
tiquées jnsques-li'i.  —  Il  défendit  aussi  de       r. 
conliaindi-o  l'abbé  Urbicu.-  il'accepler  l'i-pis- 
copat,  ipioitiuil  en  eût  le  mérite. — H  dé-       1:. 
sapprouva  l'évèque  Exupèrantius ,  qui  avait 
osé  construire  el  consacrer  un  oratoire  dans 
im  autre  diocèse  que  le  sien,  sans  l'agré- 
ment de  l'ordinaire  ,  et  mèuje  y  célébrer  la 
messe.  —  Il  exhorta  les  évèijues  de  Sicile  à       u. 
n'èlre  point  à  charge  à  leui-s  sujets ,  loi-s- 
qu'ils  allaient  dans  les  paroisses  pour  don- 
ner la  coidiruialiou  aux  enfants.  —  (J^oi-       .5. 
(|u'il  eut  fait  avertir  Paschase  ,  évêque  de 
Napics,  d'être  plus  assidu  i\  ses  fonctions 
épiscopales,  il  n'en  était  pas  plus  vigilant 
sur  son  li'ou|)eau,  ne  s'occupani  que  d'alfai- 
res  Icinporellcs,  en  pailiculicr  de  f.iiie  cuns- 


[vu"  sifccxE.]      CIIAPITHE  XI.IX. 

Iniiro  lies  vaisseaux.  Il  avait  pcnlii  dans  ce 
ni'j^dce  plus  dt^  ([iialre  cciils  sous  d'or;  et 
non  conliMit  d'aller  Ions  les  jouis  sur  la  uier, 
il  s'y  faisait  accompagner  d'un  ou  de  deux 
do  ses  clercs,  ce  qui  le  faisait  mc'priser  de 
tout  le  luonde.  Saint  Gréiroire  eu  fit  des  rc- 
proclies  h  Antlu'niiiis  ,  défenseur  et  recteur 
du  patrimoine  dans  la  Campanie,  avec  ordre 
d'avertir  de  nouveau  Pascliasc,  en  présence 
de   plusieurs  prêtres   ou  autres  personnes 
qualifiées;  cl  en  ras  qu'il  ne  se  corrij^çeâl 
point,  de  l'envoyer  à  Rome,  pour  y  appren- 
dre de  quelle  manière  un  évoque  devait  se 
conduire.  —  Par  une  autre  lettre  il  chargea 
Anthémius ,  (juoiqu'il  ne  fut  que  sous-dia- 
cre, de  roQionlrer  le  devoir  aux  évoques  né- 
gligents ,  et  de  les  envoyer  à  Rome ,  s'ils  ne 
se  corrigeaient  pas  après  avoir  été  avertis. 
4.  Le  successeur  de  Maurice  dans  l'empire 
fut  Phocas,  qui  n'avait  d'abord  été  que  ccn- 
lorion,  puis  exarque  des  centurions.  Il  fut 
couronné  empereur  le  vingt-trois  novembre 
de  l'an  002,  indiction  sixième.  Son  image  et 
celle  de  l'impératrice  Léontia  furent  appor- 
tées à  Rome  le  vingt-cinq  avril  de  l'année 
suivante  G()3.  Le  i  lergé  et  le  sénat  leur  fi- 
rent les  acclamations  ordinaires,  et  saint  Gni- 
goirc  les  lit  mettre  dans  l'oratoire  de  saint 
Césairc,  au  palais;  ensuite  il  écrivit  à  Plio- 
cas  pour  le  féliciter    sur  son  avènement  à 
la  couronne.  Il  dit  dans  sa  lettre,  que  Dieu, 
arbitre  de  la  volonté  des  hommes,  en  élève 
quelquefois  un  pour  punir  les  crimes  deplu- 
sieuis,  comme  ii  venait  de  l'éprouver  lui- 
même;  et  que  quelquefois,  pour  consoler 
plusieurs  affligés,  il  en  élevait  un  autre  dont 
la  miséricorde  les  remplissait  de  joie.  «C'est, 
dit-il,  ce  que  nous  espérons  de  votre  piété  : 
Que  les  deux  se  réjouissent,  que  la  terre  tres- 
saille de  joie,  et  que  tout  le  peuple  de  la  répu- 
blique, affligé  jusqu'à  cette  heure,  change  sa 
t7'istesse  enjoie.  »  Il  exhorte  ce  prince  à  faire 
cesser  tous  les  désordi'esdu  règne  passé,  les 
testaments  suggérés,   les  donations  extor- 
quées, en  sorte  que  chacun  jouisse  paisible- 
ment de  son  bien  et  de  sa  liberté  :  «  Car  il  y 
a,  ajoute-t-il,  cette  ditlerence  entre  les  em- 
pereurs romains  et  les  rois  des  autres  na- 
tions, que  ces  derniers  commandent  à  des 
esclaves,  et  vous  à  des  hommes  libres.  »  Cette 
lettre  est  une  preuve  que  saint  Grégoire  n'é- 
tait pas  content  du  gouvei-nemeut  de  l'em- 


SAINT  GRi:(;01RE  LE  GRAND,  PAPE.  "M 

prreur  Maurice  :  cela  ne  [)aralt  pas  moins 
par  la  ré'ponse  qu'il  (il  à  Phocas,  qui  s'était 
plaint  d(!  n'avoir  point  trouvé  de  nonce  de 
sa  part  à  Conslanlinople.  —  u  Ce  n'est  pas, 
lui  dit-il,  l'etTel  de  ma  négligence,  mais  d'une 
dure  nécessité.  Tous  les  ministres  de  notre 
église  fuyaient  avec  terreur  une  si  rude  do- 
mination, de  manière  qu'il  n'était  pas  possi- 
ble d'en  obliger  aucun  d'aller  A  Constantino- 
ple  pour  demeurer  dans  le  palais;  mais  de- 
puis (|u'ils  sont  informés  que,  parla  grâce  du 
Toul-Puissant,  vous  êtes  parvenu  ù  l'empire, 
la  joie  qu'ils  en  ont,  fait  que  ceux  qui  crai- 
gnaient auparavant  de  se  trouver  <i  la  cour, 
s'empi'essent  d'aller  se  mettre  ;\  vos  pieds.  » 
U  lui  recommande  le  diacre  Bouiface,  qu'il  lui 
envoyait  pour  être  son  nonce,  et  le  prie  ins- 
tamment de  secourir  l'Italie  contre  les  Lom- 
bards, qui  la  désolaient  depuis  trente-cinq 
ans.  —  Saint  Grégoire  écrivit  aussi  à  Léon- 
tia, pour  la  féliciter  sur  son  avènement  au 
trône;  et  après  lui  avoir  souhaité  la  grûceet 
la  protection  du  Tout-Puissant,  le  zèle  de 
Pulcliérie  pour  la  défense  de  la  foi  catholi- 
que, qui  lui  fit  donner  le  nom  de  nouvelle 
Hélène  par  le  concile  de  Chalcédoine,  ill'ex- 
horte  ;i  prendre  la  défense  de  l'église  de  saint 
Pierre  contre  les  ennemis.  — Quoique  le  but 
principal  de  sa  lettre  à  Cyriaque,  patriarcht! 
de  Constantinople,  fiît  de  lui  recommander 
le  diacre  Boniface,  il  en  prit  occasion  de  l'ex- 
horter à  renoncer  au  titre  superbe  d'évêqne 
universel. 

3.  Celle  qu'il  écrivit  ù  Eusébie  patrice,  qu'on 
croit  avoir  été  la  fille  de  Rusticienne,  est  une 
instruction  sur  l'obligation  de  s'occuper  plus 
de  ce  qui  regarde  l'âme  que  de  ce  qui  regarde  le 
corps.  — En  recommandant  à  l'exarque  Sma- 
ragde  résèque  Firmin,  qui  avait  quitté  le 
schisme  pour  se  réunir  à  l'Eglise,  il  l'avertit 
que  ïelquin  '  consentait  à  une  trêve  de  trente 
jours,  si  les Pisans  voulaient  l'observer;  mais 
qu'ils  ne  l'avaient  pas  voulu.  —  Dès  le  com- 
mencement de  son  pontificat,  il  avait  défen- 
du que  l'on  exigeât  des  fermiers  le  blé  â  plus 
grande  mesure  que  celle  qui  entrait  dans  les 
greniers  de  l'Église,  et  il  avait  ordonné  de 
rompre  tous  les  faux  poids  et  toutes  les  faus- 
ses mesures.  Pantaléon, notaire,  fit  exécuter 
cet  ordre  dans  le  territoire  de  Syracuse,  où  il 
était  recteur  du  patrimoine  de  saint  Pierre; 
mais  à  cause  qu'avant  lui  d'autres  avaient 


EplU.  38. 


'  Les  maïuiscrils  porteut,  les   uns  Cillanem,  les 
autres  VardcinaUem  ou  VasacciUonem  ;  nucun  ne 


porte  Tilquinum,   comme  on   1',t  imprimé  depuis, 
(L'éditeur.) 


532 


lIISTOmE  GÉNÉRALE  DES 


Loi*    r«iir 
l'iTimunité 
dea  clercs. 


Episl.  iZ. 


exigé  des  fermiers  une  plus  grande  mesure 
((uc  celle  dont  on  scscnait  dans  les  greniers 
de  l'Église,  il  le  chargea  de  délivrer  en  secret 
aux  plus  pauvres  des  fermiers  ce  que  l'on  pou- 
vait avoir  exigé  an  delà  cie  la  juste  mesure. 
0.  Janvier,  évèc]uc  de  Malgue  en  Espagne, 
se  plaignit  A  saint  Gi-ëgoire  d'avoir  été  dé- 
posé et  chassé  de  son  siège  par  injustice  et 
par  violence.  Un  nommé  Etienne,  aussi  évé- 
que  en  Espagne,  mais  dont  le  siège  n'est 
point  connu,  fit  les  mêmes  plaintes.  Le  Pape, 
ne  voulant  en  juger  qu'avec  connaissance  de 
cause,  députa  sur  les  lieux  le  défenseur  Jean 
pour  régler  ces  deux  atl'aires,  et  lui  doiuia 
deux  méiftoires  en  forme  d'instructions,  dont 
le  premier  porte  :  «  S'il  n'y  a  aucun  crime 
prouvé  contre  l'évêque  Janvier,  qui  mérite 
l'exil  ou  la  déposition,  il  doit  être  rétabli 
dans  sou  siège  et  dans  son  degré  d'honneur; 
et  celui  qui  a  été  ordonné  à  sa  place  de  son 
vivant  contre  les  canons,  étant  privé  du  sa- 
cerdoce, doit  l'être  aussi  de  tout  ministère 
ecclésiastique,  et  livré  à  l'évêque  Janvier, 
qui  pourra  le  tenir  en  prison,  ou  nous  l'en- 
voyer. Quant  aux  évêques  qui  l'ont  ordonné, 
ou  qui  ont  consenti  à  sou  ordination,  ils  se- 
ront privés  pour  six  mois  de  la  comu)nuion 
du  corps  et  du  sang  de  Noire-Scigneur,  et 
feront  pénitence  dans  un  monastère;  mais 
s'ils  tomlient  en  péril  de  mort,  on  ne  leur 
refusera  j.as  le  viatique;  si  ces  évêques  di- 
sent que  la  craiute  du  magistrat  les  a  fait 
consentir  à  la  déposition  de  Janvier,  en  sorte 
qu'elle  ne  se  soit  point  faite  de  leur  libre 
consentement,  on  abrégera  le  temps  de  la 
pénitence,  et  on  en  pourra  modérer  la  ma- 
nière. Si  celui  qui  a  usurpé  le  siège  de  cet 
iévêquc  est  mort,  et  qu'un  autre  ait  été  or- 
donné h  sa  place,  la  faute  de  celui-ci  est 
moindre,  parce  qu'il  semble  avoir  succédé  à 
un  mort;  ainsi  il  suflira  de  lui  ôter  le  gou- 
vernement de  l'église  de  Malgue,  sans  cpi'il 
puisse  jamais  y  rentrer;  mais  il  pourra  être 
évèque  dans  une  autre  église  vacante.  A  l'é- 
gard du  magistrat  dont  il  y  avait  plainte,  il 
sera  condamné  à  réparer  tout  le  dommage 
que  l'évêque  Janvier  a  soullèrt  par  sa  vio- 
lence, et  cet  évê(iue  eu  sera  cru  sur  son  ser- 
ment. Mais  si  les  choses  se  trouvaient  dill'é- 
rentes  du  rapport  qu'en  avait  fait  Janvier, 
saint  Grégoire  veut  que  le  défenseur  Jean, 
après  un  soigneux  examen,  décide  sui\aul 
les  règles  de  l'équité  et  de  la  justice.  Venant 
ensuite  aux  plaintes  de  l'évêque  Etienne,  il 
dit  qu'il  faut  premièrement  examiner  si  leju- 


AUTEUnS  ECCLÉSLVSTIQUES. 

gement  rendu  contre  lui  a  été  revêtu  de 
toutes  les  formalités  ;  si  les  témoins  ont  été 
dillèrents  des  accusateurs  ;  s'ils  ont  déposé 
en  sa  présence  et  avec  serment  ;  s'il  a  eu  la 
liberté  de  se  défendre;  quelle  est  la  vie. 
la  condition,  la  réputation  des  accusateurs 
et  des  témoins  ;  si  ce  ne  sont  pas  des  gens 
de  néaul,  ou  des  ennemis  de  l'accusé;  s'ils 
ont  parlé  par  ouï-dire,  ou  de  science  certai- 
ne ;  si  l'on  a  prononcé  la  «entence  en  pré- 
sence des  parties  :  que  si  toutes  ces  formali- 
tés n'ont  point  été  tjbservées,  et  qu'fllieime 
n'ait  point  été  convaincu  d'un  crime  qui 
mérite  la  déposition  ou  l'exil,  il  doit  être  ré- 
tablidansson  église.»  Saint  Grégoire  ordonne 
contre  ses  juges,  et  contre  tous  ceux  qui  au- 
ront ordonné  un  évèque  à  sa  place,  les  mê- 
mes peines  (pie  contre  ceux  qui  avaient  dé- 
posé Janvier.  Le  second  mémoire  qu'il  don- 
na à  Jean  le  défenseur,  est  intitulé  :  Cajji- 
tulaire  des  lois  impériales  jMjur  riiiimunité  des 
clercs.  C'est  un  extrait  des  lois  qui  pouvaient 
établir  le  droit  des  iirincipaux  articles  de  sa 
commission,  savoii-,  iju'un  pn-tre  ne  doit  être 
jugé  que  par  son  évèque,  ainsi  qu'il  est  perlé 
dans  la  Novellede  Jnstinieu  qui  traite  des  évê- 
ques, des  clercs  et  des  moines;  (jue  la  violeuce 
commise  contre  un  évêqne  dans  son  église 
est  un  crime  capital  et  public,  comme  celui 
de  lèse-majesté,  comme  il  est  déclaré  au  pre- 
mier livre  du  Code,  titre  sixième,  constitu- 
tion dixième;  que  révê(jue  ne  doit  point  être 
traduit  mîilgré  lui  devant  le  juge  laïque,  ni 
jugé  par  les  évêques  d'uue  autre  province  : 
c'est  ce  que  porte  la  Novelle  de  Justinien. 
Et  parce  qu'on  aurait  pu  répondre  (pri-^lieune 
n'avait  ni  patriarche  ni  métropolitain  pour 
le  juger,  saint  Grégoire  prévient  cette  objec- 
tion, en  disant  qu'il  pouvait  être  jugé,  com- 
me il  l'avait  demandé,  par  le  Siège  apostoli- 
que, qui  est  le  chef  de  tou.es  les  Églises.  H 
rapporte  aussi  des  extraits  des  lois  qui  dé- 
fendent de  recevoir  l'accusation  d'un  esclave 
ou  d'un  serviteur  contre  son  maître  :  car  on 
disait  qu'Etienne  était  dans  ce  cas,  cl  que  les 
témoins  pi  oduits  contre  lui  étaient  des  gens 
de  vile  condition  ;  siu'  «juoi  il  cite  l'authenti- 
que, qui  a  pour  titre,  des  Témoins.  Il  ajoute  : 
«Si  l'on  accuse  Élieunedu  crime  delèse-ma- 
jeslé,  il  ne  faut  point  s'arrêter  A  celte  accu- 
sation, si  sa  vie  passée  ne  forme  là-dessus 
aucun  [irèjugé.  A  ces  extraits  le  Pape  joignit 
la  sentence  en  faveur  de  l'évêque  Janvier, 
par  laipielle  il  était  déclaré  innocent,  et  l'ë- 
véque  intrus  à  sa  place  déposé.  Elle  cou- 


NOTC'h  M 


C.(I«E; 

(ICknc.  I 

ÎdI5  ;  c(  C 
hrtwl.      I. 
ITI.III.  i.c 

zixt. 


PiDiIrn. 
•d  Icccin  i 
llta. 


[vil'  sifeci-E.]        CHAPITRE  XI-IX.  —  SAINT 

flainniiil  aussi  les  ëvôques  (pii  avaifiil  on  pari 
h  sa  (li'positioii  cl  à  l'orflinalidii  de  l'iiilnis, 
on  la  inanii'i'C  qu'il  l'avail  iiiai'(|ii(' dans  le 
[irouiier  mémoire. 

§  XIV. 
Livre  quatorzième  des  iMtres  de  saint  Grégoire. 

EfiM.;.  1.  Ce  dernier  livre  contient  les  lettres  que 

ce  saint  Pape  (Vrivit  en  la  seplif'nie  indiclion, 
C'est-à-dire  pendant  l'année  (i()3  et  le  com- 
mencement do  (iOi,  f[iii  fut  la  dernière  de 
son  ponlilicat.  L'indolence  el  les  inlirmités 
de  Janvier,  évoque  deGap;liari,!occasionnaient 
divers  sujets  de  plaintes.  Les  hôpitaux  do 
cette  ile  étaient  f(nl  ni'gligés;  on  y  donnait 
le  gouvernement  des  monastères  à  des  moi- 
nes qui  étaient  tombés  dans  des  fautes;  Jan- 
vier tirait  de  son  cler;j:é  tous  les  évoques  qu'il 
ordonnait  pour  les  ('^dises  vacantes  ;  sou- 
vent, quand  il  célébiait  les  saints  mj'stèros, 
il  se  trouvait  si  pressé  de  son  mal,  qu'après 
lin  long  intoi'valic,  i"!  peine  pouvait-il  revenir 
n  l'endroit  du  canon  qu'il  avait  laissé  :  ce 
qui  faisait  que  plusieurs  doutaient  s'ils  de- 

'"  valent  communier  de  ce  qu'il  avait  consa- 

cré. Saint  Grégoire  écrivit  sur  tons  ces  poinis 
il  Vital,  défonsour  dans  l'ile  de  Sardaigne. 
11  le  chargea  de  contier  le  soin  des  hôpitaux 
à  l'économe  et  <i  l'archiprctre  de  l'Église  de 
Cagliari  ;  de  veiller  à  ce  que  Janvier  ne  prit 
pas  dans  sa  propre  église  tons  les  sujets  né- 
cessaires pour  remplir  les  églises  vacantes, 
afin  de  ne  la  pas  priver  des  personnes  qui 
pouvaient  y  être  utiles,  disant  qu'il  avait 
écrit  là-dessus  à  Janvier  même;  qu'àl'c'gard 
de  ceux  qui,  étant  simples  moines,  étaient 
tombés  en  faute,  ils  ne  devaient  pas  être 
faits  abbés  avant  d'avoir  fait  pénitence;  que 
toutefois  ceux  qui  se  trouvaient  en  charge 
pouvaient  y  demeurer,  s'ils  paraissaient  bien 
corrigés.  Il  le  chargea  aussi  d'avertir  ceux 
qui  doutaient  que  Janvier  eût  consacré,  lors- 
que ses  infirmités  l'obligeaient  de  mettre 
quelque  intervalle  dans  la  récitation  du  canon 
de  la  messe,  de  communier  hardiment,  parce 
que  la  maladie  du  célébrant  ne  profanait  pas 
la  bénétiictiou  du  sacré  mystère.  Il  veut  néan- 
moins qu'il  avertisse  cet  évèque  de  ne  point 
paraître  en  public  lorsqu'il  se  trouvera  mal, 
de  peur  de  se  rendre  méprisable,  et  de  scan- 
daliser les  faibles.  Saint  Grégoire  est  le  jire- 
mier  qui  ait  appelé  Camm  cette  partie  de  la 
liturgie  qui  sedit]après  le  trisagion  owSanc- 
ttis.  Le  pape  Vigile,  dans  sa  lettre  •'i  Profu- 


GRIÎGOIUE  LR  GRAND,  PAPR.  r>,i3 

tiirus,  évéque  de  Drague,  l'appelle  l'riôres 
raiinni(/iifs. 

2.  L'abbé  Furtunat  était  venu  à  Rome  F|.I'1.  6. 
faire  des  plaintes  contre  l'évoque  Goncoi'- 
dius,  qui  lui  avait  ôté  sans  aucun  sujet  le 
gouvernement  du  monastère  des  saints  Lau- 
rent et  Zenon  dans  la  ville  de  Césone.  Quoi- 
que la  plainte  de  Fortunat  parut  fondée, 
saint  Grégoire  ne  voulut  rien  décider  sans 
informations  faites  sur  les  lieux.  Il  en  d(uiua 
commission  à  Marinien,  archevêque  de  lla- 
venne,  avec  ordre  de  rétablir  Fortunat,  en 
cas  qu'il  eût  été  déposé  contre  les  règles,  et 
d'avertir  Concordius  de  ne  rien  changer  aux 
disijositions  de  son  prédécesseur,  par  qui 
Foitunat  avait  été  ordonné  abbé.  —  Vers  le  i. 
même  temps,  le  Pape  reçut  des  plaintes 
d'41cyson,  évèque  de  Corcyrc  ou  Corfou, 
contre  Jean,  évèque  d'Eurie  ou  EvorieonEpi- 
re,  qui,  contraint  de  quitter  son  siège  parles 
courses  des  barbares,  s'était  retiré  avec  son 
clergé  dans  la  ville  de  Cassiope,  en  l'île  do 
Corfou,  ville  qui  était  du  diocèse  d'Alcyson. 
Jean  avait  même  apporté  avec  lui  le  corps 
de  saint  Donat,  évèque  d'Eurie  sous  Thcodo- 
sele  Grand,  et  célèbre  par  ses  miracles.  Non 
content  de  la  retraite  qu'Alcyson  lui  avait 
donnée,  il  voulut  depuis  soustraire  Cassiope 
à  sa  juridiction,  et  y  exercer  l'autorité  épis- 
copale,  ayant  surpris  à  cet  effet  un  ordre  de 
l'Empereur,  qui  appuyait  sa  prétention. 
Encore  que  cet  ordre  tut  demeuré  sans  cflct, 
Alcyson  s'en  plaignit  à  ce  prince,  qui  ren- 
voya l'affaire  à  André,  archevêque  de  Nico- 
poli,  métropolitain  de  ces  deux  évêques, 
qui,  avec  connaissance  de  cause,  maintint 
Alcyson  dans  sa  juridiction  sur  la  ville  de  Cas- 
siope. Saint  Grégoire  confirma  ce  jugement, 
qui  était  fondé  sur  l'équité  et  la  justice,  les 
canons  ne  permettant  point  à  un  évèque  do 
s'emparer  des  paroisses  d'un  autre;  mais, 
quoique  l'ingratitude  de  Jean  dût  le  faire 
chasser  de  Cassiope,  puisqu'il  avait  rendu  à 
Alcyson  le  mal  pour  le  bien,  il  ordonna  k 
celui-ci  de  laisser  Jean  demeurer  paisible- 
ment à  Cassiope  avec  son  clergé,  à  la  charge 
de  renoncer  par  écrit  à  sa  vaine  prétention 
et  de  retouner  aEurie  après  le  rétablissement 
de  la  paix. — Saint  Grégoire  ne  voulut  point  ». 
rendre  publique  sa  sentence,  de  peur  qu'il 
ne  parût  mépriser  l'ordre  de  l'Empereur,  qui 
autoiisait  la  prétention  de  Jean  ;  mais  il  ins- 
truisit de  cette  atlaire  Buniface,  son  nonce  h 
Gonstantinople,  afin  qu'il  en  informât  aussi 
ce  prince,  et  qu'ensuite  il  envoyât,  de  son 


531 


UISTOIRE  GENERALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


consentement,  sa  sentence  sur  les  lieui  pour 
la  faire  exécuter.  11  dit  à  Bouiface  de  deman- 
der même  à  l'Empereur  uu  ordre  pour  l'exé- 
cution de  cette  sentence. 
Epi.1.3.  3    ^pi-ès  la  jjjycl  jg  l'évtMjue  d'Ancône, 

on  élut  trois  sujets  pour  lui  succéder  :  Flo- 
rentin archidiacre.  Rustique  diacre  de  la 
même  Église,  et  Florenlius  diacre  de  Raven- 
ne.  Saint  Grégoire,  qui  s'était  mformé  de 
leur  mérite  personnel,  eu  écrivit  à  un  évê- 
que  nommé  Jean,  eu  ces  termes.  »  On  nous 
a  dit  que  l'archidiacre  Florenlin  sait  l'Écri- 
ture, mais  qu'il  est  si  accablé  de  vieillesse  et 
si  ménager,  que  jamais  un  ami  n'entre  chez 
lui  poury  Dianger;  que,  de  plus,  il  a  fuit  ser- 
ment sur  les  Évangiles  de  n'être  jamais  évé- 
que  ;  que  le  diacre  Rustique  est  un  homme 
vigilant,  mais  qu'il  ne  sait  pas  les  Psaumes  ; 
et  que  Florenlius,  qu'on  dit  avoir  eu  tous 
les  suffrages,  est  uu  homme  fort  appliqué. 
Mais,  comme  nous  ne  connaissons  pas  son 
intérieur,  rendez- vous  prompiement  à  Ancô- 
ne  avec  notre  frère  Arméuius,  visiteur  de  la 
même  Eglise,  pour  vous  informer  exacte- 
ment des  mœurs  et  des  quaUlés  de  tous  les 
trois,  s'ils  ne  sont  point  coupables  de  crimes 
qui  éloignent  de  l'épiscopat,  et  si  ce  qu'on 
a  dit  d'eux  est  vrai.  Si  on  choisit  Florenlius, 
diacre  de  Ravenne,  il  faut  avoir  le  consen- 
tement de  sou  évêque  ;  mais  il  ne  doit  pas 
le  donner  en  vertu  de  noire  mandement,  de 
peur  qu'il  ne  semble  que  ce  soit  malgré  lui.  » 
"•  4.  Théodeliiide, reine  des  Lomlwrds, ayant 

fait  baptiser  son  Qls  Aldoalde  le  jour  de  Pi- 
ques, qui,  en  60.3,  était  le  sept  d'avril,  elle  en 
donna  avisa  saint  Grégoire,  en  lui  marquant 
qu'elle  l'avait  fait  lever  sur  les  fonts  par 
l'abbé  Secondin,  dont  elle  honorait  la  piété. 
Elle  lui  envoya  par  la  même  voie  quelques 
écrits  que  cet  abbé  avait  faits  sur  le  cinquiè- 
me concile,  en  le  priant  d'y  répondre.  Le 
Pape  témoigna  sa  joie  à  cette  princesse  de 
ce  qu'un  tils  lui  était  né,  et  de  ce  qu'elle  l'a- 
vait fait  régénéicr  dans  les  eaux  du  baptê- 
me, disant  que  la  piété  dont  elle  faisait  pio- 
fession  ne  permettait  pas  d'attendre  moins 
d'elle,  que  de  mettre  sous  la  protection  tic 
Dieu, dans  l'Eglise  catholique,  renfiinliprelle 
avait  reçu  de  lui.  11  l'cNhorle  à  l'tilever  dans 
la  craiuh^  et  dans  l'amour  de  Dieu.alin  que, 
grand  parmi  les  hommes  par  sa  dignité  ,  il 
ne  le  soit  pas  moins  aux  yeux  de  Dieu  par 
ses  bonnes  o'uvres.  A  l'égard  des  écrits  de 
l'abbé  Secondin,  il  s'excuse  d'y  répondre 
sur  sa  maladie,  qui  êtail  si  violente  qu'elle 


lui  otait  la  Hberlé  de  pirler,  comme  elle 
pouvait  s'en  assurer  par  ses  envoyés  ;  mais 
il  promet  d'y  répondre  aussitôt  que  Dieu  lui 
aura  rendu  la  santé  :  en  attendant ,  il  char- 
gea les  députés  de  Théodelinde  d'un  exem- 
plaire des  actes  du  concile  tenu  sous  le  rè- 
gne de  Justinien  ,  afin  qu'en  les  lisant ,  elle 
put  reconnaître  la  fausseté  de  tout  ce  qu'elle 
avait  ouï  dire  contre  le  Saint-Siège  et  con- 
tre l'Église  catholique.  Il  ajoute  :  «  Dieu  nous 
garde  de  recevoir  les  sentiments  d'aucun 
hérétique  ,  ou  de  nous  écarter  en  quoi  que 
ce  soit  de  la  lettre  de  saint  Léon  et  des  qua- 
tre conciles  ;  nous  recevons  tout  ce  qu'ils 
ont  reçu,  et  nous  condamnons  tout  ce  qu'ils 
ont  réprouvé.  »  Saint  Grégoire  envoya  au 
jeune  prince  Aldoalde  une  croix  avec  du 
bois  de  la  vraie  Croix  ,  et  un  Evangile  dans 
une  boite  de  Pei-se  ;  et  à  la  |)rincesse  sa  sœur, 
trois  bairues  orn.-es  de  pieries  précieuses, 
priant  Théodelinde  de  leur  donner  ces  pré- 
sents de  sa  main,  pour  les  faire  valoir.  Il  la 
pria  aussi  de  rendre  grâces  pour  lui  au  roi , 
son  maii ,  de  la  paix  qu'il  avait  faite  pour 
l'Italie,  et  de  l'exciter  ;!»  la  conserver,  comme 
elle  l'avait  déjà  fait. 

5.  Nous  venons  de  voir  que  Jean,  évêque 
d'Eurie,  en  se  retirant  à  Cassiope  dans  l'Ile 
de  Corfou ,  y  avait  apporté  le  corps  de  saint 
Donat.  Comme  il  ne  pouvait  le  placer  dans 
l'Eglise  sans  l'agrément  d'.\lcyson  ,  évêque 
diocésain,  saint  (îrégoire  lui  écrivit  que  Jean 
lui  offrait  un  acte  de  non-pn-judice  ,  et  qu'à 
cette  condition  il  devait  lui  permettre  de 
placer  ce  corps  vénérable  dans  l'église  de 
saint  Jean.  —  La  lettre  à  P'élix,  sous-diacre 
et  recteur  du  patrimoine  d'Appia  ,  contient 
le  détail  de  tons  les  fonds  de  terre  et  autres 
revenus  que  saint  Gri'goire  doima  à  l'église 
de  Saint-l'aul  pour  l'entretien  des  luminai- 
res ;  on  l'avait  gravé  sur  une  table  de  mar- 
bre que  l'on  voit  encore  atlichée  à  une  des 
murailles  de  la  basilique  de  Saint-Pierre. 
Jean  Diacre  fait  nicuti(ui  de  celte  table. 

G.  Félix  ,  ('vêquc  de  Messine  ,  avait  ouï 
dire  que  saint  Gr<;goirc,  en  répondant  aux 
dillicullés  d'Augustin  ,  av;iil  ilécidé  que  le 
mariage  était  i>erniis  entre  les  parents  au 
(piali-iènie  degré.  L'usage  <;lail  contraire  à 
Rome  et  eu  Sicile  ,  où  lu  mariage  était  dé- 
feiulu  jusqu'au  septième  degré  de  consan- 
guinité ,  et  ci'l  usage  était  fondé  sur  les  dé- 
rrets  des  papes  et  des  conciles,  nommément 
de  celui  de  Nicée.  Félix  demandait  donc 
l'ouiquoi  l'on  avait  excepté  de  cette  règle 


JMD.  D  n. 
COO.  l'il><  II, 
Dum.  3U. 


C[IAI'1TRE  XLIX.  —  SAINT  UUliGUlUE  LE  GRAND,  l'AJ'E. 


Nlim.  XI  1,8; 
Psal.  civ,  1j, 
K\od.      XXII, 


Jcn.  nia. 
fou.  LU'.  II, 
Qiini.  3T. 

HÎDcmar. 
Efisl,  37,  59, 
Cl  Iractùlii  do 
dlvonio  Lo- 
thnrù.inlcrr')- 
gai.  -,,  et 
q«a;-t.  7. 


[vil"  SIKCLE.] 

l'Eglise  naissanto  d'Angleterre.  Il  se  plal- 
pnnit  aussi  au  l'apo  des  vexations  que  les 
(ivèques  Kdiill'i aient  en  Sicile  de  la  ]iail  des 
laïques.  Knllii  "il   lui  demandait  si,  dans  le 
doute  où  l'on  était  que  certaines  églises  eus- 
sent clé  consacrées,  il  était  permis  de  les 
consacrer.  Ce  doute  était  fondé  sur  leur  an- 
tiquité, et  sur  la  négligence  de  ceux  qui  en 
avaient  la  garde.  Saint  Grégoire  répondit  sur 
la  première  question  ,  que  toute  la  ville  de 
Home  pouvait  hù  lendre  témoignage  qu'il 
n'avait  permis  aux  .Vnglais  le  mariage  au  qua- 
liièmc  degré,   que  pour  eux  seuls  et  pour 
un  temps,  à  la  charge  que  ,  lorsque  cette 
église  se  trouverait  plus  solidement  établie, 
les  mariages  y  seraient  défendus,   comme 
ailleurs,  jusqu'au  septième  degré  de  consan- 
guinité; que  cette  indulgence  lui  avait  paru 
nécessaire  dans  les   commencements ,   où 
ces  nouveaux  convertis  devaient  être  traités 
avec  la  même  attention  que  ceux  dont  saint 
Paul  dit  ;  Je  ne  uous  ai  nourris  que  de  lait,  et 
non  pas  de  viandes  solides ,  parce  que  vous  n'en 
étiez  pas  alors  capables.  Il  répond  sur  la  se- 
conde, que  les  évèques,  étant  les  oints  du 
Seigneur,  cl  appelés  les  troues  de  Dieu .  ne 
doivent  pas  être  maltraités  de    paroles  ni 
d'elTets  par  les  princes  ,  ni  par  leurs  sujets  , 
ni  en    [larticulier  ,  ni  en  public;   ce    qu'il 
prouve  par  divej-s  passages  de  l'Écriluie  : 
soutenant  que  ,  quand  même  les  pasieurs 
seraient  réprébensiblcs  dans  leur  conduite  , 
ceux  qui  leur  sont  soumis  ne  seraient  pas 
pour  cela  dispensés  de  leur  témoigner  du 
respect.  A  l'égard  de  la  troisième  question, 
il  kl  résout  en  disant  que,  toutes  les  fois 
qu'il  y  a  du  doute  sur  la  consécration  d'une 
église ,  c'est-.Vdire  si  l'on  ne  peut  prouver, 
ni  par  témoins  ,  ni  par  écrit ,  qu'une  église 
ait  été  consacrée,  il  faut  la  consacrer ,  et 
qu'on  doit  observer  la  même  règle  envers 
ceux  dont  on  doute  qu'ils  aient  été  ou  bap- 
tisés ou  confirmés  ,  parce  qu'on  n'est  point 
censé  réitérer  ce  qu'on  ne  sait  pas  certaine- 
ment avoir  déjà  été  pratiqué  ,  et  que,  si  l'on 
ne  levait  pas  ce  doute,  il  pourrait  en  résul- 
ter du  scandale  pour  les  fidèles.  Jean  Diaci'e 
rapporte  une  partie  de  cette  lettre  sous  le 
nom  de  saint  Grégoire.  Hincmar  la  cite  sou- 
vent ,  et  en  rapporte  au  moins  la  troisième 
partie.  Elle  est  aussi  attribuée  à  saint  Gré- 
goire par  Réginon,  abbé  de  Prum,  qni  écri- 
vait vers  l'an   9(10  ;  ainsi  il  ne   parait  pas 
qu'on  puisse  la  lui  contester  :  elle  porte  en- 
core son  nom  dans  un  grand  nombre  de 


X3S 


manuscrits.  Ce  qui  pourrait  embarrasser , 
c'est  qu'elle  est  adressée  à  Félix,  évôipio 
de  Messine  ,  ([ui  était  évèque  de  celte >ille 
dès   la   lu-emière    année    du    ponlilicat   de 
saint  Grégoire,  comme  il  paraît  pai'  la  let- 
tre qu'il  lui  écrivit   en  dale  de  l'iudiclioii 
neuvième,   c'est-fi-dire  de  l'an  390;   or  il 
était  mort  en  395,  puis(|uc  alors  Donus  était 
évèque  de  Messine,  ainsi  qu'on  le  voit  par 
la  lettre  que  saint  Grégoire  lui  adressa  on 
celte  année.   Félix  ne  pouvait  donc  le  con- 
sulter au  sujet   de   ce  qu'il  avait  ordonné 
touchant  les  degrés  de   consangiiiaih!  dans 
sa  lettre  ;ï  Augustin,  éciite  en  GUI.  Mais  on 
trouve  deux  évèques  du  nom  de  Félix,  qui 
ont  g(uiverné  l'i'^glise  de  Messine.  Le  pre- 
mier succéda   à  Encarpus  ,    qui   était  déjà 
avancé  en  âge  lorsque  Pelage  II  lui  écrivit 
en  S80.  Ce  Félix  eut  pour  successeur  Do- 
nus, quelque  temps  avant    l'épiscopat  de 
saint  Grégoire.  .\  Donus  succéda  l'aulre  Fé- 
lix vers  l'an  603  :   car  Douus  était  encore 
évèque  de   Messine  au  commencement  de 
cette  année,  comme  on  le  voit  par  la  dix- 
huitième  lettre  du  treizième  livre,  où  ce  saint 
Pape  lui  recommande  ,  ainsi  qu'aux  autres 
évèques    de   Sicile ,  Adrien   qu'il   envoyait 
pour  régir  le  patrimoine  de  Syracuse.  On 
pourrait  objecter  aussi  que  cette  lettre  est 
chargée  de  répétitions  inutiles,  ce  qui  prou- 
verait qu'elle  a  été  altérée  ;  mais  ces  répé- 
titions sont  assez  fréquentes  dans  les  écrits 
de  saint  Grégoire  :  il  répète  souvent  dans 
ses  lettres  ce  qu'il  avait  dit  ailleurs,  surtout 
dans  son  Pastoral. 

§  XV. 
Appendice  aux  Lettres  de  saint  Grégoire. 

1 .  Nous  aurions  pu  donner  les  extraits  d'un 
plus  giaud  nombre  de  lettres  de  saint  Gré- 
goire ;  mais  nous  nous  en  sommes  abstenus, 
par  la  crainte  de  répéter  souvent  les  mêmes 
choses,  ou  d'en  rapporter  qui  nous  ont  paru 
peu  intéressantes.  Il  y  eu  a  un  grand  nom- 
bre où  il  ne  s'agit  que  de  donner  un  visiteur 
à  une  église,  de  nommer  un  défenseur,  ou 
quelques  autres  olîiciers  pour  une  province 
oii  l'église  romaine  avait  du  bien  ;  un  lec- 
teur du  patrimoine  de  Saint-Pierre  en  Sicile, 
en  Gaule  ou  ailleurs  ;  d'imir  des  évêchés  ou 
des  monastères  ;  de  confirmer  des  donations 
ou  des  teslaments  ;  de  termiuer  des  procès 
k  l'amiable  ;  de  donner  des  ordres  pour  l'é- 
lection d'un  évèque  ;  de  corriger  des  moines 


Rcgln.  an. 
pond.  Ad  lll). 
(]'!  Keclohlii^t. 

diwkjilm  K, 
cnf.  XXX. 


I.  !..  I, 
Eplsl.   iu. 


I-il..  M, 
Epiii.  a. 


Poiirquoi 
l'on  n'a  pas 
dnnrê  l'aua- 
Ijse  de  toLles 
les  leuros  de 
saint  Grégoi' 
ro. 


536 


nisTOïïiK  gén:':rale  des  auteurs  ecclkstastiques. 


ou  des  religieuses  ;  de  payer  les  dettes  des 
pauvres,  ou  de  leur  faire  distribuer  de  quoi 
les  soulager  dans  leurs  nécessités  ;  de  tra- 
vailler à  repousser  les  Lombards ,  ou  à  faire 
la  paix  avec  eux.  L'analyse  de  deux  ou  trois 
lettres  sur  ces  différentes  matières  ,  nous  a 
paru  suffisante  pour  faire  voir  aux  lecteurs 
quelle  dtait  la  discipline  de  ce  tem[)s-l;'i ,  de 
combien  de  soins  saint  Grt'goire  avait  été 
occupé  pendant  son  pontificat,  et  de  quel 
travail  il  était  capable  malgré  ses  inlirmités 
presque  continuelles  :  car,  quoiqu'il  eût  des 
secrétaires,  il  dictait  lui-même  ou  écrivait 
ses  lettres,  ce  qui  est  sensible  par  la  con- 
formité de  Icftr  style  avec  ses  autres  écrits, 
ceqnccco-      2.  Elles  sont  suivies,  dans   la  nouvelle 

lient   ra['r*n-       »t.'  i  i*  ••  •  ,i 

dite  »«i  Ici-  édition,   de  plusieurs  pièces  nui  y  ont  du 

1238.  rapport ,  ou  qui  se  trouvaient  dans  le  re<.;is- 

tre  que  l'on  en  conservait  dans  les  archives 
de  l'Église  romaine.  On  avait  mis  en  télc  son 
symbole,  qui  se  trouve  en  etlet  au  commen- 
cement du  recueil  de  ses  lettres  dans  tous 
jonn.  Di.-  les  manuscrits.  Jean  Diacre  l'a  aussi  rap- 

»"»".. 2.'"  '  porté  dans  la  Vie  de  saint  Grégoire.  Il  est 
plus  étendu  que  ceux  des  apôtres  et  de  Cons- 
tantinople ,  mais  c'est  la  même  doctrine, 
l'ag.  123!.  L'acte  de  déposition  de  Laurent,  arcliidiacre 
de  l'Église  romaine,  et  de  subrogation  d'Ho- 
norat  à  sa  place  ,  faisait  dans  les  anciennes 
éditions  la  première  lettre  du  onzième  livre. 
La  date  est  de  la  septième  année  du  consu- 
lat de  l'empereur  Maurice,  non  qu'il  y  eût 
encore  des  consuls ,  l'empereur  Jusiinien 
avait  aboli  le  consulat  en  541 ,  mais  les  em- 
pereurs eu  prenaient  assez  souvent  le  titre. 
1231.  3.  La  Charte  pour  la  grande  litanie  dans 

la  basilique  de  Sainte-Mario,  ne  se  trouve 
que  dans  peu  de  manuscrits  ;  et  ce  qui  la 
rend  douteuse,  c'est  que  l'inscription  met 
cette  grande  litanie  dans  l'église  de  Sainte- 
Marie,^au  lieu  que  dans  le  corps  de  la  cbiirte 
clleest  indiquéi;  dans  l'églisede  Saint-l'icrre. 
et  qu'il  n'y  est  pas  dit  un  mot  de  celle  (ii- 
Sainte-Marie. 
IM.I.  vo;m       4.  Nous   avons  fait  voir  ailli'iirs  la  fans- 

"•  "    seté  du  privilège  qu'on  dit  avoir  t;té  accordé 

par  saint  Grégoire  au  monastère  de  Saiut- 
.Médard  de  Boissons.  (]e  Pape  tint  un  concile 
à  Home  le  cin(|  juillet  de  l'an  593,  <iui  était 
le  treizième  de  l'empire  de  Mauiice.  Ce  sont 
les  actes  de  ce  concile  que  l'on  a  inlilulc's  : 
pjp.  iL3«.    Décret  (lesuinl  Grégoire.  Ils  faisaient  dans  les 


anciennes  édifions  la  quarante-quatrième 
lettre  du  quatrième  livre.  Les  autres  décrets 
qui  suivent  dans  l'Appendice,  senties  mêmes 
que  ceux  du  concile  que  saint  Grégoire  as- 
sembla à  Rome  pour  juger  l'affaire  de  Jean, 
prêtre  de  l'église  de  Cha!cédoine,qui,  ayant  "^f-'-'''- 
été  condamné  par  Jean,  patriarche  de  Cons- 
tantino[ilc,  pour  cause  d'hérésie,  en  avait 
appelé  au  Saint-SJége.  Il  ^'st  fait  mention  de 
ce  concile  dans  les  lettres  «juinzième,  seiziè- 
me et  dix-septième  du  sixième  livre. 

5.  Saint  Grégoire  en  assembla  deux  autres  '*"■ 
en  GOl.  Il  fil  dans  le  premier  une  cons-  it  s. 
titiilion    en  faveur  des  moines;  dans  l'autre 

il  condamna  le  moine  André,  comme  faus- 
saire. C'est  ce  qu'il  marque  dans  la  soixante- 
quatorzième  lettre  du  onzième  livre,  adressée 
à  Eusébe  de  Thessalonique.  Suit  dans  l'Ap-  "''''• 
pendice  l'acte  de  la  satisfaction  publique  de 
Maxime,  accusé  d'avoir  été  élu  évêque  de 
Salone  par  simonie.  Il  s'en  purgea  par  ser- 
ment sur  le  corps  de  saint  Apollinaire  à 
Ravenne  ;  après  quoi  saint  Grégoire  lui  par- 
donna diverses  fautes  qu'il  avait  commises  , 
et  consentit  i\  ce  qu'il  fût  établi  sur  le 
si('ge  épiscopal  de  Salone,  avec  les  hon- 
neurs du  pallium. 

6.  Les  moines  ne  possédaient  '  rien  en     •■•-  '-"■ 
propre,  et  les  lois  leur  défendaient  de  faire 
testament.  Saint  Grégoire  dispensa  de  cette 

règle  Frobus,  abbé  de  son  monastère  de 
Saint-André;  mais  il  ne  le  fit  qu'après  l'avis 
d'un  concile,  où  assistèrent  cinq  évêques  et 
dix  prêtres.  Les  manuscrits  portent  qu'il  l'as- 
senilila  la  treizième  ou  la  quatorzième  année 
du  règne  de  Maurice,  indiction  quatrième, 
ce  qui  est  une  faute  ;  l'indiction  (]uatrième 
se  rencontre  avec  la  dix-neuvième  année  de 
l'empire  de  ce  prince  :  jiinsi  il  faut  mettre 
ce  concile  en  l'an  GOO.  Probus  y  pri'-senta  sa 
requête,  elle  portail  qu'ayant  quitté  le  monde 
depuis  (juel(|ucs  aniK-es,  il  avait  résolu  de 
demeurer  seul  dans  sa  cellule  le  reste  de  ses 
jours  ;  que  ,  pour  cette  j'aison  ,  il  n'avait 
point  disposé  de  ses  bienr,  sachant  que  son 
lils  lui  succéderait  aussi  bien  ab  intestat  i\ae 
par  testament  ;  mais  qu'étant  un  jour  allé 
rendre  ses  devoirs  à  saint  Grégoire  avec  les 
autres,  le  Pape  lui  avait  ordonné  de  prendre 
la  cli;iri;e  d'abbé  dans  le  monastère  de  Saint- 
Aiidrt',  et  qu'il  avait  été  obligé  d'obéir  aussi- 
tôt, sans  avoir  eu  le  loisir  de  disposer  de  son 


'  Qiiin  ingrcdirnlihiis  mnnasterium  eonverteiuli 
gralia,  iilleritm  nulla  sil  letandi  licentia  :  sed  ul 


rcs  eorum  fjnsdeiii  monaslerii  jurix  finni,  nprrln 
legis  dffinilione  decretnvi  est.  LiV.  I.\,  Epùl.  7. 


CHAPITRE  XI.IX.  —  SAINT  GRl':GOmE  LE  GRANH,  PAPE. 


[vu'  SIÈCLE.] 

bien.  Il  concluait  à  ce  qu'il  lui  fiU  peiuiis 
d'eu  clis[)oscr,  afin,  disait-il,  (jue  son  oin'is- 
Siuico  ne  fût  pas  jirc^juiruialile  à  son  fils,  qui 
('■lait  i)auvre.  Saint  Gréf^oiio,  après  avoir  fait 
retirer  Probus  pour  délibérer  sur  sa  requùte, 
le  fit  rentrer,  et  lui  accorda  la  liberlc';  de 
disposer  de  tous  ses  biens,  comme  s'il  ne  fut 
[)oiut  entré  dans  le  monastère. 

7.  On  lit  ensuite  une  formule  de  renoncia- 
nation  auscliisme.  Elle  est  datée  deCoustanti- 
n(i|ile  le  dix  février,  indictiou  ciniiuièmc  :  ce 
qui  donne  quelque  lieu  de  croire  qu'elle  est 
de  Firmin,  évoque  d'Istrie,  qui  en  ce  temps, 
c'csl-A-dire,  en  601,  renonça  au  sciiisme  ; 
mais  on  ne  peut  douter  que  celle  formule  ou 
piomesse,  comme  elle  est  intitulée,  n'ait  été 
altérée,  puisqu'on  y  fait  jurer  par  le  Dieu 
tout-puissant,  parles  saints  Évangiles,  et  par 
le  salut  et  le  génie  des  empereurs.  Ge  n'était 
point  ainsi  que  les  catholiques  juraient. 
<i  Nous  ne  jurons  point  par  le  génie  de  César, 
disait  '  TertuUicu,  mais  par  son  salul,  plus 
auguste  que  tous  les  génies,  qui  ne  sont  que 
des  démons.  »  On  a  mis  aussi  dans  l'Appen- 
dice unejformule  de  la  manière  d'accorder  le 
pallium  à  un  évèque  ;  puis  l'acte  de  couron- 
nement de  l'empereur  Fhocas,  depuis  qu'il 
eut  fait  mourir  Maurice  et  ses  fils  en  602.  Il 
y  est  fait  mention  de  l'ordre  que  saint  Gré- 
i;oire  douna  de  placer  l'image  de  Phocas  dans 
l'oratoire  de  Saint-Césaire  au  palais. 

S.  Suivent  trois  fragments ,  dont  deux 
sont  tirés  de  Gratien,  c|ui  les  a  cités  sous  le 
nom  de  saint  Grégoire,  et  le  troisième  se  lit 
dans  le  second  livre  de  la  Vie  de  ce  saint  par 
Jean  Diacie.  Ou  voit  par  le  premier,  que  saint 
Giégoire,  écrivant  à  Augustin,  lui  conseille 
ainsi  qu'à  tous  les  ecclésiastiques  d'Angleter- 
re de  commencer  le  jcùue  du  carêmedès  la 
quiuquagésime,  afin  d'ajouter  quelquesjours 
d'abstinence  à  cens  que  les  laïques  étaient 
ojjligés  d'observer.  Il  aurait  souhaité  de  faire 
quelques  règlemeuls  pour  empêcher,  ou  du 
moins  pour  modérer  l'avidité  que  les  person- 
nes du  siècle  témoignaient  pour  la  viande  le 
dimanche  qui  précédait  le  carême,  jusqu'à 
passer  la  moitié  de  la  nuit  à  s'en  remplir; 
mais  il  en  fut  détourné  par  la  crainte  qu'ils 
ne  devinssent  plus  mauvais,  si  on  voulait 
leur  interdire  cet  usage,  où  la  raison  n'avait 


.^;.17 


aucune  part,  mais  la  voluphi  seide.  Il  dcicla' 
ra  (pie,  pour  accomplir  le  jeùiu' ilu  carême, 
il  ne  siillisait  i)as  de  s'abstenir  de  viande, 
qu'il  fallait  aussi  faire  abstinence  de  tout  ce 
qui  vient  de  la  viande,  savoir,  du  lait,  du 
fromage  et  des  œufs,';  que  si  l'on  accoi-dait 
l'usage  du  poisson,  ce  n'était  que  par  ma- 
nière de  soulagement,  et  non  pour  satisfaire 
la  cupidité  et  la  gourmandise.  11  bltlme  les 
repas  somptueux,  et  ceux  qui,  tout  en  s'abs- 
lenant  de  viandes,  chargeaient  leurs  tables 
des  plus  beaux  poissons  de  la  mer.  A  l'égard 
du  vin,  il  en  permet  l'usage  modéré,  disant 
qu'il  n'était  pas  plus  permis  d'excéder  en 
ce  genre,  qu'en  toute  autre  matière  qui  re- 
garde les  plaisirs  du  corps.  Le  second  frag- 
ment est  un  éloge  du  pape  Agapet,  qu'on 
loue  surtout  d'avoir  chassé  de  (^.onstantino- 
ple  Anthime,  qui  eu  avait  usurpé  le  siège 
patriarchal.  Le  troisième  est  un  règlement  '"as.  nfii. 
pour  accorder  l'entrée  dans  les  monastères 
à  tous  ceux  qui  ont  le  domaine  d'eux-mêmes  , 
suit  ecclésiastiques,  soit  laïques,  à  la  charge 
de  ne  leur  permettre  des'y  stabilier,  qu'après 
les  avoir  éprouvés  suivant  les  canons,  et 
qu'autant  qu'ils  ne  seront  coupables  d'aucun 
des  ci'imes  qui  étaient  punis  de  mort  dans 
l'Ancien  Testament. 

ARTICLE  IV. 

DU  SAGHAMENTAIBE  DE  SAINT  GnÉGOlRE,  ET  DE 
SES  AUTRES  ÉCRITS  QUI  REGARDENT  LA  CÉLÉ- 
BRATION DE  l'office  divin. 

1.  On  a  remarque,  dans  l'article  du  pape  sacramer 
tjelase,  qu  il  avait  compose  des  oraisons  et  Grégoire. 
des  préfaces  d'un  style  aisé,  et,  mis  en  ordre 
non-seulement  celles  qu'il  avait  faites  lui- 
môme,  mais  aussi  celles  qui  avaient  été  com- 
posées par  ses  prédécesseurs,  et  que  le  re- 
cueil des  Offices  qui  portait  son  nom  'était 
distribué  en  plusieurs  livres.  Jean  Diacre 
dit  ^  que  saint  Grégoire  retrancha  plusieurs 
choses  du  recueil  de  Gélase,  et  qu'il  en  ajou- 
ta d'autres;  qu'il  recueillit  le  tout  en  un  vo- 
lume intitulé  :  Liviv  des  Sacrements,  ou  Sn- 
cmmentaire,  parce  qu'il  contenait  les  priè- 
res que  le  prêtre  devait  dire  dans  l'adminis- 
tration des  sacrements,  et  principalement 
dans  la  célébration  des  divins  mystères  '. 


Vnvcz   lom. 


'  Tertullian.,  ni  .-l;)  logel.,rap.  xxxii. 

*  Sed  et  GelasiLtnum  codicem  de  Missaruin  so- 
lemniis  iiiulta  subtraliens,  pouca  conrerlens,  non- 
niilla  suiicradjiciens,  in  uniiis  libclli  votuiiiine 
coarctavil,  quod  volumen  Ubrum  Sacramentorum 


prœtilulavU.  Joan.  Diacon.,  lib.  II,  nura.  n. 
'  Le  Sacramentaire  de  Gélase  a  paru  à  Venise 
en  1748,  tom.  II  de  la  Liturgie  ancienne  de  Rome 
ol  dans  le  tome  LXXIV  de  la  Patrologie  latine. 
(L'éditeur.) 


538 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


D  kliiballOD 
de   ft    S«rra* 

tom.  III,  ti], 
Crejor.,  IH'. 


Mcmrd.ool. 

1o  buDC  Itic. 


La  il  il  Florence  de  ce  Sacrameiilaire  d'avec  ce- 
lui de  Gélase  consiste'  surtout  dans  le  nom- 
bre et  la  variété  des  collocles  ou  oraisons. 
Saint  Grégoire  n'ajouta  au  canon  de  la  messe 
que  ces  paroles  :  Dis])osez  de  nos  jours  dans 
votre  jiaix.  Nous  les  disons  encore  aujour- 
d'hui, et  l'ordinaire  de  la  messe  est  le  mê- 
me que  dans  le  Sacranientaire  de  ce  Pape, 
à  la  réserve  des  préfaces  qui  sont  en  moins 
grand  nombre;  mais  celles  que  nous  disons 
sont  les  mêmes  que  dans  son  Sacramen- 
taire  '. 

2.  On  y  trouve  d'abord  l'ordre  de  la  messe 
eu  .uénér;»Jj  elle  commence  parce  que  nous 
appelons  Introït  :  c'était  une  antienne  que 
l'on  chantait  pendant  que  l'on  entrait  à  l'é- 
glise, et  que  chacun  y  prenait  sa  place.  Cette 
antienne  variait  suivant  la  ditl'érence  des  fê- 
tes. Ou  en  trouve  dansl'Anliidioniei'  de  saint 
Grégoire  pour  toutes  les  fêles  et  dinianclies 
de  l'année,  avec  le  commencement  du  psau- 
me que  l'on  chantait  après  cette  antienne. 
L'introït  variait  suivant  la  ditl'érence  des  fê- 
tes. 11  était  autre  aux  jours  de  fêtes,  autre 
dans  les  messes  quotidiennes,  c'est-à-dire 
que  l'on  prenait  pour  l'introït  un  psaume  qui 
avait  du  rapport  à  la  solennité  du  jour.  On 
disait  ensuite  Kyrie  eleison;  puis,  si  c'é- 
tait un  évêqne  qui  célébrât,  il  tiis;iil  le  Glo- 
ria in  ejicelsis,  encore  n'était-ce  que  les  di- 
manches et  les  fêtes;  les  prêtres  ne  le  di- 
saient qu'à  Pâques.  On  ne  (lisait  ni  le  Gloria 
in  excelsis,  ni  Allelviu,  les  j(jiirs  où  il  y  avait 
des  litanies  ou  processions,  parce  qu'on  les 
considérait  comme  des  jours  de  deuil.  En- 
suite le  céli'brant  récilait  l'oraison  ou  col- 
lecte du  jour;  ])uis  il  lisait  i'ivpiti'e,  qui  était 
tirée  de  celles  de  saint  Paul;  ensuite  le  (ira- 
duel  ou  Alléluia.  Ce  qui  étant  achevé,  il  li- 
sait l'Evantrilc,  l'otrertoire  et  l'oraison  sur  les 
oll'randes;  latiuelle  étant  achevée,  il  disait  à 
haute  voix  la  préface,  qui  était  suivie  du 
Sanctiis,  qu'il  répétait  trois  fois.  Suivait  le  ca- 
non, lequel  étant  fini,  il  récitait  l'oraison  ilo- 
minicalc,  saluait  le  pcuiilc  en  lui  souliailant 
la  pai.\;  puis  il  disait  l'Agniis  /Jci.  Tel  est 
l'ordre  de  la  messe  dans  le  Sacramenlaire 
de  saint  Grétroire.  11  n'y  est  pai'ié  ni  d'a- 
colytes, ni  de  sons-diacres,  ni  de  di;icres,  ni 
des  autres  olliciers  qui  assistaient  le  Pape 
dans  la  célébration  des  mystères  aux  jours 


solennels;  le  nombre  de  ces  oUSciersct  leurs 
fonctions  sont  marqués  dans  les  anciens  or- 
dres romains,  en  cette  manière  pour  le  jour 
de  Pûques. 

3.  Rome  avait  été  divisée  par  .Auguste  en 
quatorze  régions  ou  quartiers;  mais  l'usage 
ecclésiasti(]ue  les  avait  réduits  .'i  sept,  sui- 
vant lesquels  étaient  distribuées  toutes  les 
églises  et  tout  le  clergé  de  la  ville  ;  et  ils  ser- 
vaient tour  i\  tour,  â  commencer  par  les 
clercs  de  la  troisième  région  pour  le  diman- 
che, puis  ceux  de  la  quatrième  pour  le  lun- 
di, et  ainsi  des  autres.  Tous  les  acolytes  de 
la  troisième  région  se  rendaient  donc  le  di- 
manche de  Pûqucs  dès  le  matin  au  palais  de 
Latran,  et  avec  eux  les  défenseurs  de  toutes 
les  régions.  Le  reste  du  clergé  allait  aussi 
dès  le  matin  à  l'église  de  la  station,  qui  en 
ce  jour  se  faisait  à  Sainte-Marie-Majeure.  Le 
Pape  et  les  principaux  olliciers  soilaieut  à 
cheval,  à  cause  de  la  longueur  du  chemin; 
les  acolytes  et  les  défenseurs  l'accompa- 
gnaient A  pied.  L'un  d'eux  portail  à  sa  main 
le  sain!  chrême  en  une  tîole  couverte  d'une 
serviette;  d'autres  apportaient  du  palais 
même  de  Latran  les  livres  et  les  vases  néces- 
saires pour  le  service.  Lorsque  le  Pape  ap- 
prochait, les  acolytes  et  les  défenseurs  qui 
étaient  de  service  ce  jour-là,  allaient  au  de- 
vant avec  le  prêtre  titulaire  de  la  station  ;  les 
diacres  lui  aidaient  ù  descendre  de  cheval, 
et  il  entrait  d'abord  dans  la  sacristie,  h  la 
porte  de  laquelle  les  diacres  changeaient 
d'habit.  Celui  qui  devait  lire  l'évangile  en 
ouvrait  le  sceau,  et  préparait  l'endroit  ;  puis 
un  acolyte  le  portait  dans  le  sanctuaire,  et 
un  sous-diacre  le  posait  sur  l'autel  avec  res- 
pect. Pendant  que  tout  cela  se  faisait,  le 
Pape  changeait  d'habit  par  les  mains  des 
sons-diacres;  Idii  lui  donnait  l'aube,  qui  se 
mettait  sur  la  chemise,  un  autre  la  ceintu- 
re, l'amict,  la  dalmatique  de  toile,  la  grande 
dalmatique  ,  et  enfin  la  chasuble;  le  pri- 
micier  et  le  secondicier  ajustaient  sur  lui 
tous  ces  vêtements;  un  diacre  lui  mettait  le 
pallium,  puis  un  sous-diacre  régionnaire  lui 
piésentait  le  manipule,  en  disant  :  Un  tel 
lira  l'i-pitre,  un  tel  chaulera.  Sitôt  que  le  Pape 
avait  fait  signe  pour  commencer,  il  sortait  à 
la  porle  de  la  sacristie,  et  disait  :  Allumez. 
Alors  les   chantres  se   rangeaii'ii!    d.ins    le 


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«  Mabilloii,  De  Lilurgia  Gallicana.hh.  I,  caji.  u,       U.  Gniraixacr,  Jnstit.  lUuigiqucs,  tom.  1,  pag.  162 
nom.  5.  et  suiv.  (L'ddiUur.) 

<  Ou  pi'iit  vuir  ^ur  la  Liturgie  de  Baiut  Grégoire, 


CHAPITHE  XMX.  —  SAINT  GnÉGOlUE  LE  GRAND,  PAPE. 


[va'  SIÈCLE.] 

cliojiir,  et  leur  cliof  comuuMiriiil  riinlicimo 
pour  rintroïl,  ((iii  ('lait  suivi  du  |)s;uiuic  en- 
tier, dont  ou  ne  dit  plus  qu'uu  verset.  Aus- 
sitôt (juo  l'on  culeudait  ciiaulcr,  le  Pape 
sorljùl  de  la  sacristie,  s'ap[)uyaul  à  droite 
sur  l'aicliidiacre,  et  i\  pauclic  sur  le  diacre, 
précédé  de  l'euceus  et  de  se[tt  chandeliers 
portés  par  sept  acolytes.  Avant  ([u'il  tut  à 
l'autel,  les  diacres,  qui  étaient  déj;\  dans  le 
sanctuaire,  ôtaicnt  leurs  planètes  ou  chasu- 
bles ;  car  tous  en  portaienl,  j(is(pi'aux  aco- 
lytes. Eu  allani,  deux  acolytes  présentaient 
au  Pape  une  boite  ouverte,  avec  le  Saint- 
Sacrement;  le  Pape  ou  le  diacre,  après  l'a- 
voir salué  d'une  inclination  de  tète,  regar- 
dait s'il  y  en  avait  plus  qu'il  n'en  fallait  pour 
mettre  dans  le  calice,  et  en  ce  cas  il  faisait 
mettre  '  le  surplus  dans  la  réserve. 

4.  Etant  arrivé  ;\  l'autel,  il  faisait  signe  de 
dire  GlQriu  Patri,  et  de  liuir  le  psaume  de 
l'introït.  Les  diacres  baisaient  les  côtés  de 
l'autel,  et  le  Pape,  après  avoir  prié  quel- 
que temps  incliné  pour  demander  la  rémis- 
sion de  ses  péchés,  baisait  l'Évangile  et  l'au- 
tel au  milieu,  et  montait  -i  son  siège,  devant 
lequel  il  demeurait  debout,  tournant  le  vi- 
sage à  l'orient,  et  le  dos  au  peuple  ;  car  le 
siège  était  au  milieu  derrière  Taulel.  ALrs 
on  chantait /lyri'ee/mon,  et  on  continuait  jus- 
qu'à ce  que  le  Pape  fit  signe  de  le  finir.  Se 
retournant  ensuite  vers  le  peuple,  il  com- 
meui^ait  Gloria  in  excelsis,  et  se  retournait  à 
l'orient  jusqu'à  ce  qu'il  fùtfiui.  Alors  il  saluait 
le  peuple  en  disant  :  «  la  paix  soit  avec  vous  ;  » 
puis  il  se  relournait  à  l'orient,  et  disait  l'o- 
raison ou  collecte  du  jour,  après  laquelle  il 
s'asseyait  tourné  vers  le  peuple,  et  faisait 
signe  aux  évèques  et  aux  prêtres  de  s'as- 
seoir. Ils  étaient  a  ses  côtés,  les  évèques  à 
droite,  les  prêtres  à  gauche,  dans  le  demi- 
cercle  qui  enfermait  l'autel  pai:  derrière. 

5.  Le  sous-diacre  qui  devait  lire  l'Épitre, 
en  voyant  le  Pape  assis ,  montait  sur  l'am- 
bon  ,  c'était  un  pupitre  ou  petite  tribune 
élevée  de  quelques  marches  à  côté  du 
chœur.  On  en  Irouve  jusqu'à  trois  dans  les 
anciennes  églises  de  Rome  :  à  droite  un 
pour  l'Épitre  tourné,  vers  l'autel  ;  un  pour  les 
prophéties,  tourné  vers  le  peuple  ;  un  troi- 
sième à  gauche  plus  élevé  et  plus  orné,  pour 
l'Évangile.  Apres  la  lecture  de  l'Épitre  ,  le 
chantre  montait  sur  l'ambon  avec  son  livTC 


S30 


nommé  Graduel  ou  Anti/j/ionier  ,  et  chaiiliiit 
le  ri'pons  (|ue    nous    imruuions    graihu^l    à 
cause  des  degrés  de   l'ambon,  et  n'^pous  ;\ 
cause  ipie  le  chœur  répond  au  chantre.  Un 
chantait  ensuite,  selon  le  lemps.  Alléluia,  ou 
le  trait,  ainsi  nommé  à  cause  de  la  manière 
dont  il  se  chaule,  eu  tniinanl.  Ensuit(>  le  dia- 
cre venait  baiser  les  pieds  du  Pape  ,  qui  lui 
donnait  sa  bénédiction  pour  l'Evangile,  en 
disant  :  Ij;  Seigneur  soit  dans  ton  cœur,  et 
h;  resle  ;  puis  le  diacre  venait  devant  l'au- 
tel ,  où  ayant  baisé  l'Évangile,  il  le  prenait 
entre  ses  mains,  et  marchait  avec  deux  sous- 
diacres  ,  dont  l'un    portait   l'encensoir  ,   et 
deux  acolytes  devant  portaient  des  chande- 
liers. Le  diacre  montait  seul  sur  l'ambon,  et 
lisait  tourné  vers  le  midi ,  qui  était  le  côti': 
des  liouimes  :   car  ils  étaient  séparés  des 
femmes    dans  l'église.   Après  qu'on  l'avail 
lu  ,  un  sous-diacre  le  portait  à  baiser  à  tout 
le  monde  ;  puis  il  était  remis  dans  sa  boîte 
et  scellé  ;  ce  qui  semble  marquer  que  ce  n'é- 
tait pas  un  livre  relié   comme  les  nôtres  , 
mais  un  rouleau  à  l'antique.  On  ne  disait 
pas  encore  alors  le  symbole  à  la  messe  dans 
l'Eglise  romaine,  qui  n'ayant  jamais  été  in- 
feclée  d'aucune  hérésie  ,  n'avait  pas  besoin 
de  faire   profession   de  sa    foi.   Si  le  Pape 
prêchait ,  ce  que  saint  Grégoire  faisait  sou- 
vent ,   c'était  après  l'évangile.  Après  avoir 
salué  le  peuple  par  Boininus  vobiscum,  et  dit 
Oremus  ,  le  ;liacic  marchait  vers  l'autel ,  ac- 
compagné d'un  acolyte  portant  le  calice  ,  et 
un  corporal  dessus  ,  qu'il  présentait  au  dia- 
cre. Le  diacre  le  mettait  sur  l'autel,  et  jetait 
l'autre  bout  à  un  autre  diacre  pour  l'éten- 
dre :  car  c'était  une  grande  nappe  qui  cou- 
vrait tout  l'autel.  Alors  le  Pape  descendait 
du  sanctuaire  ,  soutenu  par  les  deux  pi  imi- 
ciers  des  notaires  et  des  défenseurs,  et  mar- 
chait vers  la  place  du  sénat  pour  recevoir 
les  otïrandes  des  grands  selon  leur  rang, 
c'est-à-dire  le  pain  et  le  vin  poui-  le  sacri- 
fice. Le  Pape  prenait  les  pains,  qu'il  donnait 
au  sons-diacre  régionnaire,et  on  les  mettait 
dans  une  nappe  que  tenaient  deux  acolytes. 
L'archidiacre  suivait  le  Pape,  prenait  les  bu- 
rettes ,  et  versait  le  vin  dans  un  grand  ca- 
lice que  tenait  un  sous-diacre  ,   suivi  d'un 
acolyte  portant  un  autre  vase  pour  vider  le 
calice,  quand  il  était  plein.  Après  le  Pape, 
l'évcque  semainiei'  recevait  les  auties  pains, 


Maliillon, 
C  0  m  m  e  n  t., 
png.  42,  4'J. 


'  Pontifex  vel  diaconiis  salutnt  sancta,  et  con- 
lemplaiis  ul  si  fueril  superabundaiis,  priecipiat 


?('  ponalur.  Ordorom.,  paj 
on.  losg. 


,  s,  Édil.  Slabil.,  Paris, 


540 


HISTOIRE  GÉNÉllALl-:  DES  AUTEURS  ECCLi;SIAST!QUES. 


suivi  d'un  diacre  qui  recevait  le  vin  ;  et  des 
prêtres  aidaient  encore,  s'il  était  besoin.  Le 
Pape  passait  ensuite  du  côté  des  femmes,  et 
recevait  leurs  oflrandes  ;  ainsi  tout  le  peu- 
ple demeurait  rantré  à  sa  place.  Les  pains 
étaient  ronds,  comme  il  parait  en  ce  que 
saint  Grégoire  les  appelle  '  des  cotironnes,  et 
chaciui  les  faisait  Ini-mémc.  On  le  voit  par 
riiisloire  d'une  dame  romaine,  qui  en  rece- 
vant la  communion  de  la  main  de  saint  Gré- 
goire ,  et  lui  entendant  dire  les  paroles  or- 
dinaires, ne  put  s'empêcher  de  sourire  de 
ce  qu'il  nommait  le  corps  de  Jésus-Christ  le 
pain  qu'elle  avait  fait  de  ses  mains.  Paul  ' 
Diacre,  qui  rapporte  le  premier  ce  fait,  ajou- 
te que  saint  Grégoire  fit  garder  celte  parti- 
cule de  l'Eucharistie  ,  et  que  s'étant  mis  en 
prières,  i!  la  fit  voir  à  cette  femme,  changée 
en  chair ,  en  présence  de  tout  le  peuple.  Le 
Pape  ,  après  avoir  reçu  les  olTrandes  ,  reve- 
nait à  son  siège,  lavait  ses  mains,  et  l'ar- 
chidiacre aussi  ;  j.uis,  quand  le  Pape  lui  fai- 
sait signe  ,  il  s'approchait  de  l'autel ,  et  ar- 
rangeait dessus  les  pains  que  les  sous-dia- 
cres lui  fournissaient ,  et  t'n  mettait  autant 
qu'il  jugeait  devoir  suffire  pour  la  commu- 
nion, du  peuple  ;  puis  il  prenait  la  burette 
du  Pape  de  la  main  du  sous-diacre  oblation- 
naire,  et  la  versait  dans  le  calice  par  une 
couloire ,  afin  que  le  vin  fut  plus  pur.  11  re- 
cevait aussi  celles  des  diacres.  Un  sous-dia- 
cre descendait  au  chœur,  et  recevait  de  la 
main  d\i  premier  chantre  le  vase  d'eau 
qu'il  appoilait  à  l'archidiacre,  et  celui-ci  en 
versait  en  forme  de  croix  dans  le  calice. 
Alors  le  Pape  descendait  de  son  siège  à  l'au- 
tel qu'il  baisait,  et  recevait  les  otl'randos  des 
prêtres  et  des  diacres,  et  enfin  la  sienne  que 
l'archidiacre  lui  présentait  ;  ainsi  tout  le 
monde  ofl'rait,  le  peuple,  le  clergé  ,  le  Pape 
même  ;  mais  il  y  a  plus  de  quatre  [cimj] 
cents  ans  que  les  laïques  n'oll'rent  plus  la 
matière  du  sacrifice.  Ensuite  l'archidiacre 
prenait  le  calice  de  la  main  du  sous-diacre  , 
et  le  mettait  sur  l'aiilel  auprès  de  l'hostie 
du  pape,  mais  ;i  droite  ;  ce  calice  avait  deux 
anses  enveloppées  d'un  linge  que  l'on  nom- 
mait olferloire  ;  cependant  ou  chantait  l'of- 
fertoire ;  cependant  on  chantait  l'oirertoire, 
c'est-à-dire  un  psaume  avec  son  antienne, 
et  quand  il  était  temps,  le  Pape  regardait  le 


'  Lib.  IV  Dialog.,  cn\).  LV. 
'  Paulus  Diacoii.  Yiia  Grcgor.,  iiiuii.  18;  Joan. 
Diacou.,  lib.  Il  De  Vila  Greg.,  uum.  4t. 


chœur,  et  faisait  signe  de  finir;  puis  incliné 
vers  l'autel,  les  évêques  derrière  lui ,  avec 
les  prêtres  et  les  diacres  tout  autour,  il  di- 
sait l'oraison  sur  les  otl'randes  ,  que  nous 
appelons  secrètes,  parce  qu'elle  se  dit  bas; 
puis  il  commençait  la  préface  du  sacrifice. 

6.  La  préface  finie,  on  chantait  l'hymne 
angélique  ,  c'est-à-dire  le  Snnettm  ,  en  répé- 
tant deux  ftns  Ilosanna;  après  quoi  le  Pape 
commençait  le  Canon,  qu'il  disait  seul  à  voix 
basse  ,  étant  droit  devant  l'autel.  Pendant 
ce  temps,  les  prêtres,  les  diacres  et  les  sous- 
diacres  demeuraient  debout  et  inclinés  dans 
le  sanctuaire  :  car,  le  dimanche  ,  on  ne  llé- 
chissait  pas  les  genoux.  Le  Canon  de  la  messe 
est ,  dans  le  Sacramentaire  de  saint  Gré- 
goire, le  même  que  nous  disons,  et  avec  les 
mêmes  signes  de  croix  ,  à  l'exception  de 
ceux  que  nous  faisons  au  commencement 
du  canon;  ils  sont  marqués  dans  l'ancien 
Ordre  romain.  Cet  Ordre  ne  met  point  d'au- 
tre élévation  de  l'hostie  que  celle  qui  se  fait 
à  la  fin  du  canon,  en  disant  per  ipsum  et 
CHin  ipso.  Alors  l'archirliacrc  prenait  le  ca- 
lice par  les  anses,  et  l'élevait  auprès  du  Pa- 
pe, qui  le  touchait  par  le  côté,  avec  les  hos- 
ties, puis  les  remettait  fi  leur  place.  L'aco- 
lyte, à  qui  dès  le  commencement  du  canon 
l'on  avait  donné  la  patène  n  gai-dcr,  et  qui 
l'avait  tenue  devant  sa  poitrine  dans  un  linge 
attaché  à  son  cou  en  écharpe,  la  donnait 
après  l'Oraison  dominicale  h  un  sous-diacre, 
qui ,  après  l'oraison  qui  se  dit  ensuite  ,  la 
remettait  au  sous-diacre  régionnaire  ;  rai-- 
chidiacre  la  recevait  de  lui,  et  après  l'avoir 
baisée,  il  la  donnait  au  second  diacre  pour 
la  tenir.  Le  Pape  ayant  dit  :  Jm  paix  du  Sei- 
gneur soit  (irec  vous,  faisait  de  la  main  trois 
signes  de  croix  sur  le  calice ,  et  y  mettait 
l'hostie  consacrée,  c'est -.i-dirc  celle  du  sa- 
crilice  précédent,  qui  lui  avait  été  présentée 
dans  une  boite  ouverte  par  deux  acolytes, 
comme  il  allait  de  la  sacristie  a  l'autel.  Aloi^s 
l'archidiacre  doiuiait  la  paix ,  c'est-à-dire  le 
baiser,  au  premier  évêque  ,  qui  la  donnait 
au  suivant,  et  ainsi  les  autres  par  ordre.  Le 
peuple  en  faisait  de  même,  les  liuunui'S  et 
les  femmes  sépai-émenl.  Ensuite  la  fraction 
de  rencharislie  se  faisait  en  cette  luanièru  : 
Le  Pape  rompait  d'.ibnrd  une  ilc  ses  Ixislics 
du  coté  droit,  et  laissait  sur  l'autel  la  particule 
qu'il  avait  rompue,  mettant  les  autres  hosties 
sur  la  i)alèue  que  tenait  le  second  diacre,  puis 
il  retournait  à  son  siège.  L'archidiacre  pre- 
nait le  calice,  et  le  donnait  à  tenir  au  coin  de 


CaBOn  Ai  la 
Mr»>c.  Coiu* 
DionlOB. 


Mablll.1,, 
C  o  m  m  e  n  I  . 
l»g,  a  el  '•!. 


U.(I..|.C. 


IM<  .  |a(. 


CITAPITRE  XUX.  —  SAINT  GRl'C.OIRE  LE  GRAND,  PAPE. 


I 


M11..110D 

m  m  on  t 
;.  3C  elol. 


Cn 


» 


[vil*  SIÈCLE.] 

l'autel  (lu  cûlû  droit  par  nn  pous-diarre  ; 
après  (pioi  il  prenait  los  iiostics,  et  les  met- 
tait dans  des  sacs  tenus  par  des  acolytes,  qui 
les  portaient  aux  iHèques  et  aux  prêtres 
pour  l'oniprp  les  liosties;  mais  deux  sous- 
diacres  niarcliaieut  devant,  portant  au  Pape 
lit  patène  où  étaient  les  hostii.'s  du  Pa[)e  ,  et 
deux  diacres  lus  rompaient  lorscpi'il  leui'  en 
faisait  le  sijjne.  L'areiiidiacre  vidait  l'autel , 
en  n'y  laissant  que  la  particule  que  le  Pape 
avait  rompue  :  car  on  avait  soin,  pendant 
toute  la  messe,  que  l'autel  ne  fût  point  sans 
sacrifice.  L'archidiacre  taisait  sii^nie  au  chœur 
de  chauler  Aguus  Iki ,  et  se  rangeait  auprès 
du  l'apc  ,  à  qui  un  diacre  portait  la  patène 
avec  les  hosties  rompues.  Le  Pape,  toujours 
cl  son  siéf^e  ,  communiait  dehout  ,  et  tourné 
à  l'orient  ;  et ,  de  la  même  hostie  qu'il  avait 
mordue  ,  il  en  mettait  dans  le  calice  que 
tenait  l'archidiacre  ,  en  disant  les  mêmes 
paioles  que  dit  encore  le  prêtre  en  mêlant 
les  deux  espèces,  fiai  commixtio  et  consecra- 
tio,  etc.  Ainsi  on  mettait  dans  le  calice  deux 
particules  consacrées  ,  une  du  sacrifice  pré- 
cédent ,  une  du  présent.  Ensuite  le  Pape 
prenait  le  précieux  sang  de  la  main  de  l'ar- 
chidiacre,  qui,  tenant  le  calice  ,  venait  au 
coin  de  l'autel,  et  annonçait  la  station  pour 
le  jour  suivant  ;  puis  il  versait  un  peu  du 
calice  dans  un  vase  plein  de  vin  que  tenait 
un  acolyte  :  car  on  croyait  que  le  vin  était 
entièrement  consacré  par  le  mélange  du 
sang  de  Notrc-Seignein-  ;  mais  ailleurs  on 
ne  versait  du  vin  dans  le  calice  où  était  le 
sang  précieux,  que  lorsqu'on  s'apercevait 
qu'il  n'y  eu  avait  pas  assez  pour  ceux  qui 
devaient  communier.  Ensuite  les  évêques 
s'approchaient  du  siège  pour  communier  de 
la  main  du  Pape  ,  puis  les  prêtres  ;  l'archi- 
diacre les  communiait  du  calice,  ce  que  l'on 
appelait  confirmer.  Après  la  communion  de 
ceux  qui  étaient  dans  le  sanctuaire ,  l'archi- 
diacre versait  le  reste  du  précieux  sang 
dans  le  même  vase  où  il  en  avait  déjà  versé, 
et  donnait  à  un  sous-diacre  le  calice  vide 
pour  le  serrer.  Alors  le  Pape  descendait  de 
son  siège  pour  communier  ceux  qui  étaient 
du  rang  du  sénat ,  et  l'arcliidiacre  suivait 
pour  leur  donner  l'espèce  du  vin  qu'ils  pre- 
naient avec  un  chalumeau  d'or.  Les  évê- 
ques  et  les  prêtres  portaient  ensuite  la  com- 
munion au  peuple  ,  suivis  des  diacres  pour 
les  espèces  du  vin  ;  et  après  avoir  com- 
munié les  hommes  du  côté  droit ,  ils  pas- 
lUii.poE-   salent  du  côté  des  femmes.  Dès  que  le  Pape 


Ml 


IhlatiîlIoQ 
liment. 
,  37,  93. 


commençait  ;'i  donner  la  communion  au  sé- 
nat,  le  chu'ur  eiiloimait  l'antienne  pour  la 
communion  avec  le  psaume  qu'il  continuait 
de  chanter,  jusqu';"!  ce  que  tout  le  peuple 
eût  couiniunié.  Le  Pape,  étant  revenu  à  ^on 
siège  ,  coiniiiuiiiait  encore  quelques  person- 
nes du  clergé,  c'est-ci-dirclesrégionnaireset 
tous  ceux  qui  l'avaient  accompagnt';,  on  ipii 
avaient  servi  dans  des  ministères  inférieurs, 
comme  ti  tenir  la  patène,  à  donner  ù  laver, 
à  essuyer  les  mains  ;  puis  il  regardait  si 
tout  le  peuple  avait  communié  ,  et  faisqit 
signe  au  sous-diacre  de  donner  au  chœur  le 
signal  de  dire  Glo)-ia  Patri  ;  apvis  quoi  ils 
répétaient  l'antienne  ,  et  cessaient.  Ces  an- 
tiennes sont  marquées  dans  l'Antiphonier 
de  s:iiiit  Grégoire  ,  comme  nous  les  disons 
encore  ;  mais  nous  ne  disons  plus  les  psau- 
mes, qui  toutefois  y  sont  marqués. 

7.  L'antienne  finie,  le  Pape  se  levait  de 
son  siège  et  venait  à  l'autel,  où  il  disait  le 
dernier  Dominus  vobiscum,  sans  se  tourner 
vers  le  peuple,  et  l'oraison  que  nous  ncm- 
mons  postcommunion,  et  qu'on  appelait  alors 
la  conclusion.  Elle  est  marquée  dans  le  Sa- 
crameutaire  de  saint  Grégoire,  avec  quel- 
ques autres  pour  changer  au  besoin.  Ensuite 
un  diacre  choisi  par  l'archidiacre  regardait 
le  Pape,  et  quand  il  lui  faisait  signe,  il  di- 
sait au  peuple  :  Ite,  Missa  est,  pour  le  congé- 
dier. Le  Pape  letournait  à  la  sacristie,  pré- 
cédé de  l'encens  et  des  sept  chandeliers.  Au 
moment  où  il  descendait  de  son  siège  dans  le 
presbytère,  les  évêques  lui  demandaient  sa 
bénédiction  en  disant  :  Jubé,  Domne,  benedi- 
cere;  il  la  leur  donnait,  puis  aux  prêtres,  et 
aux  autres  ordres,  à  mesure  qu'ils  la  lui  de- 
mandaient :  c'est  la  seule  bénédiction  mar- 
quée dans  cette  messe  pontificale.  L'Ordre 
romain  qui  en  prescrit  toutes  les  cérémonies 
est  très-ancien  ;  on  le  croit  même  du  temps 
de  saint  Grégoire,  quoiqu'on  ne  doute  pas 
que  l'on  n'y  ait  ajouté  quelque  chose  dans 
les  siècles  suivants.  Ce  qui  en  prouve  l'anti- 
quité, ce  sont  les  cgloijues,  ou  e.xplications 
d'Amalaire,  clerc  '  de  l'église  de  Metz,  et 
depuis  chorévèque  de  Lyon,  qui  éci'ivait  au 
commencement  du  neuvième  siècle  ;  le  ter- 
me de  ferment,  employé  pour  signifier  l'Eu- 
charistie, et  l'usage  de  la  porter  dans  une 
boite  devant  le  Pape  lorsqu'il  allait  h  l'au- 
tel. Le  pape  Innocent  I"  '  prend  le  terme  de 

'  Toji).  Il  Muswi  Itulici,  pag.  5i9. 

'  luuoc.  1,  Epùit.  ad  Deccntium,  mim.  22, 


Fin  Je  11 
Me«o. 


I 


542 


HISTOmR  OÉNIvRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Mr&se«|Our 
loute  l'aoDce* 


ferment  dans  le  môme  sens,  pf  nous  avons 
\u  dHPs  uiip  aiuicniie  '  LituiL-'ip,  (jii'nn  croit 
être  de  «aint  (jermain  évêque  de  Paris,  mort 
en  57G,  qu'avant  l'oMalion  du  pain  et  du  vin, 
on  apportait  sur  l'anlel  l'eucliarislie  dans  un 
vase  en  forme  de  tour,  où  elle  élait  en  n'-- 
serve.  Outre  cet  ancien  Ordre  romain,  I)om 
Mahillon  en  a  donné  quatorze  autres  recueil- 
lis par  divers  auteurs  en  diU'ërenls  siècles. 
Le  deinior,  t|ui  est  de  Pieiie  .Amélius,  rappor- 
te comment  les  oUices  divins  se  célébraient 
à  Rome  sous  Boniface  IX,  c'est-à-dire  vers 
l'an  1390. 

8.  Uevenons  au  Sacramenlaire  de  saint 
Grégoire.  Après  avoir  marrjué  l'ordj'e  de  la 
messe  en  gfhicral,  il  met  les  oraisons  ou  col- 
lectes que  l'on  devait  dire  pendant  tont  le 
cours  de  l'année,  avec  une  préface  particu- 
lière presque  pour  cliaqne  messe.  Nous  n'en 
.ivons  gardé  que  neuf.  On  lit  dans  '  Burchard 
que  Pelage  II  les  avait  réduites  A  ce  nombre. 
Mais  comment  saint  Gi'égoire,  son  succes- 
seur immédiat,  eût-il  contrevenu  i\  ce  déci'et 
en  en  mettant  un  bien  plus  grand  nombre? 
On  sait  d'ailleurs  par  le  témoignage  de  Guit- 
mond,  qui  écrivait  dans  le  onzième  siècle, 
et  d'Algérius  qui  vivait  dans  le  douzième, 
que  l'en  disait  alors  une  préface  particulière, 
le  cinquième  dimanche  d'après  l'Epiphanie, 
telle  qu'elle  se  lit  encore  dans  le  Sacrumen- 
fidre  de  saint  Gréfioirc;  ce  ne  peut  donc 
être  que  depuis  le  douzième  siècle  que  l'on 
aura  diminue  le  nombre  des  préfaces,  et 
qu'on  se  sera  restreint  à  neuf,  en  se  conten- 
tant d'en  changer  dans  les  [irincipales  so- 
lennités. La  première  messe  est  pour  la  veil- 
le de  Noël.  Il  y  en  a  trois  pour  le  jour  de  la 
fête,  parce  qu'on  en  disait  trois  ce  jour-là, 
mais  en  des  églises  difféientes.  Les  fêtes  de 
saint  Etienne,  de  saint  Jean,  des  saints  In- 
nocents et  (le  saint  Sylvestre,  ont  aussi  des 
messes  particulières.  Suivent  coHes  du  jour 
de  l'octiivp  de  Noël,  du  dimanche  d'après 
Noël,  de  la  veille  et  du  jour  de  l'Epiphanie, 
du  dimanche  suivant,  du  jour  de  l'octave, 
des  cinq  dimanches  d'après;  des  fêles  de 
saint  Félix,  de  saint  Maicel  pape,  de  sainte 
Prisque,  de  salut  Fabien,  de  saiul  Sébastien, 
de  sainte  Agnès,  de  saint  Vincent,  de  la  con- 
version do  saint  Paul,  de  saint  Préjecte,  de 
la  Purification  de  la  sainte  Vierge,  de  sainte 
Agathe,  de  saint  Valentin,  de  la  Chaire  do 

'  Marlenne,  toni.  V  Anecdot ,  pag.  OS. 
*  Burclinnl.,  li^.  III,  cap.  LXIX. 


saint  Pierre,  de  saint  Mathias  et  de  quantité 
d'autres  saints,  dont  l'Eglise  romaine  faisait 
l'oUice.  On  serait  surpris  d'y  en  voir  une 
pour  la  fêle  même  de  saint  Grégoire,  d'au- 
tres pour  la  fête  de  la  Nativité  de  la  Vierge, 
de  sainte  Marie  aux  Martyrs,  pour  la  veille 
et  le  jour  de  la  Toussaint,  des  prières  pour 
le  roi  très-chrétien,  et  quantité  d'autres  mes- 
ses et  prières  pour  des  fêtes  qui  n'ont  eu 
lieu  que  depuis  sa  mort,  si  l'on  ne  savait 
que,  dans  les  livres  d'usage  ordinaire,  il  se 
fait  diverses  éditions  suivant  les  difl'érentes 
occasions,  comme  on  en  fait  dans  les  calen- 
driers à  mesure  qu'il  se  trouve  quelque 
nouveau  saint  à  y  placer.  Non-seulement 
tous  les  dimanches  de  l'année  ont  une  mes- 
se particulière;  il  y  en  a  pour  chaque  jour 
du  carême,  même  pour  les  jeudis,  qui  n'en 
ont  poiut  dans  le  Sacramenlaire  du  pape 
Gélase.  Le  mercredi-saint,  on  commençait 
l'office  à  tierce,  c'est-à-dire  à  neuf  heures  du 
matin.  On  y  disait  les  oraisons  solennelles 
et  sacerdotales  pour  les  personnes  de  tout 
état  et  de  toutes  nations,  comme  au  vendre- 
di-saint, avec  les  mêmes  géuullexions,  et 
dans  le  même  ordre.  Nous  ne  les  disons  plus 
que  le  vendredi-saint.  Elles  ne  se  trouvent 
môme  au  mercredi,  dans  le  Sacramenlaire 
de  saint  Grégoire,  que  dans  un  exemplaire 
du  Vatican  ;  le  Sacramentaire  marque  qu'à 
la  huitième  oraison,  qui  est  pour  les  juifs 
perfides,  l'on  ne  doit  point  fléchir  le  genou. 
La  raison  qu'eu  donne  Alcuin  ',  est  que  les 
juifsl'avaientllcchi  devant  Jésus-Christ  en  l'a- 
dorant par  dérision.  Cet  office  fini,  le  prêtre 
baisait  l'autel,  et  sortait  ensuite  de  l'église  où 
il  ne  revenait  qu'à  la  huitième  heure,  c'est- 
à-dire  à  deux  heures  après  midi,  où  l'on 
commençait  la  messe.  Celle  du  jeudi-saint 
se  disait  à  tierce,  ou  à  neuf  heures  du  matin. 
Après  que  le  célébrant  avait  achevé  le  ca- 
non, et  avant  de  dire  l'Oraison  dominicale, 
il  commençait  la  béni'diction  des  saintes  hui- 
les, qu'il  n'achevait  qu'après  avoir  commu- 
nié *.  Cette  bénédiction  finie,  il  donnait  la 
communion  à  tout  le  peuple,  qui  eu  gardait 
une  paitie  poiu- le  lendemain  vendredi.  L'of- 
fice se  faisait  en  ce  jour  comme  nous  le  fai- 
sons encore.  Il  en  est  à  peu  près  de  même 
de  celui  du  samedi-saint,  et  du  samedi  de 
devant  la  Pentecôte.  Il  y  a  trois  messes 
pour  les  litanies  ou  processions  que  l'on  fai- 

»  Alcuin.,  f^ot.  in  hune  locum,  png.  322. 
<■  Ihid.,  png.  328. 


[vii°  SIÈCLE.]        CHAPITRE  XLTX.  —  SATNT  GRlÏGOmE  LE  GlUND,  PAPE 
sait  le  lundi,  le  mardi  et  le  mercredi  avant 


5i;{ 


l'Ascensinn,  avec  un  plu-*  grand  iioiuiire  d'o- 
raisons que  dans  les  messes  ordinaires.  Il  y 
on  a  aussi  beaucoup  plus  pour  les  samedis 
des  (piatre-lemps.  Après  la  messe  du  dinian- 
clie  de  l'oilave  de  la  Pentecôte,  on  trouve 
de  suite  celles  de  tous  les  saints  maripiés 
dans  le  calendrier  romain  depuis  le  premier 
jour  de  juin  jus([u'au  vinut-uuième  de  dé- 
cembre. Celles  do  la  veille  et  de  la  fête  do 
l'Assomption  de  la  Vierge  n'y  sont  point  ou- 
bliées. Il  s'en  trouve  pour  les  veilles  des  au- 
tres fêtes,  pour  le  commun  des  martyrs, 
des  conlessiMirs,  des  vierges,  ponr  la  consé- 
cration d'une  religieuse  et  d'une  ahbesse  ; 
vingt-six  pour  autant  de  dimanches  après  la 
Pentecôte,  et  cinq  pour  les  cinq  dimanches 
avant  Noël.  Ces  messes  sont  suivies  d'orai- 
sons pour  tous  les  jours  dans  le  cours  de  l'a- 
vent,  pour  le  matin,  pour  le  soir;  de  plu- 
sieurs messes  votives  pour  toutes  sortes  de 
nécessités;  des  rits  de  l'ordination,  de  la  bé- 
nédiction de  l'eau,  de  celle  d'une  maison 
neuve,  des  nouveaux  fruits;  des  prières  pour 
l'onction  des  infirmes  ;  des  messes  quoti- 
diennes pour  le  roi,  pour  l'évèque  et  pour 
d'autres. 

9.  L'éditeur  de  la  nouvelle  édition  des  œu- 
vres de  saint  Grégoire  a  mis  par  forme  d'ap- 
pendice, à  la  suite  du  Sacrameutaire,  trois 
messes  pontificales  très-anciennes,  avec  la 
formule  du  sacre  des  rois  de  France,  de  la 
bénédiction  d'une  reine  et  des  noces.  Toutes 
ces  pièces  avaient  déjà  été  dénuées  en  1642 
par  Dom  Hugues  Ménard,  avec  des  notes  et 
des  observations  très-amples  et  très-judi- 
cieuses sur  le  Sacramenlaire  de  saint  Gré- 
goire. On  les  a  placées  à  la  suite  des  pièces 
dont  nous  venons  de  parler,  de  même  que 
celles  d'Ange  Uocca,  qui  sont  moins  éten- 
dues, et  qui  ne  sont  que  pour  corriger  quel- 
ques endroits  du  texte  de  saint  Grégoire  que 
les  copistes  avaient  altérés. 

10.  Il  était  d'usage  dans  les  messes  solen- 
niïr'Grtso!  nelles  de  bénir  le  peuple  avant  de  lui  don- 

ner  la  sainte  communion.  L  eveque  pronon- 
çait la  prière  composée  a  cet  effet,  après 


Bénédic- 
tlODDaire     du 


avoir  dit  l'Oraison  dominicale.  Tl  y  avait  une 
autre  luMiédiclion  ]iour  la  lin  de  la  niessc;. 
llaban  Maur  en  '  parle  dans  le  premier  livre 
de  rinslilulion  des  clercs;  mais  il  semble 
entendre  par  cette  bénédiction  la  collecle 
qui  se  dit  après  la  communion,  puis(]u'il 
ajoute  iiuc  cette  oraison  Unie,  le  diacre 
congédie  le  peuiile ,  en  l'avertissant  que 
l'ollice  di!  la  messe  est  achevé.  Quoiqu'il 
eu  soit,  les  anciens  Sacramentaires  no  par- 
lent que  dt!  la  bénédiction  qui  se  donnait 
après  l'Oraison  dominicale,  ou  avant  la  com- 
munion. Lambécius  cite  '  un  manuscrit  de 
la  Biltliollièi|ue  impéri:de  de  Vienne,  qu'il 
juge  cire  de  plus  de  mille  soixante  ans, 
où,  après  le  Sacrameutaire  de  saint  Gré- 
goire, on  trouve  sous  son  nom  un  Béné- 
diclioniiaire  ou  recueil  des  bénédictions  so- 
lennelles que  révoque  donnait  au  peuple 
avant  la  communion.  Dans  le  missel  gothi- 
que donné  par  le  père  Thomasi,  et  depuis 
par  Dom  Mabillon,  avec  l'ancienne  lilurgie 
gallicane,  il  y  a  des  bénédictions  presque 
pour  toutes  le,s  messes  solennelles;  il  y  en  a 
aussi  quelques-unes  dans  le  missel  gallican, 
luais  elles  sont  clill'érenles  de  celles  qui  sont 
rapportées  dans  le  Béuédiclionnaire  qui 
porte  le  nom  de  saint  Grégoire,  et  que  Mon- 
sieur Lambécius  a  fait  imprimer  dans  le  se- 
cond tome  de  la  Bibliothèque  Impériale.  L'é- 
diteur de  la  uûuvelle  édition  des  œuvres  de 
ce  Pape,  leur  a  donné  place  dans  son  Supplé- 
mcut,  avec  une  autre  copie  beaucoup  plus 
ample  de  ce  Bénédictionnaire,  tirée  de  la 
bibliothèque  de  Saint-Thierry  près  de  Reims. 
Il  croit  que  ce  qui  a  rendu  les  manuscrits  de 
ce  Bénédictionnaire  extrêmement  rares,  c'est 
qu'il  était  détaché  du  Sacrameutaire,  et  qu'il 
faisait  un  volume  à  part  pour  l'usage  des 
évêques,  à  qui  on  le  présentait  lorsqu'il  s'a- 
gissait de  bénir  le  peuple.  Il  y  a  peu  d'ordre 
dans  le  Bénédictionnaire  donné  par  Lam- 
bécius. Celui  de  Saint-Thierry  est  mieux 
suivi;  l'un  et  l'autre  ont  une  bénédiction 
pour  la  fête  de  l'Assomption  de  la  saiule 
Vierge,  mais  difl'érente. 

11.  L'empereur  Charlemagne  '  ayant  fait     ivei-v^q»» 


'  Posl  communiunem  ergo  et  post  ejuadein  no- 
minis  canlicum,  data  benediclione  a  sacerdote 
ad  plebem,  diaconus  prœdicat  missœ  offlcium  es- 
se penictuin,  dans  Ucenliam  abeundi.  Raban.,  lib. 
1  De  Inslitnt.  Clericor.,  cap.  yxxui. 

*  Lambécius,  loin.  Il  Uibliotli.  Cœsareœ,  num. 
14. 

'  De  Sacramenlario  a  sanclo  prœdecessqre  nos- 


tro  deifluo  Greyorio  papa  disposito  jam  pridem 
Paulus  grammaticus  a  nobis  eum  pro  vobis  pe- 
liil,  et  Sfcundum  sanctœ  nostrœ  Ecclesiœ  Iradi- 
lionem  per  Joannem  monachum  atque  abbatem 
civilalis  Ravennntium  reslro'  regali  emisimiis 
excellentiœ.  Iladriau.,  Epist.  Si,  tnru.  lit  jVorœ 
edU.  Greg. .\tii^.  018.  Hue  usque  clausiUa  epistolœ 
papœ  Hadriani,    in    qua  Ubri   Sacramentorum 


544 


HISTOIRE  gi':n'i:rale  des 


le  swr.mm.  dcniunderau  nanc  Adrion,  par  Paul  le  Grara- 

Ulre    s-1     de  '      '  .,.„,. 

Him  Grt^oi-  maincn,  le  Sacranieiitaire  de  saint  Gresoire, 

n, 

en  la  forme  où  il  était  alors  ;  aussi  portait-il 
cette  inscription  dans  le  manuscrit  envoyé 
h  Cliarlemagne  :  ^1  n  nom  de  Notre-Seigneur, 
commence  le  licre  des  Sacrements  /tour  le  cours 
de  l'année,  expliqué  par  saint  Grégoire  jiojie 
de  Rome.  C'est  encore  une  découverte  ijue 
nous  devons  h  Lauihécius,  qui  a  vu  ce  ma- 
nuscrit avec  cette  inscription  dans  la  BiLilio- 
thèque  impériale  [de  Vienne]. 
ADiitAo.       12.  Saint  Gréj^oirc  ne  se  contenta  pas  de 

n»1rS  de  saint  ,  ...  ^  ,  .  .  . 

Grtjoirc,  mettre  dans  un  meilleur  01  dre  les  prières  qui 

J 3g.  664. 

se  disaient  dans  l'administration  des  sacre- 
ments, principalement  dans  celle  de  l'eiiclia- 
ristie  ;  il"  en  régla  aussiJe  chant,  et  composa 
un  Antiphnnaire  où  il  renferma  tout  ce  qui  se 
devait  clianler  en  notes  à  la  messe,  savoir  : 
l'introït,  le  graduel,  l'oirertoire,  la  post-com- 
munion. Il  parait  par  Jean  '  Diacre,  qu'il  y 
avait  dès  avant  le  pontificat  de  ce  saint,  un 
Antiphonaire  à  l'usage  de  l'Hglise,  et  que 
saint  Grégoire  ne  fit  que  le  corriger,  soit  en 
réformant  les  antiennes  qui  ne  lui  parais- 
saient pas  assez  bien  choisies  pour  être  em- 
ployées au  culte  de  Dieu,  soit  en  donnant 
plus  de  gravité  et  d'harmonie  au  chant  : 
car  il  était  fort  savant  en  musique.  Pour 
conserver  le  chant  qu'il:  avait  réglé,  il  éla- 
]jlit  à  Rome  une  école  de  chantres,  à  qui 
il  donna  quelques  terres  avec  deux  maisons, 
l'une  auprès  do  Saint-Pierre,  l'autre  auprès 
de  Saint-Jean  de  Latran.  Jean  Diacre,  de  qui 
nous  apprenons  ces  circonstances,  raconte 
que  de  son  temps  on  conservait  avec  respect 
l'original  de  l'Antiplionaire  de  saint  Grégoire 
dans  l'église  de  Latran;  que  l'on  montrait  le 
petit  lit  sur  lequel  ce  Pape  se  reposait  en 
chaulant,  ses  gouttes  et  ses  autres  inlirmilés 
ne  lui  permettant  pas  de  se  tenir  debout  ou 
assis  ;  et  le  f'ouel  dont  il  mena(;ait  les  petits 
écoliers.  La  méthode  de  chanter  établie  par 
saint  Grégoire,  et  son  Antiplionaire,  furent 
reçus  dans  plusieurs  provinces  d'Occident. 
Augustin',  allant  en  Angleterre,  emmena  des 
chantres  de  cette  école  romaine,  qui  en  pas- 
sant dans  les  Gaules ,  instruisirent  aussi  les 


AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 

Gaulois  ;  mais  ces  premiers  maîtres  étant 
morts,  le  chant  se  corrompit  peu  à  peu,  tant 
en  Angleterre  qu'en  France.  Le  pape  Vita- 
lien  ayant'  envoyé  Théodore  pour  être  ar- 
chevêque de  Cantorbéri ,  celui  -  ci  emmena 
avec  lui  Jean,  excellent  maître  de  musique, 
qui  n-tablit  le  cliani  on  plusieurs  endroits. 
Cliarlemagne',  voulant  aussi  se  conformer 
au  chaut  romain,  laissa,  étant  à  Home,  deux 
habiles  ecclésiastiques  de  sa  suite  auprès  du 
pape  .\drion,  afin  qu'ils  se  formassent  à  la 
vraie  méthode  de  chanter.  Quoique  IWiili- 
phonaire  de  saint  Grégoire  renferme  toutes 
les  parties  de  la  messe  qui  se  chantent  en 
notes,  on  lui  a  conservé  le  nom  de  l'antien- 
ne que  l'on  chante  d'abord,  et  que  nous  ap- 
pelons introït.  Tontes  ces  antiennes,  de  mê- 
me que  les  graduels,  les  otfcrtoires  et  les 
post  communions,  sont  aujourd'hui  les  mê- 
mes que  nous  voyons  dans  l'Antiplionaire 
de  saint  Grégoire.  Il  commence  au  premier 
dimanche  d'avent,  et  finit  au  vingt-troisième 
d'après  la  Pentecôte.  L'otfice  suivant ,  qui 
est  sur  la  sainte  Trinité,  est' d'Etienne  et 
d'Albin  de  Liège  ;  à  l'égard  des  trois  autres, 
dont  un  est  pour  les  voyageurs  et  deux  pour 
les  morts,  on  n'en  trouve  rien  dans  les  ma- 
nuscrits des  œuvres  de  saint  Grégoire. 

13.  On  trouve  dans  un  manuscrit  de  Com-     Aoir»  nn 

pbftnairc 

piègne  un  autre  Antiphonaire  ou  cours  d  of-  Ui^"*,'  '" 
fices,  sous  le  nom  de  ce  saint  Pape;  mais  on 
n'a  point  de  preuve  qu'il  soit  de  lui.  Il  est 
composé  d'ollices,  tant  pour  la  nuit  que  pour 
le  jour,  partie  de  l'ancien  Ordre  romain , 
partie  de  l'Ordre  gallican  :  ce  qui  donne  lieu 
de  conjecturer  que  cet  Antiphonaire  a  été 
composé  dans  les  Gaules,  pour  l'usage  par- 
ticulier de  quelque  église  où  l'on  avait  en  vé- 
nération saint  Rémi  de  Reims,  saint  Waast 
d'Arias,  saint  ISIédard  de  Soissons ,  saint 
Quentin,  saint  Crépin  et  saint  Crépinien,  et 
quelques  autres  dont  on  trouve  des  ofliccs 
particuliers  dans  cet  .Antiphonaire.  Il  y  en  a 
un  aussi  pour  saint  Dciioit  ;  mais  on  ne  peut 
conclure  que  l'auteur  ou  le  collecteur  ait  été 
bénédictin  ,  puisqu'il  s'éloigne  souvent  du 
prescrit  de  la  Règle  de  saint  Benoit,  soit  par 


sancli  Gregnrii  Magni  ad  Carolum  Mngnnm  Irans' 
missi  fit  menHo.  TUiilus  auleiii  ejusdfin  lihri  in 
ipso  codice  7nanuscri]ito  ila  se  habtl  :  In  nomine 
Dommi  incipil  liber  Satramenlorum  de  circula 
anni,  exposilus  a  saiicto  Grcgorio  papa  roma- 
no.  Laiiilifif;iiis,  ibid. 

'  Deindc  in  itoiic   Dninini,   more   sapirnlissi- 
mi  Salomonis,  propler  musicœ  compunclioncm 


dulcedinis ,  Àntiphonaritim  cenloneni  ranttnim 
sliidiosissinius  niiiiis  ulililer  compilavil ;  .m7io- 
lam  quoqiic  canlorum...  co(istt(ut(.  Joan.  Diurnn., 
lil).    II,  num.  6. 

'  Idem.,  ibid.,  mini.  H. 

•  Jbid. 

'  Ihid.,  mim.  9. 

'  Miorologua,  cap.  lx. 


[vil-  SIÈCLE.]      CIIAPITRI':  XLIX.  —  SAINT  GRiaiUlllK  LE  GHAND,  PAPE. 


.'j45 


rapport  \  la  disliibulion  des  p.saumes,  soit 
par  rapport  aux  hciirosdujourct  de  la  nuit. 
Il  niol  des  psaïuucs  propres  pour  toutes  les 
solciinilés,  tant  pour  les  offices  de  la  nuit 
que  pour  ceux  du  jour,  et  même  pour  le  com- 
mun des  apôtres,  des  martyrs  et  des  confes- 
seurs ,  avec  des  antiennes  aiix(juellcs  ces 
psaumes  ont  du  rapport.  L'office  de  la  Puri- 
fication est  de  la  sainte  Vierge,  avec  le  ré- 
pons où  on  l;i  félicite  d'avoir  elle  seule  dé- 
truit toutes  les  hérésies  :  Giiude,  Maria  Virgo, 
cttnclas  hœresa^sola  inleirmisti,  etc.  ;  mais  on 
fait  entrer  aussi  dans  cet  ofQce  le  cantique 
de  Siméon,  et  ce  qui  est  dit  de  lui  dans  l'é- 
vangile du  jour.  Dans  l'oilice  de  la  Septua- 
gésime,  VAlleluia  se  dit  très-souvenl,  appa- 
remment parce  qu'on  ne  le  disait  plus  jus- 
qu'à Pâques.  L'office  de  la  semaine  sainte 
est  un  peu  diltcrent  de  celui  que  nous  y  fai- 
sons. Il  n'est  rien  dit  du  Gloria,  luus  et  honor, 
dans  l'office  du  dimanclie  des  Hameaux.  L'of- 
fice de  la  nuit  de  Pâques  est  conforme  au 
romain,  à  quelques  cérémonies  près,  qui 
étaient  particulières  à  l'église  pour  qui  ce 
cours  d'office  ou  Antiplionaire  a  été  fait.  Les 
antiennes  de  laudes  pour  le  jour  de  l'Assomp- 
tion de  la  Vierge,  sont  les  mêmes  que  les 
nôtres.  L'office  de  saint  Denis  est  composé 
des  actes  de  son  martyre,  où  on  lit  qu'il  fut 
envoyé  dans  les  Gaules  par  saint  Clément, 
successeur  de  saint  Pierre  ,  et  qu'il  vint  jus- 
qu'à Paris.  Les  offices  de  sainte  Cécile,  de 
saint  André,  de  saint  Clément  sont  aussi  ti- 
rés de  leurs  actes.  Il  est  fait  mention,  dans 
celui  de  saint  Thomas,  de  ses  prédications  et 
de  son  martyre  dans  les  Indes  '. 

ARTICLE  V. 

DES  COMMENTAIBES  SUH  LE  PREMIER  LIVRE  DES 
ROIS,  SUR  LE  CANTIQUE  DES  CANTIQUES,  SUR 
LES  PSAUMES  DE  LA  PÉNITENCE,  ET  DE  LA  CON- 
CORDANCE DE  L'ÉCRITURE. 

S.  Grdgoi.       1.  Il  est  peu  d'éditeurs,  à  l'exception  de 


Goussainville,  qui  n'aient  mis  le  Commen-  j;„J'"'  ï„' 
taire  sur  les  seize  premiers  clia|)itres  dupre-  ['XTu'l" 
mier  livre  des  Rois  entre  les  vrais  ouvrages  de 
saint  Grégoire.  Ce  n'est  pas  que  ce  criti(iue 
l'ait  trouvé  indigne  de  ce  saint  docteur,  il  en 
parle  au  contraire  comme  d'un  ouvrage  saint 
et  pieux  ;  il  témoigne  même  souhaiter  de 
pouvoir  le  lui  attribuer  sans  blesser  la  vé- 
rité, mais  il  ne  trouve  point  de  preuves  qu'il 
soit  de  lui.  En  effet,  les  auteurs  contempo- 
rains, ou  ceux  qui  les  ont  suivis  de  près, 
comnie  Patérius ,  saint  Isidore  de  Séville, 
saint  lldeplionse  et  quelques  autres,  qui  ont 
donné  le  catalogue  des  ouvrages  de  saint 
Grégoire,  n'y  ont  point  mis  ce  Commentaire. 
Patérius,  qui  a  composé  une  espèce  de  com- 
mentaire de  l'Écriture,  eu  ne  se  servant  que 
dos  passages  tirés  des  écrits  de  ce  Pape, 
n'eu  rapporte  aucun  de  ce  Commentaire, 
quoiqu'il  en  ait  eu  occasion  en  expliquant  le 
premier  livre  des  Rois.  Taïon ,  évoque  de 
Saragosse  vers  l'an  650,  et  Alulfe,  moine  de 
Tournai  environ  l'an  1090,  n'eu  ont  rien  tiré 
non  plus  pour  composer  leurs  commentai- 
res, qui  ne  sont  toutefois  qu'un  tissu  de  pas- 
sages de  saint  Grégoire.  On  ne  trouve  pas 
même  cet  écril  dans  les  anciens  manuscrits 
qui  contiennent  ceux  de  ce  Père  ;  et  ce  qui 
est  plus  remarquable,  c'est  que  l'auteur  de 
ce  Commentaire  cite  quelquefois  l'Écriture 
autrement  que  saint  Grégoire  et  qu'il  est 
d'une  doctrine  contraire  à  la  sienne  en  plu- 
sieurs points,  principalement  sur  le  libre  ar- 
bitre, à  qui  il  donne  trop  de  pouvoir  dans  les 
bonnes  actions. 

2.  On  ne  peut  toutefois  douter  que  saint     ^,   ,     ^ 

*  ^  ClaDde,  ab- 

Grégoire    n'ait  expliqué  les  livres  des  Rois,   M  ^e  cuMe, 

c  ir      1  '     n  est  pas  non 

ni  que  Claude,  abbé  de  Classe,  n'ait  mis  par  l["\^  '^^^[ 
écrilce  que  ce  Pape  avait  dit  là-dessus;  mais  on  '"""'"'"'• 
verra  par  sa  lettre  au  sous-diacre  Jean,  qu'il 
-n'est  pas  vraisemblable  qu'il  ait  permis  que 
l'écrit  de  Qaude  fût  rendu  public.  Voici  les 
termes  de  sa  lettre  :  -  «  Autrefois  mon  très- 
cher  fils  Claude  a  rédigé  par  écrit  ce  qu'il 


'  Dans  l'édition  des  ouvrages  de  saint  Grégoire, 
donnée  i  Venise  en  1768-70,  17,  vol.  in-l»,  on  trouve 
au  tome  XII,  1°  le  Leclionnaire  ou  Contes  cor- 
rigé par  Alcuin,  par  ordre  de  Charlemagne.  Ce 
Leclionnaire  contient  les  leçons  de  l'Ancien  Testa- 
ment et  des  Épitres  canoniques,  selon  le  rit  de  l'É- 
glise romaine:  2"  On  trouve  un  capitulaire  très-an- 
cien des  leçons  de  l'Évangile  pour  la  messe,  il  est 
édité  d'après  plusieurs  manuscrits,  la  plupart  très- 
anciens;  3"  le  tome  X  contient  deux  Ordres  ro- 
mains très-anciens.  —  Celte  édition  de  Venise  est 
bien  supérieur?  à  celle  de  Paris  pour  les  livres  li- 

XI. 


turgiques.  Outre  plusieurs  pièces  anciennes,  on  y 
lit,  tom.  IX  et  X,  un  travail  très-érudit  sur  la  Li- 
turgie, sous  ce  titre:  Isagogen.  hilurgica,avcc\es 
préfaces  de  Thomasi,  de  Vezzozi,  de  Mabilloa  et  de 
Muratori  ;  avec  des  dissertations  et  des  notes.  Les 
pièces  liturgiques  sont  dans  les  tomes  IX,  X,  XI,  et 
XII.  (L'éditeur.) 

'  Prœlerea,  quia  idem  carissimus  quondam  fi- 
liux  meus  Claudius  aliqun,  me  loquenle  de  Pro- 
rerhiis,  de  Conticis  canticorum.  de  Prophetis,  de 
lihri.'!  quoque  Regum  et  de  IlcpUiteucho,  audierat, 
quœ  ego  scriplo  tradere  prœ  infirmitate  non  po- 

33 


546 


HISTOIRE  GI':NÉ11AL  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Frenves  qne 
ce  Cfifnmen- 
tâire  c'e^t  p«s 
de  idu 

Claudel 


m'entendait  dire  sur  les  Proverbes,  le  Canti- 
que, les  Prophètes,  les  livres  des  Rois  et  l'Hep- 
tateuque,  et  que  je  n'avais  pu  moi-mèine 
mettre  par  écrit  à  cause  de  mes  inlirmitds. 
Son  but  en  cela  était  d'empêcher  que  les 
explications  que  je  donnais  de  ces  livres,  ne 
se  perdissent.  Il  les  écrivit  .'i  sa  façon,  se 
proposant  de  me  les  montrer  à  loisir,  alin 
que  je  les  corrigeasse;  mais  les  ayant  ouï 
lire  par  lui-même,  j'ai  trouvé  qu'il  avait  al- 
téré le  sens  de  mes  explications  en  beau- 
coup d'endioils.  C'est  pourquoi  il  est  né- 
cessaire que,  toute  excuse  cessant,  vous  vous 
transportiez  à  son  monastère  ;  que  vous  fas- 
siez assembler  les  frères,  et  que  vous 
exigiez  d'eux  en  toute  vérité,  qu'ils  vous 
mettent  en  main  tousses  papiers,  pour  nous 
être  envoyés  aussitôt.  »  Claude  était  mort 
alors,  et  ou  pensait  <ï  lui  donner  un  successeur 
dans  l'abbaye  de  Classe.  Saint  Grégoire,  qui 
avait  désapprouvé  son  travail  de  son  vivant, 
ue  voulut  pas  qu'il  en  restât  des  vestiges  après 
sa  moil.  Ce  fut  dans  cette  vue  qu'il  se  fit  en- 
voyer tousses  papiers, après  en  avoir  ordonné 
la  recherche  avec  la  dernière  exactitude.  Il 
n'est  donc  pas  vraisemblable  que  les  extraits 
que  Claude  avait  faits  des  homélies  de  saint 
Grégoire  surleslivres  des  Rois,  soient  venus 
jusqu'à  nous. 

3.  Il  l'est  beaucoup  moins  que  le  Com- 
mentaire sur  le  livre  des  Rois  soit  de  lui;  la 
preuve  en  est  sensible.  Cet  abbé  n'avait 
fait  qu'extraire  des  homélies  de  saiut  Gré- 
goire, et  les  mettre  en  son  style,  en  y  fai- 
sant quelques  changements  qui  altéraient  le 
sens  des  paroles  de  ce  Pape.  Mais  l'auteur  de 
ce  Commentaire  ne  s'est  pas  borné  à  compo- 
poser  son  ouvrage  des  paroles  de  saint  Gré- 
goire; il  convient  '  qu'il  a  puisé  dans  les 
écrits  des  autres  anciens  Pères  ;  que  sou- 
vent il  se  contente  de  résoudre,  comme  ils 
ont  fait,  les  dillieultés  de  l'Hcriturc,  et  qu'en 

tui,  ipse  ea  suo  sensu  dictavit,  ne  oblivione  dépé- 
rirent, ut  (iplo  lempore  hœc  eadem  mihi  infcrret, 
et  emendnliux  diclureniur:  quœ  cum  mihi  legis- 
sel,  inreni  dictorum  vieorum  sensuin  ntlde  inu- 
lilius  /"iiis-.sc  ]iervuiliiltim.  l'nde  necesse  est  u(  tna 
experienlin ,  nmni  eirrusntirme  cessiintf,  ad  rjus 
monasteritim  accédât,  cancenire  fratres  facial,  et 
.sub  oinni  terilalc  quanlascumiiuc  de  dicersis 
chartas  detulil,  ad  médium  deducant,  guas  la 
suscipe  et  mihi  celerrime  iransmille.  Grc?.,  lili. 
XM,  Epist.  21. 

'  Sed  quia  in  diversis  nanctonim  Palrum  opc- 
ribus  diversa  hujus  liisloriœ  tcsiimonid  inrcniun- 
lur  erpnsila,  nolare  dcbcl  Irclur,  quia  aliquando 
eorum  sensus  Iradando  subucqunr,  aliquando  au- 


beaucoup  d'endroits  il  donne  lui-même  de 
nouvelles  solutions,  afin  que  le  lecteur,  trou- 
vant dans  son  Commentaire  du  vieux  et  du 
neuf,  le  lise  sans  ennui  et  sans  di'-goùt.  C'est 
un  homme  qui,  ne  trouvant  point  de  com- 
mentaire suivi  sur  les  livres  des  Rois,  entre- 
prend d'en  '  expliquer  uue  petite  partie, 
et  qui  est  épouvanté  de  son  entreprise  même, 
ne  se  trouvant  pas  assez  de  forces  pour  les 
mesurer  avec  le  travail  que  cette  explication 
demandait  pour  y  réussir.  Reconnaît-on  à 
ces  traits  l'abbé  de  Classe,  qu^  n'avait  d'autre 
dessein  que  de  mettre  par  écrit  ce  qu'il  avait 
ouï  dire  à  saiut  Grégoire  ?  On  objecte  que 
l'auteur  donne,  à  l'imitaliou  de  saiut  Grégoi- 
re, tantôt  le  sens  littéral,  tantôt  le  figuré, 
tantôt  le  moral;  qu'il  l'imite  encore  dans  les 
transpositions  des  termes,  qu'il  y  désigne, 
comme  lui,  l'auteur  du  livre  de  l'Ecclé- 
siastique sous  le  nom  d'un  certain  Sage  \  qu'il 
confond  de  même  Marie  so'ur  de  Lazare 
avec  la  femme  pécheresse.  Mais  tout  cela  ne 
prouve  rien  en  faveur  de  l'abbé  de  Classe  ; 
tout  autre  que  lui  a  pu  imiter  saint  Grégoire 
daus  sa  façon  de  commenter  l'Ecriture,  et 
épouser  ses  sentiments.  Un  objecte  eucoic 
que  Patérius,  dans  son  chapitre  xxxix  sur  les 
Psaumes,  cite  un  endroit  du  premier  cha- 
pitre de  ce  Commentaire  sur  les  Rois.  Il  est 
vrai  que  cet  endroit  a  quelque  ressemblance 
avec  ce  qu'on  lit  dans  ce  Commentaire;  mais 
elle  est  si  peu  considérable,  qu'on  peut  nier, 
sans  risque  d'être  contredit,  que  cet  endroit 
soit  tiré  du  Commentaire  sur  les  llois.  Il  faut 
ajouter  que  l'abbé  Claude  n'avait  extrait  que 
des  explications  de  quelques  '  passages  fies 
livres  des  Rois,  au  lieu  que  le  Commentaire 
que  nousavons  est  suivi  et  sansinlerruptiou. 
Ilesl  vrai  que  Rathcrius,  moine  de  Lobes  et  de- 
puis évêquc  de  Vérone,  qui  Uorissait  vere 
l'an  i)28,  cite'  un  passa-;  l;  sous  le  nom  de 
saint  Grégoire,  qui  se  trouve  dans  ce  Com- 

tem  cnodarœ  historiam  aliter  insudo,  ut  et  opus 
qtiod  spe  divinœ  inspirationis  aggredior,  cl  anti- 
quorum  l'alruni  uuUniiale  sil  ratidum,et  leclori 
nequaquam  fasiidiosum,  diim  inicr  ea  quiv  imiit 
r:  lera,  en  cliam  ci  qua-  non  novit,  nota  rcprœ- 
senlnt.  l'nrfal.  in  lih.  Reg..  pa?.  6,  loin.  III. 

'  llaquc  dum  ingeniis  hisloriiv  parvani  parlem 
expliiniirc  propnntmus,  pro  modula  imbeciltitntis 
noslrir  ciirsum  ilineris  in  vicinio  tcrminanius, 
tam  videliccl  ingeiiii  Icnuilale  difpsi,  quam  sacri 
voluminis  profundilate  perterriti.  Iliiil.,  png.  3. 

'  Aliqua,  me  loqucnte,  de  libris  Regum  audie- 
rat.  •;ic(.'.,  lih.  XII,  Epist.  lii. 

'  Tiiin.  Il  Spicilegii,  pnrt.  i,  paulo  anlc  finem. 


[vu' RiècLE.]        CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT  GUÉr.OinE  LK  GIIAND,  PAPE. 


IJB  Comnen- 
^■re  sur  le 
^Kitique  des 

Il 


nionliiirc;  mais  on  lo  lit  aussi  dans  son  ' 
Pasliiral  :\  peu  pr('>s  ilans  les  iiirmos  tenues; 
ainsi  le  ténioignaj'e  de  Hutliérius  est  de  peu 
de  conséquence.  L'auteur  remarque  dans  la 
préface,  que  jusqu'A  son  temps  aucun  des 
docteurs  de  ri';glise  n'avait  commenté  les 
livi'cs  des  Hois:  d'où  les  plussim|)les  infi!- 
raienl  qu'ilsn'étaient  passusceptiblesd'expli- 
calions  mystiques  ou  spirituelles,  et  qu'il  n'y 
avait  d'autre  sens  <\  y  chercher  que  celui  de 
la  lettre.  C'est  une  preuve  qu'il  ne  croyait 
pas  que  les  questions  sur  les  livres  des  Rois, 
imprimées  sous  le  nom  de  saint  Jérôme, 
fussent  de  ce  Père,  ou  du  moins  qu'il  ne  les 
connaissait  pas.  Il  compte  le  premier  livre 
des  Hois  pour  le  neuvième  livre  canonique, 
ce  qui  n'est  \Tai  qu'en  séparant  le  livre  de 
Rutli  de  celui  des  Juges:  car  en  n'en  faisant 
qu'un  de  ces  deux,  le  premier  des  Rois  de- 
vient le  huitième  livre  du  -lanon  des  saintes 
Écritures.  Son  but  est  de  commenter  ce  livre 
depuis  le  commencement  jusqu'à  l'endroit 
où  il  est  parlé  de  l'onction  de  David,  c'est-à- 
dire,  jusqu'au  treizième  verset  du  seizième 
chapitre  du  premier  livre  des  Rois.  Il  vou- 
lait éprouver,  par  cet  essai,  s'il  pouvait  don- 
ner des  explications  de  tout  le  reste  de  leur 
histoire,  mais  il  n'a  pas  été  plus  loin  ;  ainsi 
son  Commentaire  ne  s'étend  que  sur  les 
seize  premiers  chapitres  du  premier  livre.  Il 
manque  quelque  chose  dans  les  explications 
du  premier  chapitre,  et  on  n'y  trouve  point 
celle  qu'il  aval  l-  donnée  du  nom  d'Elcana. 
4.  Il  n'y  a  pas  plus  de  raison  de  donner  le 
Commentaire  sur  le  Cantique  des  cantiques 
à  Claude,  abbé  de  Classe,  que  le  Commentaire 
sur  le  premier  livre  des  Rois.  Claude  n'avait, 
au  rapport  de  saint  Grégoire  ',  mis  par  écrit 
que  quelques-unes  de  ses  explications  sur  ce 
livre,  au  lieu  que  ce  livre  est  expliqué  tout  en- 
tier dans  le  Commentaire  dont  nous  parlons. 
Il  est  plus  naturel  de  l'attribuer  à  saint  Gré- 
goire même,  puisque  saint  Ildephonse  '  lui  en 
donne  un  sur  le  Cantique,  et  que  le  passage 
que  Patérius  '  en  a  cité,  s'y  trouve  dans  les 
mêmes  termes.  Ceux  cpfi  lui  contestent  cet 
ouvrage,  répondent  que  saint  Ildepbonse s'est 


trompé,  pour  avoir  lu  mal  la  lettre  au  sous- 
diacre  J(îan,  où  il  n'iist  question  "  que  des 
extraits  que  l'abbé  de  Clas.sc  avait  faits  des 
homélies  de  saint  Grégoire  sur  le  Cantique. 
La  solution  est  ais(''e;  mais  elle  n'est  ni  rai- 
sonnable, ni  honorable  à  saint  Ildephonse, 
et  il  y  a  apparence  que  ceux  qui  la  fout,  n'ont 
pas  eux-mêmes  fait  attention  aux  termes  de 
ce  Père.  Il  no  parle  ni  des  extraits  de  l'abbé 
de  Classe,  ni  des  homélies  de  saint  Gn^goiic 
sur  le  Cantique,  mais  d'un  commentaire  en- 
tier sur  ce  livre;  et  pour  montrer  qu'il  en 
parlait  avec  connaissance  do  cause,  il  dit  que 
le  texte  y  était  expliqué  dans  un  sens  moral. 
S'il  avait  pris  occasion  de  la  lettre  au  sous- 
diacre  Jean  d'attribuer  à  saint  Grégoire  un 
commentaire  sur  le  Cantique,  il  lui  en  au- 
rait attribué  de  même  sur  rHeplaleuqne  et 
sur  les  Proverbes,  sur  lesquels,  ainsi  qu'il  est 
marqué  dans  cette  lettre,  ce  saint  Pape  avait 
aussi  fait  des  homélies;  mais  il  ne  parle  que 
du  Commentaire  sur  le  livre  de  Salomon  in- 
titulé :  Cantique  des  cantiques.  Leur  réponse 
au  témoignage  de  Patérius  n'est  guères  plus 
solide.  Ils  disent  que  des  trois  parties  du  le- 
cueil  de  Patérius,  il  n'y  a  que  la  première 
qui  soit  de  lui  ;  que  la  seconde,  qui  comprend 
les  passages  de  saint  Grégoire  sur  le  livre  de 
la  Sagesse,  l'Ecclésiastique  et  lesProphète.=, 
et  la  troisième  où  sont  ses  explications  sur 
différents  endroits  deslivres  duNouveau  Tes- 
tament, ne  sont  point  de  Patérius,  mais  d'un 
certain  Brunon,  qui  écrivait  au  commence- 
ment du  douzième  siècle.  Or,  ajoutent-ils, 
c'est  dans  cette  troisième  partie  que  se  trouve 
le  passage  cité  comme  de  saint  Grégoire  sur 
le  Cantique  des  cantiques  :  ainsi  l'on  ne  peut 
pas  dire  qu'il  ait  été  cité  par  Patérius,  mais 
seulement  par  Brunon.  Quand  il  en  serait 
ainsi,  nous  aurions  toujours  une  fireuve  que 
le  Commentaire  sur  le  Cantique  est  de  saint 
Grégoire,  puisque  Brunon  n'employa  point 
d'autres  passages  que  ceux  des  écrits  de  ce 
Père,  pour  compléter  les  deux  parties  du  re- 
cueil de  Patérius  qui  manquaient,  ou  qui  se 
trouvaient  extrêmement  défectueuses  dans 
ses  manuscrits.  C'est  ce  que  Brunon  '  dit  lui- 


'  Pastoral.,  part,  i,  cap.  u.  —  '  Lib.  I,  cap.  ii, 
num.  3.-3  Greg.,  lib.  XII,  Episl.  24. 

'  Gregorius  papa...  scripsit  super  librum  Salo- 
monis,  cui  titulus  est  Cûnticum  canticorttm , 
(luam  mire  scribens,  morali  seiisu  omne  opus 
exponewin  pr  réunit.  Ildephons.  De  Script.  Eccles. 
cap.  I. 

'  Palerhis,  in  cap.  xvn  Luae,  pat'.  489,   torn. 


IV,  et   Commentar.  in  Cant.  toru.   111,   pag.  404. 

'>  Lib.  XII,  Epist.  24;  le  passage  est  cité  plus 
havit. 

■"  Tune  ergo  ad  laborem  accinctus  eœpi  omnes 
qiios  hiihemvs  sancti  Gregorii  libros  percurrere, 
et  nunquam  a  labore  quievi  donec  capitula  quœ 
liber  Paiera  lenebat,  quo  libro  essent  posita  in- 
vesligavi,  et  sic  ex  ipsis  locis  unde  srtmpta  fue- 


548 


IIISTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


même  dans  le  Prologue  qu'il  a  mis  h  la  léle 
de  sa  compilation,  ou  si  l'on  veut,  de  la  cor- 
rection du  recueil  de  Patéiius  :  car  il  en  cor- 
rigea une  partie,  et  suppléa  ce  qui  manquait 
aux  deux  autres,  par  des  passages  tirés  des 
écrits  de  saint  (irégoire.  Au  reste  ,  c'est  de- 
viner que  de  dire,  comme  font  les  advcisai- 
res,  que  le  passage  contesté  ne  se  lit  que 
dans  la  compilation  de  Brunon.  11  faudrait, 
pour  rendre  cette  conjecture  probable,  mon- 
trer que  la  troisième  partie  du  recueil  de  Pa- 
térius  était  absolument  perdue  du  temps  de 
Brunon,  c'est-à-dire  dans  le  douzième  siè- 
cle; mais  le  coutraire  est  démontré  par  l'au- 
torité de  phisieurs  '  manuscrits  plus  anciens 
que  Brunon,  entre  autres  par  ceux  du  Vati- 
can, de  Beauvais,  de  l'abbaye  du  Bec  et 
de  Saint-Michel,  où  cette  troisième  partie  se 
trouve.  Brunon  n'avait  consulté  d'autres  ma- 
nuscrits que  ceux  qu'il  trouvait  sous  sa  main 
dans  le  pays  où  il  demeurait;  est-il  surpre- 
nant qu'il  les  ait  trouvés  défectueux?  Aussi, 
ne  doutant  pas  qu'il  n'y  en  eut  ailleurs  de 
plus  corrects  et  de  mieux  conservés,  il  dit  à 
ceux  qui  en  seraient  les  possesseurs,  de  les 
confronter  avec  sa  compilation,  pour  voir  le- 
quel aurait  réussi  le  mieux  de  Palérius  ou 
de  lui.  Laissons  donc  saint  Grégoire  eu  pos- 
session du  Commentaire  sur  le  Cantique  :  on 
le  lui  a  attribué  dans  le  siècle  même  où  il 
est  mort,  et  depuis.  Le  Maître  des  senten- 
ces *,  saint  Thomas,  et  plusieurs  autres  le 
citent  unanimement  sous  son  nom.  Il  y  a  un 
autre  Commentaire  sur  le  Cantique  des  can- 
tiques, que  l'on  a  quelquefois  imprimé  sous 
le  nom  de  saint  Grégoire,  mais  les  plus'  ha- 
biles pensent  qu'il  est  de  Robert  de  Tombe- 
laine,  religieux  du  mont  Saint-Micbel,  puis 
abbé  de  saint  Vigor  de  Bayeux,  qui  vivait 
dans  le  onzième  siècle,  sous  le  pontificat  de 
saint  Grégoire  VU.  D'autres  '  l'attribuent  .'i 
Radulfc,  abbé  de  Fontenelles,  ou  saint  Van- 
drille.  Il  est  divisé  en  deux  livres,  dont  le 
premier  commence  par  ces  paroles  :  Oss/ionst, 
inspirât io  C/iristi;  le  second:  Cuni  scrijilum 


sil  ;  celui  de  saint  Grégoire  commence  par 
celles-ci  :  Angelot  ad  eam  Domiiiiis  miierat. 

5.  Ce  saint  fait  voir  dans  K' Prologue,  qu'en 
lisant  le  Cantique  on  ne  doit  point  s'arrêter 
à  la  lettre  qui  tue,  mais  prendre  l'esprit  et 
le  sens  de  l'écrivain  sacré  qui,  par  condes- 
cendance pour  notre  faiblesse,  s'est  servi  de 
tenues  usités  dans  les  amoui-s  profanes,  pour 
nous  inspirer  l'amour  divin.  Il  dit  qu'on  l'ap- 
pelle par  excellence  Cantique  des  cantiques, 
comme  on  appelait  le  Saint  des  saints,  le 
Sabliat  des  sabbats,  à  cause  que  ce  Cantique 
renferme  des  mystères  plus  sublimes  que  les 
autres  cantiques  qui,  selon  lui,  sont  de  plu- 
sieurs sortes.  Il  y  a  des  cantiques  de  victoire, 
d'exhortation,  de  joie,  de  secours,  et  d'union 
avec  Dieu.  Marie  chanta  un  cantique  de  vic- 
toire après  le  passage  de  la  mer  Rouge. 
Moïse  chanta  un  canticjue  d'exhortation,  lors- 
qu'en  sadressant  aux  Israélites  qui  allaient 
entrer  dans  la  Terre  promise,  il  dit  :  Que  les 
deux  écoutent  ce  que  je  dis,  et  que  la  terre  en- 
tende les  paroles  qui  sortent  de  ina  bouche.  Le 
cantique  d'.\nne  est  un  cantique  de  joie  sur 
la  fécondité  de  l'Église.  Celui  que  David 
chanta  après  le  combat,  était  un  cantique 
d'actions  de  grâces  du  secours  qu'il  avait 
reçu  de  Dieu,  à  qui  il  devait  la  victoire.  Le 
cantique  d'union  est  celui  qu'on  chante  dans 
les  noces  de  l'époux  et  de  l'épouse,  dans 
l'uuion  de  l'âme  avec  Dieu  :  c'est  \h  le  Can- 
tique des  cantiques.  Saint  Grégoire  fait  re- 
marquer quatre  sortes  de  p'-rsonnes  qui  par- 
lent dans  ce  cantique,  l'époux  et  l'épouse, 
les  tilles  de  l'épouse,  les  bergers  ou  les  com- 
pagnons de  l'i'poux.  Par  l'épouse  il  entend 
l'Kglise;  par  l'époux,  Notre-Soigneur;  par 
les  filles  de  l'épouse,  les  âmes  qui  commen- 
cent à  pratiquer  Ri  vertu,  et  qui  s'y  appli- 
quent de  plus  en  plus;  par  les  compagnons 
de  l'époux,  les  hommes  parfaits  qui  annon- 
cent la  vérité. 

6.  L'auteur  du  Commentaire  sur  les  sept 
Psaumes  de  la  pénitence,  parle'  en  trois  en- 
droits avec  assez  de  feu  contre  un  pi-ince  de 


Drutc.-on 

XXXll,  1. 


I.  n»f.ii,i 


U  rr 


ranl  emendare  curavi...  llaque  factum  est  u( 
dum  terliam  sotummodo  partein  corrigeitdam 
svscepissem ,  non  solum  illam  corrigerem,  sed 
clinm  duas  quœ  in  his  rrgionibus  inienire  non 
polerum  nuperaddercm.  ..  Hoc  proœmium,  idcirco 
libri  principio  insererc  curaii.  ul  si  cuiquain  qui 
illud  opus  integrum  fiahcat,  hoc  in  manus  vcnire 
conlingat,  utriusque  diversilatc  cngnUa.quod  cui 
prœpoitere  debcat  inUllignl.  Bniiio,  Proaniio  in 
Paleriuin,  toiii.  IV,  jinfe'.  ♦,  j'inl.  2. 


<  Edil.Prœfal.  in  Comm.  in  Canlica,  tom.  II!, 
pnp.  :t9»,  :193 

'  .M.af;islcT  Sentent.,  lih.  I,  Distinct.  37,  num.  1, 
el  alii,  tnii).  III,  (lag.  NGIi. 

«  M.ibil.,  iniilecl.,  p.ig.  129. 

'  Ilnnicy,  Supplément.  Pair. 

•  Psal.  V,  IX  el  xxvt.,  et  in  proœmio  Psalmi 
vn. 


[V  II  '  SIÈCLE.]       CIIAPITllE  XIJX.  —  SAINT 

sDii  liMiips,  qu'il  accuse  d'avoir  renouvchi  la 
siiuDiiio  dans  l'K^lise,  de  l'avoir  Ironhlûc  par 
un  scliiïUic  dangereux,  de  l'avoir  voulu  icu- 
uic  esclave,  de  s'être  emparé  do  ce  fjui  lui 
appartenait,  de  s'être  rendu  maître  de  l'ë- 
glisc  de  Jlomc,  cl  d'avoir  eniropris  d'exer- 
cer sa  puissance  contre  clic.  11  n'y  a  rien 
eu  tout  cela,  dit-on,  qui  puisse  être  appli- 
([ué  ou  i\  Maurice,  ou  i\  l'iiocas,  les  deux 
empereurs  qui  ont  régné  sous  le  pontifical 
de  saint  Grégoire  ;  mais  lo  tout  convient  A  la 
querelle  de  l'enipcreur  Henri  IV  et  de  Gré- 
goire VII  au  sujet  des  investitures.  Ce  Com- 
nienlaire  est  donc  son  ouvrage,  et  non  ce- 
lui de  Grégoire  1"'.  C'est  là  le  raisonnement 
dont  Goussainvillc  et  quelques  autres  criti- 
ques se  sont  servis  pourôtcràce  saint  Pape 
l'explication  des  Psaumes  pénitentiaux;'mais 
on  peut  leur  opposer  l'autorité  de  Patérius, 
disciple  de  saiutGrégoire,qui',  en  expliquant 
lo  premier  verset  du  trente-unième  psaume, 
qui  est  le  second  des  pénitentiaux,  prend  ce  qui 
en  est  -  dit  dans  ce  Couimentaiic.  11  en  a  pris  ' 
aussi  (juelque  chose  dans  l'explication  du  qua- 
trième psaume  de  la  pénitence.  Le  papcNico- 
lasl",  dans  sa  lettre  à  l'empereur  Michel,  rap- 
porte '  sous  le  nom  de  saint  Grégoire  un  pas- 
sage que  nous  lisons  dans  le  Commentaire 
sur  le  second  psaume  .pénitentiel.  Le  concile 
de  Douzi  eu  871  ^,  en  cite  un  autre  sous  le 
nom  de  ce  Pape,  tiré  de  l'explication  du  troi- 
sième psaume.  On  voit  par  1;\  qu'on  ne  peut 
en  faire  auteur  Grégoire  VII,  qui  ne  monta 
sur  le  Saint-Siège  que  plus  de  deux  cents 
ans  après  ce  concile,  c'est-ù-dire  en  1073,  et 
qu'il  s'agit  seulement  de  trouver  un  prince 
contemporain  de  saint  Grégoire  le  Grand,  à 
qui  l'on  puisse  rapporter  ses  invectives.  Il  dit 
d'Autarit,  roi  des  Lombards,  que  c'était  un 
prince  détestable  ,  et  que  Dieu  l'avait  fait 
mourir  pour  avoir  défendu  que  les  enfants 
des  Lombards  fussent  baptisés  dans  l'Église 
catholique  ;\  la  fête  de  Pâques.  Rien  même 
n'empécbc  qu'on  n'applique  à  l'empereur 
Maurice  tous  les  reproches  qui  se  trouvent 
dans  ce  Commentaire  ;  on  sait  que,  sous  son 

'  Pater.,  lib.  XI  in  Psal.  cap.  lxiv,  pag.  209. 

•  Greg.,  in  Psal.  pag.  474. 

'  Pater.,  lib.  XI  itiPsal.,  cap.  lxvui,  pag.  206. 

'  Sanctus  jam  nomi}ialus  papa  Gregorius  et 
magister  egregius  sapientcr  edocet  diccns  :  Pecca- 
tum  cttm  voce,  culpa  est  in  actione;  peccatum 
vero  etiam  cum  clamore  est  culpa  cum  Uberlalc. 
Nicol.  Epist.  ad  Mich.  Imperat.  tom.  V  Concil. 
Harduia,  pag.  1S9,  et  Greg.,  tom.  III,  pag.  475. 

"  Quia,  ut  beatus  Gregorius  dicit,  verw  humili-, 


Giti'OOlHE  LE  GUAND,  PAPE. 


549 


règne,  la  simonie  infectait  un  grand  nom- 
bre "  d'églises  de  son  empire.  Jean  Diacre 
l'appelle  un  '  prince  avare,  et  qui  aimait  h 
s'cmpaier  du  bien  d'autrui;  il  paile  "  aussi 
de  la  tyrannie  qu'il  avait  exercée  sur  saint 
Grégoire.  Ce  saint,  il  est  vrai,  a  quelquefois 
fait  l'éloge  de  ce  prince  ;  mais  il  en  rcrul  de 
grands  sujets  de  mécontentement  sur  la  fin 
de  son  règne,  comme  on  le  voit  dans  sa''' 
lettre  ;'i  l'empereur  Phocas,  qu'il  exhorte  à 
faire  cesser  tous  les  désordres  du  règne  pas- 
sé. On  dira  peut-être  que  ce  qu'on'"  lit  dans 
le  Prologue  sur  le  septième  psaume  de  la 
pénitence,  des  persécutions  que  le  sc/iismn- 
tirjiie  faisait  à  l'Kglise,  ne  peuvent  s'entendre 
de  Maurice,  qui  ne  lo  fut  jamais.  Mais  ne 
peuvent-elles  pas  s'expliquer  des  schismati- 
ques  en  général,  qui,  sous  le  pontificat  de 
saint  Grégoire,  firent  beaucoup  de  mal  à  l'E- 
glise'? Celle-ci  fut  aussi  persécutée  par  les 
hérétiques ,  comme  l'auteur  s'en  plaint  au 
même  endioit,  et  il  en  voulait  sans  doute  aux 
Lombards,  qui  faisaient  profession  de  l'hé- 
résie arienne. 

7.  Saint  Grégoire  a  mis  à  la  tête  de  cha- 
cun des  sept  Psaumes  de  la  pénitence,  un 
Prologue  où  il  donne  en  peu  de  mots  l'ex- 
plication du  titre  et  du  sujet  du  psaume.  II 
dit  sur  le  premier,  que  suivant  son  inscrip- 
tion il  doit  être  mis  au  nombre  des  hymnes, 
parce  que  le  pécheur,  qui  y  est  représenté 
confessant  et  pleurant  ses  péchés,  fait  enten- 
dre aux  oreilles  du  Dieu  plein  de  miséri- 
corde, une  voix  de  joie  et  d'allégresse ,  se- 
lon qu'il  est  dit  dans  l'Évangile  :  //  y  au7-a 
jjliis  de  joie  dans  le  ciel  pour  un  seul  pêcheur 
qui  fait  pénitence,  que  pour  quatre-vingt-dix- 
neuf  justes  qui  n'ont  pas  besoin  de  pénitence. 
Sur  le  second,  dont  le  titre  porte  :  Entende- 
ment à  David,  il  remarque  qu'il  est  intitulé 
ainsi,  afin  que  personne  ne  se  glorifie  de  ses 
mérites  avant  la  foi,  parce  qu'ils  sont  nuls  ; 
et  que,  même  après  la  foi  qui  lui  a  été  don- 
née par  grâce,  il  ne  présume  pas  que  son 
péché  doive  demeurer  impuni.  Le  troisième 
psaume  de  la  pénitence  est  intitulé  :  DuSab- 

tatis  lestimonia  snnt,  et  iniquitatem  suam  quem- 
que  cognoscere,  et  cognitam  voce  confessionis  ape- 
rire.  Concil.  Dusiacens.  ibid.,  pag.  1274,  et  Greg., 
tom.  111,  pag.  491. 

8  Greg.,  Epist.  57,  58,  lib.  V,  et  Epist.  27,  lib.  IV. 

•>  Joan.  Diac,  lib.  III.  num.  50. 

*  Id.,  lib.  IV,  iHim.  16  et  17. 

»  Creg.,  lib.  XIII,  Epist.  31,  39. 

'"  Prowmio  in  Psal.vu  Pœnitcntialcm,  pag.  515. 


Mec  du 
Commoiilaira 
sur  les  Hrail- 
nics  pÉnKen» 
liaux,  paT. 
461. 


Pag.  '.73. 


550 


HiSTOiiiE  géni':rale  des  auteurs  ecclésiastiques. 


!•«:  (•.> 


bat  ;  sur  quoi  saint  Grégoire  dit  que  l'ûme  fi- 
dèle, faisant  rcllesion  au  repos  ([u'elle  a  per- 
du par  le  péflié  du  premier  liomnie,  con- 
temple celui  dont  elle  doit  jouir  dans  l'autre 
vie,  et  demande  s;ins  cesse  à  Dieu  d'en  jouir. 
11  fait  voir  par  le  titre  du  quatrii-me  psaume, 
que  David  le  composa  dans  la  douleur  que 
lui  causait  le  pi'cbé  qu'il  avait  commis  en  se 

CIO.  souillant  d'un  adultère  el  d'un  homicide.  Le 
cinquième  peut  s'expliquer  de  la  prière  que 
Jésus- Christ,  qui  est  notre  chef,  fait  pour 
nous  obtenir  d'être  rétablis  par  la  grâce  dans 
l'élat  dont  nous  sommes  déchus  par  le  pé- 
ché ;  ou  de  toute  personne  qui,  se  trouvant 
dans  le  besoin,  prie  Dieu  de  la  secourir.  Le 
sixième  psaume  est  un  des  quinze  que  l'on 

"■'•  appelle  graduels.  Saint  Grégoire  en  prend 
occasion  de  dire  que,  comme  l'on  montait  au 
temple  de  Salomon  par  quinze  degrés,  il  y 
en  a  autant  dans  la  vie  spirituelle  pourmon- 

tis.  ter  au  ciel.  Il  trouve  dans  le  septième,  qui  a 
pour  titre  :  Comment  David  était  persécute  imr 
Absalon  son  fils,  une  flgure  des  persécutions 
que  l'Eglise  souffre  de  la  part  de  ses  enne- 
mis. 
roncor-  8.  Le  petit  écrit  intitulé  :  Concordance  de 
''""wï'jM  quelques  passages  de  l'Écritu)X',  se  lit  sous  le 
-"'  °"'  nom  de  saint  Grégoire  dans  un  manuscrit  du 
Vatican,  el  dans  un  autre  de  l'abbaye  de  Mar- 
uioutier.  Cette  Concordance  est  [lar  deman- 
des et  par  réponses.  Dans  la  réponse  à  la  pre- 
mière demande,  l'auteur  parle  de  la  double 
crainte,  de  la  servile  et  de  la  filiale,  à  peu  près 
dans  les  mêmes  termes  et  en  s'appuyant  des 
mêmes  passages,  que  dans  le  dix-septième 
chapitre  des  Morales  sur  Job.  Il  s'exprime 
dans  la  quatrième  demande ,  sur  la  prédes- 
tination, comme  il  lait  dans  le  quatorzième 
chapitre  du  premier  livre  des  Rois;  et  ce  qu'il 
dit  dans  la  dixième  de  la  différence  entre 
le  crime  el  le  péché,  il  le  dit  dans  le  nombre 
l'J  du  vingt-unième  livre  de  ses  Morales.  Ce 
rapport  de  sentiments  et  d'expressions  entre 
les  écrits  qu'on  ne  conteste  point  h  saint  Gré- 
goire, du  moins  entre  les  Morales  sur  Job  el 
celte  Concordance,  forme,  avec  le  manuscrit 
que  nous  venons  de  citer,  une  preuve  assez 
forte  pour  établir  que  cet  écrit  est  de  saint 
Grégoire.  On  peut  ajouter  qu'il  est  assez  de 
son  style,  et  que  le  livre  de  la  Sagesse  y  esl 
cilé  sous  le  uom  '    d'«K  certain  snije,  façon 


Sue' 
c  1 
p«£.  56i. 


de  parler  qui  lui  est  familière.  On  cile  un 
troisième  manuscrit  d'une  bibliothèque  d'Es- 
pagne, qui  attribue  à  un  nommé  Martin,  prê- 
tre de  l'église  de  Léon,  une  Concorde  de  l'An- 
cien el  du  Nouveau  Testament  ;  mais  ce  ne 
peut  être  la  même  qui  est  atlribuée  à  saint 
Grégoire,  puisque  le  manuscrit  de  Mai-mou- 
lier  où  elle  se  trouve,  est  de  plus  de  huit 
cents  ans,  el  que  Martin  n'écrivait  que  sur 
la  fin  du  xii'  siècle.  Elle  est  divisée  en  trente- 
quatre  demandes  el  autant  de  réponses,  qui 
paraissent  très-utiles  pour  l'éclaircissemeut 
de  plusieurs  difficultés  de  l'ixrilure.  On  l'a 
négligée  dans  beaucoup  d'éditions  des  œu- 
vres de  saint  Grégoire,  les  éditeurs  la  re- 
gardant comme  un  ouvrage  supposé.  Elle 
se  trouve  dans  celles  de  Paris  en  1571  et 
1705  ;  on  l'a  mise  à  la  fin  du  troisième  to- 
me après  tous  les  ouvrages  de  ce  Père,  mê- 
me après  ceux  qu'on  doute  êlre  de  lui. 

ARTICLE  VI. 

EXTRAITS  DES  ÉCRITS  DE  SAINT  GRÉGOIRE,  PAR 
PATÉRICS  ET  PAR  ALLLFE. 

1.  Entre  les  clercs  que  saint  Grégoire  re- 
tint auprès  de  lui  dès  le  commeucement  de 
son  pontifical,  on  compte  Emilien',  notaire, 
qui,  avec  d'autres.,  écrivit  sous  lui  les  qua- 
rante Homélies  sur  les  Évangiles  ;  et  Palé- 
rius,  aussi  notaire,  et'Secondicien.  Le  plai- 
sir que  Patérius  trouvait  dans  la  lecture  des 
ouvrages  de  ce  saint  Pape,  principalement 
de  ses  Morales  sur  JoIj,  dont  il  expliquait  le 
texte  en  trois'  manières  diûérenles, selon  le 
sens  alh'goriquc,  le  seus  moral  et  le  sens  his- 
torique, lui  lit  nailrc  la  pensée  d'en  extraire  des 
sentences  et  des  témoignages,  dans  lesquels 
il  cx])liquait  une  bonne  partie  des  autres  li- 
vres de  l'Ecriture,  et  de  les  ranger  suivant 
l'ordre  du  canon  des  li\  res  saints.  Il  ne  donna 
d'abord  que  très-peu  d'étendue  à  sa  collec- 
tion, passant  même  plusieurs  endroits  pour 
s'épargner  du  travail.  Onp'qi'e  précaution 
qu"il  jii'il  pour  tenir  secrète  son  entreprise, 
saint  (jirégoire"  en  fut  informé.  Il  persuada 
h  Patérius  d'apporter  plus  d'exactitude  à  sa 
collection,  et  de  marquer,  i  la  tête  de  cha- 
que témoignage,  de  quel  livre  il  l'aurait  lire, 
el  quelle  en  avait  été  l'occasion,  l'alérius  no 


E:ri1s 
Plliriu.-. 


'  Intrrrogal.  i,  pap.  TM. 

*  Juiiii.  Uiuc,  li)).  Il,  Dum.  11. 

'  Sigcberl,  De  Viris  iUusl.,  vity. 


'  l'aloriiis,   Pra'fat.  in  lih.  Trstimnn.,  \i>u\.  IV, 
Ila^^  1,  pari.  2. 
»  Ibid. 


[vu*  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT  GIIKGOIHE  LK  r.HAND,  PAPE 

se  conlontii  pas  ilc  faire  des  extraits  des  Mo- 


551 


Son  Coiu- 

-riialrc    sur 

r  1 1  u  r  0, 

.  I\,  o?. 


Alotre.  Ses 
ComiorDl-ii* 
res.  Toni  IV, 
0[t<  tirecor., 
I«f.  687.- 


rales  sur  Job  ;  il  on  lit  do  tous  les  autres  ou- 
vra^^es  de  saint  Grégoire,  dont  il  lit  un  Com- 
mentaire sur  l'Ecriture,  qu'il  divisa  en  trois 
parties. 

2.  La  première  comprenait  l'explication 
des  livres  do  la  Genèse,  de  l'Exode,  du  Lé- 
vilique,  des  Nombres,  du  l)eut(''ronome,  de 
Josué,  des  Juges,  des  quatre  livres  des  Rois, 
des  Psaumes,  des  Proverbes,  et  du  Cantique 
des  cantii[uos;  la  seconde,  ce  que  saint  Gré- 
goire a  dit  sur  les  livres  de  la  Sagesse  et  de 
IEcclésiasti(jue,  sur  les  prophéties  d'Isaïe, 
do  Jérémie,  d'Ezéchiel,  de  Daniel,  d'Osée, 
de  Joël,  d'.\mos,  d'Habacuc,  d'Aggée  et  de 
Zacluirie.  On  trouvait  dans  la  ti'oisième  les 
explications  de  taint  Grégoire  sur  les  livres 
du  Nouveau  Testament,  savoir  :  sur  les  Évan- 
giles de  saint  Matthieu,  de  saint  Marc,  de 
saint  Luc  et  de  saiutJean,  sur  les  Actes  des 
Apôtres,  sur  les  Epitres  de  saint  Jacques,  de 
saint  Pierre,  de  saint  Jean  et  de  saint  Jude, 
sur  l'Apocalypse,  et  sur  les  Epitres  de  saint 
PaiU;  mais  il  ne  faut  pas  s'attendre  à  trou- 
ver dans  le  recueil  de  Patérius  un  commen- 
taire suivi  et  non  interrompu  de  tous  ces  li- 
vres de  l'Ecriture,  il  n'y  donnait  d'autres  ex- 
plications que  celles  qu'il  avait  trouvées  ré- 
pandues çà  et  là  dans  les  ouvrages  de  saint 
Grégoire;  en  sorte  qu'il  n'expliquait  quel- 
quefois que  douze  ou  quinze  vei'sets  d'un  li- 
vre, et  même  un  moindre  nombre.  Avant 
l'édition  de  '  Paris  en  1703,  nous  n'avions 
que  la  première  et  la  troisième  partie  de  la 
collection  de  Patérius,  encore  étaient-elles 
très-imparfaites  et  pleines  de  fautes.  On  a 
donné  la  troisième  dans  cette  édition,  et 
corrigé  les  autres  sur  divers  manuscrits.  Si- 
gebert  de  Gemblours  ',  qui  a  mis  Patérius 
parmi  les  hommes  illustres  de  l'Église,  ne 
lui  attribue  point  d'autres  ouvrages  que  celui 
dont  nous  venons  de  parler.  [Le  tome  LXXIX 
de  ïn  Patrulogie  latine,  col.  677-1136,  com- 
prend la  préface  sm-  la  vie  et  les  œuvres  de 
saint  Putère  et  son  Exposition  de  la  doctrine 
de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament.] 

3.  Plusieurs  siècles  après,  c'est-à-dire  dans 
les  onzième  et  douzième  siècles,  un  moine 
de  Saint-Martin  de  Tournai  ^  lit,  à  l'exemple 
de  Patérius,  des  extraits,  mais  beaucoup 
plus  amples,  des  ouvrages  de  saint  Grégoi- 


re, pour  en  former  un  commentaire  sur  les 
livres  de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament. 
11  en  composa  trois  recueils  dilliMents,  aux- 
quels il  en  ajouta  un  quatrième  qui  ne  con- 
tenait que  des  sentences  tirées  des  mômes 
ouvrages,  et  qui,  au  rapport  d'Hérimanus, 
moine  du  même  monastère,  étaient  très-uti- 
les. Il  donna  à  ces  quatre  recueils  le  titre  do 
GréijoriaL  Quoiqu'ils  existent  encore,  écrits 
de  sa  propre  main,  dans  l'abbaye  de  Saint- 
Martin  de  Tournai,  on  ne  nous  en  a  donné 
que  le  troisième,  qui  est  une  explication  des 
quatre  Évangiles,  des  Actes  des  Apôtres, 
des  Epitres  de  saint  Paul,  de  celles  que  nous 
appelons  catholiques,  et  de  l'Apocalypse. 
Les  deux  autres  regardaient  les  livres  de 
r.A.ncien  Testament.  Il  terminait  le  quatriè- 
me par  deux  vers  hexamètres,  où  il  deman- 
dait les  prières  de  saint  Grégoire  pour  obte- 
nir le  repos  *  et  la  paix  dans  l'autre  vie.  Il 
ne  s'arrête  pas  toujoui-s  aux  termes  de  saint 
Grégoire;  souvent  il  se  contente  d'eu  pren- 
dre le  sens.  [L'Exposition  du  Nouveau  Testa- 
ment d'après  les  ouvrages  de  saint  Grégoire, 
par  Alulfe,  se  trouve  dans  le  tome  LXXIX 
de  la  Patrologie  latine,  col.  1137-1424.] 

4.  Le  cardinal  Carafa,  bibliothécaire  du 
Saint-Siège,  a  rendu  un  autre  service  aux 
gens  de  lettres,  en  donnant  par  ordre  de  ma- 
tières ce  qui  lui  paraissait  de  plus  remar- 
quable dans  les  lettres  de  saint  Grégoire. 
Avec  ce  secours,  on  peut  apprendre  avec 
beaucoup  de  facilité  l'iiistoire  de  son  ponti- 
ficat, les  maximes  de  sa  conduite  dans  le 
gouvernement  des  affaires  de  l'Eglise,  et 
dans  l'administration  du  patrimoine  de  l'É- 
gliss  de  Rome  en  particulier;  ce  qui  se  pas- 
sait dans  les  élections  des  évéques,  de 
quelle  manière  il  poui'voyait  aux  églises 
pendant  la  vacance,  ou  lorsque  les  évêques 
étaient  hors  d'état  de  les  gouverner  par 
eux-mêmes  ;  quels  étaient  les  privilèges  des 
monastères;  de  quelle  manière  on  procédait 
contre  les  clercs,  et  quantité  d'autres  traits 
intéressants  de  la  discipline  ecclésiastique 
des  sixième  et  septième  siècles.  Ou  a  impri- 
mé ces  remarques  ou  mémoires  à  la  suite 
dos  lettres  de  saint  Grégoire,  afin  que  le  lec- 
lour  puisse  plus  aisément  recourir  aux  let- 
tres mêmes,  et  y  voir  les  choses  avec  plus 
d'étendue. 


Remarques 
du  cardiDal 
Carafa  sur  les 
lettre;  de  saint 
Grégoire, 
loi..  11,  |«g. 
1381. 


»  Voyez  la  préface  de  l'éditeur. 

'  Sigeb.,  De  Mris  illiist.,  cap.  \iMi. 

'  Herimauus,  toin,  XII  SpicikQii,  pag.  395. 


'  Hœc  de  Gregorii  qui  traxit  opuscula  libro  : 
Gregorii  precibus  in  pace  quiescat  Àlulfu^.  In 
prœfat,  edit.,  pag.  2. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


EllI'CtIOD 

d»        quitre 

Tniliem.  de 
Scriptor.    «- 
clMtas.     ecp. 
cciv. 

Uonori 
Scr  i>lor. 
eleriu. 
ZUII. 

Ec- 

up. 

Greçor.  hb. 
Ml.ribl.lt. 


Sur  l'Ecrl- 
torfl  Sainte. 
Soo  iu;[tica- 
UoD. 


3.  Trithèmc  met  dans  le  calalot;ue  des  ou- 
vrdges  de  saint  Grégoire  une  courte  explica- 
tion des  quatre  Évnngilc?,  qu'il  dit  com- 
mencer par  ces  mots  :  Mntllurus,  sicut  in  or- 
dine.  11  en  est  dit  quelque  cliose  dans  Hono- 
rius  d'Aulun;  mais,  comme  il  n'en  parle  que 
sur  un  ouï-dire,  il  n'est  pas  aisé  de  décider 
si  l'Explication  de?  Évangiles  qu'il  semble  at- 
tribuer à  saint  Grégoire,  est  la  même  que 
celle  dont  Trithèmc  fait  mention.  Quoi  qu'il 
en  soit,  celle-ci  se  trouve  dans  deux  manus- 
crits fort  anciens,  et  d'environ  neuf  cents  ans, 
l'un  de  la  Bibliothèque  du  roi,  l'autre  deM. Bi- 
got; mais  le  style,  qui  en  est  extrêmement 
corrompu,  est  si  différent  de  celui  de  saint 
Grégoire,  qu'on  ne  peut  lui  attribuer  cet  ou- 
vrage. Yenance,  patrice  de  Palcrme,  lai  avait 
demandé  une  explication  allégorique  de  cer- 
taines actions  de  Samson,  et  il  s'était  engagé 
à  y  travailler,  en  cas  qu'il  recouvrât  la  santé. 
C'est  tout  ce  que  nous  savons  1<\ -dessus. 

ARTICLE  VII. 

DOCTRINE  DE  S.\1NT  GRÉGOIKE. 

1.  Ce  saint  Pape  ne  croyait  '  pas  que  l'on 
dût  se  mettre  beaucoup  en  peine  de  décou- 
vrir l'auteur  du  Livre  de  Job,  parce  que  les 
fldèles  ne  doutaient  pas  qu'il  ne  fût  l'ouvra- 
ge du  Saint-Esprit.  «  C'est,  dit-il,  l'Esprit  de 
Dieu  qui  l'a  écrit,  puisqu'il  eu  a  dicté  les  pa- 
roles pour  les  mettre  par  écrit,  c'est  l'esprit 
de  Dieu  qui  l'a  écrit,  puisqu'il  en  a  inspiré  la 
pensée  à  celui  qui  l'a  composé,  et  qu'il  s'est 
servi  de  ses  paroles  pour  faire  passer  jusqu'à 
nous  des  actions  de  vertu  que  nous  puissions 
imiter.  Nous  passerions  pour  ridicules,  si  li- 
sant des  lettres  de  quelques  personnes  de 
considération,  nous  nous  occupions  moins 


de  la  personne  qui  nous  aurait  écrit,  et  du 
sens  de  sa  lettre,  que  de  rechercher  avec 
quelle  plume  il  aurait  formé'  celte  lettre  :  de 
même  si,  persuadés  que  le  Livre  de  Job  est 
l'ouvrage  du  Saint-Esprit,  nous  examinions 
avec  trop  de  soin  de  quel  auteur  il  s'est  servi 
pour  l'écrire,  ce  ne  serait  faire  autre  chose 
que  de  nous  disputer  sur  la  plume,  tandis  que 
nous  pourrions  tirer  avanl.i;je  de  la  lecture 
de  l'ouvrage  même  que  nous  lisons.»  Dans  le 
partage  des  diverses  opinions  sur  le  livre  de 
Job,  saint  Grégoire  croit  qu'il  est  plus  vrai- 
semblable de  l'attribuer  à  Job  même;  il  en 
donne  plusieurs  raisons,  que  nous  avons  rap- 
portées à  la  tête  de  l'analyse  de  ses  homélies 
sur  ce  livre. 

2.  11  remarque  que  l'esprit  de  prophétie 
mampie  quelquefois  aux  prophètes',  et  qu'il 
ncdépend  pasd'euxde  l'avoir  en  tout  temps; 
et  qu'ainsi  quand  ils  l'ont,  ils  doivent  recon- 
naître qu'il  leur  a  été  donné.  Le  treizième 
chapitre  du  troisième  livre  des  Rois  lui  four- 
nit une  preuve  qu'un  prophète  peut  être  trom- 
pé par  un  autre.  oOn  ne  doit,  dit-il,  pas  regar- 
der comme  inspiré  de  Dieu,  tout  ce  que  dit 
un  prophète.  C'était  de  lui-même  que  le  pro- 
phète Nathan  disait  '  à  David  qu'il  pouvait 
bâtir  un  temple  au  Seigneur,  mais  que  cet 
honneur  était  réservé  à  Salomon  son  fils  : 
ainsi  il  s'opposa  au  dessein  que  David  avait 
d'eu  bàlir  un,  et  rétracta  ce  qu'il  lui  avait  dit 
auparavant  sur  ce  sujet.» 

3.  Saint  Grégoire  cite  ordinairement  les 
livres  de  l'Écriture  sous  le  nom  qu'ils  por-  i" 
tent  dans  nos  Bibles;  mais  en  parlant  de  l'Ec- 
clésiastique, il  le  cite  indéfiniment  '  sous  le 
titre  d'(/>i  ccrfnirt  sngc.  11  ne  s'explique  pas 
autrement  sur  les  livresdesMacchahées,  qu'en 
disant  *  qu'il  n'est  point  déraisonnable  de 


Sur  tV'prlt 
de  pr(<|biu«. 


Sur  le»  IW 
Tr**     faroni- 


'  Sed  quis  hœc  scripserit  valde  supervacue  quœ- 
ritur  :  cum  tainen  auctor  libri  {Job)  Spirilus 
Sanclus  fideliler  credatur.  Ipse  ijilur  hœc  scrip- 
sil,  qui  scribenda  diclavil.  Ipse  scripsit,  qui  el  in 
illius  opère  i)if:piralor  extiti(,  el  per  scribintis 
vocem  imitanda  ad  nos  ejus  fada  transmisil.  Si 
magni  cujusdam  liri  susccptis  epislolis  Icgere- 
mus  verba,S'd  que  calamo  fuissent  scripla,  quœ- 
reremus:  ridirulum  profccto  esset,  epislolarvm 
auctorem  scire  serisumque  cognoscere,  sed  quali 
calamo  carum  lerba  iinprcssa  fuerint  indagare. 
Cum  ergo  rciii  cngnosctmus,  ejusque  rei  Spirilum 
saiictum  aurloreni  temmus ,  quia  sciiplorem 
qufr'rinnts,  quid  nliud  (igiiuus,  jiisi,  legeiitis  lil- 
li'ias,  dr  calamo perconlamur?  S.  Grcg.  Pripfat., 
in  m.  Job.,  (k-ig.  7,  Idiii,  I. 

'  Àliquando  lero  prophetiw  spiritus  prophtlis 
decst,   nec  semper  eoruin  vienlilius  prœslo  est. 


quatenus  cum  hune  non  habent,  se  hune  agnos- 
cant  ex  dono  habcre  cum  habcnl...  Quia  aulcm 
prophclis  prophetiw  spiritus  non  semper  adest, 
eliam  rir  Dei  indicnt,  qui,  contra  Samariam  mis- 
sus,  mala  quœ  ei  Ventura  eranl  nuntiavil  :  qui 
tanien,  prohibitus  a  Domino  m  fia  comedere, 
prvphetœ  faisi  persuasione  deceptus  est  :  qucm 
fatlnx  scrmo  non  deciperet,  si  prophetio"  spiri- 
tum  prœsentem  habuisset. Creg.,  in  Ezechiel.,  lib. 
I,  Hom.  1,    num.  1."),  )iag.  IlSO. 

»  Ibid..  iiiim.  16,  i>a)!.  1180  el  1181. 

'  iiru^r.,lil(.  M,  incop.  .\iv  Jufr.,  uiiiii.  C',pag.  389. 

'  A'oii  inordinalc  agimus,  si  ex  Ubris  licel  non 
canonicis,  sed  tamen  ad  <rdificatiniiem  lîrclesia 
editis,  testimoiiium  prnftramus.  f.lcatnr  namqur 
in  pvu'lio  l'iephiintem  feriens  slrinil,sed  suhipso 
qurm  extinxil,  uccubuil  (1  M<icb.  6-H<).  dreg.,  lib. 
Xl.\,  in  cap.  aux  Job,  uiiui.  .'H,  jni;,'.  1)23. 


CHAPITRE  XUX.  —  SAINT  GRÉGOIRE  LE  GRAND,  PAPE. 


Sur  lot  se»' 
'  dp  I  Ecn- 
c  ;  son  cx- 
llencc. 


[vu'  SIÈCLE.] 

tirer  des  tdinoignngcs  des  livros  qui  ne  sont 
pas  cancmiqncs,  puisqu'ils  ont  (Uc  publies 
pourrt'diiic:itiondc  riî-lise.  Il  suivait  en  cola 
le  sonliniont  ilo  qiiclipu's  anciens,  comme  do 
Mtililon  de  Sardes,  <pii  n'a  pas  mis  les  livres 
des  Macliabées  dans  le  canon  des  i'xritures. 
11  dit,  qu'encore  que  saint  Paul  ait  '  dcrit 
quinze  lOpitres,  ri'Igiise  n'en  reçoit  que  qua- 
torze; ce  qui  fait  voir  ipTil  était  dans  l'opinion 
de  ceux  qui  en  supposent  une  àri^glisetle  Lao- 
dicde.  U  y  en  avait'  de  son  temps  qui  doutaient 
que  saint  Pierre  fût  auteur  de  la  seconde 
Kpitre  qui   porte  son  nom;  mais  il   soutient 
qu'elle  est  d'un  des  apôtres  qui  fut  témoin  de 
la  transfiguration  du  Sauveur,  et  est  qu'elle 
de  saint  l'icrre.  Il  confond  '  Maric-Magde- 
leine,  sanu-  de  Lazare,  avec  la  femme  pé- 
cheresse, et  saint  Jean  l'Kvangéliste  ''  avec 
ce  jeune  homme  qui  suivait  Jésus-Christ,  cou- 
vert seulement  d'un  linceul,  et  qui,  le  lais- 
sant aux  soldats,  s'enfuit  tout  nu,  de  peur 
d'être  pris  avec  le  Sauveur.  11  croit  '  que 
saint  André  prêcha  l'Évangile  dans  l'Achaïe, 
saint  Jean  dans  l'Asie,  et  saint  Thomas  dans 
les  Indes.  Il  réfute  ^  ceux  qui  prétendaient 
queCéplias  repris  par  saint  Paul  était  dill'é- 
rent  de  l'apôtre  saint  Pierre.  Dans  les  cita- 
tions de  l'Kcriture,  il  suit  ''  tantôt  la  version 
de  saint  Jérôme,  qu'il  appelle  nouvelle,  tan- 
tôt l'ancienne,  voulant  en  cela  se  conformer 
à  l'usage  du  Siège  apostolique,  qui  so  ser- 
vait de  l'une  et  de  l'autre;  mais  il  préfère  à 
l'ancienne  '  celle  de  saint  Jérôme,  comme 
étant  faite  sur  l'hébreu,  et  plus  conforme  à 
l'original.  Il  cite  '  quelquefois  les  versions 
des  Septante,  d'Aqnila,  de  Théodotion  et  de 
Symmaque. 

4.  D'après  saint  Grégoire,  on  peut  tirer  deux 
avantages  de  l'obscurité  de  l'Écriture  :  «  Le 


[iremi(U''°,  en  ce  qu'elle  exerce  l'esprit,  et 
que,  par  l'application  et  la  fatigue,  elle  le  rend 
piusé'tenduet  plus  éclairé  ,  en  sorte  qu'il  com- 
prend ce  qu'il  ne  comprenait  pas  bien  avant 
ses  reclierches  ;  le  second  ,   en   ce  que  l'on 
ressent  de  la  joie,  quand  on  a  découvert  le 
sens  caché  (pie  l'on  cherchait.  Si  au  contraire 
tout  était  clair  et  facile  dans  ri'^criture  ,  elle 
pourrait  tomber  peu  à  peu  dans  le  mcipris. 
Elle  est  au-dessus  de  toute  autre  doctrine", 
non-seulement  en  ce  qu'elle  n'annonce  que 
des  vérités,  qu'elle  nous  appelle  à  une  pa- 
trie foute  céleste,  qu'elle  change  le  creur  de 
ceu.K  qui  la  lisent,  en  les  détachant  des  cho- 
ses matérielles  pour  les  porter  aux  désirs 
des  célestes;  mais  aussi  à  cause  que  par 
son  obscurité  elle  exerce  les  intelligents  et 
les  p-irfaits,  et  qu'elle  console  par. sa  douceur 
les  imparfaits  et  les  faibles.  Elle  n'est  toute- 
fois ni  assez  obscure  pour  éloigner  les  lec- 
teurs, ni  si  facile  à  entendre  qu'on  doive  la 
mépriser.  Plus  on  se  la  rend  familière,  moins 
on  en  a  de  dégoût  ;  plus  on  la  médite  ,  plus 
on  la  chérit.  Elle  aide  notre  âme  par  la  sim- 
plicité de  ses  paroles  ;  elle  l'élève  par  la  su- 
blimité des  sens  qu'elle  renferme  ;  elle  sem- 
ble croître  et  s'élever,  à  proportion  que  ceux 
qui  la  lisent  et  la  méditent,  s'élèvent  et  crois- 
sent en  intelligence  ;  en  sorte  que  les  plus 
ignorants  et  les  moins  spirituels  y  compren- 
nent quelque  chose,  et  que  les  savants  la 
trouvent  toujours  nouvelle.  Les  mystères  " 
qu'elle  contient  sont  capables  d'exercer  les 
plus  éclairés,  et,  par  les  vérités  claires  qu'ehe 
propose  ,  elle  peut  nourrir  les  plus  simples 
et  les  moins  doctes.  Elle  porte  à  l'extérieur 
de  quoi  allaiter  les  enfants,  et  elle  garde 
dans  ses  replis  secrets  de  quoi  ravir  en  ad- 
miration les  esprits  les  plus  sublimes  :  sem- 


'  Pauliis  apostolus  q^iamvis  epistolas  quindecim 
scripserit,  sancta  lamen  Ecclesia  non  amplius 
quant  qualuordecim  tenet.  Greg.,  lib.  XXXV  in 
cap.  XLII  Job,  uuui.  48,  pag.  Ilùfi. 

2  Greg.,  in  Ezech.'lih.  Il,  Homil.  6,  uum.  U,  p.-ig. 
i;<68  et  1368. 

*  Greg.,  in  Evangel.  lib.  Il,  ffortii7.  25,  pag.  1541, 
et  Bomil.  S.?,  pag.  1592  et  1593. 

*  Gre{i.,  Mural.,  lib.  XIV,  in  cap  xix  Job,  uum. 
.57,  pag.  457  et  458. 

'Greg.,  in  Evang.  lib.  I,  Ilomil.  17,  pag. 
105». 

«  Greg.,  in  Ezech.  lib.  U,  lion  il.  6,  luim.  10,  pag. 
1368. 

'  Novam  Iranslationem  différa:  sed  cum  pro- 
balionis  cnu.ta  exi'jit.nttnc  novam,  nunc  velerem 
jier  testiiiionia  assuma;  ut  quia  Sedes  apostolica 
utruqne  utilur,  met  quoque  labor  studii  ex  ulra. 


que  fulciatur.  Greg.,  in  epislola  adsancium  Lean- 
drum,  tom.  I.  pag.  6. 

«  Greg.,  Moral,  lib.  XX,  mi  cap.  xsx  Job,  num. 
62,  pag.  6G5. 

9  Greg.,  in  Ezech.  lib.  I,  Ilomil.  1,  pag.  1233  et 
1234. 

1»  Magnœ  utilitalis  est  ipsa  abscuritas  eloquio- 
ruin  Dei,  quia  exercet  sensum,  ut  fatigalione  di- 
latetur.  Habel  qxtoque  adhuc  aliud  majus,  quia 
Scripturœ  sacrœ  intelligenlia,  quœ  si  in  cunctis 
esset  aperta,  vilescerel,  in  quibusdam  lacis  obs- 
curioribus  tanto  majore  dukediiie  inventa  reficil, 
quanto  majore  labore  faligat  animum  quœsila. 
Lib.  I  in  Ezech.,  Bomil.  6,  num.    1,  pag.  1213. 

"  Lib.  XX  Moral., in  cap.  xxix  Job,  uum.  1,  pag. 
635. 

1'  Greg.,  Episl.  ad  sanctxtm  Leandrum,  cap.  iv, 
pag.  3. 


354 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Snr  la  lee- 
10  i-dtlKcrl- 
to-Q  saiale. 


Llablc  à  un  tleuve  dont  les  eaux  seraient  si 
basses  en  certains  endroits,  qu'un  agneau 
pouirait  y  passeï-,  et  si  profondes  en  d'au- 
tres, qu'un  éléphant  y  na;,'erait.  » 

5.  (1  Nous  devons  donc  la  lire  et  la  méditer  ' 
avec  grand  soin.  Elle  est  comme  une  lettre 
que  notre  Sauveur  nous  a  adressée.  Elle  sert 
à  récbaulTer  notre  cœur,  cl  ;\  empéclier  qu'il 
ne  s'engourdisse  par  le  froid  du  péché.  Saint 
Grégoire  écrivait  à  deux  filles  de  distinction  : 
<i  Je  souhaite  que  '  la  lecture  de  l'Écriture 
sainte  ait  pour  vous  de  l'attrait,  afin  que, 
lorsque  vous  serez  engagées  dans  le  ma- 
riage ,  vous  sachiez  comment  vous  conduire 
et  régler  vofre  maison  ;  »  et  à  Théodore, 
médecin  de  l'Empereur:  «  Je  me  plaius  ' 
de  ce  qu'ayant  reçu  de  Dieu  le  talent  de 
l'esprit,  le  talent  des  affaires ,  le  talent  de 
la  miséricorde  et  de  la  charité  envers  les 
pauvres ,  vous  soyez  si  attaché  aux  occupa- 
tions du  siècle,  que  vous  négligiez  de  lire 
chaque  jour  quelques  paroles  de  notre  Ré- 
dempteur. Qu'est-ce  que  l'Écriture  sainte , 
sinon  une  lettre  du  Dieu  tout-puissant  à  sa 
créature  ?  Si  vous  en  receviez  de  la  part  de 
l'Empereur,  à  quelque  heure  que  ce  fût,  vous 
n'auriez  point  de  repos  que  vous  ne  fussiez 
informé  de  son  contenu.  Mais  c'est  l'Empe- 
reur du  ciel  qui  vous  a  écrit ,  ses  lettres  re- 
gardent votre  propre  salut  ;  comment  donc 
négligez-vous  de  les  lire  ?  Apprenez-y  quel 
est  pour  vous  le  cœur  de  Dieu,  afin  de  vous 
exciter  à  soupirer  avec  plus  d'ardeur  vers 
les  biens  éternels.  »  Le  saint  Pape  loue  ceux 
qui ,  ne  sachant  pas  lire  ,  empruntent  les 
yeux  des  autres  pour  s'instruire  des  divines 
Écritures;  et  c'est  à  celle  occasion  qu'il  re- 
lève le  mérite  d'un  pauvre  nommé  Servule  *, 
qu'une  longue  maladie  avait  rendu  impotent. 
Obligé  à  demander  la  charité  aux  passants 
sous  le  portique  de  l'église  de  Saiut-Clémenl, 
Ce  pauvre  distribuait  aux  autres  ce   qu'il 


recevait  de  trop  pour  sa  subsistance  ordi- 
naire ;  mais  ,  dans  le  désir  de  nourrir  aussi 
son  âme  des  aumônes  des  fidèles,  il  eu  ache- 
ta un  exemplaire  de  la  Rible,  qu'il  se  faisait 
lire  continuellement  par  ceux  envers  qui  il 
exerçait  l'hospitalité.  Par  ce  moyen  il  apprit 
l'Ecriture,  autant  qu'en  est  capable  une  per- 
sonne qui  ne  sait  pas  lire. 

6.  L'Écriture  a  plusieurs  sens,  l'historique 
ou  littéral  ',  l'allégorique  ou  moral,  le  spiri- 
ou  anagogique.  Il  y  a  divers  endroits  dans 
tuel  le  Livre  de  Job  qui,  pris  à  la  lettre,  jette- 
raient dans  l'erreur,  au  lieu  d'instruire  ;  nous 
en  avons  donné  plus  haut  quelques  exem- 
ples ;  nous  répéterons  celui-ci  :  Suus  qui  sont 
courbés  ceux  qui  supportent  la  terre  ?  Person- 
ne ne  s'imaginera  "  que  ce  saint  homme  ait 
ajouté  foi  aux  fables  des  poètes ,  qui  nous 
représentent  le  globe  de  la  terre  soutenu  sur 
les  épaules  d'un  géant.  11  y  en  a  d'autres  qui 
doivent  se  prendre''  littéralement  ;  tels  sont 
ceux-ci  :  Je  n'ai  point  refusé  aux  pauvres  ce 
qu'ils  ont  demandé;  je  n'ai  point  fait  attendre 
les  yeux  de  la  veuve  ;  je  n'ai  point  mangé  seul 
mon  pain  ,  mais  J'en  ai  fait  jjart  wu  pupilles. 
Vouloir  donner  à  ces  paroles  un  sens  allé- 
gorique, ce  serait  anéantir  les  œuvres  de 
miséricorde  que  Job  a  pratiquées.  Comme 
il  ne  faut  pas  tout  prendre  dans  le  sens  lit- 
téral ,  on  ne  doit  pas  non  plus  ramener  tout 
à  l'allégorie  ;  mais  '  s'arrêter  tantôt  à  la  let- 
tre de  l'histoire ,  et  tantôt  y  chercher  un 
sens  spirituel  sous  l'écorce  de  la  lettre  ;  imi- 
ter les  bonnes  actions  des  patriarches  en  les 
prenant  à  la  lettre ,  et  donner  un  sens  spiri- 
tuel, pour  s'avancer  dans  la  vertu,  à  d'autres 
passages  qui ,  entendus  historiquement ,  ne 
proposent  rien  à  imiter.  » 

7.  Le  respect  que  saint  Grégoire  avait 
pour  les  quatre  premiers  conciles  généraux, 
lui  faisait  dire  anathème  '  à  quiconque  no 
les  recevait  pas.  Il  les  révérait  '"  comme  les 


Sor  IfS  di« 
T»r>  »rD*  de 
rEchlurt. 


SnrlesCoB* 
cl'ei. 


1  Studele,  quœso,  fratres  charissimi,  Dei  verba 
medilari;  nnlite  despicerc  scripla  iioslri  Iledcmp- 
toris,  qui)  tid  nos  wissa  sunl.  MuUum  lalde  est 
tjuod  per  ea  aniinus  refricalur  ad  calorem,  ne  ini- 
quilalis  suœ  frigore  lorpescat.  In  Eztch.,  lit).  Il, 
llom.  3,  iimii.  18.  l'ag.  V.Vil. 

^  Opto  itl  snnctam  ScriiUurnm  légère  ametis ; 
ut  quandiu  vos  omnipolens  Deus  viris  conJKiixertl, 
sciaiùs  qualiler  t itère,  et  domttm  vtstram  que 
modo  disponerc  debealis.  Creg. ,  Epist.  lib.  .M, 
Episl.  78,  jms.  1180.  loin.  II. 

»  i.nr.,  Epist.  lit).  IV.  Episl.  31,  pap.  712. 

»  l.leiii.,  in  Etang.,  lAh.  I,  Iwm.  15,  iiiuu,  5, 
png.  Uill. 


'  Grcg.,  Moral,  lib.  .\VI,  in  cap.  xxii,  yo&.uuin. 
2V,  paff.  50y. 

«  IJcin.,  Episl.  ad  sanchtm  Leandrum,  cap.  lu, 
pag.  4  Pt  5. 

'  Ibid.,  cap.  IV,  pag.  5. 

"  (ireg.,  i;i  Ezech.,  lib.  I,  Hom.  3,  uiiin.  4,  pag. 
1193. 

•  Si  quis  contra  haruin  synodorum  fidem  el 
conlro  sanclw  memoriœ  Leonis  papa:  tomum  al- 
gue definitionem  aliquid  unquam  logui  prœ.^umit, 
anathtma  sil.  Ideui.,  lib.  VI,  Episl.  2,  pag.  792  et 
7!)3. 

"  Sicut  sancli  EvangeUi  quatuor  libros.sicqua- 
iHor  concilia  susciperc  cl  rencrari  me  faleor 


[vu-  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XMX.  —  SAINT  GIll^;G01HE  LE  fillAND,  PAI'E. 


."ioS 


(jiiiilrc  Kvaiif^ilos,  cl  rccovail  aussi  If  ciinjiiio- 
uic;  lejclaiU  toutes  les  personnes  que  ces  con- 
ciles avuientrcjelées,  et  recevant  toutes  celles 
qu'ils  avaient  reçues.  Il  en  donnait  pour  rai- 
sou  (jiie  rappi'ohaliou  de  ces  conciles  élanl 
l'ondée  sur  un  consunlenient  universel,  ce- 
lui-là se  détruisait  sans  leur  uuire,  qui  pré- 
sumait de  lier  ce  qu'ils  avaient  délié,  ou  qui 
déliait  ce([ii'ils  avaient  lié.  «  Dieu  nous  gar- 
de ',  dit  ce  l'ape,  de  recevoir  les  sentiments 
d'aucun  hérétique  ,  ou  de  nous  écarter  en 
quoi  que  ce  soit  de  la  lettre  de  saint  Léon 
et  des  quatre  conciles  généraux.»  Il  trouve 
dans  la  tenue  des  conciles  particuliers  de 
grands  avantages,  les  évoques  y  empécliant 
qu'il  ne  naisse  des  semences  de  divisions  ' 
entre  eux  et  les  peuples  dont  ils  sont  char- 
gés; ils  coulèrent  ensemble  sur  les  moyens 
de  rétablir  la  discipline  ,  de  réparer  les  dé- 
sordres passés ,  et  d'en  prévenir  de  nou- 
veaux par  de  sages  règlements.  Si  Dieu  se 
trouve  là  où  deux  ou  trois  personnes  sont 
assemblées  en  son  nom  ,  le  croira-t-on  ab- 
sent des  lieux  où  plusieurs  évèques  sont  as- 
semblés ?  Il  veut  donc  que  l'on  tienne  de 
ces  conciles  une  fois  l'an  ^.  Les  prêtres  as- 
sistaient à  ces  assemblées  ;  ils  y  étaient  ' 
assis,  de  même  que  les  évèques  ;  mais  les 
diacres  se  tenaient  debout  avec  tout  le  reste 
du  clergé.  Les  actes  qu'on  y  dressait  étaient 
conservés  avec  soin  ,  surtout  ceux  des  con- 
ciles généraux  ;  ce  qui  n'empêchait  pas 
qu'où  y  fit  quelquefois  des  altérations.  On 
en  avait  fait  dans  celui  de  Ghalcédoine  ,  et 
saint  Grégoire,  craignant  qu'on  en  n'eût  fait 
aussi  dans  celui  d'Ephèse*,  ordonna  d'eu 


clicrclior  les  [)ius  anciens  ex(unj)laires,  prin. 
cipalenu-nt  les  lalins,  qu'il  croyait  plus  cor- 
rects que  les  grecs.  La  falsification  dont  il  su 
plaint  à  l'égard  du  concile  de  Clialci'doinc , 
regardait  le  vingt-huitième  canon  " ,  où  il 
est  parlé  des  prérogatives  de  l'ilglise  de 
Constanlinople.  Saint  Léon  ne  fit  aucun  re- 
proche lù-dessus  à  Anatole  de  Constanlino- 
ple. Les  légats  du  Saint-Siège  prétendirent 
qu'on  avait  forcé  les  évèques  de  souscrire 
à  ce  canon  ;  mais  ils  ne  se  plaignirent  d'au- 
cune falsification.  L'I'^glise  Romaine  ''  ne  re- 
cevait du  premier  concile  de  Conslantinople 
que  la  définition  de  foi  contre  Macédouius. 
8.  (I  L'Église'  consiste  dans  l'union  des  fi- 
dèles, comme  le  corps  dans  l'assemblage  des 
membres.  Sainte  et  universelle  ',  on  ne  peut 
être  sauvé  que  dans  son  sein  ;  tous  ceux  qui 
en  sont  séparés  sont  exclus  du  salut.  Les  hé- 
rétiques '"  qui  soufl'rent  quelquefois  pour  le 
nom  de  Jésus-Christ,  s'imaginent  que  leurs 
souÛ'ranccs  leur  mériteront  la  gloire  des 
martyrs;  c'est  pour  les  désabuser  que  Job  a 
dit  qu'il  y  a  un  lieu  destiné  pour  purifier 
l'or.  On  peut  souffrir  hors  de  ce  lieu,  hors  de 
l'unité  de  l'I'^glise  ;  mais  on  ne  saurait  deve- 
nir martyr  ailleurs  que  dans  ce  lieu.  L'uni- 
que fournaise  où  l'or  puisse  être  purifié,  est 
l'Église  ;  c'est  là  seulement  que  l'on  peut 
être  nettoyé  de  la  souillure  du  péché.  Si,  iiors 
de  cette  Église,  vous  souU'rez  des  amertumes, 
des  tribulations,  vous  pouvez  bien  être  brû- 
lés et  consumés,  mais  vous  ne  sauriez  être 
purifiés.  Il  n'y  a  que  l'Eglise  seule  "  dont 
Dieu  ait  les  sacrifices  pour  agréables  ;  elle 
seule  peut  efficacement  intercéder  pour  ceux 


Fliee. 


quintum  quoque  concilium  pjriter  veneror..,.. 
Cunclas  vero  quas  prœfila  veneranda  cuncilia 
persoiias  rcspuuiil,  rcspuo  :  quas  veiieranlur,  am- 
plcctor  :  quia  diim  universali  sunt  consensu  con- 
stitula,  se.  et  non  ilUi,  destruil,  quisquis  prœsu- 
mil  aul  solvere  quos  religant,  aul  ligare  quos 
solvunt.  Quisquis  ergo  aliud  supit,  analhema  sil. 
Ulein.,  lib.  I,  Episl.  25,  pag.  .ïlS. 

'  Absit  enim  nos  cujuslibel  sensum  hœretici  reci- 
pere,  vel  a  tomo  sanctie  memoriœ  Leonis,  prwde- 
vessoris  noslri,  inaUquo  deviare;  scdquœcuinque 
a  sanclis  quatuor  synodis  sunt  dcfmita,  recipi- 
mus ;  et  quœcnmque  reprobala  sunt,  condeiiiiia- 
mus.  Idem.,  lib.  \l\',  Epist.  12,  pag.  liTO. 

»  Idem.,  lili.  I.\,  Epist.  106,  pag.  lOin. 

»  Greg.,  lib.  I,  Epist.  l,  pag.  4SG. 

'  Grcg.,  in  Decretis   pag.  1288,  tom.  II. 

5  Greg.,  lib.  VI,  Episl.  14.  pag.  80a. 

6  Tom.  IV  Concil.  Labb.,  p.ig.  769. 

''  Greg.,  lih.  VII,  Epist.  31,  png.  882. 
'  Sancta  Ecclesia  sic  consistit  unitatc  fidcliuni, 
sicut  corpus  nostrum  unitum  est  compagc  mem- 


brorum.  Idem.,  Sloral.,  lib.  Xl\incap.  xxix;  Job, 
luim.  45,  pag.  627. 

'  Sancta  autem  universalis  Ecclesia  pnvdicat, 
Deuiii  veracitcr  nisi  inlra  se  coli  non  posse,  as- 
serens  quod  omnes  qui  extra  ipsam  sunt,  minime 
salvabunlur.  Idem.,  Moral.,  lib.,  XIV,  mim.  5, 
pag.  457. 

">  Su'pe  pro  /estt  Christi  Domini  ut  Redempto- 
ris  nostri  nomine  multa  patiuntur  [hœretici), 
seseque  eisdeni  passionibus  ejus  fieri  martyres 
speranl.  Quibus  sancti  viri  {Job)  voce  nunc  dici- 
lur  :  Auro  lopus  est  in  ijuo  ecoflatur.  Nam  juxta 
hoc  quod  jam.  et  ante  nos  diclum  est,  quisquis 
extra  unitatem  Eccl siœ  patitur,  pœnas  pati  po- 
test,  martyr  fieri  non  potest:  quia  auro  locus  e.sl 
in  quo  conjlatur...  Una  est  Ecclesia,  in  qua  qui 
con/lari  valueril,  ab  omni  etium  poterit  peccato- 
rum  sorde  purgari.  Si  quid  pro  Deo  amariludinis, 
si  quid  tribulationis  extra  hanc  positi  sustinetis , 
incendi  potestis  tantummodo,  non  purgari.  Crcg., 
Moral.,  lib.  XVIll,  mim.  40  et  41,  pag.  375. 

"  Sold  quippe  lEcclesiaJ  est  per  quam  sacrifi- 


556 


HISTOIRE  GKNÉRAUi;  DES  AUTEURS  ECCLKSIASTIQUTIS. 


qui  tombent  dans  l'erreur.  C'est  pour  cela 
que  Dieu  avait  ordonne'  que  l'agneau  pascal 
serait  mangé  dans  une  seule  maison,  et  qu'on 
ne  porterait  dehors  aucune  partie  de  sa  chair. 
On  mangeait  l'agneau  dans  une  môme  mai- 
son, parce  rpie  la  vraie  hostie  du  Rédemp- 
teur doit  être  immolée  dans  la  seule  Église 
catholique.  La  défense  de  porter  ilehors 
quelque  partie  de  la  victime  marque  que  les 
choses  saintes  ne  doivent  point  être  données 
aux  chiens.  11  n'y  a  que  ri']glise  où  les  bon- 
nes œuvres  ne  soient  point  privées  de  ré- 
compense; c'est  pourquoi  le  denier  évangé- 
lique  ne  fui  donné  qu'à  ceux  qui  avaient  tra- 
vaillé à  la  vigne  du  père  de  famille.  11  n'y  a 
que  l'Eglise  qui  puisse  conserver  ceux  (ju'el- 
le  renferme,  par  l'union  étroite  de  la  cha- 
rité; c'est  pour  cette  raison  que  les  eaux  du 
déluge  ne  firent  qu't'lever  l'arche,  sans  faire 
périr  aucun  de  ceux  qu'elle  renfermait,  au 
lieu  qu'elles  engloutirent  tous  ceux  (pii  n'è- 
laient  point  dans  l'arclie.  Commune  aux  bons 
et  aux  méchants  ',  l'Église  est  composée  vi- 
siblement des  uns  et  des  autres  ;  mais  Dieu, 
qui  fait  un  discernement  invisible  dans  le  se- 
cret de  ses  jugements,  la  séparera  à  la  fin  de 
la  société  des  réprouvés.  Maintenant  les  bons 
n'y  peuvent  être  sans  les  méchants,  ni  les  mé- 
chants sans  les  bons,  parce  que  diirant  cette 
vie  l'union  extérieure  de  ces  deux  parties 
est,  pour  ainsi  dire,  nécessaire  à  l'une  et  à 
l'autre,  afin  que  les  méchants  puissent  être 
convertis  par  les  exemples  des  bons,  et  que 


les  bons  puissent  être  éprouvés  et  purifiés 
par  les  tentations  des  méchants.  « 

9.  «  Tous  ceux  '  qui  ont  lu  l'Évangile  sa- 
vent que  Jésus-Christ  a  donné  le  soin  de  VVj-  '""»■ 
glise  à  saint  Pierre,  prince  de  tous  les  apô- 
tres; c'est  à  lui  qu'il  dit  :  Pierre,  m'aimez- 
voiis?  Paissez  mes  brebis.  C'est  à  lui  qu'il  dit  : 
Satan  vous  a  demandés  pour  vous  cribler  com- 
me on  crible  le  froment;  mais  j'ai  prié  pour 
vous,  afin  que  votre  foi  ne  défaille  point  :  lors 
donc  que  vous  serez  converti,  ayez  soin  d'affer- 
mir vos  frères.  C'est  à  lui  qu'il  a  dit  :  Vous 
êtes  Pierre,  et  je  bâtirai  mon  Église  sur  cette 
pierre,  et  les  portes  de  l'enfer  ne  prévaudront 
point  contre  elle.  Cet  apôtre  a  reçu  les  clefs 
du  royaume  du  ciel,  avec  le  pouvoir  de  lier 
et  de  délier;  il  a  reçu  le  soin  de  toute  l'É- 
glise, et  la  principauté  :  toutefois  on  ne  l'ap- 
pelle pas  apôtre  universel.  »  Saint  Grégoire 
parlait  ainsi  pour  confondre  Jean,  patriarche 
de  Constantinople,  qui  alfectait  de  prendre 
le  titre  d'évèque  universel.  Il  ajoute  :  «  En- 
core donc  qu'il  y  ait  plusieuis  '  apôtres,  le 
siège  du  prince  des  apôtres  a  prévalu  seul 
pour  l'autorité,  à^cause  de  la  primauté.  C'est 
le  siège  du  même  apôtre  en  trois  lieux.  0  a 
élevé  ce  siège  où  il  repose,  et  où  il  a  fini  sa 
sa  vie;  c'est  Rome.  Il  a  orné  ce  siège  où  il  a 
envoy('  Marc  l'Evangéliste,  son  disciple;  c'est 
Alexandiie.  Il  a  alfermi  ce  siège,  qu'il  a  oc- 
cupé sept  ans,  quoique  pour  en  sortir;  c'est 
Antioche.  Ce  n'est  qu'un  siège  du  même 
apôtre,  dans  lequel  trois  évoques  président 


Sur  II  rri- 
irotiié   de   S. 


cium  nominus  libenter  accipiat,  .tola  quce  pro 
erranliliw!  ftducialiler  intercédât,  l'ndt  etiain  de 
agni  Itostia  Dominiis  prœcepil  direns  :  lu  mm  ùo- 
mo  coineiletur,  uec  eflcretis  de  carnibus  cjiis  foras. 
In  una  namque  domo  agnus  comeditur ;  qitUi  in 
vna  cnlholica  Ecdesia  vera  Iwstia  Redcmptoris 
immoldtur.  de  cujus  cariiil)tt.i  divin»  lex  efferri 
foras  prolUbel;  quia  dari  sanctum  canit)us  vctat. 
Sold  est  in  qua  opus  bonum  fructuo^e  perugi- 
liir,  undc  cl  mercedem  deiiarii  non  nisi  qui  intra 
rineam  lahoraverunt,  acceperunl.  Sola  est  quœ 
intra  ne  positos  valida  chartialis  compage  custo- 
dil.  Un'Je  et  aqua  diliivii  arcain  quidcin  ad  subli- 
iiiiora  sustulil  ;  omîtes  attlent  quos  extra  arcam 
invenil,  exlinxil.  r,rcg.,  Moral.,  lib.  X.XXV,  nuui. 
17>,  pas.  1U8  el  1U9. 

'  (Jiiia  enim  a  boni.':  malisque  hœc  vilacommu- 
niter  duritur.  nunc  Ecilesia  ex  ulrorumque  nu- 
méro visibililer  congrcgatur ,  sed  Deo  invisibili- 
ter  judicunte  disccrniiur,  ulque  in  cxilu  .■.uo  a 
reprohorum  socielatc  separalur.  Modo  vcro  esse 
in  eu  nec  boni  sine  malis,  nec  viali  sine  bonis 
essr  possunl.  //oc  enim  lempore  conjunclii  utra- 
que  pars  sibi  necessario  coiigruit ,  ui  el  mali  mu- 
lentur  ptr  exempta  bonorum,  et  boni  purgenlur 


per  lentamenla  malorutn.  Greg.,  Moral.,  lih.  xxxi, 
nuiii.  28,  pai;.  1009. 

'  Cunrlis  Evangelium  scienlibus  tiquet,  quod 
voce  dominica  sancio  et  omnium  apostolorum 
Petro  principi  aposlolo  lolius  Ecclesiee  cura  corn- 
missa  est;  ipsi  quippe  dicilur:  l'eiro,  aiiia?  tnel 

Pasce  oves  meas,elc Ecce  tlavrs  rrgni  ceelestis 

accepil  (Pelrusj  :  potestas  ei  ligandi  ac  solvendi 
Iribuilur ,  cura  ei  lotius  Ecctcsim  et  princi- 
pntus  committilur,  et  lamen  universalis  aposlo- 
lus  non  vocatur;  et  rir  snnctissimus  consacerdos 
meus  Joannes  vocari  uniiersnlix  episcopus  cona- 
tur.  fiit%,  lib.  V,  Epist.  20,  pag.  748. 

'  It'tqut  cum  mulli  sinl  apostoti,  pro  ipso  ta- 
wen  principalu  sola  apostolorum  principis  sedes 
in  aucloritale  convaluit,  quœ  in  tribus  locis  unius 
est.  Ipse  enim  sublimavit  sedem,  in  qua  etiam 
quicscerc,  el  prw.icntem  rilam  finire  dignatus  est: 
ipse  decornvit  seilem.  in  qua  Ernngclistnm  disci- 
pulnm  misil  :  ipse  firmavil  sedcm,  in  qua  septem 
nnnis,  quaniiis  discessurus,  sedit.  Cum  rrgn  unius 
alqne  una  sil  se.lrs,  cui  ex  auctnritnle  divifia 
très  nunc  episcopi  prœsident,  etc.  Idem.,  lib.  Vil, 
Epist.  40,  pag.  888. 


rllé   ilu  S«b'« 
tpoatotique. 


[vil"  siÈcr.K.J      ClfAPlTIlE  XLIX.  —  SAINT 

maintenant  par  l'aiitoritt^  divine.  Dieu  per- 
mit que  celui  qu'il  voulait  faire  piésiUer  '  \ 
toute  l'Église,  la  reniât,  par  la  crainte  ([ue 
lui  inspira  la  parole  d'une  ^^ervanle;  el  il  en 
usa  ainsi  pai'  un  conseil  de  niiséiicoide,  afin 
d'apprendre  A  celui  qui  devait  être  le  pas- 
teur de  son  Kj^iise ,  ;■!  avoir  compassion 
des  fautes  des  autres,  en  considérant  celle 
dans  laquelle  il  était  tombé.  11  commenra 
donc  par  le  faire  connaître  à  lui-même  avant 
de  l'établir  sur  les  autres,  afin  que  l'expé- 
rience de  sa  propre  faiblesse  lui  apprit  avec 
quelle  douceur  et  quelle  condescendance 
il  devait  supporter  les  infirmités  des  au- 
tres. » 

10.  L'Kglise  même  de  Gonstantinople,  avec 
toutes  ses  prérogatives,  était  soumise  au  Siè- 
ge apostolique'-;  l'Empereur  elle  patriarche 
de  celte  ville  ne  faisaient  aucune  difficulté 
de  le  reconnaître.  Le  primat  d'Afrique  s'a- 
vouait aussi  soumis  à  ce  siège,  et  saint  Gré- 
goire ne  connaissait  '  aucun  évéque  qui  ne 
s'y  soumit,  lorsqu'il  se  trouvait  coupable  de 
quelque  faute  ;  mais  «  quand  la  faute  ne  l'exi- 
ge pas,  nous  sommes,  ajoute  ce  Père,  tous 
frères  selon  la  loi  de  l'humilité.  »  Les  affaires 
importantes,  principalement  celles  qui  regar- 
daient la  foi,  étaient  poitées  devant  le  Saint- 
Siège  ';  mais  ces  affaires  se  jugeaient  en 
première  instance  dans  les  provinces  où  el- 
les avaient  pris  naissance,  et  le  métropoli- 
tain ou  le  vicaire  du  Saint-Siège  en  prenait 
connaissance  dans  un  concile  de  douze  évê- 
ques,  dont  le  jugement  était  envoyé  à  Rome, 
afin  que  la  chose  y  fût  terminée  d'une  ma- 
nière certaine  et  hors  de  tout  doute  :  car  les 
Papes  ne  doutaient  point  que  ''  le  soin  de 
toutes  les  Églises  ne  les  regardât,  et  qu'ils 
ne  fussent  liés  par  une  obligation  étroite  de 


(illÉGÙIllE  LE  GllANI),  l'APK.  537 

pourvoir  à  toutes  avec  nne  sollicitude  pasto- 
rale. 

11.  C'était  l'usage  que  les  évôfjues  nouvel- 
lement élus  lissent  une  [irofessiDii  pidilique 
de  leur  foi.  Voici  c(!lle  que  l'on  croit  avoir  élé 
laite  par  saint  Grégoire  en  la  cérémonie  de  sa 
consécration.  «Je  crois 'en  un  seulDieu  tout- 
puissant.  Père,  Fils  et  Saint-Esprit,  trois  per- 
sonnes et  une  substance.  Je  crois  au  Peie 
non  engendré,  au  Fils  engendré,  et  au  Saint- 
Esprit  (jui  n'est  point  engendré  ni  non-cu- 
gendré,  mais  ([tn'  est  coéternel,  et  qui  pro- 
cède du  Père  et  du  Fils.  Je  confesse  uu  Fils 
unique,  consubstanliel  et  né  du  Père  avant 
tous  les  temps,  créateur  de  toutes  choses  vi- 
sibles et  invisibles,  lumière  de  lumière,  viai 
Dieu  de  vrai  Dieu,  splendeur  de  sa  gloire, 
figure  de  sa  substance  ;  qui,  demeurant  Ver- 
be avant  les  siècles,  a  été  créé  homme 
parfait  sur  la  fin  des  siècles  ;  qui  a  été  conçu 
du  Saint-Esprit  et  est  né  de  la  Vierge  Marie  ; 
qui  a  pris  notre  nature  sans  péché  ;  qui  a 
été  crucifié  sous  Ponce  Pilate,  a  été  enseveli, 
et  le  troisième  jour  est  ressuscité  des  morts. 
11  est  monté  an  ciel  le  quarantième  jour,  il 
est  assis  à  la  droite  du  Père,  d'où  il  viendra 
juger  les  vivants  el  les  morts.  11  mettra  de- 
vant les  yeux  de  tous  les  hommes  toutes  les 
actions  secrètes  de  chacun.  Il  donnera  les 
récompenses  éternelles  du  royaume  céleste 
aux  saints,  et  aux  méchants  les  supplices  du 
feu  éternel.  Il  renouvellera  le  siècle  par  le 
feu,  c'est-à-dire  qu'il  purifiera  le  monde  par 
le  feu.  Je  crois  une  foi,  un  baptême,  une  seu- 
le Église  apostolique  et  universelle,  dans  la- 
quelle seule  les  péchés  peuvent  être  remis 
au  nom  du  Père,  et  du  Fils,  et  du  Saint-Es- 
prit. 1) 

12.  «Jésus-Christ  dit  à  ses  apôtres  ''  api'ès 


Sur  !■  Tri. 
nlK  FI  llDUf 


Sur  la  mls- 


'  Greg.,  in  Eiang.,  lib.  II,  Hom.  21,  uum.  4, 
pag.  Iu27. 

*  Greg.,  lib.  IX,  Epist.  12,  pa^.  941. 

'  Idem.,  lib.  IX,  Epist.  59,  pag    976. 

»  Idem.,  lib.  V,  Epist.  53,  pag.  783,  et  Epist.  34, 
pag.  784. 

»  Idem.,  lib.  VII,  Epist.  19,  pag.  865. 

'  Credo  in  unum  Deum  oinnipotentem,  Palrem 
et  Fitiiim,  et  Spiritiim  Sanclum ;  très  personas, 
unam  suhslantiam  :  Patrem  ingenitiim,  Filium 
genitum,  Spiritum  vero  Sanclum  nec  genitum, 
nec  ingenitiim,  sed  coaternum.  de  Patrc  el  Filio 
procedentem.  Con/lleor  unigenitum  Filium  con- 
sulislanlialem  et  sine  tempore  naium  de  Paire, 
omnium  visibilium  et  inrisibilium  condilorem. 
Lumen  ex  lumine,  Deum  rerum  de  Den  vero, 
splendorem  gloriw,  figuram  stibstantiœ.  Qui  ma- 
nens  Verbum  unie  sœcula,  perfeclus  homo  creattis 


est,  juxla  finem  sœculorum  ;  conccptus  et  nalus 
ex  Spiritu  Sancto,  et  Maria  Virgine.  Qui  naturam 
nostrnin  suscepit  absque  peccato.  Et  sub  Pontio 
Pilato  crucifixus  est.  et  sepnllus  ;  tertia  die  re- 
surrexit  a  mnrtuis.  Die  autem  quadragesimo  as- 
cendit  in  cœlum.  Sedet  ad  dexteram  Patris,  un- 
de  venlurus  esl  judicare  vivos  et  morluos.  Posi- 
lurus  anle  oculos  omnium  omnia  occulta  singu- 
lurum.  Daturus  sanctis  perpétua  prœmia  rcgni 
cœlestis;  iniquis  autem  supplicia  ignis  œlerni.  In- 
novnlurus  sœculum  perignem.  Confileor  unam  fi- 
dem,  unum  baplisma,  unam,  apostolicam,  el  uni- 
rersalem  Ecclesiam,  in  qna  sala  pnssint  larari 
peccata,  in  nomine  Patris,  et  Filii,  et  Spiritus 
Sancli.  Symboliim  fidei  a  beato  Grcgorio  papa  dic- 
taluni,  tcim.  Il,  jiag.  1283. 

^  DUil  eis  :  Pax  vobis.  Sicut  luisit  nie  Pater,  et 
ego  mitto  vos.  Id  est,  sicut  misit  me  Pater  Deus 


I  ntr- 


iioD  des 

MDDS« 

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ce-^sion  du  â. 


SS8  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES 

sa  résurrection  :  Comme  mon  Père  m'a  en- 
voyé, de  même  je  vous  envoie,  c'esl-à-dire  : 


Jl3D     XT, 


comme  Dieu  mon  Père  m'a  envoyé,  moi  qui 
suis  Dieu  ;  de  même,  étant  anssi  homme,  je 
vous  envoie,  vous  qui  êtes  hommes.  Le  Père 
a  envoyé  son  Fils,  en  lui  faisant  prendre  une 
chair  humaine,  et  en  l'envoyant  au  monde 
pour  y  soufTrir.  L'on  peut  aussi  entendre 
celte  mission  du  Fils  selon  la  uature  divine, 
et  dire  qu'il  a  été  envoyé  du  Père,  en  ce 
qu'il  est  engendré  de  lui.  En  ell'et,  quoique  le 
Saint-Esprit,  qui  est  égal  an  Père  et  au  Fils, 
ne  se  soit  pas  incarné,  le  Fils  ne  laisse  pas  de 
dire  qu'il  l'envoie  :  Quand  le  Consolateur  que 
je  vous  enverrai  de  lu  part  de  mon  l'ère  sera 
venu.  D'où  il  résulte  clairement  que  le  mot 
de  mission  ne  doit  pas  s'entendre  seulement 
de  l'incai nation  du  Fils;  que  la  mission  du 
Saint-Espiil  n'est  antre  chose  que  sa  pro- 
cession du  Père  et  du  Fils,  et  que  l'on  peut 
dire  qu'il  est  envoyé,  parce  qu'il  procède, 
comme  on  dit  que  le  Fils  est  envoyé,  parce 
qu'il  est  engendré.»  Dans  le  texte  latin  des 
Dialogues ,  qui  est  l'original ,  on  lit  '  que 
VL'sjjrit  consolateur  procède  toujours  du  Père 
et  du  Fils  ;  au  contraire  la  version  grecque 
porte  :  L'Esprit  consolateur  procède  du  Père, 
et  demeure  dans  le  Fils;  ce  qui  favorise  l'er- 
reur des  Grecs  touchant  la  procession  du 
Saint-Esprit,  au  lieu  qu'elle  est  entièrement 
ilétruile  par  le  texte  latin.  Cela  donne  lieu 
de  croire  que  les  Grecs  ont  altéré  cet  en- 
droit des  Dialogues,  et  Jean  Diacre  le  pen- 
sait ainsi  *. 

Denm,  et  ego  milto  vos  homo  homines.  Pater  Fi- 
lium  misit,  qui  hune  pro  redemplione  generis  hu- 
maniincarnari  consliluU.  Quem  videliret  in  mun- 
dum   venire    ad   passionem   voiuil  ;  sed    tamen 

amavil   Filium,   quem   ad   passionem    misit 

Çuamvis  miiti  etiam  juxta  naluram  divinilatis 
pnssil  inlrlligi.  Eo  enimipso  a  l'atre  FUius  midi 
dicUur.  quo  a  Paire  generntur.  !\'am  Snnclvm 
quoque  Spirilum  qui,  cum  sit  cuicqualis  l'alri  cl 
Filio,  non  tamen  incarnalus  csl,  idem  se  Filius 
mittere  pcrliihcl,  dicens  :  Cum  veucrit  l'arndcliis. 
qupm  of-'o  mittnm  voliis  a  Paire.  Si  enim  milli  sn- 
lummodo  incarnari  deberelintelligi.  Sanctua  prn- 
cul  dulno  Spiiilus  nullo  modo  diccrelur  milli, 
qui  iiequaquam  incarnalus  esl;  se./  ejus  mi.'ssio 
ipsa  processio  isl,  qua  de  Paire  procedit  et  Filio. 
Sicul  itaque  Spirtlvs  milli  dicitur  quia  prorrdit. 
ita  et  Filius  non  incongrue  milli  dicitur,  quia 
geiieralur.  Oreg. ,  in  Evang.,  \i\>.  \l,  llomit.  2li, 
iiuiu.  2,  i>ag.  1553  et  1354. 

>  Cum  enim  conslel  quia  Paracletus  Spiritus  a 
Paire  semper  procédai  et  Filio,  tic.  Orpg.,  lib.  Il 
Dialug.,  tap.  .18,  |iag.  276. 

Jouii.  Diac,  lil).  IV  De  Vila  S.  Gregorti,  cip, 
75,  ijog.  172. 


13.  «  Dieu  le  Père  '  a  fait  les  noces  à  son 
Fils,  quand  il  l'a  uni  A  la  nature  humain" 
dans  le  sein  de  la  sainte  Vierge  vers  la  lin 
des  siècles.  Toute  union  se  fait  ordinaire- 
ment entre  deux  personnes;  mais  cette  sorte 
d'union  n'a  pas  lieu  en  Jésus-Christ.  Quoi- 
que Dion  et  homme,  il  n'est  pas  composé  de 
deux  personnes.  Il  existe  en  deux  natures, 
il  en  est  composé  ;  mais  c'est  un  blasphème 
d'avancer  qu'il  soit  composé  de  deux  per- 
sonnes. On  lit  dans  l'i;vangile ',  qu'aussit  it 
que  le  diable,  qui  était  venu  pour  le  tenter, 
se  fut  l'Cliré,  les  anges  s'approchèrent  pour 
le  servir.  Cet  endroit  est  formel  pour  l'union 
des  deux  natures  en  une  seule  personne.  Il 
fallait  en  elfet  que  Jésus-Christ  fut  homme, 
pour  être  tenté  par  le  diable,  et  qu'il  fût 
Dieu,  pour  être  servi  par  les  anges.  Si  le  dia- 
ble ne  l'eût  reconnu  pour  homme,  il  n'eût 
osé  le  tenter.  Si  les  anges  ne  l'eussent  con- 
nu pour  Dieu,  ils  ne  se  fussent  point  abais- 
sés à  le  servir.  »  Nestorius  disait'  :  Je  n'envie 
pas  à  Jésus-C/irisI  l'avantage  d'avoir  (té  fait 
Dieu,  puisque  je  puis  le  devenir  moi-même.  Cet 
impie  soutenait  que  Jésus-Christ  n'était  pas 
Dieu  par  nature,  mais  par  grâce.  Saint  Gré- 
goire fait  voir  qu'il  y  a  de  la  ditlerence  en- 
tre ceux  qui,  étant  nés  hommes,  reçoivent 
la  grâce  d'adoption,  et  celui  qui  seul,  né  de 
Dieu,  est  lui-même  Fils  de  Dieu  par  nature. 
«  11  n'est  pas  né  un  pur  homme,  pour  être  en- 
suite fait  Dieu  par  son  mérite.  L'ange  ayant 
annoncé  Je  mystère  incompréhensible  de 
l'Incarnation,  elle  Saint-Esprit  étant  desccn- 

'  Tune  Vcus  Pater  Deo  Filio  sun  nuplias  ffcit. 
quando  hune  in  utero  Virginis  humanœ  nalurir 
conjunxil,  quando  Deum  ante  sœcula,  fieri  roluit 
hominem  in  fine  sœculorum.  Sed  quia  ex  dnahu.i 
personis  fieri  snlel  isla  conjunclio,  ahsil  hoc  ab 
iritellcclibus  noslris.  ut  prrsonam  f)ei  et  hominis 
Redemploris  noslriJesu  Christi  ex  duahusp  rso- 
7iis  credamus  unilam.  Ex  duabus  quippc  atque 
in  duabus  hune  naturis  existcre  dicimus  ;  frd 
ex  duabus  personis  enmpositum  credi,  ut  ne- 
fas,  vitamus.  Grog.,  m  Evang.,  lib.  Il,  Ilomil.  ;!8, 
pag.  161)5. 

'  Kecedcnle  diabolo.  Àngeli  ministrabantci.  F..r 
qua  rc  quid  aliud.  quam  unius  persona-  ulraque 
nalura  oslendilur  ?  (juia  et  homo  est  quem  dia- 
bolus  tentai,  et  idem  ipse  Deits  est,  cui  ab  ange- 
lis  minislratitr.  Cngnoseamus  igilurin  eo  natu- 
ram  noslram;  quia  mai  hune  diabolus  homiicm 
cernerel,  non  lentarel.  Yencremur  in  illo  divini- 
latem  suam,  quia  nisi  snper  omnia  Deus  existe- 
rcl,  ei  nullo  modo  angcli  ministrarrnt.  Crcg. ,  in 
Evang.,  Iil>.  I,  Ilomil.  Ifi,  mnu.  4,  pag.  1194. 

»  Crej.'.,  lib.  XVIII,  Moral,  uuiii.  85,  pag. 
r,98. 


Çïur  l..<i  deux 
Nc»tcriuf  |4* 

(me. 


[vu'  sifei.i.E.]     ciiAprrnE  xlix. 

du  iioiii'  l'opi'ior,  lo  VcM'ho  do  Dion  onira 
iiiissilùl  dans  le  sein  de  la  Vierge,  il  s'y  rc- 
vèlit  lie  la  chair;  el  sans  se  (U'iiouiller  de  sa 
nature  imaïuaMc,  (]ui  lui  est  commune  et 
eoélornelle  avec  le  Père  et  le  Saint-Esprit, 
il  prit  dans  les  chastes  tlancs  de  cette  Vierge 
lin  coips  avec  lequel  l'Impassible  pût  souf- 
frir, l'Immortel  piU  uioiuir,  el  l'IOlernel  put 
devenir  temporel  vers  la  On  des  siècles  :  de 
;orle  que  par  le  sacrement  inetl'able  de  cette 
conception  miraculeuse,  il  est  arrivé  que  la 
Vierge  sacriïe  a  été  en  même  temps  et  la 
servante  et  la  mère  de  son  Seigneur,  selon 
la  vérité  de  ses  deux  natures.  Ces  deux  qua- 
lités lui  sont  données  dans  l'Écriture  :  D\)h 
me  vient  ce  bonheur,  lui  dit  Elisabeth,  que  la 
mère  de  mon  Seigneur  vienne  vers  moi  !  Marie 
répondit  à  l'ange  qui  lui  annonçait  le  mystère 
de  l'Incarnation  :  Voici  la  Servante  du  Sei- 
gneur, (fu' il  me  soit  fuit  selon  cette  jia7vlc.  Ce 
que  le  Fils  a  de  son  Père  est  dill'érent  de 
ce  qu'il  a  do  sa  mère,  et  néanmoins  celui 
qui  vient  du  Père  n'est  pas  autre  que  ce- 
lui (jui  vient  de  la  mère;  il  vient  éternel 
de  son  Père,  et  temporel  de  sa  mère.  Il  a 
tout  fait,  et  lui-même  a  été  fait.  Il  est  plus 
beau  que  tous  les  hommes  par  l'éclat  de  sa 
divinité  ;  et  selon  son  humanité,  il  est  celui 
dont  il  est  dit  dans  l'Écriture  :  Aous  ravons 
vu  tout  défiguré,  et  dans  un  état  ou  il  était 
sans  agrément  et  sans  beauté.  Il  est  venu  avant 
tous  les  siècles  du  Père,  sans  mère,  et  il  est 
venu  .•'i  la  tin  des  siècles  d'une  mère,  sans 
père.  Il  est  le  temple  du  Créateui',  et  le  Créa- 
teur du  temple.  Il  est  de  deux  natures  et 


SAINT  GHEOnmE  LE  CRAND,  PAPE. 


r).'iu 


dans  deux  natures,  sans  que  leur  union  pro- 
duise en  lui  aucune  confusion,  ni  qu(!  leur 
di.slinction  divise  ou  mnlliplic  son  unité.» 

14.  <i  Tons  les  élus',  soit  ceux  qui  ont  pié- 
cédé  la  venue  du  Messie,  soit  ceux  qui  l'ont 
suivie,  et  qui  sont  présentement  dans  l'É- 
glise, ont  cru  et  croient  au  Mi'diateur  de 
Dieu  et  des  hommes  ;  tous  ont  crié  Iwsannn, 
c'est-à-dire  :  Sauvez-nous., C'est  /ilui  que  ceux 
qui  l'ont  précédé  ont  demandé  leur  salut, 
et  que  ceux  qui  vivent  le  demandent,  en  con- 
fessant que  celui-lA  est  béni,  qui  vient  an 
nom  du  Seigneur.  Les  peuples  qui  ont  pri;- 
cédé  sa  venue,  ou  qui  l'ont  suivie,  ont  eu  la 
même  espérance  et  la  même  foi  ;  c'est  en 
vertu  de  sa  passion  et  de  sa  résurrection  que 
les  uns  et  les  autres  ont  été  guéris,  quoique 
les  uns  l'attendissent,  et  que  les  autres  ne 
fussent  venus  qu'après  :  car  de  même  que 
les  justes  qui  ont  vécu  avant  nous,  ont  cru 
qu'il  viendrait  un  jour  pour  les  racheter,  et 
l'ont  aimé  par  avance  comme  leur  libérateur, 
de  même  nous  croyons  qu'il  est  venu,  nous 
nous  attachons  à  lui  par  amour,  nous  brû- 
lons du  désir  de  le  contempler  face  à  face.» 

15.  «Dans  toutes  nos  pensées^ et  dans  tou- 
tes nos  actions,  c'est  Jésus-Christ  que  nous 
devons  prier,  comme  le  principe  de  nos  bon- 
nes pensées  et  de  nos  bonnes  œuvres  ;  sans 
lui,  nous  ne  '  sommes  jamais  sans  péché,  et 
avec  lui  nous  ne  sommesjamais  sans  justice. 
Levez-vous  sur  vos  pieds,  disait  l'Esprit  de  Dieu 
au  prophète  Ezéchiel,  et  je  vous  parlerai  ;  aus- 
sitôt l'Esprit  entra  e?  le  fit  tenir  sur  ses  pieds.  La 
voix  de  Dieu  commande  '  au  prophète  de  se 


SurUfolea 


Sur  la  gr'« 
ce.  ïja  Dicet- 
fi'é.  Dieu  'a 
Tel  re  ounl* 
quofois.  On  y 
itsisle. 


Erecb.  cap, 
Il|  Vdrs.l  et^. 


'  Prœcessit  quippe  judaicus  popiUus,  seculus  est 
genlilis,  el  quia  omnes  etecti,  sive  qui  in  Judœa 
esse  potueruiit,  sive  qui  nunc  in  Ecclesin  cvistunt, 
in  Mediatorem  Dei  et  hominum  crcdider-unt  et 
credunt.qidprœeunt  et  qui  sequuntur  hosanna  cla- 
mant. Uosaima  autem  lalina  liiigua,  salva  nos  di- 
citur.  Àb  ipso  enimsaluiem  et  priores  quœsierunt, 
et  prœseiUes  quœrunt  :  et  henediclum  qui  venil  in 
noinine  Domini  confUentur,  quoniam  nna  spes, 
itnn  fides  est  ])ra'cedentium,  atque  sequentium  po- 
pulorum.  Nam  sicut  illi  expecialapassione  acre- 
surrectione  ejus  sanati  sunt,  ita  nos  prœterila 
passione  illius  ac  permanente  in  sœcula  resurrec- 
tione  sdlvamur.  Quem  enim  priores  noslri  e.v  ju- 
daico  populo  crediderunt  atque  amaverunt  ven- 
turuni,  hune  nos  el  venisse  credimus  el  amamus, 
ejusque  desiderio  accendiinur,  ut  eum  faciead  fa- 
ciem  contemple  mur.  Greg.,  in  Ezech.,  lib.  Il,  Ho- 
mil.  5,    uum.  2,  pag.  l:ib2-1333. 

*  Discipulis  dicebat  {CtirislusJ  ;Sine  meniliil  po- 
testis  facere.  In  omne  ergo  quod  cogitainus,  in 
omne  quod  agimus,  semper  orandum  est,  ut  et 
ipso  aspirante  cogilemus,  et  ipso  adjuvante  facia- 


mus.  Greg  ,  in  Ezech.,  lib.  I,  Homil.  10,  num.  4j, 
pag.  1281. 

5  lUius  ergonohis  virlus  quœrenda  est,  et  gra- 
tta postuUnuia,  sine  quo  nusquam  absque  culpa, 
cum  quo  nusquam  sine  justitia.  hlem.,  lib.  \\\, 
Epist.  i,  pag.  819. 

*  Fili  lioininis,  sta  super  pedes  tuos,  et  loquar 
tecum.  Et  iugressus  est  iu  me  Spiritus,  postquam 
lofiutus  est  mibi,  et  slatuit  me  super  pedes  mco.». 
[Ezech-,  cap.  n,  vers.  1  et  2.)  Ecce  divina  vox  ja- 
cenli  prophelœ  jussit  ut  surgeret.  Sed  surgcre 
omnino  non  posset,  nisi  in  hune  omnipolenlis 
Dei  Spiritus  inlrassel  :  quia  ex  omnipotentis 
Dei  gratta  ad  bona  opéra  conari  quidem  possu- 
mus,  sed  hœc  implere  non  possumus,  si  ipse  non 
adjuval  qui  jubet.  Sic  Paulus,  cum  discipulos  ad- 
■monerel,  dicens  :  Cum  metu  et  tremore  veslram 
ipsorum  salutem  operauuini  ;  illico  quis  in  cis  hœc 
ipsa  bona  operaretur  adjunxit:  dicens:  Deus  est 
euim  rjui  operatur  in  vobis  et  velle  et  perBcere 
pru  buua  vuhinlate.  Ilinc  est  quod  ipsa  verilas 
discipulis  dicit  :  Sine  me  nihil  potestis  facere.  Sed 
in  his  considerandum,  quia   sic  bona  noslra  si 


HISTOIRE  G1':NKR.\LE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


560 

lever  ;  mais  il  n'nurait  pu  se  lever,  si  l'Esprit 
de  Dieu  ne  fût  entré  dans  lui.  Nous  pouvons 
bien  faire  des  ell'orls  pour  de  bonnes  actions, 
par  la  grAce  du  Tout-Puissant  ;  mais  nous 
ne  pouvons  les  accomplir,  si  celui-là  même 
qui  commande  ne  nous  aide,    .\ussi  saint 
Paul,  après  avoir  dit  à  ses  disciples  d'opérer 
leur  salut  avec  crainte  et  tremblement,  ajou- 
te que  c'est  Dieu  qui  opérera  en  eux  le  vouloir 
et  le  faire,  selon  son  bon  plaisir.  C'est  encore 
ce  qneJésus-Ctirisl  nous  enseigne,  en  disant: 
Sans  jnoi  vous  ne  pouvez  rien  faire.  Mais  si  nos 
actions  étaient  tt'Ucraent  des  dons  de  Dieu 
qu'il  n'y  ci'it  rien  du  notre,  nous  n'aurions 
aucun  droit  d'en  demander  la  récompense 
comme  l'ayarft  méritée  ;  si  au  contraire  elles 
sont  tellement  de  nous,  que  les  dons  de  Dieu 
n'y  aient  point  de  part,   pourquoi  en  ren- 
dons-nous grâces  à  Dieu  ?  Nos  mauvaises  ac- 
tions, il  est  vrai,  sont  uniquement  de  nous  ; 
mais  les  bonnes  sont  de  Dieu  et  de  nous.  Il 
nous  prévient  par  son  inspiration,  afin  que 
nous  voulions,  et  il  nous  pousse  en  nous  ins- 
pirant, afin  que  nous  ne  voulions  pas  eu 
vain,  et  que  nous  puissions  accomplir  ce  que 
nous  voulons  ;  en  sorte  que  la  grâce  préve- 
nante étant  suivie  de  la  bonne  volonté,  cela 
même  qui  est  un  don  de  Dieu  devient  notre 
mérite.  C'est  ce  que  saint  Paul  explique  en 
ces  termes  -.J'ai  travaillé  plus  que  tous  les  au- 
tres :  et  afin  qu'il  ne  parût  point  attribuer  à 
ses  propres  forces  ce  qu'il  avait  fait,  il  ajoute: 
Ce  n'est  jms  moi,  mais  la  grâce  de  Dieu  avec 
moi.  Parce  qu'il  avait  été  prévenu  par  la 
grâce,  il  semble,  en  disant  :  Te  n'est  pas  moi, 
avouer  qu'il  n'avait  aucune  part  à  la  bonne 
action  ;  mais  à  cause  que  par  cette  grâce  son 


libre  arbitre  avait  rcru  l'activité  pourle  bien, 
et  que  dans  l'accomplissement  de  la  bonne 
œuvre  il  n'avait  fait  que  suivre  l'impression 
de  cette  grâce  sur  son  libre  arbitre,  il  ajoute: 
C'est  la  grâce  de  Dieu  avec  moi.  C'est  comme 
s'il  avait  dit  :  Ce  n'est  pas  moi  qui  ai  travaillé 
dans  kl  bonne  action,  et  toutefois  c'est  moi  : 
car,  en  tant  que  j'ai  été  prévenu  par  la  grâce, 
ce  n'est  JMS  moi  ;  mais,  en  tant  que  j'ai  suivi 
l'impression  de  cette  grâce  par  ma  volonté, 
c'est  moi  qui  ai  travaillé.  Il  arrive  souvent  que 
le  même  Esprit  '  qui  nous  avait  élevés  se  re- 
tire de  nous,  afin  de  nous  faire  connaître  qui 
nous  sommes  ;  c'est  ce  que  signifient  ces  pa- 
roles de  Job  :  Vous  me  réduirez  en  jMussière. 
En  eU'et,  lorsque  Dieu  se  retire  de  l'bomme 
durant  la  tentation,  il  devient  comme  une 
terre  qui,  manquant  d'eau,  sedessèclie.  Dieu 
en  use  ainsi,  pour  lui  apprendre  quelle  est 
sa  faiblesse  lorsqu'il  est  abandonné  à  lui- 
même,  et  comment  sans  le  secours  de  sa  grâ- 
ce, il  demciwe  sec  et  stérile  :  il  abandonne 
même  *  quebjuefois  ceux  qu'il    aime    pour 
l'éternité.  Ae  m'abandonnez  pas  cntiéretnent, 
lui  disait  David,  sachant  bien  qu'il  pouvait 
lui  être  utile  d'être  abaiîdonné  pour  un  temps, 
pourvu  qu'il  ne  le  fut  pas  pour  toujours.  Dieu 
assiste  les  saints,  lorsqu'il  vient  à  eux;  il  les 
éprouve,  lorsqu'il  les  délaisse  ;  il  '  détruit, 
pour  ainsi  dire,le  cœurde  l'iiomme  lorsqu'il 
l'abandonne';  il  l'édifie,  lorsqu'il  le  remplit. 
En  vain  le  prédicateur  exliorte  au  dehors, 
si  Dieu  ne  remplit  le  cœur  de  celui  qui  écou- 
te. La  bouclie  qui  parle  est  muette,  si  Dieu 
ne   parle  au  dedans  de  l'âme,  et  n'inspire 
intérieurement  les  paroles  que  les  oreilles 
du  corps  entendent  ;  ce  qui  faisait  dire  au 


omnipotentis  Dei  dana  sxint,  ul  in  eis  aliquid  nos- 
trum  non  sil,  curnos  quasi  pro  mcritis  œlernam 
retrihulioneiii  quœriinus  !  Si  autem  ila  noslra 
sunl,  ul  cloua  Dei  omnipotentis  non  sint,  cur  de 
eis  omnipotenli  Dca  gralias  agiinus?  Scd  scien- 
dum  est,  quia  nuila  nostra  solummodo  nostra 
sunl;  bona  autem  noslra,  et  omnipotentis  Dei 
sunl,  el  nostra:  quia  ipse  aspirando  nos  prœve- 
nil  ut  velimus,  qui  adjuvando  suhsequihir,  ne 
inaniler  velimus,  sed  possimus  implire  qinr  i!o/i/- 
mus.  Prœveniente  rrgo  gratia,  el  lio:ia  voluntate 
gul)Sequenl(,  honiuoilomnipolcntis  Dei  donum  est, 
silmerilum  uoslruiu.  (juodhene  Paulus  hrevi  scn- 
lentia  explicot,  dicens  :  Plus  illis  inniiil)U9  labnin- 
vi.  Qui  ne  suœ  viderelur  virtuli  Iribuisse  quod 
feceral,  adjunxil  :  Non  aiili'in  ofro,  m-d  prati.i  Doi 
mo'iim.  Quia  ehim  cœlesti  dono  pra-vcntus  est, 
quasi  alienum  se  a  bono  suo  opère  agnovil,  di- 
cens :  Non  avilcin  c;to.  Sed  quiii  prwrrniens  gra- 
tialiberumin  eo  arbitrium  feceral  in  bonum,  quo 


libero  arbitrio  eamdem  gratiam  est  subsecutus in 
opère,  adjun.xit  :  Sed  gralia  l)i;i  inccuni.  Ac  si  di- 
ceret  :  In  hono  opère  laboravi,  non  ego,  sed  et  ego. 
In  tioc  eitim  quod  solo  Dnmini  dono  prceveiitus 
sum,  non  ego:  in  eo  autem  quod  donum  volun- 
tale  subsecutus,  el  ego  Gr(>g.,  m  Ezccli  ,  lit),  l, 
Bomil.  n,  nuni.  2,  png.  1219  et  1250. 

'  Undc  fit  plerumque  ut  isdem  qui  sublevave- 
rnl,  pnrumper  deseral  Spiritus,  qualenus  ipsum 
sibi  liominem  oslendat.  Quod  sanclus  rir  proli- 
nus  exprimit,  cum  sulijunyil  :  El  in  piilvereni  re- 
duccs  lue.  Quia  enim  per  suhtractionem  Spiritus, 
mens  uliquanlulum  in  tciitntione  deserilur,  qua- 
si iili  Itiimnre  prislino  terra  siccatur  :  ut  infirmi- 
tatem  sriiim  dereliclus  sentint,  et  sine  infusione 
superwp graHœ.  quantum  liomo  aruil,  cngnoscat. 
Idem.,  lit).  l\«,»/or(//.,  niiin.  .lO,  png.  323. 

'  Idem.,  lih.  .\X  Moral.,  luim.  .'il.  pag.  B61. 

•  IdiMn.,  lili.  XI  .Voral.,  niiin.  12,  pag.  370. 


[VII'  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT  GnÉGOIRE  LE  GRAND,  PAPE. 


561 


PiopliMc  :  5»  le  Seigneur  ne  bâtit  la  maison, 
en  vain  travaillent  ceux  qui  l'édifient.  Il  ne  faut 
pas s'étonucrsi le piidicalour n'est  pasécouté 
par  un  cœur  répi'ouvé,  puisijue  Dieu  trouve 
quelquefois  de  la  ri'sistaïue  ilans  les  nur'urs 
dépravées  de  ceux  à  qui  il  parle  lui-même. 
Gain,  averti  de  la  propre  bouclie  de  son  Dieu, 
ne  fut  point  changé,  parce  qu'en  punition 
de  son  crime  et  de  sa  mécliaiuelé.  Dieu  l'a- 
vait déj;\  abandonné  intérieurement,  lorsqu'il 
le  rcpienaitau  dehors  pour  le  convaincre  et 
le  rendre  inexcusable.  Il  est  dit  que  ^  si  Dieu 
tient  une  personne  enfermée  et  prisonniè?-e,  nul 
ne  peut  lu  /«(Ve  6W/iV,  parce  que,  comme  per- 
sonne n'empêche  la  largesse  de  Dieu  lors- 
qu'il appelle,  de  même  personne  ne  fait  obs- 
tacle à  sa  justice  lorsqu'il  abandonne,  infor- 
mer, i\  l'égard  de  liieu,  n'estautre  chose  que 
ne  point  ouvrir  ;\  ceux  qui  sont  enfermés.  On 
dit  aussi  de  Dieu,  qu'il  endurcit  par  sa  jus- 
tice les  cœurs  des  réprouvés,  lorsqu'il  ne 
les  amollit  point  par  sa  grâce,  n 
Grèce  prt.       {Q    ^^  Les  saints  *  n'ignorent  pas  que,  nés 


d'une  race  corrompue  depuis  la  chute  du 
premier  homme,  s'ils  ont  été  changés  en 
mieux  et  dans  leurs  désirs  et  dans  leurs  ac- 
tions, ce  n'est  pas  l'ouvrage  de  leur  vertu  pro- 
pre, mais  celui  de  la  grùcede  Dieu  qui  les  a 
piévenus  de  ses  dons.  Us  reconnaissent  donc 
que  tout  le  mal  qui  est  en  eux  prend  sa  sour- 
ce dans  la  corruption  de  leur  origine,  et  que 
tout  le  bien  qu'ils  ont  vient  de  la  libéralité 
de  la  grâce  et  de  la  bonté  de  leur  Sauveur, 
qui  par  sa  grâce  prévenante  leur  a  fait  vou- 
loir le  bien,  et  le  leur  a  fait  accomplir  par  une 
grâce  subséquente.  C'est  de  ces  saints  qu'il 
est  dit  dans  l'Apocalypse  :  Usant  adoré  relui 
qui  vit  durant  tous  les  siècles,  en  mettant  leurs 
couronnes  aux  pieds  du  trône  du  Seigneur.  Met- 
tre leurs  couronnes  aux  pieds  du  Seigneur, 
n'est  autre  chose  que  lui  attribuer,  et  non 
pas  â  eux-mêmes,  les  victoires  qu'ils  ont 
remportées  dans  leurs  combats,  et  en  rap- 
porter toute  la  gloire  à  celui  qui  leur  a  don- 
né les  forces  nécessaires  pour  bien  combat- 
tre. Personne  'n'a  donné  le  premier  à  Dieu, 


tratulU. 


'  Dicatur  ergo  :  Si  incluserit  hominem,  duIIus 
ost  qui  aperiît  ;  quia  sicut  iiemo  obsistit  largilati 
vocanlis,  ita  nullus  obviai  justitiœ  relinqventis. 
Inciudere  itaque  Dei,  est  clausis  nou:  aperire.  Vn- 
de  et  ad  Muysen  diciiur  de  Pharaone  :  Ego  indu- 
ralio  cur  ejus.  Ohdurare  quippe  per  justitiam  di- 
cituv,  quando  cor  reprobuni  per  gratiam  non 
emollit    klem.,  ibid.,  num.  13,  jiag.  3"1. 

'  Sancli  aulem  viri  seiunt,  post  primi  parentis 
lapsiim,  de  corruphhili  stirpe  se  éditas,  et  non 
virtute  propria,  sed  pravenienle  superna  gratia 
ad  meliora  se  vota  rtl  opéra  conimuiatos ;  et 
qtiidquid  sibi  mali  inesse  cognoscunt,  de  morlali 
prapugine  senliiint  meritum:  quidqnid  vero  in  se 
boni  inspiciunt,  imnwrtaiis  gratiœ  donum,  eique 
de  accepta  munere  debilores  fiunl,  qui  et  prœve- 
niendo  dédit  eis  bonuni  telle  quod  noluerunt,  et 
suhseqiiendo  concessil  bonum  passe  quod  volunt. 
Vnde  bene  per  Joannem  diciiur:  Adoraverunt  vi- 
veutem  in  soecula  sa^culorunj.mitteulescorouas  suas 
aute  tlirùLium  Doniini.  Coronas  namquesuas  unie 
tlironum  Domini  millere,  est  cerlamimim  suo- 
rum  victorias  non  sibi  tribuere,  sed  auctori,  ut 
ad  ilium  référant  gloriam  taudis,  a  quo  se  scitint 
vires  accepisse  cerlaminis.  Greg.,  lib.  XXII  Mo- 
ral., num.  20,  pag.  708. 

5  Keiiio  quippe,  ul  divinaillutn  gratia  subsequa- 
tur,  prius  aliquid  contuUt  Deo.  Aam  si  nos  Deum 
bene  operando  prœvenimus,  ubi  est  quod  Proptie- 
ta  ait  :  Misericordia  ejus  prœveniet  me'^  Si  quid 
nos  boncB  operationis  dedimus,  ut  ejtis  gratiam 
mereremur,  ubi  est  quod  Àpostolus  dicit  :  Gratia 
salvati  estis  per  fidem,  et  hoc  non  es  vobis,  sed 
l)ei  donum  est,  non  ex  operibus?  Si  nostra  dilec- 
tio  Deum  prœvenil,  ubi  est  quod  Joannes  aposlo- 
lusdicil:  Non  quia  dos  dilexerimus  Deum,  sed 
quia  ipse  prior  dilexit  nos?.,.  Ubi  est  quod  rur- 

XI. 


sum  per  Paulum  lam  salubriter  dicitur...  Non 
quia  sufficieiitps  simus  aliquid  cogitare  a  nobis 
quasi  a  uobis,  sed  sufficientia  nostra  ex  Deo  est'^ 
Neino  ergo  Deum  meritis  prœvenil,  ut  tenere 
eum  quasi  debiloreui  possil:  sed  miro  modo  œquus 
omnibus  Conditor,  et  quosdam  prœlegit,  et  quos- 
dam  in  suis  pravis  morib^ls  derelinquit.  ^ec  ta- 
men  electis  suis  pielalem  sine  justilia  exhibet, 
quia  /iie  eos  duris  a/Jliclionibus  premit  :  necrur- 
sum  reprobis  jusliliam  sine  misericordia  exercet 
quia  tiic  œquanimiler  loleral,  quos  quandoque  in 
perpeluum  damnât.  Si  ergo  et  electi  prœvenien- 
tem  se  gratiam  sequunlur,  el  reprobi  juxla  quod 
merentur,  accipiunt:  et  de  misericordia  ince- 
rdunt  electi  qund  laudenl,  et  de  justitia  non  lia- 
beat  reprobi  quod  accusent.  Bene  itaque  diciiur: 
Quis  ante  dédit  mihi,  ut  reddam  ei  ?  Ac  Si  aperle 
diceretur :  ad  parendum  reprobis  nulla  ralione 
compellor,  quia  eis  debilor  ex  sua  actione  non 
teneor.  Idcirco  enim  nequaquam  cœlestis  patriœ 
prœmia  œlerna  percipiunt.  quia  ea  nunc,  dum 
promereri  poterant,  ex  lihero  arbilrio  contemp- 
serunt.  Quod  videlicel  liberum  arbitrium  in  bono 
formalur  eleclis,  cum  eorum  mens  a  terrenis  de- 
sideriis  gratia  aspirante  suspendilur.  Bonum  quip- 
pe quod  agimus,  et  Dei  est,  et  nostrum  :  Dei,  per 
pra-venicnlem  graliam;  nostrum,  per  obsequen- 
tem  liberam  voluntalem.  Si  enim  Deinon  est,  un- 
de  ei  grattas  in  œlernum  agimus  ?  Rursum  si  nos- 
trum non  est,  unde  nobis  retribui  prœmia  spe- 
ramus  ?  Quia  ergo  non  immerilo  gralias  agimus, 
scimus  quod  ejus  inunere  pra'veniemur  ;  el  rur- 
sum. quia  non  immerilo  relrihutionem  quœrimus, 
scimus  quod  obsequente  libero  arbilrio  bona  ele- 
gimus,  quic  ageremus.  Greg.,  lib.  XXXIl  .floral., 
num.   as  et  39,  pag.  1100  et  1101. 


562 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


^nr  II  prO- 
U       rijiroti- 

1.00, 


pour  l'obliger  à  donner  sa  grâce.  Si  nous  le 
prévenions  par  nos  bonnes  œuvres,  que  de- 
viendraient ces  paroles  du  Hoi-proplièle  :  Sa 
miséricorde  me  prévietidru?  Et  si  nous  avons 
mérité  la  grâce  par  le  bien  que  nous  avons 
fait,  comment  l'Apôtre  a-t-il  dit  :  C'est  jmr  la 
grâce  que  vous  êtes  sauvés,  par  le  moyen  de  la 
foi,  et  cela  ne  vient  jxis  de  vous,  c'est  un  don  de 
Dieu  ;  cela  ne  vient  pas  de  vos  œuvres.  Si  notre 
amour  pour  Dieu  prévenait  ses  dons,  saint 
Jean  n'aurait  pas  dit  :  Ce  n'est  pas  nous  qui 
avons  aimé  Dieu,  c'est  lui  qui  nous  a  aimés  le 
premier.  Saint  Paul  n'aurait  pas  dit  non  plus  : 
Non  que  nous  soyons  capables  de  former  de  nous- 
mêmes  aucune  bitnne  pensée,  comme  de  nous-mê- 
mes. )) 

17.  «  Ainsi  personne  ne  prévient  Dieu,  de 
manière  à  le  rendre  son  débiteur;  mais  étant 
également  le  Créateur  de  tous  les  bommes, 
Dieu  en  prédestine ,  en  choisit  quelques- 
uns,  et  abandonne  justement  les  autres  à 
leur  vie  dépravée.  Ce  n'est  pas  qu'eu  faisant 
part  de  ses  miséricordes  à  ses  élus,  il  ne  leur 
fasse  sentir  quelquefois  les  rigueurs  de  sa 
justice,  par  les  afflictions  qu'il  leur  envoie 
durant  celte  vie.  Il  ne  prive  pas  même  les  ré- 
prouvés de  ses  grâces  et  de  ses  faveurs,  quoi- 
qu'il exerce  contre  eux  sa  justice,  puisqu'il 
les  souffre  longtemps  avec  patience  en  ce 
monde,  avant  de  les  livrer  aux  supplices 
dans  'l'éternité.  Les  élus,  en  suivant  l'im- 
pression de  la  grâce  qui  les  prévient,  ont  su- 
jet de  louer  la  miséricorde  de  Dieu;  les  ré- 
prouvés, en  soutirant  les  supplices  qu'ils 
méritent,  ne  peuvent  se  plaindre  de  sa  jus- 
tice. Qui  est-ce,  dit  le  Seigneur,  qui  m'a  don- 
né le  premier,  afin  que  je  lui  rende  ?  Comme 
s'il  disait  :  Je  ne  suis  pressé  par  aucune  rai- 
son de  pardonner  aux  réprouvés,  parce  que 
je  ne  dois  rien  au  mérite  de  leurs  actions; 
ainsi  ces  maliieureux  ne  reçoivent  point  le 
prix  éternel  delà  céleste  patrie,  parce  qu'ils 
ont  refusé  par  leur  libre  arbitre  de  la  méri- 
ter. A  l'égard  des  élus,  ils  ont  été  formés  au 


Sari 
it     U 
ivte    le 
ariNtrf. 


bien  par  l'inspiration  de  la  grâce,  et  élevés 
par  elle  au-dessus  des  désirs  terrestres.  Tout 
le  bien  que  nous  faisons  vient  de  Dieu  et  de 
nous  :  de  Dieu,  par  le  secours  de  sa  grâce 
piévenante;  de  nous,  par  la  coopération  de 
noire  libre  volonté.  S'il  ne  venait  pas  de 
Dieu,  en  vain  nous  lui  en  rendrions  gr;\ces; 
s'il  ne  venait  pas  de  nous,  quel  droit  aurions- 
nous  d'en  espérer  récompense?  Nos  actions 
de  grâces  à  Dieu  sont  donc  une  preuve  qu'il 
nous  prévient  par  ses  dons  ;  et  la  récompense 
que  nous  espérons  de  nos  bonnes  œuvres, 
est  une  autre  preuve  de  la  part  que  notre 
libre  arbitre  a  dans  les  bonnes  œuvres  qu'il 
fait  en  suivant  le  mouvement  de  la  grâce.  » 

18.  «Dieu  par  sa  bonté  agit'  premièrement 
sans  nous  dans  nous-mêmes,  aCn  que,  notre 
libre  arljitre  suivant  le  doux  mouvement  de 
sa  grâce,  elle  opère  avec  nous  le  bien  qu'elle 
nous  a  fait  désirer;  ce  qui  n'empécbe  pas 
que  Dieu  ne  le  récompense  en  nous  avec  la 
même  bouté,  que  s'il  venait  purement  de 
nous.  Saint  Paul  marque  clairement  que 
c'est  Dieu  qui  nous  prévient  pour  nous  faire 
justes,  lorsqu'il  dit  :  C'est  par  la  grâce  de  Dieu 
que  je  suis  ce  que  je  suis;  et,  parce  que  Dieu, 
à  la  suite  du  consentement  de  notre  libre  ar- 
bitre, nous  favorise  encore  de  son  secours, 
il  ajoute  :  Et  sa  grâce  n'est  pas  demeurée  en 
7noisans  effet,  mais  j'ai  travaillé  plus  que  tous 
les  autres.  Puis,  considérant  qu'il  n'étnil  rien 
de  lui-même,  il  dit  :  Non  pas  moi  toutefois; 
après  quoi,  reconnaissant  qu'avec  la  grâce 
il  a  fait  quelque  chose,  il  ajoute  :  inais  la  grâ- 
ce de  Dieu  avec  moi.  Or,  il  ne  dirait  pas  avec 
moi,  s'il  n'avait  point  le  libre  arbitre  qui  sui- 
vit l'impression  de  la  grâce  prévenante.  Il  est 
donc  vrai  que  l'innocent  sera  sauvé  à  cause  de 
la  pureté  de  ses  mains,  parce  que  Dieu,  dans 
son  dernier  jugement,  récompensera  pour 
ses  mérites,  celui  qu'il  aura  prévenu  de  sa 
grâce  durant  cette  vie.  » 

19.  «  Les  élus  parviennent  '  au  royaume  de 
Dieu  par  leur  travail,  eu  sorte  qu'ils  méritent  '^^ 


•ffftrl 


Sor 

llludr   ' 


'  Superna  ergo  pietas  priiis  agit  in  nohis  ali- 
quid  sine  nohis,  ut,  subse.ijuente  guaque  nostro  li- 
bero  arbitrio,  bonuiii  quod  jam  uppetinius,  agal 
nobiscum  :  guod  tainen  per  impcimam  graUam 
in  extrcmn  judicio  Un  rémunérai  in  nobis,  ac  si 
soUs  prDces.siasel  ex  nobi.i.  (Juin  eniiii  divina  nos 
bonitag,  ul  innocentes  faciat,  prœvenil,  l'tiulus 
ait  :  tjralia  iiulciii  L)ei  eiiui  id  (jiioil  biiiii.  El  gnia 
eaniilcm  grultam  noslrum  libcrum  arbilrinm  se- 
quilur,  adjungil  :  Kt  gratia  ujiis  in  me  vm-ua  non 
fuit,  sed  abundautius  illis  uumiljus  luburuvi.  Qui 


dum  se  de  se  nihil  etse'conspiceret,  ait  :  Non  tiu- 
tein  i'tio.  El  lainen,  quia  se  essealiguid  cum  gra- 
lia  invenil,  aiijtinxit  :  Se<l  Kralin  Hi'i  nii^cuiu. 
^on  enim  diceret,  iiieciim  ,  si  cum  prwiiniente 
grali'i  subscguens  liberum  arbilriutn  non  linbe- 

ret lHundilia  ilaque  manuum  suartim  inno- 

cens  nalvnbitur;  quia  gui  hic  prarcnitur  ttono 
ul  innoceus  fiai,  cvm  ad  judicium  ducilur,  ex 
merito  rcmuneratur.  Grcg.,  Iil>.  XVI  Moral.,  uuui. 
30,  |>.ig.  512.    • 
•  Jpsa  perennis  regni  prœdeslinatio  ila  ab  om- 


[vn«  SIÈCLE.]      CHAPITHE  XLIX.  —  SAINT 

d'oblonir  parleurs  prit'res  ce  que  Dieu  a  ré- 
solu avant  tous  les  siècles  de  leur  donner. 
Nous  savons  que  nous  sommes  appelés  ', 
mais  nous  ignorons  si  nous  sommes  (''lus  : 
c'est  ce  qui  doit  nous  porter  à  nous  humilier 
profondément  devant  Dieu.  Il  y  en  a  qui  ne 
commencent  pas  même  à  faire  le  bien;  quel- 
ques-uns ne  persévèrent  pas  dans  celui  qu'ils 
ont  commencé;  d'autres  passent  toute  leur 
vie  dans  le  péché,  et  sur  la  tin  ils  en  témoi- 
gnent du  regret  par  leurs  gémissements,  et 
font  une  sévère  pénitence;  quelques-uns,  au 
contraire,  après  avoir  mené  une  vie  sainte, 
tombent  dans  la  dépravation  et  dans  l'er- 
reur. L'un  commence  bien,  et  finit  encore 
mieux;  l'autie,  méchant  dès  sa  jeunesse,  de- 
vient pire  en  vieillissant.  Chacun  doit  donc 
vivi-e  dans  une  crainte  continuelle,  et  se  ré- 
péter souvent  ce  qui  est  dit  dans  l'Évangile, 
qn'il  y  en  a  beaucoup  d'appelés,  mais  peu  d'é- 
lus. 1)  Saint  Grégoire  rapporte  sur  cela  * 
l'exemple  de  trois  sœurs  de  son  père.  Toutes 
les  trois  se  convertirent  à  Dieu  avec  un  zèle 
égal;  deux  persévérèrent,  la  troisième  s'a- 
bandonna au  désordre,  et  se  maria,  sans 
avoir  égard  au  \œu  de  virginité  qu'elle 
avait  fait.  «  Les  jugements  de  Dieu  sont  un  pro- 
fond abime.  Que  personne  '  n'entreprenne 
d'approfondir  pourquoi  l'un  est  élu  et  l'autre 
réprouvé ,  pourquoi  *  l'un  est  attiré  par  mi- 
séricorde, etl'autrc  rejeté.  Si  vous  admirez  la 
vocation  des  gentils,  l'Écriture  vous  répondra  : 
Quand  il  accorde  la  paix,  qui  osera  le  condam- 
ner ?  Si  vous  vous  étonnez  de  la  réprobation 


gri:goiriî  le  grand,  pape. 


j63 


dos  juifs,  elle  vous  dira  :  Qumid  il  aura  caché 
son  visage,  qui  pourra  le  irgai-der?  En  sorte 
qu'il  faut  (jue  le  conseil  impr^m'lrahlc  do  la 
puissance  souveraine  nous  tiorme   lien   de 
rais(ins,  et  que  cette  considération  soit  tout 
l'éclaii'cissement  de  nos  doutes.  »  Saint  Gré- 
goire autorise  la    soumission   aveugle   que 
nous  devons  avoir  pour  les  jugements  de 
Dieu,  par  l'exemple  de  Jésus-Chiist,  ([ui  ne 
donne  point  d'autre  raison  de  ce  que  Dieu  a 
caché  ses  secrets  aux  uns,  et  les  a  révélés  aux 
autres,  sinon  qu'il  l'a  voulu  ainsi.  Pourprou- 
ver  encore  que  les  jugements   de  Dieu  au 
sujet  de  la  prédestination  et  de  la  réproba- 
tion sont  impénétrables,  il  apporte  *  l'exem- 
ple de  deux   enfants  nés  en  même   temps, 
dont  l'un  reçoit  le  baptême,  et  l'autre  meurt 
sansl'avoirreçu.  «Souvent même, ajoute-t-il, 
le  fils  d'un  père  et  d'une  mère  fidèles  meurt 
sans  avoir  reçu  le  sceau  de  la  foi,  tandis  que 
le  filsd'unpère  et  d'une  mère  infidèles  est  ré- 
généré dans  les  eaux  du  baptême.  On  dira 
peut-être  que  Dieu  avait  prévu  que  celui  qui 
est  mort  sans  ce  sacrement,  aurait  vécu  dans 
le  dt^sordre,  et  que  c'est  pour  cela  qu'il  n'a 
point  permis  que  le  baptême  lui  fût  admi- 
nistré; mais  il  faudrait  dire,  dans  ce  cas, 
que  Dieu  punit  les  péchés  de  quelqu'un  avant 
même  qu'il  les  ait  commis  :  ce  qui  répugne  à 
la  doctrine  orthodoxe. Comment  en  eû'et  pour- 
rait-on dire,  en  pensant  sainement,  que  Dieu, 
qui  délivre  les  uns  des  crimes  qu'ils  ont  com- 
mis, condamne   dans  les  autres  ces  mêmes 
crimes  avant  qu'ils  aient  pu  les  commettre?  » 


nipolenti  Dec  disposita  est,  ut  ad  hoc  electi  ex 
labore  perceniant  ;  quatenus  postulando  merean- 
tur  accipere,  quod  eis  oinnipotens  Deus  anle  sœ- 
cula  disposuit  donare.  lib.  1  Dialog..  cap.  8,  pag. 
181. 

•  Quia  vocali  sumus,  novimus;  si  sumus  electi, 

nesciiiius.  Tanto  ergo  necesse  est  ut  unusqtiisque 

nostrum  in  humilitatt  se  déprimât,  quanlu  st  sit 

electus  ignorât. ^'onnuUi  enim  bona  necincipiunt; 

nonnulli  vero   in  bonis  quœ  incœperunt,  miiiime 

persistunt.  Atter  pêne  lotam  litam  ducere  in  prw- 

vitale  conspicilur,  sed  juxta  finem  vitœ  a  pravi- 

tate  sua  per  di^lrictœ  pœnitentiœ  lamenta  revo- 

catur.  Aller  elecLam  videlur  vitam  ducere,  el  ta- 

men  liunc  conlingil  ad  erroris  nequitiam  ju.vta 

finem  declinare.  Alius  bonum  bene  inchoat,  me- 

lius  consummat.  Alius  in  malis  acUbus  aprimœva 

œtate  se  dejicit,  el  in  eisdem  operibus  semper  se 

ipso  delerior  consummalur.  Tanlo  ergo  sibi  unus- 

quisque  sollicite  melual,    quanlo  ignorât   quod 

restât;  quia,  quod  sœpe  dicendum  est,  et  sine 

oblivione   retinendum,  multi  sunt  vocati,  pauci 

Tero  electi.  Greg.,  in  Evang.,  lib.  II,   Homil.  38, 

uuiu.  n,  pag.  1641  et  1642. 


«  Greg.,  in  Evang.,  lib.  Il ,  Bomil.  38,  num.  15, 
pag.  16J2. 

3  Scriptum  est  :  Judicia  tua  abyssus  multa.  Ne- 
mo  ergo  prrscrutari  appelai,  cur,  cum  alius  re- 
pelHlur.  olius  eligatur.  Greg.,  lib.  XXIX  Moral., 
Dum.  57,  pag.  943. 

*  Idem.,  lib.  XXV  Moral,  num.  32,  pag.  803. 

5  VI  enim  unum  e  mullis  loquar,  duo  ad  hanc 
lucem  parV'uli  veniunt;  sed  uni  datur  ut  ad  re- 
demptionem  per  baptisma  redeal,  aller  anle  sub- 
trahitur.  quayn  hune  regenerans  unda  perfundat. 
Et  sa'pe  fidrlium  lilius  sine  fide  rapilur,  sœpe  in- 
fidelium  concesso  fiiici  sacramento  renovutur.  Sed 
fartasse  aliquis  dicat,  quod  hune  Deus  acturum 
prave  etiam  posl  baptismum  noverat,  et  idcirco 
eum  ad  baptismalis  gratiam  non  perducat.  Quod 
si  ita  esl,  peccata  quorumdam  procul  dubio , 
priusquam  sint  perpelrala,  puniiintur.  Et  quis 
isla  recte  senliens  di.rerit,  quia  omnipottns Deus, 
qui  alios  a  perpetralis  facinoribus  libéral,  hœc 
in  aliis  etiam  non  perpelrala  condemnet?  Greg., 
lib.  X.X.V1I  Moral.,  num.  7,  pag.  85:;. 


564 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


î: 


sorif.  jn-  20.  Les  ancres  '  dans  leiiicréillion  étaient 
■»"■"•  de  nature  à  pouvoir  di'choir  de  leur  état,  ou 
y  demeurer  par  leur  libre  arbitre;  mais, 
par  rattachement  qu'ils  ont  eu  pour  leur 
Créateur,  ils  ont  acquis  l'avantape  de  n'être 
plus  sujets  aux  clianfrements.  Saint  Grégoire 
donne  '  en  un  autre  endroit  le  nom  d'ani- 
mal raisonnable  à  l'ange  qui  annonça  aux 
pasteurs  la  naissance  du  Sauveur,  ce  qu'il 
ne  fait  sans  doute  qu'en  supposant  que  cet 
auge  avait  apparu  sous  une  forme  humaine. 
Il  dit  encore  '  que  l'ange  ,  comparé  à  l'honi- 
me.  est  esprit,  et  qu'il  est  corps,  comparé  à 
Dieu  :  expressions  q\i'il  n'emjjloie  que  pour 
marquer  que  la  nature  de  l'ange,  quelque 
excellente  qu'elle  soit,  est  infiniment  au-des- 
sous de  celle  de  Dieu.  Ailleurs  il  dit  nette- 
ment* que  l'ange  est  esprit,  et  l'iiomme  es- 
prit et  chair  ;  que  les  démous,  quoiqu'incor- 
porelo  ^ ,  seront  tourmentés  par  un  feu  cor- 
porel. Il  distingue  neuf  ordres  d'anges,  qu'il' 
appelle  ,  d'après  l'Ecriture  ,  les  auges  ,  les 
archanges ,  les  vertus  ,  les  puissances  ,  les 
principautés,  les  dominations,  les  trônes,  les 
chérubins  et  les  séraphins.  Le  mot  d'ange,  se- 
lon''lui,  est  un  nom  d'office  et  de  fonctiflns, 
et  non  pas  de  nature  ;  il  signifie  envoj-é 
ou  ambassadeur.  Les  archanges  sont  les  pre- 
miei-s  et  les  principaux  ambassadeurs;  tous, 
habitants  de  la  céleste  patrie,  ils  sont  toujours 
esprits;  mais  il  ne  sont  appelés  anges,  (pic 
quand  ils  sont  envoyés  pour  annoncer  quel- 
pmj.  ciii.t.  que  chose  ;  d'où  vient  que  David  dit  :  Dieu  qui 
des  esprits  en  fait  des  anges.  Le  diable  ,  en 
voulant  être  semblable  à  Dieu  en  élévation  ', 


par  un  orgueil  démesuré,  a  perdu  la  res- 
scmblauce  qu'il  avait  avec  Diou  ;  et  se  croyant 
capable  de  se  suffire,  il  est  tombé  d'autant 
plus  bas  au-dessous  de  lui-même  ,  qu'il  s'é- 
tait voulu  élever  plus  haut ,  au  mépris  de 
son  Créateur;  de  sorte  que  celui  qu'une  ser- 
vitude toute  volontaire  pouvait  élever,  a  été 
abattu  par  une  liberté  devenue  captive. 

21.  «Pour  ce  qui  est  du  premier  homme', 
il  fut  mis  dans  le  paradis  terrestre  en  un 
tel  état,  que  s'il  fût  demeuré  attaché  par 
les  liens  de  la  charité  à  l'obéissance  envers 
son  Créateur,  il  eût  été  un  jour  enlevé  dans 
la  céleste  patrie  des  anges  ,  sans  passer  par 
une  mort  temporelle  :  car  il  avait  été  créé 
immortel,  mais  de  telle  manière  que,  s'il  ve- 
nait à  pécher ,  il  serait  sujet  à  la  mort.  Son 
péché  avec  sa  peine  a  passé  à  tous  ses  des- 
cendants ;  tous  ont  raison  de  dire'"  avec  Da- 
vid :  J'ai  été  conçu  dans  l'iniquité,  et  via  mère 
m'a  mis  au  monde  avec  le  péché.  Celui-là  seul 
est  véritablement  saint ,  qui ,  pour  surmon- 
ter la  corruption  de  notre  nature,  n'a  pas 
voulu  être  conçu  par  les  voies  communes  et 
ordinaires.  Si  Job  fût  mort  "  au  sortir  du 
sein  de  sa  mère,  pensez-vous,  dit  saint  Gré- 
goire, qu'il  eût  mérité  la  récompense  éter- 
nelle par  cette  mort  prématurée  '1  Pensez- 
vous  que  les  enfants  qui  meurent  avant  de 
naître,  jouissent  d'un  repos  éternel?  Non, 
répond  ce  Père  ;  quiconque  n'est  point  dé- 
livré par  l'eau  de  régénération,  demeui'c  tou- 
jours engagé  dans  les  liens  du  premier  pé- 
ché :  or  ce  que  fait  maintenant  l'eau  du  bap- 
tême, parmi  les  anciens  la  foi  l'opérait  pour 


SurtViitdn 

preii.t«r  hom- 
rre,  I«  yithi 
oni;  n.*!,  la 
clrcnt.c  *ir'n  -.l 
le  bi)  Un»  di" 
Mfknt.. 


'  Tpsi  quogue  angelici  spiritus  mutabiles  exna- 
lura  siint  condili,  qualenus  aul  sua  spnnte  cnde- 
reiil,  aul  ex  arbitrio  slarent.  Sed  (juia  humililer 
elegcru.nl  ei  inliœrere.  a  quo  creati  sunt,  hanc 
ipsam  in  se  mutabilUatem  suam  standi  jam  im- 
mulahilitate  vicerunt.  Grcg.,  lib.  XXV  Uoral.,  num. 
11,  pag.  791. 

»  tireg..  idem,  m  Evang.,\i\n.  1,  Uomil.  10,  num. 
1,  pag.  UC8. 

'  Idem.,  lib.  II  Moral.,  num.  3,  pag.  39. 

*  Idem.,  lib.  IV  Moral,  num.  R,  pag.  108. 

'  Diaholus  ejusijue  nngcli,  cum  fini  incorporel, 
corporeo  sunl  igné  cruciandi.  Idem.,  lib.  IV  Dia- 
log.,  cap.  XI IX,  pag.  HT. 

"  Grcg.,  in  Evang.,  lib.  Il,  Uomil.  3i,  num.  7, 
pag.  100,^. 

'  Idem.,  ifti'd.,  num.  8,  pag 

«  Grcg.,  lib.  XX.MV  Moral., 

»  Idem.,  lib.  IV  Moral.,  num.  54,  pag.  IJG. 

"  Sos  eisi  sancti  efficimur,  non  lamen  sancli 
nasrimur  :  guia  ipaa  nnixiriF  eorrujtlihilin  condi- 
tione  ronulringiniur,  ut  cum  Praplieta  dicamu.t  : 
Kccc  cuiui  in   iniquilulibus  conceptus  guui,  et  iii 


1C04. 

num.  40,  png.  H3l. 


delictls  peperit  me  mater  mcn  Ille  aulem  soltis 
veraciter  sanctus  nalus  est,  gui  ul  ipsam  condi- 
lioneui  nalurœ  corruptibilis  linceret,  e.r  commix- 
tione  carnalis  copulœ  conceptus  non  est.  Idem., 
lib.  XVI 11  tu  Job,  num.  84,  i>ag.  ;i»8. 

"  Kumquid  .«i  egressus  {Job)  ex  utero  slatim  pe- 
riissel,  retributionis  meritum  ex  hac  ipsa  perdi- 
lione  conciperel?  Kumquid  alterna  requie  aborti- 
vi  fruuntur .'  (Juisquis  enim  rrgeneralionis  unda 
non  solvilur,  rcatu  primi  vinculi  ligalus  lenelur. 
Quod  vero  apud  nos  va  Ici  aqua  baptismalis,  hoc 
cgil  apud  veleres  vel  pro  parvulis  sola  fuies ,  vel 
pro  majoribus  virlus  sacrificii.  vel  pro  his  qui  ex 
Ahrohœ  stirpe  prodieranl,  niy.ttenum  rircumci- 
sionis.  Niim  quia  unusquisque  cum  primi  paren- 
tis  culpa  concipitur,  l'ropheta  lestatur  direns  : 
Erce  enim  in  iuii|uitalibus  conceptus  sum.  Et  quia 
is,  queni  salutis  unda  non  diluil,  originali.i  cul- 
pœ  supplicia  non  amittil,  aperle  pcr  semelipsam 
¥<ritas  pcrhibel,  dictns  :  Nisi  quis  rcn.itus  fuurit 
e.\  Hipia  et  Spiritu  Sancto,  non  liabebit  vilam  icler- 
uam.  lireg.,  lib.  IV  Moral.,  pag.  102. 


Snr  le  bip- 
tenir  do  fsint 
JfUQ  «t  celui 

Christ  ;f:e*ir. 
'"Ij.  C*ri-mo- 
"  'S  du  I>ijit4- 


[vii«  sifecLE.l      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT 

les  enfants ,  ou  la  vertu  des  sacrifices  pour 
Jcs  personnes  ;*igées,  on  le  mystère  de  la 
circoncision  pour  ceux  qui  sortaient  de  la 
race  d'Abraliam.  Que  chacun  naisse  avec  la 
coulpe  du  pi'tlié  du  piomior  homme,  O-ivid, 
comme  on  vient  de  le  dire ,  le  témoigne 
par  ces  paroles  ;  J'ai  été  conçu  dans  l'iniqui- 
tv,  etc.  VA  que  ceux  qui  n'ont  point  étd  lavés 
dans  l'eau  du  salut,  ne  soient  point  exempts 
lies  supplices  du  péché  oiif;inel,  ,I('sus-Cliiist 
nous  en  assure  en  disant  :  Si  l'on  ne  renaît 
de  l'eau  et  de  l'es/jrit,  on  ne  saurait  entrer  du7is 
le  royaume  de  Dieu.  Il  y  en  a  plusieurs  '  qui 
sont  enlevés  de  ce  monde  avant  d'être  par- 
venus à  l'âge  où  l'on  peut  faire  le  bien  et  le 
mal  ;  et ,  parce  que  les  sacrements  du  salut 
ne  les  ont  point  délivrés  de  la  faute  origi- 
nelle, les  supplices  sont  leur  partage  dans 
l'autre  vie  :  toutefois  il  n'ont  point  agi  par 
leiu"  propre  volonté  eu  celle-ci.  La  première 
blessure  que  reçoivent  ces  sortes  de  person- 
nes ,  c'est  de  naître  dans  la  corruption  du 
péché  :  la  moi-t  temporelle  est  pour  eux  une 
autre  blessure  ;  mais,  comme  cette  mort  est 
suivie  d'une  éternelle ,  on  peut  dire  avec 
Job,  que  leurs  blessures  se  sont  multipliées  par 
un  jugement  juste,  mais  caché,  puisque  ces 
personnes  qui  n'ont  commis  aucun  péché 
par  leur  propre  volonté,  sont  condamnées  à 
des  supplices  éternels.  S'il  en  est  ainsi,  quel 
doit  être  le  châtiment  de  ceux  que  l'iniquité 
de  leurs  propres  actions  condamne  ?  n 

22.  «  Saint  Jean,  après  avoir  prêché  le  bap- 
tême de  la  pénitence  ,  le  conférait  -  à  ceux 
qui  le  demandaient  ;  mais  il  ne  doiniait  point 
par  ce  baptême  la  rémission  des  péchés,  qui 
était  réservée  au  baptême  de  Jésus-Christ. 
C'est  pourquoi  l'Evangile  dit  que  saint  Jean 
prêchait  seulement  le  baptême  pour  la  ré- 


GRKr.OIHE  LE  GRAND,  PAPE.  5568 

mission  des  péchés,  c'est-à-dire  qu'il  l'annon- 
çait, ne  pouvant  le  donner  lui-même.  Par  le 
baptême  de  Jésus-Christ,  nous  recevons  la 
rémission  du  péché  originel  ' ,  et  de  tous 
ceux  que  nous  pouri-ious  avoir  commis  pré- 
ci'demmenl.  lis  sont  elfacés  véritablement 
par  ce  sacrement ,  et  non-seulement  en  ap- 
parence ,  comme  quelques-uns  '  le  disaient. 
Mais  le  baptême,  eu  nous  remetlant  la  coulpo 
originelle  ,  ne  nous  délivre  pas  de  nos  pas- 
sions ;  nous  y  demeurons  assujettis.  Il  est 
hors  de  doute  que  les"  enfants  qui  meurent 
après  le  baptême  ,  entrent  dans  le  royaume 
du  ciel  ;  mais  ceux  qui  sont  déjà  avancés  en 
âge ,  et  qui  savent  parler ,  ne  jouissent  pas 
tous  du  même  bonheur.  Il  y  en  a  qui  en  sont 
privés  parla  mauvaise  éducation  qu'ils  reçoi- 
vent de  leurs  parents;  »  ce  que  saint  Grégoire 
prouve  °  par  l'exemple  d'un  enfant  qui,  élevé 
dès  l'âge  de  cinq  ans  avec  trop  d'indulgence 
et  de  mollesse  par  son  père  ,  s'emportait  en 
des  blasphèmes  contre  la  majesté  de  Dieu, 
aussitôt  que  quelque  chose  lui  déplaisait  : 
ce  qu'il  continua  de  faire  jusqu'au  moment 
de  sa  mort.  Dans  l'Kglise  romaine,  on  plon- 
geait '  trois  fois  celui  qu'on  baptisait,  pour 
exprimer  les  trois  jours  de  la  sépulture  de 
Jésus-Christ.  Ces  trois  immersions  pouvaient 
aussi  signifier  les  trois  personnes  de  la  Tri- 
nité ,  comme  l'unique  immersion,  l'unité  de 
la  nature  divine.  Mais,  parce  qu'en  Espagne 
les  ariens  baptisaient  par  la  triple  immer- 
sion, saint  Grégoire  conseilla  à  saint  Léan- 
dre  de  Séville  de  n'employer  qu'une  seule 
immersion  dans  le  baptême,  de  peur,  dit-il, 
qu'il  ne  leur  semble  que  nous  divisons  com- 
me eux  la  divinité,  et  qu'ils  ne  se  vantent 
que  leur  coutume  l'ait  emporté  sur  la  nô- 
tre. 


k 


'  Grog.,  lib.  I\  Moral.,  uuin.  32,  pag.  303. 

'  Joannes tion sol um baiitisnritmpn'nitenti(epriF- 
dicavil,  rerum  etiam  guibusdum  dédit  :  sed  ta- 
men  baplismum  suum  in  remissionem  peccato- 
rum  dare  non  potuit.  Remissio  ettniin  peccato- 
rum  in  solo  nobis  baptisino  Cliristi  tribuiiur.  Ko- 
tandum  iUtque  quod  dicilur  :  l^raeiikans  Laptis- 
mumpœniteuti.Te  in  remissioupm  peccalonuu.  Quo- 
niam  baptismum  quod  peccata  salveret,  quia  da- 
re non  paierai,  prœdicabat,  etc.  Greg.,  in  Evang., 
lib.  1,  Homil.  20,  pag.  1516  et  1517. 

'  Ab  originali  culpa  per  baptismum  libtramxir. 
Idem.,  lib.  XV  Moral.,  nuiu.  57,  pag.  492. 

*  Si  qui  vero  sunt  qui  dicunt  peccata  in  baptis- 
male superficie  tenus  dimitti,quid  est  liac  prœdi- 
calione  infidelius,  in  qua  ipstim  fidei  sacramen- 
tum  festinant  solvereî...  Sic  quippe  ontnes  qui  in 
sanclo  baptismale  lingunlur,  eorum  peccata prai- 


lerita  omnia  laxanttir,  quia  eis  veluti  Mgyplii 
hostes  a  tergo  moriuntur.  Sed  in  inlerno  alios 
hosles  iuvenimus  ;  quia  dum  in  hac  vita  rivinms, 
priusquam  ad  promisionis  palriam  perlingamus, 
inulUv  nos  tentationes  fatigant,  et  ad  terrani  vi- 
ventium  lendentibus  iter  intercludere  festinant. 
Greg.,  lib.  Il,  Episl.  45,  pag.  1131. 

^  Etsi  omnes  haptizalos  infantes,  atque  in  ea- 
deni  infantia  morientes  ingredi  regnum  cœlesle 
credendum  est-  omnes  tamen  parvulos,  qui  scili- 
cet  jam  loqui  possunt,  régna  cœlestia  ingredi  cre- 
dendum non  est  ;  quia  nonnullis  parvulis  ejus- 
dem  regni  cœlestis  aditus  aparentibus  clauditur, 
si  maie  nutriantur.  Greg.,  lib.  IV  Dialog.,  cap. 
xvm,  pag.  100. 

*  Idem.,  ihid. 

'  L"5b.  1,  Episl.  43,  pag.  332. 


360 


niSTOIRE  GÉNÉRALE  DES  A.UTEUHS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Sar  le  ml- 
liUtr«  do  Un- 
téiD8.  et  le 
Umf*  de  l'ad- 
mioUlrer. 


23.  L'cvêque  était  le  ministre  ordinaire  du 
baptême,  en  sorte  que  son  absence  '  ,  dans 
les  jours  destinés  à  la  célt-luation  de  ce  sa- 
crement, exposait  les  enfants  A  mourir  sans 
l'avoir  reçu.  Les  jours  du  baplêmc  solennel 
étaient  la  fête  de  Pâques  et  telle  de  la  Pen- 
tecôte. Ce  fut  par  une  dispense  particulière, 
et  à  cause  de  l'utilité  de  l'Kglise  naissante 
d'.\ngleterre,  que  saint  Augustin  *  baptisa  le 
jour  de  Xoël  plus  de  dix  mille  Anglais.  Par 
ime  semblable  raison,  saint  Grégoire  ordon- 
na '  de  baptiser  des  juifs  un  jour  de  Dinian- 
cbe,  ou  en  quelque  autre  grande  fête,  en 
cas  qu'ils  eussent  de  la  peiue  à  attendre  la  fête 
de  Pâques,  en  les  obligeant  toutefois  de  se 
préparer  au  baplème  par  un  jeune  de  qua- 
rante jours  ;  mais  il  était  d  avis  qu'on  leiu- 
persuadât  de  remettre  leur  baptême  à  Pâ- 
ques. La  pénitence  de  quarante  jours  qu'on 
leiH'  imposait,  était,  comme  on  l'a  déj;'»  re- 
marqué, autant  pour  éprouver  leur  bonne 
volonté,  que  pour  leur  faire  sentir  les  ri- 
gueiu-s  du  cbristianisme,  afin  qu'ils  ne  pus- 
sent se  plaindre  de  !a  dureté  de  ses  lois  après 
l'avoir  embrassé.  Au  reste,  ce  saint  Pape  ne 
voulait  pas  que  l'on  contraignit  personne  à 
recevoir  le  baptême,  dans  la  crainte  que  ceux 
qui  ne  l'auraient  reçu  que  par  m'-cessité,  ne 
retournassent  avec  plus  de  danger  à  leurs 
superstitions.  Il  écrivit  *  donc  à  Virgile,  évê- 
que  d'Arles,  et  i\  Théodore  de  Marseille,  ac- 
cusés d'avoir  baptis(''  plusieurs  personnes,  par 
force,  d'employer  la  voie  de  la  peisuasion, 
et  de  se  contenter  de  prêcher  et  d'instruire, 
pour  éclairer  el  convertir  solidement.  On 
peut  bantiserune  "  femme  enceinte,  puisque 
la  fécondité  est  un  don  de  Dieu,  et  bai)liser 
son  enfant  aussitôt  qu'il  est  né,  s'il  y  a  dan- 
ger de  mort.  Dans  le  doute  si  une  personne 
est  baptisée,  il  faut  la  baptiser,  de  peur 
qu'elle  ne  meure  sans  baptême.  On  ne  rebap- 
tisait pas  *  ceux  qui  avaietit  été  baptisés  au 
nom  de  la  Trinité  dans  l'hérésie;  l'on  se  con- 
tentait de  les  recevoir  dans  le  sein  del'Kglise, 
ou  par  l'onction  du  saint  chrême,  ou  par  l'im- 


position des  mains,  ou  par  la  seule  profes- 
sion de  foi  ;  mais  on  baptisait  ceux  qui  n'a- 
vaient pas  reçu  le  baptême  au  nom  des  trois 
personnes  divines,  comme  les  bonosiaques, 
qui  ne  croyaient  pas  que  Jésus-Christ  fût 
Dieu,  et  les  catapbryges,  qui  regardaient 
Montan  comme  le  Saint-Esprit.  Ce  n'était  pas 
réitérer  le  baptême,  que  de  le  donner  à  des 
personnes  qui  ne  l'avaient  pas  reçu.  Quand 
les  nestoriens  revenaient  à  l'Église,  on  ne  les 
baptisait  point,  parce  que  leur  baptême  était 
conforme  à  celui  de  l'Eglise  catholic[ue  ;  mais 
on  les  obligeait  de  confesser  publiquement 
que  lésus-Christ  est  fils  de  Dieu  et  fils  de 
l'homme  ;  d'anatbématiser  Nestorius  avec 
ses  sectateurs,  et  de  recevoir  les  conciles  que 
l'Église  universelle  reçoit  :  après  quoi  on  les 
admettait  sans  dilBcullé,  en  leur  conservant 
le  rang  d'évêques  dans  leurs  Églises,  pour 
les  ramener  phis  facilement.  Les  enfants  des 
Lombaids,  qui,  par  ordre  du  roi  Autant, 
avaient  été  baptisés  en  590  dans  la  commu- 
nion arienne  ' ,  furent,  aussitôt  après  la  mort 
de  ce  prince,  arrivée  au  mois  de  septembre  de 
la  même  année,  réconciliés  à  l'Église  catho- 
lique par  ordre  de  saint  Grégoire.  Dans  le 
baptême,  on  renonçait  '  à  toutes  les  œuvres 
et  à  toutes  les  pompes  du  démon,  et  l'on  n'é- 
tait censé  véritablement  fidèle,  que  lors- 
qu'on accomplissait  en  efl'et  les  promesses 
qu'on  avait  faites  de  paroles.  C'est  sur  cela 
que  saint  Grégoire  voulait  que  les  chrétiens 
s'examinassent  sérieusement,  afin  qu'ils  se 
réjouissent  s'ils  reconnaissaient  avoir  accom- 
pli les  promesses  qu'ils  avaient  faites  lors  de 
leur  liaptôme  ,  et  qu'ils  pleurassent  leurs 
égarcmeuls,  s'ils  avaient  contrevenu  à  ces 
promesses. 

24.  deux  que  l'évéque  baptisait  et  bénis- 
sait par  ses  prières,  recevaient  "  par  l'impo- 
sition de  ses  mains  le  Saint-Esprit.  C'était  le 
sacrement  de  Confirmation.  Si  l'on  doutait  '° 
que  le  baptisé  l'eût  reçu,  en  sorte  que  l'on 
n'eût  aucune  preuve  qu'ils  eOll  été  confirmé, 
on  ne  faisait  point  difficulté  de  le  confirmer. 


Surlcacre- 
m.'Dl  dp  too- 
firmiition,  et 
fOD  inioislro. 


<  Lib.  I,  Episl.  :J3,  pag.  521  et  522. 
'  Greg.,  lib.  VIII,  Epist.  30,  pag.  918. 
>  Lib.  VIII,  Epist.  23,  i.ag.  912. 

*  Grog.,  lib.  l,  Episl.  41,  pug.  .141  pt  5»2. 

'  Iflem.,  lib.  XI,  Episl.  Cl,  pag.  1157  et  1158. 

"  Lib.  XI.  Epist.  07,  pag.  lUi7  .-l  aoq. 

■J  Greg,  lib.  I,  Episl.  17,  pag.  502. 

»  Greg.,  in  Evnnfi  ,  lib.  Il,  llnmil.  2!t,  pag.  157n. 

*  Per  nos  i/uidem  ftdelcs  ad  sanctiim  bdplisma 
veniunl,  noslris precîbiis  heiiedicuulur,  cl  iltr  im- 
positionem  mamtum  noslrarum  a  Deo  Spirilum 


Sanctumpercipiunl.l<iem.,Ub.  \,Homil.  17.  Dum. 

17,  pag.  1505. 
">  .46  aniccessoribus  noslris  tradilum  accepimtis, 

ut  (/«o/iVs  de  conlinidlione iltihiUitio  habrltir, 

et  lier  scriplis  ncc  leslihiis  rnlio  crrla  habelur 

utrnin  conlirmali  sint,  ut  tidrs  amfirmntlur 

ne  Inlis  du'iilalin  rititui  fiiIrliUus  fini  :  i/i/ONiVim 
non  monsirniur  ilernliim  quod  non  crrlis  imli- 
ciis  ostcnditur  rite  peracluvi.  Idiui.,  lib.  XIV, 
Episl.  17,  pag.  1279. 


[VH'  SIÈCLE.]      CnAinTRE  XLIX.  —  SAINT 

parce  qu'on  n'est  point  ccnsd  rditdrercoqno 
l'on  no  connaît  iioint  avoir  tMi'  (h'jà  fail.  l'ne 
dos  princi|ia!os  fonctions  des  ('viMines  '  pen- 
dant la  visite  de  lenr  diocèse,  était  de  con- 
firmer les  enfants  baptises  ;  mais  ils  ne  de- 
vaient [loiiil  -  cMio  à  charge  aux  pi^^tres  qni 
desservaient  les  ]iafoissos,  ni  prendre  au-de- 
là de  la  taxe.  Il  était  défendu  aux  évêqucs 
do  '  marquer  di^ux  fois  sur  le  front  avec  le 
saint  dirème  les  enfants  baptisés.    Les  prê- 
tres oignaient  d'aboid  sur  la  poitrine  ceux 
qu'on  devait  baptiser,   ensuite  les  évoques 
leur  faisaient  l'onction  sur  le  front.  Les  prê- 
tres de  Sardaiyne  étaient  dans  un  usage  con- 
traire. Saint  Grégoire  leur  di'feudit  de  le  con- 
tinuer, et  sachant  que  sa  défense  les  avait 
attristés,  il  leur  lit  savoir  '  qu'il  s'était  com- 
porté en  cela  suivant  la  coutume  ancienne  de 
l'Eglise  de  Home,  ajoutant  <pie,  si  quelques- 
uns  d'entre  eux  étaient  si  fort  centristes  de 
sa  défense,  il  permettait  aux  prêtres  de  faire 
à  ceux  qui  devaient  être  baptises,  l'onction  du 
chrême  sur  le  front,  au  défaut  des  évèqucs;  au- 
paravent  leur  avait  ordonné  de  ne  la  faire 
que  sur  la  poitrine.  Cet  endroit  de  la  secon- 
de lettre  de  ce  Pape  k  Janvier,  évêque  de  Ca- 
gliari,a  beaucoup  embarrassé  les  théologiens. 
Plusieurs  en  ont  inféré,  qu'encore  que  l'évé- 
que  soit  le  ministie  ordinaire  de  la  confirma- 
tion, les  prêtres  pouvaient  par  dispense  l'ad- 
ministrer, comme  ils  le  font  encore  daus  \'É- 
glise  grecque.  SaintTliomas  "apris  en  ce  sens 
le  passage  de  saint  Qrégoire.  Le  pape  Eu- 
gène IV  convient  "  que  le  Siège  apostolique  a 


GnÉfiOIHE  LE  GRAND,  PAPK.  SC7 

quelquefois  accordé  î'i  de  simples  prêtres  la 
permission  de  confirmer  avec  le  clirême  con- 
sacré par  un  évoque.  Le  cardinal  l'allavicin 
rapporte  '  plusieurs  exemples  de  ces  permis- 
sions accordées  paries  papes  Adrien  V,  Ni- 
colas IV,  Jean  XXII,  Urbain  V  et  Léon  X. 
Mais,  en  s'en  tenant  aux  paroles  de  saint 
Grégoire,  il  semble  qu'on  peut  dire  qu'elles 
n'ont  point  de  rapport  au  sacrement  de  con- 
firmation, pnis(|u'ilne  parle  pas  d'une  onc- 
tion à  faire  surle  front  des  baptisés,  mais  sur 
le  front  de  ceux  qu'on  devait  baptiser,  ainsi 
que  portent  les  éditions  les  plus  correctes. 
Ce  pouvait  donc  être  une  onction  purement 
cérémonielle  que  les  prêtres  de  Sardaigne 
faisaient  sur  le  front,  au  lieu  que  ceux  de 
l'Eglise  romaine  la  faisaient  sm-  la  poitrine. 
Aussi  saint  Grégoire  ne  déclare  pas  nulles 
les  onctions  faites  jusques-là  par  les  prêtres 
de  Sardaigne,  et  il  n'ordonne  pas  à  ceux  qui 
les  avaient  reçues  de  les  réitérer  ;  ce  qu'il 
n'aurait  pas  manqué  de  faire,  si  elles  eussent 
regardé  le  sacrement  de  coniirmation.  11  n'al- 
lègue, pour  autoriser  la  défense  qu'il  leur 
avait  faite  d'oindre  sur  le  front,  que  l'ancien 
usage  de  l'Église  romaine,  sans  faire  aucune 
mention  de  l'institution  de  Jésus-Christ,  ni 
de  la  foi  des  autres  églises. 

25.  «  Jésus-Christ,  comme  un  bon  pasteur', 
a  donné  sa  vie  pour  sou  troupeau,  afin  qu'en 
changeant  dans  le  sacrement  son  corps  et 
son  sang,  il  pût  nourrir  et  rassasier  de  sa 
propre  chair  les  brebis  qu'il  avait  rachetées. 
Il  était  ordonné  aux  '  Israélites  de  prendre 


Soi-  i'Euch.1. 
rislie.  Preuve 
de  h  lian^iib- 
stantialioD. 


CxOtl.  XII, 


'  Ecclesiis  ad  quassine  labnrepolestis  accedere, 
fraleriiitas  veslra  offlcium  visUatinnis  impendat, 
rtl  ii  gui  Mie  Deo  propilio  baptizaiitur,  inconsi- 
gnati  non  debeant  rémunère.  Lib.  X,  Epist.  45, 
pas.  1075. 

»  Lib.  XIII,Epts(.  18,  pag.  1231. 

'  Episcopi  baplizatos  infantes  signarc  bis  in 
frontibus  non  prœsumant  :  sed  presbyleri  bapli- 
zandos  ungant  in  pectore,  ut  episcopi  postmo- 
dum  ungere  debeant  in  fronte.  Lib.  IV,  Epist.  9, 
pag.  689. 

^  Pervenit  quoque  ad  nos^quosdam  scandali- 
zatos  fuisse  quod  presbyteros  chrismate  tangere 
eos  qui  baplizandi  sunl,  prokibuimus.  Et  nos 
quidem  sccundum  usum  velerem  Ecclesiie  nus- 
Ira-  fecimus  ;  sed  si  omnino  hac  de  re  aliqui  con- 
tristanlur,  ubi  episcopi  désuni,  ul  preitbylerietiain 
baptiznnilos  cbrissmale  Inngere  debeunt,  concedi- 
mns.  Lil).  IV,  Epist.  26,  pas.  705. 

5  Ex  pleniludine  polesliitis  concessil  beatus  Gre- 
gorius  papa  quod  simplices  sacerdotes  hoc  sacra- 
mchlum  (conftrmationi.>>)  conferrent.  S.  J'hom.  3 
port,  quxst.  72,  art.  11,  adprimum. 


^  Legitur  aliquando  per  apostolicœ  sedis  dis- 
pensationem  ex  rationabili  et  urgente  admodum 
causa,  siinplicem  sacerdotem  chrismate  per  epis- 
copum  confecto  hoc  administrasse  confirmationis 
sacramenium.  Eugenius  papa  qnartus,  in  Deereto 
ad  Armeuos,  tom.  IX   Concil.  Harduini,  pag.  438. 

■'  Pallavicinus,  in  Historia  Concilii  Tridenlini. 

*  Bonus  Pastor  [Chrislus)  pro  ovibus  suis  ani- 
mam  suam  posuit,  tU  in  sacramento  noslro  cor- 
pî(,^  snuni  et  sanguinem  verteret,  et  oves,  quas 
redemeral,  carnin  suœ  alimento  satiaret.  Greg., 
in  Erang.,  lib.  I,  Homil.  14,  nuui.  1,  pag.  1484. 

'  Jloyses  ait:  Sumeut  de  sanguine  agni,  ac  po- 
neut  super  utruiiique  postem,  et  in  superlimina- 
riljus  domorum   in  quibus    comedent    illum;    et 

cdcnt  carnes  nocle  illa  assas  igni Quis  namque 

sit  sanguis  agni,  non  jam  audiendo,  sed  bibcndo 
didicisUs.  Qui  sanguis  super  ulrumque  poslcm 
ponitur,  quundo  -non  solum  ore  corporis,  sed 
etiam  ore  cordis  haurilur.  In  utroq^ie  enim  poste 
sanguis  agni  est  posilus,  quando  sacramentum 
passionis  illius  cum  ore  ad  redemplionem  sumi- 
tur,  ad  imilationcm   quoque  intenta  mente  cvgi- 


568 


HTSTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTFOUES. 


du  sang  de  l'agneau,  d'en  mettre  sur  l'un  et 
sur  l'autre  poteau,  et  sur  le  haut  des  portes 
des  maisons  où  ils  le  mangeraient,  et  d'en 
manger  la  chair  rôtie  au  feu.  Nous  savons 
quel  est  le  sang  de  l'a'^neau,  non-seulement 
pour  l'avoir  oui  cxpiicjuer,  mais  aussi  pour 
l'avoir  bu.  Nous  marquons  de  ce  sang  les 
deux  poteaux,  lorsque,  le  recevant  de  la 
bouche  du  corps,  nous  le  recevons  en  mémo 
temps  de  la  bouche  du  cœur.  Le  saug  de 
l'agneau  est  rais  aux  deux  poteaux,  quand 
notre  bouche,  prenant  ce  sacrement  de  la 
passion  de  Notre  -  Seigneur ,  notre  esprit 
pense  à  l'imiter.  Boire  le  sang  de  son  Ré- 
dempteur sans  avoir  le  dessein  de  suivre  son 
exemple,  c'est  ne  mettre  ce  sang  qu'à  un 
des  côtés  de  la  porte,  au  lien  que  l'on  doit 
même  en  maquer  le  haut  des  portes.  La 
seule  communion  ne  sullit  donc  pas  pour 
célébrer  une  solennité  vraiment  sainte,  si 
l'on  n'y  joint  la  pratique  des  bonnes  œuvres. 
A  quoi  servirait  de  recevoir  de  la  bouche  le 
corps  et  le  sang  de  Jésus-Christ,  si  on  le  com- 
battait par  des  m(eurs  dépravées?  »  Paul  Dia- 
cre raconte  *  qu'une  dame  romaine  s'appro- 
chant  de  la  sainte  Tal>le,  saint  Grégoire  lui 
dit,  selon  la  coutume,  en  lui  présentant  l'Eu- 
charistie :  Le  corps  de  Noire-Seigneur  Jésus- 
Christ  puisse  vous  profiter  pour  la  ix'mission  de 
vos  péchés,  et  jwur  la  vie  éternelle.  Ces  paroles 
firent  sourire  cette  dame;  ce  que  le  saint 
Pape  ayant  remarqué  ,  il  reprit  la  sainte 
hostie,  et  la  donna  au  diacre  pour  la  mettre 
à  part  sur  l'autel.  Tout  le  peuple  ayant  com- 
munié, il  fit  venir  cette  dame,  à  (jui  il  de- 
manda quel  sujet  elle  avait  eu  de  sourire 
sur  le  point  de  communier.  Elle  répondit 
qu'elle  n'avait  pu  s'en  empêcher,  entendant 
donner  le  nom  de  corps  de  Jésus-Christ  à  un 
morceau  de  pain  qu'elle  avait  pétri  elle- 
même  :  car  la  coutume  ancienne  était  que 
les  fidèles  offrissent  le  pain  dont  ils  devaient 
communier.  Saint  Grégoire,   voyant  son  in- 


crédulité, se  mit  en  prières  avec  le  peuple; 
puis  ayant  découvert  1  iiostie  qui  était  sous 
le  corporai,  il  la  trouva  changée  eu  chair, 
avec  des  taches  de  sang.  Après  que  tous  les 
assistants  eurent  vu  ce  prodige,  le  saint,  se 
tournant  vers  la  dame,  lui  dit  :  »  Apprenez 
du  moins  maintenant  i\  croire  ce  que  la  Vé- 
rité vous  assure:  Lejjainqueje  vous  donne  est 
vraiment  macluiir,  et  mon  ^ang  vraiment  breu- 
vage. Mais  le  Créateur,  prévoyant  notre  infir- 
mité, par  la  môme  puissance  par  laquelle  il  a 
fait  toutes  choses  de  rien,  s'est  formé  un  corps 
de  la  propre  chair  de  la  Vierge  par  l'opéra- 
tion du  Saint-Esprit;  et  ensuite,  pour  réparer 
nos  forces,  il  change  le  pain,  et  le  vin  mêlé 
d'eau,  en  sa  chair  et  en  son  sang,  lorsque 
l'on  prononce  les  paroles  de  la  prière  catho- 
lique, par  la  sanctification  du  Saint-Esprit, 
quoique  les  espèces  ou  apparences  du  pain 
et  du  vin  demeurent.*»  Ce  discours  fini,  le 
Pape  pria  de  nouveau,  pour  demander  que 
l'hostie  reprit  sa  forme  ordinaire,  afin  que 
cette  femme,  qui  paraissait  frappée  du  mi- 
racle, put  communier.  Que  ce  fait  soit  vrai 
ou  supposé,  on  en  conclura  toujours  avec 
certitude  que,  dans  le  siècle  de  Paul  Diacre, 
qui  écrivait  sur  la  fin  du  huitième  siècle  ou 
au  commencement  du  neuvième,  le  dogme 
de  la  transsubstantiation  n'était  pas  inconnu, 
et  que  les  protestants  en  rapportent  mal  à 
propos  l'origine  à  Paschase  lîadbcrt.  qui  n'a 
écrit  que  depuis  la  mort  de  Paul  Diacre. 

26.  «  L'hostie  '  que  l'on  offre  sur  l'autel  a 
une  vertu  particiUière  pour  nous  obtenir  le 
pardon  de  nos  péchés,  par<;e  que  celui  qui, 
étant  une  fois  ressuscité,  n'est  plus  sujet  à 
la  mort,  soufi're  pour  ainsi  dire  de  nouveau 
dans  ce  mystère,  en  ce  que  toutes  les  fois 
que  nous  lui  offrons  l'hostie  de  sa  passion, 
nous  renouvelons  en  nous  autant  de  fois 
l'eflet  de  cette  même  passion  pour  l'absolu- 
tion de  nos  péchés.  Tout  vivant 'qu'il  est  en 
lui-môme  d'une  vie  immortelle  et  incorrup- 


Surlp  -li^ri. 
fite  rtr  iBuli'l. 

Il«|l  lllilf  4llft 

viTjnti  ri  aux 
moilft. 


tatur.  Nam  qui  sic  redemploris  sui  snnguinem 
accipit,  ut  imitari  passioncm  illitis  necduin  velil, 
in  unn  poste  snnguinem  jiosuif,  qui  eliim  in  su- 
jierliminaribus  doniorum  pnnendus  est  ..  Sed  so- 
in Redemptoris  rinstri  percepta  sacrameula  ad 
vcrain  solemnilalem  non  sufficiunl,  nisi  eis  quo- 
que  et  bona  opéra  jnnrjnniur.  Quid  enim  prodest 
corpus  et  sanguinem  iltiiis  orc  percipere,  et  ei 
pcrversis  mnribus  anilrnire?  (in'g.,  in  Evang., 
lib.  Il,  Uomil.  ii,  pap.  i3:U. 

'  l'."iul.  Uiac,  iti  Vita  S.  Grtgorii,  cap.  xxin,  pap. 
10  et  11. 

*  Singulariler  namque  ad  absolulionem  nos- 


tram  ohlnla  cum  lacrymis  et  benignilate  mentis 
sncri  allaris  tioslia  sulfragatur.  (Juta  is  qui  in  se 
resurgens  a  mnrluis  jam  non  moritur,  adhucpcr 
hanc  in  .■'un  mysterio  pro  nobis  iterum  patitur; 
nam  quolies  ei  hn.iliaiii  sme  passionis  ulferimus, 
loties  nobis  ad  absolulionem  nosiram  passionem 
illiiis  reparamus.  lircg.,  in  Evang.,  Iil>.  Il,  Hom. 
37,  pu  g.  I(i31. 

'In  semelipso  iwmorlaliter  alque  incorruplihi- 
liltr  vivcns.  pro  nobis  iterum  in  hoc  mysterio  sa- 
(•»•((•  ohlatiotiis  immolalur.  Ejus  quippe  ibi  cor- 
pus sumilur,  ejus  caro  in  populi  salutem  parli- 
tur,  ejus  languis  non  jam  in  manus  in/idelitim, 


[VII'  sifiaE.]      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT 

liMo,  il  est  immolé  de  nouveau  en  ce  mys- 
tère de  l'oblation  sacrée  :  car  son  corps  y  est 
pris,  el  sa  cliair  parta^'c'e  pour  le  salut  du 
peuple  ;  son  sang  est  répandu,  non  plus  dans 
les  mains  des  infidèles,  mais  dans  la  houclic 
des  fidèles.  A  l'heure  môme  de  rimmolation, 
les  cieux  s'ouvrent  à  la  parole  du  prêtre; 
c'est  de  quoi  aucun  des  fidèles  ne  doute. 
Pour  marquer  la  vertu  du  sacrifice,  saint 
Grégoire  rapporte  qu'une  '  femme,  n'ayant 
aucune  nouvelle  de  son  mari  emmené  captif 
dans  des  pays  éloignés,  le  crut  mort,  et  fit 
olfiir  pour  lui  chaque  semaine  la  sainte  hos- 
tie, et  qu'à  chaque  fois  qu'on  l'ollrait,  les 
chaînes  de  son  mari,  qui  était  détenu  dans 
les  prisons,   tombaient  d'elles-mêmes.  Cet 
homme,  de  retour  de  sa  captivité,  raconta 
cet  événement  à  sa  femme,  qui,  ayant  re- 
marqué les  jours  et  les  heures,  trouva  que 
les  chaînes  de  son  mari  tombaient  aux  jours 
que  l'on  offrait  pour  lui  le  saint  sacrifice.  La 
conséquence  que  le  saint  tire  de  ce  miracle, 
est  que  nous  ne  devons  point  douter  de  la 
vertu  de  l'hostie  sacrée  pour  rompre  les  liens 
de  notre  cœur,  lorsque  nous  l'ott'rons  nous- 
mêmes,  puisque,  étant  offerte  pour  un  autre, 
elle  a  eu  dans  un  étranger  la  force  de  délier 
les  chaînes  qui  tenaient  son  corps  en  captivi- 
té. L'oblation  sacrée  -  peut  obtenir  aux  morts 
l'absolution  des  péchés  véniels  dans  lesquels 
ils  sont  sortis  de  cette  vie;  mais  elle  n'est  utile 
qu'à  ceux  qui,  vivant  bien  en  ce  monde,  ont 
mérité  que  les  pieux  devoirs  qu'on  leur  rend 
après  leur  décès,  leur  soient  utiles.  On  attri- 
bue à  saint  Grégoire  l'usage  des  trentainsde 
messes  que  l'on  fait  dire  pour  les  morts;  cela 
peut  être  fondé  sur  ce  que  ce  saint  Pape  '  fit 
célébrer  trente  jours  de  suite  le  saint  sacri- 
fice pour  le  repos  de  l'âme  d'un  religieux 
dont  il  avait  fait  jeter  le  corps  sur  le  fumier, 


GRÉGOIRE  LE  GRAND,  PAPE.        rm 

parce  qu'on  avait  trouvé  sur  lui  après  sa 
mort  trois  pièces  d'or. 

i27.  On  disait  (juelquefois  des  messes  dans 
des  maisons  particulières.  Jean,  évéque  de 
Syiacusi!  \  ('lant  eu  (iillV'reud  avec  Venantius, 
refusa  sou  olfrande,  et  dc'l'endit  de  célébrer 
la  messe  dans  sa  maison.  Celui-ci,  irrité, 
envoya  des  gens  armés  qui  firent  du  dégiit 
dans  la  maison  de  l'évèque.  Saint  Grégoire, 
voulant  les  réconcilier,  manda  h  l'évoque 
Jean  de  recevoir  les  ollVandes  de  Venantius, 
et  non-seulement  de  permettre  qu'on  dit  la 
messe  dans  sa  maison,  mais  d'aller  lui-même 
la  dire,  pour  marque  de  réconciliation.  Les 
évêques  avaient  des  oratoires  dans  leurs  mai- 
sous  épiscopales.  Cassius  de  Narni  *,  ne 
pouvant  célébrer  la  messe  dans  l'église  le 
jour  de  la  fête  des  saints  apôtres,  la  célébra 
dans  l'oratoire  de  l'évêché,  et  donna  de  sa 
propre  main  le  corps  du  Seigneur  et  la  paix 
à  tous  ceux  qui  étiient  présents.  Il  y  avait 
quelquefois  plusieurs  autels  dans  une  même 
église.  Pallade,  '  évêque  de  Saintes,  en  mit 
treize  dans  l'église  qu'il  avait  fait  bâtir  en 
l'honneur  des  apôtres  saint  Pierre  et  saint 
Paul.  En  communiant  '  une  personne,  on  lui 
mettait  dans  la  bouche  le  corps  du  Seigneur. 
L'eucharistie  se  portait  '  en  voyage,  tant  sur 
mer  que  sur  terre;  on  la  donnait  aux  'mo- 
ribonds en  forme  de  viatique  ;  souvent  même 
on  mettait  une  hostie  consacrée  '"  sur  la  poi- 
trine des  défunts,  et  on  l'enterrait  avec  eux. 
Cet  usage  ne  paroissait  pas  contraire  aux  ca- 
nons du  troisième  concile  de  Carthage  et  de 
celui  d'Auxerre,  qui  défendent  seulement  de 
mettre  l'eucharistie  dans  la  bouche  des  morts. 
28.  Il  fut  dit  aux  apôtres  :  Les  péchés  seront 
remis  à  ceux  à  qui  vous  les  remettrez,  et  ils  se- 
ront retenus  à  ceux  à  qui  vous  les  retiendrez. 
Les  évêques  tiennent  à  présent  "  dans  l'É- 


Sur  1«»  or«. 
taiicf.rl  (jucl. 
r|iu'>  inlnudf 
i]i.-:i[iIineU<u- 
clxiol  la  cvlv- 
l 'ition  ia 
iiiL<<ek,  et  la 
comiiiUMvn. 


Can.  6  Car 
tbag.  01  caa. 
12  AJlisiud. 


Sur  IsPéni- 
!■  nce  el  le 
1  ouiui'-  de? 
clefs.  La  cou- 
fission  des  pé- 
ctiés. 


sed  in  ora  fideliiim   funditur Quis  enim  fide- 

lium  habere  dubium  possit,  in  ipsa  immolationis 
hora  ad  sacerdotis  vocem  cœlos  aperiri,  in  illo 
Jesu  Christi  mysterio  angelorum  choros  adesse, 
etc.  ?  tireg.,  lib.  IV  Dialog.,  cap.  lvhi,  pag.  472. 

'  Idem.,  in  Evang.,  lib.  H,  Bomil.  37,  num.  8, 
pag.  1631,  et  lib.  IV  Dialog.,  cap.  Lvn,  pag.  469. 

'  Si  insoluhiles  cutpœ  non  fuerint.  ad  absolu- 
tionem  prodesse  etiam  mortiiis  victima  sacrœ 
oblationis  posset.  Sed  sciendum  est,  quia  illis  sa- 
crée victimo!  prosint,  qui  hic  l'ivendo,  nt  eos 
etiam  pnst  mortem  bona  adjuvent,  quœ  hic  pro 
ipsis  ab  aliis  fiunt.  Greg.,  lib.  IV  Dialog.,  cap. 
LYil,  pag.  472. 

3  Idem.,  lib.  IV  Dialog.,  cap.  LV,  pag.  46S. 

*  Idem.,  lib.  VI,  Episl.  43,  pag.  824,  et  Epist.  44, 
pag.  «25. 


'  Idem.,  in  Evang.,  lib.  II,  Bomil.  37,  pag.  1632 
et  1633. 
6  Idem.,  lib.  VI,  Epist.  49,  pag.  828. 
'  Lib.  III  Dialog.,  cap.  m,  pag.  284. 

8  Lib.  III  Dialog.,  cap.  sxxvi,  pag.  357. 

9  Lib.  II  'Dialog.,  cap.  xixvu,  pag.  273,  et  lib. 
IV,  cap.  XXXV,  pag.  425. 

1»  Lib.  Il  Dialog.,  cap.  xxiv,  pag.  256. 

"  Horum  (.Xpostolorum}  profecto  nunc  in  Ec- 
cl  sia  episcopi  locum  tenent,  ligandi  atque  sol- 
vtndi  aucioritatem  suscipiunt,  qui  gradum  regi- 
minis  sortiunlur.  Grandis  honor.  sed  grave  po)i- 
dus  islius  est  honoris...  Causœ  ergo  pensandœ 
sunt,  et  tune  ligandi  atque  solvuxdi  potestas 
exercenda.  Videndum  est  quœ  culpaprœcessit,  aut 
quœ  sit  pœniientia  secuta  post  culpam  :  ut  quos 
omnipotens  Deus  per  compunctUmis  gratiam  vi- 


570 


HISTO[RE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


glise  la  place  des  apôtres,  appelés  au  gou- 
vernonipnt  de  l'Kplise,  ils  ont  l'autorité  de 
lier  et  de  délier.  C'est  un  grand  lionnenr  ; 
mais  le  poids  en  est  pesant,  puisqu'il  est  né- 
cessaire qu'ils  voient  quelle  e?t  la  faute  qui 
a  précédé,  quelle  est  la  pénitence  qui  a  sui- 
vi celte  faute,  afin  que,  par  leur  sentence, 
Us  n'absolvent  que  ceux  que  Dieu  visite  par 
la  grAce  de  componction  :  car  c'est  alors  que 
l'abî-olution  du  prélat  est  véritable,  quand 
elle  suit  la  sentence  du  juge  intérieur.  On 
trouve  un  '  exemple  de  cette  absolution  dans 
la  résurrection  de  Lazare,  mort  depuis  qua- 
tre jours.  Jésus-Christ  l'appela  d'abord  et  lui 
rendit  la"  vie  en  ^disant  :  Lazare,  sortez  du 
tuin/jeau.  A  ce  moment,  celui  qui ,  plein  de 
vie  était  sorti  du  tombeau,  est  délié  par  les 
disciples;  ainsi  ils  délièrent  vivant  celui  que 
leur  maître  avait  lessuscité  mort;  s'ils  l'eus- 
sent délié  étant  encore  mort,  ils  eussent  plu- 
tôt découvert  sa  puanteur,  que  montré  leur 
puissance.  Ce  qui  nous  apprend,  dit  saint 
Grégoire,  que  nous  ne  devons  délier  par 
l'autorité  pastorale,  que  ceux  que  nous  con- 
naissons avoir  été  ressuscites  par  la  grâce 
vivifiante  de  notre  maître.  Cette  vie  nouvelle 
commence  à  paraître  dans  la  confession  des 
péchés  ;  c'est  pour  cela  qu'il  n'est  pas  dit  à 
Lazare  mort,  Ilessuscitcz,  mais:  Sortez  du  tom- 
beau. Tout  pécheur  qui  retient  son  péché  au 
fond  de  sa  conscience,  est  encore  caché  en  lui- 
même,  et  comme  dans  les  plus  secrets  replis 
de  son  âme;  mais  celui  qui  était  mort  vient 
dehors,  lorsqu'il  confesse  ses  péchés  avec 
ime  volonté  libre  et  sincère.  Quand  donc  le 
Seigneur  dit  à  Lazare,  Sortez  dehors,  c'est 
COinme  s'il  disait  à  un  homme  mort  par  le 
péché  :  Pourquoi  tenez-vous  vos  crimes  ca- 
chés au  fond  de  votre  conscience  ?  Sortez-en 
plutôt  eu  les  confessant,  au  lieu  de  demeu- 


Eo  fa 

tnnittlo  la  «A 


rer  caché  en  vous-même,  en  ne  voulant  pas 
les  découvrir.  Que  le  pécheur  sorte  donc 
dehors  en  confessant  ses  fautes,  alin  qu'é- 
tant sorti,  les  disciples  le  délient,  c'est-à- 
dire  que  les  pasteurs  de  l'Église  lui  relâchent 
la  peine  qu'il  a  méritée,  puisqu'il  n'a  pas  eu 
honte  de  déclarer  le  mal  qu'il  avait  com- 
mis. 

29.  Faire  pénitence  ',  c'est  pleurer  les 
maux  qu'on  a  faits,  et  n'en  plus  commettre  '^"'" 
qui  méritent  d'être  pleures  à  l'avenir.  Celui 
qui,  pleurant  ses  péchés,  en  commet  d'autres, 
ou  ne  sait  pas  comment  il  doit  faire  péuitencc, 
ou  alfecle  de  l'ignorer.  Que  scrl-il  en  ell'et 
de  pleurer  des  péchés  d'impureté,  et  de  brû- 
ler d'avarice  ;  de  répandre  des  larmes  pour 
s'être  laissé  emporter  à  la  colère,  et  de  sé- 
cher d'envie  ?  Il  faut  avertir  ceux  qui  '  pleu- 
rent leurs  péchés  sans  les  quitter,  de  consi- 
dérer que  c'est  en  vaita  qu'ils  se  lavent  dans 
leurs  larmes,  puisqu'ils  se  souillent  par  la 
corruption  de  leur  vie,  et  qu'ils  ne  se  lavent 
dans  leurs  pleurs,  que  pour  retourner  à  leurs 
premières  impuretés  lorsqu'ils  seront  nets. 
C'est  pour  cela  qu'il  est  écrit  que  le  chien 
retourne  à  son  vomissement,  et  que  le  pour- 
ceau se  lave  dans  la  fange.  Quand  le  chien 
vomit,  il  jette  dehors  ce  qui-le  chargeait  au 
dedans;  mais  lorsqu'il  retourne  à  son  vo- 
missement, il  se  charge  de  nouveau  de  ce 
dont  il  s'était  déchargé.  De  même,  ceux  qui 
pleui'eut  leurs  péchés  jettent,  en  se  confes- 
sant, la  malice  et  la  corruption  dont  leur 
conscience  était  chargée  ;  mais  ils  s'en  char- 
gent de  nouveau,  quand,  après  leur  con- 
fession, ils  retournent  au  péché.  Comme  le 
pourceau  se  salit  de  plus  en  plus  en  se  la- 
vant dans  la  boue,  de  même  celui  ipii  pleure 
ses  péchés  sans  les  quitter,  se  rend  de  plus 
en  plus  digue  de  supplice,  parce  qu'il  néglige 


sitat,  illos  pastoris  sententia  absolvat.  Tune  enim 
vera  est  absolutio  prissidenlis  cum  interiii  arbi- 
trium  sequilur  Judicis.  Grcg.,  in  Evang.,  lib.  Il, 
Eomil.  26,  pag.  1555. 

'  Oreg.,  ibid.,  pag.  ISSS  el  1556. 

'  Pœnitenliam  ngere  est,  el  pcrpctrala  main 
plangere,  et  plangenda  non  perpcirare.  i\am  qni 
."■te  alia  deptnrat,  ut  tamen  alia  commitlnl,  ndhuc 
pœnileriliiim  agerc,  aut  dissimulai,  aul  ignorât. 
Quid  enim  prodest,  si  peccala  i/uix  liiTuriw  de- 
prat,  ri  tnmen  ndhuc  nrariliœ  nstihus  nnhrlat  '! 
Aut  quid  prodesl,  si  irrr  nitpns  jnm  higenl,  el  lor 
men  adhnc  inviduv  facibus  Inbrscal  ?  <ircg.,  in 
Evang.,  lib.  Il,  Homil.  :n,  iiniii.  15,  piig.  IfiOi». 

•  AUmnnendi  sunl  qui  admissa  ptangunl,  iiec 
tamen  deserunt,  ut  contiderare  sollicite  sciant 


quia  flendo  inaniter  se  mundant,  qui  vivendM  se 
nequilcr  inquinant,  cum  idcirco  se  lacrymis  la- 
vant,ul  mundi  ad  sordes  redeant.  Ilinc  enim  scrip- 
tum  est:  Caiiis  rcversus  ad  voiiiitum  Piiiioi,  et  sus 

Iota  in   volutabro  luti Et  qui   adminsa  plun- 

gunt,  profecto  nequiliam  de  qua  mnle  satinti  fue- 
ranl,  et  quw  mentis  intima  deprimrbal,  cnnfitfn- 
do  projiciunt,  quant  post  confes.^ionrm,  dum  re- 
petunt,  rcsuniunt...  Et  qiti  admissa  plangit,  née 
tamen  drserit ,  prrnœ  gravinris  cutpir  se  subjicit; 
quia  el  ipsam.  qunm  flendo  poluit  impetrnre  ve- 
niam,  contemuil,  tt  qua.ti  in  lulnua  nqua  semel- 
ipsum  vntvit.  yiitn  dum  flelihus  siii.t  ritir  mundi- 
liam  subirahit,  anle  Dei  nnilox  sordidas  ipsas 
cliam  lacrymas  facit.  Grcg.,  Regul.  l'astor.,  cap. 
XIX,  |iag.  86. 


CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT  GnÉGOIRE  LE  CRAND,  PAPE. 


Surl'pxcon 
DHDlcalioo. 


[vu'  SifeCLE.] 

le  pardon  qu'il  pouvait  obtenir  en  pleurant 
ses  fautes,  et  parce  qu'en  ne  joignant  pas  à 
ses  larmes  la  pureté  de  vie,  il  les  rend  im- 
pures et  souillées  aux  yeux  de  Dieu.  Il  y  en 
a  au  contraire  qui  quittent  '  le  péché  sans 
pleurer  ceux  qu'ils  ont  commis.  Ou  doit  les 


tili 


sonne  qu'avec  équité.  L'inférieur  ne  doit 
donc  pas  reprendre  témérairement  le  juge- 
ment de  son  pasteur,  parce  que,  encore 
qu'il  soit  lié  injustement,  il  ne  laisserait  pas 
de  se  rendre  coupable  eu  s'élevanl  avec  or- 
gueil contre  son  supérieur.   Saint  Grégoire 


avertir  qu'ils  se  trompent,  en  s'imaginant  que  rapporte  divers  exemples  d'excommunica- 
leurs  fautes  leur  sont  remises,  parce  qu'ils  lions  injustes  dont  il  délivra  ceux  contre  qui 
ne  les  mulli[ilieut  pas;  qu'ils  doivent  laver  elles  avaient  été  portées,  disant  '  que, 
par  leurs  larmes  celles  dont  ils  se  sentent 
coupables.  De  mémo  qu'un  lu)mme  qui  écrit 
quelque  chose,  en  cessant  d'écrire,  n'ell'ace 
pas  pour  cela  ce  qu'il  avait  écrit,  que  ce- 
lui qui  a  dit  des  injures  à  un  autre,  ne  lui 
satisfait  pas  en  ne  lui  en  disant  plus,  et  que 
celui  qui  s'est  endetté  ne  s'acquitte  pas  en 
ne  contractant  pas  de  nouvelles  dettes;  ainsi 
nous  ne  satisfaisons  pas  à  Dieu  en  cessant 
de  pécher,  si  nous  ne  déclarons  la  guerre  à 
nos  passions,  et  si  nous  ne  faisons  succéder 
les  larmes  aux  plaisirs.  Ce  n'est  pas  que 
Dieu  prenne  plaisir  dans  nos  peines;  mais  il 
veut  guérir  les  maladies  de  nos  âmes  par 
des  remèdes  contraires  :  que  ceux  qui  se  sont 
retirés  de  lui  par  la  douceur  des  voluptés  de 
ce  monde,  reviennent  à  lui  par  l'amertume 
des  pleurs  ;  que  ceux  qui  sont  tombés  en  se 
laissant  aller  a  des  choses  illégitimes,  se  relè- 
vent en  se  retranchant  celles  mêmes  qui  sont 
légitimes  ;  que  le  cœur  qui  s'était  répandu 
en  de  fausses  joies  soit  resserré  par  une  tris- 
tesse salutaire;  que  la  plaie  qui  est  venue 
de  l'orgueil,  trouve  sa  guérison  dans  la  bas- 
sesse d'une  vie  abjecte. 

30.  Que  le  pasteur  lie  ^  justement  ou  in- 
justement, sa  sentence  est  toujours  à  crain- 
dre au  troupeau,  et  l'inférieur  qui  se  trouve 
lié  par  une  sentence  injuste,  doit  appréhender 
qu'il  ne  l'ait  méritée  par  quelque  autre  faute. 
Mais,  si  l'inférieur  doit  craindre  d'être  lié  mê- 
me injustement,  lepasteur  doit  aussi  user  de 
discernement,  pour  ne  lier  ni  absoudre  per- 


comme  on  punit  avec  justice  une  personne 
coupable,  on  ne  peut,  sans  injustice,  punir  un 
innocent.  C'est  sur  ce  principe  qu'il  permit 
au  prêtre  Mngnus  de  l'aire  ses  fonctions  et 
de  recevoir  la  communion,  quoiqu'il  eût  été 
excommunié  par  Laurent,  évéque  de  Milan; 
qu'il  reprit  fortement  '  Janvier,  évèque  de 
Cagliari,  d'avoir  excommunié  et  anathéma- 
tisé  un  nommé  Isidore,  de  qui  il  avait  reçu 
quelcpie  injure,  les  canons  défendant  à  un 
évêque  d'excommunier  pour  nue  injure  per- 
sonnelle. Il  raconte  dans  ses  '  Dialogues  que 
deux  religieuses  que  saint  Benoit  avait  ex- 
communiées de  leur  vivant,  et  qu'on  avait 
toutefois  enterrées  clans  l'église,  parce  que 
celte  excommunication  n'était  pas  apparem- 
ment connue  de  ceux  qui  avaient  eu  soin  de 
leur  sépulture,  sortaient  de  l'église  lorsque 
pendant  la  célébration  de  la  messe  le  dia- 
cre disait  à  haute  voix  :  Si  quelqu'un  est  ex- 
communié, qu'il  se  ?'etire;  que  ce  fait  ayant 
été  rapporté  à  saint  Benoît,  il  donna  une  of- 
frande à  ceux  qui  l'en  venaient  informer,  en 
leur  disant  :    «  Allez,  faites  présenter  pour 
elles  cette  ofl'rande  au  Seigneur,  après  quoi 
elles  ne  seront  plus  excommuniées.   »    La 
chose  arriva  ainsi,  et  on  ne  vit  plus  sortir 
ces  religieuses  ;  ce  qui  flt  voir  qu'elles  avaient 
reçu  la  grâce  de  la  communion  par  le  mé- 
rite du  serviteur  de  Dieu. 

31.  Il  n'est  pas  moins  défendu  ^  de  réité- 
rer l'ordination  que  le  baptême.  S'il  arrive 
que  quelqu'un  reçoive  les  ordres  indigne- 


Fur  Vordi- 
DBlino  et  la  ré- 
sidence dus 
clercs, 


'  Greg.,  Regxil.  Pastor.,  cap.  xxx,  pag.  87  et  88. 

'  Sed  utrum  juste,  an  injuste  obliget  paslor, 
pasCoris  lamen  sententia  gregi  limenda  est  :  ne  is 
qui  subest,  et  cum  injuste  forsitan  ligatur.  ipsam 
obligationis  suœ  sententiam  ex  alia  culpa  merea- 
tur.  Pastor  ergo  vel  absolvere  iiidiscrete  limeat, 
vel  ligare.  Is  auteiu  qui  sub  manu  pasloris  est, 
ligari  timeat  vel  injuste;  nec  pnstoris  nui  judi- 
cium  temeie  reprehe  dut:  ne  et-<i  injuste  ligatus 
est,  ex  ipsa  tumidœ  repreliensionis  superbia,  cul- 
pa quœ  non  erat,  fiiit.  Greg.,  in  Efang.,  lib.  II, 
Uomil.  26.  num.  6,  pag.  1556. 
'  Sicut  exigente  culpa  quis  a  sacramento  com- 


rmmionis  digne  abigitur,  ita  insontibus  nullo  mo- 
do talis  débet  irrogari  vindicta.  Greg.,  lib.  lll, 
Epist.  20,  pag.  642. 

'  ia.;m.,  lib.  11,  Epist.  49,  pag.  613. 

5  Lib.  Il  Diiilog.,  cap.  xxui,  pag.  252  et  233. 

6  Sicut  enim  bnptizatus  semeiiteruin  baptiiari 
non  débet:  ita  qui  consecralus  est  sentel,  in  eo- 
dcm  iteruni  ordinc  non  valet  ronsecrari.  Sed  si 
f/Ki'.s  forsitan  cum  levi  culpa  ad  sacerdotiuni  ve- 
nd, pro  culpa  pœnitentia  indici  débet,  et  tamen 
ordo  servari.  Greg.,  lib.  II,  Epist.  46,  pag.  608  et 
609. 


872 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Sur  ;  siîDa* 

ques    n   leur 
niaoièK  de  vi> 


meni,  il  suffit  de  le  mettre  en  pénitence, 
sans  le  réordonner.  C'était  l'usage  de  l'É- 
glise romaine  ',  qu'un  clerc  ordonné  pour  le 
service  de  cette  église  y  demeurât,  sans 
pouvoir  passer  rt  une  autre.  On  excluait  des 
ordres  sacrés  les  *  bigames,  ou  ceux  dont  la 
première  épouse  n'était  pas  vierge;  ceux 
qui  n'étaient  pas  instruits  dans  les  lettres  ; 
ceux  qui  avaient  quelque  défaut  noiable  du 
corps  ;  ceux  qui  avaient  fait  pénitence  pu- 
blique; ceux  qui  avaient  quelque  obligation 
personnelle  ;  les  étrangers  et  les  inconnus, 
les  jeunes  '  gens  et  les  '  usuriers.  Les  "  laï- 
ques ne  pouvaient  parvenir  à  l'épiscopat 
sans  avoir  passé  car  les  autres  degrés,  et 
donné  pendant  un  temps  suffisant  des  preu- 
ves de  leur  bonne  vie  :  car  la  sagesse  et  le 
règlement  des  mnnirs  ^  sont  le  seul  degré 
pour  monter  aux  honneurs  et  aux  dignités 
de  l'Église.  L'avidité  de  l'or  ni  la  flatterie  ne 
doivent  avoir  aucune  part  à  la  collation  des 
ordres  sacrés.  Avant  d'être  promu  à  l'épis- 
copat, il  fallait  savoir  par  cœur  les  Psaumes  ; 
c'est  pourquoi  saint  Grégoire  '  refusa  d'or- 
donner le  prêtre  Jean,  parce  qu'il  ne  savait 
pas  le  Psautier,  et  que  cette  négligence  mar- 
quait qu'il  prenait  peu  de  soin  de  son  âme. 
Il  ne  voulut  pas  '  non  plus  ordonner  évo- 
que Jean  Diacre,  sans  s'être  informé  aupa- 
ravant s'il  s'était  appliqué  à  la  prière,  et  s'il 
savait  les  Psaumes.  11  excluait  '  encore  de 
cette  dignité  ceux  que  leur  grand  âge  ren- 
dait incapables  de  supporter  les  charges  de 
l'épiscopat. 

32. Les  évéques  ne  doivent  point  user  de  '" 
violence  pour  se  faire  obéir;  ils  sont,  non  des 
persécuteurs,  mais  des  pasteurs.  Bien  moins 
doivent-ils  obliger  les  gens  à  croire  à  force 
de  coups;  ce  serait  une  prédication  nouvelle 
et  inouïe.  Donner  l'aumône  est  un  devoir 
indispensable  pour  un  évéque.  Il  ne  lui  suffit 
pas  "  de  lire,  de  prier,  de  vivre  dans  la  re- 
traite, s'il  n'est  libéral  envers  les  pauvres,  et 
s'il  ne  fait  de  bonnes  œuvres  de  ses  mains; 
il  doit  surtout  recevoir  "  ses  confrères  dé- 


pouillés de  leurs  évêchés,  et  leur  fournir  la 
subsistance.  Il  était  d'usage  parmi  les  saints 
évêqnes  de  faire  lire  "  pendant  leur  repas  les 
écrits  des  anciens  Pères.  On  trouvait  mauvais 
en  eux  qu'ils  enseignassent  les"  lettres  pro- 
fanes, une  même  bouche  ne  pouvant  pro- 
noncer les  louanges  de  Jupiter  et  celles  de 
Jésuê-Christ,  et  un  évoque  ne  devant  pas 
chanter  ce  qui  ne  convient  pas  même  à  un 
laïque  de  piéic. 

33.  Quoique  la  coutume  "  de  l'Kglise  ro- 
maine, depuis  le  pontiQcat  de  saint  Léon, 
fut  d'obliger  les  sous-diacres  à  la  continence, 
ou  n'en  usait  pas  de  même  dans  les  Kglises 
de  Sicile.  Le  pape  Pelage  donna  donc  là-des- 
sus un  décret,  portant  que  tous  les  sons-dia- 
cres de  Sicile  qui  s'étnienl  mariés,  se  sépa- 
reraient de  leurs  femmes.  Ce  règlement  parut 
trop  sévère  à  saint  Grégoire,  qui  ne  trouvait 
pas  raisonnable  qu'on  les  obligeât  h  suivre 
une  loi  qu'ils  n'avaient  point  promis  de  gar- 
der avant  leur  ordination.  11  craignit  que,  si 
on  leur  imposait  ce  joug,  il  n'en  arrivât  quel- 
que chose  de  fâcheux  ;  c'est  pourquoi  il  dé- 
fendit d'inquiéter  les  sous-diacres  qui  étaient 
déjà  mariés,  mais  il  ordonna  qu'à  l'avenir  on 
n'en  ordonnerait  aucun  qui  ne  promit  de 
vivre  dans  la  continence.  Mais,  parce  qu'on 
ne  doit  élever  personne  aux  ordres  sacrés 
qu'il  n'ait  donné  des  preuves  de  sa  chasteté, 
il  régla  à  l'égard  des  sous-diacres  engagés 
dans  le  mariage,  qu'ils  ne  pourraient  monter 
aux  ordres  supérieurs.  Il  arriva  toutefois  dans 
le  diocèse  de  Catane,  que  quelques  sous- 
diacres  se  marièrent.  Le  saint  '*,  sur  l'avis 
qu'il  en  reçut,  ordonna  à  Léon,  qui  en  était 
évoque,  d'obliger  ces  sous-diacres  de  s'abs- 
tenir du  mariage,  ou  de  quitter  le  ministère 
de  l'autel.  Il  défendit'"  d'élever  à  l'épiscopat 
un  diacre  dont  la  tille,  encore  très-jeune,  était 
une  preuve  qu'il  n'y  avait  pas  longtemps 
qu'il  vivait  dans  la  continence.  Mais  pour  ce 
qui  était  des  autres  clercs,  il  était  d'avis 
qu'ils  devaient  se  "  marier,  s'ils  ne  pouvaient 
vivre  dans  le  célibat.  11  ne  permettait  "  pas 


Sur 
1.11  d. 


'  Greft.,  lib.  V.  Episl.  38,  pag.  763.  —   '  Idem., 
lib.  II,  Episl.  37,  paj;.  600. 

•  Idpin.,  lib.  III,  Episl.  48,  pag.  659. 

*  Lib.  X,  Episl.  G2,  png.  1086. 
»  Lib.  \  .  Episl.  55,  pag.  786. 

«  Lib.  XI,  Episl.  5ti,  jmg.  1U2. 
'  Lib.  V,  Episl.  iS,  pag.  777. 
«  Lib.  X,  Episl.  34.  pag.  106i. 
»  Lib.  XIV,  Episl.  11,  pag.  1269. 
"•  Lib.  III,  Episl.  53,  pag.  664. 


"  Lib.  VI,  Episl.  30,  pag.  816  et  817. 
,  Episl.  45,  piig.  540. 
'»  Lib.  VII,  Epi.<!l.  9,  pag.  856. 
'*  Lib.  \\   Episl.  54,  pag.  1140. 
"  Greg.,  lib.  I,  Episl.  44,  pag.53R. 
'«  Lib.  IV,  Episl.  36.  png.  716. 
"  Idem.,  lib.  X,  Episl.  62,  png.  108G. 
'«  Lib.  XI,  Episl.  r,4,  pag.  ll.M. 
"  Lib.  IX,  Episl.  60,  i«ig.  976  et  977. 


'•  Lib. 


[vil"  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT 

que  les  évéques,  ni  les  antres  miiiislrcs  su- 
ppriiMirs,  eussent  hahituclleinent  dims  leurs 
niaisDiis  d'iiulios  fcuimes  que  celles  (|ue  les 
eaïuius  leu)' iteiuu'ltcnt,  savoir,  la  nu''i'e,  la 
laute,  lu  sœur,  et  d'autres  proches  dont  eu  ne 
pouvait  concevoir  aucun  soupçon.  Jean,  évo- 
que de  Cajiiiari,  avait  dél'eudu  '  à  S(Ui  arclii- 
diacre  de  tenir  des  l'etnines  chez  lui.  Celui-ci 
refusa  d'obéii';  sur  quoi  taint  Grégoire  écrivit 
à  cet  évOque  de  le  di-poscr,  s'il  persistait  dans 
son  opiniâtreté. 
!'Vi>l?'"'       -J*-  '''"  Sardait^ne,  on  ri'tablissait  dans  leurs 
fonctions  les  clercs  qui,  étant  dans  les  ordres 
sacrés,  avaient  commis  des  péchés  d'impu- 
reté, et  qnelipiefois  uiêuieon  n'attendait  pas, 
pour  les  rétal)lir,  qu'ils  eussent  achève;  leur 
pénitence.  Saint  Grégoire  relranclui  ces  deux 
ahus,  en  ordonnant  -  que  ces  clercs  seraient 
pour  toujours  exclus  des  fonctions  de  leurs 
ordres,  et  que  l'on  examinerait  soigneuse- 
ment à  l'avenir  ceux  que  l'on  ordonnerait, 
pour  s'assurer  s'ils  avaient  gardé  la  conti- 
nence, et  s'ils  étaient  atTectionués  à  la  prière 
et  à  l'aumùne.   Ses  lettres  '  sont  remplies 
d'exemples  de  sa  fermeté  à  éloigner  pour 
toujours  du  ministère  des  autels  les  clercs 
tombés  dans  le  crime  d'impureté.  En  vain 
on  objecte  un  endroit  de  la  lettre  à  Secondin, 
où  il  paraît  que   ce  moine  avait  prié  saint 
Grégoire  de  lui  marquer  les  autorités  qui 
faisaient  '  voir  que  l'on  pouvait  rétablir  dans 
les  fonctions  sacerdotales  ceux  i\  qui  ou  les 
avait  interdites  pour  des  crimes  d'impureté. 
On  ne  peut  douter  que  cette  lettre  ne  soit  ou 
supposée,  ou  très-corrompue.  Premièrement, 
l'endroit  objecté  ne  se  lit  point  dans  la  lettre 
à  Secondin  rapportée  dans  huit  manuscrits 
d'Angleterre  cités  par  Jammès,  et  dans  le 
registre  des  lettres  de  ccPape  de  l'abbaye  de 
Clairvaux.  En  second  lieu,  ce  passage  est 
presque  inintelligible,  d'un  style  barbare,  et 
tout  ditlérent  de  celui  de  saint  Grégoire . 
Troisièmement,  il  n'y  a  ni  suite  ni  liaison  dans 
les  ditJerentes  parties  de  cette  lettre,  au  heu 


GRÉGOlllE  LE  GRAND,  PAPE.  ;;i3 

qu'il  y  eu  a  pour  l'ordinaire  beaucoup  dans 
celles   de    saint    Grégoire.    Une    quatrième 
preuve  est,  que  la  discipline  établie  dans  ce 
passage  touchant  les  clercs  tombés  dans  l'im- 
pureté, est  entièrement  opposée  à  celle  que 
ce  saint  Pape  a  établie  dans  un  grand  nom- 
bre de  ses  lettres,  !\  la  conduite  qn'ila  tenin; 
envers  les  cleics  coupables  de  ce  péché,  et 
aux  canons  sur  lesquels  il  s'est  fondé  pour 
empocher  qu'ils  ne  fussent  nHablis  dans  leurs 
fonctions.   Les  pei'sonnes  sensées  ne  s'ima- 
gineront jamais   que  saint  Grégoire  se  soit 
relâché,  en  écrivant  à  un  simple  moine  reclus, 
de  la  sévérité  d'une  loi  observée  générale- 
ment, et  dont  les  évéques  mêmes  n'étaient 
pas  dispensés.  En  cinquième  lieu,  c'est  faire 
injure  à  saint  Grégoire  et  à  l'Église  de  sou 
temps,   que  de  lui  faire  donner  pour  raison 
du  rétablissement  des  prêtres  tombés  dans 
l'impureté,   qu'il  tj  en  avait  peu  qui  fussent 
exempts  de  ce  c?-ime.  Avait-il  donc  une  si  mau- 
vaise opinion  des  prêtres  de  son  siècle?  S'il 
croyait  que  la  multitude  des  coupables  dût 
l'engager  à  modérer  h  cet  égard  la  rigueur 
de  la  discipline,   pourquoi  ordonnait-il  que 
celui  qui  serait  tombé  dans  des  péchés  d'impureté 
depuisson  ordination,  serait  tellement  exclus  des 
saints  ordres,  qu'il  ne  s'appmxherait  jamais  de 
l'autel  pour  en  faire  les  fonctions?  Il  faut  ajou- 
ter que  Secondin  ayant,  comme  le  supposent 
ceux  qui  reçoivent  cette  lettre,  demandé  à 
saint  Grégoire  des  autorités  qui  fissent  voir 
que  l'on  pouvait  rétablir  les  prêtres  coupables 
de  péchés  d'impureté,   ce  Pape    devait  en 
rapporter  du  moins  quelques-unes,  avant  de 
prononcer  sur  cette  question;  mais  la  lettre 
n'en  donne  aucune,  elle  décide  sans  preuve, 
et  décide  contre  la  teneur  des  anciens  canons, 
et  contre  les  propies  décisions  de  saint  Gré- 
goire :  car  il  avait  dit  dans  une  de  ses  lettres  : 
Si  l'on  accordait  ^  à  ceux  qui  sont  tombés  la  li- 
berté de  rentrer  dans  leurs  dignités,  on  détrui- 
rait entièrement   la  vigueur  de  la  discipline 
canonique,  parce  que  l'espérance  d'être  rétablis 


'  Lib.  IV,  Epist.  26,  pag.  704. 

'  Pervenit  ad  nos  quosdam  de  sacris  ordinibiis 
lapsos,  vel  post  pœnitentiam,  tel  unie  ad  minis- 
terii  sui  officium  revocari  :  guod  omnino  prohi- 
buimus,  et  in  hac  re  sacratissimi  qiioque  cano- 
nes  contradicunt.  Qui  igitur  post.  acceptuin  sa- 
crum ordinem  lapsus  in  peccalttnn  carnis  fuerit, 
sacro  nrdine  ita  careat,  ul  adaltaris  nnnistcrium 
ulterius  non  accédât.  Sed  ne  unquam  ii  qiii  nrdi- 
nali  sunt  perçant,  provideri  débet  quales  ordi- 
nentur,  ul  prius  aspicialur,  si  vila  eorum  conli- 
nens  in  annis  plurimis  fuit,  si  sludium  lectionis, 


si  eleemosynœ  amorem  habuerunt.  Greg.,  lib.  IV, 
Epist.  26,  ad  Januarium  Episcopum  Calaritanum, 
pag.  704. 

3  Greg.,  lib.  V,  Epist.  3,  pag.  729,  et  Epist.  4, 
pag.  730;  lib.  VU,  Epist.  42,  pag.  890. 

*  Greg.,  lib.  IX,  Epist.  32,  ad  Secundinum, pitg, 
968. 

s  Si  lapsis  ad  suum  ordinem  reverlendi  licen- 
tia  concedaiur ,  vigor  canonicœ  procul  duhin 
frangitur  disciplinœ,  dum  per  reversinnis  spem, 
prava'  aclionis  desideria  quisque  concipere  non 
formidat.  Greg.,   lib.   V,  Epist,  4,  pag.  729, 


574 


HISTOIRE  GÉNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Dilor*fS 
»rlf«  da  \>i* 
DilrnroK  Im- 
postes aux 
clercs,  t 


ferait  qu'il  y  en  aurait  plusieurs  qui  n'appré- 
henderaient pas  de  coticevoir  des  désirs  criininels 
de  faire  le  mal.  Celait  la  discipline  constante 
de  l'Église  romaine,  comme  on  le  voit  par  la 
réponse  de  Martin  I,  qni  occupait  le  Saint 
Sii'pe  cinquante  ans  après  saint  Gréeroire. 
«  N'ayez,  dil-il  à  Amand,  ('vèque  de  Maës- 
triclit  ',  aucune  indulgence  pour  ceux  qiii 
sont  tombé  dans  ces  crimes  :  ce  serait  détruire 
les  canons.  Celui  donc  qui  sera  tombé  une 
fois  depuis  son  ordination,  doit  demeurer 
déposé  pom-  toujours,  et  ne  pourra  jamais 
être  rétabli  dans  aucun  degré  du  sacerdoce; 
qu'il  se  contente  do  passer  le  reste  de  sa  vie 
dans  la  péiiitenio,,dans  les  larmes  et  les  gé- 
missements, aOn  que  par  la  grâce  du  Sei- 
gneur il  puisse  eflacer  son  crime.  Si  nous 
demandons  des  hommes  purs,  saints  et  irré- 
prochables pour  les  faire  entrer  dans  les  or- 
dres, à  combien  plus  forte  raison  devons-nous 
empêcher  que  ceux  qui  sont  devenus  préva- 
ricateurs, ne  touchent  avec  des  mains  souil- 
lées le  mystère  de  notre  réconciliation  !  Qu'ils 
demeurent  déposés  pour  toute  leur  vie.  » 

35.  Un  nommé  Saturnin,  déposé  du  sa- 
cerdoce pour  crime,  continua  de  faire  ses 
fonctions  et  d'ollVir  le  sacrifice.  Saint  Gré- 
goire ordonna  *  qu'il  serait  privé  de  la  par- 
ticipation du  corps  et  du  sang  de  Jésus- 
Christ;  qu'il  serait  mis  en  pénitence  pour 
le  reste  de  ses  jours,  et  qu'il  ne  recevrait  le 
viatique  qu'à  la  mort  ;  laissant  toutefois  à  la 
disposition  de  son  évêque  de  lui  accorder  la 
communion  laïque  ,  s'il  l'en  trouvait  digne  , 
après  de  dignes  fruits  de  pénitence.  Il  piiva' 
aussi  pour  six  mois  de  la  communion  du 
corps  et  du  sang  de  Notre-Seigneur ,  des 
évèques  qui  avaient  eu  part  à  une  ordina- 
tion faite  contre  les  canons  ;  ordonna  qu'ils 
feraient  pénitence  de  leur  faute  dans  un 
monastère  ,  mais  que  si,  pendant  cet  inter- 


valle ,  ils  tombaient  en  danger  de  mort ,  on 
ne  leur  refuserait  pas  le  viatique.  Celait 
l'usage  de  reléguer  dans  les  monastères  les 
clercs  coupables  de  quelques  prévarications 
contre  les  canons  ;  on  choisissait  '  à  cet  effet 
les  monastères  les  plus  réguliers  et  les  plus 
pauvres ,  afin  que  la  communauté  qui  en 
était  chargée  profitât  de  leurs  biens.  Saint 
Grégoire ,  informé  •  qu'une  religieuse  vivait 
mal,  et  apparemment  hors  de  son  cloître.  la 
fit  renfermer  dans  un  autre  monastère,  avec 
ordre  à  celui  d'où  elle  était  sortie  ,  de  ren- 
dre ce  qu'il  avait  reçu  d'elle  ,  et  de  le  don- 
ner au  monastère  qui  devait  à  l'avenir  pren- 
dre soin  du  salut  de  son  âme.  Sa  vigilance  * 
s'étendait  jusques  sur  les  besoins  temporels 
de  ces  sortes  de  pénitents,  et  il  leur  faisait 
fournir  de  quoi  les  habiller  et  les  nourrir. 
Il  envoyait  encore  dans  les  monastères  des 
laï(jues  ,  même  de  condition  ',  quand  ils  re- 
fusaient de  se  soumettre  aux  peines  décer- 
nées contre  eux  par  leur  évêque.  Par  ses 
ordres,  un  sous-diacre  ,  nommé  Hilarus*, 
convaincu  de  calomnie  ,  fut  déposé,  fouetté 
publiquement,  et  envoyé  ensuite  en  exil.  Il 
ordonna'  qu'un  clerc,  qui  avait  abusé  d'une 
fille,  serait  puni  corporeilement ,  et  renfer- 
mé dans  un  monastère  pour  y  faire  péni- 
tence; qu'un  autre,  accusé  d'idolâtrie '"  et 
d'autres  crimes  atroces,  serait  renfermé  dans 
xine  étroite  prison.  Maximien,  évêque  de  Sy- 
racuse, fit  aussi  "  enfermer  des  clercs  accu- 
sés de  maléfices. 

3G.  Saint  Grégoire ,  informé  "  du  déran- 
gement des  moines  d'un  monastère  de  Si- 
cile, leprit  révoque  de  Catane  de  son  peu 
de  vigilance,  ou  de  son  indolence,  en  cas 
qu'il  eùl  connu  le  désordre  sans  y  avoir  ap- 
porté remède.  Il  le  chargea  d'examiner  si 
personne  ne  s'était  emparé  des  biens  de 
cette  maison,  et  de  la  protéger  suivant  les 


Sur  le»  mo. 
Da^l^re-  cl  sur 
les  moîDfs. 


'  Propkrca  imllalenus  m  hujusmodi  peccalo 
delinquentilius  ad  dvstructioncm  caiionum  coin- 
paisionem  exhiheas.  A'nm  qni  scmel  posl  suam 
ordinatiuiicm  in  Uipsum  ceciderit,  deincepx  iam 
depnfitus  erit,  nuUumque  gradum  sncerdotii  po- 
Uril  adipisci  :  sed  sufficial  ei  laiiienlationibus 
flelibusque  assiduis,  iiuousque  adrixeril,  in  ea- 
dem  parnileniia  perdurare,  ut  nimniissum  délie- 
tum  divina  gratin  extinguerc  taleat.  Si  enim 
talcs  quarimus  iid  sncros  ordinns  promot>endos, 
quilius  nuUa  riiga,  nulluiiK/ue  vilœ  conlngium 
mentes  et  corpora  prœpediat;  quaiilo  magis,  si 
pont  ordinalionem  suam  quispiatn  in  lajisum  ce- 
ciderit, cl  prœvaricationis  peccnto  obnoxius,  oui- 
niiio  proltibendus  est  cv/m  manibus  lululenlis  al- 


que  pollulis  niysleriinn  nosirœ  saliitis  Iractart  ! 
.Al.irliniis  P'ip.i,  EpisL  ad  Àmandum,  pag.  916, 
loin.  III  Concil.  Harduini. 

»  Greg.,  lili.  V,  Epist.  7,  pag.  733. 

»  Idem.,  Iil>.  .Mil,  Episl.  4ii,  pag.  1250. 

'  Idem.,  Ilb.  I,  Episl.  U,  pag.  537, 

"  Idoui.,  ibid.,  pas    539. 

«  Lil)  \,Episl.  18,  pag.  502. 

•"  Idom.,  lil)    III,  Epist.  27,  pag.  643. 

"  Idem.,  111).  XI,  Episl.  71,  pag.  1172. 

»  l.ili.  III,  Epist.  41,  pag.  «54. 

'»  (irog.,  lih.X,  Epist.  4,  pag.  1044. 

"  Ml).  V,  Episl.  32,  pag.  759. 

'»  Lib.  \,Epi»t.  22,  pag.  1055. 


[vu'  siÈCLE.J      CIIAriTRE  XLIX.  —  SAINT  GRÉ(;OIRE  LE  GRAND,  PAPE. 

refiles  de  la  justice;  ol  ;iliii  de  li-  iiiPllrc  au 
fait   dos  privilèges   ini'olli!    avait   rcçtis  du 
papo  l'élayc  ,  il  lui  en  envoya  une  copie.  Il 
reprit  '  aussi  i'ëvôque  de  Spolète  de  la  pro- 
tection qu'il  donnait  à  un  moine  vagabond 
et  excommunié  jiar  son  aMié;  ajoutant  que, 
si  ce  moine   avait  étc'  cxcommunii'  injuste- 
ment, comme  il  le  disait,  il  prit  connaissance 
de  cette  afl'aire,  et  ordonni\t  ce  qui  serait  de 
justice,   afin  d'obliger  les  moines  h  obéir  à 
leurs  supérieurs.  Il  obligea  un  -  moine  in- 
corrigible de  rentrer  dans  la  servitude,  d'où 
il  avait  été  tiré  pour  entrer  dans  un  monas- 
tère. (Juoique  les  clercs',  après  avoir  em- 
brassé l'état  monastique,  n'eussent  plus  la 
liberté  de  retourner  aux  églises  qu'ils  des- 
servaient auparavant,  le  saint  Pape  trouvait 
bon  que  l'i'vèque  sous  lequel  ils  avaient  fait 
les  fonctions  de  la  cléricaturc,  les  élevât  au 
sacerdoce,  s'ils  en  étaient  capables.  Lors- 
que la  comnmnauté  avait  besoin  d'un  prê- 
tre', elle  cboisissait  celui  de  son  corps  qu'elle 
jugeait  capable  de  cette  dignité  ,  et  le  pré- 
sentait à  l'évèque  du  diocèse.  Ce  moine  ainsi 
ordonné  ne  devait  point  aller  ailleurs  olfrir  le 
sacrifice,  mais  se  tenir  assidûment  dans  son 
cloître  pour  y  faire  ses  fonctions.  Quelque- 
fois les  évoques  ,  à  défaut  d'un  nombre  suf- 
fisant de  clercs ,  recouraient  ^  aux  monas- 
tères pour  a\oir  des  sujets  dignes  du  sacer- 
doce, et  ils  en  obtenaient  sous  l'agrément 
de  l'abbé.  Ou  tirait  même''  des  moines  de 
leurs  monastères  pour  les  faire  évèques.  Il 
est  rapporté  '  dans  la  vie  de  saint  Burcliard, 
évéque  de  Wurzbourg,  que  saint  Grégoire 
donna  un  décret  portant  que  les  moines 
pouvaient    s'acquitter   des   emplois   et  des 
fonctions  liiérarcliiques,  même  plus  digne- 
ment que  les  autres,  parce  qu'ils  ont  tout 
abandonné  pour  Dieu,  et  qu'ils  font  profes- 
sion d'imiter  la  vie  soutirante  de  Jésus-Christ. 
Ce  décret  n'est  point  connu  d'ailleurs  ,  et  ce 
qui  peut  le  rendre  suspect,  c'est  qu'il  est 
fondé  sur  un  décret  semblable  fait  par  les 
trois  cent  dix-huit  Pères ,  apparemment  de 
Nicée.  Saint  Grégoire  était  trop  instruit  des 

'  Lib.  IX,  Epist.  37,  pag.  954. 

'  Lib.  V,  Epist.  34,  pag.  160. 

'  Lib.  1,  Epist.  42,  pag.  530. 

»  Lib  IX,  Epist.  92,  pag.  997;  lib.  \\l,  Epist.  iS, 
pag.  1211;  lit..  VI,  Epist  42.  pag.  824;  lib.  XIII, 
Epist.  28,  pag.  1237. 

'  Lib.  VI,  Epist.  28,  pug.  814. 

^  Lib.  I,  Epist.  18,  pag.  503. 

'  Acl.  Ordin.  S.  Benedicti,  sœculo  3,  pag.  660, 
in  Yita  S.Burchard.,  lib.  3,  cap,  2. 


anciens  canons,  pour  en  attribuer  un  sur 
celle  malière  au  concile  d(!  Nicée.  Les  moi- 
nes s'occupaient 'la  jdupart  à  transcrire  des 
livres.  Le  défenseur  Julien  étant  allé  dans 
le  monastère  de  Saitil- Ecpiice ,  y  trouva 
quantité  de  moines  occupés  A  ce  travail. 

37.  Il  eu  était  des  monastères  de  filles 
comme  des  monastères  d'hommes,  à  l'égard 
des  fonds  que  saint  Grégoire  exigeait  de  ceux 
qui  voulaient  en  établir  de  nouveaux  ;  c'est 
ce  qui  parait  par  le  consentement  qu'il  don- 
na à  l'établissement  d'un  monastère  dans  la 
ville  de  Lilybée  en  Sicile ,  aujourd'hui  Mar- 
salla.  Décius,  évêque  diocésain  ,  cliarg(''  de 
la  part  du  Pape  de  le  dédier  »  en  l'honneur 
du  Prince  des  apôtres,  de  saint  Laurent,  de 
saint  Hermès,  de  saint  Pancrace,  de  saint 
Sébastien  et  de  sainte  Agnès,  ne  devait  faire 
cette  cérémonie  qu'après  avoir  reçu  de  la 
fondatrice,  nommée  Adéodate,  une  dot  suf- 
fisante, savoir,  un  fonds  de  dix  sous  d'or  de 
rente  quitte  de  tout  tribut ,  trois  serviteiiis  , 
trois  couples  de  bœufs ,  dix  juments ,   dix 
vaches  ,  quarante  brebis,  quatre  perches  de 
vignes.  Il  n'approuvait'»  pas  que  l'on  liàtit 
des  monastères  d'hommes  dans  le  voisinage 
de  ceux  de  filles,  ni  qu'on  élût"  des  abbes- 
ses  au-dessous  de  soixante  ans  ;  voulant  au 
surplus  qu'elles  fussent'^  de  la  maison,  choi- 
sies par  la  communauté,  et  établies  ou  con- 
sacrées par  l'évèque.  Il  donna  lui-même  " 
en  propriété  une  maison  et  un  jardin  de 
Rome  à  l'abbesse  Flore  ,  pour  y  établir  les 
filles  qu'elle  avait  sous  sa  conduite,  croyant 
qu'il  fallait  assister  les  personnes  qui  ont 
embrassé  la  vie  religieuse,  de  crainte  que  la 
nécessité  ne  les  rendît  néghgenles ,  et  ne 
ruiuàt  la  vigueur  de  leur  observance.  11  fit 
de  semblaUes  hbéralités  il  des  servantes  de 
Dieu  ''  qui  demeuraient  dans  le  monastère 
de  Sainte-Euprépie  à  Rome.  Nous  avons  vu 
plus  haut  qu'il  fit  part  à  des  religieuses  de 
trente  livresd'or,  que  la  princesse  Théoctiste  '» 
lui  avait  envoyées  pour  en  faire  des  aumô- 
nes ;  qu'il  fit  donner  à  d'autres,  qui  demeu- 
raient "  dans  la  ville  de  Noie,  quarante  sous 

*  Greg.,  lib.  I  Dialog.,  pag.  169.  Voyez  Cassiodor. 
Instilul.,  cap.  xxx. 
»  Lib.  X,  Epist.   66,  pag.  1089. 
'"  Lib.  XI,  Epist.  23,  pag.  1107. 
"  Lib.  IV,  Epist.  U,  pag.  692. 
'*  Liu.  VII,  Epist.  12,  pag.  8.Ï8. 
"  Lib.  III.  Epist.  17,  pag.  636  et  637. 
'*  Lib.  U,  Epist.  i,  pag.  571. 
'5  Lib.  VII,  Epist.  26,  pag.  872. 
'«  Lib.  I,  Epvst.  24,  pag.  506, 


Sur  le*  relu 


S76 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


d'or  pour  soulager  leur  indigence  ;  qu'il  fit 
payer  le  prix  d'une  jeune  esclave  '  qui  dé- 
sirait ardemment  d'entrer  en  religion;  qu'il 
en  affranchit  une  seconde  pour  le  même 
sujet  ',  en  lui  donnant,  avec  la  liberté  ,  tout 
ce  qui  lui  arrivait  par  succession  d'un  de 
ses  parents,  afin  que  le  monastère  où  elle 
devait  entrer  en  profitât  ;  et  qu'il  s'employa' 
pour  faire  rendre  ;\  une  fille ,  qui  après  ses 
fiançailles  était  entrée  dans  un  monasière  à 
Naples,  les  biens  que  son  fiancé  tenait  d'elle, 
et  qu'il  refusait  de  rendre.  11  ordonna  de  ' 
renfermer  dans  un  monasière  une  religieuse 
qui  avait  quitté  son  habit ,  et  de  suspendre 
de  la  participation  de  la  sainte  communion 
ceux  qui  s'opposeraient  à  la  correction  de 
cette  tille.  Informé  '  qu'un  liomme  de  mau- 
vaise conduite  fournissait  une  reti-aite  à  une 
autre  religieuse  qui  avait  quitté  deux  fois 
son  habit  et  son  monastère,  il  le  fit  menacer, 
s'il  continuait  i^  autoriser  ce  désordre  ,  d'en 
écrire  à  l'Empereur  pour  l'en  faire  punir 
exemplairement.  Ses  lettres  renferment  plu- 
sieurs autres  exemples  de  sa  vigilance  sur 
les  monastères  de  filles.  Il  était  d'usage  dans 
la  Sardaigne  ,  que  l'évèque  de  ^  Cagliari 
donnât  aux  religieuses  de  sa  dépendance 
des  clercs  d'une  probité  reconnue ,  pour 
avoir  soin  de  leurs  afî'aircs  temporelles, 
.janvier  ne  faisant  point  à  cet  égard  ce  qu'a- 
vaient fait  ses  prédécesseurs,  saint  Grégoire 
lui  en  fit  des  reproches  ,  avec  ordre  '  de  se 
conformer  à  ce  qui  s'était  pratiqué  avant 
lui,  afin  que  ces  filles  n'eussent  aucun  pré- 
texte de  sortir  de  leur  monastère  :  «  Par  ce 
moyen  elles  pourront ,  dit-il ,  s'appliquer 
plus  particulièrement  à  chanter  les  louan- 
ges de  Dieu  ,  et  ù  se  mortifier  elles-mêmes  , 
en  demeurant  dans  leur  cloître  ;  elles  ne 
scandaliseront  point  les  fidèles,  et  si  quel- 
ques-unes sont  tombées  dans  le  péché,  nous 
voulons  qu'elles  soient  renfermées  dans  un 
monastère  d'une  observance  jibis  régulière, 
pour  y  faire  pénileuce.»  Ces  filles,  faute  d'a- 
voir eu  quelqu'un  qui  prît  soin  de  leurs  in- 


térêts dans  les  affaires  du  dehors,  avaient 
été  obli^'ëes  d'aller  elles-mêmes  chez  les  olli- 
ciers  publics  pour  payer  les  tributs,  de  cou- 
rir dans  les  villages  et  dans  les  fermes,  et 
de  faire  beaucoup  de  choses  dont  les  hom- 
mes seuls  peuvent  décemment  s'acquitter. 
38.  Le  mariage,  étant  indissoluble  de  sa 
nature,  ne  peut  être  dissous  pour  cause  mê- 
me de  religion*,  si  ce  n'est  du  consentement 
des  parties.  Les  lois  humaines  avaient  sur 
cela  uuc  autre  jurisprudence;  elles  en  per- 
mettaient la  dissolution  en  certains  cas.  Saint 
Grégoiie  veut  que  l'on  s'en  tienne  à  la  loi  de 
Dieu,  qui,  tant  dans  l'Ancien  que  dans  le 
Nouveau  Testament,  défend  h  l'homme  de 
quitter  sa  femme,  et  de  rompre  un  lien  que 
le  Créateur  a  rendu  commun  et  indissolu- 
ble au  mari  et  à  l'épouse.  Ayant  donc  reçu 
des  plaintes  d'une  nommée  Agathose  ',  de 
ce  que  son  mari  s'était  fait  moine  sans  son 
consentement,  il  ordonna  qu'au  cas  où  cette 
femme  n'aurait  ni  consenti,  ni  donné  lieu 
par  ses  infidélités  à  celte  séparation,  son 
mari  retournerait  avec  elle;  mais  que,  si  elle 
avait  promis  elle-même  de  quitter  le  siècle, 
on  l'obligerait  ù  tenir  sa  promesse,  et  que  sou 
mari  resterait  dans  le  monastère.  Deux  frères 
peuvent  épouser"'deux  sœurs  l'Écriture  sainte 
n'a  rien  de  contraire  à  cette  disposition.il  y  a 
une  loi  "  d'Arcade  et  d'Honorius,  qui  autorise 
les  mariages  entre  les  cousins  germains:  la  loi 
divine  les  défend;  mais  les  mariages  "  entre 
parents  au  troisième  et  au  quatrième  degré, 
sont  pei  mis  dans  l'Eglise.  C'est  un  grand 
crime  d'éjjouser  sa  belle-mère,  et  il  est  éga- 
lement défendu  d'épouser  sa  belle-sœur.  La 
plupart  des  Anglais  avaient  contracté  des 
raariagcsillicites  avant  leur  conversion.  Saint 
Augustin  fut  chargé  "  de  coiriger  cet  abus, 
avec  ordre  de  séparer  de  la  communion  ceux 
qui,  après  s'être  convertis  à  la  foi,  ne  s'abs- 
tiendraient pas  de  ces  conjouctions  illicites. 
Saint  Grégoire  avertit  ceux  "qui  avaient  pei- 
ne à  vivre  dans  la  continence,  de  se  marier, 
sans  crainte  d'oU'euser  Dieu,    pourvu  qu'ils 


Sur  l<  I 
riase. 


'  l.ili.  m,  Episl.  40,  pag.  6o3. 
Lil).  VI,  EpUl.  12,  i>ag.  800. 

•  Lil).  VII,  Eiiist.  23,  pag.  8G7. 

*  Lib.  VIII,  Episl.  8,  pag.  900  et  901. 
>  Lit).  X,  Epist.  8,  pag.  1046  et  lOiT. 

«  Lil).  I\ ,  Episl.  9,  pag.  G88.  --  ''  Ibidem. 

«  Si  enim  dicunl  reUgioiiis  causa  coiijugia  de- 
here  dissolci,  sciendum  est  r/uia  etsi  hoc  liuma- 
na  conccssU,  divina  Icx  laweii  proltilniit.  l'cr  se 
en  Yimerilas  dicil  :  {Ju»'\}uuscuujuu\\i,  honiu  non 
separet.  Quw  eliam  ail  :  Nou  licet  diuiillcrc  uxo- 


rem,  excepta  causa  foruicatioiiis.  Quis  erqo  huic 
cœksti  Legislatori  conlradical?  Scimus  quia 
schpiutn  est:  Kt  eruut  duo  iu  carne  uoa,  etc.  Grrg., 
lil).  Il,  Episl.  45,  p.ng.   1130. 

»  Idem.,  liJp.  .\I,  Episl.  50,  pag.  1137  et  1138. 

'0  Idiin.,  lib.  XI,  Episl.  «4,  pag.  1153. 

"  Cod.  Juslin.,  lib.  V,  lil.  4,  leg.  19,  pag.  419. 

"  Gri'ut.,  lil).  XI,  Episl.  64,  juig.  1)54. 

"  Idem.,  ifcirf.,  pag.  1164. 

"  (iicg.,  Itegidic  Pastoralis  terlia  parte,  cap. 
XXVII,  pag.  81, 


[vii«  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XLIX.  —  SAINT  G 

n'pusseril  pas  fait  vœu  d'entrer  clans  un  diat 
plus  irlevd,  parce  qu'alors  il  ne  leur  était 
plus  permis  d'eu  embrasser  un  moindre.  On 
regardait  comme  apostat,  et  hors  du  ihemin 
du  salut,  un  moine  qui  quittait  sa  profession 
pour  se  marier.  Venance,  patriec  de  Syra- 
cuse, étant  tombé  dans  celte  faute,  saint  Gré- 
goire liu  cc-rivil  '  de  rentrer  dans  le  cloitrc, 
et  d'accomplir  ses  vœux.  Le  palrice,  s'obs- 
tinanl  dans  son  dé'^ordi'e,  fut  attaqué  d'une 
maladie  qui  le  réduisit  à  l'extrémité.  Le  Pape 
le  fit  presser  de  nouveau  de  reprendre  -  son 
habit  avant  d'expiier,  de  crainte  que  son 
apostasie  ne  fût  un  obstacle  à  son  salut.  Il 
fil  aussi  renvoyer  '  dans  les  monastères  quel- 
ques moines  qui,  à  l'exemple  de  Venance, 
les  avaient  quittés  pour  se  marier.  Saint  Gré- 
goire ne  croit  '  pas  exemptes  de  péché  les 
personnes  mariées  qui,  dans  l'usage  du  ma- 
riage, se  proposent  d'autre  fin  que  d'avoir 
des  enfants,  et  taxe  d'incontinence  les  mè- 
res "  qui,  au  lieu  d'allaiter  elles-mêmes 
leurs  enfiints,  les  donnent  ù  des  nourrices, 
le  commerce  conjugal  devant  leur  être  dé- 
fendu jusqu'à  ce  qu'elles  aient  sevré  leurs 
enfants. 

30.  Les  fidèles  qui  ne  mettent  point  leur 
n.'n/ies  confiance  dans  leurs  propres  œuvres,  ont  re- 


U.<>    i    tpars 
tombeaux. 


cours  *  à  la  protection  des  martyrs.  Ils  per- 
sévèrent dans  les  larmes  auprès  de  leurs  sa- 
crées reliques  ;  ils  les  prient,  afin  d'obtenir 
le  pardon  par  leurs  intercessions.  Saint  Gré- 
goire demanda  à  un  évéque  de  Cartilage  "de 
faire  pour  lui  des  prières  devant  le  tombeau 
de  saint  Cyprien,  avec  promesse  de  recon- 
naître cet  office,  en  priant  pour  lui  devant  le 
corps  de  saint  Pierre.  Il  écrivit  à  une  dame, 
nommée  Rusficienne  *,  de  qui  il  avait  rei^u 
des  voiles  pour  couvrir  le  corps  de  cet  apô- 
tre, qu'il  espérait  que  celui  dont  elle  avait 
couvert  les  reliques,  la  protégerait  par  son 
intercession  de  tout  péché,  qu'il  présiderait 
au  gouvernement  et  veillerait  à  la  garde  de 


it:;i;(iiiii':  le  gua.nd,  pape.  .177 

sa  maison.  Dans  un  de  ses  discours,  prononcé 
eu  l'église  des  saints  martyrs  Processe  etMar- 
tinien.  où  leurs  reliques  reposaient,  il  "  dit 
que,  ces  martyrs  ayant  acheté  la  vie  future 
par  la  moil  même,  Dieu  les  glorifiait  par  un 
granti  nombre  de  miracles  qui  s'opéraient 
à  leur  tombeau;  les  malades  y  recevaient 
la  guérison;  les  possédés  y  étaient  déli- 
vrés; les  parjures  y  étaient  au  contraire  li- 
vrés au  démon;  que  ces  saints  étaient  une 
fois  apparus  à  une  dame  qui  fréquentait  sou- 
vent leur  église,  et  l'avaient  assurée  qu'ils 
prendraient  soin  d'elle  à  sa  mort,  en  l'assis- 
tant de  tout  leur  pouvoir;  depuis  cette  ap- 
parition elle  s'était  appliquée  de  plus  en 
plus  à  la  prière.  Il  exhorte  les  fidèles  à  pren- 
dre ces  saints  pour  leurs  patrons  et  leurs  in- 
tercesseurs auprès  du  souverain  Juge. 
40.  LacoulumederE2liseromaine"',etmê-     suri.srfU. 

^  '  qiies  des 

me  de  tout  l'Occident,  était  de  ne  pas  toucher  "'""'• 
aux  corps  des  saints  ;  mais,  lorsqu'on  deman- 
dait de  leurs  reliques,  on  se  contentait  de 
mettre  un  linge  dans  une  boite  que  l'on  des- 
ceudail  auprès  des  corps  saints,  puis  on  l'en 
relirait,  et  on  l'enfermait  avec  la  vénération 
convenable  dans  l'église  que  l'on  voulait  dé- 
dier. Il  s'y  faisait  autant  de  miracles,  que  si 
les  reliques  mêmes  du  saint  y  eussent  été 
transportées.  Il  arriva  sous  le  pontificat  de 
saint  Léon,  que  quelques-uns  doutèrent  de 
la  vérité  de  ces  reliques.  Le  Pape  fit  appor- 
ter des  ciseaux  et  coupa  le  linge,  d'où  il  sor- 
tit du  sang.  Nous  avons  déjà  rapporté  les  mi- 
racles airivés,  lorsqu'on  avait  tenté  de  tou- 
cher aux  tombeaux  des  apôtres  saint  Pierre 
et  saint  Paul,  et  les  châtiments  qu'avaient 
essuyés  ceux  qui  y  avaient  voulu  faire  seu- 
lement quelques  changements;  mais  les  Pa- 
pes envoyaient  assez  souvent  de  la  limaiUe 
des  chaînes  de  ces  deux  apôtres,  et  cette  li- 
maille opérait  "  desprodiges.C'était  lePape  '-, 
ou  quelque  évéque  de  sa  part,  qui  limait  ces 
chaînes  pour  en  avoir  de  la  poudre  ;  quel- 


'  Grcg.,  lib.  1,  Episl.  34,  pag.  .Wî  et  seq. 

«  Idom.,  lib,  yil,  Epist.  3G,  pag.  lll8cH119. 

»  Lib.  I,  Epist.  42,  pag.  530  et  331. 

»  Lib.  X.XXII,  Moral.,  num.  39,  pag.  1067. 

5  Lib.  XI,  Epist.  64,  pag.  1158. 

*  Bi  itaque  qui  de  nullo  suo  opère  confidunt, 
ad  sanclorum  v^artyrum  protectionem  curruiit, 
atque  ad  sacra  eorum  corpora  fletibus  insislunt, 
promereii  se  veniam,  eis  intercedeiilibus,  depre- 
canlur.  '^reg..  Moral.,  lib.  XVI,  uiim.  64,  pag. 
525. 

7  Lib.  Vi,  Epist.  19;  pag.  807, 
XL 


s  In  ejns  pietate  confido,  quia  ciijus  corpus  vos 
cooperuislis  in  terra,  ejus  vos  intercessio  ah  om- 
nibus peccalis  proteget  in  ca-lo,  oinnemquedomum 
vestram  sua  provisione  reget,  et  sua  vigilantia 
custodiet.  Greg.,  lib.  XI,  Epist.  44,  pag.  1123  et 
1124. 

9  Greg.,  in  Evang.,  lib.  Il,  Bomil.  32,  rjag.  1591 
et  1592. 

«0  Idem.,  lib.  IV,  Epist.  30,  pag.  709eniO. 

"  Idem.,  ibid.,  pag.  711,  et  lib.  Xlll,  Epist.  4-2, 
pag. 1248. 

"  Idem.,  lib.  IV,  Epist.  30,  pag.  711. 

37 


1^ 


578  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQL'ES. 


Sur -a  Iran'* 
UiioD  des  tc- 
liques. 


quefois  il  en  lirait  sans  peine,  d'autres  fois 
il  limait  lonpricmps  inutilement,  quand  cer- 
taines personnes  en  demandaient.  On  ren- 
fermait cette  limaille  tantôt  dans  une  croix  ', 
tantôt  dans  des  clefs  d'or'  on  d'autre  matiè- 
re, et  l'on  pendait  ces  clefs  à  son  cou',  pour 
se  préserver  de  toutes  sortes  de  maux.  Saint 
Grégoire  envoya  au  patrice  Dyname  '  une 
croix  où  il  y  avait  des  chaînes  de  saint  Pier- 
re, et  aux  quatre  coins  quelques  particules 
du  gril  de  saint  Laurent,  afin  que  ce  fer,  qui 
avait  servi  à  consommer  son  sacrifice,  allu- 
mât dans  le  cœur  de  ce  seigneur  les  flam- 
mes de  l'amour  divin.  Il  envoya  à  Récarè- 
de  '',  premier  roi  dog  Goths  en  Espagne,  une 
petite  clef  où  l'on  avait  enfermé  de  la  li- 
maille des  mêmes  chaînes,  une  croix  où 
était  enchâssée  une  partie  de  la  vraie  croix, 
et  des  cheveux  de  saint  Jean-Baptiste,  afin 
qu'il  reçût  de  la  croix  de  Jésus-Christ  une 
sohde  consolation  dans  tous  ses  besoins,  et 
le  secours  du  saint  Précurseur. 

41.  L'évéqueet  le  clergé  de  la  ville  d'Eu- 
rie  en  Épire,  chassés  de  leur  église  par  les 
barbares,  emportèrent  avec  eux  le  corps  de 
saint  Donat  martyr,  dans  un  château  de  l'île 
de  Corfou,  pour  ne  point  le  laisser  exposé  à 
la  profanation.  Saint  Grégoire  approuva  ' 
cette  translation;  mais  il  témoigne  partout 
une  grande  répugnance  pour  la  division  des 
corps  des  saints.  C'est  ce  qui  répand  quelque 
doute  sur  ce  que  dit  Baronius  ',  que  ce  saint, 
revenant  de  sa  légation  de  Constantinople, 
en  apporta  à  Rome  un  bras  de  saiut  André 
et  le  chef  de  saint  Luc;  peut-être  crut-il 
pouvoir  se  conformer  à  l'usage  où  étaient  les 
Grecs  de  diviser  les  reliques,  et  de  disper- 
ser les  ossements  d'un  même  corps  en  di- 
vers endroits.  Il  '  engagea  révcque  déposi- 
taire de  la  tuniijue  de  saint  Jean,  â  l'appor- 
ter à  Rome  en  cérémonie.  Jean  Diacre  '  dit 
que,  de  son  temps,  on  la  conservait  daus  la 
basilique  do  Suinl-Jean-de-Latran,  sous  l'au- 
tel; mais  il  parait  par  les  termes  de  saint 
Grégoire,  que  son  dessein,  en  demandant 
celte  tunique,  n'était  que  de  la  voir,  et  non 


pas  de  la  garder.  Le  même  historien  parle 
d'une  autre  tunique  qui  avait  les  manches 
larges  en  forme  de  dalmati  pic.  I!  dit  que  le 
peuple  la  croyait  aussi  de  saint  Jean,  mais 
qu'elle  était  plutôt  du  diacre  Pascl)ase. 

42.  On  prétendait,  en  Angleterre,  avoir  le 
corps  de  saint  Sixte,  martyr. Saint  .\upistin'", 
doutant  de  ce  fait,  demanda  à  saint  Grégoire 
des  reliques  du  martyr  de  ce  nom.  Le  Pape  lui 
en  envoya,  en  lui  marquant  que,  si  le  corps 
que  le  peuple  croyait  être  d'un  martyr  ne  se 
révélait  par  aucun  miracle,  et  si  aucun  des 
anciens  du  pays  n'était  informé  de  l'histoire 
de  son  martyre,  il  fallait  boucher  le  lieu  où 
ce  corps  reposait,  et  mettre  ailleurs  les  reli- 
ques qu'il  lui  envoyait,  afin  de  ne  pas  per- 
mettre au  peuple  de  quitter  le  certain  pour 
l'incertain.  Saint  Martin  av;i!t  usé  d'une  sem- 
blalile  précaution  ;\  cette  occasion.  11  y  avait 
dans  le  voisinage  de  Tours  "  un  lieu  révéré 
par  le  peuple,  comme  si  c'eût  été  la  sépul- 
ture de  quelque  martyr.  Les  évêques  ses  pré- 
décesseurs y  avaient  érigé  un  autel.  Le 
saint,  qui  ne  croyait  pas  légèrement,  de- 
manda aux  plus  anciens  du  clergé  qu'on  lui 
fit  voir  le  nom  du  martyr,  le  temps  auquel 
il  avait  soullert  ;  et,  ne  trouvant  rien  dans  la 
tradition,  il  s'abstint  pendant  quelque  temps 
d'aller  en  ce  lieu-l;\,  dans  la  crainte  d'auto- 
riser la  superstition  :  enfin  il  y  alla  avec  quel- 
ques-uns de  ses  frères,  et  se  tenant  debout 
sur  le  sépulcre,  il  pria  Dieu  de  lui  faire  con- 
naître celui  qui  y  était  ente;  ré.  Alors  il  vit  à 
sa  gauche  une  ombre  sale  d'un  regard  fa- 
rouche. Sur  le  commandemenl  qu'il  lui  fil 
de  parler,  le  fautôme  répondit  qu'il  était  un 
voleur  mis  i  mort  pour  ses  crimes;  que  le 
peuple  l'honorait  par  erreur,  et  qu'il  n'avait 
rien  de  commun  avec  les  martyrs.  Saint  Mar- 
tin fut  le  seul  qui  le  vît;  maisce"ux  de  sa  com- 
pagnie entendirent  la  voix.  Il  fit  donc  ôler 
l'autel,  et  délivra  le  peuple  de  ce  faux  culte. 

43.  Pour  dédier  une  église  ou  une  cha- 
pelle, c'i-tait  l'usage,  en  Italie,  que  l'on  en 
obtint  la  permission  du  Pape,  suivant  le  dé- 
cret de  Gclase  ";  mais  il  commettait  ordinai- 


«Ji^e*  into 


Sur  11  if^dl* 
Me«  des  ^cK. 
ft*  cl  det  mo* 
DtMins 


'  fireg.,  lit).  Xlll.  Epùt.  42,  p.ig.  12i8. 

*  Lil).  VII,  E/iist.  26,  pag.  870. 
>  Lib.  VI,  Epiit.  0,  pag.  ti9G. 

*  Lili.  III,  Episl.  o3,  jiag.  C*«. 

'  Lib.  IX,  Epist.  V22,  [Mg.   lu:il. 

*  Lit).  \\\,  Episl.  1,  pag.  12U5,  cl  Episl.  13,  p.ig. 
1271  ft  1272. 

''  Uurouiuj  ad  ann.  S8(j,  pag.  G22. 


"  1-ib.  m,  Episl.  S,  png.  62i. 

»  Joaiiiir-:  nincnnus,  in  Vila  S.  Grcgnrii,  lili.  III, 
cap.  LVii,  pag.  (18  et  119. 

'•  I.ib.  M,  Episl.  G4,  png.  lir,7. 

"  Sevorus  Siilpltius,  in  Vila  sancti  Martini,  cap. 
vin,  pag.  :it)l  et  .",02. 

"  (Jclasiiis,  Episl.  9,  cap.  IV,  pag.  1189,  tome  IV 
Concil.  Labb. 


CHAPITRE  XI.IX.  —  SAINT  GRÉGOTIIE  LE  nRAND,  PAPE. 


[vu"  SIKCLE.] 

remiMil  des  dv^qiies  pour  lotlo  ciM-rmonic. 
Ce  l'iil  i\  l'cvéquc  de  Sorenle  '  qu'il  donna  la 
commission  de  dédier  l'omtolre  du  monas- 
tère de  Savin,  alihé  de  Saint-Etienne  dans 
l'ile  de  Capri,  et  d'y  transférer  les  relii|iies 
de  sainte  Asatlie  que  cet  abbé  avait  obte- 
nues ;  mais  il  l'avertit  de  prendre  fçarde  qu'il 
n'y  eût  point  de  corps  enterré  en  ce  licu-li\  : 
car  une  des  conditions  pour  la  di'dicace  des 
églises,  était  que  l'on  n'eut  point  enterré  de 
morts  dans  le  lieu  que  l'on  voulait  consacrer. 
Il  voulait  aussi  que  l'on  ne  dédiât  des  mo- 
nastères, qu'après  que  les  fondateurs  les  au- 
raient sutiisamment  dotés,  tant  pour  l'entre- 
tien des  bâtiments,  que  pour  la  subsistance  de 
la  communauté.  A  ces  conditions,  il  permit  à 
l'évéque  de  Fernio  de  dédier-  un  monastère 
sous  le  nom  de  saint  Savin,  martyr,  fondé 
à  Gressian  par  le  diacre  Procule.  Si  l'on  n'a- 
vait aucune  preuve  qu'une  église  eût  été  con- 
sacrée', on  la  consacrait,  sans  craindre  de 
réitérer  la  consécration.  Saint  Grégoire  con- 
sacra* de  nouveau,  à  Rome,  une  église  qui 
avait  été  occupée  par  les  ariens,  la  regar- 
dant comme  souillée,  et  y  mil  des  reliques 
de  saint  Séliastieu  et  de  sainte  Agathe.  Le 
texte  marque  cette  consécration  sous  le  ter- 
me de  réconciliation.  Il  est  dit  encore  qu'il  " 
réconcilia  une  autre  église  qui  avait  été  en- 
tre les  mains  des  mêmes  hérétiques,  et  qu'il 
la  dédia  en  l'iionueur  de  saint  Séverin.  A 
l'égard  des  temples  des  idoles  ",  il  ne  voulait 
pas  qu'on  les  détruisit,  lorsqu'ils  étaient  bien 
bâtis;  mais  seulement,  qu'après  enavoii  bri- 
sé les  idoles,  ou  purifiât  ces  temples  par  des 
aspersions  d'eau  bénite,  cpi'on  y  élevât  des 
autels  et  qu'on  y  mit  des  reliques,  afin  qu'a.- 
près  avoir  servi  au  culte  des  démons,  ils  fus- 
sent consacrés  au  culte  du  vrai  Dieu.  Les 
dédicaces  d'églises  étaient  accompagnées  de 
largesses  ^  aux  pauvres,  qui  consistaient  en 
argent,  en  vin,  en  viande,  en  huile  et  au- 
tres denrées  propres  à  leur  subsistance. 

44.  C'était  une  erreur  des  priscillianistes', 
que  cliaque  homme  naissait  sous  de  certaines 
constellations.  Ils  s'autorisaient  de  l'étoile  qui 
apparut  à  la  naissance  de  Jésus-Christ,  regar- 
dant cette  étoile  comme  sa  destinée;  «  mais, 
dit  saint  Grégoire,  puisque,  selon  les  paroles 


57!) 


de  l'Hvangile,  ce  ne  fut  pas  l'enfant  qui  ;ilia 
â  l'éloile,  mais  l'étoile  à  reniant  ;  au  lieu 
de  dire  que  l'étoile  fut  la  destinée  de  l'en- 
fant ,  il  faudrait  plutôt  dire  que  l'enfant 
fut  la  destinée  de  l'i-toile.  Le  destin  est  ini 
être  imaginaire  ;  la  vie  de  l'homme  no  dé- 
pend que  de  celui  qui  en  est  le  souverain 
et  le  créateur.  L'homme  n'est  pas  fait  pour 
les  étoiles;  elles  sont  faites  pour  l'homme.  Si 
le  destin  avait  quelque  iuliiience  sur  l'iiom- 
me ,  aurait-on  vu  tant  de  dillërence  entre 
Jacob  et  Esaii,  nés  en  même  temps  et  d'une 
morne  mère?  En  vain  on  répondra  que  la 
vertu  des  constellations  opère  dans  le  mo- 
ment et  en  un  seul  instant  ;  s'il  en  est  ainsi, 
il  faudra  dire  que  l'homme  a  autant  de  des- 
tins différents  qu'il  a  de  membres,  tous  ne 
sortant  pas  du  sein  de  la  mère  en  un  seul  ins- 
tant. »  Saint  Grégoire  relève  une  autre  ima- 
gination des  astrologues,  qui  disaient  que 
tous  ceux  qui  naissent  sous  le  signe  du  Ver- 
seau, devaient  en  cette  vie  exercer  le  métier 
de  pêcheurs.  «  On  dit  qu'il  n'y  a  point  de 
pêcheurs  en  Gétulie,  et  toutefois  il  n'est  pas 
douteux  qu'il  ne  naisse  quelque  personne 
sous  le  signe  du  Verseau.  Il  n'y  a  pas  plus  de 
solidité  dans  ce  qu'ils  avancent,  que  ceux  qui 
naissent  sous  le  signe  de  la  Balance  doivent 
être  changeurs  ou  banquiers,  puisqu'il  y  a 
plusieurs  nations  chez  qui  ces  professions  ne 
sont  pas  même  connues,  quoique  chez  elles, 
comme  ailleurs,  il  naisse  des  enfants  sous 
le  signe  de  la  Balance.  Quelle  est  l'impres- 
sion et  la  vertu  du  destin  sur  deux  enfants 
nés  dans  le  même  instant,  dont  l'un  naît 
d'une  famille  où  la  couronne  est  héréditaire, 
et  l'autre  de  condition  servile  ?»  11  y  avait  à 
Rome  des  personnes  qui  défendaient  ^  de 
travailler  le  samedi.  «  S'il  faut,  lem-  dit  saint 
Grégoire,  observer  à  la  lettre  le  précepte  du 
sabbat,  on  doit  aussi  mettre  en  pratique  la 
circoncision,  contre  la  défense  de  saint  Paul. 
L'un  et  l'autre,  dans  la  loi  de  l'Évangile,  ne 
s'observent  plus  que  spirituellement.  »  Il  dit 
à  ceux  qui  ne  croyaient  pas  qu'il  fût  permis 
de  se  baigner  le  dimanche,  que  cela  n'était 
pas  même  permis  en  un  autre  jour,  si  on  le 
faisait  par  volupté;  mais  que,  si  c'était  par  né- 
cessité, ou  pouvait  le  faire  le  dimanche  com- 


»  r.refî.,  lib.  I,  £/)iSt  54,  pag.  347. 

>  Grog.,  lib.  Xlll,  Epist.  IG,  pag.  1229. 

»  Idem.,  lib.  XIV,  Episl.  17,  pag.  l2"9. 

»  Lib.  m,  Dialog.,  cap.  xxs,  pag.  341  et  seq. 

»  Lib.  l!l,  Epist.  19,  pag   037  et  038. 


6  Lib.  XI,  Epist.  76,  pag.  1176. 
■!  Lib.  I,  Epist.  o6,  pag.  548. 

8  Greg.,  in  Evang.,  lib.   I,   Homil.    10,  num.  4 
et  3,  pag.  1469  et  1470. 

9  Greg.,  lib.  XIU,  EpiSt-  1,  pag.  1213  cl  ser;. 


S80 


HISTOIRE  gi':ni':rale  des  auteurs  ecclésiastiques. 


Sor  la  féliei- 
lé  des  s^flL«. 


galuire. 


me  les  autres  jours  ;  qu'on  devait  seulement 
en  ce  jour  s'abstenir  du  travail  corporel, 
pour  vaquer  avec  plus  de  loisir  à  la  prière, 
et  expier  les  fautes  du  reste  de  la  semaine. 
On  voit  par  quelques-unes  de  ses  lettres, 
qu'il  y  avait  dans  les  Gaules  un  tjrand  nom- 
bre de  chrétiens  (fui,  tout  en  fréquentant  les 
églises,  rendaient  un  culte  aux  démons,  of- 
fraient des  sacrifices  aux  idoles  ',  bonoraient 
des  arbres,  sacrifiaient  des  tètes  d'animaux. 
Les  environs  de  Rome  étaient  même  infectés 
de  quelques  restes  d'idolâtrie  ;  on  y  adorait 
des  arbres.  Le  Pape,  pour  léprimer  ces  super- 
stitions, clnploya  l'^mtorilé  des  deux  puissan- 
ces. 11  en  écrivit  a  Agnelle',  évéque  de  Ter- 
racine,  et  au  vicomte  Maur.  Il  loue  le  notaire 
Adrien  '  de  ce  qu'il  donnait  la  chasse  aux 
enchanteurs,  aux  sorciers,  et  il  l'exhorte  à 
continuer. 

45.  «Les  saints  jouiront,  dans  la  terre  des 
vivants,  d'une  double  félicité,  savoir  :  celle 
de  l'âme,  et  celle  du  corps.  Si  saint  Jean  ne 
vit  donner  aux  saints  qu'une  seule  robe 
blanche  '  ;  c'est  que  ce  fut  avant  la  résurrec- 
tion générale  qu'il  eut  cette  vision  ,  et  que 
jusqu'à  ce  temps  les  âmes  jouissent  seu- 
les de  la  béatitude  ;  mais  ils  en  recevront 
deux,  quand  elles  seront  revêtues  de  leurs 
corps.  » 

46.  11  est  dit  dans  l'Évangile  que,  si  quel- 
qu'un a  blasphémé  contre  le  Saint-Esprit, 


ce  péché  ne  lui  sera  remis  ni  en  ce  siècle, 
ni  eu  l'autre  :  d'où  saint  GT.'-goire  dit ''qu'on 
doit  conclure  qu'il  y  a  des  péchés  qui  peu- 
vent être  remis  en  cette  vie  et  en  l'autre. 
«Mais  il  faut  savoir,  ajoute-l-il,  que  person- 
ne n'ûblicndiala  rémission  de  ses  péchés  lé- 
gère en  l'autre  vie,  qu'en  les  expiant  ]v\r  le 
feu  ;  encore  celui-là  seul  qui  l'aura  mérité  en 
cette  vie  par  ses  bonnes  œuvres.  »  Il  juee  ' 
donc  utile  aux  morts  qui  ne  sont  pas  char- 
gés de  crimes,  d'èlre  enterrés  dans  l'église; 
parce  que,  toutes  les  fois  que  leui-s  parents 
vont  dans  ces  saints  lieux,  et  qu'ils  voient 
leurs  sépulcres,  ils  se  souviennent  d'eux,  et 
prient  Dieu  pour  eux. 

47.  Les  âmes  des  justes  qui,  avant  la  ré- 
surrection de  Jésus-Christ,  descendaient  en 
enfer,  n'y  souffraient'  sans  doute  aucune 
peine.  C'est  ce  qui  fait  distinguer  à  saint 
Grégoire  deux  lieux  dans  l'enfer,  l'un  supé- 
rieur oii  ces  âmes  reposaient ,  et  un  infé- 
rieur où  les  impies  sont  tourmentés. «David 
faisait  allusion  à  ce  dernier,  lorsqu'il  disait  : 
Seigneur,  vous  avez  retiré  mon  âme  du  plus 
bas  de  l'enfer.  Job,  sachant  qu'avant  la  ve- 
nue du  Médiateur  il  descendrait  dans  l'en- 
fer, réclame  la  protection  de  son  Dieu,  afin 
qu'il  le  présenât  des  lieux  de  peines  et  de 
supplices.  Les  méchants  y  seront  tourmen- 
tés '  par  un  feu  qui  brûlera  éternellement, 
sans  avoir  besoin  du  ministère  d'aucune 


»  Greg.,  lib.  IX,  Epist.  H,  pag.  938. 
«  Lib.  VIII,  Epist.  18,  pag.  908  et  909. 
»  Lib.  W,  Epist.  53,  pag.  1139. 

*  Et  datSE  suiil  illis  siugula;  stolao  alboc ,  etc. 
{Apocalyps..  vi,  vers.  11.)  Ante  rcsurreclionem 
quippe  slolas  singulas  accepissc  dicti  sunt,  quia 
sola  atlhuc  mentis  liealitudinc  pirfriLunltir.  Bi- 
nas irgo  arcepturi  sunt,  quando  cum  animarum 
perfecto  gaudio,  etiam  corporum  incoiruplione 
l'estientur.  Grcg.,  Prœfat.  in  lib.  Job,  niuii.  20, 
pag.  n. 

'  De  quihusdam  levibus  culpis  esse  ante  judi- 
cium  purgatorius  ignis  credcndus  est  ,  pro  eo 
quod  Veritas  dicit,  quia  si  quis  in  Sanrto  Spiritu 
blasphemiam  dixerit,  nequc  m  hoc  sarulo  remit- 
tetur  ei,  tieque  in  fuluro.  In  qua  sententia  dutur 
intelligi  quasdam  culjias  in  hoc  swculo.   quas- 

dum  vero  in  fiituro Hoc  tamen  sciendum 

est,  quin  illic  saltem  de  mitiimis  niliil  quis- 
que  purgalionis  ohtineliit,  nisi  bonis  hoc  aciibus 
an  hac  adhuc  rila  positus,  ut  illic  obtincal,  pro- 
merealur.  Greg.,  Iil>.  IV,  Dialog.,  cap.  xx.\l.\,  pag. 
4(1  l't  444. 

•  Quos  gravia peccata non  depriinnni ,  hoc prod- 
esl  morliiis,  si  in  ecclesia  scpelianlur.  quod  co- 
rui/i  proximi,  qunticx  ad  radrm  .^acra  loca  con- 
veniunt,  suorum,  quorum  sepulcra  couspiciunl, 


recordantur,  et  pro  eis  Domino  preces  fundunt. 
Greg.,   lib.  IV,  Dialog.,  cap.   L,  pag.  437. 

'  Aec  lawcn  ita  juslorum  animas  ad  infernum 
descendisse  dicimus,  ut  in  locis  pœnalibus  tene- 
rentur.  Sed  esse  surperiora  inferni  loca,  esse  alia 
inferiora  credcniln  sunt  :  u(  et  in  svpcrioribus 
justi  requiescerent,  et  in  inferioribus  injusli  cru- 
ciarcntur.  Inde  cl  Psalmista,  propter  prœve- 
nienlem  se  Dei  graliam,  dicii  :  Eripuisti  nuiiiiam 
uicaiii  ex  iiiferuù  iufcriori.  Beatus  igilurJoli,  ante 
Ucilialoris  adrentum  ad  infernum  se  descendere 
sciens,  Conditoris  sui  protectionem  postulat,  ut 
a  locis  pwnalihus  alienus  existât,  ulii,  dum  ad 
requiem  ducitur,  a  suppliciis  nbscondatur.  Greg., 
lili.  Il  .Moral.,  nuiii.  13,  pag.  397  et  .398. 

»  Gchenna'  ignis,  cum  sit  corporeus,  et  in  se 
missos  rcprobo.i  corporaliter  cxural,  vec  studio 
humano  succenditur ,  nec  lignis  nutritur:  sed 
creatus  semel  durât  inertinguibilis,  et  successione 
non  indiget.  et  ardore  non  caret...  (Juia  omntpo- 
tentis  justitia,  futurorum  pra'sci<i,  ab  ipsa  mun- 
di  origine  gihennœ  ignem  creaiit.  quiin  pa-nu  re- 
priihorum  esse  seinet  inciperet,  sed  urdnrcm  suum 
etiam  sine  lignis  nunquam  finiret.  Scien^tuni  ve- 
ro quod  omnes  repiobi,  quia  f.T  onimn  simul  et 
carne  peccaverunt, illic  in  anima  pariter  et  cnrne 
cruciiinlur.t'iTeg.,  lib.  .\V  Moral.,  iniiu,  35,  pag.  482. 


[vn«  SIÈCLE.]      CHArirnE  XLIX.  —  SAFNT  GRÉCOmE  LE  OlUND,  PAPE. 


58  f 


cr('atiiro,Dioii  aynnt  cr(56  ce  feu  df'slocom- 
mencciiu'iil  pour  servir  nu   cliâliincnl  des  , 
f  réprouvés;  et  parce  qu'ils  ont  péché  et  par 

l'àine  et  par  le  corps,  ils  seront  lonrmenli's 
dans  l'une  et  liaiis  l'autre  en  ce  lien  de  sup- 
plices, n 

Sur  i«:cr.        48.  Quelque  conslanle  '  que  soi!  la  doctrine 
clf*  dos  |,.i.    j     ,, ,  .    ,    ,  ,     ,.      r        -1        , 

ncMia  l'oofcr.  dc  1  cteruite  des  peines  de  1  enfer,  \\  se  trouve 
encore  des  '  personnes  qui  ne  mettent  point 
de  fin  ;\  leurs  pc(  liés,  parce  qu'elles  s'imagi- 
.  lient  quele  jugement  de  Dieu  en  mettra  ;\  leurs 
châtiments.  «  Nous  leur  répoudons.en  deux 
mots,  dit  saint  (In-goire,  que  si  les  supplices 
des  réprouvés  doivent  finir  un  jour,  il  en  sera 
de  môme  de  la  joie  des  bienheureux,  puisque, 
ainsi  qu'il  est  dit  des  damnés  qu'ils  iront  au 
feu  éternel,  il  est  dit  des  élus  qu'ils  iront  dans 
la  vie  éternelle.  Si  les  menaces  ne  sont  pas 
véritables,  les  promesses  ne  le  seront  pas 
non  plus.  On  dira  peut-être  que  Dieu  n'a  me- 
nacé les  pc'cheurs  d'une  damnation  éternelle, 
(]uepourlesexciter.^  secorrisïerpar  la  crainte 
des  feux  éternels;  mais  ne  pourra-t-on  pas 
dire  également  que  Dieu  n'a  fait  des  pro- 
messes aux  justes,  que  pom'  les  inviter  h 
vivre  dans  la  justice  ?  Qui  peut  soiitl'rir  que 
l'on  fasse  passer  pour  faux  ce  que  la  Vérité 
a  dit  de?  supplices  éternels,  et  qu'en  s'ell'or- 
çant  de  soutenir  que  Dieu  est  miséricor- 
dieux, on  n'ait  pas  honte  de  le  faire  regarder 
comme  trompeur?  On  objecte  qu'une  faute 
qui  a  fini  ne  doit  pas  être  châtiée  sans  fin,  et 
que  Dieu  étant  juste,  il  ne  peut  punir  éter- 
nellement ce  qui  n'est  pas  une  faute  éternelle. 
Cette  objection  aurait  quelque  vraisemblance, 
si  le  juste  Juge  n'examinait  que  les  actions, 
et  non  pas  les  cœurs  ;  mais  il  sait  que  les 
méchants  n'ont  cessé  de  pécher,  que  parce 
qu'ils  ont  cessé  de  vivre,  et  qu'ils  auraient 
voulu  vivre  sans  fin,  pour  persévérer  sans 
lin  dans  l'iniquité  ;  ils  souhaitent  même  plus 
de  pécher  que  de  vivre,  en  sorte  qu'ils  ne 
désirent  de  vivre  toujours  en  ce  monde,  qu'a- 
fin  de  pécher  pendant  toute  leur  vie  :  ainsi, 
ilest  delà  justice  du  Juge  sévère  de  ne  mettre 
point  de  bornes  aux  supplices  des  méchants. 


puisque,  tant  qu'il  ont  pu,  ils  n'en  ont  point 
mis  à  leurs  crimes.  » 

On  objecte  encore  qu'un  maître  ne  frappe 
son  serviteurqiie  poiirle  coiriger,  et  non  par 
un  mauvais  plaisir  de  le  voir  souffrir;  qu'on 
ne  voit  pas  ;\  quel  dessein  Dieu  laisserait  brûler 
les  mi'chants  pendant  l'éternité,  puisque, 
étant  bon,  il  no  peut  se  repaître  des  tour- 
ments de  ces  malheureux;  enfin,  qu'il  est 
inutile  qu'ils  soient  tourmentés  éternelle- 
ment, puisque  des  peines  même  éternelles 
ne  peuvent  expier  leurs  crimes.  Saint  Gré- 
goire ri'pond  :  »  Dieu,  parce  qu'il  est  bon,  ne 
se  repaît  pas  des  tourments  des  damnés; 
mais  aussi,  étant  juste,  il  ne  peut  jamais  être 
apaisé  par  la  punition  des  injustes;  c'est 
donc  en  punition  de  leur  péchés,  que  les  mé- 
chants sei'ont  châtiés  éternellement.  Dieu 
trouve  dans  ce  châtiment  un  moyen  de  faire 
sentiraux  élus  combien  ils  lui  sont  redevables, 
ayant  évité  par  le  secours  de  sa  grâce  de  com- 
mettredesactionspunics  si  sévèrement.  Mais, 
dii-a-t-on,  commcntles  bienheureux  neprient- 
ils  pas  pour  ceux  qu'ils  voient  brûler  dans  les 
flammes  ?  N'est-il  pas  écrit  dans  l'Evangile  : 
Priez  pour  vos  ennemis  1  Cela  est  vrai  ;  mais 
les  saints  ne  prient  pour  leurs  ennemis,  que 
quand  ils  savent  que  leurs  ennemis  sont  en- 
core en  étal  de  se  convertir  et  de  faire  péni- 
tence :  or  cela  ne  se  peut  qu'en  cette  vie, 
dans  l'autre  il  n'est  plus  possible  de  revenir 
de  l'iniquité  à  la  justice.  C'est  pour  cela  que 
nous  ne  prions  ni  pour  le  diable,  ni  pour  ses 
anges,  parce  qu'ils  sont  irrévocablement  con- 
damnés aux  supplices  éternels,  et  que  nous 
ne  prions  pas  non  plus  pom*  ceux  qui  meu- 
rent dans  l'infidélité  et  l'impiété,  parce  que 
nous  ne  devons  pas  présenter  devant  le  tri- 
bunal du  juste  Juge  une  prière  inutile  et  in- 
fructueuse pour  des  gens  que  nous  savons 
être  destinés  aux  supplices  éternels.  L'étroite 
union  des  saints  avec  Dieu  les  rend  incapa- 
bles de  rien  souhaiter  qui  ne  soit  parfaite- 
ment conforme  à  son  équité  souveraine.  » 

/(9.  Saint  Grégoire,  passant  '  un  jour  par 
la  place  de  Trajan,  que  ce  prince  avait  fait 


Sur  la  iléli 
Traoce  de  I  à- 
me  de  Trajan. 


'  Constat  niinis ,  el  incunctanler  veriiin  est, 
quia  sicut  finis  non  est  gaudio  bonontm,  ita  finis 
non  eril  tormento  maloruni.  Greg.,  lib.  IV  Uia- 
log.,  cap.  XLiv,  pag.  449. 

'  Siint  eiii»!  niinc  etiam,  q^ii  iJcirco  peccatis 
suis  poncre  finem  ncgligunl,  quia  liahere  quan- 
doque  finem  fiilura  super  se  judicia  suspicantur. 
(Juibus  breviter  respomlcmus  :  si  qnandoque  fi- 
nienda  sunt  supplicia  reproborum,  qnandoque  fi- 


nicnda  sunt  ergo  et  gaudia  bcatoruw.  Per  semet- 
ipsani  Veritas  dicil  :  Iljuut  lii  in  supplicium  xlcr- 
niiiii,  justi  aufeui  in  vitam  xteruam.  Si  igitur  hoc 
verum  non  est  quod  minatus  est,  neque  illud  ve- 
rum  est  quod promisil,  etc.  Greg.,  lib.  XXXI V  J/o- 
ral.,  nuni.  3),  pag.  1132. 

3  Paul.  Diac,  in  li',\  de  Vita  S.  Greg.,  cap.  xxvii, 
pag.  Ui. 


582 


HISTOIRE  r.ÉXKHALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


oi-ner  de  superbes  édifices  où  les  principales 
actions  de  sa  vie  étaient  représenti-es  en  bas- 
reliefs,  s'appliqua  à  considérer  celui  qui  re- 
présentait ce  qu'illît  en  faveur  d'une  pauvre 
veuve  qui  était  venue  le  prier,  les  larmes  aux 
yeux,  de  venger  la  mort  de  son  Dis  qui  avait 
été  tué.  Trujaa  était  à  la  léle  de  son  armée, 
lorsqu'elle  lui  lit  cette  prière;  et,  obligé  de 
faire  grande  dilicronce,  il  répondit  ti  cette 
femme,  qu'au  retour  de  ^ou  expédition  il  lui 
ferait  justice.  Mais,  répartit  la  veuve,  si  vous 
êtes  tué  dans  le  combat,  de  qui.  Seigneur.,  pour- 
rai-je  après  cela  l'attendre  ?  De  mon  succes- 
seur, répliqua  ce  prince.  Que  vous  servira-t- 
il,  ijrand  emjjeiX'ur,  qu'un  autre  que  vuus  me 
rende  justice?  répondit  cette  femme;  «e  vaut- 
il  f/as  mieux  que  vous  vous  acquittiez  de  cette 
bonne  œuvre,  que  de  In  laisser  faire  à  un  autre  ? 
Paul  et  Jean  Diacre,  qui  racontent  cette  his- 
toire, ajoutent  ce  qui  suit  :  Alors  Tempe- 
reur,  touché  des  larmes  de  cette  pauvre  mère, 
et  forcé  par  ses  raisons,  descendit  de  cheval, 
fit  venir  ceux  qu'elle  accusait  d'avoir  tué  son 
fils,  prit  une  exacte  connaissance  de  l'atl'aire, 
et  ne  voulut  point  continuer  sa  marche,  quel- 
que instance  que  lui  en  fissent  ses  olliciers, 
qu'il  n'eut  terminée  l'allaire.  Il  lit  payer  à  la 
veuve  une  somme  cousidéiable,  et  donna  tou- 
tefois la  vie  aux  criminels.  Saint  Grégoire,  lou- 
ché de  cette  action  de  justice  et  de  charité,  pria 
Dieu,  avec  beaucoup  de  larmes  et  degéiuis- 
sements,  défaire  miséricorde  à  cet  empereur. 
Etant  allé  ensuite  au  tombeau  de  saint  Pierre, 
il  y  demeura  longtemps  en  prières,  et  quel- 
que temps  après  il  eut  une  révélalion,  où  il 
apprit  que  sa  prière  avait  été  exaucée;  mais 
à  condition  qu'à  l'avenir  il  ne  prierait  plus 
pour  des  personnes  mortes  sans  baplûme. 


Cette  histoire,  qui  n'es=f  rapportée  que  par 
des  auteurs  postérieurs  de  plus  de  deux  cent 
cinquante  ans  à  saint  Grégoire,  c'est-à-dire, 
par  Paul  et  Jean  Diacre,  a  été  rojetée  comme 
une  fable  par  tous  ceux  qui  en  ont  bien  exa- 
miné les  circonstances.  Jean  Diacre,  dans  la 
Vie  de  saint  Grégoire,  qu'il  écrivit  vers  l'an 
872  par  l'ordre  du  pape  Jean  VIII,  convient* 
qu'il  l'avait  apprise  des  .Vnglo-Saxons,  chez 
qui  elle  était  tellement  re(^ue,  qu'ils  en  fai- 
saient la  lecture  dans  leurs  églises,  apparem- 
ment le  jour  de  la  fête  de  saint  Grégoire; 
mais  n'ajoute  que  l'on  en  doutait  chez  les 
Romains,  et  qu'il  en  doutait  lui-même,  n'y 
ayant  point  d'ajjparence  que  saint  Grégoire, 
dont  la  doctrine  constante  est  qu'on  ne  doit 
pas  prier  pour  ceux  qui  sont  moi  ts  sans  bap- 
tême et  dans  l'infidélité,  ait  prié  pourTrajan 
qui  était  un  prince  |)ayen.  Trajan  eût  fait  une 
action  aussi  éclatante  que  celle  dont  il  est 
parlé  dans  cette  histoire,  ses  historiens  l'au- 
raient-ils  oubliée?  Pline  le  Jeune  ne  lui  en 
eùt-il  pas  fait  houneurdans  son  Panégyrique? 
Il  n'en  dit  pas  un  mot,  el  on  n'en  trouve  rien 
dans  tous  ceux  qui  ont  travaillé  sur  l'histoire 
romaine.  Il  y  a  plus,  c'est  qu'en  accordant 
pour  un  moment  (]ue  Trajan,  pour  conserver 
à  la  postérité  la  mémoire  de  cette  belle  ac- 
tion, l'ait  fait  graver  ou  mettre  en  relief 
sur  de  l'airain  dans  la  place  qui  porte  son 
nom,  on  ne  pourrait  en  tirer  une  preuve  cer- 
taine pour  la  veiité  de  l'histoire  rapportée 
par  Paul  et  Jean  Diacre.  Ne  sait-on  pas,  par 
les  témoignages  de  '  Procope  et  de  Cassio- 
dore,  plus  anciens  l'un  et  l'autre  que  saint 
Grégoire,  que  la  ville  de  Uoaie  fut  pillée  par 
Alaric,  roi  des  Goths,  et  par  Genséric,  roi 
des  Vandales,  et  que  ce  dernier  emporta  non- 


'  Legilur  pênes  easdem  Ànglorum  ecclesias, 
quod  Gregoriiis  per  forum  Trajani,  quod  ipse 
quondain  ptilcherrinns  wdificiis  venuf<((iral.,  pro- 
cedens,  jtiilicii  ejus,  quo  viduam  coiisolalus  j'ue- 
rat,  recordatus  alque  iniralus  sit:  quatl  sciUccl 
S'cut  a  prioribus  Iraditur,  ita  se  habrt...  lliijus 
ergo  manaueludincin  judicis  asservnl  Gregorium 
recordatitin  ad  sancli  Pelri  ajfnstoli  hasilicnni 
pcrvenissc,  ibique  Inmdiu  su/wr  errnre  tam  cle- 
meiilissimi  prinripis  deflevisse,  qiiousque  respon- 
stun  scqucnti  nocle  ccpissct,  se  pro  Trajano  fuis- 
se audilum,  Inntum  pro  nullo  ullerius  pagano 
prcces  effundcrcl.  Sed  ciiin  de  superioribus  iniru- 
culis,  nnmtinorum  sit  ncmn  qui  duhitel,  de  lioc 
quod  apud Saxoiies  legilur. hiijus  prccibiis  Trajani 
anima  m  ab  iiiferni  cruciulibus  liberatam,  ob  id 
tel  uinxime  dubiluri  viitetur,  quod  tanlus  doc.tor 
nequaquam  prwsuuieret  pro  pagano  prnrsns  ora- 
re,  qui  quarto  Dialogorum  suoru,m  libro  docue- 


rit  eamdcm  camam  esse  cur  non  orelur  a  sanc- 
tis  in  fuluro  j'udicio  pro  peccatoribus  œterno 
ignt'  damnalis.  quw  nunc  eliam  causa  est  ut 
non  orent  sancli  Iwmines  pro  Iwminibus  infide- 
libus,  impiisquc  defunclis.  .loiui.  Diac,  lib.  Il  De 
Vita  Gregorii,  miin.  H. 

'  Eudo.rin  captiva  in  Gcnscrici  poteslalem  ve- 
nit,  qui  magna  auri  argcnliquc  vi  el  imperatnria 
supelleclili  in  nares  ihi;)o.«i7o,  Carlhaginrm  vêla 
fecil  :  cum  in  nula  ner  alienis  nec  re  ilemum  ulla 
manum  ab.ilinuissel.  Juvis  quoque  Capilulmi  lem- 
plum  diripuit,  ac  iiiediani  parlem  abstulil  tecli 
quod  ex  arc  eplimo  ductum  eral,  mulloque auro 
magnifieiiilissimum  videbalur.  l'rcicup.,  lih.  I  De 
lletli)  Vnndalico,  onp.  v.  .Es  prwterea  non  mini- 
mum pondus  cl  quod  facillimum  ilireplioni  esl 
nioUi^simum  jilumbum  de  ornalu  ma-nium  refe- 
runlur  esse  stiblala.  Cassiud.,  lili.  III,  Episl.  'il. 


[vn'  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XTJX.  —  SAINT  GRÉGOIRR  LE  GRAND,  PAPE. 


583 


Purlasiii.O' 
nie. 


sonleinont  toutes  les  statues  d'iiirain,  et  Inus 
les  aiilies  oinenu'uts  tic  ce  gcnio  qui  étaient 
sur  les  places  publiques,  mais  aussi  les  pla- 
quc-s  de  ce  uiétal  qui  couvraient  le  toit  du 
temple  de  Jiq)iler  Capilolin,  et  (ju'il  lit  diar- 
gcr  le  tout  sur  des  vaisseaux  pour  être  trans- 
porté en  Afrique?  Les  Hérules  et  les  autres 
barbares  poussèrent  leur  avidité  jusqu'il  dé- 
tacher l'airain  et  le  plomii  incrustés  dans  la 
pierre.  La  i)lace  de  Trajan  ayant  donc  été, 
comme  toutes  les  autres,  dépouillée  de  tous 
ses  ornements  avant  le  pontilicat  de  saint 
Grégoire,  c'est  sans  aucun  fondement  ((u'on 
a  avancé  qu'en  passant  parcelle  place  il  s'était 
appliqué  à  considérer  le  bas  relief  qui  repré- 
sentait l'œuvredecliaritéeldejustice  que  Tra- 
jan avait  exercée  envers  une  veuve. Les  autres 
écrivains  que  l'on  cite  pour  garants  de  cette 
histoire,  ou  ont  puisé  dans  la  même  source 
que  Paul  et  Jean  Diacre,  c'est-à-dire,  dans 
les  traditions  fabuleuses  des  Anglo-Saxons, 
ou  dans  un  discours  qui  porte  le  nom  de 
saint  Jean  Uamascéne  ',  mais  qui  n'est  point 
de  lui,  comme  on  en  peut  juger  par  la  diffé- 
rence du  style. 

30.  «  Lorsqu'une  personne  -  s'explique  sans 
ambiguïté  sur  un  point  de  la  foi  catholique, 
on  la  doit  croire;  autrement,  il  n'y  en  aurait 
l)oiut  dont  on  ne  pût  rendre  la  foi  suspecte  : 
d'où  il  est  naturel  de  conckire  qu'il  n'est  ja- 
mais permis  de  soupçonner  ni  d'aflliger  un 
homme  qui  fait  profession  de  la  vraie  foi.  Ne 
pas  croire  '  celui  qui  professe  la  vérité,  ce 
n'est  pas  détruire  une  héiésie,  mais  l'établir.» 
Les  évéques  qui  quittaient  le  schisme  pour 
se  réunir  à  l'Église,  le  faisaient  sous  cette 
formule  :  (f  Je  jure  *,  sous  peine  d'être  pri- 
vé de  l'épiscopat  et  d'encourir  l'anathème, 
et  je  promets  k  saint  Pierre  et  au  bienheu- 
reux Grégoire  qui  tient  sa  place,  que  je  ne  me 
laisserai  jamais  aller  au  schisme  dont  je  me 
suis  retiré  par  la  miséricorde  de  notre  Sau- 
veur; mais  que  je  demeurerai  pour  toujours 
dans  l'unité  de  l'Église,  et  dans  la  commu- 
nion du  Pontife  Romain  ;  que  si,  à  Dieu  ne 
plaise,  je  prenais  quelque  prétexte  de  me  sé- 
parer de  l'unité,  je  serai  coupable  de  par- 
jure. » 

31 .  «  Le  Sauveur,  en  donnant  ^  à  ses  apôtres 


le  pouvoir  de  faire  des  miî'acles,  leur  dit  : 
Vous  avez  reçu  ce  don  gratuitement,  disjiensez- 
le  gratuitement.  Il  prévoyait  que  quelques- 
uns  nicllraiciit  en  commerce  les  dons  mfimes 
du  Saint-Fsprit.  Il  y  en  a  ([ui  ne  reroiveut 
pas  d'argent  de  ceux  à  qui  ils  donnent  les 
ordies  sacrés,  mais  ils  en  attendent  des  re- 
merclments  et  des  louanges.  Ce  n'est  pas  lii 
donner  gratuitement  ce  qu'ils  ont  reçu  gra- 
tuilement.  Le  Pro[)hète  détinit  un  hom- 
me juste,  celui  qui  conserve  ses  mains  nettes 
de  tout  présent.  Pourquoi  cette  façon  de 
parler,  de  tout  présent ,  si  ce  n'est  parce  qu'il 
y  a  des  présents  de  reconnaissance,  des  pré- 
sents de  mains,  et  des  présents  de  langue  ? 
Les  présents  de  reconnaissance  sont  les  obli- 
gations que  l'on  se  fait,  et  qui  ne  sont  point 
dues  ;  les  présents  de  mains  sont  l'argent, 
et  les  présents  de  langue  sont  les  remerci- 
ments  et  les  louanges.  Ceux  qui  confèrent 
les  ordres  sacrés,  tiennent  leurs  mains  vides 
de  tout  présent,  quand  ils  ne  recherchent  ni 
argent,  ni  faveur  humaine,  en  communiquant 
les  choses  divines.  »  Saint  Grégoire  se  plaint  ° 
de  quelques  évéques  qui  vendaienlles  grâces 
siiirituelles,  et  se  servaient  des  péchés  d'au- 
Irui  pour  amasser,  aux  dépens  de  leur  con- 
science, des  biens  temporels.  Il  ne  voulait  pas 
que  l'on  exigeât  '  quelque  chose  pour  la  sé- 
pulture, disant  qu'il  était  indigne  d'un  évèque 
et  d'uu  prêtre  de  faire  acheter  un  peu  de 
terre  qu'on  accorde  à  la  pourriture,  et  de  ti- 
rer du  profit  de  l'affliction  d'autrui.  Cet  abus 
régnait  dans  Rome  même  au  commencement 
de  son  pontificat.  Il  y  apporta  remède,  en 
permettant  seulement  de  recevoir  les  offran- 
des libres  et  volontaires  pour  le  luminaire. 

ARTICLE  VIU. 

JUGEMENT  DES  ÉCRITS  DE  SAINT  GKÉGOIEE. 
ÉDITIONS  qu'on  en  A  FAITES. 

i .  Les  Églises  chrétiennes,  en  donnant  d'un 
commun  conseutement  à  saint  Grégoire  le 
titre  de  Grand,  ont  fait  autant  attention  à  la 
profondeur  de  son  savoir  et  à  l'excellence  de 
ses  écrits,  qu'à  l'éminence  et  à  la  solidité  de 
ses  vertus.  Aussitôt  qu'ils  furent  rendus  pu- 
blics, on  les  '  admira,  et  on  les  préféra  au 


1  Damascen.,  Orat.  pro  defunclis,  tom.  I,  pag. 
391.  —  «  Greg.,  lib.  XI,  Epist.  45,  pag.  1132. 
'  Lib.  Vl,  Epist.  16,  pag.  805. 
*  In  Appendice,  pag.  55. 

5  Hom.i  in  Eoang.,  pag.  Itl'J. 

6  Hom.  n,  pag.  im-2. 


''  Lili.  IX,  Epist.  3,  pag.  926. 

8  Rogalus  a  Leandro  episcopo  lihrum  Job  ex- 
posuil  tripliciler,  historiée,  allegorice,  et  mora- 
liter,  et  librum  dividens  in  sex  Idiros,  consumma- 
vit  hoc  mirabile  opus  in  triginla  quinque  libris. 
Sigibert.,  lib.  De  Script.  Eccles.,  cap.  xlii. 


TTISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  Er.CLÉSIASTTOUES. 


soleil  '  pour  leur  clarlô,  et  à  l'or  le  plus  pur 
pour  leur  mérite  ;  mais  rien  ne  lit  mieux  voir 
î'cPlime  que  l'on  en  concevait,  que  les  traduc- 
tions qui  en  parurent  de  son  vivant  mrMne 
dans  les  provinces  étrangères,  et  les  divers 
recueils  que  l'on  fît  de  ses  pensées  et  de  ses 
sentences.  Il  est  peu  de  vérités  qu'il  n'ait  ou 
écluircies,  ou  défendues  contre  les  ennemis 
de  la  foi  catholique.  On  trouvera  dans  ses 
écrits  de  quoi  combattre  les  manichéens,  les 
ariens,   les  nestoriens,  les  eutychiens,  les 


une  r('putation  d'éloquence,  comme  Sulpicc 
Sévère,  (jue  l'on  appelle  li-  Salluste  chrétien; 
saint  Hilaire,  dont  saint  Jérôme  compare  l'é- 
loquence à  la  rapidité  du  Rhône  ;  saint  Au- 
gustin et  plusieurs  autres,  qui,  dans  leurs 
commentaires  sur  l'Kcritiire,  ne  se  sont  ap- 
pliqués qu'A  en  éclaircir  les  endroits  difti- 
ciles,  sans  vouloir  en  aucune  façon  s'assujet- 
tir aux  rèfïles  de  la  f,'ra'nmaire.  On  voit  par 
une  des  lettres  de  saint  Grégoire,  qu'il  mé- 
prisait l'art  de  parler,  et  qu'il  croyait  cet  as- 


pélatriens,  et  plusieurs  autres  héréli(iues  ;  de  sujetlissement  indigne  '  de  la  parole  de  Dieu. 
quoi  soutenir  l'autorité  suprême  de  l'Église  11  est  encore  bon  d'observer  ici  que,  les  lan- 
daus les  conciles,  et  établir  les  maximes  les      gués  dépendant  de  l'usage,  certaines  espres- 


plus  pures, les  plus  solides  de  la  morale  évan 
géiique.Sescommciltaires  sur  l'Écriture  font 
voir  combien  il  était  habile  à  en  développer 
les  divers  sens.  S'il  s'est  moins  arrêté  au  sens 
littéral,  c'est  que  d'autres  avant  lui  l'avaient 


sions  qui  nous  paraissent  impropres  dans  les 
écrits  de  saint  Grégoire,  pouvaient  passer 
pour  bonnes  dans  son  si ''de,  quoiqu'elles  ne 
fussent  pas  conformes  aux  règles  de  la  pure 
latinité.  Térence  disait  ijjsus  pour  ipse,  scibo 


expliqué,  entre  autres  saint  Jérôme,  qu'il  pour smm, /Âœ  pour /«c,f^/"we<i  au  génitif, 
cite  quelquefois.  Une  laissait  pas  de  recourir  pour  fnicli'is.  Nous  condamnerions  aujour- 
aux  anciennes  versions  de  l'Écriture,  lorsi[ue 


le  texte  lui  paraissait  embarrassé.  Ses  lettres 
sont  écrites  avec  beaucoup  de  force  et  d'éner- 
gie, surtout  celles  où  il  s'agit  de  faire  rentrer 
dans  le  devoir  ceux  qui  s'en  étaient  écartés. 
Princes  ou  sujets,  évèques  ou  clercs  de  moin- 
dre rang,  il  parle  à  tous  avec  liberté,  mais 
loujours  avec  politesse,  n'usant  de  termes 
durs  qu'enveis  les  incorrigibles.  Quoique  son 
style  ne  soit  ni  bien  élevé,  ni  beaucoup  tra- 
vaillé, ses  pensées  et  ses  sentiments  n'en  sont 


d'hui  ces  expressions,  comme  contraires  aux 
bonnes  règles;  mais  elles  étaient  d'usage  dans 
le  siècle  de  ce  poète,  qui  a  été  admiré  même 
dans  le  siècle  d'Auguste. 

2.  Nous  ne  connaissons  point  de  plus  an- 
cienne édition  des  œuvres  de  saint  Grégoire, 
que  celle  de  Paris,  en  1518,  par  Berthold 
Rembolt.  Elle  comprend  les  Morales  sur  Job, 
le  Pastoral,  les  Dialogues,  les  Commentaires 
sur  le  Cantique  et  les  sept  l'saumes  de  la  pé- 
nitence ;  les  Homélies  sur  Ézéchiel  et  sur  les 


Editt  iO!rt' 

ntr*'e*  ots 
Œiivr,>  àr  s. 
<..ri-^oire. 


pas  moins  nobles,  ni  ses  discours  moins  sui-  Évangiles,  avec  les  lettres  de  ce  Pape.  On 
vis.  Il  se  soutient  partout,  et  parle  toujours 
d'une  manière  digne  de  sa  naissance  et  de  la 
place  qu'il  occupait.  Il  est  extrêmement  dif- 
fus dans  ses  Morales  ;  la  plupart  de  ses  allé- 
gories paraissent  aussi  trop  rccliercliéos, 
mais  c'était  son  goût,  et  elles  plaisaient  alors. 
Il  était  persuadé  que  l'Écriture  sainte  est  un 
trésor  inépuisable  où  l'on  peut  s'enrichir  en 
une  infinité  lie  manières,  ([uand  on  veut  pren- 
dre la  peine  de  développer  les  mystères  ca- 
chés sous  l'écorce  de  la  lettre.  Il  s'appliquait 
moins  à  polir  son  discours  et  à  choisir  ses 
termes  ;  souvent  uiêuie  il  en  empluie  qui  ne 
sont  point  coruius  dans  la  bonne  latinité  ; 
quelquefois  il  pèche  contre  les  règles  de  la 
grammaire.  Si  c'est  un  défaut,  il  lui  est  com- 
mun avec  beaucoup  d'autres  écrivains,  qui 
n'ont  pas  laissé  de  se  faire,  dans  leur  temps, 

•  Gregorius  mitlUt  prce  sole  pru'Clarn  ac  prœ 
obriso  auro  prctinsn  scripsil.  IImiimp.  Aiignstod., 
lib.  De  Scripl.  eccles.,  cop.  xxxti. 

'  A'on   barharismi  roiifusioncm  devilo  .    sUus 


réim[U'ima  tons  ces  ouvrages  à  Rouen,  en 
1.521,  chez  François  Régnant,  et  en  1523  ti 
Paris,  chez  Claude  Chevalon.  L'édition  de 
1542  fut  faite  eu  la  même  ville,  par  Charles 
Giiilhiit.  Il  y  en  avait  eu  deux  à  Lyon  quel- 
que temps  auparavant,  l'une,  en  153!t,  l'au- 
tre, en  15 40,  plus  amples  que  les  précéden- 
tes, parce  qu'on  yav.iit  ajouté  lesCommen- 
taii-es  sur  le  premier  livre  des  Rois.  Il  s'en 
fil  depuis  un  sjrand  nombre  d'autres  i\  Paris, 
à  Anvers,  ;\  Venise,  à  Rome,  à  Baie,  ii  Douai, 
dont  les  plus  remarquables  sont  celles  do 
Bàle,  en  lo.'il  et  l.'jGi,  chez  Frohen,  par  les 
soins  de  lioccius;  de  Paris,  en  iri71,  revue  et 
corrigée  par  Jean  Gilot;  d'Anvers,  en  1572, 
chez  Plantin;  de  Venise,  en  1583  ;  de  Rome, 
en  1.-181I,  in-fol.  Cette  édition,  qui  se  tit  par 
ordre  du  pape  Sixte  V,  fut  regardée  comme 

mo<u.s(/Me  et  prœposilionnm  casiis  servare  con- 
lenino;  quia  iiidignum  veltementer  existimo  ne 
verha  crrir.ilis  oraculi  rcsiringam  sub  reguli-i 
Donali.  (ivep..  npist,  ad  Leandrum. 


[VTi*  SIÈCLE.]      CHAPITRE  XUX.  —  SAINT  GRftnOIRE  LE  GRAND,  PAPE. 


58S 


plus  piiifailp  qiio  lonlps  los  pr(''C(hlenk's, 
(]ii(ii(liii'  l'iiiitivc  on  iiliisioiii's  eiulroils,  parce 
qu'on  n'avait  pas  eu  soin  de  corriger  le  texte 
sur  un  assez  grand  nombre  de  manuserils. 
Elle  esl  (lisliiluu'e  an  six  tomes  (|ui  ne  font 
(piequalro  vohunrs.  Ou  (;n  fit  une  autre  iu-8°, 
en  la  même  ville,  en  ltil3.  Celles  de  Paris,  en 
l(tll5  et  1G40,  ne  sont  que  des  rc'impressions 
de  rt'dilion  de  Home  en  158!),  ou  1593;  car 
elle  ne  l'ut  aclii'vée  qu'en  cette  annt^e-hï.  En 
1675,  Pierre  Goussainville  en  doinia  une 
nouvelle,  apn^s  avoir  revu  le  texte  de  saint 
Grégoire  sur  beaucoup  de  manuscrits.  Il  fut 
aidi"  dans  son  travail  ]iar  M.  Julien.  Cette 
édition,  qui  est  en  trois  tomes  in-l'ol.,  est  re- 
commandable  par  les  savantes  préfaces  que 
les  éditeurs  ont  mises  à  la  tète  de  chaque 
ouvrage,  et  par  les  notes  sur  les  endroits  dif- 
ficiles. Elle  est  dédiée  ;\  Louis  de  Bassom- 
pierre,  alors  évéque  de  Saintes.  Quelques 
soins  que  Goussainville  se  soit  donni's  pour 
la  rendre  plus  correcte,  il  lui  est  échappe 
plusieurs  fautes  considérables,  que  l'on  a  re- 
levées dans  la  dernière  édition  qui  s'est  faite 
à  Paris  en  1703,  eu  quatre  volumes  in-fol. 
Elle  est  des  Bénédictins  de  la  congrégation 
do  Saiiit-Maur,  et  di'diée  au  pape  Clément  XI  ; 
mais  on  sait  qu'on  la  doit  principalement  à 
(.lom  Denis  de  Sainte-Marthe,  qui,  dès  l'an 
1697,  avait  publié  la  Vie  de  saint  Grégoire 
en  notre  langue,  imprimée  à  Rouen  in-4°, 
chez  la  veuve  de  Louis  Behours.  Cette  édi- 
tion est  ornée  de  plusieurs  savantes  préfa- 
ces, et  d'un  grand  nombre  de  notes  très-re- 
cherchées, où  l'éditeur  ne  néglige  point  cel- 
les de  Goussainville  ;  souvent  même  il  les 
rapporte  tout  entières,  et  y  ajoute  de  nou- 
velles remarques,  tantôt  pourconfirmer,  tan- 
tôt pour  détruire  son  sentiment  sur  certains 
endroits  du  texte  qui  soutirent  ditBculté.  La 
préface  du  premier  tome  est  générale,  et  re- 
garde toutes  les  oeuvres  de  saint  Grégoire, 
les  éditions  qu'on  en  a  faites,  les  fautes  qui 
se  sont  glissées  dans  celle  de  Goussainville, 
la  doctrine  de  ce  Pape  sur  quantité  de  points 
importants  de  la  religion,  et  son  style.  Les 
autres  préfaces  sont  paiticulières  à  chaque 
traité.  Celle  qui  est  à  la  tête  des  Lettres, 
dans  le  second  tome,  est  fort  longue,  parce 
qu'on  y  établit  un  nouvel  ordre  de  ces  Let- 
tres, et  qu'on  y  rend  raison-  de  ce  change- 
ment. Dom  Guillaume  Bessin,  connu  par 
d'autres  ouvrages,  eut  part  à  ce  nouvel  ar- 
rangement, et  aux  notes  qui  se  lisent  au  bas 
des  pages  sur  chaque  Lettre.  Dom  Denis  de 


Sainle-Martiio  a  mis  dans  le  quatrième  tome 
deux  Vies  de  saint  Gri'^goire,  l'une  écrite  par 
Paul  Diacre,  lils  de  Varnelride,  cl  moine  du 
IMonl-Cassin  ;  l'autre  par  Jean  Diacre,  aussi 
moine  du  même  monastère.  Il  yen  a  ajouté 
une  troisième  de  sa  façon,  tirée  des  écrits 
mêmes  de  ce  Père.  Après  ces  Vies  on  voit 
les  observations  d'Ange  Rocca  sur  les  por- 
traits de  saint  Gr(''goire,  de  Gordien  son  pè- 
re, de  sa  mère  Silvie,  rapportés  par  Jean 
Diacre  ;  la  figure  de  la  mitre  et  des  souliers 
du  pape  Silvestrc,et  les  donations  faites  par 
saint  Grégoire  :  c'est  ce  qui  fait  la  première 
partie  de  ce  quatrième  tome,  où  l'on  a  mis 
aussi  ce  que  les  anciens  ont  dit  de  saint  Gré- 
goire. La  seconde  contient  les  Commentaires 
de  Patelins  et  d'Alulfe,  tirés  des  ouvrages  de 
ce  Pape.  Dom  Denis  de  Sainte-Marthe  mou- 
rut le  30  mars  de  l'an  1723,  dans  une  gran- 
de réputation  de  savoir  et  de  vertu,  après 
avoir  été  plusieurs  années  supérieur  général 
de  sa  congrégation.  [Cette  édition  a  été  réim- 
primée à  Venise,  en  i7ii,  en  quatre  volumes 
in-fol.  ;  en  la  même  ville,  en  1768-76,  seize 
tomes  in-4,  par  les  soins  de  J.-B.  GaUicioli, 
dans  un  meilleur  ordre  et  avec  des  augmen- 
tations. Les  tomes  LXXV,  LXXVI,  LXXVII, 
LXXVIII,  LXXIX  de  la  Patrologie  latine  re- 
produisent l'édition  de  Paris  de  1703,  avec 
quelques  cliangcmcnis,  des  corrections  et  des 
augmentations. l,esadditions  se  trouvent  dans 
le  tome  LXXVIII.  Elles  comprennent  l°un 
Bi'nédictionuaire  attribué  à  saint  Grégoire 
le  Grand  par  Ivollad  dans  ses  Vindibonensia 
ana/ecta  ;  2°  seize  Ordres  romains,  rassemblés 
et  annotés  par  dom  Mabillon  dans  son  Musée 
italique;  ils  sont  suivis  d'un  Appendice  qui 
contient  diverses  pièces  relatives  aux  Ordo 
romains  ou  aux  cérémonies  de  l'Église  ro- 
maine. Ces  pièces  sont  également  dans  le 
Musée  italique.  Deux  Catalogues  des  ponti- 
fes romains  se  trouvent  à  la  fin  du  volume  : 
l'un  est  d'un  manuscrit  de  Corbie  duvi°  siè- 
cle, il  a  été  donné  par  Mabillon;  l'autre  a 
été  publié  par  Schelstrate  d'après  un  ma- 
nuscrit du  Vatican  du  vi"  siècle.] 

3.  Les  Morales  de  saint  Grégoire  sur  Job  fu- 
rent imprimées  séparément  à  Rome,  en  147S, 
par  les  soins  de  Dominici,  évêque  de  Bresce, 
in-fol.,  et  à  Paris,  en  1493, in-fol.  Saint  Odon, 
abbé  de  Clugny,  trouvant  qu'elles  avaient 
trop  d'étendue,  avait  un  abrégé  de  ces  Mo- 
rales ;  Martin  Marrier  le  fit  imprimer  à  Paris, 
en  1617.  Giianernerus,  chanoine  régulier 
et  sous-prieur  de  Saint-Victor  de  Paris,  vers 


TBrliriîli 
der  Œuvr 
û.  Grvt;. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


586 

l'an  H70,  en  fit  un  Commeniaire  sur  lEcri- 
tui  e,  q^i'il  intitula  :  Explications  allégoriques 
de  la  Bible,  tirées  des  paroles  de  saint  Grégoire. 
Il  fut  mis  sous  presse  en  la  même  ville,  en 
1608,  in-8°,  par  les  soins  de  Jean  Picax-d,  cha- 
noine de  la  même  abbaye.  Nous  avons  plu- 
sieurs éditions  particulières  du  Pastoral  : 
l'une  sans  date;  la  seconde  en  1496;  une 
troisième  à  Paris,  en  1 198;  une  quatrième  à 
Rome,  en  1j06;  une  cinquième  à  Paris,  en 
1668,  in-2i.  La  version  grecque  qui  en  fut 
faite  du  vivant  même  de  saint  Grégoire, 
n'est  pas  venue  jusqu'à  nous.  Il  y  en  a  une 
française,  imprimée  à  Paris  en  1670.  La  ver- 
sion grecque  des  Dialogues,  par  le  pape  Za- 
cbarie,  s'est  conservée;  on  Ta  insérée  dans 
la  plupart  des  éditions  générales  des  œuvres 
de  saint  Grégoire,  comme  dans  celles  de  Pa- 
ris, en  1640,  1675,  17()o.  On  l'avait  déjà  don- 
née, mais  imparfaite,  dans  une  édition  par- 
ticulière, à  Rome,  en  1391,  et  dans  le  troisiè- 
me tome  des  anciennes  leçons  de  Canisius. 
Les  éditions  latines  sont  de  Rome,  en  1475; 
de  Venise,  en  1480et  1494;  de  Paris,  en  1490, 
in-4°;  de  Cologne,  en  1610.  Les  Dialogues  se 
trouvent  encore  imprimés  à  Paris,  avec  les 
Homélies  sur  Ézechiel  et  le  Pastoral,  en  1498, 
chez  Udalric  Geiing  et  Rembolt.  11  y  en  a 
plusieurs  traductions  françaises  ;  une  dont 
l'auteur  ne  s'est  fait  connaître  que  par  ces 
trois  lettresT.  D.  B.,  imprimt'cen  1601,  réim- 
primée à  Lyon,  en  1616,  par  le  père  Michel 
Coyssard,  jésuite,  et  à  Paris,  en  1624,  par 
dom  Simon  Milet,  bénédictin  de  Saint-Ger- 
main-des-Prés,  avec  des  notes.  En  1689, 
F.  Biiltcau  de  la  congrégation  de  Sainl-Maur, 
en  donna  une  nouvelle  qui  fut  imprimée  chez 
Coignard,  avec  une  longue  préface  pour  la 
défense  de  cet  ouvrage.  Il  donne,  à  la  fui  de 
sa  traduction,  une  liste  de  celles  qui  ont  été 
faites  en  aiahe,  avant  l'an  800,  par  un  reli- 
gieux nommé  Antoine,  en  saxon-anglais  dans 
le  neuvième  siècle,  en  français  dans  le  dou- 
zième: ajoutant  que  ces  Dialogues  ont  aussi 
été  traduits  en  allemand  et  en  italien.  11  re- 
marque, d'après  M.  Le  Laboureur  dansl'His- 
toirede  Charles  VI,  que  Jean  de  France,  duc 
de  Berry,  avait  acheté  ces  Dialogues  en 
français,  de  Jean  Colin,  le  neuvième  jour  de 
juillet  de  l'an  1409,  pour  le  prix  de  quinze 
écus  d'or,  prisés  soixante  sous  parisis.  M. 
l'abbé  le  Bœuf  (/Jis!ie>-t.,  tora.  II,  paît.  2, 
pag.  38)  dit  avoir  vu  dans  les  bibliothèques 
de  Paris  des  traductions  en  langue  romaine 
du  livre  de  Job,  de  ceux  des  Rois  cl  des  Dia- 


logues de  saint  Grégoire.  N'était-ce  pas  celle 
que  le  duc  de  Borry  acheta?  Les  mêmes 
Dialogues  ont  élé  traduits  en  italien,  et  nous 
en  trouvons  des  éditions  en  1475,  1488  et 
1515.  On  ne  connail  point  d'autres  éditions 
des  Lettres  de  saint  Grégoire,  que  celles  de 
tous  ses  ouvrages,  si  ce  n'est  qu'on  leur  a 
donné  place  dans  le  cinquième  tome  des 
conciles  du  père  Labbe. 

4.  Le  Sacramenlaire  parut  à  Cologne,  en 
1371,  parmi  les  livres  liturgiques  de  l'édi- 
tion de  Pamélius ,  avec  TAntiphonaire  ;  à 
Rome,  en  1397 ,  avec  les  Scholies  d'Ange 
Rocca  ;  à  Paris,  en  1642,  avec  les  Noies  de 
Dom  Hugues  Ménard.  (;ettc  dernière  édition 
renferme  le  Bénédictionnaire.  M.  Lambé- 
cius  le  fit  réimprimer  quelques  temps  après 
dans  le  second  livre  de  sa  Bibliothèque  im- 
périale ,  croyant  qu'il  n'avait  pas  encore  vu 
le  jour.  Nous  ne  connaissons  d'éditions  par- 
ticulières des  Homélies  sur  Ézechiel, que  celle 
de  Paris,  en  J302,  chez  Géring et  Rembolt,  et 
des  Homélies  sur  les  Évangiles,  que  celle  qui 
a  été  donné  en  1317  ,  chez  Jean  Petit  ;  elles 
furent  les  unes  et  les  autres  imprimt'es  en  la 
même  ville,  en  1498,  avec  les  Dialogues  et 
quelques  autres  opuscules,  chez  Rembolt.  Cet 
imprimeur  donna,  en  1512,  le  Commentaire 
sur  les  sept  Psaumes  de  la  pénitence  ;  c'est  sur 
cette  édition  qu'il  a  été  réimprimé  dans  les 
grands  recueils  des  ouvra.;es  de  saint  Gré- 
goire. On  liouve  dans  les  mêmes  recueils  le 
Commentaire  sur  le  Cantique  des  cantiques. 
11  fut  imprimé  séparément  à  Bâie,  en  1496,  et 
à  Paris,  en  1498.  Les  Morales  sur  Job  ont  paru 
en  français,  en  1606, 1667  et  1669,  in-4.  trois 
vol.  On  les  trouve  aussi  en  cinq  volumes 
in-8.  On  les  a  en  italien,  à  Rome,  1714,  in-4. 
Les  quarante  Homélies,  ou  Sermons  sur  les 
Évangiles,  traduits  en  la  même  langue  ,  à 
Paris,  1663,  in-4.  Épitres  choisies  du  même 
saint,  traduites  en  français,  à  Paris,  1676, 
in-12.  Les  Homélies  sur  Ézechiel  ont  été  tra- 
duites par  M.  l'abbé  Le  Clerc,  à  Paiis,  1747, 
in-12  ;  il  n'y  a  que  les  douze  premières  ho- 
mélies. 

[Les  deux  livres  des  Homélies  sur  l'Évan- 
gile ont  paru  à  luu'olsladt,  1822,  in-8;  un 
choix  eu  a  paru  à  Paris  chez  Jérôme,  1858. 
Le  Pastoral  a  paru  avec  traduction  italienne  k 
Vérone,  en  1739;  à  Vienne,  en  1786;  à  Ingol- 
sla(ll,on  1822;  à  Namur,  en  IS25  ;  a  Paris,  en 
1826,  chez  .Méquignon;  à  Munster,  en  1846. 

Le  Pastoral  a  été  aussi  traduit  sous  ce  titre  : 
Pastoral  (le)  de  saint  Grégoire  le  Grand ,  du 


CHAPITRE  L.  —  SAINTS  GRl^r.OIRE  ET  EULOGE.  587 

Autre  Iriuliiclinii  sons  ce  litre  :  le  l'mtonJ 
ou  Devoir  ilrs  jmslciirs ,  tiadiiil  pur  l'iiljljé 
Prompsiiult ,  2°  ddition  ,  Paris  ,  Jeantbon  , 
1837,  iu-I8.  Une  traduction  du  Pastoral  avait 
ëté  doiiiite  en  1747,  in-12,  à  Paris,  par  J. 
Leden.] 


[vu*  SIÈCLE.] 

soin  et  du  devoir  des  pasleuis,  traduction 
nouvelle,  par  P.  Antoine  de  Marsill y  ,  pseu- 
douyuie  ,  selon  Uarbier ,  de  l'abbé  Prévost , 
chanoine  de  Melun,  en  16!1a,  1"  édition,  ;\  Pa- 
ris, ItJ'Jl,  in-12;  nouvelle  édition,  Paris,  Sa- 
voie, 173i),  in-12,  ou  Paris,  Dcnn,  1823,  in-18. 


s.  Grfpolro 

d'Agrn;i'ulp. 
Sa     vii>     M?r3 
Tan  5i9.   IV 
trol.  pr.   li.m. 
XCVMI,   col. 

625  et  fetj. 


CHAPITRE  L. 

Saint  Grégoire  évêque  d'Agrigcnte  [vers  l'an  598]  ;  saint  Euloge 
patriarche  d'Alexandrie  [608]. 

[Écrivnius  grecs.] 


1.  [Saint  Grégoire  d'Agrigente  'était  né 
pri'-sde  cette  ville,  l'an  339.  Son  père  s'appe- 
lait Gliariton,  et  sa  mère  Tliéodote.  Ils  étaient 
Irès-riclies,  mais  non  moins  charitables.  A 
luge  de  huit  ans  ,  son  père  le  conduisit  à  la 
ville,  et  l'oOïit  au  sainJ  évêque  Potamion, 
comme  ;\  son  père  spiiituel.  L'évêque  ,  en 
présence  de  ses  parents  même  ,  le  mit  sous 
la  direction  d'un  pieux  et  savant  prêtre  , 
nommé  Uamien ,  pour  l'instruire  dans  les 
saintes  lettres.  Le  jeune  Grégoire  y  fit  tant 
de  progrès,  qu'il  surpassait  tous  ses  condis- 
ciples et  semblait  même  égaler  son  maître. 
A  l'âge  de  douze  ans,  sur  la  demande  de 
son  père  et  de  sa  mère  ,  l'évêque  Potamion 
lui  conféra  la  tonsure  cléricale,  et  le  remit  à 
l'archidiacre  Doiiat ,  préfet  de  la  bibliothè- 
que, afin  de  le  perfectionner  dans  la  littéra- 
ture ecclésiastique  et  sacrée. 

Grégoire  demandait  continuellement  à 
Dieu  la  grâce  de  connaître  et  de  faire  son  bon 
plaisir,  et  de  méiiter  son  royaume.  Ayant 
lu  la  vie  de  saint  Basile  ,  il  conçut  un  grand 
désir  de  mener  une  vie  semblable  et  de  visiter 
les  Saints-Lieux  de  Jérusalem.  A  l'âge  de  18 
;ms,  il  lui  fut  révélé  que  Dieu  avait  exaucé  sa 
prière.  Aussitôt,  il  s'embarqua  secrètement. 
Le  maître  du  navire  qui  allait  à  Carthage  le 
reçut  très-volontiers  ,  espérant  le  vendre 
comme  esclave.  Mais  lorsque ,  pendant  la  • 
traversée ,  il  le  vit  si  appliqué  à  la  prière  et 
à  la  lecture  ,  il  changea  de  sentiment ,  et  le 
fit  connaître  à  l'évêque  de  Carthage ,  qui, 
ayant  appris  de  lui-même  son  dessein  d'al- 
ler à  Jérusalem  ,  l'y  encouragea  avec  beau- 
coup de  bienveillance. 


'  Celte  notice  est  tirée  prcsiiue  en  entier  do 
Rorbacher,  Hisit.  uiiicerscUe  de  l'Église,  lom.  IX, 
pag.  406  et  suiv. 


Il  y  alla  efl'ectivcment  avec  trois  religieux 
d'un  uîonastère  de  Rome  ,  visita  les  monas- 
tères de  la  Palestine,  et  embrassa  la  vie  re- 
ligieuse près  de  la  Ville  sainte.  Tout  le  mon- 
de était  merveilleusement  édifié  de  sa  piété 
tendre,  de  sa  science  et  de  son  humilité.  Les 
trois  religieux,  retournant  de  Jérusalem  à 
Rome,  passèrent  fortuitement  par  Agrigente, 
et  allèrent  saluer  le  saint  évêque  Potamion, 
qui  les  reçut  avec  beaucoup  de  charité.  Pen- 
dant qu'ils  étaient  là,  ils  entendirent  un  hom- 
me et  une  femme  en  sanglots,  parler  à  de 
jeunes  ecclésiastiques  de  ces  pleurs.  Com- 
me ils  en  demanderait  la  cause,  l'évêque 
leur  dit  que  c'étaient  le  père  et  la  mère  d'un 
pieux  jeune  homme  qui  avait  disparu  depuis 
deux  ans,  et  dont  ils  pleuraient  la  mort.  Les 
religieux,  ayant  demandé  à  les  voir ,  recon- 
nurent sans  peine  à  leurs  traits  les  parents 
de  leur  pieux  compagnon  qu'ils  avaient  lais- 
sé à  Jérusalem.  Ils  leur  annoncèrent  donc 
que  leur  fils  vivait  encore  ,  qu'il  était  dans 
la  Cité  sainte,  et  priait  sans  cesse  pour  eux. 
Leur  joie  fut  extrême,  aussi  bien  que  la  joie 
de  toute  la  ville. 

La  même  année  579,  il  fut  ordonné  dia- 
cre par  l'archevêque  de  Jérusalem  ,  qui  l'a- 
vait pris  en  all'ection  ,  et  dont  il  s'étudiait  à 
retracer  toutes  les  vertus.  Il  passa  ensuite 
quatre  ans  dans  un  désert  avec  un  saint 
moine,  qui  lui  apprit  la  grammaire  ,  la  rhé- 
torique, la  pliilosopbie  et  l'astronomie.  Il  sé- 
journa une  année  dans  Antiocbe,  deux  à  Con- 
stantiuople,  où  le  patriarche  et  l'empereur 
le  firent  paraître  et  parler  dans  un  concile. 

Venu  à  Rome  en  390,  il  y  demeura  un  an 
inconnu ,  dans  le  monastère  grec  de  Saint- 
Sabas.  Les  nonces  du  pape  saint  Grégoire- 
le-Grand,  qui  avaient  assisté  ;ï  ce  concile, 
étant  revenus  t'i  leur  tour,  lui  parlèrent  du 


388 


ÏTISTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


diacre  Grégoire  qu'ils  y  avaient  entendu  avec 
admiration. 

Cependant  l'évêché  d'Agrigente  vint  :\'  va- 
quer. Il  y  eut  une  double  élection.  Les  deux 
compétiteurs  vinrent  à  Rome  devant  le  Pa- 
pe, avec  une  députation  de  leurs  partis  res- 
pectifs. Cliaiiton,  père  de  Grégoire,  était  du 
nombre.  Le  l'ape ,  n'ayant  pu  les  mettre 
d'accord,  demanda  à  Chariton  et  aux  autres 
députés  ce  qu'en  conscience  ils  pensaient 
de  cette  alTaire.  Us  se  prosternèrent  à  ses 
pieds,  et  dirent  :  «  Très-saint  Père,  nous  pen- 
sons que  nul  ne  doit  s'attribuer  cet  honneur, 
s'il  n'est  appelé  de  Dieu.  Celui  donc  que  de  sa 
part  vous  nous  donnerez  pour  évêque,  nous 
le  recevrons  avec  reconnaissance.  »  Le  Pape 
étant  fortement  occupé  de  cette  allaire,  il 
lui  fut  révélé  en  songe,  que  dans  le  monas- 
tère de  Saint-Sabas ,  il  y  avait  un  certain 
Grégoire  qui  était  l'homme  choisi  de  Dieu 
pour  cette  place ,  quoiqu'il  se  fût  sauvé  de 
ce  monastère  dans  un  autre.  Le  Pape  ayant 
raconté  cette  vision  aux  principaux  de  son 
clergé  ,  on  fit  venir  le  diacre  Grégoire.  Les 
nonces  ,  qui  l'avaient  vu  à  Constantinoplc  , 
le  reconnurent  ;  l'abbé  Marc,  un  de  ces  trois 
religieux  qui  l'avaient  conduit  à  Jérusalem , 
raconta  toute  son  Ijistoire.  Le  Pape  le  dé- 
clara donc  évoque  d'Agrigcnle  ,  et  le  sacra 
lui-même  dans  l'église  de  Saint-Pierre  en 
présence  de  son  père  Chariton,  qui  ne  le 
reconnut  qu'après.  C'était  en  590,  treize  ans 
depuis  qu'il  avait  disparu.  Le  nouvel  évêque 
fut  reçu  dans  .\grigente  avec  la  joie  la  plus 
vive.  Il  guérit  un  sourd -muet  en  entrant 
dans  son  église  ,  et  fît  d'autres  miracles.  Il 
servait  lui-même  les  pauvres  et  les  malades. 
Sa  pieuse  mère  suivait  son  exemple.  Son 
père  s'appliquait  nuit  et  jour  au  jeune,  à 
la  prière,  et  à  la  méditation  des  saintes  Écri- 
tures, que  son  fils  lui  expliquait  verset  par 
verset. 

Cependant,  un  des  compétiteurs  déchus  , 
jaloux  des  .succès  du  nouvel  évoque  ,  trama 
contre  lui  un  complot  dans  lequel  il  fil  en- 
trer quelques  clercs  et  même  le  gouverneur 
du  pays.  Saint  Grégoire  d'Agrigente  fut  ac- 
cusé d'un  commerce  criminel  avec  une  per- 
sonne de  mauvaise  vie,  que  les  conspirateurs 
avaient  introduite  clandestinement  dans  sa 
maison.   Il  fut  mis  en  prison,   et,    sur   son 


appel,  conduit  à  Rome  pour  être  jugé  par  le 
Pape.  Comme  ses  accusateurs  tardaient  à  se 
présenter ,  le  pape  saint  Grégoire  écrivit  h 
fraintiMaximiende  Syracusedele?  faire  venir. 
Enfin,  en  51)4,  son  innocence  fut  reconnue, 
SCS  accusateurs  furent  condaipnés ,  et  lui- 
même  fut  comblé  de  faveurs  par  le  Pape.  Il 
fit  alors  un  voya;,'e  i\  Constantinople,  l'em- 
pereur et  le  patriarche,  qui  le  connaissaient 
et  l'affectionnaient ,  le  comblèrent  d'hon- 
neurs. 11  revint  par  Rome  à  Agrigente,  où  il 
transforma  un  vieux  temple  d'idoles  en  une 
église  sous  l'invocation  de  saint  Pierre  et  de 
saint  Paul.  L'an  598j  le  Pape  lui  envoya  le 
défenseur  Pantin ,  pour  lui  parler  de  plu- 
sieurs juifs  d'Agrigente  qui  voulaient  deve- 
nir chrétiens. 

2.  Ces  délails,et  beaucoup  d'autres  que  nous 
passons,  se  trouvent  dans  la  Vie  du  saint  évê- 
que, et  les  commentaires  sur  cette  Vie  puhliés 
par  Étienne-.^ntoiiie  Morcelli, Venise,  1791,1 
vol.  in-fol.'  La  Vie  est  écrite  en  grec  et  tradui- 
te en  latin.  Elle  a  pour  auteur  Léonce,  prêtre, 
moine  et  abbé  du  monastère  de  la  ville  de 
Rome.Onne  sait  presque  rien  de  cet  historien. 
Il  nous  apprend  qu'il  était  né  peu  après  la 
mort  du  saint  dont  il  écrit  la  vie.  Son  his- 
toire avait  été  publiée  en  1657,  à  peu  près  en 
entier,  mais  en  latin  seulement,  dans  les  Vies 
des  Saints  de  Sicile  par  le  père  Pierre  de  Sa- 
lerne,  de  la  société  de  Jésus.  Morcelli  a  fait 
paraître  le  texte  grec  avec  une  version  de 
sa  façon.  Il  établit  l'autorité  de  cette  his- 
toire contre  l'assertion  trop  précipitée  de  Pa- 
pebrock.  Il  montre  que  des  copistes  igno- 
rants auront  mis  des  noms  de  personnages 
d'une  autre  époque,  ce  qui  dérange  la  chro- 
nologie. 

3.  Saint  Grégoire  laissa  plusieurs  écrits. 
Un  seul  a  vu  le  jour  :  c'est  un  commentaire 
grec  en  dix  livres 'sur  l'KcclésiasIe.  Morcel, 
qui  Ta  publié  avec  la  vie  écrite  par  Léonce  , 
le  juge  tout  à  fait  savant  et  bien  composé. 
Le  style  de  l'auteur  lui  parait  approcher  du 
style  asiasti(pie  ,  mais  néanmoins  être  de  la 
bonne  école,  sans  rudesse  et  sans  confusion. 
Si  saint  Grégoire  joint  de  temps  en  temps  des 
mots  qui  ont  la  même  signification,  c'est  pour 
donner  t\  son  discouis  plus  de  jtlénilude  et 
plusdc  force. S'il  emploie  des  périodes  im  peu 
longues,  c'est  toujours  de  manière  à  mettre 


La  Vie  de 
fsiDI  Gréfîoi. 
IT.  par  Lùn- 


MorrMIl, 
iUd.,col.S3ô. 


Comtneotai. 
re  de  îaint 
Gr^ïroire  Mir 
rKccIca.arte. 

Iblil. 


'  Sancli  Gregorii  II  ponUficis  Agrigenlinorum, 
Yenftiis,  1791,  infol. 
*  iWoT»  la  laugue  grecque  était  la  langue  usuelle 


en  Sicile,  et  sainl  Grégoire  avait  apjiris  di'  Ijoiuie 
heure  celle  laugue.  {L'i'dileur.) 


[vu*  SIÈCLE.] 

en  l'vidcnce  le  sens  qu'il  en  a  en.  Les  grara- 
maiiii'iis  li'ouvenl  des  riclicsses  ilans  Icsmots 
qu'il  invpiite  soiivcnl  avec  une  grande  har- 
diesse. Mais  ce  qui  doit  nous  frapper  suilout, 
c'est  que  sa  doctrine  est  toujours  ortliodoxe, 
c'est  que  son  ouvraire,  plein  des  parfums  de  la 
piéld,  excite  ;\  la  vertu,  dcHourne  du  vice  et 
de  l'erreur,  et  défendle  do:;me  chrétien  et  la 
profession  de  la  foi  catholique.  Ses  explica- 
tions sur  l'Ecclésiaste,  un  des  livres  les  plus 
dilliciles  de  ri'^critnre,  en  rendent  l'inlelli- 
geuce  beaucoup  plus  facile.  11  en  explique  la 
lettre,  et  se  sert  très-rarement  d'allégories  et 
de  Iropes.  Il  va  chercher  ses  exemples  dans 
les  autres  livres  de  l'Kcriture  qu'il  paraît  con- 
naître à  fond,  et  dans  les  écrits  des  Pères  dont 
il  cite  plutôt  la  substance  et  le  sens  que  les 
paroles ,  rejetant  ce  qui  ne  lui  paraît  pas 
raisonnable  et  en  démontrant  avec  habileté 
la  fausseté. 
Choses  re-       4.  On  Dcut  remarquer  dans  ce  Commcn- 

r-mirquo:  les  .        ,       ,  .  ,        .  -  *         < 

rnntennes  taire  la  Goctrme  catholique  sur  la  ariace  '  sur 
ii.tnieire.  \q  librc  ct  arbitre  ',  sur  le  péché  originel'. 
Il  ne  place  pourtant  point  parmi  les  damnés 
les  enfants  morts  sans  avoir  reçu  le  bap- 
tême '.  Il  enseigne  que  les  bonnes  œuvi-es  des 
vivants  sont  utiles  aux  morts"  ;  11  reconnaît 
comme  bonnes  les  actions  morales  de  tous 
les  hommes  *.  Il  parle  en  termes  fort  clairs 
de  la  résurrection  des  morts  ',  fait  souvent 
mention  de  la  confession  ' ,  et  rapporte  la 
formule  de  la  consécration  telle  qu'on  la  li- 
sait dans  les  liturgies  grecques'.  Il  dit  croire 
authentique  l'histoire  de  Daniel  et  de  Susan- 
ne  '",  combat  et  réfute  les  hérésies  d'Eu- 
nomius  et  d'Aétius  ",  fait  le  plus  pompeux 
éloge  du  célibat  '%  rapporte  l'usage  qu'a- 
vaient les  chrétiens  de  réciter  des  prières 
avant  leurs  actions '';  il  pense  que  Job  vivait 
bien  avant  Salomon";  que  Salomon  fit  péni- 
tence avant  d'écrire  l'Ecclésiaste 'Ml  rappelle 
souvent  le  nom  de  Jacques  ,  frère  de  Xotie- 
Seigneur,  et  n'en  fait  pas  un  des  douze  apô- 
tres '^.  Il  arrive  ensuite  à  des  sujets  profanes, 
que  je  laisse  de  côté,  comme  étant  de  fort 
peu  d'importance.  On  y  trouvera  encore 
beaucoup  d'autres  choses  qui  peuvent  servir 
à  éclaircir  la  doctrine  catholique. 

L'auteur  s'est  servi  d'un  exemplaire  des 
Septante,  différent  en  plusieurs  endroits  des 
exemplaires  imprimés. 


ClI.\PIïRK  L.  —  S.ilNTS  GRi:GOmE  ET  EULOGE. 


j89 


s.  Kulo^^e, 
l'alriarebe 
tl'AlexaDdrie 
en  riSI,  mort 
CD  11)8. 


ti.  [Le  Commeutaire  de  saint  Gréecire  est  cnoienn  dg 
repioilnil,  avec  la  vie  écrite  par  Léonce,  au  i.ii«'pir»ioc. 
tome  .'S^t^lII  de  la  J'olrulnyie  grvcf/ue ,  col. 
5^3-1^28.  On  y  trouve  d'abord  la  préface  oii 
Morcel  expose  le  projet  et  l'ordre  de  l'i-di- 
tion  qu'il  publie  ;  2°  des  recherches  sur 
Léonce,  auteur  de  la  vie  du  saint  évèque 
d'Agrigciite  ;  3°  la  Vie  avec  des  notes; 
4°  une  analyse  de  cette  Vie  ;  5°  le  culte  ren- 
du à  saint  Grégoire  ;  G°  les  témoignages 
des  anciens  écrivains  sur  ce  saint  évCqiic; 
7°  ses  écrits.  Le  commentaire  vient  en- 
suite ;  des  notes  nombreuses  et  savantes, 
dues  A  l'éditeur,  sont  au  bas  des  pages. 
Un  appendice  repioduit  la  dissertation  que 
Jean  Lancéa  avait  publiée  à  Palerme,  en 
1760,  sur  l'époque  où  a  vécu  saint  Gré- 
goire.] 

6.  On  a  pu  remarquer  dans  les  Lettres  de 
saint  Grégoire  le  Grand,  l'estime  qu'il  faisait 
de  la  personne  et  des  écrits  de  saint  Euloge, 
patriarche  d'Alexandj-ie  ;  il  fut  un  de  ceux  à 
qui  ce  saint  pape  fit  part  de  la  nouvelle  qu'il 
avait  reçue  de  la  conversion  des  Anglais. 
11  aurait  souhaité  ,  pour  le  contenter ,  pou- 
voir lui  envoyer  les  Actes  de  tous  les  mar- 
tyrs recueillis  par  Eusèbe  de  Césarée  ;  mais 
il  l'assura  qu'on  ne  les  avait  pas  à  Rome,  et 
qu'on  n'y  connaissait  des  Actes  des  mai  lyrs 
recueillis  par  Eusèbe,  que  ce  qu'on  en  lisait 
dans  son  Histoire  ecclésiastique.  Saint  Eu- 
loge  avait  d'abord  été  prêtre  de  l'église  d'Au- 
tioche.  En  381,  il  fut  élu  patriarche  d'A- 
lexandrie ,  dont  il  occupa  le  siège  pendant 
vingt-sept  ans  ,  c'est-à-dire  jusqu'en  608.  Sa 
mémoire  est  honorée  dans  l'Eglise  le  13 
septembre. 

7.  Il  avait  composé  plusieurs  écrits  contre 
les  diverses  sectes  d'hérétiques  qui  infec- 
taient l'Église  d'Alexandrie.  Le  plus  consi- 
dérable était  contre  les  novatiens;  il  l'avait 
divisé  en  six  livres.  Dans  les  quatre  pre- 
miers, il  combattait  leur  hérésie  en  général, 
montrant  que  les  passages  de  l'Écriture  dont 
Novat  abusait,  devaient  être  pris  dans  un  sens 
tout  contraire.  Il  disait  de  cet  hérésiarque, 
qu'étant  archidiacre  de  Rome  sous  le  ponti- 
ficat du  pape  Corneille,  il  aurait  dû,  suivant 
l'usage  de  ce  temps-là,  lui  succéder  ;  mais 
que  saint  Corneille,  ayant  remarqué  en  lui 
trop  d'ambition,  lui  avait  ôté  la  dignité  d'ar- 


Tlinnpl.an 
Clirftitil. 
;•.  ICi. 


Ses  écri(9 
contre  les  No» 
Ti.tiens. 

Pholio<, 
c.  d.  182,  lap. 
<ii,  ei  cod. 
SOS,  ing.  m. 


'  Patrol.  gr.,  tom.  XCXVIII,  col.  190.  —  «  1011. 
—  »  923.  —  *■  971.  —  5  827.  —  «  7ti2-763.  —  ''  1162, 
1163,  1173  et  suiv. 


»  Col.  9S7-990.  —  s  838.  —  '»  922.  —  "  1107, 
—  »*  903.  —  13  1091.  _  u  923-959.  —  '^  807.  — 
«  887. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


590 

cliidiacre  en  le  faisant  prêtre  .  pour  lui  ôtcr 
l'espérance  de  monter  sur  l;i  chaire  de  saint 
Pierre  ;  qiie  Novat  chercha  à  s'en  venger  en 
se  séparant  de  l'Église,  et  qu'il  prit  pour 
prétexte  de  sa  séparation,  que  Corneille  ad- 
mettait à  la  communion  des  saints  mystères 
ceux  qui  étaient  tomhés  dans  des  crimes, 
après  les  avoir  toutefois  punis  par  une  pé- 
nitence proportiouni'c  à  la  grandeur  de  leurs 
fautes.  Saint  Kuloge  ajoutait  que  Novat,  de- 
puis son  schisme  ,  avait  reproché  à  saint 
Corneille  de  recevoir  les  pécheurs  à  la  com- 
munion, et  s'était  fait  chef  de  parti,  donnant 
à  ses  sectateurs  le   nom  de  cathares  ,  ou 
purs;  et  à  "ses  adversaires,  c'est-à-dire  à 
fous  les  fidèles  de  l'Église  catholique  ,  celui 
de  cornéliens.   Dans  le  cinquième  livre ,  il 
prouvait  que  l'on  dcvail  avoir  de  la  vé-néra- 
lion  pour  les  reliques  des  martyrs,  attaquant 
dans  ce  livre ,  non-seulement  les  novatiens 
d'Alexandrie  ,  mais  en  général  tous  ceux  de 
cette  secte ,  partout  où  ils  fussent.  Le  sixiè- 
me était  une  réfutation  dun  écrit  plein  de 
fables,  intitulé  :   Combat  de  l'évèque  iXovat. 
Cet  écrit  était  méprisable,  tant  pour  le  style, 
que  pour  les  choses  ([u'il  renfermait.  Les 
novatiens  y  disaient  que,  sous  l'empire  de 
Dèce,  l'officier  Pérennius  avait  contraint  par 
la  violence  des  tourments  plusieurs  chrétiens 
à  adorer  des  idoles;  que  Macédonius  ,  alors 
évêque  de  Rome  ,  avait  sacrifié  ,  suivi  des 
neuf  prêtres  de  son  église  ,  excepté  Novat , 
l'un  des  neuf,  qui  avait  seul  résisté  à  la  vio- 
lence des  tourments.  Les  actes  du  combat  de 
l'évèque  Novat,  car  ils  le  disaient  évêque  de 
Rome ,  rapportaient  les  demandes  imperti- 
nentes que  Pérennius  lui  avait  faites  ,  et  les 
réponses  aussi  impertinentes  de  Novat,  nom- 
mant plusieurs  évoques  qui  s'étaient  joints 
à  lui,  et  s'étaient  séparés  de  ceux  qui  étaient 
tombés  dans  l'idolûtrie.  Ces  évêques  étaient 
Alexandre  d'Aquilée  et  Agamemnon  de  Ti- 
bre. Ils  ajoiilaieiil  que  les  évêques  d'.Mexan- 
drie  lui   avaient  donné  le  pontificat.  Saint 
Eulogc   réfutait  toules  ces  fables  dans  ce 
sixième  livre,  mettant,   dans  la   réfutation 
qu'il  en  faisait,  plusieurs  explicaiÎDns  très- 
utiles  des  passages  de  l'Hcriturc  dont  il  se 
servait  pour  faire  voir  la  fausseté  de  la  doc- 
trine de  cette  secte  ;  en  sorte  que  la  lecture 
de  son  ouvrage  contre  les  novatiens  pouvait 
être  profitable   même  aux  plus  habiles  in- 
terprètes  des   Livies  saints.  11   était   d'ail- 
leurs écrit  d'un  style  agréable  et  persuasif. 
Nous  n'avons  de  cet  ouvrage  que  ce  que 


Photius    en   a  mis  dans  sa  Bibliothèque. 
8.  C'est  de  lui  aussi  que  nous  apprenons 
que  saint  Euloge  avait  fait  un  traité  divisé 
en  deux  livres  contre  Sévère  et  Timothée, 
deux  ennemis  de  saint  Léon  et  du  concile 
de  Chalcédoine.  Dans  ce  traité,  qui  était  dé- 
dié à  Domitien,  évêque  de  Mélitine,  saint 
Euloge  faisait  voir  que  ces  deux  hérétiques, 
au  mépris  des  règles  établies  par  l'Écriture 
et  par  les  anciens  Pères  ,  imputaient  au  pa- 
pe saint  Léon  des  sentiments  qu'il  n'avait 
pas,  en  détachant  des  paroles  de  sa  lettre  à 
Flavien  de  l'endroit  où  elles  étaient ,  et  re- 
tranchant ce  qui  servait  à  leur  donner  un 
sens  catholique.  Il  montrait  que  personne 
n'avait  combattu  plus  fortement  Nestorius 
que  saint  Léon,  en  disant  que  Dieu,  impas- 
sible de  sa  nature,  adais^'né  se  faire  homme, 
et  l'immortel  obéir  aux  lois  de  la  mort;  mais 
que  Sévère  avait  eu  grand  soin  de  retran- 
che)' ces  paroles  de  la  lettre  de  ce  pape, 
pour  n'en  prendre  que  d'ambiguës,  qu'il  lui 
était  aisé  de  fixer  h  un  bon  sens  en  les  rap- 
prochant de  celles  qui  expriment  clairement 
la  foi  catholique,  telles  que  sont  celles-ci  : 
Le  Fils  unique  éternel  du  Père  éternel ,  est 
né  du  Saint-Esprit  et  de  la  vierge  Marie.  Sé- 
vère objectait  que  saint  Léon  disait  dans  sa 
lettre  ,  que  les  deux  formes  ou  natures  opè- 
rent eu  Jésus-Christ  par  une  mutuelle  com- 
munication de  leurs  propriétés;  d'où  il  in- 
férait qu'il  y  avait  donc,  selon  ce  pape, deux 
opérants   on  agents  en  Jésus-Christ.  Saint 
Euloge  répond  que  saint  Léon  ne  pouvait 
mieux  marquer  sa  foi  sur  l'unité  de  pei-sou- 
ne,  qu'en  di'^ant  :  C'est  un  seul  et  le  même 
qui  est  Fils  de  Dieu  et  fils  de  l'homme.  Il  est 
Dieu,  parce  qii'av  commencement  était  le  Ver- 
be, et  le  Verbe  était  avec  Dieu,  et  le  Verbe  était 
Dieu.  Il  est  homme,  selon  qu'il  est  écrit  :  t't 
le  Verbe  a  été  fait  chair,  et  il  habité  parmi 
7UMS.  Il  résont  avec  la  même  précision  les 
autres  objections  de  Sévère  ,  en  opposant 
des  passages  formels  de  la  lettre  de  saint 
Léon  à  ceux  que  cet  hérétique  avait  tron- 
qués, ou  détachés  de  leur  place. 

9.  Il  entreprit  la  di'fense  de  la  même  let- 
tre de  saint  Léon  contre  Théodose  et  Sévè- 
re, chefs  des  acéphales.  Ils  avaient  divisé 
leur  censure  en  quatorze  chapitre*.  Il  suivit 
la  niênio  distiibulion  dans  sa  réptuise,  où  il 
ne  )nit  rien  d'aigre ,  ni  de  superllu.  Le  style 
en  était  doux  et  agréable.  Il  expliqua  dans 
le  même  écrit  le  sens  de  cette  expression  de 
saint  Cyrille  si  souvent  objectée  :  //  u'y  a 


?".  *friu 

c.iiilrr   ^  .*rf 

»1       1 !l"C 

i-i.oti«<,  r.  a. 

\ 

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J03D  •,  I. 


Coolrt 

WtÉr*.   Pho- 
Uu»,  rnd.tW, 


CHAPITRE  L.  —  SAINTS  GRÉGOIUE  ET  EULOGE. 


>I>iEMDrs  de 
iot  EoTo^e, 
loiius,  cod. 
0,p<s.  S3I. 


[vu"  SIÈCLE.] 

qu'une  nature  du  Vet'be  ("nc«;we;  montrant 
quo  la  ponsi'o  de  ce  Pitp  ôlail,  qu'il  y  avait 
en  Jt'-siis-Christ  ,  non  doux  [lorsonnos  ,  mais 
une  seule,  qui,  par  son  union  avec  la  naluie 
liiiniaine,  n'avail  soiiircrl  aucune  iliminiilidu. 
riuitius  dit  (jue  saint  Eulof^c  avait  composé 
cet  ouvrage  étant  encore  prêtre  de  l'église 
d'Antioche,  et  cliarné  du  soin  de  l'éiflise  dé- 
diée ;\  la  sainte  Vierge  Mî>re  de  Dieu,  appe- 
lée le  palais  de  Justinien  ;  et  qu'après  en 
avoir  composé  d'autres,  il  fut  cnlin  élu  pa- 
triarche d'AlexanJi'ie. 

10.  Pliotius  met  ensuite  un  discours  de 
saint  Euloge  ,  en  forme  d'invective  contre 
les  gaïnites  et  les  acéphales,  au  sujet  d'une 
union  qu'ils  avaient  faite  entre  eux  pour  un 
temps.  Il  montrait  que,  comme  ces  héréti- 
ques avaient  sacrifié  mutuellement  leurs 
propres  sentiments  pour  s'unir  contre  la  vé- 
rité ,  cette  union  ne  pouvait  subsister  ;  qne 
leur  conduite,  dans  le  sacrifice  qu'ils  avaient 
fait  de  leur  propre  doctrine,  était  liien  diûe- 
reutc  de  la  sage  économie  dont  l'Église  use 
quelquefois,  mais  toujours  sans  se  relâcher 
en  rien  des  vérités  de  foi  qu'elle  enseigne. 
Ainsi  saint  Paul,  pour  se  soustraire  aux  em- 
bûches inévitables  des  juifs,  circoncit  Timo- 
thée  ;  il  se  fit  lui-même  couper  les  cheveux, 
et  se  purifia  ;\  la  manière  légale  ,  lui  qui 
écrivait  aux  Galates  contre  les  observations 
légales.  Mais  c'était  prudence  de  sa  part  de 
se  relAcber  pour  un  temps  sur  ces  articles  : 
la  doctrine  de  l'Évangile  n'en  souffrait  rien. 
Saint  Ailianase  ne  se  sépara  point  de  ceux 
qui  refusaient  d'admettre  le  terme  de  con- 
substantiel ,  aussitôt  qu'il  connut  qu'ils  en 
admettaient  la  doctrine.  Par  une  suite  de  la 
même  économie  ,  Théophile  communitpia 
avec  Gélase  ,  quoique  celui-ci  mit  dans  les 
diptyques  le  nom  d'Eusèbe  de  Césarée  en 
Palestine,  parce  qu'il  ne  doutait  pas  que  Gé- 
lase ne  fût  oi'thodoxc.  On  ne  pouvait  dire  la 
même  chose  des  gaïnites  et  des  acéphales. 
Leur  doctrine  était  mauvaise  ,  et  leur  union 
ne  valait  pas  mieux ,  puisqu'elle  avait  pour 
but  de  combattre  la  foi  catholique.  Il  y  avait 
dans  le  même  traité  de  saint  Eidoge  une 
lettre  qu'il  avait  écrite ,  n'étant  encore  que 
prêtie,  à  Eutychius,  patriarche  de  Constan- 
tinople  ,  qui  contenait  une  explication  de  la 
foi  orlhodoxc,  et  des  preuves  de  sa  piété. 

11.  Photius  avait  lu  du  même  saint  un  vo- 
lume qui  contenait  onze  discours  sur  diverses 
matières.  Saint  Euloge  donnait  dans  le  pre- 
mier une  profession  de  foi,  où  il  insistait  par- 


rioi 


ticulièrementsurle  mystère  de  l'Incarnation, 
qu'il  ('■lalilissait  contre  les  hérésies  de  Nesto- 
rius  et  d'Eulychès.  En  parlant  de  l'union  des 
doux  naluies  en  une  seule  personne  dans 
Ji'sus-Cluist,  il  se  servait  du  terme  do  inù- 
lange,  mais  dans  un  sens  bien  dill'érent  de 
celui  d'Apollinaire  et  d'Eufyohè;;:  n'enten- 
dant par  ce  mol,  que  l'indivisibilité  de  ces 
deux  natures  depuis  leur  union;  en  sorte 
qu'il  reconnaissait  qu'elles  étaient  unies  sans 
confusion,  quoiqu'indivisiblement,  et  que  la 
nature  humaine  comme  la  divine  était  en  Jé- 
sus-Christ dans  toute  sa  perfoclion.  Il  expli- 
quait dans  le  même  discours  cette  expression 
de  saint  Cyrille  :  Une  nature  du  Verbe  incar- 
née, disant  queparî/He  nature,  il  entendait  la 
personne  du  Verbe,  et  par  incarnée,  la  nature 
liumainc  ;  que  c'était  donc  la  même  chose  que 
s'il  eût  dit  :  La  personnede  Verbe  s'est  incarnée. 
Le  sujet  de  son  second  discours  était  le  mê- 
me que  dans  le  précédent,  mais  moins  diffus, 
quoi  qu'il  n'y  omît  rien  d'essentiel.  Le  troi- 
sième était  encore  sur  ITucarnation.  Ily  pre- 
nait la  défense  du  concile  de  Chalcédoine  et 
des  anciens  Pères,  nommément  de  saint  Cy- 
rille, dont  la  foi  ne  pouvait  être  suspecte  h 
quiconque  savait  qu'il  s'était  réuni  avec  Jean 
d'Antioche  et  les  autres  Orientaux,  qui  con- 
fessaient hautement  deux  natures  unies  en 
une  seule  personne  ;  qu'il  n'y  avait  qu'un  seul 
Fils,  Notre  Seigneur  Jésus-Christ,  Fils  de  Dieu 
et  de  l'homme,  et  que  la  Sainte  Vierge  est 
véritablement  Mère  de  Dieu.  Il  faisait  voir 
que  ce  n'était  que  pour  ne  point  paraître  s'é- 
loigner de  la  foi  de  l'Église  sur  ce  point,  que 
quelques  autres  Pères,  comme  saint  Grégoire 
Thaumaturge  et  saint  Athanase,  ont  défendu 
de  dire  deux  natures  en  Jésus-Christ,  parce 
qu'en  disant  deux  natures,  il  semble  qu'on  les 
sépare  et  qu'on  admette  deux  fils,  au  lieu 
qu'elles  sont  unies  indivisiblement,  et  ne 
constituent  qu'un  seul  Fils, Xotre-Seigneur.  Il 
montrait  encore  que  le  témoignage  qu'on  al- 
léguait comme  de  saint  Grégoire  Thauma- 
turge, n'était  point  de  lui,  mais  d'.Vpollinaire; 
que  quand  saint  Cyrille  apporte  l'exemple  de 
la  nature  humaine  oùchaque  homme  est  un, 
il  ne  le  fait  pas  à  dessein  de  montrer  qu'il 
n'ya  qu'une  nature  en  Jésus-Christ, mais  pour 
établir  l'union  hypostatique  ou  personnelle 
des  deuxnatures  ;  parce  qu'en  eûet,  de  même 
que  l'homme  est  composé  de  deux  natures 
différentes,  savoir,  de  l'âme  et  du  corps,  ainsi 
Jésus-Christ  est  de  deux  natures  différentes, 
de  la  divine  et  de  l'humaine  ;  un  en  ces  deux 


Pk..  S3I> 


S92 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


natures,  comme  l'iiomme  est  un  dans  les 
deux  dont  il  est  composé.  Saint  Eulofre  tc- 
jetait  la  lettre  du  pape  Jules  a  Denis  comme 
supposée.  Les  acéphales  objectaient  que  le 
concile dcClialcédoinc  n'avait  pas  été  endroit 
d'introduire  l'expression  des  deux  natures,  vu 
que  celui  d'Epbèse  avait  défendu  de  faire  de 
nouvelles  professions  de  foi  :  à  cela  cet  évê- 
que  répondait  que  la  nécessité  des  temps 
ayant  obligé  le  concile  de  Nicéc  de  se  servir 
du  terme  de  cvnsubstanliel,  terme  non  usité 
auparavant  dans  le  langage  de  l'Eglise,  et 
même  condamné  dans  Paul  de  Samosale, 
une  semblable  nécessité  avait  engagé  les 
Pères  de  Chalcédoine  à  employer  les  termes 
des  deux  natures;  qu'en  cela  ils  n'avaient  rien 
fait  de  contraire  à  la  défense  du  concile  d'E- 
pbèse, qui  ne  regardait  que  les  nouvelles  pro- 
fessions de  foi  coutraires  à  celle  de  Nicée. 
Son  quatrième  discours  était  encore  une  apo- 
logie du  concile  de  Cbalcédoine,  11  y  montrait 
qu'il  avait  pu,  de  même  que  saint  Cyrille,  se 
senir  de  l'exemple  de  l'homme,  pour  établir 
l'union  bypostalique  desdeirs  natures  en  Jé- 
sus-Christ. 
r«.  K3.  12.  Dans  le  cinquième  discours,  il  combat- 

tait ceux  qui  s'imagiuaient  que  l'on  pouvait 
comprendre  parles  forces  de  l'esprit  humain 
tout  ce  qui  regarde  la  foi  chrétienne.  11  y 
combattait  aussi  ceux  qui  n'admettaient  dans 
la  Trinité  d'autre  distinction  que  de  nom.  Il 
faisait  sur  cela  un  parallèle  cnlre  les  proprié- 
tés essentielles  qui  distinguent  un  bomme 
d'un  autre  bomme,  et  celles  qui  distinguent 
le  Père  d'avec  le  Fils,  et  le  Saint-Esprit  dans 
la  Trinité,  montrant  qu'encore  que  la  toute- 
puissance  soit  un  attribut  commun  à  ces  trois 
personnes,  elles  sont  distinguées  l'une  de 
l'autre  par  certaines  propriétés  ;  ce  qui  n'em- 
pêche pas  qu'elles  n'aient  entr'elles  une  union 
si  inellable,  que  le  Père  est  dans  le  Fils,  et 
le  Fils  dans  le  Père,  le  Fils  dans  le  Pèi-e  et 
leSaint-Er-i>ril,  elle  Saint-Esprit  dans  le  Père 
et  dans  le  Fils.  Ses  adversaires  soutenaient 
qu'il  n'y  avait  point  de  ditl'éience  eulie  pro- 
priétés et  personnes.  Il  rc'-pondait  que,  si  cela 
était  ainsi,  le  Saint-Esprit  ne  iirutcderail  pas 
du  Père,  la  procession  ne  se  pouvant  dire 
d'une  propriété,  et  que  les  Pères  de  Nicée 
n'auraient  pas  dit  que  les  personnes  de  la 
Trinité  sont  consubstaïUielles,  parce  qu'il 
faut  être  insensé  pour  dire  que  les  propriétés 
,.g  sontconsubslantiellcs.il  traitait  la  même  ma- 

tière dans  les  trois  discours  suivants,  où  il 
établissait  le  nom  d'hypostuse,  ou  personne, 


sur  le  langage  de  l'Eglise,  et  la  distinction 
des  personnes  sur  la  manière  dont  le  Fils  et 
le  Saint-Espiit  tirent  leur  origine  du  Père. 

13. Son  neuvième  discours  était  àla  louange 
de  l'état  monastique,  dout  il  détaillait  les  de- 
voirs, en  exhortant  ceux  qui  l'avaient  em- 
brassé, à  les  remplir  avec  exactitude.  Il  pa- 
rait que  ceux  à  qui  il  parlait  étaient  de  la  secte 
des  sévérieus.  Après  leur  avoir  donc  fait  voir 
les  contrariétés  des  principes  de  leur  chef,  il 
les  invitait  àembrasserladoctrinederÉglise, 
et  leur  faisait  en  peu  de  mots  la  relation  de 
ce  qui  s'était  passé  à  l'occasion  du  concile 
de  Cbalcédoine,  et  des  troubles  que  les  Egyp- 
tiens, revenus  de  ce  concile,  répandirent 
par  toute  la  terre,  en  piibliaut,  contre  la  vé- 
rité, que  les  évêques  avaient  rejeté  saint  Cy- 
rille, et  reçu  Nestorius.  Il  montrait  dans  le 
dixième  discours,  adressé  encore  aux  moines, 
les  variations  des  diverses  sectes  sur  la  doo 
Irioe  de  l'Incarnation,  les  disputes  que  cau- 
sait entr'eux  la  ditl'éi'ence  des  sentiments.  Il 
attaquait  dans  le  onzième  les  agnoïtes,  qui, 
abusant  de  certains  passages  de  rKcritureoù 
Jésus-Christ  parle  comme  ignorant  quelque 
chose,  souteuaient  qu'il  les  avait  en  ellel 
ignorées.  Il  avait  envoyé  à  saint  Grégoire 
quelques  écrits  sur  ce  sujet,  qui  furent  ap- 
prouvés. Nous  avons  donné  dans  l'analyse 
des  lettres  de  ce  pape  les  principales  objec- 
tions des  agnoïtes  avec  les  réponses  de  saint 
Euloge. 

14.  Pliotius  lisait  à  la  suite  de  ces  onze  dis- 
cours, dans  ses  exemplaires,  le  décret  d'un 
concile  conli  e  les  samaritains,  la  septième  an- 
née du  règne  de  l'empereur  Marcien,  c'est-à- 
dire  en -i,ï7,  auquel  un  évèque  nommé  Euloge 
avait  présidé,  accompagné  de  plusieurs  ('VÔ- 
ques  distingués  parleur  vertu  et  par  leur  sa- 
voir. Ce  ne  pouvait  être  saint  Euloge  d'A- 
lexandrie, qui  ne  fut  élevé  à  l'épiscopat  qu'en 
581.  On  trouve  un  évèque  de  même  nom  qui 
souscrivit  au  concile  de  Cbalcédoine,  en  qua- 
lité d'évéque  de  Philadelphie  dans  l'Aiabie 
Pétrée;  mais  on  ne  voit  pas  bien  comment  il 
aurait  pu  présider  à  cette  assemblée,  si  ce 
n'est  comme  méiropolilain  honoraire.  Huoi 
qu'il  en  soit,  voici  quelle  fut  l'occasion  de  ce 
concile.  11  y  avait  parmi  les  samaritains  une 
grande  ilivision  au  sujet  du  projihèle  promis 
par  Moïse  :  les  uns  voidaient  que  ce  fût  Jo- 
sué;  les  autres,  Dositbe  ou  Dosilhée,  chef 
de  la  secte  des  dositbéens,  du  vivant  de  Si- 
mou  le  Magicien.  Chaque  parti  djcasa  des 
mémoires  en  fonue  de  requêtes,  qu'il  pré- 


pif  sr«. 


D/frpI  d'un 
Conrilo  con- 
tw  If*  Mnijt- 
nulDS,      tAg. 

«a. 


[vn'  SIÈCLE.] 


CHAPITIU-;  I..  —  SAINTS 


sciila,  ce  semble,  A  l'empereur  Marcicn,  la 
septième  année  de  son  empire,  qui  Icurdnn- 
na  pour  juges  sainlEuloge  avec  sou  concile. 
L'('V()((ue,  après  avoir  examiné  dans  celle 
assemblée  tout  ce  que  les  deux  partis  avaient 
alléj^ué,  leur  lit  voir  qu'ils  se  trompaicul 
tous  également,  et  leur  prouva  par  l'hicriture, 
que  le  Proplièle  ou  Messie  prédit  par  Moïse, 
n'était  autre  que  Jésus-Christ, Xotre-Seigueur, 
et  le  véritable  Dieu.  C'est  ainsi  que  se  ter- 
mina ce  concile,  dont  le  décret,  et  les  raisons 
sur  lesquelles  il  était  fondé,  ne  se  trouvaient 
xm!"  v'xTu'  pl"s  "^'^  temps  dcPliolius.  Cet  écrivain  parle 
xi.ixu.ui,,.  (|.,||^  troisième  livre  qu'il  avait  en  main,  et 
qu'il  semble  attribuer  à  saint  Euloge,  où  l'au- 
teur prouvait  la  résurrection  future  par  divers 
passages  de  l'Ancien  Testament.  Il  s'y  propo- 
sait aussi  la  question,  pourquoi  la  loi  de  Moïse 
ne  marquait  que  cinq  espèces  d'animaux 
purs  pour  les  sacrifices,  savoir  :  le  bouc,  le 
bélier,  le  bœuf,  la  tourterelle  et  la  colombe? 
A  quoi  il  répondait  qu'elle  n'en  avait  mar- 
qué que  ce  nombre,  parce  que  nous  n'avons 
que  cinq  sens  à  purifier. 
,1— "e".!i"«  ^^"  ^o*is  apprenons  de  Jean  Mosch,  que 
°',,,  s'  saint  Euloge  d'Alexandrie,  étant  allé  à  Cons- 
jinumeoi."  tantinople,  logea  avec  saint  Grégoire,  alors 
»"i'!t!",'ÎÎ8'.  archidiacre  de  Rome  et  nonce  du  pape  Pe- 
lage, qui  lui  raconta  une  action  de  saint 
Léon,  qu'il  dit  ctie  rapportée  dans  les  mé- 
moires de  son  église.  Ce  pape,  ayant  écrit  à 
saint  Flavien  de  Consfantinople  contre  les 
hérétiques  Nestoriiis  et  Eutychès,  porta  sa 
lettre  sur  le  tombeau  de  saint  Pierre,  a  qui 
il  dit  :  Cl  Si  j'ai  fait  des  fautes,  parce  que  je 
suis  homme,  corrigez-les,  vous  à  qui  Jésus- 
Cbrisl  à  confié  son  trône  et  son  Eglise.  »  Il 
ne  se  contenta  pas  de  prier;  il  jeûna,  il  cou- 
cha sur  la  terre;  et  au  boutdequaranle jours, 
saint  Pierre  lui  apparut  lorsqu'il  était  en 
prières,  et  lui  dit  :  «  Je  l'ai  lue,  et  jel'ai  cor- 
rigée. »  Saint  Léon  prit  sa  lettre  de  dessus 
le  tombeau  de  l'apôli-e,  et  la  trouva  en  etlet 


GllKGOIHE  ET  EULOGE.  S'Ja 

corrigée  de  la  main  même  de  saint  Pierre. 
JeaniMoscli  rapporte  encore  d'autres  appari- 
tions au  sujet  de  la  même  lettre,  donl  l'au- 
torité sera  toujours  très-grande  dans  l'Eglise, 
indépendannnent  de  tout  le  merveilleux, 
puisqu'elle!  suit  exactement  la  doctrine  des 
divines  Ecritures,  de  la  tradition  de  l'Église 
et  des  Pères,  ainsi  que  le  dit  le  concile  de 
Clialcédoine. 

iO.  Le  jusement  que  Photius  a  porté  des    .    Jugomem 

''     ^  '  ^  des  écril»    do 

écrits  de  saint  Euloge,  doit  eu  faire  regret-  "'"'  Eiiote. 
ter  la  perte.  Quoique  le  style  n'en  fût  que 
médiocrement  '  exact  et  la  onsliuctiou  peu 
régulière,  ils  étaient  utiles,  autant  parce  que 
l'auteur  y  expliquait  très-bien  les  passages  de 
l'Écriture,  que  parce  qu'il  y  réfutait  pleine- 
ment l'erreur  de  ses  adversaires.  Il  les  char- 
geait* de  confusion  en  leur  faisant  apercevoir 
leurs  égarements,  et  les  désarmait^mais  sans 
les  accabler  de  reproches,  se  bornant  ;\  la  dé- 
fense de  la  vérité;  ce  qu'il  faisait  avec  beau- 
coup de  précision,  ne  disant  rien  qui  ne  fût 
utile  à  son  sujet.  On  ne  peut  toutefois  dissi- 
muler qu'il  éiait  peu  au  fait  des  coutumes  de 
l'église  de  Rome,  car  il  dit,  contre  la  vérité 
do  l'histoiie,  que  l'on  avait  pour  maxime  '  de 
faire  succéder  l'archidiacre  au  pontificat. 

17.  Le  père  Combefis  nous  a  donné  un  dis-  J'j^'SëlV"!- 
cours  sur  la  fête  des  Rameaux  '  ;  Photius  n'en  ï^cl.^Tim; 
dit  rien,  et  dans  un  manuscrit  d'Oxford,  ce  esu'c"-'^""' 
discours  est  attribué  à  saint  Cyrille  d'Alexan- 
drie. Il  n'est  pas  toutefois  de  son  style;  il  ap- 
proche beaucoup  plus  de  celui  de  saint  Eu- 
loge, à  qui  le  père  Combefis  croit  qu'il  faut  le 
donner.  Ilauraitdù  nous  apprendre  s'il  est  in- 
titulé de  son  nom  dans  quelques  manuscrits. 
Ce  qu'il  y  a  de  vrai,  c'est  que  l'auteur  vivait 
dans  un  temps  où  l'on  disputait  sur  les  deux 
natures.  Il  emploie  une  bonne  partie  de  son 
discours  à  montrer  qu'elles  sont  unies  en  une 
seule  personne  dans  Jésus-Christ,  sans  con- 
fusion, et  pousse  assez  vivement  là-dessus 
ses  adversaires,  c'est-à-dire  les  acéphales. 


'  Bomims  fEulogiiJ  dictio,  ad  verba  quoéfaUl- 
nel,  fere  mediocriter  est  accurata:  veruin  con- 
struclione  non  procul  sœpe  a  solecisnio  abscedit. 
Divinarum  adhuc sciipturarum  non  est  imperilus, 
quariim  testimonia  ftliciter  atque.apposiie,  ciim 
advemus  novatianos,  tum  in  aliis  quibusdam  ré- 
bus adliibel.  Photius,  Cod.  182,  pag.  411. 

*  Lectus  est  liber  Eulogii  quo  piœ  doctrinœ  cau- 
sani  suscepisse  videttir,  pudorem  proptignatori- 
biis  impietatis  incM/ieus...  Sic  illonnn  dementitnn 
ostendit,  et  adcersarium  partent  tuentes  armis 
exuit...  &/  autem  hic  scriptor  purus  et  suavis, 
el  breviler  ac  leviter  accusaliones  instUuens,  et 

XI. 


sine  causa  nihilin  médium proferens.  Idem.,  Cod. 
216.  l>a-^.  767. 

'  Rrfi-rt  autem  Enlogius  Novatum  Cornelio 
ponlifice  Romunœ  Ecclesiœ  esse  arckidiaconum 
crealum,  ad  quem  ifisum  ponlificium,  pro  ejus 
temporis  more,  decedenle  e  vita  ponlifice,  defere- 
batur.  IJciD.,  Cod.  182,  p.ng.  411. 

'  îiallaud  l'a  reproduit  dans  le  t.ime  XII  Bibl. 
vel  Pat.  pag.  300,  avec  sept  chapitres  de  l'ouvrage 
de  saint  Euloge  sur  les  deux  natures  de  Noire-Sei- 
gneur. Ces  chapitres  ou  «apitules  se  trouvaient, 
parmi  les  œuvres  de  saint  Masimin,  confesseur, 
tom.  II,  pag.  tS3  rt  seq.  {L'éditeur.) 

38 


594 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Ecriu  d«  18.  [Le  cardinal  Mai  a  publié  en  ffrec,  dans 
'iij'.'"  "■"  J*^  VU"  vol.  des  Script,  vetvr.  nov.  collecl.,  pag. 
177-178,  un  fragment  du  livre  de  la  Trinité 
et  de  l'Incarnation;  et  dans  le  tome  X  des 
Classici  auctores,  pag.  i83,  un  fragment  sur 
ces  mots  :  Simon  fils  de  Jonas,  m'aimes-tu  ?  et 
im  autre  sur  le  couple  de  îourterelles,  ibid. 
pag.  -iitG- i05 .  Le  tome  VII  des  Script,  tel.  nov. 
co//ec/.,  pag.  18,  H),  54,  57,59,  CO,  Cl,  02, 03, 
63,  et  60.   contient  des  fragments  qui  pa- 


raissent appartenir  aux  livres  adressés  à  Do- 
railien.  11  y  en  a  un  autre  dans  la  Biblioliiè- 
que  nouvelle,  tom.  III,  j.ag.  104.  Le  tome 
LXXXM  de  la  Pnirologiv  grecque,  col.  2007- 
2'JG4,  contient  deux  Notices  sur  saint  Eulo- 
ge,  l'une  tirée  de  Galland,  l'autre  de  Fabri- 
cius;  le  discours  sur  les  Rameaux  d'après 
Galland;  les  sept  cbapitres  sur  les  deux  na- 
tures de  Notre-Seigneur,  etlesù-agments  re- 
cueillis par  Mai.] 


CUAPITUE  LI. 


Anastase-le-Siaaïle,  prêtre  et  moine  [vers  l'an  680]. 


Il  Ta  ea 
ln>l<  Ana.u* 
se     ûjn»     It-e 

tièrac   fifcles. 


1.  On  distingue  trois  Anastase  dans  les 
sixième  et  septième  siècles  de  l'Église.  Le 
premier  fut  fait  patriarche  d'Antioche,  en 
SOI  ;  d'où,  ayant  été  chassé  par  Justiu-le-Jeu- 
nc,  il  y  fut  rétabli  en  393,  et  mourut  en  598 
on  399,  laissant  plusieurs  lettres  et  plusieurs 
sermons,  dont  nous  avons  déjà  parlé  '.  Le 
second,  que  l'on  nomme  le  Jeune  pour  le 
distinguer  du  premier,  lui  succéda  dans  le 
patriarcliat  d'Antioche,  qu'il  ne  tint  que  jus- 
ques  vers  l'an  009  ou  010,  ayant  été  tué  par 
les  juifs  dans  une  sédition  qu'ils  excitèrent 
contre  les  cbrétiens.  Il  est  honoré  comme 
martyr  le  vingt-et-un -décembre.  Le  troisiè- 
me Anastase  ne  fut  jamais  évêque,  mais  il 
était  *  prêtre  et  moine  du  mont  Sinaï,  d'où 
lui  est  venu  le  surnom  de  Sinaïte.  Les  Grecs 
modernes  l'appellent  le  nouveau  Moïse,  per- 
suadés que,  menant  une  vie  contemplative 
sm-  la  montagne  de  Sinai,  il  y  avait  vu  Dieu, 
et  conversé  familièrement  avec  lui,  comme 
cet  ancien  législateur.  Il  fil  plusieurs  voyages 
à  Alexandrie,  en  d'autres  villfs  de  l'Egypte, 
et  dans  la  Sj'rie,  où  il  défendit  souvent  '  de 
vive  voix  la  foi  catholique  contre  les  acépha- 
les, les  sévériens  et  les  théodosiens.  C'est  ce 
qu'il  témoigne  en  dilférents  endroits  d'un  de 
ses  ouvrages,  intitulé  :  Le  Guide  du  vrai  che- 


min. Il  rapporte  '  dans  le  même  écrit  plu- 
sieurs choses  arrivées  à  Alexandrie  depuis 
la  mort  do  saint  Euloge  ;  ainsi  il  le  composa 
après  l'an  608,  qui  fut  l'année  de  la  mort  de 
ce  patriarche.  Il  y  parle  '  aussi  Se  Jean,  qui 
fut  patriarche  de  cette  ville  pour  les  Ibéo- 
dosiens,  depuis  l'an  077  ji.^qu'en  086.  11  vi- 
vait donc  alors,  mais  on  n'a  aucune  preuve 
qu'il  ait  vécu  plus  longtemps.  On  voit,  par 
l'explication  '  qu'il  a  donnée  du  sixième 
psaume,  qu'il  était  di'ja  au  monde  sous  le 
règne  de  l'empereur  Maurice,  c'est-ù-direau 
plus  tard  en  002,  qui  fut  la  dernière  année 
de  ce  prince.  Il  l'appelle  l'empereur  des 
chrétiens;  ce  qui  donne  lieu  de  conjecturer 
que  le  pays  où  il  travailla  ;\  celle  explication 
était  sous  la  domination  des  infidèles,  appa- 
remment des  Sarrasins,  qui  s'étaient  empa- 
rés de  la  Palestine. 

2.  Le  plus  célèbre  de  ses  ouvrages  est  ce- 
lui que  nous  venons  de  citer  sous  le  litre  de 
Guide  du  vrai  chemin.  Qucl'iues-uns  l'ont  at- 
tribué à  Anastase  l'Ancien,  mort  patriarche 
d'Antioche  en  r>U8  ou  599;  ne  faisant  point  ré- 
llcxion  qu'il  y  est  parlé  de  saint  Euloge,  qui  fut 
patriaiche  de  la  même  église  jusqu'en  (i08,  et 
de  Jc«n,  patriarche  ]ioiir  les  Ihéodosiens  de- 
puis l'an  077  jusqu'en  680,  comme  on  vient 


LOilifii' 
00  CiLitle  do 

r*!  d'AtiA- 
Kiave.le  •  S  - 
salle. 


'  D'après  Fesseler,  Inslil.  Patrol.,  tom.  Il,  pag. 
101 1,  on  <onser\e  à  Vienne,  dans  la  liililiollièfjuc 
juipérialf,  un  discours  iuddit  sur  la  l'aix  (ju'A- 
naslase  prononça  après  avoir  recouvré  sou  siège, 
l'iusicurs  de  ses  sermon»  sont  perdus;  d'autres 
nous  restent  et  ont  t!lé  recueillis  jjiir  Cialland,  Uibl. 
loin.  .\ll.  pag.  23'l-72,  sous  le  nom  irAuastase  Si- 
itaiie,  évéïjue  d'Auliocbe.  ^L'^^d^leur.) 


'  Aiiastas.,  in  Odcgo,  pag.  836,  tom.  IX  Bihlioth, 
vct.  Pat. 

'  Aiiaslas.,  in  Odego,  loni.  IX  Biblioth.vel.  Pat. 
pag.  S;H,  83S,  836,  8 H. 

*  AuasIas.,  in  Odvg< ,  l<iin.  IX  BibHoth.  vet.  Pat., 

piig.  83r,. 

»  lliid.,  pag.  818. 

»  Aiiasta?.,  tii  Psal.  VI,  [lag.  499. 


CIUPITHK  LI.  —  ANASTASE-LE-SINAITE,  Pn^TRE. 


[vil'  SIÈCLE.] 

de  le  dire.  Il  faut  donc  s'en  tenir  A  l'opinion 
ciiinniiine,  qui  donne  col  ouvrajre  au  moine 
Anasiase.  Gretscr  le  lit  imprimer  en  grec  et 
en  latin  h  Ingolslat  en  itJOG,  in-4°,  sur  un 
exemplaire  de  la  I?il)liotlièipie  d'Aiii^shourg. 
Nous  ne  l'avons  qu'en  lai  in  dans  la  irrande 
Bibliolhi>que  des  Pères  imprimée  à  Lyon  en 
IG77,  de  la  traduction  de  Greiscr,  qui  l'an- 
rail  sans  doute  rendue  plus  exacte,  s'il  avait 
eu  plus  d'un  manuscrit  à  consulter.  Ceux  de 
la  Uihliotlièque  du  Roi,  de  M.  Colbert,  et  de 
la  Bibliothèque  impériale  de  Vienne,  sont 
dill'('Tents  en  beaucoup  d'endroits  de  celui 
d'.\ugsbourg.  Ils  n'ont  point  l'exposition  de 
foi  qui  se  lit  au  commencement  de  l'édition 
de  Gretser.  Dans  d'autres  manuscrits,  elle 
porte  le  nom  de  saint  Jean  Damascène,  de 
même  que  les  défuiilions  qui  sont  après.  On 
a  supprimé  ces  pièces  dans  la  nouvelle  édi- 
tion des  œu^Tes  de  ce  Père,  parce  qu'on  a 
reconnu  que  l'Exposition  de  foi  et  les  Défîni- 
tious  étaient  d'Anastase  Sinaïte.  Le  quatriè- 
me chapitre,  qui  traite  de  la  naissance  de 
toutes  les  hérésies  jusqu'à  celles  de  Xesto- 
rius  et  de  Sévère,  et  le  cinquième  qui  parle 
des  conciles  dans  lesquels  ces  hérésies  ont 
été  condamnées,  sont  aussi  très-diûerents 
dans  l'édition  de  Gi'etser,  et  dans  les  manus- 


crits  dont  nous  venons  de  parler;  ce  qui 
prouve  ipic  cet  ouvrage  d'AiiasIhase  a  souf- 
fert [)lusieuis  altérations  de  la  pai't  des  co- 
pistes, qui  y  ont  ajouté  ou  relrancln!  plu- 
sieurs choses.  On  ne  peut  giières  douter 
qu'ils  n'aient  aussi  inséré  dans  le  texte  les 
scolies  que  quelques  savants  avaient  mises 
à  la  marge  pour  expliquer  les  endroits  dilli- 
ciles  de  cet  ouvrage  :  car  elles  ne  paraissent 
point  être  d'.\nastase.  Il  aurait  pu  s'expli- 
quer lui-même  sans  faire  des  scolies  sur 
sou  propre  ouvrage. 

3.  Anastase  y  donne  d'abord  plusieurs  rè- 
gles très-utiles  et  même  nécessaires  à  ceux 
qu'il  se  proposait  d'instruire,  et  de  rendre 
assez  habiles  pour  découvrir  les  pièges  des 
sévériens,  et  les  éviter.  On  appelait  sévé- 
riens  les  partisans  de  Sévère,  faux  patriar- 
che d'Antioche,  regardé  de  son  temps  comme 
le  chef  des  eufychiens.  «  Avant  toutes  choses, 
dit-il,  ilest  nécessaire 'de  mener  une  vie  pure 
et  innocente,  et  de  servir  de  demeuie  au 
Saint-Esprit;  ensuite,  de  savoir  exactement 
les  détinition.s  des  choses  les  plus  essentiel- 
les; d'avoir  une  parfaite  connaissance  des 
sentiments  de  ses  adversaires  et  de  leurs 
écrits,  afin  de  les  battre  et  de  les  confoudi-e 
par  eux-mêmes.  Il  y  amail  de  l'imprudence 


Araljsc  (!e 
tt-  Livre,  tûni. 
IX,  Ililliol. 
>cl.  Pal.  i»g. 
blO. 


Cap  I. 


'  Ut  ante  omnia  vitatn  honestam  gravemque 
ducat,  et  Spiriium  Saiictuin  incolam  in  animo 
habeal.  VI  definilinnes,  prœcipue  inagis  necessa- 
rias.  accurate  persp-ctas  habeal.  Ut  sensa  et  opi- 
nionés  adrersarioruni  adamnssim  sciât,  eorum- 
que  scripta  evolval;  crebro  enim  ex  ipsis  pudepe- 
ri  poterunl.  Ut  cum  profanis  et  faillis  primiscue 
et  indiscriminalim  de  capitibns  fidei  in  certamen 
non  descendat,sed  hahilo  deleclu  cum  qtiibus  et 
quando  et  quantum  oportet.  Ul  omnem  divinam 
Scriplurani  cum  timoré  Dei  lustret.non  matigna 
mente,  sed  in  simplicitate  cordis:  neqiie  ea  quœ 
caplum  nostrum  superantscrulari  et  conirectare 
velit.  Ut  quœ  definite  dicta  sunt,  ab  aliisinternos- 
cat  ;  et  rursus  qua-  abusive,  quœve  simpHciter. 
■  fioverit  Ecdisiam  nonnullas  traditiones  etiam 
extra  Scriplurani  accepisse  :  quod  genus,  sa- 
crant conimunionem  a  jejunis  accipi  debere; 
orare  ad  orientem  ;  Deiparam  post  partum 
quoque  ynansisse  vircinem.  eamdemque  in  spe- 
lunca  peperisse;  et  si  quœ  sunt  bujus  generis  tra- 
ditiones aliœ.  Sciât  disputationis  duos  modos  es- 
se; ulteruni  per  Scripturœ  testimonia  ;  alterum 
per  probationes  ex  ijisis  rébus  pelitas,  qui  mo- 
dus  firmior  est  et  verior  :  nam  xerba  Scripturœ 
depravari  possunt.  Quocirca  videre  licet,  simvl 
atquc  adversario  Scripturœ  testimonium  obji'i- 
tur,  ab  ipso  vicissim  e  vestigio  aUud  tcslimoiiium 
produci.  site  sit  hœreticus,  sire  judœus.  Qua- 
proplcr  is  cui  vires  hoc  concidunt,  magis  se  ar- 
met  conlra  adversarios  demonstrationibus  ex  ip- 


sa  rerum  nalura  desumptis.  Exploratam  habeat 
chronograpliiam,  et  quo  tempore  lixerit  hic  aut 
ille  pater;  quando  hœc  aut  ilta  hœresis  constite- 
rit.  Keqiie  illud  ignorandum,  adversarium,  quan- 
do per  interrogationem  ad  angustias  redactus 
est.  conarii  alia  interrogatione  proposita,  alio 
sermone  transferre  :  quod  non  est  tolerandum. 
Ànte  disputationem  ab  adversario  jurawentuw 
petenduni  est,  qun  polliceatur  nullo  verbo  contra 
conscieiuiam  suam  sese  aciurum.  Ante  congres- 
sionis  iuilium,  omnes  omnino  pravœ  suspiciones 
et  opiiiiunes  quas  adversarius  de  nobis  concepit, 
deteslandœ,  dirisque  devovendœ  sunt,  etc.  Omni 
monophysitœ  prœdiccre  oportet,  nos  non  ex  con- 
cilio  Chalcedonensi,  sed  ex  Patribus  qui  syno- 
dum  antecesserunt,  contra  illos  arma  sumere ; 
quos  et  nos  et  illi  orlhodoxos  fuisse  confitenlur. 
Uonophysilam  prwmunire  debemus,  et  sincère 
anathema  denuntiare  omnibus  itlis.qui  non  con- 
fitentur  Chri>:tum  esse  rerum  Deum.  Uoc  facto, 
indiiendu  est  persona  Judivi,  vel  Pauli  Samo.'ia- 
leni,  quivrendumque  ex  illo  unde  Uqucut  Chris- 
tum  esse  Deum  altissimum ;  quen:adinodum  fecit 
Ammonius  contra  Ealicarnasseum.  Obserrandum 
est  tnonopliysitas  ipsa  calicis  sui  oblatione  redar- 
gui:  purum  enim  nierumque  vinum  offerunt  abs- 
que  admixtione  aquœ  ;  quo  indicunt  Ch)-istum  ab 
omni  corporis  et  avimœ  concretione  Uberum,  ex 
sole  nudaque  divinitale  conslarc.  .\na.«UT?.,  in 
Odego,  cap.  i,  pag.  811. 


596  HISTOIRE  GKNKRALE  DES 

à  disputer  sur  les  matières  de  la  foi  avec 
toutes  soites  de  personnes.  Il  faut  les  choi- 
sir, n'en  disputer  qu'en  tonips  et  lieu,  et  au- 
tant qu'il  en  est  besoin.  On  doit  s'appliquer 
à  la  lecture  de  l'Ecriture  sainte  avec  mie 
grande  simplicité  de  cœur,  et  non  avec  un 
esprit  de  lincssc  et  de  subtilité,  sans  s'opi- 
niàtrer  à  vouloir  approfondir  ce  qui  surpasse 
l'inlelligence  humaine  ;  savoir  distinguer  ce 
qui  se  doit  entendre  à  la  lettre,  d'avec  ce 
qui  est  dit  métaphoriquement;  croire  que 
l'Église  a  des  traditions  sur  des  points  de 
doctrine  qui  ne  sont  point  exprimées  dans 
les  Livres  saints,  comme  d'être  à  jeun  pour 
recevoir  l'eucliaristiç;  de  prier  tournés  vers 
l'orient;  que  la  Mère  de  Dieu  est  demeurée 
\-ierge  après  son  enfantement  ;  qu'elle  a  mis 
Jésus-Christ  au  monde  dansmic  grotte,  et  au- 
tres traditions  semblables.  wAnaslase  ajoute 
qu'il  est  bon  de  savoir  qu'il  y  a  deux  ma- 
nières de  disputer  avec  les  hérétiques  :  l'une, 
en  proposant  des  passages  de  l'iîcriture 
sainte  ;  l'autre,  en  tirant  des  preuves  de  la 
chose  même.  Celte  dernière  façon  de  dispu- 
putcr  est  la  plus  solide  et  la  plus  cUicace, 
parce  que  l'on  peut  corrompie  et  altérer  les 
paroles  de  l'Écriture,  et  opposer  un  passage 
à  un  autre,  comme  font  tous  les  jours  les 
hérétiques  et  les  juifs;  ce  qui  montre  qu'il 
est  plus  avantageux  de  recourir  aux  preu- 
ves pi'ises  de  la  chose  même.  Il  veut  que  l'on 
sache  la  chronologie,  afin  de  savoir  en 
quels«  temps  tels  et  tels  Pères  ont  vécu,  et 
quand  telles  et  telles  hérésies  ont  pris  nais- 
sance; que  l'on  prenne  garde  quand  l'ad- 
versaire est  embarrassé  et  hors  d'état  de  ré- 
pondre, afin  de  l'empêcher  de  passer  à  une 
autie  question  ;  qu'on  lui  fasse  même  pro- 
mettre sous  serment,  avant  la  dispute,  qu'il 
ne  dira  rien  contre  sa  conscience;  qu'on  se 
purge  soi-même  de  tous  les  soupesons  que 
l'adversaire  pourrait  avoir,  eu  conilamnaut 
les  erreurs  dont  on  pourrait  être  soupçonné. 
«  Si  vous  avez  à  disputer  avec  les  Arabes,  di- 
tes anathème  h  celui  qui  admet  deux  dieux, 
ou  qui  croit  que  Dieu  a  engendié  de  la  mê- 
me manière  que  les  hommes.  Il  faut  se  con- 
duire de  la  même  sorte  envers  tous  les  au- 
tres hérétiques,  afin  que,  voyant  que  nous 
condamnons  toutes  les  erreurs  dont  ils  pou- 
vaient nous  soupçonner,  ils  nous  écoutent 
plus  attentivement.  Si  vous  outrez  en  dispute 
avec  un  mouophisile,  c'est-à-dire  qui  n'ad- 
met qu'une  seule  nature  en  Jésus-Christ , 
commencez  par  lui  dire  que  vous  ne  vous 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

arrêterez  pas  aux  décisions  du  concile  de 
Chalcédoine;  mais  que  vous  artrumeuteiez 
contre  lui  parles  autorités iics  Pères  qui  ont 
écrit  a\ant  ce  concile,  et  qui  sont  reconnus 
pour  orthodoxes  des  deux  côtés.  Après  cette 
précaution,  il  faut  l'avertir  de  dire  anathè- 
me à  tous  ceux  qui  ne  confessent  pas  la  di- 
vinité de  Jésus-Christ;  puis,  prenant  la  per- 
sonne d'un  juif,  ou  de  Paul  de  Samosale, 
demandez  à  ce  monophysile  des  preuves  que 
Jésus-Christ  est  le  Dieu  très-haut.  «  C'est  la 
méthode  qu'a  suivie  Ammonius  contre  Julien 
d'IIalicarnasse.  »  La  marque  il  laquelle  il  dit 
qu'on  doit  distinguer  les  monophysites,  esl 
qu'ils  oll'rent  le  vin  pur  sans  mélange  de 
l'eau;  ce  qu'ils  fout  dans  la  persuasion  que 
Jésus-Christ  na  point  d'autre  nature  que  la 
divine,  et  qu'il  n'a  ni  corps  ni  âme. 

-4.  Anastase  met  en  pratique  tous  ces  prin-  c»p.  n 
cipes  dans  son  ouvrage  :  car,  après  avoir 
montré,  dans  une  exposition  de  foi,  que  les 
catholiques  reconnaissent  en  Jésus-Christ 
deux  nat\ires,  deux  volontés  et  deux  opéra- 
tions, il  explique  pour  plus  grande  clarté, 
et  pour  éviter  toute  éipiivoque,  non-seule- 
ment ce  que  c'est  qu'on  entend  par  nature, 
volonté,  opération,  propriété,  mais  encore 
tous  les  termes  usités  dans  l'Eglise  catholi- 
que, quand  ou  parle  des  mystères  de  la  Tri- 
nité et  de  l'Incarnation,  donnant  des  défini- 
tions particulières  de  chaque  terme.  Puis  il  ,„. 
pio[iose  toutes  les  hérésies  qu'un  orthodoxe 
doit  rejeter,  particu!ièrcme;il  celles  qui  ne 
confessent  pas  que  la  sainte  Vierge  est  mère 
de  Dieu  ;  qui  assurent  qu'il  y  a  deux  person- 
nes en  Jésus-Chiisl  ;  que  la  divinité  fut  sé- 
parée de  son  corps  sur  la  croix  et  dans  le 
tombeau  ;  qui  tiennent  une  foi  dilférontcde 
celle  des  conciles  de  Nicée,de  Conslani  inople, 
d'Ephèse,  de  Chalcédoine  et  des  anciens  Pères 
de  l'Eglise,  saint  Denis,  saint  Clément,  saint 
Irénée,  saint  .\mbroise,  saint  .\thanase,  plu- 
sieurs autres  qu'il  nomme.  Il  fait  en  peu  de  ir. 
mots  l'analyse  de  la  foi  sur  la  Trinité  et  sur 
l'Incarnation  ;  à  quoi  il  ajoute  le  catalogue 
de  ceux  qui  ont  attaqué  ces  mystères,  en  com- 
mençant par  Simon  le  .Magicien,  et  unissant 
à  Nestoi'ius.  Il  mai-que  son  respect  pour  les  ,.. 
cin(|  premiers  conciles  généraux,  et  son  atla- 
chcuient  pour  la  doctrine  qui  y  a  été  établie. 
Le  texte,  au  lieu  de  ciuq,  porte  six;  mais  ou 
l'autcui-  compte  pour  le  sixième  le  concile 
de  Conslautinople  que  saint  Flavieuasseiubhi 
ciiiilir  Eulychès,  ou  il  faut  admettre  qu'il  y 
a  faute  dans  le  texte. 


r.lIAPITRK  M.  —  ANASTASE-IJÎ-SINAITK,  PItftTHE. 


[V\l'  SIKCLE.] 

5.  Il  fait  voir  que  rii(5ri'sic  de  Sévère,  qui 
était  la  mémo  que  celle  d'Eiilychès,  tire  son 
origine  de  l'hérésie  dos  niaiiicliéeiis,  des  va- 
lenlinieiis,  des  inarcioniles  c(  des  ariens  ; 
qu'elle  a  été  coiiilaiiinée  iion-seideiuent  dans 
le  concile  deClialcédoine  avec  la  personne  de 
Dioscore,  mais  aussi  par  les  anciens  Pères  de 
ri'Inlise,  par  les  écrivains  sacrés  de  l'Ancien 
et  du  Nouveau  T(!stanicnt,  et  par  le  concile 
de  Nicée.  Les  passages  qu'il  rapporte  sont 
tirés  de  saint  Cyrille,  de  saint  Ambroise,  de 
saint  Grégoire  do  Nysse,  de  saint  Ampliilo- 
qne,  de  saint  Irénéo,  et  d'Antiociius  de  l'to- 
lemaïde,  qui  tous  oui  reconnu  deux  natures 
parfaites  unies  en  une  seule  personne  dans 
Jésus-Christ. 

6.  A  ces  témoignages  il  ajoute  les  raisons 
dont  il  s'était  servi  dans  une  dispute  publi- 
que avec  les  sévériens  et  les  théodosiens, 
c'est-à-dire  les  sectateurs  de  Théodose,  dis- 
ciple de  Sévère,  et  de  la  secte  des  corrupti- 
bles, 'l'héodose  avait  l'Ié  élu  patriarche  d'A- 
lexandrie, en  531,  par  le  crédit  de  l'impéra- 
trice ;  mais  les  muines  qui  n'avaient  pas  eu 
de  part  à  sou  ('lecliou  s'y  opposèrent,  le  chas- 
sèrent de  réalise,  et  intronisèrent  Gaïcn, 
archidiacre  d'Alexandrie,  qui  était  de  la  secte 
(lesphantasiastesou  incorruptibles.  Ces  deux 
sectes  domiuaieiit  dans  cette  ville.  Les  phan- 
tasiastes  soutenaient  que  Jésus-Christ  avait 
été  incorruptible;  craignant  qu'en  le  disant 
corruptible,  ils  ne  fussent  obligés  d'admettre 
une  distinction  entre  le  corps  de  Jésus-Claist 
et  le  Verbe  de  Dieu,  et  conséquerament  deux 
natures  en  Jésus-Christ.  Les  corruptibles  se 
fondaient  sur  sa  passion,  disant  que  ce  serait 
en  nier  la  vérité  que  de  le  dire  incorruptible. 
Mais  l'un  et  l'antre  de  ces  partis  suivait  les 
erreurs  d'Eutychès  :  c'est  pourquoi  Anastase 
les  combattit  également.  Pour  les  convaincre 
par  im  argument  tiré  de  la  cliose  même,  il 
dessina  dans  une  conférence  l'imago  du  Sau- 
veur attaché  sur  hi  croix,  avec  cette  inscrip- 
tion :  Le  Verbe  de  Dieu  sur  la  croix,  son  âme 
raisotnuilile  et  son  eoi-ps  ;  puis  il  demanda  à 
ses  adversaires,  lequel  des  trois  avait  souf- 
fert la  mort?  Us  répondirent  :  «Le  corps.  »  Il 
reprit  :  «  L'âme  raisonnable  n'a  pas  souffert, 
elle  n'est  donc  pas  morte?»  «Non,  Drcpliipiè- 
rent-ils.  Sur  quoi  il  ajouta  :  «  Comment  osez- 
vous  assurer  que  Dieu  le  Verbe  a  soutlèrt,  tan- 
dis que  vous  niez  que  l'âme  raisonnable,  qui 
est  sa  créature. soit  capable  de  sontlVir?i)II  ré- 
pond aux  passages  des  Pères  qu'ils  lui  objec- 
taient, que  les  Pères  eu  avançant  que  Dieu 


so-r 


avait  soulfert,  qu'il  était  mort,  l'entendaient 
non  selon  la  divinité,  mais  dans  la  chair,  dans 
la  nalure  humaine  à  laipielle  il  s'i'îlail  uni;  en 
disânl  quel.i  ch.iirdcb'SMS-CIn-islu'avail  plus, 
depuis  s(ui  nni(Mi,  les  propriiUésde  la  chair, 
ils  ont  parlé  d(!s  pro])riétés  accidentelles-, 
c'est-à-dire  de  celles  qui  sont  propres  à  no- 
tre natuie  depuis  le  péchiî  du  premi<u'  hom- 
me. En  couiiiarani  l'imion  de  la  nature  hu- 
maine avec  la  divine,  à  uiie  goutte  de  vi- 
naigre jetée  dans  la  mer,  ils  n'ont  pas  pré- 
tenilu  ([ue,  comme  cette  goutte  de  vinaigre 
dispaiail  ,  et  est  pour  ainsi  dire  ané'au- 
tie  par  son  m(Uange,  la  nature  buinaiue 
ait  été  aussi  anéantie  par  son  union  avec  le 
Verbe  ;  ils  ne  se  sont  servis  île  cette  com- 
paraison, que  pourmai-quer  la  différence  in- 
flnie  des  deux  natures,  dont  l'une,  comparée 
h  l'antre,  n'est  pas  plus  qu'une  goutte  de  vi- 
naigre par  rapport  à  la  mer.  Il  rapporte  la  so- 
lution qu'Ainmonius  d'.\lexaudrie  donna  à 
Julien  d'Halicarnasse,  qui  faisait  aussi  cette 
comparaison  ;  l'explication  i]ue  Sévérien  de 
Gabales  donnait  à  ces  paroles  de  saint  Paul: 
Tiiiite  1(1  jili'iiitnde  de  la  divinité  h<djite  en  lui 
corijorellcment.  Il  rejelte  une  autre  com]iarai- 
son  que  les  sectateurs  de  Sévère  faisaient 
de  l'union  de  l'âme  et  du  corps  dans  l'homme, 
avec  l'union  de  la  divinité  et  de  l'humanité 
dans  Jésus-Christ,  parce  qu'ils  prétendaient 
que,  comme  l'union  de  l'âme  et  du  corps  fai- 
sait un  tout  de  deux  parties  imparfaites,  il 
en  était  de  même  de  l'union  du  Verbe*avec 
la  nature  humaine  ;  mais  il  avoue  en  même 
temps  que  cette  comparaison  serait  receva- 
ble  en  un  certain  sens,  c'est-à-dire,  en  sup- 
posant l'union  d'une  nature  parfaite  en  elle- 
méuic  à  une  autre  nature  parfaite. 

7.  C'est  pourquoi  il  confesse  que  l'huma- 
nitt;  entière,  le  corps  et  l'âme  ont  été  unis 
personnellement  à  la  divinité  de  Jésu.s-Christ, 
comme  l'âme  est  unie  tout  entière  à  notre 
corps  ;  que  l'âme  et  le  corps  qui  ont  été  unis 
personnellement  au  Verbe,  lui  sont  soumis 
avec  toutes  leurs  propriétés;  qu'ils  sont  gou- 
vernés et  régis  par  le  Verbe  plus  pai-ticuliè- 
remeut  qu'aucune  autre  créature,  à  cause  de 
leur  union  plus  intime  que  n'est  celle  des 
autres  êtres  créés  avec  la  Divinité.  Il  con- 
seille à  ceux  à  qui  les  hérétiques  feraient  des 
propositions  au-dessus  de  la  portée  de  l'es- 
prit humain,  comme  de  savoir  pourquoi  le 
Fils  est  engendré  du  Père,  et  le  Saint-Esprit 
en  procède,  de  leur  en  proposer  d'autres 
avouées  de  tous  les  catboliques,  par  exem- 


Colons.  Il 


Cap.  XTni, 

XIX. 


598 


HISTOIRE  GÉN'I^RALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


C-i'  vx" 


pie,  quelle  preuve  on  a  que  Moïse  soit  au- 
teur du  livre  de  la  (jcnèsc. 

8.  Eusuite  il  fait  outrer  eu  dispute  un  or- 
thodoxe avec  les  paianites  ou  incorruptibles. 
L'orthodoxe,  pour  tes  convaincre  (|ue  le 
corpsde  Jésus-Christ  a  ùtc  corruptible  dès  le 
moment  de  son  union  avec  la  divinité,  leur 
parle  en  ces  termes  :  "  Puis(pie  vous  dites  ' 
que  le  corps  de  Jésus-Christ  a  été  incorrup- 
tible dès  le  moment  de  l'union,  aussi  bien  (jue 
kl  divinité,  dites-moi  si  la  comnnniion  du 
sacré  corps  et  du  sang  de  Jésus-Christ  que 
vous  oUrez,  et  à  laquelle  vous  participez, 
n'est  pas  véritablement  le  vrai  corps  et  le 
sang  de  Jésùs-Christ^Fils  de  Dieu,  ou  si  c'est 
de  simple  pain,  tel  que  l'on  en  vend  au  mar- 
ché, ou  uue  figure  du  corps  du  Christ,  tel 
qu"était  le  sacrifice  du  bouc  qui  était  oll'crt 
par  les  Juifs?  »  A  cela  le  gaianile  répond  : 
(i  A  Dieu  ne  plaise  que  nous  disions  que  la 
sacrée  communion  est  la  tiguie  du  corps  de 
Christ,  ou  de  simple  pain;  mais  nous  rece- 
Yous  véritablement  le  corps  même,  et  le  sang 
même  de  Jésus-Christ,  qui  s'est  incarné  et 
qui  est  né  de  la  sainte  Mère  de  Dieu,  Marie 
toujours  vierge .  »  L'orthodoxe  réplique  : 
<i  C'est  *  ce  que  nous  cro3'ons  et  que  nous 
confessons  aussi,  selon  la  parole  que  Jésus- 
Christ  dit  à  ses  apôtres  dans  la  cène  mysti- 
que, lorsqu'il  leur  donna  le  pain  vivifiant. 
Prenez,  dit-il,  et  maniiez,  ceci  est  mon  rurps  ; 
et  en  leur  donnant  le  calice,  il  leur  dit  :  Ceci 
est  mdh  sang.  Il  ne  leur  dit  pas,  Ceci  est  la  fi- 
gure et  l'antitype  de  mon  corps  et  de  mon 

'  Orlhodoxus  ;  Sed  die  inilii,  olmecro,  si  ut  divi- 
nit'is,  il"  H  corpus  Christi  et  ab  ipso  vnionis 
exordio  immorlalitalcm  hahel,  num  coitnnviiio 
siuratissimi  eorjioris  et  sanijuiiiis  Cliiisli.  quam 
olfers  et  participas,  vere  est  nrvni  corpus  et 
sanguis  Chrintt  FiliiVei,  rcl  iiudus  punis,  quiilis 
osliatim  venditur,  vel  vicrm  duintajat  cl  fiyuram 
gerit  corporis  Christi,  ul  sacnpciuut  hirci  quod 
judwi  ojfcrunl!  Caianita:  Absit  ut  dicniiius  sa- 
crum cnmniunionem  esse  tui^luiit  fiijiiram  corpo- 
ris  Christi,  aut  nuduin  panem;  sed  ipsum  corpus 
et  sanguiiiem  Christi  l'ilii  Dti  iiicarmili,  et  ex 
sanctissima  Deipara  et  seviper  Virgine  Marin  na- 
ti  vere  accipivius.  Aiiasla?.,  in  Odego,  en]>.  vxiii, 
jiag.  855. 

»  Orlhodoxus:  Sic  crediwus  et  sic  confitewur 
juxtn  dictvm  Christi  ad  discipulos  m  cann  viys- 
tyca  dantus  illix  viri/icuni  panem  :  Ai-ii|iilc  l'I  m- 
iiicdile,  hoc  csl  oor|iiis  iiifiuii.  Siniitiler  et  vali- 
ccm  dedil  illis  dicens :  llir  est  sanguis  meus.  Ao» 
dixil:  Hoc  est  figura,  scu  qvinl  trires  gcril  ror- 
poris  et  sanguinis  inei.  Kl  pluribus  aliis  locis 
ait  Chrislus  :  Cliii  iiiniKlmal  iiiiain  eariieiu  el  lii- 
bit  inciim  snn^uiiii'iii,  iial)«t  vilain  a'tcinaui.  Cum 
igitur  ipse  Chrislus  fateatur,  vere   esse   corpus 


sang;  et  de  même  en  plusieurs  autres  lieux  : 
Celui,  dit-il,  gui  mange  mu  chair  et  beiit  mon 
sang,  a  la  vie  éternelle.  Puisque  Jésus-Christ 
déclare  que  c'est  son  corps  el  son  sang  qui 
est  reçu  par  nous  autres  fidèles,  apportez- 
moi  quelque  chose  de  la  communion  de  votre 
église  que  vous  croyez  la  plus  orthodoxe  de 
toutes,  et  nous  mettrons  dans  uu  vase  avec 
toute  sorte  de  révérence  ce  saiuicorps,  et  ce 
sacré  sang  de  Jésus-Christ  ;  et  si  dans  l'es- 
pace de  quelques  jours  il  ne  reçoit  aucun 
changement  ni  altération,  il  paraîtra  que  c'est 
avec  raison  que  vous  dites  que  le  corps  du 
Christ  a  été  incorruptible  dès  le  moment  de 
son  incarnation;  mais  s'il  est  corrompu  el 
altéré,  il  faudra  nécessairement  admettre 
l'une  de  ces  choses;  ou  ce  que  vous  pre- 
nez n'est  pas  le  vrai  corps  de  Jésus-Christ, 
mais  une  simple  fit;ure;  ou  à  cause  de  vo- 
tre mauvaise  doctrine  le  Saint-Esprit  n'est 
point  descendu  dans  les  dons;  ou  le  corps 
de  Jésus-Christ  avant  la  résurrection  était 
sujet  à  la  eori  uplion,  puisqu'il  a  été  immolé, 
mis  à  mort,  blessé,  divisé,  mangé;  au  heu 
qu'une  nature  immortelle  ne  peut  ni  être 
divisée,  ni  recevoir  de  plaies  dans  ses  mains 
ou  dans  son  côté,  ni  ètie  mise  à  mort,  ni 
être  mangée;  et  ou  ne  peut  la  tenir  entre  les 
mains  ni  la  loucher,  comme  il  parait  par  les 
natures  incoiruplibles  de  l'âme  et  de  l'ange.» 
L'oitliodoxe  avait  dit  plus  haut  contre  Timo- 
tliée,qui  délendail  le  parti  desacéphales  :  «Ti- 
mothée  '  est  donc  un  impie  en  disant  que  la 
natm'e  de  Jésus-Christ,  après  l'incarnation,  est 

suum  et  sanguincm  guem  nos /idcles  sumimus  ; 
agedum  adfcr  nobis  aliquid  ex  communionc  rés- 
ine Ecclesiu',  tanquam  supra  omîtes  alias  Eccle- 
sias  orthodoxa;  et  in  vase  cum  omni  honore  el 
rcvereutia  rejionemus  hoc  sanctum  corpus  Chris- 
ti el  sanguincm;  el  si  inlra  paucos  dics  non  cor- 
rumpatur  aul  immutelur,  aul  altcretur,  pta- 
nuni  fiel  nos  recte  adscrere  coi^pus  Christi  ub ip- 
so incarnationis  exordio  corrujitionis  crpers  esse; 
si  vero  corrumpatur  aut  imniulciur,  nccessarium 
erit  ul  unum  e  duobus  fuUamini:  aut  id  quod 
sumimus,  non  esse  rrruni  corpus  Christi,  sed  so- 
lani  figurum  et  quasi  licanum  guoddam  ;  aul 
])roptcr  pcrrersam  /idem  vrstrnm  Spirilum  Sanc- 
tum in  iltud  non  dcsctndisse  :  aul  corpus  Chrixli 
ante  rcsurrvctionem  corru}itioni  subjrclum  esse 
ulpote  immntatum,  morti  traiUlum,  vulncralum, 
dirisuni  et  manducatum.  Xnm  inimorlalis  natu- 
ra  neque  scinditur,  ncque  tolère  cl  manibus  vul- 
iieralur,  nique  in  parles  du  idilur,  nec  niorli  du- 
lur,  iicijuc  uinndiicatur;  ncque  trneri  polrst.  ne- 
que  Uuigi;  ni  palet  exeniplo  incorruplihiliumna- 
tururuni  ungcii  et  anima:  Aiiaplas.,  tliid. 

•'  Inipius  igitur  est  Timolhcus,  cum  ait  :  Naliira 
Cliristi   [losl  iucaruatioueiu  est  sola  Uivinilas,   Si 


\\n°  SIÈCLE. 


CHAI'ITllE  Ll.  —  ANASTASE-LE-SINAITE,  PRETRE. 


la  divinité  loiile  seule  :  car,  si  Jésus-Christ 
n'est  que  divinité,  comme  la  divinité  est  in- 
visil)le  et  incapable  d'être  maniée  et  d'élie 
sacrifiée,  ijn'eile  ne  pent  étie  divisée,  comme 
ne  peut  être  nianuc-e,  il  est  clair  que  Tinin- 
tliée  nie,  comme  les  Juifs,  le  sacrilice  et  la 
communion  des  sacrés  mystèies,  et  qu'il  ne 
croit  pas  et  ne  confesse   pas  que  ce  qn'il 
donne  au  peupln,  en  lui  disant  :  Le  co}-/>s  et 
le  sang  de  Jéstts-C/irist  notre  Dieu  et  notre  Snit- 
vcur,  est  dans  la  vérité  le  corps  et  le  sang  vi- 
sible, créé  et  terrestre  de  Jésus-Christ.  Car, 
ptiisipi'il  dit  que  la  divinité  seule  constitue 
la  nature  de  Jusus-Ghrist,  et  qu'il  r<;pugne 
entièrement  à  la  nature  divine  d'être  tenue, 
brisée,  divisée,  froissée,    répandue,   vid(''e, 
changée,  coupée  par  les  dents;  il  faut  que 
Timothée  tombe  de  loulenéccssilé  dans  l'un 
de  ces  deux  abimes,  ou  d'affirmer  que  la  divi- 
nité est  sujette  au  changement  et  ;'i  l'altéra- 
tion, ou  de  nier  le  corps  et  le  sang  de  Jésus- 
Clu-ist,  lequel  il  oll're  et  mange  lui-même  dans 
le  sacrifice  mystique,  et  qu'il  donne  au  peu- 
ple en  lui  disant  :  le  Corps  et  le  sang  de  Jé- 
sus-Christ, notre  Sauveur  :  car  il  devrait  plu- 
tôt lui  dire,  selon  son  opinion  :  la  seule  divi- 
nité de    Notre-Seiuneur  Jésus-Christ.  Mais 
c'est  que  l'incaniation  passe  pour  une  fable 
dans  l'esprit  de  Timothée.  «  Le  gaïanite  ré- 
pond :    «  N'y  a-t-il  pas  plusieurs  Pères  qui 
ont  assuré  que  le  corps  de  Jésus-Christ  est 
incorruptible  ?  »   L'orthodoxe  convient  que 
le  corps  de  Jésus-Christ  a  été  exempt  de  la 
corruption  qui  est  une  suite  du  péché,  et  que 
c'est  en  ce  sens  que  les  Pères  l'ont  appelé 
incorruptible;  mais  qu'aucun  ne  lui  a  attri- 
bué une  incorruptibilité  absolue  ;  qu'au  con- 
traire saint  Alhanase  a  écrit  en  teimes  exprès 
que  le  corps  de  Jésus-Christ  était  corruptible, 
parce  que  Marie  avait  été  créée.  Il  ajoute  que 


899 

s'il  n'était  pas  corruptible,  on  ne  pourrait 
concevoir  comment  ilnouscslconsubstanticl, 
ni  comment  il  est  de  la  race  d'Abiahani.  11 
cite  siu'  ce  sujet  un  passage  de  saint  Ilippo- 
lyle,  qu'il  appelait  évèque romain, apparem- 
ment parce  qu'il  le  croyait  évoque  de  l'orto, 
et  il  finit  son  traité  par  un  antre  passage  de 
saint  Denis  l'Aréopagite,  où  il  fait  voir  que 
le  Fils  seul,  h  l'exclusion  du  Père  et  du  Saint- 
Esprit,  s'est  incarné  ;  d'où  il  infère  que,  dans 
cette  proposition  de  saint  Cyrille  :  ll  y  a  une 
nature  du  Verbe  incarnée,  le  tei-me  de  nature 
se  prend  pour  la  persoime  du  Verbe,  et  non 
pour  la  nature  divine.  Au  reste,  ce  traité  au- 
rait besoin  d'être  revu  et  corrigé  sur  de  meil- 
leurs manuscrits  que  celui  d'Augsbourg,  sur 
lequel  il  a  été  donné  par  Gretser.  Le  fil  en 
est  coupé  par  quantité  de  transpositions  :  ce 
qui  lui  donne  plus  l'air  de  mémoires,  que 
d'un  ouvrage  suivi. 

9.  Il  y  a  plus  d'ordre  et  plus  de  suile  dans 
les  considéialions  anagogiques  sur  l'Hexa- 
méron,  on  l'ouvrage  dessixjoursdela  créa- 
tion; mais  on  ne  peut  en  tirer  de  grands  se- 
cours pour  l'intelligence  de  l'histoire  et  delà 
lettre,  parce  qu'il  y  explique  presque  tout  dans 
un  sens  mystiqne  et  allégorique  ;  en  avertis- 
sant '  toutefois  qu'il  ne  prétend  pas  détruire 
lelittéral,  niblâmer  les  explications  littérales 
que  lesPères  ont  données  de  la  création.  Il  dé- 
dia cet  ouvrage  à  Théophile,  qu'il  appelle  son 
fils.  Cet  écrit  est  cité  sous  le  nomd'Anastase 
Sinaïte  par  Michel  Glycas,  et  divisé  en  liouze 
livres.  Nous  avons  les  onze  premiers  dans  les 
Biblothèques  des  Pères,  imprimées  à  Paris 
en  1579,  à  Cologne  et  ailleurs,  et  à  Lyon 
en  1677;  mais  seulement  en  latin;  le  traduc- 
teur n'est  pas  connu.  Le  deuxième  parut  a 
Londres  en  grec  et  en  latin,  en  1682,  de  la 
traduction   de  M.  Dacier  -.  On  a  des  fras- 


Consldéra- 

l'ons  îLDafïo- 
(  iqi:cs  sur  la 
Cl  ;i'ion  du 
ni"iidi?.  Tom. 
IV  BilMot. 
Pat.  867. 


far  aDoal. 
{.a;.  8  et  âG, 
edir.  Venetœ, 
an.  Vrl'j. 


enim  Chrislus  est  sola  divinitas,  divinitas  rero  sub 
visum  et  tadum  non  cadit,  neque  sacrilicari  po- 
tesl  membrorum  siniul  et  esvs- expers  ;  iitiuido 
con/îcilur  Timotheiim  Judœorum  instar  in/iviari 
sacri/icium  et  comninnionem  sacratissiniorum 
wysterioruni  corporis  et  sanguinis  Chrisli,  risi- 
bile,  crcatum  et  terrestre  esse,  quodofferen.-i  tra- 
dit  hia  verbis  populo:  Corinis  et  Saui-'uis  Douiiui 
et  Uei  et  Salvatoris  Cliristi.  Si  enim  solam  diiini- 
latem  naluram  Cliristi  eifse  asserit,  lencri  autem 
et  frangi,  et  dividi,  et  in  partes  distrihui,  et  ef- 
fundi,  et  exliaiiriri,  et  transmiitari,  et  dentibus 
conteri,  a  divinitate  prorsns  ahhurrel,  in  alteni- 
Iram  loceam  Timollieus  incidat  oportet.  ut  aul  di- 
vinitatem  passibileni  et  mutabilem  statuât,  uut 
neget  corpus  et  sanguinem  Chrisli,  quœ  offtrt  et 


vianducat  in  myslica  mensa,  Iraditque  his  verbis 
populo  :  Corpus  et  Sauguis  Douiiui  nosiri  Jesu 
Chiifti.  Debebat  enim  jirorsus  sumentem  ilaallo- 
qiii:  Sola  divinitas  Uoiuini  nostri  .lesu  Cliristi.  Ye- 
runt  incarnatio  apiid  Timotlieum  fabulœ  locum 
obtinet.  Anasta?.,  in  Odego,  eap.  xui,  pag.  810. 

'  Cœterum  lilleram  qiiidem  minime  dissolveu- 
tes,  vernm  ab  oplimo  et  benignissimo  Sancto  Spi- 
ritu  sensum  mystice  absconsum  intra  littcram 
inquirentes,  primvm  hoc  considcramus  in  corpo- 
ribus.  Anaslas.,  lili.  I  in  Hexwm.,  pag.  8()0. 

-  On  n'est  pas  il'aceorcl,  dit  lloiiuianu,  Lexicon 
Bibliographicum,  si  ou  doit  attribuer  cet  opus- 
cule à  Aiiastase  Sinaïte,  ou  à  un  autre  Auastase. 
[L'éditeur.) 


600 


ITTSTnïïtE  GÉNÉRALE  DES  AUTEUnS  ECCLÉSIASTIQUES. 


t'e  que  CCI 
liTie*  coDtira* 
oeDi  de  re- 
mtnjuibie. 


tr*rat.         in 
U  ex  ir  m  r  r  • 


Idem.lib.  I, 


Actor.,  vit, 


ments  orrcc?  dos  autres  livres  Jans  los  noies 
de  Frnnfnn-le-Duc  sur  rHi'xaun'ion  de  saint 
Basile,  dans  Allatius  *  contre  Hotlinger  et 
sur  Eustatlie  d'Anlioche,  dans  les  Hexaples 
d'0^ilr^^e  par  le  P.  de  Monifaacon,  dans  les 
Noies  '  du  P.  le  Quien  sur  saint  Jean  Panias- 
cène,  et  dans  le  Spicil^ge  '  de  Grabe.  Ce 
dernier  avait  mémo  promis  '  de  les  donner 
tout  entiers  en  grec;  il  ne  l'a  pas  fait. 

10.  .\nastase  cite  les  commentaires  de 
saint  Cyrille  sur  la  Genèse,  ceux  d'Ammonius 
d'Alexandrie  sur  l'Hexaméron,  qui  n'étaient 
qu'un  recueil  de  passages  de  quelques  an- 
ciens sur  le  même  sujet.  Ammonius  disait 
que  plusieurs  étaient  tombés  dans  l'eireur 
pour  avoir  voulu  interpréter  l'Écriture  à  la 
lettre,  sans  reconnailrc  que  l'Eglise  y  était 
figurée  en  beaucoup  d'eudroit?.  Anastasecite 
aussi  les  commentaires  de  saint  Basile  sur 
l'Hexaméron,  Clément  d'Alexandrie  et  Pan- 
tène,  prêtres  de  la  même  église,  avec  quel- 
ques autres  anciens,  qui  ont  reconnu  quolnu- 
vrage  des  six  jours  devait  tellement  s'expli- 
quer à  la  lettre,  qu'on  l'entendît  encore  de  l'É- 
glise de  Jésiis-Cbrist.  Il  remarque  (ju'Orpliée, 
en  parlant  de  Dieu'^,  l'apiielle  Mnnade,  c'est- 
à-dire  unité  ou  indivisible  ;  que  Moïse  n'a  pas 
mis  son  nom  à  la  l(Me  de  ses  écrits  comme  ont 
fait  les  autres  prophètes,  parce  que  ces  écrits 
sont  moins  de  lui  que  des  anges,  par  le  minis- 
tère desquels  on  rapporte  de  saint  Etienne  ",  il 
avait  appris  ce  qu'il  rapporte  dans  la  Genèse  ; 
que  ''  les  anges  ont  connu  rincarnatiou  iivant 
son  accomplissement,  mais  sans  en  connaître 
la  manière;  que  '  saint  Pierre  et  saint  Paul 
sont  morts  l'un  et  l'autre  à  Rome  ;  que  °  ceux 
qui  reçoivent  le  baptême  dans  un  esprit  de 
dissimulation,  comme  Simon  le  Magicien, 
n'y  sont  point  véiitablemcnt  régi-nérés  ;  que 
Dieu  '"  donne  des  anges  gardiens  aux  nou- 
\eaux  baptis('s;  que  l'Epîlre  aux  Hébreux  est 
de  saint  Paul  ";  que  les  enfants,  tomu'.e  les 
adultes  reçoivent  dans  le  baptême  lajémis- 
sion  du  péclié  originel.  Il  parle  des  éciits 
d'un  diacre  d'Alexandrie  nommé  Olympio- 
dore  ",  et  d'un  commentaire  de  saint  Justin, 


martyr,  sur  le  sixième  jour  delà  création,  il 
dit  que  ce  Père,  de  mèiuc  que  Pliilon,  con- 
temporain des  apôtres,  Papias,  saint  Irénée, 
Paulène  et  Clément  d'Alexandrie,  ont  inter- 
prété de  l'Église  ce  que  l'I-^criturc"  rapporte 
du  paradis  terrestre  ;  que  d'autres,  prenant 
à  la  lettre  ce  qui  est  dit  des  apparitions  de 
Dieu,  des  discours  du  serpent,  sont  tombés 
dans  des  erreurs  considi'i  ables  :  les  uns  s'é- 
tant  imaginés  que  Dieu  avait  une  forme  cor- 
porelle ;  les  autres,  croyant  devoir  aux  coa- 
scils  du  serpent  la  propagation  du  genre 
Immain,  lui  en  ont  rendu  des  actions  de  grâces, 
et  ont  ])orté  le  nom  d'opliitcs,  c'est-à-dire 
serpentins.  11  cite  un  livre  intitulé  :  Testament 
de  nos  premiers  jK'rcs,  dans  lequel  il  était  dit 
qu'Ad.im  avait  été  mis  tiaus  le  paradis  ter- 
restre le  quarantième  jour  depuis  sa  création, 
et  il  remarque  que  ce  livre  n'était  pas  dans 
le  canon  des  Juifs,  et  qu'un  certain  bistorien 
et  clironologiste,  nommé  Pyrrhon,  avait  dit 
la  même  chose.  Il  blâme  Origène  ",  comme 
ayant  méprisé  dans  ses  commentaires  le  sens 
historique,  pour  ne  s'attacher  qu'à  des  allé- 
gories imaginaires  dans  les  explications 
qu'il  a  donm-es  de  l'Hexaméron  ;  et  il  croit 
pour  ce  sujet  condamné  avec  justice  dans 
un  concile.  Au  contraire,  il  loue  beaucoup 
les  commentaires  qu'ont  faits  sur  le  même 
sujet  saint  .Anabroise,  saint  Basile,  saint  Chry- 
sostômc,  Théodore  d'Anlioche,  Sévère  de 
Cabales,  Eusèbe  d'Eraèse,  saint  Epiphane, 
saint  Cyrille  et  Théophile  '",  parce  qu'ils  se 
sont  tous  appliqués  à  donner  le  sens  de  la 
lettre.  Il  dit  que  saint  Luc  traduisit  en  grec 
l'Évangile  hébreu  de  saint  Mathieu  '".  Il 
lombeuneseconde  foissurOrigène,  endisant, 
qu'apiès  avoir  travaillé  utilement  pour  l'É- 
glise en  interprétant  tous  les  livres  de  l'É- 
criture, il  avait  abandonné  la  vérité,  de  même 
qn 'Eusèbe  de  Césarée".  Il  traite  Aqnila  d'im- 
pie, pour  avoir  mal  tjaduit  un  passage  de 
l'Écriture,  l'expliquant  en  un  sens  qui  ten- 
dait à  faire  Lieu  menteur.  C'est  qu'au  lieu 
que  nous  lisons  :  Faisons  à  l'/iamnie  une  aide 
f/iii  lui  suit  scmblaù/e,  il  ti'aduisait  :  Faisnns- 


•  Allntius  contra  Hottinger,  pag.  158,  et  ad  Eus- 
lalh.,  pag.  136.—  »  Toiii.  I,  png.  ilK. 

'  Toiti.  Il  Spicilegii  l'ai  ,  png.  195  ni  2i3. 

'  ll.id.,  png.  245.  —  »  Itiiil.,  png.  864.—  «  Lit).  Il, 
pag.  80!),  866.  —  '  l.ll).  IV,  pnp.  873.—  "  Ibid.,  pag, 
876.-9  Lit).  V,  pag.  879,  880.-'"  Lit..  VI,  pag.  885. 

"  Lavacrum  coriim  qui  linptiznvtiir  in  Chrislo 
habel  rrram  et  pirffrtnm  nhUttionem  jirimi  Jia- 
rcnfis  Adam  abnegatioms  et  pcccati,  proplcr  quam 


cette  rausam  ii  fantes quidam  ilhiminati,  eum  sint 
ab  omni  peccato  niiindi,  el  Spiritvm  acrcprrint,  et 
Clirittlinn  sint  indtiti;  ,<a';r  ih  ij'fa  hora  aul  post 
baplixwiim  deceilnnt  niilli  rvipœ  aultilioaflinrs, 
sed  saiirli,  ul  testulur  Pauliis.  Annsla?,,  Ijh.  VI 
in  Hexameron.,  pan.  sSS. 

"  l.ili.  Vil,  png.  887.— "Ibib.,  png.893.— "Ibid., 
pag.  8!)r>.—  1»  l.ib.  VIII,  png.  8;i0.  -  '"  Ibid.,  900. 

n  Lib.  l.\,  pag.  902. 


CHAPITRE  LI.  —  ANASTASE-LE-SINAITE,  PRÊTRE. 


[vu*  S1KCI.E.] 

lui  une  aide  qui  lui  soit  op/x)sée  et  son  ennemie, 
Anastase  fail  profnssion  de  suivre, comme  son 
iiiailiT,  Etistallic  irAiiliodic,  iiii'il  qualiliede 
|irt'(lioateiir,  marlyrot  docloiirdii  concile  de 
Nicri'  '.  Il  relève  l'ei-rciir  d'Oiij-ène  sur  la 
préexistence  des  âmes,  et  dit  ((u'elle  a  été 
solidement  réfutée  par  Métliodius  '.  Il  l'ac- 
cuse aussi  d'avoir  nié  la  rt'surroclion  des 
corps.  Il  cite  les  Ilexaples  '.  mais  sans  dire 
que  cet  ouvrape  fut  de  cet  interprèle.  Sur  ces 
paroles  :  «  Dieu  fit  sortir  l'iionimc  du  paradis 
terrestre,  de  peur  que,  mangeant  du  fruit  de 
l'arlire  de  vie,  il  ne  vécût  élernellenient,  » 
il  se  propose  cette  question  :  Si  tons  ceux 
qui  mangent  dans  l'Église  le  pain  de  vie 
viviont  étcrnellenienl  ,  en  sorte  qu'aucun 
d'eux  ne  soit  comlainné  aux  supplices  éter- 
nels '  ?  11  répond  que  plusieurs  ont  mangé  de 


001 


buer  ces  questions,  puisque  l'auteur  écrivait 
après  la  mort  de  saint  Eulogo  d'Alexandrie, 
ariivée  en  fiOS ;  et  depuis  ipie  Jean  était  de- 
venu iiatriarclie  de  cette  ville  pour  les  lliéo- 
dosiens,  ce  qui  n'arriva  qu'en  G77.  Il  vaut 
donc  mieux  s'en  tenir  à  l'opinion  commune, 
qui  donne  les  Questions  à  Anastase-le-Sinaïte, 
dont  elles  portent  le  nom  dans  plusieurs  ma- 
nuscrits, et  ;\  qui  elles  sont  attribuées  parle 
solitaire  Philippe  ',  qui  écrivait  vers  l'an 
nos.  On  objecte  que  l'on  cite  divers  auteurs 
plus  récents  qu'Anastase-le-Sinaïte,  savoir 
saint  Jean  Cliraaque,  saint  Maxime  et  quel- 
ques autres;  que  l'on  y  rapporte  un  canon 
du  concile  in  Trullo  qui  ne  se  tint  qu'en 
G02;  que  l'auteur  y  compte  sept  cents  ans 
depuis  que  les  Lieux-Saints  avaient  été  remis 
au  pouvoir  des  catholiques.  Mais  on  peut  ré- 


ce  pain,  et  sont  morts  éternellement,  comme      pondre,  qu'il  n'y  a  aucun  des  écrivains  cites 

dans  ces  Questions,  qui  n'ait  écrit  avant  l'an 
602  ;  que  le  concile  in  Trullo,  s'étant  tenu 
en  cette  année,  a  pu  être  cité  par  Anastase- 
le-Sinaïte,  qui,  né  sur  la  fin  de  l'empire  de 
Maurice,  c'est-à-dire  veis  l'an  6U0  ou  602,  a 
pu  aisément  vivre  au-delà  de  692;  qu'au 
lieu  de  lire  sept  cents  ans  depuis  la  restitu- 
tion des  Lieux-Saints  aux  catholiques,  il  faut 
lire  vingt-sept  ans,  les  copistes  '  ayant  pu 
facilement  se  tromper  à  cause  de  la  ressem- 
blance des  termes  grecs,  et  prendre  Fpta  kai 
eikosi  pour  Eptacosioi.  Au  reste,  quand  il  se 
trouverait  quelques  auteurs  plus  récents 
qu'Anastase  cités  dans  ces  questions,  ce  ne 
serait  pas  une  raison  suffisante  pour  les  lui 
ôter.  Ce  n'est,  pour  ainsi  dire,  qu'une  com- 
pilation de  passages  et  d'autorités  des  Pères 
et  des  conciles,  à  laquelle  on  a  pu  ajouter 
dans  tous  les  siècles.  Aussi  les  manuscrits 
varient-ils  beaucoup,  même  sur  le  nombre 
des  questions.  Gentien  Hervet  n'en  avait  dans 
le  sien  que  %\.  Ceux  de  la  Bibliothèque  de 
Coislin  '  en  comptent  156.  Les  manuscrits 
de  la  Bibliothèque  du  Roi  rapportent  plu- 
sieurs passages  qui  ne  sont  ni  dans  l'édition  , 
de  Gretser,ni  dans  celle  dHervet.  Turrien'" 
dit  en  avoir  vu  dans  la  Bibliothèque  de  Mes- 
sine, où  l'on  ne  citait  ni  saint  Épiphane,  ni 
saint  Grégoire  de  Nysse.  Ces  deux  Pères  sont 
cités  dans  les   manuscrits  du   Vatican,  sur 

rat.  Philippus  Solitar.,  lib.  IV.arf  Callinicimn  Mo- 
nachitm,  pag.  150. 

8  Fabriiiu5,  toui.  IX  Bihlioth.  Grœca,  pag.  324. 

3  Moiitfaucou,  Bibl.  Coisliniana,  pag.  188,  189. 

'»  'ïun'iea, Prœfat.Gretser.  in  quœsliones  Anas- 


Judas,  Simon  le  Magicien,  et  les  Corinthiens 
doniparicsaint  Paul,  parcequ'ils  l'ont  mani;é 
indignement  ;  qu'il  y  en  a  au  contraire  beau- 
coup dans  les  déserts,  qui,  privés  de  cette 
divine  nourriture,  ne  laisseront  pas  de  pos- 
séder la  vie  éternelle ,  leur  union  avec 
Dieu,  les  rendant  comme  participants  de  son 
corps,  étant  eux-mêmes  le  pain,  le  corps  et 
le  sang  de  Dieu,  sa  maison,  sont  emplc,  l'au- 
tel et  rholocauste ,  l'oblation  et  l'onction 
sacrée.  D'où  il  infère,  que  par  l'arbre  de 
vie  il  faut  entendre,  et  la  manducation  du 
corps  et  du  sang  de  Jésus-Christ  ^  et  son 
union  avec  l'homme  qui  mange  ce  corps  et 
boit  ce  sang  précieux.  Il  renvoie  à  d'autres 
plus  doctes  et  plus  habiles  que  lui  pour  sa- 
voir quelle  est  la  véritable  manducation  de 
la  chair  mystique  de  Jésus-Christ  ",  et  quel 
est  son  sang  ineffable  enfermé  dans  cette 
chair. 
Le-  liv  1 1 .  Des  cent  cinquante-quatre  questions  im- 
•..i.i>o  le  SI-  primées  par  les  soins  de  Grefser  à  Inaolstat, 
en  1617,  sous  le  nom  d'Anastase  le  Sinaïle, 
il  y  en  a  quatre-vingt-treize  qui  avaient  déjà 
été  données  en  latin  par  Gentien  Hervet,  et 
imprimées  dans  les  Bibliothèques  des  Pères 
sous  le  nom  d'Anastase  de  Xicée.  On  trouve 
un  Anastase  de  Nicée  parmi  les  évêquesqui 
assistèrent  au  concile  de  Consfantinople  sous 
Mennas,  en  336;  mais  on  ne  peut  lui  attri- 

•  Lib.  L\,  p,ig.  903.  —  '  Lib.  XI,  p.ng.  920.  — ».Lib. 
XII,  pag.  7.  —  *  ll)i(l.,  pag.  16.  —  6  Ibid.,  pag.  20. 

«  ItiicJ.,  19. 

■  Fidelem  et  Dec  afflatiim  daho  tcstem  vomine 
Anastasium,   cognomento  Sinditam,  doccntem  et 


Quist.  in. 


scribenlem  clare  svper  his  quœ  interrogatus  fue-      tas». 


602 


HISTOIRE  GÉXÉRALE  DES 


Ce  qiill  y» 
<ïo  remarqua- 
ble dan<  cr» 
Questions. 

Qar  I,  I, 


lesquels  Grelser  a  donné  sou  édition.  Avant 
qu'elle  parut,  on  avait  imprimé  à  Pont-:\- 
Mousson,  en  lo92,  avec  des  lujtes,  plusieurs 
des  passades  cités  par  Anastase,  savoir,  ceux 
qui  étaient  tires  des  écrits  de  saJnl  Hippo- 
lyte,  d'Eusèbe,  de  Sévère  d'Antioche,  de 
saint  Cyrille  d'AlesaïuIrie.de  saint  Basile,  de 
saint  Epiphane  et  de  saint  Chrysostome.  Les 
antres  Pères  cités  dans  les  questions  d'Ana- 
stase  sont  saint  Clément  Romain,  saint  Gré- 
goire de  Xvsse,  saint  Cyrille  de  Jérusalem, 
saint  JeanClimaque,  le  moine  Marc,  le  moi- 
ne Maxime,  Pallade,  Uiiidocbus,  saint  Isi- 
dore dePéluse,  saint  Nil  moine,  Nicéphore, 
évéque  de  Gonstantinople,  saint  Denis  l'A- 
réopagite,  saint  Grégoire  de  Xazianze,  ïliéo- 
doret,  saint  Alhanase,  Sérène,  Joseph,  saint 
Clément  d'Alexandrie,  Olympiodore,  Némé- 
sius,  saint  Denis  d'Alexandrie,  Origène,So- 
Ijhrone  et  saint  Irénée.  Mais  il  ne  met  pas 
des  passages  de  chacun  de  ces  Pères  sur  cha- 
que question.  Il  en  rapporte  seulement  de 
ceux,  on  qui  les  ont  traitées,  ou  qui  ont  dit 
quelque  chose  qui  puisse  servir  à  les  résou- 
dre. Avant  de  les  rapporter,  il  met  ordinai- 
rement des  passages  de  l'Écriture  qui  ont 
rapport  à  la  question  proposée.  Gretser,  en 
rendant  public  cet  ouvrage,  l'a  enrichi  de 
quelques  notes,  que  l'on  n'a  pas  eu  soin  de 
distinguer  du  texte  même  dans  la  Bibliothè- 
que des  Pères  imprimée  à  Lyon,  en  1677  ;  ce 
qui  cause  de  l'embarras  au  lecteur. 

12.  Entre  plusieurs  maximes  utiles  qui 
sont  renfermées  dans  ces  Questions  ',  on 
peut  remarquer  les  suivantes.  «  Quoique  l'on 
ne  puisse  être  vrai  chrétien  sans  la  foi  et  les 
bonnes  muvres,  ces  choses  ne  suUisent  pas 
pour  rendre  un  homme  parfait  chrétien,  par- 
ce qu'il  peut  tirer  vanité  de  sa  foi,  ou  de  ses 
œuvres;  il  est  donc  nécessaire  qu'il  les  ac- 
compagne d'humilité.  11  y  avait  chez  les 
Grecs  des  espèces  de  moines  qui  passaient 
leur  vie  dans  le  repos  et  dans  le  silence,  et 
qui,  contents  d'adorer  Dieu  en  esprit,  ne  fré- 
quentaient pas  les  églises,  s'abstenaient  des 
assemblées  des  fidèles  et  de  la  communion  du 
corps  de  Jésus-Christ.  Les  gens  sages  désap- 
prouvaient leur  conduite,  parce  qu'encore 
qu'on  puisse  prier  et  adorer  Dieu  en  tous  lieux, 
et  que  le  silence  et  le  reposaient  leur  utilité, 
le  sacrifice  extérieur  de  l'Eucharistie  est  la 
chose  la  plus  agréable  à  Dieu.  Pour  faire  pé- 
nitence de  ses  faute.s,  ce  n'est  pas  assez  de 

«  Tom.  IX  Bibl.  Pat.,  pag.  957. 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

s'en  abstenir  parla  suite  ;  il  faut  encore  faire 
de  dignes  fruits  de  pénitence,  et  faire  servir 
à  la  justice  les  membres  qui  ont  servi  i l'ini- 
quité. Un  vieillard  ou  un  homme  de  faible 
complexion  n'est  point  obligé  d'embrasser 
l'état  monastique  pour  faire  pénitence  de  ses 
fautes  :  il  peut  les  expier  dans  le  monde  par 
des  actes  d'amour  envers  Dieu  et  envere  le 
prochain,  par  la  patience  dans  les  afflictions, 
par  le  pardon  des  injures,  et  en  beaucoup 
d'autres  manières  prescrites  dans  l'Écriture. 
Il  est  bon  et  utile  de  découvrir  ses  péchés 
aux  personnes  spirituelles,  pourvu  que  ces 
personnes  aient  du  savoir  et  de  la  prudence, 
en  sorte  qu'elles  ne  nuisent  pas  aux  péni- 
tents par  une  douceur  ou  par  une  sévérité 
excessive.  Avant  de  s'appr-^her  de  la  com- 
munion, il  faut  s'éprouver  soi-même,  et  se 
purifier  de  ses  fautes.  Quiconque  fait  ainsi, 
peut  s'approcher  quand  bon  lui  semble. 
Dieu  ne  nous  abandonne  ordinairement  que 
pour  nous  punir  ou  pour  nous  convertir.  C'est 
à  nous  à  examiner  .quel  sujet  nous  avons 
donné  à  Dieu  de  nous  abandonner.  Tel  qui 
nous  parait  juste,  est  quelquefois  pécheur; 
et  celui  que  nous  croyons  pécheur,  est  sou- 
vent juste  aux  yeux  de  Dieu.  Il  fini  adorer 
SCS  jugements,  et  ne  juger  personne.  Par  l'ar- 
gent d'iniquité  avec  lefpiel  Jésus-Christ  dit 
que  nous  devons  nous  faire  des  amis  dans  le 
ciel,  on  ne  doit  point  entendre  les  richesses 
acquises  par  de  mauvaises  voies  ;  m:iis  celles 
qui  lie  nous  sont  point  nécessaires  pour  no- 
tre entretien.  Nous  ne  serons  point  damnés 
pour  n'avoir  point  orné  des  églises,  mais 
pour  n'avoir  pas  soulagé  les  pauvres.  Dans 
le  doute  à  laquelle  des  deux  églises  on  doit 
donner,  ou  à  celle  qui  manque  de  vases  et 
de  meubles  nécessaires,  ou  à  celle  qui  abon- 
de de  tout,  il  faut  se  déterminer  pour  la  pre- 
mière. Les  exemples  d'Abraham,  de  Job,  de 
David,  qui  étaient  mariés,  qui  avaient  des 
enfants,  beaucoup  de  biens,  et  qui  étaient 
conséipioniment  chargés  de  beaucoup  de 
soins,  doivent  ôlcr  aux  gens  du  mundc  tout 
prétexte  de  négliger  leur  salut.  L'Apôtre  dit 
que  toute  puissance  vient  de  Dieu;  mais  il 
ne  dit  pas  ipi'il  n'y  a  point  de  iirince  qui  ne 
soit  établi  de  Dieu.  Dion  en  donne  qucl(|ue- 
fois  de  mauvais  pour  punir  les  peuples; 
mais  il  ne  les  donne  pas  tous:  il  permet  seu- 
leiiicnl  qu'ils  soient  choisis,  ou  qu'ils  par- 
viennent par  d'autres  voies  à  la  dignité  de 
princes.  Lorsque  Phocas  fut  parvenu  à  l'em- 
pire, il  fit  répandre  beaucoup  de  sang.  Un 


Qisil.  S. 


« 


[vu-  siÈOE.]  CHAPITRE  LI.  —  ANASTASK-LE-SINAITE,  l'HÊTIlK. 


sailli  luoine  do  Gonstantinople,  (ini  géinis- 
s;iil  lie  ses  cruautés,  se  plaignit  ;\  DitMi  plu- 
sieurs fois  avec  la  conliance  ijiie  lui  donnait 
sa  simplicité,  pourquoi  il  avait  donné  un  tel 
prince  ii  son  pou[)io  ?  Il  entendll  une  voix 
qui  lui  dil  :  «  Parce  ipii'  je  n'en  ai  pu  trou- 
QllJ!^l.  17.  venin  plus  mauvais.  »  C'est  aiissi  pour  nous 
punir  de  nos  pi-chés,  que  Dieu  ou  permet  ou 
ordonne  les  guerres  et  les  autres  calamités 

'"■  publiques.  Qi'and  elles  arrivont,  il  faut  ado- 

rer ses  jugements;  mais  on  ne  peut  dire  qu'il 
soit  auteur  du  péclié,  qui  est  proprement  ce 
qu'on  appelle  mal. 

!'•  13.  «  Fortuite  est  un  terme  dont  un  chré- 

tien, qui  confesse  que  Dieu  gouverne  tout, 
ne  doit  point  se  servir,  parce  que  dans 
l'idée  des  païens  ce  terme  est  exclusif  de 
la  providence  particulière  de  Dieu  :  ils  at- 
tribuent   tout   au   hasard,    ou   aux  astres. 

5«-  Prédire  l'avenir  et  faire  des  miracles,  n'est 
pas  toujours  une  preuve  de  sainteté.  On 
ne  lit  point  que  saint  Jean -Baptiste,  le 
plus  grand  de  ceux  qui  sont  nés  des  fem- 
mes, ait  fait  des  miracles  ;  Judas  au  contraire 
est  censé  en  avoir  fait,  puisqu'il  fut  envoyé 
avec  les  autres  apôtres  pour  ressusciter  les 
morts  ou  guérir  les  lépreux.  Il  ne  faut  donc 
point  être  surpris  si  l'on  voit  quelquefois  les 
méchants  ou  les  hérétiques  faire  des  prodi- 
ges; s'ils  en  font  par  la  vertu  de  Dieu,  celte 
grâce  leur  est  accordée  non  par  rapport  à 
eux-mêmes,  mais  par  rapport  à  ceux  pour 
qui  ils  font  ces  miracles.  Mais  ils  peuvent 
aussi  faire  des  prodiges  par  la  vertu  du  dé- 
mon, comme  en  ont  lait  Simon  le  Magicien, 
Manéthon,  Apollonius   de   Tyanes  et   tant 

21.  d'autres.  Le  temps  de  la  mort  de  l'homme 

lui  est  caché  par  un  etl'et  de  la  Providence. 
S'il  lui  était  connu,  tel  qui  saurait  que  sa 
mort  est  proche,  irait  tuer  son  ennemi,  peu 
inquiet  de  quelle  manière  la  mort  viendrait 
à  lui.  Un  autre,  qui  serait  sur  de  vivre  cent 
ans,  en  passerait  la  plus  grande  partie  dans 
la  débauche,  et  remettrait  aux  derniers  jours 

S2.  à  penser  à  son  salut.  Si  les  péchés  dont  nous 

sommes  coupables  en  mourant  sont  légers, 
ils  peuvent  être  pardonnes  en  considération 
des  prières  et  des  sacrifices  que  les  vivants 
oll'riront  pour  nous  ;  s'ils  sont  considérables, 
il  n'y  a  point  de  rémission  à  espérer.  Pre- 
nons un  tel  soin  de  nos  âmes  en  cette  vie, 
que  nous  ne  fondions  point  notre  salut  sur 
les  oblations  que   l'on  fera  pour  nous  après 

;3.  la  mort.  Puisque,  selon  l'Écriture,  il.y  a  deux 

Jérusalem,  lune  leirestre,  l'autre  céleste, 


603 

on  ne  pe\U  doulei-  ipi'il  n'y  ail  aussi  deux 
pai'adis,  l'un  où  Adam  a  été  mis  après  sa 
création,  l'autre  qui  est  le  séjour  des  bien- 
heurcMix.  » 

I  \.  Les  Questions  suivantes  regardent  l'cx- 
plicalioiule  certains  passages  do  l'I'À'ri turc  qui 
soull'ient  quel((ues  ditlicultés,  comme  sont 
ceux  où  il  est  dit  que  Dieu  fit  l'homme  à  son 
image;  que  les  enfants  de  Dieu,  voyant  que  les 
filles  des  houiuies  (■taient  belles,  les  épousè- 
rent, et  autres  semblables,  dont  on  trouve  les 
solutions  dans  les  commentateurs.  Auastase 
semble  fixer  à  l'âge  de  douze  ans  le  temps  où 
les  enfants  sont  en  état  d'oll'enser  Dieu.  Il  ne 
croit  pas  même  qu'ils  en  soient  tous  capables 
à  cet  âge-l;\,<iQuoitpaerH;glise  reçoive  à  la  pé- 
nitence les  fornicateurs  et  les  hérétiques,  elle 
accorde  la  communion  à  ceux-ci  aussitôt 
qu'ils  ont  abjuré  leurs  erreurs  ;  au  lieu  qu'elle 
est  quelque  temps  à  l'accorder  à  ceux-là.  La 
raison  de  celle  dill'érente  conduite  est  d'en- 
gager les  hérétiques  à  se  convertir,  et  les 
fornicateurs  à  ne  plus  retomber  dans  le  pé- 
ché. L'I'^glise  ne  rebaptise  point  les  héréti- 
ques :  elle  se  contente  de  leur  imposer  les 
mains  avec  quelques  prières,  parce  qu'elle 
sait  que  le  Saint-Esprit  est  donné  par  cette 
cérémonie.  Si  nos  jours  étaient  comptés,  en 
vain  on  implorerait  le  secours  des  saints  et 
des  médecins  pour  le  rétablissement  de  la 
santé.  »  Anastase  croit  que  les  apparitions  qui 
se  font  aux  tombeaux  des  saints,  ne  sont  pas 
des  saints  mêmes  ;  qu'elles  se  font  par  le  mi- 
nistère des  anges;  que  si  les  âmes  se  con- 
naissent dans  l'autre  monde,  ce  ne  sera  que 
par  une  permission  particulière  de  Dieu,  et 
non  eu  vertu  de  leurs  facultés  naturelles  ;  que 
l'on  ne  doit  avoir  aucun  doute  sur  la  résurrec- 
tion des  corps,  parce  qne,  encore  qu'il  soient 
réduits  en  poussière,  ou  mangés  par  les  bê- 
tes, il  n'est  pas  moins  au  pouvoir  de  Dieu 
de  les  rétabhr,  qu'il  ne  l'a  été  de  les  former; 
qne,  pour  accomplir  le  précepte  de  la  prière 
continuelle,  il  n'est  pas  nécessaire  de  s'occu- 
per en  tout  temps  de  la  prière;  qu'il  suffit  de 
s'appliquer  à  quelque  chose  d'utile,  de  bon  et 
d'agréable  à  Dieu;  que  l'eau  que  l'on  aurait 
avalée  en  lavant  sa  bouche  ne  doit  pas  em- 
pêcher la  communion;  que,  comme  il  y  a 
des  personnes  à  qui  il  est  utile  de  commu- 
nier tous  les  jours,  il  y  en  a  à  qui  cela  serait 
nuisible  ;  que  nous  devons  prier  pour  nos 
princes,  fussent-ils  juifs,  infidèles  ou  héréti- 
ques; que  la  pythonisse  évoqua  véritable- 
ment l'âme  de  Samuel  à  la  prière  de  Saûl, 


niix"i.  ei, 

-'jiio  ad  81 


604 


HISTOIRE  OÉNF^RALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


parce  qu'avant  la  descente  de  Jdsus-Clirist 
aux  enfers,  les  Ames,  tant  des  justes  que  des 
pécbeurs,  élaii^il  sous  la  puissance  du  dii- 
Qai.1. IIS.  mon;  que  l'on  peut  sans  indécence  porter 
avec  Foi  l'Eucharistie  '  dans  les  voyages  pour 
I".         s'en  communier;  mais  qu'on  ne  doit  pas  la 

recevoir  liors  de  TK^lise  catholique. 
<i8-  T  15.  S'il  y  a  plus  de  divisions  et  de  scliis- 
mes  parmi  les  chrétiens  que  parmi  les  infi- 
dèles, c'est  que  le  diable,  auteur  de  ces  di- 
visions, n'en  a  pas  besoin  pour  {rasner  les 
nalions,  qui,  faute  de  baptême,  sont  p.  lui. 
lu.  Dieu  ne  le  laisse  agir  contre  les  chrétiens, 
que  pour  donner  lieu  i\  ceux-ci  de  mériter 
des  couronnes  par  leurs  victoires  sur  cet  en- 
nemi. S'il  ne  s'agissait  dans  les  persécutions, 
que  de  perdre  les  biens  temporels,  il  ne  sc- 
iait pas  permis  de  fuir;  mais  s'il  y  a  du  dan- 
us.  ger  pour  le  salut,  la  fuite  est  permise.  Quoi- 
que tous  les  hommes,  nés  d'Adam  suivant 
les  lois  ordinaires  de  la  nature,  contractent 
le  péché  qu'il  a  transmis  à  toute  sa  postéri- 
té; tous  ne  sont  pas  vivifiés  en  Jésus-Christ, 
quoique  nés  de  pères  vivifiés  par  Jésus- 
'W.  Christ.  La  raison  en  est,  que  l'ellet  mortel  du 
péché  du  premier  homme  se  communique  de 
père  en  fils  par  la  génération;  au  lieu  que 
c'est  de  Jésus-Christ,  et  non  de  nos  pères, 
que  nous  recevons  la  vie  de  lame.  Ils  en- 
gendrent selon  le  corps,  et  non  selon  l'es- 
prit. Anastase,  pour  trouver  les  trois  jours 
et  les  trois  nuits  pendant  lesquels  il  est  dit 
que  Jésus-Christ  fut  dans  le  cœur  de  la  terre, 
commence  le  premier  au  moment  où  Jé- 
sus-Christ expira  sur  la  croix,  c'est-à-dire  à 
la  neuvième  heure  du  vendredi,  ou,  selon 
nous,  à  trois  heures  après  midi;  car  dès  ce 
moment  il  descendit  aux  enfers,  et  consé- 
quemmenl  dans  le  cœur  de  la  terre;  le  se- 
cond à  six  heures  du  même  vendredi  ;  et  le 
troisième  à  six  heures  du  soir  du  samedi  : 
car  les  juifs  faisaient  leurs  fêtes  d'un  soir  à 
l'autre.  Mais,  dans  cette  manière  de  comp- 
ter, il  faut  prendre  une  partie  du  jour  pour 
le  tout,  puisque,  exccptt' le  samedi,  les  deux 
autres  jours  ne  furent  pas  complets.  Il  n'y 
eut  que  trois  heures  du  vendredi;  du  diman- 


che, que  depuis  les  six  heures  du  soir  du  sa- 
medi jusqu'au  lever  du  soleil  du  lendemain. 
Dans  la  141'  question,  il  cite  une  oiaison  de 
l'Euchologe  des  Grecs;  dans  la  113",  un  ca- 
non d'un  concile  de  Carlhage  sur  le  baptême 
des  enfants  nouvellement  nés.  Lambecius  • 
remarque  que  la  ii'  est  tirée  du  commen- 
taire de  saint  Hippolyte  sur  le  Cantique  des 
cantiques;  la  52%  de  saint  Isidore  de  Peluse; 
la  153'  du  prêtre  Hésychius;  la  144',  selon  . 
M.  Cotelier,  est  de  saint  Irénée.  Tous  ces 
passages  ne  se  trouvent  pas  dans  l'édition 
de  Gretser,  q\ii  est  celle  que  l'on  a  suivie 
dans  la  Bibliothèque  des  Pères. 

16.  Ganisius  '  nous  a  donné  sous  le  nom     tsiM^m.ar 
d'Auastase  le  Sinaïle  trois  Discours  qui  lui   «V'ti  ™r"ii 
ont  paru  si  solides  et  importants,  qu'il  con-  !"«" 
seille  à  tous  les  prédicateurs,  et  h  tous  ceux 

qui  sont  chargés  de  la  direction  des  mœurs, 
de  les  lire  journellement.  Le  premier,  qui 
fut  prêché  le  cinquième  dimanche  de  carê- 
me, a  pour  titre  :  De  la  sacrée Synaxe,  ou  as- 
semblée où  les  chrétiens  recevaient  la  sainte 
eucharistie.  Il  tr.iite  anssi  du  pardon  des  in- 
jures, ou  de  la  défense  de  juger  son  pro- 
chain. Le  père  Combéfis  *  l'a  donné  dans  le 
premier  tome  de  son  nouveau  supplément 
avec  une  nouvelle  version,  et  après  l'avoir 
revu  sur  plusieurs  manuscrits  de  la  Biblio- 
thèque du  Roi  '.  La  version  dont  Canisius 
s'est  servi  est  d'Achilles  Statius.  C'est  aussi 
celle  que  Baronins  a  suivie  dans  les  frag- 
ments de  ce  Discours  insérés  dans  ses  An- 
nales ecclésiastiques  sur  l'an  51)!).  Quelqnes- 
uns  l'ont  attribué  à  un  Anastase  plus  jeune 
que  le  Sinaïle;  mais  il  porte  constamment  le 
nom  de  celui-ci  dans  tous  les  manuscrits, et  on 
n'en  connaît  point  à  qui  il  convienne  mieux. 

17.  Ce  Discours  commence  par  un  éioire      Ami...  de 
du  livre  des  Psaumes  ".  «  (In  les  chantait  tous 

les  jours  dans  les  assemblées  ;  et  rien  ne 
pouvait  être  plus  utile  aux  fidèles,  parce  que 
David  y  établit  parfaitement  la  vraie  reli- 
gion, enseignant  d'un  côté  ce  qu'il  faut  croi- 
re, de  l'autre  ce  qu'il  faut  pratiquer.  »  Si  l'on 
emploie  des  années  entières  pour  apprendre 
les  arts  et  les  professions  utiles  .■'i  la  société 


'  Sanclissimum  Chrisli  corpus  nitlla  injuria 
afPcitur  ex  hoc  ijuod  circiimferliir...  fiam  el  ipse 
Chrvstvit  olim  ad  omnex  rircvihol  et  ciretimfere- 
batttr.  Ergo  ntillam  injiiriam  ex  hoc  patitur,  sed 
lantum  rx  impuro  cnrdc  Qiiœsl.  113. 

»  l^anilK-ciiis,  lib.  III,  jwg.  197.  Cololoriiis,  loin. 
III  Moiiumeiit.,  png.  "j.)!,  542. 

•  CoDis.,  tom.  III,  pag.60. 


>  Conibcfls,  l"iii.  I  .Inrtuarii,  jwig.  881. 

^  r;rclztT  a  aussi  donné  en  prcc  rt  en  lalin  le 
iliscoiirs  dp  la  sacrijo  Synaxi".  Toni.  XII  do  so»  ou- 
vrajïff,  Ilatisbonnr,  1740,  in-fol  ,  pap.  419-lGO. 
{L'i^dileur.) 

«  Toiii.  IX  nihi.  Pal.,  p.i^!.  !)i3,  et  tom.  I  Leclion. 
Canis.  cilit,  Autnerp.,  pag.  4G5. 


CHAPITRE  U.  —  ANASTATE-LE-SINAITI;:,  l'IlftïHE. 


[vu*  SIÈCLE.] 

litiiiiaiiii',  ost-ce  trop  ilo  passer  loiile  sa  vie 
à  a|)i)rt;iiilre  à  coimailrc  Dion  et  à  le  servir? 
Le  contraire  arrive  Ions  les  jours.  L'envie 
(racqnérir  des  l'iclicsses,  de  posséder  des 
emplois  et  des  dignités,  fait  qn'on  se  livre 
(uni  entier  anx  moyens  de  les  avoir.  Mais  on 
ne  prend  ancun  soin  de  son  ànic;  on  ue 
pense  point  à  la  mort,  ni  au  justement  de 
Dieu,  ni  aux  supplices  do  la  vie  future. 
On  s'oublie  soi-même,  si  ce  n'est  poui'  se 
tromper.  On  va  plus  loin  :  on  se  Lait  mutuel- 
lement; on  se  tend  des  pièges;  on  se  charge 
d'opprobres  et  de  calomnies.  Attentifs  aux 
fautes  d'autrui,  nous  ne  faisons  point  de  ré- 
llexionsur  les  nôtres.  Enfoncés  dans  la  boue 
jusqu'au  cou,  nous  ne  pensons  pas  à  nous 
en  tirer.  Nous  vieillissons  dans  l'habitude  de 
censurer  les  autres;  et  dans  la  vieillesse  mê- 
me, nous  ne  songeons  pas  à  nous  examiner 
nous-mêmes.  Les  plus  petits  défauts  de  nos 
frères  nous  paraissent  i;rands;  les  nôtres, 
quelque  considérables  qu'ils  soient,  nous 
sont  imperceptibles.  Aous  ne  [jardonnons  à 
personne  :  petits  et  grands,  coupables  et  in- 
nocents, nosévêques,  nos  maîtres,  nos  chefs, 
tous  ceux  qui  nous  avertissent  de  nos  dé- 
fauts, qui  prennent  soin  de  nos  mœurs,  sont 
également  l'objet  de  nos  censures.  Nous  ne 
savons  ce  que  c'est  que  de  gémir  sur  nos  dé- 
sordi'es;  la  crainte  de  Dieu  n'est  point  en 
nous  ;  nous  ne  pensons,  ni  à  faire  pénitence, 
ni  à  nous  corriger.  Toute  notre  attention  se 
porte  au  mal,  à  la  volupté  et  à  la  débauche. 
Nous  passons  des  jours  entiers  aux  specta- 
cles, en  de  vaines  conversations,  en  discours 
déshonuètes,  sans  nous  ennuyer;  mais  à 
peine  voulons-nous  demeurer  dans  l'église 
pendant  une  heure  pour  y  adorer  Dieu,  le 
prier  et  nous  y  occuper  de  saintes  lectures. 
Si  la  leçon  de  l'Évangile  est  plus  louguequ'à 
l'ordinaire,  si  le  prêtre  prolonge  ses  prières, 
si  celui  qui  olire  '  le  sacrifice  uou  sanglant 
célèbre  les  divins  mystères  trop  lentement, 
on  s'endort,  ou  témoigne  son  ennui  par  l'é- 
garement des  yeux.  Il  y  en  a  même  qui  ne 
pensent  point  à  purifier  leur  conscience  par 
le  regret  de  leurs  fautes  :  ils  ne  songent  qu'à 

'  Si  is  qui  incruentum  sacri/icium  offert,  non- 
nihil  morosius  rem  dii:inam  peragit,  tœdio  affici- 
mur  dormitantes,  ae  oseitanles,  yag.  107. 

'  Raplo  myslico  pane  excunt.  Jbid'.,  468. 

»  (Jiiid  enim  more  illo  nrfarium  magi^,  ul  cum 
rapinis,  improbUale,  omnique  scelertim  génère 
oppleti  simus,  aquu  modiai  abluentes  manus,  sic 
sacrum  illud  corpus,  diuinumque  sanguinem  pro 
vmndi  salute   effusum,   immundi  ac  sordidati 


(m 


se  parer  dis  beaux  habits.  D'autres  n'enticnt 
dans  l'église,  (iu'a[)rès  s'être  informés  si  le 
temps  de  la  communion  approche.  Ils  en 
sortent  aussitôt  après  avoir  comme  *  enlevé 
le  pain  mystique.  F.,es  fonunes  pour  la  plu- 
part viennent  à  l'église  moins  pour  prier, 
que  pour  être  vues  et  pour  séduire  les  plus 
simples.  Se  peut-il  quelque  chose  de  plus 
mauvais',  que  la  coutume  où  l'on  est  de  re- 
cevoir le  sacré  corjis,  et  le  sang  divin  qui  a 
été  répandu  pour  le  salut  du  monde,  le  co?ur 
souillé  de  rapines  et  de  toutes  sortes  de  cri- 
mes, comme  s'il  sutlisaitpours'en approcher 
de  laver  ses  mains  avec  un  peu  d'eau?  Ne  se 
souvient-on  pas  que  Judas,  pour  avoir  reeu 
indignement  le  corps  du  Seigneur,  devint 
coupable  aussitôt  qu'il  l'eut  reçu,  et  qu'il 
donna  an  démon  une  plus  grande  entrée 
dans  son  cœur?  On  n'oserait  toucher  avec 
des  mains  souillées  les  habits  d'un  roi,  pas 
même  les  siens  propres  ;  et  on  ne  craint  point 
de  recevoir  ce  sacré  corps  dans  un  co'ur 
souillé  de  crimes.  Ce  n'est  point  ^  assez  d'en- 
trer dans  l'église  de  Dieu,  d'y  révérer  les 
saintes  images,  d'y  liouorer  et  baiser  les 
croix  ;  ce  n'est  pas  se  purifier  non  plus,  que 
de  laver  ses  mains  :  il  faut  fuir  le  péché,  la- 
ver ses  fautes  dans  la  confession  et  dans  les 
larmes,  et  s'approcher  des  mystères  purs  et 
inviolables  avec  un  cœur  contrit  et  humilié.  » 
18.  <i  Vous  direz  peut-être  :  Je  n'ai  point 
les  larmes  à  ma  disposition.  Mais  si  vous  ne  rag.  ito. 
pouvez  pleurer,  gémissez  dans  le  fond  de 
votre  cœur,  retranchez  du  moins  vos  ris; 
humiliez-vous,  assistez  avec  crainte  en  la 
présence  du  Seigneur,  les  yeux  baissés  vers 
la  terre.  Ne  voyez-vous  pas  avec  quelle  mo- 
destie les  courtisans  se  comportent  devant 
l'Empereur,  qui  souvent  est  un  impie?  Soyez 
donc  avec  une  crainte  respectueuse  dans 
l'église,  surtout  à  l'heure  où  l'on  oÛ're  le  sa- 
crifice terrible,  en  vous  persuadant  que  nous 
sommes  tous  oUèrts  à  Dieu  en  la  même  dis- 
position et  dans  les  mêmes  sentiments  que 
nous  avons  lors  de  ce  sacrifice.  Assistez-y 
avec  un  cœur  contrit.  Confessez  ^  vos  péchés 
à  Jésus-Christ  par  le  ministère  des  prêtres  ; 

2wrcipiamus?  Anastas.,  Oral,  de  Sinaxi,  pag.  ^168. 

*  j\o/i  eîiiHi  salis  est  in  Dei  Ecclesiam  ingredi, 
divinasque  sanclarum  imaginuni  figuras  vene- 
randasque  cruces  Itonorare  ac  osculari:nequeve- 
ro  manus  aqua  abluere,  idpurgatio  est;  sed  fuga 
ac  ablulio  sordium  peccali.  Ibid. 

^  Con/Uere  Christo  per  sacerdotes  peccala  tua. 
Ibid.,  jiag.  470. 


606 


HISTOIRE  GÉNÉKALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


condamnez  sans  en  rougir  vos  propres  ac- 
tions. Condamnez -vous  en  présence  des 
hommes,  afin  que  le  juste  Juge  vous  ab- 
solve et  vous  justilip  en  présence  des  an- 
ges et  de  tout  le  monde.  Demandez  misé- 
ricorde, demandez  pardon,  demandez  la  ré- 
mission de  vos  péchés,  et  la  grâce  de  n'en 
plus  commettre  à  l'avenir;  alin  que  vous 
puissiez  parliciperdignemen  taux  sacrements, 
et  recevoir  le  corps  et  le  sang  avec  une  con- 
science si  pure,  qu'ils  servent  à  la  purilicatiou 
de  votre  ùme,  et  non  à  votre  jugement.  Saint 
Paul  vous  apprendra  qu'il  eu  est  mort  plu- 
sieurs pour  s'être  approchés  indignement  des 
mystères:  Y  en  a-t,-il,  direz-vous,  qui  soient 
dignes  d'en  approcher?  J'en  connais,  et  vous 
le  deviendrez  quand  vous  le  voudrez.  Quittez 
le  péché,  faites  des  œuvres  de  pénitence  et 
des  fruits  de  justice  ;  soyez  miséricordieux  et 
libéral  envers  les  pauvjes;  priez  Dieu  avec 
un  esprit  contrit  :  il  écoutera  vos  peines.  » 
Anastase  rapporte  en  cet  endroit  une  partie 
des  prières  que  le  prêtre,  comme  médiateur 
entre  Dieu  et  les  hommes,  disait  à  haute  voix 
pour  disposer  le  peuple  à  s'unir  à  lui  dans 
l'oblation  des  divins  mystères.  On  les  lit  en- 
core dans  les  Liturgies  qui  portent  le  nom  de 
saint  Jacques  et  de  saint  Basile.  11  marque 
que  l'on  disait  l'Oraison  dominicale  avant  la 
communion,  et  il  semble  dire  que  le  peu- 
ple la  prononçait  avec  le  prèlre.  La  mo- 
rale qu'il  tire  de  cette  partie  de  la  messe, 
est  que  c'est  mentir  à  Dieu,  augmenter  le 
nombre  de  ses  péchés,  que  de  garder  de  la 
haine  contre  son  prochain,  quand  on  dit  : 
/{omettez-nous  nos  dettes,  comme  nous  les  remet- 
tons à  ceux  qui  nous  doivent.  11  ajoute  qne 
c'est  pour  nous  préparer  à  une  réconciliation 
entière,  que  nous  nous  donnons  encore  le 
baiser  de  paix  avant  la  communion.»  Après 
Ja  considération  '  de  ce  sacrifice  non-sanglant, 
le  prêtre  élève  le  pain  de  vie,  et  le  montre 
<i  tous  les  assistants.  Api'ès  quoi  le  diacre 
s'écrie  :  Soyons  attentifs,  c'est-à-dire  faites 
attention  à  vous-mêmes,  mes  frères.  Il  u'j-a 
qu'un  momeul  que  vous  nous  avez  dit  :  Nous 
avons  nos  cœurs  av  Seigneur.  Vous  avez  témoi- 


gné ensuite  que  vons  pardonniez  à  ceux  qui 
vous  ont  otfensés,  et  en  signe  de  réconcilia- 
tion vous  vous  êtes  embrassés  mutuellement. 
Mais  parce  qu'étant  homme  j'ignore  ce  qui 
se  passe  dans  votre  intériein-,  c'est  pour  cela 
que  je  vous  avertis  à  haute  voix  d'être  at- 
tentifs à  vous-mêmes,  et  de  considérer  de- 
vant qui  vous  pai-aissez.  Après  cet  avertisse- 
ment du  diacre,  le  prêtre  ajoute  :  Les  choses 
saintes  sont  fjour  les  saints.  Comme  s'il  disait  : 
Voyez  avec  quelle  disposition  vous  voulez 
vous  approcherde  la  communion,  de  crainte 
que  quelqu'un  d'entre  vous,  en  s'approchant, 
n'entende  ces  paroles:  Ne  me  touchez  pas  ;  re- 
tirez-vous de  moi,  ouvriers  d'iniquité,  qui  pen- 
sez à  vous  venger  des  injures  que  vous  avez 
reçues,  /hissez  votre  don  devant  l'autel,  et  allez 
vous  réconcilier  auparavant  avec  votre  frère  ; 
puis  vous  reviendrez  offrir  votre  don.  Imitez 
saint  Jacques,  frère  du  Seigneur,  qui,  d'a- 
près les  anciens  écrivains  ecclésiastiques 
étant  sur  le  point  de  mourir ,  pria  en 
ces  termes  pour  ses  bourreaux  :  Seigneur, 
pardonnez-leur,  parce  qu'ils  ne  savent  ce  qu'ils 
font.  » 

ly.  Anastase  insiste  boucoup  sur  le  par- 
don des  injures.  D'après  lui,  la  haine  du 
prochain,  le  souvenir  des  injures  dans  le 
désir  de  s'en  venger,  est  de  tous  les  péchés 
celui  qui  cause  le  plus  tôt  la  ruine  éternelle 
du  pécheur;  quand  une  fois  ce  désir  a  jeté 
de  profondes  racines  dans  le  co'ur  d'un 
homme,  tout  devient  inutile,  le  jeune,  la 
prière,  les  larmes,  l'aumône,  la  confession, 
la  virginité  et  toute  autre  bonne  action.  Il 
fait  remar(]uer  que  le  Seigneur  n'a  pas  dit  : 
Si  vous  otlrez  votre  don  à  l'autel,  et  que 
vous  vous  souveniez  que  vous  avez  quelque 
chose  contre  votre  frère  ,  allez  vous  récon- 
cilier avec  lui  ;  mais  :  Si ,  lorsque  vous  pré- 
sentez votre  don  à  l'autel,  vous  vous  souvenez 
que  votre  frère  a  quelque  chose  contre  vous,  al- 
lez vous  réconcilier  avec  lui.  D'où  il  tire  celle 
conclusion  :  «  Puisque  chacun  est  obligé  de 
guéiir  la  malice  de  son  frère,  quelle  espé- 
rance de  pardon  peut  avoir  celui  qui  garde 
dans  le  secret  de  son  cœur  de  la  haine  con- 


Jo-in    XX 
ISsîm.  Tl 


'  Sacerdos,  post  sacri/icn  illius  iticruenli  con- 
secrationem,  panem  vilœ  in  tiltvm  ticval ,  ip- 
numque  owiilnts  oxlendil.  l'oslmodiimque  excla- 
mai Uiacoitus,  et  ail:  Alî.en<lnimis,  hoc  est:  Vohis 
ipsi  attendue,  fratres.  Erce  paiilo  nnle  ndstipu- 
lati  eslis,  diccnles:  Ilabeinus corda  nd  Doinimiiu; 
rursurmque  piiriim  aiiimum  nique  ab  omni  simul- 
taie  ac  injuriarum  memoriu  liberum  Dco  profi- 


tentes  dixistis  :  Dimitte  nobis,  etc.  Eaque  de  caur 
sa  iniicem  amplexali  eslisin  osculo  pacis...  Tum 
Staliw  ailjvtigil  sacerdos:  Sunc'.a  .<aiitlis;  quid 
rem  hoc  ait  :'  Videlc  quomodo  ad  comniunionem 
divinorum  mysteriorum  accedalis,  )io  quis  ves- 
trum  lommunicaturus  accedens  audial  :  Noli  me 
tuii^i'i'i'.  Iliid.,  pa),'.  474. 


[vu'  SIKCI.E.] 


CHAPITIIE  LI.  —  A\ASTASE-1-E-S1NAITK,  Pllftïmî. 


ti()7 


lie  son  pioc'Iiain  ?  I)  Il  inntiinif  :  n  J'en  cii- 
tonds  iiliisieurs  qui  disent  :  Maliicnr  ;'i  moi  ! 
Je  no  sais  que  faire  pour  nie  sauver  ?  Je  ne 
puis  jeûner;  je  ne  sais  veiller;  la  continence 
surpasse  mes  forces  ;  il  m'est  trop  dur  de 
quitter  le  monde.  Comment  pouiiai-je  donc 
me  sauver?  Je  vous  le  montrerai,  dit  ce  Pè- 
re :  Pardonnez,  et  il  vous  sera  parclunné.  ^'oil•i 
un  clicmin  court  el  facile  pour  arriver  au 

M.ii.vi',1.  salut.  11  y  en  a  un  nuive  :  l\e  jugez  pas,  et 
vous  ne  serez  point  jugés.  Cette  voie  du  salut 
ue  prescrit  ni  jeûne,  ni  veilles,  ni  travail. 
Ne  jugez  pas  votre  frère,  quand  même  vous 
Pauriez  vu  de  vos  yeux  commettre  une  mau- 

Rom.u,s6.  vaise  action.  Il  n'y  a  qu'un  seulJuge,  qu'un  seul 
Seigneur,  qui  rendra  à  chacun  selon  ses  œuvres. 
Celui  qui  juge  avant  l'avènement  de  Jésus- 
Clu'ist,  est  un  usurpateur  du  droit  de  Jésus- 
Cbist  ;  c'est  un  antecLiist.  Vous  avez  vu  cet 
homme  tomber  dans  le  péclié,  mais  vous 
ne  savez  pas  s'il  n'en  fera  pas  pénitence, 
quelle  sera  la  fin  de  sa  vie.  Le  voleur  et 
l'homicide  qui  était  crucifié  avec  Jésus- 
Christ,  obtint  dans  un  moment  le  pardon  de 
ses  fautes  et  l'entrée  du  paradis.  Judas  au 
contraire  devint  dans  un  moment  ,  d'ap'  tre 
et  de  disciple  de  Jésus-Christ,  un  perfide  et 
un  traître.  » 

20.  «  Sur  toutes  choses  ne  jugez  poiut  un 
prêtre  '  sur  des  fautes  secrètes  et  incertaines 
dont  on  vous  aura  dit  qu'il  est  coupable.  Ne 
dites  pas  :  C'est  un  pécheur  qui  otl're,  il  est 
coupable,  il  est  indigne  ;  la  grâce  du  Saint- 
Esprit  ne  desrend  pas  sur  les  dons.  Ne  pen- 
sez rien  de  semblable.  11  y  a  un  autre  Juge 
des  choses  secrètes,  qui  les  connaît ,  qui  les 
examine.  Reconnaissez  en  vous-même  que 
tous  les  autres  sont  meilleurs  que  vous  ,  et 
laissez-en  le  jugement  au  juste  Juge.  Révé- 
rez comme  prêtre  celui  qui  n'erre  pas  dans 
la  foi.  Quoi  donc  ?  direz-vous ,  le  prêtre  ne 
doit-il  être  jugé  de  personne  ?  n'est-il  pas 
soumis  aux  canons  de  l'Église  ?  Sans  doute  ; 
mais  ce  n'est  pas  par  vous  qu'il  doit  être 
examiné  ou  jugé.  C'est  Dieu  qui  ledoitjnger, 
ou  l'évêqueson  supérieur.  Pourquoi,  n'étant 
qu'une  brebis,  voulez-vous  juger  votre  pas- 
teur ?  Semblable   en   cela  aux  pharisiens , 


vous  vous  attribuez  un  pouvnir  (|ni  n'appar- 
tient ipi'à  Dieu  :  c'est  à  lui  seul  de  jugi-r 
l'ordre  sacerdotal.  »  Il  parait  qu'en  cet  eu- 
droit  Anaslase  ne  parle  que  du  simple  prê- 
tre ,  qui  doit  en  etl'et  être  jugé  par  son  ('vê- 
quc  ,  an  lieu  (|ne  révê(pie  ne  peut  être  jugé 
que  par  le  concile  ,  ou  provincial ,  ou  gén(;- 
ral,  ou  par  le  Pape.  Ce  qu'il  dit  du  pouvoir 
qu'ont  les  peuples  de  juger  leur  pasteur 
(juand  il  erre  dans  la  foi  ,  doit  s'enlorulre 
d'un  pasteur  qui  s'éloignerait  visiblement 
dans  ses  instructions  de  la  doctrine  ancienne 
et  constante  de  l'Église.  Dans  ce  cas  ils  doi- 
vent s'en  éloigner,  comme  les  brebis  fuient 
le  loup  ,  et  lui  dire  anathème ,  à  lui  et  ii  sa 
nouvelle  doctrine  ,  suivant  ce  précepte  de 
saint  Paul  :  Quand  un  ange  vous  annoncerait 
un  évangile  différent  de  celui  que  nous  avons 
annoncé,  qu'il  soit  anutlicme. 

21.  Anastase  confirme  ce  qu'il  avait  dit 
des  avantages  qu'il  y  a  à  ne  juger  personne, 
par  UTie  histoire  dont  il  produit  des  témoins 
encore  vivants.  Un  moine  ,  après  avoir  vécu 
dans  son  état  avec  beaucoup  de  tiédeur  et 
de  négligence ,  tomba  dangereusement  ma- 
lade. Se  voyant  aux  portes  de  la  mort,  il  n'en 
fut  point  cfirayé  ;  et  rendant  grâces  à  Dieu, 
il  envisageait  d'un  air  riant  le  moment  où  il 
allait  sortir  du  monde.  C'était  la  coutume 
dans  les  monastères  que  tous  les  religieux 
s'assemblassent  autour  du  moribond  avec  le 
prévôt  ou  le  supérieur,  pour  l'assister  daus 
ses  derniersmoments.  Un  des  pères,  s'adres- 
sant  au  malade,  lui  demanda  avec  confiance 
pourquoi ,  ayant  été  si  peu  exact  à  remplir 
ses  devoirs,  il  ne  laissait  pas  de  regarder  sa 
mort  prochaine  avec  joie  et  tranquillité  ?  Le 
moine  ,  se  levant,  dit  à  l'assemblée  qu'il  ne 
pouvait  dissimuler  les  négligences  de  sa  vie 
passée;  qu'à  ce  moment  les  anges  de  Dieu 
lui  avaient  présenté  et  lu  un  mémoire  qui 
contenait  toi;s  les  péchés  qu'il  avait  commis 
depuis  son  entrée  daus  le  monastère  ;  que  ces 
anges  lui  ayant  demandé  s'il  les  avouait,  il 
avait  répondu  affirmativement  et  ajouté,  que 
moins  il  n'avait  depuis  ce  temps-là  jugé  per- 
du sonne,  ni  conservé  le  souvenir  des  injures 
qu'il  avait  reçues;  qu'il  espérait  en  consé- 


AdGalat.l, 


t'ag.  470. 


'  Ante  omnia  cave  sacerdotem  judices  de  oc- 
cultis  illis  ac  inccrlis  quorum  reuin  erim  agi 
audies.  Ne  dixeris  ;  Peccalor  est  qui  offert  ; 
reus  est  ;  indignus  est,  non  advcntat  Sjiirilus 
Sancti  grulia.  Nihil  ejusmodi  in  aninnim  induxe- 
ris  :  atius  est  occultorvm  judex  ac  exanmiator... 
SU  sacerdos,  qui  circa  divina  dogmala  non  ab- 


erret  ;  cœierorum  tu  noli  esse  judex...  Quid  ergo? 
dicat  aliquis;  an  non  judicio  ac  ecclcsiasticis  ca- 
no7ùbus  subjeclits  est  sacerdos?  Imnio  rel  maxi- 
me. Al  nie  non  a  te  examinatur,  aiU  judicabilur, 
sed  a  Deo  ac  sœpe  a  majore  antislile.  Cur  lu, 
cum  ovis  sis,  puslorem  judicas  ?  IbiU.,  pag.  498. 


HISTOraE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTiQUES. 


).•  PuDino  sl- 
iiimt. 


Vf  »93. 


608 

qiience  que  ses  dettes  lui  seraient  lemises  , 
comme  il  les  avait  remises  aux  autres  ;  et 
que,  n'ayant  jugé  personne,  il  ne  serait  pas 
jugé  lui-même  ;  qu'a  peine  eut  il  fait  ces  re- 
montrances, que  les  anges  décliirèrenl  le 
mémorial  de  ses  péchés  :  ce  qui  avait  causé 
la  joie  qui  paraissait  sur  son  visage.  Après 
avoir  ainsi  parlé  il  mourut  en  paix ,  laissant 
à  ses  frères  un  exemple  aussi  utile  qu'édi- 
fiant. 

22.  Le  second  discours  donné  par  Cani- 
sius  est  sur  le  psaume  sixième  '.  Nicéphore 
le  cite 'sous  le  titre  de  Livre  d'Anastuse  Si- 
naïle  sur  le  sixième  psaume.  11  porte  aussi 
le  nom  d'Anastase-Je-Sinaite  dans  tous  les 
manuscrits.  Le  troi^éme  est  une  explication 
du  même  psaume.  Ces  deux  discours  sem- 
blent pris  l'un  de  l'autre.  Mais  il  est  vi-ai- 
semblable  qu'Anastase ,  ayant  eu  deux  oc- 
casions diU'érenlcs  d'expliquer  ce  psaume  , 
aura  répété  dans  son  second  discours  une 
partie  de  ce  qu'il  avait  dit  dans  le  premier. 
Cela  est  assez  ordiuaire  aux  prédicateurs  qui 
sont  obligés  de  traiter  plus  d'une  fois  la  mê- 
me matière.  L'exorde  du  premier  fait  voir 
qu'Anastase   le  prècba   au  commencement 
du  jeûne  du  Carême.  Le  psaume  qui  en  fait 
la  matière  convenait  au  temps.  On  y  voit  un 
pétlieur  qui,  pénétré  de  douleur  de  ses  fau- 
tes ,  les  confesse  ,  s'en  bumilie  ,  les  pleure  , 
et  n'omet  rien  de  ce  qui  est  capable  de  dé- 
tourner de  lui  les  cbâtiments  dont  il  est  me- 
nacé de  la  pari  de  Dieu  ;  et  ce  qui  est  con- 
solant, c'est  qu'il  y  obtient  le  pardon  et  la 
rémission  de  ses  péchés.  L'explication  qu'en 
donne  Anasiase  est  purement  morale  ,  mais 
bien  touchée  .En  parlant  de  la  vertu  des  larmes 
de  la  pénitence,  il  s'exprime  ainsi  :  «  Comme 
nousrenaissonsparl'eau  et  parle  Saint-Esprit, 
de  même  nous  sommes  aussi  baptisés  de  nou- 
veau pai'  l'eau  des  larmes  et  par  le  feu  de  la 
componction  ,  qui  l'un  et  l'autre  nous  puri- 
fient et  nous  rendent  participants  du  Saint- 
Esprit.  Car  ni  le  baptême  ,  ni  la  vraie  dou- 
leur qui  nous  fait  verser  des  larmes  sur  nos 
péchés,  ne  se  donnent  sans  le  Saint-Esprit. 
De  là  vient  que  la  grftce  qui  nous  i  ^t  confé- 
rée dans  l'enfance  p.ir  le  baptême,  peut  nous 
être  rendue,  hirsqu'après  avoir  multiplié  nos 
péchés  enaugnu'nlant  le  nombre  de  nos  an- 
nées ,  nous  pleurons  amèrement  ces  péchés 

»  Toui.  IX  liibliolh.  l'ai.,  pap.  947.  et  Canif. 
Lection.,  loin.  I,  pag.  MO,  et  loui.  1  Auctuaiii  Com- 
bofis.,  p!ip.no7,  913. 

»  Nicej'lji.nis,  lili.  Mil,  caii.  Xl.iv. 


dans  la  vieillesse,  ou  dans  tout  autre  temps. 
Anasiase  distingue  à  cette  occasion  plusieure 
sortes  de  larmes  :  les  naturelles  que  l'on  ré- 
pand sur  un  morl,ou  qui  viennent  d'ivresse, 
ou  de  l'abondance  des  humeurs,  de  celles 
qui  naissent  du  chagrin  de  n'avoir  pas  réussi 
dansdesprojetsambitieux.dJl  y  en  ad'auties, 
dit-il,   qui  ont  pour  principe  la  crainte  de 
Dieu,  ou  l'appréhension  de  la  mort  et  des 
supplices.  Celles-ci ,  quand  on  y  persévère  , 
conduisent  à  des  larmes  plus  parfaites,  qui 
sont  fondées  sur  le  désir  de  Dieu  et  de  le 
posséder.  C'est  de  celles-là  que  parle  le  Pro- 
phète, et  qu'il  répandait  lui-même  dans  l'a- 
mertume de  son  cœur  pour  avoir  péché  con- 
tre Dieu.  »  Anasiase  rapporte,  sur  l'autorité 
de  Clément  d'Alexandrie,  l'histoire  d'un  jeu- 
ne homme  lecoiumandé  à  un  évêque  d',\sie 
par  saint  Jean  l'Kvangéliste  ;  ce  jeune  hom- 
me se  fit  chef  de  voleurs ,  et  revint  enfin  à 
lui-même  par  les  exhortations  de  cet  apôtre, 
qui  alla  le  chercher  pour  le  remettre  dans 
son  devoir.  Il  parle  d'un  autre  voleur  qui  se 
convertit  sous  le  règne  de  l'empereur  Mau- 
rice, et  il  dit  qu'il  vivait  lui-même  alors.  Cet 
endroit  peut  servir  à  fixer  le  temps  auijuel 
Anasiase  a  vécu,  mais  non  pas  l'année,  puis- 
qu'il ne  dit  point  quel  âge  il  avait  au  mo- 
ment de  cet  événement ,  mais  seulement 
qu'il  se  passa'  de  son   temps.  L'empereur 
Maurice  mourut  en  602;  ainsi  on  ne  peut 
mettre  plus  tard  la  naissance  d'Anaslase. 

23.0ncitesousle  nom  d'Anaslase  quelques 
autres  discours,  dont  quelques-uns  oui  déjà 
été  imprimés;  les  autres  n'ont  pas  encore  vu 
le  jour.  Il  y  en  a  un  surla  formation  de  l'hom- 
me à  l'image  de  Dieu.  Tarin  l'a  fait  impri- 
mer en  grec  et  en  latin  à  la  suite  do  la  IMii- 
localied'tlrigène,  à  Paris, en  1G18.11  se  trouve 
aussi  sous  le  nom  de  saint  Grégoire  de  Nyssc 
dans  le  premier  tome  de  ses  œuvres  de  l'é- 
dition de  Paris,  en  1615,  et  dans  le  second 
tcnie  de  celle  qui  fut  faite  en  la  même  ville, 
en  1638.  Le  même  discours  avait  été  impri- 
mé à  Ingolslal  avec  la  version  de  Fronton-lc- 
Duc,  en  lo'JG.  [Ce  discours  en  forme  deux  ;  la 
première  partie  fait  le  i)reniier  discours;  la 
seconde  partie  forme  le  second.  Un  troisième 
discours  a  été  publié  en  grec  et  en  latin  par 
handhù.  A ncrdol.  (/rcpcn,  2"  vol.,  Florence, 
1763,  pag.  23-85.  C'est  une  dispute  sur  les 

"  Nosira  ipsa  wlate  siib  Uaiirilio  rhrislianorum 
imiieratore  latronum  quidam  princeiis  in  Tfira- 
ciw  finibus,  crudelis  ac  inliumanm  emcrgil.  Anas- 
las.,  in  Psnl.  vi,  pag.  jno  il  pag.  jlC. 


Pl{.  1*9. 


K<T||.  «llri- 
t-utth  Anïïf'M- 
M-lc-Sio«l«. 


T<.rn, 


Tom.î, 
I»».!S. 


[VII°  SIÈCLE.] 


CIIAIMI'IIK  1.1.  —  .\XASTASE  LE  SINAITE,  PllÈTnE. 


Suite  des 
Ecrits  d'An»?. 


opérations  cl  les  volontés  en  Notre-Seigneur. 
On  y  racoDlc  au  lon^  les  commeiiciMiiunts 
ilii   iiioiiotlii'lisiuc.  La  version  latine  est  île 
Dtuiiiiiiqiie  Slraticim.  Ces  mêmes  ilisconrs  tnit 
l'té  en  partie  réimprimt's  par  Mai  sur  tJes  ma- 
nuscrits du  Vatican  qui  ont  aussi  fourni  la  lin 
du  troisième  discours  qui  manquait.  6V.'»v'/>/. , 
ret.  nor.  collcctin.,  tome  AH  .  part.    1  ,   pan'. 
ly3-:20G,''t  tnuie  L\,iiag.  GUI-22.  Mai  avertit 
que  les  parties  ipi'il  puMie  an  tome  VU"  for- 
ment, la  première  un  discours  assez  court,  et 
la  seconde  nn  discours  assez  loug.]  Alhilius 
paile  d'un  discours  d'Anastase  le  Sinaitc  sur 
la  Transfiguration  de  Jésus-Christ ,  ditlerent 
de  ceux  que  nous  avons  sur  le  même  sujet 
par  Anastase,  palriarclie  d'Aulioclie.   Il  en 
cite  '  un  autre  sur  ceux  qui  se  sunt  endormis 
dans  le  Seigneur.  Il   est  aussi  cité*  par  Lam- 
bécius.  [Il  a  été  édité  eu  grec  par  Mattlia-i, 
d'après  un  manuscrit  de  Moscou,  Mtjscou, 
1774,  in-4.]  Saint  Jean  Damascène,  dans  son 
traité  des  Images,  fait  mention  d'un  discours 
d'Anastase  '  sur  le  nouveau  Dimanche  et  l'a/jô- 
tre  saint  Thomas.  Je  ne  sais  si  ce  qu'il  rap- 
porte' de  lui  sur  l'image  de  saint  Théodore 
était  tiré  du  même  discours  ,  ou  d'un  autre. 
Quoi  qu'il  en  soit ,  Anastase  raconte  qu'il  y 
avait  dans  une  église  dédiée  à  ce  saint ,  à 
ijuatre  mille  de  Damas  '\  une  de  ses  ima- 
ges ;  qu'un  jour  les  Sarrasins  y  étant  entrés 
avec  leurs  chevaux  et  leurs  équipages  ,  l'un 
d'eux  tira  une  llèclie  contre  l'image  de  saint 
Théodore  ,  qui  fut  percée  ù  l'épaule  droite  , 
et  qu'aussitôt  il  en  sortit  du  sang  avec  abon- 
dance. Il  cite  pour  témoins  du  miracle  beau- 
coup de  personnes  qui  l'avaient  vu  de  leurs 
yeux,  et  qui  vivaient  encore.  11  avait  vu  lui- 
même  l'image,  et  considéré  de  près  les  ves- 
tiges du  sang  qui  se  faisaient  encore  remar- 
quer. 

25.  Michel  Glycas  avait  vu,  sous  le  nom 
d'Anastase  le  Sinaite,  un  sermon  sur  la  Résur- 
rection diflërent  de  celui  qui  porte  le  nom 
d'Anastase  d'Antioche  ^  On  lui  attribue  en- 
core un  traité  "  ascétique  ;  un  livre  de  l'Ame  *, 

'  Allalius,  de  Simeow'ftus,  pag.  116. 
lU.  —  s  Lambcciii.s  lib,  IV,  pag.  13C. 

'  Damasceu.  Oral.  3  de  Imagin.,  pag.  3S8. 

»  Pag.  37. 

'  Unus  sagittam  in  sancti  Theodori  imaginem 
contorsil,  ckj'us  humeruin  dextrMin  perforavit, 
statimque  sanguis  scatiiriens  ad  imam  partcm  de- 
cidil,  cunctis  prodigiuni  qnod  acciderat  sagiltam- 
qiie  humero  sancli  infixain  ac  cruorem  manan- 
tem  contuentibiis.  Mulli  aut'm  eorum  qui  rem 
viderunt,  eoque  lempore  adi'iterunt,  qiiando  mi- 
XL 


(iU'J 

des  Eclnguas  imprimées  avec  la  Philocalie 
d'Orii,rène  sous  le  titie  d'0/>î'nioji  cvll'bre  d'un 
pliili)sn|)lio  chrétien  inci^mim  sur  l'âme  ;nn 
tliscours  sur  les  divers  moyens  de  salut  et  de 
pénitence;  on  conjecture  que  c'est  ce  qui 
fait  la  104"  question  de  celles  d'Anastase;  les 
Vies  des  Pères  ([ui  ont  vi'-cu  sur  la  montagne 
de  Siuai  et  dans  le  voisinage;  l'Eloge  de  I'I'j- 
gypte;  deux  livn;sde  laFormation  de  l'homme; 
un  disf'ourssurlaFoidela  rédemption  , adres- 
sé à  l'Kglise  lie  B.ibylone.  C'est  sans  doute  le 
même  qui  l'ail  partie  "  «le  son  traité  inlilulé  : 
Guide  du  vrai  chemin.  11  faut  aussi  y  rappor- 
ter ce  que  Lambécius  '"  a  trouvé  dans  ses  ma- 
nusciits  touchant  les  piemières  hérésies  et 
les  cinq  pieniicrs  conciles  généraux.  Anas- 
tase en  parle  "  dans  le  même  traité.  Il  traite 
dans  ses  questions  plusieurs  autres  matières 
dont  les  manuscrits  fout  des  traités  séparés, 
ciimme  de  ce  qu'il  y  dit  de  la  cause  de  la 
chute  du  démon;  de  l'esprit  de  blasphème; 
de  la  vraie  adoration  et  de  la  fréquente  com- 
munion;  de  la  prière  pour  les  princes  qui 
no  sont  point  catholiques;  de  l'état  des  juifs 
morts  avant  la  venue  de  Jésus-Christ,  si  on 
doit  les  anathématiser.  On  ne  finirait  pas,  si 
l'on  voulait  rapporter  tous  les  écrits  que  l'on 
trouve  dans  les  Bibliothèques  sous  le  nom 
il'Anastase    le  Sinaite.    Possevin  écrivait  à 
Henschenius  que  le  catalogue  que  l'on  con- 
servait dans  la  Bibliothèque  du  Vatican,  con- 
tenait quatre  grandes  pages.  [Dans  le  tome 
septième  de  son  recueil  intitulé  :  Script,  vef. 
nov.   colleclio.,  Mai  donne  divers  fragments 
d'Anastase   d'Antioche   ou  le   Sinaite.  Ces 
fragments  se  trouvent,  soit  dans  l'ouvrage 
intitulé  :  Doctrine  des  Pères  sur  l'incarnation, 
parle  prêtre  Anastase,  différent  d'Anastase  le 
Sinaite,  puisqu'il  cite  ce  dernier,  soit  dans 
les  écrits  d'Anastase  le    Sinaite  contre  les 
monophysites  elles  monothéhtes.] 

23.  Nous  donnerons,  sur  le  rapport  d'A- 
nastase même,  ceux  qu'il  avait  composés,  et 
"qui  ne  sont  pas  venus  jusqu'à  nous;  savoir 
deux  hvres  '-  contre  les  Juifs;  plusieurs  "  con- 

raculum  istud  contigit,  in  vivis  hodie  supersliles 
sunt.  QiUn  et  ego  ipse  imaginem  vidi,  et  re  consi- 
derata,  hanc  in  seriplis  retuli.  Anastas.,  apud  Da- 
masceu., Oral.  3  de  Imagin.,  pag.  378. 

>>  Glycas,  in  Annal,  lib. 

'  Biblioth.  Coisiiiiana,  pag.  8T4. 

"  Ibid.,  pag.  5S5. 

'  Jn  Udego,  pag.  78  et  seq. 

">  Lambeciu?.  lib.  VI,  pag.  443.--"  Cap.  iv  et  v. 

i«  Auastas.,  lib.  VI  in  Hexœmeron,  pag.  884. 

"  Ibid.,  pag.  882. 

39 


Livres  d'A. 
naftase       qui 
«onl  perdus. 
dUjemenl    de 
«es  tcrîlï. 


610 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


ÉdiU.O    <*(! 

Œu\rc*  tlA- 
iia^a^e  dans 
tu  fjiir.  tojpe. 


férences  qu'il  avait  eues  avec  eux;  un  tome 
où  il  traitait  des  dogmes  '  de  l'Ef^lise  catho- 
lique, et  qu'il  avait  publié  sous  le  nom  de 
Flavien  de  Conslantinoplo;  un  tome  -  apo- 
logétique adressé  au  peuple  ;  un  traité  contre 
Neslorius.  Il  avait  '  eu  de  fréquentes  disputes 
avec  les  acéphales,  les  sévcricnset  les  Ihéo- 
dosiens  en  Syrie,  en  Egypte,  surtout  ii  Alex- 
drie.  II  ne  dit  pas  s'il  les  mit  depuis  par  écrit. 
Il  avertit  les  lecteurs  qu'ils  ne  trouveront 
pas  les  passages  des  Pères  rapi)ortés  dans 
SCS  ouvrages  avec  la  dcruière  exactitude, 
parce  qu'il  '  les  rapportjxit  de  mémoire, 
n'ayant  pas  tous  leurs  écrits  dans  sa  solitude. 
Les  discours  qui  n^us  restent  de  lui  ont  du 
feu,  de  l'onction  de  l'élégance. 

26.  [Le  tomeLXXXIXde  la  Palrologkgrec- 
ijue  ,  col.  1-1308  ,  reproduit  les  ouvrages  de 
saint  Anastase  le  Sinaïte  avec  une  notice  tirée 
de  Fahricius.  On  y  trouve  :  1°  l'Odegos,  d'a- 
près Gretser;  2°  les  questions  et  les  réponses, 
d'après  le  même  éditeur;  3°  le  discours 
sur  la  sacrée  synaxc  d'après  Combefts;  -1°  les 
onze  livres  des  contemplations  sur  l'Hexamé- 
ron  ,  d'après  la  Bibliothèque  des  Pères  de 
Lyon  ;  5°  le  douzième  livre,  d'après  l'édition  de 
Londres,  de  1682;  6°  les  deux  discours  sur 
le  psaume  VI,  d'après  le  Trésor  de  Canisius; 


7°  un  fragment  du  discours  sur  ces  paroles  : 
Sentndum  hnagincm,  d'après  Mai;  8°  le  troi- 
sième discouis  sur  ces  mèmt.-;  paroles,  publié 
parBandini  ;  9°  la  relation  des  sentiments  im- 
pies d'.\rius  contre  la  cousubstantialitc  du  Fils 
de  Dieu,  d'après  Maï;  10°  le  discours  sur  les 
deux  défunts,  d'ajirès  MattliaM;  11°  les  cinq 
disputes  contre  les  Juifs,  d'après  Mai  ;  c'est 
l'ouvrage  qui  est  attribué  par  dom  Ceillier  h 
Anastase,  prêtre  du  monastère  de  saint  Eu- 
thymius;  12°  quehpies  fragments  en  grec  seu- 
Jement,  d'après  le  cardinal  Mai  :  le  1"  est  sur 
les  opérations  de  Fils  du  Dieu  ',  le  2'  est  sur 
lesdenx  natures,  le  3'  est  sur  ces  paroles:  Cre- 
avit  Deus  secinidum  imaginein,  le  4'  est  un  frag- 
ment d'une  lettre  à  Sergins  le  grammairien, 
le  5' est  sur  l'Évangile  de  saint  Luc;  le  6°  est 
sur  la  dignité  sacerdotale.  Il.irless  attribue  le 
discouis  d'où  ce  fragment  est  tiré  à  saint 
Anastase,  patriarche  d'Antioche.  Quelques 
autres  exliaits  de  saint  Anastase  se  trouvent 
parmi  les  œuvres  de  saint  Jean  Damascène. 
Le  Spirilegitim  liomaninn ,  t.  VU,  p.  23  et 
2-4  de  la  préface ,  coutient  un  extrait  d'un 
opuscule  sur  l'inimunité  ecclésiastique,  grec 
et  latin,  par  Anastase  le  Sinaïte.  On  ne  l'a 
point  reproduit  dans  la  Patrolvgie  grecgue.] 


CHAPITRE  LU. 


Fanste,  moine  de  Glanfeuil  |  écrivain  latin  da  VII' siècle]. 


FsoMe  :q[)l 
lléuil.lléeiii 
U  Tie  doMîD! 
Malir. 


1.  Fauste  n'avait  •  que  sept  ans,  lorsque 
SOS  parents  le  mirent  entre  les  mains  de  saint 
Benoit  pour  être  élevé  dans  la  piété,  au  mo- 
nastère du  Mont-Cassin.  Arrivé  ù  un  âge  où 
il  pouvait  disposer  de  lui-même  avec  liberté, 
il  se  consacrai  Dieu  dans  l'état  inouastiqu£. 
Après  ([u'il  en  eut  pratiqué  les  exercices  pen- 
dant plusieurs  années,  saint  Benoît  le  choi- 
sit '  avec  quelques  autres  pour  accompagner 
saint  Maur,  qu'il  envoyait  en  France,  à  la 
prière  de  l'évèque  du  Mans,  pour  y  fonder  le 
monastère  de  Glanfeuil.  11  y  fil  un  séjour  de 


près  de  quarante -six  ans.  Mais,  deux  ans 
après  le  décès  de  saint  Maur,  il  reprit  le 
chemin  de  l'Italie ,  et  se  retira  à  Rome  dans  le 
monastère  de  Latran,  où  les  moines  de  Cassin 
s'étaient  réfugiés  après  la  destruction  de 
leur  monastère  parles  mains  des  Lombards, 
en  580.  Ce  fut  lA  qu'.'i  la  prière  "  de  l'abbé 
Théodore,  il  écrivit  la  vie  de  saint  Maur,  son 
voyage  en  France,  l'établissement  de  son 
monastère,  et  ses  miracles,  ayant  été  lui- 
même  témoin  oculaire  de  la  plupart  des  faits 
qu'il  entreprit  de  raconter.  Il  adressa  son 


'  /»  Odego,  pag.  2,  192,  191.  —  »  Ibid.,  pas.  118. 

»  Iliid.,  piitJ.  9(i,  t!i2,  156.  —  *  ll)id.,  pag.  )(iC. 

'•'  Lu  l'ai roloijie  grecuue.  ibid.  cul.  1281, dounc  cet 
pxlrait  d'aprf'S  M.iï,  Scripl.  vel.,  Imii  Vil,  pag. 
an:  il  fjiil  liro  pa;,'.  29.  L'cxlrail  donniià  la  page 20 


te  trouve  daus  les  (puvrcs  de  saint  .lenn  Diniagcène, 
loin.  XCIV  de  la  Patrol.,  eol.  lOlS.  (Lr'diUur.) 

"  r.iusl.  lîpist.,  toiu.  I  Àcl.  Ordin.  S.  Benedicti, 
MaMllou.,  pag.  jtil  edit.  Venclw,  un.  1733. 

'  Ibid.  -  «  Ibid. 


[VI1°  SIÈC1.K.] 

dcrit  '  au  pape  Bonifiice.  Mars!  ci-oil  ^  ([iie 
c'i'iail  le  Iroisiùine  fin  nom,  qni   occupait  le 
Saint-Sit'ge  on  600.  Mais  ce  fut  plus  vraisem- 
blablement '  à  Boniface  IV,  son  successeur, 
qui  tint  le  Sié'^e  ajjpslolique  beaucoup  plus 
longtemps,  et  qui  favorisa  entièrement  ceux 
qui  professaient  la  règle  de  saint  Benoit,  dans 
un  concile  qu'il  assembla  à  Home,  et  dont 
Yves  *  de  Cliartres  fait  mention   dans  sou 
Décret. 
i.jVi.d.       2.  Plusieurs  crili. lues  ont  regardé  la  Vie 
■•■  fau.io.      cie  saint  Maur  comme  une  pièce  supposée, 
et   Fausie   comme    un   auteur    imaginaire. 
^  Mais  il  est  difficile  de  ne  se  pas  rendre  aux 

preuves  du  contraire  alléguées  pardom  lUii- 
nart  danî  l'apologie  qu'il  a  faite  de  la  mission 
de  saint  Maurcn  France.  Eudes  ou  Odon,  ab- 
bé de  Glanfeuil,  qui  écrivait  dans  le  neuvième 
siècle,  dit  qu'il  avait  acheté  assez  chèiement 
un  manuscrit  qui  avaitappartenu  à  un  nommé 
Pierre,  où  étaient  les  Vies  de  saint  Benoit  et 
de  cinq  de  ses  disciples,  savoir,  Honorât,  Sim- 
plice,  Théodore,  Valentinien  et  Maur  ;  que 
ce  manuscrit  *  était  ancien  et  usé;  qu'étant 
défectueux  autant  par  la  rusticité  du  style, 
que  par  la  faute  des  copistes,  il  avait  tâché 
de  remédier  à  ces  défiMits,  en  cori  igeant  et 
le  style  et  les  fautes  qui  s'y  étaient  glissées; 
qu'il  avait  employé  vingt  jours  ou  environ  à 
ce  travail  pour  la  Vie  seule  de  saint  Maur, 
et  qu"il  l'avait  toutefois  corrigée  sans  donner 
la  moindre  atteinte  à  la  foi  de  l'histoire  et 
des  miiacles,  s'étant  appliqué  uniquement  à 
la  rendre  plus  claire  et  plus  intehigible  aux 
lecteurs.  C'était  vers  l'an  863,  qu'Odou  par- 
lait ainsi.  Un  manuscrit  qui  était  alors  usé 
de  vétusté,  et  qui  n'était  même  qu'une  copie, 
devait  être  au  moins  du  siècle  précédent,  et 
toucher  conséquemmeut  à  celui  où  Fauste 
avait  vécu.  Dira-t-on  qu'Odou  est  lui-même 
un  auteur  supposé,  ou  qu'il  a  été  de  mauvaise 
foi?  Mais  quelle  preuve  a-t-on qu'il  ait  voulu 
nous  tromper?  Personne  ne  lui  conteste  l'his- 


CIIAPITIIE  LU.  —  FArSTi:-  MOINE  DE  (JLANFELIL 


611 


toirc  du  rétablissement  du  monastère  de 
filaufcuil,  et  des  miracles  opi'rés  flans  la 
translation  des  reliques  de  saint  Maur,  et 
depuis  qu'on  les  eut  rapportées  dans  ce  mo- 
nastère :  pourquoi  lui  contesterait-on  la  ré- 
vision et  la  jiublication  de  la  vie  de  saint 
Maur?  Ne  s'atiribue-t-il  pas  l'une  et  l'autre 
dans  sa  lettre  h  Adelmodus  ,  archidiacre 
de  l'église  du  Mans,  qui  l'avait  prié  de  les 
rendre  ptibliipies?  Le  style  de  ces  pièces  est 
le  mémo  ;  on  y  voit  une  |)ail'aite  conformité 
dans  le  récit  des  événements.  On  ne  peut 
donc  douter  raisonnablement  que  celui  quia 
fait  l'histoire  de  la  translation  et  des  miracles 
de  sailli  Maur  ne  soit  le  même  qui  a  corrigé 
et  remis  en  son  style  la  \'ie  de  saint  Maur 
écrite  originaiiement  par  Fauste.  Les  chan- 
gements qu'Odon  y  a  faits  n'ont  pas  em- 
pêché (jiie  l'on  ne  l'ait  attribuée  à  Fauste 
dans  les  siècles  suivants.  Elle  est  citée  sous 
son  nom  ^  par  Léon  Marsi,  cardinal  d'Ostie, 
par  Sigebert  de  GcmlJours,  par  Pierre,  dia- 
ci-e  de  Mont-Cassiu,  par  Vossius  et  par  divers 
autres.  Mais  on  serait  plus  aise  de  l'avoir 
telle  qu'elle  était  sortie  de  ses  mains,  fjue 
retouchée  par  Odon,  à  qui  personne  ne  sait 
gré  des  peines  qu'il  s'est  données  à  cet  égard. 

3.  Nous  avons  cette  Vie  '  dans  le  premier  cequet'cst 
tome  des  Actes  de  l'ordre  de  saint  Benoît,  ■)"="'"  vi». 
dans  Surius  et  dans  Bollandus,  au  quinzième 
de  janvier.  Fauste  l'adressa  à  tous  les  moi- 
nes du  monde  chrétien.  11  leur  rend  compte 
de  son  éducation,  de  son  attachement  à  ses 
devoirs  dans  l'état  monastique,  du  choix  que 
saint  Benoît  fit  de  lui  pour  l'envoyer  en  Fran- 
ce avec  saint  Maur,  de  son  retour  en  Italie, 
et  des  instances  qu'on  lui  lit  pour  écrire  cette 
Vie.  Elle  est  trop  diffuse  et  trop  chargée  de 
merveilleux,  mais  c'était  le  goût  du  temps 
de  saint  Benoit,  dont  il  rapporte  quelques 
traits  qu'il  dit  avoir  été  omis  par  saint  Gré- 
goire. Il  remarque  que  ce  saint,  en  envoyant 
saint  Maur  en  France,  lui  donna  sa  règle  dé- 


*  Faust.  Epist,  tom.  I,  Àct.  Ordin.  S.  Bene- 
dicti ,  Mabillon.,  pag.  261  edit.  Venetw ,  an.  1733. 

'  Marsican,  in  Chronico  Cassin..  lib.  î,  cap.  ni. 
5  Mabillon.,  not.  in  epist.  Fausti. 

•  Ivo,  Ml  Décréta,  lib.  VII,  oap.  Xiil. 

•■  Reperi  in  sporlula  cujusdam  clerici  qui  Pe- 
trus  dicebatur  quaterniunculos  nimis  pêne  vetus- 
tate  conswnptos.  anliquaria  et  obtunsa  olim 
conscriplos  manu,  vitani  Benedicti  ac  quinque 
discipulorum  ejus  continentes,  Eonorati  videli- 
cet,  Siiiiplicii,  Tlieodori,  Valcntiniani  atque  Mau- 
ri,  quos  vix  emeriU  datis  non  paucis  redimere 
nunimis.  Et  qjiia  tnm  ii.cuUo  sermone  qmim  titio 


scriptorum  depravati  videbantur,  vitani  beati 
Mauri,  prout  potui,  corrigere  salagens,  viginti 
dierum  iilus  minus  labore  consumpto,  salva  fide 
dictorain  <ic  miraculorum  inibireperlorum,  sicut 
nunc  habetur,  apertiorem  eam  legentibus  reddidi 
et  expressi.  Udo,  epist.  ad  Adelniodum.,  tom.  I 
Ad  ordinis  S.  Benedicti,  pag.  261. 

«  Léo  Marsicauiis,  lib.  1  Chronic  Cassin.,  cap.  ii  ; 
Sigebert,  De  viris  illust.,  cap.  xxxii;  Petius  diac. 
De  viris  illust.  Cassin.,  cap.  u  ;  Vossius,  De  histo- 
ricis  Intinis,  lib.  11,  cap.  xxiu. 

"  .Mabillon.,  Àct.  ordinis  S,  Benedicti,  loin.  I, 
pag.  2*4  et  seq. 


612  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

crilc  de  sa  propre  main,  avec  le  poiJs  de  la      avoir  été  omise  dans  les  Dialog:acs  de  saint 
livre  de  pain,  et  un  vase  d'airain  qui  conle-      Grégoire  ' 


naiU'hémiue,  et  il  faille  détail  jour  par  jour 
decequilenrarrivadcpuislcur  dopartde  Cas- 
sin  jusqu'à  leur  arrivée  à  Glanfcuil,  connu 
aujourd'hui  sons  le  nom  de  Saint-Maur-sur- 
Loire.  Il  fait  une  faute,  en  disant,  que  pour 
donner  à  ce  saint  la  scpullure"  dans  un  en- 
droit sorabiable  à  celui  où  l'on  avait  enterré 
saint  Benoit,  on  le  mit  dans  l'oratoire  de  saint 
Martin  :  car  saint  Grégoire  '  dit  que  ce  pa- 
triarche fut  inhumé  dans  l'oratoire  de  saint 
Jean-Baptiste.  Il  fait  encore  quelques  autres 
fautes  que  Dom  Mabillon  a  soin  de  relever 
dans  ses  notes.  Il  iiiet  le  décès  de  saint  Maur 
h  la  quarante-et-unième  année  depuis  son 
arrivée  en  France  ;  ce  qui  revient  li  l'anoS-i, 
puisqu'il  était  parti  de  Cassin  au  commence- 
ment de  543.  Fauste  dit  qu'il  ne  resta  que 
deux  ans  en  France  depuis  le  décès  de  saint 
Maur.  Ainsi  il  faut  dire  qu'il  fut  près  de 
vingt  ans  sans  en  écrire  la  ^■ie,  puisqu'il  y  cite 
les  Dialogues  de  saint  Grégoire,  qui  ne  furent 
écrit  qu'en  593.  On  pourrait  dire  que  ce 
qu'on  y  en  lit  a  été  ajoute-  par  l'abbé  Odun. 
Mais  d'où  cet  abbé  auraiî-il  appris  la  guéri- 
son  miraculeuse  de  l'enfant  boiteu.\  etmnel, 
que  Fauste  attribue  à  saint  Maur,  et  qu'il  dit 


4.  La  lettre  d'Odou  a  .\ùciniiHlu>  [irécède,  < 
dans  les  imprimés  comme  dans  les  manus- 
crits, la  Vie  de  saint  \faur  par  Fauste,  pour 
lui  servir  de  preuve,  et  pour  faire  connaître 
comment  celte  Vie,  après  avoir  été  si  long- 
lemps  inconnue  en  France,  y  avait  été  ren- 
due publique.  Il  parait  que  Pierre,  de  qui 
Odon  l'acheta,  l'avait  apportée  d'Italie  ;  car 
il  en  revenait  lorsqu'Odon  le  rencontra  en 
Bourgogne.  Ce  fut  aussi  d'Italie  que  saint 
Gi'égoire,  évèquc  de  Langres,  reçut  les  Ac- 
tes du  martyre  de  saint  Bénigne,  inconnus 
aux  Bourguignons  jusqu'à  son  épiscopal, 
comme  le  remarque'  saint  Grégoire  de  Tours, 
son  neveu.  Odon  avait  (piiltc  son  abbaye  de 
Glanfeuil  pour  se  soustraire  aux  courses  des 
Normands,  et  avait  emporté  avec  lui  le  corps 
de  saint  Maur.  Il  fut  quelque  temps  errant 
çà  et  1;\,  tantôt  en  Bourgogne,  tanjùt  ailleurs. 
Mais  enlin  il  retourna  à  Glanfeuil,  oii  il  mit  par 
écrit  de  quelle  manière  il  avait  trouvé  le  ma- 
nuscrit de  la  Vie  de  saint  Maur  ;  il  composa 
aussi  l'iiistoire  de  la  Traushiliou  des  Reliques 
de  ce  saiTif,  et  du  rétablissement  du  monas- 
tère de  Glanfeuil.  Elle  est  imprimée  dans  le 
quatrième  siècle  bénédictin  de  dom  Mabillon. 


CHAPITRE  LUI. 


Saint  Colomban,  abbé  de  Luxen  |cq  615]. 

[Écrivain  latin.] 


HiUrawe  l.  L'ordre  monastique  reçut  de  grands 
de  5aiDt  co-  accroissements  dans  le  septième  siècle  par 
le  ministère  de  saint  Colomban,  différent  d'un 
abbé  du  même  nom,  qui,  au  commencement 
du  règne  de  Ju<tin  le  Jeune,  passa  d'Irlande 
dans  la  Graiule-Bretage  pour  prêcher  la  foi 
aux  Pietés  septentrionaux,  séparés  des  mé- 
ridionaux, par  d'affreuses  montagnes.  Celui- 
ci  est  surnommé  Colomban  l'.Vmicn,  pour  le 
distinguer  de  celui  dont  nous  allons  jiarler. 
Il  était  né  en  Irlande  '  vers  l'an  ;iGO,  dans  la 
province  de  Lagenic  ou  Leinster.  Après  avoir 
appris  les  arts  libéraux,  la  grammaire,  la 
rhétorique,  la  géométrie,  il  (piitla  son  pays; 
et  suivant  les  avis  d'une  femme  de  piété  con- 


sacrée à  Dieu,  il  alla  dans  une  autre  pro- 
vince d'Irlande  se  mettre  sous  la  conduite 
d'un  homme  vénérable  nommé  Silen,  qui  était 
en  grande  réputation  de  savoir  et  de  vertu. 
Il  apprit  sons  lui  les  saintes  Lettres;  puis  il 
entra  dans  le  monastère  de  Bangor,  le  plus 
célèliic  d'Irlande,  qui  avait  alors  pour  abbé 
Coinmogel  ou  Congal,  le  même  qui  avait 
fondi!  ce  monastère.  Aussitôt  qu'il  y  fut  en- 
tré, il  se  mit  sous  le  joug  de  Jésus-Christ, 
s'exerçant  continuellement  h  la  prière,  aux 
jeûnes  et  ix  toutes  les  austérités  de  la  pro- 
fession monastique,  pratifjnant  avec  ferveur 
tous  les  exercices  de  piété  dont  il  devait  un 
jour  donner  des  leçons  aux  autres. 


■  Circg.,  lili  II  Oialog.,  I  :i\i.  \v\ui. 

'  Grcg.  Turuu.,  Iili.  I  De  Gloria  Hiirlyr-,  mit.  li. 


I  .Mabillon.  lib.  MU  Annal.,  pag.  âlO,  loui.  1  ul 
loin.  Il  Àcl.  ord.  S.  Bcnedicli,  pag.  3  et  scq. 


[vil"  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  LUI.  —  SAINT  COLOMBAN  DE  LUXEU. 


*)ia 


iiqtiiKe  iir.       o.  Le  ilésii'  de  se  délacber  de  plus  en  plus 
j.n.  iwGau-  clii  luoiiilp  liù  fit  luiîtrc  lii  poiisi^p  dc  qiiiltor 

lu  en  590.  *  .  , 

ii.bMioo,  11,   moïKislèii!  de  Baniror  où  il  avait  passe 
plusieurs  années,  et  d'aller  demi-urer  dans 
une  terre  étrangère.  L'abbé,  h  qui  il  com- 
muniqua POU  dessein,  ne  consentit  qu'avec 
peine  A  son  départ.  Mais  croyant  que  c'était 
la  volonté  de  Dieu,  il  en  préféra  l'exécution 
au  secours  qu'il  retirait  de  la  présence  de 
Colomban   dans   son   monastère.   Le   saint, 
après  avoir  reçu  la  bénédiction  de  Commo- 
gel,  sortit  de  Bangor  avec  douze  autres  moi- 
nes, passa  dans   la  Grande-Bretagne,   et 
de  1;\  dans  la  Gaule.  Il  était  alors  dans  la 
trentième  année  de  son  âge,  an  500  de  Jé- 
sus-Christ. Contran  régnait  en  Bourgogne, 
et  Childeberl  en  .\ustrasie.  Saint  Colomban 
s'arrêta  dans  les  États  de   Gontran,  où  il 
choisit  pour  le  lieu  de  sa  retraite  nn  vieux 
cbâteaunommé  Anagrates,  aujourd'hui  Atie- 
gray,  situé  dans  le  désert  des  Vosges. 
Il  séiatiii       3.  Ce  pays  inculte  n'otïrit  à  ses  nouveaux 
iSKÎfion,  habitants  que  des  herbes  et  des  écorces  d'ar- 
bres. L'un  d'eux  étant  tombé  malade,  ils  ne 
trouvèrent  d'autre  ressource  pour  le  soula- 
ger, que  de  jeûner  eux-mêmes  et  de  prier. 
Le  troisième  jour  de  sa  maladie,  ils  aper- 
çurent ;\  la  porte  du  monastère  un  homme 
avec  des  chevaux  chargés  de  pain  et  d'autres 
vivres,  qui  leur  dit  qu'il  avait  été  tout  d'un 
coup  inspiré  du  ciel  de  les  secourir.  Il  les 
pria  de  demander  à  Dieu  la  guéiison  de  sa 
femme,  malade  delà  fièvre  depuis  un  an. 
Ils  prièrent,  et  obtinrent  la  guérison  de  cette 
femme.  Après  avoir  passé  une  autre  fois  neuf 
jours  sans  rien  manger  que  ce  qui  se  trou- 
vait dans  les  bois,  Caramtoc,  abbé  du  mo- 
nastère de  Salice,  averti  en  songe  de  leur 
besoin,  envoya  Marculfo,  son  cellérier,  leur 
porter  des  provisions.   Celui-ci,  ne  sachant 
point  le  chemin,  allait  sans  guide  suivant  les 
pas  des  chevaux,  qui,  marchant  d'eux-mê- 
mes, se  rendirent  sans  détour  au  monastère 
d'Anegray.  Salice  ne  subsiste  plus;  on  croit 
qu'il  était  situé  dans  un  endroit  qu'on  ap- 
pelle Saiici,  à  trois  lieues  d'Anegray,  à  une 
I  seulement  de  l'abbaye  de  Lure.  Saint  Colom- 

I  ban  avait  coutume,   pour  se  préparer  aux 

jours  de  fête  du  Seigneur  et  aux  autres  prin- 
cipales de  l'année,  de  se  retirer  dans  une 
caverne  dont  il  avait  chassé  un  ours  à  sept 
milles  ou  environ  d'Anegray,  et  où  il  ne  vi- 
vait que  de  pommes  sauvages  nommées  be- 


lues,  d'herbes  et  d'eau,  (^hielque  grande  que 
fut  raus|i''iité  de  sa  vie,  il  lui  vint  un  grand 
nombre  de  disciples  attiri's  par  l'odeur  de 
•ses  vertus.  Ne  pouvant  les  loger  tous,  il  cher- 
cha un  lieu  plus  commode  dans  le  même 
désert  pour  bâtir  un  monastère. 

4.  Un  château  situé  environ  à  huit  milles   J|„"'|i,d" 
d'Anegray,  nommé  Luxeu,  lui  parut  propre   foduimI. ''° 
à  sou  dessein.  Ou  y  voyait  encore  les  restes 
d'une  ancienne  forteresse,   et  dans  le  plus 
épais  du  bois  voisin,  des  idoles  de  pierre  que 
les  païens  avaient  adorées.  Il  y  avait  aussi 
dès  lors  des  bains  d'eau  chaude.  Le  monas- 
tère qu'il  bâtit   en  ce  lieu  devint  en  peu  de 
temps  si  célèbre  ,  que  l'aflluence  de  ceux  qui 
venaient  se  mettre  sous  sa  discipline  l'obli- 
gea d'en  construire  un  second,  ou  plutôt  un 
troisième,  qu'il  nomma  Fontaines,  à  cause 
de  l'abondance  des  eaux.  Il  est  situé  à  une 
lieue   de  Luxeu.  Il   est  surprenant  que  le 
moine  Jouas,  qui  a  écrit  la  Vie  de  saint  Co- 
lomban, n'ait  pas  marqué  l'année  de  sa  ve- 
nue dans  les  Gaules,  ni  celle  de  la  fondation 
du  monastère  de  Luxeu.  Mais  de  re  qu'il  dit  ' 
que  saint  Colomban  fut  chassé,  h  la  sollicita- 
tion de  la  reine  Brunehaut,  vingt  ans  après  sa 
demeure  dans  le  désert,  et  que,   trois  ans 
après  sou  expulsion,  la  monarchie  française 
passa  à  Clotaire  par  la  mort  de  Théodebert 
et   de   Thierry  ,   ce    qui  n'arriva    que  l'an 
613,  il  suit  que  le  saint  ne  commença  d'ha- 
biter le  désert  des  Vosges  qu'en  590,  quelque 
temps  après  son  arrivée  dans  les  Gaules,  et 
que  n'ayant  pas  fait  un  long  séjour  â  Ane- 
gray,  il  s'établit  à  Luxeu  vers  l'an  591.  La 
trudition   de  l'abbaye  de  Luxeu  est  que  le 
saint  passa  dix-sept  ou  dix-huit  ans  ù  Ane- 

gi'î'y- 

3.  En  quittant  Anegray,  il  y  laissa  quel-  n  „,ei  des 

ques-uns  de  ses  disciples,  sous  la  conduite  dïn"," fe/ 'io- 

d'un  supérieur.  Il  en  mit  aussi  un  à  Fontai-  °«A7%f  dà 

IL  '  î'i  Fontaines. 

a  communauté  qu  n  y   Faisa.i-on  i 

établit,  et  ut  une  rei;le  qui  tut  commune  a  an?e  p.rpé- 
ces  trois  monastères,  et  adoptée  ensuite 
par  plusieurs  autres  monastères  des  Gau- 
les. Saint  Bernard  dit,  dans  la  Vie  de  saint  - 
Maliichie,  avoir  appris  par  tradition  que 
l'on  chantait  jour  et  nuit  à  Luxeu  les  louan- 
ges de  Dieu  sans  aucune  interruption.  Saint 
Colomban  ne  dit  rien  de  cette  pratique  dans 
sa  Règle.  Jonas,  son  historien,  n'en  parle  pas 
non  plus,  et  on  n'en  trouve  rien  dans  les 
Actes  de  saint  Euslase,  ni  dans  ceux  d'Attale 


'  Tom.  Il  Act   ord.  S.  Benedirt.,  i>ag.  2Sl. 


Beru.ini.,  in  cila  ilalachiœ. 


614 


niSTOIllE  GÈNftRALK  DES  AUTEURS  ECCLRSIASTrOUES. 


Salol    Co 

loRtbio  e^tin- 


Il  ««t  «nvA- 
]«  •■)  »ll  ;  Il 
tn  r«<)eoi. 

Mabil'oni 
Ann^l.  lom. 
Il,  (.g.  M». 


OU  de  Bertulfe,  abbés  de  Bobbio.  L'auteur  de 
la  X'ie  de  sainte  Salaberge,  abbos=c  do  Laon, 
rapporte  qu'elle  institua  la  louanf;e  perpé- 
tue.le  dans  son  monastère,  à  l'imitation  de 
ce  qui  se  pratiquait  h  cet  éirard  par  les  moi- 
nes d'A^'aune,  et  par  les  religieuses  de  Re- 
mircmont.  Il  aurait  sans  doute  ajouté  l'exem- 
ple des  moines  de  Luxeu,  s'ils  avaient  été 
dans  le  même  usage.  Il  fut  néanmoins  établi 
par  la  suite  des  temps  dans  ce  monasti^re, 
mais  seulement  sous  l'abbé  Valdbcrt,  comme 
on  le  voit  par  un  reste  du  catalogue  des  ab- 
bés de  Luxeu.  Enfin,  ce  qui  prouve  qu'il  ne 
sidjsislait  pas  dès  le  temps  de  saint  Culoni- 
ban,  c'est  que,  le  rou Thierry  ayant  envoyé 
prendre  Colomban  pour  le  conduire  en  exil, 
les  gardes  destinés  A  cette  exécution  trou- 
vèrent le  saint  religieux  dans  l'église  occupé 
à  la  psalmodie  et  à  la  prière  avec  toute  sa  com- 
munauté: ce  qui  ne  serait  pas  arrivé  ,  si  elle 
avait  été  divisée  en  bandes  pour  chanter  suc- 
cessivement et  sans  interruption  les  louan- 
ges de  Dieu. 

6.  Cependant  saint  Colomban  confirmait 
dans  son  monastère  de  Luxeu  l'usage 
qu'il  avait  apporté  d'Irlande  ' ,  de  célébrer 
la  Pàque  le  quatorzième  de  la  lune.  Les  évo- 
que de  France  l'inquiétèrent  sur  ce  sujet,  et 
il  fut  aussi  repris  pai'  le  prôtre  Candide,  que 
le  pape  saint  Grégoire  avait  envoyé  en  Gaule 
en  qualité  de  recteur  du  patrimoine  de  l'É- 
glise romaine.  Pour  se  mettre  à  couvert  de 
tous  ces  reproches,  il  conçut  le  dessein  d'al- 
ler ;\  Ilome  pour  y  faire  approuver  sa  con- 
duite. Mais,  retenu  dans  son  monastère  par 
la  faiblesse  de  sa  sauté  et  par  le  soin  de  ses 
religieux,  il  prit  le  paiti  d'écrire  à  saint  Gré- 
goire et  aux  évoques  de  France  assemblés  , 
pour  les  prier  d'examiner  sou  alfairc.  Ses 
deux  lettres  à  saint  Grégoire  ne  furent  point 
rendues  ;  et  parce  qu'on  continuait  toujours 
en  France  ù  le  presser  de  se  conformer  au.t 
usages  de  cette  Eglise  sur  la  PAque  ,  il  écri- 
vit au  pape  Boniface  ,  en  lui  envoyant  une 
copie  des  lettres  qu'il  avait  écrites  à  saint 
Grégoire;  il  demandait  qu'il  lui  fût  permis 
d'observer  la  tradition  de  ses  anciens  ,  si  elle 
n'était  point  contre  la  foi.  On  ne  sait  point 
qu'elle  fut  la  réponse  du  pape  Boniface. 
7.  Le  roi  lliierry  ,  plein  de  respect  pour 
saint  Colomban ,  l'allait  voir  souvent  à  Luxeu 
et  se  recommandait  A  ses  prières.  Mais  le 
saint  abbé,  qui  n'ignorait  pas  que  ce  prince  en- 


tretenait des  concubines ,  lui  eu  faisait  des 
reproches,  et  l'exhortait  à  épouser  une  reine 
qui  lui  donnât  des  enfants  légitimes.  Le  roi, 
touché  de  ses  avis,  promit  de  les  suivre. 
Mais  Bruuehaut  l'en  empêchait ,  craignant 
qu'une  reine  ne  lui  fit  perdre  le  crédit  qu'elle 
avait  sur  l'esprit  de  Thierry,  qui  était  son 
petit-fils.  Un  jour ,  saint  Colomban  l'étant 
venu  voir  h  Bourcheress-n,  entre  Chi\lon-sur- 
Saône  et  Autun,  elle  lui  présenta  les  quatre 
enfants  naturels  du  roi,  le  priant   de  leur 
donner  sa  bénédiction.  »  Ce  sont ,  répondit 
le  saint  homme,  des  fiuits  de  la  débauche  ; 
ils  ne  succéderont  poini  au  royaume.»  Bru- 
neliaut ,  déji\  aigrie  contre  saint  Colomban 
de  ce  qu'il  lui  avait  refusé  l'entrée  de  son 
monastère  ,  comme  il  la  refusait  non-seule- 
ment h  toutes  les  femmes,  mais  A  tous  les 
séculiers,  envoya  défendre  aux  voisins  du 
monastère  de  laisser  sortir  aucun  des  moi- 
nes, et  de  leur  donner  ni  retraite  ni  secours. 
Le  saint ,  voulant  essayer  de  l'apaiser  ,  vint 
à  Epoisses    entre  Semur   et   Montréal,  où 
elle  était  avec  le  roi ,  qui ,  averti  de  son  ar- 
rivée ,  lui  fit  préparer  à  manger  ,  craignant 
d'attirer  sur  lui  la  colère  de  Dieu,  s'il  ne  re- 
cevait  son   serviteur  avec   honneur.   Saint 
Colomban  refusa  avec  dédain  les  mets  qu'on 
lui  apporta  de  la  part  du  roi ,  disant  :  «  Il 
est  écrit  que  le  Très-Haut  rejette  les  présents 
des  impies.  La  bouche  des  serviteurs  de  Dieu 
ne  doit  pas  être  souillée  des  viandes  de  celui 
qui  leur  refuse  non-seulement  l'entrée  de  sa 
maison,  mais  celle  des  aidres.»  A  ces  paroles 
les  vases  se  rompirent  en  morceaux,  le  vin 
et  la  bière  se  répaudiient  par  terre,  les  vian- 
des se  dispersèrent.  Les  oUkiers  ell'rayés  en 
firent  leur  rapport  au  roi,  qui  vint  le  lende- 
main ma  lin  avec  Bruuehaut  demander  pardon 
au  saint  aljhé,  avec  promesse  de  se  corriger. 
Mais  cette  promesse  fut  sans  effet.  Saint  Co- 
lomban en  fit  par  écrit  des  reproches  au  roi, 
en  le  menaçant  d'cxcommunicalion   s'il  ne 
changeait  de  vie.  La  reine  Biunchaul,  entrant 
de  nouveau  en  colère,  excita  contre  lui  les 
premiers  de  la  cour  et  même  les  évêques, 
voulant  qu'ils  trouvassent  ^  reprendre  dans 
sa  rîi''gle.Les  courtisans  donnant  aveuglément 
dans  les  volontés  de  la  reine,  pressèrent  le 
roi,  ou  de  chasser  de  Luxeu  l'homme  de 
Dieu,  ou  de  l'obliger  de  conformer  son  ins- 
titut aux  autres  qui   avaient    lieu    dans  le 
royaume.  Thierry   vint  donc  h  Lunch  .    et 


Andï 
I    1 


"  Colomban.,  loin.  XII  B»6/.  vel.  Pat  ,  png.2J,  25. 


.Mabillon.,  Annal.,  png.  2lf,  Inm.  II. 


CHAPITRE  LUI. 


[vu"  SIKCLE.] 

se  plaignit  de  ce  qwe  Coloinban  s'écartait  do 
l'usage  des  luowies  do  la  pniviiico,  eu  ne 
donnant  pas  libre  entrée  ù  tous  les  cluiHiiMis 
au  dedans  de  son  monastère.  •<  Jl  sullit,  ré- 
pondit le  saint,  que  j'aie  des  lieux  disposés 
pour  y  recevoir  tous  les  étrangers;  mais  je 
n'admets  point  les  séculiers  dans  L'intérieur 
de  la  maison.  »  Le  roi,  qui  était  entré  jusque 
dans  le  rétectoirp,  lui  répliqua  que,  s'il  vou- 
lait recevoir  de  lui  de  nouvelles  faveurs,  il 
fallait  que  tous  les  endroits  de  son  monas- 
tère fussent  ouverts  à  tout  le  monde.  Sur 
quoi  saint  Colomban  lui  dit  :  «  Si  vous  êtes 
venu  ici  pour  renverser  les  communautés  des 
serviteurs  de  Dieu,  et  la  discipline  monasti- 
que, sachez  que  nous  nous  passerons  de  votre 
secours  et  de  vos  bienfaits,  mais  que  votre 
royaume  sera  détruit  avec  toute  votre  race  » 
Le  roi  eftVayé  sortit  du  réfectoire,  en  lui  di- 
sant :  «  Vous  prétendez  que  je  vous  donnerai 
la  couronue  du  martyre,  Je  ne  suis  pas  assez 
insensé.  Mais  puisque  vous  êtes  si  éloigné 
de  notre  manière  de  vivre,  retournez  d'où 
vous  êtes  venu.  »  Saint  Colomban  répondit 
qu'il  ne  sortirait  point  de  son  monastère,  si 
on  ne  l'en  cliassait  par-  foice.  Le  roi  s'en  re- 
toui'na  ;  mais  il  laissa  un  des  grands  de  sa 
cour,  nommé  Bauilulfe,  avec  ordre  de  faire 
conduire  le  saint  abbé  à  Besançon,  jusiiu'à 
ce  qu'il  en  eût  ordonné  autrement.  Pendant 
son  séjour  en  cette  ville,  Colomban  délivra  par 
ses  prières  des  prisonniers  condamnés  à 
mort,  après  qu'ils  lui  eurent  promis  de  se  corri- 
ger et  de  faire  pénitence;  car  on  ne  lui  avait 
point  donné  de  gardes,  par  le  respect  qu'on 
lui  portait,  en  sorte  qu'il  avait  la  liberté  d'afc- 
1er  où  il  voulait.  Il  en  usa  pour  lui-même,  et 
un  jour  de  dimanche,  il  passa  au  milieu  de 
la  ville  avec  les  siens  et  revint  à  Luxeu.  C'é- 
tait vers  l'an  610. 
socondoii  8.  Le  roi  et  Brunehaut,  irrités  de  son 
lo'njb.o  °n  retour,  envoyèrent  à  diverses  fois  des  gens 
"  Mibiiinn,  armés  pour  l'obliger  de  sortir  de  son  mo- 

Annil.     le .  ,  Ti 

I,  i.f.  »3.  ■  nastere,  et  de  retourner  en  son  pays.  Il  re- 
fusa constamment  l'un  et  l'autre ,  disant 
qu'ayant  quitté  son  lieu  natal  pour  Dieu,  il 
ne  pouvait  y  retourner  sans  l'otfenser.  L'of- 
ticier  et  les  soldats,  chargés  de  le  faire  obéir 
aux  ordres  du  roi,  n'osaient  user  de  violence; 
mais  ils  le  priaient  avec  larmes  de  sortir, 
de  crainte  de  se  voir  eux-mêmes  exposés  à 
la  colère  du  prince.  Celte  considération 
le  toucha.  Il  sortit  volontairement  de  Luxeu 
la  vingtième  année  de  son  séjour  dans  les 
Vosges,   c'est-à-dire   en  610,  accompagné 


SAINT  COLOMBAN  DE  LUXEU. 


615 


seulementdesmoines qu'il  avait  amenés  d'Ir- 
lande ou  de  .Bretagne.  On  lit  rester  tous  ceux 
qui  étaient  nés  dans  les  Gaules,  llagamond, 
à  qui  le  roi  avait  donné  la  commission  de  le 
conduire,  devait  le  mener  jusqu'à  Nantes, 
pour  l'embarquer.  Etant  i'i  Auxerre,  saint 
Colomban  dit  à  cet  officier  :  u  Souvenez- 
vous  quQ  Clotaire,  que  vous  méprisez  main- 
tenant, sera  dans  trois  ans  votre  maître,  d 
D'Auxerre  il  alla  à  Nevers,  où  on  l'embar- 
qua sur  la  Loire.  Ses  gardes  ne  lui  permi- 
rent pas  d'entrer  à  Orléans  ;  on  refusa  même 
des  vivres  l\  ses  disciples,  dans  la  crainte  de 
contrevenir  aux  ordres  du  roi.  Mais  une 
femme  syrienne  eu  eut  pitié,  les  mena  chez 
elle  et  fournit  à  leurs  besoins.  En  reconnais- 
sance de  ce  service,  ils  amenèrent  son  mari, 
aveugle  depuis  longtemps,  <à  saint  Colom- 
ban, qui  le  guérit.  .\ux  approches  de  Tours,  ibid.].?. 
il  demanda  permission  d'a'Ier  faire  sa  prière 
au  tombeau  de  saint  Martin,  ce  qu'on  ne  lui  ^ 

accortla  qu'avec  beaucoup  de  peine.  Léopa- 
rius,  évèque  de  cette  ville,  l'invita  à  dîner. 
Pendant  le  repas,  Léoparius  lui  ayant  de- 
mandé pourquoi  il  retournait  en  son  pays, 
il  répondit  que  Thierry  l'avait  chassé  de  la 
conijiagnie  de  ses  frères.  Cette  réponse , 
qu'il  lit  en  des  termes  durs,  choqua  un  sei- 
gneur qui  était  du  nombre  des  conviés  et 
allié  du  joi.  Mais  le  saint,  à  qui  il  en  fit  se- 
crètement des  reproches,  lui  dit  que  dans 
trois  ans  ce  roi  et  ses  enfants  périraient,  et 
que  toute  sa  race  serait  éteinte.  Arrivé  à 
Nantes,  il  écrivit  à  ses  moines  de  Luxeu  une 
lettre  pleine  de  prudence  et  de  charité,  où, 
en  leur  recommandant  l'union,  il  leur  ordon- 
dait  d'obéir  à  Altale  son  disciple,  comme  à 
leur  supérieur.  Sufronius,  évêque  de  la  ville, 
ne  lui  donna  aucune  consolation.  Au  con- 
traire, il  se  joignit  au  comte  Théobalde  pour 
le  presser  de  partir  ;  mais  il  en  reçut  de 
Procula  et  de  Doda,  deux  femmes  de  piété, 
qui  fournirent  aux  besoins  de  son  embar- 
quement. La  navigation  ne  fut  pas  de  longue 
durée.  Le  vaisseau  qui  le  devait  porter  en 
Irlande  ayant  été  repoussé  par  le  vent,  il 
resta  pendant  trois  jours  sur  le  sable  sans 
qu'on  pût  l'eu  retirer.  Celui  à  qui  d  apparte- 
nait, croyant  que  les  meubles  du  saint  et  de 
ses  compagnons  en  étaient  cause,  les  fit  en- 
lever du  vaisseau,  et  refusa  de  les  meuer. 
Aussitôt  Je  vaisseau  se  trouva  dégagé.  Ce 
qui  ayant  été  regardé  comme  un  miracle, 
on  laissa  à  saint  Colomtan  la  liberté  d'aller 
où  il  voudrait. 


616 


HISTOIRE  GKNKKALR  DKS  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


11  vt  Totr 
lei  rol6  Clo- 
l&lte  et  Ttto' 
drtxrl.Mll'il. 
loo,  Anoil. 
tooi.  I,  I-a<. 
293,  29i,  Ï9Â, 
et  ton>.  Il  Ae* 
torord.S'  Be* 
Dcdicu,    pap. 


9.  Il  alla  trouver  le  roi  Clotaire,  lits  de 
Cliilpéric,  qui  réguait  alors  sur  Its  Français 
de  Neustrie,  àlexlrpinite  de  la  Gaule  sur  la 
côle  de  lOcéan.  Ce  prince,  intormé  des  per- 
sécutions que  Thierry  et  Bruneliaut  fai- 
saient à  saint  Coloiuban,  le  letjut  avec  joie 
et  le  pria  de  se  choisir  une  demeure  dans  ses 
Etats.  Le  saint  ne  jugea  pas  à  profxis  d'ac- 
cepter cette  grâce,  dans  la  crainte  d'aug- 
menter l'inimitié  entre  les  deux  rois;  mais 
il  accepta  de  Clotaire  une  escorte  pour  le 
conduire  dans  le  royaume  de  Théodebert, 
d'où  il  voulait  passer  en  Italie.  Il  prit  sa 
route  par  Paris,  où  il  délivra  un  possédé 
qu'il  trouva  à  la  pqftc.  A  Meaux,  il  consa- 
cra à  Dieu  la  lille  de  Chagncric,  nommée 
Fare,  qui  fut  depuis  illustre  par  ses  vertus. 
Arrivé  dans  h^s  États  de  Théodebert  avec  ses 
compagnons  et  plusieurs  des  moines  de  Lu- 
xeu  qui  l'avaient  rejoint  en  chemin  ,  ce 
prince  lui  olliil  des  beux  commodes  pour 
s'y  établir.  Saint  Colomban  accei)ta  l'otl're; 


langue  du  pays,  les  désabusa,  leur  prêcha  ^^^  "^  | 
la  vraie  foi  ;  et  prenant  les  idoles  devant  B'»^iti 
toute  l'assemblée,  les  mit  en  pièces  et  les 
jeta  dans  le  lac.  Quelques-uns  se  converti- 
rent ;  les  autres  se  retirèrent  en  colère. 
Aloi-s  saint  Colomban  ',  prenant  de  l'eau, 
la  bénit,  en  aspergea  l'église,  et,  tournant 
autour  avec  ses  disciples  en  chantant  des 
psaumes,  il  en  fit  la  dédii:ice.  Ensuite,  invo- 
quant le  nom  de  Dieu,  il  fit  les  onctions  sur 
l'autel,  y  mit  des  relr<iues  de  sainte  Aurélie, 
le  revêtit  et  y  célébra  la  messe.  Ce  qui  étant 
fait,  le  peuple  s'en  retourna  avec  joie. 

10.  Saint  Colomban  demeura  h  Bregenls 
environ  trois  ans;  il  y  b;*ilit  un  monastère, où 
ses  rebgieux  travaillaient,  les  uns  au  jardin 
potager,  d'autres  à  cultiver  des  arbres  frui- 
tiers, d'autres  ;\  pêcher;  saint  Gai  faisait  des 
filets,  le  lac  leur  fournissait  du  poisson  en 
abondance.  11  vint  en  pensée  à  saint  Colom- 
ban d'aller  prêcher  la  foi  aux  Yenèdes  ou 
Sclaves,  qui  étaient  dans  le  voisinage;  mais 


n>'(i>i>iitt 

Bref eat*. 


et  s'étant  embarqué  sur  le  Uhin,  il  remonta      il  vn  fut  détourné  dans  une  vision,  où  il  fut 


Vii<  s.  G>|. 


ce  tleuve  depuis  Mayence  jusqu'à  l'extrémité 
du  lac  de  Zurich,  d'où  il  passa  jusqu'à  Zug, 
où  il  trouva  la  solitude  si  agréable,  qu'il  ré- 
solut de  s'y  arrêter.  Lesliabitanis  étaient 
cruels  et  superstitieux,  adorant  les  idoles, 
observant  les  augures  et  les  divinations.  Il 
leur  prêcha  le  vrai  Dieu,  et  après  qu'il  eut 
confirmé  par  divers  miracles  les  vérités  qu'il 
leur  annonçait,  plusieurs  se  convertirent  et 
reçurent  le  baptême  ;  d'autres  qui,  depuis 
leur  baptême,  étaient  retournésa  l'idolâtrie, 
revMuent  a  la  pialiipio  de  ri:;vangile.  11  en 
resta  un  grand  nombre  qui  refusèrent  d'em- 
brasser la  toi.  Saint  Gai,  l'un  de  ses  disciples, 
poussé  par  son  zèle,  brûla  leurs  temples  et 
jeta  dans  le  lac  (outes  les  otlVandes  faites 
aux  idoles.  Lus  barbares  irrités  résolurent  de 
le  tuer,  et  de  chasser  de  leur  pays  saint  Co- 
lomban. Il  les  prévint,  et  passa  avec  les 
siens  à  Bregenls,  où  il  trouva  parmi  les  res- 
tes diiue  ville  ruinée  un  oratoire  de  Sainle- 
Aurélie,  auprès  duquel  ils  se  firent  de  petits 
logements.  Il  y  avait  dans  cette  église  trois 
images  d'airain  dorées  et  attachées  à  la 
rauiaille.  Le  [leuple  les  adorait  et  leur  of- 
frait des  sacrifices,  comme  aux  anciens  dieux 
lutélaires  do  ce  lieu.  Saint  Gai,  qui  savait  la 


Fredfrpp' 
C4p.  kXX*>i 


averti  que  ces  peuples  ne  se  convertiraient 
pas.  Ainsi  il  demeura  en  repos  jusqu'à  ce 
qu'il  pût  passer  eu  Italie.  Il  eu  prit  le  che- 
min quelque  temps  après  la  mort  de  Théo- 
debert arrivée  vers  l'an  6t2,  à  la  suite  de  la 
bataille  de  Tolbiac.  Thierry,  qui  lui  avait 
déclaré  la  guerre,  le  battit  deux  fois  ;  et 
l'ayant  poursuivi  après  sa  victoire,  il  l'en- 
voya à  Bruneliaut  qui  le  fit  entrer  dans  le 
clergé,  et  mourir  quelques  jours  après.  Par 
celle  mori  ,  Thierry  devint  maître  du 
royaume  d'Austrasie. 

*  H.  Agilulfe,  roi  des  Lombards  en  Italie, 
reçut  très-bien  saint  Colomban,  et  lui  donna 
le  choix  de  demeurer  en  tel  endroit  de  ses  i.uioD.An...i. 
Ltals  qu'il  voudrait.  Il  choisit  dans  le  désert  i»«- 
de  r.\[)enniu  un  lieu  nommé  Bobbio,  près 
de  la  Trebia,  où  il  y  avait  une  Église  de 
Saint-Pierre  à  demi  ruinée.  Les  environs 
élaient  fertiles,  bien  arrosés  et  pleins  de 
poissons.  11  rétablit  l'église,  et  bàlit  auprès 
un  monastère  qui  subsiste  encore.  Il  bâtit 
aussi  un  oratoire  en  l'honneur  de  la  sainte 
Vierge  sur  une  montagne  voisine,  avec  une 
caverne  de  sa  grandeur,  où  il.«e  retirait  pen- 
dant le  carême  pour  y  vivre  dans  le  jeune 
et  dans  la  prière,  ne  revenant  au  monastère 


II  T«fn  l(a- 

i  Bo    I>1D  vpr> 
l'>r>  K  .1.   M|. 


'  liealus  aulem  Columbanus  juxsil  aH'crri 
aquam,  cl  benedicetu:  illam  asiieisit  illn  teniplum, 
et  diiin  circuiri'nt  psalluntes.  dvdicaiil  ecclesiaiii. 
Deinde  invocato  nominf.  Domini  uilTit  nitart,  et 


beuitf  Àureliu'  relitfuias  m  eo  collocacit,  vesUlo- 
(jue  iilian  nisscs  Ugilimc  comiitiveruiil.  Vita  S, 
Gatlt,  lotu.  Il  Àctorum  ordin.  S.  Beneri..  \>tnt.  221. 


"•■s- 


„ul    Clou,, 
iijii  en  filit. 
MiIuiIkm, 


[vil'  SikCLE.] 

((lie  le  samuili  et  les  jours  de  fêles.  Il  mit 
umuoinc  auprès  de  l'oriiloire,  devant  lequel 
il  lli'cliissait  souvent  les  genoux  (car  c'était 
la  l'oiituuie  des  gens  de  pirté  en  Irlande  de 
faire  au  moins  cent  fifénullexions  par  jour). 
L'allaire  des  Trois-Cliapitres  faisait  toujours 
du  liruit  en  Italie.  Le  roi  Agilulfe,  qui  eu 
favorisait  les  défenseurs,  pria  saint  Colnm- 
ban  d'écrire  au  pape  Boniface  IV  sur  cette 
question.  Il  le  fit,  mais  en  des  termes  qui 
faisaient  voir  qu'il  était  mal  instruit  du  fait. 
12.  l'iMulanl  ce  temps  ,  Thierry  ,  lier  de 
la  conquête  des  Etats  de  Tliéodebert,  voulut 
ï'jos.'"*' "'  aussi  enlever  A  Clotairc  une  partie  de  ceux 
qu'il  possédait  en  Neustrie  ,  c'est-à-dire  , 
ceux  qu'il  croyait  avoir  été  usurpés  sur  le 
royaume  de  France.  Son  armée  était  déj.'i 
en  marche  pour  entrer  dans  les  provinces 
qui  appartenaient  à  ce  prince  ;  mais  il  mou- 
rut à  Melz,  quelques  mois  après  son  frère 
Théodebert,  l'an  (il3,  qui  était  le  dis-hui- 
tième de  son  règne.  Clotaire,  devenu  alors 
seul  roi  des  Français  suivant  la  prophétie  de 
saint  Colomban,  chargea  saint  Eustase,  qui 
gouvernait  le  monastère  de  Luxeu,  d'nlku- en 
llahe  l'inviter  de  sa  part  à  le  venir  trouver. 
Le  saint  vieillard  fut  ravi  de  voir  et  d'entre- 
tenir son  disciple  ;  mais  ne  pouvant  retour- 
ner à  Luxeu,  il  lui  dit  de  faire  ses  excuses 
au  roi  Clotaire,  et  de  lui  recommander  son 
monastère,  il  donna  ù  saint  Eustase  une 
lettre  pour  ce  prince,  qui  la  reçut  avec  joie, 
quoiqu'elle  fût  remplie  d'avis  pour  la  coirec- 
tion  de  ses  mœurs.  Le  séjour  de  saint  Colom- 
ban  àBibbio  ne  fut  que  d'un  an,  ce  qu'il  faut 
entendre,  depuis  qu'il  eut  achevé  ce  monastè- 
re. Il  y  mourut  le  21  novembre  de  l'année  613. 
Jonas.  moiue  de  Bobbio,  qui  écrivit  sa 
vie  vÎTigt-huit  ans  après  ,  ne  raconte  au- 
cune circonstance  de  sa  mort.  Il  était  de 
Suze  ,  et  il  vécut  dans  ce  monastère  sous 
deux  abbés  successeurs  de  saint  Colom- 
iiid.  pas.  ban,  savoir,  Atfale  et  Bertulfe.  Ce  fut  ce 
dernier  qui  l'engagea  ù  écrire  la  vie  de  saint 
Colomban.  Depuis  il  composa  celles  des  saints 
Attale  et  Bertulfe,  abbés  de  Bobio,  et  d'Eus- 
tase,  abbé  de  Luxeu,  qu'il  dédia  h  Bobolcne 
et  à  Valdberl,  distingués  l'un  et  l'autre  par 


CHAPITRE  LUI.  —  SAINT  COLOMBAN  DE  LUXEU. 


(.17 


leur  grande  piété.  Ces  Vies  se  trouvcnl  sous 
son  nom  dans  le  second  tome  des  Actes  de 
l'Ordre  de  saint  Benoit,  par  Dorn  Mabillon, 
el   dans    Suiius.    Jouas    lit   un  voyage   en 
France  ;  et  si  c'est  lui  qui  a   l'ci'it  l'Iiisloire 
de  la  vie  et  des  miracles  de  saint  Jean  de 
Réoraé,  il  faut  qu'il  ail  été  abbé  lui-môme; 
car  elle  porte  le  nom  de  l'abbé  Jouas.  Nous 
en  parlerons  encore  dans  la  suite.  Le  temps 
de  la  vie  de  saint  Colomban  fut  au  moins  de 
quatre-vingt-dix  ans,  puisque  <i  cet  âge  il  fai- 
sait encore  des  vers.    11  en    adressa  à  Fe- 
dolius,  et  c'est  Ih  qu'il  dit  qu'il  élait  parvenu 
aux  années  de  dix-huit  '  olympiades,   qui, 
en  les   mettant  à  cinq  ans,  comme   il  est 
d'usage  ',  font   90  ans.  Outre   sa  vie  écrite 
par  Jonas,    nous   en  avons   une  autre  d'un 
anonyme  qui  l'écrivait  dans  le  dixième  siè- 
cle, et  un  livre  qui  contient  le  recueil  de  ses 
miracles.    Il  y  en  a  une  en  vers  par  Flo- 
doard,   chanoine  de  Reims,    puis  moine.    Il 
la  finit  en  disant  '  ,    que   les   piodiges  qui 
s'opéraient  à  son    tombeau,    et  qu'il  jivait 
opérés  pendant  sa  vie,  étaient  une  preuve 
de  sa  sainteté,  et  que  son  savoir  et  sa  doc- 
trine  étaient  connus  par  ses  écrits. 

ARTICLE  II. 

ÉCRITS  DE  SAINT  COLOMB.iN. 
§1- 

Règle  de  saint  Cvlomban. 

1 .  Après  que  saint  Colomban  eut  établi  des        ra^ic  as 
communautés  de  moines  dans  les  raonastè-  b.nn. iiM-rv6e 

.  .,     avec  celle  de 

res  d'Anegray,  de  Luxeu  et  de  Fontaines,  il  raim  B«n<.u. 
leur  fit  une  règle  que  l'auteur  de  sa  vie  nous 
fait  '  regarder  comme  dictée  parle  Saint-Es- 
prit. Mais  elle  n'y  fut  observée  seule  que 
pendant  la  vie  de  saint  Colomban  et  sous 
saint  Eustase,  son  successeur  dans  l'abbaye 
de  Luxeu.  Saint  Valbert,  qui  en  eut  le  gou- 
vernement en  623,  aprèsla  mort  de  saint  Eus- 
tase arrivée  en  cette  année-là,  y  introduisit 
la  règle  de  saint  Benoit,  en  abrégeant  celle 
de  saint  Colomban,  mais  en  les  faisant  obser- 
ver toutes  deux  ensemble.  C'est  ce  que  té- 
moigne ^  l'auteur  de  la  Vie  de  sainte  Sala- 


'  ^nnc  ad  Otympiadis  ter  senœ  venivius  aimos. 
Toiii.  .\11  Biblintll.,  pag.  3'*. 

-  l-'iisage  est  au  contraire  de  ne  compter  que 
ipiatre  aus  pour  cliaque  olyiupiaile,  ce  qui  fait 
soi.iaïUe-'lûuze  ans,  au  lieu  lie  qn.itru-viugt-Jix  de 
la  vil'  du  Saint.  {L'éditeur. 


■'  Quam  celsa-  merituin  vitœ,  data  signa  loiiuun- 
tur:  Slrenuitalem  aniiiii  prœstans  doclrina  prie- 
fatur.  Tom.  Il,  Act.  ordiJi.  S.  Benedicti,  pag.  36. 

*  Regnlam  quam  tenerent.Spirilu  Sanclo  reple- 
lus,  condidit.  Joiins,  îJi  vita  Columb.,  cap.  IX. 

^  Hujus  l'alberti  tempnre,  per  Galliarum  pro- 


618 


HISTOIRE  GENERALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


AqdsI        lib. 
Il,     lom.     I, 


berge,  qui  écrivait  dans  le  septième  siècle, 
ajoutant  que  saint  Valbert  en  usa  de  même 
dans  plusieurs  autres  monastoies  qu'il  fonda 
ou  qu'il  aida  à  s'étaMir.  Les  plaintes  d'un 
nommé  Agreste  ou  Agrestin  qui,  après  avoir 
été  secrétaire  du  roi  Thierry .  s'était  mis 
sous  la  conduite  de  saint  Eustase,  donnèrent 
vraisemblablement  lieu  ù  cette  double  ob- 
servance. Mécontent  de  ce  que  son  abbé  lui 
refusait  la  permission  d'aller  prêcher  l'Évan- 
gile aux  infidèles,  il  inventa  diverses  calom- 
nies conlre  la  Règle  de  saint  Colomban,  la 
déféra  à.Vbellen,  évèque  de  Genève,  son  pa- 
rent, qui  essaya  de  rendre  le  roi  Clotaire  et 
les  évêques  voisins  favorables  à  Agrestin.  Il 
se  tint  à  cet  elfet,  par  ordre  de  ce  prince,  un 
concile  à  Màcon  en  62.ï,  où  saint  Eustase 
confondit  Aj^reslin  par  ses  réponses,  mon- 
trant que  la  règle  de  saint  Colomban,  en  or- 
donnant aux  moines  de  faire  en  mangeant  le 
signe  de  la  croix  sur  la  cuiller,  et  de  de- 
mander la  bénédiction  toutes  les  fois  qu'ils 
sortaient,  ne  faisait  rien  qui  fût  contraire 
à  la  religion.  Les  autres  objections  d'Agrestin 
n'étant  pas  mieux  fondées,  les  évèques  cxbor- 
tèrent  les  deux  paitis  à  la  paix.  Mais  Agres- 
tin, de  retour  à  Luxeu,  continua  de  semer  le 
trouble  jusqu'à  sa  mort ,  qui  arriva  quoique 
temps  après  la  tenue  du  concili',  ayant  été 
tué  d'un  coup  de  hache  par  son  valet.  Saint 
Eustase  mourut  la  même  année,  et  on  vit 
l'accomplissement  (le  ce  qu'il  avaitdit  à  Agres- 
tin en  présence  des  évèques  :  «  Moi  '  qui 
suis  le  disciple  et  le  successeur  de  celui 
dont  tu  condamnes  l'institut,  je  te  cite  au  ju- 
gement de  Dieu  dans  cette  année  pour  plai- 
der ta  cause  avec  lui.  n  L'abbé  Adso  ,  dans 
l'Histoire  de  saint  Valbert,  confirme  celle 
conjecture,  en  disant  de  lui  ((u'il  avait  eu 
soin  de  pcrfeclionner  et  de  réformer  tout  ce 
qu'il  avait  trouvé  de  défectueux  dans  la  dis- 


cipline monastique,  telle  qu'elle  avait  été 
observée  à  Luxeu  sous  saint  Colomban  et 
sous  saint  Eusiase  ,  et  qu'il  avait  en  recours 
pour  cet  ell'et  à  la  règle  de  sainl  Renoit. 

2.  La  Vie  de  saint  Donat,  moine  de  Luxeu, 
et  depuis  évèque  de  Besançon  ,  fournit  en- 
core une  preuve  que  la  règle  de  sainl  Benoit 
était  observée  dans  ce  monastère  avec  celle 
de  saint  Colomban  :  car  il  y  est  dit  que  cet 
é\èque  *,  pressé  plusieurs  fois  par  Flavie,  sa 
mère,  et  par  les  religieuses  du  monastère  de 
Jussan-Moutier,  à  Besançon,  il  leur  fil  un 
abrégé  de  la  règle  de  saint  Césaire,  faite  par- 
ticulièrement pour  des  filles,  et  de  celles  do 
sainl  Benoit  et  de  sainl  Colomban.  Il  est  sans 
apparence  que  ces  religieuses  eussent  de- 
mandé h  saint  Donat,  qu'elles  savaient  avoir 
été  élevé  par  saint  Colomban  même,  et  avoir 
professé  sa  règle  A  Luxeu  ,  de  leur  faire  un 
composé  de  cette  règle  et  de  celle  de  saint 
Benoit ,  si  elles  n'eussent  pas  su  qu'elles 
étaient  l'une  et  l'autre  observées  à  Luxeu, 
dont  ces  filles  n'étaient  pas  éloignées.  On  vit, 
quelque  temps  après,  ces  trois  règles,  c'est- 
à-dire  celles  de  saint  Césaire  ,  de  saint  Be- 
noit et  do  saint  Colomban,  en  usage  dans  un' 
monastère  de  filles,  bâti  dans  les  faubourgs 
de  Clermont  en  .\uvergne,  par  un  homme  de 
qualité  nommé  Génésius  :  ce  qui  donna  quel- 
que lieu  de  croire  que  c'était  l'abrégé  ou  la 
compilation  que  saint  Donat  en  avait  faite 
pour  les  religieuses  de  Jussan-Moutier.  Mais 
clans  le  huitième  siècle,  la  règle  de  saint  Be- 
noit prit  le  dessus,  et  fut  observée  seule  dans 
tous  les  monastères  de  France ,  en  sorte 
qu'en  817,  Louis  le  Pieux  demandait  aux 
évèques  du  concile  d'Aix-la-Chapelle,  quelle 
règle  les  moines  observaient  dans  les  Gaules 
avant  que  celle  de  sainl  Benoit  y  eût  été  in- 
troduite ;  question  que  ce  prince  n'aurait  pas 
faite,  si  cette  règle  n'avait  été  reçue  généra- 


R((le  dB  S. 

c«!>  de  falnl 
Co'o[iil«B. 


vincias  agmina  monachorum  ac  puellarum  sa- 
crarum  examina,  non  soliim  per  agros,  villas, 
vicos  alque  caslelUi,  veriiin  eliam  pererrini  las- 
lUalem,  ex  régula  duntuxat  et  bealorum  palrum 
Denedicli  et  Columbani  pullularc  cœperunl,  cum 
aille  illud  levipus  iiinnasterin  vix  paucn  itlis  re- 
pcrirenliir  in  lacis.  Viln  S  Snlab.  ,  toni.  Il,  Act. 
ord.  S.  ISenedicti,  paq.  107. 

'  Horiim  in  prœsentia  sacerdolnm  ego  ejusdis- 
cipulus  et  succtrssor,  cujui  la  disciplinam  et  iiis- 
liliita  damnas,  ad  divinum  jiidiCium  cum  eo  in- 
tra  pnesenlis  anni  circulum  causas  diclurum 
invita,  ul  justijudicii  examine  vindictam  sentias, 
cujus  famutum  luis  lUlraclionibn^  maculare pro- 
curas, jhjil.,  riif.'.  112,  in  Vila  liustasii. 


'  ijuani  ob  causant  sœpius  mihi  injungitis  ut 
implorala  sancli  Cwsarii  Aretalensis  episcopi  ré- 
gula quœ  specialius  Chrisli  tirginibus  dedi.:ata 
est,  una  cum  beadssimorum  Benedicli  quoque  et 
Columbani  abbatuui,  coUeclis  in  ununi  (losculis 
ad  instar  Enchiridion  excerpere  vobi.'i  rel  concer- 
nere  debereni.  Ilûnnliis,  toni.  Il  Act.  ord.  S.  Bcne- 
dicti,  pap.  321. 

'  Vir  illuslris  Genfsius  monaslerivm  sacrarum 
virginum  suburbano  pnefalie  ciritalis  in  loco 
cui  Cainelaria  nomen  indilvm  est,  fabricarc  ad 
orsus  est ,  ex  régula  ilumta.vat  rirorum  sancto- 
MU»,  id  est,  sancli  Denedicli  et  sancli  Cœsarii 
atque  Columbani,  lliiO,.  in  prœfalione,  pug.  i. 


[vil»  siKCi.E.]  CHAPITRE  LUI.  —  SAINT 

IcmPiit  dans  les  monastères  dp  ses  fynis  dès 
iivnnt  son  règne,  qui  conimenrîi  en  811.  Au 
reste,   il  n'i5tait  pas  nouveau    de  voir  plu- 
sieurs règles  en  usage  dans  un  môme  ino- 
naslère,  et  en  même  temps.  Saint  Gn^soire 
de  Tours  dit  '  que  dans  celui  d'Atliancs  ou 
Ainai,  proche  de  Lyon,  ou  suivait  non-seu- 
ment  celle  de  Cassien,  mais  encore  celle  de 
[saint]  Basile  et  de  quelques  autres  ahltés. 
,!r -,       3.  Ou  peut  diviser  la  Règle  de  saint  Colom- 
„r„ „-,,•  I .l'r;  han  '  en  deux  parties,  dont  la  première  rc- 
'"■  garde  la  pratique  des  vertus  essentielles  .'i 

\m  moine;  la  seconde  les  pénitences  qu'on 
doit  lui  imposer  pour  ses  l'autcs.  La  première 
de  ces  vertus  est  l'obéissance.  Elle  doit  ôtre 
prompte,  sans  contrariété  ni  murmure.  Quel- 
que dure  que  paraisse  la  chose  commandée, 
il  faut  l'exécuter  avec  joie,  avec  ferveur,  h 
l'imitation  de  Jésus-Christ,  qui  fut  obéissant 
cir.  11.  jusqu'à  la  mort.  La  seconde  est  le  silence, 
qui  ne  doit  être  rompu  que  pour  des  choses 
utiles  ou  bien  nécessaires.  L'heure  de  pren- 
dre la  nourriture  doit  être  vers  le  soir,  c'est- 
,M.  A-dire  à  noue.  Elle  sera  pauvre,  ne  consis- 
tant que  dans  des  herbes,  des  légumes,  do 
la  farine  détrempée  d'eau,  avec  un  pain  : 
mais  il  faut  la  proportionner  avec  le  travail, 
parce  qu'une  abstinence  excessive  n'est  pas 
'V.  une  vertu,  mais  un  vice.  On  doit  donc  tel- 

lement régler  les  choses,  que  chaque  Jour 
on  jeûne,  on  prie,  on  travaille,  on  lise.  Il  est 
défendu  fi  un  moine  non -seulement  d'avoir 
du  superflu,  mais  encore  d'en  souhaiter.  Sa 
perfection  consiste  premièrement  dans  le  dé- 
nuement et  le  mépris  des  richesses;  secon- 
dcaient  à  se  purifier  de  tous  les  vices;  troi- 
sièmement dans  l'amour  continuel  de  Dieu 
et  des  choses  divines  ,  qui  succède  ne  nous 
V.  à  l'oubli  des  choses  de  la  terre.  L'exemple 

de  Satan,  que  l'orgueil  a  fait  tomberdu  ciel, 
prouve  combien  la  vanité  est  dangereuse. 
Jamais  donc  il  ue  doit  sortir  de  la  bouche 
d'un  moine  une  parole  de  vaine  gloire,  do 
peur  qu'en  s'élevant  il  ne  perde  le  fruit  de 
•I.  son  travail.  Il  lui  servirait  peu  d'être  chaste 

de  corps,  s'il  ne  l'était  de  coDur.  Les  mauvais 
désirs  ne  sont  pas  moins  défendus  que  les 
mauvaises  actions.  Avant  saint  Colomban, 
l'ordre  de  la  psalmodie  avait  été  réglé  ditl'é- 
rcmmcnt  dans  divers  monastères  :  voici  celui 
qu'il  dit  avoir  reçu  de  ses  pères,  c'est-à-dire 
des  moines  d  Irlande.  A  tierce,  sexte  etnone, 


COLOMRAN  I)!':  LUXEU. 


(il!) 


trois  psaumes  avec  des  versets.  Aiicouunr'u- 
cement  de  la  nuit  ou  A  vêpres,  douze  psau- 
mes. L'oilice  de  la  nuit  pour  le  samedi  et  le 
dimanche  est  différent  des  autres  jours,  et 
il  dill'ére  encoiT  selon  la  vai'iéti-  des  saisons. 
Les  jours  onliuaircs  de  la  semaine  pcndîinl 
les  six  mois  d'hiver,  trente-six  psaumes  sous 
douze  antiennes:  peiulantles  six  mois  d'i'ilé, 
vinut-i[ualre  psaumes  sous  huit  antiennes, 
eu  sorte  que  chaque  antienne  était  prc-cédée 
de  trois  psaumes.  Le  samedi  et  le  dimanche 
pendant  les  mois  d'hiver,  vingt-cuiq  antien- 
nes  chaque   n.iit,    faisant   soixante-quinze 
psaumes;  de  façon  qu'en  deux  nuits  on  di- 
sait tout  le  Psautier.  Les  mois  d'été,  douze 
antiennes  par   nuit,   c'est-ù-dire   Irente-six 
psaumes  :  douze  à  minuit,  \ing-qualre  rt  ma- 
tines ou  ti  laudes.  Les  mois  de  printemps  et 
les  mois  d'automne,   ou  diminuait  ou  l'on 
augmentait  de  trois  psaumes  de  semaine  en 
semaine,  selon  que  les  luiits  augmentaient  ou 
diminuaient.  \  la  fin  de  chaque  psaume,  les 
moines  ^  se  mettaient  A  genoux.  Saint  Co- 
Jomban,  en  disant  que  pendant  les  mois  d'hi- 
ver on  chantait  en  deux  nuits  tout  le  Psau- 
tier, dit  que  les  moines  le  chantaient  à  douze 
chœurs  :  terme  qui   ne  marque   pas   douze 
bandes  de  moines  \  mais  douze  antiennes 
sous  lesquelles  on  disait  trente-six  psaumes. 
Outre  la  prière  commune,  les  moines  en  fai- 
saient   de   particulières ,    chacun    dans    sa 
cellule.  Les  jours  ordinaires  ils  travaillaient 
des  mains;  mais  à  certaines  heures,  c'esl-à- 
dire  A  celles  de  tierce,  de  sexte  et  de  noue, 
ils  quittaient  le  travail  manuel  pour  réciter 
trois  psaumes  avec  un  certain  nombre  de 
prières  réglées   pour  la  rémission  des  pé- 
chés, pour  tout  le  peuple  chrétien,  pour  les 
évêques  et  pour  tous  les  degrés  de  l'Église, 
et  pour  ceux  qui  leur  faisaient  des  aumônes, 
pour  la  paix  des  princes  et  pour  leurs  enne- 
mis.—  Parla  vertu  de  discrétion  que  saint  Co- 
lomban recommande  à  ses  moines,  il  entend 
le  juste  milieu  entre  les  extrémités.  —  Le  der- 
nier chapitre  de  sa  Règle  est  intitulé  :  De  la 
Mortijication.  Cette  vertu  renferme  particu- 
lièrement trois  choses  :  l'une ,  de  n'être  en 
discorde  avec  personne;  une  autre,  de  ne 
point  dire  tout  ce  qui  vient  ta  la  bouche  ;  la 
troisième,  de  ne  rien  faire  sans  la  volonté  de 
son  supérieur.  Ce   chapitre   est  le   dernier 
dans  les  imprimés  comme  dans  les  mauus- 


Cjp. 


'  Grpg.  Tiiron.,  lib.  X  Hisl.,  cap.  xxix. 

'  Cod.  Regul.,  toiii.  II,  pag.  01,  part.  2,  cap.  i. 


'  Pœnitent.,  nuui.  19. 

*  Mabillou,  Annal.,  [om.  I,pag.  213. 


620 


HISTOIRE  fiÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


crils,  excepté  dans  celui  de  Bobhio,  qui  en 
ajoule  un  dixième  sous  le  litre  :  De  la  Per- 
fection d'un  moine.  Saint  Benoit  d'Aniane  '  et 
Siuuragde  en  citent  un  trente-troisième,  qui 
ne  se  trouve  ni  dans  lu  llèglc  de  saint  Colom- 
ban,  ni  dans  sou  Péuitentiel.  Dom  -  Menaid 
croit  qu'il  y  u  faute  dans  la  citation,  et  que 
ce  clun)ilre  fait  partie  du  dixième  selon  le 
manuscrit  de  Bobbio.  Il  y  est  défendu  à  un 
moine  de  prendre  dans  le  monastère  la  dé- 
fense de  quelqu'un,  fùt-il  son  allié  ou  sou  pa- 
rent. L'édition  de  Mclcliior  Goldast ,  faite  sur 
mi  manuscrit  de  l'abbaye  de  Saint-Gai,  compte 
quatorze  chapitres;  mais  c'est  qu'il  a  divisé 
le  premier  eu  trois^et  le  huitième  en  cinq. 
skohiIo       i.  L'autie  partie  de  la  Rè''le  de  saint  Go- 

Eiriie  de    11  ^  ° 

fei.  de  S.  lotnban  est  le  Péniteutiel,  c'est-à-dire  les  cor- 

û°i',*  mb!'»».'  reclious  des  fautes  ordinaires  des  moines.  Il 
distinjrue  deux  sortes  de  péchés  :  les  péchés 
mortels,  que  l'on  confessait  aux  prêtres;  et 
les  moindres  péchés,  que  l'on  confessait  à 
l'abbé  ou  i\  d'autres  qui  n'étaient  pas  prê- 
tres, avant  de  se  mettre  à  table  ou  au  lit. 
Les  correctious  ordinaires  sout  les  coups  de 
fouet  :  six," pour  les  fautes  légères;  pour  les 
autres,  à  proportion;  quelquefois  jusqu'à 
deux  cents,  mais  jamais  plus  de  vingt-cinq  à 
la  fois.  On  comple  pour  une  faute  légère  qui 
était  punie  de  six  coups  de  fouet,  de  ne  pas 
répondre  Amen  à  la  bénédiction  de  la  taljle  ; 
de  parler  sans  nécessité  pendant  le  repas; 
de  ne  pas  faire  le  signe  de  la  croix  sur  sa 
cueiller,  sur  sa  lampe:  car  les  moines  en 
faisaient  sur  tout  ce  qu'ils  prenaient.  S'il  ar- 
rivait à  celui  qui  servait  dans  la  cuisine  de 
verser  qiiehiue  chose,  il  s'en  iuimiliail  dans 
l'église  après  l'ollice,  en  demandant  aux  frè- 
res de  prier  pour  lui.  On  obligeait  à  une  sem- 
blable pénitence  celui  qui  oubliait  de  lléchir 
les  genoux  après  ciiaque  psaume  pendant  l'of- 
fice. Le  serviteur  de  cuisine  demeurait  pros- 
terné à  l'égHse  pendant  douze  psaumes,  s'il 
avait  répandu  quel  ,ue  chose  deconsidéraLle. 
Quelquefois  même  ou*lui  prenait  sur  sa  poi- 
tion  ordinaire  de  quoi  réparer  la  perte  qu'il 
avait  causée  au  monastère.  Ainsi,  s'il  avait 


versé  une  grande  quantité  de  bière,  on  comp- 
tait combien  de  portions  cette  bière  répan- 
due lui  aurait  faites;  et  au  lieu  de  bière,  on 
lui  donnait  de  l'eau  à  boire,  jusqu'à  l'évalua- 
tion de  la  bière  répandue.  11  en  était  de  mê- 
me de  toute  auti-e  chose.  En  sortant  du  mo- 
nastère, les  moines  demandaient  à  genoux 
la  bénédiction  du  supérieur.  Après  l'avoir 
reçue,  ils  faisaient  sur  eux  le  signe  de  la 
croix,  et  se  présentaient  devant  la  croix. 
Ceux  qui  y  manquaient,  recevaient  douze 
coups  de  fouet.  On  en  donnait  autant  à 
ceux  qui  ne  faisaient  pas  la  prière  avant  et 
après  le  travail,  qui  mangeaient  sans  per- 
mission, ou  qui,  rentrant  dans  la  maison,  ne 
se  courbaient  pas  en  demandaut  la  bénédic- 
tion. Ils  portaient  aussi,  en  allant  en  voyage, 
de  l'huile  bénite  sur  eux,  pour  en  oindre  les 
malades.  Le  vaisseau  dans  lequel  ils  la  met- 
taient se  nommait  chrismal.  Ils  nommaient 
de  même  celui  où  ils  portaient  l'Eucbarislie  : 
car  ils  la  portaient  aussi  en  voyage. 

5.  Celui  qui  oubliait  le  chrismal,  allaut  en  p,j.  m. 
un  lieu  éloigné,  recevait  quinze  coups  de 
fouet.  Si,  étant  dans  un  champ,  il  posait  ce 
vase  sur  terre  et  l'oubliait  en  s'en  retournant, 
on  le  frappait  de  cinquante  coups,  quoiqu'il 
fût  allé  aussitôt  le  chercher.  L'oblation  du 
sacrilice  se  faisait  avec  beaucoup  d'ordre, 
de  décence  et  de  modestie.  Un  souris  y  était 
puni  de  six  coups  de  fouet.  Il  n'était  pas 
permis  au  prêtre  d'oti'rir  sans  avoir  rogné 
ses  ongles,  ni  au  diacre  de  servir  à  l'autel 
sans  s'être  fait  raser  la  barbe.  Celui  qui,  en 
recevant  le  calice  salutaire,  le  mordait  avec 
ses  dents,  était  frappé  de  six  coups  de  fouet. 
C'est  pourquoi  les  novices,  parce  qu'ils  étaient 
sans  expérience,  n'approchaient  pas  du  cali- 
ce; eu  sorte  qu'ils  ne  communiaient  que  sous 
l'espèce  du  pain'.  Quiconque'  avait  perdu  le 
sacriûce  sans  pouvoir  le  retrouver,  était  en 
pénitence  pendant  un  an.  S'il  en  avait  laissé  „n. 
corrompre  les  espèces,  en  sorte  qu'elles  fus- 
sent réduites  en  |)Oussière  ou  mangées  des 
vers,  sa  pénitence  était  d'une  demi-année. 
Si,  les  espèces  étant  dans  leur  entier,  il  s'y 


'  Menanlus,  inConcorJ.  reg.,  yiig.  1082. 

'  Ibid. 

'  Oui  perr.usserit  denlibus  calicem  salutahs, 
sex  percussionibus...  Novi,  quia  indocli,  et  qui- 
cumque  laies  fuerint,  ail  calicem  non  accédant. 
Cfiliiiiiban.,  in  pwnit.,  pai;.  U9,  102. 

'  ifiiicuniquc  sarrificium  perdidrril ,  et  nencifuhi 
sit,  aiinn  p<Finlcat.  iji'i  negligeuliain  fcceril  crga 
sncn/iViiMii.  ut  sicirdir  ri  a  vcrniibux  conximia- 


tur,  ita  ut  nd  nihilum  drfcncrit,  dimidio  anno 
pn-niteal.  IJui  negligenliam  erga  sacri/icium  in- 
currerit,  ut  iuieniatur  lerniis  in  co  et  lamen 
plénum  sit,  ignc  combural  juxla  allare  et  ahscon- 
dat  cinerem  ejus  intra  sub  allare,  et  ip$e  pœni- 
teal  quadraginla  diebus.Qui  negligit  sttcrificiiim  , 
et  immulalum  fuerit  et  pani.<  amiserit  .■<aporem 
si  rubro  colore,  viginli  dies  pvnilcat.  Ibid.,  {tag. 
lui. 


[vu'  SifXLE.] 

triiuviiil  tiii  ver,  coliii  par  la  ni'glipfcnce  de 
qui  cola  iMail  arrivé  faisait  piMiitence  ]icii- 
(laiil  qiiaïaiile jours,  brûlait  lo  voraiipiès  ilo 
l'autpl,  et  en  cachait  les  cendres  sons  l'autel. 
(Jiie  si  les  espLves  ('taicut  lellemenl  chan- 
gt'es,  ([u'elles  n'eussent  plus  ni  la  saveur,  ni 
la  couleur  du  pain,  il  cUait  mis  en  pénilencc 
pendant  vingt  jours. 

'••""•  6.  Ceux  qui  laisaienl  pénitence  n'osaient 
se  laver  que  le  dimanche;  ils  th'cliissaient 
les  g-cnoux  même  le  dimanche  et  pendant  le 
temps  pascal.  11  y  avait,  outre  les  coups  de 
fouet,  une  autre  pénitence  qu'on  nommait 
superposition.  C'était  d'être  condamné  ou  à 
des  jeûnes  extraordinaires,  ou  à  la  récitation 
d'un  certain  nombre  de  psaumes,  ou  an  si- 
lence. Un  moine  qui  muimurait  et  disait  ù 

"^-  son  ancien  :  (iJe  ne  ferai  point  ce  que  vous 
dites,  si  l'abbé  ou  le  prévôt  ne  me  l'ordonne,  n 
était  condamné  à  trois  superpositions.  Celui 
qui  disait  au  prévôt  :  «Vous  nejugei'ez  point 
ma  cause,  mais  noire  abbé,  était  mis  eu  pé- 
nitence an  pain  et  à  l'eau  pendant  quarante 
jours,  h  moins  que,  prosterné  en  présence  des 
frères,  il  ne  demandât  pardon  en  disant  :  »  Je 

""•  me  rcpens,  parce  que  j'ai  mal  parlé.  »  Il  y 
avait  dans  chaque  monastère  deux  économes, 
un  grand  et  un  petit.  Le  grand  était  le  pré- 
vôt, chargé  des  affaires  intérieures,  afin  que 
l'abbé  u'eùt  que  le  soin  des  âmes.  Le  petit 
économe  avait  soin  du  détail  de  la  maison. 
C'était  aux  économes  à  veiller  à  ce  que  les 
étrangers  fussent  bien  reçus. 
101.102.  1   Lyg  moines  changeaient  d'habit  pour  la 

nuit.  Dès  le  commencement  du  jour,  ils  en 
reprenaient  d'autres.  Ils  demeuraient  assis, 
tandis  qu'on  sonnait  l'office,  excepté  les  pé- 
nitents qui  se  tenaient  debout.  Avant  d'en- 
trer à  l'église ,  ils  lavaient  leurs  mains  et 
leur  visage  à  la  porte,  s'ils  ne  s'étaient  pas 
lavés  auparavant.  Celui  qui  n'avait  pas  en- 
tendu sonner  l'heure  de  l'oraison,  devait  ré- 
citer douze  psaumes.  Il  y  en  avait  autant 
pour  celui  qui  venait  à  l'oblalion  du  sacri- 
fice avec  sa  ceinture  ou  son  habit  de  nuit. 

""•  On  mettait  en  pénitence  pendant  trois  jours, 
au  pain  et  à  l'eau,  le  moine  qui  avait  couché 
dans  une  maison  où  il  y  avait  une  femme.  Si 
toutefois  il  ne  l'avait  pas  su,  sa  pénitence 
•  n'était  que  d'un  jour.  Manger  avant  l'heu- 
le  de  noue  le  mercredi  et  le  vendredi,  ex- 


CII.\l>ITni':  Mil.  —  SAINT  COLOMBAN  DE  LL'.VKl' 


«21 


copié  le  cas  d'infirmit(\  (Mait  une  faute  que 
l'on  devait  expiei'  par  deux  jours  de  jcuUie  au 
pain  et  A  l'eau.  Celui  '  qui  savait  que  son  frère 
avait  péché  mortellement  etne  l'eu  avertissait 
point  ,  devait  être  l'fgardé  comme  tivins^rcs- 
seurde  l'Evangile, juscpi'à  ce  qu'ilTeùt  aver- 
ti, et  que  ce  frèi'e  eftt  confessé  son  péché  au 
prêtre.  Le  silence  devait  s'observer  en  tous  '"''■ 
liiMix  et  pendant  toutes  sortes  de  travau.'i. 
Ces  paroles,  le  mien  et  le  tien,  étaient  défen-  "•'• 
dues  sous  peine  de  six  coups  de  fouet.  Il  y 
avait  deux  cents  coups  de  fouet  pour  celui 
que  l'on  avait  trouvt'  pariant  seul  familière- 
uient  avec  une  fenmic  Voilà  ce  qu'il  nous  a 
paru  de  plus  remarquable  dans  le  Pénitentiel 
de  saint  Colomban,  dont  plusieui-s  endroits 
ne  pourraient  s'entendre  que  par  la  connais- 
sance d'usages  qui  ne  subsistent  plus.  Il  n'y 
dit  lien  des  enfants,  pas  mèmedans  sa  Règle. 
Il  en  recevait  néanmoins  dans  son  monas- 
tère, comme  ou  le  voit  par  Donat,  fils  du 
duc  Valdelène  et  de  Flavie,  qu'il  éleva  dès 
l'enfance,  après  l'avoir  obtenu  de  Dieu  à 
ses  parents  pTir  sesprières.  Il  y  avait  aussi 
;\  Luxeu  certains  usages  dont  il  ne  parle  ni 
dans  sa  Règle,  ni  dans  son  Pénitentiel  comme 
celui  de  ne  point  permettre  l'entrée  de  l'in- 
térieur du  monastère  aux  séculiers  :  ce  qui 
s'observait  si  rigoureusement,  qu'il  reprit  le 
roi  Thierry  d'être  entré  au  réfectoire. 

8.  Nous  avons  un  second  Pénitentiel  -  Amreréni. 
sous  le  nom  de  saint  Colomban.  Fleming  l'a 
donné  le  premier  sur  un  manuscrit  de  Bobbio, 
où  il  est  attribué  à  cet  abbé;  et  ce  n'est  pas 
la  seule  preuve  qu'il  en  est  auteur.  On  en 
peut  tirer  une  seconde  de  la  conformité  de 
ce  Pénitentiel  avec  celui  dont  nous  venons 
de  parler,  en  ce  qui  regarde  les  moines  ;  son 
antiquité  peut  eu  fournir  une  troisième.  On 
y  voit  qu'alors  il  y  avait  encore  des  temples 
de  faux  dieux,  où  on  leur  rendait  un  culte 
superstitieux.  Saint  Colomban  trouva  des 
idolâtres  dans  les  États  de  Tliéodebert,  com- 
me on  l'a  dit  plus  h;fut.  Ainsi  rien  n'empê- 
che qu'on  no  le  recounaisse  pour  auteur  de 
ce  Pénitentiel.  Il  est  vrai  qu'il  comprend  les 
peines  canoniques  pour  toutes  sortes  de  per- 
sonnes, clercs,  moines,  laïques,  et  pour  tou- 
tes sortes  de  crimes  :  ce  qui  ne  parait  pas 
devoir  être  du  ressort  d'un  supérieur  de  mo- 
nastère. Mais  il  faut  remarquer  que  ce  Pé- 


*  Qui  scit  fralrem  suum  peccare  peccatum  ad 
morlem  et  non  arguiteum,  legis  Evangclii  Irans- 
gressor  uotelur,  donec  arguai  eum,  cvj^^s  malum 


reticuit,et  falealur  sacenloli.  Colomban,  in  Pœnit., 
pag.  101. 
'  Toin.  XII,  Bibliotk.  vet.  Put.,  pag.  21. 


622 


HISTOIHE  GltNKRALE  DES  AUTliUllS  ECGLÉSIASTIQLES. 


de  S.  Colnm- 
bsB  sur  I  Loi- 
té  <ie  D'eu  c 
U  TriDilé  df-5 
Pet.'onof». 


iiitcntiel  est  moins  un  nouveau  règlement 
de  discipline,  qu'un  recueil  des  péuilenccs 
imposées  pur  les  anciens  Pères,  soit  dans 
leurs  écrits  particuliers,  soit  dans  les  con- 
ciles. Saint  Colooiban  n'e^t  pas  le  seul  qui 
ait  fait  un  semblable  recueil.  Les  Godes  de 
l'église  orientale ,  de  l'église  romaine ,  de 
l'Église  universelle   étaient    beaucoup  plus 
amples  ;  et.  pour  nous  en  tenir  au  sujet  traité 
dans  ce  Pénitentiel ,  saint  Cuméen  ,  abbé 
d'Irlande  dans  le  même  siècle  ,  en  composa 
un  dans  le  même  goût  que  celui  de  saint 
Colomban,  excepté  qu'il  est  plus  diil'us  et 
plus  détaillé ,  et  qu'il  y  cite  '  plusieurs  fois 
les  conciles  et  les  décrets  du  Siège  aposto- 
lique, ce  que  ne  îait  pas  saint  Colomban, 
qui  se  contente  de  rapporter  les  peines  pour 
cbaque  crime,  sans  marquer  par  qui  elles 
avaient  été  réglées ,  si  ce  n'est  en  général , 
en  disant  qu'il  va  rapporter'  les  pénitences 
que  les  suints  Pères  ont  prescrites  pour  cha- 
que péché.  On  trouve  plusieurs  endroits  de  ce 
Pénitentiel,  mot  pour  mot,  dans  celui  de  saint 
Cuméan,  qui  vraisemblablement  les  en  avait 
tirés,  n'ayant  écrit  que  plusieurs  années  après 
la  mort  de  saint  Colomban.  Dans  un  manus- 
crit de    saint  Gai,  la  première    partie   du 
Pénitentiel  de  saint  Colomban   fait  aussi  la 
première  partie  de  celui  de  saint  Cuméen. 

Instructions  ou  Discours  de  saint  Colomban. 

1.  C'est  aussi  sur  un  très-ancien  manuscrit 
de  Bobbio  que  Fleming  a  fait  imprimer  quel- 
ques instructions  '  ou  discours  de  saint  Co- 
lomban sur  les  matièies  les  plus  importan- 
tes de  la  religion.  Outre  qu'elles  sont  du 
style  de  cet  abbé,  il  s'en  déclare  assez  clai- 
rement auteur  en  se  disant  Misciple  deCon- 
gal  ou  Comnuigel,  qu'il  eut  en  effet  pour 
niailrc  j  Baiigor  en  hiaude.  Il  est  vrai  qu'il 
K'  nomme  Faustc,  et  uon  pas  Cougale  ;  mais 
on  sait  par  .Notkcr  '«que  Congal  avait  aussi 
le  nom  de  Fauste.  La  première  de  ces  ins- 
tructions est  sur  1  L'nité  de  Dieu  et  la  Trini- 
té de  personnes  en  Dieu.  Il  regarde  ce  mys- 
tère comme  le  fondement  du  salut  :  c'est 


iTinrlifi-  il  OO 

Itequi»  tien 
tenu* 


pourquoi  il  en  fait  le  sujet  de  son  premier 
discours,  qu'il  commence  en  disant  que  ' 
«  quiconque  veut  être  sauvé  ,  doit  croire  en 
Dieu,  un  et  trois  tout  ensemble  ;  un  en  subs- 
tance, trois  en  subsistance  ;  un  en  puissance, 
trois  en  personnes;  un  en  nature,  trois  en 
noms;  un  en  divinité,  qui  est  le  Père,  le  Fils 
et  le  Saint-Esprit.  »  Il  prouve  qu'il  n'y  a  qu'un 
Dieu  par  ces  paroles  du  Dcutéronome  : 
Ecoute  ,  Israël ,  le  Seigneur  ton  Dieu  est  un  ; 
et  qu'il  est  trois  en  personnes ,  par  celles-ci 
du  Sauveur  :  Allez,  enseignez  toutes  les  na- 
tions en  les  Oa/Aisantau  nom  du  Père,  et  du  Fils, 
et  du  Saint-£s/jrit.  «Mais  quelle  est,  dit-il, 
la  nature  de  Dieu?  Personne  ne  l'a  vu  comme 
il  est.  Il  y  aurait  de  la  témérité  à  vouloir 
compiendre  ce  qui  est  incompréhensible. 
11  est  moins  aisé  de  connaître  la  nature  de 
la  Trinité,  que  la  profondeur  de  la  mer,  qui 
toutefois  surpasse  la  capacité  de  l'intelli- 
gence humaine.  » 

2.  Dans  le  second  discours  s'exprime  ain- 
si :  «C'est  de  Dieu  que  nous  devons  appren- 
dre ce  qu'il  est.  Nous  devons  croire  de  lui  j 
ce  qu'il  nous  en  a  appris,  soit  dans  la  Loi ,  •*" 
soit  dans  les  Propbétes,  soit  dans  l'Évangile, 
soit  dans  les  écrits  des  apôtres.  L'esprit  hu- 
main, sujet  à  erreur,  ne  peut  nous  en  don- 
ner une  parfaite  connaissance.  »  Saint  Colom- 
ban ,  regardant  donc  comme  inutile,  et  mê- 
me comme  mauvaise  toute  tentative  pour 
approfondir  la  nature  de  Dieu ,  passe ,  dans 
sa  seconde  instruction,  à  ce  qui  peut  contri- 
buer à  la  perfection  de  l'homme.  Sur  quoi 
il  dit,  d'après  Commogel,  son  maître,  que 
comme  le  laboureur  ne  se  contente  pas  de 
remuer  la  terre  pour  la  préparer  ii  recevoir 
la  semence,  mais  qu'il  en  arrache  encore 
toutes  les  racines  infructueuses  et  toutes 
les  mauvaises  herbes  ,  nous  devons  de  mê- 
me déraciner,  pour  ainsi  dire,  toutes  nos 
mauvaises  inclinatiouiî  et  nos  vices,  pour 
faire  croître  dans  notre  âme  les  semences 
de  la  vertu  ;  qu'en  vain  nous  mortifierons 
notre  corps  par  des  jeûnes  ,  par  des  veilles 
et  par  d'autres  œuvres  extérieures  de  péni- 
tence, si  nous  ne  travaillons  à  la  correction 
de  nos  mœurs ,  parce  que  la  religion  de 


'  Toni.  .\II  Biblioth.  let.  Pal.  pag.,  4t,46,  47,  48. 

'  .Mensuro)  nosceudœ  sunt  pwnilintiœ ,  qua- 
rum  sic  ordo  a  sanclis  Iraditur  Patribus.  Colmii- 
Imn.,  in  Pœnilcnliali,  laii.  i. 

'  Toiii.  Xll  Uiblioth.  vet.  Pal.,  i>atr.  9. 

-  ll)id.,  Inst.  2,  iiap.  10. 

'  .Nollifr,  ad  aiciniionumjuniiiinUarlyrologio. 


'  Credat  ilaque  omnis  qui  vull  salvus  esse  in 
Dcum  1JHHIH  ac  trinum,  u»m»i  suhstantia,  tri- 
num  subsii-lcnlia  :  uniini  poteiitia,  trinum  persona; 
■unum  natura,  trinum  noniine.  unum  numine.  qui 
est  l'ater  el  Filius  cl  Spirilus  .Sanclus.  Cutiiuilmu., 
Inslrucl.  I,  jjag.  !'. 


CIlAIMTlll!:  LUI.  —  SAINT  COLOMUAN  DE  LUXEU. 


Tioi.iJa.i. 

\e  n..'|>îl.  du 
iiiOndt*  rt  l'a- 
liii»ur  Jf» 

s»l«.  yuf.   tl. 


Qaalrlirr.s 
DiMoars  *iir 
\e9  trtvins  ilc 
Il  vie  ^'rt^<  11* 
It.  po5    12. 


Cinquième 
eUixièineDi«> 
fours  sur  la 
nalure  île  ]i 
Tie  prtsenie, 
pif.  13. 


Job,xiT,S  ; 
P^l.     crin, 

21. 


Septième  et 
tiuitiéme  Dis- 
cours sur  IV 


[vil"  SIÈCLE.] 

riKuiiiiie  c.Ktérieiir  sert  de  ])cu,  si  l'on  ne 
i-i'lornie  riiomiiic  inli-rieiir.  La  vraie  jiii'-tt: 
ne  consiste  point  ilans  l'iiumilialion  du  corps, 
mais  dans  l'hiimilitii  du  creur. 

3.  Il  traili',  dans  la  troisicme  instruction, 
du  mépris  du  monde  et  de  soi-mèuu" ,  et  de 
l'amour  dos  liions  éternels.  Le  monde  ,  par 
son  instabilité  ,  est  digne  de  mépris  :  il  en 
est  de  même  des  biens  qu'il  présente.  Il  pas- 
sera, il  passe  tous  les  jours.  Que  contient -il 
qui  ne  doive  linir un  jour?  Mais  eu  tjuoi  con- 
siste "ce  mépris?  Dans  le  renoncement  aux 
voluptés,  aux  richesses;  dans  le  mépris  de 
soi-même.  Celui-là  est  victorieux  du  monde, 
qui  meurt  à  soi-même,  à  ses  vices,  à  ses 
passions ,  avant  que  la  dissolution  de  son 
corps  avec  son  àme  se  fasse  ;  l'homme  sage 
ne  doit  rien  aimer  ici-bas ,  parce  qu'il  n'y  a 
rien  de  durable.  Son  amour  doit  avoir  pour 
objet  ce  qui  est  éternel.  C'est  le  seul  vrai 
bien. 

4.  Un  moyen  de  l'acquérir,  est  de  soullVir 
en  patience  les  travaux  et  les  adversités  de 
la  vie  présente.  Si  l'on  se  donne  tant  de 
peines  et  de  soins  pour  apprendre  quelque 
art ,  quelque  profession ,  dans  l'espérance 
d'en  tirer  quelques  émoluments  temporels  ; 
à  combien  plus  forte  raison  un  chrétien  doit- 
il,  dans  l'espérance  de  jouir  des  biens  éter- 
nels, endurer  les  peines  de  cette  vie  avec 
résignation,  vu  que  Jésus-Christ  nous  a  ap- 
pris de  vive  voix  et  par  son  exemple  ,  que 
l'on  ne  passe  point  de  la  joie  à  la  joie,  mais 
de  la  tiistesse.et  des  tribulations  à  la  joie? 

o.  C'est  ce  qu'il  continue  de  montrer  dans 
les  deux  instructions  suivantes ,  où  il  fait 
voir  que  la  vie  présente  ne  mérite  pas,  à 
proprement  parler  ,  le  nom  de  vie  ,  n'étant 
qu'un  chemin  par  lequel  nous  marchons 
pour  arriver  à  notre  patrie  :  d'où  il  suit  qu'on 
ne  doit  point  s'y  arrêter ,  ni  s'y  reposer ,  le 
véritable  repos  ne  se  trouvant  que  dans  la 
patrie  même  ,  et  non  dans  le  chemin  qui  y 
conduit.  11  montre  encore  qu'elle  n'est  qu'une 
ombre  qui  fuit  devant  nous,  et  qui  disparait, 
comme  les  songes  et  les  visions  que  nous 
avons  en  dormant.  Il  cite  sur  cela  les  pa- 
roles de  Job  et  du  Psalmiste  ' ,  qui  compa- 
rent l'un  et  l'autre  la  vie  de  l'homme  sur  la 
terre  à  une  ombre. 

6.  Il  emploie  la  septième  instruction  à 
déplorer  l'aveuglement  des  hommes  qui, 


5i3 


presque  uniquement  occupés  des  plaisirs  du 
corps,  néiiligcnt  ceux  de  l'ilme.  il  leur  re- 
présente l'inutilité  des  soins  qu'ils  se  don- 
nent pour  contenter  une  chair  qui  ne  dit  ja- 
mais :  ("est  aisez,  et  qui,  ajjrès  un  plaisir, 
quelque  déshonnètc  qu'il  soit ,  en  demande 
un  autre;  les  peines  dont  sei-onl  punis  en 
l'autre  vie  ceux  qui  en  celle-ci  se  seront  li- 
vrés aux  plaisirs  du  corps,  et  les  récompen- 
ses de  ceux  qui ,  portant  leur  vue  vers  les 
biens  éternels,  n'en  ont  point  recherché  de 
périssables.  Il  en  conclut  dans  la  huitième 
que  nous  devons  courir  sans  relâche  vers  la 
céleste  patrie  ,  en  négligeant  les  avantages 
de  cette  vie,  pour  ne  penser  qu'à  ceux  de  la 
vie  future,  qui  est  la  lin  de  celle-ci. 

7.  La  neuvième  et  la  dixième  instructions 
sont  sur  le  jugement  dernier.  Saint  Colom- 
bau  y  l'ait  voir  que  ,  s'il  y  a  quelque  parité 
en  cette  vie  entre  les  hommes  par  rapport 
à  la  manière  de  naître,  de  souflrir ,  de  croî- 
tre et  de  mourir,  il  n'y  en  aura  point  en 
l'autre  entre  les  justes  et  les  impies;  parce 
que  les  uns  et  les  autres  seront  jugés  suivant 
leurs  œuvres,  qui  n'auront  eu  aucune  res- 
semblance ,  car  il  ne  saurait  y  en  avoir  entre 
les  bonnes  et  les  mauvaises  actions,  qui  ca- 
ractérisent les  bons  et  les  méchants.  Il  dit 
que  le  moyen  de  paraître  avec  sécurité  de- 
vant le  tribunal  du  souverain  Juge  dans  le 
dernier  jour,  est  de  mourir  en  cette  vie  à 
soi-même  et  à  tous  les  plaisirs  sensuels ,  et 
de  ne  vivre  que  pour  Jésus-Christ,  en  sorte 
que  l'on  puisse  dire  avec  saint  Paul  :  Je  vis, 
ou  plutôt  ce  n'est  pas  moi  qui  vis,  7nais  c'est 
Jésus-Christ  qui  vit  en  moi. 

8.  Dans  la -onzième,  qui  traite  de  l'amour 
de  Dieu  et  du  prochain,  il  fonde  l'obligation 
d'aimer  Dieu  sur  ce  que  nous  avons  été 
faits  à  son  image  et  à  sa  ressemblance,  en 
sorte  qu'en  l'aimant,  nous  ne  lui  rendons 
que  ce  que  nous  avons  reru  de  lui  dans  no- 
tre création,  l'amour  do  Dieu  n'étant  que  le 
renouvellement  de  sou  image.  Cet  amour, 
pour  être  véritable  ,  ne  doit  point  consister 
dans  de  simples  paroles  ;  mais  dans  les  œu- 
vres ,  qui  en  prouvent  la  vérité.  A  l'égard 
de  l'amour  du  prochain,  il  dit  qu'il  ne  peut 
subsister  avec  les  détractions  et  les  médi- 
sances ,  qui  sont  le  premier-né  de  la  haine. 

9.  11  fait  dans  la  douzième  une  comparai- 
son des  soins  et  des  mouvements  que  se 


«eo^lemeni 
dt*  inoBdaln* 
r(  le  deslrdo 
liféllcltiiiui^ 
nette, lag.  li, 
■  S. 


NcDTiiffle 
Di?foura  sur 
le  JugeiiiÉOt 
liernier,  pip. 
11.  Oixlèitio. 
sur  les  moyeui 
d  éviter  la  co- 
lore du  souvij- 
rnia  Juge, 
jag.   16. 


Gâtai.  Il, 


Onzième 
Discours  sur 
t'smour  do 
U  i-'i  et  du 
]  ructjaia,  pa^. 
!T 


Douzième 
Discours  sur 
tz    CompooC' 


'  Les  citations  de  Job   et  du  psaume  cvui  ne  se 
trùUTeut  poiat  daas  ces  instructions  elles-mêmes  ; 


mais  seulement  dans  l'argument  mis  par  Fleming 
en  tête  de  l'instruction  vi.  (l'e'diteurj 


Ii2l 


lllSJOIRE  GENKUALE  DKS  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


umMi.vi-   (Jonnerail  un  homme  pour  t'viter  le  supplice      des  Liens  de  l'autre  vie  ,  donne  du  m;'pris 
"•  du  leu  auquel  il  .lurait  élë  condamné  dans      pour  les  unes,  cl  de  ranioiir  pour  les  au- 


Divrum  sur 
la  FrnultiA 
d»  vif,  i)til  f*i 
Jt<n»'Cljn<l, 
Hf.   18. 


Qualnri:^. 
nr,  quintiij. 
m*  ei  ïeii  ^- 

I.>f.l9,iOSl. 


vingt-quatre  heures ,  avec  ceux  que  nous 
devons  nous  donner  pour  éviler  le  supjjlice 
du  feu  élenicl  dans  l'aulie  vie  ,  soil  en  fai- 
sant pénitence  de  nos  fautes  ,  soit  en  veil- 
lant sur  noiis-uiènies  pour  n'en  plus  coni- 
luctli-e.  Il  la  Huit  par  une  prière  à  Dieu  .  où 
il  lui  demamic  de  l'aimer  uniquement  et  de 
toutes  ses  forces. 

10.  La  Ireizii  me  est  une  invitation  à  ceux 
qui  ont  faim  et  soif  de  la  justice,  de  recourir 
à  Jésus-Christ  «jui  est  la  fontaine  vivante 
dont  les  eaux  lejaillissent  jusqu'à  la  vie  éter- 
nelle ,  et-le  pain  des  anges,  le  pain  de  vie, 
qui  donne  la  vie  à  ce  monde. 

11.  Toutes  les  instructions  dont  nous  ve- 
nons de  parler,  paraissent  avoir  été  préchées. 
La  quatorzième  est  en  forme  de  lettre.  Saint 
Colomtjan  dit  au  commencement  qu'il  en 
avait  écrit  d'autres  à  la  même  personne  sur 
divers  sujets  de  piété,  notamment  sur  la  gra- 
vité et  sur  la  pudeur.  Ces  lettres  ne  sont  pas 
venues  jusqu'à  nous.  Il  s'adresse  dans  celle- 
ci  k  un  jeune  homme,  à  qui  il  avait  donné 
un  emploi  dans  une  communauté  de  moi- 
nes. II  compte  tellement  sur  la  solidité  des 
instructions  qu'il  lui  donne ,  qu'il  l'assure 
qu'elles  le  conduiront  au  point  de  le  conser- 
ver toujours  le  mémo  i  travers  les  vicitudes 
de  l'adversité  ,  et  de  la  prospérité  ,  et  de  lui 
procurer  dans  l'aulre  vie  l'éternelle  félicité. 
Les  plus  remarquables  sont ,  qu'il  soit  sim- 
ple dans  la  foi,  docte  dans  la  science  des 
mœurs,  tardif  A  se  fâcher,  aimable  aux  gens 
de  bien  ,  doux  envers  les  infirmes  ,  sobre , 
chaste,  patient,  libéral,  fort  et  constant  dans 
les  Iribulations,  hardi  dans  la  cause  de  la 
vérité,  infatigable  dans  les  ojuvres  de  chari- 
té, miséricordieux  envers  les  pauvres,  obéis- 
sant aux  anciens ,  soigneux  de  s'avancer 
dans  la  voie  qui  conduit  au  salut.  La  quin- 
zième iuslruction  ne  se  trouve  point  avec 
les  précédentes  dans  le  manuscrit  de  Bobbio. 
Wading  l'a  donnée  sur  un  autre  manuscrit 
où  elle  porte  ce  titre  :  Exhortation  dr  saint 
Colomban  aux  Frères  assemblas.  L'auteur  veut 
que  le  souvenir  de  leur  vocation  les  engage  k 
en  remplir  avec  exactitude  fous  les  devoirs, 
il  l'imitation  des  saints  qui  les  ont  précédés, 
et  qui  leur  ont  donné  l'exemple  de  la  vertu. 
La  seizième  a  été  donnée  par  Vardeus.  C'est 
une  exhortation  où  le  saint ,  en  faisant  un 
parallèle  de  la  rapidité  avec  laquelle  les 
cliiiscs  du   monde  passent,  avec  l'éternité 


très. 

12.  Il  y  a  une  dix-septième  inslmcliim, 
qui  dans  le  manuscrit  de  Bohl)io  se  lit  après 
la  treizième.  Les  éditeurs  l'ont  renvoyée 
après  le  .second  l*énitenliel,  à  cause  que  le  su- 
jet n'en  était  pas  le  même  que  celui  des  pré- 
cédentes ,  et  «i  cause  de  quelque  ditl'éri'ucc 
de  style. On  l'a  quelquefois-  altiiliuée  à  Fau'ite 
de  Riez.  Elle  est  très-courte ,  et  ne  contient 
que  les  passajies  de  l'Écriture  où  il  est  parlé 
des  huit  péchés  capilaux ,  et  des  vertus  qui 
leur  sont  opposées.  Ces  péchés  sont  la  gour- 
mandise ,  la  fornication  ,  la  cupidité  ,  la  co- 
lère ,  la  tristesse,  la  paresse ,  la  vaine  gloire 
et  l'orgueil. 

§111. 
Des  Lettres  de  saint  Colomban. 

l.  Des  cinq  lettres  qui  nous  restent  de  ce 
Père .  celle  qui  est  adressée  au  pape  Boni- 
face  est  placée  la  première  dans  les  impri- 
més ;  ce  qui  fait  voir  qu'on  n'y  a  pas  suivi 
l'ordre  des  temps  auxquels  elles  ont  été  écri- 
tes. Car  il  y  en  a  une  ;\  saint  Grégoire,  pré- 
décesseur de  Boniface ,  qui  n'est  toulefois 
que  la  cinquième  ,  c'est-i\-dire  la  dernière 
de  toutes.  Mais  elle  doit  être  regardée  (om- 
me  la  première  suivant  l'ordre  chronologi- 
que, puisqu'elle  est  citée  dans  la  lettre  aux 
évoques  des  Gaules  assemblés  en  concile 
vers  l'an  602,  plus  antienne  que  les  deux  au 
pape  Boniface,  cfque  celle  aux  moines  de 
Luxeu,  qui  ne  fut  écrite  qu'en  610.  Dans  l'ins- 
criplion  de  sa  lettre  à  saint  Giégoire,  il  prend 
le  prénom  de  liargoma,  on  plutùt  de  Barjona, 
fils  de  la  Colombe,  par  allusion  au  nom  de 
Colomban,  ou  Colomba,  qu'il  portait.  Les  ti- 
tres d'honneur  qu'il  donne  A  ce  pape  sont 
extraordinaires,  mais  dans  le  goût  de  son 
siècle.  11  l'appelle  la  très-grande  beauté  de 
l'Église,  et  Iclrès-augusle  spéculateur  de  ton- 
te l'Europe .  Le  motif  de  sa  lettre  était  de  dé- 
fendre l'usage  qu'il  avait  appoilé  d'Irlande  , 
de  célébrer  la  Pàque  le  qualoizième  de  la 
lune.  Il  s'appuie  sur  l'aulorilé  d'.Vualolius  , 
dont  il  dil  que  l'ouvrage  sur  la  PAcjue  a  été 
cilé  parEusèbc  de  Césarée,  et  loué  par  saint 
.lérùmc.  Il  trouve  à  redire  que  Vicloiius  n'ait 
point  suivi  dans  son  Cycle  le  calcul  d'Analo- 
lius  ,  et  qu'en  voulant  innover  sur  ce  point , 
il  ait  iiilroduit  dans  les  Gaules  un  usage  in- 
connu jiisques-li\.  Il  ne  disconvient  pas  que 


Ullrc 

Grteo  i  r 
lom.  XM 
bllnl. 
Pat.,  paf . 


Ve 


VIT  SIKCI.E. 


CTTAPITIUi:  LUI.  —  SAINT  COLOMDAN  DE  LUXEU. 


625 


1p   C.ydv  fie  Victnriiis  n'ait  (''l('  a|ij)r(niv(''  du 
pape  saiTit  J-t'oii  ;   mais  il  soiilieiit  que   ce 
n'est  pas  une  laisiiii  do  ne  le  point  aban- 
donner ,  et  que  les  plus  tiabiles  coinputistcs 
d'Irlande  ne  l'ont  regarde  qu'avec  dédain  et 
mépris.    I!    prie    donc    saint    Grégoire    de 
lui  envoyer  une  décision  sur  ce  point ,  mais 
qui  IVit  conlormc  à  l'usage  qu'il  avait  appor- 
té d'Irlande;  car  après  avoir  lu  ,  dil-il  ,  tant 
d'auteurs  ,  je  ne  suis  point  satisfait  de  ce 
que  disent  les  évè!;ues  des  Gaules  :  Nous  ne 
devons  point  célébrer  la  Pùquc  avec  les  Juifs. 
Le  pape  Victor  a  tenu  autrefois  un  sembla- 
ble langage  ;  mais  aucun  des  Orientaux  n'a 
suivi  son  sentiment.  11  ajoute  que  les  juifs 
ne  doivent  entrer  en  aucune  considération 
à  l'égard  delà  célébration  de  la  Pàque,  piiis- 
qne,  réprouvés  comme  ils  le  sont,  ils  ne  sont 
plus  censés  faire  de  Pàque,  étant  sans  tem- 
ple et  hors  de  la  ville  de  Jéi'usalem;  que 
d'ailleurs  l'Kcriture  dit  expressément  qn'on 
doit  la  célébrer  le  quatorzième  de  la  lune. 
Saint  Colomban  prie  saint  Grégoire  d'excuser 
ou  de  condamner  Viclorius  ,  ou  de  s'atten- 
dre <i  entrer  en  lice  avec  saint  Jérôme,  qui  a 
adopté   le    Cycle    d'Anatolius.    Quiconque  , 
ajoulc-t-il ,    ira    contre   l'autorité    de   saint 
Jérôme  ,  sera  rejeté  comme  hérétique  dans 
les   églises   d'Occident,  c'est-à-dire   dans 
celles  d'Irlande ,  qni  avaient  pour  maxime 
de  régler  leur  foi  en  tout  sur  les  divines  Écri- 
tures. 
le  de  la       2.  Ensuite  il  demande  au  pape  si  l'on  doit 
liie.        communiquer  avec  les  eveques  ordonnes  par 
simonie,  ou  qui,  n'étant  encore  que  diacres, 
ont  violé  la  sainteté  de  leur  état  par  des  pé- 
chés contre  la  continence  ,  quoique  secrets. 
Le  saint  abbé  avait  lui-même  été  consulté 
par  des  diacres  qui ,  se  trouvant  coupables 
d'incontinence,  n'osaient  sans  son  avis  mon- 
ter à  un  degré  supérieur.  II  passe  de  là  à 
une  autre  question,  savoir,  comment  on  de- 
vait se  conduire  envers  des  moines  qui ,  par 
le  désir  d'une  plus  grande  perfection,  quit- 
taient leurs  monastères  malgré  leurs  abbés, 
et  au  préjudice  de  leurs  vœux  se  retiraient 
dans  les  déserts.  Il  paraît  par  là  que  le  vo'u 
monastique  consistait  principalement  dans 
la  stabilité.  Saint  Colomban  témoigne  qu'il 
aurait  été  lui-même  consulter  saint  Grégoire 
sur  toutes  ces  ditbcultés,  s'il  nèu  avait  été 
empêché  par  la  faiblesse  de  sa  santé  et  par 


le  roiu  de  sa  coiumunauti;  qui  le  tenait  com- 
me eucbainé  dans  son  monastère.  Il  fait  un 
bel  éloge  du   Pastoral,  dont  la  lecture  lui 
avait  donné  tant  de  satisfaction,  qu'il  sou- 
haitait de  lire  aussi  ce  que  saint  Grégoire 
avait  écrit  sur  Kzécliiel  et  sur  le  Cantique, 
en  cas  qu'il  eût  expliqué  ces  deux  livres  en- 
tiers :  car  il  demande  surtout  l'explication 
des  derniers  chapitres.  Il  avait  lu  les  six  li- 
vres de  saint  Jérôme  sur  l'^zéchiel  ;  mais,  ce 
commentaire  ne  conienanl  pas  même  l'expli- 
cation de  la  moitié  de  cette  prophétie,  il  au- 
rait voulu  avoir  un  commentaire  sur  le  reste 
du  livre.  Enfin  il  prie  le  pape  de  lui  déve- 
lopper les  mystères  delà  prophétie  de  Za- 
cliarie.  Il  paraît  par  la  fin  de  cette  lettre, 
qu'il  en   avait  communiqué  le  dessein  au 
prêtre  Candide  .  recteur  du  patrimoine  de 
l'Eglise  dans  les  Gaules  ,  et  que  Candide  lui 
avait  fait  entrevoir  que  le  pape  ne  décide- 
rait point  la  question  de  la  Pàque  contraire- 
ment à  l'usage  ancien  de  l'Église.  Xous  n'a- 
vons pas  la  réponse  de  saint  Grégoire  :  néan- 
moins l'auteur  de  la  vie  de  sainte  Salaberge, 
assure  que  le  Pape  '  en  Gt  une  ;  mais  il  ne 
marque  pas  ce  qu'elle  contenait.  La  lettre 
de  saint  Colomban  est  écrite  avec  beaucoup 
de  liberté,  et  toutefois  avec  respect.  On  l'a 
imprimée    diverses   fois ,   et  toujours   avec 
qnautité  de  fautes  qui  la  défigurent  entière- 
ment. 

3.  II  y  avait  déjà  douze  ans  que  saint  Ce-      Lciiresux 

.         ,  ,  .  E^tcjnes    des 

tomban  demeurait  dans  le  désert  des  Yosgres^,   uiuiesassem- 

^  ^  lj!és    en  con- 

lor:^que  les  cvèques  des  Gaules,  qui  l'avaient  "'.»■  ""  '»° 
averti  plusieurs  fois  de  se  conformer  à  leur 
usage  sur  la  célébration  de  la  Pàque  ,  s'as- 
semblèrent pour  savoir  de  quelle  manière 
ils  se  conduiraient  à  son  égard.  Il  faut  donc 
mettre  ce  concile  vers  l'an  G02.  Nous  n'en 
avons  plus  les  actes,  et  il  ne  nous  serait  pas 
même  connu  sans  la  lettre  que  le  saint  abbé 
écrivit  à  ces  évêques.  Il  y  remercie  Dieu  de 
ce  qu'ils  s'étaient  assemblés  à  cause  de  lui , 
ajoutant  qu'il  serait  à  souhaiter  qu'ils  le  pus- 
sent plus  souvent,  suivant  les  canons  qui  or- 
donnent de  tenir  des  conciles  une  ou  deux 
fois  l'année,  pour  contenir  les  faibles  dans 
la  ciainle,  et  exciter  le  zèle  des  plus  fervents. 
Il  leur  souhaite  le  secours  et  l'assistance  du 
Prince  des  pasteurs  dans  l'examen  qu'ils  al- 
laient faire  de  la  question  de  la  Pàque,  agi- 
tée depuis  longtemps ,  afin  qu'ils  pussent 


'  Vita  S.  Salabci-g.  ,  tomo  il  Àct.  ordin.  S. 
nedicti,  pag.  106,  uiini.  ù. 

XI. 


Bc-  2  jom.  XII  Biblioth.  vet.  Pat.,  pag.  24. 

40 


626 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


découvrir  la  mcillcuio  tnulition  sur  ce  sujet  : 
si  c'était  celle  que  l'on  suivait  dans  les  églises 
des  Gaules,  ou  celle  des  églises  d'Occident, 
c'est-à-dire  de  l'Irlande  ,  suivant  son  style. 
n  renvoie,  pour  le  fond  de  la  ((ucstiou,  à  la 
réponse  qu'il  leur  avait  faite  trois  ans  aupa- 
ravant, aux  trois  lettres  qu'il  avait  écrites 
au  pape  ,  et  au  mémoire  qu'il  avait  adressé 
h  l'évoque  Arigius.  Il  semble  qu'il  joiftnit 
toutes  ces  pièces  à  sa  lettre  au  concile.  En- 
suite il  prie  les  évèques  de  supporter  son 
ignorance  avec  paix  et  charité  ;  déconsidérer 
qu'il  n'était  point  laulcur  de  cette  diversité, 
et  de  lui  permettre  de  vivre  en  silence  dans 
les  bois  auprès  des  ossements  de  dix-sept 
de  ses  frères  morts*  comme  il  y  avait  déjà 
vécu  douze  ans.  »  Nous  souliaitons,  ajoute- 
t-il,  de  vivre  juscpj'a  la  mort  dans  les  usages 
que  nous  avons  vu  pratiquer  à  nos  anciens. 
Voyez  ce  que  vous  ferez  à  de  pauvres  vieil- 
lards étrangers.  Je  pense  que  vous  ferez 
mieux  de  les  consoler,  que  de  les  inquiéter. 
Je  n'ai  osé  vous  aller  trouver,  de  peur  de 
disputer  en  votre  présence  ,  contre  la  dé- 
n.  Tin  et.  fcnso  de  l'Apôtre,  qui  dit:  Ne  vous  amusez 
"'  ""  jMÎnt  A  des  disputes  de  /jaroles.  Je  vous  con- 

fesse en  toute  sincérité,  que  j'ajoute  plus  de 
foi  à  la  tradition  de  ma  patrie,  qui  est  fon- 
dée sur  le  calcul  d'Anatolius  loué  et  approu- 
vé d'Eusèbe  et  de  saint  Jérôme,  qu'à  l'usage 
qui  n'est  appuyé  que  sur  le  Cycle  de  Victo- 
rius,  qui  est  un  nouvel  auteur ,  qui  n'a  écrit 
qu'en  doutant,  qui  n'a  rien  décidé  là  où  il 
était  nécessaire ,  qui  n'a  vécu  que  depuis 
saint  Martin,  saint  Jérôme,  le  pape  Damase, 
et  sous  Hilarus,  c'est-à-dire  depuis  cent  trois 
ans  (c'est  une  faute  ,  il  faut  '  lire  cent  trente 
ans).  Choisissez  lequel  des  deux  vous  aime- 
rez mieux  suivre.  Pour  moi,  je  ne  veux  point 
contester  avec  vous,  de  peur  que  les  juifs 
nos  ennemis  ne  se  réjouissent  de  la  division 
des  chrétiens.  II  peut  arriver  que  les  deux 
traditions,  celle  de  vos  Églises  et  celle  de 
ma  patrie  ,  vous  paraissent  bonnes  :  alors  , 
que  chacun  suive  ses  propres  usages  ;  sinon, 
que  l'on  décide,  en  comparant  l'an  et  l'au- 
tre Testament,  de  l'usage  que  chacun  doit 
suivre.  Car  si  c'est  la  volonté  de  Dieu  que 
vous  me  chassiez  de  ce  désert,  où  je  suis  ve- 
nu d'outrc-uier  pour  l'amourde  Jésus-Chrisl, 
jon.i,  II,  je  dirai  comme  le  Prophète  :  Si  c'est  à  cause 
de  moi  que  cette  tempête  s'est  élevée ,  faites-la 
cesser  en  me  jetant  dans  la  mer.  » 

'  .Mal.ill.iii.,  lili.  1\  Annn!..  unw.  31,  pag.  280. 


■4.  Celte  lettre  ne  fit  que  peu  ou  point  d'eDTel  t*»"  •" 
sur  les  esprits  des  eveques  des  Gaules.  Samt  "■  "■  ■>■  vf- 
Colomban,  vojant  qu'ils  continuaient  de  l'in- 
quiéter, eut  recours  au  pape  Bonifacc,  à  qui 
il  envoya  copie  de  ses  trois  Lettres  à  saint 
Grégoire,  qui  ne  lui  avaient  point  été  ren- 
dues, et  de  celle  qu'il  avait  écrite  aux  évo- 
ques des  Gaules.  Le  titre  de  la  sienne  porte 
qu'il  l'adressa  à  Boniface  IV,  successein-  de 
Boniface  III,  (pii  était  monté  sur  le  Saint- 
Siège  immédiatement  après  la  mort  de  saint 
Grégoire,  .\insi  on  ne  peut  la  mettre  avant  le 
18  septembre  de  l'an  G07,  auquel  Boniface 
IV  fut  élu.  Saint  Colomlian  lui  demandait 
qu'il  lui  fût  permis  de  s'en  tenir,  sur  l'obser- 
vation de  la  Pàque  ',  à  la  tradition  de  ses 
anciens,  en  cas  qu'elle  ne  fût  point  contraire 
à  la  foi.  Il  s'ex|)liiiue  en  I  ?rmes  très-clairs 
sur  l'unité  de  nature  et  la  trinité  de  person- 
nes eu  Dieu;  et,  pour  engager  le  pape  à  lui 
accorder  sa  demande,  il  lui  fait  entendre 
que,  faisant  corps  à  part  dans  la  solitude  avec 
ses  moines,  il  n'était  point  obligé  de  se  con- 
former à  l'usage  de  provinces  où  il  n'était 
l)as  né.  <(  Nous  sommes,  dit-il,  chez  nous 
dansnotie  patrie,  puisque  aous  ne  recevons 
pas  les  règles  de  ces  Gaulois,  et  que  nous 
demeurons  dans  les  déserts,  sans  inquiéter 
personne,  contents  d'observer  les  règles  que 
nos  anciens  ont  observées  avant  nous.  Nous 
demandons  de  pouvoir,  sous  votre  autorité, 
conserver  la  paix  et  l'unité  ecclésiastique, 
comme  saint  l'olycarpe  cl  saint  Anicet  l'ont 
conservée  cnscmljle,  sans  aucun  préjudice 
de  la  foi,  en  laquelle  ils  étaient  unis,  quoi- 
qu'ils ne  convinssent  pas  sur  le  jour  de  la 
célébration  de  la  Pâque;  et  que,  suivant  les 
canons  des  cent  cinquante  Pères  du  concile 
de  Constanlinople,  les  ICglises  qui  sont  chez 
les  barbares  puissent  vivre  selon  leurs  lois.  » 

S.  La  quatrième  Letti'e  est  adressée  aux  „'•""•■"' 
*  MAincf  di»  Lu- 

moines  qu'il  avait  laissés  à  Luxcu  en  partant  "°;  j^""''' 

pour  son  exil  en  G 10.  Il  l'écrivit  de  Nantes, 
au  moment  où  il  allait  s'embarquer  pour 
passer  en  Irlande,  ne  comptant  plus  revoir 
SCS  moines.  Il  les  exhorte  à  la  ]>atience  en  la 
persécution  que  le  roi  Thierry  et  la  reine  Bru- 
nehaut  leur  faisaient  souU'rir,  et  surtout  à 
l'union  entre  eux,  disant  que,  s'ils  n'avaient 
pas  un  même  cnnir  et  une  même  volonté,  il 
était  plus  expi'dient  qu'ils  se  séparassent  do 
demeure.  Il  leur  laisse  le  choix,  ou  de  le  ve- 
nir trouver,  ou  de  rester  à  Luxcu  sous  l'obéls- 

»  Ibid.,  png.  2J. 


[vil' SIÈCLE.]  CIIAPlTlUi  LUI. 

sancP  d'Altalc  son  tlisciplo,  qu'il  leur  orclon- 
iiadc  reconnaître  pour  Ipursupérieiir.oubicn 
de  \'al(I(>l(Mie,  au  cas  où  Atlalc  voudrait  le 
suivie  ou  Irlaudo.  l'uis,  adressant  la  parole  A 
Altaleen  particulier,  illui  enjoint  de  demeu- 
rer, s'il  voit  le  protit  des  âmes;  ou  de  venir 
le  trouver,  s'il  voit  qu'en  demeurant  il  y  ait 
du  dauiier  que  la  division  ne  se  mette  dans 
la  communauté  ;\  cause  de  la  question  de  la 
Pâque.  Car  saint  Colomban  craignait  que  ses 
moines  ne  fussent  plus  si  fermes  ;\  mainte- 
nir leur  pratique  sur  ce  sujet,  depuis  qu'il 
n'était  plus  avec  eux.  Sa  tendresse  pour  At- 
talelni  faisait  verser  des  larmes  en  lui  adres- 
sant la  parole  ;  mais  il  tâchait  d'en  empêcher 
le  cours,  en  réilochissant  qu'il  n'est  pas  d'un 
soldai  valeureux  de  pleurer  dans  le  combat. 
Il  écrivait  encore,  lorsqu'on  vint  l'avertir 
qu'on  préparait  un  vaisseau  pour  le  mener 
malgré  lui  en  son  pays  :  «  IMais  si  je  veux, 
dit-il,  m'enfuii',  je  n'ai  point  de  gardes  qui 
m'en  empêchent;  au  contraire,  ils  semblent 
vouloir  que  je  me  retire.  Si,  à  l'exemple  de 
Jonas,  dont  le  nom  en  hébreu  signifie  Co- 
lombe, l'on  me  jette  dans  la  uier,  prie/  Dieu 
que  quelque  habile  nauionnier,  faisant  ù  mon 
égard  les  fonctions  de  la  baleine,  rejette  vo- 
tre Jonas  sur  la  teire  cpi'il  tlésire.  La  fin  du 
parchemin  m'olilige  à  finir  ma  lettre.  L'amour 
n'a  point  d'ordre  :  c'est  ce  qui  la  rend  con- 
fuse. J'ai  voulu  tout  dire  en  peu  de  mots,  et 
je  ne  lai  pu.  Je  me  suis  même  abstenu  d'é- 
crire certaines  choses  dont  j'avais  d'abord  eu 
dessein  de  vous  parler.  «  Il  conjure  ses  dis- 
ciples de  ne  point  chercher,  en  son  absence, 
une  liberté  qui  les  soumettrait  à  la  servitude 
des  vices,  et  leur  dit,  pour  le  cas  où  Attale  ne 
suffirait  pas  pour  les  gouverner,  de  s'assem- 
bler tous  et  de  choisir  un  supérieur,  leur  pro- 
mettant de  les  conduire  encore  lui-même,  si 
c'était  la  volonté  de  Dieu. 

6.  Vers  l'an  613,  Agilulfe,  roi  des  Lom- 
bards, qui  lui  avait  donné  une  retraite  hono- 
rable dans  ses  Etats,  l'engagea  ù  écrire  au 
pape  Boniface  IV  eu  faveur  des  défensem-s 
des  Trois-Chapitres,  qu'il  avait  pris  sous  sa 
protection.  Ils  étaient  aussi  protégés  par  la 
reine  Tliéodelinde.  Le  saint  abbé  se  prêta 
d'autant  plus  volontiers  à  la  demande  du 
roi,  qu'il  espérait  contribuer  au.  rétablisse- 
ment de  la  paix  et  de  la  réunion  des  Églises 
divisées  depuis  longtemps  au  sujet  du  cin- 
quième concile  général.  Mais  on  voit  par  sa 


SAI.NÏ  CULO.MDAN  DE  LIJXELJ. 


G27 


Lettre  qu'il  n'ét.iit  point  au  fait  de  la  ques- 
tion, et  qu'il  n'en  savait  que  ce  que  les  schis- 
maliqiies  lui  en  avaieni  appris.  Aussi  ne  rai- 
sonne-t-il  que  sur  des  oui-dire.  On  lui  avait 
assuré  que  le  pape  Vigile  était  cause  du  scan- 
dale arrivé  à  l'occasion  de  la  condamnation 
des  Trois-Chapitres  ;  que  le  cinquième  concile 
général,  qui  les  avait  condamnés,  avait  reçu 
comme  catholiques  Nestorius,  Eutychès  et 
Dioscorc;  que  le  même  concile  avait  con- 
damné ceux  qui  admettaient  deux  substan- 
ces oiuhmx  naturcsen  Jésus-Christ;  qu'ainsi 
le  Saint-Siège,  en  ailmeltant  ce  concile  et 
la  condamnation  des  Trois-Chapitres,  avait 
souillé  la  chaire  de  saint  Pierre.  Dans  tontes 
ces  fausses  su])posiloiis,  il  se  plaint  de  ce  qu'à 
Uome  on  récitait  le  nom  du  pape  Vigile  dans 
les  diptyques  avec  ceux  des  évêques  catho- 
liques; il  exhorte  le  pape  Boniface  à  assem- 
bler un  concile,  où,  pour  se  purger,  lui  et 
son  église,  du  soupçon  d'hérésie,  il  laisse 
une  exposition  précise  de  sa  foi  ;  et  le  conjure 
en  même  temps  de  travailler  i  la  réfoima- 
tion  des  moîurs  qu'il  trouvait  extrêmement 
corrompues  en  Italie,  ce  qu'il  attribue  prin- 
cipalement au  schisme  qui  la  divisait.  Cette 
Lettre  est  semée  de  termes  peu  ménagés,  qui 
avaient  échappé  à  un  zèle  plus  ardent  qu'é- 
clairé. Il  en  fait  par  avance  ses  excuses  au 
Pape,  comme  de-  tout  ce  qui  aurait  pu  le 
choquer  dans  une  autre  Lettre  adressée  à  un 
nommé  Agrippin,  qui  l'avait  aussi  contraint 
d'écrire  sur  l'allaire  des  Trois-Chapitres.  Il 
avait  apparemment  envoyé  copie  de  cette 
Lettre  ou  Traité  au  Pape.  Au  reste,  saint  Co- 
lomban témoigne  qu'il  n'a  point  d'autre  foi 
que  celle  de  l'Église  romaine;  que  cette  Égli- 
se n'a  jamais  pris  la  défense  d'aucun  héré- 
tique, et  qu'il  demeure  attaché  indivisible- 
ment  à  la  chaire  de  saint  Pierre.  Il  donne 
dans  cette  Lettre  l'explication  de  son  nom 
en  grec,  en  hébreu  et  en  latin  ;  et  au  lieu 
que  dans  les  autres  il  prend  le  nom  de  Co- 
luinOa,  ici  il  prend  celui  de  Palunibus,  pigeon 
ramier. 

§IV. 

Poésies  de  saint  Colomban. 

I.  Sigebert,  en  parlant  des  écrits  de  'ce      p,,,.,,,.', 
saint  abbé,  dit  '  qu'il  en  avait  composé  plu-  """''''■ 
sieurs  qui  contenaient  des  instructions  très- 
utiles,  et  d'autres  dignes  d'être  chantés  ^  Il 


'  Toui.  Xil  Bibiiolh.  vet.  Pal.,  pag.  33. 


*  Sigebert.,  De  Scripl.  Eccles.,  cap.  lï. 


lïlSTOlHE  GKNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


d»lius.   Ittd., 


Poème  ^or 
ta         rc-cpni». 


C28 

onlciid  par  ceux-ci  les  poèmes  qu'il  avait 
adressés  à  ses  disciples  ou  h  ses  amis.  Il  y 
en  a  un  à  Hunald  son  disciple,  à  qui  quel- 
ques exemplaires  donnent  le  nom  de  Selhus. 
Il  est  précédé  d'une  petite  pn-face  en  vers 
aciostiches,  où  saint  Coloiuban  se  nomme 
lui-même,  et  où  il  met  aussi  le  nom  d'Hu- 
nald,  en  celte  sorte  :  Coliimbanus  Hunaldo. 
Cette  préface  roule  sur  la  brièveté  et  l'ineer- 
tiludc  de  la  vie  de  l'homme,  sur  l'inconstance 
de  ses  plaisirs  et  de  ses  honneurs.  Ce  poème 
est  une  invective  contre  l'avarice.  Le  saint  y 
fait  voir  que  les  véritables  richesses  consis- 
tent dans  la  science  de  la  loi  de  Dieu,  dans 
la  pratique  de  la  vertu,  dans  le  mépris  des 
biens  et  des  honneurs  temporels,  ou  du 
moins  dans  leur  usage  modéré.  Canisius  a 
donné  ce  poème,  mais  sans  la  préface.  Il  a 
omis  aussi  les  deux  derniers  vers,  où  saint 
Colombau  prie  Munald  de  se  souvenir  de  lui 
en  lisant  ses  vers.  Ils  sont  tous  hexamètres» 

2.  Ceux  du  Poème  à  Fédolius  '  ne  sont 
que  de  deux  pieds;  on  en  excepte  les  six  der- 
niers qui  sont  hexaihètres.  Saint  Colombau 
y  marque  qu'il  était  parvenu  à  la  dix-biii- 
tième  olympiade,  c'est-à-dire,  à  l'âge  de 
quatre-vingt-dix  ans.  '  Il  l'écrivit  donc  dans 
ses  dernières  années,  et,  comme  il  le  dit, 
dans  le  temps  cju'il  était  attaqué  d'une  ma- 
ladie violente  :  quelque  grande  que  fiît  alors 
l'infirmité  de  son  corps,  elle  ne  lui  ôtait  pas 
la  liberté  de  l'esprit.  Il  y  donne  en  peu  de 
mots  les  causes  et  les  suites  de  la  guerre  de 
Troies  et  les  règles  de  composer  des  vers 
de  même  mesure  que  ceux  qu'il  emploie 
dans  ce  poème.  Mais  il  semble  n'y  faire  en- 
trer ce  trait  de  l'histoire  profane,  que  pour 
faire  remarquer  A  Fédolius  la  vanité  des 
choses  humaines,  et  pour  l'engager  à  s'atta- 
cher fortement  à  Jésus-Christ. 

3.  L'Epigramme  sur  la  femme  est  en  qua- 
tre vers  élégiaques  '  .  C'est  une  antithèse 
entre  les  maux  que  la  première  femme  a 
causés  au  genre  humain,  et  les  avantages 
que  la  seconde,  c'est-à-dire  la  Sainte-Vierge, 
lui  a  procurés.  La  morale  qu'il  on  tire  est, 
que  tout  homme  de  bien  doit  se  garder  du 
venin  qu'une  mauvaise  femme  porte  sui"  sa 
langue. 

<  Sigpbcrt,  de  Script.  Eccles.,  pag.  34. 
'  Dites  plutôt  soixanto-rlouze  au9.  Voy.  l'ohsor- 
vulioii  ci-di-ssu9.  [L'ddilcur.) 
»  Sigcbcrt,  de  Scripl.  Ecoles.,  img.  3t. 

*  Ibiil.,  pag.  'JTi. 

'  Uaroii.,  ait  an.  8:15,  lom.  I.\. 

•  Toui.  XII  Bibliulli.  vet.  l'ai.,  pag.  23. 


-4.  Delrio  a  attribué  h  saint  Althelme , 
apolre  des  Saxons  occidentaux,  le  poème 
intitulé  :  Monostichon  ',  sur  ce  que  l'auteur, 
dans  le  vingt-et-unième  vers,  invite  à  com- 
battre les  huit  vices  capitaux,  et  que  saint 
Allhelme,  dans  un  poème  à  la  louange  de 
la  virginité,  qui  se  trouve  joint  au  Monosti- 
chon dans  un  ancien  manuscrit,  forme  aussi 
un  combat  entre  ces  huit  vices  et  les  vertus 
(]ui  leur  sont  o|iposées,  Cetle  conjecture  pa- 
rait bien  faible  à  Canisius,  qui  aime  mieux 
s'en  rapporter  à  un  manuscrit  de  Frisingue, 
où,  dans  le  titre  qui  se  lit  à  la  tête  du  Mo- 
noslichon,  il  est  dit  qu'il  passait  pour  être 
de  saint  Colomban.  Il  répond  à  l'objection, 
ou,  si  l'on  veut,  à  la  jireuve  de  Delrio, 
qu'encore  que  l'on  ne  compte  ordinairement 
que  sept  péchés  capitaux ,  les  anciens  en 
comptaient  huit.  Sur  quoi  il  cite  la  lettre  de 
Thcodidphe  "  d'Orléans  à  son  clergé,  où  il 
est  faitmeuliou  de  ces  huit  péchés  capitaux. 
Il  aurait  pu  encore  citerla  dix-septième  ins- 
truction de  saint  Colomban  "  ,  intitulée  : 
Des  huit  péchés  capitaux,  et  appuyer  sur  la 
conformité  de  doctrine  et  de  quelques  ex- 
pressions, qui  sont  les  mêmes  dans  le  Mo- 
nostichon que  dans  les  autres  poèmes  de 
saint  Colomban.  Il  y  a  même  deux  '  vers  en- 
tiers qui  sont  mot  pour  mot  dans  le  poème 
à  Ilunald  et  dans  le  Monostichon.  On  re- 
marque dans  celui-ci  plusieurs  vers  entiers 
tii-és  *  d'Octavien,  ancien  poète  romain, 
dont  saint  Colomban  avait  sans  doute  fait 
une  étude  particulière  dans  sa  jeunesse; 
et  il  avouait  sans  peine  que,  quand  il  eu 
trouvait  qui  venaient  à  son  sujet,  il  les  trans- 
crivait sans  y  rien  changer,  disant  qu'il  ne  ' 
pouvait  eu  faire  de  meilleurs.  Chaque  vers 
du  Mouostichon  renferme  une  sentence  ou 
une  maxime  de  morale  ;  et  c'est  ce  que  si- 
gnifie le  titre  du  poème.  La  plupart  sont  ti- 
r('s  d'Octavien,  mais  il  y  en  a  aussi  un  grand 
nombre  de  l'I'^criture  saiule  :  elles  sont  tou- 
tes bien  choisies,  utiles  et  édifiantes.  Elles 
ont  pour  objet  la  suite  des  huit  vices  capi- 
taux el  la  prati(|ue  des  vertus  contraires. 

5.  Suit  dans  la  Bibliothèque  des  Pères  un 
llylhme  en  forme  de  prose  carrée  qui  porte 
le  nom  de  saint  Colombau  '°.  Celte  pièce  n'a 

■>  Vive  Deo  fidcns  Cliristi  pnrcrpla  seqiiendo. 
Sinl  tilii  Uiviliœ  dicinœ  dogmata  legis. 
pag.  33  et  3ô. 

"  Prwfnt.  in  poemata  S.  Columbani,  png.  33. 

'  Quœ  fiicerc  meliora  nequii,  utor  pro  mets. 
iVdm  dicta  vetera  inverlere,  impictas  mcra  est. 
Ibid.  -  10  Ibid.,  pag.  36. 


Paèni»  io- 
tllult  Unni». 
Uclioo.   Itid., 


n<tlirrr  ou 
firtAt  Mtr**. 
Ibil  ,|JIC.3e. 


Conimi^n- 
lilro  sur  lo9 
Ptaumes. 


[vu- siKCLE.]  ClIAPlTnE  LUI. 

ni  l;i  hcaiili',  ni  i'i'ir'validii  dos  priScédcnlPS. 
l^ssorins  n'a  pas  laissé  do  la  mollrc  à  la  lolo^ 
dos  poèmes  do  ce  Ptn-a  '  ;  on  y  trouve  plu- 
sieurs de  ses  pensées  et  de  ses  expressions. 
Klle  il  pour  nialioro  rinconslance  et  la  mi- 
sère des  choses  lunnaincs. 

§  V. 

,Des  ouvrages  de  saint  Colomban  qui  sont 
perdus. 

1.  Il  faut  mettre  de  ce  nombre  le  Com- 
mentaire sur  les  Psaumes,  qu'il  composa 
('tant  ^  encore  jeune  et  avant  d'entrer  dans 
le  luonastore  de  Bangor.  Sigcl)ert  parle  de 
ce  Comn\entaire  ;  mais  il  parait  avoir  tiré  ce 
qu'il  en  dit,  de  Jonas,  auteur  de  la  Vie  de 
saint  Colomban,  qui  dit  qu'il  était  travaillé 
avec  beaucoup  de  soin  ■'.  Hartnioto,  moine 
de  Saint-Gai,  met  dans  l'inventaire  des  li- 
vres de  cette  abbaye  un  Commentaire  de 
saint  Colora lian  sur  les  Psaumes.  .l'on  ai  vu 
un  dans  celle  de  Luxeu  que  l'on  a  cru  long- 
temps être  le  même  ;  mais  on  cite  dans  ce 
Commentaire,  écrit  contre  les  ariens,  des 
autours  postérieurs  à  saint  Colomban  ;  ainsi 
il  ne  saurait  être  de  lui. 

2.  Etant  à  Milan,  il  combattit  de  vivo  voix 
les  ariens  par  les  saintes  l'^crituros,  et  en- 
suite par  écrit.  Cet  ouvrage,  dont  Jcuias 
paile  avec  éloge,  n'est  pas  venu  jusqu'à 
nous  *.  Ces  ariens  n'étaient  autres  que  les 
Lombards,  qui  avaient  pour  roi  Agilulfe. 

LiMiresji,  3.  Le  mémo  écrivain  fait  mention  d'une 
Jf'au  ro'î'clo-  lettre  que  S.  Colomban  écrivit  au  roi  Tliier- 
'°'"'  ry.  11  *  y  faisait  à  ce  prince  de  grands  re- 

proches sur  le  dérèglement  de  ses  mu'urs, 
et  le  menaçait  d'excommunication,  s'il  ne 


SAINT  COLOMBAN  DE  LUXEU. 


029 


(relesArieDS. 


changeait  de  conduite.  Elle  est  atissi  citée 
par  l'"r('dé'j:aire.  Nous  ne  l'avons  plus,  ni 
celle  qu'il  adressa  au  roi  Clolaire  pour  le 
remercier  de  ce  qu'il  l'avait  envoyé  inviter 
i\  revenir  dans  les  Gaules  °,  e'est-^-dire  dans 
son  monastère  de  Luxeu.  Quoique  le  saint 
abbé  eût  accompagne;  ses  remerciements  de 
leçons  sévères  pour  ce  prince,  le  roi  reçut  sa 
lettre  avec  joie,  et  la  regarda  comme  un 
présent  de  sa  part.  Il  on  avait  écrit  une 
autre  '  à  un  de  ses  disciples,  qui  est  aussi 
perdue  :  elle  avait  pour  matière  la  gravité 
et  la  pudeur. 

/i.  De  ses  trois  lettres  "  à  saint  Grégoire 
sur  la  Pàque,  il  ne  nous  en  reste  qu'une.  Sa 
première  aux  évoques  des  Gaules"  est  encore  p""' 
perdue,  de  même  que  le  mémoire  qu'il  avait 
adressé  i"!  Arigins ,  '"  l'un  d'cntr'eux,  et  la 
Lettre  ou  Traité  sur  l'allaiio  dos  Trois-Clia- 
pitres  "contre  Agrippin.  Il  n'y  a  aucun  fonde- 
ment de  mettre  entre  ses  ouvrages  perdus 
un  Traité  sur  les  devoirs  des  Pasteurs;  car  il 
est  visible  que  c'est  du  Pastoral  do  saint  Gré- 
goire que  veut  parler  l'tiuteur  de  la  vie  de 
sainte  Salaberge  ,  et  que,  si  le  texte  souITre 
en  cet  endroit  quelque  doute-,  il  vient  uni- 
quement de  la  faute  du  '-  copiste.  Mais  on 
ne  peut  guère  douter  que  nous  n'ayons 
peidu  un  grand  nombre  de  ses  discours; 
puisque,  suivantle  témoignage  de  Jonas  sou 
historien  ",  il  prêchait  partout  où  il  passait, 
et  qu'on  aimait  à  l'entendie,  parce  que  ses 
vei'tus  donnaient  un  grand  poids  à  ses  ins- 
tructions. 

5.  Les  éditeurs  de  la  Bibliulhèque  dos  Pè- 
res '•  ont  mis  à  la  suite  des  ouvrages  de  saint 
Colomban  une  explication  mystique,  et  mo- 
rale des  noms  do  ceux  que  l'Evangile  compte 


I,ot'rC->  "l 
Mrritfl  .^iir  In 
l'i'iuo  cl  frur 
[es  TroiS'Cba- 


Sainl  Aile- 
lan. 


'  Usser.,  Epist.  Hibern.,  pag.  6  et  7. 

-  Tantiim  ejus  in  peclore  dicinarum  Ihesauri  . 
Scripturarum  condili  tenebantur,   ul  Inlra  ado- 
le/centiœ  œlatem  detentus,  rsalmoruin    librum 
eliiiHilo  serinone  exponeret.  Jouas,  in  Vita  S.  Co- 
luiiibiin.,  uuLii.  9. 

^  Ibiil.  et  Sigfibort,  De  Script.  Eccles.,  cap.  lx. 

^  Dum  ille  Mediolanum  pênes  mnrarelur ,  ut 
luercticorum  fraudes,  id  estarianœ perlidiw  Scrip- 
turarum cauterio  disccrnere  ac  desecare  veUct  ; 
contra  quos  eliam  libellum  florenti  scientia  edi- 
dil.  Jonas,  in  Vita  Columb.,  num.  ~>9. 

»  Qiio  audito,  Columbanus  IMeras  ad  eumver- 
beribus  plenas  direxit,  contminaturque  excommu- 
nicationem,  si  emendare  dilalando,  non  velkt. 
Il)iil.,  uum.  32,  et  FrcHlo^av.  m  Chronic.  ,  nuin.  36. 

*  Liltcras  castigalionum  affamine  plenas  régi 
ClnlartO  dirigit,  gratissimum  munus.  .]oua^,  ibid., 
uum.  62. 


'  Stripsi  libi  antea  de  serieiate  ac  pudicitia. 
Coluiiilian.,  instruct.  xiv,  toin.  Ml  Bibliolli.  vet. 
Pat.,  pas.  10. 

"  Epist.  ad  Patres  Concilii,  pag.  25. 

9  II)i(l.  —  '»  Ibid. 

•'  Epist.  ad  Bonifac,  pag.  29. 

'*  E.rstant  ejiisdem  Coluniha»i  scripla  ad  bea- 
tissimnm  virum  Gregoriiun  PûiHificcm  Romanum 
qiice  de  pervigi.li  Pastorum  cura  elii:uit.  Il  faut 
lire  :  gui  de  porvigili  l'astunim  lura  clucubravit. 
Ce  qui  se  rapporte  uaturellean'iil  ti  saint  r.ré- 
goire. 

"  Agehat  rencrandus  rir  lit  per  quœcumque 
loca  progrederetur,  verbum  erangelicum  annun- 
tiaret  :  erat  cnin:  gratum  hominihus,  ut  qund  fa- 
cundiœ  cultus  adornabal,  elucnbratœ  prœdica- 
tionis  doclrina  simul  et  exempta  virlutum  con- 
finimhant.  J.mas,  in  Vita  Columb.,  num.  11. 

'••  Tum.  Ml  Biblioth.  cet  Pat.,  pag.  37. 


630 


HISTOimi  GÉNKRALE  DES  AUTEUKS  ECCLESIASTIQUES. 


entre  les  ancêtres  de  Jésus-Christ.  Elle 
porte  le  nom  de  saint  Aileran  Hibornois, 
surnommé  le  Sage.  C'est  le  seul  monument 
qui  nous  reste  de  cet  auteur;  encore  est-il 
imparfait.  On  ne  sait  en  quel  temps  il  écri- 
vait. 

§  VI. 

Jugement  des  écrits  de  saint  Colomban. 
Editions  qu'on  en  a  faites. 

japêmcni       1.  QuoioTie  la  science  des  saints  fût  celle 

itf  écrits  de  .         >,    ,         ,  .  >    .      ,  , 

Mfni  coiom-  que  saml  Colomban  possédait  le  plus  par- 
faitement ,  .il  n'était  point  étranger  aux 
sciences  humaines.  Il  avait  éludii- l'antiquité 
profane  et  ecclésiastique,  et  appris  dans  les 
écrits  des  meilleurs  maîtres  à  parler  et  à 
écrire  avec  élégance  et  noblesse ,  soit 
en  prose,  soit  en  vei-s.  Mais  il  faut  avouer 
qu'il  réussissait  mieux,  lorsqu'il  s'agissait  de 
traiter  quelques  points  de  morale.  Les  dis- 
cours que  nous  avons  de  lui  en  ce  genre 
sont  vifs,  pressants,  animés,  naturels,  per- 
suasifs et  pleins  d'onction.  Ils  coulaient  de 
source,  ne  prêchant  aux  autres  que  ce  qu'il 
pratiquait  lui-même.  Ses  lettres  ont  moins 
d'agrément,  le  tour  en  est  plus  embarrassé, 
le  style  plus  enllé  et  plus  guindé.  C'est  ap- 
paremment qu'écrivant  à  des  papes  et  à  des 
évéques,  il  le  faisafl  avec  plus  d'art.  11  est 


moins  gêné  et  plus  naturel  dans  sa  lettre  à 
des  moines. 
2.  Nous  n'avons  que  deux  éditions  com-        Edm.nî 

^  qu  OD  CD  a  fil- 

plétcs  de  ses  œuvres  :  l'une  dans  les  Collecta-  '">• 
nea  sacra  de  Fleming,  imprimés  à  Augsbourg 
en  1621,  in  8,  et  réimprimés  à  Louvain  en 
1667,  fol.;  l'autre  dans  le  douzième  tome  de 
la  Bibliothèque  des  Pères  ,  imprimés  à  Lyon 
en  1677  '.  Avant  ce  temps-l.'i,  Goldast  avait 
rendu  pulilique  la  Règle  de  saint  Colomlian 
avec  quelques  autres  de  ses  opuscules.  Son 
édition  est  de  Lille,  en  1601,  et  compiend 
d'autres  anciens  monuments  sous  le  lilic  de 
Parœnelicorum  VPterum.  Cette  Règle  se  trouve 
aussi  dans  le  Florilegium  Sanctorum  Hiber- 
n/«'de 'rhomasMessiuLrliani,  a  Paiisen  1624, 
dans  le  Corona  lucida  de  Stcugel,  et  dans  le 
Code  des  Règles  de  saint  Benoit  d'Aniane 
par  Holstenius,  à  Paris,  en  1663.  La  lettre  au 
pape  saint  Grégoire  n'est  point  dans  le  Re- 
cueil de  Fleming;  mais  on  l'a  mise  dans  le 
neuvième  livre  de  celles  de  ce  pape  de  la 
nouvelle  édition,  où  elle  est  la  127'.  Le 
Poème  à  Huuakl  fut  imprimé  séparément  à 
Bâie,  en  lo62  ,  parmi  les  poésies  chrétiennes 
recueillies  par  Georges  Fabi-icius  ;  dans  les 
Leijons  anciennes  de  Ganisiusà  IngoUlat,  en 
1601,  et  il  .\nvers,  eu  1725  ;  dans  la  Chrono- 
logie de  Lerius,  parBarrali,ei  Lyon,  en  1613, 
et  dans  le  Recueil  des  Œuvres  du  Père  Sir- 
mond  à  Paris,  en  1619  et  1696. 


CHAPITRE  LIV. 

Varnahaire  [après   l'an  615],  saint  Beitchran  évêqne  du  Mans  [623], 

saint  Protadc  de  Besançon  [625] ,  saint  Eustase  abbé 

de  Luxeu  [625],  Luculentins. 

ll'ÀriYaius  latius.1 


i.»iir.  de       *•  Nous  ne   connaissons   Varnahaire   on 

cèrTÔD'!™/.  Varnachaire  que  par  sa   lettre  à  saint  Ce- 

qoejoH.ris.  j,jjm,ç^  évêque  de  Paris,  qui  l'avait  chargé 

de  lui  envoyer  les  acics  do  quelques mailyrs 

dont  on  honorait  la  mémoire  dans   l'éL'Iise 


de  Langres.  On  infère  do  là  deux  choses: 
l'une  ipie  Varnachaire  élait  élève  de  cette 
église;  l'autre,  qu'il  était  en  réputation  de 
savoir.  Il  s'acquitta  delà  commission,  cl  en- 
voya i\  saint  Geraune,  vers  l'an  61"),  les  Ac- 


•  <^iallaii(l  a  <lonn<;  «no.  nuire  cilitioii  ilcs  œuvres 
roinplrlcs  de  s.iiiil  Coloiiilinii,  dans  le  loiiie  Xll  de 
sa  liibliuDiùqiie  ;  elle  a  passé  de  là  dans  le  Imiic 
I.X.X.X  de  la  Palrologie  /a(i«c,  avec  beaui'uui»  d'au- 
tres ailleurs.  On  y  trouve  une  notice  par  Ka- 
l)rieius,  puis  un  l'i-oléf!i>uièue  par  (jalland.  Les 
éerils  ([u'on  y  a  reproduits  sont  :  1»   la  Il'glc  ma- 


namle  ;  2»  la  Mesure  des  pénitenoes  A  inipo.<er  : 
3°  iiisiruelions  diverses  ou  seriumis  au  nombre  <le 
11:  1"  des  lettres  au  nombre  de  G;  .S»  des  lellres  et 
des  npiii^cules  eu  vers.  Vienucnt  ensuite  des  notes 
de  (ioldasl  sur  les  écrits  de  siint  Colomban  ,  el 
quelipies  diplùmes  ayant  rapport  au  saint.  fL'cdi- 
Ictir.J 


I 


Ivii'  SIÈCLE.]        CHAPITRE  I.IV.  —  VABNAHAIRE,  BERTCIIRAN,  ETC.  631 

tes  de  trois  jumeaux  iioimnés  Speusippe,  tes  et  le  culte  de  saint  Bénigne, a  prouvé  que 
Llciisipjw  et  Mi'lcimippe,  qu\  avaient  re(;u  la  les  saints  Jumeaux  sont  nés  ;'iLangres, 
couronne  du  martyre  dans  le  faubourg  de  la  qu'ils  ont  été  convertis  par  saint  Bénigne.  Le 
ville  de  Langrcs.  Il  y  joignit  ceux  do  saint  savant  auteur  déroule  les  tcimuigiiages  en 
Didier,  évoque  do  la  même  ville,  qui  avait  faveur  de  la  tradition, en  faveur  des  croyan- 
aussi  soullert  le  martyre.  Varnaliaire,  en  ces  de  l'église  de  Langres;  il  résout  les  ob- 
envoyant  ces  actes  i\  saint  Cérauro  ,  lui  jections  sur  lesipiels  on  s'appuie  pour  pré- 
écrivit une  lettre  où  il  le  compare  ;\  saint  tendre  que  les  saints  Jumeaux  étaient  cap- 
Eusèbe  de  Césaréo,  c'est  ainsi  qu'il  le  qua-  padociens,  en  montrant  que  les  Actes  des 
lilie,  qui  avait  pris  soin  longtemps  avant  lui  saints  Jumeaux  publiés  par  les  Bollandis- 
de  recueillir  les    Actes  des  martyrs.    Ceux  tes  étaient  une  falsification  de  ceux  de  War 


que  Yarnaliaire  lui  envoya  ne  peuvent  pas- 
ser pour  originaux,  ù  cause  de  la  longueur 
des  discours.  Quelques-uns  en  ont  fait  au- 
teur Yarnaliaire  même  ;  mais  il  parait  par 
sa  Lettre  qu'il  n'avait  fait  que  copier  ceux 
qu'on  lisait  à  Langres  avant  lui.  On  a  d'an- 
tres actes  du  martyre  de  ces  trois  jumeaux, 
qui  fixent  leur  mort  au  même  jour ,  c'est- 
.Vdire,  au  dix-septième  de  janvier;  mais 
qui,  au  lieu  de  mettre  leur  maityre  à  Lan- 
gres,  le  mettent  dans  la  Cappadoce.  Cette 
contrariété  donne  encore  lieu  de  juger  que 
nous  ne  les  avons  point  dans  leur  pureté. 
Aussi  Dom  Buinart  ne  leur  a-t-il  point  donné 
place  dans  son  recueil  des  Actes  sincères  des 
martyrs.  11  y  est  dit  qu'après  que  Speusippe 
et  ses  deux  frères  eurent  consommé  leur 
martyre,  on  porta  leui's  corps  à  un  village 
nommé  Urbute  à  une  petiîe  lieue  de  Lan- 
gres,  et  qu'il  s'y  faisait  beaucoup  de  mira- 
cles. Yaruabaire  ajoute  i\  cela,  que  l'inven- 
tion de  leurs  corps  et  la  dédicace  de  leur 
église  se  célébrait  le  18  de  septembre  ;  ce 
qui  semble  marquer  qu'ils  avaient  été  en 
oubli  pendant  quelques  siècles.  11  n'y  a  pas 
plus  de  raison  d'attribuer  à  cet  écrivain  -  les 
Actes  de  saint  Didier.  Saint  Céraune  ne  l'a- 
vait pas  prié  de  composer  des  actes,  mais 
de  lui  envoyer  ceux  dont  il  aurait  connais- 
sance. 

[La  lettre  de  Yarnaliaire,  les  Actes  des 
saints  Speusippe,  Eleusippc  et  ^Iéleusipj)e, 
et  ceux  de  saint  Didier  se  trouvent  au  lom", 
LXXX  de  la  Patrologie  latinc,col.  186  ef  .^-^^ 
Monsiem-  l'abbé  Bougaud,  dans  s^^^  Éindè 
historique  et  critique  sur  la  Mi-^^^j^^^   j^^  ^^_ 

'  Bollandus,  ad  dicm  1"  '  ..   ,,  ,  „.„    „■„, 

r    ,    „         ,',    ,,,  .  janiiarit;  Dubois,  Hist. 

hcd.  Pans.  lib.  III,  i-         /  ,  ' 

*  nuUan.lus,  ad   '  .  '«'P-  «•  "^"l"-  '^• 
3  Autun,  1  V  <"«'"  23  "'«"■ 

*  Cliai.   ■        "'•  '"-*'  *®^^- 

.        .du  l"  livre,  pas.  117  Cl  sinv.;  ces  ac  - 
les  sor  .  ,  ,,., 

s        -t  reproduits  a  la  page  Sbi. 

Mubillon,  Anaicctor.,  tom.  111,  pag.  100,  et  cdit. 

/fe!.,  pag.  2')4. 


nahaire  ,  et  que  cette  l'alsilication  avait  été 
faite  au  IX°  siècle  par  des  Grecs  et  par  des 
Grecs  disciples  de  Photius,  Par  un  bonbeur 
inespéré  il  a  retrouvé,  dans  un  passionnaire 
d'Autun\  les  actes  entiers  composés  auhV' 
siècle,  et  dont  une  partie  manquait  dans  l'é- 
dition des  Bollandistes.  La  partie  inédite  lui 
a  servi  à  démontrer  la  falsification  de  ces 
Actes  ''.) 

2.  Nous   avons  dans  les  Analecles  ''  de 
Dom    Mabillon    l'iiisloire   des    évêques  du   , 
Mans,  au  nombre   de    quarante-quatre.  Ce 
n'est  qu'un  abrégé  de  leur  vie,  avec  quel- 
ques   actes    des   donations   faites   à   cette 
église  par  les  princes,  ou  par  les  évêques, 
ou  par  d'autres  personnes  de  considération. 
Notre  dessein  ne  nous  engage  point  à  en- 
trer dans  la  discussion  de  tous  ces  monu- 
ments, ni   à  parler  de   tous  ces   évêques, 
eussent-ils  fait  quelques  donations  ou  tes- 
taments; nous   ne   parlerons  que   de   ceux 
que  des  écrits  d'une  autre  nature  doivent 
faire  mettre  au  rang  des  auteurs  ecclésiasti- 
ques.  Bertcbran,    ou  Bertrand,   XI'  évêque 
du  Mans,  se  rendit  célèbre  par  la  sublimité 
de  son  génie  et.  par  la  beauié  de  ses  vers. 
Fortunat,  qui  les  avait  lus  ot  qui  pouvait  en 
juger  uulaut  qu'homme   de   son   siècle,  dit 
quo  Rome  n'avait  rien  vu  de  plus  parfait  en 
ce  genre  ^  11  n'en  est  venu   aucun  jusqu'à 
nous;  et  tout  ce  qui  nous  reste  de  Bertcbran 
est  lin  testament  extrêmement  long,  qu'il 
dicta  lui-même  à  son  secrétaire,  et  qui  est 
une   preuve   qu'il  était  fort  versé  dans  la 
connaissance  des  lois.  Ce  testament  est  date 
de  la  trente-deuxième  année   du  règne  de 

6  Vix  modo  tam  nilido  pomposa  poemata  cuUu 
Audit  Trajcino  Roma  veietidti  suo.   ^ 

Quid  si  lah  decus  récitasses  in  uure  bcnalus  . 
Siravisscntplanlis  aurea  fila  luis. 

Fer  Ivca.  per  populos,  per  compila  cuncla  videres 
Cwrere  versiculos,  plèbe  faMiUe,  tuos. 

Fortunat.,  lib.  Hl-  Carm.  23. 


S.Bcrl- 
fln  évoque 
.Macs. 


632 


HISTOIRE  GI:NERALE  des  auteurs  ECCLESIASTIQUES. 


Clotaire  H,  qui  revient  à  l'an  615  de  l'ère 
vulgaire.  Berlcliran  s'élait  consacré  dès  sa 
jeunesse  au  service  de  Dieu,  et  avait  reçu  la 
tonsure  cldricale  au  tombeau  de  saint  Mar- 
tin. Admis  dans  le  clergé  de  Paris,  il  faisait 
encore  les  fonctions  d'archidiacre  dans  celte 
église,  lorsqu'il  fut  clioisi  en  58G  pour  rem- 
plir le  siège  èpiscopal  du  Mans,  vacant  par 
la  mort  de  Baldi'gisile.  L'année  suivante,  le 
roi  Contran  l'envoya  en  ambassade  vers  les 
chefs  des  Bretons,  qui  avaicnl  fait  une  irrup- 
tion dans  le    pays  Nantais.  Sa   négociation 
eut  un  heureux  succès.  Eu  589  il  assista  à 
l'assemblée    qui    se   tint  dans  la    cour  de 
ce  prince'au  sujet  des  troubles  arrivés  dans 
le   monastère  de   sainte  Radegonde  de  Poi- 
tiers. Il  semble  '  qu'après  la    mort  du  roi 
Contran,  on  voulut  l'obliger  de  manquer  de 
fidélité  A  Clotaire  II,  à  qui  la  ville  du  Mans 
appartenait,  et  qu'il  fut  chassé  de  sa  ville 
épiscopale  ;  mais  qu'il  y  revint  aussitôt  que 
Clotaire  fut  devenu  maître  de  toute  la  mo- 
narchie. Il  profita  de  la  tranijuillité  dont  il 
jouit  le  reste  de  ses  jours  pour  fonder  des 
monastères,  entr'aatres  celui  de  Saint-Pierre 
de  la   Couture,  où  il  fut   enterré   en   0:23, 
étant  mort  le  30  de  juin  de  la  même  année. 
Forlunat  '  fit  deux  poèmes  en  son  honneur. 
11  relève  dans  le   premier   l'amour  tendre 
qu'il  avait  pour  son  peuple,  e«t  l'amour  que 
son  peuple  lui  portait  ;    dans   l'autre  il  fait 
l'éloge  de  ses  écrits,  c'est-à-dire,  de  ses  vers. 
Car  il    ne   marque  point   qu'il  ait  composé 
quelque  ouvrage  en  prose.  Le  testament  de- 
Bertchran  est  reproduit  au  tome  LXXX  de  la 
Patroloyic  latine,  col.  386  et  suiv.  avec  une 
notice  parMabillon  et  la  pièce  de  ver?  que 
Forlunat  adressa  à  Bertchran. 
sji„,  p„.       3.  Nous  ne  connaissons  l'ouvrage  que  saint 
Bc'.p'^oT*^"   Protade  écrivit  sur  les  rits  ecclésiastiques, 
que  par  ce   que  nous  en  apprend  l'auteur 
anonyme  de  sa  vie  '.  11  raconte  *  que  les 


clercs  des  églises  de  Besnnçoa  étant  souvent 
en  dilUculté  au  sujet  des  cérémonies  qu'ils 
devaient  observer,  Elienne,  doyen  de  l'église 
qui  portait  le  nom   de  saint  Jean   l'Évaugë- 
listc,  et  Haymin,  doyen  d'une  autre  église 
de  la  même  ville  sous  l'invocation  de  saint 
Etienne,  prièrent  saint  Prolade  de  uiotire  fin 
à  CCS  contestations ,  en  réglant   lui-même 
tous  les  rits  ecclésiasti  jues  ;   qu'à  cet  effet 
le  saint  évèque  fit  un  livre  en   forme  de  ri- 
tuel où  il  prescrivit  de  quelle  manière  on  de- 
vait se  comporter  dans  l'assemblée  des  frè- 
res ;    ce   que   l'Eglise  devait  pratiquer   ou 
éviter;  combien  il  devait  y  avoii  de  ministres 
à  l'autel  les  jours  de  fêles  solennelles;  quel 
temps  l'on  devait  pren'tre  pour  les  proces- 
sions publiques  ,  et  où  elles  doivent  aller;  en 
quels  jours  les  communautés  de  la  ville  de- 
vaient se  rendre  à  l'église  métropolitaine,  et 
ce  qu'il  fallait  pratiquer  dans  l'église  chaipie 
jour  de  l'année.  Ce  rituel,  au  rapport  de  cet 
anonyme,  était  distribue  avec  une  sainte  in- 
dustrie. On  le  conserve  encore  dans  l'éghse 
de  Saint-Jean  *  ;  mais  avec  tant  d'additions, 
souvent  nécessaires  dans  ces  sortes  d'ouvra- 
ges, qu'il  est  tout  différent  de  ce  qu'il  était 
quand  il  sortit  des  mains  de  son  auteur'.  Saint 
Protade  avait  succédé,  dans  le  siège  èpisco- 
pal de  Besançon,  a  saint  Nicet,  mort  en  612 
ou  613.  Il  mourut  lui-même  avant  l'an  625, 
auquel  saint  Donat  ,  son  successeur  '  assista 
an  concile  de  Reims.  [Dans  le  tome  LXXX 
de  la  Patrologie  latine,  col.  410,   on  trouve 
une  jinticc  historique  sur  saint  Protade,  tirée 
de   rilistùire  de  l'h'ylise,  ville  et  diocèse  de 
Besançon  ,  tome  1 .  pur  Dunod,  et  la  Liturgie 
de  saint  Protade.  Celte  liturgie  comprend  1° 
les  Laudes  ou  acclamations  qui  se  chantaient 
entre  l'oraison  et  l'épilre  non-seulement  à 
Besançon,  mais  encore  dans  les  plus  célèbres 
églises  de  la  Gaule,  dans  celles  de  Vienne, 
de  Lyon,  de  Rouen,  et  les  acclamations  com- 


1  Mabillon.,  Am\al.,  loiu.  I,  jKig.  Ifll.  1!)2. 

'  Foituiiat.  lil).  III,  (■.ip.  xxn  et  xxui. 

s  BullaiiiJus,  ad  diem  [6  fehruarii,  pi'g-  412. 

*  Inlcr  cœlera  quidem  liiijus  bcaliKsiiui  viri 
adscribilur  laudibus,  quod  duliilaiitibiui  clcricis 
inler  se  de  diversis  ecdesiarum  usibxts,  roganle 
boum  inemoriœ  Slepliano  sanclw  matris  lîccle- 
siœ  beali  Jouiinis  Eiangclislœ  et  Ilui/miiio  sancii 
Stephani  ejusdem  civitutis  Dccano,  liliellum  edi- 
deril  in  quo  ad  scparandnm  nmne  umliiouum  hœc 
scripla  rctiqiieril:  (Juid  in  conviutu  frulrum  agi 
conrer.ial;  quid  tcnere  Uccksiam ,  qnid  vitare 
oportcat;  quoi  sacri  ordinis  Ministros  fesliri  dits 
habcant  ;  quo  et  qvando  proce$siones  fiant  :  quo 


ieinpore  totius  urbis  enngregaliones  ad  matrem 
Ecctesiam  conveniant  ;  quidijuid  eliam  agrndum 
sil  pcr  anni  circulum  in  Ecclfsia,  sanria  tjus 
cdocuil  posteras  indu^tria.  Bollaud.,  ad  diem  tu 
fehruoni,  \i«g.  41.1. 

s  Le  Cuiule,  Annal,  nd  an.  «20,  niim.  .1  ol  7. 

•  Cl-  Hihiel  a  M  iuiiii-iiui'-  dniis  les  prouves  qui 
sont  ù  la  suite  du  premier  toiuc  de  Tl'V'lis'e  <Ie  Be- 
saui'on,  .ivee  la  u:i>iise  propre  des  saints  luarlyr? 
l'erréol  et  l-'erjrux,  tirée  delà  Liturgie  (Jallitaue,  et 
avi'i'  l(;s  titres  d'une  anrieime  rèfîle  des  ihanoines 
(le  l't'ylise  luélropoliluinc  <!e  celte  cil*.  (L'édi- 
teur.) 

■  Toui.  III  ConciL,  pag.  lliSO. 


Pillât  Ku*- 
ta^e,  «bbé  de 
Luiou. 


[VII' SIÈCLE.]        CHAPmiE  LIV.  —  VAIl.NAl 

moncent  par  ces  mots  :  Cfiristiis  vincit,  C/iris- 
liis  régnât,  Christtis  iin/mal  ;  2°  un  martyro- 
loge ou  catcndiicr  pour  toute  l'anni'c. 

Ou  y  trouve,  au  dix  de  uiai,  la  fête  de  saint 
Sylvestre,  preuiier  l'vèque  de  Besaueou, 
doul  on  ne  lait  plus  la  mémoire,  dit  l'abbé 
Lebnnif,  i/iid. ,  col.  i-22  ;  et  au  3  juin,  la  trans- 
lation de  son  corps  et  de  celui  de  saint 
Anian,  autre  évêqucde  Besançon,  tous  les 
deux  dans  le  IV"  siècle.  Ce  calendrier,  s'il 
est  l'œuvre  de  saint  Protadc,  a  eu  beaucoup 
d'additions  dans  la  suite;  ce  saint  s'y  trouve 
lui-uiènie  le  10  février.  Un  appendice  donne 
la  charte  de  la  restauration  du  cliapitre  de 
saint  Etienne  par  Hugues,  archevêque  de 
Besançon,  dans  le  onzième  siècle. 

Les  autres  pièces  sont  deux  catalogues 
anciens  de  l'église  de  Besançon.] 

4.  On  met  au  vingt-neuvième  de  mars  de 
la  même  année  G2ô,  la  mort  de  saint  Eustase , 
abbé  de  Luxcu,  disciple  de  saint  Colomlmn. 
Aubert-le-Mire  et  quelques  autres  en  ont  fait 
un  écrivain  ecclésiastique',  en  supposant 
que  ,  s'étant  retiré  avec  son  maître  en  Italie 
vers  l'an  Gi3,  il  avait  laissé  par  écrit  la  rela- 
tion de  son  voyage  et  de  tout  ce  qui  était 
arrivé  de  mémorable  dans  la  route.  ÎNIais 
Jouas  dit  expressément  que  saint  Colomban, 
en  sortant  de Luxeu  par  ordre  du  roi  Thier- 
ry ,  y  laissa  suint  Eustase,  son  disciple  et  son 
ministre,  qui  en  fut  ensuite  élu  abbé  -;  et 
qu'il  gouvernait  ce  monastère,  lorsque  Clo- 
taire  II,  devenu,  sur  la  fin  de  l'an  613,  seul 
maître  de  la  monarchie  française,  le  députa 
à  saint  Colomban  pour  l'inviter  à  revenir 
dans  sou  monastère  de  Luxeu.  Il  ne  nous 
reste  de  saint  Eustase  que  la  réponse  qu'il  fit 
dans  le  concile  de  Mâcon  aux  objections 
d'Agrestin  contre  la  règle  de  saint  Colomban. 
Il  est  assez  vraisemblable  qu'au  retour  de  ce 
concile  il  mil  par  écrit  ce  qu'il  y  avait  dit  de 


lAtHE,  BEllTCllltAN,  ETC.  033 

vive  voix;  et  que  Jonas^,  qui  a  écrit  sa  vie, 
a  tiré  de  cet  écrit  ce  qu'il  rapporte  des  ré- 
ponses du  saint  abbé.  Il  était  né  eu  Boiirgo- 
guc, d'iuio famille  noljle, et  était  neveu  parsa 
mère  de  Mietius,  évêque  de  I.angres.  Après 
son  voyage  d'Italie,  il  travailla  h  la  conver- 
sion des  Varasques,  peuples  qui  habitaient 
le  long  du  Doubs,  et  dont  la  plupart  t'taieut 
ou  idolâtres,  ou  infecl('s  des  erreurs  de  Bo- 
nose  et  de  Photin.  Après  en  avoir  converti 
un  grand  nombre,  son  zèle  le  porta  .'i  tra- 
vailler aussi  à  la  conversion  des  Bavarois.  Il 
mena  avec  lui  plusieurs  ouvriers  évaugéli- 
ques,  qu'il  laissa  dans  le  ])ays  pour  conti- 
nuer l'ouvrage  qu'il  avait  commencée  avec 
succès,  et  revint  h  Luxeu  reprendre  le  gou- 
vernement de  son  monastère.  L'auteur  de  sa 
Vie  relève  '  son  éloquence,  sa  facilité  ù  s'ex- 
primer, son  savoir  et  la  pénétration  de  son 
esprit. 

0.  [Lefomc  IXdes&;'//j;.  veter.,pagA89- 
256, con  tient  des  parties  d'un  commentaire  sur 
quelques  parties  du  Nouveau  Testament,  par 
Luculentius.  Cet  auteur  c=t  grave,  doué  d'une 
grande  perspicacité,  et  orthodoxe  sur  les  dog- 
mes de  la  morale,  mais  on  ignore  l'époque  où 
il  vécut  et  sa  qualité.  Son  commentaire  est 
sur  saint  Mathieu,  saint  Jean,  les  épîtres  de 
saint  Paul  et  la  première  de  saint  Pierre.  On 
peut  inférer  cependant  qu'il  est  d'une  haute 
antiquité,  en  ce  sens  c[ue  dans  plusieurs  pas- 
sages il  réfute  les  ariens.  Il  nous  apprend  ^ 
qu'ils  appelaient  le  Père  major,  le  Fils  minor, 
et  le  Saint-Esprit /)en?ienor,  mot  nouveau.  On 
y  voit  un  témoignage  très-clair  de  la  pré- 
sence du  Christ  dans  l'Eucharistie*;  le  codex 
d'où  il  est  tiré  est  duxii"  siècle  :  les  lexicogra- 
phes pourront  3'  trouver  plusieurs  mots  nou- 
veaux ^  Le  tome  LXXII  de  la  Patrologie, 
col.  803  et  suiv,,  reproduit 
ce  commentaire  donné  par  iMaï.J 


Luculentlu!; 
loul-ëtro  de 
In  6n  du  vc 
siècle,  ou  du 
corameotP- 
mcat  du  Ti^. 


es  fragments  de 


1  Miraeus,  in  Àiictuario,  num.  178.  Vossius,  de 
kisloricis  latinis,  cap.  xxv.  l'ossevin,in  Apparaiu, 
pag.  473,  loin.  I. 

-  Jouas,  i)i  Vita  Columb.,  num.  37  et  61. 

3  Tom.  Il  Àct.  Ont  S.  Bened.,  pas.  111. 

*  Cumque nihil  profecisset  .statuil  Clotarius  rex 
ut  sijnodati  examinalione  probarettir,  non  am- 
bigens  de  beati  Eustasii  aucloritate  et  doctrina, 
qtiod  oiniies  adcersanles  sanctœ  r-egulœ  pruden- 
tia  et  facunditale  superarel.  Jouas,  in  Vita  Eus- 
tas.,  num.  9.  Comperendinatim  Agrestino  talia 


loquenti  Eustasius  sagax,  ut  eral  virtulis,  pa- 
tientiœ  et  scientiœ  compertus,  respondit.  Ibid., 
num.  11. 

s  Pag   214  et  224. 

^  Il  Fidelibus  suis  corpus  et  sanguinem  suum 
dat  comedendum  ipseqtii  dici<  :  Ego  sum  paiiisvi- 
viis,  etc.:  et  plup  loin  :  Iturus  ad  passionein  ditscipu- 
lis  ait:  Hoc  est  corpus  meum  quod  pro  cobis  tra- 
detur. 

'  Voyez  Annales  de  Philosophie ,  tom.  XXIV, 
pas.  310. 


63  i 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


CHAPITRE  LV. 

Marc  [612],  Sébastien  et  Simplice,  disciples  de  saint  Benoît,  Eatrope 

évêqnc  de  Valence,  et  Maxime  évêque  de  Sarragosse  [cori- 

vains  latins  dn  commencement  du  VIP  siècle]- 


M.rc,  àh-  1.  Entre  les  disciples  de  Paint  Benoît,  qui 
i^m\t'  "sts  ont  laisse  quelques  uionuments  de  leur  sa- 
Ton-,  Pierre  Diacre  met  un  nomme  Marc, 
moine  du  Mont-Cassin ',  qu'il  dit  avoir  c'té 
très-inslrnit  dans  les  divines  1-trilures.  Les 
éloges  qu'il  donne  à  ses  vcrssui)posent  qu'il 
avait  aussi  cultivé  les  belles-lettres.  I!  ne  cite 
que  ceux  qu'il  avait  faits  ;\  la  louange  de 
saint  Benoit,  et  où  il  faisait  encore  la  des- 
cription de  la  montagne  de  Giissin  et  du  mo- 
nastère qu'il  y  avait  Ijâli.  Ces  vers  sont  élé- 
giaques.  Sigebert  dit'  que  Marc  en  avait  pris 
la  matière  dans  la  vie  de  saint  Benoit  par 
saint  Grégoire  le  Grand,  mais  qu'il  y  avait 
ajouté  quelque  chose  de  lui-même.  Ils  sont 
cités  par  Paul  'Diacre,  par  Aldvenalde  et 
par  saint  Pierre  Damien.  On  les  trouve  im- 
primésdans  le  Recueil  des  Poésies  de  Prosper 
Martinen<.'us  h  Rome,  do90,  et  dans  le  pi'e- 
mier  tome  des  Actes  de  l'Ordie  de  saint  Be- 
noit. INIarc  ue  s'est  pas  oublié  dans  ses  vers; 
mais  il  le  fait  avec  beaucoup  d'humilité,  di- 
sant' qu'étant  parti  pour  le  Mont-Cassiu  ac- 
cablé du  poids  de  ses  péchés,  il  se  sentit  dé- 
chargé aussitôt  qu'il  y  fut  arrivé  ;  et  qu'il 
espère  jouir  unjoiir  de  la  vie  bienheureuse, 
avec  le  secours  des  prières  de  saint  Benoît. 
Les  vers  où  il  parle  ainsi  sont,  comme  ou 
vient  de  le  dire,  ('Ic'-giaques,  dilléreuls  par 
conséquent  de  ceux  que  Sigebert  avait  vus, 
et  qui  étaient  héroïques  ou  hexamètres. 
Ceux-ci  se  trouvent  également  dans  le  troi- 
sième tome  de  la  Collection  de  Marlinengus, 


S<liut!eii 
dlfclpl«  do 
S.  Benoît. 
Sot  tcriu. 


imprimée  ù  Rome,  en  l.">90,  par  les  soins 
d'Arnold  AVion  [et  dans  le  tome  LXX.X  de  la 
Patrologie  latine,  avec  une  notice  par  Fa- 
bricius,  colonne  183  et  suiv.].  On  attribue  ù 
Marc  des  sentences  et  autres  opuscules  im- 
piiraés  à  Hagueuau  en  i.^31  ,  et  à  Paris  en 
15G3  ;  mais  on  n'a  point  de  preuves  qu'ils 
soient  de  lui  :  on  les  croit  plutôt  d'uu  soli- 
taire, nommé  Marc,  dont  il  est  parh-  dans' 
Photius,  et  dont  nous  parlerons  dans  le  cha- 
pitre suivant. 

2.  Sébastien,  autre  disciple  de  saint  Be- 
noit", écrivit  la  vie  d'un  savant  nommé  JJie- 
ràmc,  ditl'érent,  comme  l'on  croit,  du  célèbre 
saint  Jérôme,  l'un  des  docteurs  de  l'Église. 
Il  ne  faut  donc  pas  lui  attiibiier  une  Vie  de 
ce  Père  qui  a  [laru  sans  nom  d'auteur,  et 
qui,  au  rapport ''de  Baronius,  est  remplie  de 
faussetés  et  de  mensonges. 

3.  Après  la  mort  de  saint  Benoit,  Cons-      suis 
tantin,  l'un  de  ses  disciples,  fut  choisi  pour  £Ï"'d.''''* 
abbé  de  Mont-Cassin.  Il  fut  un  des  quatre  '"'"' 
que  saint  Grégoire  consulta  comme  témoin 

de  la  vie  et  des  miracles  de  saint  Benoit.  On 
croit'  qu'il  gouverna  le  monastère  do  Cassiu 
jusques  vers  l'an  .j(JO.  Il  eut  pour  successeur 
Simplice,  que  saint  Grégoire  cite  aussi  dans 
ses  Dialogues  comme  témoin  des  faits  mira- 
culcu::  de  saint  Benoît.  Pierre  Diacre  dit  que 
Simplice  fit  connaître  la  Règle  de  ce  patriar- 
che'dans  tous  les  pays,  et  qu'il  composa 
quelques  vers  à  sa  louange.  Ils  sont  au  nom- 
bre de  neuf;  le  huitième  se  lit  ditrérciument 


'  Marcus  palris  Dencdicii  disripnlus,  rir  egre- 
gius  et  in  Srriiitnris  opprime  crudilns,  de  adven- 
tu  sancli  ISenedicti  ad  Cassiiinm  ,  de  situ  loci, 
construrtiniicqiie  ciriwbii  etegaïUissimos  versus 
composuil.  PcU-ns  Uiacon.,  De  Viris  illust.,  naiK  m. 

»  SigeljiTl.,  De  Scripl.  Eccles.,  c-qi.  xxxiii. 

»  l'auluo  Diacoii.,  lib.  1  De  geslin,  cap.  xxvi.  Alil- 
vpiiald,  lili.  I,  cap.  iv  De  Sliraculis  S.  Deiiedicti. 
Itaïuiaiiiis,  Serin.  H  in  ]igitiii  S.  Hcncdtcli. 

*  Bue  ego  cuiii  sc(  ^'n^Hl  depressus  fasce  subis- 
se m, 


Depositum  sensi  poiidtis  ahcsic  mihi. 
Credo  quod  ri  felix  vila  fiuar  insuper  illa, 
Orns  pro  Marco  si,   Bénédicte,  luo.  Tom.  X  AcI. 
Ord.  S.  Drncd.,  pa.ii.  2G. 

»  l'Iioliiif,  cod.  ion,  pap.  520. 

«  l'i'tnis  Diai'oiiu!!,  De  Viris  illust..  cnp.  iv. 

'  Ibiil.,  cap.  IV. 

"  Union.,  ad  an.  420,  nuiii.  <0.  Vidr.  Vossium  de 
hisldrici.t  Itilinis  in  Sebastiauo. 

»  .MaUillou.,  lib.  VI  Annal.,  ynp.  113, 


.iilprtno, 

Jp  V.l- 

lO   Es- 

Ses 


[vil-  SIÈCLE.]        GHAPITIIE  LV.  —  MWW., 

on  divers  manuscrils.  Les  uns  porleiil  .}fa- 
gistri  lati-m  ojms prop(ig(ivi(  in  rmincs  ;  ce  (]ui 
donnerait  lieu  Je  croire  que  la  lU';;lc  de  saint 
Benoit  n'tMait  connue  nulle  part  avant  que 
Siniplice  la  lit  connaître.  D'autres,  au  lieu  de 
latcns,  lisent  ia/i;  ce  qui  ne  seniit  pas  con- 
traire au  sentiment  commun  que  celte  Règle 
fut  coinuic  en  France  du  viv;int  même  de 
saint  Benoit.  Mais  en  lisant  lalens,  coiuuu' la 
mesure  du  vers  le  demande,  on  peut  dire 
que  cette  Règle,  quoique  connue  déjà  eu  plu- 
sieurs provinces,  cMait  incoinuie  dans  un  Lien 
plus  grand   nombre  où  Siruplice  la   rendit 
publique,  l'aus  la  lettre '  quel'abhé  île  Fondi 
lui  écrivit  en  lui  envoyant  deux  de  ses  reli- 
gieux pour  apprendre  à  Gassin  même  l'ob- 
servation de  celle  règle,  cet  abbé  lui  marque 
qu'elle  était  dcja  leçue  dans  la  Camiianie, 
dans  la  I,i;^urie  et  dans  plusieurs  autres  pro- 
vinces d'Italie.  Les  vers  de  Simplice  se  trou- 
vent  dans  les  Disquisitions   monnsfirjiics  de 
Heficn,  et  dans  la  Cuncorde  du  saint  Benoit* 
d'Aniane. 

4.  On  lit  dans  l'Appendice  de  la  même 
Concorde  une  Lettre  d'Kutrnpe,   évoque  de 
Valence,  A  Pierre,  évèque  d'iUirbica'.  Il  en 
avait  écrit  une  seconde  à  Licinien,  évèque 
de  Cartlmgène,  dans  laquelle  il  lui  deman- 
dait pourquoi  l'on  oignait  de  cbrêmc  les  en- 
fants   baptisés.    Celle-ci ,    qui  passait  pour 
très-utile,  est  perdue  ;  mais  nous  avons  la 
première,  qui  a  pour  titre  :  De  l'étroite  ob- 
servance des  moines  et  de  la  ruine  des  monas- 
tèi-es.  Futrope  y  fait  voir  avec  beaucoup  de 
force  et  de  solidité  que  les  supérieurs  des 
monastères  ne  doivent  point  garder  le  si- 
lence sur  les  fautes  de  leurs  religieux  ;  mais 
les  reprendre    et   les  corriger,  dussent-ils 
passer  pour  ti'op   sévères  dans  l'esprit  de 
plusieurs.    Il    se   fonde  non-seulement   sur 
l'autorité  des  divines  Écritures  dont  il  rap- 
porte plusieurs  passages,  mais  aussi  sur  la 
conduite  que  les  SS.  Pères  ont  tenue  à  cet 
égard.  Ils  n'ont  rien  omis  pour  maintenir 
l'observation  des  règles  dans  leur  pureté  et 
dans  toute  leur  étendue.  «  S'il  était  permis 
de  se  relâcher  sur  quelques  articles  de  ces 
règles,  s'il  était  défendu  de  corriger  et  de  i-e- 
prendre  ceux  qui  y  contreviennent,  les  mé- 
chants, qui  n'auraient  plus  à  craindre  les 
cliâtiments,  s'abandonneraient  aux  vices,  et 
ne  suivraient  plus  d'autres  lois    que  leurs 


SÉBASTIEN,  SIMPLICE,  ETC.  fi33 

passions.  C'est  pour  empêcher  ces  désordres 
que  Dieu  a  mis  eu  main  aux  princes  dans 
l'Ktat,  aux  évêques  et  autres  pasteurs  dans 
l'Fglise,  et  aux  supériems  dans  les  monas- 
tères, une  autorit(!  l(''gitim(;  pour  réprimer 
les  crimes  et  punir  les  coupables.  Si  nous 
voulons  abuser  des  biens  temporels  que  nous 
ne  tenons  que  de  la  libéralité  de  Dieu,  et 
suivre  notre  propre  volonté,  ne  contreve- 
nons-nous pas  à  ses  préceptes,  qui  nous  or- 
donnent d'user  de  ces  biens  avec  modéra- 
tion ?  Quelle  dilférence  y  aura-t-il  entre  nous 
et  les  gentils,  qui  ne  suivent  point  d'autre 
règle  que  celle  de  leui's  désirs?  A  quoi  nous 
servira  de  lire  tous  les  jouis  les  Vies  des 
Sainls,si,  en  faisant  profession  du  même 
genre  de  vie  qu'eux,  nous  faisons  dilliculté 
d'en  remplir  les  devoirs?  De  quel  mérite 
nous  sera-t-il  auprès  de  Dieu  d'avoir  professé 
une  religion  dont  nous  n'aurons  eu  que  le 
nom  et  les  dehors,  sans  en  avoir  pratiqué 
saintement  les  œuvres?  Saint  Paul  ne  dil-il 
pas  que  nous  devons  faiie  le  bien  et  aux 
yeux  de  Dieu  et  devant  les  hommes  ?  » 

Eutrope  n'était  encore  qu'abbé,  lorsqu'il 
écrivait  cette  lettre  ;  et  il  paiatt  que  l'évoque 
Pierre  lui  avait  écrit  de  recevoir  plusieuis 
personnes  dans  son  monastère.  Il  répondit 
qu'il  y  était  tout  disposé,  mais  qu'il  s'inquié- 
tait moins  du  nombre  des  sujets  qui  se  pré- 
sentaient que  de  leurs  bonnes  qualités  ;  parce 
que  Dieu  ne  se   plaît  point  dans  le  grand 
nombre  des  mauvais  serviteurs,  et  qui  ne  le 
sont  que  de  nom,  mais  dans  ceux  qui  vivent 
saintement  ;  qu'ainsi  il  lui  parait  plus  salu- 
taire de  marcher  avec  peu  de  monde  dans  la 
voie  du  salut,  que  de  s'en  éloigner  avec  un 
grand  nombre  de  personnes.  «  Nous  nous  eu 
tenons,  dit-il,  aux  règles  que  les  fondateurs 
et  les  pères  de  ce  monastère  nous  ont  trans- 
mises :  nous  n'allons  point  au  delà  ;   mais 
aussi  nous  n'en  voulons  rien  rabattre.  Ceux 
qui  nous  accusent  de  trop    de  sévérité   et 
d'être  cause  que  quelques-uns  sortent  de  ce 
monastère,  n'en  connaissent  pas  la   disci- 
pline, et  dès  lors  les  reproches  qu'ils  nous 
font  ne  tombent  point  sur  nous,  mais  sur 
eux-mêmes,  puisque  ce  sont  des  preuves  de 
leur  ignorance.  Au  reste,  si  nous  voulions 
être  sensibles  au  blâme  des  hommes,  nous 
ne  forions  pas  ce  qui  est  agréable  à  Dieu.  » 
Eutrope  finit  en  disant  à  l'évêque  Pierre  , 


<  .Mubillon.,  lih.  M,  .in nal.,  pag.  143. 
'  Concord.  Regul,  pag.  4,  part.  2. 


3  Isiiioni?  Hispal.,  De  Scripl.  Eccles.,  cap.  xxxu. 
Concord.  regul.  in  appendice,  pag.  82. 


G36 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


qu'il  s'était  cru  obligé  de  lui  écrire  dans  ces 
termes,  afin  de  lui  appreiuii'e  qu'i!  ne  faisait 
rien  dans  son  monastère  qui  ne  fût  prescrit 
par  la  règle  que  l'on  y  observait  ;  et  que  ceux 
qui  n'en  pouvaient  supporter  l'austérité,  de- 
vaient s'en  prendre  non  à  la  règle  ,  mais  l'i 
leur  lâcheté  et  à  leur  tiédeur. 

[Il  existe  encore  une  lettre  d'Eutrope  à 
Pierre,  ce  même  évêquc  d'Iturhica  ;  elle  est 
sur  les  huit  vices,  c'est-à-dire  sur  la  gour- 
mandise, la  fornication,  l'avarice,  la  colère, 
l'anxiété  ou  l'ennui  du  cœur,  la  vaine  gloire 
et  l'orgueil.  Cette  lettre  se  trouve  au  tome 
VIII  de  la  Bibliothèque  des  Pères  ;  elle  est  re- 


produite au  tome  LXXX  de  la  Palrologie  la- 
tine avec  une  notice  historique  siu-  Eutrope, 
et  avec  l'autre  lettre  à  Pierre,  col.  1  et  suiv.] 
o.  Quoique  Maxime  de  Sarragosse  eut  com- 
posé plusieurs  ouvrages  tant  en  prose  qu'en  *""« 
vers,  il  n'en  est  venu  aucun  jusqu'à  nous. 
Saint  Isidore  '  ne  parle  que  de  l'abrégé  his- 
torique que  Maxime  avait  fuit  de  ce  qui  s'é- 
tait passé  en  Espagne  dans  le  temps  que  les 
Goths  l'occupaient.  Il  ajoute  :  «  On  dit  qu'il 
a  écrit  plusieurs  autres  choses  que  je  n'ai 
pas  lues.  »  Maxime  assista,  en  3i)"J,  au  con- 
cile de  Barcelone  ;  en  610,  à  celui  de  Tolède; 
en  Gl't,  à  celui  d'Hgara. 


6^iqil«  du 

Oise. 


CHAPITRE   LVI. 
Marc  l'Ermite  [époque  incertaine  d'après  D.  Ceillier,  an  commencement  du 

V  siècle  d'après  d'antres]. 

[Écrivain  grec] 


Il  y  a  plu 

sÎ6ursSol''ill 


l.  Pallade  *  el  Sozomèue  font  mention 
Mare""""'^"  '^'""  ermitc  nommé  Marc,  qu'ils  disent  avoir 
ét(!  l'un  des  plus  célèbres  parmi  les  solitai- 
res d'l'>gypte  dans  le  iv'  siècle,  et  avoir  vécu 
au  moins  cent  ans,  puisqu'il  avait  atteint 
presque  cet  âge  lorsque  Pallade  le  vil  en 
390.  C'est  ce  Marc  que  l'on  appelle  des  Cel- 
lules. Nicéphore  *  en  parle  aussi  ;  mais  il  le 
distingue  d'un  autre  Marc,  à  qui  il  attribue* 
divers  ouvi-ages,  et  qu'il  dit  avoir  vécu  sous 
Tbéodose  le  Jeune  ,  et  été  instruit  par  sniiit 
Jean  Cbrysostome  en  l'une  et  l'autre  philo- 
sophie. Il  est  pailé  d'un  troisième  Marc  dans 
le  recueil'  grec  des  Paroles  des  Pères,  don- 
né par  M.  Cotclier  ;  mais  il  y  est  qualifié  d'ab- 
bé d'Egypte,  et  non  pas  ermite.  On  en  met" 
un  quatrième  sous  l'empire  de  Léon  VI,  au 
commencement  du  x°  siècle;  el  il  serait  aisé 
d'en  nommer  encoi'e  d'autres.  La  dilHculté 
est  de  savoir  lequel  d'entre  eux  est  auteur 
des  huit  traités  de  morale  cités  par  Photius, 
et  que  nous  avons  dans  le  cinquième  tome 
de  la  /iiôliol/ièr/iie  des  Pères  sous  le  nom  de 
Marc  TErmite.  Pallade  ne  donne  aucun  éciit 
à  Marc  des  Cellules.  Ou  n'eu  donne  point 


non  plus  à  Marc  abbé  d'Egypte ,  dans  le  re- 
cueil des  Paroles  des  anciens  Pères  ,  ni  ail- 
leurs. Ce  Marc,  qui  a  vécu  sous  le  règne  de 
Léon  VI,  ne  peut  être  regardé  comme  auteur 
des  traités  dont  nous  parlons,  puisqu'ils  sont 
cités  par  Photius,  qui  écrivait  plus  de  cin- 
quante ans  auparavant ,  et  qu'il  en  parle 
comme  ('■faut  d'un  écrivain  plus  am  ien  que 
lui.  Nicéphore  Caliste,  n'ayant  écrit  ipie  dans 
le  xiV-'  siècle  ,  n'est  pas  un  garant  bien  sûr 
de  ce  qui  s'est  passé  au  comuiencenient  du 
\'.  Son  opinion  es!  néanmoins  la  plus  vi'ai- 
semblable  et  la  plus  suivie.  L'ahbé  Dorothée, 
qui  écrivait  dans  le  vu' ,  rajjporte  '  dans  ses 
instructions  quelques  paroles  de  l'abbé  .Marc; 
mais  il  ne  dit  point  qu'il  ait  composé  des 
ouvrages.  Rien  donc  d'assuré  sur  l'auteur 
de  ces  huit  traités  de  morale,  sinon  qu'ils 
sont  de  Marc  l'Ermite,  et  que  ce  solitaire  a 
vécu  plusieurs  aniiégs  avant  (jim  Plioliiis 
composât  sa  Bibliothèque,  c'est-à-dire  avant 
l'an  808'.  Quel  qu'il  soit,  il  n'est  point  exact 
dans  ses  expressions,  ni  dans  sa  doctrine. 
On  n'a  point  suivi  dans  l'impression  de  ses 
oiiviages  l'ordre  marqué  par  Photius;  mais 


'  Isid.,  De  Scriiil.  Eccles.,  aiii.  .\x.\iii. 
»  l'allaù.,  in  Hisloria  Lausiaca,  cap.  xx.  Sozo- 
lucii.,  li!>.  VI.  Uinl.,  c.ip.  x.\ix. 
'  Niccphorus,  lib.  .\l  Ilislur.,  cap.  xx.w. 

*  Ifleiu,  Jil).  .\IV,  rap.  Liv. 

'  Toiii.  I  Monumenl.  Cotelerii,  pag.  571. 

•  Bellaruiiu.,  De  Script.  Eccles.,  pag.  273. 
Dorolheus,  toiii.  V  BibliotJi.  Pat.,  pag.  905. 


*  DalUiasar  .Marie  Remuniliiil,  qui  n  piililit'  ilcnx 
lraiti''s  im'dils  di-  .Miiir,  le  fait  vivre  nu  \"»  sii-clc. 
Fcssi!li;r,  Iiistit.  Patntl.,  toiii.  Il,  \m\t.  (i?n,  Ip  plai>e 
:iu  coiiuuciRcinenl  du  v»  sii'rlc,  f l le  fait  Iroisiruie 
disciple  de  saint  Joau  ClirysdSlonip.  C.allaud  avait 
«*(é  iiareilloiiionl  de  ce  sculiiiK-Ml  dnns  lp!>  l'rolARo- 
uièues  du  tome  VIII  di>  sa  UIMinllièque.  (A'éfl- 
teur.) 


[vil'  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  LVI.  —  MAU<:,  [/HUMITE. 


(i;t- 


il  aviiiii-  Ini-m^'inc  qu'ils  étaient  placés  dilTé- 
rcmmciil  d;ms  divers  manuscrits. 
■  ■"roï-fe'-  -•  I-e  proiuicr,  selon  lui,  était  iiililiilé  : /)t' 
,  ,.d"',!i  '"  f-f''  ^liritnelle.  Il  porto  le  môme  titre  dans 
i.u.ii'o!"  ''"  les  iniprinic's,  où  il  est  aussi  intilulé  :  Du  Pa- 
radis. Pliotiiis  en  parle  comme  d'un  onvraçrc 
utile  à  cenx  qui  se  proposent  de  vivre  dans 
la  piét('  '.  Marc  y  fait  voir  que  ceux-là  sont 
dans  l'erreur  ,  qui  s'iniapineiit  pouvoir  être 
sauvés  par  les  seules  œuvres,  sans  la  foi  ;  que 
non-seiilouicnt  la  toi  est  nécessaire  au  salut, 
mais  que  l'on  ne  peut  l'acquérir  par  des  œu- 
vres tailcs  sans  le  secours  de  la  grâce.  Il 
avance  sur  cela  deux  cents  maximes,  qui  sont 
comme  autant  de  iiriucipes,  dont  voici  les 
Num.  I.  pjjjg  lemarquables.  «  Nous  savons  cerlaine- 
ment  que  Pieu  est  l'auteur  de  tout  bien  ;  qu'il 
est  le  principe,  le  milieu  ■  et  la  fin  ;  qu'il  nous 
est  impossible  do  faire  quelque  chose  de  bon, 
ou  de  croire,  si  ce  n'est  par  Jésus-Christ  et 

■•  par  le  Saint-Esprit.  Tout  bien  nous  est  don- 

né de  Dieu  oratnitement.  Invoquez  donc  le 
Seigneur,  alin  qu'il  ouvre  les  yeux  de  votre 
cœur ,  que  vous  voyiez  et  que  vous  conce- 
viez l'utilité  de  la  prière  et  de  la  lecture  de 

t.  l'Ecriture  sainte.  Cet  endroit  est  bien  con- 

traire à  ce  qu'il  dit  dans  la  préface,  q*  nous 
avons  '  naturellement  cette  promptitude  d'es- 
prit que  Dieu  demande  de  nous,  et  que  Dieu 
nous  donne  sa  grâce  quand  nous  avons  cru, 
cl  lorsque  nous  voulons  rendre  quelque  ver- 
tu parfaite.  Celui  qui  a  reçu  le  don  de  Dieu, 
compatit  à  ceux  qui  ne  l'ont  pas  reçu,  et,  par 
ce  mouvement  de  compassion,  il  conserve  la 
grâce  qu'il  a  reçue  de  Dieu  ;  au  lieu  que  ce- 

c.  lui  qui  en  tire  vanité  ,  en  est  privé.  Gardez- 

vous  bien  de  vous  mettre  sous  la  discipline 
d'un  homme  vain ,  de  peur  qu'iu  lieu  de 

8.  l'humilité  ,  vous  n'appreniez   l'orgueil.  Ne 

vous  élevez  pas  des  larmes  que  vous  versez 
pendant  la  prière  :  vous  en  êtes  redevable  à 

i-i-  Jésus-Christ,  qui  a  toucbé  votre  cœur.  Dans 

le  temps  que  le  souvenir  de  Dieu  se  pré- 
sente à  votre  esprit,  ne  le  laissez  point  écou- 
ler sans  le  prier,  afin  que,  lorsque  vous  l'au- 
rez oublié  ,  il  vous  fasse  ressouvenir  de  lui. 

2'-  La  perfection  de  la  loi  est  cacliéc  dans  la 

2'-  croix  de  Jésus-Christ.  Xe  reprenez  point  ce- 


lui qui  se  retire  du  péc.hé  et  qui  rentre  dans 
le  bon  chemin.  Dieu  est  le  cfunrni'ncement 
et  l'auteur  de  toute  vertu  ,  comme  le  soleil 
l'est  de  la  lumière  quotidienne.  Ainsi,  lors-      Num.  so. 
que  vous  faites  quelque  action  vertueuse, 
souvenez-vous  de  celui  qui  a  dit  :  Sans  moi        *">■ 
mtits  ne  sauriez   rien  faire.  Que   vos  pensées        *'• 
et  vos  actions  aient  toujours  une  fin  agréable 
ù  Dieu.  Celui  qui  entreprend  un  voyage  sans       "'• 
savoir  où  il  va,  n'avance  de  rien.  Ne  vous 
imaginez  pas  être  en  possession  de  la  ver- 
tu, si  vous  êtes  exempt  d'afTlictiou.  On  n'est       '^'^^ 
point  éprouvé  par  le  repos  et  la  tranquil- 
lili'.   Quelque   grande  que  soit  l'ignominie        "■ 
que   l'on  soull're   pour  la  vérité  de   Jésus- 
Christ  ,1a  gloire  dont  (!lle  sera  récompensée 
la  surpassera  au  centuple. 

3.  «  Lfi  négligence  vient  de  l'amour  et  de        i:» 
la  recherche  de  la  volupté,  et  l'oubli  des 
devoirs  prend  sa  source  daus  la  négligence  : 
car  Dieu  adonné  à  tous  la  connaissance  des 
choses  utiles.  Comme  le  défaut  de  l'art  de        »»■ 
bien  dire  ne  nuit  point  à  un  homme  de  pié- 
té, l'éloquence  no  nuit  pas  i\  celui  qui  est 
humble.  Ne  dites  point  :  Je  ne  sais  ce  que        ^  ; 
je  dois  faire  ,  et  dès  lors  je  suis  exempt  de 
faute,  si  je  ne  le  fais  pas.  Car  si  vous  faites 
tout  ce  que  vous  savez  être  bon,  la  connais- 
sance des  autres  choses  qui  sont  bonnes  vous 
sera  donnée  ,  et  vous  counaitrez  l'un  par 
l'autre.  En  lisant  les  paroles  de  la  sainte        st. 
Écriture,  mettez  en  pratique  ce  qu'elles  pres- 
crivent ,  et  ne  vous  contentez  pas  de  les  ré- 
citer, eu  tirant  AMnité  de  cette  science  exté- 
rieure. Soyez  toujours  attentif  à  vos  pensées,        .ji. 
parce  qu'il  n'y  eu  a  point  qui  ne  soient  con- 
nues de  Dieu  ;  lorsque  vous  apercevrez  qu'el- 
les vous  promettent  de  la  gloire  devant  les 
hommes  ,  sachez  qu'elles  vous  préparent  de 
l'ignominie.  On  avance  par  degrés  dans  le       '-• 
mal  comme  daus  le  bien,  et  un  acte  de  ver- 
tu excite  à  en  faire  uu  plus  considérable.        '- 
Quand  nos  péchés  sont  légers ,   le  démon        »«• 
nous  les  représente  comme  étant  encore  plus 
petits  ;  sans  cela  il  ne  viendrait  pas  à  bout 
de  nous  en  faire  commettre  de  plus  grands. 
Lorsque  vous  entendez  dire  à  Jésus  Christ 
dans  l'Évauiïile  :   Celui-là  n'est  pas  digne  de    i-ue.xiv,33. 


i  Pmmus  titulum  prœfert,  de  lege  spiritali,  uti- 
lisque  existit  Us  qui  religiosam  vitam  agere  ag- 
gressi  sunl.  PlioUus,  cod.  iOO,  pag.  519. 

'  Primum  cerlo  scimus  Dcum  loliiis  boni  esse 
auctorem,  ctim  principium,  tum  médium,  lum  fi- 
nein,  pag.  108G. 


â  Jum  di.rimus  hominem  a  valura  habere 
promptitudinem  animi  quam  Dfus  requirit;  ut 
auWm  mens  cjierceatur,  taborcm  perferat,  aul 
opus  aliquod  perficiat,  gratia  Domini  largiiur 
volenii  et  credenti,  pag.  1086. 


G38 


niSTOlRE  GÉNÉRALE  DES 


moi,  qui  ne  renonce  pas  à  tous  ses  biens,  sacliez 
que  oela  ne  s'entend  pas  seulement  du  re- 
noncement aux  liuliesses,  mais  aussi  de  celui 
nqe:.  110.  ^  toutes  les  passions  et  actions  mauvaises.  La 
prière  n'est  point  pure,  quand  elle  n'est  pas 

'"■  dépouillée  du  souvenir  des  injures.  Quelque 
petit  que  soit  voire  ]ii'clié,ne  le  laissez  point 

'-'•         sans  retlaccr.  Il  est  plus  expédient  de  prier 

'■"•  pour  le  prochain,  que  de  le  reprendre  à  cha- 
que action. 

'"•  4.   ((  Ne  dites  point  :  Ce  que  je  ne  voulais 

pas  m'est  arrivé  ;  il  est  vraisemblable  (pie, 
si  vous  ne  le  vouliez  point ,  vous  en  aimiez 

'•'•  du  moins  la  cause.  Ne  vous  imaginez  point 
que  les  tribulations.et  les  afUlclions  qui  ar- 
rivent à  un  homme,  soient  une  suite  de  ses 
péchés  ,  parce  qu'elles  sont  communes  aux 
justes  et  aux  impics  :  n'cst-il  pas  éorit ,  que 
,.,'il  '"■"°''  ceux  qui  veulent  vivre  avec  piété  en  Jésus-C/irist 
Nom.  192.  se)'ont /K-vséciités?  Lu  paix  de  l'homme  consiste 
à  être  délivré  de  ses  aflections  mauvaises; 
mais  cela  n'arrive  ,  selon  l'Apùlre  ,  que  j.ar 

'''•  la  coopération  du  Saint-Esprit.  On  doit  tou- 
jouis  s'employer  île  toutes  ses  forces  a  faire 
le  bien  ;  et  lorsqu'on  en  fait  un  considéra- 
ble, il  ne  faut  pas  le  quitter  pour  en  faire 

Luc.  1,62  „jj  moindre,  parce  que  quiconque  ayant  mis 
la  mnin  à  la  clwrrue  rcqarde  dc.-ricre  soi,  n'est 
point  propre  au  j-oyaume  de  Dieu.  »  Dans  la 
préface  qui  est  à  la  tête  de  ce  traité ,  Marc 
exprime  *  en  ces  termes  la  manière  dont  il 
croyait  que  la  gi'âce  auit  dans  l'homme  : 
«De  même  que  le  fer,  quand  il  scie,  ou  qu'il 
coupe,  ou  qu'il  laboure,  ou  qu'il  plante  ,  ne 
fait  que  se  prêter  à  la  main  qui  l'agite,  et 
qu'il  y  a  un  priucipe  distingué  de  lui  qui  le 
remue  et  le  retire  à  soi,  et  qui,  quand  il  est 
émoussé  ,  le  rétablit  en  le  mettant  au  feu  ; 
de  même  aussi ,  quoique  l'homme  travaille 
et  se  fatigue  en  faisant  le  bien  ,  c'est  Dieu 
cependant  qui  opère  en  lui  secrètement ,  et 
qui,  lorsque  son  cœur  se  dégoûte  et  se  lasse, 


'  Qutmadmodum  itaque  ferrum.  dum  secal, 
scindil,  aral,  plantai ,  ipsum  quidem  qnatenus 
impellilur,  aliquid  prœhel,  alius  tamca  tsl  qui 
movel  et  agitai  ferrum,  et  uhi  fucrit  altri- 
tum,  igni  mandat  (l  instaurât:  hune  in  modum, 
licel  exercealur  el  lahorel  opcrans  quod  bonum 
est.  Dominas  lawrn  clam  in  ipso  operalur  :  el 
dum  labore  faligalur  cl  allrrilur,  ille  consola- 
tur  alquc  recréai  animum,  vl  ail Prophela :  Niini 
ploriabilur  scciiris  absquc  scindi'nlo. ,  aiit  in  al- 
liiiii  loll(;liir  s«rra  fiuK  tralieiite  ?...  Yerumlamcn 
cor  assimilavimus  ferro  muUam  ob  duriliem  et 
rerum  impcriliam.  jiag.  1080. 

'   Nunquam    igilur    exixtinies    le   prœvenisse 


AUTEL'RS  ECCLÉSIASTIQL'ES. 

l'encourage  et  le  renouvelle  ,  selon  ce  que 
dit  le  Prophète  :  La  cognée  i/cul-elle  se  glo- 
rifier sans  celui  qui  coupe  ,  et  la  scie  peut -elle 
se  vanter  sans  celui  qui  la  remue  ?  Nous  com- 
parons le  cœur  de  l'homme  au  fer  ,  ;\  cause 
de  son  insensibilité  el  de  son  extrême  din-e- 
té.  »  Il  était  besoin  qu'il  fit  lui-même  cette 
remarque  sur  la  comparaison  dont  il  se  sert, 
afin  d'en  ôter  l'odieux,  et  que  l'on  ne  crût 
pas  qu'il  regardât  l'homme  dans  la  bonne 
action  comme  un  instrument  purement  pas- 
sif. En  etfet  il  ne  l'emploie  que  pour  mon- 
trer' que  ce  n'est  point  l'homme  qui  pré- 
vient Dieu  ;  mais  que  c'est  Dieu  qui  le  pré- 
vient, et  ojjère  en  lui  le  vouloir  el  le  jtnrfaire,  „.  t.  '"''"'''■ 
selon  qu'il  lui  plaît.  Il  ne  dit  pas  (jue  l'homme 
ne  soit  à  l'égard  de  la  grâce  qu'un  pur  ins- 
trument ;  au  contraire ,  il  dit  que  l'homme 
opère,  qu'il  ti"a vaille,  qu'il  se  fatigue,  el  que, 
quand  son  âme  se  dégru'ite  ,  Dieu  l'encou- 
lage.  11  corn;  are  ailleurs  '  l'opération  de  la 
grâce  à  celle  de  la  pluie,  qui  s'accommode  à 
la  qualité  des  plantes  ,  et  qiii  fournit  un  suc 
doux  a  ■jcUes  qui  doivent  produir.-  des  fruits 
doux,  et  un  suc  amer  â  celles  qui  uni  de  l'a- 
mertume ;  parce  que  la  giàee,  descendant 
conliuuelb'iuent,  et  versant  des  inlluences 
dans  le  cœur  des  croyants  ,  leur  donne  la 
force  de  produire  des  actes  convenables  à 
leur  état.  Elle  devient  une  nourriture  .'i  ce- 
lui qui  a  faim,  un  breuvage  délicieux  â  ce- 
lui qui  a  soif,  un  vêlement  à  celui  qui  a  froid, 
un  repos  à  celui  qui  est  fatigué  ;  elle  est 
l'espérance  de  celui  qui  prie,  et  la  consola- 
lion  des  affligés. 

3.  11  continue  dans  le  second  traité,  qui,     Ai.i«Tr.i- 
commc  le  premier,  a  pour  litre  :  De  la  Loi  '^^i^J^^^ 
spirituelle,  à  montrer  que  l'homme  n'est  pas  •"*•  '""• 
justifié  par  les  œuvres  seules.  C'est  ce  qu'il 
établit  en  deux  cent  onze  propositions.  Il  y 
en  a  plusieurs  qui,  prises  à  la  lettre,  semblent 
dire  que  le  royaume  du  ciel  ne  nous  est  point 

Deum  in  virlule,  ex  ejus  senlentia  quidicil: 
'I  Ipse  est  qui  operalur  iu  vobis  vellc  el  pcrflcere 
pro  bùua  voluntate.  »  Ibid. 

'  Quemadnwdum  pluvia  terrœ  infusa,  accom- 
modam  quahtatem  planlis  suppedital.  dulceni 
quidem  dulcibus,  acerbam  aulem  acerbis  :  sic 
quoque  gralia  in  corda  fidclium  assidue  dcscen- 
dens  ne  influens,  convenienlcs  virlulibus  aoliones 
targitur :  esuricuti  propler  Chrislum  i\b\is  fil, 
silienlipolus  delicaliisimvs.algrnti  indumeiitum. 
laboranU  requies,  prtcanti  cordis  spcs,  tt  lugrnli 
consolalio.  Marc,  De  Lege  spirilali,  nuui.  109, 
pag.  tu94. 


rvil"  SIKCLE.] 


CHAPITRE  LVI.  —  MAHC,  L'EllMFTE. 


G39 


donné  en  rc'compon?c  de  nos  bonnes  aciions, 
mais  iiniqneiuent  par  la  volonlé  toulc  gra- 
lnile  (le  Dieu  :  ce  qni  ferait  un  mauvais  sens, 
piiis(|iie  la  foi  catholique  nous  enseigne  que 
la  f('licité  éternelle  est  accordée  aux  justes 
en  vue  des  bonnes  œuvres  qu'ils  ont  faites 
dans  la  grâce  et  avec  le  secours  de  la  grâce; 
mais  peut-être  ne  veut-il  dire  autre  cliose, 
sinon  que  nos  œuvres  en  clles-uièuies,  et  en 
ne  leur  supposant  pas  d'autre  principe  que 
le  libre  arbitre,  ne  sont  point  méritoires  de 
la  vie  éternelle.  C'est  ce  qui  parait  par  une 
de  ses  lu-opositions,  qui  est  la  viugl-Iroisième, 
où  nous  lisons  '  :  «  Toute  bonne  œuvre  que 
nous  faisons  par  notre    nature  seulement, 
fait  à  la  vérité  que  nous  nous  abstenons  du 
mal  conliaire  ;  mais  sans  la  grâce  elle  ne  peut 
contribuera  notre  sanctilkation.  »  Au  reste, 
il  reconnaît ,  et  que  la  grâce  ne  cesse  point, 
dans  ceux  qui  sont  baptisés  en  Jésus-Chiist, 
de  leur  [uèter  sou  secours  lorsqu'il  s'agit  de 
l'observation  des  divins  préceptes,  et  -  qu'il 
est  en  leur  pouvoir  de  faire  le  bien,  ou  de  ne 
le  pas  faire.  Mais  il  pense  que  celui  qui  fait 
le  bien 'dans  la  vue  de  la  rétribution  ,cbcr- 
che  plus  a  satisfaire  sa  propre  volonté,  qu'<^ 
servir  Dieu.  Ce  qu'il  ajoute,  que  les* habitu- 
des invétérées  dépêcher  ne  peuvent  se  chan- 
ger, parce  cpi'clles  sont  comme  tournées  en 
nature,  ne  peut  recevoir  de  bon  sens  si  l'on 
prend  cette  proposition  à  la  rigueur,  puis- 
qu'il est  vrai  que,  qucK|ue  forte  et  invétérée 
que  soit  une  habitude,  on  peut  la  quitter  avec 
le  secours  de  la  grâce  et  à  force  de  travail; 
mais  on  appelle  quelquefois  impossible,  ce 
qui  est  très-difficile,  et  ce  qu'il  est  rare  de 
voir  arriver. 
T..iié(i»ia       C.  Ce  qui  donne  lieu  de  croire  que  Marc  a 
[(4° '100°.°'''  pensé  ainsi,  c'est  que,  dans  le  traité  suivant, 
il  entreprend  do  montrer  que  la  pénitence 
est  de  tout  état  et  de  tous  les  temps  de  la 
vie,  et  que  les  grands  pécheurs  ne  sont  con- 
damnés que  parce  qu'ils  ne  veulent  pas  faire 
pénitence.  Ce  traité,  qui  est  le  troisième,  est 


inlitid(!  :  De  la  Pénitence.  ^Farc  y  enseigne 
que  la  pénitence  est  d'obligation  pour  les 
justes  comme  pour  les  pécheurs,  paice  qu'ils 
sont  les  uns  et  les  autres  obligés  de  retian- 
cher  leurs  mauvaisdésiis,de  priersaiiscesse 
et  de  soufl'rir  avec  patience  les  événements 
fâcheux,  qui  sont  trois  parties  essentielles  à  la 
pénitence;  que  l'aumône  est  un  moyeu  salu- 
laiie  pour  ellaccr  les  péchés;  que  ceux  qui, 
faute  d'argent,  ne  peuvent  faire  l'aumône, 
ont  un  autre  moyen  de  les  etfacer,  qui  est  de 
faire  tout  le  bien  qui  est  en  eux,  piincipale- 
ment  de  remettre  les  injures.  Il  ilit  (jue  les 
malheurs  prédits  par  Jésus-Christ  aux  riches, 
ne  regardent  que  ceux  qui  n'en  font  pas  un 
bon  usage;  et  que  ceux  qui  en  usent  selon 
Diini  en  les  distribuant  aux  pauvres,  en  le- 
cevront  le  centuple  eu  ce  monde  et  en  l'au- 
tre :  ce  qu'il  prouve  par  l'exemple  d'Abra- 
ham et  de  Job.  Il  combat  les  novatieus,  qui 
ne  donnaient  point  la  pénitence,  remettant 
â  Dieu  l'absolution  des  pécheurs;  et  parce 
qu'ils  s'autorisaient  d'un  pas-:age  de  l'Epitre 
aux  hébreux,  où  saint  Paul  ,  rejelant  la  phi- 
ralilé  des  baptêmes,  dit  qu'il  est  impossible 
que  ceux  qui  ont  une  fois  été  éclairés  se  re- 
nouvellent par  la  pénitence,  il  soutient  que 
l'Apôtie  ne  rejette  point  îa  pénitence;  qu"il 
déclare  uniquement  que  le  ba[»téuie  eu  est 
le  fondement,  et  que,  comme  il  ne  se  peut 
réitérer,  ce  devait  être  une  raison  aux  bap- 
tisés de  veillei-  sur  eux-mêmes  pour  ne  point 
tomber  dauslc  péché  aprèsle  baptême.  Marc 
parle  clalremeut  du  péché  originel,  disant^ 
que  tous  les  hommes,  tirant  leur  origine  d'A- 
dam, participent  tous  à  son  péché;  qu'en 
conséquence  ils  sont  condamnés  à  la  mort, 
dont  ils  ne  peuvent  être  délivrés  nue  par  Jé- 
sus-Christ. 11  dit  encore  que  nous  portons  un 
serpent  qui  a  tué  notre  âme,  uu  conseiller 
vain  et  superbe,  un  esprit  de  crapule  cl  d'in- 
quiétude, dont  nous  devons  demander  à  Dieu 
d'être  délivrés. 
7.  Dans  le  quatrième  traité,  qui  est  écrit 


AdBeb  CI, 
I,  4,ô  etc. 


Traité  do 


'  Omne.opus  bomim  quodper  nostram  naturam 
operamur  tnnlinn  ,  equidem  efflcit  ut  a  contrario 
malo  aut  vitio  abstineamus.  Cwterum  extra  gra- 
tiam  sanctificalionis  accessionem  nobis  facere 
non  potest.  Marc,  De  Lege  spiritali,  num.  23,  pag. 
1092. 

*  Gratta  quidem  iis  qui  in  Christo  bapli:ati 
sunt  arcana  qiiadam  ac  mystica  ratione  data  est. 
Operatur  autein  secuudum  proportionem  execu- 
tionis  mandatoruni.  Quin  etiam  gralia  occulte 
nobis  auxiliari  non  desinit  :  in  nobis  autem  si- 


lum  cst,pro  virili  bonum  facere  aut  non  facere. 
pap;.  1092,  num.  56. 

'  Faciens  bonum  et  quœrens  retributionem,  non 
servit  Veo,  sed  propriœ  rolunlati.  Ibiil.,  num.  34. 

*  Ea  minime  cnrari  possunt,  quœ  ex  prœteri- 
torum  peccatorum  consuetudine  naturam-  quam- 
dam  subinduxerunt.  Ibid.,  num.  141. 

5  Àb  Adam  Irahunl  originem,cuncliquepeccuio 
transgressionis  fuerunl  obnoxii,  ideoquc  capitali 
sententia  condemnati,  adeo  m(  citra  Christum. 
salvari  non  possent.  Ibid.,  pag.  1100. 


640 


HISTOIRE  GEM-RALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


IIOI. 


par  demandes  et  par  réponses,  Marc  fait  voir 
que  le  baptême  confère  non-seulement  la  ré- 
mission des  péchés,  mais  encore  la  ç;râce  du 
Saint-Esprit,  et  plusieurs  autres  dons  spiri- 
tuels; que  le  liaptéme  toutefois,  quoique  par- 
fait, ne  rend  point  parfait  celui  qui  le  reçoit, 
s'il  n'observe  en  même  temps  les  comman- 
dements de  Dieu,  parce  que  la  foi  nous  en- 
seigne, et  que  nous  devons  être  baptisés  en 
Jésus-Christ,  et  qu'il  nous  faut  accomplir  ses 
préceptes;  qu'encore  que  le  péché  originel 
nous  soit  remis,  il  demeure  en  nous  un  reste 
de  ce  péché,  c'est-à-dire  !a  concupiscence, 
qui  nous  porte  au  mal;  que  nos  péchés  ac- 
tuels sont  «ne  autre  source  de  nos  tentations. 
C'est  surtout  aux  pochés  actuels  qu'il  rap- 
porte toutes  les  peines  d'esprit,   et  tous  les 
combats  que  soutirent  les  personnes  qui  font 
des  etïorts  pour  surmonter  les  pensées  fâ- 
cheuses dont  elles  sont  accablées.  Comment , 
en  eflet,  celui  qui  est  possédé  de  la  vainc  gloi- 
re pourrait-il  éviter  les  pensées  d'orgueil ,  et 
celui  qui  vit  dans  les  délices,  les  pensées 
d'impureté?  Il  en  est  de  même  d'un  avare.  Il 
pensera  toujours  comme  ceux  qui  n'ont  au- 
cun sentiment  demiséricordc.  Le  seul  moyen 
d'être  délivré  de  ces  sortes  de  pensées,  est 
de  haïr  le  vice  que  l'on  a  ainu',  et  de  lui  dé- 
clarer la  guerre.  Marc  rapporte  divers  passa- 
ges  pour    prouver  l'ellicacité  du  ba]jtcme. 
Mais  il  ajoute  que  '  son  but  en  cela  est  uni- 
quement de  montrer  que  Jésus-Christ  nous 
donne  dans  ce  sacrement  les  grâces  néces- 
saires pour  observer  ses  commandements, 
et  non  pas  que  la  grâce  du  baptême  soit  i  nad- 
missible,  en  sorte  qu'après  l'avoir  reçue,  on 
n'ait  plus  besoin  de  pénitence.  Il   avait  dit 
plus  haut,  que  le  Saint-Esprit  demeure  dans 
celui  qui  reçoit  le  baptême.  Pour  plus  grande 
explication,  il  dit  ensuite  que  le  Saint-Es- 
prit étant   aussi  appelé  l'Esprit  de  Dieu  et 
l'Esprit  de  Jésus-Christ,  nous  recevons  dans 
le  baptême,  par  le  Saint-Esprit,  le  Père  et  le 
Fils,  parce  que  le  Saint-Esprit  n'est  point  sé- 
paié  du  Père  ni  du  Fils,  avec  qui  il  est  un  en 
nature,  quoiqu'il  en  soit  distingué  personnel- 
lement; car  de  même -que  le  Fils  et  le  Saint- 
Esprit  sont  dans  le  Père ,  et  le  Père  et  le  Saint- 
Esprit  dans  le  Fils;  de  même  aussi  le  Père  et 


le  Fils  sont  dans  le  Saint-Esprit,  non  par  la 
confusion  de  ces  trois  personnes,  mais  par 
l'unité  de  la  même  essence  ou  nature  divine. 
Il  compare  la  manière  dont  le  Saint-Esprit 
habite  dans  le  coMirdes  baptisés,  avec  la  ma- 
nière dont  le  soleil  éclaire  les  hommes.  C'est 
le  soleil  tout  entier  qui  les  éclaire,  sans  être 
partagé  ni  divisé.  Chacun  prend  de  sa  lu- 
mière îi  proportion  de  ia  disposition  de  ses 
yeu.^.  Le  Saiul-Esprit  rend  tous  les  baptisés 
capables  de  faire  toutes  sortes  de  bonnes  ac- 
tions; mais  il  distribue  ses  dons  à  chacun 
suivant  sa  dignité  et  la  mesure  de  sa  foi. 
Marc  fait  voir  que  Dieu  ne  commande  rien  tv 
l'homme,  qu'il  ne  puisse  accomplir;  que  le 
péché  d'Adam  a  été  volontaire;  qu'il  lui  était 
libre  comme  à  nous  de  ne  pas  écouter  les 
suggesti(Ui's  du  démon;  que  les  tenlalious  ne 
sont  pas  péché,  mais  une  preuve  de  notre 
liberté;  que  si  les  mauvaises  pensées  avaient 
absolument  leur  origine  dans  le  péché  d'.\- 
dam,  elles  seraient  les  mêmes  dans  tous  les 
hommes;  ((ue  n'étant  pas  les  mêmes,  c'est 
une  marque  quelles  sont  occasionnées  par 
les  péchés  actuels  qui  ont  précédé;   que  si 
Dieu  permet  quelquefois  (|u'elies  nous  tour- 
mentent longtemps,   c'est  pour  nous  punir 
de  ne  leur  avoir  pas  résisté  sitôt  qu'elles  se 
sont  élevées;  que  le  péché  du  premier  hom- 
me ayant  été  effacé  par  la  mort  de  Jésus- 
Christ,  nous  ne  pouvons  excuser  nos  péchés, 
parce  que  nous  les  conmiettons  librement, 
et  que  nous  ne  les  commettons   que  pour 
avoir  méprisé,  par  l'amour  des  plaisirs  illici- 
tes, la  perfection  et  la  grâce  que  nous  avions 
reçues  dans  le  baptême. 

8.  Le  cinquième  Traité  est  adressé  à  un 
moine  nommé  Nicolas,  qui,  agité  de  diver- 
ses passions,  principalement  de  la  colère, 
avait  consulté  Marc  sur  les  moyens  de  les 
modéreret  d'éteindre  la  cupidité.  Ce  solitaire 
lui  donna  de  vive  voix  [jlusieurs  instructions 
salutaires  :  depuis  il  les  mit  par  écrit  et  les 
lui  envoya.  Il  lui  conseille  surtout  de  faire 
de  continuelles  réiloxious  sur  les  Ijienfaits 
que  nous  avons  reçus  de  Dieu  par  l'Incarna- 
tion; sur  les  tiavaux  que  Jésus-Christ  a  en- 
durés pour  nous;  sur  les  maux  dont  il  nous 
a  délivrés  par  sa  mort;  sur  les  biens  qu'il 


MO». 


'  lUa  vero  le.'<limonia  adJucimus,  non  quod  di- 
camus  omnem  linmitien  (jui  hnptiznlus  est  et  gra- 
tiam  adeplus,  posthnc  immutari non  posic  et  nl- 
Ira  non  egere  pirnitentia,  nal  qund  a  haplisnw 
pcr  Christi  bene/icenliam  pltnu  gratin  Uei  nobis 
donata  est  ad  implenda  cuncta  mandata,  pag.  1104. 


'  Sicul  in  Paire  est  Filius  elSpiritus  Sanclus , 
et  rursum  in  Filio  Pater  et  S;>iri(H.«  Snnelus  :  sic 
in  Spiritu  Sanclo  est  Pater  et  Filius,  non  confu- 
sionc  trium  hyposlaseon,  sed  unione  ejusdem  et 
unius  essentive  ac  deitatis.  Ibid.,  |iag.  H05. 


PNlIni.cx 
13. 


[vil"  SIÈCLK.] 

nous  a  procurés;  et  de  rëpcler souvent,  ;\  la 
vue  (le  toulcs  ces  giAces,  c(^s  ])arolesdii  Pro- 
'•  plièlc  :  (Jiie  rendrui-jr  au  Si'ii/neur  /mur  lunt. 
CL'  (/ii'il  m'a  donné?  L;i  miklilalion  de  ces  vc- 
riti's  est  comiue  un  aiguillon  (|ui  nous  excite 
vivi'iiicnt  ù  confesser  nos  fautes  devant  Dieu, 
el  ;\  nous  humilier;  .■\  lui  rendre  grâces,  et  ;\ 
praliqner  la  vertu.  Il  représente  à  ce  moine, 
qu'étant  honoré  dans  le  monde  à  cause  de  la 
vie  religieuse  dont  il  faisait  profession,  ce 
tievait  lui  être  un  nouveau  motif  de  corriger 
ses  nueurs,  dont  il  ne  pouvait  cacher  le  dé- 
rangement au  souverain  Juge,  à  qui  rien  n'est 
i.cur.  IV,  inconnu,  et  (pti,  lorsqu'il  viendra,  produira 
duiis  la  lumihe  ce  qui  est  caché  dans  les  ténb- 
lirvs.  Il  lui  représente  encore  les  suites  fâ- 
cheuses de  la  colère,  qui  sont  d'engendrer  la 
haine  fraternelle,  d'èlrc  un  sujet  de  chagrin 
et  de  ilouleur  au  prochain,  tlo  mettre  la  con- 
fusion dans  l'âme,  de  lui  ôter  l'usage  de  sa 
raison,  de  rendre  l'homme  semblable  aux 
bètes.  Il  lui  rappelle  les  grâces  qu'il  avait  re- 
çues de  Dieu  dans  un  voyage  qu'il  avait  fait, 
avec  sa  mère,  des  Lieux-saints  à  Constauti- 
nople.  Accueilli  d'une  violente  tempête,  il 
avait  nairaculeusemeut  évité  le  naufrage,  lui 
troisième:  faveur  que  Dieu  ne  lui  avait  faite 
qu'atîn  que,  de  retour  dans  sa  patrie,  il  en- 
trât avec  ceux  qui  avaient  échappé  couîme 
lui,  dans  la  voie  du  salut.  Nicolas  était  en- 
core jeune;  c'est  pourquoi  il  l'exhorte  à 
dompter  sa  chair  par  l'ahslineuce  de  la  di- 
versité des  mets  et  du  vin;  il  ne  veut  pas 
même  qu'il  boive  de  l'eau  jusqu'à  satiété, 
toute  replétion  étant  contraire  â  la  tempé- 
rance. En  faisant  l'éunniération  de  tout  ce 
que  .Jésus-Christ  a  fait  pour  nous,  il  l'appelle 
homme  du  Seigneur,  expression  commune  à 
plusieurs  anciens.  Puis,  examinant  le  genre 
de  vie  le  plus  convenable  â  Nicolas  pour 
opérer  son  salut,  il  le  détourne  de  la  vie  éré- 
raitique,  à  cause  des  dangers  qu'elle  renfer- 
me pour  un  jeune  homme  qui, n'est  point 
ati'ermi  dans  la  vertu  par  une  longue  expé- 
rience. Il  lui  conseille  donc  de  se  mettre  dans 
la  compagnie  de  quelques  personnes  pru- 
dentes et  expérimentées  qui  puissent  le  con- 
duire par  leurs  lumières  et  par  leurs  exem- 
ples. 
Leiiredu  9.  Les  avis  de  Marc  firent  sur  le  moine  Ni- 
■a'"'!i   Mare    colas dcs  imprcssious  salutaires".  Il  y  apprît  à 


CHAPITRE  LVI.  —  MARC  L'ERMITE. 


64i 


modérer  ses  passions,  el  les  modéra  en  elTel,   iErniii»,p.g. 
Cela  l'engagea  â   écrire   â   Marc  une   lettre    "'^' 
d'actions  de  grâces,  où  il  témoigne  (ju'il  avait 
fait  part  de  ses  instructions  à  d'autres,  (jui  en 
avaient  tiré  beaucoup  d'utilité. 

10.  Le  Traité  de  la  Tempérance  '  est  un       Tr,iié  .ur 
composé  sans  suite  et  sans  liaison  de  diver-   X^rg?!"-!' 
ses  explications   mystiques  et   morales   de 
quelques  endroits  de  l'I'Jcriturc.  Il  semble  y 
admettre  dans  les  saints,  lors  même  qu'ils 

sont  encore  sur  la  terre,  une  apathie  ou 
exomi>tiou  de  passions,  et  faire  consister  la 
perfection  dans  celte  sorle  d'insensibilité.  11 
y  enseigne  que  nous  ne  possédons  pas 
toujours  la  grâce  dans  le  même  degré,  que 
quelquefois  elle  augmente  eu  nous,  qu'elle 
diminue  en  d'autres  occasions,  et  qu'il  y  en 
a  où  nous  en  sommes  privés.  Il  ajoute  qu'elle 
peut  se  rencontrer  dansTliomme  avec  le  pé- 
ché; mais  par  le  péché  il  entend  peut-être 
la  concupiscence,  qui  est  l'eOel  du  péché,  et 
qui  nous  porte  au  péché.  Il  met  les  pèleri- 
nages au  rang  des  bonnes  choses,  et  qui  vont 
de  pair  avec  les  jeûnes  et  les  veilles. 

11 .  Dans  le  traité  suivant ,  qui  est  en  foi'me        Diaio^ne 
de  dialogue   entre  Marc  et  un  avocat,   est   "'"o  JIm, 
agitée  cette  question  :  Si  l'on  doit  se  venger  f^-"'°- 
d'uue  injure,  et  condamner   ceux  qui  ont 
conseillé  de  faire  cette  injure.  Marc  soutient 

que,  suivant  les  paroles  de  l'Écriture,  nous 
devons  réserver  à  Dieu  la  vengeance,  et 
considérer  le  tort  qui  nous  est  fait  comme 
une  punition  de  nos  péchés  ;  et  l'avocat 
conclut  qu'il  suivrait  de  là  que  les  magis- 
trats pécheraient  en  punissant  les  coupables. 
Marc  nie  la  conséquence,  et  dit  que  ce  ne 
sont  point  lés  juges  qui  pèchent  en  cette  oc- 
casion, mais  les  délateurs.  Il  soutient  aussi 
contre  l'avocat  que  la  prière  est  préférable  à 
toute  sorte  de  travail,  et  il  en  donne  pour 
preuve  la  loi  que  Jésus-Cbrist  nous  a  imposée 
de  prier  sans  cesse.  Il  entend  par  prière  non- 
seulement  la  prière  vocale,  qui  ne  se  faisait 
qu'a  certaines  heures  dans  les  monastères, 
mais  aussi  la  mentale. Surla  question  proposée 
par  l'avocat,  si  la  chair  a  une  volonté  diti'érente 
de  celle  de  l'âme,  il  répond  que  l'on  n'en  peut 
douter,  puisque  saint  Paul  le  dit  expressément 
dans  son  épitre  aux  l'Jphésiens  :  Nous  avons 
tous  été  dans  les  Mêmes  déso?'dres,  faisant  la  vo-  3. 
lonté  de  la  chair  ;  et  dans  l'épître  aux  Galates  : 


'  Photius  ne  mentionne  point  cet  ouvrage  ;  de  là 
quelque  doute  sur  sou  autlienticiti'-.  Aussi  Remon- 
diui,  dans  les  notes  sur  l'opuscule  de  Marc  De  Je- 

XI. 


junio,  combat  l'.iuthenticité  du  traité  de   la  Tem- 
pérance par  des  arjjumeuts  assez  forts.  [L'dditeur.) 


41 


042 


HISTOIRE  gf.nf;rale  des  auteurs  eccléswstiques. 


r,ui.  V,   Conduisez-vous  selon  l'esprit,  et  n'accomplissez 
'  "         ftoint  les  désirs  de  la  chair;  car  la  chair  a  des 
désirs  contraires  à  ceux  de  l'esprit,  et  l'esprit 
en  a  de  contraires  à  ceux  de  la  chair.  Pur  la 
volonté  de  la  chair,  Marc  entend  les  mouve- 
ments naturels  du  corps,  mais  dérëglés.  Il 
traite  quelques  autre?  questions  de  moindre 
importance,  montrant  eutr"autres  qu'on  n'est 
point  obligé  de  plaire  à  tous  les  hommes, 
mais  seulement  aux  bons, 
coorérmt»       12.   Suit  un  autre  petit  traité  qui  a  pour 
î«c   ''ÎmI  litre  :  Conférence  de  l'esprit  avec  l'âme.  Le  but 
ite-  ini-      g„  gg[  jjg  fajpg  YQJp  q„g  nous  sommes  nous- 
mêmes  les  auteurs  de  nos  péchés;  que  nous 
ne  devons  en  rejetejr  la  cause  ni  sur  Adam, 
ni  sur  le  démon,  ni  sur  les  homme?  avec  qui 
nous  vivons  ;  que  la  guerre  que  nous  avons 
à  soutenir  n'est  point  au  dehoi-s  avec  nos 
frères,  mais  au  dedans  avec  nous-mêmes; 
que  nos  ennemis  sont,  ù  proprement  parler, 
la  volupté  et  la  vaine  gloire;  que,  dans  ce 
combat,  ce  n'est  pas  des  hommes  que  nous 
devons  attendre  du  secours,  mais  de  Jésus- 
Cbrist  ;   qu'il  ne  manquera  pas  de  prendre 
notre  parti,  si  nous  observons  ses  comman- 
dements ;   que  les  deux  ennemis  qui  nous 
attaquent,  la  volupté  et  la  vaine  gloire,  sont 
les  mêmes  qui  ont  séduit  Eve  et  trompé  Adam. 
13.  On  a  mis  à  la  suite  de  ce  traite  un. 
fragment  d'une  Lettre  de  Marc,  où  il  donne 
aoii«'°Leiro  les  signes  auxquels  on  peut  reconnaître  ceux 
nu.  qui  marchent  dans  la  voie  du  salut,  et  ceux 

qui  n'y  marchent  pas.  On  connaît  les  uns  et 
les  autres  à  leurs  sentiments  et  h  leurs  œu- 
vres. Ceux-bi  pleurent,  gémissent,  gardent 
le  silence,  ont  un  extérieur  modeste,  sont 
pénétrés  d'une  douleur  qui  part  d'un  fond 
de  piété  ;  ils  vivent  dans  la  continence,  dans 
les  veilles,  dans  les  jeûnes;  ils  sont  doux, 
magnanimes,  assidus  à  la  prière,  au  travail; 
ils  s'appliquent  h  l'étude  des  divines  Écri- 
tures ;  ils  aiment  leurs  frères.  Ceux-ci  sont 
paresseux,  hautains,  méprisants,  murmura- 
leurs,   légers  et  inconstants,  grands  man- 


'  Pholius,  Cod.  200,  png.  522. 

*  Voyez  loin.  Yl,  imp.  3%. 

'  Fabriciii!»,  loin.  IX  Bibtiolh.  Gra-c,  pag.  -(iri. 

'  l'abriciiis,  loin.  Ylll,  jiag.  ,1'jl. 

'  Nici'i>Ii(irus,  lil).  MV  llùlor.,  e.ip.  i.iv. 

"  Pcrsjticua  est  ejiis  ilirlio  ijiintenu.i  verbis  uli- 
tur  Cûnimunihus,  cl  svmina  cii]iita  percurril  nrn- 
lio;  ctsi,  fjHOd  ad  alticum  xeriiioïKin ,  non  salis 
accurate  linguam  componnl.  Siciihi  vero  in  his 
obscurilas  aliqiia  ccriiilur,  idrn  nimirum  ab  ea 
quw  per  verba  sit  rUirn  expliratiimn  rerrdil,  qiiod 
h'Oc  rjusmodi  sinl    ut  jier  arli'mciii  i/isam  polis. 


geurs,  prodigues,  sujets  à  la  colère,  turbu- 
lents ;  ils  aiment  à  parler,  à  s'enrichir  par 
des  gains  houleux,  <^  exciter  des  séditions. 
On  ne  sait  pas  à  qui  celte  lettre  était 
adressée. 

14.  Photius  attribue  à  Marc  un  neuvième 
traité  contre  les  melchisédéciens',  c'est-à-     Tr...  r^^. 

Ir«lf-\1    fl,i- 

dire  contre  certains  hérétiques  qui  assu-  •'iM'.» -.. 
raient  que  Melchisédecb  était  fils  de  Dieu, 
et  qui  le  révéraient  comme  une  grande  vertu 
supérieure  h  Jésus-Christ.  Ce  traité  n'est  pas 
venu  jusqu'.'i  nous.  Tout  ce  que  nous  en  sa- 
vons, c'est  que  Marc  n'y  épargnait  pas  môme 
son  père,  qui  avait  été  engagé  dans  cette 
hérésie'.  On  le  dit  en  manuscrit  dans  la  Bi- 
bliothèque de  Thomas  Gala>us^,  avec  plu- 
sieurs autres  traités  du  même  auteur,  qui 
n'ont  pas  encore  \n  le  jour.  [U  a  été  publié 
en  1777,  in-8,  à  Rome,  par  Rallhasar-Marie 
Remondini,  évêquc  de  Zante,  avec  un  traité 
ou  di.scours  sur  le  jeûne.  Le  savant  éditeur 
a  re\Ti  le  texte  grec  sur  de  bons  manuscrits, 
et  a  joint  à  sa  version  latine  des  notes  pleines 
d'intérêt.] 

13.  Du  nombre  des  traités  qui  se  trouvent 
dans  la  Bibliothèque  de  Thomas  Gahv'us,  il  y  „  um,i, 

^  j        Mire  qui  loni 

en  a  un  *  des  vices  et  des  vertus;  un  autre  de  i«"ii". 
la  pratique  et  de  la  théorie  spirituelles;  un 
Discours  sur  la  Croix  ,  et  plusieurs  autres 
qu'on  dit  être  dans  les  Bibliothèques  d'Angle- 
terre, de  Vienne  et  de  Venise.  Nicéphore' 
avait  vu  trente-deux  traités  sur  la  vie  ascé- 
tique, dans  lesquels  Marc  entrait  dans  le  dé- 
tail de  tout  ce  qui  appartient  à  ce  genre  de 
vie,  enseignant  où  il  fallait  se  retirer  pour  la 
pratiquer;  comnien!  il  fallait  se  conduire  se- 
lon la  volonté  de  Dieu  ;  de  quelle  façon  on 
devait  purifier  son  àme  et  surmonter  les  ten- 
ta lions  du  démon,  et  de  quelle  manière  on 
pouvait  recouvrer  les  prérogatives  perdues 
par  le  péché. 

16.  Le  style  de  Marc  est*  assez  clair,  parce 
qu'il  n'emploie  d'ordinaire  que  des  termes   v>n 
communs,  et  qu'il  dit  les  choses  sommaire 


.«îi'îiiiiHi  prrcipi  debeanl,  non  qund  dil/lculler  ea- 
dem  exprimi  oralione  possinl  ;  quod  non  in  lus 
snliim  libri.s  tisu  venil,  sed  et  in  aliis  dcincc/is 
sfquriitibus.  (Juin  nequr  in  hoc  dutntaxnt  scrip- 
lorc,  vrruin  rlium  in  omnibus  firme  iis  qui  de 
nsci'licix  iui^lilulis  et  de  pcrlurbalionibus  alque 
a/lectionibus,  qua'  per  ipsa  prnducuninr  opéra, 
diiccre  aliquid  sluilucrunl,  ejiismodi  obscurilatis 
I  ilium  alicubi  iniciiitur.  (Jnie  tnim  er  ipsis  est 
operilius  pcrcrpta  cognilio,  nolis  usquc  adco  ver- 
bis  e.rplicari  contenta  est.  l'bolius,  Cod.  lOU,  jiag. 


[vii«  SIÈCLE.]    CnAPITItE  LVIl.—  ANDRONICIEN,  LUCIUS  CUARINUS,  ETC. 


043 


Marc       1  Er- 
mite. 


'ment;  mais  il  n'a  point  la  polilossc  de  l'an- 
cienne; Athènes.  S'il  est  (iiR'lijnefois  obscur, 
cela  ne  vient  que  des  choses  qu'il  traite,  qui 
sont  de  telle  nature,  qu'il  est  plus  aisé  de 
les  comprendre  par  la  pratique  que  par  les 
discours.  De  h'i  vient  que  celle  obscurité  se 
rencontre  presque  dans  tous  ceux  qui  ont 
écrit  de  la  vie  ascétique,  et  qui  ont  traité  des 
mouvements  et  dos  passious  de  l'âme,  de 
môme  que  dos  actions  qui  en  sont  les  etl'cls, 
n'étant  pas  facile  de  faire  connaître  par  des 
paroles,  des  choses  qui  dépendent  de  la  pra- 
tique. Ses  façons  de  penser  peu  exactes  sur 
plusieurs  points  de  doctrine  ont  fait  conjec- 
turer que  ses  écrits  avaient  été  fort  altérés 
par  les  hérétiques.  Il  parait,  eu  eil'et,  in- 
croyable qu'un  même  auteur  ait  dans  une 
même  page  avance'  des  propositions  contra- 
dictoires sur  une  même  matière,  comme  le 
fait  Marc  sur  la  grâce.  N'ous  avons  marqué 
ces  endroits,  et  quelques  autres  où  il  parait 
s'être  éloigné  de  la  doctrine  commune  de 
l'Église,  du  moins  en  prenant  ses  paroles  à 
la  lettre.  Son  traité  de  la  Loi  spirituelle  et 
du  Paradis  fait  la  ti'entc-seplième  homélie 
de  celles  qu'on  attribue  à  Macaire.  Quelques 
critiques  en  ont  pris  occasion  de  donner  ces 
homélies  à  Max'C.  Us  en  rapportent  encore 
d'autres  raisons  qui  ne  nous  paraissent  pas 
assez  plausibles'. 

17.  Ce  traité  fut  imprimé  dans  le  Micro- 
presbyticon  à  Bàle,  en  1330,  et  dans  la  pre- 


mière édition  des  Ortliodoxogra plies  en  la 
même  ville,  en  l.'J.'i.'i,  de;  la  traduction  de 
Vincent  Opsopanis.  Ce  traducteur  l'avait  déji'i 
fait  imprimer  en  grec  et  en  latin,  avec  le 
traité  où  Marc  combat  ceux  qui  enseignaient 
qu'on  était  justilié  par  les  œuvres  seules. 
Cette  édition  est  de  Haguenau,  en  1531.  Jean 
de  Fuchte  les  mit  sous  presse  A  IJelmstat  en 
IGIG,  en  témoignant  qu'il  aurait  rendu  peut- 
être  son  édition  plus  exacte,  s'il  avait  eu 
communication  de  celle  que  l'on  avait  faite 
en  grec  à  Paris,  eu  1313.  Nous  en  avons  une 
en  latin  du  second  de  ces  deux  traités  ti 
Dantzick,  parles  soinsdc  Samuel  Schelvigius, 
eu  1U88,  in-V.  Les  six  autres  traités  ont  été 
traduits  en  latin  par  François  Zinus,  et  im- 
primés à  Venise,  en  lali.  Celui  de  la  Tem- 
pérance, qui  ne  se  trouvait  qu'eu  partie  dans 
l'édition  de  Paris,  en  IoG3,  se  trouve  entier 
dans  celle-ci.  Celle  de  Paris  renferme  les 
huit  traités  mentionnés  dans  Photius;  elle 
est  de  la  traduction  de  Jean  Pic,  président 
aux  enquêtes  à  Paris.  Tous  ces  traités  ,  avec 
le  fragment  d'une  Lettre  de  Marc,  ont  été 
insérés  dans  les  Bibliothèques  des  Pères,  et 
dunsV Auctuarium  deFrouton-le-Duc,àParis, 
en  1G21,  fol.,  en  grec  et  en  latin. 

[On  trouve  les  écrits  de  l'VIarc  l'Ermite  dans 
le  tome  VIII  de  la  Bibliothèque  de  Galland; 
et  de  là  ils  ont  passé  dans  le  tome  LXV  de  la 
Putrologie  grecque,  col.  903  et  suiv.,  avec 
une  notice  de  Fesseler.] 


CHAPITRE  LVII. 

Audronicien,  Lncins  Charinus,  Métrodore,  Héraclien  et  Léontius 
[au  commencemeiit  da  VIP  siècle]. 

[Écrivains  grecs.l 


1.  On  met  ordinairement  Andronicien 
parmi  les  auteuis  qui  out  vécu  sur  la  On  du 
sixième  siècle,  ou  au  commencement  du  sep- 
tième. II  serait  peut-être  mieux  do  le  placer 
dans  le  quatrième  ou  cinquième,  où  l'hérésie 
d'Eunomius,  contre  laquelle  il  écrivit,  occu- 
pait beaucoup  les  défenseurs  de  la  loi  catho- 
lique^. Photius ,  qui  avait  lu  deuxlivres  d'An- 
di'onicien  contre  les  eunomiens,  dit'  qu'il 
promettait  beaucoup  dans  ses  préfaces,  mais 

'  Voyez  tom.  III,  pag.  133  et  suiv. 
*  Voyez  tom.  IV,  pag.  410. 


qu'il  n'exécutait  pas  dans  le  coi-ps  de  l'ou- 
vrage ce  qu'il  avait  promis,  particulièrement 
dans  le  second  livre  ;  qu'il  avait  les  mœurs, 
l'esprit  et  la  manièi-e  d'écrire  d'un  philoso- 
phe, mais  qu'il  était  chrétien  de  religion. 
Nous  n'avons  pins  cet  ouvrage. 

2. Nous  neconnaissons  ceux  deLuciusCha- 
rinus  que  sur  le  rapport  que  Photius  en  a  fait'. 
Son  livre  qui  avait  pour  titre  :  Les  Voyagesdes 
Apôtres,  contenait  les  actions  de  saint  Pierre, 

8  Photius,  Cod.  45,  pag.  31. 
»  Photius,  Cod.  114,  pag.  291. 


LuciusClia 
rîDus. 


644  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 

(le  saint  Jean,  de  saint  André,  de  saint  Thomas 
et  de  saint  Paid.  Le  slj-le  en  était  inégal,  et 
les  termes  fort  communs.  Sa  manière  de  ra- 
conter était  néanmoins  bien  éloignée  de  la 
naïveté  et  de  la  simiilicité  des  écrits  des  apô- 
tres et  des  évangélistes,  parce  qu'il  alTectait 
de  temps  en  temps  de  s'élever,  en  mêlant 
dans  sa  narration  des  termes  du  barreau.  Au 
reste,  cet  ouvrage   était  rempli  d'histoires 
fabuleuses,  qui  se  détruisaient  les  unes  les 
autres  :  car  il  admettait  un  Dieu  particulier 
des  Juifs,  qu'il  disait  être  mauvais,  et  dont 
Simon  le  >Iagicicn  avait  été  le  minisire,  le 
distinguant  de  Jésu^Christ,  qu'il  disait  être 
le  Dieu  bon.  Gâtant  et  confondant  tout,  il 
donnait  à  ce  Dieu  de  bonté  tantôt  la  qualité 
de  Père,  tantôt  celle  de  Fils,  et  soutenait  qu'il 
ne  s'était  fait  homme  qu'en  apparence  ;  qu'il 
était  apparu  à   ses  disciples  sous  diverses 
formes,  tantôt  jeune,  tantôt  vieux,  tantôt  en- 
fant ;  tantôt  grand,  tantôt  petit,  et  quelque- 
fois si  haut,  qu'il  semblait  toucher  le  ciel.  Il 
débitait  plusieiu-s  folies  touchant  la  Croix, 
avançant  qu'un  autre  y  avait  été  attaché  à  la 
place  de  Jésus-Christ,   qui  s'était  moqué  de 
ses  bourreaux.  Il  rejetait  les  mariages  même 
légitimes,  et  regardait  la  génération  comme 
l'œuvre  du  démon.  Il  racontait  des  résurrec- 
tions absurdes  de  bœufs,  de  chevaux,  d'hom- 
mes. En  parlant  des  actionsde  saint  Jean,  il 
semblaitGlâmer  l'usage  des  images,  comme 
les  iconoclastes.  En  un  mot,  son  livre  ne 
renfermait  que  des  puérilités,  des  fables,  des 
faussetés,  des  impiétés,  de  sorte  qu'on  pou- 
vait, sans  s'écarter  de  la  vérité,  regarder  ce 
livTe  comme  une  source  d'erreurs,  ou  plutôt 
un  recueil  de  folies  et  d'extravagances.  Ainsi 
l'on  ne  doit  pas  en  regretter  la  perte. 
M«r.doro       3.  Pholius  parle  ensuite  d'un  anonyme  qui 
iW't'VrZ  avait  écrit  sur laPâquecontreles  Juifs'.  Ilsou- 
"''"'■  tenait  que  Jésus-Christ  n'avait   pas  mangé 

la  Pâque  le  jeudi;  qu'on  ne  devait  la  mauger 
que  le  jour  suivant,  et  qu'en  ce  jour  il  n'a- 
vait mangé  ni  l'agneau  pascal,  ni  desazymes, 
mais  qu'il  avait  fait  une  cène  particulière  et 
puremcnl  mysli.iuc,  de  laquelle  il  avait  pris 
dn  pain  et  du  vin  pour  en  donner  à  ses  dis- 
ciples. Mélrodore  avait  fait,  pour  la  célébra- 
tion de  la  fête  de  Pâques  ,  c'est-à-dire  pour 
en  trouver  le  jour,  un  couiput  de  vingt-huit 
cycles,  chacun  de  dix-neuf  ans,  dont  le  pre- 
mier commençait  à  Dioclétieu,  et  continuait 
pendant  333  ans  à   marquer  la  fête  de  Pû- 


AUTEURS  ECCLÉSUSTIQUES. 

ques  suivant  le  calcul  du  quatorzième  de  la 
lune.  Photius  regarde  ce  comput  comme 
inutile,  parce  que  l'Église  ne  s'était  point 
arrêtée  au  quatorzième  de  la  lune  pour  la 
célébration  de  la  fête  de  Pâques.  Aussi  Mé- 
trodore  trouva  des  adversaires  qui  attaquè- 
rent son  cycle  en  plusieurs  endroits.  L'un 
d'eux  avait  composé  un  troisième  volume, 
divisé  CH  huit  livres,  où  il  traitait  du  jour 
qu'on  devait  faire  la  Pâque.  Cet  ouvrage, 
qui  en  supposait  d'autres,  était  écrit  d'un 
style  simple  et  net,  et  contenait  beaucoup 
de  belles  choses  et  très-sensées.  Dans  le 
quatrième  livre  l'auteur,  dont  on  ne  sait 
pas  le  nom,  attaquait  souvent  Métrodore,  et 
donnait,  tant  dans  ce  livre  que  dans  les  au- 
tres, diverses  explications  sur  l'ouvrage  des 
six  jours  de  la  création.  Le  gicn  était  dédié 
â  Théodore,  qu'il  appelait  sou  frère.  11  en 
avait  composé  d'autres  sur  hi  même  matière, 
oîi  il  traitait  de  l'année  bissextile,  du  mois 
intercalaire,  des  épactcs  de  la  lune  et  du 
soleil,  des  cycles  de  dix-neuf  ans,  et  de  di- 
verses autres  choses  qui  avaient  rapport  à 
son  sujet.  Il  prétendait  que  Jésus-Christ  n'a- 
vait point  (.lit  la  Pâque  légale  l'année  de  sa 
mort:  ce  qui  est,  dit  Pholius,  contraire  au 
sentiment  de  saint  Chrysostome  et  de  l'É- 
glise, qui  enseignent  que  Jésus-Christ  célé- 
bra la  Pâque  prescrite  par  la  loi,  avant 
d'instituer  la  cène  mystique. 

4.  Héraclien  avait  composé  vingt  livres 
contre  les  manichéens  d'un  style  concis,  net 
et  élevé,  où  il  avait  su  allier  l'élégance  at- 
tique  avec  le  discours  familier  '.  Ces  livres 
sont  perdus.  Nous  savons  seulement  qu'il  y 
renversait  le  livre  que  les  manichéens  ap- 
pellent /:^vmif/ilc ,  le  /.ivre  des  Citants ,  cl 
celui  qu'ils  intitulaient  Le  Trésor,  qui  était 
d'Adda  ;  qu'il  faisait  mention  de  ceux  qui 
avaient  écrit  avant  lui  contre  ces  hérétiques, 
savoir  llégéniouius,  auteur  de  la  Dispute 
d'Arclii'laiis  contre  Manès ;  Tite,  évêquc  de 
Bostrcs,  qui,  croyant  écrire  contre  Manès, 
avait  écrit  contre  les  livres  d'Adda  son  maî- 
tre ;  George  de  Laodicéc,  qui  s'était  servi 
des  mêmes  arguments  que  Tite;  Sérapion, 
évêque  de  Tmuis,  et  Diodorc  de  Tarse,  qui 
avait  combattu  les  manichéens  par  un  ou- 
vrage divisé  en  viuct-cinq  livres,  dont  les 
sept  premiers  étaient  contre  rh'vmujile  vi- 
vant des  manichéens,  à  ce  (]u'il  croyait, 
mais  en  ell'et  le  livre  d'Adda,  intitulé  Muid. 


H«rtclltn,'| 

c^doiae. 


»  l'IiotiH»,  Co'l.  ll.'i,  pat-'-  291.  294 


Pholius,  Cod.  85,  pag.  203. 


C.HAPITRK  I.MII.  —  HONIFACH  IV,  DEUSDEPIT,  KTC.  043 

mais    cet    endroit    in;in([iii!    dans   les    im- 


[vii*  SIÈCLE.] 

Pans  les  autros  livres,  Diddore  de  Tarse 
expliquait  avec  iietleté  les  jiassages  do  ri'l- 
ci-ilure  dont  les  Manichéens  abusaient  [)iiiir 
auloiiser  leurs  eneurs.  Héraclien  appuyait 
en  peu  de  mots  dans  son  ouvra,i;e  ce  qui  lui 
paraissait  le  plus  faible  dans  les  écrilb  de 
CCS  auleiMS,  suppléait  ce  qui  lui  semblait 
oublié,  et  rapportait  ce  qu'ils  avaient  dit  de 
meilleur,  y  ajiutant  ce  qui  lui  venait  en 
pensée.  Pholius  dit  que  cet  écrivain  était 
fort  dans  le  raisonnement,  et  que,  faisant 
usaye  des  autres  sciences  qu'il  avait  acqui- 
ses, il  renversait  les  fables  des  manicbéens 
et  confondait  leurs  erreurs.  L'ouvrage  d'Hé- 
raclien  était  adressé  à  un  clirétieu  de  ses 
amis,  noumié  Acliillius,  à  la  prière  de  qui  il 
l'avait  composé.  Nous  avons  d'autant  plus 
sujet  d'en  regretter  la  perte,  qu'il  aurait 
été  un  monument  éternel  de  la  victoire 
que  son  auteur  avait  remportée  surl'impiété 
des  manichéens  '.  Pholius  avait  marqué 
l'empereur  sous  lequel  Héraclien   écrivait  ; 


primés. 

.').  Il  nous  a  conservé  quelques  fragments 
d'un  Discours  de  Léontius,  évé(|ne  d'Ara- 
bisse,  qui  était  intitulé  :  Ik  lu  Cimlion  cl  du 
Lazare  ressuscité  ».  Cet  évèque  y  fait  une  pein- 
ture de  la  chute  de  l'homme  et  de  ses  suites, 
pour  prouver  lu  nécessité  de  l'Incarnation. 
11  remarque  que  ces  paroles  de  Dieu  au  pre- 
mier homme:  Adam,  ou  êlcs-vous?  ne  sont 
point  dos  paroles  de  colère,  mais  de  miséri- 
corde ;  qu'live,  à  la  suite  de  son  péché,  fut 
mise  sous  le  pouvoir  d'Adam,  parce  que  la 
liberté  est  iniitile  aux  personnes  qui  ne  sa- 
vent pas  se  conduire  par  elles-mêmes.  II 
fait  une  comparaison  de  la  résurrection  du 
Lazare  avec  la  joie  que  saint  Jean  ressentit 
dans  le  sein  de  sa  mère.  Le  premier  de  ces 
deux  miracles  eut  deux  effets  :  l'un  de  faire 
voir  publiquement  la  puissance  de  Jésus- 
Christ  ;  l'autre,  de  confondre  les  calomnies 
des  juifs. 


évoque  d'Are- 

Une. 


IV, 

(tr:is. 


s« 


CHAPITRE    LVIIl. 

Les  papes  Boniface  IV  [6l4l,  Dcusdedit  [616],  Bonifacc  V  [625j, 
Honorins  [638],  et  Jean  IV  [642]. 


1.  Le  Saint-Siège  ayant  vaqué  environ  un 
an  depuis  la  mort  du  pape  Sabinien,  arrivée 
au  mois  de  février  de  l'an  603,  on  élut  pour 
lui  succéder  Boniface  troisième  du  nom  , 
qui  mourut  huit  mois  et  vingt-trois  jours 
après  son  intronisation.  Pendant  son  ponti- 
ficat, il  obtint  '  de  l'empereur  Phocas  la  con- 
servation de  la  primauté  de  son  église  contre 
les  prétentions  des  patriarches  de  Constan- 
tinople.  Il  ne  nous  reste  de  lui  aucun  écrit; 
mais  nous  avons  un  précis  des  actes  du 
concile  qu'il  assembla  à  Rome,  où  il  fut  dé- 
fendu sous  peine  d'anathènie  de  parler  d'un 
successeur,  du  vivant  du  pape  ou  de  quel- 
que autre  évèque.  Après  plus  de  dix  mois 
de  vacance,  le  Saint-Siège  fut.  rempli  par 
Boniface  lY.  Ce  fut  à  lui  que  saint  Colom- 

'  Et  certe  ad  œternum  de  hac  impietate  trium- 
phum  scriptum  est  hoc  opus.  Photiuf,  Cod.  85, 
pag.  206. 

'  Photius,  Cod.  172,  pag.  1510. 

'  Pauhis  Diaeon.,  lih.  JV  Bist.  Langob.,  cap. 
XXX vu. 


ban  ■'  s'adressa  pour  obtenir  permission 
d'observer  la  tradition  des  anciens,  parti- 
culièrement touchant  la  fête'  de  Pâques.  Il 
lui  écrivit  encore  sur  l'atïaire  des  Trois- 
Cliapitrcs.  Nous  n'avons  pas  les  réponses  de 
ce  pape.  Mellif,  évèque  de  Londies,  alla  à 
Rome  pour  traiter  avec  lui  des  atlaires  d'An- 
gleterre. Le  pape  fit  prendre  place  à  Mellit 
entre  les  évôcpies  d'Italie  dans  un  concile 
qu'il  tint,  et  on  l'on  régla  plusieurs  choses 
qui  concernaient  la  vie  et  le  repos  des  moi- 
nes. Nous  parlerons,  dans  l'article  des  Conci- 
les, du  décret  qui  fut  fait  en  celui-ci,  et  de 
la  lettre  de  ce  pape  au  roi  Ethelbert^  Boni- 
face  IV  mourut  en  61-4,  et  eut  pour  succes- 
seur Deusdcdit. 
2.  Il  était  Romain   de  naissance,   et  fils 

»  Epist.  1  Columb.,  tom  XII  Bibl.  Pal,,  pag.  24. 

5  Les  écrits  qui  nous  restent  de  B.miface  IV  se 
trouvent  au  tome  LXXX  de  la  Patrologie  latine, 
col  103  et  suiv.  Ils  y  sont  précédés  d'une  notice 
sur  ce  pape  tirée  du  Pontilical  d'Auastase.  (L'idi' 
leur.) 


Deoidedit. 


Ci6 


niSTOlRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


L.itr.  ,»on  d'Etienne  sousdiacre.  Son  pontificat  «dira 
1»"»;  "m,V-  près  de  trois  ans,  Il  aima  '  les  piètres  et  le 
''""■  clergé,  et  y  rctal>lit    l'ordre   ancien.    Nous 

avons  '  sous  son  nom  une  lettre  :\  Gordien, 
cvêque  de  Sdville,  où  il  est  déclaré  que,  sui- 
vant les  décrets  du  Saint-Siège,  des  person- 
nes mariées  qui  auraient  tenu  par  hasard 
leurs  enfants  sur  les  fonts  du  baptême,  doi- 
vent se  séparer,  et  peuvent  se  remarier. 
L'inscription  seule  de  cette  Lettre  en  fait  voir 
la  supposition,  puisque  ce  n'était  pas  Gor- 
dien, mais  saint  Isidore  qui  occupait  le  siège 
épiscopal  de  Scville  sous  le  pontificat  de 
Deusdedit.  Il  gouverna  cette  église  depuis 
l'an  000  jusqu'en  G 10^  et  ou  ne   voit  nulle 


Boniface  écri\it  sa  seconle  Lettre  à  celte 
occasion.  F]douin  (on  Edwin) ,  cinquième  • 
roi  de  Xorihumbre ,  ayant  envoyé  deman- 
der en  niniiaee  Edelljurge,s(i'tu'  d'Etiielbal- 
de,  roi  de  Gant,  on  lui  fit  réponse,  qu'il  n'é- 
tait pas  permis  de  donner  une  fille  chrétienne 
à  un  paycn.  Edouin  olTril  h  Elelluirge  hber- 
té  entière  de  l'exercice  de  sa  religion,  et  à 
tous  ceux  de  sa  suite,  deUième  qu'aux  prêtres 
et  aux  clercs,  ajoutant  qu'il  ne  refusait  pas 
de  se  faire  chrétien,  après  avoir  fait  exami- 
ner par  des  gens  sages  si  la  religion  chré- 
liennuc  était  la  plus  s^aiute  et  la  plus  digne 
de  Dieu.  Sur  celte  réponse,  on  lui  donna 
Edelburge  en  mariage.   Le  pape,    informé 


Bonifaco  Vi 
Sef  écrlu. 


part  qu'il  ait  e\i  pendant  ce  temps-là  aucun      des  bonnes  dispositions  du   roi  Edouin,  lui 
compétiteur.  Il  faut  ajouter  qu'on  ne  cou-      écrivit  '  pour  l'exhorter  à  embrasser  la  foi, 


comp 

naît  point  de  décret  du  Saint-Siège  qui  au- 
torise des  personnes  mariées  à  se  remarier 
avec  d'autres,  sous  prétexte  d'avoir  tenu 
leurs  enfants  sur  les  fonts ,  soit  exprès,  ou 
par  inadvertance.  Cela  est  absolument  con- 
traire à  la  doctrine  de  l'Eglise  '.  [La  lettre  et 
le  décret  qu'on  atlribuc  à  Deusdedit  se  trou- 
vent, avec  une  notice  tirée  du  Pontifical,  au 
tome  LXXX  de  la  Patrologie  latine,  col.  353 
et  suiv.] 

3.  Boniface  V,  successeur  de  Deusdedit, 
fut  ordonné  le  29  de  décembre  de  l'an  Gl"  \ 
Il  était  natif  de  Naples.  Pendant  son  pon- 
tificat, qui  fut  de  sept  années  et  quelques 
mois,  il  écrivit  trois  Lettres  sur  la  conver- 
sion des  Anglais.  La  première  est  à  Juste, 
qui ,  d'évèque  <lc  RoU'e  ou  Roohester,  était 
devenu  archevêque  de  Cantorbèry.  C'est  une 
réponse  à  la  lettre  qu'il  en  avait  reçue  ^  Il 
le  félicite  du  succès  de  ses  travaux  aposto- 
liques, et  l'exhorte  à  les  continuer,  l'assurant 
qu'il  en  recevrait  de  Dieu  la  récompense. 
Ensuite  il  déclare  qu'il  lui  envoyait  h;  pal- 
lium  pour  s'en  servir  dans  la  célébration 
des  saints  mystères,  et  qu'il  lui  accordait  le 
pouvoir  d'ordonner  des  évèques,  pour  faci- 
liter la  propagation  de  l'Evangile  parmi  les 
nations  qui  n'étaient  pas  encore  converties. 


par  la  considération  de  la  grandeur  du  vrai 
Dieu,  créateur  du  ciel  et  de  la  terre,  de  qui 
il  avait,  comme  tous  les  autres  princes  du 
monde,  reçu  l'autorité  royale;  et,  à  l'exem- 
ple d'EtlicIbalde  son  voisin,  et  de  sa  femme 
Edelburge,  il  lui  fait  sentir  toute  la  vanité 
des  idoles  et  de  leur  culte,  et  le  presse  de 
se  faire  l'égénèrer  dans  les  eaux  du  baptême, 
afiu  de  jouir  un  jour  de  la  gloire  dont  le  fera 
participant  le  Dieu  dont  il  aura  embrassé 
la  foi.  Dans  sa  troisième  Lettre,  qui  est 
adressée  à  la  reine  Edelburge  ",  il  prie  cette 
princesse  de  s'employer  de  tout  son  pouvoir 
à  gagner  à  Dieu  le  roi  son  époux.  En  même 
temps  il  la  félicite  de  sa  conversion,  dont  il 
dit  qu'il  avait  appris  des  nouvelles  par  les 
mêmes  personnes  qui  lui  avaient  appris  celle 
du  roi  Ethelbalde  son  frère. 

[Ces  trois  lettres  se  trouvent  au  tome  LX.VX 
de  la  PutroUiijie  latine,  col.  -435 ,  précédées 
d'une  notice  tirée  du  Liber  pont  i  fi calis.  Elles 
sont  suivies ,  comme  par  appendice  ,  d'une 
quatrième  du  même  pape,  adressée  Ajuste, 
archevêque  de  Canlorbèiy,  et  reproduite  d'a- 
près Mansi,  lom.  I  du  Snitplément  des  Conciles.] 

Avec  ces  Lettres,  le  pape  envoya  des  pré- 
sents au  roi  Edouin  et  à  la  reine  Edelburge; 
au  roi  inie  chemise  ornée  d'or  et  un  man- 


'  Tom.  V  Concil.,  pag.  1647.— »  ll)i.l.,  pag.  1C48. 

'  Aiif,'.  .Mai  il  publiv,  dans  le  VI''  vuluuie  «lu  Spi- 
cileg.  Rom.,  paj;.  113.  un  fragim-ut  iIp  la  Iclln-  de 
(iordien  à  Ueupiledil.  (lordicn  n'iUuil  point  rvOijnf 
(II!  ï5rvilli; ,  mais  bien  iH(>i|ue  d'I^'-spaKiie  ,  episco- 
;■«.<  llispaniaru'ii  ,  conune  [lorle  le  niannsrTii. 
li:ilisi  !■  IV;if;niclit,fi(iiditlipailr;in  l'a|iiiV'lndi'fi'liee 
di'  BO  marier  avcr  sa  conimî're  danslc  liapli'^nu',  ••(  de 
rexcominuiiicalion  iieiinHuclli;  iin'eueourt  le  eliré- 
\\f\i  qni  a  (•!-i!  ponlradcr  ce  mariage  à  ninjn?  ijii'il 


ne  fasse  une  digue  pthiitenoe.  11  y  parle  aussi  de 
la  défense  et  de  la  peiue  porti^es  conlre  celui  qui 
aura  pris  eu  mariage  sa  fille  spiriluellc  ou  l'aura 
donnée  il  son  fils.  Désornuiis  Idus  les  doutes  sur 
l'aulhenlicité  de  la  lellre  de  Deusdedit  à  lionlicii 
se  liouvenl  Icvc'-s.  (L'édUeur.) 

'  Toni.  V  Concil.,  pag.  ICIl. 

6  Tom  V,  pag.  tG58. 

«  Hed.i,  lib.  Il  Hist.,  cap.  ix  et  jt. 

•>  Toui.  V  Concil.,  p<ig.  IC59.-'  Ibid.,  pag.  IfiO  • 


[vil"  SIKCLE.] 


CHAPITRE  LVIII.  —  UONIFACE,  DlîUSDEniT,  ETC. 


il 


Honorine 
f^i  fait  pajie 
CD  626i 


S«  Ladre  \ 
I<aac  do  Ra- 

\CODft. 


LelO'O  3u\ 

éTéques  do 
Vtaétieotd  I- 
strie,  laf. 
IC8I. 


Iciiu;  à  la  rcino,  un  iiiir<Mi'  iTar^cnl  et  tin 
pcijjni'  d'ivoire  ^arni  d'or.  Edtn.in,  inslitiil 
et  convaincu  do  la  vt-ritë  pai'  l'ovèque  Tau- 
lin  qui  avait  suivi  Edeiburgc  i'i  la  cour,  re- 
nonça A  l'idolâlrit',  brisa  ses  idoles,  et  reçut 
le  baplème  la  onzième  année  de  son  règne, 
qui  était  l'an  027.  Mais  Bonilace  V  n'eut 
pas  la  joie  d'apprendre  une  si  agréable 
nouvelle,  étant  nioi't  le  25  d'octobre  625.  11 
est  fait  mention,  dans  la  Lettre  j^i  Juste  ',  de 
celle  que  le  roi  Ellielbalde  avait  écrite  k  ce 
pape  pour  lui  donner  avis  de  sa  conversion. 
Nous  u'avons  ni  celle  lettre,  ni  la  réponse 
de  Boniface. 

•4.  Après  sa  mort,  le  Saint-Siège  vaqua  six 
mois  et  dix-huit  jours,  au  bout  desquels  IIo- 
norius  ' ,  fils  de  Pétrone  consul ,  fut  choisi 
pour  le  remplir.  Il  était  de  Campanie.  Son 
ordination  est  marquée  au  quatorzième  de 
mai  62().  Il  gouverna  l'ijglisc  environ  douze 
ans,  pendant  lesquels  il  fit  Ijeaucoup  de 
bien  '.  Il  s'appliqua*  à  rinstruction  du  cler- 
gé, envoya  ^  des  apôtres  eu  Angleterre,  qui 
y  prêchèrent  l'Kvangile  avec  succès,  et  réu- 
nit à  l'Église  Aquilée  et  toute  l'Istrie,  séparée 
par  le  schisme  des  Trots-Chapitres  de'^ins  en- 
viron soixante-dix  ans. 

5.  Paid  Diacre  raconte,  dans  son  histoire 
des  Lombards,  qu'Adavalde,  roi  de  cette  na- 
tion, étant  tombé  eu  démence,  ses  sujets  le 
chassèrent  après  dix  ans  de  règne  avec  sa 
mère,  et  mirent  à  sa  place  Ariovalde.  Ce  ré- 
cit ne  peut  guères  s'accorder  avec  la  Lettre 
qu'Honorius  écrivit  an  patrice  Isaac,  exarque 
de  Ra  venue, pour  l'engager  à  remeltreAdaval- 
de  sur  le  trône  et  à  en  chasser  le  tyran.  Ce  Pape 
se  fùt-il  employé  pour  rendre  à  un  imbécile 
le  titre  et  l'autorité  de  roi?  Il  prie  Isaac,  aussi- 
tôt qu'il  aurait  rendu  aux  Lombards  leur  roi 
légitime,  d'envoyer  à  Rome  les  évèques  d'au- 
delà  du  Pô  qui  avaient  travaillé  à  le  dépos- 
séder, afin  de  ne  pas  laisser  impuni  le  crime 
qu'ils  avaient  commis  en  cette  occasion. 

G.  Fortuuat,  évcque  de  Grade,  mais  schis- 
matique,  avait  abandonné  cete  église,  et  em- 
portant avec  lui  tout  ce  qu'il  avait  pu  ,  était 
passé  chez  les  païens,  c'est-à-dii-e  chez  les 
Sclaves".  Le  pape  Honorius  envoya  des  gens 
au  roi  des  Lombards  pour  le  prier  d'obliger 
Fortunat  à  rendre  ce  qu'il  avait  emporté,  et 
fit  aussi  intervenir  la  république  de  Venise 
dans  cette  aU'aire.  En  même  temps  il  écrivit 


047 

aux  évoques  de  Vénétie  et  d'Istrie  d'ordon- 
ner i!vè(pie  de  Grade  Priniigeniiis,  sous-dia- 
cre régionairo  do  l'iilglise  romaine,  el  de  lui 
obéir  comme  à  leur  chef,  suivant  le  prescrit 
des  lois  ecclésiastiques.  Il  accorda  au  mê- 
me Primigenius  l'usage  du  Pallium.  Hono- 
rius donne  dans  cette  Lettre  le  titre  de  très- 
chrélicnne  ;\  la  république  de  Venise  ,  parce 
vju'olle  était  très-attachée  à  l'Église  romai- 
ne '',  et  qu'ellcavail  coutume  de  demander  son 
évêque  au  Sainl-Siége,  pour  n'être  pas  sur- 
prise par  les  schismatiqucs. 

7.  Les  deux  lettres  de  ce  pape  à  Sergius, 
patriarche  de  Constanlinople,  regardent  la 
question  d(!S  deux  volontés  cl  des  deux  opé- 
rations en  Jésus-Christ  Ml  en  sera  parlé  fort 
au  long  dans  l'article  de  Sergius.  Nous  re- 
marquerons seulement  ici  que  cet  évêque, 
ayant  adopté  la  doctrine  de  Théodore,  évê- 
que de  Pharan  en  Arabie,  qui  soutenait  que 
l'on  ne  devait  attribuer  t\  Jésus-Christ  qu'une 
seule  volonté  et  une  seule  opération,  à  cause 
de  l'unité  de  personne,  fit  tout  ce  qui  dépen- 
dait de  lui  pour  la  faire  approuver  au  Pape. 
Il  lui  écrivit  à  cet  effet  une  grande  lettre,  où, 
mêlant  la  ruse  avec  le  mensonge,  il  établis- 
sait l'erreur  du  monothélisme,  en  aflectant 
d'établir  la  vérité.  Honorius,  qui  n'était  point 
en  garde  contre  les  artifices  de  Sei-gius, 
et  qui  ne  devait  point  y  être,  parce  que 
ce  patriarche  était  dans  la  communion  de 
toutes  les  églises,  et  qu'il  n'avait  encore 
rien  écrit  pour  la  défense  de  la  nouvelle 
hérésie,  répondit  à  sa  lettre,  que  ne  voyant 
point  que  les  conciles  ni  l'IJcriture  nous 
autorisassent  à  enseigner  une  ou  deux  opé- 
rations, il  confessait  une  seule  volonté  en 
Jésus- Christ ,  parce  que  la  Divinité  a  pris 
non  pas  notre  péché,  mais  notre  nature,  telle 
qu'elle  n  été  créée  avant  que  le  péché  l'eût  cor- 
rompue. Il  ajoutait  :  «  Que  Jésus-Christ soitun 
seul  opérant  par  la  divinité  et  l'humanité,  les 
Ecritures  en  sont  pleines  ;  mais  de  savoir  si,  à 
cause  des  œuvres  de  la  divinité  et  de  l'humanité, 
on  doit  dire  ou  entendre  une  opération  ou  deux, 
c'est  ce  qui  ne  doit  point  nous  intéresser,  et  nous 
le  laissons  aux  grammairiens.  »  Ces  paroles 
montrent  clairement  qu'Honorius  ne  confes- 
sait ime  seule  volonté  en  Jésus-Christ ,  que 
parce  qu'il  ne  voyait  pas  qu'on  dût  en  ad- 
mettre deux  contraires  l'une  à  l'autre,  com- 
me il  y  en  a  deux  dans  l'homme  pécheur, 


\.PMrf  -^iir 
la'iiM'^tiondj» 
deux  TolûDtés. 


'  Tom.  V  Conci?.,  pas.  le.'iS.- 
pag.  1G77.  —   3  Ibid.   —  >  Ibiil. 


*  ïom.  V  Concil.,      Hist.,  cap.  vu.  —  "  Tom.  V   Concil.,  pag.  1681.  — 
—   5  Beda,  tib.  III       "  Ibid.,  pag.  1682.  — «  Ib.  et  tom.  Vi.pag.  617  etsuiv. 


k 


C48 


niSTOTRE  Gt-WÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLt::SIASTIOURS. 


LfUredllo- 


LeKrAàBo* 
nnrIUR  évCouo 
do    Caatûrbé- 


où  la  volont(5  de  l'espri".  est  combaltue  par  la 
volonté  de  hitliair;  qu'an  surplus  il  ne  voulut 
point  décider  la  question,  la  ir).'ai'laul  com- 
me du  ressort  des  ^'rauiniairicns,  dans  le 
sens  où  Sergius  semlilait  la  propo?  -r.  Le 
pape  Jean  IV,  qui  'était  diacre  de  l'Édise 
romaine  sous  le  pontificat  d'IFonnrius,  el  plus 
au  fait  que  porsoime  sur  le  vrai  sons  de  sa 
Lettre,  dit  :  Mon  '  prédéccssettr  a  enseigne  qu'il 
n'y  a  jjoint  en  Jésus-C/irist  deux  volontés  con- 
traires, comme  en  rwus  autres  p^clieurs  :  ce  que 
quelques-uns  ont  tourné  à  leur  propre  sens,  en  le 
soupçonnant  d'avoir  enseigné  une  seule  volonté  de 
sa  divinité  et  de  son  humanité  :  ce  qui  est  en- 
tièrement cmitraire  à  la  vérité.  La  pureté  de 
la  foi  d'Honorius  paraît  encore  dans  la  con- 
clusion de  sa  Lettre,  où  il  exhorte  Serj^ius  a 
prêcher  les  vérités  constantes  qu'il  prêchait 
lui-même,  savoir  :  qu'il  n'y  a  qu'un  seul  Fils 
de  iJteu,  vrai  Dieu,  qui,  en  deux  natures  dis- 
tinctes, a  des  ojji}rations  divines  et  humaines. 
Aussi  Sergius,  qui  ne  trouvait  pas  dans  la  ré- 
ponse de  ce  Pape  de  quoi  autoriser  son  er- 
reur, eut  recours  à  un  autre  moyen,  qui  fut 
d'engager  lléraclius  *  à  publier  son  édit  ou 
ecthèse  en  faveur  du  monothélisme,  et  de  le 
faire  souscrire  dans  une  assemblée  d'évê- 
ques,  où  il  employa,  pour  les  gagner,  les 
surprises,  les  persécutions,  les  violences. 

8.  Honorius  ',  informé  de  la  conversion 
d'Édouin,  roi  de  Northumbre,  lui  écrivit  pour 
l'en  féliciter,  et  l'exhorter  à  la  persi'vérauce. 
H  lui  conseille  la  lecture  des  o'uvres  de  saint 
Grégoire  pape.  Fuis,  répondant  à  ce  que  ce 
prince  lui  avait  demandé  pour  l'ordination 
des  évêques  de  son  royaume,  il  dit  :  «  Nous 
vous  l'accordons  volontiers ,  et  nous  en- 
voyons aux  deux  méiropolilains  Honorius  et 
Paulin,  A  chacun  un  pallium,  afin  que,  quand 
Dieu  ictirera  l'im  des  deux,  l'autre  puisse  lui 
donner  un  successeur  en  vertu  de  celle  Let- 
tre,  ce  que  nous  donnons  à  la  distance  des 
lieux  :  »  C'est-à-dire,  afin  qu'il  ne  fallût  pas 
recourir  à  Rome  pour  l'ordination  d'un  nou- 
veau métropolitain. 

9.  Cet  Honorius  était  le  cinciuième  ëvéquc 
de  Uorovcrne ,  ou*  Canlorbéry,  depuis  saint 
Augustin.  Il  s'était  joint  a  i:<louin  pour  de- 
mander le  privilège  dont  nous   venons  de 


Leur»  «as 
évoques    d  B* 


parler.  Sa  demande  lui  fut  accordée  par  le 
même  motif,  c  est-'i-dire,  à  cause  de  l'éloi- 
gnement  des  lieux.  Le  Pape  lui  envoya  a  cet 
ell'et  deux  paljiums,  l'un  pour  lui,  et  l'aulre 
pour  Ttivèque  d'York.  Ces  deux  lettres  sont 
du  11  juin  633,  indictiun  septième. 

10.  Sur  l'avis  que  les  Écossais  on  Hiber- 
nois  continuaient  do  suivre  leurs  anciens 
usages  touchant  la  céli'bration  de  la  Pâque', 
Honorius  leur  écrivit  pour  les  ramener  à  la 
pratique  de  l'Église  universelle.  Mais  sa  let- 
tre n'eut  ])as  l'elfel  qu'il  en  attendait. 

H.  Il  écrivit  k  Jean,  André  ,  Etienne  et 
Donal,  évoques  d'Lpire*,  qu'il  avait  envoyé  •'''*• 
le  pallium  h  Ilypatius  qu'ils  avaient  ordon- 
né évèque  deNicople;  ajoutant  qu'llypatius, 
étant  soupçonné  d'avi  ir  eu  pari  à  la  mort 
de  Soféricus,  son  prédécesseur ,  il  voulait 
que  ,  lorsque  la  paix  le  permettrait,  il  vint  à 
Rome  pour  se  purger  de  ce  soupron  devant 
la  confession  ou  le  tombeau  de  saint  Pierre. 

12.  Sa  dernière  lettre,  qui  est,  comme  la  «-oiç.o  •« 
préct''dente,  tinfede  la  Collection  des  Canons  str^iu». 
tlu  cardinal  Dcusdodit.  est  adressée  au  sous- 
diacre  Seri;ius  ".  L'évèque  de  Cagliari  avait 
un  dilférend  avec  quelques-uns  de  ses  clercs 
qui,  pour  le  mettre  dans  son  tort,  s'étaient 
pourvus  :\  Rnme  par  des  mémoires  contre 
lui.  Le  Pape  cita  les  parties.  L'évèque  com- 
parut ;  mais  les  clercs,  se  sentant  coupables, 
ne  comparurent  point.  Honorius  les  envoya 
chercher  par  un  défenseur;  et  ils  étaient 
déjà  end)arqués ,  lorsqu'un  nommé  Théo- 
dore ,  gouverneur  de  Sardaigne ,  s'en  saisit 
et  les  envoya  en  Afrique  pour  les  soustraire 
à  la  juridiction  du  Pape.  Cela  obligea  Hono- 
rius de  faire  demander  justice  au  préfet  du 
prétoire  par  le  sous-diacre  Sergius ,  à  qui  il 
envoya  avec  sa  lettre  la  loi  de  Valcntinien 
et  de  Tliéodose,  alin  qu'il  en  fit  part  an  pré- 
fet cl  à  toutes  les  autres  personnes  qui  pou- 
vaient prendre  intérêt  dans  cette  alfaire. 
Cette  loi  était  nue  confirmation  des  privi- 
lèges du  Sailli-Siège.  On  trouve  dans  le 
tome  XII'  de  la  Uiltliothvque  des  Pères,  à  la 
page  21-4,  une  épigramme  sous  le  nom  de 
ce  pape  :  l'étonnemeut  des  apôtres,  au  mo- 
ment où  ils  virent  monter  Jé'sus-Clirist  au 
ciel,  en  fait  le  sujet.  [Dans  le  tome  LXX.\  de 


'  l'rœdictus  ergo  privdecessor  meus  dncens  de 
mysterio  incamnlinnis  Chrisli  dictbal  non  fuisse 
in  eo  sicul  in  nobis  pcccatorihus  mcnlis  <■(  curiiis 
conlranas  vi/lunlnlts  :  ounii  quidam  ad  pruiirium 
sensum  cnnverlentcs,  Uivinilulis  ejus  cl  Ituiiiant- 
talis   unam   cuni   rotunlalem   docuisse  suspicali 


suiil.  Joan.,  Episl.  IV,  ad  Constantin.,  loin.  V  Con- 
cit.,  iiuji.  noi. 

^  Concil.  l.aler.,  sc<;rct.  3,  toui.  VI,  png.  202. 

'  ïniii.  V  ConcU.,  pa«.  lliSi.—  *  Toiii.  V  (■■•'■■,l 
[mil.  IU8».  -'  Bi!d.,  Illi.  Il  Ilist.,  cap.  \i.\. 

"  Toiii.  V  Covcil.,  p-ip.  tiii)5.  —  '  Ibid. 


rvii'  sii;f.i.E.]        CHAPITRE  LVIIl.  —  BOXIF 

lii  l'dtroingie  latine,  col.  IG.'l  cl  siiiv. ,  on  trouve 
niio  nnlice  stir  Honoriiis  d'apros  le  Liber 
l'imtifirnlis ,  seize  lellres  on  frapjmenls  :1c 
lettres  de  ce  pape,  deux  décrets,  des  vers 
sur  l'Ascension  ,  un  jirivili'ire  donné  au  mo- 
nastère de  Hobljio.  L'appendice  qui  suit  con- 
tient un  extrait  de  deux  lettres  de  saint 
>faxime  pour  la  défcMise  d'Hniioritis  ,  la  let- 
tre d'Anastase  le  DililinIlK'caiic  pour  la  mê- 
me défense  ,  et  enfin  l'épitaplie  d'IIonorius. 
A  la  fin  ilu  volume  on  trouve  une  disserta- 
tion critique  du  Père  Marcollin  Mnlkernbrelir 
sur  la  question  de  savoir  si  Hoiiorius  a  ('té 
condamné,  en  G80,  parle  sixième  concile  gé- 
néral.] 
Ltiiredii  13.11  n'est  pas  surprenant  nue  nous  n'avons 
meam  Ecoi-  aucun  monumeut  du  iiontituat  de  Séverm  , 

uls. 

successeur  dTlonorius  ,  puisqu'il  ne  gouver- 
na l'Kfrlise  romaine  que  deux  mois  et  quatre 
jours'.  Plusieurs  prêtres,  abbés  et  docteurs 
d'entre  les  Ecossais  lui  écrivirent  ;  mais  il 
était  mort,  lorsque  leur  lettre  arriva  t\  Rome. 
Le  clergé  de  celte  ville  ,  qui  avait  la  princi- 
pale autorité  pendant  la  vacance,  fît  une  ré- 
ponse qui  porte  en  tête  les  noms  des  chefs 
des  trois  ordres  du  clergé,  savoir,  d'Hilaire, 
archiprètre  et  lieutenant  du  saint  Siège  apos- 
tolique ;  de  Jean  ,  diacre  et  élu  évéque;  de 
Jean,  primicier  et  lieutenant  du  Saint-Siège  ; 
et  de  Jean,  conseiller  du  Siège  apostolique. 
On  voit,  par  le  contenu  de  leur  lettre,  que 
les  prêtres  et  abbés  écossais  avaient  averti 
le  pape  Séverin,  qu'il  y  en  avait  encore  par- 
mi ceux  de  leur  nation  qui,  ;\  l'imitation  des 
juifs ,  observaient  la  Pâque  le  quatorzième 
de  la  lune,  et  qui  renouvelaient  l'hérésie  de 
Pelage,  en  soutenant  que  l'homme  pouvait 
être  sans  péché  par  sa  propre  volonté,  et 
non  par  la  grâce  de  Dieu.  Le  clergé  rejette 
ces  deux  erreurs,  comme  ayant  été  détruites 
depuis  longtemps.  Il  dit  sur  la  seconde,  qu'on 
ne  peut  la  faire  re%ivre  sans  blasphème  et 
sans  folie,  puisqu'il  n'est  pas  possible  que 
l'homme  soit  sans  péché  ;  que  Jésus-Christ 
seul ,  le  Médiateur  de  Dieu  et  des  hommes, 
a  été  conçu  et  mis  au  monde  sans  péché  ; 
que  tous  les  autres  hommes  ont  du  moins  le 
péché  originel,  selon  ces  paroles  du  Pro- 
tmi.  i,,7.  phète  :  J'ai  été  forme  dans  l'iniquité,  et  ma 
mère  m'a  conçu  dans  le  péché.  Cette  lettre  est 
mise  dans  le  recueil  des  Conciles  comme 
étant  du  pape  Jean  IV  ,  sans  doute  parce 


ACE  IV,  lEUSnEDIT,  ETC.  OW 

qu'on  a  cru  qu'il  l'tait  désigné  par  Jiun,  dia- 
cre, évèqtie  élu,  marqué  avec  les  autres  du 
clergé  de  Home  au  nom  desquels  elle  fut 
écrite.  [On  la  trouve  au  tome  l,.\.\X  de  la 
Palrolof/ie  latine,  col.  601  et  suiv.  ,  oîi  elle 
est  reproduite  d'après  Mansi.] 

14.  Après  une  vacance  de  quatre  mois  et  ■  i"«  iv, 
vnigt-neiil  j(uirs  ,  Jean  IV  tut  ordonne  pape 
le  dernier  de  di'cembre  (i'iO.  Il  (Hait  de  Dal- 
matie,  fils  de  Venance  scholastique  ,  et  oc- 
cupa le  saint  Siège  im  an,  neuf  mois  et  dix- 
huit  jours.  Il  tint  un  concile  à  Home,  où  l'hé- 
résie des  nionotlu'lites  fut  condamnée.  Elle 
était  parfaileujent  connue  en  cette  ville  par 
l'ecthèse  ou  èdit  d'Héraclius ,  qui  avait  été 
envoyé  au  pape  Séverin  :  quoiqu'il  portât 
le  nom  de  l'empereur,  il  était  de  la  compo- 
sition de  Sergius ,  patriarche  de  Constanti- 
noplc  .  L'ecthèse  ne  contenait  rien  que  d'or- 
thodoxe sur  le  mystère  de  la  Trinité  ;  mais, 
en  expliquant  celui  de  l'hicarnalion,  elle  dé- 
clarait nettement  qu'on  ne  devait  confesser 
en  Jésus-Christ  qu'une  seule  volonté  :  ce  qui 
était  rii(''résie  formelle  des  mouothéliles , 
ainsi  appelés  des  deux  mots  grecs  monos  seul, 
et  t/ielesis,  volonté. 

13.  Sergius  ,   étant  mort  quelque  temps      sa  Leiire 

,  ,.         .  ,    ,  '    l'empsrenr 

après  la  publication  de  lecthese  ,  eut  pour  unsiamin. 
successeur  dans  le  patriarchat  de  Constan- 
tinople  un  nommé  Pyrrhus,  prêtre  et  moine 
de  Chrysopolis  près  de  Chalcèdoine.  Ami 
de  Sergius  et  infecté  de  la  même  erreur,  il 
fit  tous  ses  efiorts  pour  engager*  tous  les 
évêques  à  souscrire  l'ecthèse,  écrivant  de 
tous  côtés  en  Occident  qu'elle  contenait  une 
doctrine  approuvée  par  le  pape  Honorius. 
Jean  IV,  ayant  donc  appris  la  mort  de  l'em- 
pereur Héraclius,  et  que  Constantin  ou  Cons- 
tant son  fils  lui  avait  succédé,  lui  écrivit  une 
apologie  pour  son  prédécesseur,  où  il  com- 
bat en  même  temps  l'hérésie  des  monothé- 
lites.  Il  dit  que,  Sergius  ayant  écrit  à  IIouo- 
rius  que  quelques-uns  admettaient  en  Jésus- 
Christ  deux  volontés  contraires,  ce  pape  répon- 
dit que  Jcsus-Christ,  qui  est  tout  ensemble 
Dieu  parfait  et  homme  parfait,  étant  venu  ré- 
parer la  nature  humaine,  a  été  seul  conçu  et 
est  né  sans  péché  ;  qu'ainsi  il  n'a  jamais  eu 
deux  volontés  contraires  ,  et  que  la  volonté 
de  sa  chair  n'a  point  combattu  contre  la  vo- 
lonté de  son  esprit  ;  que  nous  avons  ces  deux 
volontés  contraires  eu  conséquence  du  pé- 


'  Toin.  V  Concil.,  pag    17.S7,  et  Betla,  lib.  UHist., 
cap.  XIX. 


2  Toni.  V  Concil.,  pag,  17.58. 


HlSTOmE  GÉNÉRALK  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


650 

ché  d'Adam  ;  mais  que  Notre-Sei^neur  n'a 
pris  qu'une  volonté  naluielle  de  l'iiumanité, 
dont  il  était  absolument  le  maître  coiUine 
Dieu.  C'est  ce  qu'il  prouve  jKir  plusieurs  pas- 
sages de  l'Écriture,  où  nous  voyons ,  d'un 
côté ,  que  tous  ceux  qui  naissent  d'Adam 
éprouvent  la  résistance  de  la  chair  à  l'esprit, 
et  un  combat  entre  la  volonté  de  l'esprit  et 
celle  de  la  chair;  et  de  l'autre  ,  que  Jésus- 
Christ  est  Dieu,  la  Vertu  et  la  Sagesse  de 
Dieu,  incapable  par  conséquent  de  deux  vo- 
lontés contraires.  Ces  principes  posés,  il  sou- 
tient que  c'est  donc  à  tort  que  quelques-uns, 
tournant  à  leur  propre  sens  les  paroles  d"Ho- 
norius ,  l'ont  accusé,  d'avoir  dit  une  seule 
volonté  de  la  divinité  et  de  l'humanité.  «  Je 
voudrais,  ajoute-t-il,  qu'ils  me  répondissent 
selon  quelle  nature  ils  disent  que  Jésus-Christ 
n'a  qu'une  seule  volonté.  Si  c'est  seulement 
selon  la  nature  divine,  que  diront-ils  de  son 
humanité  ?  Car  il  faut  reconnaître  qu'il  est 
homme  parfait,  pour  n'être  pas  manichéen. 
Si  c'est  seulement  selon  son  humanité  qu'ils 
lui  attribuent  cette  unique  volonté  ,  qu'ils 
prennent  garde  d'être  condamnés  avec  Pho- 
tin  et  Ébiou.  S'ils  disent  que  les  deux  na- 
tures n'ont  qu'une  seule  volonté,  ils  confon- 
dent non-seulement  les  volontés,  mais  les 
natures  ;  ce  qui  est  l'hérésie  des  eutychiens 
et  des  sévériens.  »  Il  assure  comme  une 
chose  indubitable  el  qui  n'avait  pas  besoin 
de  preuve  ,  que  tous  les  Pures  orthodoxes 
ont  confessé  unanimement  deux  volontés  et 
deux  opérations  en  Jésus-Christ ,  de  même 
que  deux  natures  ;  puis  il  se  plaint  de  ce  que 
l'on  avait  contraint  les  évêques  de  souscrire 


à  un  écrit  qui  tendait  à  détruire  la  doctrine 
de  la  lettre  de  saint  Léon  à  Flavien  et  du 
concile  de  Chalcédoino.  C'était  l'eclhèse  d'Hé- 
raclius.  Il  prie  Dieu  d'inspirer  à  Constant , 
comme  au  défenseur  de  la  foi,  de  supprimer 
et  de  décliirer  cet  écrit  qui  avait  été  alliché 
publiquement ,  et  qui  avait  scandalisé  non- 
seulement  tous  les  Occidentaux,  mais  le  peu- 
ple même  de  Constanlinople. 

16.  Isaac,  évêque  de  Syracuse,  avait  de- 
mandé à  Jean  IV  si ,  pour  le  repos  et  la  tran- 
quillité des  moines,  on  devait  leur  permettre 
de  choisir  et  de  mettre  dans  les  églises  qui 
leur  avaient  été  données  par  des  évêques 
catholiques  tels  prêtres  qu'ils  voudraient.  Le 
Pape  ',  après  avoir  pris  conseil,  répondit  que 
cela  se  devait  faire  ainsi,  conformément  aux 
lois  divines  et  humaines,  el  à  l'intention  des 
donateurs,  puisqu'il  est  à  présumer  que  ceux 
qui  ont  donné  le  plus,  savoir  les  églises  mê- 
mes, ont  aussi  accordé  le  moins ,  qui  est  de 
choisir  des  prêti'es  pour  la  desserte  de  ces 
églises.  Il  veut  toutefois  que  ,  si  ces  prêtres 
font  quelque  chose  contre  l'évèque,  ils  en 
soient  punis  par  le  synode. 

[Les  lettres  de  Jean  IV  se  trouvent  repi-o- 
duites,  d'après  Mansi ,  au  tome  LXXX  de  lu 
Palrologie  latine,  col.  G02  et  suiv.  11  y  a  en 
outre  un  fragment  d'une  lettre  à  Bulcrède  , 
roi  des  Saxons.  Le  pape  y  exhorte  le  roi  à 
punir  ceux  de  ses  sujets  qui ,  contrairement 
au  décret  de  saint  Grégoire,  nécessairement 
connu  de  cette  nation ,  osent  «'pouser  des 
religieuses  el  des  femmes  consacrées  à  Dieu. 
Ce  fragment  a  été  conservé  par  Ives  de 
Chartres.] 


Ltllr»»lé. 
rt-iuf  de  Sj- 
ne  lue. 


CHAPITRE    LIX. 

Jean  Philopoims  |610l,  Théodosc,  Conon,  Eugène,  Thémistius,  Théodore, 
Nicias,  Léontius  et  Georges  Pisidès  [vers  le  mémo  temps.) 


(Écrivains  grecs.) 


Jcio  Vlllo- 
t>OBu*.  ^e^ 
ètudei.  Il  ftl 
■  arriir  it  llié- 
r*«le  det  Tti- 
(Mlln. 


1.  Le  surnom  de  Philoponus  que  l'on 
donne  à  Jean,  lui  est  venu  de  .sa  grande  as- 
siduité au  travail.  Né  à  Alexandrie  ,  il  y  en- 
seigna' la  grammaire  ;  mais  il  ne  borna  pas 
In  ses  études.  Il  se  rendit  habile  dans  la  phi- 
losophie de  Platon  et  d'Aristote  ;  ot,  poussant 
plus  loin  son  désir  do  Siivoir,  il  .'•IihIIm   I;i 


théologie  chrétienne  :  car  il  f.iisnil  profes- 
sion du  christianisme.  Celte  étude  fut  potir 
lui  un  écueil,  comme  elle  l'avait  été  pour 
beaucoup  d'autres  ,  qui  étaient  passt'-s  do 
l'école  de  Platon  et  d'.\rislote  dans  ri'ïglise 
catholique.  N'oulant  mesurer  la  L'randeur  de 
nos  mystères  sur  ses  idées  philosoiiliicincs  , 


'  Toni.  V  foncil.,  pag.  1772. 


'  Plioliiis,  cod.  55. 


»[vn'sif:CLE.]      CIIAPÎTRE  LIX.  —  JEAN  PHILOPOXUS,  TnhJODOllE,  ETC. 


651 


Ses  écrilsl 
Mn  CoiiiiiirQ* 
Ulra  Mir  les 
«Ix  jours. 


S<»K|ula 


il  dfviiit  le  rlipf  d'une  nouvelle  secte  qu'on 
appoki  (les  Tritln'itcs ,  parce  qu'admcttanl 
dans  la  sainte  Trinili'  trois  natures  parlicu- 
lii-res  outre  la  commune,  ils  a(Im<'ltaienl  mi- 
ccssairemenl  (rois  dieux.  IMiiioponus  com- 
mença à  enseigner  celle  doclrine  vers  l'un 
TiK).  Il  vivait  encoie  du  t(un|>s  de  Seru;ius, 
patriarche  de  Cons'.anlinople ,  ;\  qui  il  dcdia 
quelques  onvrai^es.  Ainsi  l'on  ne  peut  mettre 
sa  mort  pins  tôt  qu'en  l'an  610,  auquel  Ser- 
gius  fut  ordonné  évoque  de  cette  ville  ;  mais 
il  peut  avoir  vécu  quebiuos  années  au-delà. 
2.  I.e  plus  considérable  de  ses  écrits  est 
son  Commentaire  sur  l'ouvrage  des  six  jours 
de  la  création  :  c'est  cehii  qu'il  d(''dia  à  Scr- 
gius,  patriarche  de  Coustantinople,  parce 
qu'il  l'avait  entrepris  ;\  sa  pi'ière.  Pholius'  dit      des  anciens  Pères,  tom.  XII,  pag.  610. 


était  la  veille  de  la  P.lque  légale,  et  qu'il  ne 
mangea  avec  ses  disciples  ni  l'agneau  |)as- 
cal,  ni  des  azymes.  Il  s'oljjecte  (pie  le  Sau- 
veur donna  l'oucliaristie  .'i  ses  apôtres  le 
premier  jour  des  azymes,  auquel  on  immo- 
lait l'agneau  pascal.  A  quoi  il  répond  (jue 
cela  ne*  peut  être,  puisi[uc,  si  .Jésus-Christ 
avait  consacré  l'eucharislie  avec  du  pain 
azyme,  cela  se  ferait  encore  de  même,  et 
non  pas  avec  du  pain  fermenté,  dont,  en 
eil'et,  les  Juifs  ne  se  servaient  plus  dès  le 
premier  jour  des  azymes.  Ce  raisonnement 
de  Pliiloponus  fait  voir  du  moius  que  de  son 
temps  les  Grecs  consacraient  avec  du  pain 
fermenté.  [La  dispute  sur  la  Pàque  est  en 
srec  et  en  latin  dans  Gallaïul,  Bibliothèque 


qu'il  s'y  est  surpassé  pour  le  style,  qui  est 
pur  et  clair;  et  qu'autant  il  se  conforme  dans 
ses  explications  à  celles  de  saint  Basile,  au- 
tant il  est  oppose  à  celles' de  Théodore  de 
Mopsueste.  Philoponus  s'y  applique  à  mon- 
trer- que  Moïse  a  raconté  l'histoire  de  la 
création  d'une  manière  simple  et  conforme 
à  ce  quise  voit  dans  la  nature.  Son  Commen- 
taire fut  imprimé  ;\  Vienne  en  1630,  in-4°, 
par  les  soins  du  P.  Cordier,  avec  le  Traité  ou 
la  Dispute  sur  la  Pàque.  [Ce  dernier  traité  se 
trouve  aussi  dans  Galland,  Bibliothèque  des 
anciens  Pères,    tom.  XII,  pag.  610.] 

3.  Il  n'en  est  rien  dit  dans  Photius,  à 
moins  qu'on  ne  veuille  entendre  de  Philo- 
ponus ce  qu'il  dit  '  d'un  auteur  qu'il  ne 
nomme  pas,  qui  avançait,  dans  un  traité  sur 
la  Pàque,  que  Jésus-Christ  avait  toujours  ob- 
servé la  Pâque  légale,  excepté  en  l'année  de 
sa  mort.  Cela  se  trouve ,  en  effet ,  dans  la 
Dispute  que  le  P.  Cordier  a  donnée  sous  le 
nom  de  Philoponus  ;  et  ce  qui  fait  voir  qu'elle 
est  de  lui,  c'est  que,  sur  la  fin,  l'auteur  cite 
son  Commentaire  sur  l'ous'rage  des  six  jours. 
Sur  ce  pied-là,  il  faudra  dire  que  Photius  a 
cité  l'ouvrage  de  Philoponus  sur  la  Pàque, 
sans  savoir  qu'il  fût  de  lui.  Philoponus  y  en- 
seigne que  Jésus-Christ  fit  en  l'année  de  sa 
mort  la  Pâque  le  treizième  de  la  lune,  qui 


4.  Le  livre  f/e  l'Eternité  du  monde  ai  \\m  Livre  de 
réfutation  de  celui  que  Procle  avait  composé  LondT"  ''" 
sur  la  même  matière  contre  les  chrétiens.  Il 
y  répond  à  toutes  les  objections  de  ce  phi- 
losophe, qui  soutenait  que  le  monde  était 
éternel,  et  fait'  voir  qu'encore  qu'il  se  vantât 
de  posséder  toutes  les  sciences  des  Grecs,  il 
n'en  avait  qu'une  connaissance  très-impar- 
faite. Cet  ouvrage  fut  imprimé  à  Venise  eu 
lo3a  en  grec,  à  Lyou  en  1337  en  latin,  delà 
traduction  de  Jean  Mahot ,  [dans  la  Biblio- 
thèque des  anciens  Pères  de  Galland,  au 
tome  XII,  pag.  472.  en  grec  et  en  latin, 
d'après  l'édition  de  Cordier,  mais  plus  cor- 
rect :  beaucoup  de  passages  y  sont  réta- 
blis.] 

3.  Nous  avons  plusieurs  ouvrages  de  Phi- 
loponus qui  ont  plus  de  rapport  aux  belles- 
lettres  et  à  la  philosophie  qu'à  la  théologie  ; 
savoir,  un  livre  des  Dialectes  des  Grecs,  im- 
primé en  grec  et  en  latin  à  Paris,  en  1521  ;  à 
Venise  ,  en  1323,  et  à  Bàle  ,  en  1332"  ;  des 
Commentaires  sur  les  Analytiques  d'Aristote, 
à  Venise,  en  1304, 1336,  1384  ;  un  livre  de  la 
Génération  de  l'homme,  à  Venise  ,  en  1327  ;  des 
Commenlaitvs  sur  les  livres  de  l'âme,  à  Venise, 
en  1333,  et  à  Lyon,  en  1338;  sur  les  cinq  li- 
vres de  la  Génération  des  animaux,  à  Venise,  en 
1326;  sur  les  trois  livres  des  Météores,  à  Ve- 


Sos  écrils 
sur  dc-i  maliè* 
res  jtroraoes. 


i  Pliotiu.s,  cod.  -13.  —  -  Ibiil.,  cod.  2i0. 

'  Pliotius,  cod.  Il 6. 

*  Xam  nihil  horuin  in  cœna  conligit,  ut  jam 
dixi;  neque  azymuin  proprii  corpovis  anUlypum 
discipulL':  suis  Cirislus  dédit:  nain  et  hoc  eliam 
nunc  finrel.  Si  aiitem  illa  fuisset  prima  dies  azy- 
morum,  non  potuisset  reperire  ferinentaluin.  l'iii- 
lopon.,  Disput.  de  Paschate. 

■'  Suiilas,  in  Proclo. 

^  Outre  CCS  vditous,  ou  cite  une  éilitiou  faite  p;ir 


Aide  Romain  à  Venise,  en  1406,  iu-fol.  ;  1312,  1340, 
1537,  iii-l»,  pareillement  i  Venise,  chez  Aide  ;  à  Bftle, 
eu  137i,  in-l'ul.,  à  la  (in  du  Dietioiiuaire  grec  et  la- 
tin et  ilaus  l'appendice  ilu  Trésor  grec  de  llcLiri 
Ktieiiiie,  1G16,  1C.2S,  ItiSu,  iu-ful.;  daiH  le  Lexique 
Scapula  à  liâtes;  en  1826,  in-fol.,  à  Londres  ;  daus  le 
Trésord'Étienne,  à  Paris  1830,  chez,  Didot.  (L'édil.) 
On  attribue  ,à  .loan  Philoponus  un  opuscule  sur 
la  sigQJflcation  des  i-aroles  que  l'on  trouve  sous 
le  n'im  de  Cyrille.  (L'éditeur.) 


652 


msToniE  GKNi':nALE  des 


S^'-    no  Tri- 
ges  perdus. 


nise  ea  1331  ;  sur  les  ijuatre  Itères  des  Phy- 
siques, iniprim>;s  à  Venise,  en  1327  et  loG'J; 
et  si/r  les  quatre  premiers  livres  de  la  Curiu- 
sité  naturelle  d'apprendre  dis  choses  secrètes, 
qui  furent  mis  sous  presse  dans  la  même 
ville,  eu  1553.  On  cile  deux  autres  écrits  de 
Philoponus  qu'on  dit  être  parmi  les  manus- 
crit? de  lu  Uililiollièqiie  de  Vienne,  savoir 
un  contre  les  acéphales,  divise;  en  17  chapi- 
tres', et  une  petite  Dissertation  sur  les  trois 
facultés  de  l'âme.  Dindorfa  publié  en  1823, 
àLcipsik,  un  ouvrage  in-8de  Jean  sur  le  ton. 
A  ni.'.  Mai  a  pulilié  en  grec,  dans  le  5/j(V(7. 
Hom.,  tom.  Il,  pag.  302-100,  une  introduc- 
tion au  commentaire  de  Jean  sur  l'Arithmé- 
tique de  Nicomaquc.  Ce  fragment  contient 
des  extraits  de   ])lusieurs  auteurs  anciens, 
entre  autres  d'Aristoclés,  d'Androcyde,  de 
Philolaiis,  etc.  Le  savant  éditeur  a  trouvé 
plusieurs  de  ces  ouvi'ages  inédits  conservés 
dans  une  traduction  syriaque  :  il  promettait 
de  les  publier,  il  n'a  pas  eu  le  temps  de  tenir 
sa  promesse.  Dans  le  tome  IIl  du  Spicileg. 
liom.,  pag.  730-741,  il  donne  une  notice  sur 
une  longue  lettre  de  ce  pliikisophe,  en  ré- 
ponse au  tiaité  que  l'empereur  Justlnien 
avait  adressé  aux  moines  d'Alexandrie  :  le 
philosophe  soutient,  par  des  raisons  philoso- 
phiques et  naturelles,  les  erreurs  monophy- 
siles.] 

6.  Photius  fait  mention  de  quelques  ou- 
vrages de  Philoponus,  dont  il  ne  nous  reste 
que  les  titres  ou  quelques  fragments  ;  un- 
traité  contre  la  Itésurrection,  où  il  préten- 
dait que  les  âmes  ne  reprendraient  pas  les 
mêmes  corps  auxquels  elles  avaient  été  unies 
en  ce  monde,  et  que  les  corps,  de  même  que 
le  monde  visible,  seraient  entièrement  dé- 
truits. Il  y  tournait  en  dérision  ce  que  les 
saints  Pères  ont  dit  de  la  résurrection  future. 
11  écrivit  uu^  petit  traité  où  il  attaquait  la 
doctrine  que  Jeau  le  Scolastique,  patriarche 
de  Constanlinople,  avait  établie  dans  un  dis- 
cours sur  la  sainte  et  consubstantielle  Tri- 
nité. Il  en  composa  un  autre  contre  l'ou- 
vrage deJamhlii[iic  \n[\\\\\é  des  Simulacres  et 
des  Idoles.  Ce  philosophe  avait  entrepris  de 
montrer  que  les  idoles  tenaient  de  la  Divi- 
nité, et  que  les  dieux  les  remplissaient  de 
leur  présence.  C'est  ce  que  réfutait  Philo- 


AUTEFRS  ECCLÉSIASTIQUES. 

ponus ,  mais  quelquefois  par  des  arguments 
qui  n'avaient  qu'un  rapport  très-éloigné  à 
son  sujet.  Suidas*  parle  d'un  livre  de  Philo- 
ponus contre  Sévère,  sans  en  marquer  la 
matière.  Photius  le  traite'  d'insensé,  pour 
avoir  osé  écrire  contre  le  concile  de  Chalcé- 
doine.  Son  ouvrage  était  divisé  en  quatre 
parties,  où  il  soutenait  qiie  les  évèques  de 
celte  assemblée  avaient  approuvé  la  doctrine 
de  Nestorius.  Le  dernier  de  ses  écrits  dont 
nous  ayons  connaissance  avait  pour  titre  : 
De  l'Union.  Il  l'avait  composé  h  la  prière  de 
Sergius,  patriarche  de  Coustanlinople.  Nicé- 
phore*  dit  qu'il  était  divisé  en  dix  chapitres, 
dans  lesquels  il  établissait  de  tout  son  pou- 
voir l'hérésie  des  monothélites.  Il  rapporte 
quelques  fragments  de  ses  autres  ouvrages, 
en  remarquant  qu'il  s'était  moins  acquis  de 
réputation  par  son  style,  qui,  en  effet,  est 
au-dessous  de  l'élégance''  atlique,  quoique 
pur  et  net,  que  par  la  subtilité  de  ses  rai- 
sonnements et  son  habileté  dans  la  phi- 
losophie de  Platon  et  d'Aristote.  Ajoutons 
que,  si  cet  écrivain  a  servi  l'i'jglise  par  quel- 
ques-uns de  ses  écrits,  il  lui  a  porté  infini-, 
ment  plus  de  préjudice,  en  appuyant  de  toutes 
ses  forces  une  hérésie  naissante,  dans  la- 
quelle il  parait  qu'il  demeura  opiniAtrément 
jusqu'<-\  sa  mort. 

7.  Il  fut  réfuté,  même  de  son  vivant,  par 
divers  auteurs  dont  nous  ne  connaissons  plus 
les  écrits  que  par  ce  que  Photius  nous  en 
apprend.  Un  dos  premiers  fut  le  moine  Théo- 
dose, qui  "  répondit  avec  assez  d'exactitude 
aux  passages,  soit  des  Pères,  soit  de  l'Ecri- 
ture ,  allégués  par  Philoponus  contre  la  ré- 
surrection des  corps.  Il  en  rapportait  d'au- 
tres pour  établir  ce  dogme  de  la  foi  et  pour 
réfuter  l'erreur  de  Philoponus.  Conon  ',  Eu- 
gène et  Tiiémistius  écrivirent  conjointement 
des  invectives  très-forles  contre  lui  sur  la 
même  matière,  où  ils  le  faisaient  passer  pour 
un  homme  indigne  du  nom  de  chrétien. 
Néanmoins  ces  trois  auteurs  s'accordaient 
avec  lui  en  ce  qu'il  rejetait  le  concile  de 
Chalcédoine.  Ce  Tiiémistius,  que  l'on  sur- 
nommait '"  Caloni/mus,  était  de  la  secte  des 
sévérienset  de  agnoètes.  Il  composa  po\irla 
défense  de  sa  secte  un  lrail(f  fort  coiu-t  sous 
le  litre  d'.\polof/ie  pour  Thiophohius.  Comme 


CODOD.  Kui:^- 
o«,  Tli^miK- 
tlG!  ri  Tl«c» 
dore. 


•  Dom  Pitra  n  annoncé  qu'il  le  publiera  dans 
sou  SpicilegiuiH  solesmense.  (L'tidileur.) 

»  Photius.  end.  21,  et  Nieepliorus,  lib.  XVIll  Ilisl. 
Ecoles.,  caj».  xlvii. 


"  Photius,  cod.  75.  —  *  Snidass,  i«  Joanne  Oram- 
malien.  — »  Pholius,  cod.  5.Ï.  — «  .Nitephur..lili.  .Wlll, 
cap.  xLvu.—  '  Photius,  co'<.  2ir>.  --»  Pholius,  cod. 
22.  —  •  Pholius,  cod.  2:<.  —  '•  Photius,  cod.  lOâ. 

.;V     '.1 


Li'cnliii 
Se-;  «m-:. 


Georges  Pi* 
si  dès.  Ses 
échl£. 


[vil*  SIÈCLE.]       CHAl'ITUE  LIX.  —  JEAN 

il  y  luallmitait  Sévère,  faux  palriarclie  d'A- 
lexandrie et  l'un  des  chefs  des  cutychicus  ; 
un  nommé  Théodore,  de  la  secle  de  ceux  qui 
disaienl  lu   Divinité  passible,  écrivit  contre 
celle  apologie,  et  lit  voir  les  absiirdili's  des 
quatre  raisonnements  tju'ouy  employait  pour. 
prouver  qu'il  y  a  des  choses  que  Jésus-Chrisl 
a  ignorées.  Tht'mistiusnifula  Théodore,  et  ce- 
lui-ci lui  répli»|ua  par  un  écrit  divisé  en  trois 
livres.  Photius  dit  qu'ils  avaient  l'un  et  l'an- 
tre du  style,  de  la  netteté  et  de  la  force.  On 
croit  que  ce  ïhémistius  est  le  même  dont  on 
trouve  qu('l(]ues  opuscules  cités  dans  les  ac- 
tes des  conciles  de  Latran  et  de  Constantino- 
ple.  En  voici  les  titres  :  quelques  livres  à  l'im- 
pératrice Tbéodora;  plusieurs  discours  con- 
tre CoUuthus  pour  la  défense  de  Tliéodose, 
disciple  de  Sévère  et  sou  successeur  dans  le 
siège  d'Alexandrie  ;  une  lettre  pour  les  Sa- 
lamitaius;  un  discours  au  moine  Charisius; 
un  iivi'e  à  Constantin,  évèque  de  Laodicée  ; 
trois  livres  Dv  lu  Hatisfui-tion,  pour  la  défense 
desaguoètes,  adressés  à  Marcelle  prêtre  et  à 
Etienne  diacre;  et  des  livres  contradictoires 
contre  le  tome  de  Tliéodose. 

8.  Un  autre  adversaire  de  Philoponus  fut 
le  moine  Xicias.  11  composa  '  un  ouvrage 
contre  les  sept  articles  dont  cet  auteur  fai- 
sait meulion  dans  son  écrit  qui  avait  pour  ti- 
tre :  L'Arbitre  on  le  Juye.  Nicias  écrivait 
d'uu  style  simple  et  concis,  répondant  à  tout 
sans  se  répandre  inutilement.  11  Ot  aussi  un 
traité  contre  l'impie  Sévère  et  deux  livres 
contre  les  Gcnlils. 

9.  Nicéphore  -  lemarque  que  l'bérésie  des 
trithéites  avait  été  combattue,  avaut  que  Phi- 
loponus et  ses  sectateurs  en  prissent  la  dé- 
fense, par  Grégoire  le  'fhéologien  ,  dans  son 
livre  au  moine  Évagre,  et  qu'elle  le  fut  de- 
puis par  Léoutius  moine,  dans  un  excellent 
livre  divisé  en  trente  chapitres  où  il  renver- 
sait de  fond  en  comble  celle  nouvelle  hérésie, 
et  établissait  solidement  la  doctrine  catholi- 
que. Cet  écrit  n'est  pas  parvenu  jusqu'à  noue. 

10.  Le  même  hislorien  dit  '  que  Georges 
Pisidès,  diacre  et  garde-chartes  de  l'église 
de  Gonstantiuople,  qui  avait  coutume  d'écri- 
re en  vers  iambiques,  en  fit  de  très-beaux  où 
il  réfutait  l'hérésie  de  Philoponus,  en  mé- 
langeant   la   raillerie    avec    ie    sérieux.    Il 

•  Pholius,  cod.  50.  -  2  Nif:t.phor.,  lib.  XVIII 
Hist.,  ijap.  XLVMi.  —  3  xir;ejilior.,  ihid. 

*  Suidas,  in  Piside. 
'  Il  y  eu  a  1910  dans  la  nouvelle  édition  du  Père 

Foggini,  Rome,  m".  (Védileur.) 


PHILOPONUS,  THÉODOHE,  ETC.  683 

n'en  rapporte  que  trois  vers,  et  on  ne  croit 
pas  qu'il  y  en  ait  en  davantage.  Nicé|)hore 
pouvait  les  avoir  tirés  de  quelque  poëme  de 
Pisidès  sur   d'autres  matières.    Pisidès   en 
composa  un  aussi  en  vers   iambiques   sur 
rilexaméion  ou  l'ouvrage  des  six  jours  de 
la  création,  qu'il  dédia  'a  Sergius,  patriarche 
de  Constanliuople.  Suidas  ''  dit  qu'il  ('tail  de 
trois  mille  vers.  Nous  n'en  avons  que  1881), 
et  toutefois  il  ne  paraît  pas  qu'il  manque 
quelque  chose  à  la  fin  ".  Le  cinquantième  vers 
et  les  suivants  contiennent  une  réfutation  de 
l'opinion  de   Procle    touchant   l'éternité  du 
niiiiule.  Le  1815'  regarde  l'empereur  lléra- 
clius,  qui  commença  à  régner  en  610  et  ré- 
gna jusqu'en  640.  Ce  poëme  et  celui  De  la 
Vanité  de  la  vie  humaine,  qui  est  encore  en 
vers  iambiques,  ont  i''t(!  imprimé'S  à  Paris,  en 
1583,  in-i,  chez  Morel,  et  depuis  à  Heidel- 
Lerg,  en  1590,  in-8,  dans  le  Cor)us  de  Pointes  ; 
à  Genève,  en  1014,  et  dans  l'appendice  de  la 
Bibliothèque  des  l'ères,  ])ar  La  Bigne,  à  Paris, 
en  1624.  C'est  par  erreur  qu'ils  furent  don- 
nés à  saiut  Cyrille  d'Alexandrie  dans  une 
édition  de  Rome,  en  1590,  in-8,  qui  conteuait 
aussi  quelques  poèmes  de  saint  Grégoire  de 
Nazianze  et  des  hymnes  de  Synésius.  On  a 
joint  aux  deux  poëmes  de  Georges,  dans  l'é- 
dition de  La  Bigne,  quelques  fragments  de 
ses  autres  ouvi'agcs  tirés  de  Suidas  et  d'ail- 
leurs. On  en  trouve  encore  d'autres  dans  le 
septième  tome  de  la  Bibliothèque  °  grecque 
de  Fabricius,  et  dans  le  septième  '  livre  de 
VEmpire  Oriental  de  Dom  Bauduri.  Le  poëme 
en  vers  iambique?  sur  le  temple  de  la  Mère 
de  Dieu  à  Constanliuople,  a  été  donné  par  Du 
Cange  dans  ses  notes  sur  '  Zouare.  Outre  ces 
poésies,  Georges  en  avait  composé  phisicurs 
autres  qui  sont  perdues,  savoir  :  deux  livres  à 
la  louange  d'Héraclius  ;  un  livre  de  la  Guerre 
des  Avares,  près  des  murs  de  Constantinople,  en 
620;  et  l'éloge  de  saiut  Anastaso  martyr  •'. 
Les  discours  sur  la  Conception  de.la  Vierge, 
sur  celle  de  sa  mère,  sur  la  Nativité  de  la 
Vierge  ,  sur  sa  Présentation   au  temple  et 
sur  sa  Présence  h  la  croix  et  au  sépulcre  ne 
sont  point  de  lui,  mais  d'un  autre  Georges 
qui,  sur  la  finduix'  siècle,  devint,  de  garde- 
chaites  de  l'église  de  Constantinople,  évè- 
que de  Nicomédie.Le  P.  Combefis  '",  qui  les 

6  Pag.  093.  —  '  Pag.  177.  —  »  Pag.  65. 

5  Ces  ouvrages  se  trouvent  dans  l'édition  de 
Foggiui.  (Vcdileur.) 

'»  Combefis,  in  Bibliolh.  concionaloria,  et  toni. 
1  Auctuarii,  pag.  995. 


i 


684 


HISTOIRE  tiI-:NKRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


avait  allribués  ù  Georges  de  Pisidie,  s'est 
réliaclé.  Il  a  donné  de  snilc  toutes  ces  ho- 
mélies dans  le  premier  tome  de  son  Auclua- 
rium  sous  le  nom  de  Georf/es  de  Niconiédie, 
avec  celle  qui  est  sur  saint  Côme  et  saint.  Da- 
mien,  et  des  frafjmenls  des  discours  A  la 
louange  de  saint  Clirysostome  et  des  Pères 
du  concile  de  Nicée. 

[Le  recueil  le  plus  complet  des  œuvres  de 
Georges  Pisidès  se  trouve  dans  la  ])ellc  col- 
lection connue  sous  le  nnmde/y^ï«n//'Hc;ily 
fait  partie  du  volume  puljliépaiFoggini,  et  est 
généralement  regardé  couinie  le  plus  beau 
pourl'exécution  typographique,  llomc,  1777, 
in-fol.  Il  a"  été  repïoduit  dans  la  nouvelle 
édition  de  la  Collection  Byzantine,  publiée 
parBeker,  Bonn,  1837,  d'où  il  est  passjdans 
le  tomcXCIl  delà  Palroloyic grecque, co].  HGl 
et  suiv.  L'éditeur  a  revu  et  corrigé  le  texte 
en  plusieurs  endroits.  On  y  trouve  :1°  la  Pré- 
face des  éditeurs;  2°  Préface  de  l'édition  de 
1777,  donnée  par  J.-M.  Qucrcius,  éditeur  lit- 
téraire,sur  la  vie  et  les  écrits  de  Pisidés;3°  Pré- 
face de  Bekker  ;  -4"  Avertissement  deQuercius 
sur  les  ouvrages  suivants  :  I.  De  l'Expédition 
d'Héraclius  contvclcsPerses, en  trois  livresen 
vers  grecs  avec  traduction  et  notes.  II.  De 
l'Invasion  et  de  la  Défaite  des  Barbares,  ou 
récit  de  la  guerre  qui  eut  lieu  sous  les  rem- 


parts de  Constanlinople  entre  les  Avares  et 
les  Grecs,  avec  une  préface  de  Quercius  et 
notes.  111.   L'Héracléide  ,  ou  Défaite  totale 
de  Cbosroès,  roi  des  Perees,  avec  préface  de 
Quercius  et  notes,  en  deux  livres.  IV.  L'hym- 
ne acatliiste,  ou  qui  se  cliantedelfoul  en  l'hon- 
neur de  la  sainte  Vierge,  pour  la  remercier  de 
la  délivrance  de  Constautinople.  Viennent 
ensuite  des  notes  cxjilicatives  de  Quercius  où 
l'on  trouve  :   1°  Une  leçon  attribuée  à  Ni- 
cépborc  Callistc  pour  la  fête  où  Ion  chante 
cette  hymne  ;  2°  un  récit  circonstancié  du  mi- 
racle qui  eut  lieu  pour  la  délivrance  de  Cons- 
tanlinople des  attaques  des  Perses  et    des 
barbares.  V. Poème  sur  la  sainte  résurrection 
de  N'.-S.  J.-C,  avec  une  préface  de  Quercius 
très-étendue,  où  il  est  question  des  auteurs 
édités  ou  encore  manuscrits  qui  ont  traité  de 
rilexaméron,  et  des  opinions  de  Pisidès  sur 
le  monde.  VI.  L'IIéxaméron  ou  l'œuvre  du 
moude,  en  1910  vers  avec  Scbolies  deMorel. 
VII.  Delà  Vanité  delà  vie.  VIU.  contre  l'impie 
Sévère,  avec  une  longue  introduction  sur  cet 
hérétique,   et  notes  explicatives.  IX.  Vie, 
institution  et  combat  de  saint  Anastasc  qui 
soullVit  le  martyre  en  Perse,   avec  préfaces 
et  notes  eu  prose. X.  183  fragments  d'ouvra- 
ges perdus.  —  Une  tiible  des  ouvrages  histo- 
riques de  Pisidès  termine  le  volume.] 


CIIAriTRE  LX. 


Hésychins  prêtre  de  Jérnsalem,  et  Hésychius  prêtre  de  Constautinople 


[Kcrivains  grecs  du  vi=  ou  vu"  siècle.] 


t>inîciiii^i 


Bt' 


1.  Tbi'ophanes,  sur  la  septième  année 
de  Théodose  le  Jeune,  fait  mention  d'un  Hé- 
sychius, prêtre  de  Jérusalem,  qui  s'était  ren- 
du recommaiidalile  pai-  son  savoir,  i)iiiU'i|)a- 
lement  par  son  intelligence  dans  les  saintes 
Ecritures.  II  met  sa  mort  en  la  vingt-sixième 
année  du  règne  de  ce  prince,  qui  l'tait  l'an  de 
Jésus-Christ  4,1.3.  Les  Grecs,  dans  h  iirMéno- 
loge,  au  2f<  de  mars,  disent  de  lui  qu'il  avait 
épuisé  toutes  les  sources  de  la  science  et  de 
la  sagesse,  et  composé  des  commentaires 
très-clairs  et  très-utiles  sui-  tous  les  Livres 


saints.  Cyrille  de  Scythople  parle  aussi  d'Hé- 
sychius,  qu'il  '  dit  avoir  été  prèti'e  de  Jéru- 
salem sous  répiscop:it  de  Juvénal.  11  y  a  eu 
plusieurs  autres  Hésychius  :  un  qui  était 
évoque  de  Salone  en  Dalmatie,  dont  saint 
Augustin  '  dit  quelque  chose  dans  ses  livres 
De  la  Cité  de  Die»  ;  un  autre,  moine  de  pro- 
fession ',  ami  de  saint  Jérôme  ;  et  nu  (jui 
gouvernait  l'Église  de  Jérusalem  sous  le  pon- 
tificat de  saint  Grégoire  le  Grand,  et  h  qui 
ce  pape  ('crivit  une  lettre  '  que  nous  avons 
encore.  La  dilliculté  est  de  savoir  duquel 


T(im.  Il  Monument.  Colelerii,  png.  233. 
I.il).  .\X,  cap.  V. 


'  Apud  Surium,  ad  21  oclob. 
*  I.ili.  IX,  Epist.  i. 


CHAPITRE  LX.  —  nÉSYCmUS  ])li  JÉRUSALEM,  ETC. 


[Vll°  SIÈCLE.] 

d 'entre  ces  Hdsychius  soiil  les  ouvra;;cs  que 
iKnis  avons  sous  ce  nom.  Il  semble  que,  poiic 
la  it'soiiilre,  l'on  doive  nécessairement  atlri- 
liuer  ces  ouvrages  à  dilleronts  auteurs.  Car 
les  uns  ont  été  écrits  originairement  en  la- 
tin, et  les  antres  en  grec.  Ceux  qui  ont  été 
écrits  en  lalin,  comme  le  Commenlaire  sur 
le  Léviti(|uc,   sont  postéiieurs  à  saint  Ciré- 
poirc  le  Grand,  puisque  l'auteur  se  sert  or- 
dinairement de  la  version  de  saint  Jérôme, 
qui  n'a  été  dans  l'usage  commun  de  l'Église 
que  depuis  ce  Pape  ;  mais  aussi  ils  sont  an- 
térieurs Il  Amalaire,  qui  les  cite  '  dans  ses 
écrits.  Amalaire  écrivait  dans  le  commence- 
ment du  IX''  siècle.  On  pourrait  répondre  que 
ce  commentaire,  en  l'élat  où  nous  l'avons, 
n'est  qu'une  traduction  dont   l'auteur  aurait 
employé  la  version  de  saint  Jérôme,  et  que 
l'ouvrage  ne  laisse  pas  d'être  de  l'un  des 
Ilésychius  de  Jérusalem  dont  nous  venons 
de  parler.  Mais  il  est  visible  par  le  parallèle 
continuel  quel'auteurfaitdela  Vulgate  avec 
les  Septante  elles  anciennes  versions,  qu'il 
travaillait.de  lui-même,  et  ne  faisait  pas  les 
simples  fonctions  de  traducteur.  Cela  se  voit 
encore  par-  un  endroit  du  premier  livre,  où, 
expliquant  ces  paroles  du  Léviliquc  :   Vous 
metlrez  vos  inaitts  siu'  lu  tète  de  Vhostie  ,  il  dit  : 
«  Ce  que  nous  appelons  hostie  est  nommé 
eu  grec  Karpoma,  ce  qui  signifie  particuliè- 
rement un  holocauste.  »  Il  fait  '  souvent  de 
semblables   remarques  qui   ne  sont   nulle- 
ment d'un  traducteur.  On  doit  donc,  outie 
les  Hésychius  que  nous  avons  cités,  en  ad- 
mettre un  autre  qui  ait  écrit  en  latin.  Car  on 
ne  peut  attribuer  ce  commenlaire  h  Hésy- 
cLius  de  Salone,  puisqu'il  vivait  avant  saint 
Grégoire,  par  conséquent  en  un  temps  où 
la  version  de  saint  Jérôme  n'était  pas  dans 
l'usage  ordinaire  des  églises  d'Occident. 


■-•MM 


luire    il'l    nr«. 


2.  Cet  Ilt'^sycliiiis  ('-tait  prêtre.  Il  en  prend 
la  qualité  dans  l'c'^pilre  dédicaloire  au  diacre  [;,' "" tj'i',',"' 
Eulycliien,  qui  l'avait  prié  de  travailler  sur  i""' 
le  l.évilique.  et  de  donner  en  même  temps 
et  de  suite  le  sens  littéral  et  spirituel  de  ce 
livre  '  .  1!  fait  voir  par  divers  exemples 
que  le  Lévitiquc  est  suKccptible  de  ces  deux 
sens;  et  il  les  suit  l'un  et  l'autre  dans  tout 
son  commentaire,  qui  est  divisé  en  sept  li- 
vres. En  expliquant,  dans  le  deuxième,  ce 
qui  est  dit,  que  l'autel  est  le  lieu  saint,  parce 
que  c'est  là  que  repose  le  Suint  des  Saints,  il  re- 
marque que  Dieu  ^  ordonna  dans  l'ancienne 
loi  dé  manger  la  cliair  des  bêtes  immolées 
avec  les  pains  qu'on  avait  oflferts,  afin  de 
nous  faire  connaître  que  c'était  la  figure  du 
mystère  qui  est  tout  ensemble  et  pain  et 
chair,  comme  étant  le  corps  de  Jésus-Christ, 
lequel  est  le  pain  vivant  qui  est  descendu  du 
ciel  ;  \o\\h  pourquoi,  ajoule-t-il,  selon  l'édi- 
tion des  Septante,  les  corbeaux  apportaient 
h  Elie  de  la  chair  le  matin,  et  dn  pain  le  soir, 
Dieu  ayant  voulu  figurer  ainsi  par  avance 
ce  mystère,  qui  ne  doit  être  préparé,  ni 
mangé,  que  dans  l'église  et  dans  le  lieu 
s:iint,  c'est-à-dire,  sur  l'autel,  et  jamais 
ailleurs.  «  Or  d'après  la  loi,  Aaron  et  ses 
enfants,  ont  droit  d'en  manger.  Car  si 
Jésus  -  Christ,  étant  attiré  par  les  prières 
des  prêtres,  ne  vient  lui-même,  ne  sanc- 
tifie la  cène ,  et  n'y  répand  sa  bénédic- 
tion, elle  ne  devient  point  le  sacrifice  du 
Seigneur.  »  Il  continue  :  «  Dieu  a  aussi  or- 
donné dans  l'ancienne  loi  qu'on  bridât  ce 
qui  restait  des  chairs  et  des  pains  des  sacri- 
fices. C'est  ce  que  nous  voyons  de  nos  yeux 
s'accomplir  encore  aujourd'hui  dans  l'Eglise, 
où  l'on  brûle  dans  le  feu  tout  ce  qui  est 
resté  après  la  célébration  des  mj-stères  et  la 
communion   des  fidèles.   Ainsi  cette  action 


'  Amalarius,  lib.  XIV  De  O/l'ic,  cap.  xxxvi. 

*  Isychii  preslj.  in  Lcvil.,  lib.  (,  cap.  i,  pag.  5i, 
toni.   XII  Bihlinlh.   tel.  Pat. 

»  Ibid.,  pa!5.  66  et  pag.  81.  —  '  Ibid.,  pag.  52. 

^  Propterea  panes  cum  carnibus  comedi  prœ- 
cepil,  utttosinleUigeremns  illud  ab  eo  mysteiium 
dici,  qund  siinul  panis  et  euro  est,  sicut  corpus 
Clirisli.  panis  vici  qui  de  cœlo  descendit.  Proplcr 
quod  Beliœ,  secundum  septuaginta  editionem  car- 
nes mane,  panes  nutem  vespere  deferehant  eorvi 
superne,  prw/igurare  linc  mysterium  Dumino  vo- 
lenle ,  quod  intus  opnrttt  in  ecclesia,  in  loco 
sancto,  id  est,  ad  altarc  coqui  et  cnmcdi  :  alibi 
vern  nequaquiim...  .iarnn  et  filii  ejus  recte  come- 
dunt:  nisi  enim  Cliristus  rogatvs  ore  sacerdoluui 
ipsc  venerit  et  cœnam  sanclificaeerit  et  iniliave- 
rit,  ca  quw  agunlur,  nuHatenus  sacriftcium  do- 


minicum  fiunt.  Sed  hoc  quod  reliijuum  est  de 
carnihus  et  panibus  in  igné  incendi  prœcepit. 
Quod  nunc  videmus  etiam  sensibiliter  in  Ecclesia 
fieri,  ignique  trudi  quœcumquc  remanere  conti- 
gerit  inconsumpla...  ICx  hoc  quod  agitur  sensibi- 
liter, siguiftcalio  cujusdam  intclligiliilis  rei,  eis 
qui  inlendunt,  proveiiit:  ut  quundo  ad  comestio- 
nem  sacrificii  deficrnius,  et  couiedere  illud  intègre 
non  possiimus,  mente  forsan  lasscscente  sive  dé- 
ficiente, uirum  ta  quœ  lideutur  corpus  oporteat 
inlelliyi  Domini,  in  quod  nec  angcii possuntpros- 
picere,  non  relinqui,  scd  eliaui  trudi  en  igni  opor- 
let  spiritns,  tU  ea  conicdal  quœ  nohis  sunt  exin- 
firmilale  inesibilia.  Quomodo  aulem  comedat  ? 
Cum  cogilarerimus  virtuliSpiritus  esse  possibilia 
ea  quw  nobis  inipossibilia  videnlur.  Ua^sjcliiu.-, 
liîi.  il  in  Lecit.,  cap.  vui,  pag.  86  (al.  178). 


656 


fflSTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


sensible  représente  et  signiGe  quelque  chose 
de  spirituel  et  cl'intelli}.'iblc  ;i  ceux  qui  ont 
soin   de   le   remarquer;  savoir   que,  quand 
nous  nous   trouvons  dans  l'iuipuissance  fie 
manger  eulièrcment  le  sacriiice,  n<itrc  es- 
prit tombant  dans  la  faiblesse  et  la  défail- 
lance, et  doutant  si  ce  qui  se  voit  doit  être 
cru   le  toi  ps   du   Sei|j;neur,    que  les   anges 
mêmes  ne  sont  pas  capables  de  regarder, 
alors  il  ne   faut  pas   sarrôter  à  ce  doute, 
mais  le  brûler  au  feu  de  l'esprit,  afin  qu'il 
mange  et  qu'il  consume  ce   que  notre    fai- 
blesse  n'est  pas  capable  de  manger   et  de 
consumer.  Mais  comment  le  feu  de  l'esprit 
le  consumera-t-il  en  nous-mêmes,  sinon  lors- 
que  nous   ron.*idéîerons  que  les  choses  qui 
nous  paraissent  impossibles,  ne  laissent  pas 
d'être  possibles  a  la  vertu  de  l'Esprit  saint  ?  » 
L'nsagc  de  brûler  les  restes  de  l'eucharistie 
durait    encore    dans    le   douzième    siècle , 
comme  ou  le  voit  par  ces  paroles  d'Alger, 
diacre  de  l'Église  de  Liège  :  «  Ce  qu'on  nous 
objecte,  dit-il,  '  que  les  espèces  sacramen- 
telles sont   mises  au  feu  par  des  personnes 
même  religieuses  et  dévotes,  et  y  sont  con- 
sumées, cela  n'est  point  injurieux,  à  Jésus- 
Christ,  comme  si,  lui-même  était  exposé  au 
feu  pour  être  brûlé  ;  ce  qui  est  impossible, 
puisqu'il  est  le  Dieu  do  tous  les  éléments. 
Mais  lorsqu'il  arrive  que  les  espèces  sensi- 
bles du  pain  et  du  vin,  qui,  par  la  volonté 
de  Dieu,  demeurent  après  que   leur   subs- 
tance est  cbangi'e  en  la  substance  du  corps 
de  son   Fils,  font    mal  au  cœur,  elles   sont 
mises  au  feu  pour  y  être  consumées  ;    et 
c'est  sans  auciuie  impureté,  puisque  le  feu 
est  le  plus  pur   de  tous  les  élémenls.  »  On 
objecte  qu"llés\  thius  dit  dans. le  même  en- 
droit, que  Jésus-Gln■i^*t  n'a  bu  son  sang  (|u"en 
figure;  mais  il  sutlit  de  rapporter  ses  paro- 
les, pour  di'-lruire  cette  objection,  a  Le  Sei- 
gneur^, dit-il,  prit  lui-nv'-mi;  le  jjremier  dans  lu 
cène  mystique  le  sang  intelligible,  et  il  donna 
ensuite  le  calice  aux  ujti'itres.  n   Le  mot  d'in- 
telligible,  sur  leciuol  ou   l'orme  la  liillicnlU', 
signifie    proprement  ce  qui  ce  conçoit  par 

'  Algeriiis,  lil).  Il  De  Sacramenl.,  cap.  i. 

'  Ipse  Dominun  pritnus  in  cœna  myslicn  inlcl- 
ligibiltm  acceijit  siinguinem ,  atque  deinde  calicem 
apostolis  dédit.  Iliid.,  png.  8i  (.il.  171). 

'  Les  Scri/ilorPS  veleres  do  Mai  tciiilii'iinciil  nu 
fmi^iiDint  (l'uu  cuiiiiiieulairo  sur  Daniel,  pag.  30. 
{L'éiliteur.) 

*  l'iioliu»,  Cod.  198,  pag.  .-.19. 

»  Toin.  XII  Biblioth.  Pal.,  luig.  185. 

•  Lc8  CloiMci  auclores,  loiu.   X,   i>ng.  517-578, 


l'esprit:  quand  donc  Hésychius  dit  que  Jésus. 
Christ  but  le  sang  intelligible,  il  entend  qu'il 
but  réellement  son  sang,  quoique  ce  sang 
ne  put  être  connu  que  par  l'esprit.  Ces  Com- 
mentaires sur  le  Lévi tique  ont  été  impri- 
més à  Bâle  en  1527,  et  à  Paris,  en  1581  in-8, 
et  dans  les  Bibliothèques  des  Pères  '  . 

'A.  Les  autres  ouvrages  que  nous  avons 
sous  le  nom  d'Hésychiu.s,  ont  été  écrits  ori- 
ginairement en  grec  ;  ainsi  ils  peuvent  être 
du  prêtre  de  ce  nom,  qui  était  du  clergé  de 
Jérusalem.  Photius ,  qui  le  cite  plus  d'une 
fois,  '  ne  lui  donne  que  le  titre  de  prêtre. 
La  glose  ordinaire  le  qualifie  d'évêque  ; 
mais  elle  n'est  pas  de  grande  autorité.  La 
première  Homélie  d'Hé.sycJiius,  dans  la  Bi- 
bliotlièque  des  Pères  ',  est  en  l'honneur  de  la 
Mère  de  Dieu  ",  elle  fut  prononcée  le  jour  de 
sa  fêle.  La  seconde  est  sur  le  même  sujet. 
La  troisième  est  un  panégyrique  de  saint 
André  apôtre.  Photius  '  a  mis,  par  inadver- 
tance, saint  Thomas  pour  saint  André.  La 
quatrième  est  sur  la  Résurrection  :  elle  a 
passé  quelque  temps  pour  le  second  dis- 
cours Je  saint  Grégoire  de  Xysse  sur  la  Ré- 
surrection ;  mais  on  convient  aujourd'hui 
qu'elle  est  d'Hésychias,  prêtre  de  Jérusa- 
lem, dont  elle  porte  le  nom  dans  4es  Manus- 
crits*. Il  avait  fait  une  Concordance  des 
Évangélistes  par  demandes  et  par  réponses. 
M.  Colelier  l'a  donnée  dans  le 'troisième 
tome  des  Monuments  de  l'Eglise  grecque, 
sur  un  manuscrit  de  la  Bibliothèque  du  Roi. 
Il  y  en  a  un  fragment,  à  la  suite  de  l'IIoiné- 
lie  sur  -la  Résurrection,  dans  le  premier 
tome  de  l'Aucluarium  du  Combefis,  qui  est 
passé  de  là  dans  le  douzième  tome  da  la  Bi- 
bliothèque des  Pères. 

[Le  tome  XI  de  la  Bibliothèque  de  Galland, 
page  221  contient  la  Concordance.] 

On  liouvc  ensuite  un  traité  abrégé  de  la 
Tempéiauce  et  de  la  Vertu,  adressé  àTliéo- 
dule.II  est  divisé  en  deux  centuries,  dont  cha- 
cune contient  cent  maximes  de  la  vie  spiri- 
tuelle ;  plusieurs  se  trouvent  motû  mot  parmi 
celles  de  MarclErmite.  Phctiusdit  'qu'elles 


Dom/'I-ett 
•Dtrr*  ceril 
du  prfire  Bl 
sjcetut. 


donnent  on  grec  UQ  frapnicnl  du  discours  sur  ta 
Présentation  de  Nolio-Soignour.  C'est  le  même 
discours  que  d'autres  nllribiient  à  Tiniiillioe  do  Jé- 
rusalem. I.e  savant  éditeur  promctlail  une  édition 
critique  île  toutes  les  œuvres  d'Ilésycliius  avec  cel- 
les de  saint  SopUroue  de  .lérusalcm  ;  elle  u'a  poiul 
paru,  il.' éditeur.) 

■>  l'h.ilius.  Cod.  209,  pag.  i486. 

'  Vojoz  toni.  VI,  pag.  20,3.  ' 

»  l'hotius,  Cod.  198,  pag.  519. 


{vil*  SIÈCLE.]         CHAPITRE  LX.  —  HESYCHIUS  DE  CONSTANïLNOPLE. 


637 


faisaient  partie  d'un  livre  (jiii  renfermait  les 
Maximes  des  Saints  conlcmporains  tic  saint 
Antoine.  L'auteur  tli',  dans  la  trente-unième 
do  la  première  centurie,  que,  vivant  dans  mi 
monastère  par  un  mouvement  libre  de  sa 
volont(^  il  était  de  son  devoir  de  se  soumettre 
à  la  volonté  de  son  supérieur,  qui  y  tenait 
la  place  de  Dieu.  L'édition  la  plus  ancienne 
de  ces  Maximes  est  de  Paris,  en  15C3.  On 
les  réimprima  en  la  môme  ville,  en  lGl-4,  de 
la  traduction  de  Jean  Pie,  et  en  lG2i,  dans 
V Auctiiarium  de  la  Bibliothèque  des  Pères. 
Ild'sclielius  fil  imprimer,  en  1G02,  A  Auj;s- 
bourg,  sous  le  nom  du  prêtre  Ilésychius,  des 
Sommaires  sur  les  douze  petits  Prophètes, 
avec  l'Introduction  d'Adrien  à  l'I'Jcriture 
sainte.  On  trouve  ces  deux  ouvrages  ensem- 
ble dans  le  huitième  tome  des  Critiques 
sacrés.  Conrad  '  Ritterhusius  donna  séparé- 
ment les  Semmaires  sur  les  petits  Prophè- 
tes, à  Amberg,  en  1604  in-8,  avec  une  tra- 
duction latine  de  sa  façon.  Il  fait  mention, 
dans  sa  Préface  sur  le  Commentaire  de 
Procope  Gazœus  sur  le  Penlateuque,  des 
Scholies  d'IIésychius  sur  Ezéchiel  :  d'autres 
en  citent  sur  la  G;  iièse,  sur  Job,  sur  les 
Psaumes  ;  et  Sadolet,  dans  une  de  ses  Let- 
tres à  Erasme,  dit  qu'Hésychius,  dans  la 
Préface  de  sou  Commentaire  sur  les  Psau- 
mes, essayait  de  prouver  qu'ils  étaient  tous 
de  David.  Tous-  ces  Commentaires  ou  Scho- 
lies sont  encore  en  manuscrit  dans  les  bi- 
bliothèques d'Italie  et  d'Angleterre  :  on  n'en 
a  point  encore  mis  sous  presse.  11  faut  dire 
la  même  chose  de  ses  Commentaires  sur 
l'Épîlre  aux  Hébreux,  dont  saint  Thomas 
rapporte  quelques  passages,  et  de  celui 
qu'il  avait  fait  sur  Habacuc  et  sur  Jonas,  cité 
plusieurs  fois  dans  la  Chaîne  de  Carall'e  sur 
les  Cantiques  des  deux  Testaments.  Photius 
rapporte  ^  quelques  fragments  de  son  Ho- 
mélie sur  saint  Jacques,  frère  du  Seigneur, 
et  sur  David  dit  le  père  du  Christ.  AUatius 
en  avait  une  sur  la  fête  de  la  Rencontre,  ou 
de  la  Purification  :  elle  n'est  pas  imprimée. 
Il  y  en  avait  une  auti'e  sur  la  Naissance  de 
Jésus-Christ.  On  cita  dans  le  cinquième  con- 
cile ^  un  passage  de  l'Histoire  ecclésiastique 
d'Hésychius,  où  il  parlait  de  Théodore  de 
Mopsueste  et  de  ses  erreurs.  Cette  Histoire 
était  sans  doute  du  prêtre  Hésycbius,  con- 
temporain de  Juvénal,  patriarche  de  Jéru- 


salem, et  de  Tliéodosc  le  Jeune,  puisque  le 
concile  où  elle  fut  citée  se  tint  en  tjîi'i:  il 
faut  même  lui  attribuer  les  Commentaires 
grecs  dont  nous  venons  de  parler,  si  l'on 
vent  s'en  lapporler  h  ce  que  Tliéophanos  et 
le  M(Miol(>ge  ont  dit  de  son  savoir  et  de  son 
érudition  ;  mais  il  ne  parait  point  qu'on 
doive  le  faire  auteur  de  la  vie  de  Longin  le 
Centurion,  imprimée  dans  le  recueil  des  Bol- 
lan(iisles,au  quinzième  de  mars.  Cette  pièce, 
qui  manque  presque  partout  de  vraisem- 
blance, ne  répond  point  à  la  léputation  du 
prêtre  Ilésycliius  dont  iious  parlons. 

4.  [Le tome  .\CIII  de  la  I'uliulu(jie (jrecipie,  ak  m^'nl 
col.  781,  contient  les  œuvres  d'IIésychius  dnn^ i»  l'ai",' 
avec  une  notice  tu-ee  de  Fabricms,  de  Cora- 
befis,  de  Galland  et  de  Cotclier.  Les  œuvres 
contiennent  :  1°  le  commentaire  sur  le  Lici- 
tiqiic  d'après  la  Bibliothèque  des  Pères  de 
Lyon;  2°  des  fragments  du  Commentaire  sur 
les  Psaumes",  d'après  Cordier;  3°lessommai- 
ses  sur  les  douze  petits  Prophètes  et  sur  Isaïe, 
avec  les  explications  des  passages  les  plus 
difficiles;  le  tout  d'après  Pearson,  Critiques 
sacres,  tom.  YIII  ;  un  fragment  sur  Daniel,  d'a- 
près Villapond,  tom.  I;  un  fragment  sur  Da- 
niel, d'après  Mai,  Script,  vet.  nov.  coll.  tom.  I; 
des  fragments  sur  les  Actes  des  Apôtres,  d'a- 
près Cramer  et  Wolfl';  sur  l'Épître  de  saint 
Jacques,  d'après  Wolf,.lne«/o^(/?YPfo,  tom.  III; 
un  fiagment  sur  la  première  Épître  de  saint 
Pierre,  et  un  sur  l'Épître  de  saint  Judes;  -i"  la 
Concordance  des  Évangélistes,  d'après  Cote- 
lier  ;  o"  les  Sermons.  Ou  y  trouve  un  frag- 
ment sur  la  naissance  de  Jésus-Christ  ;  un 
sur  l'heure  où  Noire-Seigneur  fut  crucifié; 
le  discours  sur  la  Résurrection,  publié  par 
Combefis,  et 'en  grande  partie  dans  Galland, 
sous  le  nom  de  Sévère  d'Antioche,  est  repro- 
duit au  tome  XLYI  de  la  Patrologie  grecque, 
col.  6:27-652,  parmi  les  œuvres  de  saint  Grégoi- 
re de  Nysse.  Les  autres  sermons  sont  deux  Ho- 
mélies sur  Marie  mère  de  Dieu;  un  sermon 
sur  la  Présentation  de  Notre-Seigueur;  l'é- 
loge de  l'apôtre  saint  André  ;  un  fragment 
du  discom-s  sur  saint  Jacques,  frère  de  Notre- 
Seigneur,  et  sur  David,  père  du  Christ,  d'a- 
près Photius;  0°  les  Ceuturies;  7"  le  Martyre 
de  saint  Longin,  d'après  les  Bollandistes.] 
,  5.  Photius  parle  d'un  prêtre  de  Coustan-  Hésjci.ios, 
tinople  de  ce  même  nom  ,  qui  avait  com-  *c*l,?i;,„,ino° 
posé  quatre  livres  sur  le  Serpent  d'airain  *.   *'■ 


'  Fabricius,  tom.  VI  Bibliolh.  grwc,, 
et  144.—  *  Photius,  Cod.  m,  pag.  1523. 

XI. 


pag.  244  '■*  Concil.,  tom.  V,  pag.  470,  Collât.  5. 

*  Photius,  Cod,  "I,  pag.  38. 

42 


638 


HISTOIRE  GKNi-.RALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Nous  ne  les  avons  plus;  ils  étaient  d'nn  style 
plein  d'ostentation,  et  l'auteur  n'y  cherchait 
qu'à  émouvoir  les  passions.  Dans  ce  dessein, 
il  avait  composé  liii-mome  des  harangues 
sous  le  nom  de  Moïse,  dans  lesquelles  ce  pro- 
phète apostrophait  le  peuple  d'Israël,  et  les 
réponses  de  ce  peuple  aux  discours  de  Moïse. 
Il  s'était  donné  la  même  liberté  à  l'égard  de 
Dieu,  à  qui  il  prêtait  des  discours  à  Moïse  et 


au  peuple,  et  mettait  dans  la  bouche  de  ceux- 
ci  des  réponses  en  forme  de  prières  et  d'ex- 
cuses. Ces  harangues,  ou  les  discours,  fai- 
saient la  plus  grande  partie  de  l'ouvrage  d'Hé- 
sychius  deConstantinoplc,  qui  composiiit  un 
gros  volume.  C'est  tout  ce  que  Photius  nous 
apprend  de  ces  quatre  livres  ;  et  c'en  est  as- 
sez pour  nous  empêcher  d'en  regretter  la 
perte. 


L(<tnr«  é^*- 

fiorîîsail  virs 
ISo  602  ei 
6IC. 


Ses  éeriK. 

Via    d"   faSit 
JoaD  l'AumO- 


CU.4 PITRE  LXI. 
I^éoQce  évèqae  de  Nâples  en  Chypre  [vers  l'an  602  on  616]. 

(Écrivain  grec] 


1.  Le  second  concile  deNicée,  en  rappor- 
tant un  passage  de  cet  auteur,  dit  qu'il  Uo- 
rissait  snus  l'empire  de  Maurice,  '  qui  fut  mis 
à  mort  parPhocas,  en  602.  Léonce  vécut  plu- 
sieurs années  au-delà,  puisqu'il  écrivit  la  vie 
de  saint  Jean,  patriarche  d'.\lexandrie,  sur- 
nommé l'Aumônier,  mort  eu  016,  le  23  de 
janvier.  Nous  ne  savons,  des  actions  de  Léon- 
ce, que  son  voyage  à  .\lexandrie,  et  l'entre- 
tien qu'il  y  eut  avec  un  saint  prûtrc  nommé 
Mennas.  Il  est  qualifié  évêq  le  de  Xaples  en 
Chypre,  aujourd'hui  Lemise-la-Neuve. 

2.  Le  plus  intéressant  de  ses  ouvrages  est 
la  Vie  de  saiut  Jean  l'Aumùnier  *  :  elle  lui 
est  attribuée  par  Constautius,  l'un  de  ses 
prédécesseurs,  et  elle  fut  citée  sous  son  nom 
dans  le  second  concile  de  Nicée.  Sigebert  ' 
la  lui  donne  aussi,  et  je  ne  sache  personne 
qui  la  lui  conteste.  Avant  Li'ouce,  deux  ser- 
viteurs de  Dieu,  Jean  et  Sophrone,  avaient 
écrit  la  vie  de  saint  Jean  l'Aumônier  ';  mais 
ils  avaient  omis  plusieurs  particularités  qui 
regardaient  la  dignité  et  le  mérite  de  cet 
homme  adiuirab'.e  :  c'est  ce  qui  engagea 
Léonce  :i  travailler  de  nouveau  sur  cette  ma- 
tière. Ce  qu'il  en  avait  laissé  par  écrit  étant 
venu  à  la  connaissance  de  Nicolas  I",  qui 
monta  sur  le  Saint-Siège  en  838,  ce  Pape 
chargea  Anastase,  bibliothécaire  de  l'Église 


romaine,  de  le  traduire  du  grec  en  latin. 
Cette  version  a  été  imprimée  plusieurs  fois, 
et  c'est  celle  que  les  BoUandistes  ont  suivie, 
après  l'avoir  confrontée  sur  quelques  ma- 
nuscrits grecs.  Siméon  Mélaphraste,  ou  quel- 
que autre  écrivain  grec,  composa  une  vie 
du  même  patriarche,  diU'érenle  en  plusieurs 
points  de  celle  de  Léonce.  Elle  a  été  mise  en 
latin  par  Genlien  Hervet,  et  insérée  dans  le 
recueil  de  Surius.  Nous  donnerons  sur  l'édi- 
tion des  BjUandistes  ce  qu'il  y  a  de  plus  in- 
téressant pour  notre  sujet  durs  la  vie  de  ce 
patriarche,  sans  nous  arrêter  à  celle  de  Mé- 
taphraste,  qu'ils  ont  aussi  donnée  à  la  suite 
de  celle  de  Léonce  '. 

3.  Léonce  remarque  dans  le  Pi'olofîue ',  ,c«qiiiii« 
que  la  malice  des  hommes  n'était  pas  si  '■i*  !)•»•""• 
grande  au  temps  passé  qu'elle  est  mainte- 
nant; ce  qu'il  dit  avoir  été  prédit  par  Jésus- 
Christ  en  ces  termes  :  L'accroissement  des  vi- 
ces refroidira  la  charité  de  plusieurs;  qu'il  ne 
dépend  toutefois  que  de  nous  de  marcher 
comme  nos  ancêtres  dans  la  voie  étroite, 
puisque,  encore  de  nos  jouis,  il  y  en  a  qui 
demeurent  fermes  dans  l'exécution  de  leurs 
bonnes  résolutions.  Il  donne  pour  exemple  le 
saint  dont  il  entreprend  l'histoire;  et  pour 
la  rendre  utile  à  toutes  sortes  de  personnes, 
il  dit  qu'il  l'écrira,  non  d'un  style  élevé  et 


Mjltb.  litiv, 
11. 


'  ConscripsUfiutcin  Lcnntius  vitam  sancti  Jnan- 
nis  archiepiscopi  Alexandriœ  cognomenln  Eleemo- 
synarii,  id  e.il,  misericordis.  (juin  et  sancli  Si- 
meonis  Himplicis,  ri  alia  qntvdam  :  atque  in  om- 
nibus sp-rmonibus  suis  crthodnxus  ctrnitur.  Flo- 
ruil  aulcm  leniporibm ilauriliiimperatnris.Coac . 
Nic<L-ii.  Il,  action.  4. 

•  UullaDiliis,  ad  dieni  23  januar 

•  Anastasins,  jubenle  Kicolan  papa,  Iranalulit 


inldtinum  vitam  Joannis  Ulccmosynarii  scriplam 
grwcc  a  Leon;io  episcopo.  Sigebert.,  De  Scriptor. 
^  Eccles.  cip.  cm. 

^  ride  UolLind.,  ad  diem  23  januar.,  pag.  493  et 
geq. 

•  La  vie  «le  «lint  Jcau  l'Auinôuicr  a  êlc'  Irailuite 
(Ml  italien  (uir  le  fr^re  Nicolas  d'Iisiuola,  l'urme, 
1513,  iii-4».  {L'éditeur.) 

'  l'iolog.,  pag.  498. 


CHAPITRE  I.XI.  —  T.l':OXCE  DE  NAPLES. 


[tu*  siècle.] 

l'ioquent,  commp  nvaiont  lail  Jeun  cl  So|)lnn- 
110,  iiiaistruii  slyl((  siiiii)l(;  et  uisi-,  iillii  do  la 
mettre  à  port<5o  inomc  des   ignorants.   Un 
voyage  qu'il  lit  A  Alexandrie  pour  baiser  le 
tombeau  des  saints  martyrs  Cyr  et  Jean,  lui 
fut  nnc  occasion  d'apprendre  les  ciroonstan- 
tes  de  la  vie  de  saint  Jean  l'Aunionicr.  Il  les 
apprit  du  prêtre  Mennas,  qui  avait  été  éco- 
nome de  l'église  d'Alexandrie  dans  le  temps 
que  Jean  en  était  patriarclie  ;  et  atin  de  ne 
rien  laisser  échapp-;-,  il  écrivit  lui-même  tout 
C"p-'.       ce  que  Mennas  lui  dicta.    Aussitôt  que  ce 
'  saiuteut  été  élevé  sur  le  siège  d'Alexandrie, 
il  se  fit  donner  un  rôle  exact  île  Ions  les  pau- 
vres de  la  ville,  qui  montait  à  sept  raille  cinq 
cents  et  davantage  ;  puis  il  commanda  à  son 
économe  de  leur  fournir  chaque  jour  ce  qui 
leur  était  nécessaire  pour  vivre.  Le  lende- 
main de  son  sacre,  il  fit  régler  les  mesures 
de  la  ville,  fil  mettre  son  nom  sur  celles  dont 
les  vendeurs  et  les  acheteurs  devaient  se  ser- 
vir ,  et  défendit  d'en  employer  d'autres,  sous 
peine  de  confiscation  de  tous  les  biens  en 
11.  faveur  des  pauvres.  Informé  que  les  admi- 

nistrateurs temporels  de  l'église  se  laissaient 
gagner  par  des  prrsenls  qu'on  leur  faisait  en 
forme  d'étrennes,  il  les  lit  venir  tous  à  l'heu- 
re même;  et  sans  leur  dire  une  seule  parole 
rude,  il  leur  défendit  de  recevoir  à  l'avenir 
aucrius   présents,    et   augmenta    leurs    ap- 
pointements. Tous  les  mercredis  et  samedis, 
il  domuiit  des  audiences  publiques,  faisant 
mettre  à  cet  effet  un  siège  et  deux  bancs 
devant  l'église,  où  il  s'entretenait  avec  quel- 
ques personnes  capables;  on  lisait  l'Évan- 
gile ;  et  afin  que  ceux  qui  avaient  des  plain- 
tes à  lui  faire  n'en  fussent  point  empêchés  par 
les  otficiers,  il  n'eu  retenait  qu'un  auprès  de 
lui.  Un  jour  que  personne  ne  s'était  adressé 
à  lui,  il  se  retira  les  larmes  aux  yeux;  So- 
phrone,  qui  s'en  aperçut,  lui  remontra  qu'il 
devait  au  contraire  se  réjouir  de  ce  que  l'on 
vivait  à  Alexandrie  sans  contestation  et  sans 
dispute  :  la  rèllexion  lui  parut  juste,  et  sa 
tristesse  se  convertit  en  joie.  Les  Syriens, 
échappés  de  la  captivité  des  Perses,  s'adres- 
sèrent à  lui,  le  suppliant  avec  instance  de  les 
recevoir.  Il  fit  mettre  les  malades  dans  les  hô- 
pitaux, et  donner  l'aumôue  aux  saints,  savoir  : 
une  pièce  d'argent  à  cluicun  des  hommes, 
et  deux  à  chaque  femme  ou  fille,  à  cause  de 
l'infirmité  du  sexe.  11  arriva  que  quelques- 
uns,  avec  des  habits  couverts  d'or  et  des 
brasselets  demanilèreut  aussi  l'aumône;  ses 
aumôniers  faisant  dilUcultè  de  la  leur  don- 


6S9 


ner,  il  les  en  reprit  très-sévèrement,  disant 
que  Jt''sus-(;iirist  avait  dit  :  Itunnczà  tniisccux  uc.  vi.ji 
qui  vous dcuuitiik'iil.  Un  autre  l'aboidant  avec 
un  mi;chant  habit,  et  le  priant  d'avoir  pitié 
d'un  pauvre  captif,  le  saint  lui  lit  donner  six 
pièces  d'argent  :  les  ayant  reçues;  le  men- 
diant fut  changer  d'habit,  et  vint  par  une  au- 
tre côté  lui  exposer  ses  pressants  besoins  : 
Jean  commanda  h  son  aumônier  de  lui  don- 
ner six  pièces  d'or  ;  raumônier  ayant  re- 
connu le  mendiant,  en  avertit  le  saint  évo- 
que, qui  fit  semblant  de  ne  pas  l'entendre  : 
cet  homme  revint  une  troisième  fois,  et  quoi- 
quel'aiimônier  avertit  lepalriarchc  que  c'é- 
tait toujours  le  mémo  ,  il  lui  fit  délivrer  dou- 
ze pièces  d'or,  disant  :  "  C'est  peut-être  Jé- 
sus-Christ qui  vient  :\  dessein  de  me  tenter.  » 

4.  Les  vivres  étant  devenus  extrêmement     cap. iv. 
chers  à  Alexandrie  ,  parce  que  le  Nil ,  qui  , 
par  ses  débordements,  donne  la  fécondité 
aux  campagnes ,  n'était  point  sorti  de  ses 
bords  eu  cette  année-là,  un  habitant  de  la 
ville  olfrit    au  saint  patriarche  deux   cent 
mille  boisseaux  de  blé  et  quatre-vingts  livres 
d'or,  ti  condition  qu'encore  qu'il  s'en  recon- 
nût indigne,  il  serait  honoré  du  diaconat, 
afin  que,  servant  à  l'autel,  il  pût  être  puri- 
fié du  grand  nombre  de  ses  péchés.  Le  saint 
lui  représenta  que  son  otlraude  était  légi- 
time, et  ne  pouvait  être  faile  en  meilleure 
occasion  ;  mais  qu'étant  défectueuse  par  les 
conditions  qu'il  y  apposait ,  il  ne  pouvait  la 
recevoir ,  parce  qu'il  n'est  pas  permis  de 
vendre  la  grâce  de  Dieu  pour  de  l'argent. 
Cet  homme  s'en  retournait  fort  triste  ,  lors-       t. 
qu'on  vint  dire  au  patriarche  que  les  deux 
vaisseaux  qu'il  avait  envoyés  en  Sicile  cher- 
cher du  blé,  étaient  arrivés.  Deux  ecclésias- 
tiques   s'étant   frappés  l'un   l'autre  ,  il  les 
excommunia  pour  quelques  jours  ,  suivant 
les  canons  :  l'un  d'eux  se  soumit ,  et  recon- 
nut son  péché  ;  l'auti-e  prit  occasion  de  cette 
punition  pour  continuer  à  vivre  dans  le  dé- 
sordre, menaçant  de  faire  au  patriarche  tout 
le  mal  qu'il  pourrait.  Le  dimanche  étant  ve- 
nu, le  diacre  avait  presque  achevé  l'oraison 
générale,  et  était  près  de  lever  le  saint  voile, 
lorsque  le  saint,  pensant  à  cet  ecclésiastique, 
se  ressouvint  aussi  de  ce  précepte  du  Sei- 
gneur :  Si,  lorsque  vous  êtes  près  d'offrir  votre 
présent  à  l'autel,  vous  vous  souvenez  que  votre 
frère  a  quelque  chose  contre  vous,  laissez  votre 
présent,  et  ce  qui  suit  :  il  dit  au  diacre  de  re- 
commencer l'oraison  ,  et  après  l'avoir  ache- 
vée ,  de  la  recommencer  encore  ,  jusqu'à  ce 


660 


HISTOIRE  GliXKUALK  DES  AUTEURS  EGCLI^SIASTIQUES. 


qu'il  fut  de  retour,  fei;.'naiit  que  quelque 
nécessite  l'oLligeiiil  ili-  iiuilter  l'oulcl.  Ktunl 
allé  dans  la  grande  sacristie,  il  envoya  vin;:,'! 
de  ceux  qui  étaient  de  semaine  chercher  le 
clerc  de  mauvaise  vie.  Le  patriarche ,  le 
voyant,  mit  le  premier  les  genoux  en  terre, 
et  lui  dit  :  J'ardonncz-moi ,  mm  frère.  Le  clerc, 
confus  devoir  à  ses  pieds  ce  vénérable  vieil- 
lard ,  mit  aussi  les  genoux  en  terre  ,  et  de- 
manda pardon  et  miséricorde  ;  sur  quoi  le 
palriarche  disant  :  «  Dieu  veuille  nous  par- 
donner à  tous,  »  ils  se  levèrent  et  entrèrent 
dans  l'église,  où  le  clerc,  tout  transporté  de 
joie,  se  mit  à  l'autel.  Le  saint  eut  un  jour 
une  contestation  avec  le  sénateur  Nicélas, 
an  sujet  d'une  aflaire  publique  où  il  s'agis- 
sait de  l'intérêt  des  pau\Tes  :  ils  se  sépa- 
rèrent vers  la  cinquième  heure  du  jour  en 
très-mauvaise  intelligence.  Le  patriarche  , 
qui  avait  toujours  devant  les  yeux  la  loi  du 
Seigneur,  ressentait  un  extrême  déplaisir 
de  ce  qui  était  arrivé  ;  mais  celui  de  Nicélas 
ne  venait  que  d'un  intérêt  d'argent.  Jean  cet 
homme  juste  se  disait  à  lui-même  :  «  On  ne 
doit  point  se  mettre  eu  colère ,  ni  sans  rai- 
son, ni  avec  raison  ;  et  sur  les  onze  heures, 
il  envoya  un  arcliiprêtre,  accompagné  d'iui 
clerc,  dire  de  sa  part  au  sénateur  :  «  Le  so- 
leil est  près  de  se  coucher.  »  Nicétas  n'eut 
pas  plus  tôt  entendu  cette  parole  ,  qu'em- 
brasé d'uu  feu  divin  ,  il  courut  fondant  en 
larmes  se  réconcilier  avec  son  pasteur.  Ils 
se  mirent  à  genoux  l'un  devant  l'autre,  s'en- 
tr'embrassèrent ,  et  s'entretinrent  quelque 
temps  sur  le  danger  qu'il  y  avait  d'écouter 
les  discours  de  ceux  qui  aiment  à  engager 
les  autres  dans  des  disputes  et  des  coutesla- 
tions.  Jean  avait  un  neveu  nommé  Georges , 
qui,  étant  entré  en  querelle  avec  un  hôtelier 
de  la  ville,  en  avait  été  extrêmement  injurié. 
Le  neveu  vint  tout  éploré  trouvei^  sou  oncle  ; 
mais  comme  il  ne  pouvait  parler,  tant  il  était 
pressé  de  douleur,  d'autres  cxpli(juèrent  au 
palriarche  le  sujet  de  son  chagrin.  Ahiis  ce 
véritable  médecin  des  âmes ,  voulant  adou- 
cir le  transport  de  colère  dans  lequel  il  voyait 
son  neveu-,  l'assura  qu'il  ferait  ce  jour-l;\ 
même  une  chose  (jui  rpni|)lirait  d'('tonne- 
ment  toute  la  ville.  Comme  il  vit  ipie  ce  re- 
mède avait  produit  l'eirct  qu'il  avait  prévu  , 
et  qu'il  ne  restait  plus  de  tristesse  dans  l'es- 
prit de  son  neveu,  qui  s'imaginait  sans  doute 
qu'on  ferait  fouetter  publiquement  cet  hôte- 
lier, il  lui  dit  en  le  baisant  :  u  Mon  fils,  si 
VO'.is  êlcs  véritabremeut  mon  neveu,  prépa- 


rez-vous i\  être  plutôt  fouetté  vous-même,  et 
à  soullVir  toutes  sortes  d'injures  de  qui  que 
ce  soit  :  car  la  véritable  parenté  ne  dépend 
pas  de  la  chair  ni  du  sang,  mais  de  la  vertu 
qui  en  est  l'âme.  »  Etant  averti  qu'un  dia- 
cre ne  voulait  pas  se  réconcilier  avec  un 
homme  qui  l'avait  fâché,  il  lui  refusa  la  com- 
munion, lorsqu'il  vint  pour  la  recevoir  à  son 
rang,  en  lui  disant  :  «  Allez  auparavant  vous 
réconcilier  avec  votre  frère.  i>  Le  diacre,  n'o- 
sant contester  avec  son  évêque  devant  tant 
de  monde,  et  en  un  lieu  si  saint,  lui  pro- 
mit d'obéir,  et  alors  il  lui  donna  la  commu- 
nion. 

5.  11  était  d'usage,  lorsque  l'empereur  va-  tip.  u. 
nait  d'être  couronné,  que  les  ouvriers  qui 
travaillaient  aux  embellissements  des  tom- 
beaux lui  présentassent  quatre  ou  cinq  piè- 
ces de  marbres  de  dilTérentes  couleurs ,  en 
lui  denumdant  lequel  de  ces  marbres  lui 
plaisait  pour  tombeau.  Cette  cérémonie  s'é- 
tait introduite  afin  de  faire  connaître  au  sou- 
verain de  l'empire  ,  qu'étant  homme  ,  et  su- 
jet à  être  dans  peu  réduit  en  poudre  ,  il  de- 
vait prendre  soin  de  son  âme  ,  et  gouverner 
avec  équité.  Saint  Jean  l'Aumônier,  voulant 
imiter  une  coutume  si  louable,  se  fit  faire 
uu  tombeau  au  même  lieu  où  ses  prédéces- 
seurs étaient  enterrés;  mais  il  défendit  de 
l'achever  avant  sa  mort,  afin  que  cet  ou- 
vrage demeurant  imparfait,  ceux  qui  en 
avaient  la  charge  lui  vinssent  dire  tous  les 
aus  le  jour  d'uue  fête  solennelle,  en  présence 
de  tout  le  clei-gé  :  Votre  tombeau  demeure  im- 
jjarfuit  ;  commandez  qu'on  l'achève ,  puisque 
vous  ne  savez  pas  à  quelle  heure  les  voleurs  doi- 
vent venir.  Les  églises  consacrées  à  Dieu 
dans  Jérusalem  ayant  été  brûlées  par  les 
l'eiscs,  il  envoya  à  Modeste  ,  palriarche  de 
colle  ville,  mille  pièces  d'argent ,  mille  sacs 
de  blé  .  mille  sacs  d'autres  grains  ,  mille  li- 
vres de  fer ,  mille  poignées  de  poissons , 
mille  barils  de  vin  ,  et  mille  ouvriers  égyp- 
tiens pour  lui  aider  à  rebâtir  les  églises.  La 
lettre  dont  il  accompagna  ces  présents,  était 
conçue  en  ces  termes:  «  Vénéiable  servi- 
tour  de  Jésus-Clii'isl ,  je  vous  supplie  de  me 
l'ardonner,  si  je  ne  vous  envoie  rien  (|ui  soit 
digne  de  son  temple  ,  puisque ,  s'il  était  à 
jjropos,  j'irais  moi-même  travailler  A  la  sainte 
église  de  sa  résurrection  :  je  vous  conjure 
par  le  respect  que  je  vous  porte  ,  d'excuser 
mon  peu  de  pouvoir,  et  de  demander  pour 
moi  i\  Jésus-Christ  qu'il  me  fasse  la  grâce 
d'êL'c  écrit  au  livre  de  vie.  »  il  assistait  sou- 


Cip. 


[vu'  SIKCLE.] 

vent  ceux  qui  ('taicnt  ;ï  l'afioiiie,  cl  kuir  l'er- 
inail  les  yeux  de  ses  propies  mains,  ponr  se 
préparei'  liii-nii'ine  :'i  un  passat;c  si  impor- 
tant. Il  ordonnait  anssi  rpi'on  eût  grand  soin 
de  prier  ponr  les  morts  :  sur  quoi  il  racon- 
tait que  de  son  temps  un  captif  ayant  (ité 
ment'  en  Perse,  ot  mis  en  prison,  ses  pa- 
rents, à  qui  l'on  avait  rapporté  qu'il   était 
mort  en  tel  joor  et  tel  mois  ,  faisaient    faire 
trois  fois  l'année  des  prières  pourlui.  Quatre 
ans  après,  k;  captif,  ayant  ti'otivé  le  moyen 
de  se  sauver,  revint  en  Chypre  :  ses  parents, 
surpris  de  le  voir  ,  lui  dirent  qu'ayant  reçu 
des  assurances  de  sa  mort ,  ils  avaient  fait 
trois  fois  l'année  dos  prières  pour  lui.  Le 
captif  Iciirdcmanda  en  queljourils  les  avaient 
faites  :  iis  réijondirent  :  «  Aux  saints  jours 
de  Noël,  de  Pâques  et  de  la  Pentecôte.  »  ïln 
ces  jours-l;\  mômes,  répliqua  le  captif,  un 
homme,  aussi  éclatant  de  lumière  que  le  so- 
leil, venait  me  déchaîner  et  m'cuvrir  la  pri- 
son ;  et  après  m'ètre  promené  tout  le  jour  , 
sans  que  personne  me  reconnût,  je  me  trou- 
vais le  lendemain   chargé  de  chaînes  com- 
me auparavant.  )>  Nous  voyons  par  là,  ajou- 
ta '  saint  Jean  l'Aumônier  ,  que  les  morts 
reçoivent  du  soulagement  des  prières  que 
l'on  fait  pour  eux. 

4.  Un  de  ses  domestiques  étant  tombé 
dans  une  pressante  nécessité,  il  lui  donna 
dix  livres  d'or.  Le  domestique,  confus  de 
cette  bonté,  lui  dit  qu'il  n'oserait  plus  lever 
lesyeuxpourle  regarder.  «  Mon  frère,  lui  ré- 
pondit le  patriarche,  je  n'ai  pas  encore  ré- 
pandu mon  sang  pour  vous,  ainsi  que  Jésus- 
Christ,  mon  maître  et  notre  Dieu,  le  com- 
mande.» Allant  à  l'église  des  saints  martyrs 
Cyr  et  Jean,  faire  ses  prières  sur  leur  tom- 
beau, une  femme  se  jeta  à  ses  pieds,  criant: 
Cl  Faites-moi  justice  de  mon  f;endre  qui  me 
maltraite.  »  Ceux  de  sa  suite  lui  représentè- 
rent qu'il  pourrait  à  son  retour  pourvoii'  aux 
plaintes  de  cette  femme  ;  mais  il  leur  ré- 
pondit :  «  Comment  Dieu  écouteia-t-il  mes 
prières,  si  je  rejette  celle-ci?  Qui  me  peut 
assurer  que  je  vivrai  jusqu'à  demain,  et  que 
je  n'irai  pas  aujourd'hui  rendre  compte  à 
Jésus-Christ  de  la  négligence  dont  j'aurai 
usé  envers  cette  femme  ?  »  Il  l'écoula  sur- 
le-champ,  et  donna  ordre  qu'elle  fût  satis- 
faite. Il  ne  pouvait  soutfrir  que  l'on  sortît  de 
l'église  durant   le  service.  Voyant    un  jour 


CIIAPITHE  LXI.  —  Ll^ONCE  DE  NAPLES. 


fifii 


(]ue  plusieurs  sortaient  après  la  lecture  do 
l'évangile,  il  quitta  l'autel,  les  suivit,  et  alla 
s'asseoir  au  milieu  d'<.'nx,  en  leui'  disant  : 
«  Le  pasieur  ne  tloit  point  abandonner  son 
fiiuipeau  :  ou  rentrez  avec  moi  dans  l'église, 
ou  je  demeurerai  ici  avec  vous.  N'est-ce 
pas  en  votre  considération  que  je  viens  dans 
l'église  ?  Et  ne  pourrais-je  pas  dire  la  messe 
dans  l'évéché  ?  ))  Cette  correction  leur  ôta 
l'envie  de  retomber  dans  une  semblable 
faute.  Il  défondait  à  ses  peuples  toute  com- 
nuinication  avec  les  hérétiques ,  surtout 
l'entrée  dans  les  lieux  où  ils  faisaient  leurs 
prières. 

7.  Quelque  temps  avant  sa  mort,   le  saint    ci?. 
patriarche  se  retira  en  l'île  de  Chypre.  Ce  que 
Léonce  dit  de  son  voyage  et  de  ses  derniè- 
res actions,  il  l'avait  appris,  non  du  prêtre 
Mennas,  mais  de  quelques  autres  personnes 
dignes  de  foi.   Etant   arrivé   à  Amathonte, 
lieu  de  sa  naissance,  Jean  se  fît  apporter  une 
plume  et  du  papier  pour   écrire  son  testa- 
ment, qui  consiste  plus  eu  actions  de  grâces 
à  Dieu  qu'en  legs  pieux,  puisqu'il  ne  lui  res- 
tait qu'une  seule  pièce  de  monnaie  dont  il  en 
disposa  en  faveur  des  pauvres.  Une  femme 
de  la  même  ville,  le  sachant  arrivé,  vint  se 
jeter  à  ses  pieds,  lui  demandant  l'absolution 
d'un  péché  si  énorme,  qu'elle  n'osait  le  dé- 
clarer à  personne.  Le  saint  fit  tout  ce  qui 
dépendait  de  lui  pour  l'engager  à  le  confes- 
ser; mais  voyant  que  la  boute  l'en  empê- 
chait, et  qu'elle  refusait  même  de  le  confes- 
ser  par   écrit  :  «  Ne   pouvez-vous  pas,  lui 
dit-il,  l'écrire,  le  cacheter,  et  me  l'apporter?» 
Elle  y  consentit,  en  le  conjurant  de  no  point 
ouvrir  le  papier,  et  de  donner  ordre  qu'il  ne 
put  jamais  tomber  entre  les  mains  de  per- 
sonne.   Cinq  ou   six  jours   après   que   cette 
femme  lui  eut  apporté  ce  papier,  il  moiu'ut, 
sans  en  avoir  paih'  à  qui  que  ce  fût,  et  sans 
avoir  ordonné  ce  qu'on  en  ferait.  Cependant 
celte  femme  sortit  de  la  ville  :  ayant  appris 
à   son   retour  la  mort   du   patriarche,  elle 
faillit  en  perdre  l'esprit ,  dans  la  persuasion 
que  son  papier  était  demeuré  dansTévccbé; 
mais  revenant  à  elle-même,  elle  va  au  tom- 
beau   du  saint,    embrasse    son  cercueil,   le 
baigne   de   ses  larmes,    passe   auprès    trois 
jours  entiers  sans  boire  ni  manger,  et  prie 
avec  tant  de  ferveur  et  de  foi,  que  le  saint, 
sortant  do  son  tombeau ,  lui  remet  en  main 


'  Dicebat  igitur  sanctii>!  episcopus  quia  ex  hoc 
(fiscimus  habere  dormientes  quietem,  quainlo  pro 


eis   collectas  facimus.   Vita  S.   Joan.,   cap.    vm, 
pag.  508,  toiu.  Il  Jan.  apiid  Bolland. 


662 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIOUES. 


Cap.  IV, 


Vieilrialnl 
ou  l'm^D.^, 


son  papier  cacheté  couimc  elle  l'avait  donné. 
Elle  louvre,  trouve  ce  qu'elle  avait  écrit 
ellacé,  et  voit  qu'il  y  avait  écrit  au-ticssous: 
/fn  comidcrntion  de  Jean  mim  serviteur,  je  te 
pardonne  ton  péché.  Léonce  raconte  que  de 
son  temps  il  sortait  du  tombeau  du  saint 
patriarche  une  liqueur  coiuinc  d'un  |iarlum 
précieux  ;  à  quoi  il  ajoute  qu'on  ne  devait 
point  craindre  de  croire  un  tel  miracle  , 
puisqu'il  y  avait  dans  l'ile  de  (Jiy  pre  (ilusieurs 
Faillis  des  cercueils  desquels  il  tiéeoulait  une 
liqueur  aussi  précieuse,  Dieu  voulant  par 
ces  sortes  de  grâces  honorer  ses  serviteurs. 
8.  C'est  encore  à  Léonce,  évèque  de  Na- 
ples  en  Chypre,  que  nous  sommes  redeva- 
bles de  l'histoire  de  saint  Simé'on,  suinommé 
ïaiis,  c'esl-à-dire,  extravagant  ou  insensé, 
parce  que,  dans  la  vue  de  s'humilier  aux 
yeux  (les  hommes,  il  Ut  quantité  d'actions 
qui  ne  s'accordaient  pas  avec  la  prudence 
humaine,  (juand  cette  histoire  ne  serait 
point  attribuée  à  Léonce  dans  le  second  con- 
cile de  Nict'e  ' ,  l'autorité  des  manuscrits 
yrecs ',  où  elle  porte  son  nom,  noiissullirait 
pour  l'en  croire  auteur.  Il  avait  appris  ce 
qu'il  nous  en  a  laissé  d'un  diacre  de  l'é- 
glise d'Emèse,  nommé  Jean,  contemporain 
de  saint  Siméon,  et  témoin  oculaire  de  ses 
vertus  et  de  ses  actions  extraordinaires,  qui 
était  son  ami,  et  qui  l'avait  logé  chez  lui. 
Léonce,  avant  d'avoir  eu  des  mémoires  de 
ce  diacre,  avait  composé"  un  abrégé  de  la 
vie  de  ce  Saint.  Cet  abrégé  n'est  pas  venu 
jusqu'à  nous  ;  et  il  y  a  toute  apparence  qu'il 
ne  le  jugea  pas  digne  d'être  transrais  a  la 
postérité,  ayant  découvert  une  soiure  plus 
pure  et  plus  abondante  que  celle  on  il  avait 
puisé  d'aboi'd.  La  Vie  de  saint  Siméon  se 
trouve  en  latin  dans  Suriusaupromii-r  juillet. 
Les  BoUandisles  en  ont  donné  une  nouvelle 
version,  à  côté  de  laquelle  ils  ont  mis  le 
texte  grec  *.  Léonce,  prévoyant  bien  que  la 
vie  de  ce  Saint,  telle  qu'il  la  décrivait,  pa- 
raîtrait une  l'ulie  aux  yeux  de  plusieurs  qui 
ne  jugent  des  choses  que  sur  les  dehors  et 
surles  apparences,  les  prie  "^  de  se  souvenir 
(pic  saint  l'aiil  disait:  No'is  sommes  fotis  poi/r 
l'imiour  de  Jcsus-C/irist.  El  eucoi'C  :  Ce  f/iii 
parait  en  Dieu  une  folie,  est  plus  sage  que  la 
sagesse  de  tous  les  hommes. 

'  Concil.  Nie.  2,  act.  4,  ubi  supra. 
'  HoII.ukI.,  ad  dicm  1  julii,  pag.  131. 
'  LiMjiitiiis,  in  vita   S.   Simeonis,  imiii.  63,  pag. 
168, 
'  Kllc  a  paru  en  iInlicD,  par  les  suins  Un  Père 


9.  Saint  Siméon  était  né  i  Edesse  en  Syrie- 
Les  peuples  de  cette  ville  et  des  lieux  voi- 
sins avaient  coutume  d'aller  chaque  année 
à  Jérusalem  pour  y  célébrer  la  fête  de 
l'Exaltationde  la  Sainte-Croix,c'cst-à-dire,  de 
son  Invention  ;  car  on  ne  coimaissait  point 
encoie  la  l'oie  de  l'Exaltation  sous  le  rc- 
^ne  de  Jusiinien,  auquel  Léonce  rapporte  le 
voyage  de  saint  Siméon  à  Jérusalem  '.  Il 
l'entreprit  à  Vàs^c  d'environ  vingt  ans  avec 
un  de  ses  amis,  imnjiné  Jean.  Après  avoir 
visité  les  Saint-Lieux  et  satisfait  à  leur  piété, 
ils  passèrent,  pour  s'en  retourner  en  leur 
pays,  par  la  vallée  de  Jéricho,  et  de  là  dans 
les  monastères  bâtis  le  long  du  Jourdain, 
l'ouchés  de  la  vie  (''dillimte  des  solitaires  et 
des  religieux  qui  les  habitaient,  ils  s'arrê- 
tèrent dans  celui  du  bienheureux  Nicon,  qui 
les  reçut  sous  sa  discipline,  leur  coupa  les 
cheveux  et  leur  doinia  l'iiabil  monasiicpu;. 
Lcm-  zèle  pour  les  exercices  de  piété  s'aug- 
mentant  de  jour  en  jour,  ils  obtinrent  de  lui 
de  passer  dans  un  désert  derrière  la  Mer 
Morte,  où  ils  demeurèrent  pendant  vingt- 
neuf  ans,  occupés  à  combattre  sans  cesse 
contre  l'ennemi  du  salut,  qu'ils  vainquirent 
toujours  par  les  armes  de  la  prière  et  de  la 
pénitence  la  plus  sévère.  Alors  il  vint  en 
pensée  à  Siméon  de  travailler  à  sa  sanctifi- 
cation et  à  celle  des  autres  par  les  moyens 
les  plus  propres  à  confondre  la  vaine  sagesse 
du  monde.  Ce  fut  de  contrefaire  l'insensé,  et  de 
se  rendre  méprisable  aux  hommes  par  des 
actions  qui  marcpiaient  de  la  folie,  du  moins 
en  apparence.  Les  efforts  que  lit  Jean  ,  son 
ami  et  son  compagnon,  pour  le  faire  chan- 
ger de  dessein  ,  furent  sans  efl'et.  Siméon 
le  quitta,  alla  visiter  une  seconde  fois  les 
Saints-Lieux  en  Jérusalem,  et  passa  de  là  à 
Emèse  en  Syrie,  où  il  s'arrêta  pour  le  reste 
de  ses  jours.  Quoique  âgé  de  plus  de  soixante 
ans,  on  le  vit  courir  dans  les  rues  de  cette 
ville  en  habit  de  bouffon,  jouer  avec  les  en- 
fants, sauter  dans  les  danses  publi(iues  avec 
le  premier  venu  ,  attaquer  les  passants  à 
coups  de  noix  ou  de  pierres,  fréquenter  les 
bains,  les  cabarets,  rechercher  l'amitié  des 
femmes  débanclii'os,  se  joindre  aux  jiossédés 
et  imiter  leurs  grimaces.  Mais  on  découvrit 
par  la  suite  qu'il  n'avait  eu  reconrs  à  toutes  ces 

Léunnnl  de  l.uequcs,  <le   la  compagnie  de  Jdsus; 
Lvi.cn'es,  16(.e,  iii-8°.  [Vddilcur.) 

■*  7)1  prniug.,  pag.  lal. 

•  llolliiiiil.,  ad  ditm  l  julii,  pag.  138. 


Il  Tl«  dvulbt 
Siméon. 


PS.  II>6, 


[vu»  SIÈCLE.] 

cU^marclics  d'une  folie  appnrciitf!  qun  pour 
couvrir  los  «ïiAccs  (pi'il  rpc(>viiil  de  Dini,  oii 
pour  les  eorunuuucpicr  aux  autres;  que  les 
façons  d'insensi!  qu'il  atreclail  u'elaicnt  que 
pour  niicu\  réussir  dans  ses  leuvres  de  cha- 
rité, et  pour  demeurer  lui-nièmc  dans  l'ini- 
miliatinu.  Car  la  prière  la  plus  fréquente 
qu'il  faisait  à  Dieu  était  de  vivre  caché  et 
méprisé.  Il  chassa  les  démons  des  possédés, 
guérit  des  paralytiques,  chanijea  du  vin  en 
vinaijrre,  et  le  même  vinaigre  en  bon  vin  ; 
rendit  la  santé  aux  moribonds,  convertit  des 
juifs  et  des  hé-rctiquos  ;  engagea  des  courti- 
sanes ;\  changer  de  vie,  et  prédit  plusieurs 
Cip. Ti,  fois  l'avenir.  On  remarque  entre  autres  que, 
voulant  prédire  le  tremblement  de  terre  qui 
renversa  Antioche  sous  le  règne  de  l'empe- 
reur I\[auiice  vers  l'an  587,  il  prit  un  fouet 
dont  il  frappa  les  colonnes  des  bâtiments  pu- 
blics, leur  disant  à  chacune  :  Ton  Seigneur 
a  dit  :  Tiens-toi  ferme  ;  et  que  celles  qu'il 
avait  frappées  ne  furent  point  renversées  dans 
le  tremblement  de  terre;  qu'il  dit  à  d'autres  : 
Pour  toi,  ne  demcu7-e  pas  ferme ,  et  ne  tombe  pas; 
et  que,  dans  le  même  tremblement,  elles  se 
fendirent  depuis  le  haut  jusqu'en  bas,  sans 
toutefois  être  renversées,  mais  penchées  tant 
soit  peu.  Toutes  les  colonnes  qu'il  ne  frappa 


CHAPITRE  LXI.  —  LÉONCE  DE  NAPLES. 


663 


Léonce  ^ur  la 


point  i'iMciit  renversées.  L'iiislorien  Evagre' 
se  rencontre  dans  la  phi[)art  des  faits  avec 
Léonce;  mais  il  ne  les  donne  qu'en  peu  de 
mots,  disant  qu'il  faudrait  un  traité  exprès 
pour  rapporter  les  actions  de  Siméon.  Léonce 
ne  prétond  pas  même  les  avoir  rapportées 
toutes.  Il  en  finit  le  récit  par  celui  de  sa  mort, 
qu'il  dit  avoir  été  suivie  de  plusieurs  mer- 
veilles qui  rendirent  son  nom  glorieux. 

10.  L'évoque  Constantin  dit  dans  le  second 
concile  de  Xicée,  qu'il  avait  plusieurs panégv-  y"<'if<:«<f 
riques  et  plusieurs  discours  sur  les  fêtes,  com-  f,"  .p"'"  ''' 
posés  par  Léonce,  dont  un  de  ces  discours  "-i-'^J""»- 
était  sur  la  Transfiguration  de  notre  Sauveur; 
nous  ne  l'avons  plus.  Mais  on  nous  a  con- 
servé parmi  les  actes  du  concile  un  long 
fragment  d'un  autre  discours  où  Léonce  pre- 
nait la  défense  de  la  doctrine  chrétienne 
contre  les  juifs,  et  où  il  parlait  du  culte  des 
images,  comme  étant  autorisé  par  l'Ancien 
Testament.  En  effet.  Moïse  reçut  ordre  de 
Dieu  de  faire  des  images  de  chérubins  ;  Dieu 
fit  voiràEzéchiel  un  temple  rempli  d'images 
de  chérubins,  et  de  figures  d'hommes  et  de 
lions  ;  il  y  en  avait  de  même  dans  le  temple 
de  Salomon.  Il  est  vrai  qu'on  ne  les  adorait 
pas  :  mais  -  les  chrétiens  n'adoient  pas  non 
plus  les  images  des  saints,  comme  si  c'étaient 


»  Evagr.,  lil).  IV,  cap.  34. 

'  Chrislianus  dixil  [Judœo]  :  Bene  dixisti  :  qiUa 
et  pênes  nos  non  sicut  dit  adoranlur  Sanctorum 
caractères  et  icoiiœ  tel  formes.  Si  enim  ut  lieum 
adorarem  lignum  imaginis,  posseni  pmfecto  et 
ligna  rcliqua  adorare...  usqrtequo  conijiacta  sunt 
duo  ligna  crucis,  adoro  figuram  propler  Chris- 
tum  qui  in  ipsa  crucifixus  est.  Poslquani  auiem 
ab  ineicem  separata  fuerint,  projicioea  et  incen- 
do  ;  et  sicnl  is  qui  jussioncm  imperatoris  sus- 
cepit  et  salulavit  sigillum,  non  liitum  adoravil, 
aut  chartam  aut  plunibum,  sed  iwperatori  ado- 
rationeni  impendit  et  cultum  :  ila  et  nos  christia- 
iiurunt  pueri  figuram  crucis  adorantes,  non  na- 
tvram  ligni  adoramus,  sed  signum  et  annuluni 
et  characlerem  Chrisli,  eu  m  aspicientes,  ijer  eu  m  il- 
lum  qui  in  eo  crucifi-vus  est,  salulamus  et  ado- 
ramus, et  sicut  pueri  propriipatris  cujusdemqui 
peregre  profeclus  est  ad  tempus  ab  illis.  multo 
crga  cum  affectu  ex  anima  flagrantes,  sive  vir- 
gam  ejus  in  domo  videant,  sive  sedem,  sive  cla- 
mydent,  kœc  cum  lacrymis  deosculantes  amplec- 
liintur  :  et  non  illa  adorant,  sed  patrem  deside- 
rant  et  honorant:  ita  et  nos  omîtes  fidèles,  ut 
virgam  Chrisli.  Crucem  adoramus;  ut  sedem  ve- 
ro  et  cubile,  ipsius  sanclissimum  monumentuni ; 
u(  dumum,  et  prœscpe,  et  Bethléem,  et  sancta 
ejus  cœterà  tabernacula...  Inlentio  exquiriturin 
omni  salutalione  et  omni  adoratione.  Si  me  ac- 
cusas quod  quasi  Diminum  lignum  adorent  Cru- 
cis, quare  non  calumniari);  Jacob  qui  adoravit 


super  summitatein  virgœ  Joseph  ?  Sed  manifes- 
tum  est  quia  non  lignum  videns  adoravit;  sed 
per  lignum  virgœ  Joseph  ;  qtiemadmodum  et  nos 
per  crucem  Christum...  Quia  vero  me  vidisti 
iconam  Voiniid  nostri  Jesu  Christi,  vel  immacu- 
latœ  matris  ejus,  vel  allerius  cujuspiam  justisa- 
lutare,indignaris  et  nos  idololatras  appellas?... 
Kon  erubescis  videns  me  in  toto  terrarum  orbe 
templa  idolorum  deslruere  et  templa  martyrum 
(edificare .' Si  idola  adorarem,  cur  martyres  qui 
idola  destruxerunt  adoraremus''  Si  ligna  ut  deos 
honoro  et  glorifico,  quomodo  honoro  et  glorifico 
martyres  qui  lignea  simulacra  destruxerunt? .., 
Fer  reliquias  martyrum  et  imagines  multoties 
effuganlur  da-monia...  Sed  et  fréquenter  sangui- 
num  fltiores  ex  iconis  et  reliqttiis  martyrum  facli 
sunt...  Die  mihi  quomodo  sumus  idololatrœ,  qui 
et  ipsa  ossa,  et  cinerem,  et  pannos,  et  sanguinem 
et  tumuium  martyrum  idco  adoramus  et  honora- 
mus,  quia  idolis  non  sacri/icarunt?...  0  homo, 
christianorum  populi  quolquot  figuras  Crucis  et 
conaruin  salutant,  non  ipsis  culturam  ligitis  vel 
lapidibus  nfl'erunt,  vel  auro,  velcorruptihiliima^ 
gini,  sed  per  ea  Deo  eunctorum  Creatori  gloriam, 
et  salutationem   et   cultum   impendunt.    Uonor 

enim  qui  sanctis  impendilur,  ad  cum  recurrit 

Ctun  ergo  videris  chrislianos  adorare  Crucent, 
scilo  quia  crucifixo  Christo  adorationem  offerunt, 
et  non  ligno  ;  nam  si  naturam  ligni  coluissent, 
profecto  et  arbons  et  nemora  adorassent,  sicuti 
et  tu  quoudam,  Israël,  adorabas  hœc  dicens  ar- 


HISTOIBE  Gl'^lNI^RALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES . 


664 

des  divinités.  Car  s'ils  croyaient  pouvoir  ado- 
rer l'image  d'un  saint,  peinte  sur  le  bois,  ils 
adoreraient  le  bois  sur  lequel  cette  image 
serait  peinte  el  tous  les  autres  bois.  Il  en  est 
de  même  de  la  croix.  Tant    que  les  deux 
bois  qui  la  forment  sont  joints  ensemble,  ils 
adorent  cette  figure  à  cause  de  Jésus-Ciirist 
qui  y  a  tHc  crucilié;  mais  anssilôt  qu'ils  sont 
séparés  l'un  de  l'autre,  ils  les  jettent  et  les 
brûlent.  Léonce  compare  l'adoration  que  l'on 
rend  à  la  croix  de  Jésus-Christ,  à  l'adoration 
que  rend  au  sceau  de  l'empereur  celui  qui 
en  reçoit  une  lettre.  Comme  ce  n'est  ni  à  la 
cire,  ni  au  papier,  ni  au  plomb  qu'il  rend  son 
adoration,  joaais  à  l'empereur;  de  même  les 
chrétiens,  en  adorafit  la  ligure  de  la  croix, 
n'adorent  point  les  bois  ctont  elle  est  com- 
posée, mais  Jésus-Christ  qu'ils  envisagent 
dans  la  figure  de  la  croix  où  il  a  été  attaché. 
Léonce  la  compare  encore  à  la  vénération 
qu'un  enfant  témoigne  pour  tous  les  ameuble- 
ments el  les  habits  de  son  père  absent  pour 
longtemps  :  il  les  baise  en  les  baignant  de  ses 
larmes.  Cette  marque  de  tendresse  ne  peut 
passer  pour  une  adoration,  mais  pour  une 
preuve  du  désir  que  cet  enfant  a  de  revoir  son 
père.  C'est  ainsi  que  les  fidèles  adorent  la 
croix  de  Jésus-Christ ,  et  qu'ils  témoignent  du 
respect  pour  tous  les  endroits  qu'il  a  sancti- 
fiés par  sa  présence  ,  pour  sa  crèche,  pour 
Bethléem  et  tous  les  autres  lieux  de  sa  demeu- 
re :  ce  qui  prouve  bien  que  leur  adoration  est 
relative  non  à  tous  ces  endroits,  mais  à  Jésus- 
Christ  même.   Les  Juifs,  en  adorant  le  livre 
de  la  Loi,  n'adoraient  ni  le  parchemin  sur 
sur  lequel  elle  était  écrite,  ni  l'encre  dont  on 
s'était  servi  pour  l'écrire  ;  mais  la  parole  de 
Dieu  écrite  dans  le  livre  de  la  Loi  :  de  même 
les  chrétiens,  en  adorant  l'image  de  Jésus- 
Christ,  n'adorent  ni  la  substance  du  bois,  ni 
celle  des  couleurs  ;  mais  en  tenant  en  main 
cette  ligure  inanimée  de  Jésns-Clnist,  il  leur 
semble  qu'ils  tiennent  et  qu'ils  adorent  Jésus- 
Christ  même.  Jacob,  en  baisant  la  tunique  do 
son  fils  Joseph  tout  ensanglanté,  s'imaginait 
embrasser  Joseph  même;  ainsi,  quand  nous 
tenons  ou  que  nous  saluons  les  images  de 
Jésus-Christ,  ou  de  ses  apôtres,  ou  de  ses 
martyrs,  nous  croyons  les  tenir  et  les  saluer 


eux-mêmes.  Ce  n'est  pas  l'action,  mais  l'in- 
tention que  l'on  doit  regarder  ilans  ces  soi-tes 
de  salutations  et  d'adorations.  Si  vous  m'ac- 
cusez. Continue  Léonce   en  s'adrcssaut  aux 
juifs,  de  rendre  au  bois  de  la  croix  la  même 
adoration  ([u'à  Jésus-Christ  ;   pounjuoi    ne 
faites-vous  pas  un  crime  à  Jacob  d'avoir  adoré 
le  haut  du  bâton  de  Joseph?  Mais  c'est  qu'il 
est  évident  qu'il  adora  Josejjh,  et  non  son   ' 
bâton;  et  il  Test  aussi  que  par  la  croix  nous 
adorons  Jésus-Christ,  .\braham  n'adora-t-il 
pas  les  impies  qui  lui  vendirent  le  terrain 
pour  construire  un    sépulcre  ?  Ne  lléchit-il 
pas  les  genoux  devant  eux?  Mais  il  ne  les 
adora  point  comme  des   dieux.  »    Léonce 
rapporte  plusieurs  autres  exemples  d'adora- 
tion rendue  à  des  hommes  par  des  serviteurs 
de  Dieu,  sans  que  l'Ecriture  leur  fasse  de 
reproches;  puis  il  ajoute  :  «  Pourquoi  donc 
m'appelez-vous  idolâtre,  vous  autres  juifs, 
parce  que  vous  m'avez  vu  saluer  l'image  de 
Notrc-Seigneur  Jésus-Christ,  ou  celle  de  son 
immaculée  Mère,  ou  de  quelque  autre  saint?  » 
Il  fait  voir  qu'il  n'y  a  aucun  fondement  à  ac- 
cuser les  chrétiens  d'idolâtrie,  puisque  non- 
seulement  ils  ont  renversé  les  idoles  de  lem'S 
temples,  mais  qu'ils  honorent  et  glorifient 
les  martyrs  et  les  apôtres,  qui  se  sont  aussi 
déclarés  ennemis  du  culte  des  idoles;  qu'ils 
bâtissent   des  églises  en  l'honneur  de   ces 
martyrs  dans   tout  le  monde,  et  qu'ils  cé- 
lèbrent les  louanges  des  trois  jeunes  hommes 
de  Babylone  qui  refusèrent  d'adorer  la  statue 
d'or  que  Nabuchodonosor  avait  fait  élever  ; 
que  la  vénération  qu'ils  ont  pour  les  ima- 
ges et  pour  les  reliques  des  martyrs,  est 
autorisée  par  les  miracles   opérés  par  ces 
images   et  par  ces   reliques.  «  l'ar  elles  les 
démons  ont  été  mis  en  fuite;  on  a  vu  en 
découler  du  sang  et  d'autres  liqueurs;  la 
croix  de  Jésus-Christ  a  produit  un   tel  ciian- 
gement  dans  des  idolâtres,  dans  des  homi- 
cides, dans  des  fornicaleurs,  dans  des  voleurs, 
qu'ils  ont  renoncé  au  monde,  et  pratitpié 
toutes  sortes  de  vertus.  Comment  les  chré- 
tiensseraient-ils idolâtres,  euxqui  n'honorent 
les  ossements,  les  cendres,  les  vêtements, 
le  sang,  les  tombeaux  des  martyrs ,  que 
parce  que  ces  martyrs ,  ont  refusé  constam- 


Htlir.  Tl, 


bori  fl  ligno  :  Tu  es  Deun  meus,  et  tu  me  genuis- 
li.  El  nos  iterum  non  nie  dicimus  cruci  ncqite  fi- 
guri.i  nanctorum  :  DHnosiri  eslis.  ^on  enim  siint 
DU  «ostri,  sed  siinililudines  et  imagiiiei  Christi 
et  iMiirtorum  ejun  ad  recordntionem  et  hnnorem 


rt  decorem  Ecclesiarum  propointm  et  adorandœ. 
Qui  eniiii  hounrnl  iiKirtijrem,  Deum  honorât,  et 
i/iii  nintrem  cjiis  adorât,  ipsi  hoiiorificcnliam  ex- 
liiliet.  l.i'iHiliiis,  111  Apologia,  low.Wi  CoHci/.,  png. 
235  et  seq. 


CHAPmtE  l,XI.  —  LIÎONCE  DE  NAPLES. 


[vu"  SIÈCLE.] 

mont  ilf  siicrifior  aux  idoles?  S'ils  rendent 
dos  liminpiirs  .'i  l;i  (iu:iii-o  do  la  croix  ot  aux 
imagos,  ce  cuile  ne  se  torminc  point  à  la 
niatiore  dont  elles  sont  composces,  ni  à  une 
iina^'O  corruptible,  ni  ;\  une  châsse,  ni  à  des 
roli(pies;  il  se  rapporte  au  Créateur  de  toutes 
choses,  ;\  qui  ils  le  rendent  par  ces  imac:es 
sensililes.  L'iionnour  mémo  qu'ils  rendent  ;\ 
ses  saints  retourne  vers  lui.  En  adorant  la 
croix,  ce  n'est  pas  an  bois,  mais  A  Josus- 
Christ  attaché  surlo  bois  (|u'ils  rendent  leurs 
adorations.  Ceux  des  Israélites  qui  avaient 
abandonné  le  culte  du  vrai  Dieu  pour  adorer 
des  idoles,  disaient  autrefois  aux  bois  et  aux 
arbres  :  l'of/*'  rfcs  mon  Dieu  :  c'est  vous  qui 
m'avez  engendré.  Ce  n'est  pas  l.'i  le  langage 
que  les  chrétiens  tiennent  à  la  croix  et  aux 
images  :  ils  ne  leur  disent  pas  :  Vous  êtes 
nos  dieux.  Ils  ne  les  regardent  que  comme 
des  ressemblances  et  des  figures  de  Jésus- 
Christ  et  des  saints;  ils  s'en  servent  pour  se 
remettre  plus  aisément  en  mémoire  ceux 
qu'elles  représentent  et  pour  la  décoration 
des  églises.  Celui  qui  honore  un  martyr,  ho- 
nore Dieu  ;  celui  qui  adore  la  Mère  de  Dieu, 
révère  Dieu  lui  même.  »  Nous  avons  un  au- 
tre fragment  de  la  même  .\pologie  de  Léon- 
ce pour  les  Chrétiens  dans  les  anciennes 
Leçons  de  Canisius  '.  Cet  évêque  y  fait  voir 
que  ce  que  les  prophètes  ont  prédit  de  la 
paix  dont  le  monde  devait  jouir  à  l'avéne- 
ment  de  Jésus-Christ,  a  été  pleinement  ac- 
compli :  ce  qu'il  prouve  premièrement 
par  l'édit  que  César-Anguste  publia  pour 
faire  un  dénombrement  des  habitants  de 
toute  la  terre  ;  secondement,  par  la  réunion 
qui  s'est  faite  de  tous  les  hommes  en  un  seul 
corps,  qui  est  l'Église,  par  la  prédication  de 
l'Évangile.  Lambécius  cite  encore  un  frag- 
ment de  cette  .\poIogie  où  Léonce  justifie 
le  culte  que  les  chrétiens  rendent  à  la  croix  -  : 
c'est  apparemment  le  même  qui  fat  cité  dans 
le  second  concile  de  Nicée. 
Distoorf  11-  Le  discours  sur  le  saint  vieillard  Si- 
ilrd"s.'  méon '' a  été  donne  tout  entier  en  grec  et 
"'  en  latin  par  le  P.  Gombefis,  avec  un  autre 

•  Tom.  I  leclion.  Canis.,  editÀntuerp.,  an.  1725, 
pag.  793. 

*  La.mhec.,  Biblioth.  FindoJon,  lib.  IV,  pag.  137. 
»  Tom.  1  Àuctuarii.  Combef.,  pag.  682. 

'  Turtures  castitntetn  semper  virginis  ac  Dei 
genUricis  signilicabant,  paj.'.  fi90. 

s  Pag.  G8:i. 

«  Couihefis,  tom.  I,  pag.  702. 

'  Viuis  Deiis  et  unus  mcdiator  Dei  et  hominum 
homo  Christus  Je^us.   Idcirco  igitur  Deus  est  .- 


OC." 


sur  la  mi  PentocAto  et  un  sur  l'Aveugle-né 
ol  sui'  roMiprisoniiomont  de  saint  Pierre  par 
llérodo.  Ils  ont  l'h'  mis  l'un  et  l'autre  dans 
la  Bibliothèque  des  Pères,  à  Lyon,  ou  1077. 
Le  piomier  est  une  explication  du  cantique 
que  Siméon  prononça  en  tenant  Jé-sus-Christ 
entre  ses  bras,  et  do  la  loi  di-  Moïse  touchant 
la  purification  des  femmes.  L'auteur  y  don- 
ne à  la  Sainte-Vierge  *  le  titre  de  Mère  de 
Dieu,  et  semble  dire  qu'il  "  avait  fait  un  dis- 
cours le  jour  de  la  fêle  do  la  naissance  du 
Sauveur  ,  où  il  avait  emprunté  pourla  célé- 
brer les  paroles  des  saints  Pères  et  les  can- 
tiques des  anges. 

12.  Dans  le  discours  sur  la  mi-Pentecôte  ',  oiston™ 
il  explique  le  septième  chapitre  de  l'Evan-  SiV."'"''"' 
gile  selon  saint  Jean,  où  il  est  dit  qu'au  mi- 
lieu de  la  fête  des  Tabernacles,  qui  durait 
sept  jours,  Jésus-Christ  monta  au  temple,  où 
il  se  mit  à  enseigner.  Il  dit  que  cette  fèto, 
qu'on  appelait  de  la  mi-Pentecôte,  parce 
qu'on  la  faisait  au  milieu  de  la  cinquantaine 
de  Pâques,  avait  été  établie  par  les  succes- 
seurs des  apôtres.  On  ne  voit  point  que  cette 
fête  ait  été  observée  dans  les  Églises  d'Occi- 
dent. Il  reproche  aux  hérétiques  de  corrom- 
pre le  texte  des  divines  Écritures,  à  l'imita- 
tion des  Juifs,  et  de  supposer  aux  Pères  de 
l'Église  divers  écrits ,  dont  ils  sont  eux-mê- 
mes les  auteurs;  faisant  passer  sous  les  noms 
de  saint  Athanase,  du  pape  Jules,  de  saint 
Grégoire  Thaumaturge,  les  dogmes  impies 
d'Apollinaire.  Sa  doctrine  sur  l'Incarnation 
est  exacte.  «  //  n'y  a,  dit-il,  d'après  saint 
Paul,  qu'un  Dieu  et  un  médiateur  entre  Dieu  et 
les  hommes,  Jésus-Christ  homme.  Il  est  Dieu  '', 
car  il  ne  pourrait  être  médiateur,  s'il  n'était 
qu'homme;  comme  il  ne  pourrait  l'être,  s'il 
n'était  que  Dieu.  Mais  parce  qu'il  est  Dieu  et 
homme,  ou  plutôt  Dieu  fait  homme,  c'est 
pour  cela  qu'il  est  médiateur.  Il  communi- 
que aux  deux  natures  dans  lesquelles  il  fait 
les  fonctions  de  médiateur  :  à  la  divinité, 
étant  Dieu  par  nature  ;  à  l'humanité,  étant 
homme  substantiellement,  n  II  avait  dit  dans 
le  discours  précédent'  qu'encore  que  le  Fils 

non  enim  esset  mediator  ut  esset  tantum  homo; 
ac  nec  e  conversa,  ut  tantum  Deus  esset:  ideo 
autem  est  mediator,  quia  est  et  Deus  et  homo, 
seu  potins  Deus  factus  homo.  Quamobrem  eliam 
utrisque  illis  communicat,  quibus  mediatorem 
agit;  Deo  quidem.  lU  qui  Deus  existât  per  divini- 
tatis  naturam  ;  hominibus  autem  per  huii.anita- 
tis  substantiam.  Leontius,  in  uiediam  Pentecos- 
ten,  pag.  718.  {Bihl.  vel.  Pal.,  tom.  XII,  pag.  299.) 
*  Quanquam  nalurœ  pctor  nostram  naturam 


666 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 


DiMonrs 
Dé. 


de  Dieu  par  sa  bonlé  envers  nous  se  fût  re- 
vêtu de  notre  nature  indivisiblcniful  et  sans 
confusion,  la  f,'iandeur  de  la  divinité  iv.  lais- 
sait pas  de  répandre  son  éclat  sur  la  bassesse 
de  la  nature  Immaine. 

13.  Léonce  lit  undeu.Kième  disco;:rs',  sur 
la  même  fête  de  la  mi-Pentecôle,  dans  lequel 
il  établit  la  divinité  de  Jésus-Christ  par  les 
miracles  qu'il  avait  faits  à  la  vue  des  Juifs, 
principalement  jiar  la  t.'uérison  miraculeuse 
de  l'aveugle-né.  Il  y  parle  de  l'emprisonne- 
ment de  saint  Pierre  parHérode,  donnant  à 
cet  apùtre  les  titres  de  prince  et  de  supiême 
sommet  des  apôtre? '.  Il  prétend  qu'Hérode 
ne  l'aurait. point  tiil  mettre  en  prison,  ni 
mis  à  mort  saint  Jacques  ,  si  les  Juifs  ne  l'y 
eussent  engagé  parai-gent.  11  combat,  comme 
une  folle  doctrine  ilcsp;iïeus,  ce  que  disaient 
quelques-uns,  que  l'heure  de  même  que  la 
manière  de  notre  mort  était  décidée  irrévo- 
cablement par  le  destin.  «  Si  cela  est  ainsi, 
pourquoi  dans  nos  maladies  avons-nous  re- 
cours aux  médecins  pour  éloigner  le  temps 
de  notre  mort?  Pourquoi  ceux  qui  voyagent 
sur  mer  observent-ils  avec  tant  de'  soin 
l'étoile  polaire,  et  s'empressenl-ils  si  fort 
d'arriver  au  port?  Pourquoi  évitons-nous  la 
rencontre  des  voleurs,  et  nous  munissons- 
nous  de  tant  d'armes ,  lorsque  nous  allons 
au  combat  ?  Pourquoi  faire  un  crime  à  Gain 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQL'ES. 

d'avoir  tué  son  frère  Abel,  s'il  devait  périr 
parce  genre  de  mort?  Dieu  ne  dit-il  pas 
dans  les  Psaumes  :  Invoquez-moi  ou  jour  de 
l'affliction ,  je  vous  en  délivrerai ,  et  vous  aurez 
lieu  de  m'honorer  ?  n 

14.  Baronius  ,  Possevin  et  quelques  au- 
tres, trompés  par  une  ancienne  mais  peu 
correcte  traduction  des  actes  du  second  con- 


Oa*r« 

tltrilpé  «L 
OBCC. 

Jn(em« 
dct  échu  • 

cile  de  Xicée  ,  ont  avancé  que  Léonce  avait  aiuoTiiin 
continué  l'histoire  d'Evagre  ,  et  donné  celle 
des  révolutions  arrivées  de  son  temps  dans 
l'Empire.  Mais  il  est  visible  que  les  actes  de 
ce  concile  parlent  en  cet  endroit  de  la  Vie  de 
saint  Siméou,  dit  l'Insensé  ,  composée  par 
Léonce.  11  n'y  est  question  ni  de  séditions  , 
ni  de  guerres  ;  au  lieu  que  l'ancienne  version 
fait  '  mention  des  troubles  arrivés  dans 
l'Église  du  temps  de  ce  solitaire  ;  ce  qui  a 
donné  lieu  de  conjecturer  que  Léonce  ,  qui 
eu  avait  écrit  la  vie ,  avait  aussi  composé 
une  Histoire  de  ces  troubles.  Les  écrits  de 
Léonce  ne  lui  Orent  pas  moins  d'honneur 
que  sa  vertu  ;  et  on  lui  rendit  '  témoignage 
dans  un  concile  nombreux  d'avoir  enseigné 
une  doctrine  entièrement  orthodoxe. 

[Tous  les  écrits  de  Léonce  sont  reproduits 
au  tome  XCIII  de  la  Palrologie  grecque,  col. 
lo5'J-i"-58,  avec  une  notice  tirée  de  Fabricius 
et  une  autre  tirée  de  Basnage.] 


CHAPITRE  LXII. 


Btxaoce      c--'. 

diffcreat  de 
Léonce  lOri. 
géalsie. 


Léonce  de  Byzance,  avocat  et  depuis  moine  [610]. 

[Écrivain    grec.) 


D  est  fait  mention,  dans  la  vie  de  saint  Ba- 
bas ',  d'un  Léonce  de  Byzance  que  ce  saint 
rejeta  de  sa  compagnie  ,  parce  qu'il  était 
trop  attaché  à  la  doctrine  de  Théodore  de 
Mopsueste.  Canisius  croit  que  ce  Léonce  est 
le  même  qui  écrivit  depuis  contre  Origène  , 
contre  Théodore  et  Neslorius;  et  parce  qu'il 


induerat  indivise  simul  et  iiironfnsc,  rJhilomitius 
t'imen  sic  quoque  ileilalin  miiyniludo  liuinanœ 
vilitdtem  naturw  eriinio  ijuodam  fulgore  illu.<- 
Irabat.  Serm.  in  S.  Simcon.,  pag.  C99. 

'  Coiiilx'lîs,  ibid.,  jiag.  719. 

'  Pr'viarium  Àpostolorum  principem  iic  sum- 
mum verlicem  Peirum  carceri  mandparunt,  pag. 

m. 

»  PrTlerea  beali  Simeonii,  turbationrsquc prop- 


ne  lui  paraît  point  aisé  d'accorder  ces  deux 
choses  ,  que  Léimce  ait  pris  la  défense  de 
Théodore  en  un  temps,  et  qu'il  l'ait  attaqué 
vivement  depuis  ,  il  prend  '  le  parti  de  dire 
que  Léonce  ,  suivant  la  manière  dos  ori^é- 
nistcs,  pensait  d'une  façon  et  parlait  de 
l'autre;  ou  qu'il  n'embrassa  les  erreurs  d'O- 


ter  Christum  circa  ea  tempora  tti  Ecctesia  fadas. 
Apiid  liarou.,  ad  nii.  ;;9i. 

'  llic  qui  teclus  cal  palir  in  una  iirhium  Cypri 
décore  sacratissimo  claruil...  alque  in  nninihus 
scrmonibus  suis  orthodoxus  cernitur.  Coiieil.  Ki- 
cwn.  Il,  action.  4,  l.ni.  \ll,  paj;.  '2l(>. 

'  l'i/a  S.  Sabœ,  lum.  III  ilonuinenl.  Cotcl.,  pag. 
348. 

'  Cunisius,  Anliquar  Lection.,  loui.  I,  pag.  527. 


■rçjl,| 

II 


.  0  Q  C  0- 
MCCiC. 


[vu'  SIÈCLE.] 

rif^oiic  que  depuis  qu'il  eut  écrit  coutre  lui. 
Ou  ne  peut  nier  que  Léonce  de  Byzancc, 
dont  nous  avons  les  écrits  ,  n'ait  lilé  pendant 
quel(|ui!  temps  infecté  de  l'hérésie  de  Nesto- 
rius  :  il  l'avoue  Ini-inèine';  luais  il  dit  en 
même  temps  qu'il  était  jeune  alors,  et  que 
par  la  grfice  de  Dieu  il  se  retira  de  l'abîme 
où  les  sectateurs  de  cette  liérésie  voulaient 
le  jeter;  et  c'est  ce  qui  nous  oblige  de  dis- 
tinguer ce  Léonce  de  celui  dont  il  est  parbi 
dans  la  Vie  de  saint  Sabas.  Celui-ci  était  d(^jà 
vieux,  lorsque  ce  saint,  cpii  l'avait  mené 
avec  lui  à  Consiauliuople ,  refusa  de  le  ra- 
mener en  Palestine.  Il  était  extrêmement 
attaché  aux  erreurs  d'Origène  et  de  Nesto- 
rius,  jusqu'à  exciter  des  troubles  parmi  les 
moines  ;  il  paraît  uième  qu'il  mourut  obstiné 
dans  ses  mauvais  seulimeuts.  L'autre  Léonce, 
au  contraire,  était  jeune  quand  il  fut  sur- 
pris par  les  sectateurs  de  Nestorius  :  il  ne 
fut  que  peu  de  temps  imbu  de  leur  doctrine, 
et  depuis  il  la  combattit  fortement. 

2.  Il  se  donne  lui-même  le  titre  de  scolas- 
tique  ou  d'avocat  :  ce  qui  marque  qu'il  avait 
fréquenté  le  barreau  ;\  Constautinople.  Ou 
convient  qu'il  embrassa  depuis  la  profession 
monastique.  Il  parle'  dans  ses  écrits  de  saint 
Euloge,  patriarche  d'Alexandrie,  mort  vers 
l'an  608,  et  de  Pbiloponus  ^,  auteur  de  l'hé- 
lésie  destriihéites,  qui  mourut  vers  le  même 
temps.  Il  y  dit  '  encore  que  les  sectateurs  de 
Nestorius,  pour  séduire  plus  aisément  les 
simples,  leur  faisaient  espérer  des  présents 
et  des  récompenses  de  la  part  de  l'empe- 
reur :  ce  qui  ne  peut  s'entendre  de  Maurice, 
sous  le  règne  duquel  les  hérétiques  n'osaient 
ouvrir  la  bouche^;  mais  de  Phocas ,  qui 
leur  laissa  une  entière  liberté.  Ainsi,  il  faut 
dire  que  Léonce  écrivait  dans  les  commen- 
cements du  septième  siècle.  Il  est  vrai  qu'il 
ue  dit  rien  du  cinquième  concile  ;  mais  il 
pouvait  avoir  des  raisons  pour  n'eu  point 
parler,  entre  autres  parce  qu'il  n'était  pas 
reçu  généralement,  et  que  l'empereur  Jus- 
tinien,  qui  eu  avait  pris  si  fortement  la  dé- 
fense, était  tombé  dans  Terveur  des  incor- 
ruptibles. 

3.  Son  Traité  des  Sectes  fut  imprimé  en 


CHAPITRE  L.\U.  —  LÉONCE  DR  BYZANCE. 


GG7 


grec  et  en  latin  ,  de  la  traduction  de  Lencla- 
vius,  c'iBAle,  enl.'îTS,  avec  divers  opuscules 
de  saint  (iéon  ,dcsaint  Damascène  et  de  quel- 
ques autres  anciens  ';  dans  ['Anc/uariiiiii  de 
la  Bibliothèque  des  Pères  ,  à  Paris,  en  l(i:>'t; 
et  en  latin  seulement  dans  le  neuvième  tome 
de  la  Bibliothèque  des  Pères,  ;\  Lyon,  en  1G77; 
[dans  la  Bibliothèque  des  Pères  par  Galland, 
tome  XII,  pag.  62.^;  d'où  il  a  passé  an  tome 
LXXXVI  de  lii  Patrologie  grecque,  col.  1193- 
1268.]  Il  est  divisé  en  dix  actions  ou  leçons. 
Il  avertit  dans  la  première  qu'ayant  à  faire 
l'histoire  des  sectes  surce  que  l'on  en  (l'ouvait 
dans  l'antiquité,  il  était  convenable  de  Dxerla 
signification  de  quatre  termes  très-communs 
dans  les  écrits  des  Pères  ,  savoir,  substance, 
nature,  hypostase  et  personne  :  substance 
et  nature  sont  chez  eux  la  même  chose  ;  et 
ils  ne  mettent  aucune  différence  entre  hypos- 
tase et  personne.  Après  ce  petit  préliminaire, 
il  fait  une  profession  de  foi  dans  laquelle  il 
reconnaît  une  seule  Divinité  en  trois  hypos- 
tases  :  une  du  Père,  une  du  Fils,  la  troisième 
du  Saint-Esprit  ;  qui  ne  diffèrent  en  rien,  si  ce 
n'est  par  rapport  à  leurs  propriétés  person- 
nelles de  Père ,  de  Fils  et  de  Saint-Esprit  , 
la  substance,  la  puissance,  la  volonté  de  ces 
trois  personnes  étant  une  et  la  même.  Il  ne 
veut  point  qu'on  approfondisse  de  quelle 
manière  le  Fils,  est  engendré  du  Père ,  ui 
comment  le  Saint-Esprit  en  procède  :  il  de- 
mande seulement  que  l'on  ne  juge  point  des 
noms  de  Père  et  do  Fils  dans  Dieu,  par 
l'idée  que  les  hommes  y  ont  attachée.  Il 
donne  ensuite  en  peu  de  mots  l'histoire  de 
la  création  du  monde,  et  de  ce  qui  s'est 
passé  depuis  le  commencement  jusqu'à  l'in- 
carnation du  Fils  de  «  Dieu,  qui  s'est  faite, 
dit-il  ,  sans  confusion  ''  on  mélange  des 
deux  natures,  eu  sorte  qu'après  leur  union 
elles  sont  demeurées  entières  ,  sans  aucun 
changement  de  leurs  propriétés  substan- 
tielles, et  sans  division,  parce  que  ces  deux 
natures  n'ont  qu'une  seule  personne.  Telle 
est  la  foi  des  chrétiens  :  elle  a  été  combattue 
par  quatre  sectes  différentes  ,  dont  deux  at- 
taquent la  divinité  ,  mais  par  des  sentiments 
contraires.  Sabellius  ,  auteur  de  la  première, 


'  I.coDt.,  lib.  III  coiitro  A'es(or..  pag.  693,  tom.  IX 
Hibliolh.Pat.,pig.  605.— ^Leoul.,  de Sed.,  ac.'.  5.— 
3  l))itl.  —  '  Leoiit.,  lit).  !ll  conlra  Nestor.,  pag.  «90. 

'  Gi-eg.  Magn.,  lib.  VU,  Episl.  47. 

«  Toiii.  IX  Uibltolh.  Pat.,  pj-.  (iUl. 

'  Ex  Deo  sermone  humanoqite  corpore  hypos- 


tasis  absoluta  est  rma  :  citra  confiisionem,  quo- 
niam  posl  unionein  nihilominus  uiiiïœ  res  salvœ 
alque  integrœ  manent,  non  inutalis  substanlia- 
libus  proprietatibus  ;  citra  divisionem,  qiiotiiam 
una  est  earum  Ivjpostasis.  Leont.,  de  Sectis,  act, 
1,  pag.  662. 


668 


IIISTOraE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


n'a  admis  qu'iine  naliirc  dans  la  Trinilé  ,  et 
qu'une  personne,  à  qui  l'on  ilonuait  trois 
noms  dilIV'renls.  Arius,  auteur  de  la  secon- 
de ,  admettait  trois  bypostases,  et  aussi  tiois 
natures  de  ditft'rents  genres.  Nestorius,  chef 
de  la  troisième  secte  ,  a  enseigné  contraire- 
ment à  Eutycliés  ,  auteur  de  la  quatrième. 
Celui-là  confessait  deux  natures  en  Jésus- 
Christ,  mais  il  en  contestait  l'union;  Euty- 
cliès  en  admcltait  l'union,  mais  de  façon 
que  des  deux  natures  iln'cu  fùl  resté  qu'une 
après  l'union.  » 
*ti-2.  -i.  Léonce  fait  le  dénombrement  des  livres 

canoniques,  avec  im  sommaire  de  ce  qu'ils 
contiennent,  rpm.Yquant  que  l'on  convient 
unanimement  que  le  l'cnlaleuque  est  de 
Moïse  '.  il  compte  dans  le  canon  des  livres  du 
Nouveau  Testament  les  sept  Epîlres  catlioli- 
ques  avec  l'ApocalyiJse  de  saint  Jean  ;  mais  il 
ne  met  pas  dans  le  canon  des  livres  de  l'An- 
cien Testament  ceux  de  Tobie.  d'Estlier,  de 
Judith,  de  la  Sagesse,  de  l'Ecclésiastique 
et  des  Mucliab('es.  11  exjilique  la  docirine  des 
Hébreux  sur  l'unité  d'un  Dieu ,  et  montre 
en  même  temps,  par  l'autorité  de  l'Écriture, 
qu'il  est  un  en  trois  personnes.  Comme  les 
juifs  couleslaient  la  venue  du  Messie,  il 
leur  fait  voir  qu'ils  n'étaient  dans  l'erreur  à 
cet  égard,  que  parce  qu'ils  ne  distinguaient 
pas  les  deux  avènements  prédits  par  les  pro- 
phètes, l'un  dans  rhumiiialion,  l'autic  dans  la 
gloire.  On  disait  de  son  temps  qii'Esdras, 
ayant  trouvé  tous  les  livres  saints  brûlés ,  à 
son  arrivée  à  Jérusalem  au  retour  de  la  cap- 
tivité, les  rétablit  tous  de  mémoire. 

3'  3.  Il  nomme  les  plus  illustres  évèqnes  et 

les  plus  célèbres  écrivains  que  l'Église  avait 
eus  depuis  les  apôtres  juqu'au  concile  de  Chal- 

4.  cédoine.  Il  montre  en  quoi  consislaienl  les 

hérésies  des  montanistes  ,  des  manichéens  , 
des  samosaléniens,  des  sabelliens,  desariens, 
des  macédoniens  ,  des  apollinarisles  ,  des 
nestorieus  et  des  eutychiens  ,  et  les  réfute 

t.  sommairement.  Ensuite  il  rapporte  les  trou- 

bles qui  s'élevèrent  dans  les  églises  d'KgypIe 
au  sujet  du  concile  de  Chalcédoiue  ;  les  lois 
qui  intervinrent  de  la  part  des  empereurs 
pour  faire  cesser  le  schisme,  la  naissance  de 
l'hérésie  des  incorruptibles,  celle  desagnoc- 


tes  ,  qui  soutenaient  que  Jésus-Christ  avait 
ignoré  beaucoup  de  choses  ;  et  celle  des  tri- 
théites.qui  admettaient  en  Dieu  trois  natures 
ou  substances.  «  Pliiloponus,  auteur  de  cette 
dernière  hérésie,  dit  Léonce,  était  très-ins- 
truit de  la  philosophie  d'Aristote;  et  raison- 
nant sur  les  [irincipes  de  ce  philosophe,  qui 
donne  rt  chaque  individu  une  substance  parti- 
culière, il  voulait  que,  comme  il  y  a  trois  per- 
sonnes dans  la  Trinilé  ,  on  les  reganhlt  com- 
me trois  individus  qui  avaient  chacun  leiu" 
substance  particuhèrc,  quoii|u'ilsen  eussent 
une  commune  qui  était  la  Divinité.  » 

6.  Léonce  propose  les  objections  que  les 
scliismati(iues  Taisaient  contre  le  concile  de 
Chalcédoine.  Elles  sont  à  peu  près  les  mêmes 
que  nous  avons  rapportées  en  parlant  de 
ce  concile;  et  les  réponses  qu'il  y  fait  ne 
sont  pas  dill'érenles  de  celles  qu'on  y  faisait 
communément.  11  s'arrête  principalement  à 
ce  raisonnement  philosophique,  que  faisaient 
les  ennemis  du  concile  de  Chalcédoine.  S'il 
y  a  deux  natures  en  Jésus-Christ ,  comme  le 
concile  le  définit,  ou  elles  sont  liypostatiques, 
ou  elles  ne  le  sont  pas  :  si  elles  sont  hyposta- 
tiques,  il  y  a  donc  deux  personnes  en  Jésus- 
Christ,  deux  Christs  et  deux  Fils  :  si  elles 
ne  le  sont  pas,  ce  sont  donc  deux  natures 
imaginaires  et  sans  existence.  Léonce  répond 
que,  si  par  hypostatique  l'on  entend  ce  qui 
subsiste  par  soi-même,  il  n'y  a  pas  en  Jésus- 
Christ  deux  natures  hypostatiques,  parce 
qu'il  n'y  a  pas  deux  personnes;  mais  il  sou- 
tient qu'il  y  a  de  la  diffc'rcnce  entre  être 
hypostatique,  et  avoir  son  hypostase;  que 
quoique  les  accidents  ne  soient  pas  hypo- 
statiques, parce  qu'ils  ne  subsistent  pas  par 
eux-mêmes,  ils  ont  toutefois  leur  hypostase, 
parce  qu'ils  existent  véritablement,  quoique 
dans  un  autre,  c'est-à-dire  dans  lasubslancc 
dont  ils  .«ont  accidents.  Chacune  des  deux 
natures  en  Jésus-Christ  existe  réellement , 
siins  confusion  et  sans  division;  mais  elles 
n'existent  pas  séparément  :  les  deux  natures 
composent  un  seul  iudividu,  qui  es!  Jésus- 
Christ  ;  c'est  la  même  personne  pour  les 
deux  natures ':  d'où  vient  qu'on  dit  de  Jé- 
sus-Christ lout  ce  qui  se  dit  de  la  divi- 
nité   ou    de  l'humanité.  Si    le    concile  de 


'  Àlque  hos  guinque  libros,  universi  Mogis  esse 
leslantur.  \cl.  2. 

'  Snm  entJem  hypnstasis  natiirartim  dunrum 
definiliorus  recipil  :  et  quoilcumque  rie  Diiinidtte 
quis  pr'iiuleril.itlem  et  in  Christoinvenil,  ac  vi- 


cisxim  quidqvid  do  humanitale  di.rcril,  idem  cl  in 
sutisidiilin  Chrisli  invniil  ridciii  svbsliintidli'er 
cnniprlrns  :  ipio  fit  iil  neressarin  dU(V  sinl  unius 
hyposldsis  Chrislt  natu)(V.  I.coiil.,  de  Sccti.i,  ad. 


[vu*  SIÈCLE. 


CIIAI'ITRE  LXII.  —  LKilNCE  DE  RYZANCE. 


GG!i 


Clialct'ildinc  ne  s'est  ])as  servi  des  leriues 
(l'uiiiim  liypos(ali(Hic,  ileiialiiro  de  ^'(M■1)C  in- 
carné, de  deux  natures,  comme  avait  l'ait  Siiint 
Cyrille  d'Alexandrie  ,  c'esl  ([n'ayant  allaiic  à 
Eutycliès,  il  était  inutile  d'employer  des  ter- 
mes comniuns,  et  que  cet  liérésiaiijue  ad- 
mettait lui-même.  I^éonce  expliiiue  en  quel 
sens  saint  Cyrille  les  a  employés  ,  particu- 
lièrement ceux-ci,  «  une  luiliire  du  Verbe  in- 
caiiwe  ;  ))  pnis  il  l'ait  voir  qu'en  vain  on  objec- 
tait contre  ce  concile  la  lettre  du  pape  Jules 
;\  Denis,  évèqne  de  Corinlhe  ,  puisque  cette 
lettre  était  d'Apollinaire  ;  et  qu'il  n'y  avait 
pas  plus  de  raison  d'opposer  certains  écrits 
de  saint  Grégoire  Tliaumatnrge,  qni ,  au 
rapport  de  saint  Grégoire  de  Nysse  ,  n'en  a 
laissé  d'autres  que  la  profession  de  foi  qu'il 
recjut  dans  nue  vision.  11  ajonte  que,  les  dé- 
crets de  ce  concile  étant  i)aifaitenient  con- 
formes à  la  doctrine  des  anciens  Pères  ,  c'é- 
tait sans  raison  que  les  schismatiques  von- 
laicnt  s'en  autoriser  pour  soutenir  leurs  er- 
reurs. EnOn,  il  montre  contre  les  incorrup- 
tibles, que  le  corps  de  Jésus-Christ  était 
sujet  ;\  toutes  les  infirmitc^  qiie  nous  souf- 
frons dans  les  nôtres,  excepté  au  péché; 
contre  les  agnoëtes ,  que  l'on  ne  peut  inférer 
de  ces  paroles  :  Oà  avez-vous  mis  Lazare? 
que  Jésus-Christ  ait  ignoré  le  lieu  de  sa  sé- 
pulture ,  mais  seulement  qu'il  se  servait 
quelciucfois  de  certaines  l'aidons  de  parler 
pour  réprimer  la  curiosité  de  ses  disciples; 
contre  les  origéiiisles ,  que  l'on  ne  doit  point 
atlmetlrc  la  préexistence  des  âmes,  ni  croire 
que  les  démous  seront  un  jour  rétablis  dans 
leur  premier  degré  d'honneur  et  de  félicité. 
7.  Des  six  traités  de  Léonce,  traduits  en 
latin  par  Turricn,  et  imprimés  dans  les  deux 
recueils  des  aucieimes  Leçons  de  Canisius, 
à  Ingolstat  et  à  Anvers  ,  et  dans  le  neuvième 
tome  de  la  Bibliothèque  des  Pères  de  Lyon  , 
il  y  en  a  trois  contre  Xestorius  et  Eutychès  '. 
La  matière  parut  à  l'auteur  diftlcile  à  trai- 
ter; et,  craignant  de  se  trouver  au-dessous, 
il  fit  longtemps  difficulté  de  l'entreprendre  : 
mais  enlin  il  céda  aux  instances  do  ceux  qui 
avaient  quelque  droit  d'exiger  de  lui  ce  tra- 
vail. Il  expose  dans  le  premier  livre  la  doc- 
trine Ue  Ncslorius  et  '.'/Eutychès,    fait  voir 


qu'ils  soûl  autant  op]ios<''s  l'un  .'i  l'atdre,  que 
leur  sentiment  est  (■C)ntraiie  il  la  vérité,  les 
r('fule,  ])rouve  la  distinction  des  deux  natures 
et  leur  union  en  une  seule  personne  dans 
Jésus-Chiist ,  et  établit  ces  deux  vérités  par 
nn  grand  nombre  de  passages  tirés  des  éci-its 
lie  saint  Hasile,  de  saint  Grégoire  de  Na- 
zianze,  de  saint  Prode  de  Constantinople, 
de  saint  Isidore  de  Péluse  ,  de  saint  Justin 
martyr,  à  qui  il  allribne  les  livres  de  la  Tri- 
nité; de  saint  Irénée,  de  saint  IIip[)olyle  ,  de 
saint  Pierre  d'Alexandrie,  de  saint  Cyriaque 
évèqne  de  Papho ,  de  saint  Athanase,  de 
saint  Grégoire  de  Nysse ,  du  pape  Jules  ,  de 
saint  Hilaire,  de  saint  Ambroise ,  de  saint 
Araphiloquc,  de  saint  Gélase  ,  évêque  de 
Césarée  en  Palestine,  de  saint  Augustin,  de 
saint  Jean  Chrysoslome  ,  de  saint  liphrem  , 
de  saint  Cyrille  de  Jérusalem,  de  saint  Fia- 
vien  d'Antioche  ,  de  saint  Paul  d'Emèse  et 
de  saint  Cyrille  d'Alexandrie.  Le  second, 
qui  est  en  forme  de  dialogue,  combat  ceux 
qui  avaient  passé  de  l'Église  catholique  à  la 
secte  des  incorruptibles  ,  c'est-à-dire  ,  de 
ceux  qui  enseignaient  que  le  corps  de  Jésus- 
Christ  ,  même  avant  sa  résurreclion  ,  n'était 
sujet  ni  à  la  conuption,  ni  à  la  douleur,  ni 
à  aucune  des  infirmités  humaines,  pas  même 
aux  passions  naturelles  et  innocentes,  com- 
me la  faim  et  la  soif;  en  sorte  que,  s'il  man- 
geait, c'était  sans  besoin.  Léonce  réfute  cette 
erreur  par  divers  endroitg  de  l'Écriture,  qui 
marquent  les  différentes  vicissitudes  aux- 
quelles il  a  été  ëujel ,  sa  passion  ,  sa  mort. 
Il  ajoute  que,  si  Jésus-Christ  n'avait  rien  souf- 
fert ,  nous  n'aurions  rien  à  imiter  en  lui,  et 
que  notre  chair,  qui  tire  de  la  mort  du  Sau- 
veur tant  d'honneur  et  tant  d'a'.anîages , 
serait  privée  de  l'un  et  de  l'autre.  Les  pas- 
sages qu'il  allègue  pour  prouver  la  corrup- 
tibilité  du  corps  de  Jésus-Christ,  sont  de 
saint  Denis  l'Aréopagite ,  de  saint  Jiislin 
dans  son  discours  contre  les  Gentils ,  de 
saint  Athanase ,  de  saint  Basile  ,  de  saint 
Grégoire  de  Nazianzc  ,  de  saint  Grégoire  de 
Nysse,  de  saint  Ambroise,  de  saint  Chry- 
soslome ,  de  saint  Eplirem  et  de  saint  Cy- 
rille d'Alexandrie.  Léonce  entreprend  dans  1-3».  es». 
le  troisième  livre  la  réfutation  de  ceux  qui , 


'  Le  texte  grec  de  ces  livres  a  paru  daus  Jlaï, 
SliicUeg.  Rom.,  lom.  X,  part  2,  pay.  1-39,  pag.  95- 
127,  et  pag.  Ci;-94.  On  De  sait  par  quelle  erreur  le 
livre  II  se  trouve  à  la  page  9-i-127,  taudis  qu'un 
autre  ouvrage  de  Léonce  occupe  la  place  où  de- 


vrait êlre  ce  livre  11.  Un  regrette  de  ue  pas  trou- 
ver dans  cette  édiliou  tous  les  témoignages  des  Pè- 
res :  l'éditeur  les  a  laissés  en  visant  à  la  brièveté. 
(L'édile  ur.j 


670 


HISTOIRE  Gl'ùNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTÏQLTS. 


quoique  défenseurs  de  l'hérésie  de  Nesto- 
rius ,  atlectaient  de  recevoir  le  concile  de 
Chalcédoiuc.  II?  iiniUiicnl  en  cela  les  héréti- 
ques qui  les  avaient  pri'cédés,   dont  la  plu- 
part recevaient  non  sciik-mi'nt  les  divines 
Écritures,  mais  feignaient  encore  d'admettre 
l'autorité  des  anciens  conciles,  dans  le  des- 
sein de  séduire  pins  aisément  les  simples,  et 
de  les  attirer  à  leur  parti  :  ainsi  Apollinaire 
et  Macédonius  faisaient  profession  d'admettre 
le  concile  de  Nicée  :  Nestorius,  outre  celui 
de  Nicée,  recevait  celui  de  Constantinople  : 
Eutycbùs   admettait   même   celui   d'Éphùse 
avec  tous  les  précédents.  Il  était  important 
de  faire  connaître  au  public  que  ces  nesto- 
riens  n'agissaient  pas  de  bonne  foi,  et  qu'il 
y  avait   de   l'artilicc  dans  leur  soumission 
apparente  aux  décrels  du  concile  deClialcé- 
doine.  C'est  pourquoi  Léonce,  afin  de  les 
faire  connaître  tels  qu'ils  étaient,  remonte 
jusqu'à  la  source  dans  laquelle  ils  avaient 
puisé  leurs  erreurs  et  leurs  impiétés ,  c'est- 
à-dire  jusqu'à  Théodore  de  Mopsueste  et 
à  Diodorc  de  Tarse,  les  premiers  auteurs  du 
uestorianisrae.  Il  avoue,  comme  on  l'a  déjà 
remarqué,  qu'étant  jeune  il  avait  été  infecté 
de  cette  hérésie ,  mais  qu'avec  la  grâce  de 
Uieu  il  s'en  était  retiré  presque  aussitôt.  Il 
prévient  ses  lecteurs  contre  les  présents  et 
les  faveurs  que  ceux  do  celte  secte  oitiaient 
à  ceux  qu'ils  voulaient  séduire  :  il  dit  qu'en- 
core qu'ils  enseignassent  la  doctrine  deThéo- 
dore  de  Mopsueste  et  de  Diodorc  de  Tarse  , 
ils  atlectaient  de  ne  pas  recevoir  leurs  écrits; 
que,  lorsqu'ils  avaient    séduit    quelqu'un, 
si  c'était  un  moine  de  quelque  capacité ,  ils 
l'exhortaient   aussiti.t   à  lire   les  livres   des 
gentils,  a  changer  d'habits,  à  regarder  les 
jeunes,  les  veilles,  la  retraite,  commodes 
pratiques  inutiles;  qu'ils  témoignaient  même 
du  niéi>ris  pour  Nestorius;  enlin,  qu'ils  com- 
muni(juui(Mit  avec  l'I-iglise  catholique.  11  ra- 
conte sur  cela  que  ces  nestoriens  ,  ayant  at- 
tiré dans  leur  parti  un  clerc  de  l'Église  ca- 
tholique ,  celui-ci,  effrayé  du  crime  qu'il  avait 
commis,  tomba  dans  la  tiédeur  et  dans  ji'  cha- 
grin, ne  concevant  pas  comment,  (tant  lié  de 
communion  avec  eux ,  il  pouvait  se  conser- 
ver avec  riigli-sc.  «  Que  cette  économie,  lui 


dirent-ils,  ne  vous  embarrasse  point:  le  pain 
proposé  pour  type  du  corps  de  Jésus-Christ, 
ne  reçoit  pas  plus  de  bénédiction,  que  le 
pain  que  l'on  vend  au  marché  ,  ni  que  le 
pain  que  les  philomariauistcs  ollienl  en 
l'honneur  de  Marie.  »  Léonce,  venant  ensuite 
à  Théodore  de  Mopsueste,  en  rapporte  toutes 
les  erreurs,  en  citant  les  livres  et  les  dis- 
coius  où  il  les  avait  enseignées. 

8.  Nous  apprenons  '  d'Evagre,  que  les 
nestoriens  avaient  attiré  beaucoup  de  monde 
à  leur  parti  en  corrompant  les  écrits  des 
Pères,  et  qu'ils  leur  en  avaient  attribué 
d'autres,  uniquement  pour  donner  cours  à 
leur  hérésie  en  l'appuyant  d'une  autorité  si 
respectable.  Les  entycbiens  et  les  apoUina- 
ristes  en  usèrent  de  même ,  ainsi  que  les 
acéphales.  Us  citaient  sous  le  nom  du  pape 
Jules  une  lettre  à  Denis  de  Corinthe,  et  d'au- 
tres comme  étant  de  saint  Athanasc,  de 
saint  Grégoire  Thaumaturge  ,  de  saint  Ba- 
sile, ou  de  quelques  autres  anciens.  Léonce, 
après  avoir  montré,  dans  son  Traité  des  Sec- 
tes, que  l'épître  attribuée  :!U  pape  Jules  n'est 
point  de  lui,  tant  parce  qu'elle  n'en  est  pas 
digne  ,  que  parce  qu'il  y  a  des  expressions 
contraires  à  celles  dont  on  se  servait  dans  le 
siècle  où  ce  pape  a  vécu,  et  qu'il  y  en  a 
beaucoup  qui  se  trouvent  dans  les  écrits 
d'Apollinaiie,  qu'on  croit  en  elict  auteur  de 
cette  Lettre,  composa  un  traité  exprès  pour 
découvrir  au  public  les  fraudes  dont  les  hé- 
rétiques, et  nommément  les  apolllnaiistes, 
usaient  dans  leurs  ouvrages,  en  donnant  pour 
é(;rils  des  Pères  ce  qui  éiait  de  leur  façon. 
Il  donne  de  suite  le  nom  des  apidlinaristes  , 
qui  ont  usé  de  cette  supercherie,  et  rapiiortc 
les  endroits  qu'ils  ont  cités  faussement  sons 
les  noms  des  Pères  de  l'Eglise.  C'est  ce  qui 
fait  son  ({uatrièmc  Traité. 

9.  Le  cinquième  contient  les  solutions  des 
arguments  de  Sévère';  Sévère  avait  été  fait 
patriarche  d'Antioche ,  et  s'était  mainteim 
dans  ce  sii'ge,  tandis  que  les  eutychiens  et  les 
ennemis  du  concile  de  Ghalcédoine  y  avaient 
eu  quelque  crédit;  mais  il  en  fut  chassé 
sous  le  règne  de  Justin.  Sévère  était  pur 
eutychicn  ;  il  rejetait  avec  anathème  le  con- 
cile deChiUcédoiue,  et  recevait  le  faux  con- 


tre  If^frtudiT 

ri«tP',       («il 
-07. 


dei         an 

ment*  del 


'  Kvagr.,  lili.  III,  cnp.  xxxi  ,  Lcontiiis,  île  Seclis, 
Act.  S,  i-t  \iioiiyimis,  eonira  Afephtilas,  loin.  I 
Leclion.  Canis.,  png.  5UU,  599. 

'  Le  texte  «ree  m  a  été  donné  par  Mai,  Spicileg. 
Hnm.,  loin.  X,  i>art.  2,  jwg.  128-15).  [L'édileur.) 


'  Le  texte  grée  CM  n  été  donné  par  Mai,  Spicileg, 
Rom.,  loin.  X,  part.  2,  [«ig.  40-IJ5.  Il  s'y  trouve  par 
erreur  cntie  le  premier  et  le  troisième  livre  eontre 
Nestoriufi.  (//rUiicttr.) 


(vu'  SIÈCLE.] 

file  d'Ephïîsc,  l'épalant  au  prcinior.  11  sou- 
toiiail  qu'après  l'incarnation  il  n'y  avait 
qu'une  nalure  on  Jésus-Christ,  et  qu'elle 
était  corruiilihle.  Dans  le  concile  de  Cons- 
laritinnple  sous  Mennas  ,  il  tut  anatliiîmatisë 
parmi  les  aci-pliales  :  on  donnait  ce  nom 
non  seulement  aux  eutychiens,  ([ui  ,  s'étant 
séparés  de  Pierre  RFonge,  se  trouvaient, 
pour  ainsi  dire  ,  sans  chef;  mais  générale- 
ment h  tous  les  eutychiens,  parce  que  les 
acéphales  pensaient  comme  Eutychès ,  n'ad- 
mettant comme  lui  qu'une  nature  après 
l'union.  Les  arguments  qu'ils  apportaient 
pour  prouver  leur  sentiment ,  n'étaient  que 
des  subtilités  philosophiques.  Ils  préten- 
daient que  les  termes  de  nature  et  d'hypos- 
tase  étant  synonymes,  il  suivait  de  là  (;ue  , 
comme  il  n'y  a  qu'une  hypostase  en  Jésus- 
Christ,  ou  qu'une  personne,  il  n'y  avait  non 
plus  qu'une  nature.  Léonce  les  suit  dans 
toutes  leurs  subtilités  d'école,  fait  voir  la 
différente  signitication  de  ces  deux  termes, 
et  montre,  qu'encore  que  les  propriétés  d'une 
I  nature  ne  puis.«eiit  être  communes  qu'aux 

I  substances   qui  sont  d'une    même  natuie  , 

ditférentes  natures  peuvent  participer  aux 
propriétés  d'une  hypostase  ou  personne , 
quand  elles  lui  sont  unies  hypostatiquement  : 
d'où  il  infère  que  la  divinité  et  l'iiumanité  , 
ayant  dans  Emmanuel  une  même  hypostase, 
ces  deux  natures,  quoique  dltlérentes,  peu- 
vent être  confondues  l'une  avec  l'autre , 
et  participer  aux  i)ropriétés  de  leur  hypostase 
'  ou  personne  commune  :  en  sorte  qu'on  dit 

du  même  Jésus-Christ  :  «  Il  est  visible  et  invi- 
sible ,   mortel   et    immortel ,  »  à   différents 
j^  égards  ;  c'est-à-dire  mortel  selon  son  buma- 

■       .        nité,  immortel  selon  sa  divinité. 

DoniesL-       ^'^-  ^^  sixième  Traité  '  est  composé  de 

joutiques   svllogisnips  11 vpof étiqucs .  qui  tendent  à  éta- 

T,"\'"Ll7,  1^''''  1'^  distinction  des  deux  natures  eu  Jésus- 

-'•        Christ ,  depuis  même  qu'elles  ont  été  unies 

par  l'incarnation  du  Verbe.  Les  eutychiens  ne 

niaient  pas  que  Jésus-Christ  fût  cousubstan- 

tiel  au  Père  et  à  nous  :  sur  quoi  Léonce  leur 

fait  ce  raisonnement  :   «Une  nature  simple 

n'est  pas  de  même  substance  qu'une  nature 

composée  :  la  nature  du  Père  est  simple;  celle 

de  Jésus-Christ  est  composée;  elle  u'est  donc 


CHAPITHE  LXII.  —  LKONCE  DE  BYZ.WCE. 


(i7l 


pasdela  natureduPèrc.  Comment  donccelte 
nature,  c'tant  une  selon  eux,  peut-elle  être  en- 
tièrement consiilislanlielh-  au  Père,  et  entiè- 
rement eonsubslanlielle  :i  nous?  Ne  semlileiit- 
ils  pas  avouer  par  là  que  nous  sommes  au.ssi 
consubstantiels  au  Père?  Que  s'ils  disent  que 
la  nature  de  Jésus-Christ  n'est  consubstau- 
tiolio  au  Pèi-e qu'en parlie,  eten  partie  à  nous, 
il  suivra  de  l.i  qu'il  n'y  a  que  la  moitié  do  la 
nature  de  Jésus-Christ  qui  soit  consubstan- 
tielle  au  Père,  et  l'autre  moitié  à  nous  :  ce 
qui  serait  diviser  une  nature  qu'ils  disent 
être  une,  et  la  composer  de  deux  parties 
dissemblables.    . 

^^.  Voilà  ce  qui  nous  resie  des  ouvrages       o.v,.;e, 
de  Léonce  de  Byzance.  Il   en  avait  composé   ni''îonr?al 
un  contre  Philnpouus,  où  il  réfutait  son  hé-    noUr  oulràt 
résie,  c'est-à-dire  celle  des  trithéites,  et  éta-  f'c.n-„'.'oni'.'" 
blissait  la  doctrine  d'une  seule  nature  eu  Dieu . 
C'est  ce  que  dit*  Xicéphore,   qui  ajoute  ^ 
que  l'écrit  de  Léonce  était  fort  beau,etéfail 
divisé  en  trente  chapitres.  Nous  ne  l'avons 
plus.  On  en  cite  un  autre,  qu'on  dit  être  par- 
mi les  manuscrits  de  la  Bibliothèque  de  Baviè- 
re. C'est  une  réfutation  des  eutychiens,  ousé- 
vériens,  et  des  nestoriens,  divisée  en  huit  li- 
vres ,  dont  le  premier  est  iutitulé  :  Soixante 
Questions  proposées   à  ceux  qui   n'admettent 
qu'une  nature  en  Jésus-Christ  ;  réfutation  de 
cette  erreur  par  les  témoif/nag^s  des    Pères. 
Le  second  est  contre  ceux  qui  mettent  deux 
hypostases  ou  personnes  en  Jésus-Cln-ist,  et 
ne  reconnaissent  en  lui  aucune  composition. 
Le  troisième  attaque  en  particulier  ceux  qui 
prétendaient  prouver  par  le  mystère  même 
de  rincarnation,  qu'il  y  a  deux  personnes 
eu  Jésus-Christ.  Léonce  reprend  dans  le  qua- 
trième ceux  qui  concluent  du  mystère  de 
l'Incarnation  qu'il  y  a  deux  Fils.  Il  réfute 
dans  le  cinquième  l'impiété  de  ceux  qui  ne 
veulent  pas  qu'on  donne  à  la  sainte  Vierge 
la  qualité  de  Mère  de  Dieu.  Par  une  suite 
nécessaire  ,  il  comhat  dans  le  sixième  ceux 
qui   disent   que  Jésus-Christ  n'est  pas  Dieu 
par  nalure.  Dans  le  septième,  il  fait  voir  que 
ceux-là  sont  dans  l'erreur,  qui,  en  admet- 
tant llacarnation  ,  se  contentent  d'appeler 
Jésus-Christ  Porte-Dieu,  sans  vouloir  recon- 
naître qu'il  est  vraiment  Dieu.  Le  huitième 


'  Mai  l'a  pul)1ié  en  grec  sous  ce  titre:  Capitula 
XXX  contra  Sevcrum.  Colleclio  nova  vêler.  Script., 
tom  VIII,  part.  1,  pag.  lO-tô.  {L'éditeur.) 

-  Niceplior.,  lib.  XVUI,  cap.  XLVIII. 

'  Leontius    moiutchus  omnium  maxime  egre- 


gium  librum  Iriginla  capitum  contra  illum  Pln~ 
lopunum  couscripsit  quo  simul  et  hœresim  illam 
prorsus  everlit  et  piam  nostram  sentenliam  val- 
de  confirmât.  Uni}. 


672 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


est  une  léfutalion  de  ceux  qui  avaient  cou- 
tume de  condamner  celte  proi)Osition  :  Unde 
la  Trinité  a  souffert  dans  la  chair. 

[Le  traité  dont  parle  ici  l'auteur  est  inti- 
tulé :  Réfutation  de  ceux  qui  affirment  deux 
personnes  en  Jés>is-C/irisl  et  ne  reconnaissent 
en  lui  aucune  union.  Il  contient  huit  livres; 
les  sept  premiers  ont  été  publiés  en  grec 
par  A.  Mai  dans  le  lome  IX  Collect.  nom  ve- 
ter.  ScrijJ.,p-ag.  410-010;  mais  le  huitième 
ne  se  trouvait  point  dans  les  manuscrits  du 
Vatican  qui  ont  servi  à  la  publication  de  ce 
remarquable  ouvraf^e.  Léonce  y  attaque  les 
nestoriens  plutùt    parle  raisonnement  que 
par  l'autorité,  et  il  le  fait  avec  beaucoup  de 
logique.  Les  divisious  des  livres  ne  sont  pas 
tout  à  fait  celles  qu'indique  Di.m  Ceillier.  Les 
voici  d'après  Mai.  L'auteur  traite  dans  son 
premier  livre  de  l'union  de  la  nature  divine 
du  Verbe  avec  la  nature  humaine  ;  dans  le 
deuxièrae,  de  la  personne  unique  du  Christ; 
dans  le  troisième  ,  du  Christ  Fils  unique  ; 
dans  le  quatrième ,  de  la  Vierge  Mère  de 
Dieu  ;  dans  le  cinquième  ,  du  Christ  Dieu  et 
homme  ;  dans  le  sixième,  du  Christ  qui  n'est 
point  homme  portant  Dieu,  mais  Dieu  fait 
homme  ;  dans  le  septième  de  cette   parole: 
i'n  seul  a  souffert  de  la  Trinité  dans  la  chair. 
Il  était  question  dans  le  huitième  de  l'erreui" 
des  nestoriens  ,  qui  niaient  l'union  byposta- 
tique  du  Verbe,   et  lui  attribuaient  on  ne 
sait  quelle  union  d'honneur,  de  domination, 
d'alleclion  ,  etc.  Tout  ce  traité  doit  être  lu 
par  les  théologiens  et  par  tous  ceux  qui  vou- 
dront écrire  sur  le  nestorianismc. 

A.  Mai  a  fait  paraître  aussi  pour  la  pre- 
mière fois,  en  grec  seulement,  un  autre  ou- 
viage  de  Léonce.  Une  version  latine  de  cet 
écrit  est  publiée  dans  le  lome  LXXXVIde  la 
Palrologie,  col.  1769  et  suiv. ,  avec  le  texte 
grec.  Cet  ouvrage  est  intitulé  :  Livres  con- 
tre les  Monophysites  ou  Questions  contre  ceux 
qui  admettent  en  Jésus-Christ  une  seule  nature 
composée.  Léonce  y  combat  avec  force  et  d'une 
manière  spirituelle  l'eireur  qui  consistait  à 
odmettre  une  seule  nature  en  Jésus-Cluist, 
et  il  le  fait  d'une  manière  scholaslirjue  et 
philosniihique.  Cette  argumentation  est  sui- 
vie de  la  preuve  d'autorité  fondée  bui-  les  té- 
moignages des  saints  Pères.  Cette  preuve 
est  donnée  avec  beaucoup  de  soin  :  on  y 
trouve  e.xpliijuées  les  paroles  des  saints  Pè- 
res sur  lesquelles  s'appuyaient  les  mono- 
physites. Un  y  rencontre  un  grand  nombre 
d'autorités  des  Pères  en  faveur  de  lu  vérité 


catholique  ;  on  y  réfute  solidement  les  ob- 
jections des  hérétiques  contre  le  concile  de 
Chalcédoine.  Parmi  les  témoignages  des  Pé- 
rès, il  en  est  plusieurs  qui  sont  précieux  et 
qui  étaient  encore  inédits.  Ce  tiaité  se  trouve 
dans  le  lome  Vn,  Collect.  nova  veter.  .Script., 
part.  1,  p.  lIO-loo.  Quelques  parties  avaient 
déjà  paru  en  grec  et  en  latin,  savoir  :  ce  qu'on 
lit  dans  le  même  vol.,  pag.  136-55,  se  trouve 
dans  Mansi  ,  tome  VU.  col.  831-40-837-68, 
843-.'i8,  7<J!t-824,  et  dans  Galland  ,  Biblioth. , 
tome  XII ,  pag.  733-39  ,  743-30  ,  739-43  ,  et 
pag.'  719-29.  Quelques  témoignages  des  Pè- 
res cités  dans  cet  ouvrage  se  trouvent  dans 
Mansi.  tome  Vil ,  col.  823-30,  et  dans  Gal- 
land, lome  XII,  pag.  730-32.] 

12.  On  voit  par  tous  ces  ouvrages,  que 
l'hérésie  dominante  dans  le  siècle  de  Léonce 
était  celle  qui  combattait  le  mystère  de  l'In- 
carnation.  Il  en  prit  la  défense  avec  zèle,  et 
fit  tout  ce  qui  dépendait  de  lui  pour  mettre 
la  vérité  dans  son  jour,  et  à  couvert  des 
traits  que  ses  ennemis  lui  portaient.  Son  style 
n'a  rien  de  sublime ,  et  ses  raisonnements 
ont   quelquefois   plus  de    subtilité  que    de 
solidité  ;  mais  ses  adversaires  ayant  recours 
aux  raisonnements  artificieux  de  la  philoso- 
pliie  d'.Aristote ,  il  leur   répondait  dans  le 
même  goût.  Au  reste,  on  ne  peut  douter 
qu'il  n'ail  étudié  la  théologie  dans  les  sour- 
ces mêmes  ,  c'est-à-dire  dans  les  saints  Pè- 
res, dont  il  cite  plus  de  passages  qu'aucun 
écrivain  de  son  temps.  S'il  cite  quelques  ou- 
vrages supposés  pour  des  Téritables,  c'est 
une  faute  pardonnable  dans  un  siècle  où  la 
critique  n'était  pas  au  point  où  elle  est  par- 
venue dans  des  temps  plus  heureux  ;  il  en 
savait  toutefois  assez  pour  montrer  solide- 
ment que  certains  écrits  dont  les  hérétiques 
abusaient .  n'étaient  pas  des  Pères  sous  les 
noms  desquels  ils  les  citaient  :   témoin  ce 
qu'il  dil  pour  prouver  que  la  lettre  citée  sous 
le  nom  du  pape  Jules  à  Denis  de  Corinthe,  est 
non  de  ce  Pape ,  mais  d'.\poll inaire.  S'il  at- 
tribue à  saint  Justin  le  livre  de  la  Trinité,  à 
saint  Pierre  d'.\lexandrie  l'homélie  de  l'A- 
vénement  de  Jésus-Christ ,  les  Bénédictions 
de  lialuam  à  saint  Hyppolite  ,  et  le  livre  de 
la  Trinité  à  s;iiul  Athanase,  c'est  que,  ne 
trouvant  rien  dans  ces  écrits  de  contraire 
à  la  sainte  doctrine,  il  ne  croyait  |)as  néces- 
saire d'examiner  s'ils  étaient  île  ceux  dont 
ils  portaient  les  noms.  Il  n'en  était  pas  de 
même  de  la  lettre  de  Jules  à  Denys  de  Co- 
rinthe ,  et  de  quelques  autres  écrits  que  les 


Juf;em«Bt 
des  oonafei 
de  Léonce. 


CHAPITRE  I.XIII.  —  NICÉPIIORE  D'ANTIOCIIE,  ETC. 


I  ii-tour»  al- 

'  ■'.II,:-!  ^  u- 


R(iiti.n 
f<>!n  Otie  de 
Lvoneo. 


[Vir  SitCLE.] 

liiM'étiqTies  citnienl  sons  les  ikiiiis  de  saint 
Alluiiiase  et  de  siiiiU  Gn'goire  Thaiiinatiirgn, 
pour  appuyer  les  erreurs  d'Apolliiiaiie  et 
d'Eulyi'lu'^s.  U  seml)le  dire'  dans  le  titre  de 
son  7'raité  des  sec/es,  qu'il  avait  cMi'  aidi-  par 
nu  abbé  ti'ès-docte,  ëgaleinont  instruit  des 
lettres  divines  et  humaines,  nommé  Théo- 
dore, et  qu'il  l'avait,  pour  ainsi  dire,  écrit 
sous  sa  dictée. 

13.  Lami)écius-  cite  quatre  Discours  sur 
Joi),  prononcés  le  luudi,  le  mercredi,  le  jeudi 
l't  le  vendredi  de  la  Semaine-Sainte,  par 
Léonce,  prèlre  de  Constautinople  :  le  qua- 
tiièmc  expliquait  en  même  temps  la  Passion 
de  Jésus-Christ.  Ils  n'ont  point  encore  été 
imprimés  :  s'ils  sont  de  Léonce  de  Byzanco, 
il  faut  qu'il  ait  été  prêtre  :  mais  peut-être 
sont-ils  d'un  Léonce  dont  nous  avons  parlé 
dans  le  chapitre  précédent ,  qui  avait  été 
prêtre  de  Constautinople,  avant  d'être  fait 
évêque  de  Naples  en  Chypre.  Ce  qui  donne 
quelque  probabilité  à  cette  conjecture,  c'est 
que  les  mêmes  manuscrits  qui  attribuent  ces 
quatre  discours  à  Léonce  prêtre  de  Constan- 
tinoplc,  mettent  aussi  sous  son  nom  le  ser- 
mon sur  la  fête  de  la  mi-Pentecôte,  qu'on 
convient  être  de  Léonce  ,  évêque  de  Naples 
en  Chypre  ^ 

14.  [On  trouve  dans  le  tome  XII  de  la  Bi- 
bliot/wqvc  de  Gulland,  page  625,  les  écrits  de 
Léonce  de  Byzance.  L'homélie  sur  saint 
.Jacques  encore  inédite,  a  paru,  en  1827, 
in-fol.,  A  Dorpat,  par  les  soins  de  Sartorius. 
La  Potrologie  r/reiyie  a  donné  une  édition 
complète  des  œuvres  de  Léonce  de  Byzance, 
dans  le  tome  LXXXVI,  première  et  deuxième 


673 

partie,  col.  1186-2102,  avec  notices  tirées  de 
Caliand  et  de  Fesseler,  et  avertissement  de 
Mai  s(n-'une  édition  grecque  dos  œuvres  de 
L<'!once  de   Byzance.   Les  écrits  de  Léonce 
sont  leproduits  dans  cet  ordrf!  :  1°  h-  Traité 
sur  les  Sectes,  d'après  Galland  ;  2°  le  Traité 
contre  les  nestoriens  et  les  eutychiens;  3°  le 
Livre  contre  les  monophysites;  4°  les  Trente 
i.ha[)itres  contre  Sévère.  Le  texte  grec  de 
ces  ouvrages  est  donné  d'après  le  cardinal 
Mai,  et  la  version  latine  est  faite  par  les  édi- 
teurs. 5"  Le  Traité  contre  les  fraudes  des 
apollinaristes,  texte  grec  do  Mai,  et  version 
de  Canisius;  G"  deux  Sermons  d'après  Com- 
béfis  et  Gretser  ;  7°  plusieurs  fragments  d'a- 
près Mai.  Un  appendice  reproduit  le  recueil 
de  Léonce  et  de  Jean  sur  les  choses  sacrées, 
publié  par  Mai,  &n/^/.  vel.  coll.,  [om.Yïl.  Cet 
ouvrage  était  divisé  en  deux  livres  ;  maison  n'a 
que  les  titres  des  chapitres  du  premier  livre; 
le  second  livre  est  entier.  Il  est  dirigé  con- 
tre les  origénistes,  et  est  rempli  de  notes  sa- 
vantes et  de  détails  curieux  sur  les  doctrines 
égyptiennes.  Le  cardinal  n'a  publié  que  les 
passages  de  Pères  qui  étaient  inédits  ;  il  en 
a  pourtant  retenu  quelques-uns  déjà  parus, 
pour  ne  pas  diminuer  l'utilité  de  cet  écrit. 
Galland,  au  tom.  XII  de  sa  Bibliothèque,  p. 
30,  nous  apprend  qu'Antoine  Bongiovanni,de 
Vérone,  publia,  en  1732,  une  Apologie  du 
concile  de  Chalcédoine,  par  Léonce,  comme 
supplément  à  l'édition  des  conciles  de  Ve- 
nise.   Galland   l'a  reproduite ,  tom.  XII,  p. 
719-729.  Elle  fait  partie  du  Livre  contre  les 
monophysites,  publié  par  Mai,  et  reproduit 
dans  la  Pafrologie.] 


CHAPITRE  LXIII. 

Nicéphore  Maître  d'Antioche,  saint  Siméon  Stylite  le  Jeune  [597]  [écrivains 
grecs], Panl  Diacre  de  Mérida  [610]. 

[Écrivain  latin] 


iNiccphoro,       1.  La   qualité  de  maître  d'Antioche  que 
I  de  s^int  l'ou   douue   à   Nicéphore  ,    n'avait   rien   de 

néon    Sly-  . 

le  Jeune,   commuu  uvcc  celle  de  maître  de  palais  ,  qui 

'  Leonlii  Àdvocati  Byzanlitii  Scholœ  ex  are 
Thcodnri  religiosissimi  ahbalis  iloctissimique  plii- 
losophi,  divinis  pariterque  exlernis  lilteris  eru- 
diti.  excerplœ,  pag.  C60,  tom.  IX  Biblioth.  Pat. 

^  Lambccius,  lib.  lY  Biblioth.  Vindobon.,  pag. 
70. 

'  Il  est  reproduit  au  tome  LXXXVI  de  la  Palro- 

XI. 


se  donnait  à  celui  qui  approchait  le  plus 
près  de  l'empereur  :  qualité  si  distinguée, 
que  les  frères  et  les  enfants  des  empereurs 

logie  grecque,  col.  197.5-1994,  d'après  Combefis.  On 
l'avait  déjà  doniiù  parmi  les  œuvres  de  Léonce  de 
Jcriisalera.  A  la  colouue  1993-2n0'i,  ou  trouve  un 
discours  sur  le  Vendredi-Saint,  sur  la  Passion  de 
Jcsus-Christ  et  sur  Job,  d'après  Gretser,  tom.  Il, 
{L'éditeur.) 


43 


674 


HISTOIRE  GKNKRALE  DES 


d'OrienI  ne  faisaient  aucune  difficulté  de  la 
prendre,  et  d'en  faire  les  fonctions  '.  Nicé- 
pliore  était  inailrc  d'Anliochc  ,  c'e5l-à-dire 
qu'il  y  enseifjnait  l'éloquence.  Il  était  du- 
sage  dans  les  grandes  villes  d'avoir  de  ces 
sortes  de  maîtres,  à  ({ui  la  ville  donnait  des 
appointements.  Il  est  aussi  surnommé  Ciel, 
il  cause  de  la  sublimité  de  son  éloquence. 
Mais  quelque  liabilc  qu'il  fut,  la  vie  de  saint 
Siméon  Stylite  le  Jeune  lui  parut  si  fort  au- 
dessus  du  langage  humain  ,  qu'il  eut  peine 
à  se  résoudre  à  la  mettre  par  écrit  '. 
<!•  u''1l«  d«  2.  Sémon  naquit  à  Anlioche,  en  521,  d'un 
s.  s,ni«,£i.  p^j,g  originaire  d'Edesse  en  Mésopotamie, 
qui  était  venu  fort  jeune  à  Anlioche  avec  ses 
parents  '.  Il  y  épousa  une  jeune  fille  nom- 
mée Marthe.  Après  quelques  aunées  de  ma- 
riage, il  eut  d'elle  un  fils  à  qui  il  donua  le 
nom  de  Siméon,  qui,  dès  son  bas  ûge,  con- 
çut de  l'aversion  pour  le  siècle.  Il  le  quitta 
bientôt  pour  entrer  dans  un  monastère  de 
Syrie,  silué  au  pied  d'une  montagne  appelée 
Thaiiniastore,  c'est-ù-dire  Mont  admirable, 
à  trois  lieues  d'.vntioche.  Il  y  eut  pour  maî- 
tre Jean  le  Stylile,  ainsi  nommé,  parce  qu'il 
demeurait  ordinairement  sur  une  colonne 
dressée  dans  l'enceinte  du  monastère.  Si- 
méon, autant  frappe  de  ce  gem-e  de  vie  que 
des  instructions  de  celui  qui  la  menait,  ob- 
tint de  monter  avec  lui  sur  la  coloinic.  Il  y 
passa  plusieurs  années  ;  puis  s'en  fit  dresser 
une  autre  plus  étroite,  où  il  fit  quantité  de 
miracles.  L'historien  Evagre,  qui  l'avait  con- 
nu et  vu  sur  sa  colonne,  rapporte  plusieurs 
faits  miraculeux  dont  il  avait  été  témoin  ocu- 
laire '.  Il  raconte  entr'aulres  que,  la  perte  de 
ses  enfants  lui  ayant  occasionné  diverses  pen- 
sées, comme  il  se  plaignait  eu  lui-même  de 
ce  qu'il  ne  lui  en  restait  aucun,  tandis  que  les 
gentils  en  avaient  quantité,  il  reçut  une  let- 
tre de  saint  Siméon,  à  qui  toutefois  il  ne  s'était 
point  ouvert  sur  son  chagrin,  non  plus  qu'à 
tout  autre,  dans  laquelle  le  saint  lui  disait 
de  ne  point  s'entretenir  de  pensées  sembla- 
bles, parce  qu'elles  déplaisaient  à  Dieu.  Sa 
nourriture  ordinaire  était  de  feuilles  d'ar- 
brisseaux qui  croissaient  autour  de  la  mon- 
tagne où  sa  colonne  élail  placée,  et  il  ne  bu- 
vait que  rarement.  Ce  genre  de  vie,  quoique 
très-austère,  lui  attira  beaucoup  de  disci- 
ples, qui  venaient  l'entendre  à  certaines  heu- 

'  Dolland.,  ad  diem  21  niai'i,  lom.  V,  piig.  305. 

*  Vita  Simeoii.,  imiu.  2. 

*  BollaDd.,  ifrirf.j  pag.  307  cl  «oq. 

*  Evagr.,  lili,  V  cap.  xxi,  el  lib.  VI,  cap.  ssin. 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

res,  et  ne  le  quittaient  que  pour  aller  chan- 
ter l'olfice  divin  dans  le  monastère.  Il  ins- 
truisait aussi  tous  ceux  qui  Vi-naient  le  voir; 
et  pour  se  rendre  utile  aux  absents,  il  leur 
écrivait  du  haut  de  sa  colonne. 

3.  Nous  avons  encore  une  de  ses  lettres  à  .  •^""''° 
l'empereur  Jusiinien,  au  sujet  des  violences  Jjjjy  '""  ■ 
que  les  Samaritains  exerçaient  contre  les 
chrétiens  '.  Ils  en  tuèrent  plusieurs  dans  l'é- 
glise de  Naplouse  en  Samarie,  le  jour  de  la 
Pentecôte,  attaquèrent  l'évéque  Therelin- 
chius  dans  le  temps  qu'il  offrait  les  divins 
mystères,  le  chargèrent  de  coups,  et  lui  cou- 
pèrent les  doigts  des  mains".  Zenon,  qui  ré- 
gnait alors,  voulant  prévenir  de  semblables 
séditions,  mit  une  garnison  à  Samarie,  ôta 
aux  Samaritains  le  mont  Garizim,  et  y  fit  bâ- 
tir une  église  de  la  Vierge,  enfermée  d'une 
muraille,  avec  des  hommes  pour  la  garder. 
Les  Samaritains  se  soulevèrent  de  nouxeau 
sous  le  règne  d'AnasIase,  qui  les  punit  sévè- 
rement :  ce  qui  ne  les  empêcha  pas  de  se 
révolter  encore  sous  Justinien.  Ils  se  rendi- 
rent maîtres  de  Samarie,  malgré  les  efforts 
de  la  garnison  qui  en  avait  la  garde,  y  cou- 
ronnèrent un  d'entre  eux  nommé  Julien, 
égorgèrent  l'évéque,  nommé  Ammonas,  mi- 
rent en  pièces  des  prêtres,  dont  ils  firent 
frire  les  membres  avec  des  reliques  de  mai^ 
tyrs,  pillèrent  les  églises,  y  mirent  le  feu, 
brisèrent  et  brûlèrent  les  châsses  où  étaient 
les  reliques  des  saints,  tuèrent  un  grand  nom- 
bre de  chrétiens,  en  fourmeulèrent  d'autres, 
et  commiient  toutes  sortes  d'excès. Ce  fut  sans 
doute  pour  les  réprimer  que  saint  Siméon 
éciivit  à  Justinien  :  il  ne  parle  dans  sa  lettre 
que  des  hostilités  commises  par  les  Samari- 
tains qni  demeuraient  dans  le  voisinage  de 
Porphyréou;  mais  il  ne  pouvait  ignorer  cel- 
les qu'ils  avaient  commises  ailleurs  :  s'il 
n'eu  dit  rien,  c'est  qu'il  crut  ne  devoir  faire 
passer  à  ce  prince  que  les  plaintes  qu'ilavait 
reçues  eu  pailiculier  de  Paul,  évoque  de  Por- 
phyréou, et  du  patriarche  d'Orient,  c'est-à- 
dire  de  celui  d'Anliochc.  Ce  furent  apparem- 
ment ces  deux  évêi|ues  qui  l'engagèrent  h 
écrire  à  Justinien,  et  à  lui  demander  ven- 
geance des  crimes  commis  par  les  Samari- 
tains. Il  marque  qu'il  avait  reçu  une  lettre 
de  leur  part,  où  ils  détaillaient  les  outrages 
que  les  Samaritaiusavaient  faits  au  Verbe  de 

'  Ibiil.,  pn({.  303. 

•  Procop.,  de  œdificiis,  lib.  V,  cap.  vu,  et  Cyril- 
lus,  in  Yila  S.  Sabic,  cap.  lxz. 


[vir  SIÈCLE.]  CFIAPITllE  l.XIll.  —  NICÉPIIOIIE  D'ANTIOCIIE,  ETC. 

Dieu,  qui  s'est  fait  homme  pour  uous,  ;\  la 
jjiurioiisc  More  Je   Dieu,  à  la  véïK-rable  et 


G75 


précieuse  Croix,  el  aux  sumis.  11  conjure 
l'empereur  do  punir  les  coupables,  afin  que 
la  crainte  dos  supplices  cmpôcliàt  les  antres 
de  lomboi'  dans  do  pareils  excès,  l'assucaut 
qu'on  cela  il  ne  fera  rien  qui  ne  soit  agréable 
A  Dieu.  Il  insiste  sur  les  loisqui  ordonnaient 
la  peine  de  mort  contre  ceux  qui  déshono- 
raient les  images  dos  empereurs  ,  et  on  con- 
clut' qu'à  plus  forte  raison  l'on  devait  punir 
l'attentat  de  ceux  qui  avaient  outragé  les  sain- 
tes imagos  du  Fils  de  Dieu  et  de  sa  très- 
sainte  Mère.  On  pourrait  être  sui'pris  que  ce 
saint,  au  lieu  d'exhorter  ce  prince  à  la  misé- 
ricorde, l'ait  excité  à  la  vengeance  et  à  la 
colère  ;  mais  son  zèle  peut  être  justifié  par 
l'exemple  de  celui  du  prophète  Elle,  qui , 
'V;B<>s-ii  pour  punir  la  témorilé  qu'avait  eue  Oclio- 
sias.  en  consultant  Beelsebub,  et  nou  pas 
le  vrai  Dieu,  fit  descendre  sur  les  envoyés 
de  ce  prince  le  feu  du  ciel,  dont  ils  furent 
consumés  dans  lo  moment.  La  lettre  de  saint 
Siméon  fut  citée  dans  le  second  concile  de 
Nicée  '.  Saint  Jean  Damascèue  '  lui  attribue 
un  discours  sur  les  images,  où  il  faisait  voir 
que  l'honneur  que  les  chrétiens  rendaient 
aux  images  de  Jésus-Christ,  se  rapportait  à 
celui  qu'elles  représentaient,  et  qui  est  vrai- 
ment Dieu;  qu'il  en  était  de  même  de  celles 
des  saints;  qu'ainsi  on  ne  devait  point  dé- 
sapprouver ce  culte,  ni  dire  que  les  chrétiens 
ressemblaient  aux  païens ,  qui  adressaient 
des  vœux  et  des  prières  à  des  choses  inani- 
mées, et  à  des  chimères.  Sophrone,  patriar- 
che de  Jérusalem,  citait  de  Siméou  au  rapport 
de  Photius  \  une  lettre  à  Justinien,  contre 
les  nestoriens  et  les  eulychiens.  Allatius  ^ 
met  au  nombre  des  écrits  de  saint  Siméon, 
une  prière  au  Fils  de  Dieu  contre  les  mau- 


vaises pensées,  une  ù  la  Mère  de  Dieu  sur  le 
même  sujet  ,  et  une  letlre  au  prôlre  qui 
avait  sous  sa  garde  la  croix  de  Jésus-Christ 
à  Jérusalem,  par  laquelle  il  le  priait  de  lui 
en  envoyer  un  morceau.  Cette  lettre  se 
trouve  dans  la  Vie  de  sainte  Marthe  ",  mère 
de  saint  Siméon. 

4.  On  met  sa  mort  vers  l'an  396,  en  la 
soixante -quinzième  année  de  son  âge. 
Son  culte  fut  bientôt  établi  en  Orient.  Saint 
Germain,  patriarche  deConstanlinople,  com- 
posa un  oilice  pour  lo  jour  de  sa  fête,  que 
les  Grecs  célèbrent  le  vingt-quatrième  de 
mai.  Le  diaci'c  Cosme  lut  dans  le  second 
concile  de  NiccJe  plusieurs  miracles  tirés  de 
la  Vie  de  saint  Siméon  :  et  après  qu'il  en 
eut  achevé  la  lecture,  Constantin,  évêque 
de  Constantia  en  Cypre,  témoigna,  au  nom 
des  évoques  assemblés,  qu'on  y  ajoutait 
foi  '.  Les  iconoclastes  contestèrent  la  lettre 
de  ce  saint  à  l'empereur  Justinien,  sur  cer- 
taines expressions  qui  ne  leur  paraissaient 
pas  recevables,  surtout  dans  saint  Siméon. 
Mais  le  Pape  Adrien  soutint  '  qu'elle  était 
de  lui,  et  justifia  les  expressions  dont  il  s'é- 
tait servi,  en  montrant  que  saint  Ambroise 
en  avait  employé  de  semblables  en  éciivant 
à  l'empereur  Gratien  ;  ù  quoi  il  ajouta  que 
le  saint  n'avait  pas  demandé  que  les  coupa- 
bles fussent  punis  sans  miséricorde,  comme 
on  le  disait,  mais  qu'ils  reçussent  une  peine 
convenable  et  proportionnée  à  leur  faute. 

[La  Vie  de  saint  Siméon, par  Nicéphore,  est 
reproduite  avec  le  commentaire  préliminaire 
de  Janningh  au  tome  LXXXVI  de  1t  Patro- 
logie  grecque,  col.  2963-3216,  d'après  les 
Bollandistes.  La  lettre  écrite  par  saint  Si- 
méon à  l'empereur  Justinien  est  reproduite 
ibidem,  col.  3213-3218  d'après  lepère  Labbe. 
Le  fragment  de  la  lettre  relative  aux  images 


IlorI  lie  S. 
Siititun.  Son 
ciitio  Aiidion. 
tlciI4^  do  Ma  let- 
tre. Editions 
df;*  écriti  do 
Nic^pboro. 


•  Si  piissimœ  bonarum  victoriarum  vestrarum 
leges  jubent  imagine  imperatoris  Uicessila  inju- 
riis,  morti  supremœ  tradendos  qui  hoc  conari 
prwsumpserint  ;  quanta  piitas  digiii  sunt  damna- 
tione  in  perditioneiii,  qui  in  iinaginem  Filii  Dei  et 
sanctissimœ  acgloiinsœ  Dei  genitricin  lalia  prœ- 
sumpserunt  ?]io\\:ini\.,\ing.  303,  et  Concil.  Nicaen. 
H,  tom.  VU  Concil.,  act.  5,  pag.  350. 

'  Concil.  Nie.  ibid. 

'  At  infideliuin  aliquis  forsan  vitiligalor  quœs- 
tionem  propnnet,  dicetqw  nos  quiin  Ecclesia  ima- 
gines adoramus  iis  accensendos  fore  qui  simula- 
cris  inanimis  supplicant.  .ibsit  itaque  ut  id  nos 
committamns.  Sam  quidqùid  agunt  Christiani, 
pde  pensaiur,  el  Deus  qui  mendux  non  est,  virili- 
tés operatur.  Non  enim  in  quibusdam  coloribus 


moramur,  sed  veluti  contingit  in  reprœsentatione 
litterœ  qua  aliud  significatiir,  illum  qui  invisibi- 
lis  est  in  pictnra  coyispicientes  tanquam  prœsen- 
tem  taudamus.  Nec  ei  credimus  qui  Dtus  non  sit, 
sed  qui  vere  e.rislat  Deus  ;  neque  item  sanclis  qui 
sancti  non  sint,  sed  qui  taies  plane  sint  et  vivant 
apud  Deum.  Damascenus,  Oral.  3  de  Imaginib., 
tom.  I,  pag.  386. 

*  Pliotins,  Cod.  231,  pag.  890. 

^  Allatius,  de  Sinteonibus,  apud  BoWanû., nddiem 
24  maii,  [lag.  302. 

«  Ibid.,  pag,  426. 

"  Bœc  qjiidem  honorabiles patres  de  hisquœlecta 
sunt  audivimus  et  credimtis.  Act.  4,  pag.  266-270, 

'  Adrianus,  ibid  ,  pag.  922. 


676 


HISTOIRE  GE.\1::H.VLE  DES 


Aolrt  Tia 
d«  sijot  SI* 
md».  S»  Bt- 


est  rapporté  tbid.  col.  3219-3220  d'après  l'é- 
dition des  Œuvres  de  saint  Jean  de  Damas 
donnée  par  Lequien.  ] 

5.  Saint-Jean  Damascène  '  rapporte  uu 
passage  de  la  Vie  de  saint  Siiuéon  composée 
par  Arcadius,  archevêque  de  Cypre.  C'est 
tout  ce  que  nous  en  avons,  et  c'est  le  seul 
endroit  par  où  Arcadius  soit  connu  ;  car  on 
ne  connaît  aucun  autre  écrit  de  lui.  Il  est  dit 
dans  la  Vie  de  saint  Siméon  par  Nicéplinre', 
qu'ëlaut  prés  de  mourir,  il  recommanda  à 
ses  disciples  l'observation  de  la  règle  qu'il 
leur  avait  fait  pratiquer.  Il  n'est  fait  mention 
enaucuu  endroit  d'une  règle  écrite  par  saint 
SiméoH  :  afnsi  il  faui  entendre  ces  paroles 
des  préceptes  qu'il  avait  donnés  de  vive 
voix  à  ses  disciples,  et  qu'il  avait  observés 
avec  eus.  Les  moines  d'Orient  avaient  pres- 
que autant  de  règles  dill'érentes  qu'il  y  avait 
de  monastères;  mais  ils  en  avaient  peu  par 


P«ol,  diMre 
de        Métidâ. 


AUTEURS  ECCLKSIASTIQUES. 

écrit  :  elles  se  conservaient  par  une  tradi- 
tion orale,  et  parla  pratique. 

G.  Dans  le  même  siècle,  et  vers  l'an  610, 
Paul,  diacre  de  Mérida  en  Espagne,  com-  ^  **"" 
posa  im  livre  où  il  rapportait  la  vie  et  les 
miiacles  des  saints  de  cette  Église.  Il  en  prit 
l'idée  sur  les  Dialogues  de  saint  Grégoire; 
voulant  faire  à  l'égard  des  saints  de  l'Kglise 
de  Mérida,  ce  que  ce  pape  avait  fait  pour 
les  saints  d'Italie.  L'ouvra^re  de  Paul  fut 
impriméi  Anvers  en  1035,  in-i",  parlcssoins 
de  Thomas  Tamajus,  historiographe  de  Phi- 
lippe IV  roi  d'Espagne,  avec  des  notes  et  des 
comnlt-ntaires  sur  ce  qui  s'est  passé  à  Mé- 
rida. Celle  ville  est  située  dans  l'Estrama- 
doure  sur  la  Guadiaue. 

[  Le  tome  LXXX  de  la  Pairologie  latine, 
col.  113  etsuiv.,  reproduit  l'uJition  d'Anvers, 
avec  une  notice  sur  Paul,  par  Antoine.] 


CHAPITRE  LXIV. 

Saiat  Jean  Climaqne  abbé  da  Mont  Sinaï  [605J,  et  Jean  abbé 
de  Raïthe  [après  605]. 

«  [Écrivains  grecs.] 


s.  ]>ID  Cli- 
maqoe  écrit 
>ers  la  Go  du 
Plzième  OD  an 
commeoce* 
méat  da  ftjf 
tième  aiècle. 
Il  qalue  le 
monde  k  l'are 
de  16  ans,  fait 
profession     k 


1.  Le  surnom  de  Jean  Climaque  que  l'on  a 
donné  à  ce  père  lui  vient  d'un  traité  spirituel 
qu'il  a  composé  sous  le  titre  à'L'c/ielle  pour 
monter  au  ciel,  et  que  les  Grecs  rendent  en 
leur  langue  par  le  terme  de  Kii/»aE.  Ou  n'a 
rien  de  constant  surl'annt'e  de  sa  naissance, 
ni  sur  celle  de  sa  mort.  .Mais  puisqu'il  cite, 
comme  de  son  temps  ',  des  choses  arrivées 
en  386,  sous  l'empire  de  Tibère,  il  faut  dire 
qu'il  écrivait  sur  la  fin  du  vi"  siècle,  ou  au 
commencement  du  vu'.  Il  passa  sa  jeunesse 
et  presque  toute  sa  vie  au.\  environs  ou  sur 
la  montagne  de  Sinaï,  qui  étant  dans  le  voi- 
sinage de  la  Palestine,  donne  lieu  de  con- 
jecturer qu'il  y  était  né,  et  que  ce  fut  là  qu'il 
apprit  les  belles-lettres  :  car  il  était  très-ins- 
truit dans  les  sciences  humaines.  A  l'âge  de 
seize  ans,  il  renoruja  au  monde  pour  porter 
le  joug  de  la  vie  religieuse  dans  un  monas- 
tère du  mont  Sinaï.  Procope ,  auteur  du 
temps,  dit  que  celte  montagne  était  habitée 


par  des  solitaires  dont  la  vie  laborieuse  et  pé- 
nitente n'était  qu'une  continuelle  médita- 
tion de- la  mort  '.  Saint  Je;in  Climaque  fut 
quatre  ans  à  s'instruire  et  à  s'éprouver,  avant 
de  se  consacrer  à  Dieu  par  la  profession 
monastique,  pensant  dès-lors,  comme  il  l'é- 
crivit '  depuis,  (ju'il  ne  fallait  pas  précipiter 
un  engagement  de  cette  nature,  afin  qu'on 
eût  le  temps  de  s'éprouver  dans  les  exerci- 
ces les  plus  laborieux.  Il  est  rapporté  qu'un 
pieux  abbé,  nommé  Slrat(''yL',  qui  assista  à 
sa  profession,  prédit  à  l'heure  même  que  ce 
jeutie  religieux  serait  un  jour  une  des  grandes 
lumières  du  immde.  Il  eut  pour  maître  dans 
la  discipline  monastique  un  saint  vieillard, 
nommé  Martyre.  Celui-ci,  voyant  les  pro- 
grès de  sou  disciple,  le  mena  à  saint  Anas- 
tase,  solitaire  de  la  même  montagne  de 
Sinaï,  fl  depuis  patriarche  d'Antiofhe.  Saint 
.Xnasliisf,  le  voyant,  dit  an  vieillard  qiii  le 
conduisait  :  Qui  croirait,  mon  père,  que  vous 


<  Damascen.,  Oral,  .t  de  Imaginib-,  png.  378. 
*  Hollaud.,  ad  titcm  2i  niuii,  la^'.  4u:j. 
>  Clioiac,  Graiiu  2U. 


'  Pronip.,  de  .Hdi/iciis  Justin.,  lih.  V. 
*  Climiiu.,  Epist.  ad  Paslortm,  i'.-i|>.  xiii 


[vil'  sifccLE.]  CIIAPITIIE  LXIV.  —  SAINT  JEAN  CUMAQUE,  ETC. 


677 


Il  fO  relire 
'l,ni-  lo désert. 
>>t  inoiilArodo 

VIVIf. 


Il  prend 

^      Itll       UQ 

■fiiire,    fait 
leçnD5  do 


eussiez  consacre  à  Dieu  un  futur  abbë  du  mont 
Sinaï?  Un  aulre  soliUiiii',  qui  s'élnit  retire 
dans  lo  di'sci't  do  Giuldo,  pii'dil  la  iii(''iiie 
cliose. 

2.  Saint  Jean  Climaqiio  '  avait  passé  dix- 
neuf  ans  dans  les  exercices  d'une  luiuiblc  et 
fidèle  obéissance,  lorsque  Dieu  appela  h  lui 
le  saint  vieillard  Martyre.  Cette  mort  lui  fit 
naître  le  dessein  d'embrasser  la  vie  des  ana- 
chorètes. 11  descendit  donc  de  la  montagne 
de  Sinaï,  et  se  retira  dans  la  solitude  qui  est 
au  bas  dans  la  plaine.  La  cellule  où  il  se  lo- 
gea était  éloignée  de  l'église  de  deux  lieues, 
ou  environ.  11  y  venait  les  samedis  et  les  di- 
manches avec  les   autres  solitaires,  pour  y 
entendre  l'office  et  coraniuaicr,    suivant  la 
coutume   de  lT)rient.    La  prière,   le  travail 
des  mains,  la  méditation  desgrandes  vérités 
de  la  religion,  faisaient  successivement  son 
occupation,  surtout  laméditation  de  la  mort, 
qu'il  regardait  comme  l'ennemie  de  l'ennui 
et  de  la  paresse.  Il  mangeait  sans   distinc- 
tion de  toutes  les  choses  que  sa  profession 
lui  permettait  de  manger,  mais  en  très-petite 
quantité.  De  cette   sorte,  il   vainquit  d'une 
part  l'intempérance  en  mangeant  peu  ,  et  de 
l'autre  la  vaine  gloire  en  mangeant  de  tout. 
Dieu  lui  accorda  le  don  des  larmes  :  il  les  ré- 
pandait en  secret;  et  dans  la  crainte  que  les 
autres  solitaires  ne  l'entendissent  gémir,  il 
se  retirait  à  l'écart  dans  un  petit  antre,  qu'on 
voit  encore  au  pied  de  la  montagne.  L;\  il 
faisait  retentir  jusqu'au  ciel  ses  soupirs,  ses 
gémissements   et   ses  cris,  avec  autant  de 
force    que  pourraient  faire   ceux   que  l'on 
coupe  avec  le  fer,  que  l'on  brûle  avec  le  feu, 
ou  à  qui  l'on  arrache  les  yeux.  On  voit  par 
ses  écrits  qu'il  employait  une  partie  de  son 
temps  à  lire  les  Livres  saints,  et  qu'il  y  joi- 
gnait la  lectijre  des   Pères,    principalement 
de  saint  Grégoire  de  Nazianze,  de  saint  Ba- 
sile, de  Cassien  et  de  saint  JN'il. 

3.  Quelque  désir  qu'il  eût  de  vivre  seul , 
il  ne  put  se  refuser  aux  instances  que  lui  flt 
un  solitaire  ,  nommé  Moïse  ,  de  le  prendre 
sous  sa  discipline.  L'éclat  de  ses  vertus  lui 
suscita  des  jaloux  et  des  envieux.  Ils  ne  pou- 
vaient souffrir  qu'on  allât  le  consulter  dans 
sa  cellule.  Pour  ôter  tout  sujet  de  scandale 
à  ceux  qui  en  cherchaient  uji  prétexte,  il 
témoigna  qu'il  ne  voulait  plus  parler  i\  per- 


i  Vita  Climac.  per  Danielem,  tom.  X  Biblioth. 
Pat.,  png.  386,  et  d'Autiilly,  Vie  de  Siiiiit  Jeau  Cli- 
inaque,  Paris  1G6I. 


sonne  ,  et  arrêta  pour  un  temps  lo  cours  des 
eaux  si  douces  et  si  salutaires  de  se.s  pieuses 
exhortations.  Ses  ennemis,  admiiant  son 
humilité  et  sa  modestie  ,  furent  les  premiers 
à  le  conjurer  de  reprendre  sa  première  con- 
duite, et  de  leur  faire  part,  comme  aux  au- 
tres, de  .ses  instructions. 

4.  Etant  donc  admiré  de  tous  pour  r(''mi- 
nence  de  ses  vertus ,    ils  le  choisirent  d'une 
commune   voix  pour  être  leur  conducteur 
dans  la  vie  spirituelle.  Il  était  âgé  de  soixan- 
te-quinze ans ,  dont  il  avait  passé  près  de 
quarante   dans  le  désert.    Il  monta  sur  le 
mont  de  Sinaï,  où  s'étant  de  nouveau  rem- 
ph  des  lumières  de  la  grâce  ,  il  les  répandit 
avec  abondance  sur  les  âmes  confiées  â  ses 
soins.  Pendant  qu'il  s'en  occupait ,  le  bien- 
heureux Jean ,  abbé  de  Raïthe  ,  monastère 
situé  assez  près  de  la  Mer  Rouge  à  quelques 
lieues  de  Sinaï,  lui  écrivit  pour  le  prier,  tant 
eu  son  nom  qu'au  nom  de  sa  communauté , 
de  mettre  par  écrit  les  pensées  que  l'Esprit 
de  Dieu,  lui  dicterait  touchant  la  pratique 
des  vertus  ,  et  de  leur  faire  part  des  grandes 
expériences  qu'il  avait  acquises  tlans  la  vie 
spirituelle.  «  Nous  les  recevrons ,  lui  dit  cet 
abb(!,   comme   de   nouvelles   tables  écrites 
de  la  propre  main  de  Dieu ,   envoyées  par 
votre  ministère,  ainsi  qu'à  de  nouveaux  et 
spirituels  Israélites ,  qui  sont  sortis  des  agi- 
tations du  monde  comme  du  fond  des  abîmes 
de  la  Mer  Rouge.  Ce  n'est  point  par  Oattei-ie 
que  nous  vous  parlons  de  la  sorte  :  nous  ne 
disons  que  tout  ce  que  le  monde  dit.  C'est 
ce  qui  nous  donne  une  ferme  conflance  en 
Dieu  que  nous   recevrons  bientôt  avec  une 
consolation  extraordinaire  l'excellent  ouvrage 
que  nous  espérons  de  vous  ,  ces  caractères 
gravés  par  l'Esprit  de  Dieu  ,  ces  règles  res- 
pectables   qr.i    conduiront   par   un    chemin 
droit  tous  ceux  qui  les  voudront  suivre,  et 
qui  seront  comme  une  échelle  sainte  dressée 
à  la  porte  du  paradis ,  par  laquelle  ceux  qui 
voudront  monter  au  ciel  y  arriveront  sûre- 
ment ,  sans  en  être  empêchés  par  les  efforts 
trompeurs  du   prince    des    ténèbres   de  ce 
monde  et  des  puissances  de  l'air.  » 

3.  Saint  Jean  Climaque  prit  la  prière  de 
l'abbé  de  Raïthe  et  de  sa  communauté  pour 
un  commandement  de  la  part  de  Dieu  ,  et 
résolut  d'y  satisfaire  par  le  devoir  d'une 
obéissance  religieuse.  Il  faut  l'entendre  s'ex- 
pliquer lui-même  dans  sa  réponse  à  la  lettre 
de  cet  alibé.  «  Accoutumé  comme  vous 
l'êtes  à  nous  tracer  tous  les  jours,  par  votre 


Il  o-i  riii 

al  Ini  de  Sin.i( 
h  I  ti)iu  de  't.i 
&nn.  L'ul'Uds 
Batlhe  lui 
écrit. 


Réponse  à 
la  lellre  de 
l'abbé  de  Raï- 
llie. 


078 


niSTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


exemple,  le  modèle  que  nous  devons  suivre 
pour  être  parfaitement  liumble,  vous  avez 
fait  une  action  digne  devons,  en  demandant 
des  règles  de  conduite  à  r.n  liomiuc  qui  a 
plutôt  besoin  de  recevoir  des  instructions 
que  d'en  donner,  et  qui  est  également  im- 
puissant en  œuvres  et  en  paroles  :  aussi  ne 
me  serais-je  point  engage  dans  un  travail 
qui  surpasse  ma  capacité  ,  si  je  n'eusse  ap- 
préhendé ,  en  le  refusant ,  de  secouer  le 
joug  de  l'obéissance,  qui  est  la  mère  de  tou- 
tes les  vertus.  Cette  considération  m'a  fait 
oublier  toute  ma  faiblesse,  et  entreprendre 
humblement  plus  que  je  ne  pouvais  accom- 
plir. Ce  que  j'ai  fait  toutefois,  sans  me  flatter 
que  mon  ouvrage  pût  vous  être  utile  en  quel- 
que chose,  ni  vous  donner  quelque  nouvelle 
connaissance  que  vous  n'ayez  pas  déj.i  en 
un  plus  haut  degré  que  moi.  Mauvais  disci- 
ple d'un  excellent  peintre,  j'ai  seulement 
ébauché  et  marqué  avec  du  noir  les  ombres 
des  choses  qui  d'elles-mêmes  sont  liès-vives 
et  très-éclatanles  ;  et  je  vous  ai  réservé , 
comme  au  premier  maître  et  au  plus  éminent 
entre  les  docteurs ,  le  soin  de  mettre  la  der- 
nière main  à  cet  ouvrage,  d'y  ajouler  les 
embellissements ,  d'éclaircir  ce  qu'il  y  a 
d'obscur,  et  de  suppléer  à  tout  ce  qui  man- 
que dans  les  préceptes  de  cette  loi  spiiiluelle, 
par  les  lumières  que  vous  avez  acquises  en 
l'accomplissant  si  parfaitement.  Ce  n'est  donc 
pas  à  vous  que  j'adresse  ce  petit  ouvrage  , 
mais  à  ceux  que  Dieu  a  appelés  à  son  ser- 
vice ,  et  qui  reçoivent  de  vous  ,  de  même 
que  nous,  les  instructions  qu'on  doit  atten- 
dre d'un  homme  aussi  savant  et  aussi  éclairé 
que  vous  êtes.  » 

6.  Après  avoir  gouverné  quelipip  temps 
le  monastère  de  Sinai ,  i\  retourna  dans  la 
solitude  d'où  on  l'avait  tiré  pour  le  faire 
abbé.  Il  établit  pour  son  successeur  un  frère 
qu'il  avait,  nommé  Georges,  solitaire  de  la 
même  montagne  de  Sinaï ,  et  qui  y  avait 
passé  soixante-dix  ans  dans  la  pratique  de 
toutes  sortes  de  vertus.  Lorsque  saint  Jean 
Climaque  approcha  des  dernières  heures  de 
sa  vie,  son  frère  vint  le  voir,  fondant  en  lar- 
mes,se  plaignantdcce  qu'il  lelaissail  aprèslui 
sans  secours  et  sans  assistance.  «Ne  vous  affli- 
gez point,  lui  r('pondil  1(!  saint;  si  j'ai  quelque 
pouvoir  auprès  de  Dieu  ,  il  ne  vous  laissera 
pas  un  an  dans  le  monde  '.  »  Georges  mou- 
rut en  clfet  avant  la  lin  de  l'année,  dix  mois 


après  son  frère.  Les  Grecs  célèbrent  la  fête 
de  saint  Jean  Climaque  le  trentième  de  mars, 
qui  fut  apparemment  le  jour  de  sa  mort.  Da- 
niel ,  son  historien,  écrivit  sa  vie  dans  le 
temps  qu'il  y  avait  encore  des  personnes 
qui  avaient  vu  ce  saint  personnage.  Il  cite, 
entre  autres,  un  solitaire  nommé  Isaac, 
qu'il  appelle  un  nouveau  David  ,  et  le  bien- 
heureux Jean,  abbé  dé  Uaïthe. 

7.  L'ouvrage  de  saint  Jean  Climaque,  est 
composé  de  deux  parties.  La  première  est 
son  Échelle  sainte  ',  qu'il  dressa  sur  le  mo- 
dèle de  celle  que  le  patriarclie  Jacob  vit  au- 
trefois en  songe  ,  appli(pianl ,  comme  saint 
Grégoire  de  Nazianze  et  saint  Chrysostome 
ont  fait  avant  lui,  cette  échelle  mystérieuse 
de  l'Kcrituie  a  celle  des  vertus  évangéliques 
et  religieuses.  Elle  est  composée  de  trente 
degrés  ou  échelons,  en  l'honneur  des  trente 
années  de  la  vie  cachée  de  Jésus-Christ, 
parce  que  c'est  l'image  de  la  vie  des  vrais 
chrétiens,  qui  est  cachée  en  Jésus-Christ, 
suivant  le  langage  de  saint  Paul.  La  seconde 
partie  est  sa  Lettre  au  Pasteur,  qu'il  écrivit 
principalement  pour  l'abbé  de  Raïthc;  au 
lieu  que  son  Echelle  s'adressait  aux  religieux 
de  ce  monastère,  plutôt  qu'à  l'abbé.  «  Le  pre- 
mier Degré  de  l'Échelle  sainte,  est  le  renon- 
cement wu  monde.  Par  ce  i-enoncement ,  on 
entend  une  haine  voloulaii'e  et  un  abaiidon- 
nement  des  choses  de  la  nature,  par  le  désir 
qu'on  a  de  jouir  des  biens  qui  sont  au-des- 
sus de  la  nature,  c'est-à-dire,  au-dessus  des 
biens,  des  commodités,  des  plaisi/s  delà 
vie  présente.  Ceux  qui  font  ce  renoncement, 
le  font  ou  par  l'espérance  de  la  félicité  fu- 
inre,  ou  par  le  regret  ([u'ils  ont  de  la  multi- 
tude de  leurs  péchés,  ou  par  le  seul  amour 
qu'ils  se  sentent  pour  Dieu.  S'ils  n'ont  été 
touchés  d'aucun  de  ces  mouvements,  leur 
retraite  est  indiscrète  et  téméraire.  Celui 
qui  est  sorti  du  monde  pour  se  décharger  du 
poids  de  ses  péclit's,  doit  les  i)leurer  amère- 
ment et  sans  cesse,  jusqu'à  ce  qu'il  ait  vu 
lui-même ,  ainsi  qn'im  autre  Lazare  ,  que  Jé- 
sus-Chiisl  ait  ôté  la  pierre  de  l'endurcisse- 
ment de  son  cœur  et  délivré  son  âme  des 
liens  de  ses  péchés,  en  recommandant 
anx  anges,  ses  ministres,  de  l'en  dégager, 
de  la  détacher  de  ses  passions ,  et  de  la 
laisser  s'avancer  vers  la  bienheureuse  liberté 
d'une  âme  qui  n'est  plus  liée  de  ces  chaînes. 
S'il  agit  d'une  autre  manière,  sa  retraite  ne 


Éc.'ll  d»  ^. 
JranCliii'itriiif 
iDilliilf  Kfbpl- 
14  »aiot^,  ou 
d'r''**  jour 
niODIer  au 
elel.  premier 
d'gf*,  du  rc- 
Doncruieol  lu 
monde. 


'  MoBcli.,  in  Pralo  spirilaK,  cap.  cxxvu. 


•  Toin.  X  Bibliolh.  Pat.,  pag.  3!)0. 


I 


[vu*  SIÈCLE.]  CHAPITRE  LXIV.  —  SAIN 

lui  sera  d'aucune  utilité.  Il  doit ,  en  entrant 
dans  celle  carrière,  s'attendre  ù  essuyer 
l)eaucou[)  de  travaux,  et  à  plusieurs  peines 
secrètes,  mais  il  ne  doit  pas  s'en  rebuter. 
Qu'il  oIVre  i\  .h'sus-Clirisl  une  foi  indijraniable, 
qu  il  lui  coidcsse  avec  huiuilité  sa  l'aiiilesse, 
et  il  en  recevra  du  secours.  Dans  le  coninieii- 
ccrnent  de  la  retraite,  on  ne  pratique  point 
les  vertus  sans  beaucoup  de  travail.  Mais 
plus  onfait  deprop:rès,  moins  l'on  ressent  de 
peine;  et  ipiand  on  estpaivcun  iï  surmonter 
les  sentiments  de  la  chair  par  un  zèle  ardent 
pour  le  service  de  Dieu,  on  pratique  la  vertu 
avec  joie  et  avec  activité.  »  Saint  Jeau  Cli- 
maque  préfère  celui  i[ui  se  lelire  du  monde 
par  le  mouvement  de  l'amour  divin  ,  A  ceux 
qui  ne  le  quittent  que  par  l'assurance  des 
recompenses,  ou  par  le  regret  de  leurs  pé- 
chés; mais  il  ne  désapprouve  point  ces  deux 
motifs:  il  i-egarde  ceux  qui ,  pour  se  dispen- 
ser d'embrasser  l'état  religieux  ,  allèguent 
le  grand  nombre  de  leurs  péchés  ,  comme 
des  personnes  qui  ne  s'éloignent  de  cet  état 
de  pénitence,  que  dans  le  désir  de  continuer 
à  jouir  des  délices  et  des  plaisirs  de  la  vie. 
Il  ne  croit  pas  néanmoins  que  tous  ceux  qui 
pensent  à  se  retirer  du  monde  ,  doivent  em- 
brasser un  même  genre  de  vie.  Chacun  doit 
se  conduire  en  cela  selon  l'avis  de  quelque 
père  spirituel,  ef  choisir  selon  sa  propre 
connaissance  les  lieux  ,  la  manière  de  vie  , 
la  demeure  et  les  exercices  qui  lui  sont  pro- 
pres. Car  tous  ne  peuvent  pas  demeurer 
dans  les  monastères  ,  à  cause  de  l'intempé- 
rauce  de  leur  bouche;  et  tous  ne  peuvent 
pas  soutfrir  le  rei)Os  de  la  solitude  ,  à  cause 
de  la  violence  de  leur  humeur.  Il  dislint.'^ue 
trois  sortes  de  retraites.  La  première  est 
celle  des  anachorètes,  qui  sont  seuls.  La  se- 
conde ,  celle  de  la  solitude  et  du  repos  avec 
un  compagnon  ou  deux.  La  troisième,  celle 
des  exercices  de  la  mortification  et  de  la 
patience  dans  la  société  commune  du  mo- 
nastère. 
s«ond  de-  8.  «  Quaud  OH  cst  une  fois  animé  d'une 
jamga°  "il  charité  sincère  pour  Dieu;  qu'on  désire 
véritablement  la  félicité  éternelle;  qu'on  a 
une  vive  doideur  de  ses  fautes,  et  qu'on  ne 
perd  point  de  vue  le  jugement  dernier  et 
les  supplices  éternels,  on  n'est  plus  possédé 
du  soin  ni  de  l'amour  des  biens  périssables  ; 
on  ne  tient  plus  ni  à  la  gloire,  ni  aux  plai- 
sirs du  monde,  ui  a  ses  propres  parents  ,  ni 
à  soi-même.  Il  serait  en  effet  honteux ,  après 
avoir  abandonné  tout  ce  que  l'on  possédait 


r  JEAN  CLIMAQUE,  ETC.  679 

dans  le  monde,  pour  suivre  non  pas  un 
homme  ,  mais  un  Dieu  qui  nous  appelle  t\ 
son  service ,  de  se  sentir  encore  agité  de 
soins  et  d'inquiétudes  pour  (jnelqu'une  de 
ces  choses,  qui  ne  peuvent  nous  soulager 
au  moment  île  notre  indigence  et  de  notre 
plus  grande  nécessité  ,  savoir,  à  l'heure  de 
notre  mort  :  (Te  sera// ,  comme  le  dit  Jésus-  '.='•.  r,,cj. 
Christ,  avoir  tourné  la  tète  en  arrière  après 
avoir  mis  /a  main  à  la  charrue,  et  n'avoir 
pas  été  trouvé  propre  pour  le  royaume  du 
ciel.  Saint  Jean  Climaque  dit  (jue  personne 
n'entrera  dans  ce  royaume  ,  s'il  n'accomplit 
trois  renoncements  solennels  :  le  premier,  à 
toutes  choses,  à  toutes  personnes  et  iY  tous 
pareuts;  le  second,  à  sa  propre  volonté;  et 
le  ti-oisième,  à  la  vaine  gloire  qui  suit  l'obéis- 
sance, lorsqu'on  eu  prend  un  sujet  d'or- 
gueil. 

9.  Il  entend  par  la  retraite  du  monde,  l'a-  ,  Troisième 
bandonnemeut  sans  retour  de  tout  ce  qui  "^'■'i'"  ^^ 
s'oppose  dans  notre  paj-s  au  dessein  de  piété 
que  nous  avons  résolu  d'exécuter.  C'est 
pourquoi  il  conseille  à  ceux  qui  se  sentent 
pressés  par  l'esprit  de  Dieu  de  se  retirer  dans 
la  solitude,  de  n'attendre  pas  pour  le  faire 
qu'ils  puissent  mener  avec  eux  des  person- 
nes qui  ont  encore  le  cœur  attaché  au  monde, 
fùl-ce  même  sous  le  prétexte  de  travailler  à 
leur  salut,  le  feu  de  l'amom-  divin  pouvant 
s'éteindre  par  ce  long  retardement.  Il  leur 
conseille  aussi  de  rejeter,  comme  vaines  et 
fi'i  voles,  les  pensées  qui  pourraient  leur  venir, 
après  avoir  acquis  quelque  piét(!  dans  la  so- 
litude, de  retourner  eu  leur  pays  afin  d'y 
servir  d'exemple  et  d'édification  à  ceux  qui 
auraient  vu  auparavant  leuis  actions  déré- 
glées. «Fuyez,  leur  dit-il,  de  l'Egypte,  sans 
y  retourner  jamais.  Ceux  qui  y  sont  retour- 
nés de  cœur  ont  été  privés  de  la  vue  de  la 
Jérusalem  céleste,  qui  est  la  région  de  la  paix 
et  du  calme  de  toutes  les  passions.  »  Il  ne 
regarde  pas  néanmoins  comme  une  chose 
impossible  que  ceux  qui  se  sont  parfaitement 
puriliés  dans  la  retraite,  travaillent  eûicace- 
meut  au  salut  des  gens  du  siècle,  après  avoir 
travaillé  solidement  auteur.  Il  dit,  en  parlant 
de  l'éloignemenl  que  les  solitaires  doivent 
avoir  pour  leurs  parents,  ^u'il  vaut  mieux 
déplaire  i\  ses  parents  que  de  déplaire  à 
Dieu,  parce  que  Dieu,  qui  est  notre  Créa- 
teur, est  aussi  notre  Sauveur,  au  lieu  que 
les  parents  ont  fait  souvent  périr  ceux  qu'ils 
ont  aimés.  Il  ajoute  que  celui  qui  préten- 
drait allier  l'amour  de  Dieu  avec  l'amourdes 


680 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


desio,  do  l'o- 


parents,  se  tromperait  lui-même,  parce  qu'il 
n'est  pas  possible  de  servir  deux  maîtres. 
Les  déserts  les  moins  pourvus  de  consola- 
tions humaines,  les  moins  exposés  à  la  vaine 
gloire,  les  moins  célèbres  et  les  moins  con- 
nus des  hommes,  sont  ceux  qu'il  propose  à 
quiconque  veut  véritablement  renoncer  au 
monde.  «Cachez même,  ajoule-l-il,  la  splen- 
deur de  votre  race,  et  ne  vous  glorifiez  point 
devant  les  iiommes  de  ce  que  vous  portez  un 
nom  illustre,  de  peur  qu'on  ne  juge  qu'au- 
tant que  vous  êtes  au-dessus  des  autres  par 
la  noblesse  de  votre  naissance,  autant  vous 
êtes  au-dessous  d'eux  par  la  bassesse  de 
vos  actions!  »  , 

10.  <i  De  même  que  la  Heur  précède  tou- 
jours le  fruit,  de  même  aussi  la  retraite  du 
monde,  soit  qu'elle  soit  de  corps,  c'est-à-dire, 
de  clianiremenl  do  demeure,  soit  qu'elle  soit 
seulement  d'esprit  et  de  volonté,  précède 
toujours  l'obéissance.  On  entend  par  l'obéis- 
sance un  parfait  renoncement  à  sa  propre 
volonté,  qui  est  manifesté  à  l'extérieur  par 
les  actions  du  corps.  C'est  un  mouvement 
simple  par  lequel  nous  faisons  sans  discer- 
nement tout  ce  qui  nous  est  commandé. 
Ainsi  l'obéissance  anéantit  la  volonté  propre. 
Les  Pères  ont  dit  que  dans  le  chaut  des  psau- 
mes nous  trouvons  les  armes  qui  nous  dé- 
fendent ;  dans  la  prière ,  la  muraille  qui 
nous  couvre;  dans  l'eau  de  nos  larmes  pures 
et  sincères,  le  bain  qui  nous  lave  :  mais  ils 
ont  regardé  la  sainte  obéissance  comme  un 


mains  d'un  homme  sujet  à  ses  passions,  au 
lieu  d'un  homme  qui  en  est  parfaitement  le 
maître,  nous  ne  trouvions  noti'e  perte,  au 
lieu  de  notre  salut.  Cet  examen  fait,  n'entre- 
prenons plus  de  juger  en  quoi  que  ce  soit 
des  actions  de  ce  directeur:  autrement  nous 
ne  retirerons  aucun  fruit  de  notre  obéis- 
sance. Avant  toutes  choses,  confessons-lui 
nos  péchés ,  et  sojons  prêts  à  les  confessera 
tout  le  monde,  s'il  nous  l'ordonne  :  les  plaies 
de  noire  âme  étant  découvertes  en  public, 
elles  n'empireront  pas  :  au  contraire,  elles 
se  guériront.  »  Saint  Jean  Climaque  raconte 
qu'en  un  monastère  où  il  était  allé,  l'abbé 
lit  faire  une  confession  publique  à  un  vo- 
leur que  Dieu  avait  converti,  et  qui  deman- 
dait d'être  admis  dans  la  communauté;  et 
que,  comme  il  demanda  à  cet  abbé  pourquoi 
il  avait  obligé  ce  voleur  à  confesser  publi- 
quement ses  péchés,  l'abbé  lui  en  avait 
donné  deux  raisons:  la  première,  afin  que 
la  honte  présente  qu'il  recevrait  de  cette 
confession  publique  le  délivrât  de  la  honte 
future  et  éternelle  ;  la  seconde,  alin  que 
quelques-uns  de  ses  religieux,  qui  n'avaient 
point  encore  déclaré  publiquement  leui-s 
pijcliés,  fussent  excités  par  cet  exemple  à  en 
faire  la  confession,  sans  laquelle,  ajouta-t-il, 
nul  d'eux  n'en  obtiendra  le  pardon.  Ils  avaient 
apparemment  '  été  engagés  comme  ce  vo- 
leur dans  des  péchés  publics.  Ce  n'est  pas 
que,  selon  l'ordre  de  l'Eglise,  on  fût  obligé 
de  confesser  publiquementles péchés  publics 


acte  de  foi  et  une  confession  de  notre  dépen-  que  l'on  avait  commis.  La  pénitence  en  était 
dance  du  Seiyyteur,  sans  laquelle  nul  homme 
sujet  à  sespassisns  ne  verra  Dieu.  Quoique  ces 
p;;roles  doivent  s'entendre  principalement 
des  religieux  '  qui.étanl  sujets  à  leurs  pas- 
sions, ne  sont  pas  propres  à  la  vie  érémiti- 
que  ,  011  ils  ne  seraient  soumis  à  aucune 
obéissance,  elles  peuvent  s'appliquer  aussi  à 
des  chrétiens  laïques  dans  qui  les  passions 
régnent  encore,  puisque,  de  (luelquo  condi- 
tion qu'ils  soient,  il  faul,  s'ils  veulent  se  sau- 
ver, qu'ils  se  soumettent  à  la  conduite  de 
quelque  personne  sage,  conformément  à  ce 
que  dit  Jésus-Christ,  qu'on  ne  peut  entrer 
dans  son  royaume,  si  l'on  ne  devient  hum- 
ble et  docile  comlne  les  enfants.  Mais  avant 
d'entrer  dans  la  voie  de  l'obéissance,  nous 
devons  examiner  avec  soin  les  qualités  de 
celui  que  nous  voulons  choisir  |)our  nous 
gouverner,  de  peur  qu'en  touibant  entie  les 


publique,  et  la  confession  secrète;  mais  il 
arrivait  quelquefois  que  l'on  ordomuiit  la 
confession  publique  à  de  grands  pécheurs 
qui  avaient  péché  publiquement ,  et  qui  se 
trouvaient  disposés  à  faire  celte  sorte  de 
confession.  Saint  Jean  Climaque  l'ait  ensuite 
le  récit  des  vertus  admirables  qu'il  avait 
remarquées  dans  les  religieux  d'un  gi'and 
monastère  qui  était  aux  environs  d'Alexan- 
diie.  Ils  étaient  unis  ensemble  jtar  le  lien 
indissoluble  de  l'amitié  chrétienne  ;  et  ce 
qu'il  y  avait  de  plus  admirable,  c'est  que 
leur  all'ectiou  était  exemple  de  toute  liberté 
iiitliscrule  dans  les  paioles,  et  d'entrelieus 
inutiles.  Ils  s'excitaient  mutuellement  a  la 
ferveur  et  h  la  vigilance,  et  avaient  concerté 
entre  eux  certaines  pratiques  qui  tendaient 
a  leur  sanctilicaliun.  S'il  arrivait  qiu'  quel- 
«lu'un,  l'ii  r.ibsriicc  de  l'abbé,  ( oinini'iuàl  à 


D'Andllly,  not.  in  k  grad.,  iiag.  lAo. 


'  irAliilillv,  ibid. 


[vu--  SIÈCLE.]  CIIAPITHE  LXIV. 

liarlord'iiii  luilrooii  iii.iiivais  tonnes,  ou  ;'ilo 
cMindaiiincr  par  un  jiit;oiiieiit  ti'uu'raiio,  ou  ;\ 
(lire  lies  paroles  inuliles,  un  IViMc  l'averlis- 
sail  de  sa  faute  par  quelque  signe  sccrel, 
sans  que  personne  s'en  aperrùl,  et  le  relc- 
nail  dans  les  bornes  de  son  devoir;  si  le  cou- 
pable n'cnteiulait  pas  le  signe,  ce  même 
Mrc,  pour  le  lui  faire  entendre,  se  prosler- 
naiten  terre  devant  lui,  puis  s'en  allait.  S'ils 
avaient  quelquefois  à  se  parler,  la  médita- 
tion de  la  mort,  Ja  pensée  du  jugement  der- 
nier étaitle  sujet  ordinaire  de  leurs  discours. 
A3-ant  remarqué  que  le  frère  qui  servait  h  la 
cuisine  le  faisait  dans  un  grand  recueille- 
ment et  en  versant  continuellement  des 
larmes,  il  tira  de  lui,  quoique  avec  peine, 
cet  aveu  :  «  Je  n'ai  jamais  cru  rendre  ce 
service  aux  hommes,  mais  ;"i  Dieu,  et  ce  feu 
que  je  vois  me  remet  sans  cesse  dans  la 
pensée  les  llammes  éternelles  de  l'enfer.  » 
Le  saint  ne  fut  pas  moins  édifié  de  voir  les 
plus  anciens  de  cemonastèreaccourircomme 
des  enfants  pour  recevoir  les  ordres  du  su- 
périeur, et  mettre  leur  plus  grande  gloire 
dans  leur  soumission.  Un  d'entre  eux,  nom- 
mé Isidore,  qui  avait  été  du  nombre  des  ma- 
gistrats d'Alexandrie,  ne  fut  admis  dans  la 
communauté  qu'après  s'être  tenu,  par  or- 
dre de  l'abbé,  à  genoux  devant  tous  ceux 
qui  entraient  et  sortaient  du  monastèie,  et 
avoir  demandé  à  chacun  le  secours  de  leurs 
prières.  Il  se  soumit  ;\  cette  épreuve  ;  et 
après  avoir  été  admis ,  il  la  continua,  du 
consentement  de  l'abbé,  pendant  sept  an- 
nées entières,  au  bout  desquelles  il  mourut. 
Saint  Jean  Climaque  rapporte  divers  autres 
exemples  d'humilité,  d'obéissance  et  de  pa- 
tience dont  il  avait  été  témoin,  et  les  excel- 
lents discours  qu'il  avait  ouïs  de  la  bouche 
de  ces  saints  religieux  ;  il  n'oublie  pas  de 
remarquer  que  la  plupart  d'entre  eux  avaient 
de  petites  tablettes  pendues  à  leur  ceinture, 
sur  lesquelles  ils  éciivaicnt  toutes  les  pen- 
sées qui  leur  venaient  dans  l'esprit  et  qu'ils 
rapportaient  ensuite  à  leur  abbé.  A  une  de- 
mie-licue  du  environ  du  grand  monastère,  il 
y  en  avait  un  autre  appelé  des  Pénitents,  où 
étaient  reufeiinés,  comme  dans  une  prison, 
plusieurs  moines  tombés  dans  quelques  fau- 
tes notables.  Us  n'étaient  pas  logés  tous  en- 
semble, mais  seul  à  seul,  ou  au  plus  doux 
à  deux.  Lem'  nourriture  était  de  pain  et 
d'eau,  et  de  simples  légumes.  On  leur 
fournissait  quantité  de  feuilles  de  palmier 
dont   ils  faisaient    des  corbeilles,   de  peur 


SAINT  JEAN  CLIMAOUK.  ETf..  (!8l 

de    louilxn'   dans    l'ennui    et   l'abattement. 

11.  Saint  Jean  Cliuiaiiue assure  tiu'il  avait       ':iriq..ifino 

.  '  Ho».*,    du    U 

vu,  étant  dans  ce  monastère,  quehjues-uns  p'n'i'ot". 
de  ces  pénitents  qui  passaient  des  nuits  en- 
tières debout  h  l'air  jusqu'au  lever  du  soleil, 
ayant  les  pietls  imimibiles;  d'autres  qui, 
ayant  toujours  les  yeux  au  ciel,  demandaient 
avec  grands  cris  le  secours  qu'ils  en  atten- 
daient; quelques-uns  qui  étaient  en  prières 
les  mains  liées  deriière  le  dos,  ainsi  que  des 
criminels,  le  visage  baissé  vers  la  terre,  se 
jugeant  indignes  de  regarder  le  ciel;  plu- 
sieurs ([ui  (étaient  assis  sur  le  cilice  et  la  cen- 
dre, qui  cachaicuit  leur  visage  entre  leurs 
genoux  et  se  battaient  le  front  contre  terre  ; 
d'autres  qui  frappaient  sans  cesse  leur  poi- 
trine ,  ou  arrosaient  la  terre  de  leurs  larmes. 
Souvent  ilsconjiu'aient  le  saint  homme  Isaac, 
leur  supérieur,  de  leur  faire  mettre  des  car- 
cans de  fer  au  cou,  et  des  menottes  aux 
mains,  etd'enfermer  Icurspieds comme  ceux 
des  criminels  dans  des  ceps  do  bois,  pourne 
les  en  tirer  jamais  que  pour  les  mettre  dans 
le  tombeau,  dont  quelquefois  même  ils  se 
disaient  indignes,  priant  qu'on  ne  leur  ac- 
cordât point  l'honneur  de  la  sépulture ,  et 
qu'on  jetât  leurs  corps  aux  bêtes  ou  dans  la 
rivière.  Lorsqu'ils  se  trouvaient  ensemble, 
ils  s'exhortaient  mutuellement.^ lapénitencc, 
se  remettant  en  mémoire  l'état  de  perfection 
d'où  ils  étaient  tombés,  et  dont  ils  ne  ces- 
saient de  pleurer  la  perte.  «  Je  passai  un 
mois  entier  dans  cette  prison,  ajoute  saint 
Jean  Climaque;  et  de  retour  au  grand  mo- 
nastère, je  dis  â  l'abbé  que  j'avais  jugé  ces 
hommes,  qui  se  pleuraient  tant  eux-mêmes 
pour  être  tombés  dans  quelques  fautes,  plus 
heureux  que  ceux  qui  n'en  avaient  point 
commis  et  qui  ne  se  pleuraient  pas  eux-mê- 
mes, parce  que  leur  chute  leur  avait  été  un 
sujet  de  résurrection  qui  les  rendait  plus  as- 
surés contre  le  péril  de  tomber,  que  n'é- 
taient les  autres.  «  On  voit  parla  réponse  que 
lui  lit  l'abbé,  que  la  plupart  de  ceux  qui  al- 
•laient  dans  le  monastère  des  pénitents,  en 
demandaient  eux-mêmes  la  permission  avec 
instance,  et  qu'on  ne  la  leur  accordait  qTiel- 
quefois  qu'avec  peine.  Jean  définit  la  p('niten- 
ce  un  rétablissement  du  baptême;  un  accord 
par  lequel  on  s'oblige  envers  Dieu  à  mener 
à  l'avenir  une  vie  ditférente  du  passé  ;  un  re- 
noncement de  l'esprit  aux  aises  du  corps  ; 
une  réconciliation  avec  Dieu  par  la  pratique 
des  bonnes  œuvres  contraires  aux  péchés 
dans  lesquels  on  est  tombé;  une  souUrance 


I 


682 


HISTOIRE  GÉNÉa.VLE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


SiKième  6c- 
rrtf  de  U  né- 


volontaire  de  toutes  sortes  de  peines  et  de 
travaux  ;  une  rigoureuse  mortiflcalion  de  la 
sensualité  pour  le  manger,  et  un  remords 
de  l'àmc  vivement  touclice  de  sa  misère. 
Saint  Jérôme  fait  mention  du  monastère  de 
la  Pénitence  dans  sa  préface  sur  la  traduc- 
tion de  la  règle  de  saint  Pacoue.  Ainsi  il 
existait  201)  ans  avant  saintJean  Ciiiuaque. 
12.  «  De  toutes  les  pratiques  spirituelles,  la 
d.i.'iion  "dt  11   méditation  de  la  mort  est  la  plus  utile  :  elle 

mort.  ^ 

fait  embrasser  aux  religieux  qui  vivent  en 
coraniunaulé,  les  travaux  et  les  exercices  de 
la  pénitence,  et  leur  fait  trouver  leur  plus 
grand  plaisir  dans  les  humiliations  et  les  mé- 
pris. Quant  aux  solflaires  qui  sont  éloignés 
de  tout  le  tumulte  du  monde,  elle  produit  en 
eux  uu  abandonnement  de  tous  les  soins  de 
la  terre,  une  prière  continuelle,  et  une  vigi- 
lance exacte  sur  leurs  pensées.  La  marque 
véritable  iï  laijuelle  nous  pouvons  reconnaî- 
tre si  la  pensée  de  la  mort  opère  véritable- 
ment sur  notre  creui',  est  le  détachement  vo- 
lontaire de  toutes  les  choses  créées,  et  le 
parfait  renoncement  à  notre  pi-opre  volonté. 
Cehii-la  est  vertueux,  qui  attend  la  mort  tous 
les  jours  ;  mais  celui-là  est  saint,  qui  la  dé- 
sire à  toutes  les  heures.  Néanmoins,  tout  dé- 
sir de  la  mort  n'est  pas  boa  :  il  y  en  a  qui, 
tombant  sans  cesse  par  la  violence  de  leurs 
mauvaises  habitudes,  la  souhaitent  avec  un 
sentiment  d'humilité;  d'autres,  ne  voulant 
point  faire  pénitence,  l'appellent  à  eux  par 
un  mouvement  de  désespoir.  »  Saint  Jean  Cli- 
maque  rapporte  divers  exemples  des  etl'ets 
merveilleux  que  la  pensée  de  la  mort  a  pro- 
duits sur  l'esprit  de  quelques  solitaires,  et  dit 
de  la  méditation  de  la  mort,  que  quand  elle 
est  ellicace  et  véritable,  elle  éteint  l'intempé- 
rance de  la  bouche;  que  cette  intempé- 
rance étant  éteinte,  et  si  l'humilité  est  con- 
servée, les  autres  passions  s'éteignent  en 
même  temps.  11  legarde  la  ciaiulc  de  la 
mort  comme  un  mouvement  naturel  a 
l'homme,  et  comme  un  etl'etde  sa  désobéis- 
sance; et  le  tremijiement  que  la  crainte  de 
l'horreur  de  la  mort  nous  cause,  comme  une 
preuve  que  nous  n'avons  pas  encore  expié 
nos  péchés  par  la  pénitence.  C'est  pourquoi 
il  ajoute  :  "  Jésus-Chiist  a  craint  la  moi-t, 
mais  il  n'en  a  point  trembli-,  afin  de  faire 
voir  clairement  par  l'un  et  l'autre  de  ces 
deux  etfets.  les  deux  ditférentes  qualités  qui 


étaient  propres  '  aux  deux  natures  qu'il  avait 
réunies  en  sa  personne.  » 

13.  «La  tristesse  qui  accompaixne  la  péni- 
tence, lorsqu'elle  est  sincère,  est  un  vif  sen- 
timent de  l'ûme  touchée  du  regret  de  ses 
péchés,  qui  la  fait  soupirer  sans  cesse  après 
la  possession  du  souverain  bien,  et  employer, 
pour  y  parvenir,  de  pénibles  travaux.  Si 
cette  tristesse  est  accompagnée  du  don  des 
larmes,  c'est  un  avantage  qu'il  faut  s'ell'or- 
cer  de  conserver,  parce  que  les  larmes  de  la 
pénitence  sont  en  un  sens  plus  puissantes 
que  le  baptême,  qui,  en  effet,  ne  [luritie  que 
les  olfeuses  qui  l'ont  précédé,  au  lieu  que 
ces  larmes  purilient  les  péchés  qui  l'ont  sui- 
vi. I)  Saint  Jean  Climaque,  en  avançant  cette 
proposition,  convient  qu'elle  semblait  un  peu 
hardie  :  ainsi  ^il  ne  faut  pas  la  prendre  à 
la  rigueur.  Saint  Grégoire  de  Nazianze  avait 
dit  '  avant  lui,  qu'il  n'y  avait  qu'une  prodi- 
gieuse abondance  de  larmes  (jui  pût  égaler 
la  fontaine  des  eaux  sacrées  du  baptême. 
Mais  il  faut  bien  distinguer  entre  les  larmes 
intérieures  et  spirituelles,  et  celles  qui  ne 
sortent  que  des  yeux  extérieurs  et  corporels. 
Celles-ci  ne  doivent  se  répandre  qu'avec  beau- 
coup de  circonspection,  en  certains  lieux,  et 
devant  des  personnes  choisies  pour  en  être 
les  témoins;  elles  doivent  être  comme  un 
trésor  caché,  qu'on  ne  doit  point  exposer  à 
la  vue  de  tout  le  monde.  Celles-là  peuvent 
nous  accompagner  partout,  parce  qu'il  y  a 
moins  de  danger  d'en  perdre  le  mi-rile,  par 
la  vaine  gloire  qui  se  rencontre  facilement 
avec  les  pleurs  extérieurs.  Le  saint  abbé 
racoute  d'un  anachorète  de  grande  vertu, 
nommé  Ltienne,  que  la  veille  «lu  dernier  jour 
de  sa  vie  il  eut  un  ravissement  d'esprit,  où, 
comme  s'il  eût  vu  des  pei-sonnes  qui  lui  fai- 
saient rendre  compte  de  ses  actions,  il  ré- 
pondait si  haut,  que  tous  ceux  qui  étaient 
présents  l'entendaient,  tantôt  avouer  certai- 
nes choses,  tantùt  en  nier  d'autres,  disant  à 
ceux  qui  l'accusaient  faussement  :  «  Vous 
êtes  des  imposteurs;  »  répondant  sur  d'au- 
tres accusations  :  «  Cela  est  vrai,  et  je  n'ai 
rien  à  dire  sur  ce  point;  mais  Dieu  est  misé- 
ricordieux. )) 

14.  Il  Par  la  douceur  qui  est  victorieuse  do 
la  colère,  on  entend  l'innuidiiliti'  (h;  l'Ame,  qui 
demeure  toujours  la  même  aussi  bien  dans 
les  injures  que  dans  les  applaudissements. 


S^ptl^rae 

dppr*.    à»    It 
Irjdc.,,  de  la 

S^n>teDC« 
le*  ItriDM 
Miati.*  (joi 
Lroduileot  la 
joie. 


Hultl^ni 
deitré,  de  11 
douceur 
fUrmoDie  II 
colère. 


•  ExpavescU    Chrislus   mortem.    non    Iremh- 
cit ,    ut    duaruin    in    se    nalwrarum    proprias 


affecliones   (lemnnstrarct.   Cliniai-.,   graii.   c. 
'  tJrcg.,  Orni.  U. 


CHAPITRIi  LXIV.  —  SAINT  JEAN  CLIMAQUE,  ETC. 


[vu'  SIKCI-E.] 

f.o  commencement  de  la  victoire  de  lu  dou- 
ceur sur  la  colère,  est  le  silence  de  la  lan- 
c;ue;  le  prop;i'Cs  est  le  silence  mémo  des  pen- 
sées au  milieu  de  quelque  (rouble-;  la  per- 
fecliou  de  cette  victoire  est  une  stable  et 
constante  sérénité  de  l'àme  au  milieu  des 
tentations.  La  colère  est  une  passion  qui  re- 
nouvelle sans  cesse  le  souvenir  des  injures, 
qui  lait  souhaiter  du  mal  ;'i  ceux  dont  on  a 
été  oHensé;  ainsi  cette  passionne  peut  avoir 
que  des  eUets  très-funestes,  dont  un  est  d'é- 
loigner de  nous  la  présence  du  Saint-Esprit. 
Le  premier  degré  pourparveuir  a  la  douceur 
et  à  la  patience  propre  ;i  vaincre  lu  colère, 
est  de  soutl'rir  luimblement  les  humiliations 
et  les  mépris;  le  second,  do  n'en  avoir  point 
de  ressentiment  ;  ce  serait  être  parfait  que 
de  les  estimer  autant  que  l'honneur  et  les 
louanges.  Il  y  a  des  personnes  qui  se  met- 
tent en  colère  de  s'être  mises  en  colère  :  elles 
se  punissent  ainsi  de  leur  première  chute  par 
une  seconde  chute.  Lions  la  colère,  comme 
un  tyran  furieux,  avec  les  chaînes  de  la 
douceur  ;  frappons-la  rudement  avec  la 
ver^  de  la  patience  :  amenons-la  au  tri- 
bunal de  la  raison  par  les  liens  du  saint 
amour.  » 

13.  «  Le  souvenir  des  injures  est  la  consom- 
mation et  le  comble  de  la  colère  :  il  nourrit 
et  fait  vivre  les  péchés  dans  l'àme.  C'est  une 
haine  de  la  justice,  la  ruine  des  vertus,  un 
venin  qui  empoisonne  le  cœur,  un  ver  cfui 
ronge  l'esprit.  La  prière  que  Jésus-Christ 
nous  a  laissée,  doit  couvrir  de  confusion  ce- 
lui qui  conserve  le  souvenir  des  injures, 
puisque  nous  ne  saurions  la  dire  par  son  es- 
prit, en  nous  ressouvenant  du  mal  qu'on 
nous  a  fait.  L'exemple  de  Jésus-Christ  doit 
aussi  nous  porter  à  souffrir  avec  patience, 
sans  aucun  désir  de  nous  venger.  » 

IG.  «La  médisance  naît  du  souvenir  des 
injures  :  et  une  des  marques  auxquelles  on 
connaît  les  vindicatifs  et  les  envieux,  est 
qu'ils  se  portent  sans  scrupule  et  avec  plai- 
sir à  hl.'imcr  et  h  calomnier  la  doctrine,  les 
actions  ot  les  vertus  de  leur  prochain.  »  Saint 
Jean  Climaque,  ayant  ouï  des  personnes  mé- 
dire, les  en  reprit  ;  ils  donnèrent  pour  ex- 
cuse qu'ils  le  faisaient  par  l'amour  qu'ils 
portaient  aux  personnes  dont  ils  parlaient 
mal,  et  par  le  soin  qu'ils  prenaient  de  leur 
salut,  (i  Défaites-vous,  leur  répondit-il,  d'une 
telle  charité  :  si  vous  aimez  véritablement 
ces  personnes  comme  vous  le  dites,  offrez 
pour  eJles^en  secret  des  vœux  et  des  prières 


fi83 


à  Dieu,  et  ne  blessez  pas  leur  honneur  par 
des  paroles  injurieuses.  » 

17.  «  L'intempérance  de  la  lanrrue  est  com- 
me le  troiu;  où  lu  vaine  gloire  a  coutume  de 
se  faire  voir  avec  oslenlaliou.  C'est  aussi  le 
caractère  des  ignorants  de  parler  beaucoup, 
et  ce  défunt  leur  est  commun  avec  ceux  qui 
ne  se  connaissent  pas  encore  autant  qu'ils  le 
devraient  :  ceux,  un  contraiie,  <[in  ont  une 
véritable  connaissance  d'eux-mêmes,  répri- 
ment leur  langue.  Le  silence  d'un  homme 
pieux  le  délivre  de  la  tentation  de  vanité. 
Saint  Pierre  pleura  amèrement  pour  avoir 
parlé  et  oublié  cette  sentence  de  l'Écriture  : 
J'ai  résolu  de  veiller  sur  mes  actions,  afin  que 
mu  langue  ne  me  fasse  point  péc/icr.  n 

18.  (i  11  n'y  a  point  de  péché  contre  lequel  le 
Saint-Esprit  ait  prononcé  une  sentence  plus 
redoutable  dans  les  livres  saints,  que  contre 
le  mensonge.  11  en  est  toutefois  de  la  passion 
de  mentir,  comme  de  toutes  les  autres  :  l'of- 
fense n'est  pas  toujours  égale;  mais  on  la 
juge  diftërcnte  selon  la  diversité  des  circons- 
tances. Celui  qui  se  laisse  aller  au  mensonge 
par  la  crainte  de  quelque  peine,  sera  moins 
châtié  de  Dieu,  que  celui  qui  s'y  porte  lors- 
qu'il n'est  menacé  d'aucun  péril,  ni  touché 
d'aucune  crainte  :  en  vain  le  menteur  allè- 
gue qu'il  ne  blesse  la  charité  que  par  une 
bonté  oiBcieuse,  et  une  conduite  cliuritable 
envers  le  prochain;  c'est  prendre  peur  une 
action  de  justice,  ce  qui  est  en  effet  la  perte 
de  son  âme.  » 

19.  L'ennui  ou  la  paresse,  dont  parle  saiiil 
Jean  Climaque,  ne  regarde  que  la  prière,  le 
chant  des  psaumes,  et  tout  autre  exercice 
spirituel  ;  car  il  convient  que  ceux-là  mêmes 
en  qui  ce  vice  règne,  sont  infatigables  dans 
les  exercices  corporels,  diligents  et  laborieux 
dans  le  travail  des  mains,  prompts  dans  les 
devoirs  de  l'obéissance,  assidus  à  visiter  et 
soulager  les  malades;  mais  s'il  s'agit  d'assis- 
ter à  l'office  ou  à  la  prière  commune,  leur 
corps  s'appesantit,  ils  se  sentent  plongés  dans 
le  sommeil,  et  leurs  bâillements  à  contre- 
temps les  empêchent  de  prononcer  les  ver- 
sets entiers.  Il  croit  que  ce  vice  tire  son  orr- 
gine,  tantôt  de  l'insensibilité  de  l'âme,  tan- 
tôt de  l'oubli  des  biens  célestes. 

20.  Il  nous  fait  envisager  l'in'empérance 
de  la  bouche  comme  une  prc  iiictiou  de  la 
natm-e  corrompue,  et  de  la  mauvaise  habi- 
tude avec  laquelle  on  se  livre  au  boire  et  au 
maneer.  Il  en  décrit  toutes  les  suites,  dont 
l'impureté  est  une  des  plus  fâcheuses.   Le 


Onilitnii 
dfSrS,  Ju    «É- 

IVQCO. 


Doazièmo 
ilcgré.duuieQ. 
iongc. 


Troiiiène 
degré,   dâ    la 


Qjalotiiè- 
me  degr;,  d9 
l'in'enijéran- 
ce  de  la  bou- 
che. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


684 

couspil  qu'il  donne,  est  que  chacun  se  rende 
maître  de  sou  appi-tit,  avant  d'en  être  devenu 
esclave;  d'anêter  les  excès  de  l'inlempi'- 
rance  par  la  pensée  des  feux  éternels  ;  de 
considérer  que  celui  qui  jeiine  n'a  que  des 
peusées  pures  et  chastes  dans  ses  prières, 
au  lieu  que  l'esprit  d'un  homme  intempérant 
n'est  rempli  que  d'images  impures  et  di's- 
honnétes  ;  de  se  représenter,  en  se  mettant 
à  table,  la  mort  et  le  jugement  dernier;  de 
penser,  en  buvant,  au  vinaigre  et  au  fiel  que 
l'on  présenta  à  Ji'sus-Christ. 
0»»i'è'.e  21.  Eln  parlant  de  la  chasteté,  il  dit  cnie, 
ciwilct*.  SI  nos  prejniers  parents  ne  se  fussent  point 
laissés  aller  à  l'intempérance  de  la  bouche 
en  mangeant  du  fruit  défondu,  ils  eussent 
toujours  vécu  comme  frère  et  sœur  ';  croyant 
avec  quelques  anciens,  que  Dieu  ne  les  avait 
créés  de  dillerents  sexes,  et  ne  les  avait  ma- 
riés lorsqu'ils  étaient  encore  innocents,  que 
parce  qu'il  prévoyait  qu'ils  tomheraieul  dans 
la  désobéissance  et  dans  la  mort,  et  qu'alors 
le  mariage  leur  deviendrait  nécessaire  pour 
réparer  les  ruines  de  la  mortalité,  par  la 
succession  perpétuelle  des  enfants  aux  pères. 
Mais  saint  Augustin  ne  doutait  pas,  et  c'est 
la  doctrine  de  l'Kglise,  qu'Adam  et  ftve  fus- 
sent demeurés  dans  l'état  d'innocence,  s'ils 
n'eussent  usé  du  mariage  avec  une  parfaite 
chasteté,  et  qu'ils  n'eussent  eu  des  enfants 
innocents  comme  eux.  «  Cette  parole  de  Dieu 
à  Adam  et  h  Eve  :  Croissez  et  multipliez, 
n'était  pas  *,  dit  ce  Père,  une  prédiction  des 
péchés  qui  méritaient  d'être  punis,  mais  la 
bénédiction  des  noces  qui  devaient  être  fé- 
condes. »  Saiut  Jean  Climaquo  faitr(''logedc 
la  chasteté,  l'appelant  une  participation  de 
la  nature  angéliquc  et  incorporelle,  un  re- 
noncement à  la  nature  par  un  mouvement 
surnaturel.  Les  moyens  qti'il  prescrit  pour 
l'obtenir,  sont  l'humilité,  la  douceur,  le  tra- 
vail des  mains,  les  veilles,  les  jeûnes,  la  mor- 
tification des  sens,  la  piùère,  la  retraite.  Ce 
saint  abbé  avait  avancé  un  jour,  dans  un 
entretien  avec  un  homme  des  plus  savants 
dans  les  choses  spirituelles,  que  le  plus 
grand  de  tous  les  péchés,  après  l'homicide, 
était  l'apostasie  :  ce  sa^•ant  lui  dit  :  «  D'où 
vient  donc  (|ue  les  hi'rétiques,  en  anathéraa- 
tisant  leur  hérésie,  sont  reçus  aussitôt  dans 
l'Kplise,  et  que  ceux  qui  ont  commis  un  pé- 
ché d'impureté  sont  retranchés  de  la  com- 
munion des  saints  mystères  pendant  plusieui-s 

•  D'Andilly,  no/,  in  15  grad.,  pag.  519. 


années,  depuis  même  qu'ils  ont  été  admis  ;"i 
la  pénitence?  »  S'entretenant  en  une  autre 
occasion  avec  un  solitaire  qui  avait  le  don 
de  discernement,  il  apprit  de  lui  que  les  ac- 
cidents qui  arrivent  en  dormant  viennent 
quelquefois  de  l'abondance  de  la  nourriture 
et  de  la  mollesse  d'une  vie  licencieuse  et  re- 
lâchée, quelquefois  d'orgueil  et  de  présomp- 
tion, lorsque  ,  ces  accidents  ayant  été  long- 
temps arrêtés  en  nous,  nous  en  concevons 
de  la  vanité  ;  et  quelquefois  aussi  de  la  li- 
berté avec  laquelle  nous  condamnons  notre 
prochain.  Ces  deux  dernières  causes  sont 
communes  aux  malades,  de  même  qu'-'i  ceux 
qui  sont  en  santé,  et  peut-être  même  toutes 
les  trois.  Que  s'il  se  ti-ouve  quelqu'un  en  qui 
ce  ne  puisse  être  ni  la  réplétion  des  viandes, 
ni  la  mollesse  d'une  vie  relâchée,  ni  la  va- 
nité, ni  les  jugements  téméraires,  qui  lui 
causent  cet  efl'et,  il  doit  croire  qu'alors  Dieu 
le  permet,  afin  que  par  cette  infirmité,  qui 
est  affligeante,  mais  innocente,  il  acquière 
une  plus  grande  humilité.  Ce  saint  conseille 
à  ceux  que  le  démon  tente  d'impureté,  d'é- 
lever aussitôt,  ou  les  yeux  du  corps,  ou  ceux 
de  l'âme,  vers  le  ciel,  d'étendre  leurs  mains 
en  croix  sans  les  remuer,  afin  de  confondre 
et  de  vaincre  cet  ennemi  par  cette  figure  sa- 
lutaire, et  de  crier  vers  celui  qui  a  le  pou- 
voir de  nous  sauver,  en  lui  adressant  ces 
paroles  du  psaume:  Ayez  pitié  de  moi,  mon  p>.  >i.a. 
Dieu,  car  Je  suis  faible  et  languissant. 

22.  11  appelle  l'avarice  im  culte  profane  sri. f-.r  ,i 
des  idoles,  la  fille  de  l'infidélité,  la  racine  de  dft-.^  >- 
tous  les  maux,  en  ce  que  c'est  elle  qui  pro-  '•,  i-"—!* 
duit  les  haines,  les  larcins,  les  envies,  les 
divorces,  les  inimitiés,  les  troubles,  les  res- 
sentiments, les  injures  et  les  meurti-es  :  ainsi 
celui  qui  a  vaincu  cette  passion,  a  coupé  la 
racine  à  tous  les  désordres  ;  celui,  au  con- 
traire, qui  en  est  esclave,  n'offrira  jiimais  i\ 
Dieu  des  prières  qui  soient  pures.  Job  fut 
l'exemijle  d'un  parfait  détachement  :  quoi- 
qu'il eut  perdu  tout  ce  qu'il  avait,  il  ne  per- 
dit ni  la  paix,  ni  la  tiauquillité  de  son  Ame. 
la  pauvreté  volontaire,  «'tant  un  renonce- 
ment à  tous  les  soins  de  la  terre,  est  en  mê- 
me temps  un  affranchissement  des  inquié- 
tudes de  la  vie.  Aussi  le  pauvre  volontaire 
remet-il  tous  ses  soins  dans  le  sein  de  Dieu  : 
il  reçoit  comme  de  sa  main  ce  qu'il  reçoit 
de  cell«  des  hommes.  Il  n'en  est  pas  de  même 
du  ['auvre  involontaire  :  il  est  au  contraire 

♦  Angufl.,  de  Peccato  origin.,  lili.  Il,  *nii.  .w. 


[vil"  SIÈCLE.]  CHAPITRK  LXIV.  —  SAINT  JEAN  CLIMAQUE,  ETC. 


685 


neuvie- 
^rê,  du 
<-il.d«la 
et  du 
dM 
eî      en 


"ngliètiie 

dos 

-  Gorfjo- 


cloiililcmciiliiKillieui'oiix,  jniisqno  en  ce  mon- 
de il  ne  jouit  de  rien,  cl  iju'en  l'antre  il  sera 
privé  des  biens  de  l'étcrnilë. 

23.  L'insensibilité  dont  parle  saint  Jean 
Climaiinc,  est  un  di'nuit  do  s(!nlinionl  pour 
loulcs  les  choses  saintes,  (pii  se  trouve  dans 
ceux-là  mêmes  qui  l'ont  profession  de  la  vie 
religieuse,  qui  ont  la  liuuière  de  la  foi,  et 
qui  connaissent  uièiue  le  mal  dont  -ils  sont 
altacinés.  Cela  lui  donne  lieu  de  décrire  le 
combat  continuel  qui  esl  entre  l'esprit  et  le 
cœur  de  ces  sortes  de  personnes.  L'esprit 
connaît  ses  devoirs;  le  cœur  les  transgresse. 
L'insensible  donne  des  lc(;ons  de  pénitence, 
et  il  rit  en  les  donnant  ;  il  exhorte  les  autres 
;\  la  douceur,  et  souvent  au  milieu  de  ses 
exhortations  il  se  laisse  aller  Ini-mèmc  à 
l'aigreur  :  s'il  voit  des  personnes  toucliées 
de  douleur,  il  n'en  fait  que  rire  :  s'il  s'appro- 
che de  la  sainte  table,  il  inange  ce  don  du 
ciel  comme  un  pain  commun.  Veiller  beau- 
coup, UK'diler  souvent  les  jugements  éter- 
nels, prier  dans  les  sépulcres  des  morts,  sont 
des  moyens  de  dissiper  cet  endurcissement. 

24.  Le  saint  abbé  donne  deux  leçons  ex- 
cellentes à  ceux  qui  sont  recherchés  par  le 
sommeil  pendant  la  prière  commune,  ou  qui 
y  ont  l'esprit  ordinairement  disirait  :  la  pre- 
mière est  de  considérer  dans  un  vif  senti- 
ment du  cœur,  qu'ils  sont  en  la  présence  de 
Dieu  ;  la  seconde,  de  méditer  sur  chaque 
verset  des  psaumes  que  l'on  chante.  Il  ajoute 
qu'ils  peuvent  aussi  dii'c  quelque  prière  par- 
ticulière,jusqu'àcequel'autre  côté  du  chœur 
ait  achevé  son  verset.  Au  reste,  il  veut  qu'il 
y  ait  un  temps  réglé,  tant  pour  la  prière  que 
pour  le  travail  :  «  Car  c'est,  dit-il,  ce  que 
l'ange  ordonna  expressément,  ainsi  que  le 
témoigne  le  grand  saint  Antoine.  »  Saint 
Athanase  ne  dit  rien  de  celte  apparition  de 
l'ange  dans  la  vie  de  saint  Antoine  :  mais 
Élie  de  Crète  en  parle  dans  son  commen- 
taire sur  cet  endroit  ;  ce  qui  marque  qu'il 
y  avait  là-dessus  quelque  tradition  parmi  les 
Grecs. 

25.  Parmi  les  solitaires,  il  y  en  avait  qui, 
dans  la  veille  du  soir,  adressaient  1  Dieu 
leurs  vœux  et  leurs  supplications,  ayant  les 
mains  étendues  ;  d'autres  qui  se  tenaient  de- 
bout en  chantant  à  sa  louange  des  psaumes 
etdes cantiques;  quelques- unss'appliquaient 
à  lire  les  divines  l^critures  ;  d'autres,  d'un 
esprit   plus    faible,  combattaient  contre   le 

'  D'Audilly,  not.  in  18  grad.,  pag.  589. 


sommeil  parle  tr:ivnil  dos  mains;  [)lusii!urs 
s'pxeiraient  dans  la  médilalioii  de  la  mort, 
s'eil'orçant  d'entrer  par  elle  dans  les  senti- 
ments d'une  véritable  componction.  Saint 
J(!an  Cliuuujuc  dit,  qu'encore  que  les  présents 
lie  ces  diverses  suites  de  personnes  fussent 
d'un  mérite  ditlércnt,  Dieu  les  recevait  tous; 
mais  il  est  d'avis  que  ceux  qui  se  sentent  de 
la  tiédeur  et  de  l'assoupissement  dans  la 
prière,  se  retirent  dans  des  communautés, 
pour  y  chanter  l'otiice  en  compagnie  de  plu- 
sieurs frères,  alin  que  le  respect  et  la  honte 
les  empêchent  de  se  laisser  aller  à  l'assou- 
pissement. 

26.  Ce  qu'il  dit  de  la  timidité  eOémiuéc 
ou  puérile,  regarde  moins  les  religieux  qui 
vivent  en  communauté,  que  les  anachorètes. 
Il  leur  représente  que  ce  n'est  ni  robscurit(! 
des  lieux,  ni  l'horreur  de  la  solitude,  qui 
donne  des  forces  au  démon  pour  nous  trou- 
bler, mais  que  c'est  la  sécheresse  et  la  sté- 
rilité de  notre  âmo  ;  que  c'est  aussi  quelque- 
fois une  conduite  secrète  de  la  Providence 
et  de  la  bonté  de  Dieu,  qui  nous  abandonne 
;\  cette  tentation,  afin  de  nous  apprendre  h 
n'avoir  confiance  qu'en  lui  seul.  Quand  on  a 
coutume  d'être  frappé  de  peur  en  quelques 
lieux  secrets,  il  faut  se  forcer  d'y  aller  même 
durant  la  nuit  :  si  l'on  cède  à  cette  frayeur 
ridicule,  on  la  verra  vieillir  avec  soi. 

27.  Quelques  anciens,  distinguant  la  vaine 
gloire  de  l'orgueil,  comptent  huit  péchés  ca- 
pitaux ;  d'autres,  ne  les  distinguant  pas  l'un 
de  l'autre,  n'en  mettent  que  sept.  Saint  Jean 
Climaque  est  de  ce  dernier  sentiment  :  il 
enseigne  que  la  vaine  gloire  est  le  commen- 
cement de  l'orgueil,  et  que  l'orgueil  est  la 
fin  et  la  consommation  de  la  vaine  gloire. 
Ce  n'est  donc,  a  proprement  parler,  qu'un 
même  vice,  mais  considéré  sous  deux  as- 
pects diiférents  ;  c'est  pourquoi  il  en  fait 
deux  degrés.  Il  définit  la  vainc  gloire  une 
passion  trompeuse,  qui  nous  représente  tout 
autres  que  nous  ne  sommes,  en  faisant  pa- 
raître au-dehors  les  vertus  que  notre  âme  ne 
possède  point  au  dedans,  et  en  cachant  les 
vices  dont  elle  est  le  plus  possédée.  L'or- 
gueil est  une  ostentation  insolente  de  ses 
travaux,  et  une  présomptueuse  confiance  de 
l'homme  en  ses  propres  forces.  Toute  per- 
sonne qui  aime  à  se  produire  au  dehors,  est 
remplie  au  dedans  d'une  secrète  vanité  :  ses 
jeûnes  sont  sans  récompense,  et  ses  prières 
sans  mérite  devant  le  Seigneur,  parce  qu'il 
fait  l'un  et  l'autre  pour  être  loué  des  bom- 


\  inst-et- 
uuiùiiiedot'ré, 
du  la  liiiiidité 
ofTcdi.ucu. 


Viiirl-dcn- 
ziénie  dnpré, 
de    la    vaine 

floiro    el   do 
'orgueil. 


686 


mSTOmE  GÉNKRALE  DES  A 


ViDgi-troi- 
flème  decré, 
de»{ieo5«c«de 

tIaSpLèmc. 


Util,  ir,  10. 


VlD(l-<)a(- 
IHèaie  ùifté^ 
An  h  douceur 

et  de  la  fim- 
VltdU. 


mes.  Celui  qui  s'élève  et  se  glorifie  des  dons 
naturels  qu'il  a  reçus,  comme  de  la  vivacité 
d'esprit,  de  la  facilité  pour  apprendre  les 
sciences,  ne  jouiia  jamais  des  Liens  qui  sonl 
au-dessus  de  la  nature  :  il  en  abuserait  par 
sa  vanité.  On  se  défait  de  la  vaine  gloire  en 
mettant  un  frein  à  sa  langue,  en  se  souhai- 
tant le  mépris  et  les  humiliations,  et  en  se 
portant  a  faire  (levant  les  hommes  ce  qui 
peut  notis  humilier  à  leurs  yeux.  L'orgueil 
ne  nous  empêche  pas  seulement  d'avancer 
dans  la  piété  ;  il  nous  fait  encore  tomber  du 
plus  haut  de  la  vertu.  Pour  vaincre  ce  tyran, 
il  faut  avoir  recours  à  Dieu  :  tous  les  secours 
des  homm_es  sont  inutiles  à  cet  égard. 

28.  <c  Lors  mémtf  qu'on  célèbre  la  sainte 
Messe,  et  dans  celte  heure  terrible  où  le 
plus  grand  de  nos  mystères  s'accomplit  sur 
nos  autels  ,  le  démon  nous  inspire  des  pen- 
sées de  blasphème  contre  Jésus-Christ  et 
contre  cet  auguste  sacritice  '.  Il  est  visible 
que  ces  paroles  d'abomination  et  d'impiété 
viennent  de  cet  esprit  de  ténèbres  :  si 
elles  étaient  de  nous,  comment  pourrions- 
nous  adorer,  ainsi  que  nous  faisons ,  ce 
don  que  nous  recevons  du  Ciel?  Comment 
pourrions-nous  eu  même  temps  le  maudire 
et  le  bénir?  Souvent  il  nous  suggère  des  pen- 
sées semlables  au  milieu  de  nos  prières  : 
il  agit  de  cette  sorte ,  tant  à  l'égard  des 
gens  du  monde ,  que  des  solitaires  et  des 
religieux  ;  mais  ils  ne  doivent  point  s'imagi- 
ner être  coupables  pour  avoir  eu  ces  pensées 
de  blasphème.  Le  Seigneur,  qui  voit  à  nu 
les  plus  secrets  replis  de  nos  âmes ,  sait  que 
ces  pensées  et  ces  paroles,  quoique  dans 
nous,  ne  sont  point  de  nous.  Ne  nous  en 
troublons  doue  point;  méprisons-les,  à  l'imi- 
tation de  notre  Sauveur,  et  disons  avec  lui 
au  démon  :  Retire-toi  de  moi ,  Satan  ;  j'ado- 
rerai mon  Seigneur  et  mon  Dieu,  et  ne  servi- 
rai que  lui  seul.  » 

29.  Par  la  douceur,  saint  Jean  Climaque 
entend  «  lussiette  immobile  de  l'esprit ,  par 
laquelle  il  demeure  toujours  le  mémo .  soit 
dans  les  honneurs,  soit  dans  le  mépris:  elle 
consiste  à  souUVir  avec  une  sainte  insensibi- 
lité les  injures ,  les  injustices,  et  il  prier  pour 
ceux  qui  en  sonl  les  auteurs,  .\u-dessiis  des 
agitations  de  la  colère,  elle  en  rompt  tous  les 


UTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

Ilots,  et  demeure  ferme  sans  en  être  ébranlée: 
elle  est  l'appui  de  la  patience,  l'aide  de  l'obéis- 
sance ,  le  siège  de  la  simplicité ,  c'est-à-dire, 
de  cette  habitude  de  l'âme  qui  la  rend  inca- 
pable de  toute  duplicité.  Cette  simplicité  est 
de  deux  sortes  :  l'une  naturelle,  l'autre  sur- 
naturelle. La  première  nous  donne  seule- 
ment une  aversion  de  tous  les  déguisements 
et  de  tous  les  artifices;  la  seconde  nous  pro- 
cure l'humilité  la  plus  parfaite.  » 

30.  «  Quelques-uns  disent  que  celte  vertu 
consiste  à  s'estimer  le  dernier  de  tous  les 
hommes  ,  et  le  premier  de  tous  les  pécheurs; 
mais  saint  Jean  Climaque  pense  qu'il  vaut 
mieux  délinir  l'humilité,  une  grâce  de  l'âme 
qui  ne  peut  s'exprimer,  et  qui  n'est  connue 
que  de  ceux-là  seuls  qui  la  connaissent  par 
leur  propre  expérience.  Cette  vertu  a  trois 
propriétés  excellentes  :  la  première  est  la 
soulTrance  des  humiliations  ;  la  seconde ,  la 
victoije  sur  la  colèi-e  ;  la  troisième ,  une  dé- 
Banco  de  ses  meilleures  actions ,  jointe  à  la 
confiance  en  la  miséricorde  de  Dieu  et  au 
désir  continuel  de  s'instruire.  L'on  ne  voit 
jamais  ,  dans  ceux  qui  la  possèdent ,  ni  ap- 
paience  de  haine  ,  ni  signe  de  contradiction, 
ni  trace  de  désobéissance,  si  ce  n'est  qu'il 
s'agisse  de  la  foi.  La  charité  et  l'humilité  sont 
deux  compagnes  fidèles  :  taudis  que  l'une 
nous  élève  vers  le  Ciel ,  l'autre  nous  soutient 
de  telle  sorte,  qu'elle  nous  empêche  de 
tomber  lorsque  nous  sommes  élevés.  L'hu- 
milité a  aussi  la  vertu  de  guérir  les  plaies 
les  plus  incurables.  Les  crimes  de  Manassé, 
roi  d'Israël ,  étaient  montés  à  leur  comble  : 
ce  que  tout  l'univers  n'aurait  pu  expier  par 
la  pénitence,  l'humihté  l'expia.  » 

31."  La  discrétion  peut  être  définie  en  gé- 
néral une  lumière  intérieure,  qui  nous  fait 
connaître  avec  certitude  la  volonté  de  Dieu, 
en  tout  temps,  en  tous  lieux  et  en  toutes 
actions.  On  ])eut  encore  la  définir  le  discer- 
nement que  l'homme  spirituel  fait  du  bien 
naturel  et  du  surnaturel ,  du  véritable  bien 
et  du  faux  ,  de  la  vertu  et  du  vice ,  des  bon- 
nes pensées  et  des  mauvaises.  Pour  faire  ce 
discernement,  recourons  à  Dieu,  à  notre 
conscience,  qui  nous  apprendra  de  quel 
coté  la  tentation  se  forme  ,  afin  de  l'éviter  : 
consultons    aussi    ceux    qui   sont   préposés 


V  1.1 

[Ojè".'-  Or: 
4    I  Lun,ilit4, 


Vin    I-.  lit- 
nu»  'Ir.-f.-,  da 

di»f<  1  i.rnjcnt 
dr>  l'i  n»tM, 
de»  Tife*  •! 
doi  TPnus. 


'  Isla  execrantln  blasphemia  inicr  ipsas  sacras 
synaxes  tl  suh  ipsam  horam  qua  tremcnda  mys- 
Uria  Encharistiu'  peragunhir  .  solel  Dominum 
impiis  cogitationibxis  incessere  adeoque  ipsum  sa- 


crificium  impiare...  Si  fada  et  indccora  mentis 
terbii  mca  l'uni,  qunmodo,  dum  cwtrstc  illud  do- 
mum  sunw,  supplex  adoro  ?  Cliiuuc,  Grad.  2J. 


[vu*  SIÈCLE.]       CIIAPITRK  —  LXIV.  —  SAINT  JEAN  CLIMAQUE,  ETC.  «87 

pour  nous  instruire  et  nousdiiiger.  Dieu  est      atlaclië  ;"i  la  terre.  Il  est  cerlain  qu';\  l'ëgarU 


trop  juste  pour  permettre  que  des  âmes  qui, 
avec  uuc  foi  ferme  et  une  sainte  simpiicild , 
se  sont  luinililciiu'nt  soumises  au  conseil  et 
au  jugement  d'aulrui ,  se  trouvent  trompées, 
parce  que,  encore  que  ceux  qu'elles  consul- 
tent soient  dépouivusde  luniièroset  de  pru- 
dence, c'est  Dieu  qui, d'une  manière  invisible, 
parie  par  leur  bouche.  Nous  devons  en  tou- 
tes rencontres  examiner  devant  Dieu  quelle 
est  notre  intention  et  notre  but ,  persuadés 
que  ,  lorsque  nous  agiosons  avec  la  pureté 
d'un  co^ur  dégagé  de  toute  passion ,  et  uni- 


de  ces  deux  sories  de  persomies,  il  n'y  a 
que  deux  demeures  éternelles  après  la  mort, 
le  ciel  pour  les  uns,  l'enfer  pour  les  autres. 
Le  purgatoire  n'est  qu'un  passage  où  les 
âmes  sont  purifiées  de  tous  leurs  pécliés 
avant  le  jour  du  jugement  dernier,  ainsi  que 
l'enseigne  salut  "^  Augustin. 

32.  Après  le  vingt-sixième  degré,  saint 
Jean  Climaque  fait  une  récapitulation  de  tout 
ce  qu'il  avait  dit  dans  les  précédents  ;  puis 
il  vient  au  vingl-seplième  ,  qui  n  pour  titie  : 
Ih(  repos  du  corps  et  de  l'âme.  Il  y  fait  voii', 


quenient  pour  Dieu ,   il  ne  laissera  pas  de     qu'encore  que  la  vie  érémiliquc  soit  plus 

sainte  et  plus  parfaite  en  soi  que  celle   des 
communautés  religieuses  ,  celle-ci  est  néan- 
moins plus  utile  au  commun  des  fidèles, 
l'autre  n'étant  que  pour  ceux   qui   se  sont 
pui'ifiés  de  leurs  passions  par  les  exercices 
laborieux  de  l'obéissance  et  de  la  mortifica- 
tion dans  les  monastères.  Le  repo'.  du  corps 
est,  selon  la  définition  qu'il  en  l'onne,  uu 
état  de  tranquillité  et  de  paix,   o;i  tous  les 
mouvements  et  tous  les  sens  cor;  orels  sont 
assujétis  à  la  raison  j  et  le  repos  de  l'âme, 
un  calme  de  l'esprit  et  une  médil;:tion  tran- 
quille ,  et  qui  est  exempte  de  tout.;  distrac- 
tion :  celui  qui  est  parvenu  h  cette  heureuse 
paix,  n'a  pas  besoin  d'être  instruit  par  des 
discours  ,  étant  assez  éclairé  par  la  lumière 
de  ses  propres  actions,  qui  sout  pins  ellicaces 
que  les  paroles.  Ce  saint  met  cette  dill'érence 
entre  l'état  d'un  anachorète  et  celui  d'un 
religieux,    que  le   premier  a  besoin   d'une 
grande  vigilance  et  d'une  profonde  humilité, 
n'ayant  que  les  anges  pour  le  secourir;  au 
lieu  que  l'autre  peut  être  assisté  par  ceux 
qui  vivent  avec  lui  dans  le  même  monastère. 
Il  rapporte  eusuile  les  divers  motifs  que  l'on 
peut  avoir  de  se  retirer   dans  la   solitude  ; 
puis  il  se  propose  cette  question  sans  la  ré- 
soudre :  Pourquoi  le  monastère  de  Tabeune 
dans  la  Thébaïde,    qui  était  celui  de  saint 
Pacôme,  n'avait  pas  porté  tant  d'hommes 
extraordinaires,  que  celui  de  Scété  ou  des 
Cellules,  qui  était  aussi  en   Egypte.  Sozo- 
mène  *  en  doune  la  véritable  raison,  c'était, 
dit-il,  parce  que  le  désert  de  Scété  n'était 
habité  que   par  des  anachorètes  parvenus 


récompenser  nos  actions,  quoiqu'elles  ne 
soient   pas    tout-à-fait  saintes.    Ne  jugeons 
pas  trop  sévèrement  ceux  que  nous  voyons 
enseigner  de  grandes  vérités,  et  qui  ne  les 
pratiquent  que  faiblement  :  souvent  l'utilité 
de  leurs  discours  récompense  le  défaut  de 
leurs  actions.  »  Saint  Jean  Climaque  dit  que 
personne  ne  doit  s'excuser  de  l'accomplisse- 
ment des  préceptes  de  l'Évangile,  sous  pré- 
teste qu'il  est  impossible  de  les  garder,  puis- 
qu'il s'est  même  trouvé  des  hommes  qui  ont 
fait  plus  qu'il  ne  leur  était  ordonné  par  l'É- 
vangile :  «  témoin,  dit-il,  celui  qui  aima  son 
prochain  plus  que  soi-même,  et  qui  donna  sa 
vie  pour  lui,  quoiqu'il  n'en  eût  point  reçu  de 
commandement  par  ta  loi  de  Jésus-Christ.  » 
On  voit  par  Tertnllien  ',  que  les  chrétiens  de 
son  temps  regardaient  comme  un  précepte 
de  l'Kvangile   de   donner  leur  vie  les  uns 
pour  les  autres,  et  qu'ils  faisaient  consister 
en  cela  l'amour  fraternel  qu'ils  se  devaient 
Tuutuellement  :  mais  ce  n'était  que  leur  vie 
temporelle  *;  car.  à  l'égard  du  salut ,  on  ne 
doit  point  aimer  les  autres  plus   que   soi- 
même  ,  parce  que  nous  ne  devons  rien  pré- 
férer ;\  notre  propre  salut.   Quand  le   saint 
abbé  dit  ensuite  '  qu'il  ne  reste  point  d'au- 
tre lieu  hors  le  ciel  et  la  terre  pour  ceux  qui 
meurent ,  après  s'être  attachés  pendant  leur 
vie  au  ciel  ou  à  la  terre,  son  dessein  n'est 
point  de  combattre  la  doctrine  de  l'Église 
sur  le  purgatoire  ',  mais  seulement  d'oppo- 
ser le  salut  éternel  de  ceux  qui  ont  eu  leur 
cœui'  et  leur  esprit  attaché  au  ciel ,   à  la 
damnation    éternelle  de  ceux  qui  l'ont  eu 

I  TertuU.,  in  Àpolog.,  cap.  xxsix.  • 
s  D'Andilly,  nol.  in  grad.  26,  pag.  604,  605. 
'  Qui  ea  quœ  supra  sunt  sapiunl,  ad  superiora 
ascendunt  ;  qui  vero  sapiunl  quœ  infra  sunt,  ad 
inferiora  descendunl.  Slorluorum  enim  locus  mé- 
dius nuUus  est  reliquus.  Climac,  grad.  26. 


*  D'Andilly,  not.  in  grad.  26,  pag.  615. 

*  Purgatorias  pœnas  nvllus  futurus  opinetur, 
nisi  anle  ultimum  tremendumque  judicium.  Au- 
gust.,  lib.  Il  De  Civil.  Dei,  cap.  xvi. 

«  Sozoïu.,  lib.  Vl;  cap.  xxx. 


Vînj:l.«ep- 
liènio  àtfeit 
(lu  ropo»  du 
cori'., ot do  l'd- 


688 


HISTOIRE  GKNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Vin^t-hiii- 
de  Is  {.iicre. 


au  comble  de  la  vertu  chrétienne  et  reli- 
gieuse; le  monastère  de  s.TinI  Pacônie  était 
au  contraire  composé  de  douze  cents  moines 
et  plus,  dont  apparemment  la  plupart  n'é- 
taient que  des  commençants  dans  la  pratique 
de  la  veilu.  Saint  Jean  Climaque  prescrit 
le  genre  de  vie  que  doit  suivre  un  anacho- 
rète, savoir,  de  se  débarrasser  de  toutes 
atlaires  bonnes  ou  mauvaises  ;  de  prier  sans 
relâche  ;  de  veiller  lelleuieiit  sur  son  cœnr, 
qu'il  soit  inaccessiijle  aux  démons;  de  travail- 
ler des  mains,  surtout  aux  heures  où  la  cha- 
leur provoque  au  sommeil  ;  de  chanter  des 
psaumes,  princii)alenienl  la  nuit;  et  de  lire 
les  Livres"saints  ,  qui  servent  de  lumii're  et 
de  guide  il  ceux  qui  les  lisent  avec  piété  et 
avec  respect. 

33.  11  considère  la  prière  comme  une  fami- 
liarité sainte  et  une  union  sacrée  de  l'âme 
avec  Dieu,  dont  la  propriété  est  de  réconci- 
lier la  créature  avec  le  Créateur;  mais  il 
veut  qu'avant  de  nous  mettre  en  la  présence 
de  Dieu  pour  le  prier,  nous  ayons  soin  de 
purifier  notre  âme  de  tout  ressentiment  des 
injures  que  nous  aurions  reçues,  parce 
qu'autrement  nous  ne  retirerions  aucun 
fruit  de  notre  prière.  «Elle  doit  être  simple, 
sans  fard  et  sans  allcctalion,  puisque  le  publi- 
cain  et  l'enfant  prodit;ue  llécliirenl  la  justice 
et  la  miséricorde  de  Dieu  par  une  seule  pa- 
role. Nous  devons  la  commencer  par  des  ac- 
tions de  grâces  ,  la  continuer  par  une  hum- 
ble confession  de  nos  fautes,  la  unir  en 
exposant  nos  besoins.  Il  ne  faut  pas  user  de 
longs  discours  en  parlant  à  Dieu,  de  crainte 
qu'ils  ne  dissipent  l'attention  de  l'esprit,  qui 
ne  doit  être  attaché  qu'à  la  vue  de  ce  grand 
objet  :  une  seule  parole  pleine  de  foi  sauva 
le  larron.  Lorsqu'on  se  sent  consolé  et  atten- 
dri par  quelque  parole  que  l'on  récite  dans 
la  prière,  on  doit  s'y  arrêter  sans  passer 
outre,  parce  que  c'est  une  marque  assurée 
que  notre  ange  gardien  prie  avec  nous.  Dans 
les  prières  qui  se  font  en  commun  et  en 
public,  il  faut  se  contenter  de  s'humilier  in- 
térieuremenl  ;  mais  ,  si  nous  prions  seuls  et 
sans  témoins  de  nos  actions  qui  nous  puis- 
sent donner  sujet  de  nous  élever  i)ar  leurs 
louanges ,  ne  nous  contentons  pas  de  nous 
humilierau  dedans  do  notre  cœur;  humilions 
aussi  notre  coi'ps,  en  nous  prosternant  à  terre 
pour  otfrir  à  Dieu  nos  vceux.  Dans  les  impar- 
faits, souvent  l'intérieur  se  conforme  a  l'ex- 
térieur. La  foi  donne  des  ailes  h  l'oraison  ; 
sans  elle,  elle  ne  peut  voler  jusque  dans  le 


de  la  |>«ix  dt 


Trfoli*»» 

dpçrr,  ds   la 

toi,  .tf  Ir'ii- 
raoc<>  ri  de  la 
chiillt. 


ciel.  Lorsque  vous  avez  persisté  longtemps 
h  demander  :\  Dieu  quelque  grâce  sans  l'a- 
voir obtenue  ,  ne  dites  pns  que  vous  n'avez 
retiré  aucun  fruit  de  vos  prières  :  c'en  est  un 
grand,  que  d'avoir  prié  avec  assiduité.  Con- 
tinuez de  frapper  à  la  porte.  Celui  qui  de- 
mande avec  persévérance,  reçoit.  Lorsque 
vous  vous  confessez  devant  Dieu ,  n'entrez 
pas  dans  le  détail  de  vos  fautes  corporelles, 
de  peur  que  vous  ne  vous  dressiez  des 
embûches  à  vous-même  par  les  mauvaises 
impressions  que  cet  examen  vous  pourrait 
causer.  » 

34.  La  paix  de  l'esprit  consiste  dans  l'af-  ,i»ii"''d,"î; 
franchissement  des  passions  et  dans  la  pra- 
tique habituelle  de  toutes  les  vertus.  Ainsi 
elle  fait  en  cette  vie  toute  la  perfection  de 
l'âme  Saint  Jean  Climaque  met  pour  le  der- 
nier degré  de  son  Echelle  sainte,  c'est-à-dire, 
pour  le  trentième,  la  foi,  l'espérance  et  la 
charité.  La  foi  peut  tout,  jusqu'aux  choses 
qui  paraissent  impossibles.  L'espérance  ne 
peut  être  confondue,  quand  elle  a  pour  ap- 
pui la  miséricorde  de  Dieu.  La  charité  ne 
s'arrête  point  dans  sa  course,  et  ne  donne 
point  de  repos  à  celui  qui  eu  est  une  fois  pé- 
nétré. Ces  trois  vertus  sont  le  fondement  et 
le  lien  de  toutes  les  vertus  chrétiennes. 

35.  Sa  lettre  au  Pasteurfail,  comme  on  l'a 
déjà  remarqué,  la  seconde  partie  de  son  ou- 
vrage. Elle  renferme  les  instructions  les  plus 
utiles  pour  le  gouvernement  des  âmes  ;  et 
non  content  d'y  enseigner  comment  les  su- 
périeurs doivent  se  conduire  envers  les  re- 
ligieux, il  y  entre  encore  dans  le  détail  des 
qualités  essentielles  à  ceux  à  qui  l'on  veut 
confier  le  soin  des  monastères.  Le  pasteur  à 
qui  elle  s'adresse,  était  l'abbé  de  Raithe, 
celui  qui  avait  engagé  saint  Jean  Climaque  à 
composer  sou  Échelle  sainte,  n  Je  vous  ai 
donné,  lui  dit-il;  le  dernier  lieu  dans  ce  livre 
de  la  terre  ;  mais  je  ne  doute  point  que  Dien 
ne  vous  accorde  la  première  place  au-des- 
sus de  nous  dans  celui  du  ciel,  puisque,  se- 
lon Jésus-Christ,  ceux  qui  sont  les  derniers 
en  cette  vie  par  l'humilité  de  leur  cœur,  se- 
ront les  premiers  en  l'autre  par  l'éminence 
de  leur  ghjirc.  » 

36.  Le  véritable  pasteur  est  celui  qui  peut, 
par  ses  soins  et  par  ses  prières,  remeltredaus 
le  droit  chemin  les  brebis  égarées.  Il  a  be- 
soin pour  cela  d'être  éclairé  de  Dieu,  d'a- 
voir de  l'expérience  dans  la  conduite  des 
âmes,  et  d'être  si  chaste  de  corps  et  d'esprit, 
qu'il  ])uissc  se  passer  du  secours  et  des  re- 


AnB))>r    di 

telle  lettre. 


CHAPITRE  LXIV.  —  SAINT  JEAN  TLIMAOUE. 


[vu"  SIÈCLE.] 

inèdes  des  autres.  Dans  ses  instiuctioiis pu- 
lili(Hi('S,  il  (loil  s(;  jilacrr  diiiis  un  lieu  élève 
pour  se  l'aire  mieux  entendio;  employer  la 
rudesse  des  paroles,  pour  corriger  ceux  (jui 
s'arrêtent  dans  le  cliemin  de  la  vertu  ;  veil- 
ler avec  plus  de  soin  que  jamais  sur  ceux 
ipii  tombent  dans  la  tiédeur  et  le  déconrage- 
uient;  ne  point  quitter  de  vue  ceux  tpio  la 
li'ulalion  expose  au  danger  de  périi-  ;  pleu- 
rer et  gémir  pour  eux  devant  Uicu;  compa- 
tir à  leurs  faiblesses;  s'animer  d'une  sainte 
colère  contre  le  vice,  sans  craindre  d'attris- 
ler  potu'  nu  temps  ceux  qui  en  sont  cou- 
|)al)les.  Il  conseille  aux  su|iérieurs  qui  ont 
peine  de  reprendre  en  face  leui's  inférieurs, 
de  les  avertir  de  se  corriger  en  s'attribuant  à 
eux-mêmes  la  faute  qu'ils  veulent  reprendre 
dans  les  autres;  et  à  ceux  qu'une  certaine 
pudeur  empèclie  de  reprendre  avec  liberté 
ceux  qui  sont  en  faute,  de  le  faire  par  écrit. 
La  manière  de  conduire  ne  doit  pas  être  la 
même  à  l'égaril  de  tous  ceux  qui  viennent 
pour  se  convertir.  S'il  s'en  présente  qui 
soient  accablés  sous  le  poids  de  leurs  pécliés 
et  prêts  à  tomber  dans  le  désespoir,  il  faut 
leur  remettre  devant  les  yeux  la  douceur  du 
joug  de  Jésus-Christ;  et  faire  au  contraire 
remarquer  ù  ceux  qui  sont  pleins  d'estime 
d'eux-mêmes,  que  la  voie  du  ciel  est  rude 
et  étroite.  C'est  pourquoi  il  est  nécessaire 
qu'un  supérieur  s'étudie  à  connaître  parfai- 
tement l'esprit  et  le  cœur  de  ceux  qui  sont 
sous  sa  discipline.  Il  ne  doit  ni  se  rabaisser, 
ni  s'élever  imprudemment,  mais  imiter  la 
sage  discrétion  de  saint  Paul,  qui  tantôt 
s'bumiliait  pour  consoler  et  édifier  les  faibles, 
et  tantôt  s'élevait  pour  confondi'e  et  abattre 
les  superbes. 

37.  Il  y  a  deux  sortes  de  personnes  qui  se 
présentent  en  religion  :  les  uns  sont  chargés 
de  crimes;  les  autres  sont  innocents.  Le 
supérieur  doit  demander  aux  premiers  les 
diverses  espèces  de  fautes  qu'ils  ont  commi- 
ses, et  cela  pour  deux  raisons  :  l'une,  afin 
que  la  confession  de  ces  pécliés  les  rem- 
plisse d'une  si  profonde  humilité,  qu'ils  de- 
meurent toujours  dans  la  modestie  et  la  re- 
tenue d'un  vrai  pénitent;  l'autre,  afin  que, 
se  souvenant  de  combien  de  plaies  ils  étaient 
percés  lorsqu'ils  ont  été  reçus  dans  le  mo- 
nastère, ils  conçoivent  pour  celui  qui  a  tra- 
vaillé avec  eux  à  les  en  guérir,  une  affection 
sincère.  «Prenez  garde,  ajoute  saint  Jean 
Climaque,  ;"i  n'être  pas  trop  exact  et  trop 
sévère  à  reprendi'e  jusqu'aux  moindres  fau- 
XI. 


08!) 


les  :  autrement,  vous  n'imiteriez  pas  la 
bdiilé  de  Dieu,  ([ui  soiill're  en  nous  un  nom- 
bre iulini  de  défauts  cl  d'imperfections. 
Itntmc/,  une  nourriture  plus  solide  il  ceux  qui 
couient  avec  ardeur  dans  la  carrière  de  la 
vie  spirituelle;  mais  ne  nourrissez  i{uo.  de 
lait  ceux  qui  y  marchent  plus  lentement, 
ayant  moins  de  courage  et  de  vertu  :  une 
nourriture  trop  forte  les  jetterait  dans  la 
hinyneur.  » 

38.  Il  est  de  la  prudence  du  supérieur  d'ob- 
server ceux  qui  le  contredisent  et  lui  résis- 
tent avec  audace,  et  de  les  reprendre  avec 
des  |)a rôles  dures  en  pi'ésence  de  quel(|ues 
personnes  élevées  en  dignité,  afin  de  donner 
de  la  terreur  aux  autres.  Il  doit  user  de  cette 
sévérité,  quand  même  les  religieux  seraient 
vivement  piques  de  cette  humiliation;  puis- 
que le  bien  et  la  guérison  de  plusieurs  sont 
préférables  ;'i  la  peine  et  h  la  douleur  d'un 
seul.  Parmi  ceux  qui  se  chargent  de  la  con- 
duite des  autres,  il  y  en  a  qui,  In-ùlant  de 
charité  pour  leur  prochain,    entreprennent 
au-delà  de  ce  qu'ils  peuvent  ;  d'autres  qui, 
manquant   d'amour  pour   leurs  frères,    ne 
s'engagent  qu'à  regret  et  comme  par  force 
à  les  conduire,  quoiqu'ils  en  aient  reçu  de 
Dieu  la  grâce  et  les  lumières.  Saint  Jean 
Climaque  loue  les  premiers,  et  blâme  les  se- 
conds :  ceux-là  ,  pour  leur  charité;  ceux-ci, 
parce   qu'ils   en    manquent;  mais    il    croit 
qu'un  pasteur  peut  se  dispenser  de  faire  un 
bien  pour  un  plus  grand  bien,  comme  serait 
de  fuir  le  martyre,  non  par  crainte  ni  par 
lâcheté,  mais  pour  l'utilité  de  son  troupeau. 
Il  est  d'avis  qu'un  supérieur  reçoive  sous  sa 
conduite  tous  ceux  qui  se  présentent  au  mo- 
nastère, pourvu  qu'il  prenne  tout  le  temps  el 
les  mesures  nécessaires  pour  éprouver  la 
vocation  de  chacun  ;  qu'il  témoigne  plus  de 
douceur  et  de  charité  qu'auparavant  à  ceux 
de  ses  religieux  qui  se  seront  confessés  à  lui, 
et  qu'il  prenne  plus  de  soin  de  leur  conduite, 
parce  que  c'est  un  moyen  d'augmenter  leur 
confiance;  qu'il  supporte  avec  patience  les 
imperfections   de  ceux   qu'il  conduit,  mais 
qu'il  ne    sonU're  jamais  qu'ils  désobéissent 
formellement  à  ses  ordres.  Il  continue  :  «Le 
plus  agréable  de  tous  les  présents  que  l'on 
puisse  offrir  à  Dieu  est  de  lui  consacrer  des 
âmes  par  la  pénitence.  Tout  l'univers  n'est 
pas  comparable  à  une  seule  àme,  puisque 
l'univers,  étant  corruptible,  passera,  et  que 
les   âmes,    étant  immortelles,    subsisteront 
éternellement.  Mais,  pour  secourir  et  soula- 

44 


G'JO 


HISTOIRE  GKNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Jd^freenl 
de  l'ootrape 
dtS.JeioLli- 
fnaque.  Com- 
inenlt  res  do 
l'aliU  de  n>I- 
Ibe  et  d'Eue 
de  Ciite  oo 
f^odie.  Edi* 
lier*,  cl  Irt- 
diiciiOQS. 


gerccux  que  nous  avons  entrepris  de  faire 
enli-cr  dans  le  Saint  de?  Saints,  c'csl-:\-dirc, 
dans  le  calme  des  passions  cl  dans  la  paix 
intérieure  de  l'âme,  nous  avons  besoin  de  la 
grâce  du  Ciel.  »  Il  finit  sa  lettre  parle  détail 
de  la  conduite  qu'un  excellent  supérieur  de 
monastère,  qu'il  appelle  le  père  des  pères  et 
le  docteur  des  docteurs,  observait  â  l'égard 
de  ses  religieux. 

.39.  '«  Cet  homme  admirable  avait  coutume, 
dit-il,  après  les  prières  du  soir,  de  se  placer 
avecgravité  sur  son  siège,  qui  au  debors 
n'était  qu'un  entrelacement  de  brandies  d'o- 
sier ,  mais  qui  était  au  dedans  et  selon 
l'homme  intérieur  ur^ assemblage  et  un  mé- 
lange de  toutes  les  vertus.  Tous  ses  religieux 
environnaient  sa  cbaire,  et  écoutaient  ses 
paroles  comme  les  paroles  de  Dieu  môme. 
Alors  il  ordonnait  à  l'un  de  réciter  cinquante 
psaumes  avant  de  se  coucher;  à  l'autre  d'en 
réciter  trente,  h  l'autre  cent,  à  un  autre  de 
faire  autant  de  génutlexions,  à  un  autre  de 
dormir  assis.  Il  commandait  à  un  de  lire,  et 
â  un  autre  de  faire  oraison  durant  un  cer- 
tain espace  de  temps  qu'il  limitait.  Il  établis- 
sait deux  d'entre  eux  pour  veiller  sur  les  ac- 
tions des  autres,  et  pour  observer  durant  le 
jour  ceux  qui  causaient  ensemble,  ouqui  de- 
meuraient oisifs,  pour  les  faire  souvenir  de 
leur  devoir,  et  durant  la  nuit,  ceux  qui  fe- 
raient des  veilles  irrégulicres  et  indiscrètes, 
pour  y  mettre  ordre.  Ses  soins  s'étendaient 
jusqu'à  régler  la  nourriture  que  chacun  de- 
vait prendre.  Car  elle  n'était  pas  la  même 
pour  tous,  mais dill'ércnte  selon  la  dittérencc 
de  l'état  de  chaque  religieux.  Il  faisait  don- 
ner aux  uns  une  nourriture  plus  forte  comme 
ayant  le  corps  plus  faible,  et  aux  autres  une 
j)ius  faible  comme  ayant  h'  corps  plus  vigou- 
reux. Tousexécutaient  ponctuellement  ses  or- 
dres, sans  qu'on  entendit  le  moindre  murmu- 
re. 11  avait  sous  lui  une  laure,  c'est-à-dire,  un 
certain  nombre  de  cellules  qui  étaient  dansles 
déserts  et  éloignées  les  unes  des  autres,  où  il 
envoyait  de  son  monastère  ceux  de  se*  reli- 
gieux qui  étaient  parvenus  à  une  vertu  assez 
sublime  pour  vivre  saintement  dans  la  soli- 
tude. » 

40.  Tel  est  en  substance  l'ouvrage  de  saint 
JeanClimaque,  qui  l'a  rendu  si  fameux  dans 
l'Église,  princii)alement  dans  les  commu- 
nautésoù  l'on  fait  profession  de  pratiquer  ce 
que  les  conseils  évangéliques  ont  de  plus 
parfait.  En  mémo  temps  que  ce  saint  abbé 
y  prescrit  aux  autres  le  vrai  chemin  d'arri- 


ver à  la  perfection,  il  laisse  échapper  cer- 
tains traits  de  sa  vie  qui  font  voir  qu'il  était 
lui-même  un  modèle  de  sagesse  et  de  sain- 
teté. Il  est  quelquefois  obscur  dans  ses  in- 
structions ;  ce  qui  vient  de  ce  qu'il  ne  leur 
donne  pas  assez  d'étendue,  et  qu'ayant  l'es- 
prit subtil,  quoique  grave  et  solide,  il  abonde 
en  pensées  plus  qu'en  paroles.  Il  faut  ajou- 
ter qu'il  ne  lie  pas  ses  raisonnements  avec 
ce  qui  suit,  négligeant  un  encbaînement  qui 
le  rendrait  plus  clair  et  plus  intelligible;  et 
qu'il   parle  ordinaiiement  par  aphorismes, 
c'est-à-dire,  par  sentences  qui  portent  un 
grand  sens  en  peu  de  mots.   C'est  ce  qui 
obligea  Jean,  abbé  de  Ilaïibe,  à  la  prière  de 
qui  il  avait  composé  son  ouvrage,  d'en  expli- 
quer les  endroits  les  plus  obscurs,  atin  qu'ils 
fussent  intelligibles  aux  personnes  plus  spi- 
rituelles  que   savantes.   Environ    cent   cin- 
quante ans  après,   Elie,  métropolitain  de 
Crète  ou  de  Candie,  fit  encore  un  commen- 
taire sur  VEchelle  sainte  de  saint  Jean  Cli- 
maque,  comme   il  en  avait  fait  un  sur  les 
œuvres  de  saint  Grégoire   de  Nazianze.  Ce 
commentaire,  qui  est  extrêmement  diffus, 
et  divisé  en  trois  volumes ,  n'a  pas  encore 
été  donné  au  public  ;  mais  on  le  trouve  en 
manuscrit  daus  les  bibliothèques  de  Rome, 
de  Venise  et  de  Paris.  Celui  de  l'abbé  de 
Raïtbe  a  été  imprimé  eu  latin  dans  les  Bi- 
bliothèques des  Pères  de  Paris,  de  Cologne 
et  de  Lyon.  Il  y  a  eu  d'autres  commenta- 
teurs de  l'ouvrage  de  saint  Jean  Climaque, 
dont   quelques-uns   sont   anonymes,    mais 
postérieurs  à  Elie  de  Crète.  Lambécius  '  en 
cite  un  d'un  moine  nommé  Iliérothéc;  De- 
nis le  Chartreux  fit  quelques  paraphrases  sur 
le  môme  livre,  qui  ont  été  imprimées,  avec 
celles  qu'il  avait  faites  sur  quelques  écrits 
de  Cassien,  à  Cologne,  en  l.'i'tO,  in-fol.  Sur  la 
fin  du  XVI'  siècle,  un  docteur  tlamand,  nom- 
mé Isscltius,  donna  des  éclaircissements  à  la 
fin  de  chaque  degré  dans  la  version  latine 
d'Ambroise  Camaldule,  qu'il  fit  réimprimer 
à  Cologne,  en  iols3.  Il  y  on  eut  d'autres  édi- 
tiousen  la  même  ville,  en  lîi'J.l,  1007  et  1624, 
in-8,  avec  le  Pré  spirituel  de  Siipluone,  et 
les  deux  livres  des  Miracles  de  Pieri'c  le  Vé- 
nérable. Avant  l'édition  latine  d'Ambroise 
Camaldule,  à  Venise,  en  1531, 15G9,  et  à  Co- 
logne, en  1583  et  1G24,  il  y  en  avait  eu  une 
aussi  en  latin  à  Venise  chez  Pinrius,  en  1318, 
in-8,  à  laquelle  le  Irailucleur  ne  mit  pas  son 

'  Lambcciiis  Bibliolk.  Vindoboiu,  i>ag.  192. 


1 


CHAPITRE  LXIV.  —  SAINT  JEAN  CLIMAQUE. 


[vu' SIÈCLE.] 

nom.  En  1C33,  Matlliicu  Hadérus  fit  impri- 
mer chez  Cramoisi  les  œuvres  de  saint  Jean 
Climaqiic  en  grec  cl  en  lalin,  a]irôs  les  avoir 
rennes  sur  un  grand  nomln'o  de  manuscrits. 
C'est  celle  ddilion  que  l'on  a  suivie  dans  la 
lJil)liotlu''quc  des  Pères  à  Lyon,  en  1G77,  où 
l'EcIielle  sainte  se  trouve  avec  des  scliolies 
ou  notes  Urées  on  partie  d'un  anonyme,  eu 
jiarlie  des  commeulaires  d'Klie  de  Crî'le,  et 
de  (]uelques  autres  anciens.  On  y  a  insc'ré 
aussi  les  explications  de  l'ablu'  de  Raïllie, 
avec  sa  lettre  à  saiiit  Jcau  Climaque,  et  la 
réponse  que  lui  fil  cet  abbé.  Mais  ces  expli- 
cations ne  sont  point  de  la  traduction  de 
RIalliieu  Radérus,  qui  no  put  en  entrepren- 
dre une  nouvelle,  fautede  manuscrits  grecs. 
C'est  lamûme  qui  avait  paru  à  Paris  en  IGIO , 
et  dans  les  anciennes  Bibliothèques  des  Pè- 
res. 

[Le  tome  LXXXVIII  de  la  Patrologie  grec- 
que, col.  631-1210,  contient  V Echelle  du  Pa- 
radis et  la  Lettre  nu  Pasteur,  d'après  l'édition 
de  Cramoisi  de  1G33.  Une  notice  du  Père 
I.abbc  sur  saint  Jean  Climaque  précède  ces 
ouvrages.] 

Nous  avons  plusieurs  éditions  de  saint 
Jean  Climaque  eu  d'autres  langues,  savoir, 
une  italienne,  imprimée  à  Venise,  chez  Ma- 
rinelle,  en  1585  ;  une  en  grec  vulgaire,  par 
les  soins  de  Margunius,  évêque  de  Cythère, 
mise  sous  presse  en  la  même  ville,  en  1590  ; 
une  espagnole  ;Y  Tolède  en  1504,  et  à  Sala- 
manqucen  1571,  celle-ci  est  de  la -traduc- 
tion de  Louis  de  Grenade  ;  une  française, 
dont  on  est  redevable  h  M.  Arnaud  d'An- 
dilly.  Elle  vit  le  jour  pour  la  première  fois  à 
Paris,  en  1654,  in-12.  Mais  ayant  trouvé  de- 
puis divers  manuscrits  grecs,  tant  des  œu- 
vres de  saint  Jean  Climaque  que  d'Elie  de 
Crète,  son  commentateur,    il  retoucha  sa 


cm 


première  édition  sur  ces  originaux,  et  eu 
donna  une  nouvelle  édition,  en  1661,  in-12, 
ciiez  Pierre  le  Petit,  avec  une  nouvelle  Vie 
de  ce  saint  aldié,  tirée  de  ses  écrits  et  de 
celle  qu'en  adonnée  le  moine  Daniel, auteur 
contemporain;  et  d'amples  éclaircissements 
sur  chaque  degré  de  l'Echelle  sainte.  On  lui 
a  itonn('  place  avec  les  mêmes  éclaircisse- 
ments dans  le  recueil  des  onivres  diverses  de 
M.  d'Andilly,  à  Paris,  chez  le  même  impri- 
meur, en  1675,  in-fol. 

[La  version  «jui  parut  îiOttobure,  en  178i, 
in-8,  est  moins  une  version  proprement  dite, 
qu'un  compendium  qui  rend  le  vrai  sens  du 
livre  plus  brièvement  et  plus  clairement,  et 
avec  une  grande  liberté.] 

41.  On  peut  remarquer  dans  le  Commen- 
taire de  l'abbé  de  Raïtlie  la  définition  qu'il 
donne  de  la  conscience,  qu'il  ne  distinguo . 
pas  de  la  loi  naturelle.  Elle  est  seltin  lui  ' 
une  étincelle  de  la  lumière  divine  accordée 
h  l'homme,  et  comme  semée  dans  lui  dès  le 
moment  de  sa  création,  qui  lui  fait  connaître 
le  bien  et  le  mal.  Il  regarde  comme  divin  ^le 
précepte  de  confesser  ses  péchés  aux  prêtres 
pour  en  recevoir  l'absolution,  et  prouve  son 
sentiment  par  les  traditions  des  apôtres 
et  par  les  régies  qu'ils  ont  établies  dans  l'É- 
glise catholique  sur  ce  sujet.  «Dieu,  ajoute-t- 
il,  n'a  pas  fait  l'homme  afin  qu'il  pérît ,  mais 
afin  qu'il  se  sauvât  en  servant  son  Créateur. 
C'est  pour  cela  que  les  vocations  des  hommes 
sont  différentes,  et  que  les  grâces  dont  Dieu 
les  favorise  ne  sont  pas  les  mêmes.  L'un  ai- 
me à  exercer  l'hospitalité  ;  l'autre,  à  vivre 
dans  le  repos  et  dans  la  retraite  ;  celui-ci 
console  et  exhorte  les  affligés  ;  celui-là  met 
un  frein  à  sa  langue  et  vit  dans  le  silence.  Il 
y  en  a  qui  ne  mangent  qu'une  fois  la  semai- 
ne ;  d'autres  qui  mangent  tous  les  jours.'»  Il 


Remarques 
sur  le  com- 
Hipnlaire  d« 
Inliliédo  Hiï- 
the. 


'  Conscienlia  est  scintilla  diviin  luminis  in  ho- 
mine  comlilo  suhseminnta  a  principio...  ostendens 
ei  bonum  et  malum,  et  hœc  conscientia  vocalur 
lex  naturalis.  Joau.  de  Raïtha,  in  Climac,  pag. 
510. 

s  Quia  confiteri  simpliciter  pecc.ata  tenemur  ex 
nccessitale  divini  mandnli,  patet  ex  apostolicis 
lrndilioiiH)US  cl  regiUis  ab  vis  propositif:  Eccle- 
sia-catholicœper  Spirilum - Sanctum ,  quorum  ca- 
noncset  inslilula  tcnenles.Vci  saeerdotibus,  juxta 
eorum  prœceplum,  peccnla  conftlentes  indulgen- 
tiam  et  remissionem  accipere  efficimur  digni. 
Ibid.,  pag.  311. 

'  Est  igitur  aposlolica  tradilio  de  divisione  et 
ordinatione  poenilcnliuin,  purgandorum  et  cale- 
chumenorum.  Sunl   vero  panilenlium   quinque 


loci  :  locus  Plorantium,  cum  pœnitens  slat  extra 
ambitum  Ecclesiœ,  et  procidiris  cum  fletu,  ab  in- 
gredienlibus  postulat  orationem,  aille  ipsorum 
pedes  proslralus.  Locus  qui  dicitur  Àudientium, 
ante  portas  quœ  basilicœ  dicunlur,  ad  audiendum 
ofjlcium  dirinum,  ubi  pœuitcntes  ditinum  offl- 
cium  nudiunl.  Subsequeslralio,  quœ  est  statio 
ecclesiœ ,  inlra  amhilum  ccclesia^  in  posteriori 
parle  nmbonis.  IJnde  et  qui  ibi  est,  in  exclama- 
tione  quœ  fit  ad  cgressuros,  et  ipse  cum  cis  egre- 
dilur  Consislorium,  ibique  slatuilur,  qui  us- 
qiie  ad  complemenlum  sacri  mysterii  persererat. 
Statio  vero,  cum  fidelibus  fit  participatio  rivifici 
panis  et  communicatio,  et  libalio  calicis  Domini. 
Ibid.,  pag.  513,  oU, 


692 


HISTOIRE  GKNKHALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


rapporte  aux  apôtres  l'établissement  des  di- 
vei-s  de^rrés  de  pénitence.  11  y  avait  un  lien 
destiné  pour  chacun.  Le  premier  (-tait  le  lieu 
des  pleurants.  Prosternés  hors  de  l'église 
aux  pieds  de  tous  ceux  qui  y  entraient,  ils 
imploraient  le  secours  de  leurs  prières.  Le  se- 
cond était  le  lieu  des  auditeurs  :  c'était  devant 
la  porte  de  lé^jUse  ;  là,  ils  entendaient  réci- 
ter l'ollice  divin.  Le  troisième,  se  nommait 
la  sjiqucstration  :  il  ••lait  dans  l'enceinte  de 
l'église,  mais  derrièie  i'auihon  ou  tribune, 
en  sorte  que  les  pénitents  étaient  séparés 
des  fidèles.  Aussi  ces  séquestrés  sortaient 
de  l'éirlise  avant  l'ollertoirc  avec  tous  ceux 
il  qui  le  diacre  criaiUà  baule  voix  de  sortir. 
Le  quatrième  était  appelé  consistoire,  et  on 


appelait  consistants  ceux  qui  y  étaient  feu 
pénitence,  parce  qu'ils  priaient  debout  :  il§ 
ne  sortaient  point  île  l'cglise,  que  l'oblation 
du  sacriGce  ue  fut  achevée.  On  donnait  au 
cinquième  endroit  le  nom  de  station  :  les 
pénitents  réconciliés  s'y  trouvaient  avec  les 
fidèles ,  el  participaient  avec  eux  au  corps 
cl  au  sang  de  Jésus-Christ.  De  la  manière 
dont  l'abbé  de  Raïthe  parle  de  ces  degrés  de 
jiénilence,  il  parait  qu  lis  étaient  encore  en 
usage  de  son  temps  dans  l'Kglise  grecque, 
c'est-à-dire,  dans  le  septième  siècle.  [Le 
Commentaire  de  l'abbé  de  Raïthe  est  re- 
produit au  tome  LXXXVIII  de  la  Patroloijie 
grecque,  col.  1:211-1248.  ] 


CIIAPITUE   LXV. 

lAgathias  poëte  et  historien  grec  [5901  ,J  Auremond  abbé  da  Maire  [vers 

l'ao  625J,  Sonaace  évêque  de  Reims,  Florent  prêtre  de 

l'église  de  Trois-Châteanx. 


Ae.tM..s  1.  [Agalhias,  poëte  et  historien,  né  à  My- 
î,?"  "comî:  rine,  ville  Eolienne  de  l'Asie,  vint  à  Coiislan- 
SrProeoK."  tinople,  où  il  s'attacha  ;\  la  profession  du  bar- 
reau. Il  a  continué  Y  Histoire  de  Procopc  de 
Césarée,  depuis  l'an  332  jusqu'à  l'an  ooO  de 
notre  ère.  Cette  histoire,  eu  c\\v{  livres,  a 
été  publiée ,  pour  la  première  fois ,  par 
Bon.  Vulcanius,  Leyde,  lal)i,  in-4°  ;  il  fit 
imprimer,  lu  même  année,  sa  traduction  la- 
tine et  ses  notes,  également  iu-4°.  Ou  a 
réimprimé  le  tout  auLouvrc,en  KjtiO,  in-fol., 
pour  faire  suite  à  la  Bysantine.  C.  F.  Nie- 
biihr  a  revu  le  texte  grec  sur  deux  manus- 
crits et  sur  les  dill'érentes  éditions,  et  l'a 
publié  ù  Bonn,  en  IS.'iS,  avec  la  version  la- 
tine et  les  annotations  de  Vulcanius.  Le  tome 
LXXXVIII  de  la  l'alrolnf/ie  grecque,  col.  1249, 
a  reproduit  celle  ('■dition.  L'ouvrage  a  été 
traduit  en  français  par  le  président  Cousiu, 
dans  le  tome  H  de  sou  J/isluire  de  Consfan- 
tiiiopli'.  Agalhias  avait  fait  un  Recueil  des 
épigrammalistes  grecs  qui  avaient  écrit  de- 
puis Auguste,  pour  faire  suite  aux  Antholo- 


gies précédentes.  Ce  recueil  ne  nous  est  pas 
parvenu,  mais  il  se  trouve  en  grande  partie 
dans  les  .\nlhologies  de  l'ianudc  et  de  Con- 
stantin Cephalas. 

Il  nous  reste  d'Agalliias  un  assez  grand 
nombre  d'épigrammes,  recueillies  par  Briinck 
dans  le  troisième  volume  de  ses  Analecta  : 
ses  vers  valent  mieux  que  sa  prose  ;  sa  dic- 
tion est  prolixe ,  peu  naturelle,  et  remplie 
do  termes  uniquement  consacrés  à  la  poé- 
sie. 11  est  encore  plus  difficile  de  lui  pardon- 
ner son  peu  de  jugement  et  sa  légèreté  d'es- 
prit. L'envie  d'étaler  toute  son  érudition 
l'enlrainc  toujours  hois  de  son  sujet.  11  n'a- 
vait aucune  idée  de  la  manière  d'écrire  l'his- 
toire ;  on  trouve  toutefois  dans  son  ouvrage 
des  choses  curieuses  et  exactes  '.  Il  parait 
plus  versé  dans  la  connaissance  des  choses 
de  l'Orient  que  dans  celle  de  l'Italie.  Nie- 
bulir  le  met  bien  au-dessus  de  Procope , 
pour  les  qualit('s  pei-sonnelles,  tout  eu  le  re- 
connaissant bien  inférieur  pour  le  génie  civil 
et  la  prudence  militaire  '.J 


'  Exlrail  l'U  partie  ili"  la /ii'o!/ra;i/iic  i'nitcrselle      bris  hisloriaruni,   ùdil,  iligm'.    luin.    I.NWVIII, 
de  Mi.li.ni(l,arlirl.;  Agatliiaii.  (/.'cVii/ewr.)  col,  1-255.  {L'éditeur.) 

«  Voyez  De  VUa  Agalhiœ  Myrinwi.  n 


usque  ti- 


[Vir  SIl'xi.E.l 


CHAPirnE  LXV.  —  AnATITIAS.  snXNACE,  ETC. 


693 


Aiitjmond       2.  (In  u':\  noinl  d'autre  raison  do  moltio 
■  .tni  jiinicn.    Aurciiioiul    ail  rai)';  dos  i.'Oi'i vains  occlcsias- 
ticjuos,  (|iio  paico  ([ii'on  lo  iniil  autour  d'une 
Vie  de  saint  Junion,  premier  al)bé  du  mo- 
nasli^'ie  do  Maire,  mort  vers  l'an  587.  Ulfin 
Booco,  qui  on  écrivit  une  du  mônic  saint, 
sous  le  rôfçne  de  Louis-le-l)(''l)onnaiie,  dans 
le  i.V  siècle,  mar([iie  eu  cllct  tros-cUiireuKint 
qu'il  avait  été  guidé  dans  sa  narration  par 
les  méuioiros  d'Aui  ;'inond.   «  Suint  Jiinicn'' , 
ilil-il,  .s't'.twj'rt  nirr  (an/  d'assididlé  et  <k' am- 
sfance  dans  la  pratique  des  commandements  de 
Dieu,  et  commença  à  se  ixmdre  si  reeommanda- 
lilc  par  ses  vertus,  que,  rempli  de  temps  en  temps 
de  l'esprit  de  prophétie,  il  voyait  les  choses  dont 
il  était  éloif/né,  et  prédisait  l'avenir.  J'en  raji- 
porterai  quelques   eremples,    ceux-là   surtout 
qu'Aurémond,  son  /i/s  spirituel,  son  compagnon 
inséparahle,  son  ministre  et  S07i  disciple,  trans- 
mit à  la  postérité  dejiuis  la  mort  de  ce  saint 
homme.  »   Booce  ajoute  :  «  Plusieurs  de  ses 
miracles  sont  parvenus  à  notre  connaissance,  par 
le  récit  qu'en  a  fait  Aurémond ,  qui  a    vécu 
longtemps  après  lui,  et  qui  gouverna  d'une  ma- 
nière irrépréhensible  le  troupeau  confié  à  ses 
soins,»  c'est-à-diro  lo  monastère  do  Maire, 
dont  il  fut  fait  abbé  iinmédialomont  apios  la 
mort  de  saint  Junion.  Il  faudrait,  ce  semble, 
faire  violence  aux  termes  de  Booce,  pour  les 
expliquer  d'une  tradition  orale  dont  Auré- 
mond aurait  été  le  principe.  Aussi  tous  ceux 
qui  les  ont  examinés  les  ont  pris  à  laletho.et 
entendus  d'une  Vie  faite  par  Aurémond,  et  où 
Booccav.iit  puisé  pour  composer  la  sionne.  Il 
nous  apprend''  que  saint. 1  union  le  baptisa  el 
fut  en  même  temps  sou  parrain  ,  et  qu'il  lui 
donna  dans  le  baptême  le  nom  d'Aurémond, 
parce  qu'ayant  trouvé  sa  mère  réduite  à  une 
l'xîrème  nécessité  lorsqu'elle  était  enceinte 
de  lui,  il  lui  avait  donné  uuo  pièce  d'or  pour 
la  soulager  elle-même,  et  fournir  aux  besoins 
de  son  enfant,  qu'il  prit  soin  de  son  éduca- 
tion, le  fil  élever  au  sacerdoce,  et  partagea 
avec  lui  le  gouvcnioment  do  sou  monastère. 
Il  ne  nous  reste  rien  de  l'écrit  d'Aurémond 
que  ce  que  l'on  eu  trouve  dans  celui  d'UlIln 
Boëce.  Ce  qu'il  dit,  que  saint  .lunien  baptisa 


et  leva  des  fonts  de  baptôino  Aurémond,  est 

roinan[ual)lo.  Saint  Homi  \  arcliovéïpio  do 
Iteiiiis,  eu  usa  ilo  minno  à  l'i'gard  de  (Jlovis, 
comme  on  le  lit  dans  le  testament  de  ce  salut. 
Or.  lit  aussi  dans  la  Vie  de  l'abbé  Sidoliis, 
qu'il  tint  sur  les  fonts  do  bapléino  un  enfant. 
Mais  lo  promior  concile  d'Aiixerre,  vers  l'an 
580,  défendit  par  sou  vingt-cinquième  canon 
aux  abbés  et  aux  moines  d'être  parrains.  On 
met  la  mort  d'Aurémond  vers  l'an  02."").  Le 
monastère  de  M;iiré,  dont  il  fut  abbé  depuis 
l'an  587,  a  été  transféré  depuis  sa  mort  à 
Noaillé,  ;'i  deux  lieues  de  Poitiers. 

3.  Sonnace  faisait  les  fonctions  d'arcbi- 
diacre  dans  l'église  de  Reims,  lorsque  Ro- 
mulfo,  qui  eu  élait  évoque,  l'envoya  à  Cliil- 
debert  II  "'  pour  en  obtenir  la  restitution  de 
quelques  terres,  et  la  confirmation  de  son 
testament.  Ce  prélat  étant  mort  sur  la  lin  du 
sixième  siècle,  Sonnace  fut  élu  pour  lui  suc- 
céder. Il  gouvernait  encore  cette  église  eu 
C2."î,  puisqu'il  présida  à  un  concile  qui  se 
tint  à  Reims  cette  année-là.  Mais  on  doute 
que  son  épisco[)at  ail  duré  jusqu'au  règne  de 
Dagobert,  qui  commença  en  628.  Du  moins 
est-il  certain  que  Leudégisile  gouvernail  l'é- 
glise de  Reims  dans  le  temps  que  Dagobert  l^' 
régnait  on  France,  el  il  y  régna  jusques  vers 
l'an  637  ou  638.  Nous  avons  sous  le  nom  de 
Sonnace,  dans  les  collections  des  conciles 
et  dans  la  Bihlioth'eque  des  Pères,  des  statuts 
divisés  en  vingt-et-un  articles,  sur  l'admi- 
nistration des  sacrements  et  la  conduite  des 
ecclésiastiques.  Il  n'est  rien  dit  de  ces  statuts 
dans  Flodoard,  qui  toutefois  a  rapporté  les 
canons  du  concile  tenu  à  Reims  sous  l'épi- 
scopat  de  Sonnace,  et  a  donné  le  précis  de 
son  testament  ".  N'était-il  pas  naturel  que, 
faisîiut  l'iiistoire  de  cette  église,  il  y  insérât 
des  lèglouiciils  qui,  en  un  sens,  l'intéres- 
saient plus  que  ceux  que  le  concile  avait 
faits  pour  les  églises  de  France  en  général? 
On  convi(  nt  qiio  Flodoard  a  omis  plusieurs 
pièces  qui  auraient  pu  trouver  place  dans  son 
histoire;  mais  elles  étaient  ou  moins  con- 
nues, ou  moins  intéressantes  que  celle-ci, 
qui  devait  se  trouver  entre  les  mains  d'un 


Sonoaco, 
éTËquu  de 
Rotais.  Su- 
luts  qui  por. 
tunt  son  aein. 


1  MabiUon.,  Act.  Ord.  S.  Beneclkti,  Unn.  I,  pag. 
29G;  ûiuii.  12  et  II.  liulteau.  Ilist.  occid.,  tom.  I, 
pag.  2:n. 

-  Vila  S.  Juniuni,  tom.  I  Act.  Ord  S.  Bcnedicti, 
pag.  20(1,  muii.  12  pt  14. 

'  Al  iibi  euin  ad  trititcm  pHcrilem  perdnxil, 
conspeclilnis  sancti  firi  obliilit,  qui  secuiidum 
Sakaloris  nostri  prœceplumsacris  fonlibus  eum 


propriis  manibus  initiavit.  Ipse  enim  de  sacro 
sancto  baptismale  suscepit,  el  filiuin  spirilalem 
adcjilus  est.  Aununmuvdum  vocavit,  ea  videliccl 
ex  causa,  qnasi  aura  einplum  quia  aurum  ma- 
tri  dederat  imde  ipsnin  fUiuiii  entUrirel.  Ibid., 
mim.  3. 

'•  .Mabillon.,  uol.  in  hune  Incwu. 

5  l''liji.l(iard.,  lib.  Il,  liip.  iv,  v.  —  «  Ibid.,  cap.  V. 


C94 


HISTOIRE  GÉ.NKllALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


C«  qu'il  va 
d«  r«<iiirqut- 
I*l9  daos  CCS 
«titulî. 


grand  luunhre  de  personnes,  puisqu'elle  re- 
gardai! tout  le  diocèse  de  Heiius  ;  du  moins 
devail-elle  cire  dans  les  archives  de  l'église 
de  Keiius,  cl  conséquemmenl  à  la  portc'e  de 
Flodoard,  puisqu'il  en  élait  le  gardien.  Le 
dénomhreuieut  que  l'on  fait,  dans  le  ving- 
tième slalul,  des  jours  que  l'on  devait  fclcr 
pendant  l'année  avec  cessation  de  palais, 
est  une  autre  preuve  que  Sonnace  n'en  est 
point  l'auteur  :  car  on  y  met  entre  ces  fêtes 
celle  de  la  Nativité  de  la  Sainte-Vierge,  qui 
n'a  été  de  commandement,  c'est-à-dire  chô- 
mée par  le  peuple,  que  dans  le  di.xième  siè- 
cle, quoique  l'on  en  lit  l'oUlce  dans  l'Église 
longtemps  auparavant.  Ou  la  trouve  marquée 
dans  un  calendiier  ^  du  temps  de  Louis-le- 
DcLonnaire,  c'est-à-dire  dans  les  commence- 
ments du  neuvième  siècle,  et  dans  le  Mar- 
tyrologe qui  porte  le  nom  du  vénérable  Uè-' 
de.  Saint  jiouil'ace,  évéquede  Mayence  dans 
le  huitième  siècle,  ajouta  aux  fêtes  ^  que 
l'on  faisait  dans  son  diocèse  celles  de  l'As- 
somption de  la  Vierge  et  de  sa  .Nativité. Mais 
on  ne  voit  point  qu'elles  aient  été  reçues  en 
France  dans  le  même  temps;  et  il  n'en  est 
rien  dit  dans  uu  calendrier  de  Corhie,  d'en- 
viron mille  ans.  Dom  Mabillon  ',  qui  cite  ce 
manuscrit,  le  croit  d'une  assez  grande  auto- 
rité pour  contrebalancer  celle  des  statuts 
attribués  à  Sonnace,  louchant  le  temps  de 
l'établissement  de  la  fcte  de  la  Xativité  de  la 
Sainte-Vierge  ;  et  il  ne  fait  aucune  difficulté 
de  les  juger  postérieurs  au  siècle  dans  lequel 
cet  évèque  a  vécu.  Quoi  qu'il  en  soit,  voici 
ce  qu'ils  contiennent  de  remarquable. 

4.11  est  ordonné  aux  pasteurs  *  de  se  con- 
former dans  la  doctrine  de  la  foi  à  la  tradi- 
tion de  la  sainte  Église  i-omaiue  ;  d'instruire 
leurs  peuples  de  lutililé  des  sacrements  et 
des  raisons  de  leur  institution  ;  de  les  admi- 
nistrci'  giatuitement  ;  de  proférei' avec  atten- 
tion la  l'urm(;  du  baptême,  et  de  s'informer 
des  parents  quel  est  celui  que  l'on  présente 
pour  être  baptisé;  de  ne  point  négliger  le 
Sacrement  de  Confirmation.,  dans  lequel  on 
leçoitdu  Saint-Esprit  le  don  de  force,  et  une 
grûce  abondante;  d'obliger  les  lidèlcs  à  as- 


sister au  sacrifice  de  la  Mrsse  les  jours  solen- 
nels et  de  dimanche,  sous  peine  de  privation 
d'entrée  de  l'église  et  de  la  sépulture  ordi- 
naire, au  cas  où  ils  s'en  absenteraient  deux 
fois  en  un  an.  Ou  réserve  aux  pasteurs  seuls 
la  confession  des  pénitents  pendant  le  ca- 
rême. Les  prêtres  doivent  célébrer  au  moins 
deux  fois  dans  le  mois.  L'eucharistie  sera 
portée  aux  malades  dans  un  vase  décent, 
précédée  de  llambeaux,  et  ceu.v  qui  iront  en 
voyage  la  recevront  par  forme  de  viatique. 
Elle  sera  encore  accordée  à  ceux  qui  sont 
condamnés  à  mort,  comme  un  secours  né- 
cessaire dans  une  circonstance  où  la  mort 
est  certaine.  Pour  être  admis  aux  ordres,  il 
faut  avoir  un  bénélice  sullisaut  pour-  sa  sub- 
sistance ;  ce  qu'on  laisse  a  l'examen  de  gens 
de  probité  et  sermenlés.  On  ne  donnera  la 
tonsure  qu'à  ceux  qu'on  est  moialemeul 
sur  de  faire  monter  à  des  degrés  supé- 
rieurs. On  portera  l'Exlrême-Onction  au  ma- 
lade qui  l'aura  demandée.  Les  clercs  vivront 
en  commun,  et  leur  maison  sera  ouverte  aux 
pauvres.  On  fera  des  suU'rages  pour  les  morts, 
et  l'on  n'appliquera  les  messes  que  suivant 
l'intention  des  fondateurs.  Les  fêtes  qui  se 
célébreront  avec  cessation  du  palais  sont  la 
Nativité  du  Seigneur,  la  Circoncision,  l'Epi- 
phanie, l'Annoucialion  de  la  Sainte-Vierge, 
la  Résurrection  du  Seigneur  avec  le  jour  sui- 
vant, son  Ascension,  la  Pentecôte,  la  Nativité 
de  saint  Jean-Baptiste,  les  fêtes  des  apôtres 
saint  Pierre  et  saint  Paul,r.\ssomption  delà 
Sainte-Vierge,  sa  Nativité,  la  fêle  de  saint  An- 
dr(î  apôtre,  cl  tous  les  dimanches.  On  ne  voit 
point  dans  ce  dénombrement  la  fête  de  Tous- 
les-Sainls  établie  en  France  avant  le  miheu 
du  neuvième  siècle,  quoiqu'elle  le  fut  à  Rome 
dès  les  commencements  du  septième;  ce  qui 
est  une  preuve  de  l'antiquité  de  ces  statuts. 
Colvcnerias,  ou  Gouveuier,  les  a  fait  impri- 
mer le  premier  à  Paris,  en  Mil  I ,  sur  un  ma- 
nuscrit de  l'abbaye  de  Marmoutier,  à  la  suite 
de  l'Histoire  de  Flodoard,  d'où  ils  ont  passé 
dans  l'Histoire  de  la  Métropole  de  Reims,  par 
dom  Marlot,  dans  les  Conciles  de  Rinius,  du 
P.  Lalibe,  [de  .M:msi,'  dans  la  llUdiotlihque  des 


'  Ton).  X  Spicilegii,  pag.  138,  128. 

»  Mabillon.,  Lilurg.  Gallican.,  pa".  lO.'i. 

'  Sœculo  si'iilimo  non  maguopere  accrevit  fes- 
toruin  in  Oultia  numerus.  Scio  niullo  plura  nu- 
merari  in  quoilam  concilia  rcnicnsi  quoil  ex  co- 
dice  mss.  înajoris lllonasterii  liiniits  nuit.  Vcriint 
concilium  itludlonye  rccentius  esse  consljl.  Ua- 


joris  est  aiictorilalis,  et  quidem  certe,  Calenda- 
rium  vcluslissimum  ali  annis  ferc  mille  scriptum, 
quod  kabcinus  ex  Uibliollicta  Corbviensi;  in  quo 
votatur  tialendis  febniarii  deposilio  sancla:  .tfd- 
nœ  virijiiiis.  Maliiiloii. ,  Lilurg.  Gallican.,  pag. 
lui. 
*  'l'om.  V  ConciL,  lag.  1U9J. 


• 


FioifHI  (  rô. 
cl..  Iruiftili- 


[vir  siÈOLK-l       r.IlAlMTHl':  IAVI.—  ImiROT 

Pires,  à  Lyjon,  en  1077,  [danslo  lomoLXXX 
do  l;i  Palruhgie  ladtw,  col.  iW-tli,  avec 
une  notice  du  (îu/li'a  i:/i>-istiiitia.  (In  lés  trou- 
\e  aussi  dans  les  Artis  do  hi  jirovince  errlé- 
sinsfiqiie  dp  /{tims  pu!)liés  par  Mgi  dousset, 
Reims,  1842-1811,  A  vol.  in-t.] 

5.  Florent,  prèlrL'iieri'^iise  de  Trois-CliA- 
leaux,  ville  ('pisio|)ale  ilé|)piulanle  de  la  mé- 
lro[)ole  d'Ailes,  a  l'crit  la  Vie  de  sainte  Ihis- 
ticule,  abijessc  d'un  monastère  que  saint  C(5- 
saire  avait  t'Iabli  en  celte  dernière  ville.  Il  y 
fut  enyaué  (lar  les  instances  de  Cclse,  qui, 
ce  semhle,  avait  succédé  immtfilialement  i\ 
sainte  Uusticule  ;  et  ce  fut  d'elle  (pi'il  reçut 
les  mémoires  pour  composer  la  vie  de  cette 
sainte.  11  en  apprit  aussi  des  circonstances 
de  plusieurs  personnes  qui  l'avaient  vue  et 
qui  l'avaient  connue  particulièrement;  ce 
qui  doit  donner  un  grand  poids  à  ce  qti'il 
raconte.  C'est  en  même  temps  une  preuve 
qu'il  écrivait  peu  après  la  mort  de  sainte  Uus- 
ticule. 11  le  dit  assez  clairement  en  un  en- 
droit ',  où  il  témoigne  qu'il  appréhendait  de 
renouveler  la  douleur  que  cette  mort  avait 
causée  à  Celse  et  à  toute  sa  communauté. 
On  trouve  cette  ^'ie  dans  le  second  tome  des 
Actes  de  l'ordre  de  saint  Benoit  *,  par  dom 
Mabillon.  Le  style  en  est  simple,  clair,  no- 


iiKi-;,  iiYi'Éniîcmus,  etc.  69S 

ble  et  pi'oprc  à  inspirer  de  lu  piété.  André 
Ducliesne  en  avait  dt'jà  donné  quelques  frag- 
ments dans  le  premier  tome  des  historiens  de 
Fraïu-e  '.  Husticide  ('lail  n(''e  de  N'ali'ricn  et 
deCh'mcnlia.Quoiipi'ils  fussent  de  Provence, 
Florentin  leur  donne  le  imm  de  romains,  par- 
ce que  la  Provence  était  une  province  des  Ro- 
mains. Klle  cul  deux  noms  dans  le  liaptème, 
Rusiicule  et  Marcia.  Dès  son  enfance,  elle 
fut  mise  sous  la  conduite  de  Loliola,  ahbesse 
du  monastère  de  Saint-Césaire  ;  ses  progrès 
dans  la  vertu  la  lirent  choisir  pour  lui  succé- 
der. Lille  savait  par  cœur  tous  les  psaumes 
et  les  autres  livres  de  l'Mcriture.  Accusée  au- 
près du  roi  Clotaire  d'avoir  nourri  en  secret 
Ricimci-,  elle  fut  obligée,  contre  le  prescrit  de 
la  règle  de  saint  Césaire,  de  sortir  de  son 
monastère  pour  aller  se  justilier.  Son  voyage 
eut  un  heureux  succès,  et  le  roi,  ayant  re- 
connu son  innocence,  la  renvoya  à  Arles 
avec  honneur.  Elle  y  mourut  âgée  de  plus  de 
soixante-  dix  ans,  après  avoir  chanté  avec  ses 
religieuses  l'office  de  vêpres  et  de  compiles, 
que  l'auteur  de  sa  Vie  désigne  sous  le  titre 
d'office  de  la  douzième  heure  du  jour,  c'est- 
à-dire  à  six  heures  du  soir.  On  met  sa  mort 
en  632. 


CHAPITRE  LXVI. 

Dorothée  archimandrite  [au  commencement  du  VU'  siècle],  Hypéiéchius  prêtre, 

Antiochus  moine  de  Saint-Sahas. 

[Écrivains  grecs.] 


Il  y  a  plu- 
jlcurs  Doro- 
lliéc  archi- 
niaatliitc^. 


I.  On  trouve  dans  le  premier  tome  des  Or- 
thodoxographes,  dans  VAuctuariinn  de  Fron- 
ton-le-Duc,  en  lG2i,  dans  le  onzième  de  la 
Bibliothèque  des  Pères,  à  Paris,  en  1644,  et 
dans  le  cinquième  tome  de  la  Bibliothè- 
que des  Pères  à  Lyon',  vingt-quatre  Discours 
ou  Doctrines  sur  la  manière  de  vivre  avec 
piété,  qui  portent  le  nom  de  Dorothée,  ar- 
chimandrite ■".  Il  y  a  eu  plusieurs  anciens 


moines  de  ce  nom,  et  qui  ont  eu  aussi  la 
qualité  d'archimandrite.  C'est  ce  qui  a  donné 
lieu  à  une  grande  variété  d'opinions  sur  le 
vrai  auteur  de  ces  discours.  Pallade,  dans 
son  Histoire  Lausiaque  ",  parle  de  deux  Do- 
rothée, l'un  et  l'autre  archimandrites,  qui 
vivaient  dans  le  quatrième  siècle.  On  en 
connaît  un  troisième  qui  fut  disciple  de  Jean 
dit  le  Prophète,  qui  l'avait  été  lui-même  de 


»  Xum.  29  et  32. 

*  Tom.  II  Âct.  Ordin.  S.  Benedicli,  vaô'-  13u. 
5  Tom.  1,  pag.  56'»,  565. 

*  Daus  le  tom.  XII  des  anciens  Pères  par  Gal- 
land,  d'où  ils  ont  passé  daus  le  tome  LXXXVllI  de 
la  l'atrulogie  grecque,  col.  1611-1816,  arec  la  uolico 
de  Gallaud.  [L'cdileur.) 


5  Ces  sermons  ont  paru  séparément  par  les  soins 
de  Baltliazar  Cordier,  à  Anvers,  16't6,  in-12;  à  Cré- 
mone, 1393,  in-8,  par  les  soins  et  avec  la  traduc- 
tion de  Chrysostome  Calabrais;  à  Ii;golsladt,  en 
1616,  in-12,  avec  quelques  opuscules.  (L'cdileur.) 

6  l'allad.,  in  Uist.  Lausiac,  cap.  u  et  xxxvj,  et 
Sozomen.,  lib,  VI,  cap.  xxvi. 


696 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Bai*sanuphius  ',  vers  l'un  550.  Ce  Dorothée, 
après  être  sorti  du  monastère  de  l'abbé  Se- 
ridus,  enbâlitun,  où  il  assembla  des  moines 
qu'il  gouverna.  Il  fut  allaciié  au  parti  et  à  la 
doctrine  de  Sévère,  l'un  des  chefs  des  euly- 
chiens.  Allatius  *  fait  menliou  d'un  quatriè- 
me archimandrite  du  nom  de  Dorothée,  sur- 
nommé le  Jeune,  parce  qu'il  vivait  vers  le 
commencement  du  onzième  siècle.  Quoique 
les  deux  premiers  Dorothée  fussent  archi- 
mandrites, ils  ne  l'étaient  que  des  solitaires 
ou  ermites  qui  vivaient  dans  des  cellules  sé- 
parées. Cela  paraît  par  le  récit  que  Pallade 
fait  de  leur  manière  de  vivre.  Le  troisième 
demeurait  avec  des  moines,  avec  qui  il  vivait 
en  commira  à  la  fa(;on  des  moines  appelés 
cénobites.  Le  quatrième  menait  aussi  la  vie 
commune,  avec  mille  moines  qu'il  avait  sous 
sa  discipline, 
tes  Tiuji-  2.  Un  anonyme  grec  dont  on  nous  a  don- 
moM'oo  dÔÎ-  né  le  Proloi(ue  '  sur  ces  vin^t-ciuatre  ser- 
Doroihéc, dis.  mous  OU  doctruies,  prétend  au  ils  sont  de 

c  [le  de  Je*n.     ,,.„,,,  \,      ,  ,         .         ,. 

1  ancien  Dorothée  ;  et  il  n  eu  rend  point  d  au- 
tres  raisons,    sinon  qu'iiS  renferment   une 
saine  doctrine  ;  qu'ainsi  ils  ue  peuvent  èUe 
de  Dorothée  le  Sévérien  :  ne  faisant  pas  ré- 
flexion que,  quelque  attaché  que  soit    un 
écrivain  à  une  secte  hérétique,  il  n'en  répand 
pas  toujours  le  venin  dans  tous  ses  écrits, 
surtout  lorsqu'ils  n'ont  que  peu  ou  point  de 
rapport  â  son  erreur.  Mais  ce  qui  fait  voir 
qu'ils  ne  peuvent  être  d'aucun  des  deux  an- 
ciens Dorothée,  c'est    qu'ils  sont  composés 
pom'  des  moines  qui  vivaient  eu  commun, 
et  non  pour  des  ermites.  Ceux-ci  n'avaient 
point  de  cellérier  qui  pourvût  aux  besoins 
d'un  grand  nombre  de  solitaires  répandus 
çà  et  là  dans  les  déserts.  Parmi  les  discours 
de  Dorothée,  il  y  en  a  un,  c'est  le  dix-hui- 
tième, qui  traite  exprès  du  cellérier  et  de 
son  ollice.  Il  fiut  donc  les  attribuer  à  l'un 
des  deux    Dorothée  qui  ont  gouverné  des 
monastères  où  l'on  menait  la  vie  cénobiti- 
que.  Ce  ne  peut  être  à  celui  qui  vivait  dans 
le  xi''  siècle  :  personne  jusqu'ici  ne  les  lui  a 
donnés,  et  les  manuscrits  où  U^  se  trouvent 
paraissent  plus  anciens.  Ainsi  il  parait  qu'on 
doit  en  faire  auteur  le  Dorothée  seciatcm- 
des  sévériens,  dans  les  vr  et  vii'  siècles.  Il 
cite  quelquefois  l'abbé  Pasteur  dans  ses  lot- 

>  Evag.,  lib.  IV,  cap.  sxxni. 
»  Allatius,  De  Simeoiiibug,  {jnit,    101. 
'  Ordin.,  toni.  I  Script.  Ecdesiast. ,  pag.  1C30,  et 
toiu.  V  Uibtioth.  Pat.,  r"b'-  "02. 
'  Toiu.  V  mblioth.  Pal.,  luig.  'J02. 


très  :  L'abbé  Pasteur  a  dit  avec  beaucou/i  de 
sagesse  qu'il  ne  fallait  pas  s'inquiéter  du  len- 
demain. Si  cet  abbé  était  l'ami  de  saint  Jean 
Climaque,  il  faudrait  dire  que  Doifilhée  lui 
a  survécu.  Mais  il  y  a  en  plusieurs  anciens 
abbés  de  ce  nom,  comme  on  le  voit  dans  les 
Vies  des  Pères  '. 

3.  Le  premier  de  ces  Discours  est  sur  le     c«<i«t««. 

tlcDoeol     CM  -1 

renoncement  a  soi-même  .  Dorothée  prouve  J'"»»  '••  I 

'  [Leor^lrtaoe-   i 

que  les  moines  y  sont  particulièrement  obli-  J^°,'  '"°"'-  » 
gés,  et  il  tire  de  la  figure  même  de  leurs  ha-  I 

bits,  des  arguments  pour  les  convaincre  que 
ce  n'est  pas  assez  pour  eux  de  vivre  dans  la 
retraite  d'un  monastère ,  de  renoncer  au 
monde ,  s'ils  ne  se  détachent  deux-mêmes 
et  ne  renoncent  à  leur  propre  vokmté.  Dans 
le  second,  qui  est  sur  l'humilité,  il  cite  uue 
maxime  de  l'abbé  Jean,  dont  il  avait  été 
disciple.   Il  traite  dans  le  troisième,  de  la 
conscience,  qu'il  définit  :  Je  ne  sais  quoi  de 
divin  qui  ne  cesse  de  nous  rappeler  à  nos 
devoirs.  La  crainte  de  Dieu  fait  le  sujet  du 
quadième.  C'est  là  qu'il  dit  qu'il  avait  de- 
meuré dans  le  monastère  de  l'abbé  Séridus; 
comme  dans  le   cinquième,  qu'il  avait  été 
disciple  de  l'abbé  Jean.  Il  remarque  dans  le 
quinzième,  qui  est  sur  le  jeune  du  carême, 
qu'il  durait  huit  semaines,  parce  qu'on  ne 
jeûnait  ni  le  dimanche,  ni  le  samedi,  excepté 
le  Samedi- Saint,  Le  dix-septième  est  une  in- 
struction pour  ceux  qui  se  trouvent  chargés 
du  gouvernement  des  monastères.  Le  dix- 
hiiilième  et  le  viiigl-et-unième  sont  en  forme 
de  dialogue.  Dorothée  instruit  dans  celui-là 
le  moine  à  qui  l'on  couliait  le  soin  du  tem- 
porel  du   monastère.    Il    explique  dans   le 
vingt-deuxième    et  le  vingt-troisième    uue 
partie  de  certaines  hymnes  tirées  de  saint 
Grégoire  de  Naiianze,  que  l'on  chantait  le 
jour  de  Pâciues  et  aux  fêtes  des  marlvrs. 

Les  huit  lettres  de  Doiolliée"  sont  adres- 
sées à  divei-s  moines,  pour  consoler  les  uns 
dans  leurs  infiimilés,  et  alferuiir  les  autres 
contre  les  tenlations.  Il  parle  daus  la  der- 
nière des  Sarrasins  ou  Arabes,  coujuk;  s'il 
eut  déj.i  éprouvé  la  dureté  de  leur  gouver- 
nement. 11  voulait  apparemment  désiguex' 
les  Musulmans,  dont  l'empire,  qui  n'avait 
commencé  qu'en  02 J,  s'était  déjà  beaucoup 
accru  en  635,  où  ils  prirent  Damas  et  s'éta- 

5  Tom.  V  Bibliolh.  Pal.,  png.  MOS. 

'  Ou  lc8  trouve  «laiis  la  Patrolugie  grecque,  à  la 
suite  des  Discuui's  tle  Uurotliée;  col.  I8j'3-lsl2.  (L'é- 
diteur.) 


vu"  SlhXLE. 


CHAPITRE  I.XVl.  —  nOIlOTHMK,  IIYPlsHKCIlIUS,  ETC.  697 

porte  (le  leur  cellule  avec  des  verroux  de  fer  ; 
une  autre,  de  l'aire  montre  do  leur  science 
par  (les  paroles  magnirKiuos,  la  pitU('!  cl  la 
douceur  tlovant  les  riMidrc  nxoinniandaMes. 


Mirent  dans  la  Plicnicic,  et  doux  ans  après 
dans  la  Palestine. 

|La  première  traduction  frauraiso  do  ces 
sermons  parut  i'i  Paris,   en   l(')2!),   in-8,  par 
(,.  A.  P.  avec  la  Doctrine  spirituelle  de  saint 
Gilles  d'Assise,  et  les  Sept  degrés  de  la  Con- 
templntliiii.  Fabricius  o\\   iiulique  une  autre 
par  François  lioidon ,  laite  à   Paris  ,  on  la 
même  année,  in-8  ;  c'est  sans  doute  la  même. 
L'ahbé  de  Hancé  a  traduit  du  S'rec  en  l'ran- 
rais  les  Instructions  de  saint  /hnitlik',  Paris , 
i(i8!),  in-,S.| 
iijffrf.       4_  Un  ne  sait  point  au  vrai  on  quel  temps 
,m.         vivait  l'abbé  Hyperecnuis.   Il  parait  seule- 
ment que  c'était  avant  le  milieu  du  vi"  siècle, 
puisqu'il  est  cité  jus(pi','>  trois  l'ois  dans   le 
cinquième  livre  des  Vies  des  Pères,  traduites 
de  grec  en  latin  par  le  diacre  Pelage  ',  qui 
fut  fuit  pape  en  Su.").  Photius  parle  de  ces 
Vies,  sans  on  nommer  l'aulcur  ;  et  Sigebcrt 
eu  atti'ibue  la  tradiiclion  ù  Pelage-,  cl  celle 
du  sixième  livre  des  mêmes  Vies,  au  sous- 
diacre  Jean,  qui  occupa  le  Sainl-Siégo  de- 
puis l'au  oGi    jusqu'où  o7i".   Les  endroits 
cités  d'Hypérécliius  '  se  trouvent  mol  pour 
mot  parmi  les  cent  cinquanle-neuf  capitules 
ou  règles  abrégées  de  la  vie  spirituelle,  que 
nous  avons  de  cet  auteur.  Ainsi  l'on  no  peut 
douter  que  l'auteur  anonyme  du  cinquième 
livre  des  'Vies  des  Pères  ne  les  ait  tirées  de 
lii.  Ces  règles  furent  imprimées  en  grec  et  en 
latin  dans  le  nouvel  Anctucriinn  du  P.  Com- 
belis,  il  Paiis,  eu  1G72,  et  en  latin  dans  le 
vingt-septième  tome  do  la  Bibliothèque  des 
Pères.  M.  Cotelier  en  a  mis  huit  en  grec  et 
eu  latin  dans  le  prouiior  touie  des  Monu- 
ments de  l'L'ylise  grecque.   [Le  lome  LXXIX 
de  la  Patrologie  grecque,  col.  1471-l.o02,  re- 
produit  les   Ri'gles  d'Hypérécliius,  il'après 
Cumbcils.  Les  éditeurs  avertissent  qu'elles 
devraient  se  trouver  dans  un  autre  volume.] 
Elles  ont  toutes  été  traduites  en  français  et 
imprimées  h  Paris,  chez  Pralard,  en  1G96, 
avec  quelques  traités  de  Clément  d'Alexan- 
drie, quelques  discours  de  saint  Athanase, 
et  les  sermons  de  saint  Procle,  patriarche 
deConstantinople  en  434.  Le  traducteur  met 
Hypéréchius  dans  le  vi°  ou  le  vu"  siècle  , 
sans  se  décider  ni  pour  l'un,  ni  pourl'au're. 
Elles  sont  principalement  pour  des  moines. 
Il  y  en  a  une  qui  leur  défend  de  fermer  la 

'  Plintius,  COil.  UI8.  —  *  Sigobort,  Oe  Viris  il- 
lusl.,  cap.  XVI.  —  3  Id.,  cap.  cxvii. 

'  l.ili.  V  De  Vitis  Palruni  a  Rcsveydo ,  img.  toi, 
ïii  et  45T,  edil.  Lwjd.,  an.  1017. 


Ti.  La  cinquième  année  du  règne  d'Ibira-      Amioeb»., 

*  ^  molno    de  S. 

clins,  de  Jesus-Christ  G14,  les  Perses  ',  ayant  s.ba.. 
passé  le  .Jourdain  et  conquis  la  Palestine  et 
la  ville  do  Jérusalem ,  luèreut  plusieurs 
milliers  de  clercs,  de  moines  et  de  religieu- 
ses, brûlèrent  les  églises,  et  même  le  Saint- 
Sépulcre,  en  emportèrent  tout  ce  qu'il  y  avait 
de  précieux,  les  vases  sacrés,  les  reliques  et 
le  bois  de  la  vraie  croix.  Cinq  ans  après, 
c'est-à-dire  en  G19,  ils  piircut  Aucyre,  capi- 
tale de  la  Galalio,  près  de  laquelle  était  le 
monastère  d'Altaline.  Ce  qui  obligea  les 
moines  avec  leiu'  abbé  Euslache  d'abandon- 
ner le  pays  et  de  changer  souvent  do  place, 
par  la  crainte  des  infidèles.  Ne  pouvant  em- 
porter avec  eux  beaucoup  do  livres,  l'abbé 
Eustachc  écrivit  à  Antiochus,  moine  de  la 
laurc  de  Saint-Sabas,  en  Palestine,  <à  quatre- 
vingts  stades  de  Jérusalem  vers  le  midi,  de 
lui  faire  un  abrégé  de  toute  l'Ecriture  sainte, 
contenant  en  un  seul  volume  facile  à  porter 
tout  ce  qui  est  nécessaire  au  salut.  Il  le  pria 
en  même  temps  de  lui  raconter  au  vrai  la 
mort  et  les  vertus  des  quarante-quatre  moi- 
nes de  la  même  lame,  tués  par  les  Arabes 
cinq  ans  auparavant. 

G.  Antiochus  fit  ce  que  l'abbé  Euslache  SMémis. 
demandait  de  lui'',  mais  non  pas  avec  au- 
tant d'exactitude  qu'il  l'eût  fait  '' ,  si  la 
crainte  des  barbares  ne  l'eût  contraint  de 
changer,  comme  les  autres,  à  chaque  mo- 
ment de  demeure.  11  mit  ;'i  la  tête  de  sa  ré- 
ponse la  lettre  qu'il  avait  reçue  de  cet  abbé. 
Puis,  venant  au  récit  du  martyre  de  ses 
confrères,  il  dit  que,  huit  jours  avant  la  prise 
de  Jérusalem,  la  laure  de  Saint-Sabas  fut 
attaquée  par  les  Arabes  ;  que  de  tous  les 
moines  dont  elle  était  composée,  il  n'eu  resta 
que  quarante-quatre  des  plus  anciens  et  des 
plus  vertueux;  que  ces  barbares,  après  avoir 
pillé  l'église,  les  tourmeulèrenl  cruellement 
pendant  plusieurs  jours  pour  les  obliger  à 
découvrir  les  richesses  du  monastère  ;  que  se 
voyant  frustrés  de  leur  espérance,  ils  entrè- 
rent en  fureur  et  les  mirent  eu  pièces;  et 
que  ces  saints  reçurent  la  mort  d'un  visage 
gai  et  avec  actions  de  grâces,  comme  sou- 

s  Tlionpliaii.,  ci  Chronic.  l'aschalc,  ad  an.  (iW. 
6  Toiii.  Ml  Bihlioth.  Pat.,  pag.  21U. 
'  Senii.  uo,  pa^'.  2d3. 


698 


HISTOIRE  GKNfiRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


liaitaiit  depuis  lonplemps  d'aller  à  Jésus- 
Clu'ist.  II  parle  ensiiile  do  ce  qui  était  arrivé 
à  lui  etù  ses  confrères  depuis  l'incureion  des 
Arabes,  et  des  maux  qu'ils  causèrent  dans 
la  ville  de  Jérusalem,  où  ils  brûlèrent  plu- 
sieurs églises.  L'aljié;z:é  de  l'Ecritunr  qii'An- 
lioclius  fit  pour  l'abbé  Eustache  ,  porte  le 
nom  de  Pandectes,  parce  qu'il  est  composé 
de  l.'iO  discours  moraux,  (jui  renferment  des 
préceptes  cl  des  maximes  sur  les  jjrincipaux 
devoirs  du  cbrétien,  appuyés  de  divers  passa- 
ges de  l'Écriture  et  des  anciens  docteurs  de 
l'Église  ;  c'est  comme  un  corps  de  théologie 
morale.  Il  est  précédé  d'un  p!olo<;uc  ;  mais 
il  y  manque  quelque  chose  dans  nos  impri- 
més. Le  chapitre  soixante-sixième  peut  en- 
core être  regardé  comme  une  préface,  puis- 
que l'auteur  y  rend  compte  des  motifs  qui 
l'avaient  porté  à  écrire.  Il  fait  dans  le  der- 
nier un  catalogue  des  hérésies,  depuis  celle 
de  Simon  le  Magicien  jusqu'à  celle  des  sé- 
vériens  et  des  jacobites,  ainsi  nommés  de 
Jacob  Zanzale,  Syrien  de  naissance  et  disci- 
ple de  Sévère  ;  protestant  qu'îl  s'en  tient 
avec  l'Eglise  catholique  à  ce  qu'ont  enseigné 
saint  Athanase,  saint  Basile,  saint  Grégoire 
de  Naziauze,  saint  Jean  Ghiysostome  et  saint 


Cyrille  d'Alexandrie.  Suit  une  Exomologèse 
on  prière  d'Antiochus,  dans  laquelle  il  recon- 
naît ([uc  c'est  en  punition  des  péchés  des 
chrétiens  que  Dieu  a  permis  que  les  sanc- 
tuaires fussent  abandonnés;  le  peuple  mené 
en  captivité  ;  les  corps  des  saints  jetés  de 
côté  et  d'autre  sans  sé-pulturc,  et  la  ci-oix  de 
Jésus-Christ,  qui  est  l'espérance  de  notre 
salut,  la  force  et  l'ornement  de  la  religion, 
enlevée  par  les  barbares  '.  11  fait  souvenir 
le  Seigneur  de  ses  miséi'icordcs,  et  le  con- 
jure d'en  faire  sentir  les  eflets  A  son  peuple. 
On  trouve  après  cette  prière,  dans  la  ISiblio- 
thf'(iiie  des  l'î-rvs,  un  discours  sur  les  mau- 
vaises pensées  ;  mais  c'est  la  même  chose 
que  le  quatre-vingt-unième  chapitre  des  Pan- 
dcctes.  Il  y  eut  ime  édition  de  l'ouvrage 
d'Antiochus,  à  Paris,  en  1513,  par  Tilman- 
nus.  On  l'a  inséré  depuis  dans  toutes  les  Bi- 
bliothèques des  Pères:  dans  celles  de  Paris, 
en  1571);  de  Cologne,  en  1618;  de  Paris,  en 
1644,  et  de  Lyon,  en  1677.  11  se  trouve  aussi 
dans  VAuctuarium,  de  l'un  1024,  en  grec  et 
en  latin,  [et  dans  le  tome  LXXXIX  de  la  Pa- 
tn/ogie  grecque,  col.  1-4H,  1856,  avec  une 
notice  tirée  de  Fabricius.l 


CIIAPITUE  LWII. 


Modeste  patriarche  de  Jérusalem  [après  629],  Georges  d'Alexandrie  |630], 

Jean  moine  d'Antiochc  |  vers  le  même  temps]  [écrivains  grecs],  Aran- 

sins,  Eelladins,  Juste,  Nonnitus  et  Conantius  évoques. 

[Ivrivains  latius  d'Esiiagne  au  coiiunonccmoul  du  vu"  siècle. 1 


HodM»  «•  ••  Zacharie  était  patriarche  de  Jérusalem, 
"XdëjéruI  lorsque  les  Perses  s'en  emparèrent  en  611. 
tc'ù"'.  "  Ils  l'emmenèrent  en  captivité  avec  la  plus 
grande  partie  de  son  peuple  -,  et  l'aduiinis- 
tralion  de  son  église  fut  confiée  peiidaul  son 
absence,  qui  dura  jusqu'en  629,  à  Modeste, 
abbé  du  monastère  de  Saint-Théudose.  Quoi- 


qu'il n'eut  que  la  qualité  de  vicaire ,  Pho- 
tius  '  ne  laisse  pas  de  lui  donner  celle 
d'archevêque  de  Jérusalem,  parce  qu'il  en 
lit  les  fonctions.  Il  prit  soin  non  seule- 
moul  de  la  ville,  où  il  lit  rétablir  les  églises 
brûlées,  mais  aussi  do  tout  le  diocèse  et 
de  tous  les  monastères  du  désert.  Il  avait 


'  Fvrlitvdinem  nostniin,  ornamenlum  acdcais, 
»(iJt//i.«,  inquani,  uosliue  sprm,  neiiipe  crucem 
Cliriili  Iradidisli  fidci  adversariis.  l'ag.  291,  (nm. 
XII  IlibUoth.  Pat. 

■-'  Ou  a  lie  Znrliiirir  uiii'  lettre  à  son  prujilr  |.r>ii- 
daiil  i|ui'  ix't  6vi>(|ue  ('•tait  eu  capliv  ilr'.  Kllc  est 
reproduite  d'après  le  loine  XII    de   la  lUIiliollirque 


des  l'îrfs  puwr  la  version,  cl  le  te.xle  grec  est  donné 
par  Conilji'fis,  dnus  son  livre  iuli'.ulé:  Sancli  Joan- 
iii-s  Chnjsostumi  de  educandi'i  tiheris,  liber  aurexis, 
Parimx  ICri.'i,  in-8.  Celle  lettre  est  n'pniduilo  nu 
louie  I.NNXVl  de  U  Patroloi/ir  greniue,  roi.  3219- 
32:U,  avec  uuc  iinliee  lirt^e  de  l.eiiiiien.  (I.'ddilcur.) 
3  PlioUus,  cod.  aiS,  pog.  U20. 


CHAPITRE  LXVII.  —  MOUKSÏE,  fiEORGES,  JEAN,  ETC. 


I 


Georg 
A  AksAndn 
Se.*  écrits. 


[VU'  SIECLE. 

fiiil  trois  IJiscours  ,  dont   il  no  reste  que  des 
extraits  '  :  le  premier,  sur  les  lemmcs  qui 
achetèrent  des  piirfnms   pour  embaumer   le 
corps   de  Jésus-Christ;  le   second,    sur   la 
mort  de  la  Sainle-Vierge;  le  troisième,  sur 
la  fête  de  la  Rencontre  onde  la  Présentation 
de  Jésus-Christ  au  temple.   Il  di.sait  dans  le 
premier,  que  Marie-Mayileleine  de  laquelle 
Jésus-Christ  chassa  sept  démons,  avait  vécu 
vierge  ,  et  soutl'erl  le  martyre  à  Éphèsc ,  où 
elle  était  allée  trouver  saint  Jean  l'Évangé- 
liste  après  la  mort  de  la  sainte  Vierge.  Mais 
il  ne  rapportait  ces  faits  que  sur  des  histoires 
qui  avaient  cours  de  son  temps,  où  l'on  ne 
distinguait  pas  la  Magdeleine ,  de  la  femme  pé- 
cheresse, comme  on  a  l'ait  depuis.  Le  second 
ne  paraissait  pas  à  l'holius  de  même  style  que 
le  précédent-.  Il  était  fort longet  ne  renfermait 
rien  de  digne  de  remarque.  Le  troisième  expli- 
qnail  d'une  manière  figurée  la  loi  qui  ordon- 
nait d'olfrir  en  sacrifice  des  colombes  ou  des 
tourterelles  pour  la  purification  des  femmes. 
2.  Le  successeur  de  saint  Jean  l'Aumô- 
nier, ilans  le  siège  d'Alexandrie,  fut  Georges, 
qui  l'occupa  depuisenviron  l'an  6:20  jusqu'en 
630.  Nous   n'avons  de  saint  Jean  que  son 
Testament ,    où  il  est  dit  ^  qu'encore  qu'il 
eût  trouvé  dans  la   maison  épiscopale  près 
de  quatre  mille  livres  d'or,  il  ne  laissa  en 
mourant  qu'un  tiers  de  sou ,  qu'il  ordonna 
de  distribuer  aux  pauvres.  Georges  écrivit 
la  Vie  de  saint  Chrysostomc  avec  plus  d'éten- 
due, mais  avec  moins  d'exactitude  que  n'a- 
vait fait  Pallade.  Il  dit  même  beaucoup  de 
choses  contre  la  vérité  ,  et  qui  sont  combat- 
tues par  des  témoignages  des  auteurs  con- 
temporains du  saint.   Le  style  en  est  simple 
et  bas,  et  pèche  en  plusieurs  endroits  contre 
les  lois  de  la  grammaire  et  de  la  construction 
des  termes.  Photius  a  donné   l'analyse  de 
cette  Vie  '',  que  Tilmanuus  fit  imprimer  ù 
Paris,  en  1537.  On  la  trouve  dans  Surins  au 
vingt-sept  de  janvier,  dans  le  huitième  tome 
des  (l'uvn'sdtsaiut  Chrysoslome  de  l'édition 
de  Savilius,   et  ailleuis.  Georges   cite  dans 
cette  Vie  plusieui's  lettres  '  aux  empereurs 


699 


Arcad(!  et  llonorius  et  au  pape  Innocent  I". 

."t.  On  n'a  pas  encore  rendu  publique 
Vllistuire  f:/tronolo(ji(/ue,  que  Jean  ,  moine 
d'Anlioche,  com|)osa  vers  l'an  62(t,  en  la 
couiiuenrant  à  la  création  du  monde  et  en 
la  conduisant  jusqu'à  son  temps.  Mais  nous 
en  avons  des  extraits  dans  le  traité  des  Ver- 
tus et  des  vices (\c  Constantin  Porphyrogenète, 
imprimé  en  grec  et  en  latin,  à  Paris,  eu  l6.'J't, 
in-4,  par  les  soins  de  Henri  de  Valois,  qui  avait 
reçu  ces  extraits  de  Peirescius.  Ce  traité 
n'est  pas  complet  :  de  quatorze  écrivains, 
dont  Constantin  y  donnait  des  extraits  ,  il  ne 
s'en  trouve  que  de  sept,  savoir,  de  Polybe, 
de  Diodore  de  Sicife ,  de  Nicolas  de  Damas, 
de  Denis  d'Halicarnasse,  d'Appion,  de  Dion 
Cassius  et  de  Jean  d'Antioche  :  ce  qui  ne  fait 
que  la  première  partie  de  l'ouvrage. 

i.  Saint  Ildephmise  '^  met  au  rang  des 
hommes  illustres  Aransius  ,  successeur  d'A- 
dclpliius  dans  le  siège  épiscopal  de  Tolède, 
non  à  cause  de  ses  écrits ,  mais  parce  qu'il 
avait  de  vive  voix  défendu  avec  force  la  vé- 
l'ité.  Il  y  met  aussi  Ilelladius  \  successeur 
d'Aransius,  quoiqu'il  n'ait  rien  laissé  par 
écrit ,  content  de  mettre  chaque  jour  en  pra- 
tique les  instructions  qu'il  aurait  pu  écrire 
pour  les  autres.  Juste,  qui  avait  été  disciple 
d'Helladius  ',  souscrivit  au  quatrième  con- 
cile de  Tolède,  en  633.  Il  avait  l'esprit  vif, 
et  parlait  assez  bien;  mais  il  mourut  dans 
un  âge  i)eu  avancé.  11  avait  écrit  une  lettre 
à  Uichilan.  abbé  du  monastère  d'Agali,  où  il 
lui  faisait  voir  clairement  qu'il  ne  devait  point 
abandonner  sa  communauté.  Nonnitus,  évê- 
que  de  Giroue  ,  vivait  dans  le  même  temps. 
Il  édifia  plus  son  peuple  par  ses  vertus,  que 
par  ses  discours  '.  Nous  n'avons  de  lui  aucun 
écrit.  On  avait,  du  temps  de  saint  Udephonse, 
des  Hymnes  composées  par  Gonantius,  évê- 
que  de  Palencia  ,  sur  des  airs  nouveaux  ,  et 
un  livre  de  Prières  tirées  des  Psaumes  '".  Cet 
évêque,  qui  «ivail  autant  de  prudence  et  de 
gravité  que  d'éloquence,  s'était  appliqué  par- 
ticulièrement à  régler  l'ordre  de  l'oflice  di- 
vin. Il  mourut  vers  l'an  638. 


Ji'flfi.mnln6 
d'AnlIottit. 
SoicriU. 


Ar.inf!u  -, 
lI.IMlii,  . 
Ju,-te,  N"ani- 
lue,el  CODan- 
Iitis,  Lvcqucs 
tl'fc;>p.TJue. 


'  Ces  extraits  sont  reproduits  au  tome  LXXXVI 
de  la  Patrologie  grecque,  col.  3273-3278.  Ils  sont 
préi'i5ilé?  d'une  uoticc  tirée  de  Comliefîs  et  d'une 
autre  tirée  de  Leciuien.  (L'éditeur.) 

-  11  a  été  donné  au  jiublic  par  Micliel  Giaconelli 
avec  quelques  notes  ,  et  il  est  reproduit  au  tome 
LXXXVI  de  la  Patrologie  grecque,  col.  3277-3312. 
Giacumelli  regarde  ce  discours  comme  important, 
parce  qu'on  y  trouve  exprimée  très  au  tout,-  la  tra- 
dition des  principaux  dogmes  de  la  foi  catliolique. 


Modeste  y  avance  qu'on  n'avait  rien  dit  avant  lui 
sur  la  mort  de  la  Sainte-Vierge.  On  célébrait  pour- 
tant celte  fête  sous  l'empereur  Jlaurice,  comme 
nous  l'apprend  Nicépliore,  lili.  XVI),  cap.  xxvni. 
{L'éditeur.) 

^  Leout.,  cap.  xiv,  num.  S9,  apudBolland.,  tom. 
Il,  pag.  315.  —  ^  Photius,  cod.  Oti,  pag.  251. 

■>  Voyez  tom.  VU,  pag.  127.  —  "  llde])hous.,  De 
Viris  illust.,  cap.  v.  —  '  Ibid.,  cap.  vu.  —  "  lliid., 
cap.  vin.  —  '■'  Ibid.,  cap.  x.  —  '"  Ibid.,  cap.  xi. 


7fKi 


niSTOIRE  GÉNtHALE  DES  AUTEURS  ECCLKSIASTIQUES. 


CIIAriTRE    LXVIII. 
Jean  Mosch  abbé  [619  on  6201 ,  et  Sophrone  évêqne  de  Jérusalem  [639  ou  744  '  ]. 

[ÉcrivaiDS  grecs.] 


jMoMofth.  1-  I-'un  des  plus  intimes  confidents  de  saint 
Hi>.o,ie  de  s.  jg_^|^  l'Anuiônicr.  patiiarciie  d'Alexandrie, 
était  le  moine  Jean,  suiiioiiiiué  Euciata  et 
Mosch'.  Comme  il  était  savant ,  le  saint  évo- 
que s'en  servait  utilement  pour  combattre 
les  sévériens  et  les  autres  li'ircliques  '  Jean 
y  travailla  avec  tant  .de  IVuit,  qu'il  retira  de 
l'erreur  un  grand  nombre  de  bourgades,  d'é- 
glises et  de  monastères.  JI  avait  d'abord  em- 
brassé la  profession  monastique  dans  la  com- 
munauté de  Saint-Tli(''odo!;e  en  Palestine  '. 
Envoyé  par  son  abbé  en  Egypte  pour  les  af- 
faires du  monastère,  vers  l'anoTS'',  il  péné- 
tra jusque  dans  le  flésert  d'Oasis  pour  y  voir 
un  moine  nommi-  Léon,  qui  s'i'-tait  acquis 
une  grande  réputation  de  vertu  en  donnant 
sa  vie  pour  délivrer  trois  autres  moines  pris 
par  les  barl)arcs.  De  retour  en  Palestine,  il 
demeura  dix  ans  dans  la  laure  des  Elioles, 
d'où,  après  avoir  passé  en  divers  autres 
nionasléres  ,  il  vint  en  Egypte  et  s'arrêta  <i 
Alexandrie  ''■.  Il  y  demeura  quelque  temps 
avec  Sofihrone,  qui  l'avait  accompagné  dans 
ses  voyages;  puis  il  alla  dans  l'ile  deC'jypre, 
de  là  dans  celle  de  Samos ,  et  ensuite  à 
Home.  Quelqucs-unsmcttentsamort  en  0:20, 
d'autres  en  GI9. 

2.  Ce  fut  en  cette  ville  que  Jean  com|)o.«a 
son  livre  appelé  le  /*/</  sj/irilucl  ',  comme 
étant  tout  semé  de  Heurs,  c'est-à-dire  ,  de 
miracles  ou  d'exemples  rares  de  vertu  ,  qu'il 
avait  appris  dans  ses  voyages  de  Syrie,  d'E- 
gypte el  d'Occident.  Il  le  dédia  à  Sopbrone, 
son  compagnon,  à  r[ui  il  donne  le  litre  de 
Soplusie,  parce  qu'il  avait  très-bien  éludié 
les  lettres  buuiaincs.  l'iiolius  dit  qu'il  était 
disiribué  en  trois  cent  quatre  cliai)ilres  ". 
Les  éditions  que  nous  en  avons  n'en  uietleut 
que  deux  cent  dix-neuf.  Mais  ,  dès  le  temps 


SonPréffl- 
ntucl. 


de  Photius,  les  exemplaires  n'étaient  pas 
uniformes  quant  au  nombre  des  chapitres. 
Les  uns  en  avaient  plus,  les  autres  moins. 
M.  Cotelier  en  a  donné  cent  soixante-seize 
en  grec  et  en  latin  ,  plus  entiers  qu'ils  n'é- 
taient dans  les  anciennes  éditions  '.  Le  Pré 
spirituel  fut  cité  dans  la  quatrième  action  du 
second  concile  de  Nicée  sous  le  nom  de  So- 
phrone, et  par  saint  Jean  Daniascèneàla  fin 
de  son  premier  livre  des  Images  '".  On  n'en 
peut  donner  d'autres  l'aisons,  si  ce  n'est 
<pf  il  était  dédié  à  Sopbrone  ,  et  qu'il  y  eut 
beaucoup  de  part ,  ayaut  sans  <loule  aidé 
Jean  Mosch  à  recueillir  les  faits  édifiants  qui 
y  sont  rapiiortés.  Au  reste,  Photius  dit  net- 
tement que  Jean  Mosch  eu  est  l'auteur  ",  et 
il  lui  est  attribué  dans  les  anciens  manus- 
crits. 

3.  Jean  Mosch  y  raconte  avec  naïvelé  ",  oigaiiià 
d'un  style  simple,  mais  vif,  les  faits  tels  qu'il  ?>"<!';'."'!;« 
les  avait  oui  rapporter  dans  ses  voyages  par 
des  personnes  qui  lui  paraissaient  dignes  de 
foi.  Son  but,  daiis  cet  ouvrage,  était  do  trans- 
mettre à  la  postérité  des  exemples  de  vertu 
et  d'édification,  et  de  contribuer  par  1'  au 
salut  du  prochain.  O  qu'il  y  a  de  plus  inté- 
ressant, c'est  qu'on  y  trouve  quanlili-  de 
preuves  de  la  foi  et  de  la  discipline  de  l'E- 
glise :  Un  saint  moine  de  Palestine,  qui  était 
prêtre  et  chargé  de  baptiser  et  d'oindre  ceux 
cl  celles  i\\n  dcmanth.ieut  le  baptême,  ue 
faisait  CCS  iDuclious  qu'avec  beaucoup  du  ré- 
pugnance à  l'égard  des  filles  et  des  femmes. 
L'évéque,  informé  (pi'il  avait  refusé  pendant  ^  ,,^ 
deux  jours  une  tille  (pii  était  venue  de  Perse, 
fut  touillé  de  la  peine  que  ce  vieillard  les- 
senlait  en  tes  occasions,  et  fui  sur  le  point 
d'envoyer  une  diaconesse  pour  faire  ces  onc- 
tions; mais,  se  souvenant  que  cela  élaitcm- 


'  Celte  ilcrniiTc  date  a  v\f-  suivie  par  \o  pi'Te  Pa- 
li(,'l)rotli,  î'r.  prœliin  ail  lom.  III,  iinm.  lU,  pag. 
32.  (L'éiliteur.) 

'  Cotcleriiis,  in  nolis,  Idiii.  Il,  MoiiKHifiit.,  pafi. 
655. 

'  Yita  Jtiiiii.  Hleniinfyn.,  cap.  \,  iiuni.  IIU. 

*  l'rotogo  in  Pralum  spirilnle. 


■'  llii.l.,  i-ap.  rxit.  —  "  lliiil.,  i-ap.  rxi\-,  r.wii. 
■>  Plinllns,  rorf .  Iflll,  p.i!;.  51!).  —  "  M.,  ihid. 
'  Tiim.  Il  ilnnunifnt.,  piiR.  3W. 
'"  l'iif.'.  328,  3*4,  3:.2. 

"  Srripliir  ejns  Jnnnnes  quidam,  iloschi  cog- 
nomnilti.  l'Iiciliii.-^,  iliitl. 
"  lUtit.  Lugdurens.  llilT,  m  Vitis  l'ai.  Ro:-vc;idi. 


ûê  Ba(i|.  pat'* 
63. 


Cap. 


[vil- SIÈCLE.]  CII.VI'ITIIK  lAMII.  —  JEA 

(raii'C  aux  canons,  il  cliaiigca  de  senliuient. 
Co  prèlrc  quitta  son  ministère  et  le  mouas- 
lère  :  mais  ayant  été  rassuré  sur  ses  craintes 
dans  une  vision  (ju'ii  eut  en  clieniin,  il  re- 
vint, et  baptisa  celle  i'i  qui  il  avait  d'abord 
refusé  le  baptême.  Les  Grecs  faisaient  donc 
encore  alors  connue  aujourd'hui  les  onilions 
sur  plusieurs  parties  du  corps,  au  fiont,  à  la 
poitrine,  au  dos,  aux  oreilles,  aux  pieds  et 
aux  mains.  Ces  onctions  se  font  chez  eux 
avant  le  l)aplème,  avec  l'huile  des  catéchu- 
mènes, lis  en  l'ont  d'autres  après  le  baptê- 
me avec  le  saint  chrême  au  l'iont,  aux  yeux, 
aux  narines,  à  la  bouche,  aux  oreilles,  à  la 
poitrine,  aux  mains  et  aux  pieds.  Un  frère 
du  monastère  do  Cuziba,  (jui  savait  les  rits 
el  les  paroles  de  l'oblation,  les  piononça 
sur  des  pains  qu'il  avait  commission  de  por- 
ter sur  l'autel.  Quand  le  prêtre  voulut  les  of- 
frir, il  ne  vit  point  descendre  le  Saint-Esprit, 
conmie  il  avait  accoutumé  de  le  voir.  Inquiet 
là-dessus,  il  fut  averti  par  un  ange  que  ces 
pains  avaient  été  consacrés  par  les  paroles 
(pie  le  frère  avait  prononcées;  ce  qui  enga- 
gea le  prêtre  à  défendre  qu'on  laissât  à  l'a- 
venir apprendre  ces  paroles  à  d'autres  qu'à 
ceux  qui  devaient  otl'rir  le  sacrifice.  — Une 
femme,  infectée  de  l'erreur  des  sévériens, 
était  allée  un  jour  chez  sa  voisine ,  qui  était  ca- 
tholique, pour  communier  avec  elle,  son  mari, 
qui  était  aussi  de  la  même  secte,  courut  pour 
l'en  empêcher,  et  la  prenant  par  la  gorge, 
la  contraignit  de  rejeter  la  sainte  hostie,  qui 
tomba  dans  la  boue.  Elle  n'y  fut  pas  plus 
tôt,  qu'un  éclair  l'enleva.  —  Il  y  avait  à  Pagi- 
ne, dans  la  Cilicie,  deuxstyliles,  l'un  catho- 
lique, l'autre  sévérien.  Le  catholique  envoya 
demander  au  sévérien  une  partie  de  sa  com- 
munion :  celui-ci  la  lui  donna,  croyant  qu'il 
voulait  prcndi'c  parti  dans  sa  secte  :  mais  le 
catholique  l'ayant  jetée  dans  l'eau  bouillante, 
elle  fut  aussitôt  délayée;  il  y  jeta  aussi  une 
partie  de  l'Eucharistie  des  catholiques,  qui 
refroidit  l'eau,  et  demeura  sans  être  trempée. 
—  Ephrem  ,  patriarche  d'Autiochc,  sachant 
qu'il  y  avait  un  solitaire  de  réputation  engagé 
dans  l'hérésie  des  sévériens,  l'alla  trouver, 
et  le  conjura  de  rentrer  dans  la  communion 
de  l'Église.  Je  ne  puis,  répondit  le  solitaire, 
avoir  de  communion  avec  ceux  qui  soutien- 
nent le  concile  de  Chalcédoine-.  Pensant  éton- 
ner le  patriarche,  il  lui  proposa  d'entrer  en- 
semble dans  le  feu,  disant  que  celui  qui  n'en 
serait  point  endommagé  serait  reconnu  pour 
orthodoxe,  et  l'autre  obligé  d'embrasser  la 


N  MOSCII  KT  SOPHRO.NE. 


701 


même  croyance.  lOphreni  lui  remontra  .sage- 
ment qu'il  ne  fallait  pas  obliger  Dieu  à  faire 
des  miracles;  mais  voyant  qu'il  persistait 
dans  sa  pro[iosiliou,  il  l'accepta.  On  alluma 
un  giauil  feu;  le  patriarche  pressa  le  S('^vé- 
rien  d'y  entrer  avec  lui.  Il  le  refusa.  Alors 
Ephrem,  après  avoir  fait  sa  prière  A  Jésus- 
(^lirist,  jeta  sa  propre  tunique  au  milieu  du 
Ituchcr  :  on  l'en  retii'a  trois  heiu'es  après, 
sans  que  la  violence  des  flammes,  qui  avaient 
consumé  tout  le  Ijois,  eût  donné  la  moindre 
atteinte  k  la  tunique.  Le  solitaire,  ne  doutant 
plus  de  la  vérité,  dit  analhèmc  à  l'hérésie  de 
Sévère,  et  retourna  à  l'Église  catholique. 

4.  De  dix  disciples  qu'avait  un  saint  vieil- 
lard dans  un  monastère  près  d'.\ntiuoûs,  un 
était  très-négligent  dans  ses  exercices  :  quoi- 
que souvent  repris,  il  ne  se  corrigeait  point. 
Il  mourut,  laissant  son  supérieur  dans  de 
grandes  inquiétudes  sur  le  sort  qu'il  aurait  eu 
dans  l'autre  vie.  Le  saint  pria  Dieu  de  le  lui 
faire  connaître.  Sa  prière  fut  exaucée.  Il  vit 
ce  frère  enfoncé  jusqu'au  cou  dans  un  grand 
fleuve  de  feu,  et  lui  adressa  ces  paroles  : 
«  Comljicn  de  fois  ne  vous  ai-je  pas  prié  d'a- 
voir soin  de  votre  àme,  pour  vous  préserver 
du  supplice  où  vous  êtes?  —  Je  rends  grâces 
h  Dieu ,  répondit  le  frère,  de  ce  q«e  par  vos 
prières  je  n'ai  pas  aussi  la  tête  dans  te  feu.  » 
Un  autre  solitaire  avait  dans  sa  cellule  une 
image  de  la  Sainte- Vierge  qui  portait  Jésus- 
Christ  entre  ses  bras.  Le  démou  l'attaqua  en 
diverses  manières,  pour  l'obliger  de  cesser 
le  culte  qu'il  rendait  à  cette  image.  Ce  soli- 
litaire,  vaincu  par  ses  importunités,  promit 
qu'il  ne  l'adorerait  plus,  et  le  démon  le  lais- 
sa tranquille.  Mais  ayant  découvert  à  l'abbé 
Théodore  ce  qui  lui  était  arrivé,  l'abbé  lui 
dit  qu'il  ne  devait  point  exécuter  cette  pro- 
messe, mais  continuer  d'adorer  Dieu  et  No- 
tre-Seigneur  Jésus-Christ,  avec  sa  très-sainte 
Mère. —  Sous  l'épiscopat  de  Denis,  évêquede 
Séleucie,  un  marchand  fort  i-iche,  de  la  sec- 
te des  sévériens,  avait  un  serviteur  qui  fai- 
sait profession  delà  religion  catholique.  Ce- 
lui-ci, selon  la  coutume  delà  province, reçut 
le  jour  du  Jeudi-Saint  la  sainte  communion, 
pour  la  garder  jusqu'au  mêmejourde  l'année 
suivante.  Il  l'enveloppa  d'un  linge  blanc,  et 
la  mit-dans  son-  armoire.  Obligé  après  Pâ- 
ques d'aller  à  Constantinople,  il  la  laissa  par 
mégarde  dans  cette  armoire  dont  il  avait 
donné  la  clef  à  son  maître.  Celui-ci  l'ayant 
ouverte,  y  trouva  les  parcelles  de  la  sainte 
communion  enveloppées  dans  ce  linge.  N'o- 


702 


msTOiRE  geni:rale  des  auteurs  ecclesiastioues. 


sant  pas  les  consumer,  parce  qu'elles  avaient 
été  consacrées  dans  l'Kirlise  catholique,  il  les 
laissa  on  l'état  où  elles  élaicnt.  espérant  que 
son  sen-ileur  reviendrait  :  celui-ci  n'étant  pas 
revenu  pour  le  Jeudi-Saint  suivant,  il  résolut 
de  les  bn'iler,  afin  de  ne  les  pas  conserver 
jusqu';\  une  seconde  année;  mais  ayant  ou- 
vert l'aruioirc,  il  vit  que  toutes  ces  saintes 
parcelles  avaient  produit  des  tuyaux  et  des 
épis. 
cjp.cLMTi  5.  L'abbé  Oclavius  racontait,  que  faisant 
dans  sa  jeunesse  le  chemin  de  la  Palestine 
avec  neuf  autres  de  son  âge,  dont  un  était  juif, 
celui-ci  tomba  malade  à  mort  dans  le  désert. 
Ils  le  portèrenl  loiij'  ;\  tour  :  mais  voyant 
qu'il  ne  pouvait  plus  soutenir  ce  secours,  ils 
le  laissèrent  sur  le  sable.  Le  juif,  voyant 
qu'ils  l'abandonnaient,  les  conjura  de  le  bap- 
tiser. Ils  le  refusèrent  d'abord,  disant  que  ce 
sacrement  ne  pouvait  être  conféré  que  par 
des  évoques  et  par  des  prêtres  ;  qu'au  sur- 
plus ils  manquaient  d'eau.  Il  insista;  et  alors 
un  de  la  compagnie ,  emplissant  ses  deux 
mains  de  sable,  en  répandit  par  trois  fois  sur 
la  tête  du  juif,  en  proférant  ces  paroles  : 
«  Théodore  est  baptisé  au  nom  du  Père,  et 
dn  Fils,  et  du  Sainl-Esprit.  »  Tous  répondi- 
rent :  Atnen;  et  sur  le  champ  le  juif  fut  en- 
tièrement guéri.  Arrivés  tous  à  Ascalon,  ils 
racontèrent  à  l'évêque  Denis  ce  qui  s'était 
passé.  L'évêque  assembla  son  clergé,  auquel 
il  exposa  l'all'aire.  Les  avis  furent  diUorents, 
les  uns  opinant  en  conséquence  du  miracle 
que  le  baptême  était  bon  ;  les  autres,  qu'on 
ne  pouvait  être  rc'généré  que  par  l'eau.  Le 
sentiment  de  l'évêque  Denis  fut  que  le  bap- 
tême était  nul.  Il  ordonna  que  le  juif  serait 
baptisé  dans  les  eaux  du  Jourdain,  et  fil  dia- 
cre celui  qui  l'avait  baptisé  avec  du  sable, 
cicfi.  6.  Dans  la  province  d'Apamée,  i\  quelque 

distance  de  la  ville  de  Thorax,  des  enfants 
qni  menaient  paître  des  troupeaux  dirent  en- 
semh)le  :  «  Célébrons  la  messe,  nlfrons  le  sa- 
crifice, et  communions  ainsi  (pie  fuit  Ip  prê- 
tre dans  l'église.  »  Us  choisirent  l'un  d'eux 
pour  tenir  la  place  du  prêtre,  et  deux  autres 
pour  l'assister,  connue  auraient  fait  un  dia- 
cre et  un  sous-diacre;  cl  pienaut  une  pierre 
élevée  pour  autel,  ils  mirent  dn  pain  dessus, 
et  du  vin  dans  un  pot  de  terre;  puis  celui 
qui  faisait  le  prêtre,  se  mettant  à  l'autel,  pro- 
férait les  paroles  tle  la  sainte  oblalion;  et  les 
autres,  se  servant  de  petits  linges  au  lieu 
d'éventails,  faisaient  élever  un  petit  vent. 
Jean  Mosch  remarque  qu'on  ne  doit  point 


trouver  étrange  que  cet  enfant  sût  les  paro- 
les de  la  consécration,  parce  que  la  coutume 
de  l'Eglise  était  que  les  enfants  qui  assis- 
taient à  la  messe,  se  tenaient  devant  l'autel, 
et  participaient  les  premiers  après  les  clercs 
aux  adorables  mystères  :  ce  qui  faisait  que 
les  prêtres  prononçant  tout  haut  en  (juclques 
endroits  les  oraisons  de  la  consécration,  ces 
enfants  les  leur  avaient  entendu  dire  si  sou- 
vent, qu'ils  les  avaient  retenues.  Il  ajoute, 
qu'ayant  donc  observé  ponctuellcnicnl  tout 
ce  qui  se  pratiquait  dans  l'église,  lorsqu'ils 
étaient  près  de  rompre  le  pain,  le  feu  du  ciel 
réduisit  en  cendres  et  la  pierre,  et  tout  ce  qui 
était  dessus,  sans  qu'il  en  restât  quoique  ce 
fût.  Il  joint  à  ce  récit  celui  que  Itullin  fait  du  c>p.  oi. 
baptême  conféré  par  saint  Athanase  encore 
enfant,  et  dit  que  ce  saint  évêque  était  du 
sentiment  que  ceux  qui  se  faisaient  baptiser 
par  crainte,  sans  avoir  la  foi,  ne  laissaient  pas 
d'être  baptisés,  encore  que  le  baptême  ne 
leur  servit  de  rien  pour  le  salut.  11  rapporte  ««' 
qu'à  Céane,  ville  de  Cilicio,  il  y  avait  des 
fonts  liaptismaux  qui  s'emplissaient  d'eux- 
mêmes  en  trois  bem'es  le  jour  de  l'Epipha- 
nie, et  se  désemplissaient  visiblement  en  au- 
tant de  temps,  lorsqu'on  avait  achevé  de  bap- 
tiser :  qu'il  y  en  avait  d'autres,  dans  le  châ- 
teau de  Cadebrale,  en  la  même  province,  qui 
n'étant  que  d'une  seule  pierre,  se  remplis- 
saient d'eux-mêmes  en  uu  moment  le  jour 
de  Pâques ,  et  que  cette  eau  y  demeurait  jus- 
qu'au jour^le  la  Pentecôte,  après  lequel  elle 
disparaissait  aussitôt.  Il  dit  ailleurs  que  les 
parrains  servaient  de  caution  pour  le  baptême 
des  personnes  inconnues,  ou  dont  la  conver- 
sion était  suspecte.  Quelque  extraordinaires 
que  paraissent  les  événements  que  nous  ve- 
nons de  rnpporter,  ils  prouvent  du  moins  la 
croyance  de  Jean  Mosch  sur  l'Eucliarislie, 
sur  l'utilité  de  la  prière  pour  les  morts,  sur 
le  purgatoire,  sur  le  culte  des  images.  Ils 
sont  aussi  les  témoignages  de  l'usage  oii 
l'on  était  de  son  temps  d'oiiulre  les  baptisés 
presque  dans  toutes  les  parties  du  corps, 
de  conserver  l'Eucharistie,  de  l'emporter 
dans  les  maisons  jiarticulières,  et  de  s'en 
cnmnninier  soi-même.  Los  autres  histoires 
qu'il  raconte,  renferment  des  exemples  sin- 
gtdiers  de  patience,  d'humilité,  d'austé- 
rité, de  simplicité,  la  plupart  ])lus  ;\  admi- 
rer qu';\  imiter.  Il  mourut  à  Rome,  et,  sui- 
vant ses  ordres,  Sophrone  transporta  son 
corps  dans  un  coure  de  bois,  qu'il  déposa 
dans  le  monastère  de  Saint-Théodose,  jus- 


CCHI. 


CHAPITRE  LXVIII.  —  .IKAN  MOSGH  ET  SOPHRONR. 


K.nUoiM  lin 
'  Hn*  «plitlitrl. 


i*  de  Je* 


[VU'"  SIKCI.E.] 

([ii'à  ce  ([ii'il  pûl  être  pciik'  au  iiionaslôre du 
Monl-Sinaï,  dont  les  AiaLes  cmpécliaicnl 
alors  d'approcher. 

7.  Le  Pré  spirituel  fut  imprimû  en  lalin, 
delà  traduction d'Ambroise  Ganialdulc,dans 
le  septième  tome  de  Lipoman  à  Venise  on 
lo.'iS,  et  si-paiémeat  à  Cologne  en  1383  :  on 
le  réimprima  en  la  même  ville,  en  Io'J3  et 
1601,  i'n-8,  avec  les  œuvres  de  saint  Jean 
Climaque  ;  i^  Anvers,  en  d6l."j;  î^i  Lyon,  en 
161"  ;  à  Anvers,  en  1G28  in-fol. ,  parmi  les 
Vies  des  Pères  de  Rosweyde,  dont  il  fait  le 
dixième  livre.  Il  se  trouve  aussi  dans  toutes 
les  Bibliothèques  des  Pères.  [11  est  au  tome 
LXXIV  de  la  Pcdrologie  lutine,  col.  IIO-^W]. 
Nous  l'avons  en  grec  el;  en  latin  dans  le  se- 
cond tome  de  l'Aucttiarium  de  Fronton  le 
Duc,  à  Paris  en  1624;  dans  le  treizième  de 
la  Bibliothèque  des  Pères,  imprimée  en  la 
même  ville,  en  1644  et  1634.  Comme  le  texte 
grec  n'y  était  que  fort  imparfait,  M.  Cotclier 
l'a  suppléé,  sur  trois  manuscrits  de  la  Biblio- 
thèque de  M.  Colbcrt,  dans  son  second  tome 
des  Monuments  de  l'Eglise  grecque ,  à  Paris 
en  1681  in-4°  [il  est  reproduit  au  tome 
LXXXVII  delà  Patrologie grccgue,  col.  2343- 
3116].  Paschal  d'Orange,  de  l'ordre  des  Frè- 
res Mineurs,  mit  en  français  le  Pré  spirituel, 
qui  fut  imprimé  en  cette  langaie  à  Louvain, 
en  1590.  Nous  en  avons  une  autre  traduc- 
tion de  M.  d'Andilly,  dans  le  second  tome 
des  Vies  des  Pères  des  déserts,  à  Paris,  en 
1633  :  mais  elle  ne  commence  qu'au  sep- 
tième chapitre. 

8.  Le  moine  Sophrone  étant  venu  de  Jé- 
lusalem  à  Alexandrie,  Cyrus,  qui  en  était 
cvêque,  et  qui  connaissait  son  savoir,  lui 
donna  à  examiner  les  articles  d'un  projet 
qu'il  avait  fait  pour  la  réunion  des  Eglises. 
Sophrone,  trouvant  qu'ils  contenaient  les  er- 
reurs d'Apollinaire,  pria  Cyrus  de  ne  les 
point  publier  ;  mais  Cyrus  n'eut  aucun  égard 
à  ses  remontrances.  Celles  qu'il  fit  à  Sergius 
de  Constantinople,  n'eurent  pas  un  plus  heu- 
reux succès  ;  et  ces  deux  prélats  s'unirent 
pour  établir  le  monothélisme.  Cependant  Mo- 
deste, patriarche  de  Jérusalem,  étant  mort 
en  633,  Sophrone  fut  élu  pour  lui  succéder. 
Aussitôt  il  assembla  son  concile,  et  écrivit 
une  lettre  synodale,  suivant  la  coutume, 
pour  rendre  compte  de  sa  foi  aux  évêques 

>  Tnm.  VI  Concil.,  pag.  832. 

2  Sirut  enim  in  Cftristo  titraqiie  natiira  incli- 
minule  proprietatem  suain  custodit,  ita  et  opera- 
tur  ulraque  forma  cum  alterius  comnvunicalione 


7();i 


des  grands  sièges  :  d'où  vient  que,  dans 
([iielques  exemplaires,  elle  est  adressée  au 
pape  llonorius,  et  en  d'autres  i'i  Sergius,  pa- 
triarche de  Constantinople.  Elle  changeait 
d'inscription,  selon  les  personnes  à  qui  elle 
était  envoyée,  à  la  manière  des  lettres  cir- 
culaires. Cette  lettre,  qui  est  fort  longue,  a 
été  imprimée  en  partie  dans  le  huitième  to- 
me des  Annales  de  Jiaronius,  mais  seule- 
ment en  latin.  Elle  est  tout  entière  en  grec 
el  en  latin  dans  le  recueil  des  actes  du  sixiè- 
me concile  général  contre  les  monolhélites 
en  680. 

9.  Sophrone  fait  d'abord  dans  celte  lettre  An.-,i«i 
sa  confession  de  foi,  où  il  explique  le  mys-  ".le."" 
tère  de  la  Trinité  ,  et  l'établit  contre  les  hé- 
rétiques qui  l'ont  attaqué  '.  Il  établit  de  mê- 
me le  mystère  de  l'Incarnation,  en  s'appli- 
quant  particulièrement  à  prouver  l'unité  de 
personne  en  Jésus-Christ  contre  Nestorius, 
el  la  distinction  des  natures  contre  Euty- 
chès.  Ces  deux  vérités  établies,  il  en  conclut 
que  le  même  Jésus-Christ  opérait  réellement 
ce  qui  convenait  à  l'une  el  à  l'autre  nature  ; 
ce  qu'il  n'aurait  pas  fait,  s'il  n'y  avait  eu 
qu'une  nature  en  lui.  «  Comme  il  n'y  avait 
qu'une  personne,  comment  la  Divinité  aurait- 
elle  sansDiumanité  fait  les  fonctions  corpo- 
relles? Ou  comment  le  corps,  séparé  de  la  Di- 
vinité, aurail-il  fait  les  actions  qui  sont  es- 
sentiellement propres  à  la  Divinité?  Mais 
Emmanuel  étant  un  et  le  même,  Dieu  et 
homme  dans  les  deux  natures,  il  a  fait  com- 
me Dieu  les  œuvres  qui  n'appartiennent  qu'à 
Dieu,  et  comme  homme,  celles  qui  sont  de 
la  nature  humaine.  Ce  n'est  pas  un  autre 
qui  a  fait  les  miracles,  et  un  autre  qui  a  souf- 
fert ;  c'est  le  même  Jésus-Christ  :  comme  en 
lui  chaque  nature  conserve  sa  propriété  sans 
aucune  diminution  -,  ainsi  chacune  opère  ce 
qui  lui  est  propre  avec  la  participation  de 
l'autre  nature.  Le  Verbe  opère  ce-qui  est  du 
Verbe,  avec  la  participation  du  corps;  et 
la  chair  exécute  ce  qui  est  de  la  chair,  avec 
la  participation  du  Vei-be.  Les  opérations  de 
chaque  nature  sont  réelles,  naturelles  et 
convenables,  el  proviennent  indivisibloment 
de  l'essence  de  chacune  d'elles,  quoique 
l'une  n'opère  point  sans  l'autre,  toutes  les 
deux  étant  unies  sans  confusion  en  une  mê- 
me personne  .•  c'est  pourquoi  on  ne  peut  pas 

quod  prnprium  habuil  ,  Verbo  opérante  quod 
Verbi  est,  cum  commuiuone  scilicet  corpori.t,  et 
carne  cxequenle  quod  carnis  est,  communicante 
ei  videlicet  Ycrbo.  Ibid.,  pag.  872. 


704 


HISTOIRE  GKNKHALE  DES  AUTEUllS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Pa;.  873  el 

mir. 


Pis.  8S0. 


dire  (jirelles  aient  une  seule  opération  réelle, 
naturelle  et  indistincte,  parce  que  ce  serait 
les  réduire  ;\  une  seule  substance  ou  à  une 
seule  nature,  suivant  l'eneurdcs  acéphales, 
les  natures  ne  se  connaissant  que  par  les 
opérations.  » 

10.  Pour  mieux  faiie  connaîlrc  la  distinc- 
tion des  opérations  de  chaque  nature,  So- 
phronc  t'ait  preiuiéreiucnt  le  détail  de  celles 
de  la  nature  liumaine,  disant  que  Jésus- 
Christ  est  né  comme  nous,  qu'il  a  été  nourri 
de  lait,  qu'il  a  passé  parlesditlerents  déférés 
de  grandeur  de  corps  et  d'âge,  jusqu'à  ce 
qu'il  fût  devenu  homme  parfait  ;  qu'il  a  souf- 
fert la  faim,  la  soit',  la  fatigue  des  voyages, 
la  douleur  des  tourments,  la  mort.  Il  met 
entre  les  opérations  divines  de  Jésus-Christ 
sa  conception  miraculeuse,  sa  naissance  qui 
n'a  fait  aucun  tort  à  la  virginité  de  sa  mère, 
la  manière  miraculeuse  dont  les  bergers  et 
les  mages  connurent  le  lieu  de  sa  naissance, 
le  changement  d'eau  en  vin,  la  guérison  des 
malades,  qui,  encore  qu'exécutée  par  le 
corps,  sont  des  preuves  de  la  divinité.  Ce 
Père  distingue  ensuite  dans  Jésus-Christ 
des  opératious  d'uu  moyen  ordre  ',  c'est-à- 
dire  ,  qui  ont  en  même  temps  quelque  chose 
de  divin  et  d'Iinniaiu.  Il  les  appelle  théan- 
driques  ou  déivirilcs,  suivant  le  langage  de 
saint  Denis  l'Aréopagite ,  dont  les  livres 
étaient  reçus  alors  sans  contestation,  quoi- 
qu'on ne  les  connût  pas  cent  ans  aupara- 
vant. *  Les  monolhélites  s'autoiisaieut  de 
cette  expression  pour  établir  leur  erreur; 
mais  on  leur  fit  voir  dans  la  suite  que  le  mot 
de  théandrique  renfermait  nécessairement 
deux  opérations,  et  que  saint  Denis  ne  l'avait 
employé  que  pour  marquer  l'union  de  ces 
deux  opérations  en  une  même  personne,  qui 
faisait  '  humainement  les  actions  divines,  et 
divinement  les  actions  humaines.  Il  faisait  les 
miracles  par  sa  chair  animée  d'une  âme  rai- 
sonnable, et  unie  à  lui  personnellement;  et 
par  sa  vertu  toute-puissante,  il  se  soumettait 
Yoloulaii  émeut  aux  souffrances  qui  nous  ont 
donné  la  vie. 

H.  Soiihrone  condamne  l'erreur  d'Urigè- 
nc ,   de   Didynic  et  d'Évagre   touchant  la 


préexistence  des  âmes,  en  tout  ce  qu'ils 
avaient  enseigné  de  contraire  à  la  tradition 
apostolique;  puis  il  déclare  qu'il  reçoit  les 
quatre  premiers  conciles  géiufraiix,  de  Nicée, 
de  Conslantinople,  d'Ephèse  et  de  Clialcé- 
doine,  auxquels  il  joint  le  cinquième,  c'est- 
à-dire  le  second  de  Constantinople.  comme 
étant  d'une  égale  autorilii,  approuvant  tout 
ce  qu'il  avait  reçu,  et  rejetant  tout  ce  qu'il 
avait  condamné,  soit  par  lapport  aux  dog- 
mes, soit  par  rapport  aux  personnes.  Il  re- 
çoit aussi  les  écrits  de  saint  Cyrille  contre 
iNestorius,  et  la  lettre  de  saint  Léon  à  Fla- 
vien,  comme  si  c'étaient  des  décisions  de 
saint  Pierre  et  de  saint  .Marc.  Ensuite,  après 
avoir  rapporté  les  noms  de  tous  les  héréti- 
ques depuis  Simon  le  .Magicien  jusqu'aux 
trithéiles,  dont  Philoponus  était  le  chef,  il  les 
anatbématisc  tous.  Il  distingue  entre  eux 
deux  Origènes,  l'un  surnommé  Helcéséus, 
l'autre  Adamantins.  11  joint  Magnus  aux  deux 
Apollinaires.  Il  n'en  est  rien  dit  dans  le  con- 
cile de  Rome  sous  Damase,  où  .\pollinaire 
fut  condamné  avec  sa  doctrine.  Dans  la 
crainte  qu'il  ne  lui  fut  échappé  quelque 
chose  qui  méritât  d'être  corrigé,  il  soumet 
sa  lettre  synodale  à  la  correction  d'Honorius, 
de  Sergius,  et  sans  doute  de  tous  ceux  à  qui 
il  l'avait  envoyée,  et  se  recommande  à  leurs 
prières,  de  même  que  ceux  qui  l'avaient  ai- 
dé à  la  composer,  entre  autres  Léontius, 
diacre,  et  Polyeucte.  «  Priez  aussi,  ajoutc-t- 
il,  pour  lios  empereurs  (Héraclius  et  son  fils), 
afin  que  Dieu  leur  donne  la  victoire  sur  tous 
les  barbares,  mais  principalement  qu'il  abais- 
se l'orgueil  des  Sarrasins,  qui  pour  iu)S  pé- 
chés viennent  de  s'cilever  contre  nous  inopi- 
nément, et  ravagent  tout  avec  cruauté.  » 
Photius  parle  d'une  lettre  synodique  de  So- 
phrone  adressée  au  pape  Ilonorius,  on  il  di- 
sait que  Théodorct  n'avait  point  été  chassé 
de  l'Eglise,  quoiqu'il  n'eût  pas  été  d'accord 
avec  saint  Cyrille.  On  ne  lit  rien  de  sembla- 
l)le  dans  la  lettre  synodique  dont  nous  ve- 
nons de  donner  l'exlrail  :  il  y  est  dit  seule- 
ment que  le  cinquième  concile  condamna 
les  écrits  de  Théodorct  contre  les  douze 
analhématismcs  de  saint  Cvrille  et  contre  le 


'  Licct  quœdam  earitm  opcralionum  sitit  Dca 
diciOiles,iiU(rdum  vero  itarursus  liuiiniiui',  quw- 
tiam  vero  iniduim  queiiKlam  uniiiicm  oblinent, 
liinquam  habentes  in  hoc  ipso  Dco  digiium  quid 
el  huinaiiuin.  Iltijus  vero  asscrimus,  esse  virlulis 
rlinm  iHaiu  quœ  dicilur  nova  {i-.nvv.  cummuiiis)el 
(kiviriUs  operaUo...  quain  ex  Areopago  a  l'aulo 


diviniliis  caplus...  asseruil  Diomjsius.  I'.ik.  880. 

'  Voyt'Z ,  sur  cette  asscrliou  de  U.  Ccillicr,  U:  sup- 
pltMiieiit  ilii  loiiu'  .\,  pas.  751   et  suiv.   (l.'cdKrur.) 

'  Sunimœ  unionis  est  propriuvi  per  imniutatio- 
nem  sublimiler  opcrari  ulnique,  id  est,  eumdem 
humane  divina,  el  divine  huniana.  Concil.  Lale- 
ranense,  loui.  VI,  Concil.,  pag.  187. 


LpKro  do 

Hoii.i.iu'.no* 
Cil.  Il  .11-  r.i->.l- 

ifun-. 


Autres  écrit? 
de  Sopliroae. 
Jugement  des 
écrits  de  Su* 
pbrooe* 


[vil'  sitcLE.]    CHAPITltE  LXVIII.  —  JEAN 

concile  d'Éplièse,  et  ceux  qu'il  avait  compo- 
sés pour  Dimlore  de  Tarse  et  Tliondoii;  de 
Mopsueslo.  Du  l'Cste,  ce  que  Pluiliiis  dit  de 
la  leltie  ii  Ilonorins,  se  trouve  cuntonne  à 
cette  lettre  synodale. 

12.  Sopluoue  ,  voyant  qu'elle  n'avait  pro- 
duit aucun  ellet,  et  que  l'erreur  des  niouo- 
Ihélites  se  répandait  de  plus  en  plus,  re- 
cueillit' eu  deux  volumes  six  cents  passages 
des  Pères,  pour  les  convainci'e  et  les  rame- 
ner à  la  saine  doctrine.  11  députa  même  à 
Rome  Etienne,  évoque  de  Dore,  le  premier 
de  ses  sullragants ,  qni  assista  depuis  au 
concile  de  Latran  en  Gi'J  :  mais,  avant  de 
le  faire  partir  pour  l'Italie  ,  il  le  mena  au 
Calvaire,  et  lui  dit"  :  »  Vous  rendrez  compte 
à  celui  qui  a  été  crucifié  en  ce  saint  lieu , 
quand  il  viendra  juger  les  vivants  et  les 
morts,  si  vous  négligez  le  péril  où  la  foi  se 
trouve.  Faites  donc  ce  que  je  ne  puis  faire 
eu  personne,  à  cause  de  l'incursion  des  Sar- 
rasins :  allez  promptement  à  cette  extrémité 
delà  terre  ,  vous  présenter  au  Siège  aposto- 
lique ,  où  sont  les  fondements  de  la  saine 
doctrine  :  faites  connaître  aux  saints  person- 
nages qui  y  siiiit,  tout  ce  qni  passe  ici,  et 
ne  cessez  point  de  les  prier,  jusqu'à  ce  qu'ils 
jugent  cette  nouvelle  doctrine  et  la  condam- 
nent canoniquement.i)  Etienne,  effrayé  par 
cette  conjuration  ,  et  pressé  par  les  prières 
de  plusieurs  autres  évêqncs  et  des  peuples 
catholiques  ,  se  mit  en  chemin  et  arriva  ;\ 
Rome ,  malgré  les  ordres  que  les  monothé- 
lites  avaient  donnés  pour  l'arrêter  et  le  ren- 
voyer chargé  de  chaînes.  Sopbrone  lui  donna 
sans  doute  une  lettre  pour  le  papeHonorius. 
Elle  n'est  pas  venue  jusqu'à  nous ,  non  plus 
que  son  recueil  de  passages. 

13.  Nous  avons  ^  eucore  de  lui  qu;itre  Dis- 
cours ou  Homélies  :  la  première ,  sui'  la  nais- 
sance de  Jésus-Christ  ;  la  seconde ,  en  l'hon- 
neur des  saints  Anges;  la  troisième,  sur 
l'Exaltation  de  la  sainte  Croix  et  sur  la  Ré- 
surrection ;  la  quatrième  ,  sur  l'adoration  de 
la  Croix  et  sur  le  jeûne  du  Carême.  Il  se 
plaint  amèrement  dans  l'Homélie  sur  la  nais- 


MOSCIl  ET  SAINT  SUPHRUNE. 


705 


sance  du  Sauveur,  de  ce  que  les  Sarrasins, 
qui  occupaient  Bethléem  et  faisaient  des 
courses  dans  les  environs,  ne  lui  permet- 
taient pas,  non  plus  qu'à  son  peuple  ,  d'aller 
ce  jour-là  en  ce  saint  lieu  ,  pour  satisfaire  à 
leur  dévotion  suivant  la  coutume.  Ces  Bar- 
bares avaient  menacé  de  mort  tous  ceux  qui 
iraient  à  Bethléem.  Le  saint  évoque  fut  donc 
contraint  de  célébrer  la  f6te  de  Noël  dans 
l'église  dédiée  à  la  Mère  de  Dieu  dans  l'en- 
ceinte de  la  ville  de  Jérusalem.  Il  enseigne 
dans  l'Homélie  sur  les  Anges  qu'il  n'y  a  point 
d'homme  qui  n'ait  son  ange  gardien.  On  voit 
par  l'Homélie  sur  l'Exaltation  de  la  sainte 
Croix,  qu'on  en  faisait  la  fête  chaque  année, 
et  parla  suivante,  qu'on  déposait  cette  croix 
en  public  à  la  Mi-Carême  *,  pour  être  adorée 
des  fidèles.  Ces  deux  dernières  homélies  ont 
été  données  en  grec  par  Gretzer  ^.  Saint 
Jean  Damascène  cite  sous  le  nom  de  Sopbro- 
ne '*  l'éloge  des  martyrs  saint  Cyr  et  saint 
Jean.  Il  y  en  a  deux  fragments  dans  les  actes 
du  septième  concile  général  sur  les  images. 
Papebroch'  promettait  de  le  donner  tout  en- 
tier en  grec  et  en  latin  *.  Il  ne  croit  pas 'que 
la  Vie  de  sainte  Marie  d'Egypte  soit  de  So- 
pbrone :  elle  est  toutefois  dans  de  très-an- 
ciens '"  manuscrits  sous  le  nom  de  cet  évê- 
que ,  et  elle  lui  est  attribuée  par  saint 
Damascène  ".  BoUandus  a  donné,  en  latin 
seulement ,  dans  le  premier  tome  de  Février, 
un  discours  sur  la  fête  de  la  llcucontre  ou 
de  la  Présentation  de  Jésus-Christ  au  tem- 
ple ,  qui  porte  le  nom  de  Sopbrone  dans  un 
manuscrit  de  la  Bibliothèque  de  Médicis. 

Les  autres  écrits  qu'on  a  divulgués  sous 
son  nom  sont:  le  traité-imparfait  qui  a  pour 
titre  ,  Des  travaux  et  des  voyages  de  saint  Pierre 
et  de  saint  Paul  ;  l'éloge  de  ces  deux  apôtres; 
l'écrit  touchant  le  Baptême  des  apôtres , 
imprimé  à  Hambourg,  en  1714,  à  la  suite 
du  faux  Dorojbée  de  Tyr'-;  l'éloge  de  saint 
Jean  l'Évangéliste,  dont  on  trouve  un  frag- 
ment sur  le  troisième  livre  des  Constitutions 
apostoliques,  de  l'édition  de  M.  Cotelier;  le 
Discours  sur  le  saint  Précurseur,  donné  en 


'  Tom.  VI  Concil.,  pag.  104.—  »  Ibid. 

3  Tom.  Ml  Bibliolh.  Pat.,  pag.  206. 

*  In  medio  jejunii,  adorationis.graiia,  proponi 
solel  lignum  vitale  venerandw  crucis.  Ibid.,  pag, 
214. 

5  Tom.  Il,  De  Cruce,  pag.  88. 

^  Damascen.,  lib.  III  De  Imagin.,  pag.  387,  et 
Synod.  vu,  act.  4. 

"  Papebrock.,  ud  11  Mari.,  tom.  II. 

XI. 


8  Cet  (îlogea  été  publié  parle  cardinal  Mai,  1. 111 
àaSpicilegium  Roinanum.yoas  en  parlerons  ci-des- 
sous. {L'édileiir.) 

9  Id.,  ad  diem  l  aprilis. 

'0  Lauibeoius,  lib.  IV,  pag.  128,  et  lib.  V,  pag.  27  ; 
et  Bibliolh.  Coissiniana,  pag.  226. 

11  Lib.  III  De  Imag..  pag.  388. 

i-Cet  écrit  est  reproduit  au  tome  LXXXVII  de  la 
Patrologie  grecque,  col.  3371.  [L'éditeur.) 

45 


7Wi 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


latin  dans  la  Bibliothèque 'des  pn'-dicateurs 
par  le  P.  Combefis;  les  Panégyrinues  de 
saint  Jean  Clirysostome  et  de  saint  Jean  l'Au- 
mônier ;  un  poëme  sur  le  vieillard  Siméon 
qui  reçoit  Jésus-Christ  entre  ses  bras.  Le  P. 
Labbe  avait  vu,  dans  la  Ifil)liotlièque  du  Roi, 
un  traité  de  Sophroue  intitulé,  De  l'Incar- 
nation d'un  de  la  Trinité;  mais  la  plupart  de 
ces  discours  sont  si  peu  de  chose,  qu'on 
peut  se  dispenser  d'en  chercher  les  auteurs 
véritables. 

Photius  dit  ',  en  parlant  du  style  de  So- 
phrone  ,  qu'il  se  sert  de  termes  extrordinai- 
res,  qu'il  va  par  bonds  et  par  sauts  ,  mais 
que  ses  écrits  respirent  une  vraie  piété  ; 
qu'on  y  trouve  une  •connaissauce  solide  et 


une  discussion  exacte  des  dogmes  de  la  Re- 
ligion. C'est  ce  qu'il  dit  en  particulier  de  sa 
lettre  synodale  au  pape  Hoiiorius. 

14.  Photius  parle  d'un  autre  Sophrone  qui 
écrivit  pour  la  défense  de  saint  Basile  contre 
F^unomius*.  «Il  était,  dit-il,  plus  savant  que 
Théodore ,  qui  écrivit  aussi  une  apologie 
plus  courte  poiu"  ce  saint  évéque.  Il  ne  sui- 
vait pas  tout  ce  qu'avait  dit  Eimomius  ;  son 
caractère  était  tranchant,  son  style  libre  et 
simple  :  et  quoiqu'il  fût  rempli  de  raisonne- 
ments de  logique ,  il  n'était  point  désagréa- 
ble. ))  Il  ne  nous  reste  rien  de  ce  Sophrone. 
Celui  de  Jérusalem  mourut  peu  de  temps 
après  la  prise  de  Jérusalem  par  les  Musul- 
mans, qui  arriva  en  636. 


Antre  S«- 
pbroae. 


APPENDICE 
Au  chapitre  de  Dom  Ceillier  sur  saint  Sophrone  de  Jérusalem. 


LXXXVI 

de    la  Patroi. 
^recque, 


Ediiion       1.  [Dans  la  préface  du  tome  X  des  Scrip- 

enni(lè)e    de!  >-  r  r 

s""!!  hroSS  (omm  w^en/m,  le  cardinal  Mai  marque  son 
"'lxxxv°î'°  étonnement  de  ce  que  personne  avant  lui 
u'a  songé  à.  donner  une  édition  des  œuvres 
de  saint  Sophrone  de  Jérusalem ,  une  des 
gloires  de  l'Église  et  son  principal  athlète 
contre  les  monothélites  ;  il  aurait  voulu  réu- 
nir les  écrits  édités  de  ce  Père,  qui  se  trou- 
vaient dispersés  dans  diverses  collections,  et 
les  ouvrages  inédits  conservés  dans  les  ma- 
nuscrits du  Vatican.  Ses  nombreux  travaux 
ne  lui  ont  permis  que  de  remplir  la  dernière 
partie  de  cette  tâche  ;  mais  le  désir  du  sa- 
vant cardinal  a  été  réaUsé  en  entier  par  l'é- 
diteur de  la  Palrologie  grecque,  dans  le  tome 
LXXXVIl,  3113-4015.  Le  recueil  est  précédé 
d'une  notice  siu:  saint  Sophrone,  tirée  de  Fa- 
bricius,  et  de  sa  Vie  par  les  BoUandistes.  Les 
œuvres  comprennent  l'rlpître  synodique  à 
Sergius  de  Constantino[)le,  d'après  Mansi  ; 
huit  Discours  d'après  les  éditions  d'Antoine 
Ballerini,  d'AngeloMaï,  deGretser,  de  Com- 
befis, de  Cotelier,  les  Actes  des  Saints  par 
les  BoUandistes,  et  la  Bibliothèque  des  Pères. 
N'iennent  ensuite  la  Confession  des  péchés, 
d'après  Mai  ;  un  fragment  sur  le  Baptême  des 
apôtres,  d'après  Lambécius  ;  l'éloge  de  saint 
t>yr  et  de  saint  Jean  martyrs,  d'après  .Mai; 
la  Vie  de  sainte  Marie  d'Egypte,  d'après  les 


BoUandistes  ;  les  Poèmes  anacréontiques , 
d'après  Mai  ;  le  Triodiuni,  le  Commentaire 
liturgique,  d'après  le  même  éditeur;  une 
prière,  d'après  le  Rituel  des  Grecs,  publié 
par  Goar;  l'épitaphe  d'Euloge  et  de  Jean 
l'Aumônier,  archevêques  d'Alexandrie,  d'a- 
près les  Analectes  de  Briinck  ;  un  fragment 
dogmatique,  d'après  Mai;  les  travaux,  les 
combats  et  les  voyages  de  saint  Pierre  et  de 
saint  Paul  sont  rapportés  à  la  suite,  comme 
écrits  supposés,  d'après  la  Bibliothèque  des 
Pères.  Nous  allons  parler  des  écrits  qui  ont 
été  publiés  depuis  Dom  Ceillier. 

2.  Les  neuf  Discours  réunis  dans  la  Pa- 
trologie  sont  :  1°  sur  la  Naissance  de  Jésus-  ",1 
Christ;  2°  sur  l'Annonciation  de  la  sainte 
Vierge  ;  3°  surla  Présentation  ou  la  Rencontre 
du  Seigneur  ;  4°  et  5°  sur  l'adoration  de  la 
Sainte-Croix  ;  6°  sur  les  saints  Anges  ;  7°  l'é- 
loge de  saint  Jean-Baptiste;  8°  le  panégyrique 
de  saint  Pierre  et  de  saint  Paul  ;  t)°  uu  frag- 
ment du  panégyrique  de  saint  Jean  l'Évan- 
géliste.  Le  deuxième,  le  septième  et  le  hui- 
tième sont  les  seuls  discours  qui  aient  été 
publiés  récemment.  Le  Père  .\nloine  Balle- 
rini  a  fait  paraître  l'homélie  sur  l'Annoncia- 
tion de  la  saiu(e  Vierge,  au  tome  II  de  son  5y/- 
liiijc  Moniimriil.  L'éditeur  n'hésite  pasîï placer 
pour  le  mérite  cette  homélie  immédiatement 


DiKonr*, 
«or    l'Aonnn. 


'  Hœc  e[iislola  plena  est  piclale,  novis  passim 
vtrbis.ul  equi pnllu^  snllibus  gaudens,  ni.iiijuod 
rectam  opinionem  diligcnter  examinel,  cl  sacro- 


rum  dogmalum  non  forluUain  esse  cognilionem 
oslendal.  Plioliiis,  cod.  231.  —  *  Pliotius,  cod.  5, 
png.  7.  —  '  Viiyez  tom.  VI,  pag.  108. 


[Vir  SIÈCLE.! 


CHAPITRE  LXVIll.  —  APPl 


ï*ulr.  tome 
LXXXVll, 
ri<l.33l:l. 


lUd.,  toi. 


iiprtNs  la  lellre  synodale.  Le  but  ([iio  s'y  pro- 
pose l'orateur  ost  principalemenl  (l'e\pli([ner 
p|  ilccéléhicr  le  niyslèn^  de  la  \'iei;j;e  saliK'e 
par  l'Ange;  cependant  d^sle  conuneiiceuient 
il  expose  et  explique  la  doctrine  de  l'aiignste 
Trinité,  ce  qu'il  conliiuic  i'i  Irailei' avec  beau- 
coup d'étendue  dans  dix  paragraphes.  Il  y 
expose  trtis-cxactement  la  doctrine  catholi- 
que contre  les  erreurs  anciennes  des  sabcl- 
liens,  des  ariens,  des  pneumatiques,  et  con- 
tre les  iEipi(''lt''s  ri'ceulcs  des  acéphiiles  et 
des  tliéopascliites  qui,  sous  la  conduite  de 
Pierre  Cnaphée,  altérant  le  Trisagion  et 
mêlant  tout ,  transl'éraicnt  sottement  la 
prédication  de  la  croix  h  l'auguste  Trinité. 
Quand  l'orateur  aborde  son  sujet  principal, 
il  le  suit  avec  non  moins  de  bonheur.  Là,  se 
trouvent  exposés  très-clairement  la  condition 
primitive  de  l'homme  àsa  création,  lafuneste 
chute  du  genre  humain,  la  miséricorde  de 
Dieupour  relever  l'homme.  Ony  trouve  aussi 
expliquée  la  doctrine  de  l'Église  sur  le  mystère 
de  l'Incarnation  contre  toutes  les  hérésies, 
d'une  manière  si  claire,  qu'on  peut  à  bon 
droit  comparer  cet  opuscule  à  la  lettre  sy- 
nodale qui  mérita  les  éloges  du  sixième  con- 
cile généi-al.  Nous  ne  devons  pas  oublier  ce 
que  saint  Sophrone  dit  sur  les  prérogatives 
dont  la  sainte  Vierge  fut  honorée  pour  de- 
venir digne  d'être  choisie  comme  mère  de 
r>ieu,  ni  la  comparaison  qu'il  fait  entre  Ma- 
rie et  Eve  innocente  pour  donner  l'avantage 
;\  Marie.  Il  le  fait  avec  une  piété  et  une  sa- 
gesse qu'on  cherclierait  en  vain  dans  ses 
autres  écrits  ;  aussi  est-ce  un  des  plus  beaux 
monuments  qui  nous  restent  de  cet  écrivain 
distingué. 

L'authenticité  de  cette  homélie  nous  est 
garantie  par  l'autorité  des  manuscrits,  qui 
l'attribuent  tous  à  saint  Sophrone  de  Jérusa- 
lem ;  par  le  style,  les  pensées,  les  vérités 
que  l'auteur  y  établit  ,  les  erreurs  qu'il  y 
combat.  Comme  l'erreur  des  monotliélites 
n'est  point  combattue  dans  ce  discours,  l'é- 
diteur pense  qu'il  fut  prononcé  avant  l'élé- 
vation de  Soplirone  sur  le  siège  de  Jérusa- 
lem. En  eti'et,  Sophrone  s'y  désigne  sous  le 
titre  de  i:  «xuroj,  le  plus  petit,  nom  qui  con- 
vient plutôt  à  un  moine  qu'à  un  évêque 
parlant  à  son  peuple. 

'  Sic  ergo  sulutis  noslrœ  sollicitus,  cujus  rei 
i/ratia  ad  nos  quoque  de  fcelo  venit,  piscatorum 
deleclum  fecit ,  hisQUe  (/raliam  coiitulit  apostn- 
laluS:ipsorumutiyue  iiumcro  congriiam,  quin  lu- 
men idcirco  clividerel  eorumdem  dignilatem,  tint 


':NniCE  SlIU  SAINT  SOPHRONE.  707 

Ce  discours  a  été  édité  d'après  une  copie 
do  l'exemplaire  Coislin ,  conservé  à  Paris 
avec  les  variantes  de  l'exemplaire  de  Vienne, 
et  avec  plusieurs  notes  de  l'éditeur,  h  qui 
on  est  redevable  aussi  de  la  traduction  la- 
tine. 

Le  cardinal  Mai  a  publié  ce  discours  au 
tome  IV  du  Spicilcr/iian  romnntim,  p.  130  et 
suiv.,  en  grec  et  en  latin.  Harless,  Diblioth. 
(/m'en,  prétend  à  tort  que  Combefis  a  édité 
ce  discours.  L'éloge  de  saint  Pierre  et  de 
saint  Paul  avait  déjà  été  publié  à  Rome  en 
1066,  par  les  soins  de  Jean-François  Albani, 
âgé  alors  de  17  ans,  et  qui  fut  depuis  Clé- 
ment XI  ;  mais  celte  édition  a  été  générale- 
ment inconnue  aux  écrivains  de  VHisloire 
littéraire,  et  Mai  lui-même  l'a  ignorée.  Il  s'en 
répandit  si  peu  d'exemplaires,  qu'à  Rome 
même  on  en  trouve  diflicilement  dans  les 
mélanges  des  bibliothèques  de  la  ville. 

Dans  cet  éloge,  on  trouve  une  belle  expo- 
sition de  la  primauté  de  saint  Pierre  même 
sur  saint  Paul  '. 

4.  L'opuscule  sur  la  confession  ,  publié 
par  Mai  au  tome  111  du  Spiciley.  romanum, 
nous  apprend  combien  celui  qui  reçoit  les 
confessions  des  pénitenls  doit  être  instiuit  de 
la  doctrine  morale  et  canonique,  afin  de  pou- 
voir connaître  les  différents  genres  de  fautes, 
et  les  remèdes  piopres  à  ces  fautes.  Il  donne 
ensuite  les  canons  péuitenliaux,  sans  doute 
comme  on  les  pratiquait  à  Jérusalem.  L'édi- 
teur a  fait  précéder  ce  fragment  d'une  courte 
préface,  où  il  en  donne  le  contenu  et  en 
montre  l'authenticité. 

5.  Le  troisième  volume  du  5/Jia7egr.  roman. 
renferme  l'éloge  des  saints  martyrs  Cyr  et 
Jean,  et  le  récit  de  leurs  miracles  en  grec  et 
en  latin,  p.  1  et  669.  Nous  en  avons  déjà 
parlé  ailleurs  *.  La  traduction  imprimée  au 
bas  du  texte  est  elle-même  ancienne  ;  elle 
est  due  à  Boniface  le  Conseiller  et  à  Anas- 
tase  le  Bibliothécaire  :  elle  est  quelquefois 
peu  polie,  peu  fidèle,  mais  toujours  vénéra- 
ble par  son  antiquité.  Plusieurs  preuves 
dogmatiques  ressortent  de  cet  ouvrage.  1°  La 
présence  réelle  y  est  établie.  L'auteur  y 
combat  ceux  qui,  venant  au  tombeau  des 
saints  martyrs ,  i-efusaient  de  s'approcher 
des  saints  mystères,  et  qui,  au  lieu  du  saint 

perturbationem  ordini  inducerel,  sed  rum  apos- 
tolicw  dicjnitatis  yraliœque  iinilale,  difl'erentiam 
ordinis  conserviivit.  Pat.   grœc.  tom.  L.\XXVII, 
col.  .IMS. 
^  Voyez  le  tome  111,  pag.  01,  62.  (L'éditeur.) 


Eloge  do 
■failli  Joaa  la 
l'récur^eur  ; 
KIogo  de«alnt 
Pierro  «t  do 
5'ilut  Foui. 
l'nlrol.    romo 

i-xxxvn , 

col,    :i3t)5   ot 

suiv. 


Opusucio 
sur  la  conros- 
sion  des  fté- 
cbéïj,  tbid.  col, 
33C3.3J71 


fatrol.  gr., 
t.  LXXXVII, 
ibid.  3{i63. 


Eloge  des 
saiots  martyrs 
CjrelJeaa,et 
récit  de  ieurs 
miracles.  Pa- 
trol.  Ihid.  , 
col.  2373. 


708 


HISTOIRE  gi;ni:rale  des 


corps  et  du  pfécieiix  sang  de  Jésvs-C/irist  notre 
Dieu  et  notre  Sauveur,  prenaient  l'iuiile  de  la 
lampe  qui  brûlait  devant  les  rclifines  des  mar- 
tyrs. <(  Ils  ne  savent,  dit-il,  ce  qu'ils  font; 
car  quelle  qtie  soit  la  vertu  de  celte  huile, 
elle  n'est  rien,  si  on  la  compare  à  celui  qui 
sanctifie  les  saints,  qui  est  la  vertu  et  lasar/esse 
du  iJieu,  communiquant  lui-même  le  don  des 
miracles  aux  viarti/rs,  à  celui  auquel  les  ché- 
rubins servent  de  trônes  '.  Dans  ce  passage, 
saint  Sophrone,  en  parlant  de  la  sainte  Eu- 
charistie ,  emploie  des  expressions  qui  ne 
peuvent  convenir  qu'à  la  personne  divine  de 
Notre-Seigncur,  ce  qui  suppose  la  foi  la  plus 
vive  au  dogme  de  la  présence  rëolle.  Plus 
loin,  l'illustre  patriarche  de  Jc'i'usalem  rap- 
porte que  les  martyrs  saint  Cyr  et  saint  Jean 
apparurent  en  songe  à  un  diacre  nommé  Jean, 
grand  partisan  delà  sectedesmonopliysites, 
et  que,  le  prenant  par  la  main,  ils  le  C(jndui- 
sirent  àrautelpourluidonncr  le  pain  devenu 
le  corps  vivifiant  de  Jésus-Chist  *.  Il  dit  encore 
que  les  prêtres  distribuent  le  corps,  source  de 
vie  cl  de  salut,  et  le  sang  de  Jésus-Christ,  ali- 
ment immortel  qu'on  reçoit  tous  les  diman- 
ches'. Onpeut  remarquer  1°  que  riniilc  allu- 
mée devant  les  saintes  reliques  avait  une  ver- 
tu médicinale  due  aux  mérites  des  martyrs'; 
2°  qu'on  invoquait  les  saints';  3°  que  Sophro- 
ne combat  plusieurs  hérétiques  de  son  temps  : 
lessévériens,  les  julianiles,  les  tliéodosiens, 
ceux  qui  croyaient  au  destin  ,  les  païens,  les 
blasphémateurs  et   les  athées.   4°   Nous  y 
trouvons  un  texte  de  Porphyre    qui  nous 
apprend  que  les  païens,  en  sacriiSant,  avaient 
coutume  de  faire  soitir  un  son  de  leurs  na- 
rines, et  que  les  sacritîcaleurs  se  disputaient 
souvent  entre  eux  pour  savoir  qui  en  ferait 
sortir  un  plus  fort  '. 

L'ouvrage  de  saint  Sophrone  sur  saint  Cyr 
et  saint  Jean ,  t;st  divisé  en  trois  traités.  Il  y 
a  d'abord  une  préface,   ensuite  le  panégy- 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

rique  des  saints  Cyr  et  Jean ,  puis  le  récit  dé 
soixante-dix  miracles.  Le  soixante-dixième 
fut  opéré  sur  l'auteur  lui-même,  et  c'est  par 
reconnaissance  qu'il  écrivit  la  vie  des  deux 
saints  et  la  relation  de  leurs  miracles. 

0.  Outre  cet  ouvrage  de  saint  Sophrone  suif 
les  deux  saints  martyrs,  il  en  existe  deux  au- 
tres plus  courts  :  l'un  est  intitulé,  Vie  et  couver^ 
sation,  et  récit  jmrtiel des  miracles  des  saints  Cyr 
et  Jean  ;  et  l'autre,  Vie  acéphale  des  saints  mar- 
tyrs Cyr  et  Jean.  Cette  vie  est  appelée  acé- 
phale ,  parce  que  le  commencement  en  man- 
que. On  trouve  dans  ces  deux  vies  de  pelila 
discours  de  saint  Cyrille,  qui  étaient  jusqu'A 
ce  jour  inédits,  et  qui  ont  été  publiés  par  Maï, 
et  dans  la  l'atrologie  de  M.  Migne,  dans  les 
œuvres  de  saint  Cyrille.  Le  latin  de  la  pre- 
mière vie  a  été  donné  par  Othon  Zilius,  dans 
les  Actes  des  Saints,  tome  III  du  mois  de  jan- 
vier. Le  latin  de  la  seconde  vie  est  ancieu  ;  il 
se  trouvait  dans  nn  manuscrit  du  Vatican. 

7.  Les  poésies  anacréontiques  de  saint 
Sophrone,  au  nombre  de  vingt-trois,  ou 
mieux  de  vingt-ct-une,  car  les  chants  qufi- 
torze  et  quinze  manquent,  et  il  n'est  pas 
sûr  que  le  vingt-troisième  soit  du  saint  pa- 
triarche, sont  (lues  aux  recherches  et  aux 
soins  de  l'abbé  Matranga,  protecteur  du  col- 
lège des  Grecs,  à  Rome  ;  elles  ont  paru  en  grec 
dans  le  tome  IV  du  Spiciletj.  rom. ,  en  grec 
el  en  latin.  Los  notes  et  le  latin  sont  renvoyés 
ù  la  fin  du  volume.  Dans  l'éditiou  de  la  Fa- 
frologie,  on  a  fait  concorder  le  texte,  la 
version  et  les  notes.  Dans  sa  préface ,  l'abbé 
Matranga  rend  compte  des  ilillerents  manus- 
crits où  se  trouvent  ces  poésies;  des  auteurs 
qni  s'en  sont  occupés,  des  corrections  qu'il 
y  a  faites,  du  mètre  employé  par  Sophrone. 

Ces  poésies  traitent  des  principaux  sujets  de 
l'Evangile  cl  d'autres  sujets  pieux.  Ainsi,  on 
y  trouve  l'Annonciation  de  la  Sainte  Vierge, 
la  Xativilé  de  Jésus- Christ ,  l'adoration  des 


Drus  aiifMt 
Tte«  dp  Mint 
CjrDtd«.4lnl 

Jmd.       r<. 
lrol.0>ij.,col. 


Pû*5TM   ItH- 

cr4onli(]u>-.  , 
IMd.,        col. 


•  Multi  enim  ex  his  qui  non  communicant  id 
agunt;  oleum  quod  in  sancloruiii  ardel  candela, 
pro  corpore  sancto  et  sanguine  Christi  om- 
nium noslrum  Dei  cl  Salvaloris  sumeutes,  neqiie 
quod  agunt,  ut  reor,  scientes,  neque  lœsionis  mag- 
niludinem  cognoscentcs.  Eleuim  saaclipcalum 
quidem  esse,  dico  et  ego,  sanclorum  candelœ 
oleum;  sed  quid  esl  hoc  ad  cnmpnrationcm  fjus 
qui  ipsos  sanclis  sanctifical  ?  El  virtiitem  id  con- 
tra languores  haberc  confiU'or;  sed  quid  ad  col- 
lalionem  Christi,  qui  est  Dei  virtus  et  sapicntia, 
qui  et  ipsis  quoque  marlyribus  yirtulvm  rharis- 
mata  Iribuil  ?  Dico  aulem  cl  quod  csl  honore  dig- 
num,  lanquam  id  quod  supra  loculum  ardet;  sed 


quid  ad  œqualilatem  ejus,  qui  sedet  super  cheru- 
bim?  Putrologia.  lom.  L.WXVII,  col.  3554. 

'  Qui  ipreshyteri)  de  scdibus  assurgentes  et 
manu  Joanuem  apprehendciites,  ad  dicinum  al- 
lare  duxerunl,  cl  illum  huic  sislentes,  panem  ei 
sanclum  pnchucrunl ,  vivijxcum  Christi  corjms 
effcctum.  11)1(1.,  col.  3;j«2. 

"  Ibid.,  col.  3.'S7S.  Voyc-ï  aussi  col.  3.")67,  3570, 
iiù  ilpst  qncslinii  du  Mcrificc  non-siiriglaiit  de  nos 
iiiilcis,  cl  col.  3574,  oit  l'nuteur  ilit  qu'on  roçnil  le 
I  orps  cl  le  jiuigdc  .If'sus-CIirist  ;  Accipc,  manuvm 
oslendcnlcs  figura,  rorporis  Chrisli  ne  satiguini* 
vivificam  ac  bcatam  perceplioncm. 

»  Ibid.,  col.  5554.—  »  Col.  3675.-  «  Ibid.,  col,  35S!i. 


CHAPITRE  LXVllI.  —  APPENDICE  SIJR  SAINT  SOPIÏRONE. 


LXXXVU, 
3811$  cl  £uiv. 


Triiidiuiii, 
il'id.  ,       col. 

•-riS2. 


[vil"  SIÈCLE. 

M.it,'cs,  lii  Présenlnlion  au  Icmple,  le  Bap- 
It'iiH'  lie  Jésus-Cliiist ,   la   Rôsurreclion  de 
La/,:iio ,   le   dimaiidie   des  Raincaiix ,  l'ins- 
liliilion  de   rKticliaiislie  ,  saint  Paul ,  saint 
Jean   ri'^vanjîéliste ,    saint   Klicune,    sainte 
Tlii-iU' ,    le  retour  de   la   sainte  Croix ,   la 
saiiit(>  Cité  de  Jéiiisaloni ,  les  Saints  Lieux. 
I.a  dix-septième  est  intitulée,  sur  Aunes, évê- 
i/uc  d'Asculon  :  l'autcury  parle  des  doKmes  de 
la   foi.   La  viny;t-et-unième  est  sur  Menas, 
é^eononie  d'un  monastère  d'Alexandrie  ,  ac- 
cusé l'auf^sement ,  sous  Phocas,  d'avoir  reçu 
Tliéodose,  fils  de  Maurice.  La  vingt-deuxième 
est  sur  le  seigneur  Paul,  et  sur  Maiie,  sa 
mère ,   morte  dans  le  Seigneur.   L'auteur  y 
établit  un  dialogue  entre  Je  lils  et  la  mère 
ilél'unte  ;  c'est  une  des  plus  belles  pièces  de 
poésie.   La  quatorzième   sur  la  destruction 
de  la  ville  de  Jérusalem ,   et   la  quinzième 
sur  lui-même,  manquent  dans  Je  manuscrit. 
Le  commencement  de  la  seizième  manque 
aussi;  l'abijé  Ma  tranga  a  ajouté  aux  vingt-deux 
odes  l'bymne  sur  Joseph  ,  fils  de  Jacob.  So- 
phrone  y  preud  Je  titre  de  moine  ,  médecin 
sophiste. 

On  trouve  dans  ces  poésies  pJusieurs  no- 
lions  nouveJJespourJ'hislûire  occJésiastique. 
On  y  voit  \m  saint  évêque  d'Ascalon  ,  jus- 
qu'ici inconnu,  du  noai  de  Narsès  ;  de  curieu- 
ses descriptions  des  Lieux -Saints,  de  pJu- 
sieurs couvents  d'Egypte  ,  etc.  Saint  So- 
phrone  parJe  avec  amour  du  jardin  de  Geth- 
sémani ,  qui  reçut  autrefois  Je  corps  de  la 
sainte  Mère  de  Dieu,  et  où  était  son  sépuJ- 
cre;  mais  il  ne  dit  rien  du  corps  même. 

Au  jugement  de  Photius,  ces  poésies, 
remplies  de  belles  images,  expriment  le 
dogme  d'une  manière  merveiJIeuse ';  eJJes 
sont  pleines  d'éJégance ,  de  piété  et  de  dou- 
ceur, disait  Léon  AlJatius  '. 

8.  La  seconde  série  de  poèmes  renferme 
deux  cent  trente  odes  sur  les  Vertus  chré- 
tiennes ,  et  en  particulier  sur  J'Esprit  de  pé- 
nitence. Il  est  intitulé  Triodium  :  c'est  un 
ouvrage  où  tout  respire  la  piété  et  la  dou- 
ceur chrétiennes;  il  révèle  dans  son  auteur 


709 


Commcn. 
ta-ro  LIturf:. 
que.  Patrol. 
T.L.XX.XVI1, 

toi.  aisi-ioj. 


un  grand  amour  de  Dieu  ,  beaucoup  de 
science  sur  divers  sujets  de  ri';criliu-e  '.  Il  a 
été  trouvé  par  le  cardinal  Mai  dans  un  codex 
du  Vatican,  où  sont  encore  enfouis  divers 
écrits  ascétiques  d'auteurs  grecs,  savoir: 
saint  Antoine,  Clément ,  saint  Jean  Damas- 
cène  ,  Joseph,  Léon  l'empereur,  Scrgius  et 
ïhéodose  Studite  '.  Chaque  ode  de  ces  vers 
est  de  quatre  strophes ,  dont  la  dernière  est 
presque  toujours  une  invocation  à  la  Sainte 
Vierge.  Sophrone  dit  dans  l'une  d'elles  : 
«  Vierge  sans  tache ,  vous  nous  avez  enfan- 
té, avec  deux  volontés  et  en  deux  natures, le 
Fils  unique  du  Père,  fait  homme  pour  nous 
rendre  participants  de  la  nature  divine,  lui, 
le  Dieu  suprême  ^  »  On  trouve  ici  un  témoi- 
gnage formel  des  deux  natures  et  des  deux 
volontés  en  Jésus-Christ,  contrairement  à 
l'hérésie  des  monophysites  et  des  monolhé- 
lltes. 

9.  Le  cardinal  Maï  a  publié,  sousle  nomde 
So])hrone ,  au  tome  IVdu  Spicilegium  roman., 
pag.  31  et  suiv. ,  un  commentaire  litur- 
gique, où  l'auteur  énumère  eu  détail  et  ex- 
plique les  habits  ,  les  instruments,  les  char- 
ges des  prêtres  et  tout  l'ordre  des  offices 
sacrés.  Cet  opuscule  est  important  par  la 
doctrine  qu'il  contient.  On  peut  y  remarquer 
suitout  le  précieux  témoignage  suivant  sur 
la  présence  réelle.  «  Les  prêtres  sont  assi- 
milés aux  archanges;  car,  de  même  que  Je 
séiaphin  prit  Je  cliarbon  ardent  et  Je  donna 
au  prophète  Isaïe,  de  même  aussi  les  prê- 
tres prennent  Je  pain,  c'est-à-dire  le  corps  du 
Seigneur,  et  Je  donnent  au  peuple.  XuJ  ne  doit 
donc  penser  que  les  choses  saintes  sont  des 
figures  du  corps  et  du  sang  de  Jésus-Christ  ; 
mais  il  doit  croire  que  le  pain  et  le  vin  offerts 
ont  été  changés  au  corps  et  au  sang  de  Jé- 
sus-Cllrist^  ))  La  Qn  de  ce  commentaire  man- 
que dans  le  manuscrit. 

10.  Le  tome  X  des  Script,  veter.  nov.  coll 
de  Maï,  pag.  31,  renferme  un  fragment  'tiJ.cènooi,. 
d'un  typique,  ou  hymne  sacrée,  pour  les 
petites  heures.  On  sait,  d'après  Siméon  de 
Thessalonique,   que  saint  Sophrone  a  mis 


Tropanorn. 


1  Pair,  grœc,  tooi.  LXX.Wll,  col.  3727.— Mbid. 

'  Spicil.  Rom.,  tom.  IV,  pag.  7  de  la  préf.  —  *  Ibid. 

^  In  duabtis  volanlatibus  et  nqturis  genuisti 
nnbis,  Virgo,  Flliuin  Patris  unigcniium  factum 
hominem,  ul  nos  Deus  stipremus  nstenderel  na- 
turœ  purlicipes  dicinioria  incorruplw.  Patrol., 
Irim.  L\.X.XV1[,  col.  3899. 

*  Idcirco  convenu  sacerdolem  esse  ignem  arden- 
lein,  irreprehensibitem,  ab  omni  macula  et  im- 


probatione  Uberum ;  sacerdotes  enim  archan- 
gclorum  vicem  gerunt,  et  quemadmodum  s  ra- 
phim  carboneni  suscepit  et  tradidit  Isaiœ,  sic  sa- 
cerdotes suinunt  liane  m,  id  est  corpus  Domini,  et 
dont  populo.  Ne  (juis  igilur  opinelur  figuras  re- 
prœsentativds  lanlum  esse  sanctas  corporis  cl 
sanguinis  Chriali;  ast  credal  quisque  pnnem  et 
finuiii  obUitum  concerti  in  corpus  et  sanguinem 
Chrisli.  Ibid.,  col.  3983. 


710 


mSTOUlE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


l'office  divin  dans  un  ordre  nouveau  '.  Une 

Iraduction  latine  de  ce  fragment  est  jointe 

au  texte  grec  dans  la  Palrolof;io. 

Kauei       11.  Les  autics  pipcps  qu'on  trouve  dans 

ibid. e..i. 4001  la  Patrologie  sont  une  pritrcd  apiosle  nituel 

400i. 

des  Grecs  d'après  Goar;  trois  pièces  de  vers 

très-courtes,  dont  l'une  sur  le  Lieu  destine'  aux 

Ilotes,  et  les  deux  autres  sur  Jean  l'aumô- 

ibi<i..ui.  nier,    patriarche   d'Alexandrie ,  rcproduilcs 

4009. 

ibid.,«>i.  d'après  Biunck,  Analecta.,  tome  111;  uu  fran- 

1009.401S.  '        ,  ,.      '  ,,  .       »,    ..       o       •    .,  Z 

ment  dogmatique,  d  après  Mai,  Scnpt.  vet. 
nov.  coll.,  tome  Vil,  pag.  22,  où  le  saint 
cvèque  de  Jérusalem  montre  qu'on  ne  peut 


séparer  la  substance  des  opérations.  Ce  frag- 
ment est  précédé  d'un  autre  de  saint  Basile 
déjà  édile,  mais  qui  aide  à  comprendre  celui 
de  Sophrone;  celui  de  saint  Basile  est  conirc 
l'opinion  d'Euuomius,  soutenue  auparavant 
par  Aélius.  La  préface  de  Mai,  au  tome  IV  du 
Spicilcf/.  rom..  pag.  6,  contient  un  fragment 
de  saint  Sophi  one  sur  l'i'loge  de  la  virginité  ; 
et  le  même  volume,  pag.  465,  nous  offre 
l'elogc  du  saint  évèque  et  celui  du  pape 
Jean  iV  :  le  cardinal  l'a  trouvé  dans  un  ma- 
nuscrit du  Vatican  qui  contient  la  Vie  de 
saint  Maxime.] 


lUd.csIl 


CHAPITRE    LXIX. 
Saint  Isidore  évêqne  de  Sévillc  et  docteur  de  l'Église. 

tlîcrivaiu  latin,  eu  B36.] 


POQF^UOi 

OD  D6  parle 
pas  tei  de 
qaelqoesécri. 
Tains  moDo- 
Uiilltes. 


Naisçanca 
de  ïaJDt  l^\- 
dore,  ^DD  édu- 
catioo,fesélu. 
des. 


\.  Après  avoir  pai-lé  des  écrits  que  So- 
phrone de  Jérusalem  composa  pour  la  dé- 
fense de  la  doctrine  de  l'Ilgliso  sur  les  deux 
opérations  et  les  deux  volontés  en  Ji'sus- 
Christ,  il  aurait  été  naturel  de  rapporter  les 
lettres  que  'Phéodore  de  Pliarau,  Sergius  de 
Constanlinople,  Pyrrhus  son  successeur,  Cy- 
rus  d'Alexandrie  et  quelques  autres  évèques 
du  même  temps  écrivirent  pour  établir  le 
monotliélisme.  Mais,  pour  ne  point  répéter 
plus  d'une  fois  les  mêmes  choses,  nous 
avons  cru  qu'il  valait  mieux  traiter  ce  qui 
regarde  cette  hérésie  dans  l'article  du  sixiè- 
me concile  général,  où  elle  lut  condamnée, 
et  où  Ton  lit  lecture  de  tous  les  écrits  que 
ces  évêques  avaient  répandus  pour  la  sou- 
tenir. 

2.  Un  ('îvèque  de  Saragosse,  conleiiipoiain 
et  ami  de  saint  Isiilore,  disait  '  ijne  Dieu  l'a 
suscité  ])Our  l'elever  l'Espagne  tombée  eu 
décadence,  rétablir  les  monuments  des  an- 
ciens, et  préserver  ce  royaume  d'être  entiè- 
rement gâté  par  la  rusticité.  La  vilU;  de  Car- 
lliagène  lui  (iouna  la  naissance,  et  il  reçut 
de  Sévérien  son  père,  et  de  Théodore  sa 
mère,  une  éducation  convenable  à  la  no- 
blesse de  son  extraction.  Son   goût  pour  les 

'  Scripl.  vel.  nov.  coll.  pa-r.  24  dp  In  pn'fapB. 

'  Quem  luidoriim  Deus  jitisl  toi  defcctus  HU- 
paniiv,  noui.'stn'ix  lemponbus  siiscilans.  credo 
ad  reslauratiila  nntiquorum  iin  nunienid,  ne  vs- 
quequaqucruslicitatevelerascereinus,qtiasiquam. 


sciences  se  déclara  de  bonne  heure.  11  y  fit 
de  grands  progrès,  surtout  en  s'appliquant 
il  la  lecture  des  anciens  écrivains,  dont  il 
sut  mettre  les  travaux  à  profit.  Il  avait  une 
facilité  d'expressions  '  admirable,  se  propor- 
tionnant sans  contrainte  à  la  portée  de  tous 
ceux  (|u'il  avait  à  iusiruire.  On  aimait  '  a  l'en- 
tendre dire  deux  fois  la  même  chose  ;  et 
quand  il  l'eût  réptUée  plusieurs  fois,  on  n'en 
eût  pas  ('lé  ennuyé.  11  y  a  quelque  appa- 
rence qu'il  embrassa  la  vie  cléricale  dans  le 
temps  que  saiul  Léandre  son  frère  était  évè- 
que de  Séville,  et  que  ce  fut  dans  son  cler- 
gé qu'il  commença  ù  exercer  le  saint  minis- 
tère. 

3.  Il  est  du  moins  certain  qu'il  lui  succéda 
dans  l'épiscopat,  mais  on  ne  sait  pas  au  vrai 
combien  d'années  il  l'exerça  lui-même.  Quel- 
ques-uns le  lui  l'ont  commencer  en  ril).'»,  et 
Unir  eu  030,  ce  qui  l'ait  environ  quarante 
ans.  Mais  quoiqu'on  ne  puisse  douter  qu'il 
ne  soit  mort  eu  G3(i,  puis(iiryEdemplus,  son 
disci|ile,  (|ui  avait  assisté  à  sa  morl,  le  dit 
expressément,  il  n'est  pas  possilile  de  met- 
tre sou  épiscopat  avaut  l'an  o'J!),  auquel  saint 
Léandre  vivait  encore,  ainsi  qu'on  le  voit  '' 
par  une  lellre  que  saint  (îrégoire  lui  adressa 

dam  apposait  ilesliitaw.  Hiaulio,iii  l'nriKilolioue 
lil..  Isid.-»  Iliid. 

'  lldcphousii!!,  lit).  Pe  Script,  er. /<■>■     'ap.  i\. 

0  Greii.,  lib.  IX,  Epist.  CO,  Gl. 


éT^iJUC. 


[vil*  SIKCLE. 


CHAPITRE  LXIX.  —  SAINT  ISIDORE,  ÉVÈQUE. 


711 


Il  atOsIe  à 
divers  cood- 
lu. 


en  cette  anndc-li'i,  et  par  une  autre  de  môme 
dalt>  (icrilo  au  roi  Uocari'dc,  à  i|iii  d  recoin- 
uiandcco  saiul  i!vè([ue.  Braulioii,  évèque  de 
Sarasosse,  dit  en  géuërul  '  cjiu!  saint  Isi- 
diuea  Henri  sous  le  règne  de  l'empereur  Mau- 
rice et  de  Récarède  roi  d'Espagne,  et  qu'il 
est  mort  sous  icliiid'lh'rac'liusPldeCiulliila. 
Maurice  l'ut  tué  eu  602,  et  Ciutliihi  l'omuicu- 
ça  h  rëgner  en  Espagne  en  636.  On  ne  peut 
donc  mcllie  l'épiscopat  de  saint  Isidore  plus 
lard  qu'en  UOl,  ui  plus  tôt  que  sur  la  fin  de 
l'an  ^m. 

3.  En  619,  il  présida  au  concile  de  Séville. 
Les  canons  que  l'on  y  fit,  et  que  l'on  regarde 
comme  son  ouvrage,  font  voir  qu'il  était 
également  instruit  de  l'ancienne  discipline 
ecclésiastique,  et  zélé  pour  la  remettre  en 
vigueur.  Ce  fut  en  cette  assemblée  qu'il  con- 
vainquit un  nommé  Grégoire  -,  évéque  sy- 
rien de  la  secte  des  acéphales,  et  l'engagea 
à  se  réunir  à  l'Eglise  catholique.  Il  présida 
encore  en  633  au  quatrième  concile  de  To- 
lède, non  que  son  siège  lui  eu  donnât  le 
droit,  puisque  Juste,  évêque  de  cette  ville 
et  métropolitain,  était  présent,  mais  par  suite 
de  la  considération  que  les  autres  évéques 
avaient  pour  son  savoir  et  pour  sa  vertu. 
Braulion^  parle  d'un  autre  concile  où  un 
nommé  Sintliarius  avait  été  examiné  et  con- 
vaincu, mais  sans  se  convertir.  Il  demanda 
les  actes  de  ce  concile  à  saint  Isidore.  Nous 
ne  les  avons  plus,  à  moins  qu'on  ne  dise  que 
ce  concile  est  celui  de  Séville  de  l'an  619,  et 
que  Grégoire  s'appelait  aussi  Sintharius  ; 
mais  cela  est  sans  apparence  :  Grégoire  em- 
brassa la  foi  catholique,  et  Sintharius  persé- 
véra dans  son  erreur.  Si  Sintharius  est  le 
même  que  Suinlila  roi  des  Goths,  qui  fut 
déposé  après  dix  ans  de  règne,  et  à  qui  le 
quatrième  concile  de  Tolède  dit  anathème, 
il  faut  entendre  de  ce  concile  ce  que  dit 
Braution.  En  610,  saint  Isidore  souscrivit  au 
décret  que  le  roi  Gondemar  donna  en  con- 
firmation de  ce  qui  avait  été  réglé,  la  même 
année,  dans  un  concile  de  Tolède  touchant 
la  primatie  de  l'évêque  de  cette  ville. 

4.  Sentant  approcher  sa  fin  ,  il  redoubla 
ses  aumônes  *  avec  une  telle  profusion,  que, 


pendant  les  six  derniers  mois  de  sa  vie,  on 
voyait  venir  chez  lui  de  tous  côtés  une  foule 
de  pauvres  depuis  le  matin  jusqu'au  soir. 
Quclqiies  jours  avant  sa  mort,  il  pria  deux 
évèques,  Jean  et  Eparchius,  de  le  venir 
voir.  Il  alla  avec  eux  iï  l'église ,  suivi  d'une 
grande  partie  du  clergé  et  du  peuple.  Quand 
il  fui  au  milieu  du  clueur,  l'un  des  deux  évé- 
ques mit  sur  lui  un  cilice ,  et  l'autre  la  cen- 
dre. Alors,  étendant  les  mains  au  ciel,  il 
pria  et  demanda  i\  haute  voix  le  pardon  de 
ses  péchés.  Ensuite  il  reçut  de  la  main  de 
ces  évoques  le  corps  et  le  sang  de  Notre- 
Seigneui',  se  recommanda  aux  prières  des 
assistants,  remit  les  obligations  h  ses  débi- 
teurs, exhorta  ses  peuples  à  la  charité,  et 
fit  distribuer  aux  pauvres  tout  ce  qui  lui 
restait  d'argent.  De  retour  à  son  logis,  il 
y  mourut  en  paix  quatre  jours  après ,  le 
quatrième  d'avril  636.  Le  huitième  concile 
de  Tolède  le  qualifie  de  Docteur  excellent  ^ 
et  du  dernier  qui  ait  fait  l'ornement  de  l'É- 
glise catholique  ;  ajoutant  que  ,  s'il  est  posté- 
rieur en  âge  aux  savants  évoques  qui  l'ont 
précédé  ,  il  ne  leur  est  pas  inférieur  en  doc- 
trine ,  mais  qu'il  peut  passer  pour  très-docte 
en  comparaison  de  ceux  de  son  siècle ,  et 
que  sou  nom  doit  être  prononcé  avec  respect 
et  révérence.  Saint  lldephonse,  Sigebert  de 
Gemblours  ,  et  plusieurs  autres  ont  fait  son 
éloge  dans  leurs  catalogues  des  écrivains 
ecclésiastiques,  où  ils  l'ont  placé.  On  en  fait 
la  fête  le  4  avril. 

5.  L'édition  que  l'on  a  faite  de  ses  œuvres 
à  Paris,  en  1601  ,  présente  d'abord  cinq  let- 
tres ,  dont  deux  sont  de  Braulion  ,  évêque 
de  Saragosse ,  et  trois  de  saint  Isidore.  Brau- 
lion .  ayant  appris  que  ce  Père  avait  achevé 
son  ouvrage  intitulé  :  Des  Etymologies  ou  des 
Origines,  le  lui  demanda  avec  beaucoup  d'in- 
stances. Sept  années  se  passèrent  sans  qu'il 
le  reçût;  mais  enfin  saint  Isidore  le  lui  envoya, 
en  le  priant  de  le  mettre  en  meilleur  ordre. 

6.  Braulion   en  changea  la  distribution , 
qui  était  par  titres,   et  les  divisa  en  vingt  p»ç-'i.  « 
livres  ,  ajoutant ,   avec  la  liberté  qu'on  lui   ■"""■ 
avait  donnée,  ce  qui  manquait  â  la  perfec- 
tion de  l'ouvrage.  Saint  Isidore  y  traite  pres- 


IpUres.    Kdil. 
Pdris,  1601. 


Livre? 
0  rif  i 


'  Braulio,  uhi  supra.  —  *  Ibid. 

^  Gesta  etiam  synocii  in  qua  Sintharius  exami- 
nis  cestri  igni,  e/.si  non  punlicdtus ,  iiicenilur  td- 
men  decoctus,  qna'so  n'>tiis  tliriyantur  cito.  Brau- 
lio, Epist.  1,  ad  Isidorum. 

*  /Edemptus,  de  Obilu,  Isidori, 


"  Noslri  ((nuque  swculi  Doclor  egregius  Isidu- 
rus.  Ecclesiw  calhoUcœ  nocissimum  decus,  prw- 
cedentibus  (vtale  postremus,  doctrin(e  compara- 
lione  non  iiifiinus,  et  quoi  majus  est,  in  sicculo- 
runi  fine  doctissimus.  alque  cum  reverenlia  no- 
ininandus.  Concil.  Tolet.  Mil,  cap.  ii. 


712 


HISTOIRE  GÉNRRALR  DES  AUTEURS  ECCLÉSlASTIOrES. 

Canliqne  des  Cantiques,  Paniel,  les  Paiali- 


que  de  tous  les  arts  et  de  toutes  les  sriences, 
de  la  grammaire  ',  de  la  logique,  de  la  rhé- 
torique ,  de  l'aritlimétique ,  de  la  géomé- 
trie,  des  mathématiques,  de  raslronomie  , 
de  la  médecine  ,  de  l'a-^riculture ,  de  la  na- 
vigation, de  la  chronologie.  Il  en  donne  de 
courtes  définitions,  qu'il  accompagne  d'éty- 
mologies  des  mots  grecs  et  latins ,  comme 
on  les  entendait  de  son  temps.  Il  i-craarqiie 
que    l'alphahet    des   Hébreux    ne    contient 
que  vingt-deux  lettres,    suivant  le  nombre 
des  livres  canoniques,  qui  est  de  vingt-deux; 
que  les  Grecs  en  ont  vingt-quatre,   el  les 
Latins  vingt-trois.  Il  donne  une  explication 
de  chaque  lettre,  tantôt  littérale,  tantôt  mys- 
tique ,  en  remarquant  quels  sont  les  inven- 
teurs de  ces  lettres,  et  en  quel  temps  on  a 
commencé  de  s'en  servir.  Chez  les  Grecs  les 
lettres  de  l'alphabeth  servent  à  deux  lins  : 
à  composer  les  mots,  et  à  nombrer.  Chez 
les  Latins  elles  ne  servent  qu'à  la  composi- 
tion des  mots.  Ils  emploient  les  mots  pour 
compter,  excepté  l'I  et  l'.X.    L'X,  jusqu'au 
règne  d'Auguste  ,  n'était  pas  en  usage  chez 
eux  :  ils  mettaient  .'i  sa  place  le  C.  Ils  ont 
pris  des  Grecs  l'Y  el   le  Z  ;    au  lieu  du  Z  , 
ils  employaient  deux  SS.    Nous   ne  faisons 
cette  remarque  ,  que  pour  montrer  dans  quel 
détail  saint  Isidore  entre  dans  cet  ouvrage. 
Il  va  jusqu'il  donner  la  description  des  in- 
struments de  chirurgie,  et  des  onguents  dont 
on  se  sert  en  médecine ,  donnant  en  même 
temps  la  signiûcation  des  termes  usités  dans 
cet  art.  Il  traite  aussi  des  lois  et  de  tout  ce 
qui  appartient  à  la  jurispriulcnc-e,  et  de  la 
division  des  temps  en  jours ,   en  mois ,  en 
années,  en  olympiades,  en  lustres,  en  siè- 
cles. H  y  joint  une  chronologie  qu'il  com- 
mence  à  Adam,    et  finit   à  l'empire  d'Hé- 
raclius.  Le  sixième  livre  est   le   plus  inté- 
ressant   pour  notre   sujet.    Il  y  parle   des 
livres  de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament, 
dont  il  fait  quatre  ordres  ou  classes  difl'é- 
rentes  pour  l'.\ucieu,  et  deux  pour  le  .Nou- 
veau. La  première  classe  des  livres  de  l'An- 
cien Testimient  contient  les  cinq  Livres  de 
Moïse  ;  la  seconde  ,  ceux  de  Josué  ,  des  Ju- 
ges,  des  Rois,  d'Isaïe,  do  Jéremie  ,  d'Ezé- 
chiel ,  et   des  autres    petits  Prophètes;    la 
troisième,  les  Hagiographes,   c'est-à-dire, 
le  Psautier,  les  Proverbes,  l'Ecclésiaste,  le 


pomènes,  Esdras  et  Eslher  ;   la  quatrième  , 
ceux  qui  ne  sont  point   dans  le  canon  des 
Hébieux,  savoir  les  livres  de  la   Sagesse, 
de  l'Ecclésiastique,  de  Tobie,   de  Judith, 
des  Machabées.  «  Mais  ,  ajoule-t-il ,  l'Église 
de  jrsus-Christ  '  re<;oitet  respecte  ces  livres 
comme   divins.   »   A  l'égard  des  livres  du 
Nouveau  Testament,  la  première  classe  con- 
tient les  quatre  Évangiles;  la  seconde,  les 
quatorze  Épitres  de  saint  Paul,  les  sejit  Épl- 
tres  catholiques,  les  Actes  des  .\pôlres,  el 
l'Apocalypse  de  saint  Jean.  Il  rapporte  les 
ditl'érents  sentiments  sur  les  auteurs  de  cha- 
cun de  ces  livres,  et  finit  par  la  définition 
du  mot  Ajjocryplie ,  disant  que  sous  ce  nom 
l'on  entend  les  livres  dont  on  ne  connaît  pas 
l'origine  ,   el  qui  pour  cette   raison  ont  été 
sans  autorité  dans  l'Kgiise,    quoique  quel- 
ques-uns   puissent    renfermer    de    bonnes 
choses  parmi  beaucoup  de  mauvaises.  En- 
suite il  Iraile  des  bibliothèques,  des  livres, 
de  la  matière  dont  on  les  faisait,  des  lihraii-es 
et  des  instruments  de  leur  art   11  dit  que,  le 
livre  de  la  Loi  ayant  été  brûlé  par  lesChal- 
déeus  ,  Ksdras,  inspiré  du  Saint-Esprit,  la 
rétablit  sur  d'autres  exemplaires,  mais  en  y 
corrigeant  les  endroits  que  les  Gentils  avaient 
altérés  et  corrompus.  Il  ne  parle  que  des 
quatre  premiers  ctmciles  généraux  ;  après 
quoi  il  marque  les  différents  cycles ,  les  fêtes 
principales  de  l'Église ,  les  heures'des  offices 
divins,  et  ce  que  l'on  y  chantait,  la  Liturgie 
et  toutes  les  parties  dont  elle  était  composée, 
qui  sont  les  mêmes  qu'aujourd'hui  ;  les  céré- 
monies des  sacrements  de  baptême  et  de 
confirmation,  et  les  exercices  de  la  péni- 
tence. Il  dit  que  le  sacrifice  de  la  messe  est 
ainsi  appelé,    parce  ([u'il   est  consacré  par 
une  prière  mystique ,   en   mémoire  de  hi 
passion  que  Notre  Seigneur  a  souH'crle  pour 
nous  ;  que  les  Grecs  donnent  au  saci-emcnt 
du  pain  el  dn  calice  le  nom  d'Eucharislie, 
qui  en  latin  signifie  bonne  grâce,  n'y  ayant 
en  eflel  rien   de  meilleur  que  le  corps  et  le 
sang  de  Jésus-Christ.  Il  di'fiidt  le  sacremetil 
le  signe  d'uue  chose  sainte,   que  l'on  doit 
recevoir  saintement.  H  met  de  ce  nombre  le 
baptême  ,  le  chrême  ou  lu  confirmation ,  el 
le  corps  elle  saugde  Jcsus-Clirisl,  «  qui  sont, 
dit-il,  saciemenls,  parce  que ,   sous  le  voile 


'  Ang.  Mai  «  publié  an  lome  \\<\e?  Script  Vf  1er. 
Prrpfat.,  pag.  SR,  un  fragiriRiil  'lu  |>rPii.i(T  livre 
(Jef  firigiups.  cliap.  xxvn,  sur  l'orlliogr.iplie  en  é'TÏ- 


Inre  iJicIiygrapliiqHP  nver  oxpliralion.   [L'Atilfur.) 
'  Hcclesin  Inmen  Chrisli  inler  ilivinos  lihros  el 
honorai  et  prwdical.  Isiil.,  lib.  VI,  cap,  i. 


[vil'  SIÈCLE.] 

des  clinses  corporelles,  la  vertu  divine  opi^'re 
en  seere.l  le.  salul  reiit'ernic  ilans  ces  sacre- 
ments, qui  sont  administrés  dans  l'Eglise 
par  les  miV'lianls  comme  i)ar  les  bons  minis- 
tres. [4O  luipli'me  ne  peut  se  donner  ([u'an 
nom  des  trois  personnes  do  la  sainte  Trinité, 
le  Père,  le  Fils  et  le  Saint-Esprit.  La  chair 
el  l'Ame  sont  purifiées  par  ce  sacrement. 
Celui  de  la  eonlhrnalion  se  confère  '  jiar 
l'onction  dn  ilirènie  el  pai'  l'impositiou  des 
mains.  Il  ne  se  donne  qu'après  le  baptême, 
parce  que  le  Saint-Esprit  descend  vulouliers 
dans  ceux  qui  sont  purificis  de  leurs  péchés. 
L'exorcisme  employé  dans  le  baptême,  est 
pour  conjurer  le  démon  de  sortir.  Saint  Isi- 
dore enseigne  que  les  apôtres,  avant  de  se 
séparer,  composèrent  le  symbole  que  nous 
avons  sous  leur  nom.  11  parle  des  dilléreutes 
abstinences  dans  le  jeune,  dont  une  est  la 
xëropliagic,  où  l'on  ne  niante  que  des  cho- 
ses sèclics.  La  parfaite  pénitence  est  selon 
lui  de  pleurer  ses  péchés  passés  ,  et  de  ne 
les  plus  commettre  ;\  l'avenir  :  la  satisfac- 
tion consiste  ;'i  retrancher  les  causes  et  les 
occasions  de  péché ,  el  A  ne  plus  pécher.  11 
distingue  deux  sortes  d'exomologèses  ou 
confessions  ;  l'une  de  louanges,  comme  lors- 
M.ii.ïi.ss,  que  Jésus-Christ  dit  :  «  Je  vous  l'ends  gloire, 
mon  Père,  Seigneur  du  ciel  el  de  la  tture;  » 
l'autre ,  de  ses  péchés  :  on  s'acquitte  de 
celle-ci  en  s'humiliaut.  en  se  revêtant  d'un 
sac  ,  en  couchant  sur  la  cendre  ,  en  pleui-ant 
ses  fautes.  La  lilante,  ou  rogalion,  a  po  ir 
but  d'obtenir  de  Dieu  quelque  effet  particu- 
lier lie  sa  miséricorde.  —  Le  septième  livre 
est  un  abrégé  de  théologie.  On  y  apprend  ce 
qu'il  faut  croire  sur  la  Trinité,  et  les  trois 
personnes  le  Père,  le  Fils  et  le  Saint-Esprit  ; 
sur  les  anges,  avec  la  signification  des  noms 
de  ceux  qui  se  sont  rendus  recommanda- 
bles,  soit  clans  l'Ancien,  soit  dans  le  Non- 
veau  Testament.  On  y  explique  aussi  les 
noms  d'apôtre ,  de  martyr,  de  patriarche , 
d'archevêque,  d'i-vèque ,  de  prêtre,  de  dia- 
cre ,  de  sous-diacre  et  des  autres  ministres, 
de  moine  ,  de  chrétien.  Saint  Isidore  donne 
dans  le  huitième  les  définitions  de  l'Eglise  , 
de  la  Synagogue ,  de  l'hérésie,  du  schisme. 


CH.APITRE  LXIX.  —  S.MNT  ISIPOHE,  l':VftOUE. 


71.1 


avec  nn  détail  des  hi'-résies  qu'il  y  a  en  parmi 
les  chrétiens  el  chez  les  juifs.  Les  autres 
livies  n'ont  aucun  rapport  à  noire  des- 
sein. 

7.  Saint  lldenhouse  ne  cite  qu'un  livre  des       u^<ei.i» 

^  '  In     (lifférencs 

I)i/f('ivni:i's  ou  de  la  Propriété  des  termes  ;  ""f"  1°  •""■ 
Brauliou  en  marque  deux,  en  quoi  il  est  sui-  e["p','"n,''." 
vi  par  Sigebert.  Nous  en  avons  Irais  sur  celle 
matière  :  le  premier  intitulé  :  di' la  /'ruprié/é 
des  \'er/jes;  le  second,  des  Dif/érenccs  sj/iri- 
tuelles;  le  troisième,  des  Différences  ou  des 
propriétés  du  Discours.  Peul-èlre  que  h^s  deux 
premiers  n'eu  faisaient  qu'un  autrefois,  ou 
que  saint  Isidore,  aprèsavoir  traité  cette  ma- 
tière par  ordre  alphabétique,  l'a  traitée  une 
seconde  fois  dans  un  autic  ordre.  Quoi 
qu'il  en  soit,  ce  sont  des  ouvrages  de  gram- 
maire. Celui  des  Différences  spirituelles  ne 
laisse  pas  de  renfermer  quelques  principes 
de  théologie.  11  y  est  dit,  à  l'occasion  d(!  la 
dillérence  entre  la  Trinité  et  l'Lnité,  que 
comme  le  feu,  la  candeur  ou  l'éclat,  et  la 
chaleur  ne  sont  qu'une  même  chose,  quoi- 
qu'expriméc  par  trois  noms,  de  même  la  Tri- 
nité est  dans  1-t  rclalion  des  personnes,  en- 
core que  Dieu  soit  un  en  substance;  qu'il  y 
a  entre  les  trois  personnes  cette  différence, 
que  le  Père  n'est  poinl  engendré  el  ne  pro- 
cède point,  que  le  Fils  est  engendré  du  Père, 
el  que  le  Saint-Espril^  procède  du  Père  et 
du  Fils  sans  en  être  engendré. 

8.  Les  deux  livres  des  St/noni/mes  sont  quel-  lj,,^^  ^^^ 
quefois  intitulés  Soliloques,  parce  qu'en  ef-  pa5!'°30i'°°'' 
fet  saint  Isiilore  introduit  d'un  côté  l'homme 

qui  se  plaint  de  la  misère  de  son  état,  el  de 
l'autre  la  raison  qui  l'averlit  de  son  devoir. 
Il  envoya  ces  deux  livres  ù  Braulicni,  alors 
seulement  archidiacre,  qui  les  lui  avait  de- 
mandés. Ils  sont  cités  par  Braulion  lui-mê- 
me, par  saint  Ildephonse  et  par  Sigebert  '. 
La  lecture  en  est  instructive  et  édifiante. 

9.  Le  livre  du  Mépris  du  monde  est  tiré  uvreduMè- 
presqnc  entièrement  des  Soliloques,  et  sou-  «'.^ag.Tzô! 
vent  mot  à  mot,  surtout  le  commencement  : 

c'est  la  raison  qui  s'y  entretient  avec  l'hom- 
me, de  même  que  dans  les  Soliloques  ou  Sy- 
nonymes. Nous  ne  connaissons  point  d'an- 
ciens qui  l'aient  cité  sous  le  nom  tle  saint 


'  Sicul  in  baptismo  peccatorumremissio  datur, 
ita  per  unclionem  saiictilicatio  Spirilus  adhibe- 
tur-..  Manus  impositio  ideo  fil ,  ut  per  benediclio- 
nem  advocalus  invilelur  Spirilus  Sanclus  :  tune 
eniin  Paraclelus  posl  mundata  et  benedicta  cor- 
pora  libevs  a  Paire  descendit,  et  quasi  super 
baplismi  aquam  tanquam   super  pristinam  se- 


dem  descendit.  Isiilor.,   Ub.   \I  Orifiii}.,  i-,ip.  xix. 

^  Spirilus  sanclus  ex  Paire  cl  Fiiio  non  geni- 
lus,  sed  procedens.  h'u\.,  lib.  De  Différent,  spirit., 
uuni.  3. 

■'  Br.mlio,  in  Prœnolat.  Ildeptious.,  De  Scriplor. 
Ecoles.,    cap.  ix.  Sigebert.,    De  Yiris  iliust.,  cap. 

XV. 


714 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


De  11  ricle 
•le  >i«.  pas* 
XI 0. 


OlTerMs 
ŒutreiiiKOra* 
l«.  [.«s.  JM 

et  lUiV. 


LeIM  k 
pM<«.  p.  352, 


LUrc  «I* 
Il  nalDre  de^ 
rlo»e9,  \t»e. 
iH. 


Isidore;  et  on  ne  doute  point  qne  ce  ne  soit 
l'ouviatre  dn  quelque  compihitcur. 

10.  Il  faut  porter  le  niènie  jusrement  du  li- 
vre intitulé  :  La  Hrgle  de  Y'ie.  C'est  une  com- 
pilation des  Soliloques  et  du  livre  dont  nous 
venons  de  parler.  Il  n'en  esl  rien  dit  non 
plus  dans  les  anciens  catalocrues  des  ouvra- 
ges de  saint  Isidore. 

11.  Les  quatre  opuscules  suivants  n'ont 
rien  qui  ne  soit  digne  de  ce  l'ère,  et  il  sem- 
ble que  Sitrebeit  l'en  reconnaît  auteur.  Le 
premier  est  un  discours  de  consolation  adres- 
sé à  un  pénitent  effrayé  des  jugements  de 
Pieu;  leseconil,  qui  est  en  vers,  est  une  la- 
mentationd'un  pénitent  sur  ses  péchés,  et  une 
prièie  ^  "Dieu  dont«il  implore  la  miséricorde  ; 
le  troisième  est  tout  ensemble  une  prière  à 
Dieu,  et  une  exhortation  à  la  pénitence;  le 
quatrième  est  une  oraison  contre  les  teuta- 
tions  du  démon. 

12.  La  lettre  à  l'évêqueMassanusse  trouve 
aussi  parmi  les  lettres  de  saint  Boniface  de 
Maycnce,  où  elle  est  la  soi.^ante-troisième. 
Elle  a  pour  but  de  montrer  qu'un  prêtre 
tombé  dans  un  péché  d'impureté,  et  mis  pour 
ce  sujet  en  pénitence,  peut  être  rétabli  dans 
son  degré  d'honneur,  après  l'avoir  accomplie. 
C'en  est  assez  pour  regarder  cette  lettre  com- 
me faussement  attribuée  à  saint  Isidore,  puis- 
que, dans  sa  lettre  à  Hellnde  ',  et  dans  le 
second  livre  des  Ollices  divins  ' ,  ce  docteur 
enseigne  ,  conformément  aux  anciens  ca- 
nons, qu'un  évêque  ou  un  prêtre  qui  s'est 
rendu  coupable  d'un  péché  mortel  de  celte 
espèce,  doit  être  déposé,  et  que  celui  qui 
en  a  commis  un  semblable  avant  son  ordina- 
tion, ne  doit  point  être  ordonné.  11  est  vrai 
que  Gratien'  cite  celle  lettre  sous  le  nom  de 
saint  Isidore  dans  son  Décret;  mais  ce  n'est 
pas  le  seul  endroit  où  il  s'esl  trompé. 

13.  Le  livre  de  la  IVatiire  des  Choses  ne 
peut  être  contesté  à  cet  évêque,  après  les 
lé:noipna(r(!s  formels  de  Braiilion,  de  saint 
lldephonse  et  de  Sigeberl  '.  Il  l'adressa  à  Si- 
sebul,  roi  des  Goths  en  Espagne,  dont  il  fait 


l'éloge  en  peu  de  mots.  Ce  prince  lui  avail 
lui-même  proposé  la  matière  de  rouviatc 
en  le  priant  de  lui  rendre  raison  de  la  divi- 
sion des  temps  en  jours,  en  mois,  en  années, 
des  solstices  et  des  équinoxes,  des  difî'éren- 
tes  parties  du  monde,  de  la  nature  du  soleil 
et  de  la  lune,  des  étoiles  et  des  planètes,  des 
éclipses,  des  vents,  des  nuées .  du  flux  el  du 
rclliix  de  la  mer,  et  de  plusieurs  autres  évé- 
nements naturels.  Saint  Isidore  répond  à 
tout  dans  ce  livre,  en  se  servant  des  lumiè- 
res de  ceux  qui,  soit  parmi  les  gentils,  soit 
parmi  les  écrivains  ecclésiastiques,  avaient 
traité  avant  lui  les  mêmes  matières. 

1-4.  Quelques-uns  ont  cru  que  la  Chronique 
que  l'on  a  imprimée  à  la  suite  du  livre  de  la 
Nature  des  Choses,  était  un  extrait  de  celle 
qui  se  trouve  dans  le  cinquième  livre  des 
Origines  ou  Efijmologk-s  ;  mais  il  est  plus 
vraisemblable  que  celle-ci  est  un  extrait  de 
l'autre  fait  par  Braulion,  et  inséré  par  lui 
dans  les  livres  des  Origines,  qui  demandaient, 
ce  semble,  cette  chronique  à  l'enJroit  où  elle 
est  placée.  Aussi  Braulion  distingrue  claire- 
ment la  Chronique  de  saint  Isidore  des  livres 
des  Origines.  Il  en  fait  deux  ouvrages  sépa- 
rés '.  Celte  Chronique  porte  le  nom  de  saint 
Isidoie  dans  de  très-anciens  manuscrits  , 
entre  autres  dans  un  de  la  Bibliothèque  de 
Sainl-Germain-des-Prés,  du  vu'  ou  viiT  siè- 
cle. Elle  commence  à  Adam,  et  va  jusqu'à 
la  cinquième  année  d'Héraclius,  el  la  qua- 
trième de  Sisebut,  comptant  eu  tout,  depuis 
la  création  du  monde,  cinq  mille  huit  cent 
quatorze  ans.  On  l'a  imprimée  avec  les  Notes 
de  Garcias.  Saint  Isidore  cite  dans  sa  préface 
les  Chroniques  de  Jules  Africain,  d'Eusèbe 
de  Césarée,  de  saint  Jéi-ûme,  el  de  Victor  de 
Tunnes.  11  partage  le  temps  eu  six  âges,  dont 
le  premier  commence  à  la  création  ;  le  se- 
cond à  la  seconde  année  d'après  le  déluge  ; 
le  troisième  à  la  naissance  d'Isaac,  fils  d'A- 
bi'aham  ;  le  quatrième  au  règne  de  David; 
le  cinquième  à  la  cuplivilé  de  Babylonc  ;  le 
sixième  à  la  naissance  de  Jésus-Christ,  en  la 


'  Cogiiniinius  Cordubtiisis  lic^lesiœ  sdccrdolem 
in  pontificali  culmine  carnali  labe  dclapsum... 
Sciai  se  amisisse  nomeii  et  olficium  sacerdolis, 
qui  merilum  perdidil  saiictiKilis.  Quaproplcr 
judicii  vestri  derrelo  p(rnileiili(v  perpclim  fla- 
gitia  pcrpeliala  lamentatioiie  deplorri,  pUtngal 
giicerdolii  culliim  qurm  maie  viiendo  perdidil. 
Ifiiilor.,  Upisl.  ad  Uellad. 

'  Si  is  qui  jam  in  episcupalu  tel  prefbylcrio 
morlale  aliquod  pcccalum  admiseril,  non  débet 


offrrre  panes  Domino  :  quanio  magis  anic  ordi- 
nationem  peccator  inventus  repudiari  debcl,  u( 
non  ordinelur?  I<1.,  lib.  Il  l)t  Diiin.  Uflic. 

'  liialiaii.,  in  Uecrelo,  Caussœ  33,  quœsl.  2. 

'•  Kiiiiilio,  Ideplions.  et  Si}f;cl). ,  ubi  supva. 

'  L'hrotiicorum  a  principio  mundi  usquc  ad 
lenipns  snum,  libnini  unum...  hli/molograniin  co- 
diceni  niinia  magniindine.  Uniiil.,  in  Pra  nolatio- 
ne  Itb.  Isidori. 


CHAPITRE  LXIX.  —  SAINT  (SIDORE,  l':\  Ê^UE. 


Ctironlqiia» 
le-  nûihsde» 
t^aïutalot.,  ot 
les  Suites. 
>aç.  398, 


ConiiMOii* 
tairez  sor  les 
]lvri>5  de  l'An- 
cieueidiiNoii* 
v«au  ïc^ts- 
me  ni.  Pag. 
«U;>,  413. 


Allé^'ories 
sur  l'ancien 
et  l<i  Domeau 
Tésiaiiieat  ^ 
p»c.  51  ri 


[vu"  siftrxE.] 

qiuiranto-dcnxièrac  année  du  règno  d'Au- 
};ii?lo. 

45.  Il  composa  une  Chronique  particulière, 
qui  coiilicnl  on  abrogé  1  histoire  des  ("lOths, 
(les  Vandales  et  dos  Suèves.  Nous  n'en  avons 
qu'une  pallie  dans  l'édition  de  Paris  do  1(501  ; 
mais  elle  est  |)lus  ample  dans  colle  de  Ham- 
bourg de  1611,  et  dans  celle  de  Leyde  de 
1597,  avec  les  notes  de  Vulcanius  ;  et  plus  en- 
core dans  celle  d'Amsterdam  de  Itioo.  Cette 
Chronique  est  citée  par  '  lîraulion  :  elle 
commence  i\  l'ère  214  d'Espagne,  c'est-à-dire 
à  l'an  im  de  l'ère  commune,  et  fmit  au  rè- 
gne de  Sisehiit. 

IG.  Braulion,  parlant  des  Commentaires 
de  saint  Isidore  sur  l'Ancien  et  le  Nouveau 
Testament,  dit  '■  que  quiconque  les  lira,  re- 
marquera sans  peine  que  ce  Père  les  a  enri- 
chis de  ce  qu'il  avait  lu  dans  les  anciens 
commentateurs.  Ils  sont  cités  par  saint  Ilde- 
phonse'  et  par  Sigebort ,  qui  citent  aussi 
l'opuscule  qui  sert  comme  de  préface  à  ces 
Commentaires.  Le  saint  évèque,  après  y  avoir 
donné  le  catalogue  des  livi'es  canoniques,  fait 
un  précis  de  ce  qu'ils  contiennent.  Nous  n'a- 
vons dans  les  imprimés  que  ses  Commentai- 
res sur  les  cinq  livres  de  Moïse  ,  sur  ceux  de 
Josué,  des  Juges  et  des  Rois,  avec  quelques 
fragments  de  ce  qu'il  avait  écrit  sui'  Esdras  et 
sur  les  Machabées.  Il  ne  nous  reste  rien  surles 
autres  livres  de  l'Ixriture  de  l'Ancien  Testa- 
ment*, qu'il  avaitnéanmoins  expliqués,  com- 
me nous  en  assure  '  Sigebert.  Trithème  "  en 
avait  vu  non-seulement  sur  les  livres  de 
l'Ancien  Testament,  mais  encore  sur  ceux 
du  Nouveau.  On  a  voulu  contester  à  saint 
Isidore  les  Commentaires  sur  les  quatre 
livres  des  Rois,  et  les  attribuer  à  Isidore  de 
Cordoue;  mais  ils  sont  dans  le  même  goût  et 
du  même  style  que  les  Commentaires  sur  le 
Pentateutjue,  que  personne  ne  lui  conteste. 

17.  Il  V  avait  encore  moins  de  raison  d'at- 


715 


ffue  Braulion  et  Sigebert  les  dfinnent  à  saint 
Isidiu-e  de  Sévilhi  '.  Ce  qui  a  trompi'^  est  le 
nom  d'Orosius  à  qui  elles  sont  adressées.  On 
l'a  pris  pour  le  prêtre  de  ce  nom,  contempo- 
rain de  saint  Augustin  et  de  saint  Jérôme, 
au  lieu  que  cet  Orosius  était  évêfpie,  comme 
on  le  voit  par  le  titre  de  révérendissirae  que 
saint  Isidore  lui  donne ,  en  l'appelant  son 
frère  :  c'était  apparemment  quelqu'iîvècpic 
d'Espagne. 

18.  Saint  Udephonse  et  Sigebert,  n'ayant 
fait  aucune  mention  des  livres  historiques 
de  saint  Isidore,  n'ont  rien  dit  de  son  C'a- 
taUxjnc  des  écrivains  ecclésiastiques  :  mais 
Braulion  "  en  parle,  ce  qui  est  un  témoi- 
gnage suffisant  pour  le  lui  attribuer.  Il  com- 
prend en  tout  quarante-six  écrivains,  dont 
le  premier  est  le  pape  Sixte,  et  le  dernier 
Maxime,  évoque  de  Saragosse,  auteur  d'une 
petite  Histoire  de  ce  qui  s'est  pagsé  en  Es- 
pagne sous  les  rois  Goths. 

19.  C'est  encore  sur  le  témoignage  de 
Braulion  et  de  Sigebert,  que  nous  lui  attri- 
buons le  livre  qui  a  pour  titre  :  De  la  vie  et 
de  la  mort  des  saints  Pères  de  V Ancien  et  du 
Nouveau  Testament.  Il  y  marque  le  nombre 
de  leurs  années  ot  le  lieu  de  leur  sépulture, 
quand  il  les  sait,  et  le  genre  de  leur  mort. 

20.  Il  adressa  deux  livres  h  Florentine  sa 
sreiir,  l'un  et  l'autre  contre  les  Juifs  '.  Dans 
le  premier,  il  rapporte  ce  qu'on  lit  dans  V'.l- 
criture  touchant  la  divinité  de  Jésus-Christ, 
son  incarnation,  sa  passion,  sa  mort  et  sa 
résurrection,  joignant  à  ces  autorités  de  so- 
lides rétlexions,  et  des  raisonnements  très- 
forts  pour  convaincre  les  juifs  que  tout  ce 
qui  a  été  prédit  du  Messie  dans  les  livres 
qu'ils  reçoivent  comme  divins,  a  été  accom- 
pli eu  Jésus-Christ.  Il  résout  en  passant 
toutes  leurs  objections.  Il  montre  dans  le  se- 
cond livre  ,  par  les  témoignages  des  mêmes 
Écritures,  que  les  Juifs,  qui  étaient  autrefois 


LWre;     dos 

Eerivalos  ec- 
cléïlaiitlciucs, 
pag.    5  m,    et 

p»S.  lis. 


Livre  de  la 
vio  fl  de  ta 
morl  des  SS. 
1  ères,  faiJ. 
531. 


Livres  con- 
tre les  Juttij, 
pag.  6U,  â&2. 


tribuer  à  Isidore  de  Coi'doue  les  Allégories      le  peuple  chéri  de  Dieu,  ont  été  réprouvés 
sur  l'Ancien  et  le  Nouveau  Testament,  puis-      à  cause  de  leurs  crimes;  et  que  les  Gentils, 


'  Braiilio,  nbi  $\ipra. 

'  (Juœstionum  libres  duos,  quos  qui  legit,  vete- 
rum  Irartalorum  muUam  supellectilem  recog- 
noscit.  Biaulin,  ibid. 

•'  llilepJions.  pt  Sigeb.,  ubi  supra. 

'  Ang.  Mai  a  iniljlié  dans  le  tome  lit  des  Script. 
réf.,  part.  2,  pap.  2.56,  un  prologue  sur  rédition 
du  psautier  faite  par  le  saint  éTêque.  Dans  cette 
édition,  il  marquait  par  des  signes  les  difTé- 
reuees  et  les  ressemblances  qui  existent  entre  les 
Septante  et  S.  Jérôme. 

[L'e'ditcur.) 


s  Totum  Vêtus  Testamentum  simpliciler  expo- 
nendo  percurrit.  Sigeb.,  eap.  ix. 

6  Tritbem.,  De  Viris  iUust. 

'  De  nominibus  Legis  et  Evangeliorum  librum 
«R«m  in  quo  quid  mcmoratœ  personw  ni;/steria- 
liler  significenl.  Braulio,  ubi  supra  et  Sigeb., 
cap.  IX. 

s  De  Viris  illustribns  librum  unum.  Braulio, m 
Prœnotat. 

^  Braulio,  in  Prœnol.  lib.  Isidori  ;  Sigebert.,  De 
Viris  illusl.,  cap.  lv;  Udeplious.,  De  Viris  illust., 
cap.  IX. 


716 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQl'ES. 


qui  étaient  pour  eux  un  objet  de  mi^pris,  ont 
pris  leur  place,  ayant,  selon  qu'il  avait  dté 
pn^dit,  embrassé  la  foi  de  Jésiis-Cbrist,  tan- 
dis que  les  Juifs  se  sont  opiuiàti'és  h  le  mé- 
connaître et  il  le  persécuter;  que  c'est  parce 
qu'ils  ont  nié  sa  divinité,  et  qu'ils  l'ont  fait 
mourir,  que  la  ville  de  Jérusalem  a  été  dé- 
truite de  tond  en  comble;  qu'il  n'y  a  pour  eux 
aucune  espérance  de  la  voir  jamais  réta- 
blie, au  point  d'en  faire  leur  liabilation;  que 
la  Synacrogue  a  pris  fin  par  l'établissement 
de  riv-'lise  ;  que  toutes  les  cérémonies  de  la 
Loi,  le  sabbat,  la  circoncision,  les  sacrifices 
ne  sont  plus  en  usage;  que  c'est  par  le  bap- 
tême annoncé  par  les  Prophètes  que  l'on 
obtient  maintenant  la  rémission  des  péchés; 
que  c'est  par  l'onction  sainte  du  sacrement 
de  confirmation  que  l'on  est  sanctifié  ;  que 
les  fidèles  acqniccent  le  salut  par  la  Croix  ; 
et  qu'au  lieu  des  victimes  sanglantes  que  la 
loi  ordonnait  d'immoler,  le  sacrifice  qui  plait 
au  Seigneur  est  celui  de  son  corps  et  de  son 
sang,  figuré  par  le  pain  et  le  vin  que  Melchi- 
sédecli  otl'rit.  Florentine  avait  ellc-môme  prié 
saint  Isidore  de  l'iusti-uirc  sur  ces  matières 
importantes. 
.Livre  pre-  21.  Fulirence  son  frère,  évcque  d'Astiïite 
et  ensuite  de  Carthagène,  voulut  aussi  avoir 
de  ses  ouvrages.  Il  l'engagea  h  développer 
l'origine  des  ilitlercntes  parlies  et  cérémonies 
de  Tolfice  ecclésiastique.  C'est  ce  que  saint  Isi- 
dore exécuta  en  deux  livres  qui  ont  toujours 
été  regardés  comme  le  plus  utile  de  ses  ouvra- 
ges par  rapport  à  la  discipline  de  l'Rglise  '. 
Voici  l'analyse  du  \"  livre  :  — Tout  ce  qui 
se  pratique  dans  les  ollices  ecclésiastiques 
est  fondé  ou  sur  les  divines  l']crilin-es  ,  ou 
sur  la  tradition  des  apôtres,  ou  sur  la  coutu- 
Proiog.  me  de  l'Église  universelle.  Il  y  avait  des  au- 
cp.  II.  tels  et  des  temples  dans  la  loi  ancienne.  La  foi 
III.  en  a  établi  dans  tout  le  monde  en  faveur  de 
Jésu.s-Ghrist.  On  chanta  des  cantiques  à  deux 
chœurs  après  le  passage  de  la  Mer  Rouge. 
Nous  en  chantons  dans  l'Kgiise  ;  et,  .'i  l'imita- 
A.,i,uMin.  tion  d(;  David,  nous  chantons  aussi  des  iisau- 

X    tun-  ■  ' 

mes.  Dans  la  primitive  l^glise,  on  psalmodiait 
avec  une  simple  inflexion  de  voix,  qui  appro- 
r.  cl'ail  plus  de  In  pi'ononcialion  que  du  clianl. 

On  les  clianla  ensuite  à  cause  des  hommes 
charnels,  afin  (|u'ils  fussent  du  moins  excités 
à  la  componction  par  la  douceur  du  chant, 


■lue.siMii-.bSU, 


llb. 

r«u. 


s'ils  ne  l'étaient  par  la  beauté  des  paroles. 
II  y  a  deux  sortes  d'hymnes  :  les  unes  sont  cp  in| 
tirées  de  l'Ecrilure,  les  autres  ont  été  com- 
posées par  des  hommes.  Saint  Hilaire  de 
Poitiers  est  le  premier  qui  en  ait  fait.  Saint  ,,. 
Ambroise  en  fit  ensuite,  qui  furent  d'abord 
chantées  dans  l'é.glise  de  Milan,  même  de 
son  vivant,  puis  dans  toutes  les  églises  d'Oo- 
cidenl.  On  doit  aussi  à  saint  Ambroise  l'in-  vn. 
stitution  des  antiennes  pour  l'Occident,  car 
elles  étaient  déjà  en  usage  chez  les  Grecs. 
Avant  son  éiiiscopat,  les  répons  avaient  lieu 
dans  les  églises  d'Italie.  On  les  appelait  /ti}- 
pons ,  parce  qu'après  qu'un  chantre  avait 
chanté  ,  le  chœur  répondait.  C'est  Jésus- 
Christ  qui  a  appris  aux  apùlres  à  prier,  et 
qui  leur  a  fait  un  précepte  de  la  prière.  De 
là  est  venue  la  coutume  de  l'Église  d'adres- 
ser des  prières  à  Dieu  dans  les  besoins.  Les  "■ 
Grecs  ont  les  premiers  composé  des  formu- 
les de  prières.  A  l'imitation  des  saintes  lec-  ."  '• 
turcs  qui  se  faisaient  en  certains  jours  dans 
les  synagogues  des  Juifs,  nous  en  faisonsdaus 
nos  églises,  nous  lisons  surtout  des  livres 
de  l'Ecriture.  Saint  Isidore  met  en  cet  endroit  ^' 
le  canon  de  ces  livres,  tel  qu'il  était  chez  les 
Juifs,  avec  les  auteurs  de  chacun  de  ces  li- 
vres et  les  différentes  versions  qu'on  en  a 
faites.  Il  donne  à  Moïse  le  Peniatcuque;  à 
Josué,  son  livre  ;  à  Samuel,  ceux  des  Juges 
et  de  Rulh  avec  la  première  partie  des  livres 
des  Rois  ;  les  Psaumes  à  dix  diU'ércuts  au- 
teurs ou  prophètes,  mettant  de  ce  Homl>re 
Moïse  et  David;  aux  sages  de  la  Synagogue, 
les  prophéties  d'Ezéchiel ,  de  Daniel ,  des 
douze  petits  Prophètes,  les  Paralipomènos 
et  Eslhcr.  Il  parle  de  la  version  des  Septante 
ù  peu  près  dans  les  mêmes  termes  que  saint 
Justin  et  saint  Irénée.  A  l'égard  des  livres 
du  Nouveau  Teslamcnl,il  ne  décide  rien  sur 
l'auteur  de  l'Epitre  au.x  Hébreux,  ni  siu'  la 
seconde  de  saint  Pierre,  ni  sur  les  deux  der- 
nières de  saiul  Jean  ;  mais  il  dit  nettement 
que  cet  apcJlre  a  écrit  l'Apocalypse;  et  en 
général,  que  l'on  croit  que  le  Sainl-I^spril 
est  auteur  de  tous  les  livres  de  l'Aucieu  et 
du  Nouveau  Testament*.  ■'  -^k 

22.   L'AUchn'a,  c'esl-;'i-diie   louanges   de       x,,. 
Dieu,  était  d'un  ancien  usage  chez  les  Hé- 
breux; saint  Jean  l'ouït  aussi  chanter  par  les 
anges.  Fn  Afrique,  on  ne  le  chantait  pas  en      AfOMi.pi. 


'  Uraulio,  m  Pro'nol.;  Ildeiifionc.  el  Sigeb.,  uhi      tus  Snnclus  esse  credilur.  Lili.  I  l)e  Offlc.  Eccle»., 
fupra.  Clip.  XII. 

'  Auctor  aulrm  earunidem  acripturtirum  Spiri- 


CIIAIMTIIE  LXIX.  —  SAINT  ISIDOIIK,  KVÈQUE. 


.1,18. 


ivil'  SlfcCLE.] 

loiit  temps,  mais  seulement  les  dimanches  et 
pcnil;iiit  la  cinquantaine  ilo  Pc\(iues.  Au  con- 
tiaiif,  les  églises  cl'Kspaniio  le  cliantcnt  en 
tout  temps,  hors  les  jours  île  jeune  et  du  ca- 
rême. Les  antiennes  appelées  offertoires  ne 
sont  point  d'inslilution  nouvelle.  Les  Juifs  en 
chaulaient,  lorsqu'ils  immolaient  dos  victi- 
mes. Voici  l'ordre  des  oraisons  de  la  messe, 
établi,  comme  l'on  croit,  par  saint  Pierre. 
Les  oraisons  sont  an  nombre  de  sept  :  la  pre- 
mière est  pour  avertir  le  peuple  et  l'exciter 
à  prier;  la  seconde  est  une  invocation,  afin 
que  Dieu  reçoive  favorablement  les  prières 
et  l'oblation  des  fidèles;  la  troisième  est  pour 
cens  qui  offrent,  et  pour  les  défunts,  afin 
qu'ils  obtiennent  le  pardon  par  ce  sacrifice; 
la  quatrième,  ponr  le  baiser  de  paix  et  de 
charité,  afin  que  tons,  étant  réconciliés,  s'u- 
nissent dignement  par  la  participation  du 
corps  et  du  sang  de  Jésus-Christ  ;  la  cinquiè- 
me nous  prépare  A.  sanctifier  l'oblation,  en 
invitant  les  créatures  terrestres  et  les  troupes 
célestes  des  anges  ;\  louer  Dieu  :  c'est  ce  que 
nous  appelons  la  Préface.  La  sixième  est  la 
confirmation  de  rolfrande  sanctifiée  par  le 
Saint-Esprit  ;  la  septième  est  l'Oraison  domi- 
nicale. Après  ces  sept  oraisons,  saint  Isidore 
met  le  Symbole  de  Nicée,  puis  la  bénédiction 
du  peuple,  figurée  par  celle  que  Moïse  donna" 
aux  Israélites  par  ordre  de  Dieu.  Il  remarque 
qu'encore  que  les  apôtres  ne  fussent  pas  à 
jenn  lorsqu'ils  communièrent,  parce  qu'il 
était  nécessaire  qu'ils  mangeassent  l'agneau 
pascal,  avant  de  recevoir  le  vrai  sacrement 
dont  cet  agneau  n'était  que  la  figm-e,  l'usage 
de  '  l'Église  universelle  est  que  nous  rece- 
vions k  jeun  le  corps  et  le  sang  de  Jésus- 
Christ.  Carie  pain  que  nous  rompons  '  est  le 
corps  de  Jésus-Christ,  qui  a  dit  :  Je  suis  le 
pain  de  vie  ;  et  le  vin  est  son  sang.  Le  pain 
et  le  vin  sont  deux  cliosesvisibles  ;  mais  étant 
sanctifiés  par  le  Saint-Esprit,  ils  passent  en 
sacrement  du  corps  divin.  Saint  Isidore  cite 
le  passage  de  saint  Cyprien  oi'i  nous  lisons 
qu'il  est  nécessaire  de  mêler  l'eau  avec  le 


717 


vin  dans  le  sacrifice  de  l'I^ucliarislie;  puis  il 
ajoute  :  «  11  y  en  a  ipii  disent  que  l'on  doit  re- 
cevoir l'Eucharistie  chaque  jour,  si  l'on  n'en 
est  empêché  par  quelipie  péché.  Ils  disent 
vrai,  s'ils  la  rei^oivenl  avec  dévotion  et  dans 
des  sentiments  d'humilité,  sans  Iroppiésii- 
mer  de  leur  justice;  mais  s'il  y  en  a  (|ui  aient 
commis  des  péchés  qui  les  retranclient  du 
saint  autel,  comme  étant  morts  dans  leur 
ûme,  il  faut  qu'ils  fassent  pénitence  avant 
toutes  choses,  pour  recevoir  ensuite  le  remè- 
de qui  donne  le  -salut  et  la  vie.  Car  celui  qui 
le  mange  et  qui  le  boit  indignement,  mange 
et  boit  sa  propre  condamnation.  Or,  c'est  le 
recevoir  indignement,  que  de  le  recevoir 
dans  le  temps  auquel  on  doit  faire  pénitence. 
Que  si  l'on  ne  juge  pas  que  ces  péchés  soient 
tels  qu'ils  doivent  éloigner  de  la  communion, 
alors  celui  qui  les  a  commis  ne  doit  pas  se 
priver  du  remède  qui  se  trouve  dans  la  par- 
ticipation du  corps  du  Seigneur,  de  crainte 
que  s'il  s'en  éloignait  longtemps,  il  ne  demeu- 
rât séparé  du  coi'ps  de  Jésus-Christ  :  car  il 
n'est  pas  douteux  que  ceux  qui  reçoivent  son 
corps,  n'y  trouvent  leur  vie.  »  Il  donne  pour 
maxime  générale  ',  que  celui  qui  a  cessé  de 
pécher,  ue  doit  pas  cesser  de  communier. 
Cl  Nous  croyons  *,  ajoute-t-il,  que  la  coutume 
d'oflrir  le  sacrifice  pour  le  repos  des  fidèles 
morts  et  de  prier  pour  eux,  étant  observée 
par  toute  la  terre,  a  été  instituée  par  les  apô- 
tres. C'est  ce  que  l'iiglise  catholique  obser- 
ve partout  :  et  si  elle  ne  croyait  pas  que  les 
péchés  peuvent  être  remis  aux  fidèles  après 
leurmort,  elle  ne  ferait  point  d'aumônes  ponr 
leurs  âmes,  ni  u'ollrirait  pour  elles  le  sacri- 
fice à  Dieu.  Car  lorsque  le  Seigneur  dit  :  Si 
quelqu'un  pèche  contre  le  Saint-Esprit,  son  pé- 
ché ne  lui  sera  point  pardonné,  ni  en  ce  monde, 
ni  en  l'autre,  il  fait  voir  qu'il  y  en  a  qui  sont 
pardonnes  en  l'autre  monde,  et  qui  sont  pur- 
gés par  le  feu  du  purgatoire.  » 

23.  Saint  Isidore  trouve  dans  l'Ancien  Tes- 
tament l'institution  des  oifices  de  tierce,  de 
sexte,  de  noue,  de  vêpres,  des  compiles,  des 


ilal.  SJI,32. 


C»p.  xi.< 

.\X,  \\t,  XXII, 
XXiil,      XXIV, 

\3.v  el  seq. 


'  Àb  xmiversa  Ecclesia  iiunc  a  jejunis  seinpcr 
accipUur.  Ibid.,  cap.  xvni. 

'  Panis  enim  quem  frangimus,  corpus  Christi 
est,  qui  die  il  :  Ego  suiii  pauis  vivus.  Yiiium  au- 
tem  languis  ejus  est...  Hœc  aulem  duo  sunt  visi- 
bilia;  sanclificata  tamen  per  Spirituiii  Sanctum,  in 
sacramentuin  divini  corporis  traiiseuiit.  Lih.  I  De 
Ollic,  cap.  xvni. 

'  Qui  peccare  jam  quievit,  coinmtmicare  non 
deninat.  Ibid. 

*  Sacrificium  pro  defunctorum  fideliuiv   requie 


offerri  vel  pro  eis  orari,  quia  per  tolum  hune  or- 
bem  custoditur,  credimus  quod  ab  ipsis  apostolis 
tradituin  sit.  Hoc  enim  ubique  catholica  tenet  Ec- 
clesia, quœ  nisi  crederet  fidelibui  defunolis  di- 
milli  peccata,  non  pro  eonun  spirilibus,  vel  elee- 
mosynam  faceret,  vel  I)eo  sacrificiuiii  offerret. 
liam,  el  quod  Dominus  dicit  :  Qui  peccavei-it  iii 
Spiritum  t-auclum,  uon  remittetur  ei,  uequeiuhoo 
seciilo  ucquc  iu  faturo,  demonstrat  illic  quibus- 
dam  dimiltenda  esse  peccala  el  quodain  purgato- 
rio  igné  purganda.  Ibid.,  cap.  xvni. 


718 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


veilles,  des  matines,  remarquant  en  passant 
qu'il  y  a  eu  des  hérétiques,  nommés  nycta- 
ges  ou  dormeurs,  parce  qu'ils  regardaient 
les  veilles  de  l'Église  comme  inutiles,  et  com- 
me contraires  à  l'ordre  de  Uieu,  qui  a  éta- 
bli la  nuit  pour  le  leposet  le  sommeil.  Il  dit, 
d'après  Cassien,  que  l'oUice  de  matines  a  été 
établi  premièrement  dans  le  monastère  de 
Belbléem,  doù  il  est  passé  dans  toutes  les 
églises  du  monde.  Après  quoi  il  parle  des 
fêtes  principales  de  l'Eglise,  savoir  :  du  Di- 
manche, de  Noël,  de  l'Epiphanie,  oii  l'on  cé- 
lébrait tout  ù  la  fuis  l'adoration  des  Mages, 
le  baptême  de  Jésus-Chiist  et  le  miracle  de 
l'eau  changée  en  vin  aux  noces  de  Cana;  du 
t.p.u»,r.  jour  des  Palmes,  de  la  Cène  de  Jésus-Christ, 
auquel  jour  ou  lavait  les  autels,  les  murail- 
les et  le  pavé  de  l'église,  on  purifiait  les  va- 
ses sacrés  et  on  faisait  le  saint  chrême;  du 
Vendredi-Saint,  du  Samedi-Saint,  de  Pâques, 
de  l'.\scension,  delà  Pentecôte,  des  Martyrs 
et  de  la  Dédicace,  n  Nous  célébrons  ',  ajou- 
te-t-il,  les  fêtes  des  martyrs  pour  nous  exci- 
ter à  les  imiter  et  nous  recommander  ù  leurs 
prières  ;  mais  nous  ne  les  honorons  point  du 
culte  de  latrie,  qui  ue  convient  qu'à  Dieu. 
C'est  pourquoi  nous  ne  leur  ollVons  point  le 
sacrifice.  Nous  leur  rendons  des  honneurs 
de  charité,  non  de  servitude.  »  Les  jeû- 
nes en  usage  dans  l'Église  étaient  ceux  du 
Carême ,  dont  Moïse ,  Élie  et  Jésus-Christ 
ont  donné  l'exemple,  de  la  Pentecôte,  de 

Cp.xH.r,  septembre,  c'est-à-dire  des  quat:e-lemps.  Il 
ne  dit  rien  de  ceux  de  décembre,  qui  étaient 

i',"cii".'  en  usage  dès  le  pontificat  de  saint  Léon; 
mais  il  marque  deux  jeûnes  que  nous  ne 
pratiquons  plus,  celui  du  premier  jour  de  no- 
vembre et  celui  dupremier  de  janvier.  «Nous 
jeûnons  quelquefois,  ajoutc-l-il,  trois  joui-s 
de  suite  à  l'imitation  des  Ninivites.  »  En  cer- 
taines églises  on  jeûnait  tous  les  vendredis 
de  l'année;  en  d'autres  les  samedis.  La  tra- 
dition des  églises  était  qu'on  ne  jeûnait  point 
depuis  Pâques  jusqu'à  la  Pentecôte  ;  mais  on 
ne  trouvait  pas  mauvais  que  les  moines  pra- 
tiquassent fienJant  ce  temps-là  quelquesjeù- 
nes  particuliers,  pourvu  que  ce  ue  fût  pas  le 
dimanche.  A  l'égard  des  autres  pratiques  de 
l'Église,  elles  n'étaient  pas  généralement  ob- 
niM.  corvées.  D;ins  les  unes,  on  oll'rait  tous  les 
jours  le  sacrifice;  dans  les  autres,   ou   ne 

'  Festivilates  (ipostolarum.seu  in  honore  mor- 
lyruin  fesliritates  antiqiti  paires  in  renfralioniB 
my.ilerio  cclehrari  adnxeninl,  vel  ail  excilanJuin 
(iri  imilationem,  vel  ni  iiurilis  eoriiin   ronsocif- 


Axzrii 

XXXVIM. 
XIXIX, 


l'ollrait  que  le  samedi  et  le  dimanche,  et 
dans  quelques-unes  seulement  le  dimanche. 
Comme  il  n'y  avait  en  cela  rien  qui  fût  con- 
tre la  foi  et  les  bonnes  mœurs,  chacun  pou- 
vait suivre  en  sûreté  les  usages  de  son  égli- 
se. Ce  Père  croit  que  l'usage  du  vin  et  de  la  i, 
viande  n'a  été  permis  que  depuis  le  déluge; 
qu'on  peut  par  dévotion  s'abstenir  de  l'un  et 
de  l'autre,  non  qu'ils  soient  mauvais  de  leur 
nature,  mais  parce  qu'ils  sont  la  nourriture 
des  vices. 

24.  Il  traite  dans  le  second  livre  de  tous        Lirrm 
les  ditierents  degrés  du  mmislere  ccclesias-  «•  rct!é.i« 

tique',    i-aj 

tique.  Tous  ceux  qui  en  font  quelque  fouc-  «»s.  «p. .. 
tion  sont  appelés  clercs,  parce  que  le  Sei- 
gneur est  leur  sort  et  leur  héritage,  ce  que 
signifie  le  nom  grec  de  c/erc.  Ils  doivent  me-  cp.  n. 
ner  une  vie  éloignée  de  celle  des  séculiers, 
s'abstenir  des  plaisirs  du  siècle,  des  specta- 
cles, des  festins  publics,  de  l'usure,  du  com- 
merce, des  fréquentes  visites  des  veuves  et 
des  vierges,  des  paroles  sales  ;  s'appliquer  à 
la  lecture,  à  la  prière,  à  la  psalmodie.  On  '" 
distinguait  deux  sortes  de  clercs  :  les  uns 
étaient  soumis  à  leurs  évêqnes;  les  autres, 
vivant  sans  chef,  en  prenaient  occasion  de  se 
livrer  à  leurs  passions.  Ils  n'étaient  ni  laï- 
ques, ni  ecclésiastiques.  Tous  les  clercs  poi^  '> 
talent  une  tonsure,  ayant  le  haut  de  la  tête 
rasé,  et  seulement  une  couronne  de  cheveux 
autour  de  la  têie,  à  la  façon  du  cercle  d'or 
que  les  rois  mettaient  sur  leur  tête.  Le  sacer- 
doce, dans  la  loi  ancienne,  a  commencé  par 
Aaron.  Melchisédech  otfrit  des  sacrifices;  v. 
Abraham  et  Isaac  en  oflVirenl  aussi,  mais 
c'étaient  des  sacrifices  purement  volontai- 
res. Ils  ne  les  offraient  pas  par  l'autorité  du 
sacerdoce.  Il  a  commencé  dans  le  Nouveau 
Testament  par  saint  Pierre,  qui  est  le  pre- 
mier à  qui  le  pontificat  ait  été  accordé  dans 
l'Église  de  Jésus-Christ.  Les  apôtres  reçurent 
depuis  un  pareil  degré  d'honneur  et  de  pou- 
voir. Les  évoques  lem-  ont  succédé.  Ils  sont 
ordonnés  par  l'imposition  des  mains,  non 
par  un  seul  évêque,  mais  par  les  évêques 
comprovinciaux.  L'âge  requis  pour  l'épisco- 
patestde  treuteaus.  Il  faut,  poiirêtre  évèque, 
avoir  vécu  dans  le  célibat,  ou  n'avoir  été  ma- 
rié qu'une  fois,  encore  avec  une  vierge.  En 
ordonr.ani  un  évècpic,  on  lui  donnait  un  bâ- 
ton et   un  anneau:  le  hAton,  pour  marquer 

mur  nique  oralionibus  arijuvemur:  ila  Inwen  til 
nulli  marlijrum,  offeramus...xed  ipsi  Deo  mnrly- 
rum.  Colimus  ergo  martyres  ruUu, diltctionis  et 
societalis.  Ibid.,  cap.  xxxiv. 


(vit  siècle. 


CHAPITRE  LXIX.  —  SAINT  ISIDORE,  l'iVÊQUE. 


([iril  devait  corriger  son  {)('ii|ilo,  cl  soutenir 
les  l'yihles;  ramieaii,  en  sij^ne  île  l'iionuenr 
pontifical.  Lire  l'Écrilnre  sainte,  étudier  les 
canons,  instruire  les  peuples,  leur  donner 
l'oxenipic  d'unesainlo  vie,  dotnier  l'aunione, 
exercer  l'iiospilalité  envers  les  étrangers  : 
voilà  les  devoirs  d'un  évèijue.  Ils  avaient  des 
vicaires  pour  faire  à  leur  place  diverses  fonc- 
tions dans  les  bourgs  et  les  villages  :  on  les 
noujniait  cliorévêqnes.  Ils  avaient  le  pouvoir 
d'ordonner  des  lecteurs,  des  sous-diacres,  des 
exorcistes,  mais  non  pas  des  prêtres,  .'i  moins 
que  ce  ne  IVit  de  l'agrément  de  l'évèque  du 
diocèse.  L'ordination  des  prêtres  était  donc 
réservée  aux  évêques,  pour  maintenir  l'au- 
torité et  la  splendeur  de  l'épiscopat,  et  aiin 
d'empêcher  les  divisions;  mais  lesprclicsne 
laissaient  pas  d'avoir  beaucoup  d(i  part  à  la 
dispensation  des  mystères.  Ils  présidaient 
aux  églises,  ils  consacraient  le  corps  et  le 
sang  de  Jésus-Christ,  ils  prêchaient  la  parole 
de  Dieu. 

23.  Les  diacres  sont  les  dispensateurs  des 
mj'stères  consacrés  par  les  prêtres.  Ce  sont 
eux  qui  avertissent  du  temps  de  fléchir  les 
genoux,  de  psalmodier,  d'écouter  les  lec- 
tures. Ils  présentent  aussi  le  calice  au  peuple, 
ù  qui  il  n'est  pas  permis  de  le  prendie  sur 
l'autel.  Le  texte,  au  lieu  de  peuple,  lit  le 
praire  :  ce  qui  parait  une  faute  d'impression, 
car  il  n'est  pas  vraisemblable  que  les  prê- 
tres n'aient  pas  eu  droit  de  prendre  le  calice 
sur  l'autel.  On  choisissait  encore  des  diacres 
pourlem-  confier  la  garde  du  sacraire.  Lors- 
qu'on ordonnait  un  sous-diacre,  on  ne  lui 
imposait  pas  les  mains,  comme  aux  prêtres 
et  aux  diacres,  mais  il  recevait  des  mains 
de  l'évêque  '  la  patène  et  le  calice,  et  de 
l'archidiacre  un  vase  d'eau  avec  un  linge 
pour  essuyer  les  mains.  On  les  obligeait  tou- 
tefois à  la  continence,  parce  qu'ils  touchaient 
les  vases  sacrés.  Les  lecteurs,  obliges  de 
lire  à  haute  voix  dans  l'église,  devaient  sa- 
voir prononcer  exactement,  mettre  les  ac- 
cents sur  les  syllabes,  lire  d'une  voix  claire 
et  grave,  sans  l'élever  trop,  ni  trop  l'abais- 
ser. Ou  faisait  aussi  beaucoup  d'attention  à 
la  mélodie,  h  la  force  et  à  la  netteté  de  la 
voix,  dans  le  clioix  de  ceux  qui  étaient  char- 
gés du  chant  des  psaumes.  Ce  choix  était 
confié  aux  prêtres.  Les  fonctions  des  exor- 


719 

cistes  étant  d'imposer  les  mains  sur  les  éner- 
guinèned  et  do  les  exorciser,  ils  rec^oivent  i\ 
leur  ordination,  des  mains  do  l'évêque,  le 
Livre  des  exorcismes.  Il  était  du  devoir  des 
portiers  de  ne  laisser  entier  dans  l'église  que 
ceux  ([u'il  était  d'usage  d'y  laisser  outrer. 
Saint  Isidore  distingue  six  sortes  de  moines  : 
les  cénobites,  les  ermites,  les  anachorètes; 
une  autre  cs[ièec  d'anachorètes,  (pii  n'en 
avaient  que  le  nom  et  non  la  vertu  ;  les  cir- 
concellions  ou  vagabonds,  et  les  sarabaïtes. 
Il  n'estime  que  les  trois  premières,  surtout 
les  cénobites,  ou  ceux  qui  vivent  en  com- 
munauté, à  l'exemple  des  premiers  chrétiens. 
Ensuite  il  parle  des  pénitents,  qui,  tombés 
dans  quelque  péché  considérable  depuis  leur 
baptême,  s'ell'oi-(;aient  d'en  obtenir  le  par- 
don par  leurs  larmes  et  par  leurs  regrets. 
On  leur  coupait  les  cheveux,  on  les  couvrait 
d'un  cilice,  et  on  répandait  des  cendres  sur 
leur  tête,  pour  les  faire  souvenir  qu'ils  n'é- 
taient que  poussière,  et  qu'ils  retourneraient 
en  poussière.  Les  clercs  faisaient  leur  péni- 
tence devant  Dieu;  les  laïques,  en  présence 
de  l'évêque,  qui  leur  imposait  solennelle- 
ment les  travaux  et  les  marques  de  la  péni- 
tence. Lorsque  l'évêque  bénissait  une  vierge 
consacrée  à  Dieu,  il  lui  mettait  un  voile.  Il 
ne  recevait  au  rang  des  veuves,  que  celles 
qui  avaient  quarante  ans.  Les  personnes  ma- 
riées recevaient  la  bénédiction  du  prêtre  lors 
de  leur  mariage,  l'Eglise  pratiquant  en  cette 
occasion  ce  que  Dieu  fit  dans  le  paradis  ter- 
restre, quand  il  bénit  Adam  et  Eve,  leur 
disant  :  Croissez  et  multipliez. 

26.  Après  avoir  pai-lé  des  différents  or- 
dres de  l'Eglise,  ce  Père  explique  ce  qui  re- 
garde la  foi  et  les  sacrements.  Il  distingue 
trois  degrés  dans  ceux  qui  passent  du  paga- 
nisme à  l'Église  catholique  :  les  catéchumè- 
nes, les  compétents,  les  baptisés.  Les  caté- 
chumènes y  viennent  avec  la  seule  volonté 
de  croire  en  Jésus-Christ;  les  compétents 
ont  déjà  reçu  la  doctrine  de  la  foi,  et  s'em- 
pressent de  recevoir  le  baptême.  La  foi 
qu'on  leur  enseigne  est  renfermée  dans  le 
Symbole  composé  par  les  apôtres  :  les  com- 
pétents l'apprenaient  par  cœm'.  Saint  Isidore 
l'explique,  et  marque  aussi  quelques  arti- 
cles de  la  foi  qui  n'y  sont  pas  renfermés 
clairement.  Il  ne  décide  rien  sur  l'origine  de 


C3[>,  XI  /. 


XVI..      xviii. 


'  Suhiliaconi  cum  ordiiianlur,  sicul  sacerdoles 
et  kvHiv  inanus  iinjiositionem  nonsuscipmnt;  sed 
patenam  tanlum  et  caUcem  de  manu  episcopi,  et 


ah  archidiacono  scyphuin  aquœ  cum  aquœ  mani- 
li  cl  manuterginm  accipiunt.  Lib.  UOIJic.,  cap.  x. 


720  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

l'ànic,  la  retrardanl  coninie  incertaine  :  seu-      qui  regarJe  les  archidiatics ,  à  qui  il  tlonno 
Icinenl  il  dit  qu'elle  n'est  pas  une  iiartie  de      une  grande  autorité  sur  les  parois-^es  de  leur 


(jp.  II'. 


la  substance  divine,  non  plus  que  la  nature 
des  anges.  Il  enseigne  que  le  mariage  légi- 
time n'est  point  coiulamnaMe;  que  le  baptême 
conféré  au  nom  de  la  Trinité  ne  peut  se  réité- 
rer ;  que  nul  notait  le  bieu  sans  la  grâce.  Il 
dislintruetroissortcsde  baptêmes  :lebaptème 


iini.uviii. 


ressort ,  sur  les  sous-diacres  ,  les  diacres  et 
les  prêtres,  même  sur  l'archiprêtre.  11  y  parle 
aussi  des  primlciers ,  des  lrésoriei"s  et  des 
économes. 

28.  Ses  trois  livres  des  sentences  sont  ti- 
rés des  Morales  de  saint  Grégoire  le  Grand  '. 
d'eau,  le  Imptême  de  sang  et  le  b?pléme  de  Le  premier  livre  contient  des  sentences  ou 
larmes.  C'est  Dieu  qui  baptise  :  ainsi  il  n'im-  pensées  chrétiennes  sur  les  attributs  de  Dieu,  "<''i'-< 
porte  que  ce  soit  un  bérélique  ou  un  mé-  son  immutabilité,  son  immensité,  sa  tonte- 
chant  qui  le  confère,  poi:rvu  qu'il  l'adminis-  puissance,  son  éternité,  etc.  ;  sur  la  division 
Ire  au  nom  du  Père,  du  Fils  et  du  Saint-  des  temps  et  la  création  du  monde  ;  sur  l'o- 
Esprit.  C'est  aux  évèques  et  aux  prêtres  que  liginc  du  mal;  sur  la  nature  et  l'état  des 
l'administration  en  est  réservée  ;  de  sorte  anges  et  de  l'homme  ;  sur  l'Incarnation,  sur 
que  les  diacres  ne'peuvenl  le  conférer,  que  la  divinité  et  les  opéialions  du  Saint-Esprit, 
lorsque  l'évcque  et  les  prêtres  sont  absents  sur  l'Église  et  les  hérétiques  qui  en  ont  com- 
cl.éloignés,  et  dans  le  cas  de  nécessité,  au-     battu  la  doctrine.  11  dit  d'eux  que  les  bonnes 


Lettre  & 
Lfurr*de  évê. 


Îue 
ouc, 


pae.eiâ 


quel  cas  les  laïques  mêmes  fidèles  peuvent 
le  donner,  afin  que  personne  ne  périsse, 
faute  de  ce  remède.  L'évêque  donne  le  saint 
Chrême  aux  nouveaux  baptisés,  pour  les 
rendre  les  oints  de  Jésus-Christ  ;  et  il  leur 
impose  les  mains ,  afin  qu'ils  reçoivent  le 
Saint-Esprit.  Celte  fonction  est  réservée  à 
l'évêque,  à  l'exclusion  des  prêtres,  qui  ne 
peuvent  l'exercer,  ni  en  présence  ,  ni  en 
l'absence  de  l'évêque. 

Les  deux  chapitres  suivants  ne  se  trou- 
vent point  dans  l'édition  de  Cologne  de  15G8. 
Ils  traitent  des  sulTrages  de  l'Eglise,  c'esl-iV 
dire  des  prières  et  des  bonnes  œuvres  que 
l'on  y  fait ,  tant  en  faveur  des  fidèles  vivants 
que  des  trépassés.  Il  y  est  dit  que,  pour  que 
ces  suifrages  soient  profitables,  il  est  néces- 
saire que  celui  qui  les  fait  soit  dans  la  cha- 
rité, de  même  que  celui  pour  qui  ils  sont 
faits;  qu'ainsi  ils  sont  inutiles  aux  damnés  ; 
qu'ils  profitent  à  ceux  qui  sont  détenus 
dans  le  purgatoire ,  à  proportion  que  ces 
âmes  ont  mérité,  étant  en  ce  monde,  que 
ces  suH'rnges  leur  profitassent.  Tout  cela  est 
expliqué  dans  le  goût  des  scholastiques. 

27.  Les  deux  livres  des  Ollices  ue  parais- 
saient pas  encore,  ou  peut-être  même  ils 
n'étaient  pas  achevés,  lorsque  Leiifrèile,  évê- 
que  de  Cordoue  ,  pria  saint  Isidore  de  lui 
marquer  en  détail  toutes  les  fonctions  de 
chaque  minisire  de  l'Église.  Il  le  fit  dans  une 
lettre  iind'on  a  donnée  par  paities  dans  l'é- 
dition do  IfiOl.  Le  commencement  si^  lit  à  la 
page  (il 3,  et  la  suite  à  la  page  093.  Ce  n'est 
qu'un  précis  de  ce  que  saint  Isidore  dit  de  ces 
ministres  et  de  leurs  fonctions  dans  ses  livres 
des  Ollices.  Il  s'y  êleiid  un  peu  plus  sur  ce 


œuvres  qu'ils  font  ne  leur  servent  de  rien, 
c'est-ù-dire  pour  le  salut  ;  et  qu'encore  qu'ils 
accomplissent  la  Loi  et  les  Prophètes ,  Dieu 
n'est  point  au  milieu  de  leur  assemblée,  par 
cela  seul  qu'ils  ne  sont  point  catholiques.  Il 
remarque,  dans  les  sentences  sur  la  dille- 
rence  des  deux  Testaments,  que  dans  l'An- 
cien certaines  fautes  étaient  moins  grièves 
qu'elles  ue  le  sont  dans  le  nouveau,  l'ancien 
Testament  n'ayant   que  l'ombre  de  la  vé- 
rité ,   tandis    que   le  Nouveau    a   la   vérité 
même,  et  des  préceptes  beaucoup  plus  re- 
levés. D'où  vient  que  la  vcngeani.e,  qui  était 
permise  aux  juifs,  est  condamnée  sévère- 
ment dans  les  chrétiens.  En  parlant  du  bap- 
tême, que  les  cufauls  qui  meurent  bans  l'a- 
voir reçu,  sont  condamnés  aux  peines  de 
l'enfer  pour  le  seul  péché  originel;  que  le 
baptême  délivre  des  peines  éternelles,  mais 
qu'il  ne  uous  met  pas  à  couvert  de  celles  de 
celte  vie;  qu'un  enfant  étant  dans  le  sein 
de  sa  mère  ne  peut  être  baptisé,  parce  que , 
n'étant  pas  encore  né  selon  Adam,  il  ne  peut 
renailrc  en  Jésus-Christ  ;  que  ceux  i]ui,  vi- 
vant dans  le  désordre,  croient  s'en  purifier 
en  communiant  souvent,  se  tronqjent,  puis- 
que l'Api'itre  ordonne  de  s'éprouver  avant  de 
manger  de  ce  pain,  et  de  lioire  de  ce  calice; 
que  les  miracles  étaient  nécessaires  dans  l'é- 
tablissement de  l'Église;  mais  que  présente- 
ment iju'elle  est  établie,  il  est  i)lus  grand  de 
bien  vivre  tpie  do  faire  des  miracles.  Il  parle 
des  signes  avant-coureurs  de  l'anlcchrist , 
p.irmi  lesquels  il  met  qu'alors  les  juifs  per- 
sécuteront plus  cruellemenl  l'Ilglise  ,  qu'ils 

'  Urautiu,  ifi  fraimlut.  \\h.  Isidori. 


Cap.  xt 


CHAPITRE  LXIX. 


LKre  se* 
tonil  des  Sen- 
ICDCo?,     pag. 


Llh,  II  Dif- 
férent., cap. 
IXTir,  psg. 
S99. 


[vu*  SIÈCXE.] 

ii'oiil  fait  au  premier avotipiiiciit  du  Sauveur. 
Il  tlisliiij^uc  lieux  orihi's  ciilio  les  élus  et  lo3 
réprouvés  au  ju,i;eineiil  (icruier.  Le  pi-emier 
prdre  des  élus  est  celui  des  parfaits,  qui  juge- 
ront avec  Jésu.s-Cluisl  ;  le  second,  de  ceux  qui 
scrout  ,juf;és  et  néaunioins  sauvés.  Le  pre- 
ijiier  ordre  des  réprouvés  est  de  ceux  qui  , 
iayant  été  dans  l'Ii^glise,  seront  jugés  et  con- 
damnés pour  leurs  mauvaises  actions  ;  le  se- 
cond ,  de  ceux  qui  n'oul  point  été  dans  l'E- 
glise :  ils  seruut  condanun's,  mais  ncui  pas 
jugés, parce  qu'ils  le  sont  déjà, comme  n'ayant 
pas  eu  la  toi  en  Jésus-Christ.  Les  méchants 
seront  punis  ;\  proportion  de  leurs  péchés. 
La  vue  de  leurs  supplices  ne  causera  aux 
bienheureux  aucune  douleur,  même  pas  un 
sentiment  de  compassion  ,  parce  que  la  joie 
qu'ils  trouveront  à  contempler  Dieu,  ne  lais- 
sera aucune  entrée  :\  la  tristesse. 

:29.  Les  Sentences  du  second  livre  regar- 
dent la  pratique  de  toutes  les  vertus,  en  com- 
mençant parles  théologales;  la  fuite  de  tou- 
tes sortes  de  péchés,  et  la  manière  d'en 
obtenir  le  pardon.  Il  y  est  aussi  parlé  de  la 
grâce  et  de  la  prédestination.  Sur  le  premier 
article,  saint  Isidore  enseigne  que  le  progrès 
de  l'homme  dans  la  vertu  est  un  don  de  Dieu  ; 
que  personne  ne  peut  être  corrigé  de  ses 
mauvaises  mœurs  par  soi-même,  mais  par 
la  grâce  de  Dieu  ,  dont  le  secours  nous  est 
nécessaire  pour  tout  bien,  quoiqu'on  disent 
les  défenseurs  du  libre  arbitre  ;  que  la  grâce 
divine  ne  trouve  dans  l'homme  aucun  mérite 
qui  l'attire,  mais  qu'elle  y  en  fait  quand  elle 
est  venue  ;  qu'étant  entrée  dans  un  cœur  in- 
digne d'elle,  et  n'y  ayant  rien  trouvé  qu'elle 
ne  dut  punir,  elle  forme  des  mérites  pour 
les  récompenser;  qu'il  y  a  une  double  pré- 
destination ,  l'une  des  élus  pour  le  repos  et 
la  félicité,  l'autre  des  réprouvéspour  lamoit. 
Il  s'était  expliqué  en  ces  termes  sur  cette 


SAINT  ISIDORE,  ÉVÊQUE.  721 

matière  dans  le  second  livre  des  DilI'érenccR  : 


u  PersiMine  ne  prévirent  ])ar  ses  lui-iiles  la 
grâce  du  Seigneur  ',  de  sorte  (ju'il  puis.sc  re- 
garder Dieu  comme  son  débiteur.  Mais  le 
Créateur,  qui  est  équitable  envers  tous  d'une 
manière  mcivcilleuse,  a  choisi  les  uns  eu  les 
prédestinant,  et  a  abandonné  les  autres,  par 
un  juste  jugement,  dans  leurs  mœurs  dé- 
pravées. D'où  il  parait  visiblement  que  le 
don  de  la  grâce  ne  s'acquiert  point  par  les 
forces  de  la  nature,  mais  qu'il  est  accordé 
par  un  pur  effet  de  la  bonté  divine.  Car  quel- 
ques-uns ,  faits  vases  de  miséricorde ,  sont 
sauvés  par  un  don  gratuit  de  sa  miséricorde 
prévenante  ;  et  les  autres ,  qui  ont  été  faits 
des  vases  de  colère ,  et  qui  sont  réprouvés 
et  prédestinés  à  la  peine,  sont  damnés.  C'est 
ce  qui  parait  par  l'exemple  d'Ésaii  et  de  Ja- 
cob, avant  qu'ils  fussent  nés  :  quoique  con- 
çus et  enfantés  du  même  sein  et  coupables 
l'un  et  l'autre  du  péché  originel,  la  bonté 
prévenante  de  sa  miséricorde  n'a  cependant 
attiré  à  Inique  l'un  des  deux,  en  même  temps 
que ,  par  un  effet  de  la  sévérité  de  sa  justi- 
ce, il  a  condamné  l'autre,  resté  l'objet  de  sa 
haine ,  et  l'a  laissé  dans  la  masse  de  perdi- 
tion. C'est  ce  que  le  Seigneur  a  dit  aussi  par 
sou  prophète  :  J'ai  aimé  Jacob  ,  et  j'ai  haï 
Ésaii.  D'où  il  suit  que  la  grâce  est  donnée 
par  un  effet  de  la  seule  vocation  divine,  et 
que  nul  n'est  sauvé  ou  damné,  choisi  ou  ré- 
prouvé, que  selou  le  décret  de  la  prédesti- 
nation de  Dieu,  qui  fait  paraître  sa  justice 
dans  les  réprouvés  ,  et  sa  miséricorde  dans 
les  élus  ;  ca7-  lotîtes  les  voies  du  Seigneur  ne 
sont  que  miséricorde  et  vérité.  Il  avait  dit,  quel- 
ques lignes  auparavant,  qu'il  y  a  cette  dif- 
férence entre  la  grâce  dont  Dieu  nous  fait 
part,  et  la  volonté  du  libre  arbitre  des  hom- 
mes ^,  que  le  libre  arbitre  est  la  volonté  d'une 
puissance  qui  est  bbre  et  qui  peut  d'elle- 


'  Kemo  Deum  merilis  an  tecedit  ut  tenere  eum 
quasi  debilorem  possit:sed  mira  modo  œquus  om- 
nibus Conditor  alios  pro'deslinatos prœetiijit,  alios 
vero  in  suis praiis  moribus  justojiidicio  derelm- 
quit.  Unde  verissimunt  estgraliœ  munus  non  ex  hu- 
niana  virlule,  velex  merilo  arbilrii  consequi,sed 
soHus  divin(e  pielalis  bonilate  largiri.  Qtiidam 
enim  gralissimw  misericordiœ  fjus  prœvenientis 
dono  satviintur,  effecli  vasa  misericoriliœ:  quidam 
veru  reprobi  liabiii  ad  pœnam  ptuedestinati  dam- 
nantur,  ep'ecli  vasa  irir.  Quod  excmplo  de  Jacob  el 
Esaii  nondumnatis  colligiliir,  quidnm  essent  una 
concepUone vel partu  edilioripariquenexupeccati, 
ginalis  asiricli.  aller  uni  tamen  eonnn  ad  se  miseri- 
cordiœ divinœprœvenienlis  traxit;  alterum  qtia- 
XI. 


damjustitiœ  severitale,  odio  habitnm  in  massaper- 
ditionis  relictinn  damnavil,  sicul  etperproplietam 
idem  Dominus  loqiiitur  dicens:  Jaonb  cHlexi,  Esaû 
aiiteai  odio  liabui.  Unde  consequens  est,  nullis  prœ- 
venitntibus  merilis,  co.'ferri  gralium,  sed  sola  vo- 
calione  divina.Neque quemquam salvari,siiedam- 
nari,  elegi,  velreprobari  nisi ex proposilo  pra-dcs- 
tinanlis  Dei,  quijustns  eslinrfprobatis,  misericors 
in  eleclis:  Univers»  enim  vife  Domini  misericor- 
dia  et  veritas.  Isidor.,  lib.  II,  de  Dif.  rerum,  xxxii, 
pag.  299,  300.  col.  1029. 

'  Inter  gratite  divinœ  infusioneni,  et  humani  ar- 
bitra vnluntatem  hncinteresl:  arbilrium  est  ro- 
luntas  liberœpolestis  gvœ  perse  sponte  vel  l'Ona 
velmalaappelerepolest;  gralia  aulem  estdivinw 

46 


HISTOIRE  GÉXÉR.VLE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


"22 

mf'mc  et  de  son  plein  p:ié  se  tourner  vers  le 
bien  on  le  mal  ;  an  lien  que  la  ptràce  est  un 
don  gratuit  de  la  bonté  de  Dieu,  par  lequel 
on  mérite  le  commencement  de  la  bonne  vo- 
lonté et  l'appliialion  à  l'd'uvrc:  qu'en  effet 
la  pvâce  prévient  l'homme  afin  qu'il  devien- 
ne bon,  et  que  le  libre  arbitre  ne  précède 
point  la  grâce;  mais  que  cette  grâce  pré- 
vient l'homme  qui  ne  voulait  pas  le  bien ,  et 
le  lui  fait  vouloir;  que  l'homme  est  disposé 
de  manière  que,  par  le  poids  de  sa  propre 
chair  il  a  une  pente  naturelle  à  la  prévarica- 
tion, et  qu'il  est  lent  à  faire  pénitence;  qu'il 
peut  bien  par  lui-même  faire  des  chutes,  mais 
qu'il  ne  peut  se  relever  par  lui-même  ;  qu'il 
faut  pour  cela  que  son  Créateur  lui  tende  la 
main,  et  qu'il  ne  peut  être  relevé  que  par  la 
grâce;  qu'Adam  avait  par  son  libre  arbitre 
le  pouvoir  de  commencer  le  bien  ,  qu'il  ne 
pouvait  toutefois  achever  qu'avec  le  secours 
de  Dieu  ;  mais  que  ,  pour  nous,  c'est  de  la 
grâce  de  Dieu  que  nous  recevons  et  le  com- 
mencement et  l'accomplissement  du  bien  au- 
quel se  porte  notre  libre  arbitre;  que  c'est 
Lit.  Il,  celui  qui  nous  a  donné  la  grâce  et  qui  a  ré- 
"•  tabli  eu  nous  noire  libre  arbitre,  qui  nous 

donne  de  commencer  le  bien  et  de  l'accom- 
plir. Saint  Isidore  remarque  ,  dans  le  chapi- 
tre intitulé  des  Exemples  des  Saints,  qu'il  est 
utile,  quand  on  fait  Ihisloire  de  leur  vie,  de 
c«p,  it;ii,  faire  mention  de  leurs  chutes  et  de  leur  pé- 
nitence ;  afin  que  les  pécheurs  ne  désespè- 
rent pas,  mais  quiis  fassent  pénitence  com- 
me eux,  pour  obtenir  le  pardon  de  leurs  fau- 
tes. 11  est  du  sentiment  que  plusieurs  péchés 
légers  en  font  un  cons-^idéiable.  comme  plu- 
sieurs gouttes  d'eau  composent  un  tleuve  ; 
qu'ainsi  on  doit  éviter  les  plus  petits  péchés. 
En  parlant  dans  le  treizième  chapitre  de  ceux 
qui  promettent  facilement  une  sûreté  tout 
entière  aux  pécheurs,  il  dit  que  c'est  d'eux 
que  le  Prophète  a  eu  raison  de  dire  :  <i  Ils 
truilent  honteusement  les  ùlessuresde  mon  jjeu- 
ple,  en  disant,  que  ta  paix  était  assuréç  lors- 
qu'elle ne  l'était /tas.  Celui-b'idonc  traite  hon- 
teusement les  blessures  d'un  pécheur,  qui 
lui  promet  sûreté  lorsqu'il  pèche  et  qu'il  ne 


EsmIi.  XIII, 


fait  pas  une. juste  et  légitime  pénitence,  n  H 
ajoute  ,  qu'encore  que  l'on  obtienne  le  par- 
don de  ses  péchés  par  la  pénitence  ,  l'on  ne 
doit  pas  être  sans  crainte  ;  parce  que  c'est  à 
Dieu,  et  non  pas  à  l'homme ,  à  peser  la  sa- 
tisfaction du  pénitent  dans  la  balance  de  la 
justice  ;  qu'ainsi  la  miséricorde  de  Dieu  étant 
cachée,  il  est  nécessaire  de  pleurer  sans 
cesse. 

30.  Il  traite,  dans  le  troisième,  des  diffé- 
rentes tentations  auxquelles  nous  sommes 
sujets,  et  des  moyens  de  les  sunnonter.  Il 
parcourt  A  ce  sujet  presque  toutes  les  diver- 
ses conditions  des  hommes  :  des  évêques.  des 
prêtres,  des  princes,  des  juges,  des  avocats; 
maïquant  les  dangers  et  les  obHgations  de 
chaque  état.  On  y  trouve,  comme  dans  les 
deux  livres  précédents,  des  instructions  très- 
solides  et  très-salutaires. 

31.  Les  deux  premières  de  ses  lettres  sont 
adressées  à  Biaulion  :  l'une,  lorsqu'il  n'était 
encoi-e  qu'archidiacre  de  Saracrosse;  l'autre, 
depuis  qu'il  en  fut  évêque.  Il  marque  dans 
celle-lA,  qu'il  lui  envoyait  un  anneau,  un 
maiiteau  et  un  cahier  des  Régloti,  de  celles  ap- 
paremment qu'il  composa  pour  des  moines. 
La  troisième  est  à  Uellade  et  aux  autres  évo- 
ques assemblés  pour  juger  la  cause  d'un  prê- 
tre tombé  dans  un  péché  d'impureté.  Il  est 
d'avis  qu'on  le  prive  pour  toujours  du  nom 
et  des  fonctions  <lu  sacerdoce,  et  qu'il  passe 
le  reste  de  ses  jours  dans  les  larmes  de  la  pé- 
nitence, pour  obtenir  le  pardon  de  sa  faute. 
La  quatrième,  adressée  h  Claude,  fut  écrite 
dans  le  temps  des  disputes  des  Grecs  avec 
les  Latins  sur  la  procession  du  Saint-Es- 
prit. Ainsi  elle  ne  peut  être  de  saint  Isidore. 
Ou  voitparcettelettre  que  les  Grecs  croyaient 
que  le  Symbole  qui  porte  le  nom  de  saint 
Athanase,  était  de  lui.  La  cinquième  parait 
du  même  temps  et  du  même  sl^  le.  On  y  agite 
la  question,  mue  entre  les  Grecs  et  les  Latins, 
sur  le  pain  azyme  et  le  pain  levé;  et  l'auteur 
décide  (juel'on  ne  doit  consacrer  l'Eucharis- 
tie qu'avec  du  pain  azyme.  Cette  lettre  esta 
Hcd''in[itMS,  archidiacie  :  c'était  le  nom  d'un 
des  disciples  de  saint  Isidore,  le  même  (pii  a 


LWjo  ui 
dr«âtm«nrcft, 
1^.  6'  (I. 


Lcltr«&d 
S.       Isidor*, 


(jraliivdonum  graluitum, per tjund el  bonwvulun- 
talts  iiiUiuiii,!  l  oiieris  prvnicrcmur  affeclutn...  Di- 
vitia  (juipiie  gratia  prieteuiliir  homo.  ut  bonus  sil, 
ncchtimanum  arbilniim  Dei graliam  antecedil.  sed 
ipsa  fjra'.ia  Dei  volentem  hominem  prœvenil  ut 
etiam  hene  vrlij,-  Nain  pondère  carnts  homo  fie  agi- 
fjr,  uladpeccandum  sitfacUis,  cl  ad  panilendum 
piger.  Hnbet  de  se  unde  corruat,  el  nonliabel  unde 


consurgal,  niai  gratia  Cnndiloris,  ulerigalur.  ma- 
num  j nanti  txtcndal...  {Adam)  haliuit  inchoandi 
boni  lilicruni  arbUrium,  quad  lamrn  Dii  adjulorio 
perficeretur.  Kiis  antcni  et  inchoationem  lilicri  ar- 
bitra el  perfecltonem  de  Dei  snmimuf  gratia,  qui 
et  incipere  boimm  el  perfnere  de  i;»(.o  liahcinui, 
a  quo  el  gratiœ  donum  datum,  cl  liberum  arbi- 
trium  in  nohis  est  reslauralum.  Ibid. 


[vu' SIÈCLE.]  CHAriTRE  LXIX.  —  SAINT  ISIDORE,  ÉVÊUUE. 


Proing. 


Cap.  >. 


décrit  les  circonstances  de  sa  mort.  Celle  ;\ 
Eugène,  ëvcque  de  Tolède,  est  encore  de 
même  style  que  les  den.\  précédentes.  Elle  a 
pour  but  d'établir  l;i  |)riinaiité  et  les  antres 
piéiopaiivcs  tlu  Pape.  Elle  cite  le  Symbole 
de  saint  Alhanase  coiûiue  étant  de  ce  Père, 
el  reçn  et  approuvé  de  l'I^i^lisc  catholique. 
Ce  symbole  pouvait  être  connu  dans  le  siècle 
de  saint  Isidore;  mais  il  ne  portait  pas  géné- 
ralement le  nom  de  saint  Athanase  ',  el  l'on 
n'a  point  de  preuves  qu'il  fut  dès-lors  reçu  et 
approuvé  des  Églises  catholiques.  Cela  n'ar- 
riva que  depuis, 

32.  Parmi  les  monastères  de  la  province 
Bétique  dont  il  est  parlé  dans  la  dixième  ac- 
tion du  concile  de  Séville  en  Gl'J,  il  y  en  avait 
un,  nommé  Honoii,  pour  lequel  saint  Isidore 
écrivit  une  rèfçlc.  Il  l'adressa  aux  religieux 
qui  y  demeuraient,  en  les  avertissant  qu'elle 
renfermait  les  instructions  des  Pères  di.-^per- 
sëes  çà  et  là;  et  que,  pour  leur  en  rendre  la 
pratique  plus  aisée,  il  avait  réduit  en  peu  de 
mots  ce  que  ces  anciens  avaient  mis  fort  au 
loua:,  et  écrit  d'un  style  clair  et  familier  ce 
qu'ils  n'avaient  dit  qu'avec  quelque  sorte 
d'obscurité.  —  La  clôture  du  monastère  doit 
êti'e  exacte,  et  il  ne  doit  y  avoir  qu'une  porte 
d'entrée,  et  une  antre  de  denière  pour  com- 
muniquer au  jardin  que  l'on  aura  soin  de 
placer  dans  l'enclos.  La  métairie  du  monas- 
tère en  sera  éloignée,  de  peur  que  sa  proxi- 
mité ne  soit  une  occasion  de  dérangement. 
Les  cellides  des  moines  seront  près  de  l'é- 
glise, afin  qu'ils  arrivent  plus  tôt  à  l'ollice  ; 
ou  en  éloignera  au  contraire  l'infirmerie, 
ainsi  que  les  cellules  des  religieux,  pour  que 
les  infirmes  ne  soient  point  interrompus  par 
le  bruit.  Celui  que  l'on  choisira  pour  abbé 
sera  d'un  âge  mûr.  éprouvé  dans  tontes  les 
vertus,  notamment  dans  la  patience  et  l'hu- 
milité, capable  d'instruire  les  moines  de  vive 
voix  et  par  son  exemple  :  les  moines  lui  por- 
teront le  l'espect  comme  à  leur  père.  Ils  n'au- 
ront entre  eux  qu'un  même  cœur,  et  ne  pos- 
séderont rien  en  propre.  On  éprouvera  les 
postulants  pendant  trois  mois  dans  le  loge- 
menbdes  hôtes,  avant  de  les  admettre  dans 
la  communauté  ;  et  on  ne  les  admettra  point 
dans  le  monastère,  qu'ils  n'aient  promis  par 
écrit  d'y  demeurer  le  reste  de  leur  vie.  Le 
rang  et  l'ordre  des  moines  se  réglait  sur  le 
temps  oîi  ils  étaient  entrés.  Celui  qui  était 
entré  le  premier,  avait  rang  avant  nn  autre 

*  Voyez  tome  lY,  pag.  18S. 


723 

qui  n'était  venu  qu'après  lui.  Cette  disposi- 
tion était  générale  à  l'égard  des  pauvres  et 
des  riches,  de  ceux  qui  étaient  de  conrlilion 
libre  et  de  ceux  qui  n'en  étaient  pas.  Lors  de 
Icui-  v(pu  de  staijilité,  ils  donnaient  tous 
leurs  biens-aux  pauvres  ou  au  monastère. 
Cette  donation  ne  leur  devait  pas  être  un  su- 
jet de  s'élever,  comme  les  pauvres  qui  litaient 
reçus  ne  tievaient  tirer  vanité  de  ce  qu'ils  se 
trouvaient  dans  le  monastère  de  niveau  avec 
ceux  qui  y  étaient  venus  riches.  On  ne  rece- 
vait les  esclaves  qu'avec  le  consentement  de 
leurs  maîtres.  Les  savants  et  les  ignorants  y 
étaient  admis.  La  raison  d'y  admettre  les  pau- 
vres était,  qu'il  s'en  trouvait  souvent  de  celte 
condition  qui  se  rendaient  plus  recomman- 
dables  par  leurs  vertus  et  par  leurs  autres 
qualités  personnelles,  que  les  riches. 

33.  Saiut  Isidore  règle  en  cette  sorte  les 
occupations  de  toute  la  journée.  En  été,  les 
moines  travailleront  des  mains  depuis  le 
matin  jusqu'à  tierce.  Depuis  tierce  jusqu'à 
sexte,  ils  s'appliqueront  à  la  lecture.  Ensuite 
ils  se  reposeront  jusqu'à  none  ;  après  quoi  ils 
se  remettront  au  travail  des  mains  jusqu'au 
soir.  Dans  les  trois  autres  saisons  de  l'année, 
ils  liront  depuis  le  matin  jusqu'à  tierce.  De 
là,  jusqu'à  none,  ils  travailleront  des  mains. 
Alors  ils  prendront  leur  réfection  :  puis  s'oc- 
cuperont de  la  lecture  ou  du  travail  des 
mains.  Ils  porteront  tous  leurs  ouvrages  an 
prévôt,  qui  les  portera  lui-même  à  l'abbé 
ou  au  supérieur  du  monastère.  Ils  cultive- 
ront eux-mêmes  leurs  jardins,  et  se  prépa- 
reront le  manger;  mais  ils  feront  faire  par 
des  domestiques  leurs  bâtiments  et  les  ou- 
vrages de  la  campagne.  Ils  travailleront  en 
commun,  s'occupant  pendant  le  travail,  ou 
de  la  méditation,  ou  du  chant  des  Psaumes. 
Ceux  à  qui  leur  infirmité  ne  permettra  pas 
de  travailler,  seront  traités  avec  douceur.  Au 
signe  de  l'office,  tous  accourront  pour  le  ré- 
citer, sans  pouvoir  sortir  du  chœur  avant  la 
fin,  si  ce  n'est  pour  quelque  nécessité.  Tisse 
prosterneront  pour  adorer  Dieu  en  fijissant 
chaque  psaume;  puis  s'éfant  relevés,  ils  en 
commenceront  un  autre.  Saint  Isidore  pres- 
crit un  certain  nombre  de  psaumes  pour  cha- 
que heure  canoniale,  avec  des  leçons  tirées 
de  l'Ecriture,  et  marque  tout  l'office  des 
matines  et  des  laudes,  tant  pour  les  jours  de 
fêtes,  que  pour  les  jours  ordinaires.  Ceux  qui 
manquaient  aux  vigiles  de  la  nuit,  étaient 
privés  de  la  communion.  Ds  s'assemble- 
ront trois  fois  la  semaine  pour  écouter  en 


Cip. 


724 


HISTOIIŒ  GKNIOIULE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


silence  les  inslrnclinns,  ou  de  l'ahbi-,  ou  de 
ijiKvqiie  aïK  ieii,  ou  du  innins  pour  (uitendrc 
lire  les  règles  dos  Pères.  Cette  confi-rence  se 
Cp,  riii.  faisait  après  l'iieure  de  tierce.  Chacun  de- 
mandait dès  le  matin  un  livre  au  bibliothé- 
caire, à  (]ui  il  le  rendait  le  soir.  Celui  qui  né- 
gligeait d'en  demander  à  l'heure  marquée, 
n'en  recevait  point  du  tout.  La  lecture  des  li- 
vres des  païens  ou  des  hérétiques  leur  était 
défendue.  S'ils  étaient  arrêtés  par  quelques 
dilUcultés,  ils  les  proposaient  dans  la  coufé- 

«.  rence,  ou  à  l'abbé  après  vêpres.  On  fermait  la 
porte  du  monastère  pendant  le  repas,  qui 
était  indiqué  par  un  sij^ne.Tous  maugeaient 
ensemble,  avant  l'abbé  A  leur  tète,  s'il  ne 
s'en  dispensait  pow  cas  de  maladie.  Leur 
nourriture  ordinaire  était  d'herbes  et  de  lé- 
gumes :  quelquefois,  aux  jours  solennels,  on 
ajoutait  aux  herbes  de  la  chair  la  plus  légè- 
re, c'est-à-dire  des  volailles.  Si  quelqu'un 
voulait  s'abstenir  de  chair  et  de  vin,  on  ne  l'en 
empêchait  pas,  pourvu  que  ce  ne  fût  i)oiiit 
par  un  mépris  pour  les  créatures  de  Dieu, 
comme  faisaient  les  priscillianistes  dont  l'Es- 
pagne n'était  pas  encore  entièrement  déli- 
vrée. Il  était  défendu  sous  peine  d'excommu- 
nication de  manger  ou  de  boire  hors  de  l'heu- 
re et  de  la  table  commune;  celui  qui  avait 
besoin  avant  le  temps  de  la  réfection  ordi- 
naire, demandait  la  permission  à  l'ablié  ou 
au  prévôt.  Les  si'culiers  ne  mangeaient  ja- 
mais avec  les  moines.  Ceux-ci  passaient  de 
la  table  à  hi  prière.  S'il  restait  quelque  chose 
de  leur  repas,  on  le  donnait  aux  pauvres. 
On  dinait  depuis  la  Pentecôte  jusqu'au  com- 
mencement de  l'automne.  Le  reste  de  l'an- 
née, il  n'y  avait  que  le  souper.  Le  carême, 
on  jeûnait  au  pain  et  A  l'eau.  Le  repas  des 
autres  temps  consistait  en  deux  mets,  l'un 
d'herbes,  l'autre  de  légumes,  auxquels  on 
ajoutait  des  pommes  ou  d'autres  fruits,  quand 

»•  il  y  en  avait.  On  ne  jeûnait  aucun  jour  de  di- 

manche, ni  pendant  la  cin(jnantaine  de  Pâ- 
ques, ni  l'octave  de  Xuël,  ni  la  fête  de  l'Epi- 

XI,  phanie.  On  rompait  aussi  le  jeune  en  faveur 

des  étrangers.  Eu  tout  autre  temps,  il  était 
permis  de  jeûner.  Les  vieillards  et  les  jounes 
gens  étaient  dispensés  de  la  rigueur  du  jeu- 
ne ;  ils  ne  jeûnaient  que  de  temps  h  autre, 
autant  que  la  faiblesse  de  leur  .'ige  le  per- 
mettait. 

„,.  31.  On  avait  aussi  égard  à  l'âge  et  aux  be- 

soins dans  la  distribution  dos  habits.  Les  moi- 
nes ne  portaient  point  de  linge.  La  règle  veut 
qu'ils  n'aient,  en  ce  qui  concerne  leurs  vê- 


tements, ni  propreté,  ni  néglicrence  alToctée. 
11  leur  était  défendu  do  nounir  leurs  chovcux  : 
tous  se  faisaient  raser  la  totc  en  un  même  '-'•'■  ""• 
jour.  Chaque  mois,  l'abbé  visitait  leurs  lits, 
pour  voir  s'il  y  manquait  quelque  chose,  on 
pour  retrancher  ce  qui  était  superflu.  Ils 
couchaient  tous  en  une  même  chambre,  s'il 
était  possible,  au  moins  dix  ensemble;  mais 
jamais  deux  en  un  même  lit,  et  la  chambre 
était  toujours  éclairi-o.  Lorsque  quelqu'un  i>>-,i 
faisait  une  faute,  celui  qui  en  était  tc'-moin 
devait  l'en  reprendre  une  et  deux  fois  ;  s'il  ne 
se  corrigeait  pas,  on  le  punissait,  sans  toute- 
fois le  chasser  du  monastère,  quelque  gran- 
de que  fût  sa  faute,  de  pour  de  l'exposer  à 
de  plus  grandes  tentations.  Les  peines  étaient 
proportionnées  aux  fautes  :  les  plus  légères 
étaient  punies  d'une  excommunication  de 
trois  jours;  les  plus  grandes  étaient  pu- 
nies selon  la  discrétion  de  l'abbé.  11  pouvait  ""• 
à  une  longue  excommunication  ajouter  le  châ- 
timent des  verges.  Celui  qui  était  excommu- 
nié ôtail  sa  ceinture;  et  prosterné  hors  du 
chœur,  il  demandait  pardon  à  tous  ceux  qui  y 
entraient,  jusqu'à  ce  que  sa  faute  lui  fût  par- 
donnée.  L'excommunié  était  non-seulement  "■'"■ 
séparé  de  la  communauté;  mais  encoi-e  on 
l'enfermait,  avec  défense  à  qui  que  ce  fût  de 
l'aller  voir,  de  lui  parler,  de  prier  et  de  man- 
ger avec  lui.  Le  temps  de  sa  pénitence  fini, 
l'abbé  lui  donnait  l'absolutiou  solennelle- 
ment dans  l'église.  Los  moines  en  bas  Age  ""• 
n'étaient  point  sujets  à  l'excommunication  : 
on  les  châtiait  avec  des  verges.  Comme  tous 
ne  devaient  rien  posséder  qu'on  commun, 
ils  faisaient  tous  les  ans  à  la  Pentecôte  leur 
déclaration  qu'ils  ne  gardaient  rien  en  pro- 
pre. Ils  étaient  obligés,  lorsqu'on  leur  fai- 
sait quelque  présent,  de  s'en  défaire  au  pro- 
fit de  la  communauté,  parce  que  tout  ce  qu'un 
luoinc  acquiert,  il  l'ac-juiert  au  monastère.  11 
ne  leur  était  donc  pas  permis  de  le  donner 
même  aux  pauvres,  ni  à  toute  autre  person- 
ne, saus  l'agrément  de  l'ablié.  Ils  ne  pou- 
vaient pas  même  faire  quelque  échange  avec 
leurs  confrères  sans  son  consentement.  Le  , 
pouvoir  de  l'abbé  était  restreint  A  certai- 
nes bornes  :  il  lui  était  défendu  de  mettre  de 
son  autorité  en  liberté  un  esclave  du  mo- 
nastère. 

3^1.  On  parla;.:oail  en  trois  parts  les  rcve-       "^ 
nus  ;  l'une  pour  les  infirmes  et  les  vieillards, 
et  pour  acheter  aux  frères  quolipie  chose 
pour  leur  nouriiture  les  jours  de  fêles  so- 
lenuolles  ;  l'autre,  pour  les  pauvres  ;  la  troi- 


[vu"    SIÈCLE.] 

sifSme  ,  pour  les  liabillempnts  des  moines  et 
les  autres  nécessités  du  monastère,  Le  prd- 
vùt,  iiui  en  était  le   [iriiiciiial  ollicier,  avait 
soin  des  allhiros  du  dehors;  li'  custode  ou  sa- 
cristain, devait  sonner  i'olllce,  et  pourvoir  aux 
Inminaiies  et  à  tout  ce  qui  était  nécessaire 
piiur  le  service  divin.  Un  autre  était  cliarpé 
du  vestiaire  et  des  meubles;  le  portier,  de  re- 
cevoir les  hôtes  ;  le  cellérier,  des  provisions 
de  bouche,  des  greniers  et  du  bétail  ;  le  se- 
mainier, du  service  de  la  table;  un  autre,  de 
la  cidture  du  jardin;  un  autre,  d'instiuire 
les  enfants  dounés  au  monastère  ;  un  autre, 
de  distribuer  les  aumônes.  Des  séculiers  fai- 
saient moudre  le  blé  dont  les  moines  faisaient 
leur  pain  ;  c'était  aussi  à  des  séculiers  que 
l'on  donnait  la  charge  de  faire  du  pain  pour 
les  inlirmes  et  les  étrangers.  Il  y  avait  en- 
core im  moine  préposé  à  la  garde  des  ferre- 
ments et  des  outils,  pour  les  distribuer  en 
temps  et  lieu.  Ce  monastère  avait  une  mai- 
son dans  la  ville,  où  résidait  un  ancien  avec 
cip.  Ml.      deux  jeunes.  Ou  ne  le  changeait  pas,  tout 
le  temps  qu'on  était  conteut  de  lui.  Les  ma- 
lades usaieut  de  bain  en  cas  de  nécessité  : 
du  reste  ou  leur  accordait  tout  ce  qui  était 
nécessaire  pour  les  soulager  et  rétablir  leur 
santé.  Quoique  l'on  dût  recevoir  toàs  les 
hôtes  avec  cordiahté  ,  on  en  témoignait  da- 
xïu.       vantage  aux  moines.  En  l'absence  de  l'abbé, 
j.iii       le  prévôt  gouvernait  la  communauté.  Si  quel- 
qu'un d'eux  faisait  un  voyage,  on  priait  pour 
lui  en  commun  avant  son  départ,  et  après 
son  retour.  Celui  qu'on  envoyait  dans  un  au- 
tre monastère ,  était  obligé  de  se  conformer 
à  l'observance  qu'on  y  pratiquait,  afin  de  ne 
j,,..       point  donner  de  scandale.  Il  y  avait  un  lieu 
destiné  à  la  sépulture  des  moines  ,  et  on  of- 
frait le  sacrifice  pour  chacun  d'eux  après  leur 
mort  pour  la  rémission  de  leurs  péchés  ', 
mais  avant  qu'ils  fussent  enterrés.  Chaque 
année,  le  lendemain  de  la  Pentecôte,  on  l'of- 
frait en  général  pour  tous  les  défunts.  Telle 
est  la  règle  de  saint  Isidore  ,  si  conforme  en 
beaucoup  d'articles  à  celle  de  saint  Benoit , 
qu'on^dirait  qu'ils  en  sont  tirés. 


CIIAIMTIIE  LXI.X.  —  SAINT  ISIDOUIî,  KVf;QUE. 


725 

36.  L'on  a  beaucoup  varié  sur  l'auteur  du 

traité    intitulé  :  dit  Camfmt  des   VWliis  cl  dos 
Vices.  Tantôt  on  l'a  atlrii)ué  ;'i  saint  Augus- 
tin ,  tanli")!  à   saint  Aniiuoise  ,  tantôt  à  siint 
Léon,  et  tantôt  i\  saint  Isidore  i!e  Séville.  Cette 
variété  de  sentiments  a  pris  sa  source  dans 
la  variété  même  des  manuscrits.  Oom  Jacques 
du  Breui,  (jui  croit  cet  ouvrage  de  saint  Isi- 
dore, cite  pour  lui  plusieurs  manuscrits,  com- 
me les  anciens  éditeurs  des  œuvres  de  saint 
Augustin,  de  saint  Ambroisc  et  de  saint  Léon 
en  citent  pour  le  donner  i\  chacun  de  ces 
Pères.  Sigebert  de  Gcmblours  le  met  au  nom- 
bre des  écrits  de  saint  Isidore'  dans  le  cata- 
logue qu'il  en  a  fait,  et  on  ne  peut  répondre 
à  son  témoignage,  qu'en  disant  qu'il  a  été 
trompé  par   les  manuscrits  qu'il    avait    en 
main.  L'opinion  dominante  est  que  le  traité 
du  Combat  des  Vertus  et  des  Vices  est  du 
bienlieureux  Ambroise  d'Autpert,  abbé  dans 
le  VIII'  siècle  d'un  monastère  sur  le  Vulturnc 
ou  Voltorno,  près  de  Bénévent.  La  chroni- 
que de  cette  abbaye  le  lui  donne  '  ;  l'anonyme 
de  Molk  dit  '  qu'Ambroise  d'Autpert  le  com- 
posa  à  l'imitation  du  Combat  de  l'cime  par 
le  poète  Prudence,  et  qu'il  l'adressa  à  Lant- 
fride,  prêtre  et  abbé  en  Bavière.  Il  se  trouve 
sous  le  nom  d'Ambroise  d'Autpert,  dans  un 
manuscrit  "  de  800  ans,  en  l'abbaye  de  saint 
Emmeran  de  Ratisbonne.  Il  faut  ajouter  que 
le  livre  du  Combat  des  Vertus  et  des   Vices 
a  une  grande  conformité  de  style  avec  le 
Commentaire  sur   l'Apocalypse,  qui  passe 
sans  contradiction  pour  l'ouvrage  d'Ambroi- 
se d'Autpert. 

37.  A  l'égard  du  Commentaire  sur  le  Can- 
tique des  Cantiques,  il  n'en  est  fait  mention 
dans  aucun  catalogue  des  livres  de  saint  Isi- 
dore. Braulion,  saint  Ildefonse  et  Sigebert, 
n'en  disent  rien.  Trithème  en  parle  ;  mais  il 
lui  donne  aussi  des  Commentaires  sur  tous 
les  livres  de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testa- 
ment. Quoi  qu'il  en  soit, l'ouvrage  ne  fomnit 
de  lui-même  aucune  raison  de  l'oler  à  saint 
Isidore,  ni  de  le  lui  donner. 

38.  Il  n'en  est  pas  de  même  du  livre  qui 


Du  eomti«t 

dflN   TCrlUK    «t 

itt  vtceUi  iitr. 
703. 


CcmiBpn- 
talre  sur  lû 
Cantique,  r.«g, 
719. 


'  Transeunlibus  àe  hac  luce  fratribus,  antequam 
sepelianlur,pro  dimitlendis  eoruin  peccatis  sacri- 
ficium  Domino  offeralur....  Profpiritibiis  dtfunc- 
lorutn  altéra  die  posl  PenUcostensacriliciam  Do- 
mino offeraliir.  IsiJor.,  Reg.,  cap.  xxiv. 

-  Sciipsit  Inidorus  de  conflictu  vitiorum  et  vir- 
lutum  lihruiii  uiium.  Si^'ebert. 

'  Àmhrosius  librum  qxioque  de  conflictu  rilio- 
rumedidit.  Vita  imbros.  ÀutpeH.,tom.  W.Sctor. 
Ordin.  S.  Dencd.,  pag.  238. 


*  Ambrosius,  qui  et  AtUpertus,  scribit  in  librum 
Apocalyiisis  Joannis  aposloli ;  scribit  etiam  in 
moduni  Prudentii  Psycltomacliiœ,  quod  interpre- 
tatur  pvgna  animœ,  Ichruni  de  Cun/lictu  rirtu- 
tum  et  vitiorum,  quem  et  misit  ad  Lanfridum 
ahbdiem  <tc  prt'shylerum  in  Bavnria  coustilutuiit. 
Auoiiyii).  MesUri'iis.  de  Scriptor.    Eccles.,    cap.  li. 

*  Pez,  Toiu.  I,  Anecdot.  Dissertât.  Isagogica,  pag. 
41. 

6  Tom.  I,  Spicilegii,  pag.  268  et  306. 


726 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


l'Ordre    dei 
Crteluro. 


a  pour  titre,  de  l'Ordre  des  Créatures,  impri- 
mé pour  la  première  fois  à  Paris  en  1655, 
dans  le  premier  tome  de  dom  Luc  d'Achérj-. 
Il  est  dédié  à  Braulius  évèque  de  la  ville  de 
Rome,  c'est-à-dire,  comme  porte  l'inscription, 
de  In  ville  de  Suragusse.  L'auteur  dit,  à  la  fin 
de  son  ouvrage,  que  c'est  par  ordre  de  ce 
Braulius  qu'il  l'a  entrepris  ;  et  il  lui  parle  du 
mérite  de  cet  écrit ,  et  de  sa  propre  person- 
ne ,  en  des  termes  extrêmement  humbles  et 
soumis.  Toutes  ces  circonstances  forment 
une  preuve  solide  que  l'inscription  de  ce 
traité  est  fausse.  Braulion  ne  le  cite  point 
dans  le  catalogue  des  ouvia^^es  de  saint  Isi- 
dore. Eùt-il  oublié  de  parler  d'un  livre  fait 
par  son  ordre,  et  qui  lui  aurait  été  dédié  ? 
Cet  évèque  le  fut  constamment  de  Saragos- 
se  ;  mais  a-t-on  jamais  donné  à  cette  ville  le 
nom  de  Rome  ?  Braulion  était  ami  de  saint 
Isidore;  il  avait  été  son  disciple;  mais  il 
n'avait  eu  depuis  aucune  qualité  qui  le  lui 
rendit  supérieur.  Comment  donc  lui  aurait-il 
parlé  dans  des  termes  qu'un  piètre  emploie- 
rait à  peine  en  parlant  à  sou  évèque ,  et  un 
disciple  en  écrivant  à  son  maître  ?  Un  croit  ' 
que  l'inscription  ne  portait  d'abord  que  ces 
mois  :  A  l'évoque  de  la  ville  de  Rome,  avec  cette 
lettre  initiale  B,et  que  cette  lettre  marquait 


re  qui  porte  le  nom  de  saint  Isidore  soit  de 
lui.  Peut-être  ne  le  lui  a-t-on  attribué,  que 
parce  qu'il  est  tiré  pour  la  plus  grande  par- 
tie des  livres  des  Origines.  Il  avait  fait  ua 
traité  des  nombres,  où,  à  l'occasion  des  nots- 
bres  traités  dans  l'ICcriture,  il  disait  quelque 
chose  de  l'arithmétique  ;  et  un  autre  des  hé- 
résies, où,  à  l'exemple  de  ceux  qui  avaient 
avant  lui  travaille  sur  cette  matière,  il  parlait 
de  chacune  avec  beaucoup  de  précision. 
Braulion*  cite  ces  deux  écrits.  Nous  ne  les 
avons  plus. 

40.  On  voit  par  ceux  qui  nous  restent,  que 
saint  Isidore  avait  une  profonde  érudition, 
et  qu'il  savait  mettre  à  profit  ce  qu'il  avait 
lu  dans  les  anciens  aulfurs,  soit  ecclésiasti- 
ques, soit  profanes.  Son  style  n'est  ni  élo- 
quent ni  châtié  ,  mais  il  est  clair  et  aisé.  II 
rèiine  dans  ses  œuvres  morales  un  goût  de 
piété  et  de  componction  ,  qui  touche  et  qui 
attendrit.  Ses  autres  ouvrages  sont  recom- 
maudables  par  la  variété  étonnante  des  ma- 
tières qu'il  y  traite. 

41.  Les  livres  des  Origines  furent  impri- 
més à  Augsbourg  en  1472,  iu-fol.,  par  Gou- 
tier  Zainer,  qui  employa  du  parchemin  pour 
quelques  exemplaires.  On  les  réimpiima  à 
Bâic,  en  1480,  in-fol.;  à  Venise,  en  1483,  in- 


|.a«.  9S9.  I 
vm  p«rdw 


JufPm 

de  sei  ter. 


Boniface  ,  qui  occupait  le  Saint-Siège  du  vi-  fol.  ;  à  Paiis,  en  150!),  avec  des  notes  de  Vul- 
vant  de  saint  Isidore,  dont  les  copistes  auront 
fait  Braulion,  a  qui  ils  voyaient  que  ce  saint 
avait  écrit  plusieurs  lettres  ,  et  dédié  ses  li- 
vres des  Origines.  Ce  n'est  qu'une  conjectu- 
re ;  mais  elle  esl  fortifiée  par  la  conformité 
du  style  de  cet  ouvrage  avec  ceux  de  saint 
Isidore.  Il  est  divisé  en  quinze  chapitres,  dont 
le  premier  renferme  ce  que  l'on  doit  croire 
sur  les  mystères  de  la  Trinité  et  de  l'Incar- 
nation ;  le  second ,  ce  qui  regarde  les  neuf 
ordies  des  anges.  Puis  l'auteur  donne  de  suite 
l'explication  de  l'ouvrage  des  six  jours  de  la 
création.  Dans  le  huitième  ,  il  parle  des  dé- 
mons et  de  leur  nature  :  dans  le  douzième  , 
de  la  nature  de  l'homme  après  son  péché  ; 
dans  le  treizième,  des  diverses  sortes  de  pé- 
cheurs ,  et  du  lieu  des  peines  ;  dans  le  qua- 
torzième, du  feu  du  purgatoire,  dont  il  prou- 
ve l'existence  à  peu  près  de  la  mcuie  maniè- 
re que  le  fait  saint  Isidore  dans  le  chapitre 
dix-huitième  du  premier  livre  desOHice.s  ec- 
clésiastiques :  le  quinzième  est  sur  la  vie  fu- 
ture. 
Gioiiiirt,       39.  On  n'a  aucune  preuve  que  le  Glossai- 


canius;  à  Bàle,  en  1577.  Il  y  a  trois  éditions 
particulières  de  l'Histoire  des Goths,  des  Van- 
dales et  des  Suèves;  l'une  n  Hambourg,  en 
Itjll  ;  l'autre  A  Leyde,  en  lo'J7  ;  la  troisième 
à  Amsterdam,  eu  1655.  Le  livre  des  Écrivains 
ecclésiastiques  a  été  imprimé  plusieurs  fois  : 
à  Cologne,  en  1580;  A  Madrid,  en  1593,  avec 
les  conciles  d'Espagne;  à  Anvere,  avec  la  Bi- 
bliothèque ecclésiastique  d'Auberl  le  Mire, 
en  1639;  à  Francfort,  en  1603,  parmi  les 
Écrivains  d'Espagne,  et  avec  les  notes  de 
Scholtus.  Le  Traité  de  la  vie  et  de  la  mort 
des  saints  des  deux  Testaments  se  trouve 
dans  le  recueil  des  Opuscules  de  ce  Père  à 
Haguenau,  en  1529,  iu-4,  et  dans  les  Orlho- 
Ihodoxdgraphcs,  A  Bàle,  en  15G9.  On  a  im- 
primé aussi  dans  les  Orthodoxographes  les 
livres  des  Oltices  ecclésiastiques  ;  ils  furent 
encore  mis  sous  presse  à  Paris  en  1564  et 
ICIO;  à  Cologne,  en  15G8,  et  à  Rome,  en 
1591,  avec  plusieurs  opuscules  de  même 
genre.  Les  deux  livres  a  Florentine  font  par- 
tic  de  l'édition  de  Haguenau,  en  1529,  et  de 
celle  de  Venise  en  1584.  Garcias  ayant  enri- 


>  Bolland.,  ad  diem  ^.  aprilis. 


'  Bra\ilio,  tn  Pranot.  Op.  Isidori. 


CHAPITIIE  LXIX.  —  SAINT  ISinOHE,  ÉVÈgUE. 


[vu*  siècle]. 

clii  lie  noies  les  livres  îles  Senlcnces,  les  fit 
iuipiimer  ù  Turin  en  iri'JG,  in-4.  Helsténiiis 
donna  place  à  la  Règle  des  moines  dans  son 
Code  imprimé  .'i  Paris  en  166i.  Les  l'dilions 
générales  des  oeuvres  de  sniiil  Isitloie  sonl 
celles  de  Paris  en  1580,  par  M:irgarin  de  la 
Signe,  tlieï  Mieliel  Sonniiis;  de  Madiid,  en 
15'Ji);  de  Paris,  en  d601,  par  dom  Jac(pics  du 
Breul,  moine  de  Saint-Germain-dcs-Prés, 
chez  Micliel  Sunnius;  de  Colo^^ne,  en  1617. 
Celle  de  Paris  renferme  les  notes  de  ditfé- 
rents  auteurs  sur  les  ouvrages  de  saint  Isi- 
dore, recueillies  et  augmentées  par  Jean 
Grialus,  qui  a  remarque  que  ce  Père  profite 
souvent  des  découvertes  de  Solin,  de  Ser- 
vi us,  de  Sergius,  de  Lactance,  et  de  beau- 
coup d'autres,  sans  les  ciler. 

[Les  œuvres  de  saint  Isidore  furent  impri- 
mées de  nouveau  <i  Madrid,  1778,  2  v.  in-fol., 
et  h  Rome,  1797-1803,  7  v.  in-i,  par  Arévalo. 
Cette  édition,  plus  complète  et  plus  correcte, 
est  reproduite  dans  les  tom.  LXXXI,  LXXXII, 
LXXXIII  delà  Patrologie  latine.  Voici  le  con- 
tenu de  ces  trois  volumes  :  Le  tome  LXXXI 
comprend  :  1°  Prolégomènes  de  l'éditeur, 
sous  le  titre  de  lsidon'an(i,svi\ii  vie,  les  ges- 
tes et  la  doctrine  de  l'auteur,  avec  les  préfa- 
ces de  toutes  les  anciennes  éditions;  2"  sur 
les  ouvrages  apocryphes,  en  quatre  parties. 
Appendice;  3°  commentaires  des  Bullundis- 
tes  sur  l'auteur;  4°  histoire  de  la  translation 
de  son  corps  ;  5°  préface  à  une  coUeclion  de 
ses  canons;  6°  préfaces  dej'auteur  tirées  du 
cardinal  Mai.  —  Tables. 

Le  tome  LXXXII  comprend  les  préfaces  de 
l'édition  de  Grial.  —  Vie  de  saint  Isidore,  pro- 
bablement par  Luca,  évêque  de  Tuy.  —  Noti- 
ce historique  par  Fabricius.  —  Témoignage 
sur  saint  Isidore.  —  Avertissement  de  dom 
Grial.  —  1°  Les  étymologies  en  vingt  livres, 
avec  de  nombreuses  noies.  —  Vingt-et-un 
fragments  divers.  — Variantes  tirées  de  dif- 
férentes éditions  et  manuscrits.  —  Notes  de 
Semler.  —  Annotations  de  Zaccaria.' —  No- 
tes d'Arévalo. 

Le  tome  LXXXIII  comprend  :  1°  et  2°  des  Dif- 
férences et  de  la  propriété  des  mots,  en  deux 
livres;  — 3"  quelques  Allégories  de  l'Écrituie 
sainte  ;  —  4°  de  la  naissance  et  de  la  mort  des 
patriarches  qui  sont  loués  dans  l'Ecriture;  — 
o°surlcslivres  de  l'Ancien  et  duNouveau  Tes- 
tament; —  6°  sur  les  nombres  dont  il  est  fait 
mention  dans  l'Écriture;  —  7°  Questions  sur 
l'Ancien  et  le  Nouveau  Testament,  avec  les  ré- 
ponses; —  8°  de  la  Foi  catholique  contre  les 


727 


Juifs;  y" — Sentenci's  ou  traités  de  la  religion 
en  lrt)is  livres;  —  10"  desUtliccs  ecclésiasti- 
ques;—  11°  Synonymes,  ou  lamentations  de 
l'âme  péchei'csse,  en  2 livres; — 12"  Règle  des 
moines  ; — 13"  Lettres, aunonibre  dv  treize  ;  — 
14°  d(^  l'Ordre  ou  arrangement  des  créatures; 

—  15"de  la.Xature  des  choses,  espèce  de  traité 
physi()ue; — 16° Chronique  depuis  Adam.juS- 
qu'en  654  de  J.-C.  ;  —  17"  Histoiie  des  rois 
Goths,  Vandales  et  Suèves  ;  —  18°  le  Livre 
des  hommes  illustres. 

Appendices..  ..  1.  Les  anciens  évêques  de 
Tolède.  —  2.  Qui^lques  vers  attribués  à  saint 
Isiiiore.  —  3.  Ghioni(iue  des  rois  Visigoths  de- 
puis l'an  863  jusqu'à  l'an  701.  —  4.  Chronolo- 
gie ou  série  des  rois  Goths. — 5.  Exposition  sur 
le  Cantique  des  Canti(iues.  —  6.  Du  conflit  des 
vices  et  des  vertus.  — 7.  Exposition  de  la  mes- 
se.—  8.  Quatrième  livre  des  Sentences.  —  9. 
Exhortation;! l'humilité.  —  10.  Sentences  de 
l'Éciilure  et  des  pères. — 11.  Quatre  discours. 

—  12.  Des  dogmes  ecclésiastiques.  — 13.  Sur 
la  vie  active  et  la  vie  contemplative.  — 
14.  Règle  de  vie.  — 15-16.  Deux  pièces  de 
vers  sur  la  pénitence.  —  17  et  18.  Deux  dis- 
cours. —  19  et  20.  De  la  naissance  et  de  la 
mort  des  patriarches  et  des  nombres  de  l'É- 
criture. —  21 .  Glosses  sur  la  Sainte-Écriture. 

—  22.  Des  ditïérences  et  sur  la  propriétés  des 
mots.  —  23.  Glossaire  ou  explications  des 
mots  barbares  ou  peu  usités. 

Dans  le  tome  LXXXIV  on  trouve  une  col- 
lection de  canons  attribués  à  saint  Isidore,  eu 
dix  livres  :  1°  Préface  d'Ant.  Gonzalès,  biUlio- 
thécaire  de  Madrid,  pour  l'édition  de  1821  ; 
2°  Les  conciles  des  Grecs  jusqu'au  concile  de 
Clialcédoine;  les  conciles  d'Afrique,  des  Gau- 
les, d'Espagne,  jusqu'en  704  ;  Lettres  décréta- 
is de  vingt  papes;  —  Dissertation  historico- 
critique  sur  la  véritable  et  authentique  collec- 
tion des  canons  de  saint  Isidore  par  C.  de  La 
Serra  Santader,  publiée  à  Bruxelles  en  1800. 
Cette  préface  était  écrite  pour  l'édition  qu'a- 
vait préparée  le  Père  jésuite  Buriel;  mais 
qui  n'a  point  paru.  La  première  édition  de 
cette  collection  parut  à  Madrid  en  1808,  iu- 
fol.  ;  les  Épitres  décrétales  et  les  Rescrits  des 
pontifes  romains  furent  publiés  à  Madiid  en 
1821.  On  reproche  à  l'éditeur  de  n'avoir  fait 
usage  que  de  manuscrits  espagnols,  bien 
qu'il  en  existât  ailleurs  de  plus  anciens,  du 
viir  siècle  notamment. 

Les  meilleurs  critiques  ont  trouvé  que  cette 
collection  est  d'Isidoi  e,  en  ce  sens  du  moins 
qu'il  la  revit,  l'augmenta  et  la  mit  dans  un 


728 


mSTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTECTS  ECCLÉSIASTIQinîS. 


meilleur  ordre'  :  c'est  ce  livre  des  canons  que 
le  iv"  concile  de  Tolède  ordonne  de  lire  daus 
les  conciles  d'Espagne.  11  a,  comme  nous  l'a- 
vons déjà  dit,  deux  iiaitics  :  la  1"  renferme 
les  Canons  des  conciles;  la 2'  les  Dëcrétales 
des  pontifes  romains.  Celles-ci  commencent 
à  saint  Damase,  et  unissent  àsaintGrégoire- 
le-Grand.  La  collection  ne  cite  de  ce  pape 
que  les  lettres  à  saint  Léandre  et  au  roi  Ré- 
carèdc,  ce  qui  fait  bien  voir  en  quel  temps 
et  pour  quel  pays  elle  a  été  faite  el  terminée. 
Parmi  les  nombreuses  pièces  qu'elle  con- 
tient, il  n'y  en  a  pas  une  qui  ne  soit  autlieu- 
tiquc.  Ce  (jui  n'est  pas  moins  j-emarquable, 
dit  M.  Rol.rbaclier',  c'est  que,  parmi  le  grand 
nombre  d'exemplaires  mannsciits  conservés 
en  Espagne,  il  n'y  en  pas  un  qui  contienne 
des  pièces  fausses.  La  collection  interpolée 
sous  le  nom  d'Isidore  Mercator  a  été  incon- 


nue en  Espagne  jusqu'à  l'invention  de  l'im 
primerie.  Ce  qui  ne  nu-rite  pas  moins  il'ètre 
remarqué,  c'est  ce  qu'on  lit  dans  la  préface 
de  cette  anti([ue  collection  ;  «  Aux  canons 
des  conciles  nous  ajoutons  les  décrets  des 
pontifes  romains,  attendu  que  leur  autorité 
n'est  pas  moindre  à  cau?e  de  la  suprématie 
du  siège  apostolique.  Quant  aux  canons  dits 
des  Apôtres,  comme  le  Siège  apostolique  ne 
les  re<;oil  point  et  que  les  saints  Pères  n'y 
ont  point  donné  d'adhésion,  encore  que  l'on 
y  trouve  quelque  chose  d'utile,  ils  n'ont  point 
d'autorité  canonique  et  sont  rangés  parmi 
les  apocryphes.  »  Le  tome  LXXXIV  est  tei> 
miné  par  la  table  des  canons,  l'index  des 
principaux  passages  de  l'Kcrilure  cités  dans 
les  ouvrages  de  saint  Isidoie,  l'index  des 
matières  et  des  mots  contenus  dans  toutes 
ses  œuvres.] 


CHAPITRE  LXX. 


Branlion  évêque  de  Saragosse  [vers  l'an  646] ,  Jean  évêque  de  la  même  ville,  saint 

Snlpice   éfêqae  de  Bourges,  saint  Didier  évêque  de  Cahors,  Vérus  évêque 

de  Rodez,  et  quelques  autres,  saint  Valère  abbé  [655]. 


bnnllon, 
^Ttqtjp  de  Sa- 
raeo«sp.  Sc! 
écrits. 


(Écrivains   latins  du  vii«  siècle.) 


Branlion,  dont  nous  avons  parlé  plusieurs 
fois  dans  le  cliapilre  précédent,  succéda  A 
Jean,  son  frère,  dans  le  siège  épiscopal  de 
Saragosse  en  627.  Il  assista  en  6.3.3  au  qua- 
trième concile  de  Tolède,  on  636  au  cinquiè- 
me concile  qui  se  tint  en  cette  ville,  el  au 
sixième  en  638.  Saint  Ildefonse  lui  donne 
environ  vingt  ans  d'i'-piscopat  :  ainsi  il  faut 
niettie  sa  mort  vers  l'an  646.  Outre  l'I^ioge  ' 
et  le  Catalogue  des  ouvrages  de  saint  Isidore 
de  Séville,  il  composa  '  la  Vie  de  saint  Émi- 
lien,  h  la  prière  du  prêtre  Froniniien,  à  qui 
il  l'adressa  par  une  lettre  que  l'on  a  mise  à 
la  tète  de  cette  Vie  dans  le  premier  *  tome 
des  ,\ctos  de  l'Ordre  de  saint  Benoit.  Il  y  dit 
qu'Émilien  embrassa  d'abord  la  vie  éréniiti- 
que,  qu'ensuite  il  fut  iippolé  .'i  la  desseite 
d'une  paroisse  par  l'évêque  de  Tarazone. 


C'est  là  que  l'on  a  b:\ti  depuis  un  célèbre  mo- 
nastère sous  le  nom  de  saint  Émilien,  qui 
est  surnommé  de  la  Cuculle,  pour  le  dis- 
tinguer de  saint  Émilien,  évêque  de  Ver- 
cpil,  el  de  quelques  saints  de  mémo  nom. 
Braulion  composa'  encore  une  Hymne  en 
riionnour  de  saini  Tniilien.  Elle  est  en  vers 
ianibi<jues;  et  pour  donner  plus  d'éclat  à  son 
culte,  il  ordonna  qu'au  jour  de  sa  fête,  on 
chanterait  une  "  messe  commune.  Il  avait 
même  eu  la  '  pensée  de  faire  un  discours 
pour  y  èlre  prononcé  ;  mais  il  craignit  de  trop 
allonger  l'ollice.  11  y  a  deux  de  ses  lettres  à 
saint  Isidore  dans  le  recueil  des  œuvres  de  ce 
Père. 

2.  [On  a   t)ublii'  depuis,  quarante-qualrc     ,  utitf.dt 
Icllres  écrites  par  saint  Rraiilioii  ou  adressées   '"■"■  .''"'v'!'' 

.  '  loiTif  LXAX, 

a  lui,  de  plus  une  vie  de  saiiil  l'niijien  .  une    "i- «'»• 


»  Prœf.  coll.,  l.  LXX.XIV  de  la  Pair.,  col.  01-92. 

'  Histoire  universelle  de  l'Église  au  luine  X,  lioi- 
.-(■•iiii-  éiM.  pag.  IU9. 

'  l)oui  CeilliiT  avait  omis  le  litre  de  saint  en 
panant  de  Sulpice-le-Pieux.  {L'éditeur.) 


*  Prœnotal.  lih.  Isidori.—  '  lldoplmiis. ,  De  Viris 
illusl.,  "-ap.  XII.— «  l'ug.  im. 

'  Uraulin,  EfiùiL  ad  Fruniinianum.  pag.  198.  — 
»  Il.i.l.   -  0  ll.i.l. 


[vil*  sifccLE.]       CHAPITRE  LXX.  —  DRAUT 

liymno  pour  le  même  ,  cf  une  aufro  hymne 
sur  siiinl  Milliau,  pI  les  Actes  des  martyrs  do 
Snragosse  sous  nioclcticn. 

La  première  lotlre  est  d'Isidore  évoque,  à 
Braulion  archidiacre. 

La  seconde  est  encore  d'Isidore  A  Braulion 
archidiaci'C. 

La  troisième  est  de  Braulion,  évoque  de 
Saragosse,  ii  Isidore. 

La  quatrième  est  d'Isidore  i\  Braulion  évo- 
que. 

La  cinquième  est  de  Braulion  à  Isidore. 

La  sixième,  la  septième  et  la  huitième  sont 
d'Isidore  ;\  Braulion. 

La  neuvième  est  de  Braulion  ,  évêque,  à 
Jactatus,  prêtre  : 

Florez  fait  remarquer  que  cette  lettre  et 
les  suivantes  ,  inédites  jusqu'au  moment  où 
il  écrit,  venaient  d'élre  tout  récemment  trou- 
vées dans  un  vieux  manuscrit  de  la  sainte 
église  de  Léon. 

«  Vous  désireriez ,  je  le  vois ,  dit  Braulion 
;\  Jactatus  dans  cette  neuvième  lettre,  que 
je  vous  rompe  le  pain  de  la  parole  divine  : 
mais  que  paraîtrait  ma  faible  voix  auprès  de 
la  mâle  éloquence  des  Au!,^ustin,  des  Jérôme, 
des  Hilaire,  dont  vous  étudiez  chaque  jour 
les  savants  et  pieux  écrits  ?  Vous  avez  à  faire 
pour  moi  quelque  chose  de  mieux  que  de 
m'adresser  de  pareilles  demandes,  c'est  de 
m'aider  de  vos  prières.  Vous  nous  avez  de- 
mandé des  reliques  des  saints  apûlres,  vous 
les  recevrez  dans  peu  de  temps.  Adieu,  veuil- 
lez prier  pour  nous,  o 

La  dixième  lettre  est  encore  de  Braulion 
à  Jactatus  :  dans  cette  lettre,  Braulion  dit  à 
Jactatus  que  la  lettre  qu'il  a  reçue  de  lui  est 
venue  apporter  une  heureuse  diversion  aux 
peines  et  aux  sollicitudes  qui  le  surchargent 
de  tous  côtés.  11  regrette  de  se  voir  si  éloigné 
de  lui ,  et  il  se  plaint  teudrement  que  Jac- 
tatus ait  négligé  une  occasion  de  venir  le 
voir.  «  Vous  nous  avez  envoyé,  lui  dit-il  en 
terminant,  la  substance  qui  au  sacrement  de 
l'Eucharistie  est  changée  au  corps  du  Sau- 
veur; nous  vous  envoyons  de  notre  côté  celle 
qui  y  est  changée  en  sou  sang,  et  nous  y  joi- 
gnons une  mesure  d'huile  et  un  boisseau 
d'olives,  symboles  de  la  douhle  charité  com- 
mandée aux  chrétiens.  » 

La  onzième  lettre  est  de  Braulion  au  prê- 
tre 'l'ajus:  dans  cette  lettre  il  déclare  à  Ta- 
jus  qu'il  n'a  nullement  eu  l'intention  de  l'in- 
jurier en  l'invitant  dans  sa  précédente  lettre 
à  monter  sur  l'àne  dont  il  lui  parlait,  et  que 


in\,  JEAN,  SALNT  SULPICE,  ETC.  729 

ce  n'a  été  de  sa  part  qu'une  plaisanterie  bien 
innocente,  ;\  laquelle  par  conséquent  Tajus 
a  eu  tort  de  répoudre  pai'  des  injures.  Brau- 
lion prend  occasion  de  cette  circonstance 
pour  exhorter  Tajus  i\  la  patience  et  h  l'im- 
niilité. 

La  douzième  lettre  est  de  Braulion  à  l'ar- 
chidiacre Floridius.  Dans  cette  Ictlje, Brau- 
lion s'excuse  sur  ses  nombreuses  occupations 
de  n'avoir  pas  répondu  plus  tôt  à  la  lettre  de 
Floridius.  «  Vous  me  demandez  mou  senti- 
mont  sur  diverses  questions,  lui  dit-il,  mais  je 
préfère  attendre,  pour  vous  le  donner,  le 
moment  où  j'aurai  le  bonheur  de  vous  voir  : 
une  doctrine  enseignée  de  vive  voix  a  je  ne 
sais  quelle  énergie  et  quel  prestige,  qui  ne  se 
trouvent  point  quand  on  la  confie  h  la  froide 
entremise  d'une  lettre;  je  n'ai  point  du  reste 
le  loisir  en  ce  moment  de  vous  donner  sur 
chacune  des  choses  que  vous  m'avez  deman- 
dées une  réponse  aussi  complète  que  vous 
pourriez  le  désirer,  n 

La  treizième  lettre  est  de  Braulion  à  Fru- 
miniaire,  prêtre  et  abbé,  qui  lui  avait  écrit 
sur  les  ennuis  que  lui  donnait  sa  charge  d'ab- 
bé ;  Braulion  lui  répond  de  ne  pas  céder  à  cette 
tentation,  mais  de  redoubler  de  force  et  d'é- 
nergie dans  le  Seigneur  à  mesure  que  crois- 
sent les  peines  et  les  sollicitudes  que  lui 
donne  le  gouvernement  de  sa  maison ,  et  il 
tei'mine  en  lui  recommandant  de  prier  aussi 
pour  lui,  qui  n'est  pas  non  plus  sans  avoir 
ses  anxiétés  et  ses  épreuves. 

La  quatorzième  lettre  est  encore  adressée 
au  même  Fruminiaire  :  dans  cette  lettre  , 
Braulion  prie  l'abbé  de  lire  et  de  faire  lire 
par  ses  frères  uu  commentaire  qu'il  lui  en- 
voie sur  les  écrits  de  saint  Paul ,  afin  qu'ils 
y  fassent  les  corrections  convenables.  Il  ré- 
pond ensuite  à  plusieui-s  questions  de  litur- 
gie sur  lesquelles  Fruminiaire  lui  avait  pro- 
posé ses  doutes. 

La  quinzième  lettre  est  de  Braulion  à  Ba- 
silla  sa  cousine  ,  qui  venait  de  lui  écrire  sur 
la  mort  desonmari.  «  Je  partage  votre  dou- 
leur, lui  dit-il,  et  au  moment  où  je  vous  écris 
pour  vous  consoler,  je  sens  des  larmes  qui 
s'échappent  de  mes  yeux  :  il  est  si  dur  4e 
voir  la  mort  moissonner  des  personnes  si 
bonnes  et  si  pieuses  !  mais  consolez-vous,  ce- 
lui que  nous  pleurons  n'est  point  perdu,  il 
est  daus  la  gloire.  Etforçons-nous  de  méri- 
ter d'aller  un  jour  le  rejoindre.  » 

La  seizième  lettre  est  de  Braulion  à  Api- 
cella,  qui  venait  de  perdre  sou  mari  :  il  lui 


730 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


dit  qu'il  lui  envoie  le  nianuscrit  qu'elle  lui  a 
demandé,  quoiqu'il  ait  été  écrit  pour  une 
autre  personne  ;  et  il  lui  fait  remarquer  que 
dans  celte  occasion  c'est  vraiment  la  Provi- 
dence qui  lui  adresse  ce  cahier,  oii  elle  aura 
l'exemple  de  Tobie  si  résit;ué  dans  l'afflic- 
tion, et  celui  de  Judith,  ce  modèle  si  accom- 
pli des  femmes  veuves. 

La  dix-soplii^me  lettre  est  de  Braulion  à 
l'ëvéque  Wilipildus.  Il  lui  écrit  pour  le  prier 
de  confirmer  les  ordres  du  sous-diaconat  et  du 
diaconat  qu'il  a  conféi  es  à  un  moine  d'un  des 
monastères  de  son  diocèse  :  ce  qu  il  n'a  fait 
du  reste  cpa'après  avoir  pris  des  informations 
sur  le  sujet  qu'il  a  élevé  aux.  ordres  sa- 
crés. • 

La  dix-huitième  lettre  est  de  Braulion  à 
sa  parente  Pomponia  ,  abbcsse  ;  il  lui  écrit 
pour  lui  donner  connaissance  de  la  mort  de 
leur  cousine  Basilla.  «  A  peine  une  affliction 
est-elle  pa.^sée  qu'une  autre  survient,  lui 
dit-il,  faisant  allusion  ;\  la  mort  si  récente 
du  mari  de  Basilla;  »  et  après  avoir  pailé  du 
mérite  et  de  la  piété  de  ces  deux  personnes, 
il  tenniue  en  disant  que  rien  ici-bas  n'est 
stable,  que  seuls  sont  vraiment  heureux  ceux 
qui  s'attachent  au  Seigneur. 

La  dix-neuvième  lettre  est  écrite  à  Hojon 
et  à  Eutrocie,  que  la  mort  vient  de  priver 
d'une  personne  qui  leur  était  chère.  «  La  per- 
sonne que  vous  pleurez,  leur  dil-il,  n'est 
point  morte,  elle  dort ,  et  si  vous  l'aimez  vé- 
ritablement, réjouissez-vous  :  le  sommeil  que 
lui  a  envoyé  le  Seipieur  vaut  mieux  pour 
elle  que  la  vie.  Hésifrriez-vous  donc,  et  dites 
avec  le  saint  homme  Job  :  Dieu  nous  l'avait 
donnée.  Dieu  nous  l'a  enlevée,  que  son  saint 
nom  soit  béni.  » 

La  vingtième  lettre  est  encore  adressée  à 
Hojon  et  à  Eutrocie,  que  la  première  leltre 
de  Braulion  n'avait  pu  entièrement  consoler 
de  la  mort  de  leur  cher  Hugnane  :  il  leur 
fait  remarquer  que  leur  tristesse  est  tout  h 
fait  inopportune,  que  celui  qui  en  est  l'objet 
ne  saurait  la  voir  avec  plaisir,  car  elle  est 
une  marque  de  désobéissance  el  d'insabor- 
dinalion  a  la  volonté  de  Dieu  ,  el  il  les  con- 
jure alors  de  modérer  leur  chagrin  et  de  se 
soumettre  aux  déciotsde  la  providence, afin 
qu'ils  méritent  un  jour  d'aller  lejoiudre  ce- 
lui qu'ils  pleurent. 

La  vingt-unième  esl  de  Braulion  au  pape 
Honorius  :  Braulion  écrit  cette  lettre  au  nom 
du  sixième  concile  de  Tolède,  qui  prie  le 
pape  de  condamner  ceux  qui  disent  (jue  la 


cour  romaine  permet  aux  juifs  baptisés  de 
retourner  à  leurs  superstitions. 

La  vingl-deuxième  lettre  esl  adressée  à 
l'évèque  Euli'ope  :  Brimlioul'y  remercie  de  la 
sollicitude  qu'il  a  pour  lui,  el  il  lui  donne  sur 
la  mobilité  de  l'époque  de  lafètcdePàques, 
quelques  di'tails  qu'il  lui  avait  demandés. 

Dans  la  vins^t-lroisieme  lettre,  adressée  à 
Unianimus  évéque  de  Valence,  Braulion  re- 
mercie ce  prélatde  l'aimable  leltie  qu'ilavait 
bien  voulu  lui  envoyer,  et  ilchorclie  à  décli- 
ner les  éloges  que  lui  avait  adressés  Valea- 
tin. 

La  vingl-quatrième  lettre  est  encore  à  l'é- 
vèquede  Valence  :  «N'ousavezdes peines, lui 
dit-il  ;  moi  aussi,  j'ai  les  miennes  :  allons  les 
vider  auprès  de  Dieu  tout-puissant,  à  ses 
pieds  pensons  aux  sollicitudes  l'un  de  l'au- 
tre :  ce  pieux  exercice  nous  soulagera,  et  for- 
tifiera notre  amitié  dans  le  Seigneur.  » 

La  vingl-cinquième  lettre  est  de  Braulion 
à  Emilien,  prêtre  et  abbé  :  il  le  félicite  de 
sa  charité  et  de  son  zèle,  qui  ne  trouvent 
point  un  assez  vaste  champ  dans  l'enceinte 
de  son  monastère,  et  qu'il  exerce  jusque  sur 
les  habitants  de  la  ville,  et  il  termine  en  le 
priant  de  lui  envoyer,  s'il  l'a  à  sa  disposi- 
tion, un  ouvrage  de  l'évèque  Aprincius,  qu'il 
n'a  pu  trouver  nulle  paît. 

La  vingt -sixième  leltre  est  d'Hmilieu  à 
Braulion:  Emilien  y  répond  à  Braulion  que, 
lui  non  plus,  il  n'a  pu  liouver,  malgré  ses  soi- 
gneuses recherches,  l'ouvrage  qu'il  lui  avait 
demandé. 

La  vingl-soplième  lettre  est  de  Braulion  à 
Émilien  :  il  lui  dit  dans  celle  lettre  qu'il  re- 
grette de  n'avoir  pas  eu  connaissance  de  son 
arrivée  dans  sa  ville  épiscopale,  et  il  le  con- 
jure de  lui  procurer  au  plus  tôt  le  plaisir  de 
sa  présence. 

La  vingt-huitième  lettre  est  de  Braulion  à 
Alaulfe  :  il  lui  écrit  pour  le  consoler  delà 
mort  de  sa  belle-mère  Mcllo,  et  pour  l'exhor- 
ter à  ce  sujet  A  la  résignation. 

La  vingt-neuvième  lettre  est  de  Braulion  à 
Gondesvinde  et  à  Agivarius.que  la  mort  vieut 
de  priver  de  leur  mère  qu'ils  aimaient  teu- 
dremeut  :  il  leur  dit  que  celle  qu'ils  pleurent 
n'a  t'ait  que  passer  à  une  vie  meilleure,  el  il 
les  invite  h  imiter  la  lésignalion  du  Sauveur 
au  jardin  des  Ulivieis. 

La  trenlième  lettre  esl  de  Braulion  à  ^Yis- 
Irémire,  qui  vient  d'être  affligé  par  la  mort 
de  sou  épouse:  après  quelques  lignes  ac- 
cordées à  la  douleur,  Braulion  peint  vive- 


VII' 


SIÈCLE.]      CHAPITRE  LXX.  —  BRAULION,  JEAN,  SAINT  SULPICE,  ETC. 


7.'Ji 


ment  A  Wislrt^rairo  le  néant  des  clioses  de  la 
lenc,  et  il  l'invite  .^  ne  s'attacher  qu'à  Dieu. 

I,a  Iri-nte-iinième  lettre  est  de  Braulion 
an  roi  Cliiiulasvinthc  :  il  le  pi'ie  lomlreinent 
d'avoir  pitiô  de  lui  et  de  {i^;  pus  lui  enlever 
son  archidiacre  Eugène,  qui  lui  eslsi  néces- 
saire. 

La  trente-deuxième  lettre  est  du  roi  Chin- 
dasvinthc  ti  Braulion  :  il  lui  dit  i|u'il  regretle 
de  ne  pouvoir  accéder  A  sa  demande,  mais 
qu'il  croit  devant  Dieu  qu'Etiyène  est  néces- 
saire au  poste  où  il  se  propose  de  le  faire 
établir. 

La  trente-troisième  lettre  est  de  Braulion 
au  roi  r.hindasviiitlie  :  il  lui  répond  que,  puis- 
qu'il le  désire  absolument,  il  lui  envoie  son 
archidiacre  Eugène ,  mais  que  ce  n'est  pas 
sans  une  peine  très-vive  qu'il  se  voit  séparé 
d'un  tel  collaborateur. 

La  trciite-ipiatiièmc  lettre  est  de  Braulion 
àNébridius,  que  la  mort  vient  de  séparer  de 
son  épouse  :  il  partage  d'abord  sa  douleur, 
puis  il  lui  présente  les  consolations  de  la  foi 
et  l'exhorte  A  la  résignation. 

La  trente-cinquième  lettre  est  de  saint 
Eugène  III  de  Tolède  à  Biaulion  :  il  lui  écrit 
pour  le  consulter  sur  plusieurs  questions  em- 
barrassantes qu'il  ne  sait  comment  résoudre. 
Nous  en  parlerons  à  propos  de  saint  Eu- 
gène. 

La  trente-sixième  lettre  est  de  Braulion  à 
saint  Eugène  :  il  rc'pond  dans  cette  lettre  aux 
questions  que  lui  avait  adressées  le  primat  de 
'lolède. 

La  trente-septième  lettre  est  de  Braulion 
au  roi  Chindasviutbe  :  il  lui  écrit  pour  lui 
représenter  que  le  gouvernement  de  ses 
étals  est  une  charge  bien  lourde  pour  ses 
débiles  épaules  de  vieillard,  et  qu'il  a  dans 
sou  fils  Recesvinte  un  successeur  en  tout  ca- 
pable d'occuper  dès  ce  moment  le  trône  ;  il 
le  prie  ensuite  de  lui  pardonner  sa  franchise, 
lui  faisant  remarquer  que  l'intérêt  qu'il  a  pour 
sa  personne  lui  fait  seul  tenir  un  tel  langage. 

La  trente-huitième  lettre  est  de  Braulion 
au  roi  Recesvinte  :  il  lui  dit  que  le  code  qu'il 
lui  a  envoyé  à  corriger  était  si  rempli  de 
fautes  par  suite  de  la  négligence  des  copistes, 
qu'il  a  eu  plutôt  besoin  d'être  refait,  que  d'ê- 
tre corrigé. 

La  trente-neuvième  lettre  est  du  roi  Re- 
cesvinle  à  Braulion  :  il  lemercie  le  saint  évê- 
q\ie  d'avoir  bien  voulu  corriger  le  code  en 
question,  malgré  les  fautes  si  nombreuses 
dont  il  était  rempli. 


La  quarantième  lettre  est  de  Braulion  h 
Recesvinte  :  il  lui  écrit  encore  à  propos  du 
code  que  le  roi  l'avait  prié  de  corriger. 

La  quarante-unième  lettre  est  <lu  roi  Re- 
cesvinte à  Braulion,  qui,  dans  sa  dernière 
lettre,  s'était  plaint  de  n'avoir  pu ,  à  cause  de 
son  ignorance  et  de  son  incapacité,  corriger 
le  code  aussi  parfailemcnt  qu'il  l'auiait  vou- 
lu :  Recesvinte  lui  répond  que  c'est  le  pro- 
pre de  tous  ceux  qui  joignent  la  modestie  à 
la  science,  de  se  plaindre  de  leur  ignorance, 
et  que  i)lus  Biaulion  méconnaîtra  son  mé- 
rite, plus  il  se  plaira  de  son  côté  à  le  rele- 
ver. 

La  quarante-deuxième  lettre  est  de  Tajus, 
abbé,  à  Braulion  :  il  lui  écrit  pour  lui  deman- 
der si  l'on  doit  croire  que  le  sang  du  Sau- 
veur ait  été  recueilli  pendant  sa  passion  par 
quelqu'un  de  ses  disciples,  et  jusqu'à  ([uel 
point  peuvent  être  regardées  comme  au- 
thentiques les  reliques  de  ce  sang  que  pos- 
sèdent certaines  églises. 

La  quarante-troisième  lettre  est  de  Brau- 
lion n  Tajus:  il  lui  répond  que  la  question 
dont  il  lui  a  demandé  la  solution  est  pleine 
d'obscurités  et  d'incertitudes,  qu'il  n'est  pas 
clair  que  la  possession  de  ce  sang  par  les 
fidèles  même  après  la  résurrection  du  Sau- 
veur porte  préjudice  à  la  foi  de  sa  résur- 
rection, et  qu'en  conséquence  il  ne  faut  pas 
trop  inquiéter  ceux  qui  prétendent  avoir  une 
telle  relique. 

La  quarante-quatrième  lettre  est  du  prêtre 
Fructueux  ù  Braulion  :  il  le  prie  de  lui  expli- 
quer: 1°  comment  Mathusalem,  qui  a  vécu 
quatorze  ans  après  le  déluge,  avait  pu  échap- 
per à  la  destruction  générale  sans  entrer 
dans  l'arche  ;  2°  comment  Agar,  chassée  par 
Abraham,  avait  pu  porter  sur  ses  épaules  son 
fils  déjà  grand;  3°  comment  il  était  pos- 
sible que  Salomon  fût  devenu  père  à  onze 
ans. 

Dans  la  quarante-cinquième  lettre.  Fruc- 
tueux répond  que  ceux  qui  disent  que  Ma- 
thusalem vivait  encore  après  le  déluge  ont 
commis  une  erreur  de  calcul  ;  que  l'Écriture 
ne  dit  point  qu'Agarait  porté  Ismaëlsur  ses 
épaules,  et  que,  pour  la  question  qu'il  lui  a 
adressi'e  relativement  à  Saloinou,  il  en  trou- 
vera la  solution  dans  saint  Jérôme. 

3.  L'Espagne  a  produit  trois  saints  connus 
sous  le  nom  d'Émilien  :  saint  Emilien  de  Ca- 
raca,  saint  Émilien  de  Veiceil,  et  saint  Emi- 
lien désigné  vulgairement  sous  le  nom  de 
saint  Milhau  de  la  GogoUe  ,  en  latin  ^mi- 


Vie  desaîQt 
E  m  i  I  i  s  a  ; 
hïiiini"  pouria 
infinis  ;  li^mnt 
en  I  humeur 
de  Sïiol  Mil- 
bJO.  Hatrol. 
LX.\S,coIoil. 
699, 


732 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Aciea  àe* 
marlyr*  de  S«- 

ODl  rciuffert 
sous  lci>  rcD- 
pereur»  Dlo- 
el^hcD  «t 
UsiimieD,  le 
tr&itl^nie  jour 
dp«  '.alrodcs 
de  Doveinlire, 
enSliS-  l'slrol. 

U.lil.,eol.7i,-. 


liantis  Cvcullatm;  or  c'est  ce  dernier  dont 
saint  Braulion  a  écrit  la  vie  ;  nous  avons  en 
faveur  de  l'autliencilé  de  cet  ouvraj^e  le  té- 
moia^nage  de  saint  Ildofonse. 

Saint  Braulion  adresse  cette  Vie  au  prêtre 
Fronimien.  Dans  la  préface  il  ait  que  son 
peu  de  talent  deviajt  le  délournor  d'écrire 
une  vie  si  admiraljle  ;  il  ajoute  qu'il  l'écrira 
néanmoins,  paice  que,  quelque  mal  écrite 
qu'elle  soit,  elle  est  en  elle-même  si  belle, 
qu'elle  ne  saurait  manquer  de  faire  du  bien 
à  ceux  qui  la  liront. 

Saint  iMilliau,  né  de  basse  condition  ,  fut 
pendant  sa  jeunesse  gardeur  de  troupeaux. 
A  l'ûge  de  vins;!  anj  .  il  alla  se  mettre  sous 
la  direction  d'un  ermite  dans  le  village 
de  Bilibri.  Il  fut  dans  la  suite  ordonné  par 
l'évoque  D^dime,  qui  le  fori^a  d'accepter 
la  cure  de  Vergegé.  Sa  fidélité  à  remplir  ses 
devoirs,  et  sa  cluuilé  envers  les  pauvres,  lui 
suscitèrent  des  ennemis.  Quelques-uns  de 
ses  confrères  le  perdirent  dans  l'esprit  de 
l'évoque,  et  il  fut  obligé  de  quitlcr  sa  cure. 
Il  se  résigna  à  la  volonté  de  Dieu  et  retourna 
à  son  ermitage,  où  il  reprit  avec  joie  son  pre- 
mier génie  de  vie.  Le  don  des  miracles  dont 
il  fut  alors  favorisé  donna  une  nouvelle  cé- 
lébrité ù  sa  réputation.  Il  mourut  dans  un 
âge  fort  avancé,  vers  l'an  374  ;  il  fut  enterré 
dans  la  chapelle  de  son  ermitage  ,  et  divers 
miracles  vinrent  relever  l'éclat  de  son  tom- 
beau. 

Saint  Braulion  a  encore  composé  une 
hymne  en  l'honueur  de  saint  Émilien  :  c'est 
une  pièce  pleine  d'onction  et  de  piété,  où 
sont  peintes  très-vivement  les  misères  de 
l'Église  militante,  sur  laquelle  il  appelle  la 
protection  du  Ciel  par  le  saint  qu'il  célèbre. 
Cette  hymne  renferme  des  pensées  belles  et 
pieuses,  et  elle  est  tout  imprégnée  du  senti- 
ment chrétien  ;  le  style  en  est  coulant  et  fa- 
cile, mais  peut-être  y  désirerait-on  plus  de 
coloris  et  d'animation. 

4.  Ces  actes  de  saint  Braulion  ,  quoique 
présentés  en  prose  ,  ret'srmltleiit  plus  à  une 
hymne  qu';"!  une  simple  narration  :  ils  sont 
divisés  comme  en  dix  strophes,  presque  tou- 
tes remarquables  par  un  stylo  plein  de  cha- 
leur et  (le  force.  —  Il  commence  par  dire 
que,  si  les  héros  de  l'anliquilé  grecque  et 
latine  ont  mérité  d'être  célébrés  par  les 
poètes  do  ces  deux  nations,  les  athlètes  géné- 


reux qui  ont  versé  leur  sang  pour  la  foisont  in- 
comparablement plus  dignes  d'exciter  notre 
admiratiiin  et  d'être  chantés  par  les  poètes. 
Après  quelques  détails  sur  les  édits  barbiues 
de  Dioclélien  et  We  Maximien  contre  la  reli- 
gion chrétienne,  il  nous  représente  leur  di- 
gne ministre  Dacien  se  précipitant  sur  l'Es- 
pagne avec  toute  la  fureur  d'un  lion.  A  Sa- 
ragosse,  saint  Vincent  est  la  première  vic- 
time de  sa  rage  barbare  :  à  son  exemple, 
dix-huit  des  personnages  les  plus  illustres 
de  la  ville  préférèrent  la  mort  à  l'apostasie; 
alors  presque  toute  la  population  de  Sara- 
gosse  se  porta  dans  les  rues  en  chantant  le 
Gloria  in  excclsis  ;  le  tyran  outré  de  fureur  à 
la  vue  du  courage  de  ces  dignes  soldats  du 
Christ ,  déchaîne  contre  eux  ses  infâmes  sa- 
tellites, et  la  ville  entière  est  inondée  du  sang 
de  ces  généreux  martyrs.  Braulion  termine 
en  flétrissant  la  conduite  de  Dacien,  et  en  cé- 
lébrant la  gloire  et  le  bonheur  de  la  ville  de 
Saragosse. 

Tous  ces  écrits  de  saint  Braulion  sont  re- 
produits d'après  Florez,  Eapuna  mg.,  tom. 
XXX.  Ils  sont  précédés  d'une  notice  histori- 
que sur  le  saint  par  Antoine,  Bibl.  vet.  /lisp., 
tom.  I,  pag.  374.] 

0.  Il  n'est  rien  venu  jusqu'à  nous  des  écrits 
de  Jean,  frère  de  Braulion.  Il  avait'  tra- 
vaillé sur  les  Offices  ecclésiastiques,  et  sur  la 
manière  de  trouver  le  jouroù  l'on  devait  (aire 
la  Pâque.  Son  épiscopat  fui  de  douze  ans. 

6.  Sulpice  suniommé  le  Pieux ,  pour  le 

nies     évèt 

distinguer  de  Sulpice-Siivère,  après  avoir  été  «  i>o">ï« 
chargé  '  pendant  quelque  temps  de  la  di- 
rection de  l'école  épiscopale  de  Bourges , 
fut  élu  pour  succéder  ù  saint  Austrégisilo, 
évêque  de  cette  ville,  mort  en  624.  L'année 
suivante,  il  assista  au  concile  de  Reims*.  Il 
en  tint  lui-même  quelques-uns  à  Bom-gcs  ; 
mais  l'auteur  de  sa  Vie  n'en  a  pas  marqué 
les  années  ni  le  sujet.  Ses  infirmités  l'ayaat 
obligé  sur  la  fin  de  ses  jours  à  se  décharger 
sur  un  autre  des  fi>nclions  de  son  ministère, 
il  se  relira  dans  un  monastère  qu'il  avait 
fondé  près  de  Bourges,  et  y  mourut  le  17 
janvier  OH  11  nous*  reste  de  lui  Irois  Let- 
tres, dont  deux  sont  adressées  î\  saint  Didier 
évêijue  de  Cahtus,  et  la  troisième  à  Vérus 
évêque  de  Rodez.  Elles  sont  courtes,  el  ne 
contiennent  rien  d'intéressant.  [On  les  trouve 
dans  le  tome  LX.XX  do  la  Patroluyie  latine, 


ioiD  éTêqua 

do   ^.'SfOSSO. 


Saiol    Snl- 
lice      érèqo» 


'  ll(l(|ilii>i)!!.,  De  Viris  illusl.,  niji.  vi. 

*  Acl.  Ord.  S.  Uewdicli,  tom.  Il,  pan.  |.S7c(.  sci/. 


»  Le  Coiiilc,  ad  an.  CS."!. 

^  Du  Clicstic,  tom.  I,  paj;.  882. 


[VII»  sifccLE.]    CHAIMTHE  LXX.  —  UltAULK 

col.  301   !\  ri'Ji.  Elles  sonl  pr<^C(^(léos  de  i>i 
Vie  de  saint  Snlpice,  par  un  auteur  anonyme 

i^i  pou  lU't's  coutonipoiain.  Celle  Vie  est  re- 
pioduile  d'après  M  iliiUiui  et  lîollandus.] 
saini  Di.  ''•  ^ii'iit  nidiei-,  évèipie  de  Caliors,  succé- 
,t.>tHiii.i.  j].j  j|.j„>,  [g  gouvcrnciucnt  de  celle  Kf^lise  à 
lUislique  sou  frère,  mort  vers  l'an  029.  On 
lui  donne  viuf^l-trois  ans  d'é|)iscop!il,  ce  qui 
le  conduit  jusipren  Go-4.  Nous  avons  seize 
de  ses  lettres  dans  le  recueil  de  Canisius  ', 
d'où  elles  sont  pass(>es  dans  ceux  de  Frche- 
rus,  do  Ducliesnc,  et  dans  lus  bibliothèques 
des  Pères.  La  première  est  une  réponse  à 
l'iivèque  Saluste.  ii  qui  il  dit  qu'il  avait  été 
bien  reçu  des  grands  et  des  princes,  appa- 
remment en  un  voyage  qu'il  avait  fait  i\  la 
cour.  Dans  la  seconde  ,  il  prie  Grimoald , 
maire  du  palais,  de  présenter  Loup,  abbé, 
au  roi  Sigebcrt*,  et  de  lui  accorder  sa  pro- 
tection. Il  la  lui  demande  aussi  pour  le  mo- 
nastère de  Saint-Amand  qu'il  avait  fondé. 
La  troisième,  ackessée  au  roi  Sigebert,  est 
pour  l'inviter  charitablement  ù  penser  sou- 
vent à  la  vie  future,  et  aux  récompenses  qu'il 
pourrait  y  espérer  pour  ses  œuvres  après 
avoir  régné  en  ce  monde.  Il  paraît  par  la 
quatrième ,  que  saint  Didier  avait  fait  un 
voyape  ;\  la  cour  dans  le  dessein  de  voir  le 
roi  Sigebert,  et  qu'il  n'avait  pas  réussi.  Il  dit 
dans  la  cinquième,  qui  est  au  roi  Dagobert, 
qu'il  était  souvent  nécessité  d'écrire  à  ce 
prince  pour  les  alJ'aires  de  l'église  de  Cahors. 
Ce  fut  encore  poui'les  alfaires  de  son  église, 
et  pour  le  soulagement  de  ses  pauvres,  qu'il 
écrivit  h  Grimoald  ,  maire  du  palais.  Mé- 
doald,  évéque  de  Trêves,  informé  de  ses  be- 
soins et  de  ceux  de  l'église  et  du  peuple  de 
Caliors ,  lui  envoya  de  grandes  aumônes. 
Saint  Didier  l'en  remercia  par  la  septième 
lettre.  La  huitième  et  la  neuvième  sont  aussi 
des  actions  de  grâces  :  l'une,  adressée  àClo- 
dulplie,  homme  de  condition  ;  l'autre  à  Ab- 
bon,  évoque  de  Metz.  La  dixième,  àl'évéque 
Dadon,  est  une  lettre  d'amitié.  Dans  la  on- 
zième, il  invite  Paul,  évoque  de  Verdun,  à 
la  cérémonie  de  la  dédicace  de  son  monas- 
tère, en  lui  témoignant  qu'il  sera  bien  aise 
de  renouveler  les  entretiens  qu'ils  avaient 
eus  autrefois  ensemble  sur  les  biens  de  la  vie 


)N,  .lEAN,  SAINT  SULPICK,  ETC.  TSS 

future.  La  douzième  est  h  Sulpice  le  Pieux, 
dont  nous  vouons  do  parler  :  saint  Didier  le 
prie  do  Iravalllor  A  éteindre  les  divisions 
qui  s'élevaient  de  temps  on  temps  eutn;  les 
frères.  Los  fontaines  de  Cahors  ne  coulaient 
plus,  faute  de  source  ;  il  écrivit  i'i  l'évé([ue 
Césaiie  de  lui  envoyer  des  ouvriers  habiles, 
pour  remédier  à  cette  disette  :  c'est  la  trei- 
zième lettre.  Il  exhorte  dans  la  quatorziètnc 
l'abbesse  Aspasie  h  continuer  la  pénitence 
qu'elle  avait  commencée  pour  expier  un  pé- 
ché capital  où  elle  était  tombée.  Il  lui  con- 
seille de  se  rappeler  fiéqueminent  l'histoire 
de  la  femme  pécheresse,  dont  il  est  dit  dans 
l'Évangile  qu'elle  obtint  par  ses  larmes  l'es- 
pérance du  salut.  La  quinzième  est  une  ré- 
ponse des  plus  humbles  ii  Félix  de  Narbonne. 
Cet  évoque,  se  croyant  offensé  par  saint  Di- 
dier, lui  écrivit  une  lettre  très-dure  et  pleine 
de  reproches.  Le  saint  le  tait  juge  du  dif- 
férend et  de  la  satisfaction  qu'il  voudra  lui 
imposer ,  ue  lui  demandant  d'autre  grâce 
que  de  vivre  avec  lui  en  charité.  La  seizième 
est  une  lettre  formée  ou  de  recommandation 
à  tous  les  évèqucs,  abbés,  grands  seigneurs 
et  magistrats  chez  qui  le  prêtre  Untedius 
devait  passer  en  allant  en  Espagne.  Aux  let- 
tres de  saint  Didier,  il  en  faut  joindre  trois' 
que  sa  mère  lui  écrivit  dans  le  temps  qu'il 
était  ti  la  cour,  où  il  exerça  la  charge  de 
trésorier,  sous  Clotairellet  Dagobert  son  fds. 
Dans  l'une,  elle  lui  apprend  la  mort  de  son 
frère  Rustique,  évêque  de  Cahors  :  elle  l'a- 
vertit dans  les  autres  de  ne  point  marcher 
dans  la  voie  large  qui  conduit  à  la  perdition, 
et  de  ne  s'éloigner  jamais  de  la  voie  étroite 
qui  mène  k  la  vie.  Ces  trois  lettres  se  trou- 
vent dans  la  Vie  *  de  saint  Didier,  avec  une 
partie  de  sou  testament,  plusieurs  de  ses 
sentences,  et  quelques  inscriptions  qu'il  avait 
fait  graver  sur  les  vases  et  autres  meubles 
consacrés  au  service  divin.  [Toutes  les  let- 
ties  de  saint  Didier  qui  nous  restent  avec  les 
réponses  se  trouvent  au  tome  LXXXVII  de 
la  Patrologie  latine,  col.  247  et  suiv.  Elles 
sont  précédées  :  1"  d'une  notice  tirée  du 
Gallia  Cfiristiana  ;  2°  de  sa  Vie,  par  un  ano- 
nyme, extraite  d'un  manuscrit  que  possédait 
M.  Vyon  d'Héronval,  auditeur  à  la  cour  des 


>  Tom.  I,  pag.  636. 

^  Sig'bert,  roid'.\u?trasie,  lioaoré  d'im  culte  pu- 
blic, outre  les  deux  lettres  ù  saint  Didier,  a  lais- 
sé quatre  autres  diplômes  pour  des  mouastères  et 
dis  églises.  Le  troisième  n'est  pas  autheulique.  Ils 
sont  reproduits,  d'après  Bréquigny,  au  t.  LXXXVII 


de  la  Patrologie,  col.  319,  avec  des  Prolégomèues 
du  même  éditeur.  Un  appendice  reproduit  une 
charte  de   Grimoalil,  maire  du  palais.  [L'éditeur.) 

3  Labbe,  tom.  1  Biblioth.  nov.,  pag.  702  et  suiv. 

'•  Ibid. 


734 


HISTOIRE  GÉNI':RALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


comptes.  Cette  Vie  est  en  dix-huit  cliapilres; 
elle  est  suivie  du  récit  de  douze  miracles 
opérés  par  saint  Didier,  et  finit  par  «n  (-pilo- 
gue  ;  3°  on  trouve  les  obseï  valions  de  Bas- 
nape  sur  la  Vie  et  les  lettres  de  Didier.  A  la 
suite  des  lettres,  au  nombre  de  trente-sept, 
on  lit  un  fragment  du  testament  de  saint 
Didier,  donni'  par  Bréquigny,  Diplom.  chart. 
Leg.,  tome  11.] 

8.  Canisius  a  mis  '  à  la  suite  des  lettres  de 
saint  Didier,  celles  que  diverses  personnes 
lui  écrivirent.  Il  y  en  a  deux  de  Vérus,  évé- 
que  de  Rodez',  qui  se  trouva  au  concile  de 
Reiras  en  6^3,  et  qui  souscrivit  eu  frit)  au 
privilège  que  saint  Faron  de  Meaux  accorda 
au  monastère  de  SajnteCroix '.  Il  marque' 
dans  la  première,  qu'il  avait  i-e(ju  son  man- 
dement pour  se  rendre  au  concile,  avec  les 
lettres  de  Sulpice,  qui  en  remettait  la  tenue 
;\  un  autre  temps.  Dans  la  seconde,  il  le 
prie  de  lui  continuer  sa  protection,  et  de 
l'accorder  à  ses  parents.  Vérus  prend  dans 
ces  lettres  le  titre  de  pécheur;  saint  Didier 
s'était  qualitié  de  même  :  ruais  ce  titre  d'hu- 
milité, que  les  évoques  prenaient  alors  com- 
munément, et  qui  était  depuis  quelque  temps 
en  usage,  n'empêchait  pas  qu'ils  ne  se  don- 
nassent les  uns  aux  autres  des  titres  d'hon- 
neur extraordinaires,  comme  de  grandeur, 
d'éminence,  de  félicité.  Ils  donnaient  aux 
grands  du  siècle  celui  d'excellentissime,  aux 
princes  celui  de  sérénissime,  aux  rois  ceux 
de  très-glorieux,  de  fils  de  l'Église,  de  très- 
excellents. 

Leurs  lettres  sont  d'un  style  barbare.  Ils 
n'y  observaient  aucune  règle  de  grammaire. 
Parmi  les  autres  lettres  à  saint  Didier,  il 
y  en  a  trois  de  Sulpice-le-Pieux,  une  de 
saint  Eloi  de  Xoyon ,  deux  de  saint  Paul 
évêque  de  Verdun,  rieux  de  Constance  d'Al- 
bi,  une  de  Pallade  évê(pie  dWuxerre,  une 
d'Ai)bon  évêque  de  Metz,  une  de  Raurace 
i  vèque  de  Nevei's,  une  de  Félix  évêque  de 
Limoges  :  il  en  avait  écrit  plusieurs  au  pape 


Honorius,  qui  sont  perdues.  Une  de  l'abbé 
Bertégysile,  une  de  Dadon  évcque  de  Rouen, 
une  de  l'évèquc  .\ujulfe,  deux  du  roi  Sige- 
bert,  une  de  saint  Gai  évêipie  de  Clermont, 
une  de  Chauulphe.  La  plus  intéressante  de 
toutes  est  la  seconde  de  Sigebert.  Ce  prince 
dit  '  à  saint  Didier  que  le  bniil  s'était  ré- 
pandu que  l'évêque  Wulfolendus  avait  con- 
voqué un  concile  pour  le  1"  septembre,  et 
qu'il  ne  savait  en  quel  endroit  de  son  royau- 
me cette  assemblée  devait  se  tenir  :  qu'en- 
core qu'il  fût  dans  sa  volonté  de  maintenir 
en  vigueur-  les  lois  et  les  canons  de  l'Eglise, 
comme  avaient  fait  ses  parents  et  ses  prédé- 
cesseurs, il  ne  pouvait  soulfrir  que  les  évo- 
ques de  son  royaume  s'assemblassent  sans  en 
avoir  auparavant  obtenu  sa  permission,  et 
sans  qu'il  eût  appris  d'eux  le  motif  de  la  con- 
vocation du  concile  ;  qu'il  l'accorderait  vo- 
loulieis,  si  c'était"  pour  le  maintien  de  la 
discipline  ecclésiastique,  ou  pour  l'utilité  de 
ses  Etals,  ou  pour  quelque  autre  cause  rai- 
sonnable ;  qu'en  attendant  de  plus  grands 
éclaircissemenls  sur  le  concile  indiqué  pour 
le  1"  septemltre,  il  dt'fcndait  de  le  tenir. 

9.  [Sous  Waniba,  roi  desGoths,  vivait  re- 
tiré dans  le  célèbre  monastère  de  Saint- 
Pierre-du-Mont,  saint  Valère.  Sa  sainteté  et  f""-  ''•"''• 
sa  science  jetèrent  un  immense  éclat  sur  ce  co^,?:^  "; 
monastère  qu'avait  autrefois  fondé  le  bien- 
heureux Fructueux.  I!  écrivit  un  livre  sur  la 
Vaine  sagesse  du  siècle.  Il  fait,  à  la  fin  de  cet 
ouvrage,  un  abrégé  de  sa  vie,  où  il  nous  ap- 
prend qu'il  était  né  dans  le  territoire. 

Les  principaux  livres  qu'il  nous  a  laissés 
sentie  J'rnilc  de  la  nouvelle  Vie,  la  Vie  de 
sailli  Fritclueux,  la  Vie  et  les  saints  jx'lerina- 
ges  de  sainte  Euchèrie,  les  Miracles  et  les  ré- 
vélations des  deux  moines  Maximus  et  Bonellut, 
et  d'xin  serviteur  de  saint  Fructueux.  Peut-être 
a-t-il  encoi-e  écrit  sur  Us  Psaumes.  Enfin,  (ui 
tiouve  un  fiagmenl  de  lui  dans  la  Coneorde 
des  /lègles  de  saint  Benoit,  abbé  d'Aniane. 

Le  corps  de  saint  Valere  repose  dans  l'é- 


tofiqoi*,  d'«* 
rrfv  Ao^olne, 
Bllil.  m  Ul>. 


'  Canis.,  toni.  1,  pas.  6U. 

*  Ces  If'tires  se  liouveut  au  lofiie  LXX.X  dp  la 
Palrolugie  Inl.ne,  a\ct:\iue  notice  tirée  de  l'iiliri- 
cius,  et  dr  ii.iuvcnn  ^lu  tome  LX.XXVll,  col.  2B3-2G5. 
Dans  ee  iiièiiie  volume,  col.  4114.  on  trouve  une 
notice  sur  Vërue,  extraite  du  GalUa  Clirisliana. 
(L'éditeur.) 

•  Le  tome  LX.X.XVIIde  la  Patrologie  latine,  lol. 
1133,  contient  deux  cliartes  et  le  testament  de 
saint  FaroM,  rejiroduits  d'après  Ujéiniifjny.  telles 
sont  précédées  d'une  notice  sur  saint  Faron,  d'a- 
près le  Galliu  chrisliana.  (L'éditeur.) 


*  Iliid.,  pag   C48.  -  »  Ihid.,  pag.  C*9. 

•  Sine  nu.ilra  scienlia  gyuodaU-  concilium  in 
v.osiro  regiiu  non  agatur,  nec  ad  dictas  catvndas 
scidcnibris  utla  coujunclw  episcoporum  ex  iis 
qui  ad  nontrant  dilioi.em  prrtincre  noscitnlur, 
710)1  fiatur : pn.slca  vero  opiiorUino  lempore,  si  no- 
bis  untca  denuntiatiir,  ulruin  pro  ccclesiastico 
statu,  an  pro  rcgni  ulildule,  site  rtiam  pro  qua- 
liliet  rationabili  condilione  conrentio  essr  derre- 
veril,  non  nhnuimus.  Sigelierl.,  Epi.st.  ad  Deside- 
rium  Cadurcenscm,  toui.  I,  Op.  Canis.,  pag.  649. 


fvil'  SIÈCLE.] 

gliso  de  rArclmnprc  Sainl-Micliel,  i\  quîilro 
milles  de  .Sainl-PieiTC-du-Monl.  Sa  fêle  est 
lixr^e  au  K  avril, 
npu.ci».        10.  Sainte  Eulir-rie,    entlamniée  du  dt'sir 

diipr.».  (l'ol)icnirlesi4râL'es  divines,  eiitrepiciidle  pi'?- 
.4..',i,\i  lerinas'ede  la  Terre-Saiiilc.  Sous  la  conduite 
„*î''î"  '^^  '"*  P'"oteclion  du   Seiijucur,  elle  arrive  à 

B.za-  CCS  lieux  int'inorables,  sanctifit's  par  la  nais- 
»  »>t-»l«.'''' ""  sance,  la  passion  et  la  résunocliou  du  Sau- 
veur. Elle  visite  ensuite  tes  monastères  de 
l'Orient,  et  en  lisant  l'Ancien  Testament,  elle 
parcourt  les  lieux  que  Icsisraiilites  rendirent 
célèbres,  ces  lieux  où  une  eau  miraculeuse 
sortit  d'un  rocher,  où  la  manue  tomba;  et 
dans  une  ardeur  surhumaine,  elle  vole  au 
sommet  du  Sinaï,  Ih  où  le  Seiufneur,  au  mi- 
lieu des  éclairs  et  tles  tonnerres,  donna  sa 
loi  à  Moïse.  Ces  prodij^cs  de  courage  d'une 
faible  femme  courant  de  l'OcCident  ;\  l'Orient 
pour  opérer  le  salut  de  son  âme,  devraient 
coufondi-e  notre  mollesse  et  noire  lâcheté, 
et  exciter  en  nous  un  vif  détachement  des 
mondaines  et  terrestres  voluptés,  un  ardent 
désir  des  choses  du  ciel.  Saint  Valère  ter- 
mine son  épifre  par  un  vpitaimhvn,  c'est-à- 
dire  résumé  disposé  en  acrostiche,  et  les  pre- 
mières et  dernières  lettres  de  cet  épitaméron 
nous  donnent  les  mots  suivants  : 

PATRI   DONADEO   MISER   VALERIUS. 

il.  Ce  ne  fut  pas  assez  pour  Satan  d'avoir 
entraîné  les  mauvais  animes  dans  sa  chute. 
Il  nourrit  dans  son  C(eur  les  brûlantes  flam- 
mes de  la  jalousie,  et  excite  l'homme  à  aban- 
donner son  Créateur.  Mais  un  jour.  Dieu 
voyant  la  ténébreuse  ignorance  et  la  cécité 
profonde  dans  lesquelles  ^e  trouve  plongé  le 
genre  humain,  envoie  sur  la  terre  son  fils 
unique. 

Soleil  brillant,  il  illumine  le  monde  d'une 
radieuse  clarté.  En  quittant  cette  terre,  le 
Sauveur  nous  laisse  ses  apôtres  et  ses  disci- 
ples pour  être  la  lumière  de  l'univers.  A 
leur  suite  viennent  ces  intrépides  martyrs 
qui,  méprisant  et  les  chaînes,  et  les  fouets, 
et  les  glaives,  livrent  i\  la  mort  leui^  corps 
coiTuptible  pour  acquéi'ir  ces  spicndi.les  cou- 
ronnes, que  nul  souffle  ne  peut  llétrir.  Après 
eux  ce  sont  les  cénobites  de  l'un  et  l'autre 
sexe,  comptant  pour  rien  les  voluptés  du  siè-, 
de,  et  qui,  dans  une  sublime  ferveur,  de- 
viennent les  sçrfs  du  Christ  et  se  chargent 
du  joug  suave  du  Rédempteur.  Dans  un 
élan  généreux,  ils  s'enfuient  du  monde  pour 
voler  dans   les  vastes  solitudes  du  désert. 


CHAPITRE  LXX.  —  BRAriION.  VALÈRE.  ABBI>. 


733 


Mais  do  nos  jours  les  hommes,  plonijés  dans 
je  ne  sais  quelle  folie,  passent  leur  existence 
sans  songer  aux  magnifiques  récompenses 
du  ciel,  ni  aux  épouvantables  tourments  de 
l'eidei-,  et  croupissent  dans  la  plus  honteuse 
des  indill'érences ,  ou  plutôt  marchent  ;\ 
grands  pas  dans  la  voie  large  qui  mené  aux' 
éternels  incendies. 

12.  Dans  cet  écrit,  saint  Valère  raconte 
les  visions  des  moines  Maxime,  Ronellus  et 
Baldarius  ;  visions  dans  lesquelles  il  leur  a 
été  donné  de  contempler  les  beautés  du  pa- 
radis et  l'allVense  laideur  de  l'enfer.  Dans 
ces  trois  morceaux,  il  règne  une  poésie  gra- 
cieuse et  terrible  qui  comble  l'âme  d'ime 
sainte  et  délicieuse  joie ,  en  même  temps 
qu'elle  l'accable  d'épouvantemenis.  Il  semble 
que  ces  saints  moines  aient  soulevé  un  c  lin 
du  voile  qui  nous  cache  le  ciel  et  l'enfer. 
Nous  regrettons  que  la  longueurdc  ces  pages 
sublimes  n«us  empêche  de  les  citer.  Après 
avoir  fait  le  récit  de  ces  différentes  visions, 
notre  saint  parle  d'une  septième  espèce  de 
moines,  enflés  d'orgueil  et  de  superbe,  plon- 
gés dans  des  abîmes  de  cupidité,  adonnés 
aux  passions  les  plus  honteuses. 

Le  mot  septième,  que  nous  lisons  ici,  indi- 
que, sans  aucun  doute,  que  saint  Valère 
avait  parlé  auparavant  de  six  autres  espèces 
de  moines.  Après  ces  lettres,  se  trouve  l'his- 
toire de  la  conversion  de  saint  Valère,  sa  fuite 
dans  le  désert,  son  entrée  au  monastère.  11 
énumèi'e  les  nomi)reuses  tentations  qui  vien- 
nent l'assaillir,  les  continuels  assauts  qu'il  a 
à  soutenir  contre  le  démon,  les  tourments 
atroces  que  lui  inflige  ce  cruel  ennemi  du  sa- 
lut :  toutes  choses  qu'il  serait  beaucoup  trop 
long  de  redire  ici. 

13.  Voici  maintenant  quelques  fragments 
du  traité  de  la  lYouvelle  Vie,  qui  du  reste  est 
fort  court.  «  Mon  cher  fils,  aimez  les  larmes. 
Soyez  aussi  prompt  à  pleurer  votre  faute,  que 
vous  l'avez  été  h  la  commettre.  Plus  la  pas- 
sion qui  vous  a  fait  pécher  a  été  vive,  plus 
vous  devez  être  embrasé  du  désir  de  la  pé- 
nitence. Xe  vous  laissez  pas  flatter  par  une 
sécurité  trompeuse,  mais  ayez  dans  le  cœur 
l'espérance  et  la  crainte.  Que  l'espérance 
du  pardon  vous  ftu'lifie,  mais  que  la  crainte 
de  la  géhenne  vous  empêche  de  tombei-  de 
nouveau —  J'aime  mieux  voir  de  la  force 
dans  votre  esprit,  que  dans  votre  corps.  Les 
souffrances    du  corps  sont    le   remède    de 

l'âme Soyez  patient  et  ne  répondez  pas 

aux  injures,  imitant  en  cela  Notre-Seigneur, 


Psrolfi 

que  U  blDD* 
hotiiem  Va- 
lère érrtvit  «u 
bifnb.'urem 
D  0  na  d I  ou . 
Ibid.  col.  «31, 
t,7. 


D<  Il  vie 
nouvelle, iljjd. 
col.  W7-ltS. 


736 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


qui,  soufllct<5,  llagollé,  coiironiu- d'épines,  scrraous  impudiques.  Jiijicz-vous,  mais  ne 

altach(5  il   la  croix,   s'est   toujours    tû ju^ez  pas  les  autres  ;  ne  cliercliez  jamais  à 

Ayez  de  la  simplicité  et  de  la  irravité  dans  savoir  ce  que  discut  les  liouimes  entre  eux. 

votre  démaiclic,  n'y  laissant  paraître  rien  Cela  faisant,   vous  obtiendrez  la  vie   éter- 

de  liîger...  Fuyez  la  compagnie  des  hommes  nelle.  »  ] 
méchants  et  injustes  ;  fcnnez  l'oreille  aux 


CHAPITRE  LXXI. 

Saint  Gall  ablé  [646  ,  Jonas  abbé  d'Elnonc,  saint  Cnméen  abbé  en  Hibernie, 
saint  Donat  évêqne  de  Besançon,  la  Règle  du  Maître,  denx  anonymes. 

•  [Tous  écrivains  latins  ilu  Vil'  siècle.] 


FdtlGall, 
a  ëcrils. 


1.  L'un  des  plus  illustres  disciples  de  saint 
Colombau  fut  saint  Gall,  Hibernois  comme 
lui  '.  Ils  demeurèrent  ensemble  dans  le  mo- 
nastère  de  Bangor,   d'où   ils  passèrent  en 
France  vers  l'an  585.  11  aurait  même  suivi 
son  maître  en  Italie,  s'il  n'en  eût  été  enjpè- 
ché  par  une  fièvre  qui  le  contraignit  de  s'ar- 
rêter près  de  Bregents,  sur  le  l;ic  de  Constan- 
ce, en  Suisse.  Ce  canton  faisait  alois  partie 
du  royaume  d'Austrasie.  Saint  Gall  avait  étu- 
dié à  Bangor  la  grammaire,  l'art  poétique  et 
l'Écriture  sainte.  11  fui  dans  la  suite  élevé  au 
sacerdoce.  11  était  avec  saint  Colombau  à 
Zug,  lorsque  ce  saint  abbé  prêcha  la  foi  de 
Jésus-Clirist  aux  habitants  qui  adoraient  en- 
core les  idoles.  A  la  vue  de  quelques  mira- 
cles, plusieurs  se  coiivertiient  ;    les  autres 
persistèrent  dans  lem-  aveuglement.  Saint 
Gall,  poussé  de  zèle,  briila  leurs  temples,  et 
jeta  dans  le  lac  toutes  les  ofliandes  qu'il  y 
trouva.    Les   barbares  irrités,  voulurent  le 
luer.  11  évita  la  mort  par  la  fuite,  et  se  retira 
sur  le  lac  de  Constance,  où  il  travailla  à  la 
conversion  des  idolâtres  qui  liabilaient  sur 
ses  bords.  Il  bûlit  près  de  là  un  monastère 
qui  porte  encore  aujourd'hui  son  nom,  et  il 
résolut  de  s'y  fixer.  Cependant  saintEustase 
étant  mort  vers  l'an  G25.  les  moines  lie  Luxeuil, 
lui  députèrent  six  de  leurs  frères,  venus  au- 
trefois d'Hibernie,  le  conjurant  de  fe  char- 
ger de  leur  conduite.  Il  le  refusa.  Il  ne  vou- 
lut point  non  plus  accepter  le  siège  épisco- 
palcle  Constance,  et  il  Gttomijerréleclionsur 
Jean, l'un  doses  disciples.  Il  mourut  versl'an 
C4C,  le  IG  d'octobre,  jour  auquel  l'I-.glise  cé- 


lèbre sa  mémoire.  Nous  avons  de  lui  un  dis- 
cours assez  long,  qu'il  prononça  dans  l'église 
de  Sainl-Étienne,  au  jour  de  l'ordination  do 
Jean,  évètjue  de  Constance.  Il  le  commence 
par  rapporter  le  péché  des  anges  et  la  créa- 
tion deThomme;  puis,  touchant  légèrement 
lliisîoire  des  patriarches,  la  succession  des 
rois,  il  passe  à  la  naissance  de  Jésus-Christ, 
dont  il  rapporte  le  baptême,  les  tentations 
dans  le  désert,  les  miracles,  la  mort,  la  ré- 
surrection, et  finit  à  la  descente  du  Saint-Es- 
prit sur  les  apôtres,  en  exhortant  les  fidèles 
à  vivre  conformément  aux  promesses  qu'ils 
avaient  faites  dans  le  baptême  de  renoncer 
au  démon,  à  ses  œuvres,  à  ses  pompes.  11 
enseigne  que  les  anges  ont  été  créés  avant 
le  monde,  et  que  leur  péché  est  antérieur  à 
la  création,  qui  n'a  eu  heu  h  l'égard  des 
hommes,  que  pour  remplir  le  nombre  que 
les  anges  avaient  laissé  vide  parleur  aposta- 
sie ;  sentiment  qui  aétécommuu  à  beaucoup 
d'anciens.  Il  croit  que  le  don  des  langues, 
accordé  aux  apôtres  et  à  leurs  disciples,  con- 
sistait en  ce  que,  ne  parlant  qu'une  seule 
langue,  ils   se   faisaient  entendre    de  tous 
ceux  qui  en  parlaient  de  dillérentes.  Son 
style  est  simjile,  mais  clair  et  soutenu.  Ce 
discours  se    trouve   dans   les  deux  i-ditious 
des  Anciennes  Leçons  de  Canisius,  dans  le 
Manuel  biblique  imprimé  ^Francfort  en  lUlO, 
dans  la  Bibliothèque  des  Pères  a  Paris  en 
ICii,  dans  celle  de  Lyon  en  l(!77  ;  dans  Gal- 
land.  Dibliutli.  vct.   Pair.,  tome  .\1I,  d'où  il 
a  passé  dans  le  tome  LXXXVII  de  la  Pairo- 
tuyie  latine  avec  une  notice  extraite  de  Fabri- 


Toin 


Il  Aci.  OrrfiH.  S.  Bcnedicli.  p«g.  215  ;  et      lib.  Met  .VIII  Annal.  Bencd.  Alabil.,  num.  iO  el32. 


[vn«  SIÈCXE.]  CHAPITllE  LXXI.  —  SAINT  GALL,  JONAS,  SAINT  CUMfiEN,  ETC. 


ciiis,  et  imo  autre  par  Galland.  Un  appendice 
reproduit  des  i''i»if,'rainiues  ou  liymnes  sa- 
crés des  nuciens  Pères  du  monastère  de 
Saint-Ciall,  avec  notes  de  Canisius.l  C'est  par 
erreur  (lu'l'ssérius,  dans  son  recueil  des  Lct- 
li-es  liibernoises  ,  en  a  attribué  une  à  ce 
saint:  elle  est,  non  de  saint  Gali,  abbé,  mais 
de  Gall,  évoque  de  Cleiuiont,  et  adressée  ci 
saint  Didier,  év("'i[ued(!  Caliors.  Nousl'avons 
marquée  dans  le  chapitre  précédent.  La  vie 
do  saint  Gall  fui  écrite  par  Walafride  Stra- 
bon,  qui  avait  été  moine  dans  le  monastère 
de  ce  nom. 

'■2.  Jonas,  qui  a  écrit  celle  de  saint  Colom- 
ban  ',  en  composa  encore  d'autres,  savoir  : 
celles  de  saint  Atlale,  de  saint  Eustase,  et  de 
sainte  Fare,  abbesse  d'Évoriac.  Ces  trois  Vies 
se  trouvent  ensemble  dans  un  manuscrit  de 
Compiègne,  où  elles  sont  suivies  de  celle  de 
saint  Bertulfe  ;  mais  elles  y  sont  divisées  en 
trois  livres  :  distribution  qui  parait  contraire 
à  celle  que  Jonas  en  avait  faite,  puisqu'il  dit 
expressément  dans  son  prologue  sur  la  Vie 
de  saint  Colomban,  qu'il  n'avait  composé  que 
deux  livres,  tant  pour  cette  vie  que  pour 
celles  des  saints  Attale  et  Eustase,  et  de  ceux 
dont  il  y  avait  parlé;  ce  qu'il  entend  parti- 
culièrement de  sainte  -  Fare,  qu'il  appelle 
Burgondofara,  comme  s'il  l'eût  crue  origi- 
naire de  Bourgogne,  et  de  saint  Bertulfe, 
troisième  abbé  de  Bobbio.  On  a  imprimé  ces 
quatre  Vies  dans  le  second  tome  des  Actes  de 
l'Ordre  de  saint  Benoît,  souslenomde  Jonas, 
qui  y  est  appelé  moine  de  Bobbio  ;  d'autres  lui 
donnent 'la  qualité  d'abbé,  notamment  Baim- 
bert,  qui  écrivait  en  même  temps  que  lui; 
mais  il  ne  dit  pas  de  quel  monastère.  On  ne 
peut  guères  douter  que  ce  ne  fût  en  France, 
puisque,  en  659,  le  roi  Clotaire,  et  Balhilde 
sa  mère,  l'envoyèrent  '  en  leur  nom  à  Châ- 
lons-sur-Saône  terminer  une  afl'aire  d'État. 
L'opinion  la  plus  vraisemblable,  est  qu'il 
gouvernait  le  monastère  d'Eluone,  aujour- 
d'hui Saint -Amand,  dans  la  Belgique,  où 
l'on  trouve  un  Jouas  vers  le  milieu  du  sep- 
tième siècle  dans  le  catalogue  des  abbés. 
Quoi  qu'il  en  soit,  ces  trois  Vies  sont  aussi 


737 

dignes  de  foi  qu'elles  le  peuvent  être,  puis- 
que Jonas  l(!s  a  composées  de  ce  qu'il  avait 
vu  ou  appiis  sur  les  lieux.  Il  avait  été  à  Bob- 
bio, A  Luxeuil  et  à  Faremoutierou  Évoriac.  Il 
dit  nettement  qu'il  était  eu  ce  dernier  mo- 
nastère, lorsqu'on  y  célébrait  '  les  mystères 
le  trentième  jour  depuis  la  mort  de  Gibitru- 
de,  suivant  la  coutume  de  l'Église.  Le  di- 
manche ",  pendant  que  les  religieuses  rece- 
vaient la  communion  sous  les  deux  espèces, 
le  chœur  chantait  :  Prenez  ce  sacré  corps  du 
Seigneur,  et  le  sang  du  Sauveur,  qui  vous  pro- 
curera la  vie  éternelle.  Jonas  était  natif  de 
Suze  en  Ligurie.  Il  se  relira  vers  l'an  618  à 
Bobbio,  où  il  embrassa  la  vie  monastique  sous 
saint  Attale,  successeur  de  saint  Colomban. 
Il  avait  de  l'éloquence,  mais  il  chargeait  trop 
son  style  d'expressions  peu  naturelles;  ce 
qui  le  rend  obscur  et  embarrassé.  C'est  dans 
ses  écrits  que  le  vénérable  Bède  a  puisé  ce 
qu'il  a  dit  de  saint  Colomban,  de  saint  Ber- 
tulfe, de  sainte  Fare  et  de  quelques  autres  : 
d'où  est  venue  l'erreur  de  ceux  qui  ont  at- 
tribué les  Vies  de  ces  saints,  non  à  Jonas, 
mais  à  Bède  Jonas,  allant  à  Chalons-sur-Saô- 
ue  en  6o9,  retoucha  la  Vie  de  saint  Jean  de 
Réomé,  qui  avait  été  écrite  par  un  anonyme, 
disciple  du  saint.  Il  y  ajouta  en  forme  de  dia- 
logue une  relation  des  miracles  opérés  par 
ce  saint  abbé.  Il  dit  lui-même  qu'il  en  avait 
été  prié  pendant  son  séjom-  dans  le  monas- 
tère de  Saint-Jean,  connu  aujomd'hui  sous 
le  nom  de  Moutier-saint-Jean,  par  l'abbé 
Hunna  et  par  sa  communauté.  C'est  dans 
cette  annotation  qu'il  nous  apprend  que  le 
roi  Clotaire  et  Balhilde  sa  mère  l'avaient  en- 
voyé à  Châlons  pour  une  afiairc  d'État.  Ce 
dernier  ouvrage  de  Jonas  est  d'un  style  plus 
simple  et  plus  naturel  que  les  précédents. 
Peut-être  voulut-il  imiter  celui  de  l'anony- 
me sur  lequel  il  travaillait.  La  Vie  de  saint 
Jean  de  Réomé,  et  le  récit  de  ses  miracles,  se 
trouvent  dans  le  premier  tome  des  Actes  de 
l'ordre  de  Saint-Benoit,  et  dans  l'histoire  de 
Moulier-saint-Jean,  imprimée  à  Paris  en  1637, 
par  les  soins  du  P.  Rouvrier,  jésuite.  [Les 
écrits   de  l'abbé  Jonas  sont  reproduits  au 


'  Mabil.,  Act.  tom.  II,  pag.  3. 

2  Yila  Columbani,  num.  SO. 

s  Mabillon.,  Annal.,  lib.  XIV,  num..  66. 

*  Ibid.,  num.  66. 

'  Tom.  II  Act,  Ord.  S.  Benedicti,  pag.  423,  cap. 
u. 

"^  Quodam  die  Dominico  cum  missarum  solem- 
nia  swpe  fata  Burgundofara  cum,  famularum 

XI, 


collegio  exspec(aret,  et  jani  sacri  corporis  com- 
munione  participarentnr,  quœdam  ex  iis  nomine 
Damna  cum  jain  corpus  Domini  accepisset  ac  san- 
guinem  lihasset,  et  sacro  choro  inserla  cum  com- 
parilnis  caneret:  Hoc  sacrum  corpus  Domini,  et 
Salvatoris  sauguinem  sumite  vobis  in  vitam  îeter- 
nam  ;  in  ore  ejus  globus  ignis  candido  fulgore 
rulilans  niicabat.  Ibid.,  cap.  vi,  pag.  423. 

Al 


738 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Cam'eD  ib* 
14  en  Uit«r- 
ntt.Ses  MriU. 


S«IdI  D^Dit 
éveille  de  He. 
Mnc/>n,  te  Hé* 
fie. 


tome  LXXXMI  de  la  Patrologie  latine,  col. 
ion  et  suiv.  avec  nne  noiii'e  \)nv  Fabiirius.] 

3.  Il  y  a,  dans  le  premier  tome  des  Leçons 
anciennes  de  Canisius,  une  Vie  de  saint  Mag- 
noald  ou  Magne,  disciple  de  saint  Gall.  L'au- 
teur se  nomme  Théodore,  et  dit  qu'il  avait 
vécu  avec  saint  Colomban.  Les  fautes  qu'il 
fait  en  parlant  de  ce  saint,  ce  qu'il  écrit  du 
roi  Pépin  et  des  victoires  de  Cliarlemagne, 
ôtent  tout  crédit  à  sa  narration  :  car  il  n'est 
pas  vraisemblable  qu'il  ait  conversé  familiè- 
rement avec  saint  Colomban,  mort  vers  l'an 
615,  ni  qu'il  ait  vécu  jusqu'au  règne  de  Char- 
lemagne,  qui  ne  fut  couronné  empereur 
qu'en  8Q1. 

Le  Pénilentiel  de  saint  Cuméen  •  a  beau- 
coup de  rapport  avec  celui  de  saint  Colom- 
ban :  mais  il  est  à  présumer  que  saint  Cu- 
méen, qui  n'a  composé  le  sien  que  sur  les 
canons  de  divers  conciles,  a  puisé  aussi  dans 
lePénitentiel  de  saint  Colomban.  L'endroit 
le  plus  remarquable  est  celui  *  où  saint  Cu- 
méen défend  de  manger  de  la  cliair  des  ani- 
maux suflbqués,  soit  oiseaux,  soit  bêtes  à 
quatre  pieds.  Il  se  fonde  sur  la  défense  qui 
en  fut  faite  dans  le  concile  des  apôtres  assem- 
blés à  Jérusalem.  L'sserius,  dans  '  sa  collec- 
tion des  Lettres  Hibcrnoises,  en  met  une  sous 
le  nom  de  Cuméen,  où  l'auteur  exhortait  ceux 
de  cette  nation  .'i  quitter  leur  usage  sur  la  cé- 
lébration de  la  Pâque.  L'aLiteur  du  Pénitcn- 
tiel  est  dans  les  mêmes  sentiments  :  ainsi  ou 
peut  attribuer  à  Cuméen  celte  lettre,  et  une 
hj'nme  qui  commence  parces  mots  :  Judn,  wlé- 
brcz  lesfvtesdeJésvs-Cliriat.  La  Lettrede saint 
Cuméen  est  adressée  à  Ségenius,  abbéd'lli. 
Son  Pénilentiel  fut  d'abord  imprimée  Augs- 
bourg  en  1621,  avec  celui  de  saint  Colom- 
ban; puis  dans  le  douzième  tome  de  la  Bi- 
bliothèque des  Pères.  Dom  Mabillon  en  rap- 
porte un  fragment  dans  son  Voyage  en  Alle- 
magne * .  [La  lettre  sur  la  controverse  rela- 
tive à  la  Pàqne,  et  le  Pénilentiel  de  saint 
Cuméen,  se  trouvent  au  tome  LXXXVIl  delà 
Pûlrologie  latine,  avec  une  notice  de  Fabri- 
cius,  et  une  préface  du  Père  Labbe  pour  le 
Pénilentiel.] 

4.  Ou  a  déjA  remarqué  ',  dans  la  Vie  de 
saint  Colomban,  qu'étant  à  Luxeuil,  il  bap- 


Pal.,  pafj.  M. 

Pal.,  pat'.  43,  cap.  I. 


'  Tora.  XII  nrhliiilh. 
'  Tom.  XII  liibUolh. 
»  l'ag.  21. 

'•  .Mabillon.  in  Analeeli»,  pag.  17. 
•  Columhani  vila,  loin.  Il  Àct.  Ord.  S.  Bened., 
Dum,  22. 


tisa  le  fils  de  Valdalène,  duc  de  la  Province 
transjurane.  (ju'il  lui  imposa  le  nom  de  Me- 
nât, et  qu'il  prit  soin  de  sou  éducation.  Saint 
Eustase,  son  successeur  dans  celte  abbaye, 
continua  de  former  ce  jeune  homme  dans  la 
piété  et  dans  les  lettres,  où  il  fit  beaucoup 
de  progrès.  Le  siège  épiscopal  de  Besançon 
étant  venu  à  vaquer  •  vers  l'an  621,  Donat 
fut  choisi  pour  l'occuper.  L'année  suivante, 
il  assista  au  concile  de  Reims,  et  en  646  à 
celui  de  Châlons-sur-Saoïie.  11  fonda'  le  mo- 
nastère de  Palais,  ainsi  nommé  à  cause  qu'il 
le  bâtit  sur  les  débris  des  anciens  murs  de  la 
ville.  Il  y  mit  des  moines  qui  observaient  tout 
ensemble  la  rè;,'le  de  saint  Benoît  et  celle  de 
saint  Colomban.  Flavie,  sa  mère,  demeurée 
veuve,  employa  une  partie  de  son  bien  à  bâ- 
tir un  monastère  de  filles,  connu  sous  le  nom 
de  Joussan-.Moutier.  Saint  Donat  vivait  enco- 
re en  64y,  auquel  il  souscrivit  au  privilège 
que  saint  Faron,  évêque  de  Mcaux,  accorda 
au  monastère  de  Sainte-Croix.  Ce  fut  pour  le 
monastère  fondé  par  sa  mère,  que  saint  Do- 
nat composa  une  Règle  que  saint  Benoit  d'A- 
niane  a  insérée  dans  son  Gode  ".  Elle  est  di- 
visée en  soixante  dix-sept  chapitres,  dont 
quarante-trois  sont  tirés  de  la  règle  de  saint 
Benoit,  les  autres  des  règles  des  Pères  et  de 
celle  de  saint  Césaire.  Quelques-uns  ont  at- 
tribué celte  règle  .'i  un  Donat,  moine,  qui, 
selon  saint  Iklefouse  ',  alla  d'Afrique  s'é- 
tablir en  Espagne.  Mais,  outre  que  ce  Père  ne 
met  point  de  règle  parmi  les  écrits  do  ce 
moine,  il  est  visible  que  celle-ci  fut  écrite 
pour  des  filles  qui  connaissaient  celle  de  saint 
Césaire,  (jui  avait  plus  de  cours  en  France 
qu'en  Espagne  et  qu'en  /XJ'rique.  Ce  qui  lèye 
toute  dilUculté,  c'est  que  la  règle  de  saint 
Donat  est  pour  des  tilles  qui  vivaient  dans  un 
monastère  fundé  pur  Flavie  servante  de  Dieu, 
comme  porte  Tinscriptiou  du  prologue;  c'é- 
tait la  mère  de  saint  Donat:  a  qui  pouvait- 
elle  s'adresser  mieux  pour  avoir  une  règle 
pour  son  monastère,  qu'A  son  fils,  qui  était 
en  môme  temps  son  évéque?  M.M.  de  Sainte- 
Marthe  '"  lui  ont  attribué  une  seconde  Règle 
pour  former  à  la  piété  les  moines  de  Saint- 
Paul,  et  les  chanoines  de  sa  cathédrale  ou 
de  Sainl-Étienue.  Mais  la  Hètrlfl  ipie  nous 


•  Mal)illon,  Annal.,  Ilb.  XI,  muii.  43. 

'  Vita  Coliimbani,  ubi  siipra. 

'  Cod.  regtil.,  part.  3,  pjip.  il. 

»  llilophoiifl.,  lil).  De  Viris  illust.,  cap.  iv. 

'"  Gallia  christiaiui  velus,  loui.  I,  pag.  120. 


Rè«le  du 
Uallre. 


fvii»  SIÈCLE.]        CHAPITRE  LXXn.  - 

avons  '  dans  le  Coilo  dosainl  Hcnoît  ( 
ne,  sous  les  noms  do  saint  Paul  et  do  saint 
Etienne,  est  toute  difl'érente  de  celle  que  saint 
Douât  tJfablit  dans  le  monaslère  de  Palais. 
Colle-ci  était  un  coinposô  dos  rôfijos  de  saint 
lienoit  et  do  saint  Coloinhan.  Dans  celle  de 
saint  Paul  ef  de  saint  Htieinie,  il  n'est  parlé 
ni  de  l'un  ni  de  l'autre,  et  les  rtiglements 
n'ont  i]uo  pou  ou  point  d(!  confoiinilé  avec 
ceux  de  la  l'ùtjle  de  saint  Benoit  et  de  saint 
Colomban  :  elle  est  divisée  en  quarante-deux 
capitules.  [La  Règle  de  saint  Donat  se  trouve 
au  tome  LXXXVU  de  la  Putroloyie  latine,  col. 
273  et  suiv.  Elle  est  précédée  d'une  notice 
d'après  VUistuire  littéraire  de  la  France, 
d'une  observation  critique  de  Brockies,  des 
témoignages  des  anciens  sur  saint  Donat  et 
sa  Règle  p'arCliiniel.] 

5.  La  règle  du  Maître  contient  quatre- 
vingt-quinze  chapitres,  avec  un  Prologue  et 
une  explication  de  l'Oraison  dominicale.  Elle 
est  distribuée  par  demandes  et  par  réponses. 


MARCULPIIE,  SAINT  LIYIN,  ETC.  739 

Ania-  Lo  Disciple  [)ropose  les  questions  ;  le  Maître 
répond.  C'est  pout-otre  pour  cela  qu'on  l'ap- 
pelle la  Règle  du  Maître.  On  ne  lui  sait  point 
d'autre  titre,  et  on  ne  sait  qui  l'a  composée. 
La  plus  grande  partie  en  est  tirée  do  la  rè- 
gle de  saint  Bonoit  ;  mais  l'auteur  y  a  ajouté 
beaucoup  de  choses  du  sien.  Il  écrivait  donc 
depuis  ce  patriarche,  mais  beaucoup  après, 
puisque  dans  un  manusciil  do  Corhie  on 
trouve  joint  à  cette  règle  un  catalogue  dos 
papes  qui  finit  à  Jean  VI,  qui  monta  sur  le 
Saint-Siège  en  701,  et  que  saint  Benoit  d'A- 
nianc,  qui  écrivait  dans  le  ix"  siècle,  en  a 
fait  entrer  une  grande  partie  dans  sa  Con- 
corde des  règles.  [La  Règle  du  Maître  se 
ti'ouve  au  tome  LXXXVIII  de  la  Patrolorjie 
latine,  col.  1051.  Elle  est  suivie  d'une  autre 
Règle  adressée  par  un  inconnu  à  des  vierges, 
et  d'un  Sermon  sur  les  dix  vierges,  pareille- 
ment par  un  auteur  inconnu  du  vu'  siècle. 
Toutes  ces  Règles  sont  données  d'après 
Brockies,  Codex  Regularum.] 


CHAPITRE  LXXII. 


Marculphe  moine  [vers  l'an  660] ,  saint  Livin  [vers  l'an  656] ,  Eugène ,  évêque 
de  Tolède  [657] ,  Apollonius  de  Novarre  [XV^  siècle]. 


[Écrivains  latins.] 


Marculphe, 
■  I,.,      vers 


1.  Ce  n'est  que  par  conjecture  que  l'on 
peut  découvrir  qui  était  Marculphe ,  et  le 
temps  auquel  il  a  vécu.  On  sait  seulement 
qu'il  était  moine*,  âgé  de  plus  de  soixante- 
dix  ans  lorsqu'il  commença  à  écrire,  et  que 
ce  fut  par  ordre  de  l'évêque  nommé  Landri 
qu'il  composa  son  traité  des  Formules.  Il  y 
avait  un  évèque  de  ce  nom  à  Paris  sous  le 
règne  de  Clovis  II,  fils  de  Dagobert  :  on  ne 
connaît  aucun  autre  évèque  des  Gaules  qui 
l'ait  porté  alors.  On  peut  donc  en  conclure 
que  c'était  sous  l'épiscopat  de  cet  évèque  de 
Paris  que  Marculphe  vivait.  Il  lui  doime  le 
titre  de  pape  dans  son  Epitre  dédicatoire  ; 
titre  que  l'on  donnait  communément  aux 
évéques  sous  la  première  race  de  nos  rois, 
mais  qui  ne  leur  fut  donné  que  rarement 


dans  la  suite.  Or,  Landri  était  évéquê  de 
Paris  dès  la  seizième  année  du  règne  de 
Clovis  II,  de  Jésus-Christ  Go3,  comme  on  le 
voit  par  un  privilège  que  ce  prince  accorda 
au  monastère  de  Saint-Denys  en  France, 
daté  du  22  de  juin  de  cette  année,  auquel 
Landri,  évèque  de  Paris,  souscrivit  avec  vingt- 
trois  autres  évèques.  L'original  de  ce  privi- 
lège ^  subsiste  '.  Il  est  écrit  sur  du  papier 
d'Egypte.  Le  style  et  l'orthographe  sont  des 
preuves  de  la  barbarie  du  siècle.  Si  ce  Mar- 
culphe est  le  même  que  celui  qui  était  clerc 
de  l'église  de  Bourges  sous  l'épiscopat  de 
saint  Austrégisile,  c'est  encore  une  preuve 
qu'il  a  vécu  dans  le  temps  où  nous  le  pla- 
çons, puisque  cet  évêque  mourut  en  624. 
Marculphe  pouvait   avoir   passé   du  clergé 


•  Cod.  reg.  Pat..  H,  pag.  46.  —  -  llarculplius,  Mi 
Prologo.  —  '  Mabillou,  Diplomalique,  lib.  V, 
table  17,  et  lib.  Yl,  uum.  7. 

*  On  le  trouve  reproduit  au  tome  LXXXVll  de  la 


Palrologie  latine,  col.  299  et  suiv.,  d'après  Bre- 
qiiigay,  Diplom.  cliart.  reg.,  toin.  Il  :  il  est  précédé 
d'uue  uotice  sur  saint  Landri,  extraite  du  Gallia 
christiana.  [V éditeur.) 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


740 

dans  un  monastère,  et  de  là  à  Paris  ou  dans 

(juelque  autre  monastère  du  diocèse,  oii  il 

avait  fait  connaissance  avecl'évèqueLandri. 

Di,.r;buiio»       2.  Les  formules  que  Marciiiphe  rapporte 

kJ^"  dans  son  recueil,  sont  écrites  dans  le  même 
goût  et  suivant  la  coutume  du  lieu  de  sa  de- 
meure, c'est-à-dire  de  Paris,  où  il  est  vrai- 
semblable qu'il  demeurait ,  puisqu'il  était 
connu  particulièrement  de  l'évêque  de  cette 
ville.  Il  les  divise  en  deux  livres,  dont  le 
premier  contient  principalement  les  chartes 
royales,  ou  les  actes  qui  venaient  du  palais  ; 
et  le  second,  les  actes  qui  se  passaient  entre 
les  particuliers.  Son  motif  dans  cette  collec- 
tion était  de  donneur  des  modèles  qui  pussent 
servir  comme  do  protocoles  dans  les  occa- 
sions ;  c'est  pourquoi,  n'ayant  pas  trouvé 
sur  chaque  matière  ce  qu'il  souhaitait ,  il 
composa  lui-même  des  formules  pour  rendre 
son  recueil  plus  utile  et  plus  complet.  Le 
premier  livre  est  fiartagé  en  quarante  cha- 
pitres, et  le  second  en  ciuquante-deux  :  cha- 
que chapitre  renferme  une  formule  particn- 
culière.  C'était  un  secours  pour  ceux  qui 
n'avaient  pas  assez  de  capacité  pour  dresser 
eux-mêmes  des  chartes  ou  des  actes  ;  mais 
non  une  loi  à  laquelle  ceux  qui  étaient  au 
fait  de  ces  matières  dussent  s'assujettir. 
Ainsi  l'on  ne  doit  point  décider  de  l'authen- 
ticité des  pièces  fabriquées  depuis,  sur  la 
conformité  qu'elles  auraient  ou  n'auraient 
pas  avec  les  protocoles  de  Marculphe. 
ch.rt«  te-       3-  La  première  formule  est  d'un  privilège 

m.rqu.i,ie!.  accordé  par  l'évcque  diocésain,  à  l'imitation 
des  privilèges  de  Lérins,  d'Agaune ,  de 
Luxeuil,  et  de  plusieurs  autres  monastères 
du  royaume  des  Français  '.  L'évêque  promet 
de  donner  les  ordres  à  celui  que  l'abbé  et  la 
communauté  lui  présenteront  pour  en  faire 
les  fonctions  dans  le  monastère,  d'y  bénir  un 
Lib.  I.  autel,  et  d'envoyer  aux  moines  le  snint-clu  ê- 
*"''"  '■  me,  s'ils  le  demandent;  de  leur  donner  pour 
abbé  celui  qu'ils  auront  choisi,  le  tout  gra- 
tuitement ;  de  ne  se  mêler  en  aucune  façon 
de  l'aduiinislraliou  des  biens,  meubles  ou 
immeubles  du  monastère  ;  de  n'y  point  en- 
trer, si  ce  n'est  à  la  prière  de  l'abbé  et  des 
moines  pour  faire  oraison  ;  de  se  conlenlcr, 
après  la  célébration  des  saiuls  mystères  , 
d'une  simple  bénédiction,  c'est-à-dire  d'un 
repas  modeste,  et  de  se  retirer  aussitôt  pour 
ne  point  troubler  leur  repos.  Il  laisse  à  l'abbé 
le  soin  de  corriger  ses  moines  suivant  la 

'  Maiculf.,  cdit.  Paris.,  an.  1600. 


règle ,  se  réservant  toutefois  d'y  tenir  la 
main.  Ce  privilège,  qui  devait  être  souscrit 
par  plusieui-s  évêques,  porte  trois  ans  d'ex- 
communication envers  les  contrevenants.  Au 
privilège  accordé  par  l'évêque,  Marculphe 
joint  la  confirmation  du  roi,  qui  regarde  par- 
ticulièrement les  biens  du  monastère  :  elle 
porte  défense  à  toutes  sortes  de  personnes  de 
s'en  emparer.  Vient  ensuite  une  formule 
d'immunité  donnée  par  le  roi  à  une  église  : 
il  y  fait  une  cession  de  tous  ses  droits  sur 
les  terres,  habitants,  libres  ou  serfs  de  cette 
église,  avec  défense  à  tous  juges  séculiers 
d'y  exercer  aucune  juridiction,  et  d'y  pren- 
dre aucun  droit  de  gîte  ou  de  repas.  Suit  la 
confirmation  de  celle  exemption.  Les  trois 
formules  suivantes  concernent  l'élection 
d'un  èvêque.  Dans  l'une,  le  roi  déclare  au 
métropolitain,  qu'ayant  appris  la  mort  d'un 
tel  èvêque,  il  a  résolu,  de  l'avis  des  évêques 
cl  des  grands  de  sa  cour,  de  lui  donner  un 
tel  pour  successeur;  qu'en  conséquence  il 
ait  à  le  consacrer  selon  les  règles  avec  les 
autres  évêques  à  qui  il  en  aurait  écrit.  L'au- 
tre est  un  modèle  des  lettres  que  le  prince 
écrivait  aux  évêques  qui  en  devaient  ordon- 
ner un  nouveau  avec  le  métropolitain.  La 
troisième  est  la  requête  que  les  citoyens  de 
la  ville  èpiscopale  préseulaicnt  au  roi,  pour 
le  prier  de  leur  donner  pour  èvêque  un  toi 
dont  ils  connaissaient  le  mérite. 

4.  Les  quatorzième ,  quinzième  et  sei- 
zième sont  des  formules  des  donations  faites 
aux  églises  par  les  rois,  pour  le  salut  de 
leurs  âmes.  On  leur  remet  devant  les  yeux 
que,  n'ayant  rien  apporté  en  ce  monde,  ils 
n'en  emporteront  rien  de  bon  que  les  reu\Tes 
de  piété.  Celui  qui  voulait  s'engager  dans  le 
ministère  ecclésiastique  ou  dans  un  monas- 
tère, en  demandait  l'agrément  au  roi,  qui 
lui  accordait  sa  demaiule,  pourvu  qu'il  ne 
fût  point  inscrit  dans  le  ponlier  ou  registre 
public  des  hommes  sujets  au  cens  :  en  ce 
cas,  on  lui  coupait  lés  cheveux,  et  il  pouvait 
demeurer  dans  une  église  où  dans  un  mo- 
nastère. S'il  arrivait  qu'un  èvêque,  un  abbé 
ou  un  clerc  fussent  accusés  de  retenir  le 
bien  d'autrui,  ils  étaient  obligés  d'aller  se 
défendre  à  la  cour  :  mais  les  abbés  et  les 
clercs  n'y  étaient  traduits  qu'après  qu'ils 
avaient  refusé  de  suivre  le  jugement  de  l'é- 
vê(pie  commis  par  le  roi  pour  examiner  l'af- 
faire. La  (|uar.inliènie  est  lUie  confirmation 
des  donations  faites  à  un  uionaslère,  soit  par 
les  princes,  soit  par  des  particuliers. 


Ctp.  11. 


[vu  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  LXXII.  —  MERCULPHE,  SAINT  LIVIN,  ETC. 


741 


LU..  I  ' 
Câp.  Il  etc. 


c«r.  '. 


XXXVII, 
XXXVItl  01  LX 


IXWJI. 
XXXXlll.    , 

xxxxtT,  ; 


Autre?  Tor- 
mul::9d'uu  au- 
teur loCOt-DU. 


Edi lions  de 
Mnrciilj'lio. 


5.  Les  six  premières  formules  du  second 
livre  contiennent  lie  ces  sortes  de  donations. 
Il  est  dit  dans  la  cinquième,  qu'un  mari  et 
une  femme,  après  avoir  donné  une  terre  A 
l'église,  en  donuuult'uent  ;\  l'évêqiie  l'usu- 
fruit pondant  la  vie  de  l'un  et  de  l'autre  :  ce 
que  l'évoque  leur  accorda,  à  la  charge  de 
n'en  rien  aliéner.  Les  donations  faites  aux 
églises  devaient  ("tre  insinuées  comme  les 

^autres.  Marculplie  donne  la  formule  de  ces 
insinuations.  11  était  d'usage  que  les  évoques, 
aux  fêles  principales,  comme  de  Pâques  et 
de  Noël,  envoyassent  des  eulogiosaux  autres 
évéqucs,  aux  rois  ou  à  leurs  amis.  C'était  du 
pain  qu'ils  avaient  bénit,  ou  quelque  autre 
petit  présent.  Ils  accompagnaient  ces  eulo- 
gies  d'une  lettre,  dont  Marculplic  donne  des 
modèles.  II  en  donne  aussi  des  lettres  de 
recommandation  que  les  évoques  accordaient 
ù  ceux  qu'ils  envoyaient  au  loin,  ou  qui  al- 
laient en  pèlerinage  h  Rome  ou  ailleurs,  ou 
qui  voulaient  s'engager  dans  des  monastères. 

6.  On  a  mis  à  la  suite  des  formules  de 
Marculplie  un  autre  recueil  de  formules,  di- 
visé également  en  deux  parties.  La  première 
contient  cinquante-huit  chapitres;  la  se- 
conde, vingt-sis.  L'auteur  n'en  est  pas  con- 
nu ;  mais  on  ne  doute  point  qu'il  ne  soit  an- 
cien et  presque  contemporaindeMarculphe. 
Ses  formules  sont,  comme  colles  dont  nous 
venons  de  donner  des  extraits,  sur  toutes 
sortes  de  matières  ecclésiastiques  et  civiles. 

7.  Toutes  CCS  formules,  tant  de  Marculplie 
que  de  l'Anonyme,  furent  données  au  public 
à  Paris  en  1613,  in-8°,  par  M.  Jérôme  Bi- 
gnon,  avocat  général,  avec  des  notes  très- 
rechei'chées.  FridericLindembrog  les  inséra 
dans  son  Code  '  des  lois  anciennes,  imprimé 
à  Francfort  la  même  année  chez  les  Marnius, 
avec  un  Glossaire.  L'ordre  des  chapitres  n'est 
pas  le  même  dans  ces  deux  éditions  :  ce  qui 
vient  apparemment  de  la  variation  des  ma- 
nuscrits. On  a  suivi  dans  la  Bibliothèque  des 
Pères  ^  h  Lyon  en  1677,  l'édition  de  M.  Bi- 
gnon,  mais  en  supprimant  ses  notes.  !Mar- 
culphe  fut  encore  mis  sous  presse  à  Stras- 
bourg en  1636,  et  à  Paris  en  1666  chez  les 
Cramoisi.  Cette  édition  est  augmentée  de  la 
loi  salique,  et  du  Glossaire  de  François  Pi- 
Ihou  :  mais  on  n'y  trouve  point  les  variantes 
de  Lindembrog.  i\I.  Baluze  les  a  données  à 
la  suite  des  formules,  dans  le  second  tome 

'■rV|.-j  f;. 
'  Pag.  1205.  —  !  Tom.  XII,  pag.  767. 
'  Pag.  370. 


des  Capitulaires  des  Rois  ',  iraprimés  à  Paris 
en  1677.  [D.  Bouquet  les  a  publiés  dans  le 
Recueil  des  historiens  des  Gaules  et  de  la 
France.  L'édition  la  plus  complète  est  celle 
que  l'on  trouve  au  tome  LXXXVll  de  la  Pa- 
trolocjie  latine.  Elle  comprend  :  1°  Formules 
concernant  les  afi'aires  privées  et  publiques, 
en  deux  livres,  avec  préfaces  et  notes  de  Bi- 
gnon,  et  notice  par  Fabricius,  appendice.  — 
2"  anciennes  Formules,  par  un  anonyme.  — 
3°  anciennes  Formules  selon  la  loi  romaine, 
éditées  par  Sirmond.  —  4°  autres  Formules 
d'un  auteur  inconnu,  éditées  par  Bignon.  — 
5°  autre  édition  des  Formules  de  Marcul- 
phe,  éditées  par  Lindembrog,  avec  varian- 
tes notables.  —  6°  Formules  dites  d'Angers. 
—  7°  autres  Formules  anciennes,  recueillies 
et  éditées  par  Baluze.  —  8°  autres  Formules 
éditées  par  Lepelletier,  ù\\.<isalsaticœ,  se  rap- 
portant au  temps  de  Louis  le  Pieux  et  au 
royaume  d'Austrasie,  tandis  que  celles  do 
Marculplie  se  rapportent  au  royaume  de  Bour- 
gogne. —  9°  15  Formules  inédites  publiées 
par  M.  Pardessus.  — 10°  anciennes  Formules 
concernant  la  promotion  des  évêques  après 
le  rétablissement  de  la  liberté  des  élections. 
11°  anciennes  Formules  d'exorcismes  et 
d'excommunication.  —  12°  Formules  em- 
ployées dans  les  combats  et  les  jugements  de 
Dieu,  avec  une  dissertation  préliminaire  et 
très-curieuse  de  Muratori.] 

8.  L'Hibernie  ,  qui  avait  donné  la  nais- 
sance et  l'éducation  à  saint  Livin,  ne  le  pos- 
séda pas  longtemps.  Il  passa  de  son  pays 
dans  la  Belgique,  où  Florbcrt,  abbé  du  mo- 
nastère de  Gand,  lui  donna  une  retraite  '. 
Son  zèle  pour  la  foi  l'engagea  à  la  prêcher 
aux  peuples  qui  demeuraient  du  côté  d'Hau- 
tem  et  d'Alost.  Aussi  cruels  qu'endurcis,  ils 
lui  firent  souffrir  le  martyre  vers  l'an  656, 
le  douzième  de  novembre.  Quelques  années 
avant  sa  mort,  il  composa  en  vers  élégiaques 
l'épilaphe  de  saint  Bavon ,  confesseur  à 
Gand,  qui  mourut  vers  l'an  630  ou  633.  Com- 
me il  l'avait  faite  à  la  prière  de  l'abbé  Flor- 
bert,  il  lui  écrivit,  en  la  lui  envoyant,  une 
lettre  qui  est  aussi  en  vers  élégiaques.  Ussé- 
rius  a  donné  ces  deux  pièces  dans  son  re- 
cueil des  Lettres  Hibei'uoises  ;  et  c'est  de  là 
que  Dom  Mabillon  les  a  tirées  pour  les  placer 
daus  le  second  tome  des  Actes  de  l'Ordre  de 
saint  Benoit".  Saint  Livin  s'y  donne  la  qua- 

'  Tom,  Il  Act.  Ordin.  S.  Bened.,  pag.  431,  et  seq. 
6  Ibid.,  pag.  387. 


S.iint  I.i- 
vin,apôlre  du 
Bralaal.  Ses 
écrits. 


742 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


érêloe  de  To- 


lité  de  poêle,  marquant  '  qu'il  avait  cultivé 
cet  art  dans  sa  jeunesse  avec  quelque  suc- 
cès. Il  ne  se  flattait  pas  trop.  Sa  Vie  a  été 
écrite  par  un  nonuno  Boiiifacc,  son  contem- 
porain. Celle  de  saint  Bavon  est  dun  moine 
anonyme  qui  écrivait  dans  le  Xii'  siècle.  [.\u 
tome  L.XXXVIl  de  la  Patrologie  latine,  col. 
327,  on  trouve  la  Vie  de  saint  Livin  par  Bo- 
niface,  et  la  Lettre  de  sain!  Livin  à  Florberl]. 
F.«f*»c  9.  Saint  Ildefonse  '  met  deux  Eugène 
évêques  de  Tolède  au  rang  des  hommes  il- 
lustres. Il  n'attribue  aucun  écrit  au  premier; 
mais  il  dit  du  second  qu'il  avait  composé  un 
livre  de  .la  Trinité,  et  deux  autres  petits, 
dont  l'un  était  en  vrt'S  de  ditl'érentes  mesures, 
et  l'autre  en  prose  ;  qu'il  avait  encore  revu, 
augmenté  et  poli  le  poëme  de  Draconce  sur 
l'ouvrage  des  six  jours  de  la  création,  en  y 
ajoutant  ce  qui  est  dit  du  septième  jour  : 
Draconce  n'avait  touché  cet  article  qu'impar- 
faitement. Eugène  Gl  aussi  quelques  épi- 
grammes  sur  divers  sujets  :  nous  les  avons 
dans  le  recueil  des  œuvres  du  P.  Sirmond,  et 
dans  le  douzième  tome  de  la  Bibliothèque 
des  Pères.  Eugène  fut  d'abord  du  clergé  de 
Tolède  ;  mais  trouvant  son  contentement 
dans  les  pratiques  de  la  vie  solitaire,  il  se  re- 
tira aux  environs  de  Saragosse,  près  des 
tombeaux  des  martyrs.  11  fallut  lui  faire  vio- 
lence pour  l'en  tirer,  et  le  placer  sur  le  siège 
de  Tolède,  vacant  par  la  mort  de  l'évéque 
de  même  nom.  Son  épiscopat  fut  d'environ 
douze  ans,  depuis  l'an  6i6  jusques  vers  657. 
Ses  poésies  sont  édifi'>ntes  ;  et  quoique  le 
style  n'en  soit  pas  extrêmement  châtié,  les 
pensées  en  sont  fort  justes  et  fort  solides. 
[Au  tome  LXXXVII  de  la-  Patrologie  latine, 
col.  547 ,  on  trouve  des  notices  de  Galland 
et  d'.Anloine  sur  Eugène  ;  une  autre  Vie,  ti- 
rée de  Lorenzana,  collection  des  Pères  de 
Tolède.  Les  écrits  de  saint  Eugène  qui  sui- 
vent, sont  :  1°  des  Opuscules  en  vers  sur  di- 
diveis  sujets,  au  nombre  de  trente -un; 
2°  rilcxaéméron  de  Draconce,  corrigé  par 
saint  Eugène  sur  l'ordre  du  roi  Gliindasvin- 
tus  ;  3°  des  Mélanges  en  vers  au  nombre  de 
quatre-vingt-neuf  ;  ■i"  quelques  vers  apocry- 
phes ;  5°  quatre  lettres  eu  prose.  Ces  écrits 
sont  reproduits  d'après  Lorenzana,  qui  a  cor- 
rigé sur  un  manuscrit  gothique  de  l'église 
de  Tolède  ceux  qui  avaient  été  édités  par 
Sirmond,  a  rempli  les  lacunes  qui  existaient, 


et  a  pu  ajouter  vingt-deux  vers  h  la  Cn  du 
second  livre  de  Draconce.  Le  même  manas- 
crit  a  fourni  les  mélanges,  les  vers  apocry- 
phes et  les  quatre  lettres. 

La  première  de  ces  lettres  est  adressée  à 
Biaulion.  Eugène  y  expose  trois  diflicullés 
dont  il  lui  demande  la  solution  :  1°  Quelle 
coniluilc  tenir  ;\  l'égard  d'un  frère  qui  , 
n'.iyant  pas  reçu  le  degré  de  la  prêtrise,  en 
exerce  l'office.  Ce  frère  avait  été  fort  à  char-* 
ge  à  Eugène  son  prédécesseur.  Prié  par  le 
roi  de  l'ordonner  prêtre  et  n'osant  résister,  il 
le  conduisit  à  l'autel,  ne  lui  imposa  point  les 
mains,  et  pendant  que  les  clercs  chantaient, 
il  répandit  la  malédiction  au  lieu  de  la  béné- 
diction, comme  il  l'attesta  depuis  à  des  per- 
sonnes dignes  de  foi;  en  leur  ordonnant  de 
garder  ce  secret  durant  sa  vie.  Eugène  de- 
mande si  ce  frère  est  prêtre,  et  si  ceux  qu'il 
a  baptisés  et  marqués  du  chrême  sont  à 
bon  droit  appelés  chrétiens.  2°  Des  diacres 
en  quelques  endroits  ont  oint  du  chrême  ; 
que  doit-on  faire  à  ceux  qui  ont  reçu  de  la 
sorte  l'onction  du  chrême?  Faut-il  la  réitérer 
ou  peut-on  regarder  comme  onction  ce  qui 
a  été  fait  par  présomption  ou  par  ignorance  ? 
3°  Des  prêtres,  contre  le  droit  et  la  défense 
des  canons,  confectionnent  le  chrême  et  ont 
la  témérité  d'en  marquer  ceux  qu'ils  ont 
baptisés.  Que  faut-il  faire  à  l'égard  de  ceux 
qui  ont  été  ainsi  marqués  de  l'onction,  et 
quelle  correction  imposer  à  ceux  qui  l'ont 
faite  ? 

La  seconde  lettre  est  la  réponse  de  Brau- 
liou  aux  questions  proposées.  Cet  évêque 
répond  :  «  1°  Le  prêtre  ordonné  comme 
l'a  exposé  Eugène  est  vraiment  ordonné,  et 
toute  la  faute  retombe  sur  celui  qui  a  fait 
l'ordination.  Je  ne  vois  pas,  dit  Braulion, 
pourquoi  il  ne  serait  pas  prêtre,  celui  qui  ne 
le  voulait  point  comme  tel,  ayant  publié  qu'il 
était  prêtre.  Je  ne  vois  pas  non  plus  pour- 
quoi ceux  qui  ont  été  oints  du  saint  chrê- 
me par  ce  prêtre  ne  seraient  pas  appelés 
chri'tiens  ;  lui  est  indigne ,  mais  eux  sont 
pouilant  oiiils  d'un  vrai  chrême.  Votre  pru- 
dence sait  bien  que  les  anciens  canons  ont 
défondu  au  prêtre  d'avoir  l'audace  de  don- 
ner le  chrême,  défcuisc  observée  jusqu'ici, 
nous  le  savons,  dans  l'Orient  et  dans  toute 
l'Italie;  ensuite,  on  a  pci-mis  aux  prêtres  de 
donner  le  clirême,  mais  un  clirême  bénit  par 


'  Sic  ego  qui  quondam  studio  florcnte  videbar 
Esse  poêla,  modo  curro  pedesler  equo. 


Tom.  Il  Àct.  Ord.  S.  Uened.,  png.  388. 
•  Udcphons.,  De  Yiris  illMt.  cap.  i,  iv. 


CHAPITRE  FAXK.  —  MERCULPHE,  SAINT  LFVIN,  ETC. 


[vil"  SIÈCLE.] 

les  évoques,  afin  qu'il  ne  parfit  pas  que  c'é- 
tait un  piivitégc accordé  aux  prêtres  de  con- 
sacrer le  peuple  de  Dieu  par  celte  sainte 
onction ,  tandis  que  c'est  le  privilège  des 
évoques  par  la  bt'iu'iliction  et  la  permissiou 
desquels  ils  s'ac([uillent  de  ce  ministère , 
couuu(>  par  la  main  épiscopale.  »  Braulion 
ajoute  que  révè([ue  (pii  a  ortionué  ce  prêtre 
ne  l'a  jamais  coulredit,  quand  il  donnait  le 
chrême  bénit  par  lui...  Peu  importe  qu'il  ait 
ratifié  le  ministère  de  ce  prêtre  de  son  plein 
gré,  ou  qu'il  l'ait  l'ait  soidcment  par  occa- 
sion, c'est-à-dire  sans  doute  à  cause  des  cir- 
constances du  temps. 

11  est  question  ici  évidemment  du  sacre- 
ment de  conllruialion  :  car  au  vu"  siècle  il 
était  certainement  permis  en  Ilalie  aux  prê- 
tres de  conférer  l'onction  qui  accompagne  le 
baptême,  comme  en  font  foi  tous  les  sacra- 
mcntaires.  Ce  qui  était  réservé  en  Italie  aux 
évêques  à  l'exclusion  des  prêtres,  c'est  la 
confirmation,  on  le  voit  par  tous  les  rituels 
et  tous  les  sacramentaires.  Ailleurs,  en  Sar- 
daigne,  dans  les  Gaules,  la  coutume  n'était 
pas  la  même  :  aussi  Braulion  ne  dit  point 
que  ce  soit  la  discipline  de  tout  l'Occident. 
Quant  à  l'Oiient,  il  contredit  ceux  qui  sou- 
tiennent que,  longtemps  avant  Pbotius,  les 
prêtres  avaient  le  pouvoir  de  conférer  la  cou- 
firmatiou.  Quand  il  ajoute  :  «  11  a  été  permis 
ensuite  aux  prêtres  de  donner  le  chrême,  » 
il  veut  parler  de  l'Espagne,  où  une  semblable 
permission  avait  été  accordée;  mais  les  prê- 
tres devaient  se  sei'vir  d'un  chrême  bénit  par 
l'évèque. 

Répondant  à  la  seconde  difficulté,  Brau- 
lion dit  en  substance  que  toute  la  question 
relative  aux  diacres  a  été  résolue  par  la  so- 
lution précédente  :  car,  s'il  est  permis  aux 
prêtres,  et  aux  seuls  prêtres,  de  donner  le 
chrême,  pourvu  qu'il  soit  bénit  par  l'évèque, 
évidemment  les  diacres  n'ont  pas  ce  pouvoir, 
et  on  doit  punir  ceux  qui,  par  ignorance  ou 
par  présomption,  ont  osé  se  l'arroger  '.  Pom" 
la  troisième  diUiculté ,  Braulion  est  d'avis 
que  le  chrême  confectionné  par  les  prêtres 


743 


n'est  pas  un  vrai  chrême,  et  qu'on  doit  punir 
les  coupables,  en  usant  cependant  d'indul- 
gence à  l'égard  de  ceux  (jui  l'ont  fait  par 
ignorance. 

La  troisième  lettre  est  adi'cssée  pai- Eugène 
àProtase,  évoque  de  Tarragone.  Eugène  re- 
mercie Protase  des  écrits  qu'il  en  avait  re- 
çus ;  il  lui  promet  de  composer  une  messe, 
ou  les  oraisons  de  saint  Hippolyte  ;  mais  il 
n'ose  écrire  une  messe  votive,  parce  qu'il  dé- 
sespère d'égaler,  loin  de  pouvoir  surpasser, 
celle  qui  existait.  Ces  paroles,  comme  le  fait 
observer  Lorenzana,  prouvent  que  la  litur- 
gie espagnole  était  écrite  avec  pureté  et  élé- 
gance, et  en  même  temps  qu'il  y  avait  dans 
cette  contrée  un  certain  nombre  d'hom- 
mes remarquables  qui  cultivaient  avec 
soin  la  littérature  latine,  pendant  qu'ail- 
leurs on  tombait  dans  la  barbarie  et  l'igno- 
rance. 

La  quatrième  lettre  est  une  réponse  de 
Tayon  de  Saragosse  à  Eugène.  Dans  cette 
lettre,  Tayon  dédie  à  Eugène  le  livre  qu'il 
avait  composé  sur  l'Écriture,  et  le  prie  de  le 
corriger.] 

10.  La  Bigne,  Aubert  Le  Mire ,  et  quel- 
ques autres  bibliothécaires,  ont  rais  Pierre 
Apollonius  Collatius  ,  prêtre  de  l'église  de 
Novarre,  entre  les  auteurs  qui  ont  écrit  dans 
le  vu''  siècle  ;  et  c'est  sur  ce  fondement  que 
son  poëme,  intitulé  de  la  Ruine  de  Jérusalem 
sous  Tite  et  Vespasien ,  a  été  inséié  dans  le 
douzième  tome  de  la  Bibliothèque  des  Pères, 
avec  les  poésies  d'Eugène  de  Tolède  dont 
nous  venons  de  parler.  Mais  depuis  que  Dom 
Mabillon  a  découvert,  étant  à  Florence  '\  que 
cet  Apollonius  est  le  môme  qui  adressa  à 
Laurent  de  Médicis  un  autre  poëme  en  vers 
héroïques,  qui  a  pour  matière  le  combat  de 
David  et  de  Goliath,  on  ne  doute  plus  qu'il 
n'ait  vécu  sur  la  fin  du  xV  siècle,  eu  même 
temps  que  Laurent  de  Médicis.  Apollonius, 
outre  ces  deux  pièces  de  poésie,  composa 
plusieurs  épigrammes,  dont  une  est  l'épita- 
phe  du  pape  Paul  II,  une  autre  celle  de 
Sixte  IV,  dont  Onufre  a  écrit  la  vie. 


AfoIIonlus 
1  Novarre. 


I  Voyez  une   note   très-lougue   de    Lorenzana, 
Patrol.  lat.,  tom.  LX,  col.  403  et  suiv. 


*  Mabillon.,  iter  Italie,  tom.  I,  pag.  19i. 


744 


HISTOIRE  GÉNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


CHAPITRE  LXXIU. 


Frédégaire  historien  [après  658],  et  ses  Continnatenrs. 


[Écrivains  latins.l 


,.J,\^tn^"t  *•  ^^  P'"^  ancien  historien  de  France  dc- 
llc.  ^*"'»°"  puis  saint  Grcfjoire  de  Tours,  est  Frëdi-gai- 
re  ' ,  surnommé  ordinairement  Scolastique, 
suivant  l'usage  du  temps  auquel  il  vivait,  où 
l'on  appelait  ainsi  les  savants,  ceux-là  sur- 
tout qui  fréquentaient  le  barreau,  ou  qui  pro- 
BisioiK  de  fessaient  les  ])ellcs.-lettres  '.  Les  parlicula- 
iK  inscrip-  rites  que  1  on  trouve  dans  ses  cents  tou- 
cbant  les  rois  de  Bourgogne,  et  qui  ne  se  li- 
sent pas  ailleurs,  ont  fait  conjecturer  qu'il 
était  né  dans  leurs  États,  ou  du  moins  qu'il 
y  avait  demeuré  longtemps.  On  croit  même 
qu'il  était  d'Avencbcs,  autrefois  capitale  des 
Helvétiens,  qui  était  de  la  dépendance  des 
rois  de  Bourgogne  :  opinion  qui  est  fondée 
sur  les  choses  singulières  qu'il  raconte  de 
celte  ville,  et  sur  l'éloge  qu'il  en  fait.  Fré- 
dégaire vivait  encore  en  658  :  cela  parait 
par  ce  qu'il  dit  d'un  marcliand  français, 
nommé  Samon  ',  qui  étant  allé  en  Sclavonie 
la  vingt-troisième  année  de  Clotaire  II,- de 
Jésus-Christ  623,  y  fut  élu  roi  des  Windes, 
et  régna  trente-cinq  ans,  ce  qui  revient  à 
l'an  638. 

2.  Le  seul  ouvrage  que  nous  ayons  de  Fré- 
dégaire est  une  Chronique,  qui  commence  à 
la  création  du  monde,  et  finit  à  la  quatrième 
année  de  Clovis  H,  qui  est  l'an  6il  de  l'ère 
commune.  Elle  est  divisée  en  cinq  livres.  Le 
premier  contient  une  description  du  monde; 
le  partage  qui  en  fut  fait  entre  les  fils  de  Noë, 
et  les  établissements  des  diverses  monar- 
chies jusqu'à  celle  des  Assyriens.  Suivent 
trois  Catalogues  :  celui  des  empereurs  ro- 
mains depuis  Auguste  jusqu'à  .Alexandre- 
Sévère;  celui  des  rois  des  Hébreux,  et  celui 
des  papes  depuis  saint  Pierre  jusqu'à  Tbéo- 
dore,  qui  monta  sur  le  Saint-Siège  en  642,  et 
l'occupa  jusqu'en  649.  On  a  ajouté,  mais 
d'une  autro  miin,  los  j):ipes  depuis  Thi-ndo- 
re  jusqu'à  Adrien  V.  Entre  ces  deux  der- 
niers Catalogues  est  une   supputation  des 


Sa  CbroDl- 
ijtie.  Premier 


temps  depuis  Adam  jusqu'à  Jésus-Christ,  et 
une  petite  chronique  qui  commence  avec  le 
monde,  et  linit  à  la  trente-et-unième  année 
d'Héraclius,  641  de  l'ère  commune.  Ce  livre 
a  pour  titre,  dans  le  manuscrit  du  collège 
de  Lonis-lc-Grand  :  des  Générations.  Il  y  est 
écrit  en  lettres  carrées  et  majuscules.  Ce  li- 
vre donne  lieu  de  croire  que  ce  manuscrit 
est  de  l'âge  même  de  Frédégaire,  c'est-à- 
dire  du  septième  siècle.  Quoique  Frédégaire 
ne  nomme  aucun  auteur  plus  ancien  que 
saint  Jérôme  ',  il  est  certain  qu'il  a  profité 
du  travail  de  Jules-Africain,  d'Eusèbe  de  Cé- 
sarée  et  de  quelques  autres  chronologistes 
grecs,  qui  ont  dit  les  mêmes  choses  avant 
lui. 

3.  Le  second  livre  de  la  Chronologie  de 
Frédégaire  commence  à  Ninus,  premier  roi 
des  Assyriens,  et  finit  à  la  mort  de  l'empe- 
reur Valens,  c'est-à-dire  en  378.  Il  est  com- 
posé en  partie  des  Chroniques  d'Eusèbe  et  de 
saint  Jérôme,  comme  le  troisième  l'est  de  la 
Chronique  d'Idace.  D  comprend  ce  qui  s'est 
passé  depuis  l'empire  de  Théodose  le  Grand 
jusqu'à  la  victoire  de  Justinien  sur  les  Vanda- 
les et  à  la  niortdeBélisairc,  arrivée eno6o. Ces 
trois  livres  ont  été  donnés  au  public  par  Ca- 
nisius  dans  le  second  tome  de  ses  Anciennes 
Leçons,  imprimées  à  Ingolstat  en  1601,  et  à 
Anvers  en  1723;  mais  le  premier  n'y  est  pas 
entier.  Ou  n'y  trouve  ni  les  trois  Catalogues 
dont  nous  avons  parlé,  ni  la  supputation  des 
temps  depuis  Adam  jusqu'à  Jésus-Christ,  ni 
la  chronique  depuis  le  commencement  du 
monde  jusqu'il  l'an  642  :  ce  qui  montre  que 
le  manuscrit  dont  Canisius  s'est  servi  est 
moins  ample  que  celui  du  collège  de  Lonis- 
le-Grand,  où  tous  ces  opuscules  se  lisent. 

■4.  Le  quatrième  livre  a  souvent  t'-té  im- 
primé à  la  siiilc  de  l'ilisloiro  des  Français 
par  saint  Grégoire  de  Tours.  Ce  n'est  en  elfet 
qu'un  abrégi>  des  six  premiers  livres.  Frehe- 


Irotfltine 
^re. 


'  Vales.,  /ter.  Francicar.,  lilj.  .\V,  i>ag.  445  et 
*i6. 

«  Tom.  I,  pap.  305  ;  el  Riiinart.,  Prwfat.  in  Gre- 
gor.  Turon.  Opéra. 


'  Freilej;ar.  Cliron  ,  iiiiiii.  48,  pag.  627,  el  iu  no- 
lis.  |)ng.  662.  —  '  Uuiiiail.,  Prœfat.  in  Op.  Greg. 

•  Frcilesar.,  Prologo.  pnp.  j86,  lom.  Op.  Oreg. 
Turontns.  Patrol.,  lom.  L\\\. 


CHAPITRE  LXXIII.  —  FnÉDÉGAIRE,  HISTORIEN.  74s 

à  MAcon;  de  son  voyage  h  Paris  pour  tenir 


ClD()lll(l1lO 

llm. 


Ibro. 


[vil'  SIÈCLE.] 

lus  est  le  premier  qui  l'ait  publié,  sous  le 
nom  de  Frédëgaire,  dans  son  Recueil  des 
Historiens  de  France,  imprimé  ;\  Hanaw  en 
1613.  Il  porte,  dans  l'édition  dos  Œuvres  de 
saint  Grégoire,  le  titre  à'IIistoria  vpitoinata, 
ou  d'Histoire  abrégée.  L'éditeur  l'a  donné 
sur  le  manuscrit  du  collège  de  Louis-le-Graud, 
comme  plus  correct  que  les  autres. 

5.  Il  a  placé  ensuite  le  cinquième  livre  de 
Frédégaire  ',  qui  est  le  plus  intéressant  de 
tous,  parce  que  c'est  une  continuation  de  l'His- 
toire de  France  par  saint  Grégoire;  Frédégaire 
y  rapporte  l'histoire  de  son  temps,  et  raconte 
ce  qu'il  avait  vu  par  lui-même  %  ou  appris 
de  vive  voix,  ou  lu  dans  les  historiens  ;  as- 
surant qu'en  tout  il  n'avance  rien  que  de 
certain.  Il  fait  consister  en  cela  la  ditl'érence 
de  ce  livre  d'avec  les  précédents,  où  il  n'a- 
vait pu  écrire  que  sur  le  témoignage  des  au- 
tres, de  saint  Jérôme,  d'Idace,  de  saint  Isi- 
dore de  Séville  et  de  saint  Grégoire  de  Tours. 
Il  rassure  ses  lecteurs  sur  la  fidélité  de  ses 
extraits',  en  les  renvoyant  aux  sources  d'où 
il  a  tiré  les  choses  qu'il  raconte.  Mais  sen- 
tant bien  qu'il  leur  déplairait  par  la  rusticité 
et  la  grossièreté  de  son  style  \  il  promet 
d'adoucir  leur  peine  à  cet  égard  par  une 
grande  brièveté  dans  ses  récits  ;  rejetant  les 
défauts  de  son  discours  sur  la  décadence  des 
beaux-arts  et  la  proximité  de  la  fin  du  mon- 
de, où  tout  languissait,  et  où  personne  ne 
pouvait  plus  se  llatter  d'atteindre  à  l'élo- 
quence et  à  la  pureté  de  langage  des  an- 
ciens orateurs. 

6.  Son  objet  principal  dans  ce  livre  est 
l'histoire  du  royaume  de  Bourgogne  ^  Il  la 
commence  à  la  vingt-troisième  année  du  rè- 
gne de  Gontram,  qui  est  la  584'^  de  l'ère  com- 
mune. 11  parle  de  l'église  que  ce  prince  fit 
bâtir  à  Châlons-sur-Saône  en  l'honneur  de 
saiut  Marcel,  du  monastère  qu'il  y  fonda,  et 
où  il  établit  la  louange  perpétuelle,  à  l'imi- 
tation d'Agaune  ;  du  concile  qu'il  assembla 


Clntaire  sur  les  fonts  de  baptême  ;  de  la  guer- 
re qu'il  fit  au  roi  d'Espagne  ;  de  sa  paix  avec 
Iti'carède;  de  l'année  de  sa  mort,  et  de  sa 
sépuiliu-e  dans  l'église  de  Saint-Marcel  h  Châ- 
lons.  Frédégaire  marque  ensuite  les  princi- 
paux événements  du  règne  de  Childebert, 
que  Gonliam  avait  laissé  hi'rilicr  de  ses 
Etats  ;  de  l'armée  qu'il  conduisit  contre  Clo- 
taire;  de  sa  victoire  sur  les  Varnes,  qu'il  dé- 
fit presque  entièrement.  Il  passe  de  là  à  ce 
qui  arriva  sous  les  règnes  de  Thi'odebert  et 
de  Tliéodcric,  fds  de  Childebert,  et  des  au- 
tres rois  de  Bourgogne.  Mais  il  ne  s'en  tient 
pas  à  l'histoire  de  ces  princes;  il  dit  quelque 
chose  de  celle  des  rois  de  France  et  d'Aus- 
trasie,  et  des  maires  du  palais,  quand  la  liai- 
son des  événements  le  demande;  et  il  mêle 
plusieurs  faits  étrangers,  quand  ils  lui  parais- 
sent de  quelque  importance  pour  l'histoire 
de  l'filglise;  comme  l'invention  delà  tunique 
de  Notre-Seigneur,  que  les  soldats  avaient  ti- 
rée au  sort;  la  conversion  d'un  grand  nom- 
bre de  Perses  sous  l'empire  de  Maurice  ; 
l'exil  et  le  martyre  de  saint  Didier,  évéque  de 
Vienne  ;  quelques  actions  de  saint  Colomban 
pendant  son  séjour  à  Luxeuil  ;  la  victoire  d'Hé- 
raclius  sur  les  Perses;  la  protection  qu'il  ac- 
corda à  l'hérésie  des  monothélites  ;  les  rava- 
ges que  les  Sarrasins  firent  dans  les  provin- 
ces de  l'empire,  principalement  dans  la  Pa- 
lestine et  en  Egypte.  Il  finit  sa  chronologie 
à  la  quatrième  année  de  Clovis,  roi  deNeus- 
trie  et  de  Boui-gogne,  qui  est  la  641'  de  l'ère 
vulgaire.  Il  n'y  a  aucun  lieu  de  douter  que 
les  cinq  livres  dont  nous  venons  de  parler,  ne 
soient  tous  de  Frédégaire.  C'est  partout  le 
même  génie,  et  le  même  style,  c'est-à-dire 
un  style  barbare,  qui  ne  se  dément  nulle 
part,  quand  il  parle  de  lui-même  et  qu'il  ne 
transcrit  pas  les  propres  paroles  de  ceux 
dont  il  avait  en  main  les  chronologies.  Ce 
défaut  n'a  pas  empêché  que  les  plus  habiles 


'  Tom.  Op.  Greg.  Turon.,  p.  586.  Pat.,  t.  lAXI. 

-  Itaque  heati  llieronymi,  Idacii  et  cujusilam 
sapientis  seu  et  Isidori,  imnioque  Gregorii  chro- 
nicas,  a  mundi  origine percurrens  usqiie  deceden- 
te  rigno  Gunlmmni,  his  quinque  chroniris  hujus 
libelli  iiiserui.  Tynnsacto  namque  Gregorii  volu- 
mine,  temporum  gesta...  quœpostea  mihi  fuerunt 
cognita  légende  simiil  et  audiendo,etiam  videndo 
cunda  qiiœ  certifîcatiis  cognovi,  in  hujus  libelli 
volnmine  scribere  non  silui.  Fredeg.,  Prologo  in 
lib.  V,  pag.  ."ise. 

'  fiec  quisquam  legens  hic  quicquam  dubitet, 
tmiuscujusque  libri  noinen,  redeat  ad  auctorem, 


cuncta  reperiet  subsistereveritate.  Ibid.,  pag.  .S87. 

'  Mundus  jam  senescit,  ideoque  prudentiœ  a- 
ciimen  in  nobis  tepescit,  nec  quisquann  potest 
hujus  lemporis  nec  prœsumit  oraloribns  prœce- 
denlibus  esse  consimilis.  Ego  tamin,  ut  rusticitas 
et  exlremilas  sensus  mei  valuit,  sludiosissime  de 
hisdem  libris  brevitate  quantum  plus  potui  ap- 
tare  prœsumpsi.  Ibid. 

s  Ou  peut  coDsulter  l'Apologie  de  l'histoire  de 
Frédégaire  par  l'abbé  de  Vertot,  dans  le  I"  volume 
des  Mémoires  de  l'Académie  des  inscriptions.  (L'é- 
diteur.) 


746 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


ne  lui  donnasîîent  des  louanges  ',  à  cause  de 
son  exactitude  dans  le  récit  des  ëvdncments. 
Ils  l'ont  recrardé  comme  un  historien  utile  et 
nécessaire  pour  les  temps  qui  n'en  ont  pas 
fourni  de  meilleur,  et  ils  ont  rejeté  sur  les 
défauts  de  son  sii'^clc  ceux  que  l'on  trouve 
dans  ses  écrits;  le  regardant  au  surplus  com- 
me d'une  autorité  écale  à  celle  de  saint  Gré- 
goire de  Tours  par  rapport  fi  l'histoire  '. 
iMtf°<re''Fre."  "^^  0"  distintrue  quatre  parties  dans  lacon- 
*«''"=•  tinuation  de  la  Chronolocrie  de  Frédégaire  ', 
qui  sont  chacune  de  dillereuts  auteui-s,  mais 
anonymes.  Cette  distinction  est  fondée  sur 
la  ditl'érepce  de  style,  de  la  manière  de  ra- 
conter les  choses,  eft  des  temps  où  ils  ont  vé- 
cu. La  première  jiartie  est  une  suite  du  cin- 
quième livre  de  Frédéçaire.  Ce  n'est  qu'une 
compilation  mal  différée  des  faits  arrivés  de- 
puis 642  jusqu'en  080  :  encore  la  plupart  de 
ces  faits  sont  controuvés  et  fabuleux.  La  se- 
conde s'étend  depuis  le  chapitre  QT  jusqu'c'i 
la  moitié  du  109'.  L'.\nonyme  y  rapporte  prin- 
cipalement ce  qui  s'est  passé  dans  l'Austra- 
sie  depuis  l'an  680  jusqu'en  736.  Sa  narra- 
tion est  exacte.  11  marque  lui-même  son  Age 
dans  le  chapitre  109%  en  disant  qu'il  écrivait 
le  premier  de  janvier  733.  La  troisième  partie 
commence  où  finit  la  seconde,  et  comprend 
huit  chapitres  et  demi,  où  l'on  voit  la  suite 
de  l'iiisloire  jusqu'à  l'an  ~i?)2,  auquel  Pi'pin 
fut  déclaré  roi  ;  il  paraît  que  l'auteur  écrivait 
dans  le  temps  même  des  événements,  puis- 
qu'il composa  sa  Chronique  par  ordre  de 
Childebrand,  oncle  paternel  de  ce  prince. 
Nibelung,  tils  de  Childebrand,  ût  écrire  la 
quatrième  partie,  qui  conduit  l'histoire  jus- 
qu'à la  mort  de  Pépin,  arrivée  en  768.  Il  y  est 
parlé  aussi  du  sacre  de  Charles  et  de  Carlo- 
man,  tous  deux  fils  de  Pépin.  Canisius  *  n'a 
donné  que  la  fin  de  la  troisième  partie  avec 
la  quatrième.  Elles  sont  toutes  quatre  d:ins 
les  Recueils  de  Frelierus,  de  Duchesne,  de 
la  Bibliothèque  des  Pères  de  Lyon,  dans  l'é- 
dition des  CKuvres  de  saint  Grégoire  de  Tours 
de  l'an  1699  [dans  le  tome  II  du  Recueil  des 
historiens  de  France  par  dom  Uouquel]. 
M.  L'abbé  de  Maroles,  qui  a  mis  eu  français 


les  Œuvres  de  ce  saint  évèque,  a  traduit  aussi 
le  cinquième  livre  de  la  Chronique  de  Fré- 
dégaire, avec  sa  continuation  [M.  Guizot  a 
traduit  la  Chronique  de  Frédégaire  dans  sa 
collection  dos  Mémoires  relatifs  à  l'hi.stoire 
de  Fiance,  tom.l,  Paris  1823|.  Hom  Huinart 
a  mis  à  la  suite  de  cette  Chronique  quelques 
fragments  concernant  l'histoire  de  Fiance, 
tirés  d'Eusèbe,  de  saint  Jérôme  et  d'Idace, 
et  rapportés  par  Frédégaire  sous  les  noms 
de  ces  auteurs.  Il  y  en  a  toutefois  qu'on  ne 
trouve  pas  dans  leurs  écrits  ^.  Peut-être  avait- 
il  appris  de  quelques  anciennes  traditions  ce 
qu'il  y  raconte,  en  particulier  ce  qu'il  dit  de 
l'origine  des  Français,  qu'il  fait  descendre 
des  Troyens. 

8.  Nous  joindrons  à  Frédéeraire  un  auteur  chroniqi 
anonyme  qui  écrivait  en  même  temps  qne  •*"**"• 
lui,  et  qui  faisait  également  son  étude  de  l'his- 
toire et  de  la  chronologie.  Son  ouvrage  porte 
quelquefois  le  titre  de  Chronique  d'.\lexan- 
di'ie,  et  quelquefois  celui  de  Chroniipie  pas- 
cale. Matthieu  Radérus,  qui  le  fit  imprimer 
en  1624  à  Munich,  pense  qu'on  l'a  intitulé 
d'Alexandrie,  parce  que  l'auteur  en  était  ori- 
ginaire ;  il  donne  pour  preuve  qu'il  en  était, 
ce  qu'il  dit  des  cendres  du  prophète  Jérémie 
apportées  en  cette  ville  par  ordre  d'Alexan- 
dre-le-Grand.  D'autres  en  donnent  luie  rai- 
son qui  ne  vaut  pas  mieux,  qui  est  que  celte 
Chronique  commence  par  un  grand  passage 
de  saint  Pierre,  évêque  d'.\lexandrie  et  mar- 
tyr, sur  le  jour  de  la  célébration  de  la  Pùque. 
Il  n'est  pas  besoin  de  faire  sentir  l'insuffi- 
sance de  ces  raisons  :  et  on  conviendra  aisé- 
ment que ,  pour  donner  à  cet  ouvrage  le 
nom  de  Chronique  d'.\lexandrie,  il  aurait 
fallu  qu'elle  se  bornât  A  l'histoire  de  cette 
ville,  ou  à  celle  de  ses  évêques,  ou  qu'elle 
eût  suivi  dans  ses  supputations  l'ère  et  les 
époques  des  Alexandrins.  Il  n'y  a  rien  de 
tout  cela.  L'auteur  met  toute  son  application 
à  examiner  et  à  résoudre  les  dillicultés  qui 
se  sont  élevées  soit  dans  la  Synagogue,  soit 
dans  l'F.glise,  au  sujet  de  la  célébration  de 
la  fêle  de  Pâques.  Ce  qui  est  sullisant  pour 
autoriser  rinscriptiou  de  Chronique  pascale. 


'  Fredegarius  Scholaalicus  nos  in  eo  anno  641 
deslituit  ;  hisloricus,pro  captuillorum  temporum 
diligcnti,  ul  ivtate,  sic  aulorilate  Orcgorio  proxi- 
mus,  et  in  magna  honorum  auloruni  inopia  uti- 
Us  ac  necessarius,  nec  usquequaque  contcmiien- 
<tus,  rujus  brevitas  el  cœlera  omnia  vida  lonpo- 
ribui  impulari  dcbenl.  Yalvi>iui>,  de  RcOus  Fran- 
Cicit,  lib.  XX,  piig.  179. 


»  Dom  Pilm  b  promis  de  donner  dans  le  Spici- 
legium  Solesmense  de»  fragments  inëiiiu.  {L'édi- 
teur.) 

»  Riiinari,  Prœfal.  in  op.  Gregor.  Turon.,  el 
pa|!.  61)3  eorumd.  Op. 

'  Cuni?.,  Tcitu.  H,  pag.  218. 

'  Urcg.  Uper,,  pag.  706. 


[VII'  SIÈCLE.]        CHAPITRE  LXXIII.  —  FRÉDl! 

que  sou  écrit  porte  dans  quelques  éditions, 
comme  dans  celle  de  M.  du  Gange,  faite  à 
Paris  en  1088,  et  à  Venise  en  1729.  [Une 
nouvelle  édition  en  a  été  publiée  en  1832, 
2  vol.  in-S",  i\  Bonn,  sur  le  manuscrit  du  Va- 
tican, par  L.  niiuloif;  c'est  cette  édition  qu'on 
trouve  dans  le  tome  XCII  de  la  l'alrolmjie 
grecque ,  avec  l'épitre  dédicaloire ,  la  pré- 
face, l'analyse  chronologique,  la  version,  les 
notes  de  l'édition  donnée  par  Ducange,  col. 
9-1 IG.  Un  appendice  ù  l'édition  de  Paris  fait 
connaître  les  fastes  consulaires  jusqu'à  la 
seizième  année  de  Tibère,  et  reproduit  les 
uotes  de  Matlliieu  Radérus  sur  la  Chronique 
pascale.  ] 

9.  L'ouvrage  est  composé  de  deux  parties, 
qui  dans  les  manuscrits  paraissent  de  deux 
mains  dill'érentes.  La  première  partie  s'étend 
depuis  le  commencement  du  monde  jusqu'à 
la  di.\-septième  année  du  règne  de  Constan- 
tin, de  Jésus-Christ  334.  La  seconde  conti- 
nue l'histoire  des  temps  jusqu'à  la  vingtième 
année  d'Héraclius,  C29  de  l'ère  commune  '. 
D'où  il  est  naturel  de  conclure  que  l'auteur 
de  la  première  partie  vivait  sur  la  fin  du  rè- 
gne de  Constantin  ;  l'auteur  de  la  seconde, 
sur  la  fin  de  celui  d'Héraclius,  sous  lequel 
les  disputes  de  la  Pâque,  agitées  dans  le  iy° 
siècle,  se  renouvelèrent  apparemment  en 
Orient.  Quelques-uns  ont  cru  que  saint  Maxi- 
me était  le  continuateur  de  la  Chronique 
pascale,  parce  qu'il  composa  un  Cycle  pas- 
cal, qui  finissait  à  la  trente-et-unième  année 
d'Héraclius  ;  mais  ils  n'ont  pas  pris  garde 
que  ce  saint  suivait  une  ère  difl'érente  de 
celle  de  la  Chronique  pascale  dans  la  sup- 
putation des  temps. 

10.  L'auteur,  après  avoir  rapporté  dans 


îr.AIRE,  HISTORIEN,  ETC.  747 

sa  préface  plusieurs  passages  des  Pères  sur 
la  céléhialion  de  la  fête  de  Pâques,  propose 
do  lui-même  divers  moyens  de  trouver  le 
jour  auquel  on  doit  chaque  année  célébrer 
cette  fête.  11  donne  pour  plus  grand  éclair- 
cissement deux  tables,  qu'il  a|ipcll(!  rou- 
lettes, dont  la  première  contient  un  cycle 
solaire  de  vingt-huit  ans;  la  seconde,  le 
moyen  de  trouver  en  quel  mois  l'on  doit  faire 
la  pâque  légale.  Cela  est  suivi  d'un  traité  de 
la  Pâ(jue  légale,  et  des  lunes  dans  lesquelles 
les  deux  pàques,  la  légale  et  l'ecclésiastique, 
doivent  être  célébrées.  Ensuite,  pour  mon- 
trer que  l'Église  catholique  s'est  conformée, 
dans  la  célébration  des  fêtes,  à  ce  qui  en  avait 
été  ordonné  dans  la  Loi,  il  donne  en  abrégé 
l'histoire  de  ce  qui  s'est  passé  à  cet  égard 
depuis  le  commencement  du  monde  jusqu'à 
la  vingtième  année  d'Héraclius;  mais  il  mêle 
beaucoup  de  choses  étrangères  à  son  sujet, 
pour  rendre  sa  chronologie  plus  suivie  et 
plus  intéressante.  M.  du  Cango,  dans  le  des- 
sein d'en  éclaircir  quelques  endroitS;  y  a 
joint  plusieurs  pièces ,  entre  autres  deux 
fragments  de  la  Chronique  d'Eusèbe  tou- 
chant la  manière  de  compter  les  mois  et  les 
années  chez  les  Grecs,  les  Égyptiens  et  les 
Hébreux,  un  fragment  de  l'Homélie  d'Hésy- 
chius  sur  la  naissance  de  Jésus-Christ  ;  un 
autre  d'un  traité  anonyme  sur  les  années  de 
la  naissance  et  de  la  passion  du  Sauveur;  le 
Commentaire  de  Dorothée,  évêque  de  Tyr 
et  martyr,  sous  Licinius  -,  sur  les  soixante- 
douze  disciples  du  Seigneur,  sur  les  patriar- 
ches de  Constantinople,  et  sur  les  douze  apô- 
tres :  ouvrage  plein  de  fables  et  de  menson- 
ges, et  reconnu  pour  apocryphe  par  tous  les 
savants. 


on'isgt.  Kdi- 
ilon    Vnnol. 


Ij  •  Dorothée,  d'après  Fabricius,  aurait  vécu  vers 
l'an  525,  et  ce  serait  l'rooope,  prêtre  de  Tyr,  qui 
aurait  composé  par  l'ordre  de  son  évêque  le  traité 
des  72  disciples.  Cet  écrit  a  d'abord  été  publié  par 
Dueauge,  et  ensuite  par  Fabricius  à  la  suite  des  li- 
vres sur  la  vie  de  .Moïse,  avec  les  notes  de  Gaul- 
min.  Il  est  reproduit  au  tome  XCII  de  la  Patro- 
logie  grecque,  à  la  suite  de  la  Chronique  pascale, 
col.  10j9-1075,  avec  les  variantes,  qu'un  manuscrit 
de  Leyde  a  fournies  à  Dindorf.  [L'éditeur.) 


^  Les  critiques  contemporains  d'Allemagne  por- 
tent de  cette  Chronique  un  jugement  assez  favo- 
rable. Plusieurs  en  placent  la  composition  eu  la  pre- 
mière moitié  au  iv  siècle,  et  le  reste  au  temps 
d'Héraclius.  Elle  contient  d'ailleurs  des  fragments 
d'auteurs  aussi  anciens  que  le  u=  siècle,  par  exem- 
ple de  Claude  Apollinaire,  évêque  d'Hiéraple,  dont 
les  mêmes  critiques  s'accordent  à  reconnaître  l'au- 
thenticité. (L'éditeur.} 


748 


HlSTOmE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


dore    (.      ^ei 
leiiref. 


CHAPITRE   LXXIV. 

Les  papes  Théodore  I'  1649]  et  saint  Martin  l"  [655], 
Manre,  archevêque  de  Ravenne  [648] 

[Écrivains  latins.] 


1.  Après  la  mort  de  Jean  IV,  arrivée  au 
mois  d'octobre  de  l'an  G-52,  on  élut  à  sa  place 
Théodore,  premier  du  nom  ',  Grec  de  nation, 
natif  de  Jérusalem,  et  Gis  d'un  évêque  nom- 
me aussi  Théodore»  Il  fut  ordonné  le  23  no- 
vembre de  la  même  année,  le  Saint-Siège 
ayant  vaqué  un  mois  et  treize  jours.  Son 
pontificat  dura  six  ans,  cinq  mois  et  dix-huit 
jours.  Pyrrhus, patriarche  deConslantinoplc, 
avait  quitté  son  siège  dès  l'année  précédente 
6il;  il  était  passé  à  Chalcédoine,  et  delà  en 
Afi'ique  ;  on  lui  avait  donné  pour  successeur 
Paul,  prêtre  et  économe  de  la  grande  église, 
qui  était,  comme  son  prédécesseur,  infecté 
de  l'hérésie  des  monothélites.  Il  ne  laissa 
pas  d'envoyer  ses  lettres  synodales,  et  celles 
des  évêques  qui  l'avaient  ordonné,  au  pape 
Théodore.  Elles  ne  contenaient  rien  que  de 
conlorme  à  la  foi  orthodoxe  ;  mais  ces  évo- 
ques y  donnaient  à  Pyrrhus  le  titre  de  très- 
saint,  disant  qu'il  n'avait  abandonné  son 
éghse  qu'  I  cause  du  tioul)le  et  de  la  haine 
populaire.  Le  Pape  répondit  au  patriarche 
Paul,  que  le  tumulte  et  la  haine  du  peuple 
n'ôtant  pas  l'épiscopat,  il  était  nécessaire, 
pour  affermir  son  ordination,  que  Pyrrhus 
fut  déposé  dans  un  concile,  après  que  sa 
cause  y  aurait  été  canoniquement  examinée 
par  les  évoques  les  plus  voisins;  que  la  pré- 
sence de  Pyrrhus  n'était  point  nécessaire, 
parce  que  ses  excès  étaient  notoires,  et  que 
l'on  avait  ses  écrits  ;  que  si  ses  partisans 
cherchaient  les  moyens  de  retarder  sa  con- 
damnation ,  on  pouvait  rendre  vains  leurs 
artitices  on  obtenant  de  l'Empereur  un  ordre 
pour  envoyer  Pyrrhus  à  Rome,  pour  y  être 
ju^é  dans  un  concile.  Tiiéodore  écrivit  A 
peu  prés  la  même  chose  aux  évé(|ues  qui 
avaient  ordonné  Paul,  et  envoya  A  Conslan- 
tinople  un  décret  pour  être  lu  publiquement, 
par  lequel  il  rejetait  tout  ce  que  Pyrrhus 
avait  enseigni'  contre  la  foi,  et  anathémali- 
sail,  sans  le  nommer,  l'Eclhèse  d'Héraclius. 


Le  Pape  citait  dans  sa  lettre  A  Paul  une  let- 
tre qu'il  avait  écrite  à  l'Empereur  pour  le 
prier  d'envoyer  Pyrrhus  h  Rome  ;  nous  ne 
l'avons  plus.  Il  est  dit  dans  la  seconde  action 
du  premier  concile  deLatran.sous  Martini", 
que  Théodore  déposa  Pyrrhus.  Anastase 
marque  qu'il  prononça  contre  Paul  la  sen- 
tence de  déposition.  Cela  se  fit  sans  donte 
dans  un  concile.  On  dit  même  que  le  pape*, 
s'étant  fait  apporter  le  calice  et  ayant  pris 
du  sang  précieux  de  Jésus-Christ,  en  sous- 
crivit la  sentence  contre  Pyrrhus.  [Les  écrits 
de  saint  Théodore  se  trouvent  dans  les  col- 
lections des  Conciles,  les  Bnllaires,  la  Patro- 
logie  latine,  tome  LXXXVII,  col.  iO.ï,  d'après 
Mansi.  On  y  trouve  une  notice  par  Mansi  avec 
notes  de  Binius,  six  lettres  parmi  lesquelles 
on  en  lit  une  des  églises  d'.M'rique,  une  de 
Paul,  patriarche  de  Constantinople,  une  de 
Victor,  évêque  de  Garthage;  les  trois  derniè- 
res sont  en  grec  et  en  latin.  La  sixième  est  un 
privilège  accordé  au  monastère  de  Bobbio.] 

2.  Le  diacre  Martin  résidait  à  Constanti- 
nople en  qualité  d'apocrisiaire  ;  et  ce  fut  à 
lui  que  le  pape  Théodore  adressa  ses  ordres 
pour  tenir  sa  place  dans  le  concile  qui  devait 
se  tenir  au  sujet  de  la  déposition  de  Pyrrhus. 
Théodore  étant  mort  au  mois  de  mai  de  l'an 
649,  on  choisit  pour  lui  succéder  Martin, 
qui,  comme  on  vient  de  le  dire,  avait  été  son 
apocrisiaire  à  Constantinople.  Il  était  de  Todi 
en  Toscane.  Aussitôt  après  son  ordination, 
il  tint  un  concile  à  Rome  dans  l'église  du 
Sauveur,  nommée  Constantinienne,au  palais 
de  Latran,  où  assistèrent  cent-cinq  évêques, 
y  compris  le  pape  qui  y  présidait.  La  pre- 
mière session  fut  tenue  le  cinquième  jour 
d'octobre  de  l'an  fi4lt;  la  cinquième  et  der- 
nière, douze  jours  après,  c'est-à-dire  le  der- 
nier du  même  mois.  On  y  condamna  ceux 
qui  ne  reconnaissaient  en  Jésus-Christ  qu'une 
volonté  et  une  opt'^ralion  ;  ceux  qui  rejetaient 
les  deux  volonti-s,  ou  qui  ne  voulaient  ni 


Mtrlln  I. 
It   U«nt    QD 


'  Tom.  V.  Conci/.,  p.  17T)  et  suiv.  —  'Theophan.,      ad  an. 20  Utraclii,  cttom.  WConciL,  pag.  116. 


[vu*  SIÈCLE.]  CUAinïRE  LXXIV.  —  SAINT  MARTIN  I,  ['APE. 

une,  ni  deux  volontds.  Théodore  de  IMiaian, 


7*9 


lin,  pap.  5,  6. 


A   l'Eglise 
Cnrtblgc, 


Cynis  d'Alexandrie,  Serf^ius  deConslanlino- 
ple  et  SCS  succcsseiiis  Pynlms  el  Paul,  y 
turent  condamnés  nomuiéuicnt  comiue  nio- 
nolliélites  ,  avec  tous  ceux  qui  recevaient 
l'Ecthése  d'Héraclius  et  le  Type  de  Constant. 

3.  Le  Pape  envoya  les  actes  de  ce  concile 
aux  églises  d'Orient  et  d'Occident  ',  avec  plu- 
sieurs lettres  tant  au  nom  du  concile  qu'au 
sien.  Il  y  en  a  une  ;\  tous  les  fidèles ,  où  il 
les  instruit  de  la  naissance  et  des  progrès 
de  l'erreur  des  monothélitcs,  de  la  nécessité 
d'assembler  le  concile,  et  de  la  manière  dont 
ou  y  avait  procédé  à  la  condamnation  de 
cette  nouvelle  hérésie  ,  de  ses  auteurs  et  de 
ses  partisans,  il  exhorte  tous  les  fidèles  à  les 
anathématiser,  en  même  temps  que  la  détes- 
table Ecthèse  et  le  Type  impie  ;  ajoutant  que 
c'était  pour  les  y  engager  qu'il  leur  envoyait 
les  actes  du  concile;  afin  aussi  de  se  justi- 
fier devant  Dieu  ,  et  de  rendre  inexcusables 
ceux  qui  n'obéiraient  pas. 

4.  Il  envoya  les  actes  du  même  concile 
avec  leur  traduction  en  grec  à  l'empereur 
Constantin  - ,  avec  une  lettre  par  laquelle  il 
le  priait  de  les  lire  attentivement,  de  con- 
damner par  de  pieuses  lois  les  nouveaux  hé- 
rétiques avec  leur  mauvaise  doctrine  ,  et  de 
maintenir  la  doctrine  des  Pères  et  des  Con- 
ciles. 11  fait  mention  d'une  lettre  des  mono- 
thélitcs aux  évoques  d'Afrique,  à  qui  ils  di- 
saient que  ce  prince  avaiî  publié  le  Type  de 
son  propre  mouvement,  pour  ordonner  de 
se  relâcher  un  peu  de  la  rigueur  excessive  , 
sans  préjudice  de  la  vérité.  Sur  quoi  le  Pape 
dit  :  M  Ils  n'ont  point  en  cela  écouté  les  Pè- 
res, qui  disent ,  qu'à  l'égard  des  vérités  di- 
vines, le  moindre  changement  est  impor- 
tant. »  Tous  les  évêques  du  concile  souscri- 
virent à  la  lettre  du  Pape. 

0.  Les  évêques  d'Afrique  avaient  envoyé 
au  Saint-Siège  leur  confession  de  foi ,  où  ils 
approuvaient  la  doctrine  des  deux  volontés 
et  des  deux  opérations.  Martin  I"  leur  fit  ré- 


ponse, et  leur  envoya  par  Théodore  et  Léon- 
ce, moines  de  la  Sainte-Laure  ,  les  actes  du 
cdiicile  de  l.atran,  avec  sa  lettre-circulaire. 
Il  a[)pronve  leur  confession  de  foi,  les  exhorte 
;\  y  pcrsévc'rer,  et  leur  explique  en  peu  de 
mots  ce  qui  s'était  passé  contre  les  monothé- 
litcs. 

6.  Le  Pape  reçut  de  saint  Amand  ',  évêque 
de  Maëstricht,  une  lettre  où  cet  évêque  le 
consultait  sur  ce  qu'il  avait  ;ï  faire  pour  répii- 
mer  le  désordre  de  quelques-uns  de  ses 
clci'cs,  qui  étaient  tombés  dans  des  péchés 
d'impureté  depuis  leur  ordination.  Il  en  était 
si  affligé  ,  qu'il  pensait  à  quitter  son  évêché 
pour  vivre  dans  la  retraite  et  dans  le  silence. 
Martin  I"  le  plaint  du  dérèglement  de  son 
clergé,  le  détourne  du  dessein  où  il  était  de 
quitter  ses  fonctions  pastorales,  et  lui  con- 
seille de  traiter  avec  toute  la  rigueur  des 
canons  les  prêtres,  les  diacres  et  les  autres 
clercs  qui  tombaient  dans  des  péchés  hon- 
teux. «  Celui ,  dit-il ,  qui  est  une  fois  tombé 
de  la  sorte  après  son  ordination,  doit  être 
déposé  sans  espérance  de  promotion,  et  pas- 
ser le  reste  de  ses  jours  en  pénitence,  puis- 
que nous  cherchons  pour  les  ordres  des  per- 
sonnes dont  la  vie  ait  toujours  été  pure.  » 
Le  Pape  lui  marque  ensuite  de  quelle  ma- 
nière l'hérésie  des  monothélitcs  s'était  éta- 
blie, ce  qu'il  avait  fait  pour  en  arrêter  les 
progrès  ,  et  le  charge  de  faire  connaître  les 
actes  du  concile  de  Latran  et  sa  lettre-cii'- 
culaire  aux  peuples  et  aux  évêques  des  Gau- 
les, «  qui  étant  assemblés  ,  ajoute-t-il ,  con- 
firmeront par  leur  consentement  ce  que  nous 
avons  fait  pour  la  foi,  et  nous  enverront  leurs 
souscriptions'.  »  Il  ajoute  :  «  Priez  Sigebert 
notre  fils,  roi  des  Français,  de  nous  envoyer 
des  évêques  pour  se  charger  de  la  légation 
du  Siège  apostolique,  et  porter  à  l'Empereur 
les  actes  de  notre  concile  et  ceux  du  vôtre. 
Nous  avons  fait  donner  au  porteur  les  reli- 
ques des  saints  qu'il  a  demandées  :  mais  à 
l'égard  des  livres  ,  il  ne  nous  a  pas  été  pos- 


A  S.  Ainstid 
tvi'iouc  de  Mji- 


'  Tom.  VI  Concil.,  pag.  fi  et  367. 

'  Hœc  autem  scripserunt  sanctis  Patribus  mtUo 
modo  auscultantes,  quod  in  Us  quœ  ad  Deum  per- 
tinent inque  divinis  prœdicationibus,  id  quod  pa- 
rwn  abest  pauluinque  mulatum  est,  non  parvum 
tamen  est  ducendum.  Tom.  VI  ConcH.,  pag   7. 

*  Au  tome  LXXXVII  delà. Patrologie  latine,  col. 
12G7  et  suiv.,  on  trouve  une  Vie  de  saint  Amand 
par  un  auteur  anonyme  tirée  des  Bollandi8tes  du 
mois  de  février,  une  charte  pour  bitir  un  monas- 
tère, et  un  codicile  du  testament  de  saint  Arnaud 
pour  la  sépulture  de  son  corps,  d'après  Bréquigny. 


Deux  liymnes  en  l'honneur  du  saint  sont  A  la  suite. 
(.L'éditeur.) 

'•  Idcirco  sttideat  tua  fraternitas  omnibus  ea- 
dem  innotescere,  ut  synodali  conventione  omniuvi 
fralrum  et  coepiîcoporum  nostrorum  partium 
illartim  effecta  secundum  lenorem  encyclicœ  a 
îwbis  dircciœ,  scripta  itna  cum  subscriptionibus 
vestris  nobismet  destinanda  concélèbrent,  confir- 
mantes atque  consentientes  eis  quœ  pro  ortito- 
doxa  fide  et  destructione  hccreticorum  vesaniœ 
nuper  exortw  a  nobis  statula  sunt.  Martin.,  tom. 
VI  Concil.,  pag.  385. 


750 


HISTOmE  GÉNÉUALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


A  J.  Il  c'a 
Pbliidcl.blc, 


A  Tléftdo^fl 
d  'E*Lu  Di  r, 
paf.  2V;  fcAii- 
lolc«do  Bjca- 
le,  Hf.  31  ; 
è  Georg«  ab< 
M  de  S'>oi- 
T  lioàme  , 
ff.  33;  k 
l'a  n  ta  iéon, 
,,f.  J»  ;  » 
Flcrrr,  du 
raBtf  de»  lUoi* 
liei'  ia{.  31. 


sible  de  lui  en  donner,  parce  que  notre  bi- 
bliothèque était  vide  ,  et  quil  était  si  pressé 
de  s'eu  retourner,  qu'il  n'a  pu  en  trans- 
crire. )) 

7.  L'ordre  sacerdotal  périssait  dans  les 
Eglises  dépendantes  des  siéjes  de  Jérusalem 
et  d'Antioche  par  l'oppression  des  gentils, 
et  la  relif,'ion  y  était  ignorée  d'un  grand  nom- 
bre, faute  de  ministres  et  de  liberté.  Pour 
remédier  à  ces  maux  ,  le  Pape  établit  Jean , 
évêque  de  Philadelphie,  son  vicaire  pour  tout 
l'Orient,  avec  ordre  de  remplir  incessamment 
les  églises  catholiques  d'évêques,  de  prêtres 
et  de  diacres  ;  de  recevoir  ceux  des  héréti- 
ques qui  voudraient  se  convertir,  en  leur 
faisant  auparavant,  donner  leur  confession 
de  foi  par  écril,  et  de  les  rétablir  chacun 
dans  leur  ordre,  pourvu  qu'il  ne  se  trouvât 
point  d'autre  empêchement  canonique.  «Car 
nous  sommes,  dit-il ,  les  défenseurs  et  les 
gardiens,  et  non  pas  les  prévaricateurs  des 
canons.  »  En  conséquence,  il  défend  à  Jean 
de  Philadelphie  de  confirmer  ceux  qui  s'é- 
taient choisis  eux-mêmes,  ou  ceux  dont  l'é- 
lection n'était  point  canonique.  Il  met  de  ce 
nombre  Macédonius  d'Antioche,  dont  l'élec- 
tion avait  été  faite  dans  un  pays  étranger 
sans  le  consentement  du  peuple  et  sans  décret 
d'élection,  et  parce  qu'il  était  uni  aux  héré- 
tiques, qui  l'avaient  élu  pour  récompense 
de  ses  crimes;  et  Pierre,  qu'ils  n'avaient  fait 
évêque  d'Alexandie  que  pour  fortifier  leur 
parti  par  le  grand  nombre.  Il  veut  que  ceux 
qui  seront  reçus  dans  l'Église  catholique, 
condamnent  non-seulement  l'hérésie  des  mo- 
nothélites,  mais  encore  Théodore  de  Pharan, 
Cyrus,  Sergins  et  tous  ceux  qui  sont  de  leur 
sentiment;  qu'ils  rejettent  le  Type  fait  aux 
instigations  de  Paul  de  Constanlinople ,  et 
qu'ils  confessent  claiicment  deux  volontés 
en  Jésus-Christ.  Il  marque  qu'il  lui  envoie 
les  actes  du  concile  de  Latran  et  la  lettre- 
circulaire  par  l'abbé  Théodore  son  apocri- 
siaire ,  et  par  les  moines  Jean,  Etienne  et 
Léonce  ;  et  qu'il  lui  donne  Théodore,  ('vêque 
d'Ksbnute ,  et  Antoine  de  Bacate,  pom'  l'ai- 
der dans  l'exécution  de  sa  commission. 

8.  Martin  I"  écrivit  en  particulier  k  cha- 
cun de  ces  deux  évècjues  |)r)ur  les  exhorter 
à  s'unir  à  Jean  de  Philadelphie.  Il  loue 
Tliéodore  d'Esbtmte  de  s'être  déclaré  hau- 
tement contre  les  monolhélites  en  publiant 
sa  confession  de  foi  par  éciit  ;  et  Antoine 
de  Bacate,  d'avoir  quitté  leur  parti  et  en- 
voyé au  Saint-Siège  sa  rétractation.  Sa  let- 


tre à  George,  abbé  de  Sainte-Théodose ,  est 
pour  le  remercier  d'avoir  pris  avec  ses  moi- 
nes la  défense  d'Ktienne,  évêque  de  Dore, 
légat  du  Siège  apostohque  sous  le  pape  Théo- 
dore, et  l'exhorter  à  se  soumettre  à  Jean  de 
Philadelphie.  Ceux  qui  avaient  empêché  l'é- 
vêque  de  Dore  de  recevoir  des  évêques  et 
d'ordonner  des  prêtres  selon  la  commission 
qu'il  en  avait  reçue  du  Pape,  avaient  envoyé 
à  Rome  des  plaintes  contre  lui.  Elles  y  fu- 
rent examinées,  et  se  trouvèrent  sans  fon- 
dement. C'est  ce  que  le  Pape  déclare  dans 
sa  lettre  à  Pantaléon,  ajoutant  que  ces  ca- 
lomniateurs étaient  cause  qu'il  n'y  avait  plus 
en  ces  quartiers-là  d'évéques  ni  de  prêtres 
qui  olfrisscnt  continuellement  des  sacrifices 
pour  le  peuple.  Il  parait  que  la  lettre  adres- 
sée à  Pierre,  qui  dans  l'inscription  est  appe- 
lé illustre,  qu'il  avait  l'autorité  temporelle 
dans  le  pays.  Le  Pape  lui  recommande  son 
vicaire. 

9.  Comme  son  pouvoir  s'étendait  particu- 
lièrement sur  les  Églises  dépendantes  de 
Jérusalem  et  d'Antioche,  Martin  I"  leur  écri- 
vit une  lettre-circulaire  pour  leur  déclarer 
qu'il  avait  nommé  à  ce  ministère  Jean  de 
Philadelphie,  et  les  exhorter  à  lui  obéir.  En 
même  temps  il  les  conjura  de  demeurer 
fermes  dans  la  foi  de  l'Église  romaine ,  et 
d'éviter  les  hérétiques  ,  nommément  Macé- 
donius et  Pierre ,  l'un  usurpateur  du  siège 
d'Antioche,  l'autre  de  celui  d'.\lexandrie.  Il 
leur  donna  avis  de  la  condamnation  du  mo- 
notliélisme  dans  le  concile  de  Latran,  dont 
il  dit  qu'il  avait  envoyé  les  actes  à  Jean  de 
Philadelphie,  afin  qu'il  leur  en  fit  part. 

10.  Paul ,  uouvellemont  élu  évêque  de 
Thessalonique,  envoya  suivant  la  coutume 
ses  lettres  synodales  au  pape  Martin  I".  Elles 
contenaient  sa  profession  de  foi,  mais  elle 
favorisait  le  monothélismc.  Le  Pape  s'en 
plaignit  aux  députés  de  Paul,  qui  l'assurèrent 
que  l'erreur  qui  paraissait  dans  les  lettres 
de  leur  évêque,  s'y  était  glissée  par  inadver- 
tance, et  qu'il  la  corrigerait  sitôt  qu'il  eu  se- 
rait averti.  Le  Pape  manda  à  ses  légats  qui 
étaient  sur  les  lieux  de  faire  voir  à  Paul  en 
quoi  il  avait  failli,  et  de  l'obliger  à  souscrire 
.'i  la  profession  de  foi  qu'ils  lui  donneraient 
eux-mêmes.  Paul  en  écrivit  une,  où  en  par- 
lant de  la  volonté  et  de  l'opération  de  Jé- 
sus-Cbrist,  il  omettait  le  mot  de  naturelle  et 
l'anatlième  i\  l'hérésie  des  monolhélites. 
Les  légats,  séduits  par  ses  artifices  et  ses 
Uatteries ,  se  contentèrent  de  cet  écrit.  Mais 


àf    JTu^ale 
{I  i   \Qt10Cllfl 


\   l'a» 

drTI».  alno 
que,  i.aj. 


A  l'Écllse 
deTbefsilonl- 


Psalir. 


PfrsicQl'on 


■  I)  dore  , 

f.aj    es. 


lvu°  SIÈCLE.]    CHAPITRE  LXXIV. 

le  Pape  l'ayant  vu,  et  ayant  remarqué  que 
l'iiiil  s'était  l'Ioignc  de  la  foiimile  qu'il  avait 
eiiviiyée  pcuir  la  lui  faire  souscrire,  prouosiça 
anallièuie  contre  lui,  et  ordonna  à  ses  légats, 
qui  s'étaient  laissé  séduire,  de  faire  pénitence 
dans  le  sac  et  la  cendre.  C'est  ce  que  l'on 
voit  dans  la  lettre  qu'il  écrivit  ii  cet  évéque 
pour  lui  notilier  la  sentence  qu'il  as-ait  ren- 
due contre  lui.  .\près  lui  avoii' reproché  tous 
ses  mauvais  arlilices,  il  dit  :  «  Sachez  que 
vous  êtes  déposé  de  toute  dignité  sacerdo- 
tale et  de  tout  ministère  dans  l'Église  catho- 
lique, jusqu'à  ce  que  vous  confirmiez  par 
écrit  sans  aucune  omission  tout  ce  que  nous 
avons  ici  décidé  en  concile,  et  que  vous  ana- 
tliématisicz  tout  ce  que  uous  anathéroatisons, 
particulièrement  les  nouveaux  hérétiques 
Théodore  de  Fharan ,  Cyrus  d'Alexandrie, 
Pynhus  et  Paul  avec  leur  Ecthèse  et  leur 
Type. 

H.  Le  Pape  écrivit  aussi  à  l'Église  de 
Thessalonique,  pour  lui  donner  avis  de  cette 
sentence  et  l'avertir  de  n'avoir  plus  de  com- 
munion avec  Paul ,  d'abandonner  sa  doc- 
trine, de  demeurer  ferme  daus  la  foi  de  l'É- 
glise romaine ,  de  faire  célébrer  les  mystè- 
res par  les  prêtres  et  les  diacres  catholiques, 
jusqu'à  ce  qu'il  fût  rentré  en  son  devoir,  ou 
qu'on  eût  élu  un  autre  évèque  à  sa  place  , 
qui,  à  l'imitation  du  prince  des  pasteurs  Jé- 
sus-Christ, établisse  son  peuple  dans  un  lieu 
abondant  en  pâturages,  et  l'élève  près  de 
l'eau  fortifiante  de  la  saine  doctrine. 

d2.  L'empereur  Conslautin,  informé  des 
sentiments  du  Pape  et  des  évêques  d'Italie  à 
l'égard  du  Type  qu'il  avait  l'ail  dresser  à  la 
sollicitation  des  monotliélites,  envoya  pour 
exarque  en  Italie  Oiympius  sou  chambellan, 
avec  ordre  de  faire  signer  cette  formule  à  fous 
lesévècjues  et  à  tous  les  propriétaires  des  ter- 
res. Oiympius,  arrivé  a  Rome,  trouva  le  con- 
cile de  Latran  assemblé.  Il  essaya  en  vain 
d'obliger  le  Pape  et  les  évècjiies  à  souscrire 
le  Type  ;  et  voyant  qu'ils  n'étaient  point  inti- 
midés par  les  soldats  qu'il  avait  menés  avec 
lui,  il  eut  recours  à  la  trahison,  et  ordonna  à 
son  écuyer  de  tuer  le  Pape  dans  le  temps 
qu'il  recevrait  de  lui  la  communion  dans  l'é- 
glise de  Sainte-AIarie-^Iajeure.  La  chose  était 
facile,  parce  que  c'était  l'usage  alors  de  com- 
munier chacun  à  sa  place.  Dieu  ne  permit 
pas  néanmoins  l'exécution  de  ce  crime.  L'é- 


—  SAINT  MARTIN  I,  PAPE.  751 

cuyer,  fi'appé  d'avengleiuc^nt,  ne  vit  point  le 
Pape  ilans  le  mouu'ut  ([u'il  donnait  la  com- 
munion à  Oiympius.  Celui-ci,  voyant  la  pio- 
tetlion  du  ciel  sm-  .Martin  I",  lui  déclara  les 
ordres  qu'il  avait  reçus  de  l'arrêter,  se  ré- 
concilia avec  lui,  et  passa  avec  ses  troupes 
en  Sicile,  où  il  mourut.  L'empereur  nomma 
à  sa  place  Théodore,  surnommé  Calliopas,  à 
qui  il  ordonna  d'enlever  le  Pape,  sous  pré- 
texte d'héiésie,  et  d'avoir  envoyé  aux  Sarra- 
sins, ennemis  de  l'empire,  de  l'argent  et  des 
lettres.  Le  Pape,  averti  que  Théodore  ap- 
prochait de  Home,  envoya  au  devant  quel- 
ques-uns de  son  clergé.  L'exarque  les  reçut 
dans  son  palais,  croyant  que  le  Pape  était 
avec  eux;  mais  voyant  qu'il  n'y  était  pas,  il 
dit  airx  premiers  du  clergé  :  «  Nous  voulions 
l'adorer  '  ;  mais  demain,  qui  est  dimanche, 
nous  irons  le  trouver  et  le  saluer,  car  aujour- 
d'hui il  ne  nous  a  pas  été  possible.  »  On  voit 
ici  '  les  mots  d'adorer  et  de  saluer  employés 
indiQëremment,  et  il  y  avait  longtemps  que 
l'on  disait  adorer  l'Empereur.  Théodore,  crai- 
gnant la  multitude,  ne  vint  pas  saluer  le 
Pape  le  lendemain  dimanche,  comme  il  l'a- 
vait prorais  :  mais  le  lundi  matin,  il  envoya 
son  cartuiaire  lui  dire  :  «  Vous  avez  préparé 
des  armes  et  amassé  des  pierres  pour  vous 
défendre,  et  vous  avez  des  gens  armés.  » 
C'était  une  fausseté  :  on  visita  la  maison 
épiscopale,  où  l'on  ne  trouva  rien  de  tout 
cela.  Le  même  jour,  l'exarque  vint  lui-mô- 
me ;  et  ayant  trouvé  le  Pape  malade,  couché 
sur  son  lit  à  la  porte  de  l'église,  il  présenta 
aux  prêtres  et  aux  évêques  un  ordre  de  l'Em- 
pereur pour  le  déposer,  comme  indigne  et 
intrus.  Eugène,  fils  de  Rufinien,  fut  établi  à 
sa  place  par  l'autorité  de  ce  prince,  et  Mar- 
tin 1"  livré  aux  soldats  pour  être  mené  à 
Constanlinople.  Il  n'y  arriva  que  le  17  sep- 
tembre G54,  quoiqu'il  fût  parti  de  Rome  le 
19  juin  de  l'année  précédente  653.  De  la  bar- 
que sur  laquelle  on  l'avait  emmené  il  fut  con- 
duit en  prison,  après  avoir  été  exposé  pen- 
dant plusieurs  heures  aux  insultes  de  la  po- 
pulace, même  des  païens.  Il  y  a  apparence 
que  ce  fut  de  la  prison  qu'il  écrivit  deux 
lettres  à  Théodore,  qu'il  qualifie  de  son  fi'ère 
bien-aimé.  Dans  la  première,  il  donne  pour 
témoin  de  la  pureté  de  sa  foi  le  clergé  de 
Rome,  qui  en  était  parfaitement  instruit,  et 
en  avait  rendu  témoignage  en  présence  de 


'  Dixit  primis  Cleri  :  quin  nos  voluimus  eum 
adorare,  Sed  cras  obvii  ei  erimuset  salutabimus. 


Epiit  13  ad  Theodor.,  pag.   64.  —  *  Fleury,  liv. 
XXXIX,  Bist.  Ecoles.,  pag.  499. 


752 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Iofe-ro?a- 
loir«  du  f>W 

M. 


l'exarque  Théodore.  Puis,  répondanl  aux  ac- 
cusations particulières,  il  proteste  qu'il  n'a- 
vait envoyé  ni  argent  ni  lettres  aux  Sarra- 
sins; qu'il  avait  seulement  donné  quehjue 
peu  de  chose  à  des  serviteurs  de  Uieu  qui 
venaient  chercher  des  aumônes,  mais  qui 
n'étaient  point  de  celte  nation;  que,  bien 
loin  de  ne  pas  honorer  la  Sainte-Vierge  com- 
me mère  de  Dieu,  il  déclarait  anathème  en 
ce  monde  et  en  l'autre  à  quiconque  ne  l'ho- 
nore pas  au-dessus  de  toutes  créatures,  ex- 
cepté son  Fils  Notrc-Seigneur.  Il  raconte  dans 
l'autre  la  manière  dont  l'exarque  l'avait  fait 
enlever  de  Rome,  et  avait  fait  élire  un  pape  à 
sa  place';  ce  qui  ne  s'était  jamais  fait',  puis- 
que, en  l'absence  de  l'évèque,  l'archidiacre, 
l'archiprêtre  et  le  primicier  tiennent  sa  pla- 
ce. Ensuite,  il  fait  le  détail  de  ce  qu'il  souf- 
frait dans  la  prison,  où  on  lui  refusait  même 
de  l'eau  pour  se  laver  ;  priant  Dieu  qu'après 
l'avoir  retiré  de  cette  vie,  il  amène  ses  per- 
sécuteurs à  pénitence,  et  au  repentir  de 
leur  iniquité. 

13.  Suit  dans  la  collection  des  Conciles  un 
mémoire  en  forme  de  lettre  sous  le  nom  du 
bon  clu'étien ,  aux  évéques  orthodoxes  de 
l'Occident,  à  qui  il  fait  le  récit  de  ce  qui  se 
passa  dans  l'interrogatoire  que  l'on  fit  prêter 
au  Pape  dans  la  chambre  du  conseil,  après 
quatre-vingt-treize  joui's  de  prison 
eut  récusé  les  témoins,  on  ne  laissa  pas  de 
recevoir  leur  déposition  :  et  cette  procédure 
irrégulière  dans  toutes  ses  parties,  se  termi- 
ne à  le  livrer  aux  bourreaux,  qui  lui  ùtèrent 
son  pallium,  le  dépouillèrent  de  tous  ses  ha- 
bits, lui  mirent  un  carcan  au  cou,  et  le  traî- 
nèrent depuis  le  palais  par  le  milieu  de  la 
ville,  attaché  avec  le  geôlier,  pour  marquer 
qu'il  était  condamné  à  mort.  Arrivi;  au  pré- 
toire, on  le  chargea  de  chaînes,  et  on  le  jeta 
en  prison  avec  des  meurtriers.  Le  lendemain, 
l'Empereur  alla  rendre  visite  au  patriarche 
Paul  qui  se  mourait,  et  lui  raconta  co  que 
l'on  avait  fait  soullVii-  au  Pape.  Paul,  agité  de 
remords  de  conscience,  dit  à  ce  prince,  en 
se  tournant  vers  la  muraille  :  C'est  encore 
pour  augmenter  tua  condamnation.  Ces  paro- 
les ayant  surpris  l'enipcreui-,  Paul  ajouta  : 
N'est-ce  /ms  une  chose  dé/jloraô/c  Je  traiter  aitisi 
un  évèçue?  Paul  mourut,  et  Pyrrhus,  qui  était 
présent,  voulut  entrer  dans  le  siège  de  Con- 


stantinople.  Plusieurs  s'y  opposèrent,  disant 
que,  parla  rétractation  qu'il  avait  donnée  au 
papeTliéodore,  il  s'était  rendu  indiîrne  du  sa- 
cerdoce, et  qu'il  avait  été  anathématisé  par 
le  patriarche  Paul.  Cette  contestation  donna 
lieu  ;i  un  second  interrogatoire  de  Martin  I". 
L'Empereur  lui  fit  demander  par  un  de  ses 
officiers  ce  qui  s'était  passé  à  Rome  à  l'égard 
de  Pyrrhus,  et  pourquoi  ce  patriarche  y  était 
allé.  Le  Pape  répondit  que  Pyrrhus  avait  fait 
de  lui-même  le  voyage  de  Rome  ;  qu'il  y  avait 
été  reçu  comme  un  évêque  par  le  pape  Théo- 
dore, nourri  et  entretenu  aux  dépens  de  l'É- 
glise romaine,  où  selon  la  coutume  on  donne 
à  un  évéquc  étranger  du  pain  tiès-blanc, 
des  vins  de  diverses  sortes,  non-seulement 
à  lui,  mais  aux  siens  ;  et  qu'il  avait,  sans  y 
être  forcé  de  personne,  donné  son  libelle  de 
rétractation. 

H.  Le  Pape  demeura  encore  près  de  trois 
mois  en  prison,  au  bout  desquels  il  fut  en- 
voyé en  exil  a  Chersoue,  où  il  arriva  le  15 
de  mai  63-5.  Il  écrivit  de  là  à  un  de  ses  amis, 
pour  lui  marquer  qu'il  manquait  de  tout,  et 
que  s'il  ne  lui  venait  point  de  secours  d'Ita- 
lie, il  succomberait  à  la  faim  et  aux  auti'es 
besoins  de  la  vie.  Il  se  plaint  amèrement  de 
l'abandonnement  où  il  se  trouvait  de  la  part 
du  clergé  de  Rome,  et  conjure  son  ami  de 
Quoiqu'il  .  lui  continuer  ses  bons  offices.  Il  fait  les  mô- 
mes plaintes  dans  une  autre  lettre,  où  tou- 
tefois il  prie  Dieu  de  conserver  inébranlables 
dans  la  foi  ceux  de  qui  il  était  abandonné, 
surtout  le  pasteur  qui  les  gouvernait,  c'est-à- 
dire  le  pape  Eugène.  Accablé  de  misères,  il 
mourut  le  16  de  septembre  635,  après  six 
ans,  un  mois  et  vingt-six  jours  de  pontilicat, 
à  compter  depuis  son  ordination  jusqu'à  sa 
mort.  L'Église  grecque  l'honore  comme  con- 
fesseur le  1-4  avril,  et  l'Kglise  latine,  comme 
martyr,  le  12  novembre.  [Les  écrits  qui  nous 
restent  de  saint  Martin  se  lisent  dans  les  col- 
lections des  Conciles,  les  Bulluires,  la  Pa- 
trolugie  latine,  tome  LXXXVII,  col.  105  et 
suiv.,  où  l'on  trouve  une  notice  historique 
d'après  Mansi,  la  passion  de  saint  Martin  d'a- 
près un  ancien  auteur,  dix-sept  lettres,  la 
plupart  en  grec  et  en  latin,  trois  privilèges  à 
divers  monastères.] 

15.  [Maure,  d'économe  de  l'église  de  Ila- 
venne,  en  devint  archevêque  en  648.  Enor- 


Lp(tr*dt 

[«pe  k  un  di 

U.   S«    iiii-'rt. 
(M  '  dl 


M 


'  Tom.  VI  Concil.  pag.  66. 
•  Siibrogaln  in  locn  meo  epùtcnpo,  qtwd  ncrdum 
aliquando  faclum  est  :  quia  in  absentia  ponlilicis 


nrchidiaconus  et  archiprcsbyl^r  et  primicerius  lo- 
cum  prœsenlanl  pontilicis.  Ibii). 


CHAPITRE  LXXV.  —  SAINT  ÉLOl  ET  SAINT  OUEN. 


[vu'  SlÊCtE.] 

gueilli  de  sa  puissance,  il  se  révolta  malheu- 
reusement contre  le  soiivenrml'oiitirc,  et  l'ut 
contumace  toute  sa  vie.  Loin  d'olioii-  au  pape 
Vilalicn,  qui  l'avait  cité  ;\  Uouie,  il  osa  le 
citer  lui-même  ;\  son  triimnal.  En  mourant, 
il  ordoniKi  ù  son  clci-^i!  de  rosier  séparé  de 
Rome.  Aussi  le  pape  Adéodat  défendit  qu'on 
en  fit  mémoire  dans  les  anniversaires  des 
ftmes  '.  On  a  une  lettre  de  Maure  contre  l'hé- 


75.'{ 


résio  des  monothélites;  elle  est  adressée  au 
pape  ^^artin  dans  un  temps  où  il  était  enco- 
re soumis  i\  llomc,  comme  la  teneur  de  la 
lettre  le  montre.  On  la  trouve  reproduite 
dans  le  tome  LXXXVII  deAuPatrolnyie  latine 
en  grec  et  en  latin,  col.  103  etsuiv.;  elle  est 
précédée  d'une  notice  sur  Maure  extraite 
d'Ughelli,  Italia  sacra.] 


CHAPITRE  LXXV. 
Saint  Éloi  évêque  de  Noyon  |659],  saint  Ouen  cvêqne  de  Ronen  [683 1. 


NâH*ance 

M    eSS.    Sun 
Ailucalioo. 

Eli^ii  Tiut, 
llb.  i,  cap.  I. 


C.ip.  III. 


Il  e?t  enTO- 


1.  Ce  saint  vin!  au  monde  vers  l'an  588  à 
Cliatelac,  à  deux  lieues  de  Limoges.  Son  pè- 
re, nommé  Euclicr,  aprc's  l'avoir  bien  in- 
struit de  la  religion,  le  donna  à  un  orfèvre  de 
réputation,  nommé  Abbon,  maître  de  la 
monnaie  à  Limoges,  de  qui  il  apprit  l'art  eu 
fort  peu  de  temps.  Il  se  mit  depuis  sous  la 
conduile  de  Bobbon,  trésorier  du  roi  Clolai- 
re  II,  et  fit  pour  ce  prince  un  siège  magni- 
fique, oi'né  d'or  et  de  pierreries.  Ce  roi,  satis- 
fait de  l'ouvrage  et  de  la  fidélité  avec  laquelle 
Eloi  l'avait  exécuté,  lui  donna  sa  confiance, 
et  le  fit  son  monétaire.  On  voit  ^  encore  son 
nom  sur  plusieurs  monnaies,  frappées  k  Pa- 
ris sous  Dagobert  et  sous  son  fils  Clovis  II. 

2.  Les  Gascons  ayant  fait  des  courses  et 
do  i»r  M  roi  des  ravages  sur  les  frontières  de  France  vers 

Dnsoben     en  ^ 

!■"•  1  an  633,  le  roi  Dagobert  envoya  contre  eux 

une  nombreuse  armée  qui  les  défit.  Ils  de- 
mandèrent quartier  :  ce  qui  ne  leur  fut  ac- 
cordé qu'à  la  charge  d'envoyer  les  pi-inci- 
paux  de  leur  nation  pour  implorer  la  clé- 
mence du  roi  '.  Ce  prince,  également  mé- 
content des  dommages  que  les  Bretons  a  valent 
causés  par  leurs  courses  continuelles  sur  la 
frontière  de  son  royaume,  manda  à  Judicaël, 
prince  de  Bretagne,  que  s'il  ne  lui  donnait 
satisfaction,  il  passerait  en  Bretagne,  et  y 
mettrait  tout  à  feu  et  à  sang.  Saint  Éloi,  char- 
gé de  faire  cette  déclaration  au  prince  bre- 
ton, sut  si  bien  entrer  dans  son  esprit,  qu'il 
l'engagea  ;\  venir  lui-même  à  Paris,  où  il  se 
soumit  à  tout  ce  que  le  roi  exigea  de  lui. 


3.  Son  crédit  auprès  du  roi  Dagobert  lui 
attira  l'envie  des  méchants,  dont  la  sagesse 
de  sa  conduite  était  une  censure  continuelle. 
En  travaillant,  il  avait  devant  les  yeux  un 
livre  ouvert,  pour  s'instruire  dans  la  loi  de 
Dieu;  autour  de  sa  chambre  quantité  de  li- 
vres sur  des  planches,  principalement  de 
l'Écriture  sainte,  qu'il  lisait  après  la  psalmo- 
die et  l'oraison,  et  plusieurs  de  ses  domesti- 
ques qui  chantaient  avec  lui  l'office  de  l'É- 
glise le  jour  et  la  nuit.  Quoique  le  roi  le 
mandât,  il  ne  quittait  point  ses  exercices  qu'il 
ne  les  eût  achevés.  Il  donnait  aux  pauvres 
tout  ce  qu'il  recevait  des  bienfaits  du  prince; 
et  on  n'indiquait  sa  maison  aux  étrangers, 
qu'en  leur  disant  :  «  Allez  en  une  telle  rue, 
à  l'endroit  oîi  vous  trouverez  quantité  de 
pauvres  assemblés.  »  Voulant  mettre  sa  con- 
science en  repos,  il  confessa  devant'*  un  prê- 
tre tout  ce  qu'il  avait  fait  depuis  sa  jeunesse, 
et  s'imposa  une  sévère  pénitence.  C'est  le  pre- 
mier exemple  cpie  l'histoire  fournit  d'une 
confession  générale. 

4.  Il  fonda  deux  monastères,  l'un  d'hom- 
mes à  Solignac,  à  deux  lieues  de  Limoges, 
où  il  mit  sous  la  conduite  de  saint  Remacle, 
depuis  évéque  de  Maestrick,  des  moines  ti- 
rés de  Luxeuil  ''  ;  l'autre  de  filles,  à  Paris,  où 
il  en  rassembla  jusqu'à  trois  cents,  auxquel- 
les il  donna  pour  abbesse  sainte  Aure.  Il 
obtint  du  roi  Dagobert  la  terre  où  il  fonda 
le  premier,  et  établit  le  second  dans  la  mai- 
son que  le  même  prince  lui  avait  donnée. 


Son  ipïili- 
calion  àlalec. 
Ilire,&lnpri&. 
ro  et  h  ('au. 
mûne. 

Eli^iJ  vila. 
Cap.  Tii  el  tii, 


Cap,  VI 


Il  huii 
deux  Monaï- 
lère^. 


'  Vide  Ughelli,  Ilalia  sacra. 
*  Le  Blanc,  Hist.  des  Mon.,  pag.  50  et  54. 
'  Fredegar.,  in  Chronico,  cap  Lxxvin,  et  Eligii 
Yita,  cap.  xiii. 

XI. 


'  Otnnia  ab  adolescentia  sua  coram  sacerdote 
confessus  est  acta.  Cap.  vu. 
'  Àct.  Ordin.  S.  Benedicti,  tom.  II,  pag.  488. 


48 


754 


Il  ei.l  fait 
\t-io9  de  No* 
o  eo  6iO. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

porto  quelques  fragrinents  de  ses  homélies, 
qui  nous  font  ju|,'er  que  son  style  était  sim- 
ple, mais  tendre  et  paternel,  el  qu'il  faisait 
usatre  des  sermons  de  saint  Césaire,  de  qui 
la  plupart  des  évéqnes  de  ce  temps-là  ne 
faisaient  point  dilliculté  d'emprunter  les  pa- 


a  tiu  Pendant  son  séjour  A  la  cour,  il  fit  connais- 
sance avec  saint  Didier,  évôcpie  de  Caliors, 
et  avec  saint  Ouen  ou  Audouën,  qui  fui  tians 
la  suite  évoque  de  Rouen. 

5.  Son  zèle  à  défoudre  la  foi  contre  les 
hérétiques,  et  à  détruire  la  simonie  qui  dé- 


I  ri  II 


.j'î;;';  figurait  alors  la  face  de  l'ÉsIise  gallicane,      rôles.  Saint  Eloi  insistait  beaucoup  sur  l'ac 

II,    up.  ^  .  .  ..  .     ,  _ 


Ibid.   c^p* 


cap.  ixxill. 


furent  les  motifs  qui  engagèrent  les  évoques 
du  royaume  à  jeter  les  yeux  sur  lui  pour 
remplir  le  siège  épiscopal  de  \oyon,  vacant 
vers  l'an  639  par  la  mort  de  saint  Acaire. 
Cette  église  était  unie  depuis  longtemps  avec 
celle  de  Tournai.  La  Flandre,  et  les  pays 
de  Gand  et  de  Courlrai  qui  en  dépendaient, 
étaient  haiités  par  des  peuples  la  plupart 
encore  païens,  et  si  fîirouclies  qu'ils  ne  vou- 
laient rien  entendre  de  l'Evangile.  Ce  fut  la 
principale  raison  de  leur  donner  un  pastenr 
si  zélé.  Il  ne  voulut  se  charger  de  l'épisco- 
pat,  qu'après  avoir  mené  pondant  quelque 
temps  la  vie  clt-ricale.  Déodat,  évoque  de 
Màcon,  l'ordonna  prêtre,  ensuite  il  fut  s'icré 
évèque  à  Rouen  avec  saint  Ouen  son  ami,  le 
21  de  l'an  640'.  Quatre  ans  après  il  assista  au 
concile  de  Châlons-sur-Saône.  U  avait  eu  des- 
sein d'aller  à  Rome  pour  y  prendre  avec  les 
autres  évêques  la  défense  de  la  foi  contre  les 
monolhélites  :  mais  il  en  fut  empoché  par 
des   obstacles   qu'il    ne    put    surmonter.  Il 
mourut  le  premier  jour  de  décembre  659, 
âgé  de  soixante-dix  ans,  après  environ  vingt 
ans  d'épiscopal.  Entre  les  édifices  dont  nous 
avons  parlé,  il  fit,  hors  de  la  ville  de  Paris, 
un  cimetière  poiu"  les  religieuses,  avec  une 
c.p.  iTiii.  église  dédiée    A  saint  Paul  :  il  renouvela 
Lii..  n,  celle  de  Saint-Martial  de  Limoges  :  il  fonda 
à  Noyon  un  monastère  de  filles,  orna  d'or  et 
de  pierreries  les  chasses  de  saint  Germain, 
évêque  de  Paris,  de  saint  Séverin,  de  saint 
Piat,  de  saint  Quentin,  de  saint  Lucien,  de 
sainte  Geneviève,  de  sainte  Colomlie,  et  mit 
plusieurs  ornements  aux  tombeaux  de  saint 
Martin  et  de  saint  Denis.  Le  roi  Dagobert 
fournissait  à  toutes  ces  dépenses. 

6.  Saint  Ouen,  auteur  de  sa  Vie,  nous  a 
donné  en  abrégé  la  doulrinc  des  discours  que 
ce  saint  évéque  faisait  à  ses  peuples,  en  re- 
marquant que  chaque  jour  il  les  assemblait 
de  tous  cotés,  et  les  exhortait  avec  un  zèle 
infatigable,  mais  avec  beaucoup  de  précision, 
à  la  pratique  des  vertus  chrétiennes.  U  rap- 

'  Act.  Ordin.  S.  Benedicti,  loin.  Il,  in  Prolog., 
uuiD.  no,  6t. 

>  Qui  rrgrolal,  in  xola  Dei  misericorilia  confi- 
nât, cl  Eiirh'irisiiinii  ritriiiiris  rlSanguinis  Chrisli 


rtf.  r 

Lîb.  I,  cap 


EllcIlTiU, 
III..    Il,   cop. 


complissemenl  des  promesses  que  nous  avons 
faites  au  baplome,  soit  par  nous-mômes,  soit 
par  la  bouche  de  ceux  qui  nous  ont  tenus 
sur  les  fonts  sacrés.  U  représentait  que  Dieu 
garde  le  symbole  de  la  foi  que  nous  avons 
prononcé  alors,  et  qu'il  nous  on  demandera 
compte  ;  qu'il  ne  sutfit  pas  do  porter  lo  nom 
de  chrétien,  si  l'on  n'en  remplit  les  devoirs 
et  les  obligations;  celle  oii  nous  sommes, 
lorsque  nous  allons  à  l'église,  d'y  invoquer 
le  secours  des  saint*,  de  d'iébrer  leurs  f^tes 
avec  dévotion,  principalement  le  saint  jour 
du  dimanche  ;  de  visiter  les  infirmes,  de  sou- 
lager les  prisonniers,  de  nourrir  et  de  vôlir 
les  pauvres ,  de  recevoir   les  étrangers.  11 
condamnait  les  restes  d'idohltrie  qui  avaient 
encore  cours  dans  quelques  endroits  de  son 
diocèse,  comme  de  consulter  les  devins  et 
les  sorciers,  d'observer  les  élernuemenls  et 
le  chant  des  oiseaux,  le  jour  que  l'on  sort  de 
sa  maison  ou  que  l'on  y  rentre,  les  masca- 
rades, les  festins  du  premier  jour  de  janvier, 
les  danses  et  les  chansons  A  la  Saint-.Ican  et 
aux  fêtes  des  saints.  Il  défendait  d'invoquer 
le  nom  des  faux  dieux,  de  fêter  le  jeudi  en 
l'honneur  do  Jupiter,  do  mettre  du  lumi- 
naire ou  de  rendre  des  vœux  :\  des  temples,  ù 
des  pierres,  à  des  fontaines,  ii  des  arbres 
ou  à  des  carrefours;  d'attacher  au  coudes 
femmes  ou  des  animaux  des  ligatures,  même 
faites  par  des  clercs  et  avec  dos  paroles  de 
rÉcrilure,  de  ciier  pendant  l'éclipsc  de  lune, 
d'appeler  seigneurs  le  soleil  el  la  lune,  et  de 
jiiier  par  eux  ;  de  croire  an  destin,  A  la  for- 
tune, à  la  naissance  heureuse  et  malhoureu- 
se,  puisque  Dien  veut  que  tons  les  hommes 
soient  sauvés,  et  qu'ils  parviennent  à  la  con- 
naissance de  la  vérité  ;  do  n'avoir  recours 
dans  les  maladies  ni  aux  enchanlours,  ni 
aux  sortilèges,  mais  seulement  A  la  miséri- 
corde de  Dieu  ',  h  l'encharistie  du  corps  et 
du  sang  de  Jésus-Christ,  et  i\  lluiile  sainte 
de  l'Kglise ,  pour  s'en  oindre  le   corps  au 
nom  du  Sauveur.  Quelle  que  soit  la  verlu  du 

cum  fidc  ac  devoliane  percijtiat,  olcumque  hcne- 
riicttim  fideliler  ah  Ecrlesiii  peint,  unde  corpuf 
suum  in  nomine  Clirisli  ungat.  Eligii  VtVffl, lib.  Il, 
inp.  XV,  imti.  216,  tom.  V  SpicHegii. 


CHAPITRE  LXXV.  —  SAINT  ÉLOl  ET  SAINT  OUEN. 


[vu'  SIÈCLE.] 

signe  de  Jésus-Christ  el  do  sa  croix,  il  ëtiiit 
persuadé  que  coux-l;\  seuls  en  tiraient  avan- 
tage, qui  obscrvaieul  les  coiuujandonients 
de  Dieu  :  c'est  pourquoi,  en  conseillant  à  ses 
peuples  de  se  munir  à  toute  occasion,  soit 
en  se  levant,  soit  tMi  mangeant,  soit  en  se 
couchant,  de  ce  signe  salutaire,  il  cxhoriait 
à  s'occuper  sérieusement  de  l'accomplisse- 
ment de  la  loi  du  Seigneur  et  de  la  pratique 
des  bonnes  œuvres,  du  pardon  des  ennemis, 
de  raumonc,  de  la  prière,  du  paiement  de 
la  dime  de  leurs  revenus,  soit  aux  pauvres, 
soit  aux  églises.  Il  disait  aux  '  pécheurs  de 
ne  pas  atteudj'e,  pour  recourir  aux  remèdes, 
que  leurs  plaies  fussent  pourries,  et  de  ne 
pas  augmenter  péchés  sur  péchés,  mais  de 
se  procurer  un  prompt  remède  par  la  con- 
fession. Il  voulait  'pie  l'on  séparât  de  la  com- 
munion ceux  qui  vivaient  dans  le  concu- 
binage ,  dont  il  avait  tant  d'horreur,  qu'il 
pensait  que  le  péclié  de  celui  qui  avant  le 
mariage  légitime  vit  avec  une  concubine, 
est  plus  grand  que  l'adultère,  sans  doute  à 
cause  du  scandale  qui  est  inséparable  du 
concubinage  public,  et  qui  ne  se  trouve  pas 
dans  un  adultère  secret.  C'était  sa  coutume 
de  finir  ses  discours  en  disant  qu'il  prenait 
le  ciel  et  la  terre  à  témoins  d'avoir  annoncé 
les  vérités  qui  étaient  de  son  ministère,  et 
qu'au  jour  du  jugement  il  s'élèverait  contre 
ceux  qui  n'avaient  pas  voulu  les  écouter,  ni 
les  mettre  en  pratique. 
Homélies       7.  Cet  abrégé  ne  contenait,  comme  on  le 

qu'on     lui     tt  .  ... 

«los  meoi  jt-  voit,  que  les  principes  de  religion  qui  sei- 
I  valent   de  matière    aux  discours    de    saint 

Eloi*.  On  n'y  dit  point  qu'il  en  ait  fait  sur 
les  mystères  ni  sur  les  principales  fêtes  de 
l'année,  comme  sur  le  jour  de  Noël,  de  la 
Purification,  de  la  Cène  du  Seigneur  ou  du 
Jeudi-Saint.  C'est  déjà  un  préjugé  pour  ne  lui 
point  attribuer  les  dix-sept  Homélies  que  l'on 
a  imprimées  sous  son  nom  dans  la  Biblio- 
thèque des  Pères  ;  mais  ce  n'est  pas  le  seul. 
Le  style  de  ces  homélies  est  affecté  et  mys- 
térieux ;  celui  de  saint  Eloi,  simple  et  natu- 
rel. 11  avait  été  consacré  évèque  dès  le  21 
mai  640.  La  première  de  ces  homélies  ne 
fut  prononcée  que  le  jour  de  Noël,  et  l'au- 
teur la  commence  en  disant  cpie  c'était  la 
première  fois  qu'il  parlait  à  son  peuple.  Un 
évoque  aussi  zélé  que  saint    Éloi  aurait-il 


'  Continua  per  pœtiitentiœ  confessionem  reme- 
diiim  vobis  adkibere  fesUnate.  Ibid.,  pag.  224. 
»  Tom.  XII  Bibloth.  Pat.,  pag.  300. 


75Î! 


laissé  écouler  sept  ou  huit  mois  sans  distri- 
buer le  pain  de  la  parole  divine  à  un  peuple 
qui  en  avait  si  grand  besoin?  Il s'aband(mue 
dans  la  seconde  à  des  allégories  sur  la  céré- 
monie de  la  purification  usitée  chez  les  Juifs, 
qui  n'auraient  guères  été  entendues  d'un 
peuple  tel  que  celui  de  la  Belgique,  dans  le 
temps  que  saint  Eloi  en  prit  soin.  Il  allégo- 
rise  encore  dans  la  douzième,  qui  dans  l'é- 
dilion  de  Lyon  est  comptée  pour  une  partie 
de  la  onzième.  Cilant  dans  celle-ci  ce  que 
saint  Benoit  dit  dans  sa  Règle  du  respect  et 
de  la  révérence  qu'on  doit  apporter  à  la 
prière,  il  se  sert  de  ces  termes  :  Très-heureux'^ 
et  très-saint  Père  Benoît;  au  lieu  qii'en  par- 
lant, dans  la  même  homélie,  de  saint  Augus- 
tin, de  saint  Léon,  il  ne  les  qualifie  que  de 
Saints.  L'auteur  était  donc  un  moine  béné- 
dictin, tiré  de  son  monastère  pour  remplir 
une  chaire  épiscopale  :  or,  saint  Eloi  ne  fut 
jamais  moine  bénédictin  ;  il  était  encore 
laïque,  lorsqu'on  l'élut  évèque  de  Noyon.  Il 
est  donc  visible  que  c'est  par  erreur  que  l'on 
a  mis  son  nom  à  la  tète  de  ces  dix-sept  ho- 
mélies. On  trouve  dans  la  quinzième  un  en- 
droit très-fort  pour  la  présence  réelle  :  «  Sa- 
chez ',  mes  frères,  et  croyez  fermement  que, 
comme  la  chair  que  Jésus-Christ  a  prise  dans 
le  sein  de  la  Sainte-Vierge,  est  son  véritable 
corps  qui  a  été  offert  pour  notre  salut,  de  mê- 
me le  pain  qu"il  a  donné  à  ses  disciples,  et 
que  les  prêtres  consacrent  tous  les  jours  dans 
l'église,  est  le  vrai  corps  de  Jésus-Christ.  Ce 
ne  sont  point  deux  corps  ,  c'est  le  même 
corps  que  l'on  rompt  et  que  l'on  immole  : 
Jésus-Christ  est  immolé  et  mangé,  quoiqu'il 
demeure  sain  et  entier.  « 

8.  La  sixième  lettre  parmi  celles  de  saint 
Didier,  dans  la  collection  de  Canisius,  est  de 
saint  Éloi  ^  Il  y  prend  dans  l'inscription  la 
qualité  de  serviteur  des  serviteurs  de  Dieu. 
Ce  n'est  qu'un  écrit  de  l'amitié  que  la  charité 
avait  formée  entre  lui  et  saint  Didier.  Il  dit 
au  commencement  qu'il  ne  laissait  échapper 
aucune  occasion  de  lui  écrire  :  ce  qiù  fait 
voir  qu'il  nous  manque  d'autres  lettres  de 
saint  Eloi.  On  conserve  encore  la  charte  qu'il 
fit  dresser  pour  la  fondation  du  monastère 
de  Solignac  ^  Il  y  est  dit  que  l'on  y  obser- 
vera les  règles  de  saint  Benoît  et  de  saint 
Colomban,  et  que  le  monastère  sera  exempt 


'  Ibid.,  p.ig.  314.-  i  Ibid.,  pag.  319. 

*  Canisius,  tom.  I,  pag.  646. 

6  Tom.  II  Act.  Ordin.  S.  Benedicti,  pag.  468. 


Lettre  â- 
S.  Eloi. 


7o6 


HISTÛIUE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


de  la  juridiction  de  l'évêque  et  de  toute  au- 
tie  personne,  si  ce  n'est  du  roi.  Celte  charte 
est  datée  du  22  uoveniLrc,  la  dixième  année' 
du  roiDagobert,  de  Jésus-Christ  631,  et  est 
signée  de  saint  Éloi  et  de  plusieurs  autres 
évêques. 

s<ioioii{a,  9-  Quelques  laïques  y  souscrivirent  aussi, 
*rÎ3".  **  entre  autres  Dadon.  C'est  le  môme  que  saint 
Oucn  dont  nous  parlerons  ici',  puisque  son 
principal  écrit  est  la  Vie  de  saint  Éloi.  Ils 
avaient  clé  ensemble  en  grand  crédit  à  la 
cour  du  roi  Dagobert.  Saint  Ouen  gardait  le 
sceau  en  qualité  de  réféicndaire  ou  chan- 
celier. Et^,nl  encore  enfant,  il  avait  reçu  la 
bénédiction  de  saint*  Colombau,  qui  allant 
dans  le  royaume  de  Théodeberl  ,  passa  à 
Cussy  où  demeurait  .\utliaire,  père  de  saint 
Ouen.  Ce  saint,  ayant  obtenu  du  roi  une 
terre  dans  les  forêts  de  Brie,  y  lit  bâtir  le  mo- 
nastère de  Resbac  ou  Rebais,  auquel  il  don- 
na pour  abbé  saint  .\gile,  moine  de  Luxeuil, 
et  disciple  de  sainl  Colombau.  Il  eut  part 
avec  saint  Éloi  à  la  tenue  d'un  concile  d'Or- 
léans que  l'on  compte  pour  le  sixième,  où 
Salvius,  évéque  de  Valence,  convainquit  un 
hérétique  ,  ciiassé  d'ouirc-mer  ,  qui  semait 
ses  erreurs  du  côté  d'Autun  en  6i0.  Il  fut 
ordonné  évêque  de  Rouen  à  la  place  de  saint 
Romain,  mort  quelque  temps  auparavant. 
11  assista  en  044  au  troisième  concile  de  Châ- 
lons,  et  fil  en  677  le  voyage  de  Rome  avec 
saint  Saens.  Ce  n'était  qu'un  voyage  de  dé- 
votion ;  mais  il  avait  été  choisi  en  649  avec 
saint  Éloi  pour  aller  en  cette  ville  prendre 
part,  au  nom  des  cvèqiies  de  France ,  à  la 
défense  de  la  foi  contre  les  monothélites.  On 
ne  sait  ce  qui  empêcha  l'exécution  de  ce 
dessein.  Le  pape  Martin  I"  l'avait  suggéré  , 
en  demandant  au  roi  Clovis  quelques-uns 
des  plus  savants  de  son  royaume  ,  pour  les 
envoyer  légats  àConstantinople.  Saint  Ouen 
mourut  à  Clichy,  maison  royale  près  de  Pa- 
ris ,  au  retour  d'un  voyage  qu'il  avait  fait  à 
Cologne  pour  quelque  allairu  d'État.  Son 
épiscopat  fut  de  quarante- trois  ans,  trois 
mois  et  trois  jours. 

sn«eHu.  ^^-  ^'^  sainl,  faisant  rcllexiou  que  des 
pei'sonncs  illustres  avaieut  pris  la  peine  de 
recueillir  les  actes  des  martyrs  et  les  grandes 
actions  des  confesseurs',  coui^'ut  le  dessein 
de  transmettre  aussi  à  la  poslérilc  ce  qu'il 


savait  de  la  naissance,  de  la  vie  et  de  la  mort 
de  saint  Éloi.  Quelques  personnes  d'érudi- 
tion l'avaient  fait  avant  lai  ;  mais  engagées 
dans  les  embarras  des  affaires  du  siècle,  elles 
avaient  traité  une  si  belle  matière  en  cou- 
rant, en  sorte  que  leur  travail  ne  répondait 
point  à  la  grandeur  du  sujet.  Il  lui  donna 
plus  d'étendue,  sans  s'astreindre  toutefois  à 
rapporter  tout  ce  qu'il  savait.  L'abunilante 
de  la  matière  aurait  produit  un  gros  volume. 
Le  sien  lui  a  paru  assez  considérable  pour 
être  divisé  en  deux  livres,  dont  le  premier , 
qui  est  sous-divisé  en  quarante  chapitres, 
représente  la  vie  de  saint  Kloi  depuis  sa 
naissance  jusqu'à  son  épiscopat.  Le  second, 
qui  est  de  quatre-vingts  chapitres,  contient 
la  suite  de  l'histoire  de  ce  saint  Jusqu'après 
la  translation  de  son  corps,  qui  se  fit  par 
ordre  de  la  reine,  et  de  l'évêque  son  succes- 
seur ,  un  an  après  sa  mort.  Saint  Ouen  rap- 
porte les  miracles  opérés  en  cette  occasion. 
Il  en  rapporte  beaucoup  d'autres  que  le  saint 
avait  faits  de  son  vivant  ;  et  c'est  à  quoi  il 
s'applique  le  plus  dans  son  second  livre , 
qui  est  écrit,  comme  le  premier,  d'un  style 
simple  et  sansorncmenis,  mais  clair  et  aisé, 
pour  se  conformera  l'humilité  du  saint  dont 
il  faisait  l'histoire. 

H.  Aussilùt  qu'elle  fut  achevée,  il  l'en-  sjiniro» 
vo3'a  a  un  eveque  de  ses  amis,  nommé  Ro-  tobft- 
dobert',  dont  on  ignore  le  siège  ,  avec  une 
lettre  où  il  le  priait  de  la  revoir  et  de  la  cor- 
riger, tant  dans  les  choses  que  dans  le  style, 
même  dans  l'orthographe ,  où  il  pouvait 
s'être  glissé  des  fautes,  soit  de  sa  part,  soit 
de  celle  des  copistes.  Rodobert  la  lut  exacte- 
ment, el  n'y  trouva  rien  qu';\  admirer.  Smius 
l'a  insérée  dans  son  recueil  au  premier  de 
décembre,  mais  en  y  retranchant  beaucoup 
de  choses,  et  en  changeant  le  style.  Le  père 
Labbe  n'en  a  donné  que  la  préface  dans  le 
second  tome  de  sa  Bibliolhèque  des  Manus- 
crits, imprimée  à  Paris  en  1G57.  L'ouvrage 
entier  se  trouve  dans  le  cinquième  tome  du 
Spicilége  de  dom  d'Acbéri ,  avec  la  letti-e  à 
Rodobert  et  la  réponse  que  cet  évéque  fit  à 
saint  Ouen.  Nous  avons  deux  traductions 
françaises  de  la  Vie  de  saint  Éloi  ;  l'une  faite 
sur  Surius  par  Louis  ^  de  Montigny,  cha- 
noine de  Noyon,  et  imprimée  en  1626  ;  l'au- 
tre sur  l'édition  de  dom  d'.\chéri,  par  L'É- 


'  Vita  S.  Àudoeni,   npnd.  .Sur.,  el  Bollaud.,  ad      Spiii/ij/ii,  pag.  1  il. —  »  Tmii.V  S/)id7.,pat(.  301,302. 
diem  Si  Augusli.  *  .Mirau.-.  Ue  Scriplor.  EccUs..  n\\>.  llïxiu. 

•  Audycuu!^,  Prologo  in  Vita  S.  Eligii,  tome  V 


[vu"  SIÈCLE. 


CHAPINRE  l.XXV.  —  SAINT  ÉLOI  ET  SAINT  OUEN. 


7.'i7 


Anlro  lot- 
l>o  h  Minl 
Dnl!*r  (vtfiuo 


E(flllnn<, 
Discours    |>ii- 


il  ne  faudrait  point  trop  dépasser  l'année 
645.  Or,  c'est  l'époque  où  saint  Ouen  avait 
le  plus  de  puissance  au  palais.  Référendai- 
re, apnci-isiairc,  arcliitliaiielain,  évôfjiie  de 
Rnucii.  il  pouvait  selon  l'usaj^e  exercer  toutes 
ces  roiictions  el  coulinucr  de  surveiller  au 
palais  l'éducation  du  jeune  prince.  Obligé 
cependant  de  se  livrer  à  son  troupeau,  on 
cou(;oil  qu'il  ail  éprouvé  le  besoin  de  laisser 
par  écrit,  entre  les  mains  de  son  royal  élève, 
un  précis  de  ses  enseignements  '• 

Il  est  difficile,  dit  encore  le  savant  histo- 
rien de  la  Vie  de  saint  Léger'",  de  ne  pas  y 
reconnaître  une  exhortation  d'un  maître  de 
l'oratoire  l'oyal.  Il  y  règne  une  couleur  mé- 
thodique, savante  et  pédagogique,  un  ac- 
cent d'autorité  douce  et  familière,  des  allu- 
sious  aux  traditions  intimes  du  [lalais  ,  une 
hardiesse  de  détails,  une  franchise  de  conseils 
qui  ne  s'expliquent  bien  que  dans  la  bouche 
d'un  précepteur  tel  qu'Audoen  ou  Léodegar. 
Ce  précepteur  appelle  le  jeune  roi  son  fils, 
et  il  lui  donne  des  conseils  sur  les  jeunes 
Francs  nourris  au  palais;  il  revient  fcouvent 
sur  cette  parole  qui  sent  l'école  mérovin- 
gienne, il  va  jusqu'à  demander  que  tous  les 
Francs  soient  traités  comme  les  nourrissons 
du  palais.  Il  est  évident  que  ce  langage  ne 
convient  qu'à  l'archichapelain. 

Quel  que  soit  le  Bossuet  ou  le  Fénélon  du 
vii'^  siècle  qui  ait  rédigé  ces  instructions  sur 
l'éducation  d'un  prince,  elles  jettent  un  grand 
jour  sur  le  programme  adopté  dans  la  royale 
école,  et  sur  la  délicate  mission  confiée  par 
la  reine  Bathilde  à  Léodegar. 

Voici  le  début  : 

((  J'avertis  ta  sublimiti-,  très-noble  roi, 
afin  que  ton  excellence  daigne  accueillir  bé- 
nignementce  que  j'ai  osé  écrire  sous  la  dic- 
tée de  la  charité.  Or,  il  te  faut,  très-pieux 
roi,  repasser  fréquemment  les  Écritures  sa- 
crées, afin  que  tu  puisses  y  apprendre  les 
raisons  d'agir  des  anciens  rois  qui  ont  été 
agréables  à  Dien  ;  comment,  sous  la  sauve- 
garde de  l'humilité,  ils  ont  plu  au  Seigneur; 
comment,  en  suivant  leurs  traces,  tu  obtien- 
dras un  long  et  durable  honneur  en  ce 
joyaume  présent,  et,  par  dessus  tout,  une 
vie  éternelle.  Ainsi  le  roi  David,  toujours 
sage  et  humble,  en  opérant  les  bonnes  œu- 
vres qui  agréaient  au  Seignein-,  a  triomphé 

'  Cauis.,  toin.  1,  pa^j.  639,  643;  Du  Chesnp,  tom.  Hommeraye,  Bist.  des  Archevêques  de  Rouen,  \>a(^. 

-1,  pag.  879.  87,  mim.  18. 

•  Pos^eviu. in  Apparatu,tom.],  j4ppend.,pag.  14;  '  Histoire  de  saiut  Léger,  par  D.  Pitra,  pag.  120, 

Sigebert,  De  Script.  Ecoles.,  cap.  Lvni,  in  notis;  note  2.  —  '  Ibid.,  pag.  121. 


v^qnc ,  prêtre  de  la  chapelle  des  orfèvres 
à  Paris,  et  imprimée  en  cette  ville  cliez  Coi- 
gnard  en  1693. 

12.  Canisius  et  Dnchesne  nous  ont  donné 
une  Lettre  de  saint  Didier,  évèquedeCahois, 
à  saint  Ouen  déjà  évèque  ',  où  il  le  fait  l'es- 
Sonvenir  de  l'union  qu'il  avait  avec  lui  et 
saint  Éloi,  dans  le  temps  q\i'ils  étaient  l'un 
et  l'autre  ;\  la  co;ir,  et  qui  ne  s'était  [loint 
démentie  par  leur  élévation  ii  l'épiscopat. 
Saint  Ouen  en  écrivit  une  à  saint  Ditlier, 
conjointement  avec  Constance,  évèque  d'Al- 
hi,  pour  le  prier  d'écrire  à  un  nommii  Fia 
vien,  avec  qui  ils  devaient  se  trouver  en  nn 
certain  lieu.  On  '  attribue  à  saint  Ouen  une 
Vie  de  saint  Rémi,  et  quelques  vers  ;\  la  louan- 
ge de  saint  Médard  et  de  saint  Gildard. 

[Les  écrits  de  saint  Éloi  et  de  saint  Ouen 
sont  reproduits  au  tome  LXXXVII  de  la  Pa- 
trologie  latine,  col.  477  et  suiv.,  avec  une 
notice  tirée  de  la  GaUia  christiann.  On  y 
trouve  la  Vie  de  saint  Éloi  par  saint  Ouen, 
les  homélies  de  saint  Eloi,  un  discours  publié 
par  le  cardinal  Maï  dans  les  Script,  vet.  nova 
coll.,  tome  VI,  part.  2,  p.  iii-viii.  C'est  une 
exhortation  à  un  jeune  roi.  Maï  pense  que  ce 
roi  est  Clovis  II,  et  il  attribue  cet  écrit  à  saint 
Eloi  ou  à  saint  Ouen.  Le  manuscrit  qui  l'a  four- 
ni provient  du  fonds  de  la  reine  de  Suède, 
maintenantau  Vatican.  C'est  manife.stement 
-'une  pièce  du  vii°  siècle.  «  Le  jeune  roi  aurait 
eu,  aux  termes  de  cette  œuvre,  pour  trisaïeul 
le  premier  des  Clotaires,  et  pour  aïeul  le  se- 
cond :  ce  qui  ne  peut  convenir  qu'à  l'un  ou  à 
l'antre  des  deux  fils  de  Dagobert.  Bien  qu'on 
y  fasse  plus  d'une  allusion  aux  principaux 
personnagesdelacour,  etsurtout  aux  parents 
du  jeune  prince ,  il  n'y  a  nulle  mention 
même  indirecte,  soit  de  Nanthilde,  la  veuve 
de  Dagobert,  soit  de  Bathilde.  Il  est  donc 
présumable  qu'à  l'époque  où  l'auteur  écri- 
vait, Nanthilde  était  déjà  morte,  el  que  Ba- 
thilde n'était  pas  encore  reine.  Cette  pièce 
tomberait  ainsi  entre  l'année  640  où  mourut 
Nanthilde,  et  l'année  649  où  Bathilde  devint 
reine  des  Francs.  Comme  enfin  cette  exhor- 
tation suppose  un  prince  déjà  d'un  âge  in- 
telligent, il  faut  se  reporter  au-delà  de  645, 
pour  que  Clovis  né  en  633  fût  en  étal  de 
l'entendre.  Cependant,  comme  il  est  question 
d'un  règne  naissant  ou  encore  peu  avancé, 


HISTOIRE  GRNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


758 

sans  peine  des  batailles  préparées  contre  lui, 
et  a  commencé  d'édifier  le  temple  du  Sei- 
gneur ;  et  après  lui  son  Qls  Salomon  le  mena 
à  la  perfection,  car  le  Seij^ueur  avait  parlé 
par  le  Prophète  ù  David,  lui  disant  :  De  toi 
sortira  celui  qui  plus  tard  édifiera  ma  maison, 
et  il  est  dit  que  ce  même  roi  Salomon  eut 
une  sagesse  si  grande  el  une  telle  puissance, 
que  jamais  nul  ne  put  reprendre  en  ses  dires 
un  seul  iota.  11  fut  droit  en  jugement,  sage 
en  paroles,  et  régla  tous  ses  mouvements 
d'une  manière  royale.  » 

Ainsi,  avant  toutes  choses,  le  précepteur 
en  appelle  au  grand  Maître,  el  il  dépose  au 
cœur  de  son  disciple  ^les  enseignements  des 
saints  livres. 

Ces  préliminaires  posés ,  le  pieux  insti- 
tuteur expose  avec  autorité  les  devoirs  du 
roi  et  ceux  du  chrétien,  qu'il  place  en  der- 
nier lieu,  comme  le  couronnement  des  ver- 
tus royales. 

11  réduit  à  trois  principales  les  conditions 
du  bon  roi  :  l'habileté  à  s'entourer  de  bons 
conseils  ;  la  pratique  des  vertus  vraiment 
royales  ;  la  fuite  des  vices  qui  déshonorent 
la  loyauté.  Pour  développer  ce  thème,  il  en 
appelle  successivement  aux  enseignements 
de  la  parole  divine,  aux  axiomes  de  la  sa- 
gesse des  siècles,  aux  exemples  domestiques 
des  Mérovingiens. 

11  met  en  première  ligne  le  conseil  des 
évoques,  puis  celui  des  seigneurs,  et  en  troi- 
sième lieu  seulement  celui  des  maires  du 
palais,  et  à  peine  en  dernier  lieu  fait-il  te- 
nir compte  des  suggestions  de  ces  jeunes 
Francs  ,  compagnons  d'enfance  des  rois , 
dont  l'ascendant  pouvait  être  dangereux. 

«  Quant  aux  jeunes  hommes  qui  assistent 
de  plus  près  à  tes  côtés,  accueille  leurs  pa- 
roles avec  une  discrétion  défiante,  car  sou- 
vent les  chutes  viennent  par  le  conseil  des 
jeunes,  et  l'honneur  durable  d'un  bon  conseil 
subsiste  dans  les  vieillards.» 

«  Cette  sage  distribution  des  conseillers 
révèle  un  observateur  consommé  ;  le  ren- 
versement de  cet  ordre,  la  prépondérance 
excessive  donnée  au  maire,  les  complaisances 
pour  les  plus  jeunes  conseillers,  autrement, 
l'enfance  prolongée  des  princes,  seront  la 
ruine  des  Mérovingiens. 

«  Mais  les  conseils  de  l'homme  sont  insuf- 
fisants et  SOS  prévoyances  incertaines  ;  il  faut 
donc  recourir  h  une  sagesse  plus  haute,  et  le 
plus  beau  modèle  en  ce  genre  que  présente 
l'histoire,  c'est  le  jeune  Salomon,  invoquant 


le  Dieu  de  ses  pères,  et  la  =agessc  assise  sur 
son  trùne.  C'est  cet  exemple  et  cette  prière 
qui  sont  proposés  au  jeune  prince  mérovin- 
gien pour  éclairer  son  inexpérience. 

(c  Puis  on  place  sous  ses  yeux  comme  un 
double  tableau,  où  les  vertus  d'un  bon  roi 
sont  mises  en  contraste  avec  les  vices  qu'il 
doit  éviter  : 

(i  Or  donc,  seigneur,  si  tu  demandes  à 
Dieu  ces  biens,  et  que  tu  sois  mesuré  en  tes 
paroles,  ferme  en  tes  dires,  conciliant  d'es- 
prit, riche  en  charité,  prudent  et  fin  dans  la 
bonté,  d'un  facile  el  large  accueil,  discret 
dans  les  largesses,  droit,  au  jugement,  dé- 
bonnaire à  la  peine,  compatissant  aux  pau- 
vres, le  Seigneur  ajoutera  à  tes  longues  an- 
nées, comme  il  a  fait  aux  rois  tes  prédéces- 
seurs qui  ont  noblement  régné  en  ce  siècle. 
Vraiment,  seigneur,  si  dans  cet  âge  de  jeu- 
nesse.tu  es  accompli,  toutes  les  nations  tes  en- 
nemies trembleront  devant  la  droiture  ell'é- 
quilé  de  ton  gouvernement  ;  tous  les  fidèles 
se  réjouiront  avec  toi,  tous  les  hommes  te 
craindront,  t'écoutcront,  et  t'aimeront;  tous 
rendront  grâces  au  monarque  divin,  Notre- 
Sc'igneur  Jésus  -  Christ ,  d'avoLi"  mérité  de 
posséder  un  tel  roi.  » 

11  n'y  a  pas  jusqu'à  l'élégante  pureté  de 
la  forme  qui  ne  soit  remarquable  dans  cette 
paternelle  exhortation,  d'heureuses  réminis- 
cences classiques,  mêlées  d'un  parfum  de 
latin  liturgique,  la  justesse  des  vues,  des 
traits  de  maux  piquants,  des  aperçus  jileius 
de  finesse,  toujours  dominés  par  uu  noble 
accent  de  foi  et  de  dignité  apostolique,  écla- 
tent de  plus  en  plus  dans  la  suite,  où  l'énu- 
méralion  des  vertus  royales  continue  sous 
forme  de  conseil  :  «  Il  faut  une  dignité  tou- 
jours sereine  en  écoulant  les  avis  dans  l'as- 
semblée des  conseifiers  ;  une  sollicitude  at- 
tentive à  peser  chacune  de  leurs  paroles, 
selon  les  avantages  de  la  patrie,  l'intérêt  de 
sa  stabilité,  la  nature  des  abus  à  supprimer, 
le  salut  du  prince,  les  exigences  de  son  ad- 
ministration et  les  usages  de  la  chancellerie 
du  palais  :  il  faut  tout  voir  el  tout  entendre, 
allier  l'avide  curiosité  d'un  enfant  qui  veut 
sagement  s'instruire,  à  une  prudence  telle, 
qu'on  écoulant  ses  conseillers,  le  prince 
semble  moins  leur  disciple  que  leur  maitro  ; 
que  le  sage  soit  distingué  do  la  foule,  reçu 
de  préférence,  interrogé,  honoré  de  l(ini;s 
entretiens.  Mais  le  jongleur  tient-il  ce  propos 
de  cour,  ne  l'écoute  point  fucilement.  Que 
situ  t'entretiens  avec  les  sages,  ou  quo  tu 


CHAMTRE  LXXV.  —  SAINT  ÉLOI  ET  SAINT  OUEN. 


[vil'  SIÈCLE.] 

aies  d'uliles  conversations  avec  tes  officiers, 
impose  silence  aux  jongleurs.  Mieux  vaut  dé- 
poser au  fond  de  son  cœur  la  sagesse  que  d'en- 
tendre des  propos  futiles  et  insensés  :  car  où 
luiliitc  la  sagesse,  Dieu  fait  aussi  son  séjour. 

(I  L'habile  maître  interrompt  ses  conseils 
par  des  exemples  adroitement  empruntés 
aux  traditions  mérovingiciines,  aux  ancêtres 
mêmes  du  royal  disciple.  Ces  jugements  cnu- 
temporains  ont  toute  la  maturité  de  l'his- 
toire, qui  ne  les  a  point  démentis. 

«  Telle  fut  la  sagesse  et  la  douceur  de 
Childeberf,  qu'il  aimait  d'un  égal  et  paternel 
amour  les  anciens  et  les  plus  jeunes  ;  aussi 
quiconque  se  rappelle  encore  son  nom,  prê- 
tres ou  laïques,  ('lève  les  mains  et  recom- 
mande son  âme,  d'autant  qu'il  fut  toujours 
généreux  dans  ses  largesses  pour  les  lieux 
saints  et  les  fidèles.  » 

«  Le  vieux  Clotaire,  qui  eut  cinq  fils  et  de 
qui  tu  descends,  fut  puissant  par  la  parole, 
conquit  la  patrie  et  nourrit  ses  fidèles. 

«  Mais,  entre  toutes  autres  choses,  qu'il 
nous  est  doux  de  remémorer,  ton  aïeul  Clo- 
taire, qui  eut  tant  de  bénignité  selon  Dieu, 
qu'il  ne  semblait  pas  seulement  un  juste 
dans  ses  œuvres,  mais  un  prêtre  vivant  au 
milieu  du  siècle,  en  gouvernant  les  Francs, 
il  édifia  des  églises.  Or  donc,  très-doux  sei- 
gneur, puisque  tes  pères  ont  eu  si  grande 
doctrine ,  agis  en  toutes  choses  comme  il 
convient  à  un  roi.  » 

Ce  portrait  d'un  bon  roi  ainsi  tracé,  et 
rendu  plus  saillant  par  des  applications  do- 
mestiques, ressort  davantage  du  contraste 
tiré  des  vices  que  doit  éviter  un  roi ,  et 
qui  sont  ici  flétris  sans  ménagement.  La 
légèreté  et  la  colère  ,  deux  défauts  domi- 
nants des  Mérovingiens  ;  l'ivrognerie  repro- 
chée à  tous  les  Francs,  et  en  particulier  à 
Clovis  II  ;  l'indiscrétion  dans  les  paroles  ; 
point  de  préventions,  de  malveillance  ou 
d'orgueil  contre  ra\is  de  qui  que  ce  soit; 
point  de  vengeance,  parce  qu'il  est  écrit  : 
Que  le  soleil  ne  se  couche  point  sur  votre  colère  ; 
prudente  sauvegarde  contre  ces  justices  pri- 
vées, qui,  surtout  entre  princes  et  grands, 
allaient  jusqu'à  l'extermination. 

Tout  en  demandant  grâce  pour  sa  rusti- 
cité, le  sage  maître  insiste  sur  ces  principes, 
corrobore  chaque  précepte  de  quelques  pa- 
roles divines,  recommande  encore  la  prière, 
s'épanche  lui-même  en  une  tendre  invoca- 
tion, en  des  vœux  multipliés,  empruntés  des 
plus  affectueux  cantiques  du  Roi-Prophète  ; 


159 


il  bénit,  il  promet,  il  menace,  il  supplie  le 
Dieu  des  rois  de  lui  conserver  son  fils,  de  le 
délivrer  au  jour  mauvais,  de  le  vivifier  et  de 
le  rendre  heuieux.  11  se  livre  atout  l'élan  de 
ses  paternelles  espérances,  et,  comme  pour 
remercier  Dieu  du  bien  qu'il  en  reçoit  et 
qu'il  a  fait  lui-même,  il  termine  ce  pieux 
mouvement  par  ces  paroles  d'une  joie  chré- 
tienne et  patriotique  : 

«  Heureux  qui  au  début  de  ce  règne  que 
le  Seigneur  t'a  domiéen  ces  temps  modernes, 
heureux  les  hommes  de  cœur  qui  font  le 
bien,  qui  suivent  la  droiture,  qui  opèrent  la 
justice  !  car  en  s'appliquant  îi  ces  œuvres, 
ils  te  procurent  les  charmes  de  la  vie  et  se 
ménagent  pour  chaque  chose  une  récom- 
pense ù  l'avenir.  Et  ainsi,  qu'au  loin  et  au 
large,  qu'en  ce  royaume  et  parmi  les  nations 
lointaines,  on  dise  avec  joie  qu'en  ce  palais 
la  noblesse  des  personnes  est  grande  ;  qu'ici 
n'est  point  reniée  la  vérité,  ni  la  justice  re- 
fusée ;  qu'ici,  secouant  la  cupidité  mondaine 
et  marchant  à  la  lumière  de  l'équité,  la  jus- 
tice s'avance  glorifiant  le  Seigneur,  conso- 
lant les  peuples  par  les  irréprochables  arrêts 
de  cet  incorruptible  palais,  réjouissant  les 
pauvres,  défendant  les  veuves  et  prenant  la 
tutelle  des  orphelins.  » 

Continuant  ce  mouvement  entraînant  , 
l'éloquent  pi-écepteur  fait  connaître  dans 
toute  sa  pureté  la  radieuse  image  du  roi 
très-chrétien,  cet  idéal  inconnu  de  l'anti- 
quité et  que  l'Eglise  a  laborieusement  cher- 
ché pendant  près  de  huit  siècles  à  réaliser. 
Les  évêques  des  Francs  se  dévouèrent  à  créer 
ce  prodige,  et  ce  sont  eux  qui  bientôt  pré- 
senteront Charlemagne  au  monde. 

«  Crains  Dieu,  ô  illustre  roi  des  Francs, 
mon  très-doux  fils,  et  aime-le  toujours  ;  vois- 
le  toujours  présent,  et  l'adore  religieusement, 
bien  que  tu  le  croies  invisible  aux  regards 
mortels  ;  et  à  mesure  qu'il  te  comblera 
d'honneurs  de  jour  en  jour,  aime-le  d'au- 
tant plus,  et  prie-le  homblement  chaque 
jour  qu'il  te  donne  la  sagesse  de  gouverner 
le  royaume  que  tu  as  reçu  de  lui.  Sache  que 
tu  es  le  ministre  de  Dieu  établi  pour  être 
l'auxiliaire  miséricordieux  de  tous  les  gens 
de  bien,  le  vengeur  inexorable  rpii  punisse 
tous  ceux  qui  font  le  mal,  et  qui  les  fasse 
trembler  avant  qu'ils  le  commettent.  Pense 
souvent  dans  toute  la  sollicitude  de  ton  âme, 
comment  eu  toute  ta  vie  tu  es  le  sujet  de 
Dieu,  afin  de  régner  heureux  et  longtemps 
sur  les  auti'es.  » 


760 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


(I  Le  pieux  ëvêque  se  révèle  de  plus  en 
plus  :  c'est  un  père  qui  s'adresse  à  son  fils  ; 
c'est  plus  qu'un  piécepleur  enseitrnant  un 
roi,  car  ao-dessus  du  roi  il  y  a  le  chrétien, 
au-dessus  du  trône,  l'ûme  immortelle  ;  il  ne 
suffit  pas  au  jeune  prince  qu'il  s'élève  à  la 
hauteur  d'un  grand  roi,  il  lui  faut  monter 
jusqu'à  la  dignité  du  chrélieu,  jusqu'à  la 
perfection  du  saint.  C'est  là  l'objet  des  der- 
nières recommandations,  qui  roulent  prin- 
cipalement sur  l'accomplissement  des  devoirs 
évantréliques  et  jésument  tous  les  avis  don- 
nés antérieurement.  Enfin  nous  trouvons 
aux  dernières  lignes  des  paroles  énigmati- 
ques  qui  nous  semblent  faire  allusion  aux 
intrigues  de  Grimoald  et  d'Ébroïn.  Ce  trait 
rapidement  iudiqué  est  brusquement  suivi 
d'une  solennelle  et  touchante  conclusion: 

«  Prends  garde  de  fouler  à  pieds  nus  les 
œufs  des  aspics. 

«  Pense  au  dernier  jour,  pour  ue  point 
pécher  en  ta  sécurité  ;  celui  qui  se  prépare 
à  l'avance  est  plus  sage  que  celui  qui  se  laisse 
prendre  au  dépounu.  Or,  maintenant  nour- 


ris, élève,  forme  et  sauve  le  reste  des  Francs, 
ou  leurs  enfants,  plutôt  avec  une  paternelle 
tendresse  qu'avec  un  despotique  empire. 

«  Telles  sont  les  quelques  paroles  que  j'ai 
osé  l'écrire,  entraîné  au-delà  de  mes  forces 
par  mon  amour  pour  toi  et  pour  tous  les 
Francs.  Sache  que,  si  tout  ce  qui  est  ici  écrit 
s'accomplit  sous  ton  gouvernement,  celui  qui 
accorda  quinze  ans  au  roi  lizécbias  élargira 
les  limites  de  ta  vie  et  de  ton  règne  ;  je  de- 
mande humblemcut  à  Dieu  qu'il  accorde  un 
salut  perpétuel  à  la  personne  et  à  tous  les 
tiens,  ô  roi  bien-aimé  !  » 

La  charte  pour  la  fondation  de  Solignac 
est  reproduite  aux  col.  637  et  suiv.  du  même 
volume  de  la  Patrologie.  Les  vers  de  saint 
Ouen  sur  saint  Médard  et  saint  Gildard  sont 
à  la  col.  662.  On  regrette  de  ne  pas  trou- 
ver à  la  suite  le  sermon  de  Rectitudine  cu- 
Iholicœ  conversât ionis,  relégué  parmi  les  dis- 
cours supposés  de  saint  Augustin  au  tome  VI 
de  ce  Père,  édition  des  Bénédictins,  dans 
l'Appendice,  pag.  263.  Il  est  de  saint  Eloi.] 


CHAPITRE    LXXVI. 


Saint  Maxime  abbé  de  Chrysopolis  [662],  Anastase  disciple  de  saiat  Maxime 

[même  année],    Anastase   apocrisiaire  1666], 

Théodore  et  Théodose  [Vil  sièclej. 

[Écrivains  grecs.] 


Naissance 
de  saint  Ma- 
xim e.SiD  (du> 
cation. 


1.  Ce  saint,  que  Dieu  semble  avoir  fait  naî- 
tre exprès  pour  la  défense  de  la  foi  catholi- 
que contre  les  monothélites,  naquii  à  Con- 
stantinople  vers  l'an  380.  Ses  parents,  tjui 
étaient  d'une  ancienne  noblet^sc,  et  luisaient 
profession  d'uue  piété  singulière,  le  tirent 
baptiser  dès  l'enfance,  et  lui  donnèrent  une 
éducation  convenable  à  sa  naissance  et  à 
leur  iuclinalion.  Ses  progrès  dans  les  belles- 
lettres  et  dans  la  vertu  le  tirent  admirer  <lc 
tous  ceux  qui  le  connaissaient,  llcraclius, 
qui  gouvernait  alors  l'Empire ,  l'engagea 
malgré  lui  à  son  service,  el  le  lit  son  pri^mier 
secrétaire,  le  consultant  volontiers  dans  les 
atfaires  de  quelque  importance.  Car  Maxime 
était  de  bon  conseil  :  il  avait  resjjril  péné- 
Iranl,  pai'lail  aisément  et  sans  prcparatitui  ; 
el  quand  il  s'agissait  d'écrire  surquclijiK'  af- 

'  Xaximi  Vila,  loin.  I,  pug  \,i.el  seq. 


faire,  il  s'en  acquittait  avec  une  très-grande 
facilité. 

2.  L'amour  de  la  retraite,  et  la  crainte  de 
souiller  la  pureté  de  sa  foi  par  l'hérésie  nais- 
sante des  monotbclilcs,  lui  fiient  prendre  le 
parti  de  quitter  la  cour  pour  aller  s'enfermer 
dans  le  monastère  de  Chryso polis  dans  le  voi- 
sinage de  Chalcédoiue,  où  il  pratiqua  avec 
tant  de  ferveur  et  d'ass^iduilé  les  exercices  de 
la  vie  monaslique,  que  ses  frères  se  voyant 
tous  surpasser  par  lui  en  vertu,  le  choisi- 
rent unanimement  pour  leur  abbé  à  la  place 
du  dernier  moi  t.  Il  rétisla  loiigleuips  ;  mais 
enlin  il  se  soumit  àla  charge  qu'on  lui  impu- 
sail,  considérant  qu'elle  lui  serait  moins  une 
occasion  de  conmiander  que  de  servir. 

3.  Cepoiulaul  l'erreur  des  monulht'lites  se 
répandait  do  plus  en  plus  ;  d'un  autre  coté, 
les  courses  des  Perses  el  des  Arabes  tenaient 
l'Orient  en  des  alarmes  continuelles.  Saint 


Il  (fultle  la 
ccur  et  «  re- 
tira dant  QD 
moDaalèn. 

Ibid.  p.  t. 


Il  t«  rAllr« 
rn      Afriqua, 


CHAPITRE  LXXVI.  —  SAINT  MAXIISfE,  ANASTASE,  ETC  76 ( 


ri(.  II. 


Il  \\\  Ro- 

mp.  L'pmpe- 
raur  te  Tait 
amflncr  à 

Con-l«nHno- 
fl».  Ilid.Son 
ir-;:iier  iolff- 
■;r«, 
11,13, 


[Vil''  SIÈCLE.] 

Maxime,  sachant  que  l'Afrique  et  les  lieux 
circonvoisiiis  ('taicut  à  couvert  de  tous  ces 
diiufiers,  y  alla,  r(''sohi  de  s'unir  pour  la  dé- 
fense de  la  \iaie  foi  à  ceux  qu'il  trouverait 
portés  ft  la  dt-fendre.  Il  avait  connu  Pyrrhus, 
avant  qu'il  eût  quitté  le  siège  patriarchal  de 
Constanliiiople  ;  et  ceL  évéque  était  partisan 
du  monothélisme.  Le  gouverneur  de  l'Afrique, 
où  Pyrrhus  se  trouvait  alors,  les  engagea  à 
une  conf('rcnce.  F^lle  eut  une  issue  heureuse  : 
Pyrrhus  convaincu  abjura  son  erreur,  et 
demanda  qu'il  lui  fiU  permis  d'aller  ù  Homo 
présenter  au  pape  le  libelle  de  sa  rétracta- 
tion. Cela  lui  fut  accordé,  et  il  tint  parole. 
Mais  quelque  temps  après  avoir  donné  au 
pape  Théodore  ce  libelle  souscrit  de  sa  main, 
il  professa  de  nouveau  le  monotliélisme,  ap- 
paremment dans  l'espérance  de  rentrer  dans 
son  siège  :  ce  qui  engagea  le  Pape  à  pro- 
noncer contre  lui  une  sentence  de  déposi- 
tion avccanathème. 

•4.  Maxime,  qui  l'avait  suivi  à  Rome,  eut 
part  A  l'acte  de  sa  condamnation.  Ce  fut  lui 
aussi  qui  conseilla  au  pape  Martin  I",  suc- 
cesseur de  Théodore,  d'assembler  en  649  le 
concile  de  Latran,  où  le  monothélisme  fut 
condamné  avec  tous  ses  fauteurs.  L'empe- 
reiu-,  qui  eu  était  un,  fit  enlever  saint  Maxi- 
me, avec  ordre  de  l'amener  à  Constantinople 
avec  Anastase  sou  disciple  ,  et  un  autre 
Anastase  qui  avait  été  apocrisiaire  de  ]'('- 
glise  romaine.  Aussitôt  qu'ils  furent  arrivés, 
ou  les  mit  dans  des  prisons  séparées  ;  et 
quelques  jours  après  on  les  mena  au  palais 
dans  le  lieu  où  le  sénat  était  assemblé.  Saint 
Maxime  y  étant  entré  le  premier,  le  sacel- 
laire  lui  fit  subir  son  interrogatoire.  Il  lui 
objecta  plusieurs  chefs  d'accusation,  que  le 
saint  détruisit  aisément,  parce  qu'ils  étaient 
supposés.  On  le  fit  sortir  de  l'assemblée,  où 
l'on  fit  entrer  Anastase  son  disciple.  Le  ton 
de  modestie  qu'il  fit  paraître  dans  ses  répon- 
ses irrita  ses  juges.  Le  sacellaire  commanda 
aux  assistants  de  le  frapper  :  ce  qu'ils  exé- 
cutèrent avec  tant  de  violence,  que  l'ayant 
laissé  à  demi-mort,  il  fallut  le  renvoyer  en 
prisou.  Le  même  jour,  saint  Maxime  eut  une 
conférence  avec  le  patrice  Troïle  et  Sergius, 
maître-d'hôtel  de  l'empereur.  Comme  ils  sou- 
haitaient l'un  et  l'autre  de  savoir  ce  qui  s'é- 
tait passé  entre  Ir.i  et  Pyrrhus,  tant  en  Afri- 
que qu'à  Rome,  il  le  leur  raconta,  ajoutant 
qu'il  n'avait  point  de  doctrine  particulière  ; 
que  celle  qu'il  tenait,  était  la  doctrine  com- 
mune de  l'Église  catholique.  11  leur  détailla 


Paf.  19. 


ensuite  les  rai.sons  qu'il  avait  de  ne  point 
communiquer  avec  le  siège  de  Constantino- 
ple, dont  la  [)rincipale  élail  que  les  mono- 
thélites  rejetaient  les  quatre  conciles  par  les 
neuf  articles  de  Cyrus,  patriarche  d'Alexan- 
drie, par  l'Ecthèse  d'Héraclius  ou  do  Ser- 
gius, et  par  le  Type  tle  Constant.  Il  ajouta 
que  les  neuf  articles  étaient  condamnés  par 
l'Eclhèse,  et  l'Eclhèse  abrogée  par  le  Type  ; 
qu'il  n'était  donc  pas  possible  que  ceux  qui 
s'étaii'nt  tant  de  fois  condamnés  eux-mêmes, 
qui  avaient  été  déposés  par  les  Romains  et 
par  le  concile  tenu  dans  la  huitième  indic- 
tion, c'est-à-dire  par  celui  de  Latran  en  649, 
pussent  célébrer  les  mystères  et  y  attirer  le 
Saint-Esprit. 

o.  Le  second  interrogatoire  roula  sur  le  s«Miid  u. 
Type.  Sanit  Maxime  et  Anastase  avouèrent  Pag.  is. 
qu'ilsl'avaieutauathématisé,  comme  étant  un 
écrit  contraire  à  la  foi  catholique.  Quand 
ils  fiu-ent  sortis  de  la  salle ,  on  les  remit  en 
prison ,  où  des  députés  du  patriarche  vin- 
rent demander  à  saint  Maxime  de  quelle 
église  il  était  :  de  Bysance,  de  Rome,  d'An- 
tioche,  d'Alexandrie,  de  Jérusalem'?  Il  ré- 
pondit que  l'église  à  laquelle  il  appartenait 
était  appuyée  sur  la  confession  de  la  foi  or- 
thodoxe que  saint  Pierre  avait  confessée. 
Les  députés,  changeant  de  question ,  propo- 
sèrent celle  des  deux  opérations,  disant 
qu'ils  en  reconnaissaient  deux  à  cause  de  la 
diti'érence  des  deux  natures ,  et  une  à  cause 
de  l'union.  Saint  Maxime  répondit  :  «  Si 
nous  confondons  les  deux  opérations  en  une 
à  cause  de  l'union,  et  qu'ensuite  nous  la  di- 
visions en  deux  à  cause  de  la  diti'érence ,  ce 
ne  sera  plus  ni  une  ni  deux  opérations.  »  Les 
députés  lui  déclarèrent  que,  s'il  ne  changeait 
de  sentiment ,  l'Empereur  le  ferait  mourir. 
Il  répondit  :  »  Que  s'accomplisse  en  moi  ce 
que  Dieu  a  ordonné  avant  tous  les  siècles.  » 

Le  lendemain  de  cette  conversation ,  il 
écrivit  à  son  disciple  Anastase  ce  qui  s'y  était 
passé,  afin  qu'il  en  instruisit  les  autres,  et 
qu'il  redoublât  ses  prières. 

6.  L'Empereur,  à  la  persuasion  des  ecclé- 
siastiques de  Constantinople,  changea  en  exil 
la  peine  de  mort.  Saint  Maxime  fut  envoyé 
au  château  de  Bizye  en  Thrace,  Anastase  l'A- 
pocrisiaire  à  Mesembrie,  l'autre  Anastase  à 
Perbère  dans  la  même  province.  On  les  en- 
voya tous  trois  sans  provisions  pour  leur 
subsistance,  sans  habits,  dépouillés  de  tout. 
Arrivés  au  liea  de  leur  destination  ,  Théo- 
dose, évéque  de  Césarée  en  Bythinie,  Paul  et 


It  e;t  «□- 
voyé  PO  dxîl. 
Pnf.  40. 


Pag.  «,45, 
et  seq. 
Pag.  56. 


762 


HISTOIRE  GliNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Théodose  consuls,  de  la  pail  de  l'empereur, 

lirent  subir  à  suint  Maxime  un  troisième  in- 

Trouiime   tcrrofTatoire,  où  il  lui  demandèienf  de  nou- 

toterrcfllol-  .  .  . 

'e.  veau  pourquoi  il  ne  communiquait  pas  avec 

le  siège  de  Constanlinople  ,  et  lui  promirent 
que ,  s'il  voulait  communiquer  avec  eux , 
l'Empereur  abolirait  le  Type.  Il  répondit  que 
les  changements  faits  par  les  patriarches 
Sergius,  Pyrrhus  et  Paul,  dans  la  doctrine 
de  la  foi,  l'empêchaient  de  communiquer 
avec  l'Kglise  de  Constantinople  ;  et  quand  on 
abolirait  le  Type,  et  mémo  l'Ectl.èse,  cela  ne 
suffirait  pas,  si  l'on  n'admettait  encore  les 
décisions  du  concile  de  Rome  :  c'était  celui 
de  Latran.  Ils  disputèrent  longtemps  sur  les 
deux  opérations;  et  le  consul  Théodose  étant 
convenu  de  les  reconnaître  par  écrit,  si  le 
saint  voulait  communiquer  avec  eux,  il  fut  ar- 
rêté que  saint  Maxime  et  l'évêque  Théodose 
iraient  ensemble  à  Rome  pour  travailler  ;\  la 
réunion  des  Églises.  Cet  accord  fini,  ils  se 
mirent  à  genoux  ',  firent  la  prière,  baisèrent 
chacun  l'Evangile,  la  Croix,  l'image  de  Jé- 
sus-Christ et  celle  de  la  Vierge ,  et  les  tou- 
chèrent de  leurs  mains  pour  confirmation  de 
Sêrçnd  eiii   ce  qni  avait  été  convenu. 

»i'».e,J.t.t.9.  7.  Mais  cette  convention  ne  fut  pas  de 
longue  durée.  La  même  année  où  elle  avait 
été  faite  ,  c'était  en  65G ,  Paul  consul  vint  à 
Bizye,  avec  ordre  de  la  part  de  l'Empereur 
de  transférer  saint  Maxime  au  monastère  de 
Saint-Thcodore  de  Rége  près  de  Constanti- 
nople. Cet  ordre  fut  exécuté  sur  le  champ; 
et  quoiqu'il  y  fût  dit  que  le  saint  serait  mené 
avec  beaucoup  d'honneur  et  de  soin ,  on  ne 
laissa  pas  de  lui  ôter  à  Rége  le  peu  d'argent, 
les  habits  et  quelques  autres  petits  meubles 
que  l'évêque  Théodose  lui  avait  donnés  en 
le  quittant.  Cet  évêque  vint  le  trouver  à 
Rége,  accompagné  des  patrices  Epiphane  et 
Troïle,  avec  de  nouveaux  ordres  suivant  les- 
quels saint  Maxime  devait  communiquer 
p«g.M  avec  l'Eglise  de  Constantinople,  conforraé- 
0,.  ment  au  Type.  «Aoussavez,  dit  le  saint  à 
Théodose,  ce  dont  on  est  convenu  sur  les 
saints  Évangiles,  sur  la  Croix,  sur  l'image  de 
notre  Seigneur  et  de  sa  sainte  Mère.  »  L'évê- 
que ,  baissant  le  visage ,  répondit  d'une  voix 
troublée  :  «  Que  puis-je  faire,  quand  l'Empe- 


'  Àt(juc  his  diclis  surre.rertinl  nmiics  cum  gau- 
dio  et  tacrymU,  positisque  genibu»  ail  nrnlinnem 
se  proslraveru7it :  siiigulit/nt  sanrin  lyniifielia  el 
pritiosam  Crucem  atqueimnginem  De.i  el  Salvato- 
ris  nostri  Jesu  ChrisU,  s(mctmmœqut  DominiB 


reurest  d'un  autreavis? — Pourquoi  donc,  re- 
prit saint  Maxime ,  avez-vous  touché  les  saints 
Évangiles,  vous  et  tous  ceux  qui  vous  ac- 
compagnaient, si  vous  n'aviez  pas  le  pouvoir 
d'exécuter  vos  promesses?  »  A  ces  paroles, 
ils  se  levèrent,  et  le  fi-appèrent.  L'évêque 
voulut  les  arrêter,  disant  qu'on  ne  traitait 
pas  ainsi  les  atfaires  ecclésiastiques;  mais  ils 
continuèrent  de  charger  le  saint  abbé  d'in-  a. 
jures  et  de  malédictions.  Le  lendemain ,  il 
fut  mis  entre  les  mains  des  soldats  par  un 
nouvel  ordre  de  l'Empereur,  et  conduit  à 
Méscmbrie,  où  était  Anastase  l'.^pocrisiaire. 
On  y  amena  aussi  l'autre  Anastase,  qui  avait 
d'abord  été  relégué  à  Perbère.  Pendant 
qu'ils  étaient  à  Mésembrie,  un  vénérable 
vieillard  vint  voir  saint  Maxime ,  et  lui  dit  : 
«  On  nous  a  scandalisés,  en  nous  rapportant 
que  vous  ne  nommez  pas  Mère  de  Dieu  la 
Sainte-Vierge  :  dites-nous  ce  que  vous  en 
pensez,  afin  que  nous  ne  soyons  pas  scan- 
dalisés sans  raison?  »  Saint  Maxime,  élen- 
daHt  les  mains  au  ciel ,  dit  avec  larmes  :  «  Qui-  u. 
conque  ne  dit  pas  que  Notre-Dame  la  Très- 
Sainte  -  Vierge  a  été  véritablement  la  Mère 
de  Dieu,  Créateur  du  ciel  et  de  la  terre,  soit 
auathème  de  par  le  Père,  le  Fils  et  le  Saint- 
Esprit.  »  Alors  les  assistants  dirent  en  pleu- 
rant :  (i  Mon  père.  Dieu  veuille  vous  donner 
la  force  d'achever  dignemeut  votre  course  !  «  soo  mu- 
8.  De  Mésembrie  il  fut  mené  à  Perbère,  el  eoTeif  w. 
de  h\  à  Constantinople  avec  .\naslase  son 
disciple ,  et  .\nastase  l'.^pocrisiaire.  On  as- 
sembla contre  eux  un  concile,  où  ils  furent 
anathématisés,  et  livrés  ensuite  au  préfet  du 
prétoire.  Celui-ci,  après  les  avoir  fait  battre  à 
coups  de  nerfs  de  bcpuf  et  de  verges,  leur  fit 
couper  la  langue  et  la  main  droite,  puis  les  en- 
voya en  exil  dans  le  pays  des  Lazes.  Ils  y  arri- 
vèrent le  huitième  de  juin  062.  Saint  Maxime 
fut  enfermé  dans  le  chùleau  de  Schemari,  et 
les  deux  Anastase  en  deux  autres  châteaux, 
d'où  on  les  tira  quelques  joui-s  après.  Le 
moine  .anastase  mourut  des  tourments  qu'il 
avait  soufl'erts  le  vingt-cpialrième  de  juillet  de 
la  même  année,  et  saint  Maxime  le  treizième 
d'août  suivant.  Anastase  l'Apocrisiaire  vécut 
encore  plus  de  quatre  ans,  n'étant  mort  que 
le  onzième  d'octobre  CCC,  dans  le  chiteau 


nostrœ  quœ  ilium  peperit,  osculo  consahil avère, 
apposais  eliam  prnpriis  manihus  ad  eonim  qxiœ 
dicta  essenl  firmandam  fidem.  Ad.  S.  Uaximi, 
pag.  5S. 


[vil*  SIÈCLE.]       CHAPITRE  LXXVl.  —  SALNT 

lie  Tliusume  au  pied  du  mont  Caucase.  L'É- 

i;lise  liouore  ces  trois  saints  comme  martyrs. 
0.  Saint  Maxime  a  laissé  uu grand nomljie 
d'écrits  sur  diverses  matières.  Ils  sont  précé- 
dés, dans  l'éililion  de  Paris  en  lG7."),dela 
Vie  de  ce  saint  par  un  anonyme  qui  la  com- 
posa à  la  prière  d'un  Nicolas  évéque  de 
Myre  ',  des  actes  aullicnliiiues  des  persécu- 
tions que  lui  et  les  deux  Anastase  eurent  à 
soullrir  de  la  part  des  monotbélites;  de  la 
lettre  de  saint  Maxime  ù  sou  disciple  Ana- 
stase, où  il  lui  fait  le  récit  de  la  conversation 
qu'il  avait  eue,  le  jour  de  la  Pentecôte  Gjo, 
a\ec  Pyrrhus  patriarche  de  Constantinople  ; 
de  la  lettre  que  cet  Anastase  écrivit  sur  ce 
sujet  aux  moines  de  Cagliari  en  Sardaigne; 
de  celle  qu 'Anastase  l'Apocrisiaire  adressa  à 
Théodose  prêtre  de  l'église  de  Gangres;  de 
plusieurs  pièces  qui  ont  rapport  à  la  vie  et 
aux  actions  de  saint  Maxime  ,  et  des  extraits 
des  ôlHces  de  ce  saint  tirés  des  livres  d'église 
des  Grecs.  Son  premier  ouvrage  a  pour  titre  : 
Réponses  sur  plusieurs  questions  de  l'Ecriture 
sainte.  Il  est  adressé  à  Thalassius,  prêtre  et 
abbé,  et  divisé  en  plusieurs  tomes.  Le  qua- 
trième est  cité  à  la  page  149,  et  le  cinquième 
à  la  178"  :  il  contient  en  tout  soixante-cinq 
questions  avec  leurs  réponses.  Saint  Maxime 
examine  dans  la  préface  en  q:oi  consiste  la 
nature  du  mal.  Son  sentiment  est  que  le  mal 
n'est  ni  un  être,  ni  une  qualité  réelle,  mais 
un  défaut  de  la  créature,  qui,  au  lieu  d'user 
de  ses  facultés  naturelles  pour  tendre  à  sa 
première  lin  qui  est  Dieu,  en  abuse  pour 
s'attacher  à  toute  autre  chose  qu'à  son 
Créateur.  «  C'est  de  là ,  dit-il ,  que  naissent 
tant  d'aflections  vicieuses  de  l'homme.  »  11 
attribue  ce  défaut  à  celui  de  la  connaissance 
et  de  l'amour  de  Dieu ,  l'homme  ne  pouvant 
arriver  au  salut  que  par  la  connaissance  et 
l'amour  de  celui  qui  l'a  créé.  II  traite  dans 
la  première  question  de  la  nature  et  de  l'u- 
sage des  passions,  c'est-à-dire,  de  la  volupté, 
du  chagrin,  de  la  cupidité,  de  la  crainte,  et 
autres  semblables,  qu'il  dit  n'être  point  na- 
turelles à  Ihomme,  mais  une  suite  du  péché. 
La  seconde  est  une  explication  de  ces  paroles 
de  Jésus-Christ  :  Mon  Père,  depuis  le  commen- 
cement du  monde  Jusqu'au  jour  d'aujourd'hui, 
ne  cesse  point  d'agir,  et  j'agis  aussi  incessam- 
ment comme  lui.  Il  ne  croit  pas  que  l'on  doive 


MAXIME,  ANASTASE,  ETC.  7G3 

restreindre  l'opération  de  Dieu  à  conserver 
les  êtres  une  fois  créés  ;  mais  qu'il  faut  en- 
core l'étendie  à  la  providence  de  Dieu  ,  qui 
fait  non-seulement  que  tous  les  hommes 
soient  d'une  môme  nature,  mais  qu'ils  soient 
encore  unis  de  seutimeuls.  Ce  qu'il  dit  sur  ce 
sujet  et  sur  toutes  les  autres  questions  est 
extrêmement  obscur  et  embarrassé  '.  Ce  ne 
sont  que  des  explications  allégoriques  et  des 
pensées  mystiques,  dans  lesquelles  il  n'est 
pas  aisé  de  le  suivre,  et  où  il  y  a  peu  de 
choses  à  apprendre  pour  le  sens  littéral  de 
l'Écriture.  Saint  Maxime,  s'apercevant  iui- 
même ,  en  relisant  son  ouvrage ,  de  la  diffi- 
culté que  l'on  aurait  à  l'entendre,  y  fit  des 
scholies  dont  d  recommanda  la  lecture  pour 
l'intelligence  du  texte  '.  Avec  tous  ces  se- 
cours, il  n'est  guère  intelligible  qu'à  ceux 
qui  sont  versés  dans  les  allégories  et  dans 
les  contemplations  mystiques. 

10.  Les  soixante-dix-neuf  réponses  à  divers 
doutes  sur  certains  passages  de  l'Écriture  et 
quelques  autres  matières,  sont  dans  le  même 
goût,  mais  plus  courtes  et  moins  obscures. 
Elles  sont  aussi  moins  travaillées  :  ce  qui  a  fait 
douter  qu'elles  fussent  du  même  saint.  Mais 
ne  sait-on  pas  que,  dans  un  grand  nomb.e 
d'écrits  d'unmême  auteur,  il  y  en  a  ordin  li- 
rement  où  il  paraît  plus  d'exactilude  q:ij 
dans  les  autres?  Photius,  qui  traite  fort  au 
long  de  l'ouvrage  précédent,  dit  peu  de  cho- 
ses de  celui-ci  V  Saint  Maxime  y  cite  saint 
Grégoire  de  Xysse,  l'auteur  connu  sous  le 
nom  de  saint  Denysl'Aréopagite',  et  Diado- 
dochus. 

11.  L'explication  du  psaume  cinquante - 
neuvième  est  encore  purement  allégorique 
et  mystique.  11  en  est  de  même  de  son  Com- 
mentaire sur  l'Oraison  dominicale,  adressé  à 
un  serviteur  de  Jésus-Christ  qu'il  ne  nomme 
pas.  Au  lieu  de  ces  paroles  :  Que  cotre  royau- 
me  arrive,  il  hsait  dans  le  onzième  chapitre 
de  saint  Luc  *,  de  même  que  saint  Grégoire 
de  Nysse  :  Que  votre  Saint-Esprit  vienne  et 
nous  purifie.  On  a  mis  à  la  suite  de  ce  Com- 
mentaire quelques  scholies  d'un  Grec  ano- 
nyme. 

12.  Le  Livre  Ascétique  est  un  dialogue  par 
demandes  et  par  réponses,  dans  lequel  un 
abbé  instruit  un  jeune  moine  des  principaux 
devoirs  de  la  vie  spiiituelle  ;  il  en  met  pour 


Réponses  ft 
divers  doates 
sur  quelques 
passa^'Cs  de 
I  Ecrilure  8t 
sur  quelques 
autres  matiè- 
res. Pas.  30O. 


Explication 
du  psaumeod, 
pa^.  33$j  et 
je  l'Oraison 
domiaicale, 
l>ag.  344. 


Discours 
ascétique, 
pag.  367, 


'  Tom.  1,  pag.  1,  edit.  Paris.,  an.  1675. 

-  Pliolius,  cod.  192,  pag.  495. 

'  Masimus,  Prologo  in  quœstion..  pag.  14. 


*  Pliotius,  cod.  194,  pag.  506. 
'  C'est-à-dire  saint  Denis  l'Aréopagite  lui-même. 
(L'éditeur.)  —  »  £i*c.  xi,  2. 


764 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Les  quatre 
£ur  la  charité, 


fondement  l'amour  de  Dieu,  et  le  renonce- 
ment sincère  t\  toutes  les  choses  du  monde 
et  à  soi-même.  Il  y  insiste  sur  l'amour  des 
ennemis,  et  sur  l'observation  des  autres  pré- 
ceplesderÉvanailc,  disant  qu'il  n'y  en  a  point 
d'impossibles.  Ce  qu'il  dit  des  ecclésiastiques 
de  son  temps,  fait  voir  qu'ils  s'appliquaient 
plus  aux  devoirs  extérieurs  de  leur  étal , 
qu'à  la  pratique  solide  de  la  vertu  ;  et  qu'en 
ornant  les  tombeaux  des  martyrs,  ils  n'é- 
taient pas  exempts  des  passions  qui  avaient 
animé  les  persécuteurs.  Il  demande  à  Dieu 
leur  conversion  par  une  longue  et  fervente 
prière,  où.  il  fait  intervenir  les  suU'rages  des 
saints  patriarches,  Ses  prophètes,  des  apô- 
tres et  des  martyrs.  Il  marque  sur  la  fin  que' 
le  péché  orii;inel  nous  est  remis  dans  le  bap- 
tême, et  que  la  pénitence  etface  ceux  que 
nous  avons  commis  depuis.  Ce  livre  est  d'un 
style  simple  et  clair,  propre  à  inspirer  des 
sentiments  de  piété.  Photius  le  croit  utile 
non-seulement  aux  moines  ',  mais  ù  tous  les 
chrétiens,  à  cause  que  les  principes  de  la  vie 
spirituelle  y  sont  très-bien  expliqués.  11  fut 
imprimé  à  Rome  en  1587,  avec  quelqvies 
opuscules  de  saint  Chrysostome,  et  deux 
Lettres  de  saint  Basile;  à  Nuremberg  en 
1530,  de  la  version  de  Bircheimer,  et  dans 
le  recueil  des  écrits  du  même  traducteur,  en 
1610. 

13.  Opsopœus  fit  imprimer,  en  1631,  à  Ha- 
guen.Tu,  les  quatre  cents  chapitres  sur  la  cha- 
rité, sousle  nom  de  saint  Maximi^  de  Turin, 
ne  faisant  pas  réflexion  que  cet  évêque  n'a- 
vait écrit  qu'en  latin.  Personne  ne  doute  au- 
jourd'hui qu'ils  ne  soient  de  saint  Maxime, 
abbé  et  martyr.  Photius  les  lui  attribue  ',  et 
en  trouve  le  style  plus  net  et  plus  travaillé 
que  celui  des  autres  ouvrages  de  ce  Père,  en 
remarquant  toutefois  qu'il  ne  se  sert  pas  tou- 
jours des  termes  les  plus  purs.  Il  y  en  a  une 
édition  à  Zurich,  eu  1.546,  avec  les  lieux  com- 
muns d'Autoine  Mélisse.  On  le  trouve  aussi 
dans  le  Micropresbyticus,  à  Bûle,  en  1350,  et 
dans  les  Orthodoxot^raphes  imprimés  en  la 
même  ville  en  l.^.'îo.  Ils  sont  adressés  à  Elpi- 
dius,  et  expliqués  dans  l'édition  du  F.  Gom- 
bcfis  par  des  scholies  d'un  (îrec  anonyme. 
Ouoi((ue  tous  les  quatre  ceiitenaii-es  soient 
intitulés  de  In  Cluirlti';,  ils  ne  laissent  pas  de 
renfermer  quantité  de  maximes  qui  ont  rap- 
port aux  autres  vertus.  Saint  Maxime  y  com- 


bat mêmequelquefois  des  hérésies  qui  avaien' 
cours  de  son  temps  :  entre  antres,  celle  des 
Trithéiles  ',  contre  lesquels  il  dit,  avec  saint 
Grégoire  de  Nazianze,  qu'il  est  nécessaire 
que  nous  confessions  un  Dieu  en  trois  per- 
somies.dont  chacune  conserve  sa  propriété. 
Il  y  donne  aussi  divers  préceptes  aux  moi- 
nes, et  leur  indique  les  moyens  de  surmon- 
ter les  tentations  du  démon,  en  leur  faisant  re- 
marquer que  notre  infirmité  est  telle  ',  qu'ex- 
cités à  accomplir  les  devoirs  de  notre  étal  et 
à  faire  le  bien,  nous  ne  persévérons  pasjus- 
qu'.T  la  fin,  si  Dieu  ne  nous  en  donne  la 
force. 

14.  Les  deux  cents  chapitres,  ou  maximes 
théologiques  et  économiques,  contiennent 
les  principes  de  la  théologie,  et  tout  ce  qui 
regarde  le  mystère  de  l'Incarnation.  Photius 
ne  les  distingue  de  l'ouvrage  sur  la  charité", 
qu'en  ce  qu'elles  sont  pleines  d'allégories,  et 
qu'ellesapprochent  plus  du  style  des  questions 
à  Thalassius.  Il  conclut  de  cette  atlinilé  ou 
ressemblance  de  style,  queles  chapitres  éco- 
nomiques et  théologiques  ne  peuvent  pas- 
ser pour  un  écrit  faussement  atlribuo  à  saint 
Maxime.  Ce  Père  y  donne  en  passant  plu- 
sieurs instructions  salutaires  sur  la  conduite 
des  mœurs,  principalement  sur  l'humilité.  Il 
dit  que  c'est  avec  justice  que  la  colère  de 
Dieu  tombe  sur  l'orgueilleux  ",  soit  eu  l'aban- 
donnant, soit  en  permettant  qu'il  soit  troublé 
par  les  tentations  des  démons,  afin  que,  re- 
jetant loin  de  lui  ces  sentiments  d'élévation, 
il  connaisse  sa  propre  faiblesse,  et  sache 
qu'il  a  besoin  de  la  puissance  et  de  la  grâce 
de  Dieu,  qui  fait  tout  ce  qu'il  y  a  de  bien  en 
lui.  A  quoi  il  ajoute,  que  celui-là  n'a  plus 
qu'un  pas  jusqu'il  l'impiété,  qui  par  un  en- 
durcissement de  cœur  ne  sent  point  la  perle 
qu'il  a  faite  en  cessant  de  pratiquer  la  vertu. 
Ce  trailé  fut  imprimé  séparément  à  Paris  en 
grec  et  en  latin  en  1360,  avec  la  traduction 
du  président  Pic. 

13.  Saint  Maxime  explique  dans  l'écrit 
adressé  au  scholastique  'rin'opemptus  trois 
passages  de  l'i-jcrilure  :  l'iui  tiré  du  chapitre 
dix-huitième  de  saint  Luc,  où  il  est  parlé 
d'une  veuve  qui  importune  un  mauvais  juge  ; 
l'autre  du  sixième  chapitre  du  même  Evan- 
gile, où  Jésus-Christ  dit  :  5i  un  homme  vous 
fra/tpe  sur  une  Joue,  tendez- lui  aussi  l'autre;  le 
troisième,  du  vinglièiuo   chapilie  de  saint 


Les  tn 

ceiil*maxtin 

tW  .-;„;■  c,un 
ft        t      r.iiml 

qoe',[.  il. 


Ltcrit 
Tllio|ieiD|  tu 
!>•«:.  69S. 


'  l'iintiiis,  cod.  IM,  pag.  50t).  —  •  Pliolius,  cod. 
193,  pag.  506.  —  '  Maxim.,  pag.  4i:<. 


*  Pag.  U6.  —  »  Pboliue,  coi.  104,  i)ag.  50». 

•  Pag.  561 . 


Mnl  quirsD- 
(e>lro's  nmi- 
mts  morales, 
p.  640.  Fiai:* 
neDIdolVcril 
au  tûl  d'Ac* 
Irlilo,  p.  C7I, 


PiJ.  05. 


[vil'  SIÈCLE.]        CHAPITRE  LXXVI.  —  SAINT 

Jean,  où  Jésus-Clirisl  dit  à  Marie  :  iVe  me 
touchez  pas,  car  je  ne  suis  pas  encore  monté  vers 
mon  Père.  Les  explicntions  qu'il  donne  do 
ces  passages  ne  sont  point  littérales,  naais 
allégoriques. 

16.  H  y  a  plus  de  profit  ;\  faire  dans  les 
deux  cent  ((uarantc-trois  maximes  morales. 
Pholius  n'en  l'ait  pas  mention  ;  mais  il  y  a 
beancou[i  d'autios  ouvrages  de  saint  Maxime 
dont  il  ne  dit  rien.  Celui-ci  porte  le  nom  de  ce 
Père  dans  un  ancien  manuscrit  du  Vatican, 
et  il  a  beaucoup  de  rapport  pour  le  style  avec 
les  quatre  cents  maximes  intitulées  de  la  Cha- 
rité. Il  appelle  véritablement  miséricordieux, 
non  celui  qui  donne  volontairement  son  su- 
pertlu,  mais  celui  qui  ne  répète  pas  aux  vo- 
leurs son  nécessaire.  Ce  traité  est  suivi  d'un 
fragment  du  livre  qui  a  pour  titre  :  Solution 
de  soixante-trois  doutes,  adressée  au  roi  d'Acri- 
de,  auparavant  Justinianée,  ville  de  la  Bul- 
garie, ainsi  nommée  parce  que  l'empereur 
Justin  l'Ancien  y  était  né  :  mais  on  n'a  au- 
cune preuve  qu'il  y  ait  en  des  rois  à  Acride 
dans  le  siècle  de  saint  Maxime.  On  croit  que 
la  Bulgarie,  dont  elle  était  métropole,  n'eut 
des  rois  que  depuis  :  c'est  ce  qui  donne  lieu 
de  croire  que  cet  ouvrage  est  de  quelque 
Grec  plus  récent  que  le  septième  siècle. 

17.  Les  autres  écrits  de  saint  Maxime  sont 
la  plupart  pour  défendre  la  doctrine  de  l'É- 
glise contre  les  nouveaux  hérétiques,  qui  n'ad- 
mettaient en  Jésus-Christ  ni  deux  volontés, 
ni  deux  opérations.  Il  écrivit  sur  ce  sujet 
plusieurs  Lettres  à  Marin,  prêtre  de  Chypre  ; 
h  George,  prêtre  et  abbé;  à  un  autre  Marin, 
diacre  de  Chypre;  à  l'évêque  Xicaudre,  aux 
abbés, aux  moines  et  aux  peuples  de  Sicile; 
montrant  par  des  arguments  tirés  de  la  rai- 
son, de  l'Écriture  et  des  Pères,  qu'il  y  a  en 
Jésus-Christ  deux  volontés  et  deux  opéra- 
tions naturelles.  Il  emploie  surtout  l'autorité 
de  saint  Cyrille  d'Alexandrie.  Les  monothé- 
lites  alléguaient  pour  leur  sentiment  quel- 
ques paroles  obscures  d'une  lettre  d'Héra- 
clien  h  Achillius,  oii  il  semblait  ne  reconnaî- 
tre qu'une  seule  volonté  naturelle.  Saint  Maxi- 
me répond  que  ce  n'était  pas  ainsi  que  l'on 
établissait  la  vérité;  qu'il  fallait  des  prouves 
claires  et  des  témoignages  tirés  d'écrivains 
qui  fussent  du  nombre  des  Pères  approuvés 
dans  l'Klglise;  que  taudis  qu'ils  n'allégue- 
raient qu'Héraclien  et  de  semblables  auteurs, 
ils  ne  pourraient  se  dispenser  de  les  aban- 

'  ïom.  Il,  pag.  1,  18,  27,  34,  46,  58. 


MAXIME,  ANASTASE,  ETC.  70.5 

donner  pour  s'attacher  à  la  doctrine  des 
saints  Pères  et  des  cinq  conciles  généraux, 
qui  déclarent  que  Jésus-Christ  est  Dieu  par- 
fait et  honmic  parfait,  d'où  il  suit  qu'il  y  a 
en  lui  deux  volontés  et  deux  opérations,  la 
divine  et  l'humaine.  Il  se  plaint  de  ce  que 
les  ennemis  de  la  vérité  avaient  supposé 
sous  son  nom  une  lettre  au  prêtre  Marin,  où 
ils  avaient  inséré  l'erreur  du  monothélisme, 
atîn  de  faire  voir  qu'il  n'était  pas  constant 
dans  sa  doctrine,  et  qu'il  avait  autrefois  pensé 
comme  eux.  Il  prévient  l'objection  qu'on  au-  i„.. 
rait  pu  lui  faire,  qu'eu  répondant  à  un  fort 
long  écrit  que  Pyrrhus  lui  avait  envoyé  sur 
la  question  d'une  ou  de  deux  volontés,  il  y 
avait  répondu  en  lui  donnant  de  grandes 
louanges.  Il  dit  qu'il  enavait  usé  ainsi,  parce 
qu'ayant  reçu  de  Pyrrhus  beaucoup  de  poli- 
tesses, il  devait  lui  rendre  la  pareille,  vu 
que  dans  sou  ouvrage  il  ne  décidait  point  la 
question;  qu'au  reste,  en  le  louant,  son  des- 
sein était  de  l'amener  insensiblement  à  la 
connaissance  de  la  vérité.  Dans  une  autre 
lettre  au  prêtre  Marin,  il  marque  que  ceux 
de  Goustanlinople  reprochaient  au  pape  Mar- 
tin I"  de  dire  dans  ses  Lettres  synodiques 
que  le  Saint-Esprit  procède  aussi  du  Fils  :  sur  -.a. 
quoi  il  dit  que  les  Romains  rapportaient  des 
passages  des  Pères  latins  et  de  saint  Cyrille 
d'Alexandrie,  par*lesquels  ils  montraient 
qu'ils  ne  faisaient  pas  le  Fils  principe  du 
Saint-Esprit  :  «Car  ils  savent, ajoule-t-il,  que 
le  Père  est  le  principe  de  l'un  et  de  l'autre, 
du  Fils  parla  génération,  du  Saint-Esprit  par 
la  procession.  Ils  veulent  seulement  montrer 
que  le  Saint-Esprit  vient  aussi  du  Fils,  et 
par  là  établir  l'union  et  l'inséparabihté  de 
substance,  n  Saint  Maxime  dit  encore  qu'il  ne 
fallait  pas  se  cboquer  de  certaines  façons  de 
parler  des  Latins,  à  qui  il  n'est  pas  facile  de 
rendre  exactement  en  leur  langue  ce  que  les 
Grecs  disent  eu  la  leur.  Il  fait,  dans  la  lettre  -, 
suivante,  qui  paraît  écrite  de  Rome  ,  l'éloge 
de  l'église  de  cette  ville,  et  de  la  pureté  de 
sa  foi.  Il  fait  mention,  dans  celle  qui  est  adres- 
sée à  Pierre,  de  Pyri'hus  de  Constantinople, 
de  saint  Sophrone  de  Jérusalem,  et  du  pape 
Honorius  :  nous  n'avous  cette  lettre  qu'eu 
htin.  AUatius  en  cite  un  passage  eu  grec  sur 
i'Hexamérou  d'Eustathe  d'Antioche.  Saint 
Maxime  y  attaque  vivement  Sergius  de  Gon-  '*' 
stantinople,  sa  profession  de  foi,  l'Ecthèse, 
les  conciliabules  des  mouothélites,  leurs  in- 
trigues pour  persuader  au  public  que  le  pape 
Honorius  pensait  comme  eux.  Il  y  parle  aussi 


766 


HISTOIRE  GENERALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Antre»  Irai' 
Us  de  S.  tu 


du  zèle  qu'Arcadius,  évêque  de  Chypre,  avait 
fait  paraître  pour  la  défense  de  la  saine 
doctrine,  de  ses  instances  auprès  des  mono- 
thûlites  pour  leur  faire  abandonner  leur  er- 
reur, des  efforts  que  le  pape  Martin  avait 
faits  pour  la  détruire,  des  marques  de  dou- 
leur qu'avait  donnt'ps  saint  Soplirone  en 
voyant  les  neuf  articles  de  Cyrus,  et  des  ef- 
forts qu'il  avait  faits  pour  engager  ce  pa- 
triarche à  les  supprime!-.  Il  fait  un  éloge  ma- 
gniflque  du  Pape,  c'est-à-dire  du  Saint-Sidge, 
car  il  ne  les  dislingue  pas,  et  de  son  pouvoir 
dans  toutes  les  Eglises. 

18.  Les  lettres  à  George,  prêtre  et  abbé, 
il^rp^s'u,  le  traité  dogmatique  au  diacre  Marin  envoyé 

et  seq.  ^  *       •  _  ^ 

eu  Chypre,  la  lettre  m  l'évèque  N'icandre, 
celle  aux  abbés,  aux  moines  et  aux  peuples 
de  Sicile,  les  traités  des  deux  natures  en  Jé- 
sus-Christ, des  définitions  de  consubstantiel, 
d'hyposlase,  de  personne,  contre  l'Ectlièse 
d'Héraclius,  où  il  montre  que  la  doctrine  en 
est  contraire  à  celle  de  l'Écrituie  et  des  Pè- 
res; celui  des  deux  volontés  de  Jésus-Ciirist, 
avec  les  douze  suivants,  ont  rapport  à  la 
même  matière,  et  ont  pour  but  le  maintien 
de  la  doctrine  de  l'Eglise  sur  les  deux  vo- 
lontés et  les  deux  opérations,  établies  fort 
au  long  dans  la  conférence  de  saint  Maxime 
avec  Pyrrhus. 

19.  Ce  fut  le  patrice  Grégoire,  gouverneur 
d'Afrique,  qui  les  y  engagea.  Elle  se  tint  en 
sa  présence  comme  en  celle  de  plusieurs 
évoques,  au  mois  de  juillet  645.  Des  notai- 
res écrivirent  ce  qui  fut  dit  de  part  et  d'au- 
tre. Pyrrhus  commença  par  demander  à 
saint  Maxime  pourquoi  il  le  rendait  partout 
suspect  d'héi'ésie,  lui  et  Scrgins  son  prédé- 
cesseur :  «  C'est,  répondit  le  saint  abbé,  que 
vous  avez  rejeté  la  foi  clirétienne,  enseignant 
publiquement  une  seule  volonté  en  Jésus- 
Christ.  —  Prouvez-nous,  répliqua  Pyrrhus, 
qu'en  croyant  une  volonté,  l'on  ébranle  quel- 
que article  de  la  foi?  — Sans  doute,  dit  saint 
Maxime  ;  car  qu'y  a-t-il  de  plus  impie  que 
de  dire  :  C'est  par  une  seule  et  même  vo- 
lonté que  le  même,  avant  l'incarnation,  a 
tout  fait  Je  rien,  le  conserve  et  le  gouverne, 
et  qu'après  l'incarnation  il  a  désiré  de  boire 
et  de  manger,  de  passer  d'un  lieu  à  un  au- 
tre, et  de  faire  toutes  les  autres  actions  in- 
nocentes qui  prouvaient  la  réalité  de  son  in- 
carnation? I)  Pyrrhus  fit  plusieurs  questions 
qui  ne  tendaient  ((u'à  embrouiller  la  matière. 
Mais  comme  il  était  convenu  que  Jésus-Christ, 
quoiqu'un  et  une  seule  personne,  était  Dieu 


DIalogae 
avec  Pyrrhu?, 
pag.  IS9. 


et  homme  tout  ensemble,  saint  Maxime  en 
inféra  que  Jésus-Christ  voulait  et  opérait 
conformément  à  ses'naturcs,  puisqu'aucune 
n'était  sans  volonté  et  sans  opération;  et  par 
une  suite  nécessaire,  qu'il  y  avait  en  lui 
deux  volontés  naturelles  et  autant  d'opéra- 
tions essentielles.  Il  fit  sentir  à  Pyrrhus  l'ab- 
surdité de  cette  proposition  qu'il  avait  fait 
mettre  dans  l'Ecthèse  d'Héraclius  :  Il  est  im- 
possible qu'il  n'y  ait  pas  autant  de  personnes  qui 
veulent,  que  de  volontés;  puisqu'il  suivrait  de 
Ih  que,  comme  il  n'y  a  en  Dieu  qu'une  vo- 
lonté, il  n'y  aurait  aussi  qu'une  personne  ; 
ce  qui  était  l'hérésie  de  Sabellius  ;  ou  qu'il 
y  aurait  trois  volontés,  puisqu'il  y  a  trois 
personnes,  et  par  conséquent  trois  natures, 
suivant  l'erreur  d'Arius.  Pyrrhus,  après  bien 
des  détours,  convint  que  l'on  pouvait  dire 
que,  comme  il  y  a  en  Jésus-Christ  un  com- 
posé de  deux  natures,  il  y  a  aussi  un  com- 
posé de  deux  volontés  naturelles.  Mais  il  ne 
voyait  pas  qu'en  admettant  une  composition 
de  volontés,  il  était  nécessité  d'admettre  une 
composition  de  toutes  les  propriétés  natu- 
relles, comme  du  fini  et  de  l'infini,  du  mor- 
tel et  de  l'immortel.  «  Comment,  dit  saint 
Maxime,  nommera-t-on  volonté  le  composé 
de  deux  volontés?  Le  composé  ne  peut  avoir 
le  même  nom  que  ses  parties.  »  Il  veut  que 
l'on  dise  avec  les  Pères  que  Dieu,  s'étanl 
fait  homme,  voulait  non-seulement  par  sa 
divinité,  mais  encore  par  son  humanité;  que 
l'on  confesse  avec  les  conciles,  et  les  deux 
natures,  et  les  propriétés  de  chacune,  deux 
volontés  différentes,  l'une  divine,  l'autre  hu- 
maine. Il  fait  voir  que  Jésus-Christ  a  une  vo- 
lonté humaine  qui  lui  est  naturelle,  parce 
que  le  Verbe,  en  se  faisant  homme,  a  pris  une 
chair  animée  d'une  âme  raisonnable,  qui  ne 
peut  être  sans  volonté,  puisqu'elle  est  essen- 
tiellement libre,  et  que  la  volonté  est  natu- 
relle h  l'homme.  «  En  soutenant  qu'il  n'y  a 
qu'une  volonté,  dit  encore  saint  Maxime,  il 
faut  la  reconnaître  ou  divine,  ou  angélique, 
ou  humaine,  et  conséquemment  reconnaître 
Jésus-Christ  ou  Dieu  seulement,  ou  d'une 
nature  angélique,  ou  puicmenl  homme.  » 
Pyrrhus,  pour  se  tirer  de  cet  embarras,  dit 
que  ceux  de  son  parti  enseignaient  que  la 
volonté  n'était  pas  naturelle,  mais  seulement 
que  la  nature  en  était  capable.  Mais  saint 
Maxime  prouve  que  la  volonté  est  du  fond 
de  la  nature.  Puis  venant  aux  autcuilés  de 
l'Écriture,  il  en  rapporte  un  grand  nombre 
de  passages  :  Le  lendemain  Jésus  voulut  aller 


Pi;.  1(4. 


Jnan.  t,43. 


|vii»  SIÈCLE.]        CITAPITUE  LXXVI.  —  SAINT  MAXIME,  ANASTASE,  ETC. 


Joao.  XVII, 
it. 

Malt. 

XXTII.SI. 


Suit!»  dp  1,1 
(S,-.  181. 


l>3g.  181. 


en  Galilik'  ;  Je  veux  que  ceux-ci  noient  où  je  suis  ; 
Ayant  goûté  du  vin  mêlé  de  fiel,  il  ne  voulut 
pas  en  boire;  Jésus-Christ  marchait  en  Galilée, 

Phiiip.  Il,  car  il  ne  voulait  /ws  marcher  en  Judée;  fl s'est 
rendu  oltéissant  jusqu'à  la  mort.   Or.  l'obiMS- 

loin.  \,M.  sancc  npparlicut  <l  la  volonté.  Comme  le  Père 
ressuscite  les  tnorts,  ainsi  le  Fils  donne  la  vie 

'jr.iî9.  '*  Ç"'  ''  veut.  Saint  Maxime  insiste  sur  le 
terme  comme,  qui  marque  la  même  nature 
et  la  même  volonté  du  Père  et  du  Fils. 

20.  Ensuite  il  prend  la  défense  du  pape 
Honorins,  disant  qu'il  fallait  s'en  rapporter, 
pour  le  sens  de  sa  lettre  ;\  Sei'gius,  non  à  ce 
patriarche,  mais  ù  celui  qui  l'avaitécrite,  c'est- 
à-dire  à  son  secrétaire.  Or  ce  secrétaire,  en 
écrivant  à  l'empereur  Constantin,  au  nom  du 
pape  Jean,  successeur  d'Honorins,  dit  :  «  Ser- 
gius  ayant  écrit  que  quelques-uns  admet- 
tent en  Jésus-Christ  deux  volontés  contraires, 
nous  avons  répondu  que  Jésus-Clirist  n'apas 
eu  deux  volontés  contraires  de  la  chair  et  de 
l'esprit,  comme  nous  les  avons  depuis  le  pé- 
ché; mais  une  seule  volonté,  qui  caractéri- 
sait son  humanité  :  et  ce  qui  le  prouve  clai- 
rement, c'est  qu'il  parle  de  membres  et  de 
chair,  ce  qui  ne  convient  pas  à  la  divinité. 
Puis  prévenant  l'objection,  il  dit:  «  Si  quel- 
qu'un demande  pourquoi,  en  parlant  de  l'hu- 
manité de  Jésus-Christ,  nous  n'avons  point 
fait  mention  de  la  divinité,  nous  dirons  pre- 
mièrement que  nous  avons  fait  réponse  sui- 
vant la  question  ;  ensuite,  que  nous  avons 
suivi  la  coutume  de  l'Ecriture,  qui  parle  tan- 
tôt de  sa  divinité,  et  tantôt  de  son  huma- 
nité. ))  Le  secrétaire  d'Honorius  et  du  pape 
Jean  IV  était  un  abbé  nommé  Jean.  Saint 
Maxime  montre  ensuite  cpie  saint  Sophrone  de 
Jérusalem,  au  lieu  d'être  l'auteur  du  trouble 
que  le  monothélisme  avait  occasionné,  s'était 
donné  tous  les  mouvements  nécessaires  pour 
l'étouflerdès  sa  naissance:  après  quoi  il  expli- 
que le  passage  de  saint  Cyrille  d'Alexandrie, 
où  il  dit  que  Jésus-Christ  montrait  une  seule  opé- 
ration par  ses  deux  7iatu7'es,  faisant  voir  que  ce 
Père  ne  parle  que  des  opérations  divines, 
comme  des  miracles  où  la  nature  humaine 
concourait,  soit  en  parlant,  soit  en  touchant 
les  malades,  ou  par  quelque  autre  mouve- 
ment du  corps.  Il  passe  de  là  à  l'explication 
de  ce  qui  est  dit  dans  les  ouvrages  qui  por- 
tent le  nom  de  saint  Denis  l'Aréopagite,  tou- 
chant l'opération  nouvelle  et  théandrique, 
et  montre  que  le  terme  de  nouvelle  ne  si- 
^nilie  autre  chose,  sinon  que  la  manière 
dont  Jésus-Christ  opérait  était  extraordinaire 


767 

et  au-dessus  du  cours  de  la  nature,  et  que 
le  mol  théandrique,  enfermant  les  deux  na- 
tures, enfermait  aussi  les  deux  opérations 
réiuties  en  Ji'sus-Christ.  Pyrrhus,  convaincu 
p.ir  la  solidités  des  preuves,  se  rendit,  mais 
il  demanda  grâce  pour  lui-même  et  pour 
ceux  (jui  l'avaient  précédé.  Il  voulut  encore 
mettre  à  couvert  de  la  coudamuation  le  con- 
cile qu'il  avait  tenu  en  G3!)  pour  approuver 
plus  soleniiollcment  l'Ectlièse  d'IIéraclius. 
Saint  Maxime  dit  qu'on  pouvait  condamner 
l'erreur  sans  toucher  aux  personnes  ;  qu'à 
l'égard  de  ce  concile,  il  n'en  méritait  pas  le 
nom,  non-seulement  parce  qu'il  avait  été 
assemblé  contre  les  règles,  mais  aussi  parce 
que  la  lettre-circulaire  n'avait  point  été 
écrite  du  consentement  des  patriarches;  que 
ni  le  jour  ni  le  lieu  n'y  avaient  été  marqués  ; 
qu'il  n'y  avait  en  ni  promoteur  ni  accusateur, 
et  que  les  évêques  qui  composaient  cette  as- 
semblée n'avaient  point  de  pouvoirs  de  leurs 
métropolitains,  ni  les  métropolitains  de  leurs 
patriarches.  Saint  Maxime  ne  cite  dans  la 
conférence  que1rès-peu  de  passages  des  Pè- 
res touchant  les  deux  volontés  et  les  deux 
opérations;  mais  il  en  rapporte  un  grand 
nombre  dans  les  réponses  aux  autres  ques- 
tions qui  lai  avaient  été  proposées  par  le 
moine  Théodore  ;  entre  autres  de  saint  Iré- 
née,  de  Clément,  prêtre,  et  de  saint  Alexan- 
dre, évèque  d'Alexandrie,  de  saint  Atha- 
nase,  de  Diadochus,  évêque  de  Photice,  de 
Némésius,  évêque  d'Emèse,  de  saint  Gré- 
goire de  Nyjse  et  de  saint  Ambroise. 

21.  Dans  le  traité  de  l'Ame,  saint  Maxime 
prouve  par  divers  raisonnements  philoso- 
phiques, qu'elle  est  une  substance  distinguée 
du  corps  qu'elle  anime,  simple,  incorporelle, 
raisonnable,  immortelle.  11  met  la  nature  du 
corps  dans  les  trois  dimensions. 

22.  Les  bienfaits  qu'il  avait  reçus  du  pa- 
Irice  Grégoire,  préfet  d'Afrique,  l'engagèrent 
à  lai  témoigner  sa  reconnaissance  par  une 
lettre  en  forme  de  discours,  où  il  l'exhorte  à 
ne  point  rechercher  la  magistrature  ,  ni  à  la 
fuir,  mais  à  l'exercer  dans  l'équité  et  dans 
la  justice.  Photius  compare  ce  discours,  pour 
la  clarté  et  la  douceur  de  style  ',  aux  quatre 
cents  chapitres  intitulés  :  de  la  Charité. 

23.  Nous  avons  neuf  lettres  de  saint  Maxi- 
me à  Jean  le  Chambellan.  Il  fait  dans  la  pre- 
mière l'éloge  de  la  charité  ,  qu'il  représente 
comme  la  source  de  tous  les  biens,  et  comme 

'  Wiotius,  Cad.  194,  pag.  506. 


lUil.  131  el 
seq. 


Traité  de 
l'Ame,p.  19&. 


LoKre  60 
discours  au 
Patricu  Gré- 
goire p.  90! . 


Lettres  i 
Jean  le  Cbam* 
bellao,  pag. 
319,  3J0, 


768 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQL'ES. 


faisant  seule  connaître  que  l'homiueest  créé 
à  l'iaiaire  de  Dieu.  Il  dit  dans  l;i  seconde, 
qu'on  doit  donner  l'aumône  à  tous  ceux  qui 
la  demandent,  sans  les  faite  attendre,  parce 
que  le  délai  en  celte  occasion  est  une  preuve 
qu'on  ne  la  donne  qu'avec  une  sorte  de  re- 
gret. La  troisième  fait  voir  Tutilitéde  la  tris- 
tesse qui  est  selon  Dieu,  parce  qu'elle  opère 
une  pénitence  stable  et  salutaire.  Dans  la 
p»f  i33.  quatrième  ,  il  rejette  sur  le  pécbé  l'inégalité 
des  conditions  des  hommes,  dont  les  uns, 
par  un  juste  jugement  de  Dieu ,  sont  soumis 
aux  autres,  quoiqu'ils  aient  tous  une  même 
nature.  Il  établit  dans  la  cinquième  la  dis- 
-"'•  tinction  des  deux  natures  en  Jésus-Christ 
contre  l'hérétique  Sévère.  Selon  Maxime , 
saint  Cyrille  d'Alexandrie,  en  disant  dans  sa 
lettre  à  Successus  une  nature  du  Verbe  incar- 
née, n'a  pas  nié  la  distinction  des  natures 
après  l'union  ;  il  ne  s'est  servi  de  cette  ma- 
nière de  parler,  que  pour  marquer  plus 
expressément  l'union  réelle  et  intime  des 
deux  natuics  en  la  personne  du  Verbe,  con- 
trairement à  Xestoi'ius  qui  n'admettait  entre 
elles  qu'une  union  morale  et  d'afl'ection, 
comme  entre  deux  amis,  parce  qu'en  ellet  il 
distinguait  deux  fils  et  deux  personnes  en 
'"'■  Jésus-Christ.  Il  soutient  qu'on  peut  dire  dans 
un  sens  catholique  que  Xotre-Seigneur  est 
composé  de  deux  natures,  de  lu  divinité  et 
de  l'humanité,  et  qu'il  est  en  deux  uatures, 
en  la  divinité  et  en  l'humanité,  puisqu'il  existe 
et  sera  toujours  indivisiblement  en  tontes  les 
deux.  Saint  Maxime  se  plaint  au  commen- 
cement de  cette  lettre  de  ce  que  le  chan- 
celier Théodore  avait  apporté  en  Afrique 
des  lettres  sous  le  nom  de  l'impératrice , 
adressées  au  préfet ,  où  cette  princesse  fa- 
vorisait les  sévériens;  mais  il  ajoute  que  le 
préfet,  pour  prévenir  le  mal  que  ces  lettres 
auraient  pu  occasionner,  les  avait  fait  pas- 
ser partout  pour  supposées,  et  eu  avait  fait 
des  reproches  au  porteur.  La  sixième  lettre 
est  sur  la  charité  que  nous  devons  avoir 
pour  notre  prochain.  II  donne  dans  les 
trois  autres  les  moyens  d'avoir  la  paix  avec 
Dieu. 
i.ciins  24.  Celle  que  saint  Maxime  écrivit  à  Con- 
'.^'Jn'"';'"»  slantin,  était  pour  l'exhorter  i  la  pratique  des 
iMn'"»"    commandements  de  Dieu  :  il  lui  tait  remar- 

r,. ;'ii.'.8:   quer  (ru  au  loui'  du  JuLremcnt  nous  rendrons 

p.r.  Ml;»   compte  desinslruclmnsquenous  aurons  (lon- 

»«'■         '  nées  ou  reçues.  Les  deux  lettres  suivantes, 

dont  l'une  est  ;'i  Jean  archevèiiue  de  Cyzique, 

l'autre  au  piètre  Jean,  traitent  de  la  nature 


de  l'âme.  Saint  Maxime  soutient  qu'elle  est 
si)irituelle  ,  intelligente,  immortelle  ,  incor- 
ruptible, étant  faite  à  l'image  de  Dieu  qui  a 
toutes  ces  qualités,  mais  dans  un  autre  sens, 
et  que  par  sa  séparation  d'avec  le  corps,  elle  ne 
perd  aucune  de  ces  facultés  qui  lui  sont  na- 
turelles. Dans  une  seconde  lettre  au  même 
prêtre,  il  dit  que  la  terre  de  promission  d'où 
devait  couler  le  laitetlemiel,  est  Dieu  même 
qui  nourrit  tous  les  hommes  à  tout  âge  par 
l'infusion  de  ses  grâces  et  de  ses  bienfaits. 
Il  traite  dans  celle  qu'il  adressa  à  Thalassius, 
supérieur  d'un  monastère ,  des  différents 
motifs  qui  font  agir  les  hommes  :  il  l'exhorte 
à  ne  se  laisser  conduire  que  par  l'esprit  de 
Dieu,  et  à  rejeter  toutes  les  suggestions  de 
la  nature  et  du  monde.  Il  fait  voir  dans 
la  Lettre  à  une  abbesse  de  quel  prix  est  de- 
vant Dieu  la  conversion  du  pécheur;  que 
c'est  un  crime  égal  de  ne  pas  se  repentir  de 
ses  fautes,  et  de  refuser  la  pénitence  à  ceux 
qui  la  demandent  :  d'oii  il  infère  qu'elle  de- 
vait recevoir  chaiitablement  une  religieuse 
qui,  après  être  sortie  de  son  monastère,  y 
était  revenue  pour  faire  pénitence. 

25.  La  lettre  <i  un  seigneur  nommé  Pierre 
est  un  traité  où  saint  Mnxime  établit  la  dis- 
tinction des  deux  natures  après  l'union.  Il 
y  répond  aux  objections  des  sévériens,  mon- 
tre que  la  Sainte-Vierge  est  véiilablement 
Mère  de  Dieu  ,  et  prend  la  défense  de  celle 
proposition  de  saint  Cyiille  :  Une  nature  du 
Verbe  incarnée,  parce  qu'en  même  temps  que 
cette  proposition  exclut  la  confusion  qu'A- 
pollinaire mettail  dans  les  natures  depuis  l'u- 
nion, elle  exclut  également  la  division  que 
Nestorius  eu  faisait,  en  ne  les  disant  unies 
que  d'affection.  C'est  ce  que  ce  Père  explique 
dans  une  seconde  lettre  â  Pierre.  Il  y  parle 
d'un  traité  sur  l'union  et  la  distinction  des 
deux  natures  en  Jésus-Christ ,  adressé  à 
Cosme,  diacre  d'Alexandiie ,  qui  après  avoir 
été,  ce  semble,  engagé  dans  l'hérésie  des 
sévériens,  l'avait  abandonnée  pour  se  réunir 
à  l'Église  catholique.  Saint  Maxime  y  suit  I.i 
méthode  des  schnlastiques;  mais  il  appuie 
ses  propositions  de  plusieurs  passages  des 
Pères,  de  saint  Basile,  de  saint  .\mpliiloque, 
de  saint  Grégoire  de  Nazianze.  C'est  encore 
l'hérésie  de  Sévère  qu'il  y  combat.  Il  le  finit 
par  une  profession  de  foi  où  il  reconnaît 
qu'il  y  a  deux  natures  en  Jésus-Christ,  qui, 
quoique  distinctes  l'une  de  l'autre,  même 
après  l'union,  soni  lellomcnl  unies,  que  nous 
rendons   à  l'incarné   une   même  adoration 


Pierre,     pt 

:r.ii  ri  m:  ; 

Co^nir,     |M 

:;i.i  et  iiU 
k  de<  reltpM 
•e«,  pir.  m; 
k  Julleb.  I 

m. 


Ivii*  SIÈCLE.]      CHAPITRE  LXXVI.  —  SAINT 

avcp  lo  PiSre  et  \c  Sninl-Kspril  '.  Par  iino  mi- 
tre lettre,  il  témoigne  sa  douleur  à  Cosinn 
des  calomnies  répandues  contre  Gri'goire, 
préfet  d'Afrirjne .  et  exhorte  rc  diacre  à 
prendre  la  défense  de  la  vérité  ,  sans  a[ipré- 
hender  les  tourments  ni  les  mauvais  traite- 
ments. Il  écrivit,  an  nom  de  ce  préfet,  .'i  des 
rclii,Menses  d'Alexandrie,  qui,  après  avoir 
quitté  l'hi'rt'sie  des  scvériens ,  s'y  étaient 
laissé  entraîner  de  nouveau,  pour  les  cnga- 
gçv  à  l'aliandonner  de  bonne  foi,  et  à  s'atta- 
cher inviolalilement  h  la  doctrine  de  l'KuHso. 
Ou  voit  par  cette  lettre,  que  Grégoiie,  ou 
(ioor<4es,  comme  d'autres  l'appellent,  leur 
avait  fait  beaucoup  de  bien,  et  qu'il  avait 
écrit  en  leur  faveur  aux  ^.^rands  de  l'Empire, 
pf  môme  aux  empereurs.  La  lettre  de  saint 
Maxime  ii  Julien ,  avocat  d'.\lexaudrie ,  est 
un  éloge  de  sa  fermeté  dans  la  foi.  Il  y  relève 
aussi  la  constance  qu'un  autre  avocat  de  la 
même  ville,  nommé  Christopemptus,  avait 
fait  paraître  pour  la  défense  de  la  vérité. 

26.  Quelque  temps  avant  que  Pyrrhus  eût 
été  élevé  sur  le  siège  patriarchal  de  Cons- 
tantinople,  et  qu'il  se  fut  déclaré  ouverte- 
ment pour  l'hérésie  des  monothélitcs,  saint 
Maxime  avait  reçu  de  lui  une  lettre  où  il 
disait  qu'il  n'y  avait  qu'une  opération  en 
Jésus-Christ.  Il  ne  rejetait  pas  pour  cela  la  dis- 
tinction des  deux  natures  :  et,  pour  expliquer 
sa  pensée ,  il  apportait  la  comparaison  d'un 
couteau  rougi  au  feu,  qui  coupe  et  brûle  tout 
ensemble.  Saint  Maxime  ,  en  répondant  h  la 
lettre  de  Pyrrhus,  le  pria  de  s'expliquer  plus 
clairement  sur  l'unité  de  vertu  et  d'opératioa 
en  Jésus-Christ  :  car  il  ne  trouvait  point  que 
la  comparaison  qu'il  apportait ,  et  que  saint 
Basile  et  d'autres  anciens  avaient  faite  avant 
lui ,  prouvât  qu'il  n'y  eût  qu'une  opéra- 
tion dans  le  couteau  rougi,  qui  coupe 
et  brûle  en  même  temps.  Ce  sont  au  con- 
traire dans  un  même  sujet  deux  opérations 
distinctes ,  quoique  inséparables.  Aussi  ce 
Père  s'en  servit,  dans  sa  Conférence  avec 
Pyrrhus,  pour  prouver  qu'il  y  avait  en  Jésus- 
Christ  deux  opérations,  encore  qu'il  n'y  eût 
qu'une  personne  qui  opérât.  Les  lettres  sui- 
vantes ne  contiennent  rien  de  bien  intéres- 
sant :  nous  remarquerons  seulement  qu'en 


MA.MMK,   ANASTASE,  ETC. 


7«9 


IV  lUr.in 
21,27. 


Dialogues 
ur  la  TrioiU', 


répnuda)il  au  prêtre  TIial;issius,  qui  lui  avait 
demandé  comment  il  aiiivait  que  la  colèri! 
do  Dieu  cessîM,  lorsque  les  rois  des  nations 
hii  immolaient  leurs  propres  enfants,  nu 
leurs  proches,  pour  l'apaiser  et  délourner 
les  lléaux  dont  leurs  Etats  étaient  menacés; 
il  dit  que  l'on  ne  doit  point  douter  de  la  vé- 
rité des  faits  que  les  anciennes  histoires  laj)- 
portent  sur  ce  sujet  :  mais  il  renvoie  h  un 
autre  temps  l'examen  des  raisons  qui  pou- 
vaient mouvoir  le  Seigneur  .'i  se  laisser  flé- 
chir par  de  semblables  sacrifices.  II  croit  que 
Dieu  ne  les  a  permis  que  pour  pn'parnr  les 
hommes  au  sacrifice  qu'il  voulait  lui-même 
faire  de  son  Fils  pour  la  rédemption  du  genre 
humain,  et  cite  l'endroit  du  quatrième  lisre 
des  Itois,  où  nous  lisons  que  le  roi  des  Moa- 
bilos,  se  voyant  près  d'être  livré  aux  rois  de 
Judas  et  d'Israël,  moula  sur  la  muraille  de 
sa  ville  ,  et  immola  à  leurs  yeux  son  propre 
fils  et  l'héritier  de  sa  couronne  :  ce  qui  les 
engagea  à  se  retirer  chacun  dans  leur 
royaume. 

27.  L'on  a  déjà  remarqué  dans  les  volumes 
précédents  *,  que  les  cinq  Dialogues  sur  la  p"c-  ■*' 
Trinité ,  après  avoir  été  imprimés  sous  le 
nom  de  saint  Athanase,  ont  enfin  été  rejetés 
comme  n'étant  pas  de  lui;  et  que  ceux  qui 
les  ont  donnés  à  Théodoret,  n'en  ont  pas 
apporté  des  raisons  convaincantes.  Ce  qu'il 
paraît  y  avoir  de  mieux  dans  une  question 
aussi  dillicile  à  décider,  est  de  les  attribuer 
à  saint  Maxime,  dont  ils  portent  le  nom  dans 
les  manuscrits  de  Rome,  de  Venise  et  de 
Vienne.  Ce  dernier  forme  un  témoignage 
d'autant  plus  solide ,  que  ces  cinq  Dialogues 
y  sont  de  suite  avec  les  autres  ouvrages  de  ce 
Père  ',  que  personne  ne  lui  conteste.  11  faut 
ajouter  que  les  controversistes  grecs  qui  ont 
écrits  depuis  qun  tre  à  cinq  cents  ans  ',  les  ont 
cités  sous  le  nom  de  saint  Maxime.  Les  héré- 
tiques que  l'on  combat  dans  ces  Dialogues, 
sont  les  ariens,  les  macédoniens,  les  apollina- 
ristes,  sectes  qui  n'étaient  plus  en  vigueur  du 
temps  de  saint  Maxime.  Il  n'y  est  rien  dit 
contre  les  nestoriens,  les  eutychiens.  les  sévé- 
riens ,  le*monothélites,  qui  troublaient  alors 
l'Eglise  :  n'était-il  pas  naturel  que  ce  Père 
s'appliquât  plutôt  à  détruire  des  hérésies  qui 


'  Quo  fit  ut  et  Incarnato  unam  r.um  Pâtre  et 
Spiritu  sancto  adorationein  adhibeamus.  Pag.  332. 

'  Voyez  tom.  IV,  pag.   182  et  suiv.,  et  tom.  X, 
pag.  108. 

>  Lambecius,  lib.  IV,  pag.  212. 
XI. 


*  Dometrius  Cydonius,  De  Processione  Spiritus 
Sancti,  cap.  v;  Gveg.  Conslanlinop.,  apud  .Allât., 
tom.  I  Grœcioe  Orthodox.,  pag.  448;  Manuel  Cale- 
cas,  tom.  II  Auctuarii  Combefis,  pag.  37  et  133. 


49 


770 


HISTOIRE  GÉNÉRALL  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


se  répandaient  paiioul,  qu'à  combattre  celles 
qui  n'avaient  que  peu  ou  point  de  sectateurs? 
C'est  un  argument  qu'il  n'est  pas  aisé  de  ré- 
soudre ;  mais  il  n'est  pas  convaincant.  Saint 
Maxime  a  employé  près  de  la  moitié  de  ses 
ouvrages  à  réfuter  les  hérésies  de  son  temps. 
Il  a  pu,  par  quelque  motifquinenousestpas 
connu,  combattre  celles  qui  avaient  précédé 
et  qui  ne  laissaient  pas  d'avoir  du  rapport 
avec  les  nouvelles  :  car,  en  établissant  la 
distinction  des  deux  natures  en  Jésus-Christ, 
il  fallait  prouver  également,  et  qu'il  était 
Dieu,  contre  les  ariens,  et  qu'il  était  homme 
parfait,  contre  les  apollinaristes.  Quel  rap- 
port avait  au  monothélisme  l'hérésie  des  ma- 
nichéens"? Toiitefojs  on  cite  un  Dialogue 
entre  un  orthodoxe  et  un  manichéen  sous  le 
nom  de  saint  Maxime. 
Mj,iteo«i«  28.  Il  explique  dans  sa  Mystagogie  ce  que 
ifertîf.^V?!  signiGenl  les  cérémonies  de  l'Église  dans  la 
célébration  des  saints  mystères.  Ses  explica- 
tions, quoique  allégoriques,  sont  du  moins 
une  preuve  que  la  liturgie  grecque  était 
alors  la  même  qu'aujourd'hui.  Saint  Maxime 
cite  celles  que  saint  UenysTAréopagitc  avait 
données  :  car  il  ne  doutait  pas  qu'il  n'en  fût 
c.p. ,.  auteur  ;  et  il  déclare  qu'il  ue  suivra  pas  la 
même  méthode.  L'Église  est  selon  lui  la 
figure  de  Dimi,  en  ce  qu'elle  réunit  dans 
son  sein  les  fidèles  de  tous  les  pays  du  mon- 
de, comme  Dieu  contient  et  renferme ,  pour 
ainsi  dire,  toutes  les  créatures.  Il  distingue, 

„.  dans  les  églises  matérielles,  le  sacraire  où 

les  ministres  de  l'autel  étaient  placés,  d'avec 
le  temple,  ou  cette  partie  de  l'église  que  nous 
appelons  la  nef,  où  le  peuple  prenait  place. 
Il  parle  de  l'introït  de  la  messe,  de  la  lec- 
ture des  livres  saints,  du  chant  des  cantiques 

»,„.  et  des  psaumes,  de  la  paix  que  l'évéque 
donnait  aux  fidèles,  de  la  lecture  de  l'Évan- 

I,.,,,.  gile,  après  laquelle  on  faisait  sortir  les  ca- 
téchumènes, et  tous  ceux  à  qui  il  n'était  pas 
permis  d'assister  à  la  célébration  des  saints 
mystères;  dubaiserdcpaix  que  lesfidèlesse 
donnaient  mutncllemenl,  de  la  récitation  du 

,  „.        Symbole,  du  Trisagion,  de  la  récitation  de 
xeiiiix.   l'Oraison  dominicale,  de  l'exclamation  que 

j,.         tout  le  peuple  faisait  à  la  fin  du  sacrifice,  en 

,j,  disant:  Un  saint,  un  Scif/neur ;  paroles  qui 

marquaient  l'union  que  les  fidèles  contrac- 
taient avec  Dieu  par  la  participation  des  my- 
«r.        stères,  autant  que  cette  union  est  possible  A 
l'homme.  11  explique  mystiquement  toutes 

■  Leqiiii'D,  tom.  I,  Oper,  Damasccii.,  pag.  428. 


ces  cérémonies,  même  l'usage  de  former  les 
portes  de  l'église  lorsqu'on  en  avait  fait  sor- 
tir les  catéchumènes.  La  Mystagogie  de  saint 
Maxime  a  été  imprimée  à  Augsbourg  en 
159'J,  avec  la  traduction  de  Gentien  Hervet , 
qui  avait  d'abord  été  donnée  séparément  à 
Venise  en  1548.  On  la  trouvée  au.ssi  dans  le 
recueil  des  Écrits  liturgiques  par  Claude  de 
Saintes  à  Anvers  en  1362.  dans  le  second 
tome  de  l'Auctuarium  de  Fronton  le  Duc,  à 
Paris  en  1624,  et  dans  les  Bibliothèques  des 
Pères.  [Dom  Pilra  a  promis  de  donner  au 
public  dans  le  Spicilegium  Solesmenseie  texte 
véritable  de  la  Mystagogie.] 

29.  Le  dernier  des  ou\Tages  de  saint  «"■■•'i* 
Maxime  dans  l'édition  du  P.  Combefis,  est  \Y'"'" 
un  recueil  de  plusieurs  passages  de  l'Ecri- 
ture, et  des  auteurs  tant  Lcclésiastiques  que 
profanes,  rapportés  sous  diUerenls  titres.  Ce 
recueil  est  composé  de  soixante-onze  dis- 
cours ou  chapitres,  qui  traitent  des  vices  et 
des  vertus,  des  amis  et  de  l'amitié  frater- 
nelle, de  la  royauté  et  de  la  puissance  sé- 
culière, des  ricliesses  et  de  la  pauvreté,  de  la 
prière  que  nous  devons  faire  à  Dieu,  de  l'étude 
des  belles-lettres  et  de  l'éloquence,  de  l'hon- 
neur du  aux  parents  et  de  l'amour  qu'ils 
doivent  à  leurs  enfants,  de  la  mort,  de  la  paix 
et  de  la  guerre,  du  devoir  des  femmes,  et 
de  beaucoup  d'auti'es  matières  sur  lesquelles 
il  rapporte  grand  nombre  de  maximes  mo- 
rales, la  plupart  belles  et  fort  instructives. 
Gesner  mit  sous  presse  ce  recueil  en  grec 
et  en  latin  à  Zurich  eu  1346,  mais  ea  le  con- 
fondant avec  celui  d'Antoine  Mélisse  ;  con- 
fusion qui  s'est  continuée  dans  l'édition  de 
Genève  en  ItiOO.  Celle  de  Francfort  eu  1581 
n'est  pas  moins  défeclueuse ,  puisque  les 
chapitres  de  saint  Maxime  s'y  trouvent  mê- 
lés parmi  ceux  d'Antoine  Stobée. 

30.  Saint  Maxime  Ct  i;assi  des  Commen-     cot.n,fr.i,i. 

...  .  FM   d"    falot 

taircs  sur  les  livres  qui  portent  le  nom  de  m»  m.  ,„ 
saint  Denvs  l'Aréopaiiitc.  On  ne  les  trouve  '  Ar<  p  fi. 
point  dans  l'édition  de  Paris  en  lG7o  par  le  j;^"^"^ 
P.  Combefis  :  mais  ils  sont  dans  celle  dos  o'u- 
vres  de  saint  Denys,  à  Paris  ea  1613,  1644, 
et  à  Anvers  eu  1634  par  leP.Cordier.  Nous 
n'avons  qu'une  petite  partie  de  ses  Com- 
mentaires sur  les  endroits  difficiles  de  .«aint 
Grégoire  de  Xazianze,  imprimée  à  Oxforl  en 
16S1  à  la  suite  de  cinq  livres  de  Scot  Érigène, 
intitulés  :  de  la  Division  de  la  nature  ;  le  reste 
est  en  manuscrit  dans  la  bibliothè(jue  du 
Roi.  Jean  Scot  Erigène,  qui  les  traduisit  en 
latin,  dédia  sa  traduction  à  Charles-le-Chauve. 


L 


vrts  de  S. 
Il  e  qui 
jierdu,'. 


[VII' SIÈCLE.]       CHAPITRE  LXXVI.  —  SAINT  MAXliMK,  ANASTASK,  ETC. 

(lu  la  conserve  dans  lit  bibliollièquo  tli;  l'ab- 
liMyd  lie  Cluny.  [Les  Coinuientaires  snr saint 
Ueiiys  et  sur  sniiit  Grégoire  de  Nazianze 
ont  été  publiés  en  entier  en  grec  avec  Ira- 
(kiction  latine  pcir  Fr.  Oeliler,  ù  Halo  eu  Saxe 
1837,  sur  un  manuscreiit  du  xin°  siècle,  1 
vol.  in-8.1  Le  F.  Petau  nous  a  donné  sous 
ie  nom  de  saint  Maxime  un  calcul  ecclésias- 
tique ou  cycle  pascal ,  adressé  au  patrice 
Pierre  '.  11  est  divisé  eu  trois  parties,  dont 
chacune  a  sa  roulette  pour  trouTCr  le  jour 
de  la  PAque,  les  épactes  et  tout  ce  qui  ap- 
partient à  cette  matière.  La  troisième  partie 
est  suivie  d'une  clironique  abrégée  qui  s'é- 
tend beaucoup  plus  loin  que  le  rèiïue  de 
Constant  ou  Constantin,  sous  lequel  saint 
Maxime  soull'rit  le  martyre  :  ainsi  elle  ne 
peut  être  de  lui,  en  l'état  où  elle  est  ;  mais 
il  peut  avoir  doimé  l'explication  des  princi- 
paux événements  arrivés  sous  le  gouvernc- 
ment  de  Moïse,  de  Josué,  et  sous  le  rè^ne 
des  rois  d'Israël,  des  Perses  et  des  empe- 
reurs romains,  puisqu'il  ue  conduit  celte 
explication  que  jusqu'à  l'an  o-io,  le  20°  de 
l'empire  de  Justinien,  du  monde  6043 ,  sui- 
vant sa  manière  de  compter.  Dans  son  cy- 
cle S  qui  finit  en  041,  il  suit  le  même  calcul 
que  les  Romains  :  ce  qui  n'est  pas  surpre- 
nant, puisque  les  Grecs  et  les  Latins  suivaient 
celui  des  Alexandrins,  et  qu'ils  en  avaient 
pris  les  uns  et  les  autres  le  cycle  lunaire. 

31.  Des  deux  lettres  que  saint  Maxime 
avait  écrites  à  l'abbé  Thomas',  il  ne  nous 
en  reste  qu'une,  que  Gakeus  a  traduite  en 
latin,  et  mise  à  la  suite  des  cinq  livres  de 
Scot  Érigène,  imprimés  à  Oxfort  en  1081 
avec  les  explications  de  quelques  endroits 
difficiles  de  saint  Grégoire  de  Nazianze  par 
saint  Maxime.  On  cite  de  lui  un  Dialogue 
entre  un  orthodoxe  et  un  manichéen  ',  un 
Discours  sur  le  second  avènement  de  Jésus- 
Christ',  un  Dictionnaire  étymologique  ',  une 
Chronologie  succincte  de  la  vie  de  Jésus- 
Christ',  des  Questions  sur  divers  sujets  adres- 
sées à  Nicéphore  Cartophylax  de  Constanti- 
nople,  et  plusieurs  autres  ouvrages  qui  n'ont 
pas  été  mis  sous  presse.  On  peut  voir  là-des- 
sus le  catalogue  de  la  Bibliothèque  Coisline 
par  le  P.  de  Montfaucon,  l'Apparat  de  Posse- 
vin  ,  et  la  Bibliothèque  nouvelle  des  manus- 
crits du  P.  Labbe. 


771 


'  Petavius,  in  Vranolog.,  pag.  313,  edit.  Paris, 
1630. 
*  Idem,  in  notis.  pag.  306. 
'  Photius,  cod.  194,  pag.  510. 


3!2.  Lu  variél(!  des  sujets  que  saint  Maxime       jogcnitnu 
a  traites  dans  ses  ouvrages,  en  a  occasionne   <io»incM.«i. 

.  "       '  mu.   Edlllon» 

tiaiis  le  style:   guindé   et  obscur  dans  ses   «owkeuiim. 
explications  alh'goriques  et  mystiques,  il  est 
simple  et  clair  dans  ses  explications  morales. 
Ses  lellres  ont  un  air  do  piété  et  de  do\iceur 
qui  les  fait  estimer,  (pioique  les  règles  du 
style  épistolaire  n'y  soient  pas  gardées.  On 
lit  avec  moins  de  plaisir  ses  écrits  polémi- 
ques, parce  qu'ils  sont  trop  ditl'us ,  et  qu'il 
s'y  attache  trop  à  la  manière  de  raisonner 
des  scolastiques.  Il  ue  laisse  pas  de  presser 
vivement  ses  adversaires,  et  de  les  ramener 
au  point  de  la  question,  lorsqu'ils  cherchent 
à  s'échapper  par  des  détours  et  de  vaincs 
sublililés.   Un  des  plus  intéressants   est  la 
Conférence  avec  Pyrrhus  ;  mais  ce  n'est  pas 
le  mieux  travaillé,  et  il  y  a  apparence  que 
saint  Maxime  nous  l'a  donné  tel  qu'il  était 
sorti  des  mains  des  notaires  qui  écrivaient 
ce  qui  se  disait  de  part  et  d'autre,  sans  que 
lui  ni  Pyrrhus  eussent  le  loisir  de  polir  et 
de  châtier  leurs  discours  ,  étant  oljligés  de 
parler  sur-le-champ.   On  doit,  par  la  même 
raison,  l'excuser  de  n'avoir  pas  observé  les 
lois  de  la  dialectique  dans  les  raisonnements 
dont  il  appuya  en  celte  occasion  la  cause  de 
la  vérité.  L'édition  la  plus  ample  de  ses  œu- 
vres, est  celle  qu'eu  a  donnée  le  P.  Combe- 
fis,  à  Paris  en  1073,  en  deux  volumes  in-fol. 
Ce  savant  éditeur  en  avait  promis  un  troi- 
sième, qui  devait  contenir  les  explications 
de  saint  Maxime  sur  les  ouvrages  de  saint 
Denys  l'Aréopagite,  et  sur  quelques  endroits 
de  saint  Grégoire  de  Nazianze  :   il  n'a  pas 
tenu  sa  promesse.  La  plupart  des  opuscules 
contenus  dans  ces  deux  volumes  ont  été  im- 
primés séparément,   comme  on  l'a  remar- 
qué plus  haut  on  les  trouve  aussi  dans  les 
Bibliothèques  des  Pères.  [On   trouve    une 
courte  observation  de  saint  Maxime  dans  le 
tome  XIV  de  la  Bibliothèque  des  anciens 
Pères,  par  Galland,  Supplément,  pag.  133. 
La  Patrolorjie  grecque,  tomes  XC,  XCl,  re- 
produit l'éditiou  de  Combefis  avec  une  no- 
tice de  Fabricius,  et  avec  les  additions  que 
Oehler  a  données  en  1837  à  Haie.  Les  Scolies 
sur  saint  Denys  sont  au  tome  IV  de  la  Pa- 
trologie  grecque,  parmi  les  œuvres  de  saint 
Denys  l'Aréopagite.  Le  Comput  ecclésiasti- 
que est  reproduit  au  tome  XIX  parmi  les 

*  LequieD,  ad  Damascen.,  tom.  I,  j.ag.  428. 

5  Combefis,  »!  prospeclu  Op.  S.  Jlaximi. 

5  Id.  in  notis,  tom.  I,  pag.  680. 

'  Lambeoius,  lib.  V,  pag.  114,  et  lib.  VI,  pag.  56. 


772 


HISTOIRE  GKNÉHALE  DES  AUÏELHS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Anuta» 

disciple  de  S. 
Utti'iie,  54 
Lettre  iQi 
molaesdfrCi- 
glliri. 


Alll«l4f« 

Apecriiiaiie 
dl  fiont. 


suppléments  à  la  Chronique  d'Eusèbe.  Au 
tome  XCI  de  la  Patrologie  grecque,  col.  1419- 
424,  on  trouve  trois  hymnes  de  saint  Maxime 
ieproduites  d'après  Daniel,  Thésaurus  hym- 
nolog.  ,  m,  pag.  97  et  seq.  La  1"  est  une 
hymne  d'actions  de  grâces  et  de  supplications 
à  Dieu  ;  la  seconde  est  une  hymne  de  suppli- 
cations par  manière  de  louanges;  la  troisième 
est  en  l'honueur  de  la  sainte  Trinité.] 

33.  Nous  ue  connaissons  du  moine  Anasta- 
se  que  la  lettre  qu'il  écrivit  d'après  les  ordi-es 
de  saint  Ma.\Lme  en  635  aux  moines  de  Ca- 
gliari'en  Sardaigne '.  Il  leur  marque  que  les 
monothéliles,  résolus  de  ne  pas  suivre  la  doc- 
trine des  Pères  ,  ne  savaient  eux-mêmes  la- 
quelle suivre;  et  qu'après  avoir  avancé  qu'il 
ne  fallait  dire  ni  une  ni  deux  opérations,  ils 
en  admettaient  deux  et  une,  c'est-à-dire, 
trois  eu  un  même  Jésus-Christ  :  façons  de 
parler  qui  ne  répugnent  pas  moins  à  la  rai- 
son naturelle,  qu'au  langage  des  Pères  et 
des  Conciles,  et  qui  n'ont  pas  même  été  en 
usage  parmi  les  anciens  ni  les  nouveaux  hé- 
rétiques. Il  fait  voir  que,  les  deux-natures 
ayant  conservé  chacune  leur  propriété,  il 
est  absurde  d'en  imaginer  d'autres  qui  n'ont 
aucune  réalité  ;  que  saint  Denys  n'a  pas  dit 
tine  seule  opération,  mais  une  opération  nou- 
velle, c'es'-à-diieextraoïdinaire, et  au-dessus 
du  cours  de  la  nature  ;  et  déivirile  ou  tltéandri- 
que,  parce  que  les  deux  natures  agissaient 
conjoiutement.  Il  remarque  que  les  monothé- 
htes  avaient  fait  agréer  leui-  système  aux  lé- 
gats du  Saint-Siégc  ;  et  dans  la  crainte  que 
l'erreur  ne  séduisit  beaucoup  d'autres  per- 
sonnes, il  prie  les  moines  de  Cagliari  daller 
au  plus  tôt  à  Rome  pour  se  joindre  aux  hom- 
mes pieux  qui  y  étaient  et  qui  soutenaient 
vigoureusement  la  vérité,  afin  de  conserver 
la  foi  orthodoxe  sans  aucune  nouveauté,  en 
n'approuvant  que  ce  qui  avait  été  défini  par 
les  Pères  et  les  Conciles.  Cette  Lettre  se 
trouve  dans  le  premier  tome  des  œuvres  de 
saint  Maxime,  dans  les  recueils  d'Anaslasc 
le  Bibliothécaire,  imprimés  à  Paris  en  lG2t) 
par  le  P.  Sirmond  [clans  la  Patrologie  grec- 
que, tome  XCI,  col.  734,  et  dans  la  Patrolo- 
gie latine,  tome  CXXIX,  col.  1)23]. 

34.  On  y  trouve  encore  celle  qu'Anastase 
Apocrisiaire  de  Rome ,  le  compagnon  des 


travaux  et  des  soutfrances  de  saint  Maxime, 
écrivit  à  Tiiéodose ,  prêtre  de  Gangres  et 
moine  de  Jérusalem  '.  11  y  parle  de  la  mort 
de  ce  saint  abbé,  de  celle  du  moine  Ana- 
stase,  de  ce  qu'il  eut  lui-même  a  soutlrir  de 
la  part  desmonolhélites,  et  des  secours  qu'il 
reçut,  dans  son  exil  de  Lazes,  de  la  part 
d'Etienne,  trésorier  de  l'Église  de  Jérusa- 
lem, qui  l'était  venu  voir.  Il  prie  Théodose 
de  lui  envoyer  les  actes  du  concile  de  Lalran 
tenu  en  649  sous  Martin  I",  voulant  profiter 
de  son  exil  pour  connaître  la  vérité  partout 
où  il  le  pourrait.  Avec  cette  lettre,  il  envoya 
à  Théodose  plusieure  passages  de  saint  Hip- 
polyte,  évéque  de  Porto  et  martyr,  pour  éta- 
blir les  deux  volontés  et  les  deux  opérations 
en  Jésus-Christ.  Anastase  composa  plusieurs 
ouvrages,  et  les  éciivil  lui-même,  quoiqu'on 
lui  eût  coupé  la  main  droite  :  ce  qui  fut  re- 
gardé comme  un  miracle.  Il  faisait  attacher 
au  bout  de  son  bras  deux  petits  bâtons,  avec 
lesquels  il  tenait  la  plume.  Il  parlait  aussi 
très-distinctement,  quoiqu'il  eût  eu  la  langue 
coupée  jusqu'à  la  racine. 

35.  Théodose  et  Théodore  frères,  et  tous  Tbtod^fn 
deux  mornes  de  profession,  racontent  ces  i.e<ir.««ri«. 
faits  comme  les  ayant  appris  de  témoins  di- 
gnes de  foi.  Ils  avaient  '  même  eu  de  l'abbé 
Grégoire  les  deux  petits  bâtons  d(^it  Ana- 
stase se  seiTait  pour  écrire  sa  lettre  à  Théo- 
dose,  prêtre  de  Gangres,  les  passages  tirés 
des  écrits  de  saint  Hippolyte  pour  les  deux 
volontés  et  les  deux  opèruiious,  et  quelques 
syllogismes  qu'Anastase  avait  composés  poui' 
établir  cette  doctrine.  Xous  avons  encore 
tous  ces  monuments  parmi  les  actes  de  saint 
Maxime  '.  On  y  a  inséré  l'Hypomnesticon 
de  Théodose  et  de  Théodore,  comme  en  fai- 
sant partie.  En  etiet,  ils  y  parient  de  sa 
mort  et  des  miracles  qui  s'opéraient  à  son 
tombeau,  de  la  mort  des  deux  Anastase  ses 
disciples,  de  celle  du  pape  Martin  I"  et  des 
tourments  que  les  monolhrlites  lui  firent 
souttVir.  On  a  joint  à  l'Hypomnesticon  l'écrit 
d'un  anonyme',  qui  est  une  invective auièi-e 
contre  ceux  de  Constantinople,  à  cause  des 
persécutions  qu'ils  avaient  suscitées  à  saint 
Maxime  et  aux  deux  Anastase.  U  dit  quelque 
chose  des  ouvrages  de  ce  Père. 


'  Les  éiiitears  de  la  Patrologie  grecque  atlri. 
liucnt  celle  lettre  à  Auastase,  abbé  du  monastère 
lie  Saint-Euthjmius;  mais  ou  ne  voit  pas  que  cet 
ubbé  ait  Mè  disciple  de  saint  Maxime.  {L'éditeur.) 


»  Tom.  I  Oper.  S.  Xaximi,  pag.  13. 
»  Toni.   I   Op.  S.  ilaximi,  pa^.  G7,  et   in  llypo- 
mnestico,  ibid.,  pat;.  80.  —  '  Ibid.,  pag.  80. 
'  Ibid.,  pag.  67  et  euiv,  —  '  Ibid.,  pag.  83. 


[VII'  SIÈCLE.]      CHAPITRE  LXXVII.  —  SAINT  ILDEFONSE,  QUIRIGIIIS,  ETC. 


ITd 


CHAPITRE  LXVII. 

Saint  IldefoQse  arnhovcqne  de  Tolède  |667|,  Quiricias  de  Barcclonne 

Taïon  de  Saragossc. 

[  Écrivains  latins  de  la  môme  époque.] 


Saint  II- 
dBfiiQse  patt 
dans  Jes  coin, 
mfiiceiieots 
du  soptièiiio 
tièr'e-  Il  en)- 
bra^so  la  vie 
■  liaM  que, 
r.  il  >l.l>é, 
^  c  au  but' 
Uinii-  cnnclle 
de  Tolède  en 
tu. 


1.  Le  zèle  que  saint  Ildefonso  a  fait  pi- 
raître  pour  la  défeuse  de  l'iioniiour  de  la 
Sainte-Viorgo,  l'a  rendu  célèbre  dans  l'Égli- 
se'. 11  naquit  à  Tolède  dans  les  commence- 
ments du  vn°  siècle.  Ses  parents  le  mirent 
de  bonne  heure  sons  la  discipline  de  saint 
Isidore  de  Sévillc.  Ce  fut  là  qu'il  apprit  à 
mépriser  les  vanités  du  siècle,  qu'il  quitta 
en  etlet  pour  s'enfermer  dans  le  monastère 
d'Agli  aux  faubourgs  de  Tolède.  Il  en  fut 
depuis  choisi  abbé  ,  et  assista  en  cette  qua- 
lité, avec  neuf  autres  abbés,  au  huitième 
concile  de  Tolède  en  653. 
11..!!  fait,  2.  Saint  Eugène,  évèque  de  cette  ville, 
i»dc  .n  057  ;   etaut  fflort  sur  la  fin  de  1  an  6o7  ou  au  com- 

rii:'i't  en  tîû7. 

Se-  tcriis.  mencement  de  638 ,  on  mit  h  sa  place  saint 
Ildefonse,  qui  gouverna  l'église  de  Tolède 
pendant  neuf  ans  et  deux  mois.  Sa  Vie  fut 
éccrite  par  Zixilane  -  et  par  Julien  ',  qui  fu- 
rent l'un  et  l'autre  ses  successeurs.  Le  der- 
nier remarque  que  saint  Ildefonse  avait 
lui-même  divisé  ses  écrits  en  quatre  parties, 
dont  la  première  contenait  un  livre  en  forme 
de  prosopopée  de  sa  propre  faiblesse,  un 
ti'aité  de  la  virginité  perpétuelle  de  la  Sainte- 
Vierge  contre  les  infidèles,  im  opuscule  sur 
les  propriétés  des  trois  personnes  divines, 
un  autre  qui  contenait  des  remarques  sur 
les  actions  de  chaque  jour;  un  sur  les  sacre- 
ments ;  un  livre  en  particulier  sur  le  bap- 
tême; un  traité  des  progrès  dans  le  désert 
spirituel.  La  seconde  partie  renfermait  ses 
lettres,  avec  les  réponses  qu'on  y  avait  fai- 
tes. Les  siennes  ne  portaient  pas  toujours 
son  nom  :  quelquefois  il  en  empruntait  d'é- 
trangers, ou  il  enveloppait  le  sien  de  diver- 
ses énigmes.  Il  avait  composé  la  troisième 
partie  de  messes,  d'hymnes  et  de  sermons  ; 
et  la  quatrième,  de  plusieurs  petits  ouvrages 
en  vers  et  en  prose,  parmi  lesquels  il  y  avait 
des  épitaphes  et  des  épigrammes.  Outre  les 
ouvrages  renfermés  dans  ces  quatre  parties, 

Ildephons.  Vita  et  Elog.,  tom.  II  Act.  Ordin. 
S.  Bened.,  pag.  494. 
'  Ou  Cixila.  {L'éditeur.)  —  ^  Ildephons.   Yita   et 


Son  livre 
delaVIrciniie 


il  en  avait  commencé  d'autres  que  ses  occu- 
pations ne  lui  permirent  pas  d'achever. 

3.  Ue  tous  ces  écrits,  il  ne  nous  en  reste 
qne  trois,  dont  un  est  le  livre  de  la  Virginité   forp'iu»]iede 

■^  ~  l"Salnle-Vier. 

perpétuelle  de  la  Sainte- Vierge.  Saint  Ilde-  ^'• 
fonse  le  composa  à  la  prière  de  Quiricius, 
évèque  de  Barcelonne,  comme  on  le  voit  par 
les  lettres  que  ces  deux  évoques  s'écrivirent 
mutuellement,  et  qui  ont  été  imprimées  dans 
le  second  tome  du  Spicilége  de  Dom  Luc 
d'.\cliéri'*.  Dans  l'une,  Quiricius  admire  la 
clarté  avec  laquelle  saint  Ildefonse  avait 
développé  les  mystères  de  l'incarnation  et 
de  la  naissance  du  Seigneur ,  en  mettant 
dans  un  plein  jour  les  endroits  où  l'Écriture 
parle  avec  quelque  obscurité  sur  ce  sujet; 
de  sorte  qu'il  ne  craint  point  de  dire  qu'il 
avait  confondu  Jovinien,  Helvidius,  et  le  juif 
perfide  et  incrédule.  C'étaient  les  tj-ois  Infi- 
dèles, contre  lesquels  Julien  de  Tolède  dit 
que  saint  Ildefonse  avait  entrepris  son  ou- 
vrage. Thomas  Tamayus,  dans  ses  notes  sur 
la  Vie  de  ce  saint,  dit  que  son  livre  de  la 
Virginité  n'est  autre  que  la  messe  qu'il  com- 
posa en  l'honneur  de  la  Sainte-Vierge'^;  mais 
on  ne  peut  douter  que  ce  ne  soient  deux  ou- 
vrages différents.  Le  livre  de  la  Virginité  est 
divisé  en  douze  grands  chapitres,  où  le  saint 
établit  la  virginité  perpétuelle  de  Marie,  à 
la  manière  des  controversistes,  par  des  pas- 
sages de  l'Ancieu  et  du  Nouveau  Testament, 
et  par  des  raisonnements  fondés  sur  l'un  et 
sur  l'autre.  La  messe  en  l'honneur  de  la 
Sainte- Vierge  était  d'autant  moins  suscep- 
tible de  controverse,  et  d'une  si  grande  éten- 
due, qu'il  l'avait  lui-même  notée  pour  être 
chantée  en  musique.  Ajoutons  que  Zixilane, 
évèque  de  Tolède,  distingue  ces  deux  ou- 
vrages, en  attribuant  formellement  £i  son 
prédécesseur  un  traite  delà  Virginité,  et  une 
messe  en  l'honneur  de  la  Vierge  °. 

4.  Saint   Ildefonse    commence   ce    traité   irai'é!"  ^^  " 

Elnrfiiim.  Ibid.,  p-.g.  491.  — '  Pag.308,  10,  311,  ."îlî!.   • 

»  .Mnliillon.,  Ohserrat.  Tom.,  Il  Ad.  Ord.  S.  Be- 
nedicti,  pag.  'i97.  —  ^  Ibifi.,  pag.  496, 


774 


HISTOIKE  GÉNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Cap.  1. 


c«r-  »!'• 


Autre  Iraiti 
ilel'Mfïloili 
de    JUnr.  IL 

D  f?t  laîdcS. 


par  une  prière  qu'il  lui  adresse,  et  où  il  lui 
donne  en  divers  termes  synonymes  toutes 
les  louanges  que  l'on  peut  donner  à  la  Mère 
de  Dieu'.  Ensuite  il  prouve,  par  plusieurs 
passages  de  l'Écriture,  qu'il  était  néces- 
saire que  sa  virginité  fut  parfaite,  son  sein 
étant  la  maison  de  Dieu,  et  celui  qui  devait, 
naître  de  ce  sein  ayant  été  engendré  Dieu 
dès  avant  l'aurore,  c'est-à-dire  de  toute  éter- 
nité. D'après  Ildefonse,  attaquer  sa  virginité, 
c'est  attaquer  celui  qui  est  né  d'elle;  son 
Fils  est  Dieu  parfait  comme  il  est  homme 
parfait  ;  il  a  été  aussi  facile  à  Jésus-Cbrist 
de  conserver  la  virginité  de  sa  Mère,  que  de 
naître  miraculeusement  d'elle,  et  de  faire 
quantité  d'autres  miracles  ;  les  anges  ont 
rendu  témoignage  à  la  virginité  de  Ma- 
rie, en  lui  disant,  lorsqu'elle  eut  répondu 
qu'elle  ne  connaissait  point  d'homme  :  Le 
Saint-Esprit  surviendra  en  vous,  et  la  vertu 
du  Très-Haut  votts  couvrira  de  son  ombre; 
c'est  pourquoi  le  fruit  saint  gui  naîtra  de  vous 
sera  appelé  le  Fils  de  Dieu.  Il  invoque  avec 
beaucoup  de  dévotion  la  Sainte-Vierge,  afin 
d'obtenir  la  grâce  du  Saint-Esprit ,  et  par 
cette  grâce  celle  de  posséder  Jésus-Christ 
son  Fils.  Ensuite  il  proteste  que  Tbonneur 
qu'il  rend  à  la  Mère  '  se  rapporte  au  Fils, 
sans  se  terminer  à  elle  ;  et  que  s'il  sert  Ma- 
rie, c'est  pour  devenir  le  serviteur  de  son 
Fils,  pour  lui  êlrc  plus  soumis  et  plus  uni. 
«  C'est  ainsi ,  ajoute-t-il ,  que  le  service  que 
l'on  rend  ù  la  reine  tourne  à  l'honneur  du 
roi.  ))  Ce  traité  est  d'un  style  coupé  et  sen- 
tentieux. 

5.  Il  n'en  est  pas  de  même  d'un  autre  Irai- 
té  sur  la  virginité  perpétuelle  de  Marie,  que 
François  Feu-Ardent  a  fait  imprimer  avec  le 
précédent  sous  le  nom  de  saint  Ildefonse.  Il 
est  écrit  d'une  manière  moins  concise  et  plus 
dogmatique,  chaigé  de  passages  des  Pères, 
comme  de  saint  Jérôme,  de  saint  Augustin  , 
de  saint  Grégoire-!c-Grand ,  de  saint  Cyrille 
d'Alexandrie,  de  saint  Pierre  de  Ra venue, 
dont  aucun  n'est  cité  dans  le  premier  traité. 
D'ailleurs,  l'auteur  dédie  son  ouvrage  àl'ab- 
besse  et  aux  religieuses  de  Sainte-Marie  de 
Soissons,  qu'il  appelle  de  temps  en  temps 
ses  mères,  et  matrones  très-chères.  Cela  ne 


DVTC  d«    Il 

conDii>-'aDea 


convient  point  à  saint  Ildefonse,  qui,  ayant 
passé  toute  sa  vie  en  Espagne  ,  ne  pouvait 
avoir  de  si  étroites  liaisons  en  France.  Il  y 
a  donc  plus  d';ipparence  de  raison  de  l'attri- 
buer à  Ralhert  ',  dont  il  porte  le  nom  dans 
un  manuscrit  de  Corbie.  11  y  combat,  non, 
comme  saint  Ildefonse,  les  ennemis  décla- 
rés de  la  vraie  foi,  mais  les  théologiens  de 
son  temps,  qu'il  appelle  Frères,  qui  en  re- 
connaissant que  Marie  est  Mère  de  Dieu , 
pensaient  qu'elle  avait  accouché  à  la  ma- 
nière des  autres  femmes  :  ce  que  Jovinien 
avait  dit  avant  eux,  avec  cette  diû'érence 
qu'ils  ne  niaient  pas  comme  cet  hérétique  la 
virginité  perpétuelle  de  la  Sainte-Vierge. 

6.  Saint  Ildefonse  ne  dit  rien  de  nouveau 
dans  le  livre  intitulé  :  De  la  connaissance  du 
baptême  '.  Seulement  il  y  met  par  ordre  ce  ^°  ûp'*»». 
qu'il  avait  lu  dans  les  anciens  :  c'est  pour 
cette  raison  qu  il  lui  a  donné  ce  titre.  On  peut 
diviser  cet  écrit  en  deux  parties,  dont  la  pre- 
mière traite  des  inslruclions  que  l'on  donne 
à  ceux  que  l'on  prépare  au  baptême  ;  la  se-  ^ 
conde,  de  ce  qu'ils  doivent  faire  après  l'avoir 
reçu,  et  de  ce  qu'ils  doivent  espérer,  11  com- 
mence par  une  exposition  de  foi  sur  la  Tri- 
nité, à  qui  il  attribue  la  création  de  l'uni- 
vers, et  de  toutes  les  créatures  visibles  et 
invisibles  :  puis,  passant  à  la  chute  de  l'hom- 
me, il  marque  tous  les  moyens  que  Dieu  a 
employés  pour  le  relever  :  ce  qui  ne  s'est 
fait  parfaitement  que  par  le  mystère  de 
l'incarnatiou,  qui  est  l'ouvrage  des  trois  per- 
sonnes divines,  quoique  le  Fils  seul  se  soit 
incarné.  Le  baptême  de  saint  Jean  n'était 
qu'une  préparation  à  celui  de  Jésus-Christ, 
qui  seul  remet  les  péchés,  n'importe  qu'il 
soit  administré  par  un  bon  ou  par  un  mauvais 
ministre,  parce  que  c'est  Jésus-Christ  qui 
baptise.  Saint  Ildefonse  parle  des  cérémo- 
nies qui  précédaient  et  accompagnaient  le 
baptême,  des  exorcismes,  de  l'onction  des 
catéchumènes,  du  symbole  qu'on  leur  faisait 
apprendre,  qu'il  dit  avoir  été  composé  par 
les  apôtres,  et  donne  l'explication  de  tous 
les  articles  qu'il  contient;  de  l'autorité  des 
divines  fxriturcs  ;  du  canon  des  livres  saints 
de  l'un  et  de  l'autre  Testament,  cpii  est  le 
même  qu'aujourd'hui  ;  de  l'utilité  que  les 


'  Tniii.  XII  Biblioth.  Pa«.,pa!z.  550. 

'  Xdin  ego  ut  sim  serviis  filii  ejuf,  hanc  niihi 
domiiiari  prœopto.  VI  sim  dévolus  servus  filii, 
scrvitittrin  fidelilcr  appeto  gcnilrici.<...  Sic  Iransit 
honvr  in  rrgmi,  ijui  deferlur  in  fumulalum  rc- 
ginœ.  i"'ip.  xu. 


'  Mabillou,  Toui.  Il  Àct.  Ordin.  S.  Benedicli, 
pag.  497.  —  [C'.Vsl  le  fcntinicnl  qu'embrasse  aussi 
l'éiliteur  ofii.iguol  «ic-s  (HCuvrcs  de  saiut  lliic  - 
fonsp.l 

'  Tniu.  VI  Uisrdian.  Bnluzii.  p«f.'-  '*■ 


[vm"  SIÈCLE.]      CHAPITRE  LXXVII.  —  SAINT  ILDKFONSE,  QUlItlCIUS,  ETC. 


773 


morts  reçoivent  des  oblations  et  des  aumô- 
nos  lies  fiJiMcs  vivants;  du  passage  do  la 
Mer-llonge  et  des  aiilres  Rgiiros  du  haptênin 
dans  l'Ancien  Tcslainonl  ;  de  la  parlicipation 
au  corps  cl  au  sang-  do  Jtisiis-Christ,  accorddc 
aux.  nouveaux  baplisds  aussitôt  après  leur 
baptême.  11  snndile  dire  '  qu'il  y  avait  à  To- 
lède des  fonts  baptismaux  qui  se  remplis- 
saient d'eux-mêmfs  au  jour  du  baptême  so- 
lennel, et  dont  l'eau  s'écoulait  de  même.  Les 
jours  destinés  au  baptême  étaient  ceux  de 
PAqucs  et  de  la  PcnteciMe.  La  tradition  des 
Apôtres  et  des  Pères  n'en  connaissait  point 
d'autres,  sinon  dans  le  cas  de  nécessite.  L'é- 
vèque  devait  être  présent,  excepté  dans  les 
paroisses  éloignées,  d'où  il  n'était  pas  facile 
de  venir  ti  l'église  Ju  lieu  où  l'évoque  faisait 
sa  résidence.  Celui  qu'on  baptisait  renonçait 
il  trois  choses  :  au  diable  et  ;\  ses  anges,  à 
ses  œuvres  et  à  son  empire  ;  c'est  pourquoi 
il  descendait  trois  fois  dans  l'eau,  el,  il  en 
sortait  trois  fois,  à  cause  de  la  confession  de 
foi  qu'il  faisait  en  la  personne  du  Père,  en 
la  personne  du  Fils,  et  en  la  'personne  du 
Saint-Esprit.  Le  ministre  du  baptême  était 
obligé  de  prononcer  les  noms  de  ces  trois 
personnes,  sans  quoi  le  baptême  était  nul. 
L'etFet  de  ce  sacrement  est  la  rcuassion  du 
pécbé  originel  et  des  péchés  actuels.  Le 
devoir  des  parrains  consistait ,  non-seule- 
ment à  instruii'e  ceux  qu'ils  avaient  tenus 
sur  les  fonts,  mais  encore  h  leur  donner  bon 
exemple.  L'administration  du  baptême  est 
réservée  aux  évoques  et  aux  prêtres.  Dans 
le  cas  de  nécessité,  les  autres  clercs,  même 
les  fidèles  laïques,  peuvent  baptiser,  afin  que 
personne  ne  périsse  faute  de  ce  sacrement . 
On  ne  doit  jamais  le  réitérer ,  lors  même 
qu'il  a  été  conféré  par  un  hérétique  dans  la 
forme  ordinaire.  Outre  le  baptême  d'eau,  il 
y  en  a  un  de  sang  par  le  martj're,  et  un  troi- 
sième de  larmes  et  de  pénitence.  Pour  ren- 
dre le  baptisé  digne  du  nom  de  chrétien,  on 
l'oint  du  chrême,  comme  on  en  oignait  les 
pontifes  el  les  rois.  Cette  onction  produit  la 
descente  du  Saint-Esprit  dans  l'âme  de  celui 
qui  la  l'eçoit.  Saint  Ildefonsc  distingue  cette 
onction  de  celle  qui  se  faisait  sur  le  baptisé 
avec  l'imposition  des  mains,  c'est-à-dire  du 
sacrement  de  confirmation,  dont  il  dit  que 
l'évêque  est  seul  le  minisire,  suivant  la  re- 


marque du  pape  Innocent  I".  Il  parle  ensuite 

do  l'Oraison  dominicale  que  l'on  apprenait 
aux  baptisés,  du  corps  ot  du  sang  de  Jésus- 
Christ  dont  on  les  communiait,  des  habits 
blancs  dont  on  les  revotait,  et  dos  instruc- 
tions qu'on  leur  donnait  après  les  fêles  de 
Pà(pips  on  leur  ôtant  ces  habits. 

7.  Par  les  rcnoucemcnts  fails  dans  le  bap- 
tême au  démon,  à  ses  pompes,  à  ses  œuvres, 
nous  nous  engageons  h  vivre  dans  ce  monde 
comme  dans  un  désert  où,  à  l'iiuilalion  des 
saints  anachorètes,, nous  fermons  les  yeux  à 
tous  les  objets  capables  de  nous  séduire  et 
de  nous  entraîner  dans  les  voluptés  et  les 
autres  plaisirs  illicites,  prenant  pour  guide 
de  notre  conduite  Jésus-Christ  notre  Sau- 
veur, le  Soleil  de  justice  qui  éclaire  nos  pas, 
qui  par  sa  grâce  nous  facilite  le  chemin  qui 
mène  à  la  céleste  patrie,  et  nous  en  fait  sur- 
monter les  obstacles.  C'est  en  lui  seul  que 
nous  devons  mettre  notre  espérance,  puis- 
qu'il prépare  le  vouloir  et  donne  le  pouvoir, 
et  qu'il  donne  gratuitement  des  mérites  à 
ceux  qui  d'eux-mêmes  n'en  ont  point,  afin 
qu'il  leur  restitue  les  dons  qu'il  leur  avait 
faits.  Saint  Ildefonse  fait  un  détail  des 
bienfaits  dont  Dieu  nous  comble  en  cette  vie 
pour  nous  y  soutenir  et  nous  conduire  à  la 
félicité  de  l'autre ,  et  rapporte  un  grand 
nombre  de  figures  sous  lesquelles  ces  dons 
et  ces  grâces  sont  marqués  dans  l'Écriture, 
posant  pour  principe  que  la  foi  et  les  bonnes 
œuvres  sont  également  nécessaires  au  sa- 
lut. 

8.  L'auteur  des  Homélies  imprimées  sous 
le  nom  de  saint  Ildefonse,  est  dans  les  mê- 
mes principes  que  ce  Père  sur  la  manière  de 
l'enfantementdela  Sainlc-Vierge.  11  enseigne 
que  Jésus-Christ  sortit  de  son  sein  comme 
il  sortit  du  tombeau,  et  comme  il  entra  les 
portes  fermées  dans  la  chambre  où  les  apô- 
tres étaient  assemblés.  Il  taxe  d'hérésie  l'o- 
pinion contraire ,  dans  la  persuasion  que 
c'était  attaquer  la  virginité  perpétuelle  de 
Marie  que  de  dire  qu'elle  avait  accouché  à 
la  manière  ordinaire  des  femmes.  Mais  cette 
conformité  de  sentiments  n'est  point  une 
preuve  décisive  que  ces  homélies  soient  de 
ce  Père  :  Paschase  Ralberl  et  beaucoup  d'au- 
tres ont  pensé  de  mémo.  Il  y  a  même  une 
de  ces  Homélies  qui  est  constamment  de  ce 


Livre  in 
DfnTl    »plrl- 


Les  homé- 
lies <ous  le 
nom  do  s  int 
lidcpbinsene 
sont  pas  de 
lui. 


'  Il  le  dit  assez  positiremeut  dans  tout  le  clia- 
pitre  cv,  col.  150,  toui.  XCVl  de  l.i  Palrolngie  la- 
tine. Ce  Diiiacle  est  ariirmé  par  iilusiours  éurlvaius 


eccl(5siasliques.  Voyez,  ibid.,  une  note  de  l'éilitcur 
Loreuzaua.  {L'édileur.) 


776 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


dernier  auteur  :  elle  fait  la  seconde  parlie 
de  son  traité  de  la  Virginité  perpétuelle  de 
la  Saiute-Vierge  Jans  le  manuscrit  deCorbie  '; 
ce  qui  fait  voir  que  le  collecteur  de  ces  Ho- 
mélies les  a  mises  sous  le  nom  de  saint  Ilde- 
fonse  sans  connaissance  de  cause.    Il  y  a 
plus,   c'est  que  le  style  en  est  visiblement 
dilférent  de  celui  de  ce  Père  ;  et  les  extraits 
que  l'on  y  trouve  des  écrits  de  Ratrarane  ', 
de  Paschasc  Italbert,  de  saint  Bernard,  ne 
laissent  aucun  lieu  de  douter  que  l'auteur 
n'ait  vécu  dans  le  xii'  siècle  ou  depuis.  Com- 
ment attribuer  à  un  archevêque  de  Tolède 
cette  fa(;on  de  parler  à  ses  auditeurs,  qui  se 
lit  dans  la  cinquième  Homélie  sur  l'Assomp- 
tion de  Marie  ?  Mes  très-révérends  Pères  ',  et 
mes  très-chers  frères  et  seigneurs.  Il  témoigne 
au  même  endroit  que  cette  fête  se  célébrait 
dans  tout  l'univers  avec  .une  grande  solen- 
nité :  ce  qui  n'était  pas  dans  le  vu'  siècle, 
où  on  ne  la  célébrait  qu'en  quelques  pro- 
vinces '. 
T,.i.é  d=.       9.  Il  n'est  rien  dit  du  livre  des  Écrivains 
tiér.'.°V's''  ecclésiastiques  dans  le  catalogue  des  ouvra- 
dM   Œi."rcl  ges  de    saint    lldefonse    rapporté   par  les 
tV'e"'  '""'   auteurs  de  sa  vie,  si  ce  n'est  qu'ils  l'aient 
compris  dans  le  nombre  des  ouvrages  impar- 
faits. Mais  il  s'en  déclare  lui-même  auteur 
dans  la  Préface,  où  il  dit  qu'il  a  succédé  im- 
médiatement à  Eugène  le  Jeune    dans   le 
siège  de  Tolède.  Il  fut  porté  i\  écrire  sur  cette 
matière  par  l'exemple  de  saiut  Jérôme,  de 
Gennade  et  de  saint  Isidore,  et  par  la  crainte 
de  laisser  dans  l'oubli  plusieurs  écrivains  de 
distinction  dont  il  avait  les  écrits.  Il  com- 
mence son  catalogue  par  saint  Grégoire-le- 
Grand,  ne  trouvant  pas  que  saint  Isidore  de 
Séville  en  eût  dit  assez,  et  finit  à  Eugène 
son  prédécesseur,  qui  avait  succédé  lui-mê- 
me à  un  autre  Eugène.  Ce  livre  contient  en 
tout  quatorze  chapitres,  et  autant  d'écrivains 
ecclésiastiques.  Les  ouvrages  de  saint  llde- 
fonse,   avec   ceux    qui   sont    supposés,  ont 
été  imprimés  à  Paris  en  137G,  par  les  soins 
de  Feu-Ardent  de  l'ordre  des  Frères  Mineurs, 
et  depuis  dans  la   Bibliothèque  des  Pères. 
Son  catalogue  des  écrivains  ecclésiastiques 
se  trouve  ordinairement  avec  ceux  de  saint 


Jérôme  et  de  Gennade;  ses  deux  livres  de  la 
Connaissance  du  Baptême  ul  du  Progrès  dans 
le  chemin  du  désert  où  l'on  marche  après 
le  baptême,  au  sixième  volume  des  Mélanges 
de  Baluze,  h  Paris,  en  1713;  et  ses  Let- 
tres à  Quiricius,  évêquede  Barcelonne,  avec 
les  réponses  de  cet  évêque,  dans  le  second 
tome  du  Spicilége  dedomd'Acberi.  Elles  ont 
rapport  les  unes  et  les  autres  au  livre  de  la 
Perpétuelle  virginité  de  la  Sainte-Vierge. [Lo- 
reuzana  a  donné  une  édition  complète  des 
écrits  de  saint  lldefonse  dans  le  tome  1"  de  la 
collection  des  Pères  de  Tolède,  Madrid,  1782, 
in-fol..  Le  tome  XCVIde  la  Palrologie  latine 
reproduit  les  œuvres  de  saint  lldefonse.  On 
y  trouve  :  1.  Notice  d'après  le  P.  .\ntoine.  — 
2.  Autre  Vie  par  Lorenzana. — 3.  Éloge  du 
même  par  saint  Julien.  —  4.  Autre  Vie  par 
Cixilamus,  évêque  de  Tolède.  —  5.  Autre 
Vie  par  Rodéric,  moine  au  xiu"  siècle.  —  6. 
Préface  sur  l'ouvrage  suivant,  par  l'éditeur 
Lorenzana  :  —  1.  De  la  Virginité  perpétuelle 
de  sainte  Marie,  contre  trois  infidèles.  — 2. 
Annotation  sur  la  connaissance  du  baptême. 
—  [i.  Du  Voyage  daus  le  Désert  dans  lequel 
ou  s'avance  après  le  baptême.  —  4.  Deux 
Lettres  eu  réponse  à  celle  de  Quiricius,  évê- 
que de  Barcelonne.  —  5.  Le  bvre  des  Per- 
sonnes illustres,  ou  Vie  de  quatorze  prélats, 
presque  tous  évèques  d'Espagne.  —  Premier 
appendice,   écrits  douteux.   —  6.  De  l'En- 
fantement de  la  Vierge,  plus  probablement 
de  Paschasc  Ratbert,  abbé  de  Corbie,  avec 
deux  fragments  supplémentaires.  —  7.  Qua- 
torze discours.  —  Deuxième  appendice,  ou- 
vrages suj)posés.  —  8.  De  la  Couronne  de  la 
Sainte-Vierge.  —  9.  Continuation  des  Chro- 
niques de  saint  Isidore,  depuis  l'an  671  jus- 
qu'en 680.  —  10.  Epigrammes.] 

10. C'est  aQuiricius,  évêque  de  Barcelonne, 
que  Taïon,  évc(iuede  Saragossc,  adressâtes 
cinq  livres  des  Sentences  qu'il  avait  tirées  des 
Morales  de  sain  t  Grégoire,  et  des  écrits  de  saint 
Augustin  \  Il  lit  pour  cet  ell'et  le  voyage  de 
Rome  par  ordre  du  roi  des  Wisigotbs,  parce 
qu'on  ne  trouvait  pas  en  Espagne  tous  les  li- 
vres des  Morales  de  ce  Pape.  Ce  recueil  n'a 
pas  encore  été  imprimé  '  :  mais  dom  Ma- 


Qi.irlCi:-. 

T«loii.««'9" 
da  tBragftfï*. 


«  Mnbillon.Tom.  WÀct.  Ord.  S.  Bcnedicii,pAW. 

«  D'AihiTi,  Spicilig.,  l'jm.  I.  pas.  218,  toui.  Ml, 
p.ag.  l,  et  toni.  Ml  Bibliolh.  Pat.,  pag.  5"5. 

»  Ibiil.,  p.ig.  584. 

»  Le  nouvel  éiliteiir  île?  (inivres  «le  saint  llde- 
fouK,  Lorenzana,  regarde  ces  sermons  comme  dou- 


teux; il  est  cependant  plus  porté  à  les  rcfjaidi'i 
comme  supposé::,  à  cause  du  slyle  qui  traliil  dilTi'-- 
rcnls  auteurs.  Voyez  le  Munilum,  lom.  .\C\  I  de  la 
Patrol.  lai.,  col.  235.  (L'dJilmr.) 

»  Mabilliiu,  in  Ànalcclis,  pag.  6i,  91. 

«  Il  a   paru   depuis  daus  VEsp.  Sag.   rie  Fierez, 


[VII'  SIÈCLE.]      CHAPITRE  LXXVII.  —  SAINT 

hilltiii  en  a  doniii'^  la  Préface  ou  l'Ëpître  dé- 
diialoirc  dans  SOS  Analcctcs,  où  nous  voyons 
(Hie  le  premier  livre  de  eetlc  compilation  trai- 
tait de  l'inconimutabilitë  de  Dieu,  de  sa  toute- 
puissance  et  de  sou  (ileruité.  Il  parlait  dans 
les  autres  de  l'origine  du  monde,  de  la  for- 
mation de  l'homme,  du  jugement  de  Die'i,  de 
la  fzloirc  dos  liienheureux,  des  supplices  éter- 
nels des  mécliants.  Cette  Préface  est  suivie 
d'une  épi:;framme  où  il  doime  aussi  l'idée  de 
son  ouvrage,  puis  du  commencement  du  pre- 
mier livre.  Dom  Mabillon  donne  de  suite  la 
lettre  de  Qiiiricius  à  Taïon,  qui  contient  l'é- 
loge de  son  recueil.  Taïon  souscrivit  au  hui- 
tième concile  de  Tolède  en  653.  [Le  tome 
LXXX  de  la  Patrologie  latine,  col.  719,  con- 
tient une  notice  sur  Quiricius  par  Antoine, 
une  lettre  à  Eugène,  la  lettre  à  Quiricius,  la 
réponse  à  Quiricius,  l'épigramme,  les  cinq  li- 
vres des  Sentences  ou  Tiaité  de  la  Religion, 
un  appendice  sur  la  vision  de  Taïon.  La  let- 
tre à  Eugène  de  Tolède  est  reproduite  d'après 
Florez,  Espag.  sag.,  et  d'après  Baluze,  t.  IV 
Miscella».  Elle  indique  le  but  que  Taïon 
s'était  proposé  dans  la  composition  de  son 
livre;  elle  fait  l'éloge  le  plus  parfait  de  saint 
Grégoii'c-le-Grand  pour  ses  vertus,  son  élo- 
quence, sa  doctrine,  sa  sagesse,  qui  auraient 
mérité  les  éloges  de  Socrate,  de  Platon  et  de 
Varron.  Taïon  dit  qu'il  a  extrait  la  plus 
grande  partie  de  son  ouvrage  des  Momies  de 
saint  Grégoire;  il  en  a  rempli  six  manuscrits 
qu'il  envoie  à  Eugène. 

Le  premier  livre  des  Sentences  contient 
quarante  chapitres.  L'auteur,  après  avoir 
parlé  de  l'immutabilité,  de  la  souveraineté, 
de  l'éternité,  de  l'immensité,  de  la  toute- 
puissance,  de  l'invisibilité,  de  l'iufinité  de 
Dieu,  traite  du  Père,  du  Fils,  du  Saint-Es- 
prit, de  la  Trinité  et  de  l'uuité  en  Dieu  ;  il 
établit  qu'il  n'y  a  point  de  succession  en 
Dieu;  que  la  beauté  de  la  créature  proclame 
l'existence  de  Dieu,  qu'on  attribue  à  Dieu 
quelques-unes  des  atfections  de  l'homme,  la 
mémoire,  le  zèle,  la  douleur,  quoiqu'il  n'en 
ait  pas  les  excès.  Ce  Dieu  tout-puissant  a 
fait  ime  multitude  de  merveilles,  soit  dans  la 


ILDEFONSE,  QUIRICinS,  ETC. 


777 


création  et  la  conservation  du  monde,  soit   ^r ■"■• 

dans  les  miracles  opérés  dans  l'Ancien  et 
dans  le  Nouveau  Testament.  Les  trois  chapi-        «»• 
très  suivants  roulent  sur  les  anges.  Dans  les 
autres,  il  est  question  de  la  création,  de  la  dis-        «"'■ 
tinclion  des  créatures,  de   la  perfection  du 
nombre  sept,  de  l'âme  de  l'homme  et  de  ses 
sens,  du  premier  homme,  de  son  péché,  de 
la  Jérusalem  céleste,   de  la  Babylone  ré-        "■■ 
prouvée  et  de  ses  citoyens,  des  élus  avant 
Jésus-Christ.  Dans  les  derniers,  l'auteur  s'oc-        '•  ""• 
cupe  des  moyens  qui  conduisent  à  la  pré- 
destination, surtout  sous  la  loi  ancienne. 

Le  livre  second  est  consacré  à  Nolre-Sei-        "'*'• 
gneur,  aux  apôtres,  à  l'Église,  à  ses  prédi- 
cateurs, à  ses  mystères,  ;\  l'histoire  de  ses       ""• 
persécuteurs  ;  on  y  parle  des  accroissements       ""-"i. 
continuels  de  l'Église,  des  prospérités  et  tics 
adversités  de  ce  monde,  des  hérétiques,  de 
la  foi,  de  l'espérance,  de  la  charité,  de  la 
grâce  prévenante.  Les  autres  chapitres  ex- 
posent les  devoirs  des  pasteurs  et  des  sujets,       ""  ■"■ 
des  clercs  et  des  moines. 

Le  troisième  livre,  composé  de  cinquante- 
quatre  chapitres,  traite  de  la  volonté  et  de 
la  permission  divines,  des  misères  de  la  vie 
humaine,  des  dilférentes  vertus. 

Dans  le  quatrième,  qui  renferme  quarante- 
et-un  chapitres  ,  il  est  question  principale- 
ment des  vices. 

Dans  le  cinquième  livre ,  composé  de 
trente-trois  chapitres,  l'auteur  s'élève  con- 
tre les  amateurs  du  monde,  contre  les  hy- 
pocrites, les  pécheurs  et  les  impies  ;  il  ex- 
pose les  punitions  qui  leur  sont  réservées,  il 
parle  de  la  fin  du  monde,  de  la  conversion 
des  Juifs,  de  l'antechrist,  du  second  avène- 
ment de  Xotre-Seigneur,  de  la  résurrection 
des  morts ,  du  jugement ,  de  la  piiniteuce 
sans  fruH  des  réprouvés,  de  la  damnation 
des  démons,  des  éternels  supplices  de  l'en- 
fer. Le  chapitre  xxxiii  n'est  pas  entier;  il 
manque  aussi  le  chapitre  xxxiv,  comme  nous 
l'apprend  la  préface.  Cet  ouvrage  a  été  pu- 
blié dans  le  tome  XXI  de  VFsp.  sag.  par  le 
continuateur  de  Florez,  sur  un  manusciit  de 
Saiut-Emilien  de  la  Cogolla. 


tom.  XXI,  p.ig.  171.  Antoine  nous  apprend  que 
d.ins  le  tom.  X.\X  de  VEsp.  sag.  on  trouve  un 
fragment  d'une  lettre  adressée  à  Braulion  par  Ta- 


jus  ,  prêtre  et  al)t>é.  Tajus  serait  le  même  que 
Taïon:  Vid.  Antoine,  tom.  LXXX  de  la  Patrolo- 
gie latine,  col.  721,  note  6.  {L'édiUur.) 


779 


HISTOIRE  GKNÉRALE  DKS  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


CHAPITRE  LXXVIII. 

Saint  Priest  on  Préject,  évêqne  de  Clermont  [en  670  on  6741;  saint  Léger, 

évêqne  d'Autun  |678];  saint  Arbogaste,  évcqne  de  Strasbourg  [678j; 

et  Ternace,  évêqne  de  Besançon  [vers  l'an  6801. 

[Kcrivaius  latiiif.J 


Saint  PrifSt. 
fi  oair-'auce  , 

fOD  rdQ.'ailOD, 

«S  e-n['loi«. 


[1.  Ce  saint  naquit  en  Ativergnc  de  pa- 
rents nobles  ',  catholiques  et  craignant  Dieu, 
du  temps  du  roi  Clolaire  II  '.  Après  avoir 
fait  ses  prçmières  éludes  sous  les  religieux 
du  monastère  de  STiinl-Austremoine,  il  fut 
mis  sous  la  discipline  de  saint  Genès,  pour 
lors  archidiacre,  et  depuis  évoque  d'Auver- 
gne, comme  on  disait  dans  ce  temps  quand 
on  voulait  désigner  le  peuple  de  Clermont. 
Saint  Genès  le  forma  au  service  de  l'Église, 
et  le  fît  entrer  dans  le  clergé.  Il  se  distingua 
dès-lors  par  sa  modestie,  sa  charité,  son 
exactitude  à  remplir  tous  les  devoirs  de  la 
religion.  Après  la  connaissance  du  plain- 
chant,  qu'on  regardait  comme  une  partie  es- 
sentielle de  la  science  des  clercs,  et  dans  la- 
quelle il  se  rendit  fort  habile,  sa  principale 
élude  était  celle  de  l'Ecriture  sainte  et  de 
l'histoire  ecclésiastique.  Saint  Genès,  ayant 
été  élu  évêque  d'Auvergne,  lui  confia  la 
garde  de  l'argent  destiné  à  nourrir  les  pau- 
vres, et  comme  Priest  avançait  toujours  dans 
le  lien  à  mesure  qu'il  avançait  en  âge,  ou  lui 
confia  la  paroisse  d'Issoire  et  l'école  qui  y 
était  établie.  Après  la  mort  de  saint  Genès, 
Félix,  son  successeur,  confia  à  saint  Priest  la 
conduite  du  monastère  des  religieuses  de 
Candcdin,  et  Dieu  fit  dès-lors  connaître  la 
sainteté  de  son  serviteur  par  un  miracle 
qu'il  accorda  à  ses  prières  pour  sauver  la 
vie  d'un  ouvrier  qu'on  croyait  écrasé  par  la 
chule  d'un  pan  de  muraille.  L'éclat  de  celle 
action,  joint  à  celui  de  ses  vertus,  porta  l'é- 
véqne  Félix  à  l'ordonner  prêtre  malgré  sa 
résistance,  et  linéiques  années  après,  c'cst- 
à-diie  vers  l'an  6(13  ou  600,  Félix  étant  mort, 
le  peuple,  avec  l'agrément  de  Childéric  II, 
roi  d'Austrasie,  élut  saint  Priest  pour  lui  suc- 
céder dans  l'évôché  d'Auvergne.  Un  séna- 
teur Irès-riche,  nommé  Genès,  qu'on  vou- 


lait élire,  fit  réunir  tous  les  suft'ragcs  snr  lui. 
2.  Le  nouvel  évèque  employa  son  patri- 
moine et  les  sommes  considérables  que  lui 
remit  Genès,  comte  d'Auvergne,  à  fonder 
des  monastères,  des  églises  et  plusieurs  hô- 
pitaux. Il  ne  se  contenta  pas  de  pourvoir 
aux  besoins  de  tous  les  malheureux  de  son 
vaste  diocèse,  en  établissant  des  maisons  de 
charité  ;  il  travailla  encore  à  faire  fleurir  de 
toutes  parts  les  saintes  pratiques  de  la  reli- 
gion et  la  ferveur  chrétienne.  II  y  réussit  en 
instruisant  son  peuple  avec  un  zèle  infatigable, 
conforme  à  la  doctrine  qu'il  prêchait  aux  au- 
tres. Aussi  les  deux  historiens  de  sa  vie  font- 
ils  un  graud  éloge  de  sa  sainteté  émincnte  et 
de  son  rare  talent  pour  la  parole.  Il  gouver- 
na donc  son  diocèse  en  véritable  pasteur,  et 
on  peut  dire  qu'il  fut  véritablement  le  père 
de  son  peuple.  Ses  prédications,  qui  étaient 
presque  continuelles,  mais  surtout  la  force 
de  son  exemple  portèrentplusieurs  personnes 
de  piété  à  concourir  avec  lui  pour  assurer 
les  établissements  utiles  qu'il  avait  fondes 
en  faveur  des  pauvres  de  son  diocèse.  On 
vil  entre  autres  une  dame  de  qualité  ,  nom- 
mée Claude,  laisser  par  testament  quelques 
fonds  en  faveur  d'un  hôpital  que  le  saint 
avait  fait  bâtir.  Cette  dame  n'avait  qu'une 
fille,  que  le  patrice  Hector ,  comte  de  Mar- 
seille, homme  violent  et  débauché ,  enleva 
el  conduisit  à  la  cour,  où  il  accusa  le  saint 
évêque  de  s'être  injustement  emparé  des 
biens  de  la  mère  de  cette  fille.  Celle  accu- 
sation obligea  saint  Priest  à  se  rendre  lui-mê- 
me à  la  cour.  Dans  son  voyage,  il  guérit  de 
la  fièvre  un  saint  hoimn.e  nommé  Auiarin, 
qui  vivait  dans  la  retraite  au  fond  des  Vosges 
dans  un  lieu  nommé  Doroangus'.  Amarin 
accompagna  ensuite  ri''vèque  de  Clermont  h 
la  cour,  où  la  juslificalion  de  sou  innocence 


Son  <[.!>fo. 
!■•'.  Sun  nilr- 
(;re. 


•  Voyez  Dolland,  Vie  de  sainl  Priest,  pag.  628, 
636,  el  .Mabillon,  Act.  Bened.,  Inm.  I,pag.  642,  G50. 

•  Ce  priuce  moula  sur  le  trône  eu  573  et  mourut 
en  628. 


'  Dan?  In  liante  Alsace;  ce  lieu  depuis  longtemps 
n'est  iilu?  connu  que  sous  le  nom  île  Vallée  de 
saint  Auiarin.  lue  petite  ville,  dite  aussi  de  Saint- 
Amarin,  est  le  olief-lieu  de  cette  vallée. 


fit 


CIIAIMTRK  LXXVIII.  —  SAINT  PRIEST,  SAINT  LÉGEIl,  ETC. 


[vu"  SIÈCLE.] 

et  ilo  son  bon  droit  n'eut  pas  de  peine  h  se 
proiliiire.  Le  ravisseur,  d'ailleurs,  coupable 
de  plusieurs  autres  crimes,  fut  puni  par  un 
ordre  du  roi.  Les  parents  et  les  partisans 
du  patrico  ref;ardorenl  sa  mort  comme  une 
suite  des  plaintes  que  le  saint  avait  portées 
au  roi  contre  lui.  La  perte  du  saint  évoque 
fut  donc  arrêtée.  On  commença  par  aigrir 
contre  lui  plusieui's  seigneurs  d'Auvergne  ; 
on  clieicha  ensuite  l'occasion  de  s'en  défaire. 
Elle  ne  tarda  pas  il  se  pré.'^euter.  Gomme  on 
savait  qu'il  passerait  par  Yolvic  en  reve- 
nant de  la  cour,  Agrice,  le  plus  ardent  de 
ses  ennemis,  alla  l'y  attendre  avec  vingt 
soldats.  Les  assassins  tuèrent  d'abord  Ama- 
rin,  qu'ils  prirent  pour  l'évèquo,  et  se  retirè- 
rent. Mais  le  saint,  ayant  connu  leur  des- 
sein, mit  sa  confiance  en  Dieu  et  se  présenta 
courageusement  à  eu.x,  tandis  qu'ils  reve- 
naient sur  leurs  pas  pour  examiner  ce  qu'ils 
avaient  fait  :  «  Vous  vous  êtes  trompés,  leur 
dit  saint  Priest  ;  c'est  moi  que  vous  cher- 
chez ;  faites  ce  qu'il  vous  plaira.  »  Alors 
un  Saxon  nommé  Uadbert,  le  plus  détermi- 
né de  la  troupe,  le  perça  de  son  épée  dans 
l'estomac.  Le  saint,  se  sentant  frappé  à  mort, 
dit  à  Dieu  :  «  Ne  le  leur  imputez  pas,  Sei- 
gnem",  parce  qu'ils  ne  savent  pas  ce  qu'ils 
font.  »  A  peine  eut-il  fini  ces  paroles,  qu'un 
soldat  lui  ouvrit  la  tète  d'un  coup  do  sabre, 
dont  il  expira  le  23  janvier,  l'an  de  Jésus- 
Christ  674  selon  l'opinion  commune,  et  au 
plus  tôt  en  670.  On  massacra  en  même  temps 
un  acolyte  nommé  Élède ,  le  seul  de  ses 
gens  qui  était  resté  avec  lui.  La  France  ho- 
nora la  mémoire  de  saint  Priest  immédiate- 
ment après  sa  mort.  Son  nom  fut  ajouté  au 
calendrier  dans  les  copies  que  l'on  fit  en  ce 
royaume  du  Sacramentaire  de  saint  Grégoire. 
On  bâtit  aussi  sous  son  invocation  plusieurs 
églises  dans  difl'érentes  provinces  de  la  Fran- 
ce. Une  partie  considérable  de  ses  reliques 
fut  portée  en  760  à  l'abbaye  de  Flavigny, 
qui  appartenait  à  l'ordre  de  Gluny.  On  trans- 
féra le  reste  à  Saint-Quentin  dans  l'abbaye 
de  Saint-Prix,  au  prieuré  de  Saint-Prix  près 
de  Béthune  en  Artois,  et  dans  d'autres  en- 
droits. 

Nous  avons  deux  Vies  de  sajnt  Priest  écri- 
tes par  des  auteurs  contemporains,  dont 
l'un  avait  connu  le  saint  évêque.  Nous  avons 


779 


dit,  dans  une  note  ci-dessus,  où  elles  se  trou- 
vaient. 

3.  Saint  Priest,  à  lu  suite  de  longues  et 
patientes  recherches,  surtout  quand  il  était 
préposé  i\  l'église  d'Issoire,  a  composé  l'His- 
toire de  saint  Austremoine,  apôtre  et  pre- 
mier évoque  d'Auvergne  ;  une  partie  en  est 
en  prose  ;  et  l'antre  est  en  vers.  Cette  his- 
toire ou  passion  est  reproduite  dans  la 
yova  Jiihliot/iccamaiiiiscripldrinn  librorum  du 
P.  I>abbe.  Ce  père  l'avait  reçue  d'.Vndré 
Duchesne  par  l'entremise  du  père  Sirmond. 
Il  n'a  pas  reproduit  la  partie  du  Prolo- 
gue, que  Duchesne  a  donnée  scrupuleuse- 
ment dans  sa  Collection  manuscrite  '.  La 
Bibliothèque  impériale  renferme  dans  les 
manuscrits  du  fonds  latin,  num.  3365,  fol. 
117,  une  Vie  de  saint  Austremoine  par  saint 
Priest,  peinte  au  xii'  siècle  sur  un  manus- 
crit plus  ancien,  probablement  du  viii"  siè- 
cle, au  témoignage  des  hommes  les  plus  com- 
pétents. Cette  Vie  renferme  en  entier  le  Pro- 
logue de  saint  Priest.  Ce  Prologue  s'accorde 
parfaitement,  sauf  quelques  légers  change- 
ments d'expressions,  avec  la  partie  insérée 
dans  la  collection  de  Duchesne.  L'on  pos- 
sède à  la  bibliothèque  de  la  ville  de  Cler- 
mont  un  certain  nombre  de  manuscrits  fort 
anciens  des  x,  xiii,  xiv  et  xv°  siècles,  repro- 
duisant,  avec  quelques  variantes  de  peu 
d'importance,  et  qui  ne  touchent  point  au 
fond,  la  même  vie  de  saint  ,\usU'emoine  par 
saint  Priest  '^  C'est,  du  reste,  la  tradition 
constante  de  l'église  de  Glermont.  Dans  cette 
Vie,  la  mission  des  six  évêques  envoyés  prê- 
cher l'Évangile  dans  les  Gaules  est  assignée 
à  saint  Pierre.  Voici  les  paroles  de  l'histo- 
rien rapportant  ce  fait  :  «  Après  la  glorieuse 
ascension  de  Xotre-Seigneur,  le  bienheureux 
Pierre,  prince  des  apôtres,  appelant  à  lui 
ses  très-saints  disciples,  les  destina  à  la  pré- 
dication, les  fortifia  de  sa  bénédiction  et  de 
celle  de  tous  les  apôtres,  et  les  honora  de 
la  consécration  épiscopale.  Voici  les  noms 
de  ces  hommes  illustres,  auxquels  il  assigna 
des  villes  particulières  :  l'évéque  Catien  fut 
envoyé  à  Tours  ,  Trophime  à  .\rles  ,  Paul  à 
Narbonne,  Saturnin  à  Toulouse,  Martial  à 
Limoges.  Parmi  eux,  l'illusti-e  martyr  Aus- 
tremoine reçut,  après  Dieu,  le  gouverne- 
ment de  l'église  d'Auvergne  '.  n  On  voit  par 


T.r,f>  ri» 
ijint  l'riol. 


'  Vol.  Lxxxiv,  fol.  74.  Voir  les  manuscrits  de  la 
Bil)liothi-que  Impt'riale. 

-  Cette  légende  fitait  aussi  conservée  dans  le  tré- 
cor  de  Saint-Martial  de  Limoges  et  attribuée  à  saint 


Pricft.  (Bonav.,  Hisl.  de  saint  Martial,  tom.  I,  pag. 
447.) 

'  Posl  gloriosam  igilur  Domini  nostri  ascen- 
sionem  bealissimus  Peints,  princeps  apostolorum, 


780 


HISTOIRE  GÉNKRALE  DES  AUTKUllS  ECCLESIASTIQUES. 


là  que  l'autorité  de  Grépoire  de  Tours  ,  qui 
assigne  la  mission  de  saint  Austremoine  au 
iir  siècle,  n'a  pas  empêché  l'auteur  de  la  lé- 
gende de  saint  Austremoine  d'cciire  le  con- 
traire dans  le  pays  natal  de  ce  même  histo- 
rien. On  doit  encore  remarquer  que  l'on  ii'j- 
trouve  point  le  nom  de  saint  Penys.  évèque 
de  Paris,  et  que  saint  Austremoine  et  saint 
Saturnin  y  portent  seuls  le  titre  de  martyr. 

Saint  Priest  est  également  l'auteur  de  la 
Vie  et  de  la  Passion  de  plusieurs  saints  mar- 
tyrs d'Auvergne,  tels  que  saint  Cassien  ,  sé- 
nateur de  la  ville  d'Auvergne  ;  de  saint  Vic- 
torin,  de  saint  Antolien,  de  saint  Liminien 
et  d'uu  grand  nombre  d'autres  martyrisés 
vers  l'an  268.  Ainsi  saint  Priest  se  présente 
avec  la  triple  couronne  de  la  poésie,  de  l'his- 
toire et  du  martyre.  11  mérite  donc  à  juste 
titre  d'avoir  place  dans  la  Collection  des  Au- 
teurs ecclésiastiques  '.] 
njumoco      4.  On  met  la  naissance  de  saint  Léger  -, 
|J„*"  ul'à:  autrement  Léodégaire,  vers  l'an  626.  Il  était 
dj°!iAie°4y,  de  qualité,  et  allié  à  la  famille  royale.  Dès 

est  Toit  t-Tfiquo  .  -i      i.     ,  •  *^       i        ■      1 

tn  «58,  ou  sa  jeunesse  il  fut  mis  par  ses  parents  a  la 
cour  de  Clotaire  II,  qui  le  confia  quelque 
temps  après  à  Didon,  évèque  de  Poitiers, 
pour  le  faire  instruire  dans  les  belles  let- 
tres'. Cet  évèque,  voyant  qu'il  y  avait  fait 
d'assez  grands  progrès,  le  lit  venir  auprès 
de  lui  pour  le  former  à  la  vertu,  pensant 
à  le  rendre  digne  d'être  son  successeur.  Il 
l'ordonna  diacre  a  l'âge  de  vint;t  ans,  puis 
le  fit  archidiacre,  et  partagea  avec  lui  le 
gouvernement  de  son  diocèse.  Il  ne  put  tou- 
tefois le  refuser  aux  moines  de  Saint-Maixen t, 
qui  le  demandèrent  pour  leur  abbé.  Mais 


après  qu'il  les  eut  gouvernés  en  rette  qualité 
pendant  six  années,  Clotaire  III.  et  la  reine 
Bathilde  sa  mère,  dont  il  avait  gagné  l'es- 
time et  la  bienveillance  pendant  son  séjour 
à  la  cour,  le  firent  placer  sur  le  siège  épig- 
copal  d'Autiin,  vacant  depuis  deux  ans,  dans 
l'espérance  qu'il  réunirait  le  clergé  de  cette 
église,  qui  était  extréraemeni  divisé  et  dans 
le  trouble,  parce  qu'il  y  avait  eu  deux  pré- 
tendants qui  s'étaient  disputé  ce  siège  jus- 
qu'à répandre  du  sang.  Son  élection  se  fit 
en  638  ou  059,  et  fut  suivie  de  la  réunion 
des  esprits. 

0.  Il  y  avait  dix  ans  qu'il  gouvernait  l'é-  „„^° 
glise  d'Autun,  lorsque  Clotaire  III  mourut,  '"''•  f- 
ne  laissant  aucun  enfant  mâle.  La  couronne 
appartenait  à  Childéric,  roi  d'Austrasie  :  mais 
Ébroïn,  maire  du  palais,  fit  proclamer  roi 
Théodoric.  Les  Français,  qui  craignaient 
d'avoir  pour  maître  ce  ministre  ambitieux, 
avare  et  cruel,  se  déclarèrent  pour  Childéric, 
et  saint  Léger  fut  du  nombre.  Childéric,  qui 
connaissait  sa  capacité  et  sa  vertu,  le  choisit 
pour  son  principal  ministre.  Tant  qu'il  sui- 
vit les  avis  de  ce  saint  évèque,  son  gouver- 
nement fut  béni  des  peuples  :  mais  ce  prince, 
s'étant  laissé  prévenir  par  des  esprits  brouil- 
lons et  emportés  qu'il  avait  admis  à  sa  con- 
fidence, changea  en  haiue  son  amitié  pour 
son  ministre.  U  le  fit  arrêter,  et  ordonna  une 
assemblée  de  seigneurs  pour  lui  faire  son 
procès.  Son  dessein  était  de  le  faire  mourir. 
Il  en  changea,  et  le  fit  enfermer  pour  le  reste 
de  ses  jours  dans  le  monastère  de  Luxeuil, 
où  il  avait  aussi  relégué  Ébroïn.  Us  en  sor- 
tirent l'un  et  l'autre,  après  y  avoir  vécu  en- 


ni«r- 


ailvocans  ipsos  sanctissimos  dUscipulos,  ad  prœ- 
dicanduiii  destinavil,  et  sua  omniumque  aposlo- 
loruiii  benedictione  roboravit,  H  ponti/icali  ho- 
nore sublimcnit.  Quorum  videlicel  virorum  iHus- 
trium,  qui  singutis  urbibus  rraiU  ddegamli,  hœc 
fuere  nomina:  Turonem  dirigilur  Oatianus  epis- 
copus,  Arelatcm  Trophimus,  i\arbonum  Paulus, 
Tolosam  Salurninus,  Lemovicas  ilarlidlis.  Arver- 
nicam  inler  eos  monarchium  Aiislremonins  in~ 
clytus  martyr  pont  Deuni  suscepil  regenduin.  Ex 
eisdem  tanlum  Auslremnnius  el  Salurtiinus  per 
marlyrii  palwam  assec.uti  funt  œteriue  felicilatis 
coronam.  {Apud  Labbe.  !\ov.  Bibl.  man., Tom.  Il, 
pag.  482.) 

'  Plusieurs  des  détails  ci-di-ssus  sur  les  écrits  de 
saint  Prii'st  sout  dus  à  l'obli^eanfe  de  M.  Brun, 
vicaire  général  de  Cleniiout.  Dans  la  lettre  qu'il  a 
adressée  à  M.  Vives  sur  ce  sujet,  je  lis  encore  celte 
phrase  :  «  Je  dois  ajouter  en  terminant  que  la  lé- 
gende de  saint  Austremoine  par  saint  l'riest,  que 
plusieurs  critiques  étaient  portés  à  considérer  com- 


me mêlée  do  fable,  malgré  la  presque  unanimité  de 
nos  auteurs  ecclésiastiques  et  l'unauiniilé  de  nos 
bréviaires  manuscrits  et  imprimés,  excepté  depuis 
la  fin  du  xvi|t  siècle,  se  trouve  parfaitement  d'accord 
avec  les  légendes  du  Bréviaire  récemment  approu- 
vées à  Rome.  » 

'Ou  peut  voir  sur  saint  Léger  l'histoire  intéres- 
sante de  sa  vie  publiée  par  U.  l'ilra,  l  vol.  in-8,  l'a- 
ris  1S4U.  Un  trouve  à  la  fin  du  volume  des  pièces 
importantes  dont  plusieur:?  étaient  inédiles.  Il  y  a 
entre  autres  deux  Vies  de  saint  Lé^cr:  l'une  en  vers 
a  élé  tirée  d'un  manuscrit  de  Saint-Oall;  l'auteur 
anonyme  vivait  probablement  dans  le  ix"  siècle, 
et  était  pcul-iMre  du  Poitou;  l'autre,  en  prose,  com- 
posée par  l-'riiland,  moine  de.Murbacbeu  en  Alsace, 
dans  le  xi«  siècle,  d'après  un  manuscrit  de  Slras- 
bourg  inconnu  aux  Uollandistes.  Ces  deux  Vies  ont 
fourni  des  détails  précieux.  [L'ddileur.^ 

'  Vita  Leodegarii,  tom.  Il  Arl.  ordin.  S.  Iltiied., 
pag.  GSO  el  $eq. 


CiJAl'lTlïE  LXXIX.  —  VITALIEN,  AGATllUN,  LÉON,  ETC. 


'  Lfttlro  il« 
;  Ugor  )  St- 

Nd.  p.  676. 


[VU*  .SIÈCLE.] 

sciiihli!  coiunic  s'ils  n'avaient  jannii.s  eu  rien 
a  il('uuMcr.  Ils  vinrer.t  jusqu'à  Autuu,  d'où 
ils  allùient  Uouvor  le  loi  Théoiloric.  Mais 
Kbruïn,  étant  devenu  maire  du  palais  de  ce 
prince,  fit  couper  la  tête  à  saint  Léger,  après 
lui  avoir  fait  soull'rir  auparavant  d'horribles 
tourments.  Il  mourut ,  comme  l'ou  croit ,  en 
G78.  L'Eglise  l'honore  parmi  les  martyrs. 

6.  Quelque  temps  avant  sa  mort,  il  écri- 
vit i\  sa  mère  Si(j;rade,  qui  s'était  rendue  re- 
ligieuse dans  le  moiiaslère  de  Notre-Dame 
de  Soissons  :  c'était  pour  la  consoler  de  la 
mort  de  Gairin  son  autre  fds,  qu'Ebroïn  avait 
fait  allacher  à  un  poteau,  et  ensuite  mourir 
à  coups  de  pierres.  Il  la  congratule  sur  sa 
retraite  du  monde,  lui  représente  que  la  mort 
de  Gairin  ne  lui  doit  point  être  un  sujet  de 
tristesse,  puisqu'elle  causait  de  la  joie  aux 
anges;  qu'aprèri  la  prière  que  Jésus-Christ 
a  l'aile  sur  la  croix  pour  ceux  qui  le  faisaient 
mourir,  nous  ne  pouvons  nous  dispenser 
d'aimer  nos  ennemis  et  nos  persécuteurs. 
Ou  trouve  cette  lettre  dans  le  premier  tome 
de  la  Bibliuthèque  des  Manuscrits  du  Père 
Labbe,  dans  le  second  tome  des  Actes  de 
l'Ordre  de  Saint-Benoît,  et  dans  le  quatrième 
de  la  Gaule  Chrétienne.  Nous  parlerons  ail- 
leurs des  canons  ou  statuts  que  saint  Léger 
fit  dans  un  synode  qu'il  tint  à  Autun  vers 
l'an  070.  On  a  de  lui  un  testament  par  lequel 
il  donne  quelques  terres  à  son  Église  '.  Les 


781 


fautes  qui  se  trouvent  dans  les  dates  l'ont 
d'abord  fait  rejeter  comme  sujjposé  ;  mais 
on  l'a  (le|)uis  regardé  coujnie  aullienli<(ue, 
paice  qu'il  est  avoué  par  Jouas,  évéquo 
d'Autun  dans  le  ix°  siècle,  et  par  le  pape 
Jean  VllI ,  qui  vivait  en  même  temps  '.  |0n 
trouve  l(!s  écrits  do  saint  Liiger  dans  \e[o- 
mi'.  \.C\[  de  Ui  J'iilrolufjie  lidine,  col.  '.i2'.),  et 
dans  {'Histoire  de  saint  Lcyer  par  U.  Pitra, 
])ag.  445  et  suiv.] 

7.  La  Vie  do  saint  Arbogasto  écrite  par  ^,^"^°[^^'^'°; 
Ulhou,  l'un  de  ses  successeurs,  nous  apprend  ■l'Si'u'boi.rs. 
qu'il  fut  élevé  sur  le  siège  épiscopal  de  Stras- 

boin-g  après  la  mort  de  l'évèque  Ilodlhairo 
vers  l'an  670  ' ,  et  qu'il  le  gouverna  jusqu'à 
l'an  078  ,  auquel  il  mourut.  On  lui  attribue 
un  recueil  d'homélies  en  forme  de  Couunen- 
taires  sur  les  Épltres  de  saint  Paul.  11  n'est 
point  imprimé.  [La  vie  de  saint  Arbogaste 
est  reproduite  au  tome  CXXXIV  de  la  Patro- 
logie  latine,  col.  1001-1008.] 

8.  On  n'a  pas  non  plus  la  Chronique  que      ''"'""• 
Ternacc,  évoque  de  Besançon,  composa  vers 

l'an  670 ,  où  il  donnait  la  suite  des  évèques 
ses  prédécesseurs.  Il  gouverna  cette  Église 
jusques  vers  l'an  680,  et  fd  bâtir  dans  le 
Charap-de-Mars  une  église  en  l'honneur  des 
saints  martyrs  Marcellin  et  Pierre  ,  qui  de- 
puis a  été  convertie  en  une  abbaye  de  l'Or- 
dre de  Saint-Benoit  sous  le  nom  de  saint 
Vincent  '. 


CHAPITRE   LXXIX. 
Les  Papes  Vitalien  [672],  saint  Agathon  [682],  saint  Léon  II  [684], 
Benoît  II  [685],  saint  Siviard,  abbé  [vers  687]. 

(  Écrivains  latins.] 


1.  Le  pape  Eugène  étant  mort  en  658,  le 
deuxième  de  juin,  après  un  pontificat  de 
deux  ans,  huit  mois  et  vingt-quatre  jours,  le 
Saint-Siège  vaqua  près  de  deux  mois;  et  le 

>  Le  Cointe,  ad  an.  666  ;  Mabillon,  Annal.,  lib. 
XVI,  num.  3g,  et  tom.  11  Àct.  Ordin.  S.  Benedicti, 
pag.  67 o. 

>  Voyez  Histoire  de  saint  Léger,  par  D.  Pitra, 
pag.  1})2  et  suiv.  Le  savant  auteur,  pour  lever  les 
dil'UouUés  t^^ée3  du  préambule,  des  notes  chrono- 
logiques et  de  la  désignation  du  lieu,  distingue 
trois  époques  :  celle  où  le  testament  fut  écrit,  celle 
où  il  fut  souscrit  et  clos,  et  celle  où  il  fut  trans- 
crit au  carlulaire  de  l'Église  d'Autun.  La  première 
rédaction  remouterait  au  concile  d'Autun,  et  le 
saint  évèque  n'y  aurait  mis  la  dernière  main  qu'à 


dernier  de  juillet  de  la  même  année,  on  élut 
Vitalien,  fils  d'Anasfase,  natif  de  Signia  en 
Campante,  qui  tint  le  Saint-Siège  quatorze 
ans  et  six  mois  ^.  Il  envoya,  suivant  la  cou- 
la veille  de  son  martyre,  vers  l'an  676.  Le  préam- 
bule aurait  été  interpolé.  Le  lieu  désigné  sous  le 
nom  de  Ckristiaco  ou  Kaco  par  abréviation,  se- 
rait Christi  civilas,  c'est-à-dire  Autun.  D.  Pitra 
donne  une  copie  plus  pure  de  ce  testament,  d'a- 
près Aubert  Lemire,  à  la  pag.  184,  note  1.  (L'édi- 
teur.) 

3  Bollandus,  ad  diem  21  julii  ;  Mabillon,  Annal, 
lib.  XV,  num.  59. 

'•  Bolland.,  ad  diem  ë  junii. 

'  Anastas.,  tom.  VI  Cuncil.,  ag.  4i4;  Mabill;, 
tom.  Il  Actor.,  in  Prcefat.  et  Chronol. 


782 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Sa  lellri  t 
it  Crètr. 


Sa   Mtre   & 
W»D.  a  l'aU' 

al  k  UfMge, 

éiCqu»  de  â;* 
i«ci.ae. 


tume,  des  légats  à  Constantinople,  avec  une 
Lettre  synodale  pour  donner  avis  de  son  or- 
dination à  l'empereur  Constantin  et  au  pa- 
triarche Pierre.  Ce  prince  les  reçut,  renou- 
vela des  privilèges  de  l'Eglise,  et  fit  prt'sent 
à  saint  Pierre  d'un  livre  des  Evangiles,  cou- 
vert d'or  et  orné  de  pierres  précieuses  d'une 
grandeur  extraordinaire.  Le  patriarche,  dans 
la  réponse  qu'il  lit  de  son  côté  à  la  Lettre  du 
Pape  ',  atlectait  une  grande  union  avec  lui  ; 
mais  il  ne  laissait  pas  d'établir  dans  sa  lettre 
l'unité  de  volonté  et  d'opératiou  en  Jésus- 
Christ,  par  divers  passages  des  Pères  qu'il 
avait  tronqués. 

2.  Vitalien  a  laissé  six 'Lettres,  dont  deux 
sont  adressées  à  Paul,  arclievéque  de  Crète, 
et  une  à  Waan,  chambellan  de  l'Empereur. 
Elles  roulent  toutes  trois  sur  une  même  af- 
faire' qui  regardait  Jean,  évêque  de  Lappa. 
Paul  avait  rendu  contre  lui  une  sentence, 
dont  Jean  avait  appelé  au  Saint-Siège.  Le 
Pape,  s'élant  fait  représenter  les  actes  du 
procès,  les  examina  dans  un  concile  d'évê- 
ques,  qui  reconnurent  que  la  procédure  était 
mal  instruite,  et  que  l'évéque  de  Lappa  avait 
été  condamné  contre  la  disposition  des  saints 
canons  et  des  statuts  des  Pères.  Le  concile 
fut  donc  d'avis  de  casser  cette  sentence,  et 
de  renvoyer  Jean  absous.  En  conséquence, 
le  Pape  et  les  évêques  assemblés  célébrèrent 
avec  lui  les  saints  Mystères.  Vitalien,  en  fai- 
sant part  à  l'arcbevêque  de  Crète  du  résultat 
du  concile,  lui  reproche  de  n'avoir  pas  per- 
mis à  celui  de  Lappa  de  venir  se  justifier  à 
Rome,  comme  il  le  lui  avait  demandé,  et 
lui  ordonne  de  le  rétablir  dans  son  église. 
Il  écrivit  quelques  mois  après  à  Waan  d'ac- 
corder sa  protection  à  Jean,  et  de  procurer 
le  rétablissement  de  cet  évoque  ',  apparem- 
ment parce  que  Paul  en  faisait  difliculté;  ou 
du  moins  de  lui  rendre  toutes  les  églises  qui 
dépendaient  de  son  diocèse.  C'est  ce  que 
l'on  voit  dans  la  seconde  Lettre  que  le  Pape 
écrivit  à  Paul,  où  il  lui  ordonne  de  restituer 
à  l'église  de  Lappa  deux  monastères,  dont 
celle  de  Crète  s'était  emparée.  Il  s'y  plaint 
de  ce  que  Paul  avait  soull'ert  qu'un  diacre  se 
mariAt  et  qu'il  servit  en  même  temps  dans 
deux  églises.  Il  employa  encore  le  crédit  do 


Georges,  évêque  de  Syracuse,  pour  faire  ren- 
trer au  plus  tôt  Jean  dans  son  église.  C'est  le 
sujet  de  sa  quatrième  Lettre'. 

3.  Oswi,  roi  de  Northumberland,  compre- 
nant, à  la  suite  de  la  conférence  de  Stre-  ] 
neshal,  que  l'Église  romaine  était  le  centre 
de  lÉglise  catholique,  envoya  un  saint  prêtre 
à  Rome  pour  y  être  ordonné  archevêque  de 
Cantorbéry,  afin  qu'il  put  lui-même  ordonner 
ensuite  des  évêques  dans  toutes  les  Églises 
des  Anglais  *.  Vigard,  c'était  le  nom  de  ce 
prêtre,  rendit  à  Vitalien  les  lettres  du  roi, 
avec  des  présents  consistant  en  quantité  de 
vases  d'or  et  d'artrent.  Mais,  peu  de  temps 
après  son  arrivée  ;\  Rome,  il  y  mourut  de  la 
peste.  Le  Pape,  en  attendant  qu'il  pût  trouver 
un  sujet  propre  pour  être  fait  évoque  de 
Cantorbéry,  fit  réponse  au  roi  Oswi,  louant 
son  zèle  et  celui  de  sa  nation  pour  la  foi  ca- 
tholique, et  l'exhortant  à  continuer,  et  A  se 
conformer  entièrement  aux  traditions  de  l'É- 
glise romaine,  soit  pour  la  Pàque,  soit  pour 
les  autres  observances.  Avec  cette  Lettre,  le 
Pape  envoya  à  ce  prince  des  reliques  des 
bienheureux  apôtres  saint  Pierre  et  saint 
Paul,  et  des  martyrs  saint  Laurent,  saint  Jean 
et  saint  Paul;  et  à  la  reine  son  épouse,  une 
croix  et  une  clef  d'or,  dans  laquelle  il  y  avait 
de  la  limaille  des  chaînes  de  saint  Pierre  et 
de  saint  Paul. 

A.  II  y  a  une  sixième  Lettre  sous  le  nom 
du  pape  Vitalien,  aux  moines  qui  vivaient 
dans  la  Sicile,  sous  le  domaine  de  saint  Be- 
noît et  de  saint  Placide,  et  dont  les  villes, 
les  châteaux,  les  monastères,  les  métairies  et 
les  autres  biens-fonds  avaient  été  ravagés 
par  les  incursions  des  païens.  Le  Pape,  après 
avoir  témoigné  aux  moines  sa  douleur,  dit  (ju'il 
leur  envoie  des  religieux  de  la  congrégation 
de  Gassin  pour  les  aider  à  réparer  toutes  ces 
peites,  et  déclare  qu'il  est  disposé  lui-même 
à  prendre  sous  sa  protection  tous  les  biens 
que  le  patrice  Terlulle  avait  donnés  à  saint 
Benoît  dans  la  Sicile.  Dom  Mabillou  parle 
souvent,  dans  ses  .Vunales,  de  la  donation 
de  Tertulle  ',  et  allègue  pour  la  confirmer  le 
témoignage  de  Léon  .Marsican  dans  la  Chro- 
nique de  Cassln.  N'aurait-il  pas  aussi  allégué 
cette  Lettre  de  Vitalien,  s'il  l'eût  regardée 


S4l'llr«>lt 
nioinrs  de  i 

cil",  t-af .  k" 


'  Concil.,  tom.  VI,  pag.  961. 

*  Il  y  en  a   cinq  autres  dout  uous  parlerons  ci- 
dessous.    L'éditeur.) 

•  Concil.,  tom.  VI,  pag.  UB,  US. 

Ibid.,  pag.  il7,  et  Concil.,  U>m.  VI,  pag.  449. 


•  Ibid.,  pag.  448. 
<  Deda  lib.  lil  Hisl.,  cap.  .\xt. 
''  Mabillon,  in  Annal.,  lib.  III,  num,  11,  pag.  59 
et  66. 


CHAPITRE  LXXIX.  —  SAINT  IlKiNUlT.  SAINl'  LKUN  11,  E'I'C. 


[vil*  SIÈCLE.] 

conimo  ëlanl  véritablement  de  ce  Pape?  Les 
Collecteurs  des  conciles  semblent  douter 
qu'elle  soit  de  lui;  mais  ils  n'eu  donnent 
point  do  raisons.  On  conserve  dans  les  ar- 
chives de  l'abbaye  de  Stavelo,  un  diplôme  du 
pape  Vilalien,  adresse  à  l'abbé  itabolèue  ', 
coutirmatif  des  donations  que  le  roi  Sigebert 
avait  faites  ;\  ce  monastère,  qui  dès-lors  était 
uni  i'i  celui  de  Malmedy.  Il  est  datii  du  mois 
de  décembre,  indiclion  quatrième,  c'est-à- 
dire  de  l'an  601.  Le  Pape  y  accorde  ■!\  deux 
monastères  le  droit  de  se  choisir  un  abbé, 
suivant  la  règle  de  saint  Benoît. 

5.  [On  trouve  les  lettres  de  Vilalien  dans  le 
lom.  LXXXVII  de  la  Pat?:  lat.,  avec  une  no- 
tice historique,  col.  907.  II  y  a  cinq  autres  let- 
tres dont  on  n'a  point  parlé,  et  qui  se  trouvent 
reproduites  d'après  Mansi.  La  première  est 
aux  moines  de  Fieury,  pour  l'enlèvement  du 
corps  de  saint  Benoit  du  Mont-Cassin;  la  se- 
conde est  au  roi  Clovis  ;  la  troisième  aux  ar- 
chevêques, évèques  et  abbés  des  Gaules,  d'Es- 
pagne, de  Germanie;  toutes  deux  ont  encore 
rapport  l'i  l'enlèvement  du  corps  de  saint  Be- 
noit. La  quatrième,  qui  est  la  dixième  de  la  col- 
lection, est  adressée  à  Théodore,  archevêque 
deCantorbéry;  le  Pape  confirme  lespriviléges 
de  son  église.  La  cinquième,  qui  est  la  onziè- 
me, est  adressée  à  l'évêque  de  Bénévent  ;  dif- 
férents privilèges  sont  accordés  à  son  église.] 

6.  Le  successeur  de  A'italien  fut  Adéodat 
ou  Dieudonné  ,  qui  occupa  le  Saint-Siège 
pendant  quatre  ans,  deux  mois  et  cinq  jours  -. 
Après  sa  mort,  arrivée  au  mois  de  juin  677, 
on  élut  Bonus  ou  Domnus,  qui  mourut  au 
mois  d'avril  679.  Ces  deux  papes  n'ont  laissé 
aucun  monument  par  écrit  '.  L'empereur 
Constantin  avait  toutefois  adressé  une  lettre 
à  Domnus;  mais  elle  ne  fut  rendue  qu'au 
pape  Agathon,  Domnus  étant  mort  lorsqu'elle 
arriva  à  Rome.  Agathon  fut  mis  sur  le  Saint- 
Siège  après  deux  mois  et  quinze  jours  de  va- 
cance, et  le  tint  deux  ans  et  demi.  Son  pre- 
mier soin  fut  de  répondre  à  la  lettre  de 
l'Empereur  qui  lui  avait  été  remise  par  le  se- 


783 


crélaire  lOpiphane.  Elle  contient  une  cxphca- 
tion  de  la  foi  do  l'Église  sur  la  Trinité  et 
l'Incarnation,  principalement  par  rapport  à 
la  «(ucslion  des  diMix  Vdloul/'s,  dont  Agathon 
prouve  la  distinction  par  les  passages  de  l'ii- 
criturc  expli<piés  par  les  Pères.  Constaidin, 
dans  sa  lettre  au  Pape,  l'avait  prié  d'envoyer 
à  Constantinople  des  hommes  sages  et  bien 
instruits,  avec  les  livres  nécessaires  pour  agi- 
ter et  décider  cette  question  avec  les  patriar- 
ches Théodore  de  Conslantinople  et  Macaire 
d'Antioche.  Sur  cela,  Agathon  assembla  un 
concile  de  cent  vingt-cinq  évèques,  au  mois 
de  mars  680,  dont  le  résultat  fut  qu'on  en- 
verrait à  Constantinople,  suivant  les  désirs 
de  l'Empereur,  des  députés  pour  assister  au 
concile  qui  devait  s'y  tenir.  La  lettre  synodale 
de  celui  de  Rome  contient  en  substance  les 
mêmes  choses  que  celle  du  Pape  :  il  en  sera 
parlé  plus  au  long  dans  l'article  des  Conciles 
tenus  au  sujet  du  monothélisme.  Nous  avons 
sous  le  nom  du  pape  Agathon  une  Lettre 
adressée  h  Ethelrède,  roi  des  Merciens,  à 
Théodore,  archevêque  de  Cantorbéry,  à 
Sexulfe,  abbé  et  élu  évêqiie,  et  à  tous  les 
abbés  d'Angleterre,  dans  laquelle  il  établit 
l'abbé  de  Peterboourg  son  Légat  dans  toute 
l'Angleterre,  avec  pouvoir  d'absoudre  ceux 
qui  avaient  fait  vœu  d'aller  à  Rome  aux  tom- 
beaux des  Apôtres;  eu  déclarant  qu'd  leur 
suffirait  d'aller  à  ce  monastère,  et  qu'ils  y 
obtiendraient  les  mêmes  indulgences  que 
s'ils  eussent  fait  le  voyage  de  Rome.  Mais 
c'est  une  pièce  mal  concertée  et  fabriquée 
exprès  pour  la  conservation  des  biens  et  des 
droits  de  l'abbaye  de  Peterboourg.  Il  serait 
sans  exemple  qu'un  pape  eût  écrit  une  lettre 
commune  à  un  roi,  à  un  archevêque,  et  à 
tous  les  abbés  d'un  royaume.  On  en  trouve- 
rait peu  aussi  qui  fussent  composées  de  la 
manière  dont  l'est  celle-ci  :  quoiqu'elle  soit 
adressée  au  roi  Ethelrède  dans  l'inscription, 
le  Pape  ne  lui  porte  point  la  parole  dans  le 
corpsdela  Lettre.  Au  contraire,  il  s'y  adresse, 
tantôt  à  l'archevêque  de  Cantorbéry,  tantôt  à 


«  Mabillon,  ibid.,  lib.  XV,  num.  20,  pag.  465. 

5  Tom.  VI  Concil.,  pag.  573. 

'  Adéodat  ratifia  eu  674  le  privilège  accordé  par 
Crotpert,  évêque  de  Tours,  au  monastère  de  Saint- 
Martin,  privilège  qui  consistait  à  affranchir  ce  mo- 
nastère de  l'autorité  de  l'ordinaire.  La  lettre  qui 
accorde  ce  privilège  est  adressée  à  tous  les  évèques 
des  Gaules.  Elle  est  reproduite  au  tome  LXXXVII 
de  la  Patrnlogie  latine,  col.  1141  et  suiv.  Un  privi- 
lège accordé  par  le  même  Pape  eu  673  aux  moines 
du  monastère  de  Saint-Pierre  et  de  Saint-Paul  de 


Cantorbéry  se  trouve  au  même  volume,  col.  1143  et 
suiv.  Ces  deux  pièces  sont  précédées  d'une  notice 
extraite  du  Pontifical  d'Anastase.  La  lettre  adres- 
sée à  Domnus  par  l'empereur  Constantin,  se  trouve 
en  grec  et  en  latin  au  tome  L.XXXVl!  de  la  Patro- 
logie  latine,  col.  1147  et  suiv.,  d'après  Mansi.  Elle 
est  suivie  d'une  épitaphe  en  vers  du  pape  Ilono- 
rius,  attribuée  à  Domnus  par  Papebrock  et  repro- 
duite d'après  les  inscriptions  de  Gruter.  Une  no- 
tice historique  sur  Domnus  précèal  ces  deux  piè- 
ces, tel.  1145  et  M 16.  {l'éditeur.) 


784 


HISTOIKE  GENEKALK  DES  AUTEUHS  ECCLÉSIASTIQUES. 


l'abbé  Sexulfe.  [On  trouve,  dans  le  t.  LXXXVII 
de  la  Patr.  Int. .  col.  i  139,  une  notice  sur  saint 
Ayullion  d'après  Mansi,  ci  quatre  lettres  sur 
les  all'aiies  de  l'Église,  en  prec  et  en  latin.] 
u..n  II,       "i-  Le   pape  saint  Agallion  étant  mort  en 

u.''»  lïJ^I  682,  on  lui  donna  pour  successeur  Léon  II, 
Sicilien  de  naissance,  fils  de  Paul  '.  Son  or- 
dination fut  dilTéréc  de  plusieurs  mois , 
parce  que  l'Empereur  n'avait  accordé  aux 
légats  du  pape  Agallion  la  remise  d'une 
partie  de  la  somme  donnée  habituellement 
pour  l'intronisation  du  Pape,  qu'à  condition 
que  le  Pape  nouvellement  élu  ne  serait  or- 
donné qu'après  que  le  décret  d'élection  au- 
rait été  porté  à  Constantinople,  et  que  l'Em- 
pereur aui-ait  donné  son  consentement.  Les 
mêmes  légats  rapportèrent  à  Rome  la  remise 
de  plusieuis  coulributioiis  dont  l'Eglise  ro- 
maine était  surchargée;  les  actes  du  concile 
de  Constantinople  contre  les  monothélites,  et 
deux  lettres  de  l'Empereur  confirmativcs  des 
décrets  de  ce  concile  -  :  l'une  était  adressée 
au  pape  Léon,  l'autre  aux  évoques  d'Occi- 
dent. Ce  prince  disait,  dans  la  première, 
qu'il  avait  trouvé  celles  du  pape  Agathon 
conformes  aux  saintes  Écritures,  aux  Conci- 
les et  aux  Pères;  que  tous  les  évoques  du 
concile  l'avaient  reçue  avec  autant  de  joie 
que  si  saint  Pierre  eut  parlé  ;  que  Macaire, 
pati'iarclie  d'Anlioche,  avait  seul  refusé  de 
s'y  conformer.  Le  Pape  fit  à  cette  lettre  une 
lud  I.K.  réponse  datée  du  septième  de  mai,  indiclion 

'""•  onzième,  683.  Constantin,  sous-diacre,  ré- 

gionnaire  du  Saint-Sii-ge,  l'un  de  ceux  qui 
avaient  assisté  au  concile  de  Constantinople 
de  la  part  du  pape  Agathon,  fut  chargé  de 
la  porter  à  l'Empereur.  Léon  y  disait  qu'a- 
près avoir  examin(;  les  actes  de  ce  concile, 
il  a\ail  remarqué  qu'on  y  avait  suivi  exacte- 
ment la  doctrine  des  cinq  précédents;  qu'ain- 
si il  en  adoptait  la  définition  et  la  confirmait 

ms.   l'a;.  ' 

""•  par  l'autorité  de  saint  Pierre;  qu'en  consé- 

quence il  anatbéniatisait  les  inventeurs  de  la 
nouvelle  hérésie,  Théodore  de  Pharan,  Cy- 
rus,  Sergius,  Pyirhus,  Patd  et  Pierre  de 
Constantinople,  et  encore  lïonorius,  qui,  au 
lieu  di-  jjuri/icr  relie  L'fjlise  apostolique  par  la 
doctrine  des  A jjàtres,  a  pensé  renverser  la  foi 
par  une  trahison  profane.  Léon  anathémati- 
sait  aussi  Macaire,  patriarche  d'Antioche, 
Polyclirone,  piètre  et  moine,  et  tous  les  au- 
tres qui  étaient  demeurés  opiniâtres  dans  le 
monolliélisnie. 


8.  Il  fit  part  des  décrets  du  concile  aux  ,^,-' 
évéqucs  d'Espagne,  par  quatre  lettres.  La  ,^J- 
première  est  adressée  à  tous  les  évêques  "  '• 
d'Espagne,  h  qui  il  apprend  que  le  sixième 
concile  avait  été  célébré  pendant  la  neuvième 
indiction  ;  d'où  l'on  a  pris  occasion  de  reje- 
ter celle  lettre  comme  supposée,  parce  que 
ce  concile  ne  fut  achevé  que  dans  la  dixième 
indiction.  On  peut  répondre  en  deux  maniè- 
res il  celle  difficulté  :  1°  en  disantque  le  sens 
de  celle  Leilre  est  que  la  question  touchant 
le  raonothélisine  avait  été  terminée  dans  un 
concile  assemblé  à  Constantinople  à  la  neu- 
vième indiction  ;  2°  qu'encore  que  les  dix-sep- 
tième et  dix-huitième  actions  du  concile,  qui 
sont  du  H  et  du  10  septembre,  aient  été  te- 
nues au  commencement  delà  dixième  indic- 
tion selon  les  Grecs,  le  Pape  i)ouvait  dire 
qu'elles  ne  s'étaient  tenues  qu'en  la  neuviè- 
me indiction ,  parce  que  les  Romains  ne 
commençaient  l'indiction  qu'au  vingt-qua- 
trième de  septembre;  qu'ainsi  le  concile 
avait  en  etfet  été  achevé  à  la  neuvième  in- 
diction. II  fait  en  peu  de  mots  le  récit  de  ce 
qui  se  passa  dans  ce  concile  contre  les  mono- 
thélites, et  promet  aux  évêques  d'Espagne  de 
leur  en  envoyer  les  actes  lorsqu'on  aui-ait 
achevé  de  les  traduire  du  grec  en  latin.  En 
attendant,  il  leur  fit  passer  la  définition  de 
foi  du  concile,  avec  le  discours  à  l'Empereur 
et  son  édit,  les  priant  de  faire  connaître  cette 
définition  à  tous  les  évêques  de  leur  province 
et  à  tout  le  peuple  ;  d'y  faire  souscrire  tous 
les  évêques,  et  d'envoyer  à  Home  leurs  sous- 
criptions pour  les  déposer  près  de  la  Confes- 
sion de  saint  Pierre.  —  La  seconde  Lettre  est 
à  Quiricius,  archevè(pie  de  Tolède  :  il  i-lail 
mort  avant  le  mois  d'octobre  080  ;  mais  Léon 
ne  le  savait  pas.  —  La  troisième  s'adresse  à 
un  comte  nommé  Simplicc,  et  la  quatrième  au 
roi  Ervige.  Toutes  ces  Lettres  ont  pour  but 
de  faire  recevoir  en  Espagne  la  définition  de 
foi  du  concile  de  Constantinople;  et  celle  at- 
tention était  nécessaire  de  la  part  du  Pape, 
parce  que  les  évoques  d'Espagne  n'avaient 
eu  aucune  part  au  sixième  concile  œciimé- 
ni(pic,  et  n'avaient  point  été  invités  au  con- 
cile de  Rome,  d'où  l'on  avait  envoyé  des  dé- 
putés à  Constantinople.  Parlant  dans  la  lettre 
aux  ('vèques  d'Espagne  de  la  condamnalion 
d'Ilonorius,  il  en  (loiiiiepourraison  qu'il  11 'avait 
point  éteint,  comme  il  convenait  A  l'autorité 
apostolique,  la  flamme  de  l'hérésie  dans  sa 


Toiu.  VI  Concil.,  pag.  1100. 


*  Ibid.,  pag.  1100  et  1104. 


[vil*  SIÈCLE. 1 


CHAPITKE  LXXIX.  —  SAINT  SlVlAIll),  AUBli. 


78.") 


naissance,  ui.'iis  l'avait  l'oiuciU-Je  par  sa  néf^li- 
genco  '.  Mais,  dans  sa  lottre  an  roi  Erviffo, 
il  (lit  c[no  lo  cnnciift  (ontlninnn  iroiinriiis,  pariaî 
qu'il  avait  laissi!  lU'Iiir  la  i-i\i;ic  de-  la  tradiliiiii 
apostolique  (ju'il  avait  reçue  entière  de  ses 
prédëcesseurs  *.  Léon  II  parlait  ainsi,  pour 
montrer  que  la  faute  dont  ou  cliar';eait  Iln- 
norius,  son  priVlécessenr,  no  portait  point  de 
préjudice  ;iu  Saint-Siège,  et  qu'elle  lui  était 
personnelle.  Une  l'accuse  pas  même  d'héré- 
sie, mais  seulement  de  né;^li,i;ence,  et  d'avoir 
trop  favorisé  les  ennemis  de  la  Faine  doctrine 
eu  ne  les  réprimant  pas.  Les  Icllresde  Léon 
n'arrivèrent  en  Es[)agne  qu'après  la  tenue  du 
treizième  concile  de  Tolède;  ainsi  l'on  remit 
la  réception  solennelle  an  concile  qui  devait 

ibid.  i>«g.   se  tenir  un  an  après,  suivant  la  coutume.  En 
«r»  et  sulY.  ,  '        '         .  , 

attendant  ,   on  coiamuniqua  les  actes   du 

sixième  concile  général  aux  cvèqnes,  pour 
qu'ils  les  examinassent  cliacnn  chez  eux.  Ces 
actes  furent  produits  en  68i  dans  le  quator- 
zième concile  de  Tolède,  comparés  avec  ceux 
des  quatre  premiers  conciles,  et  reçus  avec 
respect;  mais  cela  n'arriva  qu'après  la  mort 
du  pape  Léon  H,  dont  le  pontificat  ne  fut  que 
d'un  an  et  sept  mois  *. 

Le  pape  était  éloquent,  instruit  des  saintes 
Ecritures  et  des  langues  erecque  et  latine.  Il 
mourut  sur  la  fin  de  juin  en  GSi.  [Ou  trouve, 
dans  le  tome  XCVI,  col.  383,  une  notice  sur 
saint  Léon,  d'après  Mansi,  et  les  lettres  au 
nombre  de  sept,  grec  et  latin,  parmi  lesquel- 
les il  y  eu  a  une  de  l'empereur  Constantin.] 
BoDoii  u,  8.  Le  successeur  de  saint  Léon  fut  Benoit  II, 
'  1res.'  Romain  de  naissance,  fils  de  Jean.  Il  avait  ser- 

vi l'Eglise  dès  son  enfance,  et  s'était  beaucoup 
app',i(7ué  à  l'étude  de  l'Écriture  sainte  *.  Son 
pontificat  fut  de  huit  mois  et  dix-sept  jours. 
L'empereur  Constantin,  voyant  les  difficultés 
qu'il  y  avait  d'envoyer  à  Constantinople  le 
décret  d'élection  des  papes,  écrivit  au  cler- 
gé, ail  peuple  et  à  l'armée  de  Rome  que, 
pour  ordonner  sans  retard  celui  qui  aurait 
été  élu  pape ,  il  suffirait  que  l'exarque  de 
Ravennc  consentit  à  cette  élection  en  son 
nom.  Garsias  Loaisa  dit  avoir  trouvé  dans 
un  ancien  manuscrit  en  parchemin  chez  les 


franciscains  de  Saint-Jean  a  Tolède  plusieurs 
lettres  du  pape  Benoit  avec  celles  de  Léon  II, 

écrites  en  latin  ,  et  <jiii  i-laient  toutes  sur  la 
mèuie  matière,  c'esl-A-ilire,  sur  l'acreplalion 
que  les  évoques  d'Espagne  devaient  faire  ,^i^""-  '"'• 
des  décrets  du  sixième  concile  général.  Les 
évèques  du  quinzième  concile  de  Tolède  en 
G88  l'ont  aussi  mention  des  letties  que  Be-  .,,['''''■  ''"'  ' 
noit  U  leur  avait  écrites;  et  ceux  du  qua- 
torzième en  684,  de  celle  qu'ils  avaient  reçue  ^  ii.w.  m. 
de  Léon  II.  Nous  n'avons  des  lettres  de  Be- 
noit II,  que  celle  qu'il  écrivit  au  notaire 
Pierre,  qui  était  en  Espagne,  pour  le  presser 
d'exécuter  la  commission  pour  laquelle 
Léon  II,  son  prédécesseur,  l'avait  envoyé, 
qui  était  de  faiie  signer  aux  évoques  la  défi- 
nition de  foi  du  sixième  concile  œcuméni-  i,,^"''''''^'"'' 
que.  Ils  la  signèrent,  et  avec  leurs  souscrip- 
tions, ils  envoyèrent  au  pape  Benoit  un  livre 
ou  tome  où  ils  expliquaient  plus  au  long  leur 
croyance.  Le  pape,  y  ayant  trouvé  quelques 
expressions  peu  correctes,  entr'autres  celles- 
ci  :  La  volonté  a  engendré  la  volonté  ;  en  lé- 
sus-C/irisf  il  y  a  trois  substances,  les  fit  remar- 
quer au  député  des  évoques  d'Espagne,  qui 
en  fit  rapport  à  ceux  qui  l'avaient  envojé. 
Benoît  II  s'employa  en  vain  pour  ramener 
Macaire  d'Autioche  à  la  saine  doctrine.  Sous 
son  pontificat,  l'empereur  Constantin  envoya 
à  Rome  les  cheveux  de  ses  deux  fils  Jusli- 
nien  etHéraclius,  qui  furent  reçus  par  le 
Pape,  le  clei'gé  et  l'armée  '.  C'était  une  es- 
pèce d'adoption  usitée  en  ce  temps-Là.  Celui 
qui  recevait  les  cheveux  d'un  jeune  homme 
était  regardé  comme  son  père.  Ce  prince 
voulut  donc,  avant  de  mourir,  faire  cet  hon- 
neur au  Pape  ou  ;\  saint  Pierre.  Benoît  sur- 
vécut peu  à  cette  cérémonie,  étant  mort  au 
mois  de  décembre  de  l'an  685.  [Le  tome 
XCVI,  col.  421,  reproduit  une  notice  histori- 
que sur  saint  Benoit  II,  d'après  Mansi,  et  les 
deux  Lettres  de  ce  Pape. 

9.  [Siviard,  abbé  d'Anisole  au  diocèse  du        saimsi- 
Mans,  succéda  dans  cette  dignité  a  Sigiroii,   mort«rsf,>7. 
son  père,  dans  la  dernière  moitié  du  vu"  siè- 
cle. Il  était  né  au  Maine  d'une  famille  dis- 
tinguée par  sa  noblesse  et  par  sa  vertu.  Si- 


•  Mlerna  damnatione  muictati  sunt  Theodorus 
Pharuiiilaims,  Cyrus...  cum  Honorio,  qui  flam- 
mam  hœretici  dogmatis  non,  ut  decuit  apotiloli- 
cam  autoritalem,  incipientem  exiinxit,  sed  negli- 
gendo  coufovil.  Léo,  Epist.  ad  episcop.  Hispan., 
toiii.  VI  Concil.,  pag.  1247. 

'  Omnes  liœreticœ  assertionis  autores  rene- 
rando    cenaente    Concilia   condemnati..,   id  est, 


Theodorus,  Cyrus...  et  nna  cum  eis  Honorius  Ro- 
manus,  qui  iiniuuculalam  aposlolicœ  tradilionis 
regulam  qua m  a  prirdecessoribus  suis  accepit,  iiia- 
culari  consensit.  Ibid.,  Epist.  ad  Enigium,  pag. 
12j2.  —  '  Auasiasiu?,  ibid.,  pag.  1242. 

'  Aiiastas.,  loin.  VI,  pag.  1276. 

î'  Anastr.sius,  ibid.,  pag.    1276  ;  et  Paiilus,  diac. 
lil).  iV  Uist.,  cap.  LUI. 

30 


780 


UISTOIRl':  GÉNÉRALE  DKS  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


j;iion ,  son  père,  est  honoré  dans  l'Eglise 
l'omme  un  suint,  cl  Ad,  sa  mère  était  une 
personne  d'une  éminente  p'uHc.  Ils  avaient 
uneGlle  consacrée  à  Dieu  et  qui  paiait  avoir 
été  abbesse  dans  quelque  monaslère  du 
même  pays.  Siviard,  livré  à  l'élude  dès  sa 
jeunesse,  s  y  appliqua  avec  une  ardeur  sin- 
gulière. Il  y  fit  de  izrands  proirrès,  et  s'ac- 
quit en  trcs-pcu  de  lerups  la  réputation  d'un 
homme  versé  dans  toutes  sortes  de  connais- 
sances. Il  fut  ensuite  élevé  au  sacerdoce, 
puis  à  la  dignité  d'abbé,  et  on  croit  qu'il  ne 
vécut  pas  au-delà  de  087.  Tout  cela  le  ren- 
dait plus  capable  d'écrire  la  vie  de  saint  Ca- 
lais, premier  abbé  du'monastère  de  ce  nom, 
dans  la  province  du  Maine,  quoiqu'il  fut  éloi- 
gné d'un  siècle  entier  du  temps  où  vivait  ce 
saint.  Dom  Mabillon,  sans  aucune  ditticulté,le 
présente  comme  auteur  de  celle  qu'il  a  pu- 
bliée au  premier  volume  des  Actes  des  sninls 
de  l'ordre  de  saint  Benoit,  et  que  les  conti- 
nuateurs de  Bollandus  ont  fait  réimprimer 
avec  quelques  additions  et  de  très-longues 
observations  qui  semblent  révoquer  en  doute 
la  génuité  de  cet  ouvrage.  Il  serait  dillitile 
de  prouver  positivement  qu'il  appartient  à 
saint  Siviard  ;  néanmoins  on  doit  croire  que 
dom  Mabillon  n'a  pas  avancé  ce  fait  sans 
fondement.  Tout  ce  que  l'on  peut  dire  de 


plus  certain,  c'est  que  l'auteur  de  cette  \'ie 
a  puisé  dans  celle  de  saint  Domnole,  évêque 
du  Mans,  d'où  il  a  tiré  une  partie  de  sa  pré- 
face; et  dans  celle  de  saint  Avil,  abbé  de 
Mici ,  .'i  laquelle  il  a  emprunté  diverses  cir- 
constances, pour  former  comme  le  canevas 
de  son  récit,  qui  du  reste  n'est  pas  mal  écrit, 
quoiqu'un  peu  dilïus. 

Un  autre  écrivain  du  monastère  d'Anisole, 
qui  connaissait  parfaitement  les  actions  de 
saint  Siviard  avec  lequel  il  avait  vécu,  nous 
a  laissé  sur  ce  sujet  une  homélie  dans  la- 
quelle il  a  fait  entrer  les  principaux  traits  de 
son  histoire.  Quelque  court  que  soit  cet  écrit, 
il  doit  nous  être  précieux,  puisque  nous  ne 
connaissons  rien  de  mieux  sur  la  vie  de 
notre  saint  abbé.  Surius  et  Bollandus  l'ont 
publié  au  premier  mars ,  et  dom  Mabillon 
après  eu.^,  au  m'  siècle  de  son  recueil;  mais 
ce  dernier  éditeur  en  a  retranché  la  préface, 
qui  néanmoins  est  assez  courte  et  très- 
édifiante  '.  La  Vie  de  saint  Calais  par  saint  Si- 
viard est  reproduite  d'après  Mabillon  au  tome 
LXXIV  de  la /'fl//-o%('e  latine,  col.  1247-1262. 
Elle  est  suivie  du  testament  de  saint  Calais  et 
de  la  Prière  faite  pour  saint  Calais,  par  saint 
Innocent.  Ces  deux  pièces  sont  reproduites 
d'après  Mabillon.] 


CH.\PITRE  LXXX. 

Jean,  archcvêqne  de  Thessaloniqne,  Théodore,  abbé  de  Rhaïte,  Pierre  de  Laodicée, 

Thalassins,  l'abbé  Isaïe,  l'abbé  Théofride,  Cosme,  moine  de  Jérnsalem, 

Cosme  le  jenne',  Pantalcon,  diacre  de  Constantinople. 

LÉcrivaius  grecs  du  vu°  sii:cle.] 


JrlB  d« 

Tbt'-ilool- 


1.  Jean,  évoque  deThessalonique,  souscrivit 
au  sixième  concile  géut-ral  en  080  ',  eu  qua- 
lité de  légal  du  Saint-Siège.  On  ne  sait  pour- 
quoi il  prit  cette  qualité,  puisqu'il  n'est  point 
nommé  cuire  les  légats  du  pape  Agallion. 
Mais  cette  souscription  fait  voir  du  moins 
que  cet  évoque  vivait  en  000,  et  que  quand 
il  aurait  écrit,  counnc  quelques-uns  l'ont  dit, 
pour  la  défense  du  concile  de  Chalcédoine 


contre  les  eulychiens,  ce  ne  serait  pas  une 
preuve  qu'il  eût  vécu  dans  le  sixième  siècle, 
puisqu'il  pouvait  également  dans  le  septiè- 
me comliattre  ces  hérétiques  à  l'occasion 
des  monotliélites,  dont  l'hérésie  tirait  son 
origine  de  l'cutycliianisnie.  Nous  avons  de 
lui  un  discours  sur  les  femmes  qui  portè- 
rent des  parfums  pour  embaumer  le  corps 
de  Jésus-Christ',  dans  lequel  il  montre  qu'il 


'  Voypz  loraellldo  la  France  litléraire.  (I/i'dil.) 
*  Cet  deux  Cosme  ont  vécu  dans  le  vui*  eiècl'', 


v«)yez  ci-.^|)^^s.  [L'^dileur.)  —  '  Tnni.   VI   Concil., 
png.  1029. 


[vif  SIÈCLE.]      CHAPITRK  I  XXX.  —  JKAN 

n'y  a  aucune  contiiirii'té  clans  l'histoire  de 
la    rt'surreclion   rapportL'e    par  les    quatre 
(!Viing(''listes.   U    cnmple  quatre  voyajics  de 
CCS  foinincs  au   loiuhcau  ,  et  disliiii;uo  six 
Maries  quoiipi'il  n'i'u  compte  que  cinq;  sa- 
voir, Marie-Maiïdeleine  ,  de  qui  le  Sauveur 
chassa  sejit  démons;  Marie  do  Jacques  qui 
est  la  Sainto-A'ierge,  appelée  helle-mèrc  de 
saint  Jacques   le  Maj(Hir,  ;\  cause  de  saint 
Joseph  son    époux  ;  Marie,  mère  de  saint 
Jaccpies  le  Mineur  et  de  Joseph  ;  Marie  de 
Cléoplias,  soMir  de  la  Vicrf;e,  et  Mario,  sceur 
de  Marthe  et  du  Lazare.  Tout  ecla  n'est  fondé 
que  sur  des  conjectures ,  et  non  sur  le  texte 
de  ri'Jvangile.  Savilius  avait  mis  ce  discours 
parmi  ceux  qui  sont  faussememont  attribués 
à   saint   Chrysostome.    Le    père    Gombelis, 
l'ayant  trouvé  sous  le  nom  de  Jean,  évoque 
de  Thcssalonique,  le  lui  a  attribué,  et  l'a  fait 
imprimer  dans  le  premier  tome  de  son  Aiic- 
tiian'iim.  Il  y  est  intitulé  :  De  la  résurrection 
de  Jésus-Christ.    Jean   a\ait   composé   des 
rialogues  entre  un  païen  et  un  chrétien,  où 
il  faisait  voir  que  l'on  pouvait  peindre  les 
anges  et  les  âmes,  parce  qu'ils  ne  sont  pas 
incorporels   ni   invisibles,   ayant  un    corps 
subtil  composé  d'air  et  de  feu;  et  que  les 
images  que  les  chrétiens  avaient  de  Jésus- 
Chrisl  et  des  maityrs  ,  ne  devaient  pas  être 
regardées  comme  des  idoles.  Jean  prétendait 
qu'en  disant  les  anges  et  les  âmes  corporels, 
il  pensait  de  même  que  saint  Athanase,  saint 
Basile,  Mélhodius  et  plusieurs  autres  anciens. 
On  trouve   des   IVagments  de  son  ouvrage 
dans  l'action  cinquième  du  second  concile  de 
Nicée  '.  [Le  Discours  sur  la  résurrection  et  les 
fragments  des  écrits  de  Jean  sont  reproduits 
dans  la  Bibliothèque  des  anciens  Pères  de  Gal- 
land,  tome  XIIL  page  185.  On  le  trouve  aussi 
dans  le  tome  Vlll  des  œuvres  de  saint  Jean 
Ti>6o.torp    Chrysostome  parmi  les  œuvres  supposées.] 
jj*é  do  Biiiï-       ;2.  Théodore  ,  prêtre  ou  abbé  de  la  laure 
ou  du  monastère  de  Rhaïte  en  Palestine,  près 
d'Elim  ou  des  soixante-dix  Fontaines,  vivait 
en  même  temps  que  saint  Maxime,  si  c'est 
lui,  comme  on  le  croit,  à  qui  ce  Père  a  adressé 
ses  questions  touchant  l'essence  et  la  nature 
de  la  volonté,  imprimées   dans   le   second 
lome  de  ses  œuvres  ^.   Pholius  parle  d'un 
prêtre  Théodore  qui  avait  composé  un  ou- 
vrage exprès  pour  montrer  que  les  écrits  qui 
portent  le  nom  de  saint  Denis  l'Aréopagite, 
sont  de  lui  '.  Cet  ouvrage  est  perdu  ,  et  l'on 


Tlll'OnORE.  PIKRRE.  ETC. 


787 


n'a  jiucuue  preuve  qu'il  fùl  de  Théodore  de 
Rhaïte.  Il  ne  nous  reste  île  cet  abbé  qu'un 
discours  dogmati(iue  sur  l'Incarnalion  ,  où  , 
après   avoir   rapporté    les   eneurs    dt;   Mâ- 
nes, de  Paul  de  Samosiile,  d'A[iolliniiire,  de 
Théodore  de   Mopsueste ,  de  Nestorius   et 
d'Eutychès  sur  ce  mystère,  il  propose  la  doc- 
trine de  l'Eglise  qui  leur  est  entièrement  op- 
posée. Ensuite  il  expli(]U{î  cette  doctiiue,  et 
fait  voir  comment  les  errcms  qu'il  avait  rap- 
portées ont  été  renouvelées  par  Julien  d'Ha- 
licarnasse,  et  par  Sévère  d'Antioche.  Il  op- 
pose encore  à  l'un  et  à  l'autre  la  doctrine 
de  l'Église,  qui  enseigne  qu'encore  qu'il  y 
ait  en  Jésus-Christ  deux  natures  distinctes, 
il  n'y  a  cependant  qu'un  seul  Christ,  qui  est 
Dieu  parf;iit  et  homme  parfait,  parce  que  ces 
deux  natures,  la  divinité  et  l'humanité,  sont 
unies  en  lui  en  une  seule  personne.  Il  ne  dit 
rien  contre  les  monothélites  :  ce  qui  prouve 
qu'il  avait  écrit  ce  petit  traité  avant  la  nais- 
sance de  leur  hérésie.  En  le  finissant,  il  sem- 
ble en  promettre  un  autre  où  il  combattrait 
toutes  ces  erreurs  par  les  témoignages  des 
doctMiis  de  l'Eglise.  Nous  ne  l'avons  point. 
Celui  qui  nous  reste  fut  imprimé  en  latin,  c:e 
la  traduction  de  Tilmannus  ,  à  Paris  en  15S6 
in-8°,  et  dans  les  diftëientes  Bibliothèques 
dcB  Pères  ,  de  Paiis  en  1389  et  1609  ,  de  Co- 
logne en  1618,  de  Lyon  en  i677,  en  grec  et 
en  latin,  de  la  version  de  Bèze,  à  Genève  en 
1576,  1380,  et  avec  les  opuscules  théologi- 
ques de  ce  traducteur,  en  la  même  ville  en 
1382.  Il  y  en  a  deux  autres  traductions,  l'une 
de  Belforèt,  imprimée  à  Paris  en  1399  avec 
l'Histoire  du  concile  de  Nicée  par  Gelase  de 
Cyzique;  l'autre  de  Turrien ,  qui  se   trouve 
dans   le   premier  tome  de  VAuctuarium    de 
Fronton-le-Duc  ,  k  Paris  en  1624,  et  dans  la 
Bibliothèque  des  Pères  qui  parut  en  cette 
ville  en  16M  et  1034.  [Jean  Benoit  Carpzo- 
vius  a  donné  en  grec  et  en  latin  une  nou- 
velle   édition     de    cet   ouvrage    avec    des 
coirections,  des    explications    et  une    pré- 
face. La  première  partie  parut  à  Helmstad, 
en  1779,  et  la  deuxième  en   la  même  ville 
en   1780,  in-4°.  On  trouve  le  discours  dog- 
matique de  Théodore  au  tome  XCI  de  la 
Putrologic  grecque  d'après  Gallnnd,  avec  no- 
tices tirées  de  cet  éditeur  et  d'AUatius,  col. 
1479-1304.] 

3.    Nous   ne   connaissons    point    d'autres       p,^^,  ^ 

.aodicée.Sc 
iplicaiioD  de 


écrits  de  Pierre  de  Laodicée,  qu'une  expli-  Laod,eée.so„ 


<  Tom.  VU  Concil.,  pag.  353.—  »  Pag.  151. 


>  Pliotius,  Cod.  1. 


1  Ori  son  do* 
1  ^inlMle.  Sr>D 
'ontracnUlra 
•or  \t*  qiutr* 

éTitifiIes. 


7  88  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 

calinn  de  l'Oraison  dorainicalp  ' .  EUe  nsl 
courte,  mais  siilli«;anle  pour  eiilcndre  les  di- 
vei-s  sens  de  celte  prière.  [Le  père  Poussin^s. 
dans  sa  Chaîne  sur  saint  Mattliieu,  av.ait  cité 
un  passage  de  saint  Pierie  de  Laodicée  sur 
le  XIX  cliapitre,  t  2.  Le  cardinal  Mai  a 
trouvé  le  commentaire  erîticr  sur  les  quatre 
Evangt'listes,daus  les  manuscrits  du  Vatican. 
L'explication  de  l'Oraison  dominicale  et  le 
passage  de  Ponssiues  se  lisent  en  entier 
dans  le  commentaire  ,  preuve  que  celui-ci 
est  du  même  auteur,  savoir  de  Pierre  de 
Laodicée.  La  mort  a  empédié  Mair  de  tenir 
la  promesse  qu'il  avait  faite  de  publier  ce 
rommcntaiie ;  il  n'eu  a  donné  que  des  frag- 
ments relatifs  au  mystère  de  la  sainte  Kucha- 
l'istie  '.  On  y  voit  que  Judas  se  retira  avant 
l'iuslitution  de  ce  sacrement.  Cependant  l'au- 
teur ajoute ,  que  quelques-uns  prétendent 
qu'il  a  reçu  l'Eucharistie  sans  pour  cela 
changer  de  sentiment  ;  il  croit  que  saint 
Luc  le  fait  participer  à  ce  sacrement,  tau- 
dis que  d'après  saint  Jean ,  Judas  serait 
sorti  avant  l'institution.  La  présence  réelle 
est  admise  de  la  ininièro  la  plus  expresse 
par  Pierre  de  Laodicée  :  «  celui,  dit-il,  qui 
communie  au  pain,  participe  au  corps  du  Sei- 
gneur, car  nous  ne  faisons  pas  attention  à  la 
tiature  des  choses  sensibles  qui  sont  propo- 
sées, mais  par  la  foi  nous  élevons  notre  àmc 
jusqu'au  corps  même  du  Verbe  ;  il  n'a  point 
dit,  en  eftet  :  ceci  est  le  symbole ,  mais  en 
montrant  le  pain,  il  a  dit  :  Ceci  est  moricoi-ps, 
de  peur  qu'on  ne  s'imaginât  que,  ce  qu'on 
voyait  n'était  qu'une  figure  '.  »  On  pour- 
rait citer  bien  d'autres  passages  de  cet  au- 
teur en  faveur  do  la  présence  réelle.  Ainsi, 
en  expliquant  l'institution  de  l'Eucharistie 
d'après  saint  Marc ,  il  dit  que  par  ces  pa- 


AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 

rôles  :  eci  est  mon  cor/)s,  ceci  est  mon  sany, 
Jésus  déclare  que  ses  disciples  ,  après  avoir 
béni  le  pain  qui  est  oUTert,  doivent  recevoir 
la  communion  de  ce  pain  pour  la  com- 
munion de  son  corps,  reuarder  le  calice 
comme  son  propre  sang;  qu'en  sa  chair  et 
en  son  sang,  il  a  consommé  le  mystère  de  sa 
passion  pour  le  salut  commun  des  hommes 
et  la  rémission  des  péchés...  »  Jésus-Christ 
enseigne  en  outre,  continue  le  commenta- 
teur, que  nous  ne  devons  pas  faire  attention 
il  la  nature  des  choses  ofl'ertes,  mais  ^ue 
nous  devons  croire  que  par  l'action  de  grâces 
faite  sur  elles ,  elles  sont  devenues  le  corps 
et  le  sang  de  Jésus-Christ;  car  le  Verbe  de 
Dieu  vivificaleur,  une  fois  intimement  uni  à 
la  chair,  déclare  que  cette  chair  à  son  tour 
donnera  la  vie  :  «  Le  pain  que  je  donnerai, 
c'est  ma  chair,  et  cette  chair  sera  la  vie  du 
monde.  Si  vous  né  mangez  la  chair  du  Fils 
de  l'homme  et  si  vous  ne  buvez  son  san?, 
vous  n'aurez  pas  la  vie  éternelle.  «  En  faisant 
cela,  nous  avons  donc  la  vie  en  nous;  car  le 
Verbe  a  dit  encore  :  «  Celui  qui  mange  ma 
chair  et  boit  mon  sang,  demeure  en  moi,  et 
moi  en  lui.  »  Il  fallait  bien  en  cfl'eî  qu'il  habi- 
tât en  nous  par  le  Saint-Esprit  d'une  manière 
digne  de  la  Divinité  ,  et  qu'il  s'unit  <i  nos 
corps  par  sa  chair  toute  sainte  et  son  pré- 
cieux sang.  Tout  cela  nous  est  donné  sous 
les  espèces  du  pain  et  du  vin  par  une  bé- 
nédiction vivifiante,  de  peur  que  notre 
piété  ne  s'attiédisse  en  voyant  la  chair  et 
le  sang  otferls  sur  nos  autels.  Dieu,  pour 
condescendre  à  nos  infirmités,  souflle  sur 
ce  pain  un  esprit  de  vie,  et  le  change  en 
sa  propre  chair,  qui,  dans  une  communion 
vivifiante,  devient  pour  nous  un  germe  de 
vie  *.] 


'  Tom.  XII  Bibliolh.  Pat.,  pag.  322,  et  iii  Bi- 
blioth.  Pat.  Colon. 

'  Ces  fragraéuts  et  l'Cxposiliou  de  l'Oraison  do- 
iniiiicnte  sont  nu  tome  LXXXVI  de  la  Palrolojie 
grecque  avec  une  notice  tirée  de  Mai.  col.  3321- 
333«.   L'Mileur  ) 

'  Qui  cniin  pani  communicat  corpus  Domini 
participât,  non  enim  reriim  seïunlnlium  qnœpro- 
ponunlnr  naluram  al'.endinius ,  sed  ad  ipsum 
Verbi  corpus,  pcr  fideni.  animam  allollimus;  non 
enim  dixil  :  linc  est  si/nibolum,  scd  puneni  indigi- 
landi).  Hoc  est  corpus  niciiui,  ne  forte  quis  figu- 
ram  esse  lantum,  qnœ  vi':u  pcr<ipieli  ntur,  aii- 
tumarel.  Pafro!.  grœc,  toin.  I„\XXVI,  col.  3320. 

*  Dicens  aulein .  Iluc  est  cor|ins  nieinn,  et  Hic 
est  ean^uis  meus,  déclarât  discipulos  debere,  post- 
quam  pa:fin  lienrdixerint,  liujus  panis  coinniu- 
nionciii  pro  communione  corpojis  sui  accipere. 


itemque  calicem  pro  sanguine  ifsius  habere,  in 
quibus  carne  vidcliccl  et  sanguine  suo,  passionis 
myslcrinni  consunimaiit,  propter  conimunem  ho- 
minutn  salutivi.  et  remi.-'Sionrm  pfccalorum  :  fi- 
des  enim  hœc  suscipiens,  implelnrum  myslcriorum 
confensionem  liabtl,  crcdrnlesque  pec-:atnrum  re- 
missionis  participai.  Doccl  prirlcrea  non  propo- 
silorum  natiirnm  allenderc,  sed  crrderc  quod per 
graliamm  aciinnem  super  illis  faclam,  corpus 
et  sanguis  Chri.sli  facto  sunl  ;  Vivificans  enim  Dci 
y(rbiini.seip.<uni  propriif  carni  uniens  modo  quem 
ipse  nocil,  ipsam  vicificantcm  esse  dcclaravil, 
Viiuif  inqniens  (|uem  e^o  dalio,  caro  uien  est 
quani  pl:o  diilio  pro  mundi  viln;  et  ilerum  :  Nisi 
manduravcritis  carneui  Filii  tioniinis  et  bihcrilis 
pjus  snnpninem,  non  liahchilis  vilnni  ntcrnani. 
Hoc  igilur  facienles  vitam  liabnnus  in  nobis.  Di- 
:tit  enim  :   ijui  ninnducat   iiicani   carneui  cl  bibil 


Tbalssitlus. 
Ci  icrni. 


I>a(e.   Ses 
écrit!, 


[vil-  SIÈCLE].      CHAPrniE  LXXX.  —  L'ABBi 

4.  ïhalassius,  '  connu  par  les  écrits  qiio 
saint  Maxime  lui  a  adt'csisûs ,  uous  a  laissé 
qiuitre  cents  vérités  morales ,  qui  roulent  la 
plupart  sur  la  cliarilci  et  la  continence  '  : 
mais  il»y  eu  a  aussi  quelques-unes  où  il  éta- 
blit la  foi  de  l'I'^^lise  sur  les  mystères  de  la 
Trinité  et  de  l'Incarnatioii  d'une  manière 
claire  et  précise.  Il  y  conibnd,  suivant  l'usage 
des  Grecs,  le  te.  lue  de  principe  avec  celui 
de  cause;  disant  qu'encore  que  le  Fils  el  le 
Saint-Esprit  soient  co-étcrnels  au  Père,  ils 
ne  sent  pas  comme  lui  sans  piiucipc  ni  sans 
cause.  Ces  quatic  cents  vérités  ou  maximes 
se  trouvent  dans  le  recueil  des  anciens 
Théologiens  à  Augsbourg  en  laol ,  dans  les 
Orlliodoxographcs  ,  dans  le  second  tome  de 
VAticluarinm  de  la  Bibliothèque  cîc  Fronton- 
Ic-Dnc,  dans  le  douzième  tome  de  la  Biblio- 
thèque des  Pères  à  Lyon  en  1G77;]  dans  le 
tome  XIII  de  la  Bibliothèque  des  Pères  de 
Galland,  pages  3  el  suivantes;  delà  elles  ont 
passé  au  tome  XCI  de  la  Patrologie  grecque 
avec  notices  tirées  de  Gallund  et  de  Fubri- 
clus,  col.  1123-1-470.]  Œcolampade  les  fit  im- 
primer séparément  à  .\ugsbourg  en  1520. 

5.  Les  Morales  de  l'abbé  Isaïe  ne  sont  pas 
par  sentences  comme  celles  de  Thalassius, 
mais  elles  sont  en  forme  de  discours,  au  nom- 
bre de  vingt-neuf  '.  Ces  discours  sont  tous 
pour  des  moines  qu'il  avait  sous  sa  conduite, 
et  qui  menaient  avec  lui  la  vie  cénobitiqiie.  Le 
troisième  regarde  particulièrement  les  novi- 
ces; le  quatrième,  ceux  qui  vont  eu  voyage; 
les  autres  ont  pour  matière  l'iiumilité,  l'obser- 
vation du  silence,  la  sobriété,  la  pénitence, 
l'oubli  des  injures,  le  mépris  des  choses  du 
monde,  la  correctiou  desmœurs.  Le  vingt-cin- 
quième est  une  réponse  à  la  lettre  de  l'abbé 
Pierre,  qui  avait  été  son  disciple:  elle  roule 
sur  la  nécessité  d'abandonncrle  monde, quand 
on  ne  peut  en  allier  les  soins  avec  ceux  qu'on 


:  ISAlli:,  L'AABli  THliOFIUnE,  ETC.  78!) 

doit  à  son  salut.  Le  viiigt-si.\ième  est  un  re- 
cueil   lie   plusieurs   maximes   morales    quo 
l'ahbé  Pierre  avait  ouïes  de  la  bouche  do 
l'abhé  Isaïe,  el   mises  eusuilc  ]iar  écrit.  Le 
vingl-ueuvieme  ne  conlicnt  que  des  lamcn- 
lalions  sur  les  dilférentes  manières  dont  les 
hommes  piichent,  soit  par  action,  soit  par 
omission.  11  se  plaint  en  particulier  du  peu  de 
sensibilité  au  malheur  de  ceux  qui  quittaient 
l'Eglise   en  abandonnant  la   foi   orthodoxe 
[Les  Morales  de   l'abbé  Isaïe    sont  repro- 
duites au  tome  XL  de  la  Putrulor/ie  (jncquc , 
col.  li()3-l:iOG,  avec  notice  tirée  de  Galland. 
Elles  n'y  sont  qu'en  latin  de  la  version  de  Zi- 
nus;  on  n'a  point  encore  publié  le  texte  grec. 
On  a  du  même  abbé  Isaïe  C8  préceptes  ou 
conseils  pour  ceux  qui  commi'ucent  à  mener 
la  vie  monastique.  Saint   Benoit  d'Aniane 
nous  lésa  conservés;  ils  sont  reproduits  dans 
la  Pulrologie  latine,  tome  CIII,  col.  427  et  sui v. 
Le  père  Poussine  a  publié  en  1684  à  Paris 
en  grec  et  en  latin,  dix -neuf  chapitres  intitu- 
lés :  Capitula  de  religiusa  cxei'citatione  et  de 
quiète.  Galland  cjui  a  pubhé  cet  ouvrage  en 
grec  et  en  latin  a  fait  observer  que  les  dix- 
neuf  chapitres  ne  sont  que  des  extraits  des 
Morales  publiées  par  Zinus.  Deux  fragments 
sont   reproduits   en  grec   et   en  latin  à   la 
suite    dos    dix-neuf   chapitres,  d'après    les 
Parallèles  de  saint  Jean  Damascène.  Ces  frag- 
ments et  les  dix-neuf  chapitres  sont  réim- 
primés au  tome  XL  de  la  Patrologie  grecque, 
col.  12ÛO-1214  '\] 

6.  Aux  discours  de  l'abbé  Isaïe  on  en  joint       l'«i.i,« 
deux  de  l'abbé  Théofride,  l'un  sur  les  reli-  ™t;?,': 
ques,  l'autre  sur  la  vénération  des  Saints.  Il   "■•i'-'"' 
montre  dans  le  premier  que  Dieu,  qui  est 
admirable  dans  ses  saints,  ne  se  contente  pas 
de  les  glorifier  dans  le  ciel  ;  qu'il  glorifie  en- 
core  leurs  reliques  sur  la  terre  par  l'éclat 
des  miracles,  et  par  l'honneur  qu'on  leur 


uioum  sangiiinem  iu  me  uianet  et  efro  in  illo.  Opor- 
tebcit  enim  iituin  quidem  in  nobis  per  Sanclum 
Spirilum  modo  divinitale  digno  habilare,  corpo- 
ribus  vero  nnstris  per  saitclam  ipsius  carnein  et 
preliosum  saiiguiitem  commisceri;  qtiod  et  con- 
cessum  habemus  per  benediclioiiem  vivificam, 
sub  specie  parus  el  vini,  ne  forte  hebesceret  pie- 
ta<  nostra,  dum  carnein  el  sanguinem  propoiila 
videmiis  in  ecclesiarum  allaribus.  Condescendens 
enim,  ut  Dcum  decel,  infîrmitaiib-us  noslris,  puni 
oblala  virlulem  vilœ  inimittit,  el  in  suam  car- 
neni  Irunsmutal,  ul  in  communionem  vivificam 
illum  liaheanius  et  quasi  germcn  vitœ  fiai  nobis 
corpus  vitœ.  P.ilml  sncr. ,  t.im.  I.XXXVI,  rnl. 
3327-28. 


'  On  ne  doit  point  confondre  Tlialassiiis  dont  il 
ePl  ici  question  avec  Thalasse,  lecteur  et  moine 
maltraité  par  iN'estorius,  et  qui  présenta  avec  Ba- 
sile une  requête  à  l'empereur  Tliéodose  le  Jeune. 
Les  éditeurs  de  la  Patrologie  grecque  ont  eu  le 
tort  de  mettre  cette  requête  sous  le  nom  de  Tha- 
lassius, ami  el  coutemporaiu  de  saint  Maxime.  (l'e- 
dileur.) 

2  Tom.  XII  Bibliotli.  Pat.,  pag.  337. 

'  Tora.  XII  Bibliotli.  Pal.,  pag,  ?8i. 

'  .lu  ne  sais  pourquoi  D  Ceillier  a  placé  l'abbé 
Isaïe  parmi  les  auteurs  qui  out  vécu  au  vn'^  siècle. 
Galland,  dans  sa  notice  sur  cet  abbé,  montre  qu'il 
a  vécu  au  iv^  sii'de.  du  |i'm[ip  de  saint  Athanasc. 
[L'e'dileur.] 


7yo 


HISTOIUE  GKNKKALE  DES 


rend,  en  enfermant  ces  reliques  dans  des  va- 
bcs  d'or  et  d'argent  oraOs  de  pierres  pr.é- 
cieuses  '.  11  relève  dans  le  second  le  pou- 
voir des  saints  dans  le  ciel,  afin  de  nous  ex- 
citer à  les  invoquer,  et  dit  que.  si  leurs  reli- 
([uesont  en  ce  monde  tant  d'etlicacité,  leurs 
âmes  n'en  ont  pas  moins  dans  l'autre.  Il 
appelle  reliques  des  saints,  non-seulement 
leurs  coips  entiers,  mais  leuis  liahils,  leurs 
ossements,  la  poussière  de  leurs  tombeaux'; 
voulant  que  l'on  en  fasse  grand  cas,  et  qu'on 
les  conserve  avec  soin. 

cojm«,moi-       7.  Il  ne  faut  pas  confondre  Cosmc  l'An- 
na. Se>  érrlts*  ^ 

co^mtdeMi.  cicn,  ablié  de  Jérusalem',  avec  un  autre 
Cosme  i^ui  fut  évèque  de  Majiime  en  Pales- 
tine après  Pierre  ",-  vers  l'an  743  *.  C'est  de 
celui-ci  que  Suidas  a  dit  qu'il  ('tait  liommo 
d'esprit  ;  qu'il  s'entendait  parfaitement  à  faire 
des  hymnes  et  des  cantiques  spirituels,  et 
que  ce  qu'il  avait  fait  en  ce  genre,  surpas- 
.'•ait  ce  qu'on  avait  fait  jusqu'alors,  on  que 
l'on  ferait  h  l'avenir.  Suidas  ajoute  que  ce 
Cosmc  était  contemporain  de  saint  Jean  Da- 
mascène  et  son  condisciple  °.  L'abbé  de  Jé- 
jusalem  était  plus  ancien  :  il  en  est  parlé 
dans  Jean  Moscli  ',  et  l'auteur  de  la  Vie  de 
saint  Damascène  '  dit  que  son  père,  ayant 
racheté  ce  Cosme  des  mains  des  Sarrasins 
qui  l'avaient  f:iil  caplif  à  son  lelourdc  Home, 
le  donna  pour  précepteur  à  son  fils.  C'est  à 
Cosme  l'Ancien  que  l'Eglise  grecque  attri- 
bue la  plupart  des  hymnes  qu'elle  chante 
dans  l'oUJce  divin  :  ce  (jui  n'empcclie  pas 
que  Cosme  évèque  deMajunic  n'en  ail  aussi 
composé  9  ;  mais  il  u'csl  pus  aisé  de  les  distin- 
guer. Nous  en  avons  treize  dans  le  douziè- 
me tome  de  la  Bibliothèque  des  Pères,  sur 
les  principales  fêtes  de  l'année,  la  plupart 
acrostiches,  et  toutes  attribuées  à  Cosmc  de 
Jérusalem.  11  avait  mis  aussi  eu  vers  les  Psau- 
uies  de  David.  Cet  ouvrage  n'a  pas  enc(ue  élé 
leudu  public  '",  non  jilus  que  ce  qu'il  avait 
fait  sur  Moïse.  [Il  en  est  de  même  d'un  can- 
tique sur  la  mort  de  la  Sainte-Vierge  que  lui 
iillribue  Kollan.]  Ces  treize  hymnes  ont  été 

'  Eorum  reliquiœ  in  vasis  aureis  atquc  argcn- 
teis  et  gemmatis,  ac  in  omnibus  quœ  preliosa 
sunt  rerondunhir.  Ibitl.,  iiafj.  H8. 

•  Quidquid  de  reliquiis  sanctonim  possidemus, 
sive  in  vesie,  sivp  in  jniUcre,  sive  in  ossibus,  di- 
ligenlcr  et  caulu  cuKtodi(imu-<   lliiil.,  img.  119. 

'  Tom.  XII  Uiblioth.  Pal  ,  imi?.  7.!:. 

'  Cosmc  le  .Icune,  ûvCvnie  tie  Majunio,  t'Inil 
lie  Ji'Tiisiiloiii  ;  il  lient  avoir  été  moine  et  al)lii!  j 
r.osmc  l'Aii':ieii  l'Iiiit  un  inoiiip  italien  (pii  6\ovn 
eaiut  Jean  UauiajcèucaYCCCc>::inc  lu  Jeune,  {L'(fdi., 


AUTEL'IIS  EGCLESlASTigUËS. 

imprimées  dans  les  Bibliothèques  des  Pères 
de  Paris,  de  Cologne,  de  Lyon,  [dans  la  Bi- 
bliothèque des  anciens  Pères,  par  Galland, 
tome  XIlI.p.  2.U,etdeli\danslelomeXCVIII 
de  la  Putrulogie  grecque  avec  notices  tirées  de 
(îalland  et  de  Fabricius,  col  456  514],  et  à 
Venise  en  1501  iu-4°,  par  Aide  Manr.ce,  avec 
les  poésies  de  l'rudence  et  de  saint  Prosper, 
et  quelques  hymnes  d(?  !-;iint  Jean  Dauuis- 
cène  ".  [D'aulies  odes  on!  élé  publiées  par 
Galland  et  dans  la  Palrologie  grecque,  lo- 
me  XCVIlI,  col.  513-323.  Elles  se  trouvaient 
imprimées  dans  le  7'riiiditim,  Rome  1738. 
Galland  à  cause  de  la  longueur  des  stro- 
phes pense  qu'elles  appartiennent  à  un  autre 
Cosme.  D'autres  liynmcs  de  Cosme  de  Jé- 
rusalem se  trouvent  dans  la  Liturgie  grec- 
que. M.  Migne  prépare  une  édition  de  cette' 
liturgie.] 

Le  cardinal  Mai  a  publié  dan=i  le  Spicileg. 
rom.,  lome  II,  en  grec,  pag.  I3(M5,  la  collec- 
tion f.l  l'inlerprijtation  des  /lisloires  dont  saint 
Grégoire  fait  mention  dans  ses  poésies;  ces  his- 
toires sont  tirées,  soit  de  la  sainte  Écriture, 
soit  des  poètes  et  des  écrivains  profanes. 
Malgré  le  silence  de  Suidas  et  celui  des  his- 
toriens qui  ont  parlé  des  interprètes  de  saint 
Grégoire,  le  savant  éditeur  n'hésite  pas  àat- 
trilnior  cet  ouvrage  A  Cosme  le  Jeune  à  cause 
du  litre  et  de  la  conclusion,  où  Cosme  se 
nomme.  Cet  écrit,  d'après  l'auteur  lui-même, 
était  divisé  en  trois  parties  :  dans  la  pre- 
mière il  parlait  des  histoires  sacrées  et  pro- 
fanes; dans  la  seconde  il  était  question  de 
l'histoire  naturelle  contenue  dans  les  poèmes 
de  saint  Grégoire.  La  troisième  contenait 
des  observations  grammaticales  et  didacti- 
ques :  elle  manque  dans  le  manuscrit  du  Va- 
tican. D'après  le  cardinal  Mai  ',  Cosme,  au- 
teur de  cet  ouvrage  inédit,  était  de  Jérusa- 
lem, et  fut  nommé  J'/iilogrrgorins,  à  cause 
sans  doute  ilu  grand  amour  qu'il  portait  aux 
travaux  et  h  la  sainteté  de  Grégoire  de  Xa- 
zianze,  dont  il  a  commenté  les  poésies.  Il  vi- 
vait au  viii"  siècle,  était  né  i\  Jérusalem,  fut 

'  Kniis  in  Vilam  Damaseeni,  png.  20,  lom.  I. 

•  Snidas,  in  Joannem.  —  "<  Cap.  xl. 

'  Damnsceni  rila,  paj;.  5. 

'  Le  liiograiihe  de  saint  Jean  Dainaseène  le  re- 
connaît l'ormellcment.  [L'i'dili'ur.) 

'"  Lnnibecius,  lib.  III.  jing.  lon,  i|  lib.  IV,  pag. 
210. 

"  In  nniis  ail  I.ambec,  v.  pag.  570.  Vojez  Fa- 
bricins,  llibt.  grac,  nonvelle  (^dilion.  lom.  VIII, 
Jiag.  ni.  {l.Vditeur.) 


[VII"  SlfcCLE.] 


CHAPITIIE  LXXXI.  —  SAINT  JULIEN,  lUALlUS. 


791 


(51evé  diiris  la  maison  même  de  saint  Jean 
Dainasci'iip,  dont  il  l'ut  le  condisciple  et  l'ami, 
par  un  autre  Cosmc  surnommti  l'Ancien, 
moine  italien,  que  le  père  de  Jean  Damas- 
cène  avait  raclieté  des  mains  des  Sarrazins. 
Cosmc  le  Jeune  devint  évoque  de  Majiinie; 
il  esl  l'auleur  des  vers  qui  se  liouvcnt  en 
latin  danslaliihliotlièqne  desl'èiesde  Lyon. 
Le  travail  de  Cosme  est  précieux,  parce 
qu'il  nous  a  conservé  plusieurs  poésies  de 
saint  Grégoire  que  nous  ne  connaissions  pas, 
et  surtout  par  les  variantes  et  les  versions 
nouvelles  qu'il  nous  donne  pour  corriger  les 
éditions  bénédictines.  C'est  une  mine  très- 
riche  pour  un  nouvel  éditeur  de  saint  Gré- 
goire. D'ailleurs  on  y  trouvera  de  nom- 
iireux  éclaircisstmenls  pour  riiistoire  sa- 
crée, ecclésiastique,  civile  et  philosophique. 
Quanta  la  mythologie  grecque,  Cosme  nous 
y  donne  un  grand  nombre  de  notions  nou- 
velles qui  seront  à  ajouter  aux  travaux  d'A- 
pollodore,  de  Phornutus,  d'Ant.  Libérât  et 
aux  nouveaux  mythologues  latins  que  le  car- 
dinal a  publiés  -.  Cet  ouvrage  est  reproduit 
avec  une  traduction  latine  au  tome  XXXVIII 


de  la  Patrologie  grecque,  avec  la  préface  do 
Mai,  col.  3;w']. 

8.  A  la  siiile  des  Hymnes  de  Cosmc  de  Jé- 
rusalem, on  amis  dans  le  douzième  tome  de 
la  Bibliollièque  des  Pères  '  plusieurs  borné- 
lies  de  Pantah'on,  diaci'e  et  garde-charte  de 
Conslantinople  :  mais  cet  auteur  n'a  vécu  que 
dans  le  treizième  siècle,  et  non  dans  le  septiè- 
me, comme  quelques  uns  l'ont  cru  '.  La  pre- 
mière de  ces  homélies  est  sur  le  baptême  que 
Jésus-Christ  reçut  de  saint  Jean;  la  seconde 
sur  l'Exaltation  de  la  sainte  Croix;  la  troisiè- 
me et  la  quatrième  sur  la  Transliguration  de 
Nolre-Seigncur.  Surins  en  a  donné  une  sixiè- 
me au  vingt-neuf  de  septembre,  qui  est  en 
riiounenr  de  saint  Micbel.  Ou  cite  des  manus- 
crits qui  contiennent  des  discours  du  même 
auteur  sur  tous  les  dimanches  et  sur  toutes 
les  fêles  de  l'année.  Il  est  qualifié  de  prêtre 
dans  le  litre  de  l'homélie  sur  l'Exaltation  de 
la  Croix.  [Les  cinq  homélies  de  Pantaléou 
sont  reproduites  au  tome  XCVIII  de  la  Pa- 
trulogie  grecque,  avec  notices  tirées  de  Fabri- 
cius  et  de  Combefis,  col.  1239-1270. 


Paadiéon 

dlicre  et  gir> 
de-ctioTtci  dt 

CODJlAIlt  DO* 

pio 


CHAPITRE    LXXXI. 
Saint  Jnlien  archevêque  de  Tolède  [690] ,  Idalius  évêque  de  Barcelonne. 


[ViTs  le  même  temps.  Écriv.nins  latins.; 


meurt  eu  t>9U. 


1.  Tolède  fut  le  lieu  de  la  naissance  de 
saint  Julien.  Il  y  reçut  le  baptême  et  les 
premiers  principes  de  la  religion  sous  les 
yeux  de  l'arcbevêque  Eugène.  L'amitié  qu'il 
Îè1e\"é,.''l80°;  lia  avec  Gudila,  diacre  de  cette  Église,  fut  si 
étroite,  qu'ils  n'étaient  qu'un  même  co^ur  et 
une  même  âme.  Us  avaient  conçu  le  dessein 
de  passer  leurs  jours  ensemble  dans  la  re- 
traite ;  mais  y  ayant  trouvé  des  obstacles, 
ils  s'employèrent  tous  deux  ii  procurer  le 
salut  du  procbain-  Gudila  mourut  la  bui- 
tième  année  de  Wamba  ,  roi  des  Yisigoths 
en  Espagne,  c'est-à-dire  l'an  680  de  l'ère 
commune.  Julien,  après  avoir  passé  par  les 
degrés  du  diaconat  et  de  la  prêtrise,  fut  élu 


évêque  de  Tolède  à  la  place  de  Quiricius, 
mort  la  même  année.  Félix,  qui  succéda  à 
Julien  en  690,  fait  de  lui  un  grand  éloge,  où 
il  relève  ses  vertus  et  son  savoir.  Il  le  finit 
par  le  catalogue  de  ses  ouvrages,  dont  trois 
sont  venus  jusqu'à  nous. 

2.  Le  premier  a  pour  titre  :  des  Pronos- 
tics ,  c'est-à-dire  ,  de  la  considération  des 
cboses  futures.  Il  est  adressé  à  Idalius,  évê- 
que de  Barcelonne,  à  qui  saint  Julien  en  ra- 
conte l'occasion  dans  une  lettre  qui  est  à  la 
tête  de  cet  ouvrage,  n  Comme  nous  étions 
ensemble  à  Tolède  le  jour  de  la  Passion  de 
\otrc-Seigueur,  nous  entrâmes,  lui  dit-il, 
dans  un  lieu  retiré,  cherchant  le  silence  con- 


'  Proleg.  Spicileg.  Rom.,  toni.  K,  pag.  v. 

»  Voyez  Table  des  Auteurs  sacrés  el  profanes, 
découverts  et  publiés  par  .Mai,  par  M.  Bonnetty. 
(L'éditeur]. 

»  Tom.   XII  Biblioth.  Pat.,  pas.  148. 


'  Cepenflant  Harles  prouve  que  rhomélie  de 
Pantaléou,  sur  saint  Micbol,  colle  sur  l'Exaltation, 
se  trouve  dans  uu  manuscrit  duxi»  ou  du  IX«  siècle. 
Fabrie.  Biblioth.  grirc,  edit.  Harles.  loni.Xl,  pag. 
445.  {L'édileur.) 


792 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTECTS  ECCLÉSIASTIQUES. 


venable  à  cette  fête  :  assis  cliacun  sur  un 
lil,  nous  prîmes  en  main  l'Écriliiie  sainte, 
el  nous  lisions  la  Passion  en  comparant  les 
Évangiles.  Quand  nous  fûmes  arrivés  à  un 
certain  passage  dont  il  ne  me  souvient  i)as, 
nous  nous  seulimes  touchés,  nous  soupirâ- 
mes, nous  fiimcs  remplis  d'une  consolalion 
céleste,  et  élevés  a  une  iiaule  cimtemplation. 
Nos  larmes  interrompirent  la  lecture  :  nous 
commençâmes  â  nous  entretenir  avec  une 
douceur  inexplicalle,  et  je  crois  que  vous 
oubliâtes  alors  la  goutte  dont  vous  étiez  tour- 
meuté.  Nous  cliercbàmcs  ce  que  nous  serons 
après  la  mort,  afin  que  la  pensée  vive  et  sé- 
rieuse des  clioses  fijtures  nous  éloignât  plus 
sûrement  des  clioses  préseules.  »  Saint  Ju- 
lien ajoute  (iu"Idalius  et  lui  se  proposèrent 
mutuellement  des  questions  sur  ce  qui  re- 
garde l'autre  vie,  et  qu'il  fui  convenu  entre 
eu.K  que  l'on  mettrait  par  écrit  ce  que  leur 
mémoire  fournirait  sur  cette  matière  ;  qu'à 
cet  ellct  l'on  fil  venir  un  notaire  ;  mais  qu'en- 
fin Idalius  le  cbargea  de  traiter  à  loisir  ce 
qu'ils  n'avaient  fait  qu'ébaucher  dans  leur 
conférence. 
Trmii*  in      3.  Son  ouvrage  est  divisé  en  trois  livies. 

jh«Do.iic.,  j^g  premier  est  :  De  l'origine  de  la  mort  des 
hommes  '.  On  ne  peut  douter  qu'elle  ne  vienne 
du  péché  du  premier  homme,  puisque  saint 

Bum.  r  12.  P''"'  '^'^  •  ^  l>éché  esl  entré  dans  le  monde  jwr 
un  seul  homme,  et  la  mort  par  le  péché.  Il  est 
vrai  que  ce  péché  originel  est  etl'acé  dans  le 
baptême  ;  mais  il  l'est  seulement  quant  à  la 
coulpe,  et  non  quant  à  la  peine  temporelle, 
qui  consiste  dans  la  séparation  de  l'àme  d'a- 
vec le  corps.  S'il  en  était  autrement,  beau- 
coup de  personnes  recevraient  le  baptême 
plutôt  pour  s'exempter  de  mourir,  que  pour 
obtenir  le  salut  de  leur  ùme.  L'espérance 
que  mus  avons  dans  la  réception  de  ce  sa- 
cieuienl,  n'a  point  pour  objet  la  vie  présente, 
mais  la  future  qui  esl  éternelle.  C'est  ce  qui 
fait  que  la  mort  corpoielle  n'est  point  à  ap- 
préhender de  la  part  du  juste,  parce  qu'il 
vil  de  la  foi,  qui  lui  fait  envisager  la  félicité 
comme  le  terme  où  il  touche  en  quittant  cette 
vie.  Quoique  les  devoirs  funèbres,  que  l'un 
rend  aux  morts,  soient  plus  pour  la  consola- 
tion des  vivants  «pie  jiour  l'utilité  des  dé- 
fnnls,  il  est  de  la  piété  de  ne  pas  les  négli- 
ger. C'est  môme  un  tt'-moignage  que  l'on 
rend  à  la  foi  tli!  la  résuri-ccticiu.  II  est  utile 
aux  morts  irèlre  enleriés  dans  les  (-irlises  et 

'  Tuin.  Ml  liiblt'/lh.  Pat,  p.  oOn. 


auprès  des  tombeaux  des  martyrs,  parce  que 
les  fidèles,  venant  y  faiic  leurs  prières,  ne 
se  contentent  pas  de  demander  ii  Pieu  le 
repos  de  l'âme  des  défunts,  ils  emploient  en- 
core pour  eux  le  crédit  des  martyrs  auprès 
de  Dieu.  D'ailleurs  les  sacrifices  et  les  obla- 
tions  que  l'on  fait  dans  les  étjlises  pour  les 
morts,  leur  sont  profitables.  Saint  Julien  cite 
souvent  saint  Augustin  dans  ce  livre,  comme 
dans  les  suivants.  Il  cite  aussi  Julien  Po- 
mère.  Il  dit  que  quand  même  on  ne  lioiive- 
rait  lien  dans  les  Kcritures  saintes  touchant 
l'utilité  de  la  prière  pour  les  morts,  l'usage 
de  l'Église  universelle  à  cet  égard  suilirait 
pour  l'autoriser. 

•i.  Il  traite  dans  le  second  livre  de  l'état  i  > 
des  âmes  av.ant  la  résurrection;  ce  qui  lui 
donne  lieu  d'examiner  ce  que  c'est  qoe  le 
paradis,  ce  que  c'est  que  l'enfer,  et  ce  que 
c'est  que  le  purgatoire.  Il  ne  doute  point  que 
les  âmes,  après  leur  séparation  d'avec  le 
corps,  ne  soient  rerues  dans  l'un  de  ces  trois 
endroits  ;  que  les  âmes  des  justes  n'aillent 
en  païadis,  celles  des  méchants  en  enfer,  el 
qu'il  n'y  ait  un  feu  purifiant  pour  celles  qui 
quittent  ce  monde  chargées  de  péchés  légers. 
Son  sentiment  est  que  le  purgatoire  ne  du- 
rera que  jusqu'au  jour  du  ju;zcment  dernier; 
que  toutes  les  âmes  n'y  restent  pas  égale- 
ment ;  que  les  unes  en  sortent  plus  tôt,  les 
autres  plus  lard,  à  proportion  de  leurs  fau- 
tes. 11  appuie  tout  ce  qu'il  dit  sur  cette  ma- 
tière des  passages  des  Pères,  et  enseigne, 
d'après  saint  Grégoire  le  Grand ,  que  les 
bienheureux  ne  prient  point  pour  les  dam- 
nés, sachant  qu'il  n'y  a  point  de  salut  â  es- 
pérer pour  eux.  Il  prouve  par  (juelques 
exemples  que  les  saints  s'intéressent  dans  le 
ciel  pour  leurs  parents  et  amis  fidèles  qui 
sont  encore  sur  la  tei're,  non  que  ces  saints 
voient  par  eux-mêmes  ce  ipii  s'y  passe,  mais 
par  la  connaissance  que  les  anges  leur  en 
dounent  avec  la  permission  de  Dieu. 

o.  La  résurrection  des  morts  et  l'étal  des       i. 
bienheureux  font  la  matière    du  troisième   ^'-' 
livi'e.  <i  II  n'y  a  aucun  doute  que  Dieu  ne 
doive  juger  tous  les  hommes  ;  mais  personne 
n'en  sait  ni  le  tenii)s  ni  le  lieu,  mnius  encore 
combien  de  jours  ce  juiièmcnt  durera.  Quoi- 
qu'il soit  réserve  au  Fils  de  Dieu,  le  Père 
n'en  sera  pas  exclu  ;  m.iis  il  jugera  par  le 
Fils.  Le  jugement  scia  pr<''cédc  de  la  résur- 
rection gi'wK-ralo.  Les  bons  et  les  méchanls      ,  r,„ 
ressusciteront,  avec  cette  dilférence,  que  les   "'" 
méchants  ne  seront  pas  changés,  et  que  les 


[VII»  SIÈCLE.]  niIAPITRE  LXXXl.  —  SAINT  JULIKN,  ARCMKVÉQUE. 

bons  le  seront,  parce  qu'eux  seuls  seront 


?'J3 


Trailé  lia 
SIxièrre  d^>e. 
Livre  1,  pag. 
6li. 


glolifli'i 


Siiinl  Julien  iuiile  lu  moilcslic  de 


saint  Au^'ustin,  ([ui  no  voulut  poiul  tli'iicUîr 
Fi  lï'Iat  lies  corps  sera  le  même  ijuant  à  la 
forme  et  ;\  la  hauteur,  qu'ils  étaient  lors  de 
leur  si^paration  d'avec  ITime  :  seulement  il 
soutient  ([uo  les  t()r|is  des  bienheureux  se- 
ront sans  aucune  dillormité  ;  tjue  si  ceux  des 
martyrs  conservent  les  cicatrices  de  leurs 
plaies,  elles  ne  feront  aucune  peine  à  voir; 
et  que  la  dillércnce  des  sexes  aura  lieu,  mais 
sans  aucune  cupidité.  Sur  quoi  il  cile  Eu- 
gène, archevêque  de  Tolède,  qu'il  appelle 
son  maître.  «  Les  bienheureux  devenus  sem- 
blables aux  anges,  verront  Dieu  comme  ils 
le  voient  :  leur  félicité  sera  toutefois  propor- 
tionnée aux  difl'érents  degrés  de  leurs  mé- 
rites, comme  les  peines  des  damnés  seront 
IH'opoitionnées  à  leurs  péchés.  Dieu  sera 
lui-même  la  récompense  des  bons,  qui  met- 
tront tout  leur  bonheur  à  le  louer,  à  le  con- 
templer, et  à  l'aimer  éternellement.  » 

6.  Le  second  ouvrage  de  saint  Julien  est 
un  traité  du  iUxième  ihjc  du  monde.  Il  le  com- 
mence par  une  prière  à  Dieu  pour  obtenir 
la  grâce  de  traiter  cette  matière  comme  il 
convenait  ;  puis  il  s'adresse  au  roi  Ervige, 
successeur  de  AN'amba.  C'est  dans  celte  let- 
tre que  nous  apprenons  quelle  fut  l'occasion 
de  cet  écrit.  Les  Juifs,  qui  étaient  en  grand 
nombre  en  Espagne,  s'etTorçaient  de  montrer 
que  le  Messie  n'était  pas  encore  venu,  disant 
qu'il  ne  devait  venir  qu'au  sixième  âge.  Ils 
comptaient  mille  ans  pour  chaque  âge,  et  on 
u'etait  alors  qu'au  cinquième  millénaire  sui- 
vant leur  calcul.  Le  roi  Ervige,  voyant  (ju'ils 
avaient  séduit  plusieurs  des  fidèles,  ordonna 
à  saint  Julien  de  leur  répondre.  Il  le  fit  en 
trois  livres,  montjant  dans  le  premier  qu'il 
n'est  dit  ni  dans  la  Loi  ni  dans  les  Prophètes, 
que  le  Messie  doive  venir  dans  le  sixième 
millénaire  ;  qu'il  n'y  a  dans  l'Ecriture  aucune 
supputation  qui,  en  remontant  à  la  création 
du  monde,  fixe  la  naissance  temporelle  du 
Messie  ;  qu-e  lorsque  les  Prophètes  annoncent 
sa  venue,  c'est  en  disant  indéfiniment  qu'il 
naîtra  dans  les  derniers  temps,  ce  que  nous 
prenons  pour  le  sixième  âge  du  monde;  que 
nous  avons  en  cela  d'autant  plus  de  raison, 
que  les  signes  de  son  avènement  marqués 
dans  l'Ancien  Testament  sont  arrivés,  comme 
on  peut  s'en  con\ainc;e  en  faisant  le  paral- 
lèle lies  prophéties  d'Isaïe,  de  Michée,  de 
Malachie,  de  Soplionic,  des  Psaumes,  et  des 
autres  Prophètes,  avec  ce  que  les  Évangé- 


listcs  racontent  de  la  naissance  do  Jésus- 
Christ,  de  sa  Passion,  de  sa  mort  ;  que  le 
temps  marqué  par  Daniel  a  (ité  acconq)li 
sous  le  règne  d'Auguste  ;  que,  ce  que  lo 
même  prophète  a  prédit  de  la  ruine  de  Jé- 
rusalem étant  aussi  arrivé  sous  Vespasien, 
c'est  un  aveuglement  aux  Juifs  d'attendre 
le  Messie, 

7.  11  traite  la  même  matière  dans  le  se- 
cond livre,  mais  par  des  preuves  et  des  té- 
moignages tirés  du  Nouveau  Testament.  «Le 
même  ange  qui  avait  appris  h  Daniel  la  ve- 
nue du  Messie,  annonce  â  Marie  qu'elle  le 
concevra  dans  son  sein.  A  peine  est-il  né, 
que  les  bergers  viennent  l'adorer  dans  la 
ville  de  Bclliléem,  où,  de  l'aveu  des  princes 
des  prêtres,  il  devait  naître.  Hérode,  appre- 
nant sa  naissance,  en  est  troublé,  et  toute  la 
ville  de  Jérusalem  avec  lui.  Dos  mages,  con- 
duits par  une  étoile,  viennent  aussi  l'adorer. 
Saint  Jean  Baptiste  annonce  sa  venue  aux 
Juifs,  et  dans  le  temps  qu'il  le  baptise  dans 
le  Jourdain,  une  voix  du  ciel  se  fait  enten- 
dre en  ces  termes  :  Celiii-i:i  est  mon  Fils 
bicn-aimé.  »  Saint  Julien  remarque  eu  pas- 
sant que,  quand  Hérode  fit  assembler  les 
princes  des  prêtres  et  les  scribes  du  peuple 
pour  savoir  d'eux  où  devait  naître  Jésus- 
Christ,  ceux-ci  ne  s'avisèrent  pas  de  faire  un 
calcul  des  années  ou  des  âges  auxquels  sa 
venue  était  fixée  ;  qu'ils  s'en  tinrent  au  lieu 
de  sa  naissance,  qui  avait  été  désigné  par  le 
prophète  Michée.  Il  fait  une  remarque  sem- 
blable sur  la  députation  que  saint  Jean  fit  à 
Jésus-Christ  pour  savoir  s'il  était  celui  qui 
devait  venir,  ou  s'il  en  fallait  attendre  un 
autre.  «  Si  le  précurseur  avait  pu  savoir  par 
le  calcul  des  années,  depuis  la  création  du 
monde,  celle  de  la  naissance  du  Messie,  au- 
rail-il  eu  besoin  d'envoyer  ses  ilisciples  !i 
Jésus-Christ  pour  savoir  de  lui  s'il  était  le 
Messie  ou  non?  » 

8.  Apiès  avoir  fait  remarquer  dans  le  troi- 
sième livre,  que  les  Hébreux  ne  distinguaient 
pas  les  âges  du  monde  par  le  nombre  des 
années,  mais  par  les  diverses  générations,  il 
fait  voir  que  nous  sommes  au  sixième  âge,  et 
môme  au  sixième  millénaire,  suivant  le  cal- 
cul des  Septante,  qu'il  préfère  à  celui  des 
Hébreux,  apparemment  parce  qu'il  venait 
mieux  à  son  but.  Par  ce  moyen,  il  trouvait 
cinq  mille  ans  écoulés  depuis  le  commence- 
ment du  monde  jusqu'à  la  venue  du  Messie; 
à  quoi  ajoutant  686  ans  jusqu'au  temps  où  il 
écrivait,  il  était  alors  au-delà  de  la  moitié  du 


Livre  n, 
pjj.  C2j. 


Malt.  XI, 3. 


Livre  111, 


79i 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


sixième  millénaire.  Voici  comme  il  di-tingue 
les  six  agcs  du  monde  :  le  pieœicr,  dopiiis 
Adam  jusqu'au  délufrc;  le  secoiul,  depuis  le 
déluge  jusqu'à  ALraliam  ;  le  Iroisii'me,  depuis 
Abrahamjufqu'.i  David;  le  qualiième, depuis 
David  jusqu'à  la  Irausniigiation  de  Baby- 
luno;  le  cinquième,  depuis  la  Irausmipralion 
deBabylGnejus(|u'a  la  venuede  Jésus-Cln-isl; 
le  sixième,  depuis  la  venue  de  Jésus-Cliiisl 
jusqu'à  la  fin  du  monde,  qui  n'est,  dit-il,  con- 
nue que  de  Dieu  seul. 
Hi.toir.  de       9.  Le  troisième  ouvrap;e  de  saint  Julien  est 

U    guerre   de  ,,  i'-i,'i  t         ] 

w.a.u.  V Histoire  de  ta  guerre  du  roi  M  amba  contre  te 
duc  Paul  rebelle  '.  AVamba  avait  été  élu  mal- 
gré lui  pour  succéder  au  loi  Récesviutlie, 
mort  en  67:2,  et  avait  été  sacré  à  Tolède  avec 
l'buile  bénite,  répandue  sur  sa  léte  parl'ar- 
cbevcquc  Quiricius.  Aussilot  après,  il  s'éleva 
contre  lui  un  paili  dans  la  Gaule  Narbonuaise. 
Wamba  envoya  pour  le  réprimer  le  duc  Paul, 
qui  se  révolta  lui-même.  AVamlja  niardia 
en  personne  contre  lui,  le  prit,  et  flt  rendre 
aux  églises  tous  les  vases  sacrés  que  Paul 
avait  enlevés,  entre  autres  la  couronne  d'or 
que  le  roi  Récarède  avait  olierte  au  tombeau 
de  saint  Félix  de  Giroune,  et  que  Paul  avait 
mise  sur  sa  tête.  Après  quoi  il  lit  juger  les  re- 
belles dans  l'assemblée  de  la  nation  suivant 
les  canons  et  les  lois  des  VisigoUis.  Wamba 
étant  tombé  malade  en  G80,  l'archevêque  de 
Tolède  lui  doinia  la  pénitence,  et  le  revêtit 
de  l'habit  monas'.ique  '.  Ce  prince,  se  croyant 
obligé  de  demeurer  en  cet  état,  renonça  de 
la  royauté,  déclara  Ervige  son  successeur,  et 
donna  une  instruction  signée  de  sa  main  à 
saint  Julien  ,  portant  avec  quel  soin  on  devait 
célébrer  l'onction  d'Ervige.  Voilà  les  deux 
premiers  exemples  de  l'onction  des  rois. 
Le  Mtrede.  10.  Félix  de  Tolèdc  met  entre  les  ouvrages 
de  saint  Julien  un  livre  des  Antilogus,  ou 
contrariétés  apparentes  de  l'Ecriture.  Nous 
en  avons  un  de  ce  genre  imprime-  à  Cologne 
en  l.")32,  sans  nom  d'iiuteur.  André  Scliott, 
croyant  que  c'était  celui  dont  parle  F('liN,ra 
l'ait  imprimer  sous  le  nom  de  saint  Julien 
dans  le  quinzième  tome  de  la  Bibliothèque 
des  Pères,  à  Cologne  en  162:2,  d'où  il  est 
passé  sous  le  même  nom  dans  celle  de  Lyon. 

'  Duchcfiic,  toin.  I  Hist.  Franc,  pag.  821. 

«  Toin.  VI  Concil.,  pag.  )ï2:i. 

'  l,'(!ililciir  e^piifjuol  n  pruiivé  (]iio  cet  oiivr.ipc 
était  vraiment  de  saint  Julien  de  Tuli^dr-.  (L'édi- 
teur.) 

•  Kelix.  in  Ippendice  nd  Ildephuns.  de  Scripto- 
ribus  Ecclesiatt. 


Mais  Jean-Baptiste  Marus,  dans  ses  notes  sur 
•ces  hommes  illustres  du  Monl-Cassin  par 
Pierre  Diacre,  prouve  que  cette  Concordance 
est  de  l'abbé  Berthaire, dont  elle  porte  le  nom 
dans  un  ancien  manuscrit  écrit  en  lettres 
longobardiques  '.  Cet  abbé  écrivait  sur  la 
fin  du  neuvième  siècle. 

11.  Voici  les  autres  ouvrages  cpie  Félix  de  d,„îi°j'ïll 
Tolède  attribue  à  saint  Julien,  et  dont  nous  3l!l.*°°' 
ne  connaissons  que  les  titres.  Un  livre  de 
Rëltonses  adressé  à  Idalius,  évêque  de  Barce- 
lonne,  dans  lequel  il  justifiait  les  canons  et 
les  lois  qui  défendent  aux  esclaves  chrétiens 
de  servir  des  infidèles  ';  un  A]X)log('tique  de 
la  foi  adressé  au  pape  Benoît';  un  autre 
Apologétique  qui  concernait  trois  articles  sur 
lesquels  l'évêque  de  Rome  semblait  avoir  eu 
quelque  doute  ";  un  petit  écrit  des  Remèdes 
contre  les  blasphèmes,  avec  une  lettre  à  l'abbé 
Adrien;  un  recueil  de  poésies  qui  contenait 
des  hymnes,  des  éfiitaphes  et  dos  épigram- 
mes  en  grand  nombre;  un  livre  de  Lettres; 
un  recueil  de  Sermons,  parmi  lesquels  il  y 
avait  un  petit  écrit  de  la  Protection  de  la  mai- 
son de  Dieu  et  de  ceux  qui  s'y  retirent  ;  un  re- 
cueil de  Sentences  tirées  des  Commentaires  de 
saint  Augustin  sur  les  Psaumes  ;  des  extraits 
des  livres  du  même  Père  contre  Julien;  un 
traité  des  jugements  divins,  tiré  de  l'Écriture 
sainte, avecune  Leltreau  roiErvigc;  un  traité 
contre  ceux  qui  persécutent  les  personnes  qui  se  re- 
tirent dans  les  églises  ;  un  livre  des  Afesses  pour 

toute  l'année, divisé  en  quatre  parties,  dans  le- 
quel il  en  corrigeait  quelques-unes  qui  étaient 
ou  a  Itérées  ou  imparfaites,  et  en  faisait  de  nou- 
velles; un  livre  d'Oraisons  pour  les  fêtes  de 
l'église  de  Tolède  :  toutes  ces  oraisons  n'é- 
taient pas  de  lui;  il  en  avait  réformé  quel- 
ques-unes, et  fait  d'autres. toutes  nouvelles. 

12.  On  ne  trouve  point  dans  ce  catalogue  commtn. 
le  (  iimmenlauv  sur  la  prophétie  de  Au/ium.  La-  iTcpuu  «•- 
nisius  en  a  néanmoins  fait  imprimer  un  sous 

le  nom  de  saint  Julien  de  Tolède,  à  qui  il  est 
dil-il  attribué  dans  un  manuscrit  de  la  bi- 
bliolhèque  de  Bavière.  C'est  le  même  Com- 
mentaire que  l'on  a  inséré  dans  le  douzième 
tome  de  la  Bibliothèque  des  Pères  '  à  Lyou 
en  1677,  parmi  les  Œuvres  de  saint  Julien. 

'  Cette  profrission  de  foi  fut  f.iilc  pour  atto.stir 
la  foi  de  l'l>pa?iic  i)ar  rapport  A  la  eoiuliiiniintioii 
d'Apollinaire,  portée  par  le  C  concile  géutïral  de 
Confinntinopli'.  (L'édileur.) 

<  Il  est  piiMié  en  parlie  dans  le  C  coacile  de 
Tolède.  (I.'éiliteiir.) 

'  T.mi,  Ml  nihiioth.  Pat.  ptig.  030. 


CHAPITRE  LXXM.  —  SAINT  JLXIEN,  AllCIlEVÈQUE. 


[vil'  SliXLE.J 

Mais  le  silence  de  Fëlix,  qui  paraît  avoir  pris 
beaucoup  do  soin  h  faire  conuailm  tous  les 
ouvrages  de  son  prédécesseur,  la  dill'éreucc 
qu'il  y  a  entre  le  style  de  ce  Commentaire  et 
la  manière  d'écrire  lie  saiid  Julien,  font  beau- 
coup douter  qu'il  soit  de  lui'. 

Cet  évoque  assista  à  quatre  conciles  de  To- 
lède :  au  douzième,  en  681  ;  au  treizième,  en 
683;  au  quiitorzième,  cn684;  auquiuzièmc, 
en  088.  11  présida  à  ce  dernier,  où  il  fit  l'a- 
pologie de  cette  proposition  que  le  pape  Be- 
noît avait  désapprouvée  :  //  ij  a  en  Jcsus- 
r/irist  Irais  substances.  Il  en  comptait  deu.K 
dans  l'humanité,  ràmc  et  le  corps  ;  In  divinité 
faisait  la  troisième, 
jos-mmi  I^-  Saint  Julien  était  babile  pour  son  temps. 
.«s....  Ju.  ji  .^^..jj,  j^j  Jpg  p^j,gg  i.,(inj.^  Pt  possédait  l'i':- 

critu'e  sainte.  Son  slvle  est  clair,  et  sa  lati- 
nité plus  pure  que  celle  de  beaucoup  d'autres 
écrivains  de  son  siècle. 
K.iiiinn(ifi       14.  La  meilleure  et  la  plus  complète  édition 

Viivr0«  de  >.  *  *■ 

jui  CD  rt'.irti  des  œuvres  de  saint  Julien,  est  celle  qui  a  été 
io'iède"VÎ-  donnée  dans  le  tome  II  de  la  Collection  des  Pl- 
scvk'  '"'"'  f'c^de  Tolède,  parFranrois  deLorenzana,  deux 
vol.  in-fol,  Madrid,  1782;  elle  est  reproduite 
dans  le  tome  XC\'I  de  la  Patrologie  latine, 
col.  427.  (5ny  trouve  d'abord  des  notices  sur 
saint  Julien,  Idalius  et  Félix,  par  Antoine, 
Biblioth.  vet.  Hisp.;  la  Vie  de  saint  Julien, 
par  Félix,  évèiiue  de  Tolède,  avec  des  noies. 
Viennent  ensuite  les  écrits  :  1°  les  Pionos- 
tics  du  siècle  futur;  2° le  Livre  apologétique 
atlrcssé  au  pape  Benoit  II.  Nous  n'en  avons 
qu'un  extrait,  ou  la  première  partie  de  ce  li- 
vre, conservée  dans  la  Profession  de  foi  faite 
dans  le  xv'  concile  de  Tolède  de  l'an  688. 
Ce  livre  avait  été  envoyé  à  Rome  deux  ans  _ 
auparavant  pur  saint  Julien;  les  Pères  ne  se 
contentèrent  pas  d'eu  entendre  la  lecture, 
ils  l'approuvèrent  et  l'insérèrent  en  partie 
dans  les  Actes  de  leur  concile.  Saint  Julien, 
dans  cet  .Apologétique,  avait  pour  but  de  jus- 
tifier certaines  expressions  et  certaines  asser- 
tions que  le  Pape  avait  reprises  dans  son  pre- 
mier Apologétique.  Le  Pape  lui  reprochait  : 
1°  d'avoir  dit  que  la  volonté  en  Dieu  engendre 
la  volonté,  comme  la  sagesse  engendre  la  sagesse  ; 
2°  d'avoir  affirmé  qu'il  y  avait  trois  substan- 
ces en  Notre-Seigneur  Jésus-Christ.  Les  deux 
autres  chefs  d'accusations  nous  sont  tout  h 
fait  inconnus.  Suint  Julien,  dans  sa  réponse, 
montre  en  quel  sens  il  a  parlé,  confirme  son 


71).-) 


sentiment  par  les  textes  des  saints  Pères,  en 
parliculier  de  saint  Augustin,  de  saint  Cy- 
rille et  de  saint  Isidore.  Le  Souverain  Pontife 
fut  très-content  de  ces  explications  et  en  té- 
moigna sa  satisfaction,  comme  Patteste  Isi- 
dore de  Bad-ijoz  '. 

F^c  troisième  ouvrage  est  celui  des  t'/ireu- 
ves  du  sixième  âge  contre  les  Juifs.  Le  quatriè- 
me contient  les  Anlilogies  ou  oppositions  de 
l'Ancien  et  du  Nouveau-Testament,  précé- 
dées d'un  ordre  alphabétique.  L'Apologéti- 
que de  l'abbé  Samson,  écrit  en  804  contre 
Hosiigise,  et  publié  par  le  père  Florez,  to- 
me XI  de  l'L'spagne  sacrée,  ne  permet  plus  le 
doute  sur  le  véritable  auteur  des  Antilogies. 
On  y  cite  souvent  cet  écrit  de  saint  Julien; 
on  en  rapporte  les  paroles  mêmes,  telles 
qu'elles  se  trouvent  dans  les  questions  et  les 
réponses.  Devant  cette  preuve  s'évanouissent 
toutes  les  difficultés  des  critiques.  S'il  y  a  des 
manuscrits  qui  portent  le  nom  de  Berlhaire, 
c'est  peut-être  que  ces  manuscrits  ont  été 
écrits  par  lui  ou  par  ses  soins,  ou  encore  parce 
qu'ils  contiennent  sous  le  même  titre  diver- 
ses questions  expliquées  par  diverses  sen- 
tences :  ce  qui  n'est  pas  rare,  comme  on  le 
sait.  L'ouvrage  est  publié  d'après  la  Biblio- 
thèque des  Pères  de  Lyon,  mais  avec  quel- 
ques corrections  :  on  y  garde  un  meilleur  or- 
dre ;  la  question  70  du  livre  I  est  suppléée  par 
l'Apologétique  de  Samson'. 

Le  cinquième  ouvrage  est  le  Commentaire 
sur  le  prophète  Nahum.Lorenzaua  restitue  cet 
écrit  à  suint  Julien,  el  réfute  les  raisons  qu'on 
oppose  à  ce  sentiment.  Le  silence  de. Félix  ne 
prouve  rien,  car  le  même  auteur  a  laissé 
dans  l'oubli  la  Vie  de  saint  Ildefonse,  écrite 
ceitainement  par  Julien.  Ûnsait  combien  l'ar- 
gument tiré  de  la  diversité  du  style  est  fai- 
ble, à  moins  qu'on  n'ait  égard  à  toutes  les  cir- 
constances et  qu'on  les  pèse  attentivement. 
Si  l'ouvjage  en  question  se  trouve  dans  un 
seul  maiiusci  il  mutilé,  combien  d'autres  sont 
dans  le  même  cas  et  ne  sont  point  pour  cela 
rejetés  comme  supposés  !  Si  l'auteur  n'expose 
que  quatre  ou  cinq  versets,  c'est  qu'il  a  été 
forcé  d'interrompre  son  travail  par  quelque 
circonstance  imprévue  ou  par  la  mort.  Les 
deux  vers  léonins  qu'on  y  lit  ne  dénotent 
point  un  âge  plus  récent,  car  on  en  lit  aussi 
dans  Virgile  et  dans  Ovide. 

L'ouvrage,   quoique  imparfait  et  mutilé, 


'  Tes  raisou?  soûl  réfutées  par  Lorenzana.  {L'é- 
dUeur.) 


'  Voyez  noie  de  Lorenzana,  1-.449  dausle  t.XCVI. 
'  Voyez  le  Monilum  de  Lorenzana,  col.  S86, 


796 


HISTOraE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


monlre  un  aiileur  très-versc  dansTICrritiirc, 
habile  h  en  pénétrer  les  sens  cl  à  les  expo- 
ser. Le  commenlalear  donne  d'abord  le  sens 
littéral,  ensuite  le  sens  allégori(jue.  le  sens 
anasrogiqne,  et  enfin  le  sens  moral  sous  tou- 
tes ses  faces.  Celte  fécondité,  jointe  à  une 
ïfrande perspicacité,  cette  doctrine  unie  ■'i  une 
érudition  extraordinaire,  et  exprimée  avec 
des  expressions  propres,  conviennent  parfai- 
tement à  saint  Julien,  comme  on  peut  s'en 
convaincre  en  parcourant  ses  autres  écrits  '. 

Le  sixième  ouvrafre  du  saint  archevêque 
contient  la  Vie  de  saint  Ildcfonse  :  dans  ï'é- 
ditioii  de  la  Patrologie,  il  est  l'envoyé  à  la 
col.  -4.')-'ii  du  même  volume  jiarmi  le^  œu- 
vres de  saint  Ildefons«- 

Dans  le  septième  on  lit  les  Oraisons  com- 
posées par  =;iint  Julien;  elles  se  trouvent  dans 
le  Missel  mozarabique.  L'abliô  Samson,  dont 
nous  avons  déjà  parlé,  attribue  la  première 
et  la  seconde  à  saint  Julien,  ce  qu'on  igno- 
rait complètement.  La  troisième  est  celle  que 
le  saint  Docleiir  a  mise  lui-même  à  la  tète  des 
Épreuves  du  vi'  âj,'e. 

Le  huitième  ouvrage  de  l'édition  Lorenza- 
na  est  l'Histoire  de  la  liébellion  de  Paul  con- 
tre WiimOn,  en  deux  textes,  l'un  très-pur, 
l'aulre  tel  qu'il  a  été  interpolé  par  Lucas  Tu- 
densis,  et  publié  par  Schott. 

Le  ncu\ième  ouvrage  fait  suite  à  l'histoire 


précédente,  il  est  intitulé  :  Inculte  d'un  Irès- 
humitc  Historien  contre  la  Tyrannie  de  la 
Gaule.  Le  dixième  est  le  Jugement  contre  la 
perfidie  des  Tyrans,  avec  deux  textes  :  le  pur, 
et  celui  de  Lucas  Tudensis,  altéré.  Ces  deux 
ouviagcs  sont  parrillcmcnt  dirigés  contre  la 
rébellion  du  duc  Paul.  Dans  l'Appendice  on 
reproduit  les  ouvrages  supposés  :  1°  la  Chro- 
ni«iuedes  rois  Visigotlis  de -407  h  738,  dont  ou 
ignore  l'auteur,  m  lis  qui  n'est  point  l'œuvre 
de  saint  Julien;  2°  des  vers  qui  lui  sont  at- 
tribués par  le  soi-disant  Julien  Pétri,  archi- 
prêtre  de  Saint -Juste,  des  épitaphcs  qui 
se  trouvent  dans  la  Chronique  du  faux  Lut- 
prand.] 

15.  Idalius,  ëvêque  de  Barcelonno,  fi  qui  i"""!»' 
saint  Julien  avait  adressé  ses  trois  livres  des 
Pronostics,  l'en  remercia  par  une  lettre  que 
doni  Lucd'Achcri  a  donnée  dans  le  premier 
tome  du  Spicilége'.  Il  y  en  a  joint  une  autre 
du  même  ëvêque  à  celui  de  Narbonne  nom- 
mé Zunifredus,  dans  laquelle  il  marque  qu'il 
lui  envoie  les  livres  des  Pronostics  composés 
par  saint  Julien  de  Tolède,  eu  le  priant  de 
communiquer  aux  évêqu.^s  de  sa  province 
un  ouvrage  si  utile  et  si  excellent.  fOn  les 
trouve  au  tome  XCYI  de  la  l'ulrdlotjie  latine, 
col.  813,  avec  une  notice  tirée  d'.Antoine, 
Bibl.  vet.Ifisp.,  col.  443.] 


Id<llD<,  trt- 

qoe  de  Birt«> 


CHAPITRE  LX.XXII. 
Ttéodorc,  archcvcqne  de  Cantorbéry  [690]. 


idScrivaiu  lalin.) 


nsodort  1.  Nous  avons  dit  plus  haut  qu'Oswi,  roi 
yeqnodecto.  jg  Norlliumbrc,  avait,  de  concert  avec  Ek- 
*"•  bert,  roi  de  Kent,  envoyé  .'i  Rome  un  saint 

prêtre  nommé  Viyard  pour  y  être  ordonné 
archevêque  de  Cantorbéri ,  et  que  Vigard 
mourut  à  Rome  de  la  peste  avec  tous  ceux 
qu'il  avait  amenés.  Le  pape  Yitalien  fut  quel- 
que temps  à  chercher  un  sujet  digne  de 
ieiu[)lir  un  poste  de  celte  importance;  enfin 
il  jeta  les  yeux  sur  l'abbé  Adrien,  originaire 
d'Afrique,  instruit  dans  les  divines  Ecritures 
et  dans  la  discipline  monastique,  et  qui  pos- 
sédait également  li's  langues  grecque  et  la- 
tine '.  Adiien,  se  croyant  indigne  de  l'éii- 
scopat,  le  refusa;  m.ais  il  présenta  au  Pape 


un  moine  nommé  Théodore,  qui  était  do  Tarse 
en  Cilicic,  homme  savant,  de  boiuics  mœurs, 
vénérable  par  son  iîge,  et  qui  savait  le  grec 
et  le  latin.  Vilalien  l'acccitta,  et  l'ordonna 
évéque  le  vingt-sixième  de  mars  GG8,  à  con- 
dition qu'Adrien  le  conduirait  en  Angleterre. 
Théodore  élait  alors  ùgé  île  soixante-six  ans. 
Ils  n'arrivèrent  ;'i  Cantorbéry  qu'au  mois  de 
m.ii  de  l'année  suivante  CG'J.  Théodore  prit 
possession  de  sou  siège,  et  donna  \  Adrien 
le  monastère  de  Sainl-Pierio.  Ils  firent  en- 
semble la  visite  de  toutes  les  habitations  des 
Anglais,  l'tabliï-sant  [larlout  un  bon  ordre  de 
vie  et  l'usage  de  l'église  catholique  dans  la 
céh'bralion  de  la  fête  de  Pflques  '. 


I  Vnvrj  \e  Moiiitiim  i\o  I,on>nzan.n,  roi.  7«3. 
•  Toiii.  I  Spicileg..  pn(<.  .113  il  316. 


•'•  nrd.i,  lili.  IV,  is|..  1. 
'  ll)id.,  cap.  II. 


[vil'  SltCI.E. 


CIIAPmŒ  L.WXII.  —  TIII'dUUllE  DE  CANTUltUKIlV, 


797 


iisiai.iii       :>.  Ils  l'onnorent  diverses  t'xolcs  en  Ant;lc- 

dos  ^cuU>»   ou  ,1.  !■  'i     Hi%         •.  ■  ' 

Aunuiorro.    Icrrc,  OU  1  on  expliqniiit  1  hiriliiie  samic,  cl 

S"    iniirl     ou  .  .      ,,  .1.1, 

«'o-  OÙ  l'on  onsei^'^nait  1  asti-oiioinie.  1  anllinicli- 

qiie  ei'clésljistiiiuc,  c'i'sl-à-iliro  le  coni[iul  ou 
calcul  |i<inr  Irouvcc  la   l'â(|iic,   les  langues 
<;i'('ci|ue  et   laline,  la  conipusllioii  des  vers 
latins,  et  le  chant  ecclésiasli(iiie.  Tliéodoie 
mil   plusieurs  évèqucs  dans  les  lieux  où   il 
n'y  en  avail  pas  encore  eu,  en  ordonna  pour 
les  églises  vacantes,  rétablit  dans  leurs  égli- 
ses ceux  qui  en  avaient  été  chassies  injuste- 
ment, tint  plusieurs  conciles,  fonda  des  mo- 
nastères, et  ne   cessa  do  tiavailler  au  main- 
tien de  la  foi  et  de  la  discipline  jusqu'à   sa 
mort,  qui  arriva  en  690,  après  vingt-deux  ans 
d'épiscopat. 
Péniieniici       3.  Il  composa  un  Pénitentiel,  ou  recueil 
de  canons  pour  régler  les  pénitences  des  di- 
vers péchés.  Le  titre  seul  fait  voir  qu'il  était 
dilfc'rent  du  Livre  des  Canons,  dont  il  lira  dix 
articles  pour  lesfaiie  appi'ouvcr  dans  le  con- 
cile d'Herford,  auquel  il  présida  en  673  '.Ce 
-   livre  était  vraisemblablement  le  Code  de  l'E- 
glise romaine.  Théodore  n'aurait  pas  osé  en 
proposer  d'autres  aux  évèqucs  d'Angleterre, 
n'ignorant  pas  qu'Adrien,  que  le  Pape  lui 
Jivait  donné  pour  le  conduire  .'i  Gantorbéry, 
était  chargé  de  veiller  à  ce  qu'il  n'introdui- 
sit rien  de  nouveau  dans  cette  I']glise  ',  à  la 
manière  des  Grecs.  S'il  se  fut  agi  do  son  Pé- 
nitentiel, pourquoi  ne  l'aurait-il  pas  proposé 
tout  entier  au  concile?  N'était-il  pas  de  son 
intérêt   particulier  et  du  Lien  général  des 
Églises  d'Angleterre,  qu'il  fût  approuvé  dans 
un  concile  qui  représentait  toute  la  nation? 
Le  Pénitentiel,  en  l'état  où  nous  l'avons  au- 
jourd'hui, n'est  ni  entier,  ni  dans  sa  pureté. 
On  y  a  fait,  comme  il  est  arrivé  à  beaucoup 
d'autres  livres  de  ce  genre,  diverses  aug- 
mentations et  divers  changements,  suivant 
les  lieux  et  les  temps  où  il  a  été  mis  en  pra- 
tique. Sigcbert  n'j'  avait  vu  que  la  forme  en 
laquelle  les  pécheurs  devaient  expier  leurs 
péchés  '.  On  y  trouve  à  présent  quantité  de 
rits  et  de  cérémonies  qui  n'ont  aucun  rapport 


à  la  pénilcncc.  Il  y  a  même  des  endioils  où 
il  est  [)arlé  de  Théodore  eu  troisième  person- 
ne *.  Nous  avons,  dans  le  n(Miviènie  tome  du 
Siiicilége  de  Dom  Luc  d'Aclicri,  cent-vingt 
articles  de  ce  Pénitentiel,  qui  ont  ('■li-  léim- 
priiués  dans  l'Appendice  ilu  sixième  tome  des 
Conciles  du  Père  Labbe  en  1671.  Jaccp.ies 
Petit  en  donna  une  nouvelle  cdiiiou  à  Paris 
eu  1677;  mais  elle  ne  compicnd  (pie  (piator- 
ze  capitules  de  ce  Pénitentiel,  qu'il  a  arran- 
gés à  sa  façon.  Ils  se  trouvent  la  iiliipait 
dans  ceux  de  Dom  d'Aclieri  ;  et  c'est  appa- 
remment ce  qui  a  eiujiéché  le  Père  Ilardouin 
de  les  rapporter  dans  sa  Collection  des  Con- 
ciles, où  il  s'est  conlenté  de  mettre  k  côté 
les  dillVu-enles  leçons  du  manuscrit  de  M.  Fa- 
vier,  dont  Jacques  Petit  avail  eu  communi- 
cation. Il  est  surprenant  que  cet  auteur,  qui 
se  vante  d'avoir  donné  dans  quatorze  capitu- 
les tout  ce  que  le  Pénitentiel  de  Théodore 
contient  de  remarquable  et  d'intéressant, 
ne  l'ait  pas  donné  tout  entier  pour  satisfaire 
le  public,  qui  le  désire  depuis  longtemps. 
Cela  fait  douter  qu'il  ait  eu  eu  main  ce  Péni- 
tentiel dans  toute  son  étendue,  car  on  dit 
qu'il  est  très-long;  et  c'est  par  celte  raison 
que  Spelmcin  s'est  dispensé  de  le  rapporter 
dans  le  premier  tome  des  Conciles  d'Angle- 
terre, pour  ne  pas  trop  enller  son  recueil  '\  ' 
Voici  ce  qu'il  y  a  de  lemnrquable,  suivant 
l'édition  de  Dom  d'Acheri,  qui  parait  plus 
pure  et  plus  sincère  que  celle  de  Petit,  quoi- 
qu'elle ne  soit  pas  exem[]te  de  mélanges  de 
canons  étrangers. 

4.  Celait  l'usage  qu'un  prêtre  ôtât  aux       _ 
nouveaux  baptisés,  le  septième  jour  d'après   tS",'^'','„'Î,''. 
leur  baptême,  le  voile  qui  avait  été  mis  sur  m,î!,uJbie."'" 
leur  tète  dans  la  cérémonie  du  baptême  ". 
L'abbé,  dans  les  monastères,  en  usait  de  mê- 
me ù  l'égard  des  moines  qui  faisaient  profes- 
sion, parce  qu'au  jugement  des  Pères  la  pro- 
fession monastique  est  un  second  baptême, 
et  qu'elle  remet  les  péchés  comme  ils  sont 
remis  dans  le  baptême  '.  L'abbé  devait  être 
élu  par  les  moines.  C'était  l'évêque  qui  l'or- 


'  Tom.  VI  ConciL,  pag.  fi3l. 

»  Beda,  lit).  IV  Hisl  ,  Lv.p.  i. 

3  Sigebert.,  De  Script.  Eccles.,  cop.  Lxm. 

'  Art.  U  (d'Aclier)  et  11  (Potil). 

>■  Sppliuan.,  loin.  I  ConciL  Angliœ,  pas.  134. 

«  Tuiii.  IX  Spicileg.,  et  tùiii.  Vl  ConciL;  LalOj., 
et  tom.  Ml  ConciL  Harduini,  pag.  1771. 

■*  Ceci  doit  s'eateudre  moins  de  la  cérémonie 
purement  extérieure  de  la  profession  monastique, 
que  de  l'ûtiservation  de  la  règle  qui  y  est  impo- 


sée; et  de  plus  le  liaplôme  remet  les  péchés  ex 
opère  operato,  au  lieu  que  la  professiou  monas- 
tique ne  peut  les  remettre  qu'ex  opère  opcranlis. 
Les  Pères  n'ont  rien  voulu  cure  autre  chose;  et 
d'ailleurs  il  faut  entendre  ici  les  ptres  de  la  vie 
monastique,  et  non  les  Pères  de  l'I'Vdiso  propre- 
ment dits.  Voyez  dans  la  bibliothèque  (les  Pères 
de  Lyon,  tom.  XXI,  le  sermon  de  Geoffroy  de  Ven- 
dôme sur  saint  Benoit.  (L'éditeur.] 


HISTOIRE  GRNKRALR  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Cap.  II. 


nu 

X,  XIX. 


7'.i8 

(lonnail  ou  le  bénissait  pendant  la  célébra- 
tion des  saints  Mystères.  Pour  marque  de  sa 
dignité,  il  lui  nictinit  en  main  le  bâton  pas- 
toral. Pour  être  parfait  cbréticn,  il  faut  avoir 
rcru  avec  le  baplènic  la  couHrniation  de  l'é- 
vêque.  Ceux  qui,  par  ignorance,  ont  été  bap- 
tisés deux  fois,  n'ont  pas  besoin  de  péniten- 
ce. Mais  ils  ne  peuvent  éli'C  ordonnés,  si  ce 
n'est  dans  une  grande  n(''ccssilé.  Le  diman- 
che, on  n'allait  point  en  bateau,  ni  en  clia- 
riot,  ni  à  cheval,  ni  au  bain;  on  ne  faisait 
pas  même  de  pain.  Il  était  dél'endu  de  man- 


commuuanté  choisira  un  autre  abbé.  Ce- 
lui qui  était  élu  pouvait  renoncer  à  sa  digni- 
té, avec  la  permission  de  l'évcque.  La  péni- 
tence pour  l'homicide  volontaire  est  de  sept 
ans,  si  mieux  il  n'aime  renoncer  à  porter  les 
armes;  pour  la  fornication,  un  an;  pour  l'a- 
dultère, trois  ans.  Ainsi  l'on  avait  déjà  beau- 
coup abrégé  les  pénitences  prescrites  parles 
anciens  canons.  Il  n'est  pas  permis  de  dire 
la  messe  pour  celui  qui  s'est  tué  volonlaire- 
ment;  mais  on  peut  prier  pour  lui  et  faire 
des  aumônes.  Dans  le  doute  si  une  personne 
ger  du  sang,  et  de  la  chair  d'animaux  étouf-  a  été  baptisée,  il  l'anl  la  baptiser.  Permis  de 
fi'-s.  Les  moines,  chez  les  Grecs,  n'avaient  dire  la  messe  pour  un  enfant  mort  avant  Tâ- 
point  d'esclaves;  les  Latins  en  avaient.  Chez  ge  de  sept  ans.  Ceux  qui  ont  été  ordonnés 
les  Grecs,  les  clercs  et  les  laïcs  communiaient  par  les  lîcossais,  c'est-à-dire  parles  Hiber- 
tous  les  dimanches.  cTclui  qui  passait  trois      nois  et  par  les  Bretons  schismatiques,  doi- 


Ctj.ixiirtt 


dimanches  sans  recevoir  la  communion  ('tait 
excommunié.  Il  n'en  était  pas  de  même  chez 
les  Latins  :  on  leur  laissait  la  liberté  de  com- 
munier, et  ceux  qui  ne  communiaient  pas 
n'étaient  pas  pour  cela  excommuniés.  Quoi- 
que les   pénitents   ne   dussent  communier 
qu'après  avoir  accompli  le  temps  de  leur  pé- 
nitence, on  usait  de  miséricorde  envers  eux, 
et  on  leur  permettait  de  communier  au  bout 
d'un  an  ou  de  six  mois.  Les  Grecs  se  ma- 
riaient au  troisième  degré  de  consanguinité; 
les  Latins,  seulement  au  cinquième;  mais  si 
le  mariage  avait   été    contracté,    ne   fût-ce 
qu'au  quatrième,  on  ne  l'annulait  pas.  Les 
nouveaux  mariés  recevaienlla  bénédiction  du 
prêtre  pendant  la  messe.  Ensuite  ils  étaient 
nn  mois  sans  entrer  dans  l'église  ;  puis  ils 
faisaient  quinze  jours  de  pénitence  avant  de 
communier.  .\  la  mort  d'nn  moine,  on  célé- 
brait la  messe  pour  lui  le  jour  de  sa  sépul- 
ture, le  troisième  jour  d'après,  et  autant  de 
fois  que  l'abbé  le  jugeait  à  propos  :  on  of- 
frait aussi  le  sacrifice  pourles  fidèles laiViues, 
et  on  l'accompagnait  de  jeunes. 

o.  Chez  les  Grecs,  le  prêtre  peut  consacrer 
les  vierges  en  leur  donnant  le  voile,  récon- 
cilier un  pénitent,  bénir  l'huile  et  le  clucme 
pour  les  infirmes.  Les  Romains  réservent 
toutes  ces  fonctions  aux  évoques.  On  doit 
avoir  de  la  véui'ralii>n  pour  les  reliques  des 
saints,  et  tenir  tni  cierge  alliuné  devant  leurs 
chasses  pendant  la  nuit,  si  l'église  est  en  état 
de  faire  cette  ch'-pense,  11  ('-tait  permis  aux 
enfants  qui  étaient  dans  les  monastères  de 
manger  de  la  chair  jusqu'à  quatorze  ans. 
L'alibi;  no  pourra  donner  à  un  autro  le  gou- 
vernement de  son  monastère,  ni  se  choisir 
un    successenr  ;  mais,  après    sa    uinrt  ,   la 


vent  être  réhabilités  par  l'imposition  des 
mains,  et  leurs  églises  réconciliées  par  l'as- 
persion de  l'eau  bénite.  On  n'accordera  aux 
Bretons  ni  le  saint  chrême  ,  c'est-à-dire  la 
confirmation,  ni  l'eucharistie,  avant  qu'ils  ne 
se  soient  réunis  à  l'Eglise.  L'usage  de  l'Eglise 
lomaine  est  de  porter  à  l'église  les  corps  des 
moines  on  laïques  vertueux;  après  leur  mort, 
d'oindre  de  chrême  leur  poilriiie;  de  dire  la 
messe,  le  corps  présent;  de  chanter,  quand 
on  les  porte  en  terre  ;  de  faire  sur  eux  des 
prières,  quand  ils  sont  dans  le  tombeau;  de 
les  couvrir  de  terre  ou  de  pierre,  et  de  dire 
des  messes  pour  chaque  défuni,  le  premier, 
le  troisième ,  le  neuvième  et  le  trentième 
jour,  et  à  l'anniversaire. 

6.  Défense,  sous  peine  de  déposition,  à  l'é- 
voque ou  au  prêtre,  de  célébrer  la  Pâque 
avant  l'équinoxe.  Les  évêques  tiendront  cha- 
que année  deux  conciles  :  le  premier,  la  cin- 
quième semaine  après  la  Pentecôte;  le  se- 
cond, au  moisd'octoitre.  L'évèque,  le  prêtre, 
le  diacre  doivent  confesser  leurs  péchés  '.  En 
cas  de  nécessité,  on  peut  se  confesser  à  Dieu 
seul.  Gration,  Biucliard  et  Yves  de  Chartres 
citent  cet  endroit,  mais  en  des  termes  bien 
dillërents  de  l'original  Celui  dont  la  femme 
est  tombée  en  fornication  i)eut  la  répudier  et 
en  épouser  une  autre.  Les  garçons  peuvent 
se  faire  moines  à  quinze  ans;  les  filles  (pii 
sont  sous  la  puissance  de  leurs  parents  ne 
peuvent  s'engager  dans  l'état  religieux  qu'à 
seize  ou  dix-sept  ans. 

7.  Jacques  Petit  a  joint  aux  extraits  du 


'  E;)isro;)ns  ,  preshylcr,  diaconu.<  con/i/cri  rfr- 
bel  peccatuinSHum.  Cnnffusio  Pen  snli,  si  necesie 
cet,  agi  licet. 


Aulrc  r«- 


|U*n  KAU»  ta 
Boni  d«  Tlii-0* 
doiff  du  CoD- 
torUry. 


[vu*  SIÈCLE.]      CIIAIMTUK  I.XXXlll.  —  SAINT 

Pi'iiiti'iiliol  de  Tlitotloio  un  iiiilrc  irciii'il  du 
ciiiinns  (jiii  poi'lo  sou  luun,  cl  pliisioms  aud-ps 
caiiniis  qui  lui  .sont  allrihiu's  datis  une  col- 
loction  dos  conciles  d'Esjjagnc,  dans  les  Pc- 
nitcntieisd'Kùhort  d'York,  cl  de  Bède  ;  dans 
le  l'ouiteiitiol  romain  e(  dans  celui  de  l{ai);'.n, 
jiar  Yves  de  Charlres,  jiar  Gratien  cl  quel- 
ques autres,  dont  les  tëmoiguages  en  C(!  gen- 
re ne  sont  pas  toujours  digues  de  foi.  Il  y  a 
joint  encore  une  ancienne  coni|iilation  de 
canons  et  divers  monuments  sur  les  rits  de 
ri'.glise,  principalement  sm-  la  pénitence, 
avec  deux  dissertations,  l'une  sur  la  visilan- 


l'MtUCTUEUX,  ADAMNAN,  KTC.  V.)<.\ 

ce  pastorale,  l'aulre  sur  la  jienitence,  ou  il 
enircprend  de  montrer  ipuî,  dans  liss  pre- 
miers siècles  d(;  rK;^lise,  il  n'y  avait  point  de 
pénitences  réglées  pour  les  péchés  cachés. 
Son  onvraf^e,  qui  est  en  deux  volumes  in-'i", 
a  été  imprimé  à  l'aris  en  1077,  chez  Desal- 
lier, sous  le  titre  de  P<}nilentiel  de  Tliùodore. 
[L'édition  de  Jacques  Petit  ail  i'  éimprimée 
eu  partie  dans  le  tome  XCIX,  col.  !)02.  Plu- 
sieurs mnnuiuenls  qu'elle  conicnait  sont 
i-envoyés  .■'i  d'anties  volumes,  selon  l'ordre 
chronologique;  il  y  en  ;i  du  x''  el  du  xi"  siè- 
cle. I 


CHAPITRE  lAXXIll 


Saint  FructQcux,  archevêqoe  de  Brague  [vers  l'an  566]  ;  Adamnan,  abbé  de  Hil 

|704  on  705],  Arcnlfe  évêqne  Ganlois  [vers  le  même  tomps],  Céolfrid3, 

abbé  de  Wiremonthet  deJaron  [769]. 


tÉi.rivains   latins.; 


1.  Saint  Fructueux,  né  du  saug  royal  des 
Goths,  était  fds  d'tui  général  d'armée  qui 
faisait  sa  demei.ri,  ordinaire  an  territoire  de 
Vierze,  entre  Ls  montagnes  de  Léon  et  de 
Galice'.  Après  la  mort  de  ses  parents,  il 
reçut  la  tonsuie  de  Conantins,  évêque  de 
Palencia  ;  et  dans  le  désir  de  la  perfection 

Iévangélique,  il  donna  son  bien  aux  églises, 
aux  pauvres  et  à  ses  esclaves,  à  qui  il  ac- 
corda aussi  la  liberté.  Mais  il  en  employa  la 
meilleure  partie  à  fonder  le  monastère  de 
Complnte,  où  il  assembla  une  communauté 
nombreuse.  Fatigué  des  visites  que  sa  répu- 
tation lui  attiiait,  il  alla  se  cacher  dans  la 
solitude.  Ses  disciples  l'en  tirèrent  par  une 
sainte  violence  ;  mais  il  les  quitta  quelque 
temps  après  pour  aller  fonder  d'autres  mo- 
nastères. 11  y  vint  tant  de  moines,  que  le 
gouverneur  de  la  province  s'en  plaignit  au 
roi,  dans  la  crainte  qu'il  ne  demeurât  plus 
personne  pour  les  armées  et  pour  le  service 
de  l'i:tat. 
t-,e"Jiev«.  2.  Il  pensait  au  voyage  de  la  Terre-Sainte, 
rté'vêq'iè'  'de  lorsuue  le  rni,  qui  en  avait  été  averti  par  un 
"*"''  religieux,  le  fit  arrêter,  afin  de  le  retenir  en 
Espag)ie.  Il  fut  ordonné  évèque  de  Dnme,  et 
transféré  en  656  à  l'archevêché  de  Brague, 


qui  était  vacant  i)ar  la  démission  volontaire 
de  Potamius.  En  changeant  d'étal ,  il  ne 
changea  ni  sa  manière  de  vivre,  ni  l'habit 
monastique.  Il  bâtit  l'abbaye  de  Montel  entre 
Dume  et  Brague,  et  y  choisit  sa  sépulture. 
L'année  de  sa  mort  n'est  pas  certaine  ;  mais 
elle  arriva  avant  l'an  G73,  puisqu'en  cette* 
année  Léodécisius,  archevêque  de  Brague, 
souscrivit  au  troisième  concile  qui  se  tint  en 
cette  ville.  Saint  Fructueux  avait  assisté  an 
dixième  concile  de  Tolède,  en  GoG. 

3.  Dans  le  Code  des  Règles,  il  s'en  trouve 
deux  de  saint  Fructueux  :  l'une  composée  de 
vingt-cinq  chapitres,  qui  est  pour  des  moi- 
nes ;  l'antre,  qui  n'en  contient  que  vingt,  est 
appelée  la  Règle  commune^,  parce  que  le 
saint  la  composa  pour  des  communautés 
d'hommes  et  de  femmes  ,  particulièrement 
pour  les  maisons  qui  servaient  de  retraites, 
ou  à  des  pères  qui  s'y  retiraient  avec  leurs 
tlls,  ou  l'i  des  mères  qui  y  venaient  avec  leurs 
filles,  pour  vivre  sous  sa  discipline.  La  pre- 
mière a  beaucoup  de  rapport  avec  celle  de 
saint  Benoit;  elle  a  toutefois  plusieurs  statuts 
particuliers.  On  lit  dans  le  vingtième  capi- 
tule ,  que  les  religieux  tiendiont  chapitre 
trois  fois  la  semaine,  et  qu'outre  l'exborla- 


Bègle  do  S. 
Frucluenx. 


'  Tom.  Il  Act.  Ordin.  S.  Dened.,  pa;;.  .SST. 


»  Cofl.  Hegul.,  pari.  2,  pag.  132,  U7. 


800 


HISTOIRE  Gli-NÉKALE  DES 


lion  du  supérieur,  ils  entendront  la  lecture 
des  règles  des  saints  Pères.  Cela  n'est  point 
dans  la  Règle  de  saint  Benoit.  Le  dixième 
cai>il\ile  de  la  Règle  commune,  porte  que  les 
abbés  des  monastères  voisins  s'assembleront 
en  un  même  lieu  au  commencement  de  cha- 
que mois,  pour  faire  des  prières,  et  conférer 
entre  eux  des  devoirs  de  leurs  charges.  Saint 
Fructueux,  voulant  empêcher  que  le  relâ- 
chement ne  s'introduisit  parmi  ses  disciples, 
leur  défend  d'avoir  aucun  commerce  avec 
les  faux  monastères.  Sous  ce  nom,  il  enten- 
dait ceux  que  des  particuliers  érigeaient  de 
leur  autorité  sur  leurs  propres  fonds  ',  où 
ils  vivaient  avec  leurs  femmes,  leurs  enfants, 
leurs  serfs,  leurs  voisins,  en  société,  mais 
sans  règle  et  sans  supérieur;  s'ils  en  avaient 
un,  il  ne  l'était  que  de  nom.  11  y  avait  d'au- 
tres faux  monastères,  fondés  par  des  prêtres, 
dans  le  désir  qu'avaient  ces  derniers  de  pas- 
ser pour  vertueux,  ou  par  la  crainte  de  per- 
dre leurs  dîmes  et  leurs  autres  profits, 
croj'ant  se  les  assurer  par  ces  établissements, 
qui  étaient  du  goût  des  peuples.  Pour  grossir 
leur  communauté,  ils  y  recevaient  indill'é- 
remment  tous  ceux  qui  se  présentaient.  Le 
défaut  de  discipline  et  d'observance  rendait 
non-seulement  ces  assemblées  indignes  du 
nom  de  monastère  ;  elles  étaient  encore  con- 
traires aux  anciens  règlements  de  l'Église 
d'Espagne,  dont  on  cite  un  décret  qui  porte 
défense  de  tenir  pour  vrais  monastères  ceux 
qui  n'auront  pas  été  bâtis  par  la  permission 
de  l'évêque  diocésain*,  et  où  il  n'aura  pas 
établi  la  règle.  Au  reste  ,  quoique  saint 
Fructueux  reçut  des  hommes  et  des  femmes 
dans  les  siens,  les  pères  avec  leurs  enfants, 
les  mères  avec  leurs  filles,  tous  n'étaient  pas 
ensemble  dans  un  même  monastère'.  Les 
hommes  étaient  seuls,  et  les  femmes  seules. 
Il  y  avait  même  pour  chaque  sexe  un  oratoire 
particulier.  C  est  ce  que  l'on  voit  dans  les 
sixième  et  quinzième  capitules  de  la  Règle 
commune.  [Le  tome  LXXXVIl  reproduit  une 
nolice  sur  saint  Fructueux,  d'après  Antoine, 
Dibliolli.  vet.  I/isjj.,  col.  1087;  la  Règle  des 
moines,  et  la  Règle  monasli(iue  coiumtuie , 
d'après  Brockies,  Cod.  Regularnm.  La  lettre 
à  Braulion  se  trouve  au  tome  LXXX  de  la 
Palrolugie  latine,  col.   690.    Dans   le  tome 


AUTEURS  ECCLliSIASTlQUES. 

LXXXVII,  on  trouve  des  vçre  attribués  par 
quelques-uns  à  saint  Fructueux  et  qui  pa- 
raissent plutôt  composés  à  sa  louange  que 
par  lui  ;  ils  sont  reproduits  d'après  Florez, 
Espagna  sngrada.] 

A.  Adamnam,  successeur  de  Failbeus  dans 
le  gouvernement  de  l'abbaye  de  Hi,  vers  l'an 
664,  ayant  été  député  de  la  part  de  sa  na- 
tion, c'est-à-dire  des  Ilibernois,  vers  Alfrid, 
roi  de  Northuuibre  ',  eut  occasion,  pendant 
le  séjour  qu'il  fil  dans  ce  royaume,  d'obser- 
ver les  pratiques  de  l'Église  anglicane,  qui 
étaient  celles  de  l'Église  universelle.  Elles 
étaient  dilférpntes  de  celles  des  Hibernois, 
surtout  h  l'égard  de  la  Pâque.  Mais,  quoi- 
qu'Adamnan  se  fût  conformé  en  ce  point  à  l'u- 
sage de  l'Église  romaine,  il  conservait  la  ton- 
sure que  les  clercs  d'IIibernie  avaient  coutu- 
me de  porter.  Etant  donc  allé  rendre  visite  à 
Céolfrid,  abbé  de  Wiremoulh,  celui-ci  lui  de- 
manda pourquoi,  prétendant  à  la  couronne 
immortelle,  il  en  portait  une  imparfaite  à  sa 
tète.  «  Si  vous  cherchez,  Jijouta-t-il,  la  com- 
pagnie de  saint  Pierre,  comment  imitez -vous 
la  tonsure  de  celui  qu'il  a  anaihémalisé'/  » 
Les  Romains,  et  les  .\nglais  à  leur  imitation, 
portaient  une  couronne  de  cheveux  avec  la 
tète  rase  au-dessus.  Adamnan  répondit  : 
(I  Encore  que  je  porte  la  tonsure  de  Simon, 
j'en  déteste  les  erreurs.  »  Il  se  rendit  néan- 
moins aux  avis  de  Céolfride.  De  retour  a  son 
monastère,  il  voulut  engager  les  moines  à 
changer  leurs  anciens  usages  ;  mais  ses  ef- 
forts furent  inutiles.  Il  fut  plus  heureux  à  l'é- 
gard de  ceux  d'Ii lande  :  presque  tous  se  con- 
formèrent à  ce  qu'il  exigea  d'eux.  Il  réitéra 
ses  instances  auprès  de  ses  moines,  et  elles 
n'eurent  aucun  succès.  Il  mourut  le  vingt- 
troisième  (le  septembre  de  l'an  704  ou  705, 
âgé  de  80  ou  84  ans. 

5.  On  a  imprimé  sous  son  nom  â  Ingol- 
stad,  en  1610.  une  description  de  la  Terre- 
Sainte.  Le  Père  Grelzer  a  donné  cet  ouvrage 
sur  un  manuscrit  de  la  Bibliothèque  Barbe- 
rine  ;  et  Dom  Mabillou,  après  l'avoir  revu  sur 
un  manuscrit  du  Vatican  et  un  autre  de  Cor- 
bie,  !'a  inséré  dans  le  quatrième  tome  des 
Acles  de  l'Ordre  de  Saint-Iienoit  '.  Quoique 
celte  description  ait  été  rédigée  par  Adam- 
nan, on  peut  en  faire  honneur  à  Arculphe, 


Sofrrili, 

àt  I»  Tcrie- 
Silmc. 


«  Fruotuosu»,  Regul.  commun.,  caj).  I. 
«  Concil.  Ilerdens.,  an.  52V,  apud  Gratian.,  10 
guœst.,  1.  Si  ex  Lnicis. 
»  mhWioB.,  Prolog. ,inVil.  S.  Frucluosi,  loin.  Il 


Acl.  Ordin.  S.  BeneJ.,  pag.  556.  —   '  Beda,  lih.  V 
nisl..  <a|i.  XVI  et  xxrr. 

»  Tnin.  IV  Àct.  Ordin.  S.  Ueneii..  pag.  J.'iO;  DcJn, 
lib.  V  Hisl.,  cap.  xvi,  xvii,  xviii,  xix. 


rVII"  SIKCLE. 


CHAFITRE  LXXXIII.  —  ADAMNAN  ABDÉ. 


r.j  qu'il  ï 
I  de  1  lus  re- 
niarquable 
àttoi  cet  ou- 
vrage. Livre 
premier,  pag. 
456< 


porto  le  vëiK'rablc  Jtètlo,  dicta  j'i  cet  aljl)6 
ton!  ce  q>ii  est  coiiliMiii  dans  col  écrit  ';  en 
sorte  ([u'Adamnan  n'y  eut  d'autre  part  que 
colle  d'un  secrétaire  qui  lUiit  sous  la  diction 
d'un  autre.  Arciiife,  dont  l'histoire  ne  mar- 
que point  le  siéjjfc  ('piscopal, ayant  cnli'cpris 
le  voyafje  de  la  Tcri-e-Sainlc,  se  mil  en  clie- 
niin  avec  un  ermite  originaire  de  Bourgogne, 
nommé  /'/V/w.  qui  avait  d(''jà,  ce  semble,  vi- 
sité les  Saints-Lieux.  Ils  fiuenl  pemlant  neuf 
mois  tant  ù  Jérusalem  que  dans  les  environs, 
après  quoi  ils  parcoururent  le  reste  de  la  Pa- 
lestine, et  poussèrent  jusqu'à  Dumas  el  à 
Tyr,  ne  demeurant  que  tiés-pcu  de  temps 
en  chaque  endroit-.  Arculfc,  s'étani  embar- 
qué i\  Joppé,  passa  ù  Alexandrie  ',  de  lc\  k 
l'ilc  de  Crète,  puis  h  Constantinople,  d'où  il 
\iut  par  mer  en  Sicile,  ensuite  à  Rome.  Il  y 
séjourna  quelque  temps;  puis  il  reprit  la  mer 
dans  le  dessein  de  retourner  en  France. 
Mais  au  lieu  d'y  aborder,  il  fut  jeté  par  une 
tempête  sur  les  eûtes  occidentales  de  la  Bre- 
tagne, d'où,  après  avoir  essuyé  plusieurs 
dangers,  il  aborda  à  l'île  de  Hi,  où  était  le 
monastère  d'Adamnan.  Cet  abbé  le  reçut 
avec  politesse  ;  et  l'ayant  engagé  à  lui  racon- 
ter ce  qu'il  avait  vu  de  plus  remarquable 
dans  ses  voyages,  il  le  n.it  par  écrit,  et  com- 
posa de  cette  sorte  l'ouvrage  dont  nous  par- 
lons, qu'il  présenta  ensuiie  à  Alfrid,  roi  de 
Norlhumbre.  Ce  fut  au  plus  tard  en  705, 
puisque  ce  prince  mourut  en  cette  année, 
après  un  règne  d'environ  vingt  ans  '. 

G.  Bède,  qui  faisait  beaucoup  de  cas  de 
celte  description,  en  a  donné  un  précis  dans 
sou  Hisloire  ecclésiastique  d'Angleterre,  et  il 
en  a  fait  le  fonds  de  sou  traité  des  Lieux 
saints  '".  Elle  est  divisée  en  trois  livres.  Ad:im- 
nan  parle  dans  le  premier  de  la  situation  de 
la  ville  de  Jérusalem  %  de  l'église  du  Saint- 
Sépulcre,  de  celle  de  la  Sainte-Vierge  dans' 
la  vallée  de  Josaphat,  où  il  dit  que  l'on  voyait 
son  tombeau,  mais  qu'on  ne  savait  en  quel 
temps,  par  qui,  ni  comment  sou  corps  en 
avait  été  enlevé,  ni  en  quel  lieu  il  attendait  la 
résurrection.  Selon  Adamnan,  auprès  de  la 
basilique  du  Calvaire  il  y  a  une  cbambre,  ou 
cabinet,  où  l'on  permet  aux  pèlerins  de  tou- 
cher et  de  baiser  le  calice  que  Jésus-Cluist 
bénit  le  jour  de  la  Cène,  et  qu'il  donna  a  ses 
disciples;  ce  calice  est  d'argent  et  a  deux 


80t 

anses;  il  lient  environ  un  setier  ou  uneclio- 
pine,  mesuie  de  France;  au  dedans  est  l'é- 
ponge que  l'on  trempa  dans  le  vinaigre  pour 
en  faire  boire  an  Sauveur  sur  la  croix;  la 
lance  tlonl  on  perça  son  côté  se  conserve 
dans  le  porti(iue  de  la  basilique  de  Constan- 
tin ;  l'on  montre  aussi  le  suaire  dont  on 
couviil  la  lôte  de  Jésus-Clirisl,  lorsqu'on  In 
mit  dans  le  tombeau.  Arcull'o  avait  vu  tout 
cela  de  ses  yeux.  H  vit  encore  un  linge  que 
l'on  disait  avoir  été  travaillé  par  la  Sainte- 
Vierge,  et  sur  lequel  on  voyait  les  figures 
des  douze  apôtres  et  celle  de  Jésus-Christ. 
Une  partie  de  ce  linge  était  de  couleur  ronge, 
l'autre  verte.  On  montrait  i\  Jérusalem  les 
tombeaux  de  saint  Siméon,  et  de  saint  Jo- 
seph époux  de  la  Sainte-Vierge;  il  y  avait 
siu'  la  montagne  des  Oliviers  une  église  d'unie 
figure  ronde,  dont  le  milieu  était  ouvert  par 
le  haut.  On  l'avait  faite  ainsi,  pour  laisser  à 
la  postérili;  le  souvenir  de  la  route  que  Jé- 
sus-Christ avait  prise  en  montant  au  ciel. 
L'impression  de  ses  pieds  subsistait  encore  ; 
et  quoiqu'on  eut  tenté  souvent  de  paver  cet 
endroit  comme  le  reste  de  l'église,  on  n'y 
avait  pas  réussi.  Adamnan  parle  d'un  mo- 
nastère bâti  auprès  du  tombeau  de  Lazare 
frère  de  Marthe. 

7.  On  trouve  dans  le  second  livre  la  des- 
cription de  la  ville  de  Nazareth,  de  la  grotte 
où  le  Fils  de  Dieu  a  pris  naissance  selon  la 
chair,  des  sépulcres  de  David ,  de  saint  Jé- 
rôme, et  de  quelques  autres  anciens  monu- 
ments. Il  y  est  aussi  parlé  du  Jourdain,  el 
de  l'endroit  où  Jésus-Christ  reçut  le  baptôme 
de  saint  Jean.  A  cette  occasion,  Adamnan 
remarque  que,  dans  le  désert  où  le  Précur- 
seur vivait,  il  y  avait  des  sauterelles  dont 
les  pauvres  se  nourrissaient  en  les  faisant 
cuire  avec  de  l'huile,  et  des  arbres  dont  les 
feuilles  larges  et  longues  avaient  la  couleur 
de  lait  el  le  goût  de  miel  ;  et  c'est,  ajoute-t-il, 
ce  qui  est  appelé  miel  sauvage  dans  l'Évan- 
gile. 

8.  Adamnan,  pour  donner  du  poids  à  ce 
qu'Arculfe  lui  raconta  de  Tyr  et  de  la  mon- 
tagne du  Thabor,  dit  qu'il  s'accorde  avec  ce 
que  saint  Jérôme  en  a  écrit  dans  ses  Com- 
mentaires ;  et  après  avoir  parlé  d'Alex;mdrie 
et  de  ce  que  celte  ville  a  de  plus  remarqua- 
ble ,  particulièrement  de  son  port  et  du  tom- 


l'-S.lS». 


Livre  fp- 
eond.        pf. 


4e;,<GC. 


Livre  troi- 
sième, p.  ;7j. 


'  Beila,  lib.  V  Hisl.,  cap.  xvi. 

'  Lib.  II  de  Locis  sanclis,  caj).  xxvu. 

'  Ibid.,  cap.  XXX. 


XI. 


'•  Beila,  lib.  V,  cap.  xix. 

»  Id.,  toQj.  m  Op.,  pag.  3C3. 

0  Tom.  IV  Act.  Ordin.  S.  Bened.,  pag.  i3G. 

51 


802 


HISTOmE  GENERALE  DES 


l)eau  de  saint  Marc,  il  commence  son  troi- 
sième livre  par  la  description  de  Constanti- 
nople.  Ou  gardait  dans  une  église  de  celle 
ville  la  vraie  Croix,  et  on  la  monirail  seule- 
ment trois  jours  de  la  semaine  sainte,  élevée 

co.  471  5j,r  ,111  autel  d'or.  Le  jour  de  la  Cène  du  Sei- 
gneur, l'empereur,  suivi  de  l'armée  ,  enirait 
dans  celle  églire  qu'on  appelait  la  Rofonde, 
s'approchait  de  l'aulel  et  baisait  la  croi.\  sa- 
lutaire, le  visage  baissé,  .\iircs  lui ,  fous  les 
assistants  le  faisaient  aussi,  chacun  en  son 
rang,  suivant  l'âge  et  la  condition.  Le  ven- 
dredi-saint, la  reine  et  les  princesses,  les 
dames  de  qualité,  les  femmes  du  commun 
faisaient  ja  même  cérémonie ,  et  dans  le 
même  ordre.  Le  Siftnedi  était  réservé  aux 
cvêques  et  à  tout  le  clergé.  .\près  que  tous 
avaient  baisé  la  croi.K,  on  la  renfermait, jus- 
qu'à l'année  suivante,  .\rculfe  assure  que, 
quand  on  couvrait  la  boite  où  elle  était  en- 
fermée, il  en  sortait  une  odeur  admirable. 
H  parle  de  deux  hommes  de  la  lie  du  peu- 
ple, dont  un  élait  juif,  qui  furent  punis  mi- 
raculeusement pour  avoir  insulte  l'image  de 
la  Sainte-Vierge,  et  une  statue  de  marbre 
qui  loprésontait  sainl  George  martyr.  Kn  ap- 
prochant de  la  Sicile,  il  vit  les  feux  que  jette 
le  mont  Vulcaiu  ;  et  quoiqu'il  soit  éloigné 
de  douze  milles  de  la  Sicile  ,  il  assure  qu'on 
y  entendait  cette  montagne  gronder  avec 
autant  de  force  que  le  tonnerre  ,  surtout  les 
jours  de  vendi  edi  et  de  samedi. 

vîfdeî.ini  9.  Avant  Adamnan,  un  ancien,  nommé 
Cuinnencus  Alùus  avait  écrit  la  vie  de  saint 
Colomba  ,  l'un  des  apôtres  des  Pietés  ou 
Écossais,  fondateur  et  premier  abbé  de  Hi , 
mort  vers  l'an  598.  Adamnan ,  voyant  que 
cet  auteur  avait  passé  sous  silence  plusieurs 
faits  remarqiuibles,  en  entreprit  une  nou- 
velle qu'il  distribua  en  trois  livres.  Il  prévient 
ses  lecteurs  en  disant  qu'il  n'avancera  rien 
de  douteux  ni  d'inceilain,  et  qu'il  ne  rap- 
portera que  ce  qu'il  auni  appris  de  gens  di- 
gnes de  foi,  ou  que  ce  que  d'autres  avaient 
laissé  par  écrit.  I)om  Mabillon  a  donné  cette 
Vie  dans  le  juemier  tome  des  Actes  de  l'or- 
dre de  Saint-Benoit  :  mais  elle  est  beaucoup 
plus  courte  que  celle  que  nous  avons  parmi 
\cs^  Anciennes  leçons  de  Canisins.  Il  y  a  d.ms 
celle-ci  deux  préfaces  qui  ne  se  trouvent  pas 
dans  l'autie  ;  mais  on  y  lit  ce  qu'Adamnan 
en  cite  sous  le  nom  de  Cumneneus'.  Ce  qui 


ALTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

fait  voir  que  celle  que  Dom  .Mabillon  a  dou- 
née  est  celle  que  Cumneneus  composa*  et 
que  l'autre,  qui  est  imprimée  dans  le  recueil 
de  Canisius,  a  élé  écrite  par.\damnan.  Elles 
sont  l'une  et  l'anlre  remplies  d'événements 
miraculeux.  On  attribue  .t  Cumneneus  la  let- 
tre à  Séfiiénusabbô  de  Hi.  qui  est  la  onzième 
parmi  les  Hibernoises  dans  le  recueil  d'Us- 
sérius.  [Le  tome  L.X.XXVllI  de  la  Patrolcgie 
latine,  col.  721,  reproduit  d'après  Cave  et 
Fabricius  des  notices  sur  saint  Arculfe  et 
saint  Adamnan  ;  des  observations  de  Rasnagc 
sur  ce  dernier  ;  des  témoignages  du  marty- 
rologe. Viennent  ensuite  la  Vie  de  saint  Co- 
lomba et  les  Saints-Lieux,  d'après  Dom  Ma- 
billon. Il  y  a  dans  le  texte  quelques  gravures 
en  bois.  Huit  canons  attribués  à  saint  Adam- 
nan sont  ensuite  reproduits  d'après  Mans!, 
Conc.,  tome  XII,  pag.  loi.  Les  sept  premiers 
canons  sont  sur  les  animaux  qu'on  doit  évi- 
ter de  manger.] 

10.  Céolfride,  qui,  ainsi  qu'on  l'a  dit  plus  ,t,(,;.''jj"'v;' 
haut,  engagea  Adamnan  à  se  conformer  aux  ",;';''„''"""' 
usages  dé  l'Église  romaine  touchant  la  célé- 
bration de  la  Pâque'  et  la  tonsure  cléricale, 
s'élait  instruit  lui-même  de  ces  pratiques  et 
de  beaucoup  d'autres,  dans  un  voyage  qu'il 
fit  à  Rome  avec  saint  Benoit  Biscop,  dont  il 
était  disciple.  Ce  saint  étant  mort  vers  l'an 
G'JO,  Céolfride  fut  clioisi  pour  lui  succéder 
dans  le  gouvernement  des  deux  monastères 
que  sainl  Benoit  Biscop  avait  fondés  par  la 
libéralité  du  roiEgfride.  L'un  se  nommait  H7- 
remoulli,  à  cause  qu'il  était  bâti  à  l'embou- 
chure de  la  rivière  de  Wire  ;  et  l'autre,  Girvc 
ou  Juron,  à  deux  lieues  de  'NViremouth.  Le 
premier  élait  sous  l'invocatinn  de  saint  Pierre; 
le  second  sous  celle  de  saint  Paul.  Les  églises 
étaient  de  pierre,  et  voûtées  à  la  romaine. 
Comme  il  n'y  avait  point  de  verreries  dans 
la  Bielagne,  saint  Benoit  Riscop  fit  venir  des 
veriiers  detiaule.et  mit  d.'s  vitres  aux  fenê- 
tres des  églises  et  des  bâtiments  de  ces  ileux 
monastères.  Il  y  forma  aussi  une  bibliothè- 
que avec  les  livres  qu'il  avait  rapportés  de 
Rome,  orna  les  églises  de  plusieurs  images 
de  saints,  cl  y  mit  quantité  de  reliques. 
Céolfride,  devenu  abbé  de  ces  deux  monas- 
tères, en  accrut  les  revenus,  bâiil  plusieurs 
oraloires,  les  pourvut  d'ornements  et  de  va- 
ses sacrés.  Il  s'appliqua  parliculièrcmcnt  à 
augmenter  la  bibliolhôque  que  son  prédé- 


'  t.ih.  lit,  nnm   ."i,  pag.  TCO,  tom.  I  Lection.  Ca- 

Ht»I«. 


=  Vila  S.  DenedicU  Hiscop.,  t.un.  Il  Act.  OrdÎH. 
S.  Bcned.,  p,ig.  06 1  et  seq. 


CHAPITRE  LXXXIU.  —  Cl^OLFUIDE,  ABBÉ. 


I  I«l  ttIV 


Ivn»  SIÈCLE.] 

tcssçur   avait  coinruencée.    On    remarque 
qu'il  y  mit  entre  aulrcs  trois  Bibles  de  la  ver- 
sion (In  saint  Jérôme,  qu'il  avait  eues  à  Ho- 
me, et  un  livre  tic  cosmograiiliie,  d'un  ou- 
vra;:;e  merveilleux.  11  obtint  du  ffape  Sergius 
un  privili-ge  pour  conserver  la  liberté  de  ses 
nionastèi-es.  semblable  a  celui  que  saint  Be- 
noit Biscop  avait  obtenu  du  pape  Açrallion, 
et  eut  soin  de  le  faire  confirmer  dans  un  con- 
cile par  les  souscriptions  des  évoques  et  du 
roi  .Mfrèdc  '.   On  voit  par  un  frat;nient  du 
rescril  de  Sergius  i'i  GéiiHrido',  que  ce  [)ape 
le  chargea  d'envoyer  à  Rome  le  prêtre  Bédc 
pour  assister  à  la  discussion  de  certaines  af- 
faires ecclésiastiques,  circonstance  que  Bède 
n'a  point  rapportée,  par  modestie.  On  ne  lit 
nulle  part  que  Sergius  ait  invité  Géolfridc  à 
ftiire  ce  voyage  avec  Bède.  Il  se  mit  toute- 
fois en  cliemin,  aiirés  avoir  f^it  clioisir  à  sa 
place  un  autre  abb(!  nommé  Iluvolbcrth.  Mais 
fatigué  du  voyage,  attaqué  d'une  maladie  par 
suite  de  son  grand  âge,  il  mourut  h  Lan- 
gres  le  23  septembre  de  l'an  716,  âgé  de  74 
ans,  après  avoir  gouverné  les  monastères  de 
Wiremoulh  et   de  Jarou   pendant   environ 
vingt-huit  ans.  La  plupart  de  ceux  qui  l'a- 
vaient accompagné  continuèrent  leur  voyage 
de  Rome,  et  rendirent  sans  doute  au  pape 
Gréuoire  11  la  lettre  de  recommandation  que 
Huvelberlli  leur  abbé  leur  avait  donnée',  et 
dans  laquelle  il  recommandait  aussi   Géol- 
fridc en  lui  donnant  de  grands  éloges.  Bède, 
qui  avait  été  son  disciple,  en  parle  comme 
d'un  homme  d'uu  esprit  subtil  et  pénétrant  *, 
prudent,  laborieux,  plein  de  zèle  pour  la  re- 
ligion, industrieux  en  tout,  ferme  dans  le 
maintien  de  la  discipline  régulière,  et  très- 
instruit  des  lettres  divines  et  humaines. 
es.       11.  Ce  fut  à  lui  que  Naïton,  roi  des  Pietés 
ou  Ecossais,  s'adressa  vers  l'an  710,  pour 
qu'il  l'aidât  a  ramener  son  peuple  à  l'obser- 
vance catholique  touchant  la  célébration  de 
la  Pâque  '.  Ce  prince,  instruit  par  la  m('dita- 
tion  fréquente  de  l'Écriture,  avait  déjà  re- 
noncé ;\  l'erreur  qu'il  avait  suivie  sur  ce  su- 
jet ;  mais  il  voulait  obliger  ses  sujets  à  suivre 
son  exemple.  Il  envoya  à  cet  eflet  des  dépu- 


H03 


tés  ;'i  l'abbé  Céolfride,  qui  devaient  aussi  lui 
demander  de   sa  part  des  architectes  pour 
ItMtir  dans  son  pays  une  église  de  pierre  A  la 
manière  des  Romains.  Ci'oll'iide  envoya  des 
arihitoclcs,  et  écrivit  au  roi  une  gr;mde  let- 
tre où  il  p'oiive  qu'il  y  a  trois  choses  sur  la 
Hàque  (ftins  l'Ixiiture,  sur  lesquelles  il  n'est 
point  permis  do  varier,  savoir  :   qu'on  doit 
la  célébrer  le  premier  mois  de'l'année,  la 
troisième  semaine  de  ce  mois,  et  toujours  le 
dimaïuhe.  Il  cite  sur  cela  divers  passages  de 
l'Kcrilurc,  aux((iiels  il  joint  [jlnsicurs  raison- 
nements qui  tendent  à  établir  l'usage  de  l'É- 
glise touchant  la  Pàqne.  Puis  il  rapporte  les 
Cycles  d'Eusèbe  de  Césarée,  de  Théophile 
d'Alexandrii!,  de  saint  Cyrille,  et  celui  de  De- 
nis le  Petit,  qui,  dit-il,  <i  dure  encore  aujour- 
d'hui. »  Venant  ensuite  àla  tonsure  cléricale, 
il  convient  qu'elle  n'était  pas  uniforme  parmi 
les  îipotres;  qu'elle  est  une  chose  iuditl'éientc 
en  elle-même  :  mais  il  ne  laisse  pas  de  sou- 
tenir que  l'on  doit  suivre  en  ce  point  l'exem- 
ple de  saint  Pierre,  qui  portait  une  couronne 
eiilièie,  plutôt  (pie  relui  de  Simon  le  Magi- 
cien, dont  la  couronne  n'était  que  par  de- 
vant. Il  avance  ces  faits  comme  appuyés  par 
une  tradition  constante,  en  lemarquant  que, 
si  l'usage  de  la  couronne  entière  devait  pré-' 
valoir,  ce  n'était  pasà  cause  que  saint  Pierre 
l'avait  portée  ainsi,  mais  parce  qu'il  l'avait 
portée  en  mémoire  de  la  passion  de  Jésus- 
Christ,  à  qui  l'on  mit  sur  la  tête  une  cou- 
ronne entière  d'épines*.  La  Lettre  de  Céol- 
fride ayant  été  lue  eu  présence  du  roi  Na'i- 
ton,  des  seigneurs  de  sa  cour,  et  de  plusieurs 
hommes  doctes,  tous  en  rendiient  grâces  à 
Dieu;  et  il  fut  résolu  que  l'on  se  conforme- 
rait sur  la  Pàque  à  l'usage  de  l'Église  d'An- 
gleterre, qui  était  celui  de  l'Église  romaine; 
qu'à  cet  ell'et  Ion  ferait  des  copies  du  cycle 
pascal  de  dix-neuf  ans,  au  lieu  de  quatre- 
vingt-quatre  ans  ;  et  qu'à  l'égard  de  la  ton- 
sure, tous  les  clercs  du  royaume  la  porte- 
raient entière.  [La  lettre  de  Céolfride  et  le 
décret  du  roi  sur  la  Pâque,  se  trouvent  dans 
le   tome  LXXXIX   de  la  Patrologie   latine, 
col.  349,  avec  une  notice  tirée  de  Fabricius.! 


'  Vila  S.  Bencdicti  Biscop.,  tom.  II  Àctor.  Ord. 
S.  Btneclicli,  pa?.  0C9 

»  lUiil.,  in  luitis,  et  Wilclra.  Malmeburiei  s.,  lib.  I 
de  Regib.  Angl.,  cap,  m. 


5  Tom.  II  Act.  Ordin.  S.  Bened.,  pag.  970. 
»  Ibiil.,  lag.  9fi9. 

6  Toui.   y\    Concil.,   pag.    1422,   et  BecJa,  lib.  V 
UisLor.,  (^ip.  XXII. 


I 


804 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


6f  sa  ut  AdeU 
n".  <e«  t'c- 
r.'-,  i;  tM  fait 
il)4  At  Mtl- 
nieît.ufT.f.iils 
(x^qiie        de 

S-h;rluro    CD 


iifl    !c6    Bre- 


CHAPITKE  LXXXIV. 

Saint  Adelmc  'ou  Adhelme,  on  encore  Althelms,  Aldîiclme]  évêqnc  de  Schir- 
bnrn  [709],  Apponins  |  dans  Je  V  V  on  VU''  siècle  |,  Cresconins  évêqne  d'A- 
frique [dans  le  VU"  sièole,  Ions  écrivains  latins],  Démétrins 
de  Cyziqne,  Jean  de  Nicée  [snr  la  fin  du  VIP  siècle, 
écrivains  grecs  ;  saint   Lucins  archidiacre , 
écrivain  latm  dn  VI'  on  VII'  siècle  ] 


1.  Ua.dc  ceux  qui  cultivèrenl  le  plus  les 
sciences  en  Augleltrre  daus  le  septième  siè- 
cle, fut  saint  Adelme  '.  On  le  compte  même 
pour  le  premier  des  Anglais  qui  s'appliqua 
à  la  poésie  latine.  Il  était  d'une  famille  no- 
ble du  royaume  d'Ouesses  ou  des  Saxons  oc- 
cidentaux. Ses  parenlsle  mirent,  étant  encore 
jeune,  dans  l'aLbave  de  Sainl-.\ugustin  de 
Cantorbéry,  oîi  il  apprit  les  langues  grecque 
et  latine.  De  reloin-  en  son  pays,  il  se  fit  moine 
dans  le  monastère  de  Malmesbury.  Mais 
après  y  avoir  étudié  quelque  temps  les  ?.rls 
libéraux,  il  retourna  à  Cantoibéry,  dans  le 
dessein  de  se  perfectionner  sous  Adrien  qui 
en  était  abbé.  Le  dérangement  de  sa  santé 
l'obligea  de  revenir  à  Malmesbury.  Leulher, 
évoque  d'Ouessex,  l'ordonna  prêtre,  puis 
abbé  de  ce  monastère  à  la  prière  des  autres 
abbés  de  sou  diocèse.  Il  en  fut  tiré  pour  être 
fait  évoque  à  la  mort*de  saint  Ueddi,évèque 
de  Worcbesler  :  car  alors  on  partagea  ce 
diocèse  en  deux ,  Vincbeslre  et  Scliirburn 
[depuis  Salisburi.j  Le  premier  fut  rempli  par 
Daniel;  le  second,  par  saint  .\delme.  C'était 
en  705.  Il  n'occupa  ce  siège  que  quatre  ans, 
étant  mort  le  23  mai  709.  Canisius  prolonge 
son  épiscopat  jusqu'en  710. 

2.  Pendant  qu'il  était  abbé  de  Malmesbury, 
un  concile  tenu  dans  le  royaume  des  Mer- 
cicns  le  chargea  d'écrire  contre  les  erreurs 
des  Bretons,  qui  continuaient  à  célébrer  la 
Pàque  suivant  leur  ancien  usage  ',  et  qui 
avaient  diverses  pratiques  contraires  au  bien 
de  1^  paix  et  de  la  concorde.  Son  ouvrage 
eut  du  succès  :  il  ramena  plusieurs  Bretons 
à  l'observance  légitime  de  la  Pàque.  Adelme 
l'avait  adressé  au  roi  Gérouce  et  au  clergé  de 
Domnonie,  qui  faisait  partie  du  royaume  des 

'  Tum.  m  Act.  Ordinis  S.  Benedicli,  pag.  220,  et 
Boiln,  lib.  V  Hist.,  inp.  xix. 

'  lio.i.i,  ihi'l.,  loin.  Xlll  Hibl.Pat.,i.tifi.H(i.  {.Episl. 
S.  Auiielini,  iï  inler  Epist.  S.  Vonifacii.] 


Saxons  occidentaux.  Ferrarius  en  a  fait  la 
quarante-quatrième  Lettre  de  celles  qu'il  a 
fait  imprimer  sous  le  nom  de  saint  Boniface 
de  .Maycnce.  Il  parait  par  le  commf^ncemcnt 
de  ce  traité,  que  saint  Adolrae  était  présent 
au  concile,  qui  le  chargea  de  l'écrire.  II  y  in- 
siste sur  la  nécessité  de  se  conformer  au  rè- 
glemenl  du  concile  de  Nicée  sur  la  Pàque,  et 
à  l'usage  de  l'I-^glise  romaine  sur  la  forme  de 
la  tonsure  cléiicale.  II  cite  les  cycles  d'Ana- 
tolius,  de  Sulpice  Sévère  et  deVictorius. 

3.  Son  traité  de  la  Virginité  est  dédié  à 
l'abbesse  Maxime  '.  Il  est  écrit  en  vers  et  en 
prose,  il  l'imitation  de  Sédulius,  qui  écrivit 
en  ces  deux  manières  sur  le  mystère  de  la 
Pàque.  La  matière  des  vers  de  saint  .\delme 
est  la  même  que  celle  de  sa  prose.  Ce  sont 
les  mêmes  preuves,  les  mêmes  exemples,  les 
mêmes  autorités.  Mais  il  est  plus  diffus  dans 
sa  prose;  et  ce  n'est  plus  à  Maxime  qu'il 
l'adresse,  c'est  à  Hyidilicba,  supérieure  d'un 
monastère,  et  à  plusieurs  autres  vierges  dé- 
nommées dans  l'insciiplion  du  livre,  qui  est 
divisé  en  trente  chapitres.  Il  relève  les  avan- 
tages de  la  virginité  sans  blâmer  le  mariage, 
et  fait  l'éloge  de  ceux  et  de  celles  qui  sous 
l'un  et  l'autre  Testament  ont  vécu  vierges.  Il 
confond,  par  une  eireur  coi::mune  aux  Grecs, 
saint  Cyprien  qui,  après  avoir  renoncé  à  la 
magie,  se  fit  chréticu  et  souÛVit  le  martyre, 
avec  l'évêque  de  Carlhage.  Parlant  de  sainte 
Agnès,  il  suit  ce  qui  est  dit  de  la  sainte  dans 
les  faux  '  actes  de  son  martyre.  Il  fait  l'éloge 
de  saint  Benoît  et  de  sainte  Scholastique  sa 
sœur,  sur  ce  qu'il  en  avait  lu  dans  les  Dialo- 
gues de  saint  Grégoire;  mais  il  ne  dit  rien 
des  autres  Pères  d'Occident  qui  ont  écrit  des 
Règles  pour  les  moines  et  pour  les  religieu- 

»  Tom.  Xlll  Dibl.  Pat.,  png.  1  cl  SO,  et  tom.  1 
Lection.  Canisii,  p.iji.  113. 

•  \'oy.'z  sur  ces  actes,  loin.  III,  pag.  10,  note  8, 
cl  pag.  .JSO-Sji.  (iVdiYciiC.) 


Tr<IIi  i 
louaire  4c 
Vlri|iiill«, 


CHAl'ITHE  LXXXIV.  —  SAINT  ADEI.MB,  lïVftQUE. 


Tralié  des 
uil  Viccs. 


Eotçm«s  fl 
litres'  de   S. 

'Ldoltno, 


[vu'  SIÈCLE.] 

ses.  Entre  les  écrits  npocryplics  d'où  il  a  lir(5 
la  matii'i'o  (le  son  (uivrage,  on  ]i(Mit  compter 
riliii(irairo  de  saint  Pierre,  la  fausse  Dona- 
tion de  Constantin,  l'Hisloire  de  la  vision 
qu'eut  ce  prince,  dans  laijnello  il  lui  fnl  or- 
donné de  liâlirla  ville  do  Cnnslanli;iop!e.  Le 
traité  de  la  ^■ir^iuilé  se  trouve  en  vers  dans 
le  recueil  do  Canisius,  en  vers  et  en  prose 
dans  le  treizième  tome  de  la  Bibliothèque  des 
Pères,  et  dans  les  ()rlliodoxogra[ilics. 

4.  Le  traité  des  Vices  rappelle  rélog;e  de 
la  virginité '.  C'est  donc  avec  raison  qu'on 
l'a  placé  ù  la  suite  du  premier  -.  Il  est  en  vers 
dans  les  cjUeclions  dont  nous  venons  de 
parler;  el  il  y  en  a'aussi  quelque  chose  dans 
les  cinquième,  sixième  et  septième  chapi- 
tres du  traité  de  l.\  Virginiti'' en  prose. 

5.  Bèdc  attribue  ;\  saint  Adclmcdcs  Enig- 
mes et  quelijues  I.elties''.  Nous  avons  plu- 
sieurs énigmes  que  Martin  Delrio  croit  être 
celles  dont  parle  Bèdc  :  elles  sont  .sur  toutes 
sortes  de  sujets.  .Saint  Adclme  dit  dans  le  se- 
cond Prologue ,  qu'il  les  avait  composées 
h  l'imitation  de  Symphose.  .\  l'égard  de  ses 
Lettres, on  n'en  connaît  qu'une,  qui  est  adres- 
sée à  Eadfrid.  On  l'a  imprimée  parmi  les 
lettres  Hibernoises*.Dom  Mabiliou  cite  un 
ancien  manuscrit  ^  où,  après  le  Prologue  sur 
les  Enigmes,  on  lisait  nn  acrostiche  qui  ex- 
primait le  nom  de  Jésus.  Cet  acrostiche  no 
se  lit  pas  dans  les  imprimés.  Saint  Euloge, 
martyr  de  Cordoue,  faisait  tant  de  cas  des 
poésies  de  saint  Adelme  ^,  particulièrement 
de  ses  Epigrammcs,  qu'il  les  rapporta  de 
Pampelune  avec  les  livres  des  meilleurs  au- 
tems.  Mais  il  s'en  faut  beaucoup  qu'il  ait  fait 
entrer  dans  ses  poésies  les  grâces  et  les  or- 
nements dont  ce  genre  d'écrire  est  suscep- 
tible. Il  n'est  pas  même  pur  dans  ses  expres- 
sions, et  il  fait  plusieurs  fautes  contre  la  pro- 
sodie. Cela  était  pardonnable  dans  nn  homme 
qui  avait  le  premier  de  sa  nation  appris  les 
règles  de  la  versitîcation  latine.  Sa  prose 
est  chargée  de  termes  inusités  et  inconnus. 
Bède  trouvait  néanmoins  qu'il  s'exprimait 
avec  netteté';  c'était  sans  doute  relative- 
ment aux  autres  écrivains  de  son  siècle,  dont 
le  style  est  presque  toujours  dur  et  embar- 
rassé. 


80.". 

G.  Saint  Adelme  cultiva  aussi  la  poésie  an- 
glaise ,  et  composa  en  sa  langue  vulgaire 
divers  cantiques  pour  engager  le  peuple  en- 
core A  demi  barliare  à  ne  point  soitir  de  l'é- 
glise aussitôt  après  la  messe*.  Quehpiefois  il 
se  mettait  sur  un  pont  h  la  sortie  de  la  ville, 
et,  chantant  hii-mème  ses  cantiques,  il  rete- 
nait le  peuple  agr('ablemçnt,  se  servant  de 
celte  occasion  pour  leur  insinuer  les  vérités 
de  la  religion,  qu'ils  n'auraient  point  écou- 
tées dans  ses  sermons. 

[En  184i,  le  docteur  Giles  a  publié  à  Ox- 
ford une  édition  complète  dos  écrits  de  saint 
Adelme,  en  tni  vol  in  8".  M.  Migne  l'a  repro- 
duite au  tom.  LXXXIXde  la  Patrologie  latine, 
col.  6.3  et  suiv.  On  y  trouve  d'abord  une  Vie  de 
saint  .adelme  par  Fabricins,  une  autre  vie  ti- 
ri'-e  des  légendes  non  voiles  de  l'Angleterre, par 
Capgrave,  et  des  extraits  sur  saint  Adelme. 
Viennent  ensuite  les  ouvrages  du  saint  évé- 
que;  ils  sont  divisés  en  quatie  parties.  La 
première  comprend  les  ('pitres,  la  deuxième 
les  traités  ,  la  troisième  les  poèmes,  la  qua- 
trième les  diplômes. 

Les  épîtres  sont  au  nombre  de  quatorze. 
La  r°  est  adressée  ;ï  G('ronce,  roi  de  la  par- 
tie occidentale  de  l'Angleterre,  et  à  tous  les 
prêtres  qui  habitaient  dans  la  Domnouie. 
Elle  se  trouve  parmi  les  épitres  de  saint  Bo- 
niface,  martyr:  c'est  la  44°. 

Adelnse  y  dit  qu'il  a  été  cbargé  par  un 
concile  composé  d'un  grand  nombre  d'évé- 
ques  de  la  Bretagne,  de  leur  adresser  les  ob- 
servations elles  demandes  dii  concile.  Ayant 
appris  d'une  manière  certaine  que  les  prê- 
tres de  ce  pays  ne  s'accordent  pas  dans  les  cho- 
ses de  la  foi  et  qu'ils  suscitent  par  leurs  dis- 
putes un  grave  scandale  dans  l'Eglise,  il  les 
engage  à  la  paix,  dout  il  leur  montre  la  néces- 
sité plus  loin  ;  il  les  reprend  de  ce  qu'ils  refu- 
saient de  porter  la  tonsure  de  saint  Pierre  et 
imitaient  celle  de  leurs  prédécesscuis,  dont 
ils  ne  connaissent  pas  l'origine  et  que,  pour 
lui,  il  attribue  à  Simon  le  Magicien.  Il  leur 
expose  ensuite  les  motifs  de  l'institution 
de  la  tonsure,  l'antiquité  de  cet  usage,  son 
symbole.  Puis  il  leur  reproche  de  ne  pas 
célélirer  la  Pàqne  au  temps  déterminé  par 
le  concile  de  Xicée,  et  de  suivre  des  auteurs 


Autre*  i>oé. 
)!•■  (le  iblot 
Adtilnie. 


Rdili'.ii 
coniiiii'lj  lio. 
(rrils  de  5BiD*. 

AdclMiC. 


•  CanisiiiJ,  toin.  I,  pag.  735  ;  tom.  Xlll,  Bihlioth. 
Pat;  r-"-?.  19. 

8  Beda,  lib.  \.,  cap,  xis.  —  '  Beda.  ibid. 

'Depuis,  treize  autres  lettres,  parmi  lesquelles 
trois  adressées  à  saint  Adhclmo.  ont  éd!  publiées 
par  le  docteur  Giles.   Nous  en  parlerons  bientôt, 


ainsi  que  d'autres  ouvrages  inconnus  à  Dom  Ceil- 
lier.  (L'edileur.) 

5  Mabiliou.,  tom.  11  Àctor.  Ordia.  S.  Benedicli, 
paj;.  224.—  «  Ibid. 

■J  Beda,  lib.  V,  cap.  xix. 

«  Tom.  11  Act.  Ordin.  S.  Benedicli,  pag.  224. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


806 

non  approuvés;  il  ajoute  qu'il  est  tout  à  fait 
conliaiie  à  la  foi  et  à  la  tradition  que  quel- 
ques prêtres,  se  gloiilianl  de  la  pureté  de 
leur  vie,  rejettent  foule  communication  avec 
les  prêtres  étrani:ei'S,  au  point  de  jeter  aux 
pouiceaux  les  restes  des  repas  qu'ils  pren- 
nent parmi  eus.  11  les  accuse  de  vouloir 
imiter  eu  cela  les  cathares  et  les  phari- 
s-iens;  il  les  engage  à  suivre  la  doctrine  de 
Pierre  qui  a  été  établi  chef  de  l'Eglise,  et  il 
prouve  par  saint  Jacques  que  la  foi  est  morte 
sans  les  œuvres. 

La  2'  épitre  adressée  à  une  sœur  appelée 
Osgithe,  se  trouve,  comme  la  précédente, 
parmi  les  Ictlies  de  saint  Boniface  martyr; 
c'est  la  57'.  Adelme  fait  connaître  à  Osgi- 
the qu'il  a  demandé  à  l'évèque  la  permission 
(le  baptiser  une  relipicuse  ,  et  que  celui-ci  a 
permis  de  le  faire,  mais  en  secret;  il  l'engage 
ensuite  à  méditer  l'Ëcriture-Sainte  et  à  prier 
beaucoup. 

La  3"  est  adressée  à  Ealifride;  elle  se 
trouve  dans  le  recueil  des  L'jjitres  /libernoisvs 
d'Ussérius  et  dans  le  supplément  d<;  Wharlon 
à  ïHisloire  dugmal iqiie li'Usséi'ius,  page  350, 
in-4°,  Londres,  IGOO;  c'est  celle  que  nous  a 
analysée  dom  Ceillier. 

La  4'  est  adressée  à  l'évoque  Iledda  ;  elle 
se  trouve  parmi  les  épitres  de  saint  Boniface, 
c'est  la  68'  ;  le  texte  en  a  été  revu  et  corrigé 
sur  l'exemplaire  conservé  par  Guillaume  de 
Malmesburi. 

L'auteur  s'excuse  auprès  de  l'évèque  de 
n'avoir  pu  jouir  de  son  agréable  présence 
après  la  fête  de  Noël,  à  cause  des  grands 
travaux  auxquels  il  se  livre;  il  dit  qu'il  étu- 
die le  droit  romain,  et  qu'il  fait  des  vers; 
étude  d'autant  plus  obscure,  qu'elle  est  peu 
suivie  ;  il  reconnaît  qu'après  ses  longues 
études,  il  n'est  pas  fort  habile  dans  l'art  du 
calcul;  il  n'ose  lui  parler  du  zodiaque  et  des 
douze  signes,  dans  la  crainte  de  ne  pas  le 
l'aire  avec  assez  de  noblesse  et  de  science. 

L'épitre  3'  est  adressée  à  Adelme  par 
un  Écossais  anonyme;  celui-ci  le  prie,  après 


trouve  parmi  les  épîtres  de  saint  Boniface, 
c'est  la  65';  mais  elle  doit  sans  aucun  doute 
prendre  place  ici,  puisijue  le  nom  d'Adelme 
se  trouve  au  commencement  des  vei-s  qui 
suivent  cette  lettre. 

Elliehvaldc  prie  le  saint  abbé  de  continuer 
les  soins  qu'il  avait  déjà  donnés  à  son  édu- 
cation; il  le  conjure  de  ne  pas  manquer  à 
la  promesse  qu'il  avait  faite  de  l'instruire,  et 
de  ne  pas  le  rendre  semblable  à  Roboam,  qui 
fut  privé  du  bonheur  dont  son  père  Salomon 
avait  joui  ;  il  annonce  qu'il  lui  envoie  trois 
chants  en  vers,  et  lui  explique  comment  et 
pourquoi  il  les  a  composés. 

La  septième  est  envoyée  par  Adelme  à 
Adrien,  son  précepteur  d'enfance;  il  y  ex- 
prime ses  regrets  de  n'avoir  leçu  les  leçons 
d'un  si  bon  maître  que  pendaut  trois  ans,  et 
de  n'avoir  pu  depuis  retourner  sous  sa  con- 
duite, i\  cau-e  de  la  faiblesse  de  sa  santé. 

La  huitième  est  adressée  par  l'Irlandais 
Collanus  à  Adelme,  qu'il  appelle  archiman- 
drile  des  Saxons  ;  après  des  éloges  don- 
nés au  talent  de  notre  abbé,  il  le  prie  de  lui 
envoyer  quelques-uns  de  ses  ouvrages. 

La  neuvième  contient  la  réponse  d'A- 
delme à  Cellanus.  Il  lui  dit  qu'il  ne  mérite 
pas  les  louanges  qu'il  lui  a  données. 

La  dixième  lettre  est  adressée  par  Adel- 
me à  Ethelwalde,  son  disci[ile.  Il  l'engage 
à  ne  pas  se  livrer  au  luxe  et  aux  plaisirs  des 
sens,  parce  que  la  jeunesse  passe  prompte- 
ment  ;  il  lui  permet  d'étudier  les  lettres  pro- 
fanes, afin  de  mieux  couipirndre  les  saintes 
Écritures,  qu'il  lui  conseille  de  méditer  et 
d'aiiprofondir. 

La  onzième  lettre  est  adressée  par  Adelme 
au  clergé  de  l'évèque  W'ilfride. 

Au  milif'u  des  troubles  qui  agitent  l'Kglise, 
il  engage  les  clercs  à  prier,  et  surtout  à  rester 
unis  à  leur  évè([ue  qui  les  a  instruits  et  éta- 
blis dans  la  foi  ;  pour  les  y  porter  plus  cllicacc- 
uicnt,  il  leur  montre  l'exemple  des  abeilles 
toujours  unies  à  leur  reine,  et  il  dit  en  ter- 
minant :  <c  Si  c'est  avec  mépris  que  l'on  parle 


(juclques  ébiges,  de  le  recevoir  pour  sou  dis-      tics   S(''culiers  (pii'abandonnent  leurs  amis 


ciple,  et  il  lui  témoigne  le  dé:^ir  qu'il  éprouve 
de  lire  un  livre  que  possède  celui  à  qui  il  écrit. 
\  la  suite  de  cette  lettre ,  on  lit  une  prière  à 
Jésus-Christ,  en  vers;  l'aulrur  y  décrit  sur- 
tout   les    soutl'ranccs    que  Notre-Seigncur, 


dans  le  malheur,  que  dira-t-on  de  vous,  si 
vous  abanilonnez  voire  évoque  exilé"?  » 

La  douzième  lettre  est  adressée  par  Adel- 
me à  Wiulicrt.  Il  le  prie  de  vouloir  bien  lui 
faire  n  ndre  une  terre  «pi'il  avait  achetée  du 


maitredcruuiveis,  dulépiou\erdansloseiu  palrice  Baldiède,  et  que  le  roi  retenait  cn- 

de  Maiie.  core.  La  treizième  lettre  est  d'Adelme  à  Wil- 

La  (/  est  adressée  à  Adcliup  par  Etliel-  fride.  Il  lui  con.-eille  de  lire  les  oracles  sa- 

valdc,  qui  se  dit  l'élève  du  saint  abbé;  on  la  crés.  au  lieu  d'étudier  les  o.'uvrcs  menson- 


[tu*  siècle.] 

gl'res  des  philosoplies.  «  Pourquoi  préférer  à 
ccssoiircps  piiros  les  eaux  marécageuses  du 
paganisme?  Quel  bien  la  foi  retire-t-cllc  dos 
lectures  de  livres  où  se  Ironven!  les  infamies 
dePrdserjiine.trHi'h  ne,ti'l!crniione,desnac- 
cliaules,  (jue  Jcsus-Chii^t  a  leriassées  pour 
toujoin  s  du  liaut  de  sa  croix?  m'engage  enfin  à 
ne  passe  nourrir  de  ces  impures  prodiiclions. 

La  qualorzième  cpîlre  est  adressée  par  le 
bienheureux  Adclnie,  évèipie,  à  toulcs  les 
congrégations  ijui  sont  sous  sa  dire  tion.  Elle 
est  exirailc  du  registre  manuscrit  de  l'abbaye 
de  Mahnesbury.  Elle  a  pour  titre  :  Delà  Li- 
berté de  r l'élection.  Adeluie  y  annonce  i  ses 
moines  qu'il  a  souvent  essaye,  mais  en  vain, 
depuis  son  élévation  à  l'épiscopat,  de  f.iire 
élire  A  sa  place  un  abbé  pour  les  monastères 
de  Maildunesburg,  de  Froine,  et  de  Bradan- 
ford;  et  que  ces  religieux  ont  toujours  résisté, 
le  priant  seulement  de  faire  en  sorte  qu'après 
sa  mort,  personne  n'ose  revendiquer  à  au- 
cun titre  le  droit  de  les  gouveiiier;  il  fait 
connaître  ensuite  les  mesures  qu'il  a  prises 
pour  satisfaire  à  leurs  prières ,  du  consen- 
tement du  roi  Inius,  et  avec  l'assentiment 
de  son  co-évèque  Daniel  ;  il  veut  aussi  faiie 
approuver  cette  mesure  dans  un  prochain 
concile  de  tous  les  archimandrites  saxons. 

Les  Traités  sont  au  nombre  de  deux  :  le 
premier  est  à  la  louange  de  la  virginité,  le 
deuxième  est  intitulé  :  Lettre  à  Acirce  ou  le 
livre  sur  le  septénaire,  sur  les  mesures,  les 
énigmes  et  les  règles  des  pieds.  Deirio  avait 
publié  le  premier  les  Enigmes  et  on  les  avait 
mises  depuis  dans  la  Bibliothèque  des  l'ères; 
Augélo  Mai  avait  fait  paraître  l'autre  partie 
de  l'ouvrage,  au  tome  V  des  Classici  Au  to- 
res, page  301-399.  Le  docteur  Giles  a  publié 
en  entier  cet  écrit,  après  l'avoir  corrigé  sur 
sept  manuscrits  dont  l'un  est  du  x"  siècle. 
Saint  Adelme  dans  le  Prologue  s'adresse  au 
roi  Acrise  ;  il  lui  dé\  eloppe  les  mystères  ren- 
fermés dans  le  nombre  sept,  et  lui  mouti  e  son 
emploi  fréquent  dans  la  nature  et  dans  l'É- 
criture. Passant  ensuite  à  la  versification,  il 
décrit  les  ditl'érentes  mesures  des  vers.  Vient 
ensuite  le  livre  des  Énigmes  en  vers  ;  il  est 
précédé  d'un  Prologue  également  en  vers, 
et  est  suivi  des  règles  pour  composer  les  pieds 
des  vers  :  cette  partie  est  en  prose. 

Les  œuvres  poétiques  renferment  les  trai- 
t  s  suivants  :  les  Louant/es  des  Vierges,  sur 


CHAPITRE  LXXXIV.  —  APPÛNIUS. 


807 


les  huit  principaux  vices,  sur  la  Basilique 
bi'itie  par  Hugge,  fille  du  roi  des  Anglais,  sur 
les  autels  dédiés  à  Marie  et  aux  douze  apô- 
tres; Vers  en  l'honneur  des  apôtres;  Frag- 
ment sur  le  jour  du  jugeuicnl  ;  Lettre  d'un 
anonyme  à  une  so-ur  anonyme.  Augélo  Mai 
avait  di'jà  publié  ',  après  d'autres,  mais  d'une 
manière  plus  correcte  les  vers  sur  la  basi- 
lique. Le  poème  sur  les  autels  se  trouvait 
parmi  les  Œuvres  de  Raban  Maui',  à  qui 
ou  l'attribue.  D.ins  le  manuscrit  dont  s'est 
sc)-vi  le  docteur  Giles,  il  est  attribué  à  saint 
Adelme,  et  ne  forme  (ju'uu  ouvrage  avec  le 
poème  sur  la  basilique.  Les  vers  en  l'hon- 
neur des  apôtres  sont  tiiés  de  la  Vie  de  saint 
Adelme  par  Fabricius.  Dans  la  prière  adres- 
sée à  nue  sœur,  l'auteur  a  un  Piologue  en 
prose  où  il  fait  l'éloge  de  la  virginité  ;  il 
donne  ensuite  quatre  pièces  de  vers  sur  di- 
vers sujets.] 

7.  On  ne  peut  se  dispenser  de  mettre  Appo- 
nius  '  parmi  les  auteurs  qui  ont  vécu  sur  la  fin 
du  vil"  siècle,  ou  au  commencement  du  viii"  ', 
puisqu'il  est  souvent  cité  par  le  Vénérable 
Bède,  mort  en  733;  [Apponitis  avait  été  placé 
p:irBellarmin  parmi  les  écri va insduis*^ siècle; 
le  Père  Labbe  prouva  qu'il  fallait  le  rappor- 
ter au  vu"  siècle.  Mais  le  cardinal  Mai'  à  son 
tour  démontre  par  debonnesraisons.qu'Ap- 
ponius  vivait  au  moins  au  milieu  du  vi*^  siècle, 
et  qu'il  fut  contemporain  du  pape  Vigile  et 
de  Justinien.  La  première  raison  pour  ap- 
puyer ce  sentiment,  c'est  que  le  Vénérable 
Bède,  qui  llorissait  à  la  fin  du  vii«  siècle,  et 
mourut  après  l'an  730,  n'aurait  pas  loué  un 
auteur  contemporain  et  non  encore  connu. 
La  seconde,  c'est  que  l'Explication  du  Can- 
tique des  Canliquesest  adressée  parAponius 
à  un  prêtre  nommé  Aiménius;  or  Agnellus, 
évèque  de  Ravenne  vers  le  milieu  du  VI' siècle, 
écrivit  aussi  une  lettre  à  Armenius,  ce  qui  ne 
permet  pas  de  douter  qu'Apponius  n'ait  été 
contemporain  d'Agnellus.  On  ne  peut  eu  etïet 
douter  qu'Arménius,  dont  il  est  question,  ne 
soit  dans  les  deux  endroits  cités,  un  seul  et 
même  [leisonnage.  Enfin  le  genre  classique 
d'Appouius,  la  bonté  de  son  style,  la  soli- 
dité des  sens  spirituels  qu'il  apporte,  tout 
indique  un  auteur  antérieur  au  vu'  siècle. 
Il  est  probable  qu'Apponius  était  Italien.  La 
liaison  d'Arménius  avec  lui  semble  l'indi- 
quer; et  d'ailleurs,  uuns  les  Trésors  des  in- 


Soi  Conmien. 
taire  surCsa. 
tiijua. 


'  D.  Ceillier  avait  écrit  Apouius,  il  vaut  mieux 
écrire  Apponius  d'après  le  cardinal  Mai,  {L'éditeur.) 


'  Tom.  XIV,  Bibliolh.  Pal.,  pag.  98. 
'  Tom.  V  Classici  auctores,  p.îg.  36'. 


806 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


scriptions  de  Giuler,  de  Muralori,  de  Gudius, 
se  renconlrent  souvent  les  noms  d'Apponius 
oii  d'Apoiiiiis,  et  ces  pierres  scrip'iimles  sont 
pour  la  plupart   en  Italie.]  Api)Oiiius  fit  un 
Commentaire  sur  le  Cantique  des  Cantiques, 
imprimé  à  Fribouro;  en  1338,  et  dans  le  qua- 
torzième tome  de  la  liihlioîlièqnc  des  Pères, 
:\  Lyon,  en  IG~7.  Il  l'enlieprit  aux  instances 
d'un  serviteur  de  Dieu,  nommé  Artnénius,  ii 
qui  il  le  dédia.  Ce  Commentaire  est  divisé  en 
six  '  livres,  dont  le  premier  est  une  espèce 
de  prc'face.  Dans  les  suivants,  .-Vpponius  ex- 
plique cbaque  verset  du  Cantique,  faisant 
voir  que  tout  ce  qui  y  est  dit  de  l'Epoux  et 
de  l'Épouse  doit  s'entendre  de  Jésus-Clirist 
et  de  son  Eglise.  Il  remarque  que  les  cbré- 
tieus,  qui  sont  les  membres  de  cette  Eglise, 
reçoivent  le  baiser  de  l'Époux  divin,  quand 
ils  participent  au  corps  et  au  sanj?  de  Jésus- 
Cbrist  dans  rKucbaristie  ;  que ,  tout  se  devant 
faire  au  nom  et  pour  la  gloire  de  Dieu,  c'est 
pour  cela  que  le  mariage  même  doit  être 
bénit   par  les  prêtres   du   Seigneur;    que, 
(juand  une  fois  on  a  abandonne  la  vraie  foi, 
et  qu'où  est  sorti  du  troupeau  que  Jésus- 
Christ  a  confié  à  saint  Pierre,  pour  prendre 
le  parti  de  l'hérésie,  on  tombe  de  jour  en 
jour  en  de  nouvelles  erreurs;  qu'en  vain  on 
travaille  à  faire  croître  en  soi  les  vertus,  si 
l'on  ne  commence  par  en  déraciner  les  vices  ; 
que  le  mariage  de  Jésus-Christ  avec  l'Eglise 
s'est  fait  par  l'eU'usion  de  son  sang  sur  la 
croix;  que  c'est  par  les  eaux  du  baptême 
qu'il  a  rendu  son  épouse  sans  tacbe;  que, 
dans  les  exhortations  que  l'on  fait  aux  peu- 
ples, il  faut  puiser  dans  les  écrits  des  apôtres 
les  maximes  saintes,  et  ne  point  s'amuser  ;\ 
cueillir  îles  Heurs  dans  les  auteurs  profanes. 
Cet  ouviage  est  écrit  avec  beaucoup  d'esprit 
et  de  savoir  :  nous  n'eu  avons  guère  de  meil- 
leur en  ce  genre  parmi  les  anciens.  Luc,  abbé 
du  Mon'.-Saint-Corneille,  de  l'ordre  des  Pré- 
montrés, dans  le  \n'  siècle,  a  fait  un  abrégé 
de  ce  Commentaire,  que  l'on  a  inséré  dans 
le  quatorzième  tome  de  la  IJibiiotlièquc  des 
Pères.  [Le  cardinal  Mai  a  trouvé  deux  manus- 
crits de  l'Explication  du  Cantiipio  des  Can- 
tiques, l'un  .'i  Milan  et  l'autre  à  lloiue.  Il  n'a 


publié  '  que  les  livres  VII,  VIII  et  une  partie  du 
IX';  les  autres  restent  inédits  dans  la  biblio- 
thèque sessoriennc  de  Rome;  il  n'a  pas  eu  le 
temps  de  les  publier.  Cet  écrit  d'.\pponius  est 
précieux,  en  ce  qu'où  y  rencontre  la  tradition 
d'un  grand  nombre  de  points  de  dogme  ou  de 
discipline  ecclésiastique.  On  y  trouve  la  louan- 
ge des  apôtres  et  des  martyrs',  et  l'auteur  fait 
preuve  d'une  certaine  éru  lition  bistorique  '. 
Outi'e  les  versets  du  Cantique,  l'auteur  expli- 
que encore  plusieurs  autres  endroits  de  l'Écri- 
ture. En  ex]  li(|uant  la  puissancedes  clefs,  ou 
Icpouvoir  de  lier  ou  de  délier  dans  l'Église,  il 
rend  un  témoignage  admirable  et  bien  fort  con- 
tre les  hérétiques  anciens  ou  modernes  qui 
nient  cette  belle  prérogative;  cetémoignage 
est  d'autant  plus  précieux  qu'il  estd'une  haute 
antiquité  '.  On  y  remarque  aussi  un  enseigne- 
ment sublil  et  assez  étendu  surTarillmétique 
et  le  nombie  soixante  °.  On  reconnaît  facile- 
ment dans  ce  commentaire  un  homme  qui  écri- 
vait peu  de  temps  après  que  l'idolâtrie  avait 
été  abattue,  et  dans  un  siècle  où  il  fallait  mon- 
trer un  grand  zèle  contre  les  hérétiques  '.] 
8.  L'on  met  aussi,  sur  la  ûu  du  vu"  siècle, 
Cresconius,  évèque  en  Afrique',  mais  dont 
le  siège  épiscopal  n'est  pas  connu.  Il  a  fait 
une  collection  de  Canons  qui  est  divisée  en 
deux  parties.  La  première,  intitulée  Abrégé 
du  Droit  Canonique,  contient  sommairement 
toute  la  discipline  de  l'Eglise,  avec  les  cita- 
tions des  canons  sur  chaque  matière,  et  les 
noms  des  conciles  d'où  ces  canons  sont  tirés. 
Cet  abrégé  est  précédé  d'une  Lettre  ou  d'une 
Préface,  où  Cresconius  avertit  Liberinus  (pi'il 
a  suivi  la  niélliode  de  Ferrand,  diacie  de 
Caiihage.  (lutie  les  conciles,  il  cite  aussi  les 
épîtres  décrétales  des  papes.  Justel  a  sé- 
paré dans  son  édition  cette  première  partie 
de  la  seconde,  et  mis  entre  deux  la  collection 
de  Maitin  de  Rraguc.  Il  y  au  la  tète  de  cette 
seconde  partie  un  Prologue,  qu'il  ne  croit 
pas  être  de  Cresconius.  Elle  contient  en  en- 
tier les  canons  des  conciles  et  les  passages 
des  décri'tales  des  papes  cités  dans  l'abrégé. 
Cresconius,  de  môme  que  Ferrand,  rapporte 
les  canons  des  conciles  de  .Nicée,  d'.\ncyre, 
de  Néocésarée,  de  (iangres,  d'.\ntioclie,  de 


Crpficniiiuii, 
évC4]uc  d  Afrl. 

que. 


<  Il  y  en  a  douze.  {V éditeur.) 

'  Spicileg.  Rom.,  loin.  V,  pag.  I-S3. 

'  \':iti.  la  il  .«iiiv.  —  *  Piig.  7. 

'  Lul.ia  t'jiis  lilin,  dis'.ill.inlia  iiijrrliaiii  priinaui: 
III  /</.')iis  illis  ridenlur  iiileltigi  (jui  tires  Christi 
agtini  i»  terris,  (iiiibiis  ligardi  cl  ^oheuditra(iita 
est  poteslas,  qui  ore  Christi proluta  jusi^ii'ue ,  juste 


peci'antes  alligaul  conriemnando  et  juste  pœni- 
tentes  reconciliniidocundciiiiuilionis  vincula  soi- 
l'uni;  qui  sine  pcrsonarum  accepttone  omnifaria 
verilale  subnidum  proferunl  vcrlium.  l'ug.  57-58. 

•  I>«^'.  71.  -  '  Pajj   38,  16,  50,  57. 

'  Juflcllus,  Prœfal.  in  Cod.  Can. 


[vu*  SIÈCLE.]  CIIAIMÏHE  LXXXIV.  —  SAINT  AUELME,  APONIUS,  ETC. 


8Û'J 


Déméir.i 
dvCviiqu4. 


Laodicde  et  do  Sardiquc,  avec  celte  diflo- 
rcnce  qu'il  suit  la  version  et  l'cdilion  de 
DL'iiis-lc-I'etit,  au  lieu  que  Ferraïul  avait  eu 
recours  i\  des  manuscrits  plus  anciens.  Cela 
faisant  quelque  variété  dans  leur  manière  de 
rapporter  les  canons  de  ces  conciles,  Jus- 
tel  a  donné  une  table  en  i'açon  de  concor- 
dance, où  Ton  voit  eu  quoi  ces  deux  collec- 
teurs conviennent,  et  en  quoi  ils  dillèrcnt. 
L'Abrégé  de  Crcsconius  a  été  rendu  public 
à  l'aris,  en  1588,  par  l'ilLou  ,  puis  par 
Haulscrrc  à  Poitiers ,  en  1630;  ù  Dijon, 
en  1049,  par  le  Père  Cbitllet,  et  dans  l'Ap- 
pendice du  premier  tome  delà  Bibliotbèque 
canonique  de  Justel ,  à  Paris,  en  1(501. 
[On  le  trouve  aussi  dans  la  ratroloj;ie  latine, 
tome  LXXXMII,  col.  813,  avec  une  notice 
par  Fabricius.] 

Crcsconius  avait  mis  en  vers  bexamèlres 
les  guerres  et  les  vicloires  de  l'empereur 
Léon  contre  les  Sarrasins  en  Afrique.  Cet 
ouvrajre  n'est  pas  parvenu  jusqu'à  nous. 

9.  C'est  encore  sur  la  fia  du  vu"  ou  au 
commencement  du  viiie  siècle  que  l'on  place 
Démétrius  de  Cyzique  ',  dont  nous  avons  un 
petit  écrit  de  l'Origine  des  erreurs  des  Jaco/ntes 
et  des  C/iafzilzariens,  ainsi  nommés  en  langue 
arméniour.e,  parce  que,  rejetant  le  culte  de 
toutes  les  images  ,  ils  n'adoraient  que  la 
Croix.  Ils  faisaient  partie  de  la  secte  des  ja- 
col.'iles.  Le  père  Combelis  a  donné  cet  opus- 
cule sans  nom  d'auteur;  mais  il  remarque 
dans  ses  notes,  qu'il  est  de  Démélrius  do 
Cyzique;  et  il  s'appuie  sur  l'autorité  d'un  ma- 
nuscrit de  la  Bililiotbèquc  Palatine.  Ou  en 
cile  un  de  IT.scurial,  où  cet  écrit  est  aussi 
attribué  à  cet  auteur.  Il  enseigne  que  le  chef 
de  l'hérésie  des  jacobites  était  un  moine 
syrien,  nommé  Jacques,  et  surnommé  Tzunt- 
rfl/e;iiu'ayaut  imbrassé  l 'hérésie  d'Euiycbcs, 
il  la  prêcha  chez  les  Syriens  ;  qu'il  y  avait 
deux  parlis  parmi  ces  peuples,  les  melchites 
ou  royalistes ,  et  les  aposcbiles  ou  divisés. 
Les  royalistes  suivaient  la  vraie  foi,  et,  à 
l'exemple  de  l'pmpereur  Marcien.  ils  rece- 
vaient le  concile  de  Calcédoine.  Les  aposcbi- 
les, attaches  à  l'erieurd'Eutychès,  avouaient 
qu'il  y  avait  deux  natures  en  Jésus-Christ 
avant  l'union  ;  mais  ils  soutenaient  qu'il  n'y 


en  avait  qu'une  depuis  l'union,  supposant  la 
confusion  et  le  mélange  des  deux  natures  : 
ce  (pii  les  faisait  condamner  comme  théo- 
pascbites,  parce  qu'ils  disaient  que  la  Divi- 
nité a  soullcrt.  Ils  ne  reconnaissaicnld'aiitres 
conciles  que  ceux  de  Nicée,de  Cnnstanli- 
noplc  et  d'Epbèse,  condaniiuiul  tous  les  sui- 
vants. C'est  [)ar  là  que  commença  l'hérésie 
des  jacobites.  Dep-.us  ils  imaginèrent  de  ne 
se  servir  que  d'un  seul  doigt  en  fa'saul  le 
signe  de  la  cioix,  pour  mai'qiier  l'unité  de 
nature  en  Jésus-Chrisl  ;  et  au  lieu  que  îes 
catholiques  faisaient  le  signe  de  la  croix  de 
droite  à  gauche,  ces  hérétiques  le  faisaient  de 
gauche  à  droite.  Ils  mêlaient  de  l'huile  dans 
l'oLlation ,  comptaient  pour  rien  la  sainle 
communion,  ne  mettaient  point  d'eau  dans 
le  calice,  n'avaient  que  de  l'iiulidorencepour 
le  culte  des  images,  cl  ne  les  baisaient  point, 
se  contentant  de  les  toucher  du  doigt  et  de 
])aiser  ensuite  le  doigt  même.  Ils  enfouis- 
saient la  croix  le  jour  du  Vendredi-Saint,  la 
tenaient  cachée  jusqu'au  dimanche;  et,  dès 
le  point  du  jour,  ils  la  portaient  par  les  rues 
et  les  places  publiques,  où,  après  avoir  de- 
mandé si  Jésus-Christ  était  ici  ou  là,  ils  la 
découvraient.  Ils  mangeaient  de  la  chair  en 
carême,  célébraient  les  mystères  avec  des 
riis  contraires  à  la  tradition,  et  ajoutaient  au 
Trisagion,  à  l'imitation  de  Pierre-le-Foulon, 
Vous  qui  êtes  crucifie'  pour  nous,  aijez  pitié  de 
vous.  Tels  étaient  les  sectateurs  de  Jacques 
Tzanlzale.  Les  chaizitzariens  étaient  de  la 
même  secte,  mais  n'en  suivaient  pas  tous  les 
dogmes,  reconnaissant  deux  natures  en  Jé- 
sus-Christ, et  admettant,  ce  semble,  aussi 
deux  personnes,  comme  les  nestorlens.  Ils 
disaient  que,  pendant  la  passion,  l'une  des 
deux  souffrait ,  et  l'autre  regardait  souffrir. 
Ils  adoraient  la  croix ,  et  y  mettaient  des 
clous,  voulant  marquer  par  là  qu'ils  croyaient 
que  la  Divinité  avait  soutl'ert.  Us  jeûnaient 
quelques  jours  avant  le  temps  où  l'on  cesse 
de  manger  de  la  viande.  En  carême,  ils  man- 
geaient des  œufs,  du  beurre  et  du  lait  les 
jours  de  dimanche.  Quant  àl'oblation,  ils  la 
célébraient  comme  les  jacobites.  Ils  bapti- 
saient leurs  croix  pendant  quelques  jours. 
Pour  s'autoriser  dans  toutes  leurs  pratiques. 


'  C'e?t  à  I  )rt  qu'on  pl.ice  Démélrius  le  Syncelle, 
p:ifri.ir<;he  de  Cyziiiue,  nii  \j\'  siècle  :  il  est  tuort 
eu  lOSU.  Sou  ou-rage  Tradatus  de  rébus  Arme- 
niœ  se  trouve  en  I;itiu  dans  le  tome  XII  de  la  Bi- 
bliothèque des  Pères  de  Lyou,  pai;.  813,  et  dans 
la  Bibliothèque  des  anciens  Pères,  par  Galland, 


tûm.  XIV,  pas.  2G6,  sous  le  uom  de  Philippe-le-So- 
litr.iie  ou  de  Démétrius  de  Cyzique.  Voyez  Fabri- 
cius. Bibt.  grwca,  nova  edit.  toiu.  XI,  pag.  iU,  et 
r.allaud,  Proleg.  dans  le  tou-.e  XIV  de  sa  Biblio- 
thè'jue.  (Vi'dileur.) 
■  Combefis,  tom,  11  Xuctuarii,  pag.  262. 


810 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


sur  le  ^(lJI^'><e 


Mimnlrede 
Jean  de  ti'.cée 
•urhDiii«aD- 
C0  de  Jt.^u5- 
(.ttflil. 


ils  feifïnaient  les  avoir  reçues  par  tradition  de 
saint  Grégoire,  martyr  et  évéque  de  la  grande 
Anui'n'e. 

H.  Le  Père  Comhofis  joint  au  traité  de 
Déniëliius  de  Cyzique  un  Mémoire  sur  le 
schisme  des  Arméniens,  qu'il  semble  croire 
du  mémo  temps  et  du  même  auteur  '.  On  y 
voit  la  manière  dont  l'hérésie  des  eutycliiens 
Be  répandit  en  Arménie,  les  schismes  qui  se 
formèrent  parmi  ceux  de  cette  secte,  les 
conciles  qu'ils  tinrent  pour  élaj^lir  chacun 
leur  senli,ment,  le  catalogue  des  évoques  ca- 
tholiques et  hérétiques  des  Arméniens,  la 
succession  des  empereurs  romains  et  des  rois 
de  Peisc.'  Il  y  a  taule  dans  la  plupart  des 
dates.  L'auteur  met  le  concile  de  Xicée  en  la 
septième  année  du  grand  Conslanlin,  quoi- 
qu'il ne  se  soit  tenu  qu'en  la  vingtième.  11 
place  le  fameux  concile  des  .arméniens  à  Ti- 
ban  eu  la  douzième  aimée  du  règne  dcî  Jus- 
tin-le-Jcuue,  et  en  la  vingt- quatrième  de 
Chosrocs  :  ce  qui  ne  s'accorde  pas.  La  dou- 
zième année  de  Justin,  qui  fut  la  dernière  de 
son  règne,  tombe  en  578,  qui  était  la  qua- 
rante-sixième de  Chosroès.  L'erreur  serait 
encore  plus  grande,  s:  on  mettait  ce  concile 
sous  le  lègne  de  JusIin-lc-Vieux,  qui  ne  ré- 
gna que  huit  ans,  et  mourut  avant  que  Chos- 
roès fut  roi  de  Perse. 

12.  Suit  dans  le  Père  CombeGs  le  Mémoire 
ou  Homélie  de  Jean  de  Nicée  sur  la  naissance 
de  Jésus-CliJ  isl  '.[Cette  homélie  est  reproduite 
au  tome  XCVI  de  la  Putrologie grecque,  avec 
notice  tirée  deLcquien,  col.  I'i33-i450].  Dès 
le  temps  de  saint  Chrysoslome,  on  regardait 
comme  une  nouveauté  de  séparer  la  iéte  de 
la  Nativité  du  Seigneur  d'avec  l'Epiphanie  ; 
on  avait  célébré  jusque-là  l'une  et  l'autre  le 
sixième  de  janvier  en  Orient.  Les  Occiden- 
taux n'en  usaient  pas  de  même.  Us  avaient 
toujours  célébré  la  fête  de  Noël  au  23  de  dé- 
cembre, et  l'Epiphanie  au  sixième  de  jan- 
vier. Leur  usage  passa  en  Orient  sur  la  lin 
du  quatrième,  ou  an  commencement  du  cin- 
quième siècle.  Jean  de  Nicée  établit  cet  usage 
dans  sou  Mémoire.  Il  prétend  que  ceux  qui 
avaient  introduit  la  coutume  de  célébrer  la 
naissance  de  Jésus-Christ  le  G  de  janvier, 
n'en  avaient  usé  ainsi  que  parce  qu'ayant 
ouï  dire  que  Jésus-Christ  était  Agé  de  trente 
ans  lors  de  son  baplêuic,  qu'ils  lixaicnt  au 


ce  jour  était  aussi  celui  de  sa  naissance. 
Pour  montrer  qu'on  doit  la  célcbrerle  23  dé- 
cembre, il  cite  une  lettre  de  saint  Cyrille  au 
pape  Jules  avec  la  réponse  de  ce  Pape,  et 
ajoute  que  saint  Basile  écrivit  h  saint  Gré- 
goire de  Nazianze  de  faire  a  pprouvercet  usage 
dans  im  concile  de  Conslautinople;  que  l'em- 
pereur Honorius  per.Miada  à  son  frère  .\rcade 
de  suivre  en  cela  la  pratique  de  Home  ;  que 
saint  Chrysoslome  l'approuva,  et  ré.L'la  avec 
saint  Epiphaiie  (]u'on  célébrerait  à  l'avenir  la 
naissance  du  Sauveur  le  2o  de  décembre; 
que,  la  même  chose  ayant  él(''  réglée  dans 
un  concile  de  Conslautinople,  l'Orient  se  con- 
forma sur  ce  point  avec  l'Occident.  Mais  tous 
ces  faits  sont  ou  faux  ou  peu  avérés.  On  ne 
connaît  point  de  lettres  de  saint  Cyrille  au 
pape  Jules,  et  celle  que  cite  Jean  de  Nicée  a 
un  air  fabuleux.  Qui  s'imaginera  que  le  Pape, 
sur  l'avis  de  cet  évèque,  ait  fait  chercher  de 
tous  côtés  les  écrits  des  Juifs,  pour  y  trou- 
ver de  quoi  6xer  le  jour  de  la  naissance  de 
Jésus-Clirisl?  N'avait-il  pas  sur  ce  sujet  la 
pralicpie  immémoriale  de  sou  Église?  Saint 
Chrysoslome  ne  recourut  pas  à  la  chronolo- 
gie du  Juif  Josèpho,  dont  il  est  parlé  dans  la 
lettre  faussement  attribuée  à  saint  Cyrille, 
pour  se  déterminer  sur  le  jour  de  la  naissan- 
ce de  Jésus-CIr.ist;  mais  aux  registres  du  dé- 
nombrement fait  sous  Auguste,  sur  lesquels  il 
supposait  que  lesRomains  avaient  fixé  ce  jour. 
On  ne  connaît  pas  non  plus  de  lettres  parmi 
celles  de  saint  Basile,  où  cet  archevêque  mar- 
que à  saint  Grégoire  de  Nnzianze  de  faire  dé- 
cider la  question  dans  un  concile.  Jean  de  Ni- 
cée n'alléguant  point  de  témoignages  plus  ré- 
cents que  celui  de  saint  Epiphane,  ou  d'un  con- 
cile qu'il  su[)pose  s'être  tenu  du  vivant  de  Fla- 
vien  d'.Vntioche,  on  pourrait  croire  qu'il  écri- 
vait avant  le  sixième  siècle  :  maià  il  faut  qu'il 
ait  vécu  depuis,  puisqu'on  ne  trouve  pas  dans 
le  catalogue  des  évê(piescatboli(pies  d'Armé- 
nie le  nom  de  Zacharie,  à  qui  il  adresse  son 
mémoire.  Pholius  parle  d'un  évêi|ue  du  nom 
de  Zacharie  qui  tiaduisit  en  gicc  les  Dialo- 
gues et  quelques  autres  ouvrages  de  saint 
Grégoiie  le  Grand  ',  environ  IC")  ans  avant 
qu'ils  eussent  éléicndiispulilics.  Ce  fui  peut- 
être  î\  cet  évèque  que  Jean  dédia  son  écrit.  En 
ce  ca.s-là  il  aurait  vécu  dans  le  vii«  siècle.  Ce 
qu'il  y  a  de  vrai,  c'est  qu'il  vivait  avant  le  on- 


sixièmc  de  janvier,  ils  s'étaient  imaginé  que.     zièmc;  car  sou  Mémoire  est  cité  plus  d'une 


<  CombeQs,  tom.  II  Aucluarii,  (lag.  271. 
*  Combefl(>,  ibid.,  [lo^.  298. 


»  Cod.  252,  pag.  1399. 


Filnt  U- 
du»,  at(lii>lla- 

VII*      t*u       lo 

VIII*  »lèclo. 


[vil*  SIÈCLE.]       CHAPITRE  LXXXV.  —  URSIN,  SAINT  ANSBERT,  ETC.  811 

fois  par  Anasiasc  de  Côsaréc,  qui  composa  translation  du  corps  de  saint  î',tioniic,  pre- 

cn  ce  siècle-là  un  livre  sur /c^c/i/icrfe /a  iV/vc  niicr  martyr.  Cette  translation  se  lit  uo  Con- 

de  Dieu  '.  stuntinople  à  Rome  sous  le  pontificat  de  Pé- 

i;{.  [Saint  Liirius,  arcliidiacrc,  écrivait  vers  la^e,  vcis  ooti.  \'oyez  Spkilvg.   Rum. ,  [om. 

le  vu'  ou  viir  siècle.  Ang.  Mai  a  publié  sons  IV,  pag.  283-288.] 
le  nom  de  cet  autour  un  fragment  sui'  la 


CHAPITRE  LXXXV. 

Uisin,  abbé  de  Ligugé;  saint  Ansberg  de  Rouen  ;  Evancc,  abbé  de  Troclar;  Défen- 

scnr,  moine  de  Ligngé  [snr  la  fin  du  Vil  siècle,  écrivains  latins]. 

[Denis  de  Telmara,  au  septième  siècle,  écrivain  Syriaque.] 


l'r»'n, 
(•rliurnu  abbi 
ce  Ligugé. 


SôiEl  Ans- 
bert.  évâque 
de  RoueD. 


1.  Nous  avons  deux  Vies  de  saint  Léger, 
évéqiie  d'.'Vntun  :  l'une  par  un  anonyme, 
moine  de  Saiut-Sympliorien ,  et  l'autre  par 
Ursin,  prieur  ou  abbc  de  Ligugé  dans  le  dio- 
cèse de  Poitiers.  Ces  deux  écrivains  étaient 
contemporains  du  saint  évèquc;  mais  l'ano- 
nyme n'étant  point  entré  dans  un  assez 
grand  détail  de  la  vie  de  saint  Léger,  An- 
soalde,  évèque  de  Poitiers,  et  .\udnlfe,  abbé 
de  Saint-Maixeut  en  Poitou,  engagèrent  Ur- 
sin à  donner  une  Vie  plus  détaillée.  Ces  deux 
A'ies  ont  paru  si  importantes  pour  l'histoire 
de  France,  que  Duchesne  les  a  insérées  dans 
son  recueil  des  Historiens  français*.  Elles  se 
trouvent  aussi  dans  le  second  tome  des  Actes 
de  l'ordre  de  Saint-Benoit  [dans  le  tome  XCVI 
de  la  Putroloijie  latine,  col.  329  et  suiv.,  et 
dans  le  recueil  des  Mémoires  pour  riiistoire 
de  France,  par  M.  Guizol].  Surius  n'a  donné 
que  celle  d'Ursin  ;  Dom  Mabillon  en  cite  une 
troisième,  écrite  quelque  tem[is  après  la  mort 
de  saint  Léger',  et  lorsque  l'on  voyait  en- 
core plusieurs  de  ses  parents.  Elle  est  divi- 
sée en  deux  livres  :  l'un  contient  l'histoire 
de  la  vie  du  saint,  l'autre  la  relation  de  ses 
miracles  ;  mais  le  premier  n'étant  autre  chose 
que  la  Vie  composée  parUisin,  et  grossie 
seulement  de  quelques  entretiens  ou  dis- 
cours du  saint  évèque,  ce  père  n'a  pas  jugé 
à  propos  de  la  rendre  publique. 

2.  Saint  Ausbcrt,  apiès  avoir  suivi  la  cour 
de  Clotaire  111  pendant  quelques  années,  se 


retira  dans  l'abbaye  de  Fontenelle,  doul  il 
fut  choisi  abbé  iï  la  mort  de  saint  Vandregi- 
sile*.  Il  iustruisit  ses  moines  autant  par  ses 
exemples  que  par  ses  discours.  Saint  Ouen, 
qui  l'avait  ordonné  prêtre,  se  trouvant  au- 
près du  roi  Théodoric  III,  piia  ce  prince  da 
le  lui  donner  pour  successeur,  disant  qu'il 
était  souhaité  par  le  clergé  et  le  peuple.  Aus- 
sitôt donc  que  saint  Ouen  fut  mort,  Théodo- 
ric envoya  chercher  saint  Ansbert,  sous  pré- 
texle  de  prendre  son  avis  sur  quelque  aflaire. 
Le  saint,  se  doutant  du  sujet  pour  lequel  on 
le  mandait  à  la  cour,  fil  d'abord  diUîculté 
d'y  aller;  mais,  sur  les  ordres  l'éitérés  du 
roi,  il  obéit  et  fut  sacré  archevêque  de  Rouen 
par  saint  Lambert  de  Lyon.  La  cinquième 
année  de  son  épiscopat,  il  tint  un  concile  ;\ 
Rouen  avec  Radbert  de  Tours,  Régule  de 
Reims',  treize  autres  évèques,  quatre  abbés 
et  plusieurs  piètres  et  diacres.  Les  actes  de 
cette  assemblée  sont  perdus.  Quelque  temps 
après,  saint  Ansbert,  sur  une  fausse  accusa- 
tion, fut  relégué  par  l'epin,maiie  du  palais, 
au  monastère  u'Aumont,  sur  la  Sambre  en 
Hainaut.  Ce  fut  là  qu'il  composa  divers  trai- 
tés de  piété  pour  l'édification  des  moines  qui 
dépendaient  de  ce  monastère.  Ces  traités  ne 
sont  pas  venus  jusqu'à  nous;  mais  il  semble 
qu'on  ne  doit  point  les  distinguer  d'un  re- 
cueil de  questions  que  saint  Ansbert,  au  rap- 
port de  la  chronique  de  Fontenelle  '',  avait 
adressées  à  un  reclus  nommé  Siwin.  Aigrade, 


1  11  est  cité  aussi  parNicou  Je  liliaïte,  qui  vivait 
sous  les  empereurs  liasile  et  Couslautin  :  et  d'aprùs 
le  catalogue  des  évèques  catholiques  d'Arméuie,  il 
est  certain  que  Zacharie,  à  qui  Jean  de  Nicée  écri- 
vait, a  vécu  du  temps  de  Pliotius.  Voyez  Lequieii. 
(L'éditeur.) 


-  Duchesne,  tom.  I,  pag.  G23. 

3  Maliillonius.tom.  U    AcL,  pag.  049. 

'-  .Mabillonius,  Actor.,  tom.  I,  et  lib.  XVIII  .•1)1- 
nal.,  uum.  32  et  2».  —  '  Tom.  1  Act.  Ordin.  S. 
Bened.,  pag.  lOaO,  Vit.  S.  Àmbcrti,  num.  5. 


HISTOraE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


812 

auteur  de  sa  Vie,  appuie  celte  conjecture, 
en  disant  que  ces  Trailôs  fuient  iirimipale- 
ment  composés  pour  des  personnes  qui  de- 
meuraient hors  de  l'enceinte  du  monastère 
d'Aumont.  On  a  attrii)ué  à  saint  Ansbert  le 
second  et  le  troisième  des  sermons  sur  l'As- 
somption de  la  Sainte-Vierge,  imprimés  sons 
le  nom  de  saint  Ildefonse,  archevêque  de 
Tolède  ';  mais  on  n'y  trouve  rien  qui  puisse 
autoriser  ce  sentiment. 
u''rT-Mi'V       •^-  ^^  Lettre  dogmatique  d'Evance  coutrc 
s.  leur,  r  ni   (.çuj.  „^^■^  soutenaient  qu'il  n'était  point  per- 
«do  .osd.i  niisclemanserdu  sang  des  animaux  a  passé 


sin  des  provinces  des  Gaules  qui  obéissaient 
au\  ^"isigollls  d'Espagne.  G"cst  à  l'ahhé  de  ce 
monastère  que  Dom  MabiHon  croit  qu'on 
peut  donner  la  lettre  dont  nous  parlons*. 
L'auteur  y  pousse  ses  adversaires  trop  loin, 
en  leur  disant  qu'il  ne  voit  pas  pourquoi  ils 
font  dillicullé  de  manger  du  sang  des  ani- 
maux, de  peur  d'être  souillés,  tandis  qu'ils 
négligent  d'accomplir  tous  les  autres  pré- 
ceptes de  la  loicntièie,  comme  l'observaliou 
du  sabbat,  et  quantité  d'autres  cérémonies 
légales.  Il  ne  faisait  pas  réllesion,  que  les 
chrétiens  contemporains  des  apôtres,  sans 
longtemps  sous  le  nom  d'Evance,  évêque  de      oUrir  les   sacrifices  prescrits  par  la  loi  de 


Xicnne,  qui  souscrivit  eu  581  au  premier  con- 
cile de  Màcon,  et  en  583  au  troisième  de  Lyon 
sous  le  roi  Gontran.  Mais  on  ne  doute  plus  au- 
jourd'hui qu'il  ne  faille  allribucr  cette  lettre  h 
un  autre  Evance  beaucoup  plus  récent  que 


Moïse,  et  sans  observer  le  repos  du  sab- 
bat avec  les  Juifs,  ne  laissaient  pas  de 
s'abstenir  des  viandes  sulibquées  et  du  sang 
des  animaux,  suivant  le  décret  du  premier 
concile  de  Jérusalem.  Evance  réussit  mieux 


l'évèque  de  Vienne.  En  etïet ,  le  Pastoral  h  montrer  qu'il  y  a  eu  un  temps  où  il  était 
de  saint  Grégoire  y  est  cité ',  et  on  y  parle  de 
ce  pape  comme  déjà  honoré  du  litre  de 
saint  dans  TEgiise.  Or  le  Pastoral  ne  fut  écrit 
qu'en  500,  et  ainsi  depuis  la  mort  d'Evance, 
évèque  de  Vienne,  arrivée  vers  l'an  o8G,  et 
au  plus  lard  eu  589  ;  et  saint  Grégoire,  n'é- 
tant mort  qu'en  (iUi,  n'a  pu  être  qualifié  du 
titre  de  saint,  du  moins  dans  le  langage  or- 
dinaire. 11  faut  ajouter  qu'Adon,  faisant  le 
catalogue  des  évoques  de  Vienne  avant  le 
pontificat  de  saint  Grégoire,  nomme  Sévère 
successeur  d'Evance.  D'ailleurs,  la  lettre 
dont  il  est  question  porte  dans  tous  les  ma- 
nuscrits le  nom  d'Evance,  abbé.  Il  n'y  est 
jamais  ap[ielé  évèque.  Le  sujet  même  de 
cette  Lettre  ne  peut  convenir  a  un  évOque 
de  Vienne.  Il  y  est  question  de  certaines  per- 
sonnes qui,  à  Sarragosse  ou  dans  les  envi- 
rons, voulaient  que  l'on  s'abslinl  démanger 
du  sang  des  animaux  ei  des  viandes  sull'o- 
quces.  Quelle  apparence  y  a-t-il  qu'un  évè- 
que de  Vienne  se  fut  mêlé  dans  une  contes- 
tation agiléc  si  loin  de  sou  diocèse  '/  Le 
cardinal  d'Aguirre  fait  auteur  de  cette  Lettre 
Evance,  archidiacre  de  Tolède  versl'anGGO'; 
mais  il  ne  résout  point  robjection  tirée  des 
manuscrits  qui  raltribuent,  non  à  un  archi- 
diacre, mais  àunabbi!. 

On  connaît  un  autre  Evance,  qui  était  ab- 
bé de  Troclar  sur  la  fin  du  septième  siècle. 
Troclar  était  situé  dans  le  diocèse  d'AIbi,  voi- 


'  Cave,  Iliat.  Liltcrana,  png.  38G. 
'  Hasmigc,  Observât,  in  Evanc,  loin.  I  Lcction. 
Cnnis.,  png.  :i2l,  "Jai. 

»  Tora.  III  Concil.  flispan.,  pag.  86,  87. 


de  lu  prudence  de  tolérer  dans  les  Juifs  con- 
vertis certaines  observances  légales,  afin  de 
ne  point  leur  donner  de  l'éloignement  de  la 
foi  de  Jésus-Christ.  Faibles  alors,  on  ne  pou- 
vait les  nourrir  d'une  substance  solide  :  il 
leur  fallait  du  lait.  C'est  ce  qui  engagea  les 
apôlres  à  leur  permettre  l'aljstinence  du 
sang  et  des  animaux  sutlbqués,  et  A  permet- 
tre aussi  quelquefois  la  circoncision.  «  Mais, 
ajoule-t-il,  à  présent  que  l'Eijlise  est  forti- 
fiée par  l'aliment  solide  de  la  foi,  elle  ne  doit 
plus  nourrir  de  lait  ses  enfants.  »  Il  prouve 
que,  selon  l'Apùti'e,  il  n'y  a  rien  d'immonde 
que  pour  les  impins  et  les  infidèles;  que 
toutes  les  créatures  de  Dieu  sont  bonnes, 
et  que  ce  n'est  pas  ce  qui  enlie  dans  le  corps 
de  l'homme  qui  le  souille,  mais  les  mau- 
vaises [lensées  qui  sortent  de  son  cœur,  les 
adultères,  les  homicides  et  aulres  crimes 
semljlables.  Ensuite  il  fait  voir  ipie,  i)ar  la 
défense  de  manger  du  sang,  il  faut  entendrç 
non  le  sang  même,  mais  les  œuvres  du  sang, 
c'esl-à-dii  e,  les  onivres  d'iniipiité.  Il  deinande 
à  ceux  qu'il  combat  s'ils  se  font  autant  de 
scrupule  de  la  foinicalion  et  de  l'adultère 
défendus  par  le  concile  des  apôtres,  qu'ils 
s'en  faisaient  des  deux  aulres  préceptes  faits 
dans  le  même  concile,  dont  l'un  regardait 
l'abstinence  des  viandes  sulibquées,  l'autre 
celle  du  sang  des  animaux.  Les  supposant 
moins  scrupuleux  sur  le   premier  que  sur 

*  Maliil.,  Olisirval.  in  rituin  S.  Segnh'nœ,  t.  IV 
Aciiir.  Ordin.  S.  Benedirti,  p.ig.  488,  cl  lili.  XVIII 
Annal.,  pag.  006,  loin.  I,  miin.  12. 


CHAPITIIE  I.XXXV.  —  DÉFENSEUR,  MUl.NE,  UENISDE  TELMEUA. 


n.oiBC 


tiu  eur, 
IC  Li- 


[VII'  SIKCLK.] 

les  deux  autres,  il  leur  adresse  ces  jia- 
rolcs  de  Jésus-Christ  :  Malheur  à  vous,  hy- 
pocrites, qui  pilliez  la  dîme  (tes  moiiirlres  her- 
bes, pemlunt  que  vous  ni'r/lij/ez  ce  qu'il  // 
a  de  plus  iuiporluut  dans  ta  Loi.  Il  les  ren- 
voie au  l'asloral  do  saint  Gi'éjjoire,  aux  li- 
vres de  saint  Auj^ustin  contre  Fausie  le 
^lanicliéen,  et  à  celui  de  saint  Jérôme  con- 
tre Donatien.  [  Cette  lettre  se  trouve  au 
tome  LXXXVIU  de  la  J'alrolor/ie  latine ,  col. 
"17,  avec  notices  tirées  de  la  France  littéraire 
et  de  Fabricius.] 

4.  Ursin,  dont  nous  avons  parlé  plus  haut, 
avait  eu  un  nouiiné  Défenseur  pour  disciple 
dans  sou  monastère  de  Ligugé'.  Ce  fut  lui 
(jui  le  dirigea  dans  ses  études,  et  surtout 
dans  la  lecture  des  Pères  de  l'Ev^lise.  Défen- 
seur en  recueillit  par  son  ordre  les  plus 
Ijeaux  endroits,  dont  il  forma  un  livre  inti- 
tulé :  Recueil  d'L'tincelles  ou  de  Sentences  des 
Pères  Orthodoxes.  Il  prend  dans  le  titre  la 
qualité  de  grammairien,  qui  se  donnait  sou- 
vent aux  gens  de  lettres.  Gomme  il  n'avait 
entrepris  cet  ouvrage  que  pour  épargner  au 
lecteur  la  peine  de  lire  un  grand  nombre  de 
volumes,  il  partagea  le  sien  en  plusieurs 
articles,  qui  comprenaient  cliacun  les  passa- 
ges des  Pères  sur  une  même  matière,  mar- 
quant k  chaque  passage  le  nom  du  Père 
d'où  il  l'aviiit  tiré.  Il  n'entre  point  dans  le 
dogme,  mais  seulement  dans  les  matières 
de  morale,  s'arrèlant  aux  principales  vertus 
chrétiennes,  comme  la  charité,  la  patience, 
l'amour  de  Dieu  et  du  prochain,  l'humilité. 


813 


Les  Pères  qu'il  cite  sont  saint  Clément,  Ori- 
gène,  saint  Cyprien,  saint  Basile,  saint  Au- 
gustin, Eusèi)e,  saint  Césaire,  saiid  Grégoire 
]>ape,  saint  Isidore  de  Seville,  l(!s  Vies  des 
Pères  et  un  certain  Joscppe  que  l'on  ne  con- 
naît point  d'ailleurs.  Son  recueil,  dans  les 
imprimés,  est  divisé  en  quatre-vingts  chapi- 
tres ;  mais  quchiues  manuscrits  n'en  mar- 
quent que  soixante-dix  '.  On  en  a  fait  trois 
éditions  :  l'une  h  Anvers  en  1530  ',  l'autre  à 
Venise  en  l.-)o2,  et  la  troisième  à  Cologne  en 
loo't.  Dom  Mabilion,  qui  n'avait  vu  aucune 
de  ces  éditions  ',  met  le  recueil  de  Défenseur 
parmi  les  ouviages  qui  n'ont  pas  vu  le  jour; 
et  l'ayant  trouvé  manuscrit  dans  la  biblio- 
thèque du  Monl-Cassin  ,  il  en  transcrivit  la 
Préface,  que  l'on  trouve  dans  l'Appendice  du 
second  tome  de  ses  Aiuiules  '.  Défenseur  s'y 
nomme,  non  pour  tirer  vanité  de  son  ouvrage, 
dont  il  rapporte  toute  la  gloire  à  Dieu,  et  à 
Ursin  son  maître,  mais  pour  engager  ses 
lecteurs  à  se  souvenir  de  lui  dans  leurs  priè- 
res. [Le  tome  LXXXVIIl  de  la  Patrologie 
lutine,  col.  593,  reproduit  le  recueil  de  Dé- 
fenseur, avec  notices  d'après  la  France  lit- 
téraire et  Fabricius. 

5.  Denis  de Telmera,  Telmarensis,eviCi\.nQ, 
au  vu"  siècle,  avait  composé  une  clnouique  en 
syriaque.  Le  tome  X  du  Spicilcg.  rom.,'ç.  223, 
en  contient  quel.jues  extraits  sur  l'ordre  ri- 
dicule donné  par  l'empereur  Phocas,  en  617, 
de  faire  baptiser  tous  les  Juifs,  ordre  que 
ce  piince  Ct  exécuter  par  ses  otliciers  et 
par  George, préfet  de  la  province.] 


Dcq!s  â« 
Telmera. 


'  Defensor,  Prœfat.  in  Librum  Scinlillarum. 

'  Spicilig..  toiu.  ]y,  pafi.  iSi. 

'  PosseviQ,  in  Àpparatu,  loin.  1,  iiag.  387,  680. 


*  Mabilion,  Iter  Italie,  tom.  I,  iiag.  123. 

^  Tom.  Il  Annal. ,i<ag.~Oi,  in  Appendice,  nam  23. 


814 


IlISTOmE  GÉiNÉRALE  DES  AUTEUllS  ECCLÉSIASTIQUES. 


CIIAIMTRELWXVI. 
Conciles  dn  VT  siècle. 


ARTICLE  I". 

CONCILES  D'ÉPAOSE  ET  DE  LTOS  [516]. 

p.«nTfi?Bn."  *•  ^*^  '^"'  SOUS  le  consulat  d'Apapil,  et  le 
dixième  des  calendes  d'octobre,  c'est-à-dire 
le  13  septembre  517,  Tjuc  se  tint  le  concile 
d'Kpaùne,  que  l'on  ci-oit  être  la  ville  d'Yène, 
dans  le  diocèse  de  Relley.  C'était  dans  la 
preniicfc. 'innée  du  règne  de  Sigismond,  que 
saint  .\vitc,  évèquede  Vienne,  avait  converti 
ù  la  foi  catholique.  Il  se  trouva  en  ce  concile 
vingt-cinq  évéïines,  tous  du  royaume  de 
lîourgognc,  dont  le  premier  est  s^aint  Avite, 
qui  y  présida.  Ce  fut  lui  aussi  qui  le  convo- 
qua ,  comme  on  le  voit  par  la  lettre  circulaire 
qu'il  écrivit  à  tous  les  évoques  de  sa  province 

CoociT™!^   pour  les  inviter  au  concile.  Il  s'y  plaint  de  la 

'"'•  '     °    cessation    de   ces  assemblées,   témoignant 

que  le  Pape  lui  en  avait  lait  des  reproches 

très- vifs. 

cnons  de       2.  Le  concile  fit  quarante  canons.  On  les 

To'm'iv  commença  par  ordonner  que  les  évênues  ', 

<5-6.  mandes  par  leurmotropolitam  pour  venn'ou 

au  concile,  on  ;\  l'ordination  d'un  évèque,  ne 
pourraient  s'en  dispensev  qu'ea  cas  de  ma- 


Cin.  I. 


ladie.  —  Quoique  saint  Paul  eût  exclu  claire-  c„.  ». 
ment  de  la  prêtrise  et  du  diaconat  ceux  qui 
avaient  ëtéjnariés  denx  fois,  il  était  néan- 
moins arrive  que  quelques  évêques  avaient 
par  simplicité  ordonné  des  bigames  :  c'est 
pourquoi  Ion  en  lit  '  une  nouvelle  défense,       s. 
en  excluant  aussi  de  la  cléricaturc'  ceux  qui 
avaient  fait  pénitence  publique.  —  On  défen-       t. 
dit  aux  évoques',  aux  prêtres  et  aux  diacres 
d'avoir  des  chiens  cl  des  oiseaux  de  chasse: 
ce  qui  montre  que  le  clergé  commençait  à 
se  laisser  aller  aux  mœurs  des  nations  bar- 
bares qui  dominaient  en  Bourgogne.  —  Il  fut       s. 
aussi  fait  défense  '  aux  prêtres  d'un  diocèse 
de  desservir  une  église  d'un  autre  diocèse 
sans  la  permission  de  l'évèque  diocésain,  à 
moins  que  l'évèque  de  qui  ces  prêtres  dé- 
pendent ne  les  ait  cétiés  à  celui  dans  le 
diocèse  duquel  est  cette  église.  —  Défense  de       «. 
dounerla  communion  a  un  prêtre  ou  à  un  dia- 
cre °  qui  voyage  sans  avoir  des  lettres  de  son 
évèque.  — Les  ventes  des  biens  de  l'I^glise''       ^■ 
faites  par  les  prêtres  qui  desservent  les  parois- 
ses sont  déclarées  nulles. — Ils  doivent  aussi       ». 
dresser  des  actes  par  écrit"  des  choses  qu'ils 
ont  achetées,  ou  pour  eux-mêmes,  ou  au 


'  Prima  et  immutabili  coiistitulione  decrelttin 
est,  ut  cum  metropolitanus  fratrcs  vel  coinprO' 
vincialef!  suos  ad  concilium,  aut  ad  ordinaliontm 
cujuscumque  coiisacerdolis  credidcril  evocaidos, 
nisi  causa  tœdii  evidenlis  exltteril,  nulttis  excu- 
set.  Can.  1,  loin.  IV  Cocil.,  pag.  t.i"U. 

'  A"c  secundœ  uxoiis  aul  renuplu'  marilus  pres- 
byler  aul  diaconus  ordinelur,  ahunde  sufficercl 
nb  Aposlnlo  coiislilulum  Sed  quia  prœccplum  hu- 
jusmodi  txcedi  quoiumdaui  fialrum  simplicitale 
ognoviiiius  ,  specidli  observunlia  renocainus  , 
scitnte  eo  qui  contra  iiiterdirlum  ordinaierit, 
rcum  fralribus  se  fttturum  :  illo  uulein  qui  con- 
tra fas  linnoreni protiibilu'  bencdicliontx ambieril, 
rtiliU  se clcricalis minislcrii prasumpluruin.  Can. 
2,  ibtd. 

*  l'wnili  ntiam  professi  ad  clcricatum  penilus 
non  rncenlur.  C.mi.  3,  ibid. 

'  Presbyleris  episcopis,  alque  diacnnibus  canes 
ad  venandum,  et  accipilres  habere  non  liceat. 
Quod  si  quis  talium  personarum  in  liac  fucril  vo- 
luntatc  deteclus,  si  cpiscopits  est,  tribus  mcnsibus 
se  a  cominunionc  suspendal;   duobus  presbylcr 


nhslincatur.  une  diaconus  ab  omni  offlcio  et  corn- 
niunione  cessabit.  Can.  4,  ibid. 

'  Xe  presbyter  terrilorii  alieni,  sine  conscientia 
sui  episcopi,  in  allerius  civilalis  terrilorio  prw- 
Fumat  basilicis  atqxie  oratoriis  inseriire,  nisi 
forte  cpiscopus  suus  illum  ccdat  episcopo  illi,  in 
ciijus  Icrritorio  habitarc  disposuit.  In  quo  si  ex- 
ccssum  fuerit,  episcopus  cujus  presbyier  fuerit 
frari  sua  noverit  culpabilem  se  fulurum,  qui 
cliricum  juris  sui  illicita  facientem  sciens,  ab 
sçnndali  admissione  non  reiocal.  Can.  :>  pag.  lyil. 

"  Presbylero,  vil  diacono,  sine  antixlilis  sui 
epistolis  ambulanli  cominunioncm  nullus  impen- 
dat   Can.  6,  ibid. 

'  (Juidquiri  parochiarum  presbyl(ri  de  cccUsias- 
lici  ju>is  pussrssione  di'<lraxerinl,  inane  habea- 
tur  <(  vacuum,  in  vendilorem  cowpurauiis  ac- 
lione  rerlcnda.  Cau.  7,  ibid. 

'  Prcsbyler  dum  diocesim  tciiet,  de  his  quœcme- 
rit,  aut  ecclcsiœ  nomine  scripluram  facial,  aut 
ab  cjus  quam  lenuit  cfc/o.s'iVr  ordinaiwne  discC' 
dat.  Similis  quoque  de  renditionibus,  quas  abba- 
Ic.f  farcre  prtrsuwpferint  forma  servabilur,    ut 


fTi*  SIÈCLE.]  CHAPITRE  LXXXVI 

nom  de  l'Église.  La  môme  chose  est  orilon- 
néc  à  i'éfîard  des  abbos  :  ils  ne  peuvent  rien 
vendre  sans  la  permission  do  l'évèqiie,  ni 
mcmoaliiancliir  les  esclaves  qui  ont  été  don- 
nés aux  moines,  parce  qu'il  n'est  pas  juste 
que,  pendant  que  les  moines  s'occupent  tous 
les  joui's  des  travaux  de  la  campagne,  leurs 
esclaves  jouissent  du  loisir  et  du  repos  de  la 
libellé.  —  Un  même  abbé'  ne  peut  arouverner 
deux  monastères,  ni  en  établir*  de  nou- 
veaux à  l'insu  de  l'évêque.  — Les  clercs  peu- 
vent '  plaider  devant  les  juges  séculiers 
comme  défrnseurs,  mais  non  comme  de- 
mandeurs, si  ce  n'est  par  l'ordre  de  l'évê- 
que. —  Celui-ci  n'a  pas  le  pouvoir*  de  vendre 
quelque  chose  des  biens  de  l'Hcflise  sans  l'a- 
grément du  métropolitain  ;  mais  il  lui  est  per- 
mis de  faire  des  échanges  utiles.  —  Un  clerc 
convaincu  de  faux  témoignage  '  est  tenu 
pour  coupiible  de  crime  capital  :  eu  consé- 
quente il  doit  être  déposé  "^  et  mis  dans  un 
monastère  pour  le  reste  de  ses  jours,  et  n'être 
admis  à  la  communion  que  dans  cet  endroit 
seul.  — Lors(pie  le  clerc  d'une  église  est  fait 
évèque"  d'une  autre,  il  doit  laisser  à  l'église 
qu'il  a  servie  d'abord  tout  ce  qu'il  a  reru  en 
forme  de  don,  et  ne  retenir  que  ce  qu'il  a 
acheté  pour  son  usage,  selon  qu'il  en  con- 


—  CONCILE  D'EPAONE. 


813 


stera  par  écrit.  —  Ceux  d'entre  les  clercs  qui   c»"-  "= 
amont  (îté  convaincus  d'avoir  mangé  '  avec 
des  hi'r('li(pifs,  devront  élre  séparés  de  la 
conmiuiiioii  do  l'I^giise  pendant  un  an;  mais 
celle  peine  ne  regarde  que  les  clercs  d'un 
rang  supérieur,  et  l'on  se  conlenlera  de  quel- 
ques châlimenls  corpoi'els  envers  les  jeunes 
clercs  (pii  seront  tombés  dans  celle  faute.  S'il 
arrive  qiiedes  laïques  aient  assistéaux  festins 
des  Juifs,  il  leur  sera  défendu  de  manger  en- 
suite avec  aucun  clerc.  —  Le  concile  permr't        '"• 
aux  prêtres  "de  donner  l'onction  du  chrême 
aux  hérétiques  malades  à  l'extrémité,  lors- 
qu'ils demandent  en  cet  état  de  se  convertir; 
mais  en  santé  ils  doivent  demander  cette  onc- 
tion à  l'évêque. —  Il  déclare  nulles  les  dona-        "• 
lions  '"  que  l'évêque  fait  des  biens  de  l'Église, 
à  moins  qu'il  ne  l'ait  indemnisée  d'autant  de 
son  propre  bien,  et  il  ne  veut  pas  qu'aucun        '»■ 
clerc"  puisse  acquérir  le  droit  de  prescrip- 
tion sur  les  biens  de  l'iCglise  par  le  laps  du 
temps  qu'il  les  aura  possédés.  —  Il  déclare       la. 
que  si  un  abbé  trouvé  eu  ûiute'-  ou  en  fraude, 
quoiqu'il  se  prétende  innocent,  ne  veut  pas 
recevoir  un  successeur  de  la  part  de  son 
évêque.l'atl'airesera  portée  par  devanl  le  mé- 
tropolitain. —  Il  défend  aux  évêques",  aux        20. 
prêtres,  aux  diacres,  et  à  tous  autres  clercs, 


quidquid  sine  episcoporum  notitia  vcnditum  fue- 
ril,  ad  poteslatem  epUcopi  revoccliir.  ilancipia 
rero  moiuuliis  doitaia  ab  abbale  non  liccat  riia- 
numitti.  Iiijustuin  enim  pulamus,  ut  monachis 
quolidianum  rurale  opus  facientibus,  servi  co- 
rum  libertalis  otio  potinntur.  Can.  S,  ibid. 

'  L'ail»!  abbatem  duobus  monasleriis  interdici- 
mus  prœsidere.  C.in.  !),  ibid. 

'  Ccllas  noias  aut  coiigrcgatiunculas  monacho- 
mm  absque  episcopi  notUia  prohibemus  iuslitui. 
Can.  10,  ibid. 

'  Clrrici  sine  ordinatione  episcopi  sui  adiré,  vel 
interpctlure  publicum  non  prasumant  ;  scd  si pul- 
sali  futrinl,  seqiii  ad  sœculare  judicium  non  mo- 
rentur.  Can.  1 1,  ibid. 

NiiUus  episcnpus  de  rébus  ecclesiœ  suœ,  sine 
conscicnlia  melropoUlani  sui,  vendendi  aliquid 
habeiit  puteslnlem ;  utiti  tamen  omnibus  commu- 
latwne  permissa   Can.  12,  ibid. 

^  Si  quis  clericus  in  falso  teslimonio  convictus 
fuerit,  reus  capitatis  criminis  ccnseatur.  C.  Vi.ibid. 

*  Si  prcsbyter  aul  diaconus  criinen  capitale 
commiseril,  ab  offica  honore  defiositus  in  monas- 
terium  rtlrudatur ,  Un  lantummodo,  quandiu 
vixeril,  cninmunione  sumenda.  Can.  22,  pair.  ','619. 

'  Quisquùi  clericus  aliquid  de  munificfntia  ec- 
clesiœ cui  scnieral  adrptus,  ad  summum  sacer- 
do'ium  alUrius  civitalis  est  aut  fuerit  ordinatus, 
quod  dono  accepit  vel  acceperil  rcddat  ;  quoi 
usu  vel  proprietate  secundum  inslrumenti  seriem 
probatur  émisse,  possidcat.  Can.  il,  pag.  1377. 

'  Si  superioris  loci  clericus  hœretici  eujuscum- 


que  clerici  convivio  interfuerit,  unni  spatio  pa- 
cem  Ecclesiœ  non  liabcbit.  Quod  juntores  clerici 
si  prœsuiiipserint,  vapulabunt.  A  Judœorumrero 
conviens  eliam  liicos  constitutio  nostra  prolii- 
buil;  neccum  ullo  clerico  noslro panem  comedat, 
quisquis  Judtrorum  fueric  convivio  inquinalus, 
Can.  15,  pnp.  157S. 

'^  Presbi/teros,  propter  salutem  animarum  qvam. 
in  cunclis  oplamus,  despcrulis  et  decunibcnlibus 
hœrelicis,  si  conversionem  subituni  pétant,  chris- 
maie  ptrmillimus  subrenire.  Quod  omnes  con- 
rersuri,  si  sani  sunt,  ab  episcopo  noverint  expe- 
lendum.  Can.  IG,  ibid. 

">  Si  episcopus  condito  tcstamenlo  aliquid  de 
ecclcsiastici  juris  proprietate  legavenl,  aider  non 
raltbit,  nisi  vel  tanluni  de  juris  proprii  facultate 
supplererit.  Cau    17,  ibid. 

"  Cleriri  quod  eliam  sine  precatoriis,  qualibet 
diuturnilate  temporis  de  ecclesiœ  rcmunerationc 
possederint  cum  auctorilate  domni  gloriosissimi 
principis  nostri,  in  jh,9  proprtetarium  prascrip- 
lione  tempori.-i  non  vocetur,  dunimoJo  paleat  (c- 
clesiœ  rem  fuisse:  ne  videantur  eliam  episcopi 
administrationis  prolixœ  eut  precatorias,  cum 
ordinali  suni,  facere  dcbuisse.  aut  diu  lenlas  ec~ 
clesiœ  facullates  proprielali  sua  passe  transcH- 
bere.  Cau.  18,  ibid. 

'-  Àhbas  si  in  culpa  reperiatur  aut  fraude,  et 
innocentem  se  asserens  ab  episcopo  suo  accipere 
noluerit  snccessorem,  ad  metropolitani  judicium 
deducatur,  Can.  19,  ibid. 

"  Episcopo,  presbytero  et  diitcono,  vel  ceteris 


81 G  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 

d'aller  voir  des  femmes  ii  des  heures  indues, 
ce  qii'il  ciilcad  de  midi  et  du  soir  ;  njoutant 
que,  s'il  y  a  nL^cessité  de  les  aller  voir,  ils  le 
pourront,  accomp:ii,^n'.'S  d'aulrcs  clercs. 
Cm.  !i.  3.  Ou  abolit  dans  ce  concile  la  consécra- 

tion '  des  veuves  appelées  diaconesses  :  seu- 
lement on  permet,  pour  le  cas  où  elles  vou- 
draient mener  une  vie  rcli^'ieuse,  deIeu^don- 
"•  lier  la  bénédiction  de  la  pénitence.  — Celui 
qui, ayant  reçu  la  pénitence,  la  quille',  en  pu- 
bliant son  bon  propos,  pou.'  mener  une  vie  sé- 
culière, ne  pouii'a  être  admis  .'i  la  communion, 
qu'il  ne  reprenne  l'étal  qu'il  avait  cmbras- 
5»-  se.  —  Ou  permet  aux  laïques  d'accuser' les 
clercs,  de  quel([ne  ran^  qu'ils  soient,  pourvu 
f-  qu'ils  ne  leur  object'ent  rien  que  de  vrai.  —  Il 
est  l'ait  défense  de  mettre  des  reliques'  dans 
les  oratoires  de  campagne,  s'il  n'y  a  des  clercs 
dans  lé  voisinage  pour  y  venir  faire  l'oilîce, 
et  rendre  honneur  à  ces  cendies  pi-i'cicuses 
par  le  chani  des  psaumes. Que  s'il  n'y  en  a  pas 
d'assez  pioches,  l'on  n'en  ordonnera  aucun 
pour  ces  oratoires,  qu'auparavant  ou  n'ait 
fait  une  fondation  suHisante  pour  leur  vôle- 
s6.  ment  et  leur  nourriluie.  —  Il  est  défendu 
de  consacrer  '"  avec  l'onction  du  chi'ème 
d'autres  autels  que  des  autels  d(5  pierre:  ce 


AUTEURS  ECCLESIAS'nOUES 

qui  marque  qu'il  y  en  avait  encore  quelques- 
uns  de  bois.  —  Danslacélébrolioii  des  divins 
offices',  les  évêques  de  la  province  doivent 
se  conformer  au  rit  de  l'église  métropoli- 
taine.— S'il  arri\e  qu'un  évcqne^nieure  avant 
d'avoir  absous  une  personne  condamnée,  le 
successeur  pourra  l'absoudre,  en  cas  qu'elle 
se  soit  corrigée  de  sa  faute,  et  qu'elle  en  ait 
fait  pénitence.  —  Suivant  l'ancienne  discipli- 
ne, les  apostats  *  qui,  ayant  été  baptisés  dans 
l'Église  catholique,  tombaient  dans  l'hérésie, 
n'étaient  reçus,  lorsqu'ils  revenaient  ù  l'E- 
glise, qu'après  un  grand  nombre  d'aum'-es  de 
pénitence.  Le  concile  réduit  celte  pénitence 
à  deux  ans ,  pendant  lesquels  ils  devionl 
jeûner  lous  les  trois  jours,  fréquenter  l'égli- 
se ,  s'y  tenir  à  la  place  des  pénitents,  et  sor- 
tir avec  les  catéchumènes.  Que  s'ils  s'en  plai- 
gnent, on  les  obligera  d'observer  la  péniten- 
ce prescrite  par  1rs  anciens  canons.  —  Drfen- 
se  de  recevoir;!  pénitence'  ceux  qui  auront 
contracte  des  mariages  incestueux,  s'ils  ne  se 
séparent  :  on  appelle  ainsi  les  mariages  avec 
la  belle-sœur,  la  belle-mère,  la  belle-hlle,  la 
veuve  de  l'oncle,  la  cousine  peimaine  ou  is- 
sue de  gei'maine. — Les  homicides  '  qui  aui  ont 
évité  la  peine  portée  par  leslois,  feront  la  péni- 


clericis,  horis  prœterilis,  id  est,  viTidianis  vel 
vespertinis,  ad  fwminas  proliibemus  accessum  : 
qiuu  lameii,  si  causa  fuerit,  cum  piesbyterornm 
aut  clericnrum  leslimonin  videanlur.  C.nn.  20,  ihkl. 

'  Vidiiarum  coniecrulionciii,  quns  diaconas  vo- 
cilant,  ab  omni  regionc  nosira  junitMs  abrôga- 
mus,  sola  eis  pwnUenliu,  si  convirli  ambiunl, 
iniponenda.  Can.  21,  ibid. 

'  Si  qnis  accepta  professaquc  pœnitciitia,  botn 
immcmor,  ad  sœculaha  relabatur.  prorsiis  cuii- 
municare  non  potcrit,  «iVi  professioiii,  quam  il- 
licite prœtermiseral,  reformelur.  Can.  23,  jiag. 
1579. 

'  Laïcis,  coiitra  ctijuslibct  gradus  clericum,  si 
gvid  cniiiinale  parant  objicere,  duniiiwdo  vera 
suggérant,  proponendi  permittimus  poleatalcm. 
Can.  24,  ibid. 

'  Sunclorum  rcliquiœ  in  oratoriis  villaribus 
noH  ponnntur,  riisi  forsitan  clcricos  cujuscuiuque 
pnrocitiœ  ricinos  esse  conlingal,  qui  sacris  cine- 
ribus  psallrndi  frequenlia  famulentur.  Quod  si 
illi  defuerinl,  non  anle  proprii  ordincntur,  quam 
eis  competcns  viclus  et  veslitus  subslanlia  depu- 
telur.  Cnn.  2';,  itiid. 

5  Allaria,  nisi  lapidea,  chrismatis  unclionc  non 
sacrentur.  Cnn.  2(>,  ibid 

•  Ad  celebranda  divina  officia  ordinem,  qucm 
melropolilani  leneiil,  prnviitcialcs  eoruni  obser- 
vare  dehcbnnt.  Can.  27,  ibid. 

'  Si  episcopus  anle  damnaliabsolulionem  obitu 
rapiatur,  correctum  aut  p(cnilcntem  successori 
licebit  absotierc.  Can.  28,  ibid. 


8  Lap.tis,  id  est,  quiin  calholica  baptizati,  prce- 
varicatione  damnabili  posl  in  hœrcuim  Iransie- 
runt,  grandcm  rcdcundi  difficullatcm  sanxit  anti- 
quitus.  Quibus  nos, annonun  niuliiliidine  brtriatT, 
pœnitintiam  bicnnii  condilione  infra  scriplœ  ob- 
servalionis  imponimus;  ut,  prascripto  biennio, 
tertia  die  sine  rclaxalione  jejunent ,  ecclesiam  slu- 
deunl  (riqucntare,  in  panilenlum  loco  slandi  et 
orumli  liumitilalcm  noverint  observandam  :  ac 
etitim  ipsi,  cum  calecliumcni  proccd(re  conimo- 
ncntur,  abscedant.  Hoc  si  ohservare  voluerint, 
constiluto  iemporc  admitlendis  ad  atlarium  oh- 
servalio  reluxctur.  Quam  si  arduam  vel  duram 
forte  putaverint,  slatuta  pratcritorum  canonum 
complere  dcbehunt.  Can.  29,  ibid. 

*  Incestis  conjunctionibus  nihil  prorsus  veniœ 
rcsrrvajnus,  nisi  cum  adulterium  srparatione sa- 
navtrint.  Inccstos  vero,  nec  ullo  conjugii  nomine 
prœvelandos,  prœter  illos  qiios  tel  nominare  fu- 
ncslum  est,  lios  esse  ccnsemus.  Si  quis  relictam 
fratris,  quœ  pêne  prius  soror  crlilcrat,  carnali 
conjunctione  violavcrit;  si  quis  f râler  germa- 
nam  uxoris  suœ  accipiat:  si  quis  novercam  du- 
xerit  :  si  quis  consobrinœ  sobrinave  se  socicl  : 
quod  ut  a  prwsenti  temport  proliibewus,  ita  ea 
quœ  sunt  antcrius  institula  non  soliimus.  Si  quis 
reliclœ  avunculi  mi.tcealur,  aut  pairui,  vel  pri- 
lignre  concubilu  jolluntur.  Sane,  quibus  conjunc- 
tio  illicila  inlerdicilur,  habcbunl  incundi  melio- 
ris  conjugii  libcrlatem.  Can.  30,  ibid. 

">  De  paniicnlia  homicidarum,iiui  sœculi  lege» 
eraserint,  hocsumma  reverenlia  de  eii  inter  not 


CHAPITRE  LXXXVI.  —  CONCILE  DE  LYON. 


[VI*  SIÈCLE.] 

Icnce  miirquëe  dans  les  vinfçl-deuxième  et 
vini;l-li'(iisii^ine  canons  d'Ancyre.  Lii  veuve 
(l'un  piôtic  ou  '  il'iin  diacre  ne  pourra  se  re- 
marier: si  elle  le  fait,  elle  sera  chassée  de 
rKi;Iise,  de  môme  que  son  mari,  jusqu'à  ce 
qu'ils  se  S(''parcnt.  —  Les  églises  des  licrëti- 
ques  ■  seront  rcj;ardi''cs  con.me  in]purcs  et 
exécrables=,  don  ne  pourra  les  appli  jucr  à  de 
saints  usages,  attendu  qu'il  n'est  pas  possible 
de  les  purifier;  mais  on  pourra  reprendre 
celles  (pi'ils  auront  otécs  par  violence  aux  ca- 
tholiques. Victorius,  cvéque  de  Grenoble,  l'un 
des  pères  du  concile,  avait  consulté  sur  ce 
sujet  saint  Avitc  de  Vienne,  quelque  temps 
après  la  conversion  du  roi  Siqisniond.  La  ré- 
ponse de  saint  Avitc  fiit  qu'on  ne  devait  se 
servir  ni  des  églises  des  hérétiques,  ni  de 
leurs  vases  sacn's;  et  il  y  a  apparence  que 
ce  fut  le  même  saint  qui  fil  t'aiic  là-dessus  le 
canon  dont  nous  venons  de  parler.  Le  dixième 
du  premier  concile  d'Orléans  porte  au  con- 
traire qu'il  faut  consacrer  les  églises  des  hé- 
rétiques, et  c'est  l'usage  général  de  l'Eglise. 
4.  Le  maître  qui  de  son  autorité  '  ciura  fait 
mourir  son  esclave,  sera  prive  pendant  deux 
ans  de  la  commuiiion  de  l'Église.  —  Les  ci- 
toyens nobles  '■  célébreront  la  nuit  de  l'àques 
et  de  Noël  avec  leur  évéque,  en  quelque 
lieu  qu'il  se  trouve,  afin  do  recevoir  sa  béné- 
diction. —  On  ne  doit  ôler  à  aucun  pécheur" 
l'espérance  du  pardon,  s'il  fait  pénitence  et 
se  cori'ige  ;  que  s'il  se  trouve  à  l'article  de 


817 


la  mort,  on  doit  lui  remettre  le  temps  de  la 
pénitence  prescrit  par  les  canons,  à  condition 
qu'il  la  fera  s'il  revient  en  santé,  après  avoir 
reçu  l'absolution  do  ses  p  'chés.  — 11  n'est  pas  cin.  n 
permis  d'ordonner  clerc"  un  laïque,  s'il  n'a 
auparavant  doniKÎ  des  marq\ies  de  piété.  — 
Il  ne  l'est  pas''  non  plus  d'accorder  l'cnti'i''!!  ''■ 
des  monastères  de  tilles,  sinon  aux  [lerson- 
nes  âgées  et  d'une  vertu  éprouv('e,  loi'sque 
les  besoins  du  monastère  le  demandent.  Ceux 
mêmes  qui  y  entrent  jiour  dire  la  messe,  doi- 
vent sortir  aussitôt  que  le  service  est  flni  :  ce 
qui  montre  que  les  religieuses  n'avaient  alors 
que  des  chapelles  dans  l'intérieur  de  leurs  mai- 
sons. Le  coiuile  défend  parliculièrement  aux 
clercs  etaux  jeunes  moines  d'y  entier,  à  moins 
qu'ils  n'y  aient  des  parentes.  —  Si  un  esclave  "  ;"• 
coupable  de  quelque  crime  atroce  se  nifugie 
dans  l'église,  il  ne  sera  exempt  que  des  peines 
corporelles,  et  l'on  n'obligera  pas  son  maître 
de  prêter  serment  de  ne  lui  point  imposer 
de  travail  extraordinaire,  ou  de  ne  lui  point 
couper  les  cheveux  pour  le  faire  reconnaître. 
—  Comme  tous  les  évéqnes  '  devaient  veiller  40. 
à  l'observation  de  ces  canons,  le  concile  dé- 
clare que  ceux  qui  négligeront  de  le  faire, 
seront  coupables,  et  devant  Dieu,  et  devant 
leurs  confrères. 

0.  La  même  année  317,  les  évêques,  au 
nombre  de  dix,  s'assemblèrent  avec  l'arche- 
vêque de  Lyon,  nommé  Viventiole,  pour  ju- 
ger Etienne,  accusé  d'avoir  commis  un  iu- 


Coneile  do 
Lyon  en  ~>n , 
Tom.  IV  Con- 
cile, p.  1ÔS*. 


placuit  observari,  quod  Aticyritani  canones  de- 
creverunt.  Can.  31,  p.Tg.  1580. 

'  Relicta  prtsbyteii,  sive  diaconi,  si  aiicum- 
qiie  renupserit,  caleiins  ab  ecclesUt  pellatur,  do- 
uée a  conj  une  Houe  illiciia  separelur  :  marilo  quo- 
que  ejus  simili  itsque  ad  correctionem  severitate 
pleclendo.  Can.  3i,  ibid. 

*  Basilicas  hœrelicorum,  quas  tanla  execra- 
tione  luibemus  exosas,  iitpolluliojiem  earumpur- 
gabilem  non  ptttemus .  sanctis  tisihus  applicare 
dfspicimus.  Sane,  qxias  per  violentiam  nostris 
abstulerant,  possinnus  reiocare.  Cau.  33,  ibid. 

'  Si  qiiis  senum  propriiiin  sine  conscientia  ju- 
dicis  occiderit,  excommunicatione  biennii  effusio- 
nem  sanguinis  expiabit.  Can.  34,  ibid. 

*  Ut  cives  superiorum  n>Ualium  nocle  Paschtr, 
ac  nativilatis  Domini  snlemnitale,  episcopos,  nec 
interest  in  quibus  civitatibus  positos,  accipiendœ 
benediclionis  dtsiderio  noierint  expelendos.  Can. 
35,  ibid. 

'^  Ae  uliiis  sine  remcdio,  aiit  spe  veniœ  ab  ec- 
clcsia  repellulur,  neve  nlli.  si  aiit  pueniiuerit,aut 
se  con\xeril,  adveniam  redeundi  adilus  obstrua- 
tur ;  sed  si  cui  forsitan.  discrimen  mortis  immi- 
neat.  damnalionis  constiluta  tempora  relaxen- 
tur.  Quod  si  œgrotum  accepta  viatico  revalescere 
XI. 


forlasse  contingit,  statuti  temporis  spalia  obser- 
vare  convcniel.  Can.  36,  ibid. 

^  i\'e  Idicis  idsi  religione  prœmissa  clericus  or- 
dinciur.  Can.  37,  ibid. 

■"  Monasleria  puellarum  nonnisi  probatœ  vilai, 
et  œtatis  provectœ.  ad  quascumqtie  earvm  néces- 
sitâtes vel  minislrationes  permillanlur  intrare. 
Ad  faciendas  vero  missas  qui  ingressi  fuerint,  sta- 
lim  exaclo  ministerio  regredi  feslinabunt.  Alias 
autem  nec  clericus,  nec  monaclixis  juvenis,  ullum 
ad  puellarum  rongregalionem  habebit  accessuni, 
(li.si  hoc  aut  palerna,  nut  germana  necessitudo 
probelur  admitlcrc.  Can.  38,  pag.  1581. 

s  Servus  rcalu  alrociore  culpabilis  si  ad  eccle- 
siam  confugrrit.a  corporalihus  lanlum  suppliciis 
exnisetur.  De  capillis  vrro,  rel  quocun^que  opère, 
placuit  a  doniinis  juramenta  non  exigi.  Can.  39, 
ibid. 

9  Qiiocirca  hœc  qui."  sitperna  inspiraiione  com- 
muni  consensu  placuerunt,  si  qnis  sanctorum 
antistitum,  qui  statuta  prœsentia  subscriplioni- 
bus  propriis  jirinacerunt,  nec  non  et  quos  eonnn 
Deus  esse  volucrit  successores,  relicta  integritale 
ohservationis  excesserit,  reum  se  Divinilatis  pa- 
riter  et  fraternitatis  judicio  futurum  esse  cog- 
noscat.  Can.  40,  ibid. 

32 


818 


HISTOIRE  GFNKRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


cesle  avec  une  femme  appelée  Palladia.  Us 
en  furent  convaincus  l'un  et  l'aulie,  et  il  fut 
convenu  que  tous  les  évèques  qui  avaient 
prononcé  leur  condamnation  ',  la  maintien- 
draient inviolablemcnl,  et  qu'ils  en  useraient 
de  môme  contre  tous  ceux  qui  seraient  trou- 
vés engagés  dans  uu  semblable  crime.  —  Il 
parait  qu'Klienne  et  Palladia  étaient  des  per- 
sonnes puissantes,  et  que  la  cour  prenait  in- 
térêt dans  celte  all'aire  :  c'est  pourquoi  les 
évêques  de  ce  concile,  après  s'être  en}j;agé6 
mutuellement  à  maintenir  le  jugement  qu'Us 
avaient  porté  contre  les  coupables,  décla- 
rèrent que,  si  quelqu'un  d'entre  eux  venait 
à  être  persécuté  pour'  ce  sujet,  tous  les  au- 
tres prcndi'aient  part  ji  ses  souEVanccs,  et  le 
soulageraient  des  perles  qu'il  aurait  souf- 
fertes. —  Us  ajoutèrent  que ,  si  le  roi ,  irrité  ' 
delà  sentence  rendue  contre  Etienne  et  Pal- 
ladia, conlinuait  à  s'abslcuir  de  la  communion 
des  évèques  qui  l'avaient  portée,  et  à  ne 
plus  se  trouver  avec  eux  à  l'église,  ils  se  re- 
tireraient dans  des  monastères,  d'où  aucun  ne 
sortirait ,  que  la  paix  ne  fût  rendue  à  tous  les 
autres  ;  —  que  cependant  personne  *  n'au- 
rait la  témérité  d'usurper  l'église  d'un  au- 
tre, ou  d'y  faire  l'ollice  en  son  absence,  ou 


•  InnomineTrinitalis congregatiiterato in  unum, 
in  causa  Stephaniinceslicriinine poltuti,  atque  in 
Lugilunensi  urbe  degentes  decrevimus,  ut  hoc  fac- 
Cum  nostrum,  qttod  in  damnationem  ejus,  vel  il- 
lius,  quant  sibi  illicile  sociavit ,  uno  consensu 
subscripsimus,  inviolabiliter  serfaremus.  Quod 
non  solum  de  prafatis  eisdem  personis  placuit 
custodiri;  sed  m  omnibus  quolibet  loco  vel  tem- 
pore  in  hac  fuerint  percersitate  delecti.  Caii.  l, 
ton).  IV  Concil.,  pag.  1581. 

»  Id  quoque  adjecimus,  ut  si  quicumquc  nos- 
trum tribul'itinnem  quamcuwque.  x-cl  amaritudi- 
nem,  aut  commotionem  fartasse  potestalis  ne- 
cesse  habuerit  tolerare,  omnes  vno  cum  eodem 
animo  compali(>ntur.  Ll  quidquid  tel  dispendio- 
rum  obtcntu  causw  unus  susceperit,  consolalio 
fralernœ  anxielatis  relevct  tribulatos.  CaD.  2, 
ibid. 

••  Quod  si  se  rex  prœcellentissimus  ab  ecclesia, 
tel  sacerdolum  communione,  nltra  suspenderit , 
locum ei daiiles ad sacrœ  niatris gremium  leniendi, 
sancti  aniiftites  in  nionastiriis  se  absque  ulla 
dilalione,  prout  cuiquc  fuerit  oppurlunum  reci- 
pianl,  donec  pacem  inlegraw.  ad  chnritatisple- 
niludinem  coufervandam,  saiiclorum  [tejrus  pre- 
cibus,  rtslilucre  pro  sua  polenlia  vel  pietate  dig- 
iictur.  lia  ut  non  unus  quicumque  prius  de  mo- 
naslerio,  in  quo  elegerU  hahilare,discedat,  quam 
cunclis  generaliter  fratribus  fuerit  pax  promissa 
rel  reddila.  Cm.  .■?,  ibid. 

'  Illud  etinm  juxla  staluta  antiquorum  cano- 
nuin  specialiter  renovamus  omnino,  ut  nuUus 


quelque  aulre  acte  dejuridictiun  que  ce  fût, 
sous  peine  uon-seulement  d'en  être  repris 
dans  le  prochain  concile,  mais  encore  d'être 
privé  de  la  communion  de  ses  fièrcs.  —  Ils 
renouvelèrent  la  défense  d'aspirer  h  l'évôché 
d'un  évêque  vivant,  et  déclarèrent  excom- 
muniés pour  toujours''  ceux  qui  se  seraient 
fait  ordonner  à  leui-  place ,  de  même  que 
ceux  qui  auraient  pris  part  à  ces  ordinations. 
—  D  semble  par  le  dernier  canon  de  ce  con- 
cile, quele  roiaviat  enfin  reconnu  l'équité  du 
jugement  rendu  contre  les  deux  coupables, 
puisque  les  évèques  y  disent  ',  qu'en  sui- 
vant l'avis  de  ce  prince,  ils  avaient  accordé 
à  Etienne  et  à  Palladia  d'assister  aux  prières 
de  l'Église  jusqu'à  l'oraison  qui  se  lit  après 


l'évangile. 


ARTICLE  II. 


DES  CONXILES  DE  COSSTANTISOPLE  [518],  DB 
JÉRISALEM  [518],  DE  TYK  [518],  ET  DB 
HOME    [510]. 

1.  Le  dimauclic  qui  suivit    l'élection  de  co«nf<i. 

1  empereur  Justm,  et  qui  était  le  lo  juillet  incnii».!. 

518,  le  palriarcbe  Jean  étant  entré  avec  son  i5»6,°(t  lom". 

clergédanslagrandeéglisedeConstantinople,  «"m. 


frater,  ranitatis  vel  cupiditatis  stimulis  incita- 
tus  ,  ecclesiœ  alterius  aggredi  vel  parochias  prœ- 
sumere  absque  ejus  ad  guem  pertinere  noscuntur 
cessione  celpermissione  prœsumat.  yec  quisquam 
sub  necessitate  absentante  episeopo  in  ejus  qui 
abierit  locuni,  aut  sacriflciorum  aut  ordinatio- 
num  audenl  mysteria  celehrare.  Quod  si  in  hac 
temeritale  vel  audacia  quisque  proruperit,  non 
solum  se  in  concilio  redarguendum,  verum  etiam 
communione  fratrum  fulurum  novtril  alicnum. 
Can.  i,  11.1g.  1585. 

'  Id  quoque  etiam,  quod  antiquissima  rel  celé- 
berrinia  obserratione  decretum  est,  nihilominus 
iteramus,  vl  nullus  in  locum  vivcnlisadambieti- 
duni  saccrdotii  gradum  audeat  aspirare.  Quod  si 
qualibet  impia  vel  tcmcraria  voluntate  prasump- 
serit,  simulct  ipse  quifuerit  ordinatus,  et  hi  fra- 
tres,  quos  orilinationi  ejus  interfuisse  consliterit, 
perpetuie  excommtcnicationis  seutentia  fenantur. 
Can.  5,  ibid. 

'  Hac  vero  quœ  a  nobis  inspiratione  divina 
tractala  vel  finita  snnt  quisquis  excesserit,  aut 
imptcre,  quod  absit,  adrersa  prrsuasione  ntgle- 
xerit.  qun.<idiiinorum  mundatorum  transgrcssor, 
reum  se  concilio  fralernitulis  futurum  esse  cog- 
noscal.  Domini  quoque  gloriosissimi  régis  scn- 
tcnlinm  scculi,  id  temperamenli  pra'stilimus,  vt 
SIephano  privdicto.  vel  Valladiœ,  usque  ad  ora- 
tionrm  plebis,  qurr  post  evangetia  legeretur, 
orandi  in  locis  sanctis  spatium  prccstaremus. 
Clin,  (i,  ibid. 


CHAPITHE  LXXXVI. 


fvi"  SIÈCLE.] 

le  peuple,  aprùs  lui  avoir  souhaité,  à  lui   nt 
i\  l'empereur  de  limnues  aimi'es,  tleinaiula 
avec  lie  grandes  instances   que  l'on  anallié- 
niatisilt  Sévère  et    tous  les  défenseurs  de 
l'hérésie  d'Eulychès.  Le  lendemain ,  c'est- 
à-dire  le  l()  de  ce  même  mois,  ils  réitérèrent 
leurs  prières,  en  demandant  aussi  que  l'on 
remît  dans  les  sacrés  diptyques  les  noms 
d'Eupliémius,    de  Macédouius,  et  de  Léon 
évc([ue  lie  Rome,  avec  les  quatre  conciles, 
nommément  celui  do  Clialcédoine.  Le  pa- 
triarche se  rendit  aux  instances  du  peu|)le  ; 
mais,  afin  de  confirmer  authentiquement  ce 
que  l'on  avait  exigé  de  lui,  il  assembla,  qua- 
tre jours  après,  c'est-à-dire  le  20  juillet,  un 
concile  de  quarante  évoques,  tant  de  ceux 
qui  se  trouvaient  à  Conslar.tinople  ,  que  des 
plus  voisins.  Lorsqu'ils  furent  assemblés,  les 
abbés  de  la  ville  présentèrent  aux  évoques 
une  requête  signée  de  cinquante-quatre  ab- 
bés, tous  prêtres,  à  l'exception  d'Évéthius, 
supérieur  des  acémèles,  qui  n'était  que  dia- 
cre. Le  concile  fit  droit  à  leur  requête,  dont 
le  premier  chef  regardait  le  rétablissement 
d'Euphémius  et  de  Macédonius  dans  les  dip- 
tyques. A  cette  occasion,  l'on  examina  la 
procédure  faite  contre  eux,  et,  par  la  lecture 
des  actes,  on  trouva  qu'elle  était  irrégulière, 
et  que  ces  deux  évèques  n'avaient  point  été 
chassés  de  leurs  siét'es  pour  avoir  attenté 
contre  la  foi.  On  jugea   donc   raisoniuible 
la  demande  de  tout  le  peuple  et  des  moi- 
nes, et  pour  y  satisfaire  il    fut  ordonné  que 
la  mémoire  de  ces  deux  patriarches  de  Con- 
stanlinople  serait  rétablie  dans  les  sacrés 
diptyques,  comme  l'on  avait  déjà  fait  à  l'é- 
gard de  saint  Paul,  de  saint  Ghrysostome  et 
de  saint  Flavien,  évêques  de  la  même  ville. 
On  ordonna  aussi  que  ceux  qui  avaient  été 
bannis,  ou  envoyés  en  exil  pour  la  cause 
d'Euphémius  et  de  Macédonius,  fussent  rap- 
pelés et  rétablis  dans  leurs  places.  Il  parut 
raisonnable  et  utile  à  la  paix  de  l'Église  de 
mettre  dans  les  diptyques  les  noms  des  qua- 
tre conciles  généraux  de  Nicée,  de  Constan- 
tinople,  d'Éphèse  et  de  Chalcédoinc,  suivant 
que  le  peuple  et  les  archimandrites  l'avaient 
requis,  de  même  que  celui  de  Léon   évèque 
de  Rome  ,  de  sainte  mémoire  ;  parce  que  le 
concile  de  Chalcédoine  avait  également  ap- 
prouvé sa  foi  et  celle  de  saint  Cyrille  d'A- 
lexandrie, dont  le  nom  était  récité  dans  les 
tables  sacrées.  Le  peuple  et  les  abbés  avaient 
aussi  demandé  que  l'on  analhématisàt  ceux 
qui  s'étaient  déclarés  ouvertement  contre  le 


CONCILE  DE  CONSÏANTINOPLE. 


HIU 


concile  de  (iiialci'doine,  nonnU('!ment  Si'vère, 
faux  palriaichi;  d'Anlioche.  (In  lut  donc  un 
de  ses  discours  où  il  disait  un  termes  exprès  : 
«  Nous  aiiaihématisons  c(!  (pii  a  (■té;  défini  ."i 
Chalcédoine,  par  le  concile  (jui  fut  alors  as- 
semblé ,  et  par  ceux  qui  l'ont  di'lendu.   » 
Après  la  lecture  tic  ces  paroles  de  Sévère, 
le  concile  de  Constantinople  le  déclara  digne 
d'un  anathème  éternel,  déchu  de  tont(îS  fonc- 
tions, et  de  tout  nom  de  prêtre  on  de  chré- 
tien, et  privé  de  la  communion,  comme  blas- 
phémateur et  calomniateui'  des  saints  con- 
ciles. Le  patriarche  Jean  ne  s'étant  pas  trouvé     p^g.  k2. 
en  personne  en  cette  assemblée,  les  évêques 
dont  elle  était  composée  lui  écrivirent  une  let- 
tre synodale,  qui  contenait  le  lapport  de  tout 
ce  qui  s'y  était  passé,  afin  qu'il  la  commu- 
niquât lui-même  à  l'empereur,  à  l'impéra- 
trice et  au  sénat  :  cette  lettre,  que  nous  avons 
encore,  est  souscrite  de  quarante  évêques, 
dont  le  premier  est  Théophile  d'Héraclée. 
Jean  ne  se  contenta  pas  de  faire  part  à  l'em-       isc. 
perenr  et  au  sénat  des  décrets  du  concile  de 
Constantinople,  il  en  écrivit  aussi  à  Jean,  pa- 
triarche de  Jérusalem,  et  à  tous  les  métro- 
politains   assemblés   en  cette    ville ,    pour 
leur  donner  connaissance  de  ce  qui  s'était 
passé,  soit  de  la  part  du  peuple  et  des  abbés, 
soit  dans  le  concile,  dont  il  leur  envoya  les 
actes  en  diligence,  en  les  priant  de  les  con- 
firmer. Il  écrivit  une  lettre  toute  semblable 
à  Epiphane,  évêque  deTyr,  et  il  eut  soin  de 
faire  accompagner  ses  deux  lettres  d'un  or- 
dre de  l'empereur  Justin,  pour  rappeler  tous 
ceux  qui  avaient  été  bannis  par  Anastase, 
et  pour  mettre  le  nom  du  concile  de  Chalcé- 
doine dans  les  diptyques.  Le  concile  de  Con- 
stantinople écrivit  encore  une  lettre  syno- 
dale au  pape  Hornùsdas,  pour  le  prier  d'ac- 
corder sa  communion  aux  (îvêques  d'Orient, 
et  d'envoyer  à  Constantinople  des  légats  qui 
pussent  par  son  autorité  recevoir  dans  l'ii- 
glise  ceux  qui  étaient  tombés  dans  le  schisme, 
ou  dans  l'hérésie,  et  rendre  la  paix  à  toutes 
les  églises.  On  met  ce  concile  sous  le  consu- 
lat de  Magnus,  c'est-à-dire  en  318,  le  cin- 
quième du  pontificat  d'Hormisdas,  et  le  pre- 
mier de  l'empire  de  Justin. 

2.  La  lettre  du  patriarche  de  Constanti- 
nople ayant  été  apportée  à  Jérusalem  avec 
les  ordres  de  l'empereur,  Jean,  évêque  de 
cette  ville,  y  tint  un  concile  le  6  août,  oii, 
conformément  à  ces  ordres  et  à  ce  qui  s'était 
passé  dans  l'assemblée  de  Constantinople, 
ou  mit  dans  les  diptyques  les  noms  des  qua- 


Toni.    IV 
Cnnclle,  peg. 


CoDcila  de 
Jéru=alein  en 
51».  Toiti.  IV 
Concil.,    pag^. 


8J0 


HISTOIRE  GKXliUALK  DES 


tie  conciles  gént'raux  el  celui  du  pape  saint 
Léon.  Jean  de  Jérusalem  en  écrivit  une  lettre 
synodale  au  patriarclje  de  Conslantinople, 
en  son  nom  et  au  nom  de  tous  les  évèques 
des  trois  Paleslincs.  Ils  y  approuvent  l'ana- 
tlième  prononcé  contre  Sévère,  reconnais- 
sant  qu'il  avait   été  justement  déposé   de 
l'épiscopat  d'AiiliocliP,  et  piivé  de  la  dii;nité 
et  de  riionneur  du  sacerdoce.  Ils  y  donnent 
de  grandes  louanges  aux  abbés  et  aux  moines 
de  Conslantinople,  à  Toccasion  du  zèle  qu'ils 
avaient  fait  paraître  pour  la  défense  do  lu 
foi  orthodoxe  et  contre  ses  ennemis.  Us  y 
déclarent  que  c'est  dansle  symbole  dcNicée 
qu'ils  ont  été  baptisés  et  qu'ils  baptisent  eux- 
inèmcs;  qu'ils  suivent  Ja  foi  de  ce  concile  et 
de  ceux  de  Constanlinoplc,  d'Eplièse  et  de 
Chalcédoine,  où  le  même  symbole  a  été  con- 
firmé, comme  aussi  les  lettres  de  saint  Léon. 
Ils  conjurent  Jean  de  Conslantinople,  et  les 
évèques  assemblés  en  cette  ville ,   de    se 
joindre  à  eux  pour  prier  la  sainte  et  glorieuse 
Vierge  Marie',  mère  de  Dieu,  d'employer 
son  intercession  pour  la  paix  des  Églises,  et 
pour  obtenir  au   très-pieux   empereur   une 
longue  vie  et  la  victoire  sur  ses  ennemis. 
Trente -trois  évèques  souscrivirent   à  cette 
lettre,  dont  les  premiers  sont  Jean  de  Césa- 
e..!,  ^'l'^'   i'<'''^  et  Théodose  de  Scvthople.  Us  n'avaient 

Sabba",    ou  m.  •■  l 

(M,wi-  »ii6.  pas  assisté  au  concile  de  Jérusalem;  mais  le 
patriarche  Jeiin  leur  envoya  sa  lettre  par 
saint  Sabbas,  qui  était  accouiu  en  celte  ville 
à  la  nouvelle  des  ordres  de  r<jmpcreur. 

3.  La  même  année  518,  le  IG  septembre, 
qui  était  un  dimanche,  les  lettres  de  Con- 
slantinople fiiieiil  apportées  à  Tyr.  Il  y  en 
avait  une  du  patriarche  Jean,  une  du  con- 
ibid  p.soj.  cile  de  Conslantinople  à  Epiphane  de  Tyr, 
une  troisième,  qui  était  la  synodale,  à  Jean 
de  Conslantinople,  où  l'on  disait  anathème  à 
Sévère  d'Anlioclie,el  une  qualrit'iue  de  Théo- 
phile, évèque  d'Héraclée,  adressée  aussi  à 
l'évèque  Epiphane.  Après  la  lecture  de  l'É- 
vangile, le  diacre  Sergius  lut  toutes  ces  let- 
tres. Le  peuple  assemblé  dans  l'église  de 


(.oncle  de 
Tir  m  518.  T. 
IVCoDcil..p. 
1^8».  el  lom, 
V,  paf.  19t. 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

Tyr,  en  ayant  oui  la  lecture,  souhaita  à  haute 
voix  de  longues  années  h  l'empereur,  à  l'im- 
pératrice, au  sénat,  aux  préfets,  au  comte 
Jean  et  à  Epiphane,  leur  propre  t'vèque,  en 
lui  donnant  la  qualité  de  patriarche.  Puis, 
s'adressant  à  lui-même,  ils  le  prièrent  de  faire 
ce  qu'avait  fait  le  concile  de  Conslantinople, 
el  d'analliénialiser  Sévère  d'.\ntioche  et  le 
moine  Jean.  Epiphane,  étant  monté  sur  l'am- 
bou  avec  quelques  évèques  qui  se  trouvaient 
à  Tyr,  prononça  anathème  contre  Sévère  et 
le  moine  Jean  qui  avait  reçu  la  doctrine 
impie  de  cet  acéphale.  «  Qu'ils  soient  l'un  et 
l'autre,  dit-il,  anathème  el  malédiction  de 
par  le  Père,  le  Fils  el  le  Saint-Esprit,  au  ciel 
et  sur  la  terre,  en  ce  monde  et  en  l'autre.  » 
Le  peuple  cria  deux  fois  :  Amen,  ajoutant, 
entre  auli-es  acclamations,  celles-ci  ;  «  Ana- 
slase  n'est  plus;  c'est  Justin  qui  règne;  il 
n'est  pas  manichéen  comme  Anastase.»  Jean,  iNtt.î.jso. 
évèque  de  Plolémaïde ,  Théodore ,  de  Por- 
phyréone,  el  Elle,  de  Rachelène,  qui  étaient 
montes  sur  l'ambon  avec  Éjiiphane,  analhé- 
rnalisèrcnt  aussi,  dans  les  mêmes  termes, 
Sévère  et  Jean.  Ensuite  ils  tirent  la  divine 
liturgie,  en  annonçant  *  au  peuple,  par  l'ar- 
cliidiacre  Zacharie,  que  le  dimanche  suivant 
Ion  ferait  la  fêle,  dans  l'église  de  la  Sainte- 
Vierge,  il  la  gloire  de  notre  Seigneur  Jésus- 
Christ  et  de  notre  Dame  la  Mère  de  Dieu, 
pour  le  salut  el  la  prospérité  de  l'empereur 
Justin,  de  rimpéiatriccEuphémie,desliautes 
[luissances,  du  saint  archvcque  de  Conslan- 
tinople, Jean,  et  du  concile  qui  y  était  as- 
seml>lé  ;  qu'avant  d'aller  à  celte  église,  ils 
s'assembleraient  tous,  dès  le  matin,  dans 
l'ancienne,  pour  y  aller  ensemble  en  chan- 
tant, avec  les  cierges  el  l'encens.  L'évèque 
Epiphane,  el  ceux  qui  s'étaient  assemblés 
avec  lui,  écrivirent  au  concile  de  Constnnli- 
nople,  en  réponse  à  la  Icliie  qu'ils  en  avaient 
reçue ,  approuvant  la  condamnation  de  Sé- 
vère, qui  a\ail  usurpé  le  siège  épiscopal 
d'Antiocbe.  Ils  s'cHendent  sur  le  récit  de  ses 
crimes,  disant,  entre  uuties,  qu'il  avait  ex- 


'  Nobiscum  eadem  orale, 
lam  ac  glurificalam  Dci  gm 
nobiscuiu  supplicutc  ul  inici 
siaruiii,  et  vicloria  el  inculu 
raloris  noslri.  Joan.,  Episl. 
cil.,  |,ng.  190. 

•  l'ruclmnavil  hvjumodi 
veneiabilis  archidiacniius  : 
trit  charitali  (jiidiI  sei/ucnli 
Chrisli  Dci  jiostri  tl  saiicla; 
ginUikis  VirQinix  ifarim  do 


sanclissimi  el  sane- 
iliiccm  Mariam  una 
ci'dal  pro  pnce  ecclc- 
iiiilale  jiiissimi  iiiipe- 
stjiiod.,  loin.  V  t'on- 

colleclam  Zacharias 
^otum  facimus  ves- 
dnminica  ad  gloriam 
ac  gloriosisstmœ  Dei 
minœ  nostrtv,  cl  pro 


sainte  ac  vicloria  ac  perennilale  serenissimi  im- 
peraloris  noslri  Jiislini,  ac  piixsimœ  lùiphemiie 
reginœ  el  iiiajorum  piileslalum,  nec  non  fni.rliS' 
siini  arrlii(piscii]ii  rrgiœ  urhis  Joannis,  cl  ibi- 
dem cntigrigaiidif  saiicUf  si/iiodiiii  dnwo  Suiictœ 
Muriiv  suiicliiiii  folUclaiii  celcliniliinius.  Ipsa  au- 
leiii  sancla  doiiiinica  in  Matulino  ibidem  couve- 
niemus,  ul  ciim  inde  cuni  psalmodiis  el  cereis  ac 
iiiC(  iisis  ad  ipsnni  sanclani  i^omum  pcrvencrimus, 
deprectihiinem  el  sanclam  culliclam  tjpleamus. 
Toui.  V,  Concil.,  pag.  2IU  et  211. 


[Vl*  SIÈCLE.] 

coinmuniô  des  clercs  sans  le  consenlcuienl 
de  leurs  évoques,  et  reçu  ;\  sa  commuiiiou 
ceux  qu'ils  avaient  excommuniés,  jusqu'à 
leur  pci  melire,  sans  la  pailicipalion  des  évè- 
ques  qui  les  avaient  liés  par  les  censures  de 
l'Eglise,  de  faire  les  fonctions  de  leur  minis- 
tère; qu'il  avait  fait  l'un  et  l'autre  dans  l'é- 
glise mcnie  de  Tyr;  qu'il  avait  réduit  au 
l'ang  des  diacres  des  prêties  ordonnés  par 
des  évèques  qu'il  n'avait  pu  séduire  ;  qu'il 
avait  ordonné,  dans  d'autres  diocèses,  des 
cliorévèques  et  desmansionaii'os,  et  permise 
Etienne,  évèque  d'Ortliosic,  de  faire  des  or- 
dinations dans  le  diocèse  d'Autarade,  du  vi- 
vant de  l'évcque  Tliéodosc,  de  sainte  mé- 
moire; qii'h  Antioche,  il  avait  dissipé  l'ar- 
gent de  l'église,  et  s'était  servi  de  ceux  qui 
étaient  nourris  d'aumônes  pour  exciter  des 
séditions  dans  les  églises  des  villes,  et  même 
dans  les  monastères.  Ils  passent  sous  silence 
beaucoup  d'autres  mauvaises  actions  de  Sé- 
vère, et,  après  avoir  dit  qu'ils  l'anathémati- 
saient,  comme  avait  fait  le  concile  de  Cons- 
tnulinople,  ils  disent  encore  anallième  au 
moine  Jean  ,  mansionaire  de  l'église  de  la 
Sainte-Vierge,  située  dans  la  ville  de  Tyr, 
qui  ayant  traité  secrètement  avec  les  sdiis- 
matiques,  s'en  était  allé  à  .\ntioche  pour  se 
joindre  à  l'impie  Sévère,  et  avait  sousciit  de 
sa  main  l'anathème  contre  le  concile  de  Chai- 
cédoine  et  la  lettre  de  saint  Léon.  Ils  ajou- 
taient que  le  même  Jean,  étant  revenu  d'An- 
tiochc  à  Tyr,  avait  livré  aux  scliismalicjues 
l'église  de  la  Sainte-Vierge,  où  il  tenait  avec 
eux  des  assemblées  illicites,  en  y  célébrant 
même  le  baptême,  au  grand  scandale  du 
peuple,  qui  voyait  de  nouveaux  baptisés 
sortir  de  deux  endroits,  ce  qui  ne  s'était  ja- 
mais vu;  que  Jean  avait,  par  sa  conduite, 
occasionné  des  séditions,  où  les  scliismati- 
ques  avaient  jeté  '  des  pierres  contre  la  véné- 
rable croix,  et  où  il  y  avait  eu  des  clercs  et 
des  laïques  blessés,  quelques-uns  même  en 
danger  de  perdre  la  vie,  nommément  l'évê- 
que  Epiphane.  Ils  racontaient  ensuite  de 
quelle  manière  ils  avaient  fait  connaître  au 
peuple  et  au  clergé  de  Tyr  ce  qui  s'était 
passe  dans  le  concile  de  Constantinople,  la 
joie  qu'ils  en  avaient  témoignée,  les  actions 


CHAPITRE  LXXXAl.  —  CONCILE  DE  TYK. 


821 


de  grùces  que  Ions  en  avaient  rendues  à  Dieu, 
témoignant,  dans  les  termes  les  plus  précis, 
leur  éloignement  de  l'erreur  de  Nestorius, 
d'Eiilychès  et  de  Sévère,  h  qui  ils  disaient 
anatlième,ctleurallaclieinenl  ponrlcsquatie 
conciles  généraux  et  pour  les  lettres  de  saint 
Léon  ,  reconnaissant  que  ce  Pape  y  avait 
confondu  piesquc  toutes  Icsbéiésies.  Ils  de- 
mandaient avec  beaucoup  d'inslancc  ipie  le 
corps  de  Flavien,  patriarche  d'Anlioclie,  fût 
rajiporté  en  cette  ville,  et  que  son  nom  fût 
mis  dans  les  diptyques  avec  ceux  des  saints 
évèques  qui  avai(;ut  rempli  ce  siège.  Celte 
lettre  était  souscrite  d'Epiphane,  métropoli- 
tain de  Tyr,  et  de  quatre  autres  évèques. 

■'/.  Il  n'y  eut  point  de  concile  ;\  Antioche,        Lo.irod» 

,,        .     ,.  ....  ,     .  tler-i    d'An- 

parce  que  celte  église  était  sans  eveque,  liocu  fn  51». 
Sévère  qui  l'avait  usurpée  étant  regardé  ci'i'.,°iag.  i;;»^ 
comme  un  intrus;  mais  le  clergé  de  celte 
ville  écrivit  à  Jean,  patriarche  de  Constanti- 
nople, et  à  son  concile,  contre  ce  faux  évo- 
que, qu'ils  appelaient  un  loup,  et  non  pas  un 
pasteur.  Ils  racontent  ses  violences  envers 
Flavien  d'Antioche,  ses  nouveautés,  ses 
blasphèmes  contre  Dieu,  les  anathèmes  qu'il 
avait  prononcés  contre  le  concile  de  Chalcé- 
doine,  les  homicides  dont  ils  s'était  souillé, 
en  faisant  Iner  un  grand  nombre  de  saints 
moines  par  les  mains  des  juifs.  «  C'était, 
disent-ils,  un  spectacle  horrible  de  voir  des 
hommes  qui  avaient  blanchi  dans  les  exer- 
cices et  les  travaux  de  la  vie  religieuse,  nns 
el  sans  sépulture,  au  nombre  de  plus  de  trois 
cents,  exposés  aux  chiens  et  aux  oiseaux. 
Ce  qu'il  a  fait  dans  les  hôpitaux  est  égale- 
ment digne  d'horreur.  Il  y  a  bâti  des  prisons 
où  il  a  fait  mourir  à  coups  de  fouet  plusieurs 
personnes  pour  la  foi.  Toute  cette  grande 
ville  est  informée  de  ce  qu'il  a  fait  aux  fon- 
taines de  Daphné,  où  il  s'est  servi  d'enchan- 
tements, el  a  otfert  des  sacrifices  exécrables 
au  démon.  Il  n'a  pas  même  épargné  les  saints 
autels,  ni  les  vases  sacrés,  dont  il  a  brisé  les 
uns  ,  et  fûiidu  les  autres  pour  les  distribuer 
à  ses  semblables.  lia  poussé  sa  témérité  jus- 
qu'à prendre  les  colombes  -  d'or  et  d'argent 
suspendues  sur  les  fonts  sacrés  et  sur  les  au- 
tels ,  en  se  les  appropriant  à  lui-même  et  à 
ceux  de  sa  secte,  disant  qu'il  ne  faut  pas  re- 


'  Iiiler  quœ  et  venerabilis  cnix  lapidatn  est  ab 
Itis  qui  cuin  ipso  Joanne  nidificant  in  prœdiclo 
oratorio  Dei  genitricis.  Ilnd.,  paii.  198. 

-  Prœstnuptum  est  aiitem  ah  ipso  et  hoc.  o 
beatissimi,  nam  cohi/mbas  aureas  et  argenteas  in 


figuram  Spiritus  Suncti  super  divina  lavacra  et, 
attarin  ajrpensas,  uiia  ciim  aliis  sibi  appropria- 
vit,  diccm  non  oporlere  in  specie  columbce  Spiri- 
tuin  Snnctum  nominare  Tom.  V,  ConciJ.,  pag.  159. 


822 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Lellr*  des 
ft#qnM  de  'a 
Seconde  S)rie 
•u  ccnile  de 

COD-I«OtlllO- 

i.Irco  518.  T. 

V    CODCll.i    p. 

2'l, 


présenter  le  Saint-Espril  en  forme  de  co- 
lombe. Il  a  dépens(5  tous  les  revenus  de 
l'église,  engagé  ses  maisons  et  ses  plus  bel- 
les terres,  et  l'a  accablée  d'emprunts  usurai- 
res.  »  Four  tous  ces  crimes  et  beaucoup 
d'autres  (ju'ils  veulent  bien  omelire,  les  ec- 
clésiasliques  d'Antioclie  prient  le  concile  de 
Conslantiunple  de  les  délivrer  d'un  si  mé- 
chant homme,  de  le  punir  selon  les  canons 
et  les  lois  civiles,  de  s'intéresser  auprès  de 
l'eiupereiir  pour  qu'il  envoie  en  diligence  ri 
Autioche  des  gens  de  probité  avec  la  charge 
de  veiller  à  la  consenalion  du  peu  de  bien 
qui  restait  à  celte  église,  et  d'en  faire  rendre 
coni[)te  à  ceux  qui  les  avaient  adniiTiistrés 
depuis  l'inlrusion  de.Sévcre  ;  enfin,  d'inter- 
céder pour  tous  les  clercs  et  les  laïques  qui 
avaient  été  exilés,  afin  qu'ils  fussent  rappe- 
lés et  rétablis  dans  leurs  places.  On  voit  par 
là,  que  le  clergé  d'Antiocbe  n'avait  pas  en- 
core connaissance  de  l'édit  do  l'empereur 
Justin  pour  le  rappel  des  exilés.  Ainsi  l'on 
ne  peut  mettre  celle  lettre  plus  tard  qu'en 
.">18.  Elle  est  souscrite  par  (]ualorze  jaêtres, 
diacres  et  autres  clercs  de  l'église  d'Antio- 
cbe, et  par  douze  moines  de  dilTérents  mo- 
nastères. 

5.  Les  évcques  de  la  seconde  Syrie  écri- 
virent aussi  au  patriarche  et  au  concile  de 
Constantinople  contre  Sévère ,  et  contre 
Pierre,  évéque  d'Apamée,  autant  pour  leur 
témoigner  leur  joie  de  ce  qu'ils  avaient  pris 
la  défense  de  la  sainte  doctrine  établie  dans 
le  concile  de  Chalcédoine,  que  pour  se  plain- 
dre des  vexations  de  Sévère  et  de  Pierre, 
qu'ils  disent  avoir  anathéir.alisés  et  dépo- 
sés comme  hérésiarques.  A  leur  lettre,  qui 
n'était  souscrite  que  de  cinq  d'entre  eux, 
ils  joignirent  les  procédures  faites  contre 
Pierre  d'Apamée  devant  le  comte  Jean,  gou- 
verneur de  la  province ,  ci  la  lellre  qu'ils 
avaient  reçue  du  clergé  d'Apamée  centre 
leur  évcque.  Pierre  était  accusé  dans  cette 
lettre  de  plusieurs  fautes  constatées  par 
la  déposition  des  prêtres  et  des  clercs  de 
cette  église  :  entre  autres,  d'avoir  inalversé 
dans  l'administration  des  revenus  de  son 
église,  et  de  s'en  être  approprié  de  grandes 


sommes  d'argent;  d'avoir,  le  Samedi-Saint, 
lorsqu'on  faisait  l'oUice  dans  le  baptislaire 
de  l'église  de  la  Vierge,  les  catéchumènes 
étant  déjà  déshabillés  et  déchaussés,  et  les 
diacres    faisant    sur   eux   les    exorcismes  , 
obligé  tout  le  monde  de  sortir,  pour  y  faire 
entrer  jusqu'à  trois  fois  une  femme  de  mau- 
vaise vie  nommée  Marie  d'Kmèse,  qui  n'était 
ni  baptisée  ni  catéchumèiie  ;  d'y  être  de- 
meuré   seul    avec    elle   pendant    plusieurs 
heures;  d'avoir  tenu  dans  l'église  des  dis- 
cours deshonnctes  ;  de  porter  par  orgueil 
un  habit  blanc  en  signe  de  son  innocence, 
quoiqu'il  fût  couvert  de   toutes   sortes  de 
crimes  ;  d'avoir  plusieurs  fois  craché  sur  les 
ornements  du  saint  autel  pendant  l'oblation 
du  sacrifice  non  sanglant,  pour  avoir  lieu  de 
jeter  des  regards  sur  les  femmes  qui  y  as- 
sistaient. Ils  ajoutaient  en  parlant  de  l'intro- 
duction de  cette  comédienne  dans  le  baptis- 
taire,  ces  paroles  qui  nous  apprennent  de 
quelle  manière  les  catéchumènes  s'y  com- 
portaient :  ((  Tous  ceux,  disent-ils,  qui  sont 
initiés  aux  saints  mystères  '  savent  de  quel- 
les saintes  frayeurs  sont  saisis  ceux  qui  crai- 
gnent Dieu,  lorsqu'ils  sont  prêts  à  s'appro- 
cher du  saint  baptême,  quand  la  lumière 
commence   à   éclairer  véritablement   leurs 
âmes,  et  qu'ils  sont  délivrés  de  la  dure  ser^ 
vitude  du  démon.   Leur  posture  témoigne 
leur  inquiétude  :  ils  sont  debout  les  yeux 
baissés,  les  mains  jointes,  tremblants  et  ré- 
sistant aux  artitices  du  démon,    attendant 
d'être  délivrés  une  fois  pour  toujours  par  le 
baptême,  n   Les  clercs  d'Apamée  accusaient 
aussi  Pierre  d'avoir  fuit  des  ordinations  si- 
moniaques,  d'avoir  usé  de  violence  contre 
plusieurs  catholiques,  détruit  la  vraie  foi, 
renversé   la  disci|)line,   et   établi   l'hérésio 
d'Eutychès.    Thomas,    l'un  des  diacres  de 
cette  église,   lui  reprocha  ce  blasphème  : 
Quand  le  crucifié  descendrait ,  il  ne  vous  tire- 
rait pas  de   mes  mains.   Pierre   avait   parlé 
ainsi  à  ses  lecteurs  dans  un  mouvement  de 
colère.   Le  prêtre  Mégas  et  quelques  autres 
assuraient  lui  avoir  ouï  dire  la  môme  chose. 
Léonce  diacre  certifia  que  Pierre  était  entré 
souvent  dans  un  monastère,  et  qu'il  y  était 


SlVeKlI. 


'  Kcminein  pulamus  lalere  qtii  sacris  baplis- 
nidtis  mijsteriis  fueril  inilintvs,  in  quanta  dnxie- 
tale  vcrsenltir  ii  qui  tiinrnl  Domitnim,  lewpore 
quo  (Irhenl  rcnirc  ad  diiinum  Ixiiilismn,  qui  ir- 
rore  anle  ilelinehantvr.  El  quouinm  lihirum  lu- 
men  cuin  veritule  super  hujusnindi  nnimahus 
spkitdel,  ft  a  diflicili  vulde  scri-itute  liUeranlur, 


slanl  ipso  habilu  anaietalem  prw  se  frrenles, 
dcorsuiii  incliiittlo  rullu  cl  manvs  complicanlrs, 
el  in  tmipore  trrmenics,  diabolique  inriln-  aslu- 
tiir  resistcntrs,  semtl  rcdrmptioncm  vrri  salula- 
ris  baptismali-t  fTpectanlcs. Tom.  V,  Concil-,  pag. 
222. 


[VI'  SIÈCLE.] 


CHAPITHE  LXXXVI. 


CONCILE  DE  HOME. 


823 


Concile  de 

BoiTie  en  51'.i. 

Tora.  IV. 

Coucii.,  pag. 


rosit!  seul  pendant  plusieurs  licures  avec  une 
nommée  Pli'TDVola  ijui  avait  (■*(!  coniédieniie. 
Le  jour  de  la  fête  de  l'I^pipiiaiiie,  Pierre, 
ayant  assemblé  le  cler|.;é  dans  la  salle  se- 
crète, dit  au  diacre  Julien  :  »  Pourquoi  n'a- 
natliéinalisez-vous  pas  le  concile  des  six 
cent  trente  évc'iucs?  »  11  voulait  parler  de 
celui  de  Chalcédoinc.  Julien  répondit  :  «Parce 
que  l'empereur  est  catholique,  je  me  con- 
forme à  sa  créance,  et  je  dis  anallième  ii 
tous  ceux  qui  anatliématiscnt  ce  concile.  » 
Alors  Pierre,  se  levant  en  fureur,  défendit 
à  Julien  de  faire  aucune  fonction.  A  toutes 
ces  plaintes  contre  Pierre  d'Apamée ,  les 
moines  de  la  même  ville  en  joignirent  d'au- 
tres dans  un  mémoire  qu'ils  adressèrent  aux 
évoques  de  la  seconde  Syrie.  Ils  y  marquaient 
que  Pierre  s'était  rendu  coupable  de  plu- 
sieurs homicides,  qu'il  avait  mis  en  captivité 
plusieurs  moines,  qu'il  en  avait  dépouillé 
d'autres,  et  maltraité  un  fi;rand  nouibre,  et 
fait  entrer  dans  le  monastère  de  Sainte-Do- 
rothée une  multitude  de  femmes  débau- 
chées. A  raison  de  ces  crimes  et  de  plusieurs 
autres  qu'ils  rapportaient,  ils  demandaient 
kl  déposition  de  Pierre,  dont  ils  disaient 
qu'ils  ne  pouvaient  prononcer  le  nom  sans 
rougir.  Ce  mémoire  était  signé  en  langue 
syrienne  par  beaucoup  d'abbés  et  un  nombre 
inflni  de  moines  :  il  ne  nous  reste  que  les 
souscriptions  de  dix-huil  abbés,  dont  la  plu- 
part étaient  prêtres.  Plusieurs  autres  églises 
se  déclarèrent  dans  le  même  temps  pour  la 
foi  du  concile  de  Chalcédoine,  et  on  comptait 
jusqu'à  deux  mille  cinq  cents  évêqucs  qui 
l'avaient  confirmé  tant  par  leur  lettres  cir- 
culaires, que  par  des  libelles  particuliers, 
sous  le  règne  de  l'empereur  Justin,  depuis 
le  schisme  de  Pierre  d'Alexandrie,  et  d'A- 
cace  de  Constantinople  :  c'est  ce  que  dit  le 
diacre  Ruslique  '  qui  écrivait  dans  le  même 
siècle  contre  les  acéphales. 

C.  Le  pape  Uormisdas.  ayant  reçu  d'Orient 
des  lettres  de  l'empereur  Justin ,  celle  de 
Jean,  patriarche  de  Constantinople,  et  une 
troisième  du  comte  Juslinien,  qui  tendaient 
tontes  à  assurer  le  Saint-Siège  que  les  Orien- 
taux recevaient  les  quatre  conciles  généraux, 
et  que  le  nom  de  saint  Léon  et  celui  d'Hor- 
misdas  avaient  été  mis  dans  lés  diptyques. 


retint  ii  Home  pendant  quelque  temps  le 
comie  Gratus,  qui  les  y  avait  apportées  le 
20  décembre  de  l'an  518.  Toutes  ces  lettres 
furent  lues  dans  un  concile  que  le  pape  as- 
sembla en  cette  ville  au  commcncemeni  de 
l'année  suivante.  On  y  examina  aussi  avec 
soin  tout  ce  que  les  papes  précédents,  Sim- 
plicc,  Félix,  Gélasc  et  Symmaque  avaient 
pensé  sur  le  scliisme  d'Orient.  Après  quoi  il 
fut  décidé  que  [ont  ce  qui  avait  été  fait  dans  le 
concile  de  Constantinople  pour  la  confirma- 
tion du  Concile  de  Chalcédoine,  et  contre  Sé- 
vère, faux  évoque  d'Anlioche,  et  les  autres 
oulychiens,  aurait  lieu;  mais  que  ce  que  le 
même  concile  avait  ordonné  pour  le  rétablis- 
sement des  noms  d'Euphémius  et  de  Macé- 
donius  dans  les  diptyques,  serait  nul,  parce 
que  ces  deux  évêques  avaient  communiqué 
avec  Acace.  Le  concile  de  Rome  ordonna  en- 
suite, que  l'on  recevrait  h  la  communion  du 
Siège  apostolique  les  églises  d'Orient,  si  elles 
condamnaient  le  scbismatique  Acace,  eu 
ôtant  son  nom  des  tables  sacrées,  de  même 
que  celui  d'Euphémius  et  de  Macédonius. 
Pour  l'exéculion  de  ce  décret,  le  pape  envoya 
à  Coustantin(jple  une  lét^aliou  composée  de 
cinq  personnes  :  Germain ,  évêque  de  Ca- 
poue,  qui  avait  déjà  été  envoyé  sous  le  rè- 
gne de  l'empereur  Anastase;  Jean,  évêque 
d'une  autre  église;  Blandus,  prêtre;  Félix 
et  Dioscore,  diacres,  avec  un  formulaire  qu'ils 
devaient  faire  signer  h  tous  ceux  qui  vou- 
draient se  réunir  à  l'Eglise  romaine.  Cette 
légation  eut  son  ell'et,  et  la  réunion  se  fit 
entre  les  églises  d'Occident  et  d'Orient,  aux 
conditions  prescrites  parle  concile  de  Rome. 
La  réunion  occasionna  divers  autres  conciles 
dont  nous  avons  parlé  dans  l'article  d'Hor- 
misdas. 

ARTICLE  III. 

CONCILES  D'aRLES  [324],  DE  LÉRIDA  [524],  ET  PE 
VALENXE  [324]. 

*    1.  Les  collections  des  Conciles  en  meltent  concie  dAr 
un  de  tous  les  évêques  de  la  Grande-Brela-   iv   coocii.,' 

paf.  16:;». 

gne,  assemblés  sous  le  pontificat  de  saint  „  to'h.  iv. 
David,  évêque  de  Caor-Léou,  métropole  de  '=^"  "  '»"• 
la  Cambrie,  ou  pays  de  Galles,  en  319,  pour 
extirper  les  restes  de  l'hérésie  pélagienne 


'  Sufflceret  tibi  uiUca  autoritas  synoili  univer- 
salis,  quœ  loties  cunclarum  eçclesiarum  cunsona 
Sententia  confirmala  est,  tain  per  encycliius  epis- 
tolas  régnante  Leone,  qnam  per  libellas  sacerdo- 


ttitn  forsan  duor^lm  milliiiin  et  quingcntorum  im- 
perante  Jastiiio,  post  schisma  Pétri  Alexandrini 
et  Acacii  Conslanlinopolitani.  Tom.  IV  Concii, 
pag.  1589 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


824 

dans  celle  province;  mais  elles  n'en  font  au- 
cun ilétail.  Elles  mcltenl  encore  \m  concile 
en  Sardaigiie  vers  l'an  521 ,  dont  elles  rap- 
portent la  lettre  synoilaie,  dans  hiqucUe  les 
Lvcqiics  d'Afrique  relégués  en  celle  ile  expli- 
quent leur  senlirnenl  snr  la  grâce  et  le  libre 
arbitre  :  nous  avons  donné  le  précis  de  cette 
lettre  dans  l'arlide  de  saint  Fiilgence.  Eu 
324,  il  se  tint  trois  conciles  dans  le  pays  de 
la  domination  du  roiTbéodoric.  Le  premier 
est  le  quatrième  d'Arles  :  il  fut  assemblé  â 
l'occasion  de  la  dédicace  de  l'église  de  la 
Sainte- Vierge,  le  6  juin,  sous  le  consulat 
d'Opilion,  la  seconde  année  du  pape  Jean  I", 
et  la  trente-deuxième  du  règne  de  Tliéodo- 
ric  en  Italie.  Saint  Césaiie,  cvcque  d'Arles, 
présida  ce  concile,  assisté  de  douze  évèques, 
de  Iroispréfres,  et  d'un  député  nommé  Emé- 
térius,  qui  ne  prend  point  d'autres  qualités 
que  celle  d'envoyé  de  Gallican,  son  évèque  : 
les  trois  prêtres  déclarent  aussi  qu'ilsavaient 
été  députés  chacun  de  la  part  de  leur  évè- 
que. On  y  fit  quatre  canons  qui  ne  font  que 
renouveler  ceux  qui  avaient  déjà  été  établis 
dans  divers  conciles;  savoir,  que  personne 
ne  pourrait  être  ordonné  diacre  avant  l'âge 
de  vingt-cinqans,  ni  élevé  au  sacerdoce  ou  à 
l'épiscopat  avant  trente  ans;  —  cl  que  l'on  ne 
conférerait  l'ordie  de  la  prêtrise  ou  du  dia- 
conat à  un  laïque  qu'un  an  après  sa  conver- 
sion. —  Les  évèques  s'obligèrent  eux-mêmes 
à  se  conformer  à  ces  décrets,  sous  peine  de 
privation  des  saints  mystères  pendant  un  an, 
voulant  que  ceux  qui  refuseraient  de  subir 
cette  peine  fussent  soumis  à  celle  de  l'ex- 
communication. —  Ils  défendirent ,  sous  la 
même  peine,  de  recevoir  des  clercs  vaga- 
bonds, des  bigames,  ou  ceux  qui  auraient 
fait  pénitence  publique.  On  a  mis  à  la  suite 
des  canons  de  ce  cuncile  ceux  que  Graticn 
a  cités  dans  son  Décret  des  dillérenlcs  as- 
semblées tenues  en  la  même  ville  d'Arles. 


Nous  n'y  en  trouvons  point  qui  aient  rap- 
port aux  quatre  canons  dont  nous  venons 
de  parler. 

2.  Le  second  concile  de  l'an  32 i  se  tint  à 
Léi'ida,  la  quinzième  année  du  règne  de  Tliéo- 
doric  en  Espagne.  Les  évéques  au  nombre 
de  huit  s'assemblèrent  le  8  août,  et  firent 
seize  canons,  dont  le  premier  ordonne  que 
ceux  qui  servent'  à  l'autel,  qui  distribuent 
le  sang  de  Jésus-Christ,  ou  qui  touchent  les 
vases  sacrés,  s'absliendrout  de  répandre  le 
sang  humain,  sous  quelque  prétexte  que  ce 
soit,  fût-ce  même  celui  de  défendre  une  ville 
assiégée.  Il  veut  que  ceux  qui  feront  le  con- 
traire soient  privés  pendant  deux  ans,  laul 
de  la  communion,  que  des  fonctions  de  leur 
ministère;  qu'ils  expient  leurs  fautes  par 
des  veilles,  des  jeûnes  et  des  prières,  et 
qu'après  avoir  satisfait,  ils  puissent  être  tel- 
lement rétablis,  qu'on  ne  leur  accorde  pas 
d'être  promus  à  des  ordies  supérieui-s.  Que 
s'il  arrive  que  pendant  les  deux  années  de 
leur  pénitence  ils  s'en  acquittcut  négligem- 
ment, il  sera  au  pouvoir  de  l'évêque  de  la 
leur  prolonger.  —  Le  second  prescrit  sept 
ans  de  pénitence  à  ceux  ou  à  celles  qui  '  font 
périr,  en  quelque  manière  que  ce  soit,  les 
enfants  conçus  ou  nés  d'un  adultère,  défen- 
dant de  leur  donner  la  communion  avant  ce 
terme.  Il  ajoute  que  les  coupables,  après  le 
terme  de  sept  ans  expiré,  continueront  de 
faire  pénitence  le  reste  de  leur  vie  ;  et  que, 
s'ils  sont  clercs,  après  être  rentrés  dans  la 
communion,  ils  ne  serviront  plus,  mais  qu'ils 
pourront  seulement  assister  au  chœur  avec 
les  chantres;  qu'à  l'égard  des  empoison- 
neurs, ils  ne  recevronl  la  communion  qu'à 
la  fin  (le  leur  vie,  s'ils  ont  pleuré  continuel- 
lement leur  faute  depuis  qu'ils  l'ont  com- 
mise. —  On  renouvelle  dans  le  troisième  ce 
qui  avait  é!é  ordonné  touchant  les  moines 
dans  les  conciles  d'Agde  et  d'Orléans,  en  y 


C'^erll*  c 

Ton>.   IV    (| 
|wr.  IblO. 

Cu.  I. 


•  De  his  clericis,  qui  in  obsessionis  necessitate 
posili  fuerinl,  id  slalulum  est,  ul  guiallario  mi- 
niitranl,  et  Chrisli  sanguineiii  (radunt,  vcl  lasa 
sacro  ofpcio  depuluta  cnnireclant,  ul  ab  owni 
hiimann  sanguine,  eliani  hoftili  alislineant.  (Juod 
si  in  hoc  incidcrint,  ùuobus  aniii.i,  lain  of/icio, 
quani  communioue  privenlitr  :  ila  ut  his  duobus 
a/mis,  ligiltis,  jrjunii^,  orationihus  et  eliemosy- 
Jii«,  pro  liri'ius  (iua<  D  'minus  doiini-erit,expi'-n- 
tur,  cl  ila  ikmum  oficio,  vt l rommuni'ini  rrddnn- 
tur;  ea  tamen  raiione  servntn,  ne  ultrrius  ad 
ofjicid  pnliora  promoi  eanlur.  ijund  si  infra  prœ- 
finilum  Itmiius  negligentiorts  rircfi  sahilem  suiim 
exlilerunl,  protelandi  ipsius  pœnitenliœ  tcinpus 


in  poleslate  maneat  Sacerdolis.  Caii.  1,   lom.  IV, 
Conril.,  paf.'.  If.ll. 

-  His  vcro  qui  maie  conceptos  ex  adullerio  fœ- 
tus, vel  tdilos  iiecare  sluduerint,  rel  in  uteris 
mairum  polinnihus  aliquihus  colli<erinl,  in  ulro- 
que  sc.ru  udulleris,  past  srptcm  annorum  cuiri- 
cula,  communia  Iribuatur:  ila  tamen,  ut  owni 
lempore  vitœ  suir  flctibus  it  humilituliinsistaut. 
Si  rcro  clerici  fuerinl,  officiuni  ris  miiiistnmdi 
reruprrare  non  l.ceat  :  allamen  in  clioro  psalten- 
liuni  0  hmpore  recepUp  rommunionis  intirsint. 
Jpsis  yrni'fii-is  in  erilu  tnntum,  si  faciuora  sua 
oinni  teinpnre  ritif  sum  defleverint,  communia 
tribiialur.  f'.ui,  i,  ibid. 


fvi°  SIKCLE.I 


CHAI'ITHE  LXXXVI.  —  C.OiNClLE  DE  LVAUUA. 


825 


Cm. 


;ijoiil»nt  que  l'ôvèqnc  aura  '  le  pouvoir,  du 
consonteuicul  tlo  l'abbë,  et  pour  l'iilililti  de 
rii^lisOjd'ortloiiiiprcIcii'S  couxiju'il  on  liou- 
vrr;i  capiililos;  mais  co  cauoii  lui  (h'fend  de 
louclicraux  donations  faites  aux  monastères, 
voulaut  toutefois  que,  si  quelque  laùpie  dé- 
sire de  faire  consacrer  mie  ('-nlise  qu'il  au- 
rait liâlie,  il  ne  le  puisse  sous  le  titre  de  mo- 
nastère, d.uis  le  dessein  d'cmpècliei-  qu'elle 
ne  soit  en  la  disposition  de  rdvêque,àmoins 
que  cette  ('i^lise  ne  soit  pour  nue  commu- 
nauté de  moines.  —  Il  est  dit  dans  le  qua- 
trième, que  les  incestueux  ',  jusqu'il  ce  qu'ils 
se  séparent,  seront  excommuniés,  en  sorte 
qu'aucun  chrétien  ne  pourra  manger  avec 
eux,  mais  qu'ils  seront  admis  à  la  messe  des 
catécliumènes.  —  Le  cinquième  porte  que, 
si  un  des  ministres  '  de  l'autel  tombe  dans  un 
pécliédela  chair  par  fragilité,  et  qu'il  donne, 
avec  la  grâce  de  Dieu,  des  miinpies  d'une 
sincère  pénitence,  il  sera  au  pouvoir  de  l'é- 
vèque  de  le  l'établir  bientôt,  ou  de  le  laisser 
plus  longlemiis  séparé  de  l'Eglise,  suivant 
qu'il  le  trouvera  exact  ou  paresseux  à  faire 
pénitence  de  son  crime,  à  condition  néan- 
moins qu'en  le  rétablissant,  il  lui  ôtera  toute 
espérance  d'être  promu  ù  des  grades  supé- 
rieurs ;  que  si  ce  clerc  retombe,  non-seule- 
ment il  sera  privé  de  la  dignité  de  son  of- 


lîcc,  mais  il  ne  recevra  encore  la  communion 
qu'à  la  mort.  — Il  est  ordonné  dans  le  sixiè-  Cao.  c. 
me,  que  celui  Spn  a  violé-  uni;  veuve  ou  uuo 
rcligieusR  sera  excouunuuii!,  et  que  la  reli- 
gieuse le  sera  aussi ,  si  elle  ne  se  sépai'e 
d'avec  lui;  auquel  cas  seul,  c'est-h-dire,  si 
elle  retourne  à  son  devoir,  elle  sera  mise  en 
pi'nitonco  publique,  la  sentence  d'exciunuiu- 
nicatiou  ilcvant  tenir  jusqu'à  ce  qu'elle  ait 
satisfait.  —  Le  septième  sépare  pour  im  au''  '• 
de  la  communion  du  corps  et  du  sang  de 
Noire-Scigneur  celui  qui  a  fait  seimL'ut  de 
ne  jamais  se  réconcilier  avec  celui  contre 
qui  il  plaide,  et  lui  conseille  d'eUacer  plutôt 
son  péché  par  des  aumônes,  des  pleurs  et 
des  JL'ùnos.  —  Dans  le  huitième  il  est  di>  «, 
fendu  à  tout  clerc  de  tirer  son  esclave  ou  son 
disciple  "  de  l'église  où  il  s'est  réfugié,  pour 
le  fouetter,  et  cela  sous  peine  d'être  exclu 
de  l'église  jusqu'à  une  satisfaction  conve- 
nable. 

3.  Le  neuvième  veut  que  ceux  '  qui  ont  été  9. 
rebaptisés  dans  l'hérésie,  sans  y  avoir  été 
contraints  parles  tourments,  subissent  la  pé- 
nitence marquée  dans  les  canons  de  Nicée, 
c'est-à-dire  qu'ils  soient  sept  ans  en  prières 
parmi  les  catéchumènes,  et  deux  ans  parmi 
les  catholiques;  qu'ensuite,  parla  clémence 
et  la  bonté  de  l'évêque,  ils  participent  à  l'o- 


'  De  monacliis  vero  id  obserrari  placnit,  qiiod 
synodus  Àgalliensis  vel  Anrelianensis  noscitur 
d  crevisse  :  lioc  lanlummodo  udjiciendum,tit  pro 
Ecclesiiv  ulilitale,  quos  episcnpus  prnbaverit  in 
clericaius  ofjicio,  cum  abhalis  voiunlate  debeant 
ordinari.  Ea  vero  quœ  in  jure  inonastcrii  de  fa- 
cuUalibiis  olferuntur,  in  nulio  diœcesana  tege  ab 
episcopis  cnnlingnntur.  Si  aulein  ex  laïcis  gitis- 
qiiam  a  se  factain  basilicam  consecrari  desiderut, 
nequaquam  siib  monasleriispecie,  ubi  congregatio 
non  cotligilur;  vul  régula  ab  episcopo  non  consli- 
tuitur,  tam  a  diœcesana  lege  audcat  segregare. 
Can.  .3,  ibid. 

-  De  lus  qui  se  incesta  pollulione commaculant, 
placuit  ul.  quousque  in  ipso  detestando  et  iUicilo 
carnis  conluberido  persévérant,  usque  admissam 
tantum  catechumetiorum  in  ecclesia  admittan~ 
tur :  cutii  quibus  etiam  nec  cibum  sumere  vlliim 
christianorum,  sicut  Apostolus  jussit,  oportet. 
Can.  4.  ibid. 

3  Hi  qui  altario  Dei  deserviunt,  si  subito  in 
flenda  carnis  fragililate  corruerint,  et  Domino 
respiciente  digne  pœnituerint,  ita  ut  et  niorlili- 
cato  corpore  cordis  contriti  sarrifieinm  Deo  obé- 
rant, jnancnt  in  polcslate  poniilicis,  vel  veraci- 
ter  aUlictos  non  din  suspendere,  vel  desidiosos pro- 
lixiore  lempore  ab  Ectlesiw  corpore  segregare; 
ita  tamin  ulsic  otjiciorunt  suorum  loca  recipinnl, 
ne  poi^sint  ad  alliora  ofjicia  ull  rius  promoveri. 
Qiiod  si  ileralo,  velut  canes  ad  vomituni,,  reversi 


fuerint,  non  soluni  dignitate  ofjicii  careani,  scd 
etiam  sanctam  comnuinionem,  nisi  in  exilu,  non 
percipiant.  Cau.  5,  pag.  1012. 

*  Qui  pœnitenli  vidaœ,  vel  virgini  religiosœ 
vim  slupri  intulcrit,  si  se  ab  eo  stqueslrari  no- 
luerit,  pariter  a  communione  et  a  cltrislianorum 
consoriio  segregetur.  Si  vero  illa  quœ  vint  per- 
tulil  ad  sanctam,  religionem  reditrit;  in  illo  solo, 
quo  adiisque  publiée pœiiiteat,  data  sententiaper- 
severet.  Cau.  6,  ibid. 

5  Qui  sacramento  se  obligavcrit ,  ut  lUigans 
cum  quolibet,  ad  pacein  nuUomodo  redeal  ;  pro 
perjurio,  uno  anno  a  communione  corporis  et 
saiiguinis  Domini  scgregalus,  reatuni  suum  elee- 
mosi/nis,  fletibusdquantis  poleritjejuniis  abluat, 
ad  charitatemvero,  quœ  opcrit  multitudinem pec- 
calorum,  celeriler  venire  festinet.  Cnn.  7,  ibid. 

^  Nullus  clerieorum  servuni,  aut  disripulum 
suum,  ad  ecclesinm  confugientem,  exlrahere  au- 
deat,  rel  flagellare  prœsumat  :  quod  si  fecerit, 
donec  digne  pœnileut,  a  loco,  cui  honorem  non 
dédit,  segregetur.  Cau.  S,  ibid. 

'  De  bis  qui  in  prœraricatione  rebaptizali  sine 
aliqua  necessilate  vel  tornientodelapsi  sunt,  pin- 
cuit  ut  circa  eos  illa  Mcwnœ  synodi  statuta  ser- 
veniur.  quœ  de  prceiaricaloribus  censita  esse 
noscuiitur  :  idegl,  vl  seplem  annis  nter  catechu- 
menos  orent,  et  dnobus  inter  caikoticos,  et  pos- 
tea,moderatione  et  clementia  episcopi,  fidelibus  in 
oblatione  et  Eucharislia  communicent,  Can.  9,ibid. 


826  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 

Cm.  10.  blalion  elàrEucliarislie  avec  les  fidèles.  — 
11  est  oidoiin(id;ins  le  dixième  que  ceux'  qui 
ne  se  seront  pas  retirés  de  l'éplise  lorsque 
l'évèque  le  leur  aura  ordonné  pour  les  punir 
de  quelques  fautes,  n'ohtiendronl  leur  pardon 
deluiquepluslonf;tcnipsaprés,enpunitionde 
leurcontumace.  Il  est  rccoiiiinandé  à  l'évèque 
II.  parle  ouziénie  de  punir,  selon*  laqualiti;  des 
personnes,  les  clercs  qui  en  seront  vcniisaux 
mains.  —  Il  parait  par  le  douzième  qu'il 
,^  s'était  fait  plusieurs  oïdinations  contre  les  ca- 
nons :  le  concile  veut  bien  '  qu'elles  aient 
leur  efl'el,  avec  défense  néanmoins  d'élever 
à  de  plus  hauts  degrés  ceux  qui  ont  été  ainsi 
ordonnés.  Mais  il  déclare  que  ceux  qui  à  l'a- 
venir auront  été  ordonnés,  contre  les  canons, 
seront  déposés,  avec  défense  à  ceux  qui  au- 
1  ont  fait  de  semblaWes  ordinations,  d'en  faire 
aucune  dans  la  suite.  —  On  rejette  dans  le 
;j,  treizième  les  oblations  des  catholiques  '  con- 

vaincus d'avoir  donné  leurs  enfants  à  baptiser 
u,         ù  des  hérétiques.  —  Le  quatorzième  défend 
aux  fidèles  *  de  mans^er  avec  ceux  qui  se  sont 
15,  fait  leb^iptiser.  —  Le  quinzième  ordonne  ° 

l'exécution  des  anciens  canons  louchant  la  fa- 
miliarité des  clercs  avec  des  femmes  étrangè- 
res, ajoutant  que  ceux  qui  y  contreviendront 
seront  privés  de  leurs  bénéfices  api  es  une  prê- 
te, mièrc  et  seconde  inonition.  —  Le  seizième  est 
un  règlement  pour  empêcher  qu'on  n'enlève 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

on  qu'on  ne  dissipe  les  biens  et  les  effets  des 
évoques  aprèsleurmorl.  Il  est  ordonné  qu'aus- 
siti'it  que  l'évèque  sera  mort,  l'on  confiera  la 
parde  de  sa  maison  h  une  personne  fidèle  ', 
qui,  avec  une  ou  deux  autres,  veillera  à  la 
conservation  de  tout  ce  qui  se  trouvera  dans 
celte  maison,  jusqu'/i  l'élection  d'tm  succes- 
seur, en  fournissant  toutefois  là-dessus  aux 
clercs  de  cette  église  les  aliments  nécessai- 
res. Burchard,  Yves  de  Chartres  et  Surius  ci- 
tent quelques  autres  canons  de  ce  concile. 
A.  Le  troisième  fut  tenu  à  Valence  la  quin- 
zième année  du  roi  Théodoric  en  Espagne,  le 
3  novembre  de  l'an  524,  première  année  du 
pontificat  du  pape  Jean  :  il  ne  s'y  trouva  que 
six  évèqucs  avec  l'archidiacre  Sallustius  qui 
souscrivit  au  nom  de  Marcellin,  son  évêque. 
Les  six  canons  que  l'on  y  fit  regardent  prin- 
cipalement ce  qui  doit  (Mre  observé  pendant 
la  vacance  du  siège,  et  quelques  points  de  dis- 
cipline. En  voici  la  substance  :  Avant  que  l'on 
apporte  les  oblations  '  et  qne  l'on  renvoie  les 
catéchumènes,  on  lira  les  saints  Evangiles 
après  les  épitres  do  saint  Paul,  afin  que  non- 
seulement  les  fidèles,  mais  aussi  les  catéchu- 
mènes et  les  pénitents  puissent  entendre  les 
préceptes  salutaires  de  Nofrc-Seigneur  Jé- 
sus-Christ, ou  le  sermon  de  l'évèque;  — 
quand  Dieu  aura  appelé  à  lui  '  un  évêque, 
les  clercs  ne  prendront  rien  de  ce  qui  se  trou- 


Cul 

52».  Tom.'* 

Coocil., 

1617. 


'  Qui,  jubente  sacerdote,  pro  quacumqiie  culpa. 
ab  ecclesia  exire  conlempserit,  pro  noxa  cotilu- 
niaciœ.  lardius  recipiatur  ad  tcniam.  Can.  10, 
pag.  1G13. 

'  Si  qui  clerici  in  imitvam  cadem  prorupcrint, 
proul  dignilas  oUicioruin  in  lali  cxcessu  contu- 
meliam  perliiknt  ,  o  ponlifice  districtius  viudi- 
celur.  Can.  H,  ibid. 

'  Qui  contra  décréta  canonum,  indiscrète  clcri- 
cos  usqut  iiunc  ordinaverint,  cis  Dominus,  tel 
sancla  ecclcsiaslica  c/iarifav  ignoscol  :  amodo 
vero,  si  in  tali  aui^u  proruperint,  decretum  cano- 
num quod  circn  eorum  persunas  slalulum  est,  id 
est,  ul  nullum  ordinare  audeunl,  nb^ervelur;  vel 
qui  deinccps  onlmati  fuerint,  depnrinntur;  In 
vero  qui  taies  haclenus  ordinati  sunt,nullo  lem- 
pore  promdveantur.  Can.  \i,  iliid. 

*  Cntholicus  qui  filios  suos  iu  hœresi  baplizan- 
dos  obtuleril ,  obtalio  illius  in  ecclesia nullatenus 
recipiatur.  Can.  1.!,  iliid. 

s  Cum  rcliaptizatis  fidèles  religiosi  nec  in  citio 
participent.  Can.  H,  ibid. 

•  Fnmitiarilalem  extranearnm  muliermn,  licet 
ex  toto  sanrti  l'atrcs  aniiquis  monitionibus  prœ- 
ceperint  ecclcsiaslicix  evitandam,  id  mine  tamen 
nobis  visum  est,  vt  qui  talis  probnliitur,  si  pnst 
primam  et  secundam  conimonitionem  se  emen- 
dare  neglexerit.  douée  in  ritio  jerseverat,  offlcii 
sui  dignilale  privetur.  Quod  si  se,  Dec  juvante, 


correxeril,  sancto  ininislerio  reslauretur.  Can.  15, 
ibid. 

'  Sed  is  cui  domus  commissa  est,  subjunclis 
sibi,  cum  consilio  clcri,  uno  rel  duobus  fidelis.H- 
mis,  omr.ia  usque  ad  tempus  pontificis  substi- 
tuendi  debeat  conservare,  tel  /lis,  qui  domo  inve- 
niuntur,  clericis  consuetam  alimoniam  adminis- 
trare.  Can.  IC,  ibid. 

'  Inler  cetera,  bœc  censuimus  observandum.ut 
sacrosancta  Ecangelia  ante  niunerum  illationuni, 
vel  niissam  catecl:umenorum ,  in  ordine  lectiouuni 
posl  .Ipnstolum  leguntur  :  qualenus  salutaria 
prœcepla  Domini  nostri  Jesu  Chnsti,  vel  sermo- 
litm  sacerdotis,  7ion  solum  fidèles,  sed  etiam  ca- 
techumcni  ac  pœnitentes,  et  omnes  qui  ex  diverso 
svnt,  audire  licitum  habeant.  Sic  enim  ponti/i- 
cum  prwdicationc  audila ,  nonnuUos  ad  fidem 
attractos  cridcnler  scimus.  Can.  I,  toiu.  IV,  Con- 
cil.,  pag.  icn. 

9  llor  etiam  placuit,  ut  episeopoab  hocsœculo, 
jubente  Domino,  accersito,  clerici  ab  omni  om- 
nino  suiictlcclili,  tel  quœcumque  sunt  in  dumo 
ecclesiœ,  vel  episcnpi,  in  libris.  inspcciebus.  uten- 
silibus,  vasculis,  frugilius,  gr(gibus,  animalibus, 
vel  omni  omnino  re  rapnces  mnnus  abstineant, 
et  niliil  latronum  more  diripianl.  Qui  si  nec  cn- 
vnnutn  auctoritnie  cohibili  fuerint,  iimnia  quce 
pervaserint,  mciropulitani,  vel  omnium  compro- 
vincialium  sacerdolum  dislriclione  coacli,  in prw- 


[vr  SIÈCLE.]  CHAPITRE  LXXXVl.  — 

vcra  clans  la  maison  de  l'église  ou  de  \'é\&- 
qii(\  soit  en  livres,  soit  en  espèces,  ou  en  us- 
tensiles, en  vaisselle  ou  en  friiils,  ou  en  trou- 
peaux de  bélail,  ou  autres  animaux;  s'ils  ont 
enlevd  quelque  chose  contre  la  disposition 
des  canons,  ils  seroni  conlrainls  de  le  ren- 
dre par  l'anlorilé  du  métropolitain  ou  des 
évoques  de  la  province,  afin  que  le  succes- 
seur trouve  dans  la  maison  épiscopale  toutes 
les  choses  nécessaires;  ;\ cet  eU'et  on  obser- 
vera le  décret  du  coucile  de  liiez,  suivant 
lequel,  ;'i  la  mort  d'un  évêque,  l'évéque  le 
plus  voisin  viendra  faire  ses  funérailles  en  la 
manière  ordinaire,  et  prendra  soin  de  l'é- 
glise jusqu'à  l'ordination  du  successeur, 
en  sorte  que  par  sa  préseuce  il  empêche 
qu'aucun  des  clercs  ne  malverse;  pour  plus 
glande  sùrelé  le  même  évèquc  fora  faire 
tians  la  huitaine,  s'il  est  possible,  un  inven- 
taire de  tout  ce  que  le  défunt  aura  laissé,  et 
l'enverra  au  métropolitain ,  qui  commettra 
une  personne  capable  pour  payer  aux  clercs 
leurs  pensions,  à  la  charge  de  lui  rendre 
compte,  si  la  vacauce  dure  longtemps;  afin 
que  d'un  côté  les  clercs  reçoivent  leur  subsis- 
tance, et  que  de  l'autre  l'évéque  futur  n'ait 
pas  le  chagrin  d'entrer  dans  une  maison  vide 
de  tout,  où  il  ne  puisse  trouver  de  quoi  sub- 


CUNCILE  DE  VALENCE.  827 

sisler,  ni  en  fournir  aux  autres.  —  D'apn'-s  '^'^'-  '• 
le  même  concile,  '  qu'au  cas  que  l'évéque 
meuie  sans  testament,  ses  [larents  seraient 
avertis  de  ne  rien  prendre  de  ses  biens  à 
l'insu  du  métropolitain  et   des  comprovin- 
ciaux,    de   peur    qu'ils  ne    confondent   les 
biens  de  l'église  avec  ceux  de  la    succes- 
sion   du    défunt  ;    pour  cette   raison ,    ses 
parents  attendront  jusqn';\  l'ordiiialiciu  d'un 
nouvel  évoque,  ou  s'adresseront  au  uK-tro- 
politain,  si  la  vacance  dure  trop  lonj:temps. 
Le  coucile  prive  de  la  communion  de  l'Eglise 
les  clercs  ou  les  laïques  qui  feront  le  contraire 
de  ce  règlement,  h  moins  qu'ils  ne  se  corri- 
gent et  ne  cessent  leurs  poursuites.  Il  ajoute, 
que  si  quelqu'un  demande  modestement  ce 
qui  lui  est  dû,  le  métropolitain,  ou  celui  qu'il 
a  commis,  lui  fera  raison.  11  étend  la  rigueur 
de  ce  canon  contre  tous  ceux  qui  auraient 
auparavant  usurpé  les  biens  de  l'Eglise  ou  de 
l'évéque.    —  Comme  il  arrivait  quelquefois 
que  les  funérailles  étaient  ditférées  a  cause 
de  l'absence  de  l'évéque  commendalaire  qui 
devait  prendre  soin  de  l'église  vacante,  et 
que  par  là  le  corps  du  défunt  était  sujet  à 
beaucoup  d'indécence;  pour  obvier  h  cet  in- 
convénient, il  fut  ordonné  ■  que  l'évèipie  qui       *• 
avait  coutume  d'être  invité  aux  funérailles 


tiniim  stalum  reddere  intégra  coganiur:  ut  nihil 
aniisliti,  vel  dispensalori  fulure  nccessarioi-um, 
siib  hac  justa  constitutions,  dcperent.  Quod  ut 
confidenlius,  justitia  manente,  servetur,  secun- 
dum  Regiensis  synodi  consiituta,  ipiscopo  a  cor- 
pore  recedente,  vicinior  ilii  accédai  cpiscoptts  ; 
qui  ex  more  txeiiuiis  celebratis.  slatitn  ecclesiœ 
ipsius  curam  districtissime  gerat,  ne  quid  ante 
ordinationem  futuri  pnntificis  inkiantium  cleri- 
corum  suboersioni,  veldireplionijani  liceat.  Ita  ut 
de  reperlis  omnibus  inspeclior  censitio  descriptio- 
que  ftdelissima  (>i  fieri  polest)  intra  oclacas  de- 
funcli,  sub  diligentin  prœsenlis  episcopi,  peragatur. 
Deliinc  ad  metropolilani  notiliam  habita  ordina- 
tio  vel  descrip'io  dcfcratur,  tit  ejus  electione  talis 
persona  ordinandœ  domus  ecclesiasticœ  procure- 
tur,  qucB  vel  consueta  clericis  stipendia  dispen- 
sct,  et  credilarum  sibirerum  [si  forsitan  tarditas 
in  episcopo  ordinando  successeril)  metropolilano 
congruis  teniporibus  reddere  possit  rationem  :  ut 
sub  hac  salubri  constilutione ,  clerici  stipendiis 
suis  omniiio  contcnti,  labores  non  diripiunt  epi- 
scopi decedentis,  et  in  vacuam  ecclesiœ  domum 
fulurus  pontifex,  non  sine  dolnre,  succédât,  sed 
magis  de  jirœdecessoris  sui  dimisso  possit  et  ipse 
gaudere,  et  aliis  ministrare.  Can.  2,"iiaj,'.  1618. 

'  Simili  qnofiue  modo,  parentibus,  et  propin- 
quis  decedenlis  episcopi,  si  intestalus  obierit,  de- 
nuntietur,  ut  sine  melropoliiani.  rel  comproiiii- 
viatium  sacerdotum  cunscienlia,  nihil  de  rébus 
defuncti  occupare  pertentent;  ne  forte  in  hceredi- 


tariis  rébus  eiiam  aliqua  ad  ecclesiam  pertinen- 
tia,  vel  pcrmixtn  usurpent:  sed  aut  usque  ad  or- 
dinationem  futuri  expectcnt  antislitis,  aut  certe 
si  longum  fueril,  ad  metropolilani  fut  dictum  est) 
ordinationem  recurranl.  Si  quis  autein  inunenwr 
divini  tiinoris  contra  hœc  sancita  synodicacleri- 
cvs  quisquam  vel  làicus  venire  improba  mente 
tenlavcrit,  et  communione  et  consorlio  pricelur 
ecclesiœ;  quia  durum  est,  ut  ad  illam  conreniat, 
quam  expoliare  non  metuit  :  nisi  forte  spiritu 
meliori  correclus,  dum  a  prœsumptione  cessave- 
rit,  recuperet  indulgcntiam.  Si  aulem  ralionabi- 
lilcr  modesteqne  unusfjuisque  repelit  quod  sibi 
jure  debetur,  ei,  absque  aliqua  animadvtrsione, 
a  metropolilano,  vel  cui  injunxerit,  aut  rcs,  aut 
ratio  non  negetur.  Hoc  eliam  onines  canone  con- 
slringendi,  qui  in  prœteritum  res  ecclesiœ,  vel 
episcopi  usurpantes  diripuerint.  Can.  3,  ibid. 

-  Illud  eliam  provido  consilio  decretum  est,  ut 
quia  scepe  sanctorum  antistitum.  per  absentiam 
commcndatoris  episcopi,  exequiœ  differuntur,  ita 
ul  veaeranda  ponlificis  ntembra,  dum  tardius  fu- 
nerantur,  injuriœ  omnino  subjaceant;  episcopus, 
qui  post  mortem  fratris  ad  scpeliendum  eum  solet 
invitalus  occurrere,  infirmum  magis,  et  adhuc 
in  corpore  posilum,  admonilus  visitare  non  diffé- 
rât: ut  aut  de  relevatioue  consacerdotis  amplius 
gaudeat,  aut  cerle  de  ordinatione  domus  suœ  fra- 
Irem  admoneat,  cjusque  probabilem  voluntatem 
inelfectum  transmiUat,  ac  recedentem  a  sœculo, 
post  oblatum  in  ejus  commendaticne  sacrificium 


828  HISTOIHE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES, 

de  son  frère  viendrait  le  visiter  malade,  ou 


pour  se  ri^jnniravec  lui  de  sacouvalcsccnce, 
ou  pour  l'averlir  de  donner  ordre  auxuHai- 
res  de  sa  maison,  ou  pour  exécuter  sa  der- 
nière volonti';  qu'anssilùt  après  la  mort  de 
révoque,  il  otnirail  à  Dieu  le  sacrifice  pour 
lui,  le  ferait  enterrer,  et  observerait  ce  qui  a 
été  réglé  danslcscanons  précédents  touchant 
les  biens  et  les  meubles  qui  appartenaient 
soit  à  lui-même,  soit  à  l'éiilise.  H  est  ajouté 
que  si  un  évèque  raeuit  subitement,  et  que 
les  évoques  des  fronlières  ne  puissent  se 
trouver  à  ses  funérailles  à  cause  deleuréioi- 
Lnement,  ou  gardera  son  corps  un  jour  et 
une  niril,  pendant  lesquels  les  frères  et  les 
religieux,  ou  d'autres,  demeureront  auprès 
de  lui,  chantant  continuellement  des  psau- 
mes; qu'ensuite  les  prcMres  le  mettront  dans 
un  cei'cueil  d'une  manière  drccntc,  sans  tou- 
tefois l'enterrer,  jusqii'i  l'arrivée  de  l'évê- 
que  invité  avec  le  plus  de  diligence  que  l'on 
pourra,  pour  l'ensevelir  solennellement,  en 
suivant  les  rils  usités  anciennement  dans  la 

«•  sépulture  des  évèques.  —  Un  autre  règlement 

du  concile  de  Valence  fut,  que  l'on  priverait 
de  '  leurs  fonclioiis  et  de  la  communion  les 
clercs  désobéissants  a  leur  évoque,  ou  vaga- 
bonds, soit  qu'ils  soicMit  diacres  ou  prêtres; 

6.  —  qu'un  évèque  n'ordonnerait*  pas  un  clerc 

d'un  autre  diocèse  sans  l'agrément  du  dio- 
césain ;  et  que  les  évoques  ne  conféreraient 
l'ordre  de  prêtrise  à  aucun,  qu'il  ne  promit 
d'être  stable  dans  le  lieu  de  son  service. 

ARTICLE  IV. 

DES  CO.NCILES  DE  JUSQUE  [52  1],  ET  DE 
CARTUAGE  [323]. 

cmtii»       1.  Ce  fut  encore  dans  le  cours  de  l'année 
52*.  Toi».  IV   o2i  que  se  li.t  le  concile  de  Jun(iue,  ville 

Conell.,  pif.       ,        .  , 

i£î7.  d'.\nuiue,  dans  la  provnice  de  Byzacene: 

nous  n'en  avons  que  la  lettre  synodale  ,  qui 


porte  le  nom  de  Libéral,  primat  de  la  Byza- 
cene. Il  y  exhorte  Boniface  de  Cailli;ige, 
à  qui  elle  est  adressée,  à  maintenir  en  vi- 
gueur les  saints  canons,  et  à  ne  pas  permet- 
tre que  personne  y  déroge.  Saint  Fulgence 
s'étant  trouvé  à  ce  concile  en  qualité  d'é- 
vèqne  de  Ruspe,  un  évèque,  nonnné  Quod- 
vultdéas,  lui  disputa  la  préséance;  mais  tout 
le  concile  décida  en  sa  faveur.  Le  saint  ne 
dit  mot  en  celte  occasion,  pour  ne  point  pré- 
judicier  à  l'autorité  du  concile  ;  mais  comme 
il  sut  que  Quodvidtdéus  trouvait  à  redire  au 
jugement  rendu  contre  lui,  et  qu'il  en  était 
aflligé,  craignant  d'altérer  la  charité,  il  sup- 
plia puliliqucment  les  évoques  du  concile  de 
SufTète,  où  ils  assistèrent  tous  les  deux  quel- 
que temps  après ,  de  placer  Quodvultdéus 
avant  lui  :  ce  que  les  évoques  lui  accordèrent 
en  iulmirant  son  humilité.  Le  diacre  Fer- 
rand  cite  un  canon  du  concile  de  Junque, 
qui  défend  à  un  évèque  d'entreprendre  sur 
le  peuple  d'un  autre. 

2.  Le  même  diacre ,  Victor  de  Tuiines,  et 
quelques  auti'os  anciens  font  mention  d'un 
concile  tenu  à  Carthage  sous  le  pontificat  de 
Boniface,  évèque  de  cette  ville,  et  sous  le 
règne  du  roi  Hildéric  :  il  fui  convoqué  de 
toutes  les  provinces  d'Afrique.  Boniface  en 
marque  le  sujet  dans  la  lettre  de  convocation 
qu'il  adressa  à  Messor,  primai  de  Numidie, 
en  disant  que  la  paix  qui  venait  d'être  ren- 
due à  l'Kglise  d'.\frique,  après  une  si  longue 
et  si  dure  persécution,  était  troublée  au  de- 
dans par  quelques  évèques  qui  ne  voulaient 
point  déférer  à  leurs  supérieurs,  se  préten- 
dant leurs  égaux,  tandis  qu'eux-mêmes  vou- 
laient que  d'autres  leur  fussent  soumis:  il 
parait  que  c'était  envers  Boniface  même  que 
l'on  manquait  de  déférence,  et  que  l'on  atta- 
quait les  piiviléges  de  l'église  de  Carthage. 
Il  aurait  fort  souhaité  que  Messor  pût  venir 
en  personne  au  concile  ;  mais  sachant  que 


Carth^f* 
ta.  Ton 
ConciU, 
Itit. 


Deo,  mox  sepulturœ  Iradat  diligenlissime ,  et  su- 
perius  coiislUuta  canonica  non  diffcral  adimplere. 
Si  atilem  antistes  oliitu  rcpentinn  dixccsseril.  et 
conliniilanei  sacerdoles  de  Innginquo  minime 
adesse  potuerint,  uno  die  tantum  cum  nocte  exa- 
minatum  corpusculitm  sarerdotis  maneal,  non 
sine  fralrum  uc  nligiosorum  frequcntia,  velpsal- 
lentium  excubalione  servulum  a  presbyteris , 
cum  omni  diligenlia,  in  loculn  cnndilum  .•eorsuin, 
non  slnlim  humflur,  sed  honori/ice  commendelur, 
donec  sine  mora,  inntnto  undecuimiue  jionti/ice, 
ab  ipso,  Ht  condecel,  solevinilir  luniuletiir,  lit  et 
injuria-  tollalur  occasio,  et  nios  anliguus  in  spe- 
liendii  sacerdotibus  observelur.  Cau.  4,  pag.  lOin. 


■  noc  etiam  plaçait,  ul  vagus,  alque  instnbilis 
clericus,  sive  eliani  in  diaconi  minislerio,  vel 
presbyteri  ofjicio  conslilulus,  si  episcopi,  a  quo  or- 
dinales est,  jirœreplis  non  obedierit.  ut  in  dclegala 
sibi  erctesia  offlcium  dipendnl  assiduum  ;  qumis- 
que  in  vitio  pernianscrit,  a  communionc  et  ho- 
nore privelur.  Ciin.  .">,  ibid. 

♦  L'I  nuUus  alienum  clrrieum,  secundum  dc- 
creln  canonnnt,  sine  ronscnsu  rpisrnpi  sut.  au- 
di-nt  ordiiiare.  Sed  nec  illum  sanclorunt  sacerdo- 
luni  ijUisfinin  ordinel.  qui  localrni  se  Inluruin 
primitus  non  spopondenl  :  ul  per  Imc  nullus  a 
regutn  ici  disciplina  ccclesiastica  dcviare  permit- 
latur  impune.  Cnn.  6,  pag.  1620. 


OHAPITHE  LXXXVI.  —  CONCILK  DE  CAIITIIAGE. 


[Vl*  SIÈCLE.] 

son  graiiil  Age  ne  le  lui  penuellait  pas,  il  le 
juia  iri-nvoyertle  sa  province  trois  ëvèqiics, 
Firniiis,  Maricn  et  Félix,  pour  aider  i\  niain- 
lenir  les  droits  de  son  éiilise.  Il  l'avorlit,  sui- 
vant l'iincion  usaj^e,  (pie  la  fête  de  l'âipies 
devait  se  ccldljrei'  Je  Iroisièuic  des  calendes 
d'avril,  c'est-ù-dire  le  30  mars,  comme  on 
la  célélira  en  ellet  en  523.  C'était  aussi  l'u- 
sage d'envoyer  ;\  révè(jue  do  Carlliage  la 
matricule  des  évèques  morts  et  de  leurs  suc- 
cesseurs :  Bonifacc  prie  Messor  de  lui  en- 
voyer la  sienne,  afin  qu'il  put  s'en  servir 
pour  régler  le  vni\'j;  des  évLMUies  qui  venaient 
à  Cartilage  de  plusieurs  provinces,  surtout 
de  ceux  qui  ne  craignaient  pus  de  se  préfé- 
rer à  leurs  anciens.  Messor,  dans  sa  répon- 
se, loua  le  zi'le  de  Bouiface  pour  la  déf(!use 
des  privilèges  de  son  église,  et  lui  envoya 
les  trois  évèques  qu'il  désirait,  avec  un  qua- 
trième nommé  Florentieu ,  ajoutant  qu'il 
avait  écrit  à  l'évèque  Janvier,  ordinateur  de 
Bonilacc ,  pour  l'exhorter  ;\  faire ,  tant  en 
son  nom,  qu'en  celui  de  tout  le  concile,  tout 
ce  qui  conviendrait  pour  l'utilili!  de  la  cause 
qui  serait  traitée  ;  qu'an  reste  il  avait  donné 
ses  ordres  pour  faire  dresser  la  matricule 
qu'il  souhaitait. 

3.  Boniface  avait  mandé  les  évèques  pour 
le  1"  février  de  l'an  l^2o,  qui  était  le  second 
du  règne  de  Hildéi'ic  ;  mais  ils  ne  s'assem- 
blèrent que  le  cinquième  jour  de  ce  mois. 
Ce  fut  dans  la  salle  secrète  de  l'église  de 
Saint  Agilée  martyr.  Boniface  prit  le  premier 
la  parole,  et  reudit  grâces  à  Dieu  de  la  li- 
bcité  de  l'Eglise,  témoignant  qu'il  avait  plus 
de  joie  de  voir  une  si  nombreuse  assemblée 
d'évèques,  que  do  la  lumière  du  soleil.  Les 
évèques,  de  leur  côté,  au  nombre  de  soixan- 
te, assurèrent  qu'ils  n'avaient  pas  moins  de 
joie  de  voir  le  siège  de  Carthage  si  digne- 
ment rempli  après  une  si  longue  vacance  ; 
ils  exhortèrent  Boniface  à  maintenir  les  ca- 
nons, à  l'imitation  d'Aurèle,  son  prédéces- 
seur, et  à  proposer  les  matières  que  l'on  de- 
vait traiter  dans  le  concile.  Boniface  fit  lire 
sa  lettre  a  l'évèque  Messor,  primat  de  Nu- 
niidie,  puis  la  réponse  qu'il  en  avait  reçue, 
et  dont  il  fit  un  grand  éloge.  Ensuite  le  no- 
taire Rédempliolus  lut,  par  ordre  de  Boniface, 
ses  lettres  aux  évèques  de  la  province  Fro- 
consulaire,  de  celle  de  Tripolis  et  de  Numi- 
die.  Les  députes  de  ces  trois  provinces  étaient 
présents.  Il  n'y  en  avait  qu'un  de  la  Mauri- 
tanie Césarienne,  les  autres  n'ayant  pu  ve- 
nir a  cause  de  la   guerre.  A  l'égard  de  la 


829 


province  de  Sytifie,  Optât  était  venu  à  Car- 
thage, mais  il  avait  été  obligé  d'en  sortir 
par  ordre  du  roi.  Boniface  assura  que  cet 
(Wè([ue  donnerait  sans  peine  son  consente- 
ment au  i('sullat  du  concile,  lorsqu'on  lui 
en  aurait  fait  part;  quant  à  becundus  qui 
élail  le  seul  évèque  de  la  Manrilanie  Césa- 
rienne, Boniface  conseiilit  que  son  siiirragc 
valut  i)oiir  toute  sa  province  ;  mais  il  parut 
peu  coulent  que  Libérât,  primat  de  la  Byza- 
cène,  ne  parut  point,  quoiqu'il  lui  eût  écrit 
deux  fois.  Les  évèques  le  prièrent  de  l'atten- 
dre jusiju'au  lendemain,  suivant  l'ancien- 
ne coulume,  disant  que  s'il  ne  venait  point 
au  concile,  on  traiterait  de  la  manière  de 
punir  sa  désobéissance.  Félix,  député  de  la 
province  de  Xumidie,  d(;manda  qu'on  fil  lire 
les  canons  qui  marquaient  l'ordre  des  pro- 
vinces d'Afrique  :  sur  quoi  le  diacre  Agilée 
lut,  par  ordre  de  Bonifacc,  un  extrait  du  con- 
cile tenu  à  Carthage  le  1"  mai  418  dans  la 
salle  secrète  de  la  basilique  de  Fauste  ;  et 
l'on  vit  par  cet  extrait  que  la  première  pro- 
vince était  la  Proconsulaire  ou  Carthaginoi- 
se ;  la  seconde,  la  Numidie  ;  la  troisième,  la 
B^zacène,  Après  ces  préliminaires,  les  évè- 
ques ayant  délibéré  que  l'on  fit  la  lecture 
du  Symbole  de  Nicée,  on  le  lut  suivant  l'exem- 
plaire traduit  du  grec  en  latin,  envoyé  par 
Atticus,  évèque  de  Conslantinople  ;  et  tous 
les  évèques  déclarèrent  que  quiconque  re- 
fuserait d'y  souscrire,  ne  serait  pas  tenu  pour 
catliolique  :  non  que  ce  Symbole  eût  besoin 
d'être  autorisé  par  de  nouveaux  suffrages, 
mais  afin  de  se  l'imprimer  plus  fortement  dans 
le  cœur,  en  y  souscrivant  de  la  main.  L'é- 
vèque Bonifacc  voulut  même  qu'il  fût  inséré 
dans  les  Actes  de  l'assemblée.  11  ordonna 
ensuite  que  l'on  tirât  des  archives  de  l'église 
de  Carthage  le  recueil  des  canons  faits  dans 
plusieurs  conciles  d'Afrique  sur  divers  points 
de  discipline,  afin  que,  par  la  lecture  que 
l'on  en  ferait,  ceux  qui  les  avaient  observés 
s'en  congratulassent,  et  que  ceux  qui  les 
avaient  uégligés  ou  transgressés  eu  devins- 
sent plus  exacts  à  les  observer.  Le  diacre 
Agilée  en  lut  un  grand  nombre,  tous  sur  des 
points  de  discipline  :  on  voit  par  les  citations 
marquées  dans  les  actes,  qu'il  s'était  tenu 
en  Afriipie  jusqu'à  vingt  conciles  sous  Au- 
rèle  de  Carthage.  Comme  tous  ces  canons 
regardaient  en  général  la  discipline  de  l'E- 
glise, les  évèques  demandèrent  qu'on  hit 
aussi  ceux  qui  regardaient  en  particulier  les 
privilèges  de  l'église  de  Carthage.  Boniface 


830 


HISTOraE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSI ASTIQUES. 


A»einb!éa 
da  6  février 
£25. pas  1641. 


I 


Ht  lire  dans  le  même  recueil,  premièrement 
Je  c.nnou  de  Xicée  touchant  les  privilèges  de 
toutes  les  grandes  églises  ;  puis  ceux  des 
conciles  d'Afrique,  dont  qnalrc  s'étaient  te- 
nus à  Carthage,  qui  attribuaient  la  primauté 
à  cette  église  sur  toutes  les  autres  de  l'Afri- 
que ;  et  deux  du  concile  d'IIippone  où  il  était 
dit  que  tous  les  évèques  apprendraient  par 
les  lettres  de  l'évéquc  de  Carthage  en  quel 
jour  on  devrait  faire  la  Pâque  ;  et  qu'il  serait 
permis  à  chaque  province  d'avoir  son  pri- 
mat, à  condition  de  reconnailrc  la  su|)ério- 
rité  de  l'évêque  de  Carthage.  La  séance  ayant 
duré  fort  longtemps,  Bonifacc  demanda  que 
le  reste  des  aflaires  fût  renvoyé  au  lende- 
main, m«is  qu'auparavant  tous  les  évèques 
souscrivissent  aux  actes  de  ce  jour  :  ce  qui 
fut  accordé  unanimement.  Boniface  souscri- 
vit le  premier,  et  tous  les  autres  évoques  de 
suite.  Janvier,  évcque  de  Végéselitaue,  sous- 
crivit, tant  en  son  nom,  qu'en  celui  d'un 
autre  Janvier,  évêquedé  .Masculitane,  député 
comme  lui  de  la  province  de  Numidie,  à  cause 
que  sa  grande  vieillesse  ne  lui  peimettait 
point  d'écrire. 

A.  Le  lendemain,  6  février  523,  les  évoques 
s'étant  assemblés  au  même  lieu,  Boniface 
dit  que,  comme  il  ne  restait  plus  rien  à  ré- 
gler touchant  les  all'aires  générales  des  égli- 
ses, il  fallait  venir  aux  particulières.  Il  per- 
mit donc  à  l'abbé  Pierre,  qui  était  à  la  porte 
avec  quelques-uns  des  anciens  de  son  mo- 
nastère, d'entrer  dans  la  salle  du  concile.  Ils 
présentèrent  une  requête  eu  plaintes  contre 
Libérât,  primat  de  la  Byzncènc,  où  il  était 
dit  que  plusieurs  moines  de  divers  endroits 
d'Afrique,  et  quehjues-uns  même  en  dora 
de  la  mer,  assemblés  pour  former  un  mo- 
nastère dans  la  province  Byzacène,  l'avaient 
bâti  par  le  secours  de  leurs  parents  et  d'au- 
tres personnes  de  piété;  qu'ils  l'avaionl  sou- 
mis immédiatement  à  l'église  de  Carthage, 
et  fait  dédier  l'église  par  Réparât,  évèque 
de  Puppien  dans  la  Proconsulaire ,  après 
avoir  choisi  pour  abbé  un  d'entre  eux ,  qui 
était  sous-diacre  de  la  province  Byzacène. 
Depuis  ce  temps-là ,  le  siège  de  Carthage 
étant  demeuré  vacant  pendant  la  persécution 
du  roi  Trasamond,  et  le  mouaslère  ayant  eu 

>  Kum  docemus  monasterium  de  Prœcisu  quod 
in  medio  plebium  Le  pliinineiisis  ICcclesitv  poiulur 
pra'lerminso  eodem  episcopo  vicino,  Viio  Alerien- 
sis  Ecclesiœ  episcopi  consnliilioiiem  habcrc,  qui 
in  longiiuiHO  posilus  est;  et  liaccense  monaste- 
rium, quod  ilaximianensi  Ecclesiœ  vicinum  est. 


besoin  de  prêtres,  on  avait  eu  recours  à  Bo- 
niface, évéque  de  Gratiane  et  primat  de  la 
Byzacène ,  qui  ordonna  en   eU'et  quelques 
moines.  Libérât,  son  successeur  dans  la  pri- 
matie,  prélendit  que  le  monastère  dépendait 
de  lui  ;  et  comme  l'abbé  Pierre  refusait  de  le 
reconnaître,  il  l'excommunia,  lui  et  tous  ses 
moines.  Les  fidèles  dé  la  Province,  infonnés 
de  ce  qu'avait   fait   Libérât,    fuyaient   les 
moines  et  leur  refusaient  l'hospitalité,  quoi- 
que ceux-ci,  de  leur  côlé,  l'exerçassent  fi- 
dèlement.   On   leur  défendait  l'entrée  des 
églises,  et  lorsqu'on  les  y  trouvait,  on  lesea 
faisait  sortir.  Personne  n'osait  les  saluer, 
pas  même  leurs  amis,  ni  recevoir  leur  béné- 
diction. Telle  était  la  situation  du  monastère 
de  l'abbé  Pierre,  lorsqu'il  donna  sa  requête 
signée  de  lui  et  de  quatre  autres,  dont  un 
était  prêtre,  et  deux  diacres,  le  quatrième 
est  sans  qualité  :  et  il  parait  que  beaucoup 
d'autres  sousci'ivirent  aussi,  mais  ils  ne  sont 
pas  nommés.  L'abbé  Pierre  justifiait  sa  con- 
duite et  l'exemption  qu'il  prétendait  lui  être 
due,  en  disant  que  son  monastère  avait  été 
fondé  par  des  personnes  rassemblées  de  di- 
verses provinces;  qu'encore  que  le  premier 
abbé  eut  été  sous-diacre  de  la  province  By- 
zacène, il  n'avait  pas  été  élu  abbé  comme 
sous-diacre,  mais  comme  moine;  que  d'ail- 
leurs il  n'était  ni  seigneur,  ni  propriétaire 
du  monastère.  Il  ajoutait  que,  si  l'on  avait  eu 
recours  au  primai  de  la  Byzacène  pour  les 
ordinations  des  prêtres  dont  le  monastère 
avait  eu  besoin,  ce  n'était  qu'à  cause  de  la 
vacance  du  siège  de  Carthage.  Il  donnait 
pour  exemples  d'exemptions'  semblables  à 
celle  qu'il  revendiquait,  le  monastère  de  Pré- 
sis,  qui,  situé  au  milieu  du  diocèse  de  Lep- 
limin,  dans  la  Byzacène,  dépendait  m'-an- 
moins  de  l'évêque  de  Vicataire,  ville  de  la 
même  province  ;  le  monastère  de  Bacce,  près 
de  l'église  de  Maximien,  en  Numidie,  qui 
dépendait  du  primat  de  la  Byzacène,  et  le 
monastère  d'Adrumètc ,  qui  avait  toujours 
fait  ordonner  ses  prêtres  par  des  évêqties 
d'uulre-mer,  sans  s'adresser  à  l'évêque  de  la 
ville.   L'abbé  Pierre  proiluisait  encore  pour 
sa  défense  un  extrait  du  second  sermon  de 
saint  Augustin,  la  ]'ie  commune,  où  cesaint 

ad  crinsolalionem  pyimatis  llyzaicnœ  prorincias 
seconferre?  Aam  et  de  Adnimilino  mnnasirrio 
nullo  modo  silere  possumus,  qui,  iirtrlrrmisso 
ejusdem  ciii'atis  episcopo  de  Irniismarinis  parti- 
bus  sibi  semper  pr<csbyteros  ordinaverint.  Toai. 
IV  Concil.,  piig.  1616. 


I VI"  siKCLE.]  CFIAPITHE  LXXXVI.  —  CONCILK  DE  CARPENTHAS. 


831 


(•V("'([iit!  ilil  ijiio  les  nionaslèrcs  loiidés  par 
SCS  disciples  irappaitPiiaiciU  ni  aux  foiida- 
tciirs,  ni  à  l'cf^lisc  d'IIipponc,  mais  :'i  la  coin- 
inuiiatitc!  ;  un  pi'iviléj;e  accoiilo  il  un  nionas- 
li've  de  lillcs,  dès  l'an  317,  parlJonirace,  pri- 
mat de  la  Byzacènc, où,  apiès avoir  niari[Li(5 
en  ^'('lierai  i]uo  li's  monaslères  de  l'un  et 
de  l'autre  sexe  doivent  être  exempts  de  la 
condition  de  tons  les  clercs,  suivant  la  cou- 
tume des  anciens  Pères,  il  leur  pcniicl  de 
choisir  un  prêtre,  ponr  ct''l('hrer  les  mystères 
dans  leur  monastère,  iï  condition  de  faire 
miîmoire  i\  l'autel  du  primat  de  la  province. 
Il  allt'jgua  encore  le  décret  du  troisième  con- 
cile d'Arles  pour  ttM'minei'  le  ditlV'rend  entre 
Théodore,  évèque  de  Fréjus,  et  Fauste,  abbé 
de  Lérins,  qui  porte  que  toute  la  multitude 
laïque  du  monastère  serait  sous  la  conduite 
de  l'abbé  qu'elle  aurait  élu,  sans  que  l'évè- 
que  s'y  attribuât  aucun  droit,  ni  qu'il  pût  en 
ordoiHicr  aucun  pour  clerc,  sinon  à  la  prière 
de  l'abbé.  Bonil'ace  ne  ]iarut  pas  content  de 
la  conduite  de  Libérai  envers  l'abbé  Pierre. 
Nous  n'avous  plus  la  lin  des  Actes  de  ce  con- 
cile ;  mais  on  ne  peut  douter  qu'il  n'ait  favo- 
risé les  prétentions  de  cet  abbé,  puisque  le 
décret  qui  fut  fait,  et  qui  nous  a  été  conservé 
dans  un  ancien  manuscrit  du  Vatican,  porte' 
que  tous  les  monastères  seront ,  à  l'avenir, 
comme  ils  l'ont  toujours  été,  libres  en  toute 
manière  de  la  condition  des  clercs,  c'est-à- 
dire  apparemment  de  leur  juridiction,  afin 
que  les  moines  ne  soient  occupés  que  de 
leur  salut  et  de  plaire  à  Dieu. 

5.  Le  même  jour,  6  février,  on  lut  la  lettre 
de  Libéral  et  du  concile  de  Junque,  à  Boni- 
l'ace, archevêque  de  Carthage,  dans  laquelle 
ils  l'exhortaient  ù  maintenir  l'ordre  et  la  dis- 
cipline sur  divers  points,  que  les  évêques 
Pontien  et  Reslitut  proposeraient  au  concile. 
Le  premier  regardait  le  peuple  de  trois  bourgs 
de  la  Byzaccne  ;  le  second  était  contre  un 
évoque  de  la  province  Tripolitaine,  nommé 
Vincent ,  qu'ils  prétendaient  s'être  emparé 
d'un  peuple  qui  ne  lui  appartenait  pas  ;  le 
troisième  regardait  le  changement  qu'ils  vou- 
laient que  l'on  fit^daus  l'inscription  des  let- 
tres qu'on  écrivait  au  primat  et  aux  évêques; 
elle  quatrième,  l'atlaire  de  l'abbé  Pierre. 
Comme  Boniface  avait  répondu  à  la  lettre  de 
Libérât,  dès  le  G  décembie  de  l'année  pré- 
cédente, ou  lut  cette  réponse  dans  le  concile  ; 


elle  porto  qu'il  l'-tait  ddlicile  d'accorder  1\ 
Lihérat  et  aux  évêipiesdu  concile  de;  Junque 
ce  qu'ils  demandaieid,  p.-irce  quVui  ne  pou- 
vait rien  changer  à  ce  (pii  avait  été  n'-glé 
dans  les  conciles  d'Afrique,  et  observé  par 
tant  d'évêques;  qu'autrcnicnt  il  n'y  aurait 
rien  de  staljle  dans  ce  qui  regard <;  les  allaiies 
ecclésiastiques  et  les  civiles.  Boniface,  se  fon- 
dant sur  l'autorité  des  décrets  qui  avaient 
accordé  à  l'église  de  Carthage  la  primauté 
sur  toutes  celles  d'Afiiipie,  déclare  ensuiio 
que,  comme  il  lui  appartient,  en  sa  qualité 
d'évêque  de  cette  ville,  de  faire  savoir  le  jour 
de  la  Pâque  à  toutes  les  églises  de  son  res- 
sort, ils  seront  avertis  que  l'année  suivante 
celte  fête  doit  se  célébrer  le  7  avril.  A  l'égard 
de  la  demande  an  sujet  des  trois  bourgs, 
comme  il  y  avait  plusieurs  pièces  qui  con- 
cernaient cette  affaire,  le  concile  en  renvoya 
l'examen  jusqu'à  ce  que  l'on  eût  produit  ces 
documents  ;  il  décida  la  même  chose  sur  la 
demande  formée  contre  l'évêque  Yincent. 
Sur  le  troisième  article,  il  répondit  que  l'on 
s'en  tenait  à  l'usage.  Ainsi  l'all'aii'e  de  l'abbé 
Pierre  fut  proprement  la  seule  qui  occupa 
les  évêques  pendant  la  seconde  séance  du 
concile. 

ARTICLE  V. 

DU    CONCILE    DE    CARl'ENTRAS    [527],    DU    SECOND 

d'orange  [.529],  DU  troisième  de  valence 
[529],  ET  DU  second  de  vaison  [329]. 

Sous  le  consulat  de  iSIuvorlius,  le  jour  avant  coocue  da 
les  ides  de  novembre,  c'est-à-dire  le  6  de  ce  tî{!Tl"iv 
mois,  l'an  527,  qui  était  le  pontificat  de  mi''"  ""*" 
Félix  IV,  et  le  second  d'Atliahu  ic,  roi  d'Italie, 
on  tint  à  Carpentras,  ville  de  l'ancienne  Nar- 
bonnaise ,  un  concile  de  seize  évoques,  y 
compris  saiut  Césaire  d'Arles,  qui  en  fut  le 
président.  Ce  concile  ne  fit  qu'un  canon,  qui 
regarde  la  manière  d'administrer  les  revenus 
des  paroisses  de  la  campagne.  Quelques  fi- 
dèles qui  leur  avaient  donné  des  fonds  s'é- 
taient plaints  que  certains  évêques  tournas- 
sent à  leur  profit  la  plus  gnmde  partie  des 
revenus  qui  devaient  appaitenir  à  ces  pa- 
roisses, en  sorte  qu'elles  n'avaient  presque 
rien  pour  fournir  .i  l'entretien  des  clercs  qui 
les  desservaient,  ou  aux  réparations  des  bâti- 
ments. Pour  remédier  à  cet  abus,  le  concile 


'  Erunt  igitur  omnia  omnino  monusteria,  sicitt 
semper  fuerunt,  a  condilione  clcricorum  modis 


omnibus  libéra,  sibi  tanitim  et  Deo  placeniia, 
Tom.  IV  Concil.,  pag.  I6i9. 


833 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


ordonna '  quesi l'éfîlise  calliëdralc avail  assez 
de  biens  pour  ses  dépenses,  1rs  revenus  des 
paroisses  seraient  employés  pour  les  clercs 
qui  les  servaient,  ou  pour  les  répai'ations 
des  églises;  mais  que,  si  les  dépenses  de 
l'évéque  surpassaient  la  recette  des  revenus 
de  son  église,  il  pourrait  tirer  ses  besoins 
des  paroisses  les  plus  riclics,  en  leiu'  lais- 
sant ce  qui  serait  sutlifant  pour  le  clergé  et 
les  réparations,  à  la  charge  toutefois  de  ne 
pouvoir  diminuer  le  service  divin,  ni  la  por- 
tion des  clercs.  Le  même  canon  indiqua  pour 
l'année  suivante ,  au  même  jour,  6  novem- 
bre, un  concile  à  Vaison;  mais  il  ne  s'as- 
sembla que  deux  ans  après.  Afrra?cius,  évo- 
que d'.\ntilics,  quojqu'invité  de  se  trouver 
au  concile  de  Carpeutras,  avait  refusé  de  s'y 
rendre,  apparemment  parce  qu'il  se  connais- 
sait coupable  pour  avoir  ordonné  prêtre  un 
nommé  Potadius  contre  les  canons  ,  et  nom- 
mément contrcle  troisième  du  concile  d'Arles 
précédent,  qu'il  avait  ratifié  lui-même  parle 
prêtre  Cataplironius,  député  de  sa  part  à  ce 
concile.  Les  évêques,  pour  le  punir  de  cette 
double  fan  te, c'est-à-dire,  pour  n'être  pas  venu 
au  concile,  et  pour  avoir  fait  une  ordina- 
tion irréfïulière ,  le  suspendirent  pour  un 
an  de  la  célébration  des  saints  mystères,  et 
lui  signilièrent  cette  sentence  par  une  lettre 
synodale  à  laquelle  ils  souscrivirent  tous.  Ils 
souscrivirent  de  même  au  canon  touchant 
l'administration  des  biens  des  paroisses  ;  mais 
avec  cette  ditlérence ,  qu'ici  toQs,  excepté 
saint  Césaire  d'Arles,  et  Conturaéliosus  de 
Riez,  prennent  la  qualité  de  pécheurs,  au 
lieu  qu'ils  se  nomment  tous  évèques  en  sous- 
crivant à  la  sentence  portée  contre  .\sr;fcius. 
swDjeoo-  2.  L'église  que  le  patrice  Libère,  préfet  du 
n\.t.  Ttm.  prétoire  des  Gaules,  avail  bâtie  dans  la  ville 


d'Orange,  étant  achevée,  il  invita  plusieui-s 
évêques  à  venir  en  faire  la  dédicace.  Ils  s'y 
rendirent  au  nombre  de  treize,  le  o  des  noues 
de  juillet,  sous  le  consulat  de  Décius-le- 
Jeune,  surnonnné  Basile,  c'est-à-dire  ,  le  3 
juillet  de  l'an  529,  qui  était  le  troisième  du 
pape  Félix  IV,  et  d'.\thalaric  roi  d'Italie. 
Saint  Césaire  d'.Vries  est  nommé  le  premier, 
comme  ayant  présidé  à  ce  concile  ;  les  autres 
sont  presque  tous  les  mêmes  qui  s'étaient 
trouvés  au  concile  de  Carpeniras.  Après 
qu'ils  eurent  achevé  la  cérémonie  de  la  con- 
sécration, ils  conférèrent  ensemble  sur  ce 
qui  regardait  le  maintien  de  la  discipline. 
Quelques-uns  d'entre  eux  remnnti-èrent  qu'il 
y  avait  des  personnes  qui,  par  simplicité,  ne 
pensaient  pas  comme  elles  devaient  sur  la 
grâce  et  sur  le  libre  arbitre.  Cela  détermina 
l'assemblée  à  proposer  et  à  souscrire  quel- 
ques articles  qui  leur  avaient  été  envoyés  du 
Saint-Siège,  et  que  les  anciens  Pères  avaient 
tirés  des  saintes  Écritures  pour  instruire  ceux 
qui  n'avaient  pas  des  sentiments  conformes 
à  la  foi  catholique  sur  ces  matières. 

3.  Ces  articles  sont  au  nom  bre  de  vingt-cinq, 
presque  tous  appuyés  de  quelques  passages 
de  l'Écrittue;  mais,quoiqn'ds  soient  conçus 
enfoimede  canons,  ils  ne  finissent  point  par 
les  anathèmes  ordinaires,  si  ce  n'est  le  vingt- 
cinquième.  Le  concile  commence  par  con- 
damner ceux  qui  scmtiennent'  que  le  péché 
du  premier  homme  n'a  cause  du  changement 
que  dans  une  partie  de  l'homme,  savoir,  dans 
son  corps,  qu'il  a  rendu  sujet  à  la  mort; 
et  qu'il  n'a  fait  aucun  tort  à  son  àme,  lais- 
sant l'homme  aussi  libre  qu'il  était  aupara- 
vant :  c'était  l'hérésie  de  Pelage.  —  11  con- 
damne ensuite  ceux  qui  disent  que  '  le  péché 
d'Adam  n'a  nui  qu'à  lui  seul,  ou  qu'il  n'y  a 


IV  Cjocil., 

Ibfrt.  ^ 


Caoon*  dl 
eooril^  il'O- 
rlDLC.     Ilid. 

Itg.  itc;. 


'  Boc  nobis  juslum  et  rationabile  visum,  al  H 
ecclesia  ciiitalis  ejiis,  cui  ep\scopus  prwest,  ita 
est  iilonea,  ut  Christo  propilio  nihil  iiidigeal  ; 
quidquid  parocliiis  fueril  derrlictum,  c'cricis  qui 
ipsis  parochiis  deaerriunt.  ti'l  reimralionibiis  cc- 
clcsiarum  ralionalnliler  dispciiselar.  Si  rero  epis- 
copum  mullas  irpensas,  et  iimiorem  subulmuiam 
habere  cunstitenl,  ;/aroc/»u.<,  quibus  largiler  fue- 
ril ciillala  subslauiia,  hnc  lanltim,  quod  clericis 
rel  sartiB  leclia  raliniiabilitersulficial,  re^'trvelur; 
quod  aulem  amptius  fueril.  proptrr  inajiirex  ex- 
pensas  episcopus  ad  se  debeat  iccocare  :  ita  la- 
men  ut  nihil  dt  facullatula  ipsa,  cel  de  wiiiiite- 
rio  clericantm  loci  ipsiiif,  licentiam  habeanl  mi- 
nuendi  ,  Toin.  IV  Coneil-,  pnï.  ICiil'I. 

•  Si  quis  per  offemam  pnrvarifulionis  Adip  non 
totum,  id  est  secundum  corpus  et  aniiiuiiii,  in  dé- 
tenus dicil  hominem   commulalum,  sed  animœ 


liberlale  illcrsa  durante,  corpus  tanlummodo 
corrujilioni  crédit  obnnxium,  Pelngii  errore  dc- 
crptiis,  adrersatur  Scriplurœ  dicatti  :  .'Viiiin.!  quea 
l.crc.iverit  ipsa  moriclur;  et:  Nescilisquoiiinm  cui 
pxliil)t;tis  v.'S  se:\\s  ad  olieJi'^nilum,  servi  r-slis 
ejii?  cni  olifdilis"!  et:  A  qiio  quis  siiper.iliir,  cjus 
ol  frrvus  oddic'itur.  Can.  I,  loin.  IV  Concil.,  pag. 
1007. 

'  .Si  quis  soli  Àdw  prwvaricationein  suam,  non 
et  ejus  propagini,  nsseril  nncuisse ,  aiil  certemor- 
lem  lanlun)  corpnris,  quœ  pœna  prccali  est,  non 
autem  et  peccatum,  quod  ninrs  est  animœ,  per 
unum  lioniinem  in  omiie  genus  hunianum  tran- 
siisse  testntur,  injustilinm  Dro  dabit,  conlradi- 
crn.i  M'ostolo  dicenli:  l'er  unum  luiiniiicni  iifcca- 
tiiin  iiitrnvit  in  uuinduin,  ri  pi-r  prccnlinn  mors, 
rt  ita  iu  ouuics  boniitirs  inor::  pcrlransiit,  in  quo 
omncs  pcconverunl.  Can.  2,  Ibid. 


[VI*  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  LXXXVl.  —  2'  CONCILE  D'ORANGE. 


i(a:t 


(|ue  la  mort  du  corps  qui  ait  passé  à  ses  des- 
ceudanls.  —  Un  yonsoigiie  '  «luesi  queliju'uu 
(lit  que  la  grûcc  do  Dieu  peut  être  donnée 
sur  l'invocation  liiiniaine,  et  (|ue  ce  n'est  pas 
la  gritce  ([ui   l'ait  que   nous  l'invoquions,  il 
contredit  le  propliète  Isaïe,  et  l'Apôtre  qui 
dit   la    uiémc  chose    :    J'ai  été   trouvé  par 
ceux  qui  ne  me  cherchaient  point,  et  je  me  suis 
fait  voir  à  ceux  qui  ne  cherchaient  point  à  me 
connaître.  —  On  y  condamne  ceux  qui  sou- 
tiennent que  Dieu  '  attend  notre  volonté  pour 
nous  pnrilîer  de  nos  péchés,  et  que  ce  n'est 
pas  par  T'infusion  et  l'opération  du  Saint- 
Esprit  que  se  forme  en  nous  la  volonté  d'être 
puritiés  de  nos  péchés.  —  On  y  condamne 
aussi  ceux  qui  disent  '  que  l'accroissement 
de  la  foi,  de  même  que  son  commencement, 
et  que  l'acte  même  par  lequel  nous  cioyons 
en  celui  qui  justifie  l'impie,  et  par  lequel 
nous  parvenons  l'i  la  génération  du  saint  bap- 
tême ,  ne  sont  pas  en  nous  un  don  de  la 
grâce,  c'est-ù-dire,  par  l'inspiration  du  Saint- 
Esprit,  qui  tourne  notre  volonté  de  l'iufidélité 
h  la  foi,  et  de  l'impiété  à  la  piété;  mais  que 
tout  cela  vient  de  nous.  —  On  rejette,  comme 
une  doctrine  contraire  à  celle  de  l'Apùtre', 


la  doctrine  qui  veut  qiu;  Dieu  fasse  miséricorde 
A  ceux  qui  veulent,  qui  désirent,  qui  font  Iouh 
leurs  eirorts,qui  travaillent,  qui  veillent,  qui 
cherchent,  qui  diunandenl,  qui  l'i'ap[pent;  cl 
qui  ne  recounait  [las  rjuc  c'est  par  la  grûce 
de  Dieu  que  nous  croyons,  que  nous  voulons 
et  que  nous  pouvons  faire  toutes  ces  choses 
comme  il  faut.  — Les  évoques  ajoutent  que,   c.n 
si  (jucl<iu'un  '  préteuil  ([ui!,  sans  la  lumière 
et  rins[)iration  tlu  Saint-Esprit  qui  donne  h 
tous  cette  suavité  intéi'ieure  qui  fait  f[u'on 
embrasse  la  vérité  et  qu'on  y  ajoute  foi ,  il 
puisse  pur  ses  forces  nu  turelles  pensei'comme 
il  faut,  se  porter  ;'i  faire  quoi  que  ce  soit  de 
bon  par  rapport  au  salut  et  à  la  vie  éternelle, 
et  se  rendre  h  lu  prédication  salutaire,  c'est- 
à-dire  évangélique;  il  faut  que  l'esprit  d'er- 
reur et  d'héi'ésie  l'ait  séduit,  puisqu'il  n'en- 
tend pas  la  voix  de  Jésus-Christ  même  qui 
dit  dans  l'Évangile  :  Vous  ne  pouvez  rien  faire 
sans  moi  ;  ni  celle  de  l'Apôtre  qui  dit  ;  A'ous 
■ne  sommes  pas  capables  d'avoir  aucunes  bonnes 
pensées  de  nous-mêmes,  comme  de  nous-mêmes; 
mais  c'est  Dieu  qui  iwus  en  rend  capables.  — 
Ils  rejettent  comme  étrangers  à  la  vraie  foi 
ceux  qui  prétendent  ^  que  les  uns  peuvent 


'  Si  quis  ad  invocalionem  humanam  gratiam 
Dei  dicil  passe  conferri,  noit  autein  ipsain  gra- 
tiam facere  ut  invocelur  a  nnbis,  amLradicit  Isaiœ 
prophetœ,  vel  Aposlolo  ident  dicenti  :  luventus 
sum  a  non  qua'i-eulibus  uie  :  palum  apparni  liis, 
qui  me  nou  i^ter^o^'abaut.  Can.  3,  ibiil. 

'  Si  quis,  ut  a  jn  rcalo  purgemur,  volunlalem 
nostrain Deum  expectare  contendit,  non  autcm,  ut 
etiam  purgari  veliinus,  per  SancLi  Spirilus  iiifu- 
sionem  et  operutiuncm  in  nabis  fieri  confilelur, 
resistit  ipsi  Spiritui  Sancta  per  S  ilomonem  di- 
centi: Pra>paratur  \oluntasa  IJornino;  et  Apostalo 
salubriter  prœdicanti:  Deus  est  qui  operatur  iu 
Yobis  et  velle  et  perlîcere  pro  bona  vobintate.  Can. 
4,  ibid. 

'  Si  qiUs,  sicut  augmenlum,  Ha  etiam  inili'uia 
fidei,  ipsumque  credulitatis  affectum,  quo  in.  eum 
credimus  qui  juslifical  iinpium,  et  ad  generalio- 
nem  sacri  baplismalis  percenimus,  nan  per  gra- 
tiœ  donum,  id  est,  per  inspirationem  Spiritus 
Sancti  corrigenteni  volunlalem  nostram  ab  infi- 
delitate  ad  (idem,  ab  impielale  ad  pielalem,  sed 
naturaliter  nobis  inesse  dicil,  aposlolicis  dagma- 
tibus  a  cersarius  approbalur,  beato  Paula  di- 
cente  :  '  jMfidimus,  quia  qui  cœpit  iu  vobis  opus 
bonum  ,  perficiel  usqiie  iu  diem  Douiiui  nostri 
Jesu  Christi;  et  illud:  Vobis  datum  est  pro  Cbris- 
to  nou  soUim  ut  in  eum  credatis,  sed  etiam  ut 
pro  illo  pafiauiini;  et:  Gratia  saivi  facti  estis  per 
lidem,  et  hoc  non  ex  vobis,  Dei  enini  donum  est. 
Qui  enim  fidem  qua  in  Dcum  credimus  dicunt 
e^se  naturalem,  omnes  eos,  qui  ab  Ecclesia  Clirisli 
alieni  suiit,  quodam  modo  fidèles  esse  de/lniitnt. 
Can.  5,  ibid. 

XI. 


'•  Si  quis  sine  gratia  Dei  credentibus,  volenti 
bus,  desideranlibus,  conantibus.  labaranlibus.vi- 
gilanlibus,  studentibus,  pelentibus,  quœrenlibus, 
pulsanlibus  nubis  misericordiam  dicit  conferri 
dicinitus;  non  aulem  ul  credamus,  relimus,  vel 
Itœc  ainnia,  sicut  oportet,  agere  valeamvs,  per 
infusionem  et  inspirationem  Spiritus  Sancti  ex 
nobis  fieri  con/iletur,  et  aut  liumililali,  aut  obe- 
dientiœ  humanw  subjunrjit  graliœ  adjutarium, 
nec  lit  obedienles  el  humiles  sinius  ipsius  graliœ 
donum  esse  consentit,  resistit  Aposlolo  dicenti: 
Quid  liabes  quod  non  accepisti  ?  et  :  Gratia  Dei  suni 
id  quod  sum.  Can.  6,  pag.  1668. 

'  Si  quis  per  nalurœ  vigorem  bonum  aliquid, 
quod  ad  salutem  pertinet  vilœ  œlernce,  cogilare 
ut  expedit,  aut  eligere,  sive  salutari,  id  est, 
evangelicw  pncdicatiani  consentire  passe  con- 
firmât absque  illuminatione  el  inspiralione  Spi- 
ritus Sancti,  qui  dat  omnibus  suavitalem  in 
consenliendo  el  credendo  verilali,  lueretico  fal- 
lilur  spiritu,  non  intelligcns  vocem  Dei  in  Evan- 
gelia  dicentis:  Sine  me  niUil  potestis  facere;  el 
illud  Apostoli:  Non  quod  idonei  simus  cogitare 
aliquid  a  nobis,  quasi  ex  nobis,  sed  sufficientin 
nostra  ex  Deo  est.  Can.  7,  ibid. 

^  Si  quis  alias  misericordia,  alias  vero  per  li- 
berum  arbilrium,  quod  in  omnibus,  qui  de  prœ- 
varicalione  primi  haimnis  nati  sunl,  constat  esse 
viliatuin,  ad  gratiam  baptismi  passe  venire  con- 
Icndit,  a.  recta  fide  probalur  alienus.  Is  enim  om- 
nium liberum  arbilrium  per  peccalum  primi  tio- 
:ninis  asscriliiifirmatuin,  aul  ccrlc  ital.esum  pu- 
tut,  ul  tamen  quidam  valeanl  sine  revelalione  Dei 
wysterium  sululis  (eternm  per  semelipsos  pusse 

33 


834 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLESIASTIQUES. 


Siiiti  I 
rinrnSi 


Cin.  9, 


venir  ;\  la  grâce  du  baptême  par  la  miséri- 
corde de  Dieu,  cl  les  autres  par  le  libre  ar- 
bitre, qui  est  certainement  vicié  dans  tous 
ceux  qui  sont  nés  de  la  prévarication  du 
premier  homme  :  car,  qnoitpie  ceux  qui 
soutiennent  cette  doctrine  reconnaissent  que 
le  libre  arbitre  est  allaibli  dans  tous  les  hom- 
mes par  le  péché  d'Adam,  ils  ne  laissent  pas 
de  soutenir  qu'il  n'est  pas  tellement  aU'ailili, 
que  quelques-uns  ne  puissent  sans  la  révé- 
lation de  Dieu  acquérir  par  eux-mêmes  le 
mystère  du  salut  éternel  :  ce  qui  est  con- 
traire aux  paroles  de  Jésus-Clirisl,  qui  dit, 
non  pas  que  quelqu'un ,  mais  qu'o'/cî'n  ne 
peut  venir  à  lui,  sinon  celui  que  le  Père  aura 
attiré.  Voilà  ce  quer  portent  en  substance  les 
huit  premiers  articles  ou  canons  de  ce  con- 
cile. 

4.  Les  dix-sept  autres  ne  sont  proprement 
que  des  sentences  formées  des  paroles  de 
saint  Augustin  et  de  saint  Prosper;  inais  ils 
n'en  font  pas  moins  partie  des  Actes  du  con- 
cile; et  ils  seront  toujours  des  témoignages 
de  sa  docirine  sur  la  grâce,  et  de  son  zèle  à 
établir  la  nécessité  d'une  grâce  prévenante. 
«C'cstuncUetde  la  grâce  de  Dieu,  disent  ces 
évêques,  lorsque  nous  avons  '  quelques  bon- 
nes pensées,  ou  que  nous  nous  gardons  de  la 
fausseté  et  de  l'injustice  :  car,  toutes  les  fois 
que  nous  faisons  quelijue  chose  de  bon,  c'est 
Dieu  qui  agit  en  nous  et  avec  nous,  afin  que 
nous  le  fassions.  —  Il  faut  donc  que  les  ré- 
générés', et  même  les  saints,  implorent  sans 


I.  Pir 
izii,  u, 
Cm.  11. 


cesse  le  secours  de  Dieu  pour  pouvoir  arri- 
ver i\  une  bonne  fin  ou  persévérer  dans  la 
pratique  des  bonnes  enivres.  —  Personne  co.  n. 
n'oll're  véritablement  au  Seigneur  '  ce  qu'il 
en  a  reçu  pour  le  lui  offrir,  selon  qu'il  est 
écrit  :  Nom  vous  donnonsce  que  notts  avons  reçu 
de  votre  main.  —  C'est  en  regardant  ce  que 
nous  devons  être  par  le  don  de  la  grâce  ' 
que  Dieu  nous  aime,  et  non  pas  en  regar- 
dant ce  que  nous  sommes  par  nos  propres 
mérites.  —  Le  libre  arbitre  '  ajMnt  été  atfai- 
bli  dans  le  premier  homme  et  rendu  comme 
malade ,  ne  peut  être  réparé  que  par  la 
grâce  du  bnptême;  perdu  qu'il  avait  été  (quant 
â  l'étendue  des  forces)  dans  l'homme  in- 
nocent, il  ne  peut  être  rendu  que  par  celui 
qui  a  pu  le  donner,  selon  ce  que  dit  la  Vé- 
rité même  :  Si  le  Fils  vofs  délivre,  alors  vous 
serez  véritablement  libres.  —  Aucun  misérable 
ne  peut  être  °  délivré  de  quelque  misère 
que  ce  soit,  sinon  celui  qui  est  prévenu  par 
la  miséricorde  de  Dieu,  ainsi  que  le  dit  le 
Psalmiste  :  }fon  Dieu,  votre  miséricorde  me 
préviendra.  —  Comme  Adam  a  été  change'  en 
mal'  par  bon  iniquité,  et  qu'il  est  parla  dé- 
généré de  l'état  dans  lequel  Dieu  l'avait 
créé  ;  de  même  le  fidèle  est  changé  par  la 
grâce,  mais  en  mieux,  par  rapport  à  l'état 
où  il  était  par  le  péché.  Le  premier  change- 
ment est  de  l'homme  prévaricateur;  le  se- 
cond est  l'effet  de  la  puissance  de  la  droite 
du  Très-Haut.  —  Personne  ne  doit  se  glori- 
fier' de  ce  qu'il  croit  avoir,  comme  s'il  ne 


Conquirere.  Quod  quam  sil  conlrarium,  ipse  Do- 
minus  probul,  qui  non  aliquos,  sed  neminem  ad 
se  passe  venire  Itslatur,  iiisi  qutin  Palcr  atlraxe- 
rit,  sicut  et  l'etro  dicit  :  lioatiis  es  Simon  Barjoii.i, 
quia  taro  et  >-auguis  iiou  revelavil  lihi,  sed  l'aler 
meus  qui  iu  ea;li»  est;  ci  Àposlolus  :  Nemo  potest 
dioere  Doiiiiuum  Jesum  nisi  iii  Siiirilu  Sancto. 
Can.  8,  ibid. 

'  Divini  eslmuneris:  cumctrecle  cogitamus,  et 
je  les  noslfosa  falsilate  elinjuslilia  conliuemus  : 
quolies  eniin  bona  aijiiitus,  Deus  in  iiobis  alque 
nobiscum,  ul  operemur,  operatur.  Can.  !l,  p:!^'. 
1609. 

*  Àdjulorium  Dei  ctiam  rennlis  ac  sanciis 
temper  est  iniploranduin,  ni  ad  finem  bonum  per- 
tenire,  vel  in  bono  possinl  opère  perdurare.  Cm. 
\0,  ibid. 

'  .\cHio  quidquam  Domino  recle  voverit,  nisi 
ab  ipso  arceperit  quod  voicrel,  sicut  legilur  : 
Quac  de  manu  tua  accfjiinius,  danius  tibi.  Can.  II. 

'  Taies  nos  amat  Ocus,  quales  futuri  sumusip- 
sius  dono,  non  quales  sumus  noslro  merilo.  Can. 
H. 

'  Arhilrium  volunlalis  in  primo  homine  inftr- 
malum,  (iiVi  pcr  (jraliam  baplismi,   non  potest 


reparari;  quod  amissum,  nisi  a  quo  poluit  dari, 
non  potest  reddi.  Unde  veritas  ipsa  dicit  :  Si  vos 
f'ilius  liberavit,  tune  vcre  liberi  erilis.  Can.  13, 
ibid. 

*  Nullus  miser  de  quacumque  miseria  libcralur, 
nisi  qui  Dei  misericordia  prœienitur,  sicut  dicit 
Psalmisla:  Cilo  anticipel  nos  misericordia  tua. 
Domine;  et  ii/ud;  Deus  nu  us,  misericordia  cjus 
prœveuict  me.  Can.  H,  iliid. 

'  Àb  eo  quod  formavil  Deus  mulalus  estÀdnw, 
sed  in  pejus  per  iniquilatem  suam  ;  ab  eo  quod 
opcrala  esl  iniquilas  mulnlur  fidelis,  sed  in  me~ 
lius  per  graliam  Dei.  Illit  cnjo  viutalio  fuil  pra-- 
raricaloris  primi  :  lia'r,  secundum  rsalmislam, 
mutatio  esl  drxtero'  Excclsi.  Can.  15,  il)id. 

*  i\cmo  ex  eo  quod  vtdelur  liabere  gloriclur. 
lanquam  non  acceperil;  aut  ideo  se  putcl  acce- 
pisse,  quia  liltera  extrinsicus.  vel  ul  legerelur, 
iippuruil,  vel  ul  audiretur,  sonuil  :  \Xam,  sicut 
Aposlolus  dicit:  Si  i)Or  Icgem  justitia,  ergo  Clirie- 
tus  gratis  nuirtuus  esl.  Asceuileiis  in  allum  cn;^ti- 
vavil  cjiplivitati'ui.  dédit  duna  liuniiiiibus.  Inile 
habel,  quicumque  liabcl.  (juisquis  autcm  se  inde 
liiiliere  nfgal ,  aut  i:cre  non  liabct,  aut  id  quod 
videlur  Itabcre  aUfertur  ah  co.  Can.  16,  ibid. 


CHAPITRE  LXXXVI.  —  :>'  CÛNCILE  DOltANGE. 


Efibfs 


Cm.  I' 


[VI'  SIÈCLE.] 

l'aviiil  pas  reçu;  il  iio  doit  pas  môme  se  dal- 
ler (le  l'.ivnir  roçu,  pairo  rni'il  a  au  tloliurs 
la  lettre  de  la  loi.  ipi'il  peut  lire  nu  puleu- 
ilie;  puisque,  si  la  justice  nous  était  donnée 
par  la  loi,  Ji'sus-Christ  serait  mort  en  vain, 
"i  et  que  c'est  lui  au  contraire  qui,  étant  monté 
en  haut,  a  mené  caplicc  une  grande  multitude 
de  ca/jtifs,  et  a  répandu  ses  dons  sur  les  hommes. 
Voih'i  la  source  de  toutes  les  grâces  ;  celui 
qui  nie  tenir  de  1;\  ce  qu'il  a,  ou  ne  l'a  pas  vé- 
ritablement, ou  ce  qu'il  croit  avoir  lui  sera 
ô.té.  —  C'est  la  cupidité  mondaine'  qui  fait 
tonte  la  force  des  gentils,  et  la  charité  de 
Dieu  la  force  des  chrétiens;  cliaiité  qui  est 
répandue  dans  nos  cœurs,  non  par  l'arbitre 
de  la  volonté  qui  est  en  nous,  mais  par  le 
Saint-Esprit  qui  nous  a  été  donné.  —  La  ré- 
compense n'est  due'  à  aucuns  mérites  qui 
précèdent  la  grâce;  mais  la  grâce,  qui  n'est 
due  ;\  personne,  précède,  afin  que  nous  fas- 
sions des  œuvres  méritoires.  —  Quand  bien 
même  la  nature  humaine' serait  demeurée 
entière  et  parfaite,  comme  elle  avait  été 
cré(?e,  elle  n'aurait  pu  se  conserver  elle- 
même  en  cet  état  sans  le  secours  de  son 
créateur.  Comment  donc  pourrait-elle  sans 
la  grâce  de  Dieu  réparer  ce  qu'elle  a  perdu, 
puisqu'elle  ne  pouvait  pas  sans  cette  grâce 
conserver  l'intégrité  qu'elle  avait  reçue?  — 
Dieu  fait  beaucoup  de  bonnes  choses  *  dans 
l'homme,  sans  que  l'homme  les  fasse;  mais 
l'homme  ne  fait  rien  de  bon,  que  Dieu  ne  le 
lui  fasse  faire.  —  Comme  c'est  avec  la  plus 
grande  raison  '  que  l'Apôtre  a  dit  à  ceux 
qui  voulaient  que  ce  fût  la  loi  qui  les  justi- 


S3.J 

liai,  et  qui  dès  là  étaient  déchus  de  la  gnkc  : 
Si  c'est  lu  loi  i/ui  justifie,  c'est  en  vain  que  Jé- 
sus-Christ est  mort;  on  peut  dire  avec  autant 
de  raison  à  ceux  qui  fout  consister  la  grâce 
dans  les  facultés  naturelles  :  Si  c'est  lu  nature 
qui  justifie,  c'est  en  vain  que  Jésus-Christ  est 
mort.  Mais,  comme  avant  Jésus-Christ  on 
avait  déjà  et  la  loi  et  les  facultés  naturelles, 
sans  que  ni  l'une  ui  les  autres  justifiassent, 
il  est  clair  que  Jésus-Christ  n'est  pas  mort 
eu  vain.  Le  fruit  de  sa  mort  est  donc  que 
nous  accomplissions  sa  loi  par  la  grâce,  selon 
cette  parole  du  divin  Sauveur  :  Je  suis  venu 
accomplir  la  loi,  et  non  pas  l'anéantir;  et  de 
réparer  la  nature  perdue  et  ruinée  par  Adam, 
selon  cette  autre  parole  du  même  Jésus- 
Christ  :  Jesuis  venu  chercher  ce  qui  était  perdu, 
et  le  sauver.  —  Personne  n'a  de  soi  que  le 
mensonge  et  le  péché  ^  Si  l'homme  a  quel- 
que chose  de  la  vérité  et  de  la  justice,  cela 
lui  vient  de  cette  fontaine  dont  nous  devons 
tous  être  altérés  dans  le  désert  de  ce  monde, 
afin  que,  rafraîchis  par  quelques  gouttes, 
nous  ne  défaillons  point  en  chemin.  —  Les 
hommes  font  leur  volonté  '',  et  non  pas  celle 
de  Dieu,  quand  ils  font  ce  qui  déplaît  à  Dieu; 
mais,  lorsqu'ils  font  ce  qu'ils  veulent  pour 
obéir  à  la  volonté  de  Dieu,  quoiqu'ils  agis- 
sent volontairement,  c'est  néanmoins  la  vo- 
lonté de  celui  qui  prépare  la  leur,  et  qui  leur 
commande  ce  qu'ils  veulent  alors.  »  —  Pour 
montrer  l'eilicacité  et  la  nécessité  de  la 
grâce,  les  évéques  du  concile  d'Orange  di- 
sent que  ((  nous  sommes  entés  en  Jésus- 
Christ  "  comme  le  sarment  qui  doit  porter  du 


Can.  M. 


'  Fortitudinem  gentilium  mundana  cupiditas, 
fortiludinem  autem  christianorum  Dei  charitas 
facit,  quœ  diffusa  est  in  cordibua  nostris,  non 
per  voluntatis. arbitrium  quod  est  in  nabis,  sed 
per  Spirilum  Sanctum  qai  datus  est  nobis.  Can. 
17,  piig.  )G70. 

*  Nullis  meritis  graliam  prœvenientibus,  debe- 
lur  merces  bonis  operibus,  si  fiant  ;  sed  gralia, 
quœ  non  debelur,  prœcedit  ut  fiant.  Can.  18,  ibid. 

'  Natura  liumana,  etiamsi  in  illa  integritate 
in  qua  est  condita  permancret,  nullo  modo  seip- 
sam,  Creatore  suo  non  adjurante,  servaret.  Unde 
cum  sine  Dei  gralia  saluttm  non  possit  cusiodire 
quam  accepit,  quomodo  sine  Dei  gralia  poterit  re- 
parare  quod  perdidil  7  Can.  1!',  ibid. 

*  Mulla  Deus  facit  in  fiomine  bona,  quœ  non 
facil  tiomo  ;  nulla  vero  facil  liomo  bona,  quœ  non 
Deus  prœstal  ut  facial  tiomo.  Can.  20,  ibid. 

'  Sicut  eis  qui  volenles  in  lege  justificari,  el  a 
gralia  exciderunl,  verissime  dicit  .ipostolus:  Si 
in  lege  justitia  est,  ergo  Cliristus  gratis  mortuus 
est;  sic  eis  qui  graliam,  quam  commeiidat  et  per- 


cipit  ftdes  Christi,  pulant  esse  naturam,  verissime 
dicitur  :  Si  per  naluram  juslitia  est,  ergo  Cfiris- 
tus  gratis  mortmis  est.  Jani  hic  enim  eratlex,  et 
non  justificahat  :  jam  fiic  erat  et  natura,  et  non 
justiftcaha!.  Ideo  Cliristus  non  gratis  mortuus  est, 
ul  et  lex  per  illum  impleretur  qui  dixil:  -Non  veni 
legem  sùlvere,  ^ed  adimplere;  et  nalura  per  Adam 
perdita  per  illum  repararetur,  qui  dixil  renisse 
se  quœrere  et  saliare  quodperieral.  Can.  21,  ibid. 

^  yemo  hahet  de  stio,  nisi  inendacium  et  pecca- 
tum.  Si  quid  autem  liabct  liomo  i^eritulis  alque 
jusliliœ,  ab  illu  fonle  est,  quem  debemus  silire  in 
liac  eremo,  ut  ex  eo  quasi  gutlis  quibusdam  ir- 
rorali  non  deflciamus  in  via.  Can.  22,  ibid. 

'  Suam  volunlalem  liomines  faciunt,  non  Dei, 
quando  id  ugunt  quod  D(o  dtsplicel.  Quando  au- 
tem id  faciunl  quod  volunl,  ut  divinœ  serciant 
voluntali,  quamvis  volenles  agant,  illius  lamen 
volunlas  est,  a  quo  et  prœparatur  el  jubelur  quod 
volunt.  Can.  23,  ibid. 

*  lia  sin^t  in  vile  palmites,  ul  vili  nitiil  confé- 
rant, sed  inde  accipianl  unde  vivant:  sic  quippe 


836 


HISTOIRE  GliXliRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


raisin  est  enlO  dans  la  vij^ne;  cl  que  de  même 
que  le  sarmenl  n'a  poinl  de  vie  qu'il  ne  tire 
de  la  vipfne,  et  que  ce  n'est  pas  lui  qui  la 
donne  à  la  vipne,  ainsi  l'an  et  l'autre  pro- 
fitent aux  disciples,  et  non  à  Jôsiis-CbrisI, 
de  ce  qu'il  demeure  en  eux,  et  eux  en  lui. 
—  C'est  absolument  '  un  don  de  Dieu  d'ai- 
mer Dieu  :  c'est  lui  qui  a  donné  afin  qu'on 
l'aimât;  lui  qui  aime,  quoiqu'il  ne  soit  pas 
aimé.  11  nous  a  aimés,  loi-sqne  nous  lui  étions 
désagréables,  et  il  a  fait  qu'il  y  eût  en  nous 
de  quoi  lui  plaire;  car  il  a  répandu  dans  nos 
cœurs  la  cbarité  de  l'Esprit  du  Père  et  du 
Fils,  que  nous  aimons  avec  le  Père  cl  le 
Fils,  n  . 
5.  Après  avoir  t?lnbli  ces  vingt-cinq  arli- 
ïa"grtM"èi"ii   cles,  le  concile  conclut  ainsi  :  ((  Nous  devons 

Ifhre  arbitra.  ... 

donc  enseigner  et  crou-e,  suivant  les  passa- 
ges de  l'Ecriture  rapportés  ci-dessus,  et  les 
définitions  des  anciens  Pères,  que  par  le 
péché  du  premier  homme  le  libre  arbitre  a 
tellement  été  abaissé  et  ail'aibli,  que  per- 
sonne dans  la  suite  n'ap;i  aimer  Dieu  comme 
il  faut,  croire  en  lui,  oufairelebicn  pourlui, 
s'il  n'a  été  prévenu  par  la  grâce  de  la  diviue 
miséricorde.  C'est  pourquoi  nous  croyons 
qu'Abel  le  Juste,  Noc.,  Abraham,  Isaac , 
Jacob  et  tous  les  autres  anciens  Pères  n'ont 
pas  eu  par  la  nature  celle  foi  que  l'apôtre 
Kaint  Paul  relève  on  eux,  mais  par  la  grâce 
de  Dieu  :  et  après  la  venue  de  Notre-Sei- 


S.  nltaienls 
ia  concile 


pneur,  cette  grâce,  en  ceux  qui  désireul  le 
baplôme,  ne  vient  pas  du  libre  arbitre,  mais 
de  la  bonté  et  de  la  ULéralité  de  Jésus- 
Christ.  ))  Ils  rapportent  sur  cela  un  grand 
nombre  de  passages  de  l'Ecriture,  tous  tirés 
duXouveauTcslament,  elilsajoulent  :  «Nous 
croyons  aussi  que  tous  les  baptisés  peuvent 
et  doivent,  par  le  secours  et  la  coopération 
de  Jésus-Christ,  accomplir  ce  qui  tend  au 
salut  de  leurs  âmes,  s'ils  veulent  travaillerfi- 
dèlcment.  Que  quelques-.uns  soient  prédes- 
tinés au  mal  par  la  puissance  divine,  non- 
seulement  nous  ne  le  croyons  point  ;  mais  si 
quelqu'un  le  croit,  nous  le  déleslons  et  lui 
disons  analhème.  Nous  confessons  aussi  que , 
dans  toutes  les  bonnes  œuvres,  ce  n'est  pas 
nous  qui  commençons,  de  manière  que  nous 
soyons  seulement  aidés  par  la  miséricorde  de 
Dieu  après  avoir  commencé  nous-mêmes; 
mais  c'est  Dieu  qui,  sans  aucun  bon  mérite 
précédent  de  notre  part,  nous  inspiie  sa  foi 
et  son  amour,  afin  que  nous  recherchions 
fidèlement  le  sacrement  de  baptême,  et  qu'a- 
près le  baptême  nous  puissions  avec  son  se- 
cours accomplir  les  choses  qui  lui  sont  agréa- 
bles. D'où  il  est  évident  que  nous  devons 
croire  que  la  foi  du  bon  larron  que  le  Seigneur 
a  rappelé  à  la  patrie  du  paradis,  et  celle  du 
centurion  Corneille  à  qui  l'ange  du  Seigneur 
fut  envoyé,  de  même  que  celle  de  Zachéc  qui 
mérita  de  recevoir  le  Seigneur  même,  ne 


rilisestinpalmitibus,  ut  vitale  alimenlum  submi- 
■nislrel  eis,  vofi  sumal  ab  eis.  Àc  pcr  hoc  et  ma- 
ifutcm  in  se  kabere  Clirislum,  et  manere  in  Chris- 
to ,  discipulis  prodcst  ulrunique,  non  Chrislo  : 
nam,  prœciso  palii(ite,polest  de  viia  rndicc  alius 
pullulnre;  qui  aulem  prœcisus  est,  sine  radiée 
non  polesl  riiere.  Caii.  i^,  pag.  10"1. 

'  l'rursus  doniim  Dei  est  diligere  Deitm:  ipse 
lit  ditigeretur  dcdit.  qui  non  dileclus  diligit.  Dis- 
jilicentes  aniali  snmus,  ul  fierel  in  nobis  unde 
placeremus.  Diffundil  enim  charilntem  in  cordi- 
t'us  nostris  Spinlus  l'atris  et  Filii,  quem  eum 
Pâtre  amumus  et  Ftlio.  Ac  sic  sccundttm  supra- 
scri/'las  sanctaruin  Siriiiluraruin  scntenlias,  vcl 
niUiijuorum  Valrum  dcfiniliones,  hoc  Veo  propi- 
tianle  ri  privdirare  dcbcmus  et  credcre,  quod  per 
peccaluin  prinii  hoiiiinis  inrlinaluni  et  atletiua- 
tuni  fuerit  liberuiu  arbilriiim,  tit  nullus  postea 
eut  diligere  Dtum.  sicut  opnrluil,  aut  credire  in 
Deunx,  nut  nperaripropler  Deum  quod  boiium  est 
possit,  nisi  eum  gralia  niiscricordiœ  d.vinœ  pric- 
reneril.  Cnderl  Abeljusto,  et  i\oe,  et  Abrabip  et 
Jiaac,  et  Jacob,  et  oinni  uutiquorum  Patrum  multi- 
ludini,  iUam  pracluram  fidtm,  quant  in  ipsorum 
taude  prwdical  aposlolus  Patilus,  non  per  bonum 
nalurw,  quodprius  inAdam  dniumfueriit,  sed per 
gruliaiii  Pci  rrcdimus  fuisse  coUalam:  quam  gra. 


liam,  eliam  posl  adventum  Domini,  omnibus  qui 
baptizari  desidernni,  non  in  libero  arbitrio  ha- 
beri,  sed  Chrisli  novimus  simul  et  crcdimus  lar- 

gitale  conferri Hoc  e.iam  secundum  /idem  ca- 

tholicam  credimits,  quod  accepta  per  bnptismum 
gralia  omnes  baptizali ,  Chrislo  auxitiantc  et 
coopérante,  quœ  ad  salutem  aninuv  pertinent, 
possinl  et  debeant,si  fideliler  laborare  voluerinl, 
adiniplere.  Aliquos  vero  ad  maluni  diiina  poles- 
tate  prwdestinntos  esse  non  solum  non  crcdimus, 
sed  etiam,  si  sunt  qui  lantuni  malum  credereve- 
tint,  eum  omni  deleslalione  illis  anathema  dici- 
nius.  Hoc  etiam  saiuhriter  profucmur  et  crcdi- 
mus, quod  in  unini  opère  bonu  non  nos  incipi- 
nius,  et  postea  pcr  Dei  misericordiam  adjutamur: 
sed  ipse  nobis,  nullis  prucedenlihus  bonis  meri- 
tis,  et  fidem  et  amorem  sui  prius  inspiral,  ut  et 
baplismi  sacramenla  fideliler  rcquiramus.etposl 
bapiisnium  eum  ipsius  adjuturio  ea  quœ  sibi  sunt 
placita  implere  pussimus.  Unde  manifestissime 
credcnduni  esl,  quod  et  illius  latronis,  quem  Do- 
viivus  ad  pnradi!-i  palriiim  revocatil,  et  Cornclii 
cenlurionis  ad  qutni  angélus  Domini  missut  est, 
cl  Xacchœi.  qui  ipsuni  Dominum  suscipere  me- 
mil,  illa  tant  admirabilis  fidcs  non  fuit  de  nalu- 
ra.  sed  divinœ  largilatis  dor.um.  C.nn.  2.1.  pag. 
1871. 


IVI*  SIECLE. 


CHAPITRE  LXXXVI. 


i>'  CONCILE  UOnANGE. 


s:j7 


.\uroril4  du 
■«eondooDcile 
d'Oraagfl. 


venait  pas  de  la  nature ,  mais  de  la  libéralité 
de  Dien.  n  Les  l'vèques,  non  conlenis  de 
souscrire  j'i  cette  dùlinillon  de  foi ,  y  firent 
encore  souscrire  plusieurs  laïques  de  la  pre- 
mière condition,  qui  avaient  assisté  à  la  cé- 
rémonie de  la  dédicace.  Leur  but  en  cela  fut 
que  celle  délînition  de  foi  servirait  aussi  à 
désabuser  ceux  des  laïques,  que  lessémipc- 
lagiens  auraient  pu  infecter  de  leurs  erreurs. 
Les  laïques  qui  souscrivirent  sont  au  nombre 
de  huit,  tous  qualifiés  iUuslrcs,  donl  le  pre- 
mier est  le  patrice  Libère,  préfet  du  prétoire 
des  Gaules. 

6.  Saint  Césaire,  qui  avait  présidé  ce  con- 
cile, en  envoya  les  Actes  à  Rome  par  Ar- 
ménius,  prêtre  et  abbé,  pour  faire  approu- 
ver ce  qu'on  avait  défini  sur  la  matière  de  la 
grâce.  Le  pape  Félix  IV  occupait  alors  le 
Saint-Siège;  ce  pape  étant  mort  avant  l'ar- 
rivée d'Arméuius  à  Rome,  Bonifiice  II,  qui 
lui  succéda ,  répondit  A  la  lettre  de  saint 
Césaire,  le  8  des  calendes  de  février,  sous 
le  consulat  de  Lampadius  et  d'OresIe,  c'est- 
à-dire,  le  2o  janvier  330.  Non-seulement  il 
approuva  la  doctrine  établie  dans  le  concile 
d'Orange,  mais  il  produisit  lui-même  plu- 
sieurs passages  pour  l'établir  de  nouveau, 
témoignant  son  étonnemeut  de  ce  qu'il  y 
avait  encore  des  personnes  qui  errassent 
dans  une  matière  si  clairement  développée 
dans  les  saintes  Écritures.  Il  finissait  sa 
lettre  en  disant  à  saint  Hilaire  '  :  «  Nous 
espérons  de  la  divine  miséricorde  qu'elle 
opérera  tellement  par  la  doctrine  que  vous 
venez  d'établir ,  et  par  votre  ministère , 
dans  le  cœur  de  tous  ceux  que  vous  nous 
avez  marqués  être  d'un  sentiment  contraire, 


qu'ils  reconnaîtront  à  l'avenir  que  toute 
bonne  volonté  vient  de  nieu,  et  non  d'eux- 
mêmes,  selon  ce  que  dit  l'Ixrilure  :  C'est  If 
iicigncur  qvi  pri'jjare  la  volonté.  »  Le  Père 
Sirmond  ,  dans  ses  JS^otes  sur  le  concile 
d'Orange,  déclare  qu'il  a  trouvé  dans  plu- 
sieurs manuscrits  anciens,  «'i  la  tête  de  la 
lettre  du  pape  Boniface  que  nous  venons  de 
ciler,  ces  paroles  :  u  Ce  concile  d'Orange  a  éfi- 
confirmé  '  par  un  décret  du  pape  Boniface,  et 
quiconque  aura  d'autres  sentiments  que  ceux  de 
ce  concile  et  de  ce  décret  du  pape,  doit  savoir 
qu'il  est  opposé  au  Saint-Siège  apostolique  et  à 
l'Eglise  universelle.  On  avait  supprimé  celte 
noie  dansl'édilion  royale  des  conciles;  mais 
le  Père  Labbe  a  eu  soin  de  la  remettre  à  la 
suite  du  concile  d'Orange  dans  son  édition 
de  I67I.  Le  même  Père  Sirmond  ,  dans  ime 
autre  noie,  dit  qu'il  était  important'  de  faire 
voir  que  ce  concile  d'Orange  qu'on  avait  cru 
autrefois  avoir  été  célébré  sous  le  pontificat 
de  saint  Léon,  ne  s'est  tenu  qu'en  cette 
année  o2'J,  à  cause  de  plusieurs  personna- 
ges éminents  en  science  et  en  piété,  qui 
avant  le  concile  ont  paru  favoriser  dans  les 
Gaules  les  sémipélagiens,  donl  les  erreurs 
furent  enfin  proscrites  et  anathémalisées 
dans  ce  concile  confirmé  par  l'autoiilé  du 
Saint-Siège  apostolique.  «  Ce  concile,  ajoute 
ce  Père,  termina  enfin  la  dispute  si  impor- 
tante, qui  durant  plus  de  cent  ans  avait 
échaufi'é,  les  uns  contre  les  autres,  des  hom- 
mes très-saints  et  très-savants  de  part  et 
d'autre;  et  ce  fut  par  l'autorité  de  saint  Au- 
gustin, et  à  l'avantage  de  sa  doctrine,  que 
tout  ce  difïérend  fui  apaisé  par  ce  concile.  » 
On  demandera  peut-être  comment  le  Père 


'  Speramus  de  misericordia  divina,  quod  ita, 
per  minislerium  tuœ  fraternitatis  atque  doctri- 
nam,  in  omnium,  quos  dissenlire  mandasli,  dig- 
nabitur  cordihus  openiri,  iit  ex  hoc  omnem  bo- 
nam  voluntnCem  non  ex  se.  sed  ex  divina  creddnt 
gratta  propcùci,  cum  se  senserint  idjam  telle  de- 
fendere,  quod  nitebantur  perlinaciler  impugnare. 
Scriptum  est  enim  :  Prœparatur  voluutas  a  Do- 
mino. Bonif.,  Epist.  2  ad  Cœsar.  Tom.  IV  Concil., 
pag.  1CH9. 

'  In  Codice  Fossatensi  unde  a  nobis  illa  Epistola 
Bonifacii  excerpta  est,  et  in  allero  consintili  qui 
extat  in  bibliotheca  Snnctœ  Mariœ  Laudunensis 
epistola  synodo  ipsi  Àrausicanœpropier  reveren- 
tiamSedisapostolicœ  pr(rponitur,.et  epislolœ  bre- 
visde  synodi  ejusdein  aulhoritate  prœftxa  estad- 
notatio  bis  vérins:  lu  lioc  loco  contiuetur  syno- 
dus  Arauîics,  quam  per  authoritatem  sanctus  Papa 
Bonifacius  confirmavit.  Et  ideo  quicumque  aliter 
de  gratia  et  libero  arbitrio   credid»rit,  qiiara  vel 


ista  authoritas  continet,  Tel  iu  illa  synodo  constitu- 
tum  est,  contrarium  seSedi  apostolicfe  et  univer- 
sfB  per  totuui  luuadum  Ecclesias  esse  coguoscal. 
Le  Père  Labbe  ajoute:  Qiibe  Sirinundi  verba  iu 
regia  collectione  ?uldueta  nos  tiic  reponendacur  - 
viujus.  Tom.  H'  Concil.,  pag.  1673. 

'  Intererat  autem  conciliiim  istud.  quod  Leo- 
nis  olim  pnpœ  teniporibus  asferebatur,  ad  liœc 
potius  tempora  di/l'crri,  propUr  mult  s  doctrina 
et  pielate  jirœstantes  viros,  qui  spatio  interjecto 
fiirere  in  Gnllia  visi  sunc  semipelagianis,  quorum 
placila  in  liac  demum  synodo  quam  Sedis  apos- 
tûlicœ  auctoritas  comprobavit,  penitus  explosa 
ac  rejecta  sunt.  Siim.,  tom.  I  Concil.,  pag.  COo. 
Cœteruni  gravi  ac  diuturnip,  quœ  sanclissimos 
et  doctissimos  utrimque  viros  in  Galtia  centum 
amplius  annos  exercuil,  fin-^m  postea  tandem  at- 
tulit  synodus  Arausicana  II,  quœ  tolum  de  gra- 
tia et  libero  arbitrio  controversiam  ex  S.  Àugus- 
(ini  sententia  composuil.  Ibid..  pag.  14S. 


838 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Cone'le  (1« 
Vllrnce  CD 
bl9.  Tom.  IV 
CoDcil.,  pag. 
1978.    L(£Mr. 

Vni,  ht..    I, 

num.  Sj. 


VatsoD  eu  S^t 
Tom.  i\  Con- 
cil-,  i>.  It<:». 


Sirmond  a  pu  appeler  très-saints  des  liom- 
mes  qu'il  reconnaît  avoir  été  infectés  de 
l'erreur  des  sémipelagiens?  A  quoi  l'on  peut 
répondre  que  ceux  qui  étaient  dans  ces  senti- 
mentsnc  faisaient  pas  uncorpssépnré,  comme 
les  autres  hérétiques  ;  ^Jii'on  ne  les  regardait 
point  comme  hors  de  l'Église,  et  qu'ils  ont 
été  seulement  repris  d'avoir  trop  donné  à 
la  nature  dans  les  matières  de  la  grâce. 

7.  On  met  en  la  même  année  529  un  con- 
cile ;\  Valence  dans  la  Gaule  viennoise,  qui 
est  compté  pour  le  troisième  de  ceux  que 
l'on  a  tenus  en  cette  ville.  Les  Actes  en  sont 
perdus  ;  mais  on  voit  par  un  fragment  qui 
en  est  rapporlé  dans  la  Vie  de  saint  Cisnire 
par  le  diacre  Cypricn,  que  les  matières  de 
la  grâce  y'furent  encore  agitées,  et  que  saint 
Cyprien,  évêque  de  Toulon,  prouva  par  l'au- 
torité des  divines  Écritures,  et  par  les  té- 
moignages des  anciens  Pères  de  l'Église,  que 
l'homme  ne  peut  rien  faire  dans  l'ouvrage 
de  son  salut,  s'il  n'est  auparavant  appelé 
par  une  grâce  de  Dieu  prévenante  ;  et  que 
c'est  alors  qu'il  reprend  sa  véritable  liberté, 
lorsqu'il  est  délivré  et  racheté  par  Jésus- 
Christ.  Saint  Césaire  ne  put  assister  k  ce 
concile,  parce  qu'il  se  trouva  malade  ;  mais 
il  y  envoya  des  prêtres  et  des  diacres. 

8.  Sa  santé  s'étant  rétablie,  il  fut  en  état 
de  présider  au  concile  de  Vaison,  qui  se  tint 
aux  noues  de  novembre,  sous  le  ctmsidat  de 
Décius,  c'est-à-dire  le  7  novembre  deTanoSO, 
le  quatrième  du  pontificat  de  Félix,  et  du  rè- 
gne d'Athalaric,  roi  d'Italie.  Ce  concile  avait 
été  indiqué  deux  ans  aupaiavant  dans  le 
concile  de  Carpenlras ,  et  les  évèques  qui 
l'avaient  indiqué  s'y  trouvèrent  au  nombre 
de  douze.  Leur  premier  soin  fut  d'ordonner 


la  lecture   des  anciens  canons,  suivant  la 
coutume,  .\ucun  des  évèques  présents  n'y 
ayant  donné   atteinte,    tous  eu   rendirent 
grâces  à  Dieu,  et  le  bénirent  de  ce  que  cette 
assemblée  n'avait  servi  qu'à  se  donner  mu- 
tuellement des  témoignages  d'amitié,  et  à 
entretenir  la  charité.  'Toutefois,  pour  ne  pas 
se  séparer  sans  qu'il  en  revînt  quelque  chose 
à  l'édification  de  l'Église,  ils  dressèrent  cinq 
canons  pour  le  règlement  de  la  discipline, 
et  principalement  pour  l'arrangement   de 
l'olUce  divin.  Le  premier  porte,  que  suivant 
l'usage  établi  '  salutairement  en  Italie,  tous 
les  prêtres  de  la  campagne  recevront  chez 
eux  les  jeunes  lecteurs  qui  ne  sont  point 
mariés,  pour  les  élever  et  les  nourrir  spiri- 
tuellement, comme  de  bons  pères,  leur  fai- 
sant apprendre  les  Psaumes,  lire  les  divines 
Écritures,   et  les  instruisant  dans  la  loi  du 
Seigneur,  afin  de  se  préparer  dans  ces  jeu- 
nes élèves  de  dignes  successeurs,  et  de  rece- 
voir pour  celte  bonne  œuvre  des  récompen- 
ses élcrnclles  de  la  pari  de  Dieu.  Le  canon 
ajoute  que,  lorsqu'ils  seront  venus  à  l'âge 
parfait,  si  quelqu'un  d'eux  par  la  fragilité  de 
la  chair  veut  se  marier,  on  ne  lui  en  ôtera 
paslepouvoir.  Le  secondpcrmelaux  prêtres', 
pour  l'édification   de  toutes  les  églises  et 
pour  l'utiliti!'  de  tout  le  peuple,  de  prêcher 
non-seulcmcnl  dans  les   villes,   mais   dans 
toutes  les  paroisses  de  la  campagne  ;  voulant 
que,  si  quelque  infirmité  empêche  le  prêtre 
de  prêcher,  les  diacres  récitent  à  haute  voix 
les  homélies  des  saints  Pères,  cela  leur  étant 
bien  permis,  puisqu'ils  peuvent  même  lire 
l'Évangile  dev;mt  le  peuple.  Il  est  ordonné 
dans  le  troisième,  qu'a  l'exemple  du  Siège 
apostolique  '  el  des  provinces  d'Orient  et 


Caii. 


I  Hoc  enim  placnil,  ut  omnes  presbyleri,  qui 
sunt  in  parochiis  conslitxtti,  secuiuluiii  coiisuelu- 
liinem.  quam  jicr  lotnm  Jtaliuin  satis  satubriler 
leiieri  cofjiwiimm,  jiiiiioies  tectores  quanloscum- 
que  Aine  uxore  habiieriiil,  secum  in  domo,  uln 
ipsi  habilare  iiUeiUur,recipiant  ;  el  eos  quomodo 
boni  iialr(s  spirilalitcr  nulrictUcs,  psulinos  pa- 
rure, (liiinis  Icfliniiibus  insisiere,  et  in  lege  Do- 
mini  erudire  contendanl  :  ut  el  sibi  diguos  suc- 
cessores  provideant,  et  a  Domino  prœmia  ivler- 
1IO  recipianl.  Cum  vero  ad  celalem  pcrfrctam  per- 
venertnl,  si  aliqnis  eorum  pro  rarnis  fiaijililate 
iixnrem  liabere  voluerit,  poleslas  ci  ducendi  coa- 
juflium  non  negclur.  Can.  1,  lom.  IV  Concil.,  pag. 
1679. 

'  Hoc  eliam  pro  œdipcalione  omnium  Ecclesia- 
rnw.  ri  pro  ulililate  totiuspopnli,  vohis  ]ilocitit, 
ni  non  solum  m  civilatthus.siul  pii(nn  in  omnibus 
parorhiis  verbnm   faciendi  dnrnnuf  presbylrris 


poteslalent  :  ita  ni,  si  presbytcr,  aliqua  infirmi- 
tate  prohibenle,  per  scijisuni  non  polucrit  pnedi- 
care,  sanclonnn  patrum  honiiliœ  u  diacunibus 
recitenltir.  Si  enim  digni  sunl  diacones  quod  Chris- 
lus  in  Eiangelio  locutus  est  légère,  quare  indigni 
judirenlur  sanctorum  Pntrnm  cxpositiuncs  pu- 
bliée rccitare  ?  Can.  2,  iiaj;.  1680. 

»  f(  quia  lam  in  Sedc  apostolica,  quam  eliam 
fier  tolas  Oricntulcs  atquc  Ilaliœ  provincias,  dul- 
cis  et  nimium  snlutaris  consuetudo  rsl  inlromis- 
sa,  ul  Kyrie  oleifou  frequcnlius  cum  grandi  af- 
feclu  et  compunclione  dicalur;  pliicuil  eliam  no- 
bis,  ul  in  omnibus  erclesus  nostris  ista  lam  sanc- 
ta  confiutiudo,  et  ad  matulinuni,  tl  ad  missas,  et 
ad  vesperam,  Deo  propiliii,  inlromillalur.  El  in 
omnibus  missis,  seu  in  nialulinis,  sm  in  quadrn- 
grsimnlibus,  seu  in  iltis  qUiV  pro  drfunrtorum 
lommcmornlinne  fiunt,  semper:  .^nu'lus,  siiKiiif, 
Muclus,  co  ordinc,  quomodv  nd  witfos  publicas 


C^nrils  de 
ToIèdeen'i3t. 
Tom.  IV  CoD- 
eil.,  p.  1134. 


[VI*  SIÈCLE.]  CHAPITRE  LXXXM. 

d'ilalic,  où  l'on  dit  souvent  Kij rie  eleison  avec 
une  grando  dévotidii,  on  le  dira  dans  touies 
les  églises  de  la  dépendance  desévôtjues  du 
concile,  à  luulines,  ;\  la  messe  et  à  vêpres; 
et  qu'à  toutes  les  messes,  môme  de  Caièiuc 
et  dos  morts,  on  dira  trois  fuis  Sanctns, 
comme  aux  messes  publiques  ;  une  i)arole 
si  sainte  ne  pouvant  produire  de  dégoût, 
qxiand  mcnio  on  la  prononcerait  jour  et  nuit. 
Le  quatrième  ordonne  de  faire  méuioirc  ',dans 
toutes  les  églises,  du  pape  qui  occupera  alors 
le  Sainl-Siége;  et,  parce  que  c'était  l'usage 
non-seulement  à  Rome,  mais*  aussi  partout 
l'Orient,  en  Afrique  et  en  Italie,  d'ajouter, 
après  Gloriu  Put  ri,  etc.,  sicut  erat  in  princi- 
pio,  etc.,  k  cause  des  hérétiques  qui  disent 
que  le  Fils  de  Dieu  n'a  pas  toujours  été  avec 
le  Père,  mais  qu'il  a  commencé  dans  le 
temps,  on  ordonna  dans  le  ciuquième  canon 
que  cet  usage  serait  suivi  dans  les  provinces 
du  ressort  du  concile,  à  cause  que  les  ariens 
y  dominaient. 

ARTICLE  VI. 

CONCILE  DE  TOLÈDE  [.o31]. 

1 .  Sous  le  pontificat  du  pape  Boniface  II , 
la  cinquième  année  du  règne  d'Amalaric,  le 
17  mai  531,  Monlan,  évêque  de  Tolède,  y 
tint  un  concile,  assisté  de  cinq  autres  évo- 
ques d'Espagne.  Après  avoir  conféré  ensem- 


—  CONCILE  DE  TOLEDE. 


83« 


ble  sur  les  instituts  des  Pères,  et  les  décrets 
des  anciens  conciles,  il  leur  parut  raisonna- 
ble de  remettre  en  vigueur  ceux  que  l'on 
avait  négligés,  et  d'en  faire  de  nouveaux 
pour  la  perfection  de  la  discipline  de  l'É- 
glise :  ils  sont  au  nombre  de  cin(i,  dont  le 
premier  marque  en  cette  manière  les  inters- 
tices des  ordinations.  Ceux  qui  dès  l'enfance  •  cm. 
seront  destinés  à  la  cléricalure  par  leurs  pa- 
rents, recevront  d'abord  la  tonsure  ;  puis  on 
les  mettra  au  rang  des  lecteurs,  pour  être 
instruits  dans  la  maison  de  l'église  sous  les 
yeux  de  l'évéque,  par  celui  qui  leur  sera 
préposé.  Lorsqu'ilsaurontdix-huit  ans  accom- 
plis, l'évèquc  leur  demandei'a  ',  en  présence 
du  clergé  et  du  peuple ,  s'ils  veulent  se  ma- 
rierou non. — [^Quesi, acceptantavec amour  la 
grâce  de  la  chasteté  que  Dieu  leur  aura  ins- 
pirée], ils  promettent  librement  de  garder 
la  continence  [  sans  jamais  s'engager  dans 
les  liens  du  mariage],  on  les  fera  sous-dia- 
cres à  l'âge  de  vingt  ans.  A  vingt-cinq  ans  ac- 
complis, s'ils  se  sont  conduits  sagement  [et 
que  révoque  les  juge  capables  de  remplir  les 
fonctions  d'un  ordre  plus  élevé],  il  les  ordon- 
nera diacres,  [à  condition  toutefois  qu'ils  se 
gardent  bien  d'oublier  leur  promesse  ,  et  de 
revenir  sur  leurs  pas  en  contractant  un  ma- 
riage terrestre  ou  en  se  livrant  à  un  concu- 
binage secret.  S'ils  le  font'],  ils  seront  re- 
gardés comme  sacrilèges,  et  chassés  de  l'é- 


(licitur,  dici  debeat  :  quia  lam  sancta,  el  tam 
(lukis  el  (tesiderabilis  vux,  eiiamsi  die  nocttiqiie 
possit  dici,  fastidium  noji  polerit  generare.  Cau. 
3,  ibid. 

'  Et  hoc  nobis  jitslum  ristun  est,  ut  nomen  Do- 
iiiini  Papœ,  quicumque  Sedi  apostol.cw  prœfuerit, 
in  nostris  ccclesiis  recitetur.  Cau.  4,  ibid. 

-  Et  quia  non  soltim  in  Sede  .iposlolica,  sed 
etiam  per  totum  Orientent,  et  iotain  Africam,  tel 
Jlaliam,  propler  tiœrelicoruni  aslutiam,  qui  Dei 
Filium  lion  semper  cum  Paire  fuisse,  sed  a  tem- 
pore  cœpisse  blasphémant,  in  omnibus  clausulis 
post  Gloria,  sieut  eral  in  principio  dicitur,  etiam 
el  nos  in  unirersis  ecclesiis  nostris  hoc  ita  dicen- 
dum  esse  deccrnimus.  Can.  à,  ibid. 

"  De  his  qnos  voluntas  parenlum  a  primis  in- 
fantile annis  clericalus  officio  mancipavit,  statui- 
mus  obsercandum.  ut  mox  cum  delonsi,  vel  nii- 
nisterio  electorum  contraditi  fuerint,  in  donio 
ecclesiœ,  sub  episcpali  prœsenlia,  a  prœposito 
sibi  debeanl  erudiri.  At  ubi  oclavum,  decimum 
(Ptatis  suœ  compleverint  annunt,  coram  tolius 
cleri  plebisque  conspectu,  volutitas  eorum  de  ex- 
pelendo  conjuqio  ab  episcopo  perscrutelur.  Qui- 
hus  si  gratia  castitatis,  Deo  inspirante,  placuit. 
et  professionem  caslimoniœ  suœ,  absque  conju- 
'jali  necessilate,  se  spoponderint  servaluros,  ht 
tanquam  appelitores  arciissimœ  viœ,  lenissimo 


Domini  suo  subdantur  :  acprimum  subdiacoiia- 
tus  ministerium  hibitu  probationis  suœ  a  vicc- 
simo  anno  suscipiant.  Quod  si  inculpabililer  ac 
inoffense  vicesinnim  el  quinlum  annum  œtatis 
suœ  peregerinl,ad  diaconatus  offlcium,  si  scienler 
implere  posse  ab  episcopo  comprobantur,  promo- 
veri  debent.  Cavendum  tamen  esi  his,  ne  quando 
suœ  sponsionis  immemorcs,  aut  ad  terrenas  nup- 
lias,  aut  furlivos  concubitus  ultra  recurranl. 
Quod  si  forte  fecerint ;  el  sacrilegii  rei  damnen- 
tur,  et  ab  ecclesia  habeantur  extranei.  Uisaulem 
quibus  voluntas  propria,  interrogalionis  tempore. 
desideriumnubendipcrsuaseril,concessa]n  abapos- 
tolis  sententiam  (licenliam]  auferre  non  possu- 
mus:ita  ut  cum  perfectœ  (provectœ)  œlals  in 
conjugio  positi ,  renunliaturos  se  pari  consen- 
su  operibus  cartiis  spoponderint,  ad  sacralos 
gradus  aspirent.  Cau.  I,  tom.  I\'  Concil.,  pag.  1733. 

'■  D.  Ceillier  avait  traduit  aiDr;i  cette  plirase  et  la 
suivante:  «  L'évéque  leur  demandera,  en  présence 
du  clergé  et  du  peujjle,  s'ils  veulent  se  marier  ou 
non,  n'étant  pas  permis  de  leur  ôter  la  liberté  ac- 
cordée par  l'Apôtre  S'ils  piùmetteiit  librement  de 
garder  la  continence,  on  les  fera  sous-diacres,  etc.  •• 
11  suffit  de  jeter  les  jeu.\  sur  le  texte  latin,  pour  voir 
combien  lelte  traduction  était  défectueuse  et  même 
infidèle.  (L'éditeur. 

•^  D.   Ceillier  avait   traduil  ;    o  Mais  en  veillant 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Lmte  do 
Unnlao,  irh- 
QU«  d«  Tolè- 
rffl.   Ttm.  IV 

Num  xi.tr.. 


840 

glise.  [Quant  à  ceux  qui,  de  leur  volonté  pro- 
pre, dans  le  moment  où  ils  auront  été  inter- 
rogés, auront  exprimé  l'intention  de  se  ma- 
rier dans  la  suite],  nous  ne  pouvons  leur  oter 
la  liberté  accordée  par  les  apôtres  ;  tellement 
que  si,  arrivés  plus  tard  à  un  âge  mùr,  ils 
promettent,  quoique  mariés,  de  garder  la 
chasteté  du  consentement  de  leurs  femmes, 
ils  pourront  aspirer  aux  ordres  sacrés.  —  11 
est  dit  dnns  le  second  Canon,  que  ceux  qui 
auront'  été  ainsi  élevés  dans  leur  jeunesse, 
ne  pourront,  en  quelque  occasion  que  ce  soit, 
quitter  leur  propre  église  pour  passer  à  une 
autre,  et  que  l'évèque  qui  les  recevra  sans 
l'agrément  de  celui  sous  les  yeux  duquel  ils 
auront  été  Instruits,  se  rendra  coupable  en- 
vers tous  ses  confrères  ;  parce  qu'il  est  dur 
qu'un  évéque  ôte  à  son  confière  nn  jeune 
liommequecnlui-cia  lire  de  la  rusticité,  et  de 
la  crasse  de  l'enfance.  —  Le  troisième  re- 
nouvelle les  anciens  Canons  touchant  la  dé- 
fense faite  aux  clercs  d'avoir  chez  eux  des 
femmes,  autres  que  leurs  proches  parentes. 
—  Le  quatrième  permet  aux  clercs  qui  se 
seront  fait  des  métairies  ou  des  vignobles 
sur  les  terres  de  l'Église  pour  s'aider  à  sub- 
sister, d'en  jouir  pondant  leur  vio,  mais  h  la 
charge  de  ne  pouvoir  en  disposer  par  testa- 
ment ou  droit  de  succession  après  leur  mort 
en  faveur  de  personne,  si  ce  n'est  que  l'évè- 
que leur  ait  donné  ces  terres  à  condition  de 
rend;e  des  services  ou  certaines  redevances 
à  l'Église.  —  On  défend  dans  le  cinquième 
les  ruariages  entre  parents,  et  on  y  étend 
cette  défense,  tant  '  que  la  parenté  se  peut 
connaître.  Deux  autres  évêques  venus  depuis 
à  Tolède,  savoir  Xébridius  d'Egaré,  et  Juste 
d'Urgel,  souscrivirent  aux  décrets  de  ce  con- 
cile. 

2.  Ces  décrets  sont  suivis  d'une  lettre  de 
Montan  évêque  de  Tolède,  aux  chrétiens  du 
territoire  de  Palenza,  contre  des  prèties  qui 
s'i'taiont  donné  la  liberté  de  consacrer  le 
saint  chrême  contre  l'usage  de  l'Église,  qui 
réserve  ce  droit  aux  évêques.  Il  renvoie  ces 
prêtres  au  livre  des  Nombres,  pour  y  ap- 


prendre l'origine  de  leurs  prérogatives  et  de 
leur  honneur  dans  l'établissement  des  soi- 
xante-dix vieillards  que  Dieu  donna  à  Moïse, 
pour  lui  aider  dans  le  ministère  et  dans  le 
gouvernement  ;  et  leur  dit  que  le  Seigneur, 
en  les  donnant  pour  aides  dans  le  travail 
qu'il  a  imposé  aux  évêques,  a  voulu  qu'ils 
leur  fussent  inférieurs  en  dignité,  et  qu'ils 
s'abstinssent  de  certaine?  fonctions  sacrées. 
Sur  quoi  il  leur  met  devant  les  yeux  les  châ- 
timents dont  Dieu  punit  Coré,  Dathan,  Abi- 
ron,  Ûzias  et  Aza,  pour  avoir  entrepris  de 
faire   ce  qui    n'était   pas    de    leur    office. 
(>  Ignorez-vous,  ajoutc-t-il,  les  règles  des  an- 
ciens Pères,  et  les  décrets  des  conciles,  où 
il  est  ordonné  que  les  prêtres  des  paroisses 
iront  eux-mêmes  chercher  tous  les  ans  le 
saint  chrême,  ou   qu'ils  y   enveiront  leurs 
sacristains,  et  non  pas  des  personnes  viles, 
pour  le  recevoir  de  la  main  de  l'évèque  ?  Il 
me  semble  qu'en  vous  ordonnant  de  le  venir 
quérir,  ils  vous  ont  ôté  le  pouvoir  de  le  con- 
sacrer. ))  11  les  menace  d'analhème,  si  à  l'a- 
venir ils  entreprennent  quelque   chose  de 
semblable  ;  consentant  de  les  laisser  jouir 
de  tous  les  privilèges  de  leur  ordre,  pourvu 
qu'ils  n'entreprennent   point  sur   les   fonc- 
tions épiscopales;  voulant  bien  encore,  en 
cas  qu'ils  se  trouvent  malades  dans  le  temps 
pascal,  leur  envoyer  le  saint  chrême  sur  la 
dcmajide  qu'ils  lui  en  feront  par  lettres.  Ces 
prêtres   avaient   aussi   appeh;  des  évêques 
étrangers  pour  la  consécration  des  églises 
de  leurs  paroisses.  Montan  leur  défend  d'en 
user  ainsi  dans  la  suite,   disant  qu'encore 
que  tous  les  évêques  soient  unis  eu  Jésus- 
Christ  par  un  même  lien,  il  faut  conserveries 
privilèges  et  l'ordre  des  provinces.   «  C'est 
pourquoi,  contiuue-t-il,  nous  avons  ordonne 
que,  lorsqu'il  y  aura  quelque  église  ù  con- 
sacrer, vous  nous  en  donnerez  avis  par  let- 
tres, alin  que  celle  consécration  se  fasse  ou 
par  nous,  ou  par  celui  des  évêques  que  nous 
aurons  choisi.  »  Il  traite  de  folie  l'attache- 
ment qu'ils  avaient  aux  prisciilianistes,  qu'il 
accuse   de  plusieurs  infamies,  et  qu'il  dit 


sur  eux  afiu  qu'ils  ne  se  marient  point  et  qu'ils 
n'aient  aucuu  couiuicrte  secret  avec  dos  femmes. 
S'ils  sont  conviiiiiciis  de  cette  l'aulc,  etc.  u  Même 
observation  .'i  faire  que  ci-dessiis.  [^L'édileur.) 

'  ilimililer  placml  cuslodire,  ne  qui  lie  liis  qui 
lali  educalioneimbituntiir,  qualihel  occasioni-co- 
ijenle,  prnpriam  relinqutntes  eccttsiam,  ad  uUain 
tratisiic  prwsumant.  Lpiscopus  lero,  qui  cas  aus- 
npere  nbsquc  l'onsdenti''  proprii  saccrdotts  for- 


tasse  prœsumpserit,  totius  fralernitalis  reum  es- 
se noient.  Quia  duruiii  est,  ut  eum,  qurin  alius 
rumli  scn.su  ac  tquatore  infa)tliir  rxuil,  alius 
suscipcrc,  aiil  rendicare  privsuiiial.  Can.  2,  ibid. 
'  l\ainel  hœr  salubnler  prtvcavendn  sancimus, 
ne  quis  fidelium  propinquam  sanguinis  sui,  «s- 
quiquo  (illinilutis  lineamenla,  grnerts  successionc 
co(jnoscil,  in  niatrimonm  fihi  drsiiferet  mpulnri 
Cnn.  .S,  ibid. 


Anlrç  l6Ur* 
■  •Vbid. 


IV  CoQ- 


Atilii  con» 
Ile  do  Rome 
.531,  pair, 
«91.  Fremië- 
i  Séance. 


[vi«  SIÈCLE.]  CHAPITRE  LXXXVI.  - 

avoir  été  condamnés  et  par  les  saints  évé- 
qiins  cl  par  1ns  princes  du  monde  et  afin 
iprils  piiisseiil  se  convaincre  ])ar  eux-mêmes 
des  cireurs  de  celte  secte,  et  les  réfuter,  il 
leur  conseille  de  lire  les  livresque  l'évèquc 
Turibius  avait  composés  sur  cette  matière, 
et  envoyés  ii  salut  L(''on. 

3.  L'évèquc  Moulan  éciivil  une  seconde 
lettre  adressée  à  Turibius,  gouverneur  de  la 
province  :  c'était  un  bomme  zélé  pour  la  foi 
catholique,  qui  dés  les  premières  années  de 
sa  magistrature  avait  su  rendre  à  César  ce 
qui  était  à  César,  et  à  Dieu  ce  qui  est  à 
Dieu.  Par  ses  soins  les  idoles  se  trouvaient 
sans  adorateurs,  et  la  secte  despriscillianistes 
presque  confondue  :  Il  avait  aussi,  par  ses 
travaux  infatigables,  fait  rendre  par  des 
peuples  féroces  l'obéissance  due  anx  princes. 
Montan  lui  fait  part  do  ce  qu'il  avait  appris 
des  dérèglements  des  prêtres  du  territoire 
de  Palenza  dans  la  consécration  du  saint 
chrême  et  des  églises,  et  le  prie  d'employer 
son  autorité  pour  maintenir  les  évoques 
chacun  dans  leurs  droits,  sans  permettre 
qu'il  se  fasse  rien  dans  l'Église  contre  les 
anciennes  contumes. 

ARTICLE  VII. 

DES  CONCILES  DE  ROME  [o30-531J. 

Le  pape  Félix  étant  mort  le  12  octobre  329, 
on  élut  pour  lui  succéder  Boniface  II.  Un 
parti  opposé  élut  en  même  temps  un  nommé 
Dioscore  :  ce  qui  causa  un  schisme,  mais  qui 
ne  dura  qn'environ  un  mois ,  Dioscore  étant 
venu  à  mourir  le  12  novembre  de  la  même 
année.  Boniface,  se  voyant  ainsi  paisible  pos- 
sesseur de  son  siège,  assembla  un  concile  dans 
la  basilique  de  Saint-Pierre,  où  il  fit  signeraux 
évêques  un  décret  qui  l'autorisailàse  choisir 
un  successeur  :  il  nomma  le  diacre  Vigile,  que 
les  évéqucs  du  concile  promirent  par  serment 
de  reconnaître.  Le  pape,  s'apercevant  qu'il 
avait  en  cela  contrevenu  anx  saints  canons, 
et  blessé  la  dignité  de  son  siège,  assembla 
un  autre  concile,  où  il  fit  casser  le  décret  du 
premier,  et  le  brûla  en  présence  de  tous  les 
évêques,  dn  clergé  et  du  sénat. 

2.  En  531,  après  le  consulat  de  Lampadius 
et  d'Oreste,  le  7  décembre,  le  pape  Boniface 
tint  un  troisième  concile  à  Romedans  le  con- 
sistoire de  saint  André,  qui  était  au  Vatican, 
près  de  l'église  de  Saint-Pierre  :  les  Actes 
nous  en  ont  été  donnés  par  Holsténius  sur 
un  manuscrit  de  la  Biblothèque  Vaticane. 


CONCILES  DE  ROME. 


H4I 


Quatre  évéqucs  assistèrent  à  ce  concile,  et 
parmi  eux  se  trouvait  .Abundantius  de  Dé- 
nu'lriiide  en  Thcssalio  ;  les  trois  autres 
étaient  d'ilalie.  11  s'y  trouva  f(uarante  prêtres 
et  quatre  diacres.  Le  concile  (îtant  assemblé, 
le  premier  des  diacres,  nommé  Tribun,  dit 
que  Théodose  ,  évèque  d'Ech.ine  en  Thcs- 
salie,  demandait  i\  entrer.  Le  Pape  l'ayant 
pci'mis  ,  Théodose  présenta  une  requête  de 
la  part  d'Etienne,  évêque  de  Larissc ,  mé- 
tropole de  Thessalie,  où  il  disait  ([u'il  avait 
ét('  élu  évoque  de  Larisse,  après  la  mort  de 
Pioclus,  son  prédécesseur,  par  le  choix  du 
clergé  et  du  peuple;  que  de  trois  sujets 
qu'ils  avaient  choisis,  il  était  celui  que  l'on 
avait  préféré;  et  que  le  décret  de  son  élec- 
tion ayant  été  souscrit,  il  avait  été  ordonné, 
suivant  l'ancienne  coutume,  h  Larisse  même, 
comme  métropole  de  Thessalie,  où  le  con- 
cile de  la  province  s'était  assemblé  pour  cette 
ordination.  »  Je  fus,  ajoutait-il,  ordonné  du 
consentement  de  tous,  entre  autres  de  Pro- 
bien ,  évêque  de  Démétriade,  qui  fit  mon 
éloge  dans  l'église.  Cependant  le  même  Pro- 
bien, avec  Antoine,  prêtre  et  économe  de 
mon  église,  et  Démétrius,  évêque  deSciate, 
sont  allés  tout  d'un  coup  i'i  Gonslantinople 
foimer  une  accusation  contre  moi  devant 
l'archevêque  Epiphane,  disant  que  mon  or- 
dination était  illégitime,  et  prétendant  faire 
ordonner  un  autre  évêque  à  ma  place.  » 
Etienne  disait  ensuite  qu'Epiphane,  sans  l'a- 
voir entendu ,  et  sans  avoir  de  preuves , 
l'avait  par  ses  lettres  suspendu  de  ses  fonc- 
tions et  de  la  communion  des  évêques  de  la 
province  et  du  cleigé  de  son  église,  sans  lui 
permettre  même  de  tirer  sa  subsistance  de 
ses  biens ,  avec  ordre  de  venir  à  Constanli- 
nople  avec  les  évêques  qui  l'avaient  ordonné  ; 
que  le  diacre  André  lui  ayant  signifié  toutes 
ces  choses  de  la  partd'Epiphane,  il  avait  dé- 
claré, par  un  acte  public,  que  s'il  devait  être 
jugé  sur  son  ordination,  ce  ne  devait  pas 
être  à  Constantinople,  mais  à  Rome,  devant 
le  Pape  et  le  Saint-Siège;  mais  que,  sans 
avoir  égard  à  sa  demande ,  on  l'avait  mené 
à  Constantinople  malgré  lui,  où  on  l'aurait 
mis  en  prison,  si  des  personnes  charitables 
n'avaient  promis  de  le  représenter.  «  C'est 
pourquoi,  concluait-il  en  s'adressantauPape, 
j  im  ploie  votre  secours,  vous  qui  devez  main- 
tenir les  canons  et  les  décrets  de  votre  Saint- 
Siège  dans  toutes  les_églises,  mais  principa- 
lement dans  votre  province  d'IUyrie.  »  Après 
qu'on  eut  fait  la  lecture  de  cette  requête, 


843 


HISTOIUE  GENERALE  DES 


Abundantius,  évoque  de  Démélriade,  se  leva 
el  dit  que  l'robien  dont  il  s'agissait  avait 
usurpé  son  église ,  qu'il  ne  devait  pas  être 
nommé  évêque,  et  il  demanda  justice  contre 
lui.  Théodose  d'Écliiuc  présenta  ensuite  une 
seconde  requête  d'I'^lienne  de  Larissc,  oii  il 
disait  que  rarclicvéque  Kpiphane  ayant  as- 
semblé les  évêques  qui  se  trouvaient  à  Con- 
stantinople,  il  avait  encore  déclaré  que  c'était 
par  le  Saint-Siège  qu'il  devait  être  jugé,  sui- 
vant l'ancienne  coutume  de  la  province  ;  mais 
qu'Épipbane  ne  l'avait  point  écouté  ;  que,  pré- 
tendant cire  juge  des  Églises  de  Tliessalie,  il 
avait.avecles  évêques  de  son  concile,  donné 
une  sentqnce  qui  le  suspendait  des  fonctions 
du  sacerdoce.  «  3é  le  priai ,  disait  encore 
Ktieune,  de  ne  rien  prononcer  contre  moi, 
que  vous  ne  fussiez  informé  de  l'alfaire  :  cette 
remontrance  n'a  fait  que  les  aigrir,  comme  si 
je  diminuais  les  droits  de  l'Église  de  Constan- 
tinople,  en  osant  nommer  le  Saiut-Siége. 
J'ai  soutenu,  en  cûet,  que  l'autorité  du  Saint- 
Siège,  qui  a  été  donnée  au  principal  d'entre 
les  apôtres  par  no'tre  Dieu  '  et  notre  Sau- 
veur, surpasse  tous  les  privilèges  des  autres 
Églises,  qui  n'ont  une  véritable  paix  que  dans 
la  confession  de  la  foi  de  celle  de  Rome.  On 
ne  laissa  pas  délire  la  sentence  portée  contre 
moi;  j'en  ai  appelé  à  vous  :  ils  m'ont  mis 
sous  la  garde  des  défenseurs  de  l'ICglisc. 
Mais  des  gens  craignant  Dieu,  ayant  pitié  de 
ma  misère,  parce  qu'ils  me  voyaient  aban- 
donné de  tous  côtés,  ont  répondu  pour  moi, 
en  iiromettant,  sous  une  grosse  amende,  que 
je  ne  sortirais  point  de  Coustantinople  :  car 
ceux  qui  me  persécutent  ont  grand  soin 
d'cmpêclicr  que  je  n'aille  me  jeter  aux  pieds 
de  votre  Sainteté  pour  y  iccevoir  quelque 
miséricorde.  »  Le  pape  Boniface  ordonna 
d'enregistrer  dans  les  annales  ecclésiasti- 
ques tout  ce  qu'on  avait  lu,  et  mit  fin  i\  cette 
première  session,  parce  qu'il  élail  tard. 
smodii.  3.  Dans  la  seconde,  (pii  se  tint  deux  jouis 
î.rt.'ïï'si."''  après,  c'est-à-dire  le  'J  décembre,  Tbéodoso 
d'Echiné  présenta  une  troisième  requête  au 
au  nom  d'Elpide,  d'Etienne  et  de  Tiraotliée, 
tous  trois  évêques  de  la  même  province  de 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

Tliessalie,  qui  formaient  des  plaintes  tou- 
chant la  sentence  rendue  à  Coustantinople 
contre  leur  métropolitain,  au  préjudice  de 
la  juridiction  du  Saint-Siège,  dont  ils  implo- 
raient le  secours.  Le  notaire  Menas  lut  cette 
requête  à  haute  voix  par  ordre  du  pape  Bo- 
niface; elle  contenait  l'appel  que  ces  trois 
évêques  avaient  interjeté  au  Siège  apostoli- 
que de  la  sentence  prononcée  contre  Etienne 
de  Larisse.  Après  la  lecture  de  cette  requête, 
qui  fut  aussi  enregistrée,  le  Pape  ayant  de- 
mandé si  l'on  n'avait  plus  rien  h  dire  dans 
cette  cause ,  Tliéodose  d'Ëchinc  dit  par  son 
interprète  :  «  Vous  voyez  par  la  lecture  de 
ces  requêtes  ce  qui  a  été  fait  contre  les  ca- 
nons et  les  décrets  de  vos  prédécesseurs. 
Car  il  est  certain  qu'encore  '  que  le  Saint- 
Siège  s'attribue  à  bon  droit  la  primauté  de 
toutes  les  Églises  du  monde ,  et  qu'il  soit 
nécessaire  d'en  appeler  à  son  tribunal  seul 
de  tous  les  endroits  dans  les  causes  ecclé- 
siastiques ,  il  a  un  droit  particulier  pour 
gouverner  les  Églises  d'IUyrie.  Et  quoique 
vous  connaissiez  les  lettres  de  tous  vos  pré- 
décesseurs, je  produis  les  copies  de  quel- 
ques-unes ,  que  je  vous  prie  de  faire  vérifier 
sur  vos  archives.  Boniface  l'ayant  ordonné 
ainsi,  on  lira  ces  lettres  des  archives,  et 
elles  furent  lues  par  le  notaire  Menas.  11  y 
eu  a  deux  du  pape  Damase  à  Aschole  de 
Tliessalonique;  une  de  Silice  à  Anysius;  deux 
d'Innocent,  dont  l'une  est  à  Auysius,  et  l'au- 
tre à  Rufus  ;  cinq  de  Boniface  ,  savoir  trois  à 
Ilufus,  et  deux  aux  évêques  de  Tliessalie; 
la  lettre  d'Houorius  à  Théodose-lc-Jeune 
avec  la  réponse  de  ce  prince  ;  une  du  pape 
saint  Cèlestin  aux  évêques  d'illyrie;  quatic 
de  Sixte  III ,  l'une  à  Périgène ,  l'autre  au 
concile  de  Thessaloiiique ,  la  troisième  à 
Proclus,  et  la  quatrième  à  tous  les  évêques 
d'illyrie;  la  lettre  de  l'empereur  Marcien  au 
pape  saint  Léon,  sur  la  ilignité  de  l'Église 
de  Constuutinople  ;  et  sept  lettres  de  saint 
L('ou,  tant  à  ce  prince,  iju'à  Anatolius  de 
Coustantinople,  et  à  divers  évêques  de  l'Il- 
lyrie  et  de  l'Achaïe.  On  en  lut  encore  d'au- 
tres, que  nous  ne  connaissons  pas,  parce  que 


'  Quod  diclum  magia  eos  adversum  me  ampUus 
incilavit  ;  pulanlcs  de  sacrariim  ecrlesiarum  re- 
giœ  urbisjurc  aliquid  miuui,  quod  ego  apostoti- 
cam  vestram  Sedcm  lisits  sum  nominasse.  Elc- 
nim  dixi:  Quia  amtoriUi.s  Sedis  nposlulicœ,  f|im'  a 
Peo  f't  Salvnlnrc  iinslni  eiiinnio  .n|inptr\loniiii  data 
eft  ,  umnilnis  saiirtanuii  Ei'<.li»5innim  iirivilpRiis 
aiileceUit  :  in  euju<   (  niifo.=j-ioiie  ouiues  mundi  f- 


quii'.-ciinl  F:(!'Iofia>.  Toiv.  IV  Conril.,  [>ag.  IfiOiî. 
'  A'nm  constat  vcncrnndos  Sedis  vtslrir  ponlifi- 
ces,  quavtris  in  loto  wundo  Sedes  apostolica  cc- 
clrsiarum  sibijure  vitidicelphncipalum,  et  solnw 
ecclesiaslicis  cuusix  undiqiic  appellare  nrcrsse  sil  : 
spcciiiliter  tnwcn  gulicrnationi  suir  lU>jrir\  Kirle- 
sin$  vindicnffr.  Il-iil.  png.  IBOf». 


CHAIMTHE  LXXXVl. 


I     CoDf4reoc« 

PD   Î>IJ. 

IVCon. 

.  !..  r.a. 


remier 
;  lacoti- 
t-1  r«f- 


[Vl"  SIÈCLE.] 

les  Actes  de  ce  concile  do  Rome  ne  sont  pas 
venus  entiers  jus(iu';\  nons  :  de  là  vient  que 
TUMis  ne  savons  |)as  ce  qui  y  fui  juyé  louchant 
l'allaiie  d'Klienne  de  Larissc. 

AUTICLE  VIII. 

DE  I.A    CONFÉRENCE   DES   CATUOLIOUES    AVEC   LES 
ORIENTAUX  Ci;  SÉVÉniENS,    A  CONSTANTINOPLE 

[533]. 

1 .  L'empereur  Justinien,  qui  avait  succédé 
à  Justin  son  oncle  dans  le  j;ouvpineaient  de 
l'empire  en  o27,  voulant  ramener  à  l'unité 
de  l'Eglise  les  sévériens,  (il  venir  ;\  Constan- 
tinople  des  évèques  de  part  et  d'antre,  pour 
coid'érer  ensemble  siu'  les  divers  articles  qui 
les  désunissaient.  Il  appela,  du  côté  des 
catholiques,  Hypacc  archevècpic  d'Kphèse  , 
Jean  de  Vésine,  Innocent  de  Maronie,  Etien- 
ne de  Séleucie ,  Antoine  de  ïrébisondc  et 
Démétrius  de  Philippi.  Ceux  qu'il  fit  venir  du 
parti  des  sévériens  étaient  Sergius  de  Cyr, 
Thomas  de  Germauicie ,  Philoxène  de  Duli- 
chium ,  Pierre  de  Tliéodosiople ,  Jean  de 
Constantine,  et  Nonnus  de  Cérésine.  Quoique 
Démétrius  de  Philippi  fût  à  Constantiuople 
lors  de  la  convocation  de  cette  assemblée ,  il 
ne  put  en  être,  parce  qu'il  tomba  malade. 
Avant  qu'elle  se  tint,  Justinien  iit  venir  les 
évèijues,  et  les  exhorta  à  conférer  ensemble 
avec  beaucoup  de  douceur  et  de  patience, 
ajoutant  que  la  dispute  ne  se  tiendrait  pas 
en  sa  présence  ,  mais  en  celle  du  patrice 
Stratégius,  qu'il  avait  nommé  pour  y  assister 
de  sa  part. 

2.  L'assemblée  se  fit  dans  une  salle  du  pa- 
lais.'Il  ne  s'y  trouva  que  ciuq  évèques  catho- 
liques ,  au  lieu  qu'il  y  en  eut  six  de  la  part 
des  sévériens ,  avec  un  grand  nombre  de 
clercs  et  de  moines:  mais  avec  les  cinq  évè- 
ques catholiques  étaient  Eusèbe  prêtre  et 
trésorier  de  la  grande  église  de  Gonstanti- 
nople ,  Héraclien  et  Laurent,  prêtres  et  syn- 
cellcs  du  patriarche  Epiphauc  ;  Hermésigène, 
Maguus  et  Aquilain,  prêtres,  économes  et 
députés  d'Antioclie  ;  Léonce ,  député  des 
moines  de  Jérusalem.  Tous  s'étant  assis,  le 
patrice  Stratégius,  s'adressant  aux  orientaux, 
c'est-à-dire  aux  sévériens ,  leur  dit  que , 
l'Empereur  les  ayant  assemblés  pour  rece- 
voir l'éclaircissement  de  leurs  doutes  de  la 
bouche  des  évêcpies  catholiques,  ils  eussent 
à  les  proposer  sans  esprit  de  contention  , 
comme  il  convenait  à  des  personnes  de  leur 
rang.  Les  sévériens  di/enl,  qu'ils   avaient 


CUNFEltENCE. 


84;j 


présenté  à  l'Empereur  un  écrit  contenant 

l'exposition  de  leur  foi,  où  ils  avaient  mis 
tout  ce  qui  les  scandalisait.  «  Xous  avons  vu 
cet  écrit,  répoudil,  au  nom  des  catholiques, 
Ilypace,  évéque  d'l'^plii''se,  où  vous  vous  plai- 
gnez du  concile  de  Chalcédoine,  et  de  ce  qui 
y  a  été  décidé  contre  l'hérésie  d'Eulychcs. 
Dites-nous  donc  ce  que  vous  pensez  d'Kuty- 
chès.  1)  Les  Sévériens  répondirent  qu'ils  le 
tenaient  pour  hérétique,  ou  plutôt  pour  chef 
d'hérésie.  Ilypace  ajouta  :  «  Et  que  pensez- 
vous  de  Itioscore,  et  du  second  concile  d'IO- 
phèse  qu'il  a  assemblé?  »  Les  sévériens  di- 
rent qu'ils  les  regardaient  comme  ortho- 
doxes. Ilypace  reprit  :  u  Si  vous  coniîamnez 
Eutycliès  comme  hérétique,  comment  a[iiie- 
lez-vous  oi-thodoxes  Dioscore  et  les  évoques 
du  second  concile  d'Eplièse,  qui  ont  justifies 
Eulychès,  qui,  de  votre  aveu,  était  héréti- 
que ?  ))  Les  orientaux  répliquèrent  qu'ils 
avaient  peut-être  justifié  Eutycliès  comme 
ayant  fait  pénitence.  «  Si  Eutychès  s'est  re- 
penti, insista  Hypace,  pourquoi  l'anathéma- 
tisez-vous  ?  »  Les  sévériens  ne  sachant  que 
répoudre ,  Hypace  ajouta  :  «  Eutychès  ne 
s'est  point  repenti;  et  même  avant  que  l'on 
eût  achevé  de  lire  les  Actes  faits  contre  lui  à 
Constanlinople  ,  les  évoques  du  second  con- 
cile d'ICpbcse  l'avaient  déjà  justifié,  et  avaient 
au  contraire  condamné  Flavien  et  Eusèbe 
comme  hérétiques.  Si  Eutychès  se  fût  re- 
penti, on  n'aurait  pas  dû  condamner  Fla- 
vien et  Eusèbe,  puisqu'on  ne  pouvait  justi- 
fier Eutychès ,  qu'en  supposant  qu'il  élait 
revenu  à  la  doctrine  de  ces  deux  évèques, 
et  qu'il  confessait  avec  eux  les  deux  natures 
en  Jésus-Christ,  en  le  reconnaissant  consub- 
staatiel  au  Père  selon  la  divinité ,  et  cou- 
substantiel  à  sa  mère  selon  l'humanité.  Fla- 
vien et  Eusèbe  exigèrent  en  ell'et  qu'Euty- 
cliès  fit  cette  confession;  mais  Dioscore,  au 
lieu  de  l'exiger  aussi,  approuva  qu 'Eutychès 
dit  :  Je  reconnais  que  Jëstis-Christ  rtait  de  deux 
natures  avant  l'union;  mais  après  l'union,  Je 
n'admets  <ju'une  seule  nature  :  et  il  obligea 
tous  ceux  qui  étaient  de  son  parti  de  crier  : 
«  Eulychès  est  orthodoxe  :  Flavien  et  Eusèbe 
sont  d'impies  hérétiques,  n  Les  sévériens  con- 
vinrent que  Dioscore  devait  exiger  qu'Euty- 
chès  reconnût  Jésus- Christ  consubstantiel 
à  sa  mère,  et  ils  déclarèrent  que,  sans  cela, 
Dioscore  en  le  justifiant  serait  tombé  dans  l'a- 
veuglement. Alors  Hypace,  reprenant  ce  qu'il 
avait  dit,  fit  avouer  aux  sévériens  qu'Eu tychès 
élait  hérétique;  qu'Eusèbe  avait  eu  raison  de 


844 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


l'accuser,  et  Flavien  de  le  condamner;  que 
Dioscore  et  ses  t-vêques  ayant  ou  tort  de  le  re- 
cevoir, il  avait  clé  nécessaire  d'assembler  un 
autre  concile  universel  à  Clialccdoine  pour 
corriger  les  injustices  du  second  d'Êplièse. 
Mais  les  sévériens,  en  reconnaissant  la  né- 
cessité d'un  autre  concile,  formèrent  des 
dillicultës  sur  la  validité  de  celui  de  Chalcé- 
doine  ,  disant  qu'il  ne  paraissait  pas  que  la 
fin  en  eût  été  aussi  juste  que  la  convocation  ; 
c'est  ce  qui  fut  examiné  dans  la  conférence 
du  second  jour. 
rt/'if°cooT  ^-  ^^^  sévériens  objectèrent  que  le  concile 
!""'  '''■  ^^  Chalcédoine  avait  innové  dans  la  foi ,  en 
décidant  (fiie  les  deux  natures  étaient  dis- 
tinctes en  Jésus-Chiist  après  l'union,  et  sou- 
tinrent qu'il  fallait  dire  avec  saint  Cj-rille 
d'Alexandrie  el  les  cvêques  ses  prédéces- 
seurs, que  de  deux  natures  il  s'était  fait  après 
l'union  une  nature  du  Verbe  de  Dieu  incar- 
née. Hypace  leurdemanda  s'ils  condamnaient 
la  doctrine  des  deux  natures,  ou  seulement  à 
cause  qu'elle  leur  paraissait  nouvelle,  ou 
bien  parce  qu'ils  la  croyaient  fausse.  Ils  ré- 
pondirent qu'ils  la  condamnaient  et  comme 
nouvelle  et  comme  fausse,  puisque  saint 
Cyrille  ,  saint  Afhanase  ,  les  papes  Félix  et 
Jules  ,  saint  Grégoire  Tbaumaturge  et  saint 
Denys  l'Aréopagite,  ayant  déclaré  qu'il  n'y 
a  qu'une  nature  du  Dieu  Verbe  après  l'union, 
on  ne  doit  point,  au  mépris  de  tous  ces  Pè- 
res ,  dirent  qu'il  y  a  deux  natures  après  l'u- 
niou.  C'est  la  première  fois  '  qu'il  est  fait 
mention  des  écrits  que  nous  avons  sous  le 
nom  de  saint  Denys  l'Aréopagite,  ainsi  qu'on 
l'a  déjà  remarqué  ailleurs.  Hypace  répondit 
que  toutes  ces  autorités  étaient  fausses;  et 
la  preuve  qu'il  en  donna ,  c'est  que  saint 
Cyrille  n'en  avait  allégué  aucune,  tant  dans 
ses  letlies  contre  Nestorius,  que  dans  ce 
qu'il  produisit  au  concile  d'Eplièse  pour 
combatti'e  les  blasphèmes  de  cet  bérésiarque. 
Cet  évoque  y  produisit  douze  passages  des 
Pères,  mais  on  ne  lit  dans  aucun  qu'il  n'y 
ait  qu'iuie  nature  en  Jésus-Christ  après  l'in- 
carnation. C'était  toutefois  le  lieu  d'en  citer 
quelqu'un,  s'il  en  avait  connu.  Il  n'en  a  point 
cité  non  plus  dans  l'explication  de  ses  douze 
anatliématismes  contre  Tliéodoret  et  André  , 
ni  dans  aucun  autre  de  ses  écrits.  Les 
sévériens  dirent  :  «  Nous  accusez-vous  donc 
d'avoir  falsifié  les  ouvrages  que  nous  vous 
opposons?   i>   —   ((  Non,  répondit  Hypace, 


nous  ne  vous  en  soupçonnons  pas,  mais 
nous  en  accusons  les  apollinarisles ,  parce 
qi:e  nous  savons  que  ceux  qui  pensent  com- 
me Nestorius,  ont  falsifié  l'épilre  de  saint 
Athanase  ù  Epictète,  ainsi  que  nous  l'ap- 
prenons de  saint  Cyrille  même  dans  sa 
lettre  à  Jean,  évéqiie  d'.\ntioche.  »  Les 
sévériens  répliquèrent  que  saint  Cyrille  s'é- 
tait servi  de  ces  autorités  dans  ses  livres 
contre  Diodore  de  Tarse  et  Théodore  de 
Mopsueste.  Hypace  répondit  que  ces  livres 
avaient  aussi  été  falsifiés.  Et  sur  ce  que 
les  sévériens  s'oifraient  de  produire  d'an- 
ciens manuscrits ,  tirés  des  archives  d'A- 
lexandrie, qui  portaient  ce  qu'ils  avaient 
avancé,  Hypace  répondit  que,  si  l'on  en  avait 
pu  montrer  du  temps  de  saint  Protère  et  de 
Timothée  Solofaciole,  tous  deux  c'vôques  de 
cette  ville,  ils  seraient  indubitables;  mais 
que,  depuis  leur  épiscopat,  l'église  d'.4lexan- 
drie  ayant  été  occupée  par  des  hérétiques 
qui  combattaient  la  foi  des  deux  natures,  on 
ne  devait  pas  trouver  mauvais  qu'il  refu- 
sât de  recevoir  en  témoignage  des  monu- 
ments qui  sortaient  des  mains  de  leurs  en- 
nemis. Il  ajouta  qu'il  avait  montré  claire- 
ment que  la  lettie  qu'ils  citaient  sous  le  nom 
du  pape  Jidcs,  était  celle  qu',\pollinaire  avait 
écrite  à  Denys;  que  Sévère  et  ceux  de  son 
parti  ne  voudraient  pas  signer  la  confession 
de  foi  qu'ils  disaient  être  de  saint  Grégoire 
ThauuKilurge,  puisqu'il  y  est  dit  que  la  chair 
de  Jésus-Christ  est  demeurée  incorruptible; 
et  qu'à  l'égard  des  passages  qu'ils  citaient 
sous  le  nom  de  saint  Denys  l'Aréopagite,  ils 
ne  pouvaient  montrer  qu'ils  fussent  vérita- 
bles ,  parce  que,  s'ils  étaient  de  ce  saint 
évêque,  saint  Cyrille  n'aurait  pu  les  ignorer, 
et  saint  Athanase  les  aurait  produits  avant 
tout  autre  contre  Aritis  dans  le  concile  de 
Nicée. 

4.  n  Mais  pourquoi,  insistèrent  les  sévé-  slhij»  i. 
riens,  le  concde  de  Chalcédoine  n  a-t-il  pas  -"<"'■  j»^'. 
reçu  la  lettre  de  saint  Cyrille  qui  contient  les 
douze  anaihématismes,  où  il  nie  qu'il  y  ait 
deux  subsistances  en  Jésus-Christ  ?  «  Hypace 
répondit  que  le  concile  n'avait  point  rejeté 
cette  lettre,  mais  qu'il  avait  préféré  l'a'.ilre 
qui  y  fut  citée,  pour  marquer  la  conformité 
de  sa  doctrine  avec  le  Symbole  de  Nicée,  et 
celle  que  le  môme  Père  écrivit  aux  Orien- 
taux, comme  étant  l'une  et  l'autre  plus 
claires  que  la  première.  «  Saint  Cyrille,  ajou- 


'  Voyez  siircpll''  nsBCiliou  d»>  D.  Oeillier,  le  fiip-       plémont  du  Iouip  .\,  pag.  7.S1   et  eiiiv.  (L'édittvr.) 


IVl'  STÈCLE. 


nUAPITRE  LXXXVl.  —  CONCILES  DE  HOME. 


84n 


» 


lèreiit  les  sévi''i'iens ,  a  pris  d.'iiis  sa  lellre  îles 
ilonze  analhi'iuatisincs  le  terme  do  substance 
pour  celui  de  nnlurc,  en  disant  (knx  sub- 
stances au  lieu  de  deux  natures,  llypuco  répon- 
dit que  les  anciens  Pères,  et  surtout  les  La- 
tins',  avaient  confondu  ces  deux  termes; 
mais  que  les  Orientaux  les  avaient  distingués 
et  donné  le  nom  de  subsistance  ;\  celui  de  per- 
sonne; qu'il  était  arrive  de  là  que  les  Oc- 
cidentaux n'admettant  dans  la  sainte  Trinité 
qii'une  subsistance,  comme  ils  n'y  admet- 
taient qu'une  nature  et  une  substance,  les 
Orientaux  les  ont  accusés  de  sahellianismc  ; 
et  que  les  Occidentaux  ont  accuse  les  Orien- 
taux d'ariauisme,  parce  qu'ils  admettaient 
dans  la  Trinité  trois  subsistances  :  ce  qui 
avait  causé  entre  eux  une  division  qui  ne  fut 
éteinte  que  par  le  ministère  de  saint  Atlia- 
nase,  qui,  instruit  de  la  langue  latine  comme 
de  la  grecque,  réunit  les  Églises,  où  depuis 
ce  temps-là ,  chez  les  Grecs  comme  cliez  les 
Latins,  onne  reconnaît  dans  la  Tiinité  qu'une 
nature  ou  substance,  et  trois  personnes  ou 
trois  subsistances;  que  saint  Cyrille  s'est 
conformé  à  cet  usage,  et  qu'on  ne  peut  mon- 
trer que  dans  ses  cj:rits  il  se  soit  servi  indif- 
féremment du  terme  de  nature  pour  celui  de 
subsistance,  ou  du  terme  de  subsistance  et  de 
personne  pour  celui  de  nature.  Les  sévériens 
dirent  que  dans  les  deux  lettres  de  saint 
Cyrille,  l'une  à  Nestorius.et  l'autre  aux  Orien- 
taux, appi'ouvécs  nommément  dans  le  con- 
cile de  Glialcédoine,  on  lisait  que  Jésus-Christ 
est  fait  de  deux  natures;  «  ce  qui  signine, 
ajoutaient-ils,  selon  le  langage  de  ce  Père, 
que  Jésus-Christ  est  une  nature  laite  de 
deux.  I)  Hypace  répondit  que  cette  expres- 


sion de  deux  natures  signifiait  si  peu  ce  qu'ils 
prétendaient,  que  |)lusieurs  autres  anciens 
s'en  étaient  servis  dans  le  même  sens  que 
saint  Cyrille,  en  particulier  le  bienheureux 
Basile  de  Séleucie  et  saint  Flavicn,  à  qui  tou- 
tefois personne  n'en  avait  fait  de  reproches. 
Pour  le  prouver,  Hypace  rapporta  la  lettre 
de  saint  Flavicn  à  l'empereur  Tluiodose.  Les 
sévériens  continiuml  à  rapporter  divers  té- 
moignages des  lettres  de  saint  Cyrille,  où  ce 
Père  dit  :  Une  nature  incarnée,  comme  s'il  ne 
reconnaissait  pas  deux  natures  subsistantes 
après  l'union,  Hypace  répondit  :  <i  Nous  re- 
cevons' ce  qui  s'accorde  avec  ses  lettres  sj- 
nodiqucs  qui  ont  été  approuvées  dans  les 
conciles,  c'est-à-dire  la  lettre  à  Nestorius  et 
celle  auxOrientaux  ;  ce  qui  ne  s'y  accorde  pas, 
nous  ne  le  condamnons,  ni  nous  ne  le  rece- 
vons comme  une  loi  ecclésiastique.  Leslettres 
écrites  en  secret  à  un  ou  deux  amis  ont  pu 
facilement  être  corrompues.  »  Il  montre  par 
l'exemple  des  apôtres,  qu'il  y  a  des  occasions 
où  l'on  peut  se  dispenser  de  certains  usages, 
lorsqu'ils  n'ont  point  (■lé  fixés  par  une  déci- 
sion commune.  Saint  Paul  circoncit  Timo- 
théc,  lui  qui  avait  écrit  aux  Calâtes  que,  s'ils 
se  faisaient  circoncire  ,  Jésus-Cbrist  ne  leur 
servirait  de  rien.  Saint  Pierre  mangeait  quel- 
quefois avec  les  gentils  ;  en  d'autres  occasions 
il  refusait  de  manger  avec  eux.  Mais  depuis 
la  décision  qu'ils  firent  en  commun  avec  les 
autres  apôtres  dans  !e  concile  de  Jérusalem, 
celte  décision  a  dû  servir  de  règle,  et  il  n'a 
plus  été  permis  de  se  modeler  sur  ce  que 
chacun  d'eux  avait  fait  par  raison  d'économie 
ou  de  dispense.  Hypace  ajouta  que  saint  Cy- 
rille établit  clairement  dans  sa  lettre  à  Nes- 


'  Anliqui  Paires  et  maxime  Romani  pro  sub- 
slanlia,  et  natura  subsistentiam  nuncupabant. 
Unde  sicul  unam  naluram.  et  luuiin  substantiam, 
ita  et  unam  stibsistenliam  sanctœ  Trinitatis  esse 
(licebant.Orienlalibus  lern  sanctis  Palribus  pro 
persona  suscipienlibus  subsistentiam,  et  sicut  ires 
personas,ita  ettressubsisteutias  in  sancla  Trini- 
tate  dicentibus,  per  multa  Icinpnra  dissidium  fac- 
tum  est  inlcr  orientales  et  occidentales  sanctas 
Ecclesias;  orientalibus  quidem  occidentales  sa- 
bellianorum  sectam  defendere  suspicantibus,  quia 
unam  dicebant  esse  in  Trinitale  subsistentiam  ; 
occidentalibus  vero  orientales  arianam  sectam 
sequi  dicentibus,  eo  quod  très  subsistentias  in  très 
atlerius  substantiœ  vel  naturœ  personas  profer- 
rent secundum  imitationem  Arii.  (Juam  divisio- 
nem  per  sanctum  Athanasium  Deus  univit.  Utrius- 
que  enim  linguœ  periius  ulrasquc  parles  per  Dei 
graliam  ad  concordiam  revocavit,  et  ab  eo  lent- 
pore  usqve  in  hodiernum  diem,  et  apud  nos  cl 


apud  Romunos,  sicul  una  subslavtia  et  una  na- 
tura in  Trinitale  suscipimur ,  et  sicul  Ires  perso- 
nas in  Sancla  Triniiate  confitemur,  ita  et  1res 
subslanlias  glorificamus.  Toiu.   IV  Concil.,  pag. 

ntis. 

*  Nos  ea  quœ  epistolis  ejus  synodicis  consen- 
tiunt,  suscipimus ;  qucc  autem  non  consentiunt, 
neque  itamnumus,  nequc  velul  legem  ecclcsiasti^ 
cam  sequimnr.  Synodicas  autem  ejus  dico  epis- 
tolas  quœ  a  sanctis  conciliis  et  susceptœ  et  con- 
firmalœ  sunt,  id  est,  tam  eam  quœ  ad  Nestorittm 
quant  eam  quœ  ad  Orientales  scriptœ  sunt.  Ibid., 
jiap.  n*0.  Quates  ergo  ex  liis  pra-firamus  quœ  in 
secrelo  scriptœ  ad  unum  rel  secundum  amicum 
vel  familiarem  sunt,  quœ  et  facillime  potucrunt 
a  quohbel  depravari,  an  istas  quœ  in  ccrla- 
mine  dictœ  sunt,  et  ab  uniiersalibus  conciliis 
tam  laudatœ  qnam  cnnprntntœ  sunt.  Ihid..  pag. 
mi. 


X 


■HAEL'R 


846  HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES 

toiius  l'union  des  natures  sans  confusion  et 
sans  mélanp;e,  el  qn'il  a  fait  la  même  chose 
dyns  sa  lotlie  aux  Orienlaux.  Los  sévéïiens 
s'ctant  plaints  de  ce  que  Ton  accusail  d'alié- 
ralionles  lellres  parliculièresde  sainl  Cyrille 
:■!  Euloge  et  A  Successus,  sans  les  aroir  lues, 
Hypace  consentit  qu'on  en  fit  la  lecture;  et 
lorsqu'on  fut  venu  h  l'endroit  de  la  Icllrc 
.'i  Euloge,  où  il  est  dit  que  l'union  ne  peut 
être  d'une  seule  chose,  mais  de  deux  ou  de 
plusieurs,  il  soutint  que,  quand  même  le 
reste  de  la  lettre  leur  serait  favorable,  cela 
seul  détruirait  leur  prétention,  puisqu'il  n'é- 
tait pas  possible  que  saint  ('yrille  eut  admis 
l'union  dans  Jésus-Chris!,  autrement  qu'en 
reconnaissant  (ju'il  e^t  composé  do  deux  na- 
tures, comme  il  le  reconnaît,  en  ell'et,  lois- 
qu'il  dit  que  les  deux  natures  sont  en  lui 
sans  confu:^ion ,  conservant  chacune  leur 
propriété,  la  nature  humaine  n'ayant  souf- 
fert aucune  diminution  par  son  union  avec 
le  Verbe.  Il  prouva  que  la  foi  de  ce  Père  lou- 
chant les  deux  natures  ne  pouvait  être  sus- 
pecte, puisque  les  deux  natures  sont  claire- 
ment exprimées  dans  les  passages  qu'il  avait 
allégués  de  saint  Ambroise  et  de  saint  Circ- 
goire  de  Xazianze  dans  le  concile  d'Éphcse. 
Suite  de  11  3-  Les  sévériens  se  plaignirent  de  ce  que 
l'^liT'ilSr,  l'on  mettait  les  noms  des  conciles  dans  les 
''^■'"'''  sacrés  diptyques,  disant  que  cela  ne  pouvait 
qu'augmenter  la  division  des  Églises.  La  ré- 
ponse d'Hypace  fut.  qu'avant  de  nommer  les 
conciles  dans  la  célébration  des  mystères, 
c'était  l'usage  général  des  Égl  ises  d'y  nommer 
les  évêques  particuliers  de  chaque  Église; 
(ju'ainsi  il  n'y  avait  aucun  inconvénient  à  y 
nommer,  sous  le  nom  de  concile ,  tous  les 
évoques  qui  s'assemblaient  avec  beaucoup 
lie  peine  et  de  travail  pour  prendre  en  com- 
mun la  défense  de  la  foi  contre  les  héréti- 
ques; qu'en  vain  les  sévériens  objectaient 
que  la  mémoire  que  l'on  faisait  des  conciles 
dans  les  diptyques  causait  du  scandale  ;  il 
n'y  avait  que  les  hérétiques  qui  s'en  scanda- 
lisassent, en  même  temps  qu'ils  ne  craignaient 
point  de  scandaliser  eux-mêmes  les  fulcles 
par  divers  édits,  ou  professions  de  foi  qu'ils 
avaient  extorquées  des  empereurs  Basilisque 
et  Zenon  contre  la  foi  catholique,  et  par  les 
nouveautés  du  Triscgion.  Les  sévériens  for- 
mèrent encore  des  plaintes,  de  ce  que  le 
concile  de  Chalcédoine  avait  reçu  Ibas  et 
Tliéodoretccimme  catholiques,  et  de  ce  qu'on 
récitait  leurs  noms  dans  les  diptyques  parmi 
ceux  des  évéques  orthodoxes.  «  Ils  n'ont  été 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

reçus  dans  le  concile  ,  répondit  Hypace , 
qu'en  anathématisant  Nestorius.  »  Et  sur  ce 
que  les  sévériens  répliquèrent ,  qu'ils  ne 
l'avaient  fait  que  pour  tromper  le  concile, 
Hypace  reprit  :  <i  Quoi  donc  !  parce  qu'Eu- 
sèl.-e  de  Nicomédie,  Théognis  de  Nicée  cl 
quelques  autres  ont  souscrit  de  mauvaise  foi 
au  concile  de  Nicée,  et  soutenu  ensuite  ou- 
vertement Arius,  devons-nous  moins  rece- 
voir le  saint  concile  de  Nicée,  et  ne  pas  le 
nommer  dans  les  diptyques?  k  Dieu  ne  plaise  ! 
Nous  ne  défendons  point  Théodoret  ;  mais 
nous  défendons  le  concile  de  Chalcédoine, 
qui  a  eu  raison  de  le  recevoir,  sachant  certai- 
nement que,  dès  avant  la  réunion  de  ce  con- 
cile, Théodoret  s'était  réconcilii' avec  saint  Cy- 
rille, qu'il  avait  maltraité  dans  sa  réjjlique 
aux  douze  analhématismes  de  cet  évoque.  » 
Hypace  apporta  pour  preuve  de  cette  ré- 
conciliation la  lettre  de  saint  Cyrille  à  Jean 
d'Antiochc  et  auxOricnlaux  pour  la  paix  des 
églises,  et  les  lettres  que  Théodoret  el  saint 
Cyrille  s'écrivirent  muîucllemenl.  A  l'égard 
d'Ibas,  les  sévéï-icns  objectaient  sa  lettre, 
comme  étant  favorable  A  Xestoiius  et  inju- 
rieuse h  saint  Cyrille.  Hypace  répondit  qu'eu- 
corc  que  celte  lettre  eût  été  publiée  du  vivant 
de  saint  Cyrille,  cela  ne  l'avait  point  empê- 
clié  de  travailler  à  la  paix ,  comme  il  le  té- 
moignait dans  sa  lettre  i'i  Valérien  d'Icône; 
que  toutefois  le  concile  de  Chalcédoine  n'avait 
reçu  Ibas  qu'apiès  qu'il  cul  anathématisé 
Nestorius  et  sa  doctrine, «et  qu'il  aura-t  même 
reçu  Nestorius  et  Eutychès,  s'ils  eussent  re- 
noncé à  leurs  erreurs.  Il  ajouta  que  le  con- 
cile de  Chalcédoine  avait  traité  plus  rigou- 
reusement Jhas  et  Théodoret  que  n'avait  fait 
saint  Cyrille  pour  se  réconcilier  avec  eux,  puis- 
que cet  cvcque  s'était  contenté  d'exiger  qu'ils 
consentissent  à  la  condamnation  de  Nesto- 
rius el  i\  l'ordination  de  iMaximicn  de  Con- 
stanliunple,  au  lieu  que  le  concile  les  obligea 
d'analhémaliser  publiquement  .Nestorius.  Les 
sévériens  ayant  paru  satisfaits  de  celle  ré- 
ponse, on  congédia  l'as.^omblée, 

G.  Les  évêques  catholiques,  qui  s'atten- 
daient ;\  une  troisième  conférence,  préparè- 
rent un  grand  nombre  de  passages  pour  ap- 
puyer la  doctrine  des  deux  natures  :  l'Em- 
pereur, voulant  y  assister  avec  le  sénat  et  le 
patriarche  Euphémius,  fit  d'abord  entrer 
l'archevêque  Eiàphauc  avec  les  autres  évo- 
ques qui  avaient  îissisté  aux  deux  |)reniières 
conférences,  el  les  ayant  fait  asseoir,  il  leur 
parla  avec  beaucoup  de  douceur,  el  les  ex- 


Coar^rvnee 
do"  troUièitie 
joar,  p.  \"', 


[vi'  SIÈCLE.]  CHAPITRK  LXXXVI.  - 

lioila  i'i  la  paix,  apri-s  avoir  (ail  la  pri('re  sc- 
ion la  coiitnino.  l'^iisuilc  il  lil  onlrcr  les  sé- 
vérions,  qu'il  lit  nssnoir  sur  un  siège  ;\  l'op- 
posite  (le  teliii  sur  loi|ucl  les  ('vèiincs  cnlljo- 
liquesëtaieiil  assis.  Il  y  en  avait  un  troisième 
pour  les  juges  que  ce  prince  avait  choisis 
dans  cette  allaiic.  Après  ([ue  TRiupcreur  leur 
eut  parlé,  les  scvèricnslui  firent  ciileinlrc!  que 
les  catholiipies  ne  confessaient  pas  que  Dieu 
eût  soulVert  dans  sa  cliair,  ni  que  celui  quia 
soullert  fût  un  de  la  Trinité,  ui  que  les  mira- 
cles et  les  souflVanccs  fassent  de  la  ra(jnie 
personne.  Sur  cela  l'Kmpereur  dit  aux  évè- 
ques  catlioliques  :  «  Ne  confessez-vous  pas 
que  les  soull'rances  et  les  miracles  sont  de  la 
inème  personne  de  Xotre -Seigneur  Jusus- 
Christ;  que  c'est  Dieu  qui  a  soulTcrt  dans  la 
chair,  et  qu'il  est  un  delà  Trinité?  »  Hypace 
répondit  :  «  Seigneur,  nous  confessons,  ou 
plutôt  l'Ei-lise  catholique  apostolique  '  votre 
mère  confesse  que  les  suulfrances  et  les  mi- 
racles appartiennent  à  la  même  personne  de 
Jésus-Christ,  mais  non  .'i  la  même  nature. 
Selon  la  docirine  des  saints  Pères,  la  chair 
est  passible,  la  divinité  impassible.  »  Il  cita 
la  lettre  de  saint  Grégoire  de  Nazianzc  à  Clé- 
donius,  et  les  décrets  des  conciles  d'Éphèsc 
et  de  Clialcédoine  contre  Nestorius  et  Euty- 
chès,  et  ajouta  :  «  Nous  disons  que  le  Sei- 
gneur a  soullert  dans  la  chair,  à  cause  de 
ceux  qui  confondent  les  natures  ou  qui  les 
divisent,  afln  qu'en  disant  qu'il  est  passible 
selon  la  chair,  nous  déclarions  que  sa  di- 
vinité est  impassible.  Nous  disons  encore 
qu'il  est  un  de  la  Trinité  selon  la  nature  di- 
vine, et  un  d'entre  nous  selon  la  chair;  qu'il 
est  consubstantiel  au  Père  selon  la  divinité, 
et  à  nous  selon  l'humanilé;  et  que,  comme 
il  est  parfait  dans  sa  natuie  divine,  il  est 
aussi  parfait  dans  la  nature  humaine.»  Après 
la  conférence  du  troisième  jour,  l'Empereur 
flt  venir  une  quatrième  fois  les  évêques  dans 
son  palais.  Il  leur  parla  à  tous,  et  leur  té- 
moigna avec  quelle  ardeur  il  désiroit  leur 
réunion,  qu'il  avait  demandée  à  Dieu,  en  le 
priant    dans  l'oratoire   de  saint  Michel  ar- 


f'.ONCILE  n'OULHANS. 


847 


change.  Mais  de  tous  les  évêques  sévériens, 
il  n'y  eut  quePhiloxène  de  Dulichiiim  qui  se 
laissa  pei'suader.  Il  fut  suivi  de  [tiiisicurs  des 
clercs  et  des  moin(!s  (pii  les  avaient  accom- 
pagnés, et  qui  s'en  retournèrent  avec  joie 
à  leurs  églises  et  h  leurs  monastères,  après 
avoir  été  admis  à  la  communion  de  l'iOglisc 
catholique.  Quelques-uns  de  ces  clercs  et  de 
ces  moines,  parlant  en  Syriaque,  disaient  aux 
évêques  catholiques  :  «  Les  sévériens  nous 
ont  séduits,  et  nous  en  avons  séduit  plusieurs 
aulrcs  :  car  il  nous  disaient  fpie  le  Saint-Es- 
prit s'élait  retiré  des  l'glises  et  du  haplème 
des  catholiques ,  comme  aussi  de  leur  com- 
munion; et  nous  ajoutions  foi  à  leurs  paro- 
les, croyant  qu'elles  contenaient  la  vérité. 
Mais,  gloire  au  Seigneur,  qui  nous  a  retirés 
de  leurs  erreurs,  et  réunis  à  ses  saintes  égli- 
ses catholiques  et  apostoliques;  et  nous  es- 
pérons par  sa  grâce  ramener  'i  l'unité  et  à 
la  communion  de  ses  saintes  églises  la  plu- 
part de  ceux  que  nous  avons  trompés.  »  Telle 
fut  la  fin  de  la  conférence  de  Constanlino- 
ple,  dont  nous  n'avons  point  les  Actes,  mais 
seulement  une  relation  abrégée  et  fidèle 
dans  une  lettre  d'Innocent,  évêque  de  Ma- 
ronie,  à  un  prêtre  nommé  Thomas. 

ARTICLE  IX. 

DU  SECOND  CONCILE  D'ORLÉANS  [333]. 

l.  Le  second  concile  d'Orléans  fut  assem-  concii. 
blé  par  ordre  des  trois  rois  de  France,  Thier-  633,Va^°'n", 
ry,  Childebert  et  Clolaire,  fils  de  Clovis,  la 
vingt-deuxième  année  de  leur  règne,  la  pre- 
mière du  pontificat  de  Jean  II,  le  S)  des  ca- 
lendes de  juillet,  c'est-à-dire  le  23  juin  333. 
Il  s'y  trouva  vingt-six  évêques ,  et  cinq  prê- 
tres pour  autant  d'évêques  absents.  Honorât, 
archevêque  de  Bourges,  y  présida.  Léonce, 
quoique  évoque  d'Orléans,  ne  souscrivit  que 
le  second.  On  traita  dans  cette  assemblée 
de  divers  points  de  discipline,  conformément 
aux  anciens  canons  ;  et  parce  qu'il  se  trou- 
vait de  l'ambiguilé  dans  certaines  observan- 
ces, les  évêques  firent  vingt-et-uu  canons 


'  .Sus,  domine,  magis  autem  maler  vestra  ca- 
tholica  et  apostolica  sancla  Dei  Ecclesia  ejusdem 
personœ  magiii  Dei  et  Salvatoris  Jesu  Christi 
prœdicat  etpassioiies  et  miracula,  n-on  tainen  ejiis- 
deiii  naturœ  :  sed,  sicut  docuerunl  sancii  Paires, 

passibilem  carnem,  intpassibilem  divinitalein 

Sed  et  Dominum  carne  passain  ila  riirsus  con/ite- 
mur,  propter  eos  qui  cnnfundnnt  vel  dividunt,  ut 
passibilem  eum  dicentes  carne,  impassibilem  con- 


fiteamitr  divi)Utateni  :  siniililer  et  itnuni  esse  ex 
Trinilate  secundum  divinam  naturaiit  tam  cre- 
dentes  qiiam  conftlcntes,  secundum  carnem  vero 
unum  ex  nobis  placuisse  ei  credimus  fieri  ;  et  si- 
cut consubslanlialem  Patrisecundum  divinitatem., 
ita  nobis  consubslanlialem  secundum  humanila- 
lem  ;  et  sicut  perfectum  in  divinilale,  ila  perfec- 
tum  et  in  liumanitale.  Tom.  IV  Concil. ,  pag. 
1778, 


848 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


r^  eone  le.  T. 
IV  Coorll.,;. 


pour  la  roforiue  de  plusieurs  nouveaux  alius. 
-2.  »  L'évèque  invité  par  son  métropolitain 
à  l'ordination  d'un  ëvéque  on  ;\  un  concile, 
ne  pourra  se  dispenser  d'y  venir,  s'il  n'en  a 
Cad.  lois,  unc  cxcusc  légitime.  —  Chaque  année  les 
métropolitains  appelleront  leurs  comprovin- 
'■  ciaux  ou  sutlVaganls  au  concile.  — Les  évè- 

ques  ne  prendront  rien  ',  pour  quelque  cause 
que  ce  soit,  fût  ce  pour  les  ordinations  des 
évêques  ou  des  autres  clercs,  parce  qu'il 
n'est  pas  permis  à  un  évêque  de  se  laisser 
corrompre  par  le  désir  de  l'argent.  —  S'il 


séculiers  '  sans  la  permission  de  l'évèque  ; 
s'il  fait  le  contraire  il  sera  privé  de  la  com- 
munion de  son  office.  —  Celui  qui  aura 
éj)onsé  la  femme  de  son  père  sera  frappé 
d'auatl.ème.  —  Les  mariages  contractés  lé- 
gitimement *  ne  pourront  se  dissoudre  par 
la  volonté  des  parties,  quelque  inlirmilé  qui 
leur  arrive  :  si  elles  le  font,  elles  seront  pri- 
vées de  la  communion.  —  Défense  d'accom- 
plir des  vœux  que  l'on  aurait  faits  en  chan- 
tant, en  buvant  ou  en  folâtrant,  parce  que  de 
tels  vœux  irritent  Dieu,  plutôt  qu'ils  ne  l'a- 


arrive  que  (pielqu'im  '  se  soit  fait  ordonner    "Tiaiscnt.  — Il  est  aussi  dcTendu  aux  abbés, 


pour  de  l'argent,  il  sera  chassé,  le  don  de 
Dieu  ne.  devant  pas  s'acheter  à  prix  d'ar- 
gent. —  Lorsqu'urï*  évêque  sera  invité  à  la 
sf'pullurc  d'un  de  ses  confre'-res ,  il  ne  le  re- 
fusera pas  sous  un  faux  prétexte  ;  et  l'évè- 
que qui  sera  venu  pour  cette  fonction,  ne 
prendra  que  ce  qui  lui  sera  nécessaire  pour 
sa  dépense.  —  11  ira  avec  les  prêtres  dans  la 
maison  épiscopale ,  où  il  fera  faire  en  leur 
présence  un  inventaire  de  ce  qui  s'y  trouvera, 
laissant  toutes  cLoses  en  garde  à  des  per- 
sonnnes  de  probité,  afin  que  ce  qui  appar- 
tient à  l'Eglise  ne  périsse  point.  —  On  avait 
négligé  les  anciens  canons  touchant  l'ordi- 
nation des  métropolitains  :  c'est  pourquoi  il 
est  ordonné  que  le  métropolitain  élu  par  les 
évêques  de  la  province,  par  le  clergé  et  par 
le  peuple  de  la  ville,  rccevi'a  l'ordination  de 
la  main  des  évêques  de  la  province,  afin  que 
personne  ne  soit  promu  à  ce  grade,  que  ce- 
lui qui  est  capable  de  uiaiutenir  la  discipline 
de  l'Eglise,  et  de  la  faire  lleurir  de  plus  eu 
plus.  —  Lorsqu'un  diacre  se  sera  marié  étant 
en  captivité ,  il  ne  pourra  plus  à  son  retour 
servir  dans  les  fonctions  de  son  ministère; 
il  lui  sutlira  d'être  reçu  à  la  communion,  afin 
qu'il  satisfasse  pour  sa  faute  par  cette  pri- 
vation. —  Aucun  prêtre  n'habitera  avec  des 


aux  reclus  et  aux  prêtres  de  donner  des 
lettres  pacifiques.  —  S'il  arrive  que  les  clercs 
négligent  de  remplir  leurs  fonctions  on  de 
venir  à  leur  tour  servir  dans  l'église,  ils  se- 
ront privés  de  la  dignité  do  leur  rang.  —  On 
recevra  les  oblations  '  pour  ceux  qui  ont  été 
tués  en  commettant  quelques  crimes,  pourvu 
qu'ils  ne  se  soient  pas  tués  de  leurs  propres 
mains.  —  L'on  n'ordonnera  aucun  pi'ôtre,  ni 
aucun  diacie,  qui  ne  soit  lettré,  et  qui  ne 
sache  la  forme  du  baptême.  —  Les  femmes 
qui  auront  reçu,  contre  la  défense  des  ca- 
nons, la  bénédiction  de  diaconesses,  seront 
privées  de  la  communion,  si  elles  se  sont 
mariées  après  avoir  reçu  cette  bénédiction  : 
toutefois,  si,  étant  averties  par  l'évèque,  elles 
cessent  d'habiter  avec  leurs  maris,  elles 
pourront  être  reçues  à  la  communion  après 
avoir  fait  pénitence.  —  Pour  éviter  que  cet 
abus  n'arrive  dans  la  suite,  le  concile  défend 
absolument  '  de  donner  à  des  femmes  la  bé- 
nédiction de  diaconesses,  ;'i  cause  de  la  fra- 
gilité de  leur  sexe.  — Il  défend  aussi  les  ma- 
riages des  chrétiens  avec  les  juifs,  et  ordonne 
à  ceux  ou  ;\  celles  qui  en  auraient  contracté 
de  se  séjjarer,  sous  peine  de  privation  de  la 
communion.  Il  excommunie  les  catholi(iues  ' 
qui  relnnniont  à  l'idolâtrie  ou  qui  mangent 


'  Ae  qu's  episcopu.t  de  quibuslibel  cauMs,  vel 
tpiscoporum  ordinalionibus,  celerortnnqtic  cleri- 
corum,  aliquid  prœsuiual  accipire:  (juia sarerdn- 
tem  nefas  est  cupidilaiis  venulilate  cnrrumpi.  Cnn. 
a,  lom.  IV  Concii,  pOij;.  1780. 

'  Si  quis  sacerdoliitm  per  pecuniœ  nwuliiiutii 
execrabiU  ambilionc  qu(Fsierit,  abjiciatur  ul  re- 
probus  :  quia  apost<ilica  seittentia  donum  Dciessc 
prœcipit  peciinia;  Irutina  viiniiiir  comparunduin. 
Cnii.  4,  iliid. 

•■>  Kullus  presbyterorum  sine  permiisione  epis- 
copi  lui  cum  sivcularibus  Itabitarc  prœsumal. 
(juod  si  fcccrit,  ab  offlcii  comniunione  pcllittur. 
Can.  ïl,  pag.  1781. 

»  CoiUracta  matrimonia,  accedente  in/irmitate, 


nulla  voluiitalis  contrarielatc  solvaniur ;  quod  si 
qui  ex  coujugibus  feeerint,  iioverint  ic  commu- 
nione  prirnndos.  Can.  11,  ibid. 

»  Obidiiones  defunclorum,  quiin  aliquo  eriminf 
fueiiiit  inlereinpti,  recipi  dcbere  censeiuus,  si  ta- 
}iicn  non  ipsi  sibi  movlem  probcntur  propriii  ma- 
iiibus  inlutisse.  Cnn.  l."i,  pixjf.  1782. 

•  l'iacuil  iliam,  ut  nulli  po.tlmodum  fœmina 
dincnnalis  benediclio  pro  condilionis  hujus  fragi- 
tilale  creddtur.  Cnn.  17,  ibid. 

'  Calholici  qui  ud  idolorum  cullutu,  non  cut- 
Indita  nd  inlegruiii  accipli  ntaliti,  rcverluntur, 
rel  qui  cibia  iilolornm  cullilius  innnolatis  ijusiu 
ilticitœ  pnrsuutpUonif  uluntur,  nb  tVc/f.«i>  cœ- 
tibus  arceanlur;  »iiiiililer  et  Iti  qui  beitiarum 


CnAPlTRE  LXXXVi.  —  CONCILES  DE  CLEHMUNT. 


CanoDS  do 

es  CODCiiO. 


Cao.  1. 


[VI'  SliCLE.] 

ili's  viandes  immolées,  miiinc  ceux  qui  man- 
dent (les  aiiiiiKiux  liit's  par  les  Ijt^tes,  ctouf- 
los  ou  uioils  de  iii.ilailie.  —  H  exclut  eiiliè- 
lueiil  de  la  communion  les  abbés  qui  mépii- 
scnt  les  ordres  des  évùtiues,  à  moius  (]u'ils 
n'ellaceiil  lem-  faute  par  des  actes  d'humi- 
lité. » 


849 


ARTICLE  X. 

DES  CONCILES  DE  CLrilMONT  EN  AUVERGNE 
ET  DE  CAUTHAGE  [335]. 


Concile  de 
Clermrnl  i-n 
Mi.  Tom.  IV 
Coocil.f  i>ag. 
IStiS. 


[3331 


1.  Le  8  novembre,  après  le  consulat  de 
Paulin-le-Jeuue,  c'est-;\-dire  l'an  533,  qui  était 
le  premier  du  pontificat  d'Agapet ,  le  viugt- 
quatiiéme  du  royue  de  Cliildebcrt,  et  le  se- 
cond de  Tbéodebert;  Honorât,  arcbevèque 
de  Bourges,  etplusieurs  évèques  desGaules, 
au  nombre  de  quinze  en  tout,  s'assemblèrent 
dans  la  ville  de  Clcrmout  en  Auvergne,  avec 
le  consentement  de  Tbéodebert,  à  qui  cette 
ville  obéissait.  Honorât  de  Bourges  présida 
à  ce  concile  ,  comme  il  avait  fait  au  second 
d'Orléans,  et  saint  Gall  de  Clcrmout  sous- 
crivit après  lui  comme  évéque  du  lieu  ,  de 
même  que  Léonce  ,  évêque  d'Orléans ,  avait 
souscrit  le  second  au  concile  assemblé  en 
cette  ville.  Dans  les  autres  souscripiious,  on 
garda  dans  ces  deux  assemblées  le  rang  de 
l'ordination,  sans  avoir  égard  à  la  dignité 
des  sièges;  en  sorte  qu'il  y  eut  des  arclie- 
vèques  qui  souscrivirent  après  des  évèques. 

2.  Les  évèques  du  concile  de  Clermont 
commencèrent  leur  assemblée  par  prier 
Dieu,  les  genoux  en  terre,  pour  la  prospé- 
périté  du  règne  de  Tbéodebert ,  et  j)Our  le 
salut  des  peuples;  ensuite,  ayant  examiu('  les 
anciens  canons,  ils  remarquèrent,  qu'encore 
qu'ils  n'eussent  presque  rieu  omis  pour  le 
bon  règlement  delà  discipline  ecclésiastique, 
il  était  néanmoins  nécessaire  d'y  ajouter 
quelque  cbose,  et  de  renouveler  quelques- 
uns  des  anciens  décrets.  Ils  ordonnèrent 
donc  que,  toutes  les  fois  que  l'on  assemble- 
rait un  concile  ,  on  commencerait  toujours 
par  ce  qui  regarde  les  mœurs  et  la  discipline, 
avant  de  proposer  aucune  autre  aflaire  ;  — 


que,  pour  prévenir  l'abus  qui  commençai!  à 

s'introduire',  d'obtenir  les  évècliés  ))ar  la 
faveur  des  rois,  celui  (pii  désirerait  l'épisco- 
l)al  serait  ordonné  d'après  l'élection  des 
clercs  et  des  citoyens  et  le  consentement  du 
uu'îtropolilaiu,  sans  employer  la  projection 
.  des  personnes  puissantes,  sans  user  d'arti- 
fices ,  ni  obliger  personne ,  soit  par  crainte, 
soit  par  présents,  à  écrire  un  décret  d'élec- 
tion ;  qu'autrement,  l'aspirant  sera  privé  do 
la  coujmuuion  de  l'église  dont  il  aura  voulu 
être  évéque,  quoiqu'il  en  fût  indigne.  —  11 
fut  défendu  de  couvrir  les  corps  des  morts 
de  pâlies  ou  d'autres  linges  à  l'usage  de 
l'auiel;  —  et  aux  clercs  de  cherclier  leur 
appui  contre  leurs  évèques  dans  les  puissan- 
ces séculières.  —  On  excommunia  ceux  qui, 
poussés  par  l'avarice ,  demanderaient  aux 
rois  les  biens  d'une  église,  au  préjudice  des 
pauvres,  et  on  déclara  nul  le  don  qui  leur  en 
serait  fait.  —  On  renouvela  la  défense  déjà 
faite  dans  le  second  concile  d'Orléans  de 
contracter  des  mariages  avec  les  juifs  ,  et 
cela,  sous  peine  d'être  privé  de  la  société  et 
de  la  table  des  chrétiens  et  de  la  commu- 
nion de  l'Eglise.  —  On  défendit  de  couvrir 
le  corps  d'un  prêtre-  que  l'on  porte  en  terre 
du  voile  qui  couvre  le  corps  de  Jésus-Christ, 
de  peur  qu'eu  voulant  honorer  les  corps  des 
défunts,  on  ne  souille  les  autels;  —  de  prê- 
ter les  ornements  de  l'égbse  pour  servir  à 
des  noces;  —  de  faire  les  juifs  juges  des 
chrétiens;  — et  aux  évèques  d'envahir  les 
paroisses  de  leurs  confrères,  —  ou  de  rece- 
voir et  d'ordonner  un  clerc  d'un  autre  dio- 
cèse ,  sans  la  permission  de  son  évêque.  — 
On  défendit  de  nouveau ,  sous  peine  d'ex- 
communication, d'épouser  la  veuve  de  son 
frère,  la  sœur  de  sa  femme,  sa  cousine  ger- 
maine ou  issue  de  germaine,  et  la  veuve  de 
son  oncle.  —  Les  prêtres  et  les  diacres  étant 
obligés  de  vivre  dans  le*  célibat ,  s'il  s'en 
trouve  qui  aient  eu  commerce  avec  leurs 
femmes  depuis  qu'ils  ont  été  élevés  à  ces 
dignités,  ils  en  seront  privée. — Celui-là  sera 
excommunié,  qui  privera  l'église,  en  quelque 
manière   que  ce  soit ,  de  ce  qui  lui  a  été 


morsibus  extincta,  vel  quolibet  morbo  aut  casu 
su/focala  vescuntur.  Can.  20,  ibid. 

'  Episcoixitinn  desiderans  electione  clericorum 
vel  cijium,  consensu  ctiam  melropolitani  ejusdem 
provinciœ  pontifex  ordinetur.  ^'on  palrocinia  po- 
tentum  adliibeal,  non  calliditate  subdola  od  con- 
scribendum  decretum  alios  hortetur  prœmiis,  alios 
timoré  compellat,  Quod  si  qnis  fecerit,  Ecclesiœ 
XI. 


qui  indignus prœesse  cupil,  communione privabi- 
tur.  Can.  2,  tom.  IV  Coiicil.,  pag.  ISOt. 

2  jYe  operlorio  dominici  corporis  sacerdotis  un- 
quam  corpus,  dum  ad  tumulum  evehitur,  obte- 
gatur  ;  ne  sacro  vêla  mine  usibus  suis  reddilo,  dum 
honoranlur  corpora,  allaria  pollnantur.  (Jan.  ■;, 
pag.  t805. 


54 


850 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


donne  par  écrit ,  et  ne  le  rendra  pas  à  la 
C.0. 15.        première  sommation  de  l'cvèque.  —  Tous 
les  clercs,  soit  prêlres,  soit  diacres,  doivent 
cdlcbrer  tmiles  les  fèlcs  solennelles  avec  leur 
ëvêque  dans  la  métropole,  excepte  ceux  qui 
sont  attachés  à  des  titres  dans  la  ville  ou 
dans  la  campagne.  La  même  chose  est  ordon-. 
née  aux  plus  anciens  d'entre  les  citoyens,  sous 
.  peine  d'être  privés  de  la  communion  A  ces 
fêtes,  nommément  h  celles  de  Noël,  de  Pâques 
"■         et  de  la  Pentecôte.  —  Le  dernier  canon  re- 
nouvelle ceux  qui  défendent  aux  clercs  d'a- 
voir chez  eux  des  femmes  étrangères. 
t«J£'"  ""       3-    I-es  évéques  ayant  réglé  ce   qui  re- 
i««j.'"''' "**•    gardait  les  mœurs^ef  la  discipline  ,  écrivi- 
rent une  lettre  synodale  au  roi  Théodeberf, 
par  hquclle  ils  le  suppliaient,  sur  les  plain- 
tes qu'ils  avaient  reçues  d'un  grand  nombre 
de  particuliers,   de  les  laisser  jouir  paisible- 
ment, non-seulement  destenesqu'ils  avaient 
clans  son  royaume,  mais  d'empêcher  encore 
que   personne,    soit  évêque ,   soit    prêtre, 
clerc  inférieur  ou  laique,  ne  fût  privé  des 
biens  qui  lui  appartenaient  dans  les  terres 
d'un  autre  roi,  en  lui  payant  les  tributs  or- 
dinaires. Le  partage  du  royaume  de  Clovis 
entre  ses  quatre  fils,   Thierry,  Clodomir, 
Childebcrt  et  Clotaire ,  avait  occasionné  ces 
plaintes. 
ccncii.  d.       4.  Au  commencement  de  la  même  année 
M5.  Tom.  IV  53o,  OU  sur  la  lin  de  la  précédente.  Réparât, 

i>onc'i ,   pas*  .  ,  •  r  » 

I7S»  cl  1788.  qui  avait  succédé  à  Boniface  dans  le  siégo 
épiscopal  de  Carlhage,  convoqua  un  concile 
général  de  l'.Afri.iue,  où  l'on  n'en  avait  point 
vu  depuis  cent  an?,  à  cause  que  la  plupart 
des  évéques  avaient  été  réduits  en  servitude 
par  la  violence  des  persécuteurs.  Deux  cent 
dix-sept  évéques  s'y  rendiient  et  s'assem- 
blèrent dans  la  basilique  de  Fauste,  où  re- 
posaient les  reliques  de  plusieurs  martyrs. 
Ces  évéques  voulurent  par  là  consacrer  à 
Dieu  et  au  rétablissement  de  la  discipline, 
qui  avait  beaucoup  souli'ert  pendant  ces 
temps  de  troubles,  les  prémices  de  leur  li- 
berté. Après  avoir  rendu  en  comnuni-  de 
grandes  actions  de  grâces  A  Dieu  do  leur 
délivrance,  ce  qu'ils  ne  purent  faire  sans 
vei-ser  des  larmes  de  joie  ,  ils  firent  lire  pu- 
bliquement les  canons  de  iN'icéo.  Eusuile  ils 
exanjjuèrent  de  ipielle  manière  l'on  devait 
recevoir  les  évéques  ariens  qui  embras.-^aient 
la  foi  catholique  ;  s'il  fallait  les  conserver 
dans  leur  rang  d'honneur,  ou  leur  accorder 
seulement  la  communion  laïque.  L'avis  du 
concile  était  de  ne  pas  les  recevoir  comme 


évéques  ;  mais  dans  le  dontc  si  leur  résolu- 
tion plairait  au  Saint-Siégc,  il  fut  convenu 
qu'on  le  consulterait  avant  toutes  choses; 
on  députa  pour  cet  elfet  deux  évéques,  Caïus 
et  Pierre ,  avec  un  diacre  nommé  Libérât, 
que  l'on  chargea  d'une  lettre  synodale  adres- 
.    sée  au  pape  Jean  II,  qui  vivait  encore.  Mais 
ce  Pape  étant  mort  le  27  avril  533  pendant 
que  les  députés  étaient  en  chemin  ,  ils  ren- 
dirent la  lettre  à  Agapet ,  son  successeur. 
Les  évoques  d'Afrique  le  consultaient  non- 
seulement  sur  ce  qu'ils  avaient  à  faire  lou- 
chant les  évéques  ariens  qui  se  faisaient  ca- 
tholiques ,  mais  encore  sur  une  autre  diffi- 
culté très-importante ,  qui  était  de  savoir  si 
l'on  pouvait  élever  a  la  cléricatnre  ceux  qui 
dans  leur  enfance  avaient  été  baptisés  ]iar 
les  ariens.  Et  parce  que  plusieurs  évéques 
et  plusieurs  autres  clercs,  soit  prêtres,  soit 
diacres,   avaient  passé  la  mer  pendant  la 
domination  des  Vandales,   le  concile  priait 
le  Pape  de  ne  point  recevoir  à  sa  commu- 
nion ceux  qui  ne  prouveraient  point  par  les 
lettres  des  évéques  d'.Vfrique,  qu'ils  avaient 
été  envoyés  pour  l'utilité  des  églises.  Le  pape       t»™.  iv 
Agapet  leur  témoigna  dans  sa  réponse  la  i^s"'  '  '"'■ 
part  que  le  Saint-Siège  avait  prise  à  leur 
affliction,  et  les  loua  de  ce  qu'en  personnes 
sages  et  instruites  de  leurs  devoirs,  ils  n'a- 
vaient point  oublié   ce  qu'ils   devaient   au 
Siège  apostolique,  en  s'y  adressant  pour  l'é- 
claircissement de  leurs  doutes.  Il  leur  dit, 
sur  le  premier  chef  de  lenrs  demandes,   qui 
regardait  les  évoques  ariens  convertis,  qu'il 
ne  fallait  point  permettre  qu'ils  demeuras- 
sent dans  les  dignités  ecclésiastique:;;  mais 
qu'il  trouvait  bon  qu'on  leur  fil  part  des  re- 
venus de  l'Église  établis  pour  la  subsistance 
des  clercs.  Il  répondit  sur  le  second  article, 
qu'on  ne  devait  élever  à  aucune  dignité  du 
clergé  ceux  qui  quitlaiciit  l'arianisme  pour 
s'unir  à  l'i'^glise  catholique,  en  quelque  âge 
de  leur  vie  qu'ils  eussent  été  infectés  des  cr- 
reiu's  de  cette  secle.  Il  trouve  bon  encore 
qu'on  les  aide  il  subsister  des  revenus  de 
ri-glise,  et  qu'on  exerce  une  promple  misé- 
ricorde envers  tous  ceux  qui  quittent  l'erreur 
pour  embrasser  la  foi  véritable.  A  l'égard 
des  clercs  qui  avaient  passé  la  mer,  il  dit  que 
la  précaution  du  concile  devait  être  obser- 
vée, comme  nécessaire,  pour  les  obliger  de 
demeurer  dans  leurs  églises  et  les  empêcher 
d'être  vagabonds. 

.*).  Pendant  que  le  concile  était  assemblé,      ni'«r,.i.»j. 
Féhcien,  évêque  de  Ruspc,  demanda  com-       lom.  iv 


[vi»  SIÈCLE.]        CHAPITHK  LXXXVI.  —  CONCILKS  DE  CONSTANTINOPLE. 


851 


mont  il  devait  se  comporter  à  l't'giU'd  du  mo- 
nastère fondi5  par  saint  Fult^cncc  son  prédé- 
cesseur, et  dont  Fiu'lunat  évè(|iie  clait  alors 
abbé.  Félix  évéïpic  de  Zactare  répondit,  au 
nom  de  rassemblée,  qu'il  ne  fallait  lien  clian- 
ger  à  ce  (jui  avait  été  ordonné  par  l'archc- 
vôque  Bonil'ace  de  sainte  mémoire,  et  que 
les  monastères  '  devaient  jouir  d'une  pleine 
liberté  aux  conditions  prescrites  par  les  con- 
ciles, savoir  :  que  les  moines  s'adresseraient 
à  l'évoque  diocésain  pour  l'ordination  des 
clercs  et  la  consécration  des  oiatoires,  sans 
qu'il  lut  permis  de  les  assujétir  i\  aucune 
charge  ou  à  aucune  servitude  ecclésiastique, 
parce  qu'il  n'était  pas  convenable  que  l'évè- 
que  établit  sa  chaire  dans  aucun  monastère; 
que  les  moines  devaient  être  sous  la  con- 
duite et  i'autorlc  de  leur  abbé;  qu'à  la 
mort  de  celui-ci,  ils  eu  éliraient  un  autre 
eux-mêmes,  sans  que  l'évéque  put  s'en  at- 
tribuer le  choix;  et  que,  s'il  arrivait  quelque 
dilliculté  sur  ce  sujet,  elle  serait  terminée 
sur  la  décision  ou  l'avis  des  autres  abbés.  Le 
même  concile  de  Carthage  envoya  à  Con- 
stantinople  un  diacre  nommé  Théodore,  pour 
demander  à  l'Empereur  la  restitution  des 
biens  et  des  droits  des  églises  d'Afrique,  que 
les  Vandales  avaient  usurpés.  Ce  prince 
donna  à  cet  effet  une  loi  du  1"  août,  adressée 
il  Salomou,  préfet  du  prétoire  d'Afrique,  et 
datée  du  consulat  de  Bélisalre,  c'est-à-dire 
de  l'an  333,  qui  porte  que  toutes  les  terres 
usurpées  sur  les  églises  d'Afrique  leur  seront 
restituées,  à  condition  qu'elles  paieront  les 
tributs;  et  que  l'on  rendra  aussi  les  maisons 
et  les  ornements  des  églises;  que  l'Église  de 
Carthage  jouira  de  tous  les  droits  accordés 
par  les  lois  précédentes  aux  Églises  métro- 
politaines; et  qu'il  ne  sera  permis  ni  aux 
ariens,  ni  aux  donatistes  de  tenir  des  assem- 
blées, d'ordonner  des  évéques  ou  des  clercs, 
de  baptiser  et  de  pervertir  personne ,  ou 
d'exercer  aucune  charge  publique.  Outre  la 
lettre  synodale,  Réparât,  évéque  de  Carthage, 
en  éci'ivit  une  particulière  au  pape  Agapet, 


pour  le  féliciter  de  son  élévation  au  ponlill- 
cat,  et  lui  recommander  les  intérêts  de  sou 
église.  Le  Pape  le  remercia,  et  reconnut  dans 
sa  réponse  la  prééminence  de  révé(jne  de 
Carthage  sur  tous  les  autres  évéques  d'.\fri- 
que,  eu  lui  donnant  avis  qu'il  avait  répondu 
sur  les  ditlicultés  qui  lui  avaient  élé  ()ropo- 
S(''es  par  les  trois  di'piités  du  concile.  Il 
l'exhorta  dans  la  même  lettre  à  rendre  public 
tout  ce  qu'il  avait  écrit  pour  le  maintien  et 
l'observation  des  anciens  canons,  afin  que 
personne  n'eu  pût  ignorer. 

ARTICLE  XL 

CONCILES  DE  CONSTANTINOPLE  ET  DE  JÉRUSALEM 

l.  Après  la  mort  d'Epiphane,  patriarche 
de  Constantinople,  arrivée  en  333,  Anthime, 
évêque  de  Trébizonde,  fut  mis  à  sa  j)lace  par 
le  crédit  de  l'impératiiceThéodora.  Quoiqu'il 
passât  pour  catholique,  il  était  néanmoins 
ennemi  du  concile  de  Chalcédoine;  ce  qui 
engagea  Ephrem,  patriarche  d'Antioche,  à 
prier  l'empereur  Justinien  de  faire  en  sorte 
que  les  lettres  synodiques  qu'.\ntiiime  devait 
envoyer  suivant  la  coutume,  fussent  entière- 
ment conformes  à  la  doctrine  de  l'Eglise. 
Celle  qu'Anthime  envoya  à  Ephrem  fat  en 
eflfet  conçue  d'une  telle  manière,  qu'on  n'y 
découvrait  rien  de  contraire  à  la  foi  ;  mais 
comme  il  ne  s'y  e.xpliquait  pas  non  plus  avec 
assez  de  détail  et  d'exactitude,  Ephrem  le 
pria  par  écrit  d'anathématiser  Eutychès  et 
sa  doctrine.  Les  acéphales,  ranimés  par  l'or- 
dination d'Anthime,  firent  beaucoup  de  bruit 
dans  Constantinople,  jusqu'à  y  tenir  des  as- 
semblées et  conférer  le  baptême.  Le  pape 
Agapet  fut  aussitôt  informé  de  tous  ces  dé- 
sordres par  les  abbés  catholiques  de  Con- 
stantinople. Mais,  obligé  de  revenir  en  cette 
ville  par  ordre  de  Théodat  roi  des  Goths,  il 
remit  à  sou  voyage  de  remédier  aux  troubles 
qu'occasionnait  l'ordination  d'Anthime.  Il 
amena  avec  lui  cinq  évéques   et  plusieurs 


ITom.  IV 

C'Mlctl.,    na|. 

niia. 


Conolle  d^ 
Constantino- 
ple contre  An. 
tbimc  en  S3(î. 
Tom.  V 
Cot]Cil.,  pag.3 
et  ïiiiv. 

Phot.  co-t. 
128,  i-aj.  m. 


'  Cœtera  vero  monasleria  etiam  ipsa  liberlate 
plenissiina  perfruantur,  servalis  Unnlibus  con- 
cilionim  suoritm  in  hœc  duntaxut,  ut  quaiidoque 
voluerinl  sibi  clericos  ordinare,  vel  pratoria  ino- 
tiasteriis  dedicare,  episcopus  in  cujus  plèbe  vel 
civitate  lotus  munaslerii  consistil,  ipse  liujus  mu- 
neris  graliain  compleat,  salta  Ubertule  moiiacho- 
rum,  nihil  sibi  in  eis  prœier  hanc  ordinutionem 
vindicans,  neque  ecclesiaslicis  eos  conditionibus 
aut  angariis  subdens.  Oportet  enim  in  nullo  mo- 


nasterio  quemlibet  episcopum  cathedram  coUo- 
care...  Esse  enim  debent  monaclii  in  abbatum 
suorum  polestalc.  Et  quando  ipsi  abbates  de  cor- 
pore  exierint,  qui  in  luio  eoruin  ordinandi  sunt, 
judicio  congreijationts  clganlur  :  nec  ofjicium  si- 
bi hujus  electwnis  vindicet  aut  iirœsuwat  epi- 
scapus.  Si  qua  vero  contentio  exorla  fuerit,  ut  ista 
abbalum  aliorum  concilio  sive  judicio  finiril.iu: 
TAm.  IV  Concil.,  pag.  1185. 


83-2 


UISÏOlllE  GJÏNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


clercs  avec  deux  notaires,  et  fit  son  entrée 
eu  celte  ville  le  2  février  33G.  L'empereur 
Justinien,  et  Théodora  sa  femme,  le  prièrent 
de  recevoir  la  visite  d'An'.hime,  et  de  l'ad- 
mettre à  sa  communion.  Agapety  consentit, 
a  la  cliarge  qii'Anlhime  donnerait  par  écrit 
une  confession  de  foi  catholique,  et  qu'il  re- 
tournerait àl'évèclié  deTrébizonde,  attendu 
qu'il  n'était  pas  possible  qu'un  homme  trans- 
féré demeurât  dans  le  siège  de  Constantino- 
ple.  L'Impératrice  tâcha  en  vain  de  gagner 
lu  Pape  par  des  présents  et  par  des  menaces; 
Agapet  demeura  terme,  cl  vint  à  bout  le 
persuader  à  l'Empereur  de  faire  déposer  An- 
thime,  qui,  de  son  n;ôtc,  préféra  quitter  de 
siège  de  Constanlinople,  plutôt  que  de  faire 
profession  de  la  foi  catliolique.  Le  Pape,  vou- 
lant le  ju^er  dans  les  formes,  assembla  un 
concile  où  Anthime  fut  jugé;  mais  comme 
il  refusa  de  comparaître,  on  le  condamna,  et 
on  élut  à  sa  place  Mennas,  supérieur  du 
grand  hôpilal  de  Saint-Samson  à  Constanli- 
nople, qui  était  catholique,  et  rccommanda- 
ble  autant  par  son  savoir  que  par  l'intégrité 
de  ses  mœurs.  Il  fut  choisi  par  l'Empereur, 
du  conscnlement  du  clergé  et  du  peuple,  et 
reçut  l'ordination  épiscopale  de  la  maia 
lud.p..-.  d'Agapet,  dans  l'église  de  Sainte-Marie.  Le 
Pape  écrivit  ensuite  une  leltre  synodale  à 
Pierre,  patriarche  de  Jérusalem,  pour  lui 
donner  avis  de  la  manière  dont  il  avait  pro- 
cédé à  la  déposition  d'Anthime  et  à  l'ordina- 
tion de  Mennas. 
Concile d.  2.  Sévère,  faux  patriarche  d'.\ntiochc,  fut 
p?«°Ô"°M°en"-  condamné  avec  Anthime,  de  même  que  Pierre 
v'c'nctV^^'  d'Apamée  et  Zoara,  moine  eutychien.  Les 
évoques  d'Orient  et  de  Palestine  présentèrent 
Aci.oD  I.  contre  eux  une  requête  au  Pape,  dans  la- 
quelle ils  acLUsaieut  Sévère  de  s'être  fait 
initier  aux  mystères  des  païens ,  d'avoir  en- 
seigné la  doctrine  d'Eutychès  et  de  Manès, 
et  d'avoir  répandu  en  Oiient  le  sang  des 
saints  par  les  mains  des  juifs  séditieux.  Us 
accusaient  Pierre  de  plusieurs  crimes,  et 
Zoara  d'ignorance  et  de  dissolution,  comme 
aussi  de  laire  des  conventicules  secrets,  et 
de  donner  de  faux  baptêmes.  Us  concluaient 
à  ce  que  l'Église  lui  délivrée  de  ces  héréti- 
ques, que  l'on  demandât  à  l'Euipercar  une 
loi  pour  faire  brider  leurs  écrits,  et  que  l'on 
lit  exécuter  la  sentence  rendue  contre  An- 
Ibime.  Cette  requête  élait  souscrite  de  onze 
cvêques  et  de  trente-trois  clercs,  tant  prêtres 
que  diacres  cl  lecteurs,  députés  de  divciscs 
églises.  Ils  donni'.ienl  au  pape  la  qualité  de 


i«e.  ". 


Père  des  pères,  d'archevêque  des  Romains 
et  de  patriarche.  Mais  dans  la  requête  des 
abbés,  il  est  qualifié  archevêque  de  l'ancienne 
Rome  et  patriarche  œcuménique.  Ce  fut  Ma-  "•l'i.  p- 1.-, 
rien,  prêtre  et  exarque  des  monastères  de 
Constanlinople,  qui  présenta  celle-ci  à  Aga- 
pet, tant  en  son  nom  qu'au  nom  des  autres 
abbés  de  la  même  vifie,  et  de  ceux  de  la  Pa- 
lestine et  de  Syrie,  au  nombre  de  quatre- 
vingt-seize,  dont  plusieurs  souscrivirent  en 
syriaque.  Après  diverses  plaintes  générales 
contre  les  schismaliques  et  les  acéphales,  ils 
se  plaignent  en  particulier  de  ce  que  l'un 
d'eux  nommé  Isaac,  qui  était  Persan  de  nais- 
sance ,  avait  déchiré  à  coups  de  baguette 
l'image  du  très-pieux  empereur,  en  pronon- 
çant plusieurs  paroles  indécentes  contre  ce 
prince,  ce  qu'ils  regardent  comme  des  blas- 
phèmes contre  Dieu,  puisqu'il  n'avait  frappé 
cette  image  que  parce  que  l'empereur  sou- 
tenait la  cause  de  Dieu  en  prenant  la  défense 
de  la  saine  doctrine.  Us  se  plaignent  encore 
de  ce  que  les  sectateurs  de  Dioscore  et  d'Eu- 
tychès tenaient  des  assemblées,  entraient  dans 
plusieurs  maisons  de  personnes  constituées  en 
dignités,  et  y  séduisaient  des  femmes  par 
leurs  erreurs;  élevaient  des  autels  et  desbap- 
tistaircsdansdesmaisonsparticulières;  et  de 
ce  que,  sans  avoir  égard  aux  lois  de  l'Empe- 
l'cur,  qui  défendaient  aux  hérétiques  de  s'as- 
sembler cl  de  baptiser,  Zoara  avait  baptisé 
le  jour  de  Pâques  plusieurs  personnes,  entre 
lesquelles  étaient  des  enfants  de  ceux  qui 
demeuraient  dans  le  palais.  Pour  engager  le 
Pape  â  s'opposer  à  ces  maux,  ils  lui  disent 
que,  conjme  Dieu  envoya  saint  Pierre  d'O- 
rient à  Rome  pour  détruira  les  prestiges  de 
Simon-le-.Magicien,  Dieu  l'avait  aussi  envoyé 
d'Occident  en  Orient  pour  y  ruiner  le  parti 
d'.\.nthime,  de  Sévère,  de  Pierre  et  de  Zoara, 
en  les  déposant  et  en  les  chassant.  C'est 
pourquoi  ils  prient  le  Pape  de  marquer  un 
terme  à  Anthime  pour  retourner  à  son  é,:;lise 
de  Trébizoïule,  sous  peine  d'èU'e  déposé  de 
l'épiscopat;  et  de  faire  chasser  de  Con- 
stanlinople Sévère,  Pierre  et  Zoara,  comme 
déjà  condamnés ,  de  même  que  plusieurs 
évôipies,  prêtres  et  moines,  tant  du  parti 
de  Nestorius,  que  de  celui  d'Eutychès,  s'of- 
frant  de  les  nommer  eu  temps  et  lieu. 

Le  pape  Agapet  renvoya  ces  deux  requê- 
tes à  l'Empeiour;  mais  il  ne  put  terminer 
lui-même  celte  allaire,  étant  mort  â  Cnnslan- 
tinoplc  le  22  avril  de  la  même  année  53G, 
après  dix  mois  de  pontifical.  Justinien,  pour 


CHAPITRE  LXXXVI.  —  CONCILES  Dlî  CONSTANTINOPLE. 


[VI*  SIÈCLE.] 

la  finir,  fit  assoinlilor  dans  la  mc^me  ville  un 
concile  de  cinquanlo-doux  évoques,  (jiii  lin- 
rent  leur  première  séance  le  G  des  noues  do 
mai,  aprt's  le  consulat  de  Bélisaire,  c'est-à- 
dire,  le  2  mai  530.  Mennas,  élu  dvéque  de 
Constantinople  ;\  la  place  d'Anlliiiue,  y  pré- 
sida, ayant  à  sa  droite  les  évèquos  d'ilalie, 
comme  légat  du  pape  Agapet,  et  plusieurs 
évoques  de  Cappadoce,  de  Bithynie  et  d'ail- 
leurs; et  i\  sa  gauche  Hypace  d'KpIi^se  et 
grand  nombre  d'autres  évèqucs  d'OrionI,  et 
les  députés  des  évèques  absents.  Le  clergé 
de  Constantinople  assista  au  concile;  mais  il 
n'y  eul  personne  de  la  part  de  l'église  d'A- 
lexandrie, à  cause  de  la  confusion  dans  la- 
quelle l'avaient  mise  les  eutycliéens  qui  y 
dominaient,  et  qui  étaient  divisés  en  deux 
fie- 7.  sectes.  Tous  les  assistants  ayant  pris  place, 
on  fit  entrer  les  abbés  qui  avaient  présenté 
leur  requête  h  l'Empereur,  et  avec  eux  lo 
référendaire  Théodore,  chargé  de  la  porter 
au  concile.  Elle  fut  lue  par  le  notaire  Acbas. 

11.  Les  abbés  y  accusaient  Anthimc  d'avoir  long- 

temps abandonné  son  église ,  et  trompé  le 
monde  par  l'apparence  d'une  vie  mortifiée. 
Leurs  plaintes  contre  Sévère,  Pierre  et  Zoara 
étaient  à  peu  près  les  mêmes  que  celles  do 
la  requête  qu'ils  avaient  adressée  au  pape 
Agapet,  dont  les  légats  du  Saint-Siège  don- 

82.  nèrent  la  lecture.  Ils  donnèrent  aussi  ii  lire 

la  requête  des  évêques  d'Orient  à  Agapet,  et 
la  lettre  synodale  de  ce  pape  à  Pierre  évo- 
que de  Jérusalem  ,  dans  laquelle  il  déclarait 
Antbime  déposé  de  l'épiscopat  de  Constan- 
tinople, et  Mennas  légitimement  élu  en  sa 

47.  place.  Après  la  lecture  de  toutes  ces  pièces, 
le  patriarche  Menuas  nomma  des  commis- 
saires pour  signifier  à  Anthime  ce  qui  avait 
été  fait,  et  le  citer  à  comparaître  dans  trois 
jours  devant  le  concile.  Ainsi  finit  la  pre- 
mière action. 

Ar.ifn  !,  3.  Dans  l'action  suivante,  qui  se  tint  qua- 
*  '  tre  jours  après,  savoir  le  G  mai,  les  commis- 
saires déclarèrent ,  qu'ayant  cherché  An- 
tbime en  tous  les  lieux  où  ils  croyaient  qu'il 
pouvait  être,  notamment  dans  la  maison  de 
prières  placée  sous  le  nom  de  l'archange  saint 
Michel,  qui  est  dans  le  palais,  ils  n'avaient  pu 

ô.-;.  le  découvrir.  Sur  quoi  le  patriarche  Mennas 

et  tout  le  concile  dirent  qu'encore  qu'il  pa- 
rût évidemment  qu'Anthime  ne  voulait  pas 
se  présenter  ;  néanmoins ,  pour  imiter  la 
bonté  de  Notre-Sauveur  Jésus-Christ,  qui  ofiVe 
la  pénitence  comme  un  remède  salutaire  à 
ceux  qui  pèchent,  il  fallait  lui  donner  un  se- 


853 


cond  délai  de  trois  jours  pendant  lesquels  il 
serait  cité  ;\  comparaître.  On  nomma  donc 
encore  d'autres  commissaires. 

■i.  Ce  terme  étant  écoulé,  on  tint  une  troi- 
sième action  le  10  du  môme  mois,  oii  les 
commissaires  ayant  déclaré'  qu'ils  avaient 
fait  leurs  perquisitions  dans  l'éiilise  du  mar- 
tyr saint  Laurent,  et  partout  ailleurs  où  il 
convenait,  sans  avoir  pu  découvi'ir  où  était 
Anlhime  ;  Mennas,  de  l'avis  du  concile,  don- 
na mi  troisième  délai,  et  nomma  de  nouveaux 
commissaires. 

.T.  Le  concile  ajouta,  qn'afin  d'ôfer  à  An- 
thimc tout  prétexte  d'ignorance,  l'on  alHche- 
rait  publiquement  un  mouiloire  qui  contien- 
drai! la  perquisilion  et  la  citation  qu'on  avait 
ordonnées.  Outre  les  trois  jours  entiers  pour 
la  dernière  citation,  on  en  donna  sept  pour 
le  monitoire  ;  de  sorte  que  la  quatrième  ac- 
tion ne  fut  tenue  que  le  21  mai.  Les  commis- 
saires y  déposèrent  qu'ils  avaient  fait  les 
perrpiisitions  nécessaires,  et  que  l'on  avait 
alFiché  publiquement  le  monitoire,  sans  avoir 
pu  ni  rencontrer  Anthime,  ni  apprendre  en 
quel  lieu  il  s'était  retiré,  quoiqu'ils  eussent 
conjuré  les  clercs  de  l'église  de  Saint-Michel, 
et  d'autres  personnes,  de  leur  en  donner  des 
nouvelles.  Après  toutes  ces  formalités,  et  la 
lecture  des  Actes  du  concile  où  le  pape  Aga- 
pet avait  déposé  Antbime,  le  concile  décla- 
ra, parla  bouche  d'Hypace  évêque  d'Éphèse, 
qu'Autbime  s'était  rendu  coupable,  non-seu- 
lement en  se  faisant  transférer  de  Trébizonde 
à  Constantinople  contre  la  défense  des  ca- 
nons, mais  encore  en  soutenant  secrètement 
l'héi'ésie  d'Eutycbès,  et  en  travaillant  à  rom- 
pre l'union  des  églises,  procurée  avec  tant 
de  peine  ;  qu'on  lui  avait  donné  tous  les  dé- 
lais nécessaires  pour  reconnaître  sa  faute  et 
y  satisfaire;  et  que,  puisqu'il  persévéï'ait 
dans  sa  contumace ,  il  méritait,  suivant  le 
jugement  du  Pape,  d'être  privé  de  l'évèché 
de  Trébizonde  et  de  toute  autre  dignité  ec- 
clésiastique, et  retranché  du  corps  des  saintes 
églises  de  Dieu,  comme  un  membre  pourri 
et  inutile.  Le  patriarche  Mennas  prononça 
une  sentence  contre  Anthime,  h  peu  près 
dans  les  mêmes  termes  qu'Hypace  l'avait 
dictée,  ajoutant  seulement  qu'il  ne  lui  serait 
point.permis  d'entrer  à  Trébizonde  nia  Con- 
stantinople. Ce  jugemer.t  fut  suivi  de  plu- 
sieurs acclamations  dans  lesquelles  les  Orien- 
taux souhaitaient  de  longues  années  à  l'Em- 
pereur et  au  paliiarclie  ;  puis  ils  demandè- 
rent qu'on  anathémalisâl  aussi  Sévère,  Pierre 


Afliûn  i, 
P»g.  11. 


Pag.  80. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Actibi,   3, 


t^.  115. 


854 

et  Zoara,  vec  leurs  sectateurs.  Mennas  ne  le 
leur  relusa  point  ;  mais  il  les  pria  d'attendre 
que  l'on  en  eût  parlé  à  l'Empereur,  dont  ils 
connaissaient  le  zèle  pour  la  foi  orthodo.\e, 
disant  que  dans  desatlaires  de  coltc  nature, 
il  ne  convenait  point  de  rien  faire  sans  en 
avoir  communiqué  avec  ce  prince. 

Il  y  eut  soixante  et  onze  évéques  qui  sous- 
crivirent à  celte  quatrième  action  ;  les  Ro- 
mains en  latin,  les  Grecs  en  grec,  et  les  Sy- 
riens en  syriaque. 

6.  Dans  la  cinquième  action,  que  l'on  tint 
le  4  juin,  le  référendaire  Théodore  apporta 
deux  requêtes  présentées   à  l'Empereur  : 
l'une  ,  de  Paul  d'Apamée  et  des  évéques  de 
la  seconde  Syrie,  dans  laquelle  ils  faisaient 
leur  profession  de  foit  condamnaient  l'iiérésie 
de  Nestorius  et  celle  d'Eulycbès,  et  disaient 
anathème  à  Anlhime,  à  Sévère  et  h  Pierre  ; 
l'autre,  des  moines  de  Jérusalem,  de  ceux 
de  la  seconde  Syrie,  et  des  abbés  de  Con- 
stautinople,  par  laquelle  ils  demandaient  que 
les  hérétiques  dont  nous  venons  de  parler 
fussent  condamnés  avez  Zoara,  qu'ils  accu- 
saient de  soutenir  l'hérésie  d'Eutycliès,  et 
de  troubler  l'Église  catholique  ;  et  que  l'on 
chassât  tous  ceux  qui  nu  communiquaient 
pas  avec  le  saint  concile  et  avec  le  Siège 
apostolique.  Le  patriarche  Mennas ,  ayant 
fait  lire  ces  deux  requêtes,  dit  au  référen- 
daire Théodore  de  se  retirer.  Après  quoi  on 
lut  la  requête  que  les  moines  adressaient  aux 
Romains  et  au  concile.  Ils  y  disaient,  qu'a- 
près le  jugement  rendu  contre  Anthime,  ils 
ne  pouvaient  se  dispenser  de  former  leurs 
plaintes  contre  Sévère  et  Pierre,  qui  avaient 
troublé  rOrieni.  Ils  faisaient  un  détail  des 
maux  que  l'Église  soullVait  de  la  part  des 
acéphales,   des  blasphèmes  qu'ils  pronon- 
çaient contre  le  concile  de  Clialcédoine,  des 
violences  qu'ils  exerçaient  dans  les  monas- 
tères, des  meurtres  qu'ils  y  avaient  commis, 
du  refus  qu'ils  avaient  fait  d'accorder  la  sé- 
pulture à  environ  trois  cent  cinquante  moi- 
nes, qu'ils  avaient  tués  par  les  mains  des 
juifs,  des  réordinalionset  des  rébaplisations 
qu'ils  avaient  faites,  et  des  dérèglements  de 
leur  vie,  qui  allaient  si  loin,  que  quelques- 
uns  d'entre  eux  avaient  sacrilié  au  démon  et 
exercé  l'art  magique,  nommément  Sévère. 
Us  louclnuient  à  ce  que  lui  et  Pieircî  d'Apa- 
mée fussent  anathéuialisés  avec  leurs  sccla- 
Icnrs,  el  l'Empereur  supplié  de  les  chasser 
«le  Conslantinople,  de  faire  cesser  leurs  as- 
semblées illicites,  et  de  brûler  les  écrits  im- 


pies de  Sévère.  Ils  demam'aient  en  particu- 
lier la  condamnation  de  Zoara,  qu'ils  disaient 
avoir  encore  plus  troublé  l'Église  de  Dieu 
que  les  complices  de  ses  crimes ,  et  avoir 
déj;\  été  excommunié  par  le  Siège  aposto- 
lique. 

Avant  de  faire  droit  sur  cette  requête,  les 
évêques   d'Italie  demandèrent  qu'on  fit  la 
lecture  de  deux  lettres  du  pape  llormisdas, 
l'une  aux  moines  de  la  seconde  Syrie,  l'au- 
tre à  Épiphane  patriarche  de  Conslantinople, 
dans  lesquelles  il  condamnait  Sévère,  faux 
évê(jue  d'Aulioche,  et  Pierre  d'Apamée.  Les 
légats  présentèrent  ces  deux  lettres  en  latin, 
et  le  diacre  Christophe,  notaire  et  secrétaire, 
en  lut  la  version  grecque.  .\près  quoi  le  pa- 
triarche Mennas   ordonna  aux  notaires  de 
ri'^glise  de  Conslantinople  de   produire  les 
pièces  qu'ils  avaient  touchant  celle  affaire.- 
On  lut  la  requête  des  clercs  et  des  moines 
d'.\ntioche  adressée  au  patriarche  de  Con- 
slantinople Jean  el  à  son  concile  en  518,  por- 
tant plaintes  contre  Sévère,  et  le  détail  des 
crimes  dont  il  était  coupable;  la  relation  du 
même  concile  au  patriarche  Jean,  où  l'ou 
disait  anathème  à  Sévère  ;  cl  la  requête  des 
abbés  de  Constanlinople,  sur  laquelle  le  mê- 
me concile  avait  prononcé.  On  lut  encore  les 
lettres  de  Jean  de  Conslantinople  à  Jean  de 
Jérusalem  et  à  Épiphane  de  Tyrpo'ir  la  réu- 
nion des  Églises  ;    les  lettres  synodales  de 
Jean  de  Jérusalem  et  d'Kpiphaue  de  Tyr  à 
Jean  de  Constanlinople,  et  au  concile  de  la 
même  villt  ;  celles  que  les  évêques  de  la  se- 
conde Syrie  écrivirent  aussi  à  Jean  de  Con- 
slantinople et  à  son  concile  contre  Sévère  et 
Pierre  ;  les  informations  faites  contre  Pierre 
par  le  gouverneur  de  la  province,  el  la  re- 
quête des  moines  d'.\pamée  à  leurs  propres 
évêques,  portant  diverses  accusations  con- 
tre le  même  Pierre.  Après  qu'on  eut  lu  toutes 
ces  pièces,  le  patriarche  Mennas  demanda 
aux  évô  iucs  leur  avis.  Ceux  d'Italie  opinè- 
rent les  premiers  en  ces  termes  :  n  11  parait 
que  Sévèi'c,  Picnc  et  leurs  complices  ont  été 
condamnés  depuis  longtemps,  pour  des  er- 
reurs manifestes,  par  les  décrets  du  pape 
llormisdas  :  c'est  pourquoi  nous  les  tenons 
pour  condamnés,  avec  les  écrits  impies  de 
Sévère  contre  les  définitions  du  saint  c<ni- 
cile  de  Clialcédoine  et  contre  les  lettres  du 
pape  Li'oii  d'henieiise  mémoire.  Nous  com- 
prenons dans  la  même  senlence,  c'cst-ù-dire 
dans  le  même  anathème,  Zoara  et  tous  ceux 
qui  communiquent  avec  eux  et  persévèrent 


P4£.  ua. 


CHAPITRE  I.XXXVI.  —  CONCILES  DE  CONSTANTINOPLE. 


JlIfUllK 

coDflrme  I 
roodie,  r>l 
3U. 


fVl*  SIÈCLE.] 

dans  leurs  erreurs,  n  Le  concile  dit  ensuite 
anallu'nio  i'i  Sévère,  ii  Pierre  et  ù  Zoara, 
couinie  déjà  conilaniiiés;  et  le  patriarche 
Mennas,  conlirmant  l'avis  du  concile,  pro- 
nonça le  ju},'cuient  solennel  contre  eux,  en 
les  frappant  d'anatliènie,  eux  cl  Ions  leurs 
complices,  et  tout  ce  (]u'ils  pouvaient  avoir 
Ptj.  »(  ^g,,j(  po,„.  séduire  les  simples.  11  fut  .souscrit 
par  qualre-vinjjt -Imit  cvèques  :  première- 
ment par  Mennas  ;  ensuite  par  les  cinq  lé- 
gats du  pape,  savoir,  Sabiu  de  Canuse,  Kpl- 
phanc  d'Kclane,  Astèrede  Salerne,  Uusli(pie 
de  Fcssule,  et  Léon  de  Noie.  Les  deux  dia- 
cres de  l'Église  romaine,  Théopliaiies  et  Pe- 
lage ,  souscrivirent  ensuite  ;  puis  Hypace 
d'Éplièse  et  les  autres  évêques  d'Orient,  avec 
les  députés  de  diverses  églises. 

7.  Il  parait  que  ce  fut  à  la  prière  de  Men- 
'nas  que  l'empereur  Justinien  donna  une  loi 
le  G  août  de  la  même  année,  pour  confirmer 
le  jugement  du  concile,  puisqu'elle  lui  est 
adressée.  Ce  prince  dit  dans  celte  loi,  que 
ce  n'était  point  une  chose  extraordinaire  de 
voir  les  puissances  séculières  confirmer  les 
sentences  de  déposition  prononcées  par  les 
évêques  contre  des  ecclésiastiques  indignes 
de  leur  ministère;  qu'elles  en  avaient  agi 
ainsi  à  l'éi^ard  deNestorius,  d'Eutycliès,  d'A- 
rius,  de  Mucédonius,  d'Eunomius  et  de  plu- 
sieurs autres;  que  la  concorde  des  deux 
puissances  donnait  beaucoup  plus  d'autorité 
à  ces  sortes  de  jugements.  Il  reconnaît  que 
c'était  le  pape  Agapet  qui  avait  déposé  An- 
tliime  de  l'épiscopatde  Constantinople  ,  pour 
l'avoir  usurpé  contre  les  canons,  et  pour 
avoir  abandonné  la  foi  orthodoxe,  quoiqu'il 
en  aflectât  les  dehors.  Il  déclare  donc,  qu'en 
conséquenc  de  la  sentence  rendue  contre  lui 
et  contre  Sévère,  Pierre  et  Zoara,  il  leur  dé- 
fend d'entrer  dans  Constantinople  ou  dans 
aucune  autre  ville  considérable.  11  ordonne 
que  les  écrits  de  Sévère  seront  brûlés,  com- 
me étant  remplis  de  blasphèmes,  et  défend 
de  les  transcrire,  sous  peine  d'avoir  le  poing 
coupé;  et,  pour  obvier  à  de  nouveaux  trou- 
bles, il  défend  à  tons  les  hérétiques,  parti- 
culièrement aux  sectateurs  de  Nestorius, 
d'Eutychès  et  de  Sévère,  de  dogmatiser,  de 
tenir  des  assemblées,  de  baptiser  indiscrè- 
tement, d'administrer  la  communion  à  qui 
que  ce  soit,  et  d'expliquer  les  doctrines  dé- 


«35 


fendues,  soit  cl  Constantinople,  soit  dans  toute 
autre  ville.  Il  charge  Monuas  de  faire  passer 
celle  loi,  en  l'accompagnant  de  ses  lettres 
à  Ions  les  métropolitains  de  sa  dépendance, 
afin  qu'eux-mêmes  en  donnent  communica- 
tion aux  Églises  qui  leur  sont  .soumises. 

8.  AussitiM  après  la  tenue  du  concile    de       CM.tii.  d. 
Constantinople,  Meunas  en  envoya  les  Actes   'm""!'!!!,  v 

.ri'  '     .  1       T  '  t  1  .       ConcH,,  ans- 

a  Pierre  évoque  de  Jérusalem,  par  les  moi-  si», 
nés  de  Palestine,  que  cet  évéqne  avait  dé- 
putés avec  quelques-uns  de  ses  confrères  a 
Constantinople.  11  les  chargea  aussi  d'une 
lettre  pour  Pierre,  qui,  l'ayant  reçue,  assem- 
bla son  concile  le  13  des  calendes  d'octobre 
après  le  consulat  de  Bélisaire,  c'est-à-dire 
1(!  19  septembre  o'.iG.  Il  s'y  trouva  quarante- 
cinq  évoques  des  trois  Palestines.  Lorsqu'ils 
furent  assemblés,  le  diacre  Elisée,  qui  était 
aussi  notaire  du  patriarche  Pierre,  dit  que 
les  abbés  et  les  moines  demandaient  d'en- 
trer. Cela  leur  fut  accordé  ;  et  alors  Pierre 
et  son  concile  ordonnèrent  au  diacre  Elisée 
de  lire  la  lettre  du  patriarche  Mennas.  11  y 
rapportait  en  peu  de  mots  ce  qui  s'était  passé 
à  Constantinople  contre  Anthime,  Sévère, 
Pierre  et  Zoara,  et  priait  l'évéque  de  Jérusa- 
lem de  conserver  par  devers  lui  les  actes  de 
la  procédure  faite  contre  eux.  Le  diacie  lut 
à  îiau'e  voix  tous  ces  actes  depuis  la  pre- 
mière action  jusqu'à  la  fin  de  la  cinquième. 
Les  évêques  du  concile,  ne  trouvant  lien  que 
de  canonique  dans  la  procédure  faite  à  Con- 
s'.anlinople,  confirmèrent  la  déiiosition  d'An- 
thime,  et  apparemment  la  sentence  pronon- 
cée contre  Sévère,  Pierre  et  Zoara;  mais  il 
n'est  rien  dit  de  celte  sentence  dans  celle  que 
le  concile  rendit  par  la  bouche  de  Pierre.  Le 
titre  même  de  celte  sentence  ne  fait  mention 
que  d'Anlhime  :  ce  qui  fait  voir  que  nous 
n'avons  pas  en  entier  les  Actes  du  concile  de 
Jérusalem,  ou  que,  si  l'on  n'y  dit  rien  contre 
Sévère,  Pierre  etZoara, c'est  qu'on  lescroyait 
sufiisamment  condamnés  auparavant.  Il  se 
tint  sans  doute  plusieurs  conciles  semblables 
dans  les  autres  provinces;  mais  nous  n'en 
avons  point  de  connaissance.  On  voit  par  une  i,,,,,^,^  ,,,, 
des  Novelles  de  Justinien,  que  le  prêtre  Eusè- 
be,  trésorier  de  l'église  du  Saint-Sépulcre  de 
Jérusalem,  et  l'un  des  députés  au  concile  de 
Constantinople,  en  obtint  le  privilège  '  de 
pouvoir  ahéner,  en  faveur  de  son  église. 


'  Omnibus  est  hominibus  manifestum  hocsanc- 
tissimam  resurrectionetn  eos  qui  ex  omni  orbe  eo 
covfliiunl,  quorum  muUitudinem   infinilam  est 


dicere,  et  suscipere  et  alere  et  facere  sumptus 
immensos  et  insinratos...  Liceat  igitur  ipsi  sanc- 
tissiinœ  Ecclcsiœ  facere  œdi/iciorum  venditionem, 


856 


niSTOraE  GENERALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Concile 
dOrléao)  CD 
fc38.  Tom.  V 
C<iiicl!.p.39:. 


Canons  du 
enclin. 


des  maisons  d'an  revenu  modique,  afin  de 
pourvoirplusaisL'mentaiixbesoinsd'unnoin- 
bre  iufini  de  pèlerins  qui  venaient  visiter  les 
Saints-Lieux. 

ARTICLE  Xll. 

TROISIÈME  CONCILE  D'oitLÉANS  [538],  ET  CONCILE 
DE  BARCELONNE  [540]. 

1.  Le  7  mai  de  l'an  538,  qui  était  le  qua- 
trième après  le  consulat  de  Paulin-lc-Jeune, 
le  vingt-septième  du  règne  dcChildebert,  et 
le  second  du  pontificat  de  Silvérius,  on  tint 
à  Oi'léans  un  concile  qui  est  compté  pour  le 
troisième.  Il  y  eut  dix-neuf  évoques  et  sept 
prêtres  dfputé?.  Le.premier  des  évèques  et 
le  président  du  concile  était  Loup,  archevê- 
que de  Lyon.  Après  lui  souscrivirent  trois 
autres  archevêques,  Pantagathus  de  Vienne, 
Léon  de  Sens,  Arcade  de  Bourges  et  Flavius 
de  Rouen.  Injuriosus,  archevêque  de  Tours, 
n'ayant  pu  s'y  trouver,  députa  de  sa  pail  le 
prêtre  Campanus ,  qui  souscrivit  avant  tous 
les  autres  députés. 

2.  On  travailla  dans  ce  concile,  comme 
dans  les  précédents,  à  renouveler  les  anciens 
canons  qui  regardaient  la  discipline,  et  on  y 
en  fit  quelques  nouveaux  qui  parurent  né- 
cessaires. Le  premier  ordonne  que  chaque 
année  les  métropolitains  tiendront  un  concile 
provincial  avec  leurs  suÛVagants,  qui  ne  pour- 
ront se  dispenser  d'y  assister,  s'ils  n'en  sont 
empêchés  par  maladie.  Et  parce  que  quel- 
ques-uns auraient  pu  prétexter  que  la  Gaule 
étant  partagée  entre  les  Francs,  les  Bour- 
guignons et  lesGoths,  les  rois  d'une  nation 
ne  permettaient  qu'avec  peine  à  leurs  évè- 
ques d'aller  au  concile  qui  se  tenait  chez  une 
autre,  le  concile  déclare  ces  excuses  illégi- 
times depuis  que  toute  la  Gaule  était  soumise 
aux  Français,  quoiqu'ils  eussent  plusieurs 
rois,  tous  étant  de  la  même  nation.  La  peine 
qu'il  ordonne  aux  métropolitains  qui  négli- 
geront de  convoquer  le  concile  annuel,  et 
aux  évoques  qui  n'j'  assisteront  pas  sans  ex- 
cuse légitime,  est  d'être  privés  pendant  un 
an  de  la  célébration  de  la  messe.  —  Le  se- 


cond oblige  il  la  continence  '  les  sous-dia- 
cres, de  même  que  les  autres  clercs  supé- 
rieurs, sous  peine  de  déposition  et  d'être  ré- 
duits à  la  communion  laïque.  Il  veut  même 
que  l'évéque  soit  privé  pendant  trois  mois 
des  fonctions  de  son  ministère ,  si ,  sachant 
qu'un  sous-diacre  ne  vit  pas  dans  la  conti- 
nence, il  lui  permet  l'exercice  de  son  olUce. 
—  il  est  dit  dans  le  troisième,  que  suivant  la 
coutume  et  les  décrets  du  Siège  apostolique, 
les  métropolitains  seront  ordonnés  par   les 
métropolitains,  si  cela  est  possible,  et  en  pré- 
sence des  évoques  de  la  province  ;  et  que  leur 
élection  se  fera  par  les  évèques  comprovin- 
ciaux,  avec  le  consentement  du  clergé  et  des 
citoyens;  que  les  évèques  seront  aussi  choi- 
sis du  consentement  du  métropolitain,  du 
clergé  et  du  peuple  de  la  ville,  parce  qu'il 
est  raisonnable  que  celui  qui  doit  présider  à 
tous,  en  obtienne  les  suffrages. — On  renou- 
velle dans  le  quatrième  canon  la  défense  faite 
si  souvent  aux  évèques  et  à  tous  autres  ec- 
clésiastiques, d'avoir  chez  eux  des  femmes 
étrangères,  c'est-à-dire  qui  ne  soient  pas 
leurs  proches  parents.  —  Le  cinquième  laisse 
au  pouvoir  de  l'évéque  d'employer  les  biens 
donnés  aux  églises  situées  dansles  villes,  aux 
réparations  des  églises  mêmes,  ou  'i  l'entre- 
tien des  ministres ,  voulant  qu'à  l'égard  des 
revenus  des  églises  de  la  campagne  ,  ils  en 
disposent  selon  la  coutume  des  lieux.  —  Le 
sixième  fixe  l'âge  que  doivent  avoir  ceux  que 
l'on  élève  aux  ordres supéiieurs,  disant  qu'on 
ne  peut  ordonner  un  diacre  avant  l'àge  de 
vingt-cinq  ans;  ni  un  prêtre,  qu'il  n'ait  at- 
teint l'âge  de  trente  ans  ;  à  la  charge  toute- 
fois qu'ils  ne  seront  point  bigames  ni  muti- 
lés, et  qu'ils  n'auront  point  fait  pénitence 
publique.  Il  déclare  ceux  qui  seront  ordon- 
nés avec  ces  défauts,  déchus  de  leur  dignité, 
et  il  suspend  l'évéque  qui  les  aura  ordonnés 
sciemment  des  fonctions  de   son  ministère 
pendant  six  mois;  et  en  cas  qu'au  mépris  du 
canon,  il  ait  célébré  pendant  les  six  mois,  le 
concile  le  prive  pondant  un  an  entier  de  la 
commimion  de  tous  les  frères.  —  Il  est  or- 
donné dans  le  septième  que,  si  les  clercs  qui 


Cas.  3. 


nihil  verenli  kg  m  in  génère  de  his  positnm, 
proptcrea  qui,<l  lege  recentiorc  subilirisionew  nc- 
cepil,  neque  aliqua  pœna  iniie  contra  quamiibel 
personam  omnino  conveniente.  Justin.,  A'o»ei.,i)ag. 
40. 

'  il  nullus  clcricorum  a  suhdidconn,  et  siipra, 
qui  uxores  in  jiroposito  sun  accipere  inhiheulur, 
propria:,  si  forle  jam  hcUical,   niiscealur  uxori. 


Qiiod  si  feceril,  laicaenmmnninne  ennlentti^,jux- 
la  prxiirum  raunninn  slahttn,  ah  officio  depona- 
tiir.  (Jiiem  si  sciens  fpiscnpiis  siiu.i  in  hac  vilitnte 
permixlinnis  ywenlfvi,  ad  nffictum  poftea  admi- 
serit,  et  ipse  episcopus  ad  agendam  pa'nilcnliam 
tribus  mensihiis  sit  a  suo  officio  sequeslralus, 
('.au.  2,  loin.  V  Concil.,  pag.  206. 


CIUriTOE  I.XXXVI.  —  3'  r.ONCILE  DOni.ftANS. 


Cio.  «, 


[VI'"  SIKOLE.] 

sn  sont  ongnpds  volonlniiTinent  diins  le  mi- 
nislèrc,  sans  iHrc  mariiis,  vicnnont  :\  se  ma- 
rier après  leur  ordination,  ils  seront  excom- 
mnnii's  avec  leurs  femmes;  mais  que ,  s'ils 
ont  été  ordonnés  malgrù  eux,  ils  seront  seu- 
lement déposés ,  mais  non  pas  privés  de  la 
communion;  et  que  l'évoque  qui  les  auraor- 
donn(''S,  sera  un  an  sans  célébrer;  que  pour 
les  clercs  qui  seront  trouvés  coupables  d'a- 
dultère, ou  les  leurenuora  dans  un  monastère 
pour  toute  leur  vie,  sans  les  priver  néanmoins 
delacoramunion.  — Leliuilièmc  veutque  l'on 
dégrade  les  clercs  convaincus  de  vol  ou  de 
faux,  parce  que  ce  sont  des  péchés  capitaux; 
mais  il  ne  les  prive  pas  de  la  communion.  Il 
soumet  i\  une  excommunication  de  deux  ans 
le  clerc  coupable  de  parjure  dans  une  aflairc 
qui  devait  se  décider  par  le  serment.  —  Le 
neuvième  défend  d'admettre  à  l'avenir  dans 
le  clergé  ceux  qui,  ayant  eu  des  femmes  légi- 
times, ont  eu  des  enfants  de  quelques  concu- 
bines; mais  il  cousent  qu'on  laisse  dans  le 
clergé  ceux  qui,  étant  dans  ce  cas,  ont  été 
ordonnés  par  ignorance.  —  Il  est  dit  dans  le 
dixième,  qu'on  ne  séparera  poiut  les  nou- 
veaux chrétiens  qui  auront  contracté  des 
mariages  incestueux  par  ignorance  aussitôt 
après  leur  baptême  ;  mais  seulement  ceux  qui 
en  auront  contracté  sachant  les  défenses,  et 
au  mépris  des  lois,  ce  dont  l'évêque  décide- 
i-a.  —  Le  onzième  ordonne  que  les  clercs 
qui,  sous  prétexte  de  quelques  protections, 
ou  par  d'autres  raisons  illégitimes,  refu- 
seront de  s'acquitter  de  leurs  fonctions , 
seront  effacés  du  canon  ou  de  la  liste  des 
clercs  qui  desservent  les  églises,  et  ne  rece- 
vront plus  de  gages,  ni  de  présents  avec  les 
autres  chanoines.  —  Les  aliénations  des  biens 
de  l'Eglise  sont  défendues  par  le  douzième, 
et  il  y  est  ordonné  à  ceux  qui  sont  chargés 
du  soin  des  églises  de  travailler  tt  recouvrer 
dans  l'espace  de  trois  ans  les  biens  aliénés 
par  leurs  prédécesseurs,  —  Parle  treizième, 
il  est  également  défendu  aux  juifs  d'obliger 
leurs  esclaves  chrétiens  à  des  choses  con- 
traires h  la  religion  de  Jésus-Christ,  et  aux 
chrétiens  de  contracter  des  mariages  avec 
les  juifs,  et  de  manger  avec  eux.  —  Le  qua- 
torzième porte,  que  la  messe  doit  être  dite 


857 


<^  tierce,  c'est-à-dire  h  neuf  heures  du  ma- 
tin ',  aux  jours  solennels,  afin  que  les  prêtres 
puissent  plus  facilement  venir  à  l'ollice  de 
vêpres  qui  doit  se  dire  le  soir,  parce  qu'il  est 
convenable  qu'ils  se  trouvent  à  cet  ollice  en 
de  semblables  jours. 

3.  Il  est  défendu  dans  le  quinzième  aux  c.o.  is. 
évêques  d'aller  dans  les  diocèses  de  leurs 
confrères  pour  y  ordonner  des  clercs  ou  y 
consacrer  des  autels,  sous  peine  à  l'évêque 
d'être  un  an  sans  célébrer,  et  aux  clercs  qu'il 
aura  ordoimés  d'être  privés  de  leurs  fonc- 
tions, la  consécration  des  autels  demeurant 
en  son  entier.  Il  ajoute  que  les  clercs  qui 
iront  faire  leur  demeure  dans  un  autre  dio- 
cèse, ne  pourront,  sans  le  consentement  par 
écrit  de  leur  propre  évoque,  être  élevés  à  un 
ordre  snpc'uieur,  et  qu'on  refusera  même  la 
communion  aux  prêtres,  aux  diacres  et  aux 
sous-diacres  qui  voyageront  sans  être  munis 
de  lettres  de  leur  évêque.  —  Le  seizième  '"• 
excommunie  les  ravisseurs  des  vierges  con- 
sacrées ù  Dieu,  ou  qui  leur  font  violence,  de 
même  .que  celles  qui  consentent  h  demeu- 
rer avec  leurs  ravisseurs.  Il  étend  cette  peine 
sur  celles  qui  font  profession  de  viduité,  et 
prive  pour  un  an  delà  paix  de  l'Église  le 
prêtre  qui  aura  communiqué  sciemment  avec 
ces  sortes  de  personnes.  — Selon  le  dix-sep-  "• 
tième,  un  évêque  ne  peut  ôtcr  à  un  clerc  ce 
que  son  prédécesseur  lui  aura  donné  ;  mais 
il  peut  lui  ôter  ce  qu'il  lui  a  donné  lui-même, 
s'il  s'en  est  rendu  indigne  par  désobéissance, 
ou  par  quelque  autre  faute.  Il  peut  aussi  le  is. 
lui  ôter,  en  lui  donnant  l'administration  d'une 
église  ou  d'un  monastère,  parce  que  le  re- 
venu de  ce  second  bénéfice  peut  suppléer  à 
ce  que  ce  clerc  tirait  du  premier.  C'est  le 
sens  du  dix-huitième  canon.  —  Le  dix-ncu-  n. 
vième  porte,  que  les  clercs  qui  refuseront 
ouvertement  d'obéir  par  orgueil  ou  par  quel- 
que dépit,  seront  rc'duifs  h  la  communion 
laïque,  jusqu'à  ce  qu'Usaient  fait  satisfaction 
à  l'évêque,  qui  conservera  cependant  pour 
eux  une  charité  entière,  et  leur  fera  donner 
les  rétributions  ordinaires,  suivant  la  qua- 
lité des  temps.  11  permet ,  en  cas  de  difficul- 
tés, aux  clercs  de  se  pourvoir  devant  le  sy- 
node delà  province.  — Le  vingtième  accorde       ^''' 


'  De  missanim  celebrilale  in  prœcipuis  ihin- 
taxat  soteinnitatibus  id  ohservari  ilcbtt,  ul  hura 
terlia  inissarum  celehratio  in  Dei  nomine  inchoe- 
tur,  qun  facilius  intra  lioras  compétentes,  ipso  of- 
ficia cxpcdilo,  sacerdotcs  possint  ad  vespertina of- 


ficia, id  est,  in  vespertino  tempore  convenirc  :  qtiia 
sacerdolem  respertinis  ofjlciis  ab  ecclesia  talibus 
prœterea  diebus  nec  decet  déesse,  nec  convenu. 
C.TH.  14,  pag.  299. 


858 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLKSIASTIQUES. 


le  même  recours  '  à  celui  des  clercs  qui  se 
croira  traité  injustement  par  son  évè<juc.  — 
Le  vingl-unième  laisse  à  la  discrétion  du  con- 
cile de  punir  les  clercs  qui  auront  f.iil  des 
conspirations  par  écrit  ou  par  serment, 
comme  il  était  arrivé  depuis  peu.  —  Le 
vingt-deuxième  est  contre  les  usurpateuis 
des  Liens  de  l'Église,  et  contre  ceux  qui  re- 
tiennent les  oblatiuns  des  défunts,  ou  qui 
négliireut  d'eu  faire  usage  suivant  leur  in- 
tention. Le  concile  ordonne  que  ces  préva- 
ricateurs seront  suspens  de  la  communion 
ecclésiastique,  jusqu'à  ce  qu'ils  aient  restitué 
ou  à  l'église  ou  à  l'évèijue  :  il  soumet  à  la 
même  peine  tous  ceux  qui,  après  avoir  don- 
né quelque  chose  à4église,  auront  eu  la  té- 
mérité de  le  reprendre.  — 11  est  défendu 
dans  le  vingt-troisième,  sous  peine  de  dé- 
gradation, aux  ab'jés,  aux  piètres  et  aux  au- 
tres ministres,  d'aliéner  ou  d'iiypoîliéquer 
quoi  que  ce  soit  des  biens  de  l'Église,  sans 
une  permission  par  écrit  de  leur  évèque. — Le 
vingt-quatrième  ne  veut  pas  que  l'on  accorde 
la  bénédiction  de  la  pénitence  aux  person- 
nes qui  sont  encore  jeunes,  ni  même  aux  per- 
sonnes mariées,  sans  le  consentement  des 
deux  parties ,  et  encore  supposé  qu'elles 
soient  l'une  et  l'autre  dans  l'âge  parfait.  C'est 
que  ceux  qui  étaient  en  pénitence  publique 
devaient  garder  la  continence.  —  Illeuréiait 
aussi  défendu  de  quitter  les  exercices  de  la 
pénitence  pour  retourner  à  la  vie  séculière, 
ou  pour  embrasser  le  parti  des  armes.  Ceux 
qui  faisaient  le  contraire  étaient  excommu- 
niés jusqu'à  la  mort,  où  il  était  permis  néan- 
moins de  leur  accorder  le  viatique,  ainsi 
qu'où  lit  dans  le  vingt-cinquième  canon.  — 
Le  vingt-sixième  défend  d'ordonner  des  fer- 


miers ou  des  comptables,  à  moins  que,  selon 
les  statuts  du  Siège  apostolique,  ils  n'aient 
leur  décharge  par  testament  ou  par  quelque 
autre  écrit. 

i.  Dans  le  vingt-septième,  on  ordonne  la 
peine  '  de  dégradation  contre  les  diacres  et 
les  autres  clercs  supérieui-s  qui  prêtent  à 
usure,  attendu  qu'il  ne  leur  est  pas  permis 
de  rien  espérer  au-delà  de  ce  qu'ils  auront 
prêté,  ni  de  trafiquer,  soit  en  leur  nom,  soit 
sous  le  nomd'autrui.  —  Le  concile  dit  dans 
le  vingt-builième  que,  comme  le  peuple  ' 
était  persuadé  que  le  dimanche  on  ne  devait 
pas  voyager  avec  des  chevaux,  des  bœufs  ou 
des  voitures,  ni  préparer  à  manger,  on  rien 
faire  qui  regardât  la  propreté  des  maisons  ou 
des  personnes,  ce  qui  sentait  plus  l'observa- 
tion judaïque  que  le  cliristianisme,  il  voulait 
que  ce  qui  avait  été  ci -devant  permis  le  di- 
manche, le  fut  encore.  «Nous  voulons  toute- 
fois, ajoute-t-il,  que  l'on  s'abstienne  en  ce 
jour-là  de  travailler  aux  champs,  c'est-à-dire 
de  labourer,  de  façonner  la  vigne,  de  fau- 
cher les  foins,  de  moissonner,  de  battre  le 
blé,  d'essarter  ou  de  faiie  des  haies,  pour  va- 
quer plus  aisément  aux  prières  de  l'Kglise. 
Si  quelqu'un  y  contrevient,  ce  n'est  pas  aux 
laïques,  mais  aux  évcijues  à  le  corriger.  »  11 
parait  que  ce  qui  engagea  le  concile  à  faire  ce 
cauon,  fut  la  crainte  que  les  chrétiens  n'imitas- 
sent la  superstition  des  juifs,  qui  étaient  alors 
en  assez  grand  nombre  dans  les  Gaules.  —  Le 
vingt-neuvième  porte,  que  les  laïques  ne 
sortiront  de  la  messe'  qu'après  lOraison  do- 
miuica'.e  et  la  bénédiction,  si  l'évcque  est  pré- 
sent ;  et  que  personne  n'assistera,  soit  à  la 
messe  du  malin,  soit  à  l'ollice  de  vêpres,  avec 
des  armes,  qui,  dit  le  concile,  ne  sont  d'u- 


'  Si  quis  clericorum  circa  se  aul  districtionem, 
aiit  tractationem  episrnpi  sui  putal  injuslam, 
juxla  anliquas  amslituliones  recurrat  ad  syno- 
dum.  Can.  20,  pag.  301. 

»  Et  clcricus  a  diaconatu,  et  supra,  pecuniam 
non  cominodel  ad  usiiras:  itec  de  prœslilis  benc- 
ficiis  quidquam  amplius  quant  datnr  apcret;  neve 
in  exercendis  iiegotiis,  ut  pulilici  qui  ad  populi 
responsum  negotiatores  obserrant,  turpii<  liicri 
cupiditale  versetur,  aut  sub  alirno  noinine  inter- 
dicta negolia  audeal  exercerc.  Quod  si  quis  ad- 
versum  slatuta  rentre pra'sunipserit,  comniunione 
concensa  ab  ordine  regrudetur.  Can.  27,  (lag.  302. 

'  (Juia  persuastiin  est  populis  die  domtniro  agi 
cum  cabatlis,  aut  (lofriiy,  et  vehiculis  itinera  non 
dehere,  neque  ullnm  rem  ad  vielum  prirparare, 
vel  ad  nitorent  domus  vel  honiinis  pertinintem 
ullatcnus  exercere  {quir  ren  ad  judaicam  mugis 
quam   ad    christianam    observantiam   pcrtinerc 


probatur),  id  staluimus,  ut  die  dominico,  qtwd 
ante  fieri  licuii,  ticeat.  De  opère  tanicn  rurali.id 
est  aral-t,  vel  rinea,  vel  sectione,  messione.  ei- 
CHs.'-icmc,  cxarto,  vel  sepe,  rensuimus  abstinen- 
duin:  qiio  faciliiisad  ecclesiam  conienienits ora- 
tionis  gratiœ  vaceni.  Quod  si  inrentu<  fuerit  quis 
in  op<rilivs  suprascriptis,  quœ  interdicta  sunt, 
se  exercere,  qualiler  emrndari  debeat,  non  in 
/ïiïri  districtione,  scd  in  sacerdolis  castigatione 
consistai.  Cau.  28.  ibid. 

*  De  missis  nullus  laicorum  ante  discedat, 
giuun  dominica  dicalur  Oratio:  et  si  episcopui 
prwsens  fuerit,  ejus  benedielio  expecletur.  Sacri- 
ficia  vero  niatulina  missarum.  sire  vespertina, 
ne  quis  cum  armis  pertinrntibus  ad  Inllorum 
nsum  speclet.  Quod  si  fecerit,  in  sacerdotis  potes- 
tain  consistât,  qualiler  ejus  districtione  debeat 
castigari.  Can.  20,  ibid. 


CHAPITRE  LXXXVl.  —  CONCILE  D'AFIUQUE,  ETC. 


Cm.  1,1. 


[Vl*  SIÈCLE.] 

sape  que  dans  la  giieno.  Ce  canon  est  visi- 
blement contre  les  Burhaies,  iiuisquc  les  Ro- 
mains ne  portaient  pas  même  l'épée  liors 
le  temps  de  la  guerre  ou  des  voyages.  —  Les 
cvè(iaes  du  concile  disent  dans  I3  trentième 
que  vivant  par  la  grâce  de  Dieu  sous  la  do- 
mination de  princes  catholiques  ',  l'on  ne 
soull'rira  point  que  les  juifs  se  trouvent  avec 
les  chrétiens,  en  quelque  occasion  que  ce 
soit,  depuis  le  jeudi -saint  jusqu'au  jour  du 
dimanche  inclusivement,  c'est-à-dire  pen- 
dant quatre  jours  entiers.  —  Le  trente-uniè- 
me porte  excommunication  contre  les  juges 
d'une  ville  ou  d'un  lieu  quelconque,  qui  ayant 
su  qu'un  lii'rotique  aura  rehaptisé  quelqu'un 
d'entre  les  catholiques,  ne  l'auront  pas  dé- 
noncé et  fait  punir.  —  On  défend  dans  le 
trente-deuxième  i\  toutes  sortes  de  clercs  de 
traduire  personne  devant  les  juges  laïques, 
et  aux  laïques  d'y  traduire  les  clercs,  sans  la 
permission  de  l'évêque.  —  Le  trente-troisiè- 
me contient  une  imprécation  contre  ceux  qui 
négligeront  de  faire  observer  les  statuts  du 
concile,  que  les  évéques  disent  avoir  faits 
d'un  commun  consentement,  par  l'inspiration 
de  Dieu. 

5.  Septévèqucs  de  la  province  s'étant  as- 
semblés à  Barccloune  vers  l'an  540,  y  firent 
di\crs  règlements,  savoir  :  que  l'on  chante- 
rait le  psaume  3"  avant  le  cantique;  — que 
l'on  donnerait  la  bénédiction  aux  fidèles  à 
l'office  du  matin ,  de  même  qu'à  celui  du 
soir  ;  —  qu'il  ne  serait  permis  à  aucun  clerc 
de  laisser  croître  ses  cheveux ,  ni  de  raser 
sa  barbe;  —  que  les  diacres  ne  pourraient 
s'asseoir  dans  l'assemblée  des  prêtres;  — 
qu'en  l'absence  de  l'évêque,  les  prêtres  di- 
ront les  collectes  ;  —  que  les  hommes  qui 
seront  mis'  en  pénitence,  auront  la  tcte  ra- 
sée et  porteront  un  habit  religieux  ,  passant 
leur  vie  dans  les  jeûnes  et  dans  la  prière  ; 
—  qu'ils  n'assisteront  point  aux  festins  ',  et 
qu'ils  ne  feront  aucun  commerce,  se  conten- 
tant de  vivre  frugalement  dans  leur  propre 
maison  ;  —  que  ceux  qui  demandent  la  péni- 
tence étant  en  maladie  ,  la  recevront  de  l'é- 
vêque ,  à  la  charge  que  ,  s'ils  reviennent  eu 
santé ,   ils  mèneront  la  vie   des    pénitents, 


859 


sans  qu'il  soit  néanmoins  nécessaire  de  leur 
impo.ser  les  mains  di;  nouveau,  et  qu'ils  de- 
meui'cront  séparés  de  la  communion  jusqu'à 
ce  (pie  l'évêque  ait  approuvé  leur  conduite; 
—  que  l'on  donnera  la  bénédiction  du  via- 
tique à  ceux  qui  sont  en  danger; —  et  qu'à 
l'égard  des  moines ,  l'on  observera  ce  qui  a 
été  prescrit  pour  eux  dans  le  concile  de  Chal- 
cédoine. 

ARTICLE  XIIL 

CONCILE  d'aFRIOI'E  [541],  ET  QfATIlîÈME 
CO^•CILE  D'ORLÉANS  [541]. 

1 .  En  541 ,  les  évoques  de  la  province  By- 
zacène  en  Afrique  s'assemblèrent  en  concile, 
et  firent  plusieurs  canons  dont  nous  ue  sa- 
vons autre  chose,  sinon  que  l'empereur  Jus- 
tinicn,  à  qui  ils  avaient  député  deux  évêqucs 
à  Constantinople  ,  les  confirma  ,  nonobstant 
les  privilèges  que  l'on  pourrait  obtenir  par 
subreption  pour  en  empêcher  l'exécution. 
Le  rcscrit  de  ce  prince  à  cet  égard  est  de 
l'an  542.  Mais  il  y  en  a  un  autre  de  l'année 
précédente  adressé  à  Dacien,  métropolitain 
de  la  Byzacène,  et  à  tout  son  concile. 

2.  La  même  année,  il  se  tint  un  concile  à 
Orléans  qui  est  compté  pour  le  quatrième. 
11  fut  assemblé  de  tous  les  trois  royaumes  de 
France  et  de  toutes  les  provinces  des  Gaules, 
excepté  la  première  Narbonnaise  ,  qui  était 
sous  la  domination  des  Golhs.  Léonce  de 
Bordeaux  y  présida  ,  et  Marc,  évêque  d'Or- 
léans, souscrivit  le  dernier.  Il  s'y  trouva  eu 
tout  trente-huit  évêques  ;  les  absents  furent 
représentés  par  onze  prêtres  et  un  abbé, 
nommé  Ampbiloque,  député  d'Amélius,  évê- 
que de  Paris.  Les  Actes  en  sont  datés  du 
consulat  de  Basile,  indiction  quatrième,  c'est- 
à-dire  de  l'an  341. 

3.  Nous  ne  voyons  point  d'autres  motifs 
de  la  convocation  de  ce  concile ,  que  celui 
de  se  conformer  à  l'obligation  imposée  par 
les  précédents  d'en  assembler  chaque  année, 
et  de  déraciner  entièiiement  certains  abus, 
qui  duraient  toujours  malgré  les  efforts  que 
l'on  avait  faits  pour  les  corriger.  Ce  concile 
fit  donc   encore  trente  -  huit  canons ,   dont 


Ccacils 
à  Afrigrio  ou 
5i  1.  Tom.  V 
Conll.,    [af. 

3ïa 


Concile 
d'UrI.^aiis  ea 
5'.l.  Tom.  V. 
Corc:l.,    fsg. 

aso. 


r:.i.ins  Je 
Ce  cuiirile. 


Cau.  II. IX. 

25,  34,33,36, 
li.tt  IS. 


'  Quia  Deo  propitio  sub  catholicorum  regum 
dominalioite  consistiinus,  judiri  a  die  Cwnœ  us- 
que  ad  secuiidum  sabbati  in  Paschd,  hoc  est  ipso 
tiuatriduo,  procedere  inter  chrii:tianos,  t.eque  ca- 
thoUcis  populis  se  ullo  loco.  vcl  quacumque  occa- 
sione  misccre  prœsumant.   Can.  clO,  pag.  303. 

'  Preniteides  viri  tonso  capite  et  religioso  ha- 


bita utentes,  jejuniis  et  obsecrationibus  vitœ  tem- 
pus  peragant.  Cau.  ti,  pog.  379. 

^  Ut  panitentes  epiilis  non  intersint,  nec  nego- 
tiis  opcram  dent  in  dalis  et  acceptis,  sed  tantum 
in  suis  domibus  vitam  frugalem  agere  debeant. 
Can.  7,  ibid. 


860 


HISTOIRE  GKNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


huit  renouvellent  les  défenses  déjA  faites 
aux  eccli^iastiques  d'aliéner  les  biens  de 
l'É^'lise,  et  aux  laïques  de  s'en  emparer, 
en.  I.  Voici  ce  que  les  autres  contiennent  en 
substance  :  «  La  fête  de  Pâques  sera  ' 
célébrée,  suivant  la  table  ou  le  cycle  de 
Victorius ,  dans  toutes  les  Églises.  Chaque 
évêque  l'annoncera  tous  les  ans  au  peuple 
dans  l'église  le  jour  de  l'Epiphanie.  S'il  se 
rencontre  quelque  difllculté  sur  le  jour,  les 
métropolitains  consulteront  le  Siège  aposto- 
'•  lique.  —  Les  évoques  feront  observer'  le 

Carême  également  dans  toutes  les  églises, 
sans  le  commencer  plus  lot  dans  l'une  que 
dans  l'autre,  ni  permettre  que  l'on  ùte  le 
jeûne  du  "samedi.  .1  Le  défaut  d'uniformité  en 
ce  point  venait  de  ce  que  quelques-uns,  imi- 
tant l'usage  des  Grecs,  ne  jeûnaient  point  le 
samedi,  commençant  le  Carême  le  lundi  d'a- 
près la  Quinquagcsime ,  et  de  ce  que  d'au- 
tres jeûnaient  cinquante  jours  ,  et  d'autres 
soixante.  Le  concile  défend  cet  usage,  et  ne 
permet  à  personne  de  se  dispenser  du  jeûne 
pendant  tout  le  Carême,  si  ce  n'est  le  jour 
du  dimanche,  et  en  cas  de  maladie  pour  les 
»•  autres  jours.  —  Il  défend  aussi  aux  princi- 

paux citoyens  de  célébrer  la  Pâque  et  les 
autres  fêtes  solennelles  hors  de  la  %ille  et 
de  l'assemblée  de  l'église  à  laquelle  l'évêque 
préside  ;  voulant  que  celui  qui  se  trouve  en 
nécessité  de  s'absenter,  en  demande  la  per- 
*•  mission  à  son  évêque.  —  On  ne  doit  offrir' 

autre  chose  dans  le  calice  que  du  vin  mêlé 
d'eau,  parce  que  c'est  un  sacrilège  d'oflVir 
autre  chose  que  ce  que  le  Seigneur  a  Oi- 
(.  donné.  —  L'évêque  doit  être  régulièrement 

consacré  dans  la  même  ville  et  la  même 
église  pour  laquelle  il  a  été  élu.  Si  cela  ne 
se  peut,  il  le  sera  dans  la  province  en  pré- 
sence du  métropolitain  ,  ou  de  son  consen- 


tement par  les  évoques  comprovinciaux.  — 
Les  clercs  des  paroisses  recevront  de  leurs    ^^  , 
évêques  les  règlements  et  les  instructions 
nécessaires,  afin  que  ni  eux,  ni  leurs  peuples, 
ne  puissent  s'excuser  sous  prétexte  d'igno- 
rance. —  Les  seigneurs  ne  mettront  dans        ,. 
les  oratoires'  ou  chapelles  de  leurs  terres 
que  des  clercs  approuvés  par  l'évêque  dans 
le  territoire  duquel  elles  sont  situées.  —  Le       ,. 
temps  de  la  pénitence  de  ceux  qui ,  après 
être  tombés  dans  l'hérésie,  reviennent  à  l'u- 
nité de  la  foi  catholique  ,  sera  à  la  disposi- 
tion de  l'évêque,  qui  pourra  les  rétablir  dans 
la  communion  en  la  manière  et  au  temps 
qu'il  jugera  ;\  propos.  —  Les  aliénations  ou        0. 
engagements  des  biens  de  l'Église,  faits  par 
un  évêque  qui  ne  laisse  rien  de  son  bien  à 
son  église  en  mourant ,    seront  révoqués  ; 
mais  s'il  a  mis  en  liberté  quelques  esclaves, 
ils  en  jouiront,  à  la  charge  de  servir  l'Église. 

—  L'évêque  qui  aura  ordonné ,  ou  un  biga-        ,„. 
me,  ou  un  homme  marié  à  une  veuve,  sera 
suspens  des  fonctions  du  sacerdoce  pendant 

un  an  ;  et  s'il  méprise  cette  censure,  il  sera 
privé  de  la  communion  des  autres  évêques 
jusqu'au  temps  du  grand  synode,  ou,  selon 
quelques  manuscrits  ,  jusqu'au  premier  sy- 
node. Ceux  qu'il  aura  ordonnés  contre  les 
règles,  seront  dégrades. 

4.  S'il  arrive  quelque  difficulté  sur  la  u. 
possession  des  biens  temporels,  les  évê- 
ques s'accorderont  ensemble  à  l'amiable 
dans  l'espace  d'un  an,  ou  par-devant  des 
arbitres  qu'ils  choisiront;  s'ils  ditl'èrent  de 
le  faire,  ils  seront  séparés  de  la  communion 
de  leurs  frères,  parce  qu'il  n'est  pas  juste 
que  ceux  qui  président  à  tout  aient  entre  eux 
des  dillcrends  pour  quelque  sujet  que  ce  soit. 

—  Défense  aux  juges,  sous  peine  d'excom-       u. 
munication,  d'imposer"  aux  clercs  qui  des- 


'  l'iacuit  iiaqiie,  Deo  propitin,  ut  sanctitin  Pas- 
cha  secundum  laterculum  Virtnris  ab  omnibus  sa- 
cerdotibus  uno  lempore  celebrelur.  Quœ  festivitas 
annis  singulis  ab  episcnpo  Epiphaniarum  die  in 
ecclesia  populis  denuiitielur.  De  qua  solcmnilate 
quotics  aliquid  duhitatur,  inquisita  tel  agnita 
per  metropolitanos  a  Scde  aposlolica  sacra  con- 
stitulio  teneatur.  Clin.  I,  loin.  V  Concil.,  p.ip.  181. 

'  Uoc  eliam  decernimus  obserrandum,  ut  (Jua- 
dragesima  ab  omnibus  t'cctesiis  wqualiler  tenea- 
tur ;  neque  quinquagesiinani  ttul  sexagesimam 
anie  pascha  quitibct  sacerdos  prœsumnt  indicere. 
Sed  neque  per  sabbala  absque  infirmilate  quis- 
quam  solvat  quiidragesimer  jejnnium,  jiiVi  tan- 
tum  die  dominico  prandeal,  quod  sic  péri  spe- 
rialiter  Palrum  statula  sanxerunt.  Si  quis  hanc 


regulam  irritperit,  tanquam  transgresser  rfi»Yi- 
plinœ  a  sacerdotibus  censeatur.  Can.  2,  ibid. 

'  Cl  nnllus  in  oblalione  sarri  calicis,  nisi  quod 
ex  fruclu  vineœ  speralur,  et  hoc  iiqua  niixtum, 
offerre  prœsumat  :  quia  sacrilegium  judicatur 
aliud  offerri,  quam  quod  in  manttniis  sacratissi- 
mis  Sdirator  instiluit.  C.nn.  ï,  ibid. 

*  U(  in  oratoriis  domini  prœdiorum  minime 
cnntrn  vntum  episcopi  ad  quem  territorii  ipsius 
phrilegium  noscilur  prrtinere,  peregrinos  cleri- 
cos  inlrnmitlnnt  ;  nisi  forsitan  quosprobalos  ibi- 
dem districtio  pontiftcis  observare  prwceperit. 
Cau.  7,  img.  382. 

<•  Si  quis  judicum  clericos  de  quolibet  corpore 
venienles,  alque  allario  mancipatos,  vel  quorum 
nomina  in  malrirula  Ecclesimtencanlurinscripta. 


[Vl'  SIÈCLE.] 


CHAIMTUK  LXXXVl.  —  i'   CONCILE  D'OIILI^ANS. 


.s(;i 


ûan.  I^  et  Id 


servi'ut  actuellemenl  l'Église ,  el  dont  los 
noms  sont  dans  la  matiicult! ,  dos  (:liaii;os 
publiques;  et  pai-Uculièreiiicnl  d'uLliniT  les 
évèques ,  les  prêtres  cl  les  diacres  d'acee])- 
ter  des  tutelles,  parce  qu'il  est  raisonnable 
que  les  ministres  de  Jésus-Christ  jouissent 
d'une  exemption  ([ue  les  lois  civiles  accor- 
daient aux  prêtres  du  paj^anisme.  —  Ceux- 
lù  seront  privés  de  la  communion  de  l'Église, 
qui,  après  avoir  reçu  le  baptême,  retourne- 
ront i  certaines  pratiques  de  l'idolâtrie, 
comme  de  manj^er  des  viandes  immolées, 
de  jurer  par  la  tète  de  certaines  bêtes,  ou 
d'invoquer  les  noms  des  faux  dieux.  —  Pour 
éviter  tout  soupçon  d'incontinence,  on  dé- 
fend aux  prêtres  et  aux  diacres  mariés  d'a- 
voir le  lit  et  la  chambre  communs  avec  leurs 
femmes.  —  Les  juges  séculiers  ne  doivent 
point  connaître  les  causes  des  clercs,  même 
celles  que  ces  derniers  auraient  à  soutenir  ' 
contre  des  laïques,  ni  exercer  aucun  acte  de 
juridiction  sur  eux  ,  sans  la  permission  de 
l'évêque  ou  du  supérieur  ;  mais  les  clercs 
étant  eux-mêmes  cités  par  leur  supérieur 
ecclésiastique,  ne  doivent  user  d'aucune 
chicane  pour  leur  défense  ;  et  toutes  les  fois 
qu'il  y  aura  entre  eux  et  les  S(!culiers  quel- 
que difficulté ,  ils  ne  pourront  comparaître 
devant  le  juge  public,  qu'ils  ne  soient  assis- 
tés d'un  prêtre  ou  de  l'archidiacre,  et  qu'ils 
n'en  aient  permission  de  celui  qui  préside  à 
l'église  dans  laquelle  ils  servent.  —  Celui 
qui,  sans  la  permission  de  l'évêque  ou  du  su- 
périeur d'une  église ,  en  retire  de  force  ou 
par  fraude  une  personne  qui  s'y  est  retirée 
par  la  nécessité  d'y  chercher  un  asile  ,  doit 


•Ml  être  chassé  jusqu'à  ce  qu'il  ait  lait  [)éni- 
leuce  ,  et  à  condition  de  rélablii-  cetli;   per- 
sDuuo  dans    le    lieu    tl'où   il   l'a    tirée.   — 
DéfiMise,    sous    peine    d'excommunication,   cm.  s2, 
d'employer   l'autorité  des  puissances  pour 
avoir  des  lillcs  en  mariage  contie  la  volimlé 
de  leurs  parents.  —  Défense  aussi  aux  serfs        aj. 
des  églises  ou  des   évêques  d'exercer  des 
violences  et  de  faire  des  captifs,  parce  qu'il 
est  inique  que  la  discipline  de  l'Kglise  soit 
déshonorée  par  les  excès  de  serviteurs  dont 
les  maîtres  ont  coutume  de  racheter  les  cap- 
tifs mêmes'. — Le  concile,  en  conservant       s»' 
le  droit  d'asile ,  déclare  qu'un  tel  droit  ne 
doit  point  servir  de  prétexte  aux  esclaves 
qui  se  retirent  dans  les  ('glises ,  pour  con- 
tracter des  mariages  contre  la  volonté  de 
leurs  maîtres.  —  Il  est  enjoint  aux  archi-       se. 
diacres  de  prendre  garde  que  les  clercs  des 
paroisses  ou  des  oratoires  placés  dans  la  dé- 
pendance des  maisons  de  campagne  des  sei- 
gneurs ,  rendent  le  service  qu'ils  doivent  à 
l'iiglise  ;  et  à  celui  qui  voudra  avoir  une  pa-        23. 
roisse''  dans  sa  terre,  d'y  donner  avant  tou- 
tes choses  un  revenu  suffisant,  et  des  clercs 
pour  y  faire  l'office.  VoilA  l'origine  des  pa- 
tronages. —  On  renouvelle  les  canons  du       j7_ 
troisième  concile  d'Orléans  et  de  celui  d'K- 
paône  sur  les  degrés  prohibés.  —  Le  meur-       53^ 
trier  volontaire  qui  aura  trouvé  le  moyen  de 
se  mettre  à  couvert  de  la  vengeance  publi- 
que et  de  la  poursuite  des  parents,  ne  lais- 
sera pas  d'être  mis  en  pénitence  par  l'évê- 
que. —  Les  femmes  qui  auront  commis  im       j, 
adultère  avec  des  clercs,  seront  mises  en 
pénitence  par  l'évêque  ,  aussi  bien  que  ces 


publias  aciionibiis  applicure  prœsuinpserit  :  si 
a  sacerdote  coinmonilus  emendare  nolueril,  cog- 
noscat  se  pacem  Eccle>iiœ  non  liabere.  Simililer 
el  a  tutelœ  adininistratione  poutifices,  presbyle- 
ros,  alque  diacoiws,  ideo  excusatos  esse  decrevi- 
wus,  quia  quod  lex  sœculi  etiam  paganis  sa- 
cerdolibus  et  jniinittris  aille  pnrsliierat,  justum 
est  ut  erga  chrislianos  specialiler  coiiservetur. 
Can.  13,  pas.  38;i. 

'  Ut  nullus  sœcularium  personarum,  prœter- 
misso  pontifice,seuprœpositoEcclesiœ,  quemquam 
clericorum  pro  sua.  poteslate  conslringere,  discu- 
tere  audeat,  vel  dainnnre.  Sed  et  clericus,  si  pro 
causa  ad  petitionem  cujuscuinque  fuerit  ab  eccle- 
siaslico  ordinatore  commonitus,  se  ad  audien- 
tiam  spondeat  adfuturum,  et  respondere  nulla 
calliditate  dissimulet.  Sed  qiiœcumque  causatio 
quoties  inter  clericum  el  sœcularem  vertilur,  abs- 
que  presbytero  aul  archidiacono.  vel  si  guis  esse 
prœpositus  Ecclesiœ  dignnscitur.  judex  publicus 
audire  negolium  non  pnesumat.  Saiie  si  causam 


habentibus  placuit  ire  ad  judicinm  fori  ex  volun- 
lale  commum,  permiltenle  pr(eposilo  Ecclesiœ, 
clerico  licenlia  tribuulnr.  Cau.  20,  loin.  V  Concil., 
pas.  384. 

'  Le  texte  porte  :  u  Ut  servis  ecclesiœ,  vel  sucer- 
dotum,  prœdas  el  ciiptivilates  exercere  non  liceat  : 
quia  iniguum  est,  ut  quorum  domini  rcdemptio- 
nis  prœstare  soient  suffragium,  per  servorum 
excessum  disciplina  ecclesiastica  maculetur.  » 
Can.  23,  pag.  383.  Ce  que  Dom  Ceillier  a  ti'aduit 
ainsi  :  «  Défense,  etc.,  étant  injuste  que  la  disci- 
pline de  l'Église  soit  tachée  par  les  cxcès  des  ser- 
viteurs, que  les  maîtres  ont  coutume  de  racheter. 
C'est-à-dire  qu'il  a  rapporté  quorum  à  redemptio- 
nis,  au  lieu  de  le  rapporter  à  servorum,  comme  il 
semble  évident  qu'il  devait  le  faire.  [L'e'diteur.) 

3  Si  quis  in  agro  suo  aut  habet,  aut  postulat 
habere  dincesim,  primum  et  terras  ei  deputet 
sulpcienler,  et  clericos  qui  ibidem  sua  offlcia  im- 
pleant,  ut  sacratis  locis  reverentia  condigna  tri~ 
bualur.  Can.  33,  pag.  387. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


CoBClIe  «t 
CoiuUDt:oo- 
pl<    CO    St7. 

Tom.VCOE- 
cil.,  p.  399. 


Ibid.,  ti;. 
«07. 


Fae&Dd, eoo. 
tta  Moc.  f  ig. 

t7î. 


CoBcMfd'Or- 
léam  «D  U.*. 
Totn.  V  ..'oo- 
cil.,  1^.  m. 


863 

clercs  eux-mêmes,  et  révêquc  aura  le  droit 
de  les  éloigner  des  villes.  —  11  est  permis  de 
racheter  les  clircliens  qui,  devenus  esclaves 
des)  juifs,  se  réfugient  dans  une  église  et 
demandent  d'être  rachetés,  pourvu  que  l'on 
paie  aux  juifs  le  prix  auquel  ces  esclaves 
seront  estimés.  —  S'il  arrive  que  les  juifs 
les  engagent  à  embrasser  Je  judaïsme  ,  en 
leur  promettant  la  liberté  ,  ils  perdront  ces 
esclaves;  et  les  chrétiens  qui  auront  obtenu 
leur  liberté  à  condition  de  se  faire  juifs,  de- 
meureront esclaves.  —  Les  descendants 
d'esclaves  seront  obligés  aux  services  et  aux 
charges,  sous  lesquels  ceux  dont  Us  descen- 
dent ont -obtenu  leijr  liberté,  quoiqu'il  y  ait 
longtemps. 

ARTICLE  XIV. 

CO>XILE    DE    COSSTANTIKOPLE    [547],    CINQUIÈME 
COSCILE  D'ORLÉANS    ',349],    DEUXIÈME   CONCILE 

DE  cleumont  1.349],  concile  de  tocl  '330]. 

1.  Le  pape  Vigile,  étant  venu  <^  Constan- 
tiuople  en  347,  y  fut  reçu  par  l'empereur 
Justinien  avec  les  honneurs  dus  à  sa  dignité  ; 
mais  ce  prince ,  qui  avait  déjà  envoyé  en 
Afrique  son  édit  pour  la  condamnation  des 
Trois-Chapitres,  n'omit  rien  pour  engager  le 
Pape  a  les  condamner  lui-même.  On  le  pressa 
si  vivement  sur  cet  article,  qu'il  s'écria  pu- 
bliquement dans  une  assemblée  :  «  Je  vous 
déclare  qu'encore  que  vous  me  teniez  captif, 
vous  ne  tenez  pas  rapôtre  suint  Pierre.  »  Ce- 
pendant il  assembla  un  concile  des  évéques 
qui  lui  étaient  unis,  au  nombre  d'environ 
soixante-dix;  mais,  après  plusieurs  séances, 
il  le  rompit,  priant  les  évoques  de  donner 
chacun  leur  avis  par  écrit.  Après  qu'il  les 
eut  reçus,  il  les  envoya  au  palais,  ne  voulant 
pas  garder  par-devers  lui  des  réjjonses  con- 
traires au  concile  de  Chalcédoine;  mais  en 
eut  grand  soin  de  les  garder  au  palais,  avec 
les  souscriplious  des  évêques  qui  avaient 
condamné  les  Trois-CItopitres.  Le  l'ape  donna 
lui-même  sou  avis  le  11  avril  de  l'année  sui- 
vante 348,  par  lequel  il  condamnait  les  Trois- 
C/iajjitres,  sans  préjudice  du  concile  de  Chal- 
cédoine, et  à  condition  que  celle  question  ne 
serait  plus  agitée  à  l'avenir,  ni  de  vive  voix, 
ni  par  écrit. 

2.  A  Orléans,  il  se  tint  un  cinquième  con- 
cile le  28  octobre  de  l'an  549,  qui  était  le 
trenle-huiticme  du  roi  Childebert,  indiclion 
treizième.  Il  s'y  trouva  cinquante  évêques, 
cl  vingt-un  y  envoyèrent  des  députés,  les 


uns  prêtres,  les  autres  archidiacres.  Parmi 
les  évêques  présents,  il  y  avait  neuf  métro- 
politains, savoir:  saint  Sacerdos  de  Lyon,  qui 
présida  le  concile;  saint  .\urélien,  d'Arles; 
Hésychius,  de  Vienne;  Saint  Xicet,  de  Trê- 
ves; Désiré. de  Bourges;  Aspasius,  d'Eause; 
Constitut,  de  Sens;  Urbicus,  de  Besancon,  et 
Avolus,  d'Aix.  Marc,  évêque  d'Orléans,  n'y 
assista  point,  parce  qu'il  était  accusé  et 
exilé  ;  et  c'était  pour  le  juger  que  le  roi  Chil- 
debert avait  fait  assembler  un  concile  si 
nomlireux  de  toutes  les  provinces  qui  com- 
posaient les  trois  royaumes  de  France.  Les 
accusations  formées  contre  Marc  furent  trou- 
vées sans  fondement ,  en  sorte  qu'il  fut  ré- 
tabli dans  son  siège  épiscopal. 

3.  Les  évêques  du  concile,  avant  de  se 
séparer,  firent  vingl-quatre  canons,  à  la  tête 
desquels  se  trouve  une  petite  préface  où  ils 
donnent  de  grandes  louantes  au  zèle  de 
Childebert  pour  la  pureté  de  la  toi  et  le  main- 
tien de  la  religion.  Mais  ils  n'y  disent  rien  de 
l'afl'aire  de  l'évêque  d'Orléans.  Saint  Gré- 
goii-e  de  Tours  se  contente  de  dire  qu'il  fut 
justifié  dans  ce  concile,  et  rétabli  dans  sa 
ville  et  sur  son  siège.  Le  premier  des  canons 
anathématise  également  les  erreurs  d'Enlj-- 
chès  et  de  Nestorius,  comme  condamnés  par 
le  Siège  apostolique;  ce  qui  paraît  avoir  été 
ordonné  à  cause  de  la  dispute  des  Trois- 
Cltapitrcs,  dont  les  accusateurs  et  les  défen- 
seurs se  traitaient  mutuellement  de  ncstoriens 
et  d'eutychiens.  —  11  est  dit  dans  le  second 
que  les  évêques  n'excommuuieront  point 
pour  des  causes  légères  et  de  peu  d'impor- 
tance; mais  seulement  pour  des  fautes  pour 
lesquelles  les  anciens  Pères  ont  ordonné  que 
l'ou  serait  chassé  de  l'Église  —  Le  troisième 
renouvelle  les  défenses  faites  plusieurs  fois 
aux  clercs  d'habiter  avec  des  femmes  étran- 
gères. —  Le  quatrième  leui*  ordonne,  sous 
peine  de  déposition,  de  vivre  dans  le  célibat. 

—  Le  cinquième  défend  aux  évêques  de 
prendre  ou  d'ordonner  les  clercs  d'un  autre 
diocèse  sans  la  permission  de  leur  évêque. 

—  Le  sixième  porte  qu'un  esclave  ordonné 
clerc  sans  l'agrément  de  son  maitre,  deuieu- 
lera  en  servitude,  à  condition  que  celui-ci 
n'en  exige  que  des  services  honnêtes.  Le 
concile  ajoute  que,  dans  le  cas  où  s^oii  maitre 
agirait  aulrcment  A  son  «-gard,  oureui|)loie- 
rait  A  des  choses  déshonorantes  pour  l'ordre 
sacré,  l'évêque  qui  l'aurait  ordonné  le  lui 
retirerait,  eu  lui  donnant  deux  serfs  à  sa 
place.   —  Par  un  abus  qui  s'était  glissé,  il 


Vil.    Patrum, 


fvi*  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  LXXXVI.  — 


arrivait  souvent  (lue  ceux  qui  avaient  étt"  ilt*- 
livrés  de  la  serviluile  y  cUaicnl  l't'duils  do 
iioiivenu  sans  ancune  raison  :  le  scpii(>mo 
canon  veut  donc  (]no  les  l'glises  soutiennent 
la  liberté  de  ceux  qui  auront  vie  aÛVandiis, 
dans  les  mêmes  termes  qu'ils  l'ont  reçue  de 
leurs  maîtres.  —  Le  huili(>me  défend  i\  tout 
ëvôqne  d'ordonner  des  clercs  pendant  la  va- 
cance du  siège  épiscopal  ;  de  consacrer  des 
autels,   et  de  rien  prendre  des  choses  de 
l'Église  :  le  tout  sous  peine  d'être  prive  pen- 
dant un  an  tie  la  cék'bralion  do  la  messe.  — 
On  ordonne  dans  le  neuvième  de  n'élever 
personne  ù  l'épiscopat,  qu'il  n'ait  au  moins, 
pendant  un  an,  été  instruit  des  règles  spiri- 
tuelles et  de  la  discipline  ecclésiastique  par 
des  gens  docles  et  d'une  vie  éprouvée.  —  Il 
est  défendu  par  le  dixième    d'acheter  l'épi- 
scopat '  par  argenf.ou  d'employer  les  brigues 
pour  y  parvenir;  maisl'évêque  doit  être  con- 
sacré par  le  métropolitain  et  ses  comproviu- 
ciaux ,    suivant   l'élection  du   clergé  et  du 
peuple  avec  le  consentement  du  roi.  11  y  a 
des  manuscrits  qui  ne  portent  point  ce  con- 
sentement du  roi.  —  Le  onzième  déclare, 
conformément  aux  anciens  canons,  que  l'on 
ne  donnera  point  h  un  peuple  un  évêque 
qu'il   refuse  ,    et  qu'on  n'obligera   point   le 
peuple  ni  le  clergé  à  s'y  soumettre  par  l'op- 
pression des  personnes  puissantes  ;  qu'au- 
trement l'évêque  ainr.i  ordonné,  c'est-ù-dire 
plutôt  par  violence  que  par  une  élection  lé- 
gitime, seia  déposé.  —  Le  douzième  ne  veut 
pas  que  l'on  ordonne  un  évêque  à  la  place 
d'un  évêque  vivant,  s'il  n'est  déposé  pour 
quelque  crime  capital.  — Comme  la  division 
des  royaumes  occasionnait  du  trouble  dans 
la  discipline  de  l'Eglise ,  le  treizième  canon 
défend  à  toute  personne  de  s'emparer  des 
biens  légués  aux  églises,  aux  monastères  ou 
aux  hôpitaux,  sous  peine  d'être  chassé  de 
l'Eglise  jusqu'à  la  resiitulion  de  la  chose  en- 
levée. —  Le  quatorzième  est  sur  la  même  ma- 
tière; mais  il  s'explique  plus  clairement  en 
étendant  cette  défense  aux  évéques,  à  toute 
sorte  de  clercs  et  aux  laïques  de  toule  con- 
dition, leur  défendant  à  tous  de  prendre  les 


863 

biens  d'une  autre  église,  soit  dans  le  mfîme 
royaume,  soit  dans  un  autre. 

i.  Le  quinzième  conliiuio  la  fondation  d'un 
hôpital  l'Iabli  à  Lyon  pai-  le  roi  Cliildcbert,  et 
la  reine  L'itrogothe,  son  épouse  :  tous  les  évo- 
ques du  concile  souscrivirent  à  cette  fonda- 
tion, le  roi  et  la  reine  l'ayant  ainsi  souhaité; 
et  il  fui  défendu  à  l'évèquo  do  Lyon,  do  mô- 
me qu'.'i  ses  successeurs,  de  se  rien  attribuer, 
non  plus  qu'à  cette  église,  des  biens  de  l'hô- 
pital. Mais  en  même  temps  on  lui  enjoignit 
de  tenir  la  main  ;\  ce  qu'il  fiit  toujours  gou- 
verné par  des  adminisliateurs  soigneux;  que 
l'on  y  entretînt  le  nombre  des  mahides  or- 
donné par  la  fondation,  et  que  l'on  y  reçut 
les  éti  angers.  Le  concile  prononça  anathèmc 
contre  celui  qui  ferait  quelque  chose  de  con- 
traire ,  le  regardant  comme  meurtrier  des 
pauvres.  —  Le  seizième  prononce  aussi  ana- 
thème  contre  quiconque  osera  priver  les 
églises,  ou  les  lieux  saints,  des  donations 
qui  leur  auraient  été  faites  par  quoique  per- 
sonne que  ce  soit.  —  Le  dix-septième  règle 
la  manière  dont  les  causes  des  évoques  doi- 
vent ètie  jugées.  Celui  qui  aura  atl'aire  à  un 
évoque,  doit  promierement  s'adresser  à  lui- 
même  pour  tei'miner  la  chose  à  l'amiable  : 
si  l'évêque  ne  lui  fait  pas  raison,  il  s'adres- 
sera au  métropolitain,  qui  écrira  à  l'évêque 
de  finir  l'aU'aire  par  arbitrage.  S  il  ne  satis- 
fait pas  la  première  fois,  le  métropolitain  le 
mandera  pour  venir  devant  lui,  et  il  demeu- 
rera suspendu  de  sa  communion  jusqu'à  ce 
qu'il  vienne.  Mais  s'il  arrive  que  le  métropo- 
litain, interpellé  par  un  évêque  de  la  pro- 
vince, refuse  do  l'entendre  et  de  lui  faire 
justice,  l'évêque,  après  deux  admonitions, 
en  portera  ses  plaintes  au  premier  concile, 
avec  obligation  de  sa  part  d'observer  ce  que 
l'on  y  aura  ordonné.  — Le  dix-huitième  sus- 
pend pour  six  mois  les  évêques  qui,  étant 
appelés  au  concile  par  le  métropolitain,  re- 
fusent d'y  venir,  ou  en  sortent  avant  qu'il 
soit  fini,  si  ce  n'est  en  cas  d'une  infirmité 
évidente.  —  Ou  règle  dans  le  dix-neuvieme 
la  manière  de  recevoir  les  filles  dans  les  mo- 
nastères', soit  qu'elles  y  viennent  ae  leur 


'  Vt  nulli  episcopatum  prœmiis  aut  compara- 
tiont  liceal  adipisci,  sed  cum  voluiitate  régis, 
juxla  eleclionein  cteri  ac  ptebis,  siciit  in  aniiquis 
canonihus  tenetur  scriptum,  a  metràpolilano,  vel 
quem  in  vice  sua  prœiiiiserit,  cum  comprocincia- 
libus  poiHifex  consecrctur.  Quod  si  quis  hanc  re- 
gulam  Itujus  sanctœ  constiiutionis  per  coemptio- 
nem  eïcesserit,  eum  qui  per  prœmin   ordinatus 


fuerit,  statuimus  removcndum.  Can.  10,  tom.  V 
Concil.,  pafx.  393. 

«  Qnœcunique  etiiim  puellœ,  seu  propria  volun- 
tate  iiwnastcrium  expelunt,  seu  a  parentibus  of- 
feruntur,  annuin  in  ipsa  qua  intraverint  vesle 
permancant  :  in  his  rero  monasteriis,  tibi  non 
perpcluo  lenentur  inclusa',  triennium  in  ea  qua 
intraverint  veste  permaneant  :    et  postmodum, 


864 


HISTOIRE  GÉNIvRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


propre  volonté,  soit  qu'elles  soient  oUerles 
par  leurs  parents.  Si  le  monastère  où  elles 
entrent  est  fermé,  elles  seront  un  an  avec  le 
même  liabit  qu'elles  ont  apporté  du  siècle; 
mais  dans  les  monastères  où  la  clôture  n'est 
pas  perpétuelle,  elles  demeureront  trois  ans 
avec  leurs  habits  :  après  quoi  on  leur  don- 
nera celui  des  religieuses,  suivant  les  statuts 
du  monastère.  Que  si,  après  l'avoir  pris,  elles 
abandonnent  leur  bon  propos  et  retournent 
dans  le  monde  pour  se  marier,  elles  seront 
excommuniées  avec  ceux  qu'elles  auront 
épousés.  Si  toutefois  elles  s'en  séparent  et 
font  pénitence,  on  leur  rendra  la  communion. 
—  Par  le  vingtième,  il  est  ordonné  que  ceux 
qui  sont  en  prison  ""pour  quelque  crime  que 
ce  soit,  seront  visités  tous  les  dimanches  par 
l'archidiacre  ou  le  prévôt  de  l'église,  pour 
qu'il  prenne  connaissance  de  leurs  besoins, 
et  leur  fournisse  la  nourriture  et  les  choses 
nécessaires  aux  dépens  de  l'église,  par  le  mi- 
nistère d'une  personne  soigneuse  et  fidèle, 
que  révêque  choisira  à  cet  efl'et.  — Le  vingt- 
unième  dit  qu'encore  que  tous  les  prêtres  ' 
du  Seigneur  et  même  chaque  Odèle  puissent 
se  charger  du  soin  des  pauvres,  les  évêques 
néanmoins  en  prendront  un  particulier  des 
pauvres  lépreux,  tant  de  ceux  qui  se  trouvent 
dans  la  ville  épiscopale,  que  dans  les  autres 
lieux  de  son  diocèse,  en  leur  fournissant  de 
la  maison  de  l'église,  suivant  la]  possibilité 
de  ses  revenus,  le  vêtement  et  la  nourriture, 
afin  que  rien  ne  manque  à  des  gens  accablés 
par  une  si  dure  maladie.  —  Le  vingt-deuxiè- 
me renouvelle  les  anciens  règlements  tou- 
chant les  esclaves  qui  se  réfugient  dans  une 
église.  —  Le  vingl-tioisièma  ordonne  la  te- 
nue annuelle  du  concile  de  la  province.  — 
Le  vingt-quatrième  confirme  les  décrets  pré- 
cédents, voulant  que  en  qui  avait  été  i  églé 
dans  le  concile  par  l'inspiration  de  Dieu  filt 
inviolablement  observé  ù  l'avenir. 

secuudum  statula  monaslerii  ipiius,  in  quo  ele- 
gerinl  permanere,vestiinenl(i  religionis  accipiant. 
Quœ  si  deinceps,  sacra  relinqueiiles  loca,  proposi- 
tum  sanclum  sœcuii  ambitione  Iranscenderinl, 
vel  illœ,  qvœ  in  domibus  propriis,  tam  pueltœ, 
quain  viduœ,  commutatis  veslibus  convertuntur, 
cum  his  quibus  conjugio  copulanlur,  Ecclesiw 
communione privenlur.  Sane  si  culpam  sequestra- 
tione  sanaverint,  ad  cominunionis  gratiam  revo- 
centur.  Cnn.  19,  pag.  39C. 

'  Id  eliam  miserationis  inluVu  œquum  duxi- 
mus  custodiri,  ut  qui  pro  quibuscumque  culpis 
in  carcrribus  deputantur.  ab  arcliidiacono  seti  a 
prœpoiiln  Erclesia-  singulis  dicbus  dominicis  re- 
quiranlur,  ut   nécessitas   linctorum    secundum 


5.  Peu  de  temps  après  le  concile  d'Or- 
léans, dix  des  évêques  qui  y  avaient  assiste 
s'assemblèrent  à  Clermont  eu  Auvergne, 
ville  située  dans  le  royaume  du  jeune  Tiiéo- 
balde,  qui  avait  succédé  à  son  père  Théode- 
bert,  mort  en  548.  Ce  concile,  que  l'on 
compte  pour  le  second  de  Clermont,  ne  fit 
point  de  nouveaux  canons,  mais  il  confirma 
les  dix-sept  premiers  du  cinquième  concile 
d'Orléans,  a  l'exception  du  quinzième  qui 
regarde  la  fondation  de  l'hôpital  de  Lyon 
par  le  roi  Childebert.  On  ne  voit  point  pour- 
quoi les  évêques  assemblés  à  Clermont  re- 
nouvelèrent les  ordonnances  du  concile 
d'Orléans,  si  ce  n'est  pour  leur  donner  plus 
d'autorité  dans  un  royaume  différent  de  ce- 
lui où  ils  avaient  été  faits.  Ils  se  trouvent 
dans  un  ancien  manuscrit ,  précédés  d'un 
sommaire  qui  comprend  toute  la  teneur  des 
canons;  ce  qui  donne  lieu  de  croire  que  ce 
sommaire  est  de  la  façon  des  évêques  de 
Clermont.  qui,  ne  voulant  point  s'assujélir 
aux  propres  termes  de  ceux  d'Orléans,  en 
exprimèrent  les  décrets  en  d'autres  termes. 
C.  Xicet,  archevêque  de  Trêves,  qui  avait 
assisté  au  cinquième  concile  d'Orléans,  et  au 
second  de  Clermont,  en  assembla  un  h  Toul 
en  550,  du  consentement  du  loi  Théobalde  : 
les  Actes  de  ce  concile  ne  sont  pas  venus 
jusqu'à  nous.  Mais  il  parait  qu'il  fut  convo- 
qué à  l'occasion  de  quelques  insultes  faites 
à  saint  Nicet  par  des  Français  qu'il  avait  été 
obligé  d'excommunier  pour  cause  de  ma- 
riages incestueux.  Cela  peut  s'inférer  de  la 
lettre  que  Mappiuius,  évêque  de  Reims,  lui 
cciivit  pour  s'excuser  de  n'avoir  pu  assister 
au  concile  de  Toul.  Il  parle  dans  cette  lettre 
de  celle  que  le  roi  Théobalde  lui  avait  écrite 
pour  se  rcndie  en  celte  ville  le  premier  jour 
de  juin,  et  de  la  sentence  d'excommunica- 
tion que  saint  Nicet  avait  prononcée  contre 
ceux  qui  avaient  contracté  des  alliances  in- 

prœceplum  divinum  tnisericorditer  sublevett{r; 
algue  a  ponli/ice,  instituta  ftdeli  et  diligenti  per- 
sona,  qu(P  necessaria providtal,  competens  eivic- 
lus  de  domo  Ecclesiœ  tribuatur.  Cnn.  20,  ibid. 

»  Et  licel.  propitio  Deo,  omnium  Domini  sacer- 
dotum,  vel  qunrumcumque  htrc  cura  possit  esse 
fidclium,  ut  rgentibus  necessaria  debeant  minis- 
trare,  specialiler  tamen  de  leprosis  id  pietatis 
causa  convenit,  ut  itnusquisque  episcoporum, 
quos  incolas  hanc  infirinitatem  incurrisse,  tam 
territorii  sui  quam  cirilalis  agnnveril,  de  domo 
Ecclesiœ  juxia  possibililatem  victui  et  veslilui 
necessaria  subministret,  ut  non  eis  desit  miseri- 
cordiw  cura,  guos  per  duram  infirmitatem  inlo- 
Icrabilis  constringil  inopia.  Cnu.  21,  ibid. 


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(vi-  siKCLE.l      CHAPITRE  LXXXVJ.  —  2'  CONCILE  DE  CONSTANTINOPLE 


865 


cestiicuses.  Il  y  reconiiait  qu'ofant  excom- 
iiiunu's  [liir  leur  ûvôquo  ',  suivant  la  rigueur 
des  canons,  il  no  pi'ut  les  recevoir  i'i  sa  com- 
munion sans  parlici[)er  à  leurs  crimes.  Il 
distingue  deux  sortes  d'exi  ammtinicalioiis  : 
l'une  pour  des  fautes  graves  marquées  dans 
les  canons;  et  l'aulie  pourdemoinJi'esfautes, 
(ju'il  n'est  pas  permis  ;\  la  sollicitude  pasto- 
rale de  dissimuler.  11  remarque  qnc  celui  qui 
communique  sciemment  avec  un  excommu- 
nié, participe  i\  son  crime  ;  mais  qu'il  n'est 
point  coupable,  s'il  le  l'ait  par  ignorance.  11 
marque  que,  le  roi  Théobakle  ne  lui  ayant 
rien  dit  du  sujet  de  la  convocation  du  con- 
cile de  Toul,  il  n'avait  pas  cru  devoir  s'y 
trouver  ;  que  ce  prince,  pour  l'instruire  de 
ce  que  l'on  y  devait  traiter,  lui  avait  écrit 
une  seconde  lettre,  mais  qu'elle  lui  avait  été 
rendue  trop  tard.  Il  se  plaint  à  saint  Nicet 
de  ce  qu'il  ne  lui  avait  pas  fait  lui-même 
savoir  le  sujet  de  la  convocation  de  cette  as- 
semblée, puisqu'il  lui  convenait  mieux  qu'au 
prince  de  l'instruire  sur  ces  sortes  de  matiè- 
res ;  avouant  néanmoins  qu'il  ne  pouvait  se 
dispenser  d'obéir  aux  ordres  du  roi  lors- 
qu'ils avaient  le  bien  pour  objet,  et  qu'il  au- 
rait en  effet  obéi,  si  la  seconde  lettre  de  ce 
prince  lui  eût  été  rendue  ;'i  temps.  Cette  lettre 
de  Mappinius  se  trouve  dans  le  cinquième 
tome  des  Conciles  du  Père  Labbe,  comme 
pour  servir  de  supplément  aux  Actes  du  con- 
cile de  Toul. 

ARTICLE  XV. 

CONCILE  DE  MOPSUESTE  [550];  SECOND  CONCILE  DE 
CONSTANTINOPLE ,  CINQUIÈME  GÉNÉRAL  [353], 
[ÉDIT  DE  JUSTINIEN  CONTRE  ORIGÈNE.] 

projei  du  1.  Nous  l'avous  déjà  remarqué,  le  juge- 
ment rendu  par  le  pape  Vigile  le  1 1  avril  348, 
nommé  Judicatum,  par  lequel  il  condamnait 
les  Trois-Chapitres,  sans  préjudice  des  dé- 
cretsdu  concile  de  Chalcédoine,  etàla  charge 
que  personne  ne  parlerait  plus  de  cette  ques- 
tion, ni  de  vive  voix,  ni  par  écrit,  n'avait 


cfnquiêi 
concile  gé- 
néral. 


contenté  personne.  Les  ennemis  des  Truà- 
C/ia/jitres  étaient  choipK'S  do  la  réserve. 
Sauf  iautuvitrdu  concile  de  Cli/dcédoine;  cl  les 
défenseurs  dos  Trois-Cltopitres  étaient  indi- 
gnés que  le  Pape  se  fiU  laissé  enga;4or  i'i  les 
condamner.  Tous  les  évoques  d'Afrique, 
d'Ulyrie  et  de  Dalmalio  se  l'elirôrent  de  sa 
communion  ;  et  il  y  en  eut  même  dans  le 
clergé  de  Rome  qui  écrivirent  contre  lui 
dans  les  provinces,  persuadés  qu'en  con- 
damnant les  Trois-C liapitres ,  il  avait  aban- 
donné le  concile  do  Clialcédoine.  Vigile, 
voyant  le  scandale  que  sou  jugement  avait 
produit,  et  qu'il  continuait  de  produire  par 
suite  de  l'attachement  dos  évoques  de  l'Oc- 
cident à  lu  défense  des  Trois-CItapitres  ; 
pressé  d'ailleurs  par  Théodore  de  Césarée 
et  les  autres  évoques  d'Orient  de  les  con- 
damner absolument,  sans  faire  aucune  men- 
tion du  concile  de  Chalcédoine,  dit  ^  à  l'em- 
pereur Justinien  de  faire  venir  à  Constanti- 
nople  les  évêques  de  toutes  les  provinces , 
cinq  ou  six  de  chacune ,  afin  de  régler  pai- 
siblement cette  affaire  d'un  commun  consen- 
tement. ((  Car  je  ne  pourrai  jamais  me  ré- 
soudre ,  ajouta- t-il  ',  à  faire  seul,  et  sans  le 
consentement  de  tous,  ce  qui  rend  douteuse 
l'autorité  du  concile  de  Chalcédoine  et  scan- 
dahse  mes  frères.  »  Le  Pape  tira  parole  de 
l'Empereur,  que ,  sans  avoir  égard  à  ce  qui 
avait  été  dit  ou  écrit  jusques-là  sur  cette 
matière,  elle  serait  examinée  dans  un  con- 
cile avec  les  évêques  d'Afrique  et  des  autres 
provinces ,  principalement  de  celles  où  elle 
avait  causé  du  scandale  ;  et  qu'en  attendant 
la  décision  du  concile,  personne  n'entrepren- 
drait rien  au  sujet  des  Trois-Chapitres.  La 
chose  fut  convenue  ainsi  '  entre  Vigile  et 
Justinien  en  présence  de  Mennas  de  Con- 
stantinople,  de  Dacius  de  Milan,  de  Théodore 
de  Césarée ,  de  plusieurs  autres  évêques 
grecs  et  latins ,  des  juges ,  des  grands  et  de 
tout  le  sénat.  En  exécution  de  ce  projet , 
l'Empereur  envoya  en  Afrique  et  en  Illyrie  ' 
pour  faire  venir  les  évêques.  Tous  ceux  de 


'  De  qua  re  non  mediocriter  ingemissimus, 
quod  nos  relatione  vestra  scire  non  feceritis, 
iitrinn  ex  canonica  lectione  damnentur,  an  pro 
pastorali  diligentia  corrigantur.  Licet  nihil  novi 
vos  de  his  rehus  invenire  passe  eognoscimus , 
quod  prisca  Pittrum  solertia  non  potuit  reperire; 
tamen  ahsurdum  esse-  videtur,  ut  a  nobis  reci- 
piantur,  qui  a  robis  secundum  seriem  canonum 
ecclesiaslica severitate  abdicantur;  novimus enim, 
si  scienter  hoc  gerimus,  quod  criminibus  aliorum 

LX. 


misceamur;  si  ignoranler,  reatui  non  snbdamur, 
Tom.  V  ConcU-,  pag.  403. 

2  Episl.,  legatis  Franc,  tom.  V  Concil.,  pag.  407. 

'  Sine  consensu  omnium  isla,  quœ  et  synodum 
Chalced'inensem  in  dubium  venire  faciunt ,  et 
scandaltun  fralribiis  mets  générant,  solus  facere 
j)o«  acquiescam.  Epist.  Leg.  Francor.,  pag.  407. 

4  Tom.  V  Concil.,  png.  33.5,  S^ifi. 

s  Epist.  Leg.  Franc,  pag.  407. 


866 


HISTOIRE  GENERALE  DES 


rniyrie  refusèrent  ;  mais  il  en  vint  quelques- 
uns  d'Afrique.  Le  Pape ,  sachant  qu'ils  ap- 
prochaient de  Conslanlinople ,  dit  à  Justi- 
nien  :  «  Si  vous  n'êtes  pas  content  de  ce  que 
j'ai  déjà  décidé,  rendez-moi  le  jugement  que 
j'ai  prononcé ,  et  nous  examinerons  l'afl'uiic 
de  nouveau  avec  ces  évoques  qui  viennent.» 
Dieu  permit  '  que  le  Pape  trouvât  ce  moyen 
de  retirer  son  Judicatum  puhhquemenl  dans 
une  assemblée.  Il  relira  aussi  les  souscrip- 
tions des  évoques  grecs,  c'est-à-dire  les  avis 
qu'ils  avaient  donnés  par  écrit ,  étant  avec 
lui  à  Conslanlinople  en  547,  et  que  l'on  gar- 
dait au  palais  avec  les  souscriptions  de  ceux 
qui  avaient  condamné  les  Trois-Chapilres; 
après  quoi  il  déclara  que,  si  quelqu'un  d'en- 
tre eux  faisait  quelque  chose  sur  ce  sujet  jus- 
qu'au concile  universel,  ou  consentait  à  ce 
que  d'autres  auraient  fait ,  il  serait  séparé 
de  la  communion  du  Saint-Siège. 
contiie  e,  2.  Il  était  intéressant  pour  les  Orientaux 
H^r..esie,co  (j'avoir  des  preuves  en  main  que  le  nom  de 
Théodore  de  Mopsueste  n'était  point  dans 
les  diptyques  de  cette  église,  et  que  personne 
ne  se  souvenait  de  l'y  avoir  entendu  nom- 
mer. Ils  persuadèrent  donc  à  l'Empereur 
d'écrire  '  à  Jean,  évoque  de  Jusliniauople, 
métropolitain  de  la  seconde  Cilicie,  et  à 
Cosme,  évêque  de  Mopsueste ,  d'assembler 
un  concile  en  celle  ville.  Les  ordres  du 
prince  furent  exécutés  :  le  concile  s'assem- 
bla le  17  juin  de  l'an  350.  Jean  de  Justinia- 
nople  y  présida  ',  assisté  de  huit  évéqucsde 
la  seconde  Cilicie.  Marthauius,  comte  des 
domestiques,  y  fut  présent  avec  tout  le 
clergé  de  Mopsueste,  deux  comtes,  deux 
tribuns,  quelques  autres  ofiSciers  et  plusieurs 
habitants  des  plus  considérables  de  la  ville. 
Alors  Julien ,  diacre  et  notiiire ,  lut  '  les  let- 
tres de  l'Empereur;  et  les  saints  Évangiles 
ayant  été  mis  au  milieu  de  l'assemblée,  on 
fit  avancer  ceux  que  l'on  avait  produits  pour 
témoins  de  ce  fait,  que  le  nom  de  Théodore 
n'avait  point  été  inséré  dans  les  diptyques 
de  l'église  de  Mopsueste.  Parmi  ces  témoins 
il  y  avait  onze  prêtres,  six  diacres  et  dix-sept 
laïques,  dont  deux  étaient  comtes,  et  les 
autres  les  plus  anciens  et  les  plus  honnêtes 
gens  (jue  Paul  défenseur  de  la  ville  avait,  dit- 
il  ,  pu  trouver.  Les  diptyques  furent  appor- 
tés '  par  le  trésorier  de  l'église ,  qui  les  gar- 


AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

dail  avec  les  vases  sacrés;  on  les  lut  publi- 
quement et  à  haute  voix  dans  deux  exem- 
plaires dillérents.  Le  nom  de  Théodore  ne 
s'y  trouvant  pas,  les  évêques  firent  jurer  le 
trésorier  sur  les  Évangiles ,  qu'il  n'en  avait 
point  d'autres.  Quand  ils  eurent  fait  ensuite 
promettre  aux  témoins,  sur  le  môme  ser- 
ment, de  dire  la  vérité,  le  prêtre  Martyrius, 
le  premier  et  le  plus  ûgé  de  tous,  déclara 
qu'il  n'avait  jamais  vu  ni  ouï  dire  que  Théo- 
dore autrefois  évêque  de  Mopsueste  eût  été 
nommé  dans  les  sacrés  diptyques.  Mais  parce 
que,  dans  un  des  exemplaires  des  diptyques 
représenté  par  le  trésorier,  il  se  trouvait  un 
Théodore,  il  certifia  que  ce  Théodore  n'était 
mort  que  depuis  trois  ans ,  et  qu'il  était  de 
Galatie.  Il  ajouta  qu'il  avait  ouï  dire  que 
saint  Cyrille,  évêque  d'Alexandrie  avait  été 
mis  dans  les  diptyques  au  lieu  de  Théodore, 
et  qu'il  n'avait  point  de  connaissance  qu'il  y 
eût  eu  dans  Mopsueste  d'évêque  nommé 
Cyrille.  Tous  les  autres  témoins  déposèrent 
de  même.  Les  évêques  du  concile,  voyant  ' 
que  la  déposition  des  témoins  était  unanime, 
déclarèrent  *  qu'il  paraissait,  tant  par  leurs 
témoiguages,  que  pour  avoir  vu  eux-mêmes 
les  diptyques,  que  l'ancien  Théodore  en  avait 
été  ôté  ;  et  il  fut  résolu  qu'on  ferait  écrire  une 
lettre  synodique  à  l'Empereur,  et  une  autre 
au  pape  Vigile,  pour  les  informer  de  tout  ce 
qui  s'était  passé  dans  cette  assemblée.  Nous 
avons  encore  '  ces  deux  lettres. 

3.  Cependant,  au  préjudice  de  la  conven-  vioieoee» 
tion  de  ne  plus  parler  des  Trois-C hapitres  i* 
jusqu'à  la  décision  du  concile,  on  recom- 
mença à  Conslanlinople  à  presser  le  Pape  de 
les  condamner.  Il  le  refusa  ;  et  aussitôt  Théo- 
dore de  Césarée  fit  en  sorte  '  que  l'édit  de 
Justinien,  portant  condamnation  des  Trois- 
Chapitres,  fut  relu  dans  le  palais  en  présence 
de  Vigile  et  de  quelques  évêques  grecs  qui 
tenaient  son  parti.  Le  Pape  en  lit  des  plaintes; 
mais  elles  n'empêchèrent  pas  l'évêque  de 
Césarée  de  faire  un  grand  nombre  '  de  co- 
pies de  cet  édit,  qu'il  fit  atlicher  dans  l'église 
de  Conslanlinople  et  en  divers  autres  lieux, 
jusques  sur  les  portes  de  la  maison  de  Placi- 
die  où  Vigile  faisait  sa  demeure.  Il  fit  prier 
l'Empereur '"  d'ordonner  que  l'on  (Mât  les 
édits,  protestant  qu'il  se  séparait  de  la  com- 
munion de  tous  ceux  qui  Icâ  auraient  reçus. 


'  Toni.  V  Concil.,  ptig.  408.  -   •  Ibid.,  pag.  491. 

»  Ihxil.,  i>ag.  492.—  '  Ibid.,  pag.  493.  —  •  Ibid., 

pag.  494.  —  •  Ibid.,  pag,  502.  —  '  Ibid.,  pag.  502 


et  503.  —  9  Sent,  in  Theod.  Tom.  V  Concil., 
335.  —  •  Epist.  Legali.1,  pag.  408. 
'•  Vigil..  Epist.  15,  pag.  529. 


pa«- 


CHAPITRE  LXXXVI.  —  r  CONCILE  DE  CONSTANTINOPLE. 


I 


[VI*  SIÈCLE.] 

Daciiis,  évôqim  do  Milan,  dt'clara  la  in(^me 
chose,  tant  pour  lui,  que  pour  les  évèipies 
entre  lesquels  son  ëgliso  clait  siluéc.  Tliéo- 
(loïc,  sans  avoir  aucun  égard  aux  prolcsla- 
tions  du  pape,  alla  '  avec  les  évéques  de  son 
parli  i\  l'église  où  l'édit  était  alliclié,  y  célé- 
bra la  messe,  et  ôla  des  diptyques  le  nom  de 
Zoïlc  d'Alexandrie,  en  mettant  ;\  sa  place  le 
nom  d'Apollinaire,  intrus  dans  ce  siège.  Le 
Pape,  en  ayant  éti;  informé,  ne  voulut  plus 
communiquer  avec  les  Orientaux.  Mais  pré- 
voyant que  l'Empereur  en  serait  irrité,  il  se 
retira  avec  *  Uacius,  de  Milan,  dans  le  palais 
d'IIormisdas  pour  mettre  sa  vie  en  sûreté. 
Juslinicn  envoya  un  oiiicier  avec  quantité  de 
soldats  pour  l'en  tirer  de  force.  Cet  oiiicier, 
qui  était  le  préteur  destiné  à  la  recherche 
des  voleurs  et  des  meurtriers ,  fit  d'ahord 
prendre  par  les  cheveux  les  diacres  et  les 
autres  clercs  pour  les  éloigner  de  l'autel  de 
l'église  de  Saiut-Pierre,  où  ils  étaient  avec 
le  Pape;  puis,  pour  en  arracher  le  Pape  mê- 
me, qui  s'était  mis  sous  l'autel,  il  le  fit  tirer 
par  les  pieds,  par  la  barbe  et  parles  cheveux. 
Vigile,  embrassant  les  piliers  qui  soutenaient 
l'autel,  tint  ferme,  et,  comme  il  était  grand 
et  robuste,  il  rompit^  quelques-uns  de  ces 
piliers.  II  s'en  fallut  peu  que  la  sainte  table 
ne  tombât  sur  lui  :  mais  les  clercs  la  soutin- 
rent. Le  peuple  accourut  au  bruit,  et  se  mit 
à  crier;  ce  qui  obligea  le  préteur  de  se  reti- 
rer. On  croit  que  ce  fut  à  cette  occasion  que 
le  Pape  dressa  une  sentence  contre  Théo- 
dore de  Césarée,  dans  laquelle  il  le  prive  de 
l'épiscopat  et  de  la  communion  catholique. 
Elle  est  datée  du  14  août  351,  et  se  trouve 
parmi  les  Actes  '  du  cinquième  concile.  Le 
Pape  ne  la  publia  pas  d'abord,  afin  de  don- 
ner ^  le  loisir  à  l'Empereur  de  révoquer  ce  qu'il 
avait  fait,  et  aux  évêques  condamnés  de  se 
repentir.  Il  se  contenta  de  la  remettre  à  une 
personne  fidèle,  avec  ordre,  en  cas  qu'on  lui 
fit  violence  ou  qu'il  vînt  à  mourir,  de  la  pu- 
blier partout.  L'Empereur  fit  promettre  à  Vi- 
gile qu'il  ne  lui  serait  fait  aucun  mal,  s'il 
sortait  de  l'église  de  Saint-Pierre]:  on  promit 


867 


la  mémo  chose  ù  Dacius  de  Milan  ;  sur  quoi 
le  l'ai)e  retourna  au  palais  d(!  l'iacidie.  Mais 
s'aperccvant  qu'on  ne  cessait  do  lui  tendre 
des  pièges,  et  que  deux  jours  avant  Noël  ou 
avait  mis  des  gardes  à  toutes  les  entrées  de 
ce  palais,  il  s'enfuit  de  nuit  par-dessus  une 
petite  muraille,  sortit  de  Conslantinople,  et 
se  réfugia  à  Chalcédoine  dans  l'église  de 
Saintc-Euphémie.  Justinien  lui  envoya  plu- 
sieurs de  ses  ofiicicrs  pour  l'engager  h  reve- 
nir; mais  ni  eux,  ni  Pierre  le  référendaire 
de  l'église  de  Conslantinople,  ne  purent  l'o- 
bliger d'obéir  aux  ordi'es  de  ce  prince.  Il 
offrit  d'envoyer  à  Conslantinople  Dacius  de 
Milan  avec  quelques  autres,  sous  sauf-con- 
duit, pour  traiter  l'afiaire  de  l'Église,  protes- 
tant que,  si  l'on  refusait  ses  oUres,  il  serait 
obligé  de  décider  la  cause,  n'y  ayant  ni  pa- 
rents %  ni  biens  qu'il  préférât  au  salut  de 
son  âme,  et  à  la  réputation  du  prince.  C'est 
ce  que  dit  Vigile  dans  un  écrit'  en  forme  de 
lettre,  daté  du  5  février  332,  et  adressé  à 
tout  le  peuple  de  Dieu.  Il  y  raconte  toutes 
les  vexations  qu'on  lui  avait  fait  souffrir,  et 
y  donne  sa  confessioa  de  foi  pour  sa  justifi- 
cation. Il  retend  principalement  sur  le  mys- 
tère de  l'Incarnation  ,  reconnaissant  '  que 
saint  Pierre  eu  a  renfermé  toute  l'économie 
dans  ces  paroles  :  Vous  êtes  le  Christ  Fils  du 
Dieu  vivant,  nous  apprenant  que  c'est  le  mê- 
me qui  est  Dieu  et  homme,  ayant  conservé, 
dans  l'unité  de  personne ,  à  chacune  des 
deux  natures  ses  propriétés;  que  ce  qu'il  a 
pris  de  sa  mère  toujours  vierge,  il  l'a  pris 
dans  le  temps,  mais  qu'il  est  né  du  Père 
avant  tous  les  siècles.  11  reconnaît  les  quatre 
conciles  généraux,  et  dit  anathème  à  Nesto- 
rius,  à  Eutychès,  à  Dioscore,  et  à  tous  les 
autres  hérétiques  qui,  dans  les  siècles  pré- 
cédents, avaient  troublé  l'Eglise. 

4.  Théodore  de  Césarée  et  les  autres  de 
son  parti,  étonnés  de  la  fermeté  de  Vigile, 
résolurent  de  lui  donner  satisfaction.  Ils  lui 
adressèrent  à  cet  efi"et  une  profession  de  foi, 
où  ils  déclaraient  que ,  pour  conserver  la 
concorde  ecclésiastique,  et  donner  des  mar- 


Lcs  Orien. 
(aux  présen- 
tent leur  pro- 
fession d*"  Tii 
h  Vljllc. 


'  Sent,  in  Theod.,  pag.  336.  —  ^  Epist.  Legatis, 
pag.  409.  —  3  Theoph.,  in  Chronog.,  pag.  152. 

*Tom.  V  Concp.  33i.  — »Vigil.,  EpiSt.lS.p.  329. 

'  Si  ulla  provenerit  ultra  dilatio,  nos  necesse 
est  causam  modis  omnibus  definire:  quia  neque 
proximos,  neque  alios  parentes  aut  quamlibet 
substantiam  animœ  noslnc  tel  j:iissinn  princi- 
pis  opinioni  prœponimus.  Vigil.,  Epist.  15,  pag. 
334. 


■>  Vigil.,  Epist.  15,  pag.  328. 

*  Responsionis  brevitatc  confessus  est  :  Tu  es 
Christus  Filiui  Dei  vivi.  Sacratissimœ  sciticetmys- 
terium  incarnationis  cjus  apcriens,  dum  in  uni- 
tate  personœ,  seriala  geininœ  proprietate  natu- 
rw,  homn  idemque  Deus,  et  quod  ex  maire  seni- 
per  lirgine  sumpsit  in  tempore,  et  quod  natus 
ex  Viilre  est  unie  Sicculu,  pcrmancret.  Ibiil.,  pag. 
331. 


868 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


ques  qu'ik  n'avaient  d'autre  doctrine  que 
celle  des  Apôtres,  ils  recevaient  les  (juatre 
conciles  généraux  du  Nicée,  de  Constantino- 
ple,  d'Ephèse  et  de  Cbalcédoine,  promettant 
de  suivre  inviolablement  tout  ce  qui  avait 
été  décidé  d'un  commun  consentement  avec 
les  légats  et  les  vicaires  du  Saint-Siège,  par 
lesquels  les  papes  y  ont  présidé  '  chacun  eu 
leur  temps.  Les  Orientaux  ne  doutaient  donc 
point  alors  que  les  Papes  n'eussent  présidé 
par  leurs  légats  à  ces  conciles  généraux. 
Venant  ensuite  au  formulaire  ou  libelle  fait 
pour  la  condamnation  des  Trois-C/iapitres, 
ils  consentaient  qu'il  fût  remis  entre  les 
mains  du  Pape,  à  qui  ils  demandaient  pardon 
des  mauvais  traitements  qu'il  pouvait  avoir 
reçus,  et  de  ce  qu'ils  avaient  communiqué 
avec  des  personnes  excommuniées  de  sa 
part.  Cette  profession  de  foi  fut  signée  par 
Mennas  de  Constanliuople,  par  Théodore  de 
Césarée,  par  André  d'Ephèse,  par  Théodore 
d'Antioche  en  Pisidie,  par  Piei-re  de  Tarse, 
et  par  plusieurs  autres  évèques.  Le  patriar- 
che Mennas  étant  mort  le  25  août  552,  Eu- 
tychius  son  successeur  donna,  aussitôt  après 
son  intronisation,  sa  profession  de  foi  au  pape 
Vigile,  à  peu  près  semblable  à  celle  que 
Mennas,  Théodore  de  Césarée  et  les  autres 
Orientaux  lui  avaient  donnée.  11  y  déclare 
qu'il  reçoit  les  quatre  conciles  généraux  et 
les  lettres  des  Papes,  particulièrement  celles 
de  saint  Léon,  et  ajoute  :  (i  Puisque  nous 
sommes  d'accord  sur  tout  cela,  nous  deman- 
dons que  votre  Sainteté,  présidant  '  à  notre 
assemblée,  et  en  présence  des  saints  Évan- 
giles, les  Trois-Chapitres  soient  examinés  et 
la  question  terminée,  pour  confirmer  la  paix 
des  églises.  »  Eutychius  donna  cette  profes- 
sion de  foi  au  Pape  le  jour  de  l'Epiphanie  553. 
Elle  fut  souscrite  aussi  par  Apollinaire  d'A- 
lexandrie, qui  dès  lois  eu  fut  reconnu  pour 
évèque  légitime  ,  par  Domnin  d'Antioche  , 
par  l'^lie  de  Thessalonique,  et  par  quelques 
autres  qui  n'avaient  pas  souscrit  à  la  profes- 
sion précédente.  Le  Pape,  qui  aussitôt  qu'on 
l'eut  satisfait  par  la  première  profession  de 

'  Per  omnia  et  in  omnihus,  quœcumque  in  om- 
iiibiis  Qfstis  Chalcedimensis  coticilii  aliarttmque 
pr(edictarum  synudis  scriplum  invetiilur,  coin- 
muni  coiisemu  cuin  Icgalis  iilque  vicariis  Sedis 
aposloUcœ,  in  qiiibus  juxln  lempora  sua  pnede- 
ceixores  sanclitatis  résine  ipsis  syuodis  prœse- 
derunl,  lam  île  /ide  quain  de  alii.s  nmnihus  causis... 
nos iiriimillimus  seculurns.'ïiim.X  Concil.,  pag.  338. 

'  Ideo  pclimus,  prœsidente  nobis  vestra  bcali- 
liidine,  sangtig    proposais  Evangeliis,  coinmuni 


foi,  était  retourné  de  Cbalcédoine  à  Conslan- 
tinople,  répondit  à  la  seconde  dès  le  lende- 
main 7  janvier,  en  '  l'approuvant,  et  consen- 
tant à  ce  qu'on  s'assemblât  pour  décider  la 
question  des  Trois-Chapitres.  Il  aurait  sou- 
haité '  que  le  concile  se  tint  en  Italie,  ou  du 
moins  en  Sicile,  et  que  l'on  y  appelât  les 
évoques  d'Afrique  et  des  autres  provinces 
où  la  langue  latine  était  en  usage  ;  il  le  de- 
manda à  l'Empereui-.  Ce  prince  le  refusa  ;  et 
il  fut  convenu  seulement  que  le  Pape  don- 
nerait à  Justinien  les  noms  des  évêques  de 
ces  provinces,  avec  qui  il  lui  serait  permis 
de  délibérer.  On  convint  aussi ,  quelque 
temps  avant  Pâques,  qui  celte  année  353 
était  le  20  avril,  que  les  évêques  d'Orient  et 
d'Occident,  qui  se  trouvaient  à  Constantino- 
ple,  s'assembleraient  en  nombre  égal  pour 
traiter  l'atl'aire  des  Ti'ois-C/ia/utres. 

5.  Mais  l'Empereur,  désirant  de  la  termi- 
ner au  plus  tôt  et  à  son  avantage,  n'eut  an-  .  .f'""'*;* 
cun  égard  à  toutes  ces  conventions.  Il  Ot  U"J;J  'j,°'_|; 
assembler  le  concile  la  vingt-septième  année  S""?"™"  v 
de  son  règne,  la  douzième  après  le  consulat  fû".'"'  ''*' 
de  Basifc,  indiction  1,  le  i'  des  nones  de 
mai,  c'est-à-dire  le  -4  de  ce  mois  553,  dans  la 
salle  secrète  de  la  cathédrale  à  Conslanti- 
nople.  Ou  a  donné  le  nom  de  Conférences  aux 
séances  de  ce  concile  qui  commencé  et  con- 
tinué d'une  manière  irrégulière  n'est  devenu 
œcuménique  que  par  la  confirmation  subsé- 
quente du  pape  Vigile].  Eutychius,  patriarche 
de  Constautinople,  tint  le  premier  rang  dans 
la  première  conférence,  et  après  lui,  Apol- 
linaire, patriarche  d'Alexandrie;  Domuin, 
d'.\ntioche;  trois  évêques,  députés  d'Eusto- 
chius  de  Jérusalem,  et  les  évèques  dépen- 
dants de  ces  patriarches,  en  tout  cent  cin- 
quante-un' évoques,  entre  lesquels  il  y  en 
avait  cinq  d'.\frique.  Tous  ('tant  assis,  on  fit 
entrer  Théodore  ,  silenciaire,  porteur  d'une 
lettre  de  l'Empereur  au  concile,  qui  en  or- 
donna la  lecture.  Ce  prince  y  relevait  le  zèle 
que"  les  empereurs  oi-lhodoxes,  ses  prédé- 
cesseurs, avaient  témoigné  pour  la  religion 
dans  les  quatre  premiers  conciles  généraux 

traclatu  eadem  capitula  in  medio  proponenda 
Quwri  el  conferri,  et  fineniquiestioni  imponi  IbiJ., 
pafi.  339. 

>  Ibid.,  pap.  421,  428.—  »  Ibid.,  pBg.  340. 

'  l.v  iiininiscrit  do  Ilcaurnis  lit  :  Le  Iroisitme  des 
noues,  llahiz.,  Imu  V  Concil. ,  pag.  1492. 

•  Après  Jean  de  Nicomildie,  les  niauuscritg  met- 
tcut  Klicnnc  de  Niiiie,  omis  pas  le  l'ère  Labbe. 
Baluz,,  toiii.  V  Concil.,  i>ag.  1492. 

'  Toiu.  V  Concil,  l>ag.  419. 


[vi«  SIÈCLE].         CHAPITRE  LXXXVI.  —  2' 

asscmbl(5s  par  loiir  aiilnrilt^,  U  faicait  aussi 
l'iMoge  do  IVmpci'oiir  Li'on  ,    qui   consulta 
tous  les  évèquoa  tic  son  cmiiire  pour  savoir 
ce  quo  chacun  d'eux  pensait  du  concile  do 
Clialci'doine.  Ensuite  il  passait  aux  tioiiljles 
et  aux  divisions  que  les  seclatcurs  de  Neslo- 
l'ins  et  d'Rutychès  avaient  causés  dans  les 
lîlglises,  et  se  faisait  honneur  d'avoir  réuni 
les  év<^ques  d'Occident  et  d'Orient,  sans  dire 
un  mot  de  reinpcreur  Justin,  sous  le  règne 
duquel  celle  rt'union  s'était  l'aile.  11  ajoutait 
ce  qui  suit  :  pour  mahitenir  l'autorité  du  con- 
cile de  Clialcédoine,  il  avait  fait  sortir  des 
églises  ceux  qui  ne  voulaient  pas  le  recevoir; 
depuis  peu  ,   quelques    nesloriens,  voulant 
infecter  les  églises  du  venin  de  leur  hérésie, 
s'étaient  servis  du  nom  de  Théodore  de  Mop- 
sueste,  maître  de  Neslorius,  et  coupable  de 
plus  grands  hiasphèmcs  que  son  disciple;  de 
celui  de  Théodoret,  ennemi  de  la  foi  établie 
à  Éphèse  par  saint  Cyrille;  et  de  la  lettre 
d'ibas  à  Maris,  persan,  remplie  d'impiétés, 
qu'ils  disaient  toutefois  avoir  été  approuvée 
par  le  concile  de  Clialcédoine,  pour  mettre  à 
couvert  leur  mauvaise  doctrine  sous  le  nom 
de   ce   concile;    pour  arrêter    le    cours   de 
l'hérésie  nestorienne  qu'ils  renouvelaient,  il 
avait  consulté  les  évêques  sur  les  Trois-Cha- 
pitres,  et  les  avait  condamnés  de  leur  avis 
et  avec  eux;  mais  comme    il    se  trouvait 
encore  plusieurs  personnes  qui  en  prenaient 
la  défense,  il  avait  été  obligé  d'assembler 
ces  mêmes  évêques  en  concile,  atin  qu'ils 
fissent  connaître  une  seconde  fois  ce  iiu'ils 
pensaient   sur  celte   matière;   le  pape   Vi- 
gile avait  lui-même  condamné  et  analhé- 
matisé  les    Trois- Chapitres;  l'on  était  con- 
venu avec  lui  de  traiter  de  nouveau  cette 
affaire  dans  un  concile  ;  en  conséquence  il 
lui  avait  fait  déclarer  par  ses  olliciers  de  se 
rendre  à  l'assemblée   des  évêques  pour  y 
condamner  avec  les  autres  ces   Trois-Cha- 
pitres,  ou  pour  les  défendre  s'il  les  croyait 
soutenables;    au  lieu  d'y    venir,    il   s'était 
contenté  de  dire  qu'il  ferait  savoir  à  l'Empe- 
reur ce  qu'il  pensait  sur  ce  sujet.  Justinien 
fait  ensuite  une  profession  de  sa  foi  ;  après 
quoi  il  exhorte  les  évêques  à  n'avoir  en  vue, 
dans  l'examen  des  Trois-Chapitres,  c'est-à- 
dire  des  écrits  de  Théodore  de  Mopsueste, 
des   anathématismes  de   Théodoret    contre 
ceux  de  saint  Cyrille,  et  de  la  lettre  d'ibns  ;\ 
Maris,  que  la  crainte   de  Dieu   et  l'amoLir 
de  la  vérité.  Et,  afin  qu'ils  n'en  fussent  em- 
pêchés par  aucune   considération  pour  le 


CONCILE  DE  CONSTANTINOPLE. 


8G9 


pape  Vigile,  il  dit,  en  le  taxant  tacitement  : 
<(  (Juand  celui  qui  est  interrogé  sur  sa  foi 
dill'ère  longtemps  de  répondre,  il  est  censé 
renoncer  à  la  confession  de  la  vérité  :  car  il 
n'y  a  en  cette  malière  ni  premier,  ni  second; 
mais  le    plus   prêt  j'i  rc'pondre  est  h;  plus 
agréable  à  Dieu.  »  Cette  lettre  est  datée  du 
4  des  nones  de  mai.  Le  silenciairc  Théodore 
s'étanl  retiré,  on  lut  la  profession  de  foi  '  que 
le    patriarche   Eutychius    avait  donnée   au 
Pape  le  G  janvier,  et  la  réponse  que  Vigile 
lui  avait  faite  ',  par  laquelle  il  le  reconnais- 
sait pour  orthodoxe ,  consentait  fi  la  tenue 
d'un  concile  sur  les  Trois-Chapitres,  et  pro- 
mettait d'y  assister.  Les  évêques  convinrent, 
qu'encore  que  plusieurs  d'entre  eux  l'eus- 
sent invité  de  s'y  rendre,  il  était  raisonnable 
de  l'y  inviter  de  nouveau,  avant  de  juger  la 
question  des  Trois-Chnpitrcs.  C'esl  pourquoi 
les  trois  patriarches  Eutychius,  Apollinaire 
et  Domnin,  plusieurs  métropolitains  et  quel- 
ques évêques,  au  nombre  de  dix-huit,  al- 
lèrent trouver  le  Pape,   qui  répondit  qu'il 
ne  pouvait  ce  jour-là  leur  donner  de   ré- 
ponse à  cause  d'une  indisposition,  et  pro- 
mit de  leur  faire  savoir  le  lendemain  sa  réso- 
lution. Les  députés  ayant  fait  leur  rapport 
au   concile,  on   remit   l'aflaire  à  un   autre 
jour. 

6.  La  seconde  conférence  fut  tenue  le  8    scfnnjecon- 
du  même  mois  de  mai.  Les  évêques,  députés  4Ïg?'''  '''''" 
pour  savoir  la  résolution  du  Pape,  rappor- 
tèrent qu'étant  sWés  chez  lui  deux  jours  au- 
paravant, il  leur  avait  répondu  qu'il  ne  pou- 
vait venir  à  l'assemblée,  parce  qu'il  y  avait 
un  grand  nombre  d'évêques  d'Orient  et  peu 
d'Occident  ;  qu'il  mettrait  son  avis  par  écrit 
et  le  donnerait  à  l'Empereur;  que,  sur  cela, 
ils  lui  avaient  représenté  que,  dans  les  écrits 
fails   entre  lui  et  eux,    il  avait  promis  de 
venir  à  l'assemblée  des  évêques  qutseraient 
de   leur  communion  ;    qu'ils   étaient  de  la 
sienne;  qu'il  n'était  point  à  propos  de  diftd- 
rer  à  cause  des  évêques  d'Occident,  puisque, 
dans  les  quatre  conciles  généraux,  il  n'y  en 
avait  eu  que  très-peu,  et  seulement  deux  ou 
trois   évêques  avec  quelques   clercs  ;    qu'il   ?'?•  '•'i 
était  présent  et  avait  avec  lui  des  évêques 
d'Afrique  et  d'illyrie;  qu'ainsi  rien  n'empê- 
chait qu'il  ne  vint  avec  eux  au  concile  ter- 
miner avec  charité  l'affaire  qui  faisait  le  su- 
jet de  sa  convocation.  «  Xous  lui  avons  dit 
encore ,   ajoutèient   les   députés  :    Si    vous 

1  Tom.  V  CnnciL.  pag.  424.  —  •  Ibid.,  pag.  427. 


870 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 

qu'ils  traiteraient,  eu  temps  et  lieu,  Primase 
suivant  la  rit,'ucur  des  canons;  et  qu'i"!  l'égard 
des  trois  évê(|ues  d'Illyrie,  il  leur  serait  per- 
mis de  se  joindre  à  JJénénalus,  ainsi  qu'ils 
l'avaient  demandé,  vu  que  Bénénatus  était 
d'accord  avec  le  concile,  comme  il  paraissait 
en  ce  que  l'évèque  Pliocas,  son  sull'ragantet 
son  vicaire,  y  était  présent.  Ici  finit  la  se- 
conde conférence. 

7.  On  tint  la  troisième  le  lendemain,  9  mai;       T„irij„, 
mais  la  question  des  Trois-C/ia/)itres  n'y  fut  j"'*'»"».!»- 


ne  voulez  pas  vonir,  nous  ne  laisserons  pas 
de  nous  assembler,  parce  qu'il  n'est  pas  juste 
que  l'Kmpereur  et  le  peuple-  fidèle  soient 
scandalisés  d'un  délai  qui  laisse  toutes  cho- 
ses en  suspens.  Nous  l'avons  averti  que 
nous  rapporterions  tout  à  l'Empereur;  et, 
sur  notre  rapport ,  ce  prince  a  promis  d'en- 
voyer au  Pape  des  magistrats  avec  des  évê- 
ques  pour  l'exhorter  encore  à  venir.  »  Ces 
magistrats  étaient  Libère,  Pierre,  Pelrice  et 
Constantin.  Celui-ci  qui  était  le  questeur  du 
sacré  Palais,  dit,  au  nom  de  tous,  qu'ils 
étaient  allés,  dès  le  1"  mai,  trouver  le  pape  Vi- 
gile par  ordre  de  l'Empereur;  qu'ils  y  étaient 
retournés  le  7  ,  et  qu'ù  chaque  fois  ils  lui 
avaient  dit  qu'on  pouvait  venir  ;\  l'assemblée 
avec  liberté,  et  même  y  prendre  la  défense 
des  Trois-Chapitres  ;  qu'après  plusieurs  dis- 
cours, le  Pape  leur  ayant  demandé  un  délai 
pour  donner  seul  sa  réponse,  ils  lui  avaient 
répondu  :  «  Vous  avez  condamné  seul  plu- 
sieurs fois  les  Trois-Chapitres  par  écrit  et 
de  vive  voix;  mais  l'Empereur  veut  que  vous 
vous  trouviez  au  concile  avec  les  autres  évo- 
ques, afin  que  la  chose  soit  jugée  en  commun. 
A  l'égard  du  délai,  ce  prince  vous  a  déjà  fait 
dire  que ,  si  vous  consentez  de  vous  trouver 
avec  les  patriarches  et  les  évèques,  selon 
que  vous  en  êtes  convenu  avec  eux,  il  vous 
accordera  le  délai  que  vous  demandez,  et 
même  plus  long.  Mais  si  vous  voulez  donner 
votre  avis  à  part,  il  est  nécessaire  que  les 
évoques  qui  ont  été  appelés  pour  ce  sujet , 
et  qui  sont  ici  depuis  si  longtemps,  donnent 
leur  décision  synodalemcut  :  car  il  n'est  pas 
possible  de  laisser  davantage  l'Église  de  Dieu 
en  confusion,  principalement  parce  que  les 
hérétiques  calomnient  les  évèques  en  les  trai- 
tant de  nestoriens.  »  Les  magistrats  ayant 
fini  leur  rapport,  les  évèques  qui  les  avaient 
accompagnés  au  palais  du  Pape,  assurèrent 
que  le  rapport  contenait  la  vérité.  Ensuite 
le  concile  députa  trois  évèques  et  trois  prê- 
tres pour  inviter  Piimase,  évéque  d'Adru- 
luet,  en  la  province  Hyzaccno,  et  trois  évè- 
ques d'Illyrie,  Sabinien,  Piojectus  et  Paul, 
de  se  trouver  à  l'assemblée.  Primase,  qui 
était  venu  à  Conslantinople  dès  l'année  pré- 
cédente, 352,  par  ordre  de  l'Empereur,  ré- 
pondit qu'il  n'irait  point  au  concile,  si  le  Pape 
n'y  était  présent.  Les  trois  évèques  d'Illyrie 
s'excusèrent  sur  ce  que  leur  archevêque, 
Piénénalus,  à  qui  seul  ils  devaient  répondre, 
n'y  était  point.  Cesréponsesayant  ('té  rappor- 
tées au  concile ,  les  évoques  déclarèrent 


point  encore  agitée.  Les  évoques  se  conten- 
tèrent d'y  faire  profession  de  suivre  la  foi 
des  quatre  conciles  généraux,  et  de  condam- 
ner tout  ce  qui  pourrait  leur  être  contraire 
ou  injurieux,  et  tout  ce  que  l'on  avait  écrit 
pour  la  défense  des  hérésies  qui  y  avaient 
été  condamnées.  Ils  ajoutèrent  qu'ils  sui- 
vaient aussi  la  doctrine  des  saints  Pères  et 
doctem's  de  l'Église,  en  particulier  de  saint 
Athanase ,  de  saint  Hilaire.  de  saint  Basile, 
de  saint  Augustin,  de  saint  Léon,  de  Proclus 
de  Coijstantinople  ,  et  de  plusieurs  autres 
qui  sont  dénommés.  Quant  aux  écrits  de 
Théodore  de  Mopsueste,  de  Théodorel  et 
d'ibas,  sur  lesquels  l'Empereur  les  avait  char- 
gés de  s'expliquer,  ils  en  renvoyèrent  l'exa- 
men h  un  autre  jour. 

8.  Ils  tinrent  la  quatrième  conférence  le 
12  mai.  On  la  commença  par  la  discussion 
des  éciits  de  Théodore  de  Mopsueste,  dont 
un  diacre  notaire  lut  divers  extraits,  mar- 
quant l'ouvrage  d'où  chacun  était  tiré.  Il 
parut  par  les  extraits  des  hvres contre  Apol- 
linaire, que  Théodore  j'  enseignait  que  ce 
n'est  pas  Dii-u  le  Verbe  cousubstanlicl  au 
Père  qui  est  né  de  la  Vierge,  mais  son  tem- 
ple ;  qu'il  doutait  même  si  le  Verbe  y  avait 
habité  dès  le  moment  de  sa  formation  ;  qu'il 
croyait  que  le  Verhc  perfectionnait  ce  temple 
peu  ;\  peu,  et  qu'on  l'adore  ii  cause  de  son 
union  avec  le  Verbe.  Par  les  extraits  de  ses 
Commentaires  sur  saint  Jean  :  qu'il  y  avait  de 
la  folio  à  croire  que  le  Sauveur,  en  souillant 
sur  ses  apôti'es  depuis  sa  ri'surreclion,  leur 
avait  donné  le  Saint-Esprit  ;  (jue,  quand  saint 
Thomas  s'écria  :  «  Mon  Seigneur  et  mon 
Hieu,  ))  ce  n'était  pas  h  J.'Siis-Christ  qu'il  par- 
lait, mais  ;\l)ion,  qu'il  louait  de  l'avoir  ressus- 
cité. Par  lcsextrailsdeses6'o»«»Hcn/oMr,<!.wr 
les  Actes  des  a/Il' fres  :  que  son  sentiment  était, 
que  nous  sommes  bajilisés  en  Jésus-Christ 
comme  les  Israélites  le  lurent  en  Moïse,  et 
que  nous  sommes  appeh-s  r/irétiens  comme 
on  appelait  les  platoniciens,  les  épicuriens, 


Qualrième 
tour  rcQ:e,  p. 
US. 


CHAPITRE  LXXXVI.  —  2«  CONCILE  DE  CONSTANTINOPLE. 


r«j-  "a- 


tu. 


[VI'  SIÈCLE.] 

les  ninrcioniles  et  les  miinicliiiens  du  nom 
des  nuleurs  de  leurs  sectes.  Par  les  exlraits 
do  SCS  livres  sur  l'Incarnation  :  qu'il  dipait 
que  Jc^sus-Cln-ist  est  l'imajje  de  Dieu ,  et 
qu'on  l'houore  do  même  qu'on  honore  l'image 
de  l'Empereur.  Par  les  extraits  de  ses  Com- 
menlaircs  sur  saint  Luc  :  qu'il  soutenait  que 
Jësus-Cbrist  est  fds  adoptif  comme  les  autres. 
Par  les  extraits  de  ses  Conunenlnires  sur  saint 
Matthieu  :  qu'il  avait  dit  que  les  anges  qui 
s'ëtaient  approches  de  Jésus-Christ  pour  le 
servir  dans  le  désert,  l'avaient  servi  comme 
serviteur  et  ami  de  Dieu.  Par  les  extraits  de 
ses  livres  sur  l'Incarnation  :  qu'il  enseignait 
que  Jésus-Christ  avait  plus  combattu  contre 
les  passions  de  l'Ame  que  contre  les  souf- 
frances de  son  corps,  et  qu'il  s'exerçait  à  les 
vaincre  par  la  vertu  de  la  divinité  qui  habi- 
tait en  lui.  A  ces  paroles,  le  concile,  inter- 
rompant le  lecteur,  s'écria  :  «  Nous  avons 
déjà  condamné  tout  cela.  Anathème  à  Théo- 
dore de  Mopsueste  et  à  ses  écrits.  Cela  est 
contraire  à  l'Église  et  aux  Pères,  plein  d'im- 
piété, Théodore  ,  est  un  Judas.  »  On  conti- 
nua de  lire  d'autres  passages  où  il  disait  que 
l'union  du  Dieu  Verbe  avec  la  nature  humaine 
ne  s'était  faite  ni  par  la  substance,  ni  par 
l'opération,  mais  seulement  par  la  bonne 
volonté;  que  Jésus  avait  reçu  l'onction  du 
Saint-Esprit  comme  une  récompense  de  son 
mérite  et  de  son  innocence ,  selon  qu'il  est 
écrit  dans  le  psaume  xliV  :  «  Vous  avez 
aimé  la  justice  ,  et  haï  l'iniquité;  c'est  pour- 
quoi Dieu  vous  a  oint  d'une  huile  de  joie, 
d'une  manière  plus  excellente  que  tous  ceux 
qui  y  ont  part  avec  vous  ;  que  l'on  doit  dire 
de  Marie  qu'elle  est  mère  de  Dieu  et  mère 
de  l'homme;  mère  de  l'homme  par  nature, 
mère  de  Dieu  par  relation ,  parce  que  Dieu 
était  en  l'homme  qui  est  né  d'elle  ;  que 
l'homme  né  de  Marie  est  fils  de  Dieu  par 
grâce,  et  le  Verbe  par  nature.  On  lut  encore 
d'autres  endroits  de  ses  écrits,  où  il  parlait 
avec  mépris  du  livre  de  Job  et  du  Cantique 
des  cantiques;  le  symbole  cité  sous  son 
nom,  et  condamné  au  concile  d'Éphèse;  sur 
quoi  les  évêques  s'écrièrent  :  «  C'est  Satan 
qui  a  composé  ce  symbole.  Nous  ne  con- 
naissons que  le  symbole  de  Nicée.  Anathème 
à  qui  n'anathématise  pas  Théodore  de  Mop- 
sueste. Nous  l'anathématisons ,  lui  et  ses 
écrits.  1)  Ils  renvoyèrent  à  une  autre  confé- 
rence l'examen  de  ce  que  les  Pères,  les  lois 
impériales  et  les  historieus  ecclésiastiques 
avaient  dit  contre  lui. 


871 


9.  On  en  fit  donc  le  rapport  dans  la  cin- 
quième, qui  fut  tenue  le  17  mai,  comme  le 
veut  Baluze  '  sur  l'autorité  des  anciens 
manuscrits,  et  non  le  13,  comme  on  le  lit 
dans  les  ('dilioiis  des  conciles ,  et  comme  le 
semble  dire  l'archidiacre  Diodore  au  com- 
mencement de  cette  conférence.  Les  témoi- 
gnages que  l'on  cita  contre  Théodore  de  Mop- 
sueste sont  tirés  d'un  livre  contre  cet  évoque, 
où  saint  Cyrille  qui  eu  était  l'auteur  citait  ses 
paroles  elles  réfutait  ensuite  ;  de  la  requête 
présentée  contre  lui  à  Proclus  de  Constanti- 
nople  par  les  clercs  et  les  moines  d'Arménie  ; 
d'une  partie  de  la  réponse  de  Proclus  ;  de 
cinq  lettres  de  saint  Cyrille  contre  Théodore  ; 
d'un  extrait  de  l'Histoire  d'Hésychius,  prêtre 
de  Jérusalem,  que  nous  n'avons  plus,  où  il 
assurait  que  Théodore  de  Mopsueste  était 
celui  à  qui  saint  Chrysostome  écrivit  deux 
livres  pour  le  retirer  de  ses  dérèglements  et 
de  ses  erreurs  sur  l'incarnation  du  Verbe  ;  de 
deux  lois  des  empereurs  Théodose  et  Valeu- 
tinien  contre  Nestorius,  Diodore  de  Tarse  et 
Théodore  de  Mopsueste;  d'une  lettre  de 
Théophile  d'Alexandrie  h  Porphyre,  évêque 
d'Antioche  ;  d'une  de  saint  Grégoire  de  Nysse 
à  Théophile.  Tous  ces  témoignages  étaient 
rassemblés  pour  montrer  que  Théodore  de 
Mopsueste  avait  tâché  dans  ses  écrits  d'a- 
néantir le  mystère  de  l'Incarnation;  que 
suivant  les  principes  des  juifs,  il  détournait 
le  sens  des  prophéties  qui  regardaient  Jésus- 
Christ,  çfï  un  mot  qu'il  avait  été  dans  les 
mêmes  erreurs  que  Nestorius  son  disciple 
enseigna  depuis.  On  apporta  même  en  preuve 
divers  endroits  des  écrits  de  Théodoret  con- 
tre saiut  Cyrille,  qui  prouvaient  que  ce  der- 
nier avait  accusé  Théodore  de  toutes  ces  im- 
piétés ;  à  quoi  l'on  ajouta  des  exlraits  du  se- 
cond livre  de  saint  Cyrille  contre  Théodore, 
où  il  louait  son  travail,  et  condamnait  sa  doc- 
ti'ine  comme  impie. 

Après  cela  le  concile  ordonna  la  lecture 
des  lettres  de  saint  Grégoire  de  Nazianze, 
que  quelques-uns  disaient  avoir  été  écrites 
à  Théodore  de  Mopsueste ,  pour  monti-er 
qu'il  y  avait  eu  entre  eux  une  grande 
union;  ce  qui  pouvait  faire  quelque  cliose 
pour  la  défense  de  Théodore.  Mais  Euplira- 
tas  de  Tyane  et  Théodosc  de  Justiniauople 
firent  voir  que  ces  lettres  n'étaient  point 
adressées  à  Théodore  de  Mopsueste,  mais  h 
Théodore  de  Tyane,  dont  ils  assuraient  qu'on 

'  Baluz.,  Concil-,  pag.  1510, 


C>n<1nltina 
CAnrcronce,  p. 

«:a. 


Pag.  476. 


872 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQITÎS. 


P«f.  »■:?. 


Pi;.  153 

9UlT* 


Ut:.,  ,.    j 
Col  ,  ir,  tii 


lisait  encore  le  nom  dans  les  diptyques  de 
cette  étrlise.  Ensuite,  l'on  proposa  la  ques- 
tion: s'il  est  permis  de  condamner  les  mor(s. 
Sur  quoi  le  diacre  et  notaire  Photin  lut  deux 
passades  de  saint  Cyrille  où  l'on  crut  voir 
qu'il  tenait  pour  l'allirmalive.  Scxtilicn,  évê- 
que  d'Afrique,  député  de  Pi'imosus,  évoque 
de  Cartilage,  en  allégua  plusieurs  des  lettres 
de  saint  Augustin,  qui  portaient  que  ceux 
qui  avaient  eu  de  mauvais  sentiments,  de- 
vaient être  anathémalisés  après  leur  mort, 
lorsqu'on  découvrait  leurs  erreurs.  Bénicjne 
d'Héraclée,  député  de  l'évéque  deTliessalo- 
nique,  ajouta  que  Yalentin,  Marcion  et  Basi- 
lide  avaierit  été  anaihématisés  après  leur 
mort  par  l'Église  de  Dieu,  quoiqu'ils  n'eus- 
sent été  condamnés  de  leur  vivant  par  aucun 
concile;  q\ie  l'on  avait  gardé  la  même  con- 
duite il  l'égard  d'Eunomius  et  d'Apollinaire  ; 
que  Habulas,  évcque  d'Édesse,  avait  analhé- 
matisé  Théodore  de  Mopsuesle  après  sa  mort, 
comme  l'on  pouvait  s'en  convaincre  par  la 
lettre  môme  d'Ibas  à  Maris  persan.  11  allégua 
divers  autres  exemples  de  cette  conduite,  et 
ajouta  que  depuis  peu  d'années  l'Église  ro- 
maine avait  anathématisé  l'anti-pape  Dios- 
ct   core  après  sa   mort.   Quelques-uns  citaient 
pour  la  défense  de  Théodore  de  Mopsueste 
une  lettre  de  saint  Cyrille  ù  Jean  d'Autioche, 
et  une  autre  à  saint  Proclus  de  Constantino- 
ple,  où  il  disait  qu'encore  que  Théodore  eût 
enseigné  l'erreur,  on  ne  devait  pas  le  con- 
damner nommément,  de  peur  d'irriter  les 
Orientaux,  et  de  rallumer  le  feu  de  la  divi- 
sion qui  venait  d'être  éteint  par  la  réconci- 
liation de  saint  Cyrille  avec  Jean  d'.\ntioche. 
Théodore  de  Césarée,  prenant  la  parole,  ré- 
pondit au  nom  du  concile,  que  la  lettre  que 
l'on  citait  sous  le  nom  de  saint  Cyrille  était 
une  pièce  supposée;  qu'on  ne  la  trouvait  pas 
dans  le  Recueil  de  ses  écrits,  ou  du  moins 
qu'elle  n'y  était  pas  dans  les  termes  que  l'on 
citait;  que  ce  Père  avait  lui-môme  écrit  de- 
puis contre  les  erreurs  de  Thé-odore  ;  que 
saint  Proclus  les  avait  condamnées,  et  con- 
fiéquerament  l'auteur;  et  que  les  défenseurs 
(le  Tliéodore  ayant  abusé  de  la  modération 
dont  les  évoques  avaient  usé  envers  lui,  il 
n'(''lait  plus  temps  de  les  m(^nager.  Il  alh'gua 
sur  cela  l'exemple  de  saint  Paul,  qui  ne  to- 
léra que  pour  un  temps  les  observances  lé- 
gales; celui  de  saint  Basile  et  de  saint  Atha- 
nase,  qui,  après  avoir  éti'-  en  c(unmiinion 
avec  Apollinaire ,  le  condamnèrent;  et  celui 
du  pape  Léon,  qui  condamna  Eulycliès  après 


avoir  témoigné  d'abord  approuver  sa  con- 
duite. Il  Si  l'on  remonte,  ajoula-t-il,  jusqu'au 
temps  de  Théophile  d'Alexandrie,  on  verra 
qu'il  a  anathématisé  Origène  après  la  mort. 
Vous  venez  vous- mômes  de  le  condamner, 
et  le  pape  Vigile  avec  vous.  »  Les  défenseurs 
de  Théodore  disaient  que  saint  Chrysostome 
lui  avait  écrit  des  lettres  pleines  d'éloges;  on 
répondit,  ou  que  ces  lellres  étaient  suppo- 
sées, ou  que  saint  Chrysostome  n'avait  pas 
eu  connaissance  des  mauvais  senliments  de 
Théodore.  Mais,  disait-on,  Théodore  est  mort 
dans  la  communion  de  l'Église?  Pourrépon-  p.f.  «i. 
dre  àcelte  objection,  on  lut  les  Actes  du  con- 
cile de  Mopsuesie,  que  nous  avons  rappor- 
tés plus  haut ,  et  par  lesquels  il  paraissait 
que  le  nom  de  Théodore  n'avait  point  été 
mis  dans  les  diptyques  de  son  église,  ou  que, 
s'il  y  avait  été,  on  l'en  avait  ôlé  pour  mettre 
celui  de  saint  Cyrille,  puisque  les  évoques 
défunts,  marqués  dans  ces  diptyques,  étaient 
Protogène,  Zosime,  Olympius,  Cyrille,  Tho- 
mas, Bassien,  Jean,  Auxeiice,  Palatin,  Jac- 
ques, Zosime,  Théodore,  Siméon.  Ce  Théo- 
dore, comme  le  firent  remarquer  les  prêtres 
de  Mopsueste  ,  n'était  mort  que  depuis  trois 
ans  lorsque  l'on  tint  le  concile  de  Mopsueste 
en  550,  et  était  par  conséquent  diÛ'érent  de 
Théodore,  maître  de  Neslorius. 

Le  concile,  jugeant  que  les  témoignages  m. 
allégués  élaicnt  plus  que  sulUsants  pour 
prouver  que  l'on  pouvait,  suivant  la  tradition 
de  l'Eglise,  condamner  les  morts,  passa  à 
l'examen  du  second  des  Trois-C/iapilres,  qui 
regardait  Théodoret.  Un  lut  les  endroits  de  wi. 
ses  ouvrages  qui  paraissaient  les  plus  favo- 
rables aux  erreurs  de  Xestorius,  et  premiè- 
rement ceux  que  l'on  avait  tirés  de  son  Traité 
contre  les  douze  .{nathcmntismes  de  saint  Cy- 
rille, où  il  disait  que  nous  donnons  le  litre 
de  Mère  de  Dieu  à  la  Sainte-Vierge ,  parce 
qu'elle  est  mère  d'un  homme  uni  ii  Dieu.  On 
en  lut  ensuite  de  sa  lettre  aux  monastères 
contre  saint  Cyrille,  où  il  accusait  cet  évô- 
de  confondre  les  natures  en  Jésus-Christ, 
suivant  l'erreur  d'Apollinaire,  et  d'avoir 
donné  dans  les  blasphèmes  d'Ariuset  d'Eu- 
nomius. Les  autres  extraits  ('taienl  tirés  de  tm, 
divers  écrits  de  Théodoret  depuis  le  concile 
d'i;|)hèse,  de  salellie  ù  André  de  Samosale, 
de  celle  qu'il  écrivit  .l  Neslorius  après  la  réu- 
nion desdiientauxaveci^ainl  Cyrille,  etd'une 
lettres  il  Jean  d'.Anlioche.  Dans  la  plupart  do 
ces  passages,  'l'héodoret  s'exprimait  d'une 
façon  désavantageuse  .'iir  les  douze  t^hapi- 


■CHAPITRE  LXXXVI.  —  2'  CONCILE  DE  CONSTANTTNOPLE. 


l'af.  -OT. 


X,p."lv..,iiO 


MDfért'QCe.p. 
«OS. 


(16,^17. 


[Vl'  SIÈCLE.] 

très  de  saint  Cyrille.  La  derniôro  pièce  dont 
on  fit  la  lecture,  est  une  lettre  sous  le  nom 
de Tlu^odorct  i\  Jean  d'.Vnlioclie  sur  la  mort 
de  saint  Cyrille;  mais  il  est  visible  que  cette 
lettre  avait  éti5  supposc-e  par  les  ennemis  de 
Tht^odorct  pour  le  rendre  odieux.  Les  dvô- 
ipies  du  concile  applaudirent  ;\  celui  de  Chal- 
cédoine,  de  n'avoir  reçu  Tliéodoret  qu'apn"'s 
qu'il  eut  dit  anatlième  ;\  Neslorius  et  h  ses 
blasplièmes,  dont  il  avait  pris  auparavant  la 
défense  dans  ses  dcrits.  Ainsi  finit  la  cin- 
quième conférence. 

10.  La  sixi(>nie  est  du  10  mai.  On  la  com- 
mença par  la  lecture  de  la  lettre  d'Ibas,  qui 
faisait  le  sujet  du  troisième  Chapitre:  et  parce 
que  saint  Proclus  de  Constantinoplc   avait 
écrit  ;\  Jean  d'Antioclie  que  l'on  faisait  des 
plaintes  contre  Ibas,   comme  soutenant  la 
doctrine  de  Nestorius,  et  comme  ayant  tra- 
duit en  langue  syriaque  quelques  articles 
des  écrits  de  Tbéodore  de  Mopsueste  qui 
étaient  contre  la  saine  doctrine  ,  on  lut  par 
ordre  du  concile  cette  lettre  de  saint  Proclus 
à  Jean  d'Antioclie.  Apres  quoi,  Théodore  de 
Césarée  et  quelques  autres  évéques  racon- 
tèrent ce  qui  s'était  passé  en  l'atfaire  d'Ibas 
au  concile  de  Tyr  ;  comment  Ibas  avait   été 
déposé,  sans  dire  que  c'avait  été  au  brigan- 
dage d'Éplièse  ;  et  de  quelle  manière  il  s'était 
justifié  dans  le  concile  de  Chalcédoine,  où 
sa  lettre  avait  été  lue  sans  être  approuvée, 
et  où  il  avait  été  reçu  seulement  comme  pé- 
nitent ,  en  conséquence   de   la  déclaration 
qu'il  avait  faite  qu'il  condamnait  Nestorius, 
et  qu'il  se  repentait  d'avoir  parlé  mal  de  saint 
Cyrille.  Théodore  inféra  de  là  qu'Ibas  avait 
lui-même  anathématbisé  sa  propre  lettre , 
comme  contraire  à  la  définition  de  foi  de 
Chalcédoine.    Le  concile,  pour   plus   grand 
éclaircissement,  ordonna  la  lecture  de  quel- 
ques endroits  des  Actes  des  conciles  d'Épliè- 
se et  de  Chalcédoine  ;  et  après  qu'on  eut  lu 
les  lettres  de  saint  Cyrille  à  Nestorius,  celles 
de  saint  Célestin  et  le  jugement  du  concile 
d'Éphèse  sur  ces  lettres,  celles  de  saint  Léon 
à  Flavien,  et  le  jugement  que  le  concile  de 
Chalcédoine  en  avait  porté ,  le  symbole  de 
Nicée,  et  celui  de  Constanlinople,  auxquels 
toutes  ces  lettres  se  trouvaient  conformes 
pour  la  doctrine,  on  les  compara  avec  la  let- 
tre d'Ibas.  On  releva  entre  autres  celte  pro- 
position dans  la  lettre  d'Ibas  :  Ceux  qui  di- 
sent que  le  Verbe  s'est  fait  homme,  sont  héré- 
tiques et  apoUinaristes  ;  il  faut  reconnaître  le 
temple,  et  croire  en  celui  qui  habite  dans  le 


873 


temple;  d'où  les  évoques  conclurent  qu'Ibas 
admettait  deux  personnes  en  Jésus-Christ, 
suivant  la  doctrine  de  Nestorius.  Ils  ajoutè- 
rent que,  dans  la  mémo  lettre,  il  avait  loué 
et  défendu  Théodore  de  Mopsuesie  et  Nes- 
torius, et  enseigné  avec  eux  qu'il  n'y  a  qu'une 
vertu  en  deux  natures,  doctrine  qui  a  été 
combattue  par  saint  Cyrille,  comme  contraire 
à  la  vraie  foi.  Jugeant  donc  que  la  lettre 
d'Ibas  était  contraire  en  tout  à  la  définition 
de  Chalcédoine,  tous  la  déclarèrent  héréti- 
que, et  hérétiques  tous  ceux  qui  ne  l'ana- 
thématisaient  pas. 

1 1 .  Pendant  que  le  concile  faisait  l'examen  .•^""'"'"'J',?' 
des  Trois-C hapitres ,  le  pape  Vigile,  pour  5ii«,p-3"- 
exécuter  sa  promesse  de  donner  son  avis  sé- 
parément sur  ce  sujet,  dressa  un  décret  que 
l'on  nomme  Constitutum,  afin  de  le  distin- 
guer de  la  sentence  qu'il  avait  rendue  d'a- 
bord, nommée  Judicatum.  Ce  décret,  qu'il 
adressa  à  l'Empereur,  commence  parles  deux 
professions  de   foi  dont  l'une  lui  avait  été 
donnée  à  Chalcédoine  dans  l'église  de  Sainte- 
Euphémie  par  Menuas,  et  l'autre  par  Euty- 
chius,  le  6  janvier  553,  h  son  retour  à  Cou- 
stantinople.  Le  Pape  dit  ensuite,  que  la  pa- 
role qu'on  lui  avait  donnée  de  faire  assem- 
bler en  nombre  égal  les  évèques  d'Orient  et  ''''•  "° 
d'Occident  n'ayant  point  eu  son  exécution  ; 
sur  les  instances  qu'on  lui  faisait  de  donner 
sa  réponse  sur  les  Trois-C  hapitres,  il  avait 
demandé  un  délai  de  vingt  jours  à  cause  de 
son  indisposition,  priant  les  évèques  de  ne 
rien  prononcer  sur  les  Trois-C  hapitres  avant 
que  le  Saint-Siège  eût  rendu  son  jugement, 
suivant  l'ancien  usage.  Il  ajoute,  qu'il  avait 
donc  examiné  les  Actes  du  concile,  les  dé- 
crets des  Papes  ses  prédécesseurs,  et  les  au- 
tres pièces  qui  pouvaient  avoir  quelque  rap- 
port avec  chacun  des  Trois-Chapitres,  et  qu'il 
avait  vu  aussi  le  volume  qui  lui  avait  été 
présenté  de  la  part  de  l'Empereur  par  Bé- 
nigne, évoque  d'Héraclée,  rempli  de  dogmes 
contraires  à  la  foi,  et  qu'il  les  avait  condam- 
nés. Ils  étaient  réduits  à  soixante  articles, 
tous  tirés  des  écrits  de  Théodore  de  Mop- 
suesie, et  <i  peu  près  les  mêmes  que  les 
soixante-un  premiers  que  l'on  avait  propo- 
sés dans  la  quatrième  conférence,  qui  s'était 
tenue  le  12  mai.  Vigile  entre  dans  la  discus- 
sion de  chacun  de  ces  articles;  il  en  expli- 
que le  mauvais  sens,  et  le  condamne  avec 
anathème. 

Il  paraissait  par  le  huitième,  que  Tbéodore     3«.343. 
de  Mopsueste  voulait  introduire  la  doctrine 


874 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUESl 


des  deux  personnes  en  Jésus-Christ,  en  di- 
sant que  l'on  ne  doit  point  enseigner  que  ce- 
lui qui  était  avant  tous  les  siècles,  fût  venu 
dans  les  derniers  temps.  Le  Pape  déclare  que 
c'est  lemêine Dieu  Verbe  qui,  né  du  Père  avant 
les  siècles,  est  né  de  la  bicnlieureiise  Vierge 
Marie,  en  sorte  que  c'est  un  seul  et  même 
Christ  dans  les  deux  natures;  c'est  pourquoi 
il  dit  anatbèmc  à  quiconque  pense  et  ensei- 
gne le  contraire.  Il  examine  de  même  tous 
les  autres  articles,  et,  après  avoir  condamné 
tous  les  mauvais  sens  dont  ils  sont  suscep- 
tibles ,  il  défend,  sous  peine  d'anathème, 
d'en  prendre  occasion  de  censurer  les  Pères 
et  les  docteurs  de  l'Église,  dans  les  écrits  des- 
quels on  pourrait  trouver  quelques  proposi- 
tions semblables.  Les  soixante  articles  pré- 
sentés par  Bénigne  d'Héraclée  portaient  le 
nom  de  Théodore  de  Mopsuesle  ;  le  Pape  crut 
donc  ne  pouvoir  se  dispenser  d'examiner  ce 
!>af.  sa:        1"c  les  Pères  avaient  dit  de  lui.  Il  trouva  que 
le  concile  d'Éphèse  ,  en  condamnant  le  sjtu- 
bole  attribué  à  Théodore ,  n'avait  fait  au- 
cune  mention   de  sa  personne  ;    que  saint 
Cyrille,  qui  rapportait  ce  fait  dans  la  lettre 
de  Jean  d'Antioche,  ajoutait  qu'on  ne  doit 
point  insulter  aux  morts  ;   que  saint  Proclus 
de  Constantiuople  avait  condamné  les  er- 
reurs attribuées  à  Théodore  sans  le  nommer 
lui-même,   et  qu'il  n'y  avait  rien  dans  les 
Actes  du  concile  de  Chalcédoinc  contre  la 
jjj_        mémoire  de  Théodore.    Le    Pape  ajoute, 
qu'ayant  examiné  si  quelques-uns  de  ses  pré- 
décesseurs avaient  ordimné  quelque  chose 
contre  les  morts  qu'ils  n'avaient  point  con- 
damnés de  leur  vivant,  il  avait  trouvé  que 
saint   Léon ,   dans   sa  lettre   à   un   évoque 
nommé  Théodore ,  était  de  ce  sentiment , 
qu'il  fallait  réserver  à  Dieu  le  jugement  des 
morts;  et  que  Gclasc  avait  di'i-idé  la  même 
chose  dans  sa  lettre  aux  évoques  de  Daida- 
nie  ;  que  la  même  règle  avait  été  observée  à 
l'égard  de   saint  Chrysostome    et  de  saint 
,j,_        Flavien,  qui,  quoique  chass(;s  l'un  et  l'autre 
de  leur  vivant  du  siège  de  Constantiuople, 
n'avaient  point  été  tenus  pour  condamnés, 
parce  qu'ils  l'taient  trmjfturs  demeiu'és  unis 
de  communion  avec  l'I'^t^lise  romaine,  et  qu'il 


n'est  pas  permis  de  retrancher  de  l'Église 
ceux  avec  qui  le  Siège  apostolique  croit  devoir 
conserver  l'union;  que,  suivant  le  témoignage 
d'Eusèbe  de  Césarée,  saint  Denys  d'Alexan-    e...»..,  nk. 
drie  ne  voulut  point  condamner  Xépos,  évê-    «p.  ht.*  *" 
que  d'Egypte,  quoique  engagé  dans  l'erreur 
des  millénaires,  croyant  devoircette  attention 
à  im  homme   qui  était  mort  depuis  plusieurs 
années,  et  dont  toutefois  les  écrits,  infectés 
de  cette  erreur,  étaient  répandus  dans  toute  ' 
l'Egypte.    «  Par  toutes  ces  considérations, 
conclut  le  Pape,  nous  n'osons  '  pas  condam- 
ner Théodore  de  Mopsucste,  et  nous  ne  per- 
mettons il  personne  de  le  condamner,  n 

A  l'égard  des  écrits  que  l'on  produisait 
sous  le  nom  de  Théodoret,  Vigile  s'étonne 
qxie  l'on  ose  avancer  quelques  reproches 
contre  un  évèque  qui  s'étant  présenté,  depuis 
plus  de  cent  ans,  au  jugement  du  concile  de 
Chalcédoine,  y  avait  souscrit  sans  hésiter  à  ce 
jugement,  ainsi  qu'aux  lettres  de  saint  Léon.  p,g.  se?. 
Il  convient  que  Dioscore  et  les  Kgj-ptiens  l'ac- 
cusèrent d'hérésie  en  présence  des  évêques 
de  ce  concile;  mais  il  soutient  que  ces  évê- 
ques, après  l'avoir  examiné  avec  soin,  n'exi- 
gèrent autre  chose  de  lui,  que  l'anathème 
contre  Neslorius  et  sa  doctrine,  qu'il  pro- 
nonça tout  haut  en  présence  de  tous  les 
Pères.  Le  Pape  ne  croit  donc  pas  que  l'on 
puisse  condamner  sous  le  nom  de  Théodoret 
des  dogmes  nestorieus,  sans  accuser  de  men- 
songe ou  de  dissimulation  les  évêques  de 
Chalcédoine.  Il  ne  veut  pas  non  plus  que  l'on 
croie  qu'ils  aient  ignoré  l'injure  faite  t'i  saint 
Cyrille  par ThéoJoret,  en  attaquant  scsdouzo 
Anathvmalismes ;  mais  il  dit  que  ces  évêques 
ont  imité  l'exemple  de  saint  Cyrille  même, 
qui,  dans  sa  réunion  avec  les  Orientaux,  ne 
releva  point  ce  qu'ils  avaient  écrit  contre  lui. 
Le  concile  fut  d'autaut  plus  porté  à  prendre  359. 
ce  parti,  qu'en  sa  présence  Théodoret,  ayant 
ouï  lire  les  lettres  de  saint  Cyrille,  en  loua 
la  doctrine.  «  C'est  pourquoi',  ajoute  le  Pape, 
nous  défondons  ù  qui  que  ce  soit  de  rien 
avancer  au  préjudice  d'un  homme  approuvé 
dans  le  concile  de  Chalcédoine,  c'est-à-dire 
de  Théodoret;  mais  eu  conservant  en  tontes 
choses  le  respect  dd  à  sa  personne,  nous 


'  Thendorum  noslra  no/i  auilemus  damnare 
sentcnlia,  sed  ncc  nb  iiUo  quopiam  condemnari 
concedimus.  Vigil.,  Conslil.,  piig.  .'!CG. 

•  Ilac  ergo  reruiii  verilate  perpensn,  slaliiimus, 
al(fur  deceriùiiius,  niliil  in  ùijtiriiiin  atque  ob- 
ircclalioncm  prnhaUxsimi  in  rlialccdnneiiiti  sy- 
nodo  viri,  hoc  est  Theodoreli  episcopi  Cyri,  sub 


iaxnlione  nominis  ejiix,  a  gtinquain  fieri  rel  pro- 
ferri:  xcd  ciistoditti  in  oiiinilnts  personir  ejus  rr- 
vcreiiliii,  ijUiFCUinquc  ncripUi  rel  dogmata  eju» 
cujuslibcl  nomine  prolnta  sceleralontm  Kcslorii 
alque  Enl>iclielis  manifcslontur  crrorihus  congo- 
iiare,  anathcmatizamus  alquc  damnamt(S.  Ibid., 
pag.  368. 


Pis   SCI, 


[vi*  SIÈCLE.]      CHAPITRE  LXXXYI.  —  2"  Ù 

condamnons  tous  les  écrits  et  tous  les  dogmes 
produits  sous  son  nom,  ou  sous  celui  de  toute 
autre  personne  que  ce  soit,  qui  sont  confor- 
mes aux  erreurs  de  Ncsiorius  et  d'Eutyciii-s.  » 
Vigile  met  aprts  cela  cinq  anatlièmes  contre 
les  erreurs  que  l'on  relevait  dans  les  écrits 
de  Théodoret  ;  ils  tendent  ;\  établir  la  foi  de 
l'unité  de  personne  en  doux  natures  eu  Jé- 
sus-Christ, et  à  condamner  l'erreur  opposée, 
qui  était  celle  de  Nestorius. 

Pour  ce  qui  est  de  la  lettre  d'Ibas,  le  Pape 
dit  que,  n'aj'ant  pas  connaissance  de  la  lan- 
gue grecque,  il  s'était  servi  de  quelques-uns 
de  sa  suite,  qui  étaient  instruits  de  celte 
langue,  pour  examiner  ce  qui  s'était  passé  à 
l'égard  de  cet  évêque  dans  le  concile  de 
Clialcédoine;  qu'il  avait  trouvé  que,  sa  cause 
ayant  été  examinée  dans  deux  sessions  dif- 
férentes ,  il  avait  été  déclaré  innocent  et 
orthodoxe;  que  sa  lettre  même,  dont  ses  ac- 
cusateurs se  servaient  contre  lui ,  fut  recon- 
nue pour  catholique ,  parce  qu'elle  embras- 
sait la  foi  sur  laquelle  saint  Cnùlle  s'était 
réconcilié  avec  Jean  d'Antiochc  et  les  Orien- 
taux. Les  Pères  de  Chalcédoine,  ajoute  le 
Pape,  n'approuvèrent  pas  poiu-  cela  ce  que 
la  lettre  d'Ibas  contient  d'injm-ieux  à  saint 
CjTille;  lui-même  la  rétracta,  aj'ant  mieux 
compris  le  sens  des  Armthématismes  de  l'é- 
voque d'Alexandrie,  qu'il  croyait  aupara- 
vant ôter  la  distinction  des  natures,  parce 
qu'il  les  entendait  mal.  Vigile  conclut  en  or- 
donnant '  que  le  jugement  du  concile  de 
Chalcédoine  demeurerait  en  son  entier  à  l'é- 
gard de  la  lettre  d'Ibas,  comme  à  l'égard  de 
tout  le  reste.  Ensuite,  pom-  faire  voir  com- 
bien devait  être  inviolable  l'autorité  du  con- 
cile de  Chalcédoine,  même  par  rapport  au 
rétablissement  de  Théodoret ,  d'Ibas  et  de 
quelques  autres  dans  leur  siège ,  il  rapporte 
plusiem-s  extraits  des  lettres  des  papes  Léon 
et  Simplice  ,  où  l'on  voit  qu'ils  ont  approuvé 
tous  les  décrets  de  ce  concile  comme  devant 
être  en  vigueur  dans  tout  l'univers.  Il  donne 
aussi  un  extrait  de  son  Judicatum  qu'il  avait 
retiré  des  mains  de  l'Empereur  avant  l'as- 
semblée du  concile  ;  mais  il  révoque  tout  ce 
qu'il  y  avait  dit  sur  les  Trois-C hapitres ,  dé- 
fendant à  qui  que  ce  fût  de  rien  décider  de 
conti'aire.  11  souscrivit  le  premier  à  son  Con- 
stitutmn,  et  dix-sept  évéques  y  souscrivirent 


ONCILE  DE  CONSTANTINOPLE. 


873 


ensuite;  puis  un  archidiacre  cl  deux  diacres 
de  ri';glise  romaine,  dont  im  est  Pelage,  qui 
fut  son  successeur.  Il  est  dati-  du  ^A  mai  de 
l'an  5.'j3  ;  mais  il  ne  fut  envoyé  à  l'Empereur 
que  le  23  du  même  mois. 

12.  Le  prince,  sans  faire  aucune  attention       sopium» 

.  ,  ,  ,  .       eAnftreoce,  p. 

a  ce  décret,  envoya  le  questeur  (.oustantm  m»- 
pom-  assister  à  la  conférence  qui  fut  tenue 
le  26  mai,  avec  ordre  de  représenter  tous  les 
mouvements  que  Justinien  s'était  donnés 
pour  finir  la  dispute  d(\s  Trois-C lutintrcs;  les 
invitations  h  Vigile  de  se  trouver  à  l'assem- 
blée ;  les  déclarations  réitérées  de  ce  Pape, 
par  lesquelles  il  était  constant  qu'il  avait 
condamné  les  Trois-Chapitres  par  écrit  et  de 
vive  voix;  ce  qui  s'était  passé  à  l'égard  du  ti^''J''',5'^3°5';' 
Constittttiim,  que  Vigile  avait  envoyé  à  1  Em- 
pereur parServusdei,  sous-diacre  de  l'Église 
romaine  ;  et  la  réponse  que  ce  prince  fit  faire 
à  Semisdei  pour  le  Pape,  conçue  en  ces  ter- 
mes :  «  Nous  vous  avons  invité  à  venir  à 
l'assemblée  des  évéques  :  vous  l'avez  refusé, 
et  vous  dites  que  vous  avez  écrit  séparément 
sur  les  Trois-Chapitres.  Si  c'est  pour  les  con- 
damner, nous  n'avons  point  besoin  d'auti-es 
écrits  que  ceux  que  nous  avons  déjà  de  vous; 
s'il  est  diflërent,  comment  pouvons-nous  re- 
cevoir un  écrit  où  vous  vous  condamnez 
vous-même  ?  »  Afin  d'opposer  l'autorité  de 
Vigile  ù  Vigile  même ,  l'Empereur  chargea 
Constantin  de  diverses  pièces  ,  dont  le  con- 
cile devait  ordonner  la  lecture  avant  de  pro- 
céder à  \m  jugement  décisif  siu"  les  Trois- 
Chapitres.  Il  y  en  avait  une  adressée  à  l'Em- 
pereur ,  écrite  de  la  main  de  Vigile ,  et  une 
autre  à  l'impératrice  Théodora  d'heureuse 
mémoire ,  d'une  autre  main  ,  mais  souscrite 
par  Vigile.  Il  y  avait  encore  la  condamnation 
de  Rusticjue,  parent  du  Pape  ,  et  de  Sébas- 
tien, sous-diacre  de  l'Eglise  romaine,  qui 
avaient  l'un  et  l'autre  écrit  pour  la  défense 
des  Trois-Chapitres;  de  plus,  les  lettres  de 
Vigile  à  Valentinien,  évêque  de  Tomy  en 
Scythie  ,  et  à  Aurélien  ,  évêque  d'Arles.  Les 
deux  lettres  adressées  à  l'Empereur  et  à  l'Im- 
pératrice nous  ont  été  domiées  par  Ba- 
luze.  Lorsqu'on  les  cita  dans  les  sessious  Tom.viccn- 
111"  et  XIV=  du  sixième  concile  œcuméni-  f.im. '"'  " 
que ,  les  légats  du  Pape  ne  les  contestèrent 
pas  ;  mais  ils  soutinrent  qu'elles  avaient  été 
corrompues  par  les  monothélites,  et  les  évè- 


'  Prwsentis  sentcntio'  nostrœ  auctorilnte  sta- 
tuimits  atque  decernimus,  cum  in  omnibus,  tum 
eliam  in  sœpius  memorata  venerabilis  Ibœ  Ejiis- 


tola  intemcralum  Patrum  in  Chakedone  residen- 
tiwn  manere  judicium.  Ibid.,  pag,  372. 


876 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


B«lDt.,lbIâ.| 
ptf.  !Ô15. 


qiies  du  concile  en  con\'inrent  :  ce  qui  se  vit 

apparcmmont  par  la  confrontation  que  l'on 
en  lit  sur  l'exemplaire  grec  que  l'on  conser- 
vait dans  les  archives  de  l'église  patriarchale 
de  Consfantinople.  Après  que  le  questeur 
eut  produit  tous  ces  écrits,  il  dit  aux  évèqucs 
de  l'assembldc  qu'ils  devaient  se  souvenir 
que  le  Pape  avait  fait  un  Judicaliim  adressé 
à  l'archevêque  Meunas,  où  il  condamnait  les 
Trois-Cltapili-es  ;  (jue  depuis  il  avait  retiré  ce 
Judicatum,  mais  sous  de  terribles  serments 
de  condamner  publiquement  et  simplement 
ces  C/iapitrcs  ;  qu'il  avait  ordre  de  l'Empe- 
reur de  leur  remettre  ce  serment,  mais  ;\  la 
charge  de  le  lui  rench-e  après  qu'il  aurait  été 
lu  ;  qu'au  reste,  il  avait  été  reconnu  par  les 
évèques  d'Occident,  par  les  clercs  de  l'Église 
romaine,  iiomnK'ment  par  Vincent,  évéque 
de  Claudiopolis,  qui ,  étant  sous-diacre  de 
Rome,  avait  aidé  à  dresser  ce  décret.  Con- 
stantin ajouta  que  l'Empereur  l'avait  encore 
chargé  d'une  lettre  écrite  au  sujet  de  quel- 
ques ecclésiastiques  de  l'église  de  Cyr,  qui 
avaient  porté  avec  pompe  l'image  de  Théo- 
doret,  et  fait  mémoire  de  Théodore,  de  Dio- 
dore,  et  de  Neslorins  comme  d'un  martvr. 
Toutes  ces  pièces  furent  lues  dans  le  concile, 
afin  qu'il  parut  que  le  pape  Vigile  ayant  déjà 
condamné  les  Trois-Cliapitres,  son  absence 
ne  devait  pas  empêcher  les  évèques  de  les 
condamner.  Nous  avons  une  lettre  de  Justi- 
nien  portant  ordre  de  l'Empereur  d'ôter  des 
diptyques  le  nom  du  pape  Vigile,  comme 
refusant  d'assister  au  concile  et  comme  dé- 
fenseur des  Ti-ois-CItapitres;  mais  cette  let- 
tre, étant  datée  du  14  juillet,  ne  put  être  lue 
dans  ce  concile,  puisque  les  septième  et  hui- 
tième conférences,  qui  sont  les  dernières, 
s'étaient  tenues  plus  d'un  mois  auparavant  ; 
l'une  étant  du  26  mai,  et  l'autre  du  2  juin  de 
la  même  année  oo3.  Ce  qu'il  y  a  de  remar- 
quable dans  cette  lettre',  c'est  qi;e  l'Empe- 
rem-  y  dit  que,  nonobstant  l'ordre  d'ôter  des 
diptyques  le  nom  de  Vigile,  il  conservait 
l'unité  avec  le  Saint-Siège ,  et  qu'il  espérait 
que  les  évèques  du  coucUe  la  conserveraient 


I.  '  Celle  lettre  ne  peut  servir  qu'à  coustaler  la  té- 
mérité audacieuse  <le  Justinicu.  La  (li^tiuetiou 
qu'allègue  notre  auteur  d'aiiri\<  KlcMiry  est  faite  par 
un  souverain  qui  a  tort  lyulre  nu  pape  qui  a  rai- 
Bon;  elle  est  fait«  par  un  iluspule  capricieux  à  des 
prélats  courtisans  et  serviles,  couiine  le  témoigne 
la  réponse  ilaiis  la(|uelle  ils  le  louent  des  travaux 
qu'il  a  soiUcMUs  poin-  l'unité  des  églises.  Voyez 
Rorbactier,  tom.  IX,  pag.  222  el  223;  voyez  aussi 


Ballltmt 
Coofcriiicc,  p» 


aussi,  distinguant  ainsi  le  Saint-Siège  d'avec 
la  personne  de  Vigile  qui  le  remplissait. 
Cette  lettre  ne  se  trouve  point  pamii  les  Ac- 
tes du  cinquième  concile  dans  la  Collection 
du  Père  Labhe;  mais  Baluze  la  donnée 
dans  la  sienne  :  il  en  est  fait  mention  dans  çoi«i.,  loa. 
une  lettre  de  Michel,  archevêque  de  Con-  •<  •»« 
stantinople,  à  Pierre,  patriarche  d'.\nlioc!ie, 
au  second  tome  des  Monuments  de  l'Eglise 
grecque ,  recueillis  par  Cotelier.  Le  con- 
cile, après  avoir  loué  le  zèle  de  l'Empereur 
pour  la  défense  de  l'Église ,  remit  le  juge- 
ment des  Trois -Chapitres  h  la  conférence 
suivante. 

13.  Elle  se  tint  le  2  juin;  et  sans  prendre 
les  voix  des  évoques  en  particulier,  le  diacre  wï 
et  notaire  Callonymus  lut  la  sentence  que 
l'on  avait  apportée  toute  dressée  contre  les 
Trois-C/iopitres. LesPères  de  l'assemblée  di- 
rent que,  voyant  les  sectateurs  de  Nestorius 
attribuer  à  l'Église  leur  impiété,  en  faisant 
valoir  le  nom  de  Théodore  de  Mopsueste 
et  ses  écrits,  ceux  de  Théodoret  et  la  let- 
tre que  l'on  disait  être  d'Ilias,  ils  s'étaient 
élevés  contre  cet  abus  conformément  ^  la 
volonté  de  Dieu  et  à  l'ordre  de  l'Empereur, 
c[ui  les  avait  fait  venir  à  Constantinople; 
que  le  pape  Vigile,  après  avoir  assisté  à  tou- 
tes les  disputes  agitées  en  cette  ville  au  su- 
jet des  Trois-C/iapitres,  les  avait  condamnc'S 
plus  d'une  foisde  vive  voix  et  par  écrit;  qu'il 
était  convenu  de  se  trouver  en  personne  au 
concile,  afin  déjuger  cette  affaire  définitive- 
ment avec  tous  les  autres  évoques;  que,  prié 
d'accomplir  sa  promesse,  il  avait  demandé 
un  délai,  et  qu'au  lieu  de  se  rendre  à  l'assem- 
blée à  l'invitation  réitérée  des  évèques  et  de 
l'Empereur',  il  s'était  contenté  de  promettre 
qu'il  donnerait  en  partictdier  son  jugement 
par  écrit  sur  les  Trois- Chapitres.  Ils  rappor- 
tent divers  exemples  des  apôtres  el  des  an- 
ciens Pères  de  l'Église,  qui  ont  toujours  dé- 
cidé en  commun  les  questions  des  hérétiques, 
parce  qu'il  n'y  a  pas  d'autres  moyens  de 
connaître  '  la  vérité  dans  ces  sortes  de  cir- 
constances, chacun  ayant  besoin  du  secours 


.Marchetti,  critique  de  l'Histoire  de  Claude  Fleury, 
loni.  I,  pag.  r/i.  {L'cditeur.) 

'  Parce  qu'on  avait  manqué  auï  coudilions  ac- 
ceptées. {I/édileur.) 

'•A'pc  enim  potest  in  cnmmunihus  de  fide  rfis- 
ceptationibus  nlilerrerilas  maiiifeslah,cum  vmis- 
quisqtie  proximi  adjutorioindiget,  sicul  Dominus 
riicil  :  LMiuuique  fucnut  duo  vel  tics,  de,  pa^. 
5fi3. 


[vi'  SIÈCLE.]      CHAPITIIE  LXXXVl.  —  2'  CONCILE  DE  CONSTANTINOPLE. 
do  sou  frère,  suivant  l'Écriture,  où  il  est  dit 


877 


que,  lorsque  deux  ou  (rois  sont  iisseniMi's 
au  nom  de  Jésiis-Cluist,  ilest;iu  milieu  d'eux, 
lis  ajoutent  qu'nyaut  ouï  la  réponse  du  Pape 
qui  promettait  de  donner  sou  jugement  si';- 
ti.-i..  XIV,  pariimcut  ils  avaient  considéré  ce  que  dit, 
cvui""'"'''  l'Apôtre,  que  chacun  rendra  compte  ù  Dieu 
pour  soi;  et  qu'ils  avaient  d'ailleurs  appré- 
hendé le  ju,2;emcnl  dont  sont  menacés  ceux 
qui  scandalisent  un  des  plus  piMils  d'entre 
leurs  frères.  Ensuite,  ils  l'ont  en  peu  de  mots 
la  rccapitidalion  de  ce  qu'ils  avaient  t'ait 
pour  l'examen  des  Trois-Chapitrcs,  et  réfu- 
tent sommairement  ce  qu'on  alléguait  pour 
les  défendre.  Us  font  profession  de  recevoir 
les  quatre  conciles,  et  de  suivre  tout  ce  qu'ils 
ont  défini  sur  la  foi;  puis  ils  ajoutent:  «Nous 
jugeons  '  séparés  de  l'Eglise  catliolique 
ceux  (pii  ne  reçoivent  pas  ces  conciles.  Nous 
condamnons  Théodore  de  Mopsueste  et  ses 
Pog.  M7,  écrits  impies,  et  les  impiétés  écrites  par 
Théodoretcontre  la  vraiefoi,  contre  les  douze 
chapitres  de  saint  Cyrille,  contre  le  concile 
d'Ephèse  et  pour  la  défense  de  Théodore  et 
de  Nestorius.  Nous  auathématisons  encore 
la  lettre  impie  que  l'on  dit  avoir  été  écrite  par 
Ibas  à  Maris  persan,  où  l'on  nie  que  le  Verbe 
se  soit  incarné  et  fait  homme  de  la  Vierge  Ma- 
rie; où  l'on  accuse  saint  Cyrille  d'être  héré- 
tique et  apollinariste  ;  où  l'on  blâme  le  concile 
d'Éphèse  d'avoir  déposé  Nestorius  sans  exa- 


sentence  contre  les  Trois-Chapitres  est  suivie 
de  quatorze  anathèmcs  cnnlre  les  erreurs 
qui  [iouvaienl  avoir  ipiehiue  rapport  .'i  celles 
qui  avaient  été  anathéniatisées  parle  concile 
comme  étant  de  Théodore  de  Mopsueste  et 
de  Nestorius.  Un  condamne  dans  le  premier 
tous  ceux  qui  ne  confesseut  pas  que  la  na- 
ture divine  est  une  et  consubstantielle  en 
trois  personnes;  dans  le  second  ceux  qui  ne 
reconnaisseni  point  dans  le  Verbe  de  Itieu 
deux  naissances,  l'une  spirituelle  par  laquelle 
il  est  né  du  Père  avant  tous  les  siècles,  l 'autre 
corporelle  selon  laquelle  il  est  né  dans  les 
derniers  temps  de  la  sainte  Vierge  Marie 
mère  de  Dieu.  Les  huit  suivants  condamnent 
quiconque  fait  dilliculté  de  reconnaître  deux 
natures  unies  eu  Jésus -Christ  en  une  seule 
personne;  ou  nie  que  ce  soit  le  même  qui  ait 
fait  des  miracles  et  qui  ait  soulfcrt,  et  que  la 
sainte  Vierge  soit  véritablement  et  réelle- 
ment mère  de  Dieu.  On  y  établit  aussi  que 
les  deux  natures  ont  été  unies  eu  Jésus-Christ 
sans  diminution  et  sans  confusion,  en  sorte 
qu'elles  ont  l'une  et  l'autre  conservé  toutes 
leurs  propriétés;  que  l'adoration  que  l'on 
rend  à  Jésus-Christ  est  une  et  indivisible, 
parce  que  nous  n'adorons  point  Jésus-Christ 
en  deux  natures  -,  ce  qui  ferait  deux  adora- 
tions que  l'on  rendrait  séparément  à  Dieu  le 
Verbe,  et  séparément  à  l'homme  ;  mais  que 
nous   adorons   par  une  seule  adoration  le 


men,  et  où  l'on  défend  Théodore  et  Nestorius      Verbo  de  Dieu  incarné  avec  sa  propre  chair, 
avecleursécrits impies. Nousanathématisons      ainsi  que  l'Éghse  l'a  appris  dès  le  commen- 


donc  ces  ti-ois  chapitres  et  leurs  défenseurs, 
qui  prétendent  les  soutenir  par  l'autorité  des 
Pères  ou  du  concile  de  Chalcédoine.  »  La 


cernent  par  tradition.  On  y  dit  anathème  à 
ceux  qui  nient  ^  que  Notre-Seigneur  Jésus- 
Christ  qui  a  été  crucifié  dans  sa  chair,  soit 


'  Eos  auteiii  qui  hœc  non  susciphint,  aliénas 
catkolicœ  Ecclesiœ  jtulicamus.  Condemnamus  au- 
tem  et  anathematizamtis  itna  cum  omnibus  aliis 
hœreticis  qui  condemnali  et  anathematizati  swnt 
a  prœdictis  sanctis  quatuor  conciliis,  et  a  sancla 
calholica  et  apostoUca  Ecclesia,  et  Theodorum 
qui  Mopsuestiœ  episcopus  fuit,  et  impia  ejus  con- 
scripta,  etquœ  impie  J'heodoritus  conscripsil  con- 
tra rectam  fulem,  et  cuntra  duodecim  Capitula 
sancti  Cyrilli,  et  contra  Ephcsinam  primam  sy- 
nodum,  et  qum  ad  defensionem  Theodori  et  Nes- 
torii  ab  eo  scripta  sunt.  Super  hœc  anatfiemati- 
zamus  et  impiam  epislolam,  quam  dicilur  Ibas 
ad  Marim  perso  m  scripsisse,  qua-  deneijat  Deum 
Ycrbum  de  sancta  Dei  génitrice  et  sempcr  virgine 
Maria  incarnalum,  liominem  faotum  esse;  et 
sanctœ  mcmoriœ  CyriUum,  qui  rccte  docuitjun- 
quam  hœri'licum,  et  similiter  Àpollinario  scrihen-- 
tem,  criniinalur ;  et  inculpât  quidem  Ei>hesinam 
primani  synodum,  tanquam  sine  examinatione  et 
qtiœstione  ticstorio  ab   ea  deposito,  et  duodecim 


sancti  Cyrilli  capitula  impia  et  contraria  rectœ 
fidei  vocal  ;  défendit  autem  Theodorum  et  Kesto- 
rium,  et  impia  eorum  dogmata  et  conscripta. 
Prœdicta  igitur  Tria  Capitula  anathemalizamus, 
id  est  Theodorum  impium  llopsuestenum  cum 
nefandis  ejus  conscriptis,  et  quœ  impie  Theodori- 
tus  conscripsit,  et  impiam  epislolam,  quœ  dici- 
tur  Ibœ,  et  defensores  eorum,  et  qui  scripserunt 
vel  scribunt  ad  defensionem  eorum,  vel  recta  ea 
dicere  prœsumunt,  vel  omnino  impietatem  eorum 
nomine  sanctorum  Patrum,  aul  sancti  Chalcedo- 
iiensis  concilii  defenderunt,  aut  defendere  conan- 
tur.  Pag.  5U8. 

2  Si  quis  in  duabus  naturis  adorari  dicit  Chris- 
tum,  ex  quo  duas  adorationes  inlroducunl,  sepa- 
ratim  Deo  Verbo,  et  separatim  homini...  sed  non 
una  adoratione  Deum  Verbum  incarnatum  cum 
propria  ipsius  carne  adorât,  sicut  ab  inilio  Dei 
Ecclesiœ  traditum  est,  lalis  anathema  sit.  Can.  9 
pag.  571. 

5  Si  quis  non  confitelur  Dominum  nostrum  Je- 


878 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES 


vrai  Dieu,  Seigneur  de  gloire,  et  un  de  la 
sainte  Trinité.  Le  onzième  anallièmc  est  con- 
tre Arius  ',  Eunoiuius,  Macédonius,  Apolli- 
naire, Nestorius,  Eutychès,  Origène,  et  gé- 
néralement contre  tous  les  autres  hérétiques 
qui  ont  été  anatliématisés  par  la  sainte  Église 
catholique  et  apostolique,  et  par  les  quatre 
conciles  précédents,  de  môme  que  contre 
tous  leurs  éciils,  et  contre  tous  ceux  qui  ont 
enseigné  leur  doctrine,  et  y  ont  persévéré 
jusqu'il  la  mort.  Dans  les  trois  derniers,  les 
évêques,  après  y  avoir  fait  une  récapitula- 
tion des  principales  erreurs  qu'ils  avaient 
trouvées  dans  les  écrits  de  Théodore  de 
Mopsueste,  de  Théottoret  et  d'Ibas,  leur  di- 
sent anathèine,  à  eux  et  à  tous  ceux  qui 
prennent  la  défense  des  Trois-Cliapitves.  Tous 
les  évéqucs  souscrivirent,  tant  ù  ces  qua- 
torze anathcmes,  qu'à  tout  ce  qui  s'était 
passé  dans  celte  assemblée.  La  souscription 
d'Eulycliius  de  Constantinople,  qui  est  la  pre- 
mière, renferme  sommairement  la  sentence 
rendue  contre  les  TroisChapitres. 
AmiMniM  1  i.  Baluzc  nous  a  donué,  d'après  Lambé- 
ginisits  dans  cms,  quuizc  autres  anathemes  attribues  au 

une  Deuxième       ...  «i  -      *       t    i 

cooférenco.  cuiquieuie  concile  gênerai  dans  un  manuscrit 
grec^de  la  bibliothèque  impériale  de  Vienne  : 
ils  sont  tous  contre  les  erreurs  des  origénis- 
tes  touchant  la  préexistence  et  la  nature  des 
âmes,  ou  sur  l'incarnation  ;  mais  ce  qui  fait 
douter  que  ces  anathemes  soient  de  ce  con- 
cile ,  c'est  qu'on  n'y  traita  point  d'autres 
^:y>.-.lI^.lv  matières  que  celles  des  TroisChapitres.  Quel- 
jiiviii."'''  ques-uns  supposent,  qu'outre  les  huit  confé- 
rences rapportées  dans  les  collections  des 
Conciles,  on  en  tint  deux  autres  depuis  au 
sujet  des  origénistcs  :  Evagre  qui  a  fait,  dans 
son  Histoire,  l'abrégé  du  cinquième  concile, 
semble  autoriser  cette  opinion  ;  car,  après 
avoir  remarqué  que  les  Pères  avaient  donné 
l'explication  de  la  foi  catholique  dans  qua- 
torze articles,  ce  qui  se  fit  dans  la  huitième 
conférence,  il  ajoute  que  l'Empereur  ayant 
ensuite  demandé  l'avis  des  évêques  assem- 
blés au  sujet  de  la  requête  que  les  abbés 
Conon  ,  Cyriaque  et  Pancrace  avaient  pré- 
sentée <i  l'Empereur  contre  les  origénistes 
quelque  temps  avant  la  première  conférence, 
les  évoques  firent  des  exclamations  contre 
Origène  et  contre  ses  disciples;  qu'ils  en- 
voyèrent ensuite  ;\  ce  prince  une  relation 

sum  Chrislum  qui  crucifixus  est  carne,  Deum  esse 
vcrum  cl   Dominum  gloriœ  cl   iiriiim  de  saiicla 
TriniUUc,  laits  aiialhcnin  sil.  ("nii.  10,  ilmt. 
'  ''Si  quis  non  aiuilhemalizat  Arium,  Eunomium, 


de  ce  qui  s'était  passé  entre  eux,  dans  la- 
quelle ils  rejetaient  la  doctrine  d'Origène,  et 
Origène  lui-même,  comme  un  larron  lié  par 
les  liens  invisibles  de  l'anathème  qu'il  avait 
encouru.  «  Vous  saurez,  ajoutaient-ils,  ce 
que  nous  avons  fait,  si  vous  prenez  la  peine 
de  lire  les  actes.  »  Evagre  dit  encore  qu'ils 
donnèrent  un  t'crit  ;\  ce  prince,  qui  renfer- 
mait tous  les  points  de  doctrine ,  que  les 
sectateurs  d'Origène  apprenaient,  montrant 
en  même  temps  en  quoi  ils  s'accordaient 
ensemble,  en  quoi  ils  ditl'éraienl,  et  combien 
ils  s'éloignaient  de  la  vérité.  Les  mêmes 
évêques  rapportaient  aussi  divers  blasphè- 
mes de  Didyme ,  d'Évagre  et  de  Théodore 
de  Mopsueste,  qu'ils  avaient,  dit-il,  très-fidèle- 
ment extraits  de  leurs  ouvrages.  11  paraît 
donc,  par  Evagre,  que  les  évêques  du  cin- 
quième concile  général  tinrent  du  moins 
une  neuvième  conférence  où  ils  condam- 
nèrent Origène,  Didyme,  Evagre  de  Pont  et 
Théodore  ;  mais  nous  n'en  avons  plus  les 
actes,  si  ce  n'est  qu'on  veuille  y  comprendre 
les  quinze  canons  en  grec  donnés  première- 
ment par  Lambécius  qui  condamnent  les 
principales  erreurs  d'Origène.  Théodore  de 
Césarée  en  Cappadoce,  l'un  des  protecteurs 
des  origénistes,  ne  se  trouvait  plus  en  état 
d'empêcher  la  condamnation  d'Origène,  son 
crédit  étant  beaucoup  diminué  depuis  la  mort 
de  l'impératrice  Théodora  ,  arrivée  dès  l'an 
548.  Il  y  avait  même  dans  les  Actes  de  cette 
dernière  assemblée  un  endroit  propre  à  le 
couvrir  de  confusion  :  car  on  lui  attribuait 
ces  paroles  :  «  Si  les  apôtres  font  à  présent 
des  miracles,  et  sont  en  si  grand  honneur, 
quel  avantage  recevront-ils  dans  la.  résur- 
rection, s'ils  ne  sont  égaux  ù  Jésus-Christ?» 

13.  Ce  ne  fut  pas  la  seule  fois  que  l'on      c<in<i.imna- 
condamna  Origene  dans  ce  concile;  il  lavait  dm»  ic  nu. 
déjà  été  avant  la  cinquième  conférence  te-  e°«."" 
nue  le  17  mai,  puisque  Théodore  de  Césa- 
rée, pour  montrer  qu'on  peut  condamner  les 
morts,  après  avoir  dit  qu 'Origène  avait  été 
condamné  par  Théophile  d'Alexandiie,  ajou- 
ta, en  s'adrcssant  aux  évêques  du  concile  : 
n  Vous  venez  encore  de  le  condamner,  vous 
et  le  pape  Vigile.  »  Mais  peut-être,  les  évê- 
ques ne  l'avaient-ils  alors  condamné  que 
chacun  en  particulier,  on  souscrivant  i\  l'é- 
dit  de  l'Empcronr.  (Juoi  qu'il  en  puisse  êlre, 

Mnceilonium,  Apollinarium,  \estorium,Eutychen, 
Origencm,  cutn  iwpiix  eorum  ncriptxs,  ttc,  taUs 
nnnlhcma  sil.  Oau,  H, 


Tom.  VCfitt» 

dl.,  f.  «S9. 


[vi"  SIÈCLE.]      CHAPITRE  LXXXVI.  —  2*  CONCILE  DE  CONSTANTINOPLE. 


879 


ils  le  condamnèrent  tons  ensemble  dans  lo 
onzième  canon,  où  ils  dirent  anathème  h  (|iii 
n'anatliématisail  point  Ncslorius  et  Orij^èno 
avec  leurs  t^ci'ils  impies.  CyiiUi^  de  Seytlio- 
ple,  qui  écrivait  la  Vie  de  saint  Sabas,  son 
maître,  pen  de  temps  après  la  tenne  du  cin- 
quième» concile  ^(''in'i'al,  assure'  qu'Oi-it^èue 
et  Nesloiius  y  lurent  l'ini  el  l'aulce  coiulaui- 
nés  avec  leurs  dogmes.  Il  répète  la  môme 
chose  dans  la  Vie  de  saint  Entbymius,  en  re- 
marquant *  que  Jnstinien  fit  cliasser  les  moi- 
nes de  la  nouvelle  Lauro  de  Saint-Sabas, 
parce  que,  ne  pouvant  soiilfrir  la  condamna- 
tion d'Origène,  ils  s'étaient  séparés  de  la 
communion  de  l'Eglise,  sans 'que  le  patriar- 
clie  Eustochius  eût  pu  les  ramener  i)ar  ses 
exhortations.  Ce  n'est  donc  pas  l'historien* 
Evagrc  qui  a  le  premier  d'entre  l(>s  Grecs 
parlé  de  la  condamnation  d'Origène  par  le 
cinquième  concile  général,  puisqu'il  écrivait 
son  Histoire  vers  l'an  390,  au  lieu  que  Cyrille 
de  Scythople  travaillait  à  la  Vie  de  saint  Sa- 
bas en  357.  Il  est  encore  fait  mention  de  la 
condamnation  d'Origène ,  de  Didj-me  et  d'É- 
vagre  par  ce  concile  dans  la  lettre  de  So- 
phrone,  patriarche  de  Jérusalem,  à  Sergius, 
qui  fut  lue  dans  la  onzième  action  du  sixième 
concile  général,  et  dans  beaucoup  d'autres 
monuments  anciens  qu'il  est  inutile  de  rap- 
porter. 

•16.  Nous  remarquerons  seulement  qu'il  ne 
paraît  nulle  part  que  les  défenseurs  des  Trois- 
Chapitres  aient  été  entendus  dans  le  concile  ; 
mais  aussi  on  n'y  fit  rien  de  ce  qu'ils  crai- 
gnaient, et  la  condamnation  des  Trois-Clwpi- 
^;-M  ne  fut  pas  un  prétexte  pour  donner  atteinte 
au  concile  de  Chalcédoine,etpourétal)hr l'hé- 
résie d'Eutychès.  Au  contraire,  cette  hérésie  y 
fut  condamnée,  et  on  parla  toujoiu's  avec  hon- 
neur du  concile  de  Chalcédoine.  Le  pape  Vi- 
gile, après  avoir  été  six  mois  sans  pouvoir  se 
rendi'e  ù  l'avis  du  concile,  en  approuva  les  dé- 
cisions, comme  on  le  voit  dans  une  lettre 
qu'il  écrivit  au  patriarche  Eutychius  datée 
'"''«3°°'  '^^  ^  décembre  de  l'an  333.  Il  avoue  dans 
cette  lettre,  qu'il  a  manqué  à  la  charité  en 

«  Itaque  cttm  sancta  el  universalis  qidnta  sy- 
nodiis  Constantinopoli  essi-t  coacta,  communi  ge- 
neralique  anatheinati  submissi  sunt  Origenes.  et 
Tlieodorus  Mopsuestenus,  cum  iis  guœ.de  prœexis- 
lentia  el  reslilutione  dicta  sunt  ah  Evagrio  et  Di- 
dyino:  prœsentibus  quatuor  Patriarchis,  atque 
décréta  comprobanlibus.  Toiu.  lUMnnum.  Cotcl., 
pag.  374.  [Voyez  tom.  II  de  la  présente  éditioa, 
pag,  250  et  suiv.] 


se  séparant  de  ses  frères,  avec  qui  il  était 
auparavant  uni  dans   les  sentiments  d'une 
même  foi,  et  avec  qui  il  l'était  encore.  «Mais, 
ajoule-t-il,  (ui  ne  doit  ])oint  avoir  honle  do 
se  rétracter,  quand  on  reconnaît  la  vérité 
des  choses,  que  l'on  n'avait  pas  bien  connues 
auparavant,  faute  de  les  avoir  suilisammciit 
('claircii's.  »  Il  cilc  ;\  ce  pi'opos  l'exemple  de 
plusieurs  anciens,  nommément  de  saint  Au- 
gustin, qui,  quoique  très-instruit  dans  les  let- 
tres divines,  a  fait  la  rétractation  de  ses  pro- 
pres ouvrages,  en  y  coirigeant  ce  qu'il  y  avait 
de  d(>fectueux,  et  en  y  ajoutant  ce  qu'il  avait 
trouvé  depuis.  Il  dit,  qu'à  l'imitation  de  ces 
anciens,  il  n'avait  cessé  de  rechercher  dans 
les  écrits  des  Pères  ce  qu'il  y  avait  de  vrai  à 
l'égard  des  Trois-C hapitres ;i\n'\\  avait  trouvé 
plusieurs  choses  dans  les  écrits  de  Théodore 
de  Mopsueste,  de  Théodoret  et  d'D)as,  con- 
traires à  la  foi  catholique.  Il  rapporte  leurs 
principales  erreurs,  et  tinit  sa  lettre  en  di- 
sant :  <c  Nous  condamnons  donc  et  nous  ana- 
thématisons  les  Trois-C  hapitres  impies,  c'est- 
à-dire  Théodore  de  Mopsueste  avec  ses  écrits 
impies  ;  les  écrits  impies  de  Théodoret,  et  la 
lettre  que  l'on  dit  avoir  été  écrite  par  Ibas. 
Nous  soumettons  au  même  anathème  qui- 
concpie  croira  cpie  l'on  doit  recevoir  ou  dé- 
fendre ces  Trois-C  hapitres,  ou  entreprendre 
de  le  faire.  Nous  reconnaissons  pour  nos 
frères  et  nos  collègues  ceux  qui,  conservant 
la  vraie  foi  établie  dans  les  conciles  précé- 
dents, savoir,  dans  les  conciles  de  Nicée ,  de 
Constantinople,  dÉphèse  et  de  Chalcédoine, 
ont  condamné  ou  condamnent  ces  Trais-Cha- 
pitres. Et  nbus  cassons  et  annulons  par  cet 
écrit  tout  ce  qui  a  été  fait  par  nous  ou  par 
d'autres  pour  la  défense  des  Trais-Chapitres. 
Car  à  Dieu  ne  plaise  que  l'on  ose  avancer 
dans  l'Eglise  catholique  cpi'aucmi  des  blas- 
phèmes que  nous  avons  rapportés  ci-dessus 
a  été  reçu  par  ces  quatre  conciles,  ou  par 
quelqu'un  d'eux,  ni  qu'ils  aient  reçu  ceux 
qui  enseignent  ou  suivent  de  si  mauvais  sen- 
timents. »  [Cette  lettre  peut  être  regardée 
comme  un  modèle  de  dignité,  de  modestie 

^  Tempore  vero  conséquente,  œcumenica  sancta 
quinta  synodo  Constantinopoli  congrcgata.  et per 
eam  Origenis  Nestoriique  dogniatihus  anatlieinate 
percussis,  cumque  qui...  novam  Lauram  orige- 
nistw,  illinc  essent  e.vpulsi...  ipse  verser  in  hac 
Laura.  Tom.  II  Monum.  Coleler.,  pag.  338. 

'  Cyrill.,  in  Vila  S.  Sabw,  pag.  375. 

'  Ilalloix,  qiicst.  X,  paiagr.  4S2,  vide  tom.  VU, 
pag.  746. 


880 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


BktntO,  Coo- 

dl.,  p.  liîi. 


Pa;.  im  II 
ttq. 


et  depiudcnco.  Elle  coiifume  iiulirectemcnt 
le  concile  de  ConslauUiiople  ,  quoiqu'elle 
n'en  fasse  pas  mention.  Les  Grecs  l'ont  jointe 
aux  Actes  de  ce  concile  comme  une  conclu- 
sion de  la  huitième  et  deinioie  conférence, 
sans  cela  leur  concile  n'eut  compté  pour 
rien.] 

Vigile,  non  content  de  s'être  explique  de 
la  sorte  avec  le  patriarclie  Enlj-cliiiis,  donna 
environ  trois  ans  après,  étant  à  Constanli- 
nople,  une  Constitution  fort  ample  pour  la 
condamnation  des  Trois-Chapitres.  Elle  est 
datée  du  23  février  534.  Nous  l'avons  en 
latin  dans  la  Collection  des  conciles  de  Ba- 
luze,  et  dans  celle  du  père  Hardouin,  sur 
un  ancien  manuscrit  de  la  Bibliothèque  de 
M.  Colbert,  qui  est  le  seul  dont  on  ait  con- 
naissance. Ce  Pape  y  donne  d'abord  la  dé- 
finition de  foi  du  Concile  de  Chalcédoine; 
puis  la  lettre  de  saint  Léon  à  Flavien.  11  exa- 
mine ensuite  l'all'aire  d'Ibas,  comment  elle 
fut  traitée  à  Tyr  et  ;\  Chalcédoine  ;  et  entre- 
prend de  montrer  qu'il  n'a  jamais  reconnu 
la  lettre  à  Maris  persan,  citée  si  souvent 
sous  son  nom;  que  cette  lettre  lui  a  été  sup- 
posée par  les  nestoriens,  dans  le  dessein  de 
le  calomnier;  que  c'est  celle-là  qui  a  été 
condamnée  par  le  concile  de  Chalcédoine: 
que  la  lettre  que  ce  concile  déclare  ortho- 
doxe et  sur  laquelle  il  absout  Ibas,  est  celle 
du  clergé  d'Édessc  en  sa  faveur.  Il  anallié- 
matise  donc  et  condamne  la  lettre  à  Maris, 
comme  enseignant  que  Marie  n'est  point 
mère  de  Dieu,  mais  seulement  de  l'homme 
qui  est  né  d'elle;  et  tous  ceux  qui  disent  que 
cette  lettre  a  été  déclarée  orthodoxe  dans  le 


concile  de  Chalcédoine.  Vigile  examine  en- 
suite les  écrits  de  Théodore  de  Mopsueste, 
et,  après  en  avoir  marqué  les  erreurs,  il  dit 
auathènie  à  sa  personne  et  à  ses  écrits.  A 
l'égard  de  Théodorel,  comme  il  avait  lui- 
même  approuvé  la  défmilion  de  foi  de  Chal- 
cédoine, et  rejeté  tout  ce  que  ce  concile  avait 
rejeté,  le  Pape  ne  condamne  pas  sa  personne, 
mais  seulement  ce  qu'il  avait  écrit  contre  saint 
Cyiille,  et  conséqueminent  contre  le  concile 
d'Kphèsc,  dont  la  doctrine  était  celle  de 
saint  Cyrille.  La  fin  de  cette  Constitution  est 
semblable  à  celle  de  la  lettre  à  Eutychius. 
Vigile  '  condamne  les  Trois-Chapitres,  et 
leurs  défenseurs ,  reconnaissant  pour  ses 
frères  et  ses  collègues  dans  le  sacerdoce , 
ceux  qui  les  ont  condamnés  ou  condamnent, 
en  déclarant  nul  tout  ce  que  lui  ou  d'autres 
auraient  pu  faire  pour  la  défense  des  Trois- 
Chapitres.  On  peut  remarquer  ce  que  le 
Pape  dit  dans  celte  Constitution,  que  l'on  * 
n'approuva  dans  le  concile  de  Chalcédoine 
la  lettre  de  saint  Léon  à  Flavien,  qu'après 
l'avoir  examinée  et  trouvée  conforme  à  la 
doctrine  des  conciles  de  X'cée  ,  de  Constan- 
tinople  et  d'Ephèse.  D'où  il  tire  cette  consé- 
quence, que  si  l'on  a  usé  de  cette  précaution 
envers  la  lettre  d'un  si  grand  évéque  ,  il  est 
bien  permis  d'examiner  celle  d'Ibas  à  Maris, 
qui  rejette  le  concile  d'Ephèse  ,  et  qui  con- 
damne comme  hérétiques  les  écrits  de  saint 
Cyrille.  L'Empereur  satisfait  de  ce  que  Vi- 
gile avait  fait  pour  la  condamnation  des 
Trois-Chapitres,  accorda  une  loi  en  faveur 
de  l'Italie  ,  où  il  confirmait  toutes  les  dona- 
tions faites  aux  Romains  par  Alai'ic,  Amala- 


IC7I,  lU 


'  Prœterea  igitur  tria  impia  capitula  anatlie- 
malizamus  atque  dumtuimus,  id  est.  epistotam 
quœ  dicilur  Ibœ  ad  iliirim  pcrsam,  in  qiia  ne- 
fandœ  superius  designulœ  bla.'<pliemiii'  continen- 
tur,  et  impium  Theodorum  ilopsiiesleuum  ctim 
nefandis  ejus  conscriplis,  et  quœ  impie  Theodo- 
Hlus  conscripsit.  El  quiciimque  en  quoquo  tcm- 
pore  crediderit  accipienda  tel  deferenda,  aul  co- 
nulus  fiierit  aliquando  prwscntem  damnaUonem 
resolvere,  pari  analhemale  condcmnamus.  Eos 
CUlem  qui  conservantes  reclam  fidem  pra'diciis 
quatuor  synodis  prœdiralam,  mcmorala  tria  ca- 
pitula damnaverunl  vel  damnant,  fralres  et  con- 
sacerdoles  liabemus.  Quœnimque  rero  sire  meo 
nomine  sive  quorumiibel  pro  defensione  mcmo- 
ratorum  Irium  capitutnrum  prolala  fuerint  rel 
ubicumque  reperla,  pncscnlis  noslri  plenissimi 
constituli  auclorilalc  vacuamus.  Ualuz.,  Concil., 
img.  1080. 

«  Ilis  ergo  se  ita  habenlibits.  nulli  renil  in  du- 
bium  quin  Paires  noslri  ila  a  se  rcnerabiUler 
crciierent  iuscipi  beati  Leonii  epislolam,  si  eam 


cum  Nicmnœ  Conslanlinopolilance  synodorum, 
lum  eliam  bcali  Cyrilli  in  Epliesina  prima  expo- 
sitis  assercreni  convenire  doclrinis.  Et  si  illa 
lanti  pontificis  et  tanta  orlhodoxœ  fidei  luce prce- 
futgens  epistola  his  exigit  comparationihus  ap- 
probari,  quomodo  illam  ad  Marim  pcrsam  Epis- 
totam, quœ  specialiler  Epliesinam  primant  syno- 
dum  respuit,  et  beati  Cyrilli  exposila  dogmata 
definivit  hœretica,  ah  iisilem  Palribus  credalur 
orlltodoxa  nominari,  cum  illn  condeninel  quorum 
conlalionc  lanli  pontificis,  vt  diclum  est.  meruit 
doctrina  laudari  !  Il'iil.,  pag.  1567.  (tiii  n'examina 
pas  plus  la  lettre  <lc  saint  Léon  que  les  symboles 
de  Nicée  et  de  Constautinople.  Les  évOques  sans 
doute  jugeaient  avec  le  l'npe;  mais  à  la  condition 
de  juger  conin^e  lui  pour  demeurer  avec  lui.  Il  y  a 
une  grande  dilTércnce  entre  nu  examen  et  une  ac- 
ceptation, entre  une  discussion  et  une  vérifica- 
tion par  la(|uelle  on  atteste  qu'une  déiisinn  est  ce 
qu'elle  doit  être,  en  lui  rendant  une  solennelle  obéis- 
sance, Vigile  parle  de  vérification  et  non  d'un  exa- 
men à  propos  de  la  lettre  de  saint  Liou.j 


CHAl'ITllE  LXXXM.  —  2'  CONCILE  DE  CONSTANTINÛPLE. 


V.lil   «Jn.. 

coniro 


\    Con* 
,  p.  CJ6. 


[vr  SIÈCLE.] 

soutlic  OU  Théodat ,  et  déclarait  '  nids  les 
maria,qcs  contractés  avec  Ips  vicrîïes  consa- 
crées ;\  Dieu.  CoV.n  loi,  qui  est  adrossi'e  à 
Narsés  et  ù  Aiiliochtis,  préfet  du  Prétoire 
d'Italie,  est  do  l'an  Tloi. 

17.  Plusieurs  années  auparavant  ,  Justi- 
nien  avait  doinié  un  long  édit  contre  les  er- 
reurs d'Ctriijèiic,  à  la  requête  de  qiielqiu's 
moines  df.  Jérusalem,  et  à  la  sollitilation  du 
diacre  Pelage  et  de  Mennas,  patriarche  de 
Constantinople.  Ce  prince,  après  y  avoir  té- 
moigné' son  di'sir  ardent  de  conserver  la  foi 
dans  sa  pureté,  et  de  maintenir  FKglisc  ca- 
tholique dans  la  paix,  dit  qu'on  lui  avait  fait 
rapport  que  certaines  personnes,  s'écartant 
de  la  doctrine  de  l'Écriture  et  des  Pères , 
s'attachaient  à  Origène  et  à  ses  dogmes,  qui 
ne  différaient  en  rien  de  ceux  des  ariens , 
des  manichéens  et  des  autres  hérétiques.  Il  les 
réduit  à  six  articles  :  le  premier,  sur  la  Trinité  : 
d'après  Justinien,  qu'Origènc  enseignait  que 
le  Père  est  plus  grand  que  le  Fils,  et  le  Fils  que 
le  Saint-Esprit;  que  le  Filsne  peut  voir  le  Père, 
ni  le  Fils  le  Saint-Esprit;  et  que  le  Fils  est 
à  l'égard  du  Père  ce  que  nous  sommes  à 
l'égard  du  Fils.  Le  second,  sur  la  création: 
Origène  croyait  que  la  puissance  de  Dieu 
avait  des  bornes;  qu'il  n'avait  pu  faire 
qu'un  certain  nombre  d'esprits  et  une  cer- 
taine quantité  de  matière  qui  fût  à  sa  dis- 
position ;  qu'il  y  a  eu  et  qu'il  y  aura 
plusieurs  mondes.  Le  troisième  regarde  la 
préexistence  des  âmes ,  qu'Origène  disait 
avoir  été  attachées  à  des  corps  en  pu- 
nition des  fautes  qu'elles  avaient  commises 
auparavant,  surfont  en  se  dégoûtant  de  la 
contemplation  divine.  Par  le  quatrième,  on 
voit  qu'Origène  croyait  que  le  ciel,  le  soleil, 
la  lune ,  les  étoiles  et  les  eaux  qui  sont  sur 
les  cieux  sont  animés  et  raisonnables.  Le 
cinquième  porte  qu'il  croyait  qu'après  la 
résurrection  les  corps  glorieux  seront  de 
figure  ronde.  Le  sixième,  que  les  tourments 
des  damnés,  soit  hommes,  soit  démons, 
finiront  ,  et  que  tous  seront  rétablis  en 
leur  premier  état.  L'Empereur  rapporte  un 
grand  nombre  de  passages  tirés  des  écrits 
d'Origène,  principalement  de  ses  livres  des 


881 


Principes,  pour  montrer  qu'il  a  effectivement 
enseigné  toutes  ces  erreurs,  et  il  réfute  par 
l'autorité  do  l'Écriture  et  des  Pères.  Puis, 
s'adressant  h  Mennas,  .'i  qui  il  envoya  d'abord 
cet  édit,  il  l'exhorte  h  assembler  tous  les 
évêques  qui  se  trouveront  à  Constantinople, 
et  les  abbés  des  monastères,  et  à  les  obliger 
d'anathéniatiser,  par  écrit,  l'impie  Origène, 
surnoninié  Adamantins,  autrefois  prêtre  de 
l'Église  d'Alexandrie,  avec  les  dogmes  abo- 
minables qu'il  venait  de  marquer.  Pour  ne 
rien  oublier,  il  joignit  neuf  anatlièmcs  qui 
renfermaient  en  abrégé  les  dogmes  erronés 
d'Origène,  et  un  dixième  où  il  était  anathé- 
matisé  nommément.  L'Empereur  ordonna  à 
Mennas  d'envoyer  des  copies  de  ce  qu'il  au- 
rait fait  dans  son  concile,  au  sujet  d'Origène, 
à  tous  les  autres  évêques  et  à  tous  les  supé- 
rieurs des  monastères,  afin  qu'ils  en  fissent 
autant,  avec  défense  à  l'avenir  d'ordonner 
ni  évêques,  ni  abbés,  qu'ils  n'eussent  ana- 
thématisé  Origène  avec  tous  les  autres  héré- 
tiques que  l'on  a  coutume  de  condamner.  Il 
écrivit  aussi  au  pape  Vigile  et  aux  patriar- 
ches d'Alexandrie,  d'Antioche  et  de  Jérusa- 
lem sur  le  même  sujet.  L'édit  de  Justinien 
fut  accepté.  Le  patriarche^  Mennas,  et  les 
évêques  qui  se  trouvèrent  à  Constantinople, 
y  souscrivirent.  Le  pape  Vigile,  Zoïle  d'A- 
lexandrie, Éphrem  d'Antioche,  et  Pierre  de 
Jérusalem  en  firent  de  même.  Domitien  d'An- 
cyre  et  Théodore  de  Césarée,  quoique  dé- 
fenseurs d'Origène,  furent  aussi  contraints 
de  le  condamner;  et  c'est  sans  doute  de 
cette  première  condamnation  d'Origène  qu'il 
faut  entendre  ce  que  dit  Théodore  dans  la 
cinquième  conférence  du  cinquième  concile 
général'  :  Vous  venez  de  condamner  Origène, 
vous  et  le  pape  Vigile. 

18.  Aussitôt  après  la  tenue  de  ce  concile, 
l'Empereur  en  envoya  les  Actes  à  Jérusalem. 
Les  évêques  de  Palestine,  s'étant  assemblés 
à  ce  sujet,  les  approuvèrent*  et  les  confir- 
mèrent de  vive  voix  et  par  écrit.  Alexandre, 
évêquc  d'Abyle ,  fut  le  seul  qui  s'y  opposa  ; 
mais,  pour  l'en  punir,  on  le  déposa  de  l'épi- 
scopat.  Il  mourut  quelque  temps  après  à 
Constantinople,  accablé  sous  les  ruines  d'un 


Lecicquième 
concile  géDé» 
rslest  reçues 
Orient.  Il  oc- 
casionne DD 
fcbifme  cnOc* 
cident.  Con- 
cile de  Pales, 
tice. 


'  Cura  autem  tyrannicœ  ferocUatis  prœsump- 
tionem  re  etiain  ilUcita  quasi  permissa,  egisse 
tine  dubio  sit  :  sancimiis,  ut  si  quis-  iniiiiercs  Deo 
sacralas  vel  liabilum  religiosum  habentes  sibi 
conjunxisse  inveniantur,  nullam  eis  tenendi,  tel 
dotes  forte  consrriptas  iterum  monasteriis,  vel 
ecclesiis,  aui  sancto  proposilo  cuidedicatœ  sunt, 

XI. 


restiiuantur.  Fragm.  sanct.  Justiniani,  in  Codice, 
pag.  U83.  —  '  Liber.,  in  Brev.,  cap.  xxin,  pag.  778. 

'  Ound  etiam  mine  et  in  ipso  Origène  fecit  et 
sanctilas  rr^^lra,  et  Vigilius  religiosissimus  l'upa 
anliquior^  Romœ.  Pag.  490. 

'  Vita  S.  Sabœ,  tom.  III  Monum.  Cotelerii,  pag. 

315. 

56 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


882 

tremblement  de  terre  arrive^  en  cette  ville, 
l'an  o.j7.  Les  moines  '  de  la  nouvelle  laure 
de  saint  Sabas  reftisèrcnl  aussi  de  souscrire 
à  la  condamnation  d'Origène  :  ils  se  sépa- 
rèrent de  la  communion  de  l'Kglise.  En  vain 
Eustochius,  patriardie  de  Jérusalem,  s'em- 
ploya pour  les  ramener;  ils  s'opinii"itr('rent, 
et  furent  en  conséquence  chassés  de  leur 
laure  et  même  de  toute  la  province  par  les 
ordres  de  Jusiinien,  dont  le  duc  Anastase  fut 
exécuteur.  Flus^ieurs  Kglises  d'Occident  reje- 
tèrent* le  cinquième  concile,  dans  la  persua- 
sion que  la  condamnation  des  7'rois-Ckapitres 
ne  s'était  pu  faire  sans  donner  atteinte  au 
concile  de  Cbalcédoiue.  On  craignait  encore, 
en  l'acceptant,  de  donner  prise  aux  euty- 
cliiens.  Rustique,  dL-fcre  de  l'Eglise  romaine, 
persista  dans  la  défense  des  Trois- Chnpitrcs, 
et  fut  envoyé,  pour  ce  sujet,  en  exil  dans  la 
Thébaïde.  Plusieurs  évêques  '  d'Aûique  fu- 
rent, pour  la  même  cause,  exilés,  battus  et 
mis  en  prison.  Le  scliisme  se  répandit  jusque 
dans  les  Gaules  cl  en  Irlande,  où,  à  cause  de 
l'éloignement  des  lieux,  et  de  la  langue  dans 
laquelle  Théodore  de  Mopsueste,  Tliéodoret 
et  Ibas  avaient  écrit,  l'on  (-tait  moins  en  état 
de  juger  de  ce  qui  s'était  passé  dans  le  con- 
cile. Il  y  eut  aussi  des  scbismatiques  dans 
ristrie  et  dans  plusieurs  autres  provinces, 
comme  on  a  vu  dans  l'analyse  des  lettres 
du  pape  Pelage,  qui  monta  sur  le  Saint- 
Siégc  en  553 ,  trois  mois  après  la  mort  de 
Vigile,  arrivée  le  10  janvier  de  la  même  an- 
née; et  dans  celles  de  Pelage  II,  qui  fut  élu 
pape  en  377,  et  mourut  en  390. 

ARTICLE  XVI. 

CO:ïCtLES  DE  PARIS  [551],  D'ARLES  [554],  ET  DE 
PARIS  [537];  ORDONNANCE  DE  CUILDEDERT;  ÉDIT 
DE  CLOTAIRE. 

LcciD<iai».  1-  On  ne  peut  mettre  le  second  concile  de 
né'nTÎ'l're'A  Pavis  avaut  l'an  331,  puisque  Sa[>audus, 
ÔK°io"'.'i.'n   successeur  de  saint  Anrélien  d'Arles,  mort 

fcbi:  ma       tn  , ,  >  '    •  i  •  . 

okmohi.  en  cette  année,  y  présida;  mais  on  ne  peut 
p«:e°in..  aussi  le  mettre  plus  tard,  car  entre  Satla- 
rac,  évêque  de  Paris  lors  de  la  tenue  de 
ce  concile,  et  saint  Germain,  qui  assista 
au  troisième  concile  tenu  en  la  même  ville 
rn  337,  il  y  eut  un  autre  évêque  de  Paris, 
nommé  Eusèbc.  Le  sujet  de  la  convocation 
de  ce  second  concile  fut  l'examen  de  la  cause 


373 


'  Vila  S.  Sabce,  toni,  III  Monum.  Cotclerii,  pog. 


de  Safl'arac,  convaincu  par  sa  propre  confes- 
sion d'un  crime  considérable.  Les  évêqucs, 
au  nombre  de  vingt-sept,  iiarmi  lesquels  il  y 
avait  six  métropoUtains,  savoir  :  Sajiaudus, 
d'Arles;  Hésycbius,  de  Vienne;  Nicétius,  de 
Trêves;  Probien,  de  Bourges;  Constitut,  de 
Sens;  Léonce,  de  Bordeaux,  s'assendjièrenl 
dans  la  maison  de  l'église,  sur  l'invitation  du 
roi  Childebert.  Quelque  temps  avant  ce  con- 
cile, Satl'arac  avait  confessé  sa  faute  en  pré- 
sence de  Médovée,  évêque  de  Meaux;  de 
saint  Lubin,  évêque  de  Chartres;  de  Leuba- 
cairc,  abbé;  d'HicuIpbe,  prêtre;  d'Étenius, 
archidiacre,  et  de  Castricius,  diacre,  qui 
l'avaient  condamné  à  être  enfermé  dans  un 
monastère.  Le  concile  se  flt  représenter  les 
actes  de  cette  procédm-e  ;  et,  après  les  avoir 
examinés  et  trouvé  la  prmive  complète,  ils 
confirmèrent  la  sentence  rendue  par  ces  trois 
évêqucs,  avec  charge  au  métropolitain ,  qui 
était  Constitut  de  Sens,  de  déposer  Salfarac, 
suivant  les  canons.  En  conséquence,  on  or- 
donna à  sa  place  Eusèbe  évêque  de  Paris, 
qui  eut  pour  successeur  saint  Germain,  vers 
l'an  553.  Nous  n'avons  de  ce  concile  que 
le  décret  contre  Saffarac ,  avec  les  souscrip- 
tions de  vingt-sept  évêqucs  qui  le  composè- 
rent. On  n'y  trouve  rien  de  la  procédure 
faite  antécédemment  contre  lui  par  les  évo- 
quée de  Meaux  et  de  Chartres. 

2.  Sapaudus,  assisté  de  onze  évéques  et  ct.nait 

de  huit  dc'putés  des  absents,  tint  un  concile  Tom.  v  coo. 
à  Arles,  le  29  juin  de  l'an  Sol,  qui  était  le  '"'''■ 
quarante-troisième  du  règne  de  Childebert. 
Tous  ces  évêques  étaient  de  la  province 
d'Arles  et  des  deux  voisines,  la  seconde  Nar- 
bonnaise  et  les  Alpes  maritimes.  Ils  firent  ct 
sept  canons,  dont  le  premier  porte  que  les 
évéques  comprovinciaux  se  conformeront  à 
l'église  d'Arles  au  sujet  des  offrandes,  c'est- 
à-dire,  de  la  forme  des  pains  qu'on  offrait 
sur  l'autel  ;  —  le  second ,  que  la  juridiction 
sur  les  moines  appartiendra  à  révèijuc,  dans 
le  territoire  duquel  les  monastères  seront 
situés  ;  —  le  troisième ,  que  les  abbés  no 
pourront  s'absenter  longtemps  de  leur  mo- 
nastère sans  la  permission  de  l'évêque  dio- 
césain; —  le  quatrième,  qu'un  prêtre  ne 
pourra  déposer  un  diacre  ou  un  sous-diacre 
i\  l'insu  de  l'évêque;  —  le  cinquième,  que  les 
(ivêques  prendront  soin  des  monastères  de 
lilles  qui  sont  dans  leur  ville,  et  que  l'ab- 

*  Pelag.,  Epist.  ad  Episcopos  Islriœ,  tom.  V  Con- 
cis., pag.  021.  —  '  Victor.  Tunon.,  ad  an.  5W. 


Cnnons  dt 

Cfl  CMltlIC. 


Troisième 
concilo  dePa- 
rts.  Toin.  V 
Ccncll.,  pag. 
8U. 


Canons  do 
ee  eoDBilr. 


Can.  I. 


3. 

3. 


fvi*  SIÈCLE.]  CHAPITRE  LXXXVI.  - 

Lessc  ne  pourra  rien  faire  ciintro  lu  /('t/te;  — 
le  sixième,  que  les  clercs  ne  pourront  dété- 
rioi'cr  les  biens  dont  l'évoque  leur  aura  ac- 
cordé l'usaj^e,  sous  peine  de  discipline  pour 
les  jeunes  clercs,  c'est-à-dire  ceux  qui  étaient 
au-dessous  dos  sous-diacres,  et  ponr  les  vieil- 
lards de  passm-  pour  homicides  des  pauvres; 
—  le  septième,  qu'un  évèque  ne  pourra  pro- 
mouvoir un  clerc  d'une  autre  lOglise  sans  l'a- 
grément de  son  évèque  :  dans  le  cas  de  con- 
travention, celui  qui  aura  été  ordonné  ne 
pourra  faire  les  fonctions  de  l'ordre  qu'il 
aura  reçu;  et  l'évèque  qui  l'aura  ordonné 
sciemment  sera  privé  de  la  communion  pen- 
dant trois  mois. 

3.  On  met  le  troisième  concile  de  Paris 
vers  la  troisième  année  du  pape  Pelage  I,  la 
quarante-sixième  de  Cbildebert,  c'est-à-dire 
en  537,  et  on  ne  peut  guère  le  mettre  plus 
tôt,  puisque  saint  Enphrone,  élu  évèque  de 
Tours  l'année  précédente  536,  y  assista  avec 
quatorze  autres  évèques,  dont  les  plus  con- 
nus sont  Probien  de  Bourges  qui  y  présida, 
Prétextât  de  Rouen  et  saint  Germain  de  Pa- 
ris. On  y  fit  dix  canons  pour  empêcher  l'u- 
surpation des  biens  de  l'Église.  Dans  le  pre- 
mier, on  prononce  la  peine  d'excommunica- 
tion contre  ceux  qui  retiendront  les  biens  de 
l'Éflise,  jusqu'à  ce  qu'ils  les  aient  restitués; 
ou  y  défend  aussi  de  se  mettre  en  possession 
des  biens  de  l'Église  sous  prétexte  de  les 
conserver  pendant  les  interrègnes.  Les  évè- 
ques donnent  pour  raison  de  ce  canon,  qu'il 
n'est  pas  juste  qu'ils  soient  les  simples  gar- 
diens des  chartes  des  églises,  plutôt  que  les 
défenseurs  de  leurs  biens.  —  Et  parce  que  les 
biens  des  évèques  appartiennent  aux  églises, 
le  second  canon  défend  de  s'en  emparer, 
sous  peine  d'anatbème  perpétuel.  —  Le  troi- 
sième est  contre  les  évèques  qui  voudraient 
usurper,  ou  qui  auraient  usurpé  le  bien  d'au- 
trui  sous  prétexte  de  concession  du  roi.  — 
Il  est  défendu  par  le  quatrième  d'épouser  la 
veuve  de  son  frère,  do  son  père  ou  de  son 
oncle,  la  sœm-  de  sa  femme,  sa  belle-fille,  sa 
tante  et  la  fille  de  sa  belle-mère.  —  Le  cin- 
quième prive  de  la  communion  de  l'Église 
catholique,  et  condamne  à  un  anathème  per- 
pétuel, ceux  qui  enlèvent  ou  qui  demandent 
en  mariage  les  vierges  consacrées  à  Dieu  par 
une  déclaration  publique.  —  La  même  peine 
est  ordonnée  dans  le  sixième  centre  ceux  qui 
recoiu'ent  à  l'autorité  du  prince  pour-  épouser 
des  veuves  et  des  filles  malgré  lem-s  parents 
ou  qui  les  eufèvent.  —  On  renouvelle  dans 


CONCILE  DE  PARIS. 


883 


le  septième  la  défense  de  recevoir  une  per- 
sonne excomnnniiée  par  son  évècpie.  —  Il  '■°"'  •• 
est  dit  dans  le  huitième  que  l'on  n'ordonnera 
paiul  un  évèque  malgn;  les  citoyens,  mais 
celui-là  sculemc^nl  que  le  clergé  et  le  peuple 
auront  choisi  avec  une  entière  liberté;  qu'il 
ne  sera  point  intras  par  l'ordre  du  prince , 
ni  par  quelque  pacte  que  ce  soit,  ni  contre 
la  volonté  du  métropolitain  et  des  évèques 
comprovinciaux.  Le  canon  ajoute  que ,  si 
quelqu'un  a  usurpé  l'épiscopat  par  ordre  du 
roi,  aucun  des  évèques  ne  le  recevra,  sous 
peine  d'être  retranché  de  la  communion  des 
autres,  ne  pouvant  ignorer  qu'il  a  été  or- 
donné illégitimement.  Quant  aux  ordinations 
déjà  faites,  le  métropolitain  en  jugera  avec 
ses  comprovinciaux,  et  avec  les  évèques  voi- 
sins qu'il  choisira,  et  avec  qui  il  s'assemble- 
ra en  un  lieu  convenable  pour  juger  toutes 
choses  suivant  les  anciens  canons.  —  Le  neu-  *• 
vième  ordonne  que  les  enfants  des  esclaves, 
dont  le  ministère  regardait  les  sépultures,  à 
qui  l'on  a  accordé  la  liberté,  à  charge  de 
rendre  quelque  service  soit  aux  héritiers, 
soit  aux  éghses,  rempliront  les  obligations 
qui  leur  ont  été  imposées  par  celui  qui  les 
a  mis  en  liberté  ;  mais  que  si  l'Église  les  dé- 
charge en  tout  des  fonctions  du  fisc,  ils  en 
seront  décliargés,  eux  et  leurs  descendants. 
—  Le  dixième  porte,  que  les  canons  susdits  to. 
seront  signés  par  tous  les  évèques  absents, 
afin  que  ce  qui  doit  être  observé  de  tous, 
soit  aussi  reçu  unanimement.  La  plupart  des 
évèques  du  concile  ne  prennent  point  le 
nom  de  leurs  sièges,  mais  celui  de  péclisurs. 
On  ne  sait  de  quelle  Église  était  évèque  Fer- 
rocinetus,  qui  souscrivit  le  dernier  de  tous. 

4.  Le  roi  Cbildebert,  sous  lequel  se  tinrent     ordonnance 
les  conciles  dont  nous  venons  de  parler,  mou-  conire'iosrêf- 
rut  le  3  décembre  de  l'an  338,  après  qua-  nisme"  t!'v 
rante-huit   ans  de  règne.  Nous  avons  une   8°°.°'  ''  ''°°" 
partie  de  l'ordonnance  qu'il  puLlia  en  faveur 
de  la  religion  chrétienne.  Elle  porte  qu'aus- 
sitôt après  sa  publication,  tous  les  sujets  de 
son  royaume  seront  obligés  de  détruii-e  les 
simulacres  ou  les  idoles  consacrées  aux  dé- 
mons, et  qu'à  l'avenir  toutes  danses,  bouf- 
fonneries, débauches  et  divertissements  in- 
décents usités  aux  jours  de  fêtes  et  de  di- 
manches seront  abohs,  sous  peine  aux  con- 
trevenants, s'ils  sont  de  condition  servile,  de 
recevoir  cent  coups  de  fouet,  et  s'ils  sont  de 
condition  libre  ou  noble,  d'une  amende  pé- 
cuniaire. Ce  prince,  quelques  jours  avant  sa 
mort,  donna  mi  diplôme  pour  la  fondation 


884 


HISTOIRE  GKNKllALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


ToBt.V  Ton. 
cil.,  p.  SOO. 


Ordoonsnefl 
de  Clotaire* 
Totn.  V  CoD- 
dl.,  T.,  82:. 

Fleurv,  liT. 
ZX.\IV,  ,1g 
592,  t.  Vil. 


Pitn)Urc'>B> 


do  l'abbaye  de  Saint-Vincent,  aujourd'hui  de 
Saint-Gomiain-dcs-Prés  à  Paris.  L'original 
de  ce  diplôme  subsiste  encore,  et  c'est  de  là 
que  la  copie  qui  se  trouve  à  la  tête  dos  preu- 
ves jnsti/icalives  de  l'/iistoire  de  cette  abbaye, 
a  été  tirée.  On  y  voit  en  détail  les  fonds  de 
terre  que  Childcbert  donna  pour  l'élablisso- 
mciit  et  l'entretien  d'une  communauté  de 
moiups.  Le  second  concile  de  Tours  cite  une 
ordonnance  de  ce  prince  contre  les  ravis- 
seurs des  veuves  et  des  Biles  consacrées  à 
Pieu.  Les  quatre  lettres  que  le  pape  Pelage  I 
lui  adressa  supposent  qu'il  en  avait  re(;ucsde 
ce  prince  :  nous  ne  les  avons  plus. 

5.  Clota4rc,  frère  de  Childcbert,  lui  survé- 
cut environ  deux  ans  :  ils  en  avaient  régné 
ensemble  près  do  -58.  Sur  la  fin  de  son  règne, 
Clotaire  domia  nneordonnancc  générale  pour 
l'observation  de  la  justice.  On  jugera  sui- 
vant les  lois  romaines  les  affaires  qui  peu- 
vent s'élever  entre  les  Romains;  on  nom- 
mait ainsi  les  anciens  habitants  des  Gaules 
pour  les  distinguer  des  barbares,  Francs, 
Bourguignons  et  Goths,  entrés  depuis  cent 
cinquante  ans.  S'il  arrive  que  le  juge  ait 
condamné  quelqu'un  nijustement  contre  la 
loi,  il  sera  corrigé  en  l'absence  du  roi  par  . 
les  évoques;  personne  n'abusera  do  l'au- 
torité royale  pour  épouser  une  veuve  ou  une 
fille  malgré  elle,  ou  pom-  l'enlever;  per- 
sonne ne  sera  assez  hardi  pour  épouser  des 
religieuses,  ou  ôter  aux  églises  ce  qui  leur  a 
él('  donné  par  les  défunts.  Ensuite  Clotaire 
remet  à  l'iCglise  les  droits  sur  les  terres  et 
sur  les  troupeaux  ;  il  exempte  les  clercs  des 
charges  publiques  ,  confirme  les  donations 
faites  à  l'Eglise  par  ses  prédécesseurs,  et 
veut  qu'on  jouisse  sans  trouble  de  tous  les 
l)ions  qu'on  aura  possédés  depuis  trente  ans, 
pour^■u  qu'on  ait  commencé  de  les  posséder 
do  boiuie  foi  et  sur  un  juste  litre.  Clotaire 
mourut  en  361,  et  fut  enterré  dans  1  église 
de  Saint-Médard  de  Soissons  qu'il  avait  com- 
mencée, et  qui  fut  achevée  par  son  fils  Sige- 
boil. 

ARTICLE  XVII. 

CON'CiLES  delakdaff'  [560]. 

1.  Vers  l'an  560,  saint  Oudocéc,  qui  avait 


succédé  à  saint  Tcliau  dans  le  siège  épis- 
copal  de  Landall',  eu  Clamorgan ,  tint  un 
concile  où  il  appela  un  grand  nombre  de 
clercs  et  trois  abbés.  Quelque  temps  aupara- 
vant, Mourice,  roi  de  Clamorgan,  et  Cynetu 
avaient  juré  la  paix  ensemble  en  présence 
des  saintes  reliques,  sur  l'autel  des  apôtres 
saint  Pierre  et  saint  Paul,  et  de  saint  Oudo- 
cée.  Mourice,  oubliant  ce  qu'il  avait  promis, 
tua  Cynetu.  Le  saint  évéquo,  ayant  pris  l'avis 
de  son  concile,  excommunia  Mourice,  qui  en 
conséquence  demeura  doux  aimées  et  plus 
sous  l'anathème.  Le  roi,  craignant  pour  la 
perte  de  son  Ame,  demanda  pardon  de  son 
crime,  et  se  soumit  à  la  pénitence.  Saint  Ou- 
docée  lui  imposa  dos  jeûnes,  dos  prières  et 
dos  aumônes.  Mourice  fit  tout  ce  qu'on  exi- 
gea de  lui,  et  de  sa  plehic  volonté  il  donna 
de  grands  biens  à  l'église  de  Landatf. 

2.  Un  événement  tout  semblable  occa- 
sionna un  second  concile  en  cette  ville.  Le 
roi  Morcant,  et  Frioc,  son  oncle  paternel, 
avaient  fait  ensemble  une  paix  sincère,  et 
l'avaient  jurée  sur  l'autel  de  saint  lldnt,  en 
présence  de  plusieurs  personnes  considéra- 
bles. Morcant  la  rompit  en  tuant  Frioc.  Saisi 
de  crainte  à  la  vue  des  deux  crimes  qu'il  ve- 
nait de  commettre,  un  parjure  et  un  homi- 
cide, il  alla  à  réj.'lise  de  Landall',  s'adressa  à 
l'évoque  Oudocée,  et  demanda  pardon.  L'é- 
vcque  assembla  sm-  cela  un  concile,  où  il  fut 
résolu  que  l'on  n'ordonnerait  pas  de  pèleri- 
nages au  roi,  de  peurque  le  loyaume  ne  restât 
sans  chef,  mais  qu'on  lui  ferait  racheter  ses 
crimes  par  les  jeunes,  les  prières  et  les  au- 
mônes. Le  roi  alla  lui-même  au-devant  de 
ses  juges,  pour  en  recevoir  la  i)énilence  de 
ses  mauvaises  actions.  11  s'y  soumit,  promit 
de  se  corriger  et  d'exercer  à  l'avenir  la  jus- 
tice avec  miséricorde  :  après  celle  promesse 
on  lui  donna  la  communion  chrétienne. 

3.  Oudocée  vivait  encore ,  lorsqtie  Guid- 
ncrth  tua  son  frère  Morchion,  qui  lui  contes- 
tait la  couronne.  Le  saint  évoque  l'excom- 
munia dans  un  concile  qu'il  assembla  sur  ce 
sujet.  Au  bout  de  trois  ans,  Guidnerth  de- 
manda pardon,  et  l'obtint.  On  lui  inqiosa  un 
voyage  à  Comouaille,  en  l'obligeant  à  un  an 
d'absence.  Comme  il  revint  avant  le  temps, 
Oudocée  ne  voulut  point  l'absoudre  de  son 


eUeltUEdsr. 

*fn   1*10  : 
Tom.  V  CoE- 
cil.,  f.  (t8. 


S«rr>iii)  ton 
rll»  d«  LtB. 
iit.  Itid.,  p. 


TrtUlèmi 
CODrll»  09 
Landiff.  Ih., 
p.  8»). 


'  \.o  Dictionnaire  Universel  des  Conciles,  publie 
ji.ir.M.  Mit'iie,  iinHciuI  que  les  trois  assemMérs  de 
L.'iiiilalf  furent  tenues  eu  l'an  ,'i'J7,  ctquc  ee  n'était 
que  de  simples  synodes,  par  la  raison  qu'il  ne  s'y 


trouvait  d'autre  (5v{que  que  celui  du  diocèse  mdne 
de  Landatr,  entouré  de  trois  al)l)és  de  ses  niouos- 
ttres  cl  de  son  clerjié.  (L'éditeur.) 


OHAPITHE  LXXXVI.  —  COXCïLE  DE  BRAGUE. 


Coaeli«  d9 
Braque  FO 
5«3. 


|VI'  SIÈCLE.] 

excnmiminication.  Cependant  le  saint  tivi^que 
mourut,  et  Guidnntli  s'adressa  ;"!  Bcrtli;^uid 
son  successeur  pour  être  d('liii  de  l'anatlièmc  : 
l'évèquc  le  réliihlit,  après  lui  avoir  enjoint 
une  pénitence  proportionnée  ;\  ses  fautes,  et 
après  cpi'il  eut  promis  de  mieux  vivre  à  l'a- 
venir, (iuidnerth,  se  souvenant  qu'il  est  écrit 
que  l'aumône  eûace  le  péché  comme  l'eau 
éteint  le  feu,  fit  de  grandes  donations  aux 
églises. 

ARTICLE  XVIII. 

CONCILE  DE  BH.^GUE  [363]. 

1.  L'an  563,  qui  était  le  troisième  du  roi 
Ariamir,  Lucrétius,  archevêque  de  Braguc, 
tint  un  concile  en  rette  ville  ,  où  assistèrent 
huit  évèques,  dont  l'un  nommé  Martin  parait 
être  l'évèquc  de  Dume  ,  auparavant  abbé  du 
monastère  de  ce  nom  ,  érigé  depuis  peu  en 
évéché.  Il  se  trouva  plusieurs  prêtres  dans 
la  même  assemblée  avec  tout  le  reste  du 
clergé  de  Brague.  Lucrétius  ,  qui  présidait, 
proposa  les  motifs  de  la  convocation  du  con- 
cile, qui  étaient  de  maintenir  les  décrets 
de  la  foi  catholique  contre  les  restes  des 
priscillianistes ,  et  de  réformer  les  abus  qui 
pouvaient  s'être  glissés  dans  le  ministère  clé- 
rical ou  dans  le  service  de  Dieu.  Ensuite  ,  à 
la  demande  des  évêques  ,  il  fit  lire  la  lettre 
de  saint  Léon  envoyée  à  saint  Turibius  et  aux 
évèques  de  Galice,  et  celle  du  concile  des 
quatre  provinces  à  Balconius.  Saint  Léon 
dans  sa  lettre  répondait  aux  seize  articles 
que  Turibius  lui  avait  proposés,  et  qui  con- 
tenaient les  erreurs  des  priscillianistes.  La 
lettre  du  concile  des  quatre  provinces  renfer- 
mait la  profession  de  foi  cpie  le  concile  de 
Galice,  composé  des  provinces  de  Tarracone, 
de  Carthage,  de  Lusitanie  et  de  Bélique, 
di'essa  en  -447  contre  les  mêmes  hérétiques. 
Elle  était  suivie  de  dix-huit  articles  portant 
chacun  anathème.  Après  qu'on  eut  fini  la 
lectm-e  de  ces  deux  pièces,  on  lut  les  canons 


883 


de  discipline,  extraits  des  conciles  tant  géné- 
raiix  que  particidiers,  auxquels  on  en  ajouta 
vingt-deux  nouveaux  ,  qui  ])ortent  ce  qui 
suit  : 

2.  (1  On  observera  partout  le  même  ordre  de 
psalmodie,  soit  pour  les  offices  du  matin,  soit 
pour  ceux  du  soir  ,  sans  y  mêler  les  covitu- 
mes  des  monastères.  —  Aux  vigiles  des  jours 
solennels  ,  on  dira  dans  l'église  les  mêmes 
leçons.  —  Les  évèques,  de  même  que  les  prê- 
tres ,  salueront  \o  peuple  en  disant  :  (Jne  le 
Seigneur  soit  avec  vous;  à  quoi  le  peuple 
répondra  :  Et  avec  votre  esprit,  selon  la  pra- 
tique de  tout  l'Orient  fondée  sur  la  tradition 
apostolique.  —  Dans  la  célébration  de  la 
messe  et  dans  l'administration  du  baptême, 
l'on  suivra  la  forme  établie  par  Profuturus, 
évêque  de  Brague.  —  En  conservant  dans 
les  assemblées  la  primauté  au  métropoli- 
tain ',  les  autres  évêques  se  placeront  suivant 
le  temps  de  leur  ordination.  —  On  fera  '  trois 
portions  égales  pour  les  biens  de  l'iîglise,  l'une 
pour  l'évêque,  l'autre  pour  les  clercs,  et  la 
troisième  pour  les  réparations  ou  pour  les  lu- 
minaires de  l'église.  —  Il  ne  sera  pas  permis 
aux  évêques  d'ordonner  le  clerc  d'un  autre 
évêque  sans  la  permission  par  écrit  de  ce 
dernier.  —  \  l'avenir  '  les  diacres  porteront 
leur  étole  sur  l'épaule ,  et  ne  la  cacheront 
plus  sous  la  tunique,  afin  qu'ils  soient  distin- 
gués des  sous-diacres.  —  Aucun  des  lecteurs 
ne  pourra  porter  les  vases  sacrés,  si  l'évêque 
ne  l'a  ordonné  sous-diacre.  —  Les  lecteurs 
ne  porteront  point  d'habit  séculier  en  chan- 
tant dans  l'église,  ni  de  longs  cheveux  comme 
les  gentils.  —  On  ne  chantera  dans  l'église 
aucune  poésie',  hors  les  Psaumes  et  les 
Écritures  saintes  de  l'Ancien  et  du  Nouveau 
Testament  :  ce  qui  semble  exclure  les  hym- 
nes. —  Les  laïques  ,  soit  hommes  ,  soit  fem- 
mes ,  n'entreront  point  dans  le  sanctuaire  ' 
pour  communier,  cela  n'étant  permis,  selon 
les  canons,  qu'aux  seuls  clercs.  »  —  Le  con- 
çue ordonne  ensuite  à  ceux  du  clergé  qui 


Canoni  d* 
cfl  eooellr, 
Tom.  V  CoD* 
cil-,  f.  937. 


Can.  I.  i. 


»  Ilem  pîacuit,  ut  conservalo  metropolitani 
episcnpi  jirimalu,  cœteri  episcoporum,  secundum 
suœ  ordinalionis  lempus,  alius  alio  sedendi  dé- 
férât locum.  Can.  6,  tom.  V  Concil.,  pag.  840. 

-  Item  placuit,  ut  de  rébus  Ecclesiaslicis  très 
œquœ  fiant  portiones;  id  est,  episcopi  una,  alia 
clericorum,  tertia  in  recuperatione  vel  in  lumi- 
nariis  ecclegiœ  :  de  qua  parte  sive  archipresby- 
ter.sive  archidiaconus,  illam  administrans,  epis- 
copo  faciat  rationem.  Cau.  7,  ibid. 

'  Item  placuit,  ut  quia  in  aliquantis  hujiis 
proiinciœ  ecclesiis  diacones  absconsis  infra  tuni- 


cnm  ulunlur  orariis,  ita  vt  nihil  dijferre  a  sub- 
diacnnn  videantur,  de  eœtero  superposito  scapii- 
lœ  ''sicut  decetj  utanlur  orario.  Can.  9,  pag.  841. 

'  Item  placuit,  ut  extra  Psalmos,  vel  canoni- 
carum  Scriptururum  novi  et  veteris  Testamenti, 
nihil  puetice  compositnm  in  Ecclesia  psallatur  ; 
sicut  et  saitrti  prwcipiant  canones.  Caa.  12,  ibid. 

5  Item  placuit,  ut  intra  sanctuarium  altaris 
ingredi  ad  coinmunicanduni  non  liceat  laicis,  vi- 
ris  vel  mulieribus,  7iisi  tantum  clericis,  sicut  et 
antiquis  canonibus  stalulum  est.  Can.  13,  ibid. 


886 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


i». 


ne  mangent  point  de  viande  ,  de  manger  au 
mnin?  des  herbes  cuites  avec  de  la  chair, 
pour  ôlertout  soupron  d'ciro  priscillianislcs. 
Cm.  is.  —  11  défend  de  commimiqucr  '  avec  un  ex- 
communié, sous  peine  d'encourir  la  sentence 

i«.  d'excommunication  ;  —  de  donner  la  sépul- 

liu"e  ecclésiastique  ,  c'esl-à-dirc  celle  qui  se 
faisait  au  chant  des  Psaumes,  à  ceux  qui  se 
seront  tués  eux-mêmes,  soit  en  s'empoison- 
nanl,  soit  en  se  précipitant,  soit  en  se  pen- 
dant ,  ou  de  quelque  autre  manière  que  ce 
soit  ;  ou  Lien  encore  à  ceux  qui  auront  été 
punis  de  mort  pour  leurs  crimes,  et  de  faire 

"•  mémoire  d'eux  dans^l'oblation;  —  d'>  prier 

pour  les  catéchumènes  -  morts  sans  Laplème, 
et  d'accompagner  leur  sépulture  du  chant 
des  psaumes.  L'usage  contraire  s'était  intro- 
duit par  ignorance  des  canons,  —  Il  défend 
aussi  d'enterrer  personne  '  dans  les  églises 
des  saints ,  permettant  tout  au  plus  de  les 
enterrer  autour  des  murailles  des  églises  en 
dehors,  puisque  les  villes  avaient  encore  alors 
le  privilège  de  ne  point  soutTrir  que  Ion  en- 

19.  terrât  dans  l'enceinte  de  leurs  murs.  —  II 

paraît  que  quelques  *  prêtres  avaient  osé 
bénir  le  saint  chrême  des  églises  et  consa- 
crer des  autels  ;  cela  leur  est  interdit  à  l'a- 
venii-,  sous  peine  d'être  déposés  de  leur  of- 

îo.  fice.  —  Défense  d'élever"  personne  au  sacer- 
doce, qu'il  n'ait  fait  pendant  un  an  l'office  de 
lecteur,  et  passé  par  les  degrés  de  sous-diacre 
et  de  diacre,  conformément  aux  anciens  ca- 
nons, car  il  n'est  pas  permis  d'enseigner  avant 

s,.  d'avoir  appris.  —  Ce  que  les  Ddèles  offrent' 
pour  les  morts  ou  pour  quelque  autre  dévo- 
tion, doit  être  mis  à  part  par  un  des  clercs, 
et  ensuite  partagé  entre  tout  le  clergé  une 

'  Ilem  placuil,  ut  hi  qui  pro  hœresi,  ont  pro 
crimiiie  aliquo  excommunicaiilur,  nuUus  ei  com- 
municare  prœsumal,  sicut  et  anliquu  canonum 
continent  statula:  quœ  si  quis  fpernit,  voluntarie 
scipsum  alienœ  damnationi  Iradel.  Cnii.  15,  ibid. 

*  Item  plicuit,  ut  calecliumcnis  sine  redemp- 
lione  baptixmi  defunctis,  simili  modo,  neque  obla' 
lionis  commcmoralio,  neque  psallendi  impcnda- 
lur  olpcium:  nain  et  hoc  per  ignoranliam  usur- 
palum  est.  Can.  17,  ibid. 

^  Ilem  placuil,  ut  corpora  defunclorum  nutlo 
modo  in  basilica  sanclonim  sepelianlur ;  sed  si 
necesse  est,  deforis  circa  murum  bostlicœ  usque 
adeo  non  ablinrret.i\am  si  firmissimum  hocprivi- 
legium  usque  nunc  manet  civilalrs,  ul  nullomo- 
do  iiilra  amhilus  Hiii/r.rum  cujuslibel  deluncli 
corpus  humelur,  quanta  niagis  hoc  vtnernhilium 
martyrum  debel  rtvcrenlia  oblincre  !  Cau.  18, 
ibid. 

'  Ilem  placuil,  si  quis  prrsbyter,  post  hoc  in- 
terdiclum,  ausus  fucril  chri^ma  benedicere,  aut 


fois  ou  deux  l'année.  La  raison  de  ce  décret, 
c'est  que,  si  l'on  permettait  que  chacim  s'ap- 
propiiùt  les  oQïandes  de  sa  semaine,  les  rétri- 
butions seraient  souvent  inégales,  ce  qui  cau- 
serait du  murmure.  Le  dernier  canon  impose  ç^^  ^ 
la  peine  de  dégradation  à  quiconque  violera 
ceux  qui  avaient  été  f.iils  dans  ce  coiiL-ile,  et 
ceux  qu'on  y  avait  lus. 

ARTICLE  XIX. 

CONCUJES  DE  SAINTES  [5G3^,  DE  LYON  [6Q&]  ET  DE. 
TOURS  [366]. 

i .  La  même  année  563,  ou  la  précédente,  connic  d« 
Léonce,  archevêque  et  métropolitain  de  Bor-  Kj'i'm.'v 
deaux,  assembla  à  Saintes  un  concile  des  w",'! liiîf.' 
évêqucs  de  sa  province ,  où  il  déposa  Emë-  ÎyImp'ht'I 
rius,  évèque  de  cette  ville.  Les  raisons  de 
destituer  cet  évêque  paraissaient  justes  :  il 
avait  été  ordonné  sans  les  sutlVagcs  du  clergé 
et  du  peuple,  et  il  avait  obtenu  un  décret  du 
roi  Clotairc  pom*  être  sacré  sans  le  consen- 
tement du  métropolitain ,  qui  était  absent. 
L'un  et  l'autre  étaient  contre  la  discipline  ec- 
clésiastique établie  dans  le  dernier  concile 
de  Paris.  A  la  place  d'Emérius ,  les  évêques 
élurent  Héraclius,  prêtre  de  lEglise  de  Bor- 
deaux ,  cl  ils  envoyèrent  au  roi  Charibert  le 
décret  d'élection  souscrit  de  leurs  mains.  Le 
prêtre  qui  en  fut  chargé ,  étant  arrivé  à 
Tours ,  raconta  à  l'archevêque  Euphronius 
ce  qui  s'était  passé ,  l'.  priant  de  souscrire 
aussi  le  décret.  Euphronius  le  refusa  ouver- 
tement, prévoyant  le  scandale  que  celte  élec- 
tion causerait.  Le  prêtre,  arrivé  à  Paris,  dit 
au  roi  :  «  Seigneur  ",  le  Siège  apostolique 
vous  salue.  »  Celait  le  style  du  temps  de 

eceksiiim,  aut  altarium  consecrare,  a  suo  officio 
deponalur,  nam  et  anliqui  hoc  canones  relue- 
runt.  Cm.  10,  \>ag.  842. 

'  Item  placuil,  ul  ex  laico  ad  gradum  sacer- 
dolii  ante  nemo  veniot,  ni.^i  prius  anno  inlegro 
in  oflicio  leclorali  rel  subdiaconali  disciplinam 
ecclesiaslicam  discal;  et  sic  per  singulos  gradus 
prœdictus  ad  sacerdolium  leniat.  Xam  salis  re- 
prehensibile  est,  ut  qui  necdum  didicil,  jam  do- 
cerc  prœsumal;  dum  cl  antiquis  hoc  Patrum  in- 
slitutionibus  interdiclum  sil.  C.nn.  20,  ibid. 

•  Item  placuil,  ut  si  quid  ex  collalinne  fidelium, 
aut  per  commémoration!  m  defunclorum  offerlur, 
apud  unum  clcricorum  fidcliter  colligalur ,  et 
conslilutn  lemporc,  aut  semel,  aut  bis  in  anno, 
inter  amnes  clericos  dividalur  :  nam  non  modica 
exipsa  inœqunlitale  discordia  genernlur,  siunus- 
quisque  in  sua  septimana  quod  oblatum  fueril, 
sibi  (lefendat.  Cm.  21,  ibid. 

M'ieury,  lili.  .\.\.\1V  Ilist.  Eccles.,  [«g.  53*, 
lora.  VII. 


[Vl«  SIÈCXE,] 


CIIAPITHE  LXXXVI.  —  CONCILE  DE  SAINTES. 


887 


Concile  de 
Lyon  ea  566* 
Tom.  V  CoD- 
cil.,fag.  M7. 


ndmmpr  apostoliques  lous  les  si(5f;os  l'pisco- 
paiix  ,  principalement  les  métrnpolilains,  et 
lous  les  (^véques,  p'apes.  Mais  Cliaribert,  fei- 
gnant de  ne  pas  l'entendre,  dit  au  prcMro  : 
(I  Avez-voiis  été  à  Rome  pour  me  saluer  de 
la  part  du  pape  ?  »  Il  répondit  :  «  C'est  votre 
père  Léonce  qui  vous  salue  avec  les  évoques 
de  sa  province,  vous  faisant  savoir  qu'Emé- 
rius  a  été  dépost'  de  levèclié  de  Saintes, 
qu'il  avait  obtenu  par  brigue  contre  les  ca- 
nons. C'est  pourquoi  ils  vous  ont  envoyé 
leur  décret  pour  qu'on  en  mette  un  autre  h  la 
place,  afin  que  le  cliàtiment  de  ceux  qui  vio- 
lent les  canons  attire  la  bénédiction  sur  votre 
règne,  n  A  ces  mots,  le  roi  commanda  qu'on 
l'ôtàt  de  sa  présence,  qii'on  le  mît  dans  ime 
charrette  pleine  d'épines,  et  qu'on  l'envoyât 
en  exil;  et  il  ajouta  :  «Penses-tu  qu'il  ne 
reste  plus  de  fds  de  Clotaire,  qui  maintienne 
ses  actions,  pour  cliasscr  ainsi  sans  notre 
ordre  un  évèquc  qu'il  a  choisi  ?  d  II  envoya 
aussitôt  des  ecclésiastiques  pour  rétablir 
Emérius  dans  le  siège  de  Saintes,  et  des  of- 
ficiers de  sa  chambre  qui  firent  payer  à  l'ar- 
chevêque Léonce  mille  sous  d'or,  et  aux  au- 
tres évèques  du  concile  à  proportion  de  leurs 
facultés.  «  C'est  ainsi ,  dit  saint  Grégoire  de 
Tours,  que  Charibert  vengea  l'injure  faite  à 
son  père.  » 

2.  Contran  fils  de  Clotaire ,  et  frère  de 
Charibert ,  avait  eu  dans  son  partage  les 
villes  de  Châlon  et  de  Lyon.  En  566,  qui 
était  la  sixième  année  de  son  règne  ,  la  hui- 
tième du  pontificat  de  Jean  lU ,  indiction 
quatorzième  ,  il  assembla  à  Lyon  un  concile 
de  quatorze  évêques  ,  auquel  saint  Nizier 
archevêque  de  cette  viUe  présida.  On  y  fit 
sis  canons .  Le  premier  ordonne  que  les 
diûorends  des  évêques  d'une  môme  province 
seront  terminés  par  le  jugement  du  métro- 
politain, et  des  évêques  de  la  province  ;  et 
que  si  les  évêques  en  contestation  sont  de 
ditl'érentes  provinces,  les  deux  métropolitains 


les  jugeront.  Il  est  dit  dans  le  second,  que  c.o.  ;. 
les  donations  faites  par  les  évêques,  les  prê- 
tres ou  autres  clercs,  soit  aux  églises,  soit  à 
qtuîlquc  personne  en  particulier,  subsiste- 
ront ,  quand  même  elles  ne  seraient  pas  ' 
revêtues  de  toutes  les  formalités  vouhies  par 
les  lois.  Le  troisième  soumet  h  la  peine  d'ex-  s. 
communication  ceux  qui  réduisent  en  Fer- 
vitnde  les  personnes  libres.  Le  quatrième  i- 
porte  que,  conformément  aux  décrets  des 
anciens  Pères,  celui  qui  aura  été  excommu- 
nié pour  crime  par  son  évêque ,  no  pourrr 
être  reçu  à  la  communion  de  qui  que  ce  soit, 
à  moins  qu'il  n'ait  été  rétabli  par  celui-là 
même  qui  l'avait  retranché  de  la  communion 
de  l'Eglise.  Par  le  cinquième,  il  est  défendu  o. 
aux  évêques  d'ôtcr  aux  clercs  les  biens  qui 
leur  ont  été  donnés  par  leurs  prédécesseurs, 
soit  par  usufruit  si  ce  sont  des  biens  de 
l'Église,  soit  en  propriété  si  ce  sont  des  biens 
de  leur  patrimoine.  Le  sixième  vent  qu'en  e. 
toutes  les  églises  on  fasse  des  litanies  avant 
le  premier  dimanche  du  neuvième  '  mois, 
c'est-à-dire,  du  mois  de  novembre,  comme 
on  en  faisait  avant  l'Ascension.  En  ce  même 
concile,  Salone  évêque  d'Embrun,  et  Sagit- 
taire évêque  de  Gap,  accusés  et  convaincus 
de  divers  crimes,  furent  déposés  de  l'épisco- 
pat  :  nous  en  parlerons  plus  au  long  dans  la 
suite. 
3.  L'archevêque  Eiiphronius  tint  la  même      SMondton. 

elle  Qe  iuurs 

année  366  un  concile  à  Tours  le  17  novem-  »■■  a*"- 
bre,  avec  la  permission  du  roi  Chérébert,  de   contii.,p.8'52. 
qui  cette  ville  dépendait.  Neuf  évêques  y  as- 
sistèrent,  entre  autres  saint  Prétextât  de 
Rouen,  et  saint  Germain  de  Paris.  Euphro- 
nius  y  présida.  Ce  fut  à  ce  concile  que  sainte 
Radegonde  s'adressa  poiu'  obtenir  la  confir- 
mation du  monastère  qu'elle  avait  établie  à 
Poitiers ,  et  de  la  règle  qu'elle  y  faisait  ob- 
server. Les  évêcpies,  qui  ne  s'étaient  assem-     cn.  i. 
blés  que  pour  le  maintien  de  la  discipline, 
firent  sm-  ce  sujet  vingt-sept  canons,  où  il;; 


'  Quia  muUœ  tergiversationes  infidelium  Eccle- 
siam  quœrunt  collatis  privare  denariis,  id  con~ 
venu  inciolabilller  observari,  ut  lestamcnlci,quœ 
episcopi,  presbyteri,  seu  infcrioris  ordinis  clerici, 
vel  donationes,  aut  quœcumque  instrumenta  pro- 
pria voluntate  confecerint,  quibus  aliquid  Eccle- 
siœ,  aut  quibuscumque  conferre  videantur,  omni 
stabililate  subsistant.  Id  specialiter  statuentcs,  ut 
eliam  quorumcainque  religiosorum  voluntas,aut 
r.ecessitate,  aut  simplicitate,  aliquid  a  legumsœ- 
cularium  ordinevisa  fuerit  discrepare,  voluntas 
tamen  defunctorum  debeat  inconcussa  manere.et 
in  omnibus  Deo  propitio  custodiri.  De  quibus  ré- 


bus si  quis  animœ  suœ  contei'jptor  aliquid  alie- 
nare  prœsumpserit,  usque  ad  emendationis  suœ, 
vel  restitutionis  rei  ablatœ  tempus,  a  consortio 
ecclesiastico,  vel  omnium  christiayinrum  convivio 
habeatur  alienus.  Cnn.  2,  Cane.  Lugd.  Tom  V 
Concil.,  pag.  8'iS. 

*  Placuit  etiam  universis  fratribus,  ut  in  pri- 
ma hebdomada  noni  mensis,  hoc  est,  ante  diem 
dominicam,  quœ  prima  in  ipso  mense  illuxerit, 
litaniœ,  sicut  ante  Àscensionem  Doniini  sancti 
Patres  fieri  decreverunt.  deinceps  ab  omnibus  ec- 
clesiis,  seu  parochiis  celebrentur.  Can.  6,  pag.  849. 


888 


HISTOIRE  GKNFRALE  DES  AUTEURS  ECCLFSIASTIOrES. 


renouvelèrent  l'ordonnance  de  tenir  des  con- 
ciles deux  fois  l'année,  on  du  moins  une  fois, 
sous  ])eine  d'excommunication  contre  les 
évèqucs  qui,  étant  mandés,  refuseraient  d'y 
venir.  Ils  ordonnent  aux  évêques  qui  ont 
quelque  diflërend,  de  prendre  des  prêtres 
pour  arbitres.  Ils  ajoutent  '  que  le  corps  de 
notre  Seigneur  Jésus-Christ  sur  l'autel  ne 
doit  point  être  mis  au  rang  des  imases,  mais 
sous  la  croix,  comme  cela  se  pratique  en- 
core aujourd'hui  ;  que  les  laïques  ne  '  se 
tiendront  point  près  de  l'autel  ;  mais  que  la 
partie  de  l'église  qui  est  séparée  par  les  ba- 
lustres  jusqu'à  l'autel,^  ne  sera  ouverte  qu'aux 
clioiurs  des  clercs  qui  chantent  ;  que  toutefois 
le  sanctuaire  sera  ouvert,  selon  la  coutume , 
aux  laïques  et  aux  femmes  pom- prier  et  pour 
communier  :  ce  qu'il  faut  entendre  des  priè- 
res particulières  hors  le  temps  de  l'ollice. 

—  (Jue  '  chaque  cité  aui-a  soin  de  nourrir 
ses  pauvres ,  en  sorte  que  chaque  prêtre  de 
la  campagne,  et  chaque  citoyen  se  charge  des 
siens,  et  qu'ils  ne  soient  pas  vagalionds  dans 
les  autres  cités.  —  Que  les  seuls  évêques,  à 
l'exclusion  des  prêtres  et  des  laïques  ,  pour- 
ront donner  des  lettres  de  recommandation. 

—  Qu'un  évêque  ne  pourra  déposer  un  abbé 
ni  un  archiprctre  ,  que  par  le  conseil  des 
prêtres  et  des  abbés;  —  que  l'évcque  qui 
recevra  à  la  communion  quelqu'un  qu'aurait 
excommunié  un  autre  évcque,  après  qu'il  en 
aura  été  averti,  sera  lui-même  excommunié 
jusqu'au  premier  synode.  —  Ce  concile  dé- 
fendit encore  d'ordonner  dans  la  province  Ar- 
morique  un  évêque,  soit  Uouiain,  soit  Breton, 
sans  le  consentement  du  métropolitain  ou  des 
comprovinciaux,  sous  peine  d'être  excommu- 


nié jusqu'à  la  tenue  du  grand  concile.  —  Il 
renouvela  les  défenses  si  souvent  réitérées  aux 
clercsd'avoir  chez  eux  des  femmes  étrangères 
sous  prétexte  de  nécessité  ou  d'arrangement 
de  leurs  maisons.  Les  évêques  reconnaissaient 
dans  ce  canon  qu'il  eur  est  ordonné  '  de  tra- 
vailler des  mains,  et  de  se  procurerpar  quelque 
petit  métier  de  quoi  se  nourrir  et  se  vêtir.  — 
Ils  ordonnent  la  peine  d'excommunication 
contre  ceux  qui  seront  négligents  à  le  faire 
observer.  —  L'évêque  doit  vivre  avec  sa  femme 
comme  avec  sa  sœur;  et  quoiqu'il  doive  être 
toujoure  accompagné  de  clercs  même  dans  sa 
chambre,  il  faut  qu'il  soit  tellement  séparé 
d'avec  sa  femme,  que  celles  qui  la  servent 
n'aient  aucune  communication  avec  ceux  qui 
servent  les  clercs.  —  Mais  si  l'évêque  n'est 
point  marié ,  il  ne  doit  point  y  avoir  de  fem- 
mes à  sa  suite.  —  Défense  aux  prêtres  et  aux 
moines  de  coucher  deux  dans  le  même  lit, 
et  aux  moines  d'avoir  des  cellules  séparées  ; 
ils  doivent  coucher  et  lire  dans  une  chambre 
commune.  —  S'ils  sortent  de  leur  monastère 
pour  se  marier,  ils  seront  séparés,  et  rais  en 
pénitence.  On  pourra,  pour  les  obliger  de  se 
séparer,  employer  le  secours  du  juge  sécu- 
lier, qui  sera  excommunié  s'il  le  refuse,  de 
même  que  ceux  tpii  protégeront  un  sembla- 
ble mariage.  —  On  ne  permettra  '  point  aux 
femmes  d'entrer  dans  les  monastères  d'hom- 
mes. Si  l'abbé  ou  le  prévût  ne  chasse  pas 
aussitôt  celles  qu'ils  y  auront  apei-çues , 
qu'ils  soient  excommuniés.  —  Les  moines 
garderont  '  leui-s  anciens  statuts  à  l'égard 
des  jeûnes,  c'est-à-dire  qu'ils  ne  jeûneront 
point  depuis  Pâques  jusqu'à  la  Pentecôte, 
excepté  les  jours  des  Rogations.  Ils  jeûne- 


C».  10. 


'  Ut  corpus  Domini  in  altari,  non  m  imagina- 
rio  ordine.,  sed  sub  crucis  tilulo  cowponatur.  Caa. 
3,  CnncH.  Il  Turon.,  pag.  8ri3. 

»  Il  laici  secus  altare  quo  sancta  mysteha  ce- 
Ubrantur,  inler  clericos  lam  ad  vigilias  quam  ad 
inissa.-<,  slare  peiiitus  non  prœsunwttt  ;  sed  pars 
illii,  qHtp  a  cancellis  rersus  allure  diridilur,  clio- 
ris  tanlum  psallenlium  patent  elericonnn.  Ad 
orandum  vero  et  connnuniiandnm,  laici.<  et  fe- 
minis,  sicut  mos  est,  pateant  sanrta  sanctorum. 
Cin.  i,  ibid. 

*  Vt  unaqtio'que  civilas  pauperes  et  egenos  in- 
colas alimenlis  coi>gruenlil>us  pascal  secundum 
vires,  ut  tant  vicanijiresbyleri,  quam  rires  omnes, 
suum  paiiperem  pascant  :  quo  fiet  ut  ipsi  paupe~ 
rts  per  ciri'.ates  alias  non  vagentur.  Can.  5,  j.ag. 
854. 

*  Cum  jubeamur  virtum  nul  reslitum  nrlift- 
ciolo  quœrere.elmambus  propriis  laborare.  Can 
10,  ibid. 

'  L't  mulier  inlra  septa  monaslerii  nuUatenus 


introire  permillalur;  si  abbas  in  hac  parle,  aut 

pro'positus  ncgligens  apparueril,  qtiieam  viderit, 
el  non  slntiin  ejcceril,  excommunicelur.  Can.  16, 
pag.  sriB. 

•  De  jejuniis  vero  antiqua  a  monachis  instituta 
scrvenlur,  ul  de  Pascita  usque  ad  Quinquagesimam 
exceptiS  Rognlionibus,  oniiii  die  fratrihiis  pran- 
diiim  pnrparetur;  ■  post  Quinquagesimam  tota 
hebdomnde.  ex  asse  jejuninl.  Postea  usque  ad  ka- 
Ifndis  iiigusii  terin  septimann  jejunenl  secundo, 
quarla  el  scxla  die,  ex  epli.*  his  qui  aliqua  infir- 
viilale  C(nslriclisunl.  In  Auguslo,  quia  quoliriie 
fïiisvip  sanctorum  sunt,  iiramliuin  habeant.  lu 
scplembri  loto,  et  octobri,  et  nox-embri,  sicut prius 
dictum  est.  ter  in  septimann.  De  dccembri  usque 
ad  ^alntc  Domini,  omni  die  jejunenl.  Et  quia  in- 
ler Raidie  Domini  et  Epiphania  omni  die  feslivi- 
tatfs  sunt,  ilf nique  prandebunt.  Exdpilur  tri- 
duum  illud,  quo  ad  calcandam  gentilium  cousue- 
tudincm ,  patres  nosiri  sinlucrunt  privatas  in 
kalendis  januarii  fieri   litaitias,  ut  in  eccicsii 


[VI"  SIÈCLE.  ]  CFIAPITRE  LXXXVI.  —  2»  CONCILE  DE  TOURS 

rniit  loule  la  seinniiio  siiivanlo.  Depuis  ce. 


889 


Siilledsica- 
nous  du  !^e- 
cond  coDcilâ 
de  Tours. 

Can.  18. 


teiiipsjiisqu'iiu  l"''aniit,ilsjci'mci(iiil  Iroisfnis 
la  semaine ,  savoir,  le  lundi ,  le  mercredi  et 
le  vendredi.  Dans  le  mois  d'août,  parce 
qu'on  l'ait  tous  les  jours  l'oûice  des  saints, 
ils  dîneront;  dans  les  mois  de  septeinlire, 
d'octobre  et  de  novembre  ,  ils  jeûneront 
trois  fois  la  semaine  ;  dans  celui  do  dé- 
cembre ils  jeûneront,  fous  les  jours  jusqu'à 
Noël.  Et  parce  que  depuis  Noël  jusqu'à 
l'Epiphanie  ce  n'est  qu'une  suite  de  fêtes, 
ils  ne  jeûneront  pas  ,  à  l'exception  des 
trois  premiers  jours  de  janvier,  pendant  les- 
quels on  fait  des  litanies  pour  abolir  les  su- 
perstitions que  les  païens  faisaient  en  ces 
jours-là.  On  jeûnait  même  le  jour  delà  Circon- 
cision, et  on  ne  célébrait  la  messe  qu'à  la  hui- 
tième heure,  c'est-à-dire,  à  deux  heures  après 
midi.  Depuis  l'Epiphanie  jusqu'au  Carême, 
les  moines  jeûnaient  trois  fois  la  semaine. 
•4.  Voici  comment  le  concile  règle  l'ordre  de 
la  psalmodie.  En  été  ',  on  dira  à  Matines, 
c'est-à-dire  à  l'olBce  de  la  nuit,  six  antiennes 
avec  deux  psaumes  pour  chacmie ,  les  jours 
de  fêtes  solennelles;  c'étaient  celles  où  l'on 
veillait  la  nuit.  Pendant  tout  le  mois  d'août 
on  se  lèvera  de  grand  matin,  parce  qu'il  y  a 
d«s  fêtes  et  des  messes  des  saints.  La  raison 
de  se  lever  matin  était  que  ce  mois  était  rem- 
pli d'otBces  de  saints,  et  on  en  disait  la  messe 
de  bonne  heure,  afm  que  le  peuple  pût  en- 
suite travailler  à  la  moisson.  Au  mois  de  sep- 
tembre ,  on  dira  sept  antiennes  avec  deux 
psaumes  pour  chacune;  au  mois  d'octolire, 
huit  antiennes  à  trois  psaumes  ,  c'est-à-dire 
vingt-quatre  psaumes;  en  novembre,  vingt- 
sept  psaumes;  en  décembre,  trente  avec  dix 
antiennes,  et  de  même  en  janvier  et  février, 
et  jusqu'à  Pâques,  ce  qui  semble  montrer  que 


l'aniK'e  coinmenrait  à  cette  fête.  Ainsi  on  no 
devait  jamais  dire  à  Matines  moins  de  douzo 
psaumes,  et  on  en  disait  toujours  douze  à  Vê- 
pres et  six  à  sexte,  avec  A  llelnia.  Celui  qui  en 
disait  moins  de  douze  dMalincs  dey iùi\i'ùnvr 
jusqu'au  soir,  et  ne  prendre;  ce  jour-là  que 
du  pain  et  de  l'eau  pour  sa  réfection.  L'ordre 
de  cette  psalmodie  était  fondé  sur  les  statuts 
des  anciens  Pères,  et  sur  ce  (ju'ils  en  avaient 
appris  d'un  ange.  Aimoin  dit  qu'il  avait  pre- 
mièrement été  établi  dans  le  monastère  d'A- 
gaune,  et  qu'il  le  fut  depuis  à  Saint-Marcel 
de  Cliâlon-sur-Saûne,  et  à  Saint-Denis  en 
France.  Outre  les  hj-mncs  -  de  saint  Ambroise, 
qui  étaient  en  usage  dans  l'Église,  le  concile 
permet  de  chanter  celles  qui  le  méi-itent, 
pourvu  qu'elles  portent  le  nom  de  leur  au- 
teur. 

5.  Pour  lever  les  soupçons  que  la  plupart 
des  clercs  mariés  ne  gardaient  pas  le  célibat, 
il  ordonne  que  l'archiprêtreétantà  la  campa- 
gne aura  un  clerc  qui  couchera  dans  sa  cham- 
bre, et  que,  pour  se  relever,  ces  clercs  seront 
sept  qui  serviront  par  semaine  ;  que  le  prê- 
tre, le  diacre  ou  le  sous-diacre  qui  aura  été 
trouvé  avec  sa  femme,  sera  interdit  pendant 
un  an;  et  que  l'archiprètre  qui  aura  négligé 
de  veiller  sur  ses  infériem-s  sera  enfermé  pen- 
dant un  mois  pour  jeûner  au  pain  et  à  l'eau. 
—  Il  défend  aux  religieuses  de  se  marier,  soit 
qu'elles  aient  reçu  le  voile  de  la  main  de  l'é- 
vêque,  ou  seulement  changé  d'habit;  et  parce 
que  quelqiies-unes  prétendaient  n'avoir  chan- 
gé d'habit  que  pour  n'être  pas  exposées  à 
des  mariages  indignes  d'elles,  on  leur  oppose 
les  ordonnances  des  rois  Cliildebert  et  Clo- 
taire  confirmées  par  Chérébert,  portant  dé- 
fense d'épouser  les  fdles  sans  la  volonté  de 
leurs  parents.  Après  quoi  le  concile  ajoute  : 


Fleur),  II». 

SI,  pk-.  5r,j. 

loin.  Vu. 


Cas. 23. 


Sulledescn* 
nons  du  con« 
C'ie  dû  Tours. 

Cao.  19* 


ftsaUalur,  et  hora  oclava  in  ipsis  kaloidis  Cir~ 
cnmcisionis  missa  Deo  propitio  cclebretiir.  Post 
Epiphunia  vero  vsqiie  ad  quadragesimain  ter  in 
septimana  jejunent.  Can.  17,  ibid. 

'  Itemque  pro  reverentia  domini  Martini,  vel 
cultu  ac  virttile,  id  statuimus  observandum,  ut 
lam  in  ipaa  basiUca  sancta,  quam  in  ecclesiis  nos- 
tris,  iste  psallendi  ordo  serietnr:  nt  in  diebus 
fcsiis  ad  matutinum  sex  antiplionœ  binis  psalmis 
explicenlur  :  loto  angusto  manicaliones  fiant,  quia 
feslivitates  snnt  et  missœ  sanctorum  :  scplembri 
seplem  anliphonœ  explicenlur  binis  psalmis:  oc- 
tohri  oclo  ternis  psalmis  :  novembri  novem  ternis 
psalmis:  decembri  decem  ternis  psaltnis:  jnniia- 
rio  et  febrnario  itidem  usque  ad  paschn.  Sed  ut 
possibilitas  habet,  qui  facit  amidius  pro  se,  et  qui 
minus,  ut  poluerit,  Superest  ut  cel  duodecim psal- 
mi  cxpediantur  ad  Malutinum:  quia  Patrum  sta- 


tuta  prœcepernnt,  ut  ad  Sextam  sex  psalmi  di- 
cantur  cum  alléluia,  et  ad  duodecim am  dundecim, 
itemque  cum  alléluia.  Quod  cliam  angeto  osten- 
dente  didicerunt.  Si  ad  duodecimam  duodecim 
psalmi,  cur  ad  matutinum  non  itemque  vel  duo- 
decim explicenlur  ?  Quicumque  minus  quam  duo- 
decim psalmos  ad  matutinum  dixerit,  jcjunet  us- 
que ad  vesperam,  panem  cum  aqua  manducet,  et 
jejunet  omnidie  usque  ad  vesperam.  Can.  IS.pag. 
837. 

*  Licet  hymnos  Ambrosianos  habeamus  in  ca- 
none;  tamcn  quoniam  reliquorum  sunt  aliqui  qui 
digni  sunt  forma  cantari,  volumus  Ubenler  am- 
plecli  eos  prœterea,  quorum  auctornm  nomina 
fuerint  in  limine  prœnotata  :  quoniam  quœ  fide 
constiterint,  dicendi  ralione  nonobstant.  Can.  23, 
pag.  863. 


890 


HISTOIRE  r.ÉNÉUALE  DES  'aUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


C>o.  il. 


«  Celle  donc  qui  craint  la  violence  doit  se  ré- 
fugier à  l'éirlisc,  jusqu'à  ce  que  ses  parents  la 
délivrent  par  le  commandement  du  prince  ou 
le  secours  de  l'évèque,  et  lui  doinu'nt  un  mari 
digiie  d'elle.»  Pourquoi, disaient  queUiues-uns, 
la  veuve  qui  n'a  point  été  bénie,  ne  pourrait- 
elle  passe  remarier? On  répond  que  les  veu- 
ves ne  recevaient  point  de  bénédiction  poiu" 
se  consacrer  ù  Dieu.  Les  évèques  appuient  ce 
règlement  des  autorités  du  pape  Innocent  I", 
de  la  loi  romaine ,  c'est-à-dire  du  Code  tkéo- 
dosien,  des  conciles  d'.'^rlcs,  de  Milève,  d'É- 
paône. — Dans  le  canon  suivant,  où  l'on  renou- 
velle les  anciens  di'crcls  à  l'égard  des  degrés 
auxquels  il  n'est  pas  pennisde  se  marier  en- 
tre parents,  on  cite  le  dix-huitième  chapitre 
du  Lévitique,  les  canons  du  premier  concile 
d'Orléans,  et  de  ceux  d'Épaùne  et  de  Cler- 
,,_  mont.  —  Il  se  trouvait  encore  des  personnes 
qui  célébraient  le  premier  jour  de  janvier  en 
l'honneur  de  Janus;  qui,  à  la  fête  de  la  Chaire 
de  saint  Pierre,  offraient  des  viandes  aux 
morts;  qui  de  retour  chez  eux  après  la  messe, 
mangeaient  de  ces  viandes  consacrées  aux 
démons;  qui  honoraient  des  pierres,  des  ar- 
bres ou  des  fontaines ,  et  qui ,  malgré  toutes 
ces  superstitions,  prétendaient  être  chrétiens. 
Le  concile  ordonne  aux  pasteurs  et  aux  prê- 
p^'.'sS'."'''''  t''^^  ^'^  ^'^^  chasser  de  l'ét^lisc,  et  de  ne  pas 
leur  permettre  de  participer  au  saint  autel. 
La  fête  de  saint  Pierre  dont  parle  ce  canon 
fut  instituée  le  22  février  à  la  place  de  la  fête 
que  les  païens  célébraient  en  l'honneur  des 
moi  ts,  qu'ils  nommaient  Fvralin,  et  qui  du- 
rait depuis levingtième  de  ce  mois  jusqu'à  la 
fin.  En  ces  jours,  ils  portaient  des  viandes  sur 
les  tombeaux,  s'imaginant  que  les  âmes  étant 
alentour  venaient  la  nuit  les  manger.  Ce  jour- 
là  les  clirétiens  célébrèrent  premièrement  le 
martyre  de  saint  Pierre  et  de  saint  Paul  ;  puis, 
cette  fête  ayant  ('té  transféi-tfo  an  29  juin,  ou 
fit  le  22  février  la  fête  de  la  Chaire  de  saint  Pier- 
re, sans  distinction  de  la  Chaire  de  Rome  et  de 
celled'Antioche.Depuisl'ona  mis  aulSjanvier 
la  fête  de  la  Cliairc  de  saint-Pierre  à  Rome, 
et  celle  de  sa  ciiaire  à  Antioclie  est  demeu- 
rée au  22  février.  La  superstition  dont  se 
plaint  le  concile  consistait  donc  à  conserver  la 
cérémonie  païenne  avec  la  fètechrélienne  ins- 
tituée pour  l'abolir.  On  trouve  que,  le  mémo 
jour  22  f(''vrier,  les  païens  c(''lébraient  la  fête 
nommée  Terminalia.  en  l'Iionneur  du  Dieu 
Terme.  Ce  qui  fait  croire  ([ue  les  pierres  dont 
le  culte  est  uiarqui-  dans  le  canon,  étaient  les 
bornes  des  champs. 


6.  Le  concile  renouvelle  contre  les  usur- 
pateurs des  biens  d'église  les  anciens  canons, 
voulant  que  s'ils  persistent  dans  leur  usur- 
pation, après  trois  monitions,  l'évèque  s'as- 
semble avec  les  abliés,  les  prêtres  et  tout  le 
clergé ,  et  qu'ils  prononcent  ensemble  dans 
l'église  le  psaume  cvin*  contre  le  meurtiier 
des  pauvres,  pour  attirer  sur  lui  la  malédic- 
tion de  Judas,  en  sorte  qu'il  meure,  non-seu- 
lement excommunié,  mais  anathématisé.  — 
Il  prive  ces  usurpateurs,  même  de  leur  vi- 
vant ,  de  la  sainte  commmiion ,  et  de  la  so- 
ciété de  toutes  les  églises,  lorsqu'étant  aver- 
tis par  l'évèque,  ils  ne  restituent  point  ce 
qu'ils  ont  enlevé  injustement,  quand  même 
ils  s'en  seraient  emparés  pendant  l'interrè- 
gne. Il  prononce  aussi  la  peine  d'excommu- 
nication contre  les  juges  et  les  puissants  du 
siècle  qui  oppriment  les  pauvres.  —  Le  der- 
nier canon  est  contre  ceux  qui  donnent  ou  qui 
reçoivent  de  l'argent  pour  les  ordinations  : 
comme  ils  sont  également  coupables,  ils  se- 
ront séparés  de  l'I'^ghse  jusqu'au  premier  sy- 
node. 

7.  Le  père  Sirmond  nous  a  donné  une  let- 
tre qu'il  croit  avoir  été  écrite  depuis  le  second 
concile  de  Tours  par  les  évêques  qui  y  avaient 
assisté  :  ce  n'est  qu'une  exhortation  au  peu- 
ple, pour  le  porter  à  détourner  par  la  prati- 
que des  bonnes  œuvres  les  calamités  dont 
on  était  menacé  ;  à  ne  point  célébrer  de  ma- 
riages jusqu'après  ces  calamités;  à  rompre 
les  conjonctions  incestueuses  ;  à  payer  la 
dinie  de  tous  Icm-s  biens,  même  des  serfs,  et 
pour  ceux  qui  n'ont  point  de  serfs,  de  payer 
le  tiers  d'un  sol  d'or  pour  chacun  de  leurs 
enfants,  et  de  se  réconcilier  avec  leurs  enne- 
mis. Cette  lettre  est  souscrite  de  quatre  évê- 
ques qui  s'étaient  trouvés  à  ce  concile;  mais 
on  ne  sait  si  elle  fut  le  fruit  de  cette  assem- 
b!i!e,  où  si  elle  fut  écrite  quelque  temps  après, 
comme  l'inscription  semble  le  dire.  Nous  en 
avons  une  autre,  qui  est  ime  réponse  à  celle 
que  sainte  Radegonde  avait  écrite  à  ce  second 
concile  de  Tours  pour  lui  demander  la  con- 
firmation de  l'établissement  qu'elle  avait  fait 
à  Poitiers  pour  desfilles,  et  de  la  Règle  qu'elle 
leur  faisait  observer.  Cette  réponse  n'est  si- 
gnée que  de  sept  évêques,  quoiqu'ils  fussent 
neuf  en  tout.  Ils  y  accordent  à  cotte  princesse 
ce  qu'elle  leur  avait  demandé;  et  insistant 
sur  l'article  de  la  Règle  de  saint  Césaire,  qui 
regarde  la  clôture  des  religieuses,  ils  défen- 
dent à  t(uites  celles  qui  s'él:iienl  consacii'es 
à  Dieu  dans  le  monastère  de  Poitiers,  d'en 


L«tlreï  da 
fécond  concl* 
Id  do  Tour*. 
Tom.  V  Coo. 
cil.,  pi£-  8i>7. 


Tom.  V  Coi. - 


[vi«  SIÈCLE.]      CHAPITRE  LXXXVI.  —  CONCILES  DE  BRAGUE  ET  DE  LUGO. 


891 


Concilo  ,]o 
Hrngueea  572. 
Tom.  V  Con- 
01.,  |.nt'.  S3t> 


I.Pelr.  ,v,  J. 


Canons  de 
ce  coDcilo. 
Can.l. 


sortir,  sous  poinc  il'oxcoinmunicatioii ,  les 
déclarant  adultères  et  excoiiiiumiiées,  elles 
cl  leurs  maris,  en  cas  qu'elles  vinssent  à  se 
marier  aprt'S  avoir  quitté  leur  premier  état. 
Ils  f)blip('iit  lci;rs  successeurs  ù  maintenir 
cette  discipline,  sous  peine  d'en  répondre  au 
jugement  de  Dieu. 

ARTICLE  XX. 

CONCILES  DE  BRxVGUE  [572],  ET  DE  LUGO  [Slâ]. 

1.  Le  premier  jour  de  juin  de  l'an  572, 
deuxième  du  roi  Miron,  saint  Martin  de  Du- 
me,  devenu  archevêque  de  Braguc,  tint  un 
concile  des  deux  provinces  de  Galice ,  c'est- 
à-dire  de  Brague  et  de  Lugo  :  on  le  compte 
pour  le  second  de  Brai;uo.  Le  Saint- Siège 
était  alors  vacant  par  la  mortdu  pape  Jean  111  : 
c'est  au  moins  ce  que  porte  l'inscription  de 
ce  concile.  Mais  il  faut  qu'il  y  ait  faute  ou 
dans  cette  inscription,  ou  dans  le  jour  de  la 
tenue  de  cette  assemblée ,  qui  est  marquée 
au  jour  des  calendes  de  juin  ;  puisque,  selon 
le  Pontifical,  le  pape  Jean  ne  fut  enterré  que 
le  13  juillet  de  cette  année  572.  Saint  Martin 
présida  le  concile,  qui  était  composé  de  douze 
évèques,  six  de  chaque  province.  Il  fit  lire 
d'abord  ce  qui  avait  été  réglé  au  concile  pré- 
cédent, où  il  avait  assisté  en  563,  et  proposa 
d'achever  ce  qu'on  n'avait  pu  faire  alors.  Cela 
ne  regardait  point  la  foi,  car  il  n'y  avait  à  ce 
sujet  aucune  difficulté  dans  ces  deux  provin- 
ces; mais  seulement  la  discipline  ecclésiasti- 
que, qui  devait  être  réglée  suivant  l'Ecriture 
et  les  canons.  De  son  avis ,  et  de  celui  des 
évèques,  on  lut  le  passage  de  la  première 
Épître  de  saint  Pierre,  où  cet  apôtre  marque 
en  ces  termes  les  devoirs  des  pasteurs  :  u  Pais- 
se: le  troupeau  de  Dieu,  qui  vous  est  commis, 
veillant  sur  sa  conduite,  non  par  nécessité ,  mais 
par  une  affection  toute  volontaire,  qui  soit  selon 
Dieu  ;  non  par  un  honteux  désir  du  gain,  mais 
pjar  une  charité  désintéressée  ;  non  en  dominant 
sur  l'héritage  du  Seigneur,  mais  en  vous  ren- 
dant les  modèles  du  troupeau,  afin  que,  lorsque 
le  Prince  des  pasteurs  paraîtra,  vous  remportiez 
une  couronne  de  gloire  qui  ne  se  flétrirajamais.  » 
Tous  les  évèques  présents  promirent  d'obéir, 
avec  la  grâce  de  Dieu,  à  ce  divin  précepte. 
Après  quoi  ils  dressèrent  dix  canons  pour  le 
maintien  de  la  discipline. 

2.  Il  est  dit  dans  le  premier  que  les  évè- 
ques, en  visitant  leurs  églises ,  examineront 
premièrement  les  clercs  pour  savoir  com- 
ment ils  administrent  le  baptême,  comment 


ils  c('lèbrenl  la  messe  et  les  autres  offices  do 
l'église;  (jue,  s'ils  trouvent  qu'ils  se  com- 
portent ;\  cet  égard  suivant  les  canons,  ils 
eni'endront  grAces  ft  Dieu;  que  si,  au  con- 
traire, ils  les  trouvent  en  défaiil,  il  leur  or- 
donneront do  faii-e  venir  les  catéchumènes 
à  l'exorcisme,  vingt  jours  avant  leur  bap- 
tême, c'est-i\-dire  le  quatrième  dimanche  de 
Carême  ;  que ,  pendant  ce  temps,  ils  leur 
feront  apprendre  le  Symbole  des  Apôtres; 
qu'après  l'examen  des  clercs,  les  cvêques 
assembleront  leurs  peuples  unautrejour  pour 
leur  appiendre  à  fuir  les  erreurs  des  païens, 
l'iioinicide,  l'adultère,  le  parjure,  le  faux 
témoignage  elles  autres  péchés  mortels,  et 
k  croire  la  résurrection  et  le  jour  du  Juge- 
ment, dans  lequel  chacun  recevra  selon  ses 
teuvres.  —  Le  second  porte  que  l'évêque  ne 
prendra,  en  sa  visite,  pour  son  droit  hono- 
raire nommé  cathédratique,  que  deux  sous 
d'or,  et  qu'il  n'exigera  point  la  troisième 
partie  des  oôrandes ,  qui  doit  être  employée 
pour  le  luminaire  et  les  réparations;  qu'il  ne 
pourra  aussi  exiger  aucime  œuvre  servile  des 
clercs  des  paroisses.  — Il  leur  est  enjoint  par 
le  troisième  de  faire  gratuitement  les  ordi- 
nations, et  de  n'ordonner  les  clercs  qu'après 
un  soigneux  examen  et  sur  le  témoignage 
de  plusicm's.  —  Le  quatrième  défend  aux  évè- 
ques de  prendre  à  l'avenir  le  tiers  du  sou, 
que  l'on  avait  exigé  jusqu'alors  pour  le  saint 
chrême,  sous  prétexte  du  peu  de  baume 
qui  y  entre,  de  peur  qu'ils  ne  paraissent  ven- 
dre les  dons  du  Saint-Esprit,  —  Le  cinquième 
défend  aussi  d'exiger  quoi  que  ce  soit  des 
fondateurs  pour  la  consécration  des  églises  ; 
seulement  il  les  charge  de  prendre  garde 
qu'elles  soient  suffisamment  dotées ,  et  par 
écrit,  parce  qu'il  n'est  pas  raisoi.nable  qu'il 
n'y  ait  point  de  revenus ,  soit  pour  ceux  qu: 
desservent  cette  église,  soit  pour  le  lumi- 
naire. —  Il  est  dit  dans  le  sixième  que,  si  quel- 
qu'un prétend  fonder  une  église  à  la  charge 
de  partager  les  oblations  avec  les  clercs,  ai:- 
cim  évêque  ne  la  consacrera,  comme  étant 
fondée  plutôt  par  intérêt  que  par  dévotion  ; 
cet  abus  avait  lieu  dans  quelques  endroits.  — 
n  en  régnait  un  autre  :  souvent  les  pauvres, 
n'ayant  pas  de  quoi  donner  aux  ministres 
pour  baptiser  leurs  enfants ,  diti'éraient  leur 
baptême ,  ou  ne  le  leur  procuraient  point 
du  tout.  Pour  remédier  à  un  si  grand  mai, 
dont  la  suite  était  la  perte  étemelle  de  ces 
enfants,  le  concile  ordonne  parle  septième 
canon  qu'il  sera  permis  aux  prêtres  de  pren- 


892 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


dre  ce  qiii  sera  ofl'eit  volontairement  pour  le 
bnptc'mc;  mais  il  leur  déicnd  de  rien  exiger. 

lin  !.         —  Le  liuitirme  soumet  à  la  peine,  d'exrnmmu- 
nication  celui  qui  aura  accusé  un  clerc  de 
fornication ,  et  qui  n'aura  pas  pu  le  prouver. 
'•  —  Le  neuvième  diarpe  le  mëlropolilain  de 

dénoncer  aux  évèqueslejourdelal'ûqueà  la 
fin  du  concile,  et  chaque  évcqiie  de  l'annon- 
cer au  peuple,  le  jour  de  Noël,  après  l'Evan- 
gile, afin  que  personne  n'ignore  le  commen- 
cement du  Carême.  Les  trois  prcmiersjours, 
les  Églises  voisines  s'assemblaient  et  fai- 
saient des  processions  ou  prières  publiques. 
Le  troisièm-e  jour,  /i  trois  ou  quatre  heures 
de  l'après-midi,  on  célébrait  la  messe,  à  la 
fin  de  laquelle  on  avertissait  le  peuple  d'ob- 
server le  jeûne,  et  d'amener  au  milieu  du 
*  Carême  les  enfants  qui  devaient  être  bapti- 

sés, pour  qu'ils  fussent  auparavant  pmifiés 
par  les  cxorcismes.  Quelques  prêtres,  infectés 
de  l'hérésie  des  priscillianistes,  disaient  des 
messes  pour  les  morts  après  avoir  déjeuné. 
10.  —  Le  dixième  canon  cûnd;imne  cet  abus,  et 

orclnnue  que,  si  quelque  prêtre  à  l'avenir 
fait  querque  chose  de  semblable,  il  sera  privé 
de  son  otUce  et  déposé  par  son  propre  évê- 
que.  A  la  suite  de  ces  dix  canons,  on  en  a 
mis  cinq  autres  tirés  de  divers  conciles  de 
Brague  par  Garsias  Loaisa;  les  quatre  pre- 
miers se  trouvent  dans  Burchard,  et  le  cin- 
quième dans  Yves  de  Chartres.  On  y  ordonne 
d'amener  les  catéchumènes  à  l'église  vingt 
jours  avant  Pûques;  d'excommunier  ceux 
qui,  étant  avertis  de  s'abstenir  de  certaines 
superstitions  païennes,  continuent  à  les  ])ra- 
ticpier;  de  dégrader  le  prêtre  qui  aura  aliéné 
quelques  meubles  précieux  dépendants  de 
son  titre;  de  mettre  trois  ans  en  pénitence 
ceux  qui  auront  fait  des  danses  devant  les 
églises,  masqué  leur  visage  ou  changé  l'ha- 
bit de  leur  sexi;  ;  d'obliger  à  restitulion  ceux 
qui,  ])ar  négligence,  ont  détérioré  ou  occa- 
sionné la  peitc  des  biens  de  l'Eglise. 
Concile»  do       3-    Ou   distingue    deux    conciles    dans   la 

lornlvcon'.  vlllc  dc  Lugo ,  Vuu  cu  oG2,  l'autre  eu  572. 

eu.  p.j.8-4.  j^p  j.^j  Tliéodomir  fit  tenir  le  premier  pom- 
confirmer  la  foi  catholiqiie  et  pour  diverses 
autres  affaires.  Après  que  les  évêques eurent 
réglé  toutes  choses,  le  roi  leur  envoya  inie 
lettre,  où  il  lem-  représentait  qu'il  y  avait 
trop  peu  d'cvêcpics  dans  la  Galice,   ce  qui 


était  cause  qu'ils  ne  pouvaient  chaque  an- 
née faire  1;;  visite  de  leurs  diocèses  ;  et  que, 
comme  il  n'y  avait  qu'un  seul  uu-tropolitain, 
il  était  diliicil(>  que  le  concile  put  s'assembler 
tous  les  ans.  Pour  parer  à  ces  inconvénients, 
les  évêques  érigèrent  Lugo  en  métropole, 
et  firent  de  nouveaux  évcchés,  du  nombre 
desquels  fut  le  monastère  de  Dume,  dont 
saint  Martin,  qui  en  était  abbé,  fut  le  pre- 
mier évêque.  Ils  fixèrent  aussi  les  paroisses, 
pour  prévenir  les  disputes  entre  les  évêques 
voisins.  Le  roi  Ariamir  confirma  dans  le  ibii.psos. 
concile  de  572  cette  division  des  diocèses. 
Nitigius,  évêque  de  Lugo,  présida  cette  as- 
semblée ,  où  se  trouvèrent  des  légats  du 
Saint-Siège  :  nous  n'en  avons  point  les  Actes. 

ARTICLE  XXI. 

CONCILES  DE  PAHIS  [51'i] ,  ET  DE  CHALON 
[379]. 

1.  Le  roi  Contran,  voulant,  en  372,  ter-  Qonr.èr^. 
miner  un  dilTérend  siuTenu  entre  lui  et  Sige-  "•  "  ■>'■'■ 
bert,  son  trcro ,  nidiqua  un  concile  a  Fans  "■"•i-ii.  iv, 

Cip.         XLII  , 

de  tous  les  évêques  de  son  rovaiuue.  Ils  s'as-  >•■'.')"""•» 
semblèrent  au  nombre  de  trente-deux,  le  15 
février'  de  l'année  suivante  373,  dans  l'é- 
glise de  Saint-I'ierre  ,  c'est-iï-dire  de  Sainte- 
Geneviève  :  Contran  avait  proposé  ce  concile, 
que  l'on  compte  pour  le  quatrième  de  Paris,  au 
roi  Sigebert,  qui  y  avait  consenti.  Voici  cpiel 
en  fut  le  sujet.  Gilles,  archevêque  deRlieims, 
avait  érigé  un  évêché  à  Châteaudun,  qui  était 
du  domaine  de  Sigebert,  et  en  avait  consa- 
cré évêque  un  prêtre  du  diocèse  de  Chartres, 
nouime  Promotus.  La  ville  de  Chartres  ap- 
partenait à  Contran,  et  Châteaudun  était  de 
ce  diocèse.  L'évêquc  de  Chartres,  que  l'on 
nommait  Papolus ,  porta  ses  plaintes  au  roi 
Goutrau  contre  l'entreprise  de  l'évêquc  de 
Reims,  soutenant  qu'il  n'avait  aucun  droit 
d'ériger  un  évêché  dans  le  diocèse  d'autrui. 
Contran  prit  la  défense  de  l'évêque  dc  Char- 
tres; Sigebert  se  déclara  pour  l'évêque  de 
Reims.  Ces  deux  évêques  n'assistèrent  point 
au  concile;  mais  celui  de  Ciiartres  y  pré- 
senta sa  requête ,  sur  laquelle  il  gagna  son 
piocès.  Le  concile  en  écrivit  à  l'évêque  de 
Reims,  h  qui  il  réprésenta  que  l'ordination  W''  ?•"'• 
de  Promotus  était  contraire  aux  canons  et  à 
la  raison,  puisque  Chàteaudini  n'était  ni  de 


1  L(!  1 1  septembre  de  la  mftine  année,  selon  le 
Pfre  hongueval,  qui  pnratt  avoir  confondu  ici  la 
date  de  la  convocntion  du  cnncile  avec  celle  de  la 


lettre  synodale,  adressée   par  les  Pères  à  l'évêque 
de  Reims.  (L'éditeur.) 


CHAPITRE  LXXXVI.  —  CONCILES  DE  PARIS  ET  DE  CHALON. 


.m. 


Ciugalème 
eoDclle  de  Pa- 
en  07*i 
Greg.  Toron, 
Lib.  V,  up. 
III,  lib.  VII, 
cao.  XVI, et T, 

VCOQClI.Me, 
12». 


[\\'  SIÈCLE.] 

l;i  pioviiicc  de  Rlioiins,  ni  de  Ui  Gaule  Bel- 
fii(liR';  (Hi"il  devait  déposer  ce  prèlic  sacré 
évcque,  et  le  garder  auprès  de  lui  ;  ajou- 
tant rpi'en  cas  qu'il  prétondit,  soit  par  sa 
pr(i[iie  autorité,  soit  à  la  faveur  de  quelque, 
])uissance  (pic  ce  l'ut,  se  maintenir  pluslonjj;- 
tcmps  en  cette  usurpation,  bénir  îles  autels, 
confirmer  des  enfants,  faire  des  ordinations, 
ou  résister  t\  Papolus,  son  évéque,  il  serait 
séparé'  de  la  communion  et  frappé  d'ana- 
tlième,  do  même  que  ceux  qui  recevraient  sa 
bénédiction  après  ce  décret.  Cette  lettre  est 
du  H  septembre  573.  Le  concile  écrivit  le 
même  jour  au  roi  Sigeberf  pour  le  sujiplier 
de  ne  point  prendre  la  défense  d'une  si  mau- 
vaise cause,  de  peur  d'attirer  sm-  lui  la  co- 
lère de  Dieu;  mais,  malgré  le  décret  du  con- 
cile, Prnmotus  se  maintint  en  son  évcclié, 
tant  qu'il  fut  soutenu  par  le  roi  Sigebert,  qui 
vécut  encore  deux  ans  depuis.  Contran  avait 
encore  eu  dessein,  dans  la  convocation  de  ce 
concile,  de  teraiincrlcs  difl'éieiuls  entre  Cliil- 
péric  et  Sigebert  ;  mais  il  jiarait  que  la  dif- 
ficulté que  les  évéques  trouvèrent  à  faire 
valoir  leur  décret  contre  Promotus  les  empê- 
cha de  traiter  des  moyens  de  paix  enti-e  ces 
deux  princes.  Du  moins  est-il  vrai  qu'ils  se 
firent  plus  vivement  la  guerre  qu'ils  n'avaient 
fait  auparavant. 

2.  Le  cinquième  concile  de  Paris  se  tint 
en  377,  au  sujet  des  accusations  intentées 
par  le  roi  Cbilpéric  contre  saint  Prétextât, 
évêque  de  Rouen.  La  première  était  que  cet 
évêque  avait  marié,  contre  la  volonté  du  roi, 
le  prince  IMérovée,  son  fils  rebelle,  et  de 
l'avoir  marié  avec  la  veuve  de  son  oncle, 
c'est-à-dire  avec  Brunebaut ,  reine  d'Aus- 
irasie  ;  la  seconde ,  d'avoir  conspiré  avec  ce 
jeime  prince  contre  la  vie  du  roi,  et  d'avoir, 
à  cet  etlet ,  engapé  plusieurs  personnes  par 
des  présents  dans  la  conspiration.  Ces  deux 
faits  ayant  été  avancés  en  présence  des  évé- 
ques du  concile,  assemblés  au  nombre  de 
quaraute-cincj  dans  l'église  de  Sainte-Gene- 
viève, Prétextât  ne  répondit  rien  au  premier, 
parce  qu'il  était  incontestable;  mais  il  nia 
le  second,  en  soutenant  que,  s'il  avait  fait 
des  présents,  c'était  à  des  gens  de  qui  il  avait 
reçu  de  très-beaux  chevaux  et  diverses  autres 
choses;  en  sorte  que  c'était  par  pure  recon- 
naissance qu'il  leur  avait  fait  des  libérali- 
tés. On  n'alla  pas  plus  loin  dans  la  première 
séance  de  ce  concile.  Dans  la  seconde,  qui 
se  tint  en  présence  du  roi  Chilpéric,  on  ac- 
cusa l'évèque  de  Rouen  d'avoir  dérobé  à  ce 


8"J3 


prince  de  l'or  et  divers  meubles,  qu'on  avait 
trouvés  chez  lui  dans  des  ballots  :  Pré-textat 
répondit  ([ue  ces  ballots  lui  avaient  été  con- 
fiés parla  reine d'Auslrasie,  lorsqu'elle  sortit 
do  Rouen;  depuis,  elle  les  avait  envoyés  chcr- 
ciier;  que,   comme  il  avait  lait  dilliculté  de 
les  livrer  sans  l'agrément  du  roi,  le  roi  lui- 
même  lui  avait  permis  de  les  remettre  aux 
gens  do  la    reiui^  d'Auslrasie;  qu'a    l'égard 
dos  ('totfos  d'or  qu'on  l'accusait  aussi  d'avoir 
dérol)éos,  appartenaient  au  pi-inceMérovée; 
s'il  en  avait  fait  présont  à  quelques  personnes, 
il  s'était  ciu  suflisanimont  autorisé  à  le  faire, 
parce  qu'il  savait  ouo  Mérovi'e,  qui  était  son 
fils  spirituel,  ne  le  trouverait  pas  mauvais. 
Au   surplus ,    il    n'avait  fait   aucun  présent 
dans  le  dessein  de  débaucher  les  sujets  du 
roi.  Chilpéric  ne  put  s'cnipêchor  de  dire  à 
quelques-uns  de  ses  confidents  que  l'évèque 
de  Rouen  n'était  pas  si  criminel  qu'on  vou- 
lait cpi'il  le  fût;  mais  qu'il  avait  peine  à  cha- 
griner la  reine  Frédégondo,  qui  le  tourmen- 
tait sans  cesse  pour  faire  déposer  ce  prélat, 
et  qu'il  fallait  cberclicr  quelque  expédient 
poiu-  finir  celte  affaire  au  contentement  de 
celte  princesse.  Ces  courtisans  en  trouvèrent 
un ,  qui  fut  d'aller  trouver  Prétextai,  et  de 
lui  faire  enlendi-e  que  le  seul  moyen  d'être 
absous  était  de  se  reconnaître  coupable;  lui 
promotlaut,  en  cas  qu'il  prit  ce  parti,  de  le 
tirer  de   celle  mauuvaise  affaire.  L'évèque 
donna  aveuglément  dans  ce  piège.  Ainsi  les 
évoques  s'étant  assemblés  une  troisième  fois, 
Prétextât   se  jeta  aux  pieds  du  roi,  lui  de- 
manda  pai'don ,    s'avoua  coupable ,    et   dit 
qu'il  mollait  toute  son   espérance  dans  sa 
miséi-icorde.  Cbilpéric  prit  les  évêques  à  té- 
moins de  l'aveu  de  Prétextât,  le  livra  h  ses 
gardes  avec  ordie  de  le  conduire  hors  de 
l'église;    puis,    s'en   étant  retourné  à   son 
logis,  il  envoya  au  concile  un  code  de  ca- 
nons, où  l'on  avait  ajouté  ceux  qui  portent 
le  nom  des  apôtres,  et  où  il  était  dit  qu'un 
évéque,  convaincu  de  parjure,  oud'adullère, 
ou  d'homicide,  devait  être  déposé.  Prétextât, 
paraissant  étonné  de  ce  procédé,  Bertrand 
de  Bordeaux   lui  dit  :   <>  Puisque  vous  êtes 
tombé  dans  la  disgrâce  du  roi,  vous  ne  pou- 
vez plus  avoir  de  communion  avec  nous, 
qu'il  ne  vous  ait  pardonné.   »  Chilpéric  fit 
demander  aux  évêques  que  la  robe  de  Pré- 
textât fut  déchirée  en  plein  concile,  qu'on 
récitât  sur   lui  les   malédictions  contenues 
dans  le  psaume  cviu,  ou  du  moins  qu'on  l'ex- 
couimuniât  pour  toujours.  Suint  Grégoire  de 


894 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


Coatlle  il 
thiloL  m  5T9. 
Grfg.  TuroD. 
Lib.  V,    Mf. 

Xlf,      XXVlii. 

Tom.VConcil- 
1^850  61963. 


Tours,  qui  avait,  comme  les  autres,  souscrit 
à  la  condamnation  de  révè<iuc  de  Houen, 
s'opposa  à  la  demande  du  roi,  et  on  ne  pro- 
nonça point  ces  exécrations.  Mais  Prétextât 
fut  déposé  et  mis  en  prison;  d'où,  s'étant 
échappé,  il  fut  batlu  cruellement  et  relégué 
en  une  ile  de  la  mer,  près  de  Coutances.  On 
mit  sur  le  siège  de  Rouen  Melainc,  qui  ne 
l'occupa  que  jusqu'à  la  mort  de  Chiipéric, 
arrivée  en  584.  Le  canon  des  apôtres  qu'on 
lut  dans  ce  concile  est  le  vingt-quatrième; 
mais  ou  y  avait  ajouté  le  mot  ù' homicide ,  qui 
ne  se  trouve  point  dans  le  texte. 

3.  Saint  Grégoire  de  Tours ,  qui  nous  a 
conservé  les  Actes  de  ce  concile,  en  met  un 
à  Chàlon  -sur-Saône  on  la  dix-huitième  année 
du  règne  de  Contran,  c'est-à-dire  en  579,  oii 
Salone,  évèque  d'Embrun,  et  Sagittaire,  évè- 
que  de  Gap  f'ircut  disposés  de  l'épiscopat  : 
ils  l'avaient  déjà  été  dans  le  concile  de  Lyon 
de  l'an  5G6,  auquel  saint  Nizier  avait  présidé. 
Mais  ayant  obtenu  du  roi  la  permission  d'al- 
ler à  Rome,  ils  avaient  été  rétablis  par  orcb-e 
du  pape  Jean  III,  à  qui  ils  en  avaient  imposé  : 
c'étaient  deux  frères,  élevés  l'un  et  l'autre 
et  faits  diacres  par  saint  Nizier,  évèque  de 
Lyon,  et  de  son  temps  ordonnés  évèques, 
Salone,  d'Embrun,  et  Sagittaire,  de  Gap. 
Abandonnés  alors  à  eux-mêmes,  ils  se  livrè- 
rent à  toutes  sortes  de  désordres,  de  pillages, 
d'homicides,  d'adultères.  Le  roi  Gontran,en 
('■tant  informé,  assembla  en  5G6  un  concile  à 
Lyon,  où,  comme  nous  venons  de  le  dire,  ils 
furent  déposés  de  l'épiscopat.  Leur  rétabhs- 
sement  par  le  pape  Jean  III  ne  les  rendit  pas 
Grcffir.  plus  saccs.  Ils  portaient  des  armes  comme 
«p.  uMi  •!  les  laïques,  et  us  se  trouvèrent  avec  le  pa- 
tiice  Mummol,  à  qui  le  roi  de  Bourgogne 
avait  donné  le  commandement  de  son  armée 
contre  les  Lombards  en  5G8,  le  casque  en 
tète  et  le  sabre  à  la  main,  combattant  et 
chargeant  l'ennemi  avec  vigueur.  Il  leur  ar- 
riva aussi  de  frapper  quelques-uns  de  leurs 
concitoyens  jusipi'à  ell'usion  de  sang ,  et  de 
s'emporter  contre  le  roi  et  ses  enfants  en  dis- 
cours insolents.  Gontran  ,  pour  les  punir , 
leur  fil  ôter  leurs  valets,  leurs  chevaux  et 
tout  ce  qu'ils  avaient  ;  puis  les  fit  enfermer 
dans  des  monastères  pour  faire  pénitence. 
Il  les  en  fil  sortir  quelque  temps  après,  sur 
les  remontrances  de  quelques-uns  de  ses  do- 
mestiques, qui  lui  fùent  entendre  que  la 
maladie  de  son  fils  aîné  pouvait  bien  être  la 


peine  du  péché  qu'il  avait  commis  en  exilant 
des  évéfpies  innoceuts.  De  retour  dans  leurs 
diocèses,  ils  parurent  convertis,  jeûnant,  fai- 
sant des  aumônes,  récitant  chaque  jour  le 
psautier,  et  passant  les  nuits  en  prières;  mais 
cette  dévotion  ne  fut  pas  de  longue  diu'ée  : 
ils  retombèrent  dans  leurs  anciens  désordres, 
et  y  en  ajoutèrent  d'autres  ;  ce  qui  obligea 
le  roi  à  faire  tenir  le  concile  de  Chûlon.  Ou- 
tre leurs  homicides  et  lem's  adultères,  ils  fu- 
rent accusés  de  lèze-majesté  et  de  trahison. 
Ce  concile  les  déposa  ;  et  Gontran  les  fit  en- 
fermer dans  le  monastère  qu'il  avait  fondé 
en  cette  ville  en  l'honneur  de  s;iint  Marcel, 
martyr.  Ils  se  sauvèrent  l'un  et  l'autre  de 
cette  prison.  Salone  disparut  pour  toujours; 
mais  Sagittaire  s'étant  ligué  en  583  contre 
Gondi'baud,  roi  de  Bourgogne,  le  duc  Leu- 
dégisile  lui  fit  couper  la  tètopar  un  soldat.  Le 
concile  mil  à  Embrun,  Emérit,  et  à  Gap,  Ari- 
dius  ou  Arigius,  à  la  place  des  deux  évèques 
déposés. 

CH.\PmtE  XXII. 

CONCILES  DE  MAÇON  [381  OU  582^,  DE  LYON  [583] 
ET  DE  BRAIKE  [VERS  L'AN  580]. 

\.  Le  roi  Gontran  fit  encore  assembler  un      coDciitj« 
concile  a  Maçon,  le  1" novembre  de  lan  581   <">'*-■ 

,       .     ,  .  .,  ,  Ton.  V 

ou  582  :  c'était  le  vingt-unième  du  règne  de  coocf.sot. 
ce  prince  et  de  celui  de  Chiipéric,  et  le  cin- 
quième du  pontifical  de  Pelage  II .  11  s'y  trouva     c>n.  i . 
vingt-et-un  évèques,  qui,  avant  de  se  sépa- 
rer, firent  dix-neuf  canons,  dont  la  plupart        u. 
ne  font  que  renouveler  ceux  des  conciles 
précédents,  où  l'on  avait  déjà  défendu  aux       8. 
clercs  d'avoir  chez  eux  des  femmes  étran- 
gères, aux  vierges  consacrées  à  Dieu  de  se 
marier ,  aux  clercs  de  plaider  avec  un  de 
leurs  confrères  devant  un  juge  laïque,  aux 
fidèles  de  contracter  aucune  liaison  avec  les 
juifs,  et  à  qui  que  ce  soit  de  retenir  les  dona- 
tions faites  à  l'Église  par  testament.  On  dé-       is  «  i. 

fend  par  un  nouveau  canon  à  tous  les  clercs, 

s. 
en  quelques  degrés  qu'ils  soient,  et  aux  laï- 
ques, d'avoir  des  entretiens  secrets  avec  des 
religieuses ,  ou  d'entrer  dans  leurs  monas- 
tères, s'ils  ne  sont  d'un  âge  mûr  et  avancé, 
et  qu'il  n'y  ait  nécessité  ou  utilité  évidente. 
—  Défense  à  toute  personne  du  sexe  féminin       ,_ 
d'entrer  dans  la  chambre  d'un  évèque  autre- 
ment qu'en  présence  de  deux  prêtres  ou  de 
deux  diacres  ;  —  aux  clercs,  de  s'habiller  en       , 
séculiers  ;  —  aux  archevêques,  de  dire  '  la       ,. 


>  Vt  archiepiscopus  sine  pallio  missas  dicere      non  prœsumat.  Cau.  6,  tom.  V  Concil.,  pag.  9G8. 


CHAPITRE  LXXXVI.  —  CONCILES  DE  MAÇON,  DE  LYON,  ETC. 


Conrile  0? 
Lyoa  es  ^8'3■ 
Ti.m    V  Con- 


[VI'  SIÈCLE 

messe  sans  pallium;  —  aux  jtiRCS  séculiers, 
de  l'aire  mettre  en  prison  un  clerc,  si  ce  n'est 
pour  crime.  — Il  est  ordonné  de  jeûner  trois 
fois  la  semaine,  savoir   :  le  lundi,  le  mer- 
credi et  le  vendredi,  depuis  la  Sainl-Marlin  ' 
jusqu'il  Noël;  de  célébrer  en  ces  jours-là  le 
sacrifice  comme  en  carême,  c'est-;\-dire-  le 
soir,  et  de  lire  les  canons,  afin  qu'ils  ne  soient 
ignorés  de  personne.  Ce  jeûne  ne  regardait, 
ce  semble ,  que  les  clercs ,  et  on   croit  y 
voir  l'origine  de  l'Avent.  —  Les  prêtres,  les 
diacres  et  les  autres  clercs  ne  doivent  célébrer 
les  fêtes  qu'avec  leur  propre  évêquc.  —  Les 
évêques,  les  prêtres  et  les  autres  clercs  obli- 
gés au  célibat,  seront  déposes  de  leurs  gra- 
des, s'ils  sont  convaincus  de  l'avoir  violé.  — 
L'on  ne   donnera  point   aux   clirélicns  des 
juifs  pour  juges,  ni  pour  receveurs  des  im- 
pôts. —  On  exécutera  l'ordonnance  de  Cliil- 
debert,  par  laquelle  il  est  défendu  aux  juifs 
de  paraître  dans  les  rues,  depuis  le  Jeudi- 
Saint  jimpi'au  jour  de  Pâques,  et  de  s'asseoir 
en  présence  des  prêtres,  s'il  ne  leur  est  oi'- 
donné.  —  Tous  les  esclaves  chrétiens  qui 
sci-vcnt  les  juifs  peuvent  être  rachetés  en 
payant  pour  chacun  douze  sols  d'or,  sans  que 
les  maîtres  puissentrefuser  de  les  mettre  en  li- 
berté à  ce  prix.  —  Si  quelqu'un  est  convaincu 
d'avoir  induit  un  autre  à  rendre  un  faux  té- 
moignage ou  à  se  parjurer,  il  sera  excom- 
munié jusqu'à  la  mort;    et  celui  qui  aura 
rendu  ce  faux  témoignage,  ou  qui  se  sera 
parjuré,  sera  noté  d'infamie,  et  ne  pourra 
plus  seiTir  de  témoin.  Ceux  qui  accusent  des 
innocents  auprès  du  prince,  seront  déposés 
s'ils  sont  clercs,  ou  excommuniés  s'ils  sont 
laïques,  jusqu'à  ce  qu'ils  aient  réparé  le  tort 
par  une  pénitence  publique. — Une  religieuse, 
qiii,  après  être  sortie  de  son  monastère,  y 
avait  été  ramenée,  otTrait  de  donner  tout  son 
bien  à  des  gens  puissants  pour  qu'il  lui  faci- 
litassent les  moyens  d'en  sortir  une  seconde 
fois  ;  le  concile,  en  ayant  euavis,  déclara  cette 
fille  excommuniée  avec  tous  ceux  et  celles 
qui  feraient  de  semblables  donations,  ou  qui 
les  accepteraient  à  cette  condition. 

2.  Au  mois  de  mai  de  la  vingt-deuxième 
année  du  l'oi  Contran,  c'est-à-dire  en  .583, 
on  tint  un  concile  à  Lyon,  qui  est  compté 
ordinairement  pour  le  troisième ,  puisque 
l'évêque  de  cette  ville  y  présida,  assisté  de 


895 


sept  autres  évêques,  et  de  douze  députés  des 
évêques  absents  :  on  ne  sait  pas  le  nom  de 
ces  dépiitiis,  parce  que  leurs  souscriplions 
sont  perdues.  Ce  concile  fit  six  canons,  dont 
le  premier  défend  aux  clercs  d'avoir  chez 
eux  des  femmes  étrangères,  et  à  ceux  qui 
ont  été  ordonnés  étant  mariés,  de  demeurer 
dans  une  même  maison  avec  leurs  femmes. 
Le  second  marque  les  pnicaulicuis  dont  les 
évêques  doivent  se  servir  dans  les  lettres  de 
recommandation  ([ii'ils  donnent  aux  captifs, 
savoir  d'y  mettre  la  date  et  le  prix  de  la  ran- 
ron.  Le  troisième  prive  d('  la  conimuuion  les 
religieuses  qui  sortent  de  leurs  monastères, 
jusqu'à  ce  qu'elles  y  soient  retournées.  Le 
qu.itrième  renouvelle  les  anciens  décrets 
contre  les  mariages  incestueux.  Le  cinquième 
défend  aux  évêques  de  célébrer  hors  de  leurs 
églises  les  fêtes  de  Noël  ou  de  Pâques,  si  ce 
n'est  dans  le  cas  de  maladie,  ou  qu'ils  soient 
absents  par  ordre  du  roi.  Il  est  dit  dans  le 
sixième  que  les  lépreux  de  ciiaque  cité  et  de 
son  territoire  seront  nourris  et  entretenus  aux 
dépens  de  l'étilise  par  les  soins  de  l'évêque, 
afin  qu'ils  n'aient  pas  la  liberté  d'être  vaga- 
bonds dans  les  autres  villes. 

3.  Un  nommé  Leudaste,  homme  de  basse 
naissance,  mais  qui,  par  son  adresse  et  son 
esprit,  était  devenu  gouverneur  ou  comte  de 
Tours,  fit  dans  cette  ville  beaucoup  de  mal 
aux  églises  et  au  peuple.  Saint  Grégoire,  qui 
en  était  évêqne,  se  plaignit  de  Leudaste  au 
roi  Cliilpéric,  qui  le  dépouilla  de  sa  charge. 
Celui-ci,  pom's'en  venger,  accusa  saint  Gré- 
goire d'avoir  voulu  livi-er  la  ville  au  roi  Chil- 
debert,  et  d'avoir  dit  que  la  reine  commet- 
tait adultère  avec  Bertrand  ,  évêque  de  Bor- 
deaux. Cliilpéric  n'ajouta  pas  foi  au  premier 
chef  d'accusation  ;  mais  voulant  approfondir 
le  second,  il  fit  assembler  les  évêqiies  à 
Brainc,  qui  était  une  maison  royale  à  quel- 
ques lieues  de  Reims,  sur  la  rivière  de  Vesle. 
Le  roi  arrivé  à  l'assemblée,  l'évêque  de  Bor- 
deaux accusa  publiquement  celui  de  Tours 
d'avoir  chargé  la  reine  et  lui  d'un  crime 
aussi  faux,  qu'il  était  honteux,  et  en  de- 
manda justice  :  Grégoire  de  Tours  nia  le  fait 
avec  fermeté,  protestant  que  jamais  une  sem- 
blable calomnie  n'était  sortie  de  sa  bouche. 
Le  roi,  qui  connaissait  sa  probité,  laissa  à  la 
liberté  des  évêques  présents  d'écouler  les 


CoDclIe  de 

Btûine       vers 

Un  S80. 

Grpg.  To- 
ron. Lib.  V, 
ca]..  I.;  Tom. 
V   Ccucil  ,  t» 


'  Ut  a  feria  S.  Martini  usque  ad  natale  Domini, 
secundo,  quarta,  et  sexta  sabbati  jejunetur,  et 
sacriliciu  quadragesimali  debeant  ordine  celebrari. 


In  quibns  liiehus  canones  légendes  esse  speciali 
definilione  sancimus,  ut  nullus  se  fateatur  per 
ignorantiam  deliquisse.  Caii.  9,  ibid. 


896 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


témoins  conire  l'évcquc  de  Tours,  ou  de  s'en 
rapporter  à  son  serment.  Les  ovêqucs  prirent 
ce  dernier  parti ,  cl  ils  convinrent  que  Gré- 
poire,  après  avoir  '  dit  trois  messes  à  trois 
dill'érents  autels,  ferait  serment  qu'il  n'avait 
jamais  parlé  de  la  reine  en  mauvaise  part 
sur  l'article  dont  il  s'agissait.  L'évèi]ue  de 
Tours,  ayant  accompli  tout  ce  qui  avait  été 
ordonné  ,  fut  en  conséquence  déclaré  inno- 
cent. Cette  manière  de  se  justifier  éUiit  con- 
traire aux  canons;  mais  on  la  mit  eu  pra- 
tique à  cause  de  l'intérêt  du  roi.  Les  évèques, 
voyant  leur  confrère  disculpé,  demandèrent 
justice  contre  ses  accusateurs  :  le  roi  leur 
dit  que  c'était  Lcudastc;  mais,  comme  il  s'é- 
tait évadé, "on  ne  put  faire  antre  chose  contre 
lui  que  de  l'excommunier  de  toutes  les  égli- 
ses, pour  avoir  causé  ce  scandale  et  calomnié 
la  reine  et  un  évèque.  Les  évê(iues  écrivirent 
sur  cela  une  lettre  qu'ils  envoyèrent  aux 
évoques  absents  :  nous  ne  l'avons  plus.  On 
rapporte  ce  concile  à  l'an  .^80,  le  troisième  du 
poutiticat  de  Pelage,  le  dix-neuvième  du  lè- 
gnc  de  Chilpéric  :  d'autres  le  mettent  en  577. 

ARTICLE  XXm. 

CO^'CILES  DE  VALENCE  [584] ,  ET  DE  MAÇON 

[385]. 
Concile  da       1.  Lc  23  mai  de  l'an  384,  qui  était  le  vinpt- 

Vttence       en  '     a  o 

Mi.  Tom.  y  troisième  du  règne  de  Contran ,  ce  prmce 

Coocil.^p.9î6.  "  '  } 

assembla  à  Valence  un  concile  de  dix-sept 
évèques,  où  il  envoya  Asclépiodore,  son  ré- 
férendaire, avec  des  lettres  par  lesquelles  il 
demandait  la  confirmation  des  donations 
faites  ou  à  faire  aux  lieux  saints  par  lui, 
paria  défunte  reine  Austréchilde  sou  épouse, 
<•!  par  ses  deux  tilles  consacrées  à  Dieu,  Clo- 
drberge  et  Clodehilde.  Le  concile,  par  m 
('.■■ciet  unanime  ,  confirma  toutes  les  dona- 
tions, nommément  telles  qui  avaient  été  fai- 
tes aux  églises  de  Saint-Marcel  de  Cliàlon, 
et  de  Saint-Sympliorien  d'Autun,  avec  dé- 
fense, sous  peine  d'analliènie  ,  aux  évèques 
des  lieux  et  aux  rois  de  rien  ôter  ou  dimi- 
nuer de  ces  biens  à  l'irt'enir.  Sapaudus,  évo- 
que d'Arles,  présida  cette  assemblée  ;  l'ris- 


que,  évèque  de   Lyon,  souscrivit  ensuite. 

2.  Mais  il  souscrivit  le  premier,  en  qualité 
de  président ,  au  second  concile  de  Mâcon, 
que  le  même  roi  Contran  avait  indiqué  en 
cette  ville  pour  le  23  octobre  de  l'an  383  ,  le 
vingt-quatrième  de  son  règne  :  il  fut  com- 
posé de  quarante-trois  évèques.  Prisque, 
dans  les  souscriptions,  ne  se  (pialifie  qu'évè- 
que  de  Lyon  ;  mais  dans  la  préface  h  la  tète 
descauons,  il  est  appelé  patriarche,  titre  que 
l'on  donnait  alors  aux  principaux  métropoli- 
tains. Celui  de  Lyon  était  regardé  comme  le 
plus  considérable  du  royaume  de  Contran, 
è  cause  que  ce  prince  faisait  souvent  sa  rési- 
dence eu  celte  ville.  Ou  ne  donne  pas  la 
même  qualité  aux  archevêques  de  Vienne, 
de  Rouen,  de  Bordeaux,  de  Sens  et  de  Bour- 
ges, qui  assistèrent  à  ce  concile.  Tous  les 
canons  que  l'on  y  fit  regardent  la  discipline 
ecclésiastique. 

3.  Parle  premier  on  recommande  aux  évè- 
ques d'exhorter  les  peuples  à  sanctifier  le 
jour  du  dimanche  que  l'on  commençait  .'i  né- 
gliger; et  afin  d'arrêter  cet  abus  par  la  crainte 
des  châtiments,  le  concile  en  décerne  de  con- 
formes à  la  condition  des  personnes,  voulant 
qtie,  si  un  avocat  est  trouvé  à  travailler  à  des 
procès,  il  soit  chassé  du  barreau  ;  que  si  c'est 
un  paysan  ou  un  esclave  qui  s'occupe  du  la- 
bourage ou  d'autres  exercices  de  cette  nature, 
il  soit  frappé  de  quelques  coups  de  bâton  ; 
que  si  c'est  un  clerc  ou  un  moine,  il  soit  sus- 
pendu pour  six  mois  de  la  communion  avec 
ses  frères.  On  défend  dans  le  second  toutes 
œuvres  servîtes  ;\  Pâques  pendant  six  joui-s. 
Le  troisième  supprime  la  roulunie  qui  s'in- 
troduisait de  baptiser  tous  les  jours  de  fêtes 
des  martyrs,  ce  qui  faisait  qu'on  avait  peine 
à  trouver  deux  ou  trois  personnes  pour  être 
baptisées  i\  P;'tques  :  ce  concile  ordonne, 
qu'excepté  le  cas  de  maladie  ,  les  enfants 
soient'  apportés  à  l'église  pendant  le  Carême, 
afin  qu'ayant  reçu  les  impositions  des  mains 
et  l'onction  de  l'huile  sainte  ,  ils  soient  régi'-- 
nérés  dans  cette  solciuiil(-.  R  est  dit  dans  h; 
quatrième,  que  tous  les  fidèles,  tant  hom- 
mes' que  femmes,  feront  chaque  dimanche 


Crnrl'e  d« 
MieiiDciiSn. 


ce  coDctlf. 

Tom.  VI 
CCDCII.  I'.9i4|. 


Cin,  1. 


•  Tune  cunctis  dicenlibus  :  Aon  potest  persona 
inferior  super  sacerdolem  credi,  rcstitil  ad  hoc 
causa,  itt  diclis  migsis  in  tribus  altiiribus  me  de 
his  verbis  exuerem  sacramenlo.  Et  licet  canoni- 
bus  essenl  contrario,  pro  causa  lamcn  régis  impie- 
la  sunt.  Greg.  Turoii.,  lib.  V,  cap.  L,  pag.  2G5,  et 
loin.  V  Concii,  pag.  9ti5. 

•  Prœsentibus  adnwnilionibus  a  suis  erroribus 


vel  ignorantia  revnciHi,  omnes  omnino  a  die  qua- 
drngesim  i  cuin  iufantihus  suis  ad  ecclesiain  oh- 
servnre  prœcipiiiins,  ut  iiiipnsitinncm  manuum 
certis  diebusadepli,  et  sacriolei  liguore  peruncti, 
legilimi  dici  feslinltile  frunniur,  el  sacro  baplin- 
maleregcnerentur.  l'.nu.  3,  toui.V  CtiMci/.,  piig.  981. 
'  Propterea  decernimus  ttt  omnibus  dominicis 
diebus  altaris  oblatio  ab  omnibus  riris  el  mulie- 


[VI'  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  LXXXVI.  —  CONCILES  D'AUXERRE,  ETC. 


897 


Cu.  S. 


leur  uUVaiiilo  do  pain  et  de  vin  i\  l'uulel. 
l);iiis  le  cinquième',  que  les  chrétiens,  coii- 
forinénicnt  aux  luis  divines,  qui  ont  accordé 
aux  pinMies  et  aux  ininisties  la  diTUC  des 
biens,  la  ])aieii)nt  aux  ministres  tle  l'IOglise, 
pour  qu'elle  soit  employée  i\  la  sulisistaucc 
des  pauvres  et  au  rachat  des  captifs,  sous 
peine  d'(!xcomraunication  aux  contrevenants. 
Le  sixième  porte,  que  les  prêtres  céli'bre- 
ront'  la  messe  ;\jeun,  el  que  les  restes  de 
l'Eucharistie  seront  consommés  le  mercredi 
et  le  vendredi  après  la  messe  par  des  enfants 
aussi  i\  jeun ,  et  que  ces  restes  seront  aupa- 
ravant aspergés  de  vin.  Sur  les  remontran- 
ces des  évoques  Prétextât  et  Pappulus,  il  fut 
ordonné  par  le  septième,  que  les  évèqucs 
prendraient  sous  leur  protection  les  esclaves 
mis  en  liberté ,  et  qu'ils  seraient  juges  des 
diUerends  qui  naîtraient  à  ce  sujet.  Le  hui- 
tième maintient  le  dioit  d'asile,  et  défend  à 
qui  que  ce  soit  d'enlever  de  force  ceux  cjui 
se  sont  réfugiés  dans  les  églises,  voulant 
toutefois  que,  s'ils  sont  convaincus  de  fauteen 
présence  de  l'évèque,  lui-ci  cepermctle  leur 
enlèvement,  sans  violer  la  sainteté  de  l'église. 
Selon  le  neuvième ,  si  xme  personne  puis- 
sante a  un  ditlerend  avec  l'évèque ,  elle  doit 
s'adi'esser  au  métropolitain ,  qui ,  parties 
ouïes,  jugera  seul,  ou  avec  un  ou  deux  évè- 
ques ,  ou  en  plein  concile ,  suivant  l'impor- 
tance de  l'affaire.  Il  est  ordonné  dans  le  di- 
xième ,  que  les  prêtres  et  les  autres  clercs 
seront  jugés  par  lem-  évêque  seul.  Le  on- 
zième est  une  recommandation  de  l'hospita- 
lité ;  et  afin  que  les  évéques  en  donnent 
l'exemple  aux  autres ,  et  que  leurs  maisons 
ne  soient  point  d'im  difficile  accès  aux  pau- 
vres, il  leur  est  défendu  par  le  treizième  d'a- 
voir des  chiens  à  leur  porte,  ou  des  oiseaux  de 
proie.  Le  douzième  défend  aux  juges  laïques 
de  connaître  des  causes  des  veuves  et  des 
orphehns  sans  en  avoir  auparavant  averti 
l'évèque,  ou  en  son  absence  l'archidiacre  ou 


un  prètr(\  Le  quatorzième  est  contre  ceux 
(jui  se  s(;rvaient  di;  la  faveur  qu'ils  avaient 
auprès  du  roi  pour  s'emparer  des  biens  d'au- 
trui.  L(!  ([uinzième  rè^le  en  celte  manière 
le  respect  que  les  laï(pi('s  doivent  |)orti'i-  aux 
clercs  majeiu's,  quand  ils  se  rencontraient  : 
s'ils  sont  h  cheval  l'un  et  l'autre ,  le  laïtpie 
ôtera  son  chapeau  et  saluera  le  clerc  :  si  le 
clerc  est  ;\  pied  et  le  laïque  .'i  cheval,  celui-ci 
descendra  de  cheval  pom-  saluer  le  clerc.  Le 
seizième  fait  défense  à  la  veuve  d'mi  sous- 
diacre,  d'un  exorciste,  d'un  acolythe,  de  se 
remarier,  sous  peine  d'être  séparée  de  son 
mari  vÀ  de  se  voir  enfermée  dans  un  monas- 
tère de  iilles  jusqu'à  la  mort.  Il  est  défendu 
par  le  dix-septième  d'enterrer  des  morts  sur 
des  corps  à  demi  pourris.  Le  dix-huitième  dé- 
fend les  mariages  entre  parents  aux  degrés 
prohibés  par  les  lois.  Dans  le  dix-neuvième, 
on  fait  défense  aux'  clercs  de  se  trouver  aux 
jugements  de  mort  et  aux  exécutions.  Le 
vingtième  ordonne  la  célébration  d'un  con- 
cile tous  les  trois  ans,  à  l'indication  de  l'évè- 
que de  Lyon  et  du  roi,  en  un  lieu  commode, 
auquel  tous  les  évêques  seront  tenus  d'assis- 
ter. Le  roi  Contran  confirma  ces  vingt  canons 
par  une  ordonnance  datée  du  10  novembre 
de  l'an  583  ,  où  il  exhorte  les  évêques  à  dis- 
tribuer eux-mêmes  à  leurs  peuples ,  et  non 
par  d'autres,  le  pain  de  la  parole  de  Dieu. 

ARTICLE  XXIV. 

CONCILES  d'aUXERRE  [APRÈS  l'AN  583],  BE  CLEU- 
MONT  [383],  ET  DE  CONSTANTINOPLE  [387]. 

1.  Quoique  le  concile  d'Auxerre  soit  daté 
dans  quekpies  exemplaires  de  la  première 
année  du  pontificat  de  Pelage  II,  et  de  la  dix- 
septième  du  règne  de  Chilpéric ,  c'est-à-dire 
de  l'an  578 ,  il  paraît  certain  qu'il  ne  se  tint 
qu'en  583,  quelque  temps  après  le  second  de 
Màcon.  La  preuve  en  est  que  les  canons  du 
concile  d'Auxerre  ne  sont  qiie  pour  exécuter 


Can.  I(. 


Totn.  V  Con- 
eil.  paô'.  991. 


Concile 
d'Ainprre. 

ïotn  V 
Ctnc,  p.  9j7. 


ribus  offeratur  tam  pania  quam  vini.  Can.  4, 
ibid. 

'  Unde  statuimus  acdecernimus,  ut  mos  anliqiius 
a  fidelibtis  reparelur  ;  et  décimas  ecelesiasticis  fa- 
mulantibus  cœremoniis  2^opulus  omnis  inférât, 
quas  sacerdotes  aut  in  pauperem  usum,  aut  in 
captivorum  redemptioneni  pnvrogantes,  suis  ora- 
lionibus  pacem  populo  ac  salutem  impetrent.  Si 
quis  autein  contumax  nosiris  slatutis  saluberri- 
mis  fuerit,  a  membris  Ecclesiœ  omni  tempore  se- 
paretur.  Can.  5,  ibid. 

'  Item  decernimus,  ut  nullus  presbyter  confer- 
tits  cibo,  aut  crapulatus  vino,  sacrificia  contrec- 
XI. 


tare,  aut  missas  privatis  feslisque  diebus  conce- 
lebrare  prœsumat...  Quœcumque  reliquiœ  sacii- 
ficiorum post peractam  ritissain  in sacrario  super- 
sederinl,  quarta  vel  sexta  feria  innocentes  ab  illo 
cujus  interest,  ad  Ecclesiam  adducantur,  et  iiir- 
diclo  eis  jejunio,  easdem  reliquias  conspersas  vino 
percipiant.  Can.  G,  pag.  982. 

2  Àd  locum  exaniinationis  reorum  nulhts  clc- 
ricorum  accédât,  neque  intersit  atrio  saucioto., 
ubi  pro  realus  sui  qualilate  quispian  interficien- 
dus  est.  Coucil.  Matiscon.,  il,  eau.  19,  tom.  V 
Concil.,  pag.  987. 


ST 


898 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


CtBfas  de 
c«  Concile* 


II. 


ceux  de Mdcon,  auxquels  Aunacaiie  avait  eu 
part ,  et  souscrit  en  inuililé  d'evèque  d'Au- 
xoiTC.  Aussi  son  concile  ne  fut  composé  que 
d'abbés,  de  prêtres  et  de  diacres  de  son  dio- 
cèse ,  auxquels  il  était  de  sa  charge  de  noti- 
fier les  règlements  qui  s'étaient  faits  dans 
celui  deMàcon,  et  de  les  leur  faire  observer. 
Il  y  en  ajouta  d'autres  pour  le  maintien  de 
la  discipline  ecclésiastique  et  monastique,  et 
pour  la  réforme  de  certaines  superstitions 
qui  étaient  des  restes  du  paganisme. 

2.  Nous  ne  mettrons  que  les  plus  remar- 
quables. «  Défense  d'observer  le  premier 
jom-  de  janvier,  à  la  manière  des  païens,  en 
se  déguisant  en  vaches  ou  en  cerfs ,  et  en  se 
donnant  des  éti-ennes;  et  défense  de  donner 
plus  en  ce  jour,  qu'on  n'a  coutume  de  donner 
en  d'autres.  — Avant  le  jour  de  l'Epiphanie, 
les  prêtres  enverront  à  l'évcque  pour  savoir 
le  commencement  du  Carême ,  et  le  notifie- 
ront au  peuple  en  cette  solennité  même.  — 
On  n'acquittera  point  de  vœux  à  des  buis- 
sons, à  des  arbres  ou  ii  des  fontaines  ;  on  ne 
fera  point  faire  de  pieds  de  bois,  ni  de  figu- 
res entières  d'hommes  pour  mettre  dans  les 
chemins;  et  on  ne  s'assemblera  pas  dans 
les  maisons  pailiculières  pour  célébrer  les 
veifies  des  fêles.  Mais  si  quelqu'un  a  fait  un 
vœu ,  qu'il  l'accomplisse  dans  l'église ,  en 
donnant  aux  pauvres,  ou  en  faisant  écrire 
sur  la  matricule  ce  qu'il  a  voué  ;  s'il  veut 
veiller ,  que  ce  soit  dans  l'église.  —  Défense 
de  consulter  des  sorciers  ou  des  devins ,  de 
s'arrêter  aux  augui-es  ,  ou  aux  sorts  du  bois 
ou  du  pain,  ou  aux  prétendus  sorls  des  saints  ; 
—  de  veiUer  en  l'honneur  de  saint  Martin, 
parce  qu'apparemment  cette  veille  tournait 
en  abus  ;  —  de  faire  des  danses  dans  l'église, 
d'y  faire  chanter  déjeunes  filles,  et  d'y  pré- 
parer des  festins  ;  —  de  donner  l'Eucharis- 


tie ou  le  baiser  de  paix  aux  morts ,  —  de  les    c.n 
envelopper  du  voile  de  l'autel,   de  les  en-        , 
terrer  dans  le  baptistère,  —  et  de  mettre  un 
corps  sur  un  autre  qui  n'est  pas  encore  con- 
sumé ;  —  de  mettre  sur  l'autel  du  vin  miellé,       ; 
ou  quelque  autre  breuvage  que  du  vin  '  et 
de  l'eau  pour  la  consécration  du  sang  de 
Jésus-Clu-ist  ;  —  de  dire  deux  messes'  en  un 
même  jour  sur  le  même  autel,  et  à  un  pré-       ' 
tre  de  la  dire  sur  le  même  autel  où  l'évoque 
l'aura  célébrée  ce  jour-là;  —  de  boire'  ou 
manger  après  minuit  la  veille  de  Pâques,  de 
Noël  ou  des  grandes  fêtes ,  que  l'on  doit  so- 
lenniser  jusqu'à  deux  heures  du  matin.  — 
Les  prêti-es  doivent*  aller  chercher  le  saint       t 
chrême  à  la  mi-carême,  et  le  porter  dans  un 
vase  couvert  d'un  hnge ,  avec  le  même  res- 
pect qu'on  porte  les  rehqnes  des  saints.  — 
Ils  doivent  tons  venir  '  au  synode  à  la  mi-       ' 
mai,  et  les  abbés  le  1"  novembre.  —  Un       * 
moine  convaincu  de  crime   doit  être  ren- 
fermé dans  un  autre  monastère ,  si  son  abbé 
néglige  de  le  mettre  en  pénitence.  —  D  n'est       » 
permis  ni  à  un  abbé ,  ni  à  un  moine  d'être 
parrains.  —  Un  abbé  qui  aura  accordé  l'en-       > 
trée  de  son  monastère  à  une  femme ,  sera 
enfermé  trois  mois  dans  un  autre  où  il  vivra 
au  pain  et  à  l'eau.  —  11  est  défendu  aux 
clercs  d'être  présents,  lorsque  l'on  tourmente 
les  criminels  ;  —  d'assister  à  un  jugement 
de  mort,  —  et  d'appeler  un  de  leurs  confrè- 
res devant  un  juge   séculier.  —  Les  fem- 
mes' ne  doivent  pas  recevoir  l'Eucharistie 
la  main  nue  ,  —  mais  dans  un  linge  nommé 
dominical'' ;  s'il  se  trouve  qu'elles  n'enaieut 
point,  elles  attendront  au  dimanche  suisant 
pour  communier.   —  Il  leur  est  défendu* 
de  toucher  à  main  nue  la  palle  qui  couvre 
le  coips  de  Noire-Seigneur;  — et  aux  prê- 
tres, de  chanter  ou  danser  dans  un  festin.  » 


•  A'on  licet  in  altario  in  sacrificio  divino  mel- 
lilum,  quod  mulsum  appellant,  nec  ullttm  aliud 
jjoculum,  txlra  linum  cum  aqua  mixtum  ,  of- 
fcrre  :  quia  ad  grande  reatum  et  pcccatutn  perti- 
nel  preshylcro  illi,quicuinque  aliud  poculum,  ex- 
tra viiium,  in  consecralionein  saiiguiiiis  Christi 
offerre  prœsumpserit.  Cau.  8,  tom.  V  Concil.,  pag. 
958. 

'  A'on  licet  super  vno  allario  in  una  die  duas 
missas  dicre:  nec  allario  ubi  episcopus  missas 
dijcerit,  ut  presbyler  in  illadie  missas  dical.  Cau. 
10,  ibid. 

'  Non  licet  in  vigilia  Paschœ  ante  horam  se- 
cundam  noctis  vigilias  perrrplere,  quia  in  illa 
nocle  non  licet  posl  mediam  noc/em  bibere,  nec 
in  Nutali  Dnmini  nec  in  reliquis  solemnilalibus. 
Cau.  Il,  ibid. 


*  Vt  a  média  quadragesima  presbyleri  chritma 
pelant:  et  si  quis  infirinitate  dclentus  venire  non 
potuerit,  ad  archidiaconum  suum,  rel  archisub- 
diaconum  transmillal,  sed  cum  chrismario  et  lin- 
teo,  sicut  reliquiœ  sancloruni  deportari  soleni, 
Cau.  C,  ibid. 

'  i't  medio  maio  omnes  presbyleri  ad  synodum 
in  civitalem  vtniani,  et  kalendis  noventbris  om- 
nes abbatesad  concilium  conveniant.  Cau.  7,  ibid. 

'  Kon  licet  mulieri  nuda  manu  Eucharistiam 
accipere.  Cau.  36,  pag.  960. 

'  i't  unaquœque  inulier,  quando  communicat, 
dominicalem  suum  habeat.  Quod  si  qua  non  ha- 
bueril,  usque  in  alium  diem  dominicum  non  corn' 
municet.  Can.  42,  pag.  901. 

'  Son  licet  mulieri  manum  suam  ad  pallam 
dominicam  niltere.  Ëau.  37,  pag.  860. 


GHAPITllE  LXXXVl.  —  CONGELES  DE  TOLÈDE,  ETC. 


Grec.  Tu. 
roti.  1.;V11I, 

«p.  XX. 


ConcHc  de 

C0a^U-lDtlIl0• 

plfi  en  nul. 

Tom.  V 
Concil.  i..9,t5, 
rt  Evagr,  Mb. 
V,  cjp.  VU. 


[vr  SIÈCLE.] 

3.  Saint  Grdgoiro  do  Tours  raconte  que 
Théotloso  ayant  été  fait  cHr-qiic  do  Rodez, 
r(^pét;i  aussitôt  à  Ursicin,  ovih[iic  de  Ciiiiius, 
plusieurs  paroisses  qu'il  soutenait  cire  de 
sou  diocèse  ;  qu'Ursicin  faisant  dillicullc  de 
les  rendre,  les  ëvcques  de  la  province  s'as- 
semblèrent avec  leur  nu''lrop<ililaiu  à  Clcr- 
moiit,  on  .\uvcrgne,  où  ils  adjugèrent  les 
paroisses  contcsidcs  à  l'dvêque  de  Rodez, 
quoiqu'on  n'ciU  point  de  mémoire  qu'elles 
eussent  dépendu  de  son  église.  Ursicin  avait 
été  excommunié  dans  le  second  concile  do 
Màcon,  pour  avoir  reçu  Gondebaud,  ennemi 
de  Contran.  On  lui  imposa  trois  ans  de  péni- 
tence, avec  défense  pendant  ce  temps  de 
couper  sa  barbe  et  ses  clicveux,  de  boire  du 
vin  et  de  manger  de  la  chair,  de  célébrer  la 
messe,  et  de  donner  des  eulogics.  Faustien, 
qui  avait  été  élu  évèquc  de  Uax  par  l'auto- 
rité de  Gondebaud,  fut  déposé  dans  le  mê- 
me concile,  ù  la  charge  que  les  trois  évoques 
qui  a\  aient  eu  part  à  son  ordination,  savoir, 
Bertrand  de  Bordeaux,  Pallade  de  Saintes, 
et  Oreste  de  Bazas,  le  nourriraient  tour  à 
tour,  et  lui  donneraient  cent  sous  d'or  par 
an.  On  ne  sait  point  l'année  du  concile  de 
Clermont.  Quekpies-uns  le  mettent  en  la 
vingt-septième  année  du  règne  de  Gonti'an, 
c'est-à-dire  en  588,  d'autres  en  S83. 

4.  On  en  met  un  h  Constantinople  en  387, 
dont  voici  l'occasion.  Astère,  général  des 
troupes  d'Orient,  ayant  eu  une  contestation 
avec  Grégoire,  évéque  d'Antiocbe,  presque 
tous  les  habitants  de  cette  ville  prirent  le 
parti  du  général  contre  lem'  évccpie,  parce 
qu'ils  disaient  en  avoir  été  maltraités.  Astère 
fut  toutefois  déposé  de  sa  cliai-ge,  et  Jean 
mis  à  sa  place,  avec  ordi'e  d'informer  contre 
les  auteurs  de  la  sédition.  Jean,  au  lieu  de 
rendre  la  paix  à  Antiochc,  en  augmenta  le 
trouble  par  la  permission  qu'il  donna  publi- 
quement à  toutes  sortes  de  personnes  d'ac- 
cuser révèque.  Sur  cela,  un  banquier  donna 
sa  requête  à  Jean,  par  laquelle  il  exposait 
que  Grégoire  avait  eu  mi  commerce  infâme 
avec  sa  sœur,  quoique  mariée.  On  donna 
d'autres  requêtes,  où  il  était  accusé  d'avoir 
troublé  la  tranquillité  publique.  L'évèque  dé- 
clara qu'il  était  prêt  à  se  justifier  sur  ce  der- 
nier chef;  mais  à  l'égard  du  crime  d'impu- 
reté, il  en  appela  à  l'empereur  et  au  concile. 
Ce  concile  se  tint  à  Constantinople,  où  Gré- 
goire mena  avec  lui  l'historien  Evagre,  en 
qui  il  avait  confiance.  L'alfaire  fut  examinée 
en  présence  des  patriarches,  ou  de  ceux  qu'ils 


899 


avaient  envoyés  pour  tenir  leurs  places,  de 

plusieurs  sénateurs,  et  de  plusieurs  évéqucs 
et  arelievè([ues  ;  et  après  uu  iniig  ex;inien, 
Grégoire  gagna  sou  procès.  Son  accusateur 
fut  battu  ;\  coup  de  nerfs,  promené  par  toute 
la  ville,  et  envoyé  en  exil.  Ce  fut  k  l'occasion 
de  ce  concile,  ijuc  Jean-le-Jeùueur,  évèipu; 
de  Conslantinoiile,  prit  le  liUc  d'È'vêijiii'  uni- 
verscl;  mais  le  pape  Pelage  II,  en  étant  infor- 
mé, cassa  les  Actes  de  ce  concile,  avec  dé- 
fense ;\  Laurent  archidiacre,  alors  son  nonce 
auprès  de  l'empereur,  d'assister  à  la  messe 
avec  Jean. 

ARTICLE  XXV. 

CONCILES   DE   TOLÈDE    [386-389]  ,    DE   NARBONNE 
[389J,  DE  SAUniCIAC  et  de  ROME  [389]. 

1.  Pendant  que  Lévigilde,  roi  des  Visi-  convors;on 
golhs  en  Espagne ,  défendait  ses  frontières  K^o/no"™" 
conti'C  Gontran,  qui  lui  avait  déclaré  la  guerre 
poiu-  venger  la  princesse  Ingonde  sa  nièce, 
il  continuait  k  persécuter  les  catholiques, 
comme  il  avait  persécuté  cette  princesse  et 
sonmari  Herménégilde,  qui  professait  comme 
elle  la  vraie  foi.  Herménégilde  était  fils  ahié 
de  Lévigilde,  et  Ingonde  fille  de  Sigebert,  roi 
des  Français.  Saint  Léandre  évoque  de  Séville, 
fut  envoyé  en  exil  avec  beaucoup  d'autres 
évoques  cathohques.  Les  Suèves  de  Galice 
fiu'ent  aussi  persécutés  pour  la  foi  ;  et  Lévi- 
gilde, s'étant  emparé  de  cette  province,  en 
contraignit  un  grand  nombre  de  revenir  à 
l'arianisme  qu'ils  avaient  quitté  depuis  peu. 
Ce  prince  s'en  repentit  quelque  temps  après, 
surtout  d'avoir  fait  mourir  son  fils  Herméné- 
gilde :  il  reconnut  la  vérité  ;  mais  Dieu  ne  lui 
accorda  i)as  la  grâce  de  la  professer  publi- 
quement. Se  trouvant  à  la  veille  de  sa  mort, 
il  fit  venir  saint  Léandre,  et  le  pria  de  faire 
pour  Ilécarède,  son  fils  et  son  successem-,  ce 
qu'il  avait  fait  pour  son  frère  par  ses  exliorta- 
tions.  c'est-à-dire  de  travailler  à  le  rendi-e 
catholique.  Ce  jemie  prince,  s'étant  fait  in- 
struire, reconnut  la  vérité,  reçut  le  signe  de 
la  crois  avec  l'onction  du  saint  chrême,  c'est- 
à-dire  le  sacrement  de  confu-mation,  et  en- 
gagea les  évôcpies  ariens  de  son  royaume  à 
se  faire  catholiques.  Cela  se  passa  siu-  la  fin 
de  la  première  année  de  sou  règne,  qui  était 
en  587.  Au  commencement  de  l'année  sui- 
vanie,  deux  ou  trois  évêques  ariens,  qui  ne 
s'étaient  convertis  qu'en  apparence,  formè- 
rent quelque  révolte  dans  le  royaume.  Ils 
furent  découverts,  et  envoyés  eu  exil. 


Grojnr.  DIa. 
logo  IV,  cap. 


Giw.  Tu- 
ron ,  lib.  1\, 
cap. XV. 


900 


IIISTUIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASnOUES. 


Coodio  de 


Cll.,l,ij-.  937. 


2.  Le  roi  Récuiède  ne  trouva  pas  de  moyen 
plus  cilicace  pour  allermir  la  couvei-sioii  des 
Golhs,  qiie  d'assembler  un  concile  de  tous 
les  pays  de  son  obéissance  :  il  le  convotpia  i^ 
Tolède  pour  le  6  mai  de  l'an  oS'J.  Il  s'y  trouva 
soixante-quatre  évêques,  et  buit  députés  pour 
autant  d'cvèqucs  absents.  Avant  qu'ils  eus- 
sent commencé  à  tenir  leurs  séances,  le  roi, 
qui  était  présent,  les  exhorta  à  s'y  préparer 
par  les  jeûnes,  les  veilles  et  les  prières  :  ils 
passèrent  trois  jours  entiers  dans  ces  exer- 
cices de  piété  ;  puis,  quand  ils  se  trouvèrent 
assemblés,  le  roi  lit  lire  sa  profession  de  foi 
p.f.  9S9.  sur  la  Trinité,  où  il  déclare  '  qu'il  auatbéma- 
tise  Arius,  sa  doctrine  et  ses  complices  :  qu'il 
reçoit  le  concile  de  Nicée  assemblé  contre 
cette  peste  de  la  vraie  foi;  le  concile  de  Con- 
stantinoplc  contre  Macédonius;  le  premier 
concile  d'Kpbèse  contre  Xestorius;  le  concile 
de  Cbalcédoine  contre  Eutycbès  et  Dioscore, 
et  généralement  tous  les  conciles  orthodoxes 
fjui  s'accordent  avec  ces  quatre  dans  la  pureté 
de  la  foi.  Ensuite  s'adressant  aux  évêques, 
ce  prince  leur  dit  :  «  Recevez  cette  déclara- 
tion de  nous  et  de  notre  nation,  écrite  et  con- 
fîi-mée  de  nos  sousei-iptions,  et  la  gardez  avec 
les  monuments  canoniques,  pour  être  im  té- 
moignage devant  Dieu  et  devant  les  hommes, 
que  les  peuples  sur  lesquels  nous  avons,  au 
nom  de  Dieu,  une  puissance  royale,  ayant 
quitté  lem'  ancienne  erreur,  ont  reçu  dans 
l'Église  le  Saint-Esprit  par  l'onction  du  sacré 
chrême  et  par  l'imposition  des  mains,  en  con- 
fessant que  cet  Esprit  consolatem-  est  un  et 
égal  en  puissance  avec  le  Père  et  le  Fils.  Si 


;'i  l'avenir  quelqu'un  d'entre  eux  veut  se  dé- 
dire de  cette  sainte  et  vraie  foi,  que  Dieu  le 
frappe  d'anatbème  dans  sa  colère,  et  que  sa 
perte  soit  un  sujet  de  joie  aux  fidèles,  et  un 
exemple  aux  infidèles.  »  Le  roi  avait  ajouté 
à  sa  profession  de  foi  les  définitions  des  qua- 
tre conciles  généraux,  et  l'avait  souscrite  avec 
la  reine  Baddo  son  épouse.  Après  qu'on  en 
eut  fait  la  lecture,  le  concile  fit  plusieurs  ac- 
clamations de  joie,  en  rondant  grâces  à  Dieu 
de  cette  heureuse  réunion,  et  en  souhaitant 
au  roi  la  gloire  présente  et  la  couronne  éter- 
nelle. Puis,  par  ordi-e  du  concile,  un  des  évé-  pit.  mi. 
ques  catbohques,  portant  la  parole  aux  évo- 
ques, aux  prêtres  et  aux  plus  considérables 
des  Goths  convertis,  leur  demanda  ce  qu'ils 
condamnaient  dans  l'hérésie  qu'ils  venaient 
de  quitter,  et  ce  qu'ils  croyaient  dans  l'Eglise 
cathobque  à  laquelle  ils  s'étaient  réunis,  afin 
qu'il  parût  par  leur  confession  qu'ils  anathé- 
matisaieut  sincèrement  la  perfidie  arienne 
avec  tous  ses  dogmes,  ses  otlices,  sa  commu- 
nion, ses  livres,  et  qu'il  ne  restât  aucxm  doute 
qu'ils  ne  fussent  les  véritables  membres  du 
corps  de  Jésus-Christ.  Alois  tous  les  évêques 
avec  les  clercs,  et  les  premiers  de  cette  na- 
tion, déclarèrent  d'une  voix  unanime,  qu'en- 
core qu'ils  eussent  déjà  fait  dans  le  temps  de 
leur  conversion  ce  que  l'on  exigeait  deux, 
ils  étaient  prêts  à  le  réitérer,  et  h  confesser 
tout  ce  que  les  évêques  catbohques  leur 
avaient  montré  être  le  meilleur. 

3.  On  prononça  sur  cela  vingt-trois  articles 
avec  anathèmes  conti'e  les  principales  erreurs 
des  ariens,  et  contre  tous  ceux  qui  en  pre- 


Vliifl-lrt.lt 
•  ificir*  kVrO 
■  Dalli^met 
eonire  !*•  er- 
ttur>      lie» 


•  Proinde  sicut  analhematizo  Arium  cum  om- 
nibus dogmatibus  et  coniplicibus  suis,  qui  uni- 
iienitum  Dei  Filium  a  palerna  degenerem  asser- 
terat  esse  substanlia,  nec  a  Paire  genitum,  sed 
ex  iiihilo  dicebal  esse  creatum,  vel  oninia  conci- 
lia malignantium  quœ  adversus  sanclam  syno- 
rium  Kicwnam  cxtitcrunt,  ila  in  honorent,  et  in 
Inudcm  (DeiJ,  fidctn  sanclam  Nicœni  observa  et 
honora  condiii,  quant  contra  cumdein  reclw  ftdri 
l>cstent  Arium  trecentorum  dccent  et  ocla  sancta 
episcoprilis  scripsit  synodus.  Amplcctor  ilaque  et 
tcneo  fidcm  qtiinqtiaginta  episcoporum  Cunslan- 
tinapoli  congrcgatorum,  quœ  Maccdoniuin,  Spiri- 
liis  Sancti  subslantiam  minoranicm  et  a  Patris 
et  Filii  unitale  et  cssmlia  segreganlem,  jugulo 
teritatis  inlcrcmit.  Primœ  quoque  Ejdtesinœ  sy- 
nadi  fidcm,  quœ  adversus  Kestorium  ejusque doc- 
trinam  relata  est,  credo  parilcr  et  honora.  Sinii- 
Hier  et  Chalcedonensis  concilii  fidein,  guam  ple- 
itam  sanclilate  et  crudilione  adversus  Kutychcn 
el  Diascoruiii  protulit,  cum  omni  Erclcsia  catho- 
lica  reverenter  suscipio.  Omnium  quoque  orlha- 


dOTorum  venerabilium  sacerdotum  cottcilia  qii(F 
a  suprascriptis  quatuor  fanctis  synodis  fidei 
puritate  non  dissonant,  pari  veneratione  obser- 
va. Properet  ergo  reverentia  vestra  /idem  hann 
nostram  canonicis  appliTare  monimentis.  et  ab 
episcopis  rel  religiosis,  aut  gentis  nostrœ  primo- 
ribus  solertcr  fidem,  quant  in  ecclesia  calholica 
crediderunt,  horum  ^ubscriplionibus  rabaratam, 
futuris  olim  temporibus  in  tcslimnnium  Dei  ut- 
que  hominum  reservale;  ut  hœ  génies,  quas  in 
Dei  nomine  regia  potestate  prœccllimus,  el  quœ 
delersa  antiquo  errore,  per  unctionem  sacro- 
sancti  chrismatis,  vel  ntantts  impositionem  Para- 
clelum  intra  Dei  Ecclesiam  prœceperunt  Spiri- 
tunt,  quem  unum  et  œqualem  cum  Paire  et  Filio 
cnnfitenles,  ejtisque  dono  in  ,<ihi(  Ecclesiw  sanc- 
tœ  calholicœ  cotlocatœ  sunt.  Si  eorum  aliqui  hanc 
rectam  et  sanclam  confessionent  nostram  minime 
credcre  volucrint.  iram  Dei  cum  anathemate  œ- 
terno  percipiant,  et  de  ititeritu  sua,  fidelibus  gau- 
dium,  in/idelibus  sint  in  exemplum.  Toiu.  V  Con- 
cil.,  p.ig,  999. 


CHAPITRE  LXXXVI.  —  CONCILES  DE  TOLÈDE,   ETC. 


1001  el  iulv. 


[Vl«  SIÈCLE.] 

naicnl  la  ddfcnso;  nomnK'mcnt  contre  conx 
qui  no  croient  pas  que  le  Fils  soitcngondic^  ' 
dn  la  substance  du  Père  sans  commenccmiMit, 
qu'il  lui  soit  égal  el  consuhstantiel  ;  qui  nieut 
qiu^  le  Saint-Espril  .soit  coi'ternel  el  ('gai  au 
Père  et  au  Fils*,  cl  qu'il  procède  du  Père  et 
du  Fils;  qui  ne  distinj^uonl  pas  trois  person- 
nes en  Dieu' dans  l'unité  d'une  nièino  snli- 
stance  ;  qui  mettent  le  Fils  et  le  Sainl-Espril 
au  ranp  des  créatures,  et  les  disent  moindres 
que  le  Père;  qui  avancent  que  loFils  ne  sait 
pas  ce  que  sait  Dieu  le  Père;  qui  enseignent 
qu'il  est  visible  et  passible  selon  la  divinité; 
qui  reconnaissent  une  autre  foi  et  une  autre 
communion  catholique  que  celle  qui  fait  pro- 
fession de  suivre  les  décrets  des  conciles  de 
Nicée,  de  Conslantiniiple,d'Kphèsc  et  de  Chal- 
cédoinc  ;  qui  ne  rendent  pas  un  liomieui'  égal 
au  Père,  au  Fils  et  au  Saint-Esprit,  et  refusent 
de  réciter  la  glorification  qni  leur  est  com- 
mune ;  qui  regardent  comme  bonne  la  rébap- 
tisation;  qui  ne  rejettent  pas  le  libelle  com- 
posé la  douzième  année  *  du  règne  de  Lévi- 
gilde,  c'est-à-dire  le  décret  du  conciliabule  de 
Tolède  ;  qui  ne  condamnent  ^  pas  do  tout  leur 
cœur  le  concile  dellimini.  Les  évêqiies  goths 
convertis  protestèrent  rpi'ils  abandonnaient 
de  tout  leur  cœur  l'hérésie  arienne  ;  qu'ils  ne 
doutaient  pas  qu'en  la  suivant,  eux  et  leurs 
prédécesseurs  n'eussent  erré;  qu'ils  venaient 
d'apprendre  dans  l'Église  catliolique  la  foi 
évangélique  et  apostolique  ;  qu'ainsi  ils  pro- 
mettaient de  tenir  et  de  prêcher  celle  dont 
leur  roi  et  leur  seigneur  avait  fait  profession 
en  plein  concile,  avec  anatlième  à  tous  ceux 
à  qui  cette  doctrine  ne  plairait  point,  puisque 
c'est  la  vraie  foi  que  tient  l'Eglise  de  Dieu  ré- 
pandue par  tout  le  monde,  et  la  seule  par  con- 
séquent qui  soit  catholique.  Ensuite  ils  sous- 


001 

crivirentaunomlu'e  de  huit,  tant  aux  vingt- 
trois  articles  qu'aux  formules  de  foi  de  Nicée 
et  de  Constantinople ,  et  h  la  définition  de 
Clialc('doinn;  après  eux  les  prêtres  et  les  dia- 
cres ;  puis  les  grands  seigneurs  et  les  anciens 
des  Goths. 

4.  Cela  fait,  le  roi  Récarède  proposa  aux 
évêques  de  faire  des  statuts  pour  le  règle- 
ment de  la  discipline  ecclésiastique,  et  pour 
réparer  les  brèches  que  l'hérésie  y  avait  fai- 
tes. Il  demanda  en  particulier  que  dans  fou- 
les les  églises  d'Espagne  el  de  Galice  l'on  ré- 
cital h  voix  claire  et  intelligible  le  Symbole 
dans  le  sacrifice  de  la  messe  avant  la  com- 
munion du  corps  et  du  sang  de  Jésus-Christ, 
suivant  la  coutume  des  Orientaux;  afin  que 
les  peuples  sussent  d'abord  ce  qu'ils  devaient 
croire,  et  qu'ayant  purifié  leurs  cœurs  par 
la  foi ,  ils  s'approchassent  pour  recevoir  ces 
divins  mystères.  On  fit  donc  vingt-trois  ca- 
nons, dont  voici  la  teneur  :  «  — Tous  les  dé- 
crets des  anciens  conciles  et  les  lettres  syno- 
diques  des  Papes  demeureront  en  vigueur  ; 
aucun  ne  sera  promu  aux  degrés  du  minis- 
tère ecclésiastique  qu'il  n'en  soit  digne,  et  on 
ne  fera  rien  de  ce  que  les  saints  Pères  ont 
défendu.  —  Pom-  aô'ermir  la  foi  des  peuples, 
on  leur"  fera  chanter  à  la  messe  le  symbole 
du  concile  de  Constantinople  avant  l'Oraison 
dominicale,  afin  qu'après  avoir  rendu  témoi- 
gnage à  la  vraie  foi,  ils  soient  plus  purs  pour 
participer  au  corps  et  au  sang  de  Jésus-Christ. 
—  11  ne  sera  point  permis  aux  évèqucs  d'a- 
fiéner  les  biens  de  rÉgHse  ;  mais  ce  qu'ils 
auront  donné  aux  monastères  ou  aux  églises 
de  lem-  diocèse,  sans  préjudice  notable  pom* 
leui'  église  propre,  demeurera  ferme  el  stable. 
Ils  poiuTont  encore  pom-voir  aux  nécessités 
des  étrangers  et  des  pauvres.  —  Si  un  évê- 


Canooii  du 
concilt]  i\it  l'o* 
U  tl  0  I  1»  A  g . 
1003, 


•  Quicumque  Filium  Dei  Domimim  nostnim  Je- 
sum  Chrislum  negaverit  a  paterna  substantia 
sine  inilio  geniiuin,  et  œjualem  Patri,  anathema 
sit.  Concil  Toletan.  III,  Can.  2.  Tom.  V  Concil., 
pag.  1003. 

'  Quicumque  Spiritum  SanHum  non  crédit,  aut 
non  crediilerit  a  Paire  et  Filio  procedere,  eumque 
non  dixerit  coœternxim  esse  Patri  et  Filio,  et 
coœqwilem,  anathema  sit.  Can.  3,  pag.  1004. 

'  Quicumque  in  Pâtre,  et  Filio,  et  Spiritu  Sanc- 
to,  et  ptrsonas  non  distinguit,  et  unius  Dei  uni- 
tatis  substantiam  7ion  cognoscit,  anathema  sit. 
Can.  4,  ibid. 

'  Quicumque  libcllum  detestabilcm  duodecimo 
anno  Leovegeldi  régis  a  nobis  editum,in  quocon- 
tinclur  Romanorum  ad  hœrcsim  arianam  tra- 
duclio,  et  in  quo  gloria  Patri,  per  Filium,  in  Spi- 
ritu Sancto  maie  a  nobis  iastUuta  continetur, 


hune  libellum  si  qitis  pro  vero  habuerit,  anathe- 
ma sit  in  wtcrnum.  Can.  IC,  pag.  1005. 

^  Quicumque  Àrimincnse  concilium  non  ex  loto 
corde  respiierit  et  damnaverit,  anathema  sit.  Cau. 
17,  ibid. 

^  Pro  reverentia  sanctissimœ  fidei,  et  propter 
corroboraiidas  hominum  invalidas  mentes,  con- 
sultu  piissi)ni  et  gloriosissimi  domini  noslri  Rec- 
caredi  régis,  sancla  constituit  synodus,  utper  om- 
nes  ecclesias  llispaniœ,  rel  Gallœciœ,  secundum 
formam  oricnlalium  ccclcsiarum  concilii  Con- 
stantinopolitani,  hoc  est,  centum  quinquuginla 
episcoporum  symbolum  fidei  recitetur  ;  ut  prins- 
quam  Dominica  dicalur  oratio,  voce  clara  a  po- 
pulo decanlctur ;  qun  et  fuies  rera  manifeslum 
Icslimonium  habcat,  et  ad  Cliristi  rori>iis  et  san- 
ffuincm  pralibandum  pectora  populorum  fide  pu- 
riflcata  accédant.  Concil.  Toletl.  Can.  2,  pag.  10U9. 


902 


HISTOraE  GENERALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


qiic  '  veut  môme  destiner  une  (église  de  son 
diocèse  pour  y  ctuLlir  un  monastère ,  il  le 
pouiTa  du  consentement  de  son  concile,  fal- 
lùt-il  donner  à  ce  monastère  quelque  partie 
des  Liens  de  l'Église  poui-  sa  subsistance.  — 
Les  cvcques,  les  prêtres  et  les  diacres  qui 
s'étaient  convertis  de  l'arianisme,  vivaient 
maritalement  avec  lem's  femmes  ;  le  concile 
veut  qu'à  l'avenir  ils  vivent  dans  la  conti- 
nence, et  qu'à  cet  eflet  ils  se  séparent  de 
chambre  et  même  de  maison,  s'il  se  peut. 
Quant  auxévêqucs  qui  ont  toujomsété  catho- 
liques, il  leur  est  défendu  sous  les  peines  cano- 
niques d'avoir  aucune  communication  avec 
des  femmes  d'une  conduite  suspecte.  —  Les 
esclaves  afiranchls  par  les  évoques  jouiront 
de  la  liberté  sans  être  privés  de  la  protection 
particulière  de  l'Eglise,  eux  et  leurs  enfants; 
et  il  en  sera  de  même  de  ceux  qui,  quoique 
affranchis  par  d'autres  personnes,  auront  été 
recommandes  aux  églises.  —  Poiu-  ôter  lieu 
aux  discours  inutiles  et  fabuleux,  on  fera  tou- 
jours lecture  de  l'Écriture  sainte  à  la  table  de 
l'évéque ,  afin  d'édifler  ceux  qui  y  mangent. 
—  Les  clercs  tirés  des  familles  fiscales  de- 
meureront attachés  à  l'église  où  ils  sont  im- 
matriculés, en  payant  leur  capitation,  sans 
que  personne  puisse  les  revendiquer  sous 
prétexte  de  donation  du  prince.  —  Les  égli- 
ses qui  d'ariennes  sont  devenues  catholiques, 
appartiendi'ont  aux  évêques  diocésains.  — 
On  ne  contraindi-a  ni  les  veuves  ni  les  filles 
à  se  marier;  et  quiconque  empêchera  une 
veuve  ou  une  fille  de  garder  le  vœu  de  chas- 
teté ,  sera  privé  de  la  sainte  communion  et 
de  l'entrée  de  l'église.  —  En  quelques  églises' 
d'Espagne  les  pécheurs  faisaient  pénitence 
d'une  manière  honteuse,  et  non  selon  les  ca- 
nons, demandant  au  prêtre  de  les  réconcilier 


toutes  les  fois  qu'il  leur  plaisait  de  pécher. 
Ce  concile,  pour  remédier  à  cette  présomption 
qu'il  appelle  exécrable,  ordonne  que  celui  qtii 
se  repent  de  son  péché  soit  premièrement 
suspendu  de  la  communion ,  et  vienne  sou- 
vent recevoir  l'imposition  des  mains  avec  les 
auti'es  pénitents;  et  qu'après  avoii-  accompli 
le  temps  de  la  satisfaction,  il  soit  rétabli  à  la 
communion,  suivantle  jugement  de  l'cvèque. 
Il  ajoute  que  ceux  qui  retombent  dans  leurs 
péchés  pendant  le  temps  de  la  pénitence  ou 
après  la  réconciliation,  seront  condamnés 
selon  la  sévérité  des  anciens  canons,  c'est-à- 
dire  qu'ils  ne  seront  plus  reçus  à  la  pénitence 
publique,  qui  ne  s'accordait  qu'une  fois.  —  cm.  u. 
L'évéque  '  ou  le  prêtre ,  avant  d'accorder  la  pé- 
nitence à  celui  qui  la  demandait,  soit  en  santé, 
soit  en  maladie ,  commençait  par  lui  couper 
les  cheveux,  si  c'était  un  homme,  ou  à  lui 
faire  changer  d'habits,  si  c'était  mie  femme. 
Cette  précaution  paraissait  nécessaire  pour 
empêcher  les  rechutes,  n 

o.  La  licence  était  pan'cnuc  à  un  tel  de-  ,3. 
gré ,  que  les  clercs ,  sans  s'être  auparavant 
adressés  à  leur  évêque,  traduisaient  leurs 
confi'èrcs  devant  des  tribunaux  séculiers  :  le 
concile  défend  cet  abus,  sous  peine  pour  l'a- 
gresseur de  perdre  son  procès  et  d'être  privé 
de  la  communion.  —  Défense  aux  juifs  d'à-  n. 
voir  des  femmes  ou  des  conculiines  chrétien- 
nes, ou  des  esclaves  chrétiens  pom-  les  ser- 
vir, et  d'exercer  des  charges  publiques;  les 
enfants  qui  pourraient  êti-e  nés  de  sembla- 
bles mariages  seront  baptisés  ;  et  s'il  est  ar- 
rivé aux  juifs  de  cu'concLre  lem-s  esclaves 
chrétiens  ou  de  les  initier  à  lem-s  rits,  on  les 
leur  ûtera  sans  leur  en  payer  le  prix ,  et  on 
les  rétablira  dans  la  profession  de  la  religion 
chrétienne.  —  Si  un  serf  ûscaUn  a  fondé  et       ib. 


'  Si  episeopus  unam  de  parochianis  ecclesiis 
suis  monasterium  dicare  voluerit,  ut  in  eamona- 
chorum  regnlariter  congrcgalio  rival,  hoc  de 
conscnsu  concilii  sut  liabeat  liceidiam  facieiidi; 
qui  eliamde  rébus  ecclesiœ  prn  eoruin  subsluittia 
aliquid,  quod  delrimeittum  ccclesiw  non  exhibet, 
eidem  loco  donaterit,  sit  stabile.  Rei  enim  bonœ 
slaluendœ  sanctum  concilium  dat  assensum.  Cau. 
i,  pag.  1010. 

'  Quoniam  comperimus  pcr  quasdam  llispania- 
rum  ecclesias,  non  secundum  canoncm,  sed  fœ- 
dissime  pro  suis  peccalis  howines  agcre  pamiten- 
tiani,  ut  quolicnscunuiue  peccare  libuerit,  to- 
tiens  0  prvabylero  se  rcconciliari  exiioflulcnt  ;  et 
idcu  pro  coercciida  tant  exerrabili  prœsumplione, 
id  a  sanclo  concilio  jubetur,  ul  secundum  for- 
mam  canouum  anli(juorum  dcntur  pnnitcnlicc, 
hoc  est,  ul  prius  eum,  qucm  suipœnitcl  facli,  a 


communione  suspensum,  facial  interreliquospœ- 
nilentes  ad  nianus  imposilionem  crebro  rccurrcre; 
explelo  autem  satisfaclionis  tcmpore,  sicuU  sacer- 
dotalis  contcmplatio  probaxerit,  cum  commu- 
nioni  restituât.  Ui  rero  qui  ad  priora  vilia,  vel 
infra  panilcntiie  tempus,  vel  posl  reconciliatio- 
«eiii  relabunlur,  secundum  priorum  canonum  se- 
vcrilatcn'  damncntur.  Oui.  11,  pn-^.  1011. 

'  Quicuiiique  ab  episcopo  vel  a  presbytero,  sa- 
nus  vel  inlirnuis  panilcnliam  postulai,  id  ante 
omnia  episcopus  obscrvel,vcl  presbylcr,  ut  si  vir 
est,  sive  sanus,  sive  infirmus,prins  eum  tondeat, 
et  sic  pœnitrntiam  ei  tradat  ;  si  vero  mulier  fue- 
ril,  non  accipiat  pœnilcntiam,  nisi  prius  mutave- 
ril  habitum  :  sœpius  enim  luicis  trihuendo  dcsi- 
diose  pa'nileniiam,  ad  lamcnlanda  rursus  faci- 
nora  posl  accrplam  pœnilcnliam  relabunlur.  Ciiu, 
12,  col.  10  U. 


CEIAPn'RE  LXXXVI.  —  CONCILES  DE  TOLI>nE,  ETC. 


[VI*  SIÈCLE.] 

doté  une  rfglisc  do  sa  paim-cté,  l'dvôqiio  en 
procurera  la  coiitlrmntion  de  la  part  dti 
prince.  11  aura  aussi  recours  h  la  puissance 
séculière  pour  abolir  piir  toute  l'Espatrue  et 
la  Galice  tous  les  restes  d'idolâtrie.  — 11  est  dé- 
fendu aux  pères  et  aux  mères  de  faire  mourir 
les  enfants  qiii  sont  le  fruit  de  leur  débau- 
che, et  dont  ils  se  trouvent  surchargés.  Ce 
crime ,  fréquent  dans  quelques  parties  de 
l'Espagne ,  était  un  reste  des  mœurs  des 
païens.  —  Sans  préjudice  des  anciens  canons 
qui  ordonnent  deux  conciles  chaque  année, 
celui  de  Tolède  veut,  qu'attendu  la  longueur 
du  chemin  et  la  pau\Teté  des  églises  d'Espa- 
gne, les  évoques  s'assemblent  seulement  une 
fois  l'an,  au  lieu  choisi  par  le  métropolitain  ; 
et  que  les  juges  des  lieux  et  les  intendants 
des  domaines  du  roi  se  trouvent  à  ce  concile 
le  1"  novembre,  pour  apprendre  la  manière 
dont  ils  doivent  gouverner  les  peuples,  de  la 
bouche  des  évèques  qui  leur  sont  donnés 
pour  inspecteurs.  —  Plusieurs  demandaient 
que  l'on  consacrât  les  églises  c^u'ils  avaient 
fait  bâtir ,  ;\  la  charge  de  retenir  l'adminis- 
tration du  bien  dont  ils  les  avaient  dotées  : 
cette  disposition  étant  contraire  aux  anciens 
canons,  il  est  ordonné  que  dans  la  suite  cette  ad- 
ministration appartiendra  à  l'évèque  ;  — mais 
en  même  temps  on  lui  défend  de  charger  les 
prêtres  et  les  diacres  de  corvées  ou  d'impo- 
sitions nouvelles  ,  au-delà  des  anciens  droits 
des  évèques  sm'  les  paroisses.  — Il  fut  fésolu 
dans  le  concile  que  l'on  supplierait  le  roi 
d'empêcher  que  les  officiers  de  son  domaine 
ne  chargeassent  de  corvées  les  serfs  des  égli- 
ses, des  évèques  et  les  autres  clercs,  afin 
qu'ils  puissent  plus  aisément  s'acquitter  de 
lem's  devoirs  envers  leurs  maîtres.  —  Il  fut 
défendu  de  chanter  des  cantiques  '  funèbres 
ou  de  se  frapper  la  poitrine  aux  enterre- 
ments des  chrétiens,  parce  que  ces  marques 
de  deuil  sentaient  trop  le  paganisme,  et  qu'il 
suffisait  de  chanter  des  psaumes  pour  mar- 
quer l'espérance  de  la  résm-rcction.  —  On 
défendit  encore  les  danses  et  les  chansons 
déshonnètes  dans  les  solennités  des  saints, 


903 


séculiers  furent  chargés  de  l'a- 


Diifour*  (fa 
F.  Lrandie,  ['. 
I0J8, 


CCS  jours  devant  être  sanctifiés  par  l'atten- 
tion aux  offices  divins.  Comme  l'abus  était 
comnuui  dans  toute  l'Espagne,  les  évèques 
et  les  juges 
bolir  chacun  dans  leur  juridiction 

G.  Le  roi  Récarède  donna ,  la  quatrième  conimn. 
année  de  son  reîjne,  une  ordonnance  portant  nonipnri.roi 
coulinnafion  de  tout  ce  qui  avait  ete  fait  et  'o''- 
arrêté  dans  ce  concile,  que  l'on  compte  pour 
le  troisième  de  Tolède  ,  sous  peine  pour  les 
clercs  d'encourir  l'excommunication  do  la 
part  de  tout  le  concile ,  et  pour  les  laïque» 
de  confiscation  de  leurs  biens,  ou  mênn- 
d'exil,  suivant  la  qualité  des  personnes.  II 
sou-icrivit  le  premier,  et  soixante-douze  évo- 
ques après  lui ,  y  compris  les  députés  des 
absents.  Cinq  étaient  métropolitains,  savoir 
Euphémius  de  Tolède ,  saint  Léandre  de  Sé- 
ville,  Migctius  dcNarbonne,  Pantard  de  Dra- 
gue ,  Massona  d'Emérite  ,  qui  souscrivit  le 
premier. 

7.  Saint  Léandre  fit  un  discours ,  après  la 
tenue  du  concile,  sur  l'heureux  changement 
de  l'Ëghse  d'Espagne,  qui  se  trouvait  en  li- 
berté et  en  joie,  après  avoir  été  comme  cap- 
tive et  dans  les  gémissements  sous  les  per- 
sécutions des  rois  ariens.  Il  dit  que  l'oppres- 
sion où  elle  avait  été  en  ces  temps-là  avait 
produit  cet  eflet ,  que  ceux  qui ,  par  leur  in- 
fidélité, lui  étaient  à  charge,  faisaient  sa  cou- 
ronne par  leur  conversion.  Sur  quoi  il  lui 
fait  répéter  ces  paroles  du  psaume  IV^, 
comme  si  elles  avaient  été  dites  d'elle  :  Lors- 
que j'étais  resserré  dans  l'affliction,  mns  m'a- 
vez, mon  Dieu,  dilaté  le  cœur.  Il  fait  remar- 
quer' à  ses  aiiditeurs  que  les  hérésies  ne 
dominent  ordinairement  que  sur  une  nation, 
ou  qu'elles  n'occupent  que  quelque  coin  du 
monde  ;  au  lieu  que  l'Eglise  catholique  est 
répandue  par  tout  l'univers,  et  qu'elle  est 
composée  de  toutes  les  nations  ;  que  les  hé- 
résies se  cachent  dans  les  cavernes ,  tandis 
que  l'Église  catholique  se  montre  à  tout  le 
monde,  les  membres  dont  elle  est  composée 
sm-passant  toutes  les  sectes  des  hérétiques. 
Il  ajoute  que,  s'il  reste  encore  quelque  nation 


'  Religiosonim  omnium  corpora  qui  divina  to- 
catione  ab  liac  rita  recedunt,  cum  psalmis  tan- 
tummodo,  psatlenlium  vocibus  debere  ad  sepul- 
cra  deferri.  Kam  funèbre  carmenquod  vulgo  de- 
funclis  cantari  solet,  vel pectoribiis  sp.proximos 
avt  familias  cœdere,  omiiino  prohibemns.  Suffi- 
ciat  a\ttem  quod  in  spe  resurreclionis,  Chriatia- 
nonim  corporibus  famulatus  divinorum  impcndi- 
tur  canticorum.  Cau.  22,  pag.  1014. 


•  Hœreses,  inquam,  aut  in  aliqnem  angulum 
miindi,  aut  in  unnm  gentem  inveniuntur  versari. 
Ecclesiavcro  catholica,  siait  per  totum  mundum 
tendilur,  ita  et  omnium  gentium  societate  consli- 
tuilur.  Recte  ergo  hœrcses  in  cavernis,  quibus  la- 
tent, congreganl  ex  parle  divilias;  Ecclcsia  au- 
lem  cullioUca  in  spécula  totius  mundilocuplclata 
supcrgredilur  universis.    Tom.   V   Concil.,  pag. 

11/18. 


mSTOTRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIOUES. 


Conrlle  de 
NtrlxiDue  eQ 
l>H3.    Toni     V 

10^7. 


904 

barbare  qxii  n'ait  point  t^fé  éclairée  de  la  lu- 
mière de  la  foi ,  il  est  hors  de  doute  qu'elle 
le  sera  un  jour,  la  promesse  de  Jdsus-Clirist 
à  cet  dgard  ne  pouvant  manquer  d'avoir  son 
efTet  ;  l'ordre  naturel  '  demandant  d'aillems 
que  ceux  qui  tirent  leur  origine  d'un  même 
homme,  s'aiment  mutuellement  et  convien- 
nent dans  la  profession  d'une  même  vérité. 
Rodcric  de  Tolède  fait  mention  de  ce  dis- 
coms  au  livre  XXI  de  son  Histoire,  chapitre 

XV'. 

8.  Mipétius,  évêquc  de  Narbonne,  et  sept 
autres  cvèques  de  la  partie  des  Gaules  qm 
obéissait  aux  Goths,  et  qui  avaient  tous  as- 
sisté par  eux-mêmes  oupar  Icm-s  députés  au 
concile  de  Tolède,  s'assemblèrent  à  Narbonne 
le  1'^'  novembre  de  la  même  année  389 ,  qui 
était  la  quatrième  de  Récarède,  la  douzième 
de  Pelage  H,  et  la  sixième  de  Clotaire  II.  On 
y  Gt  quinze  canons.  —  Le   premier  défend 
aux  clercs  de  porter  des  habits  de  pourpre, 
cette  sorte  d'étofl'e  ne  convenant  qu'aux  laï- 
ques qui  sont  dans  les  dignités.  —  Le  second 
ordonne  de  chanter  le  Gloria  Patri,  etc.,  à  la 
Qn  de  chaque  psaume  et  à  chaque  division 
des  grands  psaumes.  —  Le  troisième  fait  re- 
marquer que  les  anciens  canons  ne  permet- 
taient pas  aux  prèti-es,  ni  aux  diacres,  ni  aux 
sous-diacres  d'avoir  lem's  maisons  sm-  les 
places  publiques ,  et  qu'il  n'était  pas  moins 
inconvenant  pom'  eux  de  s'y  arrêter ,  pour 
s'y  entretenir  de  choses  fabuleuses  et  inuti- 
les. —  On  voit  par  le  quatrième  combien  de 
nations  dillerentes  habitaient  dans  la  Gaule 
Narbonnaise.  Il  porte  que  tout  homme  hbre 
ou  esclave,  Goth,  Romain,  c'est-à-dire  Gau- 
lois, syrien.  Grec  ou  Juif,  s'abstiendra  de  tout 
travail  le  dimanche,  sous  peine  pour  l'homme 
libic  de  payer  six  sous  d'or  au  comle  de  la 
ville,  et  pour  l'esclave  de  recevoir  cent  coups 
de  fouet.  —  Le  cinquième,  le  sixième  et  le 
septième    sont   pour  réprimer  la  dc'^sobéis- 
sance ,  le  peu  de  soumission  et  les  cabales 
des  clercs.  Si  quelcpi'un  d'entre  eux  traite 
mal  son  ancien  ou  celui  qui  lui  est  supérieur 
en  dignité,  il  fera  un  an  de  pénitence,  en  la 
manière  que  l'évêque  l'aura  ordonné.  —  Le 


huitième  en  ordonne  deux  au  clerc  qui  aura 
pris  quelque  chose  des  biens  ou  de  la  mai- 
son de  l'église ,  avec  défense  de  le  rétablir 
dans  son  office  jusqu'à  ce  qu'il  ait  restitué  et 
fait  pénitence  de  sa  faute.  —  Dans  le  neu- 
vième, il  est  défendu  aux  Juifs  d'enterrer 
leurs  morts  au  chant  des  psaumes ,  sous 
peine  de  payer  au  comte  de  la  ville  six  onces 
d'or.  Ces  amendes  pécuni;'.ires  supposent 
qu'il  y  avait  au  concile  des  juges  sécuUci'S, 
ainsi  qu'il  avait  été  ordonné  par  le  concile 
de  Tolède.  —  Selon  le  dixième  canon ,  les 
clercs  doivent  desservir  l'église  à  laquelle 
l'évêque  les  a  envoyés,  sous  peine  d'être  pri- 
vés des  rétributions  et  de  la  communion 
pendant  un  an.  —  II  est  défendu  par  le  on- 
zième d'ordonner  un  prêtre  ou  un  diacre 
qui  ne  sache  pas  lire,  son  ministère  ne  pou- 
vant sans  cela  être  d'aucime  utilité  à  l'Eglise. 

—  11  est  dit  dans  le  treizième ,  que  les  sous- 
diacres  ,  les  portiers  et  les  autres  clercs  ren- 
dront fidèlement  leur  ser\-ice  à  l'église ,  et 
qu'ils  tireront  la  portière  à  leurs  anciens, 
c'est-à-dire  les  rideaux  qui  étaient  aux  por- 
tes des  églises.  La  peine  pour  les  sous-dia- 
cres qui  manqueront  à  ce  devoir,  est  la  pri- 
vation de  leurs  gages;  les  autres  seront 
fiappés  de  verges.  —  Le  douzième  fait  dé- 
fense au  prêtre  et  au  diacre  '  de  sortir  du 
sancfuaiic  pendant  qu'on  célèbre  la  messe; 
au  diacre,  au  sous-diacre  et  au  lecteur,  de  se 
dépouiller  de  l'aube  avant  que  la  messe  soit 
achevée.  Tous  les  clercs  étaient  donc  en 
aube  pendant  la  célébration  des  mystères. 

—  11  est  défendu  par  le  quatorzième  à  qui 
que  ce  soit  de  consulter  les  devins  ou  sor- 
ciers, avec  oi'dre  de  fustiger  et  de  vendre 
ceux  qui  se  disent  tels,  et  d'en  donner  le 
prix  aux  pauvres.  —  Le  concile,  ayant  appris 
que  quelques  catholiques  fêtaient  le  jeudi  en 
l'honneur  de  Jupiter,  comme  si  ce  jour  lui 
était  consacré,  condamna  avec  exécration 
cet  abus  par  son  quinzième  canon,  où  il  or- 
donna que  si  quelqu'un  fàlait  à  l'avenir  ce 
joiu-  sans  qu'il  y  eût  quelque  fête  ordonnée 
de  l'l>glise,  il  serait  mis  en  pénitence  pen- 
dant un  an ,  et  condamné  à  faire  des  aumô- 


&I1.9. 


•  Ordo  ergo  naturalis  crpnscit,  ut  qui  ex  uno 
htiminc  traliuiU  originem,  mnlnam  teiieanl  cha- 
rilatcm;  nec  dissenliant  a  fidci  verilaie,  qui  non 
dixjringunlur  luilvrali  propagitte.  Ibid.,  1019. 

'  Ihec  maxime  pro  Dci  limnre,  et  mndn  disci- 
pliniv  canonicœ,  clegimns  caslodienda  vel  fc/l- 
nendii,  ul  diimmissa  celehnilur,  nuUitspreshyler, 
dUliiiaconm absque  aliqua infirmilale,  dum  missa 


pcrficitur,  egredi  de  atlnrio  audeat.  A'ec  diacomts, 
aul  subdineonus  cette,  vel  lector antequam  miasa 
consummclur,  alba  se  prirsumat  exuere.  Quod  si 
quis(iuam  implereril  constiluliim  ;  presliyleri  in- 
crepeiilur  ul  redcdnt,  diacotins  et  execrntidos  et 
slipendio  privatidns,  reliquo!^ dintrictiime  strictis- 
sima  enndemiiKndos.  Cou'il.  Narb.  Caii,  12,  lom. 
V  ConciL,  ["iK-  lU^fi. 


Conrltci  i'« 
Siunrheeltla 


Troub'flS 
excllésft  S3<n< 
t«  -  CrOiX  do 
Poitiers  eu 
(90. 


fvi*  SIÈCLE.]    CHAPITTIE  LXXXVI. 

nos  s'il  dtait  do  condition  libre,  ou  frappé  de 
vcrpps  s'il  iMait  do  coiulilinn  sprvilo. 

U.  On  ïuot  pncoio  en  o89  deux  autres  con- 
ciles, l'nn  il  Sauriciac,  l'autre  à  Rome.  Saint 
Grégoire  '  de  Tours  parle  du  premier  :  ce 
qu'il  en  dit  n'est  nullement  inti-ressant.  Il 
est  fait  mention  du  second  dans  la  lettre  '  do 
Pelage  II  aux  évêques  de  Germanie  et  des 
Gaules;  mais  nous  avons  déj;\ remarqué  que 
celte  lettre  est  supposée  et  du  nombre  do 
celles  qu'on  attribue  à  Isidore  Mercator. 

ARTICLE  XXM. 

CONCILES  DE  POITIERS  p90],  ET  DE  METZ  [590], 
AD  SUJET  DES  TROUBLES  EXCITÉS  A  SAINTE - 
CROIX  DE   rOITIERS. 

Sainte  Radegonde,  fondatrice  du  monas- 
tère de  Sainte-Croix  à  Poitiers,  y  avait,  quel- 
que temps  avant  sa  mort,  établi  l'abbesse 
Agnès,  du  consentement  des  évoques  '.  Agnès 
étant  morte,  Leubovère  lui  succéda.  Quoi- 
que Mérouée,  évoque  de  Poitiers,  eût  pris 
ce  monastère  sous  sa  protection,  il  ne  laissa 
pas  de  s'y  former,  contre  la  nouvelle  ab- 
besse,  une  faction  violente.  Chrodiclde,  fdle 
du  roi  Cliérébort,  entreprit  do  faire  chasser 
Leubovère  et  de  se  faire  élire  abbesse  à  sa 
place.  Elle  attira  h  son  parti  Basine,  fille  du 
roi  Chilpéric  ;  et  ayant  pris  avec  elle  plus  de 
quarante  religieuses  à  qui  elle  avait  fait  ju- 
rer d'accuser  Leubovère  de  plusieurs  crimes, 
elle  sortit  du  monastère  en  disant  :  «  Je  vais 
trouver  les  rois  mes  parents,  pour  leur  faire 
connaîti'e  la  honte  que  noussoulTrons.  On  ne 
nous  traite  pas  en  filles  de  rois,  mais  en  fil- 
les de  malhem-euses  esclaves.  »  En  vain 
Mérouée  s'opposa  à  son  dessein  ;  elle  n'é- 
couta pas  plus  ses  remontrances  que  celles 
de  saint  Grégoire  de  Tours.  Tout  ce  que  cet 
évêque  put  gagner  sur  son  esprit,  fut  que  les 
autres  religieuses  qu'elle  avait  emmenées, 
passeraient  l'hiver  à  Tours,  et  qu'elle  irait 
seide  trouver  le  roi  Gontran.  Ce  prince  or- 
donna une  assemblée  d"évèques  pour  pren- 
dre connaissance  du  diflerend.  Chrodielde 
revint  à  Tours,  et  voyant  qu'ils  ne  venaient 
point,  elle  retourna  à  Poitiers,  où  ayant  as- 
semblé une  ti'oupe  de  voleurs  et  de  meur- 
triers, de  débauchés  et  d'autres  scélérats, 
elle  s'empara  de  force  de  l'église  de  Saint- 


CONCILES  DE  POITIERS  ET  DE  METZ.  905 

Hilalre,  puis  du  monastère  de  Salntc-Croix, 
fit  prendre  l'abbesse,  et  la  mit  en  prison.  Il 
se  commit  en  cette  occasion  des  meurtres  et 
divers  autres  crimes. 

2.  Les  rois  Cliiidebert  et  Gontran,  infor- 
més de  ce  scandale,  ordoimèrenl  que,  pour 
le  terminer  suivant  les  canons,  les  évoques 
s'assembleraient  à  Poitiers  *.  Cliiidebert  y 
envoya  saint  Grégoire  de  Tours  avec  Ebre- 
gisilc  de  Cologne,  et  Mérouée  do  Poitiers. 
Gontran  manda  à  Gondégésile  de  Bordeaux 
de  s'y  rendre  avec  ses  suffragants.  Saint 
Grégoire  de  Tours  ayant  déclaré  que  les 
évoques  ne  s'assembleraient  pas  que  la  sédi- 
tion ne  fût  apaisée  par  l'autorité  séculière, 
Mavon,  comte  de  Poitiers,  fut  chargé  de  la 
commission.  Il  fit  attaquer  les  séditieux,  les 
tira  du  monastère  de  Sainte-Croix,  leur  fit 
soulfrir  divers  supplices  et  rendit  la  tranquil- 
lité. Alors  les  évêques  s'étant  assis  sur  le 
tribunal  de  l'église,  Chrodielde  avança  plu- 
sieurs chefs  d'accusation  contre  l'abbesse 
Leubovère.  Elle  répondit  pertinemment  sur 
tous;  et  ses  accusatrices  ayant  avoué  qu'elles 
ne  l'accusaient  d'aucun  crime  capital,  les  évê- 
ques leur  demandèrent  raison  de  leur  sortie  et 
des  violences  commises  tant  contre  Condégé- 
sile  et  les  autres  évoques  qui  avaient  voulu  les 
juger  l'année  précédente,que  contre  l'abbesse 
et  le  monastère.  Comme  elles  ne  purent  rien 
répliquer  de  solide,  les  évoques  exhortèrent 
Clû-odielde  et  Basine  à  demander  pardon  à. 
l'abbesse  et  k  réparer  le  dommage.  Elles  le 
refusèrent,  menaçant  hautement  de  tuer 
Leubovère.  Sur  cela  les  évoques,  ayant  con- 
sulté les  canons,  les  déclarèrent  excommu- 
niées, et  rétablirent  l'abbesse.  La  sentence 
est  adressée  aux  deux  rois  Childebert  et  Gon- 
tran. Les  séditieuses,  se  voyant  condamnées, 
allèrent  trouver  Childebert,  à  qui  elles  nom- 
mèrent des  personnes  qu'elles  accusèrent 
d'avoir  un  mauvais  conunerce  avec  l'abbesse, 
et  de  porter  tous  les  jours  de  sa  part  des 
messages  à  la  reine  Frédégonde,  son  erme- 
mie.  Le  roi  examina  l'affaire;  inais  ne  trou- 
vant aucune  charge  contre  les  accusés,  il  les 
renvoya. 

3.  Cependant  le  roi  Childebert,  ayant  eu 
avis  que  Gilles  ou  ^gidius,  évoque  de  Reims, 
avait  conspiré  contre  sa  vie,  le  fit  conduire 
à  Metz  et  mettre  en  prison  ^  Il  convoqua, 


Concile  do 
rolllors       ca 


CoDcllo  do 


>  Greg.  Turon.,  lib.  IX,  rap.  xsxvii. 
'  Pelag.,  Epist.  ad  Episcop.  German.,  tom.  V 
Concil,  pag.  953. 


»  Grcg.  Turon.,  lib.  IX  et  X  Hist.  Franc. 
*  Greg.,  ibid.,  et  tom.  V  Concil.,  pag.  loS3. 
3  Greg.,  lib.  X,  c.  xix,  et  t.  V  Conc,  col.  1596. 


906 


HISTOIBE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


pour  le  juger ,  tous  les  évéques  de  son 
royauree.  Ils  s'assemblèrent  d'abord  à  Ver- 
dun vers  le  milieu  d'octobre  de  l'an  590.  De 
là  ils  passèrent  à^^feîz.  Ennodius,  chargé  de 
la  poursuite  de  l'allaire  de  Gilles,  l'interro- 
gea, et  produisit  des  lettres  à  Chilpéric,  en- 
nemi de  Childebcrt,  avec  les  réponses  de 
Chilpéric.  Il  produisit  encore  un  traité  de 
Childebertet  de  Cliilpéric  pour  chasser  Gon- 
tran  et  se  partager  entre  eux  son  royaume. 
Childebert,  qui  n'avait  aucune  connaissance 
de  ce  traité,  reprocha  à  Gilles  d'avoir  voulu 
exciter  une  guerre  civile  entre  Chilpéric  et 
Contran ,  et  d'avoir  causé  la  ruine  des  pro- 
vinces et  la  mort  d'un  grand  nombre  d'hom- 
mes. Gilles  ne  put  nier  le  fait,  parce  qu'on 
en  avait  la  preuve  dans  un  registre  du  roi 
Chilpéric.  On  l'accusa  aussi  d'avoir  reçu 
deux  mille  sous  d'or  de  ce  prince.  11  confessa 
tout  ;  et  ne  voyant  aucune  défense  à  propo- 
ser aux  évéques  du  concile ,  il  les  pria  de 
prononcer  contre  un  coupable  qui  s'avouait 
digne  de  mort  pour  le  crime  de  lèse-majesté. 
Les  évéques  lui  obtinrent  la  vie,  mais  le  dé- 
posèrent du  sacerdoce  ;  et  il  fut  aussitôt  en- 
voyé en  exil  à  Strasbourg.  Chrodielde  et 
Basine  s'étaient  l'une  et  l'autre  rendues  i\ 
Melz  pour  terminer  leur  affaire.  Basine,  pro- 
sternée devant  les  évoques,  demanda  pardon, 
avec  promesse  de  rentrer  dans  le  monastère 
de  Poitiers  et  de  se  réconcilier  avec  l'abbesse. 
Mais  Chrodielde  protesta  qu'elle  n'y  rentre- 
rait point,  tandis  rpie  Lcubovèrc  y  demeure- 
rait. Les  évéques,  à  la  prière  du  roi  Childe- 
bert, les  reçurent  à  la  communion.  Ensuite 
elles  furent  renvoyées  à  Poitiers,  à  condition 
que  Basine  rentrerait  i\  Sainte-Croix,  et  que 
Chrodielde  demeurerait  dans  une  terre  que 
ce  prince  lui  accorda.  Telle  fut  la  fin  de  ce 
grand  scandale. 

ARTICLE  XXVII. 

CONCILES   DE    NAKTEMIE   [591],    DE   SAHIIAGOSSE 

[592j ,  DE  HOME  [595] ,  de  tolède  [597] ,  et 

DE  BARCELONE  [599]. 

confiio  de       1.  Ctheriusde  Lyon  et  Svagrins  d'Autun, 

Naourre    en  J  J     r 

'"•  qui  avaient  assisté  au  concile  de  Melz,  se  trou- 

vèrent l'anm-c  suivante  391  à  celui  de  Nan- 
terre  proche  de  Paris'.  Comme  il  n'avait  été 
indiqué  que  pour  le  baptême  de  Clotaire  II, 
la  cérémonie  finie,  les  évèquov,  s'en  lelour- 
nèrent.  Ce  fui  le  roi  Contran   qui  leva  ce 


jeune  prince  des  fonts  sacrés,  et  qui  le 
nomma  Clotaire,  en  disant  :  «Que  l'enfant 
croisse,  qu'il  fasse  honneur  à  son  nom ,  et 
qu'il  jouisse  de  la  même  puissance  que  celui 
qui  l'a  porté  avant  lui.  » 

2.  Le  premier  jour  de  novembre  de  la  co«ii» 
même  année,  qui  était  la  septième  du  roi  niat. 
Récarède,  il  y  eut  un  concile  à  Sarragosse, 
où  se  trouvèrent  onze  évéques  et  deux  dia- 
cres qui  représentaient  deux  évéques  ab- 
sents*. Artemius,  évéque  de  Tarragone  et 
métropolitain  de  la  province,  y  présida.  On 
n'y  fit  que  trois  canons,  dont  le  premier  porte 
que  les  prêtres  ariens  qui  seront  retournés  à 
l'Eglise  catholique,  pourront,  s'ils  sont  purs 

dans  la  foi  et  dans  les  mœurs,  faire  les  fonc- 
tions de  leur  ordre,  après  avoir  reçu  de  nou- 
veau la  bénédiction  des  prêtres  ;  et  de  même 
les  diacres;  mais  que  ceux  dont  la  vie  ne 
sera  pas  régulière,  demeureront  déposés,  en 
restant  néanmoins  dans  le  clergé.  C'est  que 
la  plupart  ne  gardaient  pas  la  continence. 
Il  est  dit  dans  le  second,  que  les  reliques 
trouvées  chez  les  ariens  seront  portées  aux 
évéques  et  éprouvées  par  le  feu  ;  et  que  ceux 
qui  les  retiendront  ou  les  cacheront,  seront 
menacés  d'excommunication;  on  ne  croyait 
donc  pas  que  les  véritables  reliques  pussent 
être  consumées  par  le  l'eu.  Le  troisième  veut 
que ,  si  les  évéques  ariens  ont  consacré  des 
églises  avant  d'avoir  reçu  la  bénédiction, 
elles  soient  de  nouveau  consacrées  par  un 
évêque  catholique.  Ces  canons  sont  suivis 
d'une  Lettre  de  quatre  évéques  du  concile, 
par  laquelle  ils  consentent  ùce  que  les  rece- 
veurs du  fisc  prennent  un  certain  droit  par 
boisseau  de  grain,  qui  provenait  apparem- 
ment des  terres  de  l'Église. 

3.  En  395,  saint  Grégoire  tint,  le  3  juillet,      comiicd. 
un  concile  devant  le  corps  de  saint  Pierre  *. 

Il  était  composé  de  vingt-trois  évéques,  y 
compris  ce  saint  Pape,  qui  y  présidait,  et  de 
trente-trois  prêtres  qui  y  étaient  assis  do 
même  que  les  évéques;  les  diacres  debout 
avec  le  reste  du  clergé.  On  croit  que  ce  fut 
dans  ce  concile  que  l'on  examina  l'allaire  des 
prêtres  Jean  et  Atluinase,  dont  nous  avons 
parlé  plus  haut.  Les  canons  que  l'on  y  fit,  y 
furent  jirriposés  par  saint  Grégoire,  et  ap- 
prouvés de  tous  iles  évéques,  qui  répétèrent 
l'analhème  que  le  Pape  prononçait  contre 
tous  ceux  qui  y  conlrcvieiuliaienl.  Il  était 
passé  en  coutume  dans  l'église  Romaine  de 


Tmii.  V  Concil,,  pap.  1599. 


>  Ibid.,  p.ij;.  ICOO.  —  '  Ibid.,  p.ip.  1)98. 


CHAPITRE  LXXXYI.  —  CONCILES  DE  NANTEUnE,  ETC.  907 


[vr  SIÈCLE.] 

prendre  des  cliantrcs  pom-  les  ordonner  dia- 
cres ,  et  de  les  laisser  conlinuor  de  chanlor, 
au  lieu  de  vaquer  h  la  prédication  et  à  la  dis- 
tribution des  aumônes.  Le  premier  canon 
ordonne  qii';\  l'avenir  les  ministres  du  saint 
aulol  ne  clianteront  point  ;  qu'ils  liront  seu- 
lement l'évantîile  à  la  messe,  et  que  les  sous- 
diacres,  ou,  s'il  est  besoin,  lesmoindres  clercs 
chanteront  les  psaumes  et  feront  les  autres 
lectures.  Par  un  autre  abus,  les  évoques  do 
Rome  employaient  des  valets  séculiers  pour 
les  services  secrets  de  leur  chambre,  en  sorte 
que  ces  derniers  connaissaient  la  vie  inté- 
rieure de  l'évéque ,  tandis  que  les  clercs 
l'ignoraient.  Il  fut  ordonné  par  le  second  ca- 
non que  des  clercs  ou  même  des  moines 
choisis  suturaient  pour  le  service  de  la  cham- 
bre de  l'évcque,  afin  qu'il  eût  des  témoins 
secrets  de  sa  vie  qui  pussent  profiter  de  ses 
exemples.  Il  fut  défendu  par  le  troisième  aux 
recteurs  du  patrimoine  de  l'Église  de  mettre 
des  panonceaux  aux  terres  et  aux  maisons 
qui  en  dépendaient,  comme  faisaient  les  of- 
ficiers du  fisc,  et  d'employer  les  voies  de  fait 
pour  défendre  le  bien  des  pauvres.  Le  qua- 
ti'icmc  défend  de  continuer  la  coutume  qui 
s'était  introduite  parmi  le  peuple,  de  couvrir 
de  dalmatiques  les  corps  des  papes  que  l'on 
portait  en  terre.  C'est  que  le  peuple  se  par- 
tageait ces  dalmatiques,  et  les  gardait  comme 
des  reliques.  Il  est  défendu  par  le  cinqiiièmc 
de  rien  prendre  pour  les  ordinations,  le  pal- 
lium  et  les  lettres,  sous  quelque  prétexte 
que  ce  soit.  Si  toutefois  celui  qui  a  été  or- 
donné veut,  après  avoir  reçu  ses  lettres  et  le 
pallium,  donner  par  honnêteté  quelque  chose 
à  quelqu'un  du  clergé,  on  ne  le  défend  pas. 
Le  sixième  est  un  règlement  pour  la  récep- 
tion des  serfs,  soit  des  églises,  soit  des  sécu- 
liers, dans  les  monastères.  Les  recevoir  tous 
indilîéremment ,  c'était  donner  occasion  à 
tous  les  serfs  de  se  soustraire  à  l'église  ;  et 
si  on  les  retenait  tous  en  servitude  sans  exa- 
men ,  on  ôtei'ait  quelque  chose  à  Dieu  qui 
nous  a  donné  tout.  Il  fut  donc  ordonné  que 
celui  qui  voudrait  se  donner  à  Dieu  ,  serait 
auparavant  éprouvé  en  habit  séculier,  afin 
que,  si  ses  mœurs  faisaient  voir  la  sincérité 
de  son  désir,  il  fût  délivré  de  la  servitude 
des  hommes  pour  embrasser  une  vie  plus  ri- 
goureuse. La  vie  monastique  était  en  cflot 
laborieuse  alors ',  si  pauvre  et  si  mortifiée, 


que  des  esclaves  mal  convertis  n'y  auraient 
pas  trouvé  leur  compte. 

4.  L'inscription  du  concile  de  Tolède  en 
597,  la  douzième  année  du  règne  de  lléca- 
rède,  porte  qu'il  fut  composé  de  seize  évé- 
quos,  et  qu'ils  s'assemblèrent  dans  l'église 
des  apôtres  saint  Pierre  et  saint  Paul  '.  Il  n'y 
a  toutefois  les  souscriptions  que  de  treize, 
dont  Massona  de  Mérida  est  le  premier,  et 
Adelphiiis  do  Tolède,  le  troisième.  Ils  ne  fi- 
rent que  deux  canons.  Le  premier  porte  que 
les  évoques  auront  soin  non-seulement  d'ob- 
server eux-mêmes  la  continence,  mais  encore 
de  la  faire  observer  aux  prêtres  et  aux  dia- 
cres ;  qu'ils  pourront  déposer  et  enfermer 
dans  un  cloître  les  contrevenants,  pour  faire 
pénitence,  et  afin  que  cette  peine  servît 
d'exemple  aux  autres.  Il  est  dit  dans  le  se- 
cond que  l'évéque  ne  pourra  s'attribuer  le 
revenu  d'une  église  bâtie  dans  son  diocèse  ; 
qu'il  appartiendra  au  prêtre  qui  y  fait  le  ser- 
vice ;  que  si  (fe  revenu  ne  sulBt  pas  pour 
l'entretien  d'un  prêtre ,  on  y  mettra  un  dia- 
cre, ou  du  moins  un  portier  pour  tenir  l'é- 
glise propre ,  et  allumer  tous  les  soirs  le  lu- 
minaire devant  les  reliques. 

5.  L'année  suivante  398,  treizième  de  Ré- 
carède,  on  tint  à  Huesca,  ville  de  la  province 
de  Tanagone,  mi  concile  où  il  fut  ordoniK; 
que  les  évêques  assembleraient  tous  les  ans 
les  abbés,  les  prêtres  et  les  diacres  de  leur 
diocèse  pour  leur  donner  des  préceptes  et 
des  avis  sur  la  manière  dont  ils  devaient  se 
conduire,  principalement  sur  la  frugalité  et 
la  continence  '  ;  qu'ils  s'informeraient  aussi 
avec  soin  auprès  des  clercs  et  des  notaires, 
et  même  en  examinant  la  conduite  des  fem- 
mes suspectes,  si  les  prêtres,  les  diacres  et 
les  sous-diacres  vivaient  chastement  ;  afin  que 
personne  ne  fût  noté  sur  de  faux  bruits,  et 
que  le  crime  ne  fût  point  pallié  par  de  mau- 
vaises excuses.  On  ne  marque  pas  le  nombre 
des  évêques  qui  assistèrent  à  ce  concile. 

6.  Il  s'en  tint  un  le  premier  jour  de  no- 
vembre de  l'an  599,  quatorzième  du  roi  Ré- 
cai'ède,  à  Barcelone*.  Asiatique,  archevêque 
de  Tarragone,  y  présida  assisté  de  onze  évê- 
ques. De  quatre  canons  que  l'on  y  fit,  il  y  en  a 
deux-contre  la  simonie,  qui  défendent  de  rien 
prendre  soit  pour  les  ordinations,  soit  pour 
le  saint-chrême.  L'ordination  y  est  marquée 
sous  le  terme  de  bénédiction  ,  ce  qui  sert  h 


Crtn-ll«  <1<» 
ToIidQOD!i9T. 


Concllo 
fi'niipsca    en 

1,38. 


Concilri  de 
Barcelono  en 
6D9. 


1  Fleury,  1.  XXXV  Hist.  EccL,  pag.  112,  t.  VIII. 
5  Tom.  V  Concil,  pag.  1603, 


3  Tom.  V  Concil.,  pag.  1604. 
*  Tom.  V  Concil..  pag.  1605. 


908 


HISTOIRE  GÉXÉnALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIOUTS. 


expliquer  le  premier  canon  du  concile  de  Sar- 
ragosse  rapporté  ci-dessus,  où  il  est  dit  que 
les  prêtres  ariens  qui  retournent  à  l'église 
catholique,  rece%Tont  la  bénédiction  avant  de 
pouvoir  faire  les  fonctions  du  sacerdoce.  Le 
troisième  canon  du  concile  de  Barcelone  dé- 
fend d'élever  les  laïcs  à  l'épiscopat,  même 
par  ordre  du  roi,  s'ils  n'ont  obser^•é  aupara- 
vant les  interstices  marqués  par  les  canons, 
passé  par  les  degrés  du  ministère  ecclésias- 
tique, et  doimé  des  preuves  de  la  régularité 
de  leurs  mœurs.  Il  ajoute  que  le  clergé  et  le 
peuple  choisiront  deux  ou  trois  sujets  pour 


les  présenter  au  métropolitain  et  aux  évo- 
ques de  la  province ,  qui  consacreront  celui 
des  trois  sur  qui  le  sort  tombera  '  ;  et  que 
cette  manière  de  décider  du  mérite  de  la  per- 
sonne sera  précédée  d'un  jeune.  Il  est  or- 
donné par  le  quatrième  d'excommunier  et 
d'exclure  de  la  compagnie  des  lidèlcs,  sans 
leur  laisser  la  consolation  de  parler  h  per- 
sonne, les  vierges  consacrées  à  Dieu  et  les 
pénitents  de  l'un  et  l'autre  sexe,  qui  se  seront 
mariés,  même  les  femmes,  qui  ayant  été  en- 
levées, ne  se  seront  pas  séparées  de  leurs 
ravisseurs. 


CHAPITRE  LXXXVII. 
Conciles  dn  VU'  siècle. 


Concile  de 
Boue  ta  CO). 


ARTICLE  I". 

COSCILES  DE  ROME  '60l\  DE  "WORCnESTER  [601], 
DE  LA  BTZACÈSE  ^602],  DE  NtMIDIE  [6(»2  OC 
603],  DE  CAKTOnBÉRY  f605],  DE  ROME  [606], 
BE  TOLÈDE  [610],  ET  D'ÉGARA  [614]. 

l.  Le  but  du  concile  assemblé  à  Rome  le 
cinquième  d'avril  de  l'an  001 ,  fut  de  poui-voir 
au  repos  des  monastères,  et  de  les  mettre  à 
couvert  des  vexations  des  évêques  '.  Saint 
Grégoire,  qui  y  présidait,  défendit  à  tous  les 
évêques  en  général,  de  diminuer  en  rien  les 
biens,  les  terres,  les  revenus  ou  titres  des  mo- 
nastères ;  voulant  que,  s'ils  avaient  quelque 
difl'érend  pour  des  terres  qu'ils  prétendraient 
appartenir  à  leurs  églises,  il  fut  terminé 
promptement  par  des  arbitres.  II  ajouta 
qu'api'ès  la  mort  de  l'abbé,  le  successeur 
serait  choisi  par  le  consentement  libre  et 
unanime  de  la  communauté  ,  et  tiré  de  son 
corps,  s'ils  s'en  trouvait  de  capables  ;  sinon, 
que  l'on  en  prendrait  un  en  d'autres  monas- 
tères ;  que  l'élu  serait  ordonné  sans  fraude 
ni  vénabté  ;  qu'il  aurait  seul  le  gouverne- 
ment de  son  monastère,  si  ce  n'est  qu'il  se 
rendit  coupable  de  quelques  fautes  contre  les 
canons  ;  qu'on  ne  pourrait  lui  ôter  aucun  de 
ses  moines  sans  son  consentement,  soit  pour 

•  lia  tamen  ut  duobtis  aut  tribut,  gnos  ante 
consensus  cleri  et  plebis  elegerit,  melmimliiani 
judicio  ejusgue  cocpiscopis  prœsentalis ,  quem 
sors,  prœeunte  episcoporum  jejunio,  Chrislo  Do- 


gouverner  d'autres  monastères,  soit  pour  en- 
trer dans  le  clergé  ;  qu'il  pourrait  de  lui- 
même  en  ofl'rir  pour  le  sen'ice  de  l'église, 
en  cas  qu'il  en  eût  en  nombre  suDisant  pour 
l'oilice  divin  et  le  service  du  monastère  ;  que 
celui  des  moines  qui  aurait  passé  à  l'état 
ecclésiastique,  ne  pourrait  plus  demeurer 
dans  le  monastère.  Il  défendit  encore  aux 
évêques  de  faire  inventaire  des  biens  ou  des 
titres  du  monastère,  même  après  la  mort  de 
l'abbé;  d'y  célébrer  des  messes  publiques, 
d'y  mctti'e  sa  chaire,  et  d'y  faire  le  moindre 
règlement,  sinon  à  la  prière  de  l'abbé,  sous 
la  puissance  duquel  les  moines  doivent  tou- 
jours être.  Vingt-ct-un  évêques  souscrivirent 
à  ces  décrets  avec  seize  prêtres.  Il  e<t  parlé 
dans  les  lettres  de  saint  Grégoire  d'im  autre 
concile,  où  ce  Pape  condamna unmoine  grec, 
nommé  Andj-é ,  pour  avoir  falsifié  une  lettre 
d'Eusèbe,  évêque  de  Thessalonique,  adressée 
à  saint  Grégoire  même,  et  supposé  sous  son 
nom  divers  discom's ,  qui  ne  pouvaient  que 
déshonorer  le  Saint-Siège. 

2.  En  601, -ou  selon  d'autres,  en  606,  saint 
Augustin,  archevêque  de  Cantorbéry,  voulant 
ramener  les  anciens  habitants  de  la  Grande- 
Bretagne,  qui  continuaient  i\  observer  la  ?â- 
que  le  qualoraième  de  la  lune  *,  ù  la  pratique 
commune  de  l'Église ,  engagea  le  roi  Ethcl- 

mino  terminante,  monstraveril,  benediclio  conse- 
crationis  ac  cumulel.  Concil.    narciiinii.    Can.    3, 
pag.  I60G.—  '  Toin.  V  Concil.,  pag.  1G07. 
'  Lib.  XI,  Epist.-H,  pag.  117*. 


deW 


Confili 
'orctie*lcr 
■a  COI. 


CHAPITRE  LXXXVII.  —  CONCILES  DE  ROME,  ETC. 


[vil'  SIÈCLE.] 

boit  ;'i  l'aire  venir  à  une  l'onlViciiCL'  les  é\ù- 
qiies  el  les  ilocleiii's  de  la  province  des  Ure- 
|(ins  la  pins  proche  de  son  royaume,  c'csl-à- 
dire,  du  pays  de  Galles,  Elle  se  linl  sur  la 
frcmlière  des  Saxons  el  des  Brelons,  en  un 
lien  nommé  depnis  par  les  Anglais  Angusli- 
ncizat,  c'est-à-dire,  la  force  d'Augustin,  au- 
jourd'hui Worchester.  La  dispute  l'ut  longue, 
mais  sans  fruit.  Saint  Augustin,  les  voyant 
obstinés  i"!  soutenir  leurs  anciemies  traditions 
préférablemcnlàcellcsde  l'Église  universelle, 
leur  dit  qu'il  fallait  prier  Dieu  de  montrer  par 
des  signes  célestes  laquelle  on  devait  suivre. 
<i  Qu'on  amène,  ajouta-t-il,  un  malade  ;  et 
celui  dont  les  prières  l'auront  guéri,  on  croira 
qu'il  faudra  suivre  sa  foi.»  Les  Bretons  con- 
sentant, quoiqu'il  regret,  à  la  proposition,  on 
amena  un  Anglais  aveugle,  que  l'on  présenta 
d'abord  à  leurs  évoques  ;  mais  ils  ne  purent 
le  guérir.  Alors  saint  Augustin,  se  mettant  à 
genoux,  pria  Dieu,  qu'en  rendant  la  vue  à 
cet  aveugle,  il  éclairât  les  cœurs  de  plusieurs 
fidèles.  Aussitôt  l'aveugle  recouvra  la  vue, 
et  tous  les  assistants  reconnurent  qu'Augus- 
tin enseignait  la  vérité.  Les  Bretons  mêmes 
en  convinrent;  mais  n'osant  renoncer  à  lems 
anciennes  coutumes  sans  la  permission  des 
leurs,  ils  demandèrent  que  l'on  assemblât  un 
concile  plus  nombreux  :  cela  leur  fut  accordé. 
Sept  évècpies  bretons  s'y  rendirent  avec  plu- 
sieurs personnes  doctes.  Avant  d'y  venir,  ils 
consultèrent  un  anachorète  de  grande  répu- 
tation, qui  leur  dit  de  suivre  le  sentiment 
d'Aug-ustin,  s'il  était  un  homme  de  Dieu. 
«Comment  le  connaîtrons-nous  '?  »  dirent-ils. 
Il  répondit  entre  autres  choses  :  «  S'il  se  lève 
quand  vous  approcherez,  sachez  que  c'est  un 
serviteiu-  de  Jésus-Christ,  et  lui  obéissez  ;  s'il 
ne  se  lève  pas  quoique  vous  soyez  en  plus 
grand  nombre,  méprisez-le ,  comme  il  vous 
méprisera.  »  En  arrivant  au  concile,  ils  trou- 
vèrent Augustin  assis.  Emportés  alors  de  co- 
lère, et  le  regardant  comme  un  orgueilleux, 
suivant  le  discours  de  l'anachorète,  ils  affec- 
tèrent de  le  contredire  en  tout.  Augustin  leur 
dit  :  «  Quoique  vous  ayez  beaucoup  de  pra- 
tiques* contraires  à  notre  usage,  qui  est  celui 
del'Église  universelle,  je  seraicontent,  si  vous 
voulez  me  croire  sur  trois  points  :  de  célébrer 
la  Pâque  en  son  temps,  d'administrer  le  bap- 
tême suivant  la  coutume  de  l'Église  Romaine, 


909 


el  de  prêcher  avec  nous  aux  Anglais  la  parole 
de  Dieu;  à  ces  conditions  nous  tolérerons 
tout  le  reste.  »  Les  Brelons  répondirent  fpi'ils 
n'en  feraient  rien,  el  ne  le  reconnaîtraient 
jamais  pour  archevêque,  disant  entre  eux  : 
«  Si  maintenanl  il  n'a  pas  daigné  se  lever  de- 
vant nous,  quand  nous  lui  serons  une  fois 
soumis,  il  nous  comptera  pour  rien.  »  Le  saint 
ré[)liqua  :  <(  Vous  n'avez  pas  voulu  avoir  la 
paix  avec  vos  frères,  vous  anriv.  la  guerre  avec 
vos  ennemis  ;  et  vous  recevrez  la  mort  par 
la  main  des  Anglais ,  à  qui  vous  n'avez  pas 
voulu  enseigner  le  chemin  de  la  vie.  »  L'évé- 
nement vérifia  cette  prophétie.  Edilfrid,  roi 
des  Anglais,  marcha  avec  une  grande  armée 
contre  la  ville  de  Caër-Léon,  et  fit  un  grand 
carnage  de  Bretons,  commençant  par  les 
évéqnes  et  par  les  moines  qui  priaient  pour 
les  combattants. 

3.  Saint  Grégoire  recevait  fréquemment       rondi«ii^ 
des  plaintes  considérables  touchant  la  con-  w2.''"  "'"^ 
duite  de  Clémcntin,  primat  de  la  province  de 
Byzacène  '  ;  mais  ne  pouvant  s'informer  du 

vrai  par  lui-même  à  cause  de  divers  embar- 
ras, el  principalement  parce  qu'il  était  en- 
vironné des  Lombards,  il  écrivit  à  tous  les 
évéques  de  cette  province  de  faire  l'examen 
de  ces  plaintes  avec  tout  le  soin  et  toute  la 
vigueur  possibles,  afin  que  si  Clémentin  se 
trouvait  coupable,  il  fût  puni  selon  les  ca- 
nons; et  cpie,  s'il  était  innocent,  Ll  ne  fût  pas 
exposé  plus  longtemps  à  des  reproches  si  in- 
fâmes. On  ne  sait  quelle  fut  l'issue  de  ce 
concile. 

4.  Voici  ce  que  Frédégaire  nous  apprend 
de  celui  que  l'on  tint  à  Châlon-sm--Saône  la 
huitième  année  du  roi  Thierry,  c'est-à-dire 
en  003,  à  la  sollicitation  de  la  reine  Brune- 
haut  ^.  Les  désordres  dans  lesquels  cette 
princesse  vivait,  étaient  insupportables  aux 
gens  de'  bien.  Plusieurs  l'en  reprirent ,  no- 
tammentDidier,  évèque  de  Vienne.  Brunehaut 
en  eonrut  contre  lui  une  haine  mortelle.  En 
effet  elle  l'envoya  d'abord  en  exil,  puis  le  fit 
mourir.  Mais ,  pour  donner  quelque  coideur 
aux  persécutions  qu'eUc  faisait  soutirir  à  cet 
évècfue,  elle  le  fit  déposer  de  l'épiscopat  dans 
un  concUe  de  Châlon ,  où  pi-ésidait  Aridius, 
évêque  de  Lyon.  Didier  survécut  quatre  ans 
h  sa  déposition,  au  bout  desquels  il  fut  lapidé 
par  le  conseil  du  même  Ai'idius. 


Concile  da 
CliJloD  -  sur- 
SaûDe  enC03. 


>  Tom.  V   Concil.,  1610;   et  Beda,  lib.   II  Hist., 
cap.  II, 
»  Tom.  V  Concil.,  pag.  1612. 


'  Tom.  V  Concil.,  pag.  1612.  Fredegar.,  in  Chro- 
nico,  cap.  xxiv,  et  Jouas,  in  Yila  S.  Columbani, 
num.  5i. 


9i0 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


»  Efîf"**'  5.  Un  diacre  nomme'  Donadeus,  ayant  (5té 
c.02oo(,(>3.  déposé  injuBtcmont  par  Victor  son  évoque, 
en  appela  au  Saint-Siég:c.  Saint  Grégoire  en 
écrivit  aux  évoques  de  la  province,  nommé- 
ment à  Colomb  en  qui  il  avait  une  confiance 
particulière,  afin  que,  si  ce  diacre  se  trouvait 
coupable,  il  fût  enfermé  pour  faire  pénitence  ; 
ou  que,  s'il  était  innocent,  il  filt  rétabli  dans 
son  ordre,  et  l'évèquc  sévèrement  puni.  Vers 
le  même  temps,  Paulin,  évèque  de  la  même 
province,  fut  accusé  devant  le  Pape  d'avoir 
frappé  et  outragé  quelques-uns  de  ses  clercs. 
Saint  Grégoire  en  écrivit  encore  à  Colomb  et 
au  primat  de  Xumidie ,  les  exbortant  à  exa- 
miner l'alfairc  en  concile,  et  à  punir  Paulin, 
s'il  était  coupable.  Il^ordonna  à  Hilaire,  son 
cartulaire,  d'assister  à  ce  jugement,  s'il  était 
nécessaire.  On  croit  que  ce  fut  dans  le  même 
concile  que  l'on  prit  des  précautions  pour 
cmpêcber  qu'à  l'avenir  l'on  n'élevât  aux  or- 
dres sacrés  des  jeunes  gens ,  et  qu'il  n'y  eût 
de  la  simonie  dans  les  ordinations.  Mais  saint 
Grégoire  avait  écrit  à  Colomb  sui"  ce  sujet  dès 
l'an  393. 
coodiedB  6.  On  met  au  nombre  des  conciles  l'as- 
w."  '■'  semblée  qui  se  fit  à  Cantorbéry  au  mois  de 
janvier  de  l'an  603  pour  la  confirmation  du 
monastère  que  saint  Augustin  y  avait  bâti  en 
l'honneur  des  apôtres  saint  Pierre  et  saint 
Paul  '.  Le  roi  Etelbert,  à  la  sollicitation  de 
cpii  il  l'avait  bâti,  était  présent  avec  la  reine, 
son  fils  Edbald,  les  grands  du  royaume,  le 
clergé  et  le  peuple.  Le  roi  doima  à  ce  monas- 
tère, qui  fut  le  premier  des  Anglo-Saxons, 
une  partie  des  terres  qui  lui  appartenaient  en 
propre,  et  l'enrichit  de  grands  dons.  Le  pre- 
mier abbé  fut  Pierre,  qui  avait  faille  voyage 
(!e  Home  avec  Laurent,  successeur  de  saint 
Augustin  dans  le  siège  de  Cantorbéry.  Nous 
avons  encore  la  charte  de  donation,  où  le 
le  roi  Etelbert  reconnaît  qu'il  était  devenu, 
d'idolâtre,  serviteur  de  Jésus-Christ ,  en  qui 
il  dit  qu'il  avait  été  engendré  par  l'évôquo 
Augustin, 
cooeiit  ae       7.  Boniface  troisième  du  nom,  ayant  été  élu 

Rome  CI  Ue.  -,  •      i 

après  une  vacance  de  près  d'un  an  depuis  la 
mort  de  Sabinien,  arrivée  le  deuxième  février 
C05,  assembla  un  concile  à  Rome  dans  l'église 
de  Saint-Pierre  ',  où  se  trouvèrent  soixante- 


douze  évéqiies  ,  trente-quatre  prôtres  ,  les 
diacres  et  tout  le  clergé  de  la  ville.  Son  des- 
sein était  de  réformer  les  abus  qui  se  com- 
mettaient dans  l'élection  du  pape  et  des  au- 
tres évoques,  n  fut  donc  dt'fendu  dans  ce  con- 
cile, sous  peine  d'anathème,  à  qui  que  ce  fût, 
du  vivant  du  pape  ou  de  quelqu 'autre  évo- 
que, de  parler  de  son  successeur,  et  ordonné 
que,  trois  joui"s  après  ses  funérailles,  leclergé 
et  les  enfants  de  l'église  s'assembleraient 
pour  procéder  à  l'élection. 
8.  Laurent,  sucesseur  de  saint  Augustin  „  c»Miiêi)t 

'  c  Rome  eo  (lOb 

dans  le  siège  de  Cantorbéry,  l'imita  dans  son 
zèle  pour  l'accroissement  de  la  nouvelle  Église 
des  Anglais  '.  Il  étendit  ses  soins  jusque  sur 
les  Bretons  et  les  Ecossais  ;  et  voyant  que  les 
uns  et  les  autres  continuaient  dans  des  usa- 
ges contraires  à  ceux  de  l'Eglise  universelle, 
principalement  sur  la  Pâqiie ,  il  leur  écrivit 
avec  ses  confrères  Mollit  et  Just,  pour  tâcher 
de  les  ramener.  Sa  lettre  était  adressée  aux 
évoques  et  aux  abbés  de  toute  l'Ecosse.  D  y 
disait  :  n  Quand  nous  sommes  entrés  dansl'ile 
de  Bretagne ,  nous  avions  un  grand  respect 
pour  les  Bretons  et  les  Ecossais,  croyant  qu'ils 
suivaient  l'usage  de  l'Église  universelle  ;  après 
avoir  connu  les  Bretons,  nous  avons  cru  que 
les  Ecossais  étaient  meilleurs  ;  mais  nous 
avons  reconnu  ensuite,  par  la  manière  de 
vivre  de  l'évèque  Dagam  qui  est  venu  en  cette 
ville  et  de  l'abbé  Colomban  qui  a  passé  en 
Gaule,  qu'ils  ne  sont  pas  différents  des  Bre- 
tons. Car  l'évèque  Dagam  a  refusé  de  man- 
ger non-seulement  avec  nous,  mais  dans  le 
logis  où  nous  mangions.»  Laurent  écrivit  une 
semblable  lettre  avec  ses  confrères  aux  évè- 
ques  des  Bretons  pour  les  inviter  à  l'unité 
catholique.  C'est  tout  ce  que  Bède  rapporte 
de  ces  deux  lettres,  disant  qu'elles  furent  sans 
succès.  Mellit  avait  été  ordonné  évèque  de 
Londres  par  saint  Augustin  quelque  temps 
avant  sa  mort  ;  étant  allé  h  Rome  pour  traiter 
avec  le  pape  Boniface  IV  des  atfaircs  de  l'É- 
glise d'Angleterre,  il  fut  invité  ù  se  trouver 
au  concile  que  ce  pape  assembla  pour  con- 
damner *  ceux  qui ,  ayant  pour  principe  la 
jalousie  et  non  la  charité,  souteiiaienlqueles 
moines,  étant  morts  au  monde,  et  faisant 
profession  de  ne  vivre  que  pom-  Dieu,  étaient 


'  Toni.  V  Concil.,  pag.  1614, 
«  Tora.  V  Concil.,  jiag.  1CI6. 
•  Tom.  V  Concil.,  pag.  1617;   et  Beda,  lib.  II 
Ditt.,  pnp.  IV. 
'  Sunl  notuwlli  slulti  dogmalis,  magis  zelo 


amariludinis  quam  dileclionis  inflammali...  A'e« 
que  enim  Ucncdictus  monachorum  prœcejitor  hu' 
jnsmodi  aliquo  modo  fuit  inUrdiclor.  Toui.  V 
Concil.,  pag.  1630. 


[vu'  SIÈCLE.] 


CHAPITIIE  LXXXVH.  —  CONCILES  DE  ROME,  ETC. 


911 


par  l'i'llo  raison  iiuliLciii''s  du  sacerdoce  et  in- 
capables d'en  l'aire  les  l'onclions;  iju'ainsi  ils 
ne  pouvaient  administrer  les  sacrements  du 
liaptènKî  et  de  la  pénitence.  Cette  doeiriiie 
l'ut  condanniée  connue  folle,  et  il  lui  décidé 
qiie  les  religieux  élevés  au  sacerdoce  par  une 
ordination  légitime,  pouvaient  en  exercer  le 
ministi'rc  et  user  du  pouvoir  de  lier  et  do 
délier,  ce  que  Boniface  conliima  tant  par 
l'exemple  de  saint  Grégoire  son  prédécessem', 
de  saint  Augustin  apôtre  des  Anglais,  et  do 
saint  Martin,  qui  avaient,  dit-il,  porté  l'habit 
monastique,  avant.d'ètre  élevés  à  l'épiscopat, 
que  par  la  conduite  de  saint  Benoit ,  maître 
des  religieux,  qui  n'a  point  interdit  h  ses  dis- 
ciples les  fonctions  sacerdotales.  Mellit  rem- 
porta ce  décret  en  Angleterre ,  où  il  pouvait 
être  nécessaire  pom'  les  monastères  qui  y 
étaient  déjà  établis.  Car,  outre  celui  que  saint 
Augustin  avait  bâti  près  de  Cantorbéry,  il  eu 
avait  lui-même  bàli  un  auprès  de  Londres, 
nommé  Westminster  par  rapport  il  sa  situa- 
tion, c'est-A-dire,  monastère  d'Ouest.  Le  pape 
Boniface  lui  donna  des  lettres  pour  l'arclic- 
vêque  Laurent,  pour  le  clergé,  pour  le  roi 
Etelbert  et  pour  toute  la  nation  des  Anglais. 
Il  ne  nous  reste  que  celle  qui  est  adressée  au 
roi  ',  à  qui  il  dit  qu'il  avait  accordé  tout  ce 
qu'on  lui  avait  demandé  de  sa  part  pour  le 
monastère  de  Cantorbéry,  avec  défense,  sous 
peine  d'anatlième ,  à  aucun  de  ses  succes- 
sem-s  et  à  tout  autre ,  de  rien  faire  de  con- 
traire. Bède,  en  parlant  de  ce  concile  de 
Rome  ■-,  dit  que  Boniface  l'assembla  pour  y 
faire  un  règlement  au  sujet  de  la  vie  et  du 
repos  des  moines.  Ce  témoignage  ôte  tout 
doute  sur  la  tenue  de  ce  concile;  mais  je  ne 
sais  s'il  est  suflisant  pour  autoriser  le  décret, 
tel  que  nous  l'avons.  U  n'est  pas  vraisembla- 
ble que  les  papes  ni  les  conciles  se  fussent 
amusés  à  allégoriser  siu'  l'babit  des  moines. 
Ce  n'était  pas  même  encore  le  temps  où  l'on 
trouvait  dans  la  figure  des  habits  monasti- 
ques les  six  ailes  des  chérubins  :  ces  imagi- 
nations ne  sont  venues  que  depuis, 
conci!»  de  9.  Sous  le  pontificat  du  même  pape,  (lui 
ne  iinit  qu  en  G14,  il  se  tmt  un  concile  à  To- 
lède le  23  octobre  610',  où  les  évéques  de 
la  province  de  Carthagène  reconnurent  celui 
de  Tolède  pom-  leur  métropolitain,  déclarant 
qu'il  l'avait  toujours  été.  Ils  rapportèrent  en 
preuve  le  second  concile  de  Tolède ,  auquel 


l'évêque  Monlan  avait  préside!  comme  évtVpie 
de  cette  ville,  et  promirent  tant  pour  eux  que 
pour  leurs  successeurs ,  avec  anallième  h 
ceux  qui  refuseraient  de  les  imiter,  d(!  re- 
comiaitre  Tolède  pour  métropole  de;  la  pro- 
vince. Ce  décret  fut  souscrit  par  quinze  évo- 
ques ,  dont  Frotogènes  de  Siguenza  dans  la 
Vieille  Castille  est  le  premier.  Celui  di;  To- 
lède n'y  souscrivit  point,  parce  qu'il  ne;  pou- 
vait être  juge  en  sa  propre  cause.  Le  roi 
Gondemar  confirma  par  son  décret  celui  du 
concile,  en  déclarant  que  laCarpetanie,  dont 
l'évêque  de  Tolède  passait  autrefois  pour 
métropolitain,  n'était  point  une  province 
particulière ,  mais  une  partie  de  la  Carthagi- 
noise. Il  souscrivit  le  premier  à  ce  décret,  et 
après  lui  saint  Isidore,  évêquo  de  Sévilic; 
Innocent,  évêque  deMérida;  Eusèbe  deTar- 
ragone,  et  vingt-trois  autres  évéques.  La  rai- 
son do  cette  constitution  en  favem-  de  l'évê- 
que de  Tolède  est  que  cette  ville  était  la  ré- 
sidence des  rois  goths  ;  mais  Gondemar  dit 
que  ce  fut  pour  supprimer  la  pluralité  des 
métropolitains  dans  la  province  Carthagi- 
noise, parce  que,  suivant  les  canons,  il  ne 
doit  y  avoir  qu'un  métropolitain  dans  chaque 
province  ,  afin  d'ûter  l'occasion  au  schisme, 
comme  il  n'y  en  avait  qu'un  dans  les  autres 
provinces  de  son  royaume,  qui  sont  la  Lusi- 
tanie,  la  Bcetique  et  la  Tarragonaise.  Un  an- 
cien maimscrit  met  à  la  suite  du  décret  de 
ce  concile  trois  requêtes  des  églises  vacantes, 
par  lesquelles  elles  supplient  les  évoques  as- 
semblés de  les  remplir  au  plus  tôt  par  de 
dignes  sujets. 

10.  Le  successeur  du  roi  Gondemar  fut 
Sisebut.  On  tint ,  la  seconde  ou  la  troisième 
année  de  son  règne,  un  concile  à  Egara,  vifie 
connue  depuis  si  longtemps  sous  le  nom  de 
Terassa,  à  quatre  lieues  de  Barcelone  *.  On 
a  ignoré  pendant  longtemps  la  situation  do 
cette  ville  ;  mais  M.  Baluze  a  démontré  qu'elle 
était  au  même  endroit  où  est  à  présent  Te- 
rassa. Il  cite  sur  cela  d'anciens  cartulaires 
où  il  est  parlé  d'Egara,  et  do  Terracia  ou 
Tei'assa  ,  comme  d'une  même  ville  ;  et  une 
lettre  de  Raimond,  évêque  de  Barcelone  en 
1112,  où  il  parle  d'une  église  paroissiale  de 
Saint-Pierre  bâtie  dans  la  banlieue  de  Tar- 
ratia,  où  était,  dit-il,  autrefois  le  siège  épis- 
copal  d'Egara.  Ce  concile  ne  fit  autre  chose 
que  de  confirmer  le  décret  fait  dans  celui 


Concile  d'E* 
faraou  Teras- 
sa eu  GV. 


'  Tom.  V  Concil.,  pag.  1619. 
•  Beda,  lib.  II  Hist.,  cap.  iv. 


3  Tom.  V  Concil,  pag.  1620. 
*  Tom.  V  Concil.,  pag.  1645. 


912 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


CoQcllfl  do 
Paris  ca  GIS. 


d'Huesca  en  598  touchant  le  célibat  des  prê- 
tres ou  des  clercs  infL'rieurs,  c'est-à-dire  des 
diacres  et  des  sous-diacres.  Eusèbe ,  évèque 
de  ïanagoue,  comuie  motropolitain  de  la 
pro^^nce  où  Egara  était  située ,  présida  à  ce 
concile ,  aufjuel  souscrivirent  onze  autres , 
évéqucs,  Maxime,  prêtre,  et  Fructuosus,  dia- 
cre, pour  deux  évoques. 

ARTICLE  II. 

CONCILES  DE  PARIS  [613],  DE  KENT  [Gi7],  DE  SÉ- 
VILLE  [619],  ET  DE  TIIÉODOSIOPOLIS  [620]. 

Clotaire  II ,  devenu  le  seul  maître  de  tout 
l'empire  des  Français  par  la  mort  de  Tliierry, 
de  TliéodeLert,  de  Brunchaut,  et  de  Sigobert, 
qui  avait  succédé  à  Thierry  sous  la  conduite 
de  Brunchaut  sa  bisaïeule',  commença  par 
disposer  des  principales  charges  de  son  Etat  ; 
après  quoi,  voulant  le  régler  dans  toutes  ses 
parties ,  il  assembla  un  concile  à  Paris  ,  que 
l'on  compte  pom-  le  cinquième  tenu  en  cette 
nUe-là ,  et  pour  le  plus  nombreux  que  l'on 
eût  vu  jusqu'alors  en  France.  Soixante-dix- 
neuf  évèqucs  y  assistèrent  avec  plusieurs 
seigneurs  et  vassaux  du  prince.  Ils  s'assem- 
blèrent le  18  octobre  de  la  treute-el-unième 
année  de  Clotaire,  et  la  première  du  pontificat 
deDeusdedit,  ainsi  en  613,  puisque  Deusde- 
dit  fut  élu  pape  le  13  novembre  de  l'an  OU. 
On  ne  sait  point  les  noms  de  ces  évèqucs,  ni 
qui  présida  à  cette  assemblée,  parce  que  les 
souscriptions  sont  perdues.  Ils  firent  quinze 
canons ,  dont  le  premier  prescrit  l'exécution 
des  anciens  canons ,  et  ordonne  en  consé- 
quence qu'à  la  mort  d'un  évoque  on  mettra 
à  sa  place  celui  que  le  métropolitain  et  ses 
cnmprovinciaux  auront  choisi  avec  le  clergé 
et  le  peuple  de  la  ville ,  sans  que  ni  l'argent, 
ni  la  \-ue  de  quelque  intérêt  temporel  y  aient 
aucmie  part  ;  et  que  ,  si  l'élecliou  se  fait  au- 
trement, l'ordination  sera  censée  nulle  ,  sui- 
vant les  décrets  des  Pères.  Il  est  dit  dans  le 
second,  qu'aucun  évèque  n'élira  son  succes- 
seur, et  que  personne  ne  s'ingérera  de  suc- 
céder à  un  évèque  de  son  vivant ,  si  ce  n'est 
qu'une  maladie  incurable  mette  celui-ci  hors 
d'état  de  gouverner  son  église  ,  ou  qu'il  ait 
été  déposé  pour  crime.  Le  troisième  défend 
aux  clercs  ,  quelque  rang  qu'ils  tiennent ,  de 
se  prévaloir  contre  leur  évèque  de  l'autorité 
des  grands  et  même  du  prince  ;  le  quatrième, 
ti  tout  juge  séculier  do  punir  ou  do  condam- 

'  Tom.  V  Concil.,  pag.  tC49. 


ner  un  clerc  sans  le  consentement  de  son 
évèque  ;  le  cinquième ,  de  contraindre  les 
aQranchis  de  l'Eglise  à  servir  le  public.  Il  est 
ordonné  par  le  sixième,  que  les  biens  donnés 
pour  l'entretien  et  la  réparation  des  églises 
seront  administrés  par  les  évèques ,  les  prê- 
tres et  les  autres  clercs  qui  desservent  ces 
églises,  selon  l'inteulion  des  donateurs;  et 
que  quiconque  s'en  attribuera  quelque  par- 
tie, sera  séparé  de  l'Eglise  jusqu'à  ce  qu'il 
ait  restitué.  Le  concile  ajouta,  par  un  sep- 
tième canon  ,  qu'après  la  mort  d'un  évèque, 
d'un  prêtre  ou  d'un  autie  clerc ,  il  ne  sera 
permis  à  personne  de  toucher  aux  biens  de 
l'église  ou  à  leurs  biens  propres,  ni  par  ordi'e 
du  prince,  ni  par  autorité  du  juge;  mais 
qu'ils  seront  conservés  par  l'archidiaci'e  et 
le  clergé ,  jusqu'à  ce  que  l'on  connaisse  la 
disposition  qui  en  aurait  été  faite  par  le  dé- 
funt. Le  huitième  défend  pareillement  à  l'é- 
vêque  et  à  l'archidiacre,  après  la  mort  d'un 
abbé,  d'un  prêtre,  ou  d'un  autre  titulaire, 
d'enlever  ce  qu'ils  ont  laissé  à  leur  église, 
sous  prétexte  d'augmenter  le  bien  du  diocèse 
ou  celui  de  l'évêque.  En  conséquence,  le 
dixième  ordonne  que  toutes  les  donations 
faites  à  l'Eglise  par  les  évèqucs  et  les  clercs 
auront  leur  cflel,  quand  même  les  formalités 
voulues  par  les  lois  n'y  seraient  point  oliser- 
vées.  Le  neuvième  porte  que  les  évèqucs 
n'usurperont  point  les  uns  sur  les  autres  en 
quoi  que  ce  soit ,  et  encore  moins  les  sécu- 
liers sur  les  clercs,  sous  prétexte  d'une  nou- 
velle division  de  royaume  ou  de  province. 
Le  onzième  oblige  deux  évoques  qui  ont 
quelque  dillereud  de  s'adresser  au  métropo- 
litain, sous  peine  pour  celui  qui  s'adressera 
au  juge  laïque  d'être  privé  de  la  communion 
du  métropolitain.  Le  douzième  regarde  les 
moines  et  les  religieuses  qui  ont  fpiitté  le 
monastère  où  ils  avaient  fixé  leur  demeure. 
Il  est  dit  que,  s'ils  ne  retournent,  après  en 
avoir  été  avertis,  ils  seront  séparés  de  la 
commmiion  jusqu'à  l'article  de  la  mort;  mais 
que,  s'ils  y  rentrent,  on  pourra,  après  une 
humble  satisfaction,  leur  accorder  l'eucha- 
ristie. Le  treizième  excommunie  les  vierges 
et  les  veuves  qui,  après  avoir  pris  l'habit 
religieux  pour  vivre  éloignées  du  monde 
dans  leurs  propre  maison ,  le  quittent  et  se 
marient.  Le  quatorzième  défend,  sous  peine 
d'excommunication,  les  mariages  incestueux, 
c'est-à-dire ,  avec  la  veuve  de  son  frère ,  la 
so'ur  de  sa  femme,  les  filles  des  deux  sœurp, 
la  veuve  de  son  oncle,  tant  du  côté  paternel 


CHAPITRE  LXXXVII.  —  TONCILE  DE  PARIS. 


(VII'  SlèCLE.l 

que  maternel,  et  avec  une  fiUc  qui  a  pris 
riiahit  (le  religion.  Par  le  quinzième  il  est 
défciulu  aux  juifs  d'exercer  aucune  cliarpe 
ni  foncliou  piihliquo  sur  les  chri'ticns,  s'ils 
ne  voulenl  recevoir  la  grùce  du  baptême  des 
évoques  des  lieux  avec  toute  leur  famille.  On 
regardait  donc  la  di'marche  que  faisait  un 
juif  en  demandant  une  charge  comme  un 
signe  de  conversion. 
'duroi  2.  LeroiClot;iiredonna,lejonrmèmcdela 
tenue  du  concile,  un  édit  pour  l'exécution  de 
ces  canons  ',  mais  avec  quelque  modification. 
11  ajoula  au  premier,  qui  regarde  l'élection  de 
l'évêqne  parle  clergé  et  par  le  peuple,  qu'a- 
vant d'ordonner  l'évèque  élu,  il  faudra  un  or- 
dre du  prince.  Dans  le  troisième,  qui  défend 
aux  clercs  de  se  prévaloir  contre  leur  évèque 
de  l'autorité  des  grands  et  même  du  prince,  il 
inséra  que,  si  un  clerc  a  recours  au  roi  pour 
quelque  cause  que  ce  soit  et,  que  le  roi  le 
renvoie  à  l'évèque  avec  une  lettre  de  sa  part, 
l'évèque  le  recevra  et  lui  pardonnera.  Par 
le  même  édit,  Clotaire  abolit  tous  les  nou- 
veaux impôts ,  déclarant  que  sa  volonté 
était  qu'on  s'en  lintà  ce  qui  s'observait  sous 
les  rois  Contran,  Cliilpéric  et  Sigebert. 
ADirocoo-       3.  L'édit  de  Clotaire  II,  et  les  canons  du 

eilo  tJo  PiTlâ 

«B  l'on  615  concile  de  Paris,  furent  confirmés  dans  un 

ou6ir.  ' 

antre  concile  qui  se  tint  en  France  quelque 
temps  après  '  ;  mais  on  n'en  connaît  ni  le 
lieu  ni  l'année.  Les  canons  que  l'on  y  fit,  se 
trouvent  à  la  suite  de  ceux  du  concile  de  Paris 
dans  un  ancien  manuscrit  de  Reims  ,  qui  ne 
les  représente  pas  tous.  Ils  étaient  au  nom- 
bre de  quinze,  et  il  n'en  donne  qu'onze  :  ce 
qui  fait  quatre  de  moins;  encore  le  dernier 
est-il  imparfait.  Après  y  avoir  ordonné  l'exé- 
cution des  canons  du  concile  de  Paris  rela- 
tivement à  l'édit  de  Clotaire,  les  évoques  dé- 
Cbd.  I.  clarent  qu'il  ne  sera  poiut  permis  de  consa- 
crer des  autels  dans  les  lieux  où  il  y  aura 

2.  des  coi'ps  enterrés  ;  —  que  les  moines  vi- 

vront selon  leur  règle,  en  commun,  sous 
l'obéissance  d'un  supérieur,  sans  avoir  rien 

j.  en  propre  ;  —  qu'on  ne  pourra  baptiser  dans 

les  monastères,  ni  célébrer  des  messes  pour 
les  séculiers  défunts,  ni  les  y  enterrer  sans 

5.  la  permission  de  l'évèque  ;  —  que  les  clercs 

n'auront  aucune  femme  dans  leur  maison,  à 
l'exception  de  leur  tante,  de  leur  mère  et  de 


♦  Tom.  V  Concil.,  pag.  1663.—  '  Ibid.,  pag.  1663. 
»  Tom.  V  Concil.,  yag.  1662.      - 

*  Camque  vidèrent  poniilicem  celebratis  in  ec- 
clesia  missarum  solenunis  euclutristiam  populo 

XI. 


yj3 


leur  sœur;  —  que  ceux  qui  se  retireront    *-'"••• 
dans  les  églises  comme;  en  des  lieux  d'asile, 
ne  pourront  en  être  enlevés  de  force,  ni  en- 
cliainés  ;  —  (pie  les  abb('s  et  les  artbiprô-        »■ 
1res  ne  seront  point  privés  de  leurs  fonctions, 
à  moins  cjn'ils  ne  soient  coupables  de  ciuel- 
que  crime  qui  mérite  châtiment  ;  —  ni  éle-       "■ 
vés  <"i  ces  dignités  dans  la  vue  de  (pielque 
récompense  ;  —  qu'il  ne  sera  permis  en  au-       '^' 
cun  cas  aux  prêtres  ni  aux  diacres  de  se  ma- 
rier, sous  peine   aux  contrevenants  d'être 
cliassés  de  l'église; — que,  lorsqu'un  évê-       "• 
que  aura  excommunié  quelqu'un,  il  le  fera 
savoir  dans  les  villes  et  dans  les  églises  voi- 
sines, afin  que  l'excommunié  soit  connu,  et 
que  personne  ne  le  rec^oive.  La  peine  de  ceux 
qui   communicfuent    avec   un   excommunié 
connu,  est  d'être  chassé  de  l'église  et  privé 
de  la  communion  pendant  deux  ans.  —  Il       "• 
fut  ordonné  dans  le  même  concile  (jue  les 
personnes  libres  qui  se  seront  vendues  ou 
engagées  par  nécessité,  rentreront  dans  leur 
premier  état  en  rendant  le  prix  qu'elles  ont 
reçu. 

4.  Le  roi  Éthelberl  étant  mort  en  616,  son  K,„'iTn''6r! 
fils  Edbald  lui  succéda  '.  Mais  il  était  encore 
païen,  et  si  déréglé  dans  ses  mœurs,  cpi'il 
entretenait  la  femme  de  son  père.  Un  si  per- 
nicieux exemple  fut  une  occasion  d'apostasie 
à  ceux  qui  ne  s'étaient  faits  chrétiens  (jue 
par  complaisance  pour  Éthelbert  ou  par 
crainte.  Ils  retournèrent  à  l'idolâtrie  et  à  la 
débauche.  Ce  ne  fut  pas  la  seide  secousse 
dont  la  nouvelle  Église  d'Angleterre  fut  agi- 
tée. Sabareth,  ou  Saba,  roi  des  Saxons  orien- 
taux, mourut  vers  le  même  temps,  laissant 
trois  fils,  dont  aucun  n'avait  embrassé  la  re- 
ligion chrétienne,  (juoiqu'ils  vissent  leur  père 
en  faire  profession.  Ils  commencèrent  par 
rétablir  le  culte  public  des  idoles  interrompu 
sous  le  règne  de  Saba,  et  donnèrent  pleine 
liberté  à  leurs  sujets  de  les  adorer.  Voyant 
un  jom'  Mollit,  évécpie  de  Londres,  distri- 
buer l'Eucharistie  au  peuple  dans  l'église  à 
la  fin  de  la  messe,  ils  lui  dirent  :  ((  Pourquoi 
ne  nous  donnez-vous  pas  aussi  le  pain  blanc  *, 
tjue  vous  donniez  à  notre  père  Saba,  et  que 
vous  continuez  encore  de  donner  au  peu- 
ple? »  11  leur  répondit  :  «  Si  vous  voulez  être 
lavés  dans  cette  fontaine  où  votre  père  l'a 


dare,  dicebant  :  Quare  non  et  nobis  porrigis  pa- 
ne m  nilidum  quem  et  palri  nosiro  dabas,  et  po- 
pulo (idhuc  in  ecclesia  dare  non  desistis?  Tom.  V 
Concil.,  pag.  1662. 


58 


914 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


été,  vous  pourrez  participer  comme  lui  à  ce 
pain  sacré  ;  autrement  il  est  impossible.  » 
(I  Nous  ne  voulons  point,  dirent-ils,  entrer 
dans  cette  fontaine,  nous  n'en  n'avons  que 
faire,  mais  nous  voulons  manprcr  de  ce  pain.  » 
Quoi  que  l'évèque  leur  pût  dire  pour  leur 
faire  enteudre  qu'il  fallait  ctre  puriQé  avant 
de  participer  au  Saint-SacriDce,  ils  entrèrent 
en  fureur,  et  lui  dirent  enfin  :  «  Si  vous  ne 
voulez  pas  nous  contenter  dans  une  chose  si 
facile,  vous  ne  demeurerez  plus  dans  notre 
province  ;  »  et  ils  lui  ordonnèrent  de  sortir 
de  leur  rojaume,  lui  et  les  siens'.  On  voit 
ici  que  le  secret  des  mystères  ne  s'observait 
plus  alors,  et  l'on  voit  aussi  l'inconvénient 
d'avoir  négligé  oette  discipline.  L'évoque 
Mellit  ainsi  chassé  passa  dans  le  royaume 
de  Kent  pour  délibérer  avec  les  évoques  Lau- 
rent et  Just  sur  ce  qu'il  avait  à  faire.  Ils  con- 
clurent tous  trois  qu'il  valait  mieux  retourner 
en  leur  pays,  pour  y  servir  Dieu  en  liberté, 
que  de  demeurer  inutilement  chez  les  bar- 
bares révoltés  contre  la  foi.  Mellit  et  Just 
partirent  les  premiers  et  se  retirèrent  en 
Gaule  pour  y  attendre  l'événement.  Les  rois 
qui  avaient  chassé  Mellit  furent  tués  dans  un 
combat  contre  les  Génissiens,  et  leurs  peuples 
continuèrent  à  vivre  dans  l'idolâtrie. Laurent 
se  préparait  aussi  à  quitter  la  Grande-Breta- 
gne ;  mais  il  en  fut  détourné  dans  une  vision. 
Il  convertit  le  roi  Edbald,  qui  renonça  ù  son 
mariage  incestueux,  reçut  le  baptême  et  pro- 
cura de  tout  son  pouvoir  l'avantage  de  l'É- 
glise. Ce  prince  rappela  aussi  Mellit  et  Just, 
et  les  renvoya  à  leurs  églises  pour  les  ré- 
tablir en  toute  liberté.  Mellit,  trouvant  les  ha- 
bitants de  Londres  obstinés  dans  le  culte  des 
idoles,  passa  après  la  mort  de  Laurent  à  l'é- 
vèché  de  Cantorbéry,  dont  il  fut  le  troisième 
évoque. 
Concile  do  3.  En  Espagne,  sous  le  roi  Sisebut  et  le 
pontificat  de  BonifaceV,  le  13  novembre  619, 
saiut  Isidore  de  Séville,  Bisinus,  Rufin  ,  Ful- 
gencc,  et  quelques  autres  évoques  qui  étaient 
venus  en  cette  ville  pour  les  affaires  de  leurs 
églises  ',  s'assemblèrent  dans  la  salle  secrète 
de  l'église  nommée  Jérusalem.  Le  clergé  de 
Séville  y  était  présent  avec  deux  séculiers 
qui  portaient  le  titre  d'Illustres,  Pisille,  gou- 
verneur de  la  province  Bétique,  d'où  étaient 


tous  ces  évèques,  et  Suanila  intendant  du 
fisc.  Les  décrets  de  ce  concile  sont  divisés 
en  treize  actions  ou  chapitres,  selon  les  ma- 
tières différentes  qui  y  furent  traitées  ;  mais 
on  ne  tint  en  tout  que  trois  séances.  Théo- 
dulfe,  évcque  de  Malaga,  donna  sa  requête 
en  plainte  de  ce  que,  son  diocèse  ayant  été 
ravagé  pendant  la  guerre,  trois  évèques  voi- 
sins en  avaient  pris  occasion  d'empiéter  sur 
son  territoire.  Le  concile  ordonna  que  l'on 
rendrait  à  chaque  église  ce  qu'elle  avait  pos- 
sédé avant  les  hostilités,  sans  que  l'on  put 
alléguer  de  prescription,  puisque  la  guerre 
avait  empêché  d'agir.  «  On  ne  peut,  disent 
les  évèques  ' ,  objecter  la  prescription  du 
temps,  où  les  hostilités  ont  occasionné  la 
possession.  »  Ils  déclarèrent  que,  hors  ce  cas, 
la  prescription  de  trente  ans  aurait  lieu,  sui- 
vant les  édits  des  princes  et  les  décrets  des 
papes  '  ;  et  ce  fut  sur  ce  principe  qu'ils  déci- 
dèrent le  différend  qui  était  entre  Fulgence 
d'Astigite  et  Honorius  de  Cordone  touchant 
les  limites  de  leurs  diocèses.  On  donna  des 
commissaires  pour  faire  la  visite  des  lieux 
contestés,  et  pour  examiner  ensuite  la  pos- 
session, en  déclarant  que ,  si  elle  était  de 
trente  ans,  la  prescription  aurait  lieu  en  fa- 
veur du  possesseur.  — 11  fut  ordonné  ensuite  A:t.  a. 
qu'un  clerc  nommé  Ispassand,  qui  avait  quit- 
té l'église  d'Italica  pour  passer  à  celle  de 
Cordoue,  serait  renvoyé  à  son  premier  évo- 
que ;  à  cette  occasion  on  renouvela  les  an- 
ciens canons  qui  défendent  aux  clercs  de 
quitter  leurs  églises  pour  passer  à  d'autres. 
—  L'évêque  d'Astigite  avait  élevé  au  diaco-  *• 
nat  des  hommes  mariés  ù  des  veuves.  Ces 
ordinations  furent  déclarées  nulles  comme 
contraires  au  droit  divin  et  ecclésiastique, 
et  défense  fut  faite  d'en  faire  de  semblables 
à  l'avenir.  —  Il  était  arrivé  qu'un  évéqne  s. 
ayant  mal  aux  yeux  avait  ordonné  un  prêtre 
et  deux  diacres,  en  leur  imposant  seulement 
les  mains,  et  faisant  prononcer  par  un  prê- 
tre la  formule  de  l'ordination.  Le  concile  dé- 
clara ces  ordinations  nulles,  ajoutant  que 
ce  prêtre  mériterait  punition  pour  sa  har- 
diesse, s'il  était  encore  en  vie.  Quoiqu'un 
évcque  puisse  ordonner  seul  un  prêtre  ou 
un  cliaci'e  ',  il  ne  peut  le  déposer  que  dans 
un  coucile.  Les  anciens  canons  l'avaient  ré- 


'  Fleury,  lib.  XXXVII,  lom.  VIH,  pag.  287. 
»  Tom.  V  Concil,  p.iR.  IG63. 
'  A'ore  eril  objicienda  pr(e$criptio  ttmporis,  ubi 
nécessitas  inieresl  hosUUlalis.  Act.  1. 
*  Tricenlalis  oliJecUo  sUenlium  ponit:  hocenivi 


et  srcularium  principum  edicta  prœcipiunl  et 
prifsulum  romannrum  decrevU  autoritas.  Act.  2. 
"  l^piscopus  sacerdotibus  ac  ministris  solus 
honorem  darc  polcst,  auferre  solus  non  polest. 
Act.  G. 


[vil'  SIÈCLE.] 


CHAPITRE  LXXXVU.  —  CONCILE  DE  SÉVILLE. 


915 


glë  ainsi,  pour  empêcher  qu'un  prôlre  ou 
un  diacre  ne  filt  en  de  certaines  occasions 
la  viilinio  de  la  li;iine  ou  do  l'envie  de  son 
évèquc,  comino  il  était  arrivé  nouvcUcniciit 
à  Cordûuc,  dont  IVvôtiuo  avait  déposé  in- 
justement un  prêtre  de  cette  église. 

7.  Ce  n'était  pas  la  seule  fois  que  l'évêque 
de   Cordouc  avait  agi  contre  les  règles  de 
l'Eglise.  Comme  il  ne  les  savait  pas,  étant 
monté  tout  d'nn  coup  ù  l'épiscopat,  il  avait 
permis  i\  des  prêtres  d'ériger  des  autels  et  de 
consacrer  des  églises  en  l'absence  de  l'évê- 
que '.  Pour  prévenir  de  semblables  abus,  le 
concile  déclare  que  les  prêtres  ne  peuvent 
consacrer  des  autels  ou  des  églises,  ni  or- 
donner des  prêtres  ou  des  diacres,  consacrer 
des  vierges,  imposer  les  mains  aux  fidèles 
baptisés  ou  convertis  de  l'hérésie,  et  leur 
donner  le  Saint-Es^irit,  faire  le  saint  chrême, 
ou  en  marquer  les  baptisés  sur  le  front  ;  ré- 
concilier publiquement  un  pénitent  à  la  messe, 
donner  des  lettres  formées  ou   ecclésiasti- 
ques, toutes  ces  fonctions  étant  réservées 
aux  évêques  par  l'autorité  des  canons,  et  dé- 
fendues aux  prêtres;  qu'en  efl'et,  bien  qu'ils 
aient  plusieurs  choses   communes  avec  les 
évêques,  celles-là  leur  sont  interdites,  parce 
qu'ils  n'ont  pas  la  souveraineté  [le  suprême 
degré]  du  sacerdoce,  qui  n'appartient  qu'aux 
évêques  d'après  les  canons,  aliu  que  par  là  soit 
conservée  la  distinction  des  grades  du  minis- 
tère ecclésiastique  et  l'éminence  de  l'épisco- 
pat. Il  ne  leur  est  pas  même  permis  d'entrer 
dans  le  baptistère,  ni  de  baptiser  en  présence 
de  l'évêque,  ni  de  faire  un  catéchumène,  ni 
de  réconcilier  des  pénitents,  ni  de  consacrer 
l'Eucharistie,  d'instruire  le  peuple,  de  le  bénir 
et  de  le  saluer  en  présence  de  l'évêque  ;  mais 
l'évêque  peut  leur  permettre  quelques-unes 
de  ces  fonctions,  comme  de  réconcilier  les 
pénitents.  Il  fut  ordonné  qu'un  nommé  Ehs- 
sée,  qui,  après  avoir  été  mis  en  liberté  par 
son  évéque,  était  devenu  désobéissant,  se- 


rait remis  dans  l'esclavage  ù  cause  de  son  in- 
gratitude; que  chaque  évoque  se  choisirait 
un  (économe  du  corps  du  clcrgt'-,  suivant  le 
concile  de  Chalcédoine  ;  qu'il  ne  pourrait  em- 
ployer des  laïques  à  cette  fonction,  ni  ad- 
ministrer les  biens  de  l'église  sans  la  parti- 
cipation de  cet  économe.  On  confirma  les 
monastères  établis  dans  la  Bétique,  avec  dé- 
fense aux  évêques  d'en  supprimer  aucun,  ou 
de  s'emparer  de  leurs  biens.  L'administra- 
tion des  biens  des  monastères  de  filles  fut 
accordée  aux  moines,  à  la  charge  que  leurs 
demeures  seraient  éloignées;  que  les  moines 
ne  vicndraientpasmêmeau  vestibule  des  reli- 
gieuses, excepté  l'abbé  ou  le  supérieur  ;  qu'il 
ne  pouna  parler  qu'à  la  supérieure  et  en 
présence  de  deux  ou  trois  sœurs,  et  que  les 
visites  seront  rares  et  courtes.  Le  concile 
ajoute  que  le  moine  destiné  à  avoir  soin  des 
terres,  des  maisons,  des  bâtiments  et  de  tous 
les  besoins  du  monastère  des  filles  ,  sera 
très-éprouvé  au  jugement  de  l'évêque,  en 
sorte  qu'elles  n'aient  soin  que  de  leurs  âmes 
et  ne  s'occupent  que  du  service  de  Dieu  et 
de  leurs  ouvrages,  entre  lesquels  il  met  les 
habits  des  moines  qui  les  servent. 

S.  Dans  une  des  séances,  il  se  présenta  au 
concile  un  évéque  syrien  de  la  secte  des  acé- 
phales qui  niait  la  distinction  des  natures  en 
Jésus-Christ,  et  soutenait  que  la  divinité  était 
passible  en  lui.  Il  allégua  plusieurs  passages 
pour  défendre  son  sentiment,  et  résista  long- 
temps aux  salutaires  instructions  des  évê- 
ques; mais  enfin  il  se  rendit  et  confessa  qu'il 
y  a  en  Jésus-Christ  deux  natures  unies  en 
une  seule  personne.  La  résistance  qu'il  té- 
moigna d'abord  les  obligea  de  prouver  cette 
vérité  fort  au  long  et  de  réfuter  l'hérésie  des 
acéphales  par  des  témoignages  de  l'Écriture 
et  des  Pères,  entre  autres  de  saint  Hilaire, 
dans  sonCommentaire  surrÉpitreàTimothée 
(cet  écrit  n'est  pas  venu  jusqu'à  nous),  de 
saint  Ambroise ,  de  saint  Grégoire  de  Na- 


Cone.  Cal* 
cbcdoo.  Cno. 
20. 


'  Nam  quamvis  cum  episcopis  plurima  illis  mys- 
leriorum  communis  sit  dispensatio,  quœdam  no- 
vellis  et  ecclesiasiicis  regulis  sibi  proliibita  nove- 
rint,  sicut  presbyteroruin,  et  diaconorum  acvir- 
ginum  consecratio-  sicul,  conslilutio  altaris , 
benedictio  vel  unclio  :  siquidem  nec  licere  eis 
ecclesiam  vel  altaria  consecrare,  nec  per  impo- 
sitionemmanus  fidelibus  baptizatis  vel  conversis 
ex  liœresi  Paracletum  Spiritum  tradere,  nec 
Chrisma  con/icere,  chrismale  baptizatorum  fron- 
tes  signare,  sed  nec  publiée  quidem  in  missa 
quemdam  pœnitenlium  reconciliare,  nec  forma- 
tas  cuilibet  epistolas  mitttre.  Haie  enim   om- 


nia  illicita  esse  presbyteris,  quia  ponti/icatus 
apicem  non  habent,  quem  soliè  deberi  episco- 
pis auloriiale  canonum  prœcipitur :  «i  per  hoc 
et  discrelio  graduiim  et  dignitatis  fastigium 
summi  ponlificis  demonstretur.  Sed  ncque  coram 
episcopo  licere  presbyteris  in  baptisterium  in- 
Iroire,  nec  prœsente  antistite  infantem  tingere 
aul  signare,  nec  pœnitentes  sine  prœcepto  episco- 
pi  sui  reconciliare,  nec  eo  prœsente  sacramentum 
corporis  et  sangtiinis  Chrisli  con/icere,  nec  eo  eo- 
ram  posito  populum  docere  vel  benedicere  aut 
salutare,  nec  plebem  iitique  exhortari.  Conc.  Bis- 
pal.,  Act.  7. 


916 


HISTOIRE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


zianze,  de  saint  Basile,  de  saint  Augustin, 
du  pape  saint  Léon  et  de  saint  Fulirence. 
cooeîi.  de       9.  Dès  le  commencement  du  \i°  siècle,  les 

Cbanifl     Ter* 

'*>•  acéphales  avaient  infecté  de  leurs  eneui-s 

imc  partie  de  l'Arménie,  et  ce  fut  dans  ce 
dessein  qu'ils  tinrent  une  assemblée  à  Thé- 
vin  '.  Jéser  Nccainus  qui  en  était  patriarche, 
et  très  attaché  ii  la  foi  catholique,  voulant  la 
rétablir  dans  les  églises  de  sa  dépendance, 
pria  l'empereur  Héraclius,  qui  passait  pour 
aller  faire  la  guerre  à  Chosroës,  roi  de  Perse, 
de  lui  faciliter  l'exécution  de  son  dessein  en 
lui  permettant  d'assembler  un  concile.  Ce 
prince  le  permit.  Les  évèques  s'assemblèrent 
dans  la  ville  dfe  Charne,  auparavant  Thëo- 
dosiopolis,  dans  la  Grande-Arménie,  et  avec 
eux  plusieurs  grands  seigneurs.   Il  y  vint 


aussi  quelques  Grecs  et  quelques  Syriens 
par  ordre  d'Héraclius.  Le  concile  dura  pen- 
dant un  mois  entier.  On  y  agita  diverses 
questions  qui  avaient  rapport  aux  erreurs 
du  temps;  après  plusieurs  délibérations,  on 
convint  unanimement  de  casser  ce  qui  avait 
été  fait  par  les  acéphales  dans  leur  assem- 
blée de  Thévin,  de  recevoir  tous  les  décrets 
du  concile  de  Chalcédoine,  d'oter  du  trisa- 
gion  ces  paroles  que  Pierre  le  Foulon  avait 
ajoutées  :  «  Vous  qui  avez  clé  crucifié  pour 
nous;  »  de  ne  plus  célébrer,  en  un  même 
jour,  les  fêtes  de  la  naissance  de  Jésus-Christ 
et  de  son  baptême,  mais  séparément  comme 
auparavant.  De  cette  manière  la  paix  fut  ré- 
tablie entre  les  Grecs  et  les  Arméniens.  On 
tint  ce  concile  vers  l'an  622. 


'  Galanus,  Conciliatio  Ecclesiœ  Xrmen.,  part,  i,      pag.  185. 


SUPPLÉMENT 


CARACTÈRE  DE  LA  DISCUSSION  DES  TRUIS-CHAPITRES 


APPRECIATION  DE  L  ABBE  BLANC. 

«  U  n'était  question  à  Constantinople  d'au- 
cun point  de  foi  à  décider,  »  fait  observer 
l'abbé  Blanc  ',  «mais  seulement  de  prononcer 
sur  des  écrits  erronés ,  que  leurs  auteurs 
avaient  rétractés  eux-mêmes,  au  moins  im- 
plicilcmcnt  par  une  profession  de  foi  catho- 
lique. Convenait-il  de  les  condamner  formel- 
lement? Non,  en  certaines  circonstances, 
telles  que  celles  où  se  trouvaient  les  Pères 
de  Chalcédoine;  oui,  en  d'autres  temps. 
Toute  la  question  pour  Vigile  revient  donc  à 
demander  si  les  circonstances  où  il  se  trou- 
vait réclamaient  de  lui  cette  condamnation. 
Or  il  est  évident  que  la  réponse  est  également 
oui  et  non;  oui,  pour  ménager  les  Orientaux 
et  éviter  le  schisme  ;  non,  pour  ménager  les 
Occidentaux  et  éviter  le  schisme  encore.  On 
comprend  maintenant  comment  l'homme  qui 
tenait  en  quelque  sorte  la  paix  du  monde 
catholique,  et  se  trouvait  placé  dans  une  si 
cruelle  alternative,  a  varié  dans  ses  détermi- 
nations au  milieu  de  mille  incidents  qui  de- 
vaient les  influencer.  » 

APPRÉCIATION  DE  L'ABBÉ  RECEVEUR. 

L'abbé  Receveur^  dit  à  son  tour  :  «  On  a 


souvent  reproché  au  pape  Vigile  ses  varia- 
tions dans  l'afTaire  des  Trois-Chapitres;  mais, 
si  l'on  se  reporte  aux  circonstances  où  il  s'est 
trouvé,  on  reconnaîtra  sans  peine  que  toutes 
les  critiques  faites  à  ce  sujet  n'ont  aucun 
fondement.  11  est  certain  que  les  Trois-Cha- 
pitres étaient  réellement  condamnables,  et 
le  pape  Vigile  n'a  jamais  soutenu  ni  encore 
moins  défini  le  contraire.  Mais  ce  qu'ils  con- 
tenaient de  répréhensible  oflrait-il  assez  de 
danger  pour  qu'il  fût  nécessaire  ou  expé- 
dient de  prononcer  contre  ces  écrits  une 
condamnation  dont  s'était  abstenu  le  concile 
de  Chalcédoine,  et  de  flétrir  ainsi  la  mémoire 
de  leurs  auteurs,  morts  dans  la  communion 
de  l'Église  ?  C'était  une  question  d'opportu- 
nité qui  pouvait  recevoir  des  solutions  difle- 
rentes  selon  les  circonstances.  Vigile  appelé 
à  Constantinople  par  Justinien,  et  forcé  de 
partir  malgré  lui  par  Bélisaire,  ne  vit  d'a- 
bord dans  l'airaire  des  Trois-Chapitres  qu'une 
intrigue  insidieuseimagince  par  les  acéphales 
contre  le  concile  de  Chalcédoine,  et  une  cou- 
pable entreprise  sur  les  droits  de  l'Église  par 
l'autorité  temporelle,  qui  osait  décider  souve- 
rainement les  questions  graves  et  délicates  sur 
lesquelles  ni  le  concile  ni  le  Saint-Siège  n'a- 
vaient rien  prononcé.  On  conçoit  donc  que 
ce  motif,  assurément  bien  fondé,  dut  l'enga- 
ger à  séparer  de  sa  communion  les  évèques 


'  Cours  d'Histoire  ecclésiastique,  partie  2.  Pré- 
cis historiques,  tom.  II,  pag.  287. 


2  Hist.  de  l'Église,  tom.  111,  pag.  361. 


918 


HISTOraE  GÉNÉRALE  DES  AUTEURS  ECCLÉSIASTIQUES. 


qui  avaient  eu  la  faiblesse  de  souscrire  à  l'é- 
dit  de  l'Empereiu'.  Mais,  bientôt  après,  voyant 
l'opiniâtre  entêtement  de  Justinien,  l'obsé- 
quieuse servilité  de  quelques  évèques ,  et 
les  troubles  dont  l'Église  d'Orient  était  agi- 
tée, il  crut  pouvoir  remédier  au  mal  en  con- 
damnant lui-même  les  Trois-Chapitres,  avec 
défense  de  remuer  davantage  cette  question, 
et  sous  la  réserve  expresse  de  l'autorité  in- 
violable du  concile  de  Chalcédoine ,  afin 
d'ôter  ainsi  aux  acéphales  tout  moyen  d'a- 
buser de  cette  condamnation.  Toutefois  son 
jugement  plein  de  sagesse  n'eut  pas  l'elTet 
qu'il  en  espérait.  Justinien  et  les  acéphales 
voulaient  une  condamnation  pure  et  simple, 
sans  aucune  mentron  du  concile  de  Chalcé- 
doine. Le  Pape  s'y  refusa  avec  une  constante 
fermeté  qui  déjoua  tous  les  projets  des  sec- 
taires, et  les  Orientaux  prirent  le  parti  de 
reconnaître  solennellement  l'autorité  de  ce 
concile  avant  de  rien  prononcer  sur  les  Trois- 
Chapitres.  D'un  autre  côté  la  décision  du 
Pape  souleva  en  Occident  de  vives  réclama- 
tions. Il  jugea  donc  expédient  de  la  retirer, 
et  de  faire  convoquer  un  concile  où  la  ques- 
tion serait  examinée  par  un  certain  nombre 
d'évêques  de  toutes  les  provinces,  et  terminé 
par  un  jugement  commun  qui  établirait  la 
paix  et  l'union  entre  les  Églises.  Il  persista 
constamment  dans  cette  détermination,  et 
ce  fut  la  source  des  persécutions  exercées 
contre  lui.  Quand  ensuite  les  Orientaux,  pres- 
sés par  Justinien,  résolurent  de  tenir  un  con- 
cile en  l'absence  des  évêques  d'Occident, 
le  Pape  refusa  d'y  assister;  et,  craignant 
qu'une  décision  trop  absolue,  telle  que  la 
voulait  Justinien,  ne  servît  qu'à  perpétuer 
les  divisions,  il  voulut  la  prévenir  par  une 
constitution  rédigée  avec  tant  de  ménage- 
ments, qu'elle  devait  tout  à  la  fois  calmer 
les  inquiétudes  des  Occidentaux  relativement 
au  concile  de  Chalcédoine,  et  satisfaire  les 
ennemis  des  Trois-Chapitres.  Enfin ,  quand 
il  vit  que  la  décision  du  concile  de  Constan- 
tinople  était  reçue  de  tout  l'Orient,  et  que 
l'opiniâtreté  de  Justinien  ne  permettait  plus 
d'en  espérer  la  révocation,  il  ne  lui  resta 
plus  d'autre  parti  à  prendre,  pour  consener 
la  paix  à  l'Eglise  et  prévenir  un  schisme 
déplorable,  que  de  confirmer  par  son  auto- 
rité la  décision  orthodoxe  du  concile,  pour  la 
faire  recevoir  par  les  Églises  de  l'Occident.» 

'  Annales  de  Philosophie,  lom.  XLVI,  art.  i.\. 
'  Gilboo,  Décline  and  fait,  47. 


APPRECIATION  DE  M.  EDOUARD  DCMON. 

M.  Edouard  Dumont  '  (2429)  rappelle  que 
«  Marca,  dans  sa  longue  et  minutieuse  dis- 
sertation de  Décréta  Vigilii  /'a;xr,  a  très-bien 
prouvé  que  ce  qu'on  appelle  faiblesse  et  in- 
constance dans  ce  Pape,  n'a  été  que  pru- 
dence. De  plus,  celte  prudence  a  été  si  fer- 
me et  si  charitable  tout  ensemble,  qu'un  tel 
homme  n'a  pas  pu  commencer  par  le  sacri- 
lège d'une  lâche  et  homicide  simonie.  »  On 
serait  en  droit  au  moins  d'en  douter  sur  co 

seul  indice ;  et  l'on  peut  affirmer  que  les 

débats  du  cinquième  concile  sont  le  dernier 
fait  qui  complète  l'apologie  de  Vigile...  Tout 
est  dit  sur  ce  Pape,  non  sur  le  cinquième 
concile.  Lorsque  Théodose  Ascides  pro- 
posa de  condamner  les  Trois-Chapitres,  la 
première  question  qui  s'éleva  fut  de  savoir 
s'il  était  permis  d'anathématiserles  morts... 
La  réser\-e  du  concile  de  Chalcédoine  avec 
Théodore  de  Mopsueste,  était  pour  les  ca- 
tholiques d'Occident  un  motif  d'absten- 
tion. «  Gibbon  ',  reprend  M.  Edouard  Du- 
mont ',  s'est  superbement  emparé  du  sen- 
timent des  Églises  latines,  qui,  «  si  elles 
(i  eussent  combattu  sous  l'étendard  de  Rome, 
«  auraient  peut-être  fait  triompher  la  cause 
«  de  la  raison  et  de  l'humanité;  mais  leur 
«  chef  était  captif....  Le  trône  de  saint  Pierre, 
a  déshonoré  par  la  simonie,  fut  trahi  par  la 
«  lâcheté  de  Vigile,  qui,  après  une  lutte  lon- 
«  gue  et  inconséquente,  se  soumit  au  despo- 
«  tisme  de  Justinien  et  aux  sophismes  des 
«  Grecs.  Son  apostasie  excita  l'indignation 
«  des  Latins...»  Il  faut  avouer  qu'un  histo- 
rien serait  fort  embarrassé,  et  qu'il  devien- 
drait impossible  aux  honnêtes  gens  d'écrire 
sur  les  temps  passés,  si  l'opinion  des  Latins 
et  le  scrupule  des  Pères  de  Chalcédoine  de- 
vaient faire  loi.  (Vest  pourquoi  la  Providence 
a  permis  que  l'opinion  des  Grecs  et  du  cin- 
quième concile  prévalut;  et, parce  que  cette 
opinion  est  exacte.  Dieu  s'est  servi  encore 
ici  merveilleusement  de  la  mauvaise  inten- 
tion des  hommes  pour  proclamer  le  vrai,  à 
leur  insu  et  malgré  eux.  Car,  de  ce  que  le 
cinquième  concile  a  eu  raison,  l'on  aurait 
grand  tort  de  conclure  que  les  évêques  orien- 
taux sont  arrivés  de  dessein  prémédité  à  ce 
but.  Il  n'est  pas  douteux  que  les  moteurs  de 

'  Ann.  de  Philos.,  tom.  XLVH,  pog.  52.  Art.  x. 


[vil"  SIÈCLE.]  SUPPLÉMENT. 

cette  question  voulussonl  cliîtruirc  par  ce 
moyen  les  dtScrels  de  r.lialcédoino  et  relever 
l'iiérésie  crEiitycIi(''s.  On  s'est  plu  ;ï  montrer 
que  le  Pape  s'est  d'abord  tromp(5,  et  qu'il  a 
C(5dë  bon  gié  mal  gvé,  an  concile.  Outre  que 
le  fait  est  faux,  connue  on  l'a  vu,  et  qu'il  n'a 
ccVlé  qu';"!  sa  propre  réilexion,  ;\  la  droiture 
d'un  esprit  non  opiniâtre,  on  aurait  du  re- 
marquer plus  judicieusement  :  1°  que  Vigile 
a  dominé  les  Orientaux  et  le  concile  en  deux 
points  essentiels  :  en  ce  qu'il  n'a  pas  souf- 
fert qu'on  s'écart'it  du  concile  deClialcëdoine, 
dont  le  cinquième  concile  a  commencé  par 
reconnaître  l'orthodoxie  inébranlable  ;  et  en 


919 


ce  que  Théodore  de  Mopsucste  seul  a  été 
condamné,  non  la  personne  do  Théodoret  ni 
celle  d'ibas.  Le  Pape  est  donc  resté  le  maî- 
tre, on  plutôt  par  lui,  le  dogme  et  la  tradi- 
tion. 2°  Non-seulement  le  concile  n'a  valu 
que  par  la  conformité  du  décret  pontifical, 
si'parémonl  promulgué,  mais  encore  pour 
avoir  tenté  de  mépriser  son  opposition  et 
voulu  traiter  d'égal  avec  le  Pape,  le  concile 
s'est  vu  rejeté  et  méprisé  pendant  très-long- 
temps; il  a  fallu  toute  l'autorité  du  Saint- 
Siège  pour  le  faire  recevoir  en  Occident,  et 
jamais  on  ne  lui  a  rendu  le  même  respect 
qu'aux  quatre  conciles  précédents.  » 


AUTRE   SUPPLÉMENT 


Jean  le  Scholastiqne. 


Jean  le  Scbolastique  ou  l'avocat  plus  versé 
par  sa  profession  dans  l'élude  des  lois  civiles 
que  dans  ceLe  des  canons  de  l'Église,  passa 
du  barreau  dans  le  clergé  d'Antioche,  peut- 
être  sans  abandonner  entièrement  sa  place 
dans  le  collège  alors  florissant  des  juriscon- 
sultes de  cette  ville.  Il  est  certain  que  simple 
prêtre  il  entreprit  '  de  rédiger  l'un  des  plus 
anciens  codes  ecclésiastiques  connus ,  et 
classa  dans  un  ordre  métbodicpie  et  philoso- 
phique cinq  à  six  cents  canons  déjà  mis  en 
circidation,  émanés  des  conciles  et  des  grands 
sièges  épiscopaux.  Sa  collection  des  Cinçwan^e 
Titres  serait  le  point  de  départ  de  tous  les 
systèmes  de  canons,  si  lui-même,  dans  sa 
préface,  ne  mentionnait  un  recueil  antérieur 
de  soixante  titres.  L'école  de  droit  d'Antio- 
che fat  supprimée  en  533  par  la  fameuse 
constitution  de  Justinien  ad  antecessores ,  qui 
réserva  cette  étude  aux  capitales  de  l'empire, 
et  flt  refluer  les  maîtres  et  élèves  des  écoles 
d'Orient  à  Constantinople*.  Jean  d'Antioche 
fut  d'ailleurs  nommé  apocrisiaire  ou  procu- 
reur des  affaires  de  son  église,  pendantes 
en  cour  impériale;  il  était  donc  naturelle- 
ment appelé  à  fixer  l'attention  de  Justinien, 

'  Le  titre  est  foruiel  dans  la  plupart  des  manus- 
crits. 

'  Voir  Mortrcuil,  tom.  I,  pag.  109  et  ItO. 

»  Manuscrit  Coislin,  209.  Il  n'existe  à  notre  con- 
naissance que  deux  manuscrits  de  cette  seconde  ri!- 
censiou  :  l'un  cslle  n<'8i3  du  Vatican  et  l'autre  le 
n"48:idu  supplément  grec,  à  la  Bibliothèque  Impé- 
riale,celui-ci  récemment  apporté  de  la  Grèce  par  Mi- 
maïde  Miuas.  Nous  avons  cru  devoir  rendre  compte 


qui  le  substitua,  non  sans  violence,  an  saint 
patriarche  Eut jxhius ,  peu  docile  à  seconder 
les  fantaisies  théologiqnes  de  l'auteur  du 
Digeste.  On  n'a  pas  remarqué,  que  nous  sa- 
chions ,  une  seconde  rédaction  de  la  collec- 
tion des  Cinquante  Titres,  que  Jean  a  dû  exé- 
cuter après  sa  promotion  au  siège  patriarcal. 
Plus  correcte ,  plus  méthodique ,  plus  con- 
forme à  la  série  chronologique  des  canons, 
elle  n'est  plus  signée  seulement ,  comme  la 
première,  du  nom  d'un  simple  prêtre  ex-avo- 
cat («oàTiè  (TxoXairtxùv) ,  mais  de  Jean  ,  évêque 
de  Constantinople,  mis  en  place  d'Eutychius, 
comme  porte  un  manuscrit  '.  Il  exécuta  sur 
les  lois  civiles  mi  travail  analogue  ,  récem- 
ment édité  pour  la  première  fois  par  Hcim- 
bach  :  c'est  la  collection  des  Quatre-vingts 
Titres,  compilés  sur  le  Digeste,  les  Insti tûtes 
et  les  Novelles  de  Justinien,  peu  après  la  mort 
de  ce  prince,  auquel  il  sut  assez  résister  pour 
être  honoré  par  lui  de  l'exil,  «es  doux  col- 
lections, dans  leur  objet  et  leur  but,  sont 
très-distinctes ,  et  en  somme  inoll'ensives, 
quoiqu'elles  soient,  par  leur  juxta-position 
même  ,  un  acliominement  ii  la  confusion  (pii 
tentera  d'identifier  les  deux  législations'. 

de  ce  travail  dans  le  1V«  volume  du  Spicilége  et 
en  détacher  une  pièce  importante  à  peu  près  nou- 
velle, qu'il  faudra  joindre  aux  fragments  du  con- 
cile de  Nicée  que  nous  avons  pul)li('s  en  notre 
premier  volume.  Vid.  Asseman.  Bibliolh.  Orient., 
tom.  III,  pag.  367.  Le  manuscrit  du  Vatican  est 
très  mutilé. 

*  Des  canons  et  des  collections  canoniques  de 
l'Église  grecque,  par  le  P.  Uoui  Pitra,  Paris,-  858. 


FIN  DU  TOME  ONZIÈME. 


TABLE  mimm 


DES 


MATIÈRES  CONTENUES  DANS  CE  ONZIÈME  VOLUME. 


ABBÉ,  qualités  et  fonctions  de  l'abbé,  et  des 
autres  supiîrieiirs,  p.  1(32  et  suiv.  Un  abbé  ne  peut 
gouverner  deux  monastères,  ni  en  établir  un 
nouveau  à  l'insu  de  l'évi^que,  p.  815.  Les  abbés 
qui  méprisent  les  ordres  des  évêques  sont  exclus 
entièrement  de. la  communion,  p.  849.  Il  est  dé- 
fendu aux  abbés  de  s'absenter  pour  longtemps 
sans  la  permission  de  l'évêque  diocésain,  p.  882. 
L'abbé  doit  être  choisi  par  le  consentement  libre 
et  unanime  de  toute  la  communauté,  et  tiré  de 
son  corps,  p.  512  et  797.  C'était  l'évêque  qui  l'or- 
donnait, ou  le  bénissait  pendant  la  célébration  des 
mystères,  p.  797,  798.  Il  lui  mettait  en  main  le 
bâton  pastoral,  ibid.  Quel  doit  être  l'abbé  suivant 
saint  Isidore  de  Séville,  p.  723.  Saint  Grégoire  dé- 
fend de  choisir  pour  abbé  un  clerc  attaché  à  quel- 
que église  particulière,  p.  490.  .4bbé  faitévêque  : 
tous  les  biens  qu'il  a  acquis  pendant  qu'il  était 
évoque  appartiennent  de  droit  au  monastère, 
p.  518.  L'abbé  ne  peut  donner  à  un  autre  le  gou- 
vernement de  son  monastère,  ni  se  choisir  un 
successeur,  p.  798. 

ABDESSES.  Instructions  que  saint  Césaire  d'Ar- 
les donne  à  une  abbesse,  p.  152  et  153.  Autres 
Instructions  qu'elle  adresse  à  sa  sœur  Césarie, 
p.  153. 15.t.  Témoignage  de  saint  Grégoire  deTours 
sur  les  abbesses,  p.395.  Saint  Grégoire  le  Grand 
défend  d'élire  des  abbesses  au-dessous  de  60  ans, 
p.  496  et  575.  Elles  étaient  bénites  par  les  évê- 
ques, p.395.  Abbesses  qui  ne  portaient  pas  l'habii 
religieux,  p.  513.  Elles  ne  pouvaient  pas  disposer 
de  leurs  biens,  si  ce  n'est  en  faveur  de  leur  mo- 
nastère ,  ibid.  Lorsque  dans  un  monastère  il  n'y 
avait  point  de  flllo  capable  d'être  abbesse,  saint 
Grégoire  en  envoyait  d'ailleurs  à  la  demande  de 
l'évêque  diocésain,  p.  520.  Les  abbesses  héritaient 
de  leurs  parents  suivant  le  droit,  mais  la  règle 
de  saint  Benoît  le  défendait,  p.  529. 

ABBON,  évêque  de  Metz  :  saint  Didier  de  Ca- 
hors  lui  écrit,  p.  733. 

ABELLEN,  évêque  de  Genève,  p.  618. 


AB0ND.4.NTIA,  mère  de  saint  Benoît,  p.  156. 

ABRAHAM  (saint),  abbé  de  Ciragues.  Saint  Gré- 
goire do  Tours  écrit  sa  vie,  p.  380. 

ABRAMIUS,  roi  des  Ilomérites,  p.  a79. 

ACAIRE  (saint),  évoque  de  Noyon  ;  sa  mort, 
p.  754. 

ACÉJIÈTES,  moines  condamnés  par  le  pape 
Jean  II  comme  coupables  de  nestoriunisme,  p. 118. 

ACÉPHALES  schismaliques.  Leurs  erreurs  com- 
battues dans  l'ouvrage  de  Facundus  évêque  d'Her- 
miane  pour  la  défense  des  T rois-Chapitres,  p.  285 
et  suiv.  Ouvrage  composé  contre  eux  par  Rustique 
diacre  de  l'Eglise  romaine,  p.  300.  Ils  infectèrent 
de  leurs  erreurs  une  partie  de  l'Arménie,  p.  916. 
—  Écrits  de  saint  Euloge  d'Alexandrie  contre  les 
acéphales,  p.  591.  Traité  de  Jean  Philoponus  con- 
tre ces  hérétiques;  il  est  resté  manuscrit,  p.  652. 
Leurs  erreurs  condamnées  dans  un  concile  de  Sé- 
ville, p. 915, et  au  concile  de  Théodosiopolis,  p. 916. 

ADAM.  Son  péché  est  passé  par  la  voie  de  la 
génération  à  tous  ses  descendants,  p.  96. 

ADAMN.VN,  abbé  de  Hi  en  Hibernie,  succède 
à  Failbeus,  p.  800.  Ce  qu'on  sait  des  circonstances 
de  sa  vie,  ibid.  Sa  mort,  ibid.  Ses  écrits;  sa  des- 
cription de  la  Terre-Sainte,  ibid.  et  801.  Ce  qu'il 
y  a  de  remarquable  dans  cet  ouvrage,  p.  801,  802. 
Adaranan  compose  la  Vie  de  saint  Colomban,  pre- 
mier abbé  de  Hi,  p.  802. 

ADELME  isaint),  sa  naissance,  ses  études.  Il 
est  fait  abbé  de  Malmesburi,  puis  évêque  de 
Schirburn,  p.  804.  Ses  écrits:  son  traité  contre 
les  Bretons,  ibid.  Son  traité  de  la  louange  de  la 
virginité,  ibid.  et  805.  Son  traité  des  huit  vices, 
p.  8U5.  Ses  énigmes,  ses  lettres,  ses  poésies,  ibid. 
Edition  complète  de  ses  œuvres  dans  la  Patro- 
logie,  p.  805  et  suiv. 
ADELPHIUS,  évêque  de  Tolède,  p.  907. 

ADELPHIUS,  qu'on  disait  condamné  au  concile 
d'Épbèse,  p.  405. 

ADÉODAT,  pape  ;  temps  durant  lequel  il  oc- 
cupe le  Saint-Siège,  p.  783.  Sa  mort,  ibid. 


922 


TABLE  ANALYTIQUE. 


ADÉODAT,  patrice  de  Numidie;  saint  Grégoire 

le  Grand  lui  t'crit,  p.  193. 

ADILA.  Théodoric  lui  écrit  pour  le  charger  de 
veiller  à  la  garde  des  biens  de  l'église  de  .Milan, 
p.  2U. 
ADOPTION  par  la  réception  des  cheveux,  p.  785. 
ADORATIO.\.  Celle  ijue  nous  rendons  à  Dieu 
est  différente  de  celle  que  nous  rendons  aux  an- 
ges et  aux  hommes,  p.  360. 
ADORER,  se  prend  pour  saluer,  p.  751. 
ADRIEN,  évêque  de  Thébes,  condamné  injus- 
tement, en  appelle  à  l'empereur  Maurice  et  à  saint 
Grégoire  le  Grand,  p.  490. 

ADKIEiX,  abbé,  envoyé  en  Angleterre  avec  le 
moine  Théodore,  refuse  l'épiscopat,  p.  77(3. 

ADRIE.N,  auteur  d'une  introduction  à  la  Sainte- 
Ecriture,  p.  95;  éditions  de  cet  ouvrage,  ibid. 

ADRIEN,  notaire  del'alerme  ;  saint  Grégoire  le 
Grand  lui  écrit,  p.  522. 

AFFRANCHIS  de  l'Église.  11  est  défendu  de 
les  contraindre  à  servir  le  public,  p.  912. 

AFRIQUE.  Les  évéques  d'Afrique  envoient  au 
Saint-Siège  leur  confession  de  foi,  et  se  déclarent 
contre  les  monothélites,  p.  749.  saint  Grégoire 
prend  soin  des  Églises  d'Afrique,  p.  434. 

AGAPET  ou  AGAPIT  (sainti.  Pape.  Son  ordina- 
tion en  535,  p.  118.  L'empereur  Justinien  lui  en- 
voie sa  confession  de  foi,  iftid.  Lettres  de  ce  Pape  à 
l'Empereur,  ibid.  et  119;  aux  évéques  d'Afrique, 
p.  119  ;  il  saint  Césaire  d'Arles,  ibid.  et  120.  Saint 
Agapet  va  à  Constantinople,  p.  120:  fait  déposer 
AntLime,  ibid.;  il  guérit  à  Constantinople  un 
homme  qui  ne  pouvait  parler  ni  se  lever  de 
terre,  p.  475.  Sa  mort,  p.  i2l.  La  lettre  à  An- 
thime  qu'on  lui  attribue  est  visiblement  suppo- 
sée, p.  121  et  122.  Eloge  de  ce  Pape,  p.  537. 

AGAPET,  diacre  de  l'église  de  Constantino- 
ple, donne  des  avis  importants  à  l'empereur  Jus- 
tinien, p.  2GG. 

AGAPET,  moine  de  Saint-George  d"Or\'iette, 
p.  481. 

AGATHE  (sainte;.  Les  ariens  s'emparent  de 
l'église  de  Sainte- Agathe  sous  les  rois  Goths, 
p.  496  ;  elle  est  rendue  aux  catholiques,  ibid.. 
Reliques  de  sainte  Agathe,  p.  485. 

AGATIIIAS,  poète  et  historien  grec,  a  continué 
l'histoire  de  Procope,  p.  G92  ;  éditions  de  cette 
hisloire  divisée  en  cinq  livres,  ibid..  Recueil 
des  Épigrammatisles  grecs,  ibid.  Jugement  sur 
Agathias,  ibid. 

AGATHON  (saint).  Pape,  succède  à  Domnus, 
p.  783.  Sa  réponse  à  la  lettre  que  l'empereur 
Constantin  avait  écrite  au  pape  Domnus,  ibid. 
11  tient  un  concile  à  Rome,  p.  783.  Lettre  fausse- 
ment attribuée  au  pape  Agalhon,  ibid.  et  784.  Sa 
mort,  p.  784. 

AGATIION,  homme  marié,  écrit  ii  saint  Gré- 
goire le  Grand,  p.  50G. 

AGI  LAN,  arien,  ambassadeur  du  roi  d'Espagne 
à  la  cour  de  France,  p.  366,  embrasse  la  religion 
catholique,  ibid. 

AGILE  (saint),  premier  abbé  do  Rebais,  p.  756. 

AGILULFE,  roi  des  Lombards,  assiège  Rome, 
p.  452;  reçoit  très-bien  saint  Colomban,  p.  oiOi 


il  fait  un  traité  avec  saint  Grégoire  le  Grand, 
p.  517. 

AGNELLE,  évêque  de  Fondi,  transféré  à  Terra- 
cine,  p.  490  ;  saint  Grégoire  lui  écrit,  p.  480  et  580. 
AGNELLLS,  d'abord  diacre,  puis  archevêque 
de  Ravenne,  p.  349.  Sa  mort,  ibid.  Sa  lettre  à 
Arménius,  dans  laquelle  il  établit  contre  les 
ariens  la  consubstantialité  du  Verbe,  ibid. 

AG.NOITES,  hérétiques  réfutés  par  saint  Eu- 
loge  d'Alexandrie  et  par  saint  Grégoire,  p.  439, 
519,  592. 

AGRESTE  ou  AGRESTIN,  moine  de  Luxeuil, 
avait  été  auparavant  secrétaire  du  roi  Théodoric, 
p.6i8;  il  calomnie  la  règle  de  saint  Colomban, 
ibid.  ;il  est  confondu  au  concile  de  Maçon  en  625, 
ibid.  Sa  mort  funeste,  p.  618. 
AGRIPPIN,  évêque  d'Autun,  p.  307. 
AILERAN  (saint).  Hibernais,  auteur  ecclésias- 
tique :  Explication  morale  et  mystique  des  noms 
des  ancêtres  de  Jésus-Christ,  seul  ouvrage  qui 
nous  reste  de  cet  auteur,  p.  629,630. 

AIRIC  (saint),  évêque  de  Verdun,  exorcise  une 
femme  qui  avait  l'esprit  de  Python,  p.  370. 

ALAMONDARE,  prince  des  Sarrasins, embrasse 
la  foi  de  Jésus-Christ,  p.  104. 

ALARIC,  roi  des  Visigoths.  Clovis  défait  son 
armé  e  et  le  tue  de  sa  propre  main,  p.  80. 

ALBOFLÈDE,  sœur  du  roi  Clo\is,  est  baptisée 
par  saint  Rémi,  p.  79;  elle  consacre  à  Dieu  sa 
virginité  ;  ibid.  Sa  mort,  ibid. 

ALBOIN,  roi  des  Lombards,  infecté  de  l'aria- 
nisme,  p.  203. 

ALCYSON,  évêque  de  Corcyre  ou  Corfou,  p.  533, 
535. 

ALDOADE,  fils  de  Théodelinde,  reine  des  Lom- 
bards, p.  534. 

ALDIBERGE  ou  Berthe,  reine  d'Angleterre:  sa 
charité  pour  saint  Augustin,  p.  521  ;  saint  Gré- 
goire l'en  remercie,  ibid. 
ALFRIDE,  roi  do  Northumbre;  sa  mort,  p.  801. 
ALIÉN.ATION  des  biens  de  l'Église  défendue, 
p.  8G0.  Lois  de  l'empereur  Justinien  touchant  les 
aliénations,  p.  256,  257,  258. 

ALLELUIA.  Par  qui  introduit;  en  quel  temps 
on  doit  le  chanter,  p.  5i4.  En  Afrique  on  le  chan- 
tait seulement  les  dimanches  et  pendant  la  cin- 
quantaine de  Pâques,  p.  717.  Les  Églises  d'Espa- 
gne le  chantent  en  tout  temps,  hors  les  jours  de 
jeune  et  de  carême,  ibid.  Les  Grecs  le  chantent  aux 
enterrements  des  morts  et  pendant  le  carême, 
p   415. 

ALTIIÈ.ME  (saint),  apôtre  des  Saxons  occiden- 
taux :  on  lui  attribue  ;t  tort,  à  ce  qu'il  semble,  le 
poème  intitulé  :  ilonostichon  ;  cet  écrit  est  plu- 
tôt l'œuvre  de  saint  Colomban,  p.  028. 

ALULFE,  moine  de  Saint-Martin,  fait  des  ex- 
traits des  ouvrages  do  saint  Grégoire  le  Grand, 
p.  551. 

AMALASONTIIE,  mère  du  roi  Athalaric,  p.  S17; 
son  éloge  par  Cassiodore,  ibid. 

AMAND  (saint),  évêque  deMaèstricht;  le  pape 
saint  M;irlin  lui  écrit,  p.  749. 

AMAND  (saint),  évêque  de  Kodez;  sa  vie  écrite 
par  Fortunat,  p.  412. 


TABLE  ANALYTIQUE. 


923 


AMATEUR  (saint),  évCquo  d'Au\orre,p.  400;  sa 
viP  (^crlte  par  le  pri^lre  Ktiennc,  p.  323. 

AMBOiN  011  Irihune  dans  l'église,  p.  539. 

AMBUOISlî,  (lu  rang  des  Illustres,  vicaire  de 
Ronio.  Cassiodorc  lui  Ocril,  p.  218.  Autre  lettre 
(]uil  lui  t^crit  pour  le  charger  de  faire  de  grandes 
provisions  ei:  provision  de  la  famine,  p.  -220. 

AMK.  Klle  est  immortelle  sans  être  une  par- 
tic  de  la  Divinité,  p.  3H7.  Un  temps  de  saint 
Grégoire,  plusieurs  doutaient  de  l'immortalité  de 
l'àme  et  de  la  résurrection  des  corps,  p.  477.  Traité 
de  rime  par  Cassiodore,  p.  23^  et  sniv.  Délinitiun 
do  l'âme,  p.  238;  elle  est  spirituelle,  immortelle  , 
ibid.  et  239.  Sa  qualité  substantielle,  p.  239,  240; 
sa  forme,  p.  240;  ses  vertus  morales  et  natu- 
relles, p.  2i0.  Origine  et  siège  de  l'âme,  d'après 
Cassiod  iro,  p.  210,241.  Question  de  l'origine  de 
l'Ame  indécise,  p.  63.  État  de  l'âme  après  la 
mort,  p.  241  ;  ce  qu'on  doit  croire  de  la  nature 
de  l'âme,  d'après  saint  Fulgence,  p.  03.  Plusieurs 
apparitions  des  âmes,  ou  dans  le  temps  de  leur 
séparation  d'avec  le  corps ,  ou  quelque  temps 
après, p.  478.  Saint  Sophrone  condamne  l'erreur 
d'Origene  et  de  Didyme  sur  la  préexistence  des 
âmes,  p.  704. 

AMELILiS,  évéquede  Paris,  député  au  iv'  concile 
d'Orléans,  p.  859. 

AMOS,  patriarche  de  Jérusalem,  p.  510. 

ANASTASE  (saint) ,  patriarche  d'Antioche ,  se 
rend  odieux  à  l'empereur  Justin  qui  le  fait  chas- 
ser de  son  siège  et  fait  mettre  à  sa  place  saint 
Grégoire,  abbé  du  Mont-Sina,  p.  356.  Motifs  de 
cette  disgrftce,  ibid  et  359.  Aprèsla  mort  de  Gré- 
goire, il  est  rétabli  à  Anliocbe,  p.  359.  Saint  Gré- 
goire-le-Grand  lui  écrit  plusieurs  lettres  pour  le 
consoler  et  le  congratuler  sur  son  retour,  ibid.  et 
360.  .160,  482,  510.  Sa  mort,  p.  359.  L'empereur  le 
charge  de  traduire  en  grec  le  Pastoral  de  saint 
Grégoire,  ibid.  et  p.  528.  Ses  discours  sur  la  Tri- 
nité, ibid.  et  361;  sur  l'incirconscrit,  où  il  éta- 
blit l'immensité  de  Dieu,  p.  361;  sur  l'Incarna- 
tion, ibid.  et  362;  sur  la  Passion,  p.  362;  sur  la 
Résurrection,  ibid.  et  363.  Ouvrages  qui  lui  sont 
faussement  attribués,  savoir  :  les  discours  sur 
les  trois  Carêmes,  les  Réponses  aux  orthodoxes, 
l'Abrégé  de  la  Foi,  p.  363.  Ouvrages  qui  sont 
perdus  ou  qui  n'^nt  pas  encore  été  imp:imés, 
p.  363.  Éditions  de  ses  écrits,  p.  364.  365.  11  doit 
être  distingué  d'Anastase  surnommé  le  Jeune,  qui 
lui  succéda,  et  d'Anastase  le  Sinaïte,  p.  b9i. 

ANASTASE  (.saint)  surnommé  le  Jeune,  pa- 
triarche d'Antioche,  succède  a  Anastase  l'Ancien, 
p  594.  Il  est  tué  par  les  Juifs  dans  une  sédition, 
et  on  l'honore  comme  martyr,  ibid. 

ANASTASE  (saint),  le  Sinaïie,  prêtre  et  moine 
du  Sinaï;  estime  qu'ont  pour  lui  les  Grecs  mo- 
dernes, p.  594.  Ses  voyages,  ibid.  Ce  qu'on  peut 
conjecturer  sur  le  temps  où  il  a  vécu  ,  ibid.  h'O- 
dégos  on  Guide  du  vrai  Chetnin  est  de  lui,  ibid. 
et  595.  Analyse  de  ce  livre,  p.  595  et  suiv.  Ses 
considérations  anagogiques  sur  la  création  du 
monde,  p.  599;  ce  que  ces  livres  contiennent  de 
remarquable,  p.  600.  Ses  154  questions,  p.  601. 
Éditions  qu'on  en  a  faites ,  ibid.  Analyse  de  ces 


questions,  p.  602  et  suiv.  Trois  discours  -.  i"  dis- 
cours sur  la  sacrée  Synaxc  et  le  pardon  des  in- 
jures ;'analyse  de  ce  discours,  ibid. cl  suiv.;  2°  ana- 
lyse des  deux  autres  sur  le  psaume  VI ,  p.  608. 
Autres  écrits  attribués  ;"i  Anastase  sinaïte,  ibid.el 
600.  Livres  d'Anast;ise  qui  sont  perd  :s,  p.  009  et 
010.  Édition  des  œuvres  d'Anastase  dans  la  Pa- 
trologie,  p.  610. 

ANASTASE,  médecin:  on  lui  défend  l'entrée 
d'un  monastère  de  lillcs,  p.  199. 

ANASTASE,  évéque  de  Mcée,  assiste  au  concile 
de  Constantinople  sous  .Mennas,  p.  601. 

ANASTASE  (saint),  disciple  de  saint  Maxime, 
opposé  au  raonothélisrae;  l'empereur  Constantin 
le  fait  enlever  de  Rome  où  il  était  avec  saint 
Maxime,  p.  760;  ils  sont  amenés  l'i  Constantinople, 
mis  en  prison:  ce  qu'ils  soutirent  pour  la  fol 
ibid.  Maxime  est  relégué  à  Perbère,  ibid.  et  762, 
puis  a\i  pays  des  Lazes,  p.  762.  Sa  mort,  ibid.  Sa 
lettre  aux  moines  de  Cagliari,  p.  772. 

ANAST.4.SE  (saint),  apocrisiaire  de  Rome,  op- 
posé au  monotbélisme,  est  enlevé  avec  saint 
îllaxime.  et  a  part  à  tous  les  mauvais  traitements 
qu'on  lui  fait  souffrir,  p.  760,761;  il  est  relégué  à 
Mésembrie,  puis  au  pays  des  Lazes,  p.  762.  Sa 
mort,  p.  762.  Sa  lettre  â  Théodore,  prêtre  de 
Gangres,  sur  les  souffrances  de  saint  Maxime  et 
de  ses  compagnons,  p.  772.  Quoiqu'on  lui  eût 
coupé  la  main,  il  a  écrit  plusieurs  ouvrages;  il 
parlait  distinctement,  quoiqu'on  lui  eût  coupé  la 
langue  jusqu'à  la  racine,  ibid. 

ANASTASE,  prêtre  de  Jérusalem:  saint  Grégoire 
le  charge  de  réconcilier  son  évêque  avec  le  su- 
périeur du  monastère  de  Néas,  p.  509. 

AN.ASTASE,  chancelier,  à  qui  Cassiodore  écrit, 
p.  219. 

ANATOLE  ,  nonce  à  Constantinople,  saint  Gré- 
goire le  Grand  lui  écrit  au  sujet  de  Jean  évê- 
que de  la  première  Justinienne,  p.  523. 

ANATOLE,  diacre  de  Rome  :  lettre  que  lui  écrit 
Ferrand,  diacre  de  Carthage,  contre  l'hérésie  d'Eu- 
tychès,  p.  88. .\utre lettre  qu'il  lui  écrit,  ainsi  qu'au 
diacre  Pelage  sur  la  condamnation  des  Trois- 
Chapitres,  ibid.  et  suiv. 

ANATOLE  scholastique  propose  cinq  questions 
à  Ephrem,  patriarche  d'Antioche;  réponse  à  ces 
questions,  p.  173. 

AN  VTOLIUS  à  qui  Cassiodore  écrit,  p.  219. 

ANDRÉ  (saint\  prêche  l'Évangile  dans  l'Acha'ie, 
p.  400, 553  ;  souffre  le  martyre  à  Patras,  p.  374  ;  mi- 
racles à  son  tombeau,  ibid.;  livre  de  ses  miracles 
par  saint  Grégoire  de  Tours,  p.  383;  monastère 
de  Saint-André  à  Rome;  saint  Grégoire  ie  Grand 
s'y  retire,  p.  432. 

ANDRÉ,  évêque  de  Césarée  en  Cappadoce.p.  265. 

ANDRÉ,  moine,  corrompt  une  lettre  d'Eusèbe  de 
Thessalonique,  p.  527;  il  compose  divers  écrits 
sous  le  nom  de  saint  Grégoire,  ibid,  -.  ce  Pape  le 
condamne  dans  un  concile  comme  faussaire,  page 
530  et  908. 

ANDRÉ,  évêque  de  Tarente.  p.  493. 

ANDRÉ,  du  rang  des  Illustres  :  saint  Grégoire  le 
Grand  lui  envoie  de  la  limaille  des  chaînes  de 
saint  Pierre,  p.  483. 


924 

AKION  (comte),  p.  528. 

ANDROCINIEN.  Temps  où  il  a  vécu,  p.  643  ;  ses 
deux  livres  contre  les  eunomiens,  ibid. 

ANGES.  Doctrine  de  saint  Fulgence  sur  les  an- 
ges, p.  52,  61, 67.  Doctrine  du  moine  Jobius,  p.  183. 
Doctrine  de  Cosme  d'Egypte,  p.  188.  Doctrine  d'A- 
rétas  de  Césarée,  p.  205.  Sentiment  de  saint  Gré- 
goire sur  les  anges,  p.  444,  4J9,  504.  Si  ce  Pape 
les  a  crus  corporels,  ibid.  Raisons  qui  ont  empê- 
ché Moïse  de  parler  de  leur  création,  p.  183.  Ils 
ont  été  créés  en  même  temps  que  le  ciel  et  la 
terre,  p.  188.  Ils  sont  employés  à  divers  offices 
corporels,  p.  188.  Nos  prières  étant  présentées  à 
Dieu  par  les  anges  qui  veillent  sur  nous,  en  de- 
viennent plus  agréables,  p.  îG5.  Chaque  homme 
a  un  ange  gardien,  p.  188,  70-5,  de  même  que  cha- 
que nation,  ibid.,  p.  188.  Les  anges  gardiens  prient 
pour  nous,  p."688.  Anasta^e  Sinaïte  donne  des  an- 
ges gardiens  auxnouveaux-baptisés,  p.  600.  Doc- 
trine de  saint  Jean  Climaque,  p.  C88.  Homélie 
de  saint  Sophrone  de  Jérusalem  en  l'honneur 
des  saints  anges,  p,  705.  Doctrine  de  saint  Gai 
sur  les  anges,  p.  736.  Sentiment  do  Jean  deThes- 
salonique  sur  les  anges,  p.  787. 

ANGLAIS.  Saint  Grégoire  travaille  à  leur  con- 
version, p.  430,  431:  il  achète  de  jeunes  Anglais 
pour  les  instruire  dans  la  foi,  p.  437  et504;  il  en- 
voie des  missionnaires  en  Angleterre,  p.  437, 
438;  écrit  à  divers  évêques  pour  les  leur  recom- 
mander, p.  506. 

ANCRAI'  ou  Anegray,  premier  monastère  de 
saint  Colomhan,  p.  613. 

ANNATES.  leur  origine,  p.  259. 

ANO.WME  sur  l'Oclateuque,  p.  180. 

Autre  anonyme  sur  la  réception  des  manichéens, 
p.  311  et  342. 

Auire  anonyme  qui  écrit  contre  les  mani- 
chéens, p.  312. 

ANSBERT  (sainli,  archevêque  de  Rouen,  quitte 
la  cour  pour  se  retirer  U  l'abbaye  de  Fontenelle 
dont  il  est  fait  abbé.  p.  811  ;  il  succède  à  saint 
Ouen  dans  l'archevêché  de  Rouen,  ibid;  il  tient 
un  concile  à  Rouen,  ibid.  Sur  une  fausse  accu- 
sation, il  est  relégué  par  l'epin  au  monastère 
d'Aumont  en  Hainaut,  ibid.  Il  y  compose  divers 
traités  de  piété;  nous  ne  les  avons  point,  ibid. 
Sa  vie  composée  par  Aigrade,  ibid.  Deux  sermons 
qu'on  lui  attribue  sans  fondemrnl,  ibid. 

ANONYME.  Oualre  fragments  historiques  sur  le 
V'siècle  d'après  un  anonyme,  publiés  par  .Mal, p. 201. 

ANSOALDE.  évoque  de  l'oiliers,  p.  811. 

ANTECHRIST.  Signes  avant-coureurs  de  l'ante- 
christ,  p.  720.  Il  introduira  la  circoncision  et 
placera  sa  statue  dans  le  temple  de  Jérusalem, 
p.  308. 

ANTHÈME,  sous-diacre  et  défenseur  de  l'Église 
romaine,  p.  505,508. 

ANTHIME,  évoque  de  Trébisonde;  l'impéra- 
trice Théodora  le  fait  transférer  sur  le  siège  de 
Constantinople,  p.  304;  il  est  déposé,  p.  120. 

ANTIENNES.  Pourquoi  ainsi  appelées,  p.  ;m. 

ANTIOCHK.  Incendies  et  Iremlileiueiits  arrivés 
dans  cette  ville,  p.  41H. 

ANTIOCIIUS,  moine  de  Saint-Sabas;  son  abrégé 


TABLE  ANALYTIQUE. 

de  l'Écriture  sainte  intitulé  Pandectes,  p.  698  ;  édi" 
lions  de  cet  ouvrage',  ibid.  ;  sa  relation  du  mar- 
tyre de  quarante  moines  de  la  laure  de  Saint-Sa- 
bas, ibid,  697,  698. 

ANTIPHONAIRE  de  saint  Grégoire,  p.  514 .  au- 
tre antiphonaire  attribué  à  ce  Pape,  ibid. 

ANTIPODES.  Procope  de  Gaze  ne  croit  pas  qu'il 
y  en  ait,  p.  177. 

ANTOINE,  évéque  de  Bacate  ;  le  pape  saint  Mar 
tin  lui  écrit,  p.  7.50. 

ANTONIN,  sous-diacre,  recteur  du  patrimoine 
de  saint  Pierre  en  Dalmalie,  p.  482,  4BS. 

APOLLINAIRE  (saint!:Maxime, évéque  de  Salone, 
se  purge  par  serment  devant  son  tombeau,  p.  516. 

APOLLINARISTES.  Traité  de  Léonce  de  By- 
zance  contre  leurs  fraudes,  p.  670. 

APPONIUS,  auteur  qui  vivait  au  milieu  du 
vit"  siècle,  p.  807,  808.  Son  commentaire  sur  le 
Cantique  des  Cantiques,  p.  809.  Abrégé  de  ce  com- 
mentaire, ibid.  Livres  VII,  VIII  et  une  partie  du 
livre  I.\  sur  l'Exposition,  publiés  par  Maï,  ibid. 

APOTRES.  Pays  où  ils  ont  annoncé  l'Évangile, 
p.  400. 

APRIGIUS,  évéque  de  Badajoz  en  Espagne,  au- 
teur d'un  commentaire  sur  l'Apocalypse  que  nous 
n'avons  plus,  p.  265:  il  avait  aussi  composé  plu- 
sieurs autres  écrits,  ibid, 

APRONIEN.du  nombre  des  Illustres,  écrit  à 
Théodoric  au  sujet  d'un  homme  habile  dans 
l'art  dedécouvrir  les  sources;  Théodoric  lui  ré- 
pond, p. 214,  215. 

ARABES.  Leurs  incursions,  p.  697;  ils  font 
mourir  plusieurs  moines  de  la  laure  de  Saint-Sa- 
bas. ibid. 

ARANSIUS,  archevêque  de  Tolède,  dont  parle 
saint  lldefonse,  quoiqu'il  n'ait  rien  écrit,  p.  699. 

ARATOK,  poète  chrétien,  d'abord  intendant  des 
domaines  de  l'empereur,  p.  197;  le  roi  Tliéodoric 
l'envoie  en  députation  vers  Athalaric,  puis  le  fait 
comte  des  domestiques,  t'ftii'/.;  Arator  embrasse 
l'état  ecclésiastique  et  est  fait  sous-diacre  de  l'É- 
glise romaine  ;  son  poème  des  Actes  des  apdtres 
qu'il  présente  au  pape  Vigile,  ibid.:  idée  de  ce 
poème,  ih.  et  108  ;  éditions  qu'on  en  a  faites,  p.  108. 

ARBOGASTE,  évéque  de  Strasbourir.  Durée  de 
son  épiscopat,  p.  178.  Ses  homélies  en  forme  de 
commentaires  sur  les  Epttres  de  saint  Paul,  ibid. 
Sa  vie  écrite  par  Uthon,  un  de  ses  successeurs, 
ibid.  Ses  écrits,  ibid. 

ABCAUIUS,  archevêque  de  Chypre,  écrit  la  vie 
de  sailli  Simon  le  Jeune,  p.  676. 

ARCn.\NGES.  Ils  sont  destinés  à  la  garde  de 
cliaque  nation  et  de  chaque  royaume,  p  1R8. 

ARCl'I.FE,  évoque  gaulois,  visite  les  Saints- 
Lieux  ;  à  son  retour  il  aborde  à  l'île  de  Ili,  il  y  est 
reçu  par  l'abbé  Adamnan,  p.  800,801. 

ARÉGIl'S,  évéque  de  Gap,  p.  518. 

ARÉTAS,  évéque  de  Césarée  en  Cappadoce,  au- 
teur d'un  comnicntaire  sur  l'Apocalypse,  p.  2G5; 
ce  que  contient  ce  commentaire,  iVnV/.  Editions 
et  traductions  qu'on  en  a  faites,  p.  îOiî:  ,<!on  dis- 
cours en  riioiineur  des  saints  martyrs  Samonc, 
Carie  cl  Abibus,  ibiii. 

ARIEN.  Un  évéque  arien  est  confondu  dans  un 


TABLE  ANALYTIQUE. 


«25 


concllo  par  saint  RL^mi  ;  il  perd  et  recouvre  la 
parole  par  les  iiKîritcsdece  saint,  p.  82.  Conver- 
sion des  ariens  en  Espagne,  p.  900.  .Xnallif'mes 
prononci^s  dans  le  concile  de  Tol6dc  contre  les 
erreurs  des  ariens,  ibid.  Comment  on  les  récon- 
ciliait dans  l'Orient  et  dans  l'Occident,  p.  020,  5:7. 
Leurs  prêtres  étant  convertis,  sont  admis  auxfonc- 
tions  de  leur  ordre,  p.  900. 
ARIOIS,  ducde  Bénévent,  p.  488. 
AUlSTOIîOLE  traduit  en  grec  une  lettre  de 
saint  Grégoire  qui  lui  écrit  à  ce  sujet,  p.  583. 
Sa  lettre  ^  Partliénius,  ibid. 

AUITHMÉTIQUE.  Traité  de  l'arithmétique  par 
Cassiodore,  p.  230. 

AUIULFE  ,  chef  et  non  roi  des  Lombards, 
p.  486,  517. 

ARMÉNIENS,  disciples  de  saint  Sabas,  p.  274. 
Mémoire  sur  le  schisme  des  Arméniens  :  écrit 
que  le  père  Combeûs  attribue  i  Démélrius  de  Cy- 
zique  :  idée  de  cet  écrit,  p.  810. 

ARMENTAIRE,  mî;re  de  saint  Grégoire  de 
Tours,  p.  305. 

ARMEMAIRE,  femme  de  saint  Grégoire,  évo- 
que de  Langres,  p.  381. 

ARTACHIS,  cousin  germain  de  sainte  Radé- 
gonde  ;  Fortunat  lui  adresse  un  poume,  p.  411. 

ARTÉMIUS,  évCque  de  Tarragone,  préside  au 
concile  de  Sarragosse,  p.  906. 

ARTS  LIBÉRAUX.  Traité  de  Cassiodore  sur  les 
sept  arts  libéraux,  p.  235  et  suiv. 

ASCENSION  de  N.-S.;  diverses  marques  mira- 
culeuses de  l'Ascension,  p.  801. 

ASLAlTIQUE,  évêque  de  Tarragone,  préside  au 
concile  de  Barcelone,  p.  907. 
.  ASILE.  L'église  de  Saint-Martin  était  un  asile 
inviolable,  p.  37o,  388.  Ceux  qui  se  retirent  dans 
les  églises  comme  dans  des  lieux  d'asile,  ne  peu- 
vent en  être  enlevés  de  force,  p.  913.  Droit  d'asile 
confirmé,  p.  326. 

ASPASIE,  abbesse,  tombée  dans  un  péché  ca- 
pital; saint  Didier  de  Cahorslui  écrit  pour  l'en- 
gager à  continuer  sa  pénitence,  p.  733. 

ASPEBÈTE,  prince  des  Sarrasins  ;  saint  Euthy- 
mius  le  baptise,  et  change  son  nom  en  celui  de 
Pierre,  p.  273. 

ASTROLOGUES.  Saint  Grégoire  le  Grand  com- 
bat les  imaginations  des  astrologues,  p.  579. 

ASTRONOMIE.  Traité  d'astronomie  par  Cassio- 
dore, p.  237,  238. 

ATHALARIC,  roi  des  Goths,  se  sert  du  minis- 
tère de  Cassiodore,  p.  209;  ses  lettres' p.  215, 216; 
sa  mort,  p.  210. 

ATHANASE,  prêtre  et  moine  du  monastère  de 
Saint-Mile,  en  Lycaonie,  accusé  faussement  d'hé- 
résie, absous  par  saint  Grégoire,  p.  504. 

AUBE.  Habit  des  clercs  pendant  la  célébration 
des  mystères,  p.  904. 

AUBIN  (saint),  évêque  d'Angers,  p.  384;  sa  vie 
écrite  par  Fortunat,  p.  411. 
AUDULFE,  abbé  de  St-Maixent,  en  Poitou,  p.  811. 
AUGUSTIN  i,saint),  l'Église  romaine  suit  et  ob- 
serve la  doctrine  de  ce  saint,  p.  118. 

AUGUSTIN  (saint),  prévôt  du  monastère  de 
Saint-André  à  Rome,  envoyé  par  saint  Grégoire 


en  Angleterre,  p.  i^i,  MO;  y  arrive,  p.  437,  4.38; 
succès  de  sa  mission;  il  bapliso  le  roi  Ethelbert 
et  un  grand  nombre  de  ses  sujets,  p.  438.  Il  est 
établi  archevêque  de  Cantorbéri  et  métropolitain 
de  douze  évêques  qui  recevaient  l'ordination  de 
lui,  ibid.  il  rend  la  vue  a  un  aveugle,  p.  909;  bâ- 
tit un  monastère  en  l'honneur  de  saint  Pierre  et 
de  saint  Paul,  p.  910;  saint  Grégoire  le  Grand 
lui  accorde  le  Pallium,  p.  5>7.  Mémoire  que  saint 
Augustin  envoie  à  siint  Grégoire,  qui  répond  h  ses 
questions,  p.  524,  ibid.  et  suiv  ;  il  lui  écrit  au  su- 
jet de  l'établissement  des  évêchés  en  Angleterre, 
p.  527.  Avis  de  saint  Grégoire  à  saint  Augustin 
sur  ses  miracles,  p.  .■'>2l. 

AUMONES  abondantes  de  saint  Grégoire,  p.  481, 
482,  485. 

AUNAIRE  ou  Aunacairc  (saint), évêqued'.\uxer- 
re,  assistée  plusieurs  conciles  de  France,  règle 
les  processions  que  l'on  doit  faire  tous  les  jours 
de  chaque  mois  dans  les  paroisses  de  son  dio- 
cèse, p.  323  ;  il  règle  encore  la  manière  de  célébrer 
les  vigiles  dans  l'église  cathédrale  de  Sainl-Étien- 
ne,  ibid.  Sa  lettre  au  prêtre  Etienne,  pour  le 
charger  d'écrire  la  Vie  de  saint  Amateur  et 
celle  de  saint  Germain,  deux  de  ses  prédéces- 
seurs, p.  324;  réponse  d'Etienne,  ibid.  Deux  let- 
tres du  pape  Pelage  à  saint  Aunaire,  ibid.  Conciles 
qu'il  assembla  ou  auxquels  il  prit  part,  p.  897-899. 

AURE  (sainte),  abbesse  de  St-Éloi,  à  Paris,  p.  753. 

AURÉLIEN(saint\  archevêque  d'Arles,  écrit  au 
pape  Vigile  au  sujet  du  bruit  qui  s'était  répandu 
qu'il  avait  fait  quelque  chose  contre  les  décrets  des 
Papes  et  des  conciles  généraux,  p.  199;  règles  mo- 
nastiques de  saint  Aurélien  pour  les  religieux  et 
pour  les  religieuses,  p.  199  et  200;  sa  lettre  au 
roi  Théodebert,  p.  100;  il  assiste  au  cinquième 
concile  d'Orléans,  ibid.;  sa  mort,  ibid.  et  200; 
édition  de  ses  écrits  dans  la  Pa^'o/ogie,  p.  2. 

AUREMOND,  abbé  du  Maire,  écrit  la  vie  de 
Saint  Junien,  p.  093  ;  sa  mort,  ibid. 

AURIGÈNE,  évêque.  Théodoric  lui  écrit  en  lui 
renvoyant  la  supplique  d'un  nommé  Julien,  p .  214  _ 

AUSTREGISILE,  évêque  de  Bourges  :  sa  mort 
p.  732. 

AUSTREMOINE  (saint),  premier  évêque  de  Cler- 
mont.  p.  367. 

AUTELS. Défense  de  consacrer  avec  l'onction  du 
saint  chrême  d'autres  autels  que  ceux  en  pierre,  p. 
817.  Treize  autels  dans  une  église,  p.  506.  Sainte  Ra- 
dégonde  employait  les  prémices  des  fleurs  du  prin- 
temps à  en  orner  les  autels,  p.  408.  Il  n'est  point  per- 
mis de  consacrer  des  autels  dans  les  lieux  oùilya 
des  corps  enterrés,  p.  913.  Les  ministres  de  l'autel 
étaient  vêtus  de  blanc,  p.  904.  Usage  de  nommer  à 
l'autel  les  évêques  vivants  des  grands  sièges,  p.  495. 

AUTHARIT,  roi  des  Lombards,  arien,  p.  509; 
défend  de  baptiser  les  enfants  de  sa  nation  dans 
l'Église  catholique  le  jour  de  Pâques,  p.  481;  sa 
mort,  ibid. 

AUTMONDE.  évêque  deToul,  compose  la  Vie  de 
saint  Èvre  l'un  de  ses  prédécesseurs,  et  des  ré- 
pons en  son  honneur,  p-  323. 

AUXANIUS,  archevêque  d'Arles;  le  pape  Vigile 
lui  àoane  le  Pallium:',  le  fait  son  vicaire  dans  le 


926 


TABLE  ANALYTIQUE. 


Gaules,  p.  196;  lui  donne  lacomiuissioade  juger 
l'affaire  de  PrOlextat,  ibid. 
AVENT,  son  origine,  p.  895. 


AYIT  (saint),  évoque  de  Clermont,  ordonne  dia- 
cre saint  Grégoire  de  Tours,  p.  JC5. 


B. 


BACAUDE,  évéque  de  Formics,  p.  480. 

BAISER  de  paix  dans  la  communion,  p.  G06. 

BAI.BIN,  évêque  do  Roselle  :  saint  Grégoire  le 
Grand  lui  écrit,  p.  481. 

BANCOn,  monastère  d'Irlande,  p.  013. 

BAPTÊME.  Sentiment  de  saint  Fulgence  sur 
le  baplOme,  p.  37,  38,  61,  05,  07  :  de  Cassiodore, 
p.  218,  219.  Traité  du  baptême  par  Marc  l'Ermite, 
p.  639,  040.  I.e  sacrement  de  baptême  serait  nul, 
si  l'on  omettait  le  nom  du  Fils  ou  du  Saint-Es- 
prit, p.  33.  Défense  de  baptiser  en  une  seule  per- 
sonne de  la  Trinité,  ou  en''deux,  ou  en  trois  Pères, 
ou  en  trois  Fils,  ou  en  trois  Saints-Esprits,  p. 
195.  Baptême  donné  au  nom  de  Jésus-Christ  : 
sentiment  de  Facundus,  p.  287.  La  foi  dans  les 
adultes  doit  précéder  le  baptême,  p.  37.  La  foi 
sans  le  baptême  ne  sauve  pas,  p.  38.  Le  baptême 
suffit  sans  l'eucharistie,  p,  39  Le  baptême  nous 
purilie  du  poché  d'origine,  p.  143.  C'est  une  vé- 
rité catholique  que  l'enfant  qui  est  baptisé  est 
sauvé,  et  que  celui  qui  meurt  sans  le  baptême 
est  damné  à  cause  du  péché  originel,  p.  42.  Les 
enfants  qui  meurent  sans  baptême  sont  condam- 
nés aux  peines  de  l'enfer,  d'après  sain'.  Isidore, 
pour  le  seulpécbé  originel,  p.  720.  .iucun  ne 
peut  arriver  au  royaume  des  cieux.  à  moins  de 
recevoir  le  baptême  dans  l'Église  catholique, 
ou  de  répandre  son  sang  pour  Jésus-Christ,  p.  04, 
65.  Pourquoi  on  ne  baptise  pas  les  morts,  p.  38. 
Défense  de  prier  pour  les  catéchumènes  morts 
sans  baptême,  et  d'accompagner  leur  sépulture 
du  chant  des  psaumes,  p,8SG.  On  amenait  au  com- 
mencement du  Carême  les  enfants  qui  devaient 
être  baptisés  pour  les  purifier  auparavant  par 
les  exorcismes,  p.  892.  Défense  de  baptiser  tous 
Jes  jours  de  fêles  de  martyrs,  p,  890.  Dé- 
fense aux  prêtres  de  rien  exiger  pour  le  baptême, 
p.  811.  l'.aplêmedc  saint  Jean;  s'il  remettait  les  pé- 
chés, p.  505,  774.  Baptême  de  Jcsus-Christ,  ibid.  ■ 
ses  elTets,  ibid.  Trois  sortes  de  baptême  :  d'eau,  de 
sang,  de  larmes,  p.  720.  Matière  du  baptême;  his- 
toire d'un  juif  qui  fut  baptisé  avec  du  sahlc,  p.  702  ; 
ce  baptême  est  déclaré  nul,  ibid.  Forme  du  bap- 
tême, p.  7i3.  Le  baptême  conféré  au  nom  de  la  Tri- 
nité ne  peut  se  réitérer,  p.  720.  Les  pasteurs  doivent 
proférer  avec  attention  la  forme  du  baptême,  p. 
074.  On  ne  rebaptisait  pas  ceux  qui  avaient  été 
baptisés  au  nom  de  la  Trinité  dans  l'hérésie,  p. 
506.  Ministres  du  baptême,  p.  500,  720.  Baptême 
donné  par  trois  immersions  ou  par  une  seule,  ap- 
prouvé par  saint  Grégoire,  p.  305.  A  quels  jours  on 
le  donnait  :  les  jours  du  baptême  solennel  étaient 
la  fête  de  Piques  et  celle  de  la  Pentecôte,  p.  500, 
T75.  UétaitadminislrélanuitdelaveilledeP.lques, 
p.  390;lejour  de  Nuulpar  dispense,  p.  512,500.Clo- 
Vis,  roi  de  France,  fut  baptisé  le  jour  de  Koël,  p.  79, 
Saint  Grégoire  ordonna  de  baptiser  des  juifs  un 


jour  de  dimanche  ou  en  quelqueautre  grande  fête, 
p,  580.  Pénitence  imposée  avant  le  baptême,  et 
pourquoi,  ibid.  La  participation  du  corps  et  du 
sang  de  Jésus-Christ  était  accordée  aux  nouveaux 
baptisés  aussitôt  après  leur  baptême,  p.  775.  11 
ne  faut  contraindre  personne  à  recevoir  le  bap- 
tême, p.. 506.  Ceux  qui  se  font  baptiser  par  crainte, 
sans  avoir  la  foi,  ne  laissent  pas  d'être  baptisés, 
mais  le  baptême  ne  leur  sert  de  rien  pour  le  sa- 
lut, p.  702.  Dans  le  doute  si  une  personne  est 
baptisée  ou  confirmée,  il  faut  la  baptiser  et  la 
confirmer,  p.  535,  506,798.  On  peut  baptiser  une 
femme  enceinte,  p.  528,  500;  un  enfant  étant 
dans  le  sein  de  sa  mère  ne  peut  être  baptisé,  p. 
720:  mais  on  peut  le  baptiser  aussitôt  qu'il  est 
né,  s'il  y  a  danger  de  mort,  p.  500.  Cérémonies 
du  bapiême,  p.  37,  97, 138,  341,  358.  Onctions  avant 
et  après  le  baptême  chez  les  Grecs,  p.  700  ;  et 
dans  l'Église  latine,  p.  774.  Dans  le  baptême  on 
renonce  a  toutes  les  œuvres  et  à  toutes  les  pom- 
pes du  démon,  p.  ^66,  L'exorcisme  employé  dans 
le  baptême  est  pour  conjurer  le  démon  de  sor- 
tir, p.  713.  Les  parrains  servaient  de  caution  pour 
le  baptême  des  personnes  inconnues  ou  dont  la 
conversion  était  suspecte,  p.  702.  Abbés  qui  tien- 
nent des  enfants  sur  les  fonts  de  baptême,  p. 
693.  Le  concile  d'Auxerre  vers  l'an  080  défend  aux 
moines  et  aux  abhés  d'être  parrains.  ii(i'(/.  Le  prê- 
tre ôtait  aux  nouveaux  baptisés,  le  septième  jour 
après  leur  baptême,  le  voile  qui  avait  été  mis  sur 
leur  tête  lors  de  la  cérémonie,  p.  797. 

BAPTISTAIRE,  Il  était  fermé  pendant  le  Ca- 
rême, p.  511.  De  quelle  manière  les  catéchu- 
mènes se  comportaient  dans  le  baptistaire  dans 
l'église  du  monastère  de  Saint-André,  Saint  Gré- 
goire ordonne  de  le  détruire,  pourquoi,  p.  493. 
Fonts  baptismaux  miraculeux  en  Espagne,  p.  390, 
775;  et  dans  la  Cilicie,  p.  702.  Il  y  en  avait 
aussi  à  Embrun  dans  le  Dauphiné,  p.  790. 

BAKBAUICIENS,  peuples  idolâtres  en  Sardai- 
gne  convertis  par  les  soins  de  saint  Grégoire,  p. 
436. 

BARBE,  Saint  Colomban  défend  aux  diacres  de 
servir  a  l'autel  sans  s'être  fait  couper  la  barbe, 
p.  497,  020. 

BARNABE  (saint),  apôtre.  Ses  reliques  trouvées 
dans  l'île  de  Cliypre,  p.  105. 

BARSA>'UPIlE(saintSanachor(''te,  sa  vie,  p.  175; 
son  traité  contre  les  moines  tombés  dans  l'origé- 
nisme,  tftiif,  ;  éditions  de  ce  traité,  ibid. 

BASILE  de  Cilicie,  prêtre  d'Antioehe,  ses  écrits, 
p.  110. 

BASliNE,  nile  du  roi  Chilpéric,  religieuse  dans  le 
monastère  de  Sainte-Croix  de  Poitiers,  y  cause  de 
grands  troubles,  p. 905.  elle  est  excommuniée  dans 
le  concile  de  Poitiers  en5',)0,i&i(/,,-elleestreçueàla 
comuiuuioa  dans  le  coucilo  do  Metz,  p.  906. 


TABLE  ANALYTIQUE. 


!)27 


BAUDOMVIE,  religieuse  do  roltiers,  Oerit  la 
Vie  do  SaiiUo  Iladegoiuie,  p.  m,  115. 

HAVON  (saint),  confesseur  Mlaïul,  p.  711;  sa  Vie 
écrite  par  un  anonyme,  p.  7.12;  son  ('pilapiie  par 
saint  Liviii,  p.  7-11. 

BKLLATOU,  priMre,  ses  commentaires  sur  plu- 
sieurs livres  de  llîtriture  cités  par  Cassiodoie, 
p.  285;  il  avait  traduit  les  deux  Lomélies  d'Ori- 
gène  sur  Esdras,  ibkt.  et  285. 

BENAGNA.  Saint  Grégoire  écrit  au  clergé  et 
au  peuple  de  ce  pays,  p.  480  ;  il  fait  desservir 
celte  église,  p.  493. 

BÉNKDICïION.  Cétait  l'usage  dans  les  messes 
solennelles  do  bénir  le  peuple  avant  de  lui  don- 
ner la  communion,  ibid.  Il  y  avait  une  autre  bé- 
nédiction pour  la  lin  de  la  messe,  ibid. 

BÉMiDlCTlONKAIUE  de  saint  Grégoire,  p. 
543. 

BENNADE,  évêquc  de  Reims  ;  saint  Itomi  lui 
succède,  p.  77. 

BENENATUS,  évoque  de  la  première  Justi- 
nienne,  ennemi  des  Trois-Capilres,  p.  301;  11  est 
condamné  en  550,  ibid. 

BE.N'ENATUS,  évoque  de  Misène  ;  saint  Grégoire 
le  Grand  lui  écrit,  p.  487. 

BENOIT  (saint),  patriarche  des  moines  d'Occi- 
dent, sa  naissance,  son  éducation,  p.  15G;  étant 
encore  fort  jeune,  il  se  relire  à  Sublac  où  il  s'en- 
ferme dans  une  caverne,  ibid.  et  157  ;  ce  qui  lui 
arriva  dans  cette  solitude  pendant  les  trois  ans 
qu'il  y  demeura,  ibid.  ;  il  est  fait  abbé  du  mo- 
nastère de  Vicovarro,  p.  157;  l'indocilité  des 
moines  qui  attentent  même  à  sa  vie  l'oblige  de 
le  quitter;  il  retourne  à  sa  première  solitude, 
ibid.  ;  grand  nombre  de  personnes  viennent 
s'y  rendre  ses  disciples:  il  bâtit  douze  monas- 
tères, ibid  ;  miracle  qu'il  opère  à  l'égard  de  saint 
Placide,  p.  158;  il  ressuscite  un  enfant,  p.  475; 
cédant  à  l'envie  d'un  prêtre  nommé  Florentius, 
il  abandonne  ses  douze  monastères  et  en  bâtit 
un  nouveau  au  Mont-Cassin,  p.  V<S;  règle  qu'il 
donne  à  ses  religieux,  ibid.  et  15o  ;  le  patrice 
Terlullus  fait  au  monastère  de  Cassin  donation 
des  biens  qu'il  avait  dans  le  voisinage,  p.  159; 
saint  Benoît  fonde  le  monastère  de  Terracine 
en  Campanie  et  plusieurs  autres  en  Sicile ,  en 
Espagne,  en  France,  p.  159  ;  il  prédit  la  ruine 
du  monastère  du  Mont-Cassin,  ibid.;  Totila  vient 
le  voir:  récit  de  leur  entrevue,  ibid.  et  160;  la 
prédiction  de  saint  Benoît  touchant  ce  prince, 
ibid.  et  475.  Hlort  de  saint  Benoît,  p.  161  et  475; 
son  éloge,  ibid.  Analyse  de  sa  Règle,  ibid.  et 
suiv.  Distinction  de  quatre  sortes  de  moines, 
p.  16i.  Qualités  et  fonctions  de  l'abbé  et  des  au- 
tres supérieurs,  ibid.  et  162.  Autres  officiers  du 
monastère,  p.  lC-2  et  103.  Réception  des  no- 
vices, iTiù/.  et  104.  Offices  divins,  p.  104  et  105; 
travail  des  mains  et  lectures,  ibid.  et  160.  Habits 
des  moines,  p.  167.  Leur  nourriture,  ibid.  et  108. 
Les  malades,  les  hôtes,  les  voyageurs,  p.  168, 169. 
Les  corrections,  p.  169,  170.  Éloge  de  saint  Be- 
noît et  de  sa  Règle,  p.  170.  La  lettre  qu'on  sup- 
pose qu'il  a  écrite  à  saint  Rémi  de  Reims  pour 
le  prier  de  délivrer  une  possédée  n'existe  point, 


p.  170.  L'Eloge  de  saint  Placide  n'est  point  do  lui, 
i6i(/.  La  vie  de  saint  liciiuît  occupe '.e  second  livre 
(les  Dialogues  du  Pape  saint  Grégoire,  p.  474,  475. 
Vers  ;■!  sa  louange  par  Marc  un  de  ses  disciples, 
p.  034.  Autres  par  saint  Slmplice,  abbé  du  Mont- 
Cassin,  ibid. 

BENOIT  Riscop  (saint),  fonde  les  monastères 
do  Wiromonth  et  do  Jarou,  p.  8C2. 

BENOIT  II,  papo,  succède  à  Léon  II  et  ne  siège 
que  huit  mois  et  dix.-sepl  jours,  p.  785.  Ses  let- 
tres, îiiV/.  Sous  son  pontificat,  l'empereur  Con- 
stantin envoie  h  Rome  les  cheveux  de  ses  deux 
lils,  Justinien  et  Héraclius  :  c'était  une  espèce 
d'adoption  usitée  en  ce  temps-li,  ibid. 

BENOIT,  jeune  moine  vivant  à  40  milles  de 
Rome  :  ce  que  rapporte  de  lui  le  pape  saint  Gré- 
goire, p.  476. 

BERTC11R.4^ND  ouBERTRAND  (saint),  évêque  du 
Mans;  sa  vie,  p.  31;  il  se  rend  célèbre  par  ses  vers  ; 
aucun  de  ses  écrits  poétiques  n'est  venu  jusqu'à 
nous,  ibid.;  son  testament,  ibid.  et  6.32. 

BERTHE,  reine  d'Angleterre;  saint  Grégoire 
lui  écrit,  p.  521. 

BERTRAND,  évêque  de  Bordeaux,  accusé,  p.  36C. 

BIENS  de  l'Église  :  inventaire  des  biens  de  l'é- 
glise après  la  mort  de  l'évoque,  p.  496  ;  règlements 
du  concile  de  Paris  pour  la  conservation  des  biens 
de  l'Église,  p.  912.  Biens  légués  aux  églises ,  aux 
monastères,  aux  hôpitaux;  défense  à  toute  per- 
sonne do  s'en  emparer,  p.  883.  On  oblige  à  restitu- 
tion ceux  qui  par  négligence  ont  détérioré  les  biens 
de  l'église,  ou  en  ont  occasionné  la  perte,  p.  892. 
Lesventes  dos  biens  d'église  faites  par  les  prê- 
tresqui  desservent  les  paroisses,  sont  déclarées 
nulles,  p.  814. 

BIGAMES,  exclus  de  la  cléricature,  ainsi  que 
des  ordres  sacrés,  p.  530,  .572,  814. 

BL.iNDUS,  évêque  d'Orta,  retenu  en  prison  par 
le  palrice  Romain,  p.  483. 

BLASPHÈME.  Histoire  d'un  enfant  accoutumé 
à  blasphémer  le  nom  de  Dieu,  p.  478,  505. 

BOBIO,  monastère  fondé  par  saint  Colomban, 
p.  010. 

BOÈCE  fW'lfin),  écrit  la  Vie  de  saint  Junien, 
abbé  du  Maire,  p.  693. 

BONIFACE  (saint),  archevêque  de  Mayence,  fait 
demander  une  copie  de  la  lettre  de  saint  Grégoire 
à  saint  Augustin  d'Angleterre,  p.  520. 

BONIFACE,  évêque  de  Carthage,  assemble  un 
concile  en  525,  p.  528  et  suiv. 

BONIFACE  11  (saintl.  élu  Pape,  p.  114;  il  fait  ana- 
thématiser  l'antipape  Dioscore  après  sa  mort. 
ibid.:  dans  un  concile,  il  fait  passer  un  décret  qui 
l'autorisait  à  se  donner  un  successeur,  ibid.  ;  il  an- 
nule ensuite  lui-même  ce  décret,  îfcîd.;  concile  qu'il 
tient  il  Rome  pour  examiner  les  plaintes  d'Etienne 
doLarisse,  iftid.Députationdes  évêques  d'Afrique 
pour  obtenir  du  Pape  une  constitution  qui  obli- 
geât l'évèquede  Carthage  à  faire  toutes  choses  avec 
le  conseil  du  Saint-Siège,  p.  115.  Mort  de  Boniface. 
ibid.  La  lettre  àEulalius,  évêque  d'Alexandrie,  est 
supposée;  preuves  de  cette  supposition,  tiid.  La 
lettre  à  saint  Césaire  d'Arles  est  certainement  de 
Boniface  II.  ibid.  ;  ce  qu'elle  contient,  ibid  et  116; 


928 


TABLE  ANALYTIQUE. 


il  approuve  et  confirme  les  canons  du  concile 
d'Orangp  sur  la  grâce,  p.  837. 

BOMFACE  111  succède  au  pape  Sabinien.p.  645; 
condamne  ceux  qui  disaient  que  les  moines  étaient 
incapables  des  fonctions  sacerdotales,  p.  911  ;  con- 
cile qu'il  tient  à  Rome,  ibid. 

BOMFACE  IV,  Pape,  p.  645;  saint  Colomban  lui 
écrit  en  faveur  des  défenseurs  des  Trois-Cliapi- 
tres,  p.  6-27  et  G45.  Mort  de  ce  Pape,  p.  645. 

BOXIFAGE  V,  Pape,  ses  écrits,  p.  640;  sa  mort, 
ibid. 

BOXOSIAQUES,  hérétiques.  Leurs  erreurs,  p  264; 
Justinien,  évêque  de  Valence,  écrit  contre  ces  er- 
reurs, ibid.  Décisions  du  pape  saint  Grégoire  le 
Grand  sur  le  baptême,  p.  526. 

BOURGUIGNONS  vaincus  par  les  Golhs  d'Italie, 
p.  2-20. 

BRAULION,  évêque  de  Saragosse,  ami  de  saint 
Isidore  de  Séville,«p.  710;  il  retouche  le  traité 
de  ce  saint  évêque  sur  les  origines  ou  étymolo- 
gies,  p.  711;  ce  qu'il  dit  des  autres  ouvrages  de 
saint  Isidore,  p.  714  ;  deux  lettres  que  lui  écrit 
saint  Isidore,  p. 722  ;  il  succède  i  Jean,  son  frère, 
dans  l'évOché  de  Saragosse,  p.  7-2S;  il  assiste  à 
divers  conciles,  ibid.;  sa  mort,  ibid.;  il  est  auteur 
de  l'éloge  et  du  catalogue  des  ouvrages  de  saint 
Isidore  de  Séville,  et  d'une  Vie  de  saint  Émilien 
avec  une  hymne  en  son  honneur,  ibid.;  ses  lettres^ 


ses'autres  écrits  dans  la  Patrologie,  p. 728  et  suiv. 

BRÉGENTS.  Saint  Colomban  y  bâtit  un  monas- 
tère, p.  516. 

BRETAGNE.  Évoques  de  la  Grande-Bretagne 
soumis  à  saint  Augustin,  archevêque  de  Cantor- 
béry,  p.  526. 

BRE'rONS.  Leur  erreur  touchant  la  célébration 
de  la  Pâque,  p.  624;  saint  Adelme  en  ramène  plu 
sieursà  l'observance  légitime  de  la  Pâque,  p.  804; 
concile  pour  les  réunir,  p.  M8,  909. 

BRICE  (sainV,  évêque  de  Tours,  accusé  de  plu- 
sieurs crimes  et  justifié,  p.  368. 

BRL.MAS.  évêque  de  Cagliari,  p.  8. 

BRUNEHAUT,  reine  de  France;  saint  Germain 
de  Paris  lui  écrit  ;  saint  Grégoire  lui  écrit,  p.  307, 
308,  504:  elle  persécute  saint  Colomban,  p.  614; 
envoie  saint  Didier,  évêque  de  Vienne,  en  exil; 
puis  le  fait  mourir,  p.  909.  Saint  Grégoire  lui 
envoie  des  reliques  de  saint  Pierre  et  de  saint 
Paul  ;  accorde,  à  sa  demande,  des  privilèges  pour 
les  monastères  d'Autun,  p.  529,  530.  Elle  demande 
le  Pallium  pour  saint  Syagriiis,  évoque.  d'Autun, 
p.  513.  Lettre  que  lui  écrit  saint  Grégoire,  ibid. 
et  514.  Mort  de  Brunehaut,  d'après  un  anonyme, 

p.  400. 

BUT1LIE.\ ,  prêtre  de  la  ville  de  Trente,  est  dé- 
chargé par  Tbéodoric  de  l'impôt  qu'il  devait  au 
fisc,  p.  214. 


CALCÉDOINE.  Saint  Grégoire  ne  comptait  pour 
les  actes  du  concile  de  Chalcédoine  que  les  sept 
premières  actions,  p.  i95.  Concile  deChalcédoine 
falsifié  en  un  endroit  par  l'Église  de  Con- 
stantinople,  selon  saint  Grégoire ,  p.  505.  Ré- 
ponse de  Léon  de  Byzance  aux  objections  des 
schismatiques  contre  le  concile  de  Chalcédoine, 
p.  668,  669.  Dieu  aulorise  par  un  miracle  les  dé- 
crets du  concile  de  Chalcédoine,  p.  312. 

CALICE.  On  permettait  aux  pèlerins  de  toucher 
et  de  baiser  le  calice  que  J.-O.  bénit  le  jour  de 
la  Cène,  p.  801. 

CALLINiyUE.  exarque,  écrit  il  saint  Grégoire 
le  Grand  pour  Maxime,  évêque  de  Salone,  p.  516; 

CALOMNIATEUR.  Condamné  au  fouet  et  à  lexil 
par  saint  Grégoire,  p.  527.  Leudaste,  convaincu 
d'avoir  calomnié  Grégoire  do  Tours,  fut  excommu- 
nié de  toutes  les  Églises,  p.  394. 

CALUPPAL  (saint),  reclus,  p.  381;  sa  Vie  écrite 
par  saint  Grégoire  de  Tours,  ibid. 

CANDIDE,  évêque,  saint  Grégoire  le  Grand  lui 
écrit,  p.  487. 

CANDIDE,  prêtre,  recteur  du  patrimoine  de 
l'Église  romaine  en  Gaule,  p.  5o4,  513. 

CANDIDE,  abbé  au  monastère  de  Saint-André 
à  Rome,  p.  588;  saint  Grégoire  le  Grand  lui  écrit, 
p.  487,  488. 

CANON  de  la  messe;  saint  Grégoire  est  leKc- 
mier  qui  ait  appelé  Canon  cette  prière  de  la  li- 
turgie qui  se  dit  après  le  Sancius,  p.  533.  Le  pape 
Vigile  l'appelle  prières  canoniques,  ibid.;  saint 
Grégoire  a  ajouté  au  canou  de  la  messe  ces  par 


rôles  :  Disposes  de  nos  jours  dans  votre  paix, 
p.  R38. 

CANONISATION.  Ancienne  manière  de  canoni- 
ser les  saints,  p.  376. 

CANTIANE  (sainte),  martyre,  p.  333. 

CANTIQUES.  Commentaire  attribué  faussement 
à  Cassiodore  sur  le  Cantiijuc  des  Cantiques,  p.  226  ; 
commentaire  de  saint  Grégoire  le'Grand,  p.  547, 
548. 

CARAFA,  cardinal;  ses  remarques  sur  les  let- 
tres de  saint  Grégoire  le  Grand,  p.  551. 

CARDINAL,  origine  de  ce  nom  ;  évêques  et 
prêtres  cardinaux,  p.  181,  488. 

CARÉMK.  Saint  Grégoire  ne  comptait  dans  le 
carême  que  trente-six  jours  de  jeûne,  en  6tant 
les  dimanches  où  on  ne  jeûnait  pas,  p.  i'>1  :  rè- 
glement attribué  à  saint  Grégoire  touchant  le 
jeûne  du  carême,  p.  537  ;  en  quel  jour  les  Grecs  le 
commencent,  p.  262. 

CARTIIAGE.  Le  pape  Agapet  reconnaît  la  préé- 
minence de  lévêquede  Carthage  sur  tous  les  au- 
tres évêques  d'Afrique,  p.  8'il. 

CASSIEN.  Cassiodore  a.  crlit  les  moines  de  lire 
les  Institutions  de  Cassien  avec  circonspection, 
p.2ll. 

CASSIN.  Monastère  du  Mont-Cassin;  sa  fonda- 
tion, p.  158;  saint  Benoît  en  prédit  la  ruine,  p.  159, 
475;  le  patrice  Tcrtullus  fait  une  donation  solen- 
nelle des  biens  qu'il  avait  aux  environs  de  ce  mo- 
nastère, ibid. 

CASSIUS,  évêque  de  Narni,  guérit  un  possédé 
par  le  signe  de  la  croix,  p.  476;   son  éloge  Pa- 


TABLK  ANALYTIQUE. 


929 


saint  Grégoire  le  Grand,  p.  4Cl  ;  11  olTralt  presque 
tous  les  jours  le  s;ilnt  sacrillco,  ibUl. 
CAUTULAIRES ,  olliciers  de  la  cour  romaine, 

p.  dSG. 

CASSIODORE,  cliaiicelior  et  premier  ministre 
de  Théodoric,   roi  d'Italie,  et  ensuite  abue  de 
Viviers;    antiquité    et   noblesse   de   la    maison 
de  Cassiodore,  p.   207;  sa  naissance  vers  l'an 
469;  ses  études,  ibid.  et  208.   Il  est  fait  comte 
dos  domaines  en  170;  et  ensuite  des  largesses  par 
Odoacre,  p.  208.  Tliéodoric  l'emploie  dans  le  mi- 
nistère et  lui  donne  toute  sa  conliance,  ibid.  et 
209.  Athalaric  se  sert  du  ministère  de  Cassiodore 
et  lui  donne  la  même  conliance,  p.  209,  210.  Cas- 
siodore pense  i"!  établir  des  écoles  i  Rome  pour 
les  saintes  lettres,  p.  210.  Il  fait  rendre  les  vases 
sacrés  de  l'église  de  saint  Pierre  mis  en  gage  pour 
fournir  aux  frais   du  voyage  du  pape  Agapet, 
p.  210,  Il  se  retire  dans  le  monastère  de  Viviers 
qu'il  avait  fondé,  ibid.  et  211.  Sa  mort  vers  l'an 
503,  p.  211.  Son  éloge,  p.  212.  Ses  écrits,  p.  212  et 
suiv.  :  ses  leitres,  ibid.-.  les  cinq  premiers  livres, 
p.  213  et  suiv.;  le  sixième  et  le  septième,  p.  215; 
le  huitième  et  le  neuvième,  p.  215, 216  ;  le  dixième 
et  le  onzième,  p.  2i6  et  suiv.;  le  douzième,  p.  219, 
220.  Histoire  ecclésiastique  appelée   Tripartite. 
p.  220,  221.  Sa  Chronique,  p.  221,  222;  son  Comput 
pascal ,   p.    222.   Son  Histoire  des  Goths,  p.  222. 
Son  Commentaire  sur  les  Psaumes,  ibid.  ;  en  quel 
temps  et  à  quelle  occasion  il  le  composa,  ibid.  et 
223;  analyse  de  ce  commentaire,  p.  223  et  suiv. 
Commentaire  sur  le  Cantique  des  Cantiques,  qui 
lui  est  attribué,  p.  220.  Son  livre  de  l'institution 
aux  lettres  divines;  occasion  et  dessein  de  ce  li- 
vre; p.  227-235;  analyse  de  ce  livre,  ibid.  et  suiv. 
Traité  des  sept  arts  libéraux  et  de  la  grammaire, 
p.  235.  Traité  de  la  rhétorique,  p.  236;  de  la  dia- 
lectique, ibid.;  de  l'arithmétique,  ibid.;  de  la  mu- 
sique,  ibid.;  de  la  géométrie  et  de  l'astronomie, 
ibid.  et  837.  Son  traité  des  huit  parties  de  l'orai- 
son, p.  237;  son  traité  de  l'orthographe,  ibid.; 
des  tropes  ou  figures  de  l'Écriture,  ibid.  et  238; 
son  traité  de  l'âme;  en  quel  temps  et  à  quelle  oc- 
casion il  a  été  fait,  p.  238;  analyse  de  ce  traité 
ibid.  et  suiv.  Livres  de  Cassiodore  qui  sont  per- 
dus, p.  242.  Ouvrages  qui  lui  sont  attribués,  ibid. 
Sa  doctrine  sur  l'Écriture  sainte,  p.  213;  sur  la 
tradition  et  les  conciles,  ibid.  et  24i  ;  sur  la  foi,  p. 
244  ;  sur  la  nature  de  Dieu,  ibid.  et  245  ;  sur  la  Tri- 
nité, p.  245;  sur  l'Incarnation,  p.  215  et  suiv.;  sur 
l 'Église,  p.  247,  248  ;  sur  ses  ministres,  p.  248  ;  sur 
les  sacrements  de  baptême  et  de  pénitence,  p.  248 
etsuiv.;  sur  le  péché  originel  et  l'inadmissibilité  de 
la  justice,  ibid.;  sur  l'Eucharistie,  p.  250;  sur  l'or- 
dre, p.  251  ;  sur  la  grâce  et  le  libre  arbitre,  p.  251, 
252;  sur  la  félicité  des  saints  avant  le  jugement, 
p.  252  et  suiv.  Jugement  des  écrits  de  Cassiodore, 
p.  253  ;  éditions  qu'on  en  a  faites,  ibid.  et  254. 
CASTEL,  monastère  de  Cassiodore,  p.  211. 
CASTORIUS,  évêque  de  Rimini,  p.  488;  se  dé- 
met de  l'épiscopat,  p.  508. 

CASTORIUS,  notaire  et  nonce  du  Saint-Siège, 
libelle  diffamatoire  répandu  contre  lui,  p.  505. 
CASTORIUS,  cartulaire  de  l'Église  romaine 
XI. 


p.  510  ;  il  réconcilie  Maxime ,  évêque  de  Salone , 
ibid. 
CATELI.A,' veuve  distinguée  parsa  piété,  p.  485. 
CATUÉDRATIQUE.  Droit  de  visite  de  l'évoque, 
p.  «ui. 
C.yVADE,  roi  de  Perse,  p.  104. 
CÉCILE  (sainte),  martyre;  ses  actes  ont  peu 
d'apparence  de  la  vérité,  p.  511.  Voyez  la  note 
ibid. 

CÉLIBAT  des  êvêques:  il  faut  pour  être  évê- 
que avoir  vécu  dans  le  célibat,  ou  n'avoir  été 
marié  qu'une  fois,  encore  avec  une  vierge,  p.  718. 
Célibat  des  clercs,  p.  572. 
CELSE,  abbesse  de  Saint-Césaire  d'Arles,  p.  695. 
CENSURES  ecclésiastiques  du  temps  de  saint 
Grégoire  de  Tours,  p.  393. 

CÉOLFRIDE,  abbé  de  Wiremouth  et  de  Jarou, 
augmente  la  bibliothèque  que  saint  Benoît  Bis- 
cop  avait  commencée,  p.  802;  obtient  du  pape 
Sergius  un  privilège,  p.  803;  sa  mort,  i6id.;  ses 
lettres,  ibid. 

CÉRAUNE  (saint;,  évêque  de  Paris,  p.  C30;  Var- 
nhaire  lui  écrit  et  lui  envoie  les  Actes  de  quel- 
ques martyrs  de  Langres,  ibid.  et  631. 

CERBONE  (saint),  évêque  de  Populonium,  ex- 
posé à  un  ours  qui  vient  lui  lécher  les  pieds, 
p.  476. 

CÉSAIRE  (saint),  évêque  d'Arles;  sa  naissance 
en  470,  p.  125;  ses  vertus,  et  en  particulier  son 
amour  pour  les  pauvres,  ibid.  Il  est  admis  dans 
le  clergé  et  se  retire  au  monastère  de  Lérins, 
ibid.  ;  l'évèque  d'Arles  l'élève  au  diaconat,  k  la 
prêtrise,  ibid.  :  puis  il  gouverne  un  monastère,  et 
l'évèque  d'Arles  le  désigne  comme  son  succes- 
seur ;  il  devient  évoque  d'Arles  en  501  ,   ibid.  Sa 
conduite  pendant   son  épiscopat,  ibid.  et  126; 
éloge  que  fait  de  lui  saint  Ennode,  ibid.;  il  est 
accusé  devant  le  roi  Alaric  de  trahison;  Alaric 
l'exile  i  Bordeaux,  puis  reconnaissantlson  inno- 
cence le  renvoie  à  Arles,  p.  126;  il  préside  au 
conseil  d'Agde  en  505,  p.  122  ;  il  bâtit  un  monas- 
tère, ibid.  Soupçons  des  Goths  contre  lui  durant 
le  siège  d'Arles,' l'iid.  et  127.  Mauvais  traitements 
qu'ils  lui  font  endurer,  p.  127.  Sa  charité  envers 
les  Francs  et  les  Bourguignons  faits  prisonniers, 
ibid.  Il  est  accusé  de  nouveau  et  conduit  à  Ra- 
venne  où  il  se  justiûe  pleinement  et  se  concilie 
l'amitié  et  le  respect  du  roi  Théodoric,  p.  127.  Il 
va  â  Rome  ,  le  pape   Symmaque   lui  donne  le 
Pallium  et  conûrme  les  privilèges  de  l'Église  d'Ar- 
les, ibid.  ;  il  retourne  à  Arles,  y  tient  un  concile, 
assiste  à  plusieurs  autres,  ibid.  Sa  mort,  p.  128  ; 
sa  vie  écrite  en  deux  livres  par  plusieurs  de  ses 
disciples,  ibid.  Ses  écrits:  ses  discours;  ils  ont  été 
attribués  à  saint  Augustin,  à  saint  Ambroise  et  à 
d'autres,  p.  128,  129  ;  comment  on  les  distingue, 
ibid.  ;  ce  qu'il  y  a  de  remarquable  dans  les  dis- 
cours de  saint  Césaire;  p.  129  et  suiv.  Autres  ser- 
mons de  saint  Césaire,  p.  142,  143.  Ses  homélies 
recueillies  dans  la  Bibliothèque  des  Pères,  et  par 
Baluze,  p.  145  et  suiv.  Sermons  qui  lui  sont  fausse- 
ment attribués,  p-  146.  Autres  homélies  qui  lui 
sont  attribuées,  p.  u7.  Règles  de  saint  Césaire, 
p.  14";  sa  règle  pour  les  religieuses, i6îd.;analysede 

29 


yau 


TABLH  ANALYTIQUE. 


cette  règle,  ibid.  et  suiv.  Sa  règle  pour  les  moi- 
nes, p.  150;  analyse  de  cette  règle,  ibid.  et  suiv.; 
son  discours  aux  religieuses,  p.  loi,  1J2.  Ses  let- 
tres, p.  152  et  suiv.:  lettre  à  Oraiorie.  p.  152;  à 
une  vierge,  ibid.;  à  sainte  Césarie,  ibid.  ei  153; 
discours  ou  lettre  sur  les  anciens  canons  tou- 
chant la  pénitence,  p.  153;  sa  requête  au  pape 
Symmaque,  p.  153.  154;  lettre  à  Rurice,  p.  154; 
son  testament,  ibid.  Écrits  de  saint  Césaire  qui 
sont  perdus,  ibid.  et  155.  Jugement  de  ses  écrits, 
p.  155.  Éditions  qu'on  en  a  faites,  ibid.  et  156. 
Lettre  par  laquelle  le  pape  Félix  IV  conflrme  le 
règlement  renouvelé  par  saint  Césaire,  portant 
défense  d'élever  à  l'épiscopat  ceux  qui  n'avaient 
pas  servi  dans  le  clergé,  p.  H4.  Lettre  du  pape 
Boniface  H  qui  confirme  sa  doctrine  sur  la  grâce 
prévenante,  p.  115.  Autre  lettre  où  le  pape  saint 
Jean  le  charge  d'exécuter  la  sentence  portée  con- 
tre Contuméliosus,  évéque  de  Riez,  p.  118.  Deux 
lettres  que  lui  adresse  le  pape  Agapet  :  l'une  au 
sujet  des  aumônes  qu'il  lui  avait  demandées, 
l'autre  au  sujet  de  Contuméliosus,  p.  1 19, 120  Let- 
tre que  lui  écrit  le  pape  Vigile  au  sujet  d'un  hom- 
me qui  avait  épousé  la  femme  de  son  frère,  p.  190. 
Césaire  préside  au  second  concile  d'Orange,  p. 83i. 
CÉSARIE,  sœur  de  saint  Césaire  d'Arles,  à  qui 
il  conûe  la  conduite  d'un  monastère,  p.  126,  147; 
il  lui  écrit,  p.  l52,  l53. 

CÉSARIE  isainte),  différente  de  Césarie,  sœur 
de  saint  Césaire,  écrit  à  sainte  RadégonJe,  p.  3i7. 
CÉTHÉGUS,  Patrice,  p.  333. 
CHAIR.  Avant  le  déluge  l'usage  de  la  chair  était 
interdit,  p.  i87;  défense  de  manger  de  la  chair 
des  animaux  suffoqués,  p.  738. 
CHALCÉDOINE;  Voy.  CALCÉDOINE. 
CHALCÉDOMUS  et  Géronce,  abbés  :  exhorta- 
tions que  leur  adresse  Cassiodore,  p.  234-235. 

CHA.\CELIERS.  Lettres  de  Cassiodore  à  des 
chanceliers,  p.  219. 

CHANT  (le  des  psaumes  se  faisait  de  différentes 
manières  et  on  y  employait  diverses  sortes  d'ins- 
truments, p.  224.  Chant  ecclésiastique  réglé  par 
saint  Grégoire  qui  établit  à  Rome  une  école  de 
chantres,  p.  514. 

CHANTRES  d'église,  quels  ils  doivent  être, 
p.  907. 

CHAPITRES  i,les  Trois-).  Les  évêques  d'Afrique 
séparèrent  le  pape  Vigile  de  la  communion  catho- 
lique, parce  qu'il  avait  condamné  les  Troix-Cha- 
pitres,  p.  301.  Victor  de  Tuaone.  zélé  défenseur 
des  Trois-Chapilres,  p.  302.  Avis  de  Ferraiid,  dia- 
cre de  Carthage,  sur  les  Trois-Chapiires,  p.  93  et 
suiv.  Lettre  de  saint  Grégoire  le  Grand  touchant 
l'affaire  des  Trois-Chapilres,  p.  490. 

CHARARIC,  roidélrûné  par  Clovis,  est  ordonné 
prêtre,  p.  395. 

CHARIBERTou  CHEREBERT,  fils  aine  deClo- 
taire;  p.  3(19;  loué  par  l'ortuaiil  ;  excommunié  par 
saint  Germain  de  Paris,  à  cause  de  ses  mariages 
illicites,  p.  307. 

CHAUI.'HER,  évoque  de  Verdun,  auparavant  ré- 
férendaire du  roi  Childebert  II,  p.  .'175, 

CHARITÉ.  Sans  elle  les  autres  dons  du  Saint- 
Esprit  son  t  inutiles,  p.  i5;  la  charité  s'augmente 


en  nous  à  mesure  que  la  cupidité  diminue,  p,  7o. 
CHARTE  (la)  pour  la  grande  litanie  attribuée 
à  saint  Grégoire  est  douteuse,  p.  536. 

CHASSE  Chiens  et  oiseaux  de  chasse  défendus 
aux  évêques  et  aux  clercs,  p.  814. 

CHAUDRON  de  bois  où  l'on  faisait  cuire  des  lé- 
gumes et  que  le  feu  n'endommageait  pas,  p.  377. 
CHAUSSURE.  Les  diacres  de  .Messine  se  ser- 
vaient d  une  espèce  de  chaussure  particulière  aux 
évêques,  p.  511. 

CHEVEU.\.  Au  vi«  siècle  c'était  la  coutume  de 
couper  les  cheveux  à  ceux  qui  étaient  en  péni- 
tence, p.  394.  On  les  coupait  aussi  à  ceux  qui  em- 
brassaient la  profession  monastique,  ibid.  On 
coupait  les  cheveux  aux  rois  pour  marque  de  leur 
dégradalion.iiid.  Une  manière  d'adoption  en  usage 
au  vil»  siècle  était  de  recevoir  les  cheveux  d'un 
jeune  homme,  p.  785. 

CHILDEBERT  1",  roi  de  Paris:  lettre  que  lui 
écrit  Léon,  évéque  de  Sens,  p.  202.  Différentes  let- 
tres que  lui  écrit  le  pape  Pelage  I".  dans  lesquel- 
les il  lui  fait  sa  profession  de  foi,  p.  33i  ,332.  Son 
ordonnance  contre  les  restes  d'idolâtrie,  p.  883. 
Son  diplôme  pour  l'abbaye  de  Saint-Vincent,  au- 
jourd'hui Saiut-Germain-des-Prés,  p.  883,  884.  Son 
ordonnance  contre  les  ravisseurs  des  veuves  et 
des  filles  consacrées  à  Dieu,  p.  884;  temps  de  sa 
mort,  p.  883. 

CHILDEBERT  II,  roi  d'Austrasie  :  traité  de  paix 
entre  lui  et  Contran,  p.  366.  Il  envoie  saint  Gré- 
poire  de  Tours  en  ambassade  auprès  de  Contran, 
ibid.  Poème  à  sa  louange  par  Fortunat,  p.  411. 
Épigramme  du  même  à  sa  louange,  p.  411.  Lettres 
que  lui  écrit  le  pape  saint  Grégoire,  p.  503,  50t. 
Éloge  de  Childebert,  p.  504. 

CUILDEBIUND,  oncle  paternel  du  roi  Pépin, 
fait  continuer  la  Chronique  de  Frédégaire,  p. 
746. 

CHILPÉRICI'^%  roi  de  Soissons:  la  guerre  en- 
tre lui  et  Sigebert,  roi  d'Austrasie,  ne  peut  être 
ralentie  parles  instances  de  saint  Germain,  évo- 
que de  Paris,  p.  3o7,  308;  il  dresse  un  édit  par 
lequel  il  ordonnait  qu'à  l'avenir  on  nommerait 
la  Sainte-Trinité  Dieu,  simplement,  sans  distinc- 
tion de  personnes;  horreur  que  lui  en  témoi- 
gnent saint  Grégoire  de  Tours,  et  Salvius,  évé- 
que d'AIbi,  à  qui  il  le  communique,  p.  314  et 
3o6;  il  compose  des  hymnes  et  des  collectes  qui 
ne  sont  point  approuvées;  p.  314;  on  lui  attribue 
l'épitaphe  de  saint  Germain,  évéque  de  Paris, 
rapportée  par  Aimoin,  p.  308  et  314:  il  est  as- 
sassiné, p.  314  ;  lettre  de  sainte  Radegonde  aux 
rois  Cbilpéric  et  Sigebert,  p.  310.  Traité  de  Cbil- 
péric  avec  Childebert  II  et  sa  mort,  p.  309;  poème 
de  Fortunat  sur  le  mariage  de  Galswinde  avec 
Cbilpéric,  p.  407;  sou  éloge  par  le  même,  p.  408. 
CHORICIUS,  sophiste  de  Gaza:  ses  discours, 

p.  180,  181. 

CHOSROÈS  Il.roides  Perses,  enlève  le  trésor  de 
l'église  d'Apamée,  mais  il  y  laisse  le  bois  de  la 
vraie  croix,  p.  416. 

CHRÊME,  donné  gratuitement,  p.  891  ;  il  entrait 
du  bauMitf  dans  la  consécration  du  saint-chrême; 
ou  en  oignait  les  catéchumènes  et  ceux  que  i'oo 


TADI.E  ANALYTIQUE. 


931 


baptisait,  p.  8il.  U  est  permis  aux  prêtres  de 
donner  l'onction  du  chrCmo  aux  malades  h  l'ex- 
tnHnili^  p.  815. 

CllUliXlEN.  Il  ne  suffit  pas  d'en  porter  le  nom, 
il  faut  en  remplir  les  devoirs,  p.  l.H. 

CHUISM.\L.  Ce  que  c'est  dans  la  règle  de  saint 
Coloniban,  p.  liiO. 

CHRODIELDE,  nUe  du  roi  Cliariliert,  religieuse 
à  Poitiers  ;  y  cause  de  grands  troubles  ;  ses  vio- 
lences, p.  300;  est  exconimunit^e  par  le  concile 
de  Poitiers,  p.  90.');  est  reçue  à  la  communion  par 
les  pfres  du  concile  de  Metz,  p.  906. 

CHRO-MQUE  lîcrite  par  Cassiodore,  p.  221- 
22Ï. 

CHRONIQUE  attribuée  à  Dacius,  évêque  do  Mi- 
lan, p.  204. 

CHRONIQUE  de  A'ictor  de  Tunones,  p.  302. 
Éditions  qu'on  en  a  faites,  ibid. 

CHRONIQUE  d'Édesse  par  un  auteur  inconnu, 
p.  342;  ce  qu'elle  contient  de  remarquable,  ibid. 
et  343. 

CHRONIQUE  (autre)  par  un  anonyme,  p.  343- 
344. 

CHRONIQUE  de  Marius,  évêque  d'ivranches, 
en  Suisse,  p.  399-400. 

CHRONIQUE  de  Jean,  abbé  de  Riclar,  puis  évê- 
que de  Girone,  p.  425-4-26. 

CHRONIQUE  générale  de  saint  Isidore  de  Sé- 
ville,  p.  7i4.  Chronique  particulière  des  Goths, 
des  Vandales,  des  Suèves,  par  le  même,  p.  715. 

CHONIQUE  de  Frédégaire,  p.  744  et  suiv.  Ses 
quatre  continuateurs  anonymes,  p.  740.  Editions 
qu'on  en  a  faites,  ibid. 

CHRONIQUE  de  Ternace,  évêque  de  Besançon, 
p.  781. 

CHRONIQUE  pascale,  p.  746;  elle  est  de  deux 
auteurs,  p.  747;  idée  de  cet  ouvrage,  ibid.;  édi- 
tions, ibid. 

CHRONIQUE  de  Denis  de  Telmera,  p.  813. 

CHRY.SANTHE,  évêque  de  Spolète.  Saint  Gré- 
goire le  Grand  lui  écrit,  p.  493. 

CIIRÏSARGYRE,  impôt  sur  les  personnes  in- 
fâmes, p.  418. 

CIERGE  pascal.  Prières  que  l'archevêque  de 
Ravenne  récitait  en  le  bénissant,  p.  522  ;  saint 
Grégoire  lui  dit  de  les  faire  réciter  par  un  autre, 
ibid. 

CILINIE,  mère  de  saint  Rémi,  p.  76. 

CIMETIÈRES.  L'usage  était  de  les  faire  bénir 
avant  d'y  enterrer  personne,  p.  377. 

CIRCONCISION.  Saint  Grégoire  a  cru  que  la 
circoncision  remettait  le  péché  originel,  p.  505. 

CLAUDE,  père  de  saint  Fulgence,  p.  1. 

CLAUDE  ordonné  prêtre  par  saint  Rémi,  p.  80; 
trois  évêques  des  Gaules  désapprouvèrent  cette 
ordination,  p.  81. 

CLAUDE,  abbé  de  Saint-Jean-de-Classe  près 
de  Ravenne,  p.  489;  son  différend  avec  l'église 
de  Ravenne;  il  se  pourvoit  par-devant  le  Saint- 
Siège,  p.  505  ;  il  obtient  de  saint  Grégoire  un 
privilège  pour  son  monastère,  p.  5U;  fait  des 
recueils  des  œuvres  de  saint  Grégoire  sur  divers 
livres  de  l'Écriture,  p.  .545;  il  n'est  pas  auteur  du 
commentaire  sur  le  livre  des  Bois,  attribué  faus- 


sement il  saint  Grégoire,  ibid,  et  .5-10,  ni  du  com- 
mentaire sur  le  CanUque  des  Cantiques,  p.  510. 

CI.KK  miraculeuse,  p.  509. 

<:i,KMEN'l'IN,  primat  de  la  province  Bysa- 
cène.  p.  909. 

CLERCS.  L'empereur  .lustinien  règle  le  nom- 
bre des  clercs  pour  la  grande  église  de  Constan- 
tinople,  p.  ■i55.  Lois  de  cet  empereur  touchant 
les  clercs,  p.  256-259.  Défense  aux  clercs  d'avoir 
des  femmes  étrangères,  p.  260.  Décret  attribué  au 
pape  l'élage  II  sur  le  jugement  des  chircs,  p.  :)39. 
Divers  règlements  de  saint  Grégoire  le  Grand 
touchant  les  clercs,  p.  496,  497,  499,  500  et  suiv., 
.501,  510,  517,  522,  523, .524  et  suiv. Doctrine  desaint 
Grégoire  sur  les  clercs,  p.  57i  et  suiv.  Témoignage 
de  saint  Isidore  de  Séville,  p.  7i8.  Décision  du 
pape  saint  Martin  sur  les  clercs,  p.  710.  Règle- 
ment du  concile  de  Paris  de  l'an  615  touchant  les 
clercs,  p.  912, 913.  Les  clercs  étaient  tellement  atta- 
chésà  une  église  particulière,  qu'on  ne  pouvait  les 
en  tirer  pour  les  faire  évoques  sans  l'agrément  de 
l'évéque  diocésain,  p.  500.  Défense  aux  clercs  de 
quitter  leurs  églises  pour  passer  à  d'autres,  p.9i3; 
ils  ne  doivent  être  jugés  que  par  des  juges  ecclé- 
siastiques, p.  339;  ils  ne  doivent  point  èlre  tra- 
duits devant  les  tribunaux  séculiers,  p.  5ui  ;  la  con- 
naissance des  affaires  des  clercs  doit  être  laissée 
aux  évêques,  p.  522.  Clercs  obligés  à  la  garde 
des  villes  dans  un  temps  d'hostilité,  p.  511.  Con- 
tinence des  clercs  :  ceux  qui  sont  dans  les  ordres 
sacrés  y  sont  obligés,  p.  524.  Règlement  du  con- 
cile de  Tolède  de  l'an  597,  touchant  la  conti- 
nence des  clercs,  p.  907.  Les  canons  leur  défen- 
dent de  loger  avec  des  femmes  étrangères,  p. 
517,  5i8;  les  clercs  tombés  dans  les  péchés  de  la 
chair  n'étaient  jamais  rétablis  dans  leurs  fonc- 
tions, p.  477,  573,  574;  on  leur  accordait  seule- 
ment la  communion  parmi  les  laïques,  p.  499; 
diverses  sortes  de  pénitences  imposées  aux  clercs, 
p.  574  Un  clerc  convaincu  de  malélice  puni  cor- 
porellement  et  mis  en  pénitence,  ibid.  Un  clerc 
qui  avait  abusé  d'une  flUe,  puni  corporellement, 

p.  497. 

CLODOBERT,  fils  de  Chipéric  :  son  épitaplie 
par  Fortunat,  p.  408. 

CLODOSINDE,  reine  des  Lombards  :  saint  Ni- 
cétius,  évêque  de  Trêves,  lui  écrit  pour  la  por- 
ter à  convertir  le  roi  son  époux,  p.  205. 

CLOTAIRE  I",  roi  des  Français,  épouse  sainte 
Radegonde;  elle  le  quitte  et  se  consacre  à  Dieu, 
p.  315;  il  tente  en  vain  de  la  reprendre,  ibid.  et 
316;  son  ordonnance  pour  l'observation  de  la 
justice,  p.  884.  Sa  mort,  ibid. 

CLOTAIRE  II,flls  de  Chilpéric.  Prédiction  que 
lui  fait  saint  Colomban,  p.  616.  Il  reçoit  saint  Co- 
loniban, ibid.  ;  il  devient  seul  roi  des  Français, 
p.  617;  il  invite  saint  Colomban  Prévenir  à  Lu- 
xeuil,  ifcid.;  lettre  que  lui  écrit  le  saint,  ibid.;  son 
baptême,  p.  906;  Clotaire  assemble  le  concile 
de  Paris,  p.  912;  édit  pour  l'exécution  des  ca- 
nons de  ce  concile  avec  des  modifications,  p.  913. 

CLOTILDE  tsaintei,  fille  de  Chilpéric  et  nièce 
de  Gondebaud,  roi  des  Bourguignons,  épouse 
Clovis,  roi  des  Français,  p.  78;  Clotilde  travaille 


932  TABLE  ANALYTIQUE 

à  sa  conversion,  ibid.;  elle  se  retire  après  la  mort 
de  Clovis  auprès  du  tombeau  de  saint  Martin, 
p.  36s. 

CLOUS  qui  serrirent  à  attacher  le  Sauveur  à 
la  croix:  saint  Grégoire  de  Tours  en  compte  qua- 
tre, p.  372  et  389. 

CLOVIS,  roi  des  Français,  p.  78;  sa  conver- 
sion, ibid.  et  79;  son  baptême,  p.  79;  lettre  de 
saint  Rémi  à  Clovis,  p.  79-80;  lettre  de  ce  prince 
aux  (îvéques  des  Gaules;  sa  mort.  p.  80. 

COGITOSL'S,  Irlandais  qui  a  écrit  la  vie  de 
sainte  Brigide,  sa  tanie,  p.  348. 

COLOMB,  évéque  de  Numidie,  en  qui  saint  Gré- 
goire avait  confiance,  p.  489  ;  ce  Pape  lui  écrit, 
p.  489,  506. 

COLOMB,  prêtre;  saint  Grégoire  le  Grand  lui 
envoie  un  exemplaire  du  Pastoral,  p.  199. 

COLOMBA,  ou  COLyMBAN  (saint),  premier  abbé 
de  Hi,  prêche  la  foi  aux  Pietés  septentrionaux, 
p.  GI2. 

COLOMBAÎS'  (saint),  abbé  de  Luxeu,  ou  Luxeuil  : 
sanaissance,  son  éducation,  p.  612. 11  embrasse  la 
vie  monastique  à  Bancor,  ibid.;  il  quitte  l'Irlande 
et  passe  dans  les  Gaules,  p.  C13;  il  s'établit  à 
Anegray  dans  les  Vosges,  ibid.;  il  bâtit  les  mo- 
nastères de  Luxeu  et  de  Fontaines,  ibid.  On  a 
lieu  de  douter  qu'il  ait  établi  la  psalmodie  per- 
pétuelle à  Luxeu:  ibid.  et  614.  Saint  Colomban 
est  inquiété  sur  le  temps  où  il  célébrait  la  Pâque, 
p.  614;  sujet  de  la  haine  que  lui  portait  la  reine 
Brunehaut  ;  son  entretien  avec  le  roi  Thierri,  ibid. 
Il  est  exilé  et  revient,  ibid.  et  615.  Il  est.exilé  une 
seconde  fois  et  embarqué  sur  la  Loire  pour  être 
ramené  en  Irlande,  p.  615;  il  se  retire  dans  les 
États  du  roi  Théodebert  et  prêche  la  foi  a  Zug, 
p.  616:  il  s'établit  à  Bregents,où  il  fait  beaucoup 
de  conversions,  ibid.;  va  en  Italie  et  s'y  établit 
à  Bobbio  où  il  établit  un  monastère,  ibid.  Le  roi 
Clotaire  l'invite  à  revenir  à  Luxeu.  Lettre  qu'il 
écrit  à  ce  prince,  p.  617.  Il  meurt  en  615.  Sa  vie 
écrite  par  Jonas,  et  par  d'autres,  ibid.  Ses  écrits  : 
sa  règle  observée  avec  celle  de  saint  Benoît,  p! 
617,618;  règle  de  saint  Césaire  avec  celle  de  saint 
Colomban,  p.  618;  première  partie  de  la  règle  de 
saiut  Colomban,  6i9,  620;  seconde  partie  ou  le 
Pénitentiel.  p.  620,  621  ;  autre  Pénitentiel  de  saint 
Colomban,  p.  on,  622.  Premier  discours  sur  l'u- 
nité de  Dieu  et  la  trinité  des  personnes,  p.  622; 
second  discours  sur  la  mortification  des  vices  et 
l'acquisition  des  vertus,  ibid.;  troisième  discours 
sur  le  mépris  du  monde  et  l'amour  des  biens 
éternels,  p.  623;  quatrième  discours  sur  les  tra- 
vaux de  la  vie  présente,  ibid.;  cinquième  et 
sixième  discours  sur  la  nature  de  la  vie  présente, 
ibid.;  septième  et  huitième  discours  sur  l'aveu- 
glement des  mondains  et  le  désir  de  la  félicité 
éternelle,  ibid.;  neuvième  discours  sur  le  juge- 
ment dernier,  ibid.;   dixième  discours  sur  le 
moyen  d'éviter  la  colère  du  souverain  Juge,  ibid.; 
onzième  discours  sur  l'amour  de  Dieu  et  du  pro- 
chain, iftirf.  ;  douzième  discours  sur  la  comiionc- 
tion  et  la  vigilance,  ibid.  et  624;  treizième  dis- 
cours sur  la  fontaine  de  vie  qui  est  Jésus-Christ, 
ibid.;  quatorzième,  quinzième,  et  seizième  dis- 


cours, p.  624:  dix-septième  discours  sur  les  huit 
vices  capitaux,  ibid.  Lettres  de  saint  Colomban 
au  Pape  saint  Grégoire,  ibid.  et  625;  aux  évêques 
des  Gaules  assemblés  en  concile  vers  l'an  612, 
p.  625  et  626;  au  pape  Boniface,  p.  620;  aux 
moines  de  Luxeu,  p.  627;  au  pape  Boniface,  ibid. 
Poésies  de  saint  Colomban  ;  poème  à  Hunald,  son 
disciple,  ibid.  et  628;  poème  à  Fédolius,  p.  628; 
poème  sur  la  femme,  ibid.  -.  poème  intitulé  Mo- 
nostichon,  ibid.;  rhythme  en  forme  de  prose  car- 
rée, ibid.  et  629.  Ouvrages  de  saint  Colomban  qui 
sont  perdus,  p.  629  :  un  commentaire  sur  les 
Psaumes,  ibid.;  un  écrit  contre  les  ariens,  ibid.  ; 
des  lettres  au  roi  Théodoric,  ibid.;  au  roi  Clo- 
taire et  à  un  de  ses  disciples,  ibid.;  lettres  et 
écrits  sur  la  Pâque  et  sur  les  Trois-ChapHres, 
ibid.  Jugement  des  écrits  de  saint  Colomban,  et 
éditions  qu'on  en  a  faites,  p.  630. 

COLOMBES  d'or  et  d'argent  suspendues  sur  les 
sacrés  fonts  et  sur  les  autels,  p.  821 

COMMUNION  à  la  messe  pontificale,  p.  511; 
manière  dont  elle  se  faisait,  ibid.;  tous  ne 
communiaient  pas  chaque  fois  qu'ils  assistaient 
au  saint  sacrifice,  p.  390.  Les  fidèles  ne  s'appro- 
chaient de  la  communion  qu'après  la  fin  de  la 
messe,  p.  391.  Tous  buvaient  le  sang  de  Jésus- 
Christ  dans  un  même  calice,  ibid.  Chez  les  ariens 
il  y  avait  un  calice  pour  les  rois,  et  un  autre 
pour  le  peuple,  ibid.  Communion  sous  les  deux 
espèces,  p.  737;  sous  une  seule  espèce,  p.  391. 
Les  novices  de  saint  Colomban  ne  commu- 
niaient que  sous  l'espèce  du  pain,  p.  620.  Com- 
munions indignes,  p.  605, 606.  Sentiment  de  saint 
Isidore  de  Séville  sur  la  fréquente  communion, 
p.  717,  720.  Si  les  illusions  nocturnes  doivent 
empêcher  de  communier  ou  d'offrir  le  sacrifice, 
p.  526.  Une  femme  qui  a  ses  incommodités  or- 
dinaires, peut  communier,  bien  qu'elle  soit  loua- 
ble si  elle  se  prive  de  la  communion  par  res- 
pect, ibid.  Avant  de  communier,  il  faut  s'éprouver 
soi-même  et  se  purifier  de  ses  fautes,  p.  602. 
L'eau  qu'on  aurait  avalée  en  lavant  sa  bouche  ne 
doit  pas  empêcher  de  communier,  p.  603.  En 
communiant  une  personne,  on  lui  mettait  dans 
la  bouche  le  corps  du  Seigneur,  p.  569. 

C051E,  ville  sur  l'Adda;  description  qu'en  fait 
Cassiodore,  p.  219. 

COMPUT  pascal  de  Cassiodore,  p.  222. 

CONANTIUS,  évêque  de  Palencia  en  Espagne: 
hymnes  et  prières  que  lui  attribue  saint  lldc- 
fonse,  p.  699.  Sa  mort,  ibid, 

CONCILES.  Conciles  généraux,  autorité  des 
conciles  généraux,  p.  93,  94.  Les  quatre  premiers 
conciles  généraux  ont  affermi  les  fondements  de 
notre  foi,  etc.,  p.  230, 231, 244.  Ils  sont  révérés  par 
saint  Grégoire  le  Grand  comme  les  quatre  évangi- 
les, p.  434,  482,  554,  555.  Toui  ce  qui  a  été  une 
fois  arrêté  dans  le  concile  et  l'assemblée  des  Pè- 
res doit  toujours  demeurer  ferme  et  stable,  p.  92. 
11  n'a  jamais  été  permis  et  il  ne  le  sera  jamais 
d'assembler  un  concile  particulier  pour  exami- 
ner un  concile  général,  p.  jM.  La  convocation 
d'un  concile  général  appartient  par  privilège  au 
siège  apostolique  de  saint  Pierre,  p.  338.  Dans 


TABLE  ANALYTIQUE. 


933 


un  concilo  on  ne  fait  jamais  de  canons  qu'après 
les  diMlnitions  de  foi,  ibid.  Le  v»  concilo  général 
reçu  pai'  saint  r.régoire  le  (îrand,  p  i82,  r)r)r).  L'K- 
glise  romaine  n'avait  reçu  que  la  dénnitlon  do  foi 
du  concile  de  Conslantiiiople.  second  n'cuinéni- 
que,  p.  507.  Concile  d'Eplièse,  falsilié  comme  celui 
de  Clialcédoine,  p.  5o5,  55r).  Le  pape  Léon  1 1  en  voie 
aux  évO(|ues  d'Espagne  la  délinition  de  foi  du 
3' concile  de  Constantinople,  vi''  œcuménique,  p. 
784.  Conciles  particuliers.  Saint  Grégoire  le  Grand 
trouve  dans  la  tenue  des  conciles  particuliers 
de  grands  avantages,  p.  O.'iD.  11  voulait  que  l'on 
en  tienne  une  fois  l'an,  ibid.  Dans  les  conciles, 
les  prêtres  étaient  assis,  mais  les  diacres  se  te- 
naient debout  avec  le  reste  du  clergé,  ibid.  Saint 
Grégoire  ordonne  la  tenue  d'un  concile  en  France 
pour  remédier  i  divers  abus,  p.  518.  On  assem- 
blait ordinairement  en  France  les  conciles  par 
ordre  ou  du  moins  avec  l'agrément  du  roi,  p. 
393.  Les  causes  des  évéques  étaient  examinées 
dans  ces  conciles  particuliers,  ibid.  Sigebert, 
roi  d'Austrasie,  défend  d'assembler  des  conciles 
sans  sa  permission,  p.  734.  Un  évêque  condamné 
dans   un    concile    particulier   pouvait    appeler 
au  Saint-Siège,  p.  393.  —  Conciles  du  vi«  siè- 
cle :  concile  d'Épaone  en  517,  p.   811  et  suiv.; 
de    Lyon    en   517,  p.  817-818;    de   Constantino- 
ple en  518,  p.  818-819;  4e  Jérusalem  en  5is,  p. 
819-830;  de  Tyr  en   5i8,  p.  820  821  ;  lettre  du 
clergé  d'Antioche  en  518,  p.  821-822;  lettre  des 
évêques  de  la  seconde  Syrie  au  concile  de  Cons- 
tantinople, p.  822-823.  Concile  de  Rome  en  519, 
p.  823;   d'Arles  en  524,  p.    823  824;    de  Lérida 
en  524,  p.  824  et  suiv.  ;  de  Valence  en  524,  p.  8-2G 
et  suiv.;  de  Junque,  en  524,  p.  828;  de  Cartilage 
en  525,  p.  828  et  suiv  ;  de  Carpentras  en  5-2T,  p. 
831-832;  d'Orange  en  529.  p.  832 et  suiv.;  de  Va- 
lence en  529,  p.  838;  de  Vaison  en  529,  ibid.  et 
839  ;  de  Tolède  en  531,  p.  839-840.  Lettre  de  Mon- 
tan,  évêque  de  Tolède,  p.  840-sil  ;  autre  lettre 
de  Montan  à  Turibius,  p.  841.  Concile  de  Rome 
en  530,  p.  8JI  ;  autre  en  53i,  ibid.  Première  ses- 
sion, ibid.  et  842;  seconde  session,  p.  842.  Confé- 
rence des  catholiques  avec  les  Orientaux  ou  sévé- 
riens  à  Constantinople,  en  533,  p.  843.  Premier 
jour  de  la  conférence,  ibid.  et  844;  second  jour, 
p.  844  st  suiv.  Conférence  du  troisième  jour,  p. 
846-847.    Concile    d'Orléans    en    533,  p.  847  et 
suiv.  Concile  de  Clermont  en  Auvergne  en  535 
p.  8.19-850;  lettre  du  concile,  p.  8£0.   Concile  de 
Carthage  en  555,  p.  850.  DifSculté  do   Félicien, 
ibid.  et  851.  Concile  de  Constantinople  contre  An- 
thime  en  536,  p.  851-852.  Autre  concile  sous  Men- 
nas,  p.  852.  .Vction  première,  ibid.  et  853.  Action 
seconde,  p.  863;  troisième  ibid.;  quatrième,  ibid.; 
cinquième,  p.  854,  815.  L'empereur   Justinien 
confirme  ce  concile,  p.  855.  Concile  de  Jérusa- 
lem en  536,  p.  8-55;  d'Orléans  en   538,  p.  856  et 
suiv.  ;  de  Barcelonne,  en  540,  p.  859;  d'Afrique  en 
541,  p.  859;  d'Orléans  en  54i,  ibid.  et  suiv.;  de 
Constantinople  en  547,  p.  862;  d'Orléans  en  .549, 
idid.  et  suiv.;  de  Clermont  en  549,  p.  864  ;  de  Tout 
en  550,  iftîd.  et  865.  Second  concile  de  Constantino- 
ple; cinquième  général,  p.  868-881 .  Projet  de  ce  con. 


cilo,  p.  805.  Concile  de  Mopsuesto  en  550,  p.  866. 
Violences  contre  le  pape,  ibid.,  et  807.  Les  Orien- 
taux présentent  leur  profession  de  foi  au  pape 
Vigile,  p.  807.  Première  conférence  du  second 
concile  lie  Constantincipli',  p.  HiîB-Kfin.  Seconde 
conférence,  p.  809-870;  troisième,  p.  87fl  ;  qua- 
trième, ihid.  et  suiv.;  cinquième,  p.  871;  sixième, 
p.  873.  Co7)xlituluin  du  pape  Vigile,  ibid.  et  suiv. 
Septième  conférence,  p.  875,  870;  huitième,  p. 
8)0  et  suiv.  Anatlième  contre  les  origénistes  dans 
la  neuvième  conférence,  p.  878.  Condamnation 
d'Origène  dans  le  cinquième  concile  général, 
ibid.  et  879  Le  pape  Vigile  désapprouve  les  Trois- 
Chapitres,  p.  879  et  suiv.  Le  cinquième  concile 
général  est  reçu  en  Orient,  p.  881-882.  Il  occa- 
sionne un  schisme  en  Occident,  p.  882;  .  Concile 
de  Palestine,  ibid.;  d'Arles  en  554;  ibid.;  de 
Paris  en  557 ,  p.  883.  Conciles  de  Landaff , 
p.  884  et  885;  de  Brague  en  563,  p.  8858-80; 
de  Saintes  en  563,  p.  887-888;  de  Lyon  en  566, 
p.  887;  de  Tours  en  566,  p.  887-890.  Lettres  du  con- 
cile de  Tours,  p.  890-891.  Concile  de  Brague  en 

572,  p.  891;  de  Lugo  en  572,  p.  892;  de  Paris  en 

573,  ibid.  et  893;  autre  en  577,  p.  893.  Saint  Gré- 
goire de  Tours  y  assiste,  p.  366.  Concile  contre 
les  Samaritains  en  577,  p.  592-593.  Concile  de  Châ- 
lons  en  579,  p.  894;  de  Mâcon  en  581, ibid.  et895; 
de  Lyon  en  583,  p.  895; de  Braine  vers  l'an  580, 
ibid.  et896.  Saint  Grégoire  de  Tours  y  est  accusé 
et  s'y  justifie,  p.  366.  Concile  de  Valence  en  584, 
p.  896  ;  de  Mâcon  en  595,  ibid.  et  897;  d'Auxerre  en 
585,  p.  897-898;  de  Clermont  en  Auvergne  en  585,  p. 
899;  de  Constantinople  en  587,  p.  899;  de  Tolède  en 
589,  p.  900  et  suiv.;  de  Karbonne  en  589,  p.  904; 
de  Sauriciac  et  de  Home  en  589,  p.  905.  Con- 
cile de  Poitiers,  en  590,  p.  905;  de  Metz  en  590, 
ibid.  et  906;  de  Nanterre  en  591,  p.  906  ;  de  Sa- 
ragosse  en  592,  ibid.;  de  Rome  en  595,  ibid.  et 
907  ;  de  Tolède  en  597,  p.  907  ;  de  Huesca  en  598, 
ibid.;  de  Barcelone  en  599,  p.  907-908.  Conciles 
du  vu=  siècle:  Concile  de  Rome,  en  601,  p.  908; 
de  Worchester  vers  l'an  601,  ibid.  et  909;  de  la 
Byzacène  en  602,  p.  909  ;  de  Chalon-sur-Saône  en 
603,  ibid.;  de  Numidie  en  602,  p.  910;  de  Caatorbé- 
ry  en  605,  ibid.;  de  Rome  en  606,  ibid  et  911;  de 
Tolède  en  610,  p.  911:  d'Egara  ou  Terassa  en  614, 
ibid.  et  912;  de  Paris  en  645,  p.  912,  013;  de  Kent 
en  017,  p.913-914;deSévilleen619,  p.  914  et  suiv.; 
de  Théodosiopolis,  vers  l'an  622,  p.  715;  de  La- 
tran  en  619,  p.  748. 

CONCUBINAGE.  Ceux  qui  vivaient  dans  le  con- 
cubinage étaient  séparés  de  la  communion  de 
l'Église,  p.  755. 

CONFESSION  des  péchés  faite  aux  prêtres, 
p.  605  620.  Sa  nécessité,  p.  130,  137.  L'évéque,  le 
prêtre,  le  diacre,  doivent  confesser  leurs  pé- 
chés, p.  758.  En  cas  de  nécessité,  on  peut  se  con- 
fesser i  Dieu  seul,  selon  le  Pc'iiitenliel  de  Théo- 
dore, ibid.  Nous  sommes  obligés,  par  une  né- 
cessité de  précepte  divin,  de  confesser  simple- 
ment nos  péchés  aux  prêtres  pour  en  recevoir 
l'absolution,  p.  69i. Confession  générale  faite  au 
prêtre,  p.  753.  Confession  faite  par  écrit,  p.  661- 
662.  Confession  publique  d'un  vOleur  pénitent 


931 


TABLE  ANALYTIQUE. 


p.  680.  Sentiment  de  saint  Grégoire  sur  la  confes- 
sion, p.  570.  Tous  ceux  qui  confessent  leurs  pé- 
chés n'en  obtiennent  pas  la  rémission,  lorsqu'ils 
ne  les  confessent  que  de  bouche,  p.  5.5.  La  con- 
fession devient  utile,  lorsque  le  pécheur,  après 
avoir  confessé  ce  qu'il  avait  fait  de  mal,  ne  le  fait 
plus  à  l'avenir,  p.  56. 

CO.\"FIR.M.\TIO.\'.  Le  sacrement  de  confirma- 
tion se  confère  par  l'onction  du  chrême  et  par 
l'imposition  des  mains,  p.  "713.  Il  ne  se  donne 
qu'après  le  baptême,  ibid.  L'évéque  est  le  seul 
ministre  de  la  confirmation,  p.  ';75.  Pour  être 
parfait  chrétien,  il  faut  avoir  reçu  la  confir- 
mation de  l'évéque,  p.  708.  Dans  le  sacrement 
de  confirmation,  on  reçoit  du  Saint-Esprit  le 
don  de  force  et  une  grâce  abondante  ,  p.  691. 
Sentiment  de  saint  Grégoire  le  Grand  sur  le 
sacrement  de  confirmation  et  son  ministre,  p.  495 
et  566,  .567.  Si  le  prêtre  peut  administrer  la 
confirmation  par  dispense,  sentiment  des  théo- 
logiens, p.  567. 

CONGA.L,  abbé  de  Bancor,  en  Irlande,  p.  612. 

CONON,  évêque  d'Édesse,  p.  343. 

CONO.N,  abbé  de  Lérins,  à  qui  saint  Grégoire 
le  Grand  écrit,  p.  520. 

CONON,  un  de  ceux  qui  écrivirent  pour  défen- 
dre la  résurrection  des  morts  contre  Jean  Philo- 
ponus,  p.  652. 

COPISTES  ou  ANTIQU.MRES,  p.  233.  23i. 

CONST.^NCE,  mansionnaire  de  l'Église  de  saint 
Etienne,  auprès  de  la  ville  d'Ancûiie,  p.  474. 

CONSTANTIN  lIlouCONST.iNT,filsd'Héraclius, 
empereur.  Le  pape  Jean  IV  lui  écrit,  p.  649. 

CONSTANTIN  IV  ou  CONSTANT  II,  empereur, 
d'Orient,  flls  du  précédent;  lettre  que  lui  écrit 
le  pape  Martin  en  lui  envoyant  les  Actes  du 
concile  qui  avait  condamné  les  monothélites, 
p.  749  II  fait  enlever  le  pape  M;irtin  I,  p.75i.  Mau- 
vais traitements  qu'il  fait  subir  à  ce  pape,  re- 
proches que  lui  en  fait  le  patriarche  Paul ,  ibid. 
et  752.  Persécution  qu'il  fait  souffrir  à  saint 
Mïxime,  abbé  de  Chrysopolis,  opposé  au  mono- 
thélisme,  p.  701  et  suiv.  Lettre  que  lui  écrit 
l'abbé  siint  Maxime  pour  l'exhorter  à  la  pra- 
tique des  commandements  de  Dieu,  p.  7f.8.  Cons- 
tantin renouvelle  les  privilèges  de  l'église  de 
Rome  et  lui  fait  des  présents,  p.78J. 

CO.NSTANTI.N  V,  surnommé  Pogonat,  empe- 
reur d'Orient:  sa  lettre  au  pape  Douiniis  est  re- 
mise au  pape  Agatbon:  ce  qu'elle  contient,  p. 
783.  Ses  lettres  au  pape  Léon  11  conlirmatives 
des  décrets  du  concile  de  Constantinople  contre 
les  monothélites,  p.  704.  Lettre  au  clergé  et  au 
peuple  de  Rome,  par  laquelle  il  ordonne  qu'à  l'a- 
venir on  n'enverrait  point  à  Constantinople  le 
décret  de  l'élection  des  papes,  et  qu'il  suffirait 
que  l'exarque  de  Ravenne  consentît  en  son  nom 
à  l'élection,  p.  785.  Il  envoie  à  Rome  les  che- 
veux de  ses  deux  flls  Jnstiniun  et  lléraclius, 
faisant  adopter  ses  11  Is  par  le  i)ai)e,  ihid.  Sa  mort, 
ibid. 

CONSTANTIN,  disciple  de  saint  Benoît  et  abbé 
du  Mont-Cassin,  p.  6.34. 

CONSTANTIN  LE  DIACRE, gardien  des  chartes 


et  juge  des  causes  ecclésiastiques,  p.  967.  Son 
discours  sur  les  martyrs,  ibid.  Analyse  de  ce  dis- 
cours, ibid.  et  suiv. 

CONSTANTINE.  impératrice,  demande  à  saint 
Grégoire  des  reliques  de  saint  Paul,  p.  497.  Saint 
Grégoire  lui  écrit,  ibid.  et  501. 

CONSTANTINOPLE.  Prérogative  du  siège  de 
Constantinople  sur  les  autres  sièges,  p.  417. 

CONSTANTIUS,  évêque  de  Milan.  Saint  Gré- 
goire lui  écrit  sur  l'affaire  des  Trois-Chapitres, 
p.  404;  il  lui  envoie  encore  d'autres  lettres,   p. 

495;  499,  5l5,  516,  528.  Sa  mort,  p.  520,  183, 185. 

CONSTITUT,  archevêque  de  Sens,  assiste  au 
second  concile  de  Paris  en  55i,  p.  882. 

COUPÙKAL  ou  NAPPE  D'AUTEL,  p.  539. 

CORPS  11U.MA1N.  De  la  construction  du  corps 
humain,  ouvrage  de  Cassiodore,  p.  241.  Corps  de 
Jésus-Christ  :  on  l'adore,  p.  301. 

CORRECTION  des  moines  suivant  saint  Benoti, 
p.  1691-70. 

CORSES,  idolâtres  convertis,  p.  5i0. 

COSME  d'Egypte,  surnommé  Indicopleustes  à 
cause  de  sa  navigation  dans  les  Indes;  après  avoir 
longtemps  exercé  le  commerce  et  navigué  au 
loin,  il  embrasse  la  vie  monastique,  p.  i86;  ses 
ouvrages  :  Topograhie  chrétienne,  ibid.  Elle  est 
divisée  en  douze  livres  :  dessein  de  cet  ouvrage, 
ibid.el  187;  ce  qu'il  y  a  de  remarquable,  p.  187 
et  suiv.  Livres  de  Cosme  qui  sont  perdus.  Sa  Cos- 
mographie, ses  Tables  astronomiques  et  autres 
écrits,  p.  191.  Jugement  sur  son  style,  ibid.  Édi- 
tions de  sa  Topographie,  p.  186. 

COSME,  évêque  d'Epiphanie,  et  Sévérien,  d'A- 
réthuse,  se  séparent  de  la  communion  de  Sévère, 
faux  patriarche  d'Anlioche,  p.  107  ;  ils  lui  font  si- 
gnifier un  écrit  par  lequel  ils  le  déposent  de  l'é- 
piscopat,  ibid.  L'empereur  Anastase  ordonne  a 
ce  sujet  que  ces  deux  évèques  soient  chassés  de 
leurs  sièges,  puis  il  change  de  sentiment,  ibid. 

COSME,  diacre  de  Thèhes,  p.  490.i 

COSME,  évêque  de  Majume  en  Palestine;  ce 
qu'eu  dit  Suidas,  p.  790.  Ces  poésies,  ibid.  Col- 
lection et  interprétation  des  histoires  dont  saint 
Grégoire  de  Naziance  fait  mémoire  dans  ses  poé- 
sies, ibid.  et  791. 

COSME  l'Ancien,  abbé  de  Jérusalem,  différent 
de  l'abbé  de  Majume,  p.  790.  Voyez  ibid.  note  4. 
Ses  poésies,  p.  790. 

COSMOGRAPHIE.  Elle  est  très-Utile  à  ceux  qui 
étudient  l'Écriture  sainte,  p.  432-Î33. 

COUTUMES  des  églises.  Elles  sont  différentes. 
SaintGrègoire  permet  au  moine  Augustin  de  choi- 
sir celles  qu'il  jugera  à  propos  pour  les  établir 
en  Angleterre,  p.  .524-.5Î5. 

CREATION.  Si  Dieu  a  créé  tous  les  animaux,  p. 
36.  Tous  les  êtres,  soit  spirituels,  soil  corporels, 
sont  l'ouvrage  de  Dieu  qui  les  a  créésde  rien,p.64. 

CRESCONIUS,  évêque  d'Afrique.  Sa  collection 
(les  canons,  éditions  qu'on  en  a  faites,  p.  808-809; 
autre  écrit  de  Cresconiiis,  p.  809. 

CROI.V.  La  croix  de  Jésus-Christ  est  l'espé- 
rance do  notre  salut,  la  force  et  l'ortienjeiit  de 
la  religion,  p.  608.  Forlunat,  évêque  de  Poitiers, 
dit  qu'il  adore  la  croix  en  tous  temps,  qu'il  la 


TABLE  ANALYTIUUE. 


935 


regarde  comme  le  gage  certain  de  son  salut, 
qu'il  la  porte  avec  lui  comme  son  refuge  dans 
ses  besoins,  p.  401.  On  adorait  la  croix  tous  les 
mercredis  et  tous  les  vendredis  dans  l'éjjllse  du 
monastère  de  Sainte-Croix  a  l'oitiers.p.  57-2  et  389. 
On  déposait  a  Jérusalem  la  sainte  croix  en  [lublic 
à  la  mi-Carénie,  pour  être  adorée  des  fidèles,  p. 
705.  On  gardait  dans  une  église  de  Oonstantino- 
ple  la  vraie  croix,  et  on  la  montrait  seulement 
trois  jours  de  la  semaine  sainte,  élevée  sur  un 
autel  d'or,  p.  802.  Exaltation  delà  sainte  croix: 
on  en  faisait  la  fête  cliai|ue  année,  p.  705.  La 
sainte  croix  emportée  de  Jérusalem  piu' les  Perses, 
p.  (iy?.  Miracle  do  la  vraie  croix  dans  la  ville 
d'Apamée,  p.  110.  Huile  qui  découlait  du  bois  de 
la  croix  du  Sauveur,  p.  51-2.  Croix  mise  au-des- 
sus de  l'autel,  p.  389.  C'était  l'usage  général  de 
l'Église  de  bénir  avec  le  signe  de  la  croix  les 
sacrés  dons  que  l'on  offrait  sur  l'autel  et  que  l'on 
servait  ;\  table,  p.  38'J.  Signe  de  la  croix  :  les  moi- 
nes de  saint  Colomban  faisaient  le  signe  de  la 
croix  sur  tout  ce  qu'ils  prenaient,  p.  G20.  L'É- 
glise adore  par  toute  la  terre  la  croix  et  les  clous 
qui  ont  servi  d'instrument  à  la  passion  de  Jé- 
sus-Christ, à  cause  de  celui  qui  a  été  percé  de 
ces  clous,  et  attaché  à  cette  croix,  p.  301.  Jean, 
moine  schismatique  h  Tyr,  jette  des  pierres  con- 
tre la  vénérable  croix,  p.  8-21. 

CRUCIFIX.   D'où    est  venue  la  coutume    de 
peindre    les    crucifix   avec  une   périzone    ou 


une  robe  qui  descend  jusqu'aux   pieds,  p.  375. 

CUMÉKN,  Cl'MlAiN  ou  CUMIN,  abbé  en  Hiber- 
nie.  Son  l'énitentiel,  qui  a  beaucoup  de  rapport 
avec  celui  de  saint  Colomban,  p.  Ci-2,  738.  Lettre 
donnée  sous  son  nom  par  Ussérius,  p.  738.  Édi- 
tions de  son  Péuilentiel,  ibid. 

CYPIUEN,  évéque  de  Toulon,  écrit  la  vie  de 
saint  Césaire  d'Arles,  p.  128. 

CYPItlEN ,  diacre,  recteur  du  patrimoine  de 
Saint-Pierre  en  Sicile,  p.  409,  Saint  Grégoire  le 
Grand  lui  écrit,  p.  499-500. 

CVIUAQUE,  abbé  de  Saint-André,  employé  à  la 
conversion  des  Barbariciens,  p.  43G,  407;  élu  pa- 
triarche de  Constantinople,  il  envoie  au  pape  saint 
Grégoire  sa  profession  de  foi,  p.  50G-507.  Il  prend 
le  titre  d'évôque  universel,  p.  530  et  .507.  Saint 
Grégoire  lui  écrit  plusieurs  lettres  contre  cette 
prétention,  p.  507,  531. 

CVRIAQUE,  juif  converti,  p.  484. 

CiRlLLA,  nourrice  de  saint  Benoît,  p.  156. 

CYRILLE  de  Seythopole.  écrit  la  vie  de  saint 
Euthymius,  p.  272  et  suiv.  Analyse  de  cette  Vie, 
ibid.  et  suiv.  ;  il  écrit  celle  de  saint  Sabas,  p  2U, 
analyse  de  cette  Vie,  ibid.  et  suiv.  Celle  de  saint 
Jean  le  Silencieux,  p.  277-278.  Analyse  de  cette 
vie,  ibid. 

CYRUS,  évêque  d'Alexandrie,  monolhélite,  p. 
703,  est  condamné  au  concile  de  Latran,  p.  749, 
et  anathématisé  par  le  pape  Léon  II,  p.  784. 


D. 


DACIUS,  évêque  de  Milan,  chargé  par  Cassio- 
dore  de  la  distribution  du  blé  dans  le  Milanais, 
p.  220,  204.  Ce  qu'on  sait  des  circonstances  de  sa 
vie,  p.  264.  Chronique  qu'on  lui  attribue,  ibid. 
Il  s'oppose  à  l'édit  deJustinien  contre  les  Trois- 
Chapitres,  p.  867.  Il  se  retire  avec  le  pape  Vi- 
gile au  palais  d'Hormisdas;  violences  qu'il  y 
éprouve,  ibid.  Miracle  que  saint  Grégoire  le 
Grand  rapporte  de  lui  dans  ses  Dialogues,  p.  264 
et  475. 

DAGOBERT,  flls  de  Chilpéric,  p.  408. 

DALMATIQUES.  Il  est  défendu  d'en  orner  le 
corps  mort  du  pape,  p.  907.  L'usage  des  dalmati- 
ques  accordé  par  saint  Grégoire  à  Arégius,  évêque 
de  Gap,  et  à  son  archidiacre,  p.  518.  Le  pape  Sym- 
maque  donne  permission  aux  diacres  de  saint  Cé- 
saire de  porter  des  dalmatiques  comme  ceux  de 
Rome,  p.  127. 

DANSES.  Défense  de  danser  dans  les  églises, 
p.  898;  dans  les  solennités  des  saints,  p.  903. 

DÉDICACE  d'un  oratoire,  p.  615.  On  ne  pouvait 
dédier  une  église  ou  une  chapelle  en  Italie  sans 
la  permission  du  pape,  p.  578.  Le  pape  commet- 
tait ordinairement  les  évêques  pour  cette  céré- 
monie, ibid.  et  579.  Conditions  requises  pour  la 
dédicace  des  églises  et  des  monastères,  p.  579. 
Les  dédicaces  des  églises  étaient  accompagnées 
de  largesses  aux  pauvres,  ibid. 

DÉFENSEUR,  moine  de  Ligugé,  p.  8i3. Qualifié 
grammairien,  ibid.  Son  recueil  d'Étincelles  ou  de 
Sentences  des  Pères,  ibid. 


DÉFENSEURS.  Ce  qu'ils  étaient,  p.  505.  Saint 
Grégoire  établit  un  corps  de  défenseurs  à  qui  il 
donna  la  qualité  de  régionnaires ,  p.  5io.  On  ne 
doit  point  choisir  les  moines  pour  les  faire  dé- 
fenseurs de  l'Église,  p.  339, 

DÉMÉTRIUS,  évêque  de  Philippes,  envoyé  à 
Rome  par  l'emperenr  Justinien,  p.  116. 

DÉMÉTRIUS  de  Cyzique.  Son  traité  de  l'héré- 
sie des  Jacobites,  p.  809.  On  lui  attribue  un  mé- 
moire sur  le  schisme  des  Arméniens,  p.  8i0. 

DÉMÉTRIUS,  évêque  de  Naples,  p.  481.  Saint 
Grégoire  le  Grand  lui  écrit,  ibid.  Déraétrius  est 
déposé  de  l'épiscopat,  p.  487. 

DÉMON.  11  n'ade  pouvoir  de  nous  tenter  qu'au- 
tant que  Dieu  lui  en  donne,  p.  444. 

DENIS,  évêque  de  Séleucie,  p.70i. 

DENIS,  évoque  d'Ascalon  ,   p.  702. 

DENIS  (saint)  l'.Aréopagite.  Ses  Actes  fausse- 
ment attribués  à  Fortunat,  p.  412.  Ses  ouvrages 
cités  par  Léoncede  Byzance,  p.  669,  par  saint  So- 
phrone,  patriarche  de  Jérusalem,  p.  704,  par  le 
moine  Jobius ,  p.  184.  Saint  Maxime  les  com- 
mente, p.  770. 

DENIS  surnommé  ie  Petit,  p.  12i.  Ce  qu'on  sait 
de  sa  personne,  ibid.;  sa  science  et  ses  vertus, 
ibid,  et  122  ;  il  enseigne  la  dialectique  pendant 
plusieurs  années,  p.  122.  Bède  le  qualifie  abbé 
de  la  ville  de  Rome.  On  ne  sait  cependant  point 
qu'il  ait  été  supérieur  d'aucune  maison  monas- 
tique, ibid.  Sa  mort,  iftid.  Recueil  de  ses  écrits 
dans  la  Patrologie,  p.  125.  Ses  ouvrages:  son  Code 


93(i 

des  canons  des  conciles  d'Orient  et  d'Occident, 
Histoire  de  ce  code,  ibid.  et  123.  Éditions  qu'on 
en  a  faites,  p.  12S.  Cycles  de  Denis  le  Petit,  p. 
123.  Ses  lettres  sur  la  Pâque,  ibid.  et  124.  Ses  tra- 
ductions faites  de  grec  en  lalin,  p.  123.  Éiiilion 
des  (icrits  de  Denis  le  Petit  dans  la  Patrologie, 
p.  125. 

DE.MS  DE  TELMÉRA,  écrivain  syrien,  p.  813; 
sa  Chronique,  ibid. 

DE.NRÉES.  Édit  que  fait  porter  Cassiodore  pour 
fixer  le  prix  des  denrées,  p.  218. 

DÉODAT,  évèque  de  Mûeon,  p.  7:>4. 

DESTIN,  doctrine  des  païens  sur  le  destin,  com- 
batlue  par  Léonce  de  Naples,  p.  6CC.  Erreur  des 
priscillianlsles  sur  le  destin  réfutée  par  saint 
Grégoire,  p.  579. 

DELSDEDIT,  évêque  de  Milan.  Saint  Grégoire 
lui  écrit,  p.  528. 

DEUSDEDIT,  pape.  Lettre  qu'on  lui  a  fausse- 
ment attribuée,  p.  645,  C46. 

DELSDEDIT,  greffier  à  Ravenne.  Cassiodore 
lui  écrit,  p.  220. 

DEUTÉRIUS,  évêque  des  ariens  à Constantino- 
ple,  corrompt  la  forme  du  baptême,  p.  104. 

DEVINS  ou  SORCIERS.  Défense  de  les  consul- 
ter, p.  898. 

DIACONESSES.  Lois  de  Justinien  touchant  les 
diaconesses,  p.  256.  Défense  de  donner  à  des  fem- 
mes la  bénédiction  des  diaconesses,  p.  848.  Elles 
sont  abolies,  p.  816. 

DIACRES.  Saint  Césaire  d'Arles,  n'en  ordonnait 
aucun  qui  n'eût  atteint  l'ùge  de  trente  ans,  p.  126. 
Les  diacres  ne  doivent  prêcher  qu'avec  la  per- 
mission de  l'évêque,  p.  300.  Ils  ne  doivent  pas 
être  chantres,  p.  907.  Diacres régionnaires,  p.  429. 
Fonctions  des  diacres,  p.  7i9. 

DIALECTIQUE.  Traité  de  Cassiodore  sur  la  dia- 
lectique, p.  236. 

DIALOGUES  de  saint  Grégoire  traduits  en  grec, 
p.  171  :  en  arabe,  472;  en  saxon,  ibid. 

DIDIER,  évêque  de  Cahors.  d'abord  trésorier 
de  Clotaire  II  et  de  Dagobert,  son  fils,  succède  à 
Rustique  son  frère,  p.  733  ;  est  fait  évêque  de 
Cahors,  ibid.  Sa  mort,  ibid.  Analyse  de  seize  let- 
tres que  nous  avons  de  lai,  ibid.  'Trois  lettres  que 
sa  mère  lui  écrit  lorsqu'il  était  à  la  cour,  ibid.  Sa 
Vie,  ibid.  Lettres  qui  lui  sont  adressées,  ibid. 
Lettres  que  lui  écrit  saint  Éloi.  Lettres  de  saint 
Didier  à  saint  Ouen  ;  autre  de  saint  Ouen  i  saint 
Didier,  p.  757.  Édition  des  lettres  de  saint  Didier, 
p.  735  et  734. 

DIDIER  (saint), évêque  de  Langrcs,  martyr.  Ses 
Actes  envoyés  ii  Céraune,  évêiiue  de  Paris,  p.  031. 

DIDIER  (saint),  éviquc  de  Vienne  en  Dauphiné 
et  martyr.  Lettres  que  lui  écrit  le  pape  saint  Gré- 
goire, p.  517,  518.  Reproches  que  lui  fait  saint 
Grégoire  parce  qu'il  enseignait  la  grammaire, 
p.  524.  Il  prétend  que  le  Saint-Siège  avait  ac- 
cordé i  son  Église  le  Pallium,  p.  518.  Il  s'attire 
la  haine  de  la  reine  Rrunehaul,  qui  le  fait  dépo- 
ser dans  le  concile  de  Châlonsur-Saûne,  et  le 
fait  ensuite  mourir,  p.  909. 

DIDON,  évêque  de  Poitiers,  prend  soin  de  l'é- 
ducation de  saint  Léger,  p.  780. 


TABLE  ANALYTIQUE. 


DIEU  Sentiment  de  Cassiodore  sur  la  nature 
de  Dieu,  p.  214. 

DIMA.NCIIE.  Défense  de  plaider  ce  jour-là;  d'at- 
teler les  bœufs,  p.  325.  Lois  du  roi  Contran,  tftirf. 
et  326.  Comment  on  sanctifiait  le  dimanche,  p. 
398.  Comment  il  ét.ait  observé  en  Angleterre,  p. 
798.  Il  est  défendu  de  travailler  le  dimanche  el 
de  se  baigner  pour  ie  plaisir,  p.  529,  579.  Les 
Grecs  communiaient  tous  les  dimanches,  p.  798. 
Prescription  du  concile  de  Màcon  sur  l'observa- 
tion du  dimanche,  p.  896. 

DIMES  des  fruits  de  la  terre.  Obligation  de  les 
payer,  p.  140.  Première  loi  pénale  qui  ordonne 
de  payer  la  dîme  aux  prêtres  et  aux  ministres 
de  l'Église,  p.  897. 

DIONVSE,  mère  de  saint  Euthymius,  p.  272. 

DIOSCORE,  antipape,  p.  114. 

DO.MINIQUE,  évêque  de  Carthage,  demande  à 
saint  Grégoire  le  Grand  la  confirmation  des  privi- 
lèges de  son  église,  p  489.  Son  zèle  contre  les  do- 
natistes,  p.  499.  Saint  Grégoire  lui  écrit  sur  l'usage 
qu'on  doit  faire  des  calamités,  p.  520:  le  prie  d'ai- 
der un  abbé  à  contenir  ses  moines  dans  le  devoir, 

p.  509. 

DOMINIQUE,  prêtre,  p.  487. 

DOMITIE.\,  évêque  de  Mélitine,  p.  494  et  590. 

DO.MITIEN,  d'abord  abbé  de  saint  Martyrius, 
puis  évêque  d'Ancyre.  Ses  écrits;  sa  requête  au 
pape  Vigile  au  sujet  des  condamnations  d'Ori- 
gène,  p.  345. 

DOxMNOLE  (saint),  d'abord  abbé  de  Saint-Lau- 
rent, à  Paris,  puis  évêque  du  Mans,  p.  313.  Il 
assiste  au  concile  de  Tours  dont  il  rédige  les  Ac- 
tes, ibid.  11  fonde  l'abbaye  de  Saint-Vincent,  du 
Mans,  ibid.  Sa  mort,  ibid.  Ses  écrits,  ibid.  Sa  vie 
écrite  par  deux  auteurs  difTorenls,  ibid.  Son  tes- 
tament et  soncodicile,ifc!d.  Leur  édition  dans  la 
Patrologie,  ibid. 

DOMNUS,  patriarche  d'Antioche,  p,  175. 

DONADEUS,  diacre,  déposé  par  Victor,  son  évo- 
que, en  appelle  au  Saint-Siège,  p.  910. 

DON.AT,  à  qui  saint  Fulgence  adresse  le  livre 
de  la  Foi  orthodoxe,  p.  32. 

DONAT  (sainti,  moine  de  Luxeuil,  et  depuis  évê- 
que de  Be-ançon,  p.  018;  avait  été  baptisé  par 
saint  Colomban,  p.  738;  il  devient  évêque  de  De- 
sançon,  ibid.;  assiste  aux  conciles  de  Reims  et  de 
Chilons-sur-Saône,  ibid.;  fonde  le  monastère  do 
Calais,  jftid.;  compose  une  Règle  pour  dos  filles, 
p.  C18,7:}8.  Autre  Règle  que  lui  attribi;ent  MM.  de 
Saintc-Martiie,  p.  738. 

DONATIONS.  Formules  des  donations  faites  à 
l'Église,  p.  739  et  suiv. 

DONATISTES  en  Afrique,  p.  489.  Saint  Gré- 
goire ordonne  à  Colomb,  évêque  de  Numidie,  de 
s'opposer  à  leurs  entreprises,  ibid.,  et  de  veiller 
à  ce  que  les  enfants  des  catholiques  ne  fussent 
pas  rebaptisés  par  les  donatistes,  p.  bOG.  Il  prie 
l'empereur  Maurice  de  punir  ceux  qui  contreve- 
naient aux  lois  qu'il  avait  établies  contre  les  do- 
natistes, p.  500. 

DON  US  ou  DOMNUS,  pape.  Sa  mort,  p.  783. 

DONNUS  ou  DONUS,  évêque  de  Messine.  Le 
pape  saint  Grégoire  lui  donne  le  pallium,  p.  501. 


TABLE  ANALYTIQUE. 

DIPTYQUES.  Le  concile  de  Jt^rusalem  met  dans 
les  diptyques  les  Tionis  des  quatre  conciles  gi^m^- 
raux,  ei  celui  du  pape  saint  Lt^on.  p.  8H),  hju. 

DOR.M.\NTS.  Uistoire  des  sept  dormants  d'É- 
pAtVe,  par  saint  Gr(?goire  de  Tours,  p.  383  et  38.1. 
Les  sept  dormants  de  Marmoutier  sont  diffé- 
rents de  ceux  d'Kplièse,  p.  384. 

DOROTHÉE,  moine  d'Alexandrie,  compose  un 
écrit  pour  so'itenir  les  décrets  du  concile  de 
Cbalcéduine  ,  p.  106.  107. 

DOUOTIIÉE,  archimandrite.  Il  y  a  plusieurs 
Dorolhées  archimandrites,  p.C95,  G96.  Los  vingt- 
quatre  sermons  ou  doctrines  paraissent  être  de 
Dorothée  le  Sévérien,  disciple  de  .lean.  p.  096.  Ce 
que  contiennent  ces  discours,  ibid.  Huit  lettres 
du  même,  ibid.  Traductions  françaises  des  Ins- 
tructions de  Dorothée,  p.  697. 

E. 


931 

DOROVERNE,  aujourd'hui  Cantorbéry,  p.   437. 

DOYENS  de  monastères,  suivant  saint  Benoit, 
p.  163. 

DKOOTOYÉE,  premier  abbé  de  Saint-Germaln- 
dcs-Prés,  p.  376. 

DYNAME,  patrice.  Sa  naissance,  ses  études,  son 
mariage,  ses  emplois,  p.  400  et  401  ;  il  abu.«e  de 
son  autorité,  p.  401.  Il  devient  plus  modéré  et 
quitte  le  monde  pour  vivre  dans  la  retraite,  ibid. 
Sa  mort,  ibid.  Ses  écrits-,  sa  Vie  de  saint  Mari 
ou  Marins,  abbé  de  Bodanc  ou  Benon,  ibid-  II 
écrivit  aussi  la  Vie  de  saint  Maxime,  abbé  de 
Lérins,  p.  JOl.  Nous  avons  de  lui  deux  lettres, 
ibid. 

DYNAME,  petit-fils  du  patrice  Dyname,  com- 
pose son  épitaphe,  p.  401. 


EAU  bénite  employée  à  la  consécration  des  égli- 
ses, p.  195. 

ÉBRÉGISILE,  évêqaede  Cologne,  se  trouve  au 
concile  de  Poitiers  en  590,  p.  905. 

ÉBROIN,  maire  du  palais,  fait  mourir  saint  Lé- 
ger et  son  frère  Gairin,  p.  780,  781. 

ÉCCLÉSIASTE.  Passage  de  l'Écclésiaste  expli- 
qué par  saint  Grégoire,  p.  477,  478. 

ECCLÉSIASTIQUE.  Saint  Grégoire  cite  le  livre 
de  l'Eccle'siastique ,  sous  le  titre  d'un  certain 
sage,  p.  552. 

ÉCRITURE  sainte.  Lecture  de  l'Écriture  sainte 
recommandée  par  saint  Fulgence  à  Galla,  p.  27. 
Sainte  Césarie.  sœur  de  saint  Césaire,  s'occupait 
de  la  lecture  des  Livres  saints,  p.  153.  Introduc- 
tion à  la  sainte  Ecriture,  ouvrage  d'Adrien,  au- 
teur du  vi'^  siècle,  p.  95.  Témoignage  de  Cosme 
d'Egypte  sur    les    livres  de    l'Ecriture    sainte, 
p  188,  189.  Introduction  à  l'étude  de  l'Ecriture 
sainte,  ou  Institution  aux  lettres  divines  parCas- 
siodore.  p.  226  et  suiv.  Autres  ouvrages  semblables 
Indiqués  par  Cassiodore,  p.  2"2   Ouvrage  sem- 
blable de  Junilius.évéque d'Afrique,  p.  28i  et  suiv. 
Edition  de  l'Ecriture  sainte  revue  par  Cassiodore, 
p.  227  et  suiv.  Canons  de  l'Ecriture  sainte  rap- 
portés par  Cassiodore,  p.  23i.  Avis  que  Cassio- 
dore donne  à  ses  moines  sur  la  lecture  de  l'Ecri- 
ture sainte  et  sur  la  manière  d'en  corriger  les 
exemplaires,  p.  231.  Doctrine  de  Cassiodore,  p. 
245.  Doctrine  du  pape  saint  Grégoire  le  Grand, 
p.  552  et  suiv.;   sur  l'inspiration   de  l'Ecriture 
sainte,  p.  552;  sur  les  livres  qui  la  composent, 
ibid.  et  553;  sur  son  obscurité,  p.  553,  554:  sur 
la  lecture  de  l'Ecriture  sainte,  p.  £54;   sur  ses 
sens  divers;  ibid.  .Autres  témoignages  de  saint 
Grégoire  sur  l'Ecriture  sainte,  p.  444,  508.  Saint 
Grégoire   préfère  la  version  de  saint  Jérôme  à 
l'ancienne  Vulgate  qu'il  cite  néanmoins  quelque- 
fois, p.  442.  553.  Il  cite  aussi  celles  des  Septante, 
d'Aquila,  de  Théodotion  et  deSymmaque,  p. 553. 
Canon  des  Livres  saints  selon  Léonce  de  By- 
zance,  p.  668.  Pandectes  ou  abrégé  de  l'Écriture 
sainte  parle  moine  Antiochus,  p.  698.  Commen- 
taires de  saint  Isidore  de  Séville  sur  les  livres 


de  l'Ancien  et  du  Nouveau- Testament,  p.  715.  Al- 
légories du  même  saint  Isidore,  ibid.  Canon  des 
Livres  saints  selon  saint  Isidore,  p.  712,  716:  son 
témoignage  sur  leur  inspiration,  p.  716.  Questions 
de  saint  Maxime,  abbé  de  Chrysopolis,  sur  l'E- 
criture sainte,  p.  763.  Réponses  du  même  à  di- 
vers doutes  sur  l'Ecriture  sainte,  ibid. 

EDBALD  ou  ÉTHELBALD,  roi  de  Kent,  se  con- 
vertit, p.  616. 

EDOUIN,  roi  de  Northumbre,  épouse  Elder- 
burge,  p.  646.  Lettre  que  lui  écrit  le  pape  Boni- 
face  V,  pour  l'engager  à  quitter  le  culte  des  idoles, 
ibid.;  il  se  convertit,  ibid.  Le  pape  Honorius  lui 
écrit  sur  sa  conversion,  p.  648. 

EGBERT,  roi  de  Kent,  envoie  à  Rome  un  prêtre 
nommé  Vigard,  pour  y  être  ordonné  archevêque 
de  Cantorbéry,  p.  796. 

ÉGLISE.  Sentiment  de  s.aint  Fulgence  sur  l'É- 
glise, p.  53,  51,  67,  68;  de  saint  Césaire  d'Arles, 
p.  144.  Homélie  sur  l'Église,  attribuée  à  saint  Cé- 
saire d'Arles  ,  p.  147.  Doctrine  de  Cassiodore, 
p.  247,  248.  Traité  du  prêtre  Timothée  sur  la  ma- 
nière de  recevoir  ceux  qui  se  présentent  à  l'Église 
catholique,  p.  340,  341,  Doctrine  du  pape  saint  Gré- 
goire sur  l'Église,  p.  555.  Éloge  de  l'Église  catholi- 
que, p.  226.  On  ne  peut  être  sauvé  hors  de  l'Église, 
p.  44.  D'après  saint  Grégoire  le  Grand,  l'Église  con. 
siste  dans  l'union  des  fidèles,  comme  le  corps 
dans  l'assemblage  des  membres,  p.  555.  Elle  est 
sainte,  universelle;  on  ne  peut  être  sauvé  que 
dans  son  sein,  ibid.  Il  ny  a  que  l'Église  seule 
dont  Dieu  ait  les  sacrifices  pour  agréables,  ibid. 
Elle  est  composée  de  bons  et  de  méchants,  p. 
556. 

ÉGLISE  ROMAINE.  Sa  primauté  sur  toutes  les 
autres  églises,  p.  195,  557,  766. 

ÉGLISES  MATÉRIELLES.  Consécration  des  égli- 
ses, p.  388.  Quand  on  doute  si  une  église  est 
consacrée,  on  doit  la  consacrer,  p.  535,  579.  Or- 
nementation des  églises,  p.  388.  Respect  qu'on 
rendait  auxéglises,  iMd.  Noms  de  l'église  princi- 
pale, ibid.  Plan  de  l'église  que  saint  Perpétue  fit 
bâtir  sur  le  tombeau  de  saint  Martin,  ifcid.  Fortu- 

nat,  évêque  de  Poitiers,  bâtit  une  église  en  l'hon- 

60 


y38 


TABLE  ANALYTIQUE. 


neur  de  la  sainte  Vierge,  où  11  mit  les  vases  né- 
cessaires pour  conserver  le  corps  cl  le  sang  de 
Jésus-CLrist,  p.  404-  Églises  des  scliismatiqucs 
réconciliées  par  l'aspersion  de  l'eau  bénite,  p. 798. 
Églises  consacrées  de  nouveau  et  réconciliées 
par  saint  Grégoire,  p.  579.  Églises  desservies  par 
un  seul  clerc,  p.  388.  Église  interdite,  ibid. 

ELESB.iN.  roi  des  Égyptiens,  fait  une  expédi- 
tion sur  les  terres  des  Ilomérites  en  5-22.  p.  186. 

EI.EUTHÈRE  (saint)  apparaît  à  Probus,  évéque 
de  Riéti,  p.  478. 

ELIE,  patriarche  de  Jérusalem,  p.  275;  il  avait 
succédé  à  Sallasle  en  493,  ibid.  Lettre  qu'il  écrit 
aux  moines  de  la  Laure  de  saint  Sabas,  ibid.  Il 
envoie  saint  Sabas  auprès  de  l'empereur  .\nas- 
tase,  ibid.  Il  est  cbassé  de  son  siège  pour  s'être 
opposé  aux  volontés  de  cet  empereur  au  faux  con- 
cile de  Sidon  ,  p.  27o.  L'ordre  est  révoqué  à  la 
prière  de  saint  Sabas,  ibid.  L'bisloire  de  ce  pa- 
triarche se  trouve  dans  la  Vie  de  saint  Sabas, 
p.  275  et  suiv. 

ELIE,  patriarche  d'.iquilée,  schismatique,  p. 
335.  336.  Lettre  que  le  pape  Pelage  II  adresse  aux 
évêques  d'Istrie  au  sujet  de  leur  opposition  à  la 
coiidanination  des  Trois-Chapitres,  p.  SSn  et  suiv. 

ELOI  ;saint\  évêque  de  Noyon,  sa  naissance 
en  598,  p.  753.  Son  éducation,  ibid.  11  travaille 
d'abord  à  la  monnaie  de  Limoges,  puis  il  de- 
vient monétaire  du  roi  Clovis  U.ibid.  Il  est  en- 
voyé en  ambassade  par  le  roi  Dagobert  en  634, 
auprès  de  Judicaël,  prince  de  Bretagne,  dont  les 
sujets  avaient  fait  des  courses  sur  1rs  fronlières 
du  royaume,  ibid  Son  application  ;i  la  lecture, 
à  la  prière  el  à  l'aumône,  tii'd.  Il  fonde  deux  mo- 
nastères, l'un  à  Solignac,  l'autre  à  Paris,  ibid.  et 
754,  et  est  fait  évéque  de  Noyon  en  640,  p.  754. 
Sa  mort.tfcid.  Ses  écrits;  idée  que  l'auteur  donne 
des  instructions  qu  il  faisait  à  ses  peuples,  ibid. 
et  755.  Homélies  qu'on  lui  a  faussement  attri- 
buées, page  755.  Sa  lettre  à  Didier,  évéque  de 
Cahors,  p.  755.  Charte  qu'il  ut  dresser  pour  la 
fondation  du  monastère  de  Solignac,  ibid.  et  756. 
Sa  Vie  écrite  par  saint  Ouen,  archevêque  de  Rouen, 
Ç.75G.  Monastère  de  filles  fondé  à  Noyon  par  saint 

i,  p.  754.  Édition  de  ses  O'uvres  dans  la  Pa- 


ÉI 


trologii',  p.  757.  Le  Discours  à  un  jeune  roi  pu- 
blié par  Mai  semble  être  l'œuvre  de  saint  Kloi 
ou  de  saint  Ouen,  p.  757.  Analyse  de  ce  discours, 
ibid.  et  suiv. 

ELPIDE,  frère  de  Justinien  évéque  de  Valence 
en  Espagne,  p.  265. 

ELPIDIL'S  (Rusticus),  diacre  de  l'église  deLyon, 
devient  médecin  deThéodoric,  p.  99.  Il  embellit 
la  ville  de  Spolète,  ibid.  Ses  liaisons  avec  saint 
Ennode  de  Pavie  et  saint  .\vit  de  Vienne  :  lettres 
qu'il  en  reçoit,  ibid.  Ses  deux  poëmes  en  vers 
hexamètres:  cequ'ilsconliennent;  éditions  qu'on 
en  a  faites,  iftid.  et  100. 

EMÉRIUS,  évéque  de  Saintes,  déposé,  pour- 
quoi :  p.  886;  rétabli  par  ordre  du  roi  Charibert, 
p.  887. 

E.MILE,  père  de  saint  Rémi,  p.  70. 

E.MILIEN  ^sainl),  .solitaire  en  Espagne,  fonda- 
teur du  monastère  de  saint  Émilien  delà  Cuculle, 


au  diocèse  de  Tarragone.  Pa  vie  écrite  par  Brau- 
lion ,  évéque  de  Saragosse ,  p.  728.  Hymne  en 
son  honneur  par  le  même,  ibid. 
EMILIEN  saint,  évéque  deVerceil,  p.  728. 
EMINENC.E.  titre  d'honneur  que  se  donnaient 
les  évéques,  p.  734. 

ENDURCISSEMENT.  Explication  de  ces  pa- 
roles: Le  Seigneur  endurcit  le  caur  de  Pharaon, 
p.  131;  de  celles  où  il  est  dit  que  le  Seigneur 
endurcit  qui  il  lui  plaît,  p.  43. 

ENFER.  Il  n'y  a  rien  d'assuré  sur  le  lieu  où  il 
se  trouve,  p.  478,  479.  Descente  de  Jésus-Christ 
aux  enfers,  p.  185.  Quels  sont  ceux  qu'il  en  a  dé- 
livrés, p.  507,  508.  Éternité  des  peines  de  l'enfer, 
p.  479.  580,  581.  Saint  Grégoire  distingue  deux 
lieux  dans  l'enfer  i  l'un  supérieur  où  reposaient 
les  âmes  des  justes  avant  la  rt^surrection  de  J.-C, 
un  autre  inférieur  où  les  impies  sont  tourmen- 
tés, 5.S0.  Les  méchants  srront  tourmentés  dans 
l'âme  et  dans  le  corps  par  le  feu  de  l'enfer  qui 
brûlera  éternellement,  ibid.  et  581. 

E'JMUS,  évéque  d'Arles,  parent  de  saint  Césaire 
d'Arles,  p.  125. 

EPACHILS,  puni  pour  avoir  célébré  les  saints 
mystères  après  avoir  déjeuné,  p.  374. 

El'HREM,  d'abord  comte  en  Orient,  puis  pa- 
triarche d'Antioche,  p.  171.  11  n'a  pas  droit  au 
titre  de  saint,  ibid.  Sa  libéralité  envers  les  pau- 
vres, ibid.  Ses  écrits,  tfcid.  Analyse  de  ses  écrits 
pour  la  défense  de  l'Église  catholique  d'après 
Pholius,  ibid.  et  suiv.  Fragments  publiés  par  Slaï, 
p.  171,  note  6.  Il  condamne  Origène  -,  mouvements 
que  celle  condamnation  occasionne,  p  175;  il 
souscrit  à  la  condamnation  dos  Trois-Chapilres 
pour  être  conservé  dans  son  siège,  ibid.  Temps 
de  sa  mort,  ibid. 

EPlPIIANE.élu  évêque  de  Constantinople après 
la  mort  de  Jean  de  Cappadoce,  p.ll2.  Ses  lettres 
au  pape  Hormisdas,  ibid.  Rescrit  qu'il  adresse 
à  Justinien.  p.  202.  Sa  mort,  p.  112.  Réception 
qu'il  fit  au  pape  Jean  là  Constantinople,  idid.  Edi- 
tion de  ses  lettres  dans  la  patrologie,  p.  lU.  Ses 
45  canons,  ibid. 

EPIPIlANEde  Chypre  compose  une  Exposition 
des  préséances  des  patriarches  et  des  métropo- 
litains, p.  11Î.  Éditions  de  cet  ouvrage,  ibid. 

EPIPIIANE  le  Scholaslique.  Ce  qu'on  sait  de  sa 
personne,  p.  103.  A  la  prière  de  Cassiodore,  il  tra- 
duit en  latin  les  Histoires  ecclésiastiques  de  So- 
crale,  de  Sozomène  et  de  Théodoret,  dont  ensuite 
Cassiodore  forme  un  seul  corps  auquel  il  donne 
le  nom  à'UisInire  Tripartile,  ibid.  Épiphanc  tra- 
duit aussi  en  latin  les  Commentaires  de  Didyme 
sur  les  Proverbes  de  Salomon  et  sur  les  sept  Épt- 
tres  canoniques;  nous  n'avons  plus  ces  traduc- 
tions, ibid.  Sa  collection  des  Épilres  syno  laies 
écrites  à  l'empereur  Léon  pour  la  défense  du 
concile  de  Chalcédoine,  ibid. 
EPIPHANE,  lecleurderégllsedeCagliari,p.520. 
EPURES  CATHOLIQUES.  Sentiment  de  Côme 
d'Égypie  sur  ces  épilres,  p.  189. 
EPREUVES  dn  feu,  p.  37i,  701. 
EQUITIUS,    père  de   saint  Maur  disciple  de 
.-aint  Benoît,  p.  l.l?. 


TAliLt:  ANALYTIQUE. 


939 


ICOl.'ICE   ;saiiil),  AbW  dans  la  Valùrie,  pi-(^clio 
aprf-s  avoir  reçu  unu  mission  extraorjinairo,  p- 
■m.  471.  Il  meurt  vers  l'an  .''liO,  p.  l".!. 
KUVICK,  roi  des  Visii^otlis  en  Espagne,  p.  79t. 

ESCLAVES.  Canons  du  concile  d'Epaone  con- 
cernant les  esclaves,  p.  81.'),  81".  Canon  du  concilo 
de  LtW-ida,  p.  8i5.  Ut^n'enient  du  iv  concile  d'Or- 
léans toucliant  les  clii'Oiiens  esclaves  des  Juifs, 
p.80-J.  Canons  du  V"  concile  d'OrlL'aiis,p.8(i2el8Gl. 
Canon  du  3'  concile  de  Paris  touchant  les  enfants 
des  e.sclaves,  p.  88y.  Canon  du  \"  concile  de  Jli- 
con  toucliant  les  esclaves  clirtHiens  qui  servent 
les  Juifs,  p.  S9').  Canon  du  2«  concile  de  Mâcon 
loucIianS  les  esclaves  mis  en  liberté,  p.  8'J7.  Or- 
donnance de  saint  Orrgoire-le-Grand  touchant  les 
esclaves,  p.  ôOG.  Lois  qu'il  cite  touchant  les 
esclaves,  p.  532.  Témoignage  de  saint  Isidore 
de  Séville,  p.  723,  724.  On  ne  recevait  les  es- 
claves dans  les  monastères  qu'avec  le  consente- 
ment de  leurs  maîtres,  p.  723.  11  était  défendu  à 
l'abbé  démettre  en  liberté,  en  vertu  de  sa  seule 
autorité,  un  esclave  du  monastère,  p.  7U.  Les 
moines  grecs  n  avaient  point  d'esclaves,  p.  798. 
Les  lois  défendent  de  recevoir  l'accusation  d'un 
esclave  ou  serviteur  contre  son  maître,  p.  532.  Les 
esclaves  juifs  ou  païens  qui  désirent  se  faire  chré- 
tiens, doivent  être  mis  en  liberté,  p.  506. 

ESDR.VS  inspiré  duSaint-Esprit  rétablit  le  livre 
de  la  Loi  sur  d'autres  exemplaires,  p.  008,  712, 

ESPRIT-S.XLNT.  Question  sur  la  procession  du 
Saint-Esprit,  ouvrage  de  saint  Fulgence ,  p.  74. 
Traité  du  Saint-Esprit  adressé  à  Abragila,  autre 
ouvrage  de  saint  Fulgence,  ibid.  Doctrine  de  saint 
Fulgence  sur  le  Saint-Esprit,  p.  14,  17,  51,  71  et 
suiv.  Doctrine  de  Cassiodore,  p.  245;  d'Anastase, 
patriarche  d'Antioche,  p.  362;  de  saint  Grégoire 
de  Tours,  p.  387;  Je  saint  Grégoire  le  Grand, 
p.  459,  557,  558;  de  saint  Isidore  de  Séville,  p. 
713;  de  saint  Maxime  de  Chrysopolis,  p.  765.  Sa 
divinité  d'après  saint  Fulgence,  p.  72  et  suiv.  On 
croit  que  les  Grecs  ont  altéré  un  endroit  de  saint 
Grégoire,  où  ce  pape  dit  que  le  Saint-Esprit  pro- 
cède du  Père  et  du  Fils,  p.  538.  11  est  d'une 
même  substance  avec  le  Père  et  le  Fils,  p.  459. 
Il  est  dit  qu'il  prie  pour  les  pécheurs,  parce  qu'il 
les  fait  prier  en  leur  en  inspirant  le  désir  et  la 
volonté,  ibid. 

ETHELBERT,  roi  de  Kent,  se  fait  chrétien, 
donne  au  monastère  de  Saini-Pierre  et  de  Saint- 
Paul  une  partie  des  terres  qui  lui  appartenaient, 
p.  437,  438.  Le  pape  Boniface  IV'  lui  écrit,  p. 911. 
Mort  d'Éthelbert,  p.  913. 

ETHELBURGE,  reine  de  Northumbre,  p.  646. 

ETHÉRIUS,  évéque  d'Antibes,  souscrit  au  con- 
cile d'Orléans  en  542,  p.  300. 

ETHÉRIUS.  évéque  de  Lyon  :  saint  Grégoire 
ui  écrit,  (.517; il  assiste  au  concile  de  Kanterre, 
p.  906. 

ETIENNE,  abbé  de  Lérins,  p.  506. 

ETIENNE,  évéque  en  Espagne,  seplaint  à  saint 
Grégoire  d'avoir  été  déposé  avec  injustice,  p. 
532.  Le  Pape  députe  sur  les  lieux  le  défenseur 
Jean  pour  juger  cette  affaire,  ibid. 

ETIENNE,  évéque  de  Dore,  député  à  Rome  par 


Sophrono,  patriarche  de  Jéni.saleni .  p.  705  ;  légat 
du  siège  apostolique  sous  lu  pape  'l'héodore,  p. 
750. 

ETIENNE  donne  les  fonds  nécessaires  pour 
l'établissement  d'un  monastère,  p. 495. 

EllE.NNK,  cartulaire,  envoyé  en  Sicile  :  saint 
Grégoire  lui  écrit,  p.  488. 

ETOILE  des  Mages  :  sentiment  de  saint  Gré- 
goire de  Tours,  p.  372. 

EUCHARISTIE.  Prière  pour  y  faire  descendre 
le  Saint-Esprit,  p.  14  et  15.  Le  corps  et  le  sang 
de  Jésus-Christ  sont  offerts  dans  le  sacrement 
du  pain  et  du  vin  par  le  corps  même  de  Jésus- 
Christ,  qui  est  l'Église,  p.  15.  Les  prêtres  con- 
sacrent la  chair  sans  tache  de  l'Agneau  ofTerto 
pour  le  salut  de  tout  le  monde,  p.  323.  Sen- 
timent de  saint  Césaire  sur  l'Eucharistie,  p. 
144.  145:  témoignage  de  Jobius,  moine  d'Orient, 
p.  183;  de  Cosme  d'Egypte,  p.  180;  de  Cassiodore, 
p.  250  ;de  saint  Germain  de  Paris,  p.  300  et  suiv. 
Témoignage  de  saint  Véran,  évéque  de  Cavail- 
lon,  p  323;  d'Eutychius,  patriarche  de  Constan- 
tinople,  p.  3.53,  35'».  Explication  d'un  passage 
de  Facundus  sur  l'Eucharistie,  p.  293;  de  celui- 
ci:  Ce  calice  est  la  nouvelle  alliance,  p.  41. 
Explication  d'un  passage  d'Origène,  p.  293,  294. 
Témoignages  de  saint  Grégoire  de  Tours,  373  et 
390,  391.  Sentiment  de  saint  Grégoire  le  Grand, 
p.  567  et  suiv.  Témoignages  d'Anastase   Sinaïte, 

p.  59G,  597,  508.  ,599,  604,  606,  607  ;  d'UésychiUS  , 
prêtre  de  Jérusalem,  p.  635,  G56;  de  l'auteur  des 
Homélies  attribuées  à  saint  Éloi,  p.  755;  de  saint 
Jean  Climaque,  p.  686;  de  saint  Isidore  de  Sévil- 
le, p.  717.  bu  temps  de  saint  Grégoire  le  Grand, 
on  portait  l'Eucharistie  en  voyage;  on  la  donnait 
aux  mourants  en  viatique;  on  la  mettait  sur  la 
poitrine  des  morts  et  on  l'enterrait  avec  eux, 
p,  569.  On  brûlait  dans  le  feu  les  restes  de  l'Eu- 
charistie, p.  655,  656;  même  au  xii«  siècle  ,  p.  656. 
Dans  quelques  églises  on  les  donnait  aux  en- 
fants, p.  373,  419.  Histoire  d'un  enfant  juif, 
ibid.  Miracles  qui  prouvent  la  présence  réelle, 
p.  701,  70-2.  Transsubstantiation,  p.  310.  Miracle 
qui  prouve  la  transsubstaniation,  p.  568.  Les  laï- 
ques recevaient  l'Eucharistie  dans  leurs  mains  et 
s'en  communiaient  eilx-mêmes,  p.  39].  Adoration 
de  Jésus-Christ  dans  l'Eucharistie,  p.  686.  Le  dé- 
mon inspire  des  pensées  de  blasphème  durant  le 
sacrifice,  en  même  temps  que  l'Ame  y  adore  Jésus- 
Christ,  ibid.  L'usage  est  qu'on  reçoive  de  l'É- 
glise universelle  l'Eucharistie  à  jeun,  p.  596, 
717.  Dispositions  nécessaires  pour  s'approcher 
de  l'Eucharistie,  p.  135,  137.  Manière  de  la  rece- 
voir, p.  135.  On  donnait  aux  nouveaux  baptisés 
le  corps  et  le  sang  de  Jésus-Christ,  p.  183,  189. 

EUDOXE,  hérétique  inconnu  à  saint  Grégoire 
le  Grand,  p.  507. 

EUDOXIE  envoie  à  Pulchérie  le  portrait  de  la 
sainte  Vierge  par  saint  Luc,  p.  104. 

EUGÈNE,  un  de  ceux  qui  écrivirent  en  faveur 
de  la  résurrection  des  morts  contre  Jean  Philo- 
ponus,  p.  652. 

EUGÈ.NE  1,  évéque  de  Tolède,  à  qui  saint  Isi- 
dore adresse  une  lettre,  p.  723. 


940 


EUGÈNE  II  (saint) ,  évêque  de  Tolède  ,  succède 
au  précédent,  p.  742.  Durée  de  son  épiscopat,  son 
livre  de  la  Trinité,  ibid.  Ses  poésies,  ibiii.  Autres 
écrits,  ibid.  Quatre  lettres,  ibid.  et  "43. 

EUGÈNE,  pape  intrus,  après  la  déposition  du 
pape  saint  Martin,  p.  751. 

EUGIPPILS,  abbé  de  LucuUane,  ce  qu'on  sait 
des  circonstances  de  sa  vie,  p.  85.  Ses  mémoires 
sur  saint  Séverin,  apôtre  du  Norique,  ibid.  Edi- 
tions et  traduction  qu'on  en  a  faites,  p.  8G.  Rè- 
gle pour  les  religieux  de  son  monastère  que  lui 
attribue  saint  Isidore  de  Séville,  p.  86.  Recueil 
de  sentiments  et  de  pensées  tirées  des  ouvrages 
de  saint  Augustin,  ibid.  Erreur  de  Sigebert  qui  a 
donné  lieu  de  distinguer  deux  abbés  du  nom 
d'Eugippius,  ibid.  Lettre  que  lui  adresse  saint 
Fulgence,  évéque  de  Uuspe,  sur  la  charité,  ibid. 
Lettre  que  lui  écrit  Ferrand,  diacre  de  Cartbagc, 
sur  l'unité  de  natura  et  d'essence  en  Dieu  et  sur 
les  deux  natures  en  Jésus  Cbrist,  ibid.  Editions 
de  ses  lettres,  p.  86. 

EULALIUS,  évêque  de  Syracuse,  reçoit  saint 
Fulgence,  p.  4. 

EULOGE  (saint),  est  élu  patriarche  d'Alexan- 
drie en  581;  circonstances  de  sa  vie,  p.  580.  Il 
meurt  en  G08;  ses  écrits  contre  les  novatiens, 
ibid.  et  590;  contre  Sévère  et  Tiraothée,  p.  590; 
contre  Théodose  et  Sévère,  ibid.  et  -Wl  ;  contre 
lesgainites  et  les  acéphales,  p.  591.  Ses  discours, 
ibid.  et  592.  Témoignage  de  saint  Euloge  tou- 
chant la  lettre  de  saint  Léon  à  Flavien,  p.  593. 
Jugement  de  ses  écrits,  ibid.  Discours  sur  la 
fête  des  l'aimes,  qui  lui  est  attribué,  ibid.  Ecrits 
de  saint  Euloge  publiés  par  Ma'i,  p.  594.  Edition 
de  ses  écrits  dans  la  Patrologie,  ibid.  Saint  Gré- 
goire le  Grand  écrit  à  saint  Euloge,  p.  501,  502, 
509,  511,  512,  519,  529. 

EUMERIUS,  évêque  de  Nantes,  assiste  au  qua- 
trième concile  d'Orléans,  consulte  Trojanus,  évo- 
que de  Saintes,  p.  202. 
EUPHKASIUS,  évéque  de  Clerraont,  p.  380. 
EUPHRONE,  évéque  de  Tours,  fait  la  cérémo- 
nie de  la  réception  des  reliques  que  sainte  Ra- 
degonde  avait  fait  venir  d'Orient  pour  son  mo- 
nastère de  Poitiers,  p.  3lt!..  11  refuse  de  souscrire 
au  concile  de  Saintes  qui  avait  déposé  l'évéque 
Emérius,  p.  880.  11  tient  le  2"  concile  do  Tours, 
où  sont  faits  plusieurs  canons  sur  la  discipline, 
p.  887  et  suiv.  Temps  do  sa  morl,  p.  365. 

EUSÈBE,  évéque  de  Césarée.  Saint  Euloge  d'A- 
lexandrie croyait  qu'il  avait  recueilli  les  actes 
de  tous  les  niartvrs;  ce  que  lui  dit  le  pape  saint 
Grégoire  à  ce  sujet,  p.  5ii. 

EUSÈBE,  évêque  de  Tarragone,  préside  au  con- 
cile d'Egara,  p.  912. 

EUSÈBE, évéque  d'Antibes,  estauteur  d'une  his- 
toire de  la  translation  des  corps  des  saints  mar- 
tyrs Vincent,  Oronce  et  Victor,  p.  300,  yu7. 

EUSÈBE,  évêque  de  Paris,  ordonné  à  la  place 
de  Saflarac  déposé  pour  une  faute  considérable, 
p.  882. 
EUSÈBE,  abbé  en  Sicile,  p.  487. 
EUSÈBE,  éVéque  de  Thessalonique,  h  qui  saint 
Grégi'ire  écrit,  p,  5i7. 


TABLE  ANALYTIQUE. 

EUSÈBE,  palrlce,  à  qui  saint  Grégoire  écrit, 
p..'>3i. 

EUSTATHE  le  Moine,  écrivain  du  vi«  siècle,  p. 
175;  sa  lettre  à  Timothée  le  Scholastique  sur  les 
deux  natures  en  Jésus-Christ,  contre  Sévère, 
ibid. 

EUSTASE  (saint;,  abbé  de  Luxeuil,  p.  619  ;  son 
histoire,  p.  633;  sa  mort,  ibid.;  il  confond  le 
moine  Agrestin,  p.  6i7. 

EUSTOCHIUS,  cinquième  évêque  de  Tours,  or- 
donne des  jeûnes  et  des  veilles  pour  certains 
jours  dans  son  diocèse,  p.  372. 

EUSTOCHIUS,  patriarche  de  Jérusalem,  p.  882. 
Il  fait  recevoir  dans  un  concile  les  actes  du  5' 
concile  général,  ibid. 

EUSTORGE,  évêque  de  Milan.  Le  roi  Théodo- 
ric  lui  écrit  pour  lui  faire  rétablir  l'érêque 
d'Augusia,  p.  213.  Les  moines  de  la  Laure  de 
Saint-Sabas  se  séparent  de  sa  communion  par 
attachement  pour  Origène,  p.  272. 

EUSTR.\T1US,  prêtre  de  Constantinople,  fait 
l'éloge  du  pafriarche  Eutychius,  p.  347.  Traité 
de  l'état  de  l'âme  après  cette  vie  :  analyse  de 
cet  ouvrage,  ibid.  et  348.  Ce  que  Photius  dit  de 
ce  traité,  p.  348. 

EUTIIYMIUS  (saint)  :  histoire  de  sa  vie  par  Cy- 
rille de  Scythople,  p.  272  et  suiv. 
EUTROPE,  père  de  saint  Benoît,  p.  156. 
EUTROPE,  évêque  de  Valence  en  Espagne,  p. 
635.  11  nous  reste  de  lui  une  lettre  à  Pierre,  évê- 
que d'iturbica,  sur  l'étroite  observance  des  moi- 
nes et  la  ruine  des  monastères,  ibid.  et  636. 

EUTYCllÈS.  Ses  erreurs  réfutées  par  Ferrand, 
diacre  de  Carthage,  p.  S8  et  suiv. 

EUTYCHIEN,  clerc  d'Adan  dans  la  deuxième 
Cilicie,  écrit  l'histoire  de  la  conversion  de  saint 
Théophile,    p.    280,    281.    Différentes  éditions 
qu'on  a  données  de  cet  écrit,  p.  281. 
EUTYCllIliNS,  divisés  en  deux  sectes,  p.  287. 
EUTYCHIUS,  patriarche  de  Constantinople:  sa 
naissance,  p.  352.  L'evéquc  d'.Amasée  l'introduit 
dans  son  clergé,  ibid.  ;  il  le  députe  à  Constanti- 
nople pour  tenir  sa  place  dans  le  v«  concile  gé- 
néral,   ibid.  et  353.  Comment  il  se  rend  agréa- 
ble à  l'empereur  Jusiinien  qui  le  fait  patriarche 
de  Constantinople  après  la  mort  de  Mennas,  p. 
353;  il  condamne  les  Trois-Cliapitres  ;  il  refuse 
de  souscrire  ledit  que  Justinien  avait  publié  pour 
la  défense  de  l'erreur  des  incorruptibles,  ibid.; 
il  est  exilé,  et  Jean  le  Scholastique  est  ordonné  à 
sa  place,  ibid.;  il  est  accusé  dans  un  concile  et 
déposé,  puis  transféré  au  monastère  d'Amasée, 
p.  354.  Après  la  mort  de  Jean  le  Scholastique,  il 
est  rétabli  sur  le  siège  deConstantinople,  p.  351. 
Dispute  qu'il  a  avec  saint  Grégoire  sur  l'état  de 
nos  corps  après  la  résurrection,  ibid.  et  356;  il 
rétracte  son  sentiment,  p.  35c  ;  sa  mort,  ibid.  Sa 
letlre  au  pape  Vigile  :  son  discours  sur  l,i  manière 
dont  les  intelligences  sont  dans  un  lieu,  ibid.  ;  son 
éloge  par  le  prêtre  Eustratius,  p.  347.  Il  avait  suc- 
cédé à  Mennas,  p.  868.  Il  présente  auiiape  Vigile 
sa  profession  de  foi,  et  convient  avec  lui  d'assem- 
bler un  concile  pour  décider  la  question  des  Trois- 
Chapitrcs,  ibid.;  il  préside  au  5«  concile  général, 


TABLE  ANALYTIQUE. 


Oil 


2«  de  Constanllnople,  qui  condamne  les  Trois- 
ChapUres,  ibid.  et  suiv.;  lellro  que  lui  écrit  le 
papo  Vigile  eu  approuvant  les  di'cisione  de  ce 
concile,  p.  H7!).  D^'ux  frajinienls  sur  la  I'A(|iie  et 
sur  l'institution  de  lEucliaristie,  pulilitVs  par  Mal, 
p.  353,  351  La  vie  de  saint  Eutlomius  et  les  deux 
fragments  de  ses  écrits  dans  la  Palrologie,  p. 
356. 

ÉVAGRK  d'l':piptianie,  historien  ecclésiasti- 
que; sa  naissance,  ses  études,  p.  115,  416;  il  fré- 
quente le  barreau,  p.  416;  il  se  marie,  ibid.;  il 
lie  amitié  avec  Grégoire,  évOque  d'Anlioche,  et 
le  sert  dans  ses  procès,  ibid.;  il  écrit  son  Histoi- 
re, ibid.;  l'empereur  Jlaurice  l'en  recompense, 
ibid.;  sa  mort,  ibid.  Ce  qu'il  y  a  de  remarquable 
dans  les  six.  livres  de  l'Histoire  d'Évagre,  ibid. 
et  suiv.  Jugement  de  l'ilisloire  d'Évagre,  p.  420. 
Éditions  qu'on  en  a  faites,  ibid. 

ÉVANCE,  lils  du  patrice  Dynanie,  ambassadeur 
à  Constantinople,  est  tué  à  Carthagène  où  il  avait 
relâché,  p.  400. 

ÉVA^'CE,  évéque  de  Vienne,  qui  vivait  !i  la  fin  du 
■VI»  siècle,  n'est  point  l'auteur  d'une  lettre  contre 
l'abstinence  du  sang  des  animaux,  p.  812. 

ÉVANCE,  archidiacre  de  Tolède,  à  qui  le  car- 
dinal d'Aguirre  attribue  la  lettre  contre  l'absti- 
nence du  sang  des  animaux,  p.  812. 

ÉVANCE, abbé  de  Troclar,  est  le  véritable  auteur 
de  la  lettre  dogmatique  contre  l'abstinence  du 
sang  des  animaux,  p.  S12.  Analyse  de  cette  lettre, 
ibid.  et  813. 
ÉVANGILE  récité  à  la  messe,  p.  539. 
ÉVÈCHÉS  unis  par  saint  Grégoire,  p.  480,  488, 
490. 

ÉVÈQL'ES.  Saint  Grégoire  prend  soin  des  élec- 
tions   des  évéques,   p.  485,  491,  492,  496,   554; 
quelle   part   y   avaient  les   rois   goths  en  Es- 
pagne, p.  908;  et  les  rois  de  France,  p.  391,  392, 
913.  Règlement  du  concile  de  Paris  en  615  tou- 
chant l'élection  des  évéques,  p.  907.  Actes  pour 
l'élection  des  évéques, p.  740;  élection  par  sort, 
p.  908;   par    compromis,  p.    491.    Les  évéques 
ont  succédé  aux  apôtres,  p.  718.  Us  sont  ordonnés 
au  moyen  de  l'imposition  des  mains,  non  par  un 
seul  évêque,  mais  par  les  évéques  comprovin- 
claux,  ibid.  Un  seul  évêque,  en  cas  de  nécessité, 
peut  en  ordonner  un  autre,  p.  5.'5.  En  ordonnant 
un  évêque,  on  lui  donnait  un  b;îton  et  un  anneau, 
pourquoi?  p.  7i8.  La  consécration  d'un  évêque 
appartenait  de  droit  au  métropolitain  de  la  pro- 
vince, p.  395.  On  ne  suivait  pas  toujours  cette  loi 
à  la  rigueur,  ibid.  L'âge  requis  pour  l'épiscopat 
était  de  trente  ans,  p.  718.  Personne  ne  pput  par- 
venir^ l'épiscopat  sans  avoir  passé  par  tous  les  de- 
grés ecclésiastiques,  p.  393,  572.  Il  faut,  pour  être 
évêque,  avoir  vécu  dans  le  célibat,  ou  n'avoir  été 
marié  qu'une  fois,  et  seulement  avec  une  vierge, 
p.  718.  Ceux  que  l'on  élevait  à  l'épiscopat  étant  ma- 
riés, se  sépuraient  de  leurs  femmes,  p.  393. Les  évé- 
ques ne  doivent  employer  pour  les  services  se- 
crets de  leur  chambre  que  des  clercs  ondes  moi- 
nes. Plusieurs   clercs  avaient   leur  lit  dans  la 
chambre  où  l'évêque  couchait,  p.  '393.  Les  évé- 
ques ne  doivent  pas  demeurer  avec  des  femmes. 


si  ce  n'est  avec  celles  que  les  canons  permettent, 
c'est-a-dire  avec  la  mère,  la  tante  et  la  sœur, 
p.  513.  Saint  Augustin  ne  voulait  pas  môme  de 
parentes  dans  -a  maison,  ibid.  Les  évéciues  ne 
doivent  point  user  de  violence  pour   se    faire 
obéir,  p.  572  Donner  l'aumône  est  un  devoir  in- 
dispensable pour  un  évêque,  ibiil.  Il  doit  surtout 
recevoir  les  confrères  dépouillés  de  leurs  évô- 
chés,  et  leur  fournir  la  subsistance,  p.  481,  572. 
Lecture  des  écrits  dos  anciens  Pères  a  la  table  des 
évéques;  on  bklmait  en  eux  qu'ils  enseignassent 
les  lettres  profanes,  itid.  Ils  étaient  astreints  à  la 
récitation  des  heures  canoniales,  p.  393.  Ils  ne 
doivent  point  se  mêler  d'affaires  séculières,  p.  5i9. 
Ils  ne  doivent  point  être  à  charge  à  leurs  sujets 
quand  ils  \  ont  donner  la  confirmation  aux  enfants, 
p.  530.  Fonctions  réservées  aux  évéques,  p.  7i9  et 
9i5.Respect  pour  les  évéques:  c'était  l'usaj^e  de  bai- 
ser la  main  des  évéques,  pnrce  qu'ils  conféraient 
le  Saint-Esprit  p.\r  l'imposition  des  mains,  p. 
393.  Les  rois  les  envoyaient  souvent  en  qualité 
de  médiateurs,  ibid.  Ils  connaissaient  de  certai- 
nes causes  à  l'exclusion  des  juges  laïques,  ibid. 
L'évêque  ne  doit  point  être  traduit  malgré  lui 
devantlejugela'ique,  ni  jugé  par  les  évéques  d'une 
autre  province,  p.  532.  La  violence  commise  con- 
tre un  évêque  dans  son  église  est  un  crime  ca- 
pital comme  celui  de  lèze-majesté,  ibid.  Les  évo- 
ques ne  doivent  pas  être  déposés  pour  cause  de 
maladie,  p.  523.  Les  canons  défendent  de  mettre 
un  évêque  à  la  place  d'un  autre  de  son  vivant, 
p.  518.  Les  évéques  se   désignaient  quelquefois 
leurs  successeurs  avec  l'agrément  du  roi,  p.  392. 
11  est  au  pouvoir  d'un  évêque  de  donner  les  biens 
qu'il  a  acquis  avant  son  épiscopat,  p.  528,  529. 
Evéques  transférés,  p.  392  ;  privés  de  la  com- 
munion, enfermés  dans  un  monastère,  p.  492, 
574.  Évêque  violent,  puni  par  saint  Grégoire,  p. 
492.  Évêque  universel;  saint  Grégoire  en  refuse  le 
titre,  p.  512.  Lois  de  Justinien  touchant  les  évo- 
ques, p.î55,  256,  259,  260.  On  ne  doit  pas  juger 
légèrement  les  évéques,  p.  213.  L'épiscopat  est 
le  suprême  degré  du  ministère   ecclésiastique, 
p.  248.  Causes  des  évéques  :  comment  elles  doi- 
vent être  jugées,  p.  863.  Lettre  de  Théodoric, 
très-honorable  pour  les  évéques,  p.  213,  214.  Cas- 
siodore  écrit  aux  évéques  d'Italie,  p.  217.   Com- 
ment le  pape  Agapet  veut  qu'on  en  use  avec  les 
évéques  ariens  qui  entraient  dans  l'Église  catho- 
lique, p.  119.  Ce  que  dit  Cassiodore  des  évéques 
et  des  autres  ministres  de  l'Église,  p.  214.  248. 
Disposiiions  des  Novelles  de  Justinien  concer- 
Dant  les  évéques,  p.  256,  2.58,  259,  260.  Disposi- 
tions du  Code,  p  261,  262.  Témoignage  de  saint 
Grégoire  de  Tours  touchant  l'élection  des  évé- 
ques, p.  391,  592.  Évêque  œcuménique  ou  univer- 
sel, titre  donné  au  Pape,  p.  436;  usurpé  par  Jean 
le  Jeûneur  et  par  d'autres  patriarches  de  Constan- 
tinople, p.  427  et  436.  Saint  Grégoire  s'oppose  à 
cette  prétention,  p.  512.  Homélie  du  pape  saint 
Grégoire   sur  les  devoirs  des  évéques,  p.    457, 
458.  Pastoral  de  saint  Grégoire  :  c'est  un   traité 
des  devoirs  des  évéques,  p.  462  et  suiv.  Saint  Gré- 
goire prend  soin  de  l'élection  des  évéques,  p.  4S4, 


9i2 


TABLE  ANALYTIQUE. 


485,  491  et  8UiT.,  496,  534.  Divers  témoignages  de 
saint  Grt'goire'sur  ce  qui  concerne  les  évi^qiies.  p. 
484,  485,  492,  49.3,  515,  5l8,  523  et  SUiv. ,  525,  530, 
533,  572  et  SUiv.,  .574.  Témoignage  de  saint  Isidore 
de  Séville,  p.  7i8,  719.  Formules  de  Marcul- 
piie  touchant  l'élection  des  évt^ques,  p.  740. 
Dispositions  du  concile  d'Épaone,  p.  814  et  suiv. 
Canons  du  concile  de  Lérida,  p.  ss6;  canons  du 
2»  concile  d'Orléans,  p.  848;  canons  du  3',  p.  856 
et  SUiv.  ;  canons  du  4",  p.  860  et  suiv.  ;  canon  de 
ce  concile  qui  défend  de  donner  au  peuple  un 
évéque  qu'il  refuse,  p.  803;  canon  du3«  concilede 
Paris  sur  le  même  sujet;  canons  du  concile  de 
Lyon  qui  concernent  les  évfques,  p.  887;  canons 
du  î«  concile  de  Tours,  p.  888  et  suiv.  :  canons 
du  coBCile  de  Brague  et  de  celui  de  Lugo,  p.  891, 
892;  canons  du  concile  de  Màcon,  p.  894.  895;  ca- 
nons du  3«  concile  de  Tolède,  p.  901  et  suiv.; 
canon  d'un  concile*  de  Kome,  p,  987;  autre 
d'un  concile  de  Barcelone,  p.  908-.  canons  du 
5»  concile  de  Paris,  p.  912,  913.  Modification 
que  Clolaire  II  y  ajoute,  p.  913;  autres  règle- 
ments d'un  concile  de  Séville,  p.   914  et  915. 


EXALTATION  de  la  Salnte-Croix,  fêlée  chaque 

annoe  à  Jérusalem,  p. 705. 

E.VCOMMU.MC.\TION  suivant  les;règles  de  saint 
Isidore  de  Séville,  p.  724.  Sentiment  de  saint 
Grégoire  sur  l'excommunication,  p.  .571.  Exem- 
ples d'excjin^nunications  injustes,  ibid.  Les 
canons  défendent  à  un  évéque  d'excommunier 
pour  une  injure  personnelle,  ibid. 

EXCOMMU.MCATIuN  monastique,  p.  147,149; 
suivant  la  règle  de  saint  Benoît,  p.  169,  571. Reli- 
gieuses excommuniées  par  saint  Benoît,  p.  571.  Rè- 
glement duconcile  de  Paris  de  l'an  615,  touchant 
les  excommuniés,  p.  915.  Il  nest  point  permis  de 
communiquer  avec  les  excommuniés,  ni  de  leur 
parler,  p.  118,497.  Les  excommuniés  sortaient  de 
l'église  lorsqu'on  commençait  l'oblation,  p.  394. 
Communiquer  sciemment  avec  un  excommunié, 
c'est  participera  son  crime,  p.  865.  Défense  de  re- 
cevoir une  personne  excommuniée  par  son  évo- 
que, p.  1*83.  Défense  aux  évoques  d'excommunier 
pounles  causes  légères,  p.  862. 

EXTRÊME-ONCTION  portée  aux  malades,  p,«94. 


F. 


FABIEN,  arien.  Fragment  des  douze  livres  de 
saint  Fulgence  contre  cet  hérétique,  p.  70  et 
suiv. 

FACUNDUS,  évoque  d'IIermiane  en  Afrique, 
se  trouve  au  concile  de  Constanlinople  présidé 
par  le  pape  Vigile,  p.  285;  il  s'oppose  à  la  con- 
damnalion  des  Trois-Chapitres.  ibid.;  il  rend  pu- 
blic l'ouvrage  qu'il  avait  composé  pour  leur  dé- 
fense, et  l'adresse  à  l'empereur  Jusiinien,  ibid. 
Analyse  des  douze  livres  que  contient  cet  ou- 
vrage, p.  285;  1"  livre,  p.  285  et  suiv.;  du  2"  livre, 
p.  288,  289;  du  3',  p.  289;  du  4',  ibid.  et  290;  du 
.5»,  p.  290;  du  6«,  ibid.;  du  1',  ibid.  et  291  ;  du  S', 
p.  891,  292;  du  9',  p.  292  et  SUiv.;  du  10'.  p.  29.5, 
296;  du  11'  et  du  12',  p. 296,  297.  Ilse;sépare  de  la 
communion  desévfquesqui  avaient  condamné  les 
Trois-Chupilres;  i\  est  envoyé  en  exil;  il  écrit 
contre  Mucien,  p.  297.  Analyse  de  ce  traité,  iiid. 
et  298.  Sa  lettre  intitulée  de  la  Foi  catholique, 
p.  298,  299.  Jugement  sur  les  écrits  de  Facundus, 
p.  i99;  éditions  qu'on  en  a  faites,  ibid. 

FAILBEUS,  abbé  de  Ili,  p.  800. 

FAMINE  dans  les  Gaules,  p.  570;  en  Ligurie  et 
dans  le  Milanais,  p.  2iy,  220. 

FANATIOUE  dans  le  Gévaudan,  qui  se  disait 
le  Christ,  p.  371. 

FaRE  (sainte),  fille  de  Chagnoric;  saint  Colom- 
ban  la  consacre  à  Dieu,  p.  616;  elle  fut  depuis 
abbesse  d'Évoriac.  Sa  vie,  écrite  par  Jonas,p.'y7. 

FARON,  évéque  de  Meaux,  accorde  un  privi- 
lège au  monastère  de  Sainte-Croix,  p.  734. 

FASTIDIOSUS,  hérétique  arien,  réfuté  par 
saint  Fulgence,  p.  34  et  35. 

FAUSTE,  moine  de  Glanfeull,  envoyé  en  France 
avec  saint  Maur.  Il  en  écrit  la  Vie  U  la  prière  de 
l'abbé  Théodore,  p.  610.  Cette  Vie  est  de  Fauste, 
p.  eu.  Qu'est  cette  vie,  ibid.,  et  G12. 


FAUSTE  de  Riez.  Ses  livres  causent  beaucoup 
de  bruit  à  Constanlinople.  Jean,  archimandrite, 
et  Vénérius,  diacre,  les  envoyent  à  saint  Ful- 
gence, p.  41.  Les  moines  de  Scythie  anathémati- 
sent  les  livres  de  Fauste,  p.  45. 

FAL'STE,  évoque  d'Afrique  exilé  pour  la  foi, 
baiit  un  monastère  dans  le  lieu  de  son  exil,  me- 
nace dexcomiiiunication  les  moines  de  l'île  où 
saint  Fulgence  s'était  retiré,  s'ils  refusent  de  le 
renvoyer,  p.  5. 

FÉUOLIUS,  à  qui  saint  Colomban  ailresse  un 
poème,  p.  6->8. 

FÉLICIEN  est  élu  évêque  de  Ruspe,  p.  10;  as- 
siste au  concile  de  Carthage,  p.  850,  851. 

FÉLICISSIME,  diacre,  à  qui  saint  Grégoire  le 
Grand  écrit,  p.  486. 

FÉLICITÉ.  Sentiment  de  Cassiodore  sur  la  fé- 
licité des  saints  avant  le  jour  du  jugement,  p. 
253-  Les  saints  jouiront  de  la  félicité  de  l'&me 
et  du  corps,  p.  58u. 

FÉLl.V  IV  (saint),  pape  élu  par  le  roi  Théodo- 
ric,  succède  au  pape  saint  Jean,  p.  115.  Sa  mort 
après  trois  ans  et  deux  mois  de  pontilicat,  ibid. 
Des  trois  lettres  que  nous  avons  sous  son  nom, 
il  y  en  a  deux  qu'on  rejette  comme  apocryphes. 
Analyse  de  ces  lettres,  ibid. 

FÉLIX  (saint),  évéque  de  Nantes;  sa  mort,  ses 
écrits,  p.  313,  314;  il  aplanit  une  montagne,  p. 405. 

FÉLIX,  évéque  de  Messine,  consulte  saint  Gré- 
goire sur  plusieurs  dillicultés,  p.  534,  .535.  Ce  pape 
lui  répond,  ibid.  Autre  lettre  que  lui  écrit  saint 
Grégoire,  p.  485. 

FÉLIX,  évéque  de  Pisaure,  prie  saint  Grégoire 
de  célt'hrerdes  messes  publiques  dans  le  monas- 
tère de  l'abbé  Jean,  p.  .506. 

FÉLIX,  ablié,  ami  de  Fulgence,  est  maltraité 
par  un  prêtre  arien,  p.  3. 


TAJBLE  ANALYTIQUE. 

FlU.IX,  diacre  ambitieux,  veut  s'opposer  à  l'or- 
UiiKilioii  Je  sailli  FuliîL'iiro.  p.  '>. 

l'ÉLlX,  notaire;  saint  Kulgence  lui  adresse  un 
livre  de  la  'l'rinitt^  p.  50. 

Flil.IX,  évOqiie,  envoyiS  pour  convertir  les  liar- 
bariciens,  p.  -laT. 

FÉLIX,  évêquo  do  Siponto,  à  qui  saint  Gré- 
goire Ocrit,  p.  •IH.'). 

FKI.IX,  violateur  d'une  vierge,  p.  493. 

FÉMX.  Gaulois.  Son  Ologe,  p.  213. 

FKl.lX,  lioimne  reconuiiandable,  aide  Oassio- 
dore  à  i^crire  des  lettres,  p.  217. 

FEMMES.  Elles  ne  doivent  pas  habiter  avec  les 
moines,  p.  182.  Une  femme  enceinte  peut,  d'aprôs 
saint  Gri^goire  le  Grand,  T'ire  baptisée,  et  il  n'y 
a  point  de  tenr|)s  réglé  où  après  ses  couches 
elle  doive  s'abstenir  d'entrer  dans  l'église,  p.  526. 
Epigrainme  de  saint  Colomban  sur  la  femme,  G2S. 

FEKALl.i.  Fêtes  que  les  païens  célébraient  le 
22  février  en  l'honneur  des  morts,  p.  890. 

FERMENT.  Ce  terme  employé  pour  signifier 
l'eucharistie,  p.  541. 

FEHU\Nn,  diacre  île  Carthage.  p.  10  ;  il  est  nom- 
mé aussi  Fulgence.  Temps  auquel  il  vivait,  p.  86; 
il  propose  à  saint  Fulgence  plusieurs  questions, 
p.  36  et  suiv.  Sa  lettre  au  comte  lîé-iiion  sur  la 
manière  dont  un  homme  de  guerre  doit  vivre, 
p.  86  et  suiv.  Sa  lettre  à  Anatolius,  diacre  de 
Rome,  contre  I  hérésie  d'Eutychès  p.  88  et  suiv. 
Lettre  donnée  entière  par  Jlaï,  p.  91,  note.  Autres 
lettres  à  l'abbé  Eugippius  contre  les  ariens,  les 
nestoriens  et  les  eutychiens,  p.  91.  Lettre  à  Sé- 
vère Scholastique  à  Constanlinople,  contre  les 
sabelliens  et  les  ariens,  p.  9i  et  92.  Lettre  à  l'élage 
et  à  Anatolius,  diacres  de  l'Église  de  Rome,  au 
sujet  rie  la  condamnation  des  Trois-Chapitres,  p. 
92  et  suiv.  Sa  collection  des  conciles  d'Orient  et 
d'Occident,  p.  94.  Jugement  sur  ses  lettres,  p. 
95;  éditions  qu'on  en  a  faites,  ibid.  Le  diacre 
Ferrand  ne  paraît  pas  être  l'auteur  de  la  vie  de 
saint  Fulgence,  évéque  de  Ruspe,  p.  95.  Différen- 
tes questions  relatives  au  baptême,  qu'il  propose 
à  saint  Fulgence,  p.  36  et  37.  Réponse  de  saint 
Fulgence,  p.  37  et  suiv.  Auti-es  questions  qu'il 
propose  à  saint  Fulgence,  p.  39.  Réponse  du  saint, 
p.  39  et  suiv 

FERRÉOL  (saint),  évêque  d'Uzès,  compose  une 
règle  pour  les  moines,  p.  312.  Analyse  de  cette 
règle,  ibid.  et  313. 

FÊTES  principales  de  l'Église,  selon  saint  Isi- 
dore de  Séville,  p.  718.  Dénombrement  des  fêtes 
qui  se  célèbrent  avec  cessa! ion  d'affaires  du  pa- 
lais, p.  694.  Fête  de  tous  les  saints,  établie  en 
avant  le  milieu  du  ix«  siècle,  ibid. 

FIDUS,  diacre  de  Jérusalem,  député  à  Constan- 
linople par  Martyrius,  fait  naufrage,  invoque 
France  saint  Euthymius.  p.  274. 

FILS  de  Dieu.  Objections  des  ariens  contre  sa 
divinité,  réfutées  par  saint  Fulgen<;e,  p.  16.  Im- 
mensité du  Fils  de  Dieu,  p.  20. 

FIRMIN  (saint),  évêque  d'Uzès,  p.  312. 

FLAMIR,  abbé  de  Chinon  en  Touraine.  Saint 
Germain,  évêque  de  Paris,  lui  écrit,  p.  311. 

FLORBERT,  abbé  du  monastère  de  Gand,  donne 


943 

une  retraite  ;'i  saint  Livin,  p.  741  ;  il  l'engage  à 
faire  l'épita|iho  de  saint  Bavon,  ibid. 

FLOItK,  abbesse,  p.  493. 

FI.OUliNT,  ptro  de  saint  Grégoire  de  Tours, 

p.    30,'!. 

FLORENT,  père  de  saint  Nizier,  évêque  de  Lyon, 
p.  381. 

FLORENT,  i>rêtre  de  l'église  de  Trois-Chl- 
teaux,  écrit  la  vie  de  sainte  Uuslicule. 

l'LOltKNT,  diacre  de  l'Église  de  Rome,  p.  491. 

FLORENTINE,  sœur  de  saint  Léandre,  évêque 
de  Séville,  qui  lui  adresse  une  k-tlre  intitulée 
Instruction  des  xnerges.  p.  ■123,  Saint  Isidore  de 
Séville,  frère  de  Florentine,  lui  adresse  deux 
livres  contre  les  juifs,  p.  7i.'). 

FLORIEN,  abbé  de  Homan-Monlier.  Ses  lettres 
à  saint  iNicétius,  évêque  de  Trêves,  p.  206.  Ara- 
tor  lui  adresse  son  poème  sur  les  Actes  des  apô- 
tres, p.  197. 

FOI.  Sentiment  de  saint  Grégoire  sur  la  néces- 
sité de  la  foi  en  Jésus-Christ,  p.  559. 11  n'y  a  qu'une 
même  foi  du  nouveau  et  de  l'ancien  Testament. 
Par  elle,  les  anciens  croyaient  les  promesses  que 
nous  croyons  aujourd'hui  accomplies  en  nous, 
p.  41.  Dans  les  matières  qui  concernent  la  foi, 
les  princes  doivent  la  soumission  aux  décisions 
de  l'Église,  p.  297.  Profession  de  foi  du  pape  Pe- 
lage I,  p.  330. 

FONTAINE  miraculeuse  dans  la  Calabre,  dont 
les  eaux  croissaient  miraculeusement  dans  la  nuit 
de  Pâques,  lorsqu'on  commençait  à  donner  so- 
lennellement le  baptême,  p.  216. 

FORMULES  de  Marculphe;  ce  que  c'est,  p.  740, 
741.  Différentes  formules  données  par  Cassiodore. 
p.  îVj  et  219.  Autres  formules  d  un  auteur  incon- 
nu, p.  741.  Éditions  des  formules  de  Marculphe, 
ibid.  Autres  formules,  ibid. 

FORNICATION.  Celui  dont  la  femme  est  tom- 
bée en  fornication,  peut  la  répudier  et  en  épou- 
ser une  autre,  selon  saint  Théodore,  archevêque 
de  Cantorbéry,  p.  798. 

FORTUNAT,  évêque,  différent  de  Fortunat, 
évêque  de  Poitiers,  p.  30C  ;  on  le  fait  auteur  de 
la  Vie  de  saint  Marcel,  évêque  de  Paris,  ibid.;  on 
le  fait  aussi  auteur  du  premier  livre  de  la  Vie  de 
siint  Hilaire  de  Poitiers,  ibid.  Éditions  de  ces 
Vies,  ibid. 

FORTUNAT  Venance  (saint),  évêque  de  Poi- 
tiers; sa  naissance,  son  éducation;  il  passe  en 
France  vers  l'an  565,  devient  aumônier  et  chape- 
lain de  sainte  Radegonde,  est  fait  évéque  de  Poi- 
tiers, p.  403;  son  éloge,  ibid.;  l'église  de  Poi- 
tiers l'honore  comme  saint,  ifct'd.;  ses  écrits: 
son  recueil  de  poésie  divisé  en  onze  livres,  ibid. 
et  suiv.;  ses  quatre  livres  de  la  vie  de  saint  Mar- 
tin, p.  410,  41 1  ;  son  poème  sur  la  destruction  de 
la  Thuringe,  p.  411  ;  son  poème  à  Justin  le  jeune, 
ibid.;  son  poème  à  Artachis,  ibid.  Épigramme  à 
la  louange  de  Childehert  II,  ibid.  Vie  des  saints, 
composée  par  Fortunat.  p.  411;  son  poème  sur 
saint  Martial,  p.  404,  405.  Ouvrages  de  Fortunat 
qui  sont  perdus,  p.  4i2,  413.  Jugement  de  ses 
écrits,  ibid.  et  suiv.  Éditions  de  ses  ouvrages,  p. 
414.  Pièces  nouvelles,  p.  414. 


944 


TAHLE  ANALYTIQUE. 


FORTUNAT,  évêque  de  Naples,  p.  -VJi.  Saint 
Grégoire  le  charge  de  dédier  un  monaslire  en 
l'honneur  de  saint  Pierre  et  de  sainl  Michel,  p. 
502;  lui  défend  de  laisser  traduire  les  clercs  de- 
vant les  tribunaux  séculiers,  50J  ;  lui  écrit  tou- 
chant un  ma:  i  qui  avait  quitté  sa  femme,  p.  5oG. 

FORTUNAT,  ahhé,  déposé  injustement;  saint 
Grégoire  ordonne  à  Marinien  de  le  rétablir,  p.  533. 

FORTUNAT,  évéque  de  Fano  ;  saint  Grégoire  lui 
permet  de  vendre  les  vases  sacrés  pour  le  rachat 
des  captifs,  p.  507. 

FORTUNAT,  évéque  de  Naples,  à  qui  saint  Gré- 
goire le  Grand  écrit,  p.  517. 

FOULQUES,  évéque  de  Tongres,  veut  troubler 
saint  Reiiii  dans  la  possession  de  l'église  de  Mou- 
zon.  Lollro  de  saint  Rémi  à  cet  évéque,  p.  81. 

FRANÇAIS  (les)  descendent  desTroyens,  d'après 
Frédégaire,  p.  716.  • 

FRANCON,  évéque  d'Aix,  p.  39i. 

FRÉDÉGAIRE,  le  Scholastique,  historien;  ce 
qu'on  peut  conjecturer  des  circonstances  de  sa 
vie  et  du  temps  où  il  a  vécu,  p.  714;  son  pays, 
ibid.;  sa  Chronique;  analyse  des  cinq  livres 
qu'elle  contient,  ibid.  et  UI.  Jugement  sur  cet 
ouvrage  ,  p.  745,  746.  Quatre  continuateurs  de 
Frédégaire,  tous  anonymes,  p.  740.  Éditions 
et  traductions  de  ces  chroniques ,  ibid.  La 
Chronique  de  Frédégaire  imprimée  à  la  suite 
des  œuvres  de  Grégoire  de  Tours,  p.  3U0;  tra- 
duite en  français  par  l'abbé  de  Marolles  et  par 
M.  Guadet.  ibid. 

FRKDÉGONDE,  reine  de  France,  accusée  d'a- 
dultéré avec  Bertrand, évéque  de  Bordeaux,  p. 366. 

FRIARD  (saint)  reclus.  Sa  vie  écrite  par  saint 
Grégoire  de  Tours,  p.  381. 

FRIDOLIN  (saint),  abbé  de  Saint-Ililaire  de 
Poitiers.  Ce  qu'on  sait  des  circonstances  de  sa 
vie,  p.  321.  Il  bAtit  divers  monastères  dans  le 
royaume  d'Austrasie,  ibid.  Divers  écrits  qu'on 
lui  attribue,  ibid. 

FRIGIUIEN,  évéque  de  Lucques,  change  par 
des  prières  le  lit  de  la  rivière  de  Serchio,  p.  476. 

FRUCTUEUX  (saint),  archevéciue  de  Brague.Sa 
naissance,  son  éducation  :  il  fonde  plusieurs  mo- 
nastères, p.  799.  Il  est  fait  évéque  de  Dume,  puis 
archevéquede  Brague, ifrid.  Sa  mort,  ibid.;  ses  deux 
règles,  ibid.  et  800. 

FULGENCE,  frère  de  saint  Isidore  de  Séville, 
évéque  d'Assigite  et  ensuite  de  Carthagène,  p.716. 

FULGENCE  (saint),  évéque  do  Uuspe  et  con- 
fesseur. Sa  naissance,  son  éducation,  p.  1;  il  est 
chargé  dus  affaires  de  sa  famille,  ibid.  et  'i;  il  se 
retire  dans  un  monaslire,  p.  2.  II  est  chargé  de 
la  conduite  d'un  autre  monastère,  p.  3;  il  en 
fonde  un  nouveau,  ibid.  et  45;  il  va  voir  l'évé- 
que  Rulinien.  p.  4;  il  retourne  en  Afrique,  ibid.  ; 
est  ordonné  prêtre,  puis  élu  évéque  de  Uuspe  en 
508,  p.  5;  sa  conduite  pendant  son  épiscopat, 
ibid.  cl  6;  U  est  envoyé  en  exil,  p.r>;  le  roi  Trasa- 
mond  le  fait  venir,  p. 7;  lui  propose  diverses  ques- 
tions sur  la  foi,  i!)i(/.;  saint  Fulgence  est  exilé  une 
seconile  fois,  p.  7  et  8;  ses  écrits;  il  sort  de  son 
exil,  revient  il  Ruspe,  p.  8  et  9;  son  humilité,  sa 
mort  en  533,  p.  <*,  10.  Ses  écrits  :  ses  trois  livres 


à  Jlonime,  p.  10  et  sui*.  Analyse-du  I"  livre,  p. 
10  et  fuiv.  ;  Analyse  du  S'  livre,  p.  14  et  suiv.; 
ses  réponses  aux  dix  objections  des  Ariens,  p. 
16  et  suiv,;ses  trois  livres  au  roi  Trasamond;  leur 
analyse,  p.  29  et  suiv.  Sa  lettre  sur  le  vœu 
de  continence:  analyse  de  cette  lettre,  p.  25,  26; 
SCS  lettres  à  Galla  et  à  Proba,  p  26  et  suiv.  ;  ses 
lettres  à  l'abbé  Eugyppius,  p.  29;  à  Théodore, 
p.  30,  31;  à  Vinanlie,  p.  31  ;  son  livre  de  la  Foi 
orthodoxe  à  Donat,  occasion  de  ce  livre,  p.  32. 
Analyse  de  ce  livre,  ibid.  et  suiv.  Lettre  de  Vic- 
tor à  saint  Fulgence,  p-  34:  livre  contre  le  ser- 
mon de  Fastidiosus,  ibid.  et  35.  Lettre  de  Sca- 
rilas  à  saint  Fulgence,  qui  lui  répond  par  un 
livre  intitulé  :  De  l'Incarnation  du  Fils  de  Dieu, 
p.  35  et  36.  Lettre  de  sainl  Fulgence  au  diacre 
Ferrand,  p.  37  et  suiv.  Lettre  du  diacre  Ferrand 
à  saint  Fulgence  sur  le  baptême,  p.  36  et  37.  Ré- 
ponse de  saint  Fulgence  sur  la  1"  question,  p. 
37,  38;  à  la  2',  ibid.;k  la  3^  ibid.  et  39  ;  à  la  4«, 
p.  39.  Autre  lettre  de  Ferrand,  et  réponse  de  saint 
Fulgence  à  la  l"  question,  p.  39;  à  la  2',  ibid.; 
à  la  3',  p.  40;  à  la  4',  ibid.  et  41  ;  à  la  5%  p.  42. 
Lettre  de  Jean  et  de  Vénérius  aux  évéques  d'A- 
frique, p.  41;  réponse  des  évéques,  ibid.ei  suiv. 
Lettre  des  moines  de  Scythie  aux  évéques  d'A- 
frique exilés  en  Sicile,  p.  44,  45;  analyse  de  cette 
lettre,  ibid.  et  suiv.;  réponse  des  évéques,  p. 
45  et  suiv.  Lettre  du  comte  Régin  à  saint  Ful- 
gence. p.  50;  réponse  de  saint  Fulgence,  ibid. 
Son  livre  de  la  Trinité  à  Félix.  Ses  deux  livres 
de  la  Rémissio7i  des  péchés,  p.  52  ;  analyse,  ibid. 
et  suiv.;  ses  trois  livres  de  la  Foi.  Lettre  de  Fé- 
lix à  saint  Fulgence,  p.  50:  réponse  de  saint  Ful- 
gence à  Félix,  ibid,  et  suiv.  Vérité  de  la  prédes- 
tination et  de  la  grâce  de  Dieu.  Occasion  de  ces 
trois  livres  écrits  en  5-23,  p.  56;  analyse  du  1<"  li- 
vre, ibid.  et  suiv.  ;  analyse  du  2»  livre  de  la  Pré- 
destination, p.  59  et  suiv.  ;  analyse  du  3'  livre, 
p.  61  et  suiv.  Livre  de  la  foi  à  Pierre  écrit  après 
l'an  5-23.  Analyse  de  ce  livre,  p.  03  et  suiv.  Ar- 
ticles de  foi,  p,  65  et  suiv.  .\rticle  ajouté  à  ceux 
de  saint  Fulgence,  p.  68.  Le  livre  de  la  Foi  conlre 
l'évéque  Pinta  n'est  point  de  saint  Fulgence,  p. 
69.  Ses  sermons,  au  nombre  de  dix,  p.  69.  Ses 
livres  contre  Fabien  sont  perdus,  p.  70.  Fragments 
de  ces  dix  livres,  p.  71  et  suiv.  Ouvrages  de  saint 
Fulgence  que  nous  n'avons  plus.  Son  livre  des 
Questions  sur  la  procession  du  Saint-Esprit, 
p.  74, 75.  Sa  Conférence  devant  Trasamond  ;  son 
livre  dit  Saint-Esprit  à  Abragila ,  etc.,  ibid.; 
sa  lettre  aux  Carthaginois;  son  traité  du  Jeûne; 
sa  lettre  à  Stéphanie  et  à  un  évéque;  ses  livres 
contre  Fabien,  contre  Fauste  et  contre  Pinta, 
ibid.;  son  sermon  sur  la  Circoncision,  p.  75. 
Sermon  sur  l'Epiphanie  publié  par  Maï,  ifcid.  Ou- 
vrages supposés  :  le  sermon  sur  la  Purification, 
p.  75;  le  traité  sur  lu  Prédestination  ;  les  80  ser- 
mons de  l'Appe/idice.  ibid.  Jugement  des  ou- 
vrages de  sainl  Fulgence,  ibid.  et  70.  Éditions 
qu'on  a  faites  de  ses  écrits,  p.  76. 

FUNÉRAILLES,  qui  en  faisait  les  frais  à  Cons- 
tantinople,  p.  2.57.  Ce  qu'on  y  doit  chanter,  p.  903. 
Funérailles  des  évéque,  p.  827,  828. 


TABLE  ANALYTIQUE. 


945 


G. 


GATKN,  palriarplio  d'Alexandrie,  p.  :^ni. 
GAllllN,  fiiTo  de  sa  lut  Léger,  mis  à  mort  par 
Ébroïii,  p.  7S1. 

GAI.  (saint',  évi?que  de  Clermont,  oncle  pater- 
nel do  Grégoire  de  Tours,  p.  ôG.'i;  abrégé  de  sa 
\ie,  p.  380,  381.  11  est  choisi  pour  être  évêque  de 
Clermont,  ibid.  11  préserve  de  la  peste  son  dio- 
cèse, en  ordonnant  de  longues  processions  au 
milieu  du  Carême,  p.  381.  Sa  lettre  à  saint  Di- 
dier de  Cahors,  p.  734.  Ussérius  s'est  trompé  en 
attribuant  cette  lettre  à  saint  Gai  disciple  de 
saint  Coloniban,  p.  737. 

GAL  (saint),  disciple  de  saint  Colomban, 
passe  avec  lui  en  France,  p.  7.36;  l'accompagne  à 
Zug.  d'où  un  excès  de  zèle  le  fait  chasser,  p.  616 
61730.  [1  prêche  la  foi  l'i  Brégents,  p.  616.  11  s'é- 
tablit sur  le  lac  de  Constance  où  il  convertit  les 
peuples,  p.  736.  Il  y  fonde  le  monastère  de  son 
nom,  ibiil.  llefuse  l'évêclié  de  Constance,  ibid.  Sa, 
mort,  ibid.  Ses  écrits:  analyse  d'un  discours  que 
nous  avons  de  li:i,  i6i(/.  La  lettre  qu'on  lui  attri- 
bue est  de  saint  Gai,  évêque  de  Clermont,  p.  ■;37. 
GALLA,  fille  du  consul  Symmaque  :  saint  Ful- 
gence  lui  écrit,  p.  26. 

GATIEX  ou  GKATliîN,  premier  évêque  de  Tours, 
p.  37-2. 
GAUDIOSUS,  à  qui  Cassiodore  écrit,  p.  219. 
GAUDlOSU.s,  maître  de  la  Milice.  Saint  Gré- 
goire le  Grand  lui  écrit,  p.  486. 

GAULES.  Commencements  de  la  foi  chrétienne 

dans  les  Gaules,  d'après  saint  Grégoire  de  Tours, 

p.  395. 

GEN.NADE,  pntric  !  et  exarque  d'Afrique,  p.  186. 

GE.NSÉRIC,  roi  des  Goths,  s'empare  de  Car- 

Ihage,  en  chasse  tjus  les  sénateurs,  p.  1. 

GÉOJIÈTRIK.  Traité  de  Cassiodore  sur  la  géo- 
métrie, p.  '236,  237. 

GEORGES  i^saint)  martyr.  Forlunat  fait  sou 
éloge,  p.  404. 

GEORGES,  patriarche  d'Alexandrie,  succède  à 
Jean  l'Aumônier,  p.  699.  Il  écrit  la  vie  de  saint 
Jean  Chrysostome.  î'ftid.  ;  idée  de  cette  vie,  iiit/.; 
éditions  qu'on  en  a  faites,  ibid. 

GEORGE,  abbé  de  Saint-Théodore  ;  lettre  que 
lui  écrit  le  pape  .Martin  Ii'',  p.  1^>0. 

GEORGES  Pisidès,  diacre  et  garde-chartes  de 
l'église  de  Constantinople,  p.  Oj3.  Ses  écrits, 
savoir:  ses  vers  contre  Philoponus.  ibid.-.  son 
poème  sur  l'hexaméron,  ibid.  Antre  poème  sur 
la  vanité  de  la  vie  humaine,  ibid.  Fragments 
qui  restent  de  ses  autres  ouvrages,  ibid.  Poème 
sur  le  Temple  de  la  Mère  de  Dieu  à  Constanti- 
nople, ibid.  Autres  poèmes  qui  sont  perdus, 
ibid.  Les  différents  discours  qu'on  lui  a  attribués 
sont  d'un  autre  Georges  qui  vivait  au  ix°  siècle, 
ibid.  et  654.  Recueil  des  écrits  de  Georges  Pisidès 
dans  la  Byzantine  et  dans  la  Patrologie,  p. 
654. 

GEORGES,  frère   de  saint  Jean  Cliinaque,   est 
mis  à  sa  place  abbé  du  Mont  -  Sina'i,  p.  67S. 
XI. 


GEORGES,  abbé  de  Saint  Tbéodose;  lettre  que 
lui  éci'it  le  pape  saint  .M;irliii,  p.  7.')0. 

GEORGES,  prêtre,  député  de  Cyriaquo  arcbe- 
vfique  de  Constantinople,  p.  507. 

GKUASIMI",,  ariaclioii'te.  Pendant  le  Carême,  il 
ne  prenait  d'autre  nourriture  que  celle  qu'il  re- 
cevait en  participant  aux  saints  mystères,  p.  273, 
274. 

GERMAIN  (saint),  évêque  de  Paris.  Lieu  de  sa 
naissance,  p.  307  ;  il  est  fait  évêque  de  Paris  vers 
l'an  555,  ibid.;  il  excommunie  le  roi  Caribert, 
pour  deux  mariages  contractés  avec  ses  deux 
sœurs  du  vivant  de  son  épouse,  p.  391;  il  écrit 
à  la  reine  Bruneliaut,  ibid.  et  308  Sa  mort,  p. 
307.  Sa  liturgie,  p.  308  et  suiv.  :  sa  lettre  à  Fla- 
mir,  abbé  de  Chinon,  p.  311.  Saint  Germain  ac- 
corde un  privilège  au  monastère  qui  porte  au- 
jourd'hui son  nom  dans  un  des  faubourgs  de 
Paris,  p.  311.  Sa  vie  écrite  par  Fortunat,  p.  4li. 
'N''ers  à  sa  louange  attribués  à  saint  Ouen,  p.  750. 

GERM.VI.N  (sainte  évêque  de  Capoue,  p.  823. 

GÉRO.NCE  et  CHALCÉDOiMUS,  abbés.  Exhor- 
tation que  leur  adresse  Cassiodore.  p.  2'!2,  235. 

GILDAUD  (saint),  évêque  de  Rouen:  antienne 
en  son  honneur,  attribuée  à  saint  Grégoire  de 
Tours,  p.  384.  Sa  vie  écrite  par  Fortunat,  p.  412. 

GILDAS  surnommé  Albanie,  fait  profession  de 
la  vie  solitair.;  auprès  de  Glaston,  p.  318.  Il  est 
différent  de  saint  Gildas  surnommé  le  Sage,  ibid. 
Temps  de  sa  naissance  et  de  sa  mort.  ibid. 

GILDAS  (saint),  abbé  de  Ruis,  surnommé  le 
Sage  et  quelquefois  Badonic;  ce  qu'on  sait  des 
circonstances  de  sa  vie,  p.  318:  sa  naissance,  son 
éducation.  Il  est  fait  prêtre,  ibid.;  ses  voyages, 
ibid.;  il  fixe  sa  demeure  près  de  Vannes  où  il 
bâtit  le  monastère  de  Ruis,  ibid.  ;  incertitude  où 
l'on  est  sur  l'année  de  sa  mort,  ibid.  et  319.  Les 
deux  discours  sur  la  ruine  de  la  Grande-Bretagne 
et  sur  les  dérèglements  du  clergé  sont  véritable- 
ment de  lui,  p.  319.  Analyse  de  ces  deux  dis- 
cours ,  ibid.  et  320.  Canons  ou  règlements  de 
discipline  recueillis  par  saint  Gildas,  p.  320-, 
écrits  qu'on  lui  attribue,  mais  qui  ne  sont  pas 
de  lui.  p.  321.  Éditions  des  écrits  de  saint  Gildas, 

p.  320. 

GILLES,  abbé  d'un  monastère  dans  la  Gaule 
IS'arbonnaise,  accompagne  saint  Césaire  d'Arles  à 
Rome,  p.  100;  présente  une  requête  au  pape 
Symmaque,  ibid. 

GILLES,  archevêque  de  Reims,  ordonne  Pro- 
motus  évêque  de  Cbàteaudun,  qu'il  avait  érigé 
en  évêché  contre  les  canons,  p.  892.  Consécra- 
teur  (le  saint  Grégoire  de  Tours,  p.  365.  II  est  con- 
vaincu d'avoir  conspiré  contre  le  roi  Childe- 
bert,  est  déposé  du  sacerdoce  dans  le  concile  de 
Metz  en  590,  et  est  envoyé  en  exil  k  Strasbourg, 

p. 905,  9û6. 

GLAXFEUIL,  premier  monastère  de  l'ordre  de 
saint  Benoît  en  France,  p.  CIO. 

GLORIA  IN  ëXCELSIS  :  quand  on  le  disait,  p.  539. 

Cl 


946 


TABLE  ANALYTIOUE. 


GLORIA  r.VTRI.  Le  concile  de  îjarbonne  en 
589,  ordonne  de  le  chanter  à  la  Ou  de  chaque 
psaume,  p.  901.  C'iMali  l'usage  non-seulcnu'iii  à 
Rome,  mais  au!>si  par  tout  l'Orient,  en  Afrique 
et  en  Italie  d'ajouier  sicut  erat  à  cause  des  hé- 
rétiques ariens,  p.  839.  Le  concile  de  Vaison  or- 
donne de  suivre  cet  usage,  ibid. 

CONDEGESILE,  évCque  de  Bordeaux,  p.  905. 

CO.N'DEMAU,  roi  des  Golhs  en  Espagne,  con- 
firme le  concile  de  Tolède,  qui  mettait  la  pro- 
vince de  Cartbagènc  sous  la  métropole  de  To- 
lède, p.  911. 

GO.NTUAN,  roi  d'Orléans  et  de  Bourgogne,  con- 
firme les  canons  du  second  concile  de  Mâcon, 
sur  la  célébration  du  dimanche,  p.  3iô,  32G. 
Avec  quelle  religion  il  observe  le  droit  d'asile 
confirmé  par  le  même  concile,  p.  32G;  ses  don- 
nations  faites  aux  églises  de  Saint-.Marcel  et  de 
Saint-Symplioricn'd'Autun,  sont  confirmées  au 
concile  de  Valence  tenu  en  581,  p.  896.  Discours 
de  Contran  aux  généraux  de  son  armée,  p.  320; 
ambassade  de  saint  Grégoire  de  Tours  auprès  de 
lui  do  la  part  de  Childebert,  p.  306.  Église  qu'il 
fait  bâtir  à  Cbàlon  en  l'honneur  de  saint  .Mar- 
cel, p.  745.  Traité  de  paix  entre  Contran  et  Chil- 
debert, p.  327;  mort  de  Contran,  ibid.  Sa  sépul- 
ture, ihid. 

GO.NTRAN-BOSON  se  réfugie  dans  l'église  de 
Saint-Martin  do  Tours,  p.  370. 

GORDIEN,  aïeul  de  saint  Fulgence,  p.  1. 

GORDIEN,  auteur  supposé,  p.  319. 

GORDIEN,  père  de  saint  Grégoire  le  Grand; 
s'il  a  été  diacre  régionnaire,  p.  129  ;  son  portrait, 
ibid. 

GOTHS.  Ils  étaient  très-cbastes  et  ennemis  de 
toutes  les  libertés  contraires  à  la  pudeur,  p.  213. 
Histoire  des  Goths  par  Cassiodore,  p.  222. 

GIIAOE.  Sa  nécessité  enseignée  par  saint  Gré- 
goire de  Tours,  p.  398.  Jésus-Cbrist  inspire  la 
bonne  volonté,  donne  le  parfaire,  et  sans  lui  il 
ne  se  fait  rien  de  bien,  p.  400.  Doctrine  de  l'ortu- 
nat  de  Poitiers  sur  la  grâce,  p.  108,  109;  de  saint 
Grégoire  le  Grand,  p.  559  et  suiv.  Grâce  préve- 
nante et  gratuite,  p.  5GI,  5G2.  Accord  de  la  gr,1ce 
et  du  libre  arbitre,  p.  562.  Doctrine  de  .Marc 
l'Ermite  sur  la  grâce,  p.  637;  de  saint  Isidore  de 
Séville,  p.  721,  722;  de  saint  l'ulgence,  p.  11  et 
suiv.,  28,29.  31,  57  et  suiv.;  des  évéques  d'Afri- 
que, p.  441  ;  de  Laurent,  évéque  de  Novarc,  p. 
96,  97;  du  pape  Boniface  II,  p.  il.'>,  116;  de 
Cassiodore,  p.  251.  2ô2.  Canons  du  S' concile  d'O- 
range sur  la  grâce,  p.  832  et  suiv.  Les  moines  de 
Scytliie  suivent  la  doctrine  de  saint  Augustin  sur 
la  gr.'ice,  p.  45.  Saint  l'ulgence  distingue  avec  saint 
Augustin  la  grâce  des  deux  états,  p.  52,  03.  Le  se- 
cours de  la  grâce  est  nécessaire  pour  chaque  ac- 
tion, p.  87.  La  grâce  est  donnée  sans  aucun  mé- 
rite précédent,  p.  S8.  Elle  ne  se  donne  qu'aux 
humbles  et  gratuitement,  ibid.  Elle  n'est  pas  don- 
née k  tous  les  hommes,  d'après  les  moines  de 
Scytliie,  p.  12;  et  d'après  saint   Fulgence,  p.  .'■)8, 

GRAM.MAUtE.  Traité  de  la  grammaire  par  Cas- 
siodore, p.  235. 

CUÉGEXTIUS  isaint),  archevûquo  de  Taphar, 


dans  l'Arabic-Ueureuse.  On  lui  attribue  fausse- 
ment un  dialogue,  p.  270;  éditions  de  ce  dialo- 
gue, p.  280;  autres  écrits  sous  le  nom  de  saint 
Grégentius,  p.  280.  Éditions  des  lois  desUomé- 
rites,  ibid. 

GRÉGOIRE,  patriarche  d'Antioche,  embrassa 
la  vie  monastique  dans  le  monastère  des  Byzan- 
tins, aux  environs  de  Jérusalem,  dont  il  devient 
supérieur,  p.  3  JG.  11  gouverne  ensuite  le  monas- 
tère de  Pharin,  puis  celui  du  .Mont-Sinaï.  ibid. 
Son  éloge,  ibid.  Il  est  fait  patriarche  d'.Vntiocbe 
à  la  place  d'Anasiase  devenu  odieux  à  l'empereur 
Justin,  ihid.  Il  est  accusé  de  divers  crimes  de- 
vant Astérius,  comte  d'Orient,  et  se  justifie,  p. 
357.  Il  est  accusé  d'inceste  par  un  laïque,  et  se 
justifie,  p.  338,4IG.  L'empereur  Maurice  le  charge 
de  ramener  au  devoir  l'armée  d'Orient  qui  s'était 
révoltée,  p.  357  et  358.  Il  est  envoyé  en  ambas- 
sade vers  Chosroès,  roi  de  Perse,  qui  lui  fait  de 
grands  présents,  p.  359.  Il  visite  les  solitudes  de 
la  frontière  et  convertit  beaucoup  de  sévériens, 
ibid.  Sa  mort,  ibid.  Ce  que  dit  Évagre  de  ses  ou- 
vrages, ibid. 

GRÉGOIRE  ■saini\  évêque  de  Tours:  sa  nais- 
sance, son  éducation,  p.  3.55.  Il  est  ordonné  dia- 
cre à  Clermont,  par  saint  Avit,  ibid.;  évéquede 
Tours,  ibid.  Sa  conduite  pendant  son  épiscopat, 
ibid.  et  36G  ;  il  assiste  au  concile  de  Paris  en  577, 
où  il  prend  la  défense  de  saint  Prétextât,  p.  366; 
il  détourne  le  roi  Chilpéric  de  donner  un  édit  qui 
ordonnait  dénommer  la  Trinité  sans  distinction 
de  personnes,  p.  3G6;  il  est  accusé  dans  leconcile 
de  Braine  et  se  justifie,  ibid.;  il  est  envoyé  par 
Childebert  en  ambassade  vers  Contran,  roi  de 
Bourgogne,  ibid.;  il  va  à  Rome  eu  .591,  ibid.  et  p. 
3(>7.  Sa  mort  en  390,  p.  ,SG7;  son  éloge,  ibid.  Ses 
écrits  :  son  Histoire  e?clésiastique  des  Fran- 
çais: utilité  de  cette  histoire;  en  quel  temps 
écrite,  p.  3G7  ;  elle  est  divisée  en  dix  livres,  ibid. 
Analyse  du  i^'  et  du  2«  livre,  p.  3C8;  du  3°,  ibid. 
et  3C9;  des  4«,  5°.  6c,  p.  3G9,  370:  des  7»,  p.  370}  des 
8«  et  9»,  p.  371  ;  du  lO',  ibid.  et  p.  372.  Livre  de  la 
Gloire  des  Martyrs,  p.  372  ;  ce  qui  est  dit  dans  ce 
livre  de  Jésus-Christ,  de  la  sainte  Vierge,  de 
saint  Jean-Baptiste, î6id.  et  p.  373;  du  Martyre  des 
apùlres,  p.  374  ;  de  saint  Etienne  et  de  quelques 
autres  martyrs,  ibid.  et  375.  Livre  du  Martyre 
de  saint  Julien,  p.  374,  ,375;  ses  actes,  ibid.;  ses 
miracles,  p.  ô:5.  Livre  de  la  Gloire  des  Confes- 
seurs, p.  375;  ce  que  ce  livre  contient,  ibid.  et 
suiv.  Lettre  de  saint  Grégoire  i  son  clergé,  p. 
377.  Quatre  livres  des  niimcles  de  saint  .Martin, 
iV'iJ.  et  suiv.  Analyse  du  l»' livre,  p.  377:  du  2» 
livre,  ifti'd.;  du  3°,  iftW.  et  p.  379;  du  4"  livre,  p.  379. 
Prose  et  oraison  de  saint  Grégoire  en  l'honneur 
de  saint  .Martin,  p.  379.  Livre  des  Vies  des  Pères, 
p.  379  et  suiv.  Livre  de  commentaires  sur  les 
Psaumes  dont  il  nous  ne  reste  que  trois  frag- 
ments, p.  383.  Livre  des  Miracles  de  saint  An- 
dré, ibid.  Livre  du  .Martyre  de  saint  Julien, 
tbid.  L'histoire  des  Scpl  Dormants,  ibid  et  584. 
Écrits  attribués  à  saint  Grégoire,  p.  384,  385.  Ou- 
vrarios  qui  sont  perdus,  p.  385.  Doctrine  de  saint 
Grégoire  de  Tours,  p.  385  et  suiv.  Son  sentiment 


TABLE  ANALYTIQUIÎ. 


sur  lo  sort  des  saints,  p.  38.'  et  sulv.  ;  sur  la  divi- 
nité lie  Josus-Clirist,  p.  387;  sur  la  procession 
du  Saint-Ksprit,  ibid.;  sur  l'incarnatioa  du 
Vorlie,  ibid.;  sur  l'assomption  de  la  sainte  Viorne, 
ibid.;  sur  les  iina^'es,  ibid.;  sur  celles  de  Jésus- 
Christ  et  des  apAtres,  ibid.  et  3SS;  sur  les  ('gli- 
sos,  leur  dcHlicuce,  leurs  orncmenis  et  le  res- 
pect qu'on  leur  rendait,  p.  r)88  :  sur  les  reliques 
des  saints,  ibid.  et  ssi);  sur  l'adoraiion  de  la  croix, 
p.;)8i»;  sur  le  baptême  et  laconllrniation,  ibid.;  sur 
les  diUicullés  relative';.'»  la  Pàque,  ibid.  elp.X'O; 
sur  les  fonts  miraculeux  en  Espagne,  p.  300;  sur 
IKncharisiie,  sur  les  messes  pour  les  morts,  p. 
390,  301  ;  sur  le  dinianclie,  et  comment  on  le  sanc- 
tiliait,  p.  31)1;  sur  les  ministres  de  l'Église,  ibid. 
et  suiv.  ;  sur  les  conciles,  p.  393;  sur  les  censu- 
res et  interdits,  ibid.  et  p.  394;  sur  la  pénitence  sa- 
cramentelle, p.  39-1;  sur  les  moines  et  les  monia- 
les, ibid.  et  p.  395  ;  sur  les  rois  de  France,  p.  305  ; 
sur  les  coniinenccments  de  la  foi  cUréticnne  dans 
les  Gaules,  ibid.  Jugement  des  écrits  de  saint  Gré- 
goire, ibid.  et  suiv.;  son  apologie,  p.  395,  ;î96; 
son  style,  p.  396;  sa  prétendue  crédulité,  ibid.  et 
p.  397.  Fautes  de  chronologie  qu'on  lui  reproche, 
p.  397.  Éloge  de  son  histoire,  ibid.;  pureté  de  sa 
foi,  p.  398.  Éditions  de  ses  œuvres,  ibid.  et  p.  399. 
Son  éloge  par  Fortunat,  p.  406.  Autres  vers  du 
môme  à  sa  louange,  p.  408,  409. 

GRÉGOlRli  LE  GRAND  (saint),  pape  etdocteurde 
l'Église:  sa  naissance,  son  éducaticn,  p.  4-29:  il  est 
fait  préteur  de  Rome,  quitte  le  monde  et  se  retire 
dans  un  monastère,  ibid.  et  430  ;  travaille  à  la 
conversion  des  .inglais,  p.  430  et  431  ;  il  est  fait 
diacre  et  envoyé  nonce  à  Constantinople,  p.  4",1. 
11  résiste  au  patriarche  EutycLius,  le  fait  chan- 
ger de  sentiment,  ibid.  etp.  43-2;  compose  ses  .I/o- 
ra/es  sur  Job,  revient  à  Rome,  p.  432  ;  est  fait  abbé 
de  Saint-André,  p.  43-2  ;  il  aide  le  pape  Pelage  à 
écrire  ses  lettres,  ibid.  et  433.  Rome  est  désolée 
par  l'inondation  du  Tibre  et  par  la  peste,  p.  433. 
Mort  du  pape  Pelage  II,  ibid.  Saint  Grégoire  est 
élu  pape,  ibid.  Il  tient  un  concile,  ibid.  ;  envoie 
en  Orient  ses  lettres  synodales,  ibid.  et  434.  Sa 
conduite  pendant  son  épiscopat,  p.  434;  son  at- 
tention pour  les  églises  du  dehors,  ibid.  et  -135. 
11  tombe  malade  à  cause  des  maux  de  l'Italie, 
p.  435.  Édit  de  l'empereur  Maurice  contre  les 
soldats  qui  s'étaient  faits  moines.  Saint  Grégoire 
travaille  i  le  faire  révoquer,  ibid.;  il  cherche  du 
repos  dans  la  retraite,  ibid.  et  p. 436-,  ses  démêlés 
avec  Jean  patriarche  de  Constantinople  sur  le 
titre  d'écuménique,  p.  43G,  437.  Il  envoie  des  mis- 
sionnaires en  Angleterre,  p.  437,  438,  Conver- 
sion des  Corses  etdes  Juifs,  p.438.  Saint  Grégoire 
procure  la  paix  avec  les  Lombards,  ibid.  et  p.  439; 
tombe  malade,  p.  439:  tient  un  concile  à  Rome, 
ibid.  Il  entreprend  de  réparer  les  basiliques  de 
Saint-Pierre  et  de  Saint-Paul,  ibid.  et  440.  Mort 
de  l'empereur  Maurice,  p.  440.  Saint  Grégoire  en- 
voie un  nonce  à  Constantinople,  ibid.  Sa  mort, 
ibid.  Ses  écrits;  ses  commentaires  ou  .llorales 
sur  Job,  p.  441,  412,  .Méthode  de  cet  ouvrage,  p. 
442;  estime  qu'on  en  a  faite,  ibid.  et  443.  Six 
parues  :  1",  p.  443  et  suiv.;  2",  p  445  et  suiv.  3", 


947 

p.  417,  448  ;  4«,  p.  448  et  SUlV.  ;  5«,  p.  450,  451.  Scs 

homélies  sur  Ézéchiel,  p.  152  et  suiv.  On  écrivait 
scs  homélies  pendant  qu'il  les  prêchait.  Sa  pré- 
sence d'e^prit  au  milieu  des  plus  graruls  trou- 
bles, p.  452;  il  s'est  servi  du  commentaire  de 
saint  Jérôme  sur  Ézéchiel  pour  composer  scs 
homélies,  ibid.  et  453,  Ses  homélies  sont  au  nom- 
bre do  vingt-deux.  Jugement  de  ces  homélies, 
p.  .155;  ce  qu'elles  contiennent,  ibid.  et  454,  Ho- 
mélies sur  l'Évangile  divisées  en  deux  livres, 
i/)if/.  etsuiv.  Homélies  du  1"  livre,  p.  452  et  suiv.; 
homélies  du  2"  livre,  p.  4.58  et  suiv.  Son  discours 
sur  la  mortalité,  p.  402;  son  Pastoral:  estime 
qu'on  en  a  faite,  p.  4e2;  il  est  divisé  en  quatre 
parties.  Analyse  dj  la  l"  partie,  p.  103,  404;  de 
la  2»,  p.  404  et  465  ;  de  la  3",  p.  405  et  suiv.;  de  la 
4°  partie,  p.  470.  Dialogues  de  saint  Grégoire, 
p.  'i70  et  suiv.  Preuves  qu'il  en  est  l'auteur,  p. 
470,  471.  Réponses  aux  objections,  p. -471,  472. 
Dessein  de  ces  Dialogues,  p.  472.  Ces  Dialo- 
gues sont  bien  reçus  dans  le  public,  ibid.  et 
p.  473.  Ils  sont  divisés  en  quatre  livres,  p.  473. 
Analyse  du  1"  livre,  p.  473,  474;  du  2"  livre,  p. 
474,  475;  du  3=  livre,  p.  475  et  suiv.;  du  4"  li- 
vre, p.  477  et  suiv.  Lettres  de  saint  Grégoire  di- 
visées en  14  livres,  p.  479  et  suiv.  Remarques 
sur  ces  livres,  p.  470,  480.  Lettres  du  l"  li- 
vre, p.  480  et  suiv.  ;  du  2',  p.  480  et  suiv.  ;  du  3», 
p.  490  et  suiv.  ;  du  4°-,  p.  494  et  suiv.  ;  du  5°,  p.  499 

et  suiv.;  du  6=,  p.  503  et  suiv.;  du  7»,  p.  506  et 
suiv.  ;  du  8«,  p.  500  et  suiv.;  du  9»,  p.  512  et  suiv.; 
du  10c,  p.  518  et  suiv.  ;  du  île,  p.  520  et  suiv.  ;  du 
12»,  p.  528  et  suiv.  ;  du  13»,  p.  529  et  suiv.  ;  du  14', 
p.  533  et  suiv.  Appendice  aux  lettres  de  saint  Gré- 
goire, p.  535  et  suiv;  pourquoi  on  n'a  pas  entrepris 
l'analyse  de  toutes,  iftici.  et  p.  536.  Ce  que  contient 
l'appendice  aux  lettres  de  saint  Grégoire,  p.  536, 
537.  Sacramentaire  de  saint  Grégoire,  p.  537;  distri- 
bution de  ce  sacramentaire,  p.  558etsuiv,  .\ppen- 
diceau  sacramentaire:  Bénédictionnaire,  p.  543  et 
544.  Antiphonaire ,  ibid;  autre  antiphonaire , 
ibid.  Commentaire  sur  le  premier  livre  des  Rois, 
p.  545;  saint  Grégoire  n'en  est  pas  l'auteur,  ni 
Claude,  abbé  de  Classe,  ibid.  et  546,  547.  Le 
coramcntaire  sur  le  Cantique  des  Cantiques 
est  de  saint  Grégoire,  p.  547,  348.  Remarques  sur 
le  Cantique  des  Cantiques,  p.  548.  Le  commen- 
taire sur  les  sept  psaumes  pénitentiaux  est  de 
saint  Grégoire,  p.  S18,  640;  idée  de  ce  commen- 
taire, p.  559,  550.  La  concordance  de  quelques 
passages  de  l'Écriture  est  de  saint  Grégoire,  p.  550. 
Extraits  des  écrits  de  saint  Grégoire  par  Patérius 
et  parAlulfe,  p.  550,  551.  Remarques  du  cardinal 
Caraffa  sur  les  lettres  de  saint  Grégoire,  p.  551. 
Ouvrage  sur  les  quatre  Évangiles  attribué  i  saint 
Grégoire  par  Trithème,'p,5.J2.— Doctrine  de  saint 
Grégoire  sur  l'Écriture  sainte,  p.  552  et  suiv.;  sur 
les  conciles,  p.  554,  555;  sur  l'Église,  p.  555  et 
suiv.;  sur  la  primauté  de  saint  Pierre,  p.  556; 
sur  l'autorité  du  Siège  apostolique,  p.  557  ;  sur  la 
Trinité  et  l'iMcarnation,  iti(/.;sur  la  mission  des 
personnes  divines  et  la  procession  du  Saint-Es- 
prit, î'ji'J.  et  p.  558;  sur  les  deux  natures  en  Jésus- 
CUrisl,  p.  558,559;  sur  la  loi  en  Jésus-Chrisl,  p 


948 


TA  RLE  ANALYTIQUE. 


669;  sur  la  grâce,  p.  559;  sur  la  prédestination  et 
la  n'probation,  p.  502;  sur  l'accurd  de  la  grâce 
avec  le  libre  arbitre,  ibid.;  sur  l'incertiude  de  no- 
tre prOdestinaiion,  ibid.  et  5C3;  sur  les  anges  et 
les  démons,  p.  561;  sur  l'état  du  premier  homme, 
p.  ô<il,  56d;  sur  le  péché  originel,  ibid.:  sur  la  cir- 
concision, sur  le  baptême  des  enfants,  ibid.;  sur  le 
baptême  de  saint  Jean  et  celui  de  Jésus-Christ,  p. 
5cô;  sur  les  effets  et  les  cérémonies  du  baptême, 
p.  505;  sur  le  ministre  du  baptême  et  le  temps 
de  l'administrer,  p.  5C6;  sur  le  sacrement  de 
confirmation  et  son  ministre,  ibid.  et  p.  567; 
sur  l'Eucharistie,  p.  507  et  508;  sur  le  sacriflce 
de  l'autel,  p.  503,  569  ;  sur  les  oratoires  et 
quelques  points  de  discipline  touchant  la  célé- 
bration des  messes  et  la  communion,  p.  jC9-, 
sur  la  pénitence,  le  pouvoir  des  clefs,  la  confes- 
sion des"  péchés,  ibiil.  et  suiv.  ;  sur  l'excouàmu- 
nication,  p.  57i  ;  sur  l'ordination  et  la  résidence 
des  clercs,  ibid.  et  p.  572;  sur  les  qualités  des  évê- 
ques  et  leur  manière  de  vivre,  p.  572;  sur  le  cé- 
libat des  clercs,  ibid.  et  p.  573;  sur  la  pénitence  des 
clercs,  p.  573,  574;  sur  les  monastères  et  sur  les 
moines,  p.  574,  575;  sur  les  religieuses,  p.  575, 
576;  sur  le  mariage,  p.  576.  577;  sur  l'invocation 
des  saints  et  sur  les  miracles  faits  à  leurs  tom- 
beaux, p.  577;  sur  les  reliques  des  saints,  ibid. 
et  p.  578;  sur  la  translation  des  reliques,  p.  5:8-.  sur 
les  reliques  incertaines,  ibid.;  sur  la  dédicace 
des  églises  et  des  monastères,  ibid.  et  p.  57'.i;  sur  le 
destin  et  les  superstitions,  p.  579,  580;  sur  la  fé- 
licité des  saints,  p.  5â0;  sur  le  purgatoire,  ibid.; 


sur  l'enfer,  ibid.  et  p.  58i:  sur  la  délivrance  de  l'â- 
me de  l'empereur  frajan,  p.  58i  et  suiv.;  sur  l'hé- 
résie et  le  schisme,  p. 583,  sur  la  simonie,  ibid. 
Jugement  des  écrits  de  saint  Grégoire,  p.  583; 
éditions  qu'on  en  a  faites,  p.  581  et  suiv.  —  Diffé- 
rentes vies  du  pape  saint  Grégoire,  p.  585.  Con- 
ciles tenus  par  saint  Grégoire,  p.  906,  C08.  910. 
Lettres  qu'il  écrit  à  Anastase  patriarche  d'Anlio- 
che,  p.  359,  3bO.  460,  482,  510.  Il  reçoit  à  Korae 
saint  Grégoire  de  Tours,  \>.  360,  307.  Lettre  que 
lui  éciit  saint  Colomban  pour  justiHer  l'usage 
qu'il  avait  apporté  d'Irlande  ùj  célébrer  la  Pàciue 
le  11  de  la  lune,  p.  624,  62'>.  Il  le  consulte  en 
même  temps  sur  diverses  difficultés,  p.  625.  On 
n'a  point  la  réponse  que  fit  le  Pape,  ibid.,  ni  deux 
autres  lettres  que  lui  écrivit  saint  Colomban.  p. 
025.  Sentences  tirées  de  ses  .Morales  par  Ta'ion 
évêque  de  Saragosse,  p.  776,  777. 

GRÉGOIRE  isaint),  évéque  de  Langres,  assiste 
à  plusieurs  conciles,  p.  3st  ;  sa  vie  écrite  par 
Grégoire  de  Tours,  ibid. 

GREGOIRE,  préfet  d'Afrique,  engage  une  confé- 
rence entre  saint  Maxime,  abbé  de  Chrysopolis,  et 
Pyrrhus,  partisan  des  monotbélites,  p.  700;  saint 
Maxime  lui  écrit,  p.  7g7,  708. 

GRKGORIA,  dame  deConstantinoplc;  excellen- 
tes instructions  que  saint  Grégoire  lui  donne, 

p.  508. 

GREFFIER  :  détail  des  avantages  et  des  devoirs 
attachés  à  la  place  de  greffier,  p.  iiO. 

GRI.MOALD,  maire  du  palais.  Saint  Didier. 
évêque  de  Cahors,  lui  écrit,  p.  753. 


H. 


HABIT  clérical.  Défense  aux  clercs  de  porter 
des  habits  de  pourpre,  p.  001. 

HADIT  monastique,  suivant  saint  Benoit,  p. 
107. 

HABITS  sacerdotaux,  p.  538,  539.  Saint  Grégoire 
envoie  50  sous  d'or  pour  acheter  des  habits 
blancs  pour  ceux  qui  devaient  être  baptisés,  p. 
510. 

HEDDI  (saint),  évêque  de  Worcester;samort, 

p.  801. 

IIELLADIUS,  évêque  de  Tolède,  successeur d'.\.- 
ransius,  est  mis  au  nombre  des  écrivains  ecclé- 
siastiques par  saint  Ildefonse,  quoiqu'il  n'ait  rien 
laissé  par  écrit,  p.  609. 

HKKACLE,  évêque  de  Paris,  p.  80. 

IllCRACLlEN,  évéque  de  Chalcédoine,  compose 
vingt  livres  contre  les  manichéens,  p.  644;  Ce 
qu'en  dit  l'hotius.  itic/.  et  p.  040. 

IIÉRACLIL'S,  empereur,  publie  son  éditou  cc- 
Ihèse  en  faveur  du  monotholisme,  p.  048. 

HÉRÉSIE:  ne  pas  croire  ceiui  qui  professe  la 
vérité',  ce  n'est  pas  détruire  un3  hérésie,  mais 
l'établir,  p.  5S-,.  Hérésie  nouvelle  à  Constanti- 
nople,  p.  522.  imaginaire  peut-être,  ibid. 

HÉRÉnyUES.  Méthodes  pjur  les  combattre, 
p.  ')'.)'<,  j'3j.  De  quelle  manière  on  doit  recevoir 
les  hérétiques,  p.  'yia  527.  IIscorrouuKint  le  texte 
de  récriture,  et  supposent  aux  Pères  des  écrits 


dont  ils  sont  eux-mêmes  les  auteurs,  p.  665,670. 
Les  bonnes  œuvres  qu'ils  font  ne  leur  servent  de 
rien  pour  le  salut,  p.  720.  La  lecture  des  livres 
des  hérétiques  ou  des  païens  est  défendue  aux 
moines,  p.  72»  L'attacliement  seul  à  l'erreur  rend 
hérétique,  p.  290.  La  grâce  du  Saint-Esprit  n'est 
pas  chez  tous  les  hérétiques,  et  leurs  s:icriflces, 
tandis  qu  ils  sont  hérétiques,  ne  peuvent  plaire 
i  Uiou,  p.  15.  Défense  aux  clercs  de  manger  avec 
eux,  p.  81'>.  Défense  de  se  servir  de  leurs  églises, 
p.  878.  L'empereur  Justiuien  défend  les  assem- 
blées particulières  des  hérétiques,  p.  201.  Moyens 
de  se  préinuuir  contre  les  hérétiques,  p.  232. 

HiiRMÉ.NÉGlLDE  isaint,  priuce  des  Visigoths, 
quit'.e  l'ariauisma  et  reçoit  a  la  coulirmation  le 
nom  de  Jean,  p.  422;  il  se  révolte  contre  sou  père 
qui  le  fait  mourir,  ibid. 

HÉRL'LES.  Ils  font  des  ravages  dans  la  Tos- 
cane, p.  334. 

HÉSVClUUS,  évoque  de  Vienne,  assiste  au  î« 
concile  de  Paris,  p.  882. 

HÉSYCHIUS.  prêtre  de  Jérusalem  :  son  com- 
mentaire sur  le  Lévilique,  p.  6')5,  656.  Homélies 
et  autres  écrits,  p.  650.  0.57.  DilUcultés  sur  llésy- 
cliius,  p.  051.  055.  Édition  des  écrits  d'Uésychius 
dans  la  l'airologie.  p.  0')7. 

IlÉsvcHIb'S,  prêtre  de  Constantinoplo  Ses 
quatre  livru;i  sur  le  Serpenl  d'mratn  sont  per. 


TABLE  ANALYTIQUK. 


949 


dus,  p.G58;  ce  que  Pbotlus  nous  apprend  de  cet 
écrit.,  ihid. 
IlKSYcmi'S,  évoque  de  Salone  en  Dalmatic, 

p.  6Ô5. 

IIlLAiniî  (saint),  évoque  de  Poitiors.  Citait  la 
coutume  des  iiion.islères  aux  environs  de  l'oi- 
tiers  de  venir  dans  celte  ville  le  jour  de  la  /ôto 
de  saint  lliiaire  et  d'y  célébrer  les  veilles  jus- 
qu'à minuit,  p.  415. 

llll.viUE,  cartulaire  du  pape  saint  Grégoire  le 
Grand,  p.  im. 

HILAIUO.N,  abbé  de  Saint-André  .\  nome,  p.  430. 

HILAIIUS,  sous-diacre  de  l'église  de  Naplcs, 
puni  comme  calomniateur,  p.  527. 

HILDKRIC,  roi  des  Vandales,  favorable  aux 
catholiques,  p.  8. 

IIISTOIliE  KCCLÉSIASTIQUE  appelée  Tripar- 
tite,  p.  2-20,  -221. 

HO.MICIDK,  pénitence  imposée  à  un  homme 
qui  avait  tué  son  frère,  p.  371. 

HOMMES.  Jlnripies  auxquelles  on  connaît  les 
hommes  bons  ou  mauvais,  p.  211. 

IIOMOBOiNUS,  sous-diacre  de  l'Église  romaine, 
p.  332. 

HONOn.VT,  évéque  de  Novare,  p.  96. 

IIONOUAT,  archevêque  de  Bourges,  préside  au 
second  concile  d'Orléans,  p.  847,  et  à  celui  de 
Clermont  en  Auvergne,  p.  849. 

HOiNOllAÏ,  archidiacre  de  Salone.  Son  démêlé 
avec  Natalis,  son  évoque,  p.  481. 

HONOHAT  (saint),  abbé  de  Fondi.  Sa  vie  et  ses 
miracles  rapportés  dans  les  Dialogues  de  saint 
Grégoire-le-Grand,  p.  473. 

HONORAT,  prêtre,  p.  486. 

HONOIU,  monastère  de  la  province  bétique. 
Saint  Isidore  de  Séville  lui  compose  une  règle, 
p.  723. 

HONORIUS  I,  pape,  succède  en  C26  h  Boniface  V, 
p.  617.  Il  envoie  des  missionnaires  en  Angleterre 
et  fait  cesser  le  schisme  de  l'Istrie,  ibid.  Sa  lettre 
à  Isaac  de  Uavenne.  ibid.:  sa  lettre  aux  évéques  de 
■N'énétie  et  d'islrie,  ibid-;  sa  lettre  à  Sergius,  pa- 
triarche de  Constantinople,  sur  la  question  des 
deux  volontés,  ihid.  et  648  Autres  lettres  d'Hono- 
rius  à  Édouin  ;  à  Honorius,  évéque  de  Cantorbéry; 
à  l'évèque  d'York  ;  aux  Écossais,  ibid.;  aux  évo- 
ques d'Épire,  i6id.  ;  au  sous-diacre  Sergius,  ibid. 
Sa  mort,  ibid.  Lettre  du  clergé  de  Rome  aux 
Écossais,  p.  649.  Seize  lettres,  deux  décrets,  des 
vers  sur  l'Ascension,  un  privilège  pour  le  mo- 
nastère de  Bobio,  sont  les  œuvres  d'Honorius 
dans  la  Patrologie,  p.  648,  649.  Monuments  pour 
la  défense  de  ce  pape,  p.  649.  Apologie  d'Hono- 
rius par  Jean  IV.  pape,  ibid.  et  650.  Honorius 
condamné  par  Léon  11,  p.  784,  et  par  le  sixième 


concile  général,  ibid.  Voyez  le  volume  suivant, 
p.  9.'ii  !'<•  note. 

HONORIUS,  archevêque  de  Cantorbéry.  Le  pape 
Honorius  lui  envoie  deux  pnlliums,  l'un  pour 
lui,  l'autre  pour  l'évécpie  d'Yurk,  p.  filH. 

HOI'ITAI/'.X.  Leurs  administrateurs  étaient 
clercs,  p.  261,  202,  497.  Hôpital  fondé  h  Lyon  par 
le  roi  Childehert  et  la  rein(!  lIltrogolMe:  l,-i  fon- 
dation en  est  conllrméo  par  le  5"  concile  d'Or- 
léans, p.  8(i:). 

HORLOGES  dans  le  monastère  de  Cassiodore, 
p.  2:t4. 

HORMISDAS,  pape,  écrit  ^  saint  Rcmi  de  Reims, 
l'établit  son  vicaire  et  son  légat  dans  tout  le 
royaume  de  Clovis,  p.  8i.  La  lettre  que  saint 
Henri  lui  avait  écrite  est  perdue,  ibid.  Lettres 
que  lui  écrit  Jean  de  Cappadoce,  patriarche  de 
Constantinople.  p.  112  ;  autre  que  lui  écrit  Epi- 
phane,  successeur  de  Jean,  ibid.  Assemble  un  con- 
cile à  Rome  en  5i9,  où  l'on  confirme  à  quelques 
clioscs  près  ce  i|ui  s'était  fait  au  concile  de  Con- 
stantinople, tenu  la  même  année,  p.  823. 

HOUOSE,  abhé  du  Mont-Christ,  p.  485. 

HOSPITALITÉ  recommandée  par  le  second 
concile  de  Màcon,  p.  897. 

HOSPITO.N,  chef  des  Barbariciens,  se  fait  chré- 
tien, saint  Grégoire  lui  écrit,  p.  497. 

HOSTIE  consacrée  mise  sur  la  poitrine  des  dé- 
funts, p.  569. 

HUILE.  Les  moines  de  saint  Colomban  por- 
taient en  voyage  de  l'huile  bénite  sur  eux  pour 
en  oindre  les  malades,  p.  62u. 

HUNALDE,  disciple  de  saint  Colomban  qui  lui 
adresse  un  poème,  p.  627,  628. 

HUNERIC,  roi  des  Vandales,  fait  couper  la 
langue  à  des  évéques  qui  ne  laissèrent  pas  après 
cela  de  parler  librement,  p.  477. 

HYMNES.  Fortunat  avait  composé  des  hymnes 
pour  toutes  les  fêtes  de  l'année,  p.  412.  Saint  Isi- 
dore de  Séville  attrihue  à  saint  Hilaire  de  Poi- 
tiers et  à  saint  Ambroise  les  hymnes  que  l'on 
chante  dans  les  églises,  p.  7i6. 

HYPACE,  archevêque  d'Ephèse,  envoyé  à  Rome 
par  l'empereur  Justinien,  p.  116, 117;  il  parle  pour 
les  catholiques  à  la  conférence  de  Constantinople, 
p.  843  et  suiv. 

HYPATIUS,  évéque  de  Nicopole.  Le  pape  Ho- 
norius lui  envole  lepallium,  p.  648. 

HYPERCHlUS.abbéavanî  le  milieudevi' siècle. 
Ses  capitules  ou  règles  abrégées  de  la  vie  spi- 
rituelle, p.  697.  Leurs  éditions,  ibid. 

HYPOMNESTlCOxN  d'Eurépius  et  de  Théodore, 
p.  772. 

HYPOSTASE.  Ce  terme  est  employé  par  Euloge, 
patriarche  d'Antioche,  p.  592. 


I. 


IBAS.  Défense  de  la  lettre  d'Ibas  par  Facun- 
dus,  p.  290,  291. 

IDALICS,  évéque  de  Barcelone.  Saint  Julien,  ar- 
chevêque de  Tolède,  lui  adresse  son  traité  des 
Pronostics,  p.  791.  Ses  écrits,  p.  796. 


IDOLATRIE.  Les  catholiques  qui  retournent  à 
l'idolâtrie  ou  qui  mangent  des  viandes  immolées, 
etcsont  excommuniés  par  le  second  concile  d'Or- 
léans, p.  848,  849.  Restes  d'idolâtrie  en  Italie  ou 
en  France,  p.  586.  Saint  Grégoire  exhorte  la 


930 


TABLE  ANALYTIQUE. 


reine  Brunehaut  à  abolir  les  rcsles  d'idolAlrie 
qui  se  trouvaient  dans  les  États  des  rois  Tht'O- 
debert  et  Tbéodoric,  p.  513.  Saint  Eloi  évéqiie 
de  .Noyon  condamne  les  restes  d'idolâtrie  qui 
avaient  cours  dans  son  diocèse,  p.  734. 

ILDEFONSE  (saint),  archevêque  de  Tolède.  Sa 
naissance,  son  éducation,  p.  ";);  il  embrasse  la 
vie  monastique,  est  Tait  abbé  d'Agli,  assiste  au 
vin»  concile  de  Tolède,  est  fait  évéque  de  cette 
ville  en  C57  et  succède  à  saint  Eugène  de  Tolède  ; 
ibid.  Sa  vie  écrite  par  deux  auteurs  différents; 
il  meurt  en  CG7,  ibid.  Ses  écrits  :  Son  livre  de  la 
Virginité  perpétuelle  de  ta  sainte  Vierge.  Idée  de 
ce  traité,  ibid.  cl  771.  Autre  traité  de  la  virginité 
de  Marie;  il  n'est  pas  de  saint  lldefonse.  p.  774. 
Son  livre  de  la  Connaissance  du  baptême,  ibid. 
Son  livre  du  Ve'serl  spirituel,  p.  775.  Homélies 
qui  lui  sont  faussen»ent  attribuées,  ibid.  et  p. 
776.  Son  traité  des  ccrivains  ecclésiastiques,  p. 
776.  Éditions  des  œuvres  de  saint  lldefonse  dans 
la  Patrologie  d'après  Lorenzana,  ibid.  Eloge  que 
saint  lldefonse  fait  de  saint  Grégoire,  p.  441. 

ILLIDIUS  ou  ALLYRE  (saini),  évéque  de  Clcr- 
mont,  p.  3S0. 

l.MAGES  sur  les  autels,  p.  888.  Images  des  évo- 
ques dans  les  églises,  p.  348.  sentiment  de  saint 
Grégoire  sur  les  images,  p.  5i7;  de  Léonce, 
évéque  de  Naples  en  Chypre,  p.  663,  664.  Miracles 
opérés  par  les  images  et  par  les  reliques,  p.  604, 
665.  Images  de  la  sainte  Vierge,  de  Jésus-Christ 
et  des  apôtres  dans  les  églises,  p.  i287,  288.  Image 
du  Sauveur  percée  par  un  Juif  avec  un  dard 
rend  du  sang,  p.  373,  387  et  388.  L'image  de  saint 
Théodore  martyr  percée  d'une  flèche  rend  du  sang^ 
p.  387,  609.  Uisloired'un  solitaire  qui  avait  dans 
sa  cellule  une  image  de  la  sainte  Vierge  qui  por- 
tait Jésus-Christ  entre  ses  bras,  p.  70I.  Histoire 
de  deux  hommes  de  la  lie  du  peuple  qui  furent 
punis  miraculeusement  pour  avoir  insulté  l'image 
de  la  sainte  Vierge,  p.  60-2.  Discours  sur  les  images 
attribués  à  saint  Simon  Stylite  le  jeune,  p.  675. 
Histoire  d'un  solitaire  qui  avait  dans  sa  cellule 
une  image  de  la  sainte  Vierge  qui  portait  Jésus- 
Christ  dans  ses  bras,  p.  701.  Doctrine  de  Jean, 
évéque  de  Tliessalonique,  sur  les  imagis,  p.  787. 
Saint  Grégoire  fait  ûter  d'une  synagogue  des  Juifs 
une  image  de  la  sainte  Vierge  et  une  crois  qui  y 
avaient  été  mises  par  un  Juif  converti,  p.  513. 

IMl'L'RETÉ.  Ceux  qui  avaient  commis  des  pé- 
chés d'impureté  étaient  retranchés  de  la  com- 
munion des  saints  mystères  pendant  plusieurs 
années,  p.  684.  Les  prêtres,  les  évoques,  les  dia- 
cres et  les  autres  clercs  qui  sont  tombés  dans 
des  péchés  d'impureté  doivent  être  déposés  sans 
espérance  d'être  rétablis,  p-  714,  et  celui  qui  a 
commis  un  péché  semblable  avant  son  ordina- 
tion ne  doit  pas  être  ordonné,  p.  714.  Uemèdes 
contre  l'imp'ireté,  p.  684. 

INCAUNATIO.N.  11  'rétiqiics  qui  ont  erré  sur  ce 
mystère,  p.  10  et  20.  Sentiment  de  saint  Knlgence 
sur  rincarnntion,  p.  22  et  suiv.;  34,  63,  64:  de 
Ferraiid  diacre  de  Carihage.  p.  «8,  8a,  !»l,  92; 
de  l'empereur  Justinien,  p.  116,  li7;  de  saint  Cô- 
saire  d'Arles,  p.  136,  144;  de  Procope  de  Gaze, 


p.  178  :  de  Timothée  d'Alexandrie,  p.  190  ;  de  Cas- 
siodore.  p.  245  et  suiv.;  de  Faeundus,  p.  2S8;  de 
Théodore  de  Mopsuestc,  p.  202;  de  Rusticus  dia- 
cre de  l'Eglise  romaine,  p.  300,  301;  <lii  pape 
Pelage  I.  p.  332;  de  saint  Anasiase  patriarche 
d'Antioche,  p.  361,  302;  des  moines  de  Scythie. 
p.  41  et  45;  des  évêques  d'Afrique,  p.  45  ;  de  saint 
Grégoire  de  Tours,  p.  387;  de  saint  Forlunat, 
évéque  de  Poitiers,  p.  408;  de  saint  Grégoire  le 
Grand,  p.  557;  d'Anastase  Sinalte,  p.  596,  597, 
598.599:de  Léonce, évéque  de  Nicopole en  Chypre, 
p.  605,  606  ;  de  Léonce  de  liyzance.  p.  607,  668,  671  ; 
de  Théodore,  abbé  de  Rhaite,  p.  7b7;  de  saint  Eu- 
loge  d'Alexandrie,  p.  590,  591  ;  de  saint  Soplirone, 
patriarche  de  Jérusalem,  p.  703.  Si  l'on  peut 
dire  que  la  divinité  de  Jésus-i'.hrist  est  née, 
qu'elle  a  souffert,  etc. ,  p.  39,  40.  Si  l'ime  de  Jé- 
sus Christ  connaît  parfaitement  la  Divinité,  etc., 
p.  40.  Si  le  corps  de  Jésus-Christ  était  corrup- 
tible ou  incorruptible,  p.  51.  Ce  n'est  point  la 
Trinité  qui  s'est  incarnée,  c'est  le  Fils  seul,  c'està- 
dire  une  personne  de  la  Trinité,  Jésus-Christ, 
Fils  de  Dieu,  etc.,  p.  45.  II  n'est  pas  permis  de 
croire  que  le  Père  ou  le  Saint-Esprit  se  soit  (ait 
homme,  p.  51,  52. 

INCIRCONSCRIT.  Discours  de  saint  Athanase, 
patriarche  d'Antioche,  sur  l'incirconscrit,  p.  361. 

IKCORRLI'TlIiLES.  Secte  d'eutychiens  .  p.  204. 
L'empereur  Justinien  publie  un  édit  pour  la  dé- 
fense de  l'erreur  des  incorruptibles,  p.  353. 

I.NGUNDE,  femme  d'Herménégilde,  flls  de  Lé- 
vigilde.roi  des  Visigolhs,  p.  422. 

INTERCESSION'  des  saints,  p.  411.  Les  évéques 
du  concile  de  Jérusalem  en  518,  prient  la  sainte 
et  glorieuse  vierge  Marie,  mère  de  Dieu,  d'em- 
ployer son  intercession  pour  la  paix  des  églises, 
etc.,  p.  820. 

I.WOCATION  des  saints,  p.  253,  577. 

INTERDITS  ecclésiastiques,  p.  388,  393. 

INTROÏT  à  la  messe,  p.  538. 

IRÉNÉE  (saint).  Ses  écrits  ne  se  trouvaient  point 
dans  les  archives  de  l'Église  romaine,  p.  524. 

ISAAC.  exarque  de  Uavenne.  Le  Pape  llono- 
rius  lui  écrit,  p.  047. 

ISAAC,  serviteur  de  Dieu,  favorisé  du  don  des 
miracles,  p.  476. 

ISAAC,  évéque  de  Syracuse.  Lettre  que  lui  écrit 
le  pape  Jean  IV,  p.  650. 

ISACIUS,  patriarche  de  Jérusalem.  Saint  Gré- 
goire loue  la  pureté  de  sa  foi,  p.  523.  Voyez  Ué- 
syctiius. 

ISAIE,  abbé.  Analyse  de  ses  vingt-neuf  dis- 
cours de  morale,  p.  789;  ses  écrits,  ibid. 

ISIDORE  isaint»,  évoque  de  Séville  et  docteur 
de  l'Eglise;  sa  naissance,  son  éducation,  ses  étu- 
des, p.  710.  Saint  Isidore  était  fière  cadet  de  saint 
Léandre,  p.  422.  Il  lui  succède  sur  le  siège  de  Sé- 
ville, p.  423  et  711.  Concile  qu'il  tient  à  Séville, 
p.  917,  918.  Il  assiste  et  préside  à  divers  con- 
ciles, p.  711.  Sa  mort  en  636,  ibid.  Ses  écrits,  p. 
711  et  suiv.:  ses  livres  des  Origines  ou  Elymolo- 
gies,  ce  qu'ils  contiennent,  ibid.  et  suiv.;  ses 
livres  de  la  différence  ou  de  la  propriété  des 
verbes,  p.  713;  ses  livres  des  synonymes,  ibid. 


TABLK  ANALY'J'IQUE. 


951 


Le  livre  du  Mépris  du  }fnndc,ihi(l.:  le  livre  de 
la  Règle  de  Vie,  cl  Ui  lettre  .\  iMassanus  sont  dos 
ouvraRcs  supposés,  p.  711.  Autres  écrits  du  saint 
Isidore  :  diverses  œuvres  morales,  ihid.;  uu  livre 
de  la  Nature  lies  Choses,  ihid.;  deux  chroniques, 
ibid.  et  7i5;  des  commentaires  sur  les  livres  de 
t'.lncien  et  du  Nouveau  Testament,  p.  '"o;  des 
allégories  sur  l'Ancien  et  le  Nouveau  Testament, 
ibid.;  un  catalogue  des  écrivaiyis  eccle'sias(i(iues, 
ibid.;  un  livre  de  la  Vie  et  de  la  Mort  des  Pires, 
ibid.;  deux  livres  contre  les  Juifs,  ibid.  et  710; 
deux  livri'S  des  Offices  ecclésiastiques,  analyse  de 
ces  deux  livres,  p.  716  et  suiv.;  une  lettre  a  Eu- 
frède,  évêiiue  de  dordouo,  p.  720;  trois  livres  des 
Sentences,  p.720  et  suiv. -analyse  du  livre  l''Si/n(/. et 
p.  37;  du2«,  p.  •;2l,  722;  du  3°,  p.  722.  Quelques  let- 


tres, p.  711, 7>1, 723;  une  ni"'gle  pour  des  moines,  p. 
723  et  suiv.  Ouvrages  atlriliiiés  ;'i  saint  lsidf)rc  : 
un  livre  du  Combat  des  Vices  et  des  Vertus,  p. 
72,",;  un  commentaire  sur  le  Cantique  des  Canti- 
ques, ibid.;  un  livre  de  l'Ordre  des  Créatures, 
ibid.  et 720;  un  glossaire,  p.  720.  Livres  de  .saint 
Isidore  qui  sont  perdus,  ibid.  Jugement  de  ses 
écrits,  ibid.  Éditions  qu'on  en  a  faites,  ifcii/.; 
édition  dans  la  Patrologie,  p.  727,728.  —  Son 
éloge  et  le  caialogue  de  ses  ouvrages  composé  par 
Braulion,  évéque  de  Sarjgossi,-,  p.  728. 

ISTRIE.  Les  évoques  d'istrie  persévèrent  dans 
le  scliisme  pour  la  défense  des  Trois-Chapitres, 
p.  330.  Le  pape  Pelage  II  leur  écrit  pour  les  ex- 
Uorter  à  se  réunira  riiylise,  ibid.  et  suiv. 


J.VCOBITES,  hérétiques,  p.  809.  Leurs  erreurs, 
ibid. 

JACQUES,  surnommé  Trantzales,  moine  syrien, 
chef  de  l'hérésie  des  jacobites,  p.  809. 

J.\NU.\niN,  moine  de  Saint-Aurélien  d'Arles, 
fait  en  vers  acrostiches  l'épitaphe  saint  Floren- 
tin, abbé  de  ce  monaslère,  p.  321,  322. 

JANVIER,  évéque  de  Cagliari,  faible  et  colère, 
p.  bl2.  Indolence  et  inflrmités  corporelles  de 
Janvier,  p.  533.  Quatre  lettres  du  pape  saint  Gré- 
goire qui  lui  sont  adressées,  p.  483.  Autres  let- 
tres qu'il  lui  écrit,  p.  495,  490,  512,  510,  520,  -Vig, 
533.  Saint  Grégoire  lui  fait  une  sévère  répri- 
mande, p.  512. 

JANVIER,  évêque  de  Slalgue  en  Espagne,  in- 
justement déposé  et  chassé  de  son  siège,  porte 
ses  plaintes  au  pape  saint  Grégoire,  p.  532.  Ins- 
tructions que  le  Pape  donne  sur  celte  affaire  au 
défenseur  Jeau,  ibid.  Sentence  en  faveur  de  Jan- 
vier, ibid. 

JARDINIER  du  monastère  de  Fondi  :  les  ser- 
pents lui  obéissiient,  p.  493. 

JEAN-BAPTISTE  (saint).  Invention  de  son  chef 
par  deux  moines  qui  étaient  allés  par  dévotion 
à  Jérusalem,  p.  98.  L'histoire  de  cette  invention 
est  écrite  par  l'abbé  Marseilles  et  traduite  en  la- 
tin par  Denis  le  Petit,  p.  125.  Cosme  d'Egypte 
croit  que. le  père  de  saint  Jean-Paptiste  avait  été 
grand-prêtre,  p.  191.  Différentes  reliques  de  ce 
saint  dont  parle  saint  Grégoire  de  Tours,  p.  373. 
Homélies  du  pape  saint  Grégoire  sur  les  témoigna- 
ges que  saintJean  a  rendus  i  Jésus-Christ,  p.  456. 
JE.\N  (saint)  l'Evangéliste,  prêche  l'Evangile 
dans  l'Asie,  p.  553.  D'après  saint  Grégoire  le 
Grand,  il  était  le  jeune  homme  qui  suivit  Jésus- 
Christ  dans  sa  passion,  ibid.  Il  fut  enterré  à 
Ephèse,  p.  383.  11  coulait  de  son  tombi'au  une 
manne  semblable  à  de  la  farine,  p.  374.  Du  temps 
d'Ephrem,  patriarche  d'Antiocbe,  quelques-uns 
pensaient  que  saint  Jean  n'était  point  mort,  et 
qu'il  était  réservé  avec  Enoch  et  Élie  pour  le  se- 
cond avènement  de  Jésus-Christ,  p.  173.  Lettre 
d(i  pape  saint  Grégoire  au  sujet  de  la  tunique  de 
saint  Jeani  p.  490. 


JEAN  de  Cappadocc,  évêque  de  Constantinople, 
succède  à  Timolhée,  p.  111.  L'empereur  Anasiase 
l'oblige  à  condamner  le  concile  de  Chalcédoine, 
ibid.  .iprès  la  mort  de  ce  prince,  il  se  rétracte 
et  dit  anatlième  à  Sévère  de  Sozopole,  ibid.  Il 
tient  un  concile  où  la  mémoire  d'Euphémius  et 
de  Macédonius  est  rétablie,  ibid.  et  819.  Ses  let- 
tres à  Jean,  patriarche  de  Jérusalem,  et  à  Épi- 
phane,  évêque  de  Tyr,  pour  les  en  informer,  ibid. 
Il  accepte  le  formulaire  du  pape  Ilormisdas, 
ibid.  Ses  lettres  au  Pape,  ibid.  et  112.  Sa  mort,  p. 
112. 

JEAN  le  Scholastique,  patriarche  de  Constan- 
tinople, étant  prêtre  et  apocrisiaire  d'Antiocbe, 
compose  une  collection  de  canons  :  idée  de  cette 
collection,  p.  354,  355.  C'est  la  seule  faite  par  les 
Grecs  où  les  canons  du  concile  de  Sardique 
soient  insérés,  p.  355.  Il  est  ordonné  patriarche 
de  Constantinople  à  la  place  d'Eutychius.qui  refu- 
sait de  souscrire  ù  l'erreur  des  incorruptibles, 
p.  354.  Durée  de  son  pontificat,  ibid.  Sa  mort, 
p.  355.  Son  Nomocanon  :  ce  que  c'est,  ibid.  Sa  Ca- 
téchèse sur  la  Trinité  dont  parle  Photius,  ibid. 
Editions  qu'on  a  faites  de  son  Nomocanon  et  de 
sa  collection  des  canons,  ibid.  Voyez  le  Supplé- 
ment à,  la  lin  du  volume. 

JEAN  le  Jeûneur,  patriarche  de  Constantino- 
ple, succède  à  Eutychius,  p.  426.  Ses  austérités, 
ibid.  Il  prend  dans  un  concile  le  titre  d'évèque 
universel,  ibid.  et  430.  Ecrits  qu'on  lui  attribue, 
p.  427.  Il  convoque  un  concile  à  Constantinople 
au  sujet  de  Grégoire,  patriarche  d'Antiocbe,  et  s'y 
donne  le  titre  dévéque  universel,  p.  338.  Le  pape 
Pelage  II  casse  les  actes  de  ce  concile  ;  lettre  qu'il 
écrit  il  ce  sujet  à  Jean,  ibid.  et  339.  Lettre  que 
lui  écrit  saint  Grégoire,  p.  427.  Saint  Grégoire' 
le  qualiûe  d'heureuse  mémoire  après  sa  mort, 
p.  o07. 

JEAN  (saint)  l'Aumônier,  patriarche  d  Alexan- 
drie :  sa  vie  écrite  par  Léonce,  évéque  de  Naples 
en  Chypre,  p.  6.58.  Abrégé  de  cette  vie,  ibid.  et 
suiv.  Temps  de  sa  mort.  p.  699.  Son  testament, 
p.  601  et  099.  Il  sortait  de  son  tombeau  une  li- 
queur comme  d'un  parfum  précieux,  p.  662. 


952 


TABLE  ANALYTIQUE. 


JEAN,  archimandrite  à  Conslantinople,  consulte 
avec  le  diacre  Vénôrius  les  évêques  d'Afrique 
relégués  en  Sardaigne  au  sujet  des  livres  de 
Fausle  de  liiez  sur  la  prédestination  et  sur  la 
grâce,  p.  a.  Réponse  de  saint  Fulgence,  ibid.  et 
suiv. 

JEAN,  diacre,  porteur  de  la  Icllre  des  moines  de 
Scytliie  aux  évéques  d'Afrliiue,  p.  iô. 

JEAN,  prêtre  de  Cbalcédoine,  accusé  d'ensei- 
gner l'iiérésie  des  marcianisles,  est  justifié  dans 
un  concile,  p.  WT. 

JEAN  de  Scytliople,  scholastique.  Son  ouvrage 
contre  les  neslorieiis  et  les  eutycbiens  et  en  fa- 
veur du  concile  de  Cbalcidoine.  Jugement  quen 
a  porté  Pliotius,  p.  109,  110.  Basile  de  Cilicie  écrit 
un  dialogue  contre  cet  ouvrage,  p.  110;  il  accuse 
Jean  d'être  infecté  de  manichéisme  et  d'avoir 
réduit  le  carême  à  trois  semaines,  ibid 

JEAN  d'Egée,  pritrc  nestorien  (ou  plutôt  euty- 
chieni,  auteur  d'une  histoire  ecclésiastique  que 
nous  n'avons  plus,  p.  iiO.  Jugement  de  Pliotius 
sur  cette  histoire,  ibid. 

JEAN  I(sainl), pape,  succède  àHormisdas, p. ll'i. 
113.  Uestdépuléparler.  ilhéodorit  à  l'empereur 
Justin,  pour  l'engagera  révoquer  les  ordres  don- 
nés contre  les  ariens  et  leur  faire  rendre  leurs 
églises,  ibid-  11  rend  la  vue  à  un  aveugle,  p.  475. 
Réception  honorable  qu'on  lui  fait.  p.  112,  113.  11 
obtient  la  révocation  des  ordres  donnés  contre 
les  ariens,  p.  113.  A  son  retour,  Théodoric  le  fait 
arrêter,  et  il  meurt  dans  sa  prison,  ibid.  Les  deux 
lettres  que  nous  avons  sous  son  nom  sont  suppo- 
sées, ibid.  Lettre  que  lui  écrit  Cassiodore,  p. 
2i7.  Ce  que  raconte  de  lui  le  pape  saint  Grégoire 
dans  ses  Dialogues,  p.  475 

JEAN  U  (saint),  surnommé  Mercure, pape,  succède 
il  Vonifacell,  p.  116.  Lettre  que  lui  écrit  le  roi 
Atbalaric  au  sujet  de  ceux  qui  briguaient  les 
évêcbés,  ttiii.  Lettre  de  l'empereur  Jusiinien-,  ré- 
ponse du  Pape,  p.  lie,  117.  Lettre  du  Pape  aux 
sénateurs  romains,  pour  les  instruire  de  la  let- 
tre de  l'empereur  et  de  la  réponse  qu  il  y  avait 
faite,  p.  117,  118.  Lettre  à  saint  Césaire,  etc.,  au 
sujet  de  CoMluméliosus,  évêquc  de  lUez,  p.  118. 
Mort  du  pape  Jean,  ibid. 

JEAN  III,  pape,  succède  à  Pelage  l"',  p.  333;  il 
achève  l'église  des  apôtres  saint  Philippe  et 
saint  .lacques,  commencée  par  son  prédéce.«seur, 
ibid.  et  334.  Il  augmente  et  rétablit  les  cimetiè- 
res des  martyrs,  p.  334;  sa  mort.  ibid.  La  lettre 
aux  évêques  de  Germanie  et  des  Gaules,  qu'on 
lui  attribue,  est  une  pièce  supposée,  ibid.  Une 
lettre  adressée  à,  Édalde.  archevêque  de  Vienne, 
que  Jean  du  Rose  attribue  à  ce  Pape,  est  aussi 
supposée,  ibid.  Lettre  véritable  de  Jean  III  et 
son  exposé  sur  llleptateuque,  ibid. 

JE.\N  IV.  pape,  succède  au  pape  Séverin,  et  ne 
siège  qu'un  an,  neuf  mois  et  dix-huit  jours,  p. 
649.  Il  coiidaiiiiie  dans  un  concile  l'hérésie  des 
monotbéliles.  ibid.  Sa  lettre  à  l'empereur  Cons- 
tantin, lils  (l'IIéracllus,  où  il  fait  l'aiiologie  d'Ho- 
norius  et  combat  le  moiiothélisme,  ibid.  et  p.  fi50. 
Sa  lettre  .'i  Is.-iac,  évêque  de  Syracuse,  p.  050.  Edi- 
tion des  lettres  de  ce  Pape  dans  U  Palrol.,  ibid. 


JEAN,   créé  chancelier;  lettre  que    lui  écrit 
Cassiodore  pour  lui  notifier  sa  promotion,  p.  218. 
JEAN,  patrice.  Lettre  que  lui  écrit  le  pape  Pe- 
lage, p.  332. 

JEAN,  moine  scbismatique  à  Tyr,  anatbéma- 
tisé,  p.  820. 

JEAN,  moine  de  Marmoutier;  son  Histoire  de 
GeoOroi,  duc  de  Normandie,  imprimée  avec 
l'Histoire  des  Français  de  Grégoire  de  Tours,  p. 
398. 

JEAN,  sous-diacre  de  l'église  de  Ravenne;  let- 
tre que  lui  écrit  le  p.ipe  saint  Grégoire,  p.  442. 
JEAN,  évêque  d'Orviéto.  Lettre  que  lui  écrit  le 
pape  saint  Grégoire,  p.  4«i. 

JEAN,  évêque  de  Ravenne;  différentes  lettres 
quL'  lui  écrit  le  pape  saint  Grégoire,  p.  488.  Hon- 
neurs qu'il  prétend  être  attachés  à  son  siège;  ce 
que  saint  Grégoire  lui  écrit  à  ce  sujet,  ibid.  et  p. 
489.  Il  fait  un  testament  préjudiciable  à  son  égli- 
se, p.  503.  Sa  mort,  ibid. 

JEAN,  évêque  de  Larisse.  Sa  conduite  injuste  à 
l'égard  d'.\diien.  évêque  de  Tlièbes,  p.  490. 
JE.VN,  défenseur  de  l'Église  romaine,  p.  507. 
JEAN,  évêque  de  Scillitanc.  Lettre  que  lui  écrit 
le  pape  saint  Grégoire  sur  ce  qu'il  s'était  emparé 
de  quelques  bieus  du  monastère  de  Caslel,  p. 
512. 

JEAN,  évêque  à  qui  le  pape  saint  Grégoire  écrit 
pour  le  charger  de  ceux  qu'on  proposait  pour  l'é- 
vêché  d'Aiicône,  p.  534. 

JEA.N,  évêque   de  Corinthe.  Saint  Grégoire, 
pape,  lui  acocorde  l'usage  du  pallium,  p.  503. 
JEAN,  évêque  de  Gallipoli,  p.  493. 
JEAN,  évêque  de  Vellétri.  Le  pape  saint  Gré- 
goire lui  écrit,  p.  4S7. 
JEAN,  diacre  de  Tbèbes,  p.  490. 
JEAN,  évêque  de  Sorrcnto.  Le  pape  saint  Gré- 
goire lui  écrit,  p.  485. 

JEAN,  évêque  d'Antioche.  Le  pape  saint  Gré- 
goire lui  écrit,  p.  480. 
JEAN,  prêtre,  fait  une  donation,  p.  492. 
JEAN,  que  le  pape  saint  Grégoire  refuse  d'or- 
donner évêque,  parce  qu'il  ne  savait  pas  le  Psau- 
tier, p.  .503. 

JEAN,  consul.  Saint  Grégoire  le  Grand  lui  en- 
voie de  la  limaille  de  la  chaîne  de  saint  Pierre, 
p.  483. 

JEAN,  sous-diacre  de  l'Église  romaine,  envoyé 
à  Milan  par  saint  Grégoire  le  Grand,  p.  492. 

JE.VN.  évêque  de  Syracuse,  chargé  par  le  pape 
saint  Grégoire  de  prononcer  sur  les  plaintes  por- 
tées contre  Lucillus,  évêque  de  Malte,  p.  516. 

JEAN,  évêque  d'Eurie  en  Epire,  ses  entrepri- 
ses, p.  533,  534. 

JEAN,  abbé  de  Biclar,  p.  425,  426.  puis  évêque 
de  Girone.  p.  420.  La  règle  qu'il  avait  donnée  à 
ses  moines  est  perdue,  ibid.  Sa  chronique  abré- 
gée, ibid.  Ce  qu'on  y  trouve.  Éditions  quon  en 
a  faites,  ibid. 

JEAN,  évêque  de  Caorla  ou  Caprile.  scbisma- 
tique, p.  51ô.  Lettres  que  lui  écrit  le  pajie  saint 
Grégoire  sur  son  dessein  de  se  réunir  à  l'Église 
romaine,  ibid. 
JEAN,  évoque  delà  première  Justinienne dans 


TA1)1,K  ANALYTIUIH';. 


953 


rillyrio.  Saltit  Gn'^'nirn  conflrnin  son  ordination, 
p.  187;  le  coiislituo  vicain;  du  SaiiitSit'^u  dans 
la  province,  ihid. 

JEAN,  t^vi^que    do  .Iiislinianople ,  préside   au 
concile  de  Mopsiiosto  en  550,  p.  Hiui. 

JEAN(sainn  C.linKKiue.ablK'du  Moiit-Sinaï;  d'où 
lui  vient  le  siiriioni  de  Oliinaque  ;  il  écrivait  vers 
la  fin  du  w  siècle  ou  au  coiniiieiic ment  du  vu" 
sii^le,  p.  G7C.  Il  quitte  leaionde  à  l'it'ede  Uians, 
fait  profession  .^io  ans  au  Mont-Sinaï.ifcW.  Il  se  re- 
tire dans  le  désert.  Sa  manière  de  vivre,  p.  077. 
Il  prend  avec  lui  un  solitaire,  fait  des  leçons  de 
piété,  il'id.  Il  est  fait  ahlié  du  Mont-Sinaï  ;i  l'âge 
de  75  ans,  ibUI.  L'abbé  de  Uliailo  lui  écrit  pour  l'in- 
viter ;i  mettre  ses  pensées  par  écrit,  ihid.  Réponse 
à  la  lettre  de  l'abbé  do  Rlia'ite,  itnd.  etC78.  Il  se 
démet  du  gouvernement  et  retourne  clans  le  dé- 
sert :  sa  mort,  p.  078.  Analyse  de  l'ouvrage  de  saint 
Jean  Climaque  intitulé  Échelle  sainte,  ou  degrés 
potir  monter  au  ciel,  p.  678  et  suiv.  l"  degré,  du 
renoncement  au  momie,  p.  G7s,  G7ii;  2°  degré,  du 
détachement  de  toutes  choses,  p.  07i»;  3''  degré, 
de  la  retraite  du  mnnde,  ibid.  et  tîSO  ;  4"  degré, 
de  l'obéissance,  p.  GSo,  681;  5'  degré,  de  la  péni- 
tence, p.  G8I,  682;  e»  degré,  de  la  méditation  de 
la  mort,  p.  682  ;  7'' degré,  de  la  tristesse,  delà  péni- 
tenceetdes  larmes  saintes  qui  produisent  la  joie, 
ibid;  8^  degré,  de  la  douceur  qui  surmonte  la  co- 
lère, ibid.  et  683;  9'  degré,  du  souvenir  des  in- 
jures, p.  G83;  to^  degré,  de  la  médisance,  ibid.; 
11*  degré,  du  silence,  ibid.;  12'  degré,  du  men- 
songe, ibid.;  13»  degré,  de  la  paresse,  ibid.;  U"  de- 
gré, de  l'intempérance  de  la  bouche,  ibid.  et  G84  ; 
15»  degré,  de  la  chasteté,  p.  681  ;  lfi=  degré,  de 
l'avarice  et  de  la  pauvreté  volontaire,  ibid.  et 
685;  17"  degré,  de  l'insensibilité,  p.  685:  18''  de- 
gré, du  sommeil,  de  la  prière  et  du  chant  des 
psaumes  en  commun  ibid.;  19'  degré, delà  veille 
du  corps  et  de  l'esprit,  ibid.;W  degré,  de  la  ti- 
midité efféminée,  ibid.;  21°  degré,  de  la  vaine 
gloire,  ibid.;  22«  degré,  de  l'orgueil,  ibid.  et  686  ; 
23'  degré,  des  pensées  de  blasphème,  p.  686  :  24« 
degré,  de  la  douceur  et  de  la  simplicité,  ibid  ; 
25"  degré,  de  l'humilité,  ibid.;  26'  degré,  de  la 
discrétion,  ibid.  et  687;  27'  degré,  du  repos  du 
corps  et  de  l'âme,  p.  687,  688;  28'  degré,  de  la 
prière,  p.  688  ;  29«  degré,  de  la  paix  de  l'esprit, 
ibid  ;  30'  degré,  de  la  foi,  de  l'espérance  et  de  la 
charité,  ibid.  Lettre  de  saint  Jean  Climaque  aux 
pasteurs,  ibid.  Analyse  de  celte  lettre,  ibid.  et  suiv. 
Jugement  de  l'ouvrage  de  saint  Jean  Climaque, 
p.  GOO.  Editions  et  traductions  de  VÉchelle,  p. 
GÛl.  Commentaires  de  l'abbé  de  Ra'ilho  et  d'Klie 
de  Crète,  ibid.  Remarques  sur  le  commentaire 
de  l'abbé  de  Ra'itho,  p.  691,  692.  Edition  dans  la 
Patrologie,  p.  692. 

JEAN  (saint),  surnommé  le  Silencieux  :  ce  qu'on 
sait  de  sa  vie,  p.  277,  278.  Sa  vie  est  écrite  par 
Cyrille  de  Scylbople,  ibid. 

JE.AiN,  moine  d'Antioche,  auteur  d'une  histoire 
chronologique  dont  nous  n'avons  que  des  ex- 
traits, p.  699. 

JEAN  MOSCH,  surnommé  aussi  Eucrata.  His- 
toire de  sa  vie,  p.  700.  Temps  de  sa  mort,  ibid. 

XL 


Son  /•)■(*  .iiiiriliiel,  ibid.  Ce  qu'il  y  a  de  remar- 
quable dans  cet  écrit,  ibid.  et  suiv.  Editions  du 
l'rv  spirituel,  p.  703. 

JliAN,  évéque  de  Saragossc,  frère  de  Braulion, 
p.  126.  Sa  )nort,  ibid.  Ses  écrits  sont  perdus,  p. 
732. 

JEAN,  abbé  do  Réomé.  Sa  vie  écrite  par  un 
anonyme  et  retouchée  par  Jonas.  p.  617  et  737. 

JEAN,  évê(|ue  de  Philadelphie,  vicairedupape 
Martin  en  Orient,  p.  750.  Instructions  que  ce 
pape  lui  dcjiuie,  ibid. 

JEAN,  archevêque  de  Thessalonique,  souscrit 
au  vi"  concile  général,  p.  78G.  Son  discours  sur 
les  femmes  qui  portèrent  des  parfums  pour 
embaumer  le  corps  de  Jésus-Christ,  ibid.  et  787. 
Dialogue  entre  un  pa'ien  et  un  chrétien  :  autre 
ouvrage  de  Jean  que  nous  n'avons  plus,  p.  787. 
Éditions  du  discours  et  fragments,  ibid. 

JEAN  de  Nicée.  Son  Mémoire  sur  la  naissance 
de  Jésus-Christ,  ou  il  établit  l'usage  de  l'Église 
d'Occident  de  célébrer  la  fôte  de  Noël  séparé- 
ment de  celle  de  l'Epiphanie,  p.  810.  Idée  de  cet 
écrit:  il  est  appuyé  sur  des  faits  faux  ou  peu 
certains,  ibid. 

JEAN  dit  Philoponus,  à  cause  de  son  assiduité 
à  l'étude,  p.  650.  11  est  auteur  de  l'hérésie  des 
trithéites,  p.  651.  Temps  où  il  a  vécu,  ibid.  Ses 
écrits  :  son  commentaire  sur  l'ouvrage  des  six 
jours,  ibid.  Sa  dispute  sur  la  Pûque,  ibid.  Son 
livre  de  l'éternité  du  monde,  ibid.  Ses  écrits  sur 
les  traités  d'Aristote,  ibid.,  et  sur  d'autres  matiè- 
res profanes,  ibid.  et  652.  Ses  ouvrages  sont  per- 
dus, p.  652.  Théodose,  Conon  et  Eugène  combat- 
tent l'erreur  de  Philoponus  sur  la  résurrection 
des  corps,  ibid.  et  655. 

JEAN,  évéque  de  Lappa,  condamné  par  Paul, 
archevêque  de  Crète,  appelle  au  Saint-Siège,  p. 
782.  H  est  rétabli  par  le  pape  Vitalien,  ibid. 

JEAN  le  Chambellan.  Neuf  lettres  que  lui  écrit 
saint  Maxime,  abbé  de  Chrysopolis,  p.  767,  768. 

JEAN,  archevêque  de  Cyzique;  lettre  que  lui 
écrit  l'abbé  saint  Maxime  sur  la  nature  de  l'âme, 

p.  768. 

JEAN,  prêtre  à  qui  l'abbé  Maxime  écrit  une 
lettre  sur  la  nature  de  lame,  p.  768. 

JÉSUS-CHRIST.  Propriétés  de  ses  deux  natures, 
p.  17,  23,  24.  Deux  opérations  en  Jésus-Christ,  p. 
226.  Doctrine  de  saint  Fulgence  sur  Jésus-Christ, 
p.  17,23,24;deCassiodore,  p.  226,  215,246.  Précis 
de  la  vie  de  Jésus-Christ  par  saint  Grégoire 
de  Tours,  p.  3'2. 

JEUDI.  Superstition  du  jeudi  condamnée  dans 
le  concile  de  Narbonne  en  -'HO,  p.  904,  905. 

JEUDI-SAINT.  On  y  l.ivait  les  autels,  les  mu- 
railles et  le  pavé  de  l'église,  p.  718.  On  purillait 
les  vases  sacrés  et  on  faisait  le  saint  chrême, 
ibid.  On  lavait  les  tombeaux  des  saints  et  l'eau 
qui  avait  servi  guérissait  souvent  les  malades, 
p.  391. 

JEUNES.  Saint  Fulgence  prescrit  deux  jours 
de  jeûne  pour  chaque  semaine,  le  mercredi  et  le 
vendredi,  à  tous  les  clercs,  aux  veuves,  etc.,  p.  9. 
Jetines  de  l'Église  suivant  saint  Isidore  de  Se- 
ville,  p.  718.  Jeûne.s  des  moines ,  selon  la  règle 

62 


•J54 


TABLE  ANALYTIQUE. 


de  saint  Ciîsaire,  p.  \->i  ;  selon  elle  de  saint  He- 
noft,  p.  107,  1G8:  selon  le  2^  concil.'  de  Toiirs.  p. 
t«9.  Jcilues  prescrits  par  le  coiirile  de  MAcon 
avant  Koël,  p.  895.  Jcrtnes  praliqUL^^  dans  l'K- 
glise  au  temps  de  saint  Isidore  de  Scville,  p. 
718. 

JELX.  Défense  aux  évoques  de  jouer,  ou  de 
regarder  jouer  aux  dés,  p.  i.jS. 

JOB.  S'il  est  laulour  du  livre  qui  porto  son 
nom,  p.  552. 

JOBILS.  moine  d'Egypte,  écrivait  sous  le  règne 
de  Justinien.  p.  181.  Il  ne  nous  reste  rien  de 
son  traité  contre  Sévère,  patriarche  d'.Vntioche, 
ibid.  Son  traité  do  l'incarnation  du  Seigneur  di- 
visé en  douze  livres,  ibid.;  il  ne  nous  en  reste  que 
des  fragments;  ce  qu'ils  contiennent  de  consi  • 
dérablc,  ibid.  et  suiv.  Autres  fragments,  p.  185. 
Tous  sont  édités  dan»  la  Pairologic.  ibid. 

JONAS,  moine  de  Bobio,  p.  Cl".  Il  écrit  la  vie 
de  saint  Colomban,  p.  613;  ccllrs  des  saints  .U- 
tale  et  Bertulfe,  abbés  de  Bobio,  et  d'Eusiase 
abbé  de  Luxcuil,  p.  Ci7. 

JOSEPH  îsaint),  époux  de  la  sainte  Vierge,  tra- 
vaillait a  des  ouvrages  en  fer,  il  4i5. 

JOSEPH,  juif,  se  plaint  à  saint  Grégoire  le 
Grand  de  1  évOquc  de  Terraciue,  p.  483. 

JOURDAIN.  Lépreux,  guéris  dans  l'endroit  du 
Jourdain  où  le  Sauveur  fut  baptisé,  p.  373. 

JUD1CATL.M  ou  semence  du  pape  Vigile  contre 
les  Trois-Chapitrcs  s^ns  préjudice  du  concile  de 
Chalcédoine,  p.  8G2.  8G5.  Scandale  qu'il  occa- 
sionne; Vigile  retire  son  Judicatum,  ibid.  et  866. 
et  875.  Voyez  le  Supplément.  Caractère  de  la  dis- 
cussion des  Trois-Chapilres,  p.  917  et  suiv. 

JUGE  (un)  n'est  digne  de  ce  nom  qu'autant 
qu'il  observe  les  lois  de  la  justice  d'où  il  le 
lire,  etc,  p.  2U. 

JUGEMENTS  ECCLÉSIASTIQUES.  Régies  de 
procédure  d'après  saint  Grégoire-le-Grand,  p. 
032.  Comment  les  évèques  ,  les  clercs  et  les  moi- 
nes doivent  être  jugés  suivant  la  loi  de  Justi- 
nien, p.  259,  -260. 

JUIFS.  L'cinpercur  Justinien  leur  permet  de 
lire  la  Bible  en  hébreu  et  en  latin  suivant  l'hé- 
breu, etc..  p.  201.  Défense  à  eux  d'avoir  des 
femmes  ou  des  concubines  chrétiennes,  et  des 
esclaves  chrétiens,  etc.,  p.  902.  Le  concile  de 
Karbonne,  en  589,  défend  aux  juifs  d'enicrrer 
leurs  morts  au  chant  des  psaumes,  p.  904.  Il  ne 
faut  pas  forcer  les  Juifs  à  recevoir  le  baptême 
p.  484;  ils  doivent  Cire  convertis  par  douceur,  p. 
483.  Saint  Grégoire  tache  de  les  gagner  en  les  dé- 
chargeant dos  impôts,  p.  48S;  il  leur  fait  rendre 
une  synagogue,  p.  512,  513.  Il  bl;\me  le  zèle  indis- 
cret d'un  Juif  converti  contre  cu\,ifti(MI  fait  don- 
ner aux  Juifs  de  l'alerme  le  prix  des  synagogues 
et  autres  bâtiments  cl  terrains  qu'on  leur  avait 
enlevés,  p.  515.  Saint  Grégoire  veut  qu'on  leur 
laisse  le  libre  exercice  de  toutes  leurs  cérémo- 
nies, p.  530.  il  est  défenrlu  aux  Juifs  d'exercer 
aucune  charge  ou  fonction  publique  sur  les  chré- 
tiens, s'ils  ne  veulent  pas  recevoir  le  baptême, 
p.  U13.  11  leur  est  défendu  d'avoir  des  esclaves 
chrétiens,  p.  481  et  495.  Lelirs  synaiîogues  no 


doivent  pas  être  voisines  des  églises,  p.  480.  Plu' 
sieurs  Juifs  convertis,  p.  138  et  baptisés  hors  le 
temps  des  jours  solennels  du  baptême,  ibid.  Deux 
livres  de  saint  Isidore  de  Séville  contre  les 
Juifs,  p.  71j,  716.  Traité  do  saint  Julien  de  To- 
lède pour  prouver  contre  eux  que  le  Messie  est 
venu.  p.  793,  794. 

JULES.Sa  lettre  à  Prosdoce  est  supposée,  p. 287. 

JULIEN  (saint),  martyr  à  Brioude,  p.  375;  ses 
miracles,  ibid. 

JULIEN  (saint),  premier  abbé  de  Maire;  sa  vie 
écrite  par  Auremond,  p.  693. 

JULIEN  (saint),  archevêque  de  Tolède  en  680 
après  Qiiiricius,  meurt  en  69o,  p.  791.  Ses  écrits, 
ibid.  et  suiv.  Son  traité  des  Pronostics,  c'est- 
à-diro  de  la  considération  des  choses  futures, 
ibid.  et  suiv.  Analyse  de  cet  ouvrage,  p.  792, 793  ; 
son  traité  du  vi=  âge,  pour  prouver  contre  les 
Juifs  que  le  Messie  est  arrivé,  p.  793,  794;  son 
histoire  de  la  guerre  de  Wamba,  p.  794.  Ou- 
vrages de  saint  Julien  qui  sont  perdus,  ibid. 
Comm'Milaire  sur  le  prophète  Nahum ,  que  Ca- 
nisius  lii  attribue,  ibid.  Différents  conciles  aux- 
quels saint  Julien  a  assisté,  p.  795.  Jugement 
sur  sa  manière  d'écrire,  ifci<i.  Il  écrit  la  vie  de 
saint  Ildefonse,  l'un  de  ses  prédécesseurs,  p. 
773  et  79G.  Éditions  des  oeuvres  de  saint  Ju- 
lien d'après  Lorenzana  reproduite  dans  la  Pa- 
7rtolOgie,  p.  675,  079. 

JULIEN,  évêque  d'Halicarnasse  :  ce  qu'on  sait 
des  circonstances  de  sa  vie.  p.  314.  Il  est  regardé 
comme  le  chef  de  la  secte  des  incorruptibles, 
ibid.;  son  commentaire  sur  Job  dont  il  ne  reste 
que  quelques  fragments,  ibid.  et  345. 

JULIENNE,  abbesse  du  monastère  deSaint-Viie, 

p.  485. 

JU.MEAUX  (les  trois)  martyrs  honorés  à  Lan- 
gres,  p.  031.  Leurs  actes  falsifiés,  ibid.  Voyez  le 
volunie  XIII. 

JUNILIUS,  évêque  d'Afrique.  Son  ouvrage  in- 
titulé :  Des  parties  de  la  loi  divine,  p.  281.  Ana- 
lyse de  cet  ouvrage,  ibid.  et  suiv.  Jugement  de 
cet  ouvrage,  p.  2S3.  Éditions  qu'on  en  a  faites, 
p.  281,  note  1. 

JUSTE,  évêque  d'Urgol.  Son  commentaire  sur 
le  Cantique  des  Cantiques,  p.  2G4.  Éditions  qu'on 
en  a  faites,  p.  205.  La  kltre  au  pape  Sergius 
sous  son  nom  est  supposée,  ibid.  II  y  en  a  une 
autre  à  Juste  diacre,  ibid. 

JUSTE,  religieux,  propriétaire,  comment  puni 
par  saint  Grégoire-le-Grand,  p.  432. 

JUSTE,  diacre,  engage  Juste,  évêque  d'Urgel,  à 
composer  un  commentaire  sur  le  Cantique  des 
Cantiques,  p.  265. 

JUSI'E,  moine,  envoyé  en  Angleterre  par  saint 
Grégoire,  p  438.  Devenu  évêque  de  Rochesler,  il 
est  obligé  de  se  retirer  en  Gaule  et  est  ensuite 
rappelé,  p.  914.  Il  devient  archevêque  de  Can- 
torbéry  :  lettre  que  lui  écrit  le  pape  Boniface  en 
lui  envoyant  le;)a//iMm,  ^i.  640. 

JUSTE,  disciple  dllellatlius.  évêque  de  Tolède, 
souscrit  !i  un  concile  do  Tolède,  p.  079;  sa 
leltie  !i  Richjlan,  abbé  du  monastère  d'Agali. 
ibid. 


TABLE  ANALYTIQUE. 


953 


JUSTIN,  beau-frère  de  saintGrégoire  de  Tours, 
p.  ;î78. 

JUSTIN  LE  JEUNE,  empereur,  envoie  à  sainte 
Radegonde  un  inorcoau  considérable  de  l.i  vraie 
croix,  p.  lu.  Saint  l'urtunat  fait  un  poi'wne  en 
son  honneur  ifciV/.;  il  fait  b:\tir  une  église  sur 
le  mont  Sinaï  sous  l'invocation  de  la  sainte 
Vierge. 

JUSTIN,  préteur  de  la  Sicile:  un  des  devoirs 
de  sa  cliarge  était  d'envoyer  la  provision  d;;  blé 
à  liome,  p.  480. 

JUSTIN1.\NÉE  (lapremière).  L'empereur  Jusli- 
nicn  y  établit  un  évCclié  avec  la  qualité  de  métro- 
pole, p.  -207. 

JUSTINIEN,  évèque  de  Valence  en  Espagne; 
son  ouvrage  contenant  des  réponses  aux  ques- 
tions d'un  nommé  Rustique,  p.  263. 

JU.STINIEN,  empereur, sa  naissance, p. 23 l.Ouel- 
ques-uns  le  donnent  pour  aïeul  de  saint  Benoît, 
mais  cette  opinion  est  insoutenable.  Après  avoir 
passé  par  les  dignités  de  maître  de  la  milice,  de 
consul  et  de  pairice,  l'empereur  Justin,  son 
oncle,  le  déclare  Auguste  et  le  fait  couronner, 
p.  254;  il  lui  succède  à  l'empire.  Idée  de  son  gou- 
vernement, ibid.  Pourquoi  on  le  met  au  nombre 
des  écrivains  ecclésiastiques,  ibid.  et  253.  Son 
corps  du  droit,  p.  î.35.  Ses  novelles;  ce  qu'elles 
contienueiu  de  remarquables,  ibid.  et  suiv.  Ce 
qu'il  y  a  de  remarquable  dans  le  code  sur  les 
m:itières  ecclésiastiques,  p.  261,  262.  Ce  qu'il  fait 
au  sujet  du  carême,  p.  2C2.  Édit  de  Justinien 
contre  Origène,  p.  203:  autre  pour  la  condamna- 
tion des  Trois-Cliapitres,  ibid.  Reproches  que  lui 
ont  faits  les  historiens  du  temps,  ibid.  Il  tombe 
dans  l'erreur  des  incorruptibles,  ibid.  Lettre  que 
lui  écrit  à  ce  sujet  saint  Nicétius,  évèque  de  Trê- 
ves, p,  204.  Justinieu  est  réfuté  par  Léonce  de  By- 


zance,  p.  6C9.  Justinien  fait  brûler  les  écrits  do  Sé- 
vère de  Sozoph.',  faux  patriari;lie  irAntfoche,  p.  108. 
Sa  mort,  p.  263.  l'jliiiun  des  écrits  ecclésiastiques 
de  Ju^linien  dans  la  l'alrologic,  p.  2G:j.  —  Sa 
lettre  au  pape  Jean  11:  iuifaitsa  profession  de  foi 
en  l'informant  de  quelques  hérésies  qui  conti- 
nuaient en  Orient,  p  1)6.  lléponsedu  l'ape,  p.  117. 
Lettre  de  l'empereur  au  pape  saint  Agapel  et  ré- 
ponse du  l'ape,  p.  118,  119.  Réception  que  Justi- 
nien fait  à  ce  pape  ^enu  à  Coiislantinople  de  la 
paît  de  Théodat  pour  le  détourner  de  porter  la 
guerre  en  Italie,  p. J20, 121.  11  donne  des  ordres 
pour  le  rétablissement  de  Sylvérius,  p.  193.  Let- 
tre qu'il  écrit  à  Vigile,  réponse  qu'il  en  reçoit, 
p.  194.  Lettre  que  lui  écrit  Cassiodore  au  nom 
du  sénat  romain,  p.  218.  Lettre  que  lui  écrit  Pon- 
tien,  évèque  d'Afrique,  sur  l'affaire  des  Trois- 
Chaiiilres,  p.  198.  Avis  qui  lui  sont  donnés  par 
Agapet,  diacre  de  Constantinople,  p.  266.  Son 
écrit  contre  les  Trois -Chapitres  réfuté  par  Fa- 
cundus,  évèque  d'IIermiane,  p.  285.  Il  met  Euty- 
chius  sur  le  siège  de  Constantinople  et  le  fuit  en- 
suite déposer,  p.  353.  Il  procure  une  confé- 
rence entre  les  catholiques  et  les  sèvèriens,  p. 
843.  Loi  par  laquelle  il  confirme  le  jugement 
porté  contre  les  sévériens  par  le  concile  de  Cons- 
tantinople, p.  835.  Il  assemble  le  second  concile 
général  de  Const.iutinople  pour  condamner  les 
Trois-Chapitres,  p.  868.  Sa  lettre  au  concile  dans 
la  première  conférence,  ibid.  et  869.  Sa  lettre  por- 
tant ordre  d'ùier  des  diptyques  le  nom  du  pape 
Vigile,  p.  876.  Loi  qu'il  accorde  à  ce  Pape  en  fa- 
veur de  l'Italie,  p.  880,  881.  Son  cdit  contre  Ori- 
gène,  p.  881.  Il  fait  bâtir  une  église  sur  le  mont 
Sina  en  l'honneur  delà  sainte  Vierge,  p.  4S7. 

JU VÉNAL  isaiul),  apparaît  à  Probus,  évèque  de 
Riéti,  au  moment  de  sa  mort.  p.  478. 


K. 


KYRIE  ELEISON.  Saint  Grégoire  le  fait  chan- 
ter à  la  messe,  p.  314.  Le  concile  de  Vaison  or- 


donne qu'on  dira  cette  prière  à  matines,  i  la 
messe  et  à  vêpres,  p.  83s,  839. 


LACTANCE,  prêtre,  porteur  d'une  lettre  de  saint 
Nicétiusde  Trêves  à  l'empereur  Justinien,  p.  204. 

LAMPÉCIUS,  prêtre  massalien,  p.  106. 

LAMPES  perpétuelles,  p.  234. 

LANCE  dont  Jésus-Christ  eut  le  côté  percé.  On 
la  montrait  à  Jérusalem  sur  la  Un  du  vii=  siécie, 
p.  373. 

LANDAFF.  Conciles  de  Landaff  vers  560,  p.  884, 
885. 

LANGUE  coupée. .Vnaslase,apocrisiaire  de  Rome, 
parlait  très-distiuclement,  quoiqu'il  eût  la  lan- 
gue coupée  jusqu'à  la  racine,  p.  772 

LANGUES  coupées  à  des  confesseurs  qui  ne  lais- 
sent pas  de  parler,  p.  302. 

LANDRl,  évèque  de  Paris.  Marculfe  lui  adresse 
sesiormules,  p.  739 

LANTFIUDE,  prêtre  et  abbé  en  Bavière,  à  qui 


Ambroise  Autpert  adressa,  dit-on,  un  de  ses  écrits, 

p.  725. 

LANTTLDE.  sœur  de  Clovls.  SaintRemi  lui  fait 
abjurer  l'arianisme,  p.  79. 

LAURE  «le  Saint-Sabas,  p.  272. 

LAURE.N'T  (saint .  Ses  reliques,  p.  492. 

LAURENT  II,  évèque  de  Milan,  présente  au 
pape  Bonose  sa  profession  de  f  ji  pour  la  condam- 
nation des  Trois-Chapilres.  p.  4:12.  Excommuni- 
cation lancée  par  cet  évèque  et  levée  par  saint 
Grégoire.  Mort  de  Laurent,  ibid. 

LAURENT;  évèque  de  Novare,  écrivain  du  vi' 
siècle.  Ce  qu'en  dit  Sigebert  de  Gemblours,  p.  95, 
96.  Margariu  de  la  Bigne  prétend  que  de  No- 
varre  il  fut  transféré  au  siège  de  Milan  et  que 
c'est  de  lui  qu'il  faut  entendre  les  èlugcsd'Ennodc, 
p.  96.  Ses  homélies,  ibid.;s\iv\a  pénitence,  ibid. 


956 


TABLE  A^'ALYTIQUK. 


et  97:  sur  l'aumône  p.  W7;  sur  U  Chaiianée,  p.  08. 

LALUUNT,  évOque  de  Centumcclle.  Le  pape 
Pelage  1  lui  Ocrit,  p.  533. 

LALREXT,  arcbidiacre  de  l'Église  romaine,  de- 
posé,  p.  531. 

LAURENT,  missionnaire  d'Angleterre,  p.  438 
et  521;  depuis  arclievi^que  de  Canlorbéry,  après 
la  mort  de  saint  Augustin,  liche  de  ramener  les 
Bretons  et  les  Écossais  à  l'unité  catholique,  xbid. 
et  p.  910,  911.  11  convertit  le  roi  Edbald,  p.  91 1. 
Sa  mort,  iiid. 

LÉAXDUE  (saint),  évoque  de  Séville  vers  l'an 
582,  p.  422;  convertit  Ilerméncgilde,  ibid.  ;  est 
envoyé  ambassadeur  à  Constantinople-,  y  lie  ami- 
tié avec  saint  Grégoire,  depuis  pape,  ibUi.  et  423; 
il  est  envoyé  en  exiL  p.  423;  il  préside  au  con- 
cile de  îûléde  en  58J.  Son  discours  après  la  tenue 
de  ce  concile,  iftid.  11  préside  au  concile  de  Séville 
en590,  i6i(i.;il  meurt  en  603,  iftid.  Sesécrils,  ibid. 
ses  ouvrages  contre  les  ariens,  plusieurs  letlres;ses 
écrits  sur  la  liturgie  sont  perdus,  ibid-;  sa  lettre 
à  Florentine  sa  sœur,  p.  423  et  suiv,  ;  son  dis- 
cours sur  la  conversion  des  Goths,  p.  4î.'>.  Saint 
Grégoire  compose  à  la  prière  de  saint  Léandrc 
ses  Explications  morales  sur  Job,  p.  432;  il  lui 
envoie  le  l'allium,  p.  518. 
LECTURES  des  moines  selon  saint  Benoît,  p. 

165,  16G. 

LÉGER  ouLÉODEGÂlRE{sainl),évêqued'Autun. 
Sa  naissance,  son  éducation.  Il  entre  dans  le  clergé; 
il  est  fait  abbé  de  saint  Maixcnt,  p.  780  :  il  devient 
évfique  d'Aulun  en   658  ou  659,  ibid.   Après  la 
mort  de  Ciotaire  III,  il  se  déclare  pour  Childé- 
ric,  qui  d'abord  lui  donne  sa  conûance,  puis  le 
fait  enfermer  au  monastère  de  Luxeuil,  ibid.  Il 
sort  de  ce  monastère  avec  Ébroïn,  qui  devenu 
maire  du  palais  sous  Théodoric,  lui  fait  couper 
la  tête,  p.  780,  781.  Lettre  i  Sigrade  sa  mère,  au 
sujet  de  la  mort  de  Gairin,  son  frère,  p.  781.  Ses 
statuts,  i6i(i.;  son  testament,  ibid.  Sa  vie  écrite  par 
unanonyme,  moine  de  Saint-Syinpliorieii,  par  Ur- 
sin.abbéde  Ligugé.et  par  un  autre  anonyme, p.8U. 
LÉOBARD  (saint),  moine.  Saint  Grégoire  le  dé- 
tourne de  changer  de  demeure,  p.  382,  383. 
LÉoBAT  (saint),  abbé,  p.  .■i82. 
LÉOCADIE,  aïeule  de  saint  Grégoire  de  Tours, 
p.  363. 

LÉON,  archevCque  de  Sens,  résiste  au  roi  Cliil- 
debcrl,  p.  202. 
LÉON,  évéque  d'Agde,  p.  394. 
LÉON,  évoque  de  Catane,  p.  488, 506. 
LÉON  (saint),  pape.  Saint  Euloge'cntreprcml  la 
défense  de  la  lettre  de  saint  Léon  à  Flavien,  p. 
500.  Histoire  louchant  cette  lettre  rapportée  par 
Jean  Mosch,  p.  ,'i93. 

LÉON  II  (saint),  pape,  succède  à  saint  Agathon, 
p. 781,  Pourquoi  son  élection  fut  différée,  ibid.  Sa 
lettre  à  l'empereur  Constantin,  ibid.  Il  analhéma- 
tisc  Théodore  de  l'Iiaran,  Cyrus,  Pyrrhus,  Paul  et 
Pierre  de  Constanlinople,  et  encore  Ilonorius, 
ibid.  Lettre  du  pape  Léon  aux  évéques  d'Espagne, 
ibid.;  a  Quiricius,  archevêque  de  Tolède,  ibid. ; 
&  un  comte  nommé  Simplicc,  ibid.  ;  à  Ervigo,  roi 
desVisIgolhs,  p.  785,  Jugement  sur  ce  Pape.  Ses 


lettres  dans  ^a  Patrologie,  d'après  Mansi,  ibid. 
LÉON,  évéque  de  Sens.  Lettre  que  saint  Rémi 
de  Reims  lui  écrii,  p  81,  Il  assiste  au  3'  concile 
d'Orléans,  p,  202.  Sa  lettre  au  roiChildeberl  par 
laquelle  il  refuse  de  consentir  à  l'érection  de 
Melun  en  évéché,  ibid.  Temps  de  sa  mort,  ibid. 
LÉON,  évéquc  d'Agde,  réclame  contre  une  usur- 
pation des  biens  de  son  église,  p,  3Di. 

LÉON,  évèque  de  Catane.  Lettre  que  lui  écrit 
saint  Grégoire  le  Grand,  p  .506. 

LÉON,  évéque  en  l'.orse.  Saint  Grégoire  le  Grand 
lui  écrit,  p,486. 

LÉONCE,  évoque  de  Bordeaux,  préside  au  4« 
concile  d'Orléans,  en  511,  p.  859  et  suiv.  U  assiste 
au  21^  concile  de  Paris,  p,  882,  Il  préside  à  un 
concile  tenu  a  Saintes  pour  déposer  l'évéque 
Émériiis,  p.  886.  Chariberl  désapprouve  ce  pro- 
cédé et  lui  fait  payer  une  grosse  amende,  p.  887. 
LÉONCE,  évêque  de  Naples  en  Chypre,  Doris- 
sait  sous  les  empereurs  Maurice  et  Pbocas,  p. 
658,  Ses  écrits.  11  est  auteur  de  la  Vie  de  saint 
Jean  l'Aumônier,  ibid.  Ce  qu'il  y  ade  remarquable 
dans  cette  Vie,  ibid.  et  suiv.  Vie  de  saint  Siméon 
Salus  par  Léonce,  p.  662,  Abrégé  de  cette  Vie, 
ibid.  Autres  ouvrages  de  Léonce,  Discours  sur  la 
Transfiguration.  Apologie  des  chrétiens  contre 
lesJuifs,  p.  663et  suiv.  Discours  surle  saint  vieil- 
lard Siméon,  p.  605,  Discours  sur  la  Mi-PentecOte, 
ibid.  Discours  sur  l'aveuglc-né,  p.  C66.  L'histoire 
des  Révolutions  arrivées  de  son  temps  n'est  pas 
de  lui,  ibid.  Les  quatre  discours  attribués  par 
Lambécius  i"!  Léonce  de  Byzance  sont  vraisembla- 
blement de  Léonce  de  Naples,  p.  673. 

LÉONCE  DE  BYZANCE,  différent  de  Léonce 
rorigéniste,  exerce  la  profession  d'avocat  et  se 
fait  moine.  Il  écrivait  probablement  dans  le  com- 
mencement duvii'  siècle,  p,  666,  607.  Édition  des 
écrits  de  Léonce  dans  la  Patrologie,  p.  667.  Son  li- 
vre des  Sectes.  Différentes  éditions.  Analyse  de 
l'ouvrage,  ibid,  et  suiv.  Trois  traités  contre  Nes- 
lorius  et  Eutychès,  p.  669,  670.  Traiié  contre  les 
fraudes  des  apoUinaristes,  p.  670.  Ses  Solutions 
des  arguments  de  Sévère,  ibid.  et  671  ;  sfs  dotttes 
liijpothéiiques  contre  ceux  qui  nient  les  deux 
natures,  p.  671.  Ouvrages  de  Léonce  qui  ne  sont 
pas  venus  jusqu'à  nous,  p.  671,  672.  Jugement  de 
ses  écrits,  p.  672,  Quatre  discours  attribués  à 
Léonce  de  Byzance  par  Lambécius.  sont  proba- 
blement de  Léonce  de  Naples,  p,  673.  Édition 
complète  des  œuvres  de  Léonce  dans  laPafrofo- 
gic.  p.  673.  Discours  sur  saint  Jacques,  ibid,  Frag- 
ments d'après  .Mai,  ibid.  Recueil  de  Léonce  et  de 
Jean  sur  les  choses  sacrées,  ibid. 

LÉONTIA,  femme  dî  l'empereur  Phocas,  p.  440. 
Saint  Grégoire  lui  écrit,  p  531. 

LÉONTIUS,  évèque  d'Arabisse.  Son  discours 
intitulé  de  la  Cràation  et  du  Lazare  ressuscité, 
p.  iviô. 

LÉONTIUS,  moine,  combat  l'hérésie  des  Trl- 

théiies,   p.  65:1.  L'ouvrage   qu'il    écrivit  contre 

celte  hérésie  n'est  pas  venu  jusqu'il  nous,  ibid. 

LÉOPARUIS,  évéque  de  Tours,  p.  61,5. 

LÉPREUX,  b'après  le  5' concile  dOrléflls,  les 

évoques  doivent  prendre  un  soin  particulier  des 


TABLE  ANALYTIQUK. 


957 


pauvres  K^preux,  p.  «01.  Ce  que  prescrit  le  3" 
concile  lie  Lyon,  p.  89j. 
LliRiUA.  Concile  île  l.ériilaen  5î.l,p.824  etsuiv. 
LliTTHIîS  humaines.  Cassiodore  en  conseille  ia 
lecture  b.  ses  moines,  p.  233. 

LIÎTTIUCS  paciliiiues.  Di^fonsc  aux  abbi5s,  aux 
reclus  et  aux  prtMrosden  donner,  p.  8lK.  Défense 
de  donner  la  communions  un  prêtre,  ou  à  un  dia- 
cre qui  voyage  sans  avoir  des  lettres  de  son  évo- 
que, p.  811. 

LEL'BOUERE,  abbesse  de  Sainte-Croix  de  Poi- 
tiers, succède  à  Agnès  ;  elle  est  persécutée  par 
Chrodiclde  et  Basine,  p.  005.  Elle  est  mainte- 
nue par  les  conciles  de  Poitiers  et  de  Metz, 
p.  905  et  suiv. 

LEL'D  VSTE.  comte  de  Tours,  vexe  les  églises  et 
le  peuple,  p.  895.  Sur  les  plaintes  de  saint  Gré- 
goire de  Tours,  il  est  dépouillé  de  sa  charge 
par  le  roi  Cliilpéric.  Il  calumnie  saint  Grégoire 
qui  se  justifie  au  concile  de  Braino,  p.  3G9.  Leu- 
daste  est  excommunié  dans  ce  concile,  p.  39i  et 
895. 

LEUDÉGÉSILE  (le  duc),  fait  mourir  Sagittaire, 
évoque  de  Gap,  p.  894. 

LELFRÈDE,  évêque  de  Cordoue.  Lettre  que 
lui  écrit  saint  Isidore  de  Séville  sur  les  fondions 
des  ministres  ecclésiastiques,  p.  720. 
LEL'P.V^RIC,  prêtre,  p.  .'lûG. 
LÉVIGILDE,  roi  des  Visigoths  en  Espagne,  p. 
42-2  :  persécute  les  catholiques,  p.  369,  422  et  423; 
fait  mourir  son  fils  Herménégilde  ;  envoie  en 
exil  saint  Léandre,  évèque  de  Séville,  p.  423.  Sa 
mort  en  587,  p.  371  et  423. 

LIBÉRAI,  diacre  de  Carthage,  défenseur  des 
Trnis-Chapilres.  Ce  qu  on  sait  des  circonstances 
de  sa  vie  ;  ses  voyages,  p.  303.  Analyse  de  son 
Breviarium  ou  abrégé  de  l'histoire  de  Nestorius 
et  d'Eutychès,  ibid.  etsuiv.  Éditions  qu'on  en  a 
faites,  p.  305. 

LIBÉRÂT,  diacre  ambitieux.  Saint  Grégoire  or- 
donne àJanvier,  évêque  de  Cagliari, de  réprimer 
l'ambition  de  ce  diacre,  p.  485. 

LIBÉRÂT,  primat  de  la  Byzacène,  préside  à  un 
concile  tenu  à  Junqne,  p.  828.  Lettre  synodale 
qu'il  écrit  i  BonifacedeCarthage,îftirf.et83l.  Il  re- 
fuse de  reconnaître  lu  primauté  de  l'évèquedeCar- 
tbage,  p.  829.  Concile  tenu  à  ce  sujet,  p.  830  et  suiv. 
Plaintes  formées  contre  lui  par  l'abbe  Pierre,  p.  830. 
LIBERE,  patrice  et  préfet  des  Gaules,  fait  bâ- 
tir une  église  à  Orange,  en  fait  faire  la  dédicace, 

p.  832. 

LIBERTIN  [saint;,  prévôt  de  Fondi,  se  rend  cé- 
lèbre par  sa  patience,  p.  473. 

LIBRE  ARBITRE.  Sentiment  des  évèques  d'A- 
frique sur  le  libre  aibitre,  p.  46;  de  saint  Ful- 
gence,  p.  52,  59;  de  Cassiodore,  p.  251.  Du 
2':  concile  d'Orange ,  p.  833  et  suiv.  ;  de  saint 
Grégoire  le  Grand,  p.  562.  Avant  la  grâce,  il  y  a  un 


libre  arbitre  dans  l'homme,  mais  il  n'est  pas  bon, 

parce  qu'il  n'est  pas  éclairé,  etc  ,  p.  42.  La  grâce 
ne  détruit  pas  le  libre  ailiitre,  elle  le  guérit;  elle 
ne  rote  pas,  mais  elle  le  corrige,  etc  ,  p.  47. 

LICINII;N,  secrétaire  de  saint  Césaire  d'Arles, 
l'accuse  devant  le  roi  Alaric.  p.  |20. 

LICIMEN,  évêque  de  Cartliagène,  ses  écrits,  p. 
428.  11  écrit  à  saint  Grégoire  au  sujet  de  son  Pas- 
toral, p.  428  et  490. 

LITANIES.  Saint  Grégoire  ordonne  aux  évè- 
ques de  Sicile  d'indiquer  deux  litanies  ou  pro- 
cessions par  semaine,  p.  524. 

LITURGIE  de  saint  Germain,  évêque  de  Paris, 
p.  308.  Analyse  de  cette  liturgie,  p.  308  et  suiv. 
Quelques  cérémonies  (le  lalituri;ie  rapportées  par 
.inastase  Sinaïte,  p.  606.  Liturgie  niozarabique 
attribuée  à  saint  Léandre  et  i  saint  Isidore,  évo- 
ques de  Séville.  p.  423.  Explications  allégoriques 
des  cérémonies  de  la  liturgie,  par  saint  .Maxime, 
p.  770.  Éditions  de  ces  explications,  ibid. 

I.IVI.N'  (saint),  apôire  du  Brabant.  passe  d'iliber- 
nie  dans  la  Gaule  Belgique,  et  s'établit  dans  le 
monastère  de  Gand,  p.  741  ;  son  martyre,  ibid.  Il 
fait  en  vers  élégiaques  lépitaphe  de  saint  Bavon, 
ibid.  Lettre  en  vers  qu'il  éciilà  l'abbé  Florbert, 
en  lui  envoyant  cette  épitaphe,  ibid.  Sa  vie  par 
Boniface,  auteur  contemporain,  p. 712. 

LOMBARDS.  Peuples  barbares  qui  vinrent  éta- 
blir dans  l'Italie  une  nouvelle  monarchie,  p.  435. 
Ils  causent  de  grands  maux  â  l'Italie,  ibid.  Saint 
Grégoire  procure  la  pais  avec  les  Lombards  en 
599,  p.   138  et  439. 

LUBl.N  (saint),  évêque  de  Chartres;  assemblée 
oti  il  se  trouve,  p.  882.  Sa  vie  écrite  par  un  clerc 
de  son  église  et  non  par  Fortunat,  p.  412. 

LUCIE.N,  prêtre,  tiouve  les  reliques  de  saint 
Etienne  et  en  fait  une  relation,  p.  98. 

LUCIUS  CHARINUS.  Son  livre  intitulé  les 
Voyages  des  Apôtres,  p.  643.  Ce  qu'en  dit  Pho- 
tius,  ibid.  et  644. 

LUCU.LE,  évêque  do  Malte,  accusé  de  crimes. 
Saint  Grégoire  lui  écrit,  p.  488.  Ce  pape  commet 
Jean  de  Syracuse  et  quatre  autres  évèques  pour 
le  juger,  p.  5i6.  Lucille  est  déposé,  p.  518. 

LUCRÈCE,  évêque  de  Die.  Saint  Ferréol,  évê- 
que d'Uzès,  lui  adresse  sa  Règle,  p.  312. 

LUCRÉTIUS,  archevêque  de  Brague,  tient  un 
concile  en  cette  ville  en  563,  p.  885. 

LUMIXOSUS,  abbé,  p.  488. 

LL'PICIN  (saint),  abbé,  p.  3:9. 

LUPICI.X  (saint),  différent  du  premier.  Sa  vie 
écrite  par  saint  Grégoire  de  Tours,  p.  381. 

LLXEU  ou  LUXEUIL.  Monastère  fondé  par  saint 
Colomban,  p.  613. 

LYO.\.  Concile  assemblé  en  cette  ville  au  sujet 
de  l'inceste  commis  par  un  nommé  Etienne,  p. 
817  et  suiv.  .iutre  concile  sur  la  discipline,  p.  887. 
Autre,  p.  895. 


M. 


MACAIRE,  patriarche  d'Antioehe,  monolhélite, 
aaathématisé  par  le  pape  saint  Léon  II,  p.  784. 


.MACCABÉES.  Sentiment  de  saint  Grégoire  sur 
les  livres  des  Maccabe'es,  p.  553. 


958 


TABLE  ANALYTIQUE. 


ÏIACCOLUS,  prfltre  que  saint  Hemi  recommande 
au  roi  Ciovis,  p.  80. 

MACÉDOMUS,  palriarche  d'Antioche,  mono- 
tht'lite,  p.  7.'>0. 

MAGES  (les  saints).  Leurs  noms,  p.  3iV. 

MAGNA,  femme  du  frère  de  l'empereur  Anas- 
tase.  p.  100. 

JIAG.NOAI.D  ou  MAGNE  {saint),  disciple  de  saint 
Gai.  p.  7n3. 

MAGNL'S,  prêtre  de  Milan,  excommunié  par 
son  «ivC-que,  p.  402:  salut  Grégoire  lui  permet 
de  faire  ses  fondions,  ibid. 

MALADES.  Quel  soin  on  en  doit  avoir  selon 
la  Règle  de  saint  Renolt,  p.  1C8. 

MALADIES.  Il  faut  avoir  recours  dans  les  ma- 
ladies à  la  miséricorde  de  Dicm,  à  l'eucliaristie 
du  corps  et  du  sang  de  Jé.sus-Clirisl,  et  deman- 
der à  rïglisc  riiuiU;  bénite  pour  s'en  oindre  le 
corps  au  i.om  de  Jésus-Christ,  p.  754. 

MA.Mi^.HÉENS.  Auteurs  ecclébiastiques  qui  ont 
écrit  contre  ces  hérétiques,  p.  OU.  Maniéie  dont 
ou  recevait  les  manichéens  dans  l'Église,  p.  341. 
Restes  de  manichéens  dans  l'Afrique,  p.  ISô. 

MANIPULE  pour  servir  à  l'autel,  p.  489. 

M.VPPI.MLS,  évêque  de  Reims,  invité  au  con- 
cile de  Toul,  ne  peut  s'y  rendre,  p.  206.  Sa  lettre 
à  saint  Nicet  de  Trêves  où,  tout  en  s'excusant  de 
n'avoir  pas  assisté  au  concile,  il  se  plaint  de  n'y 
avoir  pas  été  invité  par  lui-même,  ibid.;  sa  lettre 
à  Villicus,  évèque  de  .Metz,  ibid.;  temps  de  sa  mort, 
p.  207.  Éditions  de  ces  lettres,  p.  20G. 

.MARC,  évéque  d'Orléans,  souscrit  le  dernierau 
concile  d'Orléans  en  54i,  p.  85'J. 

M.ARC,  disciple  de  saint  Benoît,  ce  qu'on  sait 
des  circonstances  de  sa  vie,  p.  634.  11  nous  reste 
de  cet  auteur  deux  pièces  de  vers,  ibid 

MARC  l'Ermite,  auteur  de  huit  traites  de  mo- 
rale, p.  636.  Il  y  a  eu  plusieurs  solitaires  du 
nom  de  Marc,  ibid.  On  ne  sait  rien  de  sa  per- 
sonne ni  du  temps  où  il  vivait,  si  ce  n'est  qu'il 
vivait  avant  Pliotius,  lequel  en  parle  dans  sa  Bi- 
bliothèque, ibid.  Ouvrages  de  Marc  l'Ermite,  p. 
637  et  suiv.  ;  son  traité  du  Paradis,  ou  la  Loi  spi- 
rituelle, p.  637,  638.  Autre  traité  de  la  Loi  spiri- 
tuelle  par  .Marc,  p.  637.  639.  Son  traité  du  Bap- 
tême, ibid.  et  6i0.  Traité  de  la  Pénitence,  p.  639; 
des  .Vo^rns  d'apaiser  les  passions,  p.  010,641: 
traité  sur  In  Tempérance,  p.  041  ;  Dialogue  entre 
Marc  et  un  avocat,  p.  641,  042;  Conférence  de 
l'esprit  avec  l'âme,  p.  612.  Fragments  d'une  lettre 
de  Marc,  ibid.;  son  traité  contre  les  melchisé- 
déciens,  p.  642.  Livres  de  .Marc  qui  sont  perdus, 
ibid.  Jugement  des  écrits  de  Marc,  ibid.  et  643; 
éditions  qu'on  en  a  faites,  p.  013.  Son  traité 
contre  les  melchisédeciens  recouvré  avec  un  di.s- 
cours  sur  le  jeûne  et  publié  a  Rome  en  1777, 
p.  r,ti. 

MARCEL  (salnt\  évêque  de  Paris,  p.  .412;  sa 
vie  écrite  par  For'.unat,  ibid. 

MARCEL  saint:  de  Chllon-sur-Saône,  monas- 
tère fondé  par  le  roi  Contran,  p.  327  et  745.  Les 
fondations  faites  ."i  ci'  niniiaslèru  conlirmées  par 
un  concile,  p.  5-27.  Témoignage  de  Trédégairc 
sur  la  fondation  de  co  monastère,  p.  745. 


MARCEL,  prélre  d'Emôse  ,  trouve  en  453  le 
chef  de  saint  Jean-Baptiste,  p.  999. 

.MARCELLI.N,  évêque  d'Ancine,  arrête  un  in- 
cendie, p.  474. 

MARCELLI.N  'le  comte).  Pourquoi  on  le  place 
parmi  les  écrivains  ecclésiastiques,  p.  98.  Il  fut 
chancelier  de  l'empereur  Jusiinicn,  ibid.  L'n  au- 
teur le  fait  Romain  de  naissance,  p.  99.  Ses  livres 
de  géographie  qui  sont  perdus,  p.  98  Sa  chro- 
nique :  jusqu'où  elle  s'étendait,  ibid.  Différentes 
éditions  qu'on  en  a  faites,  ibid.-  ce  qu'elle  con- 
tient de  remarquable,  ibid.  et  99. 

MARCIANITES,  hérétiques.  Leur  erreur  sur 
l'eucharistie,  p.  340,  341. 

.MARCIEN,  abbé  d'Ansion.  Saint  Fortunat  écrit 
à  sa  prière  la  vie  de  saint  Paterne,  p.  411. 

.MAR';IEX,  premier  abbé  du  monastère  de  Lu- 
cullano,  p.  Si. 

MARCIEN,  économe  de  l'église  de  Couslanti- 
nople,  arrête  le  cours  d'un  incendie  avec  le 
livre  des  évangiles,  etc.,  p.  104. 

MAROIE.N  de  Trébisonde,  chef  de  la  secte  des 
marcianites,  p.  340. 

MARCILLIANE.  fontaine  en  Calabre  dont  les 
eaux  croissaient  miraculeusement  la  nuit  de 
Pâques  pour  le  baptême,  p.  2i0. 

MARCULFE,  moine  de  profession,  p. 739;  temps 
où  il  vivait,  ibid.;  son  recueil  de  Formules, 
ibid.  ;  distribution  de  cet  ouvrage,  p.  "40 .  chartes 
remarquables,  ibid.  et  741  ;  éditions  des  Formules 
de  .Marculfe,  p.  711. 

MARI  ou  MARI  US  (saint),  abbé  de  Bodane.  Sa 
vie  écrite  par  Dyname,  p.  401  ;  ce  que  c'est  que 
l'abrégé  que  nous  en  avons,  ibid. 

M.\RIAGE.De:jrés  de  consanguinité  selon  Théo- 
dore archevêque  de  Cantorbéry,  p.  798.  Mariages 
entre  parents  au  troisième  et  au  quatrième  degré 
permis  par  saint  Grégoire,  p.  525,  534,  535  et 
576.  Défense  de  recevoir  a  pénitence  ceux 
qui  auront  contracté  des  mariages  inces- 
tueux, s'ils  ne  se  séparent,  p.  sio.  Défense  aux 
chrétiens  de  contracter  des  mariages  avec  les 
Juifs,  p.  848, 8.57.  Deux  frères  peuvent  épouser  deux 
sœurs,  p.  525.  570.  Loi  d'Arcade  et  d'Honorius 
qui  autorise  les  mariages  entre  cousins  germains, 
mais  la  loi  divine  les  défend,  p.  525,  576.  C'est 
un  crime  d'épouser  sa  belle-mère  ou  sa  belle- 
sœur  p.  525,  576.  Degrés  de  consanguinité  d'a- 
près les  Grecs,  p  798.  Les  mariages  incestueux 
sont  défendus  d'après  les  Latins,  liid.,  sous  peine 
d'excommunication,  p.  912.  Faut-il  séparer  ceux 
qui  avant  leur  conversion  ont  contracté  des 
m.Triages  illicites?  Faut-il  les  priver  de  la  com- 
munion, p.  525.  Indissolubilité  du  mariage,  p. 
■'■)2J.  Il  ne  peut  être  dissous  pour  cause  mêma  de 
religion,  ibid.  L'Église  permet  la  dissolution 
d'un  mariage  non  consommé,  quand  l'une  des 
deux  parties  veut  entrer  en  religion,  p.  5.M. 
Causes  de  la  dissolution  des  mariages  suivant  la 
novelle  de  Justinien,  p.  257.  Les  mariages  con- 
tractés légiiimement  ne  peuvent  se  dissoudre 
pir  la  volonté  des  parties,  p.  818.  L'excès  dans 
l'usage  légitime  du  mariage  n'est  pas  exempt  do 
péché  véniel,  p.  65.  Règles  sur  l'usage  du  ma- 


TAHLK  ANALYTIOl'K 

iô,  i8.  Uoclriiic 


î»5!t 


riago,  selon  s;iiiu  Kiilgoncu,  p 
(In  nifnii' saint  sur  li>  niaria','i\  p.  O'i.  llcniarqnes 
<U'  saint  Ot'saire  d'Arlos  sur  les  mariages  des  pa- 
Iriarclii's,  p.  130.  Doclrino  du  iiu'nit;  saint  l'vi^quc 
sur  If  niariatjo,  p.l3:i,|.ii.  DocIrinodoCassioiIdro; 
Le  nianaye  est  un  sacrinient  ijn'on  no  peut  pro- 
faner, sans  une  tt^morili''  eriininelle,  p.  -.'11.  l."u- 
sago  du  niaria;>\  quand  il  n'a  pas  pour  lin  la  gé- 
nération des  enfants  est  un  péclié,  p-  112  et  570. 
Ceux  qui  ont  do  la  peine  ii  vivre  dans  la  continence 
peuvent  se  marier,  pourvu  iju'ils  n'uienl  pas  fait 
vœu  d'entrer  dans  un  état  plus  relevé,  p.  576,  577. 
Défense  de  contraindre  les  veuves  et  les  filles  à 
se  marier,  p.  itl2.  mariages  des  personnes  reli- 
gieuses condamnés  par  saint  Grégoire,  p.  577. 
Le  mariage  n'est  permis  en  aucun  cas  aux  prê- 
tres ni  aux  diacres,  p.  313.  Les  personnes  mariées 
recevaient  la  bénédirtion  du  prêtre  lors  de  leur 
mariage,  p.  7i0;  pendant  la  messe,  p.  708.  Droils 
excessifs  atlacbés  aux  mariages  des  pa'ieus  réfor- 
més par  saint  Grégoire,  p.  -181.  Saint  Grégoire 
taxe  d'incontinence  les  mères  qui,  au  lieu  d'allai- 
ter ello-mêmes  leurs  enfants,  les  donnent  à 
des  nourrices,  p.  577. 

MARlANNii,  et  non  Marie  Anne,  mère  de  saint 
Fulgence,  p.  1. 

SIAUIE  (la  Sainte-A'ierge) ,  est  véritablement 
mère  de  Dieu,  p.  63,  90,  136,  360.  Sa  virginité 
perpétuelle,  p.  90.  La  mère  de  Jésus-Cbri.vt  est 
demeurée  vierge  depuis  son  enfantement,  comme 
elle  l'était  avant  de  l'avoir  conçu,  p.  56.  Le  dé- 
mon n'a  point  connu  sa  virginité,  p.  184.  D'a- 
près saint  Fulgence,  la  chair  de  Marie  a  été  une 
cbair  de  pécbé,  ayant  été  conçue  comme  les  au- 
tres hommes,  etc.,  p.  45.  Doctrine  de  saint  Ful- 
gence sur  la  sainte  Vierge,  p.  64;  de  Ferrand, 
p.  89  et  suiv.;  de  saint  Césaire  d'Arles,  p.  136; 
du  moine  Jobius,  p.  181;  d'Aiiastase,  patriarche 
d'Anlioclio,  p.  360.  Grégoire  de  Tours  est  lo  pre- 
.mier  qui  ait  dit  qu'elle  fut  élevée  au  ciel  en 
corps  et  en  âme,  p.  372  et  387.  Les  circonstances 
qu'il  rapporte  de  sa  mort  sont  fabuleuses,  p.  372. 
Poèmes  de  Foitunat  à  la  louange  de  la  sainte 
Vierge,  p.  407.  monastère  de  filles  sous  son  nom 
à  Autun,  dont  les  privilèges  sont  confirmés  par 
le  pape  saint  Grégfiir.'  le  Grand,  p.  530.  Poërae 
de  George  IMsidès  sur  le  temple  de  la  mère  de 
Dieu  h  Constantiiiople,  p.  653.  Homélie  du  prêtre 
llésycbius  en  l'honneur  de  la  sainte  Vierge,  p. 
i>56.  Livre  de  saint  lldefonsc,  archevê(]ne  de  To- 
lède, de  la  Virginilé  perprtuclle  de  Marie,  p. 
773.  Ce  traité  est  différent  de  la  messe  en  l'hon- 
neur do  la  sainle  Vierge,  ibid.  Un  autre  traité 
sur  le  même  sujet,  attribué  àsaiut  Ildefonse,  est 
de  Ratbert.  p.  774. 

m  ARIE  d'Egypte  (sainte).  Sa  vie  écrite  par  saint 
Sophrone  do  Jérusalem,  p.7o5. 

MARIE  MADELEhNE,  confondue  par  saint  Gré- 
goire avec  marie  sœur  de  Lazare  et  la  femme 
pécheresse,  p.  458. 

mARIME.\,  archevêque  de  Ravenne,  fait  lire 
aux  offices  de  la  nuit  les  Morales  du  pape  saint 
Grégoire  qui  s'y  oppose,  p.  Ui;  il  avait  succédé 
à  Jean,  p  ,"i03.  Le  pape  saint  Grégoire  lui  accorde 


le  pallium,  ibid.  Lettre  que  co  papo  lui  écrit, 
ibid.  Marinien  se  pl.unt  do  ce  qu'on  voulait  ju- 
ger ^  Homo  un  différend  entre  l'église  do  It.i- 
venne  et  l'abbaye  d(!  Classe.  Réponse  du  pape, 
p.  505.  Autres  lettres  que  lui  écrit  le  pape  saint 
Grétîoire,  ibid  ,  ,500  et  511.  Saint  Grégoire  lui  ren- 
voiel'affairo  de  Maxime  de  Salone,  p. ôi7.  Autres 
lettres  sur  sa  santé,  p.  5Ji,  522. 
MAIIINIEN,  abbé  do  l'alerme,  p.  192. 
MAKIl'S,  évèque  d'Avenche.  Son  ordination, 
sa  chronique,  p.  399,  400. 

AIAUTIN  (saint),  évêque  de  Tours.  Ses  mira- 
cles écrits  en  quatre  livres  par  saint  Grégoire 
de  Tours,  p.  377  et  suiv.  Prose  et  oraison  en 
l'honneur  do  saint  Martin,  p.  379.  Sa  Vie,  mise 
en  vers  par  Foriunat.  p.  4i0,  et  par  l'aulin  de 
Périgueux,  ibid.  Miracles  opérés  il  son  tombeau, 
p.  207,  204. 

MARTIN  (saint),  évêque  de  Rrague,  était  ori- 
ginaire do  Pannonie,  p.  350.  Ses  voyages,  ibid.; 
se  fixe  dans  la  Galice  et  y  biitit  le  monastère 
de  Dûmes  dont  il  devient  abbé,  puis  devient  ar- 
chevêque de  Brague,  ibid.  11  tiaj^  un  concile 
dans  l'église  de  sa  métropole,  ibifiSa  mort,  ibid. 
Sa  collection  des  canons,  ibid.  et  35i.  Formule 
d'une  vie  honnête,  ouvrage  qu'il  adresse  au  roi 
de  Galice,  lequel  lui  avait  demandé  des  instruc- 
tions pour  bien  vivre,  p.  35i.  Son  éloge  par  For- 
iunat, ibid.  Livres  de  l'Orgueil  et  de  l'humilité,  et 
autres  écrits  de  saint  Martin  qui  n'ont  pas  été 
imprimés,  ibid.  et  3-52.  Saint  martin  de  Dûmes 
assiste  au  premier  concile  de  Brague,  p.  885  et 
880;  tient  le  second  concile  de  Brague,  p.  891  et 
892. 

MARTIN  (saint,  apocrisiaire  àConstantinople, 
p.  748,  est  élu  pape  pour  succéder  à  Théodofo  \" , 
ibid.  Il  tient  un  concile  à  Rome,  en  envoie  les 
actes  aux  Egli.ses  d'Orient  et  d'Occident,  ibid.  et 
749.  Sa  lettre  à  tous  les  fidèles,  p.  749.  Ses  autres 
lettres:  à  l'empereur  Constantin,  à  l'Eglise  de 
Carthage,  il  saint  Amand,  évêque  de  Maestrieht,  p. 
ibid.;  il  Jean  de  Philadelphie,  à  Théodor(!  d'Es- 
bunte,  à  Antoine  de  Baeate,  il  George,  abbé  de 
Saint-Théodose,  à  Pantaléon,  il  Pierre  du  rang 
des  illustres,  p.  750;  aux  Églises  de  Jérusalem  et 
d'Antioche,  ibid.;k  Paul  deThessaloniquep.  750  et 
751;  à  l'Église  de  Thessalonique,  p.  751.  Persé- 
cution contre  le  pape  saint  Martin,  p.  75i.  Ca- 
lomnies contre  lui,  ibid.  Il  est  enlevé  de  Rome, 
mené  il  Constantinople  et  mis  en  prison,  ibid. 
Ses  lettres  ii  Théodore,  ibid.  1"  interrogatoire 
du  pape  saint  Martin,  p.  752;  2"  interrogatoire  su 
sujet  de  Pyrrhus,  ibid.  Son  exil  ;\  Chersonèse,  ibid. 
Sa  lettre  à  un  de  ses  amis,  ibid.  Sa  mort,  ibid. 
L'Église  grecque  l'honore  comme  confesseur,  et 
l'Église  laline  comme  martyr,  iind.  Editions  de 
ses  écrits,  ibid. 

.  MARTIN,  évêque  de  Tainales,  transféré  iiAlé- 
rie,  p.  185. 

MARTIN,  ermite.  Conseil  que  lui  donne  saint 
Benoît,  p.  158. 

MARTIN,  diacre,  accusé  de  plusieurs  fautes, 
prouve  son  innocence.  Saint  Gré.oire  lo  rétablit 
dans  sou  gr.ido  et  dans  ses  fonctions,  p.  508. 


1(00 


TABLE  ANALYTIQUE. 


MARTIUS  (saint),  abbé.  Pa  vie  écrite  parsafnt 
Grégoire  de  Tours,  p.  382. 

MAKTVR.  On  peut  sonlTrir  hors  de  limité  de 
l'Église,  mais  on  ne  saur.iil  devenir  martyr  que 
dans  ce  lieu,  c'e?t-i-dlre  dans  l'Kglise,  p.  .ViS. 

MARTVns.  S;iint  Kuloge  deniandt'  à  saint  Gré- 
goire les  actes  de  tous  les  martyrs  recueillis  par 
Eusébe  de  Césarée,  p.  5il  Nous  honorons  les 
reliques  des  martyrs  pour  nous  excitera  les  imi- 
ter et  nous  recommander  à  leurs  prières,  mais 
nous  ne  les  honorons  point  du  culte  de  latrie, 
etc.,  p.  7i8. 

MAUTYREou  MARTYRIL'S  (saint),  vieillard  qui 
fut  le  niailre  de  saint  Jean  Climaque,  p.  677. 

MARTYR1-:  do  quarante-quatre  moines  de  la 
laure  de  Saint-Sahas  :  relation  de  cet  événement 
par  le  moine  Antioclius,  p.  C97,  G98. 

MARÏYRIL'S,  patriarche  de  Jérusalem,  p.  274. 
Il  avait 'Surcédé  à  .\jiastase,  ibid.  Il  transféra  les 
reliques  du  saint  abbé  Eupliémius,  ibid. 

MARTYRIL'S,  moine  de  l'Abruzze.  dont  parle 
saint  Grégoire  dans  ses  Dialogues,  p.  474. 

MARTYROLOGE  du  temps  de  saint  Grégoire, 
p.  511,  est  probablement  celui  qui  est  connu  sous 
le  nom  de  saint  Jérôme,  ibid. 

MASSA.NUS,  évéque.  La  lettre  de  saint  Isidore 
de  Séville  à  Massanus  est  supposée,  p.  714. 

MASSONA,  évéque  de  .Méiida.  p.  9U7. 

MAl'R  (saint),  lils  d'Équitius,  est  donné  à  saint 
Benuît  (iiii  se  charge  de  son  éducation,  p.  \lû.  Il 
retire  miraculeusement  saint  Placide  du  lacde.Su- 
blac,  où  il  était  prés  de  se  noyer,  p.  I.'i8.  Saint  Benoît 
l'envoie  en  France  où  il  fonde  le  monastère  de 
Glanfeuil,  p.  l.')»  et  010.  Preuves  de  cette  mission, 
p.  l;.9.  Discours  que  saint  Benoit  fait  i  ses  reli- 
gieux au  sujet  du  départ  de  saint  Maur  pour  les 
Gauleê,  p.  170.  Billet  que  lui  écrit  saint  Benoît, 
en  lui  envoyant  des  reliques,  ibid.  Sa  vie  écrite 
par  Faustc,  moine  que  saint  Benoît  avait  envoyé 
en  France  avec  lui,  p.  fiio.  Plusieurs  critiques 
ont  regardé  cette  vie  comme  supposée  et  Fauste 
comme  un  auteur  imaginaire,  p.  Cil.  On  détruit 
leurs  raisons,  ibid.  Cette  vie  a  été  retouchée  par 
Odon,  abbé  de  Glanfeuil,  ibid.  Éditions  qu'on  a 
faites  de  cette  vie;  ce  qu'elle  contient  de  remar- 
quable, ibid.  et  012.  Histoire  de  la  translation  des 
reliques  de  saint  Maur  par  Odon,  abbé  de  Glan- 
feuil, p.  012. 

MAURICE  (saint;,  chef  de  la  Légion  Thébéenne, 
p.  104. 

MAI'RICE,  empereur.  Son  élévation  au  trône, 
précédée  de  divers  présages,  p,  420.  Son  édit 
contre  les  soldats  qui  s'éiajent  faits  moines,  p. 
435  et  493.  Sentiment  de  saint  Grégoire  iir  cet 
édit,  p.  493  et  494.  .11  s'y  soumet,  l'empereur; 
modère  cet  édit,  p.  491.  Saint  Grégoire  écrit  à 
Maurice  touchant  Jean  le  Jeûneur,  palriarche, 
p.  'MO.  Maurice  envoie  des  aumônes  ^  Rome, 
p.  502.  Saint  Grégoire  lui  écrit,  p.  502,  507.  Mort 
de  l'empereur  Maurice,  p.  440. 

MAL'RILLE  (saint),  évéque  d'Angers.  Sa  vie  n'a 
pas  été  écrite  par  saint  Grégoire  de  Tours,  p.  384  ; 
ni  par  Fortunat,  p.  412.  Elle  est  d'un  évoque 
d'Angers  nommé  Rainon,  ibid. 


MAURISION,  duc  de  Pérousc,  livre  cette  ville  à 
l'exarque  romain,  p.  4;t5.  Agilulfela  reprend  sur 
lui  et  lui  fait  rouper  la  léle,  ibid. 

MAURES.  Selon  Evagre,  ils  descendent  des  Ger- 
géséens,  des  Jébusécns  et  autres  nations  vaincues 
par  Josué,  p.  119. 

MAXl.ME  (saint),  abbé  de  Lérins,  puis  évéque 
de  Riez.  Sa  vie  écrite  par  le  patrice  Uyname,  p. 

402. 

MAXIME,  Florentin,  moine  dn  Mont-Cassin. 
Sa  traduction  latine  du  commentaire  d'Arétas 
sur  l'Apofalvpse,  p.  200. 

MAXIME  (saint),  abbé  de  Chrysopolis:  sa  nais- 
sance, son  éducation,  p.  7Go.  L'empereur  Iléra- 
ciius  le  fait  son  premier  secrétaire,  il  quitte  la 
cour  et  se  retire  dans  le  monastère  de  Chryso- 
polis dont  il  est  fait  abbé,  ibid.  Il  passe  en  .Vfri- 
que  :  sa  conférence  avec  Pyrrhus,  partisan  du 
monothélisme,  ibid.  et  701.  Il  va  k  Rome:  il 
anime  le  pape  saint  Martin  1"  à  condamner  le 
monothélisme,  p.  761.  L'empereur  Conslantin  le 
fait  enlever  et  amener  à  Constantinople  où  il 
est  fort  maltraité  pour  la  foi,  ibid.  Il  est  con- 
damné à  mort,  ibid.  L'empereur  l'envoie  en  exil 
au  château  de  Bizye  en  Thrace;on  lui  propose 
un  projet  d'accommodement,  ibid.  et  762.  Il  est 
transféré  au  monastère  de  RIgée  près  de  Constanti- 
nople :  on  lui  propose  l'adhésion  au  type,  il  le 
refuse;  on  le  charge  de  coups,  p.  702.  On  le  trans- 
fère à  Mésembrie,  puis  à  l'erbère  où  il  est  ana- 
théniatisé  dans  un  concile  :  on  le  bat  de  verges 
et  on  lui  coupe  la  langue  et  la  main  droite,  ibid. 
Il  est  exilé  au  pays  des  Lazcs  où  il  meurt,  ibid. 
Écrits  de  saint  Maxime, j!ti<<.  etsuiv.  Questions  sur 
l'Écriture,  p.  703.  Réponses  à  divers  doutes  sur 
quelques  passages  de  l'Écriture  et  sur  d'autres  ma- 
tières, ibid.  Explication  du  psaume  lix  tt  de  l'O- 
raison dominicale,  ibid.  Discours  ascétiques,  ibid. 
et  764.  Quatre  cents  maximes  sur  la  charité,  p.  464. 
20t)  maximes  théologiques  et  économiques,  ibid. 
L'écrit  à  Théophemptus,  ibid.  213  maximes  mo- 
rales, p.  705.  Fragment  de  l'écrit  adressé  au  roi 
d'Acride,  »6ii/.  Lettres  et  écrits  à  différentes  per- 
sonnes, ibid.  et  700.  Dialogue  avec  Pyrrhus,  p. 
707.  Calcul  ecclésiastique  ou  cycle  pascal,  attri- 
bué à  saint  Maxime,  p.  767.  Traité  de  l'àme,  ibid. 
Lettre  ou  discours  au  patrice  Grégoire,  ibid.  Let- 
tre à  Jean  le  Chambellan,  ibid.  Autres  lettres  de 
saint  Maxime,  p.  768.  Dialogue  sur  la  Trinité,  p. 
■709.  Mystagogie  de  saint  Maxime,  p  770.  Recueil 
de  maximes  sur  plusieurs  sujets,  ibid.  Commen- 
taires sur  saint  Denis  l'Aréopagite  et  sur  saint 
Grégoire  de  Nazianze  iftirf.  et  771.  Livres  desaini 
Maxime  qui  sont  perdus,  p.  771.  Jugement  de  ses 
ouvrages,  ibid.  Éditions  qu'on  en  a  faites,  ibid.  et 
772.  Vie  de  saint  Maxime  par  un  anonyme,  p. 
76.-.. 

MAXIME,  abbé  de  l'île  Barbe,  p.  37C.  Ce  que 
saint  Grégoire  de  Tours  raconte  de  lui,t&id. 

MAXIME  est  élu  évéque  de  Salone,  prend  pos- 
session à  main  armée,  p.  190,  obtient  un  édit  de 
l'empereur,  ibid.  Saint  Grégoire  s'oppose  h  son 
intrusion,  ibid.  et  505.  Saint  Grégoire  lui  écrit, 
p.  508.  Pénitenco  de  Maxime,  p.  !>16. 


TÀBLb:  ANALYTIOL'K 


901 


MAXIME,  évoque  de  Saragosso.  Ses  <*crils,  p. 
630.  Aucun  n'esi  venu  jusqu'à  nous,  ibid. 

MAXIME,  adbesse.  salnl  Adiielme  lui  adresse 
son  Traité  de  la  VirginM,  p.  SOI. 

MAXIMIEN,  évéque  de  Pudentiane.  Salnl  Gré- 
goire le  <;rand  lui  i^cril,  p.  489. 

.MAXIMIE.N,  abbt?  de  saint  André.  Miracle  en 
sa  faveur,  p.  417.  Il  csl  fait  évêque  de  Syracuse, 
p.  JK7.  Saint  Grégoire  l'établit  son  vicaire  sur 
toute  l:i  Sicile,  ibùi.;  il  lui  écrit,  p.  196. 

MÉDAUD  (saint ,  évf^qnedeNoyon.p.STô.  Sainte 
Radpgonde  le  prie  de  lUi  donner  l'habit  de  reli- 
gieuse, p.  315.  Vie  de  saint  .Médard  écrite  par 
Forlunat.  p.  41-3.  Antienne  en  l'honneur  de  saint 
Médard,  p.  :W4. 

MEDOl'É  ou  MÉDOVÉ  évéque  de  Meaux,  p.  882. 

MÉLA.MLS,  évéque  de  Rouen,  p.  371  :  intrus  à 
la  place  de  saint  Prétextât,  ibid. 

MEIXIIISÉDÉCIENS.  Traité  de  Marc  lErniile 
contre  ces  hérétiques,  p.  ôii. 

MEIXHlTES,sec!e  de  Jacobiies.  Pourquoi  ainsi 
nommés.  Leurs  erreurs,  p.  809. 

MÉLITAS  abbé  de  la  Laure  de  saint  Sabas,  p. 
277. 

MELLITE  ou  MELLITUS.  envoyé  en  Angleterre 
par  saint  Grégoire  pour  seconder  saint  Augustin, 
p.  438  et  5-24.  Lettre  que  lui  écrit  le  Pape,  p.  527. 
11  est  ordonné  évéque  de  Londres  par  saint  Au- 
gustin, p.  910  et  913.  II  va  à  Rome,  est  bien  traité 
par  le  pape  Boniface  IV,  p.  645;  assiste  au  concile 
tenu  parce  Pape.  p.  910,  9U.  11  rapporte  en  Angle- 
terre le  décret  de  ce  concile  favorable  aux  moi- 
nes, p.  911.  Il  bâtit  le  monastère  de  Westmins- 
ter, tftid.  11  est  chnssé  d'Angleterre,  puis  rétabli, 
p.  914.  11  passe  à  l'évêché  de  Cantorbéry,  ibid. 

MELL'N.  Le  roi  Childebert  veut  y  établir  un 
évêcbé,  p.  202.  Léon,  archevêque  de  Sens,  s'y  op- 
pose, ibid. 

MENNAS,  prêtre  et  économe  de  l'église  d'A- 
lexandrie, p.  659. 

MENNAS.  élu  patriarche  de  Constantinople.  Le 
pape  Agapet  le  consacre  de  sa  main,  p.  121. 11  est 
le  premier  de  l'Église  orientale,  depuis  saint 
Pierre,  qui  ail  été  ordonné  par  les  mains  du  papi-, 
ibid.  Lettre  de  communion  que  lui  écrit  le  pape 
Vigile,  p.  194.  Il  fui  mis  à  la  place  d'Anthime,  p. 
121.  Il  tient  un  concile  contre  les  sévériens.  Dé- 
tail de  ce  concile,  p.  852  et  suiv.  Sa  mort,  p. 
868. 

MENSONGE  officieux.  Procope  de  Gaze  et  saint 
Martin  de  Brague  semblent  l'approuver,  p.  177  et 

351. 

MÉRERIUS,  évèqiie  d'Angoulêmedans  le  vif  siè- 
cle. Ses  écrits  sont  perdus,  p  3li.  Temps  de  sa 
mort,  ibid. 

MÉROUÉE,  évêque  de  Poitiers,  refuse  de  placer 
une  relique  de  la  vraie  Croix  dans  le  monastère 
bili  par  sainte  Radegonde,  p.  316. 

MÉROUÉE  ou  MÉROVÉE,  flls  du  roi  Chilpéric, 
épouse  Brunehaut,  veuve  de  Sigebert,  roi  d'Ans- 
trasie,  p.  322. 

MÉRIDA  (Pauli,  diacre  de  Mérida,  écrit  la  vie 
et  les  miracles  des  saints  de  celle  église,  p.  676. 

MESSE.  La  messe  ne  consiste  pas  dans  la  lec- 


ture  des  livres  saints,  mais  dans  I  oblation  dos 
dons  et  dans  la  consécration  du  corps  et  du  sang 
de  Jésus-ChrisI,  p.  lin.  Cérémonies  de  la  messe, 
p.  300  et  suiv.  Elle  doit  être  dite  ."i  tierce  aux 
jours  solennels,  p.  857.  Défensede  dire  deux  mes- 
ses par  jour  sur  le  mémo  autel,  p.  898.  Ordre  de 
la  messe  suivant  leSacranienl:iire  de  saint  Gré- 
goire, p.  538;  selon  saint  Grégoire  de  Tours,  p. 
390,  391.  Défense  aux  laïques  de  sortir  de  l'é- 
glise avant  d'avoir  reçu  la  bénédiction  de  l'évo- 
que i  la  fin  de  la  messe,  p.  140  et  p.  858.  Deux 
sermons  de  saint  Césaire  d'Arles  sur  ce  sujet,  p. 
110.  iMesse  pontificale  suivant  l'ordre  romain,  p. 
558  et  suiv.  Lectures,  offrandes,  p.  .139,  540.  Tout 
le  monde  offrait,  le   peuple,  le  clergé,  le  Pape 
même,  p.  540.  Canon  delà  messe  et  communion. 
ibid.  et  511.  Fin  de  la  messe,  p.  54i,  512.  Messes 
pour  toute  l'année  selon  le  Sacramentaire  de 
saint  Grégoire,  p.  542,  54:>.  Doctrine  de  saint  Gré- 
goire sur  la  messe,  p  508:  elle  est  utile  aux  vi- 
vants et  aux  morts,  i6i(i.  L'ordre  des  oraisons  de 
la   messe   établi,    comme   l'on  croit,  par  saint 
Pierre,   p.   ■ii7.  On  célébrait  la  messe  la  nuit 
de  la  veille  de  Pique,  p.  590.   Au  temps  de    ce 
Pape,  on    célébrait  quelquefois  la  messe   dans 
des  maisons  particulières,  p.  569.   .Aux    autres 
jours  on  la  célébrait  le  matin   vers  l'iieure  de 
tierce.  i6id.  Le  célébrant  devait  être  à  jeun  et 
les  assistants  devaient  garder  le  silence,  ibid.  On 
disait  la  messe,  non-seulement  les  dimanches, 
mais  aussi   les  jours  de    fêles  de    martyrs ,  et 
quelquefois  en  Ihunneur  des  saints,  p.  391;  ou 
en  actions  de  grâces  pour  la  délivrance  d'une 
ville,  p.  390.  Messes  célébrées  pour  les  défunts, 
p.  390,  391,  432,  798  ;  le  30*  jour  depuis  leur  mort, 
p.  382  et  391.  On  attribue  ;i  saint    Grégoire  le 
Grand  l'usage  des  trentains  de  messys  pour  les 
morts,  p.  509.  Ln  prêtre  nommé  Sévère  disait 
tous  les  dimanches  deux  messes  dans  deux  égli- 
ses différentes,  p.  376  et  390.  Il  était  contre  les 
canons  d'en  dire  trois,  fût-ce  sur  trois  autels 
différents,  p.  590.  D'après  les  statuts  de  Sonnace, 
évéque  de  Reims,  les  prêtres  doivent  célébrer  au 
moins  deux  fois  le  mois,   p.  C94.  Validité  de  la 
messe  interrompue  au  canon  pendant  quelque 
intervalle,  p.   335.  Les  messes  ne  doivent   être 
appliquées  que  suivant  l'intention  des  fonda- 
teurs, p.  694.   On  disait  quelquefois  des  messes 
dans  des  maisons  particulières,  p.  569.  D'après 
saint  Théodore,  archevêque  de  Cantorbéry,  il 
n'est  pas  permis  de  dire  la  messe  pour  celui  qui 
s  est  tué  volontairement,  p.  79«.  Il  est  permis 
dédire  la  messe  poui-un  enfant  mon  avant  l'âge 
de  sept  ans.  ibid.  Les  lidèles  sont  obligés  d'as- 
sister au  saint  sacrilice  de  la  messe  les  jours  so- 
lennels et  les  dimanches,  etc.,  p.  694.  Messe  com- 
posée par  saint  Udefonse    en  l'honneur   de  la 
sainte  Vierge,,  p.  773. 

MESSIEN,  prêlre.  présente  une  supplique  au 
pape  Symmaque,  pour  que  l'église  d'Arles  soit 
mainlenup  ilans  ses  privilèges,  p   leo. 

MESSOK,  primat  de  Numidie,  p.  828. 

MÉTRODOltEconipcse  un  comput  de  28  cycles 
pour  trouver  le  jour  île  la  l'àque,  p.  644;  nous 

03 


962 


n'en  savons  que  ce  que  Pliotius  nous 
ibid. 

MICI.  Itiplùmi'  ilu  roi  Clovis  pour  la  fonda- 
lion  du  monastère  Je  Mici  au  diocèse  d'Orlèaiis, 
p.  80. 

MINTUnXE,  ville  d'Italie.  Le  pape  saint  Gré- 
goire unit  l'église  de  Formies  à  celle  de  Min- 
liirne,  p.  180. 

MIR.VCLES.  C'est  plus  grand  de  bien  vivre  que 
de  faire  des  miracles  p.  720.  Dans  les  premiers 
temps  l'Église  avait  besoin  de  niiraclos  pour  s'é- 
tablir et  se  fortiflcr  contre  les  persécutions,  p. 
isi.  Us  ne  donnent  pas  la  justice,  mais  la  répu- 
tation, qui  sans  la  justice  ne  sert  qu'à  nous  faire 
condamner  au  supplice  éternel,  p.  7  et  8.  Doc- 
trine de  saint  Grégoire  le  Grand  sur  les  miracles, 
p.  451,  :y2\  et  .Ï77.  Miracles  opérés  dans  les  égli- 
ses des  catholiques, 'd'après  Vivcntiole,  p.  203  et 
201.  Miracles  faits  par  saint  .Augustin,  mission- 
naire d'Angleterre,  p.  ^>i\.  Doctrine  de  saint  Isi- 
dore de  Séville  sur  les  miracles,  p.  ■î20. 

MlUON,  roi  de  Galice.  Saint  Martin  de  Brague 
lui  donne  des  instructions,  p.  S.'il. 

MISSIO.N  des  personnes  divines  dans  la  frinité, 
p.  5.'i7  et  558. 

MODESTE,  abbé  du  monastère  de  Saint-Théo- 
dose,  vicaire  du  patriarche  de  Jérusalem.  Il  avait 
fait  trois  discouis  dont  il  ne  reste  que  des 
extraits  dans  l'iiotius,  p.  69'j. 

MOINES  Proposition  des  moines  de  Scytliie: 
Vn  delà  Trinité  a  souffert.  Us  vont  à  Home,  écri 
ventau\  évèques  d'Afrique  exilés  en  Sardaigne,  p. 
il  et  45.  Réponse  desévéques  d'Afrique,  p.  l' et 
suiv.  Ce  que  dit  Ferrand  diacre  de  Carthage  sur 
leur  proposition,  p.  90.  Les  moines  de  la  Laure 
de  Saint-Sabas  se  séparent  de  la  communion  ca- 
tholique, p.  272.  Moines  de  quatre  sortes  suivant 
la  règle  de  saint  Benoît,  p.  1G2;  ils  s'occupaient 
à  transcrire  des  livres,  p.  233  et  234.  Loi  de  Jus- 
tlnien  pour  les  moines,  p.  2a5,  250.2.58,2(10  et  261. 
Règlement  touchant  les  moines,  p.  824,  825.  Saint 
Isidore  de  Séville  distingue  six  sortes  de  moi- 
nes, p.  719.  Moines  de  Palestine,  leur  genre  de 
vie,  p.  417.  Moines  de  saint  Coloruban,  leur  genre 
de  vie,  p.  619  et  suiv.  Occupations  des  moines 
pendant  la  journée  selon  la  règle  de  saint  Isi- 
dore, p.  723  et  suiv.;   leur  nourriture,  p.  724; 
leurs  habits,  ihid.;  ils  ne  gardaient  rien  en  pro- 
pre, ibid.;  les   lois  défendaient  aux  moines  de 
faire  des  testaments,  p.  530.  Saint  Grégoire  dis- 
pense de  cette  règle  l'robus,  abbé  du  monastère 
de  Saint-André,  ibid  et  537.  Les  garçons  peuvent 
se  faire  moines  il  ijuinze  ans,  p.  798.  On  éprou- 
vait les  postulants  pendant  trois  mois  dans  le 
logement  des  hôtes  avant  de  les  adnnHtre  dans  la 
communauté,  p.  ';ï3.  Règlement  de  saint  Gri'yoire 
pour  les  moines,  p.  575;  règlemi.'nl  du  concile  de 
Paris  en  015,  p.  912,  913.  Les  moines  tombés  dans 
des  fautes  ne  doivent  pas  être  faits  abbés  avant 
d'avoir  fait  pénitence  p. 533.  Les  moines  vagabonds 
doivent  être  réprimés,  p.  482.  Les  moines  apostats 
doivent  être  renfermés,  p.  488.  Uèglcment  du 
concile  do  l'ans  loucliani  les  moines  el  les  ro- 
ligieusesqni  qniiifhl  leur  monastère,  p.  !iJ2.  ihal 


T.\B1,E  ANALYTIQUE 
?n  apprend, 


des  moines  ;  s'ils  sont  incapables  des  fonctions 
sacerdotales,  p.  575  el  un.  Saint  Benoît  ne  les 
leur  a  point  interdites,  p. '.'11.  On  tirait  les  moi- 
nes de  leur  monastère  pour  les  faire  évèques,  p. 
575.  Moines  ordonnés  prêtres  avec  le  consente- 
ment de  l'abbé,  p.  505.  La  plupart  des  moines 
s'occupaient  à  transcrire  des  livres,  p.  576. 

MOÏSE  a  écrit  par  inspiration  du  Saint-Esprit, 
p. 188. Il  est  le  premier  écrivain  du  monde,  etc., 
ibid.  Pourquoi  il  n'a  pas  mis  son  nom  à  la 
tôle  de  ses  écrits,  p.  600. 

MONASTÈRE.  Uèglcmenl  du  concile  d'Éphèse 
pour  les  monastères  de  filles,  p.  817.  Monastère 
proche  d'Alexandrie,  p.  C80.  Faux  monastères  en 
Espagne,  p.  800.  Défense  détenir  pour  vrais  mo- 
nastères ceux  qui  n'auront  pas  été  bâtis  avec  I.i 
permission  de  l'évSque  diocésain,  ibid.  Monas- 
tères protégés  par  saint  Grégoire,  p.  512.  Ce 
Pape  ne  faisait  point  d'union  de  monastères  de 
différents  diocèses  sans  avoir  l'agrément  de  ré- 
voque diocésain,  p.  520  et  5i9.  Il  y  avait  des  mo- 
nastères soumis  i  la  juridiction  des  évèques, 
mais  il  y  en  avait  aussi  d'exempls,  p.  393.  Dé- 
fense de  baptiser  dans  les  monastères,  d'y  célé- 
brer des  messes  pour  les  séculiers  défunts  el  de 
les  y  enterrer  sans  la  permission  de  l'évoque, 
p.  912.  On  ne  permettait  pas  l'entrée  de  l'inté- 
rieur du  monastère  aux  séculiers, p.  621.  Saint 
Colomban  repril  le  roi  Thodoric  d'être  entré 
au  réfectoire,  ibid.  Les  monastères  de  différents 
sexes  ne  doivent  pas  être  voisins,  p.  520.  Les 
femmes  n'entraient  point  dans  les  monastères 
d'hommes,  pas  même  dans  leurs  églises.  Il  en 
était  de  même  des  hommes  à  l'égard  des  monas- 
tères de  flllcs,  p.  395,  Saint  Grégoire  défendit 
à  l'abbé  Valentin  de  donner  entrée  aux  femmes 
dans  son  monastère,  p.  199. 

MONASTÈRES  de  pénitents,  p.  681.  Monas- 
tères, lieux  de  pénitence.  Saint  Grégoire  veut  que 
l'on  renferme  dans  de  pauvres  monastères  les 
prêtres  et  les  clercs  tombés  dans  quelque  faule, 
en  leur  faisant  payer  leur  nourriture,  p.  484. 

-MONDE.  11  n'est  point  éternel,  p.  270.  Senti- 
ment de  Cosme  d'Egypte  sur  laflgure  du  monde, 
p.  186,  187.  Discours  de  saint  Colomban  sur  le 
mépris  du  monde  et  de  soi-même,  cl  l'amour 
des  biens  éternels,  p.  023  ;  sur  l'aveuglement 
des  mondains  el  le  désir  de  la  félicité  éternelle, 
ibid. 

MONEGONDE  (sainte),  recluse  à  Tours.  Sa  vie 
écrite  par  saint  Grégoire  de  Tours,  p.  382. 

MONIME,  ami  de  saint  Ful^cnce  qui  lui  adresse 
trois  livres,  p.  10  et  suiv. 

MONNAIES.  Toutes  les  nations  recevaient  les 
monnaies  de  l'empire  romain,  p.  187,  188. 

MONOPIIVSITES,  hérétiques,  p.  526  ;  conver- 
sion de  quelques-uns,  p.  529. 

MONOTIIÉLIIES.  Sergius  de  Conslanlinople 
adopte  l'erreur  des  monothélitcs,  p.  047.  Lettres 
d'Monorius  à  ce  sujet,  ibid.  et  048.  Les  monolhé- 
liles  sont  condamnés  dans  un  concile  de  Rome, 
p  049.  Lettre  dupapeJaan  IV  ù  l'empereur  (^ous- 
taiilinoù  il  les  réfute,  ibid.  et  050.  Concile  de 
Latran,  où  le  munotbélismo  est  condamné  sous 


TABLE  ANALYTIOUF. 


963 


le  ponliflcat  du  papt;  sainl  Jlarlin,  p.  7»8,  7l!t. 
DifTt'Toiils  écrits  do  s;iint  Maxime,  abbé  de  Chry- 
sopolis, coiilro  les  erreurs  dos  monotliéliles , 
p.  7G5.  r.oiifi'rence  de  sainl  Maxime  avec  Pyrrhus 
sur  le  moine  sujet,  p.  7ti6. 

MONTAN,  solitaire,  prédit  la  naissance  de  saint 
Rémi,  p.  76. 

MOPSUKSTE.  Concile  en  550  touchant  la  mé- 
moire (le  Théodore  évoque  de  Mopsuesle,  p.  860. 

MOKTS.  S'il  est  permis  de  les  condamner? 
Réponse  alDrmative,  p.  336,  et  353.  Réponse 
négative,  p.  295.  Prières  pour  les  moris,  d'a- 
près Eustratius,  p.  557;  dans  la  célébration  des 
mystères,  p.  1S9.  Utilité  de  la  prière,  des  obla- 
tions,  des  sacriûces  et  des  aumônes  que  l'on  fait 


pour  eux.  p.  uoi  (igj,  7oi.  771,  775  et  792.  11  est 
utile  .■\ux  morts  d'i'trc  enterrés  dans  les  égli^ci» 
auprès  des  ma;l>is,  p.  7!)2. 

MUCIIùN.  Ses  écrits,  p.  285.  Cassiodore  lui  fait 
traduire  en  latin  les  trente-quatre  homélies  de 
saint  Paul  sur  l'Kpttre  aux  Hébreux,  ibid.  On 
croit  que  c'est  le  même  qui  écrivit  contre  les 
évéqucs  d'Afrique  et  qui  se  nommait  Mocien, 
ibid.  r.assiodore  le  réfute,  ibid. 

MU.siQL'E  On  en  attribue  l'invention  à  Pytha- 
gore,  p  236.  Traité  de  Cassiodore  sur  la  musique, 
p.  230. 

MYSTKUES.  Le  secret  des  mystères  ne  s'ob- 
servait plus  au  vil'  siècle,  p.  914. 


N. 


NAAMAN,  prince  dos  Sarrazins.  Sa  conversion, 
p.  420. 

NA1T0.\,  roi  des  Pietés  ou  Écossais,  ramène 
son  peuple  ;"i  l'observance  catholique  de  la  célé- 
bration (le  la  Pâque,  p.  803. 

NAPLES.  Saint  Grégoire  le  Grand  écrit  au 
clergé,  aux  nobles  et  aux  habitants  de  Naples, 
p.  487. 

NASAS,  Juif,  p.  m. 

NATALIS,  évoque  de  Salone,  repris  par  le  pape 
Pelage  et  par  saint  Grégoire,  p.  181, 11  se  corrige  , 
sa  mort,  ibid. 

NATIVITÉ  de  la  sainte  Vierge.  La  fête  de  la 
Nativité  n'a  été  de  commandement,  c'est-à-dire 
chômée  par  le  peuple  qu'au  x''  siècle,  p.  694. 

NATURES.  Dislinction  des  deux  natures  en  Jé- 
sus-Christ, p.  769-  Explication  de  la  proposition 
de  saint  Cyrille  :  Une  nature  du  Verbe  incarnée, 
p.  391  et  768. 

N.ARSÈS,  patrice,  commandant  pour  l'empe- 
reur en  Italie;  le  pape  Pelage  I  lui  écrit  plu- 
sieurs lettres,  p.  328.  Narsès  est  excommunié  par 
les  schismatiques,  p.  329.  Lettre  que  lui  écrit  le 
pape  saint  Grégoire,  p.  480. 

NAZAIRE,  abbé  de  Lérins,  bâtit  le  monastère 
d'Arlue,  p.  152. 

NÉOPHYTES.  Saint  Grégoire  défend  de  les  or- 
donner, p.  503. 

NESTORIEXS.  Leurs  erreurs  sont  condamnées 
au  Vi^  concile  d'Orlénns,  p.  862.  Ils  sont  reçus 
dans  l'Église  avec  leurs  ordres  et  à  quelle  con- 
dition, p.  526. 

NESTORIl'S.  Traité  contre  Nestorius  par  un 
eutycliien  que  l'on  croit  êtrs  Basile  de  Cilicie, 
p.  110.  Nestorius  réfuté  par  le  pape  saint  Gré- 
goire le  Grand,  p.  538.  Écrits  de  Léonce  de  By- 
zance  contre  Nestorius  et  Eutychès,p.66aetsuiv. 

NIRELUNG,ûls  de  Childebrand,  fait  continuer 
la  Chronique  de  Frédégaire,  p.  746. 

NICÉPHORE, maître  d'Anlioche,  écrit  la  vie  de 
Siméon  Stylite  le  Jeune,  p.  673:  abrégé  de  cette 
Vie,  p.  674  et  675. 

NICÉTIUS  ou  NICET,  NICESSE  (saint\  évoque 
de  Trêves,  reçoit  son  élucation  dans  un  monas- 
tère dont  il  est  ensuite  fait  abbé,  p.  202:  il  de- 


vient évêque  de  Trêves,  ibid.;  il  est  exilé  par 
Clotaire  I  et  rappelé  par  Sigebert,  ibid.;  il  as- 
siste à  plusieurs  conciles,  ibid.  et  203.  Lettre  à 
Clodosinde,  épouse  d'.\lboin,  roi  des  Lombards, 
où  saint  Nicel  réfute  les  erreurs  des  ariens,  p. 
203  et  201.  Sa  lettre  à  l'empereur  Justinien  pour 
le  retirer  de  l'erreur  des  incorruptibles,  p.  201. 
Son  traité  suc  l'utilité  des  Veilles,  p.  204  et  205  ; 
son  traité  du  bien  de  la  Psalmodie,  p.  205,  206. 
Deux  lettres  de  Florien,  abbé  de  Roman-Mou- 
tier,  adressées  à  saint  Nicet,  p.  206.  Lettre  que 
lui  écrit  Mappinius.  évêque  de  Reiras,  ibid.; 
temps  de  si  mort,  p.  207-  Concile  qu'il  assemble 
à  Toul  à  l'occasion  des  insultes  qu'ilavait  reçues, 
p.  864,  805-  Sa  Vie  par  saint  Grégoire  de  Tours, 
p.  582-  Il  refuse  de  célébrer  les  sainis  mystères 
en  présence  du  roi  Théodebert,  p.  394.  Son  éloge 
par  Fortunat.  p.  405. 

MCIAS,  moine,  écrit  contre  Philoponus,  p.  653; 
ce  qu'on  sait  de  cet  écrit  intitulé  VArbiire  et  le 
Juge,  ibid. 

MCOLAS  (saint),  évêque  de  Myre.  Apparition 
de  ce  saint  à  l'empereur  Constantin  et  au  pré- 
fet Ablabius.  p.  347. 

NITIGIUS,  évêque  de  Lugo,  préside  au  concile 
tenu  <i  Drague  en  57î,  p.  350.  Saint  Martin  de  Dra- 
gue lui  adresse  son  recueil  de  canons,  ibid.W  as- 
semble un  concile  à  Lugo,  p.  892- 

.\iZIER  :saint),  évêque  de  Lyon,  préside  à  un 
concile  de  Lyon,  p.  887.  Sa  Vie  écrite  par  un 
clerc  de  son  église  et  par  saint  Grégoire  de 
Tours,  p.  381.  Il  préside  à  un  autre  concile  de 
Lyon,  ibid. 

NOBLESSE.  La  vraie  noblesse  est  celle  qui 
vit-nt  de  la  vertu  et  des  bonnes  mœurs,  p.  îi5. 

NOËL.  Usage  établi  à  Rome  de  dire  trois  messes 
le  jour  de  Noël,  p.  456. 

.NONNITUS,  évêque  de  Girone,  p.  699. 

NONNOSE,  abbé  du  Mont-Soracte,  p.  474. 

NONNOSUS,  auteur  grec  sous  l'empereur  Jus- 
tinien: sa  légation  vers  les  Sarrazins,  les  Auxu- 
miies,  les  lloniérites,  p.  280.  Idée  qu'en  donne 
Pliotius,  ibid. 

.NOURRITURE  des  moines  suivant  la  Règle  de 
saint  Benoit,  p.  168. 


OCi  TABI.l':  ANALYTIOUE 

NOVATIE.NS,  Écrits  de  saint  Eulogo  contre  ces 
héri'liques,  p.  589,  590. 

NOVELLES  de  Justinien.  Ce  qu'elles  contien- 
nent de  reinaniualile  par  rapport  aux  clioses  ec- 
cli'siastlques.  p  -255  oi  siiiv. 

NOVICES.  Cuiiinieiit  ils  sont  reçus  suivant  la 
Règle  de  saint  Benoît,  p.  ig3,  164. 

NOVlCI.\Tdedeux  ans.  p.  5io.  On  doit  éprou- 
ver les  gens  de  guerre  pendant  trois  ans  dans 
leur  babit  séculier,  ibid. 


NL'MiniE,  Saint  Grégoire  écrit  aux  évoques  da 
.Numidie,  p.  V86. 

NIJMULÈNK.  seigneur  à  qui  Fortunat  évéque 
de  Poitiers  écrit,  p.  409. 

.NURSl.N,  prêtre,  voit  à  l'heure  de  sa  mort  les 
apùtres  saint  Pierre  et  saint  Paul,  p.  178. 

NYCT.iGES  ou  DORMEURS,  hérétiques  qui  re- 
gardaient les  veilles  de  l'Église  comme  inu- 
tiles, etc.,  p.  718. 


0. 


OBLATIO.NS.  11  est  permis  de  recevoir  les  ohla- 
tions  pour  ceux  qui  ont  été  tués  en  commettant 
quelque  .crime,  pourvu  qu'ils  ne  se  soient  pas 
tués  de  leurs  propres'mains,  p.  84 8^  on  rejette  les 
oblations  des  catholiques  convaincus  d'avoir 
donné  leurs  enfants  ;i  baptiser  à  des  hérétiques, 

p.  826. 

OCLÉ.VTIQUE,  élu  évéque  de  Rimini.  Le  pape 
saint  Grégoire  ne  veut  pas  l'agréer,  p.  485. 

OCT.VTEL'OLE.  Écrits  des  Pérès  qu'on  doit  lire 
sur  roctaieuque,  p.  227,  2-28. 

OUOACRE,  roi  d'Italie,  tue  Oreste,  dépose  Au- 
gustule,  p.  208.  Théodoric,  roi  des  Golhs,  le  fait 
mettre  à  mort  dans  un  festin  auquel  il  l'avait 
invité,  ibid. 

0D0\  isaint),  abbé  de  Cluni,  écrit  la  vie  de 
saint  Grégoire  de  Tours,  p.  .365. 

OUuy,  abbé  deGlanfeuil,  retouche el  publie  la 
Vie  de  saint  Maur,  p.  611,  6)2.  Lettre  d'Odon  à 
Adelmodus,  p.  6i2. 

ŒCONO.ME.  Chaque  évêque  doit  se  choisir  un 
œconome  du  corps  du  clergé,  p.  915. 

ŒCL'.MÉMyL'E  ou  universel.  Jean,  patriarche 
de  ConsianliiiopU',  prend  le  titre  de  patriarche 
œcuménique.  ."^ainlGrégoire  s'y  oppose, p.  .500,501. 

ŒUVRES  fies)  de  miséricorde  ne  servent  de 
>ien  pour  le  salut  lorsqu'on  les  fait  hors  de  l'É- 
glise catholique,  p.  01. 

OFFERTOIRE  à  la  messe,  p. 540. 

OFFICE  divin  selon  la  Régie  de  saint  Césaire, 
p.  151  ;  selon  celle  de  saint  Benoit,  p.  164,  165. 
Règlements  du  concile  de  Brague  en  56.'?,  tou- 
chant la  célébration  de  l'olDce  divin,  p.  885  ; 
du  concile  de  Tours,  p.  8«9.  Saint  Cé.saire 
d'Arles  règle  l'olTice  divin,  p.  125-.  il  exhorte  les 
lidèles  à  se  trouver  aux  olïïces  de  la  nuil,  de 
tierce,  desexte  et  de  none,  p.  ).30.  Dans  la  célé- 
bration des  divins  ullices.  les  évéques  doivent  se 
conformer  au  rit  de  l'Église  métropolitaine,  p. 
816.  Saint  Sabas  permet  il  îles  moines  aiiiié- 
niensde  faire  l'ofTice  en  leur  langue  le  samedi  et 
le  dimanche,  p.  271.  Règlement  du  concile  de 
Vaison  sur  l'oflice  divin,  p-  8.'J8- 

OFFICES.  Traité  des  Offlces  ecclésiastiques  par 
saint  Isidore  de  Séville,  p.  lin.  Analyse  de  ce 
Trailé,  iind.  et  suiv. 

OFFICIERS  du  monastère  suivant  saint  Benoit, 
p.  i(;.3. 

OLV.MPIUS,  exarque  do  Ravennc,  veut  faire 
tuer  le  pape  saint  Martin,  p,  75<. 


OLYMPIUS,  blasphémateur  contre  la  sainte  Tri- 
nité, périt  misérablement  par  la  main  d'un  ange, 
p.  lo:i.  Détail  de  ce  prodige,  ibid.  et  ICI. 

OPhK.VTlOiNS.  Deux  opérations  en  Jésus-Christ, 
p.  703, 704, 765.  Sentiment  du  pape  Honorius  sur  les 
opérations  en  Jésus-Chrisl,  p.  647,618.  Opérations 
théandriques  on  déiiiriles.  Les  monothéliles  abu- 
saient de  celte  expression  pour  soutenir  leur  er- 
reur, p.  704. 

OPPILA.  arien,  ambassadeur  du  roi  d'Espagne 
à  la  cour  de  France,  p.  306. 

OI'rAT,  évêqued'Antibes,  souscrit  au  concile 
de  Paris  de  l'an  573,  p.  307. 

ORAISON.  Traité  des  huit  parties  de  l'Oraison, 
ou  discours,  par  Cassiodore,  p.  237. 

ORAISON  dominicale  expliquée  par  saint  For- 
tunat, p.  108,  109;  par  saint  Maxime,  p.  763:  ré- 
citée à  la  messe,  p.  140  et  5i4;  avant  la  com- 
munion, p.  606  Si  les  apôtres  ne  disaient  point 
d'autre  prière  dans  la  consécration  que  l'Oraison 
dominicale,  p.  5i4. 

ORAISON  mentale  des  moines,  p.  165. 

ORANGE.  Second  concile  d'Orange  en  529,  p. 
832;  ses  canons,  ibid.  el  suiv.  sentiment  de  ce 
concile  sur  la  grâce  et  le  libre  arbitre,  p.  «36,837. 
Autorité  de  ce  concile,  p.  837,838. 

ORARIUM.  Les  évéques  portaient  l'orarium,  p. 
5.  C'était  uneécharpe  de  toile  autour  du  cou.  d'où 
est  venue  notre  étole,  ibid.  et  6. 

ORATOIKES.  Ce  qui  est  nécessaire  pour  la  fon- 
dation des  oratoires,  p  333;  pour  la  consécration 
d'un  oratoire  ou  d'une  église,  p.  487  el.'28.  Céré- 
monies de  la  dédicace  d'un  oratoire,  p.  37.'».  Un 
évéque  ne  peut  construire  ou  consacrer  un  ora- 
toire dans  un  diocèse  dilTérent  du  sien,  sans 
l'agrémont  du  diocésain,  p.  530.  Oratoires  liomes- 
tiques  des  évéques  ou  ils  célébraient  quelquefois 
la  messe,  p.  .569. 

OllATORIE,  aiibpsse  du  monastère  d'Arlue,  p- 
152.  Saint  Césaire  lui  adresse  une  insiruction, ihirf. 

0Ri)lNAT10.\  des  évéques.  Lois  de  l'empereur 
Justinicn,  p.  2.58,2.59,261.262.  Canons  du  3*  con- 
cile de  Paris  toucliant  l'oniination  des  évéques. 
p.  883.  Il  est  défendu  aux  évéques  d'aller  dans 
les  diocèses  de  leurs  confrères  pour  y  ordonni-r 
des  clercs,  p.  857.  Le  pape  Pélagie  permet  d'or- 
donner diacre  un  homme  qui.  après  avoir  perdu 
sa  femme,  avait  eu  dos  enianis  de  sa  servante, 
p.  339.  Défense  d'urdonner  des  fermiers  ou  comp- 
tables, p.  858  Ordinations  simoniaques  défen- 


TADI.K  AN 

(lues,  |i.  Sitt.  Il  ii't'sl  pas  moins  (li'fi;ii(lu  de  rOilO- 
rer  l'ordinalion  qiio  h' baptr'nu',  p.  I811,  571.  Or- 
dination des  priHios  roservée  à  rtivOque,  p.  719. 
Un  Oviique  peut  ordonner  seul  un  prOlre  ou  un 
diacre,  mais  il  ne  peut  le  disposer  <iuc  dans  un 
concile,  p.  9U.  Un  évoque,  en  cas  de  besoin,  peut 
ordonner,  quoique  seul,  un  autre  iWOqne.  p.  025. 
L'ordinateur  doit  prononcer  la  formule  de  l'ordina- 
tion, p.  014,  Explication  d'un  endroitdc  saint  Gré- 
goire où  ce  pape  semble  dire  que  celui  qui  est 
ordonné  par  simonie  ne  l'est  pas  véritablement, 
p.  523.  D'après  saint  Théodore  de  Cantorbéry, 
ceux  qui  par  ignorance  ont  été  baptisés  deux  fois, 
ne  peuvent  élre  ordonnés,  si  ce  n  est  dans  une 
grande  nécessité,  p.  7!i8.  Ceux  (jui  ont  été  ordon- 
nés par  les  Écossais,  c'estii-dire  par  les  Bre- 
tons schismatiques,  doivent  être  réhabilités  par 
l'imposition  des  mains,  ibid.  C'était  l'usage  de 
riiglisc  romaine  qu'un  clerc  ordonné  pour  le 
service  de  cette  église  y  domeuràt  sans  pouvoir 
passer  h  une  autre,  p.  572.  Les  ordinations  doi- 
vent se  faire  par  degrés  différents  et  avec  épreu- 
ve, p.  517,  572. 

OKDRES.  Pour  être  admisauxordres,  il  faut  avoir 
un  bénéfice  suffisant  pour  sa  subsistance,  p.  094. 

URIENTIUS,  évèque  d'Elvire,  est  le  môme  que 
saint  Orient  ou  Orens,  évoque  d'Auch,  p.  lOO,  note 
2,  et  101.  Ses  écrits,  ibid.  et  suiv. 

OKIGÈNE.  Condamnation  d'Origène  au  4"  con- 


ALYTIQUE.  988 

cile  dcConslaniiiiople,  p  «78,  Hiu.  Édit  de  l'em- 
pereur Justinien  contre  lui  ;  erreurs  qu'il  lui 
attribue,  y.  881.  Origénebl;\mé  par  Anastase  Si- 
naïte.  p.  000,  Ooi.  Saint  Soplirone  de  Jésusalem 
condamne  l'erreur  d'Origciie  touchant  la  préexis- 
tence des  ,1ines,  p.  701. 

OKIGENISTES-  Anathémes  contre  les  origé- 
nistes  au  2"  concile  de  Constaniinople,  p.  878. 

ORNEMENTS  àl'usage  des  ministres  de  l'église, 
p.  311. 

OKTHOGRAPITE.  Traité  de  Cassiodore  sur  l'Or- 
thographe, p.  237.  Auteurs  qui  ont  écrit  sur  l'or- 
thographe, ibid. 

OSWl,  roi  <le  Northumbcrland.  Le  papeVitalien 
lui  écrit, p. 782.  Il  lui  envoie  plusieurs  reliques, ifr. 

OTRlilUS,  évéque  de  Mitilène,  met  saint  Eu- 
thymius  au  rang  des  lecteurs,  p.  -272. 

OU DOCÉE  (.saint),  évêque  de  LaudalT  en  Cia- 
morgan,  p.  884. 

OUEN  .référendaire  du  roi  Dagobert,est  ordonné 
évêque  de  Rouen,  p.  730;  il  assiste  en  004  au  3" 
concile  de  Chàlons-sur-Marne  ;  fait  en  077  le 
voyage  de  Rome,  ibid.  Sa  mort,i/ud.  Ses  écrits  : 
sa  vie  de  saiiilEloi,i6id;  ce  qu'elle  contient,  ibid; 
traùuctions  de  cette  vie,  idid.  et  p.  757.  Sa  lettie 
h  l'évêque  Rodobert,  ibid.;  autre  lettre  il  Didier, 
évêque  de  Cahurs,  p.  757.  Discours  à  un  jeune 
roi  attribué  par  Mai  à  saint  Ouen  ou  à  saint  Eloi, 
ibid  et  suiv. 


P. 


PALLADE,  évêque  de  Saintes,  p.  379.  Saint 
Grégoire  de  Tours  lui  envoie  des  reliques  pour 
la  consécration  d'une  église  en  l'honneur  de 
saint  Martin,  p.  379.  Pallade  écrit  à  saint  Gré- 
goire de  Tour-;,  ibid.  Saint  Grégoire,  pape,  lui 
envoie  des  reliques  pour  la  consécration  de  quatre 
autels,  p.  506. 

PALLIUM.  Quand  il  faut  le  porter,  p.  489,  503, 
604,  500.  Conditions  requises  pour  l'obtenir,  p. 
513.  Défense  de  rien  prendre  pour  le  palliura, 
p.  907.  Pallium  accordé  à  Auxanius,  évêque  d'Ar- 
les, par  le  pape  Vigile,  p.  196.  Défense  aux  arche- 
vêques de  dire  la  messe  sans  palliura,  p.  894, 
895.  Le  pallium  de  saint  Marc  se  conservait  en- 
core au  vi»  siècle,  p.  303. 

PANGE  LINGUA,  hymne  faussement  attribuée 
à  saint  Fortunat,  p.  401. 

P.v.^NONCEAUX.  Il  est  défendu  aux  recteurs 
du  patrimoine  de  l'Église  de  mettre  des  pan- 
nonceaux  aux  terres  et  îux  maisons  qui  dépen- 
dei;t  de  ce  patrimoine,  p.  907. 

PANTALÉON,  diacre  et  garde-chartes  de  Cons- 
taiitinople,  p.  791.  On  a  de  lui  cinq  homélies, 
ibid.  On  cite  des  discours  du  même  auteur,  ibid. 
Il  était  prêtre,  ibid.  Edition  de  ces  homélies  dans 
la  Palrologie.  ibid. 

PANTALÉON,  notaire,  p.  531,  791. 

PAPE  Autorité  de  l'empereur  dans  l'élection 
du  pape,  p.  433.  On  payait  une  somme  à  l'empe- 
reur pour  l'inlronisalion  du  Pape,  p.  784.  Il  est 
permis  de  l'ordonner  sans  envoyer  le  décret  de 


son  élection  à  Constaniinople,  p.  785.  Abus  qui  se 
commettaient  dans  l'élection  du  Pape  rofoiiiiés  par 
Boniface  III,  p.  910.  En  l'absence  du  Pape,  l'archi- 
diacre, l'archiprêtre  et  le  primicier  tiennent  sa 
place,  p. 752,  Lettres  synodales  que  les  Papes  en- 
voyaient aux  patriarches,  p.  433. 

PAPIER.  Manière  de  faire  le  papier,  p.  219. 

PAPOLUS,  évêque  de  Chartres,  présente  une 
requête  au  4"  concile  de  Paris,  p.  892,  893. 

PAPULE  (sainte),  déguisée  en  homme,  vit  dans 
un  monastère  lie  religieux,  p.  394,  395. 

PAQUES.  Pour  célébrer  dignement  la  fête  de 
PAques,  il  ne  suffit  pas  d'y  recevoir  le  corps  et  le 
sang  de  Jésus-Christ,  il  faut  encore  pratiquer  des 
o'uvres  de  piété,  etc.,  p.  4.58.  Difficulté  sur  la 
PAque  en  577,  en  578,  p.  389,  390.  Les  Irlandais 
la  célébraient  le  14  de  la  lune,  p.  014.  Saint  Co- 
lomban  est  inquiété  sur  ce  sujet,  ibid.  Il  en  écrit 
au  pape  saint  Grégoire,  p.  624,  625;  aux  évoques 
des  Gaules  assemblés  en  concile,  p.  625  et  suiv.; 
au  pape  Boniface,  p.  627.  Les  évêques  de  Sardai- 
gne  obligés  de  célébrer  la  Pâque  au  jour  marqué 
par  leur  métropolitain,  p.  513.  Défense,  sous 
peine  de  déposition,  à  l'évêque  ou  au  prêtre  de 
célébrer  la  Pâque  avant  léquinoxe,  p.  798.  Ano- 
nyme qui  a  écrit  sur  la  Pàque,  p.  641.  Lettre 
du  clergé  de  Rome  aux  Écossais  touchant  la  Pâ- 
que, p.  619.  Dispute  de  Philoponus  touchant  la 
Pàque,  p.  651.  Lettre  de  Céolfride,  évêque  de  Wi- 
rjinouth,  touchant  la  Pàque,  p.  803. 

PARRAINS.  Leurs  obligations,  p.  130. 


966 


TABLE  ANALYTIQUE. 


PARDULE,  Ovéque  de  Laon,  dresse,  par  ordre 
du  roi  Charles-le-Cliauve.  un  priviU^ge  pour  le 
monastère  d'Ori^ni,  p.  530. 

l'ARTHÉ.Ml's,  patrice  et  mattro  <1cs  offlces. 
Arator  lui  adresse  son  poCuie  sur  les  Actes  des 
apûlres,  p   1d7. 

PAbCHASE,  évoque  de  Naples,  p.  527;  peu  as- 
sidu à  ses  fonctions  i^piscopaies,  p.  530,  bSl. 

PASCHASE,  diacre  schismntique  délivré  du 
purgatoire  par  les  prières  de  Germain,  évèque  de 
Capoue,  p.  478. 

PASTOKAL  de  saint  Grégoire,  p.  462;  traduit 
en  grec,  ibid. 

PATKNES.  Dans  les  premiers  siècles,  elles 
étaient  grandes  et  épaisses,  parce  qu'on  y  met- 
tait les  oblations.de$  fidèles,  p.  5io. 

PATKftIUS,  notais  de  saint  Grégoire,  p.  550. 
Il  fait  des  extraits  des  Morales  de  saint  Grégoire 
sur  Job  et  sur  tous  ses  autres  ouvragesdont  il  fait 
un  commentaire  sur  l'Écriture,  ibid.  et  55t. 

PAIKUNli  saint),  évéque  d'Avranclies.  Sa  Vie 
écrite  par  saint  l'ortunat,  p.  411. 

PATRI.MOINES  de  l'Kglise  romaine.  Règlements 
de  saint  Grégoire  loucLant  ces  patrimoines,  p. 
483,  48i.  Le  patrimoine  de  l'Église  romaine  dans 
les  Gaules  consistait  plus  en  fonds  de  terre  qu'en 
argent,  p.  jOi. 

P.iTROCLlî  isainti  fonde  deux  monastères,  l'un 
de  filles  à  .Néris,  l'autre  d'hommes,  appelé  Co- 
lombiers, p  381.  Sa  Vie  écrite  par  saint  Gré- 
goire de  Tours,  ibid. 

PATRO.N.\GE  Origine  de  ce  droit,  p.  86i. 

PAL'L,  père  (le  saint  Kuthymius,  p.  iTî. 

PAl'L,  patriarche  d'Alexandrie,  était  aupara- 
vaiit  abbé  de  l'ordre  de  fabenne,  p.  304;  est  élu 
pour  succéder  à  Théodose,  envoyé  en  exil,  ibid. 
Il  est  exilé  bientôt  après  en  Palestine,  ibid.;  et 
déposé  par  ordre  de  Justinien,  ibid. 

PAUL  le  Silentiaire,  surnommé  Cyrus  Florus, 
fait  eu  vers  la  description  de  l'église  de  Sainte- 
Sophie,  bâtie  par  l'empereur  Justinien,  p.  31tj. 
Éditions  de  ce  poème,  ibid.  Éloge  de  ce  poème 
par  Agatliias,  p.  347. 

PALL,  diacre  d'Aquilée,  passe  par  Poitiers  et 
y  fait  l'épitapbe  de  saint  Fortunai,  p.  403. 

PAUL  (saint!,  évéque  de  Verdun,  p.  ■!33.  Saint 
Didier,  évéque  de  Caliors,  lui  écrit,  ibid.  Ses 
deux  lettres  à  cet  évéque,  p.  731. 

l'ALL,  patriarche  de  Conslanliiiople,  mono- 
Ihéllle,  envoie  ses  lettres  synodales  au  pape 
Théodore,  p.  748.  Réponse  du  Pape,  ibid.  Théo- 
dore prononce  la  sentence  de  déposition  contre 
Paul,  ibui. 

PAUL,  évéque  de  Thcssalonique,  monothélite, 
condamné  par  le  pape  saint  Martin,  p.  7.5o,  751. 

PAUL,  scliolastique  :  saint  Grégoire  le  Grand 
lui  écrit,  p.  180. 

PAUL,  chargé  de  l'évéché  de  X.iples  :  saint  Gré- 
goire le  Grand  lui  écrit,  p.  487,  491. 

PAUL,diacredeMérida.  Son  ouvrage  delà vieel 
des  miracles  des  ;  aintsde  l'église  de  .Mérida,p.67G. 

PAULIN,  moine  envoyé  en  Angleterre  par  saint 
Grégoire,  p.  438. 

PAULIN  (.saint),  évéque  de  Noie.  Action  hé- 


roïque que  saint  Grégoire  le  Grand  en  rapporte, 

p.  475. 

PAULIN,  évéque  d'Afrique  accusé  d'avoir  mal- 
traité ses  clercs  sans  sujet  ;  concile  tenu  à  cette 
occasion,  p.  910. 

PAULIN,  évéque  de  Taur,  transféré  à  Lipari, 
p.  487. 

PÉCHÉ.  La  source  de  tout  péché  n'est  autre 
que  l'amour  déréglé  par  lequel  la  créature  rai- 
sonnable renverse  l'ordre  que  Dieu  avait  éta- 
bli dans  le  monde,  etc.,  p.  13.  Il  n'y  a  point  de 
péché  irrémissible,  p.  31.  Le  péché  contre  le 
Saint-Esprit  que  l'Écriture  dit  n'être  pas  rémis- 
sible  est  l'impénitence  linale,  p.  54.  Différence  en- 
tre les  péchés  des  justes  et  ceux  des  méchants, 
p.  30.  Les  saints  et  les  justes  ne  peuvent  être  en 
ce  monde  sans  péchés,  p.  68.  Plusieurs  péchés 
légers  en  font  un  considérable  suivant  saint  Isi- 
dore; encore  que  l'on  obtienne  le  pardon  de  ses 
péchés  par  la  pénitence,  l'on  ne  doit  pas  être 
sans  crainte  jusqu'à  la  fin  de  la  vie,  p.  7-22. 

PÉCHÉ  ORIGINEL.  Sentiment  du  moine  Jobius 
sur  le  péché  originel,  p.  i82;  de  Cassiodore.  p. 
248,  249;  de  saint  Grégoire  le  Grand,  p.  .564,  565  ; 
d'Atiastase  le  Sinaïte,  p.  601;  de  Mire  l'Ermite, 
p.  0.39.  Les  Ames  de  tous  les  enfants  qui  naissent 
contractent  le  péché  originel,  et  le  sacrement 
du  saint  baptême  est  nécessaire  ii  tous  pour 
rompre  le  lien  du  péché  d'origine,  p.  44.  Il  est 
remis  par  le  baptême,  p.  398  et  -104,  000,  764.  Dire 
que  les  enfants  ne  contractent  point  le  péché 
originel,  c'est  nier  que  leur  chair  soit  une  chair 
de  péché,  etc.,  p.  46.  Les  enfants  qui  meurent 
sans  baptênie  sont  damnés  à  cause  du  péché  ori- 
ginel, p.  42,  67.  Jésus-Christ  a  choisi  le  supplice 
de  la  croix  pour  nous  délivrer  du  péché  originel, 
p.  liO.  D'après  saint  Julien,  archevêque  de  Tolède, 
le  péché  originel  n'est  effacé  que  quanta  lacoul- 
pe,  et  non  quant  ;'i  la  peine  temporelle,  p.  792. 

PEINTURES  dans  les  églises,  p.  333,  331. 

PELAGE,  diacre  de  l'Église  romaine,  va  àCons- 
lantinople  en  :30  avec  le  pape  Agapet  qui  le  dé- 
clare son  apociisiaire  à  Coiistantinople,  p.  327  ; 
il  favorise  l'élection  du  pape  Vigile,  ibid.  Justi- 
nien l'envoie  en  Palestine  pour  défendre  Paul 
d'Alexandrie  ;  il  poursuit  avec  .Mennas  la  con- 
daiiination  d'Origène,  ibid.;  Pelage  retourne  à 
Rome,  fléchit  Totila,  écrit  sur  les  Trois-Cha- 
pitrcs,  ibid.  et  328;  il  accompagne  le  pape  Vigile 
à  Constantinople  en  547;  il  est  élu  pape  on  555 
pour  succéder  i  Vigile.  On  le  soupçonnait  d'a- 
voir eu  part  à  la  mort  du  Vigile  ;  il  s'en  justiOe 
par  serment,  p.  328-  Sa  mort  en  559,  ibid.  Les 
lettres  de  Pelage  sont  au  nombre  de  16  :  au  patrice 
Narsès,  p.  328  et  suiv.  ;  aux  prêtres  de  Toscane, 
p.  330;  à  tout  le  peuple  de  Dieu,  ibid.;  h  Sapau- 
dus  archevêque  d'Arles,  p.  331  ;  au  roi  Childe- 
bert,  ibid.  l'iagments  de  quelques  autres  lettres 
du  pape  Pelage,  p.  332,  333.  Édition  des  lettres 
de  Pelage  dans  la  Patrologie,  p.  328,  note  5. 

PELAGE  II,  pape,  succède  i  Benoît  surnommé 
Donosc,  p.  33i  ;  il  envoie  le  diacre  Grégoire  à 
Constantinople  pour  solliciter  ilu  secours  con- 
tre les  Lombards  ijui  iiOligeaienl  Rome,  ibid.  Ses 


TABLK  ANALYTigUE. 


a(J7 


lollres  il  r.rc'goire,  diacre  tlo  IVgliso  romaine;  à 
!..uiit  Aiiiiacaire,  évC(|iie  d'Auxorre,  ibid.  et  335; 
aux  ('vOqiies  d'Islrie  (jui  pcrsi^vi^raient  dans  le 
scliisnif  pour  la  défonso  des  Trois- Chapitres,  p. 
335  et  suiv.  ;  lettre  à  Jean,  ùvOque  do  Oonstanti- 
nople,  p.  338  ;  lellros  supposik-s,  p.  339 -,  décrets 
qui  lui  sont  attribués,  ibid.  et3l0.  Mort  de  Pelage, 
p.  339  et  133.  Il  avait  fait  saint  Grégoire  son  secré- 
taire, p  371  et  43i.  Grégoire  lui  succède,  p.  371 
et  133. 

PELAGE,  évêque  de  Tours,  p.  506. 

PELAGE,  hérétique.  Son  hérésie  renouvelée 
en  Ecosse,  p.  649. 

PÉNITENCE.  Sentiment  de  Cassiodore  sur  la 
pénitence,  p.  249;  de  saint  Grégoire  le  Grand  sur 
la  pénitence  et  le  pouvoir  des  clés,  p.  509,  570. 
La  pénitence  est  vaine  lorsqu'on  désespère  de 
l'indulgence,  et  c'est  inutilement  que  l'on  espère 
la  rémission  de  ses  fautes,  lorsqu'on  n'en  fait 
pas  pénitence,  p,  31.  En  (juoi  consiste  la  vraie 
pénitence,  p.  lUO,  570,  571, 713.  Erreur  de  ceux  qui 
croient  qu'après  une  pénitence  de  trois  ans,  on 
peut  s'abandonner  au  désordre,  p.  431,  523.  Péni- 
tence sacramentelle  refusée  en  France  àceux  qui 
étaient  condamnés  imort,  accordée  en  secret,  p. 
391.  Pénitence  a  l'article  de  la  mort.  Sentiment  de 
saint  Césaire,  p.  137.  Pénitence  publique,  p.  137, 
138  Crimes  qui  y  étaient  soumis,  p.  138.  Ceux 
qui  ont  fait  pénitence  publique  sont  exclus  de 
la  cléricature,  p.  814.  Les  clercs  n'y  étaient  point 
soumis  p.  719.  Pénitence  imposée  aux  nouveaux 
mariés.p.  798.— Règlesduconciled'Epaone  sur  la 
pénitence,  p.  815;  du  concilede Tolède,  en  589,  p. 
902;duconcile  deLérida,  p.  824  et  suiv.  Pénitence 
abrégée  du  temps  de  Théodore,  archevêque  de 
Cantorbér  y,p.798.Degrés  delà  pénitence  publique, 
p.  092.  Jean,  abbé  de  Raïthe,  rapporte  aux  apô- 
tres l'établissement  des  divers  degrés  de  péni- 
tence, p.  691,  692.  —  Pénitence  des  clercs,  p. 
573,574. 

PÉNITENTS.  Manière  de  vivre  des  pénitents, 
p.  137, 138.  Descripiion  du  monastère  des  péni- 
tents, p.  681,  682.  Coutume  établie  en  France  de 
couper  les  cheveux  aux  pénitents,  p.  394.  On 
les  couvrait  d'un  cilice  et  on  répandait  des  cen- 
dres sur  leur  tête,  p.  7i9,  Communion  accordée 
aux  pénitents,  p.  793. 

PENIIENTIEL  de  saint  Colomban,  p.  620,  621. 
Autre  Pénitentiel,  p.  621,  622.  Pénitentiel  de  saint 
Cuméen,  p.  622. 

PERSE.  État  du  christianisme  dans  la  Perse 
au  vi"  siècle,  p.  188. 

PERSES.  Us  ravagent  l'Orient  sous  l'empereur 
Héraclius,  p.  697.  Conversion  d'un  grand  nombre 
de  Perses  sous  l'empereur  Maurice,  p.  745.  Vic- 
toire d'Héraclius  sur  les  Perses,  ibid. 

PETIT  CERF,  superstition  païenne,  p.  139. 

PlIiRAMOND.  S'il  ajeté  les  premiers  fonde- 
ments de  la  monarchie  française,  p.  S95. 

PHILIPPE,  maître  de  la  milice;  saint  Grégoire 
lui  écril,  p.  4S3. 

PHILOMARIANITES  hérétiques,  qui  offraient 
du  pain  en  l'honneur  de  Marie,  p.  670. 

PIllLO.N,  évêque  de  Carpalhie.  On  lui  attribue 


un  commenlaire  sur  le  Cantique  des  cantiques, 
et  un  autre  sur  les  six  jours  de  l.i  création,  p.  189. 

PHOCAS  fait  mourir  .Miiuricc  et  ses  enfants, 
p.  410.!Phocas  csl  fait  empereur  en  002,  et  est  re- 
connu il  Kome,  p.  531.  Saint  Grégoire  lui  écrit, 
ibid.,  et  lui  envoie  un  nonce,  ihiit. 

PIERRE,  nom  donné  au  baptême  ^  Aspcbète, 
prince  des  Sarrasins,  p.  273. 

PIERRE,  laïc:  saint  Fulgence  lui  adresse  son 
livre  de  la  Foi,  p.  63. 

PIERRE,  évêque  des  Sarrasins,  p.  273. 

PIERRE  (saint).  Si  saint  Pierre  et  saint  Paul 
ont  souffert  le  martyre  le  même  jour  et  la  même 
année,  p.  197  et  374;  quelques  anciens  ont  pensé 
qu'ils  souffrirent  le  martyre  le  même  jour,  mais 
non  pas  la  même  année,  p.  197,  190,  574;  cette 
opinion  improuvée  dans  le  décret  de  Gelase,  p. 
198. 

PIERRE,  évêque  d'Apamée.  Plaintes  contre  lui 
p.  822. 

PIERRE,  frère  de  s;iint  Grégoire  de  Tours,  guéri 
par  les  reliques  de  suint  Julien,  p.  375;  celte  opi- 
nion improuvée  dans  le  décret  de  Jclase,  p.  198. 

PIERRE,  diacre,  ami  de  saint  Grégoire  le  Grand, 
p.  473. 

PIERRE,  sous-diacre,  vicaire  du  Saint-Siége  et 
recteur  du  patrimoine  de  Sicile,  p.  480. 

PIERRE,  du  rang  des  Illustres,  à  qui  le  pape 
saint  Martin  écrit,  p.  750. 

PIERP.E,  acolythe  de  l'Église  romaine,  fugitif. 
Saint  Grégoire  lui  interdit  la  communion  du 
corps  et  du  sang  de  Jésus-Christ  jusqu'à  son  re- 
tour, p.  510. 

PIERRE,  notaire.  Saint  Gré^'oire  le  Grand  lui 
écrit,  p.  486. 

PIERRE,  évêque  de  Terracine.  Saint  Grégoire 
lui  écrit  en  faveur  des  Juifs,  p  483.  Il  lui  écrit 
d'autres  lettres,  p.  484. 

PIERRE,  évêque  de  l'île  de  Corse.  Saint  Gré- 
goire le  Grand  lui  écrit,  p.  510. 

PIERRE,  sous-diacre  de  Campanie.  Saint  Gré- 
goire le  Grand  lui  écrit,  p.  191. 

PIERRE,  patriarche  intrus  d'Alexandrie,  mo- 
nothélite,  p.  750. 

PIERRE  de  Laodicée.  Son  explication  de  l'O- 
raison dominicale,  p.  787,  788.  Son  commentaire 
sur  les  quatre  Évangiles  existe  manuscrit.  On  en 
a  publié  des  fragments,  p.  788. 

PIMÉNIUS,  évêque  d'Amalû,  p.  505. 

PINTA,  évêque  arien,  p.  7.  On  attribue  à  saint 
Fulgence  un  livre  de  to  Foi  contre  cet  hérétique, 
mais  il  n'est  pas  de  lui,  p.  69. 

PL.VCIDE  isaint),  disciple  de  saint  B;noît,  p. 
157.  Sa  mission  en  Sicile  ;  son  martyre  ;  transla- 
tion de  ses  reliques,  p.  159. 

PLATON,  évêque  de  Poitiers,  p.  379. 

POITIERS.  Troubles  excités  dans  le  monastère 
de  Sainte-Croix  de  Poitiers,  p.  905,  900. 

POLYCHRONE,  prêtre  et  moine  raonotliélite.  Le 
pape  Léon  II  l'anathématise,  p.  784. 

POLYELCTE  (saini) ,  martyr,  p.  272.  Église 
bàlie  sons  son  nom  près  de  la  ville  de  .'ilélitène 
sur  lEuphrate,  itid. 

PONTIEN,  évêque  d'Afrique.  Sa  lettre  àl'em- 


TABLE  ANALYTIQUE. 


jierciir  Jiistlnicn  où  il  lui  lopr.^senle  qu'en  i-oii- 
daninaiil  les  Trois  Cliapilrcs.  on  pouvait  faire 
revivre  llR^résie  cutycliicnnc,  p.  l'.'8.  Édilion 
de  celle  lettre,  ibid. 

POnCMllK,  abhé  de  '  l'rinf,  p.  Iî5. 

PORI'IlYni:.  JusUiiieii  ordonne  de  brûler  ses 
livres  p.  -201. 

PORTIEN  (saint),  abbé.  Sa  Vie  par  saint  Gré- 
goire de  Tours,  p.  380. 

l'OUTIEUS.  Leurs  fonctions,  p.  907. 

PU  EDESTINATUS.  L'auteur  de  cet  ouvrage 
était  infecté  de  lliérésie  pelagiinne,  p.  981.  Ce 
n'est  pas  celui  que  l'riinase,  évoque  d'Adrumel, 
avait  fait  sur  les  hérésies,  ibid. 

l'KÉCEPTKS.  Le  libre  arbitre  n'est  pas  capable 
de  les  acconi;>lir,  s'il  n'est  aidé  de  Dieu,  p.  Ja. 

PKÉDESTl.N  vriUN.  Sentiment  de  saint  Augus- 
tin sur  la  prédestinatiiMi.  expliqué  par  saint  l"ul- 
gence,  p.  10  et  suiv.  Sentiiiieiit  des  évéques  d'A- 
frique, p.  12  et  suiv.;  de  saint  Grégoire  sur  la 
prédestination  et  la  réprobation,  p.  !>G-2  Prédes- 
tination purement  gratuite  établie  par  saint 
Fulgence,  p.  56  et  suiv.  I.a  prédestination  ne 
peut  être  sans  la  prescience,  mais  la  prescience 
peut  êirc^  sans  la   prédestination,   etc.,  p.  M. 

PKEDESTl.NÉS.  C'est  gratuitement  que  Dieu 
appelle  les  prédestinés,  qu'il  justilie  ceux  qu'il 
appelle  et  qu'il  gloiilie  ceux  qu'il  justilie,  p.  12 
et  13.T0US  ceux-là  sont  prédestinés,  dont  Dieu  veut 
qu'ils  soient  sauvés,  p.  43.  Aucun  de  ceux  qui  sont 
écrits  dans  ses  décrets  éternels  pour  être  du 
nombre  des  prédestinés,  ne  périra  jiinais,  p.  41, 
61.  Le  nombre  des  prédestinés  est  certain  et  as- 
suré de  la  part  de  Dieu,  p.  61  et  62. 

l'UESCUlPTION.  L'empereur  Justinien  accorde 
à  l'Église  romaine  une  prescription  de  cent  ans, 
p.  i'S7.'  Prescription  dans  les  causes  ecclésiasti- 
ques, p.   914. 

l'KÉTE.VTAT  (saint),  archevêque  de  Rouen, 
marie  contre  les  régies  Mérovée  avec  Brunehaut, 
p.  :Hi.  Il  est  déjiosé  pour  ce  sujet  dans  le  cin- 
quième concile  de  Paris  et  exilé,  ibid.  Il  est  ac- 
cusé dans  un  concile  de  Paris.  Saint  Grégoire 
de  Tours  prend  hautement  sa  défense,  p.  366. 
Rappelé  de  son  exil,  il  assiste  |au  deuxième  con- 
cile de  Mâcoii.  ibid.  Il  est  assassiné,  ibid.  La 
reine  l'rédégonde  est  accusée  de  ce  crime,  ibid. 
Formules  de  prières  que  saint  Grégoire  de  Tours 
attribue  à  Prétextât,  ibid. 

PRÊTRES.  Chez  les  Grecs  ils  peuvent  consa- 
crer les  vierges,  réconcilier  b'S  pénitents,  p.  798. 

PRIÈRE.  Lettre  de  saint  Fulgence  sur  la  prière 
et  la  componction  du  cceur,  p.  29.  Lis  prêtres, 
même  en  voyage,  se  levaient  la  nuit  pour  prier, 
p  376.  Prières  et  sacrilices  pour  les  morts,  p. 
603.  Voyez  Morts.  Nous  devons  prier  pour  nos 
princes,  fussent-ils  juifs,  inlidèles  ou  hérétiques, 
ibid.  Prière  de  Cassiodore,  p.  23a. 

PRIMASE,  évêque  d'Adrumet,  disciple  de  saint 
Augustin,  se  trouve  au  concile  de  Conslaiitino 
pie  tenu  par  le  pape  Vigile  contre  Théodore  de 
Césaréc,  p.  2H3.  Il  refuse  de  se  trouver  au  cin- 
quiiine  concile  général  tenu  ."i  Constaiitiiiople, 
ibid.  Il  se  déclare  défenseur  des  Trois-  hapHrei, 


et  il  est  relégué  dans  un  monasière,  p.  2si. 
Il  les  abandonne,  est  rétabli  et  devient  primat 
de  la  Ityzacène,  ibid.  Il  est  ensuite  déposé  par 
les  défenseurs  des  Trois  Chapitres ,  ibid.  Ses 
commentaires  sur  l'Apocalypse  et  sur  les  Épitres 
de  saint  Paul,  ibid.  Éditions  qu'on  en  a  faites, 
ibid.  L'ouvrage  qu'il  avait  composé  sur  les  hé- 
résies est  perdu  :  ce  n'est  pas  le  Prœdeslinalus, 
ibid. 

PRLMATS  en  Afrique.  Règlement  de  saint  Gré- 
goire sur  ces  primats,  p.  485,  486. 

PRI.'»IAIITÉ  de  saint  Pierre,  p.  509,  556,  557. 

PHl.MIGÉNIL'S,  sous-diacre  régionnaire  de  l'É- 
glise romaine,  ordonné  évéque  de  Grade,  p.  647. 

PRINT-E.  Devoirs  d'un  bon  prince,  p.  213. 

PRINCIPE,  évéque  de  Soissons,  frère  de  saint 
Rémi,  p.  76. 

l'RlSi'.ILLIANlSTES,  hérétiques.  Ils  ensei- 
gnaient que  les  astres  présidaient  à  la  naissance 
des  rois,  p.  I.'jO. 

PRISONNIERS  doivent  être  visités  tous  les  di- 
manches par  l'archidiacre  ou  le  prévOl  de  l'é- 
glise, p.  864. 

PRISQUE,  évêque  de  Lyon,  p.  898,  préside  au 
second  concile  de  M&con,  ibid.  Il  est  nommé  pa- 
triarche dans  la  préface  des  canons  de  ce  concile, 
ibid- 

PRISQUE,  juif.  Saint  Grégoire  de  Tours  entre 
en  conférence  avec  lui,  p.  366. 

PRIVILÈGE  accordé  au  monastère  de  Saint- 
Denis  en  France,  p.  ';39.  Formule  d'un  privilège 
accordé  à  un  monastère  par  l'évêque  diocésain, 
p.  710.  Saint  Germain  accorde  un  privilège  au 
monastère  qui  porte  aujourd'hui  son  nom  dans 
un  des  faubuurgs  de  Paris,  p.  nil. 

PRIVILÈGES  donnés  aux  monastères  par  saint 
Grégoire,  p.  908.  Ce  Pape  confirme  les  privilèges 
que  le  pape  Vigile  avait  accordés  i  un  monas- 
tère d'Arles,  p.  518.  Privilèges  pour  le  monas- 
tère de  Saint  André  et  de  Sainv- Thomas  de 
Rimini.  p.  .188;  pour  le  monastère  de  Saint-Jean 
de  Classe,  p.  5ii;  pour  les  monastères  d'Aulun, 
p.  529;  pour  l'abbaye  de  Saint-Cassien  de  Mar- 
seille, p.  507;  pour  le  monastère  d'Origny,p.  530. 
Le  privilège  de  saint  Médard  de  Soissons.  est 
faussement  attribué  à  saint  Grégoire,  p.  536. 

PROBA,  su>ur  de  Galla,  consacrée  Dieu  sa  vir- 
ginité, p.  27.  Saint  Fulgence  lui  écrit,  ibid.  et 

p.  28. 

PROBIEN,  évêque  de  Bourges,  assiste  au  se- 
cond concile  de  Paris,  p.  88'.'. 

PROBUS,  abbé  du  monastère  de  Saint-André, 
fait  un  traité  avec  Agilulphe,  roi  des  Lombards, 
p.  517.  Saint  Grégoire  permet  à  Probus  de  faire 
testament,  p.  536,  537. 

PROCÈS.  C'est  une  chose  messéan te  à  un  évo- 
que d'être  convaincu  par  la  perle  d'un  procès  d'en 
avoir  entrepris  d'injustes,  p.  2ii. 

PROCESSIONS.  Défense  aux  laïques  d'en  faire 
sans  la  présence  de  l'évêque  et  de  son  clergé, 
p.  260.  Processions  ordonnées  par  saint  Grégoire 
dans  les  calamités,  p.  462.  Procession  des  Roga- 
tions avant  l'Ascension,  p.  380. 

PROCOI'Ë  surnommé  de  Gaie,  d  une  ville  de 


TABLE  ANALYTIOUK. 


•JGI) 


Pht'nicio  où  il  faisait  sa  demeiiro:  temps  où  il 
florissait:  jes  éludes,  p.  17G.  Son  commentaire  sur 
rUeplaleuque,  c'est-.';  dire  sur  les  cinti  livres  do 
Moïse,  le  livre  de  Josué  et  celui  des  Juges,  ihid.  ; 
autres  sur  les  livres  des  Rois  et  des  Paralipo- 
mônes  et  sur  Isaïe,  ibid.  Ce  qu'il  y  a  de  remar- 
quable dans  ces  commentaires,  ibid.  et  suiv.  Ou- 
vrages publit^s  par  Mai.  p.  178,  179.  Jugement 
sur  son  style,  p.  179.  Éditions  et  tradiiclions 
qu'on  a  faites  de  ses  œuvres,  p.  179.  Éditions 
dans  la  Patrologie,  ibid.  et  180.  Écrits  de  l'rocope 
de  Gaze  qui  sont  p,  idus,  p.  179. 

PKOCESSION  du  Saint-Esprit,  p.  .558. 

l'nODlGKS  en  France,  p.  370. 

rUOFESSEL'RS.  Ordonnance  d'.Vthalaric  pour 
les  appointements  des  professeurs  de  grammaire, 
de  rluMorique  et  de  droit,  p.  209. 

PROKE.-^SION  monastique;  elle  remet  les  po- 
cbtis,  comme  ils  sont  rerais  dans  le  baptême,  se- 
lon saint  Théodore  de  Cantorbéry.  p.  797. 

PUOFITURUS,  évéque  de  Brague  en  Lusilanie, 
consulte  le  pape  Vigile,  p.  195,  190. 

PROPHÉTIE.  Sa  définition,  par  Junilius,  p.  282. 
I.'esprii  de  prophétie  n'est  pas  inan.issible,  p. 
224. 

PR0T.4DE  (saint\  évêque  de  Besançon.  Son 
traité  sur  les  rits  ecclésiastiques,  p.  63-2;  il  n'est 
pas  venu  jusqu'à  nous,  ibid.  '•'.&  que  nous  en  sa- 
vons, ibid.  Sa  liturîîie,  ibid.  .Mort  de  sain)  Pro- 
tade,  iiid.  Calendrier  de  saint  Protade,  p.  633. 

PROTAIS,  évéque  d'Aix,  p.  506. 

PSALMODIE.  Traité  de  saint  Nicétius  intitulé 
Du  bien  delà  psalmodie,  p.  205,  206  Ordre  de  la 
psalmodie  selon  la  Règle  de  saint  Coloniban,  p. 
019.  Psalmodie  perpétuelle  établie  dans  les  mo- 
nastères d'Agauue,  de  Saint-Jean  de  Laon,  de  Re- 
mireraont  et  de  Luseuil  sous  l'abbé  Valdêbert,  p. 
614.  Le  roi  Contran    tablit  la  psalmodie  perpé- 


tuelle dans  le  monastère  de  Saint-Marcel  dcCbâ- 
lun-sur-Saône.  p.  745. 

PSAUMES.  David  est  auteur  des  150  psaumes, 
p.  2il;  il  les  a  composés  par  l'inspiraliou  du 
Saint-Esprit,  p.  188.  Commentaire  de  Oassiodore 
sur  les  Psaumes,  p.  222  et  suiv.  Remarques  gé- 
nérales sur  les  Psaumes,  p.  223,  224.  Diverses 
manières  de  les  cbanler,  p.  224.  On  les  cliantait 
tous  les  jouis  dans  les  assemblées,  p.  004.  Un 
évêque  doit  les  savoir,  p.  572-  Ce  que  signifle 
le  terme  pour  la  fin  dans  les  Psaumes,  \t.  224. 
Différence  entre  psaume  et  cantique,  etc.,  ibid.  Ce 
qu'on  entend  par  Diipsalma,  ihid.  et  '22'i-  Divi- 
sion des  l's  lunics,  p.  225.  Co^1ment  il  est  parlé 
de  Jésus-Christ  dans  les  Psaumes,  ibid.  Des- 
sein de  Cassiodore  dans  son  commentaire  sur 
les  Psaum3s,  p.  225-  Éloquence  de  l'Écriture  et  en 
particulier  des  Psaumes,  ibid.  et  226. 

PULCllÉRIE  (l'impératrice)  donne  tout  son 
bien  aux  pauvres,  p.  104. 

PURGATOIRE.  Explication  d'un  passage  de 
saint  Jean  Cliinaque,  qui  semble  combattre  la 
doctrine  de  l'Église  sur  le  Purgatoire,  p.  687. 
D'après  saint  Isidore  do  Séville,  il  y  a  des  pé- 
chés qui  sont  pardonnes  en  l'autre  monde  et  qui 
sont  purifiés  par  le  feu  du  Purgatoire,  p.  "17. 
Sentiment  de  saint  Césaire  sur  le  Purgatoire,  p. 
133,  13;,;  de  saint  Grégoire  le  Grand,  p.  580; 
de  saint  Julien,   archevêque   de  Tolède,  p.  792. 

PVRRIIUS,  patriarche  de  Coustantinople,  mo- 
nolhélite,  p.  649.  Sa  conférence  avec  saint  Maxi- 
me, p.  761;  sa  rétractation  à  Rome,  sa  rechute 
et  sa  condamnation,  p.  748,  761.  Lettre  de  saint 
Maxime  à  Pyrrhus,  p.  769;  il  est  anathématisé 
par  le  pape  Léon  II,  p.  784. 

PYTIIONISSE.  D'après  Anastase  le  Sinaïte,  elle 
évoqua  véritablement  l'âme  de  Samuel  à  la  prière 
de  Sadl,  p.  603. 


Q. 


QtJIMIEN  (saint),  évêque  de  Rodez,  chassé  par 
les  Goths,  p.  380.  Sa  Vie  écrite  par  saint  Grégoire 
de  Tours,  ibid. 

QUIRICIUS,  évêque  dTbérie,  p.  526. 

QUIRICIUS,  évêque  de  Barcelone,  p.  773.  Saint 
Ildefonse,  archevéq.ie  de  Tolède,  compose  sou 
livre  de  la  Virginité  perpéluelte  de  la  sainte 
Vierge  à  la  prière  de  cet  évêque,  p.  773.  Taïon, 
évêque  de  Saragosse,  lui  adresse  les  cinq  livres 
des  Sentences,  p.   776.  Lettre  de  Quiricius  à 


Talon;  éloge  du  recueil  des  Sentences,  p.  777 
QUIRICIUS,  archevêque    de  Tolède,   a  pour 
successeur  saint  Julien,  p.  791  j  le  pape  Léon  II 
lui  écrit,  p.  784.  • 

QUODVULTDEUS,  évêque  d'Afrique,  dispute  à 
saint  Fulgence  la  préséance  dans  un  concile, 
p.  9. 

QUODVULTDEUS,  abbé  du  monastère  de  Saint- 
Pierre  de  Rome,  p.  335. 


R. 


UADEGOXDE  (sainte),  reine  de  France,  épouse 
Clotaire,  se  fait  ensuite  religieuse,  p.  31j;  ellebàtit 
le  monastère  de  Sainte-Croix  à  Poitiers,  îhit/.  et 
905;  elle  écrit  aux  évêques  assemblés  à  Tours 
en  560,  p.  316;  demande  à  l'empereur  Justin  du 
bois  de  la  vraie  croix,  tdid.,  et  en  obtient,  ibid., 
372  et  411-  Son  testament,  p.  316.  Lettre  de  sainte 
Césarie  à  sainte  Radegonde ,  p.  317;  lettre  de 
sainte  Uadegonde  aux  rois  Chilpéric  etSigebert, 

XI. 


ibid.  et  318.  Sa  mort,  p.  318.  Sa  Vie  écrite  par  saint 
Fortunat,  p.  412.  Baudoiiivie  écrit  un  supplé- 
ment à  la  Vie  de  sainte  Radegonde,  p.  414;  édi- 
tion de  ces  vies  et  du  testament,  p.  3ls.  Mira- 
cles opérés  au  tombeau  de  cette  sainte,  p.  4i5. 

RAI.NO.N,  évêque  d'Angers,  auteur  de  la  vie 
de  saint  Maurille,  p.  412. 

RAPT .  Les  ravisseurs  de  religieuses  ou  de 
diaconesses  sont  punis  de  mort,  p.  2C0. 

64 


970 


TABLE  ANALYTIQUE. 


REB.MS.  Monastère  fondé  par  saint  Ouen,  p. 756. 

REBAPTIS.iTION.  Défense  aux  liJèles  de  man- 
ger avec  ceux  qui  se  sont  fait  rebaptiser,  p.  826. 

RliCARÈDE,  fils  de  Lévipilde,  roi  des  Visi- 
goths,  se  convertit  à  la  foi  catliolique,  recuit  le 
signe  de  la  croix  avec  le  saint  clnêine,  c'est-à- 
dire  la  confirmation,  p.  389,  .12:3.  Éloge  que  saint 
Grégoire  en  fait,  p.  515  et  blO-,  il  lui  écrit  et  lui 
envoie  des  présents,  ibid.  Récarède  convertit 
ses  sujets;  il  assemble  un  concile  à  Tolède  on 
589,  p.  899,  900  ;  il  fait  une  constituiion  contre 
les  Juifs,  p.  5Ui. 

RÉCO.NCILIATION.  Saint  Jean  l'Aumônier  re- 
fuse la  communion  ù  un  diacre  qui  m  voulait  pas 
se  réconcilier  avec  un  homme  qui  l'avait  fùcbé, 
p.  659,  600. 

RKDIiMI'TUS,  évoque  de  Férente,  p.  m. 

RÉDli.MPTL'S,  arctiidiacre  et  disciple  de  saint 
Isidore  de  Séville,  p.  722. 

RÉGIN  lie  comte)  consulte  saint  Fulgence  sur 
la  corruptibilité  ou  l'incorruptibilité  du  corps 
de  Jésus-Cbrist,  p.  50. 

RÈGLE  du  Maîlre,  p.  739. 

RÈGLES  de  saint  Césaire  pour  les  moines  et 
les  religieuses,  p.  117  et  suiv.  Analyse  de  la  Rè- 
gle pour  les  religieuses,  ibid.  et  suiv.  Régie  pour 
les  moines,  p.  lio  et  suiv.  Règle  de  saint  Benoît, 
p.  161.  Analyse  de  cette  Règle, iiiiii.  et  suiv.  Éloge 
de  cette  Règle,  p.  161,  170.  Elle  est  mise  en  vers 
par  l'abbé  Simplice,  p.  350  ;  elle  s'établit  dans 
plusieurs  monastères,  p  617.  Règle  donnée  par 
saint  Ferréol,  p.  312  et  suiv. 

RÈGLEMENTS  de  saint  Grégoire  pour  les  reli- 
gieuses, p.  510,  517,  575,  570.  Règlements  du  con- 
cile de  Séville,  p.  915. 

RELIGIEUSES.  Trois  raille  religieuses  de  Ro- 
me, nourries  par  saint  Grégoire,  p.  509;  leur 
sainteté,  ibid.;  religieuses  recommandées  par 
saint  Justinien,  p.  2i0. 

RELIGIO.N.  Les  rois  ne  peuvent  commander 
à  personne  d'embrasser  une  religion,  parce  que 
l'on  ne  croit  pas  par  l'ellet  de  la  contrainte,  p.  214. 

RELIQUAIRE  porté  par  saint  Grégoire,  p.  410. 

RELIQUES,  défense  d'en  mettre  dans  les  ora- 
toires de  la  campagne,  s'il  n'y  a  des  clercs  dans 
le  voisinage  pour  y  venir  faire  l'olBce,  p.  816. 
Sentiment  de  Léonce,  évéque  de  Naples,  sur  le 
C'Jlte  des  reliques,  p.  664,  60'>.  Honneur  qu'on 
leur  rend,  p.  789.  La  coutume  de  l'Église  ro- 
maine et  de  tout  l'occident  était  de  ne  pas 
toucher  aux  corps  des  saints,  etc.,  p.  498,  577. 
Les  linges  qu'on  approcliaitdes  corps  saints  s'en- 
voyaient comme  des  reliques  et  faisaient  des 
miracles,  p.  49H,  .577.  Les  chaînes  de  saint  Taul 
faisaient  beaucoU|i  de  rairacles:  on  envoyait  de 
la  limaille  de  ces  chaînes,  p.  498,  499,  577.  Saint 
Grégoire  envoie  au  roi  Récarède  un.'  clef  où  il  y 
avait  du  fer  des  chaînes  de  saint  l'ierre  et  une 
croix  qui  renfermait  du  bois  de  la  vraie  croix, 
p.  510.  Reliques  de  saint  Pierre,  p.  483,  492,  .504, 
609,  077,  578.  Reliques  de  saint  Jean-llaptiste, 
p.  373,  516,  578.  Les  reliques  de  saint  Martin 
guérissaient  les  malades,  p.  378,  379.  Trans- 
lation de  reliques  quelquefois  permise,   p.  578, 


Quand  on  apportait  des  reliques  à  quelque 
église,  on  allait  au  devant  avec  des  cierges  allu- 
més, p.  388,  389.  Reliques  portées  dans  de  longs 
voyages,  p.  389.  Reliques  éprouvées  par  le  feu, 
ibid.  et  906.  Reliques  incertaines  supprimées,  p. 
520,  578,  579. 

REMI  (saint),  évéque  de  Reims  et  apdtre  des 

Français:  sa  naissance,  p. 70;  son  éducation:  ses 
mœurs,  p.  77.  11  se  retire  dans  la  solitude,  ibid. 
Il  est  fait  évéque  de  Reims,  ibid.  Eloge  que  saint 
Sidoine  Apollinaire  fait  de  son  gouvernement, 
ibid.  Eloge  qu'il  fait  de  ses  écrits,  ibid  et  78. 
Conversion  de  Clovis.  instruit  et  baptisé  par  saint 
Rerai,  p.  78,  79.  Lettre  de  saint  Renii  a  Clovis, 
p.  79,  80.  Autre  lettre  au  même,  p.  80.  Lettre  à 
Héracle,  évoque  de  Paris,  et  à  deux  autres  évê- 
ques.  ifcùi.  et  81;  à  Foulques,  évéque  de  Tongres 
p.  81  ;  au  pape  liormisdas,  ibid.  Saint  Rémi  con- 
fond un  arien  dans  un  concile,  p.  81,  82.  Sa  mort, 
p.  82.  Son  éloge,  ibid.  Ses  écrits-  Ses  testaments, 
p.  83,84.  Le  Commentaire  surlesEpîtres  desaint 
Paul,  attribué  àsaint  Rémi,  n'est  pas  de  lui,p.8(. 
Ses  reliques,  portées  en  procession,  font  cesser 
la  peste  qui  désolait  la  ville,  p  377.  Abrégé  de  sa 
Vie  qu'on  attribue  à  saint  Fortunat,  p.  4i4;  une 
de  ses  Vies  attribuée  à  saint  Ouen,  p.  75. 

REMI,  moine  de  Saint-Germain  d'Auxerre,p.  84. 

RÉMISSION  des  péchés.  Livres  de  saint  Ful- 
gence sur  la  rémission  des  péchés,  p.  52  et  suiv- 
Douze  moyens  d'obtenir  la  rémission  des  péchés, 

p.  146. 

REMOR-V,  poisson  qui  arrête  les  vaisseaux  au 
milieu  de  leur  navigation,  p.  213. 

REPARAT,  évéque  de  Carthage.  Le  pape  Agapet 
lui  écrit,  p.  119.  Réparât  convoque  un  concile 
général  d'Afrique  à  Carthage,  p.  850. 

RÉSIDENCE  des  évêques,  p.  262.  Résidence  des 
clercs  selon  l'usage  de  l'Église  romaine,  p.  572. 

RESPECTA,  abbesse  de  saint-Cassicn  de  Mar- 
seille, p.  507-  Grégoire  accorde  un  privilège  à  son 
monastère,  ibid. 

RÉSUHRECTION  des  morts.  Tous  les  hom- 
mes ressusciteront  dans  un  moment,  chacun 
selon  leur  sexe,  p.  5J.  Sentiments  d'Orientius, 
évéque  d'Elvire,  sur  la  résurrection,  p.  101, 
102  ;  de  saint  Julien  de  Tolède  sur  la  résurrection 
générale,  p.  792,  793.  Erreur  de  Philoponus  tou- 
chant la  résurrection  générale  des  corps,  p-  652- 

REVENUS  de  l'Eglise,  partagés  en  qual,-e  por- 
tions, p.  496,  524.  Défense  ;'i  un  évéque  de  s'at- 
tribuer le  revenu  d'une  église  bùtie  dans  son  dio- 
cèse, p.9u7-  Les  revenus  dos  paroisses  de  la  cam- 
pagne doivent  être  emplojés  pour  les  clercs  qui 
les  servent  et  pour  les  réparations  des  églises, 
p,  832- 

RIIÉTORIQUE-  Traité  de  rhétorique  par  Cassio- 
sioilore.  p.  236. 

RICHESSES  :  sentiment  de  Cassiodore  sur  les 
ricliessscs.  p.  214. 

RICIIILDE,  abbesse  du  monastère  de  Sainte- 
Croix  de  Poitiers,  p.  317. 

ROGATIONS.  Comment  on  les  célébrait  du 
temps  de  saint  Césaire  d'Arles,  p.  VSs. 

ROIS  de  France.  Cérémonies  pratiquées   dans 


TABLE  ANALYTIQUE. 


971 


K>ur  couronnement,  p.  395.  Ce  que  dit  saint  Grô- 
Roire  de  Tours  sur  les  rois  de  France,  ibul. 
Exemples  remarquables  de  l'onction  des  rois,  p. 
794. 

ROMAIN  (sainr,  fondateur  et  abb*  de  Condat, 
p.  379.  Sa  Vie  écrite  par  saint  Grégoire  de  Tours, 
ibid.  et  380. 

ROMM.N,  moine,  donne  l'habit  monastique  à 
sailli  Benoît,  p.  15G. 

HO.MAI.N,  Patrice  et  exarque  d'Italie.  Saint  Gré- 
goire lui  écrit,  p.  183.  Uoinain  est  accusé  de  pro- 
téger des  religieuses  qui  s'étaient  mariées,  p.  501. 
Suint  Grégoire  lui  écrit  pour  le  détourner  de 
prendre  part  au  crime  de  ces  religieuses,  ibid. 
et  50>. 

ROrÉRIUS,  historien.  Ses  écrits,  p.  400. 

KLnMEN,  évéque.  Saint  Fulgence  le  consulte 
sur  le  voyage  qu'il  avait  dessein  de  faire  en 
Egypte,  p.  4. 


RUFINIEN,  moine,  envoyé  en  Angleterre  par 
saint  Grégoire,  p.  438. 

UURICE,  évéque  do  Limoges.  Saint  Césaire  lui 
écrit,  p.  154. 

IIL lilIClENNE,  dame  de  grande  qualité,  visite 
le  Mont-Sina,  p.  487  488-.  ses  charités,  p.  488. 
Saint  Grégoire  lui  écrit,  p.  52î. 

UUSTICULE  (sainte),  abbesse  de  Saint-Césaire  à 
Arles,  savait  toute  l'Ecriture  par  cœur,  p.  695. 
Sa  Vie  écrite  par  Florent,  prêtre  des  Trois-Cbâ- 
teaux,  ibid. 

RUSTIQUE,  évêque  de  Cahors,  samort,  p.  733. 
Il  a  pour  successeur  saint  Didier,  son  frère,  ibid. 

RU^T1QUE,  diacre  de  Rome,  écrit  contre  la 
condamnation  des  Trnis-CliapUrei<,  p.  299.  Plain- 
tes du  pape  Vigile  contre  lui,  p.  300,  ibid.  Livre 
de  Rustique  contre  les  acéphales,  p.  300,  301. 
Edition  de  ce  livre,  p.  30i. 


S. 


SABA  ou  SABARETH,  roi  des  Saxons  orien- 
taux, sa  mort,  p.  913. 

SABAS  (saint),  ses  commencements,  p.  274;  ilest 
ordonné  prêtre,  ibid.  il  est  envoyé  à  l'empereur 
Anastase  ;  il  s'oppose  à  Sévère  d'.Antioche,  p.  27j, 
•270;  il  fait  un  second  voyage  à  Consiantinople, 
p.  270.  Ce  qu'il  demande  à  l'empereur  Justinien, 
p.  277;  son  exactitude  pour  l'office  divin,  ibid. 
Son  retour  à  Jérusalem;  sa  mort,  ibid. 

SABBAT  Je)  ne  doit  pas  être  observé,  p.  5-29. 
579. 

SABIN,  évéque  de  Canosa,  avait  le  don  de  pro- 
phétie, p.  470. 

SABI.N,  évéque  de  Plaisance,  ordonna  aux  eaux 

du  l'ô  qui  désolaient  la  campagne  de  rentrer  dans 

leur  lit,  et  elles  obéirent  dans  le  moment,  p.  176. 

S.VBl.MEN,  diacre,   nonce  à  Consiantinople, 

p.  430;  depuis  pape,  sa  mort,  p.  045. 

SABLMEN,  éNéque  de  Zara,  abandonne  le  parti 
de  Jlaxime,  usurpateur  du  siège  de  Salone,  p.  508; 
il  veut  renoncer  i  lépiscopat,  ibid. 

SACERDOS  (saint',  archevêque  de  Lyon,  préside 
au  ô'  concile  d'Orléans,  p.  8ù2. 

SACRASIENÏAIRE  de  saint  Grégoire,  p.  537  et 
suiv. 

SACREMENT.  Sa  définition,  par  saint  Isidore  de 
Séville,  p.  712. 

SACRIFICE  non  sanglant,  offert  dans  l'Eglise, 
p.  605.  Le  sacrifice  delà  messe  est  ainsi  appelé, 
parce  qu'il  est  consacré  par  une  prière  mystique 
en  mémoire  de  la  passion  de  Notre-Seigneur, 
p.  7i2.  Le  sacrifice  qui  plaît  au  Seigneur  est  celui 
de  son  corps  et.de  son  sang,  figuré  par  le  pain 
et  le  vin  que  .Melchisédech  offrit,  p.  710.  Il  faut 
être  purifié  par  les  eaux  du  baptême  avant  de  par- 
ticiper au  saint  sacrifice,  p.  914.  Sacrifice  offert 
pour  les  morts,  p.  370.  La  coutume  d'offrir  le  sa- 
crifice pour  le  repos  des  fidèles  morts  et  de  prier 
pour  eux,  étant  observée  par  toute  la  terre,  a  été 
instituée  par  les  apôtres,  p.  717.  Il  e.'^t  nécessaire 
de  mêler  de  l'eau  avec  le  vin  dans  le  sacrifice  de 


l'Eucharistie,  iftid.  Les  monophysites  offraient  le 
vin  pur  sans  mélange  d'eau,  p.  590.  Saint  Colom- 
ban  défend  au  prêtre  d'offrir  le  sacrifice  sans  avoir 
rogné  ses  ongles,  p.  620.  Il  impose  des  pénitences 
à  ceux  qui  ont  perdu  le  sacrifice  ou  qui  ont 
laissé  corrompre  les  espèces,  ibid.  Pratiques  dif- 
férentes des  églises  touchant  la  célébration  du 
sacrifice,  p.  718.  Saint  Fulgence  offrait  le  sacrifice 
avec  la  même  tunique  qu'il  avait  étant  couché, 
p.  6.  Le  sacrifice  du  corps  et  du  sang  de  Jésus- 
Christ  est  également  ofl'ert  au  Père,  au  Fils,  au 
Saint-Esprit,  p.  15.  Les  prêtres  nous  rendent 
Dieu  propice  par  les  sacrifices  qu'ils  offrent  pour 
nos  péchés,  p.  248.  Saint  Jean  le  Silencieux  ne 
pouvait  retenir  ses  larmes  quand  on  offrait  le 
sacrifice  non  sanglant,  p.  278. 

SADDUCÉEN5.  L'empereur  Justinien  leur  dé- 
fend de  tenir  aucune  assemblée,  p.  261. 

SAFFARAC,  évêque  de  Paris,  convaincu  d'un 
crime  considérable,  est  déposé  dans  le  2"  concile 
de  l'aris,  p.  882. 

SAGITTAIRE,  évêque  de  Gap,  convaincu  de  di- 
vers crimes,  est  déposé,  p.  887, 894. 

SAI.NTS  (les)  s'intéressent  dans  le  ciel  pour 
leurs  parents  et  amis  fidèles  qui  sont  encore  sur 
la  terre,  p.  792;  ils  ne  prient  point  pour  les 
damnés,  ibid. 

SAISONS  :  altération  des  saisons  en  536,  p; 
220. 

S.ALABERGE  (sainte),  abbesse  de  Laon,  établit 
dans  son  monastère  la  psalmodie  perpétuelle, 
p.  014. 

SALLUSTE,  patriarche  de  Jérusalem,  ordonne 
prêtre  saint  Sabas,  p.  274. 

SALONE,  évêque  d'Embrun,  convaincu  de  di- 
vers crimes,  est  déposé,  p.  894. 

SALUT  (.le)  de  l'homme  est  tellement  l'effet  de 
la  miséricorde  de  Dieu,  qu'il  l'est  aussi  de  la  vo- 
lonté humaine,  etc.,  p.  43. 

SALYI  ;saint;,  abbé  et  ensuite  évêque  d'Albi, 
p.  370. 


972 


TABLE  ANALYTIQUE. 


SALVIUS,  évêque  de  Valence,  convainc  un  hé- 
rétique au  6*  concile  de  Valence,  p.  ".'Hj. 

SA.V.MUT.VI.N'S.  Division  parmi  les  .Samaritains 
au  sujet  du  proplitile  promis  par  Moïse,  p.  592; 
ils  exercent  des  violences  contre  les  chrétiens, 
p.  C7j  ;  achètent  des  esclaves  et  les  (ont  circon- 
cire, p.  506. 

SAMEDI.  Les  Ildèles  s'abstenaient  du  travail 
des  mains  dès  le  soir  du  samedi,  p.  391. 

S.4.M0.\,  marchand  français,  élu  roi  des  Win- 
des,  p.  744. 

SA.NCTL'AIRE.  Défense  aux  laïcs  dy  entrer 
pour  communier,  p.  885.  Le  concile  de  Tours  de 
l'an  566  leur  permet  d'y  entrer,  p.  888. 

S.UM:tL'LE  (.=aint),  prêtre.  Action  héroïque  de 
sa  charité,  p.  477. 

SANG.'  Défense  de. manger  de  la  chair  et  du 
sang  des  animaux  étouffés,  p.  798.  Lettre  d'Evance, 
abbé  de  Troclar,  contre  l'abstinence  du  sang  des 
animaux,  p.  8U. 

SAPALDUS,  évéque  d'Arles,  p.  88î.  Le  pape 
Pelage  I"  le  fait  son  vicaire  dans  les  Gaules,  lui 
accorde  l'usage  du  pallium,  p.  331.  Sapaudus  pré- 
side au  2«  concile  de  Paris,  p.  882. 

S.VTISFAGTIUN  (la),  d'après  saint  Isidore  do 
Séville,  consiste  à  retrancher  les  causes  et  les 
occasions  de  pécher,  cl  à  ne  plus  pécher,  p.  7i3. 

SATL'RM.N,  prêtre,  déposé  pour  crime,  p.  499. 

SCARILLAS  consulte  saint  Fulgence  sur  le 
mystère  de  l'Incarnation,  p.  55;  saint  Fulgence 
lui  écrit,  ibid. 

SClllSM.i.TlQUES.  11  est  permis  de  les  répri- 
mer par  la  puissance  temporelle,  p.  339. 

SCH1.SME.  Formule  de  renonciation  au  schisme, 

p.  537,  583. 

ECHOLASTIQUE,  juge  de  Campanie,  p.  491. 

SCHOLASTIQUE  (sainte),  sœur  de  saint  Be- 
noît, p.  159  et  suiv.  et  4:5.  Miracle  qui  fut  un  ellet 
de  sa  prière,  p.  IGO.  Son  Ame  monte  au  ciel  sous 
la  forme  d'une  colombe,  p.  iCO,  161  et  175. 

SÉBASTIEN,  évoque  do  Sirmium,  p.  502,  503. 

SÉBASTIEN,  évéque  de  Rhisinie.  p.  482. 

SEBASTIE.X,  diacre  de  Itorj.e,  défenseur  des 
Trois-Chapitres,  p.  299.  Plaintes  du  pape  Vigile 
contre  lui,  ibid.  et  300. 

SÉBASTH:.\,  disciple  de  saint  Benoit,  p.  634. 
On  lui  attribue  faussement  une  Vie  de  saint  Jé- 
rôme, docteur  de  l'Église,  ibid.  11  a  écrit  une  Vie 
d'un  nommé  HiérônK\  ibid. 

SECONDIX,  abbé,  convaincu  de  crimes  cl  dé- 
posé, p.  492. 

SECO.NDIN,  reclus.  La  lettre  de  saint  Grégoire 
àce  serviteur  de  Dieu  a  été  corrompue  et  altérée, 
p.  514,  515. 

SECONDIN.  évoque  de  Taormine,  p.  5i9. 

SÉDATUS,  évoque  de  Béziers,  assiste  au  con- 
cile de  Tolède  en  589,  puis  à  celui  de  Narhonne, 
tenu  la  même  ann.'o.  p.  324.  Trois  sermi>ns  qu'on 
lui  attribue,  ibid.  Éditions  de  ces  homélies,  ibid. 

SË.NOCIl  (saint),  solitaire  auprès  de  Tours, 
p.  360.  Sa  Vie  écrite  par  >aint  Grégoire  de  Tours, 
p.  382.  Saint  Euphrone  ordonne  Sénoch  diacre, 
ibid. 

SENTIJIENT.  Il  n'est  pas  blâmable  do  changer 


de  sentiment,  mais  il  l'est  d'en  changer  par  in- 
constance, p.  .'136. 

SÉPli.TL'RES.  Cérémonies  observées  dans  la 
sépulture  des  moines  et  des  laïques  vertueux, 
p.  798.  Défense  de  rien  exiger  pour  le  lieu  de  la 
sépulture,  p.  510, 514.  11  est  seulement  permis  de 
recevoir  les  offrandes  libres  et  volontaires  pour 
le  luminaire,  p.  512,  583. 

SÉRÉ.M'S,  évéquede  Marseille,  p  5o6  ilbrise 
les  images,  p.  517;  cette  action  est  biâraée  par 
saint  Grégoire,  ibid. 

SERFS.  Comment  reçus  dans  les  monastères, 
p.  907. 

SERGE  (saint),  martyr,  p.  3-59. 

SERGIL'S,  patriarche  de  Constantinople.  Sa 
lettre  au  pape  Honorius,  p.  647.  Ce  pape  lui  écrit 
deux  lettres,  ibid.;  Sergius  est  auteur  de  l'Ec- 
thèse.  p.  648.  Sa  mort,  ibid-  Il  est  condamné 
dans  le  concile  de  Latran,  p.  749;  anathématisé 
par  le  pipe  Léon  II,  p.  784. 

SERGIUS,  sous-diacre,  à  qui  le  pape  Honorius 
écrit  une  lettre,  p.  648. 

SERMENT.  Formule  d'un  serment  de  fldéliié. 

p.  256. 

SÉVÈRE  (saint',  évoque  d'Agde,  p.  400.  Roté- 
rius  n'a  pas  écrit  sa  vie,  ibid. 

SÉVÈRE  de  Sozople,  patriarche  d'Antiocbe  : 
né  païen,  il  est  instruit  à  Béryle  dans  l'élude 
des  lois,  p.  106.  Il  reçoit  le  baptême,  puis  entre 
dans  un  monastère  d'acéphales,  ibid.;  va  à 
Alexandrie  et  met  le  trouble  dans  cette  église, 
ibid.;  il  réfute  un  ouvrage  de  Lampécius.  inti- 
tulé Testament,  ibid.;  obligé  de  sortir  d'Alexan- 
drie, il  entre  dans  le  monastère  de  l'abbé  Né- 
phale,  d'où  il  se  fait  chasser,  t'ftid.;  il  vient  ^ 
Constantinople,  où  il  met  le  trouble,  p.  107  ;  il 
écrit  à  Sotéric  de  Césarée  au  sujet  du  Trisagion, 
ibid.;  Autres  lettres  qu'il  écrit  contre  Macédo- 
nius  et  le  concile  de  Chalcédoine,  ibid.;  il  s'em- 
pare du  siège  d'Antiofhe,  anathématisé  le  con- 
cile de  Chalcédoine  et  reçoit  l'hénotique  de  Ze- 
non, ibid.;  lettres  synodiquos  qu'il  envoie  aux 
évéques  de  son  patriarchat,  ibid.  Ses  violences 
contre  les  catholiques,  ibid.;  il  est  anathématisé 
dans  un  concile  de  Constantinople  et  dans  plusieurs 
autres,  p.  671,  819,  820,  852.  Requêtes  présentées 
contre  lui  à  l'empereur  Justinien,  p.  107;  il  s'en- 
fuit; lettre  où  il  se  plaint  de  la  rigueur  avec  la- 
quelle on  l'avait  poursuivi,  ibid.;  il  vientàTré- 
bisonde  et  y  cause  beaucoup  de  désordres.  Les 
catholiques  en  portent  des  plaintes  au  Pape,  qui 
le  condamne,  p.  108,  149.  Constitution  de  l'empe- 
reur Justinien  qui  ordonne  que  les  écrits  de  Sé- 
vère seront  brûlés,  et  qui  défend  de  les  trans- 
crire, sous  peine  d'avoir  le  poing  coupé,  p.  108 
et  257.  Détail  des  écrits  de  Sévère,  p.  108.  Lettre 
que  lui  écrit  le  pape  Vigile,  p.  193.  L'empereur 
Justinien  défend  de  transcrire  les  écrits  de  Sé- 
vère, sous  peine  d'avoir  le  poing  coupé,  p.  257. 
Analhènie  prononcé  contre  Sévère  dans  un  con- 
cile de  'lyr,  p.  820.  Ses  violences  décrites  dans 
une  lettre  du  clergé  d'Antiocho  à  Jean  patriarche 
de  Constantinople,  p.  821,  822.  Concile  de  Cons- 
tantinople où  il  est  anathématisé,  p.  652  ;  idée 


que  Pliolius  donne  dos  ouvrages  composiis  par 
sainlEulogccontrcSi'vèro  ol  Timolhée,  et  contre 
Tliéodose  et  Sévère,  ennemis  de  saint  Léon  et  du 
concile  de  Chalcédoine.  p.  590.  Sévère  est  chassé 
dusiéje  d'Anliocbo  sous  le  régne  de  l'empereur 
Justin,  p.  670.  Ses  erreurs  réfutées  par  Léon  '!e 
Byzance,  ibid.  et  ('>7I. 

SliVÈUK,  patriarche  d'Aquilée,  prend  la  dé- 
fense des  Trots-CliapUres,  p.  338.  Il  refuse  de  les 
condamner,  p.  181. 

SÉVÈUE,  évéque  de  Malaga.  Ses  écrits  sont  per- 
dus, p.  429. 

SÉVÉRIEN,  père  de  saint  Isidore  de  Séville,  p. 

710. 

SÉVÉRIENS.  Conférence  des  catholiques  avec 
les  sévériens  à  Constaniinople  en  533,  p.  843  et 
suiv. 
SÉVERIN,  pape,  p.  «19. 

SÉVERIN  (saint),  abbé.  Sa  mort  et  sa  transla- 
tion. Sa  Vie  écrite  par  Fortunat,  p.  412.  Eugip- 
pius,  abbé  de  LucuUane,  écrit  sa  vie,  p.  85,  86. 
Eglise  de  Saint-Séverin,  p.  492,  -079. 

SIC.UIBRES,  peuples  au-delà  du  Rbin,  p.  79, 
note  5. 

SICILE.  Saint  Grégoire  prend  soin  des  églises 
de  Sicile,  p.  434.  Évéques  de  Sicile  obligés  de  ve- 
nir a  Rome,  p.  508. 
SIDOI.NE  (saint),  évéque  de  Mayence,  p.  -lOl. 
SIÈGE  isaint-).  Siège  apostolique.  L'église  de 
Constaniinople  soumise  au  Saini-Siége,  p.  514. 
Le  Siège  apostolique  est  le  cbef  de  toutes  les 
églises,  p.  532.  Sa  primauté,  p.  93.  Sentiment  de 
saint  Grégoire  sur  l'autorité  du  Siège  apostoli- 
que, p.  557.  Les  causes  majeures  doivent  être 
portées  au  siège  apostolique,  p.  338. 

SIGEBERT  I,  roi  d'.Vustrasie,  méprise  les  sol- 
licitations de  saint  Germain,  évêque  de  Paris, 
qui  voulait  le  détourner  de  poursuivre  Cbilpéric, 
roi  de  Soissons,  p.  308.  Il  est  assassiné  par  oi'dre 
de  Frèdègonde,  ibid.  Lettre  de  sainte  Radegonde 
aux  rois  Chilpcric  et  Sigebert,  p.  317,  318. 

SIGEBERT  11.  roi  d'Austrasie.  Ses  deux  lettres 
à  saint  Didier,  èvéque  de  Oahors,  p.  755.  Lettre 
de  saint  Didier  au  roi  Sigebert,  ibid. 

SIGISMO.SD  (saint).  Sa  vie  écrite  par  Marins, 
évêque  d  Avanches,  p.  4u0. 

SIGRADE,  mère  de  saint  Léger,  religieuse 
dans  le  monastère  de  Notre-Dame  de  Soissons, 
p.  781.  Lettre  de  saint  Léger  a  sa  mère,  ibid. 

SILVÊRIL'S,  élu  pape  en  536,  est  accusé  d'in- 
telligence avec  les  Gotbs,  p.  192.  Il  est  envoyé 
en  exil,  ibid.  Sa  mort,  p.  193.  Lettres  qui  lui 
sont  attribuées,  ibid. 

SILVESTRE,  l'un  des  premiers  de  la  Byzacène, 
offre  à  saint  Fulgence  un  endroit  propre  à  bâtir 
un  monastère,  p.  5. 

SLMÉON  (saint)  Stylite  l'Ancien  :  Sa  Vie  par 
Evagre,  p.  4i7. 

SIMÉOiN  (saint)  Stylite  le  Jeune,  p.  416.  Sa 
Vie  écrite  par  Nicéphore;  abrégé  de  cette  Vie, 
p.  674,  675.  Lettre  de  saint  Siméon  à  l'empereur 
Juslinien,  p.  674,  675.  Elle  est  authentique^  p. 
675.  Sa  mort  vers  l'an  596,  p.  675.  Autre  Vie  de 
saint  Siméou,  p.  676. 


TABLE  ANALYTIOUE.  !n3 

SIMÉO.N  (.saint)  Salusou  l'Insensé.  Sa  Vie  écrite 
par  Léonce,  évéquo  de  Naples  en  Chypre,  p.  1662, 
063.  Ses  miracles,  p.  663. 

SliMÉO."y  (saint).  On  montrait  à  Jérusalem,  sur 
la  Un  du  vii°  siècle,  les  tombeaux  de  saint  Si- 
méon et  do  saint  Joseph,  époux  de  la  sainte 
Vierge,  p.  801. 

SI.MONIE.  Edit  du  roi  Athalaric  contre  la  simo- 
nie, p.  116.  Défense  d'acheter  l'épiscopat  pvr 
argent  on  d'employer  les  brigues  pour  y  parve- 
nir, p.  8(53.  Simonie  condamnée  par  saint  Gré- 
goire, p.  503,  583.  Diverses  espèces  de  simonie, 
p.  4.')5,  583,  Défense  de  rien  prendre  ni  pour  lor- 
dination,  ni  pour  le;«((Kitm,  ni  pour  les  lettres, 
p.  907;  ni  pour  le  saint  chrOice,  î6i(/.:ni  pour  les 
mariages,  ni  pour  la  bénédiction  des  vierges,  p. 
497  Simonie  dans  les  Gaules  et  la  Germanie, 
p.  503,  513.  Saint  Grégoire  travaille  à  l'extirper, 
p.  504,  517,  518.  Simonie  en  Eplre,  p.  504;  en  Orient, 
p.  523. 
SIMPLICE  (saint),  évêque  d'Autun,  p.  376. 
SIMPLICE  (saint),  troisième  abbé  du  .Mont- 
Cassin  depuis  saint  Benoît,  p.  319.  Ses  écrits, 
ibid.  et  350.  Ses  vers  à  la  louange  de  saint  Benoît, 
p.  C34,  635. 

SIMPLICE,  comte  d'Espagne,  à  qui  le  pape 
Léon  II  écrit,  p.  784. 

SIVIARD  (saint),  abbé,  p.  785.  Sa  naissance;  ce 
qu'on  sait  des  circonstances  de  sa  vie,  ibid.  et 
786.  D.  Mabillon  le  croit  auteur  de  la  Vie  de 
saint  Calais,  premier  abbé  du  monastère  de  ce 
nom,  p.  786.  Homélie  sur  saint  Siviard  par  un 
anonyme  du  monastère  d'Anisole,  ibid.  Éditions 
de  la  Vie  de  saint  Calais,  ibid. 

SIXTE  (saint),  martyr.  Saint  Grégoire  envoie 
des  reliques  de  ce  martyr  à  saint  Augustin  d'An- 
gleterre, p.  525. 

S.MARAGDE,  exarque.  Saint  Grégoire  le  Grand 
lui  écrit,  p.  531. 

SOLDATS.  L'empereur  Maurice  leur  défend  de 
se  faire  moines,  p.  510. 

SOLIG.NAC,  monastère  fondé  par  saint  Éloi,  p. 
753.  Charie  de  sa  fondation,  p.  755. 

SO.\.NACE,  évêque  de  Reims,  p.  693,  694.  Sta- 
tuts qui  portent  son  nom  ;  ce  qu'il  y  a  de  remar- 
quable dans  ces  statuts,  p.  694. 

SOPHIE  (Sainte-).  Description  de  l'église  de 
Sainte-Sophie,  par  Evagre,  p.  419. 

SOPHRONE  (saint),  moine,  p.  703;  s'oppose  aux 
articles  de  Cyrus,  évêque  d'Alexandrie,  ibid.  11 
est  fait  patriarche  de  Jérusalem  en  633  et  suc- 
cède à  Modeste,  ibid.  Sa  lettre  synodale  con- 
tre les  monothèlites,  ibid.  Analyse  de  cette 
lettre,  ibid.  et  suiv.  Lettre  de  saint  Sophrone 
au  pape  Honorius,  p.  705.  Recueil  de  passages 
des  Pères  touchant  les  deux  opérations,  ibid.  Au- 
tres écrits  de  saint  Sophrone  :  quatre  discours 
ou  homélies;  autres  écrits,  ibid.  et 706.  sa  mort, 
p.  70G  Ecrits  de  saint  Sophrone  dans  la  i'atro- 
logie,  p.  706  et  suiv. 

SOPHRO.NE,  auire  écrivain  qui  prend  la  défense 
de  saint  Basile  contre  Eunomius,  p.  700. 

SORT  des  saints.  Son  origine,  p.  385.  Manières 
doni  se  pratiquait  cette  superstition,  ibid.  et  suiv.; 


974 


TABLE  ANALYTIQUE. 


condamnée  par  plusieurs  conciles,  p.  386  -.  abo- 
lie par  le  troisième  capitulaire  de  Charlemagne, 
ibùi. 

SOL'S-DIACRES.  Leur  ordination  différente  de 
eelle  des  diacres,  p.  "19.  Ils  étaient  obligés  à  la 
continence,  p.  181,  572,  719.  Quelle  était  leur  auto- 
rité dans  les.affaires  ecclésiastiques,  p.  .180.  Sous- 
diacres  administrateurs  du  patrimoine  de  l'É- 
glise romaine,  p.  481,  4S2. 

ST.iTIO.\  S  Différentes  stations  établies  à  Rome 
par  saint  Grégoire,  p.  456. 

SLLPICE  (saint),  surnommé  le  Pieux.  Ce  qu'on 
sait  des  circonstances  de  sa  vie,  p.  752.  Il  suc- 
cède à  sain  t. Vusirégisi  le  dans  le  siège  de  Bourges, 
ibid.  Sa  mort.  ibid.  On  a  de  lui  trois  lettres,  ibid. 

SUPtRIEL'KS.  Comment  ils  doivent  se  con- 
duire envers  les  religieux.  Qualités  qui  leur  sont 
essentielles,  p.  689.     • 

SUPERSTITIONS  réprimées,  p.  579,  580.  Su- 
perstitions païennes  combattues  par  saint  Cé- 
saire,  p.  139, 140.  Superstitions  condamnées  dans 
le  second  concile  de  Tours,  p .  890. 


SY.V.GRIUS (saint?, évéqued'Autun,  p.f>06,  assiste 
au  concile  deNauterre,  p.  90G.  Saint  Grégoire  lui 
accorde  le  pallium  et  le  premier  rang  dans  sa 
province,  p.  5i3  et  518.  Il  lui  permet  l'usage  de 
la  dalmalique.  ainsi  qu'à  son  aroliidiacre  p  518. 

SYAGRIUS,  gouverneur  des  Gaules  pour  les 
Ronjains,  vaincu  par  Clovis,  roi  de  France,  p.  78. 

SYLVIE,  mère  de  saint  Grégoire  le  Grand,  se 
retire  dans  un  monastère,  p.  429.  Son  portrait 
conservé  à  Rome,  ibid. 

SY.MBOLE  des  apôtres  expliqué  par  Fortunat, 
p.  409,  410.  Les  apôtres  l'ont  composé  ensemble 
avant  de  se  séparer,  p.  409,  7i3. 

SY.MBOLE  de  Nicée  récité  dans  l'assemblée  des 
ûdèies.p.  101. 

SY.Ml'.OLE  de  saint  Grégoire,  p.  536. 

SY.AIBOlE  de  saint  Athanase  cité  comme  étant 
de  ce  l'ère,  reçu  et  approuvé  de  l'Église  catholi- 
que, p.  7-'3. 

SY.MiMAQUE,  défenseur  de  l'Église  romaine,  p. 
485.  Saint  Grégoire  le  Grand  lui  écrit,  ibid. 


TAION,  évêque  de  Sarragosse,  envoyé  à  Rome 
pour  chercher  les  Morales  de  saint  Grégoire,  p. 
443.  Il  compose  cinq  livres  de  sentences  tirées  des 
Morales  de  saint  Grégoire,  p.  777.  Ce  recueil  a 
été  imprimé  par  Florez ,  ibid.,  note  6.  Lettre  de 
Talon  à  Eugène  de  Tolède,  p.  777.  Sa  lettre  à 
Quiricius  de  Barcelone,  ibid.  U  souscrit  au  8« 
concile  de  Tolède,  p.  777. 

TARSILLE,  tante  de  saint  Grégoire  le  Grand. 
Le  pape  Félix  lui  apparaît  dans  une  vision,  p. 

478. 

TEMPLES  des  idoles,  doivent  plutôt  être  puri- 
fiés par  les  cérémonies  de  l'Église,  que  d'être 
ruinés,  p.  527.  579. 

TÉRIDE,  abbé,  neveu  de  saint  Césaire  d'Arles, 
écrit  la  Règle  pour  des  religieux  sous  la  diction 
de  son  oncle,  p.  147. 

TERMl.VALIA,  fête  que  les  païens  célébraient 
le  22  février  en  l'honneur  du  dieu  Terminus, 
p.  890. 

TERNACE,  évéque  de  Besançon.  Ce  qu'on  sait 
des  circonstances  de  sa  vie,  p.  781. 11  avait  com- 
posé une  chronique  où  il  donnait  la  suite  des 
évêques  ses  prédécesseurs,  ibid. 

TERTL'LLLS,  père  de  saint  Placide,  disciple 
de  saint  Benoit,  p.  |57. 

TE.STAMENT  de  saint  Rémi,  p.  83;  de  saint  Cé- 
saire d'.Arles,  p.  15t;  de  saint  Domnole,  évéque 
du  .Mans,  p.  313;  de  sainte  Radegunde,  p.  316, 
317:  de  saint  Yrieix,  abbé  d'Atane,  p.  .325.  Saint 
Grégoire  permet  à  l'abbé  Probus  défaire  son  tes- 
tament, p.  536,  537. 

TÉTÉRILS,  clerc  de  l'église  d'Auxcrre.  Sa  Re- 
lation des  miracles  opérés  à  Auxerre  par  les  reli- 
ques des  saints  martyrs  Cyr  et  Julilte,  p.  .100. 

TÉTRIC.US,  nis  Je  saint  Grégoire  de  Langres, 
lui  succède  dans  l'épiscopal,  p.  381. 

TUADÉE  [saint)  a  porté  la  foi  dans  la  Perse,  p. 
187. 


THALASSIUS.  Saint  Maxime  lui  écrit  deux 
lettres,  p.  707,  768  et  suiv.,  il  lui  adresse  plu- 
sieurs de  ses  écrits,  p.  789.  Il  a  composé  un  re- 
cueil de  400  vérités  ou  maximes,  ibid. 

THÉANDRIQUE  OU  DEIVIRILE.  Opération  de 
Jésus-Christ,  p.  767. 

TIIÉ.MISTIUS  de  la  secte  des  sévériens,  ses 
écrits,  p.  6-52,  653. 

TU  liOCTlSTE.  ami  de  saint  Euthymius  et  compa- 
gnon de  ses  travaux  dans  la  viesoliiaire,  p.  272, 

TIIÉuCTlSTE,  sœur  de  l'eniporeur  .Maurice. 
Saint  Grégoire  la  congratule  de  son  application 
à  la  lecture  des  Livres  saints,  p.  508,  509.  Théoo- 
tiste  envoie  à  saint  Grégoire  trente  livres  d'or, 
ibid.  El'.e  est  accusée  de  quelques  erreurs,  p. 
522.  Saint  Grégoire  lui  écrit, une  lettre  de  con- 
solation, ibid. 

TIIÉODAT,  roi  d'Italie,  oblige  le  pape  Agapct 
à  aller  à  Constantinople,  p.  âio.  il  est  déposé  par 
les  principaux  officiers  de  son  armée  et  mis  à 
mon,  ibid. 

THÉODEBERT  ,  roi  d'Austrasie,  reçoit  saint 
Coloniban,  p.  016.  Sa  mort,  ibid. 

TIIÉODELINDE,  mariée  à  Autarit.  roi  des  Lom- 
bards, épouse  ensuite  .Agilulfe,  duc  de  Turin,  p. 
494;  se  sépare  de  la  communion  de  Constance, 
évéque  de  Milan,  p.  494,  495.  Saint  Grégoire  lui 
écrit,  p.  495,534:  présents  qu'il  fait  aux  enfanU 
de  cette  princesse,  ibid. 

IIIÉOUORA,  mère  de  saint  Isidore  de  Séville, 
p.  7l0. 

THÉODORE,  évéque  de  Marseille,  p.  401;saint 
Grégoire  le  Grand  lui  écrit,  p.  494. 

THÉODORE,  évéque  de  Césaréeen  Cappadoce, 
origéniste.  p.  327. 

THÉODORE  de  Mopsueste  défendu  par  Facun- 
dus.  p.  289,  21)1  et  suiv.,  29). 

THÉODORE  abbé  de  Raïlhe  p.  787.  Temps  Où 
il  vivait,  ibid.;  il  ne  nous  reste  de  lui  qu'un  dis- 


TABLE  ANALYTIQUE. 


07 


cours  dogmatique  sur  rincarnailoii.iftW.  Éditions 
qu'on  en  a  failt>s,  ibid. 

TIir^ODOlli:,  évOqm  do  Pharan.  Sa  lettre  au 
pape  Ilouoriiis,  où  il  iHalilillo  (nonotliéiisme,  p. 
G17.  li  est  eomlainiii'  dans  le  concile  de  Latian, 
p.  713;  et  par  le  pape  l.éon  II,  p.  781. 

TIlliODOlU:.  (•■vO.iue  do  Liiybée  Saint  Gi'i^goiro 
le  Grand  I   i  lHtU,  p.  41)3. 

ÏIIl':01)0Ui:,  pape,  succède  ^  Jean  IV,  p.  71H.  Il 
prononce  contre  Paul  de  Constaiitinoiile  la  sen- 
tence de  déposition,  ibid.;  il  était  Grec  de  na- 
tion, ibid.;  durée  de  son  pontificat,  ibid.  Il 
écrit  a  Paul,  patriarche  dé  Oonslanlinople,  contre 
Pyrrlius,  ibid.,  et  contre  les  évoques  qui  avaient 
ordonné  Pyrrhus,  iftid. 

TllKODOUE,  lecteur  de  l'église  de  Constanti- 
nople;  on  le  croit  de  Paplilagonie,  p.  103;  il 
compose  d'abord  une  histoire  Iripartite,  compi- 
lée de  Socrate,  de  Sozoniéne,  de  Théodoret,  et  di- 
visée en  deux  livres,  .ibid.  Cet  ouvrage  est  en- 
core manuscrit  dans  la  bibliothèque  de  Saint- 
Marc,  a  Venise.  Léo  Allatius  en  avait  un  exem- 
plaire qui  a  servi  ;'l  Valois  pour  l'édition  qu'il  a 
donnée  des  histoires  de  Socrate, de  Sozomèneet  de 
Théodoret,  ibid.;  Théodore  composa  ensuite  une 
histoire  divisée  en  deux  livres,  qu'il  commence 
où  So.;rate  finit  et  qu'il  conduit  jusqu'au  règne 
de  Justin  l'Ancien,  ibid.  Jugement  de  cette  his- 
toire, ce  qu'elle  contient  de  remarquable,  p.  103  et 
suiv.  Éditions  et  traductions  qu'on  en  a  faites, 
p.  105.  Temps  où  Théodore  a  vécu,  ibid.;  erreur 
d'Aubertle  Mire  sur  ce  sujet,  ibid. 

THÉODORE,  évéqiie  d'Esbunte.  Le  pape  saint 
Martin  lui  écrit,  p.  750. 

THEODORE  (saint),  archevêque  de  Cantorbéri, 
en  CGS,  p.796.  Ce  qu'on  sait  des  circonstances  de 
sa  vie,  ibid.;  il  établit  des  écoles  eu  Angleterre, 
p.797:  il  préside  au  concile  d'Herforden673,  ifcid.; 
sa  mort,  p.  797;  son  Pénitentiel,  ibid.;  ce  qu'il 
contient  de  remarquable,  ibid.  et  798;  autre  re- 
cueil sous  le  nom  de  Théodore,  p.  799.  (On  a  eu 
tort  de  ne  pas  lui  donner  le  titre  de  saint  dans 
son  article). 

THÉODORE  de  Mopsueste,  p.  482. 

THÉODORE  de  la  secte  de  ceux  qui  disaient 
la  Divinité  passible.  Ses  écrits,  p.  653. 

THÉODORE,  premier  médecin  de  l'empereur 
Maurice,  p.  491;  il  envoie  à  saint  Grégoire  une 
somme  d'argent  pour  les  pauvres,  p.  499.  Saint 
Grégoire  l'exhorte  à,  la  lecture  del'Écriture  sainte, 
ibid. 

THÉODORE  Calliopas,  exarque  de  Ravenne, 
fait  enlever  de  Rome  le  pape  saint  Martin,  p.  751. 

THÉODORE,  duc  ou  préfet  de  Sardaigne.  Saint 
Grégoire  le  Grand  lui  écrit,  p.  485. 

THÉODORET.  Ses  écrits  contre  saint  Cyrille, 
réprouvés,  p.  482  et  879.  Le  pape  Pelage  I  ne  con- 
damne pas  tous  ses  écrits,  mais  seulement  ceux 
où  il  combattait  les  douze  anathématismes  de 
saint  Cyrille,  p.  337. 

THÉODORIC  ou  Tliierry,  roi  de  Bourgogne;  son 
respect  pour  saint  Colomban,  p.  614;  il  persé- 
cute ensuite  saint  Colomban,  ibid.  et  615.  Sa 
mort,  p.  615. 


THÉODORIC,  roi  des  Goths,  emploie  Casslo- 
dore  dans  le  ministère,  p.  208,  sa  mort,  p.  209, 
ses  lettres  écrites  parCassiodore,  p.  213  et  suiv. 

TIIÉOERIDK,  abbé,  p.  789.  On  a  de  lui  deux 
discours,  l'uu  sur  hs  reliques,  l'autre  sur  la  vé- 
nération des  sainis,  iind.  et  790. 

'l'IlKOliOSE  (l'emiiereur)  ne  livrait  jamais  de 
bataille,  sans  l'avis  du  Jran  le  Tliéhi'en,  p.  ci. 

TllEODOsi;,  évéqiie  de  Césarée,  fait  subir  un 
inteirogaloire  saint  Maxime,  p.  702. 

TIIÉODOSE,  évéqui  d'Auxerre,  p.  80. 

TllEODOSE,  moine,  écrit  contre  l'erreur  de 
Philoponus  louchant  la  résurrection  des  corps, 
p.  652. 

THÉODOSE,  patriarche  d'Alexandrie,  p.  303, 
304:  il  est  envoyé  en  exil,  ibid. 

THÉODULPHE,  évéque  de  Malaga.  p.  G14. 

TllÉOPRORE,  homme  de  condition,  visite  saint 
Benoît,  p.  159. 

THOMAS  (saint),  apOtre.  H  prêcha  l'Évangile 
dans  les  Indes,  p.  553.  Dans  le  lieu  où  il  fut  en- 
terré d'jbord,  il  y  a  une  lampe  qui  ne  s'éteint 
jamais ,  sans  qu'il  soit  besoin  d'y  mettre  de 
l'huile,  p.  3Ti.  Son  corps  fut  transféré  à  Édesse 
en  591,  p.  31.3. 

THOMAS,  évéque  d'Apamée,  p.  41G. 

THURINGE,  province  d'Allemagne  :  poëme  de 
saint  Fortunat  sur  sa  destruction,  p.  411. 

TIMOTHÉE,  prêtre  de  Constantinople  Son 
traité  de  la  manière  de  recevoir  ceux  qui  se  pré- 
sentent à  l'Église  catholique,  p.  340;  ce  que  con- 
tient ce  traité,  p.  340,  34i. 

TOLÈDE  ;  second  concile  tenu  en  cette  ville, 
p.  839  et  suiv.  Troisième  concile  tenu  en  cette 
ville,  p.  900  et  suiv.  .iutre  concile  de  Tolède  où 
l'évêque  de  cette  ville  est  reconnu  métropolitain 
de  la  province  de  Cartha^ène,  p.  911. 

TOMBEAU.  Description  du  tombeau  de  saint 
Pierre  au  Vatican,  p.  374.  Les  linges  et  les  vête- 
ments que  l'on  en  approchait,  rendaient  la  santé 
aux  malades,  ibid. 

TONSURE  cléricale,  rapportée  par  saint  Gré- 
goire de  Tours  à  saint  Pierre,  p.  374. 

TONSURE  cléricale  en  forme  de  couronne,  p. 
393,  718.  Les  abbés  donnaient  communément  la 
tonsure  cléricale  et  l'on  donnait  souvent  aux 
moines  le  nom  de  clercs,  p.  ô80.  La  tonsure 
cléricale  des  Anglais  était  dilïérente  de  celle  des 
Hibernois,  p.  800;  les  clercs  irlandais  portaient 
une  tonsure  toute  différente  de  celle  des  Ro- 
mains, p.  320.  La  tonsure  cléricale  ne  doit  être 
donnée  qu'à  ceux  dont  on  est  moralement  sûr 
qu'ils  monteront  à  des  degrés  supérieurs,  p.  (,9i. 

TORPILLE,  poisson  qui  engourdit  la  main  du 
marinier  qui  le  touche,  p.  213. 

TOTILA,  roi  des  Goths,  vient  voir  saintBenoit, 
p.  ir.9, 160,  474,  475.  Le  diacre  Pelage  le  fléchit, 
p.  328. 

TOUR,  où  l'on  réservait  l'Eucharistie,  p.  309. 

TRADITIONS  de  doctrines  qui  ne  sont  point 
exprimées  dans  les  Livres  saints,  p.  596. 

TUA.IAN,  abbé  d'un  monastère  de  Syracuse  et 
ensuite  évêque  de  Malte,  p.  518. 

TRAJAN,  empereur  païen.  Saint  Grégoire  ob- 


916 


TABLE  ANALYTIQUE. 


tient  son  salut  par  ses  prières,  p.  581,  682.  Cette 
fable  est  rt?ful(?e,  ibid. 

TRA.NSLATIONSdévéques,  p.  486,  487. 

TR.VSAMO>D,  roi  des  Vandales,  veut  surpren- 
dre saint  Fulgeuce.  lui  propose  diverses  ques- 
tions, p.  7.  Saint  Fulgence  lui  adresse  trois  li- 
vres, p.  19  et  suiv.  .Mort  de  Tra^amond,  p.  8. 

TRAVAIL  des  moines  suivant  la  règle  de  saint 
Benoit,  p,  103,  166  ;  suivant  celle  de  saint  Isidore 
de  Séville,  p. 723. 

TRIBO.MEN,  questeur  de  l'empereur  Justinien, 
p.  255. 

TRIBUTS.  Saint  Grégoire  se  plaint  de  ce  que 
les  terres  de  l'Église  payaient  des  tributs,  p.  M8. 
Il  oblige  des  religieux  du  territoire  de  Palerme 
à  payer  les  tributs  qu'on  exigeait  deux,  p.  5i9. 

TRl.MTÉ.  Ecrits  de  saint  Fulgence,  relatifs  au 
mystère  de  la  Trinité,  p.  16  et  suiv.  Doctrine  de 
saint  Fulgence  sur  la  Trinité,  p.  19, 32  et  suiv.,  34, 
51  et  suiv.,  63.  05,  06,  ■;i,  72,  74.  Si  les  trois  per- 
sonnes de  la  Trinité  sont  séparables,  p.  :.9.  Un  de 
la  Trinité  a  soitfferl  :  proposition  soutenue  par  les 
moines  de  Scytbie,  p.  44,  45.  Dans  quel  sens  elle 
peut  élre  catholique  selon  saint  Fulgence  de 
Ruspe,  p.  45;  selon  Ferrand,  diacre  de  Cartilage, 
p.  89  et  suiv.-  selon  Facundus,  évéque  d'Iîer- 
miane,  p.  286.  Autre  témoignage  de  Ferrand  sur  la 
Trinité,  p.  91.  Les  erreurs  des  sabelliens  et  des 
ariens  sur  la  Trinité,  réfutées  dans  une  lettre  de 
Ferrand,  diacre  de  Carlhage,  ifcid.  et  suiv.  Dortrinc 
de  l'rocopedeGaze.p  177,178;  de  Cosme  d'Egypte, 
p.  187;  de  saint  Nicétius,  évêque  de  Trêves,  p. 203, 
204;  de  Cassiodore,  p.  245;  de  Théodore  de  ,Mop- 
suesle,  p.  292  ;  du  pape  Pelage  \",  p.  332.  Catéchèse 


de  Jean  le  Scolastique  sur  la  Trinité,  p.  355.  Dis- 
cours d'Auastase,  patriarche  d'Antloche,  sur  la 
Trinité,  p.  360, 301.  Doctrine  de  saint  Grégoire,  évé- 
que  de  Tours,  p.  387;  de  saint  Fortunat,  évéque 
de  Poitiers,  p.  406.  Doctrine  et  profession  de  foi 
de  saint  Grégoire  le  Grand  sur  la  Trinité,  p.  557. 
Discours  de  saint  Euloge  d'Alexandrie  sur  la 
Trinité,  p.  592.  Discours  de  saint  Colomban  sur 
l'unité  de  Dieu  et  sur  la  trinité  des  personnes, 
p.  032.  Doctrine  de  Marc  l'Ermite,  p.  640;  de 
Léonce  de  Byzance,  p.  067;  de  saint  Isidore  de 
Séville,  p.  713.  Cinq  dialogues  sur  la  Trinité, 
d'abord  attribués  à  saint  Athanase,  puis  à  Tbéo- 
doret  :  ils  sont  de  saint  Maxime,  abbé  de  Chry- 
sopolis, p.  709,  769. 

TRIPARTITK  (Histoire),  composée  parles  soins 
de  Cassiodore  p.  220,  221. 

TRISAGION.  Addition  au  tri.sagion,  p.  184. 

TROJANUS,  évéque  de  Saintes.  Sa  lettre  à  Eu- 
niérius,  évéque  de  Nantes,  p.  202. 

TROl'ES  ou  figures  de  l'Écriture  sainte,  p.  237. 
238. 

TUNIQUE  sans  coulure  de  Jésus-Christ.  On  la 
conservait  du  ten)ps  de  saint  Grégoire  de  Tours, 
enfermée  dans  une  châsse  de  bois,  dans  la  ville 
de  Galatée,  etc.,  p.  3';3.  Invention  de  la  tunique 
de  Notre-Seigneur  que  les  soldats  avaient  tirée 
au  sort,  p.  74.Ï. 

TURl.NGE.  Voyez  Thuringe. 

TYPE  de  l'empereur  Constantin.  Le  concile  de 
Latran  condamne  tous  ceux  qui  reçoivent  le 
Type.  p.  719.  Saint  Maxime  elAnastase  l'analhé- 
matiscnl,  p   "61. 


u. 


ULTROGOTHE,  reine  de  France,  fait  célébrer 
des  messes  en  l'honneur  de  saint  .Martin,  p.  378. 

URANIUS,  évéque  d'Émèse.  p.  99. 

URBICUS,  abbé  de  Saint-Herniés,  à  Palerme, 
p.  506. 

URSE  (saint,  abbé.  p.  382.  Sa  Vie  écrite  par 
saint  Grégoire  de  Tours,  ibid. 

URSICIN,  évéque  de  Cahors,  excommunié  au 
second  concile  de  Mâcon,  p.  371,  pour  s'être  fait 


le  partisan  de  Gondebaud  ;  mis  en  pénitence  au 
concile  de  Clermont,  p.  899. 

URSIN  (saint),  évéque  de  Bourges,  enterré 
dans  un  champ  hors  de  la  ville  avec  le  reste  du 
peuple,  p.  377. 

UUSlN,  prieur  ou  abbé  de  Ligugé,  écrit  la  vie 
de  saint  Léger,  p.  81 1. 

USURE  défendue  aux  clercs  p.  SiiS. 


VACANCE  du  siège  épiscopal  :  canons  du  con- 
cile de  Valence  sur  ce  sujet,  p.  836.  Canons  dn 
5*  concile  d'Orléans  sur  ce  même  sujet,  p.  863. 

VALENTIN,  abbé  du  monastère  de  Saint-André, 
p.  430. 

VALÈRE  (saini),  abbé,  p.  734.  Sa  piété  et  sa 
«cicuce,  ibid.  Ses  écrits,  ibid.  cl  suiv. 

VAMHA,  rui   des  Visigoth.'".  Voyez  Wamba. 

VARNAIIAIHEou  VARNACH aire  envoie  ù  saint 
Cérnnne,  évéque  de  Paris,  des  Actes  de  divers  mar- 
tyres, p.  6:t0,  631. 

VASES  SACRÉS.  Le  pape  Agnpel  donne  en  gage 
aux  trésoriers  de  l'épargne  les  vases  sacrés  de 
l'étjlise  de  Saint-Pierre,  p.  210.  Cassiodore  les  fait 


rendre,  ibid.  et  220.  Saint  Grégoire  permet  de  ven- 
dre les  vases  sacréspour  racheter  lescaplifs.  p.  ."07. 

VÉDASTUS  ou  VAAST  (saint),  prêtre,  instruit 
Clovie,  roi  de  France,  dans  la  religion  chrétien- 
ne, p.  79. 

VEILLES  DES  MOINES.  Traité  de  saint  Nicétius, 
évéque  de  Trêves,  p.  204,  205. 

VÉLO.K,  maître  de  la  milice.  Saint  Grégoire-le- 
Grnnd  lui  écrit,  p.  486. 

VENANCE,  évoque  de  Luna,  p.  510.  Saint  Gré- 
goire le  Grand  lui  écrit,  p.  49i;,  499.  510. 

VENANCE,  moine,  se  marie;  Saint  Grégoire 
l'exhorte  à  reprendre  l'habit  monastique,  mais 
inutilement,  p.  483. 


TABLE  ANALYTIQUE. 


977 


VENANT  (saint),  ubbé,  p.  382.  Sa  Vie  écrite  par 
saint  Grégoire  de  Tours,  ibid. 

VENANTIE.  Saint  Fulgcnce  lui  écrit  sur  la  vraie 
pénitence  et  sur  la  i  .Uibution  future,  p.  31. 

VKNANTIL'S,  patrice.    Saint    Grégoire  le  Grand 
lui  écrit,  p.  "29. 
VENANTIUS,  évoque  de  Pérouse,  p-  529. 
VKNISE.  Le   pnpe   llonorius   douue   le   titre  de 
très-chrétienne  i\  la  rcpnblii|ue  de  Venise,  p.  6-17. 
VÉUA.N  (suint),  évè^jne  de  CavaiUon.    Ce  qu'on 
Mil  des  circonstances  de  sa  vie,  p.  3i-2.  Il  assiste 
au  second  concile  de  Mûcon,  ibid.   Son  écrit   sur 
la  continence  dos  prctres,  ibid.  et  323. 

VÉRÉCLNDIS,  évèque  d'Afrique,  défenseur  des 
Trois-Cliapitres,  p.  345.  Ce  qu'on  sait  des  circons- 
tances de  sa  vie,  ibid-  et  340-  Sa  mort,  p.  346  ;  ses 
écrits,  p.  ibid.  et  346- 

VÉRUS,  évéque  de  Uodcz.  Ses  deux  lettres  à 
saint  Didier  de  Cabors,  p.  734. 

VETTILS  Él'AGATIlLS  (saint),  martyr  à  Lyou, 
p.  303. 

VE.\ILLA  REGIS,  bymnc  de  saint  Fortunat,  p. 
404;  à  quelle  occasion  coirposée,  p.  3lC. 

VIANDIO.  Contre  ceux  qui  s'abstiennent  de 
viande  comme  d'une  chose  défendue  et  mauvaise 
par  elle-même,  p.  193. 

VIATIQUE.  On  donnait  aux  moribonds  l'Eucha- 
ristie en  forme  de  viatique,  p.  5G9.  Ou  ne  refusait 
pas  le  viatique  à  l'article  de  la  mort,  p.  S7.1. 

VICAIRE.  C'était  l'rsage  des  papes  d'envoyer  un 
vicaire  en  Sicile,  p.  480. 
VICTOR,  primat  de  la  Byzacène,  p.  5. 
VICTOR  écrit  à  saint  Fulgencc,  p.  34. 
VICTOR,  évèque  de  Capouc.  Ses  écrits,  p.  303. 
Son  Cycle  pascal,  i&irf.  Son  travail  suruue  harmo- 
nie des  Évangiles,  ibid.  On  lui  attribue  la  traduc- 
tion de  quelques  passages  de  saint  Polycarpe,  ibid. 
VICTOR  DE  TUNONES   ou    de  Tunes,  zélé  dé- 
fenseur des  Trois-Ch  ipitres,  p.  302.  Ce  qu'il  eut  h 
souU'rir  à  ce  sujet,  ibid.    Sa  Chronique,  ibid.  Idée 
de  cette  Chronique,  ibid.  Editions  qu'on  en  a  fai- 
tes, ibid. 

V'ICTOUIN,  homme  très-riche.  Sa  conversion,  sa 
pénitence,  p.  460. 

VIERGE  (la  sainte).  Voyez  Marie,  mère  de 
Dieu. 

VIERGE.  Quelle  doit  être  la  vie  d'une  vierge 
chrétienne,  p.  27,  -..s.  Les  ravisseurs  des  vierges 
consacrées'à  Dieu  sont  excommuniés,  p. 837.  Le  Se 
concile  de  Paris  les  condamne  à  un  anathéme  per- 
pétuel, p.  883.  Défense  de  prendre  de  l'argent  pour 
la  bénédiction  des  vierges,  p.  497.  Chez  les  Grecs, 
le  prêtre  peut  consacrer  les  vierges  en  leur  don- 
nant le  voile,  p.  798.  Les  vierges  consacrées  à 
Dieu,  si  elles  se  marient,  sont  excommuniées,  p. 
908  et  912. 

VIGILE,  diacre  de  l'Eglise  romaine  et  ensuite 
pape.  Le  pape  Boniface  II  le  désigne  pour  son 
successeur,  p.  114.  Le  décret  en  est  ensuite  annulé, 
ibid.  Vigile  accompagne  le  pape  Agapei,  dans  son 
voyage  à  Conslantinople,  p.  192.  Après  la  mort 
d'Agapet,  l'impératrice  Théodora  lui  promet  de  le 
faire  pape,  à  condition  qu'il  abolira  le  concile  de 
Chalcédoine   et  qu'il   approuvera  les  erreurs  des 

XL 


acéphales,    iiiU.  Il  vient  en   Italie  et  engage   lîéli- 
suire,   en    lui  promettant  deux  cents  livres,  i\  le 
faire  pape   ù  la   place  de  Siivérius  légitimement 
élu,  ibid.  Il  est  ordonné  pape,  et  Siivérius  est  en- 
voyé eu  exil,  ibid.  Ce   dernier,   étant  revenu  en 
Italie,  est  livré  à  Vigile  qui  le   fait  périr  de  faim, 
p.  193.  Lettre  que  Vigile  écrit  i\  Anthime  de  Cons- 
tantinople,  i   Tbéodosc  il'Alexandrie  et  à  Sévère 
d'Antioclie,  par  laquelle  il  semble  approuver  leurs 
erreurs,  p.  103,  194.  Justinien  lui  ayant  témoigné 
de  la  défiance  sur  sa  foi,  Vigile  lui   écrit  une  let- 
tre contraire  à  la  précéilente,  et  conforme  i  la  foi 
catholique,  p.    194.  Sa  lettre  à   Meunas  de  Cons- 
lantinople, où  il  confirme  les  auathèmes  pronon- 
cés contre  Anthime,  Sévère   et   les  autres  schis- 
niatiqucs,  ibid.  Sa  lettre  décrétale  à    Profuturus, 
évèque   do    Brague,   p.   193,  196.    Lettre    à    saint 
Césaire  d'Arles,  sur  la  pénitence  qu'on  devait  im- 
poser i  celui  qui   avait  épousé  la  femme  de  son 
frère,  p.  196.  Lettre  à  Auxanius  successeur  de  saint 
Césaire,  par    laquelle   il   lui   accorde  le  pallium, 
p.  196.  Autre  leltre  au  même,  par  laquelle  il  l'éta- 
blit son  vicaire  dans  les  Gaules,  ibid.  Lettre  à  saint 
Aurélien  successeur  d'.Vuxanius;  il  lui  accorde    le 
même  pouvoir  qu'à  son  prédécesseur,  ibid.  Lettre 
que  saint  Aurélien  lui  avait  écrite,  p.  199  11  refuse 
d'assister   au    concile  de  Conslantinople,  qui  con- 
damne les  Trois-Chapitres,p.  862;  Éditions  de  ses 
lettres  et  de  ses  écrits,  p.  197. 11  donne  son  Judica- 
ilt  m  par  lequel  il  condamne  les  Trois-Chapi  très,  sans 
préjudice  du  concile  de  Chalcédoine,  p.  862,  865.  Ce 
décret  indisposant  les  deux  partis.   Vigile  propo- 
se à  l'Empereur  de  convoquer   un  concile  géné- 
ral, p.  863.  Prétexte  sous  lequel  il  retire  des  mains 
de  Justiuien  son /iiriicaîum  et  les  avis  des  évoques 
grecs,   p.  116.  On  presse   de   nouveau  le   Pape  de 
condamner  les  Trois-Chapitres  :  il  refuse  ;  violen- 
ces qu'on  exerce   contre  lui,  p.  866,867.  Sentence 
qu'il  prononce  contre  Théodore  de  Césarée,  p.  867. 
Il  se  réfugie  à  (Ihalcédoiue  et   publie  un  écrit  où 
il  rend  compte  des  vexations  qu'on  lui  avait  fait 
souffrir,  et  où  il  fait  sa  profession  de  foi,  ibid.  Eu- 
lychius,  nouveau   patriarche   de   Conslantinople, 
lui  présente  la  sienne  qu'il  approuve,  p.  868.  On 
convient  de  discuter  l'affaire   des  Trois-Chapitres 
dans  un  concile  composé   d'un  égal  nombre  d'é- 
vêques  orientaux  et  occidentaux,   ibid.    L'empe- 
reur Justinien  se  presse  d'assembler  le  concile  de 
Conslantinople.  qui  est  le  v'  général;  le  Pape   est 
invité  à  s'y  rendre,  il  refuse,  p.  870,  875.  Le  pape 
Vigile  donne  son  Conslitutum  ;  analyse  de  ce  décret, 
p.  873  et  suiv.  Différents  écrits   du  Pape  envoyés 
au  concile  par  l'Empereur,  p.   S75,  876.  L'Empe- 
reur ordonne  d'ôter  des  diptyques  le  nom  de  Vi- 
gile, p.  876.  Observation  sur  la  conduite  de   Jus- 
tinien, ibid.,  note    I.    Vigile   approuve  enfln  les 
décisions  du   concile  :  sa  lettre  au  patriarche  Eu- 
tychius  à  ce   sujet,  p.   879,   880.  Sa  constitution 
par    laquelle  il  condamne  les  Trois-Chapitres,  p. 
880.  Mort  du  pape  Vigile,  p.  197;  882.   La  lettre 
du   pape   Pelage  1"    au   pape    Vigile    est  suppo- 
sée ,   p.  328,    Lettre  d'Eutychius ,   patriarche   de 
Conslantinople,  au  p.ipe  Vigile,  p.  333.  Saint  Co- 
lomban  se  plaint   le  ce  qu'à   Rome,  dai.s  les  dip- 

05 


978 


TABLE  ANALYTIQUE. 


lyque?,  on  récitait  le  nom  du  pape  Vigile  avec 
ceux  des  évoques  eatlioliques,  p.6;7. 

VILLICL'S,  évèquo  de  Metz,  p.  20G.  Le  patrice 
Dyname  lui  adresse  une  lettre,  p.  403. 

VIN.  L'usape  du  via  et  de  la  viande  n'a  été  per- 
mis que  depuis  le  déluge,  p.  T!8.  On  ne  doitoffrir 
dans  le  calice,  que  du  vin  mêlé  d'eau,  p.  860. 

Vl.N'CKNT,  diacre  à  qui  saint  Grégoire  le  Grand 
écrit,  p.  486. 

VIGILK,  archevêque  d'Arles,  ordonne  évêque 
saiul  Augustin,  Œissionnaire  d'Angleterre,  p.  438. 
Saint  Grégoire  le  fait  son  vicaire,  lui  envoie  le 
pallium,  503. 

VinClNITF,.  Si  elle  est  une  œuvre  de  snréroga- 
gation,  p.  16.  Elle  est  supérieure  en  dignité  au 
mariage,  p.  i7.  Livre  de  saint  lldephonse  sur  la 
virginité  perpétuelle  de  Marie,  p.  773. 

VISITEL'RS  des  églises  vacantes,  p.  '.81,  485. 

VITAL,  évêque  d»  Ravenne.  Saint  Fortunat  lui 
adresse  un  pof'mc,  p.  403. 

VITAL,  défenseur  de  Sardaigne,  p.  512. 

VITALIEN,  p.ipc  en  G58,  succède  à  Eugène,  p.  781. 
Sa  lettre  synodale,  p.  782.  Ses  lettres  à  Paul,  ar- 
chevêque de  Crète,  ibid.;  à  Waan,  ch.-imbcllan 
de  l'Empereur,  ibid.;  à  Oswi,  roi  de  Norlhumber- 
land,  ibid.  Sa  lettre  aux  moines  de  Sicile,  ibid. 
et  783.  Ses  autres  lettres,  p.  783.  Vitalieo  accorde 
un  privilège  au  monastère  de  Stavelo,  ibid. 


VIVENTIOLE  (saint),  évêque  de  Lyon.  Ce  qu'où 
sait  des  circonstances  de  sa  vie,  p.  201.  Ses  écrits 
sont  perdus,  à  l'exception  d'un  billet  par  lequel 
il  invite  saint  Avit  de  Vienne  à  la  solennité  de 
saint  Just,  ibid.  Concile  de  Lyon  auquel  il  préside 
en  517,  p.  817,819. 

VIVIEHS,  monastère  de  Cassiodorc,  p.  211.  Sa 
description,  p  233. 

VCEU.X.  Obligation  de  les  accomplir,  p.26.Sen- 
timent  de  saint  Fulgcnce  sur  le  vœu  de  coutineu- 
ce,  p.  t'ftid.et  G5.  Défensed'accomplirdcs  vœi;x  que 
l'on  aurait  faits  en  chants lil,  en  buvaut  ou  en  folâ- 
trant, p.848- 

VOL.  De  quelle  manière  il  faut  punir  le  vol 
fait  dans  l'église,  p.  555. 

VOLONTÉ  en  Dieu  desauvT  tous  les  hommes. 
Explication  de  ces  paroles  de  saint  Paul  :  Dieu 
veut  que  tous  les  hommes  soient  sauvés,  p.  47 
etsuiv.  Il  y  a  deux  volontés  en  Jisus  -  Christ , 
l'une  divine  et  l'autre  humaine,  p.  363.  Lettre 
d'Ilonorius  sur  la  question  des  deux  volontés  en 
Jésus-Christ,  p.  647,  648.  Sentiment  de  ce  pape, 
ibid.,  et  de  Jean  IV,  p.  648;  de  saint  Maxime, 
p.  765,  766. 

Wamba,  roi  des  Visigoths  :  sa  victoire  sur  les 
rebelles,  p.  994.  Il  renonce  au  royaume,  ibid. 

Waan,  chambellan,  p.  782. 

Waast.  Voyez  Vedastus. 


Y. 


YORK.  Saint  Grégoireveut  que  l'évêque  de  cette 
ville  soit;, métropolitain  de  douze  autres  évêques, 
p.  527. 

YRIEIX  (saint),  ahbé  d'Atane,  en  Limousin,  p. 


324,  325  et  375.  Sa  Vie  par  saint  Grégoire  de  Tours, 
p.  38*.  Son  teslauicnt,  p.  325.  Edition  de  ce  testa- 
ment dans  la  Palrologie,  ibid. 


z. 


ZABARDA,ducde  Sardaigne, contribue  à  la  con- 
version des  peuples  idolAtres  de  cette  île,  p.  43G. 

ZACIIAHIE,  évêque  de  Mitilène.  assiste  au  con- 
cile de  Conslantinople,  en  536,  p.  270.  Ses  écrits, 
ibid.  et  p.  ïï71. 

ZAClIARiE,  prétendu  archevêque  à  qui  se  trouve 
adressée  une  lettre  supposée  sous  le  nom  de  Jean  I, 
p.  113. 

ZACIIARIE,  patriarche  de  Jérusalem,  emmené 
en  captivité  par  les  Perses,  p.  698. 


ZEMARCUS.  Saint  Grégoire  le  Grand  défend  de 
troubler  sa  veuve,  p.  481. 

ZÉNOBIUS,  scolastiqued'Emèse,  infecté  de  l'hé- 
résie des  acéphales,  p.  171. 

Z|5N0N,  empereur.  Ses  débauches,  p.  417.  Edit 
d'union  appelé  llénotique,  p.  418. 

ZOILE,  patriarche  d'Alexanilrie,  p.  175. 

ZOSIMAS,  moine,  met  son  bagage  sur  le  dos 
d'un  lion,  p.  4lS. 


FIN  DE  LA  TABLE  ANALYTIQUE. 


TABLE 


DES  ADDITIONS  TRINCIPALES  FAITES  PAR  L'ÉDITEUR 


L 


ADAMNAN  abbé  (et  saint)  ARCULFE.  Leurs 
écrits  dans  la  Patrolugie  et  écrits  qui  les  concernent, 
p.  802. 

ADELME  (saint),  édition  de  ses  oeuvres  dans  la 
Patrologie,  p.  805.  Quatorze  nouvelles  lettres,  ana- 
lyse de  ces  lettres,  ibid.  et  pages  suivantes.  Deux 
traités,  p.  807.  OEuvres  poétiques,  ibid. 

AGATHIAS,  poète  et  historien  grec  ;  ce  qu'on  sait 
de  sa  vie,  p.  692.  Il  continue  l'histoire  de  Procope, 
ibid.  Ses  épigrammes,  ibid.  Jugement  sur  cet  écri- 
vain, ibid. 

ANASTaSE  (saint)  le  Sinaïte;  fragments  divers 
publiés  par  .Mai,  p.  609.  Edition  complète  de  ses 
œuvres  dans  la  Patrologie;  écrits  nouveaux,  p. 
609,  610. 


ANONYME  qui  a  écrit  un  sermon  sur  les  dix 
Vierges,  p.  739. 

ANONYME  du  VI»  siècle,  quatre  fragments  histo- 
riques, p.  201. 

ANONYME  qui  a  écrit  contre  les  manichéens, p.342. 

ANONY.ME  qui  a  composé  une  règle,  p.  739;  autre 
anonyme,  vbid. 

APPONIUS:  cet  auteur  vivait  au  vi»  siècle  d'après 
Mai,  p.  807.  Raisons  qui  établissent  ce  sentiment, 
ibid.  et  80S.  Commentaire  d'Apponius  sur  le  Can- 
tique des  Cantiques.  Le  cardinal  .Mai  en  a  publié 
les  livres  septième  et  huitième  et  une  partie  du 
neuvième.  Choses  remarquables  contenues  dans  ce 
Commentaire,  p.  808. 

ARATUR.  Edition  de  ses  œuvres  dans  la  Patrolo- 
gie, p.  198. 


B. 


BARSANUPHE  (saint)  anachorète,  sa  doctrine  sur 
les  opinions  d'Origène,  d'Evagre  et  de  Didyme, 
p.  175. 

BRAULION,  évêque  de  Saragosse.  [  Ses  lettres, 
p.  728  et^suivantes.Il  aécrit.la  Vie  de  saint  Emilien, 
une  Hymne  en  l'honneur  de  saint  Milhan,  p.    731, 


732.  11  acomposé  a  ussi  les  Actes  des  martyrs^de  Sa- 
ragosse, p.  732. 

'  BONIFACE  V,  pape.  Edition  de  ses  lettres,  p.  646. 
Autre  lettre  adressée  à  Juste ,  archevêque  de  Cau- 
torbéri,  ibid. 


0. 


CASSIODORE.  OEuvres  nouvelles  et  nouvelles 
éditions,  p.  234. 

CÉSAIRE  (saint),  archevêque  d'Arles.  Edition  de 
ses  œuvres  dans  la  Patrologie,  p.  156. 

CHORICIL'S,  sophiste  de  Gaza.  p.  180,  181. 

CHRONIQUE  pascale,  nouvelle  édition,  p.  747. 

CONSTANTIN,  diacre.  Ce  qu'on  sait  de  sa  vie, 
p.  2b7.  Son  Panégyrique  des  martyrs,  ibid.  Analyse 
de  ce  discours,  ibid.  et  suiv.  Réfutation  du  symbo- 


lisme païen,  ibid.  Eloge  des  martyrs,  ibid.  et  p.  268 
269.  Prière  aux  martyrs,  p.  269.  Exhortation  aux 
fidèles,  ibid.  Editions  de  ce  discours,  ibid. 

COS.ME  d'Egypte,  édition  de  ses  œuvres  dans  la 
Patrologie,  p.  186. 

COS.ME  de  Jérusalem, dit  l'Ancien. Nouveaux  écrits 
de  cet  auteur,  p.  790. 

COSAIE  de  Majume,Qil  le  Jeune.  Collection  et  in- 
terprétation des  histoires  dont  saiut  Grégoire  de  Na- 


980 


TABLE  DES  ADDITIONS  FAITES  PAR  L'ÉDITEUR. 


D. 


zianze  fait  mention  dans  sesi  poésies,  ]>.  790  et  791. 

DENVS  le  Petit,  édition  de  ses  œuvres  dans  la 
Palrologie,  p.  122  ot  125. 

DENIS  de  Telmera;  il  écrit  une  Chronique  en 
syriaque,  p.  813. 


DIDiER  (saiut),  évêque  de  Cahors,  s*!S  œuTres  et 
sa  Vie  dans  la  Patrologie,  p.  733,  "3t. 

DOUOTHI^^E  archimandrite;  traduction  françaive 
de  ses  discours,  p.  697. 


E. 


ÉDITIONS  nouvelles,  indiquées  dans  la  Table  gé- 
nérale, ci-dessus  p.  888. 

EL' Il  (saint),  évéque  de  Noyon  :  édition  de  ses 
œuvres  dans  la  Potrotofli'e,  p.  757.  Exhortation  A  uu 
jeune  roi,  publiée  par  Maï  sous  le  nom  de  saint  Eloi, 
ibid.  Analyse  de  cet,  écrit,  ibid.  et  suiv.  .\utres 
écrits  de  saint  Eloi,  p.  700. 

EPIPHANE,  patriarche  de  Constantinoplc,  édition 
de  ses  écrits  dans  la  Palrologie,  p.  112. 

EPIPHANE  de  Chypre,  p.  112. 

EUGÈNE  (saint),  archevêque  de  Tolède,  ses  écrits 


dans  la  Patrologie.  Qaatre  lettres  dont  deux  seule- 
ment sont  de  lui,  p.  742,  743. 

EL'(jlPPIUS,  édition  de  ses  écrits  dans  la  Patro^ 
loge,  p.  8(1. 

EULlMJE  (saint),  patriarche  d'Alexandrie;  écriu 
nouveaux  publiés  par  Maï,  p.  591. 

ELSTATHE  le  moine,  p.  i:.. 

ECTYCIIIL'S  (saint),  patriarche  de  Constautinople. 
Deux  fragments  de  cet  auteur  sur  la  Pftque  et  l'ins- 
titution de  l'Eucharistie,  p.  353,  354.  Autres  frag- 
ments, p.  354. 


FERRAND,  diacre.  Editions  de  ses  lettres,  p. 
86. 

FORMULES,  recueillies  dans  la  Patrologie,  p. 
7il. 

FORTL'NAT  (saint),  évêqne  <le  Poitiers.  Pif'rc  de 
vers  en  l'honneur  de  saint  Marti:il;  authenticité  de 
cette  pièce,  p.  405, 40G.  Saint  Fortunat  est  justifié,  p. 


413,  414.  Edition  complète  des  écrits  de  cet  évo- 
que, écrits  nouveaux,  p.  414. 

FRUCTUEUX  (saint),  archevêque  de  Brague  ;  édi- 
tion de  ses  écrit?  dans  la  Patrologie,  p.  800.  Ecrit» 
nouveaux,  ibid. 

FULGENCE  (saint),  évêque  de  Ruspe  :  son  ser- 
mon sur  l'Epiphanie,  p.  75. 


G. 


GEORGE  Pisidés.  Edition  de  ses  œuvres  dans  la 
Palrologie,  p.  651;  écrits  nouveaux,  ibid. 

GRI^;(.iENTIUS  (saiut),  archevêque  de  Taphar  :  édi- 
tion de  ses  écrits  dans  la  Pa^ro/ojie,  p.  280.  Ecrits 
nouveaux,  ibid. 

GRi;i;OIUE,  patriarche  d'Antioehe;  son  discours 
sur  le  baptême  de  Jésus-Christ,  p.  35S;  autres  écrits 
nouvellement  publics,  p.  3.')8,  359. 

GRÉGOIRE  (saint)  de  Tours;  éditions  et  tradm-- 
tions  nouvelles,  p.  399. 


GRÉGOIRE  LE  GRAND  (saint).  Edition  com- 
plète de  ses  œuvres  dans  la  Patrologie,  p.  585: 
éditions   et   traductions    nouvelles,    p.    586,    E87, 

GRÉGOIRE  (saint),  évêque  d'Agrigente,  sa  Vie, 
p.  587,  588  ;  elle  fut  écrite  par  Léonce,  prêtre,  abbé 
d'un  monastère  de  Rome .  p.  588.  Commentaire 
de  saint  Grégoire  sur  rEcclésiastc,p.5S8, 589.  Choses 
remarquables  contenues  dans  ce  Commentaire, 
p.  589.  Contenu  de  l'édition  publiée  par  Morcelli, 
ibid. 


H. 


HÉSVCHIUS,  prêtre  de  Jérusalem  :   écrits   nou- 
veaux, p.  657. 


HONORIUS  I",  pape  :  recueil  de  ses  écrit»,  p.  649. 
Ecrits  en;  sa  faveur,  ibid. 


ILDEFONSE  (saint).  Edition  de  ses  œuvres  dans 
la  Patrologie,  p.  776. 
IS  AIE,  abbé.  Ses  68  préceptes  ;  ses  capitules,  p.  789. 


ISIDORE  (saint)  de  Sévilln.  Edition  do  set  œu- 
vres dans  la  Palrologie,  p.  727,  728. 


JEAN  d'Asie  ou  d'Ephè^e  :  ce  qu'on  sait  de  sa  vie, 
p  420.;  son  Histoire  de  rF^lisc.  p.  421,  422. 


J. 

,  JEAMII.pipc.  L'Exposé .«urr/Zeptafeuçiie, publié 

par  D.  l'itra,  paraît  être  l'œuvi- de  Jenn  III,  p.  334. 


TABLE  DES  ADDITIONS  FAITKS  PAR  I/l';i)ITEUH. 


981 


JEAN  IV,  pape.  Lettre  à  Dulorède,  roi  des  Saxons, 
p.  650.  Recueil  des  lettres  de  oc  pape  daus  la  Pa- 
trologie,  ibid. 

.IK.W  CLl.MAQUE  (saint).  Editions  et  traductions 
nouvelles  ilo  ses  œuvres,  p.  G9I.  (Un  a  oublié  une 
traduction  française  parue  chez  Pclagaud,  Lyon, 
1836,  iu-S.) 

JKAN  Pliiloponus  :  ouvrages  nouveaux,  p.  6;j2. 

JUllN'A.NDÈS.  Truducliou  nouvelle  de  son  llis- 
ioire  des  Gotli,^,  p.  22i. 


JULIKN  (saint),  ari.lievfii]ue  da  Tolède;  ses  écrit» 
dans  la  Patrologie,  p.  795.  Ecrits  nouveaux  :  livre 
apologélique,i6id.  AuthculicitédesAatilogie8,p.795. 
Commentaire  sur  le  proiilirt^'  Nalunn,  p.  79.").  Orai- 
sons composées  par  saint  Jnlien,  ibid.  Ecrits  con- 
tre la  rébellion  du  duc  Paul,  ibid. 

JL'SÏI.NIKN,  cniprreiir;  édition  des  écrits  de  Jud- 
tinien  daus  la  Patrologie,  p.  263  ;  œuvres  nouvel- 
les, ibid. 


L. 


LÉON  II  (saint),  pape.  Recueil  de  ses  lettres  dans  la 
Patrologie,  p.  785. 

LÉO.NCE  do  Byzance,  son  éc  rit  intitulé  :  Réfuta- 
tion de  ceux  qui  affirment  deux  personnes  en  Jé- 
sus-Christ et  ne  reconnaissent  en  lui  aucune 
union,  p.  672.  Son  écrit  intitulé  :  Livre  contre  les 
monophysites,  ibid.  Edition  complète  des  œuvres 
de  Léonce,  p.  673.  Autres  écrits  nouveaux  dans  cette 
édition,  ibid. 

LÉONCE  et  Jean.  Leur  renieil  sur  les  choses  sa- 
crées, p.  673, 


LICINIEN,  évêquc  de  Carthage;  deus  nouvelles 
lettres,  p.  429. 

LlïlîlifilE  mozarabique,  p.  423. 

LUCIUS,  archidiacre  ;  temps  o(i  il  vivait,  p.  81 1  ; 
son  Histoire  de  la  translation  du  corps  de  saint 
Etienne,  ibid. 

Ll'CULENTILS;  qualités  de  cet  auteur,  p.  633;  se* 
Commentaires  sur  saint  Matthieu,  saint  Jean,  les 
Épîtres  de  S.  Paul,  et  la  1"=  Épître  de  S.  Pierre, 
ibid. 


M. 


MARC  l'Ermite.  Ecrits  nouveaux  ;  son  Traité  con- 
tres les  melchisédéciens  et  son  Discours  sur  le 
jeiine,  p.  642.  Editions  de  ses  écrits,  p.  643. 

MARCELLIN.  Chronique  composée  par  Marcellin  : 
édition  de  cet  écrit,  p.  93. 

MARTIN  (saint)  de  Dume.  Fragments  nouveaux, 
p.  352  ;  édition  complète  de  ses  écrits,  ibid. 


MARTIN  1'^'  (saint),  pape,  ses  écrits  dans  la  Pa- 
trologie, p.  752. 

MAURE,  archevêque  deRavenne,  p.  7S2;  ce  qu'on 
sait  de  sa  vie,  ibid.  et  p.  753.  Sa  Lettre  contre  l'hé- 
résie des  mouothélites,  p.  753. 

M-WIME  (saint),  abbé;   édition  de   ses   œuvres 
dans  la  Patrologie,  p.  771.  Ecrits  nouveaux,  ibid. 
et  p.  772. 


0. 

ORIENTIUS  (saint),  évêque  d'Elvire  ;  édition  de  ses  écrits,  p.  102. 


PAUL  Cyrus  Florus.  Ecrits  nouveaux,  p.  346. 

PIERRE,  évêque  de  Laodicée  ;  son  Explicatiou  de 
l'Oraison  dominicale;  son  Commentaire  sur  les 
quatre  Evaugiles,  p.  78S. 

PRIEST  ou  PRÉJECT^saint),  évêque, de  Clermont 
et  martyr  ;  sa  vie,  p.  778,  779.  Ses  écrits  ;  son  His- 
toire de  saint  Austrémoine.   p.  779.  Vies  d'autres 


saints  d'Auvergne,  composées  par  saint  Priest, 
p.  780. 

PROCOPE  de  Gaze  :  écrits  nouveaux  publiés  par 
Maï,  p.  178,  179. Edition  des  écrits  de  Procope  dans 
la  Patrologie,  p.  179,  180. 

PROTADE  (saint),  archevêque  de  Besançon.  Sa 
Liturgie,  p.  632,  633. 


REIMI  (saint),  sur  ses  deux  .Testaments,  p.  8i> 


S. 


SÉVÈRE,  patriarche  intrus  d'Autioche.  Ouvrages 
et^ragments  nouveaux,  publiés  par  .Mai,  p.  109. 

S1VI.\RD  (saint),  abbé,  sa  vie,  p.  785  et  786;  il 
écrit  la  vie  de  saint  Calais,  abbé,  p.  -786.  Homélie 
sur  saint  Siviard  par  un  contemporain,  ibid. 

SOPHRONE  (saint),  patriarche  de  Jérusalem.  Ap- 
pendice au  chapitre  de  Dom  Ceillier  sur  saint  So- 
pbrone,  p.  706  et  suiv.;  édition  de  ses  œuvres  dans 
la  Patrologie,  ibid.  Discours  sur   l'Annonciation, 


p.  706,  707.  Eloges  de  saint  Jean-Baptiste,  de  saint 
Pierre  et  de  saint  Paul,  p.  707.  Opuscule  sur  la  con- 
fession des  péchés;  Éloge  des  deux  saints  martyrs 
Cyr  et  Jean,  et  récit  de  leurs  miracles,  ibid.  et  708. 
Deux  autres  Vies  des  saints  Cyr  et  Jean,  p.  708. 
Poésies  anacréontiques,  ibid.  et  p.  ^09.  Commen- 
taire liturgique,  ibid.  Iroparium,  ibid.  et  p.  7jo. 
Autres  écrits,  p.  710. 


9«2 


TABLE  DES  ADDITIONS  FAITES  PAR  L'ÉDITEUR. 


T. 


TAION,  évêque  de  Saragossc.  Ses  écrite  dans  la  Pa- 
trologie,  p.  717.  Sou  livre  des  Sentences,  ibid. 
Analyse  de  cet  ouvrage,  ibid. 

THÉODORE,  lecteur.  Edition  de  ses  écrits  dans  la 
Patrologie.  p.  105. 11  comptait  onze  Expositions  de 
la  foi,  ibid. 

THÉODORE,  évêque  de  Scythople,  ce  qu'on  saitde 


sa  vie,  271  ;  son  écrit  sur  les  erreurs  d'OrIgène, 
p.  272.  Edition  de  cet  écrit,  ibid. 

TIll'ODORE  I",  pape.  Ses  écrits  dans  la  Patro- 
logie, p.  748. 

THÉODORE,  abbé  de  Rhaïte.  Edition  desesécritt 
dans  la  Patrologie,  p.  787. 


V. 


VALÉRE  (  saint  1,  abbé.  Sa  vie,  p.  734,  735.  Ses 
opuscules  :  Lettre  à  la  bienheureuse  Euchérie,  p.  735. 
Son  opusrujp  de  la  Vniue  Sagesse  qu'il  écrivit  au 
bieulieureux  IJonadieu  ;  sfln  opuscule  surla  Vie  nou- 
velle, ibid.  et  p.  73(1. 

VARXAHAIRE.  Sa  Lettre  et  les  Actes  des  saints 
Speusippe ,  Eleusippc  et  Méleusippe,  et  ceux  de 
saint  Didier,  p.  631. 

VÉRÉCUNDUS,  évêque  d'Afrique;  ce  qu'on  sait  de 


sa  vie,  p.  345,  346  ;  son  Abrégé  du  concile  de  Chalcé- 
doine,  p.  346.  Poème  sur  le  .lugemeiit  dernier, 
attribue'  ù  Véréoundus,  ibid. 

VICTOR,  évêque  de  Capoue.  Fragments  nou- 
veaux (les  écrits  de  Victor,  p.  305. 

VITALIE.N,  pape.  Recueil  de  ses  Lettres  dans  la 
Patrologie,  p.  783.  Cinq  autres  Lettres,  ibid.  Dif- 
férents Privilèges,  ibid. 


z. 

ZACHARIE,  évêque  de  Mitilène.  Fragments  de  son  Histoire  ecclésiastique,  p.  271. 


TABLE 


DES  NOTES  PRINCIPALES  AJOUTEES  PAU  L'EDITEUR 


CHAPITRE  11. 

SAINT  REMI. 

Edition  de  ses  écrits,  p.  82,  nut.  2,  et  p.  84,  n.  1. 
CHAPITRE  m. 

EUGII'PIUS  ET  FEBRAND. 

Vie  de  saint  Augustin  de  Favian,  par  Eugippius, 
p.  86,  n.  3. 

Lettre  de  Ferrand  à  l'abbé  Eugippius,  publiée 
par  Mai;  ce  qu'elle  contient,  p.  91,  not.  1. 

CHAPITRE  IV. 

Ce  que  D.  Ceillier  dit  ailleurs  sur  saint  Orient, 
év6que  d'Elvire,  et  ensuite  d'Auch,  p.  100,  n.  2. 

CHAPITRE  V. 

EPlPBâNE  LE  SCOLASTIQLE  ET  THÊODOEE  LECTEUB. 

Fragment  sur  la  cause  du  schisme  des  studites, 
p.  103,  n.  1. 

CHAPITRE  Vr. 

Ecrit  de  Sévère  sur  les  trois  jours  que  Notre- 
Seigneur  passa  dans  le  tombeau,  p.  108,  n.  5. 

CHAPITRE  Vil. 

SAINT  JEAN  II,  PAFE. 

Edition  de  ses  lettres,  p.  118,  u.  4. 
CHAPITRE  JX. 

SAINT  CÊSAinE  D'ARLES. 

Notices  sur  les  discours  d'Eusèbe  d'Emèse,  p.  128, 
n.  2. 

CHAPITRE  X. 

SArai  BENOIT,  PATBLARCHE. 

Editions  de  la  Règle  de  saint  Benoît,  p.  161, 
not.  4. 

CHAPITRE  XI. 

Ephrem,  patriarche  d'Antioche,  n'a  point  la  qua- 
lité de  saint,  p.  ni,  n.  1.  —  Fragments  des  ouvra- 
ges d'Ephrem,  ibid.,  n.  6. 

CHAPITRE  Xll. 

PBOCOPE  DE  GAZE. 

Commenlaire  sur  plusieurs  livres  de  l'Ancien 
Testament,  p.  176,  n.  2.  —  Lettres  de  Procope  pu- 
bliées depuis  D.  Cellier,  p.  179,  n.  2. 


CHAPITRE  XIII. 
Fragment  du  Commenlaire  de  l'Ecriture  Sainte 
par  Jobius,  p.  183,  n.  1. 

CHAPITRE  XVllI. 

SAINT  VIVENTIOLE,  ARCHEVÊQUE  DE  LYON. 

Sa  Lettre  aux  évoques  de   la  province,   p.  201, 
not.  1. 

CHAPITRE  XX. 

JL'STINIEN,  EMPEREUR. 

Traité  contre  les  monophysites;  témoignages  sur 
l'orthodoxie  des  Pontifes  romains,  p.  263,  n.  1. 

CHAPITRE  XXI. 

JUSTE  D'URGEL,    ARETAS,  ETC. 

Edition  des  écrits  d'Arétas,  p.  265,  n.  1 .  —  Temps 
où  il  a  vécu,  p.  26",  n.  2. 

CHAPITRE  XXIV. 

JUNILIUS,  ÉViQUE  D'AFRIQUE. 

Edition  de  son  ouvrage,  p.  281,  not.  1. 
CH\P1TRE  X.KV. 

RUSTIQUE,  ETC. 

Ses  notes  sur  le  Concile  de  Chalcédoine,  p.  300, 
not.  i. 

CHAPITRE  XXVI. 

ECRITS  DE  THÉDOSE  MONOPHYSITE. 

Beau  passage  sur  la  présence  réelle,  p.  303,  uot.  4. 

CHAPITRE  XXVII. 

Edition  des  écrits  de  saint  Germain,  évèque  de 
Paris,  et  de  sa  Vie,  p.  307,  not.  10. 

CHAPITRE  XX.Mll. 

PELAGE  I,   PAPE. 

Edition  de  ses  écrits  dans  la  Patrologie,  p.  328, 
not.  5. 

CHAPITRE  XXXIX. 

SAINT  MARTIN  DE  DUME. 

Edition  de  ses  écrits  dans  la  Patrologie,  p.  352, 
not.  3. 

CHAPITRE  XL. 

SAINT  EDTYCHIUS,  PATRIARCHE  DE   CONSTANTISOPLE. 

Note  sur  la  qualité  de  saint   qu'on   lui    donne,, 
p.  332,  n,  8. 


»84 


TABLE  DES  NOTES  PRINCIPALES  AJOUTÉES  FAR  L'ÉDITELH. 


CHAPITRE  XLI. 

SAINT  ANASTASE,   PATBIAHCeE  D'aNTIOCHE. 

Note  sur  ce  saint,  p.  359,  not.  5. 
CHAPITRE  XLII. 

SAfXr  GRÉGOIRE  DE  TOURS. 

Sa  vie,  p.  3fi5,  not.  I.  —  Seulimcnt  de  Fesseler 
sur  les  Actes  du  martyre  de  saint  André,  p.  383, 
not.  3.  —  Saint  Grégoire  justifié,  p.  396,  n.  t. 

CHAPITRE  XLIX. 

SAIXT  GRteolBE  LE  GRAND,   PAPE. 

On  le  justifie  de  l'accusation  d'avoir  fait  brûler 
la  bibliûtlièque  Palatine,  p.  4U,  not.  2.  —  Change- 
ment pour  les  dimanches  de  l'A  vent,  p.  455,  not.l. 
—  D.  Ceijlier  repris,  p.  473,  not.  3  et  5,  et  p.  511, 
not.  1.  —  œuvres  de  saint  Grégoire  dans  l'édition 
de  Venise,  p.  545,  not.  1. 

CHAPITRE  LI. 

ANASTASE  LE  SIiNAÏIE. 

£U;rits  d'Anastase,  patriarche  d'Antioche,  sur- 
nommé l'.Ancien,  p.  594,  not.  i. 

CHAPITRE  LUI. 

SAINT  COLOStBAN    DE  LUSECIL. 

D.  Ceillier  repris,  p.  617,  not.  2;  p.  623,  not.  1; 
et  p.  628,  not.  2.  —  Edition  des  écrits  de  saint  Co- 
lomban  dans  la  Palrologie,  p.  630,  uot.  t. 

CHAPITRE  LV. 

SAINT  PROTADE,  ETC. 

Edition  du  Rituel  de  saint  Protade,  p.  632,  not.  6. 
CHAPITRE  LVI. 

HARC  L'ERUITE. 

Temps  où  il  a  vécu,  p.  636,  not.  S. 
CHAPITRE  LVlll. 

LES  PAPES  BONIFACE  IV,  DEfS-DEDlT,  ETC. 

Édition  des  écrits  du  pape  Bonirace  dans  la  Pa- 
iTotogie,  p.  64,  uot.  5.  —  Lettre  de  Gordien,  évè- 
que  d'Espagne,  à  Ueus-dcdit,  p.  616,  not.  3. 

CHAPITRE  LIX. 
JEAN  PBILOPONUS. 

Autres  éditions  de  ses  écrits  sur  des  matières 
profanes,  p.  651,  not.  6. 

CHAPITRE  LXll. 

LÉONCE   DE  BYZANCE. 

Texte  grec  des  livres  contre  Nestorius  et  Euly- 
chès,  p.  669,  not.  1. —  Texte  grec  d'autres  ouvrages 
de  Léonce,  p.  670,  uot.  2,  3,  p.  671,  uot  1. 


CHAPITRE  LXVI. 

DOROTHÉE  ARCHIMANDRITE,     ETC. 

Éditions  de  ses  écrits,  p.  695,  not.  i,  5,  p.  696, 
not.  6. 

CHAPITRE  LXVH. 

MODESTE,  PATRIARCHE  DE  JÉRCS.^LEH. 

Lettre  de  Zacharie,  patriarche  de  Jérusalem, 
p.  698,  not.  2.  —  Édition  des  écrits  de  Modeste,  p. 
t!'9,  not.  i,  ?.. 

CHAPITRE  LXIX. 

SAINT  ISIDORE  DE  SÉVILLE. 

Ouvrages  publiés  par  Mai,  p.  7l2,  not.  1,  715, 
not.  i. 

CHAPITRE  LXX. 

BRACLION,   SAINT  DIDIER,  VÉRnS,  ETC. 

Écrits  de  saint  Sigebert,  roi  d'Austrasie,  p.  733, 
not.  3.  —  Edition  des  écrits  de  Vérus  dans  la  Pa- 
trologie,  p.  731,  not.  2.  —  Écrits  de  saint  Faron,  p. 
734,  not.  3. 

CHAPITRE  LXXIII. 

CIIROMQUË    PASCALE. 

Traité  des  72  disciples,  p.  747,  nol.  7.  —  Juge- 
ment des  critiques  d'Allemagne  sur  la  Chronique 
pascale,  p.  747,  not.  2. 

CHAPITRE   LXXIV. 

SAINT    MARTIN   I,    PAPE. 

Vie  et  écrits  de  saint  Amand,  évêque  de  Maes- 
tricht,  p.  749,  not.  ô. 

CHAPITRE  LXXVIII. 

SAINT  PRIEST,  ÉVÉylE  DE  CLERJIQNT,  SAINT  LÉGER, 
ÉV'1-.QCE  D'AUTUN. 

Lettre  de  M.  Brun,  vicaire  général  de  Clermont, 
sur  les  écrits  de  saint  Priest,  p.  "80,  not.  i.—  Vies 
de  saint  Léger,  p.  780,  not.  2.  —  Note  sur  le  testa- 
ment de  saint  Léger,  p.  781,  not.  2* 

CHAPITRE  LXXIX. 

LES  PAPES  SAINT  BENOrP,  SAINT  AGATHON,  ETC. 

Lettres  et  privilèges  du  pape  Adeodat,  p.  T«S. 
nol.  3. 

CHAPITRE  LXXXII. 

SAINT  THÉODORE  DE  CANTORBEBY. 

Note  sur  les  effets  de  la  profession  monastique, 
p.  797,  not.  7. 

CHAPITRE  LXXXIV. 

SAINT  ADELUE,    DÉMÉTRIC.<   DE  CYZIQL'E. 

Note  sur  le  temps  où  il  a  vécu,  p.  809,  not.  l. 
CHAPITRE  LXXXVI. 

CONCILES. 

Note  sur  une  lettre  de  Justiuien,  p.  S76,  uot.  l. 


SUPPLÉMENT. 


Commencements  dn  Christianisme  dans  les  Ganles*. 


Grégoire  de  Tours  '  rapporte  au  règne  de 
Décius  la  mission  des  sept  évêques  qui  prêchè- 
rent la  foi  dans  les  Gaules  '  :  saint  Galion  fut 
évùque  de  Tours,   saint  Trophimc  d'Arles, 
saint  Paul  de  NarLoune,  saint  Saturnin   de 
Toulouse,  saint  Dcuys  de  Paris,  saint  Austre- 
moiue  de  Clermout,  saint  Martial  de  Limo- 
ges.  Mais  Grégoire  reconnaît  que  la  foi  y 
avait    été    prêchée    auparavant ,    puisqu'il 
y   place  des  martyrs  dans  la  persécution 
d'Antonin  *.  Il  dit  ailleurs  ^  en  parlant  de 
saint  Saturnin,  qu'il  avait  été  ordonné  par 
les  disciples  des  apùtres;  ce  qui  paraît  le 
metti'e  en  contradiction  avec  lui-même,  car 
il  n'y  avait  plus  de  disciples  des  apôtres  du 
temps  de  Décius.  L'abbé  Arbellot  ^  a  prouvé 
qu'eu  retardant  jusqu'au  milieu  du  m'-'  siè- 
cle la  mission  des  premiers  prédicaleuis  du 
christianisme  dans  la  Gaule,  Grégoire  s'ap- 
puie sur  une  citation  inexacte,  qu'il  est  en 
contradiction  avec  des  écrivains  antérieurs 
dont  le  témoignage  a  plus  de  valeur  cpe 
le  sien;  qu'il   se  contredit  lui-même;  en- 
fin, que   les  partisans  de  cet  histoiien  re- 
connaissent que  le  passage  qui  formule  son 
opinion  historique  est  très-défectueux.  Les 
légendes  reproduisant  la  tradition  orale  des 
églises  où  elles  ont  été  composées,  s'accor- 


dent à  dire  que  les  premiers  évêques  des 
Gaules  ont  été  envoyés  par  les  apôtres  ou 
les  successeurs  des  apôtres,  par  saint  Pierre 
et  saint  Clément. 

(1  Si  l'assertion  de  Grégoire  de  Tours  avait 
eu  quelque  vraisemblance,  dit  l'abbé  Arbel- 
lot ';  si  elle  eût  pris  sa  source  dans  les  vraies 
traditions  du  pays,  elle  aurait  été  reproduite 
au  moyen-âge  par  les  hagiographes  de  cette 
époque.   Bien  loin  de  là,  elle  estcontredite 
partout  :  au  vif  siècle,  dans  la  patrie  même 
de  Grégoire  de  Tours ,  saint  Priest,  évêque 
de  Clermont,  proteste  contre  cette  assertion, 
en  assignant  aux  temps  apostoliques  la  mis- 
sion de  saint  Austremoine,  de  saint  Martial, 
de  saint  Trophime,  etc.  ;   au  ix",  Hilduin, 
abbé  de  Saint-Denys,  proteste  en  opposant 
à  la  conjecture  de  Grégoire  des  témoigna- 
ges anciens  qui  la  contredisent;  au  x"  siè- 
cle, Pierre  le  Scolastique,  en  Limousin,  pro- 
leste en  adressant  à  l'évêque  de  Toms  une 
virulente  apostrophe.  Pourquoi  donc  les  cri- 
tiques modernes  ont-ils  voulu  remettre  en 
lumière  une  coujectm'e  erronée  dont  tout  le 
moyeu-àge  a   fait  justice?  Si  la  tradition 
existe  quelque  part,  ne  se  trouve-t-eUe  pas 
dans  les  légendes  de  nos    premiers   évê- 
ques. » 


'  Voyez,  p.  395.—  '  Ceci  est  extrait  de  Henrion, 
Histoire  ecclésiastique,  tom.   XVIJ,  pag.  104,  105. 
'  De  Gloria  Conf.,  lib.  1,  cap.  xsvui. 
'  rbid.,  cap.  xiix. 


5  De  Glor.  Slart.,  cap.  xLvni. 
^  Dissertation  sur  l'apostolat  de  saint  Martial  et 
sur  l'antiquité  des  églises  de  France. 
■'  Dissertation  citée  ci-dessus. 


XI, 


66 


ADDITION. 


[Le troisième  livi-e  de? extraits  de  sainlGré- 
p^oire  le  Grand  sur  le  Nouveau  Testaineut  fut 
imprimé  à  Paris  en  1316,  in-4;  à  Strasbourg 
la  même  année  chez  Jean  Kuoblauchius  et 
sous  le  nom  de  Paterius  dans  1  édition  des 
œuvres  de  ce  saint  pape,  à  Rome,  en  1553. 


Alulfe  dit  '  dans  le  Prologue  de  tout  louvrage 
qu'il  écrivait  vers  l'an  1092;  qu'il  l'entreprit 
par  ordre  de  son  abbé,  depuis  évêque  de 
Cambrai. Ou  tiouve  ce  Prologue  dans  les  Ana- 
lectcs  de  doni  Mabillon  '.] 


'  Àpud  MabUlonium  in  Analectis. 
*  Tout  ce   qui  est  entre  crochets  se  trouve  dans 
l'édition  de  D.  Ceillier,  au  tome  XXII,  p.  19!).  Cette 


addition  aurait  dû  être  placée  à  la  page  53<  de  ce 
tome  XI  de  la  nouvelle  édition.  {L'éditeur.) 


ERRATA. 


Page  VI  de  la  table  des  chapitres.    Chapitre  xxir,  supprimez  :  Timothée,  prêtre  de  Jé- 
rusalem, Euscbe,  patriarche  d'Alexandrie. 
—      1,  ligne  io,  colonne  1,  au  lieu  de  :  Marie-Anne,  lisez  :  Marianne. 

Juffelle  —     Justelle. 

Timothée  —    Théodore, 

merveilles  opérées  par  saint  Benoît. 
Chamer,  lisez  :  Cramer, 

le  chiffre  4,  avant  Théodose  qui  commence  la 
page  304. 
;  chapitre  LX,  lisez  :  chapitre  XL. 

sur  le  baplèmedece  Saint  — 
Charimir,  — 

saint  Cirique,  — 

Cécile,  — 

IsagogenLuturgica,  — 
KoUad, 


93,    _     9,      _      1, 

—  105,     —     4,-2,         — 

—  157,  n°  o,  à  la  manchette,  mettre  : 

—  2C6,    —   10,  au  lieu  de  . 

—  303,  hgue  55  de  la  2°  col.,  mettre  : 


—  352 

—  358^  ligne  27, 

—  375,  —    13,  colonne  2, 

—  380,  —    27,      —      2, 

—  511,  —    47,       —       2, 

—  545,  note   1, 

—  585,  —    34,       —       2. 


au  lieu  de 


sur  le  baptême  de  N.-S. 

Charimer. 

Cyrgiie. 

Cécile. 

Isagoge  Liturgica. 

Rollard. 


—  728,  dans  le  titre  du  chapitre,  supprimez  :  et  quelques  autres. 

—  731,  ligne  55,  colonne  2,  au  lieu  de  :  Milhau,  lisez  :  Milhan. 

—  796,  mettez  :  le  mot  saint  à  Théodore  de  Gantorbery. 

—  799,  dans  le  titre  du  chapitre  vers  l'an  366,  lisez  :  666. 

—  799,  ibid.  au  lieu  de  :  769,  716. 

—  800,  ligne  55,  colonne  2,  dernier  mot,  ajoutez  :  qui. 


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