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Full text of "Histoire générale des traités de paix et autres transactions principales entre toutes les puissances de l'Europe depuis la paix de Westphalie; ouvrage comprenant les travaux de Koch, Schoell, etc., entièrement refondus et continués jusqu'à ce jour"

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HISTOIRE  GÉNÉRILE 

DES 

TRAITÉS  DE  PAIX 


ERRATA. 

Page  Au  lieu  de  Lùez 

101,       ligne  22;         Frédéric  VI,  Frédéric  IV. 


«B  L'IMPRIMMIE  DB  CRAPEi.ET,  Hl'E  DE  VAUCIRARD ,  9. 


HISTOIRE  GÉNÉRALE 


DES 


TRAITÉaJ)E  PAIX 

AUTRES  TM^^  PRINCIPALES 

ENTRE  TOUTES  EES  PUISSANCES  DE  L'EUROPE 

EPIlSiLA   PAIX   DE  WESTmALIE 


PARIS  :    AMYOT,  RUE  DE  LA   PAIX 


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SUITE 


QUATRIÈME  PERIODE 


OU 


HISTOIRE  DES  TRAITES 

DEPUIS  LE  COMMENCEMENT  DES  GUERRES  DE  LA  RÉVOLUTION 
FRANÇAISE  JUSQU'AU  TRAITÉ  DE  PARIS  DE  181i5 

1791—1815 


VII 


QUATRIÈME  PÉRIODE, 


OU 


HISTOIRE  DES  TRAITES 

DEPUIS  LE  COiMMENCEMENT  DES  GUERRES  DE  LA  RÉVOLUTION 
FRANÇAISE  JUSQU'AU  TRAITÉ  DE  PARIS  DE  181S. 

1791—1815. 


CHAPITRE  XXXL 


TRAITÉ   DE   niX   D  AMIENS  ENTRE  LA  FRANCE  ET   SES  ALLIÉS,    ET  LA 
GRANDE-BRETAGNE,    DU   27   MARS    1802*. 

Desseins  du  premier  Consul  à  l'égard  de  l'Angleterre.  —  Mission  de  M.  Otto 
à  Londres.  —  Ses  instructions.  —  Sa  conduite  habile.  —  Négociation 
pour  un  armistice  maritime ,  au  mois  d'aoïU  1800.  —  Projet  présenté  par 
M.  Otto.  —  Contre-projet  de  lord  Grenville.  —  Conférence  entre  M.  Otto 
et  M.  Hammond.  —  Capitulation  de  Malle.  —  Négociation  relative  à  la 
saisie  des  pêcheurs  français.  —  Nouveau  contre-projet  de  M.  Otto. — 
Le  mmslere  Addington  prend  la  direction  des  affaires  le  16  mars  1801. — 
Communication  de  lord  Eawkcshury  à  M.  Otto.,  louchant  le  rétablis- 
sement de  la  paix.  —  Négociation  des  articles  préliminaires.  —  Campa- 
gne maritime  de  1801.— Combat  d'Algésiras,  du  6  juillet;  l'amiral  Imots: 
l'amiral  Saumarez. — Articles  du  traité  des  préliminaires  de  Londres,  du 
1"  octobre  1801.  —  Enthousiasme  qu'excite  à  Londres  la  conclusion  de 
la  paix.  —  Le  général  J.auriston  arrive  en  cette  ville,  porteur  des 
ratifications. —  Congrès  à  Amiens;  plénipotentiaires;  Joseph  Bonaparte: 
marquis  Cornwallis  :  chevalier  Azara:  M.  Schimmelpenninck.  —  Les 
conférences  s'ouvrent  au  mois  de  décembre.  —Discussions  préliminaires 

—  Affaire  de  Malle.  — Difficultés  relatives  à  la  Porte  ottomane  el  à  l'Italie 

—  Traité  de  paix  d'Amiens,  entre  la  France  et  ses  alliés  et  la  Grande- 
Bretagne,  du  27  mars  1802.  —  Considérations  générales  sur  la  paix  d'A- 
miens. 

•  Pièces  officielles  relatives  aux  préliminaires  de  Londres  et  au  traité 
d'Amiens.  Paris,  de  l'imprimerie  de  la  République,  an  xi.  —  Pièces 
officielles  mises  sous  les  yeux  du  parlement  britannique  le  31   no- 


La  France,  après  les  transactions  de  Lunéville,  n'était 
plus  en  guerre  qu'avec  la  Grande-Bretagne  :  le  pre- 
mier Consul  faisait  les  préparatifs  d'une  invasion  de 
ce  royaume,  et  cependant  il  avait  de  sérieux  motifs 
pour  désirer  la  paix  ;  le  commerce  la  demandait  à 
grands  cris,  et  Bonaparte  lui-même  comprenait  bien 
que  la  paix  seule  pouvait  consolider  le  nouveau  gou- 
vernement. 

Aussitôt  après  qu'il  se  fut  saisi  du  pouvoir,  en 
même  temps  qu'il  avait  fait  une  démarche  directe  au- 
près du  roi  d'Angleterre,  Bonaparte  avait  formé  le 
projet  d'envoyer  à  Londres  un  agent  qui  sût  prépa- 
rer les  voies  à  un  rapprochement.  Sieyhs  lui  indiqua 
M.  Otto,  qu'il  avait  laissé-  comme  Chargé  d'affaires  à 
Berlin,  et  qui,  par  son  habitude  de  la  langue  et  des 
mœurs  anglaises,  aussi  bien  que  par  son  esprit  conci- 
liant, était  éminemment  apte  à  remplir  cette  mission. 
Le  caractère  à  lui  donner  présentait  seul  quelque  dif- 
ficulté. Cependant,  comme  la  France  avait  à  Londres 
un  commissaire  chargé  de  traiter  de  tout  ce  qui  était 
relatif  aux  prisonniers,  M.  Otto  fut  désigné  pour  le 
remplacer.  Quant  à  l'objet  réel  de  sa  mission,  nous 
allons  le  trouver  défini  dans  les  instructions  qui  lui 
furent  remises. 

«  La  nomination  du  citoyen  Otto,  y  est-il  dit ,  sera 
interprétée  en  Europe  d'une  manière  très-étendue;  le 
poste  qu'il  quitte,  l'ancienneté  de  sa  réputation,  la  si- 
tuation actuelle  des  affaires  donnent  à  cette  mesure  le 
caractère  d'une  avance  du  gouvernement.  Elle  en  est 

vembre  4800.  —  Suite  de  pièces  relatives  aux  discussions ,  communica- 
tions et  négociations  qui  ont  eu  lieu  entre  la  France  et  l'Angleterre ,  de- 
puis le  5  nivi'ise  an  vin  ('20  décembre  1799),  jusqu'au  terme  de  la  négo- 
ciation qui  s'ouvrit  à  la  fin  du  ministère  de  M.  Fox,  et  qui  fut  rompue 
par  le  départ  de  lord  Lauderdale,  en  octobre  4806.  Paris,  de  1  injpri- 
incrio  du  gouvernorncnl,  7  cal)icrs  in-4''. 


—  5  — 

une  en  effet;  mais  il  faut  en  laisser  l'interprétation  au 
public. 

((  Le  citoyen  Otto  ne  se  présentera,  à  son  arrivée, 
que  sous  le  rapport  de  son  agence  avec  le  ministère  de 
la  marine,  pour  les  prisonniers.  Quant  à  la  partie  di- 
plomatique de  sa  mission ,  il  sera  observateur,  et 
attendra  qu'on  lui  fasse  connaître  l'impression  pro- 
duite par  le  choix  qu'on  a  fait  de  lui.  Si  elle  se  mani- 
feste d'une  manière  vague  et  indécise,  il  laissera  dou- 
ter qu'il  l'ait  aperçue;  si  elle  se  prononce  d'une 
manière  plus  décidée,  il  se  prononcera  dans  le  même 
degré.  Enfin,  s'il  arrive  au  point  de  pouvoir  donner  à 
ce  qui  lui  aura  été  transmis  de  la  part  du  ministère 
anglais  le  caractère  d'une  mesure  correspondante  à 
l'avance  renfermée  dans  sa  nomination,  il  pourra  sor- 
tir du  rôle  passif  d'observateur.  » 

M.  Otto,  parti  de  Berlin,  chercha  vainement  dans 
les  ports  de  la  Hollande  un  bâtiment  pour  passer  en 
Angleterre,  tant  les  communications  avaient  cessé 
entre  les  deux  pays  !  Il  vint  jusqu'à  Calais  où  il  en 
fréta  un,  et  s'embarqua. 

S'il  se  fût  renfermé  dans  le  rôle  passif  qui  lui  était 
prescrit,  on  se  serait  attendu  réciproquement,  et  sa 
mission  n'eût  abouti  à  rien,  car  les  ministres  anglais 
étaient  peu  portés  à  la  paix  ;  mais  il  forma  des  rela- 
tions avec  les  hommes  qui  la  désiraient  davantage.  On 
le  fit  rencontrer  fréquemment  à  la  campagne  avec  les 
ministres,  avec  le  prince  de  Galles;  il  ne  négligea 
point  d'encourager  les  efforts  des  membres  de  l'oppo- 
sition qui  poussaient  à  la  paix,  et  six  mois  après  son 
arrivée,  il  fut  en  position  de  pouvoir  demander  une 
autorisation  explicite  de  traiter.  C'est  alors  que  com- 
mencèrent les  négociations  qui,  plusieurs  fois  inter- 
rompues, furent  cependant  conduites  à  bonne  fin.  Le 
premier  Consul,  irrité  au  delà  de  toute  expression  des 


—  6  — 

injures  dont  il  était  l'objet  dans  les  journaux  anglais , 
avait  donné  l'ordre  à  M.  Otto  de  revenir.  Mais  celui-ci 
ne  se  hâta  pas  d'obéir,  et  s'efforça  de  le  calmer.  Il  pré- 
voyait, d'après  les  discussions  du  Parlement,  un  pro- 
chain changement  dans  le  Cabinet,  et  l'arrivée  d'un 
ministère  plus  favorable  à  la  paix.  En  effet,  le  8  fé- 
vrier 1801,  M.  Pitt  résigna  volontairement  le  pouvoir 
qu'il  avait  si  longtemps  exercé. 

Afin  de  suivre  avec  exactitude  le  fil  des  négocia- 
tions, il  est  nécessaire  de  les  reprendre  au  point  où 
elles  étaient,  lors  de  la  mission  du  comte  de  Saint- 
Julien\  On  se  rappelle  que,  dans  cette  circonstance, 
le  Cabinet  de  Vienne  avait  donné  une  preuve  de  con- 
stance et  de  loyauté  en  rejetant  toutes  les  offres  pour 
le  rétablissement  de  la  paix  que  lui  faisait  le  gouver- 
nement français  «  pourvu  qu'il  voulût  la  négocier  sans 
le  concours  de  la  Grande-Bretagne.  » 

Pour  que  François  II  consentît  à  traiter,  à  Lunéville, 
d'une  paix  séparée,  il  fallut  que  la  Cour  de  Londres 
elle-même,  convaincue  que  les  efforts  de  l'Autriche  ne 
réussiraient  pas  à  abattre  le  colosse  de  la  puissance 
française,  et  pensant  qu'il  valait  mieux  ménager  les 
forces  de  cette  monarchie  pour  des  temps  plus  oppor- 
tuns, plutôt  que  de  les  user  par  une  résistance  inutile, 
dégageât  ce  monarque  des  obligations  qu'il  avait  con- 
tractées. La  Cour  de  Londres  fit  un  pas  de  plus;  sans 
y  avoir  été  provoquée,  elle  manifesta  le  désir  de  pren- 
dre part  elle-même  à  la  négociation  que  l'Autriche  al- 
lait entamer  par  ses  conseils. 

Tel  fut  l'objet  d'une  Note  que  lord  Minto,  ministre 
britannique  à  Vienne,  adressa,  le  9  août  1 800,  au  ba- 
ron de  Thugutf  et  que  celui-ci  communiqua,  le  11  du 

•  Voy.  t.  VI,  p.  239. 


même  mois,  à  M.  de  Talleyrand-Périgord ,  en  lui  pro- 
posant Schélestadt  ou  Lunéville  pour  lieu  du  Congrès. 
Le  premier  Consul,  «  pour  empêcher  que  l'admission 
de  l'Angleterre  dans  les  négociations  avec  la  Cour  de 
Vienne  ne  fut  une  occasion  de  délai  ',  »  ou  pour  tirer 
de  cette  disposition  pacifique  de  la  Grande-Bretagne 
le  parti  le  plus  favorable  à  ses  vues ,  en  retardant  la 
chute  de  Malte  et  d'Alexandrie,  bloquées  par  les  flottes 
anglaises,  chargea  M.  Otto  de  proposer  au  Cabinet 
britannique  la  conclusion  d'un  armistice  par  mer, 
semblable  à  celui  qui  existait  entre  les  armées  fran- 
çaises et  autrichiennes,  de  manière  qu'on  prit,  à  l'é- 
gard des  places  assiégées  ou  bloquées  par  les  forces 
anglaises,  des  mesures  analogues  à  celles  qui  avaient 
eu  lieu  en  Allemagne  par  rapport  aux  places  d'Ulm, 
d'ingolstadt  et  de  Philippsbourg. 

La  proposition  de  Bonaparte  fut  remise  à  lord 
Grenville  le  24  août.  Ce  ministre  ne  jugeant  pas  con- 
venable d'entrer  en  rapport  direct  avec  M.  Otto^  qui, 
ainsi  que  nous  l'avons  vu,  n'était  pai  accrédité  ni 
reconnu  comme  négociateur,  chargea  le  commis- 
saire anglais  qui  traitait  habituellement  avec  lui 
pour  l'objet  de  sa  mission,  1"  de  lui  dire  que  la 
Note  de  lord  Minto  contenait  l'expression  des  senti- 
ments du  Roi;  2°  de  demander  si  le  gouvernement 
français  s'était  expliqué  sur  les  propositions  du  baron 
de  Thugutf  relatives  à  la  tenue  du  Congrès;  3"  de  dé- 
clarer que,  dans  ce  cas,  le  Roi  enverrait  à  l'endroit 
convenu  un  plénipotentiaire  pour  traiter  de  la  paix 
avec  les  plénipotentiaires  français  et  autrichiens, 
pourvu  que  le  gouvernement  français  s'engageât  à 
respecter  les  communications  directes  de  ce  ministre 

'  La  phrase  placée  entre  guillemets  est  tirée  du  rapport  officiel 
français. 


—  8  — 

avec  sa  Cour;  mais  4°  d'observer  en  même  temps  qu'il 
n'avait  jamais  été  usité  de  conclure  un  armistice  pour 
les  opérations  par  mer  pendant  le  cours  des  négocia- 
tions pour  la  paix;  que  les  discussions  auxquelles  un 
tel  armistice  donnerait  nécessairement  lieu,  pourraient 
retarder  la  pacification,  bien  plutôt  que  de  l'accélérer; 
mais  qu'en  supposant  qu'il  fût  possible  de  parvenir  à 
une  suspension  des  hostilités  par  mer,  il  ne  le  serait 
au  moins  pas  de  prendre  un  parti  décisif  sur  cet  objet 
avant  de  savoir  comment  la  France  pensait  que  les 
conditions  convenues  pour  les  armées  d'Allemagne 
pouvaient  être  appliquées  à  un  armistice  par  mer. 

Dans  la  conférence  que  M.  Otto  eut  à  ce  sujet,  le 
29  août  avec  le  capitaine  George^  il  annonça  en  ré- 
ponse aux  questions  de  lord  Grenville,  que  les  Cabi- 
nets de  Vienne  et  de  Paris  s'étaient  entendus  pour  te- 
nir les  conférences  à  Lunéville.  Il  s'expliqua  sur  la 
manière  d'appliquer  à  un  armistice  maritime  les  prin- 
cipes sur  lesquels  se  fondait  la  suspension  d'armes  en 
Allemagne.  Comme  elle  ne  s'étend,  disait-il,  que  sur  des 
places  actuellement  bloquées  par  les  Français,  l'ana- 
logie demanderait  aussi  que  l'on  comprît  dans  l'armis- 
tice de  mer  des  places  effectivement  bloquées  par  les 
forces  anglaises;  qu'ainsi  Belle-Ile,  Malte  et  Alexan- 
drie devaient  être  mises  sur  le  même  pied  qu'Ulm, 
Ingolstadt  et  Philippsbourg.  H  ajouta  qu'il  avait  or- 
dre d'insister  sur  une  décision  avant  le  3  septembre; 
c'était  l'époque  oii  les  hostilités  devaient  recommen- 
cer en  Allemagne. 

Le  2  septembre,  on  notifia  au  commissaire  français 
que  le  lloi  avait  nommé  son  plénipotentiaire  à  Luné- 
ville,  M.  Grenvillei  et  secrétaire  de  légation,  M.  Gar- 
like,  qui  remplissait  alors  les  mômes  fonctions  à 
Berlin. 

Le  4  septembre,  M.  Otto  exposa,  dans  une  nouvelle 


—  9  — 

Note,  que  la  France  n'avait  consenti  à  l'armistice  avec 
l'Autriche  que  dans  l'espoir  d'une  prompte  pacifica- 
tion; qu'en  supposant  que  l'armistice  maritime  fût  à 
certains  égards  désavantageux  à  la  Grande-Bretagne, 
celui  d'Allemagne  ne  l'était  pas  moins  aux  intérêts  de 
la  France;  qu'en  conséquence,  les  hostilités  recom- 
menceraient sur  le  Continent  le  1 1  septembre,  et  que 
si  elles  étaient  une  fois  reprises,  le  premier  Consul 
ne  pourrait  plus  consentir,  à  l'égard  de  l'Empereur, 
qu'à  une  paix  séparée  et  complète. 

Le  même  jour,  lord  Grenville  fit  demander  à  M.  Olto  ' 
s'il  était  muni  d'un  projet  de  convention  pour  l'ar- 
mistice, et  s'il  était  autorisé  à  y  comprendre  les  alliés 
du  Roi,  et  à  y  faire  insérer  des  articles  relatifs  à  la  sortie 
des  flottes  française  et  espagnole  stationnées  à  Brest. 

Le  commissaire  français  communiqua  alors  un  pro- 
jet d'armistice  en  sept  articles  dont  il  était  porteur,  et 
qui  renfermait  les  stipulations  suivantes  :  il  y  aura 
suspension  d'hostilités  entre  les  flottes  et  armées  de 
France  et  celles  de  la  Grande-Bretagne;  les  bâtiments 
de  guerre  et  de  commerce  de  Tune  et  l'autre  nation 
pourront  librement  naviguer,  sans  être  soumis  à  au- 
cune visite;  à  dater  d'un  tel  jour,  tous  les  bâtiments 
réciproquement  pris  seront  restitués;  les  places  de 
Malte,  d'Alexandrie  et  de  Belle-Ile  seront  assimilées  à 
celles  d'Ulm,  de  Philippsbourg  et  d'Ingolstadt,  c'est- 
à-dire  que  tous  les  bâtiments  de  commerce  neutres  ou 
français  pourront  y  porter  des  vivres;  les  flottes  qui 
bloquent  Brest,  Cadix,  Toulon,  Flessingue,  se  retire- 
ront. Des  officiers  anglais,  députés  vers  l'amiral  qui 
commande  dans  la  Méditerranée,  et  vers  les  comman- 
dants des  blocus  de  Malte  et  d'Alexandrie ,  traverse- 
ront la  France;  enfin,  l'Espagne  et  la  République 
batave  seront  comprises  dans  rarmistice\ 

'  Il  paraîtrait,  par  le  Recueil  français  des  pièces,  que  M.  Otto  a  dé- 


—  10  — 

Au  reçu  de  cette  pièce,  lord  Grenville  demanda 
d'abord  une  prolongation  de  l'armistice  sur  le  Conti- 
nent, afin  qu'on  eût  le  temps  de  discuter  le  projet 
communiqué  par  M.  Otto;  cependant,  dès  le  7,  il  lui 
transmit  un  contre-projet  plus  analogue,  d'après  lui,  à 
la  convention  d'armistice  qui  avait  été  conclue  en  Alle- 
magne. Voici  les  modifications  du  projet  de  M.  Otlo, 
qu'on  y  remarque  : 

1°  Les  hostilités  ne  pourront  être  renouvelées 
qu'après  une  notification  préalable  de  quinze  jours  ; 
et,  en  cas  de  renouvellement  d'hostilités  entre  la  France 
et  l'Autriche,  l'armistice  entre  la  Grande-Bretagne  et 
la  France  sera  également  considéré  comme  rompu 
de  fait. 

2'  Malte  et  les  villes  maritimes  de  l'Egypte  seront 
mises  sur  le  même  pied  que  les  places  qui,  quoique 
comprises  dans  la  démarcation  de  l'armée  française  en 
Allemagne,  sont  occupées  par  les  troupes  autrichien- 
nes. En  conséquence,  rien  n'y  sera  admis ,  par  mer , 
qui  puisse  leur  donner  de  nouveaux  moyens  de  dé- 
fense, et  elles  ne  recevront  de  provisions  que  pour 
quatorze  jours  à  la  fois. 

3°  Des  munitions  navales  et  militaires  ne  pourront 
être  importées,  pendant  la  durée  de  l'armistice,  dans 
les  ports  français  bloqués,  et  aucun  des  vaisseaux  de 
guerre  actuellement  mouillés  dans  ces  ports  ne  pourra 
en  sortir  pour  prendre  une  autre  station. 

4"  Les  alliés  des  deux  puissances  contractantes  pour- 
ront accéder  à  cette  convention. 

Le  premier  Consul  rejetait  ce  contre-projet,  dans  la 
supposition  qu'on  voulût  le  regarder  comme  une  com- 
pensation de  l'armistice  continental;  il  l'admettait,  si 

buté  dans  sa  négociation  par  la  communication  de  ce  projet;  on  voit, 
par  le  Recueil  anglais,  que  les  choses  se  sont  passées  ainsi  que  nous  les 
avons  rapportées. 


la  Grande-Bretagne  voulait  qu'il  fût  indépendant  des 
événements  du  Continent,  et  seulement  relatif  à  une 
négociation  particulière  qui  s'ouvrirait  entre  la  France 
et  la  Grande-Bretagne  :  c'était  supposer  que  cette  puis- 
sance voudrait  abandonner  l'Autriche  et  renoncer  en 
même  temps  aux  avantages  que  sa  position  lui  don- 
nait sur  un  ennemi  qui  n'avait  aucun  moyen  de  l'at- 
taquer. Le  Cabinet  britannique  avait  pensé  que  son 
consentement  à  une  cessation  des  hostilités  par  mer, 
à  conditions  égales,  devait  être  le  prix  de  la  prolonga- 
tion de  l'armistice  continental.  Bonaparte^  au  contraire, 
soutenait  que  cette  prolongation  était  trop  favorable 
aux  intérêts  de  l'Autriche,  pour  qu'on  ne  la  rachetât 
pas  au  prix  de  concessions  importantes  en  faveur  de 
la  France.  «  Par  l'armistice  continental ,  dit  M.  Otto 
dans  sa  Note  du  16  septembre,  la  Cour  de  Vienne  ac- 
quiert le  moyen  de  réorganiser  ses  armées;  de  con- 
vertir en  hommes,  en  armes,  en  munitions  de  toute 
espèce  les  subsides  que  le  gouvernement  anglais  lui 
paye;  de  fortifier,  d'approvisionner  ses  places  de  se- 
conde et  de  troisième  ligne,  qui  se  trouvaient  en  mau- 
vais état,  parce  que  la  marche  rapide  des  armées 
françaises  n'avait  pas  été  prévue.  »  A  ces  raisons, 
fondées  dans  la  vérité,  la  Note  française  ajoute  une 
phrase  qui  paraissait  peu  séante  dans  une  négociation 
entre  deux  grandes  puissances  obligées  à  respecter  les 
convenances.  ((  Par  l'armistice  continental,  tels  sont 
les  mots  qui  furent  généralement  blâmés,  l'impres- 
sion des  victoires  des  armées  françaises  diminue,  leur 
effet  s'affaiblit.  Six  mois  de  repos  suffiraient  pour  que 
le  matériel  et  le  moral  des  armées  autrichiennes  se 
trouvassent  rétablis,  pour  que  les  vaincus  ne  fussent 
plus  frappés  de  l'ascendant  des  vainqueurs ,  et  pour 
que  cette  chance  de  supériorité  si  bien  acquise  à  la  Ré- 
publique fût  encore  pour  elle  à  ressaisir.  » 


—  12  — 

A  cette  Note  était  joint  un  nouveau  contre-projet 
auquel  celui  de  lord  Grenville  avait  servi  de  base,  mais 
avec  des  changements  dont  nous  allons  indiquer  les 
plus  essentiels. 

V  Les  hostilités  ne  pourront  recommencer  qu'un 
mois  après  la  dénonciation  de  l'armistice;  et  cette  dé- 
nonciation ne  pourra  se  faire  que  par  ordre  même  des 
gouvernements  contractants 

2°  La  clause  du  projet  anglais ,  qui  faisait  dépen- 
dre la  durée  de  l'armistice  de  celle  de  l'armistice  con- 
tinental, est  omise. 

3°  Il  sera  fourni  à  Malte  pour  onze  jours  de  vivres 
à  la  fois,  et  à  raison  de  dix  mille  rations  par  jour. 

4°  Six  frégates  pourront  partir  du  port  de  Toulon, 
débarquer  à  Alexandrie  et  en  revenir  sans  qu'elles 
puissent  être  visitées.  L'intention  avouée  du  gouver- 
nement français  était  d'envoyer  en  Egypte  douze  cents 
hommes  et  dix  mille  fusils. 

5°  Aucun  vaisseau  de  ligne  de  deux  et  trois  rangs 
de  batterie,  actuellement  mouillés  dans  les  ports  de 
Brest,  Toulon  et  dans  les  autres  ports ,  ne  pourra  en 
sortir  avant  le  renouvellement  des  hostilités,  pour 
prendre  une  autre  station  ;  mais  les  frégates,  corvettes 
ou  autres  petits  bâtiments  de  guerre  pourront  libre- 
ment sortir  et  naviguer. 

G"  Les  troupes  de  terre  à  la  solde  de  la  Grande-Bre- 
tagne ne  pourront  débarquer  en  aucun  port  d'Italie, 
pendant  la  durée  de  l'armistice. 

Dans  la  lettre  d'accompagnement,  M.  Otio  demanda 
qu'on  lui  accordât  une  conférence  pour  donner  plu- 
sieurs éclaircissements  qui  pourraient  accélérer  l'ac- 
cord entre  les  deux  puissances. 

La  réponse  de  lord  Grenville,  datée  du  20  septem- 
bre, rejeta  toute  idée  d'une  pacification  partielle,  en 
observant  que  si  les  engagements  de  la  Grande  Bre- 


—  13  — 

tagne  lui  permettaient  de  séparer  ses  intérêts  de  ceux 
de  ses  alliés,  ce  serait  moins  encore  le  cas  de  conclure 
un  armistice  maritime,  auquel  elle  ne  pourrait  con- 
sentir qu'à  titre,  de  compensation.  Cette  lettre  relève 
aussi  l'exagération  avec  laquelle  le  gouvernement  fran- 
çais évaluait  les  avantages  que  les  alliés  retiraient  de 
l'armistice  continental,  et  fait  voir  que  la  France  par- 
ticipait elle-même  à  ces  avantages  j  elle  opposa  à  la 
phrase  choquante  de  la  Note  française  une  observation 
remplie  de  dignité,  a  II  paraît  à  Sa  Majesté,  dit  lord 
Grenville,  qu'aucune  partie  des  succès  variés  de  la 
guerre  continentale  n'autorise  ses  ennemis  à  s'attri- 
buer un  ascendant  sur  les  armées  autrichiennes.  »  Le 
ministre  déclara  en  même  temps  que  le  contre-projet 
qu'il  avait  communiqué  le  7,  était  regardé  comme 
l'ultimatum  de  ce  que  la  Grande-Bretagne  pouvait 
accorder.  11  refusa  au  reste  la  conférence  deman- 
dée. 

Le  commissaire  français  répondit  le  23  septembre. 
Sa  lettre  a  deux  objets  :  l'un,  de  prouver  que  la  né- 
cessité de  négocier  une  paix  séparée  à  laquelle  la 
Grande-Bretagne  se  refusait,  existait  de  fait,  puisque 
le  gouvernement  français  avait  prévenu  le  ministère 
britannique  que,  si  l'armistice  maritime  n'était  pas 
conclu  avant  le  1 1  septembre,  les  hostilités  auront  re- 
commencé ',  et  que,  dans  ce  cas ,  le  premier  Consul  ne 
pourrait  plus  consentir,  à  l'égard  de  l'Autriche,  qu'à 
une  paix  séparée  et  complète;  qu'il  était  donc  natu- 
rel, dans  l'état  actuel  des  choses,  de  s'attendre  éven- 
tuellement à  une  paix  séparée  avec  l'Autriche ,  et  par 
conséquent  à  une  paix  également  séparée  avec  la 
Grande-Bretagne.  Le  second  objet  de  la  Note  de  M.  Olto 
est  de  se  plaindre  qu'on  ne  lui  ait  point  accordé  la 
conférence  qu'il  avait  demandée,  quoiqu'il  eût  prévenu 
qu'il  avait  des  explications  satisfaisantes  à  donner  tou- 


—  14  — 

chant  les  principales  objections  du  gouvernement  bri- 
tannique à  l'armistice  proposé. 

M.  Otto  atteignit  son  but.  Le  gouvernement  britan- 
nique nomma  M.  Hammond  pour  traiter  avec  lui.  Il  y 
a,  dans  la  Note  de  lord  Grenvillef  par  laquelle  il  répon- 
dit, le  25  septembre,  à  celle  de  M.  Otto,  du  23,  une 
observation  dont  l'expérience  des  temps  suivants  a 
trop  bien  prouvé  la  justesse  pour  que  nous  ne  l'insé- 
rions pas  ici.  ((  En  considérant  avec  attention,  dit  le 
ministre,  les  événements  passés  de  cette  lutte,  et  en 
jugeant  avec  quelque  exactitude  la  situation  présente 
des  affaires,  il  est  impossible  de  ne  pas  croire  que  la 
guerre  actuelle  ne  saurait  être  terminée  par  une  suc- 
cession de  traités  séparés  entre  les  différentes  puissan- 
ces qui  y  sont  engagées,  et  qu'on  ne  saurait  fonder 
sur  une  pareille  base  la  tranquillité  générale.  »  En  ef- 
fet, la  succession  des  traités  qui  fut  conclue  en  1801 
et  1802,  depuis  la  paix  de  Lunéville  jusqu'à  celle 
d'Amiens,  ne  put  assurer  la  tranquillité  de  l'Europe 
pendant  deux  ans  seulement.  La  guerre  recommença 
en  1 803 ,  et  dura  jusqu'en  1814;  car  tous  les  traités  de 
paix  qui  furent  conclus  pendant  ces  douze  ans  ne  fu- 
rent que  des  trêves  plus  ou  moins  longues. 

Dans  les  conférences  qui  eurent  lieu  entre  MM.  Olto 
et  Hammond,  on  se  rapprocha  de  part  et  d'autre  sur 
divers  objets  de  la  négociation,  mais  on  ne  put  s'en- 
tendre sur  les  points  suivants  : 

1°  Les  dix  mille  rations  demandées  pour  la  garnison 
de  Malte  parurent  exagérées  au  gouvernement  britan- 
nique. M.  Otto  finit  par  restreindre  cette  demande  au 
premier  mois,  pendant  lequel  on  pourrait  vérifier  les 
véritables  besoins  de  la  garnison. 

2°  Le  gouvernement  français  insista  sur  la  nécessité 
d'envoyer  six  frégates  en  Egypte  pour  faire  voir  aux 
troupes  françaises  qui  se  trouvaient  dans  ce  pays,  qu'on 


^  15  — 

prenait  intérêt  à  leur  sort.  Le  ministère  britannique 
s'y  refusa  constamment. 

3°  Le  premier  Consul  exigea  de  pouvoir  faire  sortir 
des  ports  de  France  des  frégates  et  autres  petits  vais- 
seaux armés  :  son  intention  était  de  rétablir,  par  leur 
moyen,  la  communication  avec  les  colonies  françaises. 
Le  ministère  britannique  n'y  voulut  pas  consentir, 
quoique  M.  Otto  offrît  de  faire  prendre  l'engagement 
qu'il  ne  serait  pas  envoyé  par  mer  des  provisions  na- 
vales à  Toulon  et  à  Brest. 

4°  La  Grande-Bretagne  ne  voulut  pas  s'interdire  la 
faculté  d'envoyer  de  nouvelles  troupes  en  Italie. 

Le  résultat  de  ces  débats  fut  consigné  par  M.  Otto^ 
dans  une  Note  verbale  ^ 

Les  négociations  étaient  ainsi  terminées  ;  et  si  le 
premier  Consul  avait  dû  renoncer  à  l'espoir  d'amener 
la  Grande-Bretagne  à  conclure  un  armistice  maritime, 
cet  armistice  avait  aussi  perdu  pour  lui  de  son  prix 
depuis  la  chute  de  Malte.  Le  général  Vaubois  fut  obligé 
de  capituler  le  5  septembre  1 800,  et  de  remettre  Malte 
aux  troupes  britanniques.  Quoique  cet  événement  dé- 
rangeât les  plans  de  Bonaparte^  cependant  M.  Otlo  fit, 
par  ses  ordres,  une  dernière  tentative  pour  engager  le 
Cabinet  de  Londres  à  rouvrir  une  négociation  pour 
une  paix  particulière ,  soit  à  Paris,  soit  à  Londres; 
mais  le  gouvernement  britannique  déclara,  le  9  octo- 
bre 1800,  de  la  manière  la  plus  posive,  qu'il  ne  con- 
sentirait pas  à  séparer  ses  intérêts  de  ceux  de  ses  alliés. 

M.  Otto  continua  de  résider  à  Londres  en  qualité  de 
commissaire  pour  l'échange  des  prisonniers  de  guerre. 
Au  mois  de  janvier  1801  ,  il  eut  occasion  d'entamer 

•  Elle  manque  dans  le  Recueil  français  de  l'an  xi. 


—  16  — 

une  nouvelle  négociation,  dont  l'objet  ne  serait  pas 
assez  important  pour  nous  y  arrêter,  s'il  ne  tenait  aux 
principes  généraux  sur  le  Droit  de  la  guerre. 

Le  gouvernement  français  avait  donné,  le  27  mars 
1800,  un  exemple  digne  d'être  imité,  en  défendant  à 
tous  les  vaisseaux  français  d'arrêter  des  pêcheurs  an- 
glais ,  pourvu  qu'ils  ne  fussent  pas  munis  d'armes  ;,  ni 
convaincus  d'intelligences  suspectes  avec  des  bâtiments 
de  guerre  de  leur  nation.  Cette  ordonnance  ayant  été 
communiquée  par  M.  Otto  au  Transport-Office  de  Lon- 
dres*, le  gouvernement  britannique  révoqua,  de  son 
côté,  le  30  mai,  les  ordres  qui  avaient  été  donnés  le 
24  janvier  1798 ,  aux  commandants  des  vaisseaux  an- 
glais, pour  faire  saisir  les  pêcheurs  français  et  hollan- 
dais et  leurs  bateaux.  Quelque  temps  après ,  le  Trans- 
port-Office se  plaignit  que  des  bateaux  pêcheurs 
avaient  été  armés  en  brûlots  à  Flessingue.  Le  premier 
Consul,  tout  en  soutenant  que  chaque  puissance  avait 
le  droit  de  disposer  à  son  gré  de  ses  bâtiments,  ordonna 
cependant  de  rendre  les  bateaux  pêcheurs  à  leur  pre- 
mière destination,  parce  qu'il  voulait  éviter  une  con- 
testation qui  pouvait  nuire  à  l'arrangement  convenu. 
Mais  bientôt  les  sujets  de  plainte  se  multiplièrent.  On 
prétendit,  en  Angleterre,  que  Bonaparte  avait  mis  en 
réquisition  les  pêcheurs  français  et  leurs  bateaux,  et 
les  avait  envoyés  à  Brest  pour  servir  dans  la  flotte  ;  on 
accusa  même  le  gouvernement  d'avoir  compris  dans 
cette  réquisition  des  pêcheurs  que  les  Anglais  avaient 
relâchés,  sous  condition  de  ne  pas  servir.  Les  lords 
commissaires  de  l'Amirauté  prirent  alors  la  brusque 
résolution  de  révoquer,  le  21  janvier  1801,  l'ordre 
donné  le  30  mai  précédent ,  et  de  remettre  en  vigueur 
celui  du  24  janvier  1798. 

'  Le  Transport-ofTice  est  l'aiilorilé  chargée  de  tout  le  service  concer- 
nant les  prisonniers  de  guerre. 


-^  17  — 

Aussitôt  que  le  premier  Consul  fut  informé  de  cet 
incident,  il  ordonna  à  M.  Otto  de  déclarer  que  «  si, 
d'une  part,  cet  acte  du  gouvernement  britannique, 
contraire  à  tous  les  usages  des  nations  civilisées  et  au 
droit  commun  qui  les  régit,  même  en  temps  de  guerre, 
donnait  à  la  guerre  actuelle  un  caractère  d'acharne- 
ment et  de  fureur  qui  détruisait  jusqu'aux  rapports 
d'usage  dans  une  guerre  loyale;  de  l'autre,  il  était  im- 
possible de  ne  pas  reconnaître  que  cette  conduite  du 
gouvernement  anglais  ne  tendait  qu'à  exaspérer  davan- 
tage les  deux  nations,  et  à  éloigner  encore  le  terme  de 
la  paix;  qu'en  conséquence,  lui,  M.  Otto,  ne  pouvait 
plus  rester  dans  un  pays  oiî  non-seulement  on  avait  ab- 
juré toute  disposition  à  la  paix,  mais  où  les  lois  et  les 
usages  de  la  guerre  étaient  méconnus  et  violés.  M.  Otto 
déclara  en  même  temps  que  le  gouvernement  ayant  eu 
toujours  pour  premier  désir  de  contribuer  à  la  pacifi- 
cation générale,  et  pour  maxime  d'adoucir  autant 
que  possible  les  maux  de  la  guerre,  ne  pouvait  songer, 
pour  sa  part,  à  rendre  de  misérables  pêcheurs  victimes 
de  la  prolongation  des  hostilités,  et  qu'il  s'abstiendrait 
de  toute  représaille.  » 

Les  nouveaux  ministres  que  la  retraite  de  M.  Pitt, 
avait  porté  à  la  direction  des  affaires ,  et  dont  M.  Ad- 
dingtorij  Orateur  de  la  Chambre  des  Communes,  était 
le  chef,  entrèrent  en  exercice  le  16  mars';  dès  les  pre- 
miers jours ,  ils  révoquèrent  les  ordres  qui  avaient 
été  donnés  par  leurs  prédécesseurs  contre  les  pêcheurs 
français,  et  cette  mesure  engagea  M.  Otto  à  prolonger 
son  séjour  à  Londres.  Nous  dirons  encore  que,  dans 
les  discussions  qui  eurent  lieu  au  sujet  de  cet  inci- 
dent, le  gouvernement  britannique  mit  en  avant  que  la 
liberté  de  la  pêche  n'était  fondée  que  sur  une  simple 

'  Lord  Hawkesbury,  depuis  lord  Liverpool,  remplaça  M.  Grenville 
aux  Affaires  Étrangères. 

Tii  2 


—  18  — 

concession  de  sa  part,  et  que  cette  concession  n'avait 
jamais  porté  sur  la  grande  pêche,  ni  sur  le  commerce 
d'huîtres  ou  de  poisson;  ce  qui  réduirait  cette  pêche 
à  celle  du  coquillage  qui  se  fait  sur  les  côtes. 

Les  tentatives  pour  arriver  à  une  réconciliation  entre 
la  France  et  la  Grande-Bretagne  paraissaient  définiti- 
vement ne  pouvoir  amener  aucun  résultat  lorsque,  tout 
à  coup,  le  21  mars  1801,  \orà  Hawkesbury  annonça 
à  M.  Otto  que  le  Roi  était  disposé  à  entamer  immédiate- 
ment des  négociations  pour  le  rétablissement  de  la  paix, 
prêt  à  envoyer  à  Paris,  ou  à  tout  autre  endroit  dont  on 
conviendrait,  un  ministre  autorisé  à  négocier  et  conclure 
un  traité.  Le  gouvernement  français  accueillit  cette  pro- 
position; mais  il  demanda  préalablement  deux  choses  : 
savoir,  la  conclusion  d'un  armistice,  et  une  négociation 
pour  des  articles  préliminaires.  Le  gouvernement  bri- 
tannique refusa  l'armistice,  mais  il  accéda  à  la  proposi- 
tion d'ouvrir  la  négociation  des  articles  préliminaires, 
et  on  entra  en  discussion  à  cet  égard.  Lord  Hawkesbury 
communiqua,  le  14  avril,  à  M.  Otto,  les  conditions  que 
l'Angleterre  regardait  comme  articles  préliminaires; 
c'était,  de  la  part  de  la  France,  l'évacuation  de  l'Egypte; 
de  la  part  de  la  Grande-Bretagne,  la  restitution  par- 
tielle des  conquêtes  qu'elle  avait  faites  sur  la  Fri^nce 
et  ses  alliés,  d'après  une  liste  qui,  parmi  les  pays  à 
restituer,  ne  nommait  pas  l'île  de  Malte,  Tabago,  la 
Martinique,  la  Trinité,  Esséquibo,  Démérary  et  Ber- 
bice,  enfin  l'île  de  Ceylan,  que  la  Grande-Bretagne 
prétendait  toutes  garder;  à  la  restitution  du  cap  de 
Bonne-Espérance  était  attachée  la  condition  qu'on  en 
ferait  un  port  franc.  Enfin,  on  exigeait  de  la  Répu- 
blique batave  une  indemnité  entière  pour  les  pertes 
que  la  maison  d'Orange  avait  éprouvées  dans  ses  pro- 
priétés. La  Grande-Bretagne  ajouta  encore  une  réserve; 


—  19  — 

c'était  que  si,  avant  la  signature  des  préliminaires,  on 
recevait  la  nouvelle  de  la  conclusion  d'une  convention 
pour  l'évacuation  de  l'Egypte  par  les  troupes  françaises, 
l'Angleterre  ne  serait  pas  tenue  à  souscrire  à  ces  con- 
ditions dans  toute  leur  étendue;  c'est-à-dire  que  l'An- 
gleterre regardait  une  partie  des  restitutions  qu'elle 
offrait  comme  le  prix  de  celle  de  l'Egypte,  et  par  con- 
séquent si  l'évacuation  de  ce  pays  n'était  pas  une  suite 
du  traité  à  conclure  entre  la  Grande-Bretagne  et  la 
France,  mais  que  les  événements  de  la  guerre  y  forças- 
sent les  Français,  la  Grande-Bretagne  se  regardait 
comme  autorisée  à  retenir  le  prix  auquel  elle  avait 
voulu  racheter  l'abandon  de  l'Egypte. 

Ces  hases  ayant  été  jugées  inadmissibles,  les  négo- 
ciations traînèrent  en  longueur  ou  éprouvèrent  même 
une  interruption  pendant  laquelle  les  deux  parties 
espéraient  voir  arriver  des  événements  qui  pourraient 
mettre  du  poids  dans  la  balance  de  leurs  intérêts  poli- 
tiques. Les  Anglais  terminèrent,  dans  cet  intervalle,  à 
leur  entière  satisfaction,  les  différends  qui  s'et?iiPRt 
élevés  entre  eux  et  les  puissances  du  Nord;  ils  débar- 
quèrent en  Egypte,  et  purent  se  flatter  d'en  expulser 
sous  peu  les  Français;  enfin,  ils  augmentèrent  la  masse 
de  leurs  conquêtes,  en  s'emparant  de  Saint-Eustache 
et  de  Saba.  Bonaparte ,  de  son  côté ,  poussa  l'Espagne 
à  faire  la  guerre  au  Portugal,  parce  qu'il  espérait  que 
les  conquêtes  qu'on  ferait  dans  ce  royaume  forceraient 
le  Cabinet  de  Londres  à  se  désister  de  ses  prétentions. 
Aussi  fut-il  très-mécontent  de  ce  qu'après  quelques 
succès,  le  roi  d'Espagne  eût  conclu,  le  G  juin,  avec  le 
Prince-Régent,  une  paix  qui  ne  lui  laissa  que  la  pro- 
vince d'Olivença;  il  refusa,  pour  sa  part,  de  la  ratifier, 
et  déclara  «  qu'en  signant  ce  traité,  Charles  IV  avait 
consenti  à  la  perte  de  la  Trinité.  » 

Les  négociations  recommencèrent  au  1 5  juin  1801  * 


—  20  — 

Bonaparte  fit  demander  à  lord  Hawkesbury  »  si,  dans 
le  cas  où  le  gouvernement  français  accéderait  aux  ar- 
rangements proposés  pour  les  Grandes-Indes  par  l'An- 
gleterre, et  adopterait  Vante  hélium  pour  le  Portugal, 
le  roi  d'Angleterre  consentirait  à  ce  que  le  status  ante 
bellum  fût  rétabli  dans  la  Méditerranée  et  en  Amé- 
rique? »  Exprimons  plus  clairement  cette  question. 
Le  premier  Consul  demanda  si,  dans  le  cas  où  le  gou- 
vernement français  consentirait  à  ce  que  les  Anglais 
conservassent  dans  les  Grandes-Indes  et  les  provinces 
qu'ils  s'étaient  attribuées  dans  le  partage  de  l'empire  de 
Tippo-Saîb,  et  l'île  de  Ceylan  qu'ils  avaient  conquise 
sur  les  Hollandais,  à  charge  de  rendre  tout  ce  que,  dans 
cette  partie  du  monde,  ils  avaient  conquis  de  plus  sur 
les  Hollandais  et  les  Français;  que  ce  même  gouver- 
nement consentît  à  évacuer  l'Egypte;  enfin  qu'il  se 
prêtât  non-seulement  à  faire  rendre  au  Portugal  la  pro- 
vince d'Olivença,  mais  promît  aussi  de  ne  pas  tenter 
de  nouvelles  conquêtes  sur  ce  royaume;  si,  disons- 
nous,  dans  ce  cas,  la  Grande-Bretagne  évacuerait  Malte 
et  l'île  de  Minorque,  et  rendrait  toutes  ses  conquêtes 
en  Amérique,  c'est-à-dire  la  Trinité,  les  possessions  hol- 
landaises sur  la  terre  ferme,  Saint-Eustache  et  Saba, 
la  Martinique,  Tabago,  Sainte-Lucie,  les  Saintes,  Saint- 
Pierre  et  Miquelon,  les  îles  Saint-Marcou  sur  la  côte  de 
Normandie,  etc.? 

Lord  Hawkesbury  répondit,  le  25  juin,  que  l'éva- 
cuation de  l'Egypte  par  les  Français,  et  de  Malte  et 
de  Minorque  '  par  les  Anglais,  ne  suffisait  pas  pour 
rétablir  le  status  ante  bellum  dans  la  Méditerranée; 
qu'il  serait  encore  nécessaire  que  le  gouvernement 
français  évacuât  le  comté  de  Nice  et  tous  les  États 

'  Minorque  n'est  pas  nommée  dans  cet  oflTice;  mais  comme  la  resti- 
tution de  celte  île  avait  déjà  été  offerte  par  la  Grande-Bretagne,  nous 
suppléons  à  cette  omission. 


—  21   — 

du  roi  de  Sardaigne ,  que  le  grand-duc  de  Toscane 
fût  rétabli,  et  que  le  reste  de  l'Italie  recouvrât  son 
ancienne  indépendance;  que  si  cela  ne  pouvait  être, 
et  que  la  France  conservât  encore  une  partie  de  l'in- 
fluence qu'elle  avait  dernièrement  acquise  en  Italie,  le 
Roi  était  autorisé  à  garder  l'île  de  Malte,  pour  protéger 
le  commerce  de  ses  sujets  dans  cette  partie  de  l'Eu- 
rope ;  que  la  restitution  du  Portugal  dans  le  status  ante 
hellurriy  ne  pouvait  être  un  équivalent  des  conquêtes 
que  la  Grande-Bretagne  avait  faites  en  Amérique,  et 
que  d'ailleurs  on  n'aurait  pas  véritablement  rétabli  le 
status  ante  hélium  en  Amérique,  si  l'on  n'accordait  à  la 
Grande-Bretagne  une  compensation  pour  l'acquisition 
que  la  France  avait  faite  d'une  partie  de  Saint-Do- 
mingue, contrairement  aux  conditions  de  la  paix 
d'Utrecht.  Enfin,  lord  Hawkesbury  finit  par  modifier 
ses  premières  propositions,  en  offrant  la  restitution  de 
la  Trinité  comme  compensation  du  rétablissement  du 
status  ante  bellum  pour  le  Portugal,  c'est-à-dire  de  la 
restitution  d'Olivença. 

Le  23  juillet,  le  plénipotentiaire  français  transmit 
au  ministre  britannique  un  contre-projet  qui  renferme, 
à  l'égard  des  Indes  orientales,  de  l'Egypte,  de  la  mer 
Méditerranée  et  du  Portugal,  les  conditions  qui  furent 
admises  par  les  préliminaires,  et  auxquelles,  par  ce 
motif,  nous  ne  nous  arrêterons  pas  icij  mais,  quant 
à  l'Amérique,  ce  projet  demandait  la  restitution  de 
toutes  les  conquêtes.  Ce  ne  furent  plus ,  dès  ce  mo- 
ment ,  que  les  arrangements  relatifs  à  cette  partie  du 
monde  qui  arrêtèrent  la  négociation.  Le  14  août,  lord 
Haickesburij  proposa  une  alternative;  savoir,  que  la 
Grande-Bretagne  conserverait  seulement  la  Trinité  et 
Tabago,  à  condition  que  Démérary,  Esséquibo  et  Ber- 
bice  fussent  des  ports  francs;  ou  qu'elle  garderait 
Sainte-Lucie,  Tabago,  Démérary,  Esséquibo etBerbice. 


—  22  — 

Ainsi  la  Grande-Bretagne  consentait  à  rendre  la 
Martinique;  et>  en  supposant  qu'elle  renoncerait  en- 
corfe  à  Tabago  et  à  Sainte-Lucie  ,  le  gouvernement 
français  avait  le  choix  entre  celui  de  ses  alliés  qu'il 
voudrait  sacrifier,  ou  du  roi  d'Espagne,  en  lui  faisant 
perdre  la  Trinité ,  ou  de  la  République  batave,  en  exi- 
geant qu'elle  renonçât  à  ses  possessions  dans  la 
Guyane.  Peut-on  douter  du  parti  que  Bonaparte  va 
prendre?  L'Espagne  l'avait  mécontenté  en  se  hâtant 
de  conclure  la  pîiix  de  Badajoz  ;  il  l'en  punit  par  la 
perte  de  la  Trinité,  et  les  préliminaires  de  la  paix  fu- 
rent signes  à  Londres,  le  1"  octobre  1801. 

Avant  d'en  rapporter  les  conditions ,  nous  devons 
consigner  le  résultat  de  la  campagne  maritime  de  1 801 . 
Bonaparte  avait  fait,  sur  les  côtes  de  France,  des  pré- 
paratifs qui  indiquaient  un  projet  de  débarquement 
en  Angleterre.  Pour  dissiper  les  inquiétudes  que  ces 
armements  avaient  causées  dans  l'île,  l'amiral  Nelson 
fit,  dans  les  mois  de  juillet  et  d'août,  plusieurs  tenta- 
tives pour  détruire  les  flottilles  françaises;  mais  il  ne 
recueillit  aucun  honneur  dans  ces  expéditions. 

L'amiral  français  Linois  eut  dans  cette  campagne  un 
succès  qui,  dans  l'état  de  la  supériorité  que  la  marine 
anglaise  n'avait  cessé  de  maintenir  jusqu'à  présent, 
pouvait  paraître  brillant.  Il  commandait  trois  vais- 
seaux de  ligne  et  une  frégate,  lorsque  l'amiral  Sauma- 
rez  l'attaqua,  le  6  juillet,  dans  la  baie  d'Algésiras, 
avec  six  vaisseaux  de  ligne  et  une  frégate.  Linois  le 
força  de  se  retirer  à  Gibraltar,  et  s'empara  d'un  vais- 
seau de  soixante-quatorze  canons.  Six  jours  après,  le 
même  amiral  livra  un  combat  qui  ne  fut  pas  aussi 
heureux.  Renforcé  par  cinq  vaisseaux  de  ligne  et  une 
frégate  espagnole,  commandés  par  l'amiral  Morena,  il 
avait  fait  voile  pour  Cadix  ;  ayant  rencontré  l'amiral 


—  23  — 

SaumareZf  il  lui  livra  bataille;  mais  comme  il  faisait 
miit,  deux  vaisseaux  espagnols  se  prenant  pour  enne- 
mis firent  feu  l'un  sur  l'autre ,  et  sautèrent;  un  troi- 
sième tomba  au  pouvoir  des  Anglais. 

Les  préliminaires  de  Londres  vinrent  mettre  fin  aux 
hostilités.  Voici  quelles  étaient  les  principales  stipula- 
tions*: 

V article  1"  rétablit  la  paix  entre  la  Grande-Breta- 
gne, la  République  française  et  leurs  alliés  respectifs. 
Toute  conquête  faite  de  part  ou  d'autre,  après  la  rati- 
fication des  préliminaires,  sera  regardée  comme  non 
avenue. 

La  Grande-Bretagne  restitue  à  la  République  fran- 
çaise ,  au  roi  d'Espagne  et  à  la  République  batave , 
toutes  lès  conquêtes  qu'elle  a  faites,  excepté  l'île  de  la 
Trinité  et  les  possessions  hollandaises  dans  l'île  de 
Ceylan.  Art.  2. 

Le  port  du  cap  de  Bonne-Espérance  sera  ouvert  au 
commerce  et  à  la  navigation  des  deux  jiarties  contrac- 
tantes. Art.  3. 

L'île  de  Malte  sera  évacuée  par  les  troupes  anglaises, 
et  tendue  à  l'Ordre  de  Saint  Jean  dé  Jérusalem,  sous 
la  garantie  et  la  protection  d'une  puissance  tierce  qui 
sera  désignée  dans  lé  traité  définitif.  Art.  4.  Dans  le 
cours  des  négociations ,  la  Grandè-Ëretagne  avait  pro- 
posé de  charger  de  cette  protection  l'empereur  de  Rus- 
sie ,  qu'on  prierait  d'envoyer  une  garnison  dans  l'île 
de  Malte  :  car  lord  Hawkesbury  rie  dissimula  point  là 
crainte  du  gouvernement  britannique ,  que  la  France 
ne  profitât  de  rinfluënce  qu'elle  avait  acquise  en  Italie 
pour  envahir  encore  une  fois  l'île  de  Malte. 

L'Egypte  sêi-à  restituée  à  la  t*orte,  dont  les  terri- 

•  Voy.  Martens  ,  Rec,  t.  IX ,  p.  543. 


—  24  — 

toires  et  possessions  sont  maintenus'  dans  leur  inté- 
grité, tels  qu'ils  étaient  avant  la  guerre.  Art.  5. 

Les  territoires  et  provinces  du  Portugal  seront  main- 
tenus dans  leur  intégrité.  Art.  6.  Les  mots  :  tels  qu'ils 
étaient  avant  la  guerre,  n'y  sont  pas  ajoutés,  ce  qui 
indique  qu'on  n'exigera  pas  de  l'Espagne  la  restitution 
d'Olivença.  Presque  au  même  moment  où  les  prélimi- 
naires de  Londres  furent  signés,  le  Portugal  avait  con- 
senti ,  par  la  paix  de  Madrid,  à  une  cession  qui  violait 
cette  intégrité  de  son  territoire.  Nous  verrons  à  quel 
changement,  dans  la  rédaction  du  traité  définitif, 
cette  circonstance  donna  lieu. 

Les  troupes  françaises  évacueront  le  royaume  de 
Naples  et  l'État  romain.  Les  troupes  anglaises  éva- 
cueront Porto  Ferrajo  et  tous  les  ports  et  îles  qu'elles 
occupent  dans  la  Méditerranée  et  dans  l'Adriatique. 
Art.  7.  Les  Français  avaient  occupé  une  partie  du 
royaume  de  Naples ,  par  suite  des  articles  secrets  du 
traité  de  Florence,  du  28  mars  1801  \ 

La  République  française  reconnaîtra  la  République 
des  Sept-lles.  Art.  8.  Cette  république,  instituée  par 
la  convention  du  21  mars  1800*,  entre  la  Russie  et  la 
Porte,  avait  été  reconnue  par  la  Grande-Bretagne,  le 
13  janvier  1801. 

Varticle  9  détermine  les  époques  des  évacuations  et 
restitutions  réciproques. 

Varticle  10  est  ainsi  conçu  :  «  Les  prisonniers  res- 
pectifs seront,  d'abord  après  l'échange  des  ratifications 
du  traité  définitif,  rendus  en  masse ,  et  sans  rançon, 
en  payant  de  part  et  d'autre  les  dettes  particulières 
qu'ils  auraient  contractées.  Des  discussions  s'étant  éle- 
vées touchant  le  payement  de  l'entretien  des  prison- 
niers de  guerre,  les  puissances  contractantes  se  réser- 


•  Voy.  t.  VI,  p.  270. 
'  Voy.  Ibid,  p.  220. 


2d 


vent  de  décider  cette  question  par  le  traité  définitif, 
conformément  au  droit  des  gens  et  aux  principes  con- 
sacrés par  l'usage.  » 

Voici  ce  qui  avait  donné  lieu  à  ces  discussions. 
L'article  21  des  préliminaires  de  Versailles,  du  20  jan- 
vier, et  l'article  3  du  traité  définitif,  du  3  septembre 
1783,  avaient  stipulé  que  chaque  gouvernement  sol- 
derait respectivement  les  avances  qui  auraient  été 
faites,  pour  la  subsistance  et  l'entretien  de  ses  prison- 
niers, par  le  souverain  du  pays  où  ils  auront  été  dé- 
tenus. Dans  la  guerre  qui  fut  terminée  par  les  préli- 
minaires de  Londres,  on  était  convenu  que  chaque 
gouvernement  fournirait  à  l'entretien  de  ses  prison- 
niers détenus  en  pays  ennemis;  mais  lorsque  le  Di- 
rectoire exécutif  se  trouva  dans  le  cas  d'entretenir  un 
grand  nombre  de  prisonniers  autrichiens,  russes  et 
autres ,  avec  les  gouvernements  desquels  il  n'existait 
pas  de  pareils  arrangements ,  il  jugea  à  propos  d'aban 
donner  au  gouvernement  anglais  le  soin  d'entretenir 
les  Français  qui  se  trouvaient  prisonniers  en  Angle- 
terre. Dans  ses  négociations  avec  M.  Olto ,  lord  Haw- 
kesbury  demanda  le  remboursement  de  cette  avance; 
mais ,  puisque  la  France  n'avait  pas  formé  une  pré- 
tention de  ce  genre  contre  les  alliés  de  la  Grande-Bre- 
tagne, elle  se  refusa  constamment  à  ce  rembourse- 
ment. Nous  verrons  de  quelle  manière  les  deux  États 
transigèrent  par  la  suite  sur  cette  difficulté. 

V article  \  2  dit  que  tous  les  séquestres  mis  de  part  et 
d'autre  sur  les  fonds,  revenus  et  créances,  de  quelque 
espèce  qu'ils  soient,  appartenant  à  une  des  puissances 
contractantes,  ou  à  ses  citoyens  ou  sujets,  seront  levés 
immédiatement  après  la  signature  du  traité  définitif, 
et  que  la  décision  de  toutes  réclamations  entre  les  in- 
dividus des  deux  nations,  pour  dettes,  propriétés,  ef- 
fets ou  droits  quelconques ,   qui ,  conformément  aux 


—  26  — 

usages  reçus  et  au  droit  des  gens,  doivent  être  repro- 
duites à  l'époque  de  la  paix,  sera  renvoyée  devant  les 
tribunaux  compétents,  et  que  dans  ce  cas  il  sera  rendu 
une  prompte  et  entière  jiistice  dans  le  pays  où  les  ré- 
clamations seront  faites  respectivement.  Enfin  cet  ar- 
ticle sera  appliqué  aux  alliés  respectifs. 

Les  pêcheries  sur  les  côtes  de  Terre-Neuve  et  des 
îles  adjacentes,  et  dans  le  golfe  de  Saint-Laurent, 
seront  remises  sur  le  même  pied  où  elles  étaient  avant 
la  guerre,  et  les  deux  puissances  se  réservent  de  pren- 
dre, par  le  traité  définitif,  les  arrangements  qui  pa- 
raîtront justes  et  réciproquement  utiles  pour  mettre 
l'a  pêche  des  deux  nations  dans  l'état  le  plus  propre  à 
maintenir  la  paix.  Art:  13.  C'est  un  des  articles  sur 
lesquels  les  négociateurs  eurent  le  plus  de  peine  à 
s'accorder.  Le  plénipoteiltiaire  français  proposa  trois 
articles  touchant  de  nouveaux  arrangements  à  prendre 
pour  lies  pêcheries,  parce  qu'on  se  plaignait  en  France 
de  ceiix  iqui  avaient  été  convenus  par  Varticle  3  des 
préliminaires  de  1783;  mais  lord  Hmrkesbury  tefusà 
noh-seulemertt  de  les  admettre ,  mais  même  d'entrer 
en  discussion  sûr  cet  objet,  disant  que,  vu  là  supé- 
riorité inarUime  de  la  Grande-Bretagne,  c'était  à  elle 
plutôt  qu'à  la  France  à  stipuler  de  nouveaux  avanta- 
ges pbur  la  pêche  de  ses  sujets.  Il  paraît  que  les  arti- 
cles proposés  par  M.  Otto  et  rejetés  par  lord  Hawkes- 
hury  avaient  pour  objet  de  stipuler  :  1"  l'échange  des 
îles  Saint-Pierre  et  Miquelon  contre  une  partie  de  l'île 
de  Tet-re-Neuve;  2"  là  feessiori  d'un  établissement  de 
pêche  aux  îles  Malbuines;  3°  là  neutralité  des  pêcheUrS 
en  temps  de  guerre. 

Les  ratifications  de  ces  articles  préliminaires  serbnt 
échangées  à  LoHdres  dans  le  tebme  de  quinze  jours 
pour  tout  délai  ;  et  aussitôt  après  il  sera  tlommé  de 
part  et  d'autre  des  plértipotiRntiaire&  qui  se  rendront  à 


—  27  — 

Amiens,  pour  procéder  à  la  rédaction  du  traité  défini- 
tif, de  concert  avec  Ifes  alliés  defe  puissance  contrac- 
tantes. Art.  15.  Les  ratifications  furent  échangées  à 
Londres  le  12  octobre. 

La  conclusion  de  la  paix  excita  un  enthousiasme  gé- 
néral parmi  le  peuple  anglais^  qui  célébra  la  fête  de  la 
ratification  par  des  illuminations  ist  des  feux  de  joie. 
M.  OltOy  l'heureux  négociateur,  fut  comblé,  à  Londres, 
des  témoignages  de  la  reconnaissance  publique.  La 
gravure  reproduisit  son  portrait ,  la  poésie  célébra  ses 
louanges.  Le  général  Laurislon,  aide  de  camp  du  pre- 
mier Consul,  envoyé  en  Angleterre  pour  porter  les  ra- 
tifications, fut  accueilli  avec  transport;  le  peuple  détela 
les  chevaux  de  sa  voiture  et  le  traîna  jusqu'à  son  hô- 
tel. Mais  cet  enthousiasme  ne  fut  point  partagé  par 
une  certaine  classe  de  la  nation  qui  regardait  «  la  re- 
connaissance et  la  consolidation  du  pouvoir  de  Bona- 
parte comme  la  ruine  de  la  cause  de  la  légitimité  à  la- 
quelle tient  la  tranquillité  des  peuples ,  et  comme  le 
renversement  de  l'équilibre  des  puissances  en  Europe, 
ainsi  que  de  tout  ordre,  civilisation  et  propriété  \  » 

'  AnnualHegisierÛQ  1801,  article  Histortj  of  Europe,  p.  277.  Le  fait 
suivant,  rapporté  dans  le  même  ouvrage ,  caractérise  l'état  deâ  esprits, 
à  cette  époque. 

«  La  nuit  de  ce  jour,  si  brillante  à  Londres  par  les  illuminations,  fut, 
pour  les  émigrés  français  qui  se  trouvaient  dans  cette  gcpnde  ville, 
une  huit  de  ténèbres  et  d'hobreur.  La  mélancolie,  le  découragement  et 
l'indignation  qui  s'emparèrent  de  l'esprit  du  clergé  français,  surtout 
des  prêtres  de  la  dernière  classe,  parurent  sanctionnés  par  la  voix  du 
ciel.  Entre  dix  et  onze  heures,  il  s'éleva  la  plus  furieuse  tempête  que 
la  génération  actuelle  ait  peut-être  vue  ,  et  qui  paraissait  encore  plus 
extraordinaire  dans  cette  saison  de  l'année;  le  vent,  le  tonnerre,  les 
éclairs,  la  pluie,  ne  discontinuèrent  pas  un  instant  pendant  Une  heure 
entière;  la  vdûte  du  ciel  parut  embrasée  pendant  tout  ce  temps.  Ce 
qui,  aux  yeux  des  hommes  superstitieux,  ajoutait  à  cet  augure  malheu- 
reux, c'est  qu'au  bureau  de  l'Amirauté,  où  l'illumination  représentait 
une  couronne  et  un  ancre,  le  vent  éteignit  la  coiironnè,  tandis  que 
l'ancre  brillait  dans  toute  sa  clarté.  » 


—  28  — 

Cependant  les  deux  gouvernements  se  préparèrent 
à  exécuter  Varticle  15  du  traité  des  préliminaires. 
Napoléon  Bonaparte  nomma  son  frère  Joseph  plénipo- 

Voici  un  autre  passage,  qui  peut  servir  à  l'explication  douloureuse 
de  C8  qu'on  vient  de  lire. 

«  L'empereur  Paul,  ayant  abandonné  la  cause  dont  il  avait  été  un 
si  zélé  protecteur,  invita  Louis  XVIH  à  quitter  Miltau;  ce  prince  mal- 
heureux trouva  un  asile  dans  les  États  du  roi  de  Prusse,  d'abord  à 
Kœnigsberg,  ensuite  à  Varsovie.  La  Russie  avait  été  la  seule  puissance 
du  continent  entièrement  indépendante  de  la  France.  Quand  cet  appui 
leur  manqua ,  les  royalistes  français  trouvaient  encore  une  consolation 
dans  l'attitude  non-seulement  indomptée,  mais  même  hostile,  que  la 
Grande-Bretagne  présentait  à  la  République,  et  il  leur  resta  quelques 
éclairs  d'espérance  que  les  vicissitudes  de  la  fortune  pourraient  donner 
une  tournure  favorable  à  leur  cause;  les  émigrés  français,  à  Londres, 
étaient  longtemps  demeurés  dans  cet  état  de  résignation  ,  d'anxiété  et 
de  patience  ;  supportant  l'adversité  en  l'adoucissant  par  de  nobles 
souvenirs,  par  la  fierté  de  l'honneur,  tempérée  par  l'affliction,  et  par 
quelque  faible  espoir  d'un  meilleur  avenir.  Les  misérables  restes  de 
leur  fortune  naufragée  furent  employés  pour  préserver  de  la  contagion 
du  vice  et  des  sentiments  vils  du  vulgaire,  les  enfants  destinés,  dès 
leur  entrée  dans  le  monde,  à  participer  aux  souffrances  et  aux  soucis 
de  leurs  parents;  et,  pour  nourrir  dans  leurs  cœurs  des  sentiments 
de  morale  et  de  religion  ,  ainsi  que  l'attachement,  le  respect  et  le  dé- 
vouement pour  la  famille  des  souverains  de  la  France.  On  éleva  une 
modeste  chapelle ,  et  on  institua  une  école  dans  un  faubourg  de 
Londres,  ou  les  maisons  sont  bâties  des  proportions  convenables  à  de 
pauvres  gens.  Un  digne  prêtre,  M.  Caruon  le  jeune,  se  chargea  de  la 
direction  de  cet  établissement,  où  les  enfants  des  émigrés,  avec  tous 
ceux  de  la  Grande-Bretagne  ou  de  l'Irlande  que  leurs  parents  ou  tu- 
teurs voulurent  y  envoyer,  furent  élevés  avec  le  plus  grand  soin  dans 
les  principes  de  la  morale  et  de  la  religion,  et  dans  toutes  les  connais- 
naissances  analogues  à  leurs  tendres  années.  Le  comte  d'ARTOis,  le 
prince  de  Condé,  et  d'autres  princes  et  seigneurs  français,  assis- 
taient aux  examens;  et,  en  distribuant  parmi  les  élèves  de  légers  prix 
encourageaient  les  sentiments  vertueux  que  les  auteurs  de  l'institution 
avaient  eu  pour  but  de  propager.  Dans  cette  humble  retraite  on  s'aban- 
donnait, des  deux  côtés,  aux  élans  les  plus  purs  et  les  plus  exaltés.  Le 
dévouement  des  Français  pour  la  race  de  leurs  rois,  si  bonne  et  si  ai- 
mable, se  manifestait  par  des  cris  répétés  de  vive  le  Roi!  mêlés  de  larmes  ; 
celles  des  princes  Bourbons  exprimaient  éloquemment  la  réciprocité  de 
leurs  sentiments.  C'étaient  des  scènes  touchantes  et  instructives;  une 
école  instituée  potir  montrer  les  vanités  de  ce  monde,  et  surtout  la  va- 
nité et  l'espoir  qu'on  met  dans  les  promesses  des  gouvernements.  » 


—  29  — 

tentiaire  au  Congrès  d'Amiens;  le  marquis  de  Cormoal- 
lis  fut  nommé  pour  la  Grande-Bretagne.  Le  roi  d'Es- 
pagne y  députa  le  chevalier  Azara ,  et  la  République 
bataveM.  Schimmelpenninck  ;  mais  ces  deux  ministres 
n'assistèrent  pas  aux  conférences  générales;  on  ne  les 
appelait  que  lorsqu'il  était  question  des  intérêts  de 
leurs  commettants. 

Lord  Comwallis  se  rendit  d'abord  à  Paris.  Il  eut 
dans  cette  ville,  depuis  le  24  novembre  1801,  quel- 
ques conférences  préliminaires  avec  Joseph  Bonaparte. 
Dès  le  principe,  on  vit  que  l'article  de  Malte  serait 
celui  du  traité  à  conclure  qui  présenterait  le  plus  de 
difficultés.  Cependant  Varticle  4  avait  prononcé  sur  le 
sort  de  cette  île,  de  manière  qu'il  paraissait  que  tout 
ce  qui  restait  à  faire  était  de  déterminer  la  puissance 
chargée  de  la  garantie  et  de  la  protection  de  cette  île  ; 
mais  on  avait  fait  sentir  aux  ministres  anglais  la  faute 
qu'ils  avaient  commise  en  renonçant  à  une  possession 
qui  aurait  rendu  l'Angleterre  maîtresse  absolue  de  la 
Méditerranée  et  du  commerce  du  Levant;  et  ils  s'é- 
taient proposés  de  réparer,  s'il  était  possible  ,  cette 
faute.  Il  est  probable  que  cette  résolution  était  la 
cause  du  retard  qu'ils  avaient  mis  à  renvoyer  lord 
Comwallis  sur  le  continent. 

Les  conférences  d'Amiens  s'ouvrirent  enfin  au  com- 
mencement de  décembre.  Avant  d'entamer  les  ques- 
tions principales  qui  devaient  être  des  objets  de  né- 
gociation, on  discuta  quelques  demandes  formées  par 
le  plénipotentiaire  français.  Il  proposa,  1"  que  les  îles 
de  Saint-Pierre  et  de  Miquelon  qui ,  en  exécution  de 
Varticle  2  des  préliminaires,  devaient  être  rendues  à 
la  France,  fussent  échangées  contre  une  partie  de  l'île 
de  Terre-Neuve;  2"  qu'on  cédât  à  la  France  un  éta- 
blissement pour  la  pêche  dans  les  îles  Malouines; 
3"  que  l'on  reconnût  que  les  pêcheurs  seraient  neutres 


—  30  — 

en  temps  de  guerre.  Joseph  Bonaparte  retira  ces  trois 
demandes,  sur  l'observation  que  lui  fit  lord  Cornwallis, 
qu'elles  avaient  été  présentées  et  rejetées  avant  la  signa- 
ture des  préliminaires. 

Une  autre  discussion  s'éleva  sur  une  addition  que 
le  plénipotentiaire  français  voulait  faire  à  Varticle  12 
des  préliminaires.  Elle  devait  exprimer  la  condition  que 
des  créanciers  anglais  en  France  ne  seraient  pas  plus 
favorisés  que  les  Français  eux-mêmes.  Lord  Cornwal- 
lis  observa  qu'une  pareille  condition  serait  injuste  et 
préjudiciable  à  l'Angleterre,  puisque  le  gouvernement 
anglais  n'avait  touché  à  aucune  propriété  ni  fonds  ap- 
partenant à  un.  Français  j  tandis  que  la  France  s'était 
emparée  de  tout  ce  que  les  Anglais  possédaient  en 
France,  et  n'avait  fait  que  des  remboursements  imagi- 
naires. Quelque  droit  qu'elle  eût  à  agir  ainsi  envers 
des  citoyens  français,  elle  ne  ppuvait  se  permettre 
d'appliquer  ses  lois  injustes  à  des  étrangers.  La  force 
de  ce  raisonnement  l'emporta,  et  Varticle  subsista. 

Il  s'éleva  alors  des  débats  sur  une  augmentation  de 
territoire  dans  l'Inde,  que  Joseph  Bonaparte  demanda, 
en  faisant  observer  que  la  sim})le  restitution  des  pos- 
sessions françaises  dans  ces  contrées  devait  être  regar- 
dée plutôt  comme  une  charge  que  comme  un  avantage. 
En  conséquence,  il  proposa,  1  "  que  les  Anglais  cédassent 
ou  fissent  céder  à  la  France  les  sept  joukans  ou  doua- 
nes de  Villehour,  d'autant  plus  que  le  district  de  Vil- 
lehour,  faisant  partie  du  territoire  de  Pondichéry, 
avait  été  concédé,  sans  réserve  ni  restriction,  à  la 
compagnie  française  des  Indes  orientales  par  le  sou- 
bah  de  Decan  et  par  le  nabab  d'Arcot.  Le  traité  do 
1783  avait  confirmé  cette  possession  à  la  France  sans 
restriction,  et  néanmoins  elle  avait  le  déplaisir  de  voir 
qu'on  percevait  sur  son  territoire,  au  nom  d'un  sou- 
verain étranger,  des  droits  onéreux  et  extrêmement 


—  31  — 

gênants  pour  son  commerce.  En  1 785,  MM.  de  Bussy 
et  Coutanceau  savaient  fait  des  représentations  à  ce  su- 
jet à  lord  Macartney ,  qui  avait  répondu  que  les  jou- 
kans  en  question  faisaient  partie  de  l'ancien  district 
de  Valdahour,  et  appartenaient  au  nabab  d'Arcot.  On 
lui  répondit  que  le  district  de  Villehour  lui-même 
avait  fait  partie  de  celui  de  Valdabpur;  mais  que,  de- 
puis la  concession  susdite,  il  avait  foymé  un  district 
entièrement  séparé;  que  par  conséquent  chaque  nation 
devait  jouir  des  accessoires  de  sa  portion.  La  conven- 
tion explicative  du  15  janvier  1787^  n'ayant  rien  dé- 
cidé sur  cette  question,  Joseph  Bonaparte  exprima  spq 
espoir  qu'on  allait  enfin  faire  droit  à  la  réclamation  de 
(a  France. 

11  proposa,  2°  que  la  Grande-Bretagne  consentît  à 
échanger  le  district  de  Valdahour  contre  celui  de  Ba- 
hour,  qui  appartenait  à  la  France  :  cet  arrangement 
devait  assurer  aux  habitants  de  Pondichéry  les  pre- 
miers besoins  de  la  vie,  et  terminer,  sans  un  sacrifice 
bien  grand,  des  difficultés  continuellement  renais- 
santes. 

3°  Qu'à  l'époque  de  la  restitution  de  Yanaon ,  la 
France  fût  aussi  mise  en  possession  du  district  situé 
sur  la  rive  gauche  du  Corigny,  qui  lui  avait  toujours 
appartenu,  et  où  se  trouve  le  point  d'embarquement  des 
marchandises  destinées  pour  Yanaon;  et  comme  la  ri- 
vière avait  successivement  enlevé  la  plus  grande  par- 
tie du  district  où  les  ateliers  étaient  situés,  Bonaparte 
demanda  un  district  équivalent  sur  la  rive  opposée, 
où  les  tisserands,  chassés  par  l'inondation,  pussent 
trouver  un  asile.  Enfin  il  ajouta  la  demande  qu'en 
exécution  des  traités  de  1783  et  1787,  les  Français 
eussent,  pour  leur  commerce  sur  la  côte  de  Coroman- 

'  Voy.  Martens,  Rec,  t.  III,  p.  30. 


—  32  — 

del,  et  principalement  pour  l'exécution  de  leurs  mar- 
chés dans  l'intérieur  du  pays,  les  mêmes  moyens  de 
sûreté  et  de  protection  qu'au  Bengale. 

4°  Que ,  sur  la  côte  de  Malabar,  la  France ,  en  ren- 
trant en  possession  de  Malié  et  de  ses  dépendances,  re- 
couvrât aussi  le  petit  district  de  Courchy,  qui  lui  avait 
toujours  appartenu  depuis  la  cession  que  le  roi  de  Co- 
lastrie  en  avait  faite  à  M.  Mahé  de  La  Bourdonnaye,  et 
dont  Tippo-Sultan  n'avait  jamais  pu  disposer  en  faveur 
des  Anglais,  puisqu'il  n'en  était  pas  propriétaire;  en- 
fin, que  la  France  eût  la  permission  d'établir  une  for- 
teresse à  Alèpe,  pour  prendre  part  au  commerce  de 
poivre  dans  le  royaume  de  Travancore. 

Dans  une  conférence  suivante,  Joseph  Bonaparte ^ 
se  réclamant  de  l'article  13  des  préliminaires,  de- 
manda encore  : 

1  "  Que  les  pêcheurs  français  à  Terre-Neuve  jouissent 
de  la  même  protection  que  les  Anglais  mêmes; 

2°  Qu'il  fût  libre  à  la  France  d'avoir  un  agent  com- 
mercial à  Saint-John; 

3"  Que  la  France  eût  le  droit  de  pêcher  exclusive- 
ment, et  dans  toutes  les  saisons,  sur  les  côtes  qui  lui 
avaient  été  assignées;  d'autant  plus  que,  lorsqu'elle 
céda  la  propriété  de  l'île  de  Terre-Neuve,  en  se  réser- 
vant la  pêche  dans  une  étendue  déterminée ,  elle  ne 
s'imposa  pas  la  condition  de  ne  pêclier  qu'une  cer- 
taine espèce  de  poisson  et  durant  une  saison  particu- 
lière de  l'année  seulement;  mais  qu'elle  s'était  simple- 
ment engagée  à  ne  fortifier  aucune  place  et  à  n'ériger 
aucun  bâtiment,  excepté  les  huttes  nécessaires  pour 
sécher  le  poisson;  que  de  là  découlaient  nécessaire- 
ment divers  droits  qui  lui  avaient  été  tacitement  ac- 
cordés, comme  de  couper  du  bois,  d'ériger  des  hôpi- 
taux sur  la  côte  et  de  faire  des  magasins  de  vivres; 
enfin,  le  droit  de  laisser  des  personnes  pour  protéger 


—  33  — 

les  canots  et  les  ustensiles  de  la  pêche.  La  plus  grande 
partie  de  ces  droits  ont  été  souvent  contestés  et  aussi 
souvent  reconnus,  puisque,  à  différentes  occasions, 
l'Angleterre  avait  accordé  des  indemnités  aux  pro- 
priétaires des  canots  que  les  Anglais  avaient  brûlés  ou 
détruits;  et  il  était  à  craindre  que  la  même  contesta- 
tion ne  se  reproduisît,  si  l'on  n'y  remédiait  par  des 
dispositions  précises.  Joseph  Bonaparte  fit  observer  que 
les  îles  de  Saint-Pierre  et  Miquelon  allaient  être  rendues 
à  son  gouvernement,  entièrement  ravagées  par  suite  de 
la  guerre;  qu'en  conséquence  il  espérait  obtenir  que 
la  permission  précédemment  accordée  aux  Français 
de  couper  du  bois  dans  la  baie  de  Saint-George,  qui 
est  éloignée  de  tous  leurs  établissements,  fût  appliquée 
aux  baies  de  Fortune  ou  du  Désespoir.  Cette  demande 
fut  accordée;  mais  ce  fut  la  seule  facilité  que  la  France 
pût  obtenir  pour  ses  pêcheries. 

Après  toutes  ces  discussions  préliminaires,  il  fallut 
enfin  entamer  la  grande  question,  l'objet  principal  des 
négociations,  l'affaire  de  Malte.  Sans  s'expliquer  sur 
le  vœu  de  son  gouvernement  de  conserver  cette  île, 
le  plénipotentiaire  anglais  suscita  toutes  sortes  de 
difficultés,  tantôt  sur  l'organisation  intérieure  de 
l'Ordre,  tantôt  sur  le  genre  de  garantie  dont  une 
tierce  puissance  devait  être  chargée;  sur  la  force  de 
la  garnison  qui  devait  être  placée  dans  l'île;  sur  la 
nation  dans  laquelle  on  choisirait  cette  garnison; 
tantôt  sur  l'époque  où  l'île  serait  remise  aux  cheva- 
liers de  l'Ordre.  Soit  que  le  ministre  français  ne  de- 
vinât pas  l'arrière-pensée  du  négociateur  anglais,  soit 
qu'en  allant  au-devant  de  toutes  les  difficultés,  il  vou- 
lût le  forcer  de  s'expliquer,  Joseph  Bonaparte  pro- 
posa, comme  un  moyen  de  parer  à  tous  lés  inconvé- 
nients que  la  Grande-Bretagne  paraissait  craindre,  de 
vu  3 


—  34  — 

changer  toute  la  composition  de  l'Ordre ,  de  manière 
qu'au  lieu  d'un  Ordre  nobiliaire,  il  devînt  simple- 
ment un  Ordre  hospitalier,  suivant  son  institution 
primitive,  et  que,  les  fortifications  de  Malte  étant  dé- 
molies ,  cette  île  fût  convertie  en  un  grand  lazarej; 
destiné  à  servir  également  aux  diverses  nations  qui 
faisaient  le  commerce  de  la  Méditerranée  et  du  Le- 
vant. Cet  arrangement  ne  pouvait  pas  convenir  à 
l'Angleterre;  aussi  lord  Cornwallis  je  rejeta-t-il  pé- 
remptoirement, le  12  janvier  1802,  comme  contraire 
aux  préliminaires. 

Le  plénipotentiaire  français  proposa  alors  de  sé- 
parer la  pro^ec^on  de  \3L  garantie  ;  de  déférer  la  pre- 
mière au  roi  de  Naples,  comme  seigneur  suzerain  de 
l'île;  d'attribuer  la  seconde  simultanément  à  la  France, 
à  l'Angleterre,  à  la  Russie,  à  l'Espagne,  à  l'Autriche 
et  à  la  Prusse,  de  manière  que  chacune  de  ces  puis- 
sances fournirait  deux  cents  hommes  qui  seraient 
payés  par  l'Ordre ,  et  dont  les  officiers  seraient  nom- 
més par  le  Grand-Maître,  à  condition  qu'il  les  prît 
dans  la  nation  à  laquelle  chaque  corps  appartenait. 

Le  plénipotentiaire  anglais  présenta  un  contre- 
projet  dont  voici  les  principales  stipulations  :  L'île 
sera  mise  sous  la  garantie  et  la  protection  des  six 
puissances  nommées  dans  le  projet  français;  mî^is 
elles  n'y  enverront  pas  de  garnison.  Ce  droit  sera  ac- 
cordé au  suzerain  de  l'île,  le  roi  de  Naples,  mais 
pour  un  certain  nombre  d'années  seulement,  lues 
ports  de  Malte  seront  en  tout  temps  neutres  ;  l'Ordre 
renoncera  au  principe  d'une  guerre  perpétuelle  contre 
les  infidèles,  mais  il  fermera  ses  ports  aux  vaisseaux 
des  puissances  barbaresques ,  toutes  les  fois  que 
celles-ci  seront  en  guerre  avec  le  roi  de  Naples.  La 
Grande-Bretagne  et  la  France  payeront  au  roi  des 
Deux-Siciles  une  somme  annuelle  pour  l'entretien  de 


—  35  — 

la  garnison.  Il  sera  établi  une  Langue  maltaise,  qui 
sera  entretenue  par  les  revenus  territoriaux  et  les 
droits  commerciaux  de  l'île. 

Dans  les  conférences  suivantes,  on  s'accorda  sur 
la  plupart  de  ces  points,  excepté  V article  d'après  le- 
quel le  roi  des  Deux-Siciles  devait  entretenir  pendant 
quelque  temps  une  garnison  dans  l'île.  Le  gouverne- 
ment français  eut  beaucoup  de  peine  à  lui  accorder 
cette  faculté.  Il  proposa  de  remplacer  les  troupes  sici- 
liennes par  un  corps  de  mille  Suisses,  dont  les  officiers 
seraient  nomniés  par  le  Landamman.  Ce  corps  devait 
être  soldé  par  la  France  et  l'Angleterre  pendant  un 
an,  et,  après  cette  époque,  passer  à  la  solde  de  l'Ordre 
et  se  recruter  de  Maltais.  11  consentit  enfin  que  le  roi 
des  Deux-Siciles  fournît  ce  corps  de  mille  hommes, 
mais  à  condition  qu'il  ne  serait  composé  que  d'anciens 
soldats,  natifs  des  États  de  ce  monarque,  et  qu'il  ne 
restât  qu'un  an  dans  l'île  :  finalement  le  plénipoten- 
tiaire français  porta  ce  corps  à  deux  mille  hommes , 
et  ce  fut  à  ce  nombre  que  l'on  s'arrêta. 

Une  seconde  difficulté  s'éleva  relativement  à  la  ma- 
nière dont  la  Porte  ottomane  devait  prendre  part  au 
traité  d'Amiens.  La  Grande-Bretagne  voulait  que 
l'ambassadeur  de  la  Porte  fût  admis  aux  conférences 
d'Amiens,  ou  comme  partie  contractante,  ou  comme 
partie  accédante  au  traité,  et  elle  motivait  cette  de- 
mande sur  ce  que  le  Grand  Seigneur  avait  refusé  de 
ratifier  le  traité  qii  Ali- Effendi^  son  ministre,  avait 
signé  le  9  octobre  1801  '.  Joseph  Bonaparte,  au  con- 
traire, prétendait  que  ce  traité  avait  été  simplement 
et  dûment  ratifié,  parce  que  la  restriction  que  la  Porte 
avait  attachée  à  son  approbation  par  la  phrase  sui- 

•  Voy.  t.  YI,  p.  297. 


—  se- 
yante :  ((  Autant  que  ces  articles  ne  seraient  pas  con- 
traires au  traité  de  Londres,  »  c'est-à-dire  aux  préli- 
minaires du  l^""  octobre,  devait  être  regardée  comme 
nulle,  puisqu'en  effet  le  traité  du  9  octobre  ne  renfer- 
mait rien  qui  fût  contraire  à  celui  de  Londres.  Le 
premier  Consul,  qui  désirait  renouveler  ler,  liaisons 
qui  avaient  anciennement  subsisté  entre  hi  France  et 
la  Porte,  voulait  faire  la  paix  directement  avec  elle  ; 
mais  il  prit  l'engagement  que  le  traité  ne  renfermerait 
pas  d'article  secret,  et  qu'il  serait  entièrement  basé 
sur  les  préliminaires.  On  trouva  un  moyen  qui  satisfit 
tout  le  monde  :  la  Porte  accéda,  par  une  déclaration 
du  13  mai  1802,  au  traité  d'Amiens,  et  elle  signa, 
le  25  juin  suivant,  sa  paix  définitive  avec  la  France'. 

La  reconnaissance  du  roi  d'Étrurie  et  des  Républi- 
ques italienne  et  ligurienne  par  la  Grande-Bretagne, 
présenta  une  troisième  difficulté.  Le  Cabinet  britan- 
nique s'y  refusa;  le  plénipotentiaire  français  la  de- 
manda par  des  motifs  qui  se  rapportent  à  l'Angleterre 
elle-même.  11  prétendait  que  le  commerce  anglais 
souffrirait  des  entraves  qu'y  mettraient  ces  trois  États, 
qui,  ne  faisant  aucune  espèce  d'affaires  avec  l'Angle- 
terre ,  étaient  pourtant  des  débouchés  utiles  et  même 
nécessaires  aux  produits  de  son  industrie.  Quoi  qu'il 
en  soit,  plutôt  que  de  reconnaître  ces  États,  la  Cour 
de  Londres  aima  mieux  qu'il  ne  fût  fait  aucune  men- 
tion de  la  haute  Italie  dans  le  traité;  et  par  conséquent 
le  Piémont  fut  aussi  passé  sous  silence. 

Enfin,  les  plénipotentiaires  des  (juatre  puissances 
s'étant  accordés  sur  tous  les  objets  de  la  négociation 
dont  ils  étaient  chargés,  le  traité  fut  signé  le  27  mars 
1802*.  En  voici  les  principales  stipulations  : 

'  Voy.  t.  Vl,p.  299. 

'  Mautens,  liée,  t.  IX,  p.  563.  On  doit  noter  ici  une  singulariléremar- 


—  37  — 

Il  y  aura  paix ,  amitié  et  bonne  intelligence  entre  la 
Grande-Bretagne,  d'une  part;  la  République  française, 
l'Espagne  et  la  République  batave,  d'autre  part.  Cette 
condition  est  exprimée,  dans  \e premier  article,  d'après 
le  protocole  usité  en  pareille  occasion:  on  se  promet 
d'éviter  tout  ce  qui  pourrait  respectivement  porter 
préjudice  aux  parties  contractantes.  Nous  verrons  par 
la  suite  que,  de  la  part  de  la  France,  on  s'est  plaint 
de  ce  que  cette  promesse  n'a  pas  été  observée  par 
l'Angleterre. 

Les  prisonniers  seront  restitués  de  part  et  d'autre 
sans  rançon.  Chaque  partie  contractante  soldera  res- 
pectivement les  avances  qui  auraient  été  faites  par 
aucunes  des  parties  contractantes  pour  la  subsistance 
et  l'entretien  des  prisonniers  dans  le  pays  où  ils  ont 
été  détenus.  Les  commissaires  nommés  pour  régler 
cette  comptabilité  porteront  en  compte  non-seulement 
les  dépenses  faites  par  les  prisonniers  des  nations 
respectives,  mais  aussi  par  les  troupes  étrangères  qui, 
avant  d'être  prises,  étaient  à  la  solde  et  à  la  disposi- 
tion de  l'une  des  parties  contractantes.  Art.  2.  C'est 
ainsi  qu'on  éluda  la  difficulté  qui  s'était  élevée,  dès 
les  négociations  pour  les  préliminaires ,  sur  la  ques- 
tion de  savoir  si  la  France  était  tenue  de  rembourser 
à  la  Grande-Bretagne  ses  avances  pour  les  prisonniers 
français,  que  les  feuilles  anglaises  faisaient  monter  à 
deux  millions  de  livres  sterling.  La  Grande-Bretagne 
sauva  le  principe,  et  la  France  put  se  dispenser  de 
payer. 

Les  articles  3,  4  ef  5  sont  la  répétition  et  l'explica- 

quable  :  dès  le  26  mars,  la  conclusion  delà  paix  fut  officiellement  annon- 
cée à  Paris,  comme  ayant  eu  lieu  le  25.  Cette  paix  ne-  fut  signée  que 
le  27;  mais  le  ministre  de  la  Grande-Bretagne  ayant  reçu,  dès  le  25  , 
un  courrier  qui  l'autorisait  à  la  signer,  les  deux  plénipotentiaires  dres- 
sèrent un  protocole  par  lequel  ils  s'engagèrent  à  signer  le  traité  con- 
venu ,  dès  que  les  expéditions  des  instruments  seraient  achevées. 


—  38  — 

tion  de  Y  article  2  des  préliminaires ,  avec  cette  diffé- 
rence que,  dans  celui-ci j  la  Grande-Bretagne  s'était 
réservé  de  ne  pas  rendre  la  Trinité  ni  Ceylan,  et  que, 
dans  le  traité  définitif,  l'Espagne  et  la  République 
batave,  qui  n'avaient  pas  été  parties  contractantes  à 
Londres,  cédèrent  formellement  ces  îles.  Ce  furent  les 
seules  cessions  que  l'Angleterre  obtint  par  le  traité 
d'Amiens*. 

Varticle  6  explique  l'article  3  des  préliminaires  en 
ce  qui  regarde  la  liberté  accordée  aux  bâtiments  des 
parties  contractantes  de  relâcher  au  cap  de  Bonne- 
Espérance. 

Varticle  7  statue  que  les  possessions  et  territoires 
du  Portugal  seront  maintenus  dans  leur  intégrité,  tels 
qu'ils  étaient  avant  la  guerre  :  cependafit  les  limites 
des  Guyanes  française  et  portugaise  sont  fixées  à  la 
rivière  d'Araouari,  dont  la  navigation,  fort  impor- 
tante, est  déclarée  commune,  et  la  cession  d'Olivença 
en  faveur  de  l'Espagne  est  reconnue.  C'est  ainsi  que 
fut  modifié  l'article  6  des  préliminaires. 

Les  territoires,  possessions  et  droits  de  la  Porte 
sont  maintenus  dans  leur  intégrité,  tels  qu'ils  étaient 
avant  la  guerre.  Jrt.  8. 

La  République  des  Sept-lles  est  reconnue.  Art.  9. 

Varticle  10  rend  à  l'Ordre  de  Saint-Jean  de  Jérusa- 
lem les  îles  de  Malte,  de  Gozo  et  de  Comino,  sous  des 
stipulations  qui  sont  exprimées  dans  treize  para- 
graphes. Cet  article  est  le  plus  important  de  tout  le 
traité,  mais  aucune  des  conditions  qu'il  renferme  n'a 
été  exécutée;  et  il  est  devenu  le  {)rétexte  d'une  gtiérre 
qui  s'est  renouvelé  en  1803,  et  a  duré  sans  interrup- 
tioti  jusqu'en  1814. 

•  Il  faut  consulter,  sur  l'importance  de  l'île  de  la  Trinité,  pays  pëù 
visité  par  des  voyai^eurs  instruits,  le  Voyage  de  M.  Dauxion  Lavatsse. 
Paris,  1813,  2to1.  in-8». 


—  39  — 

Les  chevaliers  des  Langues  qui  continueront  de 
subsister,  retourneront  à  Malte  pour  élire  un  grand- 
maître,  à  moins  qu'il  n'en  ait  été  nommé  un  depuis 
l'échange  des  ratifications  des  préliminaires.  Cette 
élection  sera  seule  reconnue  valable,  à  l'exclusion  de 
toute  autre  antérieure. 

Ce  paragraphe  de  l'article  1 0  est  expliqué  parle  pas- 
sage d'une  dépêche  adressée,  le  5  juin  1802,  par  lord 
Hawkeshury^  à  M.  Merry,  iiiinistre  de  la  Grande-Bre- 
tagne, à  Paris.  «  L'objet  de  ce  paragraphe,  dit  ce  lord, 
était  que,  dans  le  cas  où  une  élection  aurait  eu  lieu 
postérieurement  à  l'échange  des  ratifications  des  ar- 
ticles préliminaires  et  antérieurement  à  la  conclusion 
du  traité  définitif,  cette  élection  fat  regardée  comme 
valide;  et  quoique  l'article  ne  fasse  pas  mention  de  la 
proclamation  publiée  par  l'empereur  de  Russie  peu 
après  son  avènement  au  trône,  par  laquelle  les  cheva- 
liers de  l'Ordre  avaient  été  invités  à  s'assembler  et  à 
procéder  à  l'élection  d'un  grand-maître,  néanmoins  la 
stipulation  dont  il  s'agit  se  rapporté  évidemment  à  la 
contingence  d'une  élection  faite  sur  le  continent  par 
suite  de  cette  proclamation.  Vous  informerez  le  gou- 
vernement français  que  Sa  Majesté  est  prête  à  regar- 
der comme  valide,  conformément  à  la  stipulation  de 
l'article  10,  l'élection  qui  a  dernièrement  eu  lieu  à 
Saint-Pétersbourg.))  C'est  improprement  que  lord Hato- 
kesbury  parle  ici  d'une  élection  faite  à  Saint-Péters- 
bourg; les  divers  prieurés  de  l'Ordre,  invités  parl'em- 
pereur  Alexandre  à  élire  un  grand-maître,  avaient 
envoyé  à  Saint-Pétersbourg  leurs  votes  portant  que, 
pour  cette  fois  seulement,  le  souverain  pontife  fût 
prié  de  choisir  le  chef  de  l'Ordre  parmi  les  candidats 
qu'ils  avaient  désighés.  Bonaparte  ayant,  à  l'exemple 
de  la  Grande-Bretagne,  reconnu  ce  mode  d'élection,  le 
Pape  proclama,  le  9  février  1 803,  grand-maître  le  bailli 


—  40  — 

Tommasi,  amiral  de  l'Ordre,  et,  dans  les  derniers 
temps,  ministre  du  grand-duc  de  Toscane  à  Malte. 

Il  n'y  aura  plus,  continue  l'article  10  de  la  paix 
d'Amiens,  ni  Langue  française  ni  Langue  anglaise,  et 
nul  individu,  français  ou  anglais,  ne  pourra  être  ad- 
mis dans  l'Ordre.  Il  faut  observer  que  la  Langue  an- 
glaise avait  cessé  d'exister  depuis  longtemps,  et  que  les 
trois  Langues  françaises  (de  Provence,  d'Auvergne  et 
de  France)  avaient  été  supprimées  par  la  Révolution. 

11  sera  établi  une  Langue  maltaise  qui  sera  entrete- 
nue par  les  revenus  territoriaux  et  les  droits  commer- 
ciaux de  l'île.  Il  ne  faudra  pas  de  preuve  de  noblesse 
pour  être  reçu  dans  cette  Langue. 

Les  forces  britanniques  évacueront  l'île  et  ses  dé- 
pendances dans  les  trois  mois  qui  suivront  l'échange 
des  ratifications.  A  cette  époque,  l'île  sera  remise  à 
l'Ordre  dans  l'état  où  elle  se  trouvera,  pourvu  que  le 
grand-maître  ou  des  commissaires,  pleinement  auto- 
risés suivant  les  statuts  de  l'Ordre,  soient  dans  ladite  île 
pour  en  prendre  possession,  et  que  la  force  qui  doit 
être  fournie  par  le  roi  de  Naples  y  soit  arrivée. 

La  moitié  de  la  garnison  au  moins  sera  toujours 
composée  de  Maltais  natifs.  Le  commandant  en  chef 
de  la  garnison  sera  nommé  par  le  grand-maître. 

L'indépendance  de  l'île  et  le  présent  arrangement 
sont  mis  sous  la  protection  et  garantie  de  la  France, 
de  là  Grande-Bretagne,  de  l'Autriche,  de  l'Espagne, 
de  la  Russie  et  de  la  Prusse. 

La  neutralité  permanente  de  l'Ordre  est  proclamée. 

Les  ports  de  Malte  seront  ouverts  au  commerce  et  à 
la  navigation  de  toutes  les  nations,  qui  y  payeront 
des  droits  égaux  et  modérés. 

Les  États  barbaresques  sont  exceptés  des  deux  dispo- 
sitions immédiatement  précédentes,  tant  qu'ils  n'au- 
ront pas  renoncé  à  leur  système.  Cette  clause  diffère  de 


—  fi- 
celle des  préliminaires,   d'après  laquelle  le  port  de 
Malte  devait  être  fermé  aux  Barbaresques,  seulement 
dans  le  cas  où  elles  seraient  en  guerre  avec  le  roi  des 
Deux-Siciles. 

Les  statuts  de  l'Ordre  sont  rétablis,  et  les  dispositions 
législatives  de  cet  article  seront  converties  en  statuts. 

Le  roi  des  Deux-Siciles  sera  invité  à  fournir  deux 
mille  hommes  natifs  de  ses  Etats  pour  servir  de  gar- 
nison dans  l'île.  Cette  force  y  restera  un  an,  et  plus 
longtemps  si  les  puissances  garantes  le  jugent  néces- 
saire. 

Les  puissances  garantes  seront  invitées  à  accéder 
aux  présentes  stipulations. 

Avant  de  passer  aux  autres  articles  de  la  paix  d'A- 
miens, nous  dirons  que  l'empereur  d'Allemagne  ga- 
rantit l'article  10  par  une  déclaration  qu'il  donna  le 
6  octobre  1802;  mais  l'empereur  de  Russie,  ne  trou- 
vant pas  ces  stipulations  conformes  au  désir  qu'il  avait 
manifesté  relativement  à  l'Ordre  de  Saint-Jean  de 
Jérusalem,  ni  à  ce  qui  avait  été  en  quelque  sorte  ar- 
rêté antérieurement  entre  lui  et  la  Grande-Bretagne, 
refusa,  le  24  novembre  1802,  sa  garantie,  à  moins  que 
la  France  et  la  Grande-Bretagne  ne  s'accordassent  sur 
quelques  points  additionnels  qu'il  proposa.  Voici  les 
principales  stipulations  de  ces  articles  proposés  : 

1"  La  souveraineté  de  l'Ordre  sur  l'île  de  Malte  sera 
reconnue;  on  reconnaîtra  également  le  grand-maître  et 
le  gouvernement  civil  de  l'Ordre,  selon  ses  anciennes 
institutions ,  en  y  admettant  les  natifs  de  Malte.  Sur  ce 
dernier  point,  et  sur  tout  ce  qui  pourrait  avoir  rapport 
à  l'organisation  intérieure  de  l'Ordre,  il  dépendra  de 
son  gouvernement  légal  de  statuer  des  règlements 
comme  il  le  jugera  convenable.  L'empereur  Alexandre 
rejeta  ainsi  l'établissement  de  la  Langue  maltaise. 

2"  Les  droits  du  roi  des  Deux-Siciles,  comme  suze- 


—  42  — 

rain  dé  l'île,  resteront  tels  qu'ils  existaient  avant  la 
guerre. 

3"  L'indépendance  et  la  neutralité  de  l'île  de  Malte 
seront  assurées  et  garanties  pour  tous  les  cas  de  guerre, 
soit  entre  les  deux  puissances  garantes,  soit  entre  l'une 
d'elles  et  une  autre  puissance,  sans  excepter  le  roi  des 
Deux-Siciles,  dont  le  droit  de  suzeraineté  sur  l'île  ne 
s'étendra  pas  jusqu'à  causer  un  changement  dans  la 
neutralité. 

4°  Jusqu'au  moment  où  l'OMre  setaen  état  de  pour- 
voir, par  ses  propres  moyens,  au  maintien  de  son  in- 
dépendance et  de  sa  neutralité,  et  à  la  défense  de  Son 
chef-lieu ,  les  forts  de  l'île  seront  mis  sous  la  garde 
des  troupes  que  le  foi  des  Deux-Siciles  y  enverra  en 
nombre  suffisant  pour  la  défense  de  l'île  et  de  ses  dé- 
pendances ;  ce  nombre  sera  réglé  entre  ce  souverain  et 
les  deux  puissances  contractantes,  qui  se  chargeront 
concurremment  de  l'entretien  du  total  de  ces  troupes, 
tant  que  la  défense  de  l'île  continuera  de  leur  être  con- 
fiée, et  pendant  lequel  temps  elles  dépendront  de  l'au- 
torité du  grand-maître. 

Le  gouvernement  français  accepta  ces  modifications; 
mais,  côinme  à  l'époque  où  elles  furent  proposées,  la 
Grande-Bretagne  avait  déjà  pris  son  parti  de  ne  pas 
se  dessaisir  de  l'île  dé  Malte,  elle  ne  fut  pas  fâchée  de 
se  prévaloir  des  propositions  de  la  ÏVliséie  poiir  avanter 
que  l'Empereur  avait  refusé  une  garantie  qu'il  n'avait 
donnée  queconditionrtëllement.  En  conséquence,  elle 
n'y  adhéra  pas.  Quant  à  la  Priisse,  saris  donner  un  acte 
de  garantie  forhiellc,  elle  déélara,  par  son  ministre 
à  Paris,  qu'elle  adhérait  à  la  proposition  de  la  Russie. 

Varlicle  1 1  du  traité  d'Amiens  est  une  répétition  de 
Vartidel  des  préliminaires  i  et  ordonne  l'évacuation 
du  royaume  de  Naples  et  de  l'État  romain  par  les  trou- 
pes françaises,  de  Porto  Ferrajo  et  de  tous  les  ports  et 


—  43  — 

îles  dé  là  Méditerranée  et  de  l'AdHatique  par  lès  trou- 
pes anglaises. 

Les  évacuations,  cessions  et  restitutions  convenues, 
se  feront,  en  Europe,  dans  le  mois;  en  Amérique  et 
en  Afrique,  dans  les  trois  mois;  en  Asie ,  dans  les  six 
mois  qui  suivront  la  ratification  du  présent  traité. 
Art.  12. 

Les  articles  1 3  eM  4  stipuleht  que  les  fortifications 
sont  rendues  dans  l'état  où  elles  se  trOuvétit,  fixent  un 
délai  pour  la  vente  de  leurs  biens  aux  habitants  qui 
veulent  quitter  les  pays  cédés  ou  restitués,  et  ordon- 
nent la  levée  des  séquestres. 

V article  15,  ainsi  que  V article  13  des  préliminai- 
res, rétablit  les  pêcheries  sur  les  côtes  de  Terre-Neuve 
et  des  îles  adjacentes,  et  dans  le  golfe  de  Saint-Lau- 
rent, sur  le  même  pied  où  elles  étaient  avant  la  guerre. 
11  n'est  plus  question  des  arrangements  réciproque- 
ment utiles  que  les  préliminaires  avaient  renvoyés  au 
traité  définitif;  seulement  la  Grande-Bretagne  accorde 
aux  pêcheurs  français  de  Terre-Neuve  et  aux  habitants 
des  îles  Saint-Pierre  etMlquelon,  la  faculté  de  couper 
les  bois  qui  leur  seront  nécessaires  dans  les  baies  de 
Fortune  et  du  Désespoir,  pendant  la  première  année, 
à  compter  de  la  notification  du  présent  traité. 

Par  V article  16,  on  cofavient  de  la  restitution  des 
prises  qui  pourront  avoir  été  faites  un  mois  après  la 
signature  des  articles  préliminaires,  dans  des  délais 
qui  varient  d'après  les  distances. 

Lés  ambassadeurs,  ministres  et  autres  agents  des 
puissances  contractantes  jouiront  respectivement  des 
mêmes  rangs  et  privilèges  dont  jouissaient  avant  la 
guerre  les  agents  de  la  même  classe.  Art,  17. 

V article  18  dit  :  k  La  branche  de  la  maison  de  Nas- 
sau, qui  était  établie  dans  la  ci-devant  République  des 
Provinces-Unies,  actuellement  la  République  batave, 


—  44  — 

y  ayant  fait  des  pertes,  tant  en  propriétés  particuliè- 
res que  par  le  changement  de  constitution  adoptée  en 
ce  pays,  il  lui  sera  alloué  une  compensation  équiva- 
lente pour  lesdites  pertes.  » 

Quand  on  pense  aux  services  éminents  que  la  mai- 
son de  Nassau  a  rendus  à  la  République  des  Pays-Bas 
et  à  l'importance  des  charges  qu'elle  y  remplissait,  on 
regrette  de  voir  que  lord  Cornwallis  ait  consenti  à 
une  rédaction  par  laquelle  on  affecta  de  méconnaître 
l'auguste  caractère  dont  cette  maison  était  revêtue. 
L'article  ne  dit  pas ,  au  reste ,  par  qui  cette  compen- 
sation équivalente  sera  fournie.  Dans  le  moment 
même  où  la  paix  d'Amiens  fut  signée ,  Joseph  Bona- 
parte et  M.  Schimmelpennink  conclurent  une  conven- 
tion particulière,  par  laquelle  la  France  garantit  à  la 
République  batave  que  l'indemnité  promise,  par  l'ar- 
ticle 1 8,  à  la  maison  d'Orange,  ne  pourra,  dans  aucun 
cas  et  d'aucune  manière ,  tomber  à  la  charge  de  cette 
dernière  République.  Nous  verrons  qu'on  en  chargea 
l'Empire  germanique,  auquel  les  pertes  de  la  maison 
d'Orange  étaient  étrangères. 

«  Le  présent  traité  définitif  de  paix,  dit  V article  19, 
est  déclaré  commun  à  la  Sublime  Porte  ottomane,  al- 
liée de  Sa  Majesté  Britannique,  et  la  Sublime  Porte  sera 
invitée  à  transmettre  son  acte  d'accession  dans  le  plus 
court  délai  possible.  »  L'accession  signée  par  le  sultan 
Gazi  Sélim  Khan,  est  datée  du  ^V  jour  de  la  lune  Mou- 
hawer.  Van  de  f  hégire  1237  (13  mai  1802)^ 

Varticle  20  détermine  les  conditions  et  le  mode 
d'extradition  des  criminels,  dans  les  États  respec- 
tifs. 

Il  faut  d'abord  observer  ici  que,  contrairement  à  ce 
qui  se  pratique  ordinairement  lorsque  deux  gouverne- 

•  Marte.ns,  PpcupH,  t..  X  ,  p.  206. 


— .  45  — 

ments  rentrent  dans  l'état  de  paix,  les  traités  antérieure- 
ment conclus  entre  les  parties  contractantes  n'ont  pas 
été  renouvelés  par  le  traité  d'Amiens.  Comme  il  est  de 
principe  en  Droit  politique  que  les  hostilités  rompent 
les  traités  existants,  cette  formalité  est  regardée  comme 
nécessaire  pour  lier  de  nouveau  les  gouvernements  à 
des  obligations  anciennement  contractées,  et  dont  ils 
peuvent  se  prétendre  dégagés,  ainsi  que  pour  valider  les 
cessions  faites  antérieurement,  et  que  ces  gouverne- 
mentspourraientregardercommerévoquées.Onadonc 
fait  aux  ministres  anglais  un  grave  reproche  de  ce  qu'ils 
n'ont  pas  suivi  cette  marche  dans  le  traité  d'Amiens. 
En  rétablissant  la  bonne  intelligence  sur  les  bases  seu- 
lement de  ce  traité,  ils  ont  fait,  disait-on,  revivre  tou- 
tes les  anciennes  prétentions  auxquelles  la  France, 
l'Espagne  ou  la  Hollande  avaient  renoncé;  ils  ont  an- 
nulé la  clause  du  traité  d'Utrecht ,  qui  interdit  à  la 
couronne  d'Espagne  la  faculté  de  céder  la  moindre  de 
ses  possessions  à  la  France,  et  par  conséquent  ils  ont 
reconnu  de  fait  la  validité  de  l'abandon  que  l'Espagne 
avait  fait  de  la  moitié  de  l'île  de  Saint-Domingue,  dont 
ils  avaient  cependant  évité  de  parler  dans  le  traité; 
ils  ont,  par  cette  négligence,  sanctionné  la  réunion 
de  la  Belgique  à  la  France,  à  laquelle  la  Grande-Bre- 
tagne n'a  aucun  moyen  de  s'opposer,  si  ce  n'est  en 
vertu  du  traité  d'Utrecht;  ils  ont  fait  revivre  les  droits 
de  la  France  sur  le  Canada,  etc.  On  pourrait  peut-être 
opposer  à  ces  reproches  que,  si  le  gouvernement  bri- 
tannique avait  voulu  que  les  traités  antérieurs  fussent 
rappelés,  le  plénipotentiaire  français  aurait  sans  doute 
exigé  que  la  cession  de  la  Belgique  et  de  la  partie  es- 
pagnole de  Saint-Domingue  fût  reconnue ,  et  qu'il  va- 
lait mieux,  pour  l'Angleterre,  ne  pas  donner  son  as- 
sentiment à  des  arrangements  contre  lesquels  on  pour- 
rait revenir  dans  des  temps  plus  opportuns,  plutôt 


—  46  — 

que  d'obtenir  la  confirmation  de  concessions  antérieu- 
res dont  elle  était  en  possession,  et  qu'on  ne  pouvait 
lui  arracher  sans  lui  faire  la  guerre.  Les  amis  du  mi- 
nistère britannique  ne  se  sont  pas  contentés  de  faire 
valoir  cette  excuse  en  sa  faveur;  ils  ont  prétendu  que 
l'omission  tant  reprochée  aux  ministres  britanniques 
était,  au  contraire,  une  suite  de  leur  politique  pré- 
voyante ,  et  qu'en  ne  renouvelant  pas  les  traités  anté- 
rieurs, et  nommément  ceux  de  1783  et  1713,  ils  ont 
fait  triompher  contre  la  France  le  nouveau  droit  ma- 
ritime que  la  Grande-Bretagne  avait  fait  prévaloir 
pendant  la  guerre  terminée  par  la  paix  d'Amiens.  En 
effet,  et  nous  l'avons  remarqué  plus  d'une  fois',  le 
traité  de  navigation  et  de  commerce  signé  à  Utrecht  le 
même  jour  où  fut  conclue  la  paix  entre  la  France  et  la 
Grande-Bretagne,  avait  consacré  le  principe  de  la  li- 
berté du  commerce  des  neutres,  et  l'axiome  que  le  pa- 
villon couvre  la  marchandise;  et  comme  tous  les  trai- 
tés subséquents  jusqu'à  la  paix  de  Paris  de  1 783  avaient 
renouvelé  les  conventions  d'Utrecht,  le  silence  observé, 
dans  celui  d'Amiens  sur  les  traités  précédents  replaça 
la  Grande-Bretagne ,  à  l'égard  de  la  France  ,  dans  les 
rapports  du  droit  commun,  dont  l'axiome  favorable 
aux  neutres  n'est ,  dans  le  système  de  l'Angleterre, 
qu'une  exception  qui  ne  peut  avoir  lieu  que  par  suite 
d'une  stipulation  expresse.  11  s'ensuit  que,  depuis  le 
traité  d'Amiens,  le  gouvernement  britannique  ne  re- 
connaît plus,  à  l'égard  de  la  navigation  française,  que 
les  principes  du  Consulat  de  la  mer,  d'après  lesquels 
la  marchandise  ennemie  ne  se  trouve  pas  à  l'abri  sous 
le  pavillon  neutre;  législation  regardée  par  les  An- 
glais comnpip  tellement  importante,  qu'iU  n'ont  pas 
hésité  î^.se  brouiller  avec  tp^tes  les  puissances  ^\i 

•  T.  II,  p.  308;etl.  V,  p.20. 


~  47  — 

Nord  plutôt  que  de  permettre  qu'elle  fut  enfreinte.  Di- 
sons encore  que  si  l'humanité  regrette  que  ce  droit, 
imaginé  dans  des  siècles  moins  civilisés;,  ait  de  nou- 
veau prévalu  ,  et  forme  dorénavant  le  code  maritipie 
entre  les  nations  européennes,  ce  retour  vers  la  bar- 
barie est  dû  aux  aberrations  de  la  Convention  nationale. 
Ce  fut  elle  qui,  la  première,  rétablit  légalement  l'ancieq 
Droit  maritime.  Se  fondant  sur  une  série  de  faits,  ou 
faux  ou  exagérés,  elle  avait  décrété,  le  9  mai  1 793  \  que 
les  bâtiments  de  guerre  et  corsaires  français  pouvaient 
arrêter  et  amener  dans  les  ports  de  la  République 
française  les  navires  neutres  qui  se  trouveraient  char- 
gés en  tout  ou  en  partie,  soit  de  comestibles  apparte- 
nante des  neutres  et  destinés  pour  des  ports  ennemis, 
soit  de  marchandises  appartenant  aux  ennemis;  que 
les  dernières  seront  déclarées  de  bonne  prise,  et  que 
les  comestibles  seront  payés  sur  le  pied  de  leur  valeur 
dans  le  lieu  pour  lequel  ils  sont  destinés. 

Si  le  ministère  britannique  fut  conséquent  dans  ses 
principes  en  ne  renouvelant  pas  les  traités  antérieurs, 
il  lui  fut  plus  difficile  de  se  justifier,  aux  yeux  de  sa 
nation,  de  plusieurs  autres  reproches  qu'on  lui  adressa. 
Jamais  traité  donnant  à  un  peuple  une  paix  vivement 
désirée  n'a  rencontré  plus  d'antagonistes  qu'il  ne  s'en 
est  élevé  en  Angleterre  contre  la  paix  d'Amiens.  On 
la  reçut  avec  une  défaveur  si  grande,  que  ses  au- 
teurs, qui  ne  l'avaient  conclue  que  pour  se  maintenir 
I  dans  leurs  postes,  ne  virent  d'autre  moyen,  pour  apai- 
ser l'opinion  publique,  que  de  la  rompre.  En  effet,  un 
cri  général  s'éleva  contre  les  ministres  anglais  qui 
avaient  remplacé  M.  Pitt  et  ses  amis,  ces  pilotes  expé- 
rimentés qui  avaient  tenu  d'une  main  ferme  le  gou- 
vernail de  l'État  au  milieu  des  orages  dont  il  fut  assailli. 
On  demanda  à  M.  Addingtonetk  lord  Hawkeskiry  quel 

•  Voy.  t.  VI,  p.  305. 


—  /.8  — 

prix  revenait  donc  à  la  Grande-Bretagne  des  efforts  ex- 
traordinaires qu'elle  avait  faits  pendant  huit  années 
de  guerre?  La  masse  de  sa  dette  s'était  prodigieusement 
accrue,  tant  par  les  nombreuses  troupes  qu'elle  avait 
mises  sur  pied  que  par  les  gros  subsides  qu'elle  avait 
payés  aux  puissances  continentales  \  Ses  flottes  avaient 
remporté  des  victoires  telles  que  les  siècles  précédents 
n'en  avaient  vu  de  pareilles.  Elles  l'avaient  rendue 
maîtresse  de  presque  toutes  les  colonies  françaises  et 
hollandaises,  du  cap  de  Bonne-Espérance  et  delà  na- 
vigation de  la  mer  Méditerranée.  La  paix  d'Amiens  la 
dépouilla  de  toutes  ces  conquêtes,  à  l'exception  des  îles 
de  Ceylan  et  de  la  Trinité,  deux  possessions  impor- 
tantes, il  est  vrai,  mais  qui  ne  compensaient  pas  les 
énormes  sacrifices  qu'elle  avait  faits.  Encore  les  mi- 
nistres anglais  avaient-ils  oublié  de  faire  renouveler, 
en  faveur  de  leurs  compatriotes ,  le  droit  de  couper  du 
bois  dans  la  baie  de  Campêche,  que  les  traités  anté- 
rieurs avec  l'Espagne  leur  avaient  assuré.  Quel  dé- 
dommagement la  paix  offrait-elle  aux  îles  britanniques 

'  Les  subiides  que  l'Angleterre  avait  payés  aux  puissances  continen- 
tales depuis  1793  se  montaient  seuls  à  la  somnne  de  12,599,287  livres 
sterling,  ou  environ  300  millions  de  francs,  d'après  le  tableau  suivant, 
qui  a  été  officiellement  publié  : 

A  la  Prusse,  en  1794 1  325  891  1.  st.  10  sh.  6  d. 

A  la  Sardaigne,  de  1793  à  1796 500  000 

A  l'Kmpereurdansles  années  1795-1797.  6  920  000 

Au  Portugal,  en  1797  et  1798 367  218 

A  la  Russie,  en  1799 825000 

A  l'Électeur    de   Bavière   et    d'autres 

princes  d'Allemagne 500  000 

Nouveaux  subsides  à  l'Empereur 1  066  (66            13        4 

Nouveaux  subsides  à  la  Russie 545  494 

Nouveaux  subsides  à  la  Bavière 501017              6 

A  l'Empereur  pour  le  rétablissement  des 

magasins  de  Stockach,  enlevés  par  les 

Français • <  50  000 

12  599  287  l.  st. 


—  49  — 

pour  la  perte  de  leurs  rapports  intimes,  politiques  et 
commerciaux  avec  la  Hollande?  La  réunion  de  la  Bel- 
gique avec  la  France,  qui,  en  d'autres  temps,  aurait 
suffi  pour  allumer  une  guerre  interminable  entre  les 
deux  nations,  était  un  des  événements  les  plus  désas- 
treux pour  le  commerce  de  ces  îles.  L'Europe  ne  re- 
venait pas  de  son  étonnement  de  voir  l'Angleterre  aban- 
donner la  haute  Italie,  dont  le  nom  ne  se  trouve  même 
pas  dans  le  traité  :  cette  circonstance  seule  suffirait 
pour  faire  penser  que  le  ministère  britannique,  en  au- 
torisant lord  Cornwallis  à  accepter  cette  convention,  a 
voulu  signer  une  trêve  et  non  une  paix,  si  l'on  pouvait 
deviner  le  motif  qui  lui  faisait  désirer  une  suspension 
des  hostilités.  Comment,  en  effet,  pouvait-on  croire 
que  la  Grande-Bretagne  voulût  faire  dépendre  de  la 
bonne  volonté  du  gouvernement  français  son  commerce 
avec  Livourne  et  Gênes,  et  laisser  entre  les  mains  de  ses 
rivaux  le  Piémont,  qui,  seul,  pouvait  fournir  les  soies 
nécessaires  pour  alimenter  les  manufactures  anglaises  ? 
La  prépondérance  que  la  possession  de  la  plus 
grande  partie  de  l'Italie  devait  donner  à  la  France,  au- 
rait été  contre-balancée,  aux  yeux  des  adversaires 
du  cabinet  si  la  Grande-Bretagne  avait  persisté  à 
conserver  l'île  de  Malte,  que  la  marine  réunie  de  la 
France  et  de  l'Espagne  n'aurait  pu  lui  enlever.  On 
accabla  donc  le  ministère  des  reproches  les  plus  vio- 
lents pour  avoir  rendu  sans  motif  et  sans  compen- 
sation Minorque  et  Malte,  ces  deux  points  qui,  avec 
Gibraltar,  devaient  mettre  entre  les  mains  de  la  Grande- 
Bretagne  le  sceptre  de  la  Méditerranée. 

En  France,  au  contraire,  la  renommée  du  premier 
Consul  fut  portée  au  plus  haut  degré ,  par  le  traité 
d'Amiens,  et  l'on  peut  dire  que,  dès  ce  moment,  sa 
puissance  se  trouva  fondée  sur  la  force  des  armes,  et 

YII  4 


—  50  — 

sur  la  force  plus  grande  encore  de  l'opinion  publique. 
Aussi,  nous  verrons  le  Tribunat  puiser  dans  le  traité 
même  le  motif  du  vœu  pour  qu'il  soit  donné  au  premier 
Consul  un  gage  éclatant  de  la  reconnaissance  nationale  j 
immense,  en  effet,  devint  le  gage,  car  il  frayait  le  che- 
min du  trône;  c'était  le  Consulat  à  vie. 

Maintenant,  voici  l'appréciation  de  la  paix  d'Amiens 
telle  qu'elle  fut  développée,  au  sein  du  Corps  législa- 
tif, dans  un  travail  remarquable  et  qui  doit  rester 
comme  un  modèle  de  ce  genre  d'exposition.  «  Ce 
traité,  disait  l'orateur  du  Tribunat,  rétablit  l'union 
entre  deux  peuples  dont  la  guerre  ou  la  paix  pro- 
duit depuis  un  siècle  la  guerre  ou  la  paix  du  monde; 
il  est  le  dernier  acte  de  la  pacification  générale. 

{(  Cette  guerre  désastreuse,  qui  pendant  dix  années 
avait  bouleversé  l'Europe,  si  terrible  par  l'énergie  de 
sa  cause,  par  toutes  les  passions  qu'elle  avait  soule- 
vées, par  tous  les  moyens  d'action  et  de  résistance 
qu'elle  avait  inspirés,  par  les  revers  comme  par  les 
succès  des  principes  contraires  qui  en  dirigeaient  les 
mouvements,,  est  enfin  terminée  par  une  paix  que 
peuvent  également  avouer  l'honneur  et  l'intérêt  des 
nations,  par  une  paix  digne  des  triomphes  qui  l'ont 
préparée  et  de  tous  les  sentiments  généreux  qui  l'ont 
invoquée  et  accomplie. 

«  Comment  un  peuple  qui  voulait  être  libre  et  in- 
dépendant put-il  trouver  au  rang  de  ses  ennemis  un 
peuple  qui  devait  à  son  indépendance  et  à  sa  liberté 
toute  sa  puissance,  son  bonheur  et  sa  gloire?  Législa- 
teurs, laissons  sur  l'origine  et  toutes  les  circonstances 
de  cette  guerre  le  voile  dont  l'humanité  vient  enfin 
de  les  couvrir;  ce  n'est  pas  au  jour  de  la  réconcilia- 
tion qu'il  faut  rappeler  les  souvenirs  de  la  discorde. 

«  Trop  longtemps  les  assemblées  nationales  des 
deux  peuples  ont  retenti  des  serments  de  la  haine  et 


—  51  — 

des  cris  d'extermination;  trop  longtemps  des  vœux 
impies  contre  l'humanité  ont  été  accueillis,  honorés 
comme  les  vives  expressions  de  l'amour  de  la  patrie  : 
on  voulait  exalter  les  âmesj  on  ne  faisait  qu'enflam- 
mer les  imaginations,  et,  sans  donner  à  la  guerre  des 
moyens  plus  décisifs,  on  rendait  le  retour  à  la  paix 
plus  difiicile. 

K  Dans  le  cours  de  cette  longue  et  cruelle  division, 
quelques  paroles  de  paix  se  firent  entendre;  mais  la 
défiance,  la  crainte,  d'anciens  et  profonds  ressenti- 
ments étaient  restés  au  fond  des  cœurs,  et  l'humanité 
perdit  l'espérance  de  voir  finir  tant  de  maux.  Il  fallait, 
pour  que  la  paix  fût  véritablement  rétablie,  que  les 
hommes  dont  les  passions  avaient  allumé  la  guerre, 
ou  dont  l'aveugle  obstination  l'avait  tant  prolongée, 
eussent  perdu  leur  funeste  influence  dans  les  conseils 
des  Etats;  il  fallait  qu'en  France  un  gouvernement, 
appelé  par  tous  les  vœux  et  tous  les  intérêts,  fort  de 
la  confiance  de  la  nation  et  de  l'ascendant  de  la  gloire, 
pût  offrir  à  l'Europe,  dans  la  paix  intérieure  rétablie 
par  ses  soins,  un  gage  de  stabilité  pour  la  paix  étran- 
gère. 

((  Alors  l'Europe  vit  un  terme  aux  calamités  dont 
elle  était  accablée;  tous  les  obstacles  qui  s'opposaient 
à  la  paix  furent  enfin  écartés;  tous  les  motifs,  toutes 
les  circonstances  qui  pouvaient  en  diminuer  les  difli- 
cultés  se  trouvèrent  réunis;  et  tandis  que  le  roi  de  la 
Grande-Bretagne  présentait  à  la  France,  pour  la  sin- 
cère et  prompte  conciliation  de  leurs  intérêts,  l'hono- 
rable caractère  d'un  des  plus  illustres  citoyens  de 
l'empire  britannique ,  le  premier  magistrat  de  la  na- 
tion confiait  l'expression  du  vœu  public  et  de  ses 
sentiments  à  la  noble  franchise,  à  la  libéralité  d'esprit 
et  aux  affections  personnelles  du  négociateur  qui  l'avait 
secondé  avec  tant  de  succès  dans  les  premiers  actes  de 


—  52  — 

la  pacification  générale  :  ce  choix  fut  pour  ainsi  dire 
la  proclamation  de  la  paix.  Trois  mois,  en  effet, 
s'étaient  à  peine  écoulés,  et  la  paix  était  rendue  au 
monde. 

«  Législateurs,  avant  de  vous  offrir  les  considéra- 
tions générales  qui  résultent  de  ce  traité ,  je  dois 
mettre  sous  vos  yeux  l'examen  de  ses  dispositions 
principales. 

«  La  première  est  relative  aux  prisonniers  des  deux 
États.  Il  a  été  décidé  par  l'article  2  que  les  dépenses 
d'entretien  et  de  nourriture  des  prisonniers  de  chaque 
nation  seraient  payées  par  leurs  gouvernements  res- 
pectifs. 

«  C'est  à  la  paix  de  1763  que  cette  règle  a  été  éta- 
blie pour  la  première  fois.  L'Angleterre  avait  pris 
pendant  le  cours  de  la  guerre  environ  vingt  et  un  mille 
matelots  français;  elle  exigea  par  l'article  3  du  traité 
que  leurs  dépenses  seraient  payées  par  la  France.  La 
même  disposition  fut  renouvelée  à  la  paix  de  1783. 

«  Les  discussions  qui  s'étaient  élevées  sur  cet  objet 
à  l'époque  des  préliminaires  se  sont  reproduites  dans 
la  négociation  du  traité  défmitif.  «  Les  puissances 
«  contractantes,  disaient  les  préliminaires,  se  réser- 
«  vent  de  décider  celte  question  par  le  traité  définitif, 
«  conformément  au  Droit  des  gens  et  aux  principes 
((  consacrés  par  l'usage.  »  Le  Droit  des  gens  et  les 
principes  consacrés  par  l'usage  étaient  sans  doute  suf- 
fisamment établis  par  cette  longue  suite  de  traités 
uniformes  d'après  lesquels,  y  est-il  dit,  «  les  prison- 
((  niers  sont  rendus  sans  rançon  ni  répétition  quel- 
u  conque;  »  et  ce  droit  et  cet  usage  ne  pouvaient  être 
altérés  par  les  seuls  traités  de  1703  et  de  1783,  qu'on 
ne  doit  regarder  que  comme  des  exceptions.  Le  gou- 
vernement français,  après  avoir  refusé  de  reconnaître 
cette  disposition  comme  principe,  Ta  adoptée  comme 


—  53  — 

moyen  plus  prompt  de  conciliation  et  de  paix;  mais 
il  a  fait  admettre  par  compensation  «  qu'on  porterait 
((  en  compte  non-seulement  les  dépenses  faites  parles 
«  prisonniers  des  nations  respectives ,  mais  aussi  par 
c<  les  troupes  étrangères  qui ,  avant  d'être  prises , 
«  étaient  à  la  solde  et  à  la  disposition  de  l'une  des 
((  parties  contractantes.  » 

«  La  justice  de  cette  compensation  a  été  hautement 
reconnue  par  l'un  des  ministres  britanniques  dans  la 
séance  de  la  Chambre  des  communes  du  4  novembre 
dernier.  Il  a  déclaré  que,  «  puisque  ces  troupes  étaient 
«  non-seulement  à  la  solde,  mais  à  la  disposition  de 
<(  l'Angleterre,  il  était  raisonnable  de  les  traiter  comme 
((  prisonniers  de  guerre  anglais.  » 

«  Déjà  le  gouvernement  anglais  s'est  empressé  de 
rendre  à  leur  patrie  ces  braves  Français  qui  dans  les 
rigueurs  d'une  longue  captivité,  aggravées  encore  sans 
mesure  par  des  passions  politiques  qui  leur  étaient 
étrangères,  ne  cessaient  de  faire  des  vœux  pour  la 
prospérité  de  la  France,  et  lui  offraient  chaque  jour, 
dans  les  chants  consacrés  à  la  victoire  nationale,  leur 
enthousiasme  pour  sa  gloire ,  et  l'oubli  de  tous  les 
maux  qu'ils  souffraient  pour  elle. 

«  Toutes  les  possessions  et  colonies  de  la  Républi- 
que française  et  de  ses  alliés,  qui  ont  été  conquises 
par  l'Angleterre  dans  le  cours  de  la  guerre  actuelle, 
leur  sont  restituées,  à  l'exception  de  l'île  de  la  Trinité, 
qui  est  cédée  par  l'Espagne  à  l'Angleterre,  et  les  éta- 
blissements de  l'île  de  Ceylan,  qui  lui  sont  cédés  par 
la  République  batave.  Le  cap  de  Bonne-Espérance 
reste  à  la  République  batave  en  toute  souveraineté 
comme  avant  la  guerre. 

«  Ainsi  la  France  recouvre  la  Martinique,  Sainte- 
Lucie  et  Tabago,  améliorées,  et  surtout  préservées  des 
calamités  de  la  guerre  et  de  la  dévastation  des  trou- 


--  54  — 

blés  intérieurs;  elle  recouvre  ses  établissements  d'Afri- 
que et  de  rinde,  prêts  à  recevoir  toutes  les  impulsions 
d'une  industrie  plus  libre,  plus  active  et  plus  forte. 
Bientôt  le  commerce,  reprenant  son  essor,  protégé  par 
une  législation  éclairée,  par  un  gouvernement  juste 
et  ferme,  par  la  gloire  du  nom  français,  rentrera  dans 
ses  anciennes  routes,  et  en  cherchera  de  nouvelles. 

((  Nos  pêcheries  sur  les  côtes  de  Terre-Neuve,  etc., 
«  sont  remises,  par  l'article  15,  sur  le  même  pied  où 
M  elles  étaient  avant  la  guerre.  » 

«  On  sait  que  le  traité  de  paix  du  3  septembre  1 783 
termina  toutes  les  contestations  qui  existaient  depuis 
le  traité  d'Utrecht,  en  réglant  de  nouvelles  limites,  et 
que  la  déclaration  explicative  du  même  jour  donna  à 
la  pêche  française  plus  de  facilités  et  de  sûreté.  Il  ré- 
sulta de  ce  nouvel  ordre  de  choses  une  très-grande 
amélioration:  on  voit  en  effet,  par  les  tableaux  com- 
paratifs de  1773  et  de  1788,  que  dans  l'espace  de  ces 
quinze  années  les  valeurs  d'exportation  s'élevèrent  de 
de  six  millions  à  douze  millions  et  demi.  L'honneur  du 
pavillon  français  fut  rétabli  par  ce  traité;  la  pêche  fut 
protégée  par  les  bâtiments  de  guerre  jusqu'en  1793; 
nos  pêcheries,  sur  un  territoire  borné,  occupaient  au- 
tant de  bras  que  toutes  les  pêcheries  anglaises. 

((  Le  traité  d'Amiens  nous  replace  dans  la  même 
situation  où  nous  étions  avant  la  guerre.  Bientôt  une 
grande  activité  régnera  dans  les  ports  de  l'Océan  des- 
tinés à  ces  expéditions;  et  déjà  les  capitaux,  reprenant 
leur  ancienne  direction,  vont  ranimer  et  étendre  cette 
branche  précieuse  du  commerce  et  de  la  marine  de 
la  France. 

((  L'Angleterre  restitue  à  la  République  batave  ses 
îles  à  épiceries,  ses  établissements  de  l'Inde  et  ses  co- 
lonies de  Surinam,  Démérari,  Berbice,  Esséquibo,  que 
les  capitaux  et  l'industrie  des  Anglais  ont  portées  au 


—  55  — 

plus  haut  degré  de  prospérité.  Des  états  authentiques 
publiés  récemment  prouvent  qu'en  1801  les  exporta- 
tions de  quelques  denrées  ont  été  les  unes  vingt  fois, 
les  autres  quarante  fois  plus  considérables  qu'en  1 799. 
Ainsi  l'occupation  temporaire  de  ces  colonies  par 
l'Angleterre  aura  donné  à  la  République  batave  un 
accroissement  de  richesses  dans  cette  partie  du  monde. 

{(  L'Angleterre  n'a  pu  certainement  faire  valoir 
comme  un  sacrifice  la  restitution  du  Cap  ;  il  a  été 
prouvé ,  par  des  calculs  qui  paraissent  mériter  toute 
confiance,  que  le  commerce  du  Cap  depuis  que  l'An- 
gleterre le  possède,  c'est-à-dire  depuis  1795,  n'est 
entré  dans  son  commerce  général  que  pour  la  six- 
centième  partie. 

((  On  sait  d'ailleurs  dans  quelles  dépenses  exces- 
sives cet  établissement  a  jusqu'ici  entraîné  le  gouver- 
nement anglais.  Ce  n'est  que  sous  l'administration 
économe  et  attentive  des  Hollandais  que  le  Cap  peut 
être  une  possession  utile,  et  payer  les  frais  de  son  ré- 
gime civil  et  militaire. 

((  Le  changement  que  la-révolution  batave  a  produit 
dans  le  système  politique  et  administratif  de  la  Répu- 
blique, en  faisant  cesser  la  domination  des  intérêts 
exclusifs,  et  introduisant  plus  de  liberté  dans  l'orga- 
nisation commerciale  du  Cap,  va  donner  à  cette  colo- 
nie un  degré  de  prospérité  qu'elle  n'avait  jamais  eu. 

«  Tout  ce  que  l'Angleterre  pouvait  désirer,  c'est  le 
droit  qui  lui  est  accordé,  ainsi  qu'aux  autres  puis- 
sances contractantes,  «  d'y  faire  relâcher  leurs  bâti- 
«  ments  de  toute  espèce,  et  d'y  acheter  les  approvi- 
((  sionnements  nécessaires,  comme  auparavant,  sans 
«  payer  d'autres  droits  que  ceux  auxquels  la  Répu- 
c(  lîlique  batave  assujettit  les  bâtiments  de  sa  nation.  » 

{(  Les  établissements  de  l'île  de  Ceylan  sont  pour 
l'Angleterre  une  acquisition  très-utile,  considérés  sous 


—  so- 
le rapport  de  l'intérêt  politique;  elle  y  trouve  des 
moyens  de  défense  pour  ses  domaines  de  l'Inde,  des 
ports  vastes  et  sûrs  pour  ses  flottes,  des  retraites  pour 
ses  armées,  mais,  sous  le  rapport  de  l'intérêt  com- 
mercial, Ceylan  n'a  rien  ajouté  jusqu'ici  à  la  richesse 
de  ses  possesseurs.  Les  longues  et  sanglantes  guerres 
que  la  Compagnie  hollandaise  a  eu  à  soutenir  pen- 
dant un  siècle  avec  les  habitants  de  l'île  et  les  vices 
de  son  régime  intérieur  y  avaient  arrêté  tout  progrès 
d'amélioration  :  il  est  reconnu  qu'avant  la  guerre  le 
revenu  territorial,  les  douanes  et  les  autres  petites 
branches  de  commerce  ne  suffisaient  pas  pour  payer 
les  frais  de  son  administration  et  de  sa  défense. 

((  Par  l'article  4  le  roi  d'Espagne  cède  à  l'Angle- 
terre l'île  de  la  Trinité,  qu'elle  occupe  depuis  1797. 
Le  gouvernement  espagnol  avait  déjà  commencé  la 
prospérité  de  cette  colonie  en  ouvrant  ses  ports  à  tous 
les  vaisseaux,  en  y  appelant  les  capitaux  et  l'industrie 
de  toutes  les  nations.  Placée  entre  le  nord  et  le  sud  de 
l'Amérique,  cette  île  sera  pour  l'Angleterre  un  nouveau 
théâtre  de  combinaisons  commerciales.  Mais  l'Espagne 
trouvera  sans  doute  dans  les  améliorations  qu'elle  a 
déjà  faites  à  son  système  colonial,  et  dans  celles  dont 
il  est  encore  susceptible,  le  moyen  d'affaiblir  une  ac- 
tivité qui  lui  serait  nuisible. 

«  La  République,  vous  a  dit  le  gouvernement  dans 
«  son  message  du  1 G  de  ce  mois,  devait  à  ses  engage- 
i(  ments  et  à  la  fidélité  de  l'Espagne  de  faire  tous  ses 
«  efforts  pour  lui  conserver  l'intégrité  de  son  terri- 
«  toire  :  ce  devoir  elle  l'a  rempli  dans  tout  le  cours 
«  des  négociations  avec  toute  l'énergie  que  lui  par- 
er mettaient  les  circonstances.  I^e  roi  d'Espagne  a  re- 
((  connu  la  loyauté  de  ses  alliés,  et  sa  générosité  a  fait 
«  à  la  paix  le  sacrifice  qu'ils  s'étaient  efforcés  de  lui 
.<  épargner  •  il  acquiert  par  là  de  nouveaux  droits  à 


—  57  — 

«  la  reconnaissance  de  l'Europe.  Déjà  le  retour  du 
«  commerce  console  ses  États  des  calamités  de  la 
((  guerre,  et  bientôt  un  esprit  vivifiant  portera  dans 
«  ses  vastes  possessions  une  nouvelle  activité  et  une 
«  nouvelle  industrie.  » 

«  L'article  7  détermine  de  nouvelles  limites  entre 
la  Guyane  française  et  la  Guyane  portugaise.  La  limite 
de  l'intérieur  reste  au  même  point  où  l'avait  fixée  le 
traité  de  Madrid  du  7  vendémiaire  dernier.  Celle  du 
côté  de  la  mer  est  établie  à  la  rivière  d'Arawari,  et  se 
trouve  ainsi  reculée  d'environ  un  degré  vers  le  nord. 
Mais  le  véritable  objet  qu'on  devait  se  proposer  est 
rempli,  puisqu'on  a  enfin  terminé  des  difïicultés  qui 
existaient  depuis  un  siècle  entre  les  deux  Etats,  en 
réglant  des  limites  que  le  traité  d'Utrecbt  avait  mal 
indiquées,  et  qu'on  a  fait  cesser  de  vains  motifs  d'in- 
quiétude et  de  crainte. 

«  La  rectification  des  frontières  de  l'Espagne  et  du 
Portugal,  en  Europe,  reste  fixée  conformément  à  l'ar- 
ticle 3  du  traité  de  Badajoz,  par  lequel  le  district 
d'Olivenza  a  été  cédé  à  l'Espagne. 

«  L'article  10a  pour  objet  la  nouvelle  organisation 
de  l'île  de  Malte.  La  création  d'une  Langue  maltaise , 
et  le  droit  accordé  aux  habitants  d'occuper  la  moitié 
des  emplois  civils,  auront  une  grande  influence  sur 
l'amélioration  du  régime  intérieur;  les  abus  qu'on 
reprochait  à  l'ancienne  administration  pourront  être 
plus  facilement  corrigés.  Les  Maltais,  trouvant  dans 
un  gouvernement  plus  national  la  protection  et  l'exer- 
cice des  droits  dont  ils  se  plaignaient  d'être  privés , 
n'iront  plus,  pour  se  soustraire  à  l'autorité  établie, 
s'attacher  au  service  des  autres  puissances,  ou  acheter 
les  patentes  d'un  évêque  ou  d'un  inquisiteur  :  on  ne 
les  verra  plus  faire  naître  leurs  enfants  sur  une  terre 
voisine  pour  leur  donner,  par  le  titre  d'une  naissance 


—  58  — 

étrangère,  le  droit  de  concourir  au  gouvernement  de 
leur  pays. 

(f  D'après  les  articles  préliminaires,  l'île  de  Malte 
devait  être  évacuée  par  les  troupes  anglaises,  et  rendue 
à  l'Ordre  de  Saint-Jean  de  Jérusalem;  on  avait  stipulé 
en  outre  que,  pour  assurer  l'indépendance  absolue  de 
cette  île,  soit  envers  la  France,  soit  envers  l'Angle- 
terre, elle  serait  mise  sous  la  garantie  et  la  protection 
d'une  puissance  tierce  qui  serait  désignée  par  le  traité 
définitif. 

(c  On  a  trouvé  sans  doute  trop  de  difficultés  dans  ce 
choix  :  on  a  dû  craindre  que  l'indépendance  d'un  État 
faible  placée  sous  la  garantie  d'un  État  puissant  ne 
ressemblât  trop  à  une  dépendance  réelle,  et  qu'une 
telle  disposition  ne  fît  naître  les  dangers  mêmes  qu'on 
voulait  prévenir;  on  a  dû  voir  que  le  seul  moyen 
d'établir  cette  indépendance  était  d'appeler  à  la  pro- 
tection et  à  la  garantie  de  ce  nouvel  ordre  de  choses 
toutes  les  puissances  dont  les  intérêts  opposés  ne  pou- 
vaient être  conciliés  qu'en  les  réunissant  dans  un  in- 
térêt commun. 

«  L'indépendance  de  Malte  et  sa  neutralité  sont  une 
mesure  utile  à  toutes  les  puissances  maritimes.  Sa 
situation  dans  la  Méditerranée,  sa  proximité  des  côtes 
d'Afrique,  de  celles  d'Italie,  de  France  et  d'Espagne, 
auraient  fait  pour  chacune  d'elles,  de  la  possession 
exclusive  de  cette  île ,  un  objet  continuel  de  jalousie 
et  d'inquiétude;  aucune  n'eût  trouvé  dans  cette  nou- 
velle acquisition  des  avantages  sufiisants  pour  dédom- 
mager des  frais  de  défense  et  d'administration  qu'elle 
aurait  exigés.  Quant  à  l'Angleterre  en  particulier,  qui 
occupait  Cette  île  depuis  deux  ans,  il  est  bien  reconnu 
que  Malte  ne  peut  offrir  à  son  industrie  aucun  nou- 
veau moyen  de  développement  ;  l'Angleterre  n  a  jamais 
eu  dans  le  Levant  qu'un  commerce  très-borné;  ses 


^  59  — 

importations  n'étaient  pas  de  plus  de  sept  millions  de 
notre  monnaie  dans  le  même  temps  où  celles  de  la 
France  étaient  de  plus  de  trente-cinq.  Pendant  tout  le 
cours  de  la  guerre  les  exportations  des  manufactures 
anglaises  n'ont  pas  excédé  deux  millions  sept  cent 
mille  livres  par  année. 

((  L'intérêt  commun  des  puissances  maritimes  est 
que  les  ports  de  Malte  soient  ouverts  à  leur  commerce 
et  à  leur  navigation,  et  que  chacune  d'elles  puisse 
trouver  dans  un  hospice  général  des  moyens  égaux  de 
secours  et  de  sûreté  :  cet  avantage  leur  est  assuré  par 
le  traité. 

«  Une  seule  puissance  est  exceptée  de  ces  disposi- 
tions; ce  sont  les  États  barbaresques.  L'entrée  des 
ports  de  Malte  leur  est  interdite  «jusqu'à  ce  que,  dit 
«  le  paragraphe  9,  par  le  moyen  d'un  arrangement 
i(  que  procureront  les  parties  contractantes,  le  système 
«  d'hostilités  qui  subsiste  entre  les  États  barbares- 
«  ques,  l'Ordre  de  Saint-Jean  de  Jérusalem  et  lespuis- 
«  sances  possédant  des  Langues,  ou  concourant  à  leur 
((  exécution ,  ait  cessé.  » 

«  On  ne  pouvait  en  effet,  dans  l'état  actuel  d'hosti- 
lités, établir  que  l'Ordre  de  Malte,  qui  reçoit  de  ces 
puissances  une  partie  de  ses  revenus,  offrirait  dans 
ses  ports  à  leurs  ennemis  un  asile  sûr ,  où  ils  pour- 
raient attendre  les  bâtiments  de  commerce  à  leur  sortie 
des  ports  de  la  Sicile,  de  l'Adriatique,  du  Levant. 

H  Mais  cette  union  des  quatre  grandes  puissances 
maritimes  pour  la  liberté  et  la  sûreté  des  mers ,  cette 
stipulation  solennelle  en  faveur  de  la  justice  et  de  la 
civilisation,  distinguent  par  un  caractère  bien  hono- 
rable le  système  de  politique  qui  a  dirigé  la  négocia- 
tion d'Amiens.  Ce  n'est  point  en  effet  pour  leur  propre 
intérêt  qu'elles  forment  ce  noble  concours;  leurs  trai- 
tés particuliers  avec  les  puissances  barbaresques  don- 


—  60  — 

nent  à  leur  commerce  et  à  leur  navigation  une  garantie 
suffisante  :  c'est  pour  des  intérêts  étrangers,  que  leurs 
anciens  principes  de  politique,  que  les  maximes  hau- 
tement avouées  de  leurs  écrivains  et  de  leurs  hommes 
d'Etat  leur  ont  jusqu'ici  dénoncés  comme  des  intérêts 
ennemis,  et  que  l'humanité  peut  justement  leur  repro- 
cher d'avoir  longtemps  combattus  par  des  moyens 
trop  peu  dignes  d'elles. 

«  Puisse  ce  généreux  projet ,  si  digne  d'un  siècle 
qui  donne  tant  d'espérances  pour  le  triomphe  des  idées 
libérales,  ramener  enfin  la  culture,  l'industrie,  tous  les 
bienfaits  de  la  société  civile  sur  ces  côtes,  si  célèbres 
autrefois  par  leurs  arts,  leurs  richesses,  leur  commerce, 
et  où  depuis  tant  de  siècles  une  population  immense 
végète  dans  l'ignorance,  l'oppression  et  le  pillage! 

((  L'article  20  consacre  une  disposition  que  récla- 
maient depuis  longtemps  la  morale  publique  et  l'inté- 
rêt général  de  la  société  :  il  autorise  chacune  des  puis- 
sances contractantes  à  demander  le  renvoi  devant  les 
tribunaux  de  son  territoire  de  toutes  les  personnes 
qui,  après  y  avoir  commis  des  crimes  de  meurtre,  de 
falsification,  de  banqueroute  frauduleuse,  se  seraient 
réfugiées  sur  le  trrritoire  de  l'autre  puissance.  Mais 
cette  traduction  en  justice  ne  pourra  avoir  lieu,  est-il 
dit  dans  l'article,  «  que  lorsque  l'évidence  du  crime 
M  sera  si  bien  constatée  que  les  lois  du  lieu  où  l'on 
«  découvrira  la  personne  ainsi  accusée  auraient  auto- 
"  risé  sa  détention  et  sa  traduction  devant  la  justice, 
((  au  cas  que  le  crime  y  eût  été  commis.  » 

«  Cet  article  fait  cesser  le  scandale  de  ces  asiles  po- 
litiques qui  offraient,  dans  le  droit  de  juridiction  ter- 
ritoriale, une  invitation  permanente  aux  délits  étran- 
gers; qui  ouvraient  aux  plus  grands  coupables  de  tous 
les  empires  une  retraite  sûre,  où  ils  pouvaient  braver 
les  lois  de  leurs  pays,  et  recueillir  le  fruit  de  tous 


—  61  — 

leurs  attentats.  Il  établit  enfin  le  principe  qu'il  est  des 
crimes  qui  par  leur  nature  sont  des  actes  d'hostilité 
contre  le  genre  humain.  Mais,  en  ôtant  aux  coupables 
cette  grande  espérance  d'impunité,  il  laisse  à  l'inno- 
cence persécutée  ou  méconnue  tous  les  secours  que 
lui  doit  la  bonté,  tout  l'appui  que  lui  doit  la  justice; 
il  lui  laisse  le  droit  de  respirer  en  paix  dans  l'asile 
qu'elle  a  choisi.  Il  concilie  ainsi  le  maintien  de  l'ordre 
public  avec  la  protection  de  la  liberté  individuelle, 
les  devoirs  envers  la  sodété  générale  avec  l'indépen- 
dance de  l'État,  la  punition  du  crime  avec  le  respect 
dû  à  la  vertu  malheureuse. 

(f  Tels  sont,  législateurs,  les  principales  disposi- 
tions du  traité  que  vous  avez  offert  à  l'examen  du 
ïribunat;  vous  y  remarquerez,  comme  lui,  l'esprit 
d'équité  qui  a  présidé  à  la  discussion  de  tous  les 
droits,  au  balancement  de  toutes  les  prétentions,  de 
toutes  les  espérances.  C'est  en  effet  dans  ces  compen- 
sations réciproques,  dans  ces  combinaisons  de  pouvoir, 
de  territoire  et  d'influence,  faites  avec  justice  et 
modération,  que  se  trouve  la  véritable  garantie  de 
toute  paix,  parce  que  c'est  là  que  se  trouve  l'intérêt 
qu'ont  les  puissances  contractantes  de  n'en  point 
interrompre  le  cours. 

ff  L'expérience  ne  l'a  que  trop  appris,  ce  n'est  point 
l'acte  de  la  pacification  qui  constitue  la  paix  des 
peuples  ;  un  traité  de  paix  n'est  trop  souvent  qu'un 
appel  au  temps  et  à  la  fortune. 

{(  Qu'attendre  en  effet,  pour  le  repos  des  empires, 
de  ces  stipulations  immodérées  qui  satisfont  un 
moment  l'orgueil  d'une  nation  aux  dépens  de  son 
véritable  intérêt,  et  ne  savent  que  placer  les  peuples 
entre  la  jalousie  qu'excite  la  puissance  et  le  mépris 
qu'inspire  la  faiblesse?  Elles  laissent  le  présent  sans 
stabilité,  et  l'avenir  sans  garantie. 


—  62  — 

((  Heureusement  pour  la  tranquillité  de  l'Europe , 
cette  paix  est  utile  à  chacune  des  puissances  contrac- 
tantes. Dans  la  situation  forcée  où  les  tenait  depuis 
dix  ans  l'exagération  continue  de  tous  leurs  moyens , 
la  paix  était  devenue  pour  elles  le  premier,  le  plus 
impérieux  des  besoins;  toutes  avaient  un  égal  intérêt 
de  terminer  une  guerre  destructive  de  leur  agriculture, 
de  leur  industrie,  de  leur  commerce.  Il  n'est  aucune 
d'elles  pour  qui  l'avantage  qu'elle  aurait  désiré  acqué- 
rir, ou  qu'elle  aurait  voulu  conserver,  eût  pu  balancer 
les  malheurs  d'hostilités  nouvelles. 

«  Partout  en  effet  les  plus  éclatants ,  les  plus 
solennels  témoignages  de  la  joie  publique  ont  donné 
à  cette  paix,  si  longtemps  désirée,  la  sanction  de  la 
conscience  nationale  ;  partout  la  voix  des  peuples  a 
déclaré  que  les  gouvernements  pacificateurs  avaient 
bien  mérité  de  la  patrie  et  de  l'humanité. 

«  Le  traité  d'Amiens  laisse  la  France  et  l'Angleterre 
dans  la  possession  des  avantages  qui  convenaient  plus 
particulièrement  à  l'une  et  à  l'autre  par  rapport  à  sa 
situation  politique  ;  elles  ne  peuvent  ni  se  nuire  par 
la  nature  de  leurs  acquisitions,  ni  se  troubler  dans 
l'emploi  des  moyens  qui  y  sont  analogues. 

a  La  France  a  agrandi  son  empire  continental. 
Forcée  de  vaincre  pour  n'être  pas  soumise  à  la  domina- 
tiop  du  vainqueur,  d'occuper  le  territoire  de  ses 
ennemis  pour  ne  pas  subir  le  partage  du  sien ,  elle  en 
a  conservé  une  partie  comme  compensation  des  cala- 
mités de  la  guerre. 

((  Et  cet  accroissement  même,  pour  nous  servir  ici 
des  propres  expressions  de  l'un  des  ministres  de  Sa 
Majesté  Britannique,  k  cet  accroissement  n'est  pas 
«  aussi  grand  qu'il  pourrait  le  paraître  si  on  le  compare 
((  à  l'accroissement  des  autres  puissances  principales 
«  du  Continent.  » 


—  63  -- 

(c  Mais  la  France  a,  comme  l'Angleterre,  de  grands 
maux  à  réparer  :  elle  a  besoin  de  rétablir  sur  son  terri- 
toire les  principes  de  prospérité  que  la  guerre  exté- 
rieure et  les  troubles  civils  ont  détruits  ou  affaiblis  ; 
elle  a  besoin  de  créer  de  nouvelles  sources  de  richesses, 
proportionnées  à  l'accroissement  de  son  empire  et  de 
son  existence  politique  ;  elle  a  besoin  qu'une  législa- 
tion éclairée,  qu'une  administration  vigilante  étendent 
partout  leur  commune  influence,  pour  faciliter  à 
l'industrie  nationale  tous  ses  moyens  d'action,  pour 
écarter  les  obstacles  qui  pourraient  en  contrarier  les 
mouvements. 

((  Et  cependant,  au  moment  même  où  toutes  les 
pensées ,  tous  les  intérêts  se  dirigent  vers  le  développe- 
ment de  sa  force  intérieure,  des  hommes  dont  les 
conseils  violents  ont  si  longtemps  égaré  les  chefs  des 
nations ,  menacent  l'Europe  de  l'ambition  de  la  France, 
et  appellent  de  nouvelles  calamités  pour  le  monde  ! 

«  Non,  l'Europe  n'a  point  à  craindre  que  la  France, 
enivrée  du  souvenir  de  ses  triomphes  et  du  sentiment 
de  sa  grandeur,  aille  rouvrir  la  carrière  des  combats 
pour  y  chercher  un  prix  si  peu  digne  de  sa  véritable 
gloire.  Lorsqu'elle  vit  son  indépendance  attaquée,  son 
territoire  menacé  et  près  d'être  envahi ,  elle  s'arma , 
pour  le  maintien  de  ses  droits,  de  toute  la  puissance 
que  lui  offraient  la  dignité  nationale  outragée  et  la 
liberté  en  péril  :  à  sa  voix  la  partie  la  plus  généreuse, 
la  plus  active,  la  plus  énergique  du  peuple  français 
courut  se  précipiter  sur  tous  les  champs  de  bataille 
pour  y  triompher  ou  périr.  Elle  triompha ,  et  l'indé- 
pendance de  l'Europe  fut  sauvée  avec  l'indépendance 
de  la  France.  La  terre  a  retenti  de  ces  miracles  de  la 
valeur,  de  la  constance,  du  dévouement  à  la  patrie  , 
et  l'histoire  les  redira  aux  dernières  générations  pour 
l'exemple  et  l'honneur  de  la  nature  humaine.  Aujour- 


—  64  — 

d'hui  le  noble  objet  de  tant  d'efforts  est  rempli  ;  la 
France  a  fait  assez  pour  sa  sûreté,  pour  sa  gloire;  elle 
sait  que  la  force  réelle  d'un  État  est  dans  sa  force 
reproductive,  dans  l'augmentation  du  travail,  dans 
l'accroissement  et  la  circulation  des  capitaux,  dans  la 
liberté  du  commerce  et  de  l'industrie,  dans  un  système 
défensif  bien  organisé,  dans  les  lois  civiles  qui  pro- 
tègent les  personnes  et  les  propriétés,  dans  les  lois 
politiques  qui  sont  la  garantie  des  bonnes  lois  civiles 
et  de  leur  impartiale  exécution. 

((  Bien  des  années,  vous  disait  le  gouvernement  il  y 
«  a  peu  de  jours,  bien  des  années  s'écouleront  désor- 
«  mais  sans  victoires,  sans  triomphes,  sans  ces  négo- 
ce dations  éclatantes  qui  font  la  destinée  des  Etats  ;  mais 
«  d'autres  succès  doivent  marquer  l'existence  des 
«  nations,  et  surtout  l'existence  de  la  République. 
((  Partout  l'industrie  s'éveille;  partout  le  commerce  et 
«  les  arts  tendent  à  s'unir  pour  effacer  les  malheurs 
«  de  la  guerre  ;  des  travaux  de  tous  les  genres 
«  appellent  la  pensée  du  gouvernement.  Le  gouverne- 
«  ment  remplira  cette  nouvelle  tâche  avec  succès  aussi 
'<  longtemps  qu'il  sera  investi  de  l'opinion  du  peuple 
«  français.  Les  années  qui  vont  s'écouler  seront  moins 
((  célèbres  ;  mais  le  bonheur  de  la  France  s'accroîtra 
«  des  chances  de  gloire  qu'elle  aura  dédaignées.  ^) 

M  C'est  dans  cette  direction  invariable  de  toutes  les 
pensées  et  de  tous  les  efforts  individuels,  de  tous  les 
actes  de  la  législation  et  du  gouvernement  vers  l'amé- 
lioration de  l'État,  que  se  trouvent  ainsi  heureusement 
réunies  et  la  garantie  de  la  prospérité  de  la  France  et 
celle  de  la  paix  de  l'Europe. 

<(  L'Angleterre ,  pendant  le  cours  de  la  guerre  qui 
vient  de  finir,  a  acquis  dans  l'Inde  un  royaume  riche 
et  puissant,  qui,  réuni  à  son  ancien  territoire,  forme 
le  tiers  du  continent  indien  :   la  paix  d'Amiens  lui 


—  65  — 

assure  la  possession  des  établissements  hollandais  de 
Ceylan  et  de  l'île  de  la  Trinité.  Ainsi  un  théâtre  plus 
grand  s'est  ouvert  aux  entreprises  de  son  industrie  ; 
bientôt  de  nouvelles  combinaisons  vont  lier  ensemble 
d'une  manière  plus  intime  toutes  les  parties  de  la 
puissance  commerciale  et  de  la  puissance  politique  de 
la  Grande-Bretagne. 

«  Tandis  qu'elle  enverra  ses  vaisseaux  rouvrir  ses 
anciens  marchés,  chercher  partout  des  marchés  nou- 
veaux, la  France,  riche  d'elle-même,  ranimera,  multi- 
pliera sur  son  vaste  et  fertile  territoire  tous  les  éléments 
de  sa  prospérité,  elle  rétablira  ses  routes,  en  construira 
de  nouvelles,  creusera  des  canaux,  agrandira  sa 
navigation  et  sa  marine ,  étendra  son  commerce  par 
son  agriculture,  excitera  l'action  de  toutes  les  indus- 
tries, donnera  plus  de  stabilité  à  ses  institutions  civiles 
et  politiques,  et  assurera  sur  leurs  véritables  bases  la 
richesse ,  la  puissance  et  la  liberté  de  la  nation. 

((  Ainsi  la  France  et  l'Angleterre,  placées  chacune 
dans  une  situation  différente,  et  développant  dans 
cette  situation  tous  les  moyens  d'activité  qui  lui  sont 
propres,  marcheront  ensemble  vers  un  but  commun, 
leur  bonheur  mutuel  et  le  maintien  de  la  paix  du 
monde. 

«  Éclairées  enfin  par  une  trop  longue  et  trop  funeste 
expérience,  elles  sauront  que  ce  n'est  plus  ni  la 
jalousie  mercantile  qu'elles  doivent  choisir  pour 
conseil,  ni  les  préventions  nationales  qu'elles  doivent 
prendre  pour  règle  de  leurs  rapports  de  commerce  et 
de  politique  ;  elles  sauront  que  leur  véritable  intérêt 
est  dans  l'accroissement  réciproque  de  leur  agricul- 
ture, de  leur  commerce  et  de  leur  industrie,  pour  que 
tous  leurs  moyens  d'échange  deviennent  plus  nom- 
breux, que  tous  les  produits  du  territoire  et  de  l'art 
acquièrent  une  plus  grande  valeur  dans  un  marché 
VII  5 


— .  66  — 

plus  étendu ,  plus  rapproché ,  et  dont  les  retours  sont 
plus  prompts  ;  pour  que  des  modèles  nouveaux  de 
perfection  dans  l'immense  domaine  des  arts,  des  lettres 
et  des  sciences,  soient  constamment  offerts  à  leur 
commune  activité  ;  enfin  pour  que  la  richesse  de  l'une 
devienne  le  gage  permanent  de  la  richesse  de  l'autre. 
Elles  sauront  que  cette  politique  libérale  est  aujour- 
d'hui le  résultat  nécessaire  de  la  force  des  choses,  du 
progrès  des  lumières,  de  l'état  des  sociétés;  et  elles 
diront,  avec  cet  illustre  pair  d'Angleterre  dont  la  mort 
prématurée  a  été  une  calamité  publique  :  donnons  un 
autre  but  à  la  rivalité  nationale;  faisons  fleurir  ensemble^ 
au  sein  de  la  paix,  l'agriculture,  les  manufactures  et  le 
commerce. 

(c  Que  ce  dernier  vœu  d'une  âme  généreuse,  d'un 
véritable  ami  de  son  pays,  devienne  enfin  le  vœu  des 
deux  nations  !  Que  l'émulation  des  bonnes  lois,  de  la 
liberté,  de  tous  les  efforts  de  la  raison  humaine  pour 
le  perfectionnement  de  la  société  vienne  enfin  rempla- 
cer, dans  le  siècle  qui  commence,  cette  sanglante 
rivalité  qui  pendant  huit  siècles,  et  pendant  quarante 
années  du  siècle  dernier,  a  désolé  les  deux  empires 
pour  de  vaines  prétentions  de  territoire,  de  trône  et 
de  commerce  exclusif!  Oui,  c'est  à  ce  noble  concours 
de  toutes  les  lumières,  de  tous  les  arts,  de  toutes  les 
vertus  des  deux  nations,  que  sont  maintenant  attachées 
leurs  nouvelles  destinées  et  toutes  les  espérances  du 
genre  humain. 


CHAPITRE  XXXII. 

RECÈS  DE   LA  DÉPDTATION   DE  l'eMPIRE,    DD   25  FÉVRIER   1803. 

Le  Recès  de  la  Députation  de  l'Empire,  du  25  fé- 
vrier 1803,  complète  les  dispositions  de  la  paix  de 
Lunéville  relatives  à  l'Empire  germanique.  Nous  divi- 
sons le  chapitre,  contenant  l'exposition  de  cette  loi 
fondamentale,  en  quatre  sections. 

Dans  la  première,  sous  la  forme  d'introduction,  nous 
donnons  un  précis  historique  de  la  Constitution  ger- 
manique jusqu'à  l'époque  de  la  promulgation  du 
Recès. 

L'histoire  de  cette  loi  est  l'objet  de  la  seconde  section^ 
mais  on  y  trouve,  en  outre,  les  traités  conclus  après 
la  paix  de  Lunéville,  qui  ont  amené  la  nouvelle  organi- 
sation, ainsi  que  l'aperçu  des  travaux  de  la  députation 
de  l'Empire,  jusqu'à  sa  quarante-sixième  et  dernière 
séance. 

La  troisième  section  renferme  le  texte  même  du  Re- 
cès, accompagné  d'un  commentaire. 

Enfin,  dans  la  quatrième  section,  où  l'histoire  de  la 
députation  est  continuée  jusqu'à  sa  dissolution,  nous 
rapportons  divers  événements  et  négociations  dont  la 
connaissance  est  nécessaire  pour  l'intelligence  de  la 
Constitution  que  la  France  et  la  Russie  ont  donnée  à 
l'Allemagne  en  1 803. 


SECTION  PREMIERE. 

PRÉCIS  HISTORIQUE   DE   LA   CONSTITUTION   GERMANIQUE'. 

InlroducUon.  —  Origine  du  royaume  d'Allemagne.  —  Paix  de  Verdun,  en 
843.  —  Les  droits  des  Étals  sont  reconnus.  —  Assemblées  de  Mersen,  en 
851,  et  de  Coblenlz,  en  800.  —  Louis  le  Germanique  rétablit  les  ducs 
supprimés  par  Charlemagne.  —  Origine  des  ducs  de  Tliuringe,  de  Ba- 
vière, de  Saxe  et  de  la  France  rhénane.  —  Formation  et  partage  du 
royaume  de  Lotbaringia.  —  Traité  de  Procaspis,  en  870.  —  Sé|)aralion 
définitive  des  royaumes  de  France  et  d'Allemagne,  eu  887. —  La  royauté 
d'Allemagne  devient  élective.— Les  ducs  de  Saxe  donnent  cinq  rois  à  l'Al- 
lemagne, 919-1024.  —  Origine  des  villes,  sous  Henri  I. — Formation  d'un 
tiers  élat  libre.  —  Création  des  Margraves.  —  Oiigine  des  grands  oIDciers 
de  la  couronne.  —  Commencement  de  l'Empire  d'Allemagne  ou  duSaint- 
Ernpire  romain  de  la  nation  germanique.  —  L'empereur  d'Allemagne 
chef  séculier  de  la  chrétienté.  —  Les  ducs  et  comtes  s'approprient  les 
domaines  de  la  couronne.  —  Oihon  I  veut  convertir  au  christianisme 
les  nations  slaves.  —  Origine  de  plusieurs  nouveaux  évêchés.  —  La  mai- 
son des  ducs  de  France  est  appelée  au  trône  et  fournil  quatre  rois  à 
l'Allemagne,  1024-1125.  —  Réunion  du  royaume  d'Arles.  —  Les  fiefs  de- 
viennent héréditaires.  —  (Changement  dans  les  dénominations.  —  Origine 
du  grand  nombre  des  principautés  en  Allemagne.  —  Guerre  entre  l'Em- 
pire et  le  Sacerdoce,  sous  le  règne  de  Henri  IV.  —  Origine  des  Communes, 
sous  Henri  F.  —  Concordai  de  Worms,  en  1122.— Élection  de  Lo- 
thaire  II,  duc  de  Saxe.  —  Les  quatre  grands  ofluners  s'attribuent,  avec 
les  trois  arcbichanceliers  le  droit  d'élire  les  Empereurs.  —  La  maison 
de  Hohenstaufen  donne  six  empereurs  à  l'Allemagne,  1138-1254.  —  Pé- 
riode brillante  de  l'Empire,  les  lettres  y  sont  en  honneur.  —  Origine  des 
,  factions  Guelfe  et  Gibeline.  —  Le  Margraviat  d'Autriche  est  érigé  en 
duché.  — Privilège  célèbre.  — Avènement  de  la  maison  de  Wiltelsbach 
an  duché  de  Bavière.  —  Premiers  ducs  de  Méranie.  —  Révolution  et  dé- 

'  GÉRARD  DE  Rayneval,  Institutions  du  Droit  public  de  l'Allemagne, 
Leipzig,  1706,  in-8°. — De  Pfeffel,  Abrégé  chronologique  de  l'histoire 
et  du  droit  public  d'Allemagne.  Paris,  HTG,  2  vol  in-i".  —  Mich.  Ign. 
ScuMiDT,  Gesch.  der  Deutschen.  Ulm,  1785,  22  vol.  in-8°. — Joii.  Steph. 
PUtter's  hist.  Enttcickelung  der  deutschen  Staatsverfassung.  Gœltin- 
gen,  1789,  3  vol.  in-8°. —  II/EBERLiN'sy/om/6.  des  deutschenSlaatsrechts. 
Berlin,  1797, 3  vol.  in-8''. — J.  Cu.  Leist,  Lehrbuch  des  deutschen  StaatS' 
rechts.  Goetting.  1806,  in-S".  —  Histoire  du  droit  public  et  des  législa- 
tions  de  l'Allemagne,  par  M.  Fa.  Cu.  Eichhorn  (ministre  d'État  et  con- 
seiller privé  actuel  de  S.  M.  le  roi  de  Prusse).  4  vol.  in-8^  (îœtt.  3'  édit. 
1821-1823  en  alleinand). —  Exposé  du  droit  public  de  l'Allemagne  ,  par 
M.  le  baron  de  Scuutz.  Genève  et  Paris,  2*  édition,  1849. 


—  69  — 

membremenl  tlu  duclié  de  Saxe.  —  Premières  lois  fondamentalos  de 
l'Empire  données  par  Frédéric  IL—  Diplôme  de  1220,  délivré  à  Franc- 
fort, en  faveur  des  princes  ecclésiastiques. — Diplôme  de  1232,  signé  à 
Udine,  en  faveur  des  princes  séculiers.  —  Origine  des  États  provinciaux. 

—  Cause  de  la  grande  variété  dans  les  constilulions  des  Ëtats  d'Alle- 
magne. —  Établissement  de  l'Ordre  Teulonique  en  Prusse.—  Révolulion 
d'Italie.  — L'autorité  impériale  est  anéantie.  —  Frédéric  II  reconnaît  la 
supériorité  territoriale  des  États  d'Allemagne. —  Institution  de  la  charge 
de  juge  du  palais.  —  L'extinction  des  ducs  de  Zseringue  prépare  la  ré- 
volulion qui  détacha  la  Suisse  de  l'Allemagne.  —  Extinction  de  la  mai- 
son. d'Autriche-Babenberg.  —  Extinction  des  ducs  de  Méranie.  — 
Exlinclion  des  landgraves  de  Thuringe.  —  Extinction  de  la  maison  de 
Hohenslaufen. — Les  sept  électeurs.  —  La  couronne  impériale  mise  à 
l'enchère.  —  Origine  de  la  maison  de  Habsbourg.  —  Autriche.  —  Éta- 
blissement des  préfectures  impériales.  —  Droits  de  suzeraineté  sur  le 
royaume  de  Bourgogne.  —  Investiture  du  comté  de  Neufchàtel.  —  Avè- 
nement de  la  maison  de  Hohenzollern,  —  Bourgraviat  de  Nuremberg.  — 
Exemple  de  la  destitution  d'un  empereur.  — Origine  de  la  confédération 
helvétique.  —  Le  tiers  état  est,  pour  la  première  fois,  représenté  à  la 
Diète  de  Spire,  en  1309.—  Démembrement  du  royaume  de  Bourgogne.— 
Suppression  de  l'Ordre  des  Templiers.  — Schisme  à  l'occasion  du  succes- 
seur de  Henri  VII.  —  Union  électorale  de  Rensé,  en  1338.  —  Les  États 
d'Empire  déclarent  que  la  puissance  impériale  dérive  immédiatement  de 
Dieu.  —  Prétentions  ponlificales  anéanties.  —  La  maison  de  Luxembourg 
donne  quatre  empereurs  à  l'Allemagne,  1347-1437.  —  Bulle  d'or  de 
Charles  IV,  en  1350.  —  La  Silésie  est  incorporée  au  royaume  de  Bo- 
hême. —  Nouveaux  démembrements  du  royaume  d'Arles.  — Origine  du 
duché  de  Milan.  —  Dernier  exemple  de  la  destitution  d'un  empereur. — 
Le  maison  de  Hohenzollern  obtient  l'électoral  de  Brandebourg.  —  La 
maison  de  Misnie  obtient  l'électoral  de  Saxe.  —  Pragmatique  sanction 
germanique  de  Mayence,  en  14.39.  — Concordat  de  la  nation  germa- 
nique, en  1448.  — L'archiduc  Maximilien  épouse  Marie  de  Bourgogne, 

—  Grandeur  de  la  maison  d'Autriche.  —  L'usage  s'introduit  de  faire 
tenir  les  Diètes  par  des  envoyés.  —  Désordre  du  règne  de  Frédéric  TII. 

—  Domination  du  droit  du  plus  fort.  — Paix  publique  de  1495.  — Éta- 
blissement de  la  Chambre  impériale.  —  Institution  d'un  Conseil  de  Bé- 
gencea  la  Diète  d'Augsbourg,  en  1500.  —  Division  de  l'Empire  en  cercles. 

—  Origine  des  capitulations  impériale.  —  Matricule  de  1521.  —  Réfor- 
mation du  XVI"  siècle.  —  L'Ordre  Teutonique  est  expulsé  de  la  Prusse. 

—  Premiers  exemples  de  la  confédération  des  États.  —  Alliance  de 
Torgau  et  ligue  do  Smalkade.  —  Origine  des  deux  branches  de  la  maison 
d'Autriche.  —  Paix  de  religion.  —  Traité  de  1542,  fixant  les  rapports 
entre  le  duché  de  Lorraine  et  l'Empire.  —  Ordonnance  d'exécution  pour 
la  transaction  de  Passau.  —  Nouvel  ordre  de  succession.  —  Statut  de  fa- 
mille de  la  maison  de  Brandebourg,  en  1473.  —  Changements  introduits 
par  le  droit  de  primogénilure.  — Diète  de  1582.  —  Révolulion  complète 
opérée  par  la  guerre  de  Trente  ans. —  Dernier  Recès  d'Empire  de  1654. 

—  Diète  de  1G03.  —  Elle  enlève  à  l'Empereur  le  droit  de  convoquer  et  de 
dissoudre  l'assemblée  des  Étals.  —  Les  princes  adoptent  la  coutume  de 
se  faire  représentera  la  Dlèle  par  des  plénipotentiaires.  —Établissement 
d'un  neuvième  électoral,  en  faveur  de  !a  maison  de  Brunswic.  — Réunion 
de  la  Lorraine  à  la  France,  en  1738.  —  Nouvelle  maison  de  Habsbourg- 


—  70  — 

Autriche. —  Exlinclion  de  la  branche  cadette  de  la  maison  de  Wittels- 
bach,  en  1778.  — La  maison  de  Bavière  devientia  troisième  en  puissance 
de  l'Allemagne.  —  Union  des  princes  protecteurs  des  libertés  germa- 
niques.—  États  qui  composaient  l'empire  d'Allemagne. —  Forme  de  gou- 
vernement.^—  Droits  et  prérogatives  du  chef  de  l'Kmpire.  —  Droits  que 
l'Empereur  exerçait  avec  le  concours  des  Étals.  —  Supériorité  territo- 
riale des  États,  ou  droits  qu'ils  exerçaient  sans  le  concours  de  l'Empe- 
reur.—  Diète  de  l'Empire.  —  Sa  composition.  — Commissaire  impérial. 

—  Présidence  ou  Directoire.  —  Collège  des  électeurs.  —  Collège  des 
princes.  —  Collège  des  villes  impériales.  —  Modes  suivis  pour  les  voles- 

—  Avis,  placita  imperii.  —  Décret  de  commission.  —  Conclusum  de 
l'Empire.  —  Recès.  —  Députalions  de  l'Empire.  —  Noblesse  immé- 
diate. —  Don  gratuit  ou  caritalivum.  —  Cercles  de  Souabe,  de  Franco- 
nie  et  du  Rhin.  —  Ganerbinats. —  Division  de  l'Empire  en  dix  cercles. — 
Roi  des  Romains.  —  Vicaires  de  l'Empire. —  Contributions  ou  collectes. 

—  Mois  romains.  —  Cours  suprêmes  de  justice.  —  Conseil  aulique.  — 
Chambre  impériale  de  Wetzlar. 

Depuis  la  paix  de  Westphalie,  l'Empire  germa- 
nique n'avait  éprouvé  d'autre  changement  dans  sa 
Constitution,  que  les  faibles  altérations  résultant  de 
la  désuétude,  ou  celles  que  lui  faisaient  périodique- 
ment subir  les  capitulations  impériales  ou  pactes 
que  les  Électeurs  avaient  coutume  de  former  avec  les 
princes  qu'ils  plaçaient  sur  le  trône  impérial.  Cette 
paix  de  Westphalie,  l'ouvrage  des  plus  grands  poli- 
tiques du  XVII*  siècle,  avait  déterminé  les  rapports  entre 
le  chef  de  l'Empire  et  les  membres  de  ce  corps;  elle 
avait  donné  une  existence  légale  au  parti  protestant 
qui  prétendait  à  la  gloire  d'être  le  principal  appui  de 
la  liberté  politique  ;  on  voyait  en  elle  l'égide  de  l'in- 
dépendance de  tous  les  gouvernements  européens,  et 
le  pivot  de  tout  ce  Système  d'équilibre  qui  opposait  à 
l'ambition  de  celui  d'entre  les  princes  qui  voudrait 
s'élever  sur  les  ruines  des  autres ,  un  obstacle  qu'alors 
on  regardait  comme  infranchissable.  Dix  années  d'une 
guerre  malheureuse,  durant  laquelle  tous  les  vices 
inhérents  à  la  Constitution  germanique  se  montrè- 
rent à  découvert,  suffirent  pour  renverser  un  édifice 
cimenté  par  le  sang  des  peuples  du  Nord  et  du  Midi, 
qui  avaient  pris  part  à  la  guerre  de  Trente  ans. 


—  71   — 

En  détachant  de  l'Empire  germanique  les  provinces 
situées  sur  la  rive  gauche  du  Rhin,  et  en  procla- 
mant le  principe  que  les  princes  héréditaires  qui  per- 
draient par  cette  cession  une  partie  ou  la  totalité  de 
leurs  territoires ,  seraient  indemnisés  aux  dépens  des 
États  ecclésiastiques  situés  sur  la  rive  droite  de  ce 
fleuve,  la  paix  de  Lunéville  anéantit  la  Constitution 
de  l'Empire,  et  fit  naître  la  nécessité  de  la  recon- 
struire sur  de  nouvelles  bases.  Une  loi  fondamentale, 
préparée  par  quelques-unes  des  principales  puis- 
sances du  Continent,  discutée  dans  les  séances  d'une 
députation  extraordinaire  de  la  Diète  de  l'Empire, 
et  approuvée  par  cette  Assemblée  et  par  l'Empereur, 
donna  à  l'Allemagne  une  nouvelle  organisation  et 
remplaça  l'œuvre  des  négociateurs  d'Osnabruck,  à 
laquelle  on  avait  présagé  une  éternelle  durée.  Pro- 
duction de  l'injustice  et  de  la  violence  qui  ne  bâ- 
tissent que  sur  le  sable,  le  nouveau  pacte  social  ne 
put  assurer  au  delà  de  dix-huit  mois  l'existence  du 
Corps  germanique.  Avec  lui  disparut  pour  quelque 
temps  la  dernière  trace  de  la  liberté  allemande,  et  la 
grande  nation  porta  pendant  dix  ans  le  joug  d'un  op- 
presseur étranger  qui,  abusant  de  la  patience  de  ses 
peuples,  les  fît  sex'vir  d'instrument  pour  subjuguer 
les  États  voisins. 

C'est  ici  que  finit  l'histoire  de  l'Empire  germanique. 
Dorénavant  l'Allemagne  subira,  sous  le  vain  nom  de 
Confédération  du  Rhin,  la  domination  de  ce  qu'on 
nommait  le  Système  fédératif  de  l'Empire  français; 
elle  portera  ce  joug  jusqu'à  ce  que  le  patriotisme  de 
ses  habitants,  ranimé  par  l'excès  même  de  leur  abais- 
sement, rende  à  un  peuple  estimable  par  ses  antiques 
vertus,  cette  énergie  que  des  formes  vicieuses  de  son 
gouvernement  et  la  faiblesse  de  ses  chefs  avaient  trop 
longtemps  contenue. 


—  72  — 

L'étude  (le  l'ancienne  Constitution  germanique 
semble  d'abord  n'offrir  que  peu  d'attraits  à  la  curio- 
sité; cependant,  une  connaissance  de  ce  système  com- 
pliqué est  nécessaire  pour  l'intelligence  d'une  grande 
partie  de  l'histoire  des  deux  derniers  siècles.  Cette 
considération  nous  engage  à  placer  en  tête  de  la  der- 
nière loi  fondamentale  de  l'Empire,  un  précis  histo- 
rique de  cette  Constitution,  qui  fut  le  résultat  d'une 
longue  lutte  de  la  féodalité,  de  l'anarchie  et  du  des- 
potisme ligués  contre  les  idées  philosophiques  aux- 
quelles le  progrès  des  lumières  donna  naissance. 

L'Allemagne  ou  le  vaste  pays  qui  est  renfermé 
entre  les  Alpes  au  sud,  la  mer  du  Nord,  l'Eyder  et  la 
Baltique  au  nord,  dont  les  limites  occidentales  ont 
varié  et  les  orientales  ont  été  longtemps  incertaines, 
faisait  originairement  partie  de  la  monarchie  des 
Francs,  fondée  par  un  des  peuples  nombreux  qui  ha- 
bitaient sa  surface.  Elle  eut  des  rois  particuliers  de- 
puis la  paix  de  Verdun,  par  laquelle  les  trois  fils  de 
Louis  le  Débonnaire  se  partagèrent,  en  843 ,  toute  la 
monarchie  de  Charlemagne y  leur  aïeul.  En  bornant 
le  royaume  de  Germanie  vers  l'ouest  au  Rhin ,  le  traité 
de  Verdun  adjugea  encore  à  Louis ^  son  premier  roi, 
les  cantons  de  Mayence ,  de  Spire  et  de  VVorms ,  à  cause 
du  vin  qu'ils  produisent.  C'est  l'époque  où  commen- 
cent les  royaumes  d'Allemagne  et  de  France,  jusque- 
là  compris  dans  la  monarchie  des  Francs. 

Le  pouvoir  des  premiers  rois  d'Allemagne  n'était 
rien  moins  qu'arbitraire.  Dès  l'origine,  les  monar- 
ques des  Francs  avaient  pour  habitude  de  con- 
sulter les  grands  de  leur  empire  dans  les  affaires  les 
plus  importantes.  L'autorité  royale,  de  plus  en  plus 
affaiblie  sous  les  derniers  Mérovingiens,  avait  repris 
de  la  vigueur  sous  Charlemagne;  mais  elle  fut  avilie 


—  73  -^ 

sous  le  règne  de  son  successeur,  et  les  fils  de  Louis  le 
Débonnaire  furent  obligés,  dans  les  assemblées  tenues 
en  851  à  Mersen,  et  en  860  à  Coblentz,  de  reconnaître 
au  clergé  et  à  la  noblesse  de  leurs  royaumes  la  qua- 
lité de  vrais  conseils,  d'aides  et  de  coopérateurs  des 
souverains  dans  les  affaires  de  gouvernement.  Cette 
époque  est  remarquable  comme  celle  où,  pour  la  pre- 
mière fois,  les  droits  des  États  furent  solennellement 
proclamés  et  clairement  établis. 

Il  se  fit,  sous  Louis  le  Germanique  y  un  changement 
notable  dans  le  gouvernement.  Par  suite  de  sa  poli- 
tique, Charlemagne  avait  tâché  de  supprimer  les  ducs*, 
qui  réunissaient  en  leur  main  l'administration  civile 
au  gouvernement  militaire  des  grandes  provinces,  et 
dont  l'autorité  était  devenue  dangereuse  pour  celle  des 
rois.  Ce  prince  avait  partagé  les  anciens  duchés  en 
petits  districts,  à  chacun  desquels  présidait  un  comte*; 
mais  les  incursions  que  les  Hongrois,  les  peuples 
slaves  et  les  Normans  firent  en  Allemagne ,  sous  Louis 
le  Germanique,  engagèrent  ce  prince  à  créer  de  nou- 
veau des  gouvernements  dont  l'autorité  s'étendant  sur 
des  provinces  considérables,  pût  leur  faciliter  les 
moyens  de  rassembler  avec  promptitude  des  forces 
suftisantes  pour  s'opposer  à  ces  barbares.  Les  duchés 
de  Thuringe,  de  Bavière  et  de  Saxe  lui  durent  leur 
origine;  la  Bavière  comprenait  alors  aussi  l'Autriche; 
la  Saxe  se  composait  des  pays  situés  entre  l'Ems,  le 
Weser  et  l'Elbe;  car  ce  qu'on  appelle  aujourd'hui 
Saxe,  ou  le  pays  situé  entre  laSaale  et  l'Elbe,  et  sur 
la  droite  de  ce  fleuve,  faisait,  à  l'époque  dont  nous 
parlons,  partie  des  possessions  des  Sorabes,  peuple 


Heerzoge,  chefs  militaires. 
Grawen.  vieillards. 


—  74  — 

slave,  tributaire  des  rois  d'Allemagne.  Le  duché  de  la 
France  rhénane  fut  érigé  sous  les  fils  de  Louis  le  Ger- 
manique :  il  fut  le  berceau  de  l'électorat  palatin. 

Dans  le  partage  de  Verdun,  les  provinces  bornées  à 
l'est  par  le  royaume  d'Allemagne  et  par  l'Italie,  et  à 
l'ouest  par  l'Escaut,  la  Meuse,  la  Saône  et  le  Rhône, 
avaient  été  adjugées  à  Lothaire^  fils  aîné  de  Louis  le 
Débonnaire.  Elles  ne  faisaient  donc  partie  ni  de  la 
France  ni  de  TAllemagne.  Lothaire  eut  encore  dans 
son  lot  le  royaume  d'Italie.  Ses  fils  se  partagèrent  ses 
Etats.  L'un  d'eux,  appelé  comme  le  père,  Lothaire ^ 
eut  pour  sa  part  les  pays  situés  au  nord  de  la  Saône, 
entre  le  Rhin,  la  Meuse  et  l'Escaut.  Il  y  attacha  son 
nom,  et  la  Lotharingia  comprenait  la  Lorraine  d'au- 
jourd'hui, l'Alsace,  la  Belgique,  et  la  partie  de  la 
rive  gauche  du  Rhin  qui  n'avait  pas  été  assignée  h  Louis 
le  Germanique;  ainsi  que  la  Franche-Comté,  le  Lyon- 
nais et  une  partie  du  Dauphiné.  Le  royaume  de  Lo- 
tharingia ne  dura  que  jusqu'à  8G9;  il  fut  partagé  par 
le  traité  de  Procaspis  de  870,  entre  les  rois  de  France 
et  d'Allemagne.  Neuf  ans  plus  tard,  les  Allemands 
s'emparèrent  aussi  de  la  partie  que  ce  traité  avait  ad- 
jugée à  la  France,  à  l'exception  des  provinces  méri- 
dionales, oùBoson  venait  de  fonder  un  royaume  in- 
dépendant sous  le  nom  de  Bourgogne;  il  comprenait 
la  Franche-Comté,  une  partie  de  la  Bourgogne,  Lyon, 
le  Dauphiné  et  la  Provence. 

Quelques  années  après,  en  888,  un  gouverneur  de 
la  Suisse,  du  Valais  et  d'une  partie  de  la  Savoie  se  fit 
couronner  roi  de  la  Bourgogne  transjurane.  Les  deux 
Bourgognes  furent  réunies  en  930.  Nous  verrons  com- 
ment les  rois  d'Allemagne  trouvèrent  moyen  de  joindre 
cette  couronne  à  la  leur. 

Les  royaumes  d'Allemagne  et  de  France,  séparés 


—  75  — 

par  le  traité  de  Verdun,  furent  réunis  encore  une  fois , 
pour  un  instant,  sous  Charles  le  Gros;  mais,  en  887, 
les  Allemands  destituèrent  ce  prince,  et  depuis  ce 
temps  les  deux  États  ont  été  constamment  séparés. 

La  branche  de  la  maison  carlovingienne  régnante 
en  Allemagne  s'éteignit  en  911 .  Conrad,  duc  de  l'Au- 
strasie  ou  de  la  France  rhénane,  fut  élu  roi  par  les 
Francs  et  les  Saxons.  Sous  le  premier  nom,  les  auteurs 
du  temps  entendent  les  Franconiens,  les  Thuringiens, 
les  Souabes  et  les  Lorrains  qui,  avec  les  Saxons,  for- 
maient les  cinq  nations  dont  rAllemagne  se  compo- 
sait. Depuis  cet  événement,  l'Allemagne  n'a  cessé  de 
former  un  royaume  électif.  Conrad  fut  obligé  d'aban- 
donner la  Lorraine  à  Charles  le  Simple j,  roi  de  France; 
il  se  maintint  cependant  dans  la  possession  de  l'Al- 
sace, qui  fut  réunie  au  duché  de  Souabe  à  l'époque  de 
son  érection,  en  916,  et  y  demeura  annexée  jusqu'à 
l'extinction  des  ducs  héréditaires  de  cette  province. 

Conrad  étant  mort  sans  descendance ,  une  nouvelle 
famille  fut  élevée  sur  le  trône  germanique;  c'est  celle 
des  ducs  de  Saxe,  qui,  de  919  jusqu'en  1024,  fournit 
cinq  rois  d'Allemagne  :  Henri  /,  les  trois  Otton  et 
Saint-Henri  II.  La  couronne  était  en  même  temps  hé- 
réditaire dans  la  famille  choisie,  et  élective,  en  ce 
qu'à  chaque  vacance  du  trône  le  successeur  était  con- 
firmé par  les  États.  Henri  I  réunit  son  duché  de  Saxe 
à  la  couronne.  Il  reprit  aussi,  en  925,  le  royaume  de 
Lorraine,  dont  le  titre  n'a  pas  cessé  depuis  d'être  réuni 
au  royaume  d'Allemagne,  quoique  les  rois  de  France 
eussent  profité  des  circonstances  pour  en  arracher  une 
province  après  l'autre.  Henri  I  fonda  un  grand  nom- 
bre de  villes,  qui  devinrent  le  berceau  d'un  tiers  état 
libre,  institution  tellement  étrangère  au  système  féodal, 


—  76  — 

qu'on  peut  dater  de  son  origine  la  décadence  de  ce 
système.  Pour  défendre  les  frontières  contre  les  incur- 
sions des  peuples  barbares ,  auxquelles  l'Allemagne 
fut  continuellement  exposée  par  sa  situation,  Henri  I 
établit  des  espèces  de  commandements ,  sous  le  titre 
de  marches  \  Telle  est  l'origine  des  margraves.  On 
rapporte  à  cette  époque  l'érection  des  margraviats 
de  Lusace,  de  Misnie  et  de  Brandebourg. 

Le  couronnement  à'Otton  I,  fils  de  Henri j  offre 
deux  particularités  qu'on  ne  doit  pas  perdre  de  vue, 
si  l'on  veut  suivre  la  Constitution  germanique  dans  sa 
naissance  et  ses  progrès  successifs.  Les  trois  arche- 
vêques deMayence,  de  Trêves  et  de  Cologne  se  dispu- 
taient le  droit  de  sacrer  le  nouveau  roi;  et  au  grand 
banquet  par  lequel  cette  auguste  cérémonie  fut  ter- 
minée, les  quatre  ducs,  savoir:  ceux  de  Lorraine,  de 
la  France  rhénane,  de  Souabe  et  de  Bavière,  firent  les 
fonctions  de  grand  chambellan,  de  grand  maître,  de 
grand  échanson  et  de  grand  maréchal.  C'est  la  pre- 
mière trace  de  l'existence  des  grands  officiers  de  la 
couronne,  qui,  depuis,  s'arrogèrent  une  autorité  bien 
différente  de  ce  qu'elle  était  dans  l'origine. 

L'Italie  qui,  dans  le  partage  de  la  monarchie  des 
Francs,  avait  été  adjugée  au  fils  aîné  de  Louis  le  Dé- 
honnaire^  eut  depuis  des  rois  particuliers,  ordinaire- 
ment décorés  de  la  couronne  impériale,  qu'on  regar- 
dait comme  attachée  à  celle  d'Italie.  Olton  I  conquit, 
en  961,  le  royaume  d'Italie,  et  prit,  en  962,  la  cou- 
ronne impériale,  que  tous  les  rois  d'Allemagne,  ses 
successeurs,  ont  portée  en  leur  qualité  de  rois  d'Italie. 
Ce  fut  à  cette  époque  que  commença  la  dénomination 
d'Empire  germanique^  ou  de  Saint-Empire  romain  de  la 
nation  germanique^  dénomination  sous  laquelle  on  en- 

'  Marcha,  mark,  frontière. 


—  77  — 

tendait  la  réunion  de  la  dignité  impériale  et  des  royau- 
tés d'Allemagne,  d'Italie,  de  Lorraine  et  de  Bourgogne. 
Ce  fut  alors  qu'on  s'habitua  à  regarder  l'empereur  ro- 
main ou  d'Allemagne  comme  le  chef  séculier  de  la 
chrétienté,  dont  la  suprématie  s'étendait  sur  tous  les 
monarques  de  la  terre. 

Olton  rétablit  le  duché  de  Saxe,  et  partagea  la  Lor- 
raine en  deux  duchés,  celui  de  la  haute  Lorraine  ou 
de  la  Lorraine  Mosellane,  et  celui  de  la  basse  Lor- 
raine, appelé  depuis  duché  de  Brabant.  Les  ducs  et 
les  comtes  qui ,  d'après  leur  constitution  originaire, 
n'étaient  que  des  gouverneurs  militaires  ou  civils,  tra- 
vaillaient à  rendre  leurs  titres  héréditaires  en  s'appro- 
priant  les  domaines  de  la  couronne  situés  dans  leurs 
ressorts,  et  dont  la  jouissance  leur  avait  été  concédée 
en  guise  de  traitement.  Cette  révolution,  qui  ne  put 
se  consolider  que  lentement,  prit  une  certaine  consis- 
tance sous  Olton  /;  mais  elle  ne  fut  consommée  qu'un 
siècle  après  lui. 

Cependant  les  nations  slaves  fixées  sur  la  frontière 
orientale  de  l'Empire,  l'inquiétaient  sans  cesse  par 
leurs  incursions  et  leurs  brigandages.  Pour  les  civili- 
ser, Otton  I  conçut  le  projet  de  les  convertir  au  chris- 
tianisme :  dans  cette  vue ,  il  fonda  sur  la  frontière 
plusieurs  évêchés  dont  les  pasteurs  furent  spéciale- 
ment chargés  de  travailler  à  une  œuvre  si  méritoire. 
Les  sièges  de  Havelberg,  de  Brandebourg,  d'Ol- 
denbourg, deMeissen,  de  Mersebourg,  de  Zeitz,  de 
Posnanie  et  de  Prague  doivent  leur  origine  à  ce  plan. 
Prague  fut  soumis  à  l'archevêché  de  Mayence,  Olden- 
bourg à  celui  de  Brème.  Pour  les  autres  évêchés  nou- 
vellement érigés,  il  fut  fondé  une  cinquième  métropole 
à  Masdebouro;. 

Otton  I  dota  ces  sièges,  et  enrichit  les  autres  évê- 


—  78  — 

chés  d'Allemagne,  en  leur  concédant  des  domaines  et 
des  droits  régaliens  jusqu'alors  attachés  à  la  cou- 
ronne. La  dévotion  ne  fut  pas  l'unique  motif  de  ces 
largesses;  la  politique  y  entra  pour  quelque  chose. 
Otton  espérait  que  les  prélats  qui  lui  devaient  leur  no- 
mination, et  qu'il  avait  comblés  de  bienfaits,  devien- 
draient son  appui  contre  les  ducs  et  les  comtes  qui, 
ayant  trouvé  moyen  de  rendre  leurs  charges  hérédi- 
taires, commençaient  à  porter  ombrage  à  un  prince 
jaloux  de  son  autorité. 

Otton  III,  petit-fils  à' Otton  le  Grand,  fonda  un  sixième 
archevêché  à  Gnesne^  auquel  furent  subordonnés  les 
sièges  de  Cracovie,  de  Breslau,  de  Posnanie  et  de  Col- 
berg.  Nous  rapportons  ce  fait  pour  indiquer  jusqu'où 
s'étendait  alors,  vers  l'orient,  la  domination  des  rois 
d'Allemagne. 

Après  l'extinction  de  la  maison  de  Saxe,  en  1024, 
celle  des  ducs  de  France  (ou  de  la  France  rhénane)  fut 
appelée  au  trône  par  une  élection  libre  des  nobles  de 
toutes  les  provinces,  campés  sous  la  bannière  des  huit 
ducs\  sur  les  deux  rives  du  Rhin,  depuis  Mayence 
jusqu'à  Worms.  La  maison  de  France  a  fourni  quatre 
rois  à  l'Allemagne,  Conrad  II ,  Henri  III,  IV  et  F, 
depuis  1 024  jusqu'en  11 25. 

Conrad  II,  surnommé  le  Salicjue,  réunit  à  l'Empire 
germanique  le  beau  royaume  de  Bourgogne,  lorsqu'en 
1032  la  dynastie  des  rois  d'Arles  s'éteignit.  Cette  réu- 
nion avait  été  stipulée  par  un  traité  conclu  sous  son 
prédécesseur,  et  auquel  il  donna  force  par  les  armes. 
C'estl'époque  de  lagrandeur  de  l'Empire  d'Allemagne, 
dont  la  domination  s'étendait  ainsi  depuis  les  côtes  de 
la  Flandre  jusqu'à  la  Méditerranée,  et  renfermait  toutes 

•  De  la  France  rhénane,  de  la  Moselle,  du  Brabant,  de  Saxe,  de 
Bavière,  de Carinlhie ,  de  Souabe  et  de  Bohême. 


—  79  — 

les  provinces  aujourd'hui  françaises  qui  sont  situées 
sur  la  Meuse  et  sur  la  rive  gauche  du  Rhône.  Les  liens 
politiques  qui  attachèrent  le  royaume  de  Bourgogne  à 
l'Allemagne  étaient  les  mêmes  que  ceux  qui  réunis- 
saient le  royaume  de  Lorraine,  c'est-à-dire  que  ce 
royaume  fut  entièrement  incorporé,  et  que  ses  États 
prirent  place  dans  les  assemblées  de  la  nation  germa- 
nique. Le  royaume  d'Italie,  au  contraire,  acquis  et 
réuni  par  droit  de  conquête,  continua  à  former  un 
État  séparé,  soumis  de  droit  au  roi  que  le  libre  choix 
des  Allemands  avait  placé  sur  leur  trône.  Aussi  les 
rois  d'Allemagne  avaient-ils  la  coutume  d'aller  prendre 
à  Milan  la  couronne  d'Italie,  avant  de  se  faire  couron- 
ner empereurs  à  Rome.  Nous  ferons  encore  observer 
qu'on  trouve  sous  le  règne  de  Conrad  II  la  première 
trace  du  corps  de  la  noblesse  immédiate,  ainsi  nommée 
parce  qu'elle  jouissait  de  la  prérogative  de  ne  pas  être 
subordonnée  à  l'autorité  intermédiaire  des  ducs,  mar- 
graves et  comtes. 

L'époque  où  l'Empire  germanique  parvint  à  sa  plus 
grande  étendue,  fut  celle  où  l'autorité  de  ses  rois  dé- 
clina par  les  usurpations  des  grands.  Cette  révolution, 
préparée  depuis  Otton  I ,  fut  consommée  sous  la  mi- 
norité orageuse  de  Eenri  IVj,  dont  les  ducs  et  les 
comtes  profitèrent  pour  rendre  leurs  charges  hérédi- 
taires. Ce  changement  en  produisit  un  dans  la  géogra- 
phie politique  de  l'Allemagne.  Ce  pays  était  divisé  en 
cantons  ou  gau^  dont  chacun  portait  un  nom  particu- 
lier (tels  que  Nordgau,  Rheingau,  Kletgau,  Bris- 
gau,  etc.),  et  était  administré  par  un  comte;  mais 
quand  les  comtes  devinrent  des  chefs  héréditaires,  on 
cessa  de  les  désigner  d'après  le  district  auquel  ils 
étaient  préposés,  et  on  les  nomma  d'après  la  ville  ou  le 
château  où  ils  établirent  leur  résidence.  Ainsi,  les 


—  80  — . 

anciennes  dénominations  disparurent  successivement. 
L'hérédité  des  duchés  et  des  comtés  produisit  encore 
un  autre  changement.  Ouhliant  que  les  duchés  et  les 
comtés  étaient  des  charges  ou  fonctions  indivisibles 
par  leur  nature,  les  nouveaux  seigneurs  traitèrent  ces 
fiefs  comme  de  véritables  domaines  et  les  partagèrent 
parmi  leurs  fils  ;  telle  est  l'origine  de  cette  foule  de 
principautés  et  de  comtés  entre  lesquels  l'Allemagne 
fut  divisée  \ 

L'autorité  impériale,  affaiblie  par  cette  révolution, 
souffrit  un  autre  échec  plus  funeste  sous  le  règne  de 
Henri  IV  f  parles  dissidences  qui  s'élevèrent  entre  ce 
prince  parvenu  à  la  majorité,  et  les  souverains  pon- 
tifes, au  sujet  de  l'investiture  des  évêques.  L'issue  de 
cette  longue  lutte  privales  empereurs  de  leur  influence 
sur  le  choix  des  évêques,  en  faveur  desquels  les  pré- 
décesseurs de  Henri  IV  s'étaient  dépouillés  de  leurs 
plus  beaux  domaines.  L'élection  des  évêques  fut  alors 
confiée  aux  Chapitres,  qui  reçurent,  à  cette  époque, 
l'organisation  qu'ils  ont  conservée  jusqu'à  nos  jours. 

L'origine  des  communes  date  du  règne  de  Henri  V, 
Ce  monarque  accorda  aux  gens  de  métiers  et  aux  arti- 
sans, qui  formaient  la  plus  grande  partie  de  la  popula- 
tion des  villes,  des  immunités  et  des  privilèges,  parmi 
lesquels  la  liberté  personnelle  était  sans  doute  le  plus 
précieux.  Cette  nouvelle  législation  établit  dans  les 
villes  un  régime  qui,  sauf  quelques  altérations,  s'est 
maintenu  jusqu'à  nos  jours. 

Un  concordat,    conclu  en  1122,  à  Worms,  entre 

•  On  trouve  dans  le  xi*  siècle,  les  familles  suivantes  qui  existent  en- 
core :  les  margraves  de  Bade,  les  comtes  de  Wurtemberg,  ceux  de 
WiTTELSBAcn,  de  ZoLLER.N ,  de  Wettin  (souche  de  la  maison  ac- 
tuelle de  Saxe  et  de  celle  d'ÛLDENBouRc). 


Henri  V  et  le  pape  Calixte  U,  mit  fin  à  la  guerre  entre 
l'Empire  et  le  sacerdoce,  et  restreignit  les  droits  de 
l'Empereur  à  la  prérogative  d'envoyer  un  commissaire 
pour  assister  en  son  nom  aux  élections  des  évêques, 
et  à  celle  d'investir  les  élus  de  la  puissance  temporelle 
attachée  à  leurs  sièges. 

A  l'extinction  de  la  maison  de  France,  les  États 
d'Allemagne  exercèrent  le  droit  d'élection  dans  toute 
sa  plénitude.  Tous  les  princes  ecclésiastiques  et  sécu- 
liers, avec  leurs  vassaux  en  armes,  étant  campés  dans 
les  environs  de  Mayence,  on  nomma  parmi  les  diffé- 
rentes nations  des  seigneurs  qu'on  chargea  de  propo- 
ser des  candidats,  entre  lesquels  l'assemblée  se  ré- 
serva de  choisir  celui  qui  lui  paraîtrait  le  plus  digne 
de  gouverner.  Le  choix  tomba  sur  Lothaire  11^  duc  de 
Saxe.  A  son  couronnement  parurent  les  quatre  archi- 
officiers  séculiers  qui,  par  la  suite,  s'attribuèrent, 
avec  les  trois  archichanceliers,  le  droit  exclusif  d'élire 
les  empereurs;  savoir  :  le  duc  de  Bohême  comme 
archiéchanson,  le  comte  palatin  du  Rhin  comme  archi- 
grand  maître,  celui  de  Saxe  comme  archimaréchal,  et 
le  margrave  du  Nord,  qu'on  appela  par  la  suite  mar- 
grave de  Brandebourg,  comme  archichambellan. 

Lothaire  II  avait  destiné  le  trône  impérial  à  son  gen- 
dre, Henri  le  Fier,  duc  de  Saxe  et  de  Bavière;  mais 
les  États  qui  craignaient  sa  puissance  et  la  violence 
de  son  caractère,  élurent  Conrad  de  liohenstaufen , 
frère  puîné  du  duc  de  Souabe  et  d'Alsace.  La  maison 
de  Hohenstaufen  a  fourni  six  empereurs  depuis  1138 
jusqu'en  1254;  c'est  une  des  périodes  les  plus  bril- 
lantes de  l'histoire  d'Allemagne.  Ce  pays  fut  alors  gou- 
verné par  des  princes  aimant  les  lettres;  à  leur  exem- 
ple, les  grands  les  protégèrent;  l'Allemagne  eut  même 
une  littérature  presque  classique  qui  dépérit  dans  les 
vu  6 


—  82  —        . 

siècles  qui  suivirent.  Les  six  empereurs  de  la  maison 
de  Souabe  sont  :  Conrad  III  ^  Frédéric  /,  Henri  VI , 
Philippe,  Frédéric  II  et  Conrad  IV.  Il  faut  y  joindre  un 
empereur  de  la  maison  guelfe,  Otton  /F,  qu'une  par^ 
tie  de  l'Allemagne  reconnut  de  1 198  jusqu'en  1218, 
en  opposition  de  Philippe  et  de  Frédéric  II. 

Ce  fut  sous  Conr(^d  IIÏ  que  commencèrent  les  que- 
relles entre  les  Guelfes  et  les  Gibelins.  Conrad  III  avait 
enlevé  à  la  maison  des  Guelfes  un  des  deux  duchés 
dont  elle  était  en  possession.  Cette  mesure  donna  nais- 
sance à  deux  factions  dont  les  fureurs  troublèrent 
l'Empire  et  l'Italie  pendant  plusieurs  siècles.  Les 
Guelfes,  s'érigeant  en  défenseurs  de  la  liberté  publi- 
que, attaquèrent  tous  les  gouvernements  existants.  Les 
Gibelins,  tout  en  professant  du  respect  pour  l'autorité 
légitime,  espéraient  de  s'emparer  du  pouvoir.  Ce  m[0t 
est  une  corruption  de  Waiblingen,  ville  de  la  Souabe, 
dont  le  nom  avait  servi  de  cri  de  guerre  au  parti  im- 
périal. La  proscription  de  Henri  le  Fier,  duc  de  Saxe, 
de  la  maison  de  Guelfe,  procura  l'immédiateté  aux 
margraves  du  Nord  (Brandebourg  ),  qui  jusqu'alors 
avaient  dépendu  des  ducs  de  Saxe.  Le  duché  de  Ba- 
vière, enlevé  aux  Guelfes ,  fut  donné  à  1^  première 
maison  d'Autriche,  surnommée  de  Batenberg.  Les 
margraves  d'Autriche  avaient  été  subordonnés  jus- 
qu'alors aux  ducs  de  Jiavière. 

A  la  mort  de  Conrad  III,  on  élut  le  fils  de  son  frère 
aîné;  et,  par  cette  élection,  le  duché  de  Souabe  fut 
réuni  à  la  couronne.  Frédéric  I  rendit,  en  1150,  à 
Henri  le  Lion,  le  duché  de  Bavière,  dont  son  père 
Henri  le  Fier  y  avait  été  dépouillé.  Pour  dédommager 
le  margrave  d'Autriche  du  sacrifice  auquel  cette  res- 
titution le  condamnait,  il  démembra  son  margraviat 
de  la  Bavière,  l'éleva  au  rang  de  duché,  et  lui  accorda 


—  83  ^ 

un  privilège  célèbre  dans  les  annales  de  l'histoire  ; 
cette  concession,  qui  est  sans  exemple,  rendit  ce  du- 
ché presque  indépendant  de  l'Empire  \ 

Henri  le  Lion  répara  la  perte  qu'il  avait  essuyée  par 
le  démembrement  du  margraviat  d'Autriche ,  en  éten- 
dant vers  le  nord  les  limites  du  duché  de  Saxe.  Il  sou- 
mit les  princes  slaves  qui  régnaient  dans  le  Mecklen- 
bourg  et  la  Poméraniej  mais  le  lustre  qu'il  procura  à 
la  maison  de  Guelfe  s'éclipsa  promptement.  Brouillé 
avec  l'Empereur,  à  l'occasion  d'une  expédition  que  ce- 
lui-ci fit  en  Italie,  Henri  le  Lion  fut  proscrit  en  1  1 80 
et  déclaré  déchu  des  deux  duchés  de  Bavière  et  de 
Saxe.  Le  premier  fut  conféré  à  la  maison  de  Wittels- 
bach,  qui  occupe  encore  le  trône  de  Bavière  :  elle  n'eut 
pourtant  pas  ce  duché  dans  l'étendue  qu'il  avait  eue 
sous  les  Guelfes;  les  comtes  de  Tyrol,  de  Gœrz  (Go- 
rice)  et  d'Andechs,  qui  en  dépendaient,  furent  décla- 
rés immédiats.  Les  derniers  prirent  par  la  suite  le  ti- 
tre de  ducs  de  Méranie.  La  ville  de  Ratisbonne  fut  aussi 
soustraite  à  la  domination  du  nouveau  duc  de  Bavière, 
et  immédiatement  soumise  à  l'Empereur. 

Ce  fut  à  cette  époque  que  le  duché  de  Saxe  éprouva 
une  révolution  mémorable.  Ce  duché  s'étendait  depuis 
le  Rhin  jusqu'à  l'Elbe;  cependant  les  provinces  situées 
entre  laSaale  et  l'Elbe,  et  que,  dans  un  sens  restreint, 
on  nomme  aujourd'hui  Saxe,  n'appartenaient  pas  im- 
médiatement à  ce  duché;  elles  étaient  gouvernées  par 
les  landgraves  de  Thuringe  et  les  margraves  de  Mis- 

'  Le  nouveau  duché  fut  rendu  tellement  héréditaire  dans  la  maison 
de  Henri  d'Autriche,  que  non-seulement  il  devait  passer  aux  femmes, 
mais  même  que  le  dernier  possesseur,  si  la  maison  venait  à  s'éteindre 
entièrement,  pouvait  en  disposer  soit  par  vente  soit  de  toute  autre  ma- 
nière, en  faveur  de  qui  il  voudrait. 


^  84  — 

nie,  reconnaissant  la  suprématie  du  Duc,  aussi  bien 
que  les  princes  de  Poméranie  et  de  Mecklenbourg ,  et 
les  comtes  de  Holstein  et  d'Oldenbourg  lui  devaient 
hommage.  Le  duché  de  Saxe  lui-même  se  composait 
de  ce  qu'on  a  nommé  depuis  cercle  de  Westphalie  et 
pays  de  Brunswic-NYolfenbuttel  et  Hanovre.  Il  était 
divisé  en  trois  districts,  l'Angrivarie,  la  Westphalie  et 
rOstphalie.  En  proscrivant  la  maison  des  Guelfes, 
Frédéric  I  ne  pouvait  pas  la  dépouiller  en  entier  de 
rOstphalie,  où  se  trouvaient  le  patrimoine  et  les  alleux 
de  cette  maison.  Il  disposa  d'une  partie  de  l'Angriva- 
rie et  de  la  Westphalie  en  faveur  des  archevêques  de 
Cologne,  qui  prirent  alors  le  titre  de  ducs  de  ces  deux 
provinces.  Le  reste  des  fiefs  composant  le  duché  de 
Saxe,  et  comprenant  une  grande  partie  de  ce  que,  jus- 
qu'en 1806,  on  a  nommé  cercle  de  Westphalie,  le 
comté  de  Holstein,  les  États  ci-devant  ecclésiastiques 
du  cercle  de  basse  Saxe,  les  duchés  de  Mecklenbourg  et 
de  Poméranie,  etc.,  devaient  former  dorénavant  le  du- 
ché de  Saxe ,  qui  fut  conféré  à  une  branche  de  cette 
maison  ascanienne  qui  possédait  déjà  le  margraviat 
de  Brandebourg.  Mais  le  nouveau  duc  de  Saxe  ne  put 
se  mettre  en  possession  que  de  la  moindre  partie  des 
pays  qui  lui  avaient  été  adjugés;  le  duché  de  Saxe  fut 
entièrement  démembré.  Les  comtes  de  Holstein  et  les 
princes  de  Mecklenbourg  et  de  Poméranie  se  rendi- 
rent indépendants;  Lubeck  devint  ville  immédiate; 
les  archevêques  de  Brème  et  de  Magdebourg,  les  évê- 
ques  de  Verden ,  de  Minden,  de  Munster,  de  Pader- 
born,  de  Hildesheim,  de  Halberstadt,  s'emparèrent  des 
districts  situés  à  leur  convenance;  les  Guelfes  eux- 
mêmes  se  maintinrent  dans  rOstphalie,  de  manière 
qu'il  ne  resta  au  duc  de  Saxe  que  quelques  districts 
situés  sur  l'Elbe,  et  qui  forment  ce  qu'on  nomme  au- 
jourd'hui cercle   de  Wittenberg,  pays  d'Anhalt   et 


—  85  — 

de  Lauenbourg.  Comme  par  suite  des  partages  usités 
dans  la  nouvelle  maison  de  Saxe,  les  pays  d'Anhalt  et 
de  Lauenbourg  eurent  des  princes  particuliers,  la  di- 
gnité de  duc  de  Saxe  resta  finalement  affectée  à  la  ville 
de  Wittenberg  et  à  son  district,  et  le  nom  de  Saxe,  qui 
originairement  désignait  les  contrées  situées  entre  le 
Rhin  et  le  Weser,  passa  ainsi  à  une  province  récem- 
ment arrachée  aux  Slaves. 

La  maison  de  Wittelsbach ,  à  laquelle  Frédéric  I 
avait  donné  le  duché  de  Bavière,  obtint,  par  le  petit- 
fils  de  cet  empereur,  le  Palatinat  du  Rhin,  ou  l'an- 
cien duché  de  la  France  rhénane,  qui  a  formé,  jus- 
qu'en 1803,  le  patrimoine  de  la  maison  de  Wittels- 
bach, et  a  été  longtemps  possédé  par  la  branche  aînée 
de  cette  famille ,  tandis  que  la  cadette  régnait  en  Ba- 
vière. 

Le  règne  de  Frédéric  II  fait  époque  dans  l'histoire 
de  la  Constitution  germanique ,  parce  que  ce  prince 
publia  les  deux  premières  ordonnances  qu'on  peut 
ranger  dans  la  classe  des  lois  fondamentales  de  l'Em- 
pire. Elles  sanctionnèrent  les  droits  que  les  États 
avaient  successivement  usurpés  depuis  deux  siècles, 
et  pour  lesquels  ils  n'avaient  d'autres  titres  que  l'ob- 
servance. Le  premier  de  ces  règlements  se  trouve  dans 
un  diplôme  que  cet  empereur  accorda  en  1220,  à 
Francfort,  aux  princes  ecclésiastiques;  un  diplôme 
semblable  fut  alloué  en  1232,  à  Udine,  aux  princes 
séculiers  \  Ces  deux  actes  sont  de  véritables  chartes 
octroyées  par  le  souverain  à  une  classe  de  ses  sujets; 
ils  détaillent  les  franchises  et  immunités  que  l'Empe- 
reur concède  aux  princes  ecclésiastiques  et  séculiers. 
Tout  dans  l'histoire  de  la  Constitution  germanique 

'  Voy.  ScHMAuss,  Corp.jur.  publ.  academ.,  p.  4  et  6. 


—  86  — 

montre  d'une  part  des  usurpations  faites  par  des  vas- 
saux aux  dépens  de  l'autorité  suprême;  de  l'autre, 
des  concessions  faites  par  le  prince;  nulle  part  une 
seule  trace  que  le  Corps  germanique  se  soit  formé  par 
suite  d'une  association  politique  conclue  entre  des 
États  indépendants.  Dans  le  diplôme  de  1220,  on 
trouve  déjà  la  distinction  entre  villes  impériales  et 
villes  épiscopales,  et  il  y  est  statué  que  les  dernières 
ne  seraient  soumises  à  la  juridiction  de  l'Empereur 
que  lorsqu'il  viendrait  y  tenir  sa  cour,  huit  jours  avant 
et  huit  jours  après  son  arrivée.  Dans  tout  autre  temps, 
et  même  lorsque  l'Empereur  s'arrêtait  dans  une  ville 
épiscopale  autrement  que  pour  y  tenir  sa  cour,  elles 
étaient  soumises  à  la  juridiction  des  évêques.  L'acte 
de  '1232  confirme  aux  princes  toute  liberté  et  juri- 
diction dans  leurs  pays,  selon  l'observance.  Ces  deux 
Constitutions  impériales  renferment  les  éléments  de  la 
supériorité  territoriale  des  États  de  l'Enipire. 

Cette  supériorité  que  les  princes,  comtes  et  sei- 
gneurs exerçaient  dans  l'enceinte  de  leur  territoire, 
n'était  rien  moins  qu'arbitraire.  De  même  que  l'Em- 
pereur ne  pouvait  prendre  une  décision  dans  les  affai- 
res qui  intéressaient  l'Empire,  sans  avoir  pris  conseil 
des  Èlats  (Reichsstœnde)  ;  de  même  ceux-ci  ne  fai- 
saient rien  sans  l'avis  des  prélats ,  des  propriétaires 
nobles  et  des  villes  de  leur  territoire.  Cet  usage,  au- 
quel les  assemblées  des  États  provinciaux  {Lands- 
tœnde)  doivent  leur  origine,  ne  fut  pourtant  pas  géné- 
ral; il  ne  fut  guère  suivi  dans  les  territoires  de  moin- 
dre étendue  qui  ne  renfermaient  qu'un  petit  nombre 
de  fondations  ecclésiastiques,  de  villes  et  de  grands 
propriétaires.  Par  suite  de  l'extinction  graduelle  des 
familles,  plusieurs  de  ces  petits  territoires  furent  suc- 
cessivement réunis  ou  incorporés  à  de  plus  grands 
États;  mais  comme  les  Allemands,  rigides  observa- 


—  87  — 

leurs  des  formes,  ne  s'écàrteht  pas  facilement  de  ce 
qu'on  nomme  observance ^  ces  parcelles  réunies  à  d'au- 
tres territoires  conservèrent  leur  régime  particulier  et 
originaire.  De  là  celte  grande  variété  datis  les  Cohsti- 
tutions  des  divers  États  d'Allemagne,  qui  s'est  conser- 
vée jusqu'à  ces  derniers  temps,  et  Cette  bizarrerie  que 
l'autorité  de  quelques  grands  princes  était  bornée  par 
celle  de  leurs  Etats,  tandis  que  des  princes  beaucoup 
nloins  puissants,  soUs  le  rapport  de  l'étendue  de  leur 
territoire,  y  jouissaient  d'un  plus  grand  pouvoir. 

Ce  fut  encore  sous  le  règne  de  Frédéric  II  que  VOr- 
dre  Teutonique,  fondé  en  Palestine,  obtint  Un  établis- 
sement en  Prusse.  Un  duC  Piast  de  Cujavie  l'y  appela 
pour  convertir  et  subjuguer  les  Prussiens  attachés  au 
paganisme.  11  accorda  à  l'Ordre  la  ville  de  Culrri,  qui 
devint  le  berceau  de  sa  puissance.  Frédéric  /f  confirma 
ce  traité  en  qualité  de  chef  de  l'Etlipire,  sous  la  pro- 
tection duquel  fut  placé  cet  Ordi^e,  qiii,  dépouillé,  par 
la  suite  des  temps,  de  ses  possessions  sûr  la  mer  Ëal- 
tique,  conserva  en  Allemagne  de  riches  domaines,  et 
siégea  jusqu'au  xix"  siècle  parmi  les  Etats  d'Empire. 

Enfin,  il  faut  rapporter  à  l'époque  de  Frédéric  îï 
l'anéantissement  presque  absolu  de  l'autorité  impé- 
riale en  Italie.  Pendant  les  guerres  de  ce  f)rince  avec 
le  Siège  pontifical,  les  villes  de  là  Lombardie  expul- 
sèrent de  leuts  murs  le  parti  des  Gibelins  fidèles  à 
l'Empereur,  et  se  rendirent  presque  toutes  indépen- 
dantes, il  est  vrai  que  \a  plupart  d'entre  elles,  déchi- 
i*ées  pat  des  factions  qui  y  dominèrent  toUr  à  tour, 
firlireht  par  tomber  sous  là  verge  du  despotisme,  qui 
est  le  dénoûment  ordinaire  des  troubles  civils  dans  les 
républiques.  Mais  l'autorité  des  chefs  de  l'Empire, 
aUssi  redoutable  aUx  tyratis  Qu'elle  avait  été  abhorrée 


—  88  — 

par  les  républiques,  fut  presque  entièrement  effacée 
par  ces  révolutions. 

La  supériorité  territoriale  des  États  d'Empire  avait 
été  reconnue  par  un  acte  solennel  de  Frédéric  II ;  mais 
les  princes  n'en  restèrent  pas  moins  soumis,  pour  leurs 
personnes,  à  la  juridiction  impériale.  L'Empereur 
pouvait  même  les  proscrire ,  c'est-à-dire  les  déclarer 
déchus  de  leurs  dignités  et  de  leurs  fiefs,  sans  l'avis 
de  la  Diète,  pourvu  que,  dans  le  jugement  qui  devait 
prononcer  cette  peine,  il  fût  assisté  par  sept  princes, 
pairs  de  l'accusé.  Pour  juger  les  causes  des  princes 
entre  eux,  ou  les  appels  interjetés  des  jugements  qu'ils 
avaient  prononcés,  Frédéric  II  institua,  en  1235,  la 
charge  de  Juge  du  palais  :  ce  magistrat,  assisté  de 
quelques  assesseurs,  prononçait  au  nom  de  l'Empe- 
reur. 11  était  nécessairement  choisi  dans  la  classe  de 
la  haute  noblesse,  parce  que  c'était  un  privilège  de 
tout  homme  libre  d'être  jugé  par  ses  pairs. 

A  l'époque  dont  nous  parlons,  l'Empereur  disposait 
encore  librement  des  fiefs  devenus  vacants  par  l'ex- 
tinction des  familles  qui  en  étaient  pourvues,  ou  par 
la  félonie  des  titulaires;  mais  la  jalousie  des  États  ne 
permettait  pas  que  ces  fiefs  fussent  réunis  à  la  cou- 
ronne; l'Empereur  devait  en  disposer  dans  l'année. 
C'est  surtout  à  cette  prévoyance  que  les  États  durent 
la  conservation  de  leur  existence  politique.  Elle  pré- 
vint ce  qui  est  arrivé  dans  un  État  voisin.  Les  rois  de 
France,  en  réunissant  successivement  à  leur  couronne 
les  grands  fiefs  devenus  vacants,  préparèrent  et  conso- 
lidèrent la  puissance  absolue,  qui  ne  reconnut  dans  le 
royaume  d'autre  autorité  que  la  volonté  du  monarque. 

Si  la  chute  de  la  puissante  maison  de  Guelfe  opéra, 
vers  la  fin  du  xii*  siècle ,  un  bouleversement  dans 


—  89  — 

l'état  politique  de  l'Allemagne  septentrionale,  l'ex- 
tinction des  maisons  de  Zceringue,  d'Autriche-Baben- 
berg,  de  Thuringe  et  de  Méranie,  qui  eut  lieu  en  1 21 8, 
1246,  1247  et  1248,  causa  des  changements  tout  aussi 
considérables,  quoique  moins  violents. 

La  maison  de  Zaeringue  descendait  de  Berthoud  le 
Barbu,  qui,  après  avoir  été  pendant  quelque  temps 
revêtu  de  la  dignité  de  duc  de  Carinthie ,  conserva 
abusivement  le  titre  ducal  qui,  par  un  autre  abus,  fut 
attaché  aux  terres  que  ce  seigneur  possédait  en  Souabe 
et  en  Suisse.  11  laissa  deux  fils,  dont  l'un  fut  la  tige 
de  la  maison  de  Zaeringue ,  et  l'autre  le  fondateur  de 
celle  de  Bade,  qui  fleurit  encore.  Berthoud  /F,  duc  de 
Zœringue,  fut  nommé,  en  1 1 27,  régent  du  royaume  de 
Bourgogne  :  il  mit  cette  dignité  à  profit  pour  étendre 
sa  puissance  en  Suisse,  où  il  bâtit  Fribourg.  Berthoud  V, 
le  fondateur  de  Berne,  mourut  en  1218,  sans  enfants. 
L'extinction  de  sa  maison  prépara  la  révolution  qui, 
dans  le  xiv"  siècle,  détacha  la  Suisse  de  l'Allemagne. 
Les  possessions  de  Berthoud,  en  Souabe,  échurent  aux 
comtes  de  Fribourg  et  de  Fiirstenberg;  une  partie  de 
ses  domaines  en  Suisse  passa  aux  comtes  de  Kybourg; 
le  comte  de  Savoie  s'empara  du  pays  de  Vaud.  Toutes 
ces  familles  étaient  alliées  aux  ducs  de  Zœringue.  Le 
clergé,  la  noblesse  et  les  villes  de  la  Suisse  profitèrent 
de  l'extinction  de  cette  maison  pour  se  rendre  immé- 
diats. Depuis  des  temps  immémoriaux ,  les  habitants 
d'une  partie  d'Uri,  de  Schwytz,  d'Unterwald  et  du 
pays  de  Hasli,  étaient  en  possession  du  droit  de  se 
gouverner  d'après  leurs  propres  lois  ,  sous  l'inspec- 
tion des  avoyés  (landvôgte)  que  les  Empereurs  en- 
voyaient pour  résider  au  milieu  d'eux.  L'évêque  de 
Constance  était  maître  d'une  partie  considérable  de 
la  Thurgovie;  l'abbé  de  Saint-Gall  possédait  le  Rhin- 
thal  et  l'Appenzell.  La  ville  de  Lausanne  appartenait 


—  90  — 

à  l'évêque  qui  y  siégeait;  celui  de  Baie,  sans  exercer 
de  supériorité  dans  cette  ville^  y  jouissait  de  quelques 
droits  qui  en  dérivent.  Lucet*he  était  une  possession 
de  l'abbaye  de  Murbach  en  Alsace  :  le  chapitre  de 
Saint-Léger,  à  Lucerne,  était  maître  d'une  partie  d'Un- 
terwald.  Une  autre  partie  de  ce  catiton ,  et  de  ceux 
d'Uri  et  de  Schwytz,  était  du  domaine  du  chapitre  de 
Munster  dans  l'Ergau. 

Les  plus  puissants  parmi  les  seigneurs  laïques  de  la 
Suisse  étaient  les  comtes  de  Habsbourg,  qui,  avant  la 
fin  du  xiii^  siècle,  recueillirent  toute  la  succession  de 
Kybourg.  Ils  possédaient  des  domaines  considérables 
en  Thurgovie;  ainsi  que  les  comtés  de  Habsbourg,  de 
Kybourg  j  de  Lehzbourg  et  de  Bade.  11  y  avait  des 
comtes  particuliers  en  Argovie ,  à  Toggenbourg  et  à 
Rapperschweil.  Les  comtes  de  Neufchâtel,  de  Thier- 
stein,  de  Savoie,  de  Gruyère,  de  VYerdenberg,  de  Sar- 
gans,  les  seigneurs  de  Waedischweil,  de  Regensberg, 
et  beaucoup  d'autres  richement  possessionnés  en 
Suisse,  reconnaissaient  la  souveraineté  de  rEmpire> 
mais  devinrent  immédiats  par  l'extinction  des  ducs 
de  Zœringue.  Les  villes  de  Zurich,  de  Baie,  deSoleure, 
de  Berne,  de  Schafhouse,  obtinrent  le  rang  de  villes 
impériales. 

La  succession  de  la  maison  d'Autriche,  dite  de  Ba- 
benberg,  qui  s'éteignit  en  124G,  fut  contestée  par  les 
margraves  de  Moravie  et  par  ceux  de  Misnie;  mais 
les  rois  de  Bohême,  d'origine  slave,  s'en  emparèrent 
et  s'y  maintinrent  jusqu'au  temps  de  Rodolphe  de  Habs- 
hourgf  qui  fonda  la  seconde  maison  d'Autriche. 

La  succession  des  ducs  de  Méranie,  comtes  d'An- 
dechs,  ne  fut  pas  moins  éparpillée  que  celle  de  Zâs- 
ringue.  Les  comtes  de  Gœrz  (Goi'ice)  eurent  le  Tyrol 


—  91  — 

et  ce  que  la  maison  éteinte  avait  possédé  sur  l'Adige. 
Les  Vénitiens  s'emparèrent  des  duchés  d'Istrie  et  de 
Dalmatie.  Une  des  sœurs  du  dernier  duc  porta  dans  la 
maison  de  Châlons  la  dignité  de  comte  palatin  de  Bour- 
gogne, dont  son  frère  avait  été  revêtu.  Les  terres  qu'il 
avait  possédées  dans  le  Vogtland  passèrent  à  une  au- 
tre sœur,  épouse  du  comte  à'Orlamunde.  La  ville  de 
Bayreuth,  avec  une  grande  partie  des  domaines  qui 
formèrent  par  la  suite  les  deux  margraviats  de 
Franconie,  berceau  de  la  maison  royale  de  Prusse, 
échut  à  une  troisième  sœur  qui  avait  épousé  Frédéric 
de  Hahenzollenif  bourgrave  de  Nuremberg. 

Henri  le  Baspon,  detnier  landgrave  de  Thuringe, 
laissa  une  sœur  et  une  nièce ,  la  première  mariée  au 
margrave  de  Misnie,  l'autre  au  duc  de  Brabant.  Après 
une  vive  contestation^  la  succession  fut  partagée  entre 
les  deux  prétendants.  Le  margrave  de  Misnie  eut  là 
Thuringe  sans  la  Seigneurie  de  Hesse,  qui  en  dépen- 
dait alors,  et  prépara,  par  cette  acquisition,  la  gran- 
deur de  sa  maison,  qui  porte  aujourd'hui  la  couronne 
de  Saxe.  Sophie^,  duchesse  de  Brabant,  eut  la  seigneu- 
rie de  Hesse.  La  maison  de  Brabant  se  partagea  alors 
en  deux  branches;  Henri  r  En  faut,  second  fils  de  So- 
phie, prit,  comme  héritier  du  landgrave  de  Thuringe, 
le  titre  de  landgrave  de  Hesse,  et  devint  la  souche  des 
électeurs  et  grands-ducs  de  Hesse. 

La  maison  de  Hohenstaufen  elle-même,  qui,  outre 
le  duché  de  Souabe  dont  l'Alsace  faisait  partie,  et  ce- 
lui de  Franconie,  possédait  le  royaume  des  Deux- 
Siciles,  s'éteignit  en  1268  par  la  mort  tragique  du 
jeune  Conradin  que  le  ravisseur  de  sa  couronne  fit 
décapiter  à  Naples.  Les  princes  de  cette  maison,  dont 
le  nom  rappelle  l'époque  d'une  littérature  antérieure 


—  92  — 

à  un  siècle  d'ignorance  et  de  barbarie,  avaient  donné 
peu  de  soins  à  la  conservation  de  leurs  domaines  situés 
en  Souabe  et  en  Alsace.  La  foule  de  comtes,  de  sei- 
gneurs, de  nobles  et  de  villes  libres  qu'on  trouvait  na- 
guère dans  ces  provinces,  doivent  leur  existence  à  la 
libéralité  ou  àl'insouciance  des  derniers  Hobenstaufen. 
Si,  à  l'extinction  de  cette  maison  illustre,  il  restait  en- 
core quelque  cbose  de  son  patrimoine,  le  duc  de  Ba- 
vière, le  comte  palatin  du  Rhin,  les  margraves  de 
Bade,  les  comtes  de  Wurtemberg  et  de  Habsbourg 
pensèrent  que  la  mort  de  Conradin  les  autorisait  à  se 
l'approprier.  Le  titre  de  duché  de  Souabe  cessa  avec 
ce  prince,  sans  doute  parce  qu'il  ne  restait  plus  de 
domaines  pour  servir  à  la  dotation  d'un  nouveau  duc. 

Guillaume,  comte  de  Hollande,  opposé  par  un  parti 
à  Conrad  IV y  fut  généralement  reconnu  empereur  à  la 
mort  de  ce  dernier;  mais  il  ne  régna  que  deux  ans.  A 
sa  mort,  on  vit  les  sept  électeurs  exercer  seuls  le  droit 
de  donner  un  chef  à  l'Empire.  Ils  en  abusèrent  indi- 
gnement en  mettant  la  couronne  à  l'enchère.  Ils  ne 
s'accordèrent  pas  dans  leur  choix;  un  parti  nomma 
Richard  de  Cornouailles,  fils  de  Jean  sans  Terre  ^  roi 
d'Andeterre;  un  autre  déféra  la  couronne  à  Alfonse  X 
l'Astronome,  roi  de  Castille.  Vingt  années  d'anarchie 
qui  suivirent  ce  schisme ,  replongèrent  l'Allemagne 
dans  la  barbarie  dont  les  dernières  traces  étaient  à* 
peine  effacées.  Lassés  enfin  des  désordres  qui  en 
étaient  résultés,  les  électeurs  nommèrent  en  1273 
Rodolphe,  comte  de  Habsbourg  et  landgrave  de  la  haute 
Alsace,  ou  plutôt  il  fut  nommé  par  le  comte  palatin  du 
Rhin,  sur  lequel  les  six  autres  électeurs  avaient  com- 
promis. 

La  fondation  de  la  seconde  maison  d'Autriche  est 


—  93  — 

révénement  le  plus  remarquable  du  règne  de  Rodolphe. 
Ayant  enlevé  les  duchés  d'Autriche  et  de  Stirie  à  Otto- 
car,  roi  de  Bohême,  qui  s'en  était  injustement  emparé, 
Boâolphe  en  accorda  en  1282  l'investiture  à  son  fils; 
toutefois  la  Carinthie  qui  en  avait  fait  partie,  en  fut 
alors  démembrée  en  faveur  du  comte  de  Tyrol,  beau- 
frère  de  Rodolphe.  Rodolphe  de  Habsbourg  s'efforça  de 
recouvrer  les  droits  régaliens  et  utiles  en  Souabe  et  en 
Alsace,  dont  les  Etats  de  ces  provinces  s'étaient  saisis 
avec  les  domaines  qui  y  appartenaient.  11  établit  en 
Souabe  deux  préfets  ou  avoyers  (  landvôgte),  chargés 
d'exercer  ces  droits  en  son  nom;  un  troisième  préfet 
fut  préposé  aux  villes  libres  de  l'Ortenau,  et  un  qua- 
trième fut  placé  à  la  tête  des  dix  villes  impériales 
d'Alsace.  Ces  préfectures,  devenues  héréditaires,  fu- 
rent successivement  réunies  dans  les  mains  des  archi- 
ducs d'Autriche.  Nous  avons  vu  que  celle  d'Alsace  fut 
cédée  au  roi  ^e  France  par  la  paix  de  Westphalie; 
l'Autriche  céda  celle  d'Ortenau,  par  le  Recès  de  1 803, 
au  duc  de  Modène.  La  préfecture  réunie  de  la  haute 
et  de  la  basse  Souabe,  dont  il  ne  restait  que  quelques 
légers  droits,  fut  éteinte  par  les  dispositions  de  la  paix 
de  Presbourg. 

Les  États  du  royaume  de  Bourgogne  ou  d'Arles 
avaient  profité  de  là  faiblesse  dont  le  gouvernement 
était  frappé  sous  les  derniers  empereurs,  pour  relâcher 
le  lien  qui  les  unissait  à  l'Empire.  On  voit,  par  plu- 
sieurs événements  qui  eurent  lieu  sous  le  règne  de 
Rodolphe,  qu'il  s'occupa  des  moyens  de  le  resserrer. 
Ce  fut  devant  son  tribunal  que  furent  plaides  les  droits 
que  les  filles  de  Raymond  Berengier,  dernier  comte  de 
Barcelone  et  de  Provence,  prétendaient  à  ce  dernier 
pays.  Rodolphe  prononça  pour  la  plus  jeune,  instituée 
héritière  par  le  testament  paternel,  et  donna  en  1280 


—  94  — 

l'investiture  du  comté  de  Provence  à  Charles  d'Anjou, 
roi  de  Naples,  veuf  de  cette  princesse.  En  1288,  il 
accorda  h  Jean  de  Châlons,  comte  de  Bourgogne,  l'in- 
vestiture du  comté  de  Neufchâtel.  Jean  conféra  ensuite 
ce  dernier  comté,  à  titre  d'arrière-fief  de  l'Empire,  à 
un  certain  Rollin^  dont  la  petite-fille  le  porta  dans  la 
maison  des  comtes  de  Fribourg  en  Brisgau,  à  l'extinc- 
tion desquels  il  passa  par  mariage  successivement  dans 
celles  de  Bade  et  de  Longueville.  La  dernière  héritière 
de  cette  maison  le  posséda  jusqu'à  sa  mort  en  1706. 
Alors  les  États  du  pays,  après  avoir  discuté  les  droits 
des  divers  prétendants,  adjugèrent  la  succession  au  roi 
de  Prusse,  en  fondant  cette  décision  sur  les  conditions 
exprimées  dans  l'acte  d'investiture  de  l'empereur  fio» 
dolphe.  Enfin  Rodolphe  fit  la  guerre  à  plusieurs  sei- 
gneurs du  royaume  de  Bourgogne  qui  s'étaient  confé- 
dérés pour  le  maintien  de  leurs  usurpations.  Dans  ce 
nombre  étaient  les  comtes  de  Ferrette,  de  Montbéliard 
et  de  Savoie.  Rodolphe  les  contraignit  de  venir  à  Baie, 
pour  recevoir  de  ses  mains  l'investiture  de  leurs  fiefs, 

Frédéric  de  Hohenzollern ,  dont  le  bisaïeul  avait 
acquis  le  bourgraviat  de  Nuremberg,  et  qui,  par  son 
mariage  avec  la  sœur  du  dernier  duc  de  Méranie,  avait 
obtenu  de  belles  terres  en  Franconie  *,  fut  admis  par 
Rodolphe,  qui  était  son  oncle  maternel,  au  nombre  des 
princes  d'Empire  :  cet  empereur  comprit,  dans  l'in^ 
vestiture  qu'il  lui  accorda,  les  débris  du  duché  de 
Franconie,  resté  vacant  depuis  l'extinction  de  la  maison 
de  Hohenstaufen y  et  dont  par  la  suite  les  évêques  de 
Wiirzbourg  s'arrogèrent  le  titre. 

Le  règne  d'Adolphe  de  Nassau,  qui  fut  nommé, 
en  1292,  successeur  de  Rodolphe  de  Habsbourg,  n'offre 

♦  Voy.  cMessus,  p.  91. 


—  95  — 

rien  de  remarquable  pour  l'objet  qui  nous  occupe,  si 
ce  n'est  la  fin  de  ce  règne.  Elle  nous  fait  voir,  en  1 298, 
l'exemple  d'une  destitution  du  chef  de  l'Empire,  pro- 
noncée par  les  mêmes  princes  qui  l'avaient  élevé  au 
trône.  Elle  ne  le  fut  pourtant  que  par  une  majorité  de 
quatre  électeurs,  et  sans  le  concours  des  trois  autres. 
Les  premiers  élurent  à  sa  place  Albert  d'Autriche,  fils 
de  Rodolphe.  Adolphe  ayant  été  tué  dans  une  bataille 
que  ce  compétiteur  lui  livra,  Albert  fit  procéder  à  une 
nouvelle  élection,  à  laquelle  tous  les  électeurs  prirent 
part.  Il  acheta  leurs  suffrages  par  la  concession  de 
divers  droits  et  privilèges.  Parmi  les  prérogatives  qu'il 
accorda  à  l'électeur  de  Mayence,  il  faut  remarquer  celle 
d'archicbancelier  -  né  de  l'Empire,  avec  droit  de 
nommer  le  vice-chancelier  résidant  à  la  cour  impé- 
riale :  les  électeurs  de  Mayence  n'ont  pas  cessé  d'exercer 
ce  privilège  jusqu'à  la  dissolution  de  l'Empire  germa- 
nique. 

L'origine  de  la  Confédération  helvétique  est  l'événe- 
ment le  plus  remarquable  du  règne  d'Albert.  Son  projet 
d'ériger  dans  la  Suisse,  devenue,  par  l'extinction  des 
ducs  de  Zœringue,  province  immédiate  de  l'Empire, 
une  principauté  destinée  à  un  de  ses  fils,  fut  la  cause 
de  cette  révolution,  et  devint  l'occasion  de  sa  mort. 
Néanmoins,  il  faut  remarquer  que  l'insurrection  des 
Suisses  n'était  pas  proprement  dirigée  contre  l'Empire; 
les  cantons  se  révoltèrent  plutôt  contre  les  usurpations 
de  la  maison  d'Autriche. 

Henri,  comte  de  Luxembourg,  fut  nommé,  en  1 308, 
à  la  place  d'Albert.  Sous  ce  prince,  l'ancienne  famille 
des  rois  slaves  de  Bohême,  qu'une  tradition  populaire 
faisait  remonter  à  un  prince  fabuleux  nommé  Crocus 
et  à  sa  fille  Libussa,  espèce  de  fée  ou  de  magicienne, 
s'éteignit,  et  Henri  trouva  moyen  de  faire  passer  cette 


—  96  — 

couronne  sur  la  tête  de  son  fils  Jean  l'Aveugle.  La  Diète 
de  Spire,  où  cette  affaire  s'arrangea  en  1309,  est  la 
première  où  les  députés  des  villes  immédiates  ou  im- 
périales parurent;  ils  y  formèrent  un  collège  ou  Etat 
particulier.  Cette  admission  du  tiers  état  aux  assem- 
blées nationales  fut  une  suite  de  la  révolution  qui  s'était 
opérée  dans  les  esprits  :  six  ans  auparavant,  Phi- 
lippe IV,  le  Bel,  roi  de  France,  avait  appelé,  pour  la 
première  fois,  le  tiers  état  à  faire  partie  de  l'Assemblée 
des  États  de  son  royaume. 

Ce  fut  sous  Henri  VU  que  commencèrent  les  démem- 
brements du  royaume  de  Bourgogne,  réuni  à  TAUe- 
magne.  Lyon  en  donna  l'exemple.  Cette  ville  impériale 
se  soumit,  à  la  France,  en  1312,  à  l'occasion  d'un 
différend  qui  s'était  élevé  entre  elle  et  ses  arche- 
vêques. 

La  suppression  de  l'Ordre  des  Templiers  est  un 
autre  événement  remarquable  de  ce  règne.  Sans  sévir 
contre  ces  chevaliers,  on  se  contenta  en  Allemagne  de 
supprimer  leur  Ordre,  dont  les  biens  passèrent  à  celui 
de  Saint-Jean  de  Jérusalem.  Ce  dernier,  représenté  par 
le  grand  prieur  de  Heitersheim,  siégea  parmi  les  États 
du  Corps  germanique  jusqu'à  sa  dissolution. 

Il  y  eut,  à  la  mort  de  Henri  VII ,  un  schisme  :  au 
lieu  de  sept  Electeurs,  il  s'en  présenta  neuf,  parce  qu'il 
y  avait  deux  prétendants  à  chacun  des  électorats  de 
Bohême  et  de  Saxe.  Le  parti  autrichien,  qui  désirait 
replacer  la  couronne  impériale  sur  la  tête  d'un  Habs- 
bourg, reconnut  comme  roi  de  Bohême  le  duc  de  Ca- 
rinthie,  en  rejetant  Jean  V Aveugle.  Le  parti  de  Luxem- 
bourg, au  contraire,  admit  comme  électeur  de  Saxe  le 
duc  de  Lauenbourg,  à  l'exclusion  de  la  branche  de 
Wittenberg.  Ce  dernier  parti  élut  empereur  Louis,  duc 


—  97  — 

de  Bavière;  l'autre  lui  opposa  Frédéric ,  duc  d'Au- 
triche. Le  Pape  s'étant  arrogé  le  droit  de  prononcer 
entre  les  deux  compétiteurs,  il  en  résulta  une  querelle 
entre  Louis  de  Bavière  et  la  Cour  de  Rome;  querelle 
qui,  à  cause  de  l'importance  de  son  objet,  se  prolongea 
beaucoup  au  delà  de  la  mort  de  Frédéric  d'Autriche. 
Elle  porta  un  coup  mortel  aux  prétentions  de  supré- 
matie que  les  Papes  essayaient  de  faire  revivre,  mais 
auxquelles  le  changement  qui  s'était  effectué  dans  les  es- 
prits était  contraire.  Ceux  des  électeurs  qui  avaient 
nommé  Louis  de  Bavière,  se  réunirent,  au  mois  de 
juillet  1338,  à  Rensé,  et  y  signèrent  un  acte  de  Con- 
fédération, connu  sous  le  nom  d'Union  générale  élec- 
torale. Elle  avait  pour  objet  le  maintien  de  la  dignité 
de  l'Empire  et  des  droits  et  privilèges  des  Electeurs 
contre  qui  que  ce  soit,  sans  exception.  Cet  acte,  con- 
firmé et  souvent  renouvelé  depuis,  formait  un  des 
statuts  fondamentaux  du  Droit  public  germanique  j 
c'était  le  titre  sur  lequel  reposaient  les  droits  des  Elec- 
teurs comme  corps  politique-  Les  prétentions  ponti- 
ficales donnèrent  encore  naissance  à  un  autre  acte  fon- 
damental, publié  au  mois  d'août  suivant  à  la  Diète  de 
Francfort.  Les  États  d'Empire  déclarèrent  dans  cette 
Constitution  que  la  puissance  impériale  dérive  immé- 
diatement de  Dieu,  et  que  celui  que  la  majorité  des 
Electeurs  aura  nommé  Empereur  ou  Roi,  doit  être  re- 
gardé, par  le  seul  fait  de  cette  élection,  vrai  Roi  et  Em- 
pereur des  Romains,  et  qu'en  cette  qualité,  obéissance 
lui  est  due  par  tous  les  sujets  de  l'Empire,  sans  qu'il 
soit  nécessaire  que  le  Pape  confirme  cette  élection  ^ 

Louis  V  fut  le  premier  empereur  d'Allemagne  qui  ait 
fixé  sa  résidence  ordinaire  dans  une  ville  de  ses  États 
héréditaires,  tandis  que  ses  prédécesseurs  avaient  pour 

*  L'Union  de  Rensé  et  la  Constitution  de  1338  se  trouvent  dans 
ScHMAUSS,  Corp.  jur.  publ  acad.,  p.  9  et  iO. 

VII  7 


—  98  — 

usage  de  transporter  leur  cour  d'une  ville  de  l'Em- 
pire à  l'autre,  et  de  s'y  faire  défrayer,  soit  par  les  re- 
venus des  domaines  de  la  couronne  situés  à  portée  de 
cette  ville,  soit  par  les  subsides  des  princes  et  États. 

Quatre  princes  de  la  maison  de  Luxembourg  furent 
successivement  élevés  à  la  dignité  impériale,  depuis 
1347  jusqu'en  1437;  ce  furent  Charles  /F,  Wenceslas, 
Sigismondj  tous  les  trois  rois  de  Bohême,  et  Josse,  mar- 
grave de  Moravie.  Il  y  eut  cependant  une  interruption 
entre  Wenceslas  et  Sigismondf  de  1400  à  1411.  Robert, 
Électeur  palatin,  occupa  le  trône  pendant  ces  onze  ans. 

Le  nom  de  Charles  IV  est  célèbre  parmi  les  législa- 
teurs d'Allemagne.  La  loi,  dite  Bulle  d'or,  qu'il  fit 
promulguer  en  1356,  à  la  Diète  de  Nuremberg,  est  une 
des  principales  lois  fondamentales  de  l'Empire,  et  la 
source  du  Droit  public  de  l'Allemagne.  Cette  Constitu- 
tion détermine  le  nombre  des  Électeurs,  leurs  droits , 
la  forme  à  suivre  dans  les  élections,  et  décide  quelques 
autres  questions  d'un  intérêt  public  et  général.  Le 
nombre  des  Électeurs  y  est  fixé  à  sept,  dont  trois  ecclé- 
siastiques. La  Bulle  d'or  ne  dit  pourtant  pas  que  ce 
nombre  ne  puisse  être  augmenté.  Elle  ne  parle  pas  du 
duc  de  Bavière,  elle  nomme  seulement  parmi  les  Élec- 
teurs le  chef  de  la  maison  deWittelsbach,  le  comte  pa- 
latin du  Rhin,  archisénécbal  ou  grand-maître  de  l'Em- 
pire, et  Vicaire,  pendant  la  vacance  du  trùne,  dans  les 
provinces  dullhin.LaBulled'orétablitdans  les  maisons 
des  Électeurs  séculiers  la  succession  linéale  agnatique 
avec  le  droit  de  primogéniture.  En  Bohême  seule- 
ment, les  femmes  pouvaient  succéder  en  vertu  d'un 
ancien  privilège. 

Le  comté  de  ïyrol  était  devenu  vacant  sous  le  règne 
de  Louis  V.  Les  maisons  d'Autriche  et  de  Bavière  s'en 
disputèrent  la  possession  jusqu'à  ce  que  la  comtesse 


—  99  — 

Marguerite,  héritière  de  ce  pays,  le  cédât  en  1 363  à  la 
maison  d'Autriche,  qui  depuis  l'a  toujours  regardé 
comme  une  possession  importante^  parce  qu'elle  lui 
assure  la  communication  avec  l'Italie  et  la  Souabe. 

Chaînes  IV  agrandit  considérablement  la  Bohême, 
son  patrimoine,  en  y  réunissant  la  Silésie  et  la  Lusace. 
Ces  provinces  étaient  regardées  comme  des  dépen- 
dances de  la  république  de  Pologne  ;  mais  Casimir  le 
Grand,  roi  de  Pologne,  avait  cédé  ses  droits  à  Jeafi 
r Aveugle,  père  de  Charles  IV.  Jean  engagea  successi- 
vement les  ducs  Piasts  de  Troppau,  d'Oppeln,  de  Tes- 
chen,  de  Glogau,  de  Sagan,  de  Liegnitz  et  de  Brieg  à 
se  soumettre  à  la  couronne  de  Bohême.  Charles  IV 
ayant  épousé  l'héritière  des  duchés  de  Schweidnitz  et 
de  Jauer,  publia  en  1355  une  Pragmatique  Sanction 
par  laquelle  la  Silésie  fut  incorporée  au  royaume  de 
Bohême.  Nous  ne  comptons  pas  comme  un  agrandis- 
sement de  la  maison  de  Luxembourg,  l'acquisition  que 
Charles  IVût  de  l'électorat  de  Brandebourg,  parce  que 
cette  maison  ne  s'y  maintint  pas  longtehips. 

Les  démembrements  du  royaume  d'Arles  continuè- 
rent sous  Charles  IV.  La  reine  Jeanne  de  Naples,  com- 
tesse de  Provence,  ayant  cédé  en  1 348  la  ville  d'Avi- 
gnon au  Pape,  Charles  IV  renonça  formellement,  par 
des  lettres  patentes,  aux  droits  de  l'Empire  sur  ce  dis- 
trict. La  suzeraineté  de  l'Empire  sur  le  comtat  Venais- 
sin  avait  cessé  depuis  1273,  époque  où  les  Papes 
s'étaient  saisis  de  ce  pays. 

Le  Dauphiné  fut  cédé  en  1 349,  par  Humbect,  dernier 
dauphin  de  Vienne,  à  Charles,  fils  aîné  de  Jean,  alors 
duc  de  Normandie,  et  par  la  suite  roi  de  France.  Le 
nouveau  dauphin  prit  encore  l'investiture  de  l'empe-^ 
reur  Charles  /F  y  mais  par  la  suite  on  se  dispensa  dé 
cette  formalité. 


—  100  — 

La  suzeraineté  de  l'Empire  sur  le  comté  de  Bour- 
gogne fut  encore  reconnue  sous  Charles IV  i^ar Philippe 
le  Hardi  ^  duc  de  Bourgogne,  qui  prit  de  l'Empereur 
l'investiture  de  ce  duché,  que  lui  avait  apporté  Mar- 
guerite de  Flandre,  son  épouse. 

Enfin,  Charles  IV  fut  le  dernier  Empereur  qui  ait  été 
couronné  roi  de  Bourgogne.  Ce  couronnement  eut  lieu 
à  Arles  en  1365. 

Les  Viscontif  maîtres  de  Milan,  étaient  revêtus  de  la 
dignité  de  Vicaires  de  l'Empire  :  ils  avaient  profité  de 
ce  titre  et  de  la  haine  dont  étaient  animés  les  divers 
partis  qui  se  disputaient  le  pouvoir  dans  les  divers  pe- 
tits Etats,  pour  se  soumettre  la  plus  grande  partie  de 
la  Lombardie;  mais,  pour  jouir  avec  tranquillité  de 
ces  usurpations,  il  fallait  qu'elles  fussent  sanctionnées 
par  l'autorité  impériale.  L'empereur  Weiiceslas  vendit, 
en  1395,  à  Jean  Galéas  Visconti,  la  confirmation  de  ses 
États,  en  le  créant  duc  de  Milan. 

Cet  Empereur  fut  destitué  en  1399  par  les  Électeurs  : 
dernier  exemple  d'une  procédure  qui  ne  s'est  pas  re- 
nouvelée depuis  dans  l'histoire  d'Allemagne. 

Deux  nouvelles  maisons  électorales  commencèrent 
sous  le  règne  de  l'empereur  Sigismoiid;  celles  qui 
possèdent  encore  aujourd'hui  le  Brandebourg  et  la 
Saxe. 

La  postérité  d'Albert  l'Ours ,  issu  de  l'ancienne  mai- 
son d'Ascanie,  et  premier  margrave  de  Brandebourg, 
s'était  éteinte  dans  la  branche  aînée,  en  1322.  11  res- 
tait cependant  trois  branches  collatérales  de  la  maison 
ascanienne,  celle  de  Saxe,  de  Lauenbourg  et  d'Anhalt, 
toutes  descendantes  d'un  fils  cadet  d'Albert.  Mais 
l'empereur  Louis  prétendant  que  le  margraviat  ou 
électorat  de  Brandebourg  était  fief  vacant  de  l'Em- 


—  101   — 

pire,  en  donna,  en  1324,  l'investiture  à  son  fils  aîné, 
Louis  de  Bavière,  qui  le  céda  à  ses  frères  contre  une 
partie  de  la  haute  Bavière,  qu'ils  lui  abandonnèrent. 
Ottoîij  le  plus  jeune  de  ces  puînés,  vendit,  en  1373, 
l'électorat  à  son  beau-père,  l'empereur  Charles  IV.  Si- 
gismond,  fils  de  celui-ci,  dont  les  finances  étaient 
épuisées  par  les  guerres  de  Hongrie,  le  conféra,  en 
1 41 7,  à  Frédéric  VI  de  HohenzoUern,  bourgrave  de  Nu- 
remberg, souche  des  rois  de  Prusse.  Afin  de  réunir  les 
sommes  qu'il  devait  payer  à  l'Empereur  pour  cette  ac- 
quisition, le  nouvel  Électeur  vendit  à  la  ville  de  Nu- 
remberg le  bourg  de  cette  ville,  c'est-à-dire  le  château 
où  il  résidait  comme  Juge  impérial.  Cette  vente  donna 
lieu  à  une  contestation  qui,  après  avoir  été  long- 
temps assoupie,  s'est  renouvelée  au  commencement  du 
xix^  siècle.  La  ville  de  Nuremberg,  prétendant  avoir 
acquis  avec  le  château  la  juridiction  qui  en  dépendait, 
se  mit  en  possession  d'une  immunité  entière,  tandis 
que  les  Électeurs,  en  aliénant  le  matériel  du  château , 
s'étaient  réservé  de  droit  la  juridiction  qu'ils  tenaient 
de  l'Empire  à  titre  de  fief. 

Albert  III,  dernier  Électeur  de  Saxe  delà  maison  as- 
canienne,  mourut  en  1422.  Sans  égard  aux  droits  des 
ducs  de  Saxe-Lauenbourg  et  des  princes  d'Anhalt, 
qui  descendaient  de  Bernard,  premier  acquéreur  du 
duché  do  Saxe,  l'empereur  Sigismond  conféra  l'électo- 
rat à  Frédéric  le  Belliqueux ,  margrave  de  Misnie  et 
landgrave  de  Thuringe,  qui,  réunissant  ces  deux  pro- 
vinces à  l'électorat  de  Saxe,  lui  donna  un  nouveau 
lustre.  Le  Roi  et  tous  les  ducs  de  Saxe  d'aujoud'hui 
descendent  de  ce  prince. 

Après  les  Empereurs  de  la  maison  de  Luxembourg, 
celle  d'Autriche  occupa  le  trône  impérial ,  sans  inter- 
ruption pendant  trois  cent  trois  ans  jusqu'en  1740. 


—  102  — 

Le  règne  d'Albert  II  n'a  duré  qu'un  peu  plus  d'une 
année;  néanmoins  le  Droit  public  et  ecclésiastique 
date  de  ce  règne  une  Constitution  importante;  c'est 
celle  qui  est  connue  sous  le  nom  de  Sanction  Pragma- 
tique de  Mayence,  Cet  acte  a  été  adressé  en  1 439  par 
l'Empereur,  les  Électeurs  et  États  d'Empire,  en  pré- 
sence des  députés  du  concile  de  Baie.  Il  proclame  la 
supériorité  des  conciles  sur  le  Pape;  abolit  les  réserves 
et  les  grâces  expectatives ,  ainsi  que  les  annates  ;  re- 
connaît que  la  confirmation  des  prélats  appartient  de 
droit  aux  supérieurs  immédiats ,  et  interdit  les  appels 
en  Cour  de  Rome.  Grâce  à  l'indolent  Frédéric  III ,  l'in- 
curie des  temps  suivants  fut  si  grande,  que  cette  Con- 
stitution, fruit  du  progrès  que  les  lumières  avaient 
fait  vers  le  milieu  du  xv"  siècle,  tomba  bientôt  dans 
l'oublia 

Frédéric  III,  cousin  d'Albert  II,  régna  cinquante 
ans,  sans  énergie  et  sans  gloire.  Les  intrigues  des  mi- 
nistres du  Pape  profitèrent  de  la  faiblesse  ou  de  la 
nullité  de  ce  prince,  exclusivement  voué  aux  études, 
pour  lui  faire  signer,  en  1448,  un  nouvel  arrangement 
connu  sous  la  dénomination  de  Concordat  de  la  nation 
germanique,  et  qui  était  destiné  à  remplacer  la  Sanc- 
tion Pragmatique.  Les  publicistes  allemands  ne  sont 
pas  d'accord  sur  le  degré  d'authenticité  de  cette  trans- 
action. 


?  SancliO'pragmatica  Germanorum  illustrata  .  edidit  Christoph- 
Guill.  Kocii ,  Sacri  Romani  Imperii  eques.  Argentorati,  i789,  in-4°.  Il 
existe  trois  exemplaires  authentiques  de  la  Sanction  Pragmatique  de  la 
nation  allemande.  L'édition  de  M.  de  Koch  est  faite  d'après  une  cplla- 
tion  exacte  do  ces  trois  manuscrits.  Il  y  a  joint  le  texte  des  concordats 
■  de  la  nation  germanique  ,  conclus  en  H48  avec  le  pape  Nicolas  V,  et 
qui  sont  moins  favorables  aux  libertés  de  l'Église  allemande  que  la 
sanction  de  4  439 ,  à  laquelle  la  Cour  de  Rome  n'a  jamais  voulu  con- 
sentir. 


—  103  — 

Frédéric  III  n'oublia  pourtant  pas  les  intérêts  de  sa 
maison.  Il  négocia  un  brillant  mariage  pour  son  fils 
Naximilien.  Cet  archiduc  épousa  Marie,  fille  du  der- 
nier duc  de  Bourgogne.  Cette  riche  héritière  apporta 
à  son  époux  des  provinces  qui,  par  leur  étendue,  leur 
situation,  l'opulence  et  l'industrie  de  leurs  habitants, 
valaient  un  royaume.  Par  ce  mariage,  les  duchés  de 
Brabant,  de  Limbourg,  de  Luxembourg  et  de  Gueldre, 
et  les  comtés  de  Flandre,  d'Artois,  de  Namur,  de 
Hainaut,  de  Hollande,  de  Zéelande,  de  Westfrise,  de 
Zutphen  et  de  Bourgogne,  furent  joints  aux  domaines 
de  la  maison  d'Autriche. 

Frédéric  III  assembla  fréquemment  les  États  d'Em- 
pire ;  mais  il  se  dispensai  td'y  aller  en  personne,  et  son 
exemple  fut  suivipar  les  princes.  C'est  ainsi  que  s'établit 
l'usage  de  faire  tenir  les  Diètes  par  des  envoyés  chargés 
de  traiter  avec  les  commissaires  de  l'Em^pereur.  A  l'une 
de  ces  Diètes,  tenue  sous  Frédéric,  en  1474,  les  dépu- 
tés des  villes  se  partagèrent  pour  la  première  fois 
en  deux  bancs. 

L'autorité  impériale,  exercée  par  une  main  ferme  et 
vigoureuse,  était  le  seul  frein  capable  de  retenir  dans 
le  devoir  la  foule  des  petits  souverains  dont  l'Alle- 
magne se  composait.  Cette  autorité  s'anéantit  entière- 
ment sous  le  règne  de  Frédéric  III.  L'anarchie  la  plus 
complète  la  remplaça,  et  le  gouvernement  fut  complè- 
tement désorganisé.  Cette  époque,  dont  le  souvenir 
s'est  perpétué  dans  toutes  les  classes  de  la  nation,  est 
connue  sous  le  nom  de  domination  du  droit  du  plus  fort 
(Faust-und  Kolben-Recht). 

L'excès  du  mal  en  amena  le  remède.  Maacimilien, 
élu  Roi  des  Romains  du  vivant  de  son  père,  lui  suc-» 
céda  en  1493.  Ce  prince  ayant  convoqué,  en  1495, 
une  Diète  à  Worms  pour  obtenir  des  subsides  contre 


—  104  — 

les  Turcs  qui  avaient  fait  des  incursions  en  Autriche, 
et  contre  Charles  VUI ,  roi  de  France,  qui  avait  envahi 
l'Italie,  les  États  exigèrent  qu'il  donnât  les  mains  à  un 
arrangement  qui  pût  garantir  la  tranquillité  publique 
et  la  sûreté  des  personnes,  sans  que  les  États  fussent 
obligés  de  recourir  au  remède  des  confédérations  par- 
ticulières, par  lesquelles  ils  avaient  tâché  jusqu'alors 
de  se  mettre  à  l'abri  des  vexations.  Cet  arrangement, 
convenu  à  la  Diète  de  Worms,  est  connu  sous  le  nom 
de  Paix  publique.  Toute  voie  de  fait  d'État  à  Etat  et  de 
particulieràparticulier,  yestdéfenduesouslespeinesles 
plus  sévères.  Un  tribunal  sédentaire  fut  chargé  de  pro- 
noncer dans  tous  les  différends  qui  s'élèveraient.  Cette 
Cour,  nommée  Chambre  impériale,  devait  être  compo- 
sée d'un  juge  représentant  l'Empereur,  et  par  lui  choisi 
dans  la  haute  noblesse,  et  de  seize  assesseurs  nommés 
à  vie,  dont  la  moitié  serait  prise  dans  la  classe 
des  lettrés  ayant  un  grade  dans  les  universités. 
La  nomination  des  assesseurs  fut  d'abord  regardée 
comme  une  prérogative  impériale;  mais  comme  parla 
suite  les  États  se  chargèrent  de  l'entretien  du  tribu- 
nal, on  leur  abandonna  aussi  le  droit  de  nommer  aux 
places  vacantes  d'assesseurs.  La  Chambre  impériale 
fut  établie  à  Francfort;  transférée  ensuite  successive- 
ment à  Worms,  à  Spire,  à  Esslingue,  à  Augsbourg  ou 
à  Nuremberg,  elle  se  fixa  enfin,  en  1693,  à  Wetzlar, 
où  elle  resta  jusqu'à  l'époque  de  la  dissolution  de 
l'Empire  germanique. 

L'établissement  d'une  cour  de  justice  suprême,  in- 
dépendante de  l'Empereur,  était  une  véritable  atteinte 
portée  aux  droits  du  chef  de  l'Empire ,  regardé  jus- 
qu'alors comme  l'unique  source  de  toute  juridiction. 
Les  États  ne  se  bornèrent  pas  à  cette  première  tenta- 
tive. A  la  Diète  d' Augsbourg  de  1500,  ils  instituèrent 
un  Conseil  de  régence  qui  devait  assister  l'Empereur 


—  105  — 

dans  le  gouvernement  de  l'Empire.  Ce  conseil  devait 
être  composé  de  six  Électeurs,  à  l'exclusion  de  celui 
de  Bohême,  qui,  à  cette  époque,  n'envoyait  pas  de 
ministre  à  la  Diète,  de  deux  princes  ecclésiastiques 
alternant  sur  six,  de  deux  conseillers  de  l'Empereur, 
en  sa  qualité  de  duc  d'Autriche  et  de  Bourgogne,  d'un 
prélat  pris  sur  quatre  qui  alterneraient  entre  eux,  de 
deux  sur  huit  villes  impériales,  et  de  six  Etats  nom- 
més par  tous  leurs  co-États,  à  l'exclusion  des  Elec- 
teurs et  de  la  maison  d'Autriche.  Pour  procéder  au 
choix  de  ces  représentants ,  les  États  qui  devaient  y 
concourir  furent  distribués  en  six  cercles;  savoir  : 
ceux  de  Franconie  ,  de  Bavière ,  de  Souabe ,  du  Rhin, 
de  Westphalie  et  de  Saxe. 

Les  abus  auxquels  le  Conseil  de  régence  donna  lieu, 
les  empiétements  qu'il  se  permit  sur  l'autorité  impé- 
riale, engagèrent  Maximilien  /  à  le  dissoudre  en  1 502  j 
mais,  comme  on  avait  fait  l'expérience  des  avantages 
qui  résultaient,  pour  le  maintien  de  la  tranquillité 
publique,  de  la  division  de  l'Empire  en  cercles,  on  ré- 
solut de  la  conserver.  Néanmoins  le  but  différent  qu'on 
se  proposait  par  cette  division,  en  fit  altérer  l'organisa- 
tion. On  comprit  dans  la  nouvelle  division  les  États  qui 
n'avaient  pas  fait  partie  des  six  cercles  originaires, 
c'est-à-dire  l'Autriche  et  les  Électeurs.  En  conséquence 
on  ajouta,  en  1512,  aux  six  cercles  existants  quatre 
autres;  savoir  :  ceux  d'Autriche,  de  Bourgogne,  de 
haute  Saxe  et  le  cercle  électoral  du  Rhin.  On  dressa 
un  règlement  pour  la  constitution  intérieure  des  dix 
cercles,  et  on  leur  donna  des  chefs  ou  directeurs  char- 
gés d'y  exercer  le  pouvoir  exécutif. 

L'élection  de  Charles -Quint  devint  l'occasion   de 
l'établissement  d'une  nouvelle   loi   fondamentale  de 


—   106  — 

l'Empire,  qui  a  retenu  le  nom  de  Capitulation  impériale. 
Les  appréhensions  qu'inspirait  aux  Etats  la  puissance 
d'un  prince  qui,  aux  possessions  liéréditaires  de  la  mai- 
son d'Autriche,  réunissait  la  monarchie  espagnole ,  fit 
naître  l'idée  de  lui  faire  signer  une  espèce  de  pacte 
renfermant  les  conditions  de  son  élection ,  et  posant 
des  barrières  à  son  autorité.  Depuis  Cliarles-Quint,  tous 
les  Empereurs  ont  signé  de  pareilles  reversales. 

La  Diète  de  Worms,  de  1521,  accorda  au  nouvel 
Empereur,  pour  l'expédition  romaine  qu'il  projetait, 
une  armée  de  vingt  mille  fantassins  et  quatre  mille 
chevaux.  On  dressa  à  cette  occasion  un  nouveau  ta- 
bleau, ou,  comme  on  dit,  une  matricule  réglant  le 
contingent  de  chaque  État.  Jusqu'à  la  dissolution  de 
l'Empire,  cette  matricule  a  subsisté  comme  échelle  de 
toutes  les  contributions  que  les  États  ont  été  appe- 
lés à  payer.  On  admit  une  certaine  somme  comme 
équivalent  des  frais  d'entretien  de  chaque  contingent 
pendant  un  mois;  cette  somme  fut  appelée  mois  ro- 
main; et  lorsque  le  cas  se  présentait  où  il  fallait  que 
l'Empire  fournît  des  subsides  à  l'Empereur,  celui-ci 
avait  coutume  de  demander  un  certain  nombre  de 
mois  romains.  Jusqu'en  1 545  ,  les  États  payèrent  ces 
contingents  de  leurs  domaines  ;  mais,  à  cette  époque, 
il  leur  fut  accordé  de  pouvoir  les  lever  sur  leurs  sujets 
à  titre  de  contribution  ;  car  jusqu'alors  ce  droit  ne 
leur  appartenait  pas.  On  sent  bien  qu'une  fois  inves- 
tis de  cette  prérogative,  les  princes  trouvèrent  des 
prétextes  pour  lui  donner  de  l'extension. 

La  révolution  qui  s'opéra  dans  la  religion  au  com- 
raencement  du  xvi"  siècle  ,  influa  puissamment  sur  la 
Constitution  de  l'Empire  ;  c'est  cette  révolution  sur- 


—  107  — 

tout  qui  lui  a  donné  la  forme  qu'elle  a  conservée  jus- 
qu'au Recès  de  la  députation  de  1803. 

Une  première  conséquence  des  innovations  en  fait 
de  religion  fut  la  translation  du  grand-maître  de  l'Ordre 
Teutonique  en  Franconie.  Un  prince  cadet  de  la  mai- 
son de  Brandebourg,  nommé  Albert,  avait  été  élu,  en 
1512,  grand  maître  de  cet  Ordre  en  Prusse.  Se  trou- 
vant enveloppé  dans  une  guerre  contre  la  Pologne, 
le  ^rand-maître  se  présenta,  en  1524,  à  la  Diète  de 
Nuremberg,  et,  en  sa  qualité  de  vassal  de  l'Empire, 
réclama  l'assistance  de  ce  corps.  N'ayant  pas  obtenu 
de  la  Diète  les  secours  qu'il  avait  droit  d'en  attendre, 
il  traita,  en  1525,  avec  le  roi  de  Pologne,  lui 
abandonna  la  partie  occidentale  de  la  Prusse,  que 
depuis  ce  temps  on  nomma  la  Prusse  royale ,  et  reçut 
de  sa  main  l'investiture  de  la  Prusse  orientale  à  titre 
de  duché  héréditaire.  Immédiatement  après  il  se  dé- 
clara pour  la  nouvelle  doctrine  religieuse ,  et  se  ma- 
ria. Sa  petite-fille  apporta  le  duché  de  Prusse  en  ma- 
riage aJean-Sigismond,  Electeur  de  Brandebourg.  Quant 
à  l'Ordre  Teutonique,  il  protesta  contre  tout  ce  qu'Al- 
bert de  Brandebourg  avait  fait,  le  destitua  en  lui  nom- 
mant un  successeur  qui,  se  mettant  en  possession  des 
biens  de  l'Ordre  situés  en  Allemagne,  fixa  sa  résidence 
à  Mergentheim.  Nous  verrons  des  princes  d'Empire  se 
concerter  avec  Bonaparte  pour  dépouiller  l'Ordre  de 
ces  restes  de  son  ancienne  grandeur. 

Une  autre  conséquence  ,  mais  bien  funeste,  des 
innovations  en  fait  de  religion,  fut  l'usage  des  confé- 
dérations entre  des  États  d'un  parti  contre  ceux  de 
l'autre,  qui  s'introduisit  alors.  L'alliance  de  Torgau, 
conclue  en  1 526  entre  l'Électeur  de  Saxe,  le  landgrave 
de  Hesse ,  l'archevêque  (protestant)  et  la  ville  de 
Magdebourg ,  les  ducs  de  Brunswic-Lunebourg  et  de 


—  108  — 

Mecklenbourg ,  les  princes  d'Anhalt  et  les  comtes  de 
Mansfeld ,  et  la  fameuse  ligue  de  Smalkalde,  donnè- 
rent les  premiers  exemples  de  confédérations  de  ce 
genre.  Ils  furent  imités,  dans  le  xvii^  siècle,  par  la 
Ligue  des  États  catholiques  et  l'Union  des  protestants, 
qui ,  divisant  l'Allemagne  en  deux  corporations  en- 
nemies, préludèrent  à  la  guerre  de  Trente  ans. 

Un  événement  du  règne  de  Charles-Quint ,  étranger 
en  apparence  à  l'Allemagne,  mais  qui  a  eu  la  plus  in- 
time liaison  avec  l'histoire  et  la  politique  de  ce  pays , 
est  l'avènement  de  Ferdinand ,  frère  de  l'empereur 
Charles-Quint  y  aux  trônes  de  Hongrie  et  de  Bohême.  Il 
joignit  ces  deux  couronnes  aux  États  héréditaires  de  la 
maison  d'Autriche  en  Allemagne ,  que  Charles-Quint 
lui  avait  cédés  en  1 521 ,  en  se  réservant  toutefois  les 
pays  de  la  succession  de  Bourgogne,  qu'il  attacha  à  la 
monarchie  espagnole.  Ferdinand  obtint  les  deux  cou- 
ronnes par  son  mariage  avec  Anne,  sœur  du  jeune  roi 
Louis ,  qui  périt ,  en  1 526 ,  à  la  bataille  de  Mohacz , 
âgé  de  vingt  ans  seulement.  En  1531 ,  Ferdinand  fut 
élu  roi  des  Romains.  La  branche  de  la  maison  d'Au- 
triche, qu'il  fonda,  a  possédé  le  trône  de  l'Empire 
jusqu'en  1740. 

Dans  une  Diète  que  Charles-Quint  avait  convoquée 
en  1529,  à  Spire,  la  majorité  des  États  avait  rendu 
une  loi  par  laquelle  on  espérait  arrêter  les  progrès  de 
la  nouvelle  doctrine  religieuse.  Le  parti  attaché  à  cette 
doctrine  protesta  contre  le  décret;  et  c'est  de  cette 
circonstance  que  les  adhérents  de  la  doctrine  prêchée 
par  Luther  furent  dès  lors  désignés  par  le  nom  àQ pro- 
testants, qui  indiquait  plutôt  un  parti  politique  qu'une 
secte  religieuse.  Depuis  la  Diète  de  Spire,  les  protes- 
tants, formant  la  minorité  à  la  Diète,  disputèrent  à  la 
majorité  de  cette  assemblée  le  droit  de  rendre  des  lois 


—  109  — 

généralement  obligatoires.  La  lutte  entre  les  deux  par- 
tis se  prolongea  pendant  plus  d'un  siècle.  Nous  avons 
vu'  que  la  ligue  de  Smalkalde  ,  formée  des  princes  et 
Etats  protestants,  succomba  sous  les  armes  victorieuses 
de  Charles-Quint;  mais  que  celui-ci,  ayant  abusé  de 
l'autorité  que  la  victoire  avait  mise  entre  ses  mains, 
pour  rendre  sa  puissance  arbitraire,  l'électeur  Maurice 
de  Saxe  le  força  à  conclure  la  Paix  de  religion,  une 
des  lois  fondamentales  de  la  Constitution  germanique, 
qui,  sanctionnant  les  droits  politiques  des  protestants, 
laissa  indécises  plusieurs  questions  relatives  aux  rap- 
ports entre  les  deux  partis ,  et  qui  devinrent  la  source 
de  longues  guerres  intestines. 

Le  territoire  de  l'Empire  éprouva  un  nouveau  dé- 
membrement sous  le  règne  du  puissant  Charles-Quint. 
Henri  II,  roi  de  France,  se  rendit  maître  des  villes  de 
Metz,  Tout  et  Verdun,  qui  depuis  sont  restées  séparées 
de  l'Allemagne. 

Un  traité  conclu,  en  1542,  par  le  roi  des  Romains 
avec  le  duc  de  Lorraine,  et  confirmé  la  même  année 
par  l'empereur  Charles-Quint  à  la  Diète  de  Spire,  dé- 
termine les  rapports  entre  le  duché  de  Lorraine  et 
l'Empire  germanique  :  ces  rapports  ont  subsisté  jus- 
qu'en 1 738  ;  un  autre  traité  de  1 548  fixe  ceux  qui  liaient 
à  l'Empire  le  cercle  de  Bourgogne  ou  les  Pays-Bas. 

Sous  Charles-Quint,  la  paix  publique  fut  consolidée 
par  de  nouveaux  règlements  :  on  compléta  aussi  l'or- 
ganisation de  la  Chambre  impériale  et  des  cercles.  Il 
fut  convenu  que  le  premier  prince  en  rang  de  chaque 
cercle,  ou,  quand  le  rang  était  contesté  entre  un  prince 
ecclésiastique  et  un  séculier ,  tous  les  deux  seraient 
chargés  de  porter  à  la  connaissance  des  membres  du 

'  Voy.  1. 1,  p.  7. 


—  110  — 

cercle  les  réquisitions  que  l'Empereur  leur  adressait, 
et  de  les  convoquer  pour  délibérer  sur  les  affaires  qui 
les  concernaient  ;  telle  fut  l'origine  de  ce  qu'on  a  ap- 
pelé Diètes  de  cercle  et  princes  convoquants  {Kreistage 
und  Kreisausschreibende  Fûrsten),  La  turbulence  d'un 
membre  du  cercle  de  Franconie,  Albert^  margrave  de 
Bayreutb,  quij  refusant  de  se  soumettre  aux  disposi- 
tions de  la  paix  de  Passau  ,  continua,  comme  allié  de 
la  France,  à  faire  la  guerre  à  l'Empereur  et  aux  évê- 
ques  catholiques  de  la  Franconie  et  du  Rbin  qu'il  mit 
à  contribution,  engagea,  en  1554,  quelques  cercles  à 
se  liguer  plus  étroitement  pour  leur  défense  commune. 
Les  autres  cercles  ayant  imité  cet  exemple ,  on  s'en- 
tendit enfin,  à  la  Diète  d'Augsbourg  de  1 555,  sur  un 
règlement  ayant  pour  objet  l'exécution  de  la  transac- 
tion de  Passau  et  le  maintien  de  la  tranquillité  géné- 
rale. Ce  conclusum,  connu  sous  le  titre  d'Ordonnance 
d'exécution ,  occupe  une  place  dans  le  code  du  Droit 
public  germanique. 

Avant  la  fin  du  xvi"  siècle,  la  primogéniture  ne  don- 
nait aucune  prérogative  par  rapport  à  l'ordre  de  succes- 
sion dans  les  principautés  d'Empire,  excepté  toutefois 
les  maisons  électorales,  auxquelles  la  Bulle  d'or  avait 
interdit  tout  partage  des  terres  constituant  proprement 
l'électorat.  Plusieurs  circonstances  empêchèrent  les 
princes  d'imiter  ce  que  cette  loi  avait  déterminé  pour 
les  Electeurs  ;  la  première  fut  l'influence  qu'eut  sur 
les  idées  du  siècle  l'esprit  du  Droit  romain,  auquel 
la  succession  linéale  est  opposée  :  on  fut  longtemps  à 
s'apercevoir  de  l'inconvénient  qu'il  y  avaità  appliquer 
au  Droit  public  les  dispositions  du  Droit  civil.  En  par- 
tageant les  territoires  entre  plusieurs  héritiers,  on  aug- 
menta le  nombre  des  États  votants  à  la  Dièie,  et  les 
princes  séculiers  s'assurèrent  ainsi  la  majorité  sur  les 


—  111  — 

princes  ecclésiastiques.  La  maison  de  Brandebourg  fut 
la  première  qui,  en  1 473;  établit,  par  un  statut  de  famille, 
qu'à  l'exception  des  margraviats  de  Franconie,  que  l'É- 
lecteur Albert-Ulysse  venait  de  donner  en  apanage  à 
ses  fils  cadets,  toutes  les  autres  provinces  et  acquisitions 
futures  resteraient  réunies  sous  le  gouvernement  du 
chef  de  la  famille.  L'Autriche  et  plusieurs  autres  mai- 
sons suivirent  cet  exemple.  L'introduction  du  droit 
de  primogéniture,  qu'aucune  loi  générale  n'a  pres- 
crite, produisit  plusieurs  résultats.  Les  princes  ca- 
dets, réduits  à  leurs  apanages,  contractèrent  moins 
fréquemment  des  mariages,  et  préparèrent  ainsi  l'ex- 
tinction de  plusieurs  branches  ou  familles  illustres. 
La  Diète  prit  alors  une  nouvelle  forme.  Jusqu'alors 
on  regardait  le  droit  d'y  siéger  comme  appartenant  aux 
familles  dont  les  chefs  avaient  droit  d'y  paraître  ;  mais, 
dans  le  \yf  siècle,  on  commença  à  suivre  un  autre 
principe  qui,  depuis,  a  prévalu  comme  maxime  du 
Droit  public  germanique.  D'après  le  nouveau  système, 
le  droit  de  prendre  part  aux  délibérations  générales 
appartenait  moins  aux  familles,  qu'il  n'était  affecté 
aux  pays.  On  prit  pour  règle  la  Diète  de  1582.  Toutes 
les  voix  que  les  différents  chefs  de  branches  d'une 
maison  avaient  portées  à  cette  Diète  se  réunissaient, 
par  l'extinction  des  branches,  sur  la  tête  des  chefs  des 
branches  survivantes,  auxquels  passait  le  territoire 
que  les  branches  éteintes  avaient  possédé  en  1582. 
D'un  autre  côté,  le  pays  dont  le  prince  n'avait  pas  as- 
sisté à  cette  Diète,  resta  sans  représentant.  C'est  ainsi 
que  la  branche  aînée  de  la  maison  palatine  eut,  indépen- 
damment de  la  voix  électorale,  cinq  voix  dans  le  collège 
des  princes,  parce  qu'à  la  Diète  de  1 582,  il  avait  paru 
des  comtes  palatins  de  Lautern,  de  Simmern,  de  Neu- 
bourg,  de  Deux-Ponts  et  de  Veldenz,  dont  les  fiefs  fu- 
rent, par  la  suite  des  temps,  successivement  réunis 


—  112  — 

sur  une  seule  tête;  tandis  que  le  duché  de  Bavière,  si 
important  par  son  étendue  et  sa  population,  n'en  eut 
qu'une  seule,  et  que  la  maison  de  Hohenzollern,  celle 
de  Nassau,  qui  avait  donné  un  Empereur  à  l'Allema- 
gne, se  trouvèrent  excluesdes  délibérations  de  la  Diète. 
Autre  conséquence  de  ces  changements  :  jusqu'alors 
tout  vassal,  décoré  par  le  chef  de  l'Empire  de  la  di- 
gnité de  prince,  se  présentait  à  la  Diète  pour  prendre 
place  dans  le  collège  auquel  il  venait  d'être  agrégé; 
mais,  depuis  le  nouveau  Droit  public,  les  États  ne  re- 
connurent plus  à  l'Empereur  le  droit  de  leur  adjoin- 
dre un  collègue  sans  leur  autorisation  expresse;  et  pour 
l'accorder,  ils  exigeaient  que  le  suffrage  de  l'aspirant 
fût  attaché  à  une  possession  immédiate  analogue  au 
rang  auquel  il  prétendait.  Les  assemblées  des  cercles 
imitèrent  le  procédé  de  la  Diète  de  l'Empire,  de  ma- 
nière que  chaque  prétendant  fût  obligé  de  négocier 
son  admission.  Il  arriva  que  tel  prince  qui  n'avait  pu 
parvenir  à  siéger  à  la  Diète  générale,  prenait  part  aux 
assemblées  des  Diètes  particulières  des  cercles,  ou  que 
des  princes  occupaient  dans  les  assemblées  des  cercles 
le  rang  de  princes,  quoique  la  Diète  de  l'Empire  ne 
les  eût  admis  qu'avec  le  titre  de  comtes. 

La  guerre  de  Trente  ans  opéra  dans  la  Constitution 
germanique  une  révolution  complète,  et  lui  donna  la 
forme  qu'avec  de  légères  modifications  elle  a  conser- 
vée jusqu'aux  derniers  temps.  Nous  avons  fait  un  am- 
ple exposé  de  la  guerre  de  Trente  ans  et  de  la  paix  de 
NN  estphalie  qui  la  termina;  ici,  nous  donnerons  en  peu 
de  mots  le  résumé  des  changements  que  cette  époque 
mémorable  produisit  en  Allemagne. 

1"  Les  provinces  unies  des  Pays-Bas,  la  Suisse,  les 
trois  évêchés  de  la  Lorraine,  et  l'Alsace  furent  démem- 
brés de  l'Empire. 


—  113  — 

2"  Par  une  nouveauté  inouïe  jusqu'alors,  une  puis- 
sance étrangère,  la  Suède,  fut  reçue  membre  du  Corps 
germanique. 

3°  On  donna  en  Allemagne  le  premier  exemple  de 
sécularisations  ;  elles  ne  frappèrent  pourtant  que  des 
corporations  ecclésiastiques  qui  avaient  embrassé  la 
religion  protestante,  et  l'on  n'osa  pas  encore  les  éten- 
dre sur  des  fondations  dont  les  titulaires  étaient  restés 
fidèles  à  l'ancienne  croyance. 

4°  On  vit  le  premier  exemple  d'une  collation  de  la 
dignité  électorale. 

5"  On  alloua  aux  protestants  V égalité  des  droits  avec 
les  catholiques  y  en  comprenant  sous  le  nom  général 
de  protestants ,  les  adhérents  de  la  Confession  d' Augs- 
bourg  et  les  réformés. 

6"  On  admit  comme  principe  qu'en  certaines  ma- 
tières, la  majorité  des  suffrages  à  la  Dihte  ne  ferait  pas 
loi. 

V  Tous  les  droits  et  privilèges  des  États,  ainsi  que 
la  plénitude  de  la  supériorité  territoriale,  telle  que  les 
États  l'avaient  successivement  obtenue  ou  usurpée,  et 
qui  leur  était  en  partie  contestée,  furent  sanctionnés 
dans  toute  leur  étendue. 

8°  On  leur  reconnut  particulièrement  le  droit  de 
faire  des  alliances  entre  eux  et  avec  les  puissances 
étrangères,  pourvu  qu'elles  ne  fussent  pas  dirigées 
contre  l'Empereur  et  l'Empire,  contre  la  Paix  publique 
ni  celle  deWestphalie;  et  par  là,  on  plaça  véritablement 
ces  États  au  rang  de  souverains. 

9"  Il  fut  statué  que  les  suffrages  des  villes  impériales 
avaient  la  même  valeur  que  ceux  des  autres  États  , 
qu'ils  étaient  délibératifs,  et  non  puremement  consul- 
tatifs; on  n'établit  pourtant  pas  le  principe  que  l'ac- 
cord de  deux  collèges  quelconques,  parmi  les  trois 
dont  la  Diète  se  composait,  ferait  loi. 

vu  8 


—  114  — 

10"  On  reconnut  le  droit  des  États  de  participer, 
par  leurs  suffrages  à  la  Diète,  à  la  décision  de  toutes  les 
affaires  qui  concernaient  la  généralité  de  l'Empire , 
nommément  à  la  législation  civile,  à  l'assiette  des  con- 
tributions, à  la  fixation  de  l'état  militaire,  aux  décla- 
rations de  guerre  et  à  la  conclusion  des  traités  de  paix 
et  d'alliance. 

11  "  La  juridiction  concurrente  du  Conseil  aulique  de 
l'Empereur  avec  la  Chambre  impériale  fut  sanctionnée, 
et  les  deux  Cours  reçurent  une  organisation  conforme 
aux  stipulations  de  la  Paix  de  religion. 

1 2"  L'Empereur  ayant  prétendu  que  le  droit  démet- 
tre un  État  d'Empire  au  ban  était  réservé  à  la  majesté 
impériale,  et  les  parties  contractantes  n'ayant  pu  s'ac- 
corder sur  cet  objet ,  la  décision  de  la  question  fut 
renvoyée  à  la  prochaine  Diète. 

Plusieurs  autres  objets  étaient  dans  le  même  cas  ; 
mais  cette  Diète  qui  devait  se  réunir  six  mois  après 
la  conclusion  de  la  paix,  ne  s'assembla  qu'en  1653. 
On  y  admit  dans  le  deuxième  collège  plusieurs  princes 
qui  n'y  avaient  pas  eu  de  suffrages  jusqu'alors,  savoir  ; 
les  princes  de  Hohenzollern,  ceux  d'Eggenberg  éteints 
en  1717;  de  Lobkowitz,  deSalm,  de  Dietrischtein,  de 
Piccolomini',  d'Auersberg,  les  princes  de  Nassau-Ha- 
damar  et  Siegen,  et  ceux  de  Nassau-Dillenbourg  et 
Dietz.  Les  prélats  d'Empire  non  siégeants  dans  le  col- 
lège des  princes,  qui  jusqu'alors  n'avaient  eu  qu'une 
seule  voix  curiale  ou  collective,  en  obtinrent  deux  :  il 
en  fut  de  même  des  comtes.  Les  autres  matières  réser- 
vées à  cette  Diète  furent  renvoyées  à  l'assemblée  d'une 
dépulation  de  l'Empire  qui  devait  se  tenir  prochaine- 


'  Le  prince  Octave  Piccolomini,  duc  d'AiiALFi,  étant  mort  en  1C56 

sans  liiijser  d'enfants,  son  droit  de  suffriige  s'éteignit. 


—  115  — 

ment  à  Francfort.  La  Diète  de  1653,  qui  se  prolongea 
jusqu'à  1654,  est  remarquable  comme  la  dernière  qui 
ait  publié  un  Reces,  ou  acte  renfermant  l'ensemble 
des  dispositions  arrêtées  par  les  États  pendant  leur 
réunion.  La  Diète  qui  suivit  immédiatement,  celle  de 
1 663,  resta  assemblée  jusqu'en  1 806,  où  elle  fut  dis- 
soute d'une  manière  violente,  sans  avoir  pu  publier 
un  Recès.  Le  Recès  de  1 654  statue,  entre  autres,  que 
les  sujets  aideront  les  États  à  conserver  et  garder  les 
forteresses;  disposition  qui  devint  un  nouveau  motif 
sur  lequel  les  États  fondèrent  le  droit  d'imposer  des 
contributions  à  leurs  sujets. 

Les  Électeurs  qui  dressèrent  la  capitulation  de  Léo- 
pold  I  portèrent  de  nouvelles  atteintes  aux  droits  de  la 
nation ,  en  enlevant  aux  États  provinciaux  la  préroga- 
tive d'administrer  les  caisses  publiques,  et  celle  de  se 
réunir  spontanément  sans  avoir  été  convoqués  par  les 
princes.  On  peut  dire  que  c'est  cette  disposition  qui  a 
vraiment  établi  le  gouvernement  monarchique  des 
princes  d'Empire  \ 

En  se  perpétuant  depuis  1663,  toutefois  sans  en 
avoir  expressément  déclaré  l'intention,  la  Diète  priva 
de  fait  l'Empereur  d'une  des  prérogatives  dont  il  avait 
joui  auparavant,  celle  de  convoquer  et  de  dissoudre 
l'assemblée  des  États.  Jusqu'alors  les  princes  avaient 
assisté  en  personne  aux  Diètes,  et  il  était  rare  qu'ils 
s'y  fissent  représenter  par  des  plénipotentiaires; 
mais,  depuis  1663,  un  usage  contraire  a  prévalu, 
surtout  depuis  qu'un  conclusum,  pris  en  1670, 
autorisa  les  États  à  faire  supporter  à  leurs  sujets  les 
frais  causés  par  les  légations  à  la  Diète ^  L'autorité  de 

'  Voy.  Cap.  Imp.,  art.  xv,  g  2. 

*  Les  États  dressèrent  même,  au  mois  d'octobre  1 670,  à  la  pluralité  des 
voix,  un  avis  par  lequel,  étendant  beaucoup  la  disposition  du  Recès  de 


^  116  — 

la  Diète  a  beaucoup  souffert  de  ce  changement;  le  plus 
souvent,  les  objets  de  délibération  étaient  convenus 
depuis  longtemps  entre  les  grandes  Cours,  par  l'inter- 
médiaire des  légations  qu'on  y  entretenait,  pendant 
qu'on  les  discutait  encore  longuement  à  la  Diète.  Par 
la  même  raison,  cette  assemblée  de  ministres  a  pris  la 
forme  d'un  Congrès  tenu  entre  des  puissances  indépen- 
dantes, plutôt  que  d'une  assemblée  de  délégués  de  di- 
verses parties  d'un  même  royaume. 

En  1692,  l'empereur  Léopold  I  accorda  à  la  maison 
de  Brunswic-Lunebourg  la  dignité  électorale.  De  très- 
vives  discussions  s'élevèrent  alors  entre  le  chef  de 
l'Empire  et  les  États,  sur  la  question  de  savoir  si  la 
prérogative  en  vertu  de  laquelle  l'Empereur  seul  était 
regardé  comme  la  source  d'où  émanaient  toutes  les  di- 
gnités, s'étendait  jusqu'au  droit  de  nommer  des  Élec- 
teurs. La  question  fut  enfin  décidée  par  forme  de  trans- 
action. Le  nouvel  Électeur  fut  reconnu;  mais  l'Empe- 
reur promit  de  ne  plus  conférer  sans  le  consentement 
des  États,  une  dignité  à  laquelle  étaient  attachées  des 
fonctions  si  augustes. 

L'Empire  germanique  souffrit  encore  un  démembre- 
ment considérable  dans  le  xviii"  siècle  ;  la  paix  de 
Vienne  de  1 738  donna  à  la  France  le  duché  de  Lor- 
raine, dont  le  souverain  fut  indemnisé  par  la  posses- 
sion de  la  Toscane. 

La  maison  de  Habsbourg-Autriche  s'éteignit  en 
1740.  Cet  événement  n'eut  pas,  par  lui-même,  de  ré- 

4  654  dont  nous  avons  parlé,  ils  s'attribuèrent  presque  Siins  aucune  res- 
triction le  droit  d'imposer  leurs  sujets;  mais  l'autorité  lutélaire  do 
l'Empereur  fit  échouer  ce  projet.  La  ratification  fut  refusée  le  3  fé- 
vrier 1671,  parce  que,  dit  le  décret,  l'Empereur  a  l'obligation  de  main- 
tenir chacun  dans  ses  droits  acquis.  Voy.  Schmauss,  Corp.  jur.  publ. 
acad.,  p.  1077. 


—  117  — 

sultats  importants  pour  la  Constitution  de  l'Empire  ; 
il  ne  produisit  pas  le  bouleversement  que  la  France 
voulait  opérer.  Il  n'en  fait  pas  moins  époque  dans 
l'histoire  d'Allemagne,  parce  qu'il  fournit  au  roi  de 
Prusse  l'occasion  d'élever  sa  monarchie  au  rang  d'une 
puissance  prépondérante.  Dès  lors,  on  put  regarder 
l'Allemagne  comme  partagée,  pour  ainsi  dire,  en  deux 
corps  politiques  ayant  des  intérêts  différents  et  souvent 
opposés;  l'un,  qu'on  peut  appeler  le  parti  autrichien, 
se  composait  surtout  des  princes  ecclésiastiques  dont 
le  grand  nombre  assurait  à  l'Autriche  la  majorité  à  la 
Diète;  les  princes  héréditaires,  et  principalement  ceux 
de  la  confession  d'Augsbourg,  se  rangeaient  sous  la 
bannière  de  la  Prusse,  et  aimaient  à  être  regardés 
comme  les  défenseurs  des  libertés  de  l'Allemagne 
contre  les  empiétements  de  l'autorité  impériale.  Cette 
division,  dont  nous  avons  plus  d'une  fois,  dans  cet 
ouvrage,  indiqué  les  effets,  est  du  nombre  des  causes 
qui  renversèrent  la  Constitution  germanique. 
-  Après  la  mort  de  Charles  VI,  les  Électeurs,  influencés 
par  la  France,  nommèrent  un  Empereur  de  la  maison 
de  Bavière;  mais,  en  1745,  ils  retournèrent  à  la  mai- 
son d'Autriche,  c'est-à-dire  à  cette  nouvelle  maison 
fondée  par  l'héritière  de  Habsbourg.  Son  époux,  Fran- 
çois /,  qui  avait  échangé  son  duché  de  Lorraine  contre 
la  Toscane,  Joseph  II  et  Léopold  II,  ses  fils,  et  Fran- 
çois II,  fils  du  dernier,  terminent  la  série  des  Empe- 
reurs d'Allemagne. 

Sous  le  règne  de  Joseph  II,  en  1 778,  la  branche  ca- 
dette de  la  maison  de  Wittelsbach  s'éteignit  :  l'Électeur 
palatin  réunit  le  duché  de  Bavière  à  ses  autres  posses- 
sions, et  reprit  la  cinquième  place  parmi  les  Électeurs. 
Cette  maison  devint  ainsi  la  troisième  en  puissance  de 
TAllemagne. 


—  118  — 

L'ambition  remuante  de  l'empereur  Josep/i// inspira 
aux  États  d'Empire  des  appréhensions  pour  le  main- 
tien de  la  Constitution  de  l'Empire.  Le  roi  de  Prusse 
devint  l'auteur  d'une  confédération  des  principaux 
princes  d'Allemagne,  qui  s'annoncèrent  comme  les 
protecteurs  des  libertés  germaniques. 

La  Diète,  convoquée  en  1663,  avait  continué  sans 
interruption  ses  séances  pendant  le  règne  de  Léopold  I 
et  de  son  fils  Joseph  I;  mais,  pendant  les  interrègnes 
qui  eurent  lieu  en  171  !,  et  1740,  on  avait  élevé  des 
doutes  sur  le  droit  de  cette  assemblée  de  continuer  ses 
séances,  et  sur  celui  des  Électeurs  palatin  et  de  Saxe 
qui,  à  ces  époques,  remplissaient  les  fonctions  im- 
périales ,  de  nommer  un  plénipotentiaire  à  la  Diète. 
Cette  question  de  Droit  public,  que  les  Électeurs  avaient 
essayé  de  faire  décider  en  faveur  des  Vicaires,  par  la 
capitulation  de  Charles  VII,  fut  renouvelée  dans  l'in- 
terrègne qui  eut  lieu  en  1790,  après  la  mort  de  Jo- 
seph IL  Les  collèges  de  l'Empire  arrêtèrent  alors  de  re- 
connaître le  commissaire  que  les  Vicaires  enverraient 
à  Ratisbonne,  sans  cependant  lui  accorder  le  rang  et 
les  prérogatives  dont  jouissait  celui  de  l'Empereur.  Les 
Vicaires  n'ayant  pas  été  satisfaits  de  ce  projet  de  con- 
clusum,  la  question  restade  nouveau  indécise  jusqu'à 
l'interrègne  de  1792.  A  cette  époque,  on  s'entendit  sur 
les  points  litigieux,  et,  pour  la  première  et  la  dernière 
fois,  on  vit  à  Ratisbonne  un  commissaire  des  Vicaires 
de  l'Empire. 

Nous  avons  fait  voir  par  quelle  suite  de  concessions, 
d'usurpations  et  de  transactions,  se  forma  successive- 
ment la  Constitution  do  l'Empire  jusqu'à  l'époque  du 
Recès  de  la  députation  do  1 803.  Si  l'on  demande  main- 
tenant ce  qu'était  cette  Constitution  germanique ,  pré- 
conisée par  les  uns  comme  le  boulevard  de  l'indépen- 


—  119  — 

dance  des  États  d'Europe,  décriée  parles  autres  comme 
une  machine  compliquée  dont  le  frottement  avait  usé 
les  rouages,  et  que  le  premier  choc  renverserait,  nous 
ne  pouvons  mieux  répondre  à  cette  question  qu'en  résu- 
mant le  tableau  historique  que  nous  venons  de  tracer. 

On  peut  envisager  l'Allemagne  sous  un  double  point 
de  vue,  l'un  géographique  et  l'autre  politique. 

Sous  le  rapport  géographique,  l'Empire  d'Alle- 
magne se  composait  de  quatre  monarchies,  ancienne- 
ment indépendantes.  Trois  de  ces  États,  les  royaumes 
d'Allemagne,  de  Lorraine  et  de  Bourgogne,  étaient 
réunis  à  des  conditions  parfaitement  égales,  et  leurs 
habitants  tellement  amalgamés,  que  leurs  droits  étaient 
les  mêmes;  mais  de  ces  trois  royaumes,  un  seul  avait 
conservé  l'intégrité  de  ses  limites;  des  deux  autres,  il 
ne  restait  plus  que  de  faibles  parcelles.  La  France 
s'était  emparée  des  plus  belles  provinces  de  ces 
royaumes.  La  Provence,  le  Dauphiné,  Lyon,  la  Suisse 
et  la  Franche  -  Comté ,  anciennes  dépendances  du 
royaume  d'Arles,  étaient  perdus  depuis  longtemps  : 
la  Savoie,  la  principauté  de  Montbéliard  et  l'évêché  de 
Baie  étaient  tout  ce  qui  en  rappelait  encore  l'existence. 
La  Lorraine  fut  démembrée  en  1738;  les  belles  con- 
trées, situées  entre  la  rive  gauche  du  Rhin  et  la  mer 
du  Nord,  et  formant  le  reste  du  royaume  de  Lorraine, 
ne  furent  cédées  que  par  la  paix  deLunéville.  Le  qua- 
trième royaume  dont  se  composait  l'Empire  d'Alle- 
magne, celui  d'Italie,  n'avait  jamais  été  tellement 
réuni ,  que  ses  habitants  eussent  joui  des  mêmes 
droits  politiques  avec  les  Allemands,  les  Lorrains  et 
les  Bourguignons,  qui  ne  formaient  qu'une  seule  na- 
tion. L'Italie  était  plutôt  regardée  comme  un  pays 
conquis,  ou  comme  un  État  annexé  aux  autres,  et 
placé  sous  le  gouvernement  d'un  seul  chef.  Elle  était 
exclue  du  droit  de  concourir  à  la  nomination  de  ce 


■—  120  — 

chef;  elle  le  recevait  des  mains  des  Allemands.  Celui 
que  les  États  d'Allemagne  avaient  élevé  sur  le  trône, 
était,  par  ce  fait  même,  roi  d'Italie.  Il  allait,  il  est 
vrai,  prendre  la  couronne  lombarde  à  Milan;  mais  il 
le  faisait  pour  se  conformer  à  un  antique  usage;  et  les 
États  d'Italie  pouvaient  aussi  peu  lui  refuser  cette 
couronne,  qu'il  avait  dépendu  de  leur  faveur  de  la  lui 
déférer.  Si,  sous  ce  rapport,  le  royaume  d'Italie  pa- 
raissait n'occuper  dans  l'Empire  d'Allemagne  qu'un 
rang  subordonné,  d'un  autre  côté  on  pouvait  l'envi- 
sager comme  le  premier  en  considération,  parmi  les 
quatre  États  dont  l'ensemble  formait  cet  Empire.  C'est 
au  royaume  d'Italie  qu'était  proprement  attachée  la 
dignité  d'Empereur  romain.  Ce  n'était,  dans  l'origine, 
qu'après  avoir  ceint  la  couronne  de  fer,  que  les  mo- 
narques allaient  prendre  celle  d'Empereur  romain  : 
jusqu'à  ce  moment,  ils  ne  portaient  que  le  titre  de 
roi  d'Allemagne.  Lorsque,  parla  suite,  ces  princes 
cessèrent  de  se  faire  couronner  à  Rome,  ils  prirent  le 
titre  d'Empereurs  élus;  c'est  celui  qu'ils  ont  porté 
jusqu'à  la  dissolution  de  l'Empire.  Au  reste,  les  princes 
et  les  villes  du  royaume  d'Italie  avaient  si  bien  profité 
de  l'éloignement  du  souverain,  et  des  embarras  dans 
lesquels  les  rois  d'Allemagne  se  trouvaient  presque 
continuellement,  qu'ils  s'étaient  rendus  entièrement 
indépendants,  et  que  le  faible  lien  qui,  dans  les  der- 
niers temps,  les  réunissait  encore  à  l'Empire  d'Alle- 
magne, n'était  plus  qu'un  lien  féodal. 

Sous  le  point  de  vue  politique,  la  question  se  réduit 
à  savoir  quelle  était  la  forme  du  gouvernement  de 
l'Allemagne.  Jusqu'à  l'époque  oii  ce  gouvernement  fut 
renversé,  les  publicistes  ont  répondu  selon  qu'ils 
étaient  attachés  à  ce  qu'on  appelait  le  parti  autrichien 
ou  catholique,  ou  bien  au  parti  protestant  qui  aimait 


—  121   — 

à  se  nommer  le  parti  de  la  liberté.  Aujourd'hui  que 
les  passions  et  l'esprit  public  ont  pris  une  autre  di- 
rection, il  deviendra  plus  facile  de  résoudre  la  question, 
en  prenant  pour  guide  l'histoire  d'Allemagne,  sans  se 
placer  sous  les  bannières  d'aucun  des  deux  partis. 

Les  écrivains  protestants,  depuis  celui  qui  s'est 
masqué  sous  le  nom  à'Hippolyttis  a  Lapide,  voulaient 
faire  envisager  l'Allemagne  comme  une  confédération 
politique,  ayant  à  sa  tête  un  chef  électif.  Mais  s'il  existe 
une  forme  de  gouvernement  pour  laquelle  le  contrat 
social  ne  soit  pas  une  feuille  de  papier,  c'est  l'asso- 
ciation politique  d'États  souverains  et  indépendants 
qui  se  réunissent  pour  leur  défense  commune.  Avant 
de  former  une  telle  union,  les  États  dont  elle  se  com- 
pose doivent  avoir  existé,  un  instant  au  moins,  comme 
souverains.  En  entrant  dans  une  société  politique,  ces 
États  consentiront  à  modifier,  pour  l'utilité  générale, 
quelques-uns  de  leurs  droits  de  souveraineté;  mais 
ce  consentement  ne  saurait  être  supposé,  et  ces  États 
continueront  d'exercer  tous  les  droits  de  souveraineté 
auxquels  ils  n'auront  pas  expressément  renoncé.  La 
monarchie,  l'aristocratie,  tous  les  régimes  mixtes  se 
forment  successivement.  Dans  la  confédération  poli- 
tique, il  faut  un  acte  instantané,  il  faut  une  volonté 
positive,  clairement  exprimée;  aucune  supposition 
de  droit  ne  saurait  la  remplacer. 

Or,  un  tel  acte  n'a  pas  existé  en  Allemagne  :  sa 
Constitution  n'a  pas  été  l'œuvre  d'un  moment;  elle 
s'est  faite  successivement ,  comme  s'est  formée  la 
Constitution  anglaise,  comme  se  forment  toutes  les 
constitutions,  par  l'influence  des  circonstances  et  par 
le  changement  qu'ont  éprouvé  les  opinions  politiques 
et  religieuses  des  peuples.  Jamais  les  États  dont  l'Em- 
pire germanique  était  composé,  n'ont  été  un  instant 
indépendants  ni  souverains.  Tous  les  droits  qu'ils  ont 


—  122  — 

possédés  tant  à  l'égard  du  mode  de  leur  dépendance 
du  chef,  que  dans  leurs  rapports  avec  le  peuple  sou- 
mis à  leur  volonté,  ils  les  ont  successivement  acquis, 
usurpés  ou  arrachés  à  ce  chef.  Quoiqu'ils  aient  habi- 
lement profité  des  événements,  ils  ne  sont  pourtant 
jamais  parvenus  à  s'assurer  même  le  degré  d'indé- 
pendance et  de  souveraineté  auquel  restent  placés  des 
États  qui  ont  conclu  une  confédération.  Jamais  il  n'a 
existé  de  pacte  par  lequel  ils  seraient  entrés  volontai- 
rement dans  une  société  politique.  Réclamaient-ils  un 
droit  de  souveraineté,  ils  vous  citaient  la  loi  qui  le 
leur  accordait,  l'acte  qui  le  leur  octroyait;  enfin  cette 
possession  ou  observance  à  laquelle  ils  avaient  si  ha- 
bilement assigné  la  même  valeur  qu'aux  lois,  parce 
qu'elle  sanctifiait  à  la  longue  toutes  les  usurpations. 
Mais,  dans  tous  ces  cas,  la  supposition  de  droit  était 
contre  eux;  c'était  à  eux  à  prouver  la  possession. 
L'autorité  centrale,  créée  par  une  réunion  d'États  sou- 
verains, ne  peut  prétendre  qu'aux  prérogatives,  à 
l'exercice  desquelles  les  membres  de  la  corporation 
ont  expressément  renoncé  en  sa  faveur,  et  c'est  par 
conséquent  à  elle  de  prouver  cette  renonciation;  les 
États  d'Empire,  au  contraire,  ne  jouissaient  que  des 
prérogatives  qu'ils  avaient  acquises  soit  par  la  con- 
cession, soit  parla  possession;  encore  n'avaient-ils 
pas  réussi  à  s'attribuer  certains  droits  qui  sont  essen- 
tiellement l'apanage  de  la  souveraineté.  Si  le  chef  de 
l'Empire  ne  pouvait  rien  faire  sans  l'avis  des  États, 
encore  moins  les  États,  même  unanimes  entre  eux, 
pouvaient-ils  quelque  chose  sans  ce  chef,  qui  était  la 
source  de  toute  autorité.  Et,  quoique  les  Etats  fussent 
parvenus  à  arracher,  l'un  après  l'autre,  les  fleurons  de 
sa  couronne,  ils  n'avaient  jamais  pu  se  soustraire  à  l'au- 
torité qu'il  exerçait  comme  leur  juge  suprême.  Non-seu- 
lement il  y  avait,  dans  la  règle,  appel  des  tribunaux 


—  123  — 

qu'ils  avaient  établis  dans  leurs  territoires,  à  ceux  de 
l'Empire,  dont  l'un  se  composait  de  juges  nommés 
par  l'Empereur  seul  ;  mais  les  princes ,  pour  leurs 
personnes,  étaient  soumis  aux  jugements  de  l'Empe- 
reur; et  si,  dans  le  xviii^  siècle  seulement,  ils  ont 
restreint  le  pouvoir  qu'il  exerçait  jadis  de  les  dépouil- 
ler, par  le  ban  de  l'Empire,  du  gouvernement  de  leur 
territoire,  le  droit  lui-même  n'a  pas  cessé  de  subsister 
comme  un  monument  éternel  et  une  preuve  irréfra- 
gable de  leur  dépendance. 

Avant  de  terminer  cette  discussion,  qu'il  nous  soit 
permis  de  relever  la  nullité  de  la  prétention  de  ceux 
qui,  en  minant  les  droits  du  monarque,  s'appelaient 
les  défenseurs  de  la  liberté;  comme  si  la  liberté,  ou, 
pour  parler  plus  exactement,  l'indépendance  des 
princes  assurait  la  liberté  des  peuples  !  Une  funeste 
expérience  n'a-t-elle  pas  prouvé,  au  contraire,  qu'il 
n'existait  pour  ceux-ci  d'autre  garantie  contre  le  des- 
potisme et  le  pouvoir  arbitraire,  qu'un  ordre  de  choses 
qui  assujettissait  les  princes  au  règne  des  lois  et  à 
l'autorité  d'un  chef  suprême,  véritable  protecteur  de 
la  liberté  des  peuples? 

Disons  donc  que  l'Allemagne  n'était  ni  une  confé- 
dération politique,  ni  une  république  aristocratique; 
elle  était  une  monarchie  limitée,  tant  par  les  privilèges 
que  les  États  avaient  possédés  dès  l'origine  de  la  mo- 
narchie et  en  vertu  desquels  ils  étaient  les  conseils  du 
prince,  que  par  les  prérogatives  qu'ils  avaient  succes- 
sivement obtenues  à  divers  titres.  Quoique  le  gouver- 
nement du  roi  d'Allemagne  fût  étroitement  limité,  il 
n'en  était  pas  moins  essentiellement  monarchique; 
car  le  Roi  l'exerçait  seul,  et  les  États  ne  lui  donnaient 
que  des  avis  qu'il  dépendait  de  lui  d'agréer  ou  de  re- 
jeter. 

Telle  était  la  plus  belle  prérogative  de  l'Empereur; 


—  124  — 

car  les  autres  droits  de  souveraineté ,  dont  Texercice 
lui  avait  été  abandonné  à  lui  seul,  avaient  été  succes- 
sivement restreints  à  un  petit  nombre  de  prérogatives 
plutôt  honorifiques  que  réelles,  pour  lui  donner  une 
grande  autorité.  Outre  le  premier  rang  parmi  les  mo- 
narques, attaché  à  sa  dignité,  et  qui  le  rendait  le  pro- 
tecteur de  la  chrétienté  et  l'avoyer  ou  défenseur  du 
Saint-Siège,  il  était  regardé  comme  la  source  de  la 
noblesse  et  de  toutes  les  dignités  dans  l'Empire,  et  le 
dispensateur  de  privilèges  qui  étaient  respectés  dans 
toute  l'étendue  de  ce  pays.  Il  accordait  l'investiture 
des  fiefs  de  l'Empire  à  chaque  mutation,  et  disposait 
de  ceux  qui  devenaient  vacants  par  extinction  ou  au- 
trement. 

11  exerçait,  avec  le  concours  des  États,  le  droit  de 
donner  et  d'interpréter  les  lois,  le  droit  de  la  guerre  et 
de  la  paix,  le  droit  de  recevoir  et  d'envoyer  des  am- 
bassadeurs et  ministres,  de  contracter  des  alliances  et 
de  conclure  des  traités,  le  tout  au  nom  de  l'Empire. 

Les  droits  de  souveraineté  qui  appartenaient  aux 
États  et  autres  membres  de  l'Empire ,  et  qu'ils  exer- 
çaient sans  le  concours  de  l'Empereur,  formaient  ce 
qu'on  appelait  la  supériorité  territoriale.  Quelques  pu- 
blicistes  l'ont  nommée  quasi-  souveraineté.  Ces  droits 
étaient  en  partie  politiques,  en  partie  ecclésiastiques. 
Dans  le  nombre  des  premiers  se  trouvait  la  puissance 
législative,  renfermant  aussi  le  droit  de  faire  grâce 
et  la  haute  police;  la  juridiction  que  les  États  exer- 
çaient par  leurs  tribunaux  et  otîiciers;  le  droit  très-li- 
mité d'établir,  soit  par  leur  propre  autorité,  soit  avec 
le  concours  des  États  de  leurs  pays,  des  contributions 
pour  certains  besoins  publics;  plusieurs  droits  réga- 
liens, tels  que  celui  de  battre  monnaie,  d'exploiter  les 


—  125  — 

mines  et  salines,  d'établir  des  péages,  etc.;  le  droit 
d'entretenir  des  armées,  de  faire  la  guerre  aux  puis- 
sances étrangères,  de  faire  la  paix,  de  conclure  des 
traités  et  des  alliances  entre  eux  et  avec  les  étrangers, 
de  recevoir  et  d'envoyer  des  ministres,  d'avoir  des 
charges  de  Cour,  etc.  Quant  aux  droits  ecclésiastiques 
appartenant  à  la  supériorité  territoriale,  tous  les  Etats 
n'en  jouissaient  pas  dans  la  même  étendue.  Les  Etats 
catholiques  séculiers  ne  possédaient  que  ce  qu'on  nom- 
mait jus  circa  sacra,  c'est-à-dire  l'inspection  sur  le  culte 
et  le  droit  de  le  réformer,  autant  que  ce  droit  n'a  pas 
été  limité  par  la  paix  de  Westphalie,  dans  le  cas  où  le 
prince  et  les  sujets  ne  professent  pas  la  même  religion  \ 
Les  États  protestants  et  les  États  catholiques  ecclésiasti- 
ques possédaient  le  jus  sacrorum,  qui,  outre  \ejus  circa 
sacra,  renfermait  plusieurs  prérogatives  importan- 
tes :  la  direction  suprême  des  affaires  de  l'Église ,  la 
juridiction  ecclésiastique,  la  disposition  des  biens  ec- 
clésiastiques, en  tant  qu'elle  n'était  pas  bornée  par  la 
paix  de  Westphalie ,  et  le  droit  diocésain  ou  le  droit 
de  régler  le  culte,  autant  que,  quant  aux  ecclésiasti- 
ques catholiques,  son  exercice  n'était  pas  restreint  par 
l'autorité  du  Saint-Siège. 

Les  États  possédaient  des  domaines  considérables 
et  plusieurs  droits  qu'on  comptait  parmi  les  domai- 
nes, tels  que  le  droit  de  détraction,  la  navigation  et 
la  pêche,  les  droits  de  passage,  les  ports  et  la  mer,  en 
tant  qu'elle  est  dominée  sous  la  portée  du  canon,  le 
droit  de  varech,  celui  d'établir  des  moulins,  la  chasse, 
le  droit  de  s'emparer  des  trésors  découverts  dans  la 
terre,  etc., en  tant  que  ces  droits  n'étaient  pas  limités 
par  les  privilèges  particuliers  ou  par  l'observance. 

Tous  les  États  d'Empire  ne  possédaient  pas  sans 

'  Voy.  1. 1,  p.  199. 


—  126  — 

partage  la  supériorité  territoriale.  11  y  avait  des  pays 
où  les  États  Ytroyinciaux  (landstœn de)  participaient  à 
l'exercice  de  ces  droits.  On  appelait  ainsi  les  person- 
nes et  les  corporations  possédant  des  biens-fonds  aux- 
quels les  lois  constitutionnelles  ou  l'observance  atta- 
chaient la  prérogative  de  représenter  jusqu'à  un  certain 
point  la  nation.  Tout  en  concourant  avec  le  prince  à 
l'exercice  de  certains  droits  appartenant  à  la  supério- 
rité territoriale,  les  États  provinciaux  ne  cessaient 
pourtant,  ni  comme  corps  ni  individuellement,  d'être 
sujets  à  cette  même  supériorité  territoriale,  de  ma- 
nière que  le  véritable  caractère  de  la  représentation 
nationale  leur  manquait. 

Les  États  d'Empire  ne  jouissaient  pas  du  droit  d'é- 
tablir des  postes  dans  leurs  territoires  :  l'exercice  de 
ce  droit  régalien  avait  été  érigé  en  fief  par  les  Empe- 
reurs ,  et  conféré  comme  tel  à  la  maison  des  princes 
de  la  Tour  et  Taxis.  Il  est  probable  que,  sans  cette 
circonstance,  les  États  d'Empire  auraient  trouvé  moyen 
de  se  l'arroger. 

La  supériorité  territoriale,  telle  que  nous  venons 
de  la  définir,  était  l'apanage  de  tous  les  membres  de 
l'Empire^  c'est-à-dire  des  Électeurs,  princes,  comtes, 
seigneurs  et  villes  qui  relevaient  immédiatement  de 
l'Empereur  et  de  l'Empire.  Mais  le  hasard,  plutôt 
qu'un  principe  généralement  suivi,  n'avait  pas  pro- 
curé à  tous  ces  membres  le  droit  de  siéger  à  la  Diète; 
cette  prérogative  constituait  la  qualité  d'Etats  d'Em- 
pire. 

D'après  un  ancien  usage,  la  première  Diète  ou  réu- 
nion des  États  d'Empire  de  chaque  règne  devait  être 
convoquée  par  le  nouvel  Empereur  à  Nuremberg; 
mais  l'accumulation  des  affaires ,  à  laquelle  contri- 
buait l'extrême  lenteur  avec  laquelle  elles  se  traitaient 


—  127  — 

fut  cause  que  la  Diète  qui  s'était  assemblée  , 
en  1 663,  à  Ratisbonne ,  se  perpétua ,  sans  que  cette 
permanence  ait  été  expressément  décrétée.  La  per- 
sonne de  l'Empereur,  comme  tel ,  était  représentée  à 
cette  assemblée  par  un  commissaire  principal ,  qui 
était  ordinairement  choisi  dans  la  classe  des  princes 
d'Empire  ,  et  auquel ,  à  titre  de  concommissaire ,  était 
adjoint  un  publiciste  ou  un  jurisconsulte.  Les  Elec- 
teurs et  autres  princes  se  faisaient  représenter  par  des 
Envoyés  revêtus  d'un  double  caractère  ;  comme  mem- 
bres de  la  Diète,  ils  votaient  au  nom  de  leurs  commet- 
tants sur  les  objets  soumis  à  sa  délibération  ;  comme 
ministres  plénipotentiaires  de  leurs  Cours,  ils  étaient 
chargés  de  veiller  aux  intérêts  de  celles-ci.  Les  repré- 
sentants des  villes  impériales  étaient  regardés  comme 
de  simples  députés.  La  présidence  de  la  Diète,  ou, 
comme  on  disait,  le  directoire^  appartenait  à  l'Électeur 
de  Mayence ,  archichancelier  de  l'Empire  :  en  cette 
qualité,  il  recevait  toutes  les  communications  desti- 
nées à  la  Diète,  soit  par  le  commissaire  impérial,  soit 
par  un  membre  de  l'Empire,  soit  par  une  puissance 
étrangère  :  c'était  lui  qui  les  faisait  passer  aux  trois 
collèges  qui  formaient  la  Diète. 

Chacun  de  ces  collèges  délibérait  séparément.  Le 
premier  collège  se  composait  des  huit  Électeurs,  qui 
étaient  Mayence,  archichancelier  de  l'Empire  en  Al- 
lemagne; Trêves,  archichancelier  en  Gaule  (c'est-à- 
dire  dans  le  royaume  de  Lorraine  et  dans  le  royaume 
d'Arles);  Cologne,  archichancelier  en  Italie;  Bohême, 
archiéchanson;  Palatinat,  archisénéchal;  Saxe,  archi- 
maréchal;  Brandebourg,  archichambellan;  Brunswic- 
Lunebourg,  architrésorier.  L'Électeur  de  Mayence  pré- 
sidait ce  collège. 

Le  collège  des  princes  se  composait  de  deux  bancs, 
l'un  destiné  aux  princes  séculiers,  l'autre  aux  ecclé- 


—  128  — 

siastiquesj  il  y  avait  un  troisième  banc,  dit  transver- 
sal, pour  les  évêques  protestants.  Les  prélats  et  comtes 
siégeaient  avec  les  princes;  mais,  au  lieu  de  voix  vi- 
riles ,  ils  n'avaient  que  des  voix  curiales  ou  collec- 
tives. 

Les  princes  ecclésiastiques  étaient  l'archevêque  de 
Salzbourg,  le  grand-nriaître  de  l'Ordre  Teutonique, 
vingt-deux  évêques,  y  compris  un  protestant  et  un  autre 
dont  le  siège  était  alternativement  rempli  par  un  protes- 
tant et  un  catholique;  septjprinces,  chefs  de  fondations, 
sous  le  titre  d'abbés  ou  de  prévôts,  et  le  grand  prieur  de 
l'Ordre  de  Saint-Jean,  à  Heitersheim..  Parmi  les  princes 
séculiers  qui  portaient  les  titres  d'archiduc ,  duc , 
prince,  landgrave,  margrave,  etc.,  siégeaient  d'abord 
les  douze  ou  treize  anciennes  maisons  :  c'est  ainsi 
qu'on  nommait  celles  qui  s'étaient  trouvées  à  la  Diète 
de  1 582,  et  y  avaient  eu  un  suffrage,  en  opposition  à 
celles  qui  avaient  été  reçues  postérieurement'.  Ces 
douze  maisons  avaient  quarante-neuf  suffrages.  Ve- 
naient ensuite  les  nouveaux  princes  avec  treize  voix, 
et  parmi  eux  la  maison  de  Brandebourg  pour  la  prin- 
cipauté d'Ostfrise.  Les  prélats  et  les  abbesses  étaient 
distribués  en  deux  curies,  qu'on  appelait  le  banc  de 
Souabe  et  le  banc  du  Rhin  :  chaque  banc  ou  curie 

•  Les  douze  ou  treize  anciennes  maisons  sont  :  1°  l'Autriche  (trois 
voix);  2'  la  maison  palatine,  avec  cinq  voix  pour  la  branche  du  Rhin 
et  deux  pour  celle  de  Bavière;  3"  Brunswic,  avec  six  voix  pour  l'Élec- 
teur  et  une  pour  la  branche  ducale;  i"  Saxe ,  avec  six  voix;  5°  Bran- 
debourg, avec  six  voix;  6"  Ilolstein,  avec  trois  voix;  7»  Mecklonbourg, 
avec  cinq  voix;  8°  Wiiitfinberiï,  avec  deux  voix;  9"  Bade,  avec  trois; 
^0"  Hesse,  avec  trois;  11°  Anhait,  avec  une;  12°  Savoie,  avec  une; 
43°  Arenberg,  avec  une.  Enfin  le  roi  de  Suède  y  siégeait,  non  en  sa 
qualité  de  duc  de  Ilolstein,  mais  pour  la  Poméranie  suédoise.  Les  ducs 
d'Arenberg  ayant  siégé  à  la  Diète  de  1582,  appartiennent  véritable- 
ment aux  anciens  princes;  mais  comme  le  nombre  de  treize  a  paru  de 
mauvais  augure  à  quelques  publicistes,  ils  ont  mieux  aimé  déroger  à 
un  principe  que  de  les  admettre. 


—  129  — 

avait  une  voix  collective.  De  même  les  comtes  étaient 
divisés  en  quatre  curies  dont  chacune  avait  un  sui- 
i'ragej  savoir,  les  bancs  de  Wétéravie ,  de  Souabe,  de 
Franconie  et  de  Westplialie.  Parmi  ces  comtes,  il  se 
trouvait  plusieurs  princes  qui  n'avaient  pas  réussi  à  se 
procurer  des  voix  viriles  j  de  ce  nombre  étaient  les 
princes  de  Nassau  de  la  branche  aînée  dite  de  Wal- 
ram,  ceux  d'Ysenbourg,  de  Solms,  de  Linange,  de 
Waldeck,  de  Fiirstenberg,  d'Oettingen,  de  Schwar- 
zenberg,  de  Hohenlohe,  etc.  Parmi  les  comtes  sié- 
geaient des  princes  des  maisons  les  plus  illustres,  à 
raison  des  terres  qu'ils  avaient  acquises  depuis  1 582. 
L'archiduc  d'Autriche  et  l'archevêque  de  Salzbourg 
alternaient  pour  la  présidence  du  collège  des  princes. 
Les  suffrages  y  étaient  recueillis  par  le  comte  de  Pap- 
penheim,  grand  maréchal  héréditaire  de  l'Empire. 

Les  villes  impériales  formaient  le  troisième  collège. 
Elles  étaient  divisées  en  deux  bancs,  celui  du  Rhin  et 
celui  de  Souabe  :  chaque  ville  avait  un  suffrage  parti- 
culier. La  ville  où  la  Diète  se  tenait  était  chargée  de 
la  présidence;  s'il  était  arrivé  que  la  Diète  eût  été 
convoquée  dans  quelque  ville  médiate ,  celle  de  Co- 
logne aurait  présidé  de  droit.  Le  banc  du  Rhin  se 
composait  de  quinze,  celui  de  Souabe  de  trente-sept 
villes. 

Dans  chacun  des  trois  collèges,  la  pluralité  des  voix 
décidait,  excepté  lorsqu'il  s'agissait  de  la  religion 
ou  des  droits  de  quelque  État  en  particulier.  On 
regardait  comme  concernant  la  religion  toutes  les  af- 
faires sur  lesquelles  les  catholiques  et  les  protestants 
n'étaient  pas  d'accord.  Quand  on  s'en  occupait,  la 
Diète  se  partageait  en  deux  corps j  les  évangéliques 
formaient  l'un,  les  catholiques  l'autre.  Aussitôt  la 
matière  contestée  devenait  l'objet  d'une  négociation. 
Par  une  bizarrerie  de  la  Constitution,  le  chef  du  corps 
VII  9 


—  130  — 

évangélique  était  un  prince  catholique,  l'électeur  de 
Saxe.  Dans  tous  les  cas  ordinaires,  où  cette  scission 
n'avait  pas  lieu,  les  deux  collèges  supérieurs  se  com- 
muniquaient leurs  résolutions,  et  leurs  directeurs  con- 
féraient entre  eux  pour  parvenir  à  un  accord,  moyen- 
nant lequel  on  pût  donner  un  avis  commun  de  ces 
deux  collèges.  Dès  qu'on  y  avait  réussi,  il  existait  une 
majorité  de  deux  collèges  sur  trois;  aussi  se  conten- 
tait-on de  faire  parvenir  la  résolution  commune  au  col- 
lège des  villes,  afin  que,  s'il  le  jugeait  convenable,  il 
pût  y  adhérer. 

L'arrêtéprisparlesdeuxcollégessupérieursou  parles 
trois  collèges  réunis  ne  portait  pas  le  titre  de  décret; 
le  respect  pour  l'antique  forme  monarchique  se  mon- 
trait dans  la  manière  dont  les  résolutions  des  collèges 
étaient  présentées  au  chef  de  l'État.  C'étaient  de  sim- 
ples avis,  des  consultations  données  par  l'Empire, 
placita  Imperii.  L'Avis  sur  lequel  on  s'était  accordé 
était  porté,  par  l'électeur  de  Mayence,  à  la  connais- 
sance du  commissaire  principal  de  l'Empereur.  L'ap- 
probation de  l'Empereur,  si  elle  avait  lieu,  était  annon- 
cée au  même  Électeur  par  un  décret  de  commission 
portant  ratification.  L'Avis  ratifié  prenait  le  titre  de 
conclusum  de  V Empire  et  le  caractère  d'une  loi  obli- 
gatoire pour  tous  ses  membres.  Si  l'Empereur  refusait 
la  ratification,  la  matière  restait  indécise.  A  la  fin 
d'une  Diète,  on  réunissait  en  un  seul  corps  de  loi 
tous  les  conclusums  qu'elle  avait  pris.  Cette  réunion 
de  lois  portait  le  titre  de  rech.  Le  dernier  Recès  est 
de  1654. 

On  appelait  dépulalions  de  l'Empire  des  comités 
auxquels  l'Empereur  et  l'Empire  donnaient  pouvoir 
de  prendre,  sur  certains  objets  déterminés,  des  arrê- 
tés qui  étaient  soumis  ensuite  à  la  sanction  de  la  Diète 
et  du  chef  du  Corps  germanique.  Nous  avons  suivi 


—  131   — 

les  travaux  d'une  semblable  députation  au  Congrès  de 
llastadt;  ici,  nous  allons  voir  le  dernier  exemple  que 
l'histoire  d'Allemagne  en  ait  offert. 

Indépendamment  des  États,  l'Empire  renfermait 
des  membres  qui,  sans  siéger  à  la  Diète,  étaient, 
comme  eux,  immédiatement  soumis  à  l'Empereur  et 
à  l'Empire.  Tels  étaient  les  cadets  et  les  princesses 
des  familles  régnantes,  les  assesseurs  et  employés  des 
tribunaux  de  l'Empire,  et  surtout  le  corps  de  la  no- 
blesse immédiate.  Cette  noblesse,  très-nombreuse  en 
Souabe,  en  Franconie  et  sur  le  Rhin,  possédait  indi- 
viduellement la  supériorité  territoriale,  et,  en  corps, 
le  droit  d'envoyer  des  ministres  ou  députés,  et  de  con- 
tracter des  alliances.  Elle  payait  à  l'Empereur  un  don 
gratuit,  sous  le  nom  de  caritativum.  Les  possessions 
des  membres  de  la  noblesse  immédiate  ne  faisaient 
pas  partie  des  cercles  de  l'Empire,  mais  elles  for- 
maient à  elles  seules  trois  cercles  particuliers  (Ritler- 
kreise)f  dits  de  Souabe,  de  Franconie  et  du  Rhin,  et 
divisés  en  cantons  :  chaque  canton  avait  son  direc- 
toire. La  noblesse  avait  formé,  dans  le  moyen  âge,  des 
associations  qu'on  appelait  ganerbinats.  Ces  confédé- 
rations avaient  pour  objet  la  défense  commune  des 
biens  des  familles  qui  y  entraient,  et  pour  lesquels 
elles  établissaient  entre  elles  une  réciprocité  de  suc 
cession  et  un  régime  commun. 

La  division  de  l'Empire  en  dix  cercles  avait  pour 
objet  principal  le  maintien  de  la  paix  publique  et 
l'exécution  des  sentences  des  tribunaux  de  l'Empire. 
A  cette  destination  se  joignaient  quelques  objets  secon- 
daires ,  tels  que  la  répartition  des  forces  armées  re- 
quises pour  former  les  armées  de  l'Empire.  Des  direc- 
teurs, des  princes  convoquants,  et  des  colonels  ou 


—  132  — 

chefs  militaires,  dirigeaient  les  délibérations  des 
cercles  ou  exécutaient  les  mesures  qu'ils  avaient  or- 
données. Les  cercles  n'embrassaient  pourtant  pas  la 
totalité  de  l'Empire.  Nous  avons  dit  que  la  noblesse 
immédiate  n'en  faisait  pas  partie;  il  en  était  de  môme 
de  quelques  seigneuries  non  comprises  dans  l'organi- 
sation de  la  noblesse  immédiate,  telles  que  lever, 
Schauen,  etc.,  ainsi  que  des  parcelles  du  royaume 
d'Arles  qui  appartenaient  encore  à  l'Allemagne. 

Si,  pendant  la  vie  d'un  Empereur,  on  désignait  son 
successeur,  celui-ci  portait  le  titre  de  l'oi  des  Romains. 
En  cas  d'interrègne,  le  gouvernement  impérial  pas- 
sait entre  les  mains  de  deux  vicaires,  les  Électeurs  pa- 
latin et  de  Saxe ,  qui  pourtant  ne  l'exerçaient  pas  par 
indivis,  mais  l'un  dans  les  provinces  du  Rhin,  de 
Souabe  et  du  droit  franconien;  l'autre  dans  ceux  du 
droit  saxon.  L'Autriche  et  la  Bavière,  pendant  qu'elle 
n'était  pas  possédée  par  l'Électeur  palatin,  ne  recon- 
naissaient pas  l'autorité  des  vicaires,  et  se  trouvaient 
par  conséquent,  pendant  l'interrègne,  placées  pour 
ainsi  dire  hors  de  l'Allemagne. 

Les  domaines  qui  fournissaient  anciennement  à 
l'entretien  de  la  Cour  impériale  ayant  été  dilapidés,  il 
ne  restait  aux  chefs  de  l'Empire  que  de  très-chétifs 
revenus.  Les  contributions  ou  collectes,  par  lesquelles 
on  remédiait  au  défaut  des  finances,  étaient  consen- 
ties par  les  États.  Il  y  en  avait  une  qui  était  destinée 
à  l'entretien  de  la  Chambre  impériale,  et  qui  se  mon- 
tait à  environ  quarante  mille  rixdales.  Les  contribu- 
tions extraordinaires  étaient  principalement  accordées 
en  temps  de  guerre.  Les  États  les  consentaient  sous  le 
litre  de  mois  romains,  parce  qu'en  prenant  pour  base 
un  rôle  ou   matricule  de  1 521 ,  qui  fixait  le  nombre 


--  133  — 

de  troupes  que  chaque  État  avait  à  fournir  à  l'Empe- 
reur pour  son  expédition  de  Rome,  on  avait  évalué  en 
argent  les  contingents  de  chaque  État. 

Il  existait  en  Empire  deux  tribunaux  suprêmes  par 
lesquels  la  justice  était  rendue  au  nom  de  l'Empereur. 
Le  Conseil  aulique,  organisé  en  1512,  et  composé  de 
membres  nommés  par  l'Empereur,  cessait  pendant 
l'interrègne.  La  Chambre  impériale  qui,  depuis  1693, 
siégeait  à  Wetzar ,  était  présidée  par  un  juge  et  des 
présidents  nommés  par  l'Empereur,  et  formée  par  des 
assesseurs  que  les  Électeurs  et  les  cercles  présentaient. 
Ces  deux  cours  jugeaient  en  première  instance  les 
causes  dont  les  deux  parties  étaient  immédiates,  et 
celles  dont  le  demandeur  était  médiat  et  le  défenseur 
immédiat  ne  jouissant  pas  du  droit  des  austrhgues  ou 
d'un  for  privilégié.  Elles  jugeaient  en  seconde  instance 
les  causes  qui  y  étaient  portées  par  appel  des  tribunaux 
austrégaux,  c'est-à-dire  des  fors  privilégiés  des  Élec- 
teurs, princes,  comtes  et  nobles  immédiats;  car  les 
villes  libres  ne  jouissaient  pas  de  ce  privilège.  Elles 
jugeaient  encore  de  cette  manière  les  appels  des  tribu- 
naux établis  dans  les  territoires  des  États  d'Empire,  en 
tant  que  ceux-ci  ne  jouissaient  pas  du  privilège  de  non 
appellando.  Des  cours  impériales,  le  recours  à  la  Diète 
était  ouvert  aux  parties. 

Après  cet  exposé  rapide  de  la  Constitution  germa- 
nique, nous  allons  suivre  les  délibérations  de  l'assem- 
blée de  Ratisbonne,  et  présenter  le  texte  même  de 
l'acte  qui  a  fixé  la  répartition  des  indemnités  stipulées 
par  l'article  7  du  traité  de  Lunéville. 


SECTION  II. 


mSTOlRK    DE    lA    Dl^PUtATlOît    HE    L'EMPÎRE    DE    1803  ,    îUSQU'a    SA   QPARANTE- 
SIXItUE  SÉANCE  '. 


Trailé  de  Paris,  du  24  août  1801,  entre  la  France  et  la  Bavière  ;  M.  Cail' 
lard  :  M.  de  Cetto.  —  Négociations  à  Paris,  de  l'année  1802.  —  Traités 
secrets  entre  la  France  et  la  Prusse,  du  23  mai,  entre  la  France  et  la 
Bavière,  du  24  mai;  entre  la  France  et  la  Russie,  du  3  juin.  —  Conven- 
tion de  Paris,  du  23  mai  1802,  entre  la  France  et  la  Prusse,  relative  aux 
intérêts  de  la  maison  de  Nassau-Orange;  général  Betirnonville  :  marquis 
de  Lucchesini.  —  Convention  de  Berlin,  du  14  novembre  1802,  entre  la 
Prusse  et  la  République  batave;  comte  de  Ilaugioits  :  M.  llulimau.  — 
Traité  de  Paris,  du  20  juin  1802,  entre  la  France  et  le  Wiirlemberg; 
M.  d'ilaulerive  :  le  baron  de  Normanii.  —  La  Prusse,  la  Bavière  et  l'Au- 
Iricbe  prennent  possession  de  leurs  indemnités.  —  Déclarations  autri- 
cbiennes  et  prussiennes.  —  Déclarations  des  puissances  médiatrices ,  du 
18  aoiit  1802;  M.  de  Talleyrand  :  le  prince  Kourakine.  —  Rapport  fran- 
çais, du  21  août  1802;  observations  sur  ce  rapport.  —  Ouverture  des 
séances  de  la  dépulalion  de  l'Empire,  le  24  août.  —  Deux  partis  se  for- 
ment au  sein  de  l'assemblée.  —  Deuxième  séance.  —  Note  des  commis- 
saires de  France  et  de  Russie.  —  Demandes  de  l'Aulriclie  en  faveur 
de  la  Toscane.  —  Déclaration  sur  l'occupation  de  la  ville  de  Passau. 
—  Réponse  du  plénipotentiaire  de  Prusse.  —  Troisième  séance , 
du  8  septembre.  —  Le  sort  de  l'Allemagne  est  décidé.  —  Adoption 
du  premier  plan  d'indemnités.  —  Convention  de  Paris,  du  5  sep- 
tembre 1802,  entre  la  France,  la  Prusse  et  la  Bavière;  M.  de  Talley- 
rand :  le  marquis  de  Lucchesini  :  M.  de  Cetto.  —  Quatrième  séance, 
du  14  septembre.  —  L'Empereur  refuse  de  ratifier  le  premier  plan  d'in- 
demnité. —  Note  française,  du  13  septembre,  contre  l'occupation  de 

'  Vôy.  Prolocoll  der  ausserordentl.  Reichsdeputation  zu  Regensiburg, 
1803.  Regensb.  4  vol.  in-l"  (A.  Ch.  Gaspari),  Der  Franzoaisch-rus- 
siche l'Jntschadigunsplan,  u.  s.  ic.  Regensburg,  1802,in-8°.  A.  Ch.  Gas- 
pari, der  Deputationss-Recesa.  Hamburg,  ISOfi,  2  vol.  in-8».  (Winkopp) 
Der  ileutsche  Zuschauer  oder  Archiv  aller  merkwiirdigen  Vorfdlle , 
ivelche  auf  die  Vollziehung  des  zu  Luneville  geschlossenen  Frialens 
Reziehunq  /ia6en.  Offenbach ,  1802,  2  vol.  in-S°  (Wi^kov?)  Der  neue 
de.utsche  Zuschauer.  Frankenlhal ,  1804,  2  vol.  in-8".  (II.  v.  Scheliias) 
Vragm.  Gesch.  der  deutschen  Reichsverhandl.  von  dein  neiiesten  Depu- 
tationx-Hauptschlusse  bis  gegert  das  Ende  des  Jahrs  1804.  Regensb. 
1805,  in-8°.  (Harl)  Deutschhnds  neueste  Staats-und  Kirchenverân- 
J<?rungien.  Berlin,  1804,  in-8". 


—  135  — 

Passau.  —Cinquième  séance,  du  16  septembre.  —  Requête  pour  la  sei- 
gneurie de  Marhange.  —  Sixième  séance,  du  18  septembre.  —  Discus- 
sion entre  le  plénipotentiaire  impérial  et  le  subdélégué  de  Brandebourg. 

—  Septième  séance.  —  Le  rapport  entre  la  dépulation  et  les  média- 
teurs est  régularisé.  —  Huitième  et  neuvième  séances.  —  Affaires  par- 
ticulières. —  Note  autrichienne,  du  26  septembre,  en  réponse  à  la  note 
française  du  13.  —  Dixième  séance,  du  28  septembre.  —  Rapport  sur  la 
sustentation  des  ecclésiastiques.  —  Discussion  sur  l'indemnité  de  Hesse- 
Cassel.  —  Onzième  séance.  —  Réclamation  de  quelques  villes  impériales 
de  Souabe  et  de  Franconie.  —Douzième  et  treizième  séances.  —  Second 
plan  d'indemnités,  du  9  octobre.  —  Note  des  médiateurs,  du  8  octobre. 

—  Examen  comparatif  du  nouveau  plan.  —  Quatorzième  séance,  du 
\i  octobre.  —  Expressions  remarquables  du  vote  de  Brandebourg.  — • 
Quinzième  séance,  du  14  octobre.  —  Observations  du  subdélégué  de 
Mayence.  —  Propositions  du  subdélégué  de  Saxe  relativement  à  la  sus- 
tentation.—Seizième  séance,  du  18  octobre.  —  Discussion  touchant  la 
constitution  des  pays  sécularisés.  —  Dix-septième  séance,  du  19  oc- 
tobre. —  Réponse  des  médiateurs  aux  observations  concernant  les  prin- 
cipes. —  Dix-huitième  séance,  du  21  octobre.  —  Protestation  du  sub- 
délégué  de  Bohême  au  nom  du  grand-duc  de  Toscane.  —  Le  second 
plan  d'indemnités  est  adopté.  —  Conclusum  du  21  octobre  1802.  —  Dix- 
neuvième  séance ,  du  23  octobre.  —  Représentation  du  subdélégué  de 
la  Bohême  touchant  certains  droits  de  la  maison  d'Autriche.  —  Ving- 
tième séance,  du  26  octobre.  —  Déclaration  remarquable  du  ministre 
du  roi  de  Suède.  —  Vingt  et  unième  séance,  du  30  octobre.  —  Observa- 
lions  concernant  les  quatre  villes  impériales  de  Brème ,  Hambourg , 
Augsbourg  et  Lubeck.  —  Les  séances  22,  23,  24  et  25  sont  consacrées  à 
des  réclamations  particulières.  —  Vingt-sixième  séance,  du  11  novembre. 

—  Délibérations  relatives  à  la  sustentation  des  ecclésiastiques.  —  Vingt- 
septième  séance,  du  16  novembre.  —  Note  des  ministres  médiateurs, 
renfermant  des  modifications  au  plan  général.  —  Séances  des  18,  20,  23 
et  25  novembre.  —  Réclamations  particulières.  —  Trente-deuxième 
séance,  du  4  décembre.  —  Démission  de  l'archiduc  Antoine  de  l'arche- 
vêché de  Cologne.  —  Note  des  ministres  médiateurs ,  du  3  décembre 
1802.  —  Trente-troisième  et  trente-quatrième  séances,  des  7  et  14  dé- 
cembre.—Objets  soumis  à  la  délibération  par  le  subdélégué  de  Bohême, 

—  Trente-cinquième  séance,  du  22  décembre.  —  Observations  du  sub- 
délégué de  Brandebourg  au  sujet  du  nombre  des  suffrages.  —  Conven- 
tions de  Paris,  du  26  décembre  1802,  entre  l'Autriche  et  la  France; 
comte  Piiilippe  de  Cohen:sl  :  Joseph  Bonaparte.  —  Trente-sixième 
séance,  du  4  janvier  1803.  —  Difficultés  au  sujet  de  la  ratification  du 
plénipotentiaire  impériil.  —  Trente-septième  séance,  du  i9  janvier.  — 
Note  des  ministres  médiateurs.  —  Séances  des  23  janvier,  3,  8,  12,  15, 
IC  et  18  février.  —  Discussion  et  approbation  des  38  premiers  articles. 

—  Quarante-sixième  séance,  du  25  février.  —  Le  Recès  définitif  est  adopté 
et  soumis  à  l'approbation  de  l'Empereur  et  de  l'Empire.  —  Résumé. 

Le  dernier  Avis  de  la  Diète  relatif  à  l'exécution  de 
la  paix  de  Lunéville  avait  été  ratifié  le  7  novembre  1 801 , 
et  l'on  s'attendait  à  voir  incessamment  la  députation 


—  136  — 

nommée  par  l'Empire  commencer  ses  opérations  à 
Ratisbonne,  lieu  convenu  pour  cette  assemblée.  Ce- 
pendant les  séances  de  la  députation  ne  furent  ouvertes 
que  le  24  août  1 802.  Cet  intervalle  avait  été  employé 
en  négociations  que  l'on  n'a  guère  connues  que  par 
leurs  résultats. 

Le  premier  fruit  de  ces  négociations  fut  un  traité 
particulier  conclu  à  Paris  entre  la  République  et  l'é- 
lecteur de  Bavière.  Ce  prince  avait  succédé  à  Charles- 
Théodore,  dernier  Électeur  de  la  branche  de  Sulzbach, 
le  1 6  février  1 799,  c'est-à-dire  au  moment  où  la  guerre 
allaitrecommencerparlarupturedu  Congrès  deRastadt. 
Forcé,  comme  membre  de  l'Empire,  et  plus  particu- 
lièrement par  la  position  géographique  de  ses  Etats,  à 
prendre  part  à  la  guerre,  il  ne  s'était  pas  contenté  de 
fournir  son  contingent;  mais,  par  des  conventions  con- 
clues en  1 800,  après  le  départ  du  corps  auxiliaire  russe, 
il  avait  mis  d'abord  douze  mille  hommes,  et  ensuite  le 
reste  de  son  armée  à  la  solde  de  l'Angleterre  \  La  paix 
s'était  conclue,  un  peu  moins  d'une  année  après,  à 
Lunéville;  par  V article  6  de  ce  traité,  l'Electeur  per- 
dait de  belles  et  importantes  possessions  situées  sur  la 
rive  gauche  du  Rhin,  le  duché  de  Juliers,  une  grande 
partie  du  Palatinat,  les  principautés  du  Hundsriick  qui 
en  dépendaient,  le  duché  de  Deux-Ponts,  son  patri- 
moine personnel,  dont  il  n'avait  jamais  joui,  ayant 
succédé  aux  droits  de  son  frère,  le  duc  de  Deux-Pouls, 
pendant  que  ce  pays  était  occupé  par  les  Français; 
enfin  il  perdait  de  beaux  domaines  en  Alsace,  qui  lui 
étaient  devenus  chers,  parce  qu'il  y  avait  passé  la  plus 
belle  partie  de  sa  vie.  11  est  vrai  que  la  paix  de  Luné- 
ville  promettait  de  l'indemniser  de  ces  pertes;  mais 

•  Vol.  t.  VI,  p.  223  et  230. 


—  13T  — 

comme  le  même  traité  assurait  un  dédommagement  en 
Allemagne  à  un  prince  étranger,  le  grand-duc  de  Tos- 
cane, et  qu'on  n'ignorait  pas  que  la  convention  secrète 
du  5  août  1796  \  entre  la  France  et  la  Prusse,  promet- 
tait au  prince  de  Nassau-Orange,  pour  les  pertes  qu'il 
avait  éprouvées  hors  de  l'Allemagne,  les  évêchés  de 
Wiirzbourg  et  de  Bamberg,  les  deux  provinces  qui 
convenaient  le  mieux  à  la  Bavière,  en  supposant  que 
l'Autriche  se  fat  réservé  l'archevêché  de  Salzbourgpour 
legrand-duc  de  Toscane,  il  était  à  craindre  que  le  nombre 
de  pays  ecclésiastiques  qu'on  voudrait  séculariser  pour 
les  princes  héréditaires,  ne  serait  pas  suffisant  pour  la 
masse  des  indemnités  qu'on  avait  promis  d'accorder. 
L'Électeur,  abandonné  à  ses  propres  forces,  sans  allié 
dont  il  pût  se  promettre  beaucoup  d'appui,  se  rappelait, 
non  sans  inquiétude,  que  l'Autriche  avait  jeté  depuis 
longtemps  son  dévolu  sur  une  partie  de  la  Bavière,  qui 
lui  semblait  indispensable  pour  donner  à  sa  mo- 
narchie une  frontière  militaire.  Ce  qui  devait  ajouter 
à  l'anxiété  de  ce  prince,  c'est  la  circonstance  que, 
malgré  de  pressantes  sollicitations,  la  Grande-Bre- 
tagne s'était  refusée  à  lui  garantir,  par  la  conven- 
tion du  16  mars  1800,  l'intégrité  de  ses  possessions 
sur  la  rive  droite  du  Rhin. 

Dans  ces  conjonctures,  l'Électeur  pouvait  craindre 
que,  lorsqu'il  serait  question  d'évaluer  ses  pertes  et 
de  lui  trouver  un  dédommagement,  les  intérêts  de  sa 
maison  ne  fussent  sacrifiés  à  des  considérations  supé- 
rieures. Recherchant  un  allié  et  ne  le  trouvant  peut- 
être  pas  dans  la  Prusse,  qui  avait  à  discuter  ses  propres 
intérêts  et  ceux  de  la  maison  à'Orange^  les  yeux  de 
l'Electeur  se  tournèrent  vers  la  France,  à  laquelle  d'an- 
ciens souvenirs  l'attachaient.  Il  paraît  que  les  ouver- 

•  Voy.  t.  V,  p.  359. 


—  138  — 

tures  de  ses  ministres  furent  bien  accueillies  à  Paris. 
On  y  regardait  la  Bavière  comme  l'alliée  naturelle  delà 
France  contrel'Autriche  :  on  n'avait  point  de  reproches 
personnels  à  faire  à  l'Électeur,  qui  pouvait  facilement 
justifier  le  traité  du  16  mars  1800,  et  même  celui  du 
15  juillet,  par  les  circonstances  impérieuses  où  il  s'é- 
tait trouvé. 

Il  fut  signé,  le  24  août  1801,  à  Paris  y  un  traité  au 
nom  de  l'Électeur,  par  M.  de  Cetto,  son  ministre  au 
cercle  électoral  et  à  celui  du  haut  Rhin,  et,  au  nom 
de  la  France,  par  M.  Caillardy  alors  garde  des  Archives 
du  ministère  des  Affaires  Étrangères.  On  expose  dans  le 
préambule  que  cette  paix  particulière  est  conclue  avec 
l'Electeur,  parce  qu'il  n'a  pas  seulement  pris  part  à  la 
guerre,  moyennant  son  contingent,  comme  membre 
de  l'Empire,  mais  aussi  comme  auxiliaire  des  puis- 
sances alliées  :  c'est  ainsi  qu'on  pallia  ce  qu'il  y  avait 
d'irrégulier  dans  un  traité  particulier  d'un  État  d'Em- 
pire avec  la  France,  dans  un  moment  oii  une  députa- 
tion  solennelle  devait  régler  les  intérêts  de  tout  le  corps 
germanique. 

Par  les  articles  1  et  2,  l'amitié  est  renouvelée  entre 
les  deux  États,  et  l'Électeur  renonce  personnellement 
à  toutes  ses  possessions  sur  la  rive  gauche  du  Rhin , 
qui  avaient  déjà  été  cédées  à  Lunéville. 

V article  3  ,  qui  est  précisément  celui  pour  lequel 
cette  convention  a  été  faite,  est  ainsi  conçu  :  «  Con- 
vaincue qu'il  existe  un  intérêt  personnel  à  empêcher 
l'affaiblissement  des  possessions  bavaro-palatines,  et 
conséquemment  à  réparer  la  diminution  des  forces 
du  territoire,  qui  résulte  de  la  renonciation  ci-dessus, 
la  République  française  s'engage  à  maintenir  et  à  dé- 
fendre efficacement  l'intégrité  des  susdites  possessions 
à  la  rive  droite  du  Rhin,  dans  l'ensemble  et  l'étendue 
qu'elles  ont  ou  qu'elles  doivent  avoir  d'après  le  traité 


—  139  — 

et  les  conventions  conclues  àTeschen  le  13  mai  1779, 
sauf  les  cessions  qui  auront  lieu  du  plein  gré  de  Son  Al- 
tesse Électorale  et  du  consentement  de  toutes  les  parties 
intéressées.  La  République  française  promet  en  même 
temps  qu'elle  usera  de  toute  son  influence  et  de  tous  ses 
moyens  pour  que  Varticle  7  du  traité  de  paix  de  Luné- 
ville,  en  vertu  duquel  l'Empire  est  tenu  de  donner  aux 
princes  héréditaires  qui  se  trouvent  dépossédés  à  la  rive 
gauche  du  Rhin,  un  dédommagement  pris  dans  son 
sein,  soit  particulièrement  exécuté  à  l'égard  de  la  mai- 
son électorale  palatine  de  Bavière,  en  sorte  que  cette 
maison  reçoive  une  indemnité  territoriale,  située  autant 
que  possible  à  sa  bienséance,  etéquivalente  auxpertesde 
tout  genre  qui  ont  été  une  suite  de  la  présente  guerre.  » 

Varticle  5  renferme  encore  une  stipulation  favo- 
rable à  l'Électeur.  Nous  avons  vu  que ,  par  Varticle  8 
de  la  paix  de  Lunéville,  la  France  ne  s'était  chargée 
que  de  celles  des  dettes  hypothéquées  sur  le  sol  des 
provinces  de  la  rive  gauche  du  Rhin,  qui  résultaient 
d'emprunts  formellement  consentis  par  les  États  de 
cespaysj  mais  le  duché  de  Deux-Ponts  et  les  parcelles 
du  Palatinat,  situées  sur  cette  rive,  n'avaient  pas 
d'États.  Il  fut  donc  convenu  que  les  dettes  de  ce  pays, 
qui,  à  leur  origine,  avaient  été  enregistrées  par  les 
corps  administratifs  supérieurs,  seraient  assimilées  à 
celles  qui  avaient  été  consenties  par  les  États  dans  les 
pays  où  existaient  de  pareilles  assemblées. 

Le  8^  article  n'est  pas  moins  favorable  à  l'Électeur. 
Les  séquestres  qui  avaientété  mis,  à  cause  de  laguerre, 
sur  les  biens  des  sujets  ou  serviteurs  de  l'Électeur, 
domiciliés  sur  la  rive  gauche  du  Rhin ,  devront  être 
levés  à  compter  du  jour  de  l'échange  des  ratifications  \ 

Paris  devint,  au  commencement  de  l'année  1802, 

*  Mahtens,  Rec,  t.  IX,  p.  539. 


—  140  — 

le  centre  de  négociations  fort  animées.  L'Autriche  et 
la  Prusse  y  traitèrent  de  leurs  indemnités  particu- 
lières ;  mais  le  gouvernement  français  se  montra  peu 
favorable  aux  réclamations  de  la  première  puissance  , 
tandis  qu'il  se  prêta  ù  d'autres  projets  d'agrandis- 
sement. 

CinqtraitésfurentlerésultatdesnégociationsdeParis. 

1"  Un  traité  signé  le  23  mai  entre  la  France  et  la 
Prusse  y  et  déterminant  les  indemnités  qui  seraient  ac- 
cordées à  la  Prusse. 

2"  Un  second  traité  du  même  jour,  entre  la  France  et 
la  Prusse,  relatif  aux  réclamations  de  la  maison  de  Nas- 
sau-Orange. 

3"  Un  traité  signé  le  lendemain  24  entre  la  France  et 
la  Bavière f  sur  les  intérêts  de  cette  dernière  puis- 
sance. 

4"  Un  traité  du  3  juin  entre  la  France  et  la  Russie^ 
par  lequel  ces  deux  puissances  convinrent  de  se  char- 
ger de  la  médiation  pour  le  règlement  des  indemnités 
en  Allemagne,  et  dressèrent,  à  cet  effet,  un  plan  géné- 
ral destiné  à  être  présenté  à  la  Diète.  Bonaparte  aurait 
peut-être  disposé  en  maître  absolu  du  sort  de  l'Empire, 
s'il  n'avait  été  arrêté  dans  ses  projets  par  l'intervention 
de  l'empereur  de  Russie.  Nous  avons  dit^  que,  peu  de 
jours  après  le  rétablissement  de  la  paix  entre  Alexan- 
dre et  la  France,  le  premier  Consul  s'était  engagé,  par 
une  convention  qui  fut  signée  le  il  octobre  1801,  à 
laisser  la  Russie  prendre  part  à  l'arrangement  des  af- 
faires d'Allemagne  et  d'Italie.  L'entrevue  que  ce  prince 
eut,  au  mois  de  juin  1802,  à  Memel,  avec  le  roi  de 
Prusse,  le  confirma  sans  doute  dans  le  dessein  de  mo- 
dérer l'ambition  de  Bonaparte  en  s'associant  avec  lui 
dans  le  rôle  de  médiateur  de  l'Allemagne. 

•  Voy.  l.  VI,  p.  287. 


—  141  — 

5"  Une  convention  particulière  entre  la  France  et  le 
duc  de  Wurtemberg f  signée  le  20  juin  1802. 

Les  premier,  deuxième  et  quatrième  traités  ont  été 
tenus  secrets,   mais  on  a  pu  connaître  leur  contenu 
par  le  premier  plan  d'indemnisation  dont  nous  par- 
lerons sous  peu,  par  les  diverses  occupations  mili- 
taires, ainsi  que  par  le  traité  de  Berlin  du  14  novem- 
bre 1802,  qui  fait  voir  que  la  Prusse  promit  de  céder 
à  la  Hollande  Sevena3r,  Huyssen  et  Malbourg.  D'un 
autre  côté,  on  a  su  que  par  V article  13  de  la  conven- 
tion du  23  mai,  le  roi  de  Prusse  reconnaissait  et  garan- 
tissait à  la  République  française  les  arrangements 
qu'elle  avait  pris  en  Italie,  savoir:  1"  l'existence  du 
royaume  d'Étrurie;  2°  celle  de  la  République  italienne; 
3"  la  réunion  au  territoire  français  des  pays  qui  for- 
maient la  vingt-septième  division  militaire,  c'est-à-dire 
du  Piémont,  dont  la  réunion  cependant  n'était  pas  en- 
core opérée,  et  lorsqu'il  ne  pouvait  pas  y  avoir  de  certi- 
tude sur  l'engagement  que  l'on  contractait.  Enfin  l'on  a 
également  appris  qu'en  ratifiant,  le  16  juillet  le  traité 
du  3  juin,  l'empereur  de  Russie  avait  réservé  une  in- 
demnité plénière  au  roi  de  Sardaigne,  dont  les  intérêts 
paraissent  avoir  été  passés  sous  silence  dans  le  plan 
de  répartition,  aussi  bien  qu'au  duc  de  Holstein-01- 
denbourg,  pour  le  sacrifice  du  péage  d'Elsfletli  qu'on 
voulait  lui  imposer.  En  outre,  l'Empereur  demandait 
la  dignité  électorale  pour    le  duc  de  Mecklenbourg- 
Schiverin,  dont  le  fils  avait  épousé  la  grande-duchesse 
Hélène^  sœur  de  l'Empereur. 

La  deuxième  convention  du  23  mai  1812  fut  signée 
par  le  général  Beurnonville  au  nom  de  la  France,  et  par 
lemarquis  de  Lucchesini  pour  la  Prusse.  Nous  avons  dit* 
qu'à  l'instant  même  où  fut  signée  la  paix  d'Amiens, 

'  Voy.  ci-desbus,  p.  44. 


—  142  •— 

la  France  prenait ,  avec  la  République  batave,  renga- 
gement que  la  compensation  que  l'article  1 8  de  cette 
paix  promettait  à  la  maison  de  Nassau  pour  les  pertes 
qu'elle  avait  faites  dans  la  ci-devant  République  des 
Provinces-Unies ,  tant  en  propriétés  particulières  que 
par  la  suppression  des  charges  dont  elle  était  revêtue, 
ne  serait  pas  fournie  aux  dépens  de  la  République. 
Cette  compensation  fut  déterminée,  par  la  convention 
du  23  mai  1802,  entre  la  France  et  la  Prusse,  dont 
voici  les  principales  dispositions  : 

Le  prince  de  Nassau-Orange-Dillenbourg-Diez  re- 
nonce, pour  lui,  ses  héritiers  et  successeurs,  à  la  di- 
gnité de  stathouder ,  et  à  tous  les  droits  et  privilèges 
qui  en  dépendaient,  de  même  qu'à  tous  ses  domaines 
et  propriétés  foncières  dans  toute  l'étendue  du  terri- 
toire de  la  République  j  mais  il  conservera  les  revenus 
perpétuels  et  annuels  qu'il  a  à  prétendre  de  la  Répu- 
blique. Art.  1  et  2. 

L'article  3  détermine  l'indemnité  que  recevra  le 
prince  en  Allemagne.  Nous  en  parlerons  à  l'article  du 
Recès  de  la  députation  de  l'Empire ,  où  il  sera  ques- 
tion des  acquisitions  que  fit  la  maison  de  Nassau- 
Orange  en  Allemagne. 

Par  V article  h ,  la  succession  dans  cette  maison  est 
réglée.  La  ligne  masculine  exclura  la  ligne  féminine; 
mais,  à  défaut  d'héritiers  mâles,  les  femmes  succé- 
deront dans  tous  leurs  droits.  En  cas  de  l'entière  ex- 
tinction de  la  ligne  directe  descendant  du  prince  ré- 
gnant, la  maison  de  Prusse  héritera  des  possessions 
nouvelles  de  cette  maison.  Ce  droit  est  assuré  à  la 
maison  de  Prusse ,  à  cause  des  justes  prétentions 
qu'elle  formait  depuis  1 702  sur  la  succession  d'Orange, 
qui  est  remplacée  par  les  nouvelles  possessions  en 
Allemagne.  Henri -Frédéric  de  Nassau,  prince  d'Orange 
et  stathouder  des  Pays-Bas ,  laissa ,  entre  autres  en- 


—  143  — 

fants,  un  fils  et  deux  filles.  Le  fils  lui  succéda  sous  le 
titre  de  Guillaume  II,  et  eut  à  son  tour  pour  succes- 
seur son  fils  Guillaume  III ,  qui  mourut  en  1 702  sans 
enfants.  Louise-Henriette,  fille  aînée  de  Henri-Frédéric , 
avait  épousé  le  Grand-Électeur;  son  fils,  le  premier 
roi  de  Prusse,  se  porta  héritier  de  Guillaume  III; 
mais  celui-ci  avait  institué  Jean- Guillaume,  prince  ré- 
gnant de  Nassau-Diez ,  stathouder  de  Westfrise,  petit- 
fils  ai  Alhertine- Agnes ,  seconde  fille  de  Henri-Frédéric. 
La  France  réunit  alors  la  principauté  d'Orange  comme 
fief  éteint;  mais  les  riches  domaines  des  comtes  de 
Nassau  dans  les  Pays-Bas  devinrent  le  patrimoine  de 
la  maison  de  Nassau-Diez,  que,  depuis  ce  temps,  on 
appelle  la  maison  de  Nassau-Orange. 

V article  5  assure  à  la  maison  de  Nassau  la  garantie  de 
la  France  et  de  la  Prusse  pour  ses  nouvelles  possessions. 

Le  roi  de  Prusse  et  le  prince  de  Nassau-Orange  re- 
connaissent la  République  batave.  Art.  6. 

V article  7  dit  :  «  Immédiatement  après  l'échange  des 
ratifications,  S.  M.  le  roi  de  Prusse  et  S.  A.  S.  le  prince 
de  Nassau-Orange-Dillenbourg-Diez  peuvent  prendre 
possession  des  États  et  pays  qui  leur  sont  tombés  en 
partage.  ))Deux  choses  pourraient  surprendre  ici  :  l'oc- 
cupation prématurée  avant  qu'on  eût  demandé  le  con- 
sentement de  l'Empire,  et  la  singulière  rédaction 
de  l'article,  qui  laissait  voir  que  les  huit  articles 
qu'on  a  publiés  comme  formant  une  convention  parti- 
culière conclue,  le  23  mai,  entre  la  France  et  la  mai- 
son de  Nassau,  entraient  plutôt  dans  une  convention 
générale,  qui  stipulait  à  la  fois  les  intérêts  de  la  Prusse 
et  ceux  du  stathouder'.  Effectivement  on  a  su,  depuis, 
que  l'article  14  secret  de  la  convention  du  23  mai, 
autorisait  la  prise  de  possession,  aussitôt  après  l'é- 
chéance des  ratifications. 

'  Martens,  Rec.^  t.  X,  p.  219. 


—  144  — 

On  apprit,  par  une  convention  qui  fut  signée  à 
Berlin,  le  14  novembre  1802^,  entre  le  ministre  d'État 
comte  de  Haur/wilz  et  M.  Hultman,  Envoyé  de  la  Répu- 
blique batave,  que  la  Prusse  avait  pris,  par  Tarticle  2 
de  son  traité  du  23  mai ,  l'engagement  de  céder  à  la 
République  les  enclaves  de  Sevenœr,  Huyssen  et  Mal- 
bourg. La  convention  de  Berlin  règle  le  détail  de  cette 
cession.  Cette  convention  ne  fut  pas  exécutée.  La 
Hollande  n'obtint  la  possession  de  ces  trois  districts 
qu'après  la  paix  de  Tilsit  et  par  suite  de  la  convention 
de  Fontainebleau,  du  11  novembre  1807. 

Le  cinquième  traité,  celui  du  20  juin  1802,  fut 
signé,  au  nom  de  la  France,  par  M.  à'Hauterive,  et,  au 
nom  du  duc  de  Wurtemberg,  par  le  baron  de  Normaîm, 
son  conseiller  privé. 

Le  duc  de  Wurtemberg  renonce  à  ses  possessions  sur 
la  rive  gauche  du  Rhin  et  en  Alsace,  qui  sont  toutes 
détaillées  dans  Varticle  1 ,  ainsi  qu'aux  seigneuries, 
fiefs  et  domaines  possédés  par  les  héritiers  et  succes- 
seurs du  duc  Léopold-Eberhard  de  Wûrtemberg-Mont- 
béliardy  et  qui  sont  réversibles  à  la  maison  ducale. 
Léopold-Eberhard ,  dernier  duc  de  Wurtemberg-Mont- 
béliard,  était  mort  en  1723.  Il  avait  laissé  des  enfants 
légitimes,  issus  d'un  mariage  morganatique,  et  qui 
par  conséquent  n'avaient  pu  lui  succéder,  et  des  en- 
fants naturels  de  deux  sœurs ,  filles  d'un  baron  de 
l'Espérance.  Les  descendants  légitimes  portent  le  nom 
de  comtes  de  Sponeck;  les  descendants  des  enfants 
naturels  sont  les  barons  de  YEspérance.  11  paraît  que 
ces  deux  familles  ont  perdu  leurs  possessions  par  la 
cession  de  la  rive  gauche  du  Rhin.  Cependant  on  ne 
les  trouve  pas  parmi  celles  auxquelles  le  Recès  de  la  dé- 
putation  accorde  des  indemnités  :  nous  ignorons  si  la 

•  Voy.  Mabtens,  Recueil,  t.  X,  p.  221. 


— .  145  ~ 

maison  de  Wurtemberg  les  a  dédommagées  de  leurs 
pertes. 

Far  V article 'S  de  la  convention  du  20  juin  1802,  le 
duc  de  Wurtemberg  renonce  à  toutes  demandes  qu'il 
pourrait  former  à  titre  d'arrérages  et  de  non-jouissance 
de  droits  et  revenus  des  pays  cédés. 

Par  Vnrticle  h,  la  République  française  s'engage  à 
faire  obtenir  au  Duc  des  indemnités  territoriales  qui 
seront,  autant  que  possible,  situées  à  sa  convenance  et 
à  son  gré,  égales  aux  pertes  de  tout  genre  résultées  de 
la  guerre,  et  conformes  aux  avantages  et  privilèges 
attachés  aux  possessions  cédées.  Toutefois,  le  traité  ne 
spécifie  pas  les  indemnités,  comme  on  l'avait  fait  pour 
la  Prusse  et  la  Bavière. 

Les  articles  5  à  8  sont  relatifs  aux  dettes ,  aux  sé- 
questres et  à  l'échange  des  ratifications\ 

Peu  de  temps  après  la  conclusion  de  ces  traités,  et 
avant  que  la  députation  de  l'Empire  eût  encore  com- 
mencé ses  séances,  plusieurs  souverains  d'Allemagne 
se  mirent  en  possession  de  leurs  lots.  Le  roi  de  Prusse 
en  donna  l'exemple,  non  par  une  occupation  effective, 
mais  en  annonçant,  le  premier,  ce  projet.  Une  pa- 
tente datée  de  Kœnigsberg,  du  6  juin  1802,  déclara 
que,  par  suite  des  stipulations  de  la  paix  de  Lunéville 
et  des  conventions  sur  lesquelles  on  s'était  accordé, 
les  évêchés  et  villes  dont  nous  donnerons  plus  tard  la 
liste,  avaient  été  adjugés  à  la  Prusse.  L'occupation  eut 
lieu  le  3  août  1802.  Les  troupes  bavaroises  avaient 
pris  possession,  dès  le  16  juillet,  du  territoire  situé 
sur  la  rive  gauche  du  Lech.  Elles  entrèrent,  au  mois 
d'août,  dans  l'évêché  de  Passau,  et  firent  des  disposi- 
tions pour  occuper  la  ville  même  de  Passau.  Cette  ville 

•  Martens,  jRec,  t.  X,  p.  224. 

TII  10 


—  146  — 

avait  effectivement  été  promise  à  l'Électeur;  mais 
l'Empereur  la  réclamait  pour  son  frère,  le  grand-duc  de 
Toscane.  Pour  empêcher  que  la  Bavière  ne  s'en  mît 
en  possession,  l'Autriche  la  prévint;  les  troupes  au- 
trichiennes entrèrent  à  Passau  le  17  août;  le  19,  elles 
occupèrent  l'archevêché  de  Salzbourg. 

Au  mois  de  juillet,  le  ministère  autrichien  avait 
adressé  aux  Envoyés  de  Prusse,  de  Bavière,  de  Saxe  et 
de  plusieurs  autres  États  d'Allemagne  à  la  Diète  de 
Ratisbonne,  une  Note  circulaire  dans  laquelle  on  leur 
annonça  que,  dès  le  mois  de  février,  l'ambassadeur  de 
l'Empereur,  à  Paris,  avait  reçu  l'ordre  d'entamer  une 
négociation  pour  se  concerter  avec  le  gouvernement 
français  sur  l'exécution  des  articles  5  et  7  du  traité  de 
Lunéville;  que  cependant  cet  ambassadeur  n'avait  pas 
été  appelé  aux  négociations  qui  avaient  eu  lieu  à  ce 
sujet;  que  le  gouvernement  français  avait  fait  connaî- 
tre récemment  que,  d'accord  avec  la  Russie,  il  dési- 
rait que  la  fixation  de  l'affaire  des  indemnités  eût  lieu 
de  la  manière  prescrite  par  les  lois  de  l'Empire;  qu'en 
conséquence,  l'Empereur  allait  prendre  les  mesures 
nécessaires  pour  que  la  députation  de  l'Empire  pût 
incessamment  ouvrir  ses  séances.  On  ajouta,  au  reste, 
que  l'Empereur  était  convaincu  que  la  tranquillité  et 
le  bien-être  de  l'Allemagne  exigeaient  non-seulement 
que  le  règlement  se  fît  avec  concorde  et  avec  des 
égards  réciproques,  surtout  entre  les  principales  par- 
ties intéressées;  mais  aussi  que  l'exécution  du  plan 
qui,  de  concert  avec  la  Russie  et  la  France,  aurait  été 
adopté,  eût  lieu  d'une  manière  conforme  aux  lois,  sans 
qu'on  se  permît  des  démarches  arbitraires  et  des  actes 
de  violence  qui  forceraient  d'autres  parties  intéressées 
à  prendre  de  semblables  mesures  pour  s'assurer  l'in- 
demnité complète  qui  leur  était  due;   enfin  que  de 


_  147  — 

telles  démarches  occasionneraient  une  grande  confu- 
sion et  détruiraient  le  lien  qui  réunissait  les  membres 
de  l'Empire. 

La  Cour  de  Prusse  déclara,  en  réponse  à  cette  Note, 
qu'il  n'était,  à  la  vérité,  plus  possible  de  suspendre 
l'occupation  des  nouvelles  possessions  prussiennes; 
mais  que  le  Roi  désirait  que  cette  occupation  fût  en- 
visagée comme  une  mesure  provisoire,  et  qu'il  ne  re- 
garderait les  provinces  occupées  comme  à  lui  appar- 
tenantes, que  lorsque  la  députation  de  l'Empire  aurait 
terminé  la  mission  dont  elle  était  chargée. 

L'Empereur  convoqua  effectivement  la  députation, 
par  un  décret  de  commission  du  23  juillet,  dans  le- 
quel il  annonça  qu'il  avait  nommé  comme  plénipoten- 
tiaire impérial  auprès  du  Congrès  le  baron  de  Hugelf 
son  commissaire  à  la  Diète;  et  comme  subdélégué  de 
Bohême,  le  conseiller  aulique  Schraut.  Le  4  août  sui- 
vant, la  Diète  dressa  les  pleins  pouvoirs  pour  la  dépu- 
tation. 

Avant  l'ouverture  de  ses  séances,  les  ministres  deRus- 
sie  et  de  France  à  la  Diète  de  l'Empire,  MM.  de  Klupfel 
et  Laforesl,  remirent,  le  18  août,  à  cette  assemblée 
une  déclaration  uniforme,  signée  àPariSj  le  6  août, 
par  M.  de  Talleyrand-Périgord,  et  à  Saint-Pétersbourg, 
le  /g- juillet,  par  le  vice-chancelier,  prince  Kourakine. 

Il  est  nécessaire,  pour  l'intelligence  de  l'histoire  du 
Recès,  que  nous  insérions  ici  en  entier  cette  décla- 
ration. 

((  S.  M.  l'empereur  de  toutes  les  Russies  [le  pre- 
mier Consul  de  la  République  française],  étant  animé 
du  désir  de  contribuer  à  consolider  le  repos  et  la  tran- 
quillité de  l'Empire  germanique,  aucun  moyen  ne  lui 
a  paru  plus  propre  à  obtenir  cet  effet  de  sa  sollici- 
tude, que  celui  de  fixer,  par  un  plan  d'indemnité 


—  148  -- 

approprié,  autant  que  les  circonstances  ont  pu  le  per- 
mettre aux  convenances  respectives  ,  un  arrangement 
propre  à  produire  cet  effet  salutaire  ;  et  un  concert  de 
vues  s'étant  établi  à  cet  égard  entre  Sa  Majesté  Impé- 
riale et  le  gouvernement  français  [le  premier  Consul 
de  la  République  française  et  S.  M.  I.  de  toutes  les 
Russies],  elle  [il]  a  autorisé  son  ministre  plénipoten- 
tiaire à  Paris  [le  ministre  des  Relations  Extérieures]  à 
se  concerter  avec  le  ministre  de  la  République  fran- 
çaise [le  ministre  plénipotentiaire  de  S.  M.  I.  de  toutes 
les  Russies],  sur  les  moyens  les  plus  propres  à  appli- 
quer les  principes  adoptés  pour  ces  dédommagements 
aux  différentes  demandes  des  parties  intéressées. 

«  Le  résultat  de  ce  travail  ayant  obtenu  son  approba- 
tion, elle  [il]  a  ordonné  au  soussigné  de  le  porter  à  la 
connaissance  de  la  Diète  de  l'Empire  par  la  présente 
déclaration,  démarche  à  laquelle  Sa  Majesté  Impériale, 
aussi  bien  que  le  premier  Consul  de  la  République 
française  [le  premier  Consul  de  la  République  fran- 
çaise aussi  bien  que  Sa  Majesté  Impériale],  se  sont 
déterminés  par  les  considérations  suivantes  : 

«  L'article  7  du  traité  de  Lunéville  ayant  stipulé 
que  les  princes  héréditaires  dont  les  possessions  se 
trouvaient  comprises  dans  la  cession  faite  à  la  Répu- 
blique française  des  pays  situés  sur  la  rive  gauche  du 
Rhin,  seraient  indemnisés,  il  a  été  reconnu  que,  con- 
formément à  ce  qui  avait  été  précédemment  décidé  au 
Congrès  de  Rastadt,  cette  indemnisation  devait  s'opé- 
rer par  voie  de  sécularisation;  mais,  quoique  parfaite- 
ment d'accord  sur  la  base  du  dédommagement,  les 
États  intéressés  sont  demeurés  si  opposés  de  vues  sur 
la  distribution,  qu'il  a  paru  jusqu'ici  impossible  de 
procéder  à  l'exécution  de  l'article  précité  du  traité  de 
Lunéville.  Et,  quoique  la  Diète  de  l'Empire  ait  nommé 
une  commission  spéciale  chargée  de  s'occuper  de  cette 


—  149  — 

importante  matière,  on  voit  assez,  par  les  retards 
qu'éprouve  sa  réunion ,  combien  l'opposition  des  in- 
térêts, et  la  jalousie  des  prétentions,  mettent  d'obsta- 
cles à  ce  que  le  règlement  des  indemnités  en  Empire 
dérive  de  l'action  spontanée  du  corps  germanique. 
C'est  ce  qui  a  fait  penser  à  S.  M.  l'empereur  de  toutes 
les  Russies  et  au  premier  Consul  de  la  République 
française  [au  premier  Consul  de  la  République  fran- 
çaise et  à  S.  M.  l'empereur  de  toutes  les  Russies]  qu'il 
convenait  à  deux  puissances  parfaitement  désintéres- 
sées de  présenter  leur  médiation,  et  d'offrir  aux  déli- 
bérations de  la  Diète  impériale  un  plan  général  d'in- 
demnisation rédigé  d'après  les  calculs  de  la  plus 
rigoureuse  impartialité,  et  dans  lequel  on  se  serait 
appliqué  tant  à  compenser  les  pertes  reconnues,  qu'à 
conserver,  entre  les  maisons  principales  en  Allemagne, 
l'équilibre  qui  subsistait  avant  la  guerre. 

((  En  conséquence,  après  avoir  examiné  avec  la 
plus  scrupuleuse  attention  tous  les  mémoires,  tant  en 
évaluation  des  pertes  qu'en  demandes  d'indemnités , 
présentés  par  les  parties  intéressées,  on  est  demeuré 
d'accord  de  proposer  que  les  dédommagements  soient 
répartis  de  la  manière  suivante  : 

«  A  V archiduc  grand-duc,  pour  la  Toscane  et  dé- 
pendances :  l'archevêché  de  Salzbourg,  la  prévôté  de 
Berchtolsgaden,  l'évêché  de  Trente,  l'évêché  deBrixen, 
la  partie  de  l'évêché  de  Passau  située  au  delà  de  l'IUz 
et  de  rinn  du  côté  de  l'Autriche ,  à  l'exception  des 
faubourgs  de  Passau  avec  un  rayon  de  cinq  cents 
toises,  les  abbayes,  chapitres  et  couvents  situés  dans 
les  diocèses  sus-mentionnés. 

((  Les  principautés  ci-dessus  seront  tenues  par  l'ar- 
chiduc aux  conditions,  engagements  et  rapports  fon- 
dés sur  les  traités  existants.  Lesdites  principautés 
seront  retirées  du  cercle  de  Bavière  et  incorporées  au 


—  150  — 

cercle  d'Autriche;  et  leurs  juridictions  ecclésiasti- 
ques, tant  métropolitaine  que  diocésaine ,  seront  pa- 
reillement séparées  par  les  limites  des  deux  cercles. 
Mûhldorff  sera  uni  à  la  Bavière,  et  son  équivalent  en 
revenus  sera  pris  sur  ceux  de  Freisingen. 

«  Au  ci-devant  duc  de  Modène.,  pour  le  Modénois  et 
dépendances ,  le  Brisgau  et  l'Ortenau. 

i(  A  V électeur  palatin  de  Bavière ^  pour  le  duché  de 
Deux-Ponts,  le  duché  de  Juliers,  le  Palatinat  du  Rhin, 
le  marquisat  de  Berg-op-Zoom ,  la  seigneurie  de  Ra- 
venstein  et  autres,  situées  dans  la  Belgique  et  en 
Alsace  :  les  évêchés  de  Passau,  à  la  réserve  de  la  part 
de  l'archiduc:  de  Wûrzbourg,  sous  les  réserves  ci- 
après;  deBamberg,  d'Aichstedt,  de  Freisingen,  d'Augs- 
bourg,  la  prévôté  de  Kempten,  les  villes  impériales  de 
Rothenbourg,  Weissenbourg,  Windsheim,  Schwein- 
furt,  Gochsheim ,  Sennefeld  ,  Althausen  ,  Kempten  , 
Kaufbeuren,  Memmingen,  Dinkelsbûhl ,  Nœrdlingen, 
Ulm,  Bopfîngen,  Buchhorn,  Waugen,  Leutkirch,  Ra- 
vensbourg  et  Alschhausen,  les  abbayes  de  Saint-Ulric, 
Irsée,  Wengen,  Sœfflingen,  Elchingen,  Ursberg,  Ro- 
kenbourg,  Wettenhausen,  Ottobeuren  etRaysersheim. 

«  Au  roi  de  Prusse,  pour  les  duchés  de  Clèves  (  à  la 
gauche  du  Rhin)  et  de  Gueldre,  la  principauté  de 
Mœrs,  les  enclaves  de  Sevenaer,  Huissen  et  Malbourg, 
et  les  péages  du  Rhin  et  de  la  Meuse  :  l'évêché  de  Hil- 
desheim  et  celui  de  Paderborn ,  le  territoire  d'Er- 
fort  et  Untergleichen,  l'Eischfeld  et  partie  mayençaise 
de  Tréfort,  la  partie  de  l'évêché  de  Munster  située  à  la 
droite  d'une  ligne  tirée  d'Olphen  par  Munster  sur 
Tecklenbourg,  les  deux  villes  d'Olphen  et  de  Munster 
y  comprises,  ainsi  que  la  rive  droite  de  l'Embs  jusqu'à 
Linghen,  les  villes  impériales  de  Mulhausen,  Northau- 
sen  et  de  Goslar;  les  abbayes  de  Herforden,  Quedlin- 
bourg,  Elten,  Essen  et  Werden. 


—  151  — 

((  Aux  princes  de  Nassau;  savoir  : 

«  Nassau-Usingenj,  pour  la  principauté  deSaarbruck, 
les  deux  tiers  du  comté  de  Saarwerden,  la  seigneurie 
d'Ottweiler  et  celle  de  Lahr  dans  l'Ortenau  :  les  restes 
de  l'électorat  de  Mayence  à  la  droite  du  Mein  (à  la  ré- 
serve du  grand  bailliage  d'Ascliaffenbourg),  et  ceux  en- 
tre le  Mein,  le  pays  de  Darnstadt  et  le  comté  d'Erbach, 
Caub  et  les  restes  de  l'électorat  de  Cologne  proprement 
dit  (à  la  réserve  du  comté  d'Altwied),  les  couvents  de 
Seligenstadt  et  Bleidenstadt,  le  comté  de  Sayn-Alten- 
kirchen  après  la  mort  du  margrave  d'Anspach,  les 
villages  de  Soden  et  Sulzbach. 

c(  Nassau-Weibourg ,  pour  le  tiers  de  Saarwerden  et 
la  seigneurie  de  Kichheim-Bolanden  :  les  restes  de  l'é- 
lectorat de  Trêves  avec  l'abbaye  d'Arnstein  et  celle  de 
Marienstadt. 

«  Nassau-Dillenboiirg  f  pour  indemnité  du  statbou- 
dérat  et  des  domaines  en  Hollande  et  en  Belgique,  les 
évêchés  de  Fulde  et  de  Corvey,  la  ville  de  Dortmund, 
les  abbayes  et  chapitres  situés  dans  ces  territoires,  à  la 
charge  par  lui  de  satisfaire  aux  prétentions  subsistan- 
tes et  précédemment  reconnues  par  la  France  sur 
quelques  successions  réunies  au  majorât  de  Nassau- 
Dillenbourg  pendant  le  cours  du  siècle  dernier,  l'ab- 
baye de  Weingarten  et  celle  de  Kappel  au  comté  de  la 
Lippe,  de  Kappenberg  au  pays  de  Munster  et  de  Diet- 
kirchen. 

u  Au  margrave  de  Baden,  pour  sa  part  au  comté  de 
Sponheim,  et  les  terres  et  seigneuries  dans  le  Luxem- 
bourg, l'Alsace,  etc.  :  l'évêché  de  Constance,  les  restes 
des  évêchés  de  Spire,  Baie  et  Strasbourg,  les  bailliages 
palatins  de  Ladenbourg,  Bretten  et  Heidelberg,  avec 
les  villes  de  Heidelberg  et  Manheim,  la  seigneurie  de 
Lahr,  lorsque  le  prince  de  Nassau  sera  mis  en  posses- 
sion d' Altenkirchen  ;  les  restes  du  comté  de  Lichten- 


—  152  — 

berg  à  la  droite  du  Rhin,  les  villes  impériales  d'Of- 
fenbourg,  Zell-Hamersbach,  Gengenbacs,  Uberlingen, 
Biberach,  PfuUendorff  et  Wimpfen;  les  abbayes  de 
Schwarzacb,  Frauenalb,  AUerheiligen,  Lichtenthal, 
Gengenbach,  Ettenheiin-Munster,  Petershausen  et  Sal- 
mansweiler. 

«  Au  duc  de  Wurtemberg j,  pour  la  principauté  de  Mont- 
béliard  et  ses  possessions  en  Alsace  et  Franche-Comté  : 
la  prévôté  d'Elwangen,  l'abbaye  de  Zwiefalten,  les 
villes  impériales  de  Weil,  Reutlingen,  Eslingen,  Roth- 
weil,  Giengen,  Aalen,  Hall,  Gemùndt  etHeilbronn. 

«  Au  landgrave  de  Hesse-Cassel,  pour  Saint-Goar  et 
Rheinfels,  et  moyennant  qu'il  sera  chargé  de  l'indem- 
nité de  Hesse-Rothenbourg  :  les  enclaves  mayençaises 
d'Amœnebourg  et  de  Fritzlar,  avec  leurs  dépendances, 
et  le  village  de  Holzhausen. 

ce  Au  landgrave  de  Hesse-Darmstadt,  pour  la  totalité  du 
comté  de  Lichtenberg  et  dépendances  :  les  bailliages 
palatins  de  Lindenfels  et  Otzberg,  et  les  restes  du  bail- 
liage d'Oppenheim,  le  duché  deWestphalie,  à  la  réserve 
de  l'indemnité  du  prince  de  Witgenstein,  les  bailliages 
mayençais  de  Gernsheim,  Bensheim,  Heppenheim,  les 
restes  de  l'évêché  de  Worms,   la  ville  de  Friedberg. 

«  Au  prince  de  Hohenlohe-Bartensteinf  au  comte  de 
Lowenhaupt ,  aux  héritiers  du  baron  de  Dielrich,  pour 
les  parties  allodialesdu  comté  de  Lichtenberg;  savoir  : 

({  A  Hohenlohe,  pour  Oberbronn  :  le  bailliage  de 
Yaxtberg  et  les  portions  de  Mayence  et  de  Wiirzbourg 
au  bailliage  de  Kunzelsau. 

((  Aux  autres,  pour  Rauchenbourg,  Niederbronn, 
Reishofen,  etc.  :  l'abbaye  de  Rothenmimster. 

«  Au  même  comte  de  Lowenhaupt  et  au  comte  de 
Hillesheim,  pour  Reipoltzkirchen  :  l'abbaye  de  Hei- 
lighreutzthal. 

«  kxxiL  princes  et  comtes  deLowenstein,  pour  le  comté  de 


—  153  — 

Virnebourg,  la  seigneurie  de  Scharfeneck  et  autres  ter- 
res dans  les  pays  réunis  à  la  France  :  la  part  de  Wiirz- 
bourg  aux  comtés  de  Rhineck  et  de  Wertheim  à  la 
droite  du  Mein,  l'abbaye  de  Brombach. 

«  Au  prince  de  Linange  :  les  bailliages  mayençais  de 
Miltenberg,  Amorbach,  Biscbofsheim,  Kœnigshofen, 
Krautheim  et  toutes  les  parties  de  Mayence  comprises 
entre  le  Mein,  la  Tauber,  le  Necker  et  le  comté  d'Erbach, 
les  parcelles  de  Wiirzbourg  à  la  gauche  de  la  Tauber, 
les  bailliages  palatins  de  Boxberg  et  Mosbach,  l'abbaye 
d'Amorbach  et  la  prévôté  de  Combourg,  avec  supério- 
rité territoriale. 

(c  Au  comte  de  Linange-Guntersblum  :  le  bailliage 
mayençais  ou  Kellerey  de  Billigheim. 

«  Au  comte  de  Linange-Heidesheim  :  le  bailliage 
mayençais  ou  Kellerey  de  Neidenau. 

((  Au  comte  de  Linange-Westerbourg ,  branche  aînée  : 
le  couvent  de  Schœnthal  sur  la  Yaxt,  avec  supériorité 
territoriale. 

«  Branche  cadette  :  la  prévôté  de  Wimpfen. 

«  Aux  priîîces  de  Salm-Salm  et  de  Salm-Kirbourg,  aux 
RhingraveSj  aux  princes  et  comte  de  Salm-Reiferscheid  : 
les  restes  du  haut  évêché  de  Munster. 

«  Au  prince  de  Wied-Runckel,  pour  le  comté  de 
Créange  :  le  comté  d'Altwied,  à  la  réserve  des  baillia- 
ges de  Lintz  et  d'Unckel. 

«  Au  duc  d'Aremberg,  au  comte  de  la  Mark,  au  prince 
de  Ligne,  pour  la  principauté  d'Aremberg,  les  comtés 
de  Sassenberg,  Schleyden  et  Fagnolles  :  le  comté  de 
Becklinghausen,  avec  le  bailliage  de  Diilmen  au  pays 
de  Munster. 

«  Aux  princes  et  comtes  de  Solms ,  pour  Rohrbach, 
Hirschfeld  :  les  couvents  d'Arnsbourg  et  d'Ilbenstadt. 

((  Au  prince  de  Wittgenstein y  pour  Neumagen,  etc.  : 


—  154  — 

l'abbaye  de  Graffschaft,  le  district  de  Zuschenau  et  la 
forêt  de  Hellenhergestreil  au  duché  de  Westphalie. 

M  Au  comte  de  Wartemberg,  pour  Wartemberg  :  la 
Kellerey  de  Necker-Steinach,  celle  d'Erenberg  et  la 
ferme  de  Wimpfen  dépendante  de  Worms  et  de  Spire. 

((  Au  prince  de  Stolberg,  pour  le  comté  de  Rochefort  ; 
les  couvents  d'Engelthal  et  Rockenberg. 

«  Au  prince  d'Isenbourg  :  la  part  du  chapitre  de  Ja- 
cobsberg  au  village  de  Geinsheim. 

«  Au  prince  de  la  Tour-Taxis,  pour  indemnité  du  re- 
venu des  postes  impériales  dans  les  provinces  cédées 
et  domaines  dans  la  Belgique  :  l'abbaye  de  Buchau 
avec  la  ville,  celle  de  Marchthal  et  de  Neresheim,  le 
bailliage  d'Ostrach  dépendant  de  Salmansweiler. 

«  Au  comte  de  Sickingen,  pour  le  comté  de  Land- 
stuhl,  etc.  :  les  abbayes  d'Ochsenhausen  et  de  Miin- 
chroth. 

i(  Au  comte  de  la  Leyen,  pour  Bliecastel,  etc.  :  les 
abbayes  de  Schussenried,  Guttenzell,  Hegbach,  Baindt 
et  Buxheim. 

a  Au  prince  de  Brezenheim  :  l'abbaye  de  Lindau  avec 
la  ville. 

«  A  la  comtesse  de  Colloredo,  pour  Dachstuhl  :  l'ab- 
baye de  Sainte-Croix  de  Donauwerth. 

«  A  la  comtesse  de  Sternherg,  pour  Manderscheid- 
Blanckenheim  :  les  abbayes  de  Weissenau  etYsny  avec 
la  ville. 

((  Au  prince  de  Dietrichstein,  pour  la  seigneurie  de 
Trasp,  qui  sera  abandonnée  aux  Grisons  :  la  seigneu- 
rie de  Neu-Ravensbourg. 

Aux  comtes  de  Westphalie  : 

de  Bassenheim,  pour  Ollbruck  ; 

de  Sinzendorf,  pour  Rhineck  : 

de  Schœsberg,  pour  Kerpen  : 


--  155  — 

d'Ostein,  pour  Millendonck  : 

de  Quadt,  pour  Wickerade  : 

de  Plettenberg,  pour  Wittem  : 

de  Metternich,  pour  Winnebourg,  etc.  : 

d'Aspremont,  pour  Reckhoim  : 

de  Tœrring,  pour  Gronsfeld  : 

de  Nesselrode,  pour  Wylré,  etc.  : 

Le  bas  évêché  de  Munster. 

((  Au  grand  prieur  de  Malte,  pour  les  commanderies 
à  la  gauche  dn  Rhin  :  l'abbaye  de  Saint-Blaize  avec  le 
comté  de  Bondorf  et  dépendances ,  les  abbayes  de 
Saint-Trutpert,  de  Schuttern,  de  Saint-Pierre  et  de 
Tennenbach. 

«  Après  avoir  proposé  de  régler  ainsi  les  indemnités 
exigibles  des  princes  héréditaires,  on  a  reconnu  qu'il 
était  à  la  fois  possible  et  convenable  de  conserver  dans 
le  premier  collège  de  l'Empire  un  électeur  ecclésias- 
tique. On  propose  en  conséquence  : 

((  Que  Tarchichancelier  de  l'Empire  soit  transféré 
au  siège  de  Ratisbonne,  avec  les  abbayes  de  Saint- 
Emeran,  Obermunster  et  Niedermunster,  conservant 
desesanciennes  possessions  le  grand  bailliage  d'Aschaf- 
fenjjjfourg,  à  la  droite  du  Mein,  et  qu'il  y  soit  réuni 
d'ailleurs  un  nombre  suffisant  d'abbayes  médiates 
pour,  avec  les  terres  ci-dessus,  lui  parfaire  un  revenu 
anniiel  d'un  million  de  florins. 

«  Et  comme  le  meilleur  moyen  de  consolider  le 
corps  germanique,  c'est  de  faire  entrer  au  premier 
collège  les  princes  les  plus  influents  de  l'Empire,  on 
propose  que  le  titre  électoral  soit  accordé  au  mar- 
grave de  Bade,  au  duc  de  Wurtemberg  et  au  landgrave 
de  Hfisse-Cassel. 

«  De  plus,  comme  le  roi  d'Angleterre,  en  sa  qualité 


—  156  — 

d'électeur  de  Hanovre,  a  élevé  des  prétentions  sur  Hil- 
desheim,  Corvey  et  Hœxter,  et  qu'il  serait  intéressant 
qu'il  se  désistât  de  ses  prétentions,  on  propose  que 
l'évêché  d'Osnabriick,  qui  appartenait  déjà  par  alter- 
nat à  la  maison  électorale  de  Brunswic,  lui  soit  dé- 
volu à  perpétuité  sous  les  conditions  suivantes  : 

(c  Premièrement,  que  le  roi  d'Angleterre,  électeur 
de  Hanovre,  renoncera  à  tous  ses  droits  et  prétentions 
sur  Hildesheim,  Corvey  et  Hœxter. 

«  Deuxièmement,  qu'il  fera  pareillement  abandon 
aux  villes  de  Hambourg  et  de  Brème,  des  droits  et  pro- 
priétés qu'il  exerce  et  possède  dans  lesdites  villes  et 
dans  l'étendue  de  leur  territoire. 

«  Troisièmement,  qu'il  cédera  le  bailliage  de  Wild- 
hausen  au  duc  d'Oldenbourg  et  ses  droits  à  la  succes- 
sion éventuelle  du  comté  d'Altenkirchen  au  prince  de 
Nassau-Usingen.  Moyennant  la  cession  du  bailliage  de 
Wildhausen  au  duc  d'Oldenbourg  et  la  sécularisation 
qui  sera  faite  à  son  profit  de  l'évêché  et  du  grand  cha- 
pitre de  Lubeck,  le  péage  d'Elsfleth  demeure  supprimé 
sans  pouvoir  être  rétabli  sous  aucun  prétexte  ou  dé- 
nomination quelconque,  et  les  droits  et  propriétés  des- 
dits évêchés  et  chapitres  dans  la  ville  de  Lubeck  seront 
réunis  au  domaine  de  la  ville. 

«  Ces  propositions,  par  rapport  au  règlement  des 
indemnités  en  Allemagne,  conduisent  encore  à  énon- 
cer ici  plusieurs  considérations  générales  qui  sont  de 
nature  à  devoir  fixer  l'attention  de  la  Diète,  et  sur  les- 
quelles il  ne  pourra  manquer  d'être  pris  des  décisions 
convenables. 

«  H  paraît  nécessaire  d'établir  : 

«  Premièrement,  que  les  biens  ecclésiastiques  des 
grands  chapitres  et  de  leurs  dignitaires  devront  être 
incorporés  au  domaine  des  évêques,  et  passer,  avec  les 
évêchés,  aux  princes  auxquels  ceux-ci  sont  assignés. 


—  157  — 

((  Deuxièmement,  que  les  biens  des  chapitres,  ab- 
bayes, couvents,  tant  d'hommes  que  de  femmes,  tant 
médiats  qu'immédiats,  dont  il  n'a  pas  été  formel- 
lement fait  emploi  dans  la  présente  proposition,  se- 
ront appliqués  : 

«  A.)  Au  complément  de  l'indemnité  des  états  et 
membres  héréditaires  de  l'Empire,  s'il  est  reconnu 
qu'il  n'y  a  pas  été  suffisamment  pourvu  par  les  assi- 
gnations ci-dessus,  et  sauf  la  souveraineté  qui  demeu- 
rera toujours  aux  princes  territoriaux. 

{(  B.)  A  la  dotation  des  nouvelles  églises  cathédrales 
qui  seront  ou  conservées  ou  établies,  tant  pour  l'en- 
tretien des  évêques  que  de  leurs  chapitres  et  autres 
frais  de  culte. 

«  C.)  Aux  pensions  viagères  et  alimentaires  du  clergé 
supprimé. 

((  Troisièmement,  que  les  biens  et  les  revenus  ap- 
partenant aux  hôpitaux,  fabriques,  universités,  collè- 
ges et  autres  fondations  pieuses,  comme  aussi  celles 
des  communes  de  l'une  des  deux  rives  du  Rhin  situées 
sur  l'autre  rive,  devront  en  demeurer  distraits  et  mis 
à  la  disposition  des  gouvernements  respectifs. 

((  Quatrièmement,  que  les  terres  et  propriétés  as- 
signées aux  états  de  l'Empire,  en  remplacement  de 
leurs  possessions  à  la  rive  gauche  du  Rhin ,  demeu- 
reront spécialement  affectées  au  payement  de  dettes 
desdits  princes,  tant  personnelles  que  de  celles  pro- 
venant de  leurs  anciennes  possessions. 

«  Cinquièmement,  que  tous  les  péages  du  Rhin  per- 
çus soit  à  la  droite,  soit  à  la  gauche  du  fleuve,  devront 
être  supprimés,  sans  pouvoir  être  rétablis  sous  quel- 
que dénomination  que  ce  soit,  sauf  les  droits  de 
douane. 

((  Sixièmement,  que  tous  les  fiefs  relevant  des  cours 
féodales  établies  ci-devant  à  la  rive  gauche  du  Rhin , 


—  158  — 

et  situés  à  la  rive  droite,  relèveront  désormais  direc- 
tement de  l'Empereur  et  de  l'Empire. 

«  Septièmement,  que  les  princes  de  Nassau-Usin- 
gen,  Nassau-Weilbourg,  Salm-Salm,  Salm-Kyrbourg , 
Linange,  Aremberg,  seront  maintenus  ou  introduits 
au  collège  des  princes,  chacun  avec  vote  viril  affecté 
aux  possessions  qu'ils  recevront  en  indemnité  de  leurs 
anciennes  terres  immédiates;  que  les  votes  des  com- 
tes immédiats  d'Empire  seront  pareillement  transfé- 
rés sur  les  terres  qu'ils  recevront  en  dédommagement, 
et  que  les  votes  ecclésiastiques  seront  exercés  par  les 
princes  et  comtes  qui,  par  l'effet  du  traité  de  Lunéville, 
se  trouveront  en  possession  des  chefs-lieux. 

«Huitièmement,  que  le  collège  des  villes  devra 
demeurer  composé  des  villes  libres  et  impériales 
deLubeck,  Hambourg,  Brème,  Wetzlar,  Francfort, 
Nuremberg,  Augsbourg  et  Ratisbonne,  et  qu'il  devra 
être  avisé  au  moyen  de  pourvoir  à  ce  que ,  dans  les 
guerres  futures  où  l'Empire  pourrait  intervenir,  les- 
dites  villes  ne  soient  tenues  d'y  prendre  aucune  part, 
et  que  leur  neutralité  soit  assurée  par  l'Empire,  autant 
qu'elle  serait  reconnue  par  les  autres  puissances  bel- 
ligérantes. 

((  Neuvièmement,  que  la  sécularisation  des  couvents 
de  femmes  recluses  ne  devra  s'effectuer  que  du  con- 
sentement de  l'évêque  diocésain;  mais  que  les  cou- 
vents d'hommes  seront  à  la  disposition  des  princes 
territoriaux ,  qui  pourront  les  supprimer  ou  les  con- 
server à  leur  gré. 

«  Tel  est  l'ensemble  des  arrangements  et  des  consi- 
dérations que  le  soussigné  a  reçu  ordre  de  présenter  à 
la  Diète  impériale,  et  sur  lesquels  il  croit  devoir  appe- 
ler ses  plus  promptes  et  plus  sérieuses  délibérations , 
en  lui  exprimant,  au  nom  de  Sa  Majesté  Impériale  [du 
premier  Consul  de  la  République  française],  que  l'in- 


—  159  — 

térêt  de  l'Allemagne,  la  consolidation  de  la  paix  et  la 
tranquillité  générale  de  l'Europe ,  exigent  que  tout  ce 
qui  concerne  le  règlementdes  indemnités  germaniques 
soit  terminé  dans  l'espace  de  deux  mois. 

«  Saint-Pétersbourg,  le  ^e  juillet  1802 [Paris,  ISther- 
midor  an  x(6  août  1802)]. 

Signé  : 

«  Le  PRINCE  DE  KouRAKiN,  vîce- chancelier. 
[Ch.  Maur.  Talleyrand.]  » 

Il  n'est  pas  moins  nécessaire  d'avoir  sous  les  yeux 
le  rapport  fait,  en  Sénat,  au  premier  Consul  par  le  mi- 
nistre des  Relations  Extérieures,  dans  la  séance  du 
21  août  1802. 

((  Le  traité  de  Lunéville  avait  opéré  le  rétablisse- 
ment absolu  de  la  paix  entre  la  France  et  l'Allemagne. 
Il  avait  réglé  d'une  manière  expresse  et  définitive  les 
rapports  généraux  entre  ces  deux  pays  ;  et  la  France, 
se  trouvant  de  tout  point  satisfaite,  l'entière  exécution 
du  traité  n'aurait  eu  besoin  d'aucun  règlement  ulté- 
rieur, s'il  n'avait  été  reconnu  juste  et  formellement 
stipulé  que  la  cession  consentie  par  l'Empire,  au  pro- 
fit de  la  République,  serait  supportée  collectivement 
par  la  fédération  germanique,  en  admettant  toutefois 
la  distinction  des  princes  laïques  héréditaires  et  des 
ecclésiastiques  usufruitiers. 

«  Ce  principe  une  fois  posé,  il  paraissait  que  c'était 
au  corps  germanique  à  s'occuper  spontanément,  et 
sans  délai,  de  son  application. 

((  Le  vœu  sincère  du  gouvernement  français,  uni- 
quement appliqué  aux  affaires  de  l'intérieur,  était  de 
n'entrer  pour  rien  dans  le  règlement  des  indemnités 
promises;  et  il  borna  son  influence  à  témoigner  sou- 


—  160  — 

vent  qu'il  était  empressé  de  voir  que  le  traité  de  Lu- 
néville  reçût  le  complément  de  son  exécution  par  celle 
de  l'article  7.  Mais  ces  excitations  restèrent  sans  effet, 
et  plus  d'une  année  s'écoula  sans  qu'on  pût  s'aperce- 
voir qu'il  y  eût  seulement  rien  d'entamé  pour  la  ré- 
partition des  dédommagements. 

«  Le  défaut  d'exécution  d'une  des  stipulations  ca- 
pitales du  traité  de  Lunéville ,  laissait  l'Allemagne 
entière  dans  un  état  d'incertitude  qui  devenait  chaque 
jour  plus  embarrassant,  en  cela  que  les  prétentions, 
les  intrigues  s'élevaient  et  se  fortifiaient  à  mesure  qu'il 
y  avait  plus  d'indécision  dans  les  affaires  et  dans  les 
esprits.  L'espèce  de  dissolution  où  se  trouvait  le  corps 
germanique  retardait  pour  l'Europe  entière  les  avan- 
tages de  la  paix,  et  il  pouvait,  à  quelques  égards, 
compromettre  la  tranquillité  générale.  Le  gouverne- 
ment de  la  République  n'eut  pas  seul  le  sentiment  de 
ce  danger;  et,  tandis  qu'il  recevait  de  toutes  parts  les 
réclamations  des  parties  intéressées  à  la  répartition 
des  dédommagements,  la  Cour  de  Russie  témoigna 
combien  il  lui  paraissait  urgent  que  les  affaires  d'Al- 
lemagne fussent  réglées.  L'empereur  Alexandre,  à  son 
avènement  au  trône,  sentit  le  noble  désir  de  contribuer 
au  maintien  de  la  paix  rétablie;  et  un  concert  intime, 
une  association  franche  et  complète  des  vues  les  plus 
généreuses  s'étant  promptement  formés  entre  le  pre- 
mier Consul  et  l'Empereur,  il  fut  reconnu  par  eux  que 
la  pacification  du  Continent  ne  pouvait  être  solide- 
ment garantie  qu'autant  que  le  traité  de  Lunéville  au- 
rait reçu  sa  complète  exécution;  et  que  celte  exécution 
ne  pouvait  plus  être  procurée  que  par  l'initiative  et 
l'influence  de  deux  puissances  parfaitement  désinté- 
ressées, dont  la  médiation  prépondérante  écarterait 
tous  les  obstacles  élevés  depuis  dix-huit  mois  contre 
la  répartition  définitive  des  indemnités. 


—  161  — 

«  Ce  fut  donc  uniquement  pour  mettre  le  sceau  à 
la  pacification  de  l'Europe  et  pour  en  garantir  la  sta- 
bilité, que  le  premier  Consul  et  S.  M.  l'empereur  de 
Russie  se  déterminèrent,  d'un  commun  accord,  à  in- 
tervenir dans  les  affaires  d'Allemagne  pour  effectuer, 
par  leur  médiation,  ce  qu'on  aurait  vainement  attendu 
des  délibérations  intérieures  du  corps   germanique. 

«  Ce  premier  point  étant  convenu,  une  discussion 
fut  ouverte  et  suivie  entre  les  deux  Cabinets  pour  l'exa- 
men des  voies  et  moyens  qui  devaient  conduire  au 
résultat  désiré.  Il  fut  arrêté  qu'un  plan  général  d'in- 
demnisation serait  présenté  à  la  Diète;  et  ce  fut  dans 
la  rédaction  de  ce  plan  qu'on  porta,  des  deux  parts, 
le  soin  le  plus  scrupuleux  à  compenser  toutes  les  per- 
tes, à  satisfaire  tous  les  intérêts,  et  à  concilier  sans 
cesse  les  réclamations  de  la  justice  avec  les  convenan- 
ces de  la  politique. 

«  Il  ne  suffisait  pas,  en  effet,  de  déterminer  rigou- 
reusement la  valeur  des  pertes  éprouvées,  et  d'y  pro- 
portionner les  compensations  :  les  résultats  de  la 
guerre  ayant  altéré  l'équilibre  intérieur  de  l'Allema- 
gne, il  fallait  s'appliquer  à  le  rétablir.  L'introduction 
de  princes  nouveaux  dans  le  système  germanique  exi- 
gait  des  combinaisons  nouvelles.  La  valeur  réelle  des 
dédommagements  ne  devait  plus  seulement  résulter 
de  leur  étendue,  mais  souvent  de  leur  position;  et  les 
avantages  que  pouvaient  procurer  à  quelques  puissan- 
ces la  concentration  de  leurs  anciens  et  nouveaux  do- 
maines ,  étaient  eux-mêmes  d'une  considération  im- 
portante et  qui  devait  être  observée. 

((  Les  deux  gouvernements  s'appliquèrent  donc  à 
examiner  avec  un  soin  scrupuleux  la  question  des  in- 
demnités sous  tous  ses  rapports.  Ils  sentirent  que  si 
la  politique  exigeait  la  complète  satisfaction  des  mai- 
sons principales,  il  n'était  pas  d'une  justice  moins  ri- 
vn  11 


—  162  — 

goureuse  de  procurer  aux  Efcats  du  second  et  du  troi- 
sième ordre  le  dédommagement  de  leurs  pertes;  et  le 
premier  Consul  mit  un  empressement  particulier  à  sou- 
tenir des  droits  qui  auraient  pu  trouver  moins  d'appui 
au  milieu  des  intéressés. 

«  Le  concert  parfait  qui  s'était  formé  entre  la 
France  et  la  Russie,  résultat  heureux  des  rapports  di- 
rects que  le  premier  Consul  avait  aimé  à  entretenir 
avec  S,  M.  l'empereur  de  Russie,  ayant  présidé  à  tou- 
tes les  discussions,  on  fut  bientôt  d'accord  sur  tous 
les  points ,  et  un  plan  général  d'indemnisation  arrêté 
à  Paris  entre  les  plénipotentiaires  respectifs ,  reçut 
l'approbation  du  premier  Consul  et  celle  de  l'Empe- 
reur. 

«  11  a  été  convenu  que  ce  plan  serait  présenté  à  la 
Diète  de  l'Empire  sous  la  forme  d'une  déclaration  qui 
serait  faite  simultanément  pax  des  ministres  extraor- 
dinaires nommés  à  cet  effet.  De  la  part  du  premier 
Consul,  c'est  le  citoyen  Laforesty  ministre  de  la  Répu- 
blique près  l'électeur  palatin  de  Bavière,  qui  a  eu  or- 
dre de  se  rendre  à  Ratisbonne;  de  la  part  de  l'empe- 
reur de  Russie ,  c'est  pareillement  le  baron  de  Bilhler, 
son  ministre  à  Munich. 

((  Cette  déclaration  doit  avoir  été  présentée  ces  jours 
derniers,  et  la  lecture  que  le  premier  Consul  a  ordonné 
qui  lui  en  fût  faite  en  Sénat,  va  faire  connaître  les 
principes  qui  ont  dirigé  les  deux  gouvernements,  et 
le  soin  qu'ils  ont  mis  à  en  ménager  l'application. 

<(  En  effet,  si  l'on  examine  le  plan  proposé,  on  verra 
que,  dans  l'exécution  d'un  système  qui  a  pour  but 
principal  de  consolider  la  paix  de  l'Europe,  on  s'est 
surtout  appliqué  à  diminuer  les  chances  de  guerre. 
C'est  pourquoi  on  a  pris  soin  d'éviter  tout  contact  de 
territoire  entre  les  deux  puissances  qui  ont  le  plus  sou- 
vent ensanglanté  l'Europe  par  leurs  querelles,  et  qui,  ré- 


—  163  — 

conciliées  de  bonne  foi,  ne  peuvent  avoir  aujourd'hui 
un  désir  plus  vif  que  celui  d'éloigner  toutes  les  occa- 
sions de  mésintelligence  qui  naissent  du  voisinage,  et 
qui,  entre  des  États  rivaux,  ne  sont  jamais  sans  péril. 

«  Ce  même  principe  adopté,  non  dans  toute  sa  ri- 
gueur, mais  autant  que  les  circonstances  ont  pu  le 
permettre,  a  décidé  à  placer  aussi  les  indemnités  de 
la  Prusse  hors  de  contact  avec  la  France  et  la  Batavie. 

((  De  cet  arrangement ,  l'Autriche  aura  retiré  l'im- 
mense avantage  de  voir  toutes  ces  possessions  con- 
centrées; 

((  La  maison  palatine  aura  pareillement  reçu  une 
organisation  plus  forte  et  plus  avantageuse  pour  sa 
défense, 

K  Et  la  Prusse  continuera  à  former,  dans  le  système 
germanique,  la  base  essentielle  d'un  contre-poids  né- 
cessaire. 

«  Le  règlement  des  indemnités  seconc  aires  a  aussi 
été  proposié  d'après  des  convenances  générales  et  par- 
ticulières, et  on  n'a  rien  négligé  pour  les  établir  dans 
une  juste  proportion  des  pertes  reconnues.  Il  pourra 
cependant  paraître  que  la  maison  de  Bade  a  été  plus 
avantagée  que  les  autres  ;  mais  il  a  été  jugé  néces- 
saire de  fortifier  le  cercle  de  Souabe,  qui  se  trouve  in- 
termédiaire entre  la  France  et  les  grands  États  germa- 
niques; et  le  premier  Consul  s'est  applaudi  que,  dans 
cette  circonstance,  la  politique  fut  parfaitement  d'ac- 
cord avec  la  disposition  du  gouvernement  français, 
qui  ne  pouvait  voir  qu'avec  plaisir  une  augmentation 
de  puissance  accordée  à  un  prince  dont  les  vertus 
avaient  obtenu  depuis  longtemps  l'estime  de  l'Europe, 
dont  les  alliances  avaient  si  honorablement  distingué 
la  famille,  et  dont  la  conduite,  pendant  tout  le  cours 
de  la  guerre,  a  mérité  particulièrement  la  bienveillance 
de  la  République. 


—  IC'f  — 

«  C'est  aussi  avec  une  véritable  satisfaction  que  la 
France  et  la  Russie,  obligées  de  prendre  la  séculari- 
sation pour  base  des  dédommagements,  ont  reconnu 
la  possibilité  de  conserver  en  Empire  un  électeur  ec- 
clésiastique ,  et  qu'ils  ont  proposé  de  lui  assigner  un 
sort  convenable  en  lui  laissant  le  titre  et  les  fonctions 
d'archichancelier. 

(c  On  a  dû  présenter  encore  à  la  Diète  de  l'Empire 
quelques  considérations  générales  qui  doivent  servir 
de  base  aux  règlements  intérieurs  qu'exigera  la  nou- 
velle organisation  du  corps  germanique;  et  le  premier 
Consul  et  S.  M.  l'empereur  de  Russie  peuvent  sans 
doute  se  rendre  le  témoignage  qu'uniquement  animés 
du  désir  de  consolider  la  paix  en  Europe ,  et  n'étant 
mus  par  aucun  intérêt  personnel ,  il  n'a  rien  été  né- 
gligé de  leur  part  pour  présenter  à  la  Diète  de  l'Empire 
un  plan  d'indemnisation  tel,  qu'il  a  paru  impossible 
d'en  rédiger 'm  dont  les  bases  et  les  développements 
fussent  plus',j^,onformes  à  l'esprit  et  au  texte  du  traité 
de  Lunéville,  plus  analogues  aux  convenances  politi- 
ques de  l'Europe,  plus  favorables  au  maintien  de  la 
paix. 

((  Les  deux  gouvernements  de  France  et  de  Russie 
ont  la  persuasion  que  le  temps  qu'ils  ont  marqué  doit 
suffire  pour  la  décision  des  intérêts  germaniques,  et 
ils  trouveront,  dans  la  longue  prospérité  qui  en  ré- 
sultera pour  l'Allemagne ,  une  douce  et  honorable 
récompense  des  efforts  qu'ils  auront  faits  pour  la  lui 
procurer.  » 

On  voit,  par  le  préambule  de  la  déclaration  du 
18  août  et  par  le  rapport  otficiel  qu'on  vient  de  lire, 
qu'il  ne  s'agissait  pas  seulement  de  proposer  une  in- 
demnité aux  États  qui  avaient  perdu  des  possessions 
sur  la  rive  gauche  du  Rhin,  mais  qu'il  était  principa- 


—  165  — 

lement  question  de  rétablir  l'équilibre  qui  subsistait 
avant  la  guerre  entre  les  principales  maisons  d'Alle- 
magne. On  se  demande  :  quel  est  cet  équilibre  qu'il 
s'agissait  de  rétablir?  Est-ce  l'équilibre  de  droit  repo- 
sant sur  les  lois  fondamentales  qui,  en  assujettissant 
les  États  à  l'Empereur  et  à  l'Empire,  mettaient  des 
bornes  à  l'autorité  du  premier?  est-ce  celui  qui  exis- 
tait entre  les  trois  collésies  de  la  Diète?  est-ce  celui 
que  la  paix  de  Westphalie  avait  établi  entre  les  deux 
principales  religions?  Mais  le  dernier  n'avait  pas  été 
dérangé  parla  guerre;  le  second  a  été  plutôt  troublé 
par  le  plan  d'indemnité  qui  a  privé  le  collège  des 
villes  de  son  influence,  et  le  premier  était  assuré  par 
des  lois  que  ce  plan  n'a  pas  consolidées. 

Il  n'était  donc  point  question  de  l'équilibre  de  droit; 
il  s'agissait  uniquement  de  l'équilibre  de  puissance. 
Les  médiateurs  voulaient  maintenir,  contre  la  prépon- 
dérance de  l'Autriche,  un  équilibre  dont  la  Prusse  et  la 
Bavière  devaient  être  les  pivots.  On  a  demandé  s'il  est 
vrai  que  cet  équilibre  ait  été  troublé.  Il  paraît  que,  lors- 
qu'on vit,  en  1 792,  l'union  intime  entre  l'Autriche  et  la 
Prusse ,  on  aurait  eu  raison  de  craindre  pour  l'équi- 
libre politique  en  Allemagne,  si,  dès  l'origine  de  cette 
alliance,  qui  alors  paraissait  peu  naturelle,  on  avait  pu 
concevoir  des  doutes  sur  son  objet  ;  mais  bien  loin  de 
tendre  à  l'asservissement  de  l'Allemagne,  cette  union 
se  proposait,  au  contraire,  le  maintien  de  son  indé- 
pendance. L'équilibre  que  la  France  veut  rétablir 
était-il  dérangé  par  les  pertes  que  la  Prusse  et  la  Ba- 
vière avaient  éprouvées?  la  première  avait  sacrifié  une 
population  d'environ  cent  vingt-sept  mille  habitants, 
avec  un  revenu  qui  n'allait  pas  tout  à  fait  à  un  demi- 
million  de  florins.  C'était  une  bien  faible  partie  de  la 
monarchie;  on  ne  pouvait,  dans  aucun  cas,  la  com- 
parer à  l'importance  de  la  Prusse  méridionale  el  des 


—  166  — 

principautés  de  la  Franconie  qu'elle  avait  acquises 
pendant  la  guerre. 

En  1792,  la  Prusse  possédait  :  trois  mille  six  cents 
milles  carrés,  sept  millions  d'habitants,  trente  et  un 
millions  de  rixdales  de  revenus. 

A  la  paix  de  Lunéville ,  cinq  mille  quatre  cents 
milles  carrés,  neuf  millions  d'habitants,  trente-six 
millions  de  rixdales  de  revenus. 

Ce  n'est  donc  pas  par  son  affaiblissement  que 
l'équilibre  a  été  troublé. 

Il  n'en  futpas  demêmeparrapportàlaBavière.  L'Élec- 
teur perdait,  parla  cession  de  la  rive  gauche  du  Rhin, 
une  surface  de  cent  quatre-vingt-six  milles  carrés,  fai- 
sant plus  du  cinquième  de  l'étendue  de  ses  États,  cinq 
cent  quatre-vingt  mille  âmes  formant  le  quart  de  ses  su- 
jets, et  le  tiers  de  ses  revenus,  qu'on  estimait  alors 
pouvoir  s'élever  à  douze  millions  de  florins.  Mais,  en 
supposant  qu'on  ne  lui  eût  accordé  qu'une  stricte  in- 
demnité, l'Électeur  gagnait  en  puissance  par  la  con- 
centration de  ses  forces  :  les  provinces  qu'on  lui  assigna 
arrondissaient  ses  Etats,  tandis  que  celles  qu'il  avait 
perdues  étaient  éloignées  du  centre  de  son  pouvoir. 

Si  l'équilibre  n'avait  pas  été  dérangé  par  les  pertes 
de  la  Prusse;  s'il  avait  peu  souffert  par  celles  de  la 
maison  palatine,  il  faut  chercher  ailleurs  le  danger 
dont  il  était  menacé.  On  pouvait  craindre,  en  effet, 
qu'il  ne  fût  renversé  par  les  avantages  que  la  paix  de 
Lunéville  avait  accordés  à  la  maison  d'Autriche.  La 
Prusse  avait  pu  voir  sans  jalousie  entre  les  mains  de 
cette  maison  les  Pays-Bas,  dont  la  possession  exposait 
l'Autriche  à  de  fréquentes  contestations  avec  la 
France  ;  elle  ne  devait  pas  regar-der  comme  ajoutant 
un  poids  important  à  la  puissance  autrichienne  la 
Lombardie,  séparée  de  ses  autres  États  héréditaires,  et 
convoitée  sans  cesse  par  un  voisin  qui,  depuis  un 


—  167  — 

siècle  et  demi,  épiait  toutes  les  occasions  de  s'agran- 
dir. Mais  la  Prusse  était  effrayée  de  l'immense  accrois- 
sement de  puissance  que  la  maison  d'Autriche  gagnait 
en  échangeant  les  Pays-Bas  et  la  Lombardie,  dont  la 
possession  était  si  précaire,  contre  une  grande  partie 
des  États  de  Venise,  qui,  étant  contiguë  au  reste  de  la 
monarchie,  diminuait  prodigieusement  ses  lignes  de 
défense,  et  favorisait  le  développement  de  l'industrie 
et  du  commerce  de  ses  anciennes  possessions.  La 
Prusse  et  la  Bavière  pouvaient  encore  être  inquiètes 
du  projet  de  transplanter  en  Allemagne  le  grand-duc 
de  Toscane.  Où  trouver  un  équivalent  pour  le  beau 
pays  auquel  ce  prince  avait  renoncé,  si  ce  n'est  aux 
dépens  de  la  Bavière,  ou  en  s'appropriant  les  provinces 
sur  lesquelles  elle  avait  jeté  son  dévolu  ? 

Si  les  moyens  de  parer  à  ces  inconvénients  ne  sont 
pas  clairement  expliqués  dans  les  deux  pièces  que 
nous  avons  insérées,  elles  y  sont  ébauchées.  Il  s'agis- 
sait d'abord  d'empêcher  que  le  grand-duc  n'obtînt  en 
Allemagne  l'indemnité  pleine  et  entière  qui  lui  avait 
été  promise;  il  fallait  au  contraire  considérablement 
augmenter  le  lot  auquel  la  Prusse  et  la  Bavière  auraient 
eu  droit,  si  l'on  s'en  était  tenu  strictement  au  traité 
de  Lunéville  ;  il  fallait  ensuite  accorder  à  quelques 
États  du  second  ordre  une  influence  assez  grande  dans 
les  affaires  d'Allemagne  pour  balancer  celle  de  TAu- 
triche,  mais  pas  assez  prépondérante  pour  pouvoir  se 
passer  de  la  protection  de  la  France.  Pour  atteindre  ce 
but,  il  fallait  enfin  que  l'Empereur,  quoique  partie 
principalement  intéressée  à  l'arrangement  des  indem- 
nités, en  fût  écarté.  Ce  fut  lorsqu'on  eut  adopté  cette 
marche,  «  que  Paris  devint  Vraiment  le  foyer  de 
toutes  les  intrigues,  le  marché  où  se  vendaient  les 
biens  ecclésiastiques  d'Allemagne*.  » 

•  On  a  vu  qu'en  effet  la  mesure  radicale  d-ei  sécularisations  avait  été 


—  168  — 

La  députation  extraordinaire  de  TEmpire,  nommée 
par  un  Avis  de  l'Empire  du  2  octobre  1 801 ,  que  l'Em- 
pereur avait  ratifié  fe  7  novembre  suivant,  et  chargée 
d'exécuter  les  articles  5  et  7  de  la  paix  de  Lunéville, 
s'assembla  pour  la  première  fois  et  se  constitua  le 
24  août  1802,  après  avoir  tenu,  le  22,  une  conférence 
préalable  dans  laquelle  on  était  convenu  d'écarter 
toute  espèce  de  cérémonial.  Elle  était  composée  de 
quatre  Électeurs,  Mayence,  Saxe,  Bohême  et  Brande- 
bourg, et  de  quatre  membres  du  collège  des  Princes; 
savoir  :  Bavière,  Wurtemberg,  le  grand-maître  de 
l'Ordre  Teutonique  et  Hesse-Cassel.  Quoique  le  plé- 
nipotentiaire impérial,  les  subdélégués  des  députés 
et  les  ministres  des  puissances  médiatrices  soient 
nommés  dans  le  préambule  du  Recès  que  nous  donnons 
plus  loin  dans  toute  son  étendue^  il  est  utile,  pour 
l'intelligence  des  débats,  de  les  désigner  ici. 


décidée.  Mais  «cette  grande  opération  des  indemnités  de  l'Empire  a  été 
tellement  dominée  par  une  politique  de  Cabinet,  qu'à  peine  a-t-on  re- 
marqué l'idée  philosophique  du  mode  d'exécution.  Ce  n'est  point  ce- 
pendant un  événement  sans  importance  que  cette  sécuUuisation  uni- 
verselle des  biens  ecclésiastiques  d'Allemagne ,  que  l'abolition  d'une 
théocratie  bizarre  qui  soumettait  de  nombreuses  populations  au  gou- 
vernement d'un  prêtre  élu  par  le  chapitre  d'une  cathédrale.  Si  le  frac- 
tionnement du  vaste  territoire  de  la  Germanie  en  douze  ou  quinze  cents 
souverainetés  particulières,  avait  le  funeste  effet  de  rapetisser  les  hom- 
mes à  la  mesure  de  leur  gouvernement,  combien  le  mal  ne  devait-il  pas 
être  plus  grand  encore  là  où  le  prince  n'avait  pas  même  à  ménager,  à 
mettre  en  valeur  le  sol  et  les  hommes  dans  l'intérêt  de  ses  enfants;  là 
où  le  pouvoir,  étant  électif,  le  choix  d'un  maître  viager  se  concentrait 
dans  une  compagnie  de  chanoines  ,  et  s'opérait  dans  une  sacristie  !  Dès 
longtemps  la  raison  publique  appelait  la  réforme  d'un  ordre  de  choses 
aussi  révoltant.  C'était  un  des  rêves  de  Faédéric  II;  mais,  dans  ce 
prince,  le  vœu  du  philosophe  tenait  de  bien  près  à  l'intérêt  direct  du 
monarque.  »  La  France  et  la  Russie,  «  en  consommant  ce  grand  ou- 
vrage, dans  un  système  de  politique  générale,  ont  non-seulement  servi 
l'Allemagne;  elles  ont  bien  mérité  du  genre  humain.  » 


—  169  — 


MÉDIATEURS. 

PLÉNIPOTENTIAIRE 

IMPÉRIAL. 

SUBDÉLÉGUÉS. 

FRANCE  : 

RUSSIE  : 

MAYENCE : 

M.Laforest^minhtve  ex- 

Le baron  de  Hiiget. 

Le  baron  à'Albini. 

traordinaire.    (  Parmi 

les  conseillers  adjoints 

BOHÊME  : 

à  ce  ministre,  celui  au- 

M. de  Schraut,  et  en- 

quel on  attribuait  le 

suite  le  comte  de  Col- 

plus  d'influence  était 

loredo-Mansfeld. 

M.  Jacques  Mathieu , 

chef  aux  Relations  Ex- 

SAXE : 

térieures  et  auteur  du 

M.  de  Globig. 

premier  plan  d'indem- 
nité.) 

BRANDEBOURG  : 

Le  comte  de  Gœrtz  et 

RUSSIE  : 

M.  Hœnlein. 

M.  deKliipffel,  ministre 

résident  prés  la  Diète 

BAVIÈRE  : 

générale  de  l'Empire; 

Le  baron  de  Rechberg 

et  ensuite  le  baron  de 

et  Rothenlœwen. 

Buhler,  ministreextra- 
ordinaire. 

GRAND-HAlTRETEUTONlQUE. 

Le  baron  de  Nordegg- 
Rabenau. 

WURTEMBERG  : 

Le  baron  de  Normann, 
et,  l'arrivée  de  ce  mi- 
nistre ayant  été  retar- 
dée, dans  la  première 
séance ,   le  baron  de 
Buhler. 

HESSE-CASSEL  i 

M.  de  Gunterrode,  et 
ensuite  M.  Starkloff. 

Le  plénipotentiaire  de  l'Empereur  parut  dans  la 
première  séance  qui,  ainsi  que  les  suivantes,  fut  te- 


—  170  — 

nue  à  l'hôtel  de  ville  de  Uatisbonne,  et  y  fit  la  propo- 
sition suivante  : 

((Depuis  l'avis  de  l'Empire  du  2  octobre  1801, 
l'Empereur  a  vainement  proposé  à  plusieurs  reprises, 
par  écrit  et  verbalement,  au  gouvernement  français , 
la  réunion  de  la  députation  de  l'Empire  avec  des  plé- 
nipotentiaires français,  pour  se  concerter  sur  ce  qu'il 
restait  encore  à  faire  pour  la  paix.  Il  n'a  pas  mieux 
réussi  à  entamer  avec  ce  gouvernement  une  négocia- 
tion préalable  sur  ses  propres  intérêts;  et,  quoiqu'il 
ait  accédé  avec  empressement  à  la  proposition  que  la 
Russie  lui  a  faite,  à  la  fin  de  l'année  passée,  d'une  né- 
gociation commune  à  Paris,  néanmoins  son  ambassa- 
deur dans  cette  ville  n'a  pas  été  appelé  à  cette  négo- 
ciation, ni  informé  de  son  succès  et  de  ses  résultats. 
Ainsi  aucun  retard  de  sa  part,  ni  la  moindre  négli- 
gence dans  l'exercice  de  ses  fonctions  de  chef  de  l'Em- 
pire, n'a  pu  contribuer  à  priver  l'Empereur  et  l'Em- 
pire, qui  ont  été  parties  contractantes  à  la  paix  de 
Lunéville,  du  droit  qui  leur  a  été  réservé  dans  cet  in- 
strument, de  traiter  directement  et  de  régler  l'affaire 
des  indemnités.  Aussitôt  qu'il  a  connu  ce  qui  avait  été 
convenu  sur  cet  objet  entre  la  Russie  et  la  France, 
l'Empereur,  plein  de  confiance  dans  le  respect  de  ces 
puissances  pour  les  droits  inviolables  d'un  Etat  indé- 
pendant tel  que  le  corps  germanique,  s'est  empressé 
de  convoquer  la  députation  de  l'Empire,  afin  qu'elle 
coopère  à  une  affaire  qui  concerne  à  un  si  haut  degré 
l'intérêt,  la  propriété,  la  constitution  et  le  salut  de 
l'Empire.  Il  y  a  été  porté  par  un  nouveau  motif,  lors- 
qu'il a  su  que  si  ces  deux  puissances,  en  leur  qualité 
de  parties  désintéressées,  ont  jugé  utile  de  contribuer, 
par  leurs  conseils  et  leur  intervention  amicale,  à  ar- 
ranger une  affaire  très-embrouillée,  elles  ne  pensent 
pourtant  pas  disputer  à  l'Empire  et  à  la  députation 


—  171   — 

qui  le  représente,  le  droit  de  prendre  part  elle-même  à 
l'arrangement  des  indemnités.  La  mission  de  la  dépu- 
tation  est  de  conclure,  de  concert  avec  des  plénipo- 
tentiaires français,  la  convention  particulière  qui  man- 
quait encore  pour  compléter  les  arrangements  de  la 
paix  de  Lunéville,  et  nommément  pour  déterminer, 
par  le  moyen  de  sécularisations,  les  indemnités  pro- 
mises par  les  articles  5  et  7.  Le  premier  objet  de  la 
députation  sera,  en  conséquence,  de  délibérer  mûre- 
ment sur  les  principes  d'indemnisation  adoptés  dans 
la  déclaration  remise  par  les  puissances  médiatrices, 
et  sur  les  applications  multipliées  qui  en  ont  été  faites; 
de  procurer  avec  une  égale  justice  l'exécution  des  in- 
demnités promises  par  le  traité;  de  ne  pas  perdre  de 
vue  les  principes  généraux  établis  dans  la  paix  et  par 
les  négociations  de  Rastadt,  sans  permettre  que,  sous 
le  prétexte  d'un  équilibre  à  fixer  entre  les  princes 
d'Allemagne  de  la  première  classe,  on  y  fasse  des  ex- 
ceptions nuisibles;  de  réfléchir  tant  sur  l'application 
de  ces  principes  que  sur  les  autres  points  concernant 
la  constitution  de  l'Empire,  et  recommandés,  par  la 
déclaration,  aux  soins  de  l'Empire;  enfin  de  porter  à 
ce  travail  l'attention  que  réclament  l'importance  de  la 
chose  et  les  conséquences  qui  doivent  nécessairement 
en  résulter  pour  le  bien-être  de  l'Empire  en  général , 
de  ses  Etats  et  de  tous  ses  membres.  » 

Le  plénipotentiaire  finit  par  engager  la  députation 
à  accélérer  son  travail;  «  cependant,  dit-il  en  faisant 
allusion  au  terme  de  deux  mois  que  la  déclaration  des 
puissances  médiatrices  avaient  prescrit,  une  affaire 
de  cette  importance  ne  permet  pas  qu'on  lui  fixe  un 
terme  péremptoire,,et  le  Droit  des  gens,  ainsi  que  les 
lois  de  l'Empire,  n'autoriseraient  pas  le  chef  de  l'Em- 
pire à  l'ordonner.  » 

Ce  que  le  plénipotentiaire  impérial  avait  dit  fut 


—  IT'i  — 

développé,  après  sa  sortie  de  la  salle,  par  le  sub- 
délégué de  Bohême,  qui  dit,  entre  autres  choses,  que 
M.  de  Talleyrand-Périgord  avait  assuré  le  ministre 
d'Autriche  à  Paris,  qu'on  était  convenu  avec  la  Russie 
de  faire  à  l'Empire  une  simple  proposition;  qu'on  ne 
pouvait  pas  même  la  qualifier  de  plan;  que  c'était 
un  simple  projet  soumis  à  la  députation ,  un  conseil 
qu'on  croyait  utile  pour  satisfaire  toutes  les  préten- 
tions; d'où  ce  subdélégué  conclut  qu'on  devait  ré- 
pondre à  la  déclaration  des  puissances  médiatrices, 
en  les  assurant  que  la  députation  prendra  en  consi- 
dération leur  mns  amical. 

Une  observation  qu'il  faut  faire,  parce  qu'elle  sert 
à  l'intelligence  des  délibérations  suivantes  de  la  dé- 
putation, c'est  que  ce  corps  se  divisa,  dès  le  commen- 
cement de  ses  séances,  en  deux  partis.  A  la  tête  de 
l'un  était  l'Autriche  qui  avait  tout  sujet  d'être  mécon- 
tente du  plan  d'indemnité,  non-seulement  parce  qu'on 
l'avait  exclue  des  négociations  qui  avaient  précédé  la 
rédaction  de  ce  plan,  mais  encore  parce  qu'au  lieu 
d'une  indemnité  pleine  et  entière  que  la  paix  de  Lu- 
néville  avait  positivement  promise  au  grand-duc  de 
Toscane,  on  ne  lui  offrait  maintenant  qu'environ  le 
tiers  de  ce  qu'il  avait  perdu.  Au  surplus,  s'il  était 
vrai  que  le  plan  dût  établir  un  équilibre  en  Allemagne, 
l'Autriche  avait  un  motif  de  plus  pour  réclamer  une 
augmentation  du  lot  du  grand-duc,  puisque,  le  plan 
ayant  disposé  à  peu  près  de  tout  ce  qu'il  y  avait  à 
donner  en  Allemagne,  cette  augmentation  devait  né- 
cessairement être  prise  sur  la  part  qui  était  échue  à 
ceux  qu'on  avait  voulu  agrandir  pour  contre-balancer 
la  puissance  autrichienne.  A  l'Autriche  se  joignait, 
dans  la  députation,  le  grand-maître  de  l'Ordre  Teu- 
lonique,  prince  de  cette  maison.  La  Prusse  était  à  la 
têto  du   parti  opposé,   dans  lequel   se  trouvaient  la 


—  173  — . 

Bavière,  le  Wurtemberg  et  Hesse-Cassel,  trois  princes 
dont  les  intérêts  n'avaient  pas  été  négligés  par  les 
médiateurs.  L'électeur  de  Mayence,  placé  dans  une 
situation  très-difficile,  balançait  entre  les  deux  partis. 
La  Saxe  seule,  comme  partie  entièrement  désintéres- 
sée, pouvait  s'attacher  strictement  aux  instructions 
données  par  la  Diète,  et  nous  verrons  que,  pénétrée 
de  la  beauté  de  son  rôle,  elle  ne  s'en  est  pas  écartée 
un  instant. 

Dans  la  seconde  séance,  qui  eut  lieu  le  31  août,  il 
fut  donné  lecture  d'une  Note  que  le  ministre  de  France 
avait  remise  le  28,  et  celui  de  Russie  le  29  août,  au 
ministre  de  Mayence,  et  qui  contenait  ce  qui  suit  : 

«  Le  soussigné,  plénipotentiaire  de  S.  M.  \.  l'em- 
pereur de  toutes  les  Russies  près  de  l'Empire  germa- 
nique, a  reçu  de  M.  le  subdélégué  de  Bohême,  en  forme 
officielle,  l'extrait  manuscrit  d'un  rescrit  de  sa  Cour, 
en  date  du  20  août,  lu  à  la  séance  de  la  députation 
extraordinaire  de  l'Empire,  du  24  du  même  mois,  in- 
séré au  protocole  de  cette  séance,  et  répandu  depuis 
hier  matin  par  la  voie  de  l'impression.  Ce  rescrit 
porte  que  M.  le  subdélégué  a  ordre  de  faire  part  de 
son  contenu  au  soussigné. 

((  Le  soussigné  ne  peut  donc  se  dispenser  d'observer 
que  le  gouvernement  de  la  République  française  a 
montré,  dès  l'échange  des  ratifications  du  traité  de 
Lunéville,  l'empressement  qu'a  partagé  S.  M.  l'em- 
pereur de  toutes  les  Russies  pour  parvenir  aux  arran- 
gements complémentaires  de  cette  paix;  que  la  justice 
due  à  tous  les  princes  à  indemniser  voulait  que  tant 
d'intérêts  divers  fussent  considérés  collectivement; 
qu'enfin  les  déclarations  faites  d'une  part  au  nom  de 
S.  M.  L  l'empereur  de  Russie,  de  l'autre  au  nom  du 
du  premier  Consul  de  la  République  française,  toutes 


—  174  — 

les  deux  signées  par  leur  ordre  exprès,  portent  un  ca- 
ractère et  contiennent  des  explications  qui  attestent 
leur  longue  sollicitude  pour  le  bien-être  de  l'Empire 
germanique. 

«  Le  soussigné  ne  croit  pas  qu'il  y  ait  lieu  de  faire 
de  plus  amples  réflexions  sur  un  état  de  choses  aussi 
généralement  compris.  Il  se  réfère  avec  confiance  à  la 
déclaration  même  de  sa  Cour,  et  demande  que  cette 
Note  soit  lue  à  la  première  séance  de  la  députation 
extraordinaire  et  insérée  au  protocole. 

«  Ratisbonne,  le  |^  août  1802'. 

«  Le  baron  de  Bùhier.  w 

Ensuite  le  subdélégué  de  Brandebourg  dit  que  le 
Roi  son  maître  avait  regretté  que,  malgré  le  désin- 
téressement qu'il  avait  montré  à  l'égard  des  pertes 
qu'il  avait  éprouvées,  soit  comme  puissance  souve- 
raine ^  soit  comme  mem.bre  de  l'Empire,  il  ait  ren- 
contré des  difficultés  qui  ne  lui  avaient  pas  permis 
d'atteindre  le  but  qu'il  s'était  proposé.  Il  paraît  que 
le  subdélégué  a  voulu  dire  par  là  que  le  Roi  aurait 
désiré  procurer  une  indemnité  entière  au  grand-duc 
de  Toscane,  mais  que  le  principe  d'équilibre  adopté 
par  les  médiateurs  s'y  était  opposé.  Le  subdélégué 
ajouta  que  ses  instructions  lui  prescrivaient  de  voter 
pour  que  le  plan  fût  adopté  dans  sa  généralité  par  un 
conclusum  préalable,  en  réservant  toutefois  aux  déli- 
bérations futures  les  modifications  que  des  réclama- 
tions fondées  pourraient  rendre  nécessaires. 

La  Bavière  vota  dans  le  même  sens  ;  mais  le  subdé- 

'  La  Note  française  était  mot  à  mol  la  même,  sauf  les  titres  et  qoa* 

litée. 

'  Ceci  se  nippoile  au  duché  de  tiueldre,  qui  n'appartenait  pas  à 
l'Empire  germanique. 


—  175  — • 

légué  du  grand-maître  de  l'Ordre  Teutonique  demanda 
qu'en  exprimant  aux  médiateurs  la  reconnaissance  de 
la  députation  pour  leur  intervention,  on  leur  annonçât 
qu'en  vertu  des  pouvoirs  dont  elle  était  revêtue ,  la 
députation  allait  vérifier  chaque  perte  en  particulier, 
et  examiner,  d'après  les  principes  énoncés  dans  ses 
instructions,  les  indemnités  réclamées;  après  quoi, 
elle  aurait  recours  au  conseil  renfermé  dans  la  décla- 
ration, et,  s'il  se  rencontrait  quelque  difficulté,  s'en 
expliquerait  avec  les  plénipotentiaires  des  puissances 
médiatrices. 

Les  subdélégués  de  Wurtemberg  et  de  Hesse-Cassel 
ayant  opiné  dans  le  sens  de  celui  de  Brandebourg,  et 
le  ministre  de  Saxe  s'étant  réservé  de  voter  dans  une 
prochaine  séance,  le  ministre  de  Mayence,  après  une 
introduction  qui  remettait  sous  les  yeux  de  ses  collè- 
gues le  devoir  que  leur  mission  leur  imposait,  dit; 
«  Les  médiateurs  ayant  pensé  avec  raison  que  l'Em- 
pire seul  ne  parviendrait  pas  à  arranger  cette  affaire 
importante,  ont  remis  à  la  députation  un  plan  qu'ils 
lui  ont  recommandé  d'examiner  avec  soin,  et  cepen- 
dant avec  célérité,  parce  que  l'intérêt  de  l'Allemagne, 
la  consolidation  de  la  paix  et  la  tranquillité  générale 
de  l'Europe  exigent  que  tout  ce  qui  concerne  le  règle- 
ment des  indemnités  germaniques  soit  terminé  dans 
l'espace  de  deux  mois.    , 

«  Il  est  notoire  que ,  sans  attendre  ces  règlements, 
plusieurs  Cours  allemandes  ont  occupé ,  soit  définiti- 
vement, soit  militairement  et  provisoirement,  les  pays 
que  les  déclarations  leur  destinaient.  Il  serait  superflu 
de  remarquer  que  l'état  des  choses  que  l'Empire  a 
envisagé  lorsqu'il  a  tracé  les  pouvoirs  de  la  députa- 
tion, a  été  ainsi  considérablement  altéré.  En  suppo- 
sant que  la  célérité,  si  instamment  recommandée, 
n'eût  pas  été  aussi  nécessaire  qu'elle  l'est  devenue  en 


—  176  — 

effet  après  que  les  déclarations  des  deux  puissances 
ont  été  rendues  publiques,  les  événements  dont  on 
vient  de  parler  auraient  imposé  à  la  députation  le  de- 
voir de  hâter,  autant  que  possible,  cette  affaire  diffi- 
cile, quelque  triste  et  quelque  compliquée  qu'elle  pa- 
raisse. La  première  question  qui  se  présente  est  celle 
qui  se  rapporte  à  la  marche  à  suivre  dans  ce  moment. 
Il  est  indubitable  qu'on  est  obligé  de  négocier  avec  les 
deux  puissances  sur  la  base  de  leurs  déclarations. 

((  Ces  déclarations  renferment  deux  parties  :  d'abord 
les  indemnités  déterminées,  et  ensuite  divers  autres 
objets  qui  sont  présentés  sous  le  titre  de  Considéra- 
tions générales^  comme  dignes  de  fixer  l'attention  de 
la  députation;  parmi  celles-ci  il  y  a  des  questions  in- 
timement liées  aux  indemnités  mêmes,  et  sur  lesquelles 
il  faudra  prendre  un  parti,  ou  au  moins  établir  des 
règles  générales  aussitôt  qu'on  réglera  celles-là.  Telles 
sont  la  sustentation  de  toutes  les  personnes  qui  per- 
dent leur  existence  constitutionnelle  dans  les  pays  sé- 
cularisés, les  dettes  et  pensions  attachées  aux  pays  qui 
vont  être  sécularisés,  surtout  lorsque  ces  pays  ne 
passent  pas  entre  les  mains  d'un  seul  prince.  Il  sera 
donc  nécessaire  qu'en  assignant  une  indemnité,  on 
prononce  et  statue  en  même  temps  d'une  manière 
claire  que,  de  même  que  tous  les  droits  et  revenus 
d'un  pays  sécularisé  passent  au  nouvel  acquéreur,  il 
sera  aussi  chargé  de  toutes  les  charges  inhérentes  aux 
pays  qui  lui  sont  concédés.  » 

Le  même  plénipotentiaire  dit  encore  :  «  Pour  ce  qui 
concerne  la  masse  des  indemnités  établie  par  les  dé- 
clarations, et  la  répartition  des  pays  sécularisés,  ainsi 
que  des  villes  libres  qu'on  y  a  englobées,  il  est  évident 
que  les  deux  puissances  médiatrices  ne  se  sont  pas 
astreintes  à  exécuter  à  la  lettre  la  paix  de  Lunéville, 
qui  est  cependant  la  base  des  instructions  de  la  dé- 


—'  177  — 

putation.  Elles  ne  dissimulent  pas  qu'en  fixant  les  lots 
des  Cours  du  premier  rang  et  des  Etats  qui  ont  des 
suffrages  virils,  elles  n'ont  pas  voulu  prendre  pour 
échelle  le  montant  exact  de  la  perte,  mais  qu'elles  ont 
été  guidées  par  des  considérations  politiques  particu- 
lières; tandis  qu'à  l'égard  des  États  qui  n'ont  que  des 
voix  curiales,  l'intention  des  médiateurs  est,  qu'après 
un  examen  impartial,  on  détermine  d'une  manière  con- 
forme à  la  perte,  l'indemnité  que  cette  classe  d'États 
devra  recevoir.  Mais  comment,  avec  les  meilleures  in- 
tentions, aurait-il  été  possible  que  des  puissances 
étrangères  fussent  pourvues  des  connaissances  locales 
nécessaires  pour  dresser  un  plan  exact  d'indemnités? 
C'est  le  sentiment  de  cette  impossibilité  qui  porte  ces 
puissances  à  demander  que  la  députation  examine  soi- 
gneusement le  plan  proposé,  et  c'est  le  devoir  le  plus 
sacré  de  celle-ci  d'aller  au-devant  de  ce  vœu.  » 

Après  avoir  ensuite  exprimé  la  reconnaissance  de 
son  souverain  envers  les  médiateurs ,  qui ,  ayant  re- 
connu la  néc^sité  de  conserver  sa  métropole,  avaient 
voulu  la  doter  d'une  manière  analogue  à  sa  dignité, 
ainsi  que  ses  regrets  de  ce  que  les  deux  autres  électo- 
rats  ecclésiastiques  dussent  cesser,  et  qu'on  eût  trop 
généralisé  la  sécularisation,  le  plénipotentiaire  de 
Mayence  accéda  aux  votes  de  la  Bohême  et  du  grand- 
maître  de  l'Ordre  Teutonique,  qui  avaient  demandé  un 
examen  du  plan  proposé  :  il  y  accéda  toutefois  avec 
cette  modification ,  que  l'on  ne  devait  pas  entrer  en 
discussion  sur  les  indemnités  destinées  aux  puissances 
du  premier  rang,  parce  qu'à  leur  égard  il  ne  s'agissait 
pas  d'indemnités  seulement,  mais  de  principes  qui 
étaient  placés  hors  du  cercle  des  opérations  de  la  dé- 
putation. 

Dans  la  même  séance ,  le  subdélégué  de  la  Bohême 
remit  une  réclamation  formelle  de  sa  Cour  contre  l'in- 
VII  12 


—  178  — 

suffisance  de  l'indemnité  destinée  au  grand-duc  de 
Toscane,  et  proposa  d'ajouter  aux  principautés  de 
Salzbourg,  de  Berchtolsgaden  et  de  Passau,  ayant  en- 
semble un  revenu  de  un  million  trois  cent  cinquante 
mille  flor. ,  un  supplément  d'indemnisation  dans  le 
cercle  de  Souabe,  moyennant  des  principautés  ecclé- 
siastiques et  des  villes  impériales  d'un  rapport  annuel 
de  deux  millions  trois  cent  soixante-neuf  mille  cent 
flor.^  11  présenta  ensuite  une  déclaration  sur  l'occu- 

*  Voici  la  liste  de  ce  que  l'Autriche  demandait  pour  le  grand-duc , 
indépendamment  de  Salzbourg,  Berchtolsgaden  et  Passau  : 

m.  c.            hab.  fl.  de  rev. 

L'évêché  d'Augsbourg  avec  Sainl-Ulric. . .  54  70  000  450  000 

Kempten 46  45  000  230  000 

Les  abbayes  immédiates  suivantes  : 

Salmansweiler 4J        7  000  80  000 

Weingarten 6  il  000  i 00  000 

Petershausen 1          2  300  45  000 

Weissenau 1          2  400  30  000 

Schussenried 2          3  200  40  000 

Ochsenhausen 4          8  000  95  000 

Roth : . .  1          2  000  34  000 

Ottobeuren 2f        6  000  70  000 

Irsée U        4  000  50  000 

Roggenbourg 1  i         3  000  42  000 

Ursperg U        2  000  48  000 

Wettenhausen -Ij        3  000  50  000 

Les  villes  impériales  suivantes  : 

Augsbourg H  36  000  250  000 

Kempten ^k        3  200  22  000 

Ulm U  48  000  300  000 

Memmingen 2  11000  45  000 

Kaufbeuren U        8  000  28  000 

Ysny —         1300  4  600 

Wangen 2          3  000  14  000 

Leutkirch 2|        1  800  6  000 

Biberach 2  10  000  35  000 

Gmund î  12  000  38  000 

Aalen k        3  200  15000 

Halle 6  16  000  90  000 

99i    200  100  1  634  600 


—  179  — 

pation  de  la  ville  de  Passau  par  des  troupes  autri- 
chiennes.  Il  dit,  entre  autres,  dans  cette  dernière 
pièce  :  K  Lorsque  les  plans  dans  lesquels  on  réglait  le 
sort  de  l'Allemagne  étaient  encore  un  secret  impéné- 
trable pour  l'Empereur  et  le  corps  germanique,   on 
procéda  déjà,  dans  le  Nord,   à  des  occupations  aux- 
quelles il  ne  manquait,  pour  leur  donner  la  nature 
d'incorporations,  que    d'avoir  fait   prêter  hommage 
par  les  habitants.  En  même  temps  on  fit,  au  centre  et 
au  sud  de  l'Allemagne,  des  préparatifs  pour  une  sem- 
blable mesure,  à  laquelle  on  paraissait  vouloir  donner 
une  si  grande  extension,  que    non-seulement  on  y 
comprenaitles  pays  qu'une  négociation  antérieure  avait 
destinés  au  grand-duc  de  Toscane,  mais  qu'on  rendait 
même  impossible  leur  remplacement  par  d'autres  dis- 
tricts. L'Empereur  crut  devoir  envoyer  un  ministre  à 
Munich,  pour  faire  des  représentations,  proposer  que, 
jusqu'à  ce  que  ladéputation  aurait  terminé  son  travail, 
on  s'abstînt,  de  la  part  des  deux  Cours,  de  toute  oc- 
cupation provisoire,  et  offrir  une  négociation  pour 
s'entendre  sur  les  prétentions  réciproques;  mais  l'É- 
lecteur a  décliné  toute  représentation  et  proposition, 
.et  s'est  mis  en  mesure  de  s'emparer  de  Passau.  Alors 
l'Empereur  cédant  aux  sollicitations  du  prince-évêque, 
a  occupé  cette  ville ,  ainsi  que  les  pays  de  Salzbourg 
et  de  Berchtolsgaden.   Cependant  l'administration  et 


De  l'autre  part 

Rothweil 

Buchau , 

Pfullendorff 

Ravensbourg 

Uberlingen i  i 

Buchhorn 

Lindau 

Total. 


m.  c. 

hab. 

fl.  de  rev. 

99^ 

200  100 

1  634  600 

n 

15  000 

60  000 

— 

800 

3  000 

1 

2 

4  000 

14  000 

1 

4  500 

16  000 

n 

6  000 

26  000 

800 

2  500 

1 

5  000 

16  000 

4381 

353  700  2  369  100 

—  180  — 

les  revenus  de  ces  trois  principautés  ont  été  laissés 
entre  les  mains  des  possesseurs  actuels;  car  l'Empe- 
reur, tout  en  se  regardant  comme  autorisé  à  assurer 
la  possession  de  ces  pays  à  son  frère ,  ne  pense  pas 
pouvoir  le  mettre  en  possession  effective  avant  que 
l'affaire  des  indemnisations  ait  été  réglée  d'une  ma- 
nière conforme  aux  traités  et  à  la  Constitution.  » 

A  cette  déclaration,  qui  renfermait  une  attaque  di- 
rigée contre  la  Prusse,  le  plénipotentiaire  de  Brande- 
bourg répondit  de  la  manière  suivante  :  «  Comme 
dans  toute  les  négociations  pour  la  paix  avec  la  Répu- 
blique française,  ainsi  que  dans  la  guerre  qui  les  a 
précédées,  la  Prusse  n'a  pas  seulement  agi  en  qualité 
d'État  d'Empire,  mais  qu'elle  y  a  en  même  temps  dé- 
veloppé le  caractère  d'une  puissance  souveraine,  cette 
double  qualité,  que  l'Autriche  a  également  fait  valoir, 
ne  saurait  être  perdue  de  vue,  et  il  est  nécessaire  d'y 
avoir  égard  lorsqu'il  est  question  de  déterminer  l'in- 
demnité de  la  Prusse.  Quoique,  en  sa  qualité  de  puis- 
sance souveraine,  le  lloi  n'ait  eu  nulle  obligation  d'ac- 
quiescer à  la  cession  que,  dans  son  traité  avec  la 
France,  l'Empereur  avait  faite  des  provinces  transrhé- 
nanes de  la  Prusse,  et  môme,  parmi  elles,  d'une  pro- 
vince qui  n'appartenait  pas  à  l'Empire ,  le  duché  de 
Gueldre',  néanmoins,  par  amour  pour  la  paix,  on  ne 
s'y  est  pas  opposé  ;  mais,  en  votant  à  la  Diète  pour  la 
ratification  de  la  paix,  on  s'est  expressément  réservé 
ses  droits.  Pour  les  maintenir,  on  n'a  pu,  de  la  part 
de  la  Prusse,  suivre  d'autre  marche  que  celle  que 
l'exemple  de  l'Autriche  avait  tracée  Non-seulement 
cette  puissance  a,  dans  ses  traités  de  paix  avec  la 
France,  stipulé   une   indemnité  pour  les  provinces 

'  Ici  la  mémoire  de  M.  le  comte  de  Gobuz  se  montre  infidèle.  L'arti- 
cle 6  de  la  paix  de  Lunéville  dit  en  toutes  lettres  :  «  qui  faisaient  par- 
lie  de  l'Empire  germanique.  » 


—  181  — 

qu'elle  cédait,  mais  elle  s'est  mise  sur-le-champ  en 
possession  de  ces  indemnités*.  Le  Roi  devait  donc  à 
sa  dignité  et  aux  droits  que  lui  donnait  l'égalité  de  ses 
rapports,  de  faire  la  même  chose  à  l'égard  de  son  in- 
demnité, et  de  se  placer  ainsi  sur  une  même  ligne  avec 
l'Autriche.  C'est  sous  ce  point  de  vue  qu'il  faut  envi- 
sager les  négociations  que  le  Roi  a  entamées  avec  les 
puissances  médiatrices.  Une  convention  du  23  mai  de 
cette  année  ^  ne  lui  assigne  pas  seulement,  sans  restric- 
tion, les  indemnités  connues  par  le  plan,  mais  elle  dit 
expressément  que  ces  pays  doivent  être  occupés  sur- 
le-champ.  Cette  stipulation  positive,  l'exemple  de  l'Au- 
triche et  les  inconvénients  qui  résultent,  pour  un  peu- 
ple destiné  à  changer  de  maître,  d'un  état  précaire  et 
incertain,  ont  engagé  le  Roi  à  occuper  les  pays  qui  lui 
avaient  été  assignés.  Si  la  conduite  de  la  Prusse,  dans 
cette  occurrence,  n'a  eu  rien  d'arbitraire;  si  son  exem- 
ple est  fait  pour  accélérer  l'arrangement  des  indem- 
nités, et  mettre  fin  aux  incertitudes  sous  lesquelles 
tant  d'États  allemands  gémissent  depuis  si  longtemps; 
si  ses  démarches  ont  plutôt  consolidé  qu'ébranlé  la 
tranquillité  de  l'Allemagne  septentrionale,  le  Roi  est 
en  droit  de  s'attendre  à  ce  que  tout  ce  qui  peut  man- 
quer aux  formes  constitutionnelles  recevra  son  com- 
plément par  la  sanction  que  l'Empire  accordera  aux 
indemnités  en  général.  » 

Le  subdélégué  de  Bavière  énonça  à  cette  occasion 
une  proposition  qui  dut  étonner  tout  le  monde.  Il 
s'offrit  de  démontrer,  par  des  données  statistiques  très- 
exactes,  que  les  indemnités  accordées  à  l'Électeur  ne 
pouvaient,  sous  aucun  rapport,  être  regardées  comme 
un  équivalent  pour  le  sacrifice  des  provinces  du  Pala- 

'  Ceci  se  rapporte  à  l'État  de  Venise. 

*  Ce  fut  pour  la  première  fois  que  l'on  mentionnait  officiellement 
cette  convention.  Voy.  ci-cle=su?,  p.  MO. 


—  182  — 

tinat.  Nous  reviendrons  sur  cette  assertion,  et  remar- 
quons ici  seulement  qu'elle  contredit  le  rapport  de 
M.  de  Talleyrand ,  où  l'on  dit  qu'il  a  été  nécessaire 
d'agrandir  la  Bavière,  parce  qu'elle  devait  servir  de 
base  à  l'équilibre  de  l'Allemagne. 

Le  sort  de  rAllemagne  fut  décidé  dans  la  troisième 
séance  qui  eut  lieu  le  8  septembre,  si  toutefois  le  sort 
de  l'Allemagne  n'était  pas  décidé  d'avance.  Ce  jour-là, 
le  subdélégué  de  Saxe,  qui  n'avait  pas  encore  voté  sur 
l'objet  qui  était  en  discussion,  dit  que,  puisque  les 
ministres  médiateurs  demandaient  avec  instance  une 
prompte  résolution  sur  leur  déclaration,  l'Electeur  ne 
pouvait,  d'après  les  instructions  données  par  la  Diète, 
voter  que  pour  qu'on  exprimât  de  la  reconnaissance 
pour  la  communication  de  la  déclaration,  comme  d'un 
fil  qui  guidera  les  délibérations  de  la  députation,  et 
pour  qu'on  prît  maintenant  en  mûre  délibération  les 
points  importants  qu'elle  renfermait,  en  y  liant  tou- 
tefois le  règlement  des  dettes  dans  les  pays  qui  servi- 
ront d'indemnité,  et  la  sustentation  convenable  des 
possesseurs  actuels,  ainsi  que  tout  ce  qui  tenait  à  la 
constitution  politique  et  religieuse  et  aux  droits  des 
tiers. 

Les  subdélégués  de  Brandebourg,  de  Bavière,  de 
Wurtemberg  et  de  Hesse-Cassel  ayant  accédé  à  la  pro- 
position faite  dans  la  séance  précédente  par  le  pléni- 
potentiaire deMayence,  pour  qu'on  fît  des  stipulations 
à  l'égard  de  la  sustentation  des  ecclésiastiques  et  des 
dettes  des  pays  sécularisés,  le  baron  iVAlbini  ajouta  à 
son  premier  vote  un  supplément  qui  le  dénatura  tout 
à  fait.  Il  dit  :  «  Comme  les  médiateurs  exigent  que 
l'affaire  des  indemnisations  soit  terminée  dans  l'espace 
de  deux  mois,  il  est  évident  qu'il  n'entre  pas  dans 
leur  intention  qu'on  demande  à  chaque  partie  iuté- 


__  /|83  — 

ressée  une  liquidation  formelle  de  sa  perte,  que  ces 
états  soient  examinés  et  les  indemnités  fixées  en  con- 
séquence. Comment,  en  effet,  la  députation  pourrait- 
elle  faire  un  tel  examen ,  vu  que  la  déclaration  com- 
prend des  parties  dont  la  paix  de  Lunéville  n'avait  pas 
fait  mention  *?  Ce  serait  en  vain  qu'on  se  flatterait  de 
l'espérance  de  sauver  encore  une  partie  des  biens  ec- 
clésiastiques et  des  villes  que  les  médiateurs  avaient 
compris  dans  la  masse  des  indemnités.  Dans  ces  cir- 
constances, il  ne  reste  à  la  députation  d'autre  parti 
que  de  limiter  l'examen  du  plan  que  son  devoir  lui 
impose,  et  de  ne  considérer  que  les  réclamations  pres- 
santes contre  le  plan  qui  lui  seront  adressées.  Mais 
comme  elle  ne  connaît  pas  les  calculs  et  les  évaluations 
qui  ont  motivé  chaque  indemnité  en  particulier,  il  sera 
nécessaire  qu'on  prie  les  ministres  des  puissances  mé- 
diatrices de  les  communiquer.  » 

Le  subdélégué  *se  résuma  en  proposant  «  qu'il  fût 
déclaré  à  ces  ministres  qu'on  adoptait  en  général  le 
plan  d'indemnité,  en  se  réservant  toutes  les  modifi- 
cations auxquelles  des  réclamations  donneraient  lieu, 
ou  que  la  députation  elle-même  jugerait  nécessaires; 
mais  qu'en  même  temps  il  était  indispensable  de  statuer 
qu'avec  les  pays  formant  l'indemnité,  chaque  partie 
intéressée  prît  aussi  sur  elle  la  sustentation  convenable 
des  personnes  qui  jusqu'à  présent  y  avaient  eu  une 
existence  constitutionnelle,  ainsi  que  les  dettes  qui  y 
étaient  hypothéquées.  » 

Les  quatre  membres  du  parti  opposé  à  l'Autriche 
ayant  adhéré  à  cette  prjoposition,  et  le  plénipotentiaire 
de  Saxe  ayant  déclaré  que,  quoique  ses  instructions 
ne  lui  permissent  pas  (l'adopter  le  plan  sans  distinc- 

'  La  maison  de  Nassau-Orange ,  le  duc  d'Oldenbonrg  ,  le  prince  de 
Dietrichstein,  le  prétendant  au  titre  de  prince  de  Nassau-Siegen. 

Jjji) 


—  184  — 

tion,  il  se  soumettait  cependant  à  la  pluralité  des  voix; 
le  vote  de  Mayence  fut  changé,  par  la  pluralité  des  suf- 
frages, en  conclusum,  et  la  proposition  des  puissances 
médiatrices  fut  ainsi  adoptée. 

Par  un  second  conclusum  du  même  jour,  on  arrêta 
que  les  trois  réclamations  qui,  jusqu'à  ce  jour,  avaient 
été  présentées  de  la  part  du  grand-duc  de  Toscane,  du 
grand-maître  de  l'Ordre  Teutonique  et  du  comte  de 
StadioUj  seraient  renvoyées  aux  ministres  des  puis- 
sances médiatrices. 

Peu  de  jours  avant  ce  conclusum,  le  5  septembre  1 802, 
la  France,  la  Prusse  et  la  Bavière  avaient  signé,  à 
Paris,  une  convention,  ou  plutôt  une  espèce  de  décla- 
ration, qu'on  pouvait  regarder  comme  hostile  envers 
l'Autriche.  Comme  elle  ne  saurait  être  abrégée,  et  qu'il 
est  nécessaire  de  l'avoir  sous  les  yeux  pour  l'intelli- 
gence de  la  suite  de  ces  négociations,  nous  l'insérons 
ici  en  entier. 

«  Le  premier  Consul  de  la  République  française  et 
S.  M.  l'empereur  de  toutes  les  Russies  ayant  résolu  de 
se  charger  de  la  médiation  dans  l'arrangement  des 
affaires  allemandes,  et  désigné,  par  leur  déclaration 
du  18  août,  les  indemnités  qu'en  conformité  de  l'ar- 
ticle  7  du  traité  de  Lunéville  ils  ont  cru  devoir  adjuger  à 
chaque  prince,  S.  M.  le  roi  de  Prusse  s'est  hâtée  d'ac- 
cepter le  plan  présenté,  et  s'est  scrupuleusement 
bornée,  lors  de  la  prise  de  possession  des  États  à  elle 
adjugés,  aux  limites  assignées  par  la  déclaration. 
Comme  S.  M.  l'Empereur  avait  annoncé  aussi,  de 
son  côté,  le  dessein  de  faire  occuper  ses  diverses  pos- 
sessions, le  premier  Consul  et  S.  M.  l'empereur  de 
Russie  et  le  roi  de  Prusse  se  sont  fait  respectivement 
un  devoir  de  lui  donner  à  connaître  qu'il  ne  serait  pas 
convenable  que  ses  troupes  outre-passassent  les  limites 


—  185  — 

fixées  dans  la  déclaration,  et  occupassent  d'autres  ter- 
ritoires que  ceux  désignés  pour  l'indemnisation  de  l'ar- 
chiduc Ferdinand.  Cependant,  au  mépris  de  cette  ou- 
verture, faite  à  l'ambassadeur  impérial  à  Paris,  par 
les  ministres  des  trois  puissances,  ainsi  que  de  celle 
faite  à  M.  de  Sladion  à  Berlin,  par  M.  le  comte  de 
Haugwitz,  les  troupes  autrichiennes  ont  pris  possession 
de  la  ville  de  Passau,  et  Sa  Majesté  Impériale  a  fait 
déclarer  à  la  Diète  d'Empire  qu'elle  ne  pouvait  point 
l'évacuer,  à  moins  que  les  pays  occupés  par  d'autres 
princes  ne  fussent  également  évacués;  ce  qui  montre 
que  Sa  Majesté  Impériale  n'attache  aucun  prix  à  la 
déclaration  des  puissances  médiatrices,  et  la  considère 
comme  non  avenue.  En  conséquence,  le  premier  Consul 
de  la  République  française  et  S.  M.  le  roi  de  Prusse 
s'obligent  de  renouveler,  de  concert,  à  Ratisbonne  et  à 
Vienne,  leurs  efforts  pour  que  le  plan  d'indemnisation 
présenté  soit  accepté  en  entier  par  l'Empire  germa- 
nique et  ratifié  par  l'Empereur,  en  particulier  dans  ce 
point  qui  garantit  à  l'électeur  de  Bavière  la  conserva- 
tion de  ses  possessions  sur  la  rive  droite  de  l'Inn  et 
lui  assure  la  ville  de  Passau.  Et  quand,  contre  leurs 
espérances  et  contre  leurs  efforts  réunis,  S.  M.  l'Em- 
pereur, qui  a  occupé  la  ville  de  Passau,  se  refuserait  à 
l'évacuer  de  nouveau  dans  l'espace  des  soixante  jours 
destinés  aux  délibérations  de  la  Diète,  les  gouverne- 
ments français  et  prussien  s'engagent  à  réunir  leurs 
forces  aux  forces  bavaroises  pour  assurer  à  la  Bavière 
tant  la  conservation  de  ses  anciennes  possessions  sur 
la  rive  droite  de  l'Inn,  que  la  possession  de  Passau  et 
toutes  les  indemnités  à  elle  adjugées.  Ainsi  fait  à  Paris, 
le  18  fructidor  an  x  (5  sept.  1802). 

«  Signé  :  Talleyrand, 

Marquis  de  Lucchesini, 
Cetto.  » 


—  186  — 

Les  conclusums  du  8  septembre  avaient  été  adressés 
au  plénipotentiaire  de  l'Empereur.  Dès  la  quatrième 
séance  de  la  députation,  qui  fut  tenue  le  14  septem- 
bre, le  plénipotentiaire  de  Mayence  annonça  que  celui 
de  l'Empereur  avait  refusé  de  ratifier  le  premier  con- 
clusum  qui  avait  accepté,  en  général,  le  plan  d'indem- 
nités. Le  'décret  de  ce  plénipotentiaire  rappela  à  la 
députation,  et  ses  instructions  qui  exigeaient  un  exa- 
men,  et  les  dispositions  du  traité  de  Luné  ville,  seule 
boussole  qui  devait  la  guider  dans  ses  délibérations. 

Dans  la  même  séance,  on  lut  une  Note  du  ministre 
de  France,  du  13  septembre,  dirigée  contre  le  vote 
que  le  subdélégué  de  Bohême  avait  émis  dans  la  séance 
du  24  août.  Voici  cette  Note  : 

c(  Le  soussigné,  ministre  extraordinaire  de  la  Répu- 
blique française  près  la  Diète  de  l'Empire  germani- 
que, s'est  empressé  de  transmettre  à  son  gouverne- 
ment le  rescrit  communiqué  par  M.  le  subdélégué  de 
Bohême  à  la  députation  extraordinaire  de  l'Empire, 
dans  sa  séance  du  24  août,  et  pareillement  communi- 
qué au  soussigné  le  28  dudit  mois.  H  est  chargé  de  faire 
parvenir  à  la  députation  les  observations  suivantes  : 

«  Le  premier  Consul  a  été  vivement  affecté  de  voir 
que  ses  intentions  pour  l'affermissement  de  la  prospé- 
rité du  corps  germanique  aient  été  méconnues. 

«  Puisqu'on  lui  reproche  de  n'avoir  point  répondu 
aux  ouvertures  faites  par  Sa  Majesté  Impériale  et 
Royale  depuis  la  conclusion  du  traité  de  Lunéville, 
et  d'avoir  ainsi  retardé,  pour  l'Allemagne,  cette  in- 
téressante portion  de  l'Europe,  les  avantages  de  la 
paix,  il  doit  déclarer  que  les  ouvertures  qui,  quoi- 
que confidentielles  et  secrètes,  sont  aujourd'hui  rappe- 
lées publiquement  par  la  Cour  de  Vienne ,  bien  loin 
d'être  propres  à  procurer  l'exécution   de    Varticle  7 


—  187  — 

du  traité  de  Liinéville,  ne  pouvaient  tendre  qu'à  l'é- 
loigner, en  cela  qu'au  lieu  d'indiquer  les  moyens  de 
pourvoir  à  l'indemnisation  de  tant  de  princes  séculiers 
qui  avaient  fait  des  pertes  si  considérables ,  elles  n'a- 
vaient pour  but  que  de  régler  le  dédommagement  de 
l'archiduc  Ferdinand  y  en  y  employant  des  domaines 
laïques  et  héréditaires. 

«  Les  projets  de  la  Cour  de  Vienne  tend  aient  à  por- 
ter son  territoire  jusqu'au  Lech ,  et  auraient  eu  par 
conséquent  pour  eiîet  de  rayer  la  Bavière  du  nombre 
des  puissances.  La  justice  et  la  générosité,  qui  sont 
toujours  les  premières  écoutées  dans  le  cœur  du  pre- 
mier Consul,  lui  ont  donc  fait  une  loi  d'oublier  ce  que 
l'Électeur  pouvait  avoir  eu  de  torts  envers  la  Républi- 
que, et  de  ne  pas  laisser  périr  un  État  affaibli,  menacé, 
mais  garanti  cependant  jusqu'ici  par  la  politique  des 
gouvernements  intéressés  au  maintien  d'un  juste  équi- 
libre en  Allemagne;  car  si  l'équilibre  de  l'Europe 
veut  que  l'Autriche  soit  grande  et  puissante ,  celui  de 
l'Allemagne  exige  que  la  Bavière  soit  conservée  intè- 
gre, et  mise  à  couvert  de  tout  envahissement  ultérieur. 
Que  deviendrait  le  corps  germanique ,  si  les  princi- 
paux États  qui  le  composent  voyaient  leur  indépen- 
dance à  tout  moment  compromise  ;  et  l'honneur  même 
de  cette  antique  fédération  ne  souffrirait-il  pas  de  l'af- 
faiblissement d'un  prince  dont  la  maison  a  si  hono- 
rablement concouru  à  l'établissement  et  au  maintien 
de  la  Constitution  germanique? 

«  Ce  n'est  donc  pas  à  Paris  que  les  insinuations  de 
la  Cour  de  Vienne  sur  les  affaires  d'Allemagne  ont  pu 
être  accueillies;  et,  quoiqu'elle  les  ait  renouvelées 
depuis  à  Pétersbourg,  elles  n'ont  pu  y  avoir  un  meil- 
leur succès.  L'âme  grande  et  généreuse  de  l'empereur 
Alexandre  ne  pouvait  lui  permettre  de  négliger  les  in- 
térêts de  la  Bavière,  qui  étaient  également  recomman- 


.—  188  — 

dés  par  les  liens  du  sang  et  par  tous  les  calculs  d'une 
sage  politique. 

«  N'ayant  pu  réussir  ni  à  Pétersbourg  ni  à  Paris,  la 
Cour  de  Vienne  n'en  poursuivait  pas  moins  à  Munich 
l'exécution  de  ses  projets,  et  ce  fut  la  communication 
que  fit  l'Electeur  de  ses  inquiétudes  aux  gouverne- 
ments de  France  et  de  Russie  qui  contribua  surtout  à 
leur  faire  sentir  la  nécessité  de  réunir  leur  influence 
pour  protéger  les  princes  héréditaires,  garantir  l'exécu- 
tion de  V article  7  du  traité  de  Lunéville,  et  ne  pas  laisser 
tomber  au  dernier  rang  une  maison  des  plus  anciennes 
et  naguère  des  plus  puissantes  de  l'Allemagne. 

((  Le  soussigné  est  donc  chargé  de  déclarer  à  la  dé- 
putation  que  les  États  héréditaires  de  S.  A.  S.  l'élec- 
teur palatin  de  Bavière,  ainsi  que  les  possessions  qui 
lui  sont  destinées  comme  dédommai^ements  et  comme 
nécessaires  au  rétablissement  de  l'équilibre  en  Alle- 
magne, se  trouvent  naturellement  et  indispensablement 
placés  sous  la  protection  des  puissances  médiatrices; 
que  le  premier  Consul,  personnellement,  ne  souffrira 
pas  que  la  place  importante  de  Passau  demeure  aux 
mains  de  l'Autriche,  ni  qu'elle  obtienne  aucune  partie 
du  territoire  que  la  Bavière  possède  à  la  droite  de  l'Inn, 
car  il  regarde  qu'il  n'y  aurait  point  d'indépendance 
pour  la  Bavière  du  moment  où  les  troupes  de  l'Autri- 
che seraient  si  voisines  de  sa  capitale. 

«  Il  reste  encore  au  soussigné  à  exprimer  àladéputa- 
tion  le  regret  qu'éprouve  le  premier  Consul  de  divul- 
guer des  négociations  qui  n'ont  eu  lieu  que  sous  le 
sceau  de  la  confidence,  et  dont  le  secret,  par  consé- 
quent, aurait  du  demeurer  sacré;  mais  il  y  a  été  con 
traint  par  une  juste  représaille  et  par  le  prix  qu'il  attache 
à  l'opinion  et  l'estime  du  brave  et  loyal  peuple  germain. 

«  A  Ratisbonne  ,  le  26  fructidor  an  x  (  13  septem- 
bre 1S02\  M  IjAFOREST.  » 


—  189  — 

Le  subdélégué  de  Bohême  fit  observer,  dans  cette 
séance,  qu'en  admettant  en  masse  le  plan  d'indemnité 
proposé,  la  députation  avait  donné  à  chaque  réclamant 
des  antagonistes  dans  la  personne  de  tous  ceux  qui 
avaient  reçu  des  lots  trop  considérables,  parce  que  ces 
Etats  favorisés  regardant  ce  qu'on  leur  avait  destiné 
comme  une  propriété  bien  acquise ,  seront  naturelle- 
ment peu  disposés  à  la  justice  envers  ceux  dont  on  ne 
pouvait  satisfaire  les  réclamations,  sans  diminuer  quel- 
que chose  de  ce  qu'on  avait  donné  de  trop  aux  premiers. 
Après  cette  introduction,  le  subdélégué  annonça  que  sa 
Cour,  dans  l'intention  d'accélérer  la  marche  de  l'affaire, 
avait  ouvert  de  nouvelles  négociations  avec  la  France 
et  la  Russie,  et  qu'elle  protestait  solennellement  con- 
tre toute  acceptation  provisoire  du  plan  d'indemnité. 
Quant  à  la  Note  française,  il  assura  que,  pendant  tout 
le  temps  qu'il  avait  pris  part  aux  négociations  de 
Paris ,  il  n'avait  jamais  eu  la  moindre  connaissance 
d'un  projet  tendant  à  étendre  les  frontières  de  la  mo- 
narchie jusqu'au  Lech,  ni  de  détruire  l'état  actuej  des 
possessions  bavaroises;  que,  pour  chaque  cession  pro- 
posée, on  avait  offert  la  valeur  complète,  et  qu'en  gé- 
néral on  n'avait  jamais  eu  en  vue  de  faire  le  moindre 
changement  sans  le  consentement  de  la  Bavière. 

L'impartialité  exige  que  nous  remarquions  que  si, 
d'une  part,  les  votes  émis  dans  les  diverses  séances 
de  la  députation  contre  le  projet  d'indemnité  des  mé- 
diateurs, renfermaient  de  grandes  vérités,  on  ne  pou- 
vait, d'un  autre  côté,  se  dissimuler  que  l'unique  mo- 
tif qui  rendait  l'Autriche  contraire  à  ce  plan ,  était  le 
peu  d'égard  qu'on  avait  eu  à  la  réclamation  du  grand- 
duc  de  Toscane  ,  et  cette  circonstance  donnait  un  cer- 
tain poids  à  l'assertion  des  ministres  de  France,  que  la 
Gourde  Vienne  n'avait  négocié  que  pour  le  grand-duc. 


—  190  -- 

Le  subdélégué  de  Brandebourg  protesta  formelle- 
ment contre  la  qualité  de  commissaire  impérial  prise 
par  le  plénipotentiaire  de  l'Empereur,  qui  indiquait 
que  l'intention  de  ce  ministre  était  de  regarder  les  dé- 
crets de  la  députation  comme  de  simples  Avis.  Il  émit 
l'opinion  que  le  conclusum  ,  provoqué  par  des  circon- 
stances extraordinaires ,  et  arrêté  par  la  pluralité  des 
voix,  restait,  malgré  le  refus  du  plénipotentiaire  de 
l'Empereur  de  le  ratifier,  dans  toute  sa  force  et  vali- 
dité, et  qu'en  le  prenant  pour  base,  la  députation  pou- 
vait continuer  ses  discussions  et  ses  négociations  avec 
les  ministres  des  puissances  médiatrices ,  jusqu'à  ce 
qu'il  fût  possible  de  s'entendre  sur  un  conclusum  dé- 
finitif qui  pût  être  soumis  à  l'Empereur  et  à  l'Em- 
pire. 

La  députation  n'adopta  pas  cet  avis,  mais  elle  arrêta 
de  faire  au  plénipotentiaire  de  l'Empereur  des  repré- 
sentations sur  son  refus,  et  de  relever,  à  cette  occa- 
sion, d'une  manière  indirecte,  le  titre  de  commissaire 
impérial  qu'il  avait  pris.  Nous  avons  vu*  qu'une  diffi- 
culté du  même  genre  s'était  présentée  au  congrès  de 
Rastadt. 

Sur  la  proposition  du  subdélégué  de  Brandebourg, 
on  arrêta,  dans  cette  séance,  que  les  réclamations  qui 
avaient  été  ou  seraient  encore  adressées  à  la  députa- 
tion contre  des  points  du  plan  d'indemnisation,  se- 
raient transmises  aux  ministres  médiateurs  pour  con- 
naître leur  avis,  et  qu'on  engagerait  les  directeurs  des 
collèges  des  comtes  de  la  Westphalie  et  de  la  Wétéra- 
vie  à  se  faire  communiquer,  par  les  parties  inté- 
ressées de  leurs  collèges,  les  états  de  liquidation 
qu'elles  avaient  remis  à  la  France;  d'examiner  la  par- 
tie de  l'évêché  de  Munster,  que  Vartide  30  du  plan 

'  Voy.  t.  VI,  p.  U.  ;     '"•  ' 


—  191  — 

destinait  à  ces  comtes,  et  de  proposer  une  répartition 
de  ce  district  parmi  les  parties  intéressées. 

Ce  fut  dans  le  cours  de  la  discussion  qui  avait  pré- 
cédé cet  arrêté,  que  le  subdélégué  de  Brandebourg  dit 
qu'il  lui  paraissait  qu'il  ne  pouvait  pas  être  dans  l'in- 
tention des  médiateurs  de  disposer,  à  titre  d'indem- 
nité, de  biens  ecclésiastiques  médiats  situés  sous  la 
souveraineté  de  princes  séculiers.  11  paraît  cependant 
que  telle  avait  été  l'opinion  des  médiateurs ,  puisque 
le  paragraphe  2  de  Varticle  36  du  plan  dit  «  que  les 
biens  des  chapitres,  abbayes,  couvents  tant  d'hommes 
que  de  femmes,  tant  médiats  qu'immédiats ,  dont  il 
n'a  pas  été  formellement  fait  mention  dans  la  présente 
proposition  ,  seront  appliqués  au  complément  de  l'in- 
demnité des  États  et  membres  héréditaires  de  l'Em- 
pire ,  s'il  est  reconnu  qu'il  n'y  a  pas  été  suffisamment 
pourvu  par  les  assignations  ci-dessus ,  et  sauf  la  sou- 
veraineté qui  demeurera  toujours  aux  princes  territo- 
riaux. »  Nous  verrons  comment  on  changea  par  la 
suite  cette  disposition  qui  portait  évidemment  atteinte 
à  la  supériorité  territoriale  des  Etats,  en  vertu  de  la- 
quelle eux  seuls  pouvaient  supprimer  des  fondations 
médiates  qui  se  trouvaient  dans  leurs  territoires,  sup- 
posé que  les  restrictions  mises  par  la  paix  de  Westpha- 
lie  au  droit  de  réformer  ou  d'autres  pactes  et  rêver- 
salés  ne  leur  enlevassent  pas  cette  faculté. 

La  requête  que  le  baron  de  Helmstœdt  présenta  à  la 
cinquième  séance,  le  16  septembre,  pour  demander 
une  indemnité  pour  la  seigneurie  deMorhange^,  donna 

'  Celle  seigneurie,  nommée  en  allemand  Morchingen,  avec  celles  de 
Hunsingen  et  Altroff,  qui  en  font  partie,  est  située  en  Lorraine  ,  dans 
les  environs  de  Dieuze.  L'immédiateté  de  celte  seigneurie  a  été  recon- 
nue par  la  paix  de  Westphalie  (art.  4,  §  34)  ;  mais  elle  l'avait  perdue 
par  la  paix  de  Ryswick.  Elle  se  composait  de  trente  et  un  villages,  et 
rapportait  soixante-quatorze  mille  cinq  cent  trente-trois  florins. 


—  192  — 

lieu  à  un  conclusum,  portant  qu'on  réclamerait  auprès 
des  ministres  de  France  l'exécution  du  9'  article  de 
la  paix  de  Lunéville ,  qui  ordonnait  la  levée  du  sé- 
questre mis  sur  les  biens  de  tout  propriétaire  quel- 
conque. Nous  avons  remarqué',  en  parlant  de  cet  ar- 
ticle, qu'il  était  rédigé  avec  bien  peu  de  clarté,  et  que, 
pour  lever  l'apparente  contradiction  qui  subsistait 
entre  cet  article  et  la  disposition  àeV article  6,  laquelle 
cédait  à  la  France  tous  les  domaines  qui  avaient  fait 
partie  de  l'Empire ,  il  aurait  fallu  préciser  qu'on  ne 
cédait  que  les  domaines  des  États  d'Empire,  et  qu'on 
réservait  les  possessions  des  membres  de  l'Empire  et 
autres  particuliers.  Le  gouvernement  français  avait 
laissé  subsister  le  séquestre  sur  la  seigneurie  de 
Morhange ,  parce  qu'il  confondait  cette  terre  immé- 
diate, à  laquelle  on  donnait  abusivement  le  titre  de 
comté,  mais  à  laquelle  n'était  attachée  aucune  voix,  ni 
à  la  Diète,  ni  aux  assemblées  de  cercles,  avec  les  do- 
maines des  États  d'Empire. 

On  annonça,  dans  cette  séance,  à  la  députation,  que 
les  ministres  des  puissances  médiatrices  avaient  re- 
fusé d'accuser  réception  du  deuxième  conclusum,  et 
par  conséquent  de  tous  les  suivants,  parce  qu'ils 
croyaient  devoir  attendre  qu'on  leur  communiquât 
d'abord  le  premier. 

Dans  la  discussion  l\  laquelle  donna  lieu,  à  la 
sixième  séance  du  18  septembre,  le  refus  réitéré  du 
plénipotentiaire  impérial,  de  ratifier  ce  conclusum,  le 
subdélégué  de  Brandebourg  rétorqua ,  contre  l'Au- 
triche, le  reproche  fait  à  la  députation  de  s'être  écar- 
tée de  la  paix  de  Lunéville.  H  dit  que  la  Cour  de  Vienne 
en  avait  donné  le  premier  exemple  en  comprenant, 

'  Voy.  t.  VI,  p.  2o7. 


—  193  — 

dans  la  liste  des  indemnités  qu'elle  avait  demandées 
pour  le  grand-duc  de  Toscane,  dix-neuf  villes  libres  de 
la  Souabe. 

La  septième  séance  fut  tenue  le  21  septembre.  Le 
plénipotentiaire  impérial  y  fit  connaître  à  la  députa- 
tion  que,  quoiqu'il  n'eût  pu  accéder  au  premier  con- 
clusum,  il  l'avait  cependant  communiqué  aux  minis- 
tres médiateurs.  Ainsi  le  rapport  entre  la  députation 
et  les  ministres  médiateurs,  par  l'intermédiaire  du 
plénipotentiaire  impérial,  se  trouvait  établi ,  et  la  dé- 
putation pouvait  dès  lors  leur  transmettre  les  réclama- 
tions qui  lui  parvenaient. 

Comme  nous  nous  bornons  à  extraire  des  protocoles 
les  points  qui  offrent  un  intérêt  général,  nous  passons 
sous  silence  les  nombreuses  réclamations  particulières 
qui  furent  présentées  à  la  députation  dans  cette  séance 
et  dans  les  suivantes ,  à  moins  qu'elles  ne  donnent 
lieu  à  discuter  un  principe  ou  à  éclaircir  un  point  his- 
torique. Nous  aurons  occasion  de  revenir  sur  ces  ré- 
clamations lorsque  nous  donnerons  le  texte  même  du 
Recès. 

Les  huitième  et  neuvième  séances,  des  23  et  25  sep- 
tembre ,  furent  entièrement  remplies  par  des  affaires 
particulières. 

Le  lendemain  de  la  dernière  séance,  le  plénipoten- 
tiaire impérial  remit  au  ministre  de  France  une  Note 
en  réponse  à  la  sienne  du  13  septembre.  Nous  la  pla- 
çons également  ici  : 

«  La  déclaration  remise  à  Ratisbonne,  au  nom  des 
puissances  intervenantes,  renfermait  une  imputation 
grave  et  non  méritée  sur  les  retards  qu'avait  éprouvés  le 
rassemblement  de  la  députation  de  l'Empire.  Sa  Majesté 

YII  13 


_  194  — 

se  devait  à  elle-même,  ainsi  qu'à  l'Empire  germanique, 
de  prouver  par  des  faits  que  rien  n'avait  été  négligé 
de  sa  part  pour  abréger  ces  délais.  Loin  de  vouloir 
inculper  personne,  l'exposé  fidèle  de  ce  qui  s'est  passé 
n'avait  pour  objet  que  de  mettre  en  évidence  la  pureté 
de  la  conduite  de  l'Empereur. 

«  Tel  est  également  le  motif  qui  oblige  Sa  Majesté  de 
rappeler  ici  d'autres  faits  relatifs  aux  pourparlers  an- 
térieurs qui  ont  eu  lieu  sur  l'indemnité  de  la  Toscane, 
afin  de  les  opposer  aux  assertions  que  renferme  la  Note 
remise,  le  13  de  ce  mois,  au  soussigné,  par  le  ci- 
toyen La/bresï,  ministre  extraordinaire  de  la  République 
française. 

«  Sa  Majesté  s'en  remet  volontiers  au  jugement  de 
toute  l'Europe,  si  elle  peut  être  taxée  d'injustice  ou 
d'ambition  pour  avoir  insisté  sur  l'indemnité  pleine  et 
entière  que  le  traité  de  Lunéville  assure  à  son  auguste 
frère.  Quant  aux  moyens  qu'elle  a  employés  pour  ob- 
tenir l'exécution  d'une  stipulation  aussi  formelle,  bien 
loin  d'avoir  à  craindre  de  les  exposer  au  grand  jour, 
elle  ne  peut  qu'en  désirer  la  publicité,  d'autant  que 
tous  ses  efforts  n'ont  eu  pour  but  que  de  combiner  la 
stricte  exécution  de  la  paix  de  Lunéville  avec  le  main- 
tien de  la  Constitution  germanique. 

«  Quelques  insinuations  indirectes  faites  à  Vienne  par 
une  personne  distinguée  au  service  de  la  Cour  de  Mu- 
nich, ont  dû  faire  croire  que  l'Électeur  palatin  désirait 
lui-même  de  s'arranger  avec  le  grand-duc  de  Toscane 
sur  les  échanges  à  leur  convenance  mutuelle,  personne 
ne  doutant  alors  que  l'indemnité  de  Son  Altesse  Royale 
serait  telle  que  portait  le  traité.  Dans  la  supposition 
que  le  complément  de  l'indemnité  de  la  Toscane  ne 
pouvait  être  trouvé  que  dans  des  biens  ecclésiastiques 
de  la  Souabe,  il  s'agissait  de  concentrer  les  posses- 
sions respectives  par  un  échange  de  la  Bavière,  voi- 


—  195  —     . 

sine  de  l'archevêché  de  Salzbourg.  Sa  Majesté  n'ayant 
aucun  motif  de  refuser  un  pareil  arrangement,  ne  se 
montra  pas  éloignée  à  donner  suite  à  ces  ouvertures. 

«  Des  insinuations  de  même  genre  eurent  lieu  à  Pa- 
ris, au  moment  de  la  ratification  du  traité  de  Luné- 
ville,  et  on  alla  même  jusqu'à  mettre  en  doute,  dans 
ce  qui  a  été  dit  au  plénipotentiaire  autrichien,  si  l'Élec- 
teur pourrait  conserver  la  ville  de  Munich;  mais  ja- 
mais il  n'a  été  ni  pu  être  question  ,  dans  ces  différents 
pourparlers,  de  porter  jusqu'au  Lech  l'indemnité  de 
monseigneur  le  grand-duc  de  Toscane.  A  quel  titre  au- 
rait-on pu  priver  l'Electeur  de  la  totalité  de  la  Bavière, 
ou  trouver  les  moyens  de  l'en  dédommager?  et  quand 
Sa  Majesté  aurait  eu  des  vues  aussi  éloignées  de  ses 
sentiments,  comment  pouvait-on  seulement  concevoir 
l'idée  d'engager  le  gouvernement  français  à  les  adopter? 

«  On  en  appelle  à  son  propre  témoignage,  à  celui  de 
la  Cour  de  Munich,  de  la  Cour  impériale  de  Russie,  à 
laquelle  tout  a  été  communiqué  à  ce  sujet.  Tous  ceux 
qui  ont  eu  connaissance  de  ce  qui  se  traitait  alors 
n'ignorent  pas  qu'il  n'était  question  que  de  l'Iser,  en- 
core avec  la  proposition,  faite  par  l'Autriche,  de  lais- 
ser à  l'Électeur  un  arrondissement  convenable  pour 
éloigner  la  ville  de  Munich  de  la  frontière  ;  et  que  ce 
projet,  qui  sûrement  n'était  pas  exagéré  dans  la  sup- 
position d'une  indemnité  pleine  et  entière  pour  la  Tos- 
cane, en  même  temps  que  Son  Altesse  Électorale  Pa- 
latine aurait  obtenu  en  Souabe  un  équivalent  complet 
des  cessions  auxquelles  elle  se  serait  portée  volontai- 
rement, a  été  entièrement  abandonné  par  l'Empereur, 
aussitôt  qu'il  s'est  aperçu  que  l'Électeur  n'inclinait 
pas  à  y  donner  les  mains.  Dès  lors  les  vues  et  les  de- 
mandes de  Sa  Majesté,  pour  convenir  du  lot  supplé- 
mentaire à  donner  à  son  auguste  frère,  se  sont  unique- 
ment fixées  sur  des  biens  ecclésiastiques  et  des  villes 


—  196  — 

libres  situées  dans  le  cercle  de  Souabe.  Le  tableau  en 
a  été  rédigé  à  Paris,  et  également  proposé  ensuite  par 
Sa  Majesté  Impériale  de  toutes  les  Russies,  qui,  dans 
sa  sagesse,  l'avait  adopté  en  plein. 

«  En  se  bornant  à  cet  exposé  fidèle  de  tout  ce  qui  s'est 
passé  à  cet  égard,  on  peut  se  dispenser  de  relever  les 
inductions  contenues  dans  la  note  susmentionnée  du 
citoyen  Laforest.  Jamais  l'Empereur  n'a  pu  avoir  la 
pensée  de  procurer  à  son  auguste  frère  une  partie 
quelconque  de  la  Bavière,  d'aucune  autre  manière 
que  par  un  arrangement  de  gré  à  gré  à  la  parfaite 
convenance  de  l'Électeur  palatin. 

«  Sa  Majesté  a  déjà  donné,  relativement  à  la  ville  de 
Passau,  toutes  les  assurances  qu'on  pouvait  attendre 
de  sa  justice  et  de  sa  modération.  Elle  est  prête  à  re- 
mettre cette  ville  à  celui  qui,  par  l'arrangement  légal 
et  définitif  des  indemnités,  en  aura  été  reconnu  le 
légitime  propriétaire;  ce  n'est  qu'alors  que  son  pos- 
sesseur actuel  cessera  de  l'être ,  et  que  Sa  Majesté  sera 
dégagée  de  l'obligation  que  lui  ont  fait  contracter  les 
demandes  du  prince-évêque  de  pourvoir  à  sa  sûreté 
jusqu'à  la  décision  de  son  sort. 

((  L'Empereur  ne  veut  pas  renoncer  à  l'espoir  que 
les  propositions  aussi  modérées  qu'équitables  dont 
il  a  chargé  récemment  son  ambassadeur  près  la  Répu- 
blique française,  mettront  fin  à  toute  différence  d'opi- 
nion entre  lui  et  le  premier  Consul  ;  mais  s'il  en  était 
autrement,  son  auguste  frère,  sans  avoir  de  préten- 
tions à  former  sur  aucune  partie  de  la  Bavière,  qu'il 
n'a  jamais  songé  à  acquérir  que  par  la  voie  d'un 
échange  de  gré  à  gré,  n'en  conserverait  pas  moins  le 
droit  incontestable  que  lui  assure  le  traité  de  Lunéville 
à  un  dédommagement  plein  et  entier  de  la  Toscane; 
droit  dont  l'Empire  et  la  France  se  sont  solennellement 
engagés  à  le  faire  jouir. 


—  197  — 

«  Le  soussigné  saisit  avec  empressement  cette  occa- 
sion pour  renouveler  au  citoyen  Laforest,  ministre 
extraordinaire  de  la  République  française,  l'assurance 
de  sa  haute  considération. 

«  Ratisbonne,  le  26  septembre  1 802. 

«  Signé:  Baron  de  Hugel.  » 

Dans  la  dixième  séance ,  le  28  septembre ,  le  Direc- 
toire, pour  répondre  au  vœu  que  la  députation  lui 
avait  adressé  le  25 ,  fit  un  rapport  sur  la  sustentation 
des  personnes  qui  avaient  eu  jusqu'alors  une  existence 
constitutionnelle  dans  les  pays  à  séculariser.  Il  les  di- 
visa en  six  classes,  savoir  : 

r  États  ecclésiastiques  qui  passent  en  entier  sous 
la  domination  d'un  prince  séculier,  et  dans  lesquels  il 
faut  prendre  en  considération  les  prieur,  abbé  ou  ab- 
besse,  leurs  chapitres,  leurs  officiers  civils,  ecclésias- 
tiques et  militaires; 

2"  Pays  ecclésiastiques  qui  vont  être  partagés,  mais 
dont  la  plus  grande  partie,  avec  la  résidence,  est  si- 
tuée sur  la  rive  droite  du  Rhin  ; 

3°  Ceux  dont  la  plus  grande  partie,  avec  la  rési- 
dence, sont  situés  sur  la  rive  gauche  du  Rhin,  mais 
dont  cependant  une  portion  considérable  est  située 
sur  la  droite; 

4"  Ceux  qui  n'ont  presque  plus  rien  sur  la  rive 
droite,  tels  que  l'évêché  de  Baie; 

5°  Ceux  qui  sont  entièrement  situés  sur  la  rive  gau- 
che, comme  l'évêché  de  Liège; 

6"  Les  ecclésiastiques  et  les  employés  dont  les  cor- 
porations sont  supprimées  sur  la  rive  gauche ,  et  qui 
ont  été  renvoyés,  sans  pension,  sur  la  rive  droite, 
mais  dont  les  corporations  ont  plus  ou  moins  de  biens 
ou  de  revenus  sur  la  rive  droite  du  Rhin. 


-^  198  — 

D'après  cette  classificatiou,  le  subdélégué  deMayence 
proposa  une  série  de  questions  sur  laquelle  il  invita 
la  députation  à  voter  quand  le  moment  en  serait  venu. 

Le  landgrave  de  Hesse-Cassel  s'étant  plaint  de  l'in- 
suffisance de  l'indemnité  qui  lui  était  assignée,  le  sub- 
délégué deMayence  prouva,  en  entrant  dans  beaucoup 
de  détails,  que  l'indemnité  offerte  surpassait  considéra- 
blement la  valeur  de  la  perte  que  ce  prince  éprouvait. 
Comme,  outrela  perte  réelle,  leLandgravevoulaitencore 
faire  valoir  celle  de  protection  et  d'avoierie  sur  Corvey, 
Hoxter,  Herse  et  Oberwesel,  le  baron  à'Albini  observa 
que  tous  ces  droits  de  protection  qui,  dans  les  temps 
où  le  droit  du  plus  fort  prévalait,  avaient  été  déférés, 
souvent  contre  leur  gré,  aux  États  puissants  en  faveur 
des  États  faibles,  n'étaient,  pour  la  plupart,  que  des 
droits  honorifiques,  plus  onéreux  qu'utiles.  Le  même 
ministre  se  plaignit  encore  que,  sans  attendre  que 
l'électeur  de  Mayence  eût  été  mis  en  possession  de  la 
dotation  que  le  plan  lui  promettait,  le  landgrave  de 
Hesse  se  fût  emparé  des  quatre  bailliages  mayençais 
que  ce  même  plan  lui  assignait;  qu'il  eût  mis  la  main 
sur  les  caisses  publiques,  et  fait  prêter  serment  aux 
sujets  qui  n'avaient  pas  encore  été  déliés  de  celui  qui 
les  attachait  à  leur  souverain.  L'histoire  doit  remar- 
quer ces  irrégularités  commises  par  un  prince  qui, 
quatre  ans  après,  a  été  lui-même  la  victime  du  pouvoir 
arbitraire.  Au  reste,  le  conclusum  pris  sur  la  récla- 
mation du  Landgrave  porte  qu'il  paraît  suffisamment 
indei^nisé. 

Les  villes  impériales  de  Souabe  et  de  Franconie, 
destinées  à  perdre  leur  immédiateté,  avaient  présenté 
un  n^émoire  dans  lequel,  sans  protester  contre  cette 
décision,  elles  avaient  seulement  réclamé  le  maintien 
de  leurs  Constitutions.  Ce  mémoire  avait  été  l'objet  de 


—  199  •— 

discussions  pendant  plusieurs  séances;  le  30  septem 
bre,  dans  la  onzième,  le  Directoire  résuma  les  divers 
votes  émis,  et  en  forma  un  projet  de  conclusum  qui 
conservait  à  ces  villes  divers  beaux  privilèges.  Nous 
en  parlerons  à  V article  27  du  Recès;  mais  nous  obser- 
vons ici  que  la  question  de  savoir  si  des  villes  impé- 
riales pouvaient,  contrairement  à  la  paix  de  Lunéville, 
faire  partie  de  la  masse  des  indemnités,  n'a  pas  été 
formellement  discutée  dans  la  députation  ;  on  l'a  re- 
gardée comme  décidée  par  l'adoption  du  plan  d'indem- 
nités. 

On  transmit  aux  médiateurs  la  réclamation  du  duc 
de  Modene,  pour  un  supplément  d'indemnités,  mais  on 
refusa  d'accueillir  celle  de  l'archiduchesse  Marie  y  sa 
lille,  pour  les  principautés  de  Massa  et  de  Carrara, 
parce  qu'on  jugea  qu'elle  n'était  pas  du  ressort  de  la 
députation. 

On  rejeta  également  la  réclamation  de  la  noblesse 
immédiate,  qui  demandait  à  être  indemnisée  de  la  perte 
des  revenus  qu'elle  éprouvait  par  la  cession  de  la  rive 
gauche  du  Rhin,  vu  que  les  lois  françaises  la  dépouil- 
laient des  dîmes,  prestations  féodales  et  droits  seigneu- 
riaux. Le  canton  du  haut  Rhin  avait  évalué  cette  perte 
à  soixante-dix-neuf  mille  huit  cent  soixante-quatorze 
florins  ;  celui  du  bas  Rhin  à  cent  trente-trois  mille 
cent  quarante-huit  florins  par  an. 

Dans  la  douzième  séance,  du  5  octobre,  on  s'occupa 
d'objets  particuliers. 

On  avait  jusqu'alors  envoyé  aux  ministres  des  puis- 
sances médiatrices  toutes  les  réclamations  qui  avaient 
paru  fondées;  on  pensait  ou  on  affectait  de  croire  que, 
comme  ces  ministres  avaient  annoncé  qu'ils  étaient  en 
possession  des  mémoires  et  évaluations  formés  parles 
parties  intéressées,  il  leur  serait  facile  d'y  puiser  tous 


—  200  — 

les  renseignements  qui  manquaient  à  la  députation  : 
mais,  jusqu'au  8  ociobre,  ces  ministres  n'avaient 
transmis  aucun  éclaircissement.  Ce  jour  ils  adressè- 
rent au  plénipotentiaire  impérial  une  nouvelle  rédac- 
tion modifiée,  suppléée  et  rectifiée  de  leur  première 
déclaration ,  ou  un  second  plan  général  d'indemnisa- 
tion, dans  lequel  on  avait  eu  égard  aux  réclamations 
qui  avaient  été  présentées,  excepté  toutefois  à  l'égard  du 
grand-duc  de  Toscane^  dont  l'indemnisation  n'était  pas 
changée. 

Ce  nouveau  plan  fut  communiqué  le  9  octobre^ 
dans  la  treizième  séance  de  la  députation. 

Il  était  accompagné  de  la  Note  suivante  : 

«  Le  soussigné,  ministre  plénipotentiaire  de  S.  M. 
l'empereur  de  toutes  les  Russies  [extraordinaire  de  la 
République  française]  près  la  Diète  de  l'Empire  ger- 
manique, a  reçu  du  plénipotentiaire  impérial  l'arrêté 
principal  que  la  députation  extraordinaire  a  pris  dans 
la  séance  du  8  septembre  dernier  en  adoption  préala- 
ble, sous  la  réserve  de  modifications  ultérieures,  du 
plan  tracé  par  la  déclaration  remise  au  nom  des  puis- 
sances médiatrices  le  18  août  1802  (30  thermidor  der- 
nier). Il  a  également  reçu  les  réclamations,  observa- 
tions et  pétitions  qui  ont  été  renvoyées  à  l'examen  des 
ministres  des  gouvernements  médiateurs  par  des  arrê- 
tés subséquents  de  la  députation. 

«  11  s'est  empressé,  ainsi  que  le  ministre  extraordi- 
naire de  ia  République  française  [  plénipotentiaire  de 
S.  M.  l'empereur  de  toutes  les  Russies],  de  se  concer- 
ter à  ce  sujet  avec  les  membres  de  la  députation,  et  de 
donner  avec  lui,  à  chaque  pièce,  l'attention  que  les 
principes  et  les  ordres  de  leurs  gouvernements  respec- 
tifs, aussi  bien  que  la  nature  des  circonstances,  pou- 
vaient permettre. 


—  201   — 

«  Les  dernières  instructions  des  puissances  média- 
trices, en  conséquence  des  réclamations,  observations 
et  pétitions  qu'elles  ont  elles-mêmes  reçues,  soit  di- 
rectement, soit  par  l'organe  de  leurs  ministres,  étant 
en  même  temps  parvenues  au  soussigné  et  au  ministre 
extraordinaire  de  la  République  française  [plénipoten- 
tiaire de  S.  M.  l'empereur  de  toutes  les  Russies],  il  a, 
d'accord  avec  lui,  l'honneur  de  reporter  à  l'adoption 
immédiate  et  définitive  de  la  députation  extraordinaire 
les  dispositions  de  la  déclaration  remise  le  1 8  août 
(30  thermidor),  modifiées,  suppléées  et  rectifiées, 
dispositions  combinées  dans  leur  ensemble  en  exé- 
cution du  traité  de  Lunéville,  et  d'après  les  prin- 
cipes qui  ont  guidé  les  deux  puissances  médiatrices 
dans  l'interprétation  et  l'application  qu'elles  en  ont 
faites. 

«  Il  se  flatte  que  la  députation  sera  sensible  à  cette 
nouvelle  preuve  de  la  sollicitude  des  puissances  mé- 
diatrices pour  le  bien-être  de  l'Empire  germanique. 
Elle  reconnaîtra  aussi  combien  ont  été  utiles  les  éclair- 
cissements que  ses  membres  ont  donnés  avec  le  zèle 
et  le  patriotisme  qui  les  distinguent. 

c(  Mais  le  soussigné  ne  peut  trop  fortement  exposer 
à  la  députation  combien  est  grande  l'urgence  des  cir- 
constances, et  combien  il  importe  qu'une  décision 
prompte  et  finale  fasse  jouir  l'Empire  germanique  du 
résultat  des  intentions  amicales  des  puissances  média- 
trices. 

«  La  députation  ne  perd  pas  sûrement  de  vue  que  le 
terme  qu'elles  ont  désigné  à  l'espérance  publique  est 
presque  écoulé. 

ce  A  Ratisbonne,  ce  'i^-  1802  [i^,^^;]. 

«  Le  baron  de  Buuler. 
«  [Laforest.]  » 


—  202  — 

Quant  au  plan  même,  nous  allons  seulement  indi- 
quer en  quoi  il  différait  de  celui  du  1 8  août. 

r  Au  paragraphe  3,  qui  détermine  le  lot  du  roi  de 
PrussCf  la  ligne  qui  sépare  la  partie  de  l'évêché  de 
Munster  qu'on  lui  alloue,  de  la  partie  qui  est  divisée 
entre  plusieurs  autres  princes ,  est  déterminée  avec 
plus  de  précision. 

2°  La  fin  de  ce  paragraphe  renferme  les  lots  des 
ducs  d'Arenbei^Qf  de  Croï,  de  Looz  et  de  Coswarenf  des 
princes  de  Li^ne,  de  Salm-Salm,  Salm-Ryrbourgf  Salm- 
Reifferscheid,  et  du  comte  de  Reifferscheid-Dycky  ainsi 
que  nous  verrons  qu'ils  ont  été  assignés  par  le  Recès, 
avec  la  différence  cependant  que  le  prince  de  Ligne 
fut  rayé  de  ce  paragraphe,  et  que  son  lot  fut  changé. 

3"  La  maison  de  Bruiisîcic-Wolfenbutlel ,  dont  il 
n'était  pas  question  dans  le  premier  plan ,  occupe  dans 
le  nouveau  un  alinéa  du  paragraphe  A. 

4"  Le  second  plan  enlève  au  margrave  de  Bade  une 
partie  de  l'abbaye  de  Salmansweiler,  qu'il  remplace 
par  celles  de  Reichenau  et  d'Ochningen  et  par  la  pré- 
vôté d'Odenheim. 

5"  Le  lot  du  duc  de  Wurtemberg  est  augmenté  des 
abbayes  et  couvents  de  Schœnthal,  Combourg,  Koth- 
mûnster,  Heiligenkreuzthal ,  Obristenfeld ,  Holzhau- 
sen  Margarethausen  et  du  village  de  Diirmestetten; 
mais  il  est  chargé  de  servir  diverses  rentes,  montant 
à  quatre-vingt-huit  mille  florins,  aux  personnes  aux- 
quelles le  premier  plan  avait  destiné  ces  abbayes. 

6°  La  part  du  landgrave  de  liesse-Cassel  est  aug- 
mentée des  bailliages  mayençais  de  Naumbourg  et 
Neustadt;  des  chapitres  de  Fritzlar  et  Amœnebourg, 
et  de  la  ville  de  Gelnhausenj  il  renoncera  à  ses  droits 
surCorvey,  et  payera  au  landgrave  de  Hesse-Rothen 
bourg  une  rente  de  vingt-deux  mille  cinq  cents  florins. 

7"  Le  landgrave  de  Uesse-Darmsladt  recevra,  outre 


—  203  — 

ce  que  le  premier  plan  lui  avait  destiné ,  neuf  autres 
bailliages  mayençais,  les  restes  des  bailliages  palatins 
d'Umstadt  et  d'Alzey,  l'abbaye  de  Seligenstadt  qui, 
dans  le  premier  plan,  était  donnée  à  Nassau-Usingen, 
celle  de  Marienschloss,  et  la  prévôté  de  Wimpfen,  et 
une  rente  de  vingt  et  un  mille  florins  sur  Franc- 
fort; il  en  payera  une  de  quinze  cents  florins  au 
prince  de  Wittgenstein-Berlehourg ^  et  augmentera  d'un 
quart  la  rente  apanagère  du  landgrave  de  Hesse-Hom- 
bourg. 

8°  L'indemnité  duduc  d'OMe/ièowr^  est  plus  exacte- 
ment réglée. 

9"  Le  duc  de  MecJdenbourg-Schwerin ,  les  princes  de 
Hohenzùllern  et  à' Oettingen  y  passés  sous  silence  dans 
le  premier  plan,  reçoivent  des  indemnités. 

10°  L'indemnité  de  Nassau-Usingen  q^X^Xws,  claire- 
ment exprimée  ;  au  lieu  des  abbayes  de  Rappel  et  de 
Kappenberg,  on  donne  à  Nassau-Dillenbourg  celles  de 
Hofen,  Saint-Gérold  et  Banderen. 

1 1  °  Indépendamment  de  l'indemnité  que  le  premier 
plan  allouait  à  la  maison  de  La  Tour  et  Taxis,  le  second 
plan  lui  donne  la  garantie  dont  nous  parlerons  à  l'ar- 
ticle 13  du  Recès. 

1 2"  L'indemnité  du  prince  de  Lœioenstein-Wertheim 
est  augmentée;  néanmoins  le  second  plan  ne  lui  donne 
pas  encore  la  rente  de  douze  mille  florins  que  le  Recès 
lui  déféra. 

1 3"  La  maison  de  Solms  recevra  l'abbaye  d'Alten- 
bourg  à  la  place  de  celle  d'Ilbenstadt. 

14°  L'indemnité  que  la  maison  de  Stolherg  devait 
recevoir  en  terres,  est  changée  en  une  rente. 

1 5°  Le  lot  de  Hohenlohe-Bartenstein  est  augmenté , 
et  il  est  dit  que  c'est  le  prince  Charles  de  cette  maison 
qui  reçoit  cette  indemnité.  Hohenlohe-Waldenbourg , 
oublié  dans  le  premier  plan,  reçoit  une  rente;  il  n'est 


—  204  — 

pas  encore  question  d'une  indemnité  pour  Hohenlohe- 
Ingelfingen  et  Hohenlohe-Neuenstein. 

^  6"  L'indemnité  du  prince  à'henhourg  se  compose 
des  villages  de  Gainsheim  et  de  Burgel;  on  assigne 
une  rente  à  la  comtesse  de  Parkstein. 

17°  L'indemnité  de  la  maison  de  Linange  est  réglée 
ainsi  que  nous  la  trouverons  au  paragraphe  20 ,  ex- 
cepté les  rentes  dont  il  est  question  dans  celui-ci ,  et 
dont  le  second  plan  ne  parle  pas  encore. 

18°  Les  indemnités  de  Wied-Runked  y  Brezenheim, 
etWittgensteinBerlebourg,  sont  réglées,  comme  nous 
le  verrons  aux  paragraphes  21 ,  22  et  23. 

1 9°  L'indemnité  des  comtes  de  Wartemberg,  Sickin- 
gen ,  la  Leyen ,  Colloredo ,  Sternherg,  et  des  comtes  de 
laWestphalie,  a  fait  place  à  la  disposition  dont  nous 
parlerons  à  l'occasion  de  V article  24. 

20°  L'indemnité  de  l'archichancelier  est  réglée, 
ainsi  qu'elle  a  été  déterminée  par  les  trois  premiers 
alinéa  du  paragraphe  25.  Le  complément  d'indemnité 
d'un  million  de  florins  devra  lui  être  fourni  par  des 
assignations  sur  des  fondations  immédiates. 
J?  21°  Il  est  assigné  une  indemnité  au  grand-maître 
de  l'Ordre  Teutonique,  originairement  omis. 

22°  Les  paragraphes  27,  28,  29  et  30,  concernant 
les  villes  libres,  l'Ordre  équestre,  la  République  hel- 
vétique et  les  rentes,  se  trouvent  pour  la  première  fois 
dans  ce  projet. 

23°  Le  paragraphe  32  propose  quelques  nouveaux 
votes  virils. 

24°  Les  paragraphes  33  à  34  sont  ébauchés. 

Aussitôt  que  la  députation  eut  pris  connaissance 
de  ce  nouveau  plan,  le  Directoire  demanda  l'avis  des 
subdélégués.  Ceux  de  Bohême,  de  Saxe  et  du  grand- 
maître  de  l'Ordre  Teutonique  se  réservèrent  de  s'ex- 
pliquer ultérieurement;  les  cinq   autres  adoptèrent 


—  205  — 

sur-le-champ  le  nouveau  plan;  cependant  il  ne  fut  pas 
fait  de  conclusiim. 

On  vota  encore  sur  ce  plan  dans  la  quatorzième 
séance,  le  1 2  octobre.  Dans  le  vote  de  Brandebourg  se 
trouvent  ces  expressions  remarquables: «S.  M.  le  Roi, 
en  sa  qualité  de  souverain,  s'est  entendue  amicalement 
sur  le  plan  de  la  Russie  et  de  la  France  avec  ces  deux 
hautes  puissances,  et  elle  en  a  fait  faire  l'ouverture 
confidentielle  à  la  Cour  impériale,  d'après  les  relations 
également  amicales  qui  existent  entre  elle  et  cette 
Cour.  En  cette  même  qualité.  Sa  Majesté  a  conclu,  le 
23  mai  dernier,  avec  la  République  française,  et  de 
concert  avec  la  Russie,  une  convention  particulière, 
par  laquelle  les  pays  d'indemnité  connus  par  le  plan 
présenté  lui  ont  été  donnés,  avec  la  supériorité  terri- 
toriale et  la  souveraineté,  sur  le  même  pied  qu'elle 
possède  ses  autres  États  allemands,  lesquels  pays  lui 
ont  été  cédés  pour  en  prendre  immédiatement  posses- 
sion, et  garantis.  La  subdélégation  de  Brandebourg 
croit  essentiellement  nécessaire  de  déclarer  ici  publi- 
quement qu'il  s'ensuit  de  ces  transactions,  comme  con- 
séquence immédiate,  que  les  indemnités  de  Sa  Majesté 
Prussienne  se  trouvent  dans  une  catégorie  particulière 
par  rapport  aux  autres,  et  qu'on  doit  y  avoir  égard 
dans  toutes  les  restrictions  que  d'autres  stipulations 
pourront  établir.  » 

On  ne  prit  pas  de  conclusum^  le  Directoire  ayant 
averti  qu'il  avait  été  présenté  des  réclamations  contre 
le  nouveau  plan. 

Dans  la  quinzième  séance  qui  eut  lieu  le  14  oc- 
tobre, le  subdélégué  de  Mayence  dit  entre  autres; 

«  Après  avoir  maintenant  mûrement  réfléchi  sur 
le  plan,  il  me  paraît  qu'il  ne  reste  autre  chose  à  faire 


— .  206  —> 

que  d'accéder  à  ceux  de  MM.  les  subdélégués  qui 
proposent  son  adoption  dans  son  ensemble. 

«  Quant  aux  grandes  Cours,  on  ne  peut  guère 
espérer  que  les  puissances  médiatrices  admettront 
d'autres  modifications  ultérieures  de  leur  première 
déclaration  que  celles  qui  ont  effectivement  été  faites 
en  plusieurs  endroits  dans  le  plan  général,  d'autant 
moins  que  S.  M.  le  roi  de  Prusse,  comme  puissance, 
vient  de  déclarer  qu'elle  ne  voulait  consentir  à  aucun 
changement  ultérieur.  Les  observations  que  la  dépu- 
tation  a  faites  aux  ministres  des  puissances  média- 
trices, sur  d'autres  articles,  ont  été,  pour  la  plupart, 
prises  en  considération  de  manière  à  satisfaire  les 
réclamations,  et  la  voie  a  été  ouverte  pour  la  décision 
ultérieure  sur  d'autres,  de  sorte  qu'on  peut  en  espérer 
des  résultats  conformes  à  la  justice.  Il  a  été,  à  la  vé- 
rité, ajouté  à  ce  second  plan  plusieurs  nouvelles  dis- 
positions auxquelles  la  députation  n'a  pas  donné  oc- 
casion, et  contre  une  partie  desquelles  il  a  déjà  été 
présenté  des  réclamations,  et  pourrait  bien  encore 
être  élevé  quelques  plaintes  de  la  part  des  intéressés. 
Cependant  la  députation  ne  peut  pas  s'occuper  de  ces 
dernières  ex  offîcio;  quant  aux  premières,  le  sub- 
délégué est  d'avis,  aim  unanimibus,  qu'on  devra  en- 
core les  examiner.  On  peut  cependant  être  persuadé 
d'avance  que  les  ministres  des  puissances  médiatrices 
qui  ont  dû  avoir  des  raisons  particulières  pour  établir 
de  pareilles  dispositions,  sauront  satisfaire  ces  petits 
et  grands  intéressés.  Ces  objets,  qui,  proportionnel^ 
lement,  sont  de  peu  de  conséquence,  ne  peuvent  donc 
point  arrêter  l'adoption  du  nouveau  plan  dans  son 
ensemble. 

«  On  a  de  plus  porté  à  la  dictature,  immédiatement 
avant  la  remise  du  second  plan  général,  quelques 
nouvelles   réclamations  qui   devront,   au  moins  en 


—  207  — 

partie,  être  portées  à  la  connaissance  de  MM.  les  mi- 
nistres médiateurs. 

«  Tout  ce  que  la  députation  a  jugé  essentiellement 
nécessaire  d'observer,  au  sujet  des  dettes  et  de  toutes 
les  personnes  qui  ont  une  existence  constitutionnelle 
dans  les  pays  à  séculariser,  a  été  trouvé  juste  et  équi- 
table par  les  puissances  médiatrices  et  leurs  ministres  : 
d'accord  avec  la  députation,  elles  veulent  qu'il  soit 
établi  sans  délai  à  ce  sujet  le  règlement  nécessaire. 

«  Après  tout  cela,  de  quelle  utilité  pourrait  encore 
être  la  non-adoption  du  nouveau  plan  général?  à  quoi 
pourrait-elle  mener?  On  n'aurait  pas  du  aller  aussi 
loin,  quant  aux  prises  de  possession,  qu'on  est  effec- 
tivement allé,  si  on  voulait  encore  proposer,  avec 
quelque  espoir  de  succès,  un  changement  dans  le  fond  : 
on  n'a  pas  besoin  de  prouver  que  l'état  actuel  est,  sous 
tous  les  rapports,  le  moins  supportable  pour  les  sou- 
verains, les  personnes  à  leur  service,  et  les  sujets  qui, 
sûrs  des  changements,  les  attendent  d'un  jour  à  l'autre. 

«  L'Allemagne  elle-même  et  sa  Constitution,  et  celle 
des  cercles,  se  trouvent  entièrement  paralysées.  Ce 
qu'on  ne  peut  plus  changer  doit  être  effectué,  afin 
que  la  tranquillité  et  l'ordre  soient  rétablis  dans  les 
pays,  et  que  l'Empire  obtienne  une  constitution.  >) 

Le  même  membre  observa  que,  s'il  était  question 
d'instituer  de  nouveaux  votes  virils  dans  le  collège  des 
Princes,  il  serait  juste  de  conférer  plusieurs  suffrages 
à  quelques  grandes  maisons  d'Allemagne,  et  nommé- 
ment à  l'Autriche  et  à  la  Saxe,  puisque  la  première 
cédait  les  deux  suffrages  qui  lui  appartenaient  pour 
le  cercle  de  Bourgogne  et  pour  Nomény,  et  n'en  con- 
servait par  conséquent  qu'un  seul;  et  que  l'électeur 
de  Saxe  n'en  avait  jamais  eu  qu'un  seul,  celui  de 
Henneberg,  pour  lequel  il  alternait  même  avec  la 
branche  aînée  de  sa  maison.    Comme  ce  qu'on  appe- 


—  208  — 

lait  les  principes  était,  dans  le  nouveau  plan ,  déclaré 
inséparable  des  autres  dispositions,  le  subdélégué 
pensait  qu'il  serait  nécessaire  de  faire  quelques  obser- 
vations aux  ministres  médiateurs,  sur  le  troisième 
principe  auquel  des  Universités  d'Allemagne  étaient 
intéressées;  sur  le  quatrième,  relatif  aux  dettes;  le 
cinquième,  relatif  aux  péages  du  Rhin;  le  neuvième, 
concernant  la  sustentation  des  ecclésiastiques  et  de 
leurs  officiers;  que  le  plan  donnerait  aussi  lieu  à  faire 
des  représentations  sur  le  onzième  principe,  si,  par 
une  Note  qui  venait  d'être  transmise,  les  ministres 
médiateurs  n'avaient,  de  leur  propre  mouvement, 
décidé  cette  question  ainsi  qu'on  l'avait  désiré. 

De  tous  les  arrangements  dont  la  députation  était 
chargée,  il  n'y  en  avait  pas  de  plus  difficile  et  de  plus 
compliqué  que  la  fixation  de  la  sustentation  future  des 
ecclésiastiques  et  des  officiers,  et  en  général  des  per- 
sonnes employées  dans  les  pays  sécularisés.  Le  travail 
était  devenu  d'autant  plus  difficile  qu'à  cette  question 
on  attacha  celle  de  la  constitution  future  des  pays 
concédés  en  indemnisation  ;  question  qu'il  aurait 
peut-être  été  convenable  de  traiter  séparément.  Quel- 
ques milliers  de  personnes,  de  toutes  les  classes  et  de 
tous  les  rangs,  attendaient  avec  anxiété  une  fixation 
qui  devait  assurer  leur  sort  et  l'existence  de  leurs  fa- 
milles. Les  subdélégués  étaient  pénétrés  de  la  nécessité 
de  mettre  fin  à  cette  incertitude;  mais  l'extension 
qu'on  avait  donnée  à  la  question  fut  cause  qu'on  ne 
commença  à  s'en  occuper  que  dans  la  quinzième 
séance.  Le  subdélégué  de  Saxe  fut  le  premier  qui  émit 
son  vote;  il  demanda  qu'on  laissât  aux  anciens  princes 
ecclésiastiques,  leur  vie  durant,  ceux  de  leurs  reve- 
nus domaniaux  qui  avaient  toujours  été  employés  à 
l'entretien  de  leur  Cour,  ou  qui,  destinés  à  leurs  menus 


—  209  — 

plaisirs,  entraient  habituellement  dans  leurs  caisses 
particulières;  et  qu'on  affectât  irrévocablement  ces 
revenus  à  certains  bailliages  et  rentes,  sans  en  réduire 
le  montant,  quand  même  les  revenus  du  pays  auraient 
éprouvé  quelque  diminution  par  la  cession  de  la  rive 
gauche  ;  enfin  qu'il  fût  permis  à  ces  prélats  de  conti- 
nuer à  demeurer  dans  leurs  résidences,  en  conservant 
la  dignité  dont  ils  avaient  joui  jusqu'alors;  qu'on  leur 
abandonnât  à  cet  effet,  en  propriété,  le  mobilier  né- 
cessaire, de  même  que  les  épargnes  de  leur  Chambre 
des  finances,  en  tant  cependant  que  celles-ci  n'étaient 
pas  spécialement  destinées  à  amortir  les  dettes  de  ces 
Chambres.  Quant  à  la  constitution  des  pays  sécula- 
risés ,  la  Saxe  établit  en  principe  que  les  nouveaux 
possesseurs  ne  faisaient  que  remplacer  les  anciens; 
qu'en  conséquence  les  droits  et  les  libertés  des  États 
et  sujets,  par  rapport  aux  contributions  et  aux  presta- 
tions, devaient  être  maintenus.  En  parcourant  en  par- 
ticulier les  six  classes  de  personnes  établies  dans  le 
rapport  directorial,  la  Saxe  demanda  que  si  ce  qui 
restait  de  l'électorat  de  Trêves  n'était  pas  suffisant 
pour  faire  un  fonds  de  sustentation  qui  égalât  le  re- 
venu annuel  qui  avait  été  destiné  à  l'entretien  de  la 
Cour  de  l'Électeur,  il  serait  juste  que  ceux  des  États 
séculiers  qui,  par  les  sécularisations,  ont  obtenu  une 
augmentation  considérable  de  leur  territoire,  se  char- 
geassent de  concourir  à  cette  contribution  temporaire. 

La  discussion  continua  à  la  seizième  séance,  le 
18  octobre.  Le  grand-maître  de  l'Ordre  Teutonique 
distingua  entre  le  caractère  d'évêque  et  celui  de  sou- 
verain. La  question  de  savoir  si  les  princes  ecclésias- 
tiques, dont  les  pays  servaient  d'indemnité,  et  qui, 
par  conséquent,  perdaient  le  caractère  de  princes, 
resteraient  encore  évêques  ou  non ,  parut  au  subdélé- 
VII  14 


—  210  — 

gué  n'être  pas  du  ressort  de  la  députatiori.  Il  fut  d'avis 
que  les  princes  d'Empire  dépossédés  devront  conti* 
nuer  à  porter  leur  ancien  titre  et  à  prendre  leur  ancien 
rang;  qu'il  leur  sera  libre  de  fixer  leur  séjour  hors 
des  pays  dont  ils  perdaient  le  gouvernement;  que, 
s'ils  préfèrent  y  rester,  ils  pourront  choisir  une  habi- 
tation d'été  qui  soit  de  nature  à  leur  fournir  les  plai- 
sirs de  la  campagne;  que  leurs  habitations  d'hiver  et 
d'été  seront  convenablement  meublées ,  et  que  les 
meubles  et  le  service  de  table  seront  entretenus  par  le 
nouveau  souverain;  qu'il  leur  sera  permis  d'emmener 
des  écuries  de  la  Cour  les  chevaux  et  équipages  néces- 
saires; que  leurs  serviteurs  toucheront  leurs  salaires 
des  revenus  domaniaux  du  nouveau  prince;  enfin 
qu'on  leur  fixera  une  pension  proportionnée  et  calcu- 
lée sur  le  moyen  terme  de  dix  années  des  sommes  qui 
ont  été  employées  par  le  passé  pour  l'entretien  de 
leur  Cour;  et  que  ces  pensions  seraient  assignées  sur 
certains  bailliages  dont  les  préposés  prêteront  serment 
de  ne  faire  qu'à  eux  seuls  les  remises  d'argent  et  li- 
vraisons en  nature  qui  auront  été  stipulées.  A  l'égard 
de  la  constitution  des  pays  sécularisés,  le  subdélégué 
distingue  entre  constitution  et  gouvernement  ou  ad- 
ministration. 11  doit  être  libre,  d'après  lui,  au  nouveau 
prince,  d'établir  telle  administration  qu'il  jugera  con- 
venir aux  pays;  il  n'en  est  pas  de  même  de  la  Consti- 
tution, et  le  subdélégué  pense  qu'il  ne  dépend  pas  plus 
de  la  volonté  arbitraire  des  nouveaux  princes  de  la 
changer,  que  l'ancien  possesseur  n'en  avait  eu  le  droit. 
La  paix  de  Lunéville,  qui  est  la  loi  d'après  laquelle 
la  députation  de  l'Empire  est  tenue  de  prononcer, 
n'assure  aux  princes  héréditaires  que  des  dédomma- 
gements. L'estimation  de  la  perte  et  de  la  compensa- 
tion est  le  résultat  du  calcul  combiné  de  la  surface, 
du  nombre  des  habitants  et  de  la  richesse  des  pays 


—  211   — 

perdus  et  donnés;  mais  elle  ne  demande  pas  la  viola- 
tion des  droits  qui,  par  la  Constitution  des  pays  cédés, 
sont  assurés  aux  habitants.  Violer  ces  droits,  ce  serait 
violer  le  Droit  des  gens,  qui,  même  lors  de  la  paix  de 
Westphalie,  fut  si  religieusement  respecté.  Le  roi  de 
Suède  et  l'électeur  de  Brandebourg  firent  jouir  alors 
d'une  égalité  de  droits  les  pays  qui  leur  étaient  tombés 
en  partage.  Le  subdélégué  est,  en  conséquence,  d'avis 
que  ;,  pour  tranquilliser  tant  de  millions  d'Allemands 
libres,  il  faut,  au  moment  même  où  l'occupation  a 
lieu,  proclamer  le  principe  que  les  nouveaux  souve- 
rains ne  sont  pas  autorisés  à  faire  des  changements 
arbitraires  dans  la  Constitution.  11  s'ensuit  que  les 
Etats  doivent  être  conservés  où  ils  existent,  et  que  les 
nouveaux  souverains  doivent  être  tenus  de  prendre 
leur  consentement  lorsqu'ils  voudront  changer  ou 
augmenter  les  contributions  ordinaires,  contracter  des 
dettes,  aliéner  des  domaines,  etc.  On  doit  aussi  s'at- 
tendre à  ce  que  tous  les  établissements  de  bienfai- 
sance garantis  par  les  États ,  tels  que  fonds  d'amor- 
tissement, d'assurances  en  cas  d'incendie,  etc.,  seront 
religieusement  maintenus.  Les  sujets  des  pays  qui 
passent  sous  un  autre  souverain  doivent  de  même  avoir 
la  liberté  de  quitter  ce  pays  dans  un  délai  déterminé  ; 
de  s'établir  partout  où  ils  voudront,  et  d'emporter 
toute  leur  fortune.  Le  subdélégué  cita,  outre  les  prin- 
cipes du  Droit  des  gens,  les  lois  de  l'Empire  qui  ga- 
rantissent cette  liberté  aux  sujets. 

On  ne  peut  que  regretter  que  ces  observations,  qui 
honorent  infiniment  le  prince  qui  les  a  fait  communi- 
quer à  la  députation,  et  le  ministre  qui  a  été  son  organe, 
n'aient  pas  été  prises  en  considération,  et  que  le  Recès 
ait  passé  sous  silence  une  matière  si  importante.  Il  a 
été  réservé  au  Congrès  de  Vienne  de  consacrer  des  prin- 
cipes qui  avaient  été  tant  de  fois  violés  depuis  dix  ans» 


—  212  — 

Quant  à  la  sustentation  des  ecclésiastiques  auxquels 
la  paix  de  Lunéville  ne  laissait  que  peu  de  chose  ou 
rien  sur  la  rive  droite  du  Rhin,  le  grand-maître  de 
l'Ordre  Teutonique  vota  pour  qu'on  exigeât  que  la 
France  en  fût  chargée;  si,  contre  toute  attente,  elle 
s'y  refusait,  il  pensait  qu'il  serait  du  devoir  de  l'Em- 
pire d'avoir  soin  de  ces  personnes,  en  s'imposant  le 
payement  d'une  certaine  quantité  de  mois  romains. 

On  délibéra  ensuite  sur  l'article  34  du  plan  d'in- 
demnité renfermant  les  principes.  Le  paragraphe  4  de 
cet  article,  qui  est  le  paragraphe  38  du  Recès  princi~ 
pal,  et  qui  transporte  sur  les  pays  donnés  aux  États 
d'Empire ,  en  remplacement  de  ceux  qu'ils  ont  perdus 
sur  la  rive  gauche  du  Rhin ,  les  dettes  personnelles  des 
anciens  possesseurs  ,  parut  au  subdélégué  de  Brande- 
bourg attentatoire  à  l'article  8  du  traité  de  Lunéville. 
((  Le  Roi,  dit  ce  ministre,  regarde  comme  son  devoir, 
en  sa  qualité  de  député  de  l'Empire,  de  réclaTner 
contre  le  projet  d'accabler  les  pays  et  sujets  allemands 
de  ce  fardeau  nouveau ,  inattendu  et  exorbitant  ;  la 
générosité  et  la  justice  du  gouvernement  français  ne 
lui  permettent  pas  de  douter  qu'il  ne  suffise  de  cette 
réclamation  pour  obtenir  du  ministre  de  France  l'as- 
surance tranquillisante  de  l'exécution  fidèle  et  reli- 
gieuse de  l'obligation  que  la  France  avait  contractée 
par  un  traité  solennel.  « 

On  prit  ce  jour-là  deux  conclusums  :  l'un,  relatif  à 
l'article  24,  établit  une  commission  particulière  pour 
faire  la  répartition  entre  les  comtes  d'Empire  de  plu- 
sieurs abbayes  qui  se  trouvaient  encore  disponibles  en 
Souabe  ;  l'autre  conclusum  proposa  des  modifications 
à  quelques-uns  des  principes  de  l'article  34. 

On  tint  la  dix-septième  séance  le  19  octobre.  On  y 
reçut  la  réponse  des  médiateurs  aux  observations  qui 


—  213  — 

avaient  été  faites  sur  les  principes.  Ils  étaient  d'accord 
sur  la  plupart  de  ces  modifications  ;  mais  ils  rappe- 
laient en  même  temps  à  la  députation  que  les  deux 
mois  fixés  pour  ses  délibérations  étaient  sur  le  point 
d'expirer.  On  continua  à  recueillir  les  voix  sur  le  plan  ; 
mais  personne  ne  vota  dans  cette  séance,  si  ce  n'est 
que  la  Saxe  accéda  à  la  majorité  des  suffrages,  qui  s'é- 
tait déjà  prononcée  pour  l'adoption  du  plan. 

Dans  la  dix-huitième  séance,  le  21  octobre,  le  sub- 
délégué de  Bohême  protesta  de  nouveau ,  au  nom  du 
grand-duc  de  Toscane  ,  contre  l'admission  du  second 
plan,  dans  lequel  on  n'avait  pas  eu  égard  aux  justes 
réclamations  de  ce  prince.  Il  démontra  la  frivolité  de 
l'objection  qu'on  lui  opposait;  savoir  :  que  la  masse 
des  indemnités  n'était  pas  suffisante  pour  lui  donner 
le  dédommagement  plein  et  entier  que  le  traité  de 
Lunéville  lui  avait  promis;  il  fit  voir  que  si  cela  était 
il  serait  injuste  de  faire  peser  sur  un  seul  la  réduction 
à  laquelle  tous  devaient  se  soumettre  dans  une  pro- 
portion égale.  Il  annonça  pourtant  que  la  Cour  de 
Vienne  avait  fait  la  proposition  d'échanger  la  presque 
totalité  de  ses  possessions  en  Souabe  contre  la  partie 
de  la  Bavière  située  sur  la  rive  droite  de  l'Inn,  et  celle 
d'une  augmentation  de  l'indemnité  du  grand-duc,  qui 
la  porterait  seulement  à  dix-huit  cent  mille  florins  de  re- 
venus, ne  faisant  pas  la  moitié  de  ceux  auxquels  il  avait 
droit.  Il  fit  voir  que  les  circonstances  n'exigeaient  nul- 
lement une  précipitation  qui  ne  permît  pas  d'attendre 
le  résultat  de  cette  négociation.  Malgré  cette  protesta- 
tion, le  second  plan  des  médiateurs  fut  adopté ,  dans 
cette  séance,  par  un  conclusum  formel,  qu'on  adressa 
à  la  plénipotence  impériale. 

Dans  la  même  séance,  le  Brandebourg  vota  sur  la 
question  de  la  sustentation  des  ecclésiastiques  et  de 


—  214  — 

leurs  officiers,  et  sur  l'affaire  des  dettes.  Comme  la 
première  partie  de  son  vote  a  été  la  base  du  conclusum 
définitif,  nous  ne  nous  y  arrêterons  pas,  nous  conten- 
tant de  rapporter  le  passage  suivant  : 

«  Plus,  dit  le  subdélégué,  la  Constitution  religieuse 
et  ecclésiastique  a  fourni  jusqu'ici  dans  beaucoup  de 
pays  un  prétexte  pour  exercer  contre  tout  parti  reli- 
gieux autre  que  celui  qu'on  nommait  dominant,  la 
plus  criante  intolérance,  en  privant  non-seulement  les 
membres  de  ces  partis  du  droit  de  suivre  leur  culte, 
mais  en  les  dépouillant  même  de  l'exercice  des  droits 
civils  et  les  excluant  de  la  participation  à  toute  espèce 
d'industrie  et  de  commerce;  plus  l'esprit  du  siècle 
dans  lequel  nous  vivons  exige  que,  faisant  hommage 
aux  principes  actuels,  nous  ne  sanctionnions  aucun 
règlement  restrictif  qui  serait  opposé  au  système  d'une 
sage  tolérance  et  d'une  liberté  absolue  de  religion.  » 

Dans  la  dix-neuvième  séance  du  23  octobre,  le  sub- 
délégué de  Bohême  présenta  la  liste  des  objets  dont  le 
nouveau  plan  d'indemnité  disposait,  quoiqu'ils  fus- 
sent propriétés  de  la  maison  d'Autriche  ou  du  grand- 
duc  de  Toscane,  ou  soumis  à  leur  souveraineté,  ou  sur 
lesquels  cette  maison  exerçait  quelques  droits.  Tels 
étaient; 

V  Miihldorff  et  la  partie  du  comté  de  Neubourg 
située  sur  la  rive  gauche  de  l'Inn,  assignées  à  la  Ba- 
vière :  Miihldorfl'  dépendait  de  l'archevêché  de  Salz- 
bourg,  et  le  comté  de  Neubourg  était,  quant  à  la  su- 
périorité territoriale,  sous  l'évêché  de  Passau;  mais, 
quant  à  la  souveraineté,  sous  l'Autriche  ; 

2°  L'Ortenau  qu'on  avait  envisagé  comme  dépen- 
dance du  Brisgau,  assigné  au  duc  de  Modène,  et  qui 
formait  un  district  entièrement  détaché; 

3"  La  prévôté  de  Kempten,  située  sous  la  juridic- 


—  215  — 

tion  territoriale  de  l'Autriche;  l'abbaye  médiate  de 
VValdsassen,  sur  laquelle  elle  avait  le  droit  de  protec- 
tion; l'abbaye  d'Ottobeuren  et  les  villes  impériales  de 
Buchhorn,  Wengen,  Leutkirch  et  Ravensbourg,  qui 
dépendaient  de  la  préfecture  autrichienne  en  Souabe 
ou  lui  payaient  diverses  rétributions.  Tous  ces  pays 
faisaient  partie  de  l'indemnité  promise  à  la  Bavière; 

4"  Les  abbayes  de  Gengenbach,  Petershausen,  Sal- 
mansweiler,  les  villes  impériales  d'Offenbourg ,  Zell, 
Gengenbach,  Uberlingen,  Biberach  et  PfuUendorff, 
soumises  soit  à  la  préfecture  autrichienne  d'Ortenau 
qui  y  exerçait  divers  droits,  soit  à  la  préfecture  autri- 
chienne en  Souabe,  étaient  assignées  au  margrave  de 
Bade; 

5°  Les  villes  impériales  de  Weil,  Reutlingen,  Eslin- 
gen  et  Aalen ,  soumises  à  la  même  préfecture ,  à  la- 
quelle elles  payaient  un  droit  de  récognition,  et  le 
couvent  de  Heiligenkreuzthal,  qui  n'était  pas  immé- 
diat, faisaient  partie  du  lot  du  Wurtemberg; 

6°  L'abbaye  de  Weingarten,  soumise  à  la  préfec- 
ture de  l'Autriche,  et  en  partie  même  à  sa  supériorité 
territoriale,  était  destinée  à  la  maison  de  Nassau; 

7"  L'abbaye  et  la  ville  impériale  de  Lindau,  se  trou- 
vant dans  le  même  cas,  devaient  être  données  au 
prince  de  Bretzenheim  ; 

8°  De  môme  la  ville  et  l'abbaye  de  Buchau,  desti- 
nées au  prince  de  La  Tour  et  Taxis; 

9°  On  assignait  aux  comtes  d'Empire,  à  l'indem- 
nité desquels  il  n'avait  pas  été  pourvu  ailleurs,  les 
abbayes  d'Ochsenhausen ,  de  Mùnchrotb ,  Schussen- 
ried,  Gutenzell,  Baindt,  Buxheim,  Weissenau  et  Ysny, 
avec  la  ville  de  ce  nom;  mais  toutes  ces  abbayes  rele- 
vaient sous  différents  titres  de  l'Autriche,  ou  lui 
payaient  des  redevances  ; 

1 0°  On  voulait  donner  au  grand-maître  de  l'Ordre 


—  216  — 

Teutonique,  et  au  grand  prieur  de  Heitersheim ,  les 
abbayes,  chapitres  et  couvents  médiats  du  Vorarlberg 
et  de  la  Souabe  autrichienne,  à  l'égard  desquels  le  sub- 
délégué se  référa  aux  opinions  émises  dans  la  qua- 
trième séance,  d'après  lesquelles  on  ne  pouvait  pas , 
sans  léser  les  droits  de  supériorité  des  tiers,  disposer 
des  biens  ecclésiastiques  médiats; 

11°  L'Autriche  avait  la  supériorité  territoriale  sur 
la  seigneurie  de  Trasp  que  le  plan  donnait  à  la  Répu- 
blique helvétique. 

((  Si,  ajoute  le  subdélégué,  on  ne  parle  pas,  de 
notre  côté,  de  l'étendue  inappréciable  des  droits  pour 
immédiatement  après  en  déterminer  pourtant  la  va- 
leur j  si  on  ne  remonte  pas  à  des  prétentions  qui  datent 
du  xv"'  et  du  xvi"  siècle;  cette  discrétion  prouve  seule- 
ment que  celui  qui  ne  veut  que  conserver  ce  qui  lui 
appartient,  sans  porter  atteinte  aux  droits  d'autrui,  ne 
peut  jamais  former  une  demande  qui  blesse  les  senti- 
ments légitimes  d'un  tiersl  On  doit,  par  cette  raison, 
attendre  avec  d'autant  plus  de  confiance  que  celui  qui 
respecte  les  droits  d'autrui,  et  qui  se  prête  atout  ar- 
rangement équitable,  trouvera  dans  les  autres  la  même 
disposition.  » 

En  votant  sur  la  sustentation  des  ecclésiastiques,  le 
subdélégué  de  Wurtemberg  dit  qu'en  accordant  le 
principe  qui  assurait  aux  princes  ecclésiastiques  un 
traitement  conforme  à  leur  rang,  il  pensait  pourtant 
qu'on  ne  devait  pas  prendre  pour  échelle  la  dépense 
que  ces  princes  avaient  faite  jusqu'à  présent,  parce 
qu'un  prince  régnant  était  obligé  à  une  dépense  plus 
considérable  que  celui  qui  s'était  démis  du  gouverne- 
ment. 

La  Saxe  opina  pour  que  les  villes  hanséatiques  se 
chargeassent  de  contribuer  à  l'entretien  de  l'archi- 
chancelier  de  l'Empire. 


—  217  — 

Une  déclaration  remarquable  remise  par  M.  de 
Bildt,  ministre  du  roi  de  Suède,  comme  duc  de  Pomé- 
ranie,  ouvrit  la  vingtième  séance ,  qui  eut  lieu  le 
26  octobre;  en  voici  la  teneur: 

«  Le  ministre  de  Suède  croit  qu'il  doit  rompre  le 
silence,  puisque  l'Empire  d'Allemagne  est  de  nouveau 
menacé  de  dangers  et  de  secousses,  et  cela  à  une  oc- 
casion où  tous  les  membres  de  l'Empire  auraient  plu- 
tôt dû  s'unir  à  son  chef  pour  soutenir  l'indépendance, 
sans  laquelle  il  ne  peut  pas  y  avoir  de  repos  durable 
ni  de  sûreté.  Le  Roi  pense  avec  trop  de  générosité 
pour  désirer  agrandir  ses  possessions  en  Allemagne  ; 
il  n'a  pas  d'autre  but  que  le  vrai  bien  de  l'Empire  ger- 
nique,  le  maintien  de  ses  lois  constitutionnelles  et  de 
son  indépendance;  cependant  il  n'aurait  point  pris 
part  aux  affaires  d'Allemagne,  s'il  n'avait  pas  appris 
que  des  puissances  étrangères  se  mêlaient  des  impor- 
tantes négociations  qui  sont  maintenant  en  activité; 
dans  ce  cas,  comme  prince  de  l'Empire  et  garant  de 
ses  constitutions,  il  avait  dû  penser  être  beaucoup 
plus  autorisé  à  participer  à  ces  délibérations.  Le  Roi 
reconnaît,  à  la  vérité,  la  nécessité  de  changements 
dans  l'Empire  d'Allemagne,  comme  suites  du  principe 
des  indemnisations;  mais  aussi,  en  conséquence  de 
ce  principe,  on  doit  agir,  d'après  lui,  avec  la  plus 
grande  équité  et  justice,  de  manière  que  ceux  qui  ont 
éprouvé  de  véritables  pertes  ne  reçoivent  pour  cela 
que  des  dédommagements.  Par  les  prises  de  posses- 
sion militaire  de  pays  qui  même  maintenant  n'ont 
pas  encore  été  adjugés  par  l'autorité  compétente,  l'on 
a  donné  un  exemple  dangereux  et  illégal.  » 

Après  cette  déclaration ,  le  subdélégué  de  Bohême 
annonça  que  les  négociations  relatives  à  la  Toscane 


—  218  — 

étaient  parvenues  à  un  point  qui  faisait  espérer  qu'elles 
auraient  un  prompt  résultat. 

Ce  fut  dans  cette  séance  que  fut  arrêté  le  conclusum 
qui  régla  le  sort  des  anciens  souverains,  et  qui  forme 
les  articles  47  et  suivants  du  Recès.  Nous  plaçons  ici 
le  préambule  de  ce  conclusum,  comme  un  monument 
qui  fait  honneur  à  la  justice  et  à  la  sensibilité  des  sub- 
délégués. «  Comme  il  est  du  devoir  de  l'Empire  d'a- 
doucir, autant  que  possible ,  le  sort  des  innocentes 
victimes  de  la  paix,  et  d'empêcher  qu'elles  ne  soient 
exposées  à  l'arbitraire,  mais  plutôt  d'assurer  leur  exis- 
tence politique  et  personnelle  sur  le  pied  oii  elles  en 
avaient  joui  jusqu'à  présent,  ainsi  que  leur  sustenta- 
tion future,  d'une  manière  convenable  à  leur  dignité, 
et  d'étendre  sa  sollicitude  sur  toutes  les  classes  d'in- 
dividus qui  entrent  dans  la  même  catégorie;  il  devra 
être  statué  que,  etc. 

La  vingt-unième  séance  qui  fut  tenue  le  30  octobre, 
eut  ceci  de  remarquable  que,  quoique  tous  les  subdé- 
légués eussent  unanimement  reconnu  l'injustice  du 
principe  d'englober  dans  la  masse  des  indemnités,  des 
biens  ecclésiastiques  médiats,  situés  sous  la  supério- 
rité territoriale  d'un  autre  prince,  cependant  on  aban- 
donna l'idée  de  faire  valoir  cette  opposition,  parce 
qu'on  avait  éprouvé  que  les  médiateurs  persistaient 
dans  leur  manière  de  voir. 

Un  conclusum  du  même  jour  statua  qu'en  échange 
des  avantages  importants  que  le  plan  général  assurait 
aux  quatre  villes  impériales  de  Brème,  Hambourg, 
Augsbourg  et  Lubeck,  il  était  juste  de  les  faire  con- 
tribuer pour  remplir  ce  qui  pouvait  manquer  à  la 
masse  des  indemnités,  et  spécialement  au  complément 
des  revenus  de  l'archichancelier  de  l'Empire.  Cette  idée 
avait  été  discutée  dans  plusieurs  séancesj  mais,  depuis 


_  219  — 

le  30  octobre,  où  elle  fut  consacrée  par  un  conclusum, 
on  n'en  entendit  plus  parler;  et  ce  conclusum,  sur 
l'admission  duquel  la  députation  avait  été  unanime, 
n'entra  pas  dans  le  Recès.  Il  est  probable  que  ces  villes 
trouvèrent  le  moyen  de  rendre,  par  des  négociations 
particulières,  les  médiateurs  favorables  à  leur  cause  \ 

Les  vingt-deuxième,  vingt-troisième,  vingt-qua- 
trième et  vingt-cinquième  séances  (les  2,  4,  6,  et  8  no- 
vembre) étaierit  principalement  consacrées  à  des  récla- 
mations particulières. 

Comme  la  plénipotence  impériale,  .tout  en  accédant 
au  conclusum  du  26,  relatif  à  la  sustentation  des  ecclé- 
siastiques dont  les  possessions  seraient  sécularisées, 
avait  cependant  fait  quelques  réserves,  surtout  à  l'é- 
gard de  la  quatrième  et  de  la  cinquième  classe  des 
personnes  ecclésiastiques,  en  faveur  desquelles  le 
conclusum  avait  trop  peu  fait  ^,  on  délibéra  sur  ces 
observations  dans  la  vingt-sixième  séance  du  1 1  no- 
vembre. Le  subdélégué  de  Bohême  dit,  à  cette  occa- 
sion :  (f  Les  successeurs  de  ces  évêques,  qui,  dans  les 
premiers  temps  de  l'Empire,  ont  siégé  avec  les  plus 
anciennes  et  les  plus  illustres  maisons  d'Allemagne 
dans  le  conseil  des  empereurs,  toutes  les  fois  que  ceux- 
ci  voulaient  connaître  leur  avis  sur  tout  ce  qui  tenait 
à  la  religion,  aux  mœurs,  aux  lois  et  à  la  justice,  sur 
tout  ce  qui  pouvait  contribuer  à  la  civilisation  de  la 

'  Ceci  rappelle  ce  qui  avait  été  dit  dans  une  autre  occasion  des 
villes  de  Brème  ,  Francfort  et  Hambourg  ,  qu'elles  savaient  apprécier 
l'amitié  de  la  France.  Voy.  t.  VI,  p.  60. 

*  Il  avait  été  dit  que  l'Empire,  en  général,  devra  concourir  (par  des 
mois  romains)  à  la  sustentation  des  personnes  de  la  quatrième  classe  , 
et  que,  quant  à  celles  de  la  cinquième,  on  n'avait  pas  perdu  l'espoir 
de  leur  voir  trouver  un  établissement  dans  leur  patrie  (sur  la  rive  gau- 
che du  Rhin),  et  qu'en  conséquence  on  les  recommanderait  à  la  solli- 
citude de  l'Empereur  et  de  l'Empire. 


—  220  — 

nation  et  au  perfectionnement  de  sa  constitution,  des- 
cendent après  mille  ans  de  leurs  sièges,  et  font  à  l'a- 
mour de  la  paix  le  sacrifice  des  droits  régaliens  les 
plus  précieux  et  les  plus  légitimement  acquis.  Ils  ver- 
sent dans  la  masse  des  biens  qui  doit  servir  à  indem- 
niser leurs  co-États  séculiers  de  la  perte  qu'ils  ont 
éprouvée,  une  propriété  sacrée,  incomparablement  su- 
périeure en  étendue  à  tout  ce  que  les  princes  séculiers 
ont  jamais  possédé  sur  la  rive  gauche  du  Rhin,  et  cette 
vaste  propriété  se  trouve  aujourd'hui  tellement  par- 
tagée, que  lorsque  deux  princes-évêques  \  forts  de  la 
sainteté  de  leurs  droits,  de  l'égalité  de  leur  dignité,  se 
confiant  dans  l'honneur  de  l'Empire,  et  certains  des 
intentions  des  médiateurs,  demandent  où  ils  trouve- 
ront dorénavant  une  sustentation  conforme  à  leur  rang, 
on  paraît  douter  qu'il  puisse  être  fait  quelque  chose 
pour  eux,  si  ce  n'est  une  recommandation  stérile  à 
l'Empereur  et  à  l'Empire.  Car  on  ne  peut  pas  se  dis- 
simuler que  les  mois  romains  qu'on  pense  leur  assi- 
gner, n'offrent  qu'une  ressource  infiniment  précaire. 
Les  médiateurs  savent  aussi  bien  que  la  députation, 
quels  sont  les  princes  qui  ont  reçu  des  indemnités 
nullement  proportionnées  à  leurs  pertes.  Peut-on 
croire  qu'ils  veulent  que  l'abondance  soit  d'un  côté  et 
le  plus  grand  dénûment  de  l'autre?  Non,  ils  trou- 
veront juste  que  les  princes  héréditaires  qui,  par  la 
sécularisation,  obtiennent  une  augmentation  considé- 
rable de  leur  territoire,  se  chargent  d'une  partie  de 
cette  contribution  temporaire.  En  admettant  ce  prin- 
cipe, nous  serons  conséquents  avec  nous-mêmes, 
puisque  nous  avons  reconnu  la  justice  de  ce  principe, 
en  chargeant  les  villes  impériales  de  l'obligation  d'y 
concourir.  Un  grand  nombre  d'États  d'Allemagne  sont 

*  Ceux  de  Liège  et  do  Bâie. 


—  221   — 

indifférents  aux  pertes  et  aux  avantages  qui  résultent 
de  cette  négociation;  étrangers  à  la  députation,  ils 
n'influent  pas  sur  ses  délibérations;  mais  lorsqu'un 
jour  ses  arrêtés  leur  sont  officiellement  connus,  ils 
seront  autorisés,  avant  de  les  ratifier,  de  nous  demander 
compte  de  l'emploi  des  propriétés  de  l'Église  qui  étaient 
à  notre  disposition,  avant  que  nous  exigions  que  leurs 
sujets  fournissent  les  contributions  qu'on  veut  leur 
imposer.  Si,  lorsqu'ils  se  seront  aperçus  alors  que 
quelques-uns  de  leurs  co-États  se  sont  considérable- 
ment enrichis  en  pays  et  en  revenus,  et  que  tous 
jouissent  des  revenus  des  grandes  prébendes,  calculés 
sur  le  pied  du  denier  dix,  ils  consentent  à  se  soumettre 
au  payement  des  mois  romains,  certes  on  pourra  ad- 
mirer leur  débonnaireté;  mais  on  ne  pourra  l'en  exiger 
comme  un  devoir;  et,  puisque  cette  contribution  ne 
peut  leur  être  imposée  malgré  eux,  où  est  la  garantie 
qui  la  sanctionne?  » 

Le  conclusum  qui  fut  rendu  à  ce  sujet  n'améliora 
guère  le  sort  des  personnes  pour  lesquelles  on  s'était 
intéressé;  il  se  borna  à  placer  la  cinquième  classe 
dans  la  quatrième,  en  lui  promettant,  comme  à  celle-ci, 
des  mois  romains. 

Dans  la  vingt-septième  séance,  du  16  novembre,  il 
fut  donné  lecture  d'une  Note  des  ministres  médiateurs, 
renfermant  de  nouvelles  rectifications  du  plan  général, 
qui,  en  partie,  avaient  été  proposées  par  la  députation, 
et  en  partie  étaient  le  résultat  de  négociations  parti- 
culières. Cette  Note  confirma  en  même  temps  l'espoir 
d'un  prochain  arrangement  avec  l'Autriche  pour  la 
Toscane.  Nous  allons  en  placer  ici  le  préambule  et  la  fin  : 

«  Le  soussigné,  ministre  plénipotentiaire  de  S.  M. 
l'empereur  de  toutes  les  Russies  [extraordinaire  de 
la  République  française]  près  la  Diète  de  l'Empire  ger- 


—  222  — 

manique,  a  reçu  de  M.  le  plénipotentiaire  impérial, 
depuis  l'arrêté  de  la  députation  extraordinaire  du  ^  oc- 
tobre 1802  [,7r"m2]>  portant  adoption  définitive  du 
plan  général  d'indemnités,  tous  les  arrêtés  subséquents 
dont  la  députation  a  demandé  que  communication  fût 
faite  aux  ministres  des  puissances  médiatrices. 

(f  La  députation  s'est  acquis  des  droits  à  la  recon- 
naissance de  l'Empire  germanique  par  l'activité  et  la 
sagesse  avec  lesquelles  elle  s'est  livrée  à  l'examen  d'un 
plan  aussi  étroitement  lié  au  repos  de  l'Allemagne. 
Elle  ne  s'est  pas  moins  distinguée  par  la  rédaction 
prompte,  autant  que  réfléchie,  des  règlements  qui  en 
découlaient  le  plus  immédiatement. 

((  Le  soussigné  a  remarqué,  dans  le  règlement  du  ^oc- 
tobre 1802  [lèoêlngdî]»  l'empressement  de  la  députation 
à  faire  jouir  les  comtes  d'Empire  réclamants  des  com- 
pensations que  les  puissances  médiatrices  ont  eu  en 
vue  de  leur  procurer.  Il  espère  qu'il  sera  pourvu  à  tous 
les  droits  légitimes. 

((  11  a  applaudi  aux  intentions  prévoyantes  et  géné- 
reuses qui  ont  dicté  le  règlement  du  -^  octobre  1 802 
[iVS^];  règlement  qui,  en  assurant  le  sort  de  plu- 
sieurs milliers  d'individus,  empêchera  qu'aucun  regret 
ne  trouble  la  satisfaction  donnée  aux  princes  et  Etats 
indemnisés.  Les  arrêtés  supplémentaires  des  fi^^\  1802 
[StwI]  et  f^:  1802  [î^-l^^  y  ajoutent  quelques  dis- 
positions qui  restaient  à  désirer.  Cependant  le  sous- 
signé ne  peut  cesser  d'exprimer  une  vive  sollicitude 
pour  le  sort  des  personnes  comprises  dans  la  quatrième 
et  la  cinquième  classe  du  règlement.  Le  traité  de  Lu- 
néville  les  a  conliés  aux  soins  de  l'Empire,  et  l'Empire 
ne  saurait  remplir  trop  promptement  les  engagements 
bienveillants  contractés  à  leur  égard. 

((  Le  soussigné,  enfin,  n'hésite  pas  à  déclarer  qu'il 
partage  l'opinion  générale  de  l'Allemagne  sur  la  jus- 


—  223  — 

tice  et  l'équité  du  règlement  du  ||  oct.  1 802  [so-S^] 
relatif  aux  dettes;  d'autant  que  l'arrêté  du  '^  1802 
[-'noTisoî]  a  remédié  aux  objections  qui  s'étaient  élevées. 
Il  exprime  le  vœu  que  les  princes  et  États  en  accélèrent 
l'exécution,  et  que,  dans  les  opérations  qu'ils  doivent 
faire  pour  prendre  leurs  parts  respectives  des  charges, 
ils  apportent  l'un  envers  l'autre  les  sentiments  qui  ont 
animé  la  députation. 

«  Mais  le  moment  est  arrivé  où  la  députation,  après 
avoir  épuisé  l'examen  de  toutes  les  demandes  qui  pou- 
vaient porter  sur  les  objets  qui  l'occupent,  n'a  plus 
qu'à  fondre  le  plan  général  et  les  règlements,  dans  un 
Recès  également  attendu  par  l'Empire  et  par  les  puis- 
sances médiatrices.  Le  soussigné  s'étant  concerté  avec 
le  ministre  extraordinaire  de  la  République  française 
[plénipotentiaire  de  S.  M.  1.  de  toutes  les  Russies],  ne 
peut  différer  plus  longtemps  l'exécution  des  ordres  de 
son  gouvernement.  Il  va  répondre,  en  conséquence, 
tant  aux  questions  qui  lui  ont  été  référées  par  la  dé- 
putation, qu'aux  judicieuses  observations  de  ses  mem- 
bres et  aux  réclamations  nombreuses  qu'il  a  reçues 
sur  des  points  de  pure  rédaction. 

Nous  passons  les  rectifications,  pour  donner  la  fin 
de  cette  Note  : 

«  En  terminant  cette  Note,  le  soussigné  renouvelle 
à  la  députation  l'instante  invitation  de  former  un  Recès 
du  plan  général  d^indemnité  et  des  règlements  déjà 
adoptés,  sauf  à  s'occuper  ensuite  des  autres  règlements 
qui  seraient  jugés  nécessaires.  Il  la  prie  d'ailleurs  de 
s'en  rapporter  avec  confiance  aux  soins  des  puissances 
médiatrices  pour  amener  à  une  heureuse  issue  les  dis- 
positions manifestées  par  Sa  Majesté  Impériale  et 
Royale. 

«  ARatisbonne,  le  ^novembre  1802  [fl-^^^fl- 
«  Le  baron  de  Buhler  [Laforest],  » 


—  224  — 

Dans  la  vingt-huitième  séance,  du  1 8  novembre,  la 
députation  eut  connaissance  d'une  missive  du  pléni- 
potentiaire impérial,  qui  l'engageait  à  trouver  un  fonds 
pour  assurer  la  sustentation  des  ecclésiastiques  de  la 
quatrième  et  de  la  cinquième  classe.  On  statua  que  l'on 
s'occuperait  de  la  rédaction  d'un  conclusum  principal. 

Une  partie  du  projet  de  conclusum  principal  fut 
soumise  aux  députés  dans  la  vingt-neuvième  séance, 
du  20  novembre,  ainsi  qu'une  Note  des  médiateurs, 
renfermant  encore  quelques  changements  et  additions 
qui  furent  sur-le-champ  adoptés. 

On  s'occupa  de  la  fin  du  conclusum  principal  dans 
la  trentième  séance,  le  23  novembre,  et  dans  la  sui- 
vante, du  25,  d'affaires  particulières. 

Le  plénipotentiaire  annonça  à  la  députation,  dans 
sa  trente-deuxième  séance,  du  4  décembre,  que  le 
conclusum  principal  dont  elle  s'occupait,  ne  pourrait 
être  regardé  que  comme  un  projet  de  rédaction  sur 
lequel  il  se  réservait  de  faire  ses  observations  :  il  re- 
commanda à  la  députation  de  s'occuper  de  quelques 
objets  arriérés,  tels  que  la  navigation  du  Rhin.  Une 
Note  des  ministres  médiateurs  exprima  le  vœu  que  la 
rédaction  française  des  quarante-sept  premiers  articles 
fût  envisagée  comme  l'original  du  futur  Recès;  ils 
consentaient  que,  pour  les  articles  suivants,  le  texte 
allemand  fût  regardé  comme  tel.  Ils  annoncèrent  en 
même  temps  qu'ils  se  proposaient  de  porter  le  conclu- 
sum à  la  Diète  de  l'Empire. 

Dans  la  même  séance  du  4  décembre,  le  subdélé- 
gué de  Bohême  remit  la  démission  de  l'archiduc 
Antoine  f  de  l'archevêché  de  Cologne  et  de  l'évêché 
de  Munster,  auxquels  il  avait  été  élu ,  et  dit,  entre  au- 
tres ;  «  C'est  à  celte  occasion  que  la  Cour  impériale 
royale  croit  devoir  observer  que,  dans  le  cours  des 


— -  225  — 

présentes  délibérations,  elle  n'a  pas  éprouvé  la  réci- 
procité d'égards  que  méritaient  les  facilités  qu'elle  y 
avait  apportées  de  son  côté.  Toutes  les  parties  princi- 
palement intéressées  aux  indemnités  ont  été  traitées 
avec  libéralité,  tant  par  les  puissances  médiatrices  que 
par  la  Députation  :  dans  le  choix  des  territoires  qu'on 
leur  destinait,  on  a  eu  égard  à  leur  convenance,  et  on 
a  eu  soin  de  les  arrondir;  toutes  les  réclamations  ont 
été  examinées  d'après  des  principes  justes  et  équita- 
bles :  deux  fois  les  médiateurs  ont,  en  leur  faveur, 
modifié  le  plan  originaire.  Un  seul  intéressé  éprouve 
un  traitement  différent  :  les  réclamations  autrichien- 
nes, fondées  sur  des  stipulations  expresses  et  sur  des 
faits  évidents,  sont  restées  sans  succès;  au  lieu  d'y 
avoir  égard,  on  a  fourni  à  cette  puissance,  par  les 
changements  du  second  plan,  de  nouveaux  motifs  de 
se  plaindre.  Si  la  Députation  a  senti  la  justice  de  ces 
plaintes,  elle  n'a  au  moins  rien  fait  pour  y  remédier.» 
Le  même  subdélégué  ajouta  encore  que  les  der- 
nières modifications  du  plan  ne  faisaient  pas  droit 
aux  réclamations  de  l'Autriche;  que  celle-ci  avait  con- 
senti à  ne  recevoir  pour  la  Toscane  que  la  moitié  de 
l'indemnité  qui  lui  était  due,  et  à  se  contenter  du 
supplément  proposé  à  Paris;  que  si  cependant  la  Dé- 
putation ne  voulait  pas  attendre  la  conclusion  d'un 
arrangement  avec  les  médiateurs ,  qui  paraissait  pro- 
chain, il  serait  convenable  d'ajouter  au  conclusum 
principal  une  clause  qui  rendît  possible  l'exécution 
de  ce  qui  aurait  été  ultérieurement  convenu  avec  la 
maison  d'Autriche,  et  que,  dans  tous  les  cas,  le  sub- 
délégué de  Bohême  ne  pouvait  accéder  à  ce  conclusum 
que  sous  la  réserve  d'une  telle  clause.  Il  proposa  en- 
suite que  la  dignité  électorale  fut  accordée  au  grand- 
duc  de  Toscane;  que  le  même  rang  fût  attaché  à  la 
charge  de  grand-maître  de  l'Ordre  Teutonique.  Il  pro- 
vn  15 


—  226  — 

posa  aussi  l'introduction  de  nouvelles  voix  viriles  dans 
le  collège  des  Princes,  en  faveur  de  princes  catholi- 
ques, puisque,  par  le  grand  nombre  de  suffrages,  an- 
ciennement portés  par  des  princes  catholiques,  qui 
maintenant  passaient  à  des  protestants,  la  proportion 
entre  les  deux  religions  était  dérangée. 

Dans  cette  séance,  le  ministre  directorial  commu- 
niqua aussi  une  Note  que  les  ministres  médiateurs 
avaient  adressée,  le  3  décembre,  au  plénipotentiaire 
impérial  en  ces  termes  : 

«  Le  soussigné,  ministre  plénipotentiaire  de  S.  M. 
l'empereur  de  toutes  les  Russies  [extraordinaire  de  la 
République  française]  près  la  Diète  de  l'Empire  ger- 
manique, s'empresse  d'exprimer  la  satisfaction  avec 
laquelle  il  a  reçu  de  M.  le  plénipotentiaire  impérial 
une  expédition  authentique  de  l'acte  solennel  et  défi- 
nitif émané  le  23  novembre  [2  frimaire]  de  la  Dépu- 
tation  extraordinaire,  revêtue  de  pleins  pouvoirs  de 
l'Empire. 

((  Cet  important  résultat  fixe  dès  à  présent  d'une 
manière  invariable  l'arrangement  des  indemnités,  et 
assure  la  tranquillité  de  l'Allemagne,  en  mettant  fin  à 
toutes  les  incertitudes,  en  réglant  tous  les  intérêts,  en 
conférant  par  anticipation ,  à  chacun  des  princes  et 
États  indemnisés,  la  possession  et  la  jouissance  des 
pays  qui  lui  sont  dévolus.  Les  irrégularités  qui  pour- 
raient encore  subsister,  vont  sans  doute  disparaître  ; 
et  ceux  qui  auraient,  ou  par  méprise  ou  sous  des  pré- 
textes quelconques,  occupé  des  points  attribués  à  un 
de  leurs  co-États,  se  feront  un  mérite  de  les  restituer, 
sans  attendre  que  les  dispositions  arrêtées  soient  con- 
sacrées par  le  complément  des  formes  constitution- 
nelles. 

f<  M.  le  plénipotentiaire  impérial  rappelle  qu'il  reste 
toujours  au  chef  de  l'Empire  des  vœux  à  former  sur 


—  227  — 

ce  qui  touche  sa  maison.  Il  s'abstient  encore  de  donner 
une  adhésion  parfaite  à  toutes  les  parties  de  l'acte  dé- 
finitif de  la  Députation  ;  il  renouvelle  à  ce  sujet  l'ex- 
pression de  sa  confiance  dans  les  puissances  média- 
trices. La  Députation  peut  être  en  effet  de  plus  en  plus 
assurée  qu'elles  ne  négligeront  aucun  des  moyens 
propres  à  consolider  ce  qui  a  été  fait  jusqu'ici.  C'est 
l'objet  d'une  négociation  qui  sera  suivie  à  Paris,  et 
qui  ne  doit  avoir  aucune  influence  sur  les  mesures  à 
prendre  à  Ratisbonne. 

«  Dans  l'intervalle,  le  soussigné  remplit  à  la  fois 
les  vues  de  son  gouvernement  et  celles  de  la  Députa- 
tion, en  portant  à  la  Diète  générale  de  l'Empire  l'œuvre 
de  leur  sollicitude  commune;  œuvre  que  les  puissan- 
ces médiatrices  considèrent  aujourd'hui  comme  étant 
plus  spécialement  confiée  à  leur  surveillance  amicale. 
L'acte  définitif  du  23  novembre  [2  frimaire]  présente 
dans  ses  dispositions  l'ensemble  le  plus  complet.  Il 
contient  les  principes  du  peu  d'objets  à  régler  ulté- 
rieurement, tels,  par  exemple,  que  l'affectation  des 
trois  cent  cinquante  mille  florins  assignés  générale- 
ment à  l'électeur  archichancelier.  Cet  acte  est  enfin 
susceptible  de  recevoir  successivement  toutes  les 
sanctions  qui  le  convertiront  en  acte  du  Corps  ger- 
manique, et  les  puissances  médiatrices  se  chargent 
encore  de  ce  soin  avec  le  même  zèle  qui  les  anime 
pour  le  bien-être  de  l'Empire. 

((  La  Députation  reconnaîtra  dans  cette  marche  une 
suite  de  l'extrême  attention  qu'ont  les  puissances  mé- 
diatrices, de  s'occuper  préférablement  des  arrange- 
ments qui  conduisent  le  plus  promptement  les  princes 
et  États  de  l'Empire  à  recueillir  les  premiers  fruits  de 
la  paix  de  Lunéville.  Elles  ont  l'intime  conviction  que 
la  Députation  appréciera  de  son  côté,  avec  sa  sagesse 
ordinaire,  toutes  les  propositions  incidentes  qui  ten- 


—  228  — 

(iraient  à  entraîner  dans  des  voies  dilatoires  ou  à  com- 
pliquer les  matières. 

H  II  est  agréable  au  soussigné  de  pouvoir  ajouter 
que  l'acte  qui  vient  de  lui  être  transmis,  répond  par- 
faitement à  l'attente  de  son  gouvernement;  mais  il  ob- 
serve que  les  paragraphes  1  à  47  inclusivement,  étant 
l'expression  d'un  texte  rédigé,  examiné  et  accepté  en 
langue  française,  la  scrupuleuse  fidélité  avec  laquelle 
ils  paraissent  rendus  dans  la  langue  allemande  ne  dis- 
pense pas  de  conserver  la  version  originale.  11  a  en 
conséquence  l'honneur  de  remettre  une  expédition  en 
langue  française  de  ces  quarante-sept  paragraphes  tels 
qu'ils  ont  été  proposés  ou  subséquemment  consentis 
par  les  puissances  médiatrices  et  finalement  agréées 
par  la  Députation,  pour  entrer  dans  son  acte  définitif 
du  23  novembre  [2  frimaire].  Il  demande  que  cette 
pièce  soit  annexée  à  l'acte  définitif,  pour  que  les  par- 
ties intéressées  puissent  y  avoir  recours  en  cas  de  be- 
soin. Cette  précaution  obvie  évidemment  aux  inter- 
prétations erronées  ou  aux  doutes  qui  pourraient 
s'élever  dans  l'avenir.  Peut-être  même  serait-il  utile 
que  la  Députation  voulût  bien  faire  une  dernière  con- 
frontation des  deux  versions;  et,  si  elle  aperçoit  quel- 
que nuance  équivoque  dans  la  dernière,  la  rectifier  au 
protocole,  pour  détruire  jusqu'à  la  possibilité  des 
discussions  de  ce  genre  dans  des  temps  plus  reculés. 

((  A Ratisbonne,  le  \Z::^:  1802  [-l^l^l^^^rrw;]. 

«  F^e  baron  de  Buhler. 

«   [Laforest.]   » 


Dans  la  trente-troisième  séance,  le  7  décembre,  le 
subdélégué  de  Bohême  indiqua  les  objets  suivants 
comme  devant  être  soumis  à  la  délibération  :  1  "  le  sup- 


■—  229  — 

plément  de  la  dotation  de  l'archichancelier,  en  ayant 
soin  de  fixer  cette  dotation  de  manière  que  le  premier 
prince  de  l'Empire  ne  soit  pas  rendu  dépendant  de 
ceux  qui  sont  chargés  de  lui  servir  une  rente;  2°  la 
pension  de  l'électeur  de  Trêves  ;  3"  la  sustentation  des 
évêques  de  Liège  et  de  Baie ,  et  de  leurs  chapitres  ; 
4"  la  confirmation  des  droits  constitutionnels  de  la  No- 
blesse immédiate  ;  5"  la  conservation  des  droits  des 
sujets  des  pays  sécularisés,  en  tant  que  ces  droits 
étaient  fondés  sur  des  conventions  et  sur  l'observance. 

Une  missive  de  la  plénipotence  impériale,  lue  dans 
la  trente-quatrième  séance,  le  14  décembre,  désigne 
les  points  suivants  comme  devant  encore  être  discutés  : 
1"  la  sustentation  des  ecclésiastiques;  2"  le  sort  de 
ceux  qui  avaient  obtenu  des  prébendes ,  par  suite  du 
droit  des  premières  prières  de  l'Empereur;  3°  les  con- 
stitutions territoriales  et  les  droits  des  sujets  ;  4"  les 
biens  des  églises  ou  des  paroisses,  à  distinguer  des 
biens  ecclésiastiques;  5°  un  fonds  stable  pour  le  clergé 
de  la  rive  gauche  du  Rhin;  6"  les  péages  du  Rhin, 
dont  la  plénipotence  désirait  le  maintien  ;  7°  la  confir- 
mation de  la  paix  de  Westphalie  et  des  traités  subsé- 
quents ;  8"  le  maintien  des  droits  et  des  libertés  de  la 
Noblesse  immédiate. 

Dans  la  trente-cinquième  séance,  du  22  décembre, 
le  subdélégué  de  Brandebourg  dit  que,  d'après  les 
assurances  données  par  les  ministres,  au  sujet  de  la 
Toscane,  il  n'était  plus  nécessaire  de  joindre  une  ré- 
serve au  conclusum  général,  ainsi  que  la  Bohême  l'a- 
vait demandé,  n  Le  Roi,  ajoute  ce  plénipotentiaire, 
peut  consentir  à  ce  qu'on  propose  d'augmenter  le 
nombre  des  suffrages  catholiques  dans  le  collège  des 
Princes,  mais  nullement  par  le  motif  mis  en  avant 


— .  2;^0  — 

par  le  subdélégué  de  Bohême,  et  d'après  lequel  il  se- 
rait nécessaire  de  rétablir  la  proportion  entre  les  deux 
religions.  Depuis  des  siècles,  les  voix  protestantes  ont 
été  en  minorité  dans  ce  collège  et  dans  le  collège  élec- 
toral ,  sans  que  le  parti  protestant  y  ait  vu  son  exis- 
tence compromise.  En  général,  grâces  en  soient  ren- 
dues à  l'esprit  du  siècle,  les  temps  sont  passés  où  la 
superstition  et  le  fanatisme  faisaient  de  toute  affaire 
politique  une  affaire  de  religion.  Il  y  aurait  peu  de 
conséquence  à  insister  sur  la  nécessité  d'une  parité  de 
religion  à  la  Diète,  dans  un  moment  où  la  députation 
proclame  l'égalité  parfaite  des  religions  en  Allemagne.  » 
On  prit,  dans  cette  séance,  un  conclusum  portant 
qu'incessamment,  et  avant  le  commencement  de  la  dé- 
libération de  la  Diète  de  l'Empire  sur  le  conclusum  gé- 
néral, la  Députation  fera  à  ce  sujet  son  rapporta  l'Em- 
pereur et  à  l'Empire. 

Dans  l'intervalle  qui  s'écoula  entre  la  trente-cin- 
quième et  la  trente-sixième  séance ,  le  différend  qui 
subsistait  depuis  si  longtemps  entre  l'Autriche  et  la 
France  fut  enfin  arrangé  j  mais  comme  en  politique 
les  services  ne  peuvent  pas  être  gratuits,  il  fut  signé  à 
Paris,  le  26  décembre  1802,  deux  conventions  :  l'une 
entre  l'Autriche  et  la  France  seules,  l'autre  également 
entre r  Autriche  etla France,  avec  accession  de  laRussie. 

La  première  de  ces  conventions,  dont  M.  Schoell  n'a 
pas  eu  connai8sance,^etqui  ne  figure  point  dans  les  Re- 
cueils, est  seulement  composée  de  deux  articles  destinés 
à  rester  secrets.  Ils  n'intéressaient  que  la  France,  mais 
ils  l'intéressaient  à  un  haut  degré.  Obtenus  de  la  com- 
plaisance de  l'Autriche,  ils  étaient  la  répétition  de  ce 
que  la  Prusse  avait  déjà  concédé  par  la  convention  se- 
crète du  23  mai,  savoir:  une  garantie  des  possessions 


—  231  — 

respectives,  et  notamment,  pour  la  France,  celle  des  ar- 
rangements pris  par  elle  en  Italie.  Ainsi,  par  l'article  1 , 
on  reconnaissait  pour  roi  d'Étrurie  l'infant  d'Espagne, 
qui  était  en  possession  de  la  Toscane;  et  par  l'article  2 
on  reconnaissait  également  tous  les  changements  sut- 
venus  en  Italie  depuis  le  traité  de  Lunéville.  C'était, 
comme  on  le  voit,  un  résultat  des  plus  importants  pout" 
le  gouvernement  consulaire. 

La  seconde  convention  du  26  décembre,  (Jui  seule 
fut  rendue  publique,  était  signée  par  lé  comte  Philippe 
deCobenzl,  au  nom  de  l'Empereur;  Joseph  Bonaparte, 
au  nom  de  la  France,  et  par  le  comte  Markof,  au  nOttî 
de  l'empereur  de  Russie. 

Voici  l'analyse  du  traité  : 

Pour  augmenter  l'indemnité  du  duc  de  Modem,  l'Em- 
pereur lui  cède  le  bailliage  oU  le  pays  d'Ortenau.  Art.  1 . 

Pour  indemniser  l'Empereur  de  l'Ortenau,  les  deux 
évêchés  de  Trente  et  de  Brixen  sont  sécularisés  en  sa 
faveur.  Art.  2. 

Pour  compléter  l'indemnité  du  grand-duc  de  Tos- 
cane, l'évêclié  d'Eichstelt  est  ajouté  à  ce  qui  lui  a  été 
adjugé  par  le  conclusum  général  du  23  novembre ,  à 
l'exception  cependant  des  bailliages  de  Sandsee,  Wern- 
fels-Spalt,  Ahrberg-Ohrnbau  et  Wahrberg-Herrieden 
et  de  toutes  les  dépendances  de  l'évêclié  d'Eichstett  qui 
sont  enclavées  dans  les  pays  d'Anspachetde  Bayreutb. 
Ces  territoires  resteront  à  l'Électeur  bavaro-palatin ,  et 
le  grand-duc  recevra  en  remplacement  une  indemnité 
équivalente  en  argent  comptant  qui  sera  prise  sur  les 
domaines  de  l'Électeur  palatin  en  Bohême ,  et,  en  cas 
d'insuffisance,  sur  d'autres  revenus  de  ce  prince. 

Sous  la  réserve  de  ces  stipulations  et  des  droits  de 
propriété  et  d'autres  qui  compétent  à  l'Empereur, 
comme  souverain  des  États  héréditaires  autrichiens  et 
chef  suprême  de  l'Empire,  et  qui  peuvent  s'accorder 


—  232  — 

avec  l'exécution  du  plan  d'indemnité,  l'Empereur 
s'oblige  d'employer  son  influence  pour  que  le  plan 
général  d'indemnité,  arrêté  par  la  députation  de  l'Em- 
pire, sauf  les  modifications  contenues  dans  la  pré- 
sente convention,  soit  ratifié  par  l'Empire  et  reçoive 
ainsi,  dans  le  plus  court  délai,  la  sanction  impériale 
même.  Art,  4. 

Il  est  nécessaire  de  fixer  l'attention  du  lecteur  sur  la 
rédaction  de  cet  article.  L'Empereur  s'oblige  à  prêter 
la  main  à  l'exécution  du  plan  d'indemnité,  tel  qu'il  est 
modifié  par  la  présente  convention  j  mais  il  ne  le  pro- 
met «  que  sous  la  réserve  des  droits  de  propriétés  et 
d'autres  qui  lui  compétent  en  sa  double  qualité  de 
chef  de  l'Empire  et  de  souverain  des  États  d'Autriche.  » 
Ainsi ,  quelles  que  soient  les  stipulations  du  plan  et 
celles  du  Recès  qui  l'aura  adopté,  elles  ne  peuvent  pré- 
judicier  en  rien  aux  droits  de  la  maison  d'Autriche,  qui 
resteront  intacts,  ainsi  que  ceux  de  l'Empereur.  Nous 
verrons  l'usage  que  la  Cour  de  Vienne  fera  de  cette 
réserve  à  l'occasion  des  différends  qui  s'élèveront  sur 
l'introduction  de  nouveaux  princes  à  la  Diète  et  à  l'é- 
gard du  droit  d'épave. 

«  11  s'entend  expressément,  dit  l'article  5  de  la  con- 
vention ,  qu'après  l'échange  du  présent  acte ,  les  pays 
mentionnés  dans  les  articles  précédents  pourront  être 
occupés  civilement  et  militairement  par  les  princes 
auxquels  ils  sont  adjugés,  ou  en  leur  nom,  et  nom- 
mément aussi  la  ville  de  Passau  et  les  faubourgs  Innstadt 
et  Iltzstadt,  qui  seront  aussitôt  évacués  par  les  troupes 
de  Sa  Majesté  Impériale  et  Royale  et  cédés  en  pro- 
priété à  Son  Altesse  Électorale  Bavaro-Palatine ,  néan- 
moins, sous  ces  conditions,  que  les  fortifications  de 
ladite  ville  ne  seront  point  augmentées,  mais  seule- 
ment entretenues,  et  qu'il  ne  pourra  point  être  élevé 
de  nouvelles  fortifications  dans  les  faubourgs  Innstadt 

\ 


—  233  — 

et  Iltzstadt.  Il  ne  pourra  point  non  pins  être  élevé  de 
nouvelles  fortifications  dans  le  territoire  de  l'évêclié 
d'Eichstadt,  par  S.  A.  R.  l'archiduc  Ferdinand  ou  ses 
héritiers. 

Le  premier  Consul  de  la  République  française  se 
réunira  avec  Sa  Majesté  Impériale  de  toutes  les  Russies, 
pour  procurer  à  S.  A.  R.  l'archiduc  Ferdinand  et  à  ses 
héritiers  la  dignité  électorale.  Art.  6. 

Les  hautes  parties  contractantes  se  garantissent 
réciproquement  l'exécution  de  tout  ce  qui  est  contenu 
dans  les  articles  ci-dessus,  et  le  ministre  plénipoten- 
tiaire de  Sa  Majesté  Impériale  de  toutes  les  Russies 
sera  invité  à  accéder  à  la  présente  convention,  pour 
Sa  Majesté  Impériale  et  en  son  nom,  comme  principale 
partie  contractante.  Art.  7. 

Le  4  janvier  1 803  fut  tenue  la  trente-sixième  séance 
de  la  Députation.  Le  subdélégué  de  Brandebourg  y  dit 
entre  autres  :  «  Pour  ce  qui  regarde  la  Noblesse  immé- 
diate de  l'Empire,  possessionnée  sur  la  rive  droite  du 
Rhin  ,  dont  les  intérêts  ne  sont  en  aucun  rapport  avec 
les  indemnités ,  il  en  sera  aussi  peu  question ,  dans 
les  négociations  actuelles,  qu'il  y  est  question  d'au- 
tres classes  d'États ,  de  dynasties  et  de  membres  de 
l'Empire.  La  Constitution  germanique  est  maintenue 
dans  tous  les  points  qui  n'ont  point  été  changés  par 
le  règlement  des  indemnités ,  par  conséquent  aussi 
dans  ce  qui  se  rapporte  aux  droits  de  la  Noblesse  im- 
médiate que  les  termes  exprès  du  paragraphe  28  de 
l'article  5  du  traité  de  Westphalie  ne  reconnaissent 
qu'autant  qu'un  noble  n'est  pas  soumis  à  un  État 
d'Empire  sous  le  rapport  de  ses  biens  et  à  l'égard  du 
territoire  ou  du  domicile.  »  Dans  le  même  vote,  le 
subdélégué  protesta  contre  le  titre  de  commissaire  im- 
périal que  le  plénipotentiaire  prenait,  et  contre  sa  pré- 


_-.  234  — 

tention  de  ratifier  les  conclusuiîiâ  de  laDéputation.  Un 
Vote  émis  par  la  Saxe  dans  cette  séance  nous  fournit 
une  occasion  de  parler  de  cette  difficulté  qui  s'était 
reproduite  à  différentes  reprises  depuis  que  la  Dépu- 
tation  était  réunie. 

«  La  question  de  savoir,  dit  le  subdélégué  de  Saxe,  si 
chaque  conclusum  d'une  députation  extraordinaire  de 
l'Empire  a  besoin  de  la  ratification  du  plénipotentiaire 
impérial,  n'a  été  décidée  par  aucune  loi  de  l'Empire; 
l'observance  seule  fait  règle  à  cet  égard.  Mais  cette 
observance  a  varié  selon  la  nature  des  travaux  dont 
les  députations  ont  été  chargées;  si  ces  travaux  sont 
d'une  telle  nature  que  la  Députation  se  trouve  dans  le 
cas  de  donner,  sur  certains  objets  de  législation,  des 
décisions  définitives,  non  soumises  à  une  ratification 
spéciale  de  f  Empereur  et  de  l'Empire  ^  il  paraît  qu'il  est 
indispensable  que  la  ratification  de  VEmpereur  soit 
attachée  à  chaque  conclusum.  Mais,  lorsque  laDépu- 
tation n'a  été  instituée  que  pour  préparer  un  avis  qui 
sera  soumis  ensuite  à  l'Empereur  et  à  l'Empire,  ceux-ci 
ne  donnent  leur  ratification  qu'à  cet  avis,  qui  est  porté 
devant  eux  à  la  fin  de  la  discussion.  11  s'ensuit  que 
dans  un  tel  cas  il  n'existe  aucun  motif  pour  soumettre 
un  conclusum  à  une  double  ratification.  Plus  d'une 
affaire  importante  éprouverait  des  retards  préjudi- 
ciables, s'il  fallait  attendre  la  ratification  de  chaque 
point,  et  qu'en  cas  de  refus  les  discussions  fussent  in- 
terrompues. 11  est  arrivé  que,  pour  éviter  cet  incon- 
vénient, principalement  dans  des  négociations  de  paix, 
les  États  d'Empire,  appelés  à  y  prendre  part  par  leurs 
subdélégués,  ont  exigé  qu'on  ne  bornât  pas  leurs 
pouvoirs  à  une  négociation  indirecte  avec  les  ministres 
étrangers,  par  l'intermédiaire  des  plénipotentiaires 
impériaux,  mais  qu'on  les  admît  à  des  conférences 
générales.  Cette  demande  n'ayant  pas  été  totalement 


—  235  — 

accordée  aux  députations  de  1 682  et  1 697,  on  inséra 
dans  la  capitulation  de  1 741  le  passage  qui  se  trouve  ar- 
ticle 1 1 ,  paragraphe  1 2,  et  qui  assure  aux  États  le  droit 
de  prendre  une  part  immédiate  aux  négociations  avec 
les  puissances  étrangères.  Aussi  l'instruction  donnée  à 
la  députation  de  Rastadt  portait-elle  expressément  que 
la  Députation  délibérerait  soit  par  elle-même,  soit,  le 
cas  échéant,  sur  la  proposition  du  plénipotentiaire  im- 
périal; qu'elle  porterait  son  conclusum  à  ce  plénipo- 
tentiaire, et  s'entendrait  avec  lui  sur  le  mode  de  former 
un  avis  commun.  Ce  rapport  entre  le  plénipotentiaire 
impérial  et  la  Députation  a  été  observé  à  Rastadt;  et 
lorsque  le  plénipotentiaire  de  l'Empereur  réclama  l'ini- 
tiative des  propositions,  et  qu'il  voulut  exercer  le  droit 
de  ratification,  en  se  qualifiant  de  commissaire,  et  ses 
communications  de  décrets  de  commission,  on  protesta 
contre  ces  prétentions.  Comme  la  Députation  actuelle  a 
unanimement  résolu  de  suivre  la  même  marche,  on  ne 
pourra  regarder  comme  une  innovation  le  refus  qu'elle 
fait  d'accorder  au  plénipotentiaire  la  faculté  de  ratifier 
chaque  conclusum,  droit  qui  n'est  fondé  ni  sur  la  capi- 
tulation impériale,  ni  sur  l'observance.  » 

Le  conclusum  de  ce  jour  porte  qu'on  invitera  les  mi- 
nistres médiateurs  à  faire  des  ouvertures  ultérieures  : 

1"  Sur  le  complément  de  la  dotation  de  l'électeur 
archichancelier;  2°  sur  le  mode  d'assigner  les  rentes 
ou  pensions  déjà  déterminées;  3°  sur  les  péages  du 
Rhin;  4"  sur  un  mode  de  pourvoir  à  la  sustentation  de 
l'électeur  de  Trêves  sans  le  secours  de  mois  romains  ; 
5°  sur  la  sustentation  des  évêques  de  Liège  et  de  Bâle. 

On  approuva  aussi  le  projet  de  rapport  proposé  par 
le  Directoire  pour  servir  d'introduction  au  conclusum 
général  du  23  novembre;  et  le  ministre  du  margrave 
de  Bade  annonça  que  son  souverain  s'était  entendu 
avec  l'évêque  de  Constance  (l'électeur  archichance- 


—  236  — 
lier),  sur  la  rente  qui  serait  payée  pour  son  entretien. 

Dans  la  trente-septième  séance  (19  janvier  1803), 
on  donna  lecture  de  deux  Notes  des  ministres  média- 
teurs. La  première  était  relative  aux  nouvelles  voix 
viriles,  et  la  seconde  à  la  sustentation  de  l'électeur  de 
Trêves ,  dont  on  proposait  de  charger  tous  les  Élec- 
teurs, à  l'exception  de  l'archichancelier,  et  à  la  susten- 
tation des  évêques  de  Liège  et  de  Baie,  dont  devaient 
se  charger  les  évêques  jouissant  de  plus  d'une  pension. 

Une  communication  du  plénipotentiaire  impérial 
porta  à  la  connaissance  de  la  Députation  l'arrangement 
qui  avait  été  conclu  le  26  décembre  au  sujet  du  grand- 
duc  de  Toscane.  Ainsi  le  seul  obstacle  qui  retardait 
encore  l'affaire  des  indemnités  se  trouva  levé;  la  Bo- 
hême accéda  au  conclusum  qui  avait  décrété  l'adoption 
du  plan  d'indemnité,  et  le  plénipotentiaire  impérial  y 
adhéra  également. 

Les  ministres  de  Bavière  et  de  Wurtemberg  annon- 
cèrent que  leurs  souverains  s'étaient  entendus  avec 
l'évêque  d'Augsbourg  et  le  prévôt  d'Ellwangen  (l'élec- 
teur de  Trêves)  sur  le  montant  de  leur  sustentation. 

Dans  la  trente-huitième  séance  (  le  23  janvier  1 803  ), 
la  Députation  arrêta  d'inviter  les  ministres  médiateurs 
à  s'occuper  du  complément  de  la  dotation  de  l'électeur 
archichancelier,  dont  leur  dernière  Note  ne  parlait  pas. 

Un  conclusum  fait  le  29  janvier,  dans  la  trente- 
neuvième  séance,  déclare  que  si  les  évêques  de  Liège 
et  de  Baie  sont  nommés  à  quelque  autre  évêché,  ils  con- 
serveront intacte  la  rente  fixée  pour  leur  sustentation. 

Le  plénipotentiaire  impérial  n'ayant  pas  trouvé  con- 
venable que  la  Députation  eût  accueilli  des  requêtes 
présentées  par  des  princes,  à  l'effet  d'obtenir  des  voix 
viriles,  on  établit,  dans  la  quarantième  séance,  le  3  fé- 


~  237  — 

vrier,  le  principe  que  la  Députation  ne  pouvait  accueil- 
lir de  pareilles  demandes  qui  lui  étaient  adressées  par 
les  pétitionnaires  mêmes,  mais  qu'elle  devait  les  ren- 
voyer à  la  décision  de  l'Empereur  et  de  l'Empire;  que 
si,  au  contraire,  ces  demandes  étaient  faites  par  les 
ministres  médiateurs,  la  Députation  était  autorisée 
par  ses  pouvoirs  à  les  discuter  et  à  prendre  une  déci- 
sion à  leur  égard. 

Dans  la  même  séance,  la  Bavière  demanda  un  dé- 
dommagement pour  la  portion  de  l'évêché  d'Eichstett, 
que  la  convention  du  26  décembre  avait  adjugée  au 
grand-duc  de  Toscane.  Il  fut  arrêté,  le  8,  dans  la  qua- 
rante-unième séance,  que  ce  mémoire  serait  transmis 
aux  ministres  médiateurs,  mais  sans  leur  être  recom- 
mandé. 

Les  objets  sur  lesquels  les  ministres  médiateurs 
s'étaient  réservés  de  revenir,  furent  développés  dans 
une  Note  dont  on  fit  lecture  dans  la  quarante-deuxième 
séance ,  le  1 2  février  :  on  approuva  le  même  jour  le 
travail  de  la  commission,  qui  avait  été  chargée  de  répar- 
tir entre  les  comtes  les  indemnités  réservées  en  Souabe. 

Comme  la  dernière  Note  des  ministres  médiateurs 
renfermait  trop  d'objets  pour  qu'on  pût  les  joindre 
par  forme  de  supplément  au  conclusum  principal,  on 
convint,  dans  la  quarante-troisième  séance,  le  15  fé- 
vrier, de  le  rédiger  de  nouveau,  et  on  approuva,  dans 
la  même  séance,  la  rédaction  des  trente-huit  premiers 
articles.  Cette  discussion  fut  achevée,  le  16,  dans  la 
quarante- quatrième  séance  j  le  18,  dans  la  quarante- 
cinquième,  on  fit  quelques  nouveaux  changements  de 
peu  d'importance,  que  les  ministres  médiateurs  avaient 
proposés  verbalement  au  Directoire.  Enfin,  le  25,  dans 
la  quarante-dixième  séance,  le  llecès  définitif  fut  adopté 
et  soumis  à  l'approbation  de  l'Empereur  et  de  l'Empire, 


—  238  — 

On  voit,  en  résumé,  qu'il  a  existé  quatre  plans  d'in- 
demnisation, et  deux  conclusums  principaux. 

1"  Le  premier  plan  est  celui  qui  fut  soumis  à  la  Dé- 
putation,  dès  sa  première  séance,  le  24  août,  et  adopté 
le  8  septembre,  dans  son  ensemble; 

2"  La  Députation  ayant  porté  aux  ministres  média- 
teurs un  grand  nombre  de  réclamations,  ceux-ci  les 
firent  entrer  dans  un  second  plan,  qu'on  appela  général, 
parce  qu'on  se  flattait  qu'il  s'étendait  sur  tous  les  ob- 
jets. Il  fut  porté  à  la  Députation  le  9  octobre,  et  sur-le- 
champ  adopté  par  la  majorité; 

3"  Comme  les  ministres  médiateurs  proposèrent  de 
nouveaux  changements  les  1 3  et  1 9  octobre  et  1 5  no- 
vembre, il  en  résulta  un  troisième  plan,  qui  fut  adopté 
le  23  novembre  par  le  premier  conclusum  principal; 

4°  La  convention  du  26  décembre,  sur  l'indemnisa- 
tion du  grand-duc  de  Toscane,  et  d'autres  change- 
ments proposés  par  les  ministres  dans  les  Notes  des 
3  décembre  1 802,  1 8  et  31  janvier,  et  1 1  février  1 803, 
nécessitèrent  la  rédaction  du  quatrième  plan ,  qui  fut 
adopté,  le  25  février,  par  le  deuœihme  conclusum  prin- 
cipal, ou  le  Rechs  de  la  députation. 

Avant  de  nous  occuper  du  Recès  lui-même,  qui  a 
donné  une  nouvelle  forme  au  Corps  germanique,  fai- 
sons quelques  observations  générales  sur  les  points  à 
l'égard  desquels  la  Députation  n'a  pas  réussi  à  obtenir 
des  décisions  favorables  des  médiateurs. 

1''  Quoique  ses  instructions  lui  eussent  prescrit 
d'examiner  dans  toutes  ses  parties  le  plan  qui  lui 
était  proposé,  elle  ne  put  pourtant  pas;  la  moitié  des 
membres  dont  elle  était  composée  ne  le  voulut  même 
pas,  et  leur  opinion  prévalut  sur  celle  des  autres, 
sans  doute  parce  qu'on  l'envisagea  comme  le  seul 
moyen  d'éviter  de  plus  grands  inconvénients; 

2°  Elle  ne  parvint  pas  à  obtenir  des  ministres  mé- 


—  239  — 

diateurs  à  lui  donner  communication  des  mémoires  et 
évaluations  qui,  à  ce  qu'on  disait,  avaient  servi  de  base 
au  plan  d'indemnité  :  ce  refus,  de  la  part  des  ministres, 
fut  très-sage  ;  ces  mémoires  n'auraient  fait  que  provo- 
quer une  discussion  dont  il  était  impossible  de  pré- 
voir la  fin  :  d'ailleurs  on  sut  que,  par  d'autres  motifs, 
les  évaluations  devaient  rester  un  secret  ; 

3**  Quoique  unanime  sur  le  principe  que  des  fon- 
dations médiates  situées  hors  des  pays  qui  entraient 
dans  la  masse  des  indemnités,  ne  pouvaient  pas  être 
employées  en  indemnisation,  la  Députation  ne  réussit 
pas  à  faire  admettre  cette  maxime  de  Droit  public; 

4°  Quoique  unanime,  la  Députation  ne  put  obtenir 
de  la  France  la  levée  du  séquestre  qui ,  d'après  l'ar- 
ticle 9  du  traité  de  Lunéville,  aurait  dû  avoir  lieu  à 
l'égard  des  pays  cédés  à  la  France,  elle  ne  sut  pas  non 
plus  si  l'on  était  disposé  en  France;  à  suivre  sur  ce 
point  certaines  règles.  Le  gouvernement  français  agit 
avec  une  volonté  arbitraire ,  qui  n'eut  égard  à  au- 
cune convenance,  et  moins  encore  aux  principes  de  la 
justice  ; 

5°  La  moitié  de  la  Députation  ne  put  obtenir  de 
l'autre  que  ceux  qui  avaient  reçu  des  indemnités  au 
delà  de  leurs  pertes,  se  chargeassent,  à  ce  titre,  de  con- 
tribuer au  fonds  de  sustentation  des  ecclésiastiques  ; 

6"  Quoique  tous  les  membres  fussent  d'accord,  elle 
ne  put  imposer  aux  quatre  villes  impériales  l'obliga- 
tion de  contribuer  au  fonds  de  sustentation  ; 

7°  Quoique  la  masse  des  pays  qui  formaient  les  in- 
demnités fût  supérieure  à  celle  des  pertes,  néanmoins 
la  Députation  ne  trouva  pas  moyen  de  doter  convena- 
blement en  biens-fonds  le  premier  prince  de  l'Empire; 
elle  fut  obligée  d'assigner  une  partie  de  son  revenu 
sur  la  navigation  du  Rhin. 

En  définitive,  il  faut  le  reconnaître,  la  Députation 


—  240  — 

n'a  pas  fait  tout  le  bien  qu'elle  aurait  sans  doute  ac- 
compli si  elle  avait  été  abandonnée  à  ses  propres 
lumières  et  à  ses  inspirations  généreuses,  cependant 
le  Recès  qu'elle  a  présenté  à  ses  commettants  n'en 
mérite  pas  moins,  par  son  importance  et  la  multipli- 
cité des  objets  qui  y  sont  traités,  une  place  à  côté  de 
la  paix  de  Westphalie.  L'histoire  doit  à  cette  assem- 
blée le  témoignage  honorable  que,  dans  une  situation 
très-difficile,  elle  a  montré  une  prudence  consommée, 
et  que,  lorsqu'il  lui  a  fallu  céder  à  la  force,  elle  n'a 
pas  compromis  sa  dignité.  Les  votes  émis  par  les  sub- 
délégués, toujours  fondés  sur  les  principes,  sont  aussi 
l'expression  des  plus  nobles  sentiments;  laDéputation 
a  décidé  avec  modération  et  sagesse  des  questions 
très-compliquées;  elle  a  écouté  avec  patience  et  pesé 
avec  impartialité  toutes  les  réclamations  qui  lui  ont 
été  soumises  ;  et  si  parfois  il  n'a  pas  été  en  son  pouvoir 
d'y  faire  droit,  du  moins  toujours  a-t-elle  eu  la  volonté 
d'être  juste.  L'esquisse  de  ses  travaux,  que  nous  ve- 
nons de  mettre  sous  les  yeux  de  nos  lecteurs,  est  tirée 
du  Recueil  des  protocoles  de  cette  assemblée.  11  nous 
aurait  été  facile  d'ajouter  à  l'exposé  des  négociations 
de  Ratisbonne  ou  de  celles  qui,  à  la  même  époque,  se 
suivaient  à  Paris  et  se  continuèrent  sur  les  bords  du 
Rhin,  certains  faits  individuels,  caractéristiques  de 
Vabus  des  influences  alors  exercées  et  qu'un  personnage 
des  Relations  Extérieures,  avec  son  accent  méridional, 
nommait  si  plaisamment  la  campagne  d'or  des  indem- 
nités; mais  de  pareils  traits  feraient  un  affligeant  con- 
traste avec  la  droiture  et  la  loyauté  qui  présidèrent  aux 
délibérations  des  subdélégués  de  l'Empire,  et  nous  les 
avons  rejetés  comme  indignes  de  la  majesté  de  l'histoire. 


SECTION  m. 


RECÈS  DE  LA  DÉPCTATION  DE  l'eMPIRE,  DU  25  FÉVRIER  1803, 

TEXTE  ET  COMMENTAIRE'. 


InIroducUon.  —  Indemnilé  de  l'Autriche.  —  Indemnité  de  la  Toscane.  — 
Indemnité  de  Modène.  —  Indemnilé  de  la  Bavière.  —  Indemnité  de  la 
Prusse.  —  Indemnilé  d'Arenberg.  —  Indemnité  du  duc  de  Croï,  —  In- 
demnité du  duc  de  Looz.  —  Indemnilé  des  deux  maisons  de  Salm.  — 
Indemnité  de  la  maison  de  Brunswic-Lunébourg.  —  Indemnité  du  duc 
de  Brunswic.  —  Indemnité  du  margrave  de  Bade.  —  Indemnité  du  duc 
de  Wurtemberg. —  Indemnilé  de  la  maison  de  Hohenlohe.  —  Indemnilé 
de  Salm-Beiffersciieidt.  —  Indemnité  de  Limbourg-Styrum.  —  Indem- 
nité de  la  maison  de  Hesse-Cassel. —  Indemnité  de  la  maison  de  Hesse- 
Darmstadt.  —  Indemnilé  du  duc  d'Oldenbourg.  —  Convention  de 
Ratisbonne,  du  6  avril  1803;  M.  de  Koch  :  le  baron  de  Bûhler  :  M.  I.afo- 
rest  :  le  comle  de  Gœrlx.  —  Indemnité  de  Mecklenbourg-Schwerin. 
^Indemnité  de  Hohenzoliern.  — Indemnité  de  Dietrichstein.  — Indem- 
nité du  prince  de  Ligne.  —  Généalogie  de  la  maison  de  Nassau.  — 
Indemnité  de  Nassau-Usingen.  —  Indemnilé  de  Nassau-Weilbourg.  — 
Indemnilé  du  prince  de  Nassau-Siegen.  —  Indemnité  du  prince  de 
La  Tour  et  Taxis.  —  Indemnilé  de  la  maison  de  Lœwenslein-Wert- 
heim.  —  Indemnité  de  la  maison  d'Oettingen-Wallerstein.  —  Indem- 

*  Le  texte  du  Recès  est  indiqué  par  des  guillemets.  Nous  devons 
faire  une  observation  relative  aux  données  statistiques  produites  dans  le 
commentaire.  On  sait  combien,  en  général,  les  notions  qu'on  trouve 
dans  les  livres  sur  l'étendue,  la  population  et  les  revenus  des  pays  sont 
incertaines  et  inexactes,  lorsqu'elles  ne  se  fondent  pas  sur  des  mesures 
trigonométriques ,  des  dénombrements  effectifs  ou  des  comptes  rendus 
aux  gouvernements.  La  statistique  est  donc  parfois  une  science  conjectu- 
rale; mais,  à  l'époque  où  siégea  la  Députation  dont  nous  publions  les 
travaux,  l'intérêt  et  la  convoitise  avaient  troublé  à  dessein  tout  ce  qui, 
auparavant,  paraissait  clair.  Les  plénipotentiaires  des  réclamants  pré- 
sentèrent des  évaluations  évidemment  exagérées  de  tout  ce  que  leurs 
souverains  avaient  perdu ,  et  s'efforcèrent  de  diminuer  la  valeur  des  in- 
demnités qu'on  leur  offrait.  Nous  avons  presque  toujours  suivi  les  ren- 
seignements que  nous  avons  trouvés  dans  les  auteurs  cités  au  commen- 
cement de  la  seconde  section.  Lorsqu'ils  n'étaient  pas  d'accord  entre 
eux,  nous  avons  adopté  les  données  qui  nous  paraissaient  les  plus  pro- 
bables ;  mais  le  genre  de  cet  ouvrage  ne  nous  a  pas  permis  de  discuter 
les  motifs  de  notre  préférence.  Très-souvent  nous  avons  corrigé  les  chif- 
fres de  Gaspari  et  de  Winkopp  d'après  des  publications  officielles  qui 
ont  eu  lieu  depuis  que  leurs  ouvrages  ont  paru. 

TII  16 


—  2A2  — 

nité  de  la  maison  de  Solms.  —  Indemnité  de  la  maison  de  Stolherg.— 
Indemnité  de  Hohenlohe.  —  Indemnité  d'Isenbourg.  —  Indemnité 
de  la  maison  de  Linange.  —  Indemnité  de  la  maison  de  Wied-Runkel. 

—  Indemnité  du  prince  de  Bretzenheim.  —  Indemnité  de  la  maison 
de  Wiltgenstein.  —  Indemnité  des  comtes  du  Collège  de  Weslplialie. 

—  Indemnité  d'Aspremont.  —  Indemnité  de  Bassenheim.  —  Indem- 
nité de  Metternich.  —  Indemnité  d'Ostein.  —  Indemnité  de  Pletten- 
berg.  —  Indemnité  de  Quadt,  —  Indemnité  de  Schœsberg.  —  Indem- 
nité de  Sinzendorff.  — Indemnité  de  Sternberg.  — Indemnité  deToeiring. 

—  Indemnité  de  Warlemberg.  —Indemnité  deGolstein,  de  Hallberg. 

—  Indemnité  de  Nesselrode.  —  Indemnité  de  Sickingen.  —  Comtes  de 
la  quatrième  classe,  —  Comtes  de  la  cinquième  classe,  —  Dotation  de 
l'archichancelier,  —  Indemnité  de  l'Ordre  Teutonique,  —  Indemnité 
de  l'Ordre  de  Malte.  —  Droits  des  villes  impériales,  —  Indemnité  de  la 
ville  d'Augsbourg.  —  Indemnité  de  la  ville  de  Lubeck.  —  Convention 
du  2  avril  1804,  entre  le  duc  d'Oldenbourg  et  la  ville  de  Lubeck.  — 
Noblesse  de  l'Empire.  —  République  belvétique.  —  Racliat  des  rentes. 

—  Nouveaux  électeurs.  —  Votes  virils  du  Collège  des  Princes.  —Privi- 
lège de  non  appellando,  —  Biens  des  grands  chapitres.  —  Fondations 
non  employées.  —  Biens  des  chapitres.  —  Biens  des  fabriques,  — 
Dettes  des  pays.  —  Péage  du  Rhin, —  Convention  de  Paris,  du  15  août 
1804,  sur  l'octroi  delà  navigation  du  Rhin,  —  Fiefs. — Yoles  des  comtes. 

—  Sécularisation  des  couvents,  —  Époque  de  la  jouissance  des  indem- 
nités.—Aliénations  annulées.  —  Successions  de  famille.  — Échanges  et 
transactions.  —  Sort  des  anciens  souverains.  —  Leurs  rangs.  —  Leur 
juridiction.  —  Leur  sustentation.  —  Évêques  suffraganls.  —  Sn^tenla- 
lion  des  chanoines.  —  Années  de  carence.  —  Chanoinesses.  —  Sefvi- 
teurs  des  cliapitres. — Conventuels.- Précisles.  — ^Panistes.  —  Serviteurs 
des  souverains  ecclésiastiques.  —  Constitution  politique  des  pays  sécula- 
risés. —  Droits  régaliens,  —  Diocèses.  —  Cultes.  —  Fondations  médiates. 

—  Fondations  pieuses.  —  Garantie  des  pensions.  —  Les  directeurs  des 
Cercles  sont  chargés  de  l'exécution  du  Recès.  —  Pays  sécularisés  entre 
plusieurs  seigneurs.  —  Électeur  de  Trêves.  —  Sa  sustentation.  —  Cha- 
pitre de  Cologne. —  Autres  ecclésiastiques.  — Serviteurs  de  la  rive  gauche. 

—  Chanoines.  —  Évéques  de  Bàle  et  de  Liège.  —  Serviteurs  des  corpo- 
rations su]»|)rimées. —  Dettes  affectées  aux  pays  d'indemnité.  — Créances 
hypothécaires.  —  Nouvelles  detles.  —  Dettes  des  Cercles.  —  Dettes  des 
Cercles  du  Rhin.  —  Dettes  des  Cercles  sur  la  rive  gauche.  —  Chambre 
impériale.  -^  Conclusion, 

«  Pour  terminer  la  guerre  élevée  entre  Sa  Majesté 
Impériale  et  l'Empire  germanique  d'une  part,  et  la 
République  française  de  l'autre,  il  avait  été,  confor- 
mément à  l'article  20  du  traité  de  paijc  conclu  à  Gampo 
Formio,  le  17  octobre  1797,  ouvert  un  Congrès  de 
paix  à  Uastadt,  dans  la  même  année,  entre  Sadite  Ma- 
jesté Impériale  et  une  Députation  extraordinaire  de 
l'Empire,  nommée  à  cet  effet,  d'une  part,  et  les  pléni- 


—  243  — 

potentiaires  de  la  République  française  de  l'autre.  Les 
négociations  y  étaient  déjà  avancées ,  au  point  que , 
non-seulement  la  cession  des  pays  situés  sur  la  rive 
gauche  du  Rhin  avait  été  consentie  au  nom  de  l'Em- 
pire germanique,  mais  qu'on  y  était  même  convenu 
de  la  base  des  indemnités  par  la  voie  des  sécularisa- 
tions pour  les  pertes  résultant  de  cette  cession,  lors- 
que ces  négociations  de  paix  furent  rompues  par  la 
reprise  des  hostilités.  La  paix  fut  ensuite  conclue  à 
Lunéville,  le  9  février  1801,  par  Sa  Majesté  Impériale 
et  au  nom  de  l'Empire  germanique,  avec  le  premier 
Consul  de  la  République  française,  en  se  rapportant 
à  la  base  déjà  consentie  par  la  Députation  de  l'Empire 
au  précédent  Congrès  de  Rastadt.  Ce  traité  de  paix  fut 
ratifié,  le  7  mars  1 801  ,  par  les  Électeurs,  Princes  et 
Etats,  avec  le  concours  du  chef  suprême  de  l'Empire; 
mais,  daiis  ce  traité  même,  quelques  objets  étaient 
renvoyés  à  un  arrangement  ultérieur,  puisque  non- 
seulement  l'indemnité  assurée  par  l'article  5  au  grand- 
duc  de  Toscane  en  Allemagne  n'y  était  pas  déterminée, 
mais  qu'en  vertu  de  l'article  7,  les  indemnités  des 
Etats  héréditaires  de  l'Empire,  conformément  aux 
principes  déjà  mentionnés  qui  avaient  été  établis  à 
Rastadt  devaient  être  réglés  ultérieurement. 

«  Sa  Majesté  Impériale  ayant  ensuit^,  pour  l'exécu- 
tion de  ces  articles,  immédiatement  après  la  commu- 
nication faite  du  traité  de  paix  de  Lunéville,  demandé 
à  la  Diète  générale  de  l'Empire ,  par  un  décret  parti- 
culier de  commission  impériale,  du  3  mars  1801,  un 
avis  ultérieur  sur  le  mode  de  coopération  des  États  de 
l'Empire,  aux  arrangements  complémentaires  de  cette 
paix,  il  a  été  formé,  le  2  octobre  1801  ,  un  avis  de 
l'Empire  portant  qu'il  gérait  nommé  à  cet  effet  une 
nouvelle  Députation  extraordinaire  d'Empire  compo- 
sée de  huit  membres;  savoir  : 


—  244  — 

Du  Collège  électoral  : 

Mayence,  Bohême, 

Saxe,  Brandebourg. 

Du  Collège  des  Princes  : 

Bavière,  Grand-maître  Teutonique, 

Wurtemberg,    Hesse-Cassel. 

Et  cet  avis  ayant  été  approuvé  par  Sa  Majesté  Impé- 
riale, le  7  novembre  1801,  elle  a  enfin  notifié  à  la 
Diète,  par  un  nouveau  décret  de  commission  du  2  août 
de  cette  année,  que  le  moment  était  venu  où  la  Dépu- 
tation  extraordinaire  devait  se  réunir;  qu'en  consé- 
quence tous  les  États  députés  devaient  envoyer  leurs 
sous-délégués  à  Ratisbonne,  comme  le  lieu  de  réunion 
fixé  de  concert  avec  le  gouvernement  français,  et  que 
les  pleins  pouvoirs  nécessaires  à  la  Députation  pour 
l'entier  arrangement  de  l'œuvre  de  la  paix  devaient 
être  expédiés;  Sa  Majesté  Impériale,  en  sa  qualité  de 
chef  suprême  de  l'Empire,  ayant  déjà  nommé  pour 
son  plénipotentiaire  M.  le  baron  de  Hugel,  conseiller 
intime  actuel  de  Sa  Majesté  Impériale,  et  concommis- 
saire  impérial  à  la  Diète  générale  de  l'Empire. 

«  Les  pleins  pouvoirs  de  l'Empire,  à  l'effet  d'exami- 
ner, discuter  et  régler ,  de  concert  avec  le  gouverne- 
ment français,  les  objets  réservés  à  un  arrangement 
particulier  par  les  articles  5  et?  du  traité  deLunéville 
ayant  été  expédiés,  le  3  août  de  cette  année,  pour  cette 
Députation  extraordinaire,  les  États  députés  de  l'Em- 
pire ont  envoyé  leurs  subdélégués  en  cette  ville  de 
Ratisbonne;  savoir: 

((  Mayence  :  M.  le  baron  François- Joseph  d'Albini , 
conseiller  privé  impérial,  commandeur  de  l'Ordre  de 
Saint-Étienne  et  ministre  d'État  de  S.  A.  Électorale  de 
Mayence. 


—  245  — 

((  Bohême  :  M.  François  Albin  de  Schrauty  conseiller 
aulique  impérial,  et  ensuite  M.  le  comte  Ferdinand  de 
CoUoredo-Mansfeldy  chambellan  impérial  et  ministre 
de  l'électeur  et  roi  de  Bohême  à  la  Diète  de  l'Empire. 

«  Saxe  :  M.  Jean-Ernest  de  Globig ,  conseiller  privé 
de  S.  A.  S.  Électorale  de  Saxe. 

((  Brandebourg  :  M.  Jean-Eustache,  comte  de  Schlitz, 
dit  GœrtZy  ministre  privé  actuel  d'État  et  de  guerre  de 
S.  M.  le  roi  de  Prusse,  son  ministre  à  la  Diète  de  l'Em- 
pire, chevalier  des  Ordres  de  TAigle-Noir  et  de  l'Aigle- 
Rouge;  et  M.  Conrad-Sigismond-Charles  Eœnlein ^  mi- 
nistre directorial  de  Sa  Majesté  Prussienne  au  cercle 
de  Franconie,  et  vice-président  de  la  chambre  des 
finances  à  Anspach. 

«  Bavière  :  Aloyse-François-Xavier,  baron  de  Rech- 
berg  et  Rothenlœwen ,  chambellan ,  conseiller  privé 
actuel  et  ministre  de  S.  A.  Électorale  à  la  Diète  de 
l'Empire. 

«  Grand-maître  Teutonique  :  M.  Philippe-Ernest, 
baron  de  Nordegg-RabenaUy  chevalier  de  l'Ordre  Teu- 
tonique, bailli  de  Franconie,  commandeur  de  Donau- 
werth,  conseiller  actuel  de  cour,  de  régence  et  de 
chambre  du  prince  grand-maître  de  l'Ordre  Teutoni- 
que, et  grand  bailli  du  district  de  Scheuerberg  à 
Hornegg. 

c(  Wurtemberg  :  M.  Philippe  Christian  y  baron  de 
Normann,  conseiller  privé  actuel ,  vice-président  et 
chambellan  de  S.  A.  S.  le  Duc,  et  chevalier  de  son 
grand  Ordre. 

c(  Hesse-Cassel  :  M.  Philippe-Maximilien  de  GiXn- 
terode,  conseiller  privé  de  S.  A.  S.  le  Landgrave  et 
son  ministre  à  la  Diète  de  l'Empire  j  et  ensuite  M.  le 
conseiller  de  guerre  de  Hesse-Cassel,  George-Guillaume 
Starkloff. 

«  Cette  Députation,  après  s'être  dûment  légitimée, 


—  246  — 

s'est  constitué  le  24  août;  et  ses  séances  ont  été  ou- 
vertes par  la  proposition  de  M.  le  plénipotentiaire  im- 
périal. 

«  Le  premier  Consul  de  la  République  française 
ayant  envoyé  en  même  temps  à  Katisbonne  un  ministre 
extraordinaire  en  la  personne  du  citoyen  Laforest ,  et 
S.  M.  l'empereur  de  Russie  s'étant  déterminé  à  inter- 
poser sa  haute  médiation,  conjointement  avec  le  gou- 
vernement français,  pour  le  règlement  de  l'affaire  des 
indemnités  et  pour  l'affermissement  du  repos  de  l'Al- 
lemagne j  et  ledit  ministre  de  la  République  française, 
citoyen  Laforest,  ayant  simultanément,  avec  M.  de 
Klûpffel,  ministre  résident  de  Russie  près  la  Diète  gé- 
nérale de  l'Empire,  communiqué  à  cet  effet,  dès  le 
18  août,  à  la  Députation  de  l'Empire,  deux  déclara- 
tions uniformes  par  lesquelles  ces  hautes  puissances 
médiatrices  ont  proposé ,  pour  faciliter  les  délibéra- 
tions, un  plan  général  d'indemnités;  et  S.  M.  I.  de 
toutes  les  Russies  ayant  jugé  à  propos  d'envoyer  bien- 
tôt après,  pour  cet  objet,  un  plénipotentiaire  particu- 
lier à  Ratisbonne  en  la  personne  de  M.  le  baron  Charles 
de  Bûhler,  son  conseiller  privé  et  chevalier  de  plusieurs 
Ordres,  jusqu'ici  son  Envoyé  extraordinaire  à  la  Cour 
électorale  bavaro-palatine  ;  et  la  Députation  de  l'Em- 
pire ayant  mûrement  examiné  dans  toutes  leurs  par- 
ties les  déclarations  remises,  et  ayant  fait  parvenir 
ses  arrêtés  à  ce  sujet  auxdits  ministres  des  puissances 
médiatrices,  en  leur  communiquant  chaque  fois  les 
réclamations  nombreuses  qui  lui  ont  été  adressées;  et 
ceux-ci  ayant  ensuite  remis,  le  8  octobre ,  à  la  Dépu- 
tation, un  plan  modifié  comme  résultat  de  leurs  der- 
nières Instructions  ;  la  Députation  ayant  de  môme  pris 
en  nouvelle  délibération  ce  second  plan ,  et  commu- 
niqué pareillement  à  MM.  les  ministres  sus-mention- 
nés  ses  arrêtés  ultérieurs,  et  ceux-ci  s'étant  encore 


—  247  — 

expliqués  plus  en  détail  par  des  Notes  subséquentes 
des  1 9  octobre,  1 5  et  1 9  novembre,  3  décembre  de 
l'année  dernière^  18  et  31  janvier,  et  enfin  du  11  de 
ce  mois. 

((  11  a  été  rédigé,  en  conséquence  et  d'après  tous  les 
arrêtés  précédents  et  particuliers  de  la  Députation,  le 
Conclusum  principal  suivant. 

«  La  répartition  et  le  règlement  définitif  des  in- 
demnités ont  lieu  ainsi  qu'il  suit  : 

§1- 

«AS.  M.  l'empereur  et  roi  de  Hongrie  et  de  Bohême^ 
archiduc  d'Autriche  ^  pour  la  cession  du  bailliage 
d'Ortenau  :  les  évêcliés  de  Trente  et  de  Brixen,  avec 
tous  leurs  biens,  revenus,  propriétés,  droits  et  préro- 
gatives, sans  aucune  exception  quelconque,  et  les  cha- 
pitres, abbayes  et  couvents  situés  dans  ces  deux  évê- 
chés,  à  charge  néanmoins  de  pourvoir  à  l'entretien 
viager  des  deux  princes-évêques  actuels  et  des  mem- 
bres des  deux  chapitres  de  la  manière  dont  ils  pour- 
ront convenir  entre  eux,  ainsi  qu'à  la  dotation  subsé- 
quente du  clergé  à  préposer  à  ces  deux  diocèses^,  sur 
le  pied  établi  dans  d'autres  provinces  de  la  monarchie 
autrichienne.  Tous  les  droits  de  propriété  et  autred 
qui  compétent  à  S.  M.  l'Empereur  et  Roi,  comme  sou- 
verain des  États  héréditaires  d'Autriche  et  comme 
chef  suprême  de  l'Empire,  compatibles  avec  l'exécu- 
tion du  présent  acte,  lui  restent  réservés  ;  et  ceux,  au 
contraire,  dont  il  est  disposé  spécialement,  passeront 
aux  nouveaux  possesseurs.  » 

Le  dernier  paragraphe  de  cette  première  partie  du 
premier  article,  qui  est  destiné  à  régler  les  indemnités 
des  trois  branches  de  la  maison  d'Autriche,  est  em- 


—  248  — 

prunté  mot  pour  mot  de  l'article  4  de  la  convention  du 
26  décembre  1 802,  depuis  ces  mots  :  Tous  les  droits 
de  propriété,  etc.,  jusqu'à  ceux-ci  :  lui  restent  réser- 
vés. Il  est  probable  qu'en  signant  cette  convention,  les 
ministres  de  France  ne  se  doutaient  pas  de  l'impor- 
tance de  cette  réserve,  demandée  par  la  maison  d'Au- 
triche, et  qui  fournissait  à  l'Empereur  un  moyen 
pour  se  refuser  à  l'exécution  de  tous  les  articles  du 
Recès  qui  blesseraient  ses  droits,  soit  comme  chef  de 
l'Empire,  soit  comme  monarque.  Avertis  de  leur  er- 
reur, ils  proposèrent,  par  une  Note  du  1 1  février  1 803, 
la  rédaction  du  paragraphe  1 ,  telle  que  nous  venons  de  la 
donner.  Tout  en  y  insérant  les  mots  sacramentaux  que 
l'Autriche  regardait  comme  l'égide  de  ses  droits,  ils 
crurent  en  diminuer  l'efficacité  en  y  ajoutant  ces  mots  : 
((  et  ceux  au  contraire  dont  il  est  disposé  spéciale- 
ment, passeront  aux  nouveaux  possesseurs.  ))  Ils  eurent 
l'air  de  s'en  vanter,  dans  leur  Note  du  9  mars  1 803, 
en  disant  que  les  réserves  de  la  convention  du  26  dé- 
cembre ne  pouvaient  préjudicier  aux  États,  à  l'égard 
des  droits  que  pouvait  avoir  eus  la  maison  d'Autriche 
sur  des  pays  que  le  Recès  leur  abandonnait  ;  que  la 
transmission  de  ces  droits  aux  nouveaux  possesseurs 
était  établie  par  le  Recès,  et  que  la  première  partie 
du  paragraphe  1   exprimait  clairement  l'accord  qui 
régnait  là-dessus  entre  l'Empereur  et  les  puissances 
médiatrices. 

Mais  cette  précaution  fut  vaine  ;  et  cette  fois-ci  les 
ministres  de  France  ne  furent  pas  les  plus  lins  :  le 
subdélégué  de  Bohême  laissa  passer  la  nouvelle  ré- 
daction; mais  lorsqu'il  fut  question  de  ratifier  le  Re- 
cès, l'Empereur  ne  le  fit  qu'en  réservant  toute  la  teneur 
de  la  convention  du  26  décembre  1802,  d'après  le 
texle  littéral  de  ses  articles.  Cette  réserve  détruisit  la 
clause  salvatoire  du  paragraphe  1 . 


—  249  — 

«  À  l'Archiduc  Grand-  Duc ,  pour  la  Toscane  et  dé- 
pendances :  l'archevêché  de  Salzbourg,  la  prévôté  de 
Berchtolsgâden,  la  partie  de  l'évêché  de  Passau  située 
au  delà  de  l'iltz  et  de  l'Inn  du  côté  de  l'Autriche,  à 
l'exception  néanmoins  d'Innstadt  et  d'Ilzstadt,  avec 
un  rayon  de  cinq  cents  toises  françaises ,  à  prendre 
de  l'extrémité  desdits  faubourgs;  enfin,  les  chapitres, 
abbayes  et  couvents  situés  dans  les  diocèses  sus-men- 
tionnés. 

«  Ces  possessions  seront  tenues  par  l'Archiduc , 
aux  conditions ,  engagements  et  rapports  fondés  sur 
les  traités  existants. 

i<  Elles  sont  retirées  du  cercle  de  Bavière  et  incorpo- 
rées au  cercle  d'Autriche.  Leurs  juridictions  ecclésias- 
tiques, tant  métropolitaine  que  diocésaine,  sont  pa- 
reillement séparées  par  les  limites  des  deux  cercles, 
pour  être,  quant  aux  parties  ci-dessus  distraites,  réu- 
nies aux  diocèses  de  la  Bavière. 

c(  Miihldorff  et  la  partie  du  comté  de  Neubourg  à  la 
gauche  de  l'Inn  sont,  avec  toute  supériorité  territoriale, 
réunis  au  duché  de  Bavière.  L'équivalent  du  revenu 
de  Mishldorff  et  celui  de  la  supériorité  territoriale 
de  Neubourg  sera  pris  sur  ceux  de  Freisingen  encla- 
vés dans  le  territoire  autrichien. 

«  L'Archiduc  Grand-Duc  recevra  et  possédera  en  ou- 
tre, pour  lui  et  ses  héritiers ,  en  toute  souveraineté 
et  indépendance,  l'évêché  d'Eichstett  avec  tous  les 
biens,  revenus,  droits  et  prérogatives  y  annexés^  tels 
que  le  prince-évêque  en  jouissait  à  l'époque  de  la  si- 
gnature du  traité  de  Lunéville,  à  l'exception  seulement 
des  bailliages  de  Sandsée,  Wernfels-Spalt ,  Abenber, 
Ahrberg-Ohrnbau  et  Wahrberg-Herrieden ,  et  toutes 
autres  dépendances  de  l'évêché  d'Eichstett  qui  se 
trouvent  enclavées  dans  le  pays  d'Anspach  et  de  Ba- 
reuth,  lesquels  demeureront  à  l'électeur  palatin  de 


—  250  — 

Bavière^  et  seront  compensés  à  l'Archiduc  Grand-Duc 
par  un  équivalent  complet  pris  sur  les  domaines  de 
l'Électeur  en  Bohême,  et,  en  cas  d'insuflisance,  sur 
d'autres  revenus  quelconques  de  ce  prince.  Dans  le 
territoire  dudit  évêclié  d'Eichstett ,  il  ne  pourra  être 
élevé  aucune  fortification  nouvelle  par  l'Archiduc 
Grand-Duc  ou  ses  héritiers. 

«  Le  Brisgau  et  l'Ortenau  forment  l'indemnité  du  ci- 
devant  duc  de  ModènCf  pour  le  Modénois ,  apparte- 
nances et  dépendances  j  et  ces  deux  pays  seront  pos- 
sédés par  ce  prince  et  ses  héritiers  aux  termes  de 
l'article  4  du  traité  de  Lunéville,  qui  doit  à  cet  égard, 
sans  aucune  restriction  et  limitation,  s'entendre  de 
rOrtenau  comme  du  Brisgau.  » 

Dans  le  premier  plan,  présenté  par  les  ministres 
médiateurs,  les  évêchés  de  Trente  et  de  Brixen  étaient 
assignés  au  grand-duc  de  Toscane,  avec  Salzbourg  et 
une  partie  de  l'évêché  de  Passau,  et  on  donnait  au  duc 
de  Modène  l'Ortenau,  qu'on  affectait  de  regarder  comme 
une  dépendance  du  Brisgau'.  Par  la  convention  du 

'  Le  mol  û' Or tenau  a  deux  significations,  l'une  géographique,  l'autro 
politique.  Dans  la  première,  il  comprend  tout  le  district  situé  du  sud  au 
nord,  entre  le  Brisgau  et  le  margraviat  de  Bade,  et  de  l'ouest  à  l'est  en- 
tre le  Rhin  et  la  forêt  Noire.  En  Ce  sens  il  renfermait  :  ^°  le»  bailliages 
de  Wildsliedt  et  de  Lichlenau,-  appartenant,  jusqu'en  1803,  à  la  maison 
de  Darmstadt  ;  2°  le  bailliage  d'Oberkirch  de  l'évêché  de  Strasbourg  ; 
3°  la  préfecture  d'Orlenau ,  ou  l'Ortenau  dans  le  sens  politique.  Cette 
préfecture  s'étendait ,  \°  sur  les  villes  impériales  d'Olfcnbourg,  de  Zel 
et  de  Gengenbach  ;  2°  sur  un  certain  nombre  de  Villages  répandus  dans 
l'Ortenau  pris  dans  le  sens  géographique.  La  maison  d'Âulriche  «  à  la- 
quelle cette  préfecture  appartenait  comme  patrimoine  de  celle  de  Habs- 
bourg, l'avait  donnée  ù  litre  de  lief  à  la  maison  do  Baden-Baden;  elle 
l'avait  réunie  à  ses  domaines,  û  l'extinctiori  de  cette  branche ,  en  1771, 
Dans  l'enceinte  de  la  préfecture  se  trouvaient  encore,  3"  plusieurs  vil- 
lages appartenant  à  la  noblesse  immédiate,  et  formant  ce  qu'on  appe- 
lait le  canton  d'Ortenau.  En  cédant  l'Ortenau,  l'Autriche  donna  au  duc 
de  Modèhe  cè  qu't'Ue  possédait,  c'fcst-à-dlre  la  piéfeotufe  d'OHdnau,  et 
rien  de  plus. 


—  251  «- 

26  décembre,  la  maison  d'Autriche  renonça  à  l'Orte- 
nau  en  faveur  da  duc  de  Modène,  et  on  lui  donna,  à 
titre  de  compensation,  les  évêchés  de  Trente  et  de 
Brixen.  Ces  pays  se  trouvaient  déjà  dans  des  rapports 
de  sujétion  envers  l'Autriche.  Quoique  Etats  d'Empire 
et  siégeant  aux  Diètes,  les  évêques  étaient  en  même 
temps  États  duTyrol,  et  soumis  à  la  suzeraineté  autri- 
chienne. L'évêché  de  Trente  avait,  sur  une  surface 
de  soixante-quinze  milles  carrés  une  population  de 
cent  cinquante  mille  habitants;  celui  de  Brixen  trente 
mille  sur  dix-sept  mille  carrés;  mais  comme  ces  évê- 
chés étaient,  sous  le  rapport  de  la  surface  et  de  la  popu- 
lation, censés  faire  partie  de  la  monarchie,  l'Autriche 
bien  loin  de  gagner,  sous  ces  deux  rapports,  par 
l'échange,  y  perdrait  au  contraire  seize  mille  habi- 
tants que  renfermait  l'Ortenau;  mais  elle  mit  fin  aux 
discussions  que  la  double  qualité  dont  les  évêques 
étaient  revêtus  comme  États  d'Empire  et  comme  États 
du  Tyrol,  faisait  continuellement  naître;  elle  gagna 
aussi  considérablement  en  revenus,  puisque  l'évêché 
de  Trente  rapportait  cinq  cent  cinquante  mille  florins, 
et  celui  de  Brixen  deux  cent  cinquante  mille,  tandis 
que  les  revenus  du  Brisgau  et  de  l'Ortenau  se  rédui- 
saient à  très-peu  de  chose. 

Le  subdélégué  de  Bohême  avait  dit,  dans  la  seconde 
séance,  que,  d'après  un  dénombrement  exact,  la  Tos- 
cane renfermait  un  million,  cent  cinquante  mille  ha- 
bitants sur  quatre  cent  quarante  milles  carrés.  Ce  der- 
nier nombre  était  exagéré  :  d'après  les  données  les 
plus  modernes ,  le  grand-duché  a  trois  cent  quatre- 
vingt-seize  milles  carrés';   mais   comme  les   média- 


*  La  population ,  au  contraire ,  a  été  trouvée  de  un  million  quatre 
cent  trente-six  mille  sept  cent  quatre-vingt-cinq  habitants ,  répartis 
dans  trente-six  villes,  cent  trente-quatre  bourgs  et  deux  mille  quatre 


-.  252  — 

teurs  avaient  adopté  le  principe  que  les  revenus  seuls 
devaient  être  pris  en  considération  lorsqu'il  s'agirait  de 
déterminer  l'indemnité  d'une  perte ,  l'examen  de  la 
surface  devient  superflu.  Quant  aux  revenus  ils  étaient 
très-connus,  grâce  à  la  publicité  que  le  grand-duc 
Léopold  avait  donnée  à  son  administration.  Ils  se 
montaient,  en  1789,  déduction  faite  des  frais  de  per- 
ception, à  plus  de  neuf  millions  de  livres  de  Florence, 
équivalent  à  près  de  trois  millions  huit  cent  mille 
florins  d'Empire,  et  s'étaient  accrus,  dans  l'espace  de 
dix  ans,  jusqu'à  quatre  millions.  En  remplacement  de 
cette  belle  possession,  leRecès  donne  au  Grand-Duc  ; 

m.  c.        habit.  rev.  en  flor. 

L'archevêché  de  Salzbourg  ayant 4  80  i  94  000  i  000  000  ' 

Une  partie  de  l'évêché  de  Passau i  0      24  000  400  000 

L'évêché  d'Eichslett i  6      50  000  400  000 

La  principauté  de  Berchtolsgaden 4  4      1 8  000  200  000 


Total...     220    286  000    2  000  000 


A  quoi  il  faut  ajouter  l'indemnité  que  le  Grand-Duc 
dut  recevoir  pour  la  partie  de  l'évêché  d'Eiclistett 
qui  fut  donnée  à  la  Bavière,  et  à  laquelle  le  IVecès 
destine  les  possessions  provenant  de  la  succession  de 

cent  cinquante-quatre  paroisses.  Nous  verrons,  plus  lard,  les  différences 
qui  sont  résultées  de  la  prise  de  possession  du  duché  de  Lucques. 

'  Le  bénéfice  net  des  salines  se  monte  annuellement  à  près  de  deux 
cent  mille  florins. 

Le  nombre  des  milles  carrés  et  celui  de  la  population  du  duché  de 
Salzbourg  et  de  la  principauté  de  Berchtolsgaden,  sont  admis  ici  tels 
qu'on  les  croyait  à  l'époque  du  Recès.  Mais  des  données  exactes  que 
X.  de  Kocu-Sternfeld  publia  en  i810  ,  ont  prouvé  que  Salzbourg  n'a 
que  cent  soixante-trois  nulles  carrés,  et  qu'il  avait,  en  1808,  cent  qua- 
tre-vingt-sept mille  neuf  cent  vingt-neuf  habitanLs,  tandis  que  Berchtols- 
gaden n'en  avait  que  huit  mille  deux  cent  soixante-seize  sur  un  peu 
moins  de  huit  milles  carrés.  Dans  les  tableaux  statistiques  qui  ont  été 
dressés  au  Congrès  de  Vienne  par  les  commissions  statistiques,  on 
donne  à  Salzbourg  une  population  de  cent  quatre-vingt-seize  mille,  et 
à  Berchtolsgaden  une  de  douze  mille  âmes. 


—  253  — 

Deux-Ponts,  que  l'Électeur  avait  en  Bohême.  On  n'en 
connaît  pas  la  valeur,  mais  il  est  probable  qu'elles 
rapportent  au  moins  un  million  de  florins.  Quoi  qu'il 
en  soit,  ces  pays  formaient  un  faible  dédommagement 
pour  la  belle  Toscane.  La  défense  d'établir  de  nou- 
velles fortifications  dans  la  partie  de  l'évêché  d'Eich- 
stett,  abandonnée  à  la  Toscane,  est  motivée  sur  ce 
qu'on  regardait  avec  raison  le  nouvel  État  formé  en 
faveur  de  ce  prince,  comme  une  dépendance  de  la 
monarchie  autrichienne. 

On  dit  que  le  Cabinet  de  Vienne  avait  le  projet 
d'échanger  les  États  du  Grand-Duc  en  Allemagne  con- 
tre une  partie  de  l'ancienne  République  de  Venise,  y 
compris  cette  ville,  et  que  le  plan  de  cet  échange  avait 
été  dressé  par  le  ministre  du  Grand-Duc.  On  ajoute 
que  les  représentations  de  l'archiduc  Charles ,  sur 
l'importance  militaire  de  Venise,  pour  la  sûreté  de 
l'Autriche  intérieure,  de  la  Croatie  et  de  la  Dalmatie, 
y  firent  renoncer,  et  que  ce  ne  fut  que  depuis  lors 
qu'on  demanda  pour  le  Grand-Duc  la  dignité  élec- 
torale. 

Nous  devons  encore  remarquer  une  inexactitude 
qui  se  trouve  dans  la  rédaction  de  l'article.  Il  donne 
au  Grand-Duc  les  chapitres,  abbayes  et  couvents 
situés  dans  les  diocèses  de  Salzbourg  et  Passau  :  il  est 
évident  néanmoins,  par  ce  qui  suit,  qu'on  a  eu  l'in- 
tention de  ne  lui  laisser  que  les  couvents  situés  dans 
les  territoires  qu'on  lui  assignait,  et  non  dans  les  dio- 
cèses qui  s'étendaient  bien  au  delà  des  premiers  :  les 
territoires  étaient  les  pays  que  ces  prélats  gouvernaient 
comme  princes;  les  diocèses  ceux  qui  leur  étaient  sou- 
mis, comme  évêques. 

Le  duché  de  Modène  et  ses  appartenances  avaient, 
sur  une  surface  de  quatre-vingt-seize  milles  carrés, 


—  254  — 

une  population  de  trois  cent  quatre-vingt  mille  habi- 
tants*, et  rapportaient,  dans  les  derniers  temps,  sept 
millions  de  livres  de  Modène,  équivalant  à  un  million 
deux  cent  soixante  mille  florins  d'Empire;  ou,  en  sup- 
posant que  les  frais  d'administration  ne  soient  pas 
déduits  de  cette  somme,  au  moins  un  million  cin- 
quante mille  florins.  Quant  au  Brisgau,  il  ne  rappor- 
tait à  la  maison  d'Autriche  qu'une  somme  nette  de 
cent  soixante-trois  mille  florins  par  an,  y  compris  le 
Frickthal,  mais  sans  les  revenus  des  mines  et  les  at- 
tributions directes.  Le  Brisgau,  sans  le  Frickthal,  mais 
avec  rOrtenau,  avait,  sur  une  surface  de  cinquante- 
trois  milles  carrés,  une  population  de  cent  soixante- 
sept  mille  habitants.  Ces  pays   pouvaient  rapporter 
tout  au  plus  quatre  cent  mille  florins ,   de  manière 
qu'ils  n'offraient  au  duc  de  Modène  une  indemnité 
que  pour  le  tiers  de  sa  perte.  Ce  qui  diminua  consi- 
dérablement la  valeur  de  cette  indemnité,  c'est  qu'on 
ne  laissa  pas  au  nouveau  souverain  la  disposition  des 
abbayes  et   couvents  situés  dans  le    Brisgau  ,  qui 
auraient  doublé  ses  revenus.  Nous  verrons  que  ces  fon- 
dations furent  données  au  grand  prieuré  de  Heiters- 
heim.  11  faut  encore  observer  que  le  Brisgau  et  l'Orte- 
nau  ne  renfermaient  pas  une  résidence  convenable 
pour  le  souverain,  ni  même  une  maison  de  plaisance. 
L'article  4  du  traité  de  Lunéville  dit  que  le  duc  de 
Modène  possédera  le  Brisgau  aux  mômes  conditions 
que  celles  en  vertu  desquelles  il  possédait  le  Modénois. 
Le  paragraphe  1  rappelle  cette  clause.  Le  duc  de  Mo- 
dène possédait  le  Modénois  conime  vassal  de  l'En^pire, 
mais  en  pleine  souveraineté.  Pogsédera-t-il  de  même 
le  Brisgau  et  l'Ortenau,  qui  ainsi  seront  détaché^  de 


'  Le  dénombrement  de  <  81 0  n'en  a  fait  trouver  que  trois  cent  soixante 
nei|f  mille  trois  cent  soixante-quatre. 


—  255  — 

l'Allemagne?  Le  paragraphe  paraît  l'indiquer;  mais 
ce  paragraphe  se  trouve,  à  cet  égard,  en  contradic- 
tion avec  le  paragraphe  32  ,  qui  nomme  ce  prince 
parmi  les  États  d'Empire.  Enfin  nous  remarquerons, 
dans  la  rédaction  du  paragraphe  2,  encore  une  de 
ces  inexactitudes  qui  proviennent  de  la  circonstance 
que  le  Droit  public  d'Allemagne  était  étranger  aux  ré- 
dacteurs des  quarante-sept  premiers  articles.  Le  Bris- 
gau,  dans  toute  son  étendue,  n'appartenait  pas  à  la 
maison  d'Autriche  ;  elle  ne  possédait  que  la  préfecture 
de  BrisgaUy  qui  en  faisait  partie,  et  ce  n'est  que  cette 
province  qu'elle  a  pu  céder  au  duc  de  Modène. 

§  2. 

«  A  l'électeur  palatin  de  Bavière,  pour  le  Palatinat 
du  Rhin,  les  duchés  de  Deux-Ponts,  Simmern  et  Ju- 
liers,  les  principautés  de  Lautern  et  Veldenz,  le  mar- 
quisat de  Berg-op-Zoom,  la  seigneurie  de  Kavenstein 
et  autres  seigneuries  situées  dans  la  Belgique  et  en 
Alsace  :  l'évêché  de  Wiirzbourg,  sous  les  réserves  ci- 
après,  ceux  de  Bamberg,  Freisingen,  Augsbourg  et 
celui  de  Passau,  sauf  la  part  ci-dessus  de  l'Archiduc 
Grand-Duc,  avec  la  ville  et  les  faubourgs  et  leurs  dé- 
pendances quelconques  en  deçà  de  l'inn  et  de  l'iltz, 
et,  de  plus,  un  rayon  de  cinq  cents  toises  françaises  à 
prendre  de  leur  extrémité.  Plus,  la  prévôté  de  Kempten, 
les  abbayes  de  Waldsassen,  Eberach,  Irsée,  Wengen, 
Sœfflingen,  Elchingen,  Ursberg,  Roggenbourg,  Wet- 
tenhausen,  Ottobeuern,  Kaisersheim  et  Saint-Ulric; 
plus,  les  droits,  les  propriétés  et  revenu^  epclésiasti- 
ques  dépendant  des  chapitres,  abbayes  et  couvents 
situés  dans  la  ville  et  banlieue  d' Augsbourg,  à  la  ré- 
serve de  tout  ce  qui  est  compris  dans  ladite  ville  et 
sa  banlieue;  enfin,  les  villes  impériales  ou  villages  de 


—  256  — 

Rolhenbourg,  Weissenbourg,  Windsheim,  Scbwein- 
furt,  Gochsheim,  Sennfeld ,  Kempten ,  Kaufbeuern, 
Memmingen,  Dinkelsbiibl,  Nordlingen,  Ulm,  Ropfin- 
gen,  Buchborn ,  Wangen ,  Leutkirch  et  Ravensbourg, 
avec  leurs  territoires,  y  compris  les  Freyenleute  der 
Leutkircber-Heide. 

((  Les  fortifications  de  la  ville  de  Passau  ne  pour- 
ront être  augmentées.  Elles  seront  seulement  entrete- 
nues, et  il  ne  pourra  être  élevé  aucun  nouvel  ouvrage 
de  fortification  dans  les  faubourgs.  L'électeur  palatin 
de  Bavière  possédera  en  outre,  en  toute  propriété  et 
supériorité,  les  parties  d'Eicbstett  détacbées  du  lot  de 
l'Arcbiduc  Grand-Duc  aux  conditions  mentionnées.  Il 
est  réservé  de  pourvoir  ultérieurement,  par  une  com- 
pensation territoriale,  à  ce  qui  manque  encore  à  l'élec- 
teur palatin  de  Bavière  pour  l'évêcbé  d'Eicbstett  qui 
lui  avait  été  assigné  antérieurement.  » 

L'indemnité  allouée  à  la  maison  palatine  est  la  plus 
considérable  que  le  Recès  ait  accordée,  mais  aussi 
celle  sur  l'évaluation  de  laquelle  il  a  existé  le  plus  de 
différence  dans  les  opinions.  La  perte  que  cette  maison 
avait  supportée  fut  liquidée  de  la  manière  suivante, 
dans  l'évaluation  qui  a  servi  de  base  à  la  convention 
du  3  juin  1802  : 

1 .  Possessions  en  Alsace 

2.  Possessions  en  Belgique 10 

3.  Duché  de  Deux-Ponts 

4.  Duché  de  Juliers 

5.  Partie  du  Palatinat  située  sur  la  rive 
gauche  du  Rhin 48 

6.  Dilo  sur  la  rive  droite 

7.  Arriéré  de  revenus  de  huit  ans  à 
2i  pour  <00 

Total... 

non  compris  les  péages  du  Rhin ,   qui  rapportaient 


m.  c. 

habit. 

rev.  en  flor. 

24 

118000 

300  000 

10 

50  000 

200  000 

36 

96  000 

61 4  000 

75 

210  000 

706  000 

48 

170  000 

1  490  000 

27 

136  000 

940  000 
4  620  000 

220 

780  000 

5  870  000 

—  257  — 

cent  quarante  mille  florins.  Ces  données  sont  tirées 
de  la  déclaration  que  le  subdélégué  de  Bavière  fit  dans 
la  vingt-neuvième  séance  de  laDéputation.  On  opposa 
à  cette  évaluation  : 

V  Que,  dans  les  deux  cent  vingt  milles  carrés  et 
sept  cent  quatre-vingt  mille  habitants,  on  avait  com- 
pris les  possessions  médiates  en  Alsace  et  en  Belgi- 
que, pour  trente-quatre  milles  carrés  et  cent  soixante- 
huit  mille  âmes.  Mais  l'Électeur  ne  pouvait  évaluer 
cette  perte  que  d'après  les  seuls  revenus  qu'un  calcul 
exagéré  portait,  pour  ses  domaines  en  Alsace,  à  trois 
cent  mille  florins,  et  pour  ceux  de  la  Belgique,  à  deux 
cent  mille  florins.  On  pense  que  ce  demi-million  était 
bien  compensé  par  les  fondations  médiates  des  pays 
qui  furent  assignés  à  l'Électeur,  et  que  quand  même 
il  y  aurait  eu,  sous  ce  rapport,  quelque  déficit,  il 
était  compensé  par  l'avantage  d'acquérir  des  posses- 
sions immédiates; 

2"  De  la  somme  de  cinq  millions  huit  cent  soixante- 
dix  mille  florins  de  revenus  annuels,  il  faut  encore 
déduire  celle  de  un  million  six  cent  vingt  mille  florins 
que  la  Cour  de  Munich  demandait  comme  intérêts 
d'un  capital  représentant  la  perte  des  revenus  pendant 
huit  ans  de  guerre.  Cette  perte  doit  être  mise  dans  la 
classe  de  ces  malheurs  dont  on  ne  peut  espérer  le  dé- 
dommagement, et  qui  n'ont  été  pris  en  considération 
dans  aucune  autre  réclamation  portée  à  la  Députation; 

3°  Quoique,  dans  l'évaluation,  on  ait  porté  en 
compte  la  totalité  du  Palatinat  du  Rhin,  puisqu'il  fut 
convenu,  dès  le  principe,  que  l'Électeur,  pour  procu- 
rer un  arrondissement  convenable  au  margrave  de 
Bade,  lui  abandonnerait  ce  pays,  cependant  on  a 
lieu  de  penser  que  l'estimation  des  revenus  du  Pala- 
tinat à  deux  millions  quatre  cent  trente  mille  florins 
est  exagérée  de  quatre  cent  trente  mille  florins. 
VII  17 


—  258  — 

D'après  ces  rectilications,  la  perte  de  la  maison  pa- 
latine se  serait  montée  ; 

111.  c.        habil.  rcv.  en  flor 

Pour  le  Palatinat  du  Rhin,  à 75  è  340  000  2  000  000 

Le  duché  de  Deux-Ponts 36         60  000  600  000 

Celui  de  Juliers 75  210  000  706  000 

Les  possessions  en  Alsace  et  en  Belgi- 

qae 500  000 

Total...   186i     580  000    3  806  000 

Une  perte  qui  ne  peut  qu'avoir  été  sensible  à  l'Élec- 
teur, est  celle  du  Palatinat  du  Rhin ,  que  la  paix  de 
Lunéville  et  le  Recès  de  la  Députation  partagèrent  en- 
tre plusieurs  souverains.  On  est  accoutumé  à  regarder 
ce  pays  comme  le  berceau  de  la  maison  de  Wittels- 
bacb,  parce  que,  depuis  le  xiv^  siècle,  il  a  appartenu 
à  la  branche  aînée  de  cette  famille;  nous  avons  dit 
cependant  que  la  Bavière,  quoique  dans  ce  partage 
elle  devînt  l'apanage  de  la  branche  cadette,  est  le  plus 
ancien  patrimoine  de  la  maison. 

Parlons  maintenant  de  l'indemnité  qui  fut  allouée 
pour  cette  perte.  La  principale  est  l'évêché  de  Wiirz- 
bourg.  Les  géographes  d'Allemagne  ne  sont  pas  d'ac- 
cord sur  la  population  de  ce  pays ,  ni  sur  le  montant 
des  revenus  que  le  prince-évêque  en  tirait.  L'électeur 
de  Bavière  n'eut  pas  la  totalité  de  cet  évêché;  on  en 
détacha,  en  faveur  des  princes  de  Lœwenstein ,  de 
Hohenlohe  et  de  Linange,  plusieurs  parcelles  renfer- 
mant sept  villes,  quatre-vingt-dix-sept  villages,  et 
près  de  cinquante  mille  habitants  sur  environ  quinze 
milles  carrés.  Quant  aux  revenus,  il  paraît  que,  sans 
compter  ceux  du  chapitre,  parce  qu'ils  durent  servir 
à  la  dotation  de  l'évoque,  mais  en  y  comprenant  ceux 
des  abbayes  et  autres  fondations  médiates,  on  peut 
les  évaluer  à  deux  millions  et  demi.  Il  est  vrai  que 
le  Recès  ne  donne  expressément  à  l'Électeur  que  l'ab- 


— •  259  — 

baye  d'Ëberach,  une  des  plus  riches  parmi  les  .ab- 
bayes médiates  d'Allemagne;  mais  la  disposition  gé- 
nérale du  paragraphe  35  le  rendit  maître  de  toutes 
les  fondations  qui  se  trouvaient  dans  cet  évêché,  ex- 
cepté cependant  le  chapitre  noble  de  Combourg,  situé 
près  de  Halle  en  Souabe,  et  celui  de  Schœnthal,  sur 
le  Jaxt^  que  le  paragraphe  6  alloua  au  duc  de  Wur- 
temberg. 

Parmi  les  indemnités  adjugées  à  l'Electeur,  se  trouve 
une  partie  de  l'évêché  d'Eichstett,  qu'on  ne  peut  éva- 
luer que  par  rapport  à  la  surface  et  à  la  population, 
mais  non  par  rapport  aux  revenus,  puisque  l'Électeur 
fut  obligé  de  céder,  à  titre  d'équivalent,  ses  terres  en 
Bohême.  Cependant,  la  possession  de  la  totalité  de 
l'évêché  ayant  été  garantie  à  l'Électeur  par  la  France 
et  la  Russie,  le  Recès  lui  promit  une  compensation 
territoriale.  Il  était  impossible  de  la  trouver  en  terres 
immédiates,  et  la  promesse  faite  à  l'Électeur  resta  sans 
effet  jusqu'à  la  dissolution  de  l'Empire  germanique. 
La  sécularisation  de  la  langue  bavaroise  de  l'Ordre  de 
Saint-Jean  augmenta,  il  est  vrai,  les  revenus  de  l'Élec- 
teur de  cent  soixante-dix  mille  florins;  mais,  en  ad- 
mettant que  cet  objet  puisse  être  regardé  comme  une 
indemnité  pour  la  perte  de  l'évêché  d'Eichstett,  il  res- 
tait encore  un  déficit  de  deux  cent  trente  mille  florins. 

Voici  maintenant  le  tableau  des  pays  donnés  à  la 
Bavière  à  titre  d'indemnités;  ils  sont  évalués,  d'après 
leur  surface,  leur  population  et  leurs  revenus  : 

L'évêché  de  Wurzbourg ,  y  compris  Ebe- 
rach  et  les  autres  fondations  immé-    ">•  c-     habit.       rev.  en  fior. 
diates 79    250  000      2  500  000' 

L'évêché  de  Bamberg,   avec  les  fonda- 
tions immédiates. 65    220  000      1  500  000 


A  reporter .  . .   U4     470  000       4  000  000 
ScHOEPF,  Histor.  slat.  Beschreib.  des  Hochst.  Wurtzburg.  Hildbur- 


—  260  — 

nepurt ...   114     470  000  4  000  000 
L'évêché  d'Augsbourg  avec  l'abbaye  de 

Saint-Ulric 45      92  000  450  000 

Celui  de  Freysing  avec  Miihldorf,  enclave 

qui  avait  appartenu  à  Salzbourg 4  5      30  000  200  000 

Celui  de  Passau  avec  Neubourg 5      20  000  '  200  000 

La  prévôté  de  Kempten 46      50  000  250  000 

Une  petite  partie  de  l'évêché  d'Eichstett.  4      42  000 

L'abbaye  d'Elchingen 2  *       4  000  60  000 

Celle  d'Irséc 2        4  400  60  000 

Celle  de  Kaisersheim 3         6  000  90  000 

Celle  d'Ottobeuren 5      12  000  100  000 

Celle  de  Roggenbourg 2J      5  000  75  000 

Celle  de  Sœflingen 1|      3  000  65  000 

Celle  de  Saint-Ulric,  comprise  dans  Augs- 

bourg If       3  600  50  000 

L'abbaye  d'Ursperg 

Celle  de  Wettenhausen 2        3  000  70  000 

Celle  d'Elberach ,  comprise  sous  WUrz- 

bourg 

Celle  de  Waldsassen 200  000 

Celle  de  Wengen  à  Ulrn 20  000 

La  ville  libre  de  Bopfingen J      1  800  6  000 

Celle  de  Buchborn, ^      1  000  10  000 

Celle  de  DLinkelsbiihl 1         8  000  50  000 

Celle  de  Kaufbeuern 2         7  000  22  000 

Celle  de  Kempten l       3  600  30  000 

Celle  de  Leutkirch,  y  compris  les  villages 

libres i\      5  000  25  000 

Celle  de  Memmingen 2      41500  45  000 

Celle  de  Nordlingen 4  a      8  000  20  000 

Celle  de  Ravensbourg ^       6  000  20  000 

Celle  de  Rothenbourg  sur  le  Tauber 5      24  000  60  000 


A  repwler. .  267  J  792  900      6  178  000 

ghause,  1802,  dit  (jue  ,  d'après  le  dernier  dénombrement  fait  pour  la 
conscription,  la  population  se  montait  à  deux  cent  soixante-deux  mille 
quatre  cent  neuf;  mais  il  donne  de  bonnes  raisons  pour  l'estimer  à 
trois  cent  soixanto-dix-liuit  mille.  Dans  ce  nombre  n'est  pas  comprise  la 
population  des  parcelles  de  l'évêché  que  le  Recèsen  avait  détachées.  On 
est  autorisé  à  porter  les  revenus  nets  de  l'évêque  et  du  chapitre  à  trois 
millions,  non  compris  ceux  de  l'abbaye  d'Eberach,  qui  passaient  cent 
mille  florins;  mais  on  ne  met  ici  que  deux  millions  et  demi,  parce 
que  le  Recès  démembra  diverses  parcelles  de  l'évêché  en  faveur  d'au- 
tres intéressés. 
'  D'après  d'autres ,  quarante-quatre  mille. 


—  261   — 

Report ...  267  f  792  900  61 78  000 

Celle  de  Schweinfurt 2  6  200  20  000 

Celle  d'Ulm U  38  000  3-50  000 

Celle  de  Wangen ]{  4  300  18  000 

Celle  de  Weissenbourg 4  6  500  48  000 

Celle  de  Windsheim 1  4  000  13  000 

Les  villages  libres  de  Gochsheim  et  Senn- 

feld... I  2  600  10  000 

Total...  288    854 .HOO       6  607000 

Si  nous  n'avons  compris  dans  ce  tableau  l'abbaye  de 
Waldsassen  que  pour  les  uevenus,  et  non  pour  le  ter- 
ritoire, qui  était  de  treize  milles  carrés,  ni  pour  la  po- 
pulation qui  se  montait  à  dix  mille  âmes,  c'est  qu'elle 
était  située  dans  un  pays  qui,  depuis  longtemps,  appar- 
tenait à  l'Électeur,  c'est-à-dire  dans  le  haut  Palatinat.  Il 
paraît  qu'elle  lui  a  été  nominativement  assignée  pour 
mettre  fm  tant  à  une  réclamation  de  l'abbé  qui  pré- 
tendait à  l'immédiateté ,  qu'à  celle  des  rois  de  Bo- 
hême, qui  exerçaient  le  droit  d'avoirie  sur  ce  riche 
couvent. 

Le  comté  de  Neubourg,  dont  il  est  question  à 
l'article  de  Passau,  était  situé  sur  l'inn,  et  avait  ap- 
partenu à  une  branche  de  la  maison  des  anciens 
comtes  de  Salm,  qui  le  vendit,  dans  le  wif  siècle,  à 
une  branche  de  la  maison  de  Sinzendorf.  Après  l'ex- 
tinction de  celle-ci,  en  1767,  le  comté  échut  à  l'évê- 
ché  de  Passau.  Au  reste,  il  faut  combiner  ce  qui  est 
dit  dans  l'article  au  sujet  de  Passau,  avec  ce  que  dit 
de  cette  ville  l'article  1 .  La  ville  de  Passau  est  située 
dans  l'angle  que  forme  l'Inn  en  versant  ses  eaux  dans 
le  Danube;  mais  elle  a  au  delà  de  l'Inn  un  faubourg 
nommé  Innstadt,  et,  au  delà  du  Danube,  un  autre 
nommé  Ilzstadt,  d'après  la  petite  rivière  d'Ilz  qui  à  ce 
point  se  jette  dans  ce  fleuve,  de  manière  que  Passau 
se  compose  de  trois  villes  différentes.  Ilzstadt  est  dé- 
fendue par  deux  châteaux  forts,  situés  sur  une  même 


—  262  — 

montagne,  et  nommés  Oberhauss  et  Niederliauss.  Les 
trois  villes,  et,  en  outre,  à  l'égard  d'Instadt,  nn  rayon 
déterminé,  furent  donnés  à  la  Bavière. 

Avec  la  ville  de  Leutkircli  on  céd^  à  l'Électeur  les 
villages  libres  (die  freyen  Leute  der  Leutkirchp.r  Heide). 
Ces  villages,  au  nombre  de  trente-neuf,  habités  par 
des  paysans  libres  et  appartenant  immédiatement  à 
l'Empire  et  à  l'Empereur,  élaient  soumis  à  la  juridic- 
tion d'un  tribunal  portant  le  titre  de  tribunal  provin- 
cial particulier  en  haute  et  basse  Souabe,  dans  la  plaine 
de  Leutkirch  et  dans  les  chasses  libres  (dm  freye  Kai- 
serl.  Landgericht ,  in  Ober-nnd  Nieder  Schtoaben,  auf 
Leutkircher  Heid  und  in  der  Gepilrs).  L'Empereur, 
comme  chef  de  la  maison  d'Autriche,  nommait  le  juge 
qui  résidait  à  Altorff,  bourg  libre  et  immédiat  près  de 
Ravensbourg;  il  tenait  ses  assises  quatre  fois  par 
mois,  alternativement  à  Altorff,  Wangen,  Ravens- 
bourg et  Ysny.  Ce  tribunal  s'étendait  au  delà  du  dis- 
trict des  villages  libres;  ceux-ci  avaient  un  bailli  par- 
ticulier, qui  résidait  à  Gebratzhoffen.  Les  villages 
jusqu'alors  libres  deGochsheim  etSennfeld  sont  situés 
près  de  Schweinfurt.  Dans  le  premier  plan,  on  avait 
aussi  donné  à  l'Électeur  le  village  libre  d'Alschhausen 
situé  en  Souabe,  que  ce  plan  avait  nommé  Althausen , 
mais  comme  l'Ordre  Teutonique  fit  valoir  les  droits 
que  la  commanderie  du  même  nom  prétendait  sur  ce 
village,  il  fut  omis  dans  le  second  plan. 

En  comparant  les  indemnités  de  la  Bavière  avec  ses 
pertes,  on  pourrait  être  étonné  que  le  subdélégué  de 
cette  puissance  ait  déclaré,  le  30  octobre,  et  par 
conséquent  à  une  époque  où  on  lui  destinait  encore 
l'évêchéd'Eichstett,  que  les  indemnités  étaient  insuffi- 
santes d'un  million  et  demi  de  llorins  par  an.  D'après 
nos  calculs,  la  Bavière  a  gagné  cent  quatre  milles 
carrés  avec  deux  cent  soixante-quatorze  mille  habi- 


—  263  — 

tants,  et  un  revenu  annuel  de  deux  millions  huit  cent 
mille  florins.  Un  fait  peut  expliquer  l'assertion  bava- 
roise :  dans  son  calcul,  la  Bavière  portait  les  revenus 
de  l'évêché  d'Augsbourg,  de  la  prévôté  de  Kempten, 
de  l'abbaye  d'Irsée  et  des  villes  de  Kempten  et  de 
Kaufbeurn,  à  quatre  cent  mille  florins.  L'Autriche,  au 
contraire,  en  réclamant  ces  mêmes  pays  pour  le  grand- 
duc  de  Toscane,  faisait  monter  ces  revenus  à  huit  cent 
mille  florins,  :  de  part  ou  d'autre,  il  y  avait  donc  er- 
reur dans  les  évaluations. 

«  Au  roi  de  Prusse^  électeur  de  Brandebourg^  pour 
le  duché  de  Gueldre  et  la  partie  de  celui  de  Clèves, 
située  à  la  rive  gauche  du  Rhin ,  la  principauté  de 
Mœurs,  les  enclaves  de  Sévenœr,  Huissen  etMahlbourg, 
et  les  péages  du  Rhin  et  de  la  Meuse  :  les  évêchés  de 
Hildesheim  et  de  Paderborn;  le  territoire  d'Erfurtavec 
Untergleichen  et  tous  les  droits  et  propriétés  mayen- 
çaises  en  Thuringe,  l'Eichsfeld  et  la  partie  mayençaise 
de  Tréfort  ;  plus,  les  abbayes  de  Herforden ,  Quedlin- 
bourg,  Elten,  Essen,  Werden,  et  Cappenberg,  et  les 
villes  impériales  de  Mûlhausen,  Nordhausen  et  Goslar; 
enfin  la  ville  de  Munster  avec  la  partie  de  l'évêché  de 
ce  nom,  située  sur  et  à  la  droite  d'une  ligne  tirée  sous 
Olphen,  passant  par  Seperad  ,  Kakelsbeck,  Hedding- 
schel,  Ghischink,  Notteln,  Hulschhofen,  Nannhold, 
Nienborg;,  Uttenbrock,  Grimmel,  Schœnfeld  et  Greven, 
se  prolongeant  en  suivant  le  cours  de  l'Ems  jusqu'au 
confluent  de  l'Hoopsteraa,  dans  le  comté  de  Lingen. 

((  Les  restes  de  l'évêché  de  Munster  sont  partagés 
ainsi  qu'il  suit;  savoir  :  Au  duc  d'Oldenbourg  :  les 
bailliages  de  Vechte  et  de  Kloppenbourg. 

('  Au  duc  à'Arenberg  :  le  bailliage  de  Meppen  avec 
le  comté  de  Recklinghausen ,  pays  de  Cologne;  au 
duc  de  Cro'i  :  les  reste  du  bailliage  de  Diilmen;  au 


—  264  — 

duc  de  Looz  et  Corswarem  :  les  restes  des  bailliages  de 
Bevergern  et  de  Wolbeck. 

((  Les  chapitres,  prébendes  archidiaconales,  ab- 
bayes et  couvents  situés  aux  bailliages  formant  les 
restes  ci-dessus  mentionnés  de  l'évêché  de  Munster,  y 
sont  incorporés. 

«  Aux  princes  de  Salm  :  les  bailliages  de  Bocholt  et 
d'Ahaus,  avec  les  chapitres,  archidiaconés ,  abbayes 
et  couvents  y  situés  ;  le  tout  dans  la  proportion  de 
deux  tiers  pour  Salm-Salm  et  d'un  tiers  pour  Kyr- 
hourgy  dont  le  départ  sera  fait  très-incessamment  par 
un  règlement  ultérieur. 

«  Les  restes  du  bailliage  de  Horstmar,  avec  les  cha- 
pitres, archidiaconés,  abbayes  et  couvents  qui  s'y 
trouvent,  passent  exclusivement  au  rhingrave,  à  la 
charge  de  remplir  les  engagements  contractés  envers 
les  princes  de  Salm  le  26  octobre  dernier. 

«  Il  résulte  de  la  division  faite  de  l'évêché  de  Mun- 
ster, que  l'ancienne  constitution  des  États  ne  peut 
plus  avoir  lieu. 

«  La  maison  de  Salm-Reiferscheidt-Bedbur  reçoit  le 
bailliage  mayençais  de  Krautheim  ,  avec  les  droits  de 
juridiction  de  l'abbaye  de  Schœnthal  audit  bailliage, 
et,  en  outre,  une  rente  perpétuelle  de  trente-deux  mille 
florins  sur  Amorbach. 

«  Le  prince  de  Sahn-Reiferscheidt,  pour  le  comté  de 
Niedersalm  :  une  rente  perpétuelle  de  douze  mille  flo- 
rins sur  Schœnthal. 

«  Le  comte  de  Reiferscheidt-Dyck,  pour  les  droits 
féodaux  de  son  comté  :  une  rente  perpétuelle  de  vingt- 
huit  mille  florins  sur  les  biens  des  chapitres  de  Franc- 
fort. )) 

Ce  paragraphe  est  un  de  ceux  qui  ont  éprouvé  le 
plus  de  changements,  comparativement  au  premier 
plan.  Coliii-ci,  après  le  lot  de  la  Prusse,  avait  «issigné 


—  265  — 

au  duc  d'Arenberg  le  comté  de  Recklinghausen,  et  le 
bailliage  de  Diilmen;  aux  princes  de  Salm-Salm,  Salm- 
Kyrbourg,  aux  rhingraves  et  aux  princes  et  comtes 
de  Salm-Reiferscheidt,  les  restes  du  haut  évêché  de 
Munster,  sans  qu'il  y  fût  question  des  ducs  de  Croï 
et  de  Lqoz. 

La  première  partie  du  paragraphe  détermine  l'in- 
demnité de  la  Prusse.  Cette  puissance  avait  perdu  : 

m.  c.  habil.                     rev.  en  finr. 

Une  partie  du  duché  de  Clèves 16  43  000  j 

La  principauté  de  Mœurs 6  29  000  «>232  000  900  000  * 

Le  duché  de  Gueldre 24  60  000  =^| 

Les  péages  du  Rhin  et  de  la  Meuse. .  450  000 

Sevenser,  Huissen  et  Malbourg 2  5  000                   50  000 


Total...    48  137000  1  400  000 


Il  parait  au  premier  abord  que  la  politique  de  la 
Prusse  aurait  dû  la  porter  à  chercher  son  indemnité 
en  Franconie,  où  elle  avait  fait  assigner  celle  de  la 
maison  d'Orange ,  dont  elle  est  l'héritière.  Cet  arran- 
gement lui  aurait  été  avantageux  en  concentrant  ses 
forces  ;  et  si  elle  avait  pu  encore  échanger  ses  posses- 
sions sur  le  Rhin,  elle  cessait  d'être  en  contact  avec  la 
France.  Un  jour  on  connaîtra,  sans  doute,  les  motifs 
qui  l'ont  engagée  à  renoncer  à  ce  système.  Les  pays 
qu'elle  obtint  surpassèrent,  il  est  vrai,  de  beaucoup 
ceux  qu'elle  avait  perdus,  mais  ils  sont  isolés  et  com- 

*  D'après  un  dénombrement  de  4792,  il  y  avait  vingt-sept  mille  deux 
cent  cinquante-huit  habitants. 

*  Estimation  officielle. 

"  D'autres  estiment  ce  nombre  exagéré.  Us  se  fondent  sur  ce  que  le 
dernier  démembrement  de  1782  a  donné  quarante-sept  mille  deux  cent 
soixante-dix-huit  habitants,  et  croient  que  l'augmentation,  en  vingt  ans, 
ne  peut  pas  avoir  outre-passé  trois  mille  habitants,  parce  que,  de 
1744  jusqu'en  1782,  elle  n'avait  été  que  de  sept  mille  cinq  cent  cin- 
quante-huit habitants. 

*  Estimation  officielle. 


—  266  — 

posés  de  parcelles  dont  chacune  est  trop  peu  considé- 
rable par  elle-même.  Les  revenus  de  ces  pays  ne  sont 
pas  connus  avec  certitude;  cependant  les  sommes  sui- 
vantes ne  paraissent  nullement  exagérées. 

m.  c.        hal)it,  rcv.  en  flor. 

L'évèché  de  Hildesheim 32    '  4  29  000  750  000 

Celui  de  Paderborn 50        97  000  •  900  000 

Sa  part  de  l'évèché  de  Munster 80  f  126  000  900  000 

L'Eichsfeld  avec  Trefurt 36         75  000  450  000 

Erfurt  et  Untergleichen 1 1  f      45  000  300  000 

MUlhausen ,  Nordhausen  ,  Goslar 5        34  000  200  000 

Herforden,  Quedlinbourg,  Elten,  Essen  , 

Werden  et  Cappenbourg 6  20  000  300  000 

Total...  221-1    526  000      3  800  000 
Ce  qui  fait  un  excédant  de 
173  \  milles  carrés; 
409  000  habitants; 
2  400  000  florins  de  revenus. 

Les  revenus  de  l'évèché  de  Hildesheim  étaient  pro- 
bablement plus  considérables  que  ceux  de  Testimation 
officielle,  et  quelques  auteurs  les  font  monter  à  un 
million;  mais  comme  le  pays  avait  aussi  des  dettes, 
nous  avons  suivi  l'estimation  modérée.  La  part  prus- 
sienne de  l'évèché  de  Munster  est  la  plus  fertile ,  la 
mieux  peuplée  et  la  plus  industrieuse.  L'Eichsfeld, 
district  de  la  Thuringe,  avait  appartenu  aux  électeurs 
de  Mayence ,  qui  l'avaient  successivement  acheté  des 
comtes  de  Gleichen  et  des  ducs  de  Grubenhagen.  Tre- 
furt est  une  ville  hessoise  située  surlaWerra;  mais 
un  tiers  de  la  ville  et  quatre  village  faisaient,  sous  le 
nom  de  bailliage  de  Trefurt,  partie  de  l'Eichsfeld. 
Erfurt,  capitale  delaThuringe,  appartenait  également 
à  l'électeur  de  Mayence. 

Sous  le  nom  d' Untergleichen,  le  Recès  entend  la 

•  D'après  Hassrlt,  Stanis  und  Adress-Handbuch  der  Imtftchen  Run- 
des-Staaten,  fur  1816,  t.  I,  p.  172.  Auparavant  on  n'eftimail  les  ha- 
bitants qu'à  quatre-vingl-qualori^e  mille. 


—  267  — 

partie  du  comté  de  Gleichen  qui  était  sous  la  domi- 
nation de  Mayence.  Les  anciens  comtes  de  Gleichen, 
célèbres  dans  l'histoire  du  moyen  âge,  possédaient  en 
Thuringe  deux  districts,  appelés  le  comté  de  haut 
Gleichen  et  le  comté  de  bas  Gleichen.  A  leur  extinc- 
tion, en  1631 ,  le  premier  passa  à  la  maison  de  Hohen- 
lohe,  qui  le  possède  encore.  Le  comté  inférieur  fut 
partagé  entre  la  maison  de  Schwarzbourg  et  une  ligne 
des  comtes  ou  princes  de  Hatzfeld.  Celle-ci  s'étant 
éteinte  en  1 704,  l'électeur  de  Mayence  prit  possession 
de  sa  part  du  comté  de  Gleichen,  comme  d'un  fief  va- 
cant. Elle  comprenait,  outre  le  château  ruiné  de  Glei- 
chen et  le  bourg  de  Wandersleben,  les  seigneuries  de 
Kranichfeld  et  de  Blankenhain.  C'est  ce  district  qui, 
par  le  Recès,  fut  cédé  à  la  Prusse. 

La  ville  de  Goslar,  située  au  pied  du  Harz ,  renfer- 
mait deux  fondations  luthériennes  immédiates,  celle 
de  Saint-Siméon  et  Saint-Juda,  et  celle  du  Petersberg, 
dont  le  Recès  ne  fait  pas  mention.  L'abbaye  de  Her- 
vorden,  composée  de  dames  nobles,  était  située  près 
de  la  ville  de  ce  nom,  dans  le  comté  de  Ravensberg 
en  VVestphalie,  et  n'avait  qu'un  territoire  de  peu 
d'étendue.  Celle  de  Quedlinbourg  était  bien  plus  con- 
sidérable, mais  se  trouvait  déjà  sous  la  protection  de 
la  maison  de  Brandebourg,  ce  qui  n'empêchait  pas  la 
princesse  abbesse  d'avoir  voix  et  séance  à  la  Diète, 
aussi  bien  que  celles  de  Hervorden  et  d'Essen.  Ces  deux 
abbayes,  ainsi  que  celles  d'Elten  et  de  Werden,  habi- 
tées par  des  religieux  et  le  couvent  de  Cappenberg, 
étaient  situées  en  Westphalie.  Ce  dernier  avait  d'abord 
été  destiné  au  prince  d'Orange  ;  mais  le  second  plan 
le  donna  à  la  Prusse^  et  c'est  le  seul  changement  que 
l'indemnisation  prussienne  ait  éprouvé. 

La    seconde    période    du    3'    paragraphe    déter- 
mine une  indemnité  pour  le  duc  d'Oldenbourg;  mais 


—  268  — 

comme  nous  aurons  encore  une  occasion  de  parler  des 
intérêts  de  ce  prince,  nous  devons  ici  nous  borner 
à  cette  mention. 

La  maison  d'Arenberg  est  une  branche  de  la  maison 
de  Ligne,  ainsi  nommée  d'après  une  ville  du  Hainaut. 
Elle  se  partagea,  dans  le  xv"  siècle,  en  deux  branches, 
celle  des  barons  de  Ligne  et  celle  des  barons  de  Bar- 
banson  :  Jean,  baron  de  Barbanson,  épousa  l'héritière 
du  comté  d'Arenberg,  et  fut  élevé  à  la  dignité  de 
prince. 

Le  duc  d'Arenberg  perdait,  par  la  cession  de  la  rive 
gauche  : 

1"  Le  duché  d'Arenberg,  situé  dans  l'Eyffel,  entre 
le  duché  de  Juliers  et  l'électorat  de  Cologne,  d'une 
surface  de  quatre  milles  carrés ,  d'une  population  de 
deux  mille  neuf  cent  dix-huit  âmes,  et  d'un  revenu  de 
trente  mille  soixante-douze  florins; 

T  Les  comtés  de  Kerpen  et  de  Kasselbourg,  sur 
l'Erft;  le  bailliage  de  Neukirchen ,  qu'il  possédait  en 
commun  avec  l'électeur  de  Trêves  ;  le  village  de  Gillen- 
feld  et  la  Fcigneurie  de  Floringen,  six  milles  carrés, 
trois  mille  sept  cent  trente-quatre  âmes,  trente  et  un 
mille  cent  quatre-vingt-six  florins  de  revenus; 

3°  La  baronnie  de  Commern,  avec  la  seigneurie  de 
Harzheim  et  la  moitié  de  celle  de  Mechernich ,  dans 
le  duché  de  Juliers,  un  mille  carré,  mille  deux  cent 
seize  âmes,  treize  mille  sept  cent  quatre-vingt-deux 
florins  de  revenus  ; 

4"  La  seigneurie  de  Sassenbourg,  dans  l'Eyffel,  un 
mille  carré,  mille  cinq  cent  soixante-quatorze  âmes,  sept 
mille  quatre  cent  quatre-vingt-dix  florins  de  revenus; 

5°  Divers  biens  à  Ahrweiler  dans  l'élecîorat  de  Co- 
logne, rapportant  deux  mille  quatre-vingt-dix-sept 
florins  ; 


—  269  — 

G"  La  seigneurie  de  Schleideu,  dans  l'Eyffel,  avec 
celle  de  Muringen,  provenant  l'une  et  l'autre  de  la 
succession  de  la  Mark-Ijimay,  dont  l'héritière  était  la 
mère  du  Duc  ([ui  régnait  en  1 802,  huit  milles  carrés*, 
quatre  mille  huit  cent  quatre-vingt-sept  âmes,  trente- 
cinq  mille  quatre  cent  vingt-six  florins  de  revenus. 

Le  total  de  ces  revenus  en  terres  immédiates  se  mon- 
tait à  environ  cent  vingt-six  mille  florins,  dont  qua- 
rante-quatre mille  provenant  de  forêts,  et  trente-six 
mille  d'autres  domaines.  La  maison  d'Arenberg  per- 
dait aussi  de  belles  possessions  dans  les  Pays-Bas,  et 
entre  autres  le  duché  d'Arschot. 

Le  premier  plan  lui  avait  assigné  le  comté  de  Reck- 
linghausen,  qui  faisait  partie  de  l'électoral  de  Cologne, 
et  le  bailliage  de  Diilmen ,  dépendant  de  l'évêché  de 
Munster;  dans  le  second  plan,  on  échangea  ce  bail- 
liage contre  celui  de  Meppen.  Ce  bailliage  a  une  sur- 
face de  quarante-huit  milles  carrés,  mais  est  en  grande 
partie  inculte  et  marécageux.  Il  renferme  le  village  de 
Papenburg,  connu  par  le  commerce  maritime  de  ses 
habitants.  La  population  de  Meppen,  qu'en  1803  on 
estimait  à  vingt-quatre  mille  habitants,  se  montait, 
en  1809,  à  trente  et  un  mille.  Les  revenus  étaient  por- 
tés à  soixante-seize  mille  florins,  indépendamment 
d'un  riche  couvent  appartenant  à  l'évêché  de  Corvey. 
Le  comté  de  Recklinghausen  a,  sur  une  face  de  douze 
milles  carrés,  trente  mille  habitants'^,  et  rapporte  cent 
vingt  mille  florins.  11  s'ensuit  que  le  duc  d'Arenberg 
a  été  indemnisé  bien  au  delà  des  pertes  qu'il  avait 

'  Peut-être  lieues  curréos. 

"^  Ea  1803 ,  on  n'estima  ce  comté  qu'à  sept  milles  et  demi  carrés  de 
surface  ,  avec  dix-huit  mille  habitants;  et  alors  le  revenu  de  cent  vingt 
mille  florins  paraissait  exagéré.  En  1810,  lorsque  Bonaparte  dépouilla 
arbitrairement  le  duc  d'ARENBEUc  de  cette  possession,  on  apprit  qu'elle 
renfermait  trente  mille  habitants.  Les  droits  seigneuriaux  seuls  furent 
estimés  alors  à  cent  six  mille  sept  cent  deux  francs  par  an. 


—  270  — 

éprouvées  en  terres  immédiates.  Ses  possessions  en 
France  et  dans  la  Belgique,  en  tant  qu'elles  n'avaient 
pas  été  aliénées*,  lui  furent  rendues  par  un  décret  de 
Bonaparte,  du  28  octobre  1 803,  après  que,  conformé- 
ment à  une  disposition  des  lois  françaises  qui  ne  per- 
mettaient pas  à  un  Français  de  posséder  une  princi- 
pauté étrangère,  il  eutcédéMeppen  et  Recklinghausen 
à  son  fils  aîné,  le  duc  Prosper-Louis. 

Les  ducs  de  Croï  descendent  des  anciens  rois  de 
Hongrie.  Marc,  petit-fils  de  Bêla  l'Aveugle ,  s'établit 
dans  le  xii*  siècle  en  France,  et  y  épousa  l'héritière 
d'Airaines  et  de  Croï,  dont  il  prit  le  nom.  Cette  mai- 
son avait  de  riches  possessions  en  France,  en  Belgique 
et  en  Allemagne,  mais  aucune  qui  fût  immédiate. 
En  1486,  l'empereur  Maximilien  lui  accorda  le  titre 
de  prince  d'Empire;  et,  en  1G6G,  l'empereur  LéopoUl 
essaya  de  lui  faire  accorder  séance  à  la  Diète.  On  ne 
connaît  pas  le  montant  des  pertes  que  le  duc  de  Croï 
avait  éprouvées  par  la  cession  de  la  rive  gauche  du 
Rhin;  il  ne  paraît  pas  que,  d'après  les  stipulations  de 
la  paix  de  Lunéville,  il  fût  dans  le  cas  de  recevoir  une 
indemnité.  Aussi  n'était-il  pas  fait  mention  de  lui  dans 
le  premier  plan,  et  n'avait-il  présenté  aucune  réclama- 
tion à  la  Députation.  Il  paraît  donc  que  ce  fut  par  une 
protection  spéciale  du  gouvernement  français  qu'on 
le  plaça  dans  le  second  plan.  Le  bailliage  de  Dulmeii, 
qui  lui  échut,  a  une  surface  de  six  milles  un  quart 
carrés  et  dix  mille  habitants.  Il  rapporte  cinquante 
mille  florins,  y  compris  la  chartreuse  de  VVelderen. 

Les  ducs  de  Looz  et  Corswarem,  dont  on  avait  en- 

'  Le  du(;  (I'Arenbemg  dil,  dans  un  inémoiro  qu'il  fit  préscnU-r  an 
mois  d'octobre  1814  au  Congrès  de  Vienne,  que  la  France  a  vendu  une 
partie  de  sed  domaines  situés  dans  le  duché  d'Arschot,  pour  une  somme 
de  un  million  trois  cent  neuf  mille  florins. 


—  271    — 

tendu  parler  pour  la  première  fois  en  Allemagne,  lors 
des  négociations  de  Rastadt,  font  remonter  leur  ori- 
gine aux  anciens  comtes  de  Hainaut.  Ils  avaient  pos- 
sédé les  comtés  de  Looz  et  de  Hoorne,  qui  depuis  plu- 
sieurs siècles  étaient  incorporés  à  l'évêché  de  Liège  ; 
dans  les  derniers  temps,  ils  avaient  des  terres  en  Bel- 
gique. Nous  ne  trouvons  dans  aucune  géographie  le 
comté  immédiat  de  Nyel,  dont  ils  portent  le  titre.  Ils 
n'étaient  pas  plus  que  les  ducs  de  Croï  dans  le  cas  de 
recevoir  une  indemnité  en  Allemagne;  aussi  le  pre- 
mier plan  n'avait-il  pas  fait  mention  d'eux.  Le  second 
plan  et  le  Recès  leur  allouent  les  restes  des  bailliages 
de  Bevergeren  ou  Rheina  et  Wolbeck ,  dans  l'évêché 
de  Munster,  treize  milles  trois  quarts  carrés,  seize 
mille  habitants  et  cent  mille  florins  de  revenus.  Le 
duc  de  Looz  ayant  obtenu  une  voix  virile  dans  le  col- 
lège des  Princes,  a  donné  à  ce  petit  pays  le  titre  de 
principauté  de  Rheina-Wolheck. 

H  existait  en  Allemagne  deux  comtés  de  Salm;  l'un, 
situé  dans  les  Vosges,  entre  l'Alsace  et  la  Lorraine  ; 
l'autre,  entre  le  duché  de  Luxembourg  et  l'évêché  de 
Liège  :  on  les  distinguait  par  les  épithètes  de  supérieur 
et  à' inférieur .  Ces  deux  pays  appartenaient  dans  l'ori- 
gine aune  même  famille,  qu'on  désigne  par  la  déno- 
mination ô'miciens  comtes  de  Salm.  Dans  le  xi"  siècle 
elle  se  divisa  en  deux  branches;  l'aînée  eut  pour  héri- 
tage le  comté  supérieur  dans  les  Vosges;  la  cadette,  le 
comté  inférieur  dans  le  Luxembourg.  L'aînée  s'étei- 
gnit dans  les  xv'-  et  xvi*"  siècles,  à  l'exception  d'une 
branche  collatérale  qui  avait  acquis  le  comté  de  Neu- 
bourg,  sur  l'Jnn,  et  qui  se  perpétua  jusqu'en  1781  \ 
Comme  elle  n'eut  pas  de  part  au  comté  de  Salm ,  et 

'  Voy.  ci-dessus,  p.  261. 


—  272  — 

que  d'ailleurs  elle  n'existait  plus  à  l'époque  du  llecès, 
nous  n'en  dirons  rien  de  plus.  A  l'extinction  de  la 
branche  aînée  de  Salm,  le  comté  supérieur  de  Salni 
fut  partagé  entre  deux  héritières  ;  l'une  porta  sa  por- 
tion dans  la  maison  de  Lorraine;  l'autre,  dans  une 
branche  des  Wild-et-Rhingraves,  qui  prit  alors  le  nom 
de  Salm.  La  branche  de  Salm  qui  posséda  le  comté 
inférieur,  s'est  perpétuée  jusqu'à  nos  jours,  divisée 
en  quatre  branches  qui,  jusqu'en  1803,  portaient 
les  titres  suivants:  V  Salm-ReilTerscheidt-Bedbur; 
2"  Salm-Reifferscheidt;  3°  Salm-Reifferscheidt-Ains- 
pach;  4°  Salm-Reifferscheidt-Dyck.  Ces  quatre  bran- 
ches forment  seules  la  véritable  maison  de  Salm; 
aussi,  pour  se  distinguer  des  Wild-et-Rhiugraves  qui 
ont  pris  ce  nom,  ils  s'appellent  vieux  comtes  de  Salm 
{AUyraven  von  Salm). 

Quant  aux  Wild-et-Rhingraves ,  ils  formaient  pri- 
mitivement deux  familles:  OtloUy  comte  de  Wittelsbach 
qui,  après  avoir  tué  l'empereur  Philippe^  se  réfugia 
dans  les  Ardennes,  est  regardé  comme  la  souche  des 
VVildgraves;  les  Rhingraves  sont  bien  plus  anciens,  et 
remontent  au  x^  siècle.  Les  VVildgraves  s'éteignirent 
dans  le  xv"  siècle ,  et  leurs  possessions  passèrent  par 
mariage  aux  Rhingraves.  Jean  V,  Wild-et-Rhingrave, 
épousa  Jeannettey  comtesse  de  Salm,  qui  lui  apporta  la 
moitié  orientale  du  comté  supérieur  de  Salm;  ce  qui 
fut  cause  que  son  fils  s'appela  Wild-et-Rhingrave  de 
Salm.  Cetle  maison  se  divisa  en  deux  branches  prin- 
cipales; celle  de  Salm,  et  celle  des  Wild-et-Rhingra- 
ves; celle  de  Salm  se  subdivisa  dans  les  branches  de 
Salm-Salm  et  Salm-Kyrbourg;  celle  des  Wild-et-Rhin- 
graves forma  les  branches  de  Grumbach  et  de  Rhein- 
grafenstein. 

11  paraît  que  les  rédacteurs  du  premier  plan  d'in- 
demnité avaient  confondu  ces  maisons,  puisqu'ils  les 


—  273  — 

comprirent  dans  une  seule  phrase  ainsi  conçue  :  aux 
princes  de  Salm-Salm  et  Salm-Kyrbourg,  aux  Rhin- 
graves,  aux  princes  et  comtes  de  Salm-Reifferscheidt . 
les  restes  du  haut  évêché  de  Munster,  c'est-à-dire  ce 
qui  restait,  déduction  faite  de  la  partie  prussienne  et 
du  bailliage  deDûlmen,  Le  Recès,  au  contraire,  dis- 
tingue la  maison  llhingravienne  de  celle  des  anciens 
comtes  de  Salm,  et,  à  son  exemple,  nous  allons  parler 
séparément  de  leur  indemnité. 

Les  possessions  de  la  maison  desWild-et-Rhingraves 
de  Salm  consistaient  dans  le  comté  supérieur  de  Salm, 
le  bailliage  de  Kyrbourg,  sur  la  Nahe;  le  comté  de 
Rheingrafenstein,  sur  la  même  rivière  ;  le  bailliage  de 
Grumbach,  surlaGlen;  la  seigneurie  de  Putelange 
en  Lorraine,  et  divers  bailliages  situés  dans  le  Hunds- 
rûck,  indépendamment  du  comté  d'Anholt  en  West- 
phalie,  que  la  paix  de  Lunéville  ne  leur  avait  pas  en- 
levé. D'aprèslesévaluationsprésentéesparcette  maison, 
la  tolalilé  des  possessions  qu'elle  avait  perdues  rap- 
portait quatre  cent  vingt  mille  florins'.  Le  Recès  lui 

'  La  Révolution  française  avait  fait  éprouver  à  cette  maison  une  perte 
qu'aucune  indemnité  ne  pouvait  réparer.  Le  prince  régnant  de  Salm- 
Kyrbourg,  qui  vivait  à  Paris,  y  fut  décapité  en  1794. 

Les  possessions  me'dîa/es  de  la  branche  de  Salm-Salm,  situées  sur  la 
rive  gauche  du  Rhin,  qui,  d'après  les  articles  9  et  tO  du  traité  de  Luné- 
ville,  devaient  être  rendues  à  cette  branche,  consistaient  dans  les  por- 
tions suivantes  :  1°  les  biens  patrimoniaux  et  droits  non  supprimés  du 
duché  d'Hoogstraten  et  du  vicomte  d'Alost  dans  les  Pays-Bas;  2"  les 
biens  patrimoniaux  et  droits  non  supprimés  des  seigneuries  de  Puligny- 
Ogerviller,  Ceintrey  et  Voinémont  en  Lorraine,  avec  une  rente  per- 
pétuelle de  neuf  cent  vingt-trois  livres  sur  les  États  de  Lorraine.  Ces 
ijiens  et  droits  rapportaient,  avant  la  Révolution  française,  environ 
neuf  mille  cinq  cents  livres  de  France,  dont  les  droits  supprimés  for- 
maient à  peu  près  trois  dix-neuvièmes;  3°  un  neuvième  des  revenus  de 
la  principauté  d'Arches  et  Charleville  en  Champagne,  par  indivis  avec 
la  maison  de  Condé,  lequel  neuvième,  pour  le  produit  des  domaines, 
bois  et  fermes  patrimoniales,  se  montait  à  environ  quatre  mille  cinq 
cents  francs  par  an  ;  i°  un  tiers  des  trois  rentes  sur  l'Hôtel  de  Ville  de 
Paris,  l'une  de  mille  livres,  l'autre  de  mille  cinquante-iieuf  livres,  et  la 
vu  IS 


—  274  — 

donne;  savoir  :  aux  princes  de  Salm-Salm  et  de  Salm- 
Kyrbourg,  les  bailliages  d'Ahaus  et  de  Bocholt,  de 
révêché  de  Munster,  renfermant  cinquante-cinq  mille 
deux  cent  quatre-vingt-six  habitants^  sur  vingt-huit 
milles  carrés,  et  rapportant  deux  cent  cinquante  mille 
florins,  et  aux  branches  Rhingraviennes  la  partie  de 
celui  de  Horstmar ,  qui  n'était  pas  entrée  dans  le  lot 
de  la  Prusse,  et  qui  avait  cinquante  mille  habitants 
sur  trente  milles  carrés,  avec  un  revenu  de  trois  cent 
mille  florins.  Dans  le  calcul  des  revenus ,  ceux  des 
chapitres,  archidiaconés,  abbayes  et  couvents  qui  s'y 
trouvent,  entrent  pour  les  trois  cinquièmes.  Mais 
comme  dans  cette  répartition ,  les  branches  de  Salm- 
Salm  et  de  Salm-Kyrbourg  étaient  lésées,  lesRhingra- 
ves  furent  obligés  de  leur  servir  une  rente  annuelle  de 


troisième  de  quarante-quatre  livres  onze  sous  huit  deniers;  5°  un  tiers 
d'une  rente  sur  les  domaines  confisqués  de  la  maison  d'Orléans,  laquelle 
rente  était  de  mille  trois  cent  trente-trois  livres  six  sous  huit  deniers. 
Les  deux  autres  tiers  de  ces  quatre  rentes  appartenaient  aux  maisons 
d'Ursel  et  de  Bournonville.  Le  prince  de  Salm-Salm  ayant  déclaré  le 
47  septembre  1803,  qu'il  était  dans  l'intention  de  conserver  son  État 
en  Allemagne,  en  se  soumettant  à  vendre  dans  un  délai  fixé  ses  posses- 
sions en  France,  qui,  d'après  la  paix  de  Lunéville,  devaient  lui  être 
restituées,  le  gouvernement  français  ordonna,  le  21  floréal  an  xii,  que 
le  séquestre  existant  sur  les  biens  de  ce  prince  situés  dans  la  Belgique, 
serait  levé  à  son  profit;  qu'il  prendrait  ces  biens  dans  l'étal  où  ils  se 
trouvaient,  sans  restitution  de  fruits  et  sans  indemnité  pour  ceux  qui 
auraient  pu  être  aliénés  ou  affectés,  soit  à  la  Légion  d'honneur,  soit  à 
la  dotation  des  sénatoreries,  soit  à  tout  autre  service  public;  que  le 
prince  serait  tenu  de  vendre  ces  biens  dans  le  délai  de  trois  ans;  qu'il 
renoncerait  à  tous  les  biens  auxquels  sa  famille  pourrait  prétendre  en 
France  (c'est-à-dire  dans  l'ancienne  France).  Le  prince  signa  cette  re- 
nonciation le  8  octobre  4804;  mais  il  ne  put  pas  obtenir  ta  restitution 
des  biens  situés  dans  la  Belgique.  Il  n'est  rentré  dans  la  jouissance  de 
ces  biens  que  par  un  arrêté  du  roi  des  Pays-Bas,  du  20  avril  4  84  5. 

*  Gaspari  ne  parle  que  de  quarante-huit  mille  ;  mais  les  détails  qu'on 
trouve  dans  Winkopp,  Rhein.  Bund,  t.  XIII,  p.  281,  donnent  la  somme 
que  nous  indiquons.  Dans  un  travail  soumis  à  la  commission  statistique 
du  Congrès  de  Vienne,  cette  population  est  portée  à  cinquante-six  mille, 
en  y  comprenant  celle  d'ÂnhoIt,  qu'on  estime  à  trois  mille  âmes. 


—  275  — 

quarante-deux  mille  florins.  Ce  sont  là  les  engagements 
dont  il  est  question  dans  l'article.  Les  comtés  de  Bo- 
cholt  et  d'Ahaus  furent  donnés  aux  deux  branches  de 
Salm  par  indivis,  à  charge  de  les  partager,  ulté- 
rieurement, dans  la  proportion  de  deux  tiers  pour 
Salm-Salm,  et  un  tiers  pourSalm-Kyrbourg.Ce  partage 
n'a  jamais  eu  lieu;  seulement  le  prince  Salm-Kyrbourg 
fixa  sa  résidence  à  Ahaus,  et  le  prince  de  Salm-Salm  fixa 
la  sienne  à  Anholt.  Mais,  il  y  a  peu  d'années,  les  in- 
térêts respectifs  des  deux  familles  princières  ont  été  ré- 
glés par  une  transaction  définitive. 

L'ancienne  maison  de  Salm  était  divisée,  comme 
nous  l'avons  vu,  en  quatre  branches  ;  mais  l'une  d'elles, 
celle  de  Hainspach  en  Bohême,  n'avait  rien  perdu  par 
la  cession  de  la  rive  gauche  du  Rhin.  Les  trois  autres 
avaient  fait  les  pertes  dont  nous  parlerons,  et  pour  les- 
quelles le  premier  plan  les  avait  renvoyées,  avec  la 
maison  Rhingravienne,  aux  restes  du  haut  évêché  de 
Munster.  Mais  comme  dans  le  second  plan  on  en  avait 
encore  détaché  le  bailliage  de  Diilmen  pour  le  donner 
au  duc  de  Croï ,  et  que  la  maison  Rhingravienne  eût 
obtenu  au  delà  de  la  valeur  de  ses  pertes,  on  renonça 
à  placer  les  anciens  princes  et  comtes  de  Salm  en 
Westphalie.  En  conséquence  on  assigna  : 

V  A  la  maison  de  Salm-Reifferscheidt-Bedbur,  pour 
le  comté  de  Reifferscheidt  et  la  seigneurie  de  Bedbur 
qui,  d'après  les  estimations  présentées,  rapportaient, 
le  premier,  sous  la  supériorité  territoriale  de  l'élec- 
teur de  Cologne,  sept  mille  huit  cent  florins,  et 
l'autre  vingt-sept  mille  six  cents  florins  :  le  bailliage 
mayençais  de  Krautheim,  sur  le  Jaxt,  qui,  sans  Na- 
gelsberg,  Billigheim  et  Neidenau,  qui  en  furent  déta- 
chés, le  premier  pour  Hohenlohe-ïngelfingen ,  et  les 
deux  autres  pour  Linange-Westerbourg ,  avait  encore 
sur  quatre  milles  carrés  et  demi,  huit  mille  habitants; 


__  276  — 

on  y  ajouta  une  rente  de  trente-deux  mille  florins  sur 
Amorbach,  c'est-à-dire  sur  le  prince  de  Linange.  Cette 
nouvelle  possession  de  la  maison  de  Salm  fut  élevée, 
en  1 804,  par  l'Empereur,  au  rang  d'une  principauté, 
sous  le  titre  de  Krautheim.  Par  un  arrangement  qui 
fut  conclu  immédiatement  après  le  Recès,  le  prince 
de  Linange  racheta  la  rente  de  trente-deux  mille  flo- 
rins par  la  cession  de  l'abbaye  de  Gerlachsheim,  du 
bailliage  de  Grûnsfeld  et  du  village  de  Distelhausen, 
que  le  paragraphe  20  lui  avait  abandonnés;  et,  au 
mois  d'avril  1805,  Distelhausen  fut  échangé  contre 
Boppenhausen.  D'après  des  données  statistiques 
exactes,  qui  furent  publiées  quelques  années  plus 
tard,  on  sut  que  la  principauté  de  Salm-Krautheim 
renfermait  treize  mille  huit  cent  soixante-dix  habi- 
tants, et  rapportait  quatre-vingt  mille  florins  ; 

2°  A  la  branche  de  Salm-Reifferscheidt,  qui  avait 
perdu  le  comté  médiat  de  Salm  dans  le  Luxembourg, 
une  rente  de  douze  mille  florins  fondée  sur  l'abbaye 
de  Schœnthal-sur-le-Jaxt,  et  payable  par  le  duc  de 
Wurtemberg'; 

3°  A  celle  de  Salm-Reifferscheidt-Dyck ,  pour  les 
droits  féodaux  et  seigneuriaux  de  la  seigneurie  de 
Dyck,  passée  sous  la  domination  française,  une  rente 
de  vingt-huit  mille  florins  payable  par  la  ville  de 
Francfort,  qui  la  racheta  en  1805.  Le  chef  de  cette 
branche  ayant  été  créé  comte  de  l'Empire  français  en 
1809,  fut  réintégré  dans  ses  biens  situés  en  France.  Il 
a  été  élevé  à  la  dignité  de  prince  par  le  roi  de  Prusse, 
en  1816. 

S  4. 

«  Au  roi  d'Angleterre  y  électeur  de  lirunsicic-Lu- 
ncbourg  pour  ses  prétentions  au  comté  de  Sayn-Alten- 
kirchen,  Hildesheim,  Corvey  et  Hœxter,  et  ses  droits 


—  277  — 

et  propriétés  dans  les  villes  de  Hambourg  et  de  Bremen 
et  leurs  territoires,  notamment  dans  le  territoire  de 
cette  dernière,  tel  qu'il  sera  déterminé  ci-après,  comme 
aussi  pour  la  cession  du  bailliage  de  Wildeshausen  : 
révêché  d'Osnabruck. 

((  Au  duc  de  Brunswic-Wolfenbûttel  :  les  abbayes 
de  Gandersheim  et  de  Helmstsedt,  à  charge  d'une 
rente  perpétuelle  de  deux  mille  florins  envers  la  fon- 
dation de  la  princesse  Amélie  à  Dessau.  » 

Ce  paragraphe  se  rapporte  en  entier  aux  deux  bran- 
ches de  la  maison  de  Brunswic.  Cette  maison  n'avait 
rien  perdu  par  la  cession  de  la  rive  gauche  du  Rhin  ;  par 
conséquent,  elle  n'étaitpas  comprise  dans  lacatégorie  de 
celles  auxquelles  la  paix  de  Lunéville  avait  promis  une 
indemnité.  Aussi  le  premier  plan  l'avait-il  passée  sous 
silence.  Mais  comme  les  médiateurs  réunirent  en  une 
seule  masse  les  fondations  immédiates  évangéliques 
et  les  biens  ecclésiastiques  catholiques,  la  maison 
de  Brunswic  se  trouva  favorisée  par  leur  plan ,  et  ap- 
pelée à  recevoir  une  indemnité.  Elle  l'obtint  dans 
une  proportion  bien  supérieure  à  sa  perte. 


L'électeur  de  Brunswic-Lunébourg  perdit  par  le 
Recès  : 

r  Ses  prétentions  au  comté  de  Sayn-Altenkirchen. 
Plusieurs  princes  d'Empire  ont  réclamé  des  indem- 
nités pour  de  simples  prétentions  à  des  droits  souvent 
douteux,  presque  toujours  éventuels.  La  prétention  de 
la  maison  de  Brunswic  au  comté  de  Sayn-Altenkir- 
chen n'est  pas  de  cette  catégorie.  Les  anciens  comtes 
de  Sayn  s'éteignirent  en  1 606,  et  l'héritière  du  comté, 
qui  avait  épousé  un  comte  de  Wittgenstein,  le  transmit 
à  son  fils  unique,  qui  mourut  en  1636,  laissant  deux 
sœurs,  qui  se  partagèrent  le  comté  :  l'une  eut  Hachen- 


—  278  — 

bourg,  dont  nous  ne  parlons  pas  ici',  la  cadette  Alten- 
kirchen.  Celle-ci  épousa  Jean-George ,  duc  de  Saxe- 
Eisenach,  et  ordonna  que  le  comté  de  Sayn-Altenkir- 
chen  passerait  de  préférence  à  sa  fille,  qui  était  l'aînée 
de  ses  enfants.  Cette  fille,  nommée  Èléonore,  épousa 
le  margrave  d'Anspach,  Jean-Frédéric.  Elle  laissa  un 
fils  et  une  fille.  Le  fils  régna  après  la  mort  de  deux 
frères  consanguins,  ses  aînés,  comme  margrave  d'Ans- 
pach, et  hérita  aussi  de  sa  mère  du  comté  de  Sayn- 
Altenkirchen.  Il  transmit  ses  États  à  ses  descendants, 
dont  le  dernier  était  Alexandre  y  margrave  d'Anspach 
et  de  Bayreuth.  Comme  celui-ci  n'avait  pas  d'enfants, 
il  résigna,  en  1 792,  ses  margraviats  au  roi  de  Prusse  ; 
mais  il  conserva  le  comté  de  Sayn-Altenkirchen  qui, 
après  sa  mort,  devait  passer  au  roi  d'Angleterre, 
électeur  de  Brunswic-Lunébourg,  comme  descendant 
de  la  fille  à'Éléonore  de  Saxe  et  du  margrave  Jean-Fré- 
déric. Comme  le  Recès  disposa  autrement  du  comté  de 
Sayn-Altenkirchen,  il  fallut  que  l'Électeur  renonçât  à 
cette  succession  qui  lui  serait  échue  en  1 806.  Ce  comté 
rapportait  quatre-vingt  mille  florins*; 

2°  L'Électeurperdit  ses  prétentions  surHildesheim, 
Corvey  et  Hœxterj  c'était  un  droit  de  protection  ou 
d'avoierie  plus  onéreux  que  lucratif; 

3"  11  perdit  les  droits  et  propriétés  qu'il  possédait 
dans  les  villes  de  Hambourg  et  Brème,  comme  duc  de 
Brème,  successeur  des  archevêques.  Nous  en  parle- 
rons à  l'occasion  du  paragraphe  27; 

4°  Le  bailliage  de  Wildeshausen,  situé  sur  la  Hunte, 

•  Nous  rappellerons  seulement  que  le  comté  de  Sayn-Hachenbourg 
entra  par  mariage  dans  la  maison  des  bourgraves  de  KincuBEna,  et  qu'à 
l'extinclion  du  dernier  mâle  de  celle-ci,  en  1799,  il  échut  à  la  princesse 
régnante  de  Nassau- Weilbouro. 

•  Estimation  commune.  Une  autre,  qu'on  dit  tirée  des  Archives,  ne 
les  porte  qu'à  trente  mille  rthlr.  ou  cinquante-cinq  mille  florins. 
Voy.  Polit.  Jour».,  4805,  1. 1,  p.  475. 


—  2T9  — 

en  Westphalie,  dont  le  Recès  disposa  en  faveur  du 
duc  d'Oldenbourg  :  il  rapportait  vingt-cinq  mille,  ou, 
selon  d'autres,  seize  mille  cinq  cents  florins  seule- 
ment ; 

5"  Le  dôme  de  Brème,  dont  les  revenus  annuels  se 
montaient  à  quarante-sept  mille  cinq  cents  florins. 
Total  de  la  perte,  cent  quarante-quatre  mille  florins  de 
revenus. 

En  compensation  de  ces  pertes  actuelles  ou  futures, 
le  Recès  accorde  à  la  maison  de  Brunswic-Lunébourg 
l'évêché  d'Osnabruck,  comprenant  sur  cinquante  milles 
carrés,  une  population  de  cent  vingt-six  mille  habi- 
tants, et  rapportant  sept  cent  cinquante  mille  florins; 
magnifique  indemnité,  qui  avait  été  convenue  à  la 
suite  d'une  négociation  particulière  qui  eut  lieu  à 
Londres,  et  sur  laquelle  on  ne  connaît  aucun  détail  : 
ce  qui  en  diminue  cependant  la  valeur,  c'est  que, 
d'après  les  stipulations  de  la  paix  de  Westphalie, 
Osnabruck  avait  alternativement  un  évêque  catholique 
et  un  évêque  protestant  de  la  maison  de  Brunswic, 
de  manière  que,  le  cas  échéant,  il  servait  d'apanage 
à  un  prince  puîné  de  la  maison.  En  effet,  depuis  1 764, 
le  duc  d'York,  second  fils  du  roi  d'Angleterre,  était 
évêque  d'Osnabruck. 

Le  premier  plan  d'indemnité  alloua  cet  évêché  à  la 
maison  de  Brunswic-Lunébourg,  sans  autres  condi- 
tions que  celles  qui  sont  exprimées  dans  le  Recès;  le 
second  lui  imposait  une  double  charge,  savoir  une 
rente  annuelle  de  dix  mille  florins  en  faveur  du  duc 
de  Mecklenbourg-Schvi^erin,  et  la  cession  de  l'abbaye 
de  Wittmarsen.  L'Électeur  s'y  étant  constamment  re- 
fusé, le  premier  conclusum  général,  du  25  novembre, 
lui  laissa  Wittmarsen,  et  le  Recès  l'exonéra  de  la 
rente. 

La  maison  de  Brunswic-Wolfenbùttel  n'avait  rien 


—  280  — 

perdu,  ni  par  la  cession  delà  rive  gauche  du  Rhin,  ni 
par  les  dispositions  du  premier  plan  d'indemnités,  à 
moins  qu'on  ne  veuille  compter  pour  quelque  chose 
les  droits  qu'ainsi  que  celle  de  Lunébourg,  elle  pré- 
tendait sur  l'évêché  de  Hildesheim;  mais  comme  les 
auteurs  du  premier  plan  avaient  oublié  de  faire  men- 
tion de  deux  abbayes  situées  dans  l'enceinte  du  duché, 
le  duc  les  réclama,  et  le  Recès  les  lui  alloua;  c'étaient 
Gandersheim  et  Helmstaedt.  L'abbaye  protestante  de 
femmes  qui  se  trouvait  à  Gandersheim,  ville  du  Harz, 
était  immédiate,  et  l'abbesse  avait  voix  et  séance  à  la 
Diète  :  celle  d'Helmstœdt ,  située  dans  la  ville  de  ce 
nom,  et  dépendant  de  l'abbaye  de  Werden,  était  sous 
la  supériorité  territoriale  des  ducs  de  Brunswic.  Ces 
deux  fondations  rapportaient  quarante  mille  florins. 
Elles  furent  données  au  Duc,  à  charge  d'une  rente 
perpétuelle  de  deux  mille  florins  envers  la  fondation 
de  la  princesse  Amélie  à  Dessau.  Cette  princesse,  morte 
en  1 793,  avait  acquis,  dans  les  environs  de  Kreuznach, 
des  terres  de  la  valeur  de  quarante-six  mille  deux  cent 
sept  florins,  que,  par  son  testament,  elle  légua  aux 
pauvres  et  malades  de  sa  ville  natale.  Le  gouverne- 
ment français  les  avait  séquestrés  en  1 799,  et  ce  fut 
une  heureuse  idée  de  la  Députation  d'imposer,  en  fa- 
veur de  cette  institution,  une  charge  perpétuelle  à  un 
prince  qui  n'avait  fait  que  gagner  aux  arrangements 
de  1803. 

§  5. 

«  Au  margrave  de  Bade,  pour  sa  part  au  comté  de 
Sponheim  et  ses  terres  et  seigneuries  dans  le  J^uxem- 
bourg,  l'Alsace,  etc.  :  l'évêché  de  Constance,  les  restes 
des  évêchésde  Spire,  Baie  et  Strasbourg;  les  bailliages 
palatins  de  Ladenbourg,  Bretten  et  Heidelberg,  avec 
les  villes  de  Heidelberg  et  de  Mannheim;  plus,  la  sel- 


~  281   — 

gneurie  de  Lahr,  aux  conditions  convenues  entre  ledit 
margrave,  le  prince  de  Nassau-Usingen  et  les  autres 
intéressés;  plus,  les  bailliages  hessois  de  Lichtenau  et 
de  Wildstœdtj  plus,  les  abbayes  de  Schwarzach , 
Frauenalb,  AUerheiligen  ,  Lichtenthal,  Gengenbach, 
Ettenheim-Munster,  Petershausen,  Reichenau,  Oehnin- 
gen,  la  prévôté  et  le  chapitre  d'Odenheim,  et  l'abbaye 
de  Salmansweiler,  à  la  réserve  d'Ostrach  et  des  an- 
nexes ci-après,  les  villes  impériales  d'Offenbourg, 
Zell  am  Hammersbach ,  Gengenbach,  Ueberlingen, 
Biberach,  Pfullendorff  et  Wimpfen;  enfin,  les  droits 
et  possessions  tant  médiats  qu'immédiats  dépendant 
des  établissements  publics  et  corporations  de  la  rive 
gauche  du  Rhin  au  sud  du  Necker.  » 

De  tous  les  princes  qui  ont  fait  des  pertes  par  la 
cession  de  la  rive  gauche  du  Rhin,  il  n'y  en  a  pas  qui 
ait  reçu  une  indemnisation  proportionnellement  plus 
grande  que  le  margrave  de  Bade.  Elle  surpasse  six 
fois  sa  perte,  et,  après  le  Recès  de  1 803,  ses  revenus 
se  trouvèrent  doublés.  Il  dut  ce  traitement  favorable 
autant  à  la  considération  que  ses  vertus  avaient  inspi- 
rée pour  sa  personne,  qu'à  son  alliance  avec  l'empe- 
reur de  Russie  qui  avait  épousé  sa  petite-fille.  La 
maison  de  Bade  avait  perdu  sa  part  du  comté  de  Spon- 
heim  qui,  sur  huit  milles  carrés,  renfermait  vingt- 
cinq  mille  cinq  cents  habitants,  et  rapportait  cent 
soixante-deux  mille  florins,  ainsi  que  des  possessions 
médiates  en  Alsace  et  dans  le  Luxembourg,  dont  le  re- 
venu se  montait  à  soixante-dix-huit  mille  florins. 
Comme  il  ne  se  trouvait  pas  à  la  convenance  du  mar- 
grave d'évêché  considérable  au  moyen  duquel  on 
eût  arrondi  ses  États,  on  se  vit  obligé  d'y  réunir  di- 
verses parcelles  de  territoire  détachées,  situées  dans 
la  proximité  du  margraviat,  en  engageant  les  maisons 
de  Hesse-Darmstadt  et  de  Nassau-Usingen  à  lui  céder 


—  282  — 

les  terres  qu'elles  possédaient  en  Souabe.  Malgré  ces  ar- 
rangements, on  ne  put  établir  la  contiguïté  entre  tous  les 
districts  qu'on  assigna  au  margrave.  L'évêché  de  Con- 
stance, qu'on  lui  donna,  était  séparé  des  autres  posses- 
sions qu'il  avait  alors,  etleBrisgau  se  trouvait  interposé 
entre  le  haut  margraviat  et  le  margraviat  inférieur, 
qui,  sans  cette  interruption,  auraient  formé  une  éten- 
due de  cinquante  lieues  le  long  du  Rhin. 

L'évêché  de  Constance  était  situé  sur  le  lac  de  ce 
nom  :  la  ville  de  Constance  n'y  appartenait  pas.  L'évê- 
que,  dont  Mœrsbourg  était  la  résidence,  avait  un  dio- 
cèse beaucoup  plus  considérable  que  son  territoire  ;  il 
étendait  sa  juridiction  sur  une  grande  partie  de  la 
Suisse. 

L'évêque  de  Spire  avait  perdu  quelques  bailliages 
situés  sur  la  rive  gauche  du  Rhin,  ainsi  que  ses  pos- 
sessions médiates  en  Alsace;  cependant  la  plus  grande 
partie  de  l'évêché  avec  Bruchsal,  la  résidence,  et  la 
forteresse  de  Philippsbourg,  étaient  situées  sur  la  rive 
droite  de  ce  fleuve. 

Il  n'en  était  pas  de  même  des  évêchés  de  Strasbourg 
et  de  Baie.  Le  premier,  dont  les  plus  belles  possessions 
étaient  situées  en  Alsace,  n'avait  sur  la  rive  droite 
que  le  bailliage  d'Oberkirch  dans  l'Ortenau,  et  Etten- 
heim  dans  le  Brisgau ,  dont  le  chef-lieu  ,  une  année 
plus  tard,  acquit  une  si  malheureuse  célébrité.  L'évê- 
que de  Bâle  n'avait  sur  cette  rive  que  le  seul  bailliage 
de  Schlingen  à  quelques  lieues  de  Bâle,  sur  le  Rhin. 

La  partie  la  plus  importante  de  l'indemnité  assignée 
au  margrave  de  Bade,  consistait  dans  le  district  du 
Palatinat,  composé  des  bailliages  de  Ladenbourg,  Bret- 
ten  et  Heidelberg,  avec  les  villes  de  Heidelberg  et  de 
Mannheim,  les  deux  capitales  de  Télectorat,  auxquelles 
aucune  autre  ville  du  margraviat  ne  pouvait  se  com- 
parer. Par  cette  cession,  le  pays  de  Bade  eut  aussi  son 


^  -283  — 

université  particulière;  elle  était  établie  à  Heidelberg. 

La  seigneurie  de  Lahr,  dans  l'Ortenau,  appartenait 
au  prince  de  Nassau-Usingen.  Elle  fut  cédée  au  mar- 
grave de  Bade  aux  conditions  convenues  entre  ce  mar- 
grave, le  prince  de  Nassau-Usingen  et  les  autres  inté- 
ressés. On  ne  connaît  pas  cette  convention;  mais  il 
paraît  qu'à  l'égard  du  prince  de  Nassau-Usingen,  elle 
renfermait  la  stipulation  qu'il  ne  se  dessaisirait  de  ce 
domaine  que  lorsqu'il  aurait  été  mis  en  possession  du 
comté  de  Sayn-Altenkirchen,  c'est-à-dire  après  la  mort 
du  dernier  margrave  de  Brandebourg-Anspach  et  Bay- 
reuth.  C'est  ainsi,  du  moins,  que  la  condition  était  ex- 
primée dans  le  premier  plan.  Peu  de  temps  après  le 
Recès,  le  margrave  de  Bade  engagea  celui  d'Anspach 
à  abdiquer  le  comté  de  Sayn-Altenkirchen,  contre  une 
pension  de  trente  mille  florins  qu'il  promit  de  lui 
payer;  ce  comté  passa  alors  au  prince  de  Nassau,  et 
le  margrave  de  Bade  fut  mis  en  possession  de  la  sei- 
gneurie de  Lahr. 

L'acquisition  que  fit  ce  prince  des  bailliages  hessois 
de  Lichtenau  et  de  Wildstœdt,  était  fort  intéressante, 
tant  par  la  fertilité  de  ces  deux  bailliages  que  parce 
que  cette  possession  arrondissait  ses  États  :  nous  re- 
viendrons sur  ce  petit  pays  à  l'article  7  du  Recès. 

Quatre  abbayes  immédiates  furent  sécularisées  en 
faveur  du  margrave  ;  savoir:  SalmansweilerenSouabe, 
distraction  néanmoins  faite  du  bailliage  d'Ostrach  qui 
fut  donné  à  un  autre  prince;  la  prévôté  d'Odenheim, 
dont  le  siège  était  à  Bruchsal  ;  l'abbaye  de  Gengen- 
bach,  dans  la  ville  de  ce  nom,  et  Petershausen,  près 
de  Constance.  Les  sept  autres  abbayes  étaient  médiates; 
savoir:  Reichenau,  dans  une  île  du  lac  de  Zell,  qui 
fait  partie  de  celui  de  Constance;  Oehningen,  dans 
l'évêché  de  Constance;  Allerheiligen  et  Ettenheim- 
Munster,  dans  l'évêché  de  Strasbourg;  Frauenalb  et 


—  284  — 

Lichtenthal,  dans  le  margraviat  inférieur  de  Bade,  et 
Schwarzach,  près  de  Lichtenau. 

Parmi  les  villes  impériales  qui  échurent  au  mar- 
grave, Biberacli  était  la  plus  considérable  par  son  éten- 
due et  par  l'industrie  de  ses  habitants. 

Récapitulons  les  nouvelles  acquisitions  de  ce  prince . 

m.  c.  habitants.  tlor.  de  rev. 

L'évêché  de  Constance 5  U  000  80  000 

Celui  de  Spire 'l\  30000  150  000 

Celui  de  Strasbourg 6^  20  000  130  000 

Celui  de Bâle |  1000  10000 

Une  partie  du  Palatinat 17  99000  500  000 

La  seigneurie  de  Lahr 1  7  000  40  000 

Les  bailliages hessois 5  15  000  80000 

Sept  villes  impériales 7f  37  000  150  000 

Quatre  abbayes  immédiates 6  14000  1 75  000 

Sept  abbayes  médiates 225000 


Total...     59f    237  000       1540  000 
Montant  de  la  perte 8        25500'        240000 


Augmentation 51 J     211500      1300000 

§6. 

«  Au  duc  de  Wurtemberg,  pour  la  principauté  de 
Montbéliard  et  dépendances;  comme  aussi  pour  ses 
droits,  possessions ,  charges  et  répétitions  en  Alsace 
et  Franche-Comté:  la  prévôté  d'Elwangen,  les  cha- 
pitres, abbayes  et  couvents  de  Zwiefalten,  Schœnthal, 
Combourg,  avec  supériorité  territoriale  (sauf  les  droits 
des  princes  séculiers  et  du  comté  de  Limbourg), 
Rothmunster,  Heiligenkreutzthal,  Obristenfeld,  Mar- 
garethhausen,  et  tous  ceux  situés  dans  ses  nouvelles 
possessions;  plus,  le  village  de  Durrenmetstetten  et 

'  Dans  diverses  évaluations ,  on  a  fait  monter  la  perte  du  mar- 
grave à  trente-huit  mille  quatre  cent  trente  habitants;  mais  nous  sup- 
posons que,  dans  ce  nombre,  ceux  des  possessions  médiates  sont  com- 
prises. 


—  285  — 

les  villes  impériales  de  Weil,  Reutlingen,  Eslingen, 
Rothweil,  Giengen,  Aalen,Hall,  Gmiindtet  Heilbronn; 
le  tout  à  charge  de  servir  les  rentes  perpétuelles  sui- 
vantes; savoir  : 

«  Aux  princes  de  Hohenlohe-Waldenbourg,  pour 
leur  part  au  péage  de  Boppard  ;  six  cents  florins,  dont 
moitié  à  Bartenstein,  moitié  à  Schillingsfiirst. 

«  Au  prince  de  Salm-Reifferscheidt,  pour  son  comté 
de  Niedersalm  :  douze  mille  florins. 

«  Au  comte  de  Limbourg-Styrum,  pour  la  seigneu- 
rie d'Oberstein  :  douze  mille  deux  cents  florins. 

«  Au  comte  de  Schall ,  pour  sa  terre  de  Megen  : 
douze  mille  florins. 

H  A  la  comtesse  de  Hillesheim,  pour  sa  part  à  la 
seigneurie  de  Reipoîtskirchen  :  cinq  mille  quatre  cents 
florins. 

«  A  la  comtesse  douairière  de  Lœwenhaupt,  pour 
les  droits  féodaux  de  sa  part  à  la  seigneurie  d'Ober 
et  Niederbronn  .  onze  mille  trois  cents  florins. 

«  Aux  héritiers  du  baron  de  Dietrich  pour  idem  : 
trente  et  un  mille  deux  cents  florins. 

«  Aux  sieurs  Seubert,  pour  les  fiefs  Benthal  etBre- 
tigny  :  trois  mille  trois  cents  florins.  » 

Les  pertes  qu'avaient  éprouvées  le  duc  de  Wurtem- 
berg se  rapportent  aux  indemnités  qu'il  reçut  comme 
deux  à  trois,  et  les  dernières  furent  choisies  de  ma- 
nière qu'elles  arrondirent  parfaitement  ses  anciens 
États. 

Sa  perte  consistait  dans  le  comté  de  Montbéliard, 
un  des  restes  de  l'ancien  royaume  d'Arles,  qui,  an- 
ciennement régi  par  des  comtes  particuliers,  avait  été 
porté,  vers  la  fin  du  xiv"  siècle,  par  mariage,  dans  la 
maison  de  Wurtemberg.  Indépendamment  de  ce  comté, 
le  seul  pays  immédiat  dont  la  paix  de  Lunéville  dé- 


--  286  — 

pouilla  ce  prince,  il  avait  encore  perdu  les  seigneuries 
d'Héricourt,  de  Châtelet,  Blamont,  Clermont,  Granges, 
Clerval  et  Passavant ,  regardées  comme  dépendances 
du  comté ,  mais  sur  lesquelles  la  France  exerçait  la 
souveraineté.  Le  comté,  sans  les  seigneuries,  avait 
sept  milles  carrés  de  surface,  avec  quatorze  mille  ha- 
bitants; avec  les  seigneuries,  il  rapportait  deux  cent 
quarante-huit  mille  florins. 

A  l'indemnité  que  le  premier  plan  avait  destinée  au 
duc  de  Wurtemberg,  le  second  ajouta  les  abbayes  de 
Schœnthal,  Combourg,  Rothmiinster,  Heiligenkreutz- 
thal,  Obristenfeld  et  Margarethliausen,  et  le  village  de 
Durrenmetstetten,  près  Dornstetten,  c'est-à-dire  la 
moitié  de  ce  village  qui  appartenait  au  couvent  de 
Mûri  en  Suisse ,  car  l'autre  moitié  était  déjà  wiirtem- 
bergeoise.  Le  même  plan  y  ajouta  encore  le  couvent 
de  Holzhausen ,  qui  était  omis  dans  le  premier  con- 
clusum  général. 

Schœnthal  et  Combourg  étaient  situés  dans  l'évêché 
de  Wiirzbourg;  Combourg  était  soumis  à  la  supério- 
rité territoriale  de  l'évêque;  Kothmiinster  était  une 
abbaye  de  femmes,  sur  le  Neckar,  près  de  Rothweil  ; 
Heiligenkreutzthal  était  un  couvent  de  femmes ,  dans 
la  préfecture  autrichienne  de  Souabe,  et  sous  la  supé- 
riorité territoriale  de  l'Autriche;  mais,  malgré  les 
réclamations  du  subdélégué  de  Bohême,  les  média- 
teurs le  comprirent  dans  la  masse  des  indemnités. 
Nous  verrons  par  la  suite  que  la  maison  d'Autriche  se 
maintmt  dans  cette  possession.  Obristenfeld  était  éga- 
lement une  fondation  de  dames  nobles,  dans  un  bourg 
wiirtembergeois  du  bailliage  de  Beilstein.  Marga- 
rethhausen,  couvent  de  religieuses,  était  agrégé  au 
canton  de  Necker  et  de  Forêt-Noire  de  la  Noblesse  im- 
médiate. 

Outre  ces  couvents,  l'article  du  Recès  adjuge  encore 


—  287  — 

au  duc  de  Wurtemberg  tous  ceux  qui  se  trouvent  dans 
ses  nouvelles  possessions.  Le  second  plan  disait  :  dans 
ses  nouvelles  possessions  aussi  bien  que  dans  les  an- 
ciennes; mais  comme  cette  stipulation  aurait  renversé 
la  constitution  du  pays,  le  premier  conclusum  ajouta  : 
sans  préjudice  de  l'emploi  constitutionnel  des  der- 
nières; et  enfin  le  Recès  principal  omit  ces  mots: 
dans  les  anciennes  possessions,  et  la  clause  salvatoire. 
On  sait  que  le  duché  de  Wurtemberg  renfermait  onze 
anciens  couvents  qui,  depuis  la  Réformation,  ont  été 
sécularisés,  et  dont  les  prélats  protestants  siégeaient 
parmi  les  États  du  pays. 

Ce  fut  en  considération  de  l'augmentation  que  le 
second  plan  accorda  au  Duc,  laquelle  se  montait  à  un 
revenu  de  cent  cinquante  mille  florins,  qu'on  char- 
gea ce  prince  de  servir  diverses  rentes  s'élèvant  à  une 
somme  de  quatre-vingt-huit  mille  florins.  Voici  un 
aperçu  des  indemnités  wûrtembergeoises  : 

m.  c.  habit.  rev.  en  flor. 

La  prévôté  d'Elwangen 6|  20  000  1 30  000 

L'abbaye  de  Zwiefalten 3|  8  000  60  000 

Les  six  autres  abbayes  et  couvents 2|  7  000  i  50  000 

Neuf  villes  impériales  et  un  village 1 6|  85  000  360  000 

700000 
Dont  à  déduire  les  rentes 88  000 

Total 29^      120000        612000 

Perte 7  14000       240000 

Augmentation....     22^      106000       372000 

Disons  encore  un  mot  des  rentes  dont  le  duc  de 
Wurtemberg  fut  chargé. 

Un  péage  du  Rhin,  qui  se  percevait  à  Boppard,  ville 
de  l'électorat  de  Trêves,  appartenait  à  plusieurs  con- 
sorts. Une  des  deux  branches  principales  de  la  maison 
de  Hohenlohe,  celle  de  Waldenbourg ,  y  participait 
pour  environ  cinq  cent  vingt-six  florins;  le  duc  de 


—  288  — 

Wurtemberg  fut  obligé  de  l'en  indemniser,  moyennant 
une  rente  annuelle  de  six  cents  florins  dont  il  s'est 
probablement  racheté. 

Nous  avons  déjà  parlé  de  la  perte  du  comté  infé- 
rieur de  Salm  :  la  maison  de  Reifl'erscheidt,  pour  la- 
quelle on  n'avait  plus  trouvé  d'indemnité  en  West- 
phalie,  eut  une  rente  de  douze  mille  florins  sur  le  duc 
de  Wurtemberg. 

H  y  avait  en  Allemagne  deux  maisons  d'une  origine 
très-différente,  dont  l'une  s'appelait  Limbourg ,  et 
l'autre  Limpourg.  La  dernière  avait  ses  possessions  en 
Franconie,  et  s'éteignit  en  1713.  Son  comté  fut  alors 
divisé  entre  un  grand  nombre  de  princes  et  de  parti- 
culiers; mais  le  titre  et  le  droit  de  siéger  aux  Diètes 
du  cercle  de  Franconie  passa  à  la  maison  de  PûcJder, 
dont  une  branche  prit  le  nom  de  Limpourg-Sontheim. 
La  maison  de  Limbourg  avait  une  origine  plus  illustre  ; 
elle  remontait  aux  anciens  comtes  de  Teisterbant  en 
Gueldre,  qu'on  trouve  dès  le  viii"  siècle,  et  desquels 
descendaient,  1"  la  maison  de  Limbourg-Luxembourg, 
qui  donna  quatre  Empereurs  à  l'Allemagne  et  s'éteignit 
en  1437,  2°  la  maison  des  ducs  de  Juliers,  Clèves  et 
Berg,  éteinte  en  1609.  Le  comte  de  Limbourg-Styruni, 
ainsi  surnommé  d'après  un  château  que  ses  ancêtres 
avaient  bâti  dans  le  duché  de  Berg,  ne  possédait  plus, 
des  grands  biens  de  sa  maison ,  que  quelques  terres 
éparsesen  Westphalie,  en  Belgique,  et  la  seigneurie 
d'Oberstein  dans  l'Eyffel.  11  perdit  la  dernière  par  la 
cession  de  la  rive  gauche  du  Rhin  ;  elle  était  peu  con- 
sidérable, ne  renfermait  que  deux  mille  deux  cents 
habitants,  et  rapportait  quatorze  mille  florins.  Dans 
le  premier  plan,  on  avait  oublié  d'en  parler.  La  rente 
de  douze  mille  deux  cents  florins,  affectée  sur  le  duché 


—  289  — 

de  Wurtemberg,  indemnisa  donc  largement  le  comte 
de  sa  perte.  Au  reste,  cette  rente  ne  fut  pas  longtemps 
à  la  charge  du  duc  de  Wurtemberg,  puisque  le  comte, 
qui  était  le  dernier  de  sa  maison,  mourut  en  1809- 
La  seigneurie  de  Reipoltskirchen,  dans  le  Hunds- 
drûck,  était  bien  immédiate,  mais  n'avait  pas  voix  et 
séance  à  la  Diète.  Le  premier  plan  avait  supposé  que 
ce  comté  appartenait  aux  comtes  de  Lœwenhaupt  et 
de  Hillesheim;  il  se  trouva  depuis  qu'il  avait  été  la 
propriété  de  la  comtesse  de  Hillesheim  et  de  la  prin- 
cesse d'Isembourg.  Celle-ci  eut  sa  compensation  par 
le  paragraphe  19.  Ce  comté  rapportait  à  la  com- 
tesse de  Hillesheim  quatre  mille  trois  cent  quarante- 
quatre  florins,  ainsi  un  peu  moins  que  la  rente  qui 
fut  donnée  à  titre  d'indemnité.  Les  autres  personnes 
nommées  dans  ce  paragraphe  n'avaient  aucun  droit  à 
une  indemnité;  la  faveur  seule  les  a  fait  placer  sur 
cette  liste. 

«  Au  landgrave  de  Hesse-Cassel ,  pour  Saint-Goar 
et  Rheinfels ,  et  ses  droits  et  prétentions  sur  Corvey  : 
les  bailliages  mayençais  de  Fritzlar,  Naumbourg,  Neu- 
stadt  et  Amœnebourgj  les  chapitres  de  Fritzlar  et  d'A- 
mœnebourg,  et  les  couvents  auxdits  bailliages;  plus, 
la  ville  de  Gelnhausen  et  le  village  d'Empire  de  Holz- 
hausen;  le  tout  à  charge  d'une  rente  perpétuelle  de 
vingt-deux  mille  cinq  cents  florins  envers  le  landgrave 
de  Hesse-Rothenbourg,  laquelle  rente  néanmoins  sera 
transférée  dans  la  suite  sur  l'excédant  du  produit  de 
l'octroi  de  navigation  mentionné  au  paragraphe  39, 
si,  après  le  payement  des  rentes  directement  assi- 
gnées sur  ce  produit  dans  le  présent  acte,  il  se  trouve 
un  excédant  suffisant. 

((  Au  landgrave  de  Hesse-Darmsladt .,  pour  le  comté 
vn  19 


—  290  — 

de  Lichtenberg,  la  suppression  de  ses  droits  de  pro- 
tection  sur  Wetzlar  et  de  haut  conduit  à  Francfort, 
et  la  cession  des  bailliages  hessois  de  Lichtenau  et  de 
Wildstaedt,  de  Kazenellenbogen,  deBraubach,d'Embs, 
de  Kleeberg,  d'Epstein  et  du  village  de  Weiperfelden  : 
le  duché  de  Westphalie  avec  dépendances,  et  notam- 
ment Volkmarsen  avec  les  chapitres,  abbayes  et  cou- 
vents qui  se  trouvent  dans  ledit  duché,  à  charge  d'une 
rente  perpétuelle  de  quinze  mille  florins  envers  le 
prince  de  Wittgenstein  -  Berlebourg ,   laquelle  rente 
néanmoins  sera  transférée  dans  la  suite  sur  l'excédant 
du  produit  de  l'octroi  de  navigation  mentionné  au 
paragraphe  39,   si ,  après  le  payement    des  rentes 
directement  assignées  sur  ce  produit   dans  le  pré- 
sent acte,  il  se   trouve  un  excédant  suffisant;  plus, 
les  bailliages  mayencais  de  Gernsheim,   Bensheim, 
Heppenheim,  Lorsch,  Fûrth,  Steinheim,  Alzenau,  Vil- 
bel,  Rockenbourg,  Hassloch,  Astheim,  Hirschhorn, 
les  possessions  et  revenus  dépendant  de  Mayence,  au 
sud  du  Mein,  situés  au  pays  de  Darmstadt,  notamment 
les  cens  de  Mœnchshof,  GundhofetClarenberg,  comme 
aussi  ceux  dépendant  des  chapitres,  abbayes  et  cou- 
vents assignés  ci-après  au  prince  de  Nassau-Usingen, 
à  la  réserve  des  villages  de  Burgel  et  deSchwanheim, 
plus,  les  bailliages  palatins  de  Lindenfels,  Umstadtet 
Otzberg,  et  les  restes  de  ceux  d'Alzey  etd'Oppenheim; 
plus,  les  restes  de  l'évêché  de  Worms,  les  abbayes  de 
Seligenstadt  et  de  Marienschloss,  près  Rockenbourg, 
et  la  prévôté  de  Wimpfen  et  la  ville  impériale  de 
Friedberg;  le  tout  à  charge  d'augmenter  d'un  quart 
au  moins  la  rente  apanagère  du  landgrave  de  Hesse- 
Hombourg.  » 

Ce  paragraphe  détermine  l'indemnité  des  différentes 
branches  de  la  maison  de  Hesse.  La  ligne  aînée,  dite 


—  291   — 

de  Cassel,  et  la  branche  apanagée  de  Rheinfels-Ro- 
thenbourg  avaient  perdu,  sur  la  rive  gauche  du  Rhin, 
la  ville  de  Saint-Goar  et  la  forteresse  de  Rheinfels, 
avec  deux  mille  cinq  cents  habitants.  Le  landgrave 
de  Rheinfels-Rothenbourg,  qui  était  propriétaire  des 
domaines,  estima  sa  perte  à  dix-huit  mille  cent  soixante- 
sept  florins  par  an  ;  les  droits  de  souveraineté ,  qui 
appartenaient  au  landgrave  de  Hesse-Cassel,  ne  peu- 
vent pas  avoir  rapporté  au  delà  de  sept  mille  cinq 
cents  florins.  Pour  cette  perte,  le  premier  plan  avait 
assigné  au  landgrave  de  Hesse-Cassel  les  bailliages 
mayençais  d'Amœnebourg  et  de  Fritzlar,  avec  leurs 
dépendances,  et  le  village  de  Holzhausen ,  à  charge 
d'indemniser  le  landgrave  de  Hesse-Rheinfels-Rothen- 
bourg.  Les  dépendances  d'Amœnebourg  et  de  Fritzlar 
étaient  les  petites  villes  de  Neustadt  et  de  Naumbourg, 
tous  enclaves  de  la  Hesse.  Holzhausen  ou  Burg-Holz- 
hausen,  bourg  du  comté  de  Hanau,  prétendait  être 
immédiat;  mais  les  landgraves  de  Hesse-Cassel  s'étaient 
maintenus  en  possession  de  cet  endroit,  de  manière 
qu'en  le  leur  accordant  à  titre  d'indemnité,  le  premier 
plan  n'avait  d'autre  objet  en  vue  que  de  terminer  une 
discussion  qu'on  pouvait  faire  revivre,  sans  pour  cela 
augmenter  les  revenus  du  Landgrave.  Les  deux  bail- 
liages mayençais,  qui  renfermaient  treize  mille  habi- 
tants, rapportaient  soixante  mille  florins  ^  y  compris 
toutefois  les  chapitres  de  Fritzlar  et  d'Amœnebourg. 
Ainsi,  en  supposant  que  le  Landgrave  eût  payé  à  Hesse- 
Rheinfels  une  rente  de  vingt-deux  mille  cinq  cents 
florins,  il  lui  restait  quarante  mille  florins  pour  l'in- 
demnité de  la  perte  de  ses  droits  de  souveraineté  sur 
deux  villes. 

Cependant  le  landgrave  de  Hesse-Cassel  fut  mécon- 
tent de  cette  compensation.  Son  ministre,  qui  siégeait 
dans  la  Députation,  réclama  une  indemnité  pour  ses 


—  292  — 

prétentions  peu  liquides  sur  Corvey,  Hœxter,  Herse  et 
Oberwesel;  il  éleva  d'abord  des  difficultés  sur  les  cal- 
culs ;  et  quand  il  se  vit  réfuté  par  le  subdélégué  de 
Mayence,  qui  connaissait  parfaitement  le  pays,  il  dé- 
clara qu'il  ne  voyait  pas  pourquoi ,  parmi  toutes  les 
maisons  d'Allemagne  du  premier  rang,  celle  de  Hesse 
devait  être  la  seule  dont  l'indemnité  serait  détermi- 
née d'après  la  perte  réelle,  et  sans  qu'on  eût  égard,  en 
sa  faveur,  à  l'équilibre  de  puissance  qu'on  avait  ob- 
servé envers  les  autres. 

Cet  argument  était  sans  réplique ,  aussi  le  lot  du 
Landgrave  fut-il  augmenté.  Non-seulement  on  y  com- 
prit expressément  les  chapitres  de  Fritzlar  et  d'Amœ- 
nebourg  et  les  autres  couvents,  dont  le  premier  plan 
ne  parlait  pas,  ainsi  que  la  ville  libre  de  Gelnhausen; 
mais  on  voulut  aussi  le  dispenser  de  l'obligation  de 
payer  une  rente  au  landgrave  de  Rothenbourg.  A 
vrai  dire,  en  soumettant  à  sa  supériorité  territo- 
riale la  ville  de  Gelnhausen,  on  n'ajouta  pas  à  ses  re- 
venus. Cette  ville,  anciennement  impériale,  avait  été 
engagée  par  l'empereur  Charles  IV,  et  cet  engagement 
avait  été  cédé  par  la  suite  au  comte  de  Hanau.  Une 
sentence  de  la  Chambre  impériale  deWetzlar  déclara, 
en  1734,  la  ville  immédiate ,  et  elle  se  mit  en  posses- 
sion du  droit  de  voter  à  la  Diète;  mais  comme  le 
landgrave  de  Hesse  avait  pris  son  recours  à  la  Diète, 
et  que  la  ville  se  vit  menacée  d'un  procès  long  et  dis- 
pendieux, elle  renonça,  sous  le  règne  de  Charles  VII, 
à  son  immédiateté. 

La  seconde  ligne  principale  de  la  maison  de  Hesse, 
celle  de  Darmstadt,  avait  souffert  une  perte  beaucoup 
plus  considérable  (jue  son  aînée. 

1°  Elle  avait  perdu,  par  les  décrets  de  l'Assemblée 
nationale ,  la  partie  du  comté  ou  de  la  seigneurie  de 


—  293  — 

Hanau-Lichtenberg,  située  en  Alsace  et  dans  les  Vosges. 
Reinhard  II,  comte  de  Hanau ,  mort  en  1451  ,  laissa 
deux  fils  qui  formèrent  ligne.  L'aîné,  Reinhard  III,  eut 
le  comté  de  Hanau,  qu'on  appela  dès  lors  comté  de 
Hanau-Milnzenberg  ;  Philippe,  le  cadet,  qui  avait  épousé 
Aîine,  héritière  de  la  baronnie  de  Lichtenberg,  située 
en  Alsace  et  en  Souabe,  devint  la  souche  des  comtes 
de  Hanau-Lichtenberg.  Les  comtes  de  Hanau-Mûnzen- 
berg  s'éteignirent  pendant  la  guerre  de  Trente  ans, 
en  1 642,  et  la  branche  de  Lichtenberg  réunit  tout  le 
comté;  mais  comme  elle  n'avait  réussi  à  se  mettre  en 
possession  de  cette  succession  que  par  l'assistance  de 
la  maison  de  Hesse-Cassel,  il  fut  conclu,  en  1 643,  un 
pacte  de  confraternité,  d'après  lequel  le  Landgrave  de- 
vait hériter  du  comté  de  Hanau-Mûnzenberg,  à  l'extinc- 
tion des  mâles  de  la  maison.  Le  cas  arriva  en  1 736.  La 
maison  de  Hesse-Cassel  se  mit  alors  en  possession  du 
comté  de  Hanau-Mûnzenberg  ;  et  le  comté  de  Hanau- 
Lichtenberg  fut  porté,  par  la  fille  du  dernier  comte, 
dans  la  maison  de  Hesse-Darmstadt.  La  partie  de  la 
seigneurie  de  Lichtenberg,  située  en  Alsace ,  était  di- 
visée en  douze  bailliages,  et  renfermait  soixante-seize 
mille  habitants.  Elle  était  riche  en  beaux  domaines; 
et,  quoique  par  suite  de  la  paix  de  Ryswick  elle  eût 
été  placée  sous  la  souveraineté  de  la  France,  les  lettres 
patentes  qu'obtint,  en  1701,  le  comte  de  Hanau^  lui 
donnèrent  des  privilèges  tels  qu'aucun  autre  vassal 
n'en  possédait  sous  le  sceptre  des  rois  de  France.  Aussi 
le  landgrave  de  Darmstadt  a-t-il  fait  monter  les  reve- 
nus de  ce  pays  à  six  cent  soixante-six  mille  cinquante 
florins,  et  s'il  est  vrai  que  ce  calcul  ait  été  un  peu 
exagéré,  nous  ne  pensons  pas,  comme  quelques  géo- 
graphes allemands,  qu'il  l'ait  été  de  moitié,  ni  même 
du  tiers. 

>  Voy.  t.  Il,  p.  167. 


—  294  — 

Telle  était  l'unique  perte  que  la  maison  de  Hesse- 
Darmstadt  eût  soufferte,  lorsque  le  premier  plan  d'in- 
demnités fut  présenté  par  les  médiateurs;  mais  ce  plan 
y  ajouta  : 

2"  Les  bailliages  de  Lichtenau  et  de  Wildstœdt,  ou 
la  partie  du  comté  de  Hanau-Liclitenberg ,  située  en 
Souabe.  Le  plan  les  donna  au  margrave  de  Bade,  et 
nous  avons  vu,  en  parlant  de  l'indemnité  de  ce  prince, 
que  ces  deux  bailliages  rapportaient  quatre-vingt  mille 
florins. 

3°  Pour  arrondir  les  États  du  prince  de  Nassau- 
Usingen,  le  Landgrave  céda  les  bailliages  de  Kazenel- 
lenbogen,  de  Braubacb,  d'Embs  et  d'Epstein,  dans  le 
comté  inférieur  de  Kazenellenbogen,  et  celui  de  Kle- 
berg  avec  les  villages  de  Weiperfelden,  dans  la  baute 
Hesse,  qu'il  possédait  en  partie  en  commun  avec  la 
maison  de  Nassau.  Ils  avaient  quinze  mille  habitants  sur 
cinq  milles  carrés,  et  rapportaient  quatre-vingt-dix 
mille  florins; 

V  Enfin  le  Landgrave  renonça  à  ses  droits  de  pro- 
tection sur  Wetzlar,  et  de  haut  conduit  à  Francfort. 
Ce  prince  prétendait  à  plusieurs  droits  sur  Wetzlar,  à 
titre  de  droits  d'ouverture,  d'engagement  impérial, 
d'avoierie,  de  protection,  de  haut  conduit  et  de  juri- 
diction sur  le  château  de  Carlsmunde.  Il  y  tenait  gar- 
nison, et  nommait  un  des  membres  du  Sénat.  Le  droit 
de  haut  conduit  à  Francfort  était  un  reste  de  la  bar- 
barie du  moyen  âge,  où  les  particuliers  ne  pouvaient 
voyager  sans  s'exposer  à  être  pillés  par  les  barons  et 
seigneurs.  A  cette  époque,  plusieurs  princes  se  char- 
gèrent du  soin  de  protéger  les  voies  publiques,  en 
exigeant  des  voyageurs  une  petite  rétribution  à  laquelle 
ceux-ci  se  soumirent  volontiers.  Par  la  suite  des  temps, 
cette  protection  devint  inutile;  mais  les  princes  ne 
renoncèrent  point  à  ce  prétexte  pour  augmenter  leurs 


—  295  — 

revenus.  Pendant  la  foire  de  Francfort,  célèbre  en 
Allemagne,  le  landgrave  de  Darmstadt  plaçait  sur  la 
route  qui  conduit  de  sa  capitale  à  cette  ville,  quelques 
détachements  de  troupe  en  apparence  destinés  à  pur- 
ger les  routes  des  voleurs  qui  les  infestaient*. 

Tels  furent  les  sacrifices  que  fit  la  maison  de  Darm- 
stadt. Nous  avons  vu  que  d'après  le  premier  plan  elle 
n'avait  perdu  que  le  comté  de  Hanau-Lichtenberg,  sur 
les  deux  rives  du  Rhin.  Cette  possession  peut  avoir 
rapporté  cinq  cent  mille  florins.  Le  plan  lui  donna 
pour  cela  trois  bailliages  du  Palatinat,  Lindenfels, 
Ozberg  et  les  restes  d'Oppenheim,  le  duché  de  West- 
phalie,  à  la  réserve  d'une  partie  destinée  au  prince  de 
Wittgensteinj  trois  bailliages  de  Mayence,  Gernsheim, 
Bensheim  et  Heppenheim,  les  restes  de  l'évêché  de 
VVorms,  et  la  ville  de  Friedberg. 

Le  llecès  y  ajouta  neuf  bailliages  mayençais ,  deux 
bailliages  du  Palatinat,  et  plusieurs  abbayes;  enfin  il 
donna  au  Landgrave  la  totalité  du  duché  de  Westpha- 
lie,  avec  les  couvents  considérables  que  ce  pays  ren- 
fermait; mais  il  lui  imposa  une  double  charge,  1"  le 
payement  d'une  rente  de  quinze  mille  florins  envers 
le  prince  de  Wittgenstein;  2"  l'augmentation  de  l'apa- 
nage du  landgrave  de  Hesse-Hombourg.  Volkmarsen 
est  un  bailliage  du  duché  de  Westphalie;  mais  la  mai- 
son de  Cassel  et  le  prince  de  Nassau-Orange,  comme 
étant  par  le  Recès  aux  droits  de  l'évêque  de  Corvey,  y 
formaient  des  prétentions,  ce  qui  fut  cause  qu'on  le 
donna  nominativement  au  Landgrave.  Les  bailliages 
mayençais  qu'il  réunit  en  vertu  de  cet  acte,  forment 
la  nouvelle  principauté  de  Starkenbourg. 

'  En  supprimant  l'abus  du  haut  conduit,  à  l'égard  de  la  maison  de 
Darmstadt,  les  auteurs  du  Recès  oublièrent  d'abolir  également  le  droit 
que  la  maison  de  Nassau  percevait  à  ce  titre.  Elle  y  renonça  volontaire- 
ment par  une  déclaration  qu'elle  publia  le  \"  elle  3  mars  1810. 


—  206  — 

En  récapitulant  ces  acquisitions,  nous  trouvons  que 
la  maison  de  Darmstadt  a  obtenu  : 

m.  c.  liabii.  rev.  en  flor. 

Bailliages  mayençais 11j        28000  150000 

Bailliages  du  Pulatinat 3|          8  000         60  000 

Duché  de  Westphalie 72        -130000  650000 

Évêché  de  Worms 1i          3000         23000 

Abbaye  de  Seligenstadt 50  000 

Abbaye  de  Marienschloss 

Prévôté  de  Wimpfen iOOOO 

Ville  de  Friedberg 2000       10000 

Total...     88A        171000      953000 

A  ces  revenus  il  faut  ajouter  les  revenus  peu  consi- 
dérables de  l'abbaye  de  Marienschloss  ;  mais  il  faut  en 
déduire  la  rente  de  quinze  mille  florins ,  assurée  au 
prince  de  Wittgenstein,  et  l'augmentation  de  l'apanage 
de  Hombourg.  Cette  branche  de  la  maison  de  Hesse 
ne  possédait  rien  sur  la  rive  gauche  du  Rhin  :  cepen- 
dant elle  fit  valoir  les  pertes  qu'elle  avait  éprouvées 
par  la  guerre,  et  qu'on  estimait  à  quatre  millions  sept 
cent  mille  florins,  pour  réclamer  le  bailliage  mayen- 
çais d'Oberwesel,  entouré  de  ses  possessions.  La  Dé- 
putation  ne  crut  pas  pouvoir  accorder  cette  demande  ; 
mais  elle  fut  favorablement  accueillie  par  les  média- 
teurs. En  augmentant  la  rente  apanagère  d'un  cin- 
quième, ces  ministres  voulurent  sans  doute  parler  de 
V apanage  (ou  plutôt  parage),  caria  renie  apanagère  de 
cette  maison  n'était  que  de  deux  mille  florins.  Celle 
que  le  landgrave  de  Darmstadt  lui  alloua  par  suite  de 
cet  article  fut  de  vingt  mille  florins,  ce  qui  indique 
que  les  revenus  de  cette  maison  se  montaient  à  cent 
mille  florins. 

Nous  dirons  plus  loin  pourquoi  une  indemnité  fut 
allouée  au  prince  de  Wittgenstein.  Quant  à  la  faveur 
que  l'on  témoignait  à  la  maison  de  Flesse-Hombourg, 
elle  était  une  suite  de  l'intérêt  que  les  princes  de  cette 


—  2!)?   — 

maison  avaient  inspiré  par  leurs  qualités  personnelles 
aux  généraux  français  pendant  le  long  séjour  que  les 
troupes  de  la  République  avaient  fait  sur  la  rive  gauche 
du  Rhin. 

§8. 

«  Au  duc  de  Hohtein-Oldenhourg ,  pour  la  sup- 
pression du  péage  d'Elsfleth ,  la  cession  des  villages 
au  territoire  deLubeck,  déterminés  ci-après,  et  pour 
ses  droits  et  propriétés  et  ceux  du  chapitre  dans  la 
ville  de  ce  nom  :  l'évêché  et  grand  chapitre  de  Lubeck, 
le  bailliage  hanovrien  de  Wildeshausen,  et  les  bail- 
liages déjà  mentionnés  de  Vechte  et  de  Kloppenbourg, 
au  pays  de  Munster.  » 

Le  duc  de  Holstein-Oldenbourg  refusa  pendant 
quelque  temps  de  prendre  part  à  un  règlement  d'in- 
demnités qui,  d'après  la  situation  de  ses  États  et  les 
stipulations  du  traité  de  Lunéville,  devait  lui  rester 
étranger.  Il  regardait  l'évêché  deLubeck  comme  sécu- 
larisé de  fait  en  faveur  de  sa  maison,  puisqu'à  l'ex- 
ception de  quelques  chanoines  catholiques,  le  chef  et 
les  membres  du  chapitre  étaient  séculiers.  Mais  comme 
la  ville  de  Brème  avait  obtenu,  à  force  de  sollicitations, 
que  la  France  demandât  la  suppression  du  péage 
d'Elsfleth,  il  fallut  penser  à  une  indemnité  pour  le 
propriétaire.  Elsfleth  est  un  bourg  du  duché  d'Olden- 
bourg, situé  sur  le  Weser,  à  l'endroit  où  la  Hunte  y 
verse  ses  eaux.  Le  péage  que  payent  les  bâtiments 
qui  veulent  remonter  jusqu'à  Brème,  a  été  accordé  à 
titre  de  fief  impérial  aux  anciens  comtes  d'Oldenbourg, 
Il  rapportait  annuellement  cent  trente  mille  florins. 
Le  premier  plan  donna  au  Duc,  pour  la  renonciation 
ù  ce  péage,  le  bailliage  de  Wildeshausen,  et  sécularisa 


—  298  — 

à  son  profit  l'évèché  et  le  grand  chapitre  de  Lubeck. 
Le  bailliage  de  Wildeshausen  qu'on  avait  engagé  l'é- 
lecteur de  Brunswic  à  céder ,  pour  avoir  quelque 
chose  à  offrir  au  duc  d'Oldenbourg  en  compensation 
de  la  renonciation  qu'on  lui  demandait,  est  un  ancien 
domaine  des  comtes  d'Oldenbourg,  dont  les  archevê- 
ques de  Brème  avaient  trouvé  moyen  de  s'emparer. 
Il  est  situé  à  la  convenance  du  duc  d'Oldenbourg  j  mais 
il  n'ajoute  aux  revenus  de  ce  prince  qu'une  somme 
de  vingt-cinq  mille  florins,  ou  peut-être  moins  encore. 
En  y  réunissant  les  revenus  de  l'évèché  de  Lubeck, 
qui  se  montent  à  soixante-quinze  mille  florins,  il  man- 
quait encore  une  somme  annuelle  de  trente  mille  flo- 
rins pour  indemniser  de  la  suppression  du  péage.  Une 
autre  circonstance  diminuait  encore,  aux  yeux  du  Duc, 
l'indemnité  qu'on  lui  offrait.  En  sa  qualité  d'évêque 
de  Lubeck,  il  avait  conclu,  en  1 799,  avec  son  chapi- 
tre, un  traité  par  lequel  celui-ci  s'était  engagé  à  pos- 
tuler pendant  trois  générations  consécutives  les  des- 
cendants de  ce  prince.  L'Empereur  avait  confirmé 
cette  convention  j  la  Russie  et  le  Danemark  l'avaient 
garantie,  et  il  était  probable  que,  sans  sécularisation 
formelle,  l'évèché  ne  sortirait  pas  de  cette  maison. 
Au  surplus,  le  roi  de  Danemark  demandait  une  in- 
demnité pour  son  droit  de  protection  sur  l'évèché, 
pour  celui  d'en  conférer  une  prébende,  et  pour  la  su- 
périorité territoriale  sur  plus  de  quarante  villages  du 
chapitre  situés  en  Holstein. 

L'insuffisance  de  la  compensation  étant  évidente, 
les  médiateurs  y  ajoutèrent,  dans  le  second  plan,  le 
bailliage  de  Vechte  et  de  Cloppenbourg,  appartenant 
à  l'évèché  de  Munster.  Ils  sont  considérables,  renfer- 
ment, sur  une  surface  de  quarante-six  milles  et  demi, 
soixante  mille  habitants,  et  rapportent  soixante-quinze 
mille  florins;  mais  en  même  temps  le  plan  détacha. 


—  299  — 

en  faveur  de  la  ville  de  Lubeck,  quelques  parcelles  de 
l'évêché.  La  députation  s'occupa  peu  de  cet  arrange- 
ment, qui  devint  l'objet  d'une  négociation  entre  les 
médiatenrs  ;  ils  eurent  quelque  peine  à  s'accorder  à 
cet  égard.  L'article  resta  dans  le  Recès  tel  que  nous 
l'avons  donné  ;  mais  le  Duc  refusa  de  s'y  soumettre. 
Ce  ne  fut  que  le  6  avril  1 803,  après  que  la  Diète  de 
l'Empire  eut  ratifié  le  Recès,  qu'il  fut  conclu,  sous 
la  médiation  de  la  Prusse,  une  convention  par  laquelle 
le  duc  d'Oldenbourg  accéda  au  Recès,  mais  à  condi- 
tion qu'on  lui  accordât  pour  dix  ans,  depuis  le  T' juin 
1803  jusqu'au  31  décembre  1812,  la  jouissance  du 
péage  d'Elsfleth. 

Cette  convention  ne  se  trouvant  point  dans  le  Re- 
cueil primitif  de  M.  de  MartenSy  nous  l'insérons  ici 
textuellement. 

Nous  parlerons  plus  loin  de  la  convention  que  ce 
prince  conclut  avec  la  ville  de  Lubeck. 


Convention  relative  aux  intérêts  de  S.  A.  S.  monseigneur  le 
duc  d'Oldenbourg ,  prince-évêque  de  Lubeck,  en  date  du 
25  mars  [6  avril]  1803. 

S.  A.  S.  le  duc  administrateur  régnant  deHolstein- 
Oldenbourg,  prince-évêque  de  Lubeck,  ayant  chargé 
de  ses  pleins  pouvoirs  M.  le  baron  de  Koch,  son  mi- 
nistre à  la  Diète  générale  de  l'Empire,  à  l'effet  de  con- 
venir à  Ratisbonne  avec  les  ministres  plénipotentiaires 
et  extraordinaires  des  puissances  médiatrices,  agissant 
au  nom  et  en  vertu  des  pouvoirs  de  leurs  gouverne- 
ments respectifs,  de  l'aplanissement  des  difficultés 
qui  ont  subsisté  jusqu'ici,  relativement  à  l'exécution 
des  clauses  du  plan  d'indemnité  qui  touchent  aux 
intérêts  de  Son  Altesse  Sérénissime. 


—  300  -^ 

Et  S.  M.  le  roi  de  Prusse  ayant  été  invitée,  par 
S.  M.  I.  de  Russie  à  concourir  à  la  satisfaction  de 
Son  Altesse  Sérénissime,  et  y  ayant  coopéré,  tant  par 
ses  bons  conseils  que  par  l'intervention  en  son  nom 
de  son  ministre  plénipotentiaire  à  Ratisbonne,  il  a 
été  convenu  entre  lesdits  ministres,  et  rédigé  par 
écrit,  pour  prévenir  tout  malentendu,  les  articles 
suivants  : 

Art.  1 .  Son  Altesse  Sérénissime  accède  entière- 
ment, et  sans  exception  ni  réserve  quelconque,  tant 
dans  sa  qualité  de  duc-administrateur  régnant  d'Ol- 
denbourg, qu'en  celle  de  prince-évêque  de  Lubeck , 
à  toutes  les  dispositions  de  l'acte  général  des  arran- 
gements d'Allemagne,  tel  qu'il  a  été  rfitifié  par  la  Diète 
et  soumis  à  la  ratification  de  l'Empereur  le  ^  mars 
1803  (germinal  an  xi  ),  notamment  au  second,  qua- 
trième et  septième  alinéa  du  paragraphe  3,  au  para- 
graphe 8,  au  second,  sixième ,  septième ,  dixième  et 
onzième  alinéa  du  paragraphe  27,  et  aux  paragra- 
phes 34,  3G,  43  et  47  de  cet  acte. 

En  conséquence  de  quoi,  le  péage  d'Elsfleth  reste 
supprimé  à  perpétuité,  suivant  la  teneur  de  l'acte 
susmentionné;  le  privilège  de  ce  péage  sera  caduc  du 
jour  de  la  ratification  du  chef  de  l'Empire;  Son  Altesse 
Sérénissime  se  démet  de  l'investiture  qu'elle  en  avait 
reçue;  l'évêché  et  le  grand  chapitre  sont  sécularisés, 
et  deviennent  possession  héréditaire  de  la  maison  de 
Holstein-Oldenbourg;  les  villes  de  Bremen  et  Lubeck 
pourront  entrer  immédiatement  en  possession  et  jouis- 
sance, sans  être  tenues  à  aucune  compensation,  à  cet 
égard,  envers  Son  Altesse  Sérénissime,  savoir  :  la  pre- 
mière du  Grolland,  la  seconde  du  territoire  de  l'évê- 
ché et  du  grand  chapitre  de  Lubeck  avec  leurs  droits, 
bâtiments,  propriétés  et  revenus  quelconques  compris 
dans  les  limites  à  elles  assignées  par  ledit  acte. 


—  301   — 

Néanmoins,  la  ville  de  Lubeck  devra,  selon  les 
principes  adoptés  et  suivis  à  l'égard  des  autres  évo- 
ques, laisser  aux  capitulaires  du  chapitre,  leur  vie 
durant,  les  maisons  respectivement  accordées  à  cha- 
cun d'eux. 

Elle  devra,  également,  suivant  les  mêmes  prin- 
cipes, contribuer  à  la  sustentation  des  capitulaires  au 
prorata  des  revenus  du  chapitre  qui  lui  tombe  en  par- 
tage, le  loyer  des  maisons  excepté ,  et  s'entendre  à 
l'amiable,  à  cet  effet,  avec  Son  Altesse  Sérénissime. 

Art.  2.  Son  Altesse  Sérénissime  et  ses  héritiers  pos- 
séderont l'évéché  et  les  biens  du  grand  chapitre  de 
Lubeck  de  la  même  manière  qu'ils  étaient  possédés 
par  le  prince-évêque  et  le  grand  chapitre.  Si  quelque 
tiers  réclamant  répétait  de  la  ville  de  Lubeck,  à  un 
titre  quelconque,  une  compensation,  relativement  aux 
objets  de  l'évéché  et  du  grand  chapitre  qui  lui  sont 
attribués,  Son  Altesse  Sérénissime  s'interposera  comme 
si  ces  objets  en  faisaient  encore  partie,  pour  en  main- 
tenir les  droits,  et  dans  le  cas  où  Son  Altesse  Sérénis- 
sime aurait,  en  raison  desdits  évêché  et  grand  cha- 
pitre, à  satisfaire  un  tiers  réclamant,  la  ville  de 
Lubeck  sera  tenue  à  fournir  un  juste  contingent  en  ce 
qui  la  concernait,  à  Son  Altesse  Sérénissime. 

Art.  3.  Son  Altesse  Sérénissime  retirant  les  réserves 
qu'elle  a  fait  faire  à  la  Députation  et  à  la  Diète,  sur  les 
dispositions  auxquelles  elle  accède  aujourd'hui ,  son 
ministre  déclarera  à  la  Députation  et  à  la  Diète  sa 
pleine  et  entière  adhésion ,  à  leur  plus  prochaine 
séance  après  la  signature. 

Art.  4.  En  supplément  de  l'indemnité  assignée  à 
Son  Altesse  Sérénissime  tant  pour  la  suppression  du 
péage  d'Elsfleth,  que  pour  les  distractions  faites  en 
faveur  des  villes  de  Bremen  et  de  Lubeck,  elle  con- 


—  302  — 

servera  l'administration  et  la  perception  de  ce  péage, 
pendant  dix  ans,  à  compter  du  1*"  janvier  1803,  s'en- 
gageant  de  la  manière  la  plus  formelle,  tant  en  son 
nom,  qu'au  nom  de  ses  successeurs,  à  ne  prolonger, 
sous  aucun  prétexte,  par  delà  le  1"  janvier  1813,  la 
perception  temporaire  qui  lui  est  laissée. 

Art.  5.  Les  ministres  des  puissances  médiatrices 
feront,  immédiatement  après  la  signature,  les  décla- 
rations nécessaires  pour  que  l'Empire  connaisse  et 
approuve  la  fixation  de  l'époque  où  la  perception  tem- 
poraire du  .péage  d'Elsfleth  doit  cesser. 

Art,  6.  Son  Altesse  Sérénissime  s'engage  à  prendre 
les  mesures  les  plus  efficaces,  pour  que  la  disposi- 
tion de  l'acte  ci-dessus  mentionné,  en  faveur  de  la 
libre  navigation  du  bas  Weser,  reçoive,  dès  ce  mo- 
ment, toute  l'application  compatible  avec  la  percep- 
tion temporaire  du  péage  d'Elsfleth. 

Art.  7.  Le  péage  continuera  d'être  perçu  confor- 
mément au  tarif  existant,  inséré  dans  les  lettres  d'in- 
vestiture, sans  pouvoir  être  augmenté. 

Art.  8.  Si,  à  une  époque  quelconque,  pendant  le 
cours  de  cette  perception  temporaire,  la  ville  de  Bre- 
men  convenait  avec  Son  Altesse  Sérénissime  d'un  ar- 
rangement satisfaisant.  Son  Altesse  Sérénissime  se 
réserve  le  droit  de  faire  cesser  dès  lors  la  perception, 
ou  de  la  conférer  à  la  ville  pour  un  certain  nombre 
d'années  restant  à  courir,  selon  la  nature  de  l'arran- 
gement qui  serait  convenu  à  l'amiable. 

Art.  9.  Il  sera  donné  communication  officielle  des 
articles  ci-dessus,  aux  députés  des  villes  de  Bremen 
et  de  Lubeck,  par  les  ministres  des  puissances  mé- 
diatrices et  de  Son  Altesse  Sérénissime. 

Art.  10.  Tous  les  arrangements  seront  exécutés  sans 
délai,  Son  Altesse  Sérénissime  s'engage  particulière- 


—  303  — 

ment  d'obtenir  l'approbation  de  S.  M.  I.  de  Russie, 
chef  de  son  auguste  maison. 

Fait  et  signé  à  Ratisbonne,  le  25  mars  (6  avril) 
1803. 

(L.  S.  )  Signé  y  Koch. 

(L.  S.  )  Le  baron  de  BOhler. 

(  L.  S.  )  Laforest. 

(  L.  S.  )  Le  comte  de  Goertz. 


§  9. 

«  Au  duc  de  Mecklenbourg-Schwetin ,  pour  ses 
droits  et  répétitions  sur  deux  canonicats  héréditaires 
de  l'église  de  Strasbourg,  qui  lui  avaient  été  donnés 
en  remplacement  du  port  de  Wismar,  ainsi  que  pour 
ses  prétentions  sur  la  presqu'île  de  Priwal  dans  la 
Trave,  dont  la  propriété  reste  exclusivement  à  la 
ville  de  Lubeck  :  les  droits  et  propriétés  de  l'hôpital 
de  Lubeck  dans  les  villages  de  Warnekenhagen ,  Al- 
tenbuchow  et  Crumbrook,  et  dans  ceux  de  l'île  de  Pceel; 
plus  une  rente  perpétuelle  de  dix  mille  florins  sur 
l'octroi  de  navigation  mentionné  au  paragraphe  39.  )) 

Le  paragraphe  2  de  l'article  12  de  la  paix  d'Os- 
nabrûck  accorda  à  la  branche  des  ducs  de  Mecklen-^ 
bourg-Schwerin,  qui  réunissait  alors  les  deux  branches 
actuelles  de  Schwerin  et  de  Strelitz,  deux  canoni- 
cats dans  la  cathédrale  de  Strasbourg  \  Un  arrêt  du  con- 
seil d'Alsace  de  1687  l'en  priva,  et  elle  n'en  a  pas  joui 
depuis.  Nous  ferons  observer  au  reste  qu'elle  rentra 
bientôt,  après  l'achèvement  du  Recès,  dans  la  posses- 
sion de  la  ville  de  Wismar,  en  compensation  de  la- 

••  Voy.  t.  I,  p.  235. 


—  304  — 

quelle  elle  avait  obtenu,  non  pas  seulement  les  deux 
canonicats,  ainsi  que  le  Recès  semble  le  dire,  mais 
aussi  deux  commanderies  de  l'Ordre  de  Saint-Jean,  et 
les  évêchés  de  Schwerin  et  de  Ratzebourg.  Par  un 
traité  conclu  à  Malmô,  le  26  juin  1803,  entre  le  baron 
de  Toll,  au  nom  du  roi  de  Suède,  et  le  baron  de  Lutzow 
et  M.  Brunig,  au  nom  du  duc  de  Mecklenbourg-Schwe- 
rin,  le  Roi  céda  au  Duc,  à  titre  d'antichrèse  et  moyen- 
nant une  rétribution  de  un  million  deux  cent  cin- 
quante mille  écus  de  banque  de  Hambourg,  pour  cent 
ans,  la  possession  usufruitière  de  la  ville  et  seigneurie 
de  Wismar,  et  des  bailliages  de  Pœl  et  de  Neukloster*. 
Le  premier  plan  d'indemnité  n'avait  pas  fait  men- 
tion du  duc  de  Mecklenbourg-Schwerin  ;  mais  le  second 
plan,  en  lui  imposant  la  renonciation  à  ses  droits  sur 
l'île  de  Priwal  dans  la  Trave,  lieu  de  pâturage  dont  la 
ville  de  Lubeck  avait  la  copropriété,  lui  donna  les 
droits  et  propriétés  de  l'hôpital  de  Lubeck,  dans  les 
trois  villages  nommés,  et  dans  l'île,  alors  encore  sué- 
doise, de  Pœl.  Il  y  ajouta  une  rente  annuelle  de  dix 
mille  florins,  assignée  sur  les  couvents  d'Osnabrûck, 
et  destinée  à  acquérir  le  bailliage  lauenbourgeois  de 
Neuhaus  entre  l'Elbe  et  la  Regnitz;  mais  l'électeur  de 
Brunswic  protesta  tant  contre  la  charge  dont  on  vou- 
lait grever  la  principauté  d'Osnabrûck,  que  contre  la 
destination  qu'on  donnait  à  cette  rente,  puisqu'il 
n'était  pas  disposé  à  aliéner  ledit  bailliage.  Cette  pro- 
testation engagea  la  députation  à  ajouter,  dans  le 
premier  conclusum  général,  cette  clause  :  sous  la  ré- 
serve d'un  arrangement  entre  les  puissances  média- 
trices et  l'électeur  de  Hanovre.  Par  suite  de  cet  arran- 
gement, la  principauté  d'Osnabrûck  fut  dispensée  du 
payement  de  la  rente,  et  on  raya  la  phrase  où  il  était 

'  Yoy.  Martbns,  Recueil,  t.  X,  p.  488. 


—  305  — 

question  de  son  emploi  à  l'acquisition  d'un  bailliage 
de  Hanovre. 

Le  duc  de  Mecklenbourg-Strélitz  réclama  une  part 
de  l'indemnité  qui  avait  été  allouée  à  la  branche  aînée 
de  sa  maison,  pour  une  prétention  à  laquelle  il  n'avait 
pas  moins  de  droitj  mais  les  deux  souverains  ne  pu- 
rent pas  s'accorder,  etle  ducdeMecklenbourg-Schwerin 
se  plaignit  qu'il  n'avait  pas  été  traité  par  la  Députa- 
tion  avec  les  égards  auxquels  le  rang  et  l'ancienneté 
de  sa  maison  lui  donnaient  droit.  Cette  observation  se 
rapportait  sans  doute  à  la  dignité  électorale,  qu'il 
croyait  lui  être  due  aussi  bien  qu'aux  trois  maisons 
qui  en  furent  revêtues  par  le  Recès. 

§  10. 

«  Au  prince  de  Hohenzollern-Hechingen ,  pour  ses 
droits  féodaux  dans  le  comté  de  Geule  et  les  sei- 
gneuries de  Mouffain  et  de  Baillouville,  au  pays  de 
Liège  :  la  seigneurie  de  Hirschlatt  et  le  couvent  de 
Stetten. 

((  Au  prince  de  Hohenzollern-Sigmaringen  j  pour 
ses  droits  féodaux  dans  les  seigneuries  de  Boxmeer, 
Dixmuide,  Berg,  Gendringen,  Elten,  Wisch,  Pan- 
nerden  et  Miihlingen,  et  pour  ses  domaines  dans  la 
Belgique  :  la  seigneurie  de  Glatt  et  les  couvents  d'In- 
zikhotîen,  de  Klosterbeuern  et  de  Holzheim,  au  pays 
d'Augsbourg.  » 

La  maison  de  HohenzoUern  n'avait  perdu  aucune 
possession  immédiate,  et  par  conséquent  elle  n'avait 
aucun  droit  aune  indemnisation,  d'après  les  principes 
que  la  Députation  avait  adoptés.  Aussi  le  premier 
plan  ne  lui  en  avait-il  pas  accordé;  et  elle  n'avait  pas 
présenté  de  réclamation.  On  voit,  par  la  rédaction 
même  de  l'article,  que  la  France  avait  restitué  à  cette 
Yii  20 


—  306  — 

maison  les  biens  qu'elle  possédait  dans  la  Belgique, 
puisqu'on  ne  l'indemnise  que  de  la  perte  de  ses  droits 
féodaux.  C'est  sans  doute  à  la  protection  prussienne, 
ou  à  quelque  autre  liaison,  que  ces  princes  durent 
une  faveur,  que  tant  d'autres  maisons  avaient  sol- 
licitée en  vain. 

Parmi  les  seigneuries  et  terres  médiates  dont  la 
branche  de  Hohenzollern-Sigmaringen  avait  perdu  les 
revenus  féodaux ,  le  liecès  nomme  Berg.  C'est  un 
ancien  comté ,  situé  dans  l'enceinte  du  pays  de  Zut- 
phen,  qui  avait  anciennement  ses  comtes  particuliers. 
Après  la  mort  du  dernier,  en  1 71 2,  le  comté  passa  à 
sa  sœur,  qui  avait  épousé  un  prince  de  Sigmaringen. 
Ce  petit  pays  s'appelle  aussi  S'Heerenberg;  il  se 
compose  de  la  ville  de  ce  nom,  des  seigneuries  de 
Genderingen  et  Elten,  que  le  Recès  nomme,  et  de  plu- 
sieurs autres  endroits.  Pannerden,  qu'il  nomme  éga- 
lement, est  peut-être  la  maison  de  chasse  de  Paverden, 
située  près  du  village  de  Zeddam,  dans  ce  comté. 

L'indemnité  accordée  à  la  branche  deHechingen  est 
peu  considérable;  Hirsclilatt  et  le  couvent  de  Stetten. 
La  seigneurie  de  Glatt,  sur  le  Necker,  dans  l'enceinte 
du  comté  inférieur  de  Hohenberg,  se  compose  d'un 
seul  village  et  d'un  château  avec  ses  domaines;  il 
appartenait  à  l'abbaye  de  Mûri  en  Suisse.  Le  couvent 
d'Inzikhoffen,  près  Sigmaringen,  était  immédiat;  ceux 
de  Klosterbeuern  et  de  Ilolzheim,  l'un  et  l'autre  dans 
l'enceinte  de  l'évêché  d'Augsbourg  (quoique  le  texte 
allemand  de  l'acte  ne  le  dise  que  de  Holzheim  ),  pos- 
sédaient chacun  plusieurs  villages  *. 

On  connaît,  au  reste,  la  parenté  qui  existe  entre  les 
princes  de  Hohenzollern  et  la  maison  royale  de  Prusse, 

•  Voy.  Histoire,  géographie  et  topographie  des  principautés  de  Ho- 
henzollern-UechingenetlIohenzollern-Sigmaringen.  Ulm,  -1824(60  alle- 
mand). 


—  307  — 

à  laquelle  ils  viennent  lout  récemment  de  céder  leurs 
possessions  territoriales.  Lamaison  de  HohenzoUern  ou 
de  ZoUern  remonte  à  la  plus  haute  antiquité  et  a  une 
origine  commune  avec  celle  de  Habsbourg;  car  l'une  et 
l'autre  descendent  à'EthicuSy  duc  d'Alsace.  Conrad , 
frère  de  Frédéric  IV,  comte  de  Zollern,  obtint,  vers 
la  fin  du  XII*  siècle,  le  bourgraviat  de  Nuremberg, 
et  devint  la  souche  des  margraves  de  Brandebourg*. 

§  11. 

a  Au  prince  de  Dietrichstein  ^  pour  la  seigneurie 
de  Trasp  au  pays  des  Grisons  :  la  seigneurie  de  Neu- 
Ravensbourg. 

«  Au  prince  de  Ligne ,  pour  Fagnolles  :  l'abbaye 
d'Edelstetten ,  à  titre  de  comté.  » 

Les  Dietrichstein  sont  une  ancienne  maison  pos- 
sessionnée  en  Autriche  et  soumise  à  la  supériorité 
territoriale  du  duché  de  Carinthie.  UnDietrich  (Didier) 
de  Zeltschach  est  regardé  comme  le  fondateur  du 
château  de  Dietrichstein  ;  mais  la  généalogie  de  cette 
maison  remonte,  avec  plus  de  certitude,  à  Reinpert, 
qui  a  vécu  vers  la  fin  du  x^  siècle.  Les  barons  de 
Dietrichstein ,  investis  de  la  charge  héréditaire  de 
grands  échansons  du  duché  de  Carinthie,  obtinrent, 
dans  le  xvf  siècle,  le  titre  de  comte,  et,  en  1622,  la 
plus  jeune  des  branches  fut  élevée  à  la  dignité  de 
prince  à'Emi^ire.  Ferdinand-Joseph ,  prince  de  Dietrich- 
stein ,  acquit ,  en  1 686 ,  la  seigneurie  de  Trasp  dans 
le  Tyrol,  à  laquelle  fut  dès  lors  affectée  une  voix  virile 
dans  le  collège  des  Princes  à  la  Diète  de  l'Empire. 
Cette  principauté  se  composait  d'un  château  et  de 
quelques  villages  sur  l'Inn.  Les  médiateurs  l'ayant 

'  Voy.  ci-dessus,  p.  \0^. 


—  308  — 

destinée  à  la  république  des  Grisons ,  dont  elle  était 
entourée  de  tous  côtés ,  on  assigna  au  prince  la  sei- 
gneurie de  Neu-Ravensbourg,  près  du  lac  de  Con- 
stance, qui  jusqu'alors  avait  appartenu  à  l'abbaye  de 
Saint-Gall  en  Suisse. 

Dans  le  premier  plan,  on  avait  réuni  en  un  seul 
article  les  indemnités  du  duc  d'Arenberg  et  du  prince 
de  Ligne  f  et  on  leur  avait  destiné  le  comté  de  Reck- 
linghausen  et  le  bailliage  de  Dulmen;  mais  lorsque, 
dans  l'intervalle  entre  le  premier  et  le  second  plan, 
l'indemnisation  du  duc  d'Arenberg  eut  été  complétée, 
on  disposa  autrement  du  pays  de  Dulmen,  et  on  des- 
tina au  prince  de  Ligne  l'abbaye  médiate  de  Witt- 
marsen,  située  dans  le  comté  de  Bentheim;  mais 
l'électeur  de  Hanovre,  qui,  à  titre  d'engagiste,  possé- 
dait ce  comté,  s'y  opposa.  Alors  le  premier  conclusum 
général  le  remplaça  par  Edelstetten,  chapitre  immé- 
diat de  dames  nobles  dans  le  margraviat  de  Burgau, 
possédant  quelques  villages,  et  rapportant  seize  mille 
florins,  tandis  que  la  seigneurie  de  Fagnolles  n'avait 
que  cinq  mille  cinq  cents  florins  de  revenus.  Le 
mérite  personnel  du  prince  Charles- Joseph ^  célèbre 
comme  militaire  et  comme  littérateur,  lui  fit  sans 
doute  décerner  une  indemnité  si  large.  La  seigneu- 
rie de  Fagnolles,  située  près  de  Philippeville,  avait 
été  érigée,  en  1770,  en  comté  d'Empire,  sous  le 
nom  de  Ligne,  et  agrégée,  en  1786,  au  collège  des 
comtes  de  Westphalie  :  c'était  donc  le  dernier  comté 
d'Empire  en  rang  d'ancienneté. 

En  1804,  le  prince  de  Ligne  vendit  Edelstetten  au 
prince  d'Esterhazy,  avec  le  droit  de  siéger  dans  le  col- 
lège des  Princes,  que  le  Recès  y  avait  attaché. 


309 


§  12. 

i<  Au  prince  de  Nassau -Usingerif  pour  la  princi- 
pauté de  Saarbruck,  les  deux  tiers  du  comté  de 
Saarwerden,  la  seigneurie  d'Otteweiler  et  celle  de 
Lahr  dans  l'Ortenau  :  les  bailliages  mayençais  de 
Kœnigstein,  Hœchst,  Cronenberg,  Riidesbeim,  Ober- 
lahnstein,  Eltwill,  Cassel,  avec  les  possessions  du 
grand  chapitre  à  la  droite  du  Mein  sous  Francfort  ; 
plus,  le  bailliage  palatin  de  Caub  avec  dépendances, 
les  restes  de  l'électorat  de  Cologne  proprement  dit 
(à  l'exception  des  bailliages  d'Altwied  et  de  Nurbourg); 
les  bailliages  hessois  de  Kazenelnbogen ,  Braubach, 
Embs,  Epstein  et  Kleeberg,  dégagé  des  prétentions 
de  Solms,  les  villages  de  Weiperfelden ,  Soden, 
Sulzbach,  Schwanheim  et  Okriftel;  les  chapitres  et 
abbayes  de  Limbourg,  Rumersdorff,  Bleidenstadt, 
Sayn,  et  tous  les  chapitres,  abbayes  et  couvents  situés 
dans  les  terres  qu'il  reçoit  en  indemnité;  enfin,  le 
comté  de  Sayn-Altenkirchen,  à  charge  de  se  confor- 
mer à  la  convention  arrêtée  pour  le  dédommagement 
de  la  maison  de  Sayn-Wittgenstein ,  dont  les  préten- 
tions sur  le  comté  de  Sayn  et  dépendances  demeurent 
éteintes. 

((  Au  prince  de  Nassau-Weilbourg  y  pour  le  tiers 
de  Saarw^erden  et  la  seigneurie  de  Kirchheim-Polan- 
den  :  les  restes  de  l'électorat  de  Trêves  avec  les 
abbayes  d'Arnstein,  de  Schœnau  et  de  Marienstadt. 

«  Au  prince  de  Nassau-Dillenbourg ,  pour  indemnité 
du  Stathoudérat  et  de  ses  domaines  en  Hollande  et 
dans  la  Belgique  :  les  évêchés  de  Fulde  et  de  Corvey, 
la  ville  impériale  de  Dortmund,  l'abbaye  de  Wein- 
garten,  les  abbayes  et  prévôtés  de  Hofen,  Saint-Gérold 
au  pays  de  Weingarten ,  Bandern  au  territoire  de 
Liechtenstein,  Dietkirchen  au  pays  de  iNassau,  ainsi 


—  310  — 

que  tous  les  chapitres ,  abbayes  ,  prévôtés  et  couvents 
situés  dans  les  pays  assignés,  à  charge  par  lui  de 
satisfaire  aux  prétentions  subsistantes,  et  précédem- 
ment reconnues  par  la  France,  sur  quelques  succes- 
sions réunies  au  majorât  de  Nassau  -  Dillenbourg 
pendant  le  cours  du  dernier  siècle.  » 


Ce  paragraphe  renferme  l'indemnité  des  trois  bran- 
ches de  la  maison  de  Nassau,  qui  existaient  encore  en 
1803.  Avant  d'en  expliquer  le  détail,  qu'il  nous  soit 
permis  de  rappeler  la  généalogie  d'une  maison  si  fé- 
conde en  grands  capitaines  et  en  habiles  politiques. 

Cette  maison  illustre ,  qui  a  fourni  un  Roi  à  l'Alle- 
magne ,  et  dont  le  nom  est  si  célèbre  dans  l'histoire 
des  Pays-Bas ,  est  une  des  plus  anciennes  d'Europe. 
Son  origine  se  perd  dans  la  nuit  des  temps  j  mais  on 
regarde  comme  sa  souche  un  frère  de  Conrad  /,  roi 
d'Allemagne,  nommé  Otton  ou  Udoiif  qui  fut  comte 
dans  le  Lahngau ,  et  seigneur  de  Laurenbourg.  On 
voit  encore  les  ruines  de  ce  château  sur  la  Lahn, 
dans  le  comté  de  Holzeppel,  qui  appartient  à  la  maison 
d'Anhalt-Bernbourg-Schaumbourg.  Les  seigneurs  de 
Laurenbourg  ayant  bâti,  en  1181  ,  le  château  de  Nas- 
sau, s'appelèrent  dès  lors  comtes  de  Nassau.  Walrah, 
seigneur  de  Laurenbourg,  mort  en  1020,  laissa  deux 
fils,  Walrah  et  Otton.  Le  premier  est  la  souche  de 
toutes  les  branches  de  la  maison  de  Laurenbourg  ou 
Nassau  existantes  ou  éteintes. 

Otton  épousa  en  premières  noces  l'héritière  du 
comté  de  Gueldre ,  et  en  secondes  celle  du  comté  de 
Zutphen.  Rainault  II  le  Roux,  son  descendant  au  sep- 
tième degré,  comte  de  Gueldre  et  de  Zutphen,  fut 
créé  duc  en  1333.  Sa  descendance  masculine  s'éteignit 
en  1423,   et  le  duché  de  Gueldre  passa  par  héritage 


—  311  — 

dans  la  maison  des  comtes  d'Egmont,  qui  le  posséda 
jusqu'en  1518. 

Henri  le  Riche  y  cinquième  descendant  de  Walrab, 
laissa  deux  fils,  Walram  et  Otton^  qui  se  partagèrent 
la  succession  du  père,  et  devinrent  les  souches  des 
deux  lignes  de  la  maison  de  Nassau ,   qui  fleuris- 
sent encore  aujourd'hui  dans  la  dynastie  royale  des 
Pays-Bas,    et   dans  la  branche    ducale   de  Nassau. 
Walram  l'aîné  eut  les  possessions  situées  sur  le  haut 
Rhin;  son  fils  fut  le  roi  Adolphe,  dont  les  fils  parta- 
gèrent la  ligne  de  Walram  en   plusieurs   branches. 
Mais  toutes  ces  branches  se  trouvèrent  réunies  dans 
la  personne  du  comte  Louis ,  qui  mourut  en  1627,  et 
qu'on  doit  regarder  comme  la  dernière  souche  des 
branches  de  Nassau  de  la  ligne  de  Walram.  Ses  fils 
étaient  au  nombre  de  trois,  qui  fondèrent  les  maisons 
de  Saarbriick,  Idstein  et  Weilbourg.  Idstein  fut  la  pre- 
mière à  s'éteindre  en  1721  ;  mais  Saarbriick  et  Weil- 
bourg continuèrent.  La  ligne  de  Saarbriick  se  subdivisa 
en  deux  branches  :  Saarbrûck-Usingen  et  Saarbriick- 
Saarbrûck-Otteweiler.  Il  existait  donc,   au  commen- 
cement de  la  guerre  de  la  Révolution  française ,  trois 
branches  de  la  ligne  aînée  ou  de  Walram;  savoir  ; 
1°  Saarbrûck-Usingen;  2"  Saarbriick  -  Saarbriick ,   et 
3"  Weilbourg.   La  première  ne  possédait  rien  sur  la 
rive  gauche  du  Rhin ,  tandis  que  toutes  les  terres  de 
la  seconde  branche,  savoir  :  le  comté  de  Saarbriick, 
la  seigneurie  d'Otteweiler,les  deux  tiers  de  Saarwerden 
et  quelques  autres  seigneuries  de  moindre  étendue , 
étaient  situés  sur  cette  rive;   la  troisième    branche 
possédait  la   seigneurie  de  Kirchheim,  le  tiers   de 
Saarwerden  et  quelques  autres  districts.  Les  armées 
françaises  envahirent  ce  pays  en  1791,  et  elles  l'oc- 
cupaient lorsque   le  prince  Henri  de   Nassau -Saar- 
briick-Saarbrtick ,  dernier  de  sa  branche,  mourut  à 


—  312  — 

Kadolsbourg  en  Franconie,  le  1"  mai  1797  :  les  droits 
à  sa  succession  passèrent  exclusivement  à  la  branche 
d'Usingen. 

La  perte  de  cette  branche  consistait,  en  conséquence, 
uniquement  dans  la  succession  qu'elle  aurait  dû  re- 
cueillir en  1797.  On  estimait  que  le  territoire  de  la 
maison  de  Saarbrûck  avait  dix-neuf  milles  carrés  et 
cinquante-trois  mille  deux  cent  quatre-vingt-six  ha- 
bitants, et  rapportait  quatre  cent  sept  mille  flo- 
rins; mais  comme  il  entrait  dans  la  vue  des  média 
teurs  de  donner  au  margrave  de  Bade  la  seigneurie  de 
Lahr,  qui  appartenait  au  prince  d'Usingen,  il  faut 
ajouter  à  cette  perte  cinq  milles  carrés,  sept  mille  ha- 
bitants et  quarante  mille  florins  de  revenus. 

Voyons  maintenant  l'indemnité  qui  fut  donnée  pour 
ces  pertes  au  prince  de  Nassau-Usingen. 

Sept  bailliages  mayençais  avec  les  pos- 
sessions du  grand  chapitre  à  la  droite    «1- c.  habit.       rev.  enflor. 
du  Mein,  formant 8^        24  000       200  000 

Le  bailliage  palatin  de  Caub |  2000  10  000 

Le  reste  de  l'archevêché  de  Cologne. . .      ^\  5  000        30000 

Cinq  bailliages  hessois  avec  Weiper- 
felden 5  15000         90000 

Soder  et  Sulzbach 1         , 

Schwanheim  et  Okriftel j         T         2000         20000 

Le  comté  de  Sayn-Altenkirchen 5  12000         80  000 

Quatre  chapitres,  et  tous  les  chapitres, 
abbayes  et  couvents  situés  dans  les 
terres  qu'il  a  reçues  en  indemnité.  • .  1 50  000 

2li        60  000       580  000* 

L'indemnité  égala  par  conséquent  la  perte  sous  les 
rapports  de  l'étendue  et  de  la  population,  mais  la  sur- 
passa de  cent  trente-trois  mille  florins  sous  celui  des 
revenus.  Elle  fut  extrêmement  avantageuse  à  la  maison 
d'Usingen,  parce  qu'au  lieu  de  deux  possessions  éloi- 

*  Telle  fut  l'estimation  qu'on  fit  à  l'époque  de  1803;  mais,  douze 


—  313  — 

gnées,  elle  lui  donna  des  districts  situés  dans  sa  proxi- 
mité, et  arrondissant  parfaitement  son  territoire. 

Parmi  les  bailliages  mayençais  qui  furent  donnés  au 
prince  de  Nassau-Usingen,  se  trouvent  ceux  d'Eltwill 
ou  EUfeld  et  Riidesheim,  qui  forment  le  Rhingau, 
canton  célèbre  pour  ses  vins,  la  petite  ville  de  Cassel, 
située  en  face  de  Mayence,  et  le  village  de  Hochheim, 
plus  célèbre  encore  que  le  Rhingau,  par  ses  vi- 
gnobles :  ce  village  avait  appartenu  au  chapitre  de 
Mayence.  Dans  l'enceinte  du  Rhintal  est  situé  le  Johan- 
nisberg,  dépendant  de  l'évêché  de  Fulde;  mais  ce 
beau  domaine  passa  au  nouveau  possesseur  de  Fulde, 
de  manière  que  le  prince  de  Nassau-Usingen  n'en  eut 
que  la  souveraineté,  ainsi  que  l'avait  eue  l'électeur  de 
Mayence. 

Soden  et  Sulzbach  sont  deux  villages  considérables 
qui  se  prétendaient  immédiats,  mais  sur  lesquels 
l'électeur  de  Mayence  et  la  ville  de  Francfort  exer- 
çaient le  droit  de  protection  en  vertu  duquel  ils  s'en 
regardaient  comme  les  souverains,  chacun  pour  moi- 
tié. Il  y  a  à  Soden  de  belles  salines  qui  appartiennent 
à  des  particuliers  ;  mais  le  prince  de  Nassau-Usingen 
perçoit  le  dixième  des  revenus  de  ces  établissements. 

années  plus  tard,  M.  Hassel  publia  l'estimation  suivante,  pour  laquelle 
ce  publiciste  eut  sans  doute  des  données  exactes  ; 

m.  c.  habit. 

1.  Les  bailliages  mayençais,  avec  Schwanheim...  24  60  000 

2.  Les  restes  de  l'archevêché  de  Cologne if  4  000 

3.  Le  bailliage  de  Caub i  4  800 

4.  Les  cinq  bailliages  hessois 4|  10000 

5.  Sayn-Altenkirchen 5  15000 

6.  Sulzbach,  Soden,  Weiperfelden  et  Okriftel 1*  2  000 

7.  Les  abbayes 

36|      92  800 

Voy.  Hassel allg.  europ.  Staats-und  Address-Handb.  fiir  das  Jahr  1816, 
Bd.  I,  Ablh.  1,  p.  386. 


—  314  — 

Le  village  d'Okriftel  fut  enlevé  au  prince  d'Isen- 
bourg  contre  un  dédommagement  dont  nous  parlerons. 

Le  comté  de  Sayn-Altenkirclien  convenait  d'autant 
mieux  à  la  maison  de  Nassau,  que  par  cet  arrangement 
la  totalité  du  comté  deSayn  devait  un  jour  être  réunie 
à  cette  maison.  En  effet,  la  branche  d'Usingen  s'étant 
éteinte  le  23  mars  1816,  toutes  ses  possessions  pas- 
sèrent à  celle  de  Weilbourg,  qui  déjà  tenait  Sayn- 
Hachenbourg  par  la  comtesse  de  Kirchberg,  épouse 
de  Frédéric-Guillaume ,  prince  de  Weilbourg. 

Les  quatre  chapitres  nommément  cédés  au  prince 
de  Nassau-Usingen,  sont  celui  de  Saint-George  à  Lim- 
bourg-sur-la-Lahn,  ville  anciennement  dépendante  de 
rarchevôché  de  Trêves,  et  donnée  par  le  Recès  au 
prince  de  Weilbourg,  ainsi  que  le  bailliage  de  Monta- 
baur,  dans  lequel  était  située  l'abbaye  de  Rummers- 
dorfj  le  chapitre  noble  de  Saint-Ferrutius,  dans  le 
village  de  Bleidenstatt,  appartenant  à  Usingen  ;  enfin 
l'abbaye  de  Sayn  située  dans  le  bailliage  de  Vallendar, 
qui  appartenait  en  commun  à  l'électeur  de  Trêves  et 
au  comte  de  Wittgenstein  :  la  part  électorale  fut  dévo- 
lue par  le  Recès  au  prince  de  Weilbourg.  Ainsi  ces 
quatre  abbayes  étaient  toutes  sous  la  souveraineté  de 
ce  dernier  prince. 

Nous  avons  déjà  fait  connaître  Tune  des  conditions 
qui  furent  attachées  à  la  possession  du  comté  de  Sayn- 
Altenkirchen*,  et,  à  l'occasion  du  paragraphe  23,  nous 
reviendrons  sur  celle  qui  regarde  les  prétentions  de 
la  maison  de  Wittgenstein. 

L'indemnité  du  prince  de  Nassau-Usingen  ne  fut  au 
reste  pas  tout  à  fait  conforme  à  celle  que  le  premier 
plan  lui  avait  assignée.  Il  lui  donnait  aussi  la  partie 
de  l'ancien  électoral  de  Mayence  qui  était  située 
entre  le  Mein,  le  pays  de  Darmstadt  et  le  comté  d'Er- 

•  Voy.  p.  278. 


—  315  — 

bach  (savoir  les  bailliages  de  Lorsch,  Fûrth,  Stenbeim, 
Alzenaii,  Vilbel,  Rockenbourg,  Hassloch,  Astheim  et 
Hirschhorn);  mais  comme  ces  districts  arrondissaient 
parfaitement  le  landgrave  de  Darmstadt,  on  les  échan- 
gea contre  les  bailliages  hessois  situés  à  la  portée  du 
prince  de  Nassau. 

La  perte  de  la  maison  de  Nassau-Weilbourg  se 
montait  à  six  milles  carrés  avec  quinze  mille  cinq 
cents  habitants,  qui,  à  ce  qu'on  prétendait,  avaient 
rapporté  cent  soixante-dix-huit  mille  florins;  calcul 
exagéré  de  plus  de  cinquante  mille  florins.  Le  reste 
de  l'électorat  de  Trêves,  qu'on  abandonnait  à  cette 
maison,  formait  encore  seize  milles  carrés  avec  trente- 
sept  mille  habitants,  et  rapportait  deux  cent  cinquante 
mille  florins  :  il  consistait  dans  la  partie  des  bailliages 
d'Ehrenbreitstein  et  de  Bergpflege,  située  sur  la  rive 
droite  du  Rhin,  une  grande  partie  du  comté  de  Bas- 
Isenbourg,  les  bailliages  de  Hammerstein,  Welmich, 
Montabaur  et  Limbourg,  dans  lequel  se  trouve  le  vil- 
lage de  Niederselters ,  ayant  des  eaux  célèbres  * ,  des 
parties  de  Camberg,  Wehrheim,  Vallendaret  Mûnzfel- 
den.  Le  Prince  n'obtint  pas  les  abbayes  renfermées 
dans  ce  pays  et  dont  on  avait  disposé  en  faveur  du 
prince  de  Nassau-Usingen ,  excepté  Schœnau  ;  mais 
on  lui  donna  la  riche  abbaye  immédiate  d'Arnstein 
sur  la  Lahn  et  de  Marienstadt,  dans  le  comté  de 
Sayn-Hachenbourg.  Ces  trois  abbayes  rapportaient 
soixante-quinze  mille  florins  ;  d'où  il  s'ensuit  que  la 
totalité  de  l'indemnité  de  Nassau-Weilbourg  se  mon- 
tait à  un  revenu  annuel  de  trois  cent  vingt-cinq  mille 


'  Le  prince  de  Nassau-Weilbourg  n'eut  que  la  supériorité  territoriale 
sur  la  kellerey  de  Villmar,  dépendant  du  bailliage  de  Limbourg  ;  Wied- 
Runkel  en  eut  les  domaines. 


—-  316  — 

florins,  qui  surpassait  près  de  deux  fois  celui  de  la 
perte. 

L'électorat  de  Trêves  avait  anciennement  une  Consti- 
tution représentative.  Se  fondant  sur  ce  que  dit,  à 
l'égard  de  Munster,  le  paragraphe  3  du  Recès,  le  Prince 
la  supprima.  Les  États  adressèrent  leurs  plaintes  au 
Conseil  aulique,  mais  ils  en  furent  déboutés. 

Il  nous  reste  à  parler  de  la  branche  ottonienne  de 
la  maison  de  Nassau.  Dans  le  partage  de  la  succession 
de  Henri  le  Richej  Otton,  son  fils  puîné,  obtint  Dillen- 
bourg,  Siegen  et  Bielstein.  Ses  descendants  se  parta- 
gèrent en  plusieurs  lignes  ;  mais  toutes  se  réunirent 
dans  la  personne  de  Guillaume  l'aîné,  qui  vécut  du 
temps  de  la  Réformation  et  mourut  en  1 559.  Les  biens 
de  la  maison  s'étaient  beaucoup  accrus;  des  posses- 
sions considérables  dans  les  Pays-Bas,  et  le  comté  de 
Dietz  avaient  été  acquis  soit  par  mariages,  soit  par 
achats.  Guillaume  était  héritier,  par  sa  mère,  du  comte 
de  Catzenellenbogen  et  de  la  partie  du  comté  de  Dietz, 
qui  n'avait  pas  appartenu  à  sa  maison;  mais  la  maison 
de  Hesse  se  mit  en  possession  du  premier  comté  et 
n'abandonna  à  celle  de  Nassau  que  le  reste  de  Dietz. 
Guillaume  l'aîné  s'appelait  en  conséquence  comte  de 
Nassau-Catzenellenbogen . 

Il  laissa  deux  fils  qui  fondèrent  deux  lignes;  l'aîné, 
dit  Guillaume  le  jeune,  eut  les  possessions  de  sa  maison 
dans  les  Pays-Bas  et  hérita  de  la  principauté  d'Orange; 
le  cadet,  dit  Jean  l'aîné,  eut  les  terres  d'Allemagne. 

La  ligne  fondée  par  Guillaumele  jeune  s'est  illustrée 
sous  le  nom  de  princes  d'Orange;  elle  s'éteignit  en 
1 702,  par  la  mort  de  Guillaume  III,  roi  d'Angleterre. 
Sa  succession  fut  contestée  entre  le  roi  de  Prusse  et  la 
ligne  allemande  de  la  maison  de  Nassau;  mais  celle-ci 
obtint  les  domaines  situés  dans  les  Pays-Bas  et  les  di- 


—  317  — 

gnités  dont  la  branche  d'Orange  avait  été  revêtue;  et 
elle  prit  alors  le  nom  de  Nassau-Orange. 

Cette  seconde  maison  d'Orange  descendait,  comme 
nous  l'avons  dit,  de  Jean  l'aîné,  second  fils  de  Guil- 
laume l'aîné.  Jean  l'aîné  partagea  ses  possessions  entre 
ses  quatre  fils,  qui  fondèrent  les  lignes  de  Siegen,  de 
Dillenbourg,  de  Dietz  et  de  Hadamar.  La  première,  la 
seconde  et  la  quatrième  s'éteignirent  en  1743,  1739 
et  171 1 ,  et  il  ne  resta,  par  conséquent,  que  la  maison 
de  Dietz  qui  réunit  toutes  les  possessions  d'Allemagne 
de  la  ligne  ottonienne,  et  l'héritage  de  la  première 
maison  de  Nassau- Orange.  Guillaume  F,  prince  de 
Nassau-Dietz  ou  d'Orange,  avait  été  dépouillé,  en  1 795, 
de  son  patrimoine  dans  les  Pays-Bas,  et  des  dignités 
dont  sa  famille  y  était  revêtue. 

Nous  avons  parlé  plus  haut  des  pertes  que  cette  mai- 
son avait  supportées,  et  des  conventions  par  lesquel- 
les l'Allemagne  avait  été  chargée  de  l'en  indemniser. 

L'article  3  de  la  convention  conclue  à  Paris,  le 
23  mai  1802  ,  entre  la  France  et  la  Prusse,  avait  dé- 
terminé cette  indemnité;  c'étaient  les  évêchés  de  Fulde 
et  de  Corvey,  l'abbaye  de  Weingarten,  les  villes  de 
Dortmund,  Isny  et  Buchhorn.  On  ne  sait  pourquoi  le 
premier  plan  proposa,  à  la  place  des  villes  d'Isny  et 
de  Buchhorn,  les  abbayes  de  Rappel  dans  le  comté  de 
Lippe,  de  Kappenberg  dans  le  comté  de  Munster,  et  de 
Dietkirchen.  Le  Recès  y  fit  de  nouveaux  changements, 
et  on  accorda  au  prince  d'Orange  l'indemnité  suivante  : 

m.  c.  habit.  rev.  en  flor. 

L'évêché  de  Fulde 33  96  000*  660  000 

Celui  de  Corvey 5  iOOOO  iOOOOO 

La  ville  impériale  de  Dortmund 2        6  000  60  000 

Areporter...     40     412  000  820  000 

'  Le  nombre  de  quatre-vingt-seize  mille  est  placé  ici  par  estimation. 
Un  dénombrement  fait  en  1795  ou  4796,  dont  on  peut  voir  les  détails 
dans  WiNKOi'P,  deutsche  Zuschauer,  t.  I,   p.  286,  donne  quatre-vingt- 


L'abbaye  de  Weingarten 
Saint-Gérold 

—  318  — 

Beport. . .  40 

avec  Hofen  et 
6 

112  000 
1 4  000 

820  000 
150000 

Bandern  et  Dietkirchen . . 

30  000 

46 

126000 

1000000 

Les  revenus  de  l'évêché  de  Fulde  ne  se  montaient, 
sous  les  évêques,  qu'à  la  somme  de  quatre  cent  qua- 
tre-vingt-dix mille  florins,  mais  dans  cette  somme 
n'étaient  pas  compris:  1"  les  revenus  du  chapitre, 
qui  étaient  de  quatre-vingt-dix  mille  florins;  2"  ceux 
des  nombreux  couvents  de  l'évêché;  3"  les  revenus  de 
Johannisberg,  domaine  placé  sous  la  souveraineté  de 
l'électeur  de  Mayence,  et  attribué,  par  le  Recès,  à  celle 
du  prince  de  Nassau-Usingen.  Le  domaine  de  Johan- 
nisberg, déjà  renommé  par  ses  vins  au  bouquet  déli- 
cieux, est  devenu  célèbre,  depuis  1816,  à  un  titre 
d'une  bien  autre  valeur,  par  l'investiture  qu'en  a 
donnée  l'empereur  François  au  prince  de  Metlernich. 

L'évêché  de  Corvey  était  le  dernier  de  l'Allemagne; 
il  n'avait  été  élevé  à  cette  dignité  qu'en  1783  par  le 
Pape,  et  en  1 793  par  l'empereur  François  IL 

La  ville  libre  de  Dortmund  est  située  en  Wesphalie, 
et  renfermait  plusieurs  couvents.  L'abbaye  de  Wein- 
garten est  située  en  Souabe,  sur  la  rivière  de  Schussen; 
elle  possédait  la  seigneurie  de  Blumeneck  dans  le  Val- 
gau  ou  Voralberg ,  où  se  trouve  également  l'abbaye  de 
Saint-Gérold;  Bandern  est  sur  le  Rhin,  dans  l'enceinte 
de  la  principauté  de  Liechtenstein.  Hofen  est  une  an- 
cienne abbaye  de  bénédictins,  sur  la  partie  du  lac  de 
Constance  qu'on  appelle  lac  d'Uberlingen.  Dietkirchen 
se  trouve  dans  la  partie  du  comté  de  Dietz  qui  appar- 
tenait aux  électeurs  de  Trêves.  On  voit  que  l'indemnité 

dix  mille  vingt  âmes,  dont  soixante-dix-sept  mille  cent  trente-six  dans 
les  bailliages  du  Prince,  et  douze  raille  huit  cent  quatre-vingt-quatre 
dans  ceux  du  chapitre. 


—  319  — 

donnée  à  la  maison  de  Nassau-Orange  se  composait 
entièrement  de  parcelles  détachées.  Elle  en  abandonna 
les  plus  éloignées  à  l'Autriche,  par  une  convention 
dont  nous  aurons  occasion  de  parler. 

Au  reste,  on  ne  sait  pas  pourquoi  le  premier  plan 
et  le  Recès  appellent  la  maison  d'Orange  de  la  ligne 
ottonienne  princes  de  Nassau-Dillenbourg .  Si  on  avait 
des  motifs  d'éviter  le  nom  d'Orange,  rien  ne  s'op- 
posait à  ce  que  l'on  donnât  à  cette  maison  le  nom  de 
princes  de  Dietz,  qui  est  celui  qu'elle  portait  depuis  des 
siècles. 

A  l'indemnité  de  cette  maison,  on  ajoute  une  clause 
qui  exige  quelques  éclaircissements  ultérieurs;  la 
voici  :  K  à  charge  par  lui  (c'est-à-dire  par  le  prince  de 
Nassau-Dillenbourg)  de  satisfaire  aux  prétentions  sub- 
sistantes et  précédemment  reconnues  par  la  France 
sur  quelques  successions  réunies  au  majorât  de  Nas- 
sau-Dillenbourg pendant  le  cours  du  dernier  siècle.  » 
Cette  même  clause  avait  été  exprimée  de  la  ma- 
nière suivante  dans  l'article  3  de  la  convention  du 
23  mai  1 802  :  «  à  condition  que  Son  Altesse  Sérénis  ■ 
sime  soit,  tenue  de  donner  satisfaction,  relativement 
aux  prétentions  existantes  et  précédemment  reconnues 
par  la  France,  du  droit  de  succession,  lesquelles  con- 
cernaient la  branche  aînée  de  sa  maison  dans  le  cours 
du  dernier  siècle  ;  cette  satisfaction  sera  déterminée 
par  des  arbitres  à  nommer  à  volonté  pour  cet  effet 
par  les  parties  contractantes.  » 

Quelles  étaient  donc  ces  prétentions,  précédemment 
reconnues  par  la  France,  de  droits  de  succession  qui 
concernaient  la  branche  aînée  de  la  maison  de  Nassau, 
de  la  ligne  ottonienne,  et  qui  obligeaient  à  une  satis- 
faction la  troisième  branche  de  cette  ligne,  celle  de 
Dietz,  que  le  Recès  appelle  Dillenbourg  ? 

Nous  avons  dit  que  la  branche  de  Siegen  s'était 


—  320  — 

éteinte,  en  1 743,  par  la  mort  de  Guillaume-Hyacinthe. 
Ce  prince  avait  été  précédé  dans  la  tombe  par  un  frère 
puîné  et  consanguin  qui  s'appelait  Emmanuel,  et  qui, 
d'après  le  Droit  public  d'Allemagne,  n'aurait  pu  suc- 
céder ,  parce  que  sa  mère ,  Isabelle -Claire-Eugénie  de 
LaSerre,  n'était  pas  de  naissance  assez  illustre,  et  que, 
par  conséquent,  son  mariage  avec  Jean-François-Désiré, 
père  de  Guillaume-Hyacinthe  et  à'Emmcmuelf  n'était 
regardé  que  comme  morganatique,  espèce  d'union 
qui  donne  aux  enfants  le  droit  de  légitimité,  mais  non 
celui  de  succession.  Si  Emmanuel  n'avait  pas  le  droit  à 
succéder  aux  fiefs  de  Siegen,  il  ne  pouvait  pas  en  trans- 
mettre à  sa  descendance. 

Emmanuel  di.-i-\\  laissé  des  descendants  légitimes? 
Cette  question  a  été  vivement  discutée.  Il  avait  été 
marié  à  Charlotte  de  Mailly ,  marquise  de  Ncsle,  qui 
s'en  était  séparée  en  1727.  Cette  dame  avait  mis  au 
monde  un  fils,  nommé Maximilieîi,  qui  prétendait  être 
û\s  A' Emmanuel,  mais  que  les  princes  de  Nassau-Dietz 
ne  voulurent  pas  reconnaître,  et  que  les  tribunaux  de 
l'Empire  déclarèrent  bâtard  et  adultérin.  Cependant  sa 
mère,  la  marquise  de  Nesle,  par  ses  démarches  persévé- 
rantes, obtint  du  parlement  de  Paris,  en  1 75G,  un  arrêt 
qui  déclara  son  fils  légitime.  Il  est  clair  qu'une  sentence 
rendue  par  un  tribunal  français,  d'après  les  lois  fran- 
çaises entièrement  différentes  de  celles  de  l'Allemagne, 
ne  pouvait  donner  au  fils  de  la  marquise  de  Nesle  au-. 
cun  droit  aux  possessions  de  la  maison  de  Nassau  en 
Allemagne.  Cependantcefils  adultérin  futtoujours  traité 
en  France  de  prince  de  Siegen,  et  transmit  ce  titre  à 
son  fils,  Charles  -  Henri -Nicolas.  Celui-ci  se  distingua 
par  sa  bravoure  au  siège  de  Gibraltar,  et  dans  les 
guerres  de  la  Russie  contre  la  Porte  et  la  Suède  j  et  ce 
fut  sans  doute  l'intérêt  qu'il  avait  personnellement 
inspiré,  beaucoup  plus  que  la  justice  de  sa  cause,  qui 


—  321   — 

engagea  les  médiateurs  à  imposer  à  la  maison  d'O- 
range l'obligation  de  l'indemniser  de  ses  prétendus 
droits  de  succession.  La  manière  dont  cette  maison 
s'en  est  acquittée  n'a  pas  été  officiellement  connue; 
mais  on  assure  qu'il  a  été  payé  au  prince  une  somme 
de  cent  trente  mille  florins,  et  qu'une  rente  viagère 
de  quinze  mille  florins,  dont  il  n'a  pas  joui  longtemps 
lui  avait  été  constituée. 

§  13. 

{(  Au  prince  de  La  Tour  et  Taxis,  pour  indemnité 
des  revenus  des  postes  de  l'Empire  dans  les  provinces 
cédées  à  la  France  :  l'abbaye  de  Buchau  avec  la  ville, 
celles  de  Marchtlial  et  de  Neresbeim,  et  le  bailliage 
d'Osterach  dépendant  de  Salmansweiler  dans  toute 
l'étendue  de  son  administration  actuelle,  avec  la  sei- 
gneurie de  Schemmelberg,  et  les  hameaux  de  Tiefen- 
tlial,  Franzhoff  et  Stetten.  La  conservation  des  postes 
du  prince  de  La  Tour  et  Taxis,  telles  qu'elles  sont  con- 
stituées, lui  est  d'ailleurs  garantie.  En  conséquence, 
lesdites  postes  sont  maintenues  in  statu  quo  pour  l'é- 
tendue et  l'exercice  qu'elles  conservaient  lors  du  traité 
de  Lunéville;  et,  pour  en  assurer  d'autant  plus  l'éta- 
blissement dans  toute  son  intégrité,  tel  qu'il  se  trou- 
vait à  ladite  époque,  elles  sont  mises  sous  la  protec- 
tion spéciale  de  l'Empereur  et  du  collège  électoral.  » 

La  maison  de  La  Tour  et  Taxis  n'est  pas  une  de 
celles  qui  brillaient  parmi  les  souverains  par  l'anti- 
quité de  leur  race  ou  par  l'éclat  de  leurs  services  ;  mais 
si  les  fondateurs  d'établissements  utiles  ont  droit  à  la 
reconnaissance  de  leurs  contemporains  et  de  la  posté- 
rité, personne  n'a  plus  de  titres  à  la  considération  que 
cette  maison.  Originaires  de  la  Lombardie,  les  Tour 
VII  21 


—  322  — 

et  Taxis  se  transportèrent,  dans  le  xv"  siècle,  dans  les 
Pays-Bas,  où  ils  imaginèrent  d'établir  des  postes,  ser- 
vice alors  entièrement  inconnu.  Us  en  conservèrent 
la  direction  sous  les  empereurs  Maximilien  et  Charles- 
Quint.  L'empereur  Mathias  chargea  Lamoral,  baron  de 
Taxis,  d'introduire  les  postes  dans  le  reste  de  l'Empire, 
et  lui  accorda,  en  1 G1 5,  avec  le  titre  de  comte,  la  charge 
de  grand-maître  héréditaire  des  postes  en  Empire. 
Son  arrière-petit-fils,  Eugène-Alexandre  ^  fut  élevé  eu 
1795  à  la  dignité  de  prince  d'Empire.  La  charge 
de  grand-maître  héréditaire  des  postes  de  l'Empire  fut 
érigée,  en  1 744,  en  fief  du  trône;  et,  en  1 754,  le  prince 
Alexandre-Ferdinand  obtint  voix  et  séance  au  collège 
des  Princes  à  la  Diète ,  sous  la  condition  qu'il  ferait 
l'acquisition  d'une  terre  immédiate  à  laquelle  ce  suf- 
frage serait  affecté.  Cette  acquisition  fut  faite  par  son  fils 
Char  les- Anselme,  11  acheta,  en  1 785,  du  comte  de  Truch- 
sess-Waldbourg ,  pour  une  somme  de  deux  millions 
cent  mille  florins,  les  seigneuries  de  Scheer,  Fried- 
berg,  Diirmentingen  et  Buss,  que  l'Empereur  éleva, 
en  4787,  au  rang  de  comté  princier,  sous  le  nom  de 
Scheer.  Il  obtint  en  conséquence  le  droit  de  siéger 
parmi  les  princes  du  cercle  de  Souabe.  Par  la  cession 
de  la  rive  gauche  du  Rhin,  le  prince  de  La  Tour  et 
Taxis  perdit  les  postes  dans  les  provinces  cédées,  et 
des  domaines  dans  la  Belgique.  Les  revenus  qu'il 
tirait  de  ces  derniers  sont  inconnus;  on  ne  connaît 
pas  non  plus  d'une  manière  olïicielle  le  produit  des 
postes  dont  cette  maison  était  en  possession.  D'après 
des  calculs  qui  nous  ont  été  communiqués,  et  que 
nous  pouvons  regarder  comme  authentiques,  les  postes 
de  l'Empire,  sans  celles  de  la  Belgique,  rapportaient 
deux  millions  de  florins  nets,  dont  à  peu  près  un 
dixième  venait  des  provinces  situées  sur  la  rive  gauche 
du  Rhin.  On  peut  y  ajouter  les  postes  des  Pays-Bas, 


—  323  — 

qui  rapportaient  environ  cinq  cent  mille  florins  d'Em- 
pire, dont  il  faut  toutefois  déduire  cent  cinquante 
mille  florins  de  Vienne,  que  la  maison  de  La  Tour  et 
Taxis  payait  pour  cette  jouissance  à  titre  de  bail.  On 
peut  donc  estimer  à  six  ou  sept  cent  mille  florins  de 
revenus  nets  la  perte  de  cette  maison.  Si  les  districts 
qui  lui  étaient  assignés  à  titre  d'indemnité  ne  la  dé- 
dommageaient pas  de  cette  perte,  on  voit  au  moins 
avec  plaisir  que  l'article  qui  la  concerne  a  été  dicté 
par  ce  sentiment  de  bienveillance  que  cette  maison 
avait  inspiré  à  tous  ceux  qui  étaient  en  rapport  avec 
elle.  Jamais  souverain  n'a  eu  des  serviteurs  plus  atta- 
chés que  cette  maison,  parce  que  jamais  souverain  n'a 
mieux  possédé  le  secret  de  s'assurer  par  des  bienfaits 
du  zèle  et  du  dévouement  de  ses  serviteurs.  Deux  cir- 
constances qui  ont  sans  doute  contribué  à  rendre  la 
rédaction  de  l'article  1 3 ,  si  favorable  à  la  maison  de 
Taxis,  furent  l'alliance  que  le  prince  Alexandre  avait 
contractée  avec  une  sœur  de  la  reine  de  Prusse,  et  la 
considération  personnelle  qu'il  avait  acquise  par  sa 
manière  d'exercer  les  fonctions  de  commissaire  prin- 
cipal de  l'Empereur  auprès  de  la  Diète  de  l'Empire  à 
Ratisbonne,  lieu  du  Congrès. 

Voici  comment  le  premier  plan  s'exprimait  à  l'égard 
du  prince  de  La  Tour  et  Taxis  :  «  Pour  indemnité  du 
revenu  des  postes  impériales  dans  les  provinces  cé- 
dées, et  domaines  dans  la  Belgique  :  l'abbaye  de  Buchau 
avec  la  ville,  celles  de  Marchthal  et  de  Neresheim,  le 
bailliage  d'Osterach,  dépendant  de  Salmansweiler,  » 
Dès  le  troisième  plan  on  raya  les  mots  qui  sont  en 
italique,  mais  on  donna  à  la  cession  d'Osterach  une 
extension  considérable,  et  on  ajouta  la  garantie  des 
postes  dans  l'Empire. 

Buchau  est  une  ville  peu  importante ,  située  sur  le 
lac  de  Feder  en  Souabe;  mais  l'abbaye  dont  les  do- 


—  324  — 

maines  sont  en  partie  placés  entre  ce  même  lac  et  la 
principauté  de  Scheer  est  considérable.  L'abbaye  de 
Marchthal  y  est  contiguë  et  plus  riche  encore.  Le 
bailliage  d'Osteracli  touche  aussi  à  la  principauté  de 
Scheer;  mais  les  accessoires  qu'on  y  ajoute  en  sont 
détachés,  quoique  situés  dans  la  proximité.  Il  n'en  est 
pas  de  même  de  l'abbaye  de  Neresheim,  située  dans 
le  comté  d'Oettingen.  Ce  couvent  était  célèbre  par  sa 
bibliothèque  et  ses  cabinets  de  monnaies  et  d'histoire 
naturelle.  11  convenait,  par  sa  situation,  au  prince  de 
la  Tour  et  Taxis,  parce  qu'il  touchait  à  sa  seigneurie 
de  Dischingen.  Au  reste,  il  faut  lire  dans  l'acte  Tie- 
fenhiihle  et  Frankenhofen,  au  lieu  de  Tiefenthal  et 
Franzhoff. 

Voici  le  résumé  de  l'indemnité  donnée  à  la  maison 
de  Taxis  : 

m.  c.  habit.  rev.  en  flor, 

Villeet  abhayedeBiichau 2  5  000  75  000 

Abbaye  de  Marchthal 3  7000  75000 

Abbaye  de  Neresheim i|  5000  50000 

Oslerach  avec  les  dépendances 4  ^  4  000  25  000 

8      21000  225000 

Pour  ce  qui  regarde  la  conservation  des  postes  du 
prince  de  La  Tour  et  Taxis,  le  Recès  ne  put  la  lui  ga- 
rantir. Le  roi  de  Prusse  abolit  les  postes  de  Taxis  dans 
ses  possessions;  l'électeur  de  Wurtemberg  en  fit  de 
même  au  mois  de  décembre  1S05.  La  paix  de  Pres- 
bourg  occasionna  d'autres  changements.  Le  roi  de  Ba- 
vière conféra,  le  1 4  février  1 806,  au  prince  de  La  Tour 
et  Taxis,  la  charge  de  grand-maître  héréditaire  des 
postes,  comme  un  fief  de  la  couronne.  Le  25  septem- 
bre 1805,  le  grand-duc  de  Bade  fit  de  môme;  le 
22  novembre  180G,  le  grand-duc  de  Wurzbourg 
suivit  cet  exemple.  Le  prince-primat  et  les  princes  de 
Nassau-Weilbourg  et  Usingen  accordèrent  la  même 


—  325  — 

faveur  à  la  maison  de  Taxis;  mais  le  grand-duc  de 
Berg  le  dépouilla  de  la  poste  dans  ses  États. 

§  14. 

«  Au  prince  de  Lœivenstein  -  Wertheim  ,  pour  le 
comté  de  Putlange^  les  seigneuries  de  Scharfeneck,  de 
Cugnon  et  autres,  les  deux  villages  mayençais  de 
Wiirth  et  de  Trennfurth,  les  bailliages  de  Rotlienfels 
et  de  Hombourg  au  pays  de  Wiirzbourg,  les  abbayes 
de  Brummbach,  Neustadt  et  Holzkirchen,  les  régies 
wiirzbourgeoises  de  Widdern  etThalheim,  une  rente 
perpétuelle  de  douze  mille  florins  sur  l'octroi  de 
navigation  mentionné  au  paragraphe  39,  et  les  droits 
et  revenus  de  Wiirzbourg  dans  le  comté  de  Wert- 
heim ;  sous  la  clause  néanmoins  de  rétrocéder  le  susdit 
bailliage  de  Hombourg  et  l'abbaye  de  Holzkirchen  à 
l'électeur  palatin  de  Bavière,  contre  une  rente  perpé- 
tuelle de  vingt-huit  mille  florins,  ou  tout  autre  équi- 
valent dont  ils  pourront  convenir. 

«Aux  comtes  de  Lœwenstein-Wertheim,  pour  le 
comté  de  Virnebourg  :  le  bailliage  de  Frudenberg,  la 
chartreuse  de  Griinau,  le  couvent  de  Triefenstein 
et  les  villages  de  Montfeld,  Rauenberg,  Wessenthal  et 
Trennfeld.  )) 

Le  comté  de  Lœwenstein  est  situé  dans  les  environs 
de  la  ville  de  Heilbronn,  entre  l'ancien  duché  de  Wur- 
temberg et  le  comté  de  Hohenlohe.  Il  faut  distinguer, 
dans  l'ordre  chronologique,  deux  maisons  de  comtes 
de  Lœvenstein.  La  première,  qui  possédait  ce  comté 
à  titre  d'alleu,  s'éteignit  en  1441,  après  que  le  dernier 
comte,  nommé  Wolfgang,  l'eût  vendu  pour  la  somme 
de  quatorze  mille  florins  à  Frédéric  le  Victorieux^  Élec- 
teur palatin.  Ce  prince  avait  épousé,  en  mariage  mor- 


—  326  — 

ganatique,  une  demoiselle  de  Dettingen,  dont  il  eut 
un  fils.  Il  donna  à  ce  fils  la  seigneurie  de  Scharfe- 
neck,  près  Landau,  avec  Weinberg,  Neustadt-sur-le- 
Kocher,  Meckmiihl,  Utzberg  et  Umstadt.  Mais  le  suc- 
cesseur de  l'électeur  Frédéric  annula  la  donation  ;  il 
laissa  cependant  à  son  cousin  Scharfeneck,  et  lui  donna 
le  comté  de  Lœwenstein  en  remplacement  des  autres 
terres  démembrées  en  sa  faveur  de  l'électorat.  Ce  sei- 
gneur devint  la  souche  de  la  seconde  maison  de  Lœ- 
wenstein; mais  dans  les  troubles  qui  eurent  lieu  en 
1504  dans  le  Palatinat,  il  fut  obligé  de  se  soumettre, 
pour  Lœwenstein,  à  la  supériorité  territoriale  du  duc 
Ulrich  de  Wurtemberg,  de  manière  qu'il  ne  posséda 
d'autre  terre  immédiate  que  Scharfeneck.  Son  petit- 
fils,  Louis  II ,  épousa  une  comtesse  de  Stolberg,  qui 
hérita,  par  sa  sœur,  le  comté  de  Wertheim  en  Fran- 
conie,  et  une  partie  de  celui  de  Rochefort,  situé  dans 
l'enceinte  du  duché  de  Luxembourg.  Depuis  ce  temps, 
Louis  II  s'appela  comte  de  Lœwenstein-Wertheim.  Ses 
fils  fondèrent  deux  lignes  :  celle  de  Virnebourg,  ainsi 
appelée  du  comté  de  ce  nom,  situé  dans  l'Eyffel, 
qu'elle  eut  par  mariage,  et  celle  de  Rochefort.  Ces 
deux  lignes,  qui  possèdent  en  commun  les  comtés  de 
Lœwenstein  et  de  Wertheim,  subsistent  encore;  la 
cadette  est  décorée  du  titre  de  prince. 

Le  comté  de  Virnebourg,  appartenant  à  la  branche 
des  comtes,  la  seigneurie  de  Scharfeneck,  et  les  autres 
possessions  des  princes  de  Lœwenstein-Wertheim  dans 
les  Pays-Bas,  faisant  leur  part  du  comté  de  Rochefort, 
furent  perdus  par  la  cession  de  la  rive  gauche  du 
Rhin.  Le  premier  plan  assigna  vaguement  à  ces  deux 
maisons  une  indemnité,  en  s'exprimant ainsi  :  «  Aux 
princes  et  comtes  de  Lœwenstein ,  pour  le  comté  de 
Virnebourg,  la  seigneurie  de  Scharfeneck,  et  autres 
terres  dans  les  pays  réunis  à  la  France  :  la  part  de 


—  327  — 

Wûrzbourg  aux  comtés  de  Rlieineck  et  de  Wertheim, 
à  la  droite  du  Mein;  l'abbaye  de  Brombach.  »  Cet  ar- 
ticle était  très-mal  rédigé;  ces  mots  :  «  à  la  droite  du 
Mein,  »  devaient  sans  doute  être  placés  après  celui  de 
Rheineck,  puisque  le  bailliage  de  Rothenfels  qui,  an- 
ciennement, avait  appartenu  aux  comtes  deRheineck, 
ou  plutôt  Rieneck,  et  qu'après  l'extinction  de  cette 
maison ,  les  évêques  de  Fulde  avaient  repris  comme 
fief  dépendant  d'eux,  est  situé  sur  la  rive  droite  du 
Mein,  tandis  que  les  bailliages  d-e  Remlingen,  de  Lau 
tenbach,  de  Freudenberg  et  Schwanberg,  qui,  aveâ 
les  couvents  de  Brummbach,  Holzkirchen  et  Grûnau, 
formaient  la  partie  du  comté  de  Wertheim,  dont  les 
évêques  de  Wûrzbourg  avaient  dépouillé  les  comtes 
de  Lœwenstein,  en  1 598,  sont  tous  situés  sur  la  rive 
gauche  du  Mein.  Tout  cela  s'éclaircit  par  la  discus- 
sion à  laquelle  les  réclamalions  de  la  maison  de  Lœ- 
wenstein donnèrent  lieu,  et  le  Recès  détermine  clai- 
rement l'objet  de  la  perte  et  l'indemnité. 

La  ligne  princière  n'avait  perdu,  en  terres  immé- 
diates, que  la  seigneurie  de  Scharfeneek;  et  comme 
la  qualité  d'Etat  d'Empire  n'y  était  pas  attachée,  cette 
perte  n'était  pas  dans  le  cas  d'être  compensée  par  une 
indemnité,  d'après  le  principe  admis  par  la  Députa- 
tion,  sauf  à  cette  maison  de  réclamer  de  la  France 
la  levée  du  séquestre  mis  sur  ses  terres  médiates  et 
immédiates.  Il  y  avait  encore  moins  de  motifs  d'al- 
louer à  cette  maison  un  dédommagement  pour  les 
terres  qu'elle  avait  possédées  sous  la  souveraineté  de 
la  France.  Cependant  on  ne  voulut  pas  seulement  la 
dédommager  de  sa  perte  qui,  en  déduisant  ce  que 
son  mémoire  avait  d'exagéré,  pouvait  aller  à  quatre- 
vingt-sept  mille  florins  par  an;  mais  on  voulut,  à  ce 
qu'il  paraît,  réparer  à  son  égard  le  tort  que  les  évo- 
ques de  Wûrzbourg  avaient  fait  depuis  deux  siècles  à 


~  328  — 

cette  famille;    car  on  doubla  son   indemnité,  ainsi 
qu'on  va  le  voir  par  l'aperçu  suivant  ; 

Les  villages  mayençais   de   Wiirth  et      m.  c      ha))ii.        rev.  en  non. 

Trennfurlh i  600  5000 

Les  bailliages  wurzbourgeois  deRolhen- 

fels  et  de  Hombourg 5^      15  000  62000 

Les  régies  wiirzbourgeoises  de  Widdern 

et  Thalheim 8  000 

Les  abbayes  de  Brummbach ,  Neustadt 

et  Holzkirchen ij        3000  60000 

Les  droits  et  revenus  de  Wiirzbourg  dans 

le  comté  de  Wertheim 3  000 

Une  rente  sur  l'octroi  de  la  navigation 

duRhin 12  000 

7  18  600        150  000 

Cependant ,  comme  le  bailliage  de  Hombourg  et 
l'abbaye  de  Holzkirchen  sont  situés  de  manière  que 
l'électeur  de  Bavière  diit  en  désirer  l'acquisition,  on 
lui  laissa  la  faculté  de  les  racheter  contre  une  rente 
perpétuelle  de  vingt-huit  mille  florins.  Au  reste,  tout 
ce  qui  fut  donné  au  prince  de  Lœwenstein  arrondit 
parfaitement  son  comté  de  Wertheim. 

La  branche  des  comtes  de  Lœwenstein-Wertheim 
ne  fut  pas  moins  bien  dédommagée.  Son  comté  de 
Virnebourg  avait  sur  un  mille  un  quart  carré  deux 
mille  six  cents  habitants,  et  donnait  à  son  possesseur 
dix-neuf  mille  sept  cent  treize  florins  de  revenus;  on 
lui  alloua  pour  cela  le  bailliage  de  Freudenberg,  par- 
tie du  comté  de  Wertheim  qui  avait  appartenu  à 
l'évêque  de  Wiirzbourg,  avec  plusieurs  couvents  et 
villages,  ensemble  un  mille  trois  quarts  carré  avec 
quatre  mille  cent  habitants,  rapportant  quarante-cinq 
mille  florins. 

§  15. 

«  Au  prince  d'Oettingen-W aller stein ,  pour  la  sei- 
gneurie de  Dachstuhl  :  l'abbaye  de  Sainte-Croix  de 


—  329  — 

Donauwerth,  le  chapitre  de  Saint- Magnus  à  Fiissen, 
et  les  couvents  de  Kirchheim,  d'Eggingen  et  Maihin- 
gen  au  pays  de  Wallerstein.  » 

La  seigneurie  de  Dachstuhl ,  renfermant  sur  deux 
milles  carrés  six  mille  habitants ,  et  rapportant  cin- 
quante-six mille  florins,  est  située  entre  la  Lorraine 
et  l'ancien  électorat  de  Trêves;  son  possesseur  avait  la 
qualité  d'État  du  cercle  électoral,  mais  il  n'était  pas 
État  d'Empire.  Cette  seigneurie  appartenait  à  la  maison 
d'Oeltingen-Baldern,  qui  s'était  éteinte  dans  les  mâles 
en  1 799.  La  succession  était  réclamée  par  la  prin- 
cesse de  CoUoredo-Mansfeld,  née  princesse  d'Oettin- 
gen.  C'est  pourquoi  le  premier  plan  adjuge  au  prince 
de  CoUoredo,  à  titre  d'indemnité,  l'abbaye  de  Sainte- 
Croix  de  Donauwerth.  Cependant  la  succession  de 
Dachstuhl  était  aussi  réclamée  par  les  princes  d'Oet- 
tingen-Wallerstein,  et  elle  leur  fut  adjugée  par  une 
transaction  qui  fut  conclue  le  3  octobre  Ï802.  Il  ne 
fut  donc  plus  question,  dans  le  second  plan,  du  prince 
de  Colloredo,  mais  bien  du  prince  d'Oettingen- Wal- 
lerstein, dont  on  augmenta  l'indemnité  en  y  ajoutant 
plusieurs  abbayes  d'un  rapport  annuel  de  quatre- 
vingt  mille  florins. 

§16. 

«  Aux  princes  et  comtes  de  Solms ,  pour  la  seigneu- 
rie de  Rohrbach,  celle  de  Kratz-Scharfenstein,  Hirsch- 
feld,  et  pour  leurs  droits  et  prétentions  sur  l'abbaye 
d'Arensbourg,  et  sur  le  bailliage  de  Kleberg  :  l'abbaye 
d'Arensbourg  et  celle  d'Altenbourg  au  pays  de  Solms.  w 

Les  possessions  que  la  maison  de  Solms  avait  per- 
dues n'étaient  pas  médiates,  et,  par  conséquent,  ne 
devaient  pas  être  compensées;  cependant  on  lui  donna 


—  330  — 

deux  couvents  situés  à  sa  portée,  et  rapportant  qua- 
rante-cinq mille  florins. 

§17. 

c(  Aux  princes  et  comtes  de  Stolberg,  pour  le  comté 
de  Rochefort  et  leurs  prétentions  sur  Kœnigstein  : 
une  rente  perpétuelle  de  trente  mille  florins  sur  l'oc- 
troi   de  navigation  mentionné  au  paragraphe   39.  » 

L'antique  maison  de  Stolberg,  dont  l'origine  se 
perd  dans  la  nuit  des  temps,  se  divise  en  deux  lignes 
dont  chacune  se  subdivisait,  à  l'époque  du  Recès,  en 
deux  branches  :  l'aînée  se  composait  des  comtes  de 
Stolberg-Wernigerode,  et  des  princes  de  Stolberg- 
Gedern;  la  cadette  se  formait  de  Stolberg-Stolberg,  et 
Stolberg-Rosla.  Les  quatre  branches  possédaient  une 
partie  du  comté  de  Rochefort,  dans  le  Luxembourg , 
renfermant  la  ville  de  ce  nom,  la  seigneurie  de  Bri- 
quemont,  le  comté  de  Montaigu  et  d'autres  domaines. 
La  moitié  appartenant  à  la  seconde  ligne,  avait  été 
rendue  par  le  gouvernement  français,  par  le  motif 
singulier  que  cette  ligne  n'avait  pas  pris  part  à  la 
guerre;  mais  l'autre  moitié  avait  été  confisquée.  La 
totalité  du  comté  rapportait  quatorze  mille  quatre 
cent  six  florins  de  revenus  nets.  Mais  la  maison  de 
Stolberg  avait  des  prétentions  légitimes  sur  le  comté  de 
Kœnigstein,  dont  l'électeur  de  Mayence  avait  pris  pos- 
session à  titre  de  dépôt,  en  1581,  lors  de  la  mort  du 
dernier  comte,  dont  la  sœur  avait  épousé  un  Stolberg. 
La  rente  de  trente-deux  mille  florins  indemnisait  en 
môme  temps  pour  la  perte  et  pour  la  prétention. 

§  18. 
u   Au  prince    Charles   de    llohenlohe  -  Bartenstcin , 
pour  la   seigneurie   d'Obcrbronn  :   les  bailliages  de 


—  331   ~ 

Haltenbergstetten ,  Lautenbacli,  Jaxberg  et  Brauns- 
bach,  les  péages  de  Wlirzbourg  au  pays  de  Hohenlohe, 
sa  part  au  village  de  Neuenkirchen ,  le  village  de 
Munster  et  la  partie  orientale  du  territoire  de  Carls- 
berg;  le  tout  sous  la  clause  de  rétrocéder,  contre  un 
juste  équivalent,  à  l'Électeur  palatin,  le  territoire 
nécessaire  pour  établir  une  route  militaire  et  de  com- 
munication directe  et  non  interrompue  de  Wiirzbourg 
à  Rotbenbourg. 

f<  Aux  chefs  des  deux  branches  de  Hohenlohe- 
Waldenbourg,  pour  leur  part  au  péage  de  Boppard  : 
la  rente  perpétuelle  déjà  mentionnée  de  six  cents 
florins  sur  Combourg. 

«  Au  prince  de  Hohenlohe-Ingelfîngen,  pour  ses 
droits  et  prétentions  sur  les  sept  villages  de  Kœnigs- 
hofen ,  Rettersheim  ,  Reiderfeld  ,  Wermuthhausen , 
Neubronn ,  Streichental  et  Oberndorf  :  le  village  de 
Nagelsberg. 

«  Au  prince  de  Hohenlohe-Neuenstein ,  pour  la 
cession  du  village  de  Munster  et  de  la  partie  orientale 
du  territoire  de  Carlsberg ,  savoir  :  un  rayon  de  cinq 
cents  toises  françaises  à  prendre  de  l'extrême  fron- 
tière ,  le  village  d'Amrichshausen  et  les  parts  de 
Mayence,  Wiirzbourg  et  Combourg,  au  bourg  de 
Kiinzelsau.  » 

Les  princes  de  Hohenlohe,  ainsi  nommés  d'après 
un  ancien  château  en  Franconie  ,  descendent  d'un 
frère  de  Conrad  I^  roi  d'Allemagne,  qui  fut  duc  de 
Franconie.  Malgré  une  origine  si  illustre,  cette  maison 
n'est  revêtue  de  la  dignité  de  prince  que  depuis  1744 
et  1764;  les  empereurs  Charles  VII  et  François  I,  par 
égard  pour  son  antiquité,  la  déclarèrent  princière 
plutôt  qu'ils  ne  relevèrent  au  rang  de  prince.  Elle  se 
divise  en  deux  principales  lignes,  celle  de  Neuenstein 


■—  332  — 

et  celle  de  Waldenbourg  ;  chacune  comprend  plu- 
sieurs branches,  savoir  :  Neuenstein  (sans  parler  de 
Neuenstein-Neuenstein,  qui  s'est  éteinte  après  l'époque 
du  Recès  de  l'Empire  en  1805),  celles  de  1°  Langen- 
bourgj  2"  Langenbourg-Ingelfingen;  3°  Langenbourg- 
Kirchberg.  La  ligne  de  Waldenbourg  se  divise  en 
deux  branches  :  I^Bartenstein  qui,  par  suite  des  dis- 
positions du  Recès,  se  subdivisa  en  Bartenstein  et 
Jaxtberg,  et  2°  Schillingsfiirt. 

La  maison  de  Hohenlohe  se  trouvait  placée,  dans  le 
premier  plan ,  en  ces  termes  :  «  Le  prince  de  Hohen- 
lohe-Bartenstein  pour  Oberbronn  :  le  bailliage  de 
Jaxtberg  et  les  portions  de  Mayence  ou  Wiirzbourg  au 
bailliage  de  Kiinzelsau.  » 

Oberbronn ,  dans  la  basse  Alsace ,  faisait  partie  du 
comté  de  Hanau ,  ou  plutôt  était  une  seigneurie 
détachée  en  1541  de  celle  de  Lichtenberg,  et  com- 
posée de  quinze  villages ,  de  deux  châteaux ,  formant 
deux  bailliages  dits  d'Oberbronn  et  de  Niederbronn. 
Oberbronn  avait  passé,  par  mariage,  partie  aux  comtes 
de  Lœwenhaupt,  partie  aux  princes  de  Hohenlohe; 
Niederbronn  avait  été  acheté  par  le  baron  de  Dietrich. 
C'est  à  cause  de  cette  possession  qu'on  trouve  les  noms 
de  Lœwenhaupt  et  de  Dietrich  dans  le  paragraphe  0 
du  Recès.  La  partie  d'Oberbronn ,  qui  appartenait  à 
la  maison  de  Hohenlohe-Bartenstein ,  formait  l'apa- 
nage du  prince  Charles ^  frère  du  prince  de //o/ien/o/ie- 
Barlenstein.  Comme  cette  seigneurie  avait  été  médiate, 
le  prince  n'était  pas  plus  dans  le  cas  de  réclamer  une 
indemnité  que  les  comtes  de  Lœwenhaupt  et  les  barons 
de  Dietrich.  11  dut  à  l'intervention  des  amis  qu'il  avait 
à  Paris  et  à  Ratisbonne,  non-seulement  d'être  compris 
dans  le  premier  plan  ,  mais  de  voir  successivement 
s'accroître  son  indemnité,  sans  avoir  jamais  réclamé, 
au  moins  publiquement.  Le  second  plan  ne  donna  plus 


—  333  — 

cette  indemnité  au  prince  de  Bartenstein,  mais  au 
prince  Charles  lui-même. 

Elle  renfermait,  sur  trois  milles  et  demi  carrés, 
huit  mille  cinq  cents  habitants,  et  rapportait  cinquante 
mille  florins.  Les  bailliages  de  Haltenbergstetten  et 
Lautenbach  forment  ensemble  l'ancienne  seigneurie 
de  Niederstetten ,  qui  appartenait  aux  princes  de 
Hatzfeld-Wildenberg,  après  l'extinction  desquels  ,  en 
1783,  elle  avait  été  réunie,  comme  fief  vacant,  à 
l'évêché  de  Wurzbourg.  On  y  joignit,  pour  le  prince 
Charles,  le  bailliage  v^ûrzbourgeois  de  Jaxtberg,  d'après 
lequel  cette  nouvelle  branche  de  Hohenlohe  se  nomma  j 
la  seigneurie  de  Braunsbach  sur  le  Kocher,  sans  faire 
mention  des  droits  de  la  famille  de  Greifenklau,  à 
laquelle  appartient  la  nue  propriété  de  ce  district 
engagé  au  grand  chapitre  de  Wurzbourg,  et  quelques 
autres  parcelles  nommées  dans  le  texte.  La  condition 
ajoutée  en  faveur  de  l'électeur  palatin  de  Bavière  n'est 
pas  fort  claire;  une  route  directe  de  Wurzbourg  à 
Rothenbourg-sur-le-Tauber  doit  traverser  la  princi- 
pauté d'Anspach  ;  mais  on  ne  voit  pas  comment  elle 
pouvait  atteindre  les  possessions  de  Jaxtberg. 

Après  cela,  le  Recès  répète  la  stipulation  du  para- 
graphe 6  d'une  rente  de  six  cents  florins  à  servir  par 
le  duc  de  Wurtemberg  aux  deux  branches  de  la  ligne 
de  Hohenlohe-Waldenbourg,  pour  leur  part  au  péage 
de  Boppard  sur  le  Rhin. 

Les  villages  sur  \esque\s  lîigelfîng en  a  fait  valoir  ses 
prétentions,  qui  ont  été  compensées  par  la  cession 
de  Nagelsberg,   sont  situés  dans  l'ancien  évêché  de 


Wiirzbourg 


Le  prince  de  Hohenlohe-Neuenstein  fut  largement 
indemnisé  par  le  beau  village  de  Kiinzelsau  sur  le 
Kocher  et  par  Amvichshausen,  du  léger  sacrifice  qu'il 
avait  fait  pour  arrondir  le  territoire  de  Jaxtberg. 


—  334-  -- 

§  19. 

«  Au  prince  d'Isenbourg,  pour  la  cession  du  village 
d'Okriftel  :  le  village  de  Gainsheim ,  près  du  Rhin , 
avec  les  restes  du  chapitre  de  Jacobsberg,  à  la  droite 
du  Rhin ,  à  la  réserve  des  enclaves  au  territoire  du 
landgrave  de  Hesse-Cassel  ;  et  le  village  de  Biirgel, 
près  d'Offenbach. 

«  A  la  princesse  d'Isenbourg,  comtesse  de  Parkstein, 
pour  sa  part  à  la  seigneurie  de  Reipoltskirchen  et 
autres  seigneuries  à  la  rive  gauche  du  Rhin  :  une 
rente  perpétuelle  de  vingt-trois  mille  florins  sur  l'oc- 
troi de  navigation  mentionné  au  paragraphe  39.  » 

Le  prince  d'Isenbourgavaitperdu  le  village  d'Okriftel 
sur  la  droite  du  Mein ,  que  le  paragraphe  12  avait 
donné  au  prince  de  Nassau*.  Il  en  fut  indemnisé  par 
celui  de  Gainsheim,  en  facedeMayence,  et  par  Riirgel, 
qui  avait  appartenu  à  une  fondation  à  Mayence,etqui 
est  situé  près  d'Offenbach,  sa  résidence. 

La  comtesse  de  Parkstein,  fille  naturelle  de  Charles- 
ThéodorCf  électeur  de  Bavière,  avait  épousé  un  grand- 
oncle  du  prince  d'Isenbourg.  Sa  part  de  la  seigneurie 
de  Reipolzkirchen  rapportait  dix- sept  mille  cinq  cent 
cinquante-cinq  florins,  y  compris  cependant  diverses 
possessions  médiates  ^ 

§  20. 

«  A  la  maison  de  Linange ,  pour  la  principauté  de 
ce  nom,  le  comté  de  Dabo  et  la  seigneurie  de  Wei- 
hersheim,  ainsi  que  pour  ses  droits  et  prétentions 
sur  Saarwerden,  Lahr  et  Malberg,  savoir  :  au  prince 
de  Linange  :  les  bailliages  mayençais  de  Miltenberg, 

'  Voy.  ci-dessus,  p.  309. 
•  Voy.  aussi  paragraphe  6. 


—  335  — 

Buchen,  Seligenthal,  Amorbach  et  Bischofsheim; 
les  bailliages  de  Grûnsfeld ,  Lauda ,  Hartheim  et 
Rittberg,  détachés  de  Wurzbourg;  les  bailliages  pala- 
tins de  Boxberg  et  Mosbach,  et  les  abbayes  de  Ger- 
lachsheim  et  d' Amorbach. 

Au  comte  de  Linange-Guntersblum,  pour  ses  pertes 
et  sa  part  auxdites  prétentions  :  la  kellerey  mayen- 
çaise  de  Billigheim,  et  une  rente  perpétuelle  de  trois 
mille  florins  sur  l'octroi  de  navigation  mentionné  au 
paragraphe  39. 

c(  Au  comte  de  Linange-Heidesheim,  pour  ses  pertes 
et  sa  part  auxdites  prétentions  :  la  kellerey  mayen- 
çaise  de  Neidenau,  et  une  rente  perpétuelle  de  trois 
mille  florins  sur  l'octroi  de  navigation  mentionné  au 
paragraphe  39. 

«  Au  comte  de  Linange-Westerbourg,  branche 
aînée  :  l'abbaye  et  le  couvent  d'Ilbenstadt  en  Wetté- 
ravie,  avec  supériorité  territoriale  dans  son  enclos,  et 
une  rente  perpétuelle  de  trois  mille  florins  sur  l'octroi 
de  navigation  mentionné  au  paragraphe  39. 

((  Au  comte  de  Linange-Westerbourg,  branche  ca- 
dette :  l'abbaye  d'Engelthal  en  Wettéravie,  et  une 
rente  perpétuelle  de  six  mille  florins  sur  l'octroi  de 
navigation  mentionné  au  paragraphe  39.  » 

Il  existe  en  Allemagne  deux  maisons  qui,  portant  le 
nom  du  même  château  de  Linange,  ont  une  origine 
toute  différente,  et  qui  toutes  les  deux  ne  descendent 
que  par  les  femmes  de  la  véritable  maison  de  Linange. 
Le  Recès  confond  les  deux  familles  en  un  seul  article. 

L'antique  et  vénérable  maison  de  Linange,  dont  l'ori- 
gine remonte  aux  premiers  temps  de  la  monarchie , 
s'éteignit  en  1220.  Le  neveu  du  dernier  comte,  fils  de 
sa  sœur  Luccarda  et  d'un  comte  de  Saarbruckf  prit 
alors  le  nom  de  son  oncle  maternel,  et  devint  le  fon- 


—  336  — • 

dateur  de  la  seconde  maison  de  Linange-Hardenbourg, 
qui  acquit  par  mariage  le  comté  de  Dabo  dans  les 
Vosges.  Frédéric  et  Jo/frid ,  deux  frères,  fondèrent 
deux  lignes,  dont  la  seconde  se  subdivisa  en  plusieurs 
branches;  celle  des  princes  de  Linange-Hardenbourg- 
Dabo,  celle  des  comtes  de  Linange-Guntersblum ,  et 
celle  des  comtes  de  Linange-Heidesheim,  existent  en- 
core, mais  avec  des  désignations  différentes.  La  pre- 
mière ligne,  qui  descendait  de  FrédériCf  portait  le  titre 
de  Landgrave  ;  elle  s'éteignit  en  1 467.  La  sœur  du  der- 
nier Landgrave  avait  épousé  un  comte  deWesterbourg, 
qui  prit  alors  aussi  le  nom  de  Linange,  et  devint  le 
fondateur  d'une  nouvelle  maison  de  ce  nom  qui  est 
partagée  aujourd'hui  en  deux  branches,  dites  Vieux- 
Linange-Westerbourg ,  et  Nouveau-Linange  Wester- 
bourg,  l'une  et  l'autre  avec  le  titre  de  comtes. 

Les  princes  de  Linange  avaient  perdu  la  totalité  de 
leurs  possessions,  savoir  :  1"  la  moitié  du  comté  de 
Linange  oii  sont  situés  le  château  de  Hardenbourg,  et 
Dûrckheim  leur  résidence;  2"  le  comté  de  Dabo;  3"  le 
village  considérable  de  Weihersheim  en  Alsace.  Ces 
deux  dernières  possessions  n'étaient  pas  immédiates. 
On  faisait  monter  à  deux  cent  vingt  mille  florins  les 
revenus  annuels  du  prince,  dont  les  domaines  étaient 
considérables.  On  porta  encore  en  ligne  de  compte 
les  prétentions  que  le  prince  formait  sur  Saarwerden, 
Lahr  et  Mahlberg,  pour  créer  en  sa  faveur  une  belle 
principauté,  située  entre  le  Mein,  le  Tauber  et  le 
Necker.  On  y  employa  des  restes  de  l'électorat  de 
Mayence,  de  l'évêché  de  Wiirzbourg  et  du  Palalinat. 
Les  bailliages  mayençais  sont  :  1"  Miltenberg,  sur  la 
rive  gauche  du  Mein,  entre  les  comtés  d'Erbach  et  de 
Wertheim;  car  la  petite  partie  de  ce  bailliage  qui 
est  située  sur  la  rive  droite,  fut  donnée  à  l'Électeur 
archichancelier,  ainsi  que  nous  le  verrons  au  para- 


~  337  — 

graphe  25;  2"  le  grand  bailliage  d'Amorbacli,  composé 
des  bailliages  de  Buchheim  (nommé  Buchen  dans  le 
Recès),  Seligenthal  et  Amorbach  au  sud  de  Milten- 
berg;  S"  Bischoffsheim-sur-le-Tauber;  au  sud  de  ce 
bailliage  est  située  une  terre  qui  avait  anciennement 
appartenu  à  la  famille  de  Hatzfeld ,  et  que  Mayence 
avait  réunie  comme  fief  vacant.  Quoique  le  Recès  ne 
la  nommât  pas,  néanmoins  le  prince  s'en  mit  en  pos- 
session comme  d'une  dépendance  de  Bisclioffsheim. 
Les  bailliages  wurzbourgeois  de  Grûnsfeld,  Lauda, 
Hardheim  et  Rittberg  et  les  bailliages  de  Boxberg  et 
de  Mosbach,  qui  ont  anciennement  appartenu  à  l'Elec- 
teur palatin,  sont  contigus  à  ces  possessions.  Les  ab- 
bayes d'Amorbach,  dans  la  ville  de  ce  nom,  et  de  Ger- 
lachsheim  sur  le  Tauber,  dans  le  bailliage  de  Lauda, 
sont  très-riches.  Voici  la  récapitulation  de  ces  districts^ 

m.c.  habit.  rev.  en  flor. 

Les  3  bailliages  mayençais l/^f  37  300  183  000 

Les  4  bailliages  wurzbourgeois 6,^  17  600  93  000 

Les  2  du  Palatinat 6|  28  000  157000 

Les  2  abbayes 125000 

Total...     27|         82  900        558  000 

Il  faut  cependant  déduire  de  ces  revenus,  V  une 
rente  de  trente-deux  mille  florins  que  le  paragraphe  3 
du  Recès  a  assignée  sur  Amorbach  en  faveur  du 
prince  de  Salm-Krautheim;  2"  les  intérêts  des  dettes 
considérables  dont  le  prince  de  Linange  fut  obligé  de 
se  charger  pour  sa  part  de  l'électorat  de  Mayence  et  du 
Palatinat,  ainsi  que  de  celles  qu'il  avait  été  obligé  de 
contracter  dans  les  temps  qui  précédèrent  immédia- 

*  Ces  évaluations  sont  empruntées  de  Gaspari.  D'après  une  note 
plus  exacte  qu'on  trouve  dans  Winkopps  Rhein.  Bund,  t.  VI,  p.  98, 
le  nombre  des  habitants  était,  en  1 807,  de  quatre-vingt-neuf  mille  cent; 
les  revenus,  déduction  faite  de  cent  dix-neuf  mille  florins  pour  dépenses 
locales,  se  montaient  à  quatre  cent  quatre-vingt-dix  mille  florins  nets, 
les  dettes  passaient  cinq  millions. 

\n  22 


—  338  — 

tement  le  llecès.  Il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  le 
prince  de  Linange  est  un  des  États  d'Empire  qui  ont 
reçu  la  plus  large  indemnité,  en  proportion  de  sa 
perte. 

Le  comte  de  Linange-Guntersblum  estima  sa  part 
au  comté  de  Linange  à  Un  revenu  annuel  de  vingt- 
deux  mille  neuf  cent  soixante  douze  florins  en  droits 
seigneuriaux,  et  de  six  mille  six  cent  vingt-cinq  flo- 
rins en  domaines;  il  avait  encore  perdu  dix-huit  mille 
cinq  cent  soixante-quinze  florins  de  revenus  de  plu- 
fcieurs  terres  que  le  dernier  Électeur  palatin,  dont  il 
avait  épousé  une  fille  naturelle ,  lui  avait  conférées. 
Le  comte  de  Linange-lleidesheim  réclama  pour  sa  part 
seize  mille  florins  de  revenus.  Les  deux  kellereys  de 
Billiglieim  et  do  Neidenau,  situées  entre  le  Jaxt  et  le 
Necker,  au  sud  de  la  nouvelle  principauté  de  Linange, 
ne  rapportant  ensemble  que  trente-trois  mille  florins, 
on  alloua  à  chacun  de  ces  comtes  une  rente  supplé- 
mentaire de  trois  mille  florins.  11  paraît  qu'on  supposa 
que  les  terres  allodiales  en  France  leur  seraient  ren- 
dues. 

Les  deux  branches  de  la  maison  de  Linange-Wester- 
bourg,  qui  possèdent  le  comté  de  Westerbourg,  et, 
avec  Wied-Runkel ,  la  seigneurie  de  Schadek  sur  la 
Lahn,  ont  perdu  leur  part  du  comté  de  Linange  avec 
la  ville  de  Grlinstadt.  L'aînée  faisait  monter  sa  perte 
à  un  revenu  annuel  de  quarante-cinq  mille  cinq  cent 
quinze  florins;  la  cadette,  le  sien  à  trente-neuf  mille 
quatre  cent  vingt-cinq.  Le  premier  plan  avait  donné  â 
celle-là  le  couvent  de  Schœnthal  sur  le  Jaxt,  avec  la 
supériorité  territoriale ,  et  elle  ne  réclama  pas  contre 
cette  disposition.  Mais  le  duc  de  Wurtemberg  ayant 
demandé  cette  abbaye,  le  second  plan  donna  au  comte 
de  Westerbourg  le  couvent  d'Ilbenstadt  en  Wcttéravie, 
qui  était  médiat  et  ne  rapportait  pas  vingt  mille  florins; 


—  339  — 

le  conelusum  général  y  ajouta  la  supériorité  territo- 
riale, et  le  llecès  une  fente  de  trois  mille  florins. 

Le  premier  plan  avait  destiné  à  la  seconde  branche 
l'abbaye  de  Wimpfen,  qui  ne  rapportait  que  huit  mille 
llorins  nets;  le  second  plan,  au  lieu  d'améliorer  son 
sort,  mit  à  la  place  de  cette  abbaye  le  couvent  d'Engel- 
thal,  prés  celui  d'Ilbenstadt,  qui  n'avait  ni  immédia- 
teté  ni  sujets,  et  dont  les  revenus  étaient  minimes. 
Cependant,  d'après  le  plan  des  médiateurs,  le  comte 
dut  rester  chargé  des  dettes  considérables  pour  les- 
quelles ses  possessions  d'outre-Rhin  se  trouvaient 
grevées  sous  administration.  Après  plusieurs  récla- 
mations, on  finit  par  lui  accorder  une  rente  de  six 
mille  florins. 

On  a  lieu  d'être  surpris  de  la  rigueur  avec  laquelle 
les  quatre  branches  de  la  maison  des  comtes  de  Li- 
nange  ont  été  traitées,  tant  par  les  médiateurs  que  par 
la  Députation. 

§   21^ 

«  Au  prince  de  Wied  -  Runkel ,  pour  le  comté  de 
Créange;  les  bailliages  de  Nurbourg  et  d'Alt-Wied,  au 
pays  de  Cologne,  et  la  kellerey  de  Vilmar.  » 

Le  prince  de  Wied-llunkel,  dont  le  comté  de  Runkel 
est  situé  sur  le  Lahn,  avait  possédé  le  comté  de  Créange 
(en  allemand  Krichingen)  avec  les  seigneuries  de  Saar- 
wellingen,  Ravilleou  Rollingen,  Helflingen,  Laningen, 
ïettingen,  Miinzingen,  Remilly  et  Volmhaut,  dans  les 
environs  de  Sarguemines.  D'après  les  états  qu'il  fit 
remettre  à  la  Députation,  ces  terres  rapportaient  cin- 
quante mille  florins;  d'autres  n'estiment  les  revenus 
qu'à  vingt-huit  mille  florins.  Le  premier  plan  lui  avait 
assigné  le  bailliage  d'Aldenwied  dans  l'électorat  de 
Cologne,  qu'il  nomma  le  comté  d'Altwied  ;  il  en  avait 


—  3/.0  — 

cependant  démembré  les  petits  bailliages  de  Linz  et 
Unkel  qui,  à  ce  qu'il  paraît,  étaient  réservés  au  prince 
de  Nassau-Usingen.  Le  prince  de  Wied-Runkel  ayant 
réclamé  contre  l'insuffisance  de  cette  indemnité,  le 
second  plan  et  le  Ilecès  lui  laissèrent  le  bailliage 
entier,  et  ajoutèrent  à  son  lot  la  recette  de  Vilmar, 
qui  appartenait  à  l'abbaye  de  Saint-Mathias  près  Trê- 
ves. Le  bailliage  de  Neurbourg,  que  le  Recès  appelle 
Nurbourg,  est  une  appartenance  de  celui  d'Alden- 
wied.  On  estime  que  ces  différents  objets  rapportaient 
cinquante  mille  florins. 

§  22. 

«  Au  prince  de  Bretzenhcim ,  pour  Bretzenlieim  et 
Winzenheim  :  la  ville  et  l'abbaye  de  Lindau,  au  lac 
de  Constance.  » 

L'électeur  palatin  de  Bavière,  Charles-Théodore, 
acheta  de  l'électeur  de  Cologne,  pour  une  somme  de 
trois  cent  mille  florins,  la  seigneurie  de  Bretzenheim, 
sur  la  Nahe,  qu'il  donna  au  comte  de  Heideck,  son  fils 
naturel.  En  1790,  Joseph  H  éleva  le  nouveau  comte  de 
Bretzenheim  au  rang  de  prince  d'Empire.  Le  premier 
plan  lui  destina  la  ville  de  Lindau.  Le  prince  se  plaignit 
de  l'insuffisance  de  cette  indemnité,  et  obtint  aussi 
l'abbaye  de  Lindau.  Dans  les  mémoires  qu'il  fit  pré- 
senter à  cette  occasion  à  la  Députation,  on  trouve  la 
clef  de  la  différence  frappante  qu'on  remarquait  dans 
toutes  les  évaluations  entre  les  revenus  des  pays  situés 
sur  la  rive  gauche  du  Rhin,  et  ceux  qui  sont  sur  la  rive 
droite  :  c'est  que  dans  les  premiers  tous  les  revenus 
en  nature  ont  été  calculés  aux  prix  de  vente,  tandis 
que  dans  les  autres  on  a  pris  pour  base  ce  qu'on  ap- 
pelle les  taxes  des  Chambres,  qui,  faites  il  y  a  plus 


—  341   — 

d'un  siècle,  sont  souvent  inférieures  des  deux  tiers 
aux  prix  actuels  des  choses. 

Les  terres  que  perdait  le  prince  de  Bretzenlieim 
avaient  une  surface  de  huit  milles  carrés,  et  une  po- 
pulation de  six  mille  neuf  cent  trente-huit  âmes,  rap- 
portant soixante-huit  mille  six  cent  sept  florins; 
savoir  : 

1.  La  seigneurie  de  Bretzenheim  avec  Winzenheim 36249 

2.  Celle (ie  Weisvveiler  et  Poland 8040 

3.  Celle  de  Breitenbend 1518 

i.  Celle  de  LUtzelstein  avec  la  saline  de  Kreuznach 15700 

5.  Loyer  de  maisons 7100 

68  607 

L'indemnité  donnée  en  compensation  de  cette  perte, 
présentait  six  mille  habitants  et  rapportait  quarante- 
six  mille  florins.  Deux  mois  après  la  signature  du 
Recès,  le  prince  de  Bretzenheim  échangea  la  ville  et 
l'abbaye  de  Lindau  contre  des  terres  en  Bohême,  que 
lui  céda  la  maison  d'Autriche. 

§  23. 

«  Au  prince  de  Wittgenstein-Berkbourg ,  pour  les 
sei2:neuries  de  Neumasen  et  de  Hemsbach  :  la  rente 
perpétuelle  déjà  mentionnée  de  quinze  mille  florins 
sur  le  duché  de  Westphalie. 

«  Il  est  pourvu  à  la  satisfaction  de  la  maison  de 
Sayn-Wittgenstein  ,  pour  ses  prétentions  reconnues 
légitimes  sur  les  comtés  de  Sayn-Altenkirchen  et  de 
Hachenbourg,  au  moyen  de  l'arrangement  concerté 
entre  le  margrave  de  Bade,  les  princes  de  Nassau  et 
lesdits  comtes  de  Wittgenstein.  » 

La  maison  de  Wittgenstein  est  la  branche  cadette  de 
cette  maison  de  Sayn,  qui  s'éteignit  en  1606^,  et  qui 

*  Voy.  ci-dessus,  p.  277. 


—  342  — 

avait  possédé  ITachenbourg  et  Altenkirclien.  La  bran- 
che aînée  de  la  famille  de  Wittgenstein,  portant  le  nom 
de  Berlebourg,  avait  perdu  Neumagen  et  Hemsbacli, 
deux  possessions  médiates  sur  la  Moselle,  rapportant 
quinze  mille  florins.  Le  premier  plan  leur  avait  des- 
tiné quelques  districts  du  duché  de  Westphalie;  le 
second  les  remplaça  par  une  rente.  L'arrangement 
concerté  pour  donner  satisfaction  à  la  maison  de  Witt- 
genstein en  général,  pour  ses  droits  sur  le  comté  de 
Sayn,  n'a  pas  été  rendu  public.  On  assure  que  cette 
maison  a  obtenu  une  somme  de  trois  cent  mille  flo- 
rins, et  une  rente  de  douze  mille  florins. 

§  24. 

Parmi  les  États  d'Empire  lésés  par  la  cession  de  la 
rive  gauche  du  Rhin,  il  s'en  trouva  plusieurs  qui  per- 
daient toutes  leurs  possessions;  d'autres  qui  se 
voyaient  dépouillés  de  celles  sur  lesquelles  se  fon- 
dait leur  qualité  d'État  d'Empire^  ou  au  moins  des 
domaines  immédiats  pour  lesquels,  d'après  les  prin- 
cipes adoptés  par  la  Députation,  il  leur  revenait  une 
indemnité.  Le  premier  plan  d'indemnité  avait  indiqué 
nominativement  plusieurs  de  ces  Etats;  de  ce  nombre 
étaient  Sternberg,  Wartemberg,  Sickingen,  la  Leyen, 
et  quelques  autres  compris  dans  les  articles  précé- 
dents. Dix  autres  :  Bassenheim,  Sinzendorf,  Schuîs- 
berg,  Ostein,  Quadt,  Plettenberg,  Metternich,  Aspre- 
mont,  Tœrring  et  Nesselrode,  étaient  réunis  dans  le 
paragraphe  30,  sous  la  dénomination  de  comtes  de 
Westphalie^  et  ce  paragraphe  leur  donnait  la  partie  in- 
férieure de  l'évôché  de  Munster.  Mais  ces  comtes  en 
masse,  et  plusieurs  d'entre  eux  en  leur  nom  particu- 
lier, réclamèrent  contre  une  indemnisation  si  peu 
analogue  aux  pertes  qu'ils  avaient  éprouvées.  En  con- 


—  343  — 

séquence,  la  Députation  résolut,  dans  sa  quatrième 
séance,  de  prier  les  ministres  médiateurs  de  faire  con- 
naître les  mémoires  et  évaluations  qui  avaient  été  la  base 
de  leur  travail;  mais,  en  cette  occasion  comme  dans 
toutes  les  autres,  ces  ministres  se  gardèrent  de  commu- 
niquer les  pièces  réclamées,  qui  probablement  n'étaient 
pas  de  nature  à  être  portées  à  la  connaissance  du  pu- 
blic. Dans  la  môme  séance,  la  Députation  chargea  les 
deux  directoires  du  collège  des  comtes  de  la  West- 
pbalie,  et  celui  du  collège  de  Wettéravie,  comme  sur- 
arbitre, de  se  faire  remettre,  par  les  parties  intéres- 
sées, copie  des  liquidations  qu'elles  avaient  présentées 
aux  puissances  médiatrices,  de  faire  examiner,  sous 
le  rapport  géographique  et  économique,  le  district 
que  le  plan  destinait  à  ces  maisons,  et  de  dresser  un 
projet  de  répartition  de  ce  district  entre  ceux  qui  y 
avaient  droit. 

Mais  comme  dans  l'intervalle  il  s'était  élevé  un 
grand  nombre  d'autres  réclamations  contre  le  plan  ; 
que  le  duc  d'Oldenbourg  surtout  se  récriait  contre  le 
dédommagement  qui  lui  était  offert  pour  le  péage 
d'Elsfleth,  et  que  cependant  on  ne  pouvait  trouver 
d'équivalent  pour  ce  prince  que  dans  l'éveché  de 
Munster,  on  donna,  dans  le  second  plan,  une  nouvelle 
destination  au  bas  évêché,  en  le  partageant  entre  Ol- 
denbourg, Arenberg,  Croï  et  Looz.  On  se  vit  obligé 
alors  de  reprendre  les  abbayes  et  autres  districts  que 
les  paragraphes  24,  25  et  2S  avaient  assignés  aux 
comtes  de  Sickingen,  de  la  Leyen  et  de  Sternberg,  et 
d'en  former  un  fonds  destiné  à  satisfaire  tous  les  com- 
tes auxquels  il  revenait  une  indemnité;  cependant, 
comme  ce  fonds  était  évidemment  insuffisant,  on  ne 
voulait  en  attribuer  à  chaque  intéressé  que  la  part  re- 
quist',  pour  la  qualité  d'État  d'Empire  ;  et  quant  aux 
suppléments  on  voulait  former  un  second  fonds  com- 


-^  344  — 

posé  des  biens  ecclésiastiques  médiats.  Ce  second 
fonds  n'a  pas  été  établi,  parce  que,  comme  nous 
l'avons  vu ,  la  plupart  des  intéressés  auxquels  on  a 
donné  des  terres  ci-devant  ecclésiastiques ,  se  sont 
aussi  réservé  la  possession  des  biens  médiats  qui  s'y 
trouvaient. 

Le  premier  fonds  fut  effectivement  formé;  il  se 
composait  des  abbayes  de  Baindt,  Buxheim,  Guttenzell, 
Heggbach  et  Schussenried,  qui  avaient  été  destinées 
au  comte  de  la  Laye;  de  celles  d'Ochsenhausen  et  de 
Rodt,  qui  avaient  été  assignées  au  comte  de  Sickingen  ; 
de  la  ville  et  de  l'abbaye  d'Isny,  et  de  l'abbaye  de 
Weissenau,  promises  à  la  comtesse  de  Sternberg.  Le 
16  octobre  1802,  une  commission,  composée  du  duc 
de  Wurtemberg  et  du  margrave  de  Bade,  fut  chargée 
d'administrer  provisoirement  ces  districts,  d'examiner 
les  prétentions  des  comtes,  de  désigner  ceux  d'entre 
eux  auxquels  on  devait  assigner  des  terres  immédiates, 
et  de  proposer  une  répartition  proportionnée.  L'in- 
struction de  cette  commission  indiqua  cinq  classes  de 
comtes  qui  devaient  être  distingués,  savoir  : 

1"  Ceux  qui  avaient  possédé  des  terres  immé- 
diates chargées  de  contribuer  aux  frais  généraux  de 
l'Empire  et  à  ceux  d'un  cercle,  et  qui ,  à  cause  de 
ces  terres,  avaient  siégé  comme  États  d'Empire  à  la 
Diète ,  et  comme  États  de  cercle  aux  assemblées  de 
cercle  ; 

2"  Ceux  qui  avaient  possédé  des  terres  immédiates 
chargées  de  contribuer  aux  frais  de  l'Empire  et  à  ceux 
d'un  cercle,  et  qui,  pour  cela,  avaient  voix  et  séance 
aux  assemblées  de  cercle,  sans  les  avoir  à  la  Diète  ; 

3°  Ceux  qui  avaient  possédé  des  terres  immédiates 
chargées  de  deux  espèces  de  contributions,  mais  sans 
voix  à  la  Diète  et  à  l'assemblée  du  cercle; 

4"  Ceux  qui  avaient  possédé  des  terres  immédiates 


—  345  — 

exemptes  de  toute  charge  et  n'ayant  voix  ni  à  la  Diète 
ni  aux  cercles; 

5°  Les  seigneurs,  portant  le  titre  de  comte,  qui 
n'avaient  possédé  que  des  terres  nobles  et  des  terres 
médiates,  et  qui,  par  conséquent,  n'appartenaient  pas 
à  la  classe  de  ceux  auxquels  une  indemnité  était  pro- 
mise, mais  devaient  solliciter  la  levée  du  séquestre 
mis  sur  leurs  biens. 

Après  avoir  établi  ces  classes,  la  commission  dut 
faire  la  distribution  des  indemnités  en  passant  d'une 
classe  à  l'autre,  de  manière  cependant  que,  dans  tous 
les  cas,  ceux  de  la  seconde  obtinssent  des  terres  aux- 
quelles leur  droit  de  suffrage  à  un  cercle  pût  être  af- 
fecté. 

La  commission,  composée,  de  la  part  du  duc  de 
Wurtemberg,  de  M.  Von  der  Lûh,  et,  de  la  part  de 
Bade,  de  M.  Hofer^  arriva,  le  1'2  novembre,  à  Ochsen- 
hausen,  fit  dresser  des  inventaires,  et  entra  en  posses- 
sion civile,  pour  compte  du  fonds  d'indemnité,  des 
abbayes  réservées.  Elle  établit  les  principes  généraux 
suivants,  comme  devant  servir  de  base  au  calcul  des 
pertes  : 

\  °  D'après  le  paragraphe  24  du  premier  conclu- 
sum  général,  on  ne  peut  indemniser  que  pour  des 
territoires  perdus;  on  ne  peut  accorder  de  dédomma- 
gement à  titre  de  dommage  de  guerre,  perte  d'effets  et 
de  revenus; 

2°  On  prendra,  pour  base  du  calcul  des  pertes,  les 
revenus  annuels,  et  non  la  surface  ni  la  population; 

3"  On  ne  fera  pas  entrer  en  ligne  de  compte  la  valeur 
des  bâtiments; 

4"  Il  ne  pourra  rien  être  accordé  pour  droits  pure- 
ment honorifiques; 

5"  Les  revenus  doivent  avoir  effectivement  existé; 
ainsi  on  ne  fera  pas  entrer  en  calcul  les  améliorations 


—  346  — 

qui  promettent  un  rapport  futur,  les  mines  non  ex- 
ploitées, etc. 

6°  Dans  le  calcul  des  revenus,  tant  des  possessions 
perdues  que  de  celles  à  recevoir  en  compensation,  il 
faut  déduire  les  charges  perpétuelles,  et  les  frais  de 
-  perception  primitive,  mais  non  ceux  de  régie  ou  d'ad- 
ministration, dont  le  montant  est  arbitraire  et  dépend 
du  plus  ou  moins  d'économie  des  possesseurs; 

7°  On  ne  peut  porter  en  ligne  de  compte  les  dettes 
hypothéquées  sur  les  possessions  perdues,  parce  qu'on 
ne  sait  pas  encore  si  elles  passeront  aux  nouvelles 
possessions. 

La  commission  termina  son  travail  vers  la  fin  de  jan- 
vier, et  la  Députation  l'adopta  avec  de  légères  modifica- 
tions; il  fut  inséré  dans  le  Uecès,  dont  il  forme  le 
paragraphe  24,  que  nous  allons  parcourir.  En  voici  le 
préambule  ; 

«  A  l'égard  des  comtes  d'Empire,  comme  les  parties 
de  territoire  immédiat  qui  restent  disponibles  sont 
insuffisantes  pour  leur  indemnisation,  et  qu'il  con- 
vient néanmoins  de  leur  faire  à  chacun  un  établisse- 
ment proportionnel  auquel  leur  droit  de  vote  puisse 
être  transféré,  les  abbayes  et  couvents  immédiats  sui- 
vants, avec  leurs  dépendances,  demeurent  réservés  à 
cette  fin;  savoir  :  Ochsenhausen,  Miinchrolh,  Schus^ 
senried,  Guttenzell ,  Ileggbach,  Ikiindt,  IJuxheim, 
Weissenau  et  Isny,  avec  leurs  dépendances,  ainsi  que 
la  ville  d'Isny,  ayant  été  réservés  à  cette  fin.  Cette  masse 
d'indemnités  est  répartie  do  la  manière  suivante.  » 

Après  cette  introduction,  viennent  d'abord  les  in- 
demnités des  comtes  de  la  première  et  do  la  seconde 
classe,  savoir  : 

«  1"  Au  comte  d'Aspremont-Linden,  pour  Reck- 
heim  :  l'abbaye  de  Uaindt;  plus,  une  rente  annuelle 


—  347  — 
de  huit  cent  cinquante  florins  sur  Ochsenliausen.  » 

Le  conité  d'Aspremont  est  situé  4ans  le  duché  de 
Fiimhourg,  et  la  seigneurie  de  Lynden  dans  l'évêché 
de  Liége^  L'un  et  l'autre  étalent  médiats,  et  par  con- 
séquent les  possesseurs  n'avaient  pas  d'indemnité  à 
réclamer  pour  leur  pef  te  :  piais  ils  avaient  aussi  perdu 
le  pomté  de  Reckheim  ou  Reekem  près  Maëstricht, 
pour  lequel  ils  se  trouvaient  dans  la  première  classe 
de  comtes  établie  par  l'Instruction  de  la  Députation. 
Ce  comté  rapportait  treize  mille  cinq  cents  florins  j  il 
avait  deux  mille  huit  cents  habitants  sur  un  mille  et 
demi  carré.  L'abbaye  de  femmes  de  Baindt  qu'on  lui 
donna,  est  située  dans  l'enceinte  de  ce  qu'on  appelait 
alors  préfecture  autrichienne  d'Altorf.  Elle  n'avait  ni 
territoire  ni  sujets. 

«  2"  Au  comte  de  Bassenheim,  pour  Pyrmont  et 
OUbriick  :  l'abbaye  de  ïJeggbach  (à  la  réserve  de 
Mietingen  et  Sullmingen,  de  la  dîme  de  Baldrin- 
gen,  et  des  cinq  cents»arpents  de  bois  qui  sont  affec- 
tés à  cette  part  détachée)  ;  plus,  une  rente  de  treize 
cents  florins  sur  Buxheim.  » 

La  famille  de  Bassenheim,  originaire  d'un  château 
des  environs  de  Coblentz,  porte  le  nom  de  Waldbott, 
ce  qui  veut  dire  défenseur  de  la  forêt.  Henri  Waldbott 
de  Bassenheim  fut,  en  1 1 90,  le  premier  grand-maître 
de  l'Ordre  Teutonique,  et  la  famille  de  Bassenheim 
devait  à  cette  circonstance  la  distinction  que  son  chef 
était  chevalier-né  de  l'Ordre,  quand  même  il  était 
marié.  La  seigneurie  d'OUbriick  près  d'Andernach^ 
de  mille  cinq  cents  quatre-vingt-dix  habitants,  et  d'un 
rapport  de  huit  mille  cent  quatre-vingt-dix-huit  flo- 
rins^  était  le  seul  territoire  perdu  par  cette  maison, 

'  La  famille  d'Aspremont  possède  de  riches  domaines  en  Hongrie. 


—  348  — 

que  la  commission  établie  à  Ochsenliausen  crut  devoir 
ranger  dans  la  seconde  classe  :  on  fut  embarrassé  de 
savoir  quelle  classe  il  fallait  assigner  à  la  seigneurie 
de  Pi'ermont  (non  Pyrmont,  comme  dit  le  Recès),  si- 
tuée près  de  Mûnster-Megenfeld.  Cette  seigneurie  ren- 
dait son  possesseur  État  d'Empire,  puisque  depuis 
1787  il  siégeait  à  la  Diète  comme  membre  du  collège 
des  comtes  de  Westphalie  ;  mais,  par  une  bizarrerie 
singulière,  Piermont  n'appartenait  à  aucun  cercle,  et 
ne  payait  aucune  contribution  ni  d'Empire  ni  de  cer- 
cles. Elle  rapportait  trois  mille  vingt  et  un  florins. 

On  donna  au  comte  de  Bassenheim  l'abbaye  de 
femmes  de  Heggbach  près  de  Biberach,  mais  en  en  dé- 
tachant les  deux  principaux  villages  qui  constituaient 
son  territoire.  Le  comte  possédait  encore  sur  la  rive 
gauche  du  Rhin  les  seigneuries  de  Bassenheim,  He- 
resbach,  Heckenbach  et  Sevenach,  pour  lesquelles  on 
ne  put  lui  donner  une  indemnité,  pas  plus  que  pour 
le  château  de  Bassenheim. 

«  3"  Au  comte  de  Metternich ,  pour  Winnebourg 
et  Beilstein  :  l'abbaye  d'Ochsenhausen  (à  la  réserve 
du  bailliage  de  Tannheim) ,  à  charge  d'acquitter 
une  rente  annuelle  de  vingt  mille  florins,  dont  huit 
cent  cinquante  au  comte  d'Aspremont,  onze  mille 
au  comte  de  Quadt,  et  huit  mille  cent  cinquante  au 
comte  de  Wartemberg.  » 

La  famille  de  Metternich  dont  le  nom  brille  d'un 
si  vif  éclat  dans  l'histoire  diplomatique  des  xviii"  et 
XIX*  siècles ,  a  fourni  dans  le  xvii*  plusieurs  prélats 
aux  sièges  archiépiscopaux  de  Mayence  et  de  Trê- 
ves ;  elle  possédait  les  seigneuries  de  Winnebourg  et 
Beilstein,  dans  l'enceinte  de  l'électorat  de  Trêves. 
Le  territoire  de  l'abbaye  d'Ochsenhausen  était  très- 
considérable  et  divisé  en  cinq  bailliages. 


—  349  — 

«  4°  Au  comte  d'Ostein ,  pour  Mylendonk  :  l'ab- 
baye de  Buxheim  (à  la  réserve  du  village  de  Pless), 
à  charge  d'acquitter  une  rente  annuelle  de  neuf 
mille  florins,  dont  treize  cents  au  comte  de  Bassen- 
heim,  six  mille  au  comte  de  Plettenberg,  et  mille  sept 
cents  au  comte  de  Goltstein .  » 

La  seigneurie  de  Mylendonk  est  située  entre  le  du- 
ché de  Juliers  et  l'électorat  de  Cologne.  Elle  rapportait 
neuf  mille  huit  cents  florins;  sa  surface  était  de 
trois  quarts  de  mille  carré;  sa  population  de  mille  six 
cents  âmes.  Le  dernier  comte  d'Ostein  l'avait  héritée 
de  sa  mère.  On  lui  donna,  par  le  Recès,  la  chartreuse 
de  Buxheim  près  de  Memmingen,  avec  quelques  vil- 
lages. Le  comte  d'Ostein  mourut  en  1809,  sans  laisser 
d'autre  héritier  qu'une  sœur  octogénaire,  veuve  d'un 
comte  de  Hatzfeld.  On  ignore  si  la  seigneurie  de  Bux- 
heim qui,  par  l'acte  de  la  confédération  du  Rhin,  fut 
soumise  à  la  souveraineté  du  roi  de  Bavière,  a  été 
réunie  par  ce  monarque  comme  fief  vacant. 

((  5°  Au  comte  de  Plettenberg,  pour  Wittem  et 
Eyss  :  les  endroits  de  Mietingen  et  Sullmingen ,  déta- 
chés de  Heggbach,  avec  la  dîme  deBaldringen  et  cinq 
cents  arpents  de  bois  pris  sur  les  parties  des  forêts  les 
plus  voisines  de  Mietingen  ;  savoir  :  celles  de  Wolf- 
loch,  Laitbiihl  et  Schneckenkau;  plus,  une  rente  an- 
nuelle de  six  mille  florins  sur  Buxheim.  » 

VValther  de  Plettenberg  a  été  grand-maître  de  l'Ordre 
Teutonique  en  Prusse,  de  1495  à  1535.  Les  seigneu- 
ries de  Wittem  et  Eyss  sont  situées  dans  le  duché  de 
Limbourg.  On  indemnisa  le  comte  de  Plettenberg  de 
sa  perte,  estimée  à  quatorze  mille  florins  de  revenus, 
eu  lui  donnant  une  partie  de  l'abbaye  de  Heggbach  et 
une  rente. 


—  350  — 

«  6"  Au  comte  de  Quadt,  pour  Wickeratli  etSclnva- 
nenbefg  :  l'abbaye  et  la  ville  d'Isny;  plus,  une  rente 
annuelle  de  onze  mille  florins  sur  Ochscnhausen.  » 

Les  seigneuries  de  Wickeralh  et  de  Schwîinenberg 
sont  situées  entre  le  ducbé  de  Juliers  et  l'élcctorat  do 
Cologne;  elles  avaient  une  surface  de  un  dcmi-milio 
carré  et  une  population  de  trois  mille  âmes. 

«  7"  Au  comte  de  Schœsberg,  pour  Kerpen  et  Lotu- 
mersum  ;  le  bailliage  de  Tannbeim,  délacbé  d'Oclisen- 
bausen  (à  la  rései*ve  du  village  de  Winterrieden),  à 
cbarge  d'acquitter  une  rente  annuelle  de  deux  mille 
florins,  dont  quinze  cents  au  comte  de  Sinzendorffj  cH 
cinq  cents  au  comte  de  Hallberg.  » 

Les  seigneuries  de  Kerpen  et  Lommersum  sont 
situées  dans  le  ducbé  de  Juliers j  elles  rapportaient 
douze  mifle  florins. 

((  8"  Au  comte  de  Sinzendorff,  pour  le  boi  "graviat 
de  Reineck  :  le  village  sus-mentionné  de  Winterrie- 
den, avec  titre  de  bourgraviat;  plus,  une  rente  an- 
nuelle de  quinze  cents  florins  sur  Tannbeim.  » 

La  maison  de  Sinzendorff,  dont  le  nom  se  trouve  si 
souvent  dans  les  annales  de  la  diplomatie  européenne, 
a  une  origine  illustre  :  elle  la  fait  remonter  à  Ktliico, 
comte  d'Altorff,  petit-fils  de  Henri  Gnelf,  duc  de  lîa- 
vière.  Si  cette  généalogie  était  bien  prouvée^  cette 
maison  serait  une  brandie  cadette  de  celle  de  Bruns- 
wic;  branche  formée  longtemps  avant  l'époque  où 
les  Guelfes  ont  obtenu  le  ducbé  de  Saxe.  Le  château  de 
Sinzendorff  est  situé  en  Autriche.  Les  comtes  étaient 
depuis  1635  grands  trésoriers  héréditaires  de  l'Em- 
pire. Us  sont  encore  grands  échansons  héréditaires  de 


ôo 


l'archiduché  d'Autriche  au-dessus  de  l'Ems;  grands 
écuyers  tranchants,  grands  écuyers,  et  juges  de  camp 
héréditaires  des  deux  Autriches.  La  perte  de  cette 
maison  consistait  dans  le  bourgraviat  de  Reineck,  au- 
quel appartenait  la  ville  de  ce  nom,  située  sur  le  lUiin, 
près  d'Andernach.  L'Empereur  éleva,  en  1 80r)j  le  vil- 
lage de  Winterrieden  au  rang  de  bourgraviat,  titre 
équivalant  à  celui  de  principauté. 

«  9"  Au  comte  de  Sternberg,  pour  Blankenheim  , 
Junkrath,  Geroldstein  et  Dollendorf  :  les  abbayes  de 
Schussenried  et  de  Weissenau,  à  cliarge  d'acquitter 
une  rente  annuelle  de  treize  mille  neuf  cents  florins, 
dont  cinq  mille  cinq  cents  au  comte  de  Wartemberg 
pour  Sickingen,  onze  cent  dix  au  comte  de  Sickingen- 
Sickingen,  six  mille  huit  cent  quatre-vingts  au  comte 
de  Nesselrode-lleichenstein,  et  cent  cinquante  au  comte 
de  Goltstein.» 

Les  comtes  de  Sternberg  sont  originaires  de  la  Fran- 
conie  :  le  berceau  de  leiir  famille  est  dans  l'évêché 
d'Eichstett,  et  appartient  aujourd'hui  à  la  famille  de 
Gultemberg.  Jaroslaw  de  Slernberg  remporta,  en  1 241 , 
sur  les  Mongols,  la  fameuse  bataille  à'Olmiilz  qui 
préserva  l'Europe  du  joug  de  ces  barbares.  Il  bâtit  un 
nouveau  château  de  Sternbers  en  Bohême.  Son  frère 
fut  le  premier  grand-maître  de  l'Ordre  de  la  Croix  à 
l'étoile  rouge  en  Bohême.  Le  chef  de  cette  maison 
avait  obtenu,  en  1780,  à  la  mort  du  dernier  comte  de 
Manderscheid,  dont  il  avait  épousé  la  fille  aînée ,  les 
comtés  de  Blankenheim  et  Geroldstein  dans  l'Eiffel, 
auxquels  appartenaient  les  seigneuries  de  Junkrath  et 
Dollendorf.  Les  abbayes  de  Schussenried  sur  le  lac  de 
Feder,  et  celle  de  Weissenau  ou  Minderau  sur  la 
Schuss,  sont  riches  et  considérables,  mais  on  les  a 
grevées  d'une  rente  de  treize  mille  neuf  cents  florins. 


—  352  — 

((  1 0"  Au  comte  de  Tœrring ,  pour  Gronsfeld  :  Fab- 
baye  de  Guttenzell.  » 

La  famille  de  Tœrring,  une  des  plus  anciennes  de  la 
Bavière  et  qui  fait  remonter  sa  généalogie  jusqu'à 
l'époque  de  Tassilon,  posséda  héréditairement  les 
charges  de  grand-maître  des  chasses  de  la  Bavière, 
grand  chambellan  de  l'archevêché  de  Salzbourg,  et 
grand  maréchal  de  l'évêché  de  Ratisbonne.  Une  bran- 
che de  cette  maison,  celle  de  Jettenbach,  avait  perdu 
le  comté  de  Gronsfeld,  dans  le  duché  de  Limbourg, 
ayant  un  mille  carré  de  surface,  mille  neuf  cents  ha- 
bitants, et  rapportant  douze  mille  sept  cents  florins. 
L'abbaye  de  Guttenzell ,  est  située  sur  la  rive  gauche 
de  l'iller. 

«  1  r  Au  comte  de  Wartemberg,  pour  VVartemberg: 
l'abbaye  de  lloth,  et  une  rente  annuelle  de  huit  mille 
cent  cinquante  florins  sur  Ochsenhausen. 

i(  12"  Au  comte  de  Wartemberg,  pour  Sickingen , 
en  remplacement  d'Ellerstadt,  Aspach  et  Oranienhof  : 
le  village  de  Pless,  détaché  de  Buxheim;  plus,  une 
rente  annuelle  de  cinq  mille  cinq  cents  florins  sur 
Schussenried.  )) 

Le  comté  de  Wartemberg  est  situé  dans  le  Palatinat, 
et  se  compose  de  plusieurs  districts  détachés,  ayant 
ensemble  trois  milles  carrés,  et  rapportant  quarante- 
six  mille  six  cents  florins.  Metlenheim,  entre  Worms 
et  Oppenheim,  était  la  résidence  des  comtes.  L'ab- 
baye de  lloth,  qu'on  leur  donna  en  remplacement  du 
comté  de  Wartemberg,  est  située  au  nord  du  comté 
de  Waldbourg.  En  1788,  le  comte  avait  vendu  à  celui 
de  Sickingen  le  village  d'Ellerstadt  et  les  fermes  d'As- 
pach  et  d'Oranienhof  :  le  Uecôs  assigna  pour  cet  objet 
une  indemnité  particulière. 


—  353  — 

Tout  ce  qui  formait  la  masse  des  indemnités  étant 
ainsi  épuisé,  et  tous  les  intéressés  des  deux  premières 
classes  ayant  obtenu  un  dédommagement  qui,  d'a- 
près les  règles  ci-dessus  établies,  pouvait  être  regardé 
comme  suffisant,  il  ne  resta  plus  à  répartir,  entre  les 
classes  suivantes,  qu'une  masse  de  dix  mille  six  cents 
florins  de  rentes  annuelles,  réservées  sur  Buxheim  et 
Schussenried.  D'après  les  instructions  que  la  commis- 
tion  avait  reçues,  ces  rentes  devaient  être  assignées  à 
la  troisième  classe  des  comtes  ;  mais  ceux-ci  avaient 
liquidé  un  total  de  vingt -deux  mille  neuf  cent 
soixante  florins.  La  masse  qui  leur  était  destinée,  of- 
frant ainsi  un  déficit,  on  ne  put  prendre  d'autre  parti 
que  de  distribuer  à  ces  intéressés  les  dix  mille  six 
cents  florins  au  marc  la  livre,  de  manière  que  chacun 
reçût  quarante -six  pour  cent  de  sa  perte.  C'est  pour 
quoi  le  Recès  continue  ainsi  : 

H  13°  Au  comte  de  Goltstein^  pour  Schlenacken  :  une 
rente  annuelle  de  mille  huit  cent  cinquante  florins, 
dont  mille  sept  cents  sur  Buxheim,  et  cent  cinquante 
sur  Schussenried. 

((  14°  Au  comte  de  Hallberg  j  pour  Fussgœnheim 
et  Ruchheim  :  une  rente  annuelle  de  sept  mille  trois 
cent  quatre-vingts  florins,  dont  six  mille  huit  cent 
quatre-vingts  sur  Schussenried  et  cinq  cents  sur 
Tannheim. 

«  15°  Au  comte  de  Nesselrode-Reichejistein  ^  pour 
Burgfrey  et  Mechernich  :  une  rente  annuelle  de  deux 
cent  soixante  florins  sur  Schussenried. 

«  16"  Au  comte  de  Sickingen-Sickingen ,  pour  le 
bailliage  de  Hoheneinœden  :  une  rente  annuelle  de 
onze  cent  dix  florins  sur  Schussenried.  » 

Schlenacken,  que  le  comte  de  Goltstein  avait  perdu, 
faisait  anciennement  partie  des  seigneuries  de  Wittem 
vu  23 


—  364  — 

et  Ey8s;  les  comtes  de  Plettenberg  l'avaient  vendu  au 
comte  de  Goltstein  qui,  n'ayant  pas  voix  à  la  Diète, 
n'était  pas  du  nombre  des  Etats  d'Empire ,  quoique 
État  de  cercle. 

Ruchheim  et  Fussganheim ,  deux  villages  considé- 
rables du  comté  de  Linange,  avaient  été  concédés  à  la 
famille  des  barons  ou  comtes  de  Hallberg,  mais  la 
possession  lui  était  contestée. 

La  maison  de  Nesselrode,  d'origine  saxonne  et  très- 
ancienne,  était  décorée  de  la  charge  héréditaire  de 
chambellan  et  maréchal  du  duché  de  Berg;  elle  avait 
voix  et  séance  au  cercle  de  Westphalie,  pour  la  sei- 
gneurie de  Reichenstein,  dans  l'enceinte  du  comté  de 
Wied-Runkel.  Burgfrey  et  Mechernich  se  trouvaient 
dans  le  duché  de  Juliers.  Cette  maison  forme  deux 
branches,  celle  de  Reichenstein  et  Landeskron,  et 
celle  d'Ereshoven  à  laquelle  appartient  un  des  plus 
célèbres  diplomates  de  notre  temps,  le  chancelier  de 
l'empire  de  Russie,  comte  Charles-Robert  de  Nessel- 
rode. 

Les  comtes  de  Sickingen,  dont  le  nom  se  retrouve  sou- 
vent dans  les  annales  du  xvi*  siècle,  étaient  membres  du 
collège  des  comtes  de  la  Souabe,  pour  leur  seigneurie 
de  Burg-Sickingen  ;  ils  possédaient,  sur  la  rive  gauche 
du  Rhin,  la  seigneurie  de  Dachstuhl,  et  d'autres  do- 
maines considérables,  pour  lesquels  les  médiateurs 
leur  avaient  assigné  les  abbayes  d'Ochsenhausen  et  de 
Roth;  mais,  en  examinant  leurs  titres,  la  Commission 
trouva  qu'à  l'exception  des  villages  du  comté  de  War- 
temberg,  pour  lesquels  ils  appartenaient  à  la  première 
classe,  et  le  bailliage  de  Hoheneinœden,  qui  leur  assi- 
gnait une  place  dans  la  troisième,  toutes  leurs  posses- 
sions, rapportant  encore  cent  vingt-deux  mille  sept 
cent  quatre-vingt-dix-neuf  florins,  étaient  de  la  cin- 
quième classe,  à  laquelle,  non  plus  qu'à  la  quatrième, 


—  355  — 

rinsiiffisance  des  fonds  assignés  ne  permit  pas  d'ac- 
corder une  indemnité. 

Nous  allons  donner  le  dénombrement  de  ces  deux 
classes. 

Quatrième  classe  : 

Le  comte  de  la  Leyeriy  État  d'Empire  pour  le  comté 
de  Hohengeroldseck,  était  de  cette  classe  pour  sa  sei- 
gneurie de  Bliescastel  et  une  partie  de  ses  dépendances 
du  côté  du  duché  de  Deux-Ponts,  rapportant  cent  cinq 
mille  florins.  L'article  1 2  secret  du  traité  de  Campo 
Formio  avait  nommé  ce  seigneur  parmi  les  États  qui 
devaient  être  indemnisés;  et  le  premier  plan  lui  avait 
assigné,  pour  ses  domaines  de  la  quatrième  et  de  la 
cinquième  classe,  les  abbayes  de  Schussenried,  Gut- 
tenzell,  Heggbach,  Baindt  et  Buxheim.  Il  fut  d'autant 
plus  à  plaindre  que,  pour  l'autre  moitié  de  ses  reve- 
nus, il  rentra  dans  la  cinquième  classe,  dont  nous  ve- 
nons de  faire  connaître  le  sort.  Cependant  il  obtint  la 
restitution  d'une  grande  partie  de  ses  domaines  en 
France,  de  ceux  qui  n'avaient  pas  été  aliénés  ni  don- 
nés en  dotation  à  la  Légion  d'honneur. 

Le  comte  de  Hallberg ,  pour  Heuchelheim,  rappor- 
tant deux  mille  florins. 

Cinquième  classe  : 

Aspremont-Lynderij  pour  un  capital  de  deux  cent 
vingt  mille  florins. 

Bassenheim,  pour  Bassenheim,  Heresbach,  Hecken- 
bach,  Sevenach,  rapportant  quarante-huit  mille  flo- 
rins. 

Bentheim-Steinfurt,  pour  la  seigneurie  d'Alpen  dans 
l'électorat  de  Cologne,  dix-huit  mille  florins. 

Hallberg f  pour  Horst,  Luxheim,  etc.,  cinq  mille 
huit  cent  soixante-deux  florins. 


—  356  — 

De  la  Leyen,  pour  Adendorf,  Mûnchweiler ,  etc., 
encore  cent  treize  mille  florins. 

Metternich  -  Winnebourg  -  Beilstein ,  pour  Oberahe , 
Reinhardstein,  etc.,  rapportant  seize  mille  quatre 
cents  florins. 

Les  deux  branches  de  la  maison  de  Nesselrode,  pour 
Thumb  et  autres  domaines,  d'un  revenu  de  quatorze 
mille  florins. 

Ostein,  pour  des  domaines  médiats,  rapportant 
quatre  cents  florins. 

Créange,  pour  la  seigneurie  de  Pittanges ,  dans  le 
duché  de  Luxembourg,  rapportant  neuf  mille  florins. 

Schœsherg,  pour  des  terres  médiates  d'un  revenu  de 
vingt-sept  mille  cinq  cents  florins. 

Sickingetif  pour  Hohenburg,  Landstuhl,  etc.,  cent 
vingt-deux  mille  septcent  quatre-vingt-dix-neuf  florins. 

Siern&er^^  pour  Manderscheid,  etc.,  ayant  soixante- 
sept  mille  cent  florins  de  revenus. 

Tœrring,  pour  deux  mille  trois  cents  florins  de  re- 
venus en  biens  médiats,  situés  en  Hollande. 

Le  paragraphe  24  se  termine  par  les  dispositions 
générales  suivantes  : 

«  Les  dispositions  générales  qui  suivent  sont  insé- 
parables de  cette  répartition. 

«  1 .  Les  votes  des  comtes  d'Empire  indemnisés,  dont 
la  perte  consistait  en  territoire  immédiat  contribuant 
aux  prestations  de  l'Empire  et  du  cercle,  et  qui  avaient 
en  même  temps  une  voix  ou  partie  de  voix  aux  Diètes 
de  l'Empire  ou  du  cercle  ;  savoir  :  les  comtes  d'Aspre- 
mont,  de  Bassenheim ,  de  Metternich,  d'Ostein ,  de 
Plettenberg,  de  Quadt,  de  Schœsberg,  de  Sinzendorfî, 
de  Sternberg,  de  ïorring  et  de  Wartemberg,  sont 
transportés  sur  leurs  nouvelles  possessions. 

«  2.  Les  parties  d'indemnité  détachées  du  chef-lieu 


—  357  — 

acquittent  leurs  quotes-parts  aux  prestations  de  l'Em- 
pire et  du  cercle  dans  la  caisse  principale,  dans  les 
mêmes  proportions  qu'auparavant,  et  fournissent  le 
même  nombre  d'hommes  qui  était  fourni  au  contin- 
gent précédent.  Le  possesseur  de  la  partie  détachée  a 
le  droit  de  faire  la  sous-répartition  de  sa  quote-part,  et 
de  lever  son  contingent  d'hommes. 

«  3.  Le  droit  de  détraction  entre  les  possessions  du 
chef-lieu  et  de  la  partie  détachée  reste  dans  ses  rap- 
ports actuels. 

«  4.  Le  possesseur  d'une  partie  détachée  acquiert 
le  mobilier  qui  s'y  trouve  ou  qui  en  dépend,  de  même 
que  les  arrérages  sur  lesquels  il  doit  s'entendre  avec 
l'ancien  possesseur. 

«  Il  n'a  aucune  part  aux  capitaux  actifs  et  passifs 
de  la  caisse  générale  du  chef-lieu ,  parce  qu'ils  ont 
déjà  été  portés  généralement  en  ligne  de  compte  dans 
les  calculs  du  produit. 

«  5.  Il  est  tenu  de  fournir  sa  quote-part  pour  la  sus- 
tentation du  clergé  du  chef-lieu,  en  proportion  du  re- 
venu de  la  partie  qui  est  détachée. 

i'  6.  Aux  rentes  assignées  ci-dessus  sont  attribués 
tous  les  avantages  et  dispositions  qui  sont  déterminés 
dans  le  présent  acte  pour  les  rentes  qui  y  sont  établies. 

((  7.  Le  propriétaire  d'une  rente  est  aussi  tenu  de 
supporter  une  partie  des  frais  de  sustentation  du 
clergé  du  chef-lieu,  sur  lequel  la  rente  est  assignée  ; 
cependant,  comme  il  n'a  aucune  part  au  mobilier 
dudit  chef-lieu,  il  ne  peut  être  tenu  de  fournir  que  la 
moitié  de  la  quote-part  établie  en  raison  des  revenus 
de  l'objet  d'indemnité,  déduction  faite  des  charges. 

((  8.  Pour  égaliser  les  charges  temporaires,  surtout 
les  frais  de  sustentation,  justement  évaluées  d'après 
les  dispositions  des  paragraphes  51  et  57  du  présent 
acte,  pour  le  clergé  des  neuf  abbayes,  les  capitaux 


—  358  — 

actifs  de  la  chartreuse  de  Buxheim,  montant  à  cent 
soixante-seize  mille  florins,  seront  employés  d'après 
les  principes  suivants  : 

«  1°  La  somme  de  sustentation  qui  n'excède  pas  le 
tiers  des  revenus  d'une  abbaye,  est  considérée  comme 
compensée  tant  par  l'universalité  de  cette  charge  com- 
mune à  tous,  que  par  l'acquisition  du  mobilier. 

«  2"  Lorsque  la  somme  de  sustentation  excède  le 
tiers  du  revenu,  cet  excédant  est  bonifié  à  l'octuple 
par  lesdits  capitaux. 

«  3"  Le  futur  possesseur  de  Buxheim  est  chargé 
d'administrer  ces  capitaux,  d'en  payer  les  intérêts  à 
raison  de  trois  et  demi  pour  cent  à  ceux  qui  y  ont 
part,  et  de  les  acquitter  en  huit  termes  d'une  année 
chacun,  après  les  avoir  successivement  dénoncés. 

«  4"  En  conséquence  de  ces  dispositions,  les  futurs 
possesseurs  des  abbayes  recevront  de  ces  capitaux 
actifs,  savoir  : 

«  Pour  Roth,  sept  mille  cinq  cents  florins;  pour 
Weissenau,  six  mille  quatre  cent  cinquante;  pour 
Buxheim,  vingt  mille  deux  cents;  pour  Heggbach, 
cinquante-trois  mille  neuf  cent  cinquante;  pourBaindt, 
trente-huit  mille  six  cent  cinquante;  pour  Guttentzell, 
quarante-cinq  mille  deux  cent  cinquante  :  les  quatre 
mille  florins  restant  doivent  être  considérés  comme 
un  excédant  destiné  à  couvrir  les  pertes  possibles. 

«  5"  S'il  y  avait  une  plus  grande  perte  qui  ne  pût 
être  attribuée  à  tort  à  l'administration  de  ces  capi- 
taux, elle  serait  supportée  proportionnellement  par 
tous  ceux  qui  y  ont  part. 

«  Le  complément  de  Tindemnité,  s'il  y  a  lieu,  et  eu 
tant  qu'il  n'y  serait  pas  pourvu  par  la  levée  future  du 
séquestre,  sera,  pour  lesdits  comtes  et  pour  tous  au- 
tres réclamants  à  ce  titre,  assigné  sur  les  revenus  qui 
pourraient  être  ultérieurement  disponibles.  » 


—  359  — 

On  ne  sait  sur  quoi  se  fonde  la  dernière  phrase  ; 
la  Députation  savait  parfaitement  qu'il  ne  restait  plus 
rien  de  disponible  en  Empire. 

§  25. 

«  Le  siège  de  Mayence  est  transféré  à  l'église  cathé- 
drale de  Ratisbonne.  Les  dignités  de  prince-électeur- 
archichancelier  de  l'Empire,  ainsi  que  celles  d'arche- 
vêque métropolitain  et  de  primat  de  Germanie,  y 
demeureront  unies  à  perpétuité.  Sa  juridiction  métro- 
politaine s'étend  sur  les  anciennes  provinces  ecclé- 
siastiques de  Mayence,  Cologne  et  Trêves  (en  tant 
qu'elles  se  trouvent  à  la  rive  droite  du  Rhin,  et  en 
exceptant  les  États  du  roi  de  Prusse);  enfin  sur  celle 
de  Salzbourg,  en  tant  qu'elle  s'étend  sur  les  pays  unis 
à  l'électorat  palatin  de  Bavière. 

«  Quant  au  temporel,  ladotation  del'Électeur-Archi- 
chancelier  est  formée  de  la  principauté  d'Aschaffen- 
bourg  et  de  la  principauté  de  Ratisbonne.  La  première 
est  formée  du  grand  bailliage  d'Aschaffenbourg,  dans 
son  intégrité  et  étendue  actuelles  j  plus,  des  bailliages 
d'Aufîenau,  Lohr,  Orb,  avec  la  saline,  Prozelten  et 
Klingenberg,  à  la  droite  du  Mein,  et  du  bailliage  wtlrz- 
bourgeois  d'Aurach  au  Sinn-Grund;  la  seconde  com- 
prend  la  principauté  actuelle  de  Ratisbonne ,  la  ville 
de  ce  nom  et  toutes  les  dépendances,  avec  les  chapi- 
tres, abbayes  et  couvents,  tant  médiats  qu'immédiats, 
qui  s'y  trouvent,  notamment  Saint-Émeran,  Ober- 
Munster  et  Nieder-Mûnsterj  le  tout  dans  les  rapports 
actuellement  existant  à  l'égard  de  la  Bavière.  Cette  do- 
nation est  formée,  en  outre,  de  la  ville  impériale  de 
Wetzlar,  à  titre  de  comté  et  en  pleine  supériorité  terri- 
toriale, ainsi  que  de  tous  les  chapitres,  abbayes  et 
couvents  situés  dans  lesdites  principautés  et  comtés  ; 


—  360  — 

plus,  de  la  maison  de  Kompostel  à  Francfort,  et  des 
propriétés  et  revenus  du  grand  chapitre  de  Mayence, 
tenues  et  perçues  hors  des  bailliages  assignés  au  roi 
de  Prusse,  au  landgrave  de  Hesse-Darmstadt,  aux  prin- 
ces de  Nassau-Usingen  et  de  Linange. 

«  Le  revenu  des  objets  ci-dessus  spécifiés  est  évalué 
à  six  cent  cinquante  mille  florins. 

«  Il  sera  pourvu  immédiatement  au  complément 
d'indemnité  derÉlecteur-Archichancelier,  fixée  à  un 
million  de  florins,  par  des  assignations  sur  l'octroi  de 
navigation  mentionné  au  paragraphe  39. 

«  En  attendant  que  cet  octroi  soit  en  activité ,  les 
péages  à  la  rive  droite  du  Rhin  qui  auraient  continué 
à  être  perçus  depuis  le  \"  décembre  1802,  serviront 
à  l'acquit  dudit  complément  d'indemnité.  L'Électeur- 
Archichancelier  s'entendra  à  cet  effet  avec  les  princes, 
au  nom  desquels  ils  auraient  été  perçus.  S'il  se  trouve 
des  fonds  suffisants  après  l'acquit  de  son  complément, 
ils  serviront  à  payer  d'autant  les  assignations  portées 
aux  paragraphes  9,  14,  17,  19  et  20. 

«  L'Électeur-Archichancelier  continuera  d'être  élu 
conformément  aux  statuts  de  son  ancienne  métro- 
pole. 

«  Les  villes  de  Ratisbonne  et  de  Wetzlar  jouiront 
d'une  neutralité  absolue,  en  cas  de  guerre  même 
d'Empire,  attendu  qu'elles  sont,  l'une  le  siège  de  la 
Diète  générale,  l'autre  le  siège  de  la  chambre  impé- 
riale. » 

L'Empire  germanique  avait  trois  chanceliers,  pour 
les  royaumes  d'Allemagne,  de  Lorraine-Bourgogne  et 
d'Italie.  Les  trois  premiers  princes  de  l'Église  alle- 
mande en  étaient  revêtus;  mais  les  fonctions  des  ar- 
chevêques de  Trêves  et  de  Cologne,  comme  chance- 
liers, étaient  tombées  en  désuétude.  Ces  dignités  furent 


—  361  — 

tacitement  supprimées  par  le  Recès.  Mais  on  ne  pou- 
vait se  passer  d'un  chancelier  qui,  d'après  la  Consti- 
tution germanique,  était  le  principal  ressort  de  la  ma- 
chine politique.  En  conséquence,  on  conserva  cette 
charge  au  successeur  de  l'électeur  de  Mayence,  qui  y 
réunit  les  dignités  d'électeur,  d'archevêque  etde  primat 
d'Allemagne.  Cette  dernière  qualité  avait  été  attribuée 
jusqu'alors  à  l'archevêque  de  Salzbourg,  mais  comme 
un  vain  titre  sans  réalité.  On  agrandit  considérable- 
ment la  province  métropolitaine  de  l'archevêque,  dont 
on  transféra  le  siège  à  Ratisbonne;  car  on  y  joignit  ce 
qui  restait  des  trois  autres  archevêchés,  en  tant  que 
les  diocèses  qui  leur  étaient  soumis  ne  se  trouvaient 
pas  dans  les  États  du  roi  de  Prusse,  ni  dans  ceux  de 
la  maison  d'Autriche;  cette  dernière  exception  n'est 
exprimée  qu'indirectement  par  ces  mots  :  en  tant 
qu'elle  s'étend  sur  les  pays  unis  à  Vélectorat  palatin  de 
Bavière.  Le  Recès  ne  dit  pas  expressément  que  sa  pro- 
vince s'étendra  aussi  sur  les  évêchés  qui  jusqu'alors 
étaient  immédiatement  soumis  au  saint-siége,  tels  que 
Bamberg  et  Fulde;  mais  cet  arrangement  n'a  sans 
doute  pas  souffert  de  difficulté  dans  son  exécution, 
d'autant  plus  que  les  archevêques  de  Mayence  contes- 
taient l'immédiateté  de  Fulde.  11  fallut,  pour  la  trans- 
lation du  siège  archiépiscopal  à  Ratisbonne,  une  con- 
firmation du  souverain  pontife  :  elle  fut  donnée  par 
une  bulle  que  le  Pape  signa  le  2  février  1 805 ,  pen- 
dant son  séjour  à  Paris. 

L'électorat  de  Mayence,  composé  de  vingt-cinq  bail- 
liages situés  presque  tous  sur  la  rive  droite  du  Rhin, 
de  la  ville  d'Erfurt,  capitale  de  la  Thuringe,  et  de 
l'Eichsfeld,  formait  un  État  de  cent  soixante-neuf  mil- 
les carrés,  renfermant  trois  cent  cinquante  mille  habi- 
tants, et  rapportant  deux  millions  de  florins.  On  a  lieu 
d'être  surpris  que^  décidés  à  conserver  la  dignité  d'Ar- 


—  362  — 

chichancelier,  qui  donne  à  son  titulaire  le  premier 
rang  parmi  les  princes  de  l'Empire,  les  médiateurs 
n'aient  pas  conservé  à  ce  prince  les  États  qui  lui  res- 
taient après  la  perte  de  sa  capitale  et  de  quelques  dis- 
tricts situés  sur  la  rive  gauche  du  Rhin.  On  est  plus 
étonné  encore,  qu'après  avoir  morcelé  cet  État  de  ma- 
nière qu'il  n'en  restât  plus  qu'un  district  de  vingt  et 
un  milles  carrés ,  avec  quarante-huit  mille  habitants, 
ils  n'aient  pensé  à  assurer  à  l'Archichancelier  une  do- 
tation analogue  au  rang  qu'il  devait  occuper,  que  lors- 
qu'il ne  se  trouva  plus  rien  de  disponible.  Voici  com- 
ment le  premier  plan  s'était  exprimé  à  cet  égard  : 

«  S.  M.  l'empereur  de  Russie  et  le  premier  Consul 
de  la  République  française  [Le  premier  Consul  de  la 
République  française  et  S.  M.  l'empereur  de  Russie], 
après  avoir  proposé  de  régler  ainsi  les  indemnités  exi- 
gibles des  princes  héréditaires,  ont  reconnu  qu'il  était 
à  la  fois  possible  et  convenable  de  conserver  dans  le 
premier  collège  de  l'Empire  un  électeur  ecclésiastique. 
Ils  proposent,  en  conséquence,  que  l'archichancelier 
de  l'Empire  soit  transféré  au  siège  de  Ratisbonne,  avec 
les  abbayes  de  Saint-Emeran,  Ober-Mûnster  et  Nieder- 
Munster,  conservant  de  ses  anciennes  possessions  le 
grand  bailliage  d'Aschaffenbourg,  à  la  droite  du  Mein, 
et  qu'il  y  soit  réuni  d'ailleurs  un  nombre  suffisant 
d'abbayes  médiates,  pour,  avec  les  terres  ci-dessus , 
lui  parfaire  un  revenu  annuel  d'un  million  de  florins.  « 

Pour  parfaire  ce  million,  on  augmenta  d'abord  l'é- 
tendue du  grand  bailliage  d'Aschaffenbourg,  en  y  lais- 
sant réunie  la  portion  située  sur  la  rive  gauche  du 
Mein,  et  y  comprenant  expressément  le  bailliage  de 
Lohr  ou  la  partie  mayençaise  du  comté  de  Rieneck  ; 
Orbe-Haussen ,  qui  a  une  saline  considérable;  Auf- 
fenau,  terre  appartenant  au  canton  du  Rhin  de  la  No- 
blesse immédiate,  mais  que  l'électeur  de  Mayeooe 


—  363  — 

avait  acheté,  en  1 780,  de  la  maison  de  Forstmeister  j 
les  parties  de  Prozelten  et  Klingenberg,  situées  sur  la 
rive  droite  du  Mein,  et  que,  sans  cette  disposition  eX" 
presse,  le  prince  de  Linange  aurait  pu  réclamer  comme 
dépendances  du  bailliage  d'Aurach  sur  le  Sinne,  ou 
la  partie  wiirzbourgeoise  du  comté  de  Rieneck.  On 
ajouta  ensuite  à  l'évêché  de  Ratisbonne  la  ville  de  ce 
nom  et  celle  de  Wetzlar  :  le  premier  plan  avait  con- 
servé à  ces  villes  leur  immédiateté,  comme  étant,  l'une 
le  siège  de  la  Diète  de  l'Empire,  et  l'autre  celui  de  la 
Chambre  impériale. 

Moyennant  ces  additions,  on  était  parvenu  à  former 
au  premier  prince  de  l'Empire  un  État  de  vingt-quatre 
milles  un  quart  carrés,  habité  par  quatre-vingt-deux 
mille  âmes  et  rapportant  six  cent  cinquante  mille  flo- 
rins.  Les  trois  cent  cinquante  mille  florins  qui  man- 
quaient furent  assignés  sur  l'octroi  de  la  navigation  du 
Rhin.  Il  faut  encore  observer  une  petite  différence  en- 
tre la  rédaction  de  cet  article  et  celle  du  premier  plan; 
celui-ci  disait  :  L'archichancelier  de  l'Empire  sera 
transféré  à  Ratisbonne;  le  Recès  s'exprime  ainsi  :  Le 
siège  de  Mayence  est  transféré  à  l'église  cathédrale  de 
Ratisbonne.  Les  médiateurs  pensaient  que  l'archi- 
chancelier devait  résider  dans  la  ville  où  siégeait  la 
Diète,  dont  il  était  le  directeur  :  le  Recès  lui  laissai* 
faculté  de  se  choisir  une  autre  résidence. 


§  26. 

«  Les  Ordres  Teutonique  et  de  Malte  sont,  en  con- 
sidération des  services  militaires  de  leurs  membres , 
soustraits  à  la  sécularisation;  et,  à  raison  de  leurs 
pertes  à  la  rive  gauche  du  Rhin,  ils  reçoivent  en  com- 
pensation,  savoir  : 

c(  Le  prince  grand-maître  et  l'Ordre  Teutonique   les 


—  364  — 

chapitres,  abbayes  et  couvents  médiats  du  Vorarlberg, 
de  la  Souabe  autrichienne,  et  généralement  tous  les 
couvents  médiats  des  diocèses  d'Augsbourg  et  de 
Constance  et  Souabe,  dont  il  n'a  pas  été  disposé,  hors 
ceux  du  Brisgau. 

«  Le  prince  grand  prieur  et  le  grand  prieuré  d'Al- 
lemagne de  l'Ordre  de  Malte  :  le  comté  de  Bondorf,  les 
abbayes  de  Saint-Biaise ,  de  Saint-Trutpert,  de  Schut- 
tern,  de  Saint-Pierre  et  de  Tennenbach,  et  générale- 
ment tous  les  chapitres,  abbayes  et  couvents  du  Bris- 
gau, avec  toutes  les  dépendances  respectives  à  la  rive 
droite  du  Rhin  des  objets  ci-dessus  désignés,  à  charge 
par  lui  d'acquitter  les  dettes  personnelles  des  ci-devant 
évêques  de  Baie  et  de  Liège,  contractées  depuis  qu'ils 
sont  hors  de  leurs  sièges ,  telles  qu'elles  seront  ulté- 
rieurement liquidées.  » 

On  a  fait  des  observations  critiques  sur  le  préam- 
bule de  ce  paragraphe,  qui  détermine  que  les  Ordres 
Teutonique  et  de  Malte  sont  conservés  à  cause  des  ser- 
vices militaires  de  leurs  membres;  mais,  on  répon- 
dait que  si  ce  n'était  point  là  précisément  le  motif,  du 
moins  il  devait  paraître  juste  et  convenable  qu'à  une 
époque  où,  par  la  sécularisation  de  tant  de  chapitres 
etde  fondations,  on  enlevait  à  la  noblesse  allemande  la 
facilité  d'établir  ses  cadets  etde  parvenir  aux  premiè- 
res dignités  de  l'Église  etde  l'État,  on  lui  conservât  au 
moins  deux  institutions  enrichies  par  les  dotations  de 
l'ancienne  noblesse.  Cependant,  il  y  a  lieu  de  croire 
que  le  véritable  motif  auquel  elles  durent  leur  conser- 
vation, fut  la  protection  que  la  Russie  accordait  à  l'une 
d'elles.  Ce  qui  l'indique,  c'est  que  dans  le  premier 
plan  il  n'était  question  que  de  l'Ordre  de  Malte,  et 
que  l'Institution  toute  nationale  de  l'Ordre  Teutonique 
y  était  complètement  oubliée. 


—  365  — 

Dans  le  Recès,  l'Ordre  Teutonique  occupe  le  pre- 
mier rang.  Nous  avons  parlé  ailleurs  de  la  grande 
fortune  que  cet  Ordre  avait  acquise ,  et  de  la  manière 
dont  il  fut  dépouillé  des  conquêtes  qu'il  avait  faites 
sur  la  mer  Baltique,  et  réduit  à  ses  possessions  en 
Allemagne.  A  l'époque  de  sa  grandeur  les  terres  que 
l'Ordre  avait  acquises  en  Autriche,  dans  le  Tyrol,  sur 
le  Rhin,  en  Souabe,  en  Alsace  et  en  Bourgogne,  étaient 
immédiatement  soumises  au  grand-maître  de  Marien- 
bourg,  ce  qui  est  cause  que,  jusqu'au  dernier  moment, 
elles  portèrent  le  titre  de  province  prussienne.  Les 
autres  possessions  de  l'Ordre  formaient  la  province 
allemande,  soumise  à  un  maître  particulier  auquel, 
vers  la  fin  du  xv*  siècle,  il  fut  assigné  un  district 
dont  Mergentheim  était  le  chef-lieu.  Le  grand-maître 
en  Prusse  et  le  maître  Teutonique  avaient  voix  et 
séance  à  la  Diète. 

Albert  de  Brandebourg,  grand-maître  de  l'Ordre  en 
Prusse,  s'étant  fait  donner,  en  1525,  par  le  roi  de 
Pologne,  la  Prusse  orientale  à  titre  de  duché  héré- 
ditaire, le  maître  Teutonique,  Walther  de  Cronberg, 
fut  investi  par  Charles-Quint  du  titre  de  grand-maître 
de  l'Ordre,  administrateur  de  la  province  de  Prusse. 
Il  réunit  sous  sa  maîtrise  les  possessions  de  l'Ordre 
en  Allemagne,  qui  avaient  immédiatement  dépendu 
de  la  province  de  Prusse.  Il  occupait  à  la  Diète  la 
place  qui  avait  anciennement  appartenu  au  grand- 
maître  de  l'Ordre  en  Prusse,  et  était  le  second  prince 
ecclésiastique,  non-électeur.  Ce  rang  lui  était  cepen- 
dant disputé  par  l'évêque  de  Bamberg. 

Les  domaines  de  l'Ordre  étaient  répandus  sur  toute 
l'Allemagne,  et  divisés  en  douze  bailliages,  indépen- 
damment de  ceux  qui  formaient  ce  qu'on  appelait 
abusivement  la  principauté  de  Mergentheim.  Ces  bail- 
liages étaient  ceux  de  Franconie,  d'Alsace  et  de  Bour- 


—  3G6  — 

gogne,  d'Autriche,  de  l'Adige,  de  Coblentz,  d'Alten- 
biesen  (dans  la  Belgique),  deWestphalie,  de  Lorraine, 
de  Hesse,  de  Saxe,  deThuringe  et  d'Utrecht.  Les  bail- 
liages d'Alsace  et  de  Coblentz  avaient  voix  et  séance 
à  la  Diète,  parmi  les  prélats  du  banc  du  Rhin.  Les 
revenus  des  commanderies  situées  sur  la  rive  gauche 
du  Rhin  se  montaient  à  trois  cent  quatre-vingt-dix- 
huit  mille  six  cent  quatre  florins ,  dont  quarante-cinq 
mille  trois  cent  soixante-dix  entraient  dans  la  caisse 
du  grand-maître'. 

•  Voici  le  détail  de  cette  perte  : 

I.     Possessions  du  grand-maître  : 

revenus  annuels. 

i.  La  commanderie  de  Weissembourg 23  23<  flor. 

2.  Celle  de  Spire M  973 

3.  La  ferme  d'Oppau 5  231 

4.  La  châlelienie  de  Weinheim,  proche  Alzei.      2  172 
8.  La  commanderie  de  Mayence 2  763 

45  370 
IL    Province  d'Alsace  et  de  Boulogne  : 

1 .  La  commanderie  de  Rixheim 1  665 

2.  La  seigneurie  de  Fessenheim 4  679 

3.  La  commanderie  de  Miilhausen 6  650 

4.  Partie  de  celle  de  Bâie 1  958 

6.  La  commanderie  de  Ruffach 6  672 

6.  Celle  de  Guebwiler 4  422 

7.  Celle  d'Andlau 4  273 

8.  Celle  de  Strasbourg 8  891 

9.  Celle  de  Brucken 2  895 

10.  Celle  de  Kaisersberg 949 

42  754 
IIL    Province  de  Coblentz  : 

1.  La  commanderie  provinciale  de  Cologne.  23  429 

2.  La  seigneurie  d'Elsen 9  880 

3.  La  commanderie  d'Anvers 33  655 

4.  Celle  de  Coblentz 13  425 

5.  Celle  de  MufTendorff i  541 

6.  Celle  de  Trar  et  Rheinberg 2  737 

87  667 
IV.    Province  de  Hesse  : 

La  commanderie  d'Oberflorsheira 7  586 

A  reporter 183  377 


—  367  — 

Le  second  plan  fixa  l'indemnité  de  l'Ordre,  telle 
qu'elle  est  déterminée  par  le  Recès  ;  mais  dans  la  vingt 
et  unième  séance  de  la  Députation,  le  subdélégué  du 
grand-maître ,  l'archiduc  Charles^  déclara  que  l'Ordre 
n'acceptait  que  ceux  des  couvents  médiats  qui  se  trou- 
vaient dans  des  terres  faisant  partie  des  indemnités, 
mais  qu'il  refusait  ceux  qui  étaient  situés  dans  des 
pays  anciennement  héréditaires;  ou,  ce  qui  revient 
au  même,  il  n'accepte  que  celles  qui  se  trouvaient 
dans  les  diocèses  de  Constance  et  d'Augsbourg.  Un 

Report 183  377 

V.      Province  d'Altenbiesen  : 

1.  La  commanderie  provinciale  d'Altenbiesen.    68  277 

2.  La  commanderie  de  Maëstricht 15  753 

3.  La  seigneurie  et  les  recettes  de  Dieppen- 

bur,  Beverst  et  Damnis 3  744 

4.  La  recette  de  Saint- Trond 3  018 

5.  Celle  de  Tongres 1  418 

6.  Celle  de  Vogt 2  282 

7.  Celle  de  Holt 1  952 

8.  La  commanderie  de  Gemmert 18  903 

9.  Celle  deSiersdorf 10  789 

10.  Celle  de  Bernsheim 10  778 

11.  Celle  de  Beckevort 12  249 

12.  Celle  de  Cologne 5  886 

13.  Celle  de  Petersfuhren 4  787 

11.  Celle  d'Aix-la-Chapelle 3  908 

18.  Celle  de  Gruyrode 3  369 

16.  Celle  d'Ordingen 5  166 

17.  Partie  de  celle  de  Raraersdorf 4  613 


VI.    Province  de  Lorraine  : 

1.  La    commanderie  provinciale  de  Trêves, 

avec  les  fermes  de  RachtigetdeTammels..  12  184 

2.  La  commanderie  de  Beckingen 13  742 

3.  Celle  de  Saarbourg 2  052 

4.  Celle  de  Saarbruck 4  1 92 

5.  Celle  de  Meinsiedel 4  824 

è.  Celle  de  Luxembourg 1  341 


176  892 


38  335 


Total...     398  604 


—  368  — 

chapitre  général  de  l'Ordre,  tenu  au  mois  d'août  1 806, 
les  réunit  à  la  grande-maîtrise. 

L'Ordre  de  Malte,  dont  toutes  les  Langues  devaient 
se  regarder  comme  solidaires,  avait  bien  le  droit  de 
n'être  pas  si  scrupuleux.  Le  grand  prieur  de  cet  Ordre 
en  Allemagne  avait  la  qualité  d'État  d'Empire  et 
siégeait  à  la  Diète  parmi  les  princes.  Il  résidait  à 
Heitersheim  dans  le  Brisgau,  où  était  située  sa  prin- 
cipauté. On  n'a  pas  fait  connaît  la  valeur  des  com- 
manderies  que  la  Langue  allemande  a  perdues  par 
la  session  de  la  rive  gauche  du  Rhin.  Le  grand  prieur 
accepta  sans  difficulté  ce  que  le  Recès  lui  don- 
nait; savoir  :  1"  le  comté  de  Bondorf,  pour  lequel 
le  prince  abbé  de  Saint-Biaise  avait  voix  et  séance  à 
la  Diète  de  l'Empire j  2"  cette  abbaye  elle-même  qui 
possédait,  outre  ce  comté,  la  seigneurie  de  Stauff'en; 
enfin  3°  les  abbayes  de  Saint-Trutpert,  Saint-Pierre, 
Schuttern  et  Tennenbach,  quoique  ces  cinq  abbayes 
fussent  sous  la  supériorité  territoriale  du  Brisgau,  qui 
n'était  pas  dans  la  catégorie  des  pays  dont  on  avait 
formé  la  masse  des  indemnités,  mais  avait  été  cédé 
au  duc  de  Modène,  dans  l'État  où  il  avait  appartenu 
à  la  maison  d'Autriche.  Les  sciences  ne  peuvent  que 
regretter  la  suppression  de  l'abbaye  de  Saint-Biaise, 
institution  utile  par  les  travaux  littéraires  auxquels 
ces  moines  se  livraient;  elle  était  le  principal  foyer 
de  l'érudition  parmi  les  catholiques  du  midi  de  l'Al- 
lemagne. On  estime  les  acquisitions  que  l'Ordre  de 
Malte  fit  par  cette  disposition,  à  neuf  milles  car- 
rés, ayant  quatorze  mille  habitants  et  rapportant 
cent  quatre-vingt  mille  florins.  Pour  satisfaire  à  la 
condition  que  la  fin  de  l'article  avait  imposée  au  grand 
prieur,  il  prit  l'engagement,  par  une  convention  parti- 
culière, signée  sous  la  garantie  de  la  France,  de  payer 


—  369  — 

par  termes  huit  cent  quarante  mille  florins  à  l'évêque 
de  Liège,  et  deux  cent  soixante  mille  florins  à  celui 
de  Bade.  Dans  un  mémoire  que  le  premier  avait  pré- 
senté à  la  Députation,  dans  sa  séance  du  24  septembre, 
il  faisait  monter  à  un  million  sept  cent  quatre-vingt- 
dix-neuf  mille  neuf  cent  soixante-quatre  mille  florins 
les  dettes  qu'il  avait  contractées  pour  son  entretien, 
et  pour  celui  de  cent  vingt-trois  ministres  et  conseil- 
lers, et  vingt-quatre  employés  subalternes.  On  sut  à 
cette  occasion  que  les  revenus  nets  de  l'évêché  de 
Liège  se  montaient  à  deux  cent  quatre-vingt-dix-huit 
mille  trois  cent  onze  florins. 

§27. 

c(  Le  collège  des  villes  impériales  demeure  com- 
posé des  villes  libres  et  immédiates  d'Augsbourg,  Lu- 
beck,  Nuremberg,  Francfort,  Brème  et  Hambourg. 

«  Elles  jouissent,  dans  toute  l'étendue  de  leurs  terri- 
toires respectifs,  de  lapleine  supériorité  et  detoute juri- 
diction quelconque,  sans  réserve  ni  exception,  sauf 
néanmoins  l'appel  aux  tribunauxsuprêmesdel'Empire. 

«  Elles  jouissent  pareillement  d'une  neutralité  abso- 
lue, même  dans  les  guerres  de  l'Empire  :  à  cet  effet, 
elles  seront  franches  à  perpétuité  de  toute  contribu- 
tion militaire  ordinaire  et  extraordinaire,  et,  dans 
toutes  les  questions  de  paix  ou  de  guerre,  dispensées 
pleinement  et  nécessairement  de  tout  concours  aux 
votes  de  l'Empire.  » 

Le  nombre  des  villes  impériales  était,  en  1 802,  de 
quarante-sept.  Le  premier  plan  le  réduisit  à  huit,  et 
le  second  priva  encore  de  leur  immédiateté  Ratis- 
bonne  et  Wetzlar.  Il  s'éleva  entre  les  six  villes  que 
le  Recès  conserva,  une  contestation  sur  le  rang;  elle 
vn  24 


—.  370  — 

fut  décidée  le  4-  mai  1803  par  un  acte  qui  statua  que 
Hambourg  aurait,  pour  la  première  fois,  le  directoire, 
mais  que  cette  charge  alternerait  de  deux  ans  en  deux 
ans,  et  que  pour  le  reste  elles  conserveraient  Tordre 
que  l'article  leur  assigne. 

Après  avoir  déterminé  en  général  les  privilèges 
de  ces  villes,  l'article  continue  ainsi  qu'il  suit  : 

((  Elles  reçoivent  en  outre  une  indemnité,  compen- 
sation et  concession,  savoir  : 

«  La  ville  d'Augsboiirg  tous  les  biens,  bâtiments , 
propriétés  et  revenus  ecclésiastiques  de  son  territoire, 
tant  en  dedans  qu'en  dehors  de  ses  murs,  sans  aucune 
exception  quelconque.  » 

La  ville  d'Augsbourg  n'avait  rien  perdu  par  la  ces- 
sion de  la  rive  gauche  du  Rhin  :  ce  qu'elle  obtint,  fut 
une  concession  purement  gratuite.  C'étaient  les  bâti- 
ments appartenant  à  l'évêché  et  au  chapitre  d'Augs- 
bourg, parmi  lesquels  se  trouvait  la  balance  publique; 
cependant,  d'après  les  dispositions  de  l'article  50,  le 
prince-évêque  dut  conserver  son  palais  épiscopal  sa 
vie  durant.  Indépendamment  de  ces  bâtiments,  la 
ville  eut  ceux  des  abbayes  de  Saint-Ulric  et  Sainte- 
Afra,  des  abbayes  médiates  de  Sainte-Croix  et  de  Saint- 
Georges,  de  quatre  couvents  de  religieux,  de  la  fon- 
dation noble  pour  les  femmes,  dite  de  Sainte-Ursule, 
et  de  trois  couvents  de  femmes.  Tout  ce  que  ces  fon- 
dations possédaient  hors  des  murs  de  la  ville  entra 
dans  le  lot  de  la  Bavière. 

<  La  ville  de  Lubeck,  pour  la  cession  des  villages 
et  hameaux  dépendant  de  son  hôpital  dans  le  Meck- 
lenbourg  :  tout  le  territoire  de  l'évêché  et  grand  cha- 
pitre de  Lubeck  avec  leurs  droits,  bâtiments,  propriétés 
et  revenus  quelconques,  compris  entre  la  Trave,  la 


—  371   ■— 

Baltique,  le  lac  de  Himmelsdorf,  une  ligne  tirée  de  là 
au-dessus  de  Swartau,  à  une  distance  de  cinq  cents 
toises  françaises,  au  moins,  de  la  Trave,  le  Holstein 
danois  et  le  Hanovre. 

((  Quant  aux  parcelles  dépendant  de  la  ville  de  Lu- 
beck  hors  du  territoire  ainsi  déterminé,  et  enclavées 
dans  les  États  du  duc  de  Holstein-Oldenbourg,  il  en 
sera  traité  à  l'amiable.  » 

Lubeck  fut  richement  dédommagée  de  quelques  vil- 
lages que  le  Recès  lui  avait  enlevés  en  faveur  du  duc 
de  Mecklenbourg,  puisqu'elle  obtint,  à  titre  de  compen- 
sation, deux  ou  trois  villages  de  l'évêché  de  Lubeck, 
et  huit  du  chapitre,  avec  les  bâtiments  de  l'évêché. 

Le  6  avril  1 803,  le  duc  d'Oldenbourg  conclut,  ainsi 
que  nous  l'avons  dit*,  àRatisbonne^  avec  les  puis- 
sances médiatrices,  une  convention  particulière  relative 
à  son  indemnisation;  mais  ce  ne  fut  que  le  2  avril 
1 804  que  son  arrangement  définitif  avec  la  ville  de 
Lubeck  fut  signé  à  Eutin.  Les  plénipotentiaires  dans 
cette  négociation  étaient,  de  la  part  du  Duc,  le  conseil- 
ler de  justice  Escheji,  et  le  docteur  BuchhoUz,  syndic 
du  chapitre;  de  la  part  de  la  ville,  les  sénateurs  Rodde 
et  Tesdorpf.  La  convention  est  très-détaillée  et  se  com- 
pose de  quarante  et  un  articles  et  dix  articles  séparés, 
dont  nous  allons  donner  le  sommaire  ^ 

Le  duc  d'Oldenbourg,  prince-évêque  de  Lubeck, 
cède  à  la  ville  le  palais  épiscopal  et  quarante-quatre 
maisons  appartenant  à  l'évêché  ou  au  chapitre,  et  sises 
dans  la  ville,  de  manière  cependant  que  les  chanoines 


*  Voy.  ci-dessus,  p. 299. 

*  Voy.  Polit.  Journal,  1804,  t.  II,  p.  864.  Cette  convention  manque 
dans  le  recueil  primitif  de  M.  de  Martens. 


—  372  — 

et  autres  bénéficiers  en  jouiront  leur  vie  durant. 
Art.  1-3. 

La  part  de  l'évêché  à  la  cathédrale,  avec  la  caisse  de 
la  fabrique,  est  cédée  à  la  ville,  à  la  réserve  des  sé- 
pultures des  évêques  dans  l'église.  Arl.  A. 

Le  culte  catholique  sera  maintenu  dans  l'évêché, 
dans  l'état  où  il  était.  Art.  5.  Pour  l'intelligence  de 
cet  article,  il  faut  savoir  que,  sur  les  trente  chanoines, 
quatre  étaient  catholiques. 

Tous  les  payements  que  la  caisse  du  chapitre  était 
jusqu'à  présent  chargée  de  faire  à  des  fondations  ou 
officiers  de  Lubeck,  cesseront,  en  tant  qu'ils  ne  repo- 
sent pas  sur  des  fondations  particulières.  Art.  1 4  eM  5. 

Le  Duc  cède  à  la  ville  sept  villages  situés  entre  la 
Trave,  la  mer  et  le  lac  Himmelsdorf,  et  rapportant 
cinq  mille  cinq  cent  quatre-vingt-seize  marcs  sept 
schellings  et  demi,  à  condition  que  ces  revenus  soient 
employés  au  contingent  que  la  ville  doit  verser  pour 
le  fonds  de  sustentation.  Art.  16  eH7. 

La  ville  contribuera  au  prorata  au  payement  des 
charges  de  l'évêché  à  l'égard  de  l'Empire  et  du  cercle. 
Art.  21 . 

La  ville  renonce  à  l'établissement  de  la  ligne  dont 
il  est  question  dans  le  Recès.  Art.  22. 

VârV article 2^ f  leDuc  abandonne  àla  ville  plusieurs 
villages  contre  la  restitution,  stipulée  dans  Varticle  24, 
des  mêmes  villages  que  par  l'article  10  le  Duc  lui  avait 
cédés,  et  la  cession  de  quelques  autres. 

L'article  27  du  Recès  fixe  l'indemnité  de  la  ville  de 
Francfort  de  la  manière  suivante  : 

«  La  ville  de  Francfort,  pour  la  cession  de  sa  part 
aux  villages  de  Soden  et  Sultzbach  :  les  chapitres,  ab- 
bayes et  couvents  situés  dans  son  enceinte,  avec  toutes 
leurs  dépendances,  tant  au  dehors  qu'en  dedans  de 


—  373  — 

son  territoire,  et  notamment  Mockstadt,  ainsi  que 
tous  les  biens,  bâtiments,  propriétés  et  revenus  ecclé- 
siastiques compris  dans  ladite  ville  et  ledit  territoire 
(le  Kompostel  excepté),  sous  la  condition  de  servir  une 
rente  perpétuelle  de  vingt-huit  mille  florins  au  comte 
de  Salm-Reiffercheidt-Dyck,  une  de  trois  mille  six  cents 
florins  au  comte  de  Stadion-Warthausen,  et  une  de 
deux  mille  quatre  cents  florins  au  comte  de  Stadion- 
Tannhausen,  lesquelles  rentes  montant  en  tout  à 
trente-quatre  mille  florins,  seront  transférées  dans  la 
suite  sur  l'excédant  du  produit  de  l'octroi  de  naviga- 
tion mentionné  au  paragraphe  39,  si,  après  le  paye- 
ment des  rentes  directement  assignées  sur  ce  produit 
dans  le  présent  acte,  il  se  trouve  un  excédant  suffisant. 
«  Le  commerce  de  Francfort  est  en  outre  affranchi 
de  tous  droits  de  haut  conduit  exercés  ou  prétendus 
par  aucun  des  États  d'Empire.  » 

L'article  12  avait  cédé  au  prince  de  Nassau  les  vil- 
lages de  Soden  et  Sulzbach  :  ils  étaient  immédiats, 
mais  la  ville  de  Francfort  y  formait  des  prétentions 
en  vertu  de  son  droit  de  protection.  En  lui  assignant 
les  chapitres  et  couvents  situés  dans  ses  murs  %  on 
crut  lui  donner  une  si  riche  indemnité  qu'on  la  char- 
gea du  payement  d'une  rente  de  vingt-huit  mille  flo- 
rins au  comte  de  Salm-Reiffercheidt-Dyck,  et  d'une 
autre  de  six  mille  florins  au  comte  de  Stadion;  mais 
l'expérience  prouva  qu'on  s'était  bien  trompé.  Le  Ma- 
gistrat, qui  se  doutait  de  l'erreur^  ne  prit  possession 
de  ces  biens  qu'après  avoir  mis  ses  droits  à  couvert 

'  Ces  chapitres  et  couvents  sont  ;  1  °  le  chapitre  de  Saint-Barthélémy; 
2"  celui  de  Saint-Léonard  ;  3°  celui  de  Notre-Dame-ès-Monts;  i"  le  cou- 
vent des  Dominicains  de  Saint-Frédéric;  5°  celui  des  Dominicaines  de 
Rosenberg,  qui  s'occupent  de  l'éducation  des  filles  ;  6°  un  couvent  de 
Carmes;  7»  la  maison  des  Dames  anglaises,  qui  se  vouent  à  l'éducation. 


—  374  '— 

par  une  protestation.  L'inventaire  qui  en  fut  dressé 
démontra  un  revenu  de  cinquante-neuf  mille  quatre 
cent  soixante-quinze  florins  cinquante-trois  kreutzers; 
mais  les  charges,  pensions,  intérêts,  frais  d'adminis- 
tration et  d'entretien,  frais  de  culte,  etc.,  se  montaient 
à  soixante-six  mille  six  cent  trente-neuf  florins  vingt- 
quatre  kreutzers,  sans  la  rente  de  trente-quatre  mille 
florins.  Ainsi,  loin  d'être  indemnisée  de  ses  droits  sur 
Soden  et  Sulzbach,  la  ville  de  Francfort  voyait  ses 
charges  augmentées;  aussi  refusa-t-elle  de  servir  les 
rentes  des  comtes  de  Salm  et  de  Stadion.  Cependant 
nous  trouvons  que  la  ville  s'arrangea,  en  1 805,  avec 
le  comte  de  Salm-Reiffercheidt-Dyck,  moyennant  une 
somme  qu'elle  lui  paya  une  fois  pour  toutes;  nous 
ignorons  ce  qui  a  été  fait  pour  les  comtes  de  Stadion, 
auxquels  ces  rentes  furent  assignées  en  remplacement 
des  maisons  qu'ils  possédaient  à  Francfort. 

«  Le  territoire  de  Brème  comprend  le  bourg  de  We- 
gesack  avec  dépendances,  le  Grolland,  le  Barkhof,  le 
moulin  de  Hemlingen ,  les  villages  de  Hastede , 
Schwaghausen  et  Wahr,  avec  dépendances,  et  tout  ce 
qui  est  compris  entre  le  Weser,  les  rivières  de  Wumme, 
Leesum,  les  frontières  actuelles  et  une  ligne  à  tirer  de 
Sebaldsbriicke,  par  le  moulin  de  Hemlingen,  jusqu'à 
la  rive  gauche  du  Weser,  avec  tous  les  droits,  bâti- 
ments, propriétés  et  revenus  quelconques  dépendant 
du  duché  et  du  grand  chapitre  de  Brème,  et  en  général 
de  l'électeur  de  Brunswic-Lunebourg ,  dans  ladite 
ville  et  son  territoire. 

{(  Pour  mettre  le  commerce  de  Brème  et  la  naviga- 
tion du  bas  Weser  à  l'abri  de  toute  entrave,  le  péage 
d'Elsfleth  est  supprimé  à  perpétuité,  sans  pouvoir  être 
rétabli  sous  aucun  prétexte  ou  dénomination  quel- 
conque ;  et  les  vaisseaux  ou  bâtiments,  et  les  mar- 


—  375  — 

chandises  qu'ils  transportent,  soit  en  montant  ladite 
rivière,  soit  en  la  descendant,  ne  pourront  être  arrêtés 
ni  empêchés  sous  quelque  prétexte  que  ce  soit.  » 

L'augmentation  de  territoire  que  ces  dispositions 
assuraient  à  la  ville  de  Brème,  était  prise  sur  le  terri- 
toire du  duché  de  Brème  ou  de  l'électorat  de  Brunswic, 
qui  en  avait  été  indemnisé  par  le  paragraphe  4.  Parmi 
les  droits  que  l'électeur  de  Brunswic-Lunebourg  exer- 
çait dans  la  ville  de  Brème,  le  principal  était  celui  de 
nommer  le  chef  de  la  justice  criminelle,  qui  portait  le 
titre  de  Stadtvogt.  La  cathédrale  lui  appartenait  avec 
le  gymnase,  deux  cents  maisons  et  une  maison  d'or- 
phelins. Ces  domaines  passèrent  par  le  Recès  à  la  ville 
de  Brème;  mais  un  avantage  beaucoup  plus  grand 
que  cet  acte  lui  assurait,  était  la  suppression  du  péage 
d'Elsfleth.  Sans  parler  de  la  perte  de  temps  qu'éprou- 
vaient les  bâtiments  en  faisant  halte  à  cet  endroit,  le 
commerce  de  Brème  gagnait  par  cette  suppression  une 
somme  annuelle  de  cent  cinquante  mille  florins.  Nous 
avons  déjà  dit  que,  par  la  convention  du  6  avril  1803, 
le  péage  dut  encore  être  maintenu  pendant  douze  ans. 

«  La  ville  de,  Hambourg  a  à  sa  disposition  tous  les 
droits,  bâtiments,  propriétés  et  revenus  du  duché  de 
Brème  et  de  son  grand  chapitre,  et  en  général  de  l'é- 
lecteur de  Brunswic-Lunebourg,  situés  dans  son  en- 
ceinte et  dans  son  territoire.  » 

L'électeur  de  Brunswic-Lunebourg  était  regardé 
comme  le  propriétaire  de  la  cathédrale  de  Hambourg; 
il  nommait  aux  canonicats  qui  devenaient  vacants 
dans  les  mois  de  janvier,  mars,  mai,  juillet,  septem- 
bre, novembre,  le  grand  chapitre  nommait  aux  autres. 
Ce  dernier  possédait  dans  la  ville  quelques  maisons  de 
peu  de  rapport. 


^'  376  — 

Le  Recès  dépouilla  l'électeur  de  Brunswic  de  tout 
ce  qu'il  possédait  à  Hambourg;  mais  il  ne  parla  pas 
des  droits  que  le  roi  de  Danemark  exerçait,  comme 
duc  de  Holstein,  sur  le  chapitre  de  Hambourg.  Comme 
le  Roi  ne  voulut  pas  y  renoncer  gratuitement,  il  fut 
conclu,  le  21  avril  1803,  àHambourgy  une  conven- 
tion entre  le  baron  à'Eyben,  ministre  de  Danemark 
accrédité  auprès  du  cercle  de  basse  Saxe,  et  le  baron 
de  Brockdorf,  chancelier  de  la  régence  de  Gluckstadt, 
au  nom  du  Roi;  le  syndic  Doormann  et  le  sénateur 
Schulte,  au  nom  de  la  ville  ^ 

Le  Roi  renonce,  par  V article  \,  à  tous  les  droits 
quelconques  qu'il  avait  sur  le  chapitre  de  Hambourg. 

Il  se  charge  de  la  sustentation  des  prébendiers  qui 
avaient  été  nommés  par  le  Danemark.  Art.  2. 

La  ville  renonce  aux  villages  de  Poppenbiittel  et 
Spitzendorf,  appartenant  au  chapitre  sous  la  supério- 
rité territoriale  du  Roi,  comme  duc  de  Holstein  et  sei- 
gneur de  Pinneberg.  Art.  3. 

Elle  renonce  également  à  tous  les  revenus  que  le 
chapitre  tirait  des  États  allemands  du  Roi.  Art.  4. 

Elle  cède  au  Roi  le  village  de  Bilsen,  appartenant 
au  couvent  de  Saint-Jean  à  Hambourg,  et  la  part  du 
village  de  Boisbûttel  qui  avait  appartenu  à  la  ville. 
Art.  5. 

Le  Roi  renonce  à  la  supériorité  territoriale  sur  le 
village  hambourgeois  d'Alsterdorff.  Art.  6. 

Nous  devons  encore  ajouter  une  observation  géné- 
rale qui  est  nécessaire  pour  l'intelligence  de  ce  qui  a 
été  dit  aux  articles  de  Brème  et  de  Hambourg.  L'arche- 
vêché de  Hambourg  fut  fondé  en  834,  et  saint  Ans- 
gaire  fut  le  premier  prélat  qui  occupa  ce  siège  ;  mais 


'  Polit.  Joum.,  4803,  t.  II,  p.  4082.  Celte  convention  ne  se  trouve 
pas  dans  le  Recueil  de  M.  Martens. 


—  377  — 

les  incursions  réitérées  des  peuples  païens  des  envi- 
rons forcèrent  les  archevêques  à  transférer  leur  siège 
à  Brème.  Il  en  résulta  des  discussions  entre  les  cathé- 
drales des  deux  villes;  on  les  termina  en  1223,  par  un 
arrangement  qui  fixa  à  Brème  le  siège  de  l'archevêché, 
en  conservant  toutefois  le  grand  chapitre  de  Ham- 
bourg. L'archevêché  de  Brème  fut  donné,  par  la  paix 
de  Wesphalie,  à  la  couronne  de  Suède,  à  titre  de  du- 
ché séculier;  cette  cession  comprenait  les  droits  que  les 
archevêques  avaient  exercés  sur  le  chapitre  de  Ham- 
bourg, mais  elle  réserva  ceux  de  la  ville,  du  duc  de 
Holstein  et  du  chapitre  même.  Il  s'ensuivit  que  ce  cha- 
pitre fut  conservé,  ainsi  que  celui  de  Brème.  Avec  le 
duché  de  Brème  les  deux  chapitres  passèrent  sous  la 
domination  de  la  maison  de  Brunswic-Lunebourg. 
Ils  ne  furent  supprimés  que  par  le  Recès  de  1803. 

Le  paragraphe  27  de  ce  Recès  se  termine  ainsi  qu'il 
suit. 

((  Quant  à  la  fixation  du  territoire  de  Nuremberg, 
elle  est  remise  à  des  transactions  ultérieures. 

«  Les  six  villes  ci-dessus  nommées  ne  peuvent  per- 
mettre de  recrutement  militaire  dans  leur  enceinte  et 
dans  leur  territoire,  que  pour  les  États  de  l'Empire. 

«  Les  Electeurs  et  princes  auxquels  des  villes 
impériales  tombent  en  partage  comme  indemnité, 
traiteront  ces  villes,  par  rapport  à  leur  constitution 
municipale  et  à  leur  propriété,  sur  le  même  pied  que 
les  villes  les  plus  privilégiées  comparativement  de 
chaque  pays,  autant  que  l'organisation  dudit  pays  et 
les  dispositions  nécessaires  pour  le  bien  général  le 
permettront.  Il  leur  est  assuré  en  particulier  le  libre 
exercice  de  leur  religion  et  la  possession  paisible  de 
tous  leurs  biens  et  revenus  consacrés  à  des  usages 
pieux  ou  de  bienfaisance. 


—  378  — 

S  28. 

«  Les  indemnités  qui  pourraient  être  dues  à  au- 
cuns des  membres  de  l'ordre  équestre,  seront^  à  Tins 
tar  du  complément  des  indemnités  des  comtes  d'Em- 
pire, et  en  tant  qu'il  n'y  serait  pas  pourvu  par  la  levée 
future  du  séquestre^  assignées  sur  les  revenus  qui 
pourront  être  ultérieurement  disponibles,  et  dans  des 
proportions  relatives  à  leurs  prétentions  légitimes.  » 

Nous  avons  déjà  dit  que  les  promesses  renfermées 
dans  ce  paragraphe  étaient  illusoires,  puisqu'il  ne 
restait  plus  de  revenus  disponibles. 

§  29. 

«  La  République  helvétique,  en  compensation  de 
ses  droits  et  prétentions  sur  les  possessions  situées  en 
Souabe,  dépendantes  de  ses  établissements  ecclésiasti- 
ques, desquels  il  a  été  disposé  par  les  articles  précé- 
dents, reçoit  l'évêché  de  Coire,  en  pourvoyant  à  l'en- 
tretien de  l'évêque,  du  chapitre  et  de  leurs  officiers; 
plus,  la  seigneurie  de  Trasp.  Elle  est  en  outre  autori- 
sée à  racheter,  au  moyen  de  rentes  perpétuelles  équi- 
valentes au  produit  net,  remboursables  au  taux  établi 
par  les  lois  helvétiques,  ou  de  tel  arrangement  dont 
elle  pourra  convenir  avec  les  parties  intéressés,  tous 
les  droits  quelconques,  dîmes,  domaines,  propriétés 
et  revenus  appartenant,  soit  à  l'Empereur,  aux  princes 
et  États  d'Empire,  soit  aux  établissements  ecclésiasti- 
ques sécularisés,  seigneurs  et  particuliers  étrangers 
dans  toute  l'étendue  du  territoire  helvétique. 

((  Les  sécularisations  que  ladite  République  pour- 
rait faire  chez  elle  auront  lieu  sans  perte  et  préjudice 
des  dépendances  en  Empire  de  ses  établissements  re- 
ligieux, sauf  ce  dont  il  a  été  disposé;  et  la  réciprocité 


—  379  — 

a  été  stipulée  pour  les  dépendances,  en  Helvétie,  des 
établissements  religieux  d'Empire.  Toute  juridiction 
d'un  prince,  Etat  ou  membre  de  l'Empire,  cessera 
désormais  dans  l'étendue  du  territoire  helvétique, 
ainsi  que  toute  suzeraineté  et  tous  droits  purement  ho- 
norifiques; et  la  même  chose  a  lieu  à  l'égard  des  pos- 
sessions helvétiques  situées  dans  l'Empire  germani- 
que. » 

Le  Recès  avait  disposé  de  quelques  domaines  ap- 
partenant à  l'abbaye  de  Mûri  et  à  celle  de  Saint-Gall; 
savoir  :  du  village  de  Durenmestetten,  de  la  seigneurie 
de  Glatt,  et  de  celle  de  Neu-Ravensbourg.  On  en  in- 
demnisa, non  ces  chapitres,  mais  la  République  hel- 
vétique, parce  qu'on  supposait  qu'elle  supprimerait 
toutes  ces  fondations. 

S  30. 

«  Toutes  les  rentes  perpétuelles  établies  par  les  ar- 
ticles précédents  seront  perpétuellement  rachetables 
au  denier  quarante,  sauf  tout  autre  arrangement,  dont 
les  parties  intéressées  conviendront  de  gré  à  gré.  L'é- 
chéance de  ces  rentes  perpétuelles  est  fixée  au  V  dé- 
cembre de  chaque  année. 

((  Le  payement  s'effectue  sur  le  pied  de  vingt-quatre 
florins  au  marc,  en  bonne  monnaie  courante  d'argent.  » 

§31. 

((  La  dignité  électorale  est  accordée  à  l'Archiduc 
Grand-Duc.  Elle  est  accordée  également  au  margrave 
de  Bade,  au  duc  de  Wurtemberg  et  au  landgrave 
de  Hesse-Cassel,  qui,  pour  le  rang,  alterneront  entre 
eux  d'après  les  strophes  établies  au  collège  des  Prin- 
ces, et,  pour  leur  introduction,  observeront  les  forma- 
lités d'usage.  A  l'extinction  de  la  maison  de  Hesse- 


—  380  — 

Cassel,  le  titre  électoral  passera  à  la  maison  de  Hesse- 
Darmstadt.  » 

Les  deux  premiers  plans  et  le  premier  conclusum 
général  ne  parlent  que  de  trois  nouveaux  Électeurs , 
Bade,  Wurtemberg  et  Hesse-Cassel.  Après  la  conven- 
tion du  26  décembre  1802,  on  y  ajouta  le  grand-duc 
de  Toscane,  comme  premier  en  rang;  de  manière  que 
dorénavant  le  collège  électoral  se  composait  de  quatre 
Électeurs  catholiques  :  l'Archichancelier,  la  Bohême, 
la  Bavière  et  le  Salzbourg,  et  de  six  protestants:  la 
Saxe,  le  Brandebourg,  Brunswic-Lunebourg  et  les 
trois  nouveaux  qui  deva.ient  alterner  pour  le  rang.  La 
dignité  électorale  avait  aussi  été  demandée  dans  le 
cours  des  négociations,  pour  le  grand-maître  de  l'Ordre 
Teutonique,  et,  après  la  rédaction  du  Recès,  pour  le 
duc  de  Mecklenbourg-Schwerin. 

Cette  dernière  proposition  fut  présentée  dans  une 
Note  que  les  ministres  médiateurs  transmirent  à  la 
Députation,  le  6  mai  1803,  trois  jours  avant  sa  disso- 
lution. L'empereur  Alexandre  demanda  cette  dignité 
pour  son  allié ,  en  motivant  son  désir  d'une  manière 
qui  n'aurait  pas  manqué  son  effet ,  si  la  Députation 
avait  encore  eu  le  temps  de  délibérer  sur  cet  objet. 
L'Empereur,  auquel  l'histoire  rendra  la  justice,  que, 
dans  toute  cette  négociation,  il  n'a  été  dirigé  que  par 
des  considérations  de  l'intérêt  le  plus  élevé,  par  le  seul 
désir  de  pacifier  le  monde  et  de  diminuer  l'influence  du 
chef  de  la  France,  déclara  qu'il  regardait  l'accomplisse- 
ment de  ce  vœu  comme  le  prix  de  sa  sollicitude  pour  le 
bonheur  et  la  tranquillité  de  l'Allemagne.  Il  ajouta  que  le 
chef  de  la  maison  de  Mecklenbourg-Schwerin  ferait, 
à  cet  effet,  les  démarches  requises  par  les  lois  et  les 
usages. 

En  nommant  quatre  nouveaux  Électeurs,  et  parmi 
eux  un  seul  catholique ,  non-seulement  la  proportion 


—  381  — 

qui  avait  eu  lieu  jusqu'alors  dans  le  collège  électoral, 
par  rapport  à  la  religion ,  fut  dérangée ,  mais  les  pro- 
testants obtinrent  même  une  prépondérance  dont 
l'histoire  n'avait  offert  qu'un  seul  exemple ,  dans  les 
années  1 543  à  1 584.  A  cette  époque,  où  l'électeur  de 
Bohême  ne  prenait  pas  encore  part  aux  délibérations 
de  la  Diète ,  non-seulement  les  trois  autres  Électeurs 
séculiers  étaient  protestants,  mais  parmi  les  Électeurs 
ecclésiastiques  il  y  en  avait  même  un  qui  professait  le 
culte  luthérien;  c'était  Guebhard  TruchsesSf  électeur 
de  Cologne. 

Parmi  les  dix  Électeurs  de  1803,  six  étaient  pro- 
testants, savoir:  la  Saxe  *,  le  Brandebourg,  l'élec- 
teur de  Brunswic-Lunebourg,  celui  de  Bade,  celui 
de  Wurtemberg  et  celui  de  Hesse-Cassel.  Cependant 
nous  verrons  que  l'Empereur  ne  fit  aucune  difficulté 
de  ratifier  cet  article  du  Recès. 

Pour  apprécier  la  modération  dont  le  Cabinet  de 
Vienne  a  fait  preuve  en  cette  occasion,  on  doit  se  re- 
porter à  l'époque  dont  l'histoire  nous  occupe.  Grâce 
aux  secousses  violentes  que  l'Europe  avait  éprouvées 
depuis  1 789,  on  avait  parcouru  en  treize  années  un 
demi-siècle;  si  l'expérience  avait  prouvé  la  vanité  de 
ces  théories  politiques,  auxquelles  alors  on  attachait 
tant  de  prix,  elle  avait  aussi  renversé  les  barrières 
qu'une  malheureuse  division  religieuse  avait  placées, 
non-seulement  entre  les  nations ,  mais  aussi  entre  les 
citoyens  d'un  même  pays.  Le  sang  de  nos  frères,  qui  a 
coulé  à  grands  flots,  a  chèrement  payé  cet  avantage. 

Le  paragraphe  31  dit  que  les  nouveaux  Électeurs 
observeront,  pour  leur  introduction,  les  formalités 
d'usage.  Nous  voyons,  par  le  décret  de  commis- 
sion de  l'Empereur,  du  13  août  1803,   dont  il  sera 

'  Quoique  l'Électeur,  de  sa  personne  ,  fût  catholique,  son  ministère 
était  protestant  et  dirigeait  le  corps  évangélique. 


—  382  — 

question  plus  tard,  ce  que  la  Cour  impériale  enten- 
dait par  les  formalités  d'usage.  Il  fallait,  1"  déter- 
miner la  portion  de  territoire  à  laquelle  la  dignité 
électorale  devait  être  affectée.  D'après  la  constitution 
de  la  Bulle  d'Or,  cette  dignité  passait  nécessairement 
et  sans  division  à  la  primogéniture,  tandis  que  cet 
ordre  de  succession,  quoique  devenu  à  peu  près  général 
en  Allemagne,  n'était  pourtant  pas  constitutionnel,  et 
n'y  avait  guère  été  introduit  que  par  des  pactes  ou  des 
statuts  de  famille;  2"  il  fallait  être  revêtu  d'un  archi- 
office,  et  le  même  décret  de  commission,  du  13  août, 
nous  apprend  que  l'Empereur  ne  se  croyait  pas  autorisé 
à  le  conférer  de  son  propre  mouvement;  3"  il  fallait 
avoir  reçu  l'investiture  du  chef  de  l'Empire ,  source 
unique  de  toutes  les  dignités;  enfin,  4"  il  fallait  se 
charger  du  payement  d'une  part  proportionnée  des 
contributions  pour  l'Empire  et  les  cercles,  et  con- 
courir dans  la  même  proportion  à  l'entretien  de  la 
Chambre  impériale.  A  ces  quatre  obligations  il  faut 
encore  ajouter  celle  de  payer,  une  fois  pour  toutes,  une 
taxe  à  la  chancellerie  impériale. 

S  32. 

Ce  paragraphe  traite  des  nouveaux  votes  virils  au 
collège  des  Princes  à  la  Diète,  et  remplace  le  para- 
graphe 7  du  premier  plan,  qui  dit  simplement  : 

«  Que  les  princes  de  Nassau-Usingen,  Nassau- Weil- 
bourg,  Salm-Salm,  Salm-Kyrbourg,  Linange,  Arenberg, 
seront  maintenus  ou  introduits  au  collège  des  Princes, 
chacun  avec  un  vote  viril,  affecté  aux  possessions 
qu'ils  recevront  en  indemnité  de  leurs  anciennes  terres 
immédiates;  que  les  votes  des  comtes  immédiats 
d'Empire  seront  pareillement  transférés  sur  les  terres 
qu'ils  recevront  en  dédommagement,  et  que  les  votes 


—  383  — 

ecclésiastiques  seront  exercés  par  les  princes  et  com- 
tes qui,  par  l'effet  du  traité  de  Lunéville,  se  trouveront 
en  possession  des  chefs-lieux,  n 

Le  second  plan  proposa  de  plus  de  nouveaux  votes 
pour  le  Brandebourg,  Hesse-Cassel,  Hesse-Darmstadt 
et  Solms-Braunfels,  et  le  premier  conclusum  annonça 
encore  un  supplément.  Il  en  résulta  la  rédaction  sui- 
vante : 

.  De  nouveaux  votes  virils  au  collège  des  Princes  sont 
accordés,  savoir  : 

votes. 

A  l'Empereur,  comme  archiduc  d'Autriche:  pour  la  Styrie,  1  ; 
pour  la  Carniole^  1  ;  pour  la  Carinthie,  \  ;  pour  le  ïyrol,1  ; 
total 4 

A  l'Électeur  palatin,  comme  duc  de  Bavière:  pour  le  duché  de 
Berg,  1  ;  pour  Sulzbach,  \  ;  pour  la  basse  Bavière,  1  ;  pour 
Mindelheim,  1  ;  total 4 

Au  roi  de  Prusse,  comme  duc  de  Magdebourg  :  pour  Erfurth,  'I; 
pour  l'Eichsfeld,  1  ;  total 2 

A  l'Électeur-Archichancelier  :  pour  la  principauté  d'Aschaffen- 
bourg,  4  ;  ci 4 

A  l'électeur  de  Saxe,  comme  margrave  de  Misnie:  pour  le  mar- 
graviat de  Misnie,  1  ;  pour  le  bourgraviat  de  Misnie,  1  ;  pour 
Querfurlh ,  1  ;  total 3    ' 

Au  même,  alternativement  avec  Saxe-Weimar  et  Saxe-Gotha: 
pour  la  Thuringe,  1  ;  ci 1 

Au  roi  d'Angleterre,  comme  duc  de  Brème:  pour  Gœttingen,  1  ; 
ci i\ 

Au  duc  de  Brunswic-Wolfenbiittel  :  pour  Blankenbourg,  1;  ci.       i 

Au  margrave  de  Bade  :  pour  Bruchsal,  au  lieu  de  Spire,  4  ;  pour 
Ettenheim,  au  lieu  de  Strasbourg,  1  ;  total 2 

Au  duc  de  Wurtemberg  :  pour  Teck,  1  ;  pour  Zwiefalten,,  1  ; 
pour  TUbingen,  \  ;  total 3 

Au  roi  de  Danemark,  comme  duc  de  Holstein  :  pour  Plœn,  4;  ci.       1 

Au  landgrave  de  Hesse-Darmstadt  :  pour  le  duché  de  Westpha- 
Ue,  1  ;  pour  Starckenbourg,  I  ;  total ; 2 

Au  landgrave  de  Hesse-Ga3?el  :  pour  Fritzlar,  1;  pour  Hanau,  1; 
total 2 

Au  duc  deModène  :  pour  le  Brisgau,  1  ;  pour  l'Ortenau,  i  ;  total.       2 

Au  duc  de  Mecklenbourg-Strélitz  :  pour  Stargard,  1  ;  ci i 

Au  duc  d'Arenberg,  le  vote  qu'il  exerçait  précédemment,  trans- 
porté sur  ses  possessions  à  la  rive  droite  du  Rhin 4 


—  384  — 

Au  prince  de  Salm-Salm,  à  lui  seul  le  vote  qui  était  précédem- 
ment en  commun  avec  Salm-Kyrbourg,  ci 

Au  prince  deNassau-Usingen,  1;  ci 

Au  prince  de  Nassau -Weil bourg,  1  ;  ci 

Au  prince  de  Hohenlohe-Sigmaringen,  1  ;  ci 

Au  prince  de  Salm-Kyrbourg,  1  ;  ci 

Au  prince  de  FUrstenberg  :  pour  Baar  et  Stuhlingen,  \;  ci 

Au  prince  Schwarzenberg  :  pour  Kletfgau,  1  ;  ci 

Au  prince  de  La  Tour  et  Taxis  :  pour  Bucliau,  1  ;  ci 

Au  prince  de  Waldeck,  i;  ci 

Au  prince  de  Lœwenstein-Wertheim,  1;  ci 

Au  prince  d'Oettingen-Spielberg ,  1  ;  ci 

Au  prince  d'Oeltingen-Wallersteiii,  i;  ci 

Au  prince  de  Solms-Braunfels,  i;  ci 

Au  prince  de  Hohenlohe-Neuenstein,  1  ;  ci 

Au  prince  deHuhenlohe-Waldenbourg-Schiliingsrdrst,  1;  ci 

Au  prince  de  Hohenlohe-Waldenbourg-Bartenstein,  i  ;  ci 

Ati  prince  d'Isembourg-Birstein,  1  ;  ci 

Au  prince  de  Kaunitz  :  pour  Ritlberg,  1  ;  ci 

Au  prince  de  Reuss-Plauen-Graiz,  i  ;  ci 

Au  prince  de  Linange,  4  ;  ci 

Au  prince  de  Ligne  :  pour  Edelstetten,  1  ;  ci 

Au  duc  de  Looz  :  pour  Wolbeck,  4  ;  ci 

Le  commencement  de  ce  paragraphe  dit  :  De  nou- 
veaux votes  virils  au  collège  des  Princes  sont  accor- 
dés, etc.;  ensuite  il  fait  le  dénombrement  de  cin- 
quante-cinq votes  ;  mais  cette  rédaction  a  quelque  chose 
d'inexact,  car,  parmi  ces  cinquante-cinq  votes,  il  n'y 
en  avait  véritablement  que  cinquante  et  un  nouveaux, 
puisque  ceux  de  Bruchsal,  d'Ettenheim  et  d'Arenberg 
remplaçaient  trois  anciens  suffrages,  et  que  celui  de 
Salm-Salm  était  également  ancien. 

Le  paragraphe  continue  ainsi  : 


«  L'ordre  d'appel  des  votes,  tant  anciens  que  nou- 
veaux, au  collège  des  Princes  de  l'Empire,  est 
déterminé,  d'après  la  dixième  strophe,  de  la  manière 
suivante  : 


—  385 


1.  Autriche*. 

2.  Bavière  [haute]  *. 

3.  Styrie*. 

4.  Magdebourg. 

5.  Salzbourg*. 

6.  Bavière  [basse]*. 

7.  iîaiîs6onne*. 

8.  Sulzbach*. 

9.  Ordre  Teutonique*. 

10.  Neubourg*. 

11.  Bamberg*. 

12.  Bremen. 

13.  Margraviat  de  Misnie. 

14.  Duc/ie  de  Berg*. 

15.  WUrzbourg*. 

16.  Carinthie*. 

17.  Eichstett*. 

18.  Saxe-Cobourg. 

19.  Bruchsal. 

20.  Saxe-Gotha. 

21.  Ettenheim. 

22.  Saxe-Altenbourg. 

23.  Constance. 

24.  Saxe-Weimar. 

25.  Augsbourg*. 

26.  Saxe-Eisenach. 

27.  Hildesheim. 

28.  Brandebourg- Anspach. 

29.  Paderborn. 

30.  Brandebourg-Bayreuth. 

31.  Freisingen*. 

32.  Wolfenbuttel. 

33.  Landgraviat  de  Thuringe. 

34.  Brunsvnc-Zell. 

35.  Passoit*. 

36.  Brunsicic-Calemberg. 

37.  ^Trente*. 

38.  Brunswic-Grubenhagen. 

39.  Brixen*. 

40.  Halberstadt. 

41.  Carniole*. 

42.  Bade-Bade. 

43.  Wurtemberg-Teck. 

44.  Bade-Durlach. 

VII 


45.  Osnabriick. 

46.  Fercien. 

47.  Munster. 

48.  Bade-Hochberg. 

49.  Lubeck. 

50 .  Wurtemberg. 

51.  Hanau. 

52.  Holstein-Gliickstadt. 

53.  Fulde. 

54.  Holstein-Oldenbourg. 

55.  Kempten*. 

56.  Mecklenbourg-Schwerin. 

57.  Elivangen. 

58.  Mecklenbourg-Gustrow. 

59.  Ordre  de  Malte*. 

60.  Hesse-Darmstadt. 

61 .  Berchtolsgaden* . 

62.  Hesse-Cassel. 

63.  Westphalie. 

64.  Poméranie  citérieure. 

65.  Holstein-Plœn. 

66.  Poméranie  ultérieure. 

67.  Brisgau*. 

68.  Saxe-Lauenbourg. 

69.  Corvey. 

70.  Minden. 

71 .  Bourgraviat  de  Misnie. 

72.  Leuchtenberg* . 

73.  Anhalt. 

74.  Saxe-Henneberg. 

75.  Schwerin. 

76.  Camin. 

77.  Ratzebourg. 

78.  Hirschfeld. 

79.  Tt/ror. 

80.  Tiibingen. 

81 .  Querfurth. 

82.  Arenberg*. 

83.  Hohenzollern-Hechingen' 

84.  Fritzlar. 

85.  Lobkowitz*. 

86.  Salm-Salm*. 

87.  Dietrichstein*. 

88.  Nassau-Hadamar. 

26 


—  386 


89. 

Ztviefalten. 

112. 

Schwgrtzenberg-Klettgau  *. 

90. 
91, 
92. 
93. 
94. 
95. 
96. 
97. 

Nassau-Dillenbourg. 

Auersberg*. 

Starkenbourg. 

Ostfrise. 

FUrstenberg*. 

Schwarzenberg*. 

Gottingen. 

Mindelheim  *. 

113. 
114. 
115. 

La  Tour  et  Taxis,  Buchau*. 
Waldeck. 
Lœwenstein-Werlheim  *, 

116. 
117. 
118. 
119. 

Oettingen-Spielberg*. 
Oettingen-Wallerstein  *. 
Solms-Braunfels. 
Hohenlohe-Neuenstein. 

98. 

Lichtenstein  *• 

120. 

Hohenlohe  -  Waldenbourg- 

99. 

La  Tour  et  Taxis*. 

Schillingsfiirst*. 

100. 

Schwarzbourg. 

121. 

Hohenlohe  -  Waldenbourg- 

101. 

Ortenau*. 

Bartetisteift*. 

102. 

Aschaffenbourg  *. 

122. 

Isembourg-Birstein . 

103. 
104. 
105. 
106. 
107. 
108. 
109. 

Eichsfeld. 

Blankenbourg. 

Stargard. 

Erfurth. 

Nassau-Usingen. 

Nassau-Weilbourg. 

HohenzoUern-Sigmaringen*. 

123. 
124. 
425. 
126. 

127. 
128. 

Kaunitz-Rittberg*. 

Reuss-Plaueû-GrâiZ, 

Linange. 

Ligne*. 

Looz*. 

Comtes  de  Souabe*. 

110. 

Salm-Kyrbourg*. 

129. 

Comtes  de  Wettéravie. 

111. 

FUrstenberg-Baar  et  Stuhlin- 

130. 

Comtes  de  Franconie. 

gen** 

131. 

Comtes  de  WestphaUe. 

«  Le  Directoire  du  collège  des  Princes  reste  comme 
il  était  précédemment. 

((  Les  alternats  qui  ont  eu  lieu  jusqu'à  présent  con- 
tinueront à  être  observés,  et  les  différentes  maisons, 
ainsi  que  les  branches  de  la  même  maison,  convien- 
dront entre  elles  des  alternats  nouveaux. 

((  11  n'est  rien  changé,  par  l'appel  des  Votes,  à  l'élé- 
vation ou  à  l'égalité  du  rang  des  princes  entre  eux,  et 
les  droits  de  chacun  sont  réservés. 

((  Les  votes  des  principautés  sécularisées  sont  main- 
tenus à  leur  ancienne  place,  de  manière  que  les  latera 
puissent  être  conservés  aussi  longtemps  que  le  collège 
le  jugera  utile. 

«  Les  princes  qui  ont  à  exercer  des  votes  affectés 
aux  États  ci-devant  ecclésiastiques ,  qui  leur   sont 


—  387  — 

donnés  en  indemnité ,  n'acquièrent  point  par  là  des 
titres  à  un  rang  plus  élevé  que  celui  qu'ils  avaient 
précédemment. 

{(  Les  princes  qui  reçoivent  de  nouveaux  votes  en 
remplacement  des  votes  perdus,  conservent  le  rang 
des  anciens. 

«  Les  neuf  autres  strophes  seront  arrangées  d'après 
la  dixième,  qui  a  servi  de  base  pour  l'ordre  établi  ci- 
dessus. 

Dans  ces  cent  trente  et  une  voix,  on  ne  voit  plus 
les  voix  curiales  qu'avaient  possédées  auparavant  les 
prélats  supprimés.  Il  faut  encore  faire  deux  autres 
observations.  Des  cent  trente  et  une  voix,  soixante- 
quatre*,  ou  en  certain  cas  soixante-six,  et  ainsi  la 
majorité,  appartenaient  aux  Électeurs  ;  ce  qui  donnait 
à  ces  princes  une  telle  prépondérance,  que  désormais 
les  délibérations  des  simples  princes  devenaient  pres- 
que inutiles.  Voici  la  distribution  de  ces  voix  : 

voix. 

A  l'Archichancelier,  les  numéros  7  et  i  02 2 

A  la  Bohême  :  1,  3,  16,  37,  39,  41,  79 7 

A  la  Bavière  :  2,  6,  8,  40,  1i,  44,  45,  25,  31,  35,  55,72,  97..*  13 

A  la  Saxe:  13,74,  84 3 

Au  Brandebourg  :  4,  27,  28,  29,  30,  40,  47,  66,  70,  76,  93,  403, 

406 43 

A  Brunswic-Lunebourg  :  12,  34,  36,  38,  45,  46,  68,  96 8 

A  Salzbourg  :  5,  17,  64 3 

A  Bade  :  19,  24,  23,  42,  44,  48 6 

Au  Wurtemberg  :  43,  50,  57,  80,  89 5 

A  la  Hesse  :  51,  62,  78,  84 :  4 

61 

Les  soixante-cinquième  et  soixante -sixième  voix 
électorales  ne  l'étaient  pas  constamment;  ce  sont  celles 
qui ,  dans  le  tableau  ci-dessus ,  portent  les  n°'  33  et 
74,  et  la  dénomination  deThuringe  et  de  Saxe-Henne- 

'  Ces  soixante-quatre  noms  sont  imprimés  en  italique,  p.  385  et  386. 


—  388  — 

berg.  L'Électeur  et  les  Ducs  de  Saxe  jouissaient  alter- 
nativement de  ces  voix. 

La  seconde  observation  est  relative  à  la  proposition 
dans  laquelle  les  catholiques  et  les  protestants  devaient, 
d'après  le  Recès,  prendre  part  aux  délibérations  du 
collège  des  Princes.  Avant  le  Recès  de  la  Députation , 
le  collège  des  Princes  se  composait  en  tout  de  quatre- 
vingt-dix-neuf  voix,  savoir  : 

Princes  catholiques,  y  compris  la  voix  curiale  des  comtes  du  ^'oix* 

banc  de  Souabe  * 52 

Princes  prolestants,  y  compris  les  comtes  de  Wettéravie  et  de 

Franconie,  avec  deux  voix  curiales 45 

Auxquelles  il  faut  ajouter  les  voix  d'Osnabriick  et  des  comtes  de 

Westphalie,  que  les  deux  parties  possédaient  alternativement.  2 

"  99 

Il  s'ensuit  que,  dans  le  cas  le  plus  défavorable,  les 
catholiques  formaient  la  majorité  absolue,  et  qu'il 
pouvait  arriver  que  la  majorité  relative  fût  de  neuf 
voix.  Il  en  était  tout  autrement  ordonné  dans  le  Recès. 
Cette  loi  accordait  : 

voix. 

Aux  catholiques  * 53 

Aux  protestants 77 

Auxquelles  il  faut  ajouter  la  voix  des  comtes  westphaliens,  qui 

demeura  alternative 4 

431 

Par  conséquent  la  forte  majorité  était  acquise  au 
parti  protestant.  Cette  circonstance  était  d'autant  plus 
préjudiciable  à  l'autorité  impériale ,  que  le  chef  de 
l'Empire  avait  toujours  eu  la  plus  grande  influence 
sur  les  décisions  du  second  collège.  Aussi  les  ministres 
de  la  Cour  de  Vienne  n'avaient-ils  cessé  de  réclamer 

'  Mais  à  l'exclusion  des  ducs  de  Savoie  et  des  archevêques  de  Besan- 
çon, qui  ne  votaient  plus  depuis  longtemps,  bien  qu'ils  fussent  compris 
dans  la  matricule. 

*  Nous  les  avons  distingués  des  voix  protestantes  par  un  astérisque. 


—  389  — 

au  moins  la  parité  entre  les  protestants  et  les  catho- 
liques \ 

'  Voici  une  liste  qui  avait  été  proposée  de  la  part  d'un  ministre  d'Au- 
triche. 

Votes  catholiques. 

Autriche:  pour  Autriche,  Styrie,  Carinthie,  Carniole,  Gorice, 

Gradisca,  Tyrol,  Feldkirch,  Bregenz,  Piudenzet  Sonnenberg.  10 
Sazbourg  :  pour  Salzbourg,  Trente,  Brixen,  Berchtolsgaden, 

Gurk,  Chiemsee,  Sekau,  Lavant 8 

Bavière  :   pour  haute  et  basse  Bavière,  haut  Palatinat,  Neu- 
bourg,  Bamberg,  Wiirzbourg,  Augsbourg,  Passau,  Freysing, 

Kempten,  Eichstett,  Leuchtenberg 42 

Grand-maître  de  l'Ordre  Teiitonique 1 

Archichancelier  :  Ratisbonne ,  Aschaffenbourg,  Wetzlar 3 

Ordre  de  Saint-Jean  :  Grand  prieuré,  Bondorff 2 

Arenberg 4 

HohenzoUern-Hechingen i 

Hohenzollern-Sigmaringen H 

Lobkowitz 4 

Salm-Salm i 

Salm-Kyrbourg 1 

Dietrichstein i 

Auersberg 4 

Fiirstenberg 2 

Schwarzenberg  :  pour  Schwarzenberg  et  Klettgau 2 

Liechtenstein 1 

Prince  de  La  Tour  et  Taxis  :  pour  Scheer  et  Diirmetingen,  pour 

Buchau,  Marchthal  et  Neresheim 2 

Oe  ttingen-Wallerstein 4 

Oettingen-Spielberg 4 

Lœwenstein-Wertheim 4 

Croï 4 

Lamberg 4 

Portia 4 

Hohenlohe- Waldenbourg 4 

Hohenlohe-SchillingsfUrt 4 

Modène  :  pour  Brisgau  et  Ortenau 2 

CoUoredo ; 4 

Kaunitz 4 

Ligne • 4 

Khevenhiiller 4 

Looz 4 

A  reporter...  66 


—  390  — 

Ce  qui  est  dit  dans  le  paragraphe  32  des  strophes 
exige  encore  un  mot  d'explication.  On  comptait 
.dans  le  collège  des  Princes  ai:£  anciennes  maisons, 
savoir  :  Wurtemberg,  Poméranie,  H  esse,  Bade,  Hol- 
stein  et  Mecklenbourg,  qui,  n'ayant  pu  s'accorder  sur 
le  rang,  alternaient  d'après  un  tour  de  rôle  nommé, 

fieport. . .     66 

Bretzenheim ,,,,,..,,..,..,,,,,..,.,      l 

Comtes  catholiques ,,..,,,»»,.,.,,,.,..,,.,..,....,      3 

70 
Votes  protestants. 

Brandebourg  :  pour  Magdebourg,  Anspach,  Culmbach,  Halber- 
stadt,  Poméranie  ultérieure ,  Minden,  Gamin,  Ostfrise ,  Hil- 

desheim,  Paderborn,  Munster,  Erfurt,  Eichsfeld 43 

Brunswic  -  Lunebourg  :  pour  Celle,  Calenberg,  Grubenhagen, 

Brème,  Verden,  Lauenbourg,  Osnabriick 7 

Brunswic-Wolfenbiittel 4 

Saxe  électorale 4 

Saxe- Weimar  et  Eisenach 2 

Saxe-Gotha  et  Altenbourg 2 

Henneberg 4 

Les  deux  Mecklenbourg 4 

Cassel  :  pour  la  Hesse,  Hirschfeld,  Hanau,  Fritzlar 4 

Darmstadt  :  pour  la  Hesse,  Westphalie,  Starkenbourg 3 

Anhalt 1 

Bade  :  pour  Durlach,  Bade,  Hochberg,  Constance 4 

Schwarzbourg 4 

Wiirtemberg  :  pour  Wiirtemberg,  Elwang,  Teck,  Calw 4 

Lubeck,  Holstein-Oldenbourg ,  Holstein-Gluckstadt 3 

Poméranie  citérieure 4 

Nassau-Orange  :  pour  Siegen,  Dillenhourg,  Pulde,  Gorvey 4 

Nassau-Usingen 4 

Nassau-Weilbourg 4 

Solms-Braunfels 4 

Linange 4 

Reuss-Plauen 4 

Hohenlohe-Neuenstein 4 

Waldeck 4 

Isenbourg 4 

Les  comtes  protestants 3 

Ce  qui  donnait  la  parité 70 


—  391  — 

du  grec,  strophe,  qui  présentait  un  grand  nombre  de 
variations  distinguées  par  des  chiffres.  La  dixième 
variation  ou  strophe  est  celle  d'après  laquelle  ces 
princes  sont  nommés  dans  le  Recès. 

Anticipons  sur  les  événements  pour  dire  que  l'Em- 
pereur n'a  jamais  ratifié  cet  article  du  Recès ,  de 
manière  qu'il  n'eut  pas  force  de  loi. 

§33. 

((  Le  privilège  de  non  appellando  illimité  appartient 
à  tous  les  Électeurs  pour  toutes  leurs  possessions  ;  au 
landgrave  de  Hesse-Darmstadt,  pour  ses  anciennes  et 
nouvelles  possessions;  et  est  accordé  à  la  maison  de 
]>[as8au,  en  commun,  tant  pour  ses  anciennes  que  pour 
ses  nouvelles  possessions.  » 

Rien  de  plus  contraire  à  l'esprit  de  la  Constitution 
que  l'abus  du  privilège  de  non  appellando,  en  vertu 
duquel  les  princes  qui  jouissaient  de  cette  préroga- 
tive privaient  leurs  sujets  de  la  faculté  d'interjeter 
appel  des  sentences  de  leurs  tribunaux  à  la  justice 
suprême  de  l'Empereur  et  de  l'Empire  ,  qu'adminis- 
traient le  Conseil  auUque  et  la  Chambre  impériale.  La 
Bulle  d'Or  avait  confirmé  cette  prérogative  aux  Élec- 
teurs; les  archiducs  d'Autriche  en  jouissaient  en  vertu 
de  leur  grand  privilège,  ainsi  que  les  ducs  de  Saxe  et 
de  Wurtemberg  et  le  roi  de  Suède.  La  maison  de 
Mecklenbourg  l'avait  obtenue  par  la  paix  de  Teschen- 
Enfin,  le  Recès  l'accorda,  non -seulement  aux  quatre 
nouveaux  Électeurs,  mais  aussi  au  landgrave  de  Hesse- 
Darmstadt  et  à  toute  la  maison  de  Napsau, 

§34. 

«  Tous  les  biens  des  grands  chapitres  et  de  leurs 
dignitaires  sont  incorporés  aux  domaines  des  évêques, 


—  392  — 

et  passent,  avec  les  évêchés,  aux  princes  auxquels 
ceux-ci  sont  assignés.  Dans  les  évêchés  partagés  entre 
plusieurs,  lesdits  biens  sont  incorporés  aux  portions 
respectives.  » 

Il  s'ensuit  que  tous  ces  biens  des  chapitres,  incor- 
porés aux  domaines  des  évêques  et  passés  entre  les 
mains  des  princes  auxquels  sont  cédés  les  évêchés  et 
leurs  domaines,  sont  mis  à  la  libre  disposition  de  ces 
princes  pour  être  sécularisés  et  employés  de  la  manière 
qu'ils  le  jugeront  à  propos. 

§35. 

«  Tous  les  biens  des  chapitres,  abbayes  et  couvents, 
fondés,  tant  des  anciennes  que  des  nouvelles  posses- 
sions, tant  protestants  que  catholiques,  tant  médiats 
qu'immédiats,  dont  il  n'a  pas  été  formellement  fait 
emploi  dans  les  arrangements  précédents ,  sont  mis  à 
la  libre  et  pleine  disposition  des  princes  territoriaux 
respectifs,  tant  pour  dépense  du  culte,  frais  d'instruc- 
tion et  autres  établissements  d'utilité  publique,  que 
pour  le  soulagement  de  leurs  finances,  sous  la  réserve 
formelle  : 

«  De  la  dotation  fixe  des  cathédrales  qui  seront  con- 
servées j 

(c  Des  pensions  du  clergé  supprimé,  conformément 
aux  règlements  dont  une  partie  se  trouve  ci-dessous , 
et  les  autres  seront  déterminées  incessamment.  » 

Ce  paragraphe  renferme  une  disposition  qui  choquait 
le  sentiment  des  convenances  et  un  usage  consacré 
par  la  pratique  de  près  de  trois  siècles.  Les  princes 
d'Empire,  en  introduisant  dans  leurs  États  la  ré  for- 
mation de  Luther ,  sécularisèrent  un  grand  nombre  de 


—  393  — 

fondations  pieuses;  lorsque  la  paix  de  Westphalie 
étendit  cette  mesure  même  à  des  fondations  immé- 
diates, les  princes  ne  pensèrent  pas  qu'il  leur  appar- 
tenait d'en  dénaturer  la  destination  pour  les  employer 
au  soulagement  de  leurs  finances  :  ils  continuèrent  à 
en  consacrer  les  revenus  à  des  objets  d'utilité  géné- 
rale, à  l'instruction  publique,  à  l'encouragement  des 
sciences,  à  l'entretien  des  pauvres,  aux  récompenses 
des  services  rendus  à  l'État.  Souvent  ils  conservèrent 
même  les  formes  extérieures  de  ces  Institutions,  et  l'on 
vit  jusqu'au  xix*  siècle  des  évêchés,  des  abbayes,  des 
chanoines  et  des  chanoinesses,  n'ayant  d'ecclésias- 
tique que  le  nom*.  On  pouvait  s'attendre  que  les 
princes  qui  se  partagèrent,  en  1803,  la  dépouille  de 
l'Église  allemande,  suivraient  d'autres  maximes.  Après 
les  pertes  que  ces  princes  avaient  éprouvées,  il  leur 
fallait  des  ressources  extraordinaires  pour  rétablir  leurs 
finances  ;  et,  dans  ce  partage,  plusieurs  fondations  ec- 
clésiastiques furent  tellement  morcelées,  qu'il  aurait 
été  impossible  de  les  consacrer  dorénavant  à  des  éta- 
blissements d'utilité  générale;  il  était  donc  naturel 
d'abandonner  aux  besoins  des  uns,  à  la  convoitise  des 
autres,  tout  ce  qui  pouvait,  dans  les  pays  ci-devant 
ecclésiastiques,  être  employé  à  soulager  leurs  finances  ; 
mais  il  est  pénible  de  voir  que  les  princes  se  soient  ré- 
servé la  faculté  d'envelopper  dans  cette  destruction  gé- 
nérale tous  les  établissements  protestants  et  catholiques 
portant  le  titre  d'abbayes,  de  chapitres  et  de  couvents. 
La  justice  exige  toutefois  de  dire  qu'ils  n'ont  guère  fait 
usage  d'une  ressource  que  le  Recès  mettait  à  leur  dis- 
position. 


'  L'Université  de  Strasbourg  a  possédé  jusqu'à  la  Révolution  un  cha- 
pitre composé  de  seize  chanoines  protestants  laïques,  remplissant  des 
chaires  de  professeurs. 


—  394  — 

§  36. 

«  Les  chapitres,  abbayes  et  couvents  nommément 
et  formellement  assignés  en  indemnité,  de  même  que 
ceux  mis  à  la  disposition  des  princes  territoriaux,  pas- 
sent à  leurs  nouveaux  possesseurs  avec  tous  leurs 
biens,  droits^  capitaux  et  revenus,  en  quelque  lieu 
qu'ils  soient  situés,  sauf  les  distractions  expresses.  » 

On  a  eu  pour  but  de  prévenir  parce  paragraphe  une 
mesure  que  la  maison  d'Autriche  avait  annoncé  vou- 
loir prendre,  en  confisquant  à  son  profit  les  biens  que 
des  couvents  donnés  en  indemnités  et  sécularisés  par 
leurs  nouveaux  acquéreurs,  possédaient  dans  la  mo- 
narchie autrichienne.  Aussi  les  médiateurs  mirent-ils 
le  plus  grand  soin  à  rédiger  l'article  avec  clarté  et  pré- 
cision; ils  demandèrent,  nommément  par  leur  Note  du 
11  février  1803,  qu'on  y  insérât  le  mot  de  capitaux, 
à  cause  des  fonds  considérables  que  les  évêques  de 
Bamberg  et  de  Wiirzbourg  avaient  placés  à  la  banque 
de  Vienne.  Ces  ministres  manifestèrent  cette  intention, 
en  disant,  dans  leur  Note  du  9  mai  1 803,  par  laquelle 
ils  prenaient  congé  de  la  Députation,  que  tous  les  États 
d'Empire  sans  distinction  devaient  avoir  devant  les 
yeux  l'obligation  que  l'Empire  avait  contractée  de 
contribuer  collectivernent  aux  indemnités,  et  que  le 
paragraphe  36  de  la  nouvelle  loi  était  principalement 
celui  par  lequel  cet  engagement  était  rempli. 

Nous  l'avons  déjà  dit,  toutes  ces  clauses,  toutes  ces 
précautions  étaient  devenues  vaines  et  illusoire^,  par 
la  réserve  que  le  ministre  d'Autriche  à  Paris  avait 
trouvé  moyen  de  faire  glisser  dans  l'article  4  de  la 
convention  du  26  décembre  1802. 


-~  395  — 

S  37. 

«  Les  biens  et  revenus  appartenant  aux  hôpitaux, 
fabriques,  universités,  collèges  et  autres  fondations 
pieuses,  comme  aussi  ceux  des  communes  de  l'une  des 
deux  rives  du  Rhin  situés  sur  l'autre  rive,  doivent  en 
demeurer  distraits,  et  sont  mis  à  la  disposition  des  gou- 
vernements respectifs,  c'est-à-dire,  quant  à  la  droite 
du  Rhin,  des  gouvernements  locaux;  et  il  est  entendu 
que  les  biens  et  revenus  appartenant  aux  institutions 
littéraires  précédemment  communes  aux  deux  rives, 
et  aujourd'hui  continuées  à  la  droite,  lesquels  ne  sont 
pas  situés  dans  le  territoire  des  princes  indemnisés, 
resteront  attachés  auxdites  institutions  continuées  à  la 
droite  du  Rhin.  » 

§  38. 

«  Les  terres  et  propriétés  assignées  aux  États  d'Em- 
pire en  remplacement  de  leurs  possessions  à  la  rive 
gauche  du  Rhin,  demeurent  spécialement  affectées  au 
payement  des  dettes  desdits  princes,  tant  personnelles 
que  de  celles  provenant  de  leurs  anciennes  posses- 
sions, sauf  les  stipulations  du  traité  de  Luné  ville  et 
des  traités  particuliers  conclus  sur  ce  point  entre  la 
France  et  aucuns  des  États  d'Empire.  » 

Cet  article  important,  qui  n'est  qu'une  interpréta- 
tion de  l'article  8  du  traité  de  Lunéville  *,  contraste 
avec  les  prétentions  que  l'ancien  Directoire  de  la  Ré- 
publique française  avait  élevées  à  Rastadt,  et  à  l'égard 
desquelles  la  postérité  reprochera  toujours  à  la  Dépu- 
tation  d'alors  d'avoir  montré  une  condescendance, 
non-seulement  très-préjudiciable  au  bien-être  de  ses 

'  Voy.  t.  VI,  p.  as6. 


—  396  — 

commettants  et  ruineuse  pour  l'Allemagne,  mais  d'au- 
tant plus  dangereuse,  qu'elle  a  sanctionné  tout  ce 
que  l'orgueil  de  la  victoire  a  jamais  exigé  de  plus 
injuste. 

Les  dispositions  de  cet  article  exigent  quelque  dé- 
tail. 

Il  faut  distinguer  entre  trois  sortes  de  dettes  :  dettes 
affectées  aux  caisses  des  contributions  publiques, 
dettes  affectées  aux  domaines  publics,  dettes  person- 
nelles des  princes.  Les  deux  premières  espèces  seules 
existaient  dans  les  pays  gouvernés  par  des  princes  ec- 
clésiastiques. Originairement  et  à  une  époque  où  l'on 
n'avait  pas  encore  des  idées  fort  claires  sur  la  diffé- 
rence entre  les  domaines  et  les  contributions,  et  où  il 
n'existait  pas  de  caisse  particulière  pour  chaque  espèce 
de  revenus,  toutes  les  dettes  des  pays  d'Église  étaient 
domaniales.  Pour  en  contracter,  les  princes  avaient 
besoin  du  consentement  soit  de  leurs  chapitres  seuls, 
soit  de  ces  corps  et  des  États,  s'il  en  existait.  Ces  cha- 
pitres, composés  de  chanoines  dont  chacun  avait  la 
perspective  de  remplacer  un  jour  le  souverain,  se  sont 
toujours  montrés  peu  complaisants  envers  les  princes 
à  leur  accorder  ce  consentement  j  ce  qui  souvent  a 
forcé  ceux-ci  à  pourvoir  à  de  pressants  besoins  par  les 
économies  de  leurs  domaines.  Fallait-il  se  résoudre  à 
contracter  des  dettes,  on  engageait  au  créancier  quel- 
que domaine  dont  il  percevait  les  revenus  jusqu'à 
parfait  payement  du  capital  et  des  intérêts.  Ce  ne  fut 
que  dans  le  xvn^  siècle,  lorsque  la  guerre  de  Trente  ans 
et  les  guerres  que  l'Empire  eut  à  soutenir  ensuite  con- 
tre la  France  augmentèrent  considérablement  la  masse 
des  dettes,  qu'on  pensa  à  en  affecter  une  partie  sur  les 
caisses  des  contributions.  Les  pays  ecclésiastiques  se 
sont  toujours  distingués  par  l'exactitude  avec  laquelle 
ils  payaient  les  intérêts  de  leurs  dettes.  Cette  régularité 


—  397  — 

et  l'impossibilité  de  charger  le  pays  des*  dettes  per- 
sonnelles des  princes,  maintinrent  leur  crédit;  et  il 
n'existe  pas  un  exemple,  que  le  chef  de  l'Empire  se 
soit  vu  dans  le  cas  de  placer  un  pays  ecclésiastique 
sous  administration,  comme  il  est  arrivé  fréquemment 
à  l'égard  des  principautés  séculières. 

Dans  celle-ci ,  on  suivit  un  autre  système.  En  con- 
tractant une  dette,  on  l'affectait  ordinairement  sur  la 
caisse  des  contributions,  et  on  établissait  autant  de 
nouvelles  impositions  qu'il  en  fallait  pour  payer  les 
intérêts  et  rembourser  le  capital.  Si  cet  arrangement 
devenait  quelquefois  une  charge  momentanée  trop  forte, 
les  résultats  en  ont  été  à  l'avantage  de  la  postérité. 
Les  dettes  domaniales  des  pays  séculiers  proviennent 
soit  des  temps  de  guerres  où  on  ne  pouvait  avoir  re- 
cours à  des  impositions  extraordinaires,  soit  des  dota- 
tions des  princesses,  soit  de  voyages  entrepris  par  les 
princes;  souvent  de  leur  amour  pour  le  luxe  :  dans 
ce  dernier  cas,  elles  ne  pouvaient  être  affectées  aux 
domaines  sans  le  consentement  des  agnats  ;  mais  si 
ceux-ci  le  refusaient  d'abord ,  on  trouvait  moyen 
par  la  suite,  et  lorsque  l'auteur  des  dettes  n'existait 
plus,  de  leur  arracher. 

Lorsque  l'Empereur  céda,  par  la  paix  de  Campo  For- 
mio,  ses  possessions  héréditaires  sur  la  rive  gauche 
du  Rhin,  il  stipula,  par  l'article  41 ,  que  toutes  les 
dettes  hypothécaires,  avant  la  Révolution,  sur  le  sol 
de  ces  pays,  et  dont  les  contrats  seraient  revêtus  des 
formalités  d'usage,  seraient  à  la  charge  de  la  France. 
Cette  disposition  était  conforme  à  la  justice,  pourvu 
que  ces  mots  :  avant  la  Révolution,  fussent  identiques 
avec  ceux-ci  :  avant  la  conquête  de  ces  provinces  par  les 
armes  de  la  République;  comme  ils  l'étaient  probable- 
ment à  l'égard  des  Pays-Bas  autrichiens;  mais  cette 
même  disposition  devenait  souverainement  injuste  si, 


—  398  — 

par  analogie,  on  voulait  ensuite  l'appliquer  aux  pays 
de  la  rive  gauche  du  Rhin ,  à  la  cession  desquels  la 
Députation  de  l'Empire ,  réunie  à  Rastadt,  consentit , 
parce  qu'une  grande  partie  de  ces  dettes  avait  été  con- 
tractée depuis  la  Révolution  française  et  pour  la  guerre 
de  France.  Néanmoins,  les  ministres  de  France  à  Ras- 
tadt ne  bornèrent  pas  là  l'injustice  de  leurs  préten- 
tions. Nous  avons  dit,  dans  le  précis  de  l'histoire  de 
cette  négociation,  qu'ils  exigèrent  que  la  rive  gauche 
du  Rhin  leur  fût  cédée  franche  de  toutes  dettes,  et  que 
toutes  les  dettes  de  cette  rive  fussent  transportées  sur 
la  rive  droite  :  prétention  contraire  à  tous  les  principes 
du  Droit  public.  On  se  rappelle  que  les  agents  du  Di- 
rectoire exécutif  offrirent  dérisoirement,  comme  une 
preuve  de  leur  facilité,  de  se  charger  de  celles  des 
dettes  communales  qui  avaient  été  contractées  depuis 
que  les  communes  étaient  occupées  par  les  troupea 
françaises. 

Nous  n'aurons  pas  à  louer  souvent  la  modération 
du  pouvoir  qui  a  succédé  en  France  à  ces  prétendus 
républicains,  auxquels  Montesquieu  enseignait  vaine- 
ment que  la  vertu  est  le  principe  des  républiques; 
saisissons  donc  cette  occasion  pour  signaler  la  diffé- 
rence entre  la  conduite  du  gouvernement  directorial 
en  1798,  et  celle  du  gouvernement  consulaire  en 
1802.  V article  8  de  la  paix  de  Lunéville  rend  un 
hommage  plein  et  entier  aux  principes,  en  reconnais- 
sant que  ceux  auxquels  les  pays  appartiendront  se 
chargeront  des  dettes  hypothéquées  sur  le  sol  de  ces 
pays.  Cependant  un  paragraphe  de  la  première  décla- 
ration des  ministres  médiateurs,  qui  certainement 
n'a  pas  été  rédigé  sous  l'inspiration  de  celui  qui  a 
dicté  la  paix  de  Lunéville,  montrait  qu'oubliant  ce  que 
ce  traité  avait  statué ,  on  voulait  revenir  aux  principes 
monstrueux  de  Rastadt.  u  Que  les  terres,  disent  ces 


—  399  — 

ministres*,  et  propriétés  assignées  aux  États  d'Em- 
pire, en  remplacement  de  leurs  possessions  à  la  rive 
gauche  du  Rhin ,  demeureront  spécialement  affectées 
au  payement  des  dettes  desdits  princes ,  tant  person- 
nelles que  de  celles  provenant  de  leurs  anciennes  pos- 
sessions. »  Dans  le  second  plan,  ils  ajoutèrent:  «  sauf 
les  traités  particuliers  conclus  sur  ce  point  entre  la 
France  et  aucuns  États  d'Empire.  »  Les  ministres 
ayant  ainsi  dérogé  au  premier  principe,  il  fut  facile 
de  les  ramener  dans  la  voie  de  la  justice ,  en  leur  rap- 
pelant V article  8  de  la  paix  de  Lunéville,  qui  déroge 
à  leur  disposition  en  faveur  de  tous  les  États  d'Em- 
pire. Varticle  38  fut  alors  dressé  tel  qu'on  le  lit  dans 
leRecès;  il  est  conforme  à  la  justice  quant  à  l'effet; 
mais  on  doit  regretter  que,  par  la  forme  de  sa  rédac- 
tion, il  consacre  un  principe  monstrueux,  qu'un  jour 
peut-être  un  nouveau  conquérant  ne  craindra  pas 
d'invoquer  en  citant  cet  article. 

§  39. 

«  Tous  les  péages  du  Rhin  perçus  soit  à  la  droite, 
soit  à  la  gauche  du  fleuve,  sont  supprimés  sans  pou- 
voir être  rétablis,  sous  quelque  dénomination  que  ce 
soit,  sauf  les  droits  de  douane  et  un  octroi  de  navi- 
gation ,  lequel  est  consenti  sur  les  bases  suivantes  : 

H  Le  Rhin  étant  devenu,  depuis  les  frontières  de  la 
République  batave  jusqu'à  celles  de  la  République  hel- 
vétique, un  fleuve  commun  entre  la  République  fran- 
çaise et  l'Empire  germanique,  l'octroi  de  navigation 
est  établi,  et  sera  réglé  et  perçu  en  commun  entre  la 
France  et  l'Empire. 

«  L'Empire,  avec  le  consentement  de  l'Empereur, 
délègue  pleinement  et  entièrement  tous  ses  droits,  à  cet 

'  Voy.  ci-dessus  p.  157. 


—  400  — 

égard,  à  l'Électeur-Archichancelier,  qui  est  revêtu  des 
pleins  pouvoirs  du  Corps  germanique  pour  arrêter, 
avec  le  gouvernement  français,  tous  les  règlements 
généraux  et  particuliers  relatifs  à  l'octroi  de  naviga- 
tion, lesquels  règlements  seront  portés  à  l'approbation 
du  collège  électoral  et  à  la  connaissance  du  Corps  ger- 
manique par  l'Électeur-Archichancelier. 

«  La  taxe  sera  combinée  de  manière  à  ne  pas  excé- 
der le  montant  des  péages  supprimés.  Elle  sera  plus 
forte  sur  la  navigation  des  étrangers  que  sur  celle  des 
riverains  français  ou  allemands,  et  sur  les  bâtiments 
qui  remonteront  le  Rhin,  que  sur  ceux  qui  le  descen- 
dront. 

«  La  perception  en  sera  confiée  à  des  mains  uni- 
ques, et  le  mode  à  adopter  sera  tel,  que  la  navigation 
soit  retardée  le  moins  possible. 

«  Le  directeur  général  de  l'octroi  sera  nommé  en 
commun  par  le  gouvernement  français  et  l'Électeur- 
Archichancelier,  qui  tiendront  respectivement  un  con- 
trôleur près  de  chaque  bureau  de  perception.  Les  per- 
cepteurs de  la  rive  droite  seront  nommés  par  l'Élec- 
teur-Archichancelier, avec  l'agrément  du  souverain 
territorial. 

«  Néanmoins  ces  bases  d'administration  et  de  per- 
ception sont  subordonnées  à  l'arrangement  qui  sera 
conclu  sur  l'organisation  de  l'octroi  de  navigation 
entre  le  gouvernement  français  et  l'Électeur-Archi- 
chancelier. 

«  Il  n'y  aura  pas  moins  de  cinq  ni  plus  de  quinze 
bureaux  de  perception.  Ces  bureaux  ne  seront  nulle- 
ment exempts  de  la  juridiction  des  souverains  terri- 
toriaux, hors  des  objets  de  leur  service.  Ils  en  rece- 
vront, au  contraire,  toute  assistance  en  cas  de  besoin. 

{<  Le  produit  brut  de  l'octroi  est  spécialement  affecté 
aux  frais  de  perception,  administration  et  police. 


~  401   — 

«  Le  surplus  sera  partagé  en  deux  parties  égales, 
chacune  destinée  principalement  à  l'entretien  des  che- 
mins de  halage  et  travaux  nécessaires  à  la  navigation 
sur  chaque  rive  respective. 

«  Le  reliquat  net  de  la  moitié  appartenant  à  la  rive 
droite  est  hypothéqué  :  1  "  au  complément  de  la  dota- 
tion de  l'Électeur-Archichancelier  et  autres  assigna- 
tions portées  aux  paragraphes  9,  14,  17,  19  et  20; 
2"  au  payement  des  rentes  subsidiairement  et  condi- 
tionnellement  assignées  par  les  paragraphes  7  et  27. 

M  S'il  y  avait  un  surplus  annuel  de  revenu ,  il  ser- 
virait à  l'amortissement  graduel  des  charges  dont  le 
droit  d'octroi  de  navigation  est  grevé. 

«  L'Electeur-Archichancelier  se  concertera  annuel- 
lement avec  le  gouvernement  français  et  les  princes 
territoriaux  riverains  de  la  droite  du  Rhin,  pour  l'en- 
tretien des  chemins  de  halage  et  travaux  nécessaires 
à  la  navigation  dans  l'étendue  des  frontières  respec- 
tives sur  le  Rhin.  » 

Voici  ce  qu'à  la  place  de  ce  long  article,  disait  le 
premier  plan  d'indemnité  proposé  par  les  médiateurs  : 
((  Que  tous  les  péages  du  Rhin  perçus,  soit  à  la  droite, 
soit  à  la  gauche  du  fleuve,  devront  être  supprimés  , 
sans  pouvoir  être  rétablis,  sous  quelque  dénomina- 
tion que  ce  soit,  sauf  les  droits  de  douane.  »  Le  se- 
cond plan  et  le  premier  conclusum  général  n'en  disent 
pas  davantage.  Mais  bientôt  l'impossibilité  de  trouver 
un  gage  pour  les  dettes  hypothéquées  sur  les  péages 
qu'on  supprimait  engagea  plusieurs  États  à  proposer 
la  conservation  de  quelques  péages  dont  on  emploie- 
rait le  produit  uniquement  au  payement  de  ces  dettes. 
Ensuite  on  eut  l'idée  d'y  affecter  aussi  ce  qui  man- 
quait à  la  dotation  de  l'archichancelier,  au  lieu  de 
destiner  à  cet  objet  un  fonds  formé  par  des  fondations 
VII  26 


—  A02  — ■ 

médiates.  Ces  considérations  furent  cause  qu'on  ré- 
solut de  conserver  les  péages  du  Rhin,  ou  plutôt  de 
les  recréer  sous  la  dénomination  d'octroi  de  navigation . 
De  là  la  rédaction  bizarre  de  cet  article,  qui  rétablit  ce 
q  ue  le  premier  plan  proposait  seulement  de  supprimer, 
et  ce  qui,  par  conséquent,  existait  au  moins  de  droit. 
Les  vingt-quatre  péages  anciennement  établis  sur 
le  Rhin  rapportaient,  d'après  des  états  authentiques , 
près  de  deux  millions  de  florins.  L'octroi  ne  doit  pas 
aller  au  delà.  Les  étrangers,  qu'on  oppose  ici  aux  rive- 
rains, sont  sans  doute  les  Hollandais  et  les  Suisses; 
mais  cette  difi'érence  ne  fut  pas  observée.  Voici  la  ré- 
capitulation des  rentes  que  le  Recès  affecte  au  reliquat 
net  de  la  moitié  appartenant  à  la  rive  droite. 

A  l'Archichancelier 350  000  flor. 

A  Mecklenbourg-Schwerin 16  000 

Au  prince  de  Lœwenstein-Wertheim 12  000 

A  la  maison  de  Stolberg 30  000 

A  la  comtesse  d'Isenbourg 23  000 

A  Linange-Guntersblum 3  000 

A  Linange-Heidesheim 3  000 

A  la  branche  aînée  de  Linange-Westerbourg 3  000 

A  la  branche  cadette 6  000 

Total...     446  000 
S'il  reste  un  excédant,  on  y  assigne  : 

Hesse-Rothenbourg ,  avec 22  500 

Wittgenstein-Berlebourg 15  000 

Sôlm-ReifiFerscheidt-Dyck 28  000 

Stadion-Warlhausen 3  600 

Sladion-Thannhausen 2  400 

Total...     517  500 

S'il  y  avait  un  surplus  annuel  de  revenus,  il  servi- 
rait à  l'amortissement  graduel  des  charges  dont  le 
droit  d'octroi  de  navigation  est  grevé,  dit  le  Recès. 
Cette  phrase  est  peu  claire.  Qu'entend-on  par  les  char- 
ges dont  l'octroi  est  grevé?  Sont-ce  les  rentes  dont 
nous  venons  de  donner  le  tableau?  et  l'intention  des 


—  403  — 

auteurs  du  Recès  est-elle  qu'on  exécute  à  leur  égard 
l'articl  30,  en  rachetant  graduellement  ces  rentes  au 
denier  quarante?  Cette  interprétation  paraît  fort  natu- 
relle, lorsqu'on  n'envisage  que  les  stipulations  mêmes 
du  Recès,  sans  consulter  son  histoire;  mais  en  se  rap- 
pelant que  l'octroi  a  été  originairement  imaginé  pour 
être  employé  à  l'amortissement  des  dettes  hypothé- 
quées sur  les  péages  du  Rhin ,  on  est  tenté  de  croire 
que  ce  sont  là  les  charges  dont  il  est  grevé;  mais  alors 
on  ne  peut  s'empêcher  de  s'étonner  que  l'amortisse- 
ment de  ces  dettes,  auxquelles  on  enlevait  leur  hypo- 
thèque, n'ait  pas  été  plus  clairement  exprimé,  et  qu'on 
ait  subordonné  le  sort  d'une  dette  si  sacrée  à  la  chance 
incertaine  d'un  double  reliquat. 

Le  règlement  que  l'Électeur-Archichancelier  avait 
été  chargé  de  dresser,  de  concert  avec  le  gouvernement 
français,  fut  arrêté  par  une  convention  signée,  à  Pmis 
/e15  août  1804,  entre  MM.  Cretet,  directeur  général 
des  ponts  et  chaussées  ;  Colliriy  directeur  général  des 
douanes  ;  Coquebert  de  Montbret  et  Pfeffel,  au  nom  de 
la  France,  et  de  Bemt,  ministre  de  l'Archichancelier, 
au  nom  de  ce  prince.  Elle  renferme  cent  trente-deux 
articles,  dont  nous  ne  citerons  que  quelques-uns  qui 
sont  d'un  intérêt  général*. 

La  base  de  cette  convention  est  le  principe  énoncé 
dans  y  article  2,  d'après  lequel  le  thalweg  du  Rhin  forme 
à  la  vérité  la  limite  entre  la  France  et  l'Allemagne  ; 
mais  le  Rhin  sera  toujours  considéré,  sous  le  rapport 
de  la  navigation  et  du  commerce,  comme  un  fleuve 
commun  entre  les  deux  empires. 

'  En  donnant  le  sommaire  de  la  convention  pour  l'octroi  de  la  navi- 
gation du  Rhin,  nous  ne  nous  astreignons  pas  à  l'ordre  des  article? 
Nous  suivons  l'ordre  systématique  observé  par  M.  KlIjber  dans  son 
Staatsrecht  des  Rheinbundes.  Tiibingen,  4808,  in-8°. 


—  404  — 

La  convention  établit  deux  espèces  de  droits  : 
1"  un  droit  de  reconnaissance,  et  2°  un  droit  d'octroi. 
Le  premier  sera  perçu  dans  chaque  bureau  de  l'octroi 
pour  chaque  embarcation  chargée  ou  non  chargée, 
du  port  de  cinquante  quintaux  et  au-dessus,  qui  pas- 
sera devant  un  bureau  en  remontant  ou  en  descendant. 
Ce  droit  varie,  d'après  le  jaugeage  de  cinquante  à  deux 
mille  cinq  cents  quintaux  et  au-dessus,  de  dix  centi- 
mes à  quinze  francs.  Art.  94. 

Le  droit  d'octroi  sera  payé  pour  toutes  les  marchan- 
dises au  quintal,  d'après  un  tarif  calculé  sur  les  dis- 
tances d'un  bureau  à  l'autre.  En  remontant,  la  tota- 
lité des  droits  à  payer  aux  douze  bureaux,  depuis 
Griethausen  *  jusqu'à  Neubourg ,  forme  un  franc 
quatre-vingt-cinq  centimes  par  quintal,  et  en  descen- 
dant, depuis  Strasbourg  jusqu'à  Griethausen,  un  franc 
vingt-huit  centimes.  Art.  97-99. 

Le  droit  d'octroi  sera  perçu  d'avance  et  à  raison 
de  la  distance  à  parcourir  qui  sera  toujours  comptée 
entière,  quoique  l'embarcation  décharge  avant  d'y 
arriver;  de  même  on  ne  payera  pas  pour  la  distance 
parcourue  avant  d'arriver  au  premier  bureau.  Art.  93. 

L'administration  générale  de  l'octroi  sera  composée 
d'un  directeur  général  nommé  en  commun  par  la 
France  et  l'Archichancelier,  et  de  quatre  inspecteurs, 
dont  deux  nommés  par  la  France  et  deux  par  l'Élec- 
teur-Archichancelier.  Elle  siégera  à  May ence.  Art.  42, 
43,  45,  48,  49. 

Il  y  aura  douze  bureaux  pour  la  perception  de 
l'octroi,  six  sur  la  rive  gauche  et  six  sur  la  rive  droite  ; 
et  dans  chacun  il  y  aura  un  receveur,  un  contrôleur, 
deux  visiteurs  et  un  commis  aux  écritures.  Art.  47. 

Les  franchises  des  foires  de  Francfort,  en  ce  qui 

*  Ce  bureau  fut  placé  à  Lobiih. 


—  405  — 

concerne  la  navigation  du  Rhin,  continueront  d'avoir 
lieu  comme  par  le  passé.  Les  embarcations  apparte- 
nant au  port  de  Mayence,  et  conduites  par  des  bate- 
liers de  cette  ville,  lesquelles  auront  été  chargées  à 
Cologne  pour  Francfort,  ne  seront  point  obligées  de 
rompre  charge  à  Mayence.  Art.  1 0  eH  1 . 

La  navigation  entre  Strasbourg  et  Mayence  sera 
libre  et  les  embarcations  venant  du  haut  du  Rhin  pour 
se  rendre  à  Francfort  entreront  dans  le  Mein,  sans  se 
détourner,  pour  aborder  à  Mayence.  Art,  12. 

On  n'admettra  aucune  demande  en  exemption  ou 
modération  de  droits ,  à  quelques  personnes  que  les 
embarcations  appartiennent,  et  nonobstant  tout  pri- 
vilège ou  usage  contraire.  Art.  112.  Néanmoins  les 
coches  ou  diligences  d'eau  et  les  nacelles  unique- 
ment employées  au  transport  des  voyageurs  et  de  leurs 
effets ,  ne  seront  point  assujetties  aux  règlements  de 
la  grande  navigation,  ni  par  rapport  aux  stations,  ni 
aux  associations  de  bateliers.  Art.  22.  Ces  espèces 
d'embarcations  payeront  le  droit  d'octroi  comme  si 
elles  étaient  chargées  du  quart  des  marchandises 
qu'elles  pourraient  embarquer  en  raison  de  leur  ton- 
nage. Art.  101. 

Les  droits  de  l'octroi  de  la  navigation  du  Rhin  ne 
pourront  jamais  être  affermés.  Art.  111. 

Une  commission  composée  d'un  commissaire  fran- 
çais, d'un  autre  nommé  par  l'Électeur -Archichance- 
lier  et  d'un  jurisconsulte  choisi  par  les  deux  com- 
missaires précédents,  s'assemblera  chaque  année  à 
Mayence  pour  juger  les  recours  en  matière  de  per- 
ception de  l'octroi  et  de  police  de  la  navigation. 
Art.  }23etsuiv.  Cette  commission  s'assembla  pour  la 
première  fois  le  15  février  1808. 

Les  dépenses  pour  l'entretien  des  chemins  de  ha- 
lage  ne  seront  point  prélevées  sur  la  masse  des  pro- 


—  406  — 

duits  de  l'octroi  avant  le  partage;  mais  chaque  partie 
y  pourvoira  sur  sa  rive.  Art.  34. 

Si  la  guerre  avait  lieu  entre  quelques-uns  des  États 
situés  sur  le  Rhin,  ou  même  entre  les  deux  empires, 
la  perception  du  droit  d'octroi  continuera  à  se  faire 
librement  sans  qu'il  y  soit  porté  obstacle  de  part  ni 
d'autre.  Il  sera  donné  des  sauvegardes  pour  les  bu- 
reaux et  les  caisses.  Art.  31 . 

Les  principales  stations  seront  Strasbourg,  Mayence 
et  Cologne.  Toutes  les  embarcations  seront  obligées 
d'y  rompre  charge  et  de  verser  leurs  chargements  dans 
d'autres  embarcations.  Art,  3-6. 

Le  droit  d'étape  ou  de  mise  en  vente  forcée  de 
Mayence  et  Cologne  est  aboli,  et  tous  les  droits  qui 
ont  été  perçus  pour  cela  sont  supprimés.  Art.  8. 

La  navigation  qui  a  lieu,  à  partir  de  Mayence  et  de 
Cologne,  est  confiée  à  des  associations  de  bateliers, 
qui  recevront  une  organisation  particulière,  et  dans 
laquelle  les  bateliers  des  deux  rives  pourront  entrer. 
Art,  14-17. 

En  conformité  d'un  Avis  du  collège  électoral  de 
l'Empire,  du  1 8  mars  1 805,  cette  convention  fut  rati- 
fiée par  l'Empereur  le  1 1  mai  de  la  même  année  ^ 

Le  19  février  1810,  à  une  époque  où  la  violence  et 
le  pouvoir  arbitraire  avaient  fait  taire  la  voix  de  la 
justice  eu  Europe,  l'Électeur-Archichancelier,  ou, 
comme  il  se  qualifiait  depuis  1806,  le  Prince  Primat 
de  la  confédération  du  Rhin ,  conclut  avec  Napoléon 
une  convention,  par  l'article  6  de  laquelle  il  céda  à 
celui-ci  la  moitié  de  l'octroi  du  Rhin,  non  possédée 
par  la  France,  en  se  chargeant  d'acquitter,  conformé- 
ment au  Recès  de  l'Empire,  les  rentes  qui,  par  les 

«  Voy.  Mabtbns,  R«c.,  t.  XI,  p.  36. 


—  407  — 

paragraphes  7,  9, 14, 17,  19,  20  et  27  duditRecès,  ont 
été  assignées  sur  ladite  moitié  de  l'octroi  du  Rhin; 
l'hypothèque  spéciale  que  les  propriétaires  de  ces 
rentes  avaient  sur  cette  moitié  de  l'octroi  étant  pleine- 
ment et  à  perpétuité  transférée  sur  les  biens  domaniaux 
des  principautés  de  Fulde  et  de  Hanau,  cédées  à  Son 
Altesse  Électorale  par  le  présent  traité. 

En  conséquence  de  ce  traité,  le  grand-duc  de  Franc- 
fort publia,  le  1"  décembre  1810,  une  déclaration 
ayant  pour  objet  de  faire  connaître  l'état  de  la  compta- 
bilité de  l'octroi.  Il  y  annonça  que,  sur  les  deux  mil- 
lions quatre  cent  cinquante  mille  florins  qui  auraient 
dû  lui  être  payés  sur  l'octroi,  pour  les  années  1 804 
à  1810,  il  lui  était  dû  une  somme  de  six  cent  mille 
florins,  dont  il  était  en  droit  de  réclamer  le  payement 
dans  les  années  1811  à  1 81 4,  à  raison  de  cent  cinquante 
mille  florins  par  an,  mais  qu'il  y  renonçait  en  faveur 
des  deux  départements  de  Fulde  et  de  Hanau.  Les  ren- 
tes de  seconde  classe,  fondées,  par  les  paragraphes  9, 
14,17,  1 9  et  20  sur  l'octroi  de  navigation,  se  mon- 
taient à  quatre-vingt-dix  mille  florins  par  an;  le  Grand- 
Duc  promit  d'ajouter  annuellement,  pendant  quatre 
ans,  soixante  mille  florins  de  ses  propres  revenus,  afin 
qu'en  1 81 5  les  propriétaires  des  quatre-vingt-dix  millç 
florins  pussent  entrer  en  pleine  jouissance  de  leurs 
rentes.  De  1815  à  1828,  les  départements  de  Fulde 
et  de  Hanau  ajouteraient  annuellement  ces  soixante 
mille  florins;  de  manière  qu'en  1829,  l'arriéré  de  la 
seconde  classe  serait  couvert,  et  qu'on  pourrait  penser 
au  payement  des  rentes  de  la  troisième  classe,  établies 
par  les  paragraphes  7  et  27  du  Recès  \ 

'  WiNKOPP,  Rhein.  Bund,  t.  XVII,  p.  442. 


—  /«.08  — 

{(  Tous  les  Fiefs  situés  à  la  rive  droite  du  Rhin  et  re- 
levant de  cours  féodales  ci -devant  établies  à  la  rive 
gauche,  relèvent  désormais  directement  de  l'Empereur 
et  de  l'Empire,  si  la  supériorité  territoriale  y  est  atta- 
chée comme  États  d'Empire;  dans  le  cas  contraire, 
ces  fiefs  relèvent  du  prince  territorial  dans  les  États 
duquel  ils  sont  enclavés.  Néanmoins  les  fiefs  ci-devant 
de  Mayence  et  jouissant  de  la  supériorité  territoriale, 
relèvent  d'Aschaffenbourg. 

«  Il  dépend  des  nouveaux  souverains  de  se  con- 
tenter provisoirement,  et  jusqu'au  prochain  cas  de  re- 
prise de  fief,  d'une  simple  reconnaissance  de  la  part 
des  nouveaux  vassaux,  ou  bien  d'insister  sur  la  forma- 
lité de  l'investiture.  Les  vassaux  seront  toutefois,  dans 
ce  dernier  cas,  affranchis  des  taxes  féodales  et  autres 
émoluments  d'usage.  » 

Par  cet  arrangement,  les  rapports  des  États  entre 
eux  et  envers  l'Empire  furent  infiniment  simplifiés. 
Les  terres  situées  sur  la  rive  droite  du  Rhin,  qui 
jusqu'alors  avaient  dépendu  de  seigneurs  directs  qui 
n'existaient  plus  (parce  que  la  République  française 
avait  pris  leur  place),  cessaient  d'être  arrière-fiefs  de 
l'Empire,  si  elles  appartenaient  à  un  prince  État  d'Em- 
pire. Si  leur  possesseur  n'était  pas  revêtu  de  la  supé- 
riorité territoriale,  celui-ci  devenait  vassal  du  prince 
sous  la  supériorité  duquel  ces  terres  étaient  situées, 
de  manière  que  la  supériorité  territoriale  et  le  do- 
maine direct  fussent  confondus  dans  les  mains  de  ce 
prince.  On  fit  une  exception  à  cette  règle  en  faveur 
des  fiefs  de  l'Archichancelier  de  l'Empire. 

§  41. 
M  Les  Voies  des  comtes  immédiats  d'Empire  se  trou, 
vant,  d'après  le  paragraphe  24,  transportés  sur  les 


—  409  — 

territoires  qui  leur  sont  donnés  en  indemnité,  le  mode 
d'exercice  de  ces  voix  et  des  prérogatives  y  attachées 
sera  déterminé  par  un  règlement  particulier. 

((  Les  votes  etcclésiastiques  sont  exercés  conformé- 
ment aux  dispositions  du  paragraphe  32.  » 

Le  règlement  particulier  dont  il  est  ici  question  ne 
fut  pas  fait,  parce  que  tout  ce  qui  tenait  à  la  question 
des  suffrages  à  la  Diète  fut  ajourné. 

§  42. 

«  La  Sécularisation  des  couvents  de  femmes  recluses 
ne  peut  s'effectuer  que  de  concert  avec  l'évêque  diocé- 
sain ;  mais  les  couvents  d'hommes  seront  à  la  disposi- 
tion des  princes  territoriaux  ou  des  nouveaux  posses- 
seurs, qui  pourront  les  supprimer  ou  les  conserver  à 
leur  gré.  Les  uns  et  les  autres  ne  peuvent  recevoir  de 
novices  que  du  consentement  du  prince  territorial  ou 
du  nouveau  possesseur,  » 

Ce  paragraphe  renferme  en  partie  une  répétition, 
en  tant  qu'il  met  à  la  disposition  des  princes  territo- 
riaux les  couvents  d'hommes,  et  une  contradiction 
avec  le  paragraphe  35,  en  ce  qu'il  en  excepte  les  cou- 
vents de  femmes. 

§  43. 

«  La  jouissance  des  biens  assignés  en  indemnité 
commence  du  1*'  décembre  1802,  pour  les  princes  et 
États  indemnisés  qui  n'auraient  pas  été  dans  le  cas  de 
prendre  possession  civile  avant  la  présentation  des 
déclarations  des  puissances  médiatrices  ;  et  la  posses- 
sion civile  a  lieu,  pour  tous,  huit  jours  avant  le  i"  dé- 
cembre. 

((  Les  arrérages  des  fonds  qui  étaient  à  la  disposition 
des  usufruitiers  jusqu'à  l'époque  des  jouissances  nou- 
velles, appartiendront  aux  anciens  possesseurs,  sauf 


—  410  — 

tous  autres  arrangements  convenus  entre  les  parties 
intéressées.  » 

%  44. 

«  Toutes  les  aliénations  qui  ne  sont  pas  une  suite 
de  l'administration  ordinaire,  et  qui  auraient  été  faites 
par  les  abbayes  et  couvents  après  le  24  août  1802, 
sont  déclarées  nulles.  » 

Cet  article  fut  provoqué  par  une  plainte  du  grand- 
maître  de  l'Ordre  de  Saint-Jean  de  Jérusalem ,  qui 
dénonça  les  ventes  faites  par  les  couvents  du  Brisgau 
que  le  premier  plan  lui  destinait.  On  a  fixé  l'époque 
du  24  août  1 802 ,  parce  que  ce  fut  ce  jour-là  que  la 
Députation  tint  sa  première  séance. 

S  45. 

«  Les  dispositions  précédentes  rendent  caduques 
toutes  les  prétentions  qui  existaient  sur  les  terres  cé- 
dées à  la  République  française  par  le  traité  de  Luné- 
ville.  Néanmoins,  il  est  entendu  que  les  droits  de  suc- 
cession de  famille f  existant  sur  des  possessions  situées 
à  la  rive  gauche  du  Rhin  et  échangées,  sont  transportés 
sur  les  objets  donnés  en  indemnité  et  en  échange 
comme  surrogat.  Sont  également  caduques  les  préten- 
tions qui,  existant  sur  les  biens  donnés  en  rempla- 
cement à  la  rive  droite  du  Rhin ,  n'auraient  pas  été 
produites  et  jugées  ou  arrangées  à  l'amiable  dans  le 
terme  d'un  an,  à  compter  du  T"  décembre  1802.  S'il 
arrivait  que,  par  défaut  de  jugement  ou  par  refus 
de  transaction  équitable,  une  prétention  produite  ne 
fût  pas  terminée  à  l'expiration  de  ladite  année,  elle 
sera  jugée  sans  appel ,  par  jugement  des  austrègues  , 
dans  le  terme  d'une  seconde  année.  Comme  l'Électeur- 
Archichancelier  est  doté  eœ  jure  novo,  il  faut,  pour 
maintenir  sa  dotation,  qu'en  cas  de  perte  de  revenus  ré- 


—  411   — 

sultant  d'une  prétention  contre  lui,  cette  perte  soit  com- 
pensée par  la  concession  de  ceux  des  fiefs  relevant  de 
l'Empereur  et  de  l'Empire  qui  deviendraient  vacants.  » 

Ce  paragraphe  se  rapporte  aux  prétentions  autres 
que  pour  dettes,  c'est-à-dire  aux  prétentions  dites 
réelles  y  et  ayant  pour  objet  les  terres  et  domaines 
mêmes.  Le  premier  plan  d'indemnité  s'était  borné  à 
libérer  les  provinces  cédées  à  la  France  de  toute 
dette  qui  y  avait  été  affectée,  sans  parler  des  autres 
prétentions  dont  ces  pays  pouvaient  être  l'objet.  Le 
second  plan  déclara  caduques  toutes  ces  prétentions, 
de  manière  que  la  France  reçut  la  rive  gauche  du 
Rhin  dégagée  de  toute  espèce  de  prétentions,  que 
quelque  État  ou  membre  de  l'Empire  pourrait  vouloir 
y  former.  Comme  cependant  il  restait  une  classe  de 
prétentions  qui  pouvait  subsister,  sans  préjudice  à  la 
cession  pleine  et  entière  qui  avait  été  faite  à  la  France, 
savoir  les  droits  de  succession  de  famille,  on  trans- 
porta ces  droits  sur  les  pays  de  la  rive  droite  du  Rhin 
donnés  en  échange j  c'est-à-dire  que,  le  cas  arrivant 
où  une  famille  anciennement  possessionnée  sur  ]a 
rive  gauche  s'étant  éteinte,  une  autre  aurait  eu  droit 
de  succéder  dans  les  possessions  perdues,  elle  succé- 
dera dans  les  possessions  données  en  indemnité. 
Toutefois  cette  disposition  générale  laisse  indécise  une 
question  qui  devrait  se  présenter  et  donner  lieu  à  des 
difficultés.  Une  famille  qui  a  reçu,  sur  la  rive  droite, 
une  indemnité  pour  ce  qu'elle  a  perdu  sur  la  rive 
gauche,  s'étant  éteinte,  il  peut  se  trouver  divers  pré- 
tendants ayant  droit,  non  à  toute  la  succession ,  mais 
à  une  partie  seulement,  à  une  terre  ou  un  domaine 
isolé  j  on  demandera  :  sur  quelle  partie  de  l'indemnité 
ce  droit  de  succession  a-t-il  été  transporté?  Dans 
quelle  proportion  l'a-t-il  été,  dans  le  cas  où  l'indem- 


—  412  — 

nité  n'était  pas  d'égale  valeur  avec  la  perte ,  mais  ou 
supérieure  ou  inférieure? 

Mais  une  autre  condition  se  présentait  encore.  Les 
pays  donnés  en  indemnité  pouvaient  aussi  être  l'objet  de 
quelque  prétention  réelle.  On  demanda  si,  par  la  cession 
à  titre  d'indemnité,  ces  prétentions  devenaient  aussi  ca- 
duques ou  si  elles  continuaient  d'exister.  L'une  etl'autre 
supposition  renfermaient  une  injustice  et  offraient  des 
inconvénients.  Pourquoi  les  droits  qu'un  tiers  pouvait 
avoir  sur  ces  terres  auraient-ils  été  anéantis,  puisque 
la  transmission  de  ces  terres  des  mains  d'un  souverain 
dans  celles  de  l'autre  se  faisait  sans  le  concours  et  le 
consentement  de  ce  tiers  ?  D'un  autre  côté,  le  nouveau 
possesseur  pouvait  ainsi  avoir  reçu  une  indemnité 
illusoire,  puisque  l'issue  du  procès  intenté  par  le  tiers 
prétendant  pouvait  le  priver  d'une  partie  de  son  in- 
demnité. Le  second  plan  d'indemnité  avait  préféré  le 
premier  inconvénient,  en  déclarant  caduques  toutes 
les  prétentions  existant  sur  des  biens  donnés  en  rem- 
placement à  la  rive  droite  du  Rhin;  mais  les  obser- 
vations faites  par  les  subdélégués  engagèrent  les 
ministres  médiateurs  à  modifier  cette  disposition  par 
une  Note  du  1 3  octobre  1 802,  dans  laquelle  ils  propo- 
sèrent que  ces  prétentions  ne  seraient  regardées  comme 
caduques,  qu'autant  qu'elles  n'auraient  pas  été  pro- 
duites et  jugées  ou  arrangées  à  l'amiable  dans  le  terme 
d'un  an.  Le  conclusum  général  ajouta  la  nouvelle 
modification  :  S'il  arrivait,  etc.,  et,  dans  la  dix- 
huitième  séance,  la  Députation  interpréta  le  paragra- 
phe, en  déclarant  que  la  préclusion  ne  s'appliquait  ni 
aux  prétentions  futures  (actiones  nondum  natœ),  pour 
lesquelles  il  n'y  avait  pas  de  demeure  f  ni  aux  procès 
pendants,  et  qu'à  l'égard  de  ces  derniers  il  suffisait  que 
la  décision  fût  pressée  dans  le  terme  prescrit  d'une 
année. 


—  413  — 

Ce  paragraphe  laissa  indécise  une  question  qui 
donna  lieu  à  un  procès  entre  les  maisons  d'Arenberg 
et  de  Lœwenstein-Wertheim.  Cette  dernière  formait 
des  prétentions  sur  les  seigneuries  de  Kerpen  et  Kas- 
selbourg,  que  la  première  avait  possédées  sur  la  rive 
gauche  du  Rhin.  Elle  avait  fait  valoir  ces  prétentions 
pour  réclamer  une  plus  grande  indemnité  que  celle 
que  le  premier  plan  lui  avait  adjugée;  elle  obtint  cette 
augmentation,  mais  le  Recès  ne  comprit  pas  expres- 
sément ces  prétentions  dans  l'énumération  des  objets 
que  cette  maison  perdait ,  et  pour  lesquels  elle  était 
indemnisée*.  Elle  s'en  prévalut  pour  donner  suite  à 
son  procès  contre  la  maison  d'Arenberg,  et  le  gagna  ^ 

§  46. 

«  Tous  échanges^  purifications  de  territoire  et  trans- 
actions quelconques  des  princes,  États  et  membres 
de  l'Empire  entre  eux,  qui  auront  lieu  dans  le  terme 
d'un  an,  auront  même  force  et  exécution  que  s'ils 
étaient  effectivement  insérés  dans  le  présent  acte.  » 

«  Quant  au  sort  des  anciens  souverains  et  possesseurs, 
et  du  clergé  qui  en  dépend,  ainsi  que  de  leurs  anciens 
officiers,  tant  auliques  que  civils  et  militaires,  et 
quant  aux  obligations  particulières  des  princes  et  États 
indemnisés  concernant  l'entretien  convenable  desdits 
souverains  et  autres  individus,  les  constitutions  des 
pays ,  l'acquittement  des  dettes ,  et  en  particulier  le 
payement  de  la  contribution  destinée  à  l'entretien  de 

'  Voy.  ci-dessus,  p.  325. 

'■*  Voy.  (Daniels)  Der  45  Art.  des  R.  Deputations-schlusses  vom  25 
Hom.  1803  aus  den  Mmisterial-Noten  und  den  Verhandl.  der  çiusserord. 
R.  Deputation  erlautert,  Co\fï.  1805,  in-i". 


—  414  — 

la  Chambre  impériale,  lesquelles  obligations  commen- 
cent à  l'entrée  en  jouissance  effective  des  pays  donnés 
en  indemnité,  les  paragraphes  suivants  contiennent 
les  dispositions  arrêtées  à  leur  égard.  » 

Cet  article  est  le  dernier  dont  le  texte  français  con- 
stitue l'original. 

S  48. 

'<  Tous  les  souverains  dépossédés  conservent  leur 
dignité  personnelle  avec  le  rang  qui  y  est  attaché,  de 
même  que  la  jouissance  de  leur  immédiateté  per- 
sonnelle. )i 

Lorsque  par  la  suite  l'Empire  germanique  fut  dis- 
sous, on  traita  les  souverains  dépossédés  à  l'instar  de 
ceux  qu'on  appela  alors  médiatisés. 

S  49. 

«  Les  princes-évêques,  abbés  ou  prévôts  princiers, 
conservent  en  outre  la  juridiction  sur  les  personnes 
employées  à  leur  service,  de  manière  qu'ils  puissent, 
dans  les  causes  civiles,  choisir,  après  en  avoir  informé 
les  autorités  supérieures  du  pays,  le  tribunal  de  pre- 
mière instance  auquel  elles  devront  être  portées,  et, 
dans  des  cas  criminels,  prendre  les  premières  infor- 
mations. Les  causes  civiles  passeront,  quant  aux  au- 
tres instances,  aux  tribunaux  d'appel  du  souverain; 
dans  les  affaires  criminelles,  au  contraire,  lorsque  la 
compétence  sera  dûment  constatée,  le  prévenu  sera 
traduit  devant  les  tribunaux  criminels  du  pays.  Il  est 
entendu  que  tous  les  serviteurs  d'un  tel  prince  de- 
vront se  soumettre  aux  lois  existantes  du  pays  ou  qui 
pourront  être  rendues  par  la  suite,  et  particulièrement 
aux  ordonnances  de  police. 


—  415  — 

§  50. 

((  Il  est  assuré  à  tous  les  souverains  ecclésiastiques 
dépossédés,  à  vie  durante,  et  suivant  leurs  différents 
grades,  un  logement  gratuit  convenable  à  leur  rang  et 
état,  avec  l'ameublement  et  le  service  de  table.  Les 
princes-évêques  et  princes-abbés  du  premier  rang 
auront,  de  plus,  une  habitation  d'été.  Il  est  aussi 
entendu  que  tous  les  meubles  qui  leur  appartiennent 
en  propre  doivent  leur  être  laissés  entièrement,  mais 
que  ce  qui  appartient  à  l'État  doit  retourner  à  celui-ci 
après  leur  décès.  » 

§  51. 

La  sustentation  des  souverains  ecclésiastiques  dont 
les  pays  passent  en  entier  ou  en  majeure  partie  avec 
leurs  résidences  à  des  souverains  séculiers,  ne  peut 
être  déterminée,  vu  la  différence  de  leurs  revenus, 
qu'en  proportion  desdits  revenus;  en  conséquence,  il 
ne  peut  être  établi  qu'un  minimum  et  un  maximum, 
lesquels  sont  réglés  de  la  manière  suivante;  savoir  : 

«  1"  Pour  les  princes-évêques,  le  minimum  à  vingt 
mille,  et  le  maximum  à  soixante  mille  florins. 

f(  Pour  le  prince-évêque  de  Wiirzbourg,  en  sa  qua- 
lité de  coadjuteur  de  Bamberg,  en  sus  la  moitié  de  ce 
maximum. 

(f  2"  Pour  les  princes-abbés  et  prévôts  du  premier 
rang,  le  minimum  des  princes-évêques. 

c(  Pour  tous  les  autres  princes-abbés,  le  minimum  à 
six  mille,  et  le  maximum  à  douze  mille  florins, 

((  Pour  les  princesses-abbesses ,  le  minimum  à  trois 
mille,  et  le  maximum  à  six  mille  florins. 

«  3"  Pour  les  prélats  et  abbesses  d'Empire,  de  même 
que 


—  416  — 

«  4°  Pour  les  abbés  immédiats,  le  minimum  à  deux 
mille,  et  le  maximum  à  huit  mille  florins. 

«  Pour  toutes  ces  déterminations,  on  n'entend  point 
restreindre  la  générosité  des  nouveaux  souverains  : 
chacun  d'eux  est  libre  de  déterminer  ultérieurement 
ce  qu'il  croira  pouvoir  accorder  par  des  considérations 
et  égards  particuliers. 

«  LaDéputation  dEmpire  s'attend  que  les  nouveaux 
souverains  séculiers  lui  feront  connaître  positive- 
ment, au  plus  tard  dans  quatre  semaines,  comment 
ce  règlement  aura  été  exécuté  à  la  satisfaction  des 
souverains  dépossédés,  ou  devra  l'être  dans  la  suite 
par  les  prélatures  à  supprimer,  afin  que  si,  contre  son 
attente,  l'application  des  règles  ci-dessus  établies 
éprouvait  quelque  difficulté  pour  lune  ou  l'autre  dé- 
termination, la  Députation  pût  en  connaître.  » 

§  52. 

«  Les  évêques  suffragants  pourvus  de  prébendes,  les 
capitulaires  des  grands  chapitres,  dignitaires  et  cha- 
noines des  chapitres  nobles,  conserveront  à  vie  leurs 
habitations  chapitrales.  Les  dépenses  faites  pour 
l'achat  ou  le  droit  d'option  de  leurs  maisons,  devront 
être  bonifiées,  soit  à  eux,  soit  à  leurs  héritiers,  si  le 
souverain  veut  en  disposer  après  leur  décès.  Il  leur  est 
réservé,  en  outre,  la  propriété  particulière  de  leurs 
habitations  là  où  elle  leur  était  attribuée  par  l'obser- 
vance, n 

§  53. 

«  Pour  leur  sustentation  future,  on  devra  laisser 
aux  capitulaires  des  grands  chapitres,  dignitaires  et 
chanoines  des  chapitres  nobles,  les  neuf  dixièmes  du 
total  de  leurs  anciens  revenus,  et  à  chacun  en  parti- 


—  417  — 

culier  ce  dont  il  a  joui  jusqu'à  présent.  On  devra  éga- 
lement laisser  aux  vicaires  la  jouissance  de  leur  loge- 
ment actuel;  et,  attendu  qu'ils  sont  pour  la  plupart 
mal  payés,  celle  de  leurs  revenus  en  entier,  jusqu'à 
ce  qu'ils  soient  placés  dans  d'autres  emplois  ecclésias- 
tiques, à  charge  par  eux  de  continuer,  en  attendant, 
de  vaquer  au  service  de  l'église. 

w  Les  domiciliaires  qui  auront  déjà  joui  d'une  par- 
tie de  leurs  prébendes,  devront  être  traités  à  l'instar 
des  capitulaires,  quant  à  leur  quote  de  sustentation, 
et  ils  entreront  successivement  en  jouissance  des  pré- 
bendes à  mesure  qu'elles  viendront  à  vaquer,  à  moins 
que  le  souverain  ne  s'arrange  avec  eux  d'une  autre 
manière,  n 

§  54. 

«  Les  capitulaires  et  les  domiciliaires  des  grands 
chapitres,  ainsi  que  des  chapitres  nobles  et  médiats 
qui,  suivant  leurs  différents  statuts,  n'entrent  en 
jouissance  qu'après  l'expiration  des  années  de  carence j 
ou  à  la  suite  d'autres  circonstances,  pourvu  qu'ils  se 
trouvent  dans  la  possession  effective  de  leurs  prében- 
des, ont  les  mêmes  droits  que  ceux  qui  s'en  trouvent 
déjà  en  jouissance  réelle.  » 

§  55. 

«  Les  chanoinesses  conserveront  la  jouissance  de  ce 
qu'elles  ont  eu  jusqu'ici,  aussi  longtemps  que  les  nou- 
veaux souverains  ne  préféreront  pas  de  les  supprimer, 
moyennant  un  arrangement  à  déterminer  à  leur  satis- 
faction, n 

§  56. 

«  Les  dispositions  suivantes,  à  l'égard  des  person- 
nes au  service  des  princes ,  sont  également  applicables 
VII  ^  27 


—  418  — 

aux  serviteurs,  soit  ecclésiastiques,  soit  séculiers  des 
chapitres.  » 

§  57. 

«  Les  conventuels  des  abbayes  princières  et  immé- 
diates de  l'Empire  continueront  d'être  entretenus  dans 
quelque  communauté  d'une  manière  convenable  et 
conforme  à  leur  ancien  genre  de  vie.  Ceux  qui  en  sor- 
tiront avec  l'agrément  du  souverain  toucheront,  jus- 
qu'à ce  qu'ils  soient  autrement  établis,  une  pension 
de  trois  à  six  cents  florins,  suivant  les  revenus  de  leur 
fondation. 

«  Il  sera  pourvu  de  la  même  manière  à  la  sustenta- 
tion des  frères  lais.  Les  novices  qui  ne  sont  pas  en- 
core liés  par  des  vœux  peuvent  être  renvoyés  par  le 
souverain  avec  une  pension  proportionnelle  de  trois 
années.  » 

§  58. 

«  Les  précistes  impériaux  qui  ont  déjà  présenté 
leurs  titres  aux  chapitres,  et  qui  n'auront  pas  laissé 
passer  leur  tour  lorsqu'il  aura  lieu,  recevront,  en  cas 
de  vacance,  une  pension  proportionnelle. 

«  Cette  disposition  est  également  applicable  auxpa- 
nistes  qui  ont  un  droit  acquis  et  reconnu  sur  leurs  bé- 
néfices laïques.  » 

Une  des  prérogatives  dont  jouissait  l'Empereur  était 
le  droit  des  premières  prières,  en  vertu  duquel  il  dis- 
posait une  fois,  pendant  son  règne,  d'une  prébende 
dans  chaque  chapitre  et  couvent  immédiat  de  l'Em- 
pire, et  dans  les  chapitres  et  couvents  médiats  où  il 
exerçait  ce  droit  en  1 624.  Celui  qui  était  l'objet  de  la 
grâce  impériale  n'était  pas  obligé  à  prendre  la  pre- 
mière prébende  vacante,  et  pouvait  attendre  et  choisir 
celle  qui  lui  convenait. 


—  419  ~ 

Un  autre  droit  réservé  à  l'Empereur  était  celui  des 
lettres  de  partis ,  en  vertu  duquel  il  pouvait,  une  fois 
pendant  son  règne,  accorder  dans  chaque  couvent  une 
prébende  laïque.  Le  paniste  ou  porteur  d'une  telle 
lettre  de  grâce  recevait,  sa  vie  durant,  du  couvent, 
les  aliments,  le  logement  et  le  vêtement. 

S  59. 

«  Quant  aux  serviteurs  auliques,  ecclésiastiques  et 
séculiers ,  aux  militaires  et  aux  pensionnaires  des  sou- 
verains ecclésiastiques,  villes  impériales  et  corpora- 
tions immédiates,  que  le  souverain  dépossédé  n'aura 
pas  conservés  à  son  service  personnel,  ainsi  qu'aux 
serviteurs  des  Cercles  là  où  ceux-ci  subiraient  un  chan- 
gement, il  leur  est  conservé  à  tous  la  pleine  et  entière 
jouissance  à  vie  de  leurs  rang,  appointements  et  émo- 
luments légitimes;  et,  ces  derniers  cessant,  il  leur 
sera  alloué  une  bonification  à  régler  en  remplacement, 
à  charge  par  eux  de  se  laisser  employer ,  même  ail- 
leurs et  dans  d'autres  emplois,  au  gré  du  nouveau 
souverain,  et  d'après  leurs  talents  et  connaissances. 
Cependant  ceux  de  ces  serviteurs  qui  seraient  domici- 
liés dans  une  province  et  qu'on  voudrait  transférer 
contre  leur  gré  dans  une  autre,  auront  le  choix  de  se 
faire  porter  sur  l'état  des  pensions.  Dans  ce  dernier 
cas,  on  conservera  comme  pension  à  celui  qui  aura 
quinze  années  de  service,  ses  appointements  et  émo- 
luments en  entier;  à  celui  qui  aura  dix  années  de  ser- 
vice, la  moitié  de  ses  appointements.  Les  pensionnai- 
res actuels  continueront  de  toucher  leurs  pensions, 
à  moins  qu'il  n'y  ait  eu  récemment  des  abus  à  ce 
sujet. 

«  Si  le  nouveau  souverain  ne  voulait  pas  garder  à 
son  service  quelque  employé,  il  conservera  ses  ap- 


—  420  — 

pointements  à  vie;  mais  si,  depuis  le  24  août  de  cette 
année,  il  a  été  accordé  de  nouvelles  pensions,  des 
augmentations  de  traitements,  ou  bien  établi  de  nou- 
veaux traitements,  il  dépend,  comme  de  raison,  du 
nouveau  souverain  de  décider  s'il  juge  ces  concessions 
conformes  aux  principes  de  la  justice  et  d'une  bonne 
administration.  » 

§  60. 

«  La  Constitution  politique  actuelle  des  pays  à  sécu- 
lariser, en  tant  qu'elle  est  fondée  sur  des  conventions 
formelles  entre  le  souverain  et  le  pays  et  sur  d'autres 
lois  de  l'Empire,  sera  maintenue  intacte,  sans  que 
cependant  le  nouveau  souverain  ait  les  mains  liées 
pour  ce  qui  a  rapport  à  l'administration  civile  et  mi- 
litaire, à  son  amélioration  et  simplification.  » 

§  61. 

«  Les  régaliens,  domaines  épiscopaux,  possessions 
et  revenus  des  grands  chapitres  passent  au  nouveau 
souverain.  » 

5  62. 

«  Les  diocèses  archiépiscopaux  et  épiscopaux  restent 
dans  leur  état  actuel,  jusqu'à  ce  qu'il  soit  établi  une 
autre  organisation  diocésaine,  conformément  aux  lois 
de  l'Empire,  de  laquelle  dépendra  aussi  l'établisse- 
ment futur  des  chapitres  cathédraux.  » 

6  63. 

«  \S exercice  du  culte  actuel  de  chaque  pays  est  main- 
tenu et  mis  à  l'abri  de  toute  atteinte.  Il  est  laissé  en 
particulier,  à  chaque  religion,  la  possession  et  la  jouis- 
sance paisible  des  biens  d'église  et  fonds  d'écoles  qui 


—  421   — 

lui  appartiennent,  conformément  aux  stipulations  du 
traité  de  Westphalie.  Toutefois,  il  dépend  du  souve- 
rain de  tolérer  des  individus  d'un  autre  culte,  et  de 
leur  accorder  la  pleine  jouissance  des  droits  civils.  » 
Quoique  cet  article  reconnaisse  aux  souverains  le 
droit  de  tolérer  des  individus  d'un  autre  culte  et  de 
leur  accorder  la  pleine  jouissance  des  droits  civils,  il 
ne  renverse  pourtant  pas  les  barrières  que  le  traité  de 
Westphalie,  des  pactes  particuliers  et  des  lettres  re- 
versales  opposaient  au  droit  de  réforme  des  princes 
attachés  à  une  autre  religion  qu'à  celle  de  leurs  sujets. 
Ainsi  l'article  ne  donne  rien  aux  princes  en  matière 
ecclésiastique,  dont  ils  n'aient  été  en  possession  aupa- 
ravant. 

§  64. 
(f  Les  chapitres,  abbayes  et  couvents  médiats  dans  les 
pays  à  séculariser,  seront  traités  sur  le  pied  établi  ci- 
dessus  pour  les  immédiats,  c'est-à-dire  que  les  cha- 
noines des  chapitres  médiats  supprimés  conserveront, 
avec  leurs  habitations,  les  neuf  dixièmes  de  leur  revenu 
actuel.  Les  vicaires  le  conserveront  en  entier;  et  les 
domiciliaires,  les  neuf  dixièmes  de  ce  dont  ils  peuvent 
déjà  avoir  joui,  et  ils  succéderont  aux  capitulaires. 
Néanmoins,  les  chanoines  dont  le  revenu  n'excède  pas 
en  totalité  huit  cents  florins,  le  conserveront  en  entier 
à  l'instar  des  vicaires.  Les  abbés  dont  l'immédiateté 
a  jusqu'ici  été  contestée,  ou  qui  sont  incontestable- 
ment médiats,  recevront  proportionnellement  au  re- 
venu de  leurs  abbayes,  une  pension  de  deux  à  huit 
mille  florins;  leurs  conventuels  et  ceux  des  autres  cou- 
vents, trois  à  six  cents  florins.  Les  frères  lais  et  no- 
vices seront  traités  sur  le  même  pied  établi  ci-dessus 
pour  ceux  des  fondations  immédiates.  Ce  qui  a  été 
stipulé  à  l'égard  des  employés  en  général,  s'applique 
également  aux  serviteurs  de  toutes  ces  corporations. 


—  422  — 

§  65. 

c(  Les  fondations  pieuses  et  de  charité  seront  conser- 
vées comme  toute  propriété  particulière,  en  restant 
toutefois  soumises  à  la  surveillance  et  à  l'autorité  des 
souverains.  » 

§  66. 

«  Afin  de  garantir  autant  que  possible  la  subsis- 
tance de  ce  grand  nombre  de  personnes  de  distinction 
et  autres  victimes,  les  nouveaux  souverains  devront 
assigner  tous  ces  fonds  de  sustentation  sur  les  recettes 
les  plus  à  leur  portée ,  et  les  faire  acquitter  par  tri- 
mestre et  sans  retard,  comme  ayant  l'iiypothèque  la 
plus  privilégiée  sur  les  revenus  du  pays ,  en  bonnes 
espèces,  sur  le  pied  de  vingt-quatre  florins  au  marc. 
En  conséquence,  ils  ne  pourront  pas  permettre  à  leurs 
tribunaux  de  saisir  ces  fonds  alimentaires.  » 

§  67. 

«  Les  directoires  des  cercles  sont  chargés  de  veiller 
à  Vexécution  de  toutes  ces  stipulations ,  et  de  décréter 
et  faire  effectuer,  à  la  première  réquisition  des  pen- 
sionnaires, sans  accorder  de  délai  ni  admettre  d'op- 
position, l'exécution  contre  les  autorités  déléguées  à 
cet  effet,  qui  ne  pourront  pas  justifier  du  payement 
par  la  quittance;  et,  dans  le  cas  où  ces  payements  cour- 
raient quelques  risques ,  de  prendre  les  revenus  en 
administration  immédiate  en  tant  qu'ils  seraient  né- 
cessaires pour  cet  objet.  » 

§  68. 

«  Quant  aux  pays  ecclésiastiques  qui  ne  passent 
pas  en  totalité  ou  en  majeure  partie,  avec  leurs  rési- 


—  423  — 

dences,  à  un  seul  souverain  séculier,  mais  qui  sont 
répartis  entre  plusieurs ,  et  dont  les  résidences  et  la 
plus  grande  partie  du  territoire  se  trouvent  sur  la  rive 
droite  du  Rhin,  les  principes  établis  ci-dessus  sont 
également  applicables,  tant  à  la  sustentation  des  per- 
sonnes lésées  par  ces  changements,  qu'à  la  sûreté  des 
serviteurs,  à  la  garantie  du  culte,  etc.  La  répartition 
des  sommes  fixées  pour  cette  sustentation  et  les  fonds 
sur  lesquels  elles  seront  assignées,  exigent  cependant, 
pour  ces  pays,  de  nouvelles  dispositions  particulières. 
En  conséquence ,  les  charges  spécialement  affectées  à 
quelques  districts,  telles  que  l'entretien  d'un  couvent 
médiat,  celui  des  employés  et  serviteurs  d'un  bail- 
liage, etc.,  seront  supportées  par  les  seuls  souverains 
auxquels  ce  district  aura  été  dévolu.  La  sustentation 
des  personnes  dépendantes  des  chapitres  cathédraux 
et  des  corporations  ecclésiastiques  et  séculières  qui 
possédaient  des  fonds  en  propre  ne  peut,  dans  un  pays 
ecclésiastique  démembré,  être  supportée  par  toute  la 
masse,  mais  uniquement  par  ceux  qui  acquièrent  les 
biens  et  revenus  desdits  chapitres  cathédraux  et  cor- 
porations, et  sera  répartie  entre  eux  proportionnelle- 
ment. 

«  Il  ne  reste  donc  à  répartir,  entre  tous  les  nouveaux 
possesseurs  d'un  tel  pays,  que  les  charges  qui  concer- 
nent la  totalité  dudit  pays,  auxquelles  charges  appar- 
tient principalement  la  sustentation  du  souverain  ec- 
clésiastique dépossédé.  Tous  les  copartageants  devront 
s'entendre  à  ce  sujet  le  plus  tôt  possible.  Dans  le  cas' 
cependant  oii  ils  ne  pourraient  pas  s'arranger  à  l'amia- 
ble dans  l'espace  de  quatre  semaines,  les  princes  con-- 
voquant  des  cercles,  et,  dans  les  cercles  du  haut  et- 
du  bas  Rhin  qui  sont  particulièrement  dans  ce  casy 
Mayence  et  Hesse-Caséel,  examineront  conjointement 
ces  objets,  et  arrêteront  les  dispositions  nécessaires.  «»' 


—  424  — 

Nous  verrons,  à  l'occasion  de  V article  29  de  l'acte 
de  la  Confédération  du  Rhin,  quels  ont  été  les  résultats 
de  la  commission  dont  les  électeurs  de  Mayence  et  de 
Hesse-Cassel  furent  chargés  par  cet  article. 

S  69. 

«  Quant  aux  pays  dont  les  souverains  ecclésiasti- 
ques ont  perdu  leur  résidence  sur  la  rive  gauche  du 
Rhin  avec  lesdits  pays  y  situés,  mais  qui  ont  cepen- 
dant encore  conservé  des  possessions  considérables 
sur  la  rive  droite,  on  doit  principalement  avoir  égard 
à  S.  A.  Électorale  de  Trêves,  comme  Électeur  d'Em- 
pire, à  son  grand  chapitre  et  à  ses  serviteurs.  Comme 
les  restes  des  pays  et  revenus  de  l'électorat  sur  la  rive 
droite  ne  suffisent  pas,  à  beaucoup  près,  pour  sub- 
venir à  cette  sustentation,  d'autant  plus  que  le  grand 
chapitre  de  Trêves  n'a  pas  conservé  de  fonds  particu- 
lier sur  cette  rive,  l'entretien  de  Son  Altesse  Électorale 
est  fixé  à  cent  mille  florins. 

((  Le  collège  électoral,  y  compris  les  nouveaux  élec- 
teurs à  introduire,  est  invité  à  se  charger  de  cette 
somme,  à  la  payer  annuellement  à  l'électeur  de 
Trêves  à  des  époques  déterminées,  et  à  statuer  sur  le 
règlement  de  cet  objet  par  un  arrêté  particulier  du 
collège  électoral.  Il  est,  déplus,  arrêté  que  la  ville  im- 
périale d'Augsbourg  laissera  à  vie  à  Son  Altesse  Électo- 
rale son  château  épiscopal  et  les  bâtiments  nécessaires 
pour  les  personnes  à  son  service,  avec  l'ameublement 
actuel  et  les  immunités  dont  ce  prince  a  joui  jusqu'à 
présent,  dans  toute  leur  étendue.  » 

§  70. 

i(  Les  nouveaux  possesseurs  des  restes  du  pays  de 
Trêves  étant  entièrement  dispensés  de  contribuer  à 


--  425  — 

cette  sustentation,  devront  se  charger  d'une  part  pro- 
portionnellement plus  grande  pour  la  sustentation  du 
grand  chapitre  et  des  serviteurs  de  Trêves.  Mayence 
et  Hesse-Cassel  sont  également  chargés  de  déterminer 
leur  juste  quote-part  à  ces  pensions.  » 

§  71. 

«  Le  règlement  de  la  sustentation  du  grand  chapitre 
de  Cologne  devra,  à  l'instar  de  celui  de  Trêves,  être 
non-seulement  proportionné  aux  possessions  et  reve- 
nus dudit  chapitre  sur  la  rive  droite,  mais  on  aura 
aussi  égard  à  ce  que  les  nouveaux  possesseurs  ne  sont 
pas  dans  le  cas  d'entretenir  un  prince  sur  les  revenus 
des  pays  qui  leur  sont  dévolus;  en  conséquence,  les 
commissaires  sus- mentionnés  devront  chercher  à 
pourvoir  à  la  sustentation  convenable  du  grand  cha- 
pitre de  Cologne,  d'après  les  considérations  établies 
ci-dessus.  » 

§  T2. 

c(  Tout  ce  qui  a  été  établi  pour  les  ecclésiastiques 
qui  passent  en  totalité  ou  en  majeure  partie  avec  les 
résidences  des  anciens  souverains  à  un  souverain  sé- 
culier, ou  qui  ne  passent  ni  en  totalité  ni  en  majeure 
partie,  avec  les  résidences,  à  un  possesseur  séculier, 
mais  qui  sont  répartis  entre  plusieurs,  et  dont  les  ré- 
sidences et  la  plus  grande  partie  du  pays  sont  situées 
sur  la  rive  droite  du  Rhin,  est  également  applicable  à 
tous  les  autres  souverains  ecclésiastiques,  grands  cha- 
pitres, serviteurs,  chapitres,  fondations  et  couvents 
médiats,  corporations  ecclésiastiques  et  séculières, 
constitutions  civile  et  ecclésiastique,  compris  dans 
cette  classe.  Il  est  entendu  toutefois  que  la  sustenta- 
tion de  toutes  les  personnes  appartenant  à  cette  classe, 
dont  les  fonds  ne  sont  pas  situés  en  entier  sur  la 


—  426  — 

rive  droite,  ne  peut  pas  être  ausai  considérable  que 
celle  des  personnes  désignées  ci-dessus,  mais  qu'elle 
sera  principalement  déterminée  d'après  les  revenus 
qui  leur  restent  sur  cette  rive.  En  conséquence,  la 
sustentation  de  ces  chapitres  et  couvents  ne  peut  être 
généralement  fixée  aux  neuf  dixièmes  de  leurs  anciens 
revenus.  » 

§  73. 

«  Les  serviteurs  qui  n'ont  pas  d'emploi  local  dans 
les  bailliages  de  la  rive  droite  ne  peuvent  attendre 
quelque  secours  des  nouveaux  possesseurs  que  dans 
la  proportion  des  parties  de  territoire  restant  sur  cette 
rive,  comparées  à  tout  le  pays,  à  moins  qu'à  l'instar 
des  serviteurs  électoraux  de  Cologne,  employés  sur 
la  rivG  droite  du  Rhin,  ils  n'aient  été  appelés  expres- 
sément par  leurs  souverains  pour  l'administration 
des  pays  de  ladite  rive,  dans  lequel  cas  on  leur  conti- 
nuera leurs  appointements  en  entier.  » 

§  74. 

(t  Cette  disposition  est,  en  général,  restreinte  aux 
capitulaires  et  aux  serviteurs  qui  ont  suivi  leurs  sou- 
verains sur  la  rive  droite  du  Rhin,  et  qui  n'ont  point 
établi  depuis  leur  domicile  sur  la  rive  gauche,  prin- 
cipe qui  doit  être  appliqué  généralement.  Cependant 
les  chanoines  qui  n'ont  pas  passé  sur  la  rive  droite 
du  Rhin,  mais  qui  sont  restés  à  leurs  cathédrales, 
seront  assimilés  à  ceux  qui  ont  passé  ce  fleuve,  dans 
le  cas  où  ils  s'établiraient  dans  la  suite  sur  la  rive 
droite.  » 

S  75. 

((  Quant  aux  souverains  ecclésiastiques  auxquels  il 
reste  très-peu  de  pays  et  de  revenus  à  la  rive  droite 


—  427  — 

du  Rhin,  tels  que  le  prince-évêque  de  Baie,  et  à  leurs 
grands  chapitres  et  serviteurs,  ou  qui  ont  tout  perdu 
sur  la  rive  gauche,  tels  que  le  prince-évêque  de  Liège, 
il  est  nécessaire  de  déterminer  un  fonds  particulier 
pour  leur  sustentation  convenable.  En  conséquence, 
la  sustentation  du  prince-évêque  de  Liège,  dont  la 
situation  est  unique,  est  fixée  à  vingt  mille  florins. 
Les  princes-évêques  qui  étaient  en  possession  de  deux 
ou  plusieurs  évêchés,  contribueront,  pour  la  forma- 
tion de  cette  somme,  du  dixième  de  la  pension  qu'ils 
tirent  pour  l'un  de  leurs  évêchés.  Ils  consacreront 
également  un  vingtième  des  revenus  d'un  de  leurs 
évêchés  pour  former  la  moitié  de  ce  minimum,  c'est- 
à-dire  dix  mille  florins  pour  le  prince-évêque  de  Baie, 
vu  qu'il  ne  lui  est  resté  que  quelques  parcelles  de 
son  pays  sur  la  rive  droite  du  Rhin.  Dans  le  cas  où 
l'un  des  princes-évêques  contribuant  d'un  dixième 
et  d'un  vingtième  sur  un  de  ses  bénéfices  en  faveur 
des  princes-évêques  de  Liège  et  de  Baie,  viendrait  à 
mourir  avant  l'un  de  ces  derniers,  le  prince  territorial 
à  qui  une  telle  pension  retomberait  serait  chargé 
de  continuer  auxdits  princes-évêques  le  payement 
du  dixième  et  du  vingtième  qui  leur  reviennent.  Les 
princes-évêques  de  Baie  et  de  Liège  sont,  en  outre, 
recommandés  à  la  collation  des  premiers  sièges  épi- 
scopaux  disponibles.  Il  leur  sera  toutefois  libre  d'ac- 
cepter ou  non  des  évêchés,  sans  que,  dans  aucun 
cas,  il  puisse  leur  être  tenu  compte  sur  les  revenus  de 
l'èvêché  de  leur  somme  de  sustentation  déjà  fixée  au 
minimum. 

«  Les  deux  sommes  sus-mentionnées  seront  fournies 
d'après  la  répartition  suivante  par  MM.  les  princes- 
évêques;  savoir  : 

«  L'archevêque  de  Trêves  donnera  de  sa  pension  de 
soixante  mille  florins,  comme  évêque  d'Augsbourg; 


—  428  — 

savoir  :  à  l'évêque  de  Baie,  trois  mille  florins  ;  à  l'é- 
vêque  de  Liège,  six  mille  florins. 

((  Plus,  comme  prévôt  d'Elwangen ,  de  sa  pension 
de  vingt  mille  florins,  à  l'évêque  de  Baie,  mille  flo- 
rins; à  celui  de  Liège,  deux  mille  florins. 

«  L'évêque  de  Wiirzbourg,  de  sa  pension  de  trente 
mille  florins,  comme  coadjuteur  de  Bamberg,  à  l'évê- 
que de  Baie,  mille  cinq  cents  florins;  à  celui  de  Liège, 
trois  mille  florins. 

«  L'évêque  de  Hildesheim  et  Paderborn  reçoit  pour 
ces  deux  sièges  cinquante  mille  écus  de  PrussC;,  ou 
quatre-vingt  mille  florins  :  ainsi,  de  la  moitié  il  don- 
nera deux  mille  florins  à  Baie  et  quatre  mille  à  Liège. 

((  L'évêque  de  Ratisbonne,  de  sa  pension  de  vingt 
mille  florins,  pour  Freysingen,  mille  florins  à  Baie,  et 
deux  mille  florins  à  Liège. 

«  Le  même,  de  celle  de  vingt  mille  florins  pour  la 
prévôté  de  Berchtolsgaden,  mille  florins  à  Baie,  deux 
mille  florins  à  Liège. 

«  L'Électeur-Archichancelier,  de  sa  pension  de  dix 
mille  florins,  comme  prince-évêque  de  Constance, 
cinq  cents  florins  à  Baie,  mille  à  Liège. 

«  A  l'égard  des  grands  chapitres  et  serviteurs  aux- 
quels les  nouveaux  princes  territoriaux,  en  raison  de 
leurs  biens  et  revenus  situés  sur  la  rive  droite  du 
Rhin,  ne  seraient  pas  en  état  de  fournir  leur  susten- 
tation nécessaire,  tels  que  ceux  de  Cologne ,  Trêves, 
Worms,  Liège,  Baie,  Spire,  Strasbourg  et  autres  qui 
se  trouvent  dans  le  même  cas,  il  sera  formé  pour  eux 
une  caisse  particulière,  pour  laquelle  il  sera  retenu, 
à  chaque  chanoine  ayant  plus  d'une  prébende,  deux 
dixièmes  de  chaque  neuf-dixième  qu'ils  ont  à  retirer 
de  cette  prébende;  laquelle  caisse  sera  confiée  à  l'É- 
lecteur-Archichancelier  de  l'Empire,  pour  la  distribu- 
tion en  être  faite  par  lui  dans  de  justes  proportions,  et 


—  429  — 

de  manière  à  satisfaire  à  cet  objet  autant  que  les  fonds 
pourront  le  permettre.  N'en  seront  pas  moins  tenus 
pour  cela  les  princes  territoriaux  qui  reçoivent  les 
restes  de  ces  pays,  ainsi  que  des  revenus  des  grands 
chapitres  et  autres  corporations,  de  pourvoir  propor- 
tionnellement à  l'entretien  des  parties  souffrantes.  » 

Pour  l'administration  de  cette  caisse  de  sustenta- 
tion, l'Archichancelier  établit  une  commission  parti- 
culière qui  siégea  d'abord  à  Ratisbonne,  et  fut  ensuite 
transférée  à  Francfort. 

On  voit,  par  un  rapport  que  le  chef  de  cette  com- 
mission fit,  le  31  décembre  1810,  à  l'Archichancelier, 
devenu  alors  grand-duc  de  Francfort,  que,  pendant 
les  années  1803  à  1809,  la  caisse  de  sustentation  n'a 
pu  payer  que  le  minimum  des  pensions  fixées  par  ce 
paragraphe  î  mais,  dans  le  courant  de  cette  dernière 
année,  elle  éprouva  un  déficit  si  considérable,  qu'au 
lieu  de  quatre-vingt-treize  mille  cinq  cent  soixante- 
treize  florins  montant  du  maximum  pour  cent  vingt- 
deux  personnes,  ou  au  moins  de  soixante-huit  mille 
huit  cent  quarante  et  un  qui  étaient  le  minimum, 
on  n'a  pu  payer,  en  1810,  que  vingt-quatre  mille 
cent  quatre-vingt-neuf  florins,  et  la  recette  probable, 
pour  1811,  était  encore  au-dessous  de  cette  somme. 
L'incorporation  de  l'évêché  de  Munster,  dans  le 
grand-duché  de  Berg,  avait  fait  tarir  la  source  des 
revenus  que  la  caisse  tirait  auparavant  de  ce  pays.  Il 
en  fut  de  même  pour  le  royaume  de  Westphalie,  où 
des  titulaires  cessèrent  de  contribuer  après  le  décret  de 
Jérôme  Bonaparte,  du  29  octobre  1810,  supprimant 
tous  les  chapitres.  Le  chapitre  d'Osnabriick  discon- 
tinua également  de  fournir  son  contingent,  après 
que  cette  principauté  eut  été  incorporée  à  l'Empire 
français. 


—  430  — 

§  76. 

«  Enfin,  quant  aux  ecclésiastiques  et  serviteurs  dont 
les  corporations  ont  été  supprimées  sur  la  rive  gauche 
du  Rhin,  et  qui  ont  cependant  encore  plus  ou  moins 
de  biens  sur  la  rive  droite,  biens  qui  sont  mis  à  la 
disposition  des  nouveaux  souverains  locaux,  il  est 
entendu  que  lesdits  souverains,  autant  que  ces  revenus 
y  suffiront,  sont,  à  l'instar  de  tous  les  autres  nou- 
veaux possesseurs,  chargés  de  la  sustentation  des 
personnes  qui,  étant  nées  sur  la  rive  droite  du  Rhin, 
y  ont  été  renvoyées  par  le  gouvernement  français  sans 
pension,  pour  y  être  entretenues,  ou  qui  se  sont  déjà 
établies  sur  cette  rive  pendant  la  guerre  à  cause  de 
ces  revenus  et  de  leur  administration,  ainsi  que  pour 
leur  subsistance,  et  qui  en  ont  effectivement  joui 
jusqu'à  présent.  En  conséquence,  ils  sont  tenus  de 
laisser,  à  vie  durante,  à  ces  infortunés,  la  jouissance 
desdits  revenus,  auxquels  ils  ont  un  droit  fondé,  et  il 
ne  pourra  en  être  disposé  qu'après  leur  décès.  » 

§  77. 

«  Comme  il  est  nécessaire,  pour  rassurer  les  créan- 
ciers, de  pourvoir  aux  dettes  affectées  aux  pays  don- 
nés en  indemnité,  il  est  entendu  que,  dans  les  pays 
qui  passent  en  entier  d'un  souverain  ecclésiastique  à 
un  souverain  séculier,  ce  dernier  doit  se  charger  de 
toutes  ces  dettes,  tant  domaniales  que  territoriales, 
les  acquitter,  et  en  payer  les  intérêts  sur  ses  nouveaux 
revenus  et  impositions ,  de  la  même  manière  que  le 
souverain  ecclésiastique  aurait  été  tenu  de  le  faire.  » 

S  78. 

«  Dans  les  pays  ecclésiastiques  partagés  entre  plu- 
sieurs, le  créancier  auquel  il  a  été  assigné  une  hypo- 


—  431  -- 

thèque  spéciale  peut  s'en  tenir  à  cette  hypothèque, 
de  manière  que  les  copartageants  d'un  tel  pays  qui 
sont  nantis  de  cette  hypothèque  spéciale,  soient  obli- 
gés de  lui  en  payer  provisoirement  les  intérêts.  Ces 
dettes,  ainsi  que  celles  qui  n'ont  qu'une  hypothèque 
générale,  ou  versionem  in  rem,  et  enfin  celles  qui  ont 
perdu  leurs  hypothèques  spéciales,  telles  que  les 
péages,  seront  ensuite  réparties  comme  dettes  géné- 
rales du  pays  entre  tous  les  copartageants  dudit  pays, 
en  quotes-parts  proportionnelles,  savoir  les  dettes 
domaniales  à  raison  du  produit  des  domaines,  et 
les  dettes  territoriales  d'après  le  rôle  des  contribu- 
tions. » 

s  79. 

«  Mais  afin  que  les  créanciers  ne  soient  pas  obligés 
d'attendre  le  payement  de  ces  intérêts  jusqu'à  cette 
répartition,  il  est  établi,  à  l'égard  des  capitaux  dé- 
pourvus d'hypothèque  spéciale,  que  le  possesseur  du 
chef -lieu  ou  de  la  plus  grande  partie  du  pays  acquit- 
tera provisoirement  ces  intérêts  jusqu'à  la  liquidation 
définitive,  à  moins  que  les  copartageants,  là  où  les 
parts  ne  sont  pas  très-inégales,  ne  s'entendent  provi- 
soirement entre  eux  sur  le  payement  des  intérêts  de 
ces  capitaux.  » 

§  80. 

«  Lorsque  les  pays  ecclésiastiques  dont  les  dettes 
sont  à  régler  se  trouvent  en  partie  sur  la  rive  gauche 
du  Rhin,  les  dettes  territoriales  qui  ont  leur  hypo- 
thèque spéciale  sur  la  rive  gauche,  ou  qui  sont  dans 
le  cas,  d'après  le  traité  de  Lunéville,  de  passer  à  la 
République  française,  seront  préalablement  déduites 
de  la  masse  à  répartir  des  dettes  d'un  tel  pays.  » 


—  432  — 

§  81. 

«  Si  de  nouvelles  dettes  ont  encore  été  contractées 
quelque  part  après  le  24  août  de  cette  année,  leur 
acquittement  tiendra  à  la  question  de  savoir  si  l'avan- 
tage ou  les  besoins  réels  de  l'État  ont  exigé  ces  em- 
prunts. » 

S  82. 

«  Quant  aux  dettes  de  cercles  entiers ,  nommément 
de  ceux  situés  entièrement  sur  la  rive  droite  du  Rhin, 
tels  que  les  cercles  de  Franconie  et  de  Souabe,  tous 
les  pays  qui  en  ont  jusqu'ici  fait  partie  restent  char- 
gés du  payement  de  ces  dettes;  mais  lorsque  quelque 
pays  ecclésiastique  du  cercle  est  partagé  entre  plu- 
sieurs souverains  séculiers,  il  est  également  nécessaire 
de  régler  le  plus  tôt  possible ,  pour  chaque  portion 
d'un  tel  pays,  sa  quote  matriculaire  aux  prestations 
de  l'Empire  et  du  cercle,  et  ce  sera  d'après  cette  échelle 
que  les  nouveaux  possesseurs  concourront  à  l'amortis- 
sement des  dettes  du  cercle  et  au  payement  des  inté- 
rêts. En  attendant  que  cette  répartition  ait  eu  lieu,  la 
contribution  de  tous  ces  pays  démembrés  aux  presta- 
tions du  cercle  et  au  payement  des  intérêts  des  dettes, 
sera  acquittée  de  la  manière  établie  ci-dessus  à  l'égard 
des  dettes  territoriales  des  pays  démembrés.  » 

§  83. 

«  Enfin,  quant  aux  dettes  contractées  par  les  cercles 
du  haut  et  bas  Rhin,  situés  l'un  et  l'autre  sur  les  deux 
rives  de  ce  fleuve;  savoir,  par  le  cercle  du  bas  Rhin, 
immédiatement  avant  la  guerre,  et  par  celui  du  haut 
Rhin,  pendant  et  pour  la  guerre,  les  créanciers  de  ces 
deux  cercles  sont,  eu  égard  aux  circonstances,  en  droit 
de  s'en  tenir,  pour  le  remboursement  de  leurs  capi- 


—  433  — 

taux  et  intérêts,  aux  pays  des  deux  cercles  situés  à  la 
rive  droite.  Les  souverains  des  pays  situés  sur  cette 
rive ,  et  qui  appartiennent  à  l'un  ou  à  l'autre  de  ces 
cercles,  devront  s'entendre  entre  eux  sur  l'acquitte- 
ment de  ces  capitaux  et  de  leurs  intérêts.  Il  sera,  à 
cet  effet,  préalablement  nécessaire  de  poursuivre  la 
rentrée  aux  caisses  générales  et  particulières,  établies 
dans  le  cercle  du  haut  Rhin,  des  arrérages  exigibles, 
en  tant  qu'il  n'existe  pas  d'exception  valable,  lesquels 
arrérages  devront  être  affectés  au  payement  des  inté- 
rêts et  des  capitaux.  Le  surplus  sera  acquitté  en  mois 
romains  ordinaires  du  cercle,  par  les  pays  qui  en  font 
encore  partie.  » 

§  84. 

«  Dans  le  cas  où  la  quote  matriculaire  des  pays  de 
cercles  situés  sur  la  rive  gauche  auxdites  dettes  ne 
serait  pas  comprise  par  la  République  française  dans 
la  catégorie  de  celles  dont  elle  devra  se  charger,  la 
part  des  pays  séculiers  des  cercles  situés  sur  cette 
rive  sera  ajoutée  à  celles  dont  les  États  d'Empire  in- 
demnisés doivent  se  charger,  sans  en  grever  leurs  nou- 
veaux, sujets;  et  la  part  seule  des  pays  ecclésiastiques 
aux  dettes  des  cercles  ne  sera  pas  transférée,  et  aug- 
mentera la  masse  des  dettes  du  reste  des  pays  du  cer- 
cle situé  sur  la  rive  droite,  parce  qu'il  n'est  point 
donné  d'indemnités  pour  ces  pays.  » 

La  commission,  établie  par  le  paragraphe  88,  s'as- 
sembla effectivement  le  6  mars  1804,  et  fut  réunie 
jusqu'au  31  août  1806;  elle  augmenta  la  masse  des 
dettes  des  deux  cercles  du  Rhin  d'un  capital  de  qua- 
rante-trois mille  deux  cent  trois  florins,  pour  les  frais 
qu'elle  occasionna. 

VII  28 


—  434  — 

S  89. 

u  Enfin  on  s'en  repose  sur  l'Empereur  et  l'Empire 
du  soin  de  statuer  le  plus  tôt  possible  et  définitive- 
ment sur  le  rapport  principal  dudit  tribunal,  relative- 
ment à  sa  sustentation,  et  d'en  déterminer  légalement 
l'organisation,  en  raison  de  la  diminution  des  fonds 
affectés  à  son  entretien  et  des  changements  survenus. 

«  Fait  à  Ratisbonne,  le  25  février  1 803.  » 

Ainsi  fut  terminée  l'œuvre  de  la  régénération  de 
l'Empire  confiée  à  la  Députation  extraordinaire  de  Ra- 
tisbonne. Six  mois  avaient  suffi  pour  aplanir  toutes  les 
difficultés  et  pour  construire  un  édifice  que  l'Allema- 
gne, abandonnée  à  elle-même,  n'aurait  peut-être  ja- 
mais achevé.  Le  Recès  de  la  Députation  était  en  grande 
partie  l'ouvrage  des  ministres  étrangers  qui ,  dans  le 
cours  de  cette  négociation ,  agirent  quelquefois  plutôt 
comme  des  maîtres  annonçant  leur  volonté  que  comme 
des  médiateurs  chargés  de  concilier  des  intérêts  oppo- 
sés. Toutefois  ils  ne  se  montrèrent  aussi  absolus  que 
dans  les  questions  touchant  à  la  politique  de  leurs 
gouvernements  j  pour  ce  qui  tenait  au  régime  intérieur 
de  l'Allemagne,  ils  se  bornèrent  à  donner  des  avis, 
laissant  aux  subdélégués  le  soin  de  les  débattre.  Ainsi 
les  articles  purement  réglementaires  de  cette  loi  sont 
presque  uniquement  dus  aux  subdélégués;  ils  témoi- 
gnent de  l'esprit  de  justice  et  des  sentiments  d'huma- 
nité qui  animaient  leurs  auteurs.  Quoique  souvent  di- 
visée d'opinion  et  obligée  parfois  à  sacrifier  ses 
principes,  la  Députation,  tout  en  cédant  à  l'empire  des 
circonstances,  a  maintenu  la  dignité  qui  convenait 
aux  représentants  d'une  grande  nation.  Les  noms  des 
subdélégués  de  Ratisbonne  seront  inscrits  avec  hon- 


—  435  — 

neurs  dans  les  fastes  de  la  Diplomatie.  Parmi  ces 
hommes  d'État  que  leurs  talents  recommandent  à  la 
publique  estime,  on  distinguera  surtout  le  ministre 
directorial  qui  n'a  cessé  de  faire  preuve  d'une  impar- 
tialité difficile  à  conserver  au  milieu  de  tant  d'inté- 
rêts divers,  et  d'un  esprit  de  méthode  et  de  clarté  qui 
a  puissamment  contribué  à  l'accélération  des  travaux 
de  l'assemblée.  L'ouvrage  de  ces  ministres  cependaut 
fut  de  peu  de  durée,  mais  à  cet  égard  leur  prévoyance 
et  leur  patriotisme  sont  à  l'abri  de  toute  atteinte;  les 
événements  qui  vont  se  développer  nous  montreront 
bientôt  les  causes  de  la  fragilité  de  leur  œuvre. 


SECTION  IV. 

liVÉNEMENTS   POSTÉRIEURS   AU    RKCÈS   DE   LA   DÉPUTATION   DE   L'EMPIRE. 

Ralificalion  du  Recès  par  l'Empereur  et  l'Empu-e.  — Dissolution  de  la  Dé- 
pulalion  de  l'Empire.  —  Traités  d'épuration.  —  Introduction  des  nou- 
veaux Électeurs.  — Discussion  sur  l'organisation  du  Collège  des  Princes. 
—  Conleslalions  sur  le  droit  d'épave.  —  Convention  de  Ratisbonne,  du 
2  juin  1804,  enlre  l'Autriche  et  le  WUrlemberg.  —  Convention  du 
23  juin  1804,  entre  l'Autriche  et  Nassau-Orange.  —  Commission  execu- 
tive de  Francfort.  —  Différend  au  sujet  de  la  Noblesse  immédiate.  — 
Conservatorium  du  2.3  janvier  180'f.  —  Subdélégalion  de  Ratisbonne; 
baron  d'Albini  ;  baron  de  Globig  ;  baron  de  Gemmingen  ;  baron  de  Hiï- 
gel  ;  comte  de  Sfadion.  — Communication  finale  de  M.  Bâcher. 

En  transmettant,  le  25  février  1 803,  aux  ministres 
de  Russie  et  de  France  le  Recès  qu'on  vient  de  lire, 
le  plénipotentiaire  impérial  ajouta  que  l'Empereur  se 
réservait  de  faire  connaître  à  la  Diète  de  l'Empire  ses 
sentiments  sur  quelques  nouveaux  articles  qui  avaient 
été  introduits  dans  le  conclusum  général  de  laDéputa- 
tion,  et  qui  ne  découlaient  pas  de  la  convention  du 
26  décembre  1802,  ou  n'étaient  point  relatifs  à  l'affaire 
des  indemnités;  que  les  délibérations  de  la  Diète  à  la- 
quelle une  partie  de  cet  acte  avait  déjà  été  portée  ne 
manqueraient  pas  d'avoir  promptement  un  résultat  dé- 
finitif, et  qu'en  attendant  il  devait  déclarer  que,  d'après 
sa  manière  de  voir,  tout  ce  qui  ,se  rapportait  à  la  pro- 
position d'accorder  de  nouvelles  voix  viriles  dans  le 
collège  des  Princes,  devait  être  entièrement  abandonné 
à  l'Empereur  et  à  l'Empire. 

Les  délibérations  de  la  Diète  ne  furent  pas  longues. 
Le  24  mars  elle  donna  son  Avis  pour  1°  approuver 
au  nom  de  l'Empire  le  conclusum  de  la  Députation  ; 
2"  confirmer  les  lois  fondamentales  de  l'Empire  sub- 


—  437  — 

sistantes,  spécialement  la  paix  de  Westphalie  et  tous  les 
traités  subséquents,  en  tant  qu'il  n'y  avait  pas  été  ex- 
pressément dérogé;  3"  maintenir  pour  l'avenir  la  Con- 
stitution de  l'Empire  germanique,  dans  tous  les  autres 
points  auxquels  il  n'avait  point  été  porté  formellement 
atteinte,  tels  qu'ils  avaient  jusqu'ici  subsisté  pour  les 
Électeurs,  Princes  et  États  de  l'Empire,  y  compris 
aussi  l'Ordre  Teutonique  et  la  Noblesse  immédiate. 

Le  décret  de  commission,  par  lequel  l'Empereur  ra- 
tifia cet  Avis,  et  qui  lui  donna  la  forme  d'un  conclu- 
sum  ou  loi  obligatoire,  est  du  27  avril  1803.  Aux 
réserves  faites  dans  l'Avis,  l'Empereur  en  ajouta  plu- 
sieurs autres  : 

r  Que  la  convention  du  26  décembre  1802  sera 
maintenue  dans  toute  sa  vigueur  et  dans  toutes  ses 
obligations,  d'après  le  texte  littéral  de  ses  articles, 
surtout  en  ce  qui  concernait  les  réserves  contenues 
dans  l'article  4.  Moyennant  cette  réserve  positive, 
claire  et  précise,  l'Empereur  annula  indirectement  la 
clause  salvatoire  que  les  ministres  de  France  avaient 
placée  à  la  fin  de  l'introduction  du  premier  article  du 
Recès,  et  par  laquelle  ils  s'étaient  flattés  de  rendre 
illusoire  la  réserve  exprimée  dans  l'article  4  de  la  con- 
vention du  26  décembre  1 802  \ 

2"  Qu'en  tant  que  les  réserves  regardent  les  droits 
qui  compétent  à  Sa  Majesté,  comme  Empereur  et  chef 
suprême  de  l'Empire ,  l'exercice  de  ces  droits  sera 
maintenu  sans  restriction ,  tant  pour  l'exécution  du 
présent  acte  de  l'Empire  que  pour  les  temps  à  venir; 

3°  Que  la  confirmation  des  lois  fondamentales  de 
l'Empire,  mentionnée  dans  l'Avis  de  la  Diète,  et  la 
réserve  qui  y  est  proposée  pour  le  maintien  de  la  Con- 

'  Voy.  ci-dessus,  p.  248. 


—  438  — 

stitution  de  l'Empire,  seront  réalisées ^  eœéculées  el 
maintenues  ; 

A"  Que  les  objections  que  Sa  Majesté  Impériale  a  fait 
produire  à  l'occasion  des  propositions  que  la  Députa- 
tion  avait  faites  antérieurement  pour  augmenter  le 
nombre  des  votes  virils  au  collège  des  Princes,  n'ayant 
point  été  levées  par  les  propositions  postérieures, 
Sa  Majesté  Impériale  se  voyait  obligée,  par  les  devoirs 
auxquels  ses  serments  la  liaient  pour  le  maintien  de  la 
Constitution  de  l'Empire  et  la  protection  de  la  religion 
catholique,  de  suspendre  provisoirement  sa  ratification 
relativement  à  cet  objet,  et  de  se  réserver  de  demander 
incessamment,  par  un  décret  de  commission,  qu'il  t'ùt 
formé  un  Avis  ultérieur  de  l'Empire,  pour  pourvoir, 
par  des  propositions  convenables,  à  ce  qu'une  majorité 
de  voix  si  décidée  étant  déjà  dévolue  aux  États  protes- 
tants dans  le  collège  électoral  et  dans  celui  des  villes 
impériales,  les  proportions  usitées  entre  les  deux  reli- 
gions ne  fussent  pas  tellement  changées  au  collège  des 
Princes,  que  la  parité  des  voix  fût  essentiellement 
outre-passée  ; 

5"  Qu'à  l'égard  des  points  du  dernier  arrêté  de  la 
Députation  dont  le  règlement  était  encore  sujet  à  des 
propositions  et  négociations  futures,  tels  que  ceux 
qui  se  trouvent  exprimés  à  la  fin  des  paragraphes  2 
et  39,  l'intervervention  ultérieure,  qui  appartenait  à 
l'Empereur  et  à  l'Empire,  leur  fût  réservée. 

Dans  ces  deux  actes,  l'Avis  de  l'Empire  et  le  Décret 
de  commission  impérial,  deux  choses  doivent  être 
remarquées  :  1  "  la  mention  expresse,  faite  dans  l'Avis 
et  répétée  dans  le  Décret,  de  la  Noblesse  immédiate 
comme  d'un  corps  constitutionnel  et  placé  sur  la  môme 
ligne  que  les  États  d'Empire  j  2*  les  mots  ajoutés  à  la 
troisième  réserve,  et  qui  font  dépendre  la  ratification 
de  l'acte  de  la  mise  en  exécution  et  du  maintien  des 


—  489  — 

droits  assurés  aux  États  ainsi  qu'à  l'Ordre  Teutonique 
et  à  la  Noblesse  immédiate.  Cette  condition  n'ayant 
pas  été  observée,  l'Empereur  pouvait,  sous  le  point  de 
vue  du  Droit,  regarder  comme  non  avenue  sa  ratifica- 
tion, et  par  conséquent  comme  frappé  de  nullité  le 
Recès  de  l'Empire  dans  toutes  ses  stipulations. 

La  Députation  de  l'Empire  n'avait  tenu  que  trois 
séances,  depuis  le  25  février,  pour  laisser  à  la  Diète  le 
loisir  de  délibérer  sur  son  conclusum.  Celui-ci  ayant 
été  ratifié,  à  l'exception  d'un  seul  article,  par  l'Avis  de 
lEmpire  du  24  mars  et  le  Décret  de  commission  impé- 
rial du  27  avril,  le  baron  de  Hûgel  remit  à  la  Dépu- 
tation ,  dans  sa  cinquantième  séance,  le  1 9  mai ,  un 
décret  du  9,  par  lequel  il  déclara  qu'elle  était  dis- 
soute ;  que  les  pouvoirs  dont  elle  avait  été  investie 
étaient  révoqués ,  ainsi  que  l'étaient  ceux  que  lui- 
même  tenait  de  la  part  du  chef  de  l'Empire.  Le  même 
jour,  les  ministres  médiateurs  prirent  congé  de  1» 
Députation  par  la  Note  suivante  : 

«  S.  M.  l'empereur  de  toutes  les  Russies  et  le  pre- 
mier Consul  de  la  République  française  [le  premier 
Consul  de  la  République  française  et  S.  M.  l'empereur 
de  toutes  les  Russies],  voyant  avec  satisfaction  que  le 
but  qu'ils  s'étaient  proposé,  lors  de  leur  intervention 
amicale  dans  l'arrangement  des  indemnités,  est  heu- 
reusement atteint ,  et  que  le  Corps  germanique  est 
désormais  en  situation  de  pourvoir,  par  ses  propres 
moyens,  aux  mesures  d'organisation  intérieure  qui, 
sans  découler  directement  des  articles  5  et  7  du  traité 
deLunéville,  peuvent  lui  paraître  une  suite  nécessaire 
de  l'acte  qui  en  est  le  complément,  le  soussigné,  plé- 
nipotentiaire de  S.  M.  l'empereur  de  toutes  les  Russies 
[ministre  extraordinaire  de  la  République  française] 
près  de  la  Diète  générale  de  l'Empire,  a  ordre  d'an- 


—  440  — 

noncer  que  la  mission  dont  il  a  été  honoré  par  son 
gouvernement  [sa  cour]  est  en  ce  moment  terminée, 
et  qu'il  retourne  à  ses  fonctions  précédentes. 

«  La  sollicitude  de  S.  M.  l'empereur  de  toutes  les 
Russies  et  du  premier  Consul  [du  premier  Consul  et 
de  l'empereur  de  toutes  les  Russies]  pour  le  bien-être 
de  l'Allemagne,  ne  leur  laisse  en  effet  plus  rien  aper- 
cevoir qui  n'appartienne  spécialement  à  l'action 
ordinaire  du  Corps  germanique;  et  les  expressions  de 
reconnaissance  avec  lesquelles  l'Empire  et  son  chef 
suprême  ont  accueilli  le  résultat  de  leurs  soins ,  ne 
leur  permettant  pas  de  douter  qu'une  loi  adoptée  sous 
leur  médiation  et  revêtue  de  toute  la  solennité  des  for- 
malités constitutionnelles ,  ne  soit  ponctuellement 
exécutée  dans  toutes  ses  parties. 

«  C'est  par  cette  exécution  scrupuleuse  que  chaque 
État  d'Empire  doit  prouver  son  patriotisme  et  l'im- 
portance qu'il  attache  à  la  tranquillité  générale  aussi 
bien  qu'à  la  sienne. 

«  Les  dispositions  fondamentales  que  le  Corps  ger- 
manique vient  de  consacrer  abrogent  quelques  dispo- 
sitions précédentes  dont  le  souvenir  subsiste  encore. 
Celles-ci  ne  sauraient  plus  être  invoquées  à  l'avenir. 
Il  n'est  aucun  membre  de  l'Empire  qui  ne  doive  avoir 
sous  les  yeux  que  le  Corps  germanique  s'était  lié,  par 
le  traité  de  Lunéville,  à  subvenir  collectivement  à  l'in- 
demnisation. Le  paragraphe  36  de  la  nouvelle  loi  est 
surtout  celui  par  lequel  est  accomplie  l'obligation 
commune;  et,  comme  dans  un  système  étendu  toutes 
les  parties  s'enchaînent,  les  rentes  assignées,  les  pen- 
sions, les  dettes  doivent  aussi  être  acquittées  avec  une 
honorable  exactitude.  L'intérêt  de  tous  et  de  chacun 
en  particulier,  la  sûreté  des  États  et  des  propriétés,  le 
maintien  de  l'ordre  établi,  exigent  qu'aucun  des  Etats 
d'Empire  ne  cherche  la  solution  des  doutes  qu'il  pour- 


_  A41   — 

rait  concevoir,  que  dans  le  texte  même  de  la  loi  con- 
certée avec  les  puissances  médiatrices.  Elles  ne  sont 
engagées  à  rien  qui  n'y  soit  fidèlement  exprimé.  Les 
droits  conférés  et  les  droits  réservés  s'y  trouvent  éga- 
lement. 

'(  S'il  arrivait  cependant  que,  dans  la  nouveauté  de 
tant  d'arrangements  divers,  un  des  États  de  l'Empire 
se  trouvât  conduit  à  léser  par  méprise  les  droits  d'un 
autre,  la  justice  et  la  bonne  foi  auront  promptement 
réparé  l'erreur  que  des  mesures  de  rétorsion  aggra- 
veraient au  contraire.  S.  M.  l'empereur  de  toutes  les 
Uussies  et  le  premier  Consul  [le  premier  Consul  de  la 
République  française  et  S.  M.  l'empereur  de  toutes 
les  Russies]  sont  intimement  convaincus,  au  reste, 
qu'aucun  mauvais  exemple  ne  sera  donné,  et  bien 
moins  encore  imité. 

«  Le  soussigné  s'acquitte  d'un  dernier  devoir,  eti 
assurant  la  Diète  de  l'intérêt  constant  que  S.  M.  l'em- 
pereur de  toutes  les  Russies  [le  premier  Consul] 
prendra  à  la  prospérité  du  Corps  germanique. 

«  A  Ratisbonne,  le  %^  1803  [le  ,^^,^^]. 

«  Le  baron  de  Buhler. 

[Laforest.]  » 


Le  paragraphe  46  du  Recès  de  la  Députation  avait 
statué  que  tous  échanges,  purifications  de  territoires 
et  transactions  quelconques  des  Etats  entre  eux,  qui 
auraient  lieu  dans  le  terme  d'un  an,  auraient  même 
force  et  exécution  que  s'ils  étaient  insérés  dans  l'acte. 
Nous  avons  vu  des  exemples  de  pareilles  transactions 
dans  une  convention  que  le  ministre  d'Oldenbourg 
conclut,  le  6  avril  1803,  à  Ratisbonne,  avec  les  mi- 


—  442  — 

nistres  médiateurs*  ;  dans  celle  du  21  avril  de  la  même 
année,  entre  le  roi  de  Danemark  et  la  ville  de  Ham- 
bourg*; dans  celle  du  2  avril  1804  entre  le  duc  d'Ol- 
denbourg et  la  ville  de  Lubeck^  Un  autre  exemple 
d'une  transaction  de  cette  nature  fut  un  traité  qu'on 
signa  le  30  juin  1803,  Ce  traité  fit  naître  de  vives  ré- 
clamations de  la  part  de  la  ville  de  Nuremberg,  qui 
se  prétendait  lésée  par  plusieurs  de  ses  stipulations. 
L'électeur  de  Bavière  céda,  par  cet  arrangement,  au 
roi  de  Prusse,  toutes  les  terres,  tous  les  droits  et  re- 
venus qui  lui  appartenaient  dans  les  margraviats  de 
la  Franconie,  comme  possesseur  des- évêchés,  abbayes 
et  couvents  de  ce  cercle ,  que  le  Recès  lui  avait  décer- 
nés. 

Le  décret  de  commission,  annoncé  dans  celui  du 
27  avril  1803,  fut  signé  le  30  juin,  et  dicté  à  la  Diète 
le  8  juillet  1803.  Il  représentait  la  nécessité  d'une 
parité  entre  les  voix  catholiques  et  protestantes,  fon- 
dée sur  la  paix  de  Westphalie  et  sur  l'observance , 
et  invitait  les  États  à  lui  soumettre  un  Avis  dans  le- 
quel ils  lui  proposeraient  la  nomination  de  nouveaux 
princes  catholiques  en  nombre  nécessaire  pour  réta- 
blir celte  parité,  s'ils  ne  préféraient  qu'en  atten- 
dant, une  partie  des  princes  nommés  par  le  Recès  ne 
fût  pas  introduite.  Comme  le  collège  électoral  refusa 
de  prendre  cet  objet  en  délibération  avant  l'introduc- 
tion de  quatre  nouveaux  Électeurs,  l'Empereur  or- 
donna cette  introduction  par  un  décret  du  13  août. 
Conformément  à  la  Bulle  d'Or,  il  y  détermina  les  pays 
auxquels  la  dignité  électorale  devait  être  spécialement 
affectée.  C'étaient,  pour  l'électeur  de  Salzbourg,  l'an- 

•  Voy.  p.  299. 

•  Voy.  p.  376. 

»  Voy.  p.  ^^^. 


—  443  — 

cien  archevêché,  aujourd'hui  duché  de  Salzbourgj 
pour  celui  de  Bade,  les  provinces  qui,  dans  la  nou- 
velle organisation,  étaient  appelées  Palatinat  du  Rhin 
et  margraviat  de  Bade;  pour  Wurtemberg,  l'ancien 
duché;  et  pour  la  flesse,  tout  l'ensemble  des  États  de 
l'Électeur.  La  Diète  était  invitée  à  délibérer  sur  les 
grandes  charges  qui  devaient  être  attachées  à  chacun 
de  ces  électorats.  Comme  les  événements  subséquents 
ne  laissèrent  pas  à  la  Diète  le  temps  de  donner  un 
Avis  sur  cet  objet,  nous  dirons  seulement  que  le  nou- 
vel électeur  de  Wurtemberg  avait  demandé  la  charge 
d'archibanneret,  comme  attachée  depuis  longtemps  à 
sa  maison  j  et  celui  de  Hesse  la  dignité  d'archigéné- 
ral ,  comme  répondant  au  mérite  militaire  de  la 
sienne.  L'introduction  des  nouveaux  Électeurs  eut 
lieu  le  22  août  1803. 

Cette  affaire  étant  terminée  à  la  satisfaction  com- 
mune, on  put  s'occuper  du  décret  de  commission 
du  8  juillet  et  de  la  nouvelle  organisation  du  collège 
des  Princes.  Déjà  un  grand  nombre  de  princes  d'Em- 
pire avaient  réclamé  des  voix  viriles,  s'ils  n'en  avaient 
pas,  ou  une  augmentation  de  celles  que  le  Recès  leur 
attribuait.  Nous  allons  les  nommer  dans  l'ordre  chro- 
nologique de  leurs  demandes. 

La  princesse  régente  de  Lippe-Detmold,  pour  son  fils 
mineur,  le  4  février  1803. 

Le  prince  de  Wied-Runkel ,  le  26  du  même  mois. 

Le  comte  de  Metternich-Winnebourg-Beilsteiny  au 
nom  des  comtes  catholiques  de  la  Westphalie,  qui  de- 
mandaient une  voix  curiale,  indépendamment  de 
celle  qu'ils  possédaient  en  commun  avec  les  comtes 
protestants;  le  10  mars  1803. 

Le  duc  de  Saxe-Meiningen,  qui  en  demanda  une, 


_  444  — 

outre  celle  de  Henneberg  pour  laquelle  il  alternait  avec 
les  autres  branches  de  sa  maison;  le  14  mai. 

Le  duc  de  Saxe-Cobourg,  qui  se  trouvait  dans  la 
même  condition;  le  10  juin. 

Le  prince  de  Fùrstenberg;  le  1"  septembre.  Cette 
maison  avait,  depuis  1667,  une  voix  à  la  Diète,  et  le 
,  Recès  la  lui  avait  conservée;  mais  elle  croyait  être  au- 
torisée à  en  demander  deux  pour  les  landgraviats  de 
Stiihlingen  et  de  Baar,  quoique  le  premier  ne  fut 
qu'arrière-fief  de  l'Empire. 

Le  prince  Fugger-Babenhausen ,  que  l'Empereur 
avait  élevé,  le  1"  août  1803,  à  la  dignité  de  prince, 
demanda  le  droit  de  voter;  le  1*""  octobre. 

Les  chefs  des  trois  branches  de  la  maison  des  Truch- 
sess-Waldbourg,  auxquels  l'Empereur  avait  conféré, 
le  21  mars  1803,  le  rang  de  princes.  Leur  mémoire 
fut  présenté  le  4  novembre  1803. 

Le  prince  de  Salm-Salm  demanda,  le  4  novembre, 
une  seconde  voix  pour  Anholt. 

Le  duc  de  Croï,  que  le  Recès  avait  placé  parmi  les 
princes  d'Empire,  demanda,  le  10  novembre,  son 
introduction  dans  le  collège. 

Le  même  jour,  la  maison  de  Sayn-Wittgenstein  ré- 
clama cette  faveur. 

Le  18  novembre  se  présenta  le  prince  de  Metternich, 
que  l'Empereur  avait  décoré,  le  30  juin ,  de  ce  titre, 
en  attachant  la  dignité  princière  à  la  terre  d'Ochsen- 
liausen. 

Les  comtes  de  Khévenhûller  sont  originaires  de  la 
Franconie.  Vers  la  fin  du  xi°  siècle,  ils  s'établirent  en 
Carinthie,  oùils  obtinrent,  à  titre  héréditaire,  la  charge 
de  grands  écuyers  du  duché.  Ils  se  partagèrent  en 
deux  branches,  dont  la  cadette,  qui  porte  le  nom  de 
Khévenhûller  -  Melsch  et  Aichelberg ,  possède  depuis 
1764  la  dignité  de  prince,  tandis  que  l'aînée  a  con- 


—  445  — 

serve  le  titre  de  comte.  Le  prince  de  Khévenhiiller  de- 
manda, le  18  novembre  1803,  voix  et  séance  à  la 
Diète;  et  comme  il  ne  possédait  pas  suffisamment  de 
^  terres  immédiates,  il  prit  l'engagement  de  satisfaire 
à  ce  que  le  paragraphe  5  de  l'article  1  de  la  capitula- 
tion impériale  prescrit  en  pareille  circonstance. 

Le  duc  à'Arenbergf  possesseur  de  Meppen  et  de 
Recklingshausen,  demanda,  le  5  décembre  1803,  deux 
voix  au  lieu  d'une  seule  que  le  Recès  lui  accordait. 

La  princesse  régente  d' Oettingen  -  Wallerstein  de- 
manda, le  24  décembre,  outre  la  voix  que  le  Recès 
donnait  à  sa  maison,  une  seconde  pour  la  succession 
de  la  branche  de  Baldern,  pour  laquelle  le  même  acte 
lui  avait  alloué  une  indemnité. 

Le  roi  de  Suède  avait  demandé  une  voix  pour  la 
seigneurie  de  Wismar  ;  mais  comme  il  venait  de  céder 
ou  d'hypothéquer  cette  ville  au  duc  de  Mecklenbourg- 
Schwerin,  il  demanda,  le  24  décembre,  une  voix 
comme  prince  de  RiXgen,  indépendamment  de  celle 
qu'il  avait  comme  duc  de  la  Poméranie  citérieure. 

Le  prince  de  Lcewenstein-Wertheim  demanda,  le 
12  janvier  1804,  une  seconde  voix  comme  possesseur 
du  bailliage  de  Rothenfels. 

Le  bourgraviat  de  Winterrieden  ayant  été  élevé  à 
la  dignité  princière,  le  prince  de  Sinzendorff,  qui  avait 
obtenu  cette  possession  par  le  Recès,  demanda,  le 
16  janvier  1804,  son  admission. 

Le  prince  de  Salm-Krautheim ^  après  avoir  obtenu 
cette  dignité  au  mois  de  février,  sollicita,  le  1"  mars 
1804,  l'admission  des  deux  branches  de  sa  maison  à 
la  jouissance  d'une  seule  voix. 

Le  21  avril  1 804,  le  prince  de  Liechtenstein  demanda 
une  seconde  voix. 

Le  comté  d'Egloff  ayant  été  élevé,  le  24  mai  1804, 
au  rang  d'une  principauté,  sous  le  nom  de  Windisch- 


—  446  — 

grœtz,  la  princesse  régente  demanda,  le  15  juillet 
1804,  l'admission  de  son  fils. 

Comme  il  paraissait  que  les  princes  avaient  Tinten- 
tion  d'exclure  le  collège  des  villes  du  droit  de  prendre 
part  à  la  délibération  sur  le  décret  impérial  du  8  juil- 
let, les  villes  remirent,  le  10  août,  un  mémoire  dans 
lequel  elles  réclamèrent  ce  droit  en  vertu  des  stipula- 
tions de  la  paix  de  Westplialie,  qui  leur  accordaient^ 
sans  restriction,  la  coopération  aux  délibérations  de  la 
Diète.  La  seule  exception  de  cette  règle  que  les  villes 
voulurent  reconnaître  est  celle  que  renferme  le  para- 
graphe 27  du  Recès  de  la  Députation,  qui  les  exclut 
de  la  délibération  sur  la  guerre  et  la  paix.  Elles  citè- 
rent l'exemple  de  1708,  où  elles  avaient  voté  sur  la 
réadmission  de  l'électeur  de  Bohême  et  sur  l'intro- 
duction de  celui  de  Brunswic  dans  le  premier  collège. 
Enfin  elles  firent  observer  qu'il  ne  s'agissait  pas 
seulement  de  la  réception  dans  le  collège  des  Princes 
de  quelques  nouveaux  membres,  mais  plutôt  d'une 
question  qui  présentait  un  intérêt  majeur,  de  savoir 
si  à  l'avenir  les  voix  des  États  d'Empire  devaient  se 
conformer  à  la  religion  du  pays  ou  à  celle  du  souve- 
rain. Cette  représentation  produisit  son  effet,  et  le 
collège  des  villes  prit  part  à  la  délibération. 

Avant  qu'elle  commençât,  on  eut  connaissance  d'un 
rescrit  que  la  Cour  de  Berlin  avait  adressé  à  son  mi- 
nistre à  la  Diète,  pour  lui  dire  qu'on  ne  pouvait  accé- 
der aux  principes  énoncés  dans  le  Décret  de  commis- 
sion du  30  juin.  11  est  remarquable  que  le  roi  de  Prusse 
fut  engagé  à  cette  démarche  par  l'électeur  de  Bavière, 
celui  de  tous  les  princes  catholiques  auquel  le  Recès 
destinait  le  plus  grand  nombre  de  voix. 

Le  comte  de  Cobenzly  vice-chancelier  de  l'Empire, 
réfuta  cette  déclaration  par  un  rescrit  qu'il  adressa , 
le  10  novembre  1803,  au  ministre  directorial  d'Au- 


—  447  — 

triche  près  la  Diète.  Il  y  exposa,  entre  autres  motifs,  que 
l'Empereur  était  d'autant  plus  autorisé  de  refuser  la 
ratification  de  l'article  32  du  Recès,  que,  dans  la  con- 
vention du  26  décembre  1 802,  il  s'était  expressément 
réservé  les  droits  qui  lui  compétaient  comme  chef  su- 
prême de  l'Empire,  droits  qu'il  exerçait  principale- 
ment lorsqu'il  s'agissait  d'accorder  des  votes;  que  si 
la  Cour  de  Berlin  avançait  que  le  parti  catholique  pou- 
vait aussi  bien  se  contenter  de  la  minorité  et  du  droit 
de  faire  corps  à  part  (itio  in  partes),  comme  les  pro- 
testants avaient  été  obligés  de  faire  jusqu'à  présent,  il 
fallait  considérer  que  la  guerre  qu'on  venait  de  termi- 
ner n'avait  pas  été,  comme  celle  de  Trente  ans,  une 
guerre  de  religion;  qu'on  n'avait  pas  vu,  comme  alors, 
la  population  de  pays  entiers  passer  d'une  religion  à 
l'autre ,  que  le  rapport  existant  avant  la  guerre  entre 
les  adhérents  des  différentes  religions  n'avait  pas  été 
altéré  ;  qu'à  la  vérité,  le  parti  catholique  avait  été  for- 
tement diminué  par  la  cession  de  la  rive  gauche  du 
Rhin,  mais  qu'il  conservait  toujours  sa  supériorité  de 
nombre  sur  les  protestants;  et  que  par  conséquent  les 
raisons  qui,  à  l'époque  de  la  paix  de  Westphalie, 
avaient  accordé  la  prépondérance  aux  catholiques, 
subsistaient  toujours;  que,  bien  loin  cependant  de 
vouloir  faire  obtenir  une  majorité  aux  princes  catho- 
liques, l'Empereur  ne  demandait  que  la  parité;  qu'il 
consentait  même  à  ce  que,  provisoirement  et  sans  pré- 
judice, l'appel  nominal  fût  fait  d'après  l'article  32. 
Les  délibérations  commencèrent  le  14  novembre 
1803.  Tous  les  Électeurs,  à  l'exception  de  ceux  de 
Bohême  et  de  Salzbourg,  votèrent  pour  qu'on  priât 
l'Empereur  de  ratifier  le  paragraphe  32  sans  insister 
sur  la  nécessité  d'une  égalité  arithmétique  entre  les 
adhérents  des  deux  religions.  Nous  allons  rapporter 
ici  quelques-unes  seulement  des  observations  les  plus 


—  448  — 

frappantes  qui  furent  faites  dans  le  cours  de  cette  dis- 
cussion. 

L'électeur  palatin  de  Bavière  (car  c'est  depuis  le 
Recès  de  1 803  que  ce  titre  a  été  officiellement  sub- 
stitué à  celui  d^Électeur  palatin)  proposa  de  tran- 
cher toute  la  difficulté  en  proclamant  comme  loi  fon- 
damentale de  l'État  une  parfaite  liherté  de  religion^ 
et  en  complétant  le  paragraphe  63  du  Recès  par  une 
déclaration  portant  que  tous  les  obstacles  que  les  pac- 
tes etlesreversales  opposaient  au  droit  de  réformer  des 
princes,  étaient  annulés  j  il  soutint  que  cette  décla- 
ration serait  même  conforme  à  l'esprit  de  la  paix  de 
Westphalie,  qui  n'avait  voulu  autre  chose  qu'empê- 
cher l'oppression  d'un  parti,  tandis  que  par  ces  re- 
versales  on  avait  accordé  l'exclusion  à  l'un  ou  à  l'au- 
tre culte.  Au  reste,  l'Electeur  lui-même,  attaché  à  la 
religion  catholique,  ne  pensa  pas  qu'une  parité  nu- 
mérique des  votes  fût  nécessaire,  soit  parce  que  l'es- 
prit des  temps  avait  changé,  soit  parce  que  les  lois  de 
l'Empire  établissaient  une  parité  de  droit  (par  Vilio  in 
partes). 

L'électeur  de  Saxe  dit  qu'il  ne  s'opposait  pas  à  ce 
qu'indépendamment  des  princes  auxquels  le  para- 
graphe 32  accordait  le  droit  de  siéger  à  la  Diète,  on 
introduisît  par  la  suite  de  nouveaux  compétiteurs,  sans 
distinction  de  religion,  pourvu  qu'ils  fussent  suffisam- 
ment qualifiés^  mais  qu'avant  tout  il  fallait  que  le  pa- 
ragraphe 32  eût  été  ratifié. 

Le  ministre  de  l'électeur  de  Brandebourg  s'énonça 
dans  le  même  sens  ;  il  ajouta  que  si,  à  l'exemple  de 
ce  qui  avait  lieu  dans  les  États  de  la  monarchie  prus- 
sienne, on  voulait  établir  pour  toute  l'Allemagne  une 
égalité  parfaite  des  religions,  une  pareille  loi  serait 
sans  doute  conforme  aux  lumières  du  siècle,  pourvu 
qu'on  ne  liât  pas  les   mains   aux  souverains  qui  de- 


—  449  — 

valent  rester  les  maîtres  de  faire  à  cet  égard  les  modi- 
fications que  les  localités  exigeraient. 

Le  vote  émis  par  le  ministre  de  Wurtemberg  ren- 
ferme une  nouvelle  raison  contre  la  nécessité  de  la 
parité  arithmétique.  Ce  ministre  fit  observer  que  l'iné- 
galité qui  se  trouvait  maintenant  entre  les  deux  partis 
n'était  pas  l'effet  d'une  préméditation,  mais  le  résultat 
des  circonstances  malheureuses  qui  avaient  fait  périr 
dix-neuf  voix  catholiques',  sans  compter  la  Savoie  et 
l'archevêché  de  Besançon,  perte  qui  avait  été  augmen- 
tée encore  de  deux  voix  par  la  sécularisation  des  pré- 
latures  ;  que  cependant  sur  les  dix-huit  voix  par  les- 
quelles on  avait  remplacé  celles  des  États  sécularisés, 
onze  étaient  restées  à  des  États  catholiques ,  et  sept 
seulement  avaient  été  attribuées  à  des  protestants; 
enfin  que,  lorsque  les  médiateurs  avaient  demandé 
l'introduction  de  nouveaux  votes  dans  le  collège  des 
Princes,  ils  avaient  assez  bien  observé  la  parité,  puis- 
que le  nombre  des  nouvelles  voix  protestantes  ne  sur- 
passait que  d'une  celui  des  catholiques.  L'électeur  de 
Wurtemberg  toucha  aussi  une  question  de  Droit  pu- 
blic qui  a  été  souvent  agitée  en  Allemagne,  et  sur 
laquelle  les  publicistes  ne  sont  pas  d'accord  :  les  votes 
des  États  de  l'Empire  sont-ils  de  l'une  ou  de  l'autre 
religion,  selon  la  religion  du  prince  ou  selon  celle  du 
pays?  Cette  question  se  confond  avec  une  autre  qui 
est  d'un  intérêt  plus  relevé  ;  savoir  :  les  princes  parais- 
sent-ils à  la  Diète  comme  représentants  de  leur  pays 
ou  par  leur  propre  droit?  Les  plus  grands  juriscon- 
sultes protestants  du  xviu^  siècle  voyant  de  si  fréquents 
exemples  des  princes  de  leur  culte  embrassant  la  re- 
ligion catholique,  ont  soutenu  la  première  opinion  j 

'  Savoir  Bourgogne,  Worms,  Spire,  Strasbourg ,  Bâle ,  Liège,  Coire, 
Wissembourg,  Priim,  Stable,  Lautern,  Simmern,  Deux-Ponts,  Veldenz, 
Nomény,  Montbéliard,  Arenberg,  Salm  et  Dietrichstein. 

VII  29 


—  450  — 

« 

mais  les  circonstances  ayant  changé ,  le  ministre  de 
Wurtemberg  défendit  l'avis  contraire,  et  il  est  hors 
de  doute  que  ce  dernier  peut  être  soutenu  par  l'ana- 
logie de  l'observance. 

Le  ministre  de  Bohême,  en  votant  dans  le  sens  du 
décret  de  commission,  rappela  qu'un  Avis  de  l'Empire, 
du  30  juin  1708,  ratifié  par  l'Empereur,  assurait  une 
double  voix  à  l'électeur  de  Mayence ,  pour  le  cas  où 
le  nombre  des  électeurs  protestants  augmenterait.  Il 
proposa  dix-huit  nouvelles  voix  catholiques;  savoir: 
six  à  l'Autriche  (pour  la  basse  Autriche,  pour  Gorice 
ou  Gœrz,  Gradisca,  Burgau,  Nellenbourg  et  Hohen- 
berg)  ;'une  seconde  à  l'Archichancelier,  pour  Wetzlar, 
et  à  l'électeur  de  Salzbourg,  pour  le  basPassau;  six 
voix  aux  princes  de  Metternich,  Fugger-Babenhausen, 
Truchsess,  au  duc  de  Croï ,  aux  princes  de  Colloredo 
et  de  Khévenhûller;  une  seconde  voix,  aux  princes  de 
Ftirstenberg,  de  Salm-Salm  et  de  Liechtenstein  et  au 
duc  d'Arenberg.  Il  ajouta  que,  de  la  part  de  la  mai- 
son d'Autriche,  on  s'opposait  à  la  requête  des  princes 
de  Lippe-Detmold  et  Wied-Runkel,  et  des  ducs  de 
Saxe-Meiningen  et  Saalfeld. 

Le  ministre  de  l'électeur  de  Salzbourg  ajouta  aux 
dix-huit  voix  proposées  par  celui  de  Bohême  cinq  de 
plus,  savoir  :  pour  l'Ordre  Teutonique,  pour  celui  de 
Saint-Jean,  pour  les  comtes  catholiques  de  la  West- 
phalie  et  de  la  Franconie ,  et  pour  la  maison  de  Tru- 
chsess. 

L'Archichancelier  ouvrit,  dans  la  séance  du  12  dé- 
cembre 1803,  un  avis  tendant  à  concilier  les  deux 
partis.  Il  proposa  la  ratification  du  paragraphe  32,  à 
condition  qu'on  accordât  aux  catholiques  les  vingt- 
sept  voix  qui  leur  manquaient  pour  la  parité.  Et  comme 
Texamen  des  qualités  des  divers  compétiteurs  deman- 
derait du  temps,  il  voulut  qu'en  attendant  on  accordât 


—  451  — 

âubsidiairement  vingt-sept  votes  de  plus  aux  cinq 
principaux  princes  catholiques,  savoir  :  six  à  l'Autri- 
che, autant  à  la  Bavière,  et  cinq  à  Salzbourg,  Ratis- 
bonne  et  au  grand-maître  de  l'Ordre  Teutonique.  Si 
cependant  on  voulait  immédiatement  laisser  prendre 
séance  à  quatre  princes  catholiques  dont  les  qualités 
étaient  connues  ,  savoir  :  aux  ducs  de  Croï',  aux  prin- 
ces de  Truchsess,  de  Fugger-Babenhausen  et  deMetter- 
nich,  la  Bavière,  Salzbourg,  Ratisbonne  et  le  grand- 
maître  auraient  chacun  une  voix  subsidiaire  de  moins; 
dans  ce  cas ,  on  donnerait  des  votes  supplémentaires 
aux  deux  branches  de  Saxe  qui  en  demandaient,  ainsi 
qu'à  la  maison  catholique  de  Fûrstenberg.  Si  on  vou- 
lait accorder  sur-le-champ  une  voix  aux  princes  de 
CoUoredo  et  de  Khévenhilller,  on  accorderait  la  même 
faveur  à  ceux  de  Lippe-Detmold  et  de  Wied-Runkel. 

L'électeur  de  Brunswic-Lunebourg  ne  vota  que 
dans  la  séance  du  3  février  1 804.  Il  proposa  l'établis- 
sement d'une  députation  chargée  d'arranger  le  diffé- 
rend; et,  dans  la  séance  du  20,  la  ratification  du  para- 
graphe 32,  et  l'introduction  immédiate  de  quatorze 
nouveaux  votes,  savoir  :  six  pour  l'Autriche  et  un  pour 
l'Archichancelier,  Salzbourg,  Croï,  Fugger-Babenhau- 
sen, Truchsess,  Metternich,  les  comtes  catholiques  de 
la  Westphalie  et  de  la  Franconie. 

Le  1 4  novembre  1 803,  les  délibérations  avaient  aussi 
commencé  dans  le  conseil  des  princes.  Comme  l'Em- 
pereur n'avait  pas  ratifié  le  paragraphe  32,  le  direc- 
toire fit  l'appel  nominal  d'après  l'ancienne  matricule. 
Il  s'éleva  à  ce  sujet  diverses  réclamations  que  nous  pas- 
sons sous  silence,  parce  qu'elles  ont  perdu  leur  impor- 
tance. L'appel  se  fit  de  manière  qu'il  ne  comprenait  pas 

'  Cette  maison  était  en  effet  très-qualifiée  par  son  origine. 


—  452  — 

les  États  qui  avaient  entièrement  cessé  d'exister,  mais 
que  les  voix  ci-devant  ecclésiastiques  furent  portées  par 
les  possesseurs  actuels  de  ces  pays.  Dans  le  premier 
cas  étaient  les  quinze  suivants  :  Bourgogne,  Baie, 
Liège,  Coire,  Wissembourg,Prum,  Lautern,Simmern, 
Deux-Ponts,  Stablo,  Nomeny,  Montbéliard ,  prélats  de 
Souabe  et  du  Rhin.  Le  nombre  des  votants  se  trouva 
ainsi  réduit  à  quatre-vingt-quatre,  ou  plutôt  à  quatre- 
vingts  ,  Hesse-Darmstadt ,  Deux-Ponts  et  Henneberg 
n'ayant  pas  voté,  et  le  vote  des  comtes  de  Westpha- 
lie  étant  devenu  si  insignifiant  qu'on  ne  peut  pas  le 
compter. 

De  ces  quatre-vingts  voix,  les  électeurs  de  Bavière, 
de  Saxe,  de  Brandebourg,  de  Wurtemberg,  de  Bade  et 
de  Hesse,  votèrent  contre  la  parité  numérique.  Ils 
avaient  en  tout  trente  voix. 

Auxquelles  accédèrent  : 

voix. 

Le  duc  de  Saxe-Weimar,  avec 2 

Celui  de  Gotha,  avec 2 

Brunswic-Wolfenbiittel 1 

Lubeck,  avec 2 

Fulde  et  Nassau-Orange 

Schwarzbourg 

Mecklenbourg-Strelitz 

Anhalt 

Les  comtes  de  Wettéravie 

Ceux  de  Franconie 


En  tout. . .     46 
Vingt  voix  votèrent  pour  la  parité  arithmétique  ;  savoir  : 

L'Autriche,  avec 3 

Salzbourg,  avec 3 

L'Archichancelier 4 

Arenberg,  Lobkowitz,  Salm,  Dielrichstein ,  Auersberg,  Fursten- 
berg,  Liechtenstein,  Tour  et  Taxis,  Schwarzenberg,  Hohen- 
zollern,  l'Ordre  Teutonique,  celui  de  Saint-Jean,  les  comtes 
de  la  Souabe,  avec 43 

Total...    20 


—  453  — 

Les  autres  voix  avaient  proposé  l'établissement 
d'une  députation  particulière  et  des  moyens  concilia- 
toires.  Pour  empêcher  la  majorité  de  prendre  un  con- 
clusum ,  la  minorité  pouvait  avoir  recours  à  la  sépa- 
ration en  corps,  itio  in  partes;  mais  ici  s'élevait  une 
question  qui  ne  s'était  pas  encore  présentée  :  Le  corps 
des  catholiques  peut-il  faire  envisager  comme  affaire 
religieuse  une  question  dans  laquelle  neuf  voix  catho- 
liques (  celles  de  la  Bavière  )  avaient  voté  avec  les 
adversaires?  On  ne  se  vit  point  dans  la  nécessité  de  la 
décider,  parce  que  la  majorité ,  avertie  que  l'Empereur 
ne  ratifierait  pas  un  avis  qui  serait  contraire  à  la  pa- 
rité, ne  se  pressa  pas  de  prendre  un  conclusum.  La 
chose  resta  indécise  ;  les  nouvelles  voix  accordées  par 
le  Recès  ne  devinrent  pas  effectives,  et  les  grands  évé- 
nements qui  survinrent  en  1 805  firent  perdre  de  vue 
cet  objet ,  que  le  bouleversement  de  l'Empire ,  en 
1 806,  entraîna  dans  le  néant. 

Une  affaire  qui  occasionna  beaucoup  de  réclamations 
fut  l'exercice ,  par  la  maison  d'Autriche  ,  d'un  droit 
qu'en  empruntant  un  mot  de  l'ancienne  jurisprudence 
française ,  elle  appela  le  droit  d'épave.  En  se  référant 
aux  réserves  que  l'Empereur  avait  insérées  dans  la 
convention  du  26  décembre  1 802  \  et  sous  l'abri  des- 
quelles il  avait  placé  la  plénitude  des  prérogatives 
impériales  et  des  droits  de  sa  maison ,  ce  monarque 
prit  possession,  non-seulement  de  l'abbaye  de  Heili- 
genkreuzthal  que,  malgré  la  protestation  du  subdélégué 
de  Bohême ,  le  Recès  avait  donnée  à  l'électeur  de 
Wurtemberg  *,  mais  en  général  de  tous  les  immeubles, 
cens  et  capitaux  que  des  évêchés,  chapitres,  abbayes 
et  couvents,  situés  hors  des  provinces  autrichiennes 


Voy.  ci-dessus,  p.  230. 
Voy.  ci-dessus,  p.  284. 


--.  454  — 

et  sécularisés  par  le  Recès,  possédaient  dans  les  pays 
héréditaires.  Cette  démarche  était  évidemment  con- 
traire aux  stipulations  du  Recès  j  mais  la  Cour  de 
Vienne  avait  mis  ses  droits  à  couvert  par  la  réserve 
dont  nous  avons  parlé,  et  elle  prétendait  quç  les  biens 
de  toutes  les  fondations  sécularisées  devant  être  regar- 
dés comme  n'ayant  pas  de  maître,  retombaient  en 
vertu  du  droit  d'épave  au  fisc  du  souverain.  En  vertu 
de  ce  droit,  la  maison  d'Autriche  ne  saisissait  les  biens 
des  fondations  données  en  indemnité,  qu'autant  que 
le  nouveau  possesseur  les  sécularisait  j  mais  elle  sai- 
sissait aussi  les  biens  des  couvents  sécularisés  dans 
des  pays  non  donnés  en  indemnité,  comme  par 
exemple  en  Bavière. 

La  Députation  de  l'Empire  n'était  pas  encore  dis- 
soute que  déjà  on  lui  adressa  des  plaintes  sur  la  vio- 
lation de  Variicle  36  de  son  Recès  que  la  maison 
d'Autriche  s'était  permise.  Dans  sa  quarante-huitième 
séance,  du  20  avril,  et  dans  la  quarante-neuvihme  j  du 
7  mai,  les  électeurs  de  Bavière  et  de  Wurtemberg,  les 
princes  de  Nassau-Fulde ,  de  La  Tour  et  Taxis  et  de 
Hohenzollern,  le  grand  prieur  de  l'Ordre  de  Saint- 
Jean,  et  les  comtes  d'Aspremont,  d'Ostein,  de  Quadt 
et  de  Sternberg,  lui  présentèrent  des  mémoires  à  ce 
sujet.  La  Cour  de  Vienne  en  prit  occasion  de  s'expli- 
quer sur  ses  principes  par  un  décret  que  la  chancel- 
lerie adressa,  le  1 9  mai  1 803,  aux  ministres  de  Bohême 
et  d'Autriche,  à  la  Diète.  Nous  allons  rapporter  sona- 
mairement  les  motifs  sur  lesquels  elle  fonda  la  légi- 
timité du  droit  d'épave  : 

1"  Le  droit  d'épave  a  été  généralement  exercé  à 
l'occasion  des  sécularisations  qui  ont  eu  lieu  dans 
la  dernière  moitié  du  xviii"  siècle j  il  a  été  nommé- 
ment exercé  contre  l'Autriche,  par  quelques-uns  des 
princes   réclamants  à  l'occasion  do  la   suppression 


—  455  — 

des  jésuites  et  des  sécularisations  ordonnées  par  l'em- 
pereur Joseph  II.  Le  rescrit  se  dispense  toutefois  de 
citer  le  décret  du  Conseil  aulique,  qui  avait  décidé 
tout  autrement  la  question  à  l'époque  du  procès  qui 
s'était  élevé  en  1781  entre  l'Université  de  Mayence 
et  les  landgraves  de  Hesse-Darmstadt  et  Hesse-Hom- 
bourg , 

2**  C'est  en  vain  qu'on  veut  opposer  à  la  maison 
d'Autriche  le  paragraphe  47  de  Varticle  5  de  la  paix 
d'Osnabruck;  ce  paragraphe  ne  se  rapporte  qu'aux 
sécularisations  qui  ont  eu  lieu  depuis  les  troubles  de 
religion  :  il  n'établit  pas  un  principe  général  pour  les 
temps  à  venir. 

3"  La  maison  d'Autriche  ayant  renoncé  aux  indem- 
nités ultérieures  qu'elle  pouvait  exiger,  on  ne  peut 
pas  prétendre  qu'elle  contribue  encore  à  l'indemni- 
sation d'autrui  par  le  sacrifice  de  ses  droits. 

4°  Soutenir  que  les  réserves  exprimées  dans  Var- 
ticle 4  de  la  convention  de  Paris,  pour  être  conciliées 
avec  l'exécution  du  plan  d'indemnité,  devraient  être 
parfaitement  d'accord  avec  toutes  les  stipulations  du 
Recès,  sans  exception,  serait  prétendre  que  ces  ré- 
serves ne  concernent  que  des  droits  auxquels  le  Recès 
n'a  pas  porté  atteinte ,  c'est-à-dire  qui  n'avaient  pas 
besoin  de  réserve.  Le  rescrit  convient  que,  parmi  les 
droits  qui  compétent  à  la  maison  d'Autriche,  il  y  en  a 
plusieurs  dont  l'exercice  est  incompatible  avec  ïes- 
sence  d'une  sécularisation ,  et,  par  conséquent,  avec 
l'exécution  du  Recès;  il  en  cite  quelques-uns,  tels  que 
le  droit  d'avocatie  sur  des  fondations  immédiates  si- 
tuées en  Souabe  j  le  droit  du  seigneur  direct  des  fiefs 
autrichiens  possédés  par  ces  fondations,  de  les  réunir 
au  domaine,  lorsque  les  vassaux  cessent  d'exister. 

5"  Si,  par  l'exercice  du  droit  d'épave,  plusieurs 
États  d'Empire  souffrent  un  préjudice  notable,  la 


—  456  — 

faute  en  est  à  ceux  qui  n'ont  observé  aucune  propor- 
tion entre  la  valeur  des  pertes  et  la  masse  des  objets 
d'indemnité. 

6°  Si,  par  V article  1  du  Recès,  la  maison  d'Au- 
triche a  renoncé  aux  enclaves  de  l'évêché  de  Freisin- 
gen,  dans  les  pays  héréditaires ,  cette  renonciation  a 
eu  lieu  en  faveur  d'une  branche  de  sa  maison,  et  est 
expresse.  On  ne  peut  pas  opposer  à  cette  maison  une 
autre  stipulation  du  même  paragraphe,  par  laquelle 
il  est  dit  que  les  enclaves  d'Eichstett,  dans  les  pays 
d'Anspach  et  de  Bayreuth,  appartiendront  à  la  Ba- 
vière, ces  enclaves  étant  immédiates,  et  la  maison 
d'Autriche  ne  prétendant  exercer  le  droit  d'épave  que 
sur  des  terres  médiates,  le  cas  n'est  pas  identique*. 

Ce  fut  par  ces  motifs  que  la  Cour  de  Vienne  per- 
sista à  donner  suite  au  droit  d'épave,  qui  frappa  sen- 
siblement plusieurs  petits  princes  ou  comtes,  aux- 
quels on  avait  assigné  leurs  indemnités  en  Souabe,  et 
qui,  à  raison  des  pertes  qu'ils  éprouvaient,  refusèrent 
de  contribuer  à  l'entretien  des  moines  des  couvents 
sécularisés,  ou  de  servir  les  rentes  dont  ils  avaient  été 
chargés  par  le  paragraphe  24  du  Recès. 

Quelques-unes  de  ces  réclamations  furent  réglées 
par  des  transactions.  Le  2  juin  1 804,  la  Cour  de  Vienne 
signa  à  Ratisbonne,  avec  l'électeur  de  Wurtemberg, 
une  convention ,  par  laquelle  l'abbaye  de  Heiligen- 
kfeuzthal  fut  l'endue  à  l'Électeur,  qui  consentit  à  la 
posséder  sous  la  supériorité  territoriale  de  l'Autriche; 
celle-ci  resta  en  possession  de  toutes  les  appartenances 

*  On  peut  consulter  sur  cette  discussion  deux  ouvrages,  dont  l'un, 
intitulé  :  Bas  HeimfaUs-oder  fiscalische  Occupattonsrecht  des  Erzhauses 
OEstreich,  etc.,  1803,  in-S",  est  un  commentaire  du  rescrit  dont  nous 
avons  donné  l'analyse.  L'autre  :  Bas  Occupattonsrecht  des  Landesherrl. 
Fiscus,  von  K.  (Klubea),  1804,  in-8<',  en  est  une  réfutation. 


—  457  —. 

d'Ellwangen,  Zwiefalten,  Rothenmiinster  et  Marga- 
rethenhausen,  ainsi  que  de  celles  du  couvent  des  do- 
minicains de  Rothweil,  qui  avaient  été  saisies  en  vertu 
du  droit  d'épave,  à  l'exception  des  biens  des  orphe- 
lins et  des  caisses  de  fondations  pieuses. 

Une  convention  semblable  fut  conclue  le  23  juin  1 804 
avec  le  prince  de  Nassau -Orange,  qui  céda  à  l'Autri- 
che les  parties  les  plus  écartées  de  l'abbaye  de  Wein- 
garten,  la  seigneurie  de  Blumeneck,  Saint -Gérold, 
Bandern,  Hofen,  la  seigneurie  de  Lubenau  et  diverses 
autres  parcelles,  à  condition  que  la  maison  d'Autriche 
lui  payerait  quarante  florins  par  chaque  quinze  flo- 
rins de  revenus  nets  des  immeubles  immédiats.  L'Au- 
triche leva  les  séquestres  mis  sur  les  biens  du  couvent 
de  Weingarten,  situés  dans  ses  États,  à  condition  que 
le  prince  reconnût  la  supériorité  territoriale  et  la  juri- 
diction de  cette  maison. 

Les  articles 68  et  70  duRecèsde  la  Députation  avaient 
donné  le  soin  aux  électeurs  de  Mayence  et  de  Hesse- 
Cassel  de  répartir  entre  les  États  restants  des  cercles 
du  haut  et  bas  Rhin  les  charges  qui  concernaient 
la  totalité  de  ces  deux  cercles,  et  principalement  la 
sustentation  des  souverains  ecclésiastiques  dépossé- 
dés. L'Électeur-Archichancelier  nomma,  pour  le  re- 
présenter à  cette  commission,  son  conseiller  privé,  le 
baron  de  Kieningen.  L'électeur  de  Hesse-Cassel  nomma 
son  subdélégué,  le  baron  de  Gayling-d' Altheim.  Cette 
commission  se  constitua  à  Francfort,  le  8  mars  1 804, 
et  tint  une  suite  de  séances  qui  se  prolongèrent  jus- 
qu'à l'époque  où  l'Empire  germanique  cessa  d'exister. 
Ses  travaux  sont  étrangers  à  notre  plan. 

Une  discussion  très -animée  s'éleva  sur  le  sort  ré- 
servé à  la  Noblesse  immédiate.  Nous  avons  déjà  eu 


—  458  — 

plusieurs  occasioQs  de  parler  de  cette  Institution  dont 
l'origine  remonte  à  l'époque  des  derniers  Empereurs 
de  la  maison  de  Souabe  ou  de  Hohenstaufen.  Quoique 
la  Noblesse  immédiate  ne  fût  pas  parvenue  au  droit  de 
siéger  à  la  Diète,  elle  était,  sous  tous  les  autres  points, 
traitée  comme  l'égale  des  États  d'Empire.  Ses  posses- 
sions éparses  en  Souabe,  en  Franconie  et  sur  les  deux 
rives  du  Rhin,  ne  faisaient  pas  partie  des  Cercles  ou 
grandes  divisions  de  l'Allemagne;  mais  elles  for- 
maient elles-mêmes  trois  cercles  particuliers,  de 
Souabe,  de  Franconie  et  du  Rhin,  et  chaque  cercle 
était  divisé  en  cantons ,  ayant  leurs  directoires  char- 
gés de  l'administration  générale  et  de  l'exercice  de  la 
justice  en  seconde  instance  et  par  appel  de  la  justice 
seigneuriale,  et  composée  de  plusieurs  nobles  élus  par 
leurs  pairs,  et  d'un  Syndic  choisi  dans  la  classe  des 
jurisconsultes.  Si  toutes  les  possessions  de  ce  corps 
avaient  été  réunies,  elles  auraient  formé  une  belle 
principauté,  puisqu'elles  étaient  habitées,  avant  la 
cession  de  la  rive  gauche  du  Rhin,  par  quatre  cent 
cinquante  mille  âmes,  et  rapportaient  deux  millions 
quatre  cent  mille  florins.  Par  cette  cession ,  la  No- 
blesse perdit  trente-cinq  mille  sujets  et  deux  cent 
quatre-vingt-dix  mille  florins  de  revenus. 

L'existence  de  ces  petits  souverains  portait  ombrage 
aux  princes  dans  les  États  desquels  leurs  terres  étaient 
situées.  Probablement,  dès  1802,  les  médiateurs  fu- 
rent sollicités  de  la  faire  disparaître j  mais  ils  furent 
sauvés  par  l'esprit  chevaleresque  et  favorable  à  la 
noblesse  qui,  depuis  Paul  /,  dominait  dans  le  Cabi- 
net russe.  Toutefois,  à  peine  les  ministres  médiateurs 
eurent-ils  déclaré  leur  mission  terminée,  qu'on  fit  de 
nouvelles  tentatives  pour  soumettre  la  Noblesse  immé- 
diate à  la  supériorité  territoriale  des  grands  États. 

L'électeur  de  Bavière  en  donna  l'exemple.  L'Avis 


—  459  — 

de  l'Empire,  du  24  mars,  avait  de  nouveau  garanti  les 
droits  de  la  Noblesse  immédiate  ;  cependant,  en  pre- 
nant possession  des  évêchés  de  Wiirzbourg  et  de  Bam- 
berg,  le  gouvernement  de  Munich  se  saisit  des  rentes 
des  nobles,  occupa  militairement  leurs  terres,  y  établit 
des  impositions,  et  entrava  l'exercice  de  la  justice 
seigneuriale.  Une  proclamation  bavaroise  du  9  octo- 
bre 1 803  annonça  que  l'existence  de  la  Noblesse  im- 
médiate était  abusive  sous  plusieurs  rapports,  et  de- 
vait être  ramenée  au  point  d'où  elle  n'aurait  jamais 
dû  s'écarter.  Le  17  novembre  suivant,  les  nobles  poa- 
sessionnés  dans  l'enceinte  des  provinces  électorales 
furent  sommées  de  prêter,  dans  le  délai  de  huit  jours, 
serment  de  fidélité,  sous  peine  de  voir  leurs  terres  sé- 
questrées. 

La  Noblesse  réclama  la  protection  du  chef  de  l'Em- 
pire; elle  lui  fut  accordée,  et  l'Empereur  fit  inviter, 
par  une  Note  du  6  décembre ,  la  Cour  de  Munich  de 
rétablir  la  Noblesse  immédiate  dans  le  status  quo  \  La 
Noblesse  s'était  aussi  adressée  au  gouvernement  fran- 
çais qui  lui  répondit  le  1 6  décembre  par  une  Note  dont 
la  seconde  partie  parut  contradictoire  avec  la  pre- 
mière. On  y  dit  que  le  premier  Consul,  déterminé  à 
maintenir  r existence  de  la  Noblesse  immédiate^  a  or- 
donné à  son  ministre  à  Munich  de  faire  le  nécessaire 
pour  arrêter  les  entreprises  et  actes  de  violence  de 
l'Électeur  contre  la  Noblesse  immédiate,  mais  qu'on 
souhaitait  cependant  quelle  s'arrangeât  amiablement 
avec  l'Electeur  et  les  autres  princes,  et  qu'on  avait 
communiqué  aux  Cours  de  Vienne,  Pétersbourg  et 
Berlin  le  vœu  d'un  pareil  arrangement. 

L'exemple  de  l'électeur  de  Bavière  était  trop  sédui- 

*  Cette  Note,  présentée  par  le  baron  de  Buol-Schauenstein,  se  trouve 
dans  HiSBEJiLiN,  Staats-Arçhiv,  Heft  44,  4804,  p.  393. 


—  460  — 

sant  pour  ne  pas  trouver  des  imitateurs.  Les  prises  de 
possession  se  suivirent  rapidement  :  de  la  part  de  Nas- 
sau-Orange-Fulde  le  29  novembre,  de  l'électeur  de 
Hesse  le  6  décembre,  de  Hesse-Darmstadt  le  9,  d'Isen- 
bourg  le  14,  de  Linange  le  16,  de  la  maison  de 
Hohenlohe  le  26,  de  Salm-Reifferscheidt  le  29,  et  de 
Nassau-Usingen  le  31  décembre.  11  arriva  même  que 
plusieurs  princes  prirent  possession  des  mêmes  terres 
seigneuriales.  Un  acte  particulièrement  remarqué  fut 
la  surprise  du  bourg  de  Friedberg,  dans  la  soirée  ora- 
geuse du  20  janvier  1804,  par  des  troupes  de  Darm- 
stadt.  Ce  bourg  était  un  ganerbinat,  c'est-à-dire  le 
siège  du  gouvernement  d'une  de  ces  confraternités 
qui  se  formèrent  dans  le  moyen  âge,  et  qui  avaient 
pour  objet  la  sûreté  des  terres  pour  lesquelles  on  en- 
trait dans  cette  union,  et  le  droit  de  succession  réci- 
proque dans  les  terres  ainsi  mises  en  commun. 

La  Note  impériale  du  6  décembre  1 803  étant  restée 
sans  effet,  et  même,  à  ce  qu'on  prétend,  sans  réponse, 
le  Conseil  aulique,  tribunal  suprême  de  l'Empire, 
traitant  l'usurpation  de  l'Électeur  en  simple  affaire  de 
justice,  publia,  le  23  janvier  1804,  une  ordonnance, 
ou,  comme  on  dit,  un  conservatorium ,  par  laquelle  il 
fut  enjoint  à  l'Électeur  de  s'abstenir  de  ces  actes  arbi- 
traires, et  de  rétablir  la  Noblesse  dans  son  immédia- 
teté  ;  et,  à  défaut  d'obéissance  de  la  part  de  ce  prince, 
l'Archichancelier,  les  électeurs  de  Saxe  et  de  Bade  et 
l'Autriche  furent  commis  pour  exécuter  cet  arrêt. 

Quelques  jours  après,  le  roi  de  Suède  se  trouvant 
à  la  Cour  de  Munich,  fit,  en  sa  qualité  de  duc  de  Po- 
méranie,  présenter  à  la  Diète  une  Note  dirigée  contre 
les  procédés  de  la  Bavière.  Il  y  invita  l'Empereur  à 
faire  usage  des  moyens  que  la  Providence  avait  mis 
entre  ses  mains,  pour  maintenir  la  Constitution,  et 
repousser  les  atteintes  qu'on  voudrait  y  porter. 


—  461  — 

La  Prusse  ne  partagea  pas  cette  manière  de  voir. 
Voici  quelques  passages  extraits  d'une  Note  que  le 
ministre  de  cette  puissance  à  la  Diète  remit  le  25  jan- 
vier 1 804.  «  Si,  avec  les  États  sécularisés,  non-seule- 
ment les  droits  qu'ils  ont  exercés,  mais  aussi  leurs 
prétentions,  ont  passé  aux  nouveaux  acquéreurs,  ceux- 
ci,  en  leur  qualité  de  souverains  héréditaires,  ont 
une  autre  manière  de  voir,  et  d'autres  intérêts,  que 
des  princes  ecclésiastiques.  Ils  doivent  fréquemment 
se  voir  dans  le  cas  de  réclamer,  comme  parties  essen- 
tielles de  leurs  lots,  des  droits  que  la  négligence  des 
gouvernants  et  l'usurpation  des  temps  antérieurs  ont 
obscurcis.  Plusieurs  États  du  premier  rang  ont  mani- 
festé leurs  prétentions  sur  les  terres  de  la  Noblesse, 
situées  dans  l'enceinte  de  leur  territoire  ou  sur  leurs 
confins,  soit  parce  qu'elles  y  ont  anciennement  appar- 
tenu, soit  parce  qu'elles  se  trouvent,  à  l'égard  de  ces 
territoires,  dans  des  rapports  de  féodalité  et  de  juri- 
diction, qui  prouvent  l'ancienne  supériorité  territo- 
riale. »  Le  ministre  ajoute  que,  quels  que  soient  les 
droits  des  souverains  et  de  la  Noblesse,  cette  affaire 
ne  pouvait  pas ,  par  sa  nature ,  être  portée  devant  les 
tribunaux,  et  que  le  Roi,  pour  sa  part,  ne  se  désiste- 
rait pas  des  mesures  qu'il  avait  cru  devoir  prendre 
envers  la  Noblesse  possessionnée  dans  des  principautés 
de  la  Franconie. 

Le  30  janvier,  les  ministres  d'Autriche  à  Ratisbonne 
annoncèrent  officiellement  que  leur  maître  avait  ac- 
cepté la  commission  dont  le  conservatorium  du  23  jan- 
vier l'avait  chargé.  Les  trois  Électeurs  donnèrent  des 
déclarations  semblables. 

L'électeur  de  Bavière,  cédant  à  l'orage,  se  soumit 
au  conservatoire,  et  les  autres  princes,  à  l'exception 
de  la  Prusse,  suivirent  encore  son  exemple.  Cette  con- 
descendance, qu'on  pouvait  regarder  comme  tempo- 


—  462  — 

raire,  n'empêcha  pas  que  les  quatre  cours,  indiquées 
par  le  décret  du  Conseil  aulique,  n'instituassent  à 
Ratisbonne  une  subdélégation,  composée  du  baron 
d'Albinif  au  nom  de  l'Archichancelier;  du  baron  de 
Glohig ,  en  celui  de  l'électeur  de  Saxe;  du  baron  de 
Gemmingeiif  pour  celui  de  Bade,  et  du  baron  de  Hûgel 
et  du  comte  de  Stadion,  au  nom  de  l'Autriche.  Elle 
ouvrit  ses  séances  le  27  mars  1 804.  Dès  le  1 1  du  même 
mois,  le  Chargé  d'affaires  de  France  à  la  Diète, 
M.  Bâcher  y  remit  une  Note  par  laquelle  il  annonça 
que  l'empereur  de  Russie  avait  proposé  au  premier 
Consul  d'intervenir  encore  une  fois  pour  prévenir  les 
suites  désastreuses  que  pourraient  avoir  les  différends 
relatifs  à  l'Ordre  équestre. 

Le  27  du  même  mois,  le  ministre  de  Brandebourg  à  la 
Diète  donna  connaissance  d'un  mémoire  du  Roi,  dans 
lequel,  en  se  référant  à  la  précédente  Noté,  on  ferait 
observer  que,  d'après  la  déclaration  donnée  par  l'élec- 
teur de  Bavière,  la  question  cessait  d'être  du  ressort  des 
tribunaux;  que  le  Roi  croyait  au  reste  devoir  mettre 
à  couvert,  par  une  protestation  formelle,  ses  droits  et 
ceux  de  ses  co-États,  contre  la  mesure  inconstitution- 
nelle ordonnée  par  le  Conseil  aulique;  qu'il  engageait 
toutefois  ses  corÉtats  à  accepter  la  médiation  de  la 
Russie  et  de  la  France. 

Le  28  avril,  M.  Bâcher  expliqua  par  une  communi- 
cation faite  par  manière  de  conversation  f  que  la  situa- 
tion où  se  trouvaient  les  affaires  d'Allemagne  exigeait 
qu'on  évitât  tous  différends,  et  surtout  toutes  discus- 
sions intérieures  qui  étaient  inutiles,  dans  un  moment 
où  l'Empire  attendait  une  médiation  qui  aurait  lieu 
incessamment  de  la  part  de  la  France  et  de  la  Russie. 
Il  dit  qu'il  serait  désagréable  aux  médiateurs  que  la 
commission  établie  pour  l'exécution  du  commissorium 
du  Conseil  aulique,  prétendît  donner  cours  à  ses  opé- 


—  463  — 

rations,  et  qu'on  espérait  plutôt  qu'elle  tomberait 
d'elle-même. 

Lorsque  le  délégué  de  Bonaparte  présenta  cette 
Note ,  son  maître  «  s'était  rendu  coupable  de  ce  grand 
coup  d'État  f  dont  f  exécution  barbare  a  retenti  si  pro- 
fondément dans  tous  les  cœurs\  »  et  qui  ne  permettait 
plus  à  l'empereur  Alexandre  d'agir  de  concert  avec 
lui.  Plus  de  démarches  combinées  dès  lors!  Le  sort  de 
la  Noblesse  immédiate  fut  ajourné  jusqu'à  la  conclu- 
sion de  la  paix  de  Presbourg,  oii  les  possessions  de 
tant  de  faibles  princes  furent  réunies  aux  grands  États 
qui,  depuis  longtemps,  avaient  jeté  leur  dévolu  sur 
ces  territoires. 


'  Expressions  attribuées  au  comte  de  Stadion.  «  Un  Français  n'au- 
rait pas  su  déplorer  dans  un  plus  noble  langage  l'assassinat  du  duc 

d'ENGHIEN.  » 


FIN   DU   TOME   SEPTIÈME. 


TABLE  DES  MATIÈRES 


DU  SEPTIÈME  VOLUME. 


SUITE 


QUATRIÈME  PERIODE, 


HISTOIRE  DES  TRAITÉS  DEPUIS  LE  COMMENCEMENT  DES 
GUERRES  DE  LA  RÉVOLUTION  FRANÇAISE  JUSQUAU  TRAITÉ 
DE    PARIS  DE    1815.   —   1791-1815. 


CHAPITRE  XXXI. 


TRAITÉ  DE  PAIX  d'aMIENS  ENTRE  LA  FRANCE  ET  SES  ALLIÉS,   ET  LA 
GRANDE-BRETAGNE  ,   DO   27  MARS   1802. 

Page  3. 


Desseins  du  premier  Consul  à 
l'égard  de  l'Angleterre 4 

Mission  de  M.  Otto  à  Londres. .    tt>. 

Ses  instructions ih. 

Sa  conduite  habile 6 

Négociation  pour  un  armistice 
maritime ,  au  mois  d'août 
1800 7 

Projet  présenté  par  M.  Otto 9 

Contre-projet  de  lord  Gren- 
ville 10 

Conférence  entre  M.  Otto  et 
M.  Hammond 14 

VII 


Capitulation  de  Malte 15 

Négociation  relative  à  la  saisie 
des  pêcheurs  français 16 

Nouveau  contre-projet  de  M. 
Otto 17 

Le  ministère  Âddington  prend 
la  direction  des  affaires  le  16 
mars  1801 ib. 

Communication  de  lord  Haw- 
kesbury  à  M.  Otto^  touchant 
le  rétablissement  de  la  paix.    18 

Négociation  des  articles  préli- 
minaires      ibi 

30 


—  466  — 


Campagne  marilime  de  1801. . .    22 

Combat  d'Algésiras,  du  G  juil- 
let; l'amiral  Linois:  l'amiral 
Saumarea ib. 

Articles  du  traité  des  prélimi- 
naires de  Londres,  du  1"  oc- 
tobre 1801 23 

Entbousiasme  qu'excile  à  Lon- 
dres la  conclusion  de  la  paix.    27 

Le  général  Lauriston  arrive  en 
celle  ville,  porteur  des  rati- 
fications     ib. 

Congrès  à  Amiens  ;  plénipoten- 
tiaires ;  Joseph  Bonaparte  : 
marquis  Cornwallis:  cheva- 


lier Azara:  M.  Schimmel- 
penninck 28 

Les  conférences  s'ouvrent  au 
mois  de  décembre 29 

Discussions  préliminaires ib. 

Affaire  de  Malte 33 

Difiicultés  relatives  à  la  Porte 
ottomane  et  à  l'Italie 35 

Traité  de  paix  d'Amiens,  entre 
la  France  et  ses  alliés  et  la 
Grande-Bretagne,  du  27  mars 
1802 36 

Considérations  générales  sur  la 
paix  d'Amiens. .  » 44 


CHAPITRE  XXXII. 

RECÈS  DE  LA  DÉPDTATION  DE  l'eMPIRE,  DU  25  FÉVRIER  1803. 

Page  67. 
SECTION  PREMIÈRE. 

PRECIS  HISTORIQUE   DE  LA  CONSTITUTION  GERMANIQUE. 

Page  68. 


Introduction 70 

Origine  du  royaume  d'Allema- 
gne       72 

Paix  de  Verdun,  en  843 ib. 

Les  droits  des  Étals  sont  recon- 
nus      ib. 

Assemblées  de  Mersen,  en  851, 
et  de  Coblentz,  en  8Go 73 

Louis  le  Germanique  rétablit 
les  ducs  supprimés  par  Ctiar- 
lemagne ib. 

Origine  des  ducs  de  Thuringe, 
de  IJavière,  de  Saxe  cl  de 
la  France  rhénane ib. 

Formation  cl  partage  du  royau- 
me de  Lotharingia 74 

Traité  de  Procasjtis,  en  870. . .    ib. 

Séparation  déflnitivc  des  royau- 
mes de  France  et  d'Allema- 
gne, en  887 75 

La  royauté  d'Allemagne  devient 
élective ib. 

Les  ducs  de  Saxe  donnent  cinq 
roisà  l'Allemagne,  919-1024.    ib. 

Origine  des  villes,  sous  Henri  I.   ib. 


Formation  d'un  tiers  élal  libre.  75 

Création  des  Margraves 76 

Origine  des  grands  officiers  de  la 

couronne ib. 

Commencement  de  l'Empire 
d'Allemagne  ou  du  Saint-Em- 
pire romain  de  la  nation  ger- 
manique      ib. 

L'empereur  d'Allemagne  chef 
séculier  de  la  chrélienlé 77 

Les  ducs  et  comtes  s'appro- 
prient les  domaines  de  la  cou- 
ronne      ib. 

Oihon  l  veut  convertir  au  chris- 
tianisme les  nations  slaves. . .    ib. 

Origine  de  plusieurs  nouveaux 
évôchés ib. 

La  maison  dos  durs  de  France 
est  appelée  au  trône  cl  four- 
nit quatre  rois  à  l'Allemagne, 
1024-1115 78 

Réunion  du  royaume  d'Arles.,    ib. 

Les  fiefs  deviennent  héréditai- 
res      79 

Changement  dans  les  dénomi- 
nations    ib. 


467 


Origine  du  grand  nombre  des 
principaulés  en  Allemagne.  ;     80 

Guerre  entre  l'Empire  cl  le  Sa- 
cerdoce ,  sous  le  règne  de 
Henri  IV ib. 

Origine  des  Communes ,  sous 
Henri   V ib. 

Concordai  de  Worms,  en  1 122.    ib. 

Éleclion  de  Lothaire  II,  duc 
de  Saxe 81 

Les  qualre  grands  officiers  s'al- 
Iribuent,  avec  les  Iroisarchi- 
chanceliers  le  droit  d'élire  les 
Empereurs ib. 

La  maison  de  Hohenstaufen 
donne  six  empereurs  à  l'Alle- 
magne, 1138-1254 ib. 

Période  brilianle  de  l'Empire, 
les  lellres  y  sont  en  honneur,    ib. 

Origine  des  factions  Guelfe  cl 
Gibeline 82 

Le  Margraviat  d'Autriche  est 
érigé  en  duché ib. 

Privilège  célèbre 83 

Avènement  de  la  maison  de 
Willelsbach  au  duché  de  Ba- 
vière     ib. 

Premiers  ducs  de  Méranie ib. 

Révolution  et  démembrement 
du  duché  de  Saxe ib. 

Premières  lois  fondamentales 
de  l'Empire  données  par  Fré- 
déric II 85 

Diplôme  de  1220,  délivré  à 
Francfort,  en  faveur  des  prin- 
ces ecclésiastiques ib. 

Diplôme  de  1232,  signé  à  Udine, 
en  faveur  des  princes  sécu- 
liers      ib. 

Origine  des  États  provinciaux. .  86 

Cause  de  la  grande  variété  dans 
les  constUulions  des  Élals 
d'Allemagne 87 

Établissement  de  l'Ordre  Teu- 
lonique  en  Prusse ib. 

Révolution  d'Italie ib. 

L'autorité  impériale  est  anéan- 
tie      88 

Frédéric  II  reconnaît  la  supé- 
riorité territoriale  l'es  Étals 
d'Allemagne ib. 

Institution  de  la  charge  de  juge 
du  palais ih. 

L'extinction  des  ducs  de  Zaîrin- 
gue  prépare  la  révolution  qui 


détacha  la  Suisse  de  l'Alle- 
magne      89 

Extinction  de  la  maison  d'Au- 
Iriche-Babenberg 90 

Extinction  des  ducs  de  Méra- 
nie      ib. 

Extinction  des  landgraves  de 
ïhuringe 91 

Extinction  de  la  maison  de  Ho- 
henstaufen      ib. 

Les  sept  électeurs 92 

La  couronne  impériale  mise  à 
l'enchère ib. 

Origine  de  la  maison  de  Habs- 
bourg     ib, 

Autriche ib. 

Établissement  des  préfectures 
impériales 93 

Droits  de  suzeraineté  sur  le 
royaume  de  Bourgogne ib. 

Investiture  du  comté  de  Neuf- 
châlel 94 

Avènement  de  la  maison  de  Ho- 
henzollern ib. 

Bourgraviat  de  Nuremberg ib. 

Exemple  de  la  destitution  d'un 
empereur 95 

Origine  de  la  confédération  hel- 
vétique      ib. 

Le  tiers  état  est,  pour  la  pre- 
mière fois,  représenté  à  la 
Dièle  de  Spire,  en  1309 9G 

Démembrement  du  royaume  de 
Bourgogne ib. 

Suppression  de  l'Ordre  des  Tem- 
pliers      ib. 

Schisme  à  l'occasion  du  succes- 
seur de  Henri  VII ib. 

Union  électorale  de  Rensé,  en 
1338 97 

Les  Étals  d'Empire  déclarent 
que  la  puissance  impériale  dé- 
rive immédialemeul  de  Dieu.    ib. 

Prétentions  pontificales  anéan- 
ties     ib. 

LamaisondeLuxembourg  don- 
ne qualre  empereurs  à  l'Al- 
lemagne, 1347-1437 98 

Bulle  d'Or  de  Charles  IV,  en 
135G il. 

La  Silésie  est  incorporée  au 

royaume  de  Bohême id 

Nouveaux  démembrements  du 
royaume  d'Arles il. 


—  468  — 


Origine  du  duché  de  Milan.. . .  lOO 
Dernier  exemple  de  la  deslitu- 
Uon  d'un  empereur ib. 

Le  maison  de  Hohenzollern  ob- 
Uenl  l'éleclorat  de  Brande- 
bourg   101 

La  maison  de  Misnie  obtient 
l'électoral  de  Saxe ib. 

Pragmatique  sanction  germani- 
que de  Mayence,  en  1439.     102 

Concordat  de  la  nation  germa- 
nique, en  1448 ib. 

L'archiduc  Maxiniilien  épouse 
Marie  de  Bourgogne 103 

Grandeur  de  la  maison  d'Au- 
triche     ib. 

L'usage  s'introduit  de  faire  tenir 
les  Diètes  par  des  envoyés. .    ib. 

Désordre  du  règne  de  Frédé- 
ric IH ib. 

Domination  du  droit  du  plus 
fort ib. 

Paix  publique  de  1495 104 

Établissement  de  la  Chambre 
impériales ib. 

Institution  d'un  Conseil  de  Bé- 
gencea  la  Diète  d'Augsbourg, 
en  1600 ib. 

Division  de  l'Empire  encercles.  105 
Origine  des  capitulations  im- 
périales    106 

Matricule  de  1521 ib. 

Réformation  du  xvi*  siècle ib, 

L'Ordre  Teutonique  est  expulsé 

de  la  Prusse 107 

Premiers  exemples  de  la  con- 
fédération des  Étals ib. 

Alliance  de  Torgau  et  ligue  de 
Smalkade ib. 

Origine  des  deux  branches  de 
la  maison  d'Autriche 108 

Paix  de  religion 109 

Traite  de  1542,  fixant  les  rap- 
ports entre  le  duché  de  Lor- 
raine et  l'Empire ib. 

Ordonnance  d'exécution  pour  la 
transaction  de  Passau 110 

Nouvel  ordre  de  succession . . .    ib. 
Statut  de  famille  de  la  maison 
de  Brandebourg,  en  1473...  111 

Changemenis  introduits  dans  le 
droit  de  primogéniture ib. 

Diète  de  1582 ib. 


Révolution  complète  opérée  par 
la  guerre  de  Trente  ans 112 

Dernier  Recès  d'Empire  de  1654.  116 

Diète  de  1663 ib. 

Elle  enlève  à  l'Empereur  le 
droit  de  convoquer  et  de  dis- 
soudre l'assemblée  des  États,    ib. 

Les  princes  adoptent  la  coutu- 
me de  se  faire  représenter  à 
la  Diète  par  des  plénipoten- 
tiaires     ib. 

Établissement  d'un  neuvième 
électoral,  en  faveur  de  la  mai- 
son de  Brunswic lie 

Réunion  de  la  Lorraine  à  la 
France,  en  1738 ib. 

Nouvelle  maison  de  Habsbourg- 
Autriche  117 

Extinction  de  la  branche  ca- 
dette de  la  maison  de  Wittels- 
bach,  enl778 ib. 

La  maison  de  Bavière  devient  la 
troisième  en  puissance  de 
l'Allemagne ib. 

Union  des  princes  protecteurs 
des  libertés  germaniques.. .  118 

Étals  qui  composaient  l'Empire 
d'Allemagne 119 

Forme  de  gouvernement 120 

Droits  et  prérogatives  du  chef 
de  l'Empire.. 123 

Droits  que  l'Empereur  exerçait 
avec  le  concours  des  États. .  124 

Supériorité  territoriale  des 
Élals,  ou  droits  qu'ils  exer- 
çaient sans  le  concours  de 
l'Empereur ib. 

Diète  de  l'Empire 126 

Sa  composition 127 

Commissaire  impérial ib. 

Présidence  ou  Directoire ib. 

Collège  des  électeurs ib. 

Collège  des  princes t&. 

Collège  des  villes  impériales. .  129 

Modes  suivis  pour  les  voles. . . .  ib. 

Avis,  placita  împerii 130 

Décret   de  commission ib. 

Conclusum  de  l'Empire ib. 

Recès ib. 

Dépulalions  de   l'Empire ib. 

Noblesse  immédiate 131 

Don  gratuit  ou  caritativum. . .  ib. 


/i69 


Cercles  de  Souabe,  de  Fi-anco- 
nieetduRhin I3i 

GanerJjinats . , ib. 

Division  de  l'Empire  en  dix  cer- 
cles     ib 

Roi  des  Romains 1 32 


Vicaires  de  l'Empire  132 

Conlril)Ulions  ou  collectes ib. 

Mois  romains. ib. 

Cours  suprêmes  de  jusUce.. ..  133 

Conseil  aulique i^- 

Chambre  mp^naie deWetzlar.    ib. 


SECTION  II. 


HISTOIRE    DE    LA.    DÉPUTATION    DE    l'EMPIRE    DE    1803,    JUSQU'A   SA   QUARANTE- 
SIXIÈME   SÉANCE. 


Page  134. 


13G 


139 


Traité  de  Paris,  du  24  août  1801 , 
entre  la  France  et  la  Bavière , 
M.  Caillard  :  M.  de  Cetto. , 

Négociations  à  Paris,  de  l'année 
1802 

Traité  secret  entre  la  France 
et  la  Prusse,  du  23  mai i40 

Traité  secret  entre  la  France 
et  la  Bavière,  du  23  mai.. . .    ib. 

Traité  secret  entre  la  France  et 
la  Russie ,  du  3  juin ib. 

Convention  de  Paris,  du  23  mai 
1802,  entre  la  France  et  la 
Prusse,  relative  aux  intérêts 
de  la  maison  de  Nassau-Oran- 
ge ;  général  Beurnonville  : 
marquis  de  Lucchesini 141 

Convention  de  Berlin,  du  14  no- 
vembre 1802,  entre  la  Prusse 
et  la  République  balave  ; 
comte  de  Haugwitz  :  M.HuU- 
man 143 

Traité  de  Paris,  du  20  juin  1802, 
entre  la  France  et  le  Wur- 
temberg; M.  d'Hauterive:  le 
baron  de  Normann 144 

La  Prusse,  la  Bavière  et  l'Au- 
triche prennent  possession  de 
leurs  indemnités 145 

Déclarations  autrichiennes  et 
prussiennes 147 

Déclarations  des  puissances  mé- 
diatrices, du  18  août  1802; 
M.  de  Talleyrand  :  le  prince 
Kourakine ib. 

Rapport  français,  du  21  août 
1802  ;  observations  sur  ce  rap- 
port   

Ouverture  des  séances  de  la  Dé- 
putation  de  l'Empire,  le  24 
août 


159 


168 


Deux  partis  se  forment  au  sein 
de  l'assemblée 172 

Deuxième  séance n3 

Note  des  commissaires  de  Fran- 
ce et  de  Russie ib. 

Demandes  de  l'Autriche  en  fa- 
veur de  la  Toscane 174 

Déclaration  sur  l'occupation  de 
la  ville  de  Passau 179 

Réponse  du  plénipotentiaire  de 
Prusse 180 

Troisième  séance,  du  8  septem- 
bre   182 

Le  sort  de  l'Allemagne  est  dé- 
cidé     il'- 

Adoption  du  premier  plan  d'in- 
demnités   I8'i 

Convention  de  Paris,  du  5  sep- 
tembre 1802,  entre  la  France, 
la  Prusse  et  la  Bavière;  M.  de 
Talleyrand  :  le  mar([uis  de 
Lucchesini:  M.  de  Cetto...    ib. 

Quatrième  séance,  du  14  sep- 
tembre   186 

L'Empereur  refuse  de  ratifier  le 
premier  plan  d'indemnité. . .    ib. 

Note  française,  du  13  septem- 
bre, contre  l'occupation  de 
Passau ib. 

Cinquième  séance,  du  16  sep- 
tembre   191 

Requête  pour  la  seigneurie  de 
Marliange ib. 

Sixième  séance,  du  18  septem- 
bre    192 

Discussion  entre  le  plénipoten- 
tiaire impérial  et  le  subdélé- 
gué de  Brandebourg ib. 

Septième  séance 193 


—  470  — 


Le  rapport  entre  laDépulalion 
et  les  médiateurs  est  régu- 
larisé   193 

Huitième  et  neuvième  séances,   ib. 

Affaires  particulières ib. 

Note  autrichienne,  du  2G  sep- 
tembre, en  réponse  à  la  noie 
française  du  13 ib. 

Dixième  séance,  du  28  septem- 
bre     197 

Rapport  sur  la  sustentation  des 
ecclésiastiques ib. 

Discussion  sur  l'indemnité  de 
Hesse-Cassel 198 

Onzième  séance 199 

Réclamation  de  quelques  villes 
impériales  de  Souabe  et  de 
Franconie ib. 

Douzième  et  treizième  séances,   ib. 

Second  plan  d'indemnités,  du  9 
octobre 200 

Noie  des  médiateurs,  du  8  oc- 
tobre      ib. 

Examen  comparatif  du  nouveau 
plan 202 

Quatorzième  séance,  du  12  oc- 
tobre    205 

Expressions  remarquables  du 
vole  de  Brandebourg ib. 

Quinzième  séance,  du  14  oc- 
tobre      ib. 

Observations  du  subdélégué  de 
Mayence ib. 

Propositions  du  subdélégué  de 
Saxe  relativement  à  la  susten- 
tation   208 

Seizième  séance,  du  18  octobre.  209 

Discussion  touchant  la  consti- 
tution des  pays  sécularisés,    ib. 

Dix-septième  séance,  du  19  oc- 
tobre    212 

Réponse  des  médiateurs  aux 
observations  concernant  les 
principes ib. 

Dix-huitième  séance,  du  21  oc- 
tobre    213 

Protestation  du  subdélégué  de 
Bohême  au  nom  du  grand- 
duc  de  Toscane ib. 

Le  second  plan  d'indemnités  est 
adopté ib 

Conclusum  du  21  octobre  1802.    ib. 

Dix-neuvième  séance,  du  23  oc- 
tobre   214 


Représentation  du  subdélégué 
de  la  Bohême  touchant  cer- 
tains droits  de  la  maison 
d'Autriche 214 

Vingtième  séance,  du  26  oc- 
tobre    217 

Déclaration  remarquable  du 
ministre  du  roi  de  Suède. . .    ib. 

Vingt  et  unième  séance,  du  30 
octobre 218 

Observations  concernant  les 
quatre  villes  impériales  de 
Brème  ,  Hambourg,  Augs- 
bourg  et  Lubeck ib. 

Les  séances  22,  23,  24  et  25  sont 
consacrées  à  des  réclama- 
tions particulières 219 

Vingl-sixième  séance,  du  1 1  no- 
vembre      ib. 

Délibérations  relatives  à  la  sus- 
tentation des  ecclésiastiques,   ib. 

Vingt-septième  séance,  du  IG 
novembre 22 1 

Note  des  ministres  médiateurs, 
renfermant  des  moditlcalions 
au  plan  général ib. 

Séances  des  18,  20, 23  et  25  no- 
vembre    224 

Réclamations  particulières ib. 

Trente-deuxième  «éance,  du 
4  décembre ib. 

Démission  de  l'archiduc  i4n<otne 
de  l'archevêché  de  Cologne,   ib. 

Note  des  ministres  médiateurs, 
du  3  décembre  1802. 22G 

Trente-troisième  et  trente-qua- 
trième séances,  des  7  et  14 
décembre 228 

Objets  soumis  à  la  délibération 
par  le  subdciégué  de  Bohême,   ib. 

Trente-cinquième  séance,  du  22 
décembre 229 

Observations  du  subdélégué  de 
Brandebourg  au  sujet  du 
nombre  des  suffrages ib. 

Conventions  de  Paris,  du  2G  dé- 
cembre 1802,  entre  l'Autri- 
che et  la  France  ;  comte 
Phili|)|)e  de  Cobenxl:  Joseph 
Bonaparte 230 

Trente-sixième  séance  ,  du  4 
janvier  1803 232 

Diflicullés  au  sujet  de  la  rali- 
lication  du  plénipotentiaire 
impérial 233 


—  471   — 

Trenle-seplième  séance,  du  19 


janvier 2-35 

Note  (les  ministres  médiateurs,  ib. 
Séances  des  23  janvier,  3 ,  8, 

12,  15,  IG  et  18  lévrier 23G 

Discussion  et  approbation  des 

38  premiers  articles 237 


Quarante-sixième  séance,  du  25 
février 237 

LeRecès  définilif  est  adopté  et 
soumis  à  l'approl^alion  de 
l'Empereur  et  de  l'Empire.,    ib. 

Résumé.   ib. 


SECTION  III. 

RECÈS  DE   LA  DÉPIITATION  DE  l'EMPIRE  ,  DU    25  FÉVRIER   1803,   TEXTE   ET 
COMMENTAIRE. 

Pase  241. 


Introduction 242 

Indemnité  de  l'Autriche 247 

—  de  la  Toscane 249 

—  de  Modène 250 

—  de  la  Bavière 255 

—  de  la  Prusse 263 

—  d'Arenberg 2G8 

—  du   duc  de  Croï...  270 

—  du  duc  de  Looz ib. 

—  des  deux  maisons  de 

Salra 271 

—  de  la  maison  deBruns- 

wic-Lunebourg  .  27G 

—  duducdeBrunswic.  277 

—  du  margrave  de  Ba- 

de    280 

—  du  duc  de  Wiirtem- 

berg 284 

—  de  la  maison  de  Ho- 

heniohe 285 

—  de     Salm    Reiffer- 

sclieidl ib. 

—  de  Limbourg-Sty- 

rum ib. 

—  de  la  maison  de  Hes- 

se-Cassel 289 

—  de  la  maison  de  Hes- 

se-Darmstadt ib. 

—  du    duc    d'Olden- 

bourg   297 

—  de    Mecklenbourg- 

Schwerin 303 

—  de  Hohenzollern. ..  305 

—  de  Dielrichstein.   . .  307 

—  du  prince  de  Ligne.  308 


Généalogie  de  la   maison  de 
Nassau 310 

Indemnité  de  Nassau-Usingen    312 

—  de    Nassau  -  Weil  - 

bourg 315 

—  du  prince  de  Nassau- 

Siegen 316 

—  du  prince  de  La  Tour 

et  Taxis 321 

—  de    la    maison    de 

Lœvenslein-Wert- 
heim 325 

—  de    la    maison    de 

d'Oettingen--Wal- 
lerslein 328 

—  de    la    maison    de 

Solms 329 

—  de  la  maison  de  Stol- 

berg 330 

—  de  la  maison  de  Ho- 

henlohe ib. 

—  d'isenbourg 334 

—  de  la  maison  de  Li- 

nange ib. 

—  de    la    maison    de 

Wied-Runkel....  339 

—  du  prince  de  Brel- 

zenheira 340 

—  de  la  maison  de  Witt- 

genstein..   . .  —  341 

—  des  comtes  du  col- 

lège de  Wesphalie.  342 

—  d'Aspremonl 346 

—  de  Bassenheim 347 

—  de  Metternich 348 

—  d'Ostein 349 


472  — 


Indemnité  de  Pletlenberg 

349 

—       de  Quadt 

350 

—       de  Schœsberg 

ib. 

—       de  Sinzendorff 

ib. 

—       de  SlerDl)erg 

351 

—       de  Toerring —  — 

352 

-—       de  Wartemberg. . . . 

ib. 

—       de  Golstein 

353 

—        de  Hallberg 

ib. 

—       de  Nesselrode 

ib. 

—       de  Sickingen 

ib. 

Comtes  de  la  quatrième  classe. 

355 

—     de  la  cinquième  classe 

ib. 

Dotation  de  l'Archichancelier. . 

359 

Indemnité  de  l'Ordre  Teutoni- 

que 

3G3 

—       de  l'Ordre  de  Malle. 

3G8 

Droits  des  villes  impériales. . . . 

3G9 

Indemnité  de  la  ville  d'Augs- 

bourg 

370 

—      delà  ville  de Lubeck. 

ib. 

Convention  du  2  avril   1804, 

entre   le   duc  d'Oldenbourg 

et  la  ville  de  Lubeck 

371 

Noblesse  de  l'Empire 

378 

République  helvétique 

ib. 

Rachat  des  rentes 

379 

Nouveaux  électeurs 

1^ 

Votes    virils  du  Collège   des 

Princes 

38? 

Privilège  de  non  appellando. . 

391 

Biens  des  grands  chapitres 

ib. 

Fondations  non  employées — 

392 

Biens  des  chapitres 

394 

—    des  fabri<iues 

395 

Dettes  des  Pays 

ih 

Péage  du  Rhin 

399 

Convention  de  Paris,  du  1 5  août 

1804,  sur  l'octroi  de  la  navi- 

gation du  Rhin...   

403 

Fiefs 

408 

Votes  des  comtes 

ih 

Sécularisation  des  couvents. . . 

409 

Époque  de  la  jouissance  des  in- 

demnités      

ib 

Aliénations  annulées 

410 

Succession  de  famille 

ib. 

Échanges  et  transactions 

413 

Sort  des  anciens  soi<yerains. . .    ib. 

Leurs  rangs 414 

Leur  juridiction ib. 

Leur  sustentation 416 

Évoques  suffraganls 416 

Sustentation  des  chanoines. . .    ib. 

Années  de  carence 417 

Ghanoinesses ih. 

Serviteurs  des  chapitres ib. 

Conventuels 418 

Précistes ib. 

Panistes 419 

Serviteurs  des  souverains  ecclé- 
siastiques     ib. 

Constitution  politique  des  pays 
sécularisés 420 

Droits  régaliens ib. 

Diocèses ib. 

Cultes ib. 

Fondations  médiates 421 

—       pieuses 422 

Garantie  des  pensions ib. 

Les  directeurs  des  Cercles  sont 
chargés  de  l'exécution  du 
Recès ib. 

Pays  sécularisés  entre  plusieurs 

seigneur» ib. 

Électeur  de  Trêves 424 

Sa  sustentation ib. 

Chapitre  de  Cologne 425 

Autres  ecclésiastiques ib. 

Serviteurs  de  la  rive  gauche. . .  426 

Chanoines t7>. 

Évoques  de  Bàle  et  de  Liège. .    ib. 

Serviteurs  des  corporations  sup- 
primées    430 

Dettes  affectées  aux  pays  d'in- 
demnité      ib. 

Créances  hypothécaires. .    ib. 

Nouvelles  dettes 432 

Dettes  des  Cercles ib. 

—  des  Cercles  du  Rhin. . . .   ib. 

—  des  Cercles  sur  la  rive 

gauche 433 

Cliambre  impériale 434 

Conclusion ib. 


—  473  — 


SECTION  IV. 


ÉVÉNEMENTS  POSTÉRIEURS  AU  RECÈS  DE  LA  DÉPUTATION  DE  L'EMPIRE. 

Pace  43G. 


Ralification  du  Recès  par  l'Em- 
pereur et  l'Empire 436 

Dissolution  de  la  Députation  de 
l'Empire 439 

Traité  d'épuration 441 

Introduction  des  nouveaux 
Électeurs 442 

Discussion  sur  l'organisation 
du  Collège  des  Princes 443 

Contestations  sur  le  droit  d'é- 
pave    453 


Convention  de  Ratisbonne,  du 
2  juin  1804,  entre  l' Autriche 
et  le  "Wiirlemberg 456 

Convention  du  23  juin  1804, 
entre  l'Autriche  et  Nassau- 
Orange 457 

Commission  executive  de  Franc- 
fort... ib. 

Discussion  sur  la  Noblesse  im- 
médiate   458 


FIN    DE   LA   TABLE. 


â 


JX       Garden,  Guillaume  de,  comte 

152         Histoire  g^n^rale 

G35 

t.7 


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