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Full text of "Histoire générale et impartiale des erreurs, des fautes et des crimes commis pendant la Révolution française, a dater du 24 août 1787 : contenant le nombre des individus qui ont péri par la révolution, de ceux qui ont émigré, et les intrigues des factions qui pendant ce tems ont désolé la France. : Ornée de gravures et de tableaux."

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HISTOIRE 

GÉNÉRALE  ET  IMPARTIALE 

DES  ERREURS,  DES  FAUTES 

ET     DES    CRIMES. 

COMMIS  PENDANT  LA  RÉVOLUTION  FRANÇAISE, 

T  O  M  E      V  I. 


H  I  s  T  O  IRE 

GÉNÉRALE  ET  IMPARTIALE 

DES  ERREURS,  DES  FAUTES 

ET     DES     GRIMES 

COMMIS  PENDANT  LA  RÉVOLUTION  FRANÇAISE, 

A  dater  du  24  Août  1787  ; 

Contenant  le  nombre  des  indiridus  qui  ont{)pii  par  la  Révolution, 
de  ceux  qui  ont  émigré  ,  et  les  intrigues  des  factions  qui  pendant  ce 
t«ms  ont  désolé  la  Fkance. 

OaNis    D^    GRAVURES    ET   DE    TABLEAUX. 


D»  Ilmouciinee  des  GooTtrnës  naît  It  tyraMsie  des  Gouremaas. 


CONVENTION    NATION  A-L  £. 

^     T  O  M  Ë  •  1  ï.: 


Stà  c  <■  •*'  h  i  >  ^  i  .•■ 


A    PARIS, 

Ko E  DES  Marais, N°.  90,  Faubourg-Germain. 


AN  V  DK  LA  RiFUBLIQ.UE  (  1797  ,  vieux  style. } 


I. 


1    >       /  0 1  '%*     4 


TABLE 

DES      MATIÈRES 

Contenues  dans  ce  volume. 


VJ  R I M  E  s  commis  à  Lyon ,  sous  le  proconsulat  Page 

.  de  Legendre,Basirc,  Rovère,Robert-Lindet, 
"Nioche  ,  Gaultier,  Vitet,  Couthon  ,  Laporte, 
Maignet,  Collot-d'Herbois,  Regnaud,  Châ- 
teauneuf-Randon,Reverchon,Dubois-Crancc, 
Albitte,  le  prêtre  Fouché  (de  Nantes),  le 
prêtre  Bassal  ,  Alquier  ,  Javogues  s  Boissy- 
d'Anglas,  Méaulle  ,  Dupuis  (fils),  Cadroy  , 
Despinassy  ,  Poulain- Grandpré  ,  Pocholle  , 
Expert,  Charlier,  Boisset.  i 

Crimes  commis  dans  la  commune  de  Cusset  et 
de  Vichy,  département  de  l  Allier  ,  sous  le 
proconsulat  de  Forestier ,  Fouché  (de  Nante) , 
Noël  Pointe  et  Vernerey.  78 

Précis  historique  des  crimes  commis  à  Dijon, 
département  de  laCôte-d'Or,  sous  le  procon- 
sulat de  Bernard  (  de  Saintes  ).  88 

Précis  historique  des  crimes  commis  dans  le 
département  de  TAin  ,  particulièrement  à 
Bourg,  soùs  le  proconsulat  de  Javogues  , 
Amar  ,  Mcrlinot  ,  Albitte  ,  Méaulle,  et 
Gouly.  94 

Régime  intérieur  des  prisons  de  la  commune 
du  Puy,  département  de  la  Haute-Loire.         106 

Précis  historique  des  crimes  commis  dans  le 
département  des  Bouches  -  du  -  Rhône  , 
particulièrement  à  Marseille  ,  sous  le  procon- 
sulat de  Pomme  ,  Charbonnière  ,  Fréron  , 
Barras,  Robespierre  jeune,  Albitte,  Ricord, 
Salicetti ,    Gasparin  ,    Ignard  ,    Chambon  , 

Tome  VI.  a 


vj     Table  ^D ES  MAxiiREs; 

Cadroy  ,   Jourdan  ,    Gaultier  ,    Mariette  , 
Durand-MaiHane  et  Brune  t.  Page  108- 

Crimes  commis  à  Toulon,  sous  le  proconsulat 
de  Gasparinf  Lester-Beauvais  1  Robespierre 
jeune,  Albitte  ,  Ricord ,  Barras,  Fréron, 
Salicetti.  ,  14^ 

Précis  historique  des  Horreurs  commises  à 
Orange  ,  département  de  Vaucluse  ',  sous  le 
proconsulat  du  prêtre  Maignet ,  et  voyage 
de  3i  détenus  de  la  ville  de  Grasse.  ï6i 

Incendie  de   Bédouin,  département   de. Vau- 
cluse ,  par  les  ordres  du  prêtre  Maignet.  17a 
Crimes  du  prêtre  Monestier,  proconsul  dans 

le  départ,  des  Hautes  et  Basses  Pyrénées.  178 

Un  mot  sur  le  proconsulat  de  Dartigoyte  dans 

le  département  du  Gers.  i83 

Du  proconsuiat  de  Bô ,   dans  le  départern^en t 

du  Cantal  et  autres.  184 

Crimes  du  proconsul  Esnue-Lavallée  ,  dans  le 
département  de^ayentie,  et  particulièrement 
à  Laval.  186 

Précis  historique  des  crimes  commis  à  la  Ro- 
chelle et  à  Rochefort,  sous  le  proconsulat 
de  Niou  ,  Trulard,  Mazade  ,  Lequiijio , 
Laignelot  ,  Garnier  (  de  Saintes  ).  189 

Crimes  d'un  dénonciateur  à  Caen,  le  3  février    . , 
1793.  197 

Du  proconsulat  de  Merlin  (  de  Thîonville  ).         199' 
Sur  le  proconsulat  et  mœurs  de  Lakanal.  ^02 

Crimes   du  proconsul  Lecarpentier.  20S 

Révélation  du  conventionnel  Julien  (de  Tou- 
louse ).  ,  ^of 
Crimes  de  Dupin  ,  membre  de  la  Convention 

et  ci-devant  contrôleur  général  des  fermes.       911 
Crimes  de  Lejeune  ,  ex-conventionnel.  ^iS 

Crimes  de  Duhem.  sri7 

Proconsulat  de  Dubouchet.  220^ 

Crimes  commis  sou5  le  proconsulat  de  Pinct  et 


Table  DES  Matières.      vîj 

Cavaignàc  ,  danâ  le  dépactetnent  des  Basses- 
Pyrénées,  ^    Page  221 

Atrocités  commises  dans  le  département  de  la 
Vendée  et  autres  circonvoisins ,  sous  le  pro- 
consulat de  Hentz  ,  Francastel ,  ^  Ingrand  , 
Richard,  Choudreu,  Laignelot  Phelippeaux, 
Bourdon  (de  l'Oise),  Goupilleau,  Tliurreau, 
Cavaignàc,  Melle,  Méaulle,  Bourbotte  ,  etc.     asS 

Suite  des  atrocités  commises  dans  le  départ, 
de  la  Vendée  ,  et  autres  départemens  cir- 
convoisins, sous  le  proconsulat  de  Carrier, 
Hentz,  etc.  *  3 79 

Précis  historique  des  crûmes  commis  à  Arras  , 
Cambrai,  et  autres  lieuK,  sous  le  procQnsulat 
du  prêtre  Joseph  Lebon.  348 

Précis  historique  des  crimes  commis  dans  le 
département  du  Nord  ,  sous  le  proconsulat 
de  Duquesnoy.  S88 

Massacres  et  incendies  dans  les  Colonies 
françaises.  409 

enquête  et  réunion  de  la  Belgique  à  la 
France  ,  et  crimes  commis  sous  ^e  procon- 
sulat de  Danton,  Lacroix,  Robert,  Portier 
(deTOise),  Haussmann,  Briez ,  Lefêvre  (de 
Nantes)  Jean  -  Baptiste  Lacoste  ,  Laurent, 
Roberjot  ,  Pérès  ,  Roger-Ducos  ,  Frécine 
Gilet.  449 

Journées  du  9  thermidor  an  2,  12  germinal 
an  3,  s  et  3  prairial  an 3,  et  1 3  vendémiaire 

^    an  4.  *  470 

Résultat  des  évènemens  qui  se  sont  passés  sous 
le  règne  de  la  Convention  et  en  général  sur 
la  révolution  française.  5i3 

Tableau  général  dé^  désastres  de  la  révolution 
française,  des    individus   qui    ont  péri    ou 

,  émigré ,  des  villes ,  châteaux ,  villages  qui 
ont  disparus,  à  dater  du  24  août  1787,  avec  la 
nomeaclature  des  qualifications   auxquelles 


vîîj       Table  Di^s  Matières. 

la  révolution  a  donné  naissance  ,  le  nombre  Fagt 
des  lois  rendues  depuis  l'Assemblée  coi^ti- 
tuante  et  le  résultat  des  victoires  remportées 
par    les  Français  ,    pendant    la    révolution 
française.  Sa  3 

.Tableau  des  membres  composant  le  comité  de 

Salut  public,  sous  la  Convention.  527 

Tableau  des  membres  composant  le  comité  de 
'     sûreté  générale  ,  sous  la  Convention.  Ssjg 

Tableau  des  Députés  de  la  Convention  qui  ont 
été  envoyés  en  mission  dans  les  départc- 
mens  depuis  le  2î  septembre  1792,  au  2 
octobre  i796(  10  vendémiaire,  an  4.  j  533 

Liste  des  Membre  composant  la  Convention 
nationale.  553 


Fin  de  la  table. 


HISTOIRE   GÉNÉRAtË 

DES  CRIMES 

COMMIS  PENDANT  LA  RÉVOLUTION 
FRANÇAISE.  •         ^ 


CONVENTION  NATIOl^ALE. 

Crimes  commis. à Ly^n ^ sous  It pro consulat 
de  Le  gendre  ,  Basire  ,  Rovère  ,  Ràbert-^ 
Lindet  ,  Kioche  ,  Gaultier  , .  Te'^V  i  Cou-- 
thon  ,  Laporte  ,  Màigriet  ,  C(?//(?/  -  d'Her-' 
bois  ,  Regnaud  ,  Châte/iuneyf .  -.  Randon  ^ 
Reverchon ,  Dubois^Çrqncé ,  Àlbitte ,  le  prêtre 
Fouché  (  de  KanUs  )y  le  prêtre  Èassal  y 
Alquier  ,  Javogu£s  ,  J5aii5;?.  -,  d^Anglas  , 
Méuuïle  ,  p;Upuii  JiU  ^Çadroy ,  Despinassy , 
Poulain  -  Grandpré  ,  PfichoÛe  ,  J^xpert  y 
Charlier  y  Boisse.t.       .     . 

L'existence  de  JLyoçi  compte  déjà  plu$ 
de  dix-huit  cent  trente-deux  ^ns.  Les  évé- 
nemens  que  cette  ville  a  éprouvés  pendanf 
cette  longue  série  d'année^  ce  saur^iient  sç 
comparer  à  ceux  qui  faillirçjiU  fia -mettre  à 
deux  doigts  de  sa  perte  ,  pcûdant  le  règne 
de  la  Convention,  ,     .  ^, 

jH^me  VI.  A 


/^ 


s        ^       Criffkei  ^commis  ç,  Lyon  , 

Auguste  commença  à  la  rendre  célèbre 
par  un  séjour  çle  trois  années.  Les  étrangers 
y  accoururent  en  toiîle;  etRqme  elle-même 
déserta  ses  foyers  ,  pour  venir  dans  Lyon 
Wir^produire  aux^yeiixde  TEmpereur,  son 
îdolç.  ^ 

Soixante  nations  se  disputèrent  lâchement 
rhonneur  d'ériger^i^im  temple-4^  Auguste  ; 
et  cet  édifice  magnifique  fut  construit  au 
con&ient  du  Rhône  et  ^de.  k  Siône  ,  et 
embelli  par  soixante-  statues  ,  qui  offraient 
ttri  spectacle  tout-à-fait  liotiveaii  alors  dani 
cette  X^îUe.  .-  .    * 

Un  siècle  s'était  à  peine  écoulé  depuis  sa 
îôttââtiôn  ,  qu  un  îhéendie  d^s  plus  terribles 
ia  donsuma  dans  une  nuit ,  et  ne  laissa  au 
lever  du  soleil  que  des  monceaux  de  cendres: 
le  tctnple  d'Auguste  ,  et  un  Lycée  construit 
sous  les  auspices  de  Galigula  ,  avaient  seuls 
échappés  aïK  flàttimes,  Néroh  fournit  les 
fontU  nécessàîirié^  pour  la  retonstructiôn  de 
la  ville  ;  et ,  dans  peu  de  tèm^s  ^  son  indus- 
trie et  le  concours  des  étrangers  lui^reu- 
idirent  ÈOh  prerùîef  état  ût  splendeur. 

Le  commerce  donnait  alors  urte  grande 
îttfluence  au*k  Lyéhhàis  parmi  les  autres 
peuples  de  la  Gaule  ;  ses  richesses  ache-- 
Vèrent  dé  i  enorgueillir*  La  religion  cteré* 
tienne  comptait  .déjà  quelques  prosélytes 
dans   Lyon,    Ces  nouveaux  convertis  nt 


sous  les  Proconsuls  conventionnels^       3 

purent  voir  sans  horreur  les  apprêts  des 
Décennales ,  fêtes  instituées  à  Lyon.  La  ma- 
jorité des  Lyonnais  s'irrita  de  ce  refus  ;  le 
fanatisme  dun  côté  ,  et  la  crainte  de  dé- 
plaire à  TEmpereur  de  l'autre  ,  armèrent  les 
citoyens  les  uns  contre  les  autres ,  et  trente 
mille  hommes,  périrent. 

Ce  premier .  massacre  pour  les  opinions 
I  religieuses  se  retraça  sous  le  règne  affreux 
de  Charles  IX.  Un  nommé  Maudelot  avait 
remplacé  le  Gouverneur  ,  homme  plein  de 
vertus  :  des  lettres  de  Catherine  Médicis 
atrivem  quatre  jours  après  le  massacre  dé 
Paris  ,  avec  ordre  à  la  ville  de  Lyon  de  les 
imiter.  Le  Gouveryi^ewr  ,  rassemblant; les 
protestans  ,  les  fait  enfermer  dans  diffèr- 
rentes  maisons  ,  et  le  signal  jdu  massacre 
est  donné.  La  quantité  d'hommes  qui 
périrent  dans  cette  occasion  est  incaku* 
lable  :  le  Rhône  roula  dans  ses  floto  «anj 
de  cadavres ,  que  ses  eaux  en  futent  lohg- 
temsempoisonnées,et  que  la  peste  se  détlara 
dans  la  plupart  des  contrées  qu'il  arrosait. 

Tels  sont  les  événemens  les  plus  consi* 
dérables  de. la  ville  de  Lyon;  il  y  en  a 
d'affreux  :  eh  bien  !  cette  ville  ,  rebâtie  à 
neuf  par  les  soins  de  Néron,  est  démolie 
par  ordre  de  la  Convention  nationale 
de  France  ,  en  1794  ,  sous  la  direction 
de    son  Comité   de    Salut   public.    Elle  a 

A  2 


4  Crimes  commis  à  Lyon  , 

essuyé  plus  de  calamités  en  ces  dernîert 
teins  ,  dans  le  court  espace  de  quinze  à 
dix-huit  mois  ,  que  pendant  les  dix-huit 
siècles  antérieurs  de  son  existence.  L'exposé 
nud  des:  faits  ne  prouvera  qpe  trop  cette 
assertion  historique.  Entrons  tout  de  suite 
en  matière ,  et  que  le  lecteur  frémisse  à  là 
vue  d'un  tableau  que  nous  n'avons  pu 
tracer  sans  frénlir  nous-mêmes. 
_  En  janvier  i  ygS,  une  Municipalité  orga- 
nisée dans  les  cabarets  ,  s'installe  dans  les 
murs  de  Lyon,  et  avec  elle  s'installent 
1  anarchie  en  écharpe  et  la  magistrature  du 
maratisme. 

-.Dans  cette  autorité  si  funestemcnt  cons- 
tituée pour  le  pillage  et  l'oppression  de  la 
ville ,  on  distinguait  avec  eftroi  le  procureur 
de  la  Cpmmune ,  nommé  Laussel  ,  et  son 
substitut,  appelé  Bertholon  ,  qui  était  alors 
gardon  perruquier. 

Laussel ,  chassé  autrefois  des  Joséphistes 
en  Languedoc ,  n'avait  à  Lyon  d'autre 
moyen  d'existence  que  les  produits  d'une 
messe  ,  payée  3  liv.  ,  qu'il  disait  tous  les 
dimanches  a  Tile  Perrache  ;  mais  à  des 
passions  ardentes  et  à  une  ambition  déme- 
surée ,  il  joignait  une  profonde  scélératesse 
qui  ne  s'effrayait  point  des  obstacles  ,  et  une 
grande  facilité  pour  écrire  et  parler,  moyen 
Sjir  de    les    surmonter    tous   avec  succès^. 


sous  les  Proconsuls  conventionnels,        5 

-  ChalUer,  ci-devant  ahbé  i.  avait  fui  la 
Savoie ,  son  pays  natal ,  pour  vejiir  à  Lyon , 
où  il  entra  chez  un  négociant  pour  faire 
Téducat'on  de  ses  enfans  ;  il  se  livra  ensuite 
au  commerce,  et  s'associa  avec  Bertrand  > 
marchand  de  galons, 

Cç  Ghallier  était  une  espèce  de  fou  ,  dont 
l'ambition  n'en  fut  aussi  que  plus  illimitée. 
Il  avait  pris  Marat  pour  son  modèle  en  révo- 
lution. Il  vint  à  Paris  ,  passa  six  mois  aur 
près  d^  lui ,  y  puisa  ses  leçons  ;  et  de  retoïkr 
à  Lyon ,  il  afficha  publiquement  ses  desseins 
pour  parvenir  à  la  législature  J  en  -f^itiiint 
distribuer  avec  profusion;,  â  rla  classe  iQtt- 
vrière,  son  portrait,  aub&s  duquel  on  Usait: 
i(  Ghallier  ,  excellent  patriô^,,- à  passé  six 
au  mois  à  Paris  Tpour. être  Vîldmirateur  delà 
yj  MontagnQrjde  iU  iCarwentioîîit' nationale 
59  et  du  patriotisme  dé  Marat.  «  • 
_f  La  Municipalité. payait  ;p;is  encore  de 
•chef,  LesrLyonnais^ffrayé^jpar  la  nomitia.- 
-tipn  de  ces  scélérjEys^^jvouit^fent  réparer  ^^^^ 
4ppuciance  qui  iGs-^avait'éloignéj  des  Assêmî- 
blées  sectionnaires.  La  cabale  désorganisa- 
-tricè  futfi.djéjouéc  ,  et  le  :  citàyen^/Vïmér^-. 
C-hol  fut  élu  maire.  Ce  citoyen  respectable 
n  accepta  <ette  place  que  pQjar  ^auver  son 
.pays  ,  en  balançant,  autant,  qu'il  serait  en 
«on  pouvoir  ,  J[es  inteii<ions  ^perfides  dos 
.Membres 4e  iCjéte^Cppiiçune  i>)d9nt  re;s:u%- 

A3 


6  Crimes  commis  à  Lyoïf  ,    - 

vagahce  sacrifia  dabordàTégalité  les  orne- 
niens  qui  décoraient  les  bassins  de  la  place 
de  Bellecour.  ; 

Les  écarts  révolutionnaires  de  ces  Ma^ 
gîstrats  consternèrent  les  habitans  de  Lyon. 
Différentes  adresses  envoyées  à  la  Cohven^- 
tion,  testèrent  sans  effet,  La  Montagne  de 
la  Convention^  et  Marat  zélé  partisan  de 
Challier,  atténuaient  les  plaintes  contenues 
<lans  ces  adresses  ,  et  Ton  y  répondait  d'ôr- 
dinàite  par  le  grand  ordre,  du  jour,  '[ 
<-  Cette  Municipalité  ,  autorisée  par  lé 
isikhce  de  la  pnemière  aùtorké  ;  mit  eh  jeii 
tôtts  ses  ressorts  révolutionfïairès.  Un  bureau 
:de  dénonciation  fut  créé ,'  et  douze  cent§ 
citoyens  des  plufe  riches  d'entre  les  négo* 
tians  furent  bientôt  plotigés  dans  les  càvêS 
At  la  Maison  cortimune;  Lia  cupidité  muni- 
cipale avait  dicté  led  ptfemiètés  listes  de 
proscriptions.  ;  Dé  gràtids  sacrifiées  delà 
^af  t  des  déteflii^  leur  fitfeht'rHéteuvrer  leui: 
liberté.  Dans  iêf  ^scatidatteûx  coriitnètce  de 
4a  liberté  îndivjdftuèire  ,  le  prêtre  Xûwjjrf  % 
-distingua  ptit  ^  s-ôîfii  impudeur  et  Sbii  avarîcie. 
'  Le  6  févrvir^i7^3,  la  seène  thange.  Au 
'^tlub  qui  éïaîl^'^ôtti|)ô^  de  si*  cerit*j  furieux  , 
'GAa7/t^rcfuî"èft'T  dirigeait  tous  Iti  mouvè- 
'fflens  ,  pataîi!\ih  pôignai*d  à  la  main  ,  exigé 
•dVbord  que  tfhàfeun  pré^e  le  swmént  dfe 
-f  atd^r  le<ska:«ijJ«-«t^êt^ër  'rt^^  aHak 
L   A 


sous  Its  ProconsnUtwfoentiànneh.       ^ 

Àtre  arrêté.:  Les  prétendus  complois.  dès 
riches*  et  des  aristocrates  furent  d'abord  mfe 
en  a^aniv^t  il  fallait ,  sstns  perdre  u4 
instaiû>i  les'  déjouer.-Le  moment  des  ven^ 
geances^était  arrivé  ?il  i*e  fallait  \pzs  différer 
plus  long7tems  de  piacér  la  guillotine  sur 
le  pont  Saittt-Claire'ï  et  poui"'  ïcscécutér  ce 
projet ,  les  conjurés-arret?èrent'd'ahord;;dc 
■se  saisir  de  îrartillcriey  de  1^  braquer 'Sur 
^les  priiicipales  avenues  ,  :  de  former  ^un»tt»î- 
bunakâemblable  à  «geliài^du  sisêrpteoibre  dt 
Parcs.  :Nepf  cents  citoryeitsl  des  ^pla6  richeft 
désignés i'd^ns; Les  listes  rédigées:  par  iGbab- 
lier  ,:d|e\)aûent>  ^tte  im^nvlés  ,  et  tous  jcëux 
kiom  icds  >€G86assîns  rcnnvDitâient  les^riches 
vdépôuSIles^IlGur  siiccé^ier;  On  arrêta  légale- 
ment de:  jeter:  les  càdavrëi  dans  lélRhôiia. 
^ur  Tobaervaftion  d'^iiî  )di3S  assis tansij cqiie  le 
'.bourreau Jiepourrait'su&fe  ,  et  peut-êtrç  se 
iiefis8érâit';jl  lôbtyenieiirtsres,  le  Procureur 
ide  la  Commune ,  Laussbl:,-  leva  la  difficulté 
dh  invdiaétile^  ûDu^i^éS'à-faire  Ijoffice  de 
juges  iet)a|» •^bourreaux:,  en  leur.t^emar- 
jquant'  q»e  pomr  guillotiner  un  hon^me  ,  A 
n'y  avait  qu  une  ficelle  à  tirer.  Plusieiaté'  dès 
ClubisfflB^  së'présehtèrentipôurremplir  ■  cet 
affr€jirii:>mmisière.  IJ«  dTecrac  propxxstt  de  ne 
pas  les  g^jiddotiner /<mais 'd'avoir  (pour  mot 
xi  ordred'èiécution  :  \F4aim  passeï'  Icfontilà 
M(msieuu\Qt^f^  xle  nuot  devait  âtre  le 

A   4 


8  Crimes,  conimis  à  Lyon  , 

«ignal.de  son  immersion  dans  Më  Rhône. 
Plusieurs  témoins;  ont  déposé  de  ce  fait 
lors  du  jugement,  de  Chàllier..  Le  pillage 
-de  Lyon  était  arçêlérpar  Id  Mdnidpalitéf. 
Un  de  &es  .MeiâtiirôSr  que  rerreùr  environ- 
nait alors  ,!  a  confesafe;  depuis  : jqpe  Je  léol 
létait.  à.»  Fordre  ••  du.  jour;:  dans;  tOini}e&  les 
-siéabiceii' sécrètes  de  tes  Munioipauix.  3  j'  1.. 
iji<3Etrbe'jcohsjiiraxi90i  contre  îlarhûrêté  pH- 
-blique  parviht  auxr.  oneillcs  du  Maixc.^  Il 
'£kit"r2iu$sitôt?,battfcejld^nérale  ,  et -la  force 
^ubliqufi ■  ;sou&j lesjrawnes  en  ixïipoie.À  ctes 
^célêïats.r  Irritéis  de  voir  leurprojetiaiijçânti , 
ils  firent  affirhcr^âiycc^.profusijin  un  "placard 
.-portant  ^que  le -maireî,  NîvièretChol  lavatit 
-pert^ula  confiance  publique.  LejJVÏaiarç' .y 
xépoHflit  en  publiant  les  crimes  idc  la  Mu- 
'nicîpali.té.  Satisfaitxl  avoir  sauvé .s«&conci- 
:toyens  ,  et  craignant*  de  succomber.. soiis 
le  poids  de  la  barneiet  de  la  perfidie  de 
tant d'chnfemis' iqu-il vienait  de  démasquér/il 
:donna  sa  démission  v  mais  dans  la  nouvelle 
élection  qui  eut  lieu,  la  presque ^totalité 
ides  votans  lui  conféra  de  nouveau  ia  place 
.<le- Maire,     <      .''.■.     ■>.'; .  .  .-  .   •.•         ^• 

Un  jeune  Ixomme  enhardi  par'  Icettie 
réélection,  élève  îa  .voix  contre.  Ghallier 
qu il  accuse  desxomplots  déjoués  par  le 
Maire.  Deux  émissaires  de  la  Municipalité 
se  saisissent  aussitôt  du  .jeune  -homme  et 


5ÔUS  les  Proconsuls  conventionnels.         g 

reutraki^jdt  ;dans  les  cachots.  La  .foule 
indignée  .  Taxraqhe  de  leurs  main^  ,  et 
se  porte,  spontané  mj^iit.  au  ;  club  centnil 
et  anéantit  ce  repaire  du  crime.  Bertrand 
et.  Hidens  soi\.fils  naturel  ,  membres  de 
cette  société  ;  furent  arrêtés  et  livrés  au 
tribunal  cfiminjel.  Challier  qui  en  était  le 
.président ,  vûl^tfà  bout  d'étouffer  k  procér 
duré;  et  q^e^u'es  tems  après  ces  deux  pré- 
yeiius  fjirent  trouvéspcndusdans  leurs  cham- 
bras* Cb^lUier  et  Aej  Clubistes ,  furieux  de  ce 
qui  venait, .^er  se  passer»  ,.;rçc9ururent  à  la 
Convention  ,  et  peîgnirçnt  les  Lyonnais 
,commedeS{Cp;atre*,iiévoluti9n|iaires  spus  le 
couteau  deçgijiélsils  se  trouvaient.  ïalliea 
se  chargea.  4p  faiçe  à  ce  sujet  un  rapport 
^Qie^sp^ger^ ,.  et  la.  Montagne  devait  trop  à 
ces  Gl^bisteÇ:'Jp/s^^r,  Jies  abanjlqijner.  Des 
.bat<^illQ^s^  »fu^^f  destinés  pQurlje^.secçurij^. 
Ba^ire  ^jL^^eqdrc  et  Royère  fureut  ch^irgé» 
;d>n  *4i^igfiir,-Jçs  ajp^ératiprif,,    ,        . 

Gç  triuwv^^t  çqmmença  pai-  rétablir  le 
club,  et  r^njmai audace. d^  'çc  parti.  Ces 
députés  moftt^gi)^rd$,,  en, ,  affiçjiant  une 
autorité  très-étendu^),,jn>OAtTjèrej[at  publi- 
quegient  Ipurv préférence. r^poij^ç  Ifjs ,  Clu- 
biste^r  eu  3ej^ant  escortQ{Vppa]gopJ[usieu2;s 
d'epttr'çux  :  on.epj  jer9ar^iji;^|tuîj-,q^i  pr^ 
naît .t^autement  le  titfç  ;de;.^i9jUÊçpau.  dp 
Madame  :  cUjLa^ïaballe*  ;,j  ^j^,    ^rfrij.  .j 


10  Crimes  commis  â  Lyon  ^ 

Cependant  Nivière  -  Chôl  accablé  de 
dégoûts  avait  refusé  la  place  à  laquelle  oti 
venait  de  le  nommer  pour  la  seconde  foisl 
Le  médecin  Gilibert  en  fut  pourvu.  Ber- 
trand Tassocié  et  le  partisan  de  Challier  , 
avait  eu  assez  de  voix  pour  bapïancer  cette 
nomination.  Giiîbert  fut  précipité  ^ans  les 
cachots,  d'où  il  ne  sortit  qti'eù  donnant. sa 
démission.  Les  Clubistes  itTiômphèrént  ; 
Bertrand  fut  installé  Maire  ,  et  Lègénd^e 
vint  à  la  Convention  se  vabtfer  d'avoir  fofcfe 
les  Lyonnais  d'^acdeptei:  un  'Maife  sàHï^ 
culotte.   '     '-'^      '^;    \  [    Vi    ^-    c  •  •    •  ■        ■  '» 

Alors  les  plaintes  dès  Lyonnais  sur^ît^ 
Vexationis  '  municipales  et  ;p¥bCcîn^ulairés  *, 
furent  iràîtées  de  cris  sédkieuk.  On  fascina 
les  yeux  du  Peuple  en  lui  ïesant  sans  ce^èfe 
sappréhetider  seS-finéienfiiîéijcliâînes','  et  Yàti 
•fit  depèndjeyan  saliit  d«  là  irtPéàtion  d'trnfe 
*foTce  aritiéë',  deséinéc  à  màinteâit^  ïe  dépar- 
tement dans  uri  état  de  révolution.'  Ce 
corps,  sous-ïé  iktéd^â^fnéefévohttfoniiàire  , 
devait  être  stsUldié  pat*  les  rlcbe^V^t  Challier 
et  ses  partisans- 'se  réservaient?  Secrètement 
les  moyèïià  d'^kécution.  ' 

Lyon   îttt'T)iéntôt  tapissé    de    placards 

xttaràmles''V'Iqû?'né  servira t  'pis  '  peu  à 

rehausser  Tàtixîàce  de  très  brigandsi  Parmi 

"ce  ^rand  nombre  Jécrits  iiiteiidiaîres  ,  oh 

en  distingue  un  remarquztble  par  le  serment 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.       1 1 

de  trois  cents  prétendus  républicains.  Telle 
était  à  peu-près  la  conclusion  de  cet  hor- 
rible écrit  :  <<  Nous  jurons  d'exterminer 
9>  quiconque  ne  pense  pas  comme,  nous  ; 
»5  ce  sont  nos  ennemis  ,  et  leurs  cadavres 
9i  sanglans  jetés  d&ns  le  Rhône ,  porteront 
»  la  terreur  aux  mers  épouvantées.  15 

Les  bons  citoyens  étaient  dans  la  cons- 
ternation. Le  i5  avril  ,  huit  mille  hommes 
^c  rassemblèrent  dansl'église  des  Augustins» 
et  arrêtèrent' d'envoyer  trois  commissaires 
aux  Représéntans  ,  afin  d'obtenir  la  liberté 
de    s  assembler  en  sections   à  Tinstar   dès 
habitans  de  Paris  ,  pour  procéder  à  l'exa- 
men de   la  conduite   de   la  Municipalité. 
Legendre  ,  à  qui  ces  cômmissaites  s'adressè- 
rent ,  leur  dit  qu'il  ne  leui!^  permettrait  pas  , 
dussent-ils   le    Coupet    en  '84   morceaux. 
Prenez  -  vous    lis'  Représéntans    du     peuple 
pour    des    coyôns  ?    dit-iï  à  la  diéputatii3ri. 
-Buissonat ,  l'orateur  ,  lui  repliqUa  :  p.rentt 
vous  Us  Lyonnais  pouf  des  genssaûs  r..*Mi.^r 
Cette  repartie  si  digrfe  par  son  briginàlité 
de  figurer  à  ùàti  de  l|i  dtetriawde,  valut  à  èôft 
Auteur  un  5erremenl-lteitiÀ>ii  dcf  la^à¥t 
du  boucher  Legéttd¥è7  c]piiî  l'inVita  â  Wfih 
dîner  âVéC  5iSi  fe  létidîémaÎ!i;   Ce  cîto^éti 
paya  par-  18  mois   de^  détention  da¥i^'  Icfs 
prisons  de  Paris  ,  le  dédalli  qu'il  marqûà^^fi 
ne  se  rendant  pas  à  ce4tie  invitation,       *^ 


12  Crimes  commis  à  Lyon,,, 

Basire  ,  Rovère.  et  Legendre  occupés  cte 
spectacles  et  des^repas  les  phij^ somptueux', 
voyaient  de^sang-frôid  les  mouvenxens  Iqui 
s'opéraient  de. part  et  d  autre  ,  et  ne  s occu- 
|>aient  que  du^r^tablissement.^es  sociétés 
populaires.  Lçg:endre  ,y  présid^^,,  et  ses 
virulentes  motions  furent  Tappel  etlacalise 
des  massacres  qui sç  commirent  parja  suite» 
Ces  trois  Proconsuls  qui  sç  pavanaient  du 
titre  de  défJensejujns^^de^Sans-Culottes.,  insulr 
taifent  ouvertement  à  c^ttç.  çl^s^iQ  d'hommes 
par  leur  faste:  et^ ûjn  cpf tège,squijtetra;çai$.nt 
Jes   usages    des   cqura   de  nos:  ci-devaiM: 

Prînce§é-.-    •  '-'  -:: .  ;••.:,',   -k^,   M-../i/    '[ 

Le  fils  de  .4'Otléan&' passait;  pair  cette 
ville  pour  aller  rejoindre  Tarmée  de  Birori. 
Il  d,esççndit  à  rhptel  de  Milan  où  logeaient 
ces  trois  Dépîutçs*  Son  séjoiir  fut  de  trois 
semaines, >  peflçifuji;  lequel.teras  nos  trois 
.Proconsuls  firfent  ifégùliètement  letir  cour 
à  ce  jeunç  nicilitair^e.  Ikle  tr^îlèrçntmajgni' 
ifiquÇfflent.  IlsrmvHèyent  à  leurs  ôrgiés  aux^- 
qUeWie*  pn  adn}(çttait:aussi  le  prêtre  Laussel, 
contre. lequel  JaryoiH  puJ>lrqU€i  /sVlçvait  de 
^tomtes, parts.  Çfp4jid^nt  Légendre  ne  pou- 
van^  ^éftis|t;jer  awx?  njpiijibre^aesracQmsations 
qui  4m  parveï>&ifin;tf<pntref  cÇf(Pri[>c;ureur  de 
la[  Çoit]^mune  ,  jleS  fit;  arrêter 'J^n^m^jfOur  au 
•sortir,  d'un  repas  Tqtii  avait v^qu  lieu  -a.ux 
Brotteaux..  RovèrçjàvMt  ïefusl.dfti^igtierjle 


sous  lés  Proconsuh  conventionnels.     i3 

mandat  d'arrêt,  en  disant  que  Ton  fesait 
la  guerre  aux  patriotes,  Laussel  ,  son  secré- 
taires Leclercet  sa  femme  furent  traduits  au 
tribunal  révolutionnaire  de  Paris.  Alors  le 
parti  maratiste  vînt  à  triompher,  et  Laussel 
n  eut  qu'à  se  présenter  pour  être  acquitté  , 
quelques  puissantes  que  fussent  les  preuve? 
produites  à  leur  charge. 

Basire  ,  Legendre  et  Rovère  quittèrent 
Lyon ,  après  avoir  tout  fait  pour  aigrir  les 
esprits.  Nommés  pour  pacifier  cette  ville  , 
ils  relevèrent  un  parti  qui  marchait  à  grands 
pas  au  meurtre  et  au  pillage.  Ils  lui  tra- 
cèrent sa  marche  ,  en  accumulant  proscrip- 
tions sur  proscriptions  ,  et  en  privant  un 
grand  nombre  de  citoyens  tie  leur  liberté. 

A  leur  arrivée  ,  ils  laissèrent  ignorer  à  la 
Convention  la  situation  de  cette  ville  ; 
Basire  dit  seulement  aux  Jacobins  :  a  Lyon 
f»  est  en  mauvais  état  ;  mais  la  foudre  y 
jj  fût-elle  tombée  ,  notre  dévouement  à  la 
9J  Montagne  et  les  sollicitations  des  Jaco- 
>5  bins  nous  auraient  fait  revenir  au  plus 
f>  vite. 

Cependant ,  à  Lyon,  la  Municipalité^ 
le  Département  et  les  autres  Corps  admi- 
nistratifs se  réunirent  sous  la  présidence  du 
Maire.  La  formation  de  Tarmée  révolution- 
naire déjà  arrêtée  par  Challier  et  ses  adhé- 
rens  est  mise  à  exécution.  Un  Comité ,  sous 


14  Crimes  coij^mis  4  Lyon  ^ 

le  titre  spécieux  4e  Comité  de  Salut  public^ 
fut  également  institué  ;  et  les  Représentans 
Albitte  aîné,  Gauthier,  Nioche  ^Dubois- 
Crancé ,  qui  passaient  par  cette  ville  pour 
se  rendre  à  Uarmée  des  Alpes ,  sanction^' 
nèrent  ces  différentes  institutions. 

L'authenticité  donnée  à  ces  mesures  fut 
le  signal  des  attaques  les  plus  effrénée^ 
contre  les  fortunes  et  la  vie  des  citoyens*. 
On  arrête  une  contribution  de  33  millions. 
Des  mandats  impératifs  sont  déce^rnés 
pour  la  perception  de  cette  taxe  mons- 
trueusement exhorbitante.  Quelques-uns  dç 
ces  bulletins  concussionnaires  se  montent 
à  une  somme  de  400,000  liv.  ;  et  ceux  qu'ils 
frappent ,  sont  menacés  delà  perte ^e leur 
liberté. 

Toutes  ces  vexations  ont  iin  point  fixç\ 
le  désespoir  des  Lyonnais,  afin  de  déclarer 
leur  malheureuse  patrie  en  état  de  rébellion» 
de  Tensevelir  sous  des  monceaux  de  cada- 
vres ,  et  d'effacer  à  jamais  jusqu'au  nom  de 
cette  cité  naguères  si  florissante  par  son 
industrie  ,^et  digne  objet  de  jalousie  pouï 
toutes  les  Nations  commerçantes. 

Le  28  mai  1793  ,  d-es  jeunes  gens  se 
rassemblent  pendant  la  nuit,  et  font  de 
nombreuses  patrouilles  pouf  $'opposer  à 
la  tyranniç  de  la  Municipalité  :  instruite  de 
ce  fait ,  eUe  en  fit  beaucoup  arrêter.   Cette 


sous  les  Proconsuls  conventionnels,      i5 

mesure  causa  une  rumeur  générale  ,  à  tra- 
vers laquelle  Tindignation  se  manifestait. 
La  Municipalité  en  craignit  les  suites.  Elle 
dépêcha  un  courier  à  Tarmée  des  Alpes  , 
campé^e  à  douze  lieues  de  Lyon.  Elle  peignit 
Textrême  agitation  qui  régnait  dans  la 
ville  ,  et  demanda  aux  trois  Proconsuls  de 
faire  avancer  une  colonne  sur  Lyon.  Un 
bataillon  d'Allobroges  ,  et  un  de  Vol  on* 
taires  ,  à  la  tête  desquels  étaient  les  repré- 
sentans  Nioche  et  Gauthier  ,  dirigèrent  aussi- 
tôt leur  marche  sur  cette  yille.  A  leur  arri- 
vée ,  la  Municipalité  se  transporta  dans  les 
sections  quun  décret  précédent  avait  auto- 
risées à  s'assembler.  Elles  s'étaient  déclarées 
en  permanance ,  et  reçurent  Tordre  de  se 
dissoudre.  Dans  la  nuit  qui  suivit  les  évé- 
nemens ,  on  arrêta  plusieurs  Pré^dens  et 
Secrétaires  ;  et  cent  pères  de  familles  les 
suivirent  dans  la  cave  des  morts. 

Le  fig  f  ceux  des  Présidens  des  sections 
échappés  aux  chaînes  municipales  ,  se  réu- 
nirent à  TArsenal  avec  une  partie  des 
Administrateurs  du  département.  Ils  se 
formèrent  en  comité.  La  force  armée  du 
parti  des  sections  se  rassembla  sur  la  place 
de  Bellecour  au  nombre  d'environ  lo  à 
1 2,000  hommes.  Ceux  qui  avaient  embrassé 
le  parti  de  la  Commune  se  rendirent  sur 
la  place  des  Terreaux* 


i6      •      Crim€5  commis  à  Lyon  , 

Le  représentant  Gaultier  vint  sur  la 
place  de  Bellecour  pour  haranguer  les  ci- 
toyens armés  ,  et  les  inviter  à  se  dissoudre. 
Pendant  le  court  colloque  qui  eut  lieu  à 
à  cet  égard  ,  ce  Représentant  qui  pt^imét- 
tait  néanmoins  la  destitution  de  la  Muni^ 
cipalité  ,  parut  tergiverser  sur  quelques  faits. 
Ce  corps  aimé  le  retint  en  qualité  dotage. 
'  La  Municipalité  usa  de  représailles  ,  et  lïiit 
en  arrestation  deux  de  àes  Commissaires. 

La  Municipalité  commença  lés  hostilités 
en  fesant  tirer  le  canon  sur  le  bataillon  de 
la  Pêcherie.  Aussitôt  ces  12,000  hommes 
s'ébranlent ,  et  s'avancent  sur  trois  colonnes 
vers  la  Maison  Commune.  Le  feu  s'engage 
de  part  et  d'autre  ;  il  dure  cinq  heures  ,  et 
il  périt  1200  pesonnes.  Des  femmes  dignes 
de  donner  la  main  aux  furies  de  guillotines 
de  Paris  ,  se  distinguèrent  par  leur  atrocité. 
Elles  étaient  du  parti  de  la  Commune  ;  elles 
s'acharnèrent  contre  les  blessés  qu  elles 
massacraient  impitoyablement,  La  nommée 
Giroudon  se  fit  remarquer.  La  troupe  de 
ligne  décida  la  victoire  en  faveur  de  la 
Municipalité. A  8  heures  du  soir,  les  vaincus 
se  dispersèrent  ,  et  une  partie  des  vain- 
queurs célébrèrent  leur  triomphe  par  des 
orgies  où  ils  s'abandonnèrent  à  une  impru- 
dente sécurité.  Les  Lyonnais  défaits  ,  mais 
jion   désespérés,   se  rallient  de  nouveau 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.      17 

pendant  la  nuit  sur  la  place  des  Carmes  ; 
et  au  milieu  du  silence  de  la  nuit,  cette 
troupe  commandée  parle  citoyen  Madinier, 
s'empare  de  la  Maison  Commune ,  arrête 
tous  les  Municipaux  ainsi  que  Challier 
qu  ils  jettent  dans  les  cachots. 

Le  Comité  de  TArsenal  voyant  son  parti 
victorieux,  s'érigea  en  Municipalité  provi- 
soire. Les  représentans  Nioche  et  Gaultier 
voyant  la  victoire  changer  de  parti ,  chan- 
gèrent également  d'opinion.  Ils  blâmèrent 
hautement  la  Municipalité  dont  ils  feigni- 
rent d'avoir  ignoré  les  attentats  ,  et  repri- 
rent le  chemin  de  l'armée  des  Alpes. 

Cependant  la  nouvelle  Municipalité 
et  le  Département  s'empressèrent  de 
nommer  une  députation  extraordinaire 
pour  instruire  la  Convention  de  l'événe- 
ment du  29  mai.  Mais  les  nouvelles  de  ce 
qui  venait  d'arriver  à  Paris  dans  les  journées 
du  3i  mai  et  suivantes  ,  firent  abandonner 
le  projet  de  cette  députation.  Conformé- 
ment aux  lois  existantes  ,  on  érigea  un  tri^. 
bunal  sous  le  nom  de  commission  départe-^ 
mentale ,  et  une  autre  de  cinq  membres 
pour  juger  les  militaires. 

Après  cet  événement ,  le  peuple  de  Lyon 
débarrassé  de  ses  oppresseurs  ,  respira 
pendant  quelque  tems  ,  et  la  Convention 
en  apprenant  par  Savoie  des  papiers  publics 

tome  VL  B 


1 8  Crimes  commis  à  Lyon  , 

ce  qui  venait  de  se  passer  dans  cette  ville  » 
n'ayant  eu  aucuns  renseignemens  sur  son 
état  précédent  ,  par  les  députés  Legendre  , 
Basire  et  Rovère ,  envoya  le  3  juin  lygS, 
Robert  -  Lindet ,  Membre  du  Comité  de 
Salut  public.  Il  vit  clairement  que  le  parti 
qui  avait  triomphé  à  Paris,  aux  journées  du 
3i  mai,  venait  de  succomber  à  Lyon; 
et  à  son  retour  ,  le  29  juin  ,  il  dit  à  la 
Convention  : 

Citoyens  ,  vous  avez  décrété  que  je  me  rendrais 
dans  votre  sein  pour  vous  rendre  compte  de  l'état 
de  la  ville  de  Lyon  ,  de  la  situatioù  des  esprit* 
dans  cette  ville,  et  les  ordres  de  votre  Comité  m'im- 
posent l'obligation  de  garder  le  silence  sur  tout  ce 
que  j'ai  vu,  jusqu'à  ce  que  les  fonctionnaires  publics 
que  vous  avez  mandés  aient  obéi  à  votre  décret. 
Au  reste  ,  je  puis  assurer  la  Convention  que  si  la 
nouvelle  autorité  qui  s'élève  à  Lyon  tient  les  rênes 
de  l'administration  avec  fermeté  ,  il  n'y  a  rien  à 
craindre  pour  la  liberté  ,  mais  beaucoup  à  observer. 
En  attendant ,  voici  le  projet  que  je  suis  chargé  de 
yous  préseilter  au  nom  du  Comité  de  Salut  public. 

i^.  La  Convention  nationale  met  sous  la  sauve- 
garde de  la  loi  et  des  autorités  constituées  ,  les  ci- 
toyens arrêtés  à  Lyon  dans  les  derniers  troubles  qui 
y  ont  eu  lieu. 

2°.  11  sera  sursis  à  toute  instruction  et  poursuites 
eommencées  contre  ces  citoyens.  Le  projet  de  décret 
est  adopté. 

.  Le  triomphe  de  la  Montagne  avait  fait 
proscrire  une  foule  de  députés  ,  ils  se  dis- 
persèrent sur  tous  les  points  de  la  France 
pour  y  chercher  un  asyle  et  un  appui  contre 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.       19 

la  persécution,  Chassey  et  Biroteau  se  ren- 
dirent à  Lyon ,  instruisirent  les  habitans 
des  evènemens  qui  avaient  eu  lieu  à  cette 
époque  ,  firent  le  récit  de  la  tyrannie  de 
la  Convention  ,  et  invitèrent  les  Lyonnais 
à  se  prémunir  contre  elle  :  ici  ils  exposèrent 
les  vues  anarchiques  du  parti  Montagnard 
et  des  fureurs  sanguinaires  des  Maratistes. 
Les  Lyonnais  ébranlés  par  cette  nouvelle  ', 
se  laissèrent  entraîner  par  Téloquence  de 
Biroteau,  s'assemblèrent  en  armes  ,  et  avec 
leurs  drapeaux  ,  ayant  à  leur  tète  les  Au- 
torités supérieures  et  les  deux  Députés.  On 
yarrête  rassemblée  des  sections;  et  quelques 
jours  après  ,  eiles  proclamèrent  que  Lyon 
ne  reconnaissait  plus  la  Convention  ni  ses 
décrets. 

Cette  première  démarche  faite  ,  les 
Lyonnais  se  trouvaient  au  bord  d'un  pré- 
cipice que  Biroteau  avait  creusé  sous  leurs 
pas.  Au  milieu  de  Terreur  qui  les  entourait, 
ils  ne  songèrent  même  pas  à  retenir  ces 
deux  Députés  ,  qui  contens  d'avoir  soufflé 
les  premières  étincellea  d'une  insurrection, 
s'échappèrent  nuitamment ,  et  l'un  d'eux 
gagna  la  Suisse. 

C'est  ainsi  qu'après  avoir  résisté  aux 
invitations  des  Bordelais  et  des  Marseillais 
pour  se  .liguer  contre  la  Convention  na- 
tionale ,  les  Lyonnais  se  trouvèrent ,  sans 

fi  S 


SJO  Crimes  commis  à  Lyon  , 

s'en  douter  ,  du  nombre  des  départemeiis 
;  que  Ton  dit  alors  s'être  fédéralisés  contre 
la  Convention ,  tandis  que  la  force  armée 
départementale  n'était  destinée  que  pour 
la  protéger  contre  les  maratistes  qui  Top- 
primaient«  Lyon  convoqua  en  conséquence 
toutes  les  gardes  nationales  de  son  arron- 
dissement ,  pour  célébrer  la  fédération  du 
14  juillets  -sous  le  nom  de  fédération 
Lyonnaise  ,  à  laquelle  assistèrent  des  dé- 
putés de  Marseille. 

La  Commission  départementale  et  les 
sections  ordonnèrent  en  même  tems  au 
tribunal  Criminel  de  juger  Challier.  Cet 
Accusé  usa  de  tous  les  moyens  que  la 
loi  accordait  pour  sa  défense  ;  et  le  17 
juillet  1793  ,  il  fut  condamné  à  mort. 
(  Voyex  le  tome  premier.  )  Riard  fut  éga- 
lement condamné  comme  convaincu  d'avoir 
commandé  la  force  armée  de  la  Municipa- 
lité. Un  Municipal  du  nom  de  Saute-Mouche^ 
ayant  été  précédenunent  acquitté  ,  fut 
attaqué  à  la  sortie  de  la  prison.  Pour  éviter 
ses  assassins  ,  il  se  réfugia  dans  un  café  au 
coin  du  pont  volant,  où  il  reçut  une  balle 
qui  lui  arracha  la  vie.  Son  corps  fut  jeté 
dans  la  rivière. 

^  Nous  avons  esquissé  la  tyrannie  exercée 
par  la  Municipalité  Challier  \  ses  vexa- 
tions de  tout  genre  ,  avaient  porté  l'indi- 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.      «  i 

gnation  au  plus  haut  point.  L'assentiment 
donné  par  la  Convention  à  ses  .mesures 
oppressives  ,  avait  achevé  d'aigrir  les 
esprits  ,  et  chaque  parti  se  vit  obligé 
de  recourir  aux  armes.  La  victoire  s  était 
décidée  en  faveur  des  opprimés  ,  et  les 
oppresseurs  dont  les  chefs  venaient  de 
triompher  à  Paris  ,  y  trouvèrent  par  la 
suite ,  de  terribles  vengeurs.  Les  évènemens 
du  3 1  mai,  l'arrivée  subite  des  deux  proscrits 
Biroteau  et  Chassey  ,  leurs  invitations  aux 
Lyonnais  de  chercher  à  se  garantir  de  la 
tyrannie  des  Montagnards,  ne  laissèrent 
d'autre  parti  aux  Lyonnais  ,  que  de  suivre 
leur  primitive  impulsion.  D'immenses  pré- 
paratifs de  guerre  ,  se  fesaicnt  dans  les 
armées  avoisinantes  ;  le  bruit  jjiublic  ,  un 
certain  pressentiment  fesaient  soupçonner 
que  CCS  apprêts  allaient  être  dirigés  contre 
Lyon  :  elle  se  prépara  au  combat.  Le  parti 
royaliste  ,  malgré  qu'il  ne  se  fût  pas  montré 
à  découvert ,  était  cependant  assez  puissant 
dans  cette  ville  ,  voisine  des  Suisses.  Les 
troubles  presque  continuels  qui  l'avaient 
agitée  ,  favorisaient  leur  entrée.  C'était  au 
milieu  des  tumultes  civils  qu'ils  espéraient 
relever  l'étendart  royal,  et  ils  avaient  trouvé 
dans  la  conduite  delaMunicipalité  maratiste^ 
une  protection  pour  l'érection  de  la  royauté. 
Le  souvenir  des   premières   coi^piratious 

B  3 


>  22  Crimes  commis  à  L^^on  ; 

que  V  dès  TAssemblée  constituante  ,  on 
avait  découvertes  dans  cette  ville  ,  aug- 
mentait encore  sur  elle  les  inquiétudes  na- 
tionales. On  n'avait  pas  oublié  que  c'était 
daiis  cette  ville  que  les  princes  à  Turin  , 
et  les  conspirateurs  du  camp  de  Jalès  , 
avaient  résolu  de  porter  le  siège  de  la 
royauté  :  d  abord  ,  pour  se  venger  de  la 
Conduite  des  Parisiens  ,  ensuite  pour  ra- 
viver les  manufactures  que  la  révolution 
anéantissait.  Les  négocians  ne  cessaient  de 
se  plaindre  a^uprès  de  la  classe  ouvrière 
sur  le  nouvel  ordre  de  choses.  La  Cour 
de  France  une  fois  abolie  ,  il  ne  fallait 
plus  songer  à  la  fabrication  des  riches 
étoffes ,  qui  fesaient  refluer  tant  de  richesses 
à  Lyon.  Ces  différens  propos  divulgués 
avec  art ,  Turgence  du  moment ,  facilitèrent 
à  laConimission  départementale  une  liberté 
daction  dont  elle  avait  besoin  pour  ré- 
sister à  l'oppression  qui  menaçait  la  France. 
La  faction  dominatrice  qui  criait  sar^s  cessé 
contre  les  agens  de  l'Anglais  et  de  l'Autriche , 
servait  indubitablement  Furie  et  l'autre 
puissance  ,  et. principalement  la  première, 
en  concourant  à  là. destruction  d'une  ville, 
pour  l'anéantissement  de  laquelle  ,  sous  le 
règne  de  Louis  XIV  ,  ils  avaient  offert  dix 
millions. 

Les  ouvriers  qui  avaient  beaucoup  à  s^è 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.       83 

plaindre  de  la  morgue  des  négocîans  et 
de  leur,  luxe  quils  comparaient  à  la  modi* 
cité  de  leur  salaire  ,  étaient  sans  cesse  ba- 
lottés  entre  le  parti  de  la  Mcwitagne  et. lé 
parti  royaliste  qui,  par  des  motifs  différeni 
visaient  au  même  but-  à, Ja  guerre  civile; 
Cette  classe  d'hommes  ,  peu  éclairée  ,  sani 
occupations  ,  et  ne  désirant  que  la  vivi- 
fication  des  ateliers,  suivait  aveuglément 
les  impressions  qu  on  lui  donnait ,  sous 
le  masque  d'un  avenit  plus  heureux.  Par 
TefFet  de  tant  de  suggestions  ,  Challict 
fut  condamné  et  exécuté  ,  malgré  le  décret 
du  3  juillet ,  .qui  rendait  les  dépositaires 
de  Tautorité  publique  de  cette  ville,  rest 
ponsables  individuellement  Aftt  3.ur  Jeuts 
têtes ,  des  atteintes .  qui  •  pourraient  êtr« 
portées  a  1^  cureté  des!. citoyens  arrêtés  ^ 
détenus,  ou  relaxés  pat  çwté  des  évènemeris 
du  a^  m?LJU  .;.  .       :  ^ 

Peut-être  ^ût-il  été;  plu»,  .prudent  oU 
plij$  gf  néreuJC  de  Jlaiss.er  la  yié  à^  Ch^lUer:^ 
mais  la:  /Vindicte  publique  ^voulait  irappér 
en  lui  TAuteur  des  premières  ^rresjatiôn5^ 
de  c^  ajCtes .  arbitraires  -  qui  ,  f:çj;Asidéxés 
comme  l'efFet  d'un  cerveau  mal  or^nisé  , 
n'en  avaient  pas  moi^s-été  le  signal  des 
atrocités  municipales,;  .-âftP  supplice  en 
fut  donc  la  juste  expiation ,  et  les  Lyonnais 
ne  durent  y  voir  que  Texe^cicé  d'un  dçoii 

B  4 


s 4  Crimes  commis  à  Lyon  , 

consacré  légalement  alors ,  le   droit  de  la 

résistance  à  Compression. 

-Ce  sentiment  fut  le  premier  mobile  de 
leur  insurrection;  et  en  prenant  les  armes  , 
ils  devaient  d'autant  moins  soupçonner  une 
trahison  ,  ^tietous  les  actes  émanés  de  la 
Commission  ;  départementale  ,  portaient 
Fempreinte  de  la  Republique  une  et  indivi-» 
sible  ,  et  qu  elle  prenait  élle-niême  la  déno- 
mination d^  ComVnission  populaire^  r^épubli^ 
caine  et  de  Salut' public  du  département  de 
RMne  et  Loiret 

C'fesr^sous  ce  titre  qu'elle  fit  paraître 
une  proclamation  destinée  à  pi*émunir  les 
ijitoyetis  peu  édairés  contre  les  suggestions 
des  -Agens  de  là  Montagne  ,  qui  venait  de 
remporter  à  Paris  les  triomphes  du  3i 
mai,  et  du  2  juin.  Après  avoir  rappelé 
dans  cette  proclamation  lés  récefifà  outrages 
faits  au  peuple  français  dans  là  personne 
de  ses  RepréseAtàns  proscrits  par  Tinsolence 
aftarchîsted^jne  minorité  composée  de  c^nt 
éhit:;^uante:meftïbï*es seulement:  les  Membres 
de  la  com^mission  ajoutaient  ««qu'à  leut 
>)  exemple  ,  une  grande  majorité  des  dé- 
fj  partèmens  se  sont  levés  contre  Tôppres* 
99  sion.  Ils  les  citent  au  nombre  de  soixante- 
5  5  trois  :  cependant ,  ajoutent  -  ils  ,  des 
>5  hommes  pervers  prêchent  par-tout  la 
n  discorde,  la  guerre  civile  et  le?  principes 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.      25 

ij  les  plus  contraires  au  bonheur  public. 
t>  Ils  invitent  les  citoyens  à  se  défier  de 
I  5>  leurs  insinuateurs  perfides,  au  nom  de 
n  tout  ce  qu  ils  ont  de  plus  cher.  D'ailleurs 
»  qu'ils  examinent  scrupuleusement  la 
f>  conduite  de  ces  hommes  qui  se  couvrent 
,»9  du  manteau  du  patriotisme.  Ils  recon* 
n  naîtront  des  hommes  qui,  sans  aucun  des 
n  liens  qui  attachent  Thomme  à  la  société  , 
9r  n'*ont  de  ressources  que  dans  le  crime 
n  et  le  brigandage  in  Ensuite  cherchant 
à  détruire  le  soupçon  qu'on  élève  contre 
eux  sur  le  projet  de  rétablir  la  royauté  , 
a  ils  peignent  les  anarchistes  comme  les 
«  auteurs  des  maux  qui  désolent  la  France, 
5)  qui  les  premiers  ontlevé  Té tendart  contre 
n  les  amis  des  lois,  î  >  Ils  finissent  par  ranimer 
Tespoir  et  le  courage  de  ce  peuple ,  u  en  lui 
n  apprenant  que  le  bataillon  envoyé 
J5  contre  Je  Jura,  avait  fini  par  déposer 
n  ses  armes  et  fraterniser  avec  eux  :  qu  ainsi 
M  il  ne  leur  reste  plus  qu  à  livrer  au  glaive 
n  des  lois  ceux  qui  cherchent  à  enchaîner 
ij  leur  ardeut  pbur  défendre  la  cause  quils 
n  ont  embrassé  ,  et  d'où  dépend  leur  salut 
99  et   celui  de  TEmpîre  français,  n 

Il  manquait  un  général  aux  troupes 
lyonnaises.  Précy^  ancien  militaire,  jouissant 
d'une  fortune  médiocre  ,  reçut  à  son  do- 
micile situé  i,  quelques  lieues   de  Lyon  « 


s 6  Crimes  commis  à  Lyon' i 

une  députation  qui  Tinvita  à  venir  prendre 
le  commandement  de  la  force  départe- 
mentale. Il  vînt  à  Lyon  pour  y  reconnaître 
Tesprit  qui  ranimait.  Il  hésitait  de  prendre  le 
commandement;mais  la  C  ommission  layant 
assuré  que  soixante-trois  departemens  en- 
traient dans  cette  fédération ,  fit  cesser  ses 
incertitudes.  D'un  autre  côté ,  les  négocians 
pour  augmenter  le  nombre  des  défenseurs,- 
fern;tèrent  leurs  magasins  et  leurs  ateliers; 
Ouvriers  et  commis  furent  forcés  de  prendre 
les  armes  ;  on  les  y  encouragea  même  en 
leur  donnant  une  paye  de  5  liv.  par  jour, 
non  en  espèces  ,  mais  en  papier-monnaie 
portant  pour  inscription  ^Billets  de.  siège  eb^ 
sidionale  ,  et  signés  par  Mes  principaux 
Membres  de  la  Commission  municipale. 

L  armée  lyonnaise  s'organisa  en  peu  dé 
tems.  Elle  fut  composée  de  6000  hommes 
d'élite,  et  1^  masse  de  ses  défenseurs  en 
général,  se  montait  à  près  de  trente  mille 
hommes.  Cette  armée  commença  à  s'em- 
parer de  tous  les  Inagasiqs -de  vivres  et  de 
niunitidns  appartenant  àila.  République  et 
réservés- p'our  Tarmée  d'Italie,  ainsi  que 
des  fonderies  de  canons.  Le  citoyen /fr^/Vaw; 
directeur  de  l'une  de  ces  fonderies  ,  refusa 
son   ministère  et  se  sauva. 

Les  troupes  destinées  contre. cette  ville, 
conduites  par  Dubois- Crancé  ,,se  présenumt 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.       27 

sur  les  hauteurs  environnantes  et  dominaient 
du  côté  de  la  Croix-Rouge,  Une  artillerie 
formidable  avait  é*é  commandée  pour  ce 
siège  :  par  la  suite  ,  la  levée  en  masse  des 
départemens  voisitf» ,  eut  ses  quartiers 
autour  de- Lyon  ,  qui  se  trouva  bloqué  de 
toutes  parts  :  elle  n'eut  de  communication 
de  libre  que  celle  des  Brotteaux  ,  par  le 
pont  St.-Clair.  L'opiniâtre  résistance  des 
Lyonnais  ,  fit  accuser  Dubois-Crancé  de 
ménager  les  assiégés.  (1)  On  lui  adjoignit  i 
Couthon  ,  Châteauneuf-  Randon  ,  Maignet  , 
Laporte  ttrjavogues.  Sous  ces  quatre  Mon- 
tagnards, le  siège  prit  une  nouvelle  acti- 
vité. Les  bataillons  de  TAuvergne,  et  autres 
appelés  à  ce  siège  ,  redoublent  d'efforts  , 
à  la  vue  de  cette  ville  riche  dont  on  leur 
promet  le  pillage.  Les  Montagnards  qui 
n'épargnaient  rien  pour  en  venir  à  leur 
but ,  distribuaient  avec  profusion  les  asf- 
signats  dont  ils  dirigeaient  à  volonté  la 
fabrication.  Danton  écrivit  à  Couthon  qu'il 
fallait  détruire  cette  ville  ,  que  tous  les  sa- 
crifices devaient  être  faits.  Cette  invitation 
de  Danton  était  inutile  ,  puisque  le  Comité 
de  Salut  public  avait  arrêté   cette  mesure 

(1)  Pendant  qu'il  dirigeait  ce  siège  ,  un  nommé 
Servan  ,,  aidé-de-camp  de  Précy  ,  pris  dans  une 
sortie,  les  armes  à  la  main  ,  fut  jugé  par  une  cour 
martiale  ,  et  condamné  à  être  fusillé. 


X 


28  Crimes  commis  à  Lyon  , 

relative  à  son  plan  de,  dépopulation.  Là 
disette  se  fesait  sentir  dans  Lyon  où  Ton 
distribuait  par  jour  à  chaque  individu 
un  gobelet  d'avoine  ,  et  ceux  qui  n'avaient 
pas  voulu  prendre  le*"  armes,  étaient  privés 
de  tout  secours.  Plusieurs  femmes  et  erifans 
étaient  déjà  morts  de  besoin  :  le  peu  d'é- 
nergie d'une  partie  de  ceux  qui  avaient  pris 
les  ajrmes  ,  la  quantité  de  partisans  de  la 
Montagne  qui  étaient  comme  autant  d'es- 
pions ,  les  trahisons  continuelles  qu'ils 
occasionnaient ,  et  contre  lesquels  on  avait 
été  force  de  sévir  ,  soit  en  incarcérant 
ceux  qui  était  soupçonnés ,  soit  en  fesant 
fusiller  ceux  qui  étaient  convaincus  ,  ren- 
dirent les  efforts  des  assiégés  inutiles  ;  et 
après  avoir  soutenu  un  blocus  de  soixante- 
trois  jours ,  un  des  plus  meurtriers  et  des 
plus  désastreux  que  l'histoire  nous  fournisse, 
Lyon  ouvrit  ses  portes  à  l'armée  de  la 
Montagne  ,  le  9  octobre  1 793. 

Les  assiégés  qui  s'attendaient  à  trouver 
leurs  assa^ssins  dans  les  vainqueùrs,furent  sin- 
gulièrement étonnés  et  attendris ,  en  voyant 
l'armée  entrer  avec  des  vivres  de  toute 
espèce  ,  et  chaque  soldat  distribuer  une 
portion  de  sa  subsistance  aux  citoyens. 
Un  pareil  début  séduisit  la  multitude  ,  qui 
finit  par  regarder  ces  soldats  comme  ses 
libérateurs  \  mais  elle  ne  pouvait  s'imaginer 


st)U5  les  Proconsuls  conventionnels.     «9 

que  les  Représentans  qui  étaient  à  leur  suite, 
vinssent  y  porter  la  désolation  et  le  carnage* 

Le  général  Précy  ,  qui  n  ignorait  pas  le 
peu  de  confiance  que  méritaient  les  Dé- 
putés de  la  Montagne  ,  avait  déjà  pris  le 
parti  de  la  retraite  à  le  tête  de  deux  mille 
cinq  cents  hommes ,  qui  étaient  l'élite  des 
assiégés.  Cette  retraite  ,  qui  lui  avait  parue 
indispensable  dès  Tinstant  où  les  pour- 
parlers annonçaient  la  prochaine  reddi- 
tion de  la  place  ,  fesait  déjà  déserter  les 
postes  avancés  par  les  factionnaires  fatigués 
d'un  siège  aussi  long  ,  et  à  qui  les  prélimi- 
naires de  paix  firent  briller  une  lueur  de 
yepos ,  dont  ils  s'empressèrent  de  jouir 
par  avance. 

Ces  malheureux  ne  voyant  donc  d'autre 
salut  que  dans  la  fuite  ,  emmènent  leurs 
femmes  et  leurs  enfans  ,  qu'ils  mettent  au 
milieu  de  leurs  bataillons  ,  et  abandonnent 
leurs  foyers  ,  leur  patrie  et  leur  fortune» 
On  ne  peut  dépeindre  la  douleur  qui  dé* 
chirait  cette  petite  armée.  Les  mères  ,  les 
enfans  qu'elles  serraient  contre  leur  sein  , 
murmuraient  contre  le  ciel ,  et  accusaient 
leurs  ennemis  d'injustice  et  de  barbarie.  La 
destinée  la  plus  affreuse  les  expulsait  de 
leur  asyle  ;  elle  présida  à  leur  départ ,  en 
leus  fesant  ressentir  les  plus  terribles  coups* 
Une  décharge  d  artillerie  frappa  le  milieu  de 


3o  Crimes  commis  à  Lyon  , 

cette  colonne  à  sa  sortie  ;  un  obus  mît  le 
feu  à  un  caisson ,  son  exJ>losion  porta  la 
mort  parmi  les  femmes  et  des  enfans* 
Plusieurs  éprouvèrent  des  blessures  mor- 
telles ,  qui  les  firent  périr  au  milieu  des  cris 
d  un  désespoir  déjà  alimenté  par  cette  re- 
traite forcée^  Néanmoins  cette  petite  armée 
continua  sa  route  ;  mais  les  Représentans 
ne  la  perdirent  pas  de  vue  ;  ils  préparèrent 
sa  destruction  par  tous  les  moyens  que  la 
puissance  et  la  barbarie  leur  fournirent. 
Des  Commissaires  sont  expédiés  dans  toutes 
les  campagnes  par  où  ils  doivent  passer. 
Le  tocsin  sonne  à  leur  approche  ;  les  paysans 
s'arment  de  toutes  parts,  les  harcèlent ,  leur 
coupent  le  passage.  Près  de  St.  Cyr,  au 
Mont  d'Or  ,  à  St.  Germain  ,  ils  les  at- 
tendent d^ns  les  creux  des  défilés  ;  ils  les 
assaillent  dans  les  difFérens  endroits  ,  et 
parviennent  à  les  détruire.  Ils  n'épargnent 
ni  les  femmes  ni  les  enfans  ,  ils  se  préci- 
pitent dessus  à  coups  de  bâtons  ,  à  coups 
de  fourches  ;  les  assomment.,  les  égorgent , 
et  parviennent  à  exterminer  jusqu'au  der- 
nier de  ces  infortunés. 

Les  Représentans  ,  en  possession  de  la 
ville  de  Lyon  ,  commencèrent  d'abord  à 
rétablir  le  fameux  club  ,  présidé  jadis  par 
Challier.  Plusieurs  Représentans  s'y  ren- 
dirent,  et  y  prononcèrent  les  discours  les 


sous  Us  Proconsuls  conventionnels.      5 1 

plus  propres  à  exalter  les  têtes ,  et  em- 
braser toutes  les  passions.  Javogues ,  dans 
un  de  ses  élans  oratoires ,  y  peignit  Challier 
et  Riurd  ,  comme  les  martyrs  de  la  liberté  , 
les  héros  de  la  République  et  les  seuls  amis 

(du  peuple.  II.  parla  aux  ouvriers  de  l'asser- 
visse ment  honteux  dans  lequel  les  riches  les 
avaient  retenus  silong-tcms  ,  en  s'appro- 
prîant  tous  les  fruits  de  leurs  travaux  et 
de  leur  industrie.- Les  propriétaires  furent 
signalés  au  peuple  comme  les  usurpateurs 
de  son  bien  ;  il  finit  par  Tinviter  à  rentrer 
dans  ses  droits ,  en  dépouillant  les  pro- 
priétaires ;  et  lorsque  le  décret  sur  la  dis- 
tribution des  maisons  des  riches  aux  pauvres 
fut  devenu  public ,  il  leur  persuada  que  la 
démolition  des  édifices  était  un  moyen 
certain  de  parvenir  à  cette  sainte  égalité  , 
qui  est  la  base  de  la  liberté. 

C'est  ainsi  que  ces  Représentans  pro- 
clamaient ce  système  agrairien  ,  conçu  par 
les  Comités  et  la  Convention,  pour  assurer 
leur  ^despotisme  par  la  main  même  du 
peuple;  c'est  ainsi  qu'en  offrant  àPindigent, 
fatigué  d  une  longue  misère  ,  l'illusion  en- 
chanteresse d'une  égalité  future  d'opulence 
et  de  bonheur  ,  ils  achetaient  ses  bras  et 
sa  force  pour  la  ruine  et  l'extermination 
des  Français ,  qu'ils  enchaînaient  par  de 
chimériques  espérances  :  les  remords  de  la 


i 

32  Crimes  commii  à  Lyon ,  ' 

multitude  égarée  ,  Fentraînaient  des  égà-  | 
Temens  aux  crimes  ,  et  lui  firent  bientôt  un  \ 
besoin  de  la  férocité.  J 

Le  même  siystême  s'étendait  du  Mi  Si  au  \ 
Nord  ;  et  Paris  était  comme  un  gouffre  ' 
central  où  s'engloutissaient  les  victimes 
d'élite  ,  et  comme  un  modèle  des  principes  , 
de  dépopulation  offert  au  reste  des  dépar- 
temens  ,  pour  encourager  et  activer  les  • 
exécutions  et  les  massacres. 

Les  prédications  agrairicnnes  dejavogues 
ne  furent  que  trop  bien  entendues  ,  et  ses 
affreux  succès  sont  imprimés  en  caractères 
ineffaçables  sur  les  murs  et  sur  les  ruines 
de  cette  ville  infortunée.  ' 

Lyon  ,  comme  toutes  les  autres  Com- 
munes de  la  République  ,  avait  sans 
doute  des  royalistes  dans  son  sein  ;  mais 
on  y  comptait  en  revanche  une  foule 
d'excellens  républicains.  Les  Représentans  , 
on  le  sait ,  ne  desiraient  pas  en  trouver  ;  ils 
trouvèrent  même,  un  moyen  de  créer  des 
suspects  de  royalisme ,  en  affichant  et  que 
5>  quiconque  laisserait  paraître  sur  son  vi- 
»>  sage  la  moindre  apparence  de  tristesse  , 
3>  serait  déclaré  <2n5/ocr^<^.  »»  Ainsi  bravant 
le^  deuil  public  ,  et  se  jouant  de  la  famine 
qui  régnait  dans  les  murs  de  Lyon  ,  ils 
commandèrent  au  père  de  sourire  à  la  vue 
de   ses   enfans    expirans    de   besoin ,  ou 


sous  Us  Proconsuls  conventionnels.     33 

assassinés  ;  ils  voulaient  étouffer  jusqu'à  cette 
douloureuse  mélancolie  ,  que  la  nature  a 
voulu  attacher  au  don  sacré  de  la  maternité* 
Comme  la  présence  et  Tanêté  des  Re- 
présentans  ne  commandaient  pas  la  gaî  té  des 
Lyonnais  ,  CoUot-dHerbois  écrivit  à  la 
Convention  que  Taristocratie  était  peinte 
sur  le  visage  des  Lyonnais  ;  que  leur  haine 
pour  la  République  s  y  lisait  par  leur  air 
sourcilleux  ;  comme  si  une  ville  ,  menacée 
à  chaque  instant  de  pillage  ,  de  démoli- 
tion, et  dont  les  habitsms  étaient  sous  les 
poignards  des  sicaires  du  club  Challier , 
devait  s'abandonner  à  Talégresse. 

Il  ne  manquait  plus  à  la  folie  révolu- 
tionnaire que  de  diviniser  le  crime  ,  en 
fesant  Tapothéose  de  Challier  ;  ils  indi- 
quèrent pour  cette  fcte  un  jour  destiné  à 
celle  de  notre  ancien  culte.  Cette  circons- 
tance ne  fit  qu'ajouter  au  ridicule  et  à 
Fhorreur  dont  se  couvrirent  dans  cette 
journée. les  promoteurs  de  la  dégradation 
des  Lyonnais  ,  en  leur  présentant  pour 
idole  ce  Challier  ,  Tennemi  juré  de  son 
repos  et  de  son  bonheur.  Le  Sénat  romain 
décerna  des  honneurs  divins  à  ses  tyrans. 
Le  Peuple  français ,  dit  souverain  ,  fait 
brûler  Tencens  aux  pieds  des  siens. 

Le  jour  fixé  pour  la  fête  de  Challier  ,  son 
image  est  pompeusement  promenée  dans 
Tome   VI.  c 


34  Crimes  commis  à  Lyon  , 

les  Yues  de  Lyon  ;  des  hommes  et  des 
femmes  la  portent  avec  respect  :  d'autres 
'hommes  sont  chargés  de  vases  sacrés  ;  au 
milieu  d'eux  est  un  âne  ,  couvert  d'une 
chappe  et  coîfFé  d'une  mître  :  à  sa  queue 
sont  suspendus  la  Bible  et  l'Evangile.  On 
brûle  le  corps  supposé  de  Challier  ,  et  ses 
cendres  sont  pieusement  distribuées  aux 
sectateurs  de  sa  morale.  L'Evangile  et  la 
Bible  sont  brûlés  ,  et  oh  en  jette  les  cendres 
au  vent.  Cette  cérémonie  s'acheva  par 
faire  boire  l'âne  dans  un  calice.  On  agita 
ensuite  de  consacrer  cette  journée  en  im- 
molant tous  les  prisonniers  aux  mânes  de 
Challier.  Ce  massacre ,  auquel  ces  indignes 
partisans  applaudirent,  eut  peut-être  été 
exécuté  ,  sans  un  orage  violent  qui  dissipa 
tout-à-coup  cette  odieuse  fête.  La  Com- 
mune de  Wris  ,  à  qui  le  club  Lyonnais  avait 
envoyé  le  cœur  de  Challier  ,  s'empressa 
également  de  célébrer  des  fêtes  en  son 
honneur.  La  réintégration  de  ce  club  ,  dont 
les  sentimens  s'accordaient  si  bien  avec  les 
siens ,  établissait  entre  les  deux  plus  grandes 
xités  de  la  France  ,  une  correspondance 
et  une  unité  d'action  qui  devaient  du  Nord 
au  Midi  faire  tout  courber  sous  la  tyrannie 
révolutionnaire. 

Le  sang  des  Lyonnais  quel'on  avait  déjà 
commencé  à  verser  sur  l'échafaud,   celui 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.      35 

quf'on  se  proposait  de  verser  encore ,  la 
plupart  des  ennemis  de  Challier ,  frappés 
de  la  hache  ,  le  reste  n'attendant  plus  que 
Imstant  ou  la  rage  des  bourreaux  devait 
s  appesantir  sur  eux  ,  offrirent  aux  Rcpré- 
sentans  du  Peuple  un  triomphe  trop  digne 
de  la  Montagne ,  pour  ne  pas  lui  en  faire 
hommage.  En  conséquence  ,  ils  adressèrent 
la  lettre  suivante  à  la  Convention  na- 
tionale. 

Commune-Affranchie^  sto  Brumaire^  an  2  de  la  République 
française^  une  et  indivisible.  (^  lo  novembre^  i793.  ) 

Citoyens    collègues. 

L'ombre  de  Challier  est  satisfaite  ;  ceux  qui  dic- 
tèrent l'arrêt  atroce  de  son  supplice  ,  sont  frappés 
de  la  foudre  ;  et  ses  précieux  restes,  religieusement 
recueillis  par  les  républicains ,  viennent  d'être 
portés  en  triomphe  dans  toutes  les  rues  de  Com- 
mune-AfiFranchie.  * 

C'est  au  milieu  même  de  la  place  dU^.ce  martyr 
intrépide  fut  immolé  à  la  rage  effrénée  de  ses  bour- 
reaux, que  ses  cendres  ont  été  exposées  à  la 
vénération  publique  et  à  la  religion  du  patriotisme. 

Aux  sentimens  profonds  et  énergiques  qui  rem- 
plissaient toutes  les  âmes,  a  succédé  un  sentiment 
plus  doux ,  plus  touchant  ;  des  larmes  ont  coulé  de 
tous  les  yeux  à  la  vue  de  la  Colombe  qui  Tavoit 
accompagné  et  consolé  dans  son  affreuse  prison  ,  et 
qui  semblait  gémir  auprès  de  son  simulacre.  Tous 
les  cœurs  se  sont  dilates  ;  le  silence  de  la  douleur  a 
été  interrompu  par  les  cris  mille  fois  répétés  :  Ven- 
geancc  !  vengeance  ! 

C    2 


36        '    Crimes  commis  â  Lym.  ,^  ^ 

.  Nous  le  jurons  ,  le  peuple,  sera  vengé  !  Notre 
courage  sévère  répondra  à  sa  juste  in^patience.  Lesol 
qui  fut  fougi  du  sang  des  patriotes,  sera  boulversé  ; 
tout  ce  que  le  crime  et  le  vice  avaient  éleyé  scri 
îtnéanti  ;  et  sur  les  débris  de  cette  ville  superbe  et 
rebelle  ,  qui  fut  assez  corrompue  pour  demander 
un  maître  ,  le  voyageur  verra  ,  avec  satisfaction  , 
quelques  monumens  simples,  élevés  à  la  mémoire 
des  martyrs  de  la  liberté  ,  et  des  chaumières  éparses  , 
que  les  amis  de  Tégalité  s'empresseront  de  venir 
habiter ,  pour  y  vivre  heureux  des  bienfaits  de  la 
nature. 

Signée    FOUCHÉ,  Représentant  du  Peuple. 

La  Montagne  jéblouie  par  son  triomphe 
sur  cette  cité  fam<euse  ,  doat  elle  redoutait 
peut-être  le  réveil  ,  la  proscrivit  entière- 
ment ;  et  par  Torgane  du  Comité  de  Salut 
public  ,  la  Convention  avait  rendu  ,  dès  le 
Ûi  vendémiaire,  (12  octobre  J  793)  le  décret 
qui  ensevelissait  à  jamais  sa  gloire  ,  et  qui 
devait  effacer  jusqu'à  son  nom.  En  voici  le 
texte  : 

Du   21    Vendémiaire^   seconde  année  Républicaine, 

La  Convention  nationale,  après  avoir  entendu, 
le  rappOTt  du  Comité  dç  Salm  public,  décrète  : 

Article     p  b  e  m  i  e  r. 

Il  sejra  nommé  par  la  Convention  nationale 
sur  la  présentation  du  Comité  de  Salut  public, 
une  conwnission  extraotrdinaire  ,  composée  de  cinq 
membres ,  pour  faire  -punir  militairemeiit  et  sans 
délai  les  contre-révolutionnaires  de  Lyon. 

IL  Tous  les  habitàns  de  Lyon  seront  désarmés. 

Leurs  armes  seront  distribuées  sur-le-champ  aux 
défenseurs  de  la  République, 


sous  les  PrvconstUs  çomentimneh.     37 

Une  p^irtie  sera  remise-  aux  patriotes  de  Lyon 
qui  ont  été  opprimés  par  les  riches  e^  les  contrer 
révolutionnaires.  -;  , 

III.  La^  ville  de  Lyon  sera  détruite.. Tout  ce  qxri 
futjhabité  par  le  riche  sera  démoli.  Il  ne  restera  que 
la  maison  du  pauvre,  les  habitation^  des  patnote;i 
égorgés  ou  proscrits ,  les  édifices  spécialement 
employés  k  ISndustrie  ,  et  les  monunièns  consacrés 
à  r humanité  et  à  l'instruction  publique. 

IV.  Le  nom:  de  Lyon  sera  effacé  du  tableaq  de^ 
villes  dé  la  République. 

La  réufiion  des  maisons  conservées  portera 
désormais  le  -  nom   de    VilU-Affranehie, 

V.  IL  sera  élevé  sur  les  ruines  de  Lyon  une  colonne 
qui  attestera  à  la  postérité  les  crimes  et  la  punition 
des  royalistes  de  cette  ville,  avec  cette  inscription  : 

^  Lyçnjit  la  guerre  à  la  Liberté  ; 

j  Lyon  tiest  plus. 

Le  dix- huiùème  jour  du  premier  mois  , 

Lan  deuxiimt  de. la  République  Française , 

..U^i^,  et  indivisible. 

t  VI.  Les  Rfïyrisehtans  du  peuple  nommeront  snr- 
le-champ  des  commissaires  pour  fp^rc  le  tableau  de 
toutes  les  propriétés  qui  ont  appartenues  aux  riches 
et  aux  cdntt'e- révolutionnaires  de  Lyon  ,  pour  être 
«tatué  incessamment  par  la  Convention  sur  lés 
moyens  d'cxéx;ution  du  décret  du  19  juillet  1793, 
qui  affecte  ces  biens  à  l'indemnité  des  patriotes. 

.  Du  28  ,  premier  ynoifSr 4^  la  seconde  armée  républicaine. 

La  Convention,  nationale  décrète  que  la  lettrfe 
écrite  le  2  7  août  dernier  aux  Représentant  du  peuple 
Dubois-Crancé  et  Gaultier, par  les  citoyens  de.L)^,on, 
et  revêtue  de  20  mille  signatures  ,  sera  déposée 
dans  ses  archives  ,  pour  servir  de  monument  étej^- 
nel  de  la  trahison  des  signataires  de  cette  lettre.   ^ 

ç  3 


38  Crimes  commis  à  Lyon  , 

Ordonne  en  outre  que  cette  lettre  sera  imprimée , 
et  envoyée,  à  tous  les  corps  administratifs,  et  qufc 
copie  oftcielle  en  sera  envoyée  par  le  Comité; dfe 
Salut  public  ,  aux  Représentans  du  peuple  dfeins 
Lyon,  pour  servir  de  base  à  leurs  opérations  dans 
cette  ville  rebelle.  -    -  - 

,^._  Pour  procéder  à  rcx.écùtion  d'un  ordre 
aussi  désastreux ,  il  fallait  être  bien  assuré 
de  Fassentiment  ou  plutôt  de  Faveuglement 
du  Peuple.  Comment  ne  pas  s'étonner 
que  cette  foule  d'ouvriers  ,  qui  devait  sou 
existence  à  la  richesse  des  commer^atis , 
aux  nombreux  magasins  ,  aux  immenses 
ateliers  que  Lyon  renfermait  dans  ses 
murs ,  n  ait  pas  senti  que  la  proscriptioii 
des  négocians  ,  dé  ces  ateliers  et  la  démo- 
lition de  leurs  habitations',  entraînaient 
nécessairement  Tanéantissement  de  '  toute 
industrie  et  de  tout  moyen  d'existence  pour 
elle-même  ?  Comment  nVt-elle  pas  été 
avertie  par  un  sage  pressentiment  de  là 
misère  et  de  la  famine  qui  l'attendaient  , 
sur  l'affreuse  perfidie  des  tyrans  conven- 
tionnels qui  Tégarâîent ,  sur  l'éternelle 
exécration  qui  leur  était  due  ? 

Les  vainqueurs ,  au  lieu  de  se  conduire 
en  pères  de  famille,  toujours  disposés  à  la 
clémence  qui  aurait  ramené  les  vaincus  au 
'centré  commun,  et  conquis  aux  vainqueurs 
.'de  nqmbreux  et  de  zèles  partisans  ,  agirent 
en  despotes  irrités  et  avides  de  sang. 


V 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.      Sç^ 

Les  Membres  de  Tancienne  Municipalité 
avaient  déjà  été  mis  en  liberté  et  réinstallés. 
Que  de  vengeances  à  assouvir  !  que  de  bri- 
gandages à  exercer  !  Vils  instrumens  des  Re-i 
présentans  du  Peuple!  ils  alimentent  leurs  fu- 
reurs, en  désignant  pour  victimes  ceux  qui 
avaient  développé  la  plus  vigoureuse  résis- 
tance à  leurs  projets  liberticides.  CoUot-s 
d'Herbois,  ci-devant  comédien  ,  avait  aussi 
une  vengeance  particulière  à  exercer  contre 
toute  cette  malheureuse  cité.  Lors  de  son 
début  sur  le  théâtre  de  Lyon ,  il  avait  été 
sifflé.  Aussi  s'écrîa-t-il  pendant  le  siège  de. 
cette  ville  ,  qu  elle  lui  paierait  bien  cher 
ses  coups  de  sifflets.  Ainsi  Lyon  deyait  être 
victime  de  son  bon  goût  pour  les  arts  (i). 


(i)  Cet  histrion  était  en  mission  immédiatement 
après  ce  siège  ,  à  Crépy  ,  dan»  le  département  de 
TAisne ,  avec  Lequinio  et  Isoré.  Avant  de  se  faire 
connaître  ,  ces  Députés  parcouraient  les  places  pu- 
bliques ,  se  glissaient  dans  les  groupes  et  cher- 
chaient à  révolutionner  le  pays  ,  en  soulevant  le 
Peuple  contre  les  riches  "  :  11  n'est  pas  étonnant  , 
51  disait-on  de  toutes  parts  ,  que  nous  soyons  mal 
»  gouvernés  ,  la  Convention  n'est  composé  que 
i9  d'hommes  ignares,  sans  délicatesse  ;  la  plupart 
n  sont  i4l>nnus,  et  n'ont  jamais  eu  de  moyens 
jî  de  subsistance.  Il  y  a  jusqu'à  des  Comédien» 
j>  qui  sont  membres  de  cette  Assemblée.  ji  Le 
Procureur-Syndic  était  l'auteur  de  ces  observations , 
dont  le  dernier  trait  ne  devait  pas  flatter  l'amour- 
propre  de  Gollot.  Deux  heures  après  les  Députéa 

c   4 


40       •        Crifnes  commis  à  Lyon  ,   '" 

Une  Commission  militaire  composée  de 
cinq  membres ,  quoique  maratiste  ,  jugeait 
cejpendant  avec  queîqua^parence  de  jus- 
tice.'Elle  suivait  à  p.çu-près  les  formes,  La 
Société  populaire  établie  datis  la  salle  des 
spectacles  des  Terreaux  ,  se  plaigtiit  de  ce 
qu  elle  ne  condamnait  pas  url  as?ez  grand 
nombre  d'individus;  que  la  Nation  avait 
"besoin  d'ctré vengée  prdmptement ,  et  qu'il 
fallait  en  envoyer  èbus  ïes  joùts  soixante  à 
la  mort.  Cotlôt-d'Hferbois  étrivit  aux  jaco- 
bins de  PiHs.ll  invita  de  choisir  dans  leur 
seîn  de  courageux  Jacobins  polir  accélérer 
le  jugement  des  Lyonnais,  ajoutant  quit 
ny  avait  pas  vingt  patriotes  à  Lyon.  Ainsi , 
d'après  cfette  lettre,  bn  doit  présunîer  qiié 
la*"Munic1pâlité  ,  le  "Club  èl  le  Tribunal 
n'étaient  pas  encore  assez  à  la  hauteur; . 

Les  Jacobins  '  envoyèrent  aussitôt    une 

annoncèrent  leur  arrivée  au  district.  Aussitôt  il 
envoie  une  cléputation  à  la  tête  de  Iqiielle  se  trou- 
vait le^  Procureur-Syndic.  Collot  Tapperçôit ,  de- 
mande ce  que  veulent  ces  hommes;  on  Ven  instruit: 
'Retirez-vous  ,  s'ecrie-t-il  aussitôt ,  vous  êtes  dés  contre-- 
révotîitionnaires  ,  vous  ri' it es  pas  dignes  de  paràïtri 
devant  la  Représentaiionnaiiofiale.  Les  membres,  inter- 
dits se  retirent,  vont  iairé  part  à  leurs  conègues  de 
la  réception  qui  leur  a  été  faite  ,  tous  en  ignorent 
les  raisons.  Enfin  ,  le  Procureur-Syndic  se  rapjpelé 
ses  propos,  et  la  figure  de  Collot-d'Herbois.  Aussi- 
tôt, frappé  de  terreur,  ils  prennent  la  fuite» 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.       41 

colonne  de  Tarmée  révolutionnaire  com- 
jDiandée  par  Ronsin  et  Parrein  ;  ce  dernier 
ex-avocat  et  orateur  du  faubourg  Saint- 
Antoine  de  Paris.  Les  soldats  de  Tarmée 
révolutionnaire  furent  choisis  à  dessein 
parmi  tout  ce  qu'il  y  avait  de  plus  exécrable 
dans  ce  corps.  Ils  furent  suivis  d'une  com- 
pagnie de  canonniers.  Lés  nommés  Antoine 
et  Lafagc  ,  meinbres  de  la  Société  ,  parti- 
rent également  pour  Lyon.  Aussitôt  une 
Commission  de  sept  membres  fut  installée. 
jParrein  la  présidait.  Il  avait  pour  collègues 
Lafage  ,  Brùnières  ,  Serjiet ,'  Côurchand , 
Marcellin  ,  Vauquoy  et  Andirieu  laîné. 
Ce  tribunal  de  sang  voulut  ,  a  l'exemple 
des  Grecs  ,  juger  en  plein  air;  mais  juger 
n'était  pas  leur  vœu  :  cette  marche  n'aurait 
pas  frayé  aux  détenus  la  route  de  Téchafaud. 
CetteCommission  signala  son  installationpar 
l'envoi  de  209  individus  au  supplice. C'était 
la  fusillade  ;  mais  avant  de  narrer  cette 
épouvantable  anecdote  ,  remontons  à  la 
source  des  jugemens  des  deux  Commissions. 
L'interrogatoire  qu'on  fesait  subir,  était 
court  et  précis.  Trois  questions  en  fesaient 
souvent  la  base  :  Quel  est  ton  nom  ,  ta  pro- 
fession ?  Qji  as-tu  fait  pendant  le  siège  ?  Ès-tù 
dénoncé  ?  Ces  lieux  communs  que  les  tri- 
bunaux de  la  tyrannie  s'étaient  adoptés  ^ 
tels  que  les   dénonciations  de  fanatisme , 


42  Crimes  commis  à  Lyon  , 

de  haine  pour  les  Sans  -  Culottes ,  pour 
Végalité  ;  Tinterprétation  des  discours  ,  et 
des  gestes  les  plus  innocens  ;  le  propos  le 
plus  léger  ,  enfin  la  moindre  indiscrétion  , 
suffirent  pour  motiver  cette  foule  d'arrêts 
qui  couvrirent  les  places  de  Lyon  de  sang 
et  de  carnage.  Au  milieu  de  toutes  ces  hor- 
reurs ,  plusieurs  des  accusés  conservèrent 
tout  le  calme  de  l'innocence  ,  et  leur  ré- 
ponse laconique  annoncèrent  leur  mépris 
pour  leuts  bourreaux  /et  la  haine  même 
de  la  vie.  j 

Marie  Adrian  ,  jeune  fille  de  seize  ans  , 
vêtue- en  homme,  avait  servi  au  canoix 
pendant  le  siège.  Traduite  devant  ces  juges , 
ils  lui  dirent  :  Comment  as-tu  pu  braver  le 
feu  et  tirer  le  canon  contre  ta  patrie  ?  C'était 
au  contraire  pour  la  défe7idre^  répondit-elle^ 

Une  autre  du  même  âge  et  aussi  inté-- 
ressante  ,  ne  voulait  pas  porter  la  cocarde. 
Interrogée  sur  le  motif  de  son  refus  :  Ce 
n'est  point  la  cocarde  que  je  hais  ,  dit-elle  ; 
mais  comme  vous  la  portez  ,  elle  me  paraît'  le 
signal  du  crime -^  elle  déshonorerait  mon  front. 
Lafage  fit  signe  au  guichetier  d'attacher  une 
cocarde  au  bonnet  de  cette  jeune  accusée. 
Vas ,  lui  dit-il  ensuite ,  en  portant  celle-ci 
tu  es  sauvée.  Aussitôt  elle  se  lève  avec  sang- 
froid  ,  détache  cette  cocarde  ,  et  ne  répond 
aux  juges  que  par  ces  mots  :  Je  vous    la 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.      43 

rends.  Elle  sort  aussitôt ,  et  court  à  la  mort. 

La  citoyenne  Marie  Lolière  ,  femme 
Cochet ,  avait  tellement  pris  la  faction  de 
la  Montagne  en  aversion  ,  qu  elle  avait  dit 
hautement  qu  elle  couperait  la  tête  d'un 
Représentant  du  Peuple,  et  qu'elle  la  porte- 
rait au  bout  d'une  pique.  Elle  fut  guillotinée 
pour  ses  propos ,  et  pour  avoir  donné 
Texemple  de  la  rébellion  en  portant  les 
armes  contre  sa  patrie  ,  et  en  se  travestis- 
sant en  homme  pour  mieux  exécuter  ses 
desseins. 

Un  Commandant  de  bataillon  de  la  garde 
nationale  réclamait  auprès  du  tribunal  la 
liberté  de  son  frère.  11  avait  laissé  son  épéc 
au  corps  de  garde  placé  à  l'entrée  du  tri- 
bunal. Les  soldats  la  tirèrent  par  curiosité 
du  fourreau.  Malheureusement  cette  épée 
qui  était  ancienne  portait  l'empreinte  des 
trois  fleurs  de  lys.  Aussitôt  elle  est  mise 
sous  les  yeux  des  juges.  Ce  Commandant 
étonné,  se  trouble  dans  ses  moyens  de 
défense.  Tu  venais ,  lui  dit-on  ,  réclamer  ton 
frère ,  tu  partageras  sa  prison  et  son  jugement. 

Un  accusé  du  nom  de  Calas  se  présente. 
Etais-tu ,  lui  demandent  les  juges  ,  parent 
de  ces  Calas  que  des  Parlementaires  ont  fait 
rouer  ?  Sur  l'afl&rmative  :  Sois  libre  ,  lui 
dit-on  ,  ton  parent  te  sauve. 

Un  autre  évita  la  mort  par  une  réponse 


44  Crimes  commis  à  Lyon  , 

unique  à  tout  ce  qu'on  lui  demanda.  Elle 
se  bornait  aux  deux  mots  :  Comme  vous. 
Aimes-tu  l'argent  ,  lui  demande  - 1  -  on  ? 
—  Comme  vous.  As-tu  porté  les  armes 
pendant  le  siège  ?  ~-  Comme  vous.  Es-tu 
patriote  ?  -—  Comme  vous.  Il  fut  acquitté. 

Une  jeune  fille  ,  au  milieu  des  transports 
du  désespoir ,  entre  dans  la  salle ,  et  s'écrie  : 
'Mes  frères  sont  fusillés  ;  vous  venez  de  faire 
périr  mon  père  ;  je  nai  plus  de  farnille  ,  que 
faire  seule  au  monde  ?  Je  m'' y  déteste-^  mettez 
tin  terme  à  mon  malheur  ;  de  grâce  faites-moi 
périr,  ^lle  était  aujc  genoux  des  juges  en 
leuradressant  cette  triste  prière,  Courchand 
et  Fernèx  firent  paraître  quelques  mouve- 
tnens  de  sensibilité.  Relevez-vous  ,  jeune* 
fille  ,  dit  l'un;  en  vain  vous  nous  demander 
la  mort  ;  nous  voudrions  bien  vous  accorder 
votre  demande  ,  mais  nous  fie  lé  pou- 
vons pas. 

Tandis  que  la  mori  était  a  l'ordre  du 
jour  parle  ministère  de  ce  tribunal  de  sang, 
les  accusés  ,  parmi  lesquels  étaient  des 
religieuses  et  des  prêtres  ,  y  paraissaient 
'avec  cette  intrépidité  qui  sait  braver  la 
mort  et  les  hoxxxv^^xxx.  Si  votre  devoir  ,  disait 
un  d'eux,  est  de  nous  condamner  ,  obéissez  a 
votre  loi  \f  obéir  aussi  à  la  mienne';  elle  m' or- 
donne  de  mourir  et  de  pardonner  âmes  ennemis. 

Crois-tu  à  l'enfer  ^  demandaient  les  juges 


sous  les  Proconsuls  conventicnnds.      45 

au  curé  d'Amplepuy  ?  Comment  en  douter , 
dit-il  ,  en  vous  voyant  ?  Un  autre  prêtre 
croit   échapper  au  trépas  par  Tathéisme. 

Crois-tu  en  Dieu ,  lui  deraanda-t-on  ?  T'rès^ 
peu ,  répondit-iL  Meur\  ,  infâme  ,  dit  aussi- 
tôt le  Président,  et  va  le  reconnaître. 

Qjie  penses -tu  de  Jésus  ,  de  manda- t-on  à 
un  autre  ?  11  répond  qu  il  croit  que  sa  mo- 
rale a  mis  les  hommes  dans  Terreur.  Court 
au  supplice.  Scélérat ,  lui  cria-t-on  ;  Jésu§ 
tromper  les  hommes  !  lui  qui  leur  prêcha  f  égalité^ 
et  qui  fut  le  premier  et  le  meilleur  sans-culotte 
de  la  Judée. 

La  piété  filiale  et  Tamitié  fraternelle  s'im- 
mortalisèrent dans  ces  tristes  circonstances 
par  leur  dévouement  héroïque.  Le  citoyen 
Badger  ,  dont  le  frère  malade  des  blessures 
qu'il  avait  reçues  à  Tafiaire  du  sjg  mai , 
jetait  grièvement  dénoncé  ,  fut  arrêté  à  sa 
place  et  conduit  dans  la  prison.  Un  mot 
pouvait  le  rendre  à  la  liberté  ,  à  la  vie.  Il 
se  tut  ,  fut  condamné  ,  et  marcha  gaiement 
au  supplice. 

Les  deux  frères  Bruyset,  imprimeurs- 
libraires  ,  tous  deux  jouissant  d'une  pro- 
bité exemplaire  ,  firent  incarcérés,  comme 
ayant  participé  à  la  défense  de  Lyon.  L'aîné 
5'était  chargé  du  papier  -  monnaie ,  dit 
billet  de  siège  ohsidional.  Sa  signature  était 
même  apposée  au  bas  de  ces  billets.  Malade, 


46  Crimes  commis  à  Lyon  , 

il  fut  mis  dans  une  infirmerie.  Le  frère 
cadet  fut  mis  en  jugement.  On  lui  présente 
lesbilletsetlasignature.il  répondit  que  cette 
signature  était  bien  celle  deBruyset.  Ce  peu 
de  mots  équivoques  suffit  au  tribunal  pour 
éclairer  leur  conscience.  Us  renvoyèrent  à  la 
mort.  Ce  trait  de  générosité  devient  encore 
plus  sublime,si  Ton  considère  quece  Citoyen 
en  se  sacrifiant  pour  son  frère  qu  une  ma- 
ladie avait  fait  transporter  dans  un  hospice  , 
s'arrachait  à  sa  femme  et  ses  enfans  ,  qu'il  a 
laissé  en  mourant  au  soin  de  son  frère. 
Certainement  l'ingratitude  ,  dans  une  pa- 
reille circonstance  ,  serait  un  grand  crime. 
Ce  dernier  trait  eut  lieu  à  J'occasion  de 
révasion  des  prisonniers  de  la  cave  dite  la 
mauvaise  Cave  ;  c'était  là  que  Tpn  déposait 
les  condamnés  avant  que  de  les  conduire 
au  supplice.  Ceux  qui  étaient  sortis  du  tri- 
1t>uiial  la  veille  de  la  décade  ,  attendaient 
jusqu'au  surlendemain  pour  subir  leur 
mort;  car ,  les  décades  ,  les  tribunaux  et  les 
exécutions  étaient  suspendus  ,  et  les  auto- 
rités existantes  donnaient  des  fêtes  au 
peuple  ,  qu'ils  préparaient  par  leurs  dis- 
cours féroces  aux  scènes  sanglantes  qui 
devaient  se  succéder  rapidement  dans  le 
cours  de  la  décade.  A  la  faveur  de  cet  inter- 
valle ,  un  détenu  avait  projette  son  évasion. 
Il  reçoit  par  un  soupirail  tous  les  instru- 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.     47 

tniens  nécessaires  pour  Teffectuer  ;  et  la  nuit 
qui  devait  précéder  leur  supplice  ,  il  fut 
exécuté  au  milieu  des  plus  vives  alarmes 
et  des  obstacles  qui  eussent  été  insurmon- 
tables pour  tout  homme  qui  n'eût  pas 
eu  la  certitude  de  la  mort.  Quinze  échappent. 
Couchoux  fils  vient  briser  les  chaînes  de  son 
père  octogénaire  ,  et  dont  les  jambes  enflées 
et  ulcérées  ne  lui  laissent  pas  la  liberté  de 
jouir  de  cet  avantage  :  u  Fuis  ,  mon  fils  , 
J5  lui  dit-il ,  si  tu  en  as  l'occasion  et  le  tems  ; 
9^  fuis  à  rinstant ,  je  te  l'ordonne  :  pour 
îj  moi ,  je  ne  puis  te  suivre  ,  j'ai  assez  vécu* 
j>  Bientôt  mes  peines  seront  finies  :  la  plus 
M  grande  disparaît,  si  je  te  crois  sauvé.^Son 
fils  insiste  et  l'assure  qu'il  ne  quittera  pas  la 
prison  sans  lui ,  et  que  par  son  refus  il  va 
causer  la  perte  de  l'un  et  de  l'autre.  Enfin , 
le  père  se  décide  ,  il  se  lève  ;  et  appuyé 
sur  son  fils  ,  il  s'avance  vers  l'escalier.  Il  ne 
peut  soulever  ses  jambes  :  alors  le  fils  ,  âgé 
seulement  de  vingt-deux  ans  ,  et  d'une  faible 
complexion  ,  le  prend  sur  ses  épaules ,  et 
gagne  avec  ce  précieux  fardeau  la  barrière. 
La  nuit  acheva  de  couronner  leurs  efforts  ; 
ils  sortent  de  la  ville. 

Cette  mauvaise  cave  ,  continuellement 
habitée  par  le  sombre  désespoir  ,  en  por- 
tait l'empreinte  sur  ses  murailles.  Ici ily  avait 
crayonné:  Dans  cent  trente  minutes  je  nexis'^ 


48  Crimes  commis  à  Lyon  , 

ter  ai  plus  :  f  aurai  vu  la  mort  ;  quelle  soit 
bénie  !  n  est-elle  pas  mère  du  repos  ?  Près  de 
la  porte  on  lisait  ces  mots  :  Jtiges  barbares  , 
vous  vous  êtes  trompés  en  croyant  me  punir  :  la 
Jin  de  mes  jours  est  la  fin  de  mes  maux  ;  vous 
êtes  mes  véritables  amis,  t^lus  loin  ,  la  sombre 
mélancolie  avait  esquissé  ses  sinistres  pen- 
sées sur  l'existence  et  le  néant.  Le  désespoir 
y  laisse  des  traces  encore  plus  funestes.  Un 
citoyen  veut  hâter  le  moment  de  son  sup- 
plice ;  un  verre  de  bouteille  estrinstrument 
dont  il  se  sert  pour  délivrer  son  corps  :  il 
y  fait  plus  de  trente  blessures  pour  s'ouvrir^ 
les  veines.  On  le  trouva ,  le  matin  ,  baigné 
dans  son  sang ,  et  le  tribunal  le  fit  conduire 
sur  un  matelas  ,  sous  lechafaud  de  la 
guillotine. 

Un  des  malheureux  condamnés  ,  nommé 
Grivet ,  fut  oublié  dans  la  cave  ;  il  y  passa 
quatre  jours ,  vivant  des  restes  qu'avaient 
laissé  ses  infortunés  compagnons.  Au  bout 
de  ce  terme  ,  le  geôlier  amène  une  nouvelle 
victime  ,  et  recule  d'effroi  en  appercevant 
Grivet.  Il  appelle  aussitôt  la  sentinelle  ,  et 
crie  à  Finconnu  :  D'où  viens-tu  ?  —  Je  ne 
suis  pas  sorti  d'ici ,  répond  Grivet  ;  on  a  sans 
doute  couduit  à  la  mort  tous  mes  compagnons 
d'infortune  :  on  m'a  oublié ,  c'est  un  malheur , 
car  je  n  existerais  plus  ;  mais  il  va  être  réparé  , 
puisque  je  te  vois.  Le  geôlier  alla  raconter  ce 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.  49 
laît  au  tribunal,  qui  fit  monter  Grivet ,  et 
Imtcrrogea.  Il  parla  du  profond  sommeil 
où  il  était  plongé  lors  du  départ  des  autres 
condamnés \  et  le  tribunal ,  par  lefFet d'une 
contradiction  sans  exemple ,  jugea  à  propos 
de  le  mettre  en  liberté. 

Un  stratagème  bien  conçu  a  souvent 
sauvé  son  inventeur.  Le  sculpteur  Chinard  » 
proscrit  pour  avoir  servi  pendant  le  siège  ^ 
de  concert  avec  quelques  amis,  se  faif 
arrêter  au  district ,  s'étant  saisi  de  quelques 
papiers  inutiles.  On  le  livre  à  la  police  cor* 
^rcctionnçUe  ,  comme  filou.  Ce  tribunal  le 
condamna  à  un  an  de  détention  :  c'était 
son  principal  voeu,  à  laide  d'un  faux  nom 
qu'il  avait  pris  lors  de  l'instruction  de  cette 
afiaire  ,  et  d'un  énorme  bonnet  qui  lui  cou- 
vrait la  moitié  du  visage.  Il  resta  ignoré  dans 
cet  asyle  pendant  tout  le  tems  que  durèrent 
les  massacres, 

La  guillotine  n  avait  pas  rempli  le  vœu 
des  bourreaux  ;  la  fusillade  et  le  canon 
chargé  à  mitraille  furent  choisis  de  préfé- 
rence ,  pour  vomir  la  mort  à  grands  flots. 
Les  Représentans  du  peuple  craignaient 
d'ailleurs  que  la  grande  quantité  de  sang 
qui  inondait  la  place  des  Terreaux ,  ne  finit 
par  irriter  le  peuple.  On  avait  cependant 
creusé  sur  la  place  différens  fossés  pour  y 
recueillir    le   sang.    On    transporta    donc 

Tome  VI.  •    D 


5o        ;u  Crimes  commis  à  Lyon  , 

jailleursi  le  théâtre  du  carnage  ;  et  pour 
métayer  cette  nouvelle  forme  de  donner  la 
mort,  les  Représentans  dirent  au  peuple 
que  sa  vengeance  n'était  pas  assez  promptç  , 
que  ses  ennemis  devaient  périr  en  masse  ^ 
et  que  la  foudre  seule^  pouvait  hâter  la  des- 
truction de  ses  ennemis. 

Ronsin  ,  général  de  Tarmée  révolution^ 
naire  ,  écrivit  à  la  société  des  Cordeliers 
•de  Paris  les  moyens  prompts  qu'on  allait 
employer  pour  se  débarrasser  en  masse  des 
contre-révolutionnaires  ,  et  que  le  Rhône  ^ 
teint  de  leur  sang  ,  irait  annoncer  aux' 
fédéralistes  du  Midi  leur  destruction, 

Soixanteronze  individus  ,  choisis  dans 
toutes  les  classes  et  dans  tous  les  âges  , 
attachés  deux  à  deux  ,  traversent  la  ville  , 
au  son  d'urie.musique  guerrière  ,  et  arrivent 
aux  Brotteaux,  Une  allée  J3ordée  d'arbres:^ 
et  sur  les  côtés  de  laquelle  on  avait  creu^^ 
des  fossés .  parallèles  ,  pour  recevoir  les 
corps  des  morts  et  des  mourans  ,  des  sol-^ 
dats  bordaient  de  chaque  côté  la  ligne  ,  et 
menaçaient  du  sabre  et  du  fusil  ceux  qui 
auraieht  tenté  de  s'écarrter  de  la  direction 
horisontalê  que  le  boulet  devait  parcourir 
pour  terminer  leurs  jours.  Garottés  deux  à 
deux  ,  et  à  la  suite  les  uns  des  autres  ,  lesi 
condamnés  voient  d'un  coup-d'œil  la  tombe 
qui  les  attend,et  les  farouches  Exécuteurs  qui 


sous  les  Proconsuls  conventionnds.     5i 

s'apprêtent  à  les  y  précipiter  ;  ils  entendent 
la  manœuvre  du  canoii.  Quel  raffinement 
de  cruauté  !  on  étend  leur  supplice  au-delà 
même  de  la  mort.  Au  milieu  de  ces  terribles 
apprêts  ,  les  jeunes  gens  offrent  de  concert 
et  spontanément  leurs  derniers  hommages 
à  leur  patrie  ;  sans  murmure  et  sans  fai- 
blesse ,  tous  font  entendre  ce  généreux 
refrain  : 

Mourir  pour  sa  patrie  , 

Est  le  sort  le  plus  beau,  le  plus  digne  d'envie. 

Ils  allaient  le  recommencer  ;  Thorriblc 
décharge  vint  les  interrompre.  Les  bouches 

d'airain  ont  vomi  la  mort Mais  que  dis- 

je  !  plût  au  ciel  qu  ils  Feussent  vomie  !  Le 
canon  et  la  mitraille  dispersent  dans  les 
afrs  des  membres  fracassés  {  Voyez  la  lettre 
E  de  la  gravure  du  tome  I ,  page  i  du  discours 
préliminaire  )  ,  et  laissent  sur  le  champ  du 
supplice  un  tronc  douloureux.  On  entend 
les  cris  plaintifs  et  les  gémissemens  pro- 
longés de  ces  infortunées  victimes.  Elles 
coujurent  leurs  bourreaux  de  terminer  leurs 
souffrances.  Elles  invoquent  une  seconde 
décharge  plus  sûre  et  plus  meurtrière.  Mais 
les  malheureux  n'ont  pas  le  choix  du  sup- 
plice. On  leur  envie  jusqu'à  la  consolation 
d'une  mort  prompte  et  dégagée  des  hor- 
reurs qui  l'environnent.  Leurs  cohvulsions 

D  2 


52  Grimes  commis  à  Lyon  , 

ne  sont  pas  à  leur  terme.  Ces  farouches 
soldats  ,  que  ces  juges-boufreaux  façonnent 
à  toutes  les  exécutions  militaires ,  couvrent , 
par  le  feu  de  leur  armes  dirigées  sur  ces 
victimes  ,  les  plaintes  et  les  gémissemens 
qui  s'exhalent  dans  les  airs.  Ensuite  le  sabre 
à  la  main  et  la  baïonnette  en  avant ,  îk 
s'avancent  et  plongent  le  fer  dans  le  sein , 
dans  toutes  les  parties  du  corps  de  leurs 
victimes  ;  le  sang  jaillit  à  grand  flots  ,  et  les 
cadavres  déchirés  par  la  mitraille  ou  hachés 
par  Tacier  assassin  ,  s'entassent  pêle-mêle  , 
fet  vont  ensanglanter  le  Rhône. 

C'était  de  la  prison  de  Roanne  qu'étaient 
sortis  ces  soixante-neuf  jeunes  gens.  Deux 
cent  neuf  autres  malheureux  ,  extraits  du 
même  endroit ,  et  jugés  en  masse  le  même 
jour  ,  sont  conduits  aux  Brotteaux ,  au 
milieu  de  nombreux  bataillons  de  gardes 
et  de  gendarmes.  A  chaque  arbre  d'une 
allée  de  saules  ,  était  fixée  une  longue  corde 
à  laquelle  on  attache  chaque  condamne 
avec  celle  qui  lui  comprimait  les  mains 
derrière  le  dos  (  Voyez  la  lettre  D  de  ta'^ra- 
vure  du  tome  I ,  page  i  du  discours  prélimi- 
naire).  A  mesure  qu'on  lie  ces  victimes  aux 
arbres  ,  un  piquet ,  plus  ou  moins  nom- 
breux ,  placé  à  quatre  pas  en  avant ,  attend 
l'ordre  de  les  fusiller.  Corfibien  furent 
longues  et  douloureuses  leurs  angoisses  , 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.       53 

avant  que  le  dernier  de  ces.  malheureux  eût 
été  fixé  à  Fafbre  dont  il  ne  devait  plus  être 
séparé  que  mort  ou  mourant. 

Le  signal  se  donne ,  et  le  plomb  atteint 
les  victimes.  Mais  cette  décharge  opérée 
par  des  hommes  peu  experts  dans  le  ma- 
niement des  armes  ,  ne  fit  que  prolonger 
leur  supplice.  On  voit  la  plupart  de  ces 
malheureux  tomber,  se  relever,  et  le  visage 
♦  couvert  de  boue  ,  de  sang  et  de  meurtris- 
sures ,  tous  font  entendre  cette  afFreuse 
prière  :  Achevez-moi ....  mes  amis ,  ne  m'^- 
pargnez  pas.  Par  leurs  cris ,  ils  cherchent  à 
fixer  Tattention  du  soldat ,  et  soulèvent  une 
tête  languissante.  Ils  lui  montrent  le  sein 
sur  lequel  il  doit  diriger  son  feu. 

Le  supplice  de  ces  deux  cent  neuf  indi-  ^ 
vidus  se  prolongea  à  raison  du  nombre  des 
victimes.  L'ex-constituant  Merle  ,  maire  dç 
Mâcon  ,  avait  eu  le  poignet  emporté  par 
une  balle.  Ce  coup  avait  brisé  ses  liens.  Il 
fend  aussitôt  la  presse  qui  s'ouvre  pour  lui 
livrer  le  passage.  Les  volontaires  et  les 
dragons  qui  protégeaient  ces  tristes  expé- 
ditions ,  Tavaieiit  vu  fuir  sans  se  mettre  en 
peine  de  le  poursuivre.  Mais  quelques  ca- 
valiers révolutionnaires  se  détachent ,  latr 
teignent  et  l'achèvent  à  coups   de  sabre. 

Cette  exécution  finie  ,  on  dépouilla  les 
corps  et  on  les  jeta  daris   de    profondes 

D  3 


54  Crimes  commis  à  Lyon  ,' 

fosses  où  on  les  couvrit  de  chaux.  On  voulut 
les  compter  ;  il  s'en  trouva  deux  cent  dix 
au  lieu  de  deux  cent  neuf.  Une  des  victimes 
était  parvenue  à  s'évader  ,  et  Ton  ne  savait 
à  •  quoi  attribuer  cette  augmentation  de 
cadavres  ,  lorqu'on  se  rappela  que ,  tandis 
qu'on  garrotait  les  détenus  dans  la  cour  des 
prisons  de  Roanne  ,  deux  commissionnaires 
avaient  été  saisis;  en  vain  ils  avaient  élevé 
la  voix  ,  et  offraient  de  prouver  qu'ils  ne 
se  trouvaient  dans  l'intérieur  de  cette  prison 
qu'à  cause  des  occupations  mercenaires 
qu'ils  remplissaient  journellement  à  l'égard 
des  prisonniers.  On  fut  sourd  à  leurs  récla- 
mations. Ils  furent  liés  et  poussés  jusqu'au 
lieu  de  l'exécution  à  coups  de  bourrades; 
ils  y  avaient  trouvé  la  mort. 

Le  choix  des  victimes  fait  avec  tant  de 
négligence ,  causa  la  mort  de  plus  d'un  in- 
dividu que  l'on  enleva  souvent  sans  prendre 
aucune  information  sur  l'existencç  d'un 
jugement.  Le  citoyen  la  Révolière  fut  ar- 
raché de  son  cachot  ,  pour  être  conduit  à 
la  fusillade.  Il  a  beau  dire  qu'on  se  méprend, 
qu'il  n'a  pas  été  interrogé  ,  qu'il  n'a  même 
encore  paru  devant  aucuns  juges;  on  l'en- 
traîne au  supplice. 

Il  y  avait  deux  caves  distinguées  par  le 
nom  de  bo7me  et  mauvaise  caves ,  où  l'on 
déposait  les  détenus.  Un  signe  démonstratif 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.     55' 

du  Président  du  tribunal  indiquait  au 
geôlier  dans  laquelle  des  deux  il  devait 
conduire  un  accusé.  Il  est  cependant  arrivé 
qu!une  méprise  de  la  part  de  ces  guichetiers , 
ou  leur  défaut  d'intelligence  précipitèrent 
plus  d'une  fois,  indifféremment,  dans  la 
mauvaise  cave  ,  ceux  que  le  tribunal  avait 
désignés  pour  la  bonne.  Cependant ,  ceux 
qui  avaient  le  bonheur  de  s  y  voir  conduits 
n'étaient  pas  encore  à  couverts  de  la  rage 
de  leurs  juges.  Toutes  les  décades  un  gui- 
chetier venait  retirer  un  ou  deux  d'entre 
eux ,  pour  les  fusillades.  Ainsi  le  tribunal 
mêlait  à  Tespérànce  de  la  liberté  les  fu- 
nestes appréhensions  du  trépas. 

Un  citoyen  détenu  dans  la  bonne  cave , 
entend  un  jour  retentir  son  nom  sous  ces 
sinistres  voûtes.  Il  avance  ;  ses  malheureux 
compagnons  lui  donnent  le  dernier  témoi- 
gnage de  leur  sensil3ilité  ,  en  lui  serrant  la 
main.  Ce  citoyen  ,  nommé  Laurenson\ 
Officier  municipal  de  Momand  ,  espérait 
sa  prochaine  liberté.  Sa  Commune  lui  avait 
fait  passer  une  réclamation  énergique  ;  mais 
voyant  ses  dénonciateurs  eux-mêmes  se 
rétracter  des  accusations  portées  contre  lui, 
et  comptant  déjà  sur  la  liberté  qu  on  lui 
promettait ,  il  avait  mis  dans  sa  poche  la 
réclamation  ,  comme  pièce  inutile.  Ce- 
pendant on  Tentraîne  ;  on  l'attache  aux 

D  4 


56  Crimes  commis  à  Lyon  , 

détenus  dévoués  à  la  guillotine.  Son  esprit 
se  trouble  ;  il  prend  pour  un  rêve  affreux 
ce  passage  subit.de  la  vie  au  supplicel  Sa 
réclamation  tombe  à  ses  pieds  ;  je  n'ai  pu  , 
dit-il  à  un  gendarme  qui  la  ramasse  ,  pré^ 
senter  ce  mémoire  aux  juges  ;  je  rpe  périrais 
pas  s'iU  l'avaient  lu.  L'oflScieux  Gendarme 
Éend  la  presse ,  et  se  transporte ,  sans  perdre 
de  tems  ,  au  tribunal.  Sur  le  vu  de  cette 
pièce  ,  les  Juges  ordonnent  la  réintégration 
du  Condamné  dans  les  prisons  ,  s'il  en  est 
encore  tems.  Le  Gendarme  court  à  la  place 
des  exécutions.  Une  minute  plus  tard  c'en 
était  fait.  Laurenson  -,  que  le  hasard  avait 
placé  le  dernier  des  quarante  victimes ,  était 
déjà  attaché  à  la  planche  fatale.  Le  Gen- 
darme ,  tout  essoufflé ,  crie  d'arrêter ,  montre 
son  ordre  ,  et  le  malheureux  est  détaché. 
Sans  connaissance  et  sans  mouvement ,  on 
le  porte  dans  la  salle  de  Fhôtel  commun* 
Pour  le  rappeler  à  la  vie  ,  on  lui  ouvre 
trois  fois  la  veine.  Enfin  il  donne  des  signes 
d'existence  ;  mais  sa  raison  est  entièrement 
aliénée.  66  Ma  tête  n  est-elle  pas  à  terre?  de- 
mande-t-il  dans  l'excès  de  son  égarement  ; 
ah  !  quon  me-  la  rende ,  quon  me  la  rende.... 
Ne  voyez-vous  pas  xe  sang  qui  fume?  Il  couU 
près  de  moi  et  sur  mes  souliers....  Voyez  ce 
gouffre  où  sont  entassés  tous  ces  corps....  Retenez- 
moi  ,  je  vais  y  tomber.  Ce  spectacle  remplit 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.       5^ 

dliorreur  et  de  pitié  tous  les  assistans. 
Laurenson  fut  conduit  dans  un  hospice  de 
santé.  ' 

Une  femme ,  âgée  de  quatre-vingts  ans  , 
nommée  Martinon  ,  malade  au  point  de  ne 
pouvoir  marcher  pour  aller  subir  son  ju- 
gement ,  fut  jetée  sur  une  charrette  ;  mais 
dans  la  crainte  qu  elle  ne  vînt  à  rouler  à 
terre  ,  on  Tétendit  tout  de  son  long ,  et  au 
moyen  de  cordes,  on  la  billonna  avec  force 
comme  un  balot.  En  vain  elle  fait  entendre 
des  cris  plaintifs  ;  plus  sa  douleur  éclate , 
plus  les  barbares  resserrent  ses  liens.  Enfin , 
après  quelques  instans  de  marche ,  la  cha- 
rette  éprouve  une  secousse.  Le  ventre  de 
l'octogénaire  éclate  ,  ses  intestins  sortent , 
elle  expire. 

Au  milieu  du  sang  innocent  qui  fumait 
de  toutes  parts  ,  la  Commission  militaire 
voulut  pafaître  n'écouter  que  la  justice. 
Par  ses  ordres  ,  on  arrêtait  une  infinité 
d'individus  de'  tout  âge  et  de  tout  sexe  y 
absolument  étrangers  aux  évènemens  de 
Lyon  ;  et ,  les  jours  destinés  aux  fêtes  ,  ils 
étaient  pompeusement  conduits  au  milieu 
des  cérémonies  ,  et  on  proclamait  solen- 
nellement leur  liberté  aux  acclamations  du 
peuple  ,  et  au  bruit  de  lartillerie. 

Tandis  que  par  cette  artificieuse  politique 
elle  cherchait  à  éblouir  le  peuple^  beaucoup 


58  Crimes  cùmmis  à  Lyon  i 

de  femmes  honnêtes  se  voyaient  forcées  de^ 
feîre  le  sacrifice  de  leur  honncwr  entre 
les  bras  de  ce  qu  il  y  avait  de  plus  hideux 
parmi  les  buveurs  de  sang ,  pour  soustraire 
à  leurs  poignards  ce  qu  elles  ont  de  plus 
cher.  Quelques-uns  d'entr  eiix  ,  affichant 
une  sévérité  de  mœurs  républicaines ,  fe- 
saient  un  crime  à  ceux  de  leurs  collègues  qui 
se  liaient  avec  des  femmes  nobles  ;  mais 
îk  se  disculpaient  de  ces  liaisons  antî- 
civiques ,  en  disant  qu'ils  voulaient  par  là 
ramener  ces  femmes  nobles^  dans  le  giron 
de  la  République  • 

Les  Représentans ,  de  leur  côté  ,  cher- 
chèrent à  se  dél^arrasser  des  importunités 
réitérées  que  tous  les  sentimens  humains 
attachaient  à  leurs  pas. 

Trois  femmes  ,  dont  deux  réclamaient 
leurs  maris  ,  dont  l'autre  aussi  jeune  qu'ai- 
mable implorait  en  faveur  de  son  frère  , 
furent  arrêtées  dans  l'appartement  même 
des  Représentans,  qui  les  condamnèrent  à 
être  exposées  pendant  deux  heures  sur 
l'échafaud,  comme  importqiles^et  cherchant 
à  les  apitoyer  sur  le  sort  des  détenus.  (  Voyez 
la  lettre  Q^de  la  gravure  en  tête  du  Tom.  i  ^pag.  i 
du  discours  préliminaire  )  .hdiieune  fille  toucha 
vivement  un  officier  qui  était  de  garde  chez: 
les  Représentans.  Cet  outrage  fait  à  la  vertu 
et  à  l'innocence ,  la  lui  fit  accueillir  à  sa 


sous  les  Proconsuls,  conventionnels.     Sg 

descente  de  Téchafaud.  Il  s'étudia  à  verser 
la  consolation  dans  son  ame  ,  en  Tassurant 
qu  il  n'approuvait  point  la  conduite  infâme 
des  Représcntans  ;  et  pour  lui  en  donner 
une  preuve  incontestable  ,  il  lui  demanda 
sa    main  ,   et  Fobtint. 

Cependant  Lapdrte  ,  Tun  des  députés  , 
accorda  la  liberté  d  un  citoyen  ,  à  la  sol- 
licitation de  son  épouse ,  femme  d'une  grande 
beauté.  Soit  reconnaissance  ,  soit  que  ce 
fut  un  prix  exigé  d'elle  ,  en  échange  de  la 
faveur  qu'elle  venait  d'obtenir ,  elle  divorça 
et  partagea  sa  couche  avec  ce  Représentant, 
après  l'avoir  épousé. 

Sans  doute  on  ne  pensera  pas  que  les 
vertus  républicaines  ,  portées  mêmes  au 
plus  haut  degré  d'austérité  ,  aient  jamais 
présidé  à  la  conduite  de  ces  odieux  Mi- 
nistres de  la  Convention  et  de  la  mort.  Les 
preuves  d'itamoralité  qu'ils  ont  fait  éclater 
pendant  le  cours  de  leur  mission  ;  leur 
faste  asiatique  dans  une  ville  dont  ils  di- 
rigeaient la  démolition, contrastaient  autant 
avec  les  principes  de  sans-culotisme  qu'ils 
prêchaient  au  peuple  ,  que  leurs  mitrail- 
lades ,  sans  cesse  renouvelées ,  avec  ceux 
(T humanité  ,  de  justice  ,  dont  ils  osaient  aussi 
proférer  quelquefois,  ou  plutôt  blasphémer 
les  noms.  Café  ,  sucre  ,  vins  ,  liqueurs  , 
mets  exquis  ,   tout  était  mis  en  réquisition 


6o  Crimes  commis  à  Lyon ,'  • 

pour  leur  gourmandise  ;  ce  que  les  ma- 
gasins conservaient  encore  de  plus  recherché 
en  bas  de  soie  ,  en  étoffes  de  toutes  les 
espèces  ,  les  ameublemens  les  plus  riches  , 
les  hôtels  les  plus  fastueux  leur  appar- 
partenaient  du  droit  de  préhension  ;  et  il 
n'en  coûtait  à  leur  mollesse  et  à  leur  cupidité 
toujours  insatiables  que  de  désirer*  Un  ordre 
à  la  Commission  suffisait^  et  par  sa  comjplai- 
sance  sans  bornes, elle  s'empressait  d  acheter 
rimpunité  de  ses  brigandages  personnels  et 
de  son  luxe  effréné,  La  Commission  tem- 
poraire s'était  aussi  emparé  pour  se  loger, 
des  plus  belles  maisons  de  la  rue  Sainte-? 
Catherine  ;  et ,  comme  si  elle  eut  voulu 
immortaliser  son  affreuse  *  résidence  dans 
cette  ville  ,  elle  changea  le  nom  de  la 
rue  quïls  habitaient ,  en  celui  de  commis^ 
sion  temporaire  :  par  la  position  de  cette 
rue  ,  des  bâtimens  trés-élevés  masquaient 
à  ces  bourreaux  la  place  des  Terreaux  où 
l'échafaud  était  dressé.  Ils  ordonnèrent 
la  démolition  de  ces  maisons  ,  toutes  à 
cinq  étages  et  bâties  en  pierre  de  taille  , 
et  menacèrent  de  la  peine  de  mort ,  si  sous 
huit  jours  ,  elles  n'étaient  pas  abattues* 
(  Voyez  les  lettres  S  et  T  de  la  gravure  'du  tome  I 
page  première  du  discours  préliminaire.  )  Plus  de 
deux  cents  locataires  n'eurent  que  quelques 
heures  pour  déménager.  Il  fallait  voir  ce 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.      6i 

tableau.  Des  femmes  ,  des  enfans  avec  des 
paquets  sur  le  dos.  D'autres  traînant  des 
fardeaux  ;  les  petits  enfans  attachés  aux 
jupons  de  leurs  mères. 

L'empire  qu  ils  exerçaient  sur  les  habitans 
était  tel,  que  nul  citoyen  ne  pouvait  extraire 
aucun  objet  de  son  domicile.  C'était  avec  des 
peines  infinies  qu'on  parvenait  à  livrer  son 
linge  à  une  blanchisseuse.  Il  fallait  un 
laissez-passer  de  la  Commission  qui  vérifiait 
d'abord  les  paquets  ;  et  si  les  effets  étaient 
de  quelque  valeur ,  ou  le  linge  un  peu  fin  , 
il  se  les  appropriaient ,  en  disant  que  les 
aristocrates  seuls  pouvaient  s'en  permettre 
l'usage  ;  que  c'était  au-dessus  des  besoins 
du  régime  de  l'égalité,  et  qu'ils  seraient  plus 
utilement  employés  en  les  destinant  pour 
les  défenseurs  de  la  République. 

Cette  Commission  présidait  et  ordonnait 
les  démolitions.  Un  arrêté  qu'elle  fit  afficher 
indiqua  les  quartiers  qui  devaient  dispa- 
raître sous  le  marteau  destructeur.  Cette 
opération  devait  être  conduite  avec  la  plus 
grande  promptitude.  Douze  cents  maisons 
devaient  être  renversées  à  thaque  moisv 
Leur  silence  sur  le  tems  que  devait  durer 
ce  travail ,  inquiétait  tous  les  citoyens  qui 
craignaient  qu'à  la  longue  aucunes  maisons 
ne  fussent  épargnées. 

Lorsque  cet  arrêté  eut  été  public  à  Paris  , 


62  Crimes  commis  à  Lyon  , 

des  citoyens  ,  qui  se  trouvaient  au  parquet 
du  Procureur  de  la  Commune  { Chaumette  ) 
pour  quelques  intérêts  particuliers  ,  par- 
lèrent sur  cet  arrêté  ,  qu  ils  dépeignirent 
comme  très-impolitique.  Ruiner  cette  ville , 
la  plus  forte  .et  la  plus  riche  de  la  France 
par  ses  fabriques ,  c'était  certainement  porter 
une  secousse  très-violente  au  commerce  ei]i 
général.  Les  ennemis  extérieurs,  et  sur-tout 
l'Angleterre  ,  obtenaient  par  cette  mesure 
un  triomphe  assuré  sur  l'industrie  française. 
Hébert ,  présent  à  cette  discussion  ,  fut 
d'un  avis  différent.  Il  prétendit  d'abord  que 
les  arts  ep  le  commerce  étaient  les  ennemis 
nés  de  la  liberté.  Que  d'ailleurs  ,  Paris 
devant  être  le  point  central  de  toute  l'auto- 
rité publiqjue  ,  il  ne  devait  pas  exister  une 
Commune  assez  puissante  pour  la  rivaliser. 
Cette  opinion  ,  émanée  de  T Auteur  d'une 
Feuille  ordurière  ,  portait  le  caractère  dé 
«on  ignorance  et  de  cette  provocation  au 
meurtre  et  à  la  destruction  ,  dont  il  avait 
toujours  été  le  fidèle  partisan.  Le  citoyen 
Real ,  son  substitut ,  était  bien  loin  de  par- 
tager son  opinion. 

Les  Représentans  ne  crurent  pas  devoir 
s'opposer  à  cet  arrêté.  Ils  laissèrent  à  la 
Commission  toute  la  latitude  pour,  qu'elle 
lé  fit  exécuter.  .Ils  indiquèrent  seulement 
les  qusfftiçrs  dont  les  bâtimens  devaient 


/ 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.      63 

ra^és.  Alors  les  maisons  qui  formaient 
tlign^  depuis  le  pont  du  Change  jusqu))r 
re-Encisc ,  disparurent.  Les  Représen- 
X%  ordonnèrent  ensuite  la  démolition  des 
téux  superbes  façades  de  la  place  de  Belle- 
^IW^iofin^  disaient-ils,  d'humilier  for gneÛ 
iyoiinais.  On  ne  donna  que  deux  heures 
IK:  habîtans  pour  déménager.  Qu'on  se 
plus  de  mille  locataires  obligés  de 
inager  en  deux  heures  !  Des  femmes 
les,  des  femmes  en  couche,  des  enfans, 
Vieillards  portant  un  paquet  ou  le  traî- 
t.  (  Voyez  la  lettre  S  de  la  gravure  ,  ea 
t,du .  tome  i ,  page  i  du  discours  prélimi^ 
miatrc/].  Les  ouvriers  arrêtés  pour  cette  ex- 
p44î^on  se  mirent  sur-le-champ  à  Touvrage. 
Coutbon ,  qui  s'était  fait  porter  sur  la  place  ^ 
accompagné  de  Châteauneuf  •  Randon  , 
donna  le  premier  coup  de  marteau  ,  en 
disant  :  Jfe  te  condamne  à  être  démolie  au  nom 
4e  la  loi  (i).  Aussitôt  chacun  se  presse  pour 
sortiises  meubles.  Cependant  les  ouvriers  , 
en  possession  du  faîte  de  ces  maisons ,  en 
rénj^ërsent  les  débris  ,  au  milieu  des  effets 

•  •  («)  Sous  la  monarchie  en  France ,  les  Rois ,  pendant 
jc^oo.aûu  ^posaient les  premières  pierres  pour  la  cens- 
tmction  des  édifices  publics  ;  et  la  première  année  du 
.  ïègike  des  Républicains  àt^  la  Montagne  de  laConven» 
•.4ui0n,  des  Législateurs  donnent  le  premier  coup  d« 
flôfarcèau  pour  les  démalir  :  ce  rapprochement  est  né- 


64  Crimes  commis  à  Lyon  , 

que  leurs  habitans  en  ont  déjà  extraits  ; 
cette  confusion  ne  pouvait  s'éviter  dans 
1  instant  où  Ton  donnait  si  peu  de  tems 
aux  uns  ,  et  où  les  ordres  étaient  si  précis 
pour  les  autres. 

Le  peuplé  ,  dont  les  anciens  travaux 
étaient  anéantis  ,  embrassait  avec  plaisir  ce 
genre  d'occupation  ;  il  y  applaudissait  avec 
d'autant  plus  de  zèle ,  qu'il  en  retirait  un 
grand  avantage.  Quarante  mille  âmes  des 
deux  sexes  furent  sans  cesse  occupées  à  ces 
tlémolitions.  hent  grand  nombre  effraya 
les  Proconsuls  ,  au  point  qu'ignorant  les 
moyens  de  pourvoir  à  leur  nourriture  ,  on 
leur  promit  les  dépouilles  des  riches.  Ce 
nouveau  gouvernement,  avare  de  dépenses 
pour  les  établissemens  publics  les  plus  essen- 
tiels ,  ne  rougit  pas  de  dépenser  cinquante 
millions  pour  la  démolition  de  cette  ville. 

En  promettant  au  peuple  de  Lyon  la 
dépouille  des  riches  ,  on  se  modelait  sur 
tout  ce  qui  s'était  passé  dans  les  grandes 
cités.  La  Montagiïe  d'ailleurs  comptait  si 
peu  de  partisans  ,  qu'elle  n'sbvait  d'autre 
ressource  que  de  démoraliser  le  peuple  ,  et 
de  le  porter  à  toutes  sortes  d'excès  en  lui 
prodiguant  ses  assignats.  ^        ,. 

Tous  les  Comités  révolutionnaii  de 
Lyon  étaient  composés  de  brig^ijcjs  et 
d'hommes  ineptes»    Leur  conduite  -a  été 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.      65 

Teffet  de  rimpulsion  qu  ils  ont  re^ue  de  la 
Convention  ,  des  Proconsuls  et  de  la 
Commission  temporaire.  Si  ces  itiistitutioAs 
avaient  existé  deux  ans  de  plus ,  elles  au^ 
raient  bouleversé  l'Europe  *  ■    ■     '  . 

.  Les  sans-culottes  en  place  quittèrent  de 
leur  côté  leurs  asylcs  modestes  ,  pour  venir 
habiter  de  superbes  hôtels  ;  ils  étaient  »tout 
étonnés  de  se  trouver  dans  des  appartemens 
somptueux  ,  décorés  de  glaces  et  enrichis 
par  la. peinture  et  la  sculpture,  ' 

Quelques  sans  -  culottes  de  bonne-foî 
convenaient  entre  eux  qu'ils  ne  J)Ouvaientr 
pas  toiyours  être  si  bien  logés.  Inquiets  iur 
leur  existence  future  ,  en  voyant  que  là 
mort  avait  moissonné  ceux  qui  les  nourris-- 
saient  par  leur  travail,  ils  gémissaient  en 
secret  siir  leur  aisance  actuelle  et  passagère  f 
d'autres  arrêtaient  de  soumettre  aux  Pro- 
concis  l'inquiétude  qui  les  agitait;  ils  en 
recevaient  q^clqiies  parîsAes  consolantes. 
c«  Soyez  tranquilles ,  leur  disait-on  ,  le  gmi- 
«  vernementiera  travailler  à  son  cottipte  ? 
>»  il  établira  une  caisse  ;  vous  aureiff-  des* 
»5  fondr  d  avance  pojir  vous  fournir  de 
»»  soic-f  vous  fabriquerez  6t  voias  lîvterer 
w  vos  létoflFes  à  un  prix^mod^été.  Continuez 
»i  totrJpnTs  d'habiter  Ire  appartemehs  que 
fi  ^aus  occupez,  n 

Qjidques-uns  de  ces  patriotes  désignés 
tovfit  VI.  K 


66  Crimes  eommis  àLyon  ',     " 

^u6,  le  nom  de  sans-culpttes  ,  et  dont  lei 
sentimçns  probes  difFéraient  entièrement  dé 
1^  conduite  des  révolutionnaires  ,  osèrent 
iémoigner  aux  Représentans  leur  douleur  à 
la  vue  des  excès  qu  on  se  permettait  sous 
leurs  auspices  et  en  leur  nom  ,  et  toute  Tin- 
^igp^tion  qu  ils  vouaient  à  la  Commissk)ri 
tenippraire ,  ainsi:  qu'aux  Comités-  révolu- 
lionnaires  :  ils  furent  traités  de  modérés  et 
incarcérés  ;  maist  le  caractère  atroce  de  ces 
Proconsuls  se  trouve  peint  dans  leur  cor^; 
tespondahce  avec  la  Convention,  ('^Fd^^^z 
'pfig^ 44c  i  iome  premier  des  réjl.prélim.  ) 
7  Lyon  ,  preSqu  entièrement  anéanti  par 
les  Tavages  de  la  bombe  ,  et  comme  en- 
glouti sous  ses  propres  décombres  ;  Lyon  , 
yeuf  de  la  plus  forte  partie  de  son  ancienne 
pQpulation ,  et  réduit ,  par  Tanéantissement 
de  ses  ateliers  et  de  son  industrie,  à  la  misère 
ft  à  tous  les  besoins  ,  Lyon  semblait  pou-=^ 
voir,  prétendre  enfin  à  Tindulgence  de  ses 
bpU;çreaviK  ;  et  quelqùesmns  de  ses  plus- 
infortunés  habitans  vinrent,  au  nom /de: 
4ix  mille  concitoyens  ,  implorer  de  la  Con- 
vention un  regard  de  commisération.  Qui 
le  croirait  ?  trente  mille  Français  mt>issonnés 
par  le  siège  ,  et  3^5pq  (i)  emportési  par  la 

(i)  Plus  de  400  femmes  en  couches  périrent  de 
frayeur,  ou  par  l'effet  de  la  bombe  :  runè  de  ces' 
femmes  étouffa  son  enfaût  ayant  que  de  se  suicider  ; 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.      67 

guillotine  ,     la    mitraille,  et  la  fusillade^ 
n étaient,  pas  assez  encore. pour  ces  avides 
dçvorateurs   de  Fespèce.  humaine.  Revers 
choD.,  CoUpt  et  leurs:  Coopéi:ateurs  4e  des- 
truction accoururenjfà  Paris  combattre  ce 
système   de  clémence  que  commandaient 
enfin  tant  de.  forfaits  ;  Us.  exposèrent  toute 
leur  conduite  avec  Taudaced^un  tigre^^jui 
compte   ses   exploits  par  Iç    nombre    des 
cadavres  qu'il  a  déchirés  ,  et  cette  horrible 
conduite  obtint  de  la  Convention  la  sanç^ 
tion  d  uuDpcret  approbateur.  Les  Député^ 
jde  cette  çitç  ^plaintive  furent  proscrits  ,  et 
n  échappèrent  que  par  la  fuite  ^un;décrel 
d'arrestation  ,  et  par  suite  à  Téchafaud.  ,    .; 
Le  9  thermidor  an  2  (  27  juillet; ijg^^)., 
le  supplice  de  Robespierre  produisit  Ve^et 
(de  la  foudre  SUE  la  totalité  des  citoye^^ 
Dans  le  sein  de  la  Convention  fut  prosçriç 
le  mot;de  terreur.  ^  mot  si  cher  pour  v elle 
pendant  dix-huit  mois.  Tous  les  partisan^ 
du  régime  révolutionnaire  ,.  tous  ceux  flui 
lui  deva^ex^^  Içur  existence  ,  furent  cohster* 
pés,  et  tous  Jes  Comités  révolutionnaires^^ 
les  Tribunaux  et  Comraissipns  miliiairesr.y 

une  autté  jeta  trois  de  ses  enfeiis  dans  le  Rhône  ,  et 
8y  jeta  après  ;  un  vieillard,  à  la  nouvelle  de  li 
jnitraillade  de  sob  fils  ,  &e'.|»en4it  à  une  pputre^i 
une  jeune  fille  de  16  ans  5e,  jeta  par  la  fenêtre  , 
d'un   sixième    étage.  Soixantë-dcax^  iiidividus  pé- 

'^rirent  tu-  travaillant  aux  âérnolmons;     -     - 

£   2 


68  Crimes  'commis  à  Lyon  ^ 

employèrent  leurs  derniers  momens  à  lutter 
cohime  un  assassin  de  grand  ëhemin  ,  lors- 
qu'il voit  la  force  armée  sur  le  point  de 
latteindre,  Lyon  \  plus  que  toute  autre 
ville  ,  avait  des  plaies  à  fermer;  la  presque 
totalité  était  comprimée  depuis  long-tems , 
car  les  instruméns  révolutionnaires  avaient 
frappe  sans  pitié  la  classe  du  peuple  comme 
celle  des  riches. 

Le  Député  Dupuîs  ,  fils  ,  envoyé  peu 
avant  thermidor  à  Lyon  ,  y  fut  à  cette 
époque  remplacé  par  Reverc^hori ,  qui  n'était 
j>lus'  le  Reverchon  de  la  térreut.  Apre*, 
avoir^été' naguère  Fardent  prosélyte  de  cet 
affreux  régime  ,  on  le  vit  alors  faire  dé-^ 
sarra^  les  terroristes;  cinq  furent  arrêtés 
comme  complices  de  Robespierre ,  et  par- 
tirent pour  Paris  eh  posté  dans  deux  ber- 
lines a  six  chevaux.  Ce  voyage  a  coûté 
près  de  dix  mille  livres  éciis  à  la  Répu^ 
plique.  i 

Lafrorte  iavait  également  changé  ,  et  pôuiî' 
faite  oublier  les  àiErocités  commises  sous 
les  auspices  de  la  Convention  et  de  iSesCo-- 
mités  ,  il  rejetta  tout  sui^  les  terroristes, 
Boisset ,  qui  lui  succéda ,  doit  se  reprocher: 
les  égorgemens  ;:cblnmis  dans  les  prisons 
de  Lyon  ;  il  était  présent  au  massacre  des 
prisonniers  de  Roanne,  Les  Assassins  di- 
saient :  ((  Nou^  vei^gêjSfn^  aojSf  ^  pèrç^ ,  nojs 


sous  les  Proconsuls  cmvmtîomiels.       6g 

9%  fcmtnes  ,  nos  enfans  ;  il  répondait  ^  cette 
w  vengeance  est  légitime  ,  mais  qu  elle  se 
»  borne  là,  n 

Le  régime  de  la  terreur  qui  a  couvert 
toute  la  France  de  cadavres ,  semble  avoÎT 
eu  une  nuance  de  férocité  de  plus  dans  tout 
le  Midi ,  et  sur-tout  à  Lyon  ;  c'est  dans  cette 
ville  que  les  scènes  sanglantes  commen-- 
cèrent.  Tous  les  jeunes  gens  qui  avaient 
survécu  à  leurs  pères  ,  leurs^  frères  ,'  leurs 
épouses ,  leurs  amis ,  attendaient  le  moment 
de  se  venger  de  tous  ceux  qui  au  nom  des 
lois  assassines  ,  les  avaient  privés  de  ce 
qu  ils  avaient  de  plus  cher  ;  et  ils  enve- 
loppèrent dans  le  vaste  filet  d'une  proscrip» 
tiori  aveugle,  tous  ceux  qui  avaient  oc- 
cupés des  places  dans  les  Comité  révolu* 
tîonnaires  ,  les  Commissions  populaires  ^ 
et  les  Municipalités  sanguinaires ,  et  c.  L'on 
fit  imprimer  une  liste  m-4^.  de  tous  ceux 
qui  avaient  faits  quelques  dénonciations 
pendant  les  horreurs  de  Lyon  ;  et  eu  face 
du  nom  des  dénonciateurs  ,  on  lisait ,  sur 
un  colonne  parallèle  ,  le  noms  des  pei<r 
sonnes  dénoncées  ,  et  presque  toutes  par 
suite  guillotinées  ou  fusillées.  La  publicité 
de  cette  liste  eut  un  effet  incalculable  ;  elle 
rappella  beaucoup  de  noms  que  Ton  comv 
mençait  à  oublier  ;  et  à  l'aide  de  ce  funeste 
mémorial ,  plusieurs  jeunes  gens  allèrent 


yô         '  Crimes  commis  à  Lyon  ,    '  '  ' 

chez  ceux:  qu'ils  croyaient  devoir  accuser  dtr 
leurs  malheurs  ,  les  fesaient  sortir  devant* 
eux  ,  comme  pour  aller  à  la  Maison  com- 
iïiune  ,  et  les  égorgeaient  ou  les  assom- 
maient par  derrière  5  le 'cadavre  attaché 
aussitôt  à  la  première  voiture  qui  passait , 
était  ainsi  traîné  aux  bords  du  Rhône  ,  où 
ils  le  précipitaient,  (  Voyez  la  lettre  R  de  la 
gravure  au  tome  I.  )  Ceux  qui  se  portèrent 
d'abord  à  ces  excès  ,  se  rappelèrent  de  la 
lettre  de  Ronsin  aux  Cordeliers  de  Paris 
qui  leur  annonçait  que  le  Rhône  irait  por- 
ter dans  la  Méditerranée  l'épouvante  aux 
fédéralistes  ,  avec  les  débris  des  conspi- 
rateurs de  Lyon, 

Les  Citoyens  de  cette  ville  regardaient 
froidement  traîner  les  cadavres  ;  ils  ne 
voyaient  que  la  disparution  d^un  de  leurs 
assassins  ;  plusieurs  d'entre  eux  encoura- 
geaient cette  jeunesse  impétueuse.  Mais, 
hélas  !  faut-il  le  dire  ?  l'homme  se  dégrade 
aux  yeux  de  l'Auteur  de  la  nature  ,  en 
voulant  imiter  les  scélérats  qui  trempent 
leurs  mains  dans  le  sang.  Ajoutons  que 
plusieurs  voleurs  se  mêlèrent  parmi  ces 
prétendus  vengeurs  ,  et  beaucoup  de  mal- 
heureux ne  furent  massacrés  que  pour 
être  plus  aisément  dépouillés. 

Les  tueurs  se  portèrent  chez  le  nommé 
Richard  ,   marchand    de  tableaux  rue  St. 


S0U5  Us 'Proconsuls  conventionnels.      71' 

Dominique';  ne  le  trouvant  pajS  ,  ils  s'em- 
parèrent de  sa  fille  âgée  de  dix-sept  ans  ,  la 
conduisirent  en  prison  où  elle  fut  massacrée. 

La  femme  Tabau  ,  en  Tabsence  de  son 
mari ,  fut  égorgée.  La  femme  Jouve  ,  Ja- 
cobine ,  Tune  des'  furies  de  la  terreur  ,  et 
la  femme  Jacob  ,  éprouvèrent  le  même 
sort.  Ils  se  transportèrent  chez  la  citoyenne 
Roua  ,  marchande  de  modes ,  la  firent  sortir 
dans  la  rue  ,  et  lui  brûlèrent  la  cervelle  à  la 
porte  même  de  sa  boutique.  Roux  ,  c^cier 
municipal  ,  Lafage  ,  Fomtx  ,  Borgeret  et 
Robas ,  furent  aussi  massacrés  dans  diffé- 
rentes   circonstances. 

Beaucoup  de  bons  citoyens  représen- 
tèrent à  plusieurs  de  ces  jeunes  gensThor- 
reur  d'une  pareille  conduite,  u  Vous  ne 
99  vous  rappelez  donc  pas  ,  reprenaient-ils  , 
»j  la  manière  atroce  avec  laquelle  ils  ont 
»j  assassiné  et  mitraillé  nos  frères ,  ils  les 
>j  conduisaient  même  à  la  mort  au  son  de 
99  la  musique.  — Vous  dites  vrai ,  leur  répon-' 
99  dait-on  ;  mais  ceux  sur  lesquels  vous  vous 
Ȕ  vengez  ,  ne  sont  pas  les  plus  coupables.^ 
»j  C'est  la  Convention  nationale  ,  qui  la 
99  première  a  ordonné  l'horrible  boucherie 
99  de  nos  concitoyens.  Mes  avis  ne  doivent;^ 
J5  pas  être  suspects  ,  ajoutait  un  citoyen  avec 
99  V  accent  delà  plus  vive  sensibilité  puisque* 
V  jai  perdu  mon  père  et  deux  frères  , 

E   4'  ' 


7-2-  Crimes  comrfiis  à  Lyon  ,' 

99  puisque  moi-même,  je  ne  dois  mon  salut 
j5  qu  à  la  fuite,  je  ne  voudrais  cependant 
3J  pas  souiller  mes  mains  du  sang  de  mes 
ry  assassins  :  je  me  repose  sur  la  justice  di- 
>)  vine  ,  qui  tôt  ou  tard  fait  tomber  sa 
99  verge  de  fer  sur  les  coupables.  :  A  ces 
>5  mots ,  un  jeune  homme  ,  comme  agité  par 
♦5  ses  remords  ,  s^écrie  :  Ah  !  Si  j'avais  eu  le 
?>  bonheur  de  vous  entendre  plutôt  ,  je 
5»  n'aurais  pas  à  rougir  aujourd'hui  de  bien 
f9  de^  crimes  ;  oui  :  rougir.  A  chaque  expé-» 
99  dition  où  je  me  suis  trouvé ,  j'ai  éprouvé 
M  unfrisonnêment  que  je  ne  puis  exprimer, 
99  je  n'étais  point  né  pour  être  un  assassin  , 
99  pour  m'allier  à  certains  hommes  qui  , 
M  sans  doute  ,  n'agissent  pas  comme  moi 
99  par  désespoir ,  qui  de  sang-froid  passent 
5.5  d'iui  massacre  à  une  orgie  ;  et  qui ,  dit-^ 
r9  on ,  reçoivent  cinq  livres  par  jours.  9$ 
Les  autrçs  gardèrent  un  profond  silence; 
D.ésîgnons  les  vrais  coupables.  Si  Boisser 
et  Reverchon  avaient  parlé  en  particulier 
à  ces  jeunes  gens  ,  dont  plusieurs  ,  il  faut 
l'avouer ,  croyaient  exerder  une  vengeance? 
légitime  ,  nécessaire  ;  s'ils  avaient  tenté  de 
fermer  leur^-  cicatrices  avec  le  calmant  de 
la  morale  V  si ,  sur-tout ,  avec  une  géné- 
reuse franchise  ,  ils  leur  avaient  crié  :  u  Ar- 
5  5  rêtez ,  Malheureux ,  les  hommes  que  vouy 
55  frappez^  ne  sont  pas  les  plus  criminels  ; 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.       73 

w  cfe  sont  nos  lois  qui  armèrent  leurs  mains  ; 
M  ce  sont  nos  fureurs  qui  leur  désignaient 
M  les  victimes-;  c'est  fa  Convention  qui  a 
55  organisé  lafFreux  système  tfextermina- 
jr  tion  ;  ces  hommes  n'ont  été  que  ses  îns- 
>>  trumens aussi  vils  quelle  était  elle-même 
«  exécrable.  15  A  ce  noble  aveu,  garant 
dun  repentir  sincère  ,  et  d'une  prompte 
réparation  de  tous  les  forfaits  révolution- 
naires ,  quel  homme  ,  assez  aveugle  dans  ses 
ressentimens  ,  n'eût  senti  le  besoin  du  par- 
don ,  n'eût  embrassé  avec  délices  la  douce  es- 
pérance ?  Mais  tant  d^  générosité  ne  conve- 
nait guère  à  ces  Tyrans  ,  si  involontai- 
rement détrônés  par  le  9  thermidor  ;  en- 
traînés malgré  eux  par  l'opinion ,  désormais 
leur  reine  et  leur  juge ,  ils  voulurent  trom- 
per sa  justice  ,  (1)  en  lui  livrant  eux-mêmesr 
leurs  propres  agens ,  et  par  ce  sacrifice* 
insuffisant,    ils^  crurent     échapper  à  son 


(1)  Ce  fut  un  spjcctacle  bien  étrange  pour  Tôbser- 
vateur,  que  Teffronterie  avec  laquelle  les  principaux 
Auteurs  du  terrorisme  firent,  après  le  g  thermidor,' 
un  appel  homicide  contre  leurs  propres  agens. 
Fréron  arma  lui-même  contre  eux  la  jeunesse  pari* 
sienne  ;  Tallien  se  distingua  aussi  dans  cette  réac- 
tion ,  si  inconséquente  avec  leurs  anciens  torts  j 
et  leurs  73  collègues,  qui  avaient  de  longs  rcssen- 
timeas  à  satisfaire  ,  ne  secondèrent  que  trop  active- 
ment ce  nouveau  système  de  terreur  ;  on  attendait 
d'^ux  ,  du  moins  ,  un  peu  plus  de  générosité,  maif 


74  ^Crimes  commis  à  Lyon  , 

impassible  vengeance  qui  déjà  commence 
pour  eux  ,  et  leur  garantit  Téternelle  cxé-- 
cration  de  la  postérité. 

L'un  de  ceux  qui  fesait  le  métier  de  tueur , 
montait  seul  dans  la  maison  de  celui  à  qui 
il  voulait  ôter  la  vie.  Il  le  sommait  de  le 
suivre  ,  et  aussitôt  qu'il  était  dans  la  rue  , 
il  Fassommait.  Pour  l'ordinaire  ,  ils  se 
jetaient  sept  à  huit  sur  les  victimes  ,  et  le 
peuple  traînait  de  sang-froid  ces  cadavres 
dans  le  Rhône  ;  ils  en  étaient  quittes  pour 
dire  c'est  un  Mathevon  :  c'était  le  nom  d'un 
ouvrier  en  soie ,  dont  la  famille  a  long-tems 
existée  au  milieu  de  je  ne  sais  quel  ridicule 
dont  on  la  couvrait ,  au  point  que  ce  nom 
à  jamais  fameux.,  <ivait  fournj  autrefois  le 
sujet  d'une  comédie.  Pour  quoi  faut -il 
qu'il  soit  devenu  le  signal  tragique  des  mas- 
sacres les  plus  iniques  ,  et  toujours  les 
plus  odieux  ,  puisqu'ils  étaient  sans]  l'aveu 
des  lois  ? 

Le  16  floréal,  an  3  (5  mai  lygSj  quelqu'un 
■.  "  ■  I  ■  ■■■ 

ils  n'aspirèrent  à  la  puissance  que  pour  se  venger. 
Mercier,  Tun  d'eux,  disait  :  Je  ne  mourrai  pas  content 
^ue  je  n  aie  plongé  un  poignard  dans  le  cœur  d'un  Mon- 
tagnard. 

Cadroy  ,  dans  une  proclamation  qu'il  fit  le  28 
floréal  an  3  (  i5  mai  lygS  )  ,  eut  soin  de  désigner 
comme  seuls  coupables  de  la  tyrannie  ,  les  terro- 
ristes et  Robespierre  ,  mais  n'eut  garde  de  jeter  le 
moindre  soupçon  sur  la  Convention. 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.     75 

fit  la  motion  au  spectacle  d'aller  tuer  aux 
prisons  les  terroristes  (  i  )  Une  vingtaine 
d'individus,  accompagnés  d'un  détachement 
armé  se  portèrent  aux  maisonsdes  Recluses 
de  St.  Joseph  et  de  Roanne.  (  Voyez  la 
lettre  L  de  la  gravure  du  tome  I.  page  i. 
du  discours  préliminaire)^  Quatre  -  vingt- 
quatorze  détenus,  parmi  lesquels  étaient 
trois  femmes,  furent  massacrés.  Dans  une  de 
ces  prisons  il  y  eut  une  défense  opiniâtre  , 
le  combat  fut  sanglant ,  les  prisonniers 
tuèrent  douze  des  assiégeans  ,  qui  ne  pou- 
vant plus  soutenir  le  combat ,  mirent  le 
feu  à  la  prison.  Et  Ton  vit  alors  une  mal- 
heureuse femme  tenant  son  enfant  dans  ses 
bras  ,  se  précipiter  du  haut  d'une  tour 
dans  les  flammes.  Le  Cousin  du  général 
Bonaparte  fut  égorgé  i5  mois  après  , 
pour  avoir  tenu  un  propos  relativement 


(ï)  A  cette  même  époque  un  nommé  Bonnard^  dé- 
nonciateur connu,  était  au  Tribunal  criminel  pour  y 
subir  son  jugement.  Le  Peuple  s'y  était  porté  en 
foule;  le  Président  vorulut  feire  évacuer  le  parquet. , 
Le  Sergent  de  poste  commanda  de  porter  les  armes  : 
au  milieu  du  tumulte  le  peuple  crut  qu  on  le» 
fesait  charger.  Quelques  soldats  même  ,  par  un  mal- 
entendu,  à  ce  quon  prétend,  les  chargèrent.  Le 
peuple  se  porte  aussitôt  à  la  prison  voisine  du  tri- 
bunal ;  la  garnison  se  met  sous  les  armes  ,  mais 
il  n''ëtait  plus  tems  «  soixante-dix  victimes  avaient 
^té   immolées. 


76  Crimes  commis  à  Lyon  , 

aux  assassinats  qui  se  commentaient  à  Lyon* 
Le  Bureau  central  de  cette  ville  fit  arrêter  ^ 
douze  à  quinze  individus  prévenus  d  assas-* 
sinats  :  traduits  au  tribunal  de  Roanne  , 
ils  furent  acquittés  ;  ils  revinrent  à  Lyon  , 
et  des  femmes  sortirent  au*devant  deux 
avec  des  fleurs  ,  ils  allèrent  au  spectacle 
où  ils  furent  couronnés. 

Oh!....  humanité  ,  pourquoi  n'exerce-tu 
pas  ta  puissance  consolatrice  sur  les  âmes 
foibles  ou  méchantes  !  Pourquoi  faut  -  il 
que  les  hommes  se  dévorent  avec  plus  de 
de  barbarie  que  les  animaux  ,  quand  donc 
seront  -  ils  bien  convaincus  de  cette  vérité 
écrite  dans  la  nature  ,  que  la  destruction 
de  son  semblable  est  un  crime  qui  ne  peut 
s'expier  Pâmais  le  plus  grand  de  tous  les 
crimes  ,  celui  que  rien  ne  peut  ni  expier 
ni  excuseï"  ,  c'est  la  lâcheté  d'un  gouver* 
nement  qui  protège  ou  tolère  les  assas- 
sinats. Hélas  !  voilà  encore  cent  vingt-cinq 
victimes  de  cette  Convention  dévoratricç  , 
de  ces  Sénateurs  presqu'aussi  funestes  par 
leur  faiblesse  ,  qu'ils  l'ont  été  dans  leurs 
longues  fureurs  !  ' 

Liste  des  individus  massacrés  à  Lyon  dans  les  prisonf  de 
Roanne  et  de  S  t. -Joseph^  les  16  et  17  fioréalan  3» 
(  5  ^^  9  mai  1795  ). 

Claude  Aubcrt ,  fabricant  de  bas.  —  L(5uÎ3  Abcl; 
•—  Louis  Assada ,  ouvrier  en  soie.  —  Antoine  Bcrgcr> 


sous  les  Proconsuls  conventionnels.      77 

toHîer. — Jean  B  eau  d,  cordonnier. — Amant  Bassîeux. 
— Jacques  benel.  —  Claude  Bussière.  —  François 
Blondel.  —  Anthelme    fcolat.  — Jacques  Berdilot. 

—  Anne  Bisset ,  veuve  Rabate. —   vntoine  Hisset, 

—  Charles  Brochol ,  cordonnier.  —  Martial  Baillât* 

—  Etienne  Bonnard,  chapelier.  —  Vince&t-Philippè 
Berttand ,  négociant.  —  Rose  Bellin.  —  François 
Biolay  ,  graveùï.  —  Antoine-BenbîtClavel.  —  Paul 
Chabus,  fabriquant  de  parasols.-  —  Jean-Baptiste 
Carteron  ^  ouvrier  en  soie.  —  Pierre  Givott'e  y 
chapelier.  —  FIfeury  Chalonsr  tourneur.  —  Antoine 
Caries.  —  Fleury  Guet  ,  fabriquant.  —  Joseph 
Chabran.  —  Louise  Caraque.  — CîornUi — Etienne 
Dcbuis^  —  André  Duclos.  —  Antoine  Duport  v 
aégeciant.  -=r  Jjsan-Fran^ois  Charmette  Desgraage]S« 
'. —  Catherine-,  de  Lyon  ,  veuve  de  Jean  Delormes. 

—  Jean-François  Désireuses.,  greffier  de  la  policé 
municipale. -v-^  Antoine  d'OrfcuUle  ,  comédien. 
7—  Ëmmanuel^Melchior-Phillippe  Oesmârtin,,  négo- 
ciant. —  Durand,  agent  de  la  police.  —  Duseign^ur. 

—  Claude  Estelle  ,  ouvrière  en  soie.  —  Etiehne- 
Fr.  Friand ,  puvrier  de  bas.  —  Claude  Forobert.  ^^ 
François- Gabriel  Frontain.  —  Ftatiçois  Gonnct.'-^ 
Guillaume  -  Hubert  Gault ,  dit  Grand  -  Maison  V 
co9iniaQj;iant  de  gendarmerie.  —  Michel  Gagneux^ 
-^—  Antoine  Glachet.  —  Claude  Grand.  —  Jeanne 
lournout. — François Jacquemel. — Gobert  Alexis. -^^ 
Joseph  Lacroix,  coraohnïer.  — r Jcajn-Àiitoïhe  Làû-* 
sent,  ^^x  Louitf  JLarôche  ,  ou.vr«srjj8ja  soie,  -r- Je?n/< 
J^apdstç   Lamber)^  é<:rivain.  ; —  JEtienne  Léon. — • 

ÎFrai^çoisJeste.ph  Lebon.  —  Charles  Langrume.  —7 
câtH^laudeJLachaud.  — ^Jacques  Laffôrre.  —  f  eanne- 
lââie  MèillMi^femmeRoulet,  couturière.  — Antoincf 
A^ajâcn.,.-!-  Louis  M,9ytvàfi  ,  dit  Capucin.  —  Claude 
MolJar.c^\-^.FélixMaj:ifï»ecourt,  prêtre,  -^  Simon- 
Nicolas  .Macabeo*,. administrateur  du  district.  — '• 
Picri-è  Morîn.--^— Laurent  ^et  MiHetv  instituteur.  — 
-«^Charles  Mlchattd«-rrJean^hilippe«Masson,reUeur«. 


8o  Crimes  commis  à  Lyon  , 

il  fut  condamné  à  la  déportation  ;  le  peuple 
le  traîna  sur  une  charrette,  et  le  couvrit  dt 
de  boue.  Demazures ,  mauvais  comédien* 
Thierriet ,  ex^prêtre ,  sans  mœurs.  Il  avait 
cherché  à  séduire  la  femme  de  son  frère  , 
Membre  du  Ck)mité  révolutionnaire.  Il 
mettait  la  liberté  des  prisonnières  à  prix  ; 
il  exigeait  qu  elles  se  prêtassent  à  sa  brutale 
passion.  MarcïUat ,  autre  prêtre  :  sa  com 
duite  révolutionnaire  le  rendit  digne  d'aller 
siéger  à  la  Commission  temporaire.  Mazet , 
ex-prêtre  ,  constamment  hypocrite  et  le  vil 
esclave  des  Grands.  Roiiyer ,  chassé  dà, 
barreau  ,  à  cause  de  son  înconduite.'- 
Saulnier ,  chirurgien  :  son  incapacité  Tavaii 
réduit  à  la  pîus  extrême  mrsère  vil  afficha  à 
la  sï)ciété  populaiifè  la  soif  du  sang  par  se» 
motions  forcenées;  Biirelle,rédtiit  égalemériê 
à  rindigence  ,  à  cause  de  ses  excès  en  tout 
genre.  Verd  ,  ancien  employé  dans  îc^ 
gabelles  :  ses  ifuretirs  san^ulrtaires  lui: pro- 
curèrent remploi'  de  Procditur-général  dé 
la  Commisision  populaire  v  ses  nombretoé 
brigandages  le  fir-cnt  exclure  de  cette  placei 
Mioche' ,  j^ôtaire  prévaricateur  :  chassé  4èf 
la  société  populaire  pour  uii  vdl  de  farin'èî 
fait  aux  casernes  ,  il  s -étail! 'procuré  par  cfe 
moyen  de  très-beau  pain /tandis  que  le 
reste  des  citoyens  n'eii  ifiarigeaît  que  d'â- 
voine.  Ainsi  /des  voleurs  avfdes  <fe  budii 


dcns  le  départ,  de  f  Allier.  8 1 

composaient ,  comme  ailleurs ,  le  Comité 
révolutionnaire  de  Moulins, 

Dès  leur  installation  ,  tout  change  dé 
fece  ;  les  prisons  se  remplissent  ,  les  pro- 
priétés sont  pillées  ,  et  l'humanité  en  pleurs 
se  voit  par-tout  repoussée.  Fouché  sortit  de 
k  ville  ;  et  Forestier  ,  bien  que  sa  mission 
ne  s'étendît^  que  sur  une  fabrique  d  armes 
voisine  ,  ne  laissa  pas  que  d'influencer  les 
opérations  de  ce  Comité,  Il  fait  séquestret 
.les  biens  des  détenus  ,  dès  qu'il  fut  investi 
des  poi^voirs  illimités  qu  il  avait  sollicités 
auprès  du  Comité  des  décemvirs  :  le  simple 
nécessaire  devait  être  prélevé  pour  leur 
subsistance  jusqu'à  la  paix. 

Dans  un  arrêté  du  3o  septembre  ,  il  pro- 
clame une  loi  émanée  de  sa  seule  puissance  : 
il  condamne  à  une  exposition  de  quatre 
heurtes  sur  l'échafaud  ,  quiconque  s'oppo- 
serait à  ses  arrêtés  et  à  ceux  du  Comité  révo^- 
lutionnaire  ,  comme  aux  décrets  de  la 
Convention.  La  tyrannie  n'a  plus  de  bornes  : 
les  citoyens  ,  supposés  riches  ,  sont  taxés 
au-dessus  de  leurs  facultés.  Cette  loi  pèse 
sur  les  détenus  dont  les  biçns  sotit  séques- 
trés. Il  ne  leur  restait  aucun  moyen  de 
satisfaire  à  cette  taxe  énorme;  le  Comité  en  fit 
exposer  quatre  sur  l'échafaud ,  les  citoyens 
Heuillard  ,  Saincy ,  Lavalette  et  Balore.  Ce 
/dernier    avait  été   requis  de   verser  une 

Tomi  VI.  F 


$8  Crimes  commis 

somme  de  quatre- vingt  mille  livres  ,  le  il 
octobre  1 7  g3  ;  k  8.2  ,  nouvelle  réquisition 
pour  acquitter  une  nouvelle  taxe  de  cent 
mille  livres ,  indépendamment  de  la  somme 
i  laquelle  il  avait  été  précédemment  cottisé. 
Trois  de  ces  citoyens  parurent  sur  Técha- 
faud  ,  avec  un  écriteau  portant  ces  mots  : 
Mauvais  riche  qui  na  rien  donné  à  la  caisse  de 
Ifienjaisance.  Le  citoyen  Balore  fut  traîné 
presque  nud  sur  Téchafaud  ,  par  un  froid' 
fies  plus  rigoureux. 

Le  Comité  révolutionnaire  était  embar- 
rassé pou^r  se  pyocurcr  des  subsistances  , 
des  l(^em;ens  ,  e^  c.  ;  le  Représentant  lève 
facilement  cette  dif&culté.  u  Je  suis  étonné , 
t>  Citoyens,  de  votre  embarras,  leur  écrit-il  ; 
«  il  vous  manque  des  farines  ,j!?r^nez-<jn  chez 
f>  les  riches  aristocrates ,  ils  en  ont  ;  il  vous 
xy  maqque  des  bleds  ,  orgajiiseï  votre  armée, 
ii\  révolutiqnnaire  ,  et  mettez  sur  l'échafatid 
8»  les  fermiers  et  prQpriètaires  qui  seront  rebelles. 
»>  auK  réquisitions  \  il  vous  manque  des  loge- . 

V  mens  ,  emparez-vous  des  hôtels  de  vos  déte^ 
9)  nus;  il  voua  manque  des  lits ,  demandez-en 

V  aux  riçhfis  ,  et  ç.  En  un  mot,  que  rien  ne 
j5  vous  arrête  dans  vos  mesures  :  marchez 
19  d'un  pas  ferme  et  hardi  à  la  régénération 

V  universelle  •  »> 

L'autorité  du  Comité  est  donc  sans  frein  \ 
il  inflige  de  son  cheluue  punition  infamante 


dans  le  départ,  de  C Allier.  S3 

i  une  femme  dénoncée  comme  accapareusiB 
de  sucre  par  le  concierge  des  prisons.  ^Exé- 
cuteur lui  fit  faire  le  tour  de  la  ville  avec 
cette  inscription ,  affameuse  dli  peuple^.  Lb 
perfide  délateur  trouvait  dans  cette  dé- 
marche ,  le  moyen  de  se  soustraire  au 
paiement  de  soixante-quinze  livres  dé  cette 
îienrée. 

Trente-deux  citoyens  de  Moulins  ,  rc- 
commandables  par  le  courage  que  quel- 
ques^ns  avaient  montré  en  divulguant  et 
dénonçant  les  brigandages  de  la  Munici- 
palîté ,  gémissaient  dans  les  priions.  Quatre 
d'entr  eux  avaient  déjà  subî'une  exposition 
de  quatre  heures  sur  Téchafaùd  ,  comme  on 
la  déjà  vu.  Le  Comité  résolut  de  les  envoyer 
à  la  Commission  populaire  de  Lyon.  Quel- 
ques-uns de  leurs  ancrens  collègues  y 
•légeaient  :  en  leur  envoyant  ces  ennemis 
communs  ,  c'était  les  envoyer  à  la  mon. 

L'ouverture  de  cette  boucherie  fut  pré- 
Iodée  par  dés  bruits  de  conspirations  dans 
les  prisons  ,  de  la  part  des  trente-deux  ; 
ensuite  ils  sont  inculpés  de  fédéralisme , 
{>our  avoir  montré  de  la  joie  lors  des  évé- 
nemens  de  Lyon.  Ces  accusations  étaient 
des  plus  absurdes  -,  ces  infortunés  étaient 
dans  les  cachots  long-tems  avant  ces  évé- 
nemens.  La  nouvelle  de  cette  translation 
consterna  tous  les  habitans.  Le  Comité  se 

F   2 


$4  Crimes  commis  \ 

joua  de  ropinion  publique  et  des  larmes 

des  'épouses  et  des  enfans  de  ces  infortunés^ 

Xiés  deux  s^  dtns.  ,  on  les  entasse  sur  dt$ 

4:harrettes ,  et  une  forte  division  de  gfendarr 

merie  est  cpmmandée  pour  leur  escorte^ 

Ce  triste  cortège  prend  la  route  de  Jjyon» 

Jrîusieurs  d.e  leurs  femmes  et  de  leurs  enfansr, 

iâétenus  comme  eux ,  rompent  leurs  chaînea, 

^ç.^  fopt  jour  à  travers  leurs  gardes ,  et  suivent 

_fes  voitures*  Les  menaces  ,  la  brutalité  des 

^sat|êUite5  qui  les  .  env  ne  peuvent 

^comprimer içs  élans  de  leur  tendresse;  le^ 

jparoles    de;  consolatipn    s'adressent    aux 

^épçjux  et  auji  pères.,  et  chacun  les  exhorte 

,a,,puisef  leur  courage  dans  leur  linnocencCb 

iQueiques-unes  de  ces  femmes,  suivirent  le$ 

voitures  pendant  quelque  tems,  La  faiblesse 

et  Tépuisement  diminuèrent  bientôt   ceUc 

escorte  ,  et  livrèrent  les  malheureux  captifi 

à  ridée   désespérante   quils    ne    verraieni 

plus  leurs  femmes  et  leurs  enfans. 

Delan  était  chargé  des  pièces  de  convic- 
tions-^ il  trouvales  trente-deux  sur  la  route  i 
il  insulta  lâchement  à  leur  malheur.  Il  étpit 
alprs  dans  la  voiture  de  lun  d'eiijc.:  ce  fut 
un  nouveau  motif  d'outrage.  '•       . 

Delan  était  porteur  d'une  Jçttre  que  le 
Comité  écrivait  à  Tun  des  m^e^bres  de  la 
Commission  ,  dont  nous  allons  extraire  le* 
principaux  paragraphes» 


da7i5  le  dépWt  WV'AÏlier.  i§ 

rM  Eaîs^ksUÎdbc participer  à^'honttetrt-  de  la  graiitfff 
»f  fusillade,  dQh(  la  cQJïc.epàpmTfaiti l'^éioge  ,dc"Y^d 
JX  imagination  révjolvtitî^nsûre.  -N^TW^p^Quyjç^^^^ 
î^  aVec  toi,  que  cette  Manière  de  foudroyer  les  jçnnej 
ji^-mis  du  peuple  i  est  infinfeSeîit  jffi?^^à^i^é^Ué"'?i 
99;  toute -puissance  ,  etikûniifr^àX:  Aiè^pottKMè^'è? 
M  en.  grand  ^a|s^uy9¥<iH^et^r^-|9|^  y^iori,tç  dutragéefî 
»  :que  le  jeu  mekuiniet  Jps^fcam^^^^l^.Çi^^ 
ji  Ce  dernier  lirsOrumeAt  n  est  bon  que  pour  Its 
^^petits<crimihél8  obscurs  ;  «ne^éé?  y^fté^ir  ditts  4ë 
»  Iabyrin^f(l€^ifp>rim^''pcBn'  jjigQDcVfl^ibiëgaiiidft 
jj  PTendsdj^:Coy^\té^f^m^^  a  , 

15  sans  au curiç^ remords,  la  cbpv^ctiori  intime  çt  mq- 
>«-Tale'  dé  leur ^c^(^^ératcsse^I^(îfôildftH»^  '^   '  "  '  ^ 

La  .dé|i(^ciation  ides  ig>Wî4irprpbéft^\xHï 
l^ouliru  contre  les  Y^xs^pcm^  éti  -Agtisik 
révo^ui^onriqiïes  ,.  signé;  :'id^iinCi.:niajoiiti 
^i»po8antiÇf.,/  e4a.it  vUne^vrfldj  principales 
piècesrfJfj^ftviftiQp  ççjjtrft  ççf  tïfii«çtjie.tt»i 
tau5  3çigfl^iBs*f e«*i  Le  CQHiU^i^mv^eriftcGiomf 
ipâ55^îpfl»  fk  dui  i  y^^ 

i^n^e'  jRojupr   opérer   te  eç^jRdairin^UfiOj^dc 
pli^^e^i^  attlj^s^ignaj^rèftFlQiifi  If^wlf  .iô 

Parmi  les  autres  ipï^c^dites^d^  eméiitmt), 
$e  troUîY^i|ri$^iÇÎ^c^tjr€S  iJ|un0itriÇ8rin&Igni- 
fiantÇ;  ^ya^t^ifé  ,écrite  d^i^^pn  è^ll^Umtét' 
dij  citpjj^^EÙillar^^ji^ljVi  Mo\xsé% 

te  Cpp;i^..:§^y^ît\bifMîi^^  comprio- 

m^^it  /p'4S,;lp.î  m^ri  iM^ftiA  i«g^^  qiwJe 

•     F  3 


xma^î  doit  être^  rcgîirdé  comme. le  véritable 
CfOrrespondanti.  D'aîlleurs  il  s'offre  d'envoyet 
tajemmesi  lit'VbmrnissioH  l'exige'.  Lésàutre^" 
lettrés  portex(t  Jj^x^eme  caractère  ,  et  nou$- 
çroypW  inutile: âen  faire  mention;  mais 
à;  est  bon  dc^  'ft-Mismëttte  âlTiisloirè  \eï\ 
nott$ [;soi^dùn^^  »  q^Ç.  le  Comité! 

savait  àdfe^sè;  ^yi  90m  des  accusés.  Nou» 
allons  transcrire  les  pins  saiHa(ntei5i  .  '^ 
-  Bàllvri  tsi  uri  Bbmitiie  tjrèè^^^  ,  par 
conséquent^ janiJ^âeÉaliis^^  -it-  to^ijej^, c^dttt 
porte  sa  scélératesse  sur  sa  figuré.  -—  Za- 
ghf/«^éstnaifô€arfitt"de  professioH; '-—  Jîîzr- 
iariB«e  lafcenw^kir lyncfen fë^ftfiè.  -^-^ S^ftit^ 
est  un  inaUVtfishricàfef-^èt  puantd'arîstèci-iÉtîé/ 
•"  Xes>treB(te-<y*ix  âfrtvent  à;Lyon^^etfô>i^ 
reimettî^eiaTtf  Rè^pffeftntànl  èfîi'-lfifiié^îî^^^  utï 
inèïi^ireojaiûfLmm'îi^  BeîââtfaWiS  ^  d'^ré 
«utorisé:'âif^ftë3fti?He0ipftifttisil^ft^pb 
*cquittet:te^^ifa«?s  «tixi^aèllft  Ik^'Qntféé 
îmfiou^sf  ëV  deftfiïâdehi  à^'^é'^  éfrtctfdu* 

Mcwiiti;  OÀ  rf^ert  *ifehdit'  ^às '^îà"^f é^ôiisîtï 
Ils  furent  assassinés  le  1 1   nivôse  ^  ari   S*  J 
^•Si'dééembré  i?g^.  j  ^  -  ' --  -  î  ^^ 
•    Le  Comité ';"jàlôùîJi'é!d;T^^  sort 

îèle  tévolutioi^ake  aux  yèiïïk^^ëi  Mara- 
tistes  de  la  Cotiyention  ,  faii  cdntîaîre^  sik 
citoyens  au  '  îtrîterfàl  iréVoîûtîoiliiaU^e  de 
Paris.  Ils   y  furéitt'  côftdaiiihéi  .à    moirt; 


dans  le  départ  dt  TAltier.  îj 

Quinze  autres  étaient  déjà  destinés  poujr 
Lyon,  lorsque  le  ciricyen  Noël  Pbinte  ; 
Représentant ,  vint  i  Mbulins  ,  et  s^^ppôsà 
à  cfe  Nouveau  crime. 

Le  citoyen  Vernerey  ,- aussi  tnembré  de 
la  Convention  ,  se  distingua  pendant  son 
séjour  dans  cette  ville  par  plusieurs  aetéS 
de  justice.  Il  arracha  des  mairie  dU  Comité 
révolutionnaire  des  citoyens  dont  il  avait 
juré  la  perte  ,  parce  que  leur  dépôsitioA 
favorable  à  un  détenu ,  Tclvait  fait  slcquittér^ 
Forcé  de  quitter  ce  Département  <  Fores^ 
tiet  lui  succède  et  fait  renaître  la  tétteUr. 

Ce  Maratiste  avait  destitué  les  Membre!^ 
deis  autorités  constituées  nommés  pat  Ver- 
nerey.  A  Cusset ,  il  renouvelle  les  admihis- 
trations.  Le  père  de  son  fiiévèu  t^\.  pladé  au 
Comité  de  surveillance.  Ce  ttiême  tiéveu  , 
nomnié  Gi\}ùis,  présidait  celui  de  Moulins. 
Le  citoyen  Villard  e*t  exclu  de  sa  place. 
Père  d'une  ndmbredke  famille  et  d'une 
probité  sans  tàthe ,  il  hé  peut  évitef  ce 
triste  effet  dé  la  vengeance  de  Foïéstièr^ 

Le  titdyeii  Vetnerey  avait  éktgi  la 
famille  Chaput-Dubôst.  Forestier,  qUi  con- 
voitait leurs  biens  immenses  pour  son 
neveu  ,  la  fit  de  nouveau  arrêter  et  tra-; 
duîre  là  Paris  où  elle  fut  àssaissihée. 

Forestier  n'oublié  pas  ses  intérêts  per- 
sonnels.  C'est    au    détriment  de   futilité 

F  4 


83  Crirfies' commis ,.  etc. 

publiqiïe  qu  il  agrandit  ses  propriétés^  La 
loi  sur  le  dessèchement  des  étangs  avait 
jexcepté  celui  du  Rosier  ,  dont  Teau  fesait 
tourner  les  moulins  de  xinq  ou  ^ix  Comr 
mufies.  Forestiejfait  arrêter  par  k  Dépatte- 
ment;  qu'il  sera  baissé  de  six  pieds  ,  et 
parvient  ainsi  à  agrandir  les  terres  ;  qu'A 
possédait  sur  la  rive. 

/  Ses  actions  n  étaient  que  le  résultat  de 
^es  principes.  On  Tentendit  s'écrier  :«6Riea 
99  n'est  plus  beau ,  plus  majestueux  qu'un 
39  tribunal  révolutionnaire  ;  que  cette  foule 
55  d'accusés  qui  y  passent  en  revue  avet  uiic 
^5  i^idité  incroyable  ,  et  que  ces  juréS;qui 
99  font  feu  de  &l^.  Un  tribunal  révolutioA- 
39  naire  est  une  puissance  bien  au-dessus  de 
5)  la  •  Gonvention,  »?         •.  .  .t; 

Deux  de  ses  ennera.is  avaient,  échappés  , 
on  ne  sait  par  quel  hasard  ,  à  la  guillotine 
de  Lyon.  Ils  ne  seront  jpfts  si  heureux ,  dit-il', 
au  tribunal  de.P^isv'  C'est  à  ce  tribunsfl 
-que  son  nevèuuluîi  e;?cpédie  ses  viçtames. 
Forestier,  vieftt  y  jotair  de  leurs  djerniens 
iftstans.;  Le  citoyen  Roiig[ane-Prinsat  était 
assis  sur  le  fauteuil;  Sérn  défenseur, se  dis- 
posait à  parler^  Qjn'âllez-vousiaire  ,  ilui  dit 
Jorestier  ?  Défendre  des  aristQcratess  c'ei^t 
vous  rendre  suspect.  Le  Défénsfouar  n'osa 
ouvrir  la  bouche  ,; et  Rougane  pcyH*.; 
_  Pei|x  par ticuUçrS bavaient  obtenu^-  leur 


Crimes  commis  à  Dijon.  89 

élargissement  auprès  du  Comité  de  Sûreté 
générale.  L'arrêté  est  perfidement  soustrait  ; 
ils  sont  guillotinés. 

Les  habitans  de  Cusset  indignés  de  tant 
d'actes  inhumains  ,  après  le  9  thermidor  , 
se  contentèrent  de  placer  sous  les  fenêtres 
de  Givois  et  de  Forestier  un  baquet  rempli 
de  sang,  d'ossemens  et  de  têtes  de  morts  , 
avec  cette  inscription  :  Contemplez  votre 
ouvrage^  étanchh  votre  soij:^  mais  tremblez  , 
tyrans  ! 

Ce  court  exposé  suffit  pour  juger  ces 
hommes  de  sang  et  de  boue  ,  qui  semblent 
avoir  pris  à  tâche  de  faire  regretter  Tancien 
régime  ,  en  souillant  le  nouveau. 


Précis  historique  des  crimes  commis  à  Dijon  j 
Département  de  la  Côte-d'Or ,  souslepro- 
coViSulat  de  Bernarl-le-Saintes.       '- 

liE  lecteur  peut,  d'un  coup-d'œil,  fixer 
son  opinion  sur  ce  conventionnel  par  le 
trait  suivant  :  Son  collègue  Bernard  *dç 
ISaint-Affirique ,  eut  souvent  à  sôuflfi'ir  de 
;^cette  ressemblance  de  nô'm.  C  est  sûr-tout 
ce  qui  lui  arriva  dans  une  petite  ville  dix 
Nord  où  il  était  en,  mîssto'rî.  ^^.L'^âpparîtion 
^'un  Bernard  effraye  les/hàbîïans  au  poinj; 


gù  Crimes  commis  à  Dijon  , 

i]uune  partie  sort  de  la  ville;  Un  citoyen 
vient  trouver  ce  Député  i  ets'enqùit  auprès 
de  lui ,  par  forme  de  conversation  ,  s'il 
était  Bernard^de-Saintes.  Ëh  !  mon  dieu 
non  ,  dit  celui-ci  !  je  suis  Bernard  de  Saint- 
AfFrique.  En  ce  cas  ,  Gitoyren  ,  continue 
cet  habitant,  hâtez-vous  de  faire  publier  quje 
vous  êtes  Bernard  de  Saint^Affrique  ,  sans 
cela  notre  ville  va  être  déserté. 

Le  citoyen  Micault  était  de  retour  en 
France  depuis  le  26  mars  1792  ,  fait  certifie 
par  la  Municipalité  de  Strasbourg,  Il  était 
domicilié  dans  le  département  de  rYonnr, 
où  il  était  porté  sur  la.  liste  despréveiiro 
d'émigratioBi  Les  débats  seuls,  pouvaient 
déterminer  les  opinions  sur  cette  préven- 
tion. Il  fut  ,  par  ordre  de  Bernard  ,  drstraît 
de  Ses  jugejs  naturels  pour  être  traduit  :^li 
tribunal  de  Dijon.  Micault  avait  demandé 
la  liberté  d'aller  à  la  section  de  Dijon  .qu'il 
habitait  déptiîs  1793,  pour  faite  fénOtivèler 
son,  certificat  de  résidence.  Bernsird  lui  en 
avait  fait  la  promesse;  mais  en  le  fesài^l 
extrairedelaprisopoûilétaitrenfermé ,  soy^s 
Fespoîr  d  aller  à  sa  section  ,  il  fut  réintégipé 
dans  la  mai&pn  de  justice  d'où  il  ne  sortit 
qiie  pour  aller  à  Téchafaud.  Bernard  avait 
déjà  requis  le  commissaire  Fauchey  de  lui 
faire  ouvrir  les-portès  de  1^  piaison  Micault. 
Il    s'y  établit  avec   toute    sa   famille   qu'il 


sous  le  ProcôHsutat  de  Bemard-de-  Sain  tes.  ^  i 

tmînait  après  lui  pour  la  faire  vivre  sur  le 
produit  de  ses  dilapidauons.  Il  augmente 
Bieme  son  domestique  de  quatre  individus. 
Bernard  manifeste  sa  joie  avant  cette  exécu-> 
don ,  par  des  chants  et  des  danses  en  pré- 
sence de  la  fille  de  Micault  et  de  ses 
domestiques. 

Il  menace  le  tribunal  V  et  le  force   de  se 
rassembler  snr-le-champ  pour  juger  le  ci-de- 
Yant'pré^ideât  Gôurbeton.  Gè  vieillard ,  au 
bout  de  tr^is  heurei»  ^   n'extsiait  plus;  La 
Êimille  dcjcétitoyen^expulséede  sesproprié- 
|é$i  mêmeiavant  son  supplice  ,  parle  député 
Bernard,  ne' pouvait, «dam  les  tems ,  appré- 
cier ^les.^  pertes  que  kii:*avafit'ôc<:asiohné 
les  dilapidations  de  ceTProcbnsul.  Lés  ôb*- 
jtis  de.consQniitikti6n  futetit  sur-tout^ehx 
fur.  lesquels  â)  étendit 'i^vo^ace  rapà<:ité« 
Qti.cite  particulièrement. que  daïi«^  FMfjîacie! 
4*i«6f  jours;  irs'èst  bu  plu*  de  twîile  boH- 
%éS^s\  devin?  des,  itieilletities  qlxaHté^.  Quànt^ 
à  son  installation  dans  laiîiaiïfCifiï  ^de'MkaUh  «* 
éB><noble  ef  rrclië  propriétaitôi^  «4W  Witre 
écrite  à  la  société  de  Montbc41îurdV  dOtt«> 
nous^lcKnsièflftraîre  quelquefi^^i^agreLphés  \ 
ne  lâissBra:rienà'dési«r  tfOX  te^  moiift«-pâr-' 
liculicrs -qui  ont  extiié  livide;  Bôriiafdf  à 
pcyOTsuivre;le5Tichesp<îo  Mon  C«Otrp  d'edâii, 
»x:iciv\  à-  Dîjbir)aiélé  de  pretldre  gîte  daÉnS^ 
59  la  maison  àa.CHrm  Micaûlt  »  présidiént- 


g?  Crimes^  comnlis  'à  Dijon  ,     ^^  '  '•  '  ' 

9},  du  Parlement,:  et  tj'akeujias&cz  bon  nezi 
M;  car  outre  que  la  cave' ^j^  meublée  ^  de  Jori 
57  bon  vin,  il  s'est  trouvé  quciiquei9-petiteSr 
5>  armoires  qui. m'ont  mîs^  dànsrtié 'ïai^'dë^ 
«  confisquer  ce  superbe. hôtel  au  profit  de? 

9.9  la  Nation J'invoie  ckehher  le  maître  A 

t>  Luxeuil  pour  le  faire  juger^  ^migri"^'  (et 
,»  400  mille  livres i de  rentc^  Vont  tonAer 
t9  dans  les  cofires  dela?Nation;  '  >'v!  .  .  r 
.Bernard  écrivit  à  la  Cdflvélifibtt^f 
u  Instruit  que  ks  iAristocrates.deîDîjo*n'â# 
w  donnaient  '  encore/  via.  v<|uàlificatioii  '  d3 
9^  comte  et  de  mapquisî^^jfenvafcfexfrédflî 
3L>  dix-sept  au.  tribtwia|  «révohi^iiMiQkiir'èf ,  "j& 
9^  jferài  fairei1ie.-:infcihe^  voy^ej^  cedx  Ipk 
«  'lesirôiteroRtî  jV^ :  ■.'].  ...  :  Ji.b'qi  .io  a^I 
-U|i' Administrateur idijfDéparteioem  dé-t 
çenisjli  ,des  mandats  d^arrêtda  cè^terméW»^ 
i/:Jrt|va •arr^4é  etAsa:ftwmt>ï\ilzm*m  tm^.  13 
Maire  était  le  tyran  de  J>ijbn-r  Beâu^i)^ 
administrateur  ,  ,ctiiGu5M>iï/>^^gB/de  paix)) 
^^ieîit  ses  miiîtiôtresit^  r-  '^r  >'  r^^  ^.,-  --.ri 
L  •î^igeriW',  ^çcUsaiteur  pubKc  •  du  tribunal 
Qïiîriinçli,  éfîtnt  à  là  r comédie  , .  dît  f  jau» 
Acteurs::  «4  ,Vouç  Jouez  oui  opérart^cjè  .vaisr^ 
5j^moi^  (àoni^^  V»^  tragéfiié  ;- aojourd^'hui  .7 
91  pour  ;le  pxemi&'  actei^  an.eh»;expédi«r2t . 
V  ttPi?  9  demain^  ,çiaq:  ;  piôs'  jtjtianiGL ^om j>^ 
5:>  rSéra  accoutumé  ,'il  faut  (qu^jI-fombLe  une 
«rtete  dans  <fhaqué  faniilIfe.Lrf»  a>;    •  /     1  -^ 


sous  le  Proconsulat  de  Bernard-de-Sainte.  gS 

:  ILorsqu  ils  voulaient  perdre  un  homme  , 
ils  menaçaient  de  1  arrêter.  Le  citoyen  pre- 
nait la  fuite  ,  et  le  lendemain  on  le  mettait 
6ur  la  liste  des  émigrés.  Forcé  de  revenir  , 
on  le  déclarait  hors  la  loi. 

Les  places  furent  distribuées  avec  une 
perfidie  ,  que  le  prêtre  Chaussieu ,  qui  avait 
pris  le  surnom  de  Marat  ^  se  fit  nommer 
médecin  des  prisons  ,  dans  Tinstant  où  une 
épidémie  terrible  y  exerçait  ses  ravages  , 
et  se  communiquait  aux  habitans.  Il  fit 
mettre  six  cents  malades  dans  une  église 
propre  à  en  contenir  au  plus  deux  cents* 
Un  grand  nombre  périt. 

Le  Comité  révolutionnaire  de  cette  ville 
fut  un  des  ^plus  atroces  de  la  République, 
Tous  ses  Membres  étaient  autant  de  bri- 
gands et,  de  faussaires.  Le  viol  et  l'assassinat 
leur  étaient  familiers.  Savans  dans  tous  les 
gpnres  de  terreur  ,  ils  imaginèrent  des 
conspirations  dans  les  prisons.  Ce  fut  à 
Taide  de  cette  chimère  qu'ils  firent  traduire 
dix-neuf  individus  au  tribunal  révolution- 
naire de  Paris  ,  au  nombre  desquels  était 
une  femme.  Ils  furent  successivement  égor- 
gés ,  les  i  et  17  floréal ,  an  2  ,  (  20  avril  et 
6  mai  1794.) 

Ce  fut  de  Dijon  que  quelques  jours  après 
le  9  thermidor  ,  on  vit  paraître  cette  affreuse 
pétition  à  la  Convention  ,  tendante  au  réta- 


94  Crimes  commis 

blisseracnt  du  régime  révolutionnaire.  Les 
Jacobins  la  firent  colporter  dans  tout^^  les 
sections  de  Paris  ,  afin  de  rallier  leurs  affî- 
dés  ;  heureusement  que  le  soleil4evant  du 
9  thermidor,  (27  juillet  1794)  dissipa  cette 
bourasque  naissante ,  et  la  précipiu  clans 
Torabre  du  néant, 

»'       ■     'I.'    ■>'  t.,;  ■,  ,.i.vi     .',    u '4  '  ;  izssf:asssssssasaGsam 

Précis  historique  des  crimes  commis  dans  le 
département  de  l'Ain  ,  particulièrement  à 
Bourg  y  sous  le  proconsulat  de  Javogues  , 
Amar  ,  Merlinot  ,  Albitte  ,  Méaulle  et 
Gouly, 

Les  habitans  de  Bourg  furent  comprimés 
p^r  une  succession  continuelle  de  Procon*- 
suis.  Agens  dociles  du  triumvirat  dont  ils 
tiennent  leur  fatal  pouvoir,  on  croit  voir 
en  eux  les  disciples  aveugles  et  dévoués  du 
vieux  de  la  Montagne ,  prince  des  assassins. 
Les  conventionnels  Amar  et  Merlinot 
furent  envoyés  en  mission  dans  le  Déparr 
tement  de  T Ain  en  1 7  gS  ,  où  ils  arrivèrent 
le  18  mars.  On  y  jouissait  alors  dfe  cette 
paix  profonde  que  lesautres  Communes  de 
la  République  n'auraient  jamais  vu  bannir 
de  leur  sein  ,  si  le  génie  du  mal  n  eût  secoué 
de  toutes  parts  ses  funestes  brandons.  Amar 
et  Merlinot ,  dès  leur  arrivée  ,  rallièrent 
autour   d'eux  ces  homaies  que  la  société 


dans  le  diparU  de  F  Ain.  gS 

9?ait  droit  de  suspecter.  Les  Desisles  ,  les 
Gouvers  et  les  RoUet ,  gens  les  plus  mal-* 
Camés ,  sont  les  instrumens  de  leur  puis* 
sance.  C'est  devant  eux  et  leurs  setablables 
que  le'prédicant  Âmar  sur-tout ,  exhale  ses 
jentimens.  C'est  à  eux  qu  il  donne  le  signal 
du  meurtre  et  du  brigandage,  u  Dénoncez  , 
9}  disait-il  à  la  fin  de  chaque  discours  ; 
n  dénoncez.  Quoi  !  point  de  dénonciation  ! 
M  Le  père  doit  dénoncer  son  fils  ,  et  le  fils 
M  son  père.  Il  n'y  a  point  de  vrai  pa- 
»9  triotisme  sans  dénonciation,  m 

En  conséquence  de  ces  principes  politi- 
ques,  la  calomnie  entraîna  bientôt  quatre 
çu  cinq  cents  de  ses  victimes  dans  les  pri- 
ions de  la  ville.  Aux  plaintes  ,  aux  récla- 
Qiations  ,  Amar  répond  par  ces  paroles  : 
w  Tout  ce  qu'un  détenu  peut  dire  pour  sa 
55  justification  ,  et  rien  ,  c'est  la  même 
59  chose.  M  * 

Citons-un  trait  sur  cent.  La  maison  de 
\à  citoyenne  Bouvent ,  située  à  St.  Ram- 
bert ,  fut  investie  ,  la  nuit  du  26  au  27 
mars  ;  on  s'empare  de  cette  femme ,  âgée 
de  soixante  ans  et  couverte  d'infirmités. 
$es  domestiques  partagent  ses  fers  ;  les 
perquisitions  les  plus  sévères  3ont  faites 
4ans  sa  maison  ,  et  rien  ne  décèle  la 
inoindre  trace  de  sa  correspondance  avec 
^'Anois*  Le  dénonciateur  de   cette  pré- 


q6        '  Crimes  commis 

tendue  correspondance  ,  homme  inconnu  ^ 
déclare  cependant  qu  il  a  appris  par  oui  dire 
ce  complot.  D'après  une  telle  déposition  , 
les  Administrateurs  s'eiripressent  de  solli- 
citer ,  auprès  des  Commissaires  ,  au  moins 
rélârgissement  provisoire  de  la  détenue  ; 
ils  firent  en  même  tems  valoir  son  grand 
âge  et  ses  infirmités.  Tout  cela  en  vain. 
L'interrogatoire  qu'elle  subit ,  fit  triompher 
son  innocence ,  elle  se  crut  alors  en  droit 
demander  sa  liberté  sous  un  caution- 
nement ;  elle  pria  en  même  tems  qu'on  lia 
délivra  l'extrait  de  la  dénonciation  dirigée 
contre  elle.  De  si  justes  demandes  furenu 
sans  effet  ,  elle  continua  d^  garder  prison  , 
et  la  dénonciation  resta  dans  le  porte-feuille 
des  Commissaires,  qui  préférèrent  sacrifier 
l'innocence  ,  plutôt  que  de  compromettre 
le  dénonciateur. 

Parmi  les  Communes  de  ce  département , 
que  la  présence  des  Proconsuls  plongeait 
dans  le  deuil ,  Trévoux  fut  une  de  ctûêè 
qui  eut  le  plus  à  se  plaindre  de  leurs  actes 
^arbitraires.  Cependant  Merlinot  était  dé- 
puté du  département  de  l'Ain  ,  et  Merlinot 
avait  son  domicile  à  Trévoux.  Ses  habitans 
étaient  bien  éloignés  de  s'imaginer  qu'ils 
se  choisissaient  un  bourreau  en  le  nommant 
leur  mandataire.  Despote,  également  cruel 
et  perfide  ,  il  fait  enlever  ,  au  milieu  d'un 


dans  le  départ,  de  tAin.       *      97 

repas  ,  qu'pn  donnait  à  ses  Cotoimissaires  , 
le  citoyen  Chainague  qui  contribuait  aux 
frais  de  ce  banquet.  Son  éppuse  a'armfc  , 
siux  pieds  des  Représentans ,  de  tous  Atsr^ 
moyens  que  la  tendresse  lui  suggère  pouirl 
les  intéresser  en  faveur  de  son  mari;  ils 
la  font  arrêter  et  conduire  dans  les  prisons 
destinées  aux  criminels.  Cette,  double  dé- 
tention enlève  à  une  famille  nombreuse 
ses  deux  soutiens  ;  ils  gémissent  plusieurs 
mots'  dans  les  cachots  ,  sans  qu  aucune  in- 
lenrogation  ni  procès-verbaux  constatent 
k  motif  de  leur  captivité. 

Après  s  être  entouré  des  hommes  perdus 
4e  mœurs  dont  ils  rehaussent  le  couragtf 
par  leur  exemple  et  par  leurs  exhortations , 
Âmar  et  Merlinot  parviennent  à  dominer 
rassemblée  de  cette  Commune.  Il  n'est 
permis  à  qui  que  ce  soit  d'élever  la  voix 
en  faveur  dés  prévenus.  Un  frère  ne  peut 
y  prendre  la  défense  de  son  frère  :  la  pa- 
role lui  est  impérieusement  interdite  ,  et 
la  gyiillotine  sera  son  partage  dans  le  délai 
de  vingt-quatre  heures  ,  s'il  ose  enfreindre 
la  loi  qu  on  lui  impose.  C'est  au  milieu  de 
cette  assemblée  ainsi  composée  ,  que  les 
deux  Proconsuls  attaquent  les  certificats 
de  civisme  ;  ceux  accordés  par  le  Conseil 
général  de  la  Commune  ,  sont  révoqués  ; 
que  d'abus  et  de  vexations  n  entraîna  pas 

Tome  VU  G 


gS  :^\i^Criines  commis 

Unduvelle  épuration  ;  nouveau  poignard 
dans  la  J^iaîtiictfc  s:  scélérats! 

c  ires-câtoyens-Chicod,  Goyffon  ,  Morel 
a^Valentih ,  indignés  de  la  conduite  des 
Procoi»sul$N,  viennent  à  la  barre  delaCon- 
vèhtibnr,  le;  i g  mai,  implorer  sa  justice 
ônofeveat  de  leurs  malheureux  conci- 
toyens, A  leur  retour  ,  la  prison  les  punit 
dece  qu'Amaat'etMerlinot  appelaient  leur 
audace«  ^'^.^ 

-  Un  Agent  national ,  du  nom  de  Rollet , 
dit  Marat^  arrivait  à  Cerizat ,  Commune 
de  TAin  ;  un  Cultivateur  sonne  une  petite- 
cloche  pour:  assembler  la  Municipalité  et 
ïfe  recevoir*  Ce  Rollet  traita  cette  action  de 
contre-révolution  ,  de  réveil  du  fanatisme  ; 
le  Cultivateur  fut  traîné  sur  la  terre  pen- 
dant une  demi-lieue  à  la  queue  du  cheval 
dé  Rollet. 

Cependant  les  pouvoirs  de  ces  deux 
Commissaires  étaient  révoqués  dès  le  3o 
avril.  Le  25  du  même  mois  ,  un  arrêté  du 
Comité  de  Sûreté  générale ,  avait  autorisé 
les  Autorités  constituées  à  prononcer  sur  le 
sort  des  détenus.  Mais  ces  deux  Proconsul» 
ne  voient  qu'avec  peine  la  puissance 
échapper  de  leurs  mains.  Les  différentes 
Autorités  avaient  déjà  procédé  à  la  relaxa- 
tion de  plusieurs  détenus  ,  et  le  tribunal 
en  avait  acquitté  d  autres. 


éans  h  départ,  de  VAin^  99 

Le  16  mai,  Amar  et  Metlinot ,  firent 
passer  aux  Administrateurs  du  Directoire  , 
un  arrêté  J>at  lequel  ils  ordonnent  n  que 
>5  les  détenus ,  dans  iç  département  de 
»^  FAîn  >,  par  mesure  de  sûreté  ,  resteront 
^j  dans  tet.  état  jusqu'à  ce  que  la  Conven- 
>  j  tîôn  nationale  en  ait  autrement  ordonné  % 
>5  que  toutes  personnes  dénoncées  par  six 
5»  citoyens  pour  fait  d'incivisme  ,  seront 
>j  inscrites  5ur  la  liste  des  notoirement 
*5  suspectés  et  regardés  comme  complices 
f>  des  révoltés  de  la  Vendée.  ^5 Ils  finissent 
par  inviter  le  département  à  se  conformer 
au  présent  arrêté  ,  et  ils  se  plaignent  de 
ce  que  le  Procureur- général  syndic  s^est 
permis  de  donner  Tordre  verbal  à  plusieurs 
Municipalités  de  mettre  les  détenus  en 
liberté.  Ils  le  menacent  de  prendre  des 
mesures  capables  d'arrêter  ces  abus  ,  s'ils 
parviennent  à  acquérir  la  preuve  de  ce 
fait. 

Le  Conseil  général  du  département  de 
TAin  rendit  à  cet  arrêté  toute  la  justice 
qui  lui  était  du.  Après  l'avoir  regardé 
comme  non  ^venu ,  il  passa  à  l'ordre  du 
jour. 

Javogues  ,  déjà  fameux  par  ses  cruauté 
et    ses    brigandages   à    Lyon  ,    se    mit   en 
marche  à  la  tête  d'une  armée  révolution- 
naire pour  se  rendre  dans  ce  département  • 

G  S 


100  Crimes  commis 

Sans  mission  ,  il  se  propose  néanmoins  d'y 
exercer  une  autorité  sans  bornes  ,  et  il  la 
prélude  à  Feurs  ,  où  il  institue  un  tribunsd 
révolutionnaire.  Des  hommes  d  une  igno- 
rance crasse  et  adoimés  à  la  plus  crapur 
leuse  ivrognerie  sont  les  jugés  qu'il  se 
choisit  pour  les  composer,  a  Mon  ami  , 
5  »  disait-il  à  Tun  d'eux  ,  il  faut  que  les 
9  9  sans-çulottes  profitent  du  moment  pour 
9  y  faire  leurs  affaires  ,  n'importe  par  quels 
M  moyens  ;  ainsi  fais  guillotiner  tous  lc$ 
j>  riches  ,  ou  tu  le  seras,  n 

Avec  des  moyens  si  propres  à  en  imposer 
à  l'ignorance  et  à  la  cupidité  ^  Javogues 
organisa  proraptement  la  mort  et  le  pillage; 
dépouiller  les  citoyens  aisés ,  en  faire  con-»- 
duire  tous  les  jours  un  grand  nombre  à 
i'échafaud  ,  à  Taide  de  la  perfidie  la  plu$' 
atrocement  combinée  ;  tel  est  le  tableau 
que  nous  offre  sa  conduite  dans  les  villes 
qu'il  a  parcourues. 

Les  laboureurs  étaient  arrachés  à  leurs 
travaux  et  chargés  de  fers ,  sous  le  prétexte 
de  refus  de  payer  l'emprunt  forcé.  Les 
épouses  de  ces  malheureux  venaient  solli- 
citer auprès  de  Javogues  la  liberté  de  leurs 
maris.  <<  Ils  sortiront,  disait-il ,  quand  ils 
5>  auront  payés.  Sont-ils  dans  Timpuissancc 
n  de  satisfaire  à  cette  taxe ,  ils  ne  sortiront 
»  pas  >%  Ces  femmes ,  certaines  que  l'or  seul 


dans  le  départ,  de  tAin^  loi 

pouvait  briser  lés  chaînes  de  leurs  époux  , 
fesaient    les    plus    grands  sacrifices   pout 

•  completter  la  somme  exigée.  Javogues  pro- 
mettait alors  leur  liberté  pour  le  lendemain , 
jour  où  il  les  fesait  traduire  au  tribunal 
révolutionnaire.  Quelle  surprise  de  la  part 
de  ces  infortunées  ,  en  voyant  leurs  époux 
prendre  le  chemin  de  Téchafaud  !  En  vain 
elles  vont  de  nouveau  invoquer  la  justice 
de  Javogues ,  et  la  parole  qu'il  leur  a  donnée, 
»  Dans  une  heure,  dit-il,  ils  seront  guillo- 

1  55  tinés;  et  si  vous  raisonnez,  vous  les  suivrez: 
5»  vous  êtes  encore  bien  heureuses  que  je  ne 
55  vous  fasse  pas  arrêter  55.  L'une  d'elles,  à 
ce  terrible  arrêt  ,  perdit  connaissance. 
Javogues  se  mit  à  rire,  u  Ces  bougresses-là^ 
55  dit-il,  font  les  béguelles  ;  f. .  • ..  je  vais 
55  faire  apporter  une  guillotine ,  cela  les  fera 
55  revenir  n.  Après  une  foule  de  traits  éga- 
lement arbitraires  et  barbares ,  il  se  trans- 
porta à  Bourg,  et  y  installa  une  Commission 
populaire  pour  procéder  au  jugement  des 
détenus.  L'activité  de  ce  tribunal  fut  néan- 
moins suspendue  un  moment  par  la  pré- 
sence du  représentant  Gouly. 

Mais  l'entrée  de  Javogues  ,  dans  cette 
ville ,  fut  semblable  à  celle  d'un  vainqueur 
irrité.  Il  ordonna  aux  soldats  de  la  traiter 
comme  si  elle  eût  été  prise  d'assaut.  Aussitôt 
les  maisons  sont  investies.  Des  brigands 

G  3 


io«  Crim'es  commis 

armés  les  entourent ,  et  tout  devîe^it  I  objet 
de  leurs  rapines»  Javogues  ,  digne  chef  de 
ces  pirates  ,  reçut  sa  portion  du  butin  ^ 
consistant  en  une  grosse  masse  d'argenterie 
et  de  numéraire.  Son  état  d'ivresse  conti- 
nuelle ,  pendant  son  séjour  à  Bourg  ,  le 
fit  regarder  comme  le  plus  méprisable  et 
le  plus  crapuleux  des  hommes;  et  s'il  jouit 
de  quelques  instans  lucides  ,  ce  fut  pouP 
déployer,  au  milieu  de  la  société  populaire^ 
sa  farouche  éloquence.  44  Les  propriétés  , 
55  y  disait-il  un  jour  ,  sont  une  usurpation  j| 
99  faite  sur  les  sans  -  culottes ,  et  la  Répu-^ 
55  blique  ne  pourra  s'affermir  que  sur  le 
V  cadavre  du  dernier  des  honnêtes  gens  »î. 
Albitte,  également  couvert  du  sang  et  des 
dépouilles  des  Lyonnais  •  suivit  dé  près 
Javogues,  Il  se  distingua  à  son  entrée  dans 
cette  ville ,  par  un  faste  vraiment  asiatique* 
Le  luxe  et  la  mollesse  ♦  qui  semblaient  ses 
passions  dominantes  ,  ne  laissaient  pas 
soupçonner  que  son  cœur  pût  être  suscep- 
tible de  cruauté.  Son  Conseil ,  composé  de 
plusieurs  Membres  de  la  Commission  révo- 
lutionnaire de  Lyon,  auxquels  il  joignit 
son  valet  d'écurie ,  condamné  depuis  à  vingt 
ans  de  fer  ,  fut  chargé  d'interroger  et  juger 
les  détenus.  Seize  d'entre  eux  ,  d'après  ses 
recommandations  particulières  ,  furent  en- 
voyés à  Lyon ,  où  ils  périrent  douze  heures 


dans  le  départ.,  dis  l'Ain.  ?io3 

après  kur  arrivée ,  sans  avoir  été  interrogés, 
JLe  représentant  Gouly ,  dont  nous  avons 
déjà  parié  ,  était  parvenu  à  faire  mettre  en 
liberté  les  citoyens  incarcérés  par  r9rdre 
de  Javogues.  Albitte,  sans  daigner  s'informer 
des  causes  qui  avaient  occasionné  leur  dé- 
tention sous  le  proconsulat  de  Javogues', 
avait  ordonné  qu  ils  seraient  réintégrés  dans 
les  prisons.  C'est  sur  eux  que  les  Jacobins, 
dont  il  est  entouré  ,  exercent  leur  odieux 
ministère. 

La  destruction  ,  mise  à  Tordre  du  jour 
dans  ces  tristes  contrées  ,  les  couvre  de 
sépulcres  et  de  ruines.  Les  couvertures  des 
portails  ,  les  colombiers  ,  les  cabinets  des 
jardins  ,  les  petites  tours  ou  coupoles  qui 
éclairaient  Fintérieur  des  maisons ,  les  tours 
servant  de  cages  aux  escaliers ,  et  les  clochers 
sont  jetés  à  bas ,  comme  autant  de  châteaux 
forts*. Les  habitans  des  campagnes  sont  à 
cet  effet  mis  en  réquisition.  Il  ne  respecte 
pas  leur  travaux  précieux  au  moment  de 
la  récolte.  La  terreur  quil  inspire  à  ces 
malheureux  cultivateurs  ,  est  telle ,  que  six 
d'entre  eux  ,  en  pressant  les  démolitions  , 
sont  écrasés.  Cet  accident  arriva  presque 
^ous  ses  yeux  sans  l'émouvoir. 

Les  Administrateurs  probes  et  éclairés 
furent  destitués  et  remplacés  par  ses  cra- 
puleux et  ignares  satellites.  Il  n'admettait 

G  4 


ïtr4  Criines  commis 

à  sa  société  que  les  assassins  et  les  femmes 
prostituées.  Brigadd  dans  tous  les  genres  , 
il  met  en  réquisition  ,  pour  son  usage  ,  ie 
vin  des  particuliers»;  et  pour  rétablir  sa 
santé  affaiblie  par  les  débauches ,  il  accapara 
le  lait  qu  on  porte  au  marché ,  qu'il  emploie 
pour  prendre  des  bains  ,  et  qu'il  fait  vendre 
ensuite.  Offrant  une  protection  ouverte  au 
crime  ,  il  accueil  le  nommé  Roitx  ,  officier 
municipal  de  Lyon ,  que  ses  meurtres  obli* 
geaient  de  fuir  cette  ville  ,  et  le  nomme 
inspecteur  des  chevaux  mis  en  réquisition 
à  Bourg.  Le  voiturier  qui  conduisait  ce 
voleur  avec  intention  de  le  livrer  à  la  justice  ^^ 
fut  incarcéré  et  mis  au  secret ,  où  il  gémit 
pendant  long-tems. 

Albitte  ose  se  vanter  que ,  pendant  son  sé^ 
jour  à  Lyon ,  il  s'était  débarrassé  de  quatre  à 
cinq  cents  femmes  ,  invoquant  par  leun 
c^s  et  leurs  larmes  son  humanité  en  faveur 
de  leurs  pères ,  de  leurs  époux  et  de  lean 
enfans  ,  en  fesant  attacher  deux  des  plus 
jolies  pendant  deux  heures  à  un  poteau; 
et  U  ajoutait  avec  un  rire  barbare  :  «4  après 
s  5  avoir  été  détachées ,  elles  n  en  dînèrent 
39  pas  moins  de  bon  appétit  m. 

MeauUe ,  qui  vient  après  Albitte ,  ne  laisse 
pas  plus  respirer  les  habitans  de  cette  Ck)m- 
xnune.  Les  mêmes  intrigans  Tentourent.  Les 
journées  se  passent  en  orgies  sur  les  prés  et  à 


,  dans  U  départ,  de  tAin.  io5 

la  pecfiè  aux  anguilles  ;  et  les  nuits  se  pro* 
longent  dans  ces  orgies.  Au  bout  de  quel*- 
qu€S  décades  ,  on  vit  par^tre  un  arrêté  , 
par  lequel  il  était  défendu  aux  femmes  , 
parens  et  enfans  des  détenus  ,  de  solliciter 
sa  justice. 

Pendant  son  séjour  à  Bourg ,  entouré  de 
^femioes  sans  pudeur ,  il  y  donne  l'exemple 
jde  la  plus  crapuleuse  débauche.  Par  -  tout 
ii  porte  les  citoyens  au  désespoir  par  des 
vexatioïis  înnouies  ;  et  le  terme  de  sa  mission 
approdiant ,  pour  consommer  la  perte  de 
cette  Commune  ,  qu  il  préméditait ,  il  ose 
en  imposer  i  la  France  ,  en  là  peignant  en 
état  de  rébellion.  En  même-tems  il  fait 
venir  trois  cents  hommes  de  la  garde  na- 
lûmale  du  district  de  Gex  ,  pour  égorger 
les  détenus  et  autres  citoyens  de  cette 
Commune. 

Tels  furent  les  excès  auxquels  se  livrèrent 
les  proconsuls  Javogues  ,  Amar ,  Merlînot , 
Aibitte  et  Meaulle.  Leur  mémoire  est 
à  jamais  exécrée  dans  le  département  de 
rAtn  ;  les  citoyens  craignent  de  prononcer 
leurs  noms ,  pour  ne  pas  renouveler  le  sou- 
venir des  maux  dont  leur  mission  a  flétri 
kl  génération  actuelle. 


io6         Régime  intérieur  des  Prisons 


Si  s 


RÉGIME  intérieur  des  prisons  de  la  commune  \ 
du  Puy  y  département  de  la  Haute-Loirem 

JL  A  Commune  duPuy ,  ainsi  que  toutes  celléî 
du  département,  souffrit  pendant  très-long- 
tcms  le  renversement  de  Tordre  social.  Des 
inconnus ,  revêtus  des  fonctions  publiques»^ 
furent  créés  Membres  du  Comité  révolu- 
tionnaire ,  et  cinq  cents  personnes  sont 
aussitôt  j  etées  dans  les  prisons.  Le  Concierge 
choisi  par  ces  hommes  ,  ne  remplit  que 
trop  bien  leurs  vœux  par  son  ^  excessive 
dureté.  Les  vieillards  sont  entassés  dans  Ats, 
salles  humides  dont  on  a  intercepté  Faîr  ' 
en  mâsonnant  les  croisées.  Ils  ne  respirent' 
que  les  exhalaisons  infectes  causées  pat 
des  cochons  nourris  dans  Tintérieur  de  la 
maison.  Là  ,  comme  par-tout ,  les  vivres 
destinés  aux  détenus  ,  sont  pillés  avant  de 
leur  parvenir  ;  et  les  plaintes  à  cet  égard 
^nt  accueillies  par  des  outrages ,  par  de 
mauvais  traitemens  ,  et  la  réclusion  pen- 
dant quinze  jours  dans  un  cachot  des  plus 
affreux. 

Les  Auteurs  de  ces  incarcérations,  jaloux 
de  tourmenter  leurs  victimes  ,  en  puisent 
tous  les  moyens  dans  leur  génie  infernal» 
Un  Concierge  plus  humain  avait  remplacé 


de  la  commune  du  Puy.  107 

le  premier  ;  pour  éteindre  dans  son  cœur 
le  peii  de  sensibilité  qu'il  y  conserve  pour 
ceux  qui  sont  soumis  à  son  inspection  -,  on 
persuade  à  cet  homme  crédule  que  les 
détenus  ont  formé  le  projet  de  Fassassiner  ; 
le  même  soupçon  se  propage  parmi  les 
Membres  de  la  Garde  nationale.  Les  pa- 
trouilles sont  doublées  ;  les  visites  nocturnes 
se  multiplient.  On  fait  Tappel-de  chaque 
détenu.  L  assassinat  a  failli  punir  plus 
dune  fois  celui  qu'un  sommeil  profond  em- 
pêchait de  répondre  à  cet  appel  :  Eveillons 
ce  b là  avec  la  baïonnette. 

Des  épouses ,  des  filles  portent  quelques 
alimenk  à  leurs  époux  ,  à  leurs  pères  ;  on 
insulte  par-tout  à  la  pudeur  ;  des  chansons 
obscènes ,  des  gestes  lubriques ,  des  tableaux 
infâmes  ,  des  nudités  indécentes  frappent 
leurs  oreilles  et  leurs  regards.  D'autres 
exposent  un  Christ  sur  le  seuil  de  la  porte  t 
et  forcent  les  femmes  à  le  fouler  aux  pieds  ; 
c'est  le  seul  moyen  pour  faire  parvenir  à 
leurs  parens  la  nourriture  qu'elles  leur 
apportent  :  les  insultes  et  les  menaces  de 
la  réclusion  sont  le  partage  de  celles  dont 
la  répugnance  se  manifeste  trop  évidem- 
ment. 

La  Garde  nationale  que  la  calomnie 
irritait  sans  cesse  contre  les  prisonniers  , 
f éitérait  ses  perquisitions  au .  milieu  de  la 


lo8         Régime  intéritur  des  prisons 

buit ,  et  imaginait ,  chaque  jour  ,  un  noil^ 
Veau  genre  ne  persécution.  Elle  trouve  uii* 
prisonnier  dont  la  seule  consolation  étafj^ 
d'avoir  ses  deux  chiens  à  ses  côtés  ;  elle  Icf 
lui  arrache ,  et  précipite  Tùn  dans  les  lieuiè^. 
d'aisance  ,  et  Tautré  dans  la  cour. 

On  se  fait  un  jeu  de  l'appareil  le  plu* 
effrayant.  Un  canon  est  braqué  sur  la  coitf 
de  la  prison ,  et  la  mèche  allumée  jour  êl 
nuit.  Un  des  canonniers  nommé  Lieutard^ 
commissaire  de  la  maison  ,  fait  dessinier 
deux  guillotines ,  au  bas  desquelles  il  apposé 
les  inscriptions  les  plus  terribles  contre  lèi 
reclus ,  en  les  désignant  nominativement, 
A  cet  étrange  spectacle  ,  ils  se  plaignent  t 
ce  commissaire ,  en  lui  peignant  la  fatale 
impression  qu'une  telle  image  peut  faire  sur 
leurs  épouses  et  leurs  ehfans.  Il  leur  répond 
avec  fureur ,  que  s'il  en  avait  le  pouvoir  , 
ils  les  ferait  tous  guillotiner. 

Dans  le  tems  où  l'on  transférait  au  Puy 
des  détenus  de  la  Commune  de  Saint- 
Didier  ,  l'escorte  se  permit  de  faire  descendre 
des  charrettes  deux  de  ces  malheureux ,  et 
ils  les  fusillèrent  sans  aucune  autre  forme  de 
de  procès.  Un  de  ces  infortunés  avait  tenté 
de  s'évader  ;  il  est  atteint  par  ces  furieux  et 
massacré.  Deux  autres  ne  durent  la  vie 
qu'à  l'intrépidité  d'un  canonnier  qui ,  au 
péril  de  ses  jours ,  détourna  les  baïonnettes 
qui  les  menaçaient. 


de  la  commune  du  Puy.  109 

Cette  conduite  atroce  fut  prolongée  encore 

Ipfig-tems  après  la  chute  du  décemvirat» 

Plus  jaloux  deii  perpétuer  les  crimes  qut 

de  les  faire  oublier  ,  dans  une  séance  pu'» 

blique ,  les  Jacobins  veulent  que  Ton  dé« 

npace    vingt  -  cinq  individus   portés    sur 

one  vieille  liste  de  proscription  ,  et   sus 

laquelle  on  avait  antérieurement  demandé 

des  renseignemens.  Leur  délibération  por- 

^t  pour  principes  qu'on  devait  recevoir 

|out   à    charge    et   rien  à  décharge.    C< 

ne  ^t  qu^avec  le  temsque  la  justice  pénétra 

diosces  sombres  cachots ,  et  en  fit  sortir  les 

^mocens  pour  les  remplacer  par  leurs  an* 

ciens  persécuteurs. 

< 

■■I"    ■   I      '  "  i'--i 

Précis  historique  des  crimes  commis  dans  U 
département  des  Bouches-du- Rhône  ,  partie 
(ulièrement  à  Marseille  ^  sous  le  procçn^ 
sulatde  Pomme ,  Charbonnières ,  Fréron , 
Barras  ,  Robespierre  jeune  ,  Albitte  i^ 
Ricord  ,  Salicetti  ,  Gasparin  ,  Isnard  , 
Chambon ,  Cadroy  ,  Jourdan  ,  Gaultier  ^ 
Mariette  ,  Durand-de-Maillane  ,  Brunet« 

S I  les  suites  de  la  journée  du  3 1  mai  on( 
été  funestes  pour  la  plupart  des  Départe* 
mens  de  la  France  ,  c'est  sur-tout  dans  le 
Midi  que  les  ravages  et  le&  atrocités  révolu* 


i 


i\à     Sang  répandu  dans  le  département 

tionnaires  se  sont  développés  avec  une 
activité  et  une  audace  plus  épouvantables! 
La  chaleur  des  têtes  mérldiotiales  qui  exà^ 
gère  tout ,  tie  permet  ni  mesurés  ,  ni  modé^ 
ration;  et  lorsque  le  fanatisme  de  la  liberté 
est  venu  enflammer  ces  esprits  turbulens  ^ 
ôti  a  vu  des  despotes  d'opinion  juger  dighé 
de  mort  tout  ce  qui  ne  partageait  pas  leur 
délire.       '      ; 

Avant  de  nous  livrer  à  ces  remarque! 
locales  si  utiles  pour  apprécier ,  par  un 
rapprochement  comparatif,  le  moral- etlë 
caractère  de  ces  Peuples  et  celui  des  Repré^-j 
sentans  qu  on  leur  a  envoyés  ,  temontotii 
à  la  source  des  événemens.  ^^'"^ 

.   Marseille  s'insurge  contre  le  3i  mai  ;  et 
pour  marcher  au  secours  des  Représentans 
opprimés  par  la  Montagne  ,  elle  organise 
Une  force   départementale    qui  ,   dans   sa 
inarchc ,  se  proposait  de   rallier  sous    scs^ 
étendards  tout  ce  qu'il  y  avait  de  Républi- 
cains zélés  le  long  des  rives  de  la  Durante^  ;, 
Une  nouvelle  Autorité,  sous  le  nom  de*  Co-^ 
mité  central  de  section  ,   s'organise   et  lance . 
plusieurs  mandats  d'arrêt  contre  certains 
hommes  turbulens  et  chauds  partisans  de  }à 
Montagne  et  de  Marat ,  qui ,  dans  les.tems 
oùilsjouissaientde  l'autorité,  avaient  exercé 
la  plus  effroyable  tyrannie.  On  institue  .  en 
même  -  tems    un    tribunal  populaire   qui 


des  BoucheS'dU'Rhône. .  iii 

condamne  à  mort  plusieurs  de  ces  individus. 
Ce  renversement  des  Autorités  révolution- 
sjûres  y  leur  réorganisation  sur  des  bases 
diamétralement  opposées  à  la  politique  de 
la  Montagne ,  tels  furent  tous  les  torts  de 
cette  cité. 

Lyon  était  bloqué  ;  la  Vendée  toujours 
anéantie  ,  se  relevait  à  chaque  instant  avec 
un  appareil  de  plus  en  plus  formidable  ; 
ks  frontières  au  Nord  et  au  Midi  étaient 
entamées  par  les  alliés.  A  la  faveur  de  cet 
lAcendie  général ,  les  Marseillais  semblaient 
ne  devoir  trouver  aucim  obstacle  dans  leur 
ipute  ,  lorsque  Carteaux  se  présenta  devant 
la  colonne  marseillaise  ;  et  après  un  combat 
sanglant  où  il  périt  56o  Français  ,  et  qui 
décida  du  sort  dt  Marseille  ,  il  y  entra 
triomphant.  Alors  tout  change  de  face  :  la 
jusdce ,  qui  n'est  plus  que  la  loi  du  plus 
fort,  menace  les  vaincus;  et  le  crime,  en 
signalant  la  défaite  de  ses  ennemis  ,  appelle 
déjà  sur  leur  tête  toute  la  vengeance  des 
lois  révolutionnaires. 

La  Convention  rend  le  9  juin  lygS  , 
un  décret  qui  met  hors  de  la  loi  tous  les 
Membres  du  tribunal  populaire  du  Comité 
.  central  ;  elle  englobe  dans  les  mêmes  filets  , 
tous  ceux  qui  auraient  signé  des  arrêtés  ou 
délibérations  liberticides ,  et  charge'  le  tri- 
bunal criminel  du  département  des  !&ouches« 


1 1 2    Scmg  répandu  dans  le  département 

dU'Rhône  ,  de  juger  les  conspirateurs.  Deu^ 
Représentans  sont  envoyés  pour  surveiller 
l'exécution  de  ces  décrets  :  c'étaient  ks  ci- 
toyens Pomme  et  Charbonnières  ;  le  premier, 
Américain ,  chaud  Montagnard  ;  le  second , 
jeime  efféminé ,  se  partageant  entre  le  far- 
deau de$  affaires  publiques  et  les  soins  de 
sa  toilette.  Mais  comme  ils  paraissaient  peu 
propres  à  seconder  les  vues  expéditives  du 
Comité  décemviral ,  et  qu  ils  n  avaient  en- 
core fait  guillotiner  que  17  individus  ,  ils 
sont  remplacés  par  Barras  et  Fréron  qui , 
après  avoir   parcouru  le  département  dvt 
Var,  arrivent  à  Marseille  les  premiers  jounr 
d'octobre  1792.  Ils  agirent  conformément 
au  décret  de  mise  hors  de  la  loi ,  et  zvasr 
arrêtés  et  instructions  particulières  du  Co« 
mité  de  Salut  public. 

Tout  est  bientôt  bouleversé  ,  la  terreur 
s'organise  ;  elle  médite  ses  vengeances  ; 
elle  calcule  ses  victimes  et  aiguise  ses 
poignards.  On  installe  une  Commission 
municipale  avec  de  grands  pouvoirs  ;  les 
Autorités  constituées  se  composent  de  Ja- 
cobins forcenés.  Ricord  ,  fils  du  député  de 
ce  nom  ,  jeune  homme  de  vingt  ans ,  res- 
pirant ,  dans  les  bras  de  son  père ,  le  soufile 
empoisonné  du  terrorisme ,  est  nommé 
Procureur-syndic  du  département.  11  pré- 
sidait en  m^me-tems  la  société  populaire 


des  Bouches-du'-Rhône.  ii3 

qui ,  sous  ses  auspices ,  secondait  parfair 
tement  les  décemvirs  du  Comité  de  Salut 
public  ,  dont  Barras  et  Fréron  n'avaient 
été  jusqu  alors  que  les  serviles  exécuteurs 
des  arrêtés  et  décrets;  m^-is  jaloux  de 
faire  quelques  pas  dans .  la  carrière  révo- 
lutionnaire ,  ils  publièrent  bientôt  la  pro« 
clamatioii  suivante  : 

Froclamatios  des  Représentans  du  Peuple  Barras  et' 

Fréron, . 

Le»  Représentans  du  Peuple ,  Barras  et  Fréron , 
annoncent  au  département  des  Bouches-du-Rhônela 
fenne  lésolution-  où  ils  sont  de  sauver  la  liberté 
publique  ,  ou  de  périr  dans* leur  sainte  entreprise» 

Us  viennent  faire  succéder  la  vérité  et  la  justicç 
au  système  désastreux  du  modérantisme  et  du  roya* 
Usme  ;  il  ne  suffira  plus  d'avoir  de  l'or  pour  acheter 
impunément  le  droit  d'être  scélérat  :  qu'ils  tremblent 

tous  ces  oppresseurs  de  la  patrie  ! Voye:^  toup 

CCS  mille  vciisseaux  resserrés  dans  vos  ports  ,,  voyez 
▼otjrc  industrie  captive  ,  votre  commerce  paralysé  ! 
c'est  à  eux  que  vous  le  devez  !....  Mais  la  terreur 
fst  à  Vi^rdre  dujour..,,  II  ne  suffira  plus,  pour  jouir 
«yeç  insr$ititu4e  des  bienfaits  de  la  révolution,  d'êtrç 
modères  ,  d'être  accapareurs  ou  sectionnaires.  Nous 
ne- voulons  que  des  républicains  :  sauver  Marseille  et 
raser  Tûulon^  voilà  le  but  de  nos  travaux. 

Pou|:y parvenir, nous  allons  transformer  les  placer 
publiques  en  ateliers,  les  boutiques  en  forges  natio- 
nales  ;  que  l'enclume  retentisse  ;  qup  tout  respire  le 
géniç  martial  et  l'amour  de  la  liberté.  Nous  serons 
li^^i^fibles ,  inaccessibles  à  toute  considération  perr 
sonu^Ue  ;  nous  braverons  et  les  séductions  de  la 
beauté  et  les  poignards  des  assassins.  Que  les  saoji^ 

Tome  VI.  h 


1  î4     Sangrépandu  dans  le  département 

culottes  travaillent  le  jour,  qu'ils  veillent  le  nuit , 
et  que  le  soleil  n'achève  point  son  cours  sans  nous 
avoir  vu  faire  des  pas  de  géant  vers  cette  libertç 
chérie  ,  pour  laquelle  nous  sommes  tout  prêts .  i 
nous  immoler. 

Fait  à  Marseille ,  le  12  octobre  lygS ,  Tan  s  de  la 
Hépublique  française  ,  une  et  indivisible. 

Les  Représentans  du  Peuple  près  les  armées  d'Ita- 
lie et  les  départemcns  méridionaux. 

Stgne\  P.  Barras  et  Frèron. 

Cette  proclamation  s'exécute  avec  la  plus 
prompte  activité  ;  ces  travaux  ,  dont  la  di- 
tcction  est  •<îohfiée  au  zèle  jacobin  des 
Ck)mmissaîrcs  Nouette  et  Lambert^  ren- 
dirent en  un  seul  instant  Marseille  mé- 
connaissable ,  et  Ton  eut  pris  pour  une 
place  d  armes  cette  cité  jadis  la  plus  com- 
merçante de  TEurope  ;  son  port  Tadmirà- 
tion  des  étrangers  /n'offrait  plus  qu'un 
amas  de  navires  oisifs. 

Le  g  octobre  ,  la  nouvelle  de  la  reddî-. 
tion'de  Lyon  était  parvenue  à  Marseille  , 
et  le  nouveau  triomphe  sur  le  parti  déjà 
abattu  à  Paris  ,  dans  les  journées  du  3 1 
mai  ,  avait  rehaussé  singulièrement  Tau- 
dace  des  dignes  janissaires  du  nouveau 
gouvernement.  Le  tribunal  criminel  se 
signala  par  l'assassinat  de  vingt  citoyens 
mis  hors  de  la  loi  ,  qni  furent  guillotinés. 

Les  Marseillais  ,  que  Ton  a  vu  les  prin- 
cipaux   instrumens   de    Fanarchie  ,    aux 


des  BoucheS'dU'Rhone.     '  -'     1 15 

époques  les  plus  célèbres  de  la  révolu- 
tion ,  et  sur-tout  dans  les  journées  des  2 
septembre,  doivent  être  singulièrement  dis- 
tingués de  ceux  qui  se  prononcèrent  si  for- 
tement en  cette  circonstance  contre  le 
triomphe  de  la  même  anarchie  ;  et  Fhis* 
torien  doit,  pour  Thonneur  du  nom  Mar- 
seillais  ,  désigner  ces  hommes  qui  ont ,  sous 
ce  titre  usurpé  ,  joué  un  rôle  si  funeste  et 
si  exécrable  dans  les  septembrisations  dé 
la  capitale. 

.  Toulon  et  Marseille  par  leur  position  au 
bord  de  la  Méditerranée  ,  et  par  la  proxi- 
mité de  difFérens  Etats  ,  furent  de  tout  tems 
lasyle  de  tous  les  brigands  ,  que  la  justice 
poursuivait  chez  les  puissances  voisines  , 
telles  que  la  Catalogne  ,  la  Corse ,  l'Italie ,  la 
Turquie  et  la  Barbarie  ,  et  c.  Cette  classe 
dliommes  ne  vivant  que  dans  l'obscurité 
àa  crime  ,  devait  embrasser  avec  plaisir 
tous  les  mouvemens  convulsifs  d'un  gou* 
vernement  ,  qui  non  -  seulement  offrait 
toutes  les  occasions  et  toutes  les  facilités  à 
leur  penchant  pour  le  crime  ,  maisie  sanç-^ 
tioiinait  encore  par  ses  éloges  ,  ses  places  et 
$ts  recompenses;  tels  étaient  ceux  qui, après 
avoir  fait  leurs  premières  armes  dans  les  murs 
d'Avignon ,  vinrent  ensanglanter  ceux  de 
Paris.  Le  propos  que  Ton  prête  à  Barras  , 
et  dont  une  femme   digne  de  foi  atteste 

H  S 


iii6    Sang  répandu  dans  le  département 

rauthenticité  ,  peint  assez  bien  Tesprit  qui 
animait  cette  troupe  forcenée.  Il  était  aux 
environs  d'Avignon ,  lorsque  cette  horde  se 
livrait  à  ces  massacres  :  (4  Cette  race  est  abo- 
^5  minable ,  dit-il  ;  pour  les  arrêter  dan&leur$ 
f  5  débord^mens ,  il  faut  d'abord  parler  kur 
»5  langage  ;  car ,  à  les  en  croire,  il  faudrait 
fj  détruire  tout  le  genre  humain*  ^Poultier 
qui  était  aussi  dans  ces  contrées  ^  assurait 
alors  que  parmi  ceux  qui*  fesaient  les  pa- . 
triotcs  les  plus  exaltés ,  se  trouvait  un  grand 
nombre  de  voleurs  et  d assassins;  c'était »> 
sans  doute  ,  pour  propager  leur  morale 
atroce ,  que  plusieurs  de  ces  sicair^s ,  di- 
saient hautement  dans  Paris  ,  ne  recon- 
naître  de  patriotes  q^e  ceux  qui  paurraien| 
aire:  J'ai  coupé  tant  de  têtes,  et  fai  tra^ 
vaille  en  septembre  ,  attachant  à  ces  funestes 
_  journées  tout  l'honneur  du  républicanisme* 
Ils  s'empressèrent  de  faire  passer  à  la  Cou-* 
vention  une  adresse  ,  dans  laquelle  ils  se 
plaignirent  que  le  décret  du  23  février  1 7  gS, 
qui  ordonnait  de  poursuivre  les  auteurs 
des  journées  de  septembre,  était  un  pré^ 
texte  pour  poursuivre  les  meilleurs  par 
triodes.  Ces  soi-disant  républicains ,  comme 
Ton  voit ,  différaient  entièrement  de  ceux 
qui  s'armèrent  au  3i  mai  pour  écraser 
l'anarchie. 
-:;  L'ambition     d^s    Anglais     cherchait    à 


*     'desBoûchêS'du-RkSne.  fi7 

«fivàhîr  notre  commerce;  et  la  perfidie 
avait  déjà  introduit  leurs  armées  dans  le 
port  de  Tofulon.  Leur  or  qui  semblait  di- 
riger le  Comité  de  Salut  piïbiic  v-  refluait 
$\ir  toutes  fes  villes  commèrçaiites  pour  en 
opérer  la  destruction.  Plusietirs  des  Agenâ 
de  cette  pui&sance  étaient  même  à  Mar- 
seille ,  lorsque  Barras  et  Frérott  ,  d'après 
un  arrêté  du  Comité  de  Salut  publie  ,  soit 
ineptie  ,  Soit  asserviss«ement  pour  les  ttrdrei 
des  décemvirs  ,  ordonnèrent  la  démoli^ 
tion  de  cette  cité.  Un  d'eux  proposa  ert 
même  -  tems  de  combler  son  port.  Les  né- 
gocians ,  dont  le  crédit  ouvert  dans  tous 
les  ports  de  Funivers  pouvait  prôcurct 
Tabondance  à  le  France  ;  les  riches  arma- 
teurs ,  les  banquiers  furent  proscrits  ,  et 
portèrent  leurs  têtes  sur  Téchafaud.  Le 
Comité  de  Salut  public  ,  dont  on  ne  fesait 
*par  là  que  remplir  les  instructions  ,  trou- 
vait plus  expéditif  de  les  assassiner  pour 
^'emparer  deleurs  biens,  dédaignant  l'avan- 
tage que  FEtat  pouvait  retirer  de  leurs  cor-»- 
respondances ,  quj  seules  suffisaient  pour 
mettre  un  terme  à  la  disette  générale^ 
Aussi  ne  put-on  y  opposer  que  de  faibles 
ressources  ,  qui  ne  se  soutinrent  quavefc 
les  monceaux  d'ôr  et  les  riches  meubles 
que  Ton  fut  forcé  d'échanger  pour  les 
blé«   d'Afrique  ;    mais   la    disette  entrait 

H  3 


1 1 8     Sang  répandu  dans  le  département 

lelle-même  dans  les  plans  dn  gouvernement , 
et  en  tarissant  ainsi  toutes  les  sources  d'a- 
bondance ,  tous  les  moyens  de  nourrir  le 
peuple  affamé  ,  Barras  et  Fréron  ,  dont  les 
lumières  en  économie .  politique  étaient 
d'ailleurs  si  bdmées ,  obéissaient  avec  plaisir 
au  système  d'extermination  que  leur  rap- 
pellait  sans  cesse  le  Comité  ,  dans  sres  cir- 
culaires et  dans  ses  lettres  particulières  ,  en 
leur  disant  que  la  République  ne  devait  con- 
naître axicune  considération ,  et  qu  elle  serait 
toujours  assez  riche  avec  du  fer  et  du  pain. 
Marseille  vit  bientôt  arriver  les  députés 
qui  avaient  assisté  au  siège  de  Toulon  ,  tôud 
gen^  que  la  voix  publique  désignait  comme 
très-dangereux  ,  tant  pour  leurs  opinions 
que  pour  leur  caractère  :  ROBESPIERRK 
jeune ,  digne  émule  de  son  frère ,  était  de  ce 
nombre  ;  son  nom  seul  inspirait  Teffroi. 
Ricord  ne  parlait  que  de  terreur ,  et  toutes 
ses  actions  tendaient  vers  cet  affreux  régime. 
Gasparin  et  Salicetti  leur  étaient  adjoints  : 
ce  dernier  ne  manquait  pas  de  moyens ,  qu£ 
n'en  étaient  que  plus  dangereux  ,  puisqu'il 
les  consacrait  tout  entiers  à  la  tyrannie. 
,  Malgré  cette  recrue  de  Montagnards  , 
Pomme  et  Charbonnières  restèrent  quelques 
tems  à  Marseille  ,  et  prirent  part  à  tout  ce 
qui  sy  passa.  Le  premier  ne  quitta  cette 
ville  que  le  21  brumaire  an  2  (  1 1  novembrr,  . 


des  BoucheS'dU'Rhône.  ^  119 

1793)  ;  son  collègue  Favait  devancé  dès  la 
veille. 

Les  Députés  qui  restèrent  dans  Marseille , 
travaillèrent  de  concert  à  porter  le  dernier 
coup  à  son  existence  politique.  Par  un  de 
leurs  arrêtés  ,  ils  Timposent  à  une  somme 
d^  quatre  millions.  Une  contribution  aussi 
cxhorbitante  jette  la  consternation  dans 
Tame  des  Marseillais  ;  leur  fortune  est 
sapée  dans  les  fondemens  ;  les  arts  sont 
renversés  ;  les  ateliers  se  ferment ,  et  les 
travaux  cessent.  La  classe  ouvrière  ,  dénuée 
de  ressources  ,  se  jette  du  côté  des  Repré- 
séntans  du  peuple  ,  dont  elle  reçoit  une 
solde  journalière ,  iqui  augmente  les  soutiens 
de  l'anarchie •  Le  tribunal  criminel ,  de  son 
côté,  donne  plus  d'activité  à  ses  assassinats^ 
Le  jpremier  brumaire  an  2  (2 2  octobre  1 7  gS), 
Imberty  ,  Procureur-syndic  du  département 
des  Basses-Alpes  ,  est  conduit  à  Téchafaud* 
Les  incarcérations  se  multiplient  ;  les  mai- 
sons des  Frères  Ignorantins  ,  les  Dames 
Sainte-Clair  et  Saint-James,  reçoivent  dans 
leur  enceinte  onze  cents  citoyens.  La  ven-, 
geance  haineuse  ,  avant  de  dresser  leur 
échafaud  ,  épuise  ses  fureurs  par  les  vexa- 
tions les  plus  violentes  et  les  privations  de 
toute  espèce,  et  trente -personnes  y  périrent 
d'inanition  ,  ou  furent  consumées  par  le$- 
maladies  pestilentielles» 
.  H  4 


120     Sang  répandu  dans  le  département 

La  société  populaire  ,  menée  par  des 
jeunes  gens  inexpérimentés  ou  sanguinaires, 
se  livrant  à  toute  la  fougue  de  leur  carac- 
tère ,  criait  sans  cesse  kxïr  la  lenteur  du 
tribunal  ,  et  demandait  des  visites  domici- 
liaires. Nombre  d'excellens  patriotes  furent 
compris  dans  les  mesures  quils  prirent , 
dans  rînteiltion  ,  à  ce  qu  ils  disaient ,  d'o- 
pérer le  salut  public. 

Le  tribunal  criminel  continua  dés-lors  ses 
sanglantes  expéditions  jusqu'au  29  bru- 
maire (  19  novembre  ).  Le  3o  ,  il  assista  à 
une  fête  nationale.  Des  rochets  roulés  et 
amoncelés  sur  la  place  ,  reçoivent  le  nom 
de  Montagne-^  le  buste  de  Marat  est  pro- 
mené solennellement  au  milieu  de  la  Gardé 
Nationale  ,  de  la  Société  populaire  et  dei' 
Autorités  constituées. 

Le  tribunal  reprit  ses  fofic'tiohs  jusqu'au 
Ô6   nivôse   (  1 5  janvier  17^4)  ,     qu'il  tînL 
.sa    dernière    séance.  Deux  cent   quaratltè*^ 
individus  furent  envoyés  à  Féchafaud. 

Depuis  six  àiois  ,  Marseille  Souffrait  avec, 
une  patiente  résignation  les  coups  dont  la 
tèrféur  rassàssihait.  Toulon  était  J>ris  ,  et 
Ton  présbmait  qiie  cette  victoire  iserait  le 
signal  de  la  générosité  et  du  pardon  ;  mâià 
la  perquisition  faite  dans  les  maisons  dei 
Touldnaîs  procura  quelques  papiers  qui 
attestaient  une  espète  de  correspondance 


des  Bouches'du-Rhênè.  ifi 

8VCC  les  habitans  de  Marseille.  Alors  ,  les 
Représentans  Barras  ^  Salicetti  \  Fréron  et 
Ricord  firent  afficher  sur  les  murs  de  Mar- 
seille une  proclamation  dortt  le  considérant 
attaqué  le  patriotisme  des  habitans  de  cette 
ville ,  en  l'accusant  d  avoir  la  première  levé 
Fétendard  de  la  rébellion;  d'avoir,  pair  ses 
commissaires ,  cherché  à  soulever  lès  dépar- 
temens  circonvoîsins ,  et  employé  la  terreur 
pour  forcer  les  paisibles  habitans  des  cam- 
pagnes à  Tinsurrection.  On  leur  reproche 
d  avoir  insulté  la  Représentation  nationale  , 
en  fesant  arrêter  ses  Commissaires  ;  et  ea 
fesant  marcher  des  bataillons  contre  lesf 
Croupes  dé  la  République  ;  d  avoir  assiégé  , 
pris  et  saccagé  les  villes  qui  lui  étaient, 
fidèles.  La  Municipalité  est  particulièîemcnt 
àdcusée  de  rébellion  ,  coftime  ayattt  tenïé^ 
de  soutenir  sa  désobéissance  par  la  îprce; 
^rmée  ;  enfin  ,  .  sa  correspondance  at^ec 
Toulon  ,  ^e§  efforti  pour  lî^rrër  ^on^fovv 
ayx  AnglâîS/Tels  sont  lès  prétendu^  griefs* 
qui  servent  dé  base  à  un  arrêté  deè  Répr^^ 
s^entans  ,  conçu  en  ces  termes  :  .^ 

Les  Représentans  du  Peuple ,  arrêtent  :   l'^.  Le 
nom  de  'Marseille  ,  que  ^orte  ,éticore   Cette  tApi- 
mune  crinaînelle  ,  sera  changé  ;  la  Convention  na- 
tionale setâ  ifivlié  de  lui  en  dbiîher  UÀ  autre  ;  pfo-^ 
visoircnrent    cile  restera  sans  ncm  ,  et  portera  cette" 
dénomination. 

14^.  Les  repaires,  ou  se-tenàîentles  assemblées  des 


12d     Sang  répandu  dans  te  département 

Sections  et  du  Comité  général,  seront  rasés,  et  un 

f>otëâu  ,  qui  rappellera  leur  révolte ,  sera  dressé  sur 
e  terrein  qu'ils  occupaient. 

3o.  Est  excepté  de  cette  mesure  le  lieu  de  rassem- 
blée de  la  Section  n^.  1 1 .  qui  seule  a  donné  tant  de 
preuves  de  son  attachement  pour  Tunité  et  Tindivi- 
sibiUté  de  la  République: 

4®.  Il  sera  fait  un  inventaire  exact  des  meuble» 
et  effets  garnissant  les  lieux  à  démolir.  Ces  meubles 
et  effets  seront  péalablement  enlevés  pour  être 
vendus  conformément  à  la  loi  sur  la  vente  des  biens 
des  rebelles  ;  les  matières  d'or  et  d'argent  seront 
portées  à  la  monnaie. 

L'Administratioix.  du  district  désignera  le  lieu  oà. 
seront  portés  les  titres  et  papiers. 
'  L'Administration  des  poudres  et  salpêtres  aura , 
aluprcs  de  chaque  édifice  à  démolir  ,  un  préposé- 
pour  y  recueillir  et  faire  valoir  les  terres  salpêtréc*. 
.5''.  Le  Commandant  militaire  de  la  Commune  dç 
sans^nom  est  chargé,  sous  sa  responsabilité  ,  de  faire 
eiécuter  le  présent  arrêté  au  moment  de  sa  réccp-' 
tion  ;  il  chargera ,  en  outre ,  la  Commission  munici- 
p^c  provisoire  ,  d'exécuter  sur-le-champ  les  dispo- 
sitions relatives  aux  démolitions  des  lieux  où  se 
tenaient  les  sections. 

6^.  Le  présent  arrêté  sera  proclamé* ,  publié  , 
imprimé  et  affiché  dans  la  Commune.de  sans  nom  , 
et  dahs  tous  les  départemens  méridionaux. 

,Fait  au  port  de  la  Montagne  ,  le  7  nivôse  ,  l'an  2* 
rfc^a  République  (  27  décembre  1798  ). 

Signé  ,    Fréron  ,    Paul   Barras*  ,  Salicetti  , 
•  ,.       BlCO^RD  (i). 

Ainsi  Marseille  voit ,  pour  airisi  dire  , 
son  tombeau  s'ouvrir  ;  elle  est  déjà  effacée 

(i)  Le  ci-devant  marquis  Lapoype  ,  beau-frère  de 


'  des  BoucheS'dU'Rhàne.    ^        isi5 

du  nombre  des  villes  existantes.  Une  cor- 
respondance insignifiante ,  nécessitée  peut- 
être  par  des  raisons  de  commerce  ,  ramène 
la  mort  dans  ses  murs.  Cette  cité  avait-ét^ 
fondée  par  une  ancienne  colonie  de  Pho- 
céens ,  qui  vinrent  chercher  la  liberté  sur 
les  côtes  de  Tancienne  Gaule  narbonnaise  ; 
sa  splendeur  et  son  commerce  se  soutinrent 
au  milieu  des,secousses  de  TEmpire  romain, 
et  des  irruptions  des  peuples  barbares  q^ii , 
à  différentes  époques  ,  ravagèrent  jses  pro- 
vinces. Soumise  ensuite  aux  lois  des  Francs , 
toujours  florissante  au  milieu  de  nos  dissen- 
lions  intestines  et  de  nos  guerres  d'opinion , 
elle  voit  flétrir  et  s'anéantir  sa  renommée  , 
son  industrie  et  sa  richesse  ,  au  nom  de 
cette  liberté  ,  sous  les  auspices  de  laquelle 
elle  avait ,  depuis  nombre  de  siècles ,  porté 
ses  dieux  pénates  sur  les  parages  de  la 
Méditerranée. 

Lesmêmes  Représentans  du  peuple  prirent 
un  autre  arrêté  pour  organiser  une  Com- 
mission militaire.  Ils  la  composèrent  de 
quatre  membres  ,  trois  desquels  pouvaient 
procéder  au  jugement  de  ces  nouveaux 
coupables.  Un  jeune  homme  de  vingt  ansLj, 

Fréron,  avait  été,  après  le  sîége  de  Toulon,  nommé 
commandant  de  la  place  de  Marseille,  et  chargé  par 
les  Représentans  de  l'exécution  de  leifrs  arrêtés. 


124  Sang  répandu  dans  le  département 
du  nom  de  Louis ,  qu'il  crut  devoir  eîFacer 
par  celui  de  Briitus  ,  présida  ce  nouveau 
tribunal,  dont  l'institution  jeta  une  épou- 
vante générale.  A  Tinexpérience  de  Tâge  , 
ajoutez  rignorance  profonde  de  ces  juges , 
à  qui  les  tyrans ,  en  leur  remettant  le  glaive 
vengeur,  ne  demandaient  sans  doute  que  dé 
frapper  aveuglément.  Le  président  Brutus 
ne  savait  pas  rédiger  lé  moindre  arrêté; 
l'énoncé  de  leur  jugement  portait  toujours 
que  les  condamnés  périssaient  pouf  avoir 
porté  les  armes  contre  la  République.  Ce 
protocole  inepte  et  bannal  assassinait  iili« 
distinctement  des  hommes  infirmes  et  sép- 
tuagénaires.  * 

Voici  larrêté  de  Forgahisation  de  cette 
Commission. 

Les  Représentans  près  les  années  et  les  départe- 
mens  du  Midi , 

Considérant  que  les  provocateurs  de  la  guerre 
pivile  lèvent  insolemment'  la  tête  ; 

Que  les  plus  acharnés  sectionnaires  échappent  ai^ 
supplice  ;  que  dès  négocians  ,  Sangsues  du  peuple  , 
continuent  à  afl&mcr  leuts  concitoyens'  en  se  jouant , 
à  TombrC'  de  ce  tribunal ,  des  lois  lés  plus  précises  ç 

Considérant  que  les  amis  ,  les  correspohdans  de 
Tinfâme  Barbaroux  ,  mis  hors  de  la  loi  comme  lui , 
ont  trouvé  grâce  devant  ce  tribunal  ;  qu'au  lieu 
d'exercer  lc«  vengeances  nationales  ,  c'est  plutôt 
des  haines  particulières  qu'il  paraît  assouvir  ; 
.  Arrêtent:  i^.  Les  Membres  du  tribunal  révolution- 
naire seront  renouvelés. 

2^.  Il  sera  nommé  parles  Représentans/du  Peuple 


des  BoucheS'dU'Rhône.  ii^S 

une  Commission  militaire^  pour  juger  les  prévenus 
de  crime  de  contre-révolution. 

3^.  Les  scellés  seront  mis  sur  les  papiers  du 
greffe. 

4*^.  Maillet,  Président  de  ce  tribunal,  et  Giraud, 
accusateur  public  ,  seront  mis  en  état  d'arrestation t 
et  traduits  pardevant  le  tribunal  révolutionnaire  à 
I^aris,  comme  prévenus  d'avoir  pré  variqué  dans  leurs 
fonctions ,  et  de  complots  fédéralistes  ;  les  scellés 
seront  mis  sur  leurs  papiers. 

5^.  Les  Représentans  du  Peuple  nomment  pour 
membres  de  la  nouvelle  Commission  militaire  ,  les 
citoyens  Frutus,  Lefebure,  Thiberge  et  Lépine. 

La  Commission  pourra  juger  au  nombre  de  trois 
Membres. 

6**.  Il  sera  établi  un  tribunal  criminel  du  dépar- 
tement pour  juger  les"^délits  communs,  conformé- 
ment aux  lois  rendues  par  Tinstruction  criminelle  par 
jurés  ;  ce  tribunal  tiendra  ses  séances  à  Aix. 

L  Adipinistration  du  département  est  chargée  de 
{)rendre  les  mesures  les  plus  promptes  ,  pour  que 
ce  tribunal  entre  en  activité  sur-le-champ. 

7**.  Le  présent  arrêté  sera  proclamé  ,  publié  ,  im- 
primé et  affiché  à  la  diligence  du  Commandant  de 
la  place,  lequel  est  en  outre  chargé  des  arrestations 
et  transféremens  y  mentionnés. 

Fait  au  port  d&la  Montagne ,  le  17  nivôse  î  Tan  i 
de  la  République  (6  janvier   1794  ). 

Signé  ,    Fréron  ,  Paul  Barras  ,    Salicetti  ^ 
R1CORD. 

Cette  Commission ,  depuis  le  4  pluviôse 
jjusqu'au  i3  (  23  janvier  1794  au  premier 
février  ) ,  fit  périr  cent  soixante  personnes, 
file  eut  lastuce  de  mettre  e^  tête  de  son 
premier  jugement  le  texte  de  la  loi  du  19 
giars    1 7  93  ,  par   laquelle  la   Convention 


1.26     Sang  répandu  dans  le  département 

déclare  ne  vouloir  faire  ni  paix  ,  ni  trêve  avec 
les  aristocrates  et  les  ennemis  de  la  révolution , 
et  les  met  hors  de  la  loi. 

Quel  vaste  champ  une  pareille  loi  n'ou- 
vrait-elle  pas  aux  partisans  de  la  terreur  ? 
La  Commission  ,  toute  sanguinaire  qu  elle 
était,  trouvait  dans  ce  texte  une  espèce  de 
justification  de  ces  assassinats  journaliers , 
et  en  rejetait  en  quelque  sorte  toute  Thor- 
reur  sur  Danton ,  auteur  de  cette  loi ,  et 
sur  la  Convention  ,  qui  lavait  adopté  à 
Tunanimité.  Les  Représentans  en  mission 

'  ajoutèrent  encore  à  Tatroce  iniquité  de  cette 
jurisprudence  ,  en  nommant  pour  ses  or- 
ganes un  tribunal  composé  seulement  de 
trois  individus  ,  que  devait  présider  un 
nommé  Lacroix ,  guillotiné  depuis  à  Paris , 
avec  la  faction  Hébert.  Heureusement  sa 
nomination  n'eut  pas  lieu  ;  car  cet  Individu 
qui  n  avait  cessé  de  persécuter  les  patriotes, 
dont  il  avait  fait  traduire  un  grand  nombre 
au  tribunal  révolutionnaire  de  Paris ,  n'au- 
rait usé  du  droit  de  vie  et  de  mort  que  pour 

la  mort 

Enfin  le  Tribunal  criminel  et  cette  Com- 
mission envoyèrent  au  supplice  plus  de 
quatre  cents  individus  ,  dont  les  noms  se 
trouvent  dans  les  tom.  i  et  2.  Des  propos 
tenus  contre  la  Montagne  et  contre  Marat , 

*  dictèrent  l'arrêt  de  plusieurs.  On  cite  ,  à 


des  Bouches-du-Rhone.  ii27 

cet  égard  ,  une  jeune  femme  guillotinée 
pour  avoir  dit  que  les  Députés  montagnards 
lésaient  détester  laRépublique ,  qu'ils  étaient 
autant  dassassins  et  de  maratistes  ;  que 
Marat  était  un  atroce  scélérat  ;  que  la  Corday 
avait  rendu  un  service  signalé  à  son  pays  , 
en  le  délivrant  de  ce  monstre. 

Cette  Commission  eût  été  aussi  expé- 
ditive  que  le  tribunal  Fouquier ,  sans  l'em- 
pire qu'un  citoyen  avait  sur  le  président 
Brutus.  Il  Tempêcha  nombre  de  fois  de 
condamner  à  mort  une  infinité  d'individus 
simplement  suspects  d'aristocratie. 

Nou^  tairons  ici  les  outrages,  les  impré- 
cations qui  pleuvaient  sur  les  victimes  que 
l'on  conduisait  à  la  mort.  Il  y  a  lieu  de 
croire  qu'elles  étaient  commandées  par  leis 
Comités  de  Salut  public  et  de  Sûreté 
générale  ,  pour  faire  insulter  ,  jusqu'au 
dernier  mometit  leurs  victimes  ,  par  une 
populace  sans  frein.  Les  condamnés  ré- 
pondaient aux  criailleries  de  cette  horde 
furieuse  ,  par  le  sang-froid  et  le  mépris.  La 
mort  semblait  venir  à  leur  secours  pour  les 
délivrer  de  la  vue  de  ces  monstres.  Il  est 
cependant  essentiel  de  donner  une  notice 
de  la  correspondance  d'un  des  commis- 
saires du  Comité  de  Salut  public  avec 
l'Accusateur  public  du  tribunal  révolution-» 
naire  de  Marseille.   Il  commence  par  lui 


is8     Sang  répandu  dans  le  département 

faire  des  reproches  sur  la  lenteur  qu  il  met 
dans  la  condamnation  des  conspirateurs  ; 
ensuite  il  ajoute  : 

Je  citerai  toujours  Paris  ,  car  Paris  peut  servir  de 
modèle  en  tout.  A  Paris  donc  ,  Tcjrt  de  guillotiner 
a  atteint  sa  dernière  perfection.  S^nsson  et  ses 
élèves  guillotinent  avec  tant  de  prestesse ,  qu*on 
croirait  qu'ils  ont  pris  des  leçons  de  Cornus  ,  à  là 
manière  dont  ils  escamottent  leur  homme  ;  ils  en 
ont  expédié  douze  en  i3  minutes.  Envoyez  donc 
à  ParisTexécùteur  des  hautes-ceuvrçs  de  Marseille, 
faire  un  cours  de  guillotine  auprès  de  son  collègue 
Samson  ;  car  nous  n'en  finirons  pas.  Tu  dois  savoir 
que  nous  ne  te  laisserons  pas  manquer  de  gibier  d^ 
guillotine  ,  et  qu'il  faut  en  expédier  grand  nombris^ 
£n  outre,  je  ne  voudrais  pas  que  tu  fis  accompager 
ces  bougreS'fà  avec  un  tamDour ,  mais  avec  un  trom- 
pette, ce  qui  annonce  mieux  la  justice  du  peuple.. 

Il  faut  suppléer  à  la  promptitude  de  la  guilla» 
fine  ,  pour  électriser  le  peuple  ,  en  conduisant  sey 
ennemis  à  Péchafaud.  Il  faut  que  cela  soit  une  espèce 
de  spectacle  pour  lui.  Les  chants ,  la  danse  ^  doi- 
vent prouver  aux  aristocrates  que  le  peuple  ne  voifc 
de  bonheur  que  dans  leur  supplice.  Il  faut  en  outrcv 
faire  ensorte  qu'il  y  ait  un  grand  concours  de  peuple 
pour  les  accompagner  à  Téchafaud. 

Nous  ne  devons  pas  omettre  un  trait  qui 
montre  jusqu'où  peut  aller  Tabus  du  pou- 
voir. Pour  se  délasser  de  ses  arrêtés  fulmî-^ 
nans  ,  de  sa  correspondance  instructive  ,  de 
ses  fatigues  à  la  guerre  ,  il  fallait  bien  ,  au 
représentant  Fréron ,  des  objets  de  distrac- 
tions et  d  amusement*  Parmi  les  laïs  que 


des  Bouchti-dù-RMut.  it^ 

le  théâtre  offrait  sans  cesse  à  ses  regards  s  ii 
avait  distingué  la  j eune  Masson, 

Aussi  -  tôt  un  honnête  Agent ,  dont  lé 
Bom  obscur  ne  mérite  pas  d'être  cité  ,  est 
chargé  des  premières  propositions  ;  mais 
au  grand  étonnement  de  celui  qui  disposait 
tout  à  son  gré  ,  il  nest  pas.  écouté.  On. 
apprend  que  la  refusante  a  pour  chevalier 
lé  colonel  du  régiment  dliussards  de  Ber- 
chiny  y  alors  en  garnison  dans  cette  villel 
Aussitôt  le  Proconsiil  fait  signifier  au  co* 
|onel(le  citoyen  Bongon)  Tordre  de  quitter 
Marseille  dans  le  jour  ,  sous  peiné)  d^êtr^ 
traduit  au  tribunal  révolutionnaire  ,  et  att 
régiment,  celui  de  partir  dans  la  nuit, 

'Nous  ne  devons  pasjoublier  que  le  citxs^ûtk 
Bouf^,  brave  et  intrépide  militaire ,  après 
t^âtre  souvent  signalé ,  est  mort  glorieuseJ^^ 
laent  i  larmée  dltalie»  Le  mérite  reconnut 
de  cet  officier  n'a  pas  empêché  que  Fréron  \ 
lors  de  sa  seconde  inission  dans  te  Midi  ^ 
voyant  toujours  endui  un  rivai  dangeveùx'i 
le  destitua  de  .sa  pleine  autorité.  ^ 

,  £nfin ,  le  g  thermidor  vint  abattre  Té* 
pouva^tabie  colosse  de  la  tyrannie  ;  les 
Agens  révolutionnaires  des  contrées  méri^ 
djjonnales  ,  étourdis  de  cette  chute  ,  cher- 
chèrent à  se  mettre  à  Fabri  des  suites  ,  en 
joignant  leurs  applaudîssemens  à  Fappro* 
badoa  universelle.  Mais  le  regret  d'une  Au« 
Tome  VI.  i 


1 3o      San§ ripaiidii  dans  le  département 

Ib^itésappée  dans  ses fondemens,  imprimait 
sur  leurs  figurefc  une  honte  inèfibçable; 
Cet  ab^cticm  où  ils  se  trouvaient  réduits, 
aurait  dû  suffire  aux  ressentimens  de  ceux 
iquils  avaient  opprimés  pen4aBi;faéur  ty^ 
xaome  •  ;•  mais  cette  modération  sage  et  gé^^ 
HéteùsCLï  ne.  convenait  guère  à  rex^ltatioU 
ides.caTîârtères  injéridionaux. 
•  ijLe  verdgede  la  vengeance  »feVmpara;j  dé 
toutes  .les  tê«e£b  La  Convention  liavaît  mis 
laxrlémenceà  lordireidu  jour.:  lesirîbun«uk 
déviaient  instruire  .cpncrê  ^les  cou^i^blês  ; 
maib  des  hommes  .dont  lés  plâiesM étaient 
ioncore  récentes  .^i  écartèrent  la  jjcléménoâ 
et  les  lois.  5  se  travestirent  en  bourrjeamxv 
jOfe'fisxiouVelèrent  à  ^siQO  \  lieues  de  iFasis  les 
$^i^es  désastreuses,  du  3  septembi!e«  loLmeH 
vifei etkcoxe  flotter.' sur '^cs;  vagues,  les^  tristes 
victimes  d'une  nouvelle  révolution  .dans 
Jer/côiîps:  politique;:!  ^      ../..:  :> 

^  f  iMàjîéille  ,  Aixl,  ;  Arles  ^  :  Tarascoo)  onf 
^t^fjfoi^âtrie  de  oes'houvelli^  atrocitésr 
Les  Repré^eiitans  :  nxuôhtagnabdsiji  avaient 
excité ^:  favorisé  les  premiers,  massacrés, 
qu'ils  avaient  en  quelque  sorte  -léïgaliséK 
Dé  nouveaux  Représèntans  se  taisent  de-? 
vant  de  nouveaux  ^assassinats.  Ils  parlaient 
de  .  la  justice  ,  et  pas  un  arrêté.,  n'essaya 
d'enchaîner  des  attentats  qui  usurpaient 
les  droits  de  la  justicci  Violateurs  effrontés 


des  nouvellç5  lois  qu  ik  ont  proclamées  , 
elles  devieijinent  entre  leurs  mains  un .  filç 
si  faible  quÇ:  le  moindre  souffle,  le  brise  j 
tandis  que:  leuts  prcdécç^purs.  pouvaient , 
ea  quelque  sorte  exçus^f  Jeur3.  écarts  s^n-.. 
gilinaires  par  cette  foule  de  lois  dont^Ja 
conséquen^ce-futU  terreur  générale.    . 

Isnard,  Cliambon-Latoi:jr,.  Cadroiy,  Jour- 
dan,  Gaultier  ,  MAfiett^.^  Durand-Mûllaue; 
parurent  tour|^-tour  dans,  ces  coniréesavjec 
des  pouvoir^  illimités.  Éa.jvaip  ,  .disent-ils 
pqùr  leur  j^jstificatipn. ,  q^  aucun,  massacre 
Ufjr  fijt  commis  de  leur  .tems  ayant. .cçjuî 
des  prisonniers  duj  Fortrjean.  Il  est  cansi 
taté  que  différens  ijidividùs  c^e  tout  âge  et 
de  toutjsexe  furent  ir^pitQYablemem  égorgés 
par  des Jipmmes  qui:^ej4^»içn^^  avec,  impu- 
dence les  vengeurs  de  .VVumanité.  Cejsi 
affreuses  lois  icje  rejprésaiiUes  eussent  mérité 
peut-être  quelques,  applaùidj^pemens  dan? 
le  tems  où  les  frères  ,  le^  parens  ,  les  ^amis 
de  ces  terribles  vengeurs  courbaient  "leiii; 
tête  sous  la  hache  des  tyrans  ;  mais  ces 
tyrans  sont  désarmés  ,  réduits  à  Timpuis-j 
s^ice„  et  ;vous  les  assassinez  !  !  !  Il  failaij 
biçn  plutôt;  les  laisser  survivre  à  votre 
Jtriomphe,  les  écraser  sous  le  poids  d'une 
honorable  générosité  ^  et  les  condamner 
au  long  supplice  du  spectacle  de  vos  vertus 
et  de  votre  bonheur, 

I  2 


i'5i     Sang  répandu  dans  le  département 

Les  assassins  formés  encompagnie-franchc, 
àômmées  de  Jésus  et  du  Soleil ,  compriment 
^ancienne  terreur  par  la  terreur  ,  et  ven- 
gent l'assassinat  par  lassassiihit.  Pour  nou^ 
en  convaincre  ,  parcourons  les  massacres 
partiels  commis  avant  ceux  du  Fort-Jean, 

Vincent /yi^<^  du  tribunal  du  district  Aé 
Sisteton,  et  Breyssaud,  administrateur  du 
même  district ,  succombèrent  sous  les 
poignards.  La  mort  de  ce  defrïter ,  racontée 
par  son  propre  fils,  fait  frémir.  Ce  citoyen 
avait  d^àboird  été  arrêté  par  ordrç  de 
Mwo/Ai^n ,  secrétaire  du  Représentant  Gaul- 
tier ,  et  relâché  par  ordre  du  Comité  dé 
Salut  public.  Arrêté  une  seconde  fois  par 
èrdre  dû  même  Mévalhon  ,  il  est  assassiné 
eh  arrivant  à  Sisteron.  Couvert  de  blessures; 
en  le  laisse  pour  mort.  Quelques  personnes 
s'appercevant  qu'il  respirait  encore ,  le 
font  transporte!"  à  rhôpital.  Les  Assaçsîn^ 
apprennent  que  leur  vicâme  leur  a  échappé, 
aussitôt  ils  viennent ,  la  nuit ,  à  ITiôpital  ; 
Fenlèvent  ;  ilç  le  lient  dans  un  draps  ,  lé 
lancent ,  à  forcé  de  bras  ,  contre  les  murs  ; 
et  son  corps  couvert  de  meurtrissures  ,  çsi 
précipité  d'une  fenêtre  sur  le  pavé.  Le* 
Assassins  descendent ,  le  traînent  au  rivagç 
de  la  Durance  ,  et  ses  membres  sont  coupés 
par  morceaux  et  jetés  dans  les  flots* 

Ces  deux  meurtres  avaient  été  précédée 


des  Bouçhes-dU'Rhont.  r3j3 

4^  plusieurs  autres  commis  également  dans 
les  Communes  environnantes  de  Marseille. 
Le    ig   nivôse  ,   an  3  ,  (  8  janvier  1795  ) 
,  Toussaint  Leblanc  ,  âgé  de  rg  ans  ,  fut  tué 
à  coups  de  baïonnettes.  Lt  26  floréal ,  (  i5 
mai  J   Vallon^  cordonnier,    fut    haché    à 
.  coups  de  sabre  ^  ainsi  que  Jean  Bain ,  cof- 
donnier  ^  âgé  de  3  2  ans«   Le  2  prairiat, 
.  (s  1  mai  )  réponse  de  Maillet ,  Président  du 
tribunal   criminel  de  Marseille  ,  Jean  Ra- 
chegal ,  cordonnier  ,   et   Grai ,  dégraisse^ 
d'habits\  furent  trouvés  assassinés  en  difF4- 
rens  endroits.   Le    7   prairial,    (26  mai] 
Fraguier  père  et  fils  furent  massacrés.  Lis 
l3  prairial  (icr.  juin)  François Jullien ,  cafc- 
iier,François-Ripère,€ribleur,  ttLouisJulien^ 
dit  Sevéran  y  furent  tués.  Le  27  prairial., 
.(  l5  juin  )  Pierre  Louvet ,  dragon  ,  fut  ren- 
versé d'un  coups  de  pistolet.  A  cette  même 
époque  périt  Michel  Fressun  ^  caporal  de  la 
83 me.    demi  -  brigade.   Le  même  jour,, 
Jx>seph-Roussel  fils ,  offici^sr  municipal ,  fut 
tué  d'un  coups  de  fusil.  Le  i3  messidor, 
(premier  juillet)  Courbon  fut  assassiné  dans 
les  prisons  de  Lambesc.  Dans  le  cours  de 
fructidor  ,  Fournier ,   gendarme  fut  tiré  4e 
ibrce  de  la  prison  de  Château-Renaud  ,  et 
assommé  par  des  inconnus.  Le  premier  jour 
complémentaire    (17    septembre)    Mattùi 
,j>ère  et  ses  deux  fils  ayîint  voulu  se  révolter 

I  o 


'i34  Sangfêpandu  dans  le  département 
contre  les  gendarmes  qui  les  escortaient , 
en  furent  massacrés,  Claude  Qur and  tombai 
Sous  le  fer  des  assassin?  à  Tarascon.  Granet  » 
ancien  Pré'si'dent  du  département  des 
'Bouchés  -  du  -  Rhône  ,  fut  massacré  par  le 
'peuple,  à  Salon  le  16  prairial  ,^  (4  juin)  :  on 
lavait  arrêté  malgré  les  efforts  de  la  Muni- 
cîpalîté.  Le  3  messidor,  (  23  juin  )  Tûiïle^ 
^cùisinîtr,  Memfere  dun  Comité  révolution- 
inairè*,  fut  déchîïé  en  arrivarii  à  Salon,  Les 
tïômmés  Dauphin^  Languin,  Chaileau,  Mare- 
' rail e  ^'tt  Ravel  ont  été  assommés  à  coups  de 
,bâton;  comme  on  lés  conduisait  à  la  maison 
'-iParYët;  Truchement ,  ex-'commissaire  natio- 
nal du  district  de  Salon;  Bormard ^  ei- 
agent  du  même  district,  tiLarduiot^  ont 
été  assassinés  dans  les  prisons  d'Aix,  Le  4 
thermidor  ,  {  2î  juillet)  Jean-Martin  Mau- 
reau  fut  tiié  à  coups  de  sabre,  A  Eyragues  , 
le  fils  de  Bernard^  huissier  ,  jeune  homme 
de  22  ans  ,  fut  assassiné. 

Enfin  arriva  Févéïiement  désastreux  du 
Fort-Jean,  Cette  prison  était  remplie  ,  il 
est  vrai ,  des  aveugles  instrumens  du  gou- 
vernement de  la  terreur  ;  Tindignation 
publique  s'élevait  de  toutes  parts  contre 
eux.  On  ne  s'imaginera  pas  sans  doute 
que  la  masse  pure  du  peuple  ,  dans  cette 
ville' plus  qu'ailleurs,  ait  trempé  ses  main& 
dans  le  sang.  Il  y  'eut  des  meneurs  ;  queils 


••'•'■:..  des  Bvuches-^dû-RhdiU.  < '*•  i55 
flont-ils  ?  On  Fignore;  mais  des  Repïésen^ 
tans,  revêtus  de  pouvoirs  illimités;  niaise 
Cadroy  ,  Isnard ,  Chambon  devraient  -  ils 
rignorer  ?  II  fallait  un  prétexta  ,  et  les  pre- 
miers jours  de  prairial  ,(20  mai)  on  juge  î 
i  propos  de  faire  insurger  les  ouvriers  de 
Tarsenal  de  Toulon,  Le  motif  spécieux  de 
cette  insurrection  fut  que  les  pçs^nniers 
détenus  à  Marseille  devaient  être  4^ssa-' 
crés  avant  la  fin  du  jour.  Ils  accourent  pour 
les  délivrer.  Après  avoir  pillé  le  magasin 
des  armés  v,  leireprésentant  Brifnet  veut  en 
vain  rétablir  le  calme  ;  après  de  longs  et 
inutiles  efforts ,  il  se  retire  chez  lui  ;  et 
dans  son  désespoir  ,  il  se  brûle  la  cervelle.  - 

Cependant,  au  bruit  de  la  marche  des 
révoltés  ,  les  habitans  de  Marseille  étaient 
plongés  dans  la  stupeur.  Isnard  qui  était 
à  la  Maison  commune  ,  paraît  sur  le  balcqn, 
et  dit  :  «<  Quoi!  Citoyens,  vous  manquez* 
t>  d  armes  !  Eh  !  déterrez  les  ossemens  de 
>f  vos  frères,  de  vos.  amis  et  de  tant 
»»  d'hommes  égorgés  par  la  terreur,  et 
»v  suivez-moi.  ?>  Ce  peu  de  mots  électrisè- 
rent  tous  les  habitans.  Deux  bataillons  se 
forment  aussitôt,  et  aidés  de  ceux  d'Aix  , 
ils  enveloppent  et  sabrent  les  révoltés»   ' 

Un  grand  nombre  est  fait  prisronnier  j 
on  les  conduit  en  triomphe  à  Marseille  ,. 
et  la  plupart  périssent  s\ir  Téchafaud^,  Une  • 

1  4 


l3.$     Sang  répandu  daAs  le  dépdfUment 

soixantaine  de  Marins  trouvés  sur  le 
chemin  de  Beausset  (i),  sont  égaiemefil 
envoyés  à  la  mort. 

A  cette  nouvelle  ,  quatre  mille  cinq  ceati 
Matelots  déaertent  Totdon.  Ils  se  réfugieiit 
dans  les  campagnes  pour  se  mettre  à  Tabri 
de  toutes  poursuites.  Un  assez  grand  nora-i 
bre  se  «endit  à  Marseille  ;  ils  finirent  pat  sa 
réunînaux  compagnies  de  J^éim  et  ànSùléU 
pour  marcher  contre  les  prisonniers  do 
Fort-Jean. 

A  midi  y  la  compagnie  du  Soleil ,  conm 
mandée  par  Robin  ,  s'empare  du  Fort  €€ 
des  clefs.  On  se  disposait  à  a^aquer  le 
numéro  premier,  qui  opposa  de  la  tési^ 
tance.  Us  se  portèrent  alors  à  la  Chapelle  » 
et  y  massacrèrent  tous  ceux  qui  y  étaient. 

Ali,  Robin  j  Durand ,  Roche  ,  Lesellie9 
et  autres  des  compagnies  de  Jésus  se  por-J 
tèrent  dans  les  divers  cachots  pour  y  mas^ 
9acrer  ceux  qui  avaient  échappé  au  canoci 
chargé  à  mitraille,  à  Tépaisse  fumée  de 
la  paille  mor cillée ,  mêlée  à  celle  du  souftre.^ 
Le  cachot ,  n^  6  ,  se  battit  long-uems  ^  fnai* 
k  feu  mit  fin  à  la  résistance  ;  tout  périt.  Le 
numéro  9  après  avoir  été  incendié  ,  ftit 
balayé  par  un  coup  de  canon  à  mitraflle  f 

'  (i)  Ces  matins  étaient  du  nombre  de  ceux  qui 
ftisillèrent  à  Toulon,  après  Tentrée  de  Tarmée  de  la 
Mùntttgnê. 


des  SoucheS'dU'Rhône.  i3ï 

pfeicé  vîs-à-vîs  sur  une  brèche  de  la  porte. 
Le  numéro  8  fui  égorgé  en  entier.  Enfin , 
sur  les  dix  heures  du  soir,  les  Représentans 
arrivèrent  et  firent  cesser  le  carnage.  Le 
Commandant  de  la  place  s'empara  du  Fort  » 
harangua  la  multitude  ,  et  Tinvita ,  au  nom 
ëe  la  loi,  à  cesser  cette  boucherie.  Le» 
Assassins  applaudirent  et  se  retirèrent.  La 
coflipagnie ,  dite  des  Enfansdu  Soleil ,  sontt 
éa  prisons  en  disant  :  La  victoire  est  à 
iidus.  On  £iit  monter  à  soc  le  nombre  des 
îpriatomïîers  massacrés  dans  le  Fort,  dont 
aoUs  n'avons  pu  nous  procurer  que  les 
Abms  stnvàns  : 

JsKqnes- Vincent  Etienne.  Pcrrîii,  jugeau  tribunal 
lévôlutidnnaire  de  Patis.  Sotiche  ,  employé  aux 
charrois.  Payeme,  cordonnier.  Boycr,  cordonnier, 
Pons  T  cord.  Renaud,  cord.Petreman  ,  cord.  Gurét , 
cordonnier.  Démarre,  instituteur.  Mille , porte-fcix. 
Joseph  Marcellier  de  Mont-Meiron ,  Pierre  Bttuf 
d'AutioL  Joseph  Ferreol.  Bi^ot  du  Châtclet. 
PnttTe-Michel  d'AUauch.  Jean-Baptbte  Paumond  ^ 
d'Attbagne.  Bonnefay  d'Auriol.  Laugicr ,  cordon* 
nier,  Beinaud ,  de  Garpentraj.  Ferrand  d'Anbagne. 
Jacques  Cordier.  Dominique  Bonni ,  cordonnier. 
Jean  Aubert,  de  Pourrière.Jean  Garoutté,  de  Pour- 
rîère^  Laurent  Barthélémy,  de  Fourrière.  Mathieu 
Icard,  de  Fourrière.  Joseph -Claude  Bouchard ,  de 
Poûrrière.  Antoine  Guilloher.  Ricaud père.  Ponliéu*. 

Iean-Baptiâte  Portai.  J.Julien.  Joserand ,  ton.  Jean- 
laptiste  Ricord ,  fih  Ponlîeur.  Joseph  Escan ,  tailleur 
d*babit.  Laugier  fils.Hyadnthe  Manéille  ,  tonnelier. 
Louis  Penellon  ,  marchand  de  coton.  Jean-Pi errt 
Michel.  Jean-Pierre  Coyol.  Jean  Just.  Joseph  Gan- 


i35     Sang  répandu  dans  le  département 

teaume.  Joseph  Seret.  Joseph  Massclin.  Reynaiid.. 
Maximin  Bônifaix.  Nicolas  Martin.  Pierre  Bceùf. 
Jean-Baptiste  Paumes.  Clément  Second.  Astie^  fils^^ 
menuisier.ProbasseSavau.JosephjBizot.Jean-IkiptistC 
Laugier ,  cordonnier.  Jacques  Michel,  dit  BjaQC. 
Jean-Claude  Bouchard.  Antoiije  Guillofier.  Françoîà 
Ainphoux.Làùrent  Barthélémy  .Jean  A  ubert.  Mathieu 
Icard.  Joserahd,  J ean- Baptiste.  Ricord  fils.  Antoine 
Feraud.  Louis  Guillot.  Etienne  Reynaud.  Jeat^ 
Bàpstîste  Portai.  Joseph  Julien.  Jacques  Cordier , 
Dominique  Bonin.Jos^tfEscau.  François  Matfiïîcr* 
Roubaud.  Félix  Paul,corcr.  Joseph  Petroman.  Antoine 
Merle.  Ant,  Payernc .Jacques  Etienne.  Ant.  Guérjjft^ 
Louis  Bennet.  Jean-Baptiste  Souche.  Pierre  Deinarre* 
Antoine  Boyer.JeanJustruel.  Bernard  Coq.  Laurent 
Reyboulet.  Jeanjoseph  Faure.  Louis  Agivot.''Om- 
chard.  Douvet.  Louis  Giraud.  J eanr Baptiste  Ljxtrci 
Philippe  Pelissier.  Marc  Salaisser.  Jean  Marra«» 
Joseph  Brun.  Augustin  Bondu.  Joseph  Bertrand. 
Claude. Talsel ,  de  Salon.  Penelou  neveu.  Antoine 
Vescio.  Ange  Reynaud.  Ignace  Laurent.  .Robjn 
Martin.  Laurent  Imbert.  Joseph  Portai.  Laurent 
Fouque.  Joseph  Mortan.  Claude  Moutret  ,  dit 
Bourguignon.  André  Giraud.  Denis  le  Seignior. 
Jean  Lexcasque.  Philippe  Gaussier.  Laforce.  Louis 
Lévêque.  Jean  -  François  Bonniud.  Uochepcnot. 
André  Gravier.  Hyacinthe  Manille.  François  Fonta- 
ncille. Jacques  Ricord. Jean-Bapiiste  Maigret.  Joseph 
Mauron.  George  Pastoret  (  piémontais  ).  Antoine 
Perrin  ,  commissaire  national.  Jean-^aptiste  Long. 
Mathieu  Manche  ,  père.  Noël,  dit  Saint-François* 
Galissard,  maçon.  Joseph  et  Claude  Bonnet,  frères, 
Firmin  Viil.  Guillaume  Thibaud  ^  dît  Balaqnet. 
Joseph  Lieutard.  Barrct  ,  père.  Flèche  ,  vtrieir. 
Gondard  ,  père  ,  cordonnier.  Velut.  Girard  , 
gendarme.  Rey  dit  Cassan ,  perruquier.  Jr^seph 
Mourre,  maçon.  Lachet  fils,  maçon.  Tombeau  ..fils* 
André-LanchiJicorriste.BcssierdeMouriés.Troujas» 


des  Bouchtî-du^Rhone.  tSg 

lEi  Thibois.  Jean*Baptiste  Mauche .,  ex«chanoine. 
Jean-Louis  Triale.  Noël  Baoulx.  Antoine  AngeUer, 
et  Pelissier  Foufnier. 

Le  6  prairial ,  (  25  mai  1796  )  iin  déta- 
chement d'hommes  dégujsés ,  s'empare 
par  surprise  du  corps -de-garde  des  prisons 
de  Tarascon  ,  et  les  détenus  y  sont  mas- 
sacrés au  nombre  de  vingt-quatre  ;  on  les 
tnûne  par  les  pieds  jusqu  àlaplate  formedu 
château,  d'où  on  les  précipite  dans  le  Rhône.  " 

Le  3  messidor  ,(21  juin  1 7  96  )  les  mêmes 
horreurs  se  renouvellèrent  au  fort  d'E- 
pragues  de  cette  ville  ;  les  mêmes  indi- 
vidus s'y  transportèrent ,  se  firent  ouvrir 
les  portes  ,  et  vingt-trgis  individus  ,  dont 
deux  femmes  ,  furent  égorgés  et  précipités 
dans  le  Rhône. 

Dans  un  autre  massacre ,  soixante -quinze 
Individus  sontprécipités  du  haut  delà  tour 
de  Tarascon  ,  élevée  de. deux  cents  pieds  , 
sur  un  rocher.  Leurs  corps  brisés  et 
meurtris  ,  sont  ensuite  jetés  dans  le  Rhône. 
De  nombreux  spectateurs  fesaient  retentir 
Tair  de  leurs  applaudissements  à  chaque 
chute  de  Tun   de  ces  malheureux  (i). 

(i)  Ainsi,  dànsla société, il  s'est  trouvé  des  hommes 
assez  atroces  pour  applaudir  au  supplice  de  leurs 
semblables  ;  on  en  a  vu  qui  ont  fait  retentir  l'air  de 
leur  joie  féroce  autour  de  la  guillotine  ,  comme  oa 
en  vit  alors  (à Tarrascon) 'assister  gaiement  à  ces 
massacres. 


140     Sang  répandu  dans  le  département         \ 

Le  S2  floréal,  (  1 1  mai  1796]  la  maisoh  \ 
de  justice  d'Aix  fiit  forcée.  Les  Assassins  ; 
s'étaient  saisis  de  deux  pièces   de   canon  \ 
quils    braquèrent    contre  les  portes.   La   ^ 
troupe  de  ligne  ,  Soit  foiblesse  ,  sôit  cotH* 
descendance  ,    fit  peu  d'efforts  pour  ga- 
rantir le$  détenus  ^  dont  trente  ,  partie 
lesquels    on    compte    plusieurs    femmeir^ 
lurent  égorgés.  Ce  désastre  aurait  dû  êtrfc 
prévu  ,  car  dès  le   matin ,   des  Individu» 
arrivés  récemment  de  Marseille  ,  avaient 
insulté  )es  prévenus  en  pleine  audieâe6«  - 

Les  EgoFgeurs ,  quelque  tems  après  $e 
9t  ttanâpoîtèrent  de  nouveau  à  Aix ,  en- 
foncèrent les  portes  de  la  prison,  et  tuèrettt 
Ratante-deux  détenus  ,  parmi  lesquels 
étaient  encore  des  femmes.  L  une  d'elles , 
la  fémâiè  Fassy  ,  allaitait  nti  enfetit  de 
quatre  mois ,  elle  le  setrait  contre  son  sein , 
dans  la  confiance  que  cette  innocente 
éréaturë  lui  servirait  de  bouclier  contre 
le  fer  dés  as^sâins  ;  son  nourrisoii  lui  est 
arraché ,  mi  lui  brûle  la  cervelle  ,  et  ott  la 
met  eii  piècés.Le  nombre  des  Individus  mas- 
sacrés dans  ces  différentes  circonstatices  st^ 
monte  à  peu  pfès  à  trois  cent  cinquante. 

Tels  sont  les  évènemens  désastreux  qui  ont 
eu  lieu  dans  ces  contrées  jusqu'au  3  messidor 
an  troisième  (21  juin  27  gS)  ;ils  se  sont  passée 
sous  les  yeux  de  plusieurs  Reprësentans 


des  Bouches  du  Bhone.  141 

du  peuple  qui  avaient  été ,  par  leur  silence 
ou  leur  lâcheté ,  complices  du  régime  de 
b  terreur.  Us  voyaient  égorger  de  sang-froid 
des  hommes    qui    navaient.  été  que  les 
îiûtrumens  passifs  d'un  plan  de  dépopula- 
tion arrêté  par  la  faction  de  la  Montagne. 
Le    représentant    Brunet  a  préféré   se 
donner  la  mort  plutôt  que  d'être  specta- 
teur de  tes  assassinats  qu'il  h^avaît  pu  em- 
pêcher.   Mais    vous   ,  isnard  ,    Chambon- 
tatour  ,  Cadroy  ,  qu'on  accusa',  avez  -  vous 
montrez  la  mrême  énergie  PLors  des  journées 
des  «  septembre ,  vous  siégiez  à  l'Assemblée 
nationale  ;  si  vous   ave;  '  sanctionnez   ces; 
horreurs   par    votre  silence  ,  vous   vous 
êtes  montré  dignes  de  .diriger  de  pareils 
massacres  ,   et  ceux  que  vous  avez  excités 
i  venger  leur  père ,   leurs  amis  ,  ne  vous 
coiisidèfent  pas  moins  comme  de  lâches 
assassins  de  votre  patrie.  Mais  craignez  I4 
justice  éternelle  qui  tôt  ou  tard  vous  attein- 
dra.   Vous  êtes  responsables  du  sang   qu^ 
s'est  versé  ,  et  qui  se  versera  peut-être  pen- 
dant   deux    générations.  Vos    noms  sont 
incrustés   dans  les  annales  de  sang  avec 
cette  épitdj>he  : 

Sous  r Assemblée  législative  , 
f  h  furent  complices  des  journées  de  septembre  ; 
Sous  la  Convention  , 
Ils  légalisèrent  les  assassinats^ 


14 st  Crimes  commis  à  foulon. 

Crimes  commis  à  Toulon  ,  sous  h  proconsulal^ 
de  Gaspariçi:  ,  Lester-Beauvais  ,  Rpbesr^ 

..  pierre  7 eîme  ,  Albitte  ,  Ricor-d  ^  Barras  ,f 
Fréron  ,  Salicetti. 

DEUXipobilespuîssaûs  détermînient  toutes^ 
les  actions  hifmaîaes,  la  cramif^  et /Vi/?ofr  ; 
ce  sont  eux  qui  déterminèrent  1^  livraison, 
de  Toulon  aux  Anglais  ,  et  le  crime  n*eii 
peut  être  justement  attribué  qu'à,  ceux  qui 
réduisirent  cette  cité  malheur,cuse  à  l'hu^ 
miWante  nécessité  de  demander  aux  en- 
nemis de  ïa  patfie  ,  protection  contre  le 
despotisme  dç.  ses  propres  tyrans  ,  et  as- 
sistance dans  §es  plus  urgeris  ^tjesoins. 

Le  fléau  de  la  terreur  pesait  ^ur  la  France  ; 
la  factipn  de  .la  Montagne. cpmptait  ses 
triomphes  par  ses  forfaits  ;.les  cadavres,  des 
Lyonnajis  n'avaient  point  encore,  suivant 
le  mot  de^Rons^n,  po7té  tépouvajite  aux* 
habitans  de  la.Méàiterranéc  \,mms\t  canon 
qui  réduisait  Lyon  en  cendrçs  retentissait; 
daixs  tout  le  Midi ,  les  hornblês  jnenaccs 
des  bandes  révolutionnaires  qui  assiégeaient 
Lyon ,  la  férocité  trop  connue  de  leurs 
chefs  assassins  ,  ne  permettaient  aux  Tour 
lonnais  consternés  ,  que  TefFroi  de  la  des- 
truction ,    que    Tattente   de  la   mort,  La 


Crimes  commis  à  Toulon.  i 45 

lÀort  !  elle  dévprait  déjà  ces  infortunés  ; 
k  famine  ,  organisée  avec  irii  dît  perfide 
far-  les  directeurs  suprêmes'  d'exteîtnîtia- 
liori,  cîéployait',  sur-tout  à  Toulon,  toutei 
ses  horreurs  et  tous  ses  ravagcsi  L'Anglais 
offrait  à  la  fois  Tabondahce  et  la  tranquil- 
lité ;•  élises  offres  devenaient  plus  précieuses 
parle  contraste  des  fureurs- meiiaçant es  des 
Mafatîstès  qui  semblaient  accourus  de  toutes? 
^krtâ  dans  cette  -cité  ,  tout  expfrès  pour  lui 
fadre  haïr  ,  par  leurs  brigandages  6t  leiir  . 
despotisme  tumultuaire,  là  liberté  /  pour 
contraindre  ,  à  force  :  d'excès  -commis  aii 
nom  de  la* 'République  ,  à  Tabjtrrer  ,  à  se 
jciet  dans  lès  bî^s'  d'une -royauté  nourri- 
cière et  paisible. 

•  Il  est,  dît  le  Cardinal,  de  Reti  :,- des  posi- 
tions si  critique^  i^ où  ^uoiqu  on  cHoisisse\-'Dii 
ne  peut  que- faire  une  faute  ^  et  choisir  un 
malheur.  Placé  ainsi  entre  la  crainte  du  ter-i 
rorism^  de  la  Montagne  ,  et  Téspoir  d'traf 
meilleur  régime  V  Toulon  ouvrît  son  port  i 
imh  si  ces  alarmes  sinistrei  nont  été  qui? 
trop  bien  justifiées  depuis  '  petits'  lotira 
tt  exéctable's  a\t*?iKats  de  l*-*^Montagne  ^? 
les  Anflai^s  à  tétiPtC3fftr,  lie  tardèrent  parf 
à  prouver  à  cetÊé"<îké'  malheuitiéùse  qiie  lei 
dons  d^ûn  'êmi^ni'  à'ont  lîoojèàrs^erfides. 
Ils  lui  apportèrétit  du  pain  ,  maiis  ce  n'était 
que  commcfTappât jeté  p»  ce  voleur  de*la 


1 44  Crimes  commis  à  tùulon. 

fable  au  gardien  vigilant ,  pour  rendoraûv 
et  Tenchaîner;  et  quand  les  trpupes  repu-- 
blicaxnes  se  présentèrent  pour  r^çpnqu^rtf 
cette  place,  importante,  cette  clef  de  la 
Méditerranée  ,  les  Anglais  agirent  comme 
des  brigands  entrés  à  main  armée  dans  uAe 
maison,  qiû  ne  cherchent  à  s'y  maintenir 
que  pendant  le  tems  nécessaire  pour  -eii 
exporter  tout  le  butin  qu'elle  renferniie. 

A  peine  ^yon  était  ren^u  ,  que  Farmée 
victorieuse  s^  porti^  sur  Toulpn ,  et  trdM^ae 
sans  obstacle  les  gorges  qui  bordeoi  Mil 
territoire^  £Ue  attaque  , .  emporte  succès*? 
sivement  les  redoutes  les  plus  formidables  t 
çt  défendues  à  la  fois  par.ljï  nature,  parief 
travaux  de  Tart ,  et  par  des,  forces  no^ 
breuses.et  des  corps  d'élite^  Ce^hit  d»nsi:es 
combats  qijie  le  jeune  Bonaparte  ^  comt 
mandant  Tartillerie  française  ,  donna  les 
premiers  témoignages  de  ses  talens  milirt 
^dres ,  de  spn  ^ludace  intrépide  et  calme» 
de  son  zèlç  ir^fatigable  ;  ce  fut  à  TikitaqiM 
de  ia  rt^uy^  0u  fort  Phaçon  qu'il  ^  fit 
remarquer  fiies  ileprésentans  par  la  hiur-r 
diesse  et  Vj|a1;>ileté  4?  ^^  diisppsitions  ,  et 
quavec  unie  fierté  jcépubUicaine ,  |i  osa» 
dit  -  on  ,  répondre  à  Barras  ,  qui  se  per« 
metuit  de  içpndiMnner  le  placement  d  une 
batterie ,  Unci^vous  â  votre  métier  de  reprir 
sentant ,    et-  Uis^^f,  *  mi  /ftiu   le  mien  j 


Crimes  commis  à  Toulon.  145 

(f  artilleur.  Cette  batterie  restera  là  ,  et  je 
réponds  du  succès  sur  ma  tête.  Le  batterîe  ne 
fiit  pas  déplacée  ,  et  le  fort  Pharon  fut  pris. 

Les  Etrangers  ne  résistaiient  qu  autant  de 
tems  qu'il  leur  en  fallait  pour  ravager  et 
détruire.  Ceux  qui  connaissaient  la  posi- 
tion de  Toulon  ,  environnée  par  la  nature 
des  remparts  les  plus  insurmontables  du 
côté  du  continent ,  qui  se  rappellent  que 
Tes  vaisseaux  Anglais  la  rendaient  impre- 
nable du  côté  àe  la  mer ,  concevront  diffi- 
cilement la  promptitude  avec  laquelle  les 
ennemis  abandonnèrent  cette  conquêtes! 
précieuse  ;  mais  c'est  moins  l'envahissement 
toujours  dispendieux  de  nos  contrées  ,  que 
leur  entier  ^anéantissement  qui  convenait 
a  la  politique  destructive  du  cabinet  bri- 
tannique ;  et  que  pouvaient  -  ils  faire  de 
plus  sûr  pour  la  prompte  destruction  de 
Toulon  ,  que  de  le  livrer  aux  féroces  Mon-: 
tagnards  ?  Quels  Agens  plus  actifs  de  dé- 
molition et  de  mort  ? 

L'Ennemi  songea  donc  bientôt  à  la  re- 
traite ,  et  ne  s'occupa  que  des  moyens  de 
fa.e  laisser  aux  assiégeans  que  des  maisons 
yides  ,  des  arsenaux  dégarnis,  des  ports 
sans   vaisseaux. 

L'Espagnol  qui  était  accouru  pour  avoir 
ifnt  part  à  nos  dépouilles  ,  se  livre  au 
pillage  ,    et  transporte  sur   ses    bâtimens 

Tome  VI.  k         *' 


146  Crimes  commis  à  Toulpn. 

ce  qu  il  trouve  de  plus  précieux.  Maïs 
ce  quil  y  eut  de  plus  malheureux  ,  ce  fut 
Fexd  volontaire  de  six  mille  familles  tou- 
lonaises.  Après  s'être  chargé  de  leur  or  et 
de  leur  argenterie' vîïs  se  précipitent  en  dé- 
sordre sur  le  port ,  à  travers  le  feu  des  bat- 
teries et  les  bombes  de  larmée  républî- 
çâinè.  qui  les  pressaient  de  tous  côtés.  Ils 
jettent  à  la  mer  ce  qu  ils  ne  peuvent .  em- 
barquer sur  les  felouques  qui  doivent  les 
conduire  à^  bord  des  vaisseaux.  Plusieurs 
hommes  qui  s'élancent  avec  précipitation 
vers  les  barques  ,  et  beaucoup  de  femmes 
sur-tout  affaissées  par  le  poids  de  Tor  ,  de 
largent  et  des  bijoux  dont  elles  ont  rempU 
leurs  tabliers  ,  tombent  dans  la  mer  ;  et  la 
plupart  des  felouques  surchargées  de  ri-' 
chesscs  et  de  fuyards  ,  s'engloutissent. 

On  met  aussi  le  feu  aux  vaisseaux  qu'on 
ne  peut  emmener ,  et  aux  magasins  qu'on  n'a 
pu  vider;  et  après  avpir  enclôué  les  canons 
qui  n'ont  pu  être  jetés  dans  la  mer  ;  après 
avoir  semé  d/^s  mèches  allimiees  dans  les 
magasins  à  poudre  et  aux  mines ,  l'Ennemi , 
qui  n'attendait  que  la  nuit  pour  partir  ^ 
s'éloigne  à"  Ta  liieur  des  incendies.  Alors 
trois  cents  Toulonnais  que.r6ri,avait  chargés' 
dé  chaînes  dans  lé  vaisseau  dit  le  TTie-* 
mistocle  y  aidés  pair  huit  cents'  galériens" 
qui  avaient  brise  leurs  fers  V^ouydfent  les 


Crimes  commis  à  Toulon.  147 

portes  aux  assiégeàns  ,  après  avoir  attaqué 
Varrîère-garde  anglaisé  ,  massacré  tout  ce 
qui  tomba  sous  leurs  mains ,  et  forcé  le 
reste  à  chercher  son  salut  sur  les  vais- 
seaux. 

La  ville  fut  mise  au  pillage  ,  et  le  dé* 
sordrc  fut  tel ,  que  pendant  vingt  -  quat'ré 
lieures ,  lesReprésentans  eux-mêmes  eurent 
peine  à  trouver  un  abri  ,  et  restèrent  logéi 
dans  là  salle  de  la  Mais'on 'Commune  ,  tan^ 
dis  que  les  habitahs  restés  datis  Toulon  ^ 
les  galériens  déchaînés  et  les  soldats  •Vain* 
queurs  se  partageaient  lés  <iépouilles  et 
leslogemens,  ' -^        '-  •      - 

Deux  cerus  chevaux  'abandonnés  jpar 
les  Espagnols  ^  furent  saisis' et  vendus  pstf 
les  preneurs  a-  ceux  qui  en 'tfrànqtiâient»     '  * 

C  est  ati  milieu  dé  ce-  boikleVerséttieWt 
que  Ton  rtindit  la  libetté^ii  Représentant 
Beàuvàis  qtlî  avait  été  traité  avec  iidaucé®^ 
d'égards  par  les  Anglais ,  et  s^fart  lui-mêrh* 
condamné  à  une  captivité  volontairç  petit 
n'être  pas  traité  ensuite  comme  leur  ^oin-^ 
plice  par  les  Républicains'*  ^vainqueurs.  Il 
taourut  peu  -de  jours  a^rès*,  et  fijt'  suivi 
'presqu'aussitôfpar  son  Collègue  iGâ5pârifiî$ 
tjuî^'^rit  .d'une  indigeSÉi^fi',  -  ^tibiqU'-ôij 
^ut  prétêndûquilpèrclit'k  A^ieà  là  tête  dé 
Tarmée  ;  qix  Tes  rèprés^ïiita  f4us«(ém¥ifî 
comme  des-Wàr^yft  de4i  Ré|>ubliques'|)oliir 

]^   2 


^3  Crimes  commis  à  Toulon* 

avoir  un  prétexte  de  leur  immoler  des 
victimes  en  sacrifice  expiatoire  ;  et  ce  fut 
Tallien  qui  proposa  de  décerner  à  ces  deux 
iUusJLresvictiçnes  les  honneurs  duPanthéon» 
Aux  brigandages  qui  signalèrent  l'entrée 
deç  Repvésentans  du  peuple  dans  Toulon  , 
succédèrent  un  bouleversement  général  et 
ffis  plus  horribles  boucheries»  Il  suffit  de 
jeter  un  coup  ;  d'oeil  sur  le  rapport  de 
RuorcL  :tt  sur  la  çoirespondance  de  Fré^ 
ron  po,ur  voir  U  funèbre  nomenclature 
4es  victimes  livrées  à  la  iportiil  a  soin 
cKappfsndrç;  lui  -  m^gie  d^ns  ses  lettres  4 
Moyst  Çaile  :  m  Que  cela  va  bien  ,  quil  9. 
%>f^9^^' douze  piiljre  mâçpns  pOHr  démolir 
•ft  .^t-<r^ser  la  vi^e  ;  que  ^ou$  les  jours  ii 
jî  t^esait  tpm]i])€;r.dieu:^ççi)t$  tçtçs,  et  que  déjà 
)}  huit  cents  Toulo^nai^étaie^^  fy,^illés,et  cm 
.  .ji^si  les  i^ngjiaisj  ^çat;  ^u  çop[ib|e  de  leur^ 
5ççcs^t•.Lyon^4ispa^aît  insençil^leîn^çnt  soiiç 
les  efforts  de  quarante  miUç  individus  ,  et 
yiiçLgt-guatre  mille, b/,as  sont  4éj.à  levés  pour 
détï^ire  Toujon.  Qh  !  comme  ces  qnnemis 
fiaturfils  de  l^/Répu^lique  4?V;?^pn,t  sourirç 
Jprt  ypyant.  ç^  rdjis^yucteuçs  révçlution* 
p^iyeç.embr^ssjqy  .^Y^^^  taw  d  ardeur  leur 
plàp  d'anf  angs^eiçetît  de  la/§plçncj^'uç  çJL 
és  !^.  gloire  deJa  Eçançe  !  Quç.Ûe  ne  fut 
p^Jle\ur  jôief,j6n^pprenant  q\i'un  de  ces 
fci^m^s -aiy4it|>s^gp§é  sfefPffliblçK  le  port 


Crimes  commis  à  Toulon.  44^ 

et  Marseille ,  sous  prétexte  dé  punir  cette 
viUe  de  la  part  qu  elle  avait  prise  dans  là 
résistance  générale  aux  progrès  affreux  dé 
Il  action  de  la  Montagne.  Mais  revenons 
à  Fréron.  Dans  une  autre  lettre  datée  de 
Marseille  ,  il  annonce  <«  que  «on  tribunal 
>i  révolu^onnaire  va  un  train  époiiveu;- 
»j  table  contre  les  conspirateurs;  que  les 
99  négocians  dansent  la  carmagnole  ;  que 
f  j  c'est  sur  eux  principalement  qu'il  s'attacha. 

Ces  derniers  mots  prouvent  assez  quelle 
espèce  de  motifs  dirigeaient  les  fureurs  des 
Proconsuls  victorieux  ,  et  leur  enlèvent 
l'excuse  mensongère  d'avoir  voulu  venger 
la  République  trahie*.  Sans  doute  ,  il  y  eut 
à  Toulon  des  royalistes  coupables  ,  des 
conspirateurs  perfides  qui  tramèrent  le  dé- 
membrement du  territoire  français  ,  et 
vendirent  à  TEtfanger  la  liberté  de  leurs  con- 
citoyens égarés  ;  mais  là ,  comme  par  toute 
la  France  ,  la  masse  des  citoyens  fut  essen- 
tiellement attachée  à  la  patrie  ,  à  la  libertés 

Qu'une  nation  ,  façonnée  ,  par  ses  habi- 
tudes de  14  siècles  ,  au  régime  et  à  l'amour 
de  la  monarchie  ;  que  cette  nation  attachée 
par  ses  sermens  encore  récens  à  une  royauté 
constitutionnellement  organisée  ,  n'ait  pu 
•voir  sans  effroi  s'écrouler  cet  édifice  sous 
lequel  la  paix  et  l'ordre  semblaient  s'être 
réfugiés;  qu'au  nom  soudain  et  presque 

K  3 


i5o  Crimes  commis  à  Toulon. 

inintelligible  alors  de  République  ,  elle  ait 
redouté  les  désastres  d'une  révolution  nou« 
velle  et  sans  fin  ;  qu  elle  ne  se  soit  pas 
prosternée  de  reconnoissance  et  d'amour 
devant  ce  soleil ,  s'ofFrantpour  la  première 
fbis  aux  regards  ,  tout  couvert  de  tache^ 
ensanglantées  ;  qu  à  Toulon  ,  comme  à 
Verdun  ,  comme  dans  toutes  les  villes 
tombées  au  pouvoir  de  TEnncmi ,  le  Vainr 
queur  ait  obtenu  de  la  peur  universelle  des 
homi^ages  et  des  rcmercîmens  solennels , 
qui    osera   (i)    de   cet  assentiment    forcé 

(i)  Le  silence  est  toujours  suspect  à  la  tyrannîe  t 
et  ce  n'est  que  par  des  actes  bien  formels  de  dévoue- 
ment ,  qu'on  espère  pouvoir  rassurer  sa  méfiance 
ombrageuse.  Lors  des  journées  des  5  et  6  octobre  ^ 
îl  convenait  peut-être  au  républicanisme  du  jeune* 
Barras  ,  de  garder  au  moins  le  silence  ;  mais  on 
sait  qu'il  crut  devoir  au  respect  du  gouvernement 
alors  subsistant ,  de  déposer  juridiquement  contre 
les  auteurs  et  complices  de  cette  insurrection*^ 
et  déclara  qu'il  avait  dit  aux  insurgés  :  Cette  insurrec- 
tion est  une  horreur^  le  Roi  n'est  pas  cause  si  ses  Ministres 
êntprévariqué. 

Fréron  aussi ,  sous  la  monarchie ,  avait  fait  preuve 
de  dévouement  à  l'autorité  établie  ;  et  sa  qualité  de 
membre  de  la  société  des  Amis  de  la  Constitution  de 
1 791,  ne  fut  pas  le  seul  gage  de  fidélité  qu'il  ait 
donné  à  ce  pacte  monarchique.  Cependant  combien 
de  citpyens  fusillés  par  leurs  ordres,  sous  les  mura 
de  Toulon  ,  n'avaient  à  expier  qu'un  attachement 
semblable  à  cette  même  constitution,  que  le  respect 
nécessairement  accordé  à  la  royauté,  auand  les  loi» 
ou  la  force  le  commandaient  ? 


Crimes  commis  à  JotUon.  iBl 

conclure  contre  Tensemble  des  hab.itans  , 
lui  reprocher  une  complicité  impossiblf^ 
dans  la  conspiration  ? 

Des  actes  publics  existent  ;  et  des  pièces 
authentiques  prouvent  que  les  machina- 
teurs  de  la  défection  de  Toulon  n'ont  agi 
qu  en  haine  de  la  révolution  toute  entière. 
L'Assemblée  constituante quila  commença, 
le  Ministre  populaire  qui  contribua  le  plus 
aux  premiers  succès  de  cette  Assemblée  , 
se  trouvent  condamnes  aussi  impitoya- 
blement que  les  Jacobins  et  les  Maratistes 
eux-mêmes  dans  une  délibération  émanée 
le  i3  novembre  1 793  ,  rfw  tribunal  populaire^ 
martial  ,  établi  provisoirement  à  Toulon 
sous  les  auspices  du  gouvernement  Anglais. 
Un  jugement  de  ce  tribunal  contre  Jean- 
Baptiste  Gueit ,  natif  de  Toulon,  exprime  , 
entre  autres  motifs  de  condamnation  ,  le 
grief  ,  d'avoir  violé  le  palais  de  nos  rois  en  y 
pénétrant  à  main  armée ,  et  fesant  Jeu  sur  ses 
gardes ,  à  l'affaire  du  10  août. 

Ce  sont  là,  sans  doute ,  des  délits  contre 
la  République  ;  mais  ces  délits  sont  ils  ceux 
delà  multitude  ?  quonexamine  au  contraire 
la  nature  et  la  forme  de  ces  actes  repré- 
hensibles  ;  qu  on  prenne  garde  au  titre 
de  tribunal  populaire-martial ,  à  cette  ins- 
titution populaire  dun  Comité  général  des^ 
sections  permanentes  ^  à  ce  respect  du  moins 

K   4 


i5i  Crîmei  àrrimis  à  foiilèn. 

apparent  poiir  lès  jifîridipèè  de  là  lîBéftè 
du  peuple,  â  te  refus  formel  de  la  part 
du  gouvernement  Anglais  dé  prendre  lés 
rênes  du  gouvernement  ,  que  le  Comité  géné- 
ral ,  par  une  délibération  du  8  septembre , 
voulut  remettre  entre  ses  mains,  en  le  priant 
de  daigner  ,  par  pitié  pour  le  peuple  de  ton-- 
Ion  et  j)our  t intérêt  même  du  royaume ,  lès  di- 
riger lui-même  ;  quon  lise  ces  termes,  de 
la  déclaration  dé  lainiral  Hood  à  iqùi Tou- 
lon tut  livré  :  ««  Je  déclare  cjull  lïe  sera 
5»  tbiiché  en  aucune  manière  aux  prb^ 
55  prîétés  ;  que  bien  au  contraire  ,  elles 
55  seront  toutes  très-scrupuleusément  pirô- 
55  tégées  ,  n'ayant  que  le  vœu  de  rétablît 
5  5  la  paix  chez  une  grande  nation  ,  sur  uii 
5  5  pied  juste  et  raisonnable  ;  et  lorsque  la 
55  paix  aura  eu  lieu ,  ce  que  j'espère  bièn- 
55  ^tôt ,  le  port  de  'l'oulbn  ,  avec  lès  vaîs- 
55  seaux  qui  s'y  trouvent,  ainsi  que  les 
55  forteresses  et  toiites  les  forces  qui  y  sont 
5  5  réunies  ,  seront  rendues  à  la  France  , 
55  d'après  l'inventaire  qui  en  aura  été  fait 
55  textuellement. 

"  Donné  à  bord  du  vaisseau  la  Victoire  ^  le  2 
^3  octobre   lygS.      .  Signé  tt  o  ô  d.   n 

Ajoutez  ces  mots  du  gouverneur  An- 
glais ,  en  réponse  au  Comité  général  de 
Toulon,  qui  demandait  la  permission  de 
faire  des  visités  domiciliaires  : 


[  Crimes  eommis  à  Toulon.  i53 

««Une  paà-eiile  démarche  est  toujours  un 
i»  acte  de  violence  ,  et  montre  par  consé- 
»  quëbt  que  le  gouvemenient  est  faible  ou 
»  ârbitfaire  et  despotique.  Les  visites  do- 
j»  miciliâires  ne  tendent  qu'à  aigrir  les 
jî  esprits  ;  et  vous  savez  aXjssi  bien  que 
ij  moi  que  ce  n'est  que  par  des  moyens 
»>  doù&  qu'on  peut  ramener  le  peuple 
n  égaré  ii. 

iyén  est  assez  ,  sans  doiitc  ,  pour  prou- 
ver que  ce  peuple  ,  en  invoquant  le  secours 
et  la  protection  des  puissances  étrangères  contre 
les  horreurs  de  la  famine  qui  le  pressait  » 
les  attentats  de  la  Montagne  qui  le  révol- 
taient ,  n'avait  point  aliéné  tout  sentiment 
de  patrie  et  de  liberté  ;  qu'il  savait ,  au 
fort  même  de  l'oppression  ,  inspirer  le 
besoin  de  le  ménager  lui  -  même  en  rcs- 
|>ectant  ses  dtoits ,  que  là  condition  essen- 
tielle de  sa  défection  momentanée  ^  était 
le  ritablisserhent  de  la  paix  sur  un  pied  juste 
et  raisonnable  ,  et  la  certitude  de  rester  invio- 
lablcment  attaché  à  t Empire  français. 

La  réception  de  la  nouvelle  de  la  prisé 
de  Toulon,  fut  pour  le  comité  suprême 
de  Salut  public  une  bien  douce  occa- 
sion d'exercer  ses  plans  dé  dépopulation. 
Un  décret  de  mort,  rendu  par  son  organe , 
frappe  d'*abord  cette  malheureuse  cité  ;  et , 
comme  celui  de  Marseille  ,  son  noûi  ti\ 


i54  Crimes  commis  à  Toulon. 

effacé  de  Fhistoire  ,  et  retnplacé  par  ceîui 
de  Port  de  la  Montagne.  On  ordonne  la 
démolition  de  la  ville  ;  et  Fairain  ,  fidèle 
écho  de  celui  qui  déchire  les  membres  des 
/  Toulonnais  ,  proclame  par  toute  la  France 
leur  destruction.  Barbares  Vainqueurs!  bien 
loin  de  se  montrer  les  tuteurs  de  la  Ré- 
publique ,  et  de  déployer  dans  ces  cir- 
constances toutes  les  vertus  paternelles  et 
compatissantes  ,  qui  devaient  être  Tapa- 
nage  de  ses  Représentans  ,  ils  se  laissent 
entraîner  par  leurs  passions  ,  et  ne  s'oc^ 
cupent  que  de  fureurs  !  on  dirait  que  le$ 
Anglais  ,  après  avoir  emporté  For  et  Far-» 
gent ,  ont  confié  le  plus  funeste  article  de 
leur  politique  meurtrière  au  zèle  de  ces 
assassins ,  qui  conduisent  à  Féchafaud  de« 
femmes  ,  des  filles  ,  des  vieillards  ;  qui 
livrent  à  la  mort  tous  ceux  dont  la  probité  i 
les  lumières  et  le  créait  pouvaient  faire 
revivre  le  commerce  et  Findustrie  dans 
Toulon. 

Oh  !  si  à  cette  époque ,  le  génie  de  la 
justice  et  de  Fhumanité  eût  pu  planer  ùri 
instant  sur  ces  malheureuses  contrées  , 
combien  il  lui  eût  été  facile  de  faire  revenir 
de  Ferreur  cette  foule  d'hommes  qui  âjéiuis- 
s^îent  intérieurement  des  maux  qui  acca- 
blaient leur  patrie!  Mais  F^irmée  victorieu.^e 
Ut  s'est  pas  plutôt  signalée  par  sa  premicic 


Crimes  cornmis^  à  Toulon,  i55 

'victoire  sur  les  Anglais  ,  que  la  frayeur 
s'empare  des  Toulonnais  :  tous  redoutent 
,  la  présence  de  ces  hommes  de  sang ,  que 
la  Convention  envoie  dans  leurs  murs. 
L  exil  et  la  perte  de  leurs  richesses  leur 
paraissent  préférables  aux  sanglans  outrages 
quils  en  attendent.  On  va  voir  que  cet 
sdBreux  pressentiment  ne  se  réalisa  que  trop* 
Le  pillage  de  Toulon  avait  été  promis  à 
l'armée  ;  mais,  au  moment  de  son^ entrée  , 
un  lui  offrit  une  somme  de  quatre  millions 
pour  l'indemniser,  somme  qu'on  parvint 
à  se  procurer  par  toutes  sortes  d'exactions*. 
On  avait  aussi  promis  de  lui  livrer  tous 
ceux  qui  avaient  porté  les  armes  contre 
elle  ,  B&n  qu'elle  les  sacrifiât  aux  mânes  de 
ses  compagnons  morts  sous  les  murs  de 
cette  ville.  Alors ,  par  ordre  de  Fréron  , 
tous  les  citoyens  qui  s'étaient  armés  pour 
soutenir  la  rebelUon ,  ou  qui  avaient  accepté 
quelques  places  au  nom  de  Louis  XVIII  » 
sont  avertis  de  se  rendre  au  Champ-de- 
Mars ,  sous  peine  de  mort.  Cet  ordre  imprima 
la  terreur  dans  tous  lés  esprits.  D'un  autre 
côté  ,  les  Toulonnais  furent  rassurés  par. 
l'espoir  d'échapper  à  cette  peine ,  en  obéis- 
sant ponctuellement.  On  ne  pouvait  mettre 
en  avant  un  piège  plus  abominable  pour 
se  procurer  des  victimes.  Huit  mille  citoyens 
se  rendent  au  lieu  désigné.  Cette  multitude 


i56  Crimes  commis  à  Toulon. 

de  TouloTinais  épouvante  les  ordônnâteurif  ' 
du  massacre,  Fréron  lui-même  ,  entoura 
d'une  artillerie  formidable  ,  dénombre  avec 
effroi  ses  victimes,  Ricord ,  Salicetti ,  Robes-î 
pierre^jeune  et  Barras  furent  eflFrayés  à  là 
vue  de  cette  multitude  de  citoyens  ;  ils 
prirent  la  résolution  de  livrer  à  Tarmée  un 
moindre  nombre  de  victimes.  L*un  d'eux 
proposa  l'institution  d'un  jury  pour  choisir 
Jes  plus  coupables.  Un  Citoyen  digne  dé 
foi ,  et  qui  était  à  la  suite  des  Répréscntâns  , 
nous  a  assuré  que  ce  fut  sur  les  observati6iis 
de  Barras  qu'on  adopta  ce  nouveau  moyen* 
On  délégua  auît  prisonniers  duThémis- 
toclc  cette  fonction  ,  qui  suppbâe  l'impirr 
tialité  la  plus  rigoureuse  et  le  calme  de 
toutes  les  passions.  Ces  hommes  ,  à  qui  la 
justice  ne  dénotait  aucuns  grands  Coupables, 
puisqu'ils  avaient  fui  avec  les  Anglais  ou  piérî^ 
trouvèrent  dans  leur  ragé  et  leur  vengeance 
des  motifs  de  proscription  :  ils  se  précipitent 
dans  la  foule ,  et  saisissent  leurs  victimes 
au  gré  de  leurs  caprices.  ««Avance,  disérit- 
y>  ils  à  un  Citoyeri.  —  Mais  ,  je  n*ai  pas 
95  pris  les  armes.— Marches  toujours. ïj  Un 
autre  invoque  leur  équité  ,  en  alléguant 
qu'il  ne  les  a  prises  que  par  force  :  il  est 
également  entraîné.  Un  vieilîard  de  76  ans 
leur  dit  :  4«  Vous  voyez  pa:r  mon  grand  âge 
>»  que  je  n  ai  pu  offrir  mon  faible  bras  à 


Crimes  commis  à  Toulon.  \5^ 

V  TAnglaîs  ;  j'ai  toujours  fait  des  vœux 
H  pour  le  bonheur  de  mon  pays,  n  Une 
défense  si  frappante  n'obtient  qu'un  sourire 
dédaigneux  ;  on  le  pousse  au  nombre  des 
victimes ,  qu  on  range  le  long  d'un  mur. 
Bientôt  l'airain  tonne  et  crible  tous  ces 
malheureux.  Une  voix  s^écrie  :  u  Que  tous 
n  ceux  qui  ne  sont  pas  morts  se  relèvent  !  »f 
Excités  par  l'espoir  d'être  secourus  ,  les 
blessés  obéissent  ;  ils  sont  de  nouveau  fou* 
droyés ,  et  le  fer  achève  ce  que  la  mitraille 
avait  épargné.  {Voy.  la  lettre  B  de  lagr.  du  1. 1 .) 
Parmi  cette  foule  dinfortunés ,  on  compte 
plusieurs  habitans  des  campagnes  voisines  ^ 
accourus  à  Toidon  dans  l'intention  d'assister 
i  la  fête  qu'on  devait  célébrer  pour  le 
triomphe  de  la  République.  Ils  comptaient 
n  avoir  qu'à  se  réjouir  avec  la  patrie  ,  qui 
retrouvait  ses  enfans.  De  nouveaux  vont 
çncore  être  perdus  pour  elle  ,  et  lautel  de 
lapatrie  est  pour  eux  le  tombeau. 

Trois  citoyens,  échappés  comme  par  pro- 
dige de  cette  sanglante  expédition,  méritent 
de  trouver  place  dans  cette  narration. 

Un  vieillard  est  arraché  d'entre  les  bra« 
de  son  fils  ;  on  l'entraîne  au  milieu  de  deux 
mille  victimes.  Après  avoir  échappé  à  la 
double  canonnade  et  au  fer  meurtrier  ,  en 
simulant  l'immobilité  du  cadavre  ,  la  nuit 
étend  son  ombre«  Des  brigands  d'un  autre 


i58  Crimes  commis  à  Toulon. 

genre  viennent  dépouiller  les  morts  ;  ils  leJ 
foulent  aux  pieds ,  ef  les  sabrent  pour  arra- 
cher plutôt  les^ étoffes  et  les  bijoux.  Bientôt 
un  profond  silence  règne.  Ce  vieillard  osfë 
soulever  la  tête  ;  il  ne  voit  rien  ,  il  n'entend 
rien.  Il  parcourt  en  frémissant  ce  vaste 
champ  de  cadavres  ;  tout-à-coup  il  apper- 
çoit  un  infortuné  qui  s'agite  ;  il  l'appelle .; 
et  appuyés  lun  sur  Tautrc  ,  ils . s'éloigne;at 
de  cet  affreux  spectacle.  Le  soleil  navlait 
pas  encore  éclairé  Thorison  ,  qu  ils  avaient 
trouvé  dans  la  campagne  ur  e  maison  hos- 
pitalière qui  les  mettait  à  l'abri  de  la  rage 
de  leurs  bourreaux.  L'autre  qui  a  eu  le 
bonheur  d'échapper  à  cette  fusillade  ,  est  ua 
jeune  officier  de  marine  marchande  :  il  fut 
dépouillé  et  laissé  pour  mort.  Frappé  d'une 
balle  dans  le  bas-veritrc ,  il  était  tombé 
dans  un  assoupissèttient  mortel ,  dont  là 
fraîcheur  de  la  nuit  le  fait  revenir."  Il  se 
relève  ,  et  s  achétrifine  au  milieu  des  plu^ 
grandes  souffrantes  de  l'autre  côté  du 
Chàmp-de-Mats.' Ne  pouvant  résister  aux" 
douleurs  aiguës  qui  le  déchirent  ,  il  gémîé 
âe  voir  encore ^le  ciel  ;  il  appelle  ,  il  cherche 
un  être  bienfesant  qui  daigne  lui  donner  la 
mort.  Un  factionnaire  l'arrête  ;  après  lavôit 
Instruit  de  son  malheur  et  de§  tourmehs 
qu'il  endure .,  il  le  prie  ,  au  nom  de  l'huma- 
nité ,  il  lui  dçraaride  de  l'achevtr.  u  Mets- 


Crimes  commis  à  Toulon.  i5g 

11  toî  à  genoux ,  lui  dit  le  militaire  ;  je  vais 
19  décharger  mon  fusil ,  crainte  de  jeter 
»  Falarme  et  de  te  manquer,  n  Aussitôt ,  il 
'  se  dîs|>ose  à  Tassommer  ,  en  lui  assenant  un 
coup  de  crosse.  Le  coup  fut  si  violent  que  ' 
le  crâne  en  fut  fracassé  dans  plusieurs  en- 
droits ;  mais  malheureusement  le  fusil  se 
brisant"  en  deux  par  ce  choc  ,  en  atténua  la 
force  ;  et  ce  malheureux ,  seulement  étourdi, 
tomba  évanouL  II  resta  dans  cet  état  jus- 
qu'au lendemain  au  soir.  La  fraîcheur  de  la 
nuit  le  rappela  une  seconde  fois  à  la  vie  ; 
et  disputant  de  nouveaii  contre  la  mort ,  il 
se  traîna  vers  une  chaumière  ,  où  des  mains 
hospitalières  pansèrent  ses  plaies  ,  et  par- 
vinrent,  au  bout  de  quinze  jours  ,  à  le 
rétablir.  Ce  jeune  homme  était  connu  à 
Toulon  pour  bon  patriote. 
;  Les  fusillades  furent  répétées  nombre 
de  fois.  Suivons  Fréron  dafis  sa  corres- 
pondance. Le  6  nivôse  ,  {  ?6  décembre 
1793) ,  il  écrit  à  ses  amis  Nouet  et  Lambert,' 
à  Marseille  ;  «4  Les  fusillades  sont  ici  à  Tordre 
93  du  jour  ;  en  voilà  plus  de  600  qui  ne 
»f  porteront  plus  les  armes  contre  la  Ré- 
55  publique.  Là  mortaUté  est  parmi  les 
ji  Sujets  de  Louis  XVin...i^Sans  la  crainte 
99  de  faire  périr  d'înnoc^titjes  victime^  , 
>j  telles  que  les  enfaris  ,  lesfemines  infirmes, 
99  et  les  patriotes  détenus ,  tout  était  passé 


i6o  Crimes  commis  à  Toulon^ 

n  au  fil  de  Tépée  ;  comme  sans  craintç 
»5  d'incendier  Fàrsenal  et  les  magasins  dii 
5>  port ,  échappés  à  la  rage  des  anglais  ,  l^^ 
3>>  ville  eût  ^té  livrée  aux  flammes;  mais  elle 
,99  n'en  disparaîtra  pas  moins  du  sol  de  la 
5)  liberté  ,  cette  cité  pourrie  de  Royalisme! 
99  Demain  et  jours  suivans ,  nous  allons 
95  procéder  au  râsement.  —  Fusillade3,  jus- 
99  qu  à  ce  qu  il  n'y  ait  plus  de  traîtres.  9? 

La  guillotine  de  son  côté  ,  frappait 
nombre  de  victimes  ,  des  fçmmes  et  des 
vieillards.  Le  citoyen  Baussur  âgé  de  94 
ans,fut  porté  dans  uiie  chaise  à  bras  jusque^ 
çur  réchafaud.  Les  bourreaux  ne  respec- 
tèrent pas  une  fpmpfiç  qui  sortait  de  Tî^ç-t 
çouchement.  '^\ 

farmi  ccyx  qijî  furent  fusillés ,  on  regrettç 
le  cit.  C/mn,àgé  de  70  an?  çt  maître  mâteur 
jie  vaisseaux.  Savant  dans  sop  art ,  son 
existence  était  précieuse  ppur  les  seryiceç 
«ans  nombre  qu'il  rendait  à  l'arsenal.  Oxx 
cite  encore  le  citoyen  Delon  ,  officier  ref- 
aire qui  avait  perdu  un  biras  au  service.  H 
se  trouvait  par  hasard  à  TouIqi).  lors  dij 
siège.  Appelé ,  çomiïie  les  ai»tres  ,  ay  c^mjp 
de  Mars  ,. sou  filjs  voulut  en  vain  l'enlevef 
de  la  foule  ,  il  s'y  refu$a.  Ce  digne  fils, 
voyant  la  résistance  de  son  père  ,  ne  put  sç 
décider  à  l'abaiidoî^nçr  :  tpuS;  deux  fureij^ 
fusillés.      \   *'  .  '  ' 


.Horreurs  commises  à  Orange.         i6i 

Le  général  Lapoype ,  cet  ex-inarquis.,beaur 
frère  de  Fréron  ,  qui  commandait  le  siège, 
n  ayak  pas  pu  parvenir  à  obtenir  du  Gé- 
néral anglais  qu  on  rencUt  la  liberté  à  son 
épouse  alors  à  Toulon*  Pour  colorer  se^ 
motifs  de  vengeance  envers  les  Toulonnais, 
il  fit  courir  le  bruit  qu'elle  avait  été  assas- 
sinée ,  mais  elle  a  démenti  par  la  suite  tes 
£uDL  bruits  ,  en. rendant  justice  aux  égards 
que  le  Général  anglais  n'avait  cessé  d  avoir 
pour  elle  pendant  la  durée  du  siège ,  qui 
a  coûté  Ifi  vie  à  plus  .de  di^c  mille  hommek 
en  y  aj4>utai>t  leS)fu^Uades  ,  guillotinades;^ 
les  femmes  et  les  enfans  tombés  iàJa  mer  ea 
fe  sauvant  au  nombre  de  4,323 ,  ce  qui  fait 
un  ,tot}l.d>nvî^.on  14 ,3  8  5  individus  sacrifiés 
par  ;^nti$ahi^an  des  Anglais ,  et  idéyorés 
îpor  c^  an^opoph^ges  de  MôJôt^gttards. 
■     ,.  <      .    .1 . ■-  c    -  ■■  ^    ■  — 

PRÉGlê  Mstorique  des  horreurs  commiïfs  à 
jOFèHfge  i  département  de  Vauduse  ^SùUs  te 
prBwnsulat  du  prêire  MÂrGNET\  et  ^pyage 
diSi  détenus  de  la  ville  de  Grasiil 

liE  .pfêtre  Maignet  arrive  dans  le  dépar- 
tement de  Vaucluse.  La  perte  de  ceux  qui 
avaient  improuvé  les  massacres  de  la  Glâ^ 
.cière  .était  jurée  ;  ils  avaient  mérité  tous 
Je  ressentiment,  et  toute  la  rage  sanguinaire 
deis  chefs  d'assassinats  ;  les  Payans  cons« 
Tome  VI.  L 


i62  Hùrrews.' commises  à  Orangé. 
piraiênLà  Paris  avec  le  Comité  5irj>rême 
de  Salut  public  ranéantissement  de  •  ces 
■citoyens  •  redoutés  pour  leur  •  courage  ,  et 
Ton  a  trouvé  da'iks  Ul  papiers  dé'RôbéS^ 
pierre  wne  note  qui'vouaitàla  mort  i2,ooG 
Jiommes  dé  ce  dépattement,  jMaigriet  fot  le 
<ligiTe  agent  de  destruction  qu'eïtvoydî  le 
£omité  vers  ;ces  contrées  proscrites. 
fcL  Jties^  ihcarcéraitiaiik*  sont  -  les  premiers 
■actes  jqui  annoncent  '^  mission.  Leis"  lois 
iéyoqujaièntJ au;- tribunal  ^révolutionnaire  dé 
^3X1^  tous -les  prévenus  de  conspiration.  ; 
,naais  £ds*  formes  ^^liîéWt  encore  trop''lentéï 
0isangvé.i^Il^s6l:ltcita> auprès  des  Membl'ës 
:did  iGpmité  de  Salut  public  -, ^ Imstitution 
aâlimer^CommiseiôÀ  ^éviolutio'nnfaire.'' il  édHit 
<d*abarfal  à  Couthon  à  ce  sujet  fîutfiil  n'y 
5  5.id)plup  ^\tui'diUib  ew propres  t^fMn  j^'i^^uni 
j5__seulfe.:fehose  que  je-vous  demande  ,  c^est  de 
55  m'a^f priser  à  forcer  un  jrit^upjjl^i'év.ov 
.5.5  ipt|^onnaire.  5  5  Le^. nombre  ^es.d^ipftus , 

trahslaUoix  ji^^Paris  ^^pinaâde  ^  »^ç^^  ajriji^^s  et 
des  vivres  pour  la  route  et  le  déplacemeq^ 
■de  3©,oba  'hônwffes  pour  Venir  d^pdiér 
contr -eux.  Il  finitfpat  représenter  les  dsln^rs 
<lun  pareil  voyage.^  '[    ''"  •^*'''^  /• 

Quelques  transcendahs  qûfe  fiisfeferit^  tes 
motife  9  ce  Procomsulcrùt  de^bi!r  éiivûyçîr 


sous  le  pfocimulat  du  prêtre  Maignet.  i63 

son  secrétaire  Layigae  à  Paris.  Celui-ci 
après  plusieurs  conférences  avec  Coutixact» 
Robespierre  et  CoJJot  »  parvint  à  se  /aire 
écouter  duÇqijuté  de  Salut  public.  t/Àgènjt 
national  près  la  Commune  de  Paris  ; 
(Payian)  qui  avait* long- temS  séjourné  dans 
Orange,  fut  consulté  sur  cet  étabKsséinenr, 
et  json  avis  fut  favorable  au  prptjet»  Hç 
Maignet.  Le  Comité  de  Salut  public  -arrête 
en  '  conséquence  le   aï:  floréall  ani'(   lo 

«^   1794)  •   .  :.v  .       viT:i.:-     . 

•K  QiTiT  sera  éta\)lî  à  Ôrkn'^é  lifVfcoinmfsifoApa- 
»  pulaire  .  composée  de  cinq  membres ,  pour^ger 
li  les  ennemis  de  h  rèvokitiofarv  qiti  sérortTmtivés 
91  dans  les  pays  environnans  ,  et  princi^[ialem^îft 
»,  dans  les  départfsm^ns  de  Yaucluse  et  des  Ro^dies- 
V  -iu-RbôbcV  les'  •MemBrPi'  Aff^tifiu  <îtfATTiMsioa 
^f  seroiu  Icfc  du>3*ensÂrtatf<r3^'jlirâ-Mï'iribuf al>èéjH<>- 
^  lutî6f^n^]^c^ii«<A^:«^^.4^^<^paft^memdeiaJ>^ 
.n. Roman-foronsg^^  pcésidei^ç.d^  ladministration  ou 
i»  district  de  Die/J'^rn«x,ijuge  dû  tribunal  de  district 
'99'  de  Ciommatié^Affranchie.  Ka§M.  nie'mriôTier ,  toc 
9>  d'Auvergne  ;  à  ComiBUno^ Affranchie.  Le  Ripri- 
yf.^€n^f  du  Peuple^  Maiigntt  ^  çsç-chs^igé  d'ipmllec 
n  cette  Commission,  n  '■-".*. 

-      -  —J  *  ■     /L*  ...  »      ■       i'  f 

^  .Qn  liiî  .adjoignit  di^,  iégorgeura  jdesgl^ 
cièrcs  d'Avignom  Cesbxîg^uds^qyi  ayaiet^t 
été  incarcérés  -y  n^oublièxjsiit'ipas  dans  cçttjp 
occasîdn^la  vengeançe^'^ls  népargn^^r^t 
aucun  dç  ceux  qui  avaient  çontr-iboés  à 
provoquer  sur  leur  tête  un  châtiment.  Urpp 
bien  mérité.  Le  Cpmiié-de:  Salut  public 

L  2 


•164         Horreurs  commises  à  €range* 

adressa  à  la  Commission  rinstruction  suL- 
fvaûte-: 

ce  Lès  pembres  de  la  Commission  établie  à  Orange 
-sont  npmmés  pour  juger  lés'  ennefois  de  -la  révo- 
Jution. 

;;r.n  Léft^ennemis  dje<^Téyolutionsont  tQU5ceuxqu^, 
par  Quelques  moyens  .jiue  ce  soit,  et  de  quelque^ 
^dehors,  qu'ils  se  sôiçn.t'  couvehs;'bnt  therc&é  à  cori- 
'érariëf  il^inarche  de  la  révolution  ,  et  à  etnpêclior 
'j'affiersnûsetaQ&t  de  i^.R^p^Wique. 
.  .11^4  pjeinejdue -à  ce^çrime  e&t  lajuçijrt:  lapreuvp 
requise  pour  la  condamnation  soiit  tous  les  .rèn* 
seignemens  ,  de  quelque  nature  qu*'ils  islnent^'-cjdi 
jxÇuy^ent.eQnvaiscjçe  u,ii,Jipinme  r^sonnable  /ei  ami 
.dc'.fe. if^^rté./et.ç/'./^  ;  '.' 

.i¥Aa«a«*8S.  >r  ■  ...     .  =,  .  ,:  , 

-€njfit  précéder  i?exéciidiûn  paj^  ^n^  visite 
•âbmidlîàîre,    Uto  Hstôsfassixwt  * jpH^  'en 

.Toiirnit  le  ihotîf.  Soji^jp té  texte  ^é  découvrir 
'les  wMîe«?,s   ^aupçQtiinë^  ^di^ 
cinq  cents  individus iforenl  arrêtés, 
'"\Aù  9'  raessitltî^  i^('«f  juin  1794  )  JaCoiff- 
mission  avait  envoyé  à  la  ^inort  hëut  iricfî- 
-*îdu=^î^et  au  gUljjôrrtritlor  !^-(  i2(7J3.uïlfcir.)^^lus 
•'de  trois  aenfestâvafeiudéjàtponmufctêw 
'réchatfaud.^QcS'égcrrgènrs'ise  ppéparaiént  A 
^en 'multiplier  \é^€mbve^  lorsciieila'. chute 
-deïRc^bespierrë^éur'  arracha  le  ^glaive  des 
^niains.  '  :    ►/ 

-'Airappuide<é^iqu«<nèus-veiù>nS'^e  dire. 


som  le  prvcomiUat'dt  Maignsl,       tôS 

▼oîci  Textrait  dune  déposition  faite  devant 
k  tribunal  criminel  du  dépaitemeni.  de 
Vaucluse ,,  siégeant  à  AvigQiOA\ 

««  Le  i8  frimaire  an  3  ( 8 décembre  1794)-, cïtcotn- 
pani  Antoine  Paqaet ,  exécuteur  des  jugermens  erimi* 
ncl  de  ce  depaxtement  v  natif  de  la  Commune  d» 
Lyon  ,  âgé  d'envkon  3o  ans  ^  lequel  a  dé.clàré  «. 
moyennant  serment ,  que  sur  les  différentes  réqui- 
sitions qui  lui  ont  été  faites^  par  VSbt ,  Accnsatenif 
public  de  la  ci-deyant  Gommissàpn^ditepopuioDre^civ 
devant  établie  à  Orange  ;ilamisàmQrt  3 18  personnes 
de  sexe  divers,  dans  le  séjour  que  cette  Commission 
a  fait  à  Orange  ;  que  pendant  ce  teitis  il  a  Tif  ctiu 
que  Viot ,  Accusateur  public ,  et  Napier  ,  Officief 
ministériel,  attachés  à  cette  Gonuaission ,.  Sie.  poc-» 
taient  dans  les  maisons  d'arrêt  ou  de  détention  ; 
avant  que  le  déclarant  fut  se  saisir  des  condamnés  à 
mort  ;  et  qu'ils  les  fouillaient  dans  toutes  leurs 
poches  et  goussets,  et  dans  leurs  marllcsi,  et  enlevaient 
tous  leurs  effets  ,  bijoux,  montres ,  bagues.,  boudes 
d'oreilles ,  chaînes  en  or  au  col  des  femmes  ,  et 
quelquefois  les  habits  d'hommes  ctr  de  femmes  ;  dé 
manière,  que  lorsque  le  déclarant  sVmpaYàât  diei 
personnes  condamnées  ,  leur  dépouiUe  ne  consis- 
tait qu  à  la  chemise,  culotte,  bas  et  habits  1  s'ils 
étaient  mauvais.  Déclare  encore  que  lesditï  Viot 
et  Napier  apportaient  les  bijouxaux ju^cs  de  la- 
dite Commission ,  et  qu'its  fessient  le  partage  avec 
eux.  n 

Le  6  floréal  ,(21  avril  1794)  des  détenus 
étaient  partis  de  Grasse  au  nombre  de  3 1  9 
savoir  ,  27  hommes;  et  4  femmes,  dont 
deux  enceintes. 

Pendant  ce  voyage  de  23 o  lieues  ,  nous 
omettrons  de  parler  de  ces  cris  de  iiureuT 

L  3 


i66       H<>rreur\iç(mrnisei  àVraiigê.''^ 

c^aîutîîpetople  égâté  fit  entendre  dans  difFé-- 
rôns  endroits^^  de  leur  passage  :  nous  nous  at- 
tachons aux  traita  les  plus  saillàns.. Quelques 
Communes  eutr'autres  celle  de  St.-Maximin, 
cbeirchèrent  à  adoucir  leur  sort  par  tous  les. 
tnpyens  qui  étaient  en  leur  pouvoir.  Mais 
à  Aix ,  ils  sont,  cornfqndus  'dkns  une  cour* 
étroite  avec  une  ifoule  de  brigands  et  de 
voleurs:  on  les  jette  ensuite  dansnn  galetas 
mal  sain  ,  sans  paille  et  sans  aucuns' 
yâsçs,. propres  à  leurs  besoins.  Les  Geôliers 
n'aidaient  pas  daigné  répondre  à  leurs 
pressantes  soUt^tàtions.  Il  fallut  se  résoudre 
à^s^éfendire  sur  la  poussière.  Vers  les  il 
heures  du  soir  ,  la  Concierge  vient  leur, 
demander  5o-  sous  chacun  pour  payer  leur 
^ttJ  'Cinquante  sous  par  tête,  s'écrie  l'un 
deux,  pour  £Qucher  sur  la  planche  !  Cette 
observation  rendit  cette  mégère  furieuse* 
Elle  s'élance  sur  son  Auteur  ,  lui  déchire  se» 
hardes,  et  veut  le' traîner  nud  dans  un 
cachot  à  l'aide  d'un  des  garçons  de  la 
geôle.  Il  n'ira  pas  seul ,  dirent  ses  com-^ 
pagnons  ,  en  arrêtant  la  Concierge,  '  Nous 
partageons  ses  plaintes  et  son  indignation  ; 
nous  subirons  son  sort.  Le  bruit  que  pro- 
duisit cette  scène  ,  attira  la  garde  nationale 
qui  fut  bien  loin  de  l'approuver,  > 

Dans  Avignon  ,  la  Municipalité  s'étonna 
de  ce  qu'ils  n'étaient  pas   enchaînés.  Le® 


sous  le  prQcoHsulat: du  prêtre  Maigret.  \6^ 

Proconsuls  et  le  voisinage  de  la  Commis* 
sion  d'Orange  détruisait  dans  ces  contrées 
tout  sentiment  d'humanité.  Les  Autcrrités 
constituées  n'étaient  quun  ramas  de  bri- 
gands. Ils  ne  firent  que  coucher  à  Orange  ; 
où  ils  furent  frappés  d'horreur  à  la  vue  de 
l'Accusateur  public.  Ils  continuèrent  leur 
route  jusqu'à  Valence,  où  ils  eurent  pour 
compagnon  un  Exécuteur  des  jugemens 
criminels,  qui  ne  cessa v  -dans  le  courant 
de  la  nuit ,  de  dénombrer  avec  complai- 
sance les  victimes  qu'il  avait  immolées.  On 
célébraitla  fête  du  i4Juillètlorsde  leur  arri^ 
vée  à  Lyon.Leur  positioUidevint  plus  cruelle 
dans,  cette  ville.On  ies-attacha  de  ttois  en 
trois»  par  le  cou  au  moyen  de  fortes  chaînes. 
Les  femmes  furent  néanmoins  exemptes  de 
cette  rigueur.  La  gêne  où  se  trouvaient  ce& 
n^alheureux  ,  ne  leur  permettait  qu'avec 
peine  de  monter  sur  les  charrettes-  Un  d'eux 
fait  un  faux  pas  ,  entraîne  son  voisin  aprè$ 
lui ,  et  le  troisième  suspendu  entre  eux  et 
la  chaîne  commune  ,  perd  la  voix  et  la 
respiration  par  le  resserrement  de  ce  fatal 
lien;  ses  yeux  et  sa  langue  offrent  le 
spectacle  hideux  d'un  homme  étranglé.  Les 
gendarmes  regardaient  froidement  ce  spec-» 
tacle.  Quelques  bons  citoyens  s'empres^^ 
surent  de  relever  ceux  qui  étaient  à  terre  ^ 
et  replacèrent  ces  \rois  prisonniers  à  €Ôt4 

L  4 


l68      Horreurs  commises  é  Orange  j 

de  leurs  compagnpns  qui  n  avaient  pu  les 
secourir. 

Ils  apprirent  en  route  Idt  moit  de  Ro- 
bespierre. Cette  nouvelle  les*  rappela  à  la 
vie,  et  leur  donna. assez  de  cotiira^e  pour 
supporter  les  avanies  qu'iis^  eurem  à  essuyer 
pendant  le  reste  du  chertiîn.  Ils  trouvèrent 
néanmoins  dans  tes  Autorités  constituées 
de  Corbeil  des  Magistrats  qui  s'empres- 
sèrent de  mettre  un  frein  aux  rapides  de  la? 
Concierge.  Cette  femme  fouillait  les  déte-' 
nuà  avec  une  indécence  révoltante  qu'elle 
accompagnait  de  propos  et  dé  gestes  iès> 
plus  grossiers^  Le  14  thermidor  ^  ils  arrivé-' 
rent  â  Paris.  Dépôàés  àla  Conciergerie  et  âctt 
Plessis  ,  ils  futerit  bicû tôt  tendus  à  leaftfr-' 
milles.  Mais  revenons  à  Orange.L€peu|]âé 
accablé  satts  la  puissance  des  boûfrealî* 
révolutionftalires,  sentant  une  fois  seèehaînfeil 
brisées  ,  se  porta  dans  différentes  Gônhf-' 
tnttnes  à  tous  les  excès  de  la  vengesincë.  Lé 
département  de  Vaucltise  vit  couler  auàfirf 
le  Sang  de  quelques-uns  de  ses  oppressetir*.* 
Napier  ddnt  nous  avons  déjà  parM  i  hxmtiét 
de  la  Commission  ,  avait  été  cofidaitttlô 
aux  fers  pat  jugemenftdu  tribufial  ctiflSititflv' 
Il  était  exposé  à  lin  potfeau  sur  la  plslcË 
publique;  La  foule  attirée  par  la  curiosité  ^ 
écarte  la  Gendarmerie  r'  arrache  N^pîer 
du  poteau  et  le  met  tu  pièces. 


sous  le  procofisulat  de  Mafgnet.       169 

Dans  la  Commune  de  llsle,  près  Avign on; 
le  nommé  Prade^  gendarmé,  est  assailli 
par^ne  foule  de  forcenés.  On  le  traîne  à 
lliôtel  de  la  patrie.  Les  poignards  se  lèvent 
sur  lui  ;  et  son  épouse  qui  était  accourue  à 
son:  secours  ,  reçoit  un  coup  d^  sabre  qui 
lui  coupe  le  bras  ,  tandis  qu  elle  s'élançait 
vers  lui.  Dans  celle  d'Aiguille  ,  on  allait  à 
là  chasse  des  partisans  dé  là  terreur.  Le 
nommé  Brassan  a  été  enterré  vif.  Le  curé 
de  Barbantanne  ,  prêtre  constitutionnel ,  a 
été  jeté ,  pieds  et  poings  liés  ,  dans  la  Du- 
rance.  Dans  celle  de  Mondragon  et  autres 
lieux  du  Département  ,  environ  vingt- 
cinq  personnes  ont  été  immolées.  Ces  mas- 
sacres partiels  et  les  égorgemens  juridiques 
de  la  Commission  ,  nous  offrent  une  masse 
d'à-peu-près  quatre  cents  individus. 

Tout  ce  sang  versé  est  Touvragé  de  la 
Convention.  Jusqu'à  elle  ,  ij  était  inoui  dans 
les  fiastes  de  l'histoire  ,  de  voir  tant  de 
crimes  commis  sous  les  yeux ,  par  le  fait  et 
au  nom  de  plusieurs  centaines  de  Législa- 
teurs ;  il  était  iiioui  de  voir  des  Lé^slateurs 
se  faire  eux-mêmes  guichetiers,  boureaux, 
incendiaires  et  pillards.  tJn  grand  Peuple 
se  fait  représenter  par  sept  cent  cinquante 
Mandataires;et  ces  Hommes  n'usent  de  leurs 
mandats  que  pour  décimer  cette  même 
Nation.  Oh  !  Comité  de  Salut  public  !  tu  seras 


,170  InceHdie  de  Bédouin  , 

maudit  dans  tous  les  siècles  !  puisses-tu 
leur  servir  de  leçons  L  tu  en  as  donné 
d'assez  frappantes  ! 


Incendie  de  la  ville  de  Bédouin  ,  département 
de  Vauclûse  ,  par  les  ordres  du  prêtre 
Maignet  i  et  approuve  par  la  Convention. 

Bédouin  à  trois  lieues  de  Carpentras^ 
était  composée  de  cinq  cents  maisons  ,  et 
habitée  par  deux  mille  habitans.  Son  com- 
merce en  soirie ,  y  fesait  <^irculer  labon- 
dance.  Depuis  trois  ans ,  cette  Commune 
éprouvait  les  vexations  de  la  part  des  brî- 
gginds  que  le  régime  révolutionnaire  avait 
élevés  aux  premières  places  ;  taxes  ,  con- 
tributions exhorbitantes  ,  tels  étaient  les 
premiers  moyens  de  spoliation  dont  on 
usa  d'abord  ;  mais  on  convoitait  ses  ri- 
chesses. Il  ne  manquait  plus  qu'un  prétexte 
spécieux  pour  en  valider  le  pillage.  Un 
petit  arbre  de  la  liberté  ,  planté  hors  de 
l'enceinte  de  cette  Commune  ,  fut  coupé 
dans  la  nuit  du  i3  au  14  floréal  an  sr  ^ 
(3  mai  1794).  Telle  était  rînnocenré  des 
habitans  ,  qu'eux-mêmes  allèrent  eri  porter 
la  nouvelle  à  Maignet  ';  néanmoins  on  crie 
à  la  contre-révolution ,  et  l'on  aggrave   ce; 


par  les  ordres  du  prêtre  Maignet.      171 

premier  fait  par  une  inculpation  assez  usitée 
dans  ces  tems-là  ;  on  assure  que  le  cri  de 
vive  le  rcri  s'y  était  fait  entendre.  Maignet,  en 
mission  à  cette  époque  dans  le  département 
de  Vaucluse  ,  prend  un  arrêté  par  lequel 
il  proscrit  non  -  seulement  les  habitans  de 
cette   Commune  ,    mais    encore   ceux  des 
Communes  environnantes.  Son  dernier  ar- 
rêté ,  en    date  du  17    floréal  ,  condamne 
la  ville  de  Bédouin  aux  flammes.  Une  Com- 
mission   municipale   composée   en  partie 
d'hommes  féroces  qui  s'étaient  déjà  distin-» 
guésà  Avignon  etàOrange  ,  et  se  trouvaient 
à  point  nommé  par-tout  où  le  sang  humain 
devait  couler  ,    s  y  transportent.   Barjavel 
en  est  l'accusateur  public.  Lego ,  jadis  no- 
taire  à  Paris  ,  nommé  Agent  national  de 
Carpentras ,  dénoncé  de  toutes  parts  comme 
le  complice  de  Robespierre  ,  ployant  sous 
le  poids  de  la  haine  publique  ,  est  nommé 
Commissaire  exécutif  près  ce  tribunal*  Ses 
arrêtés  affichés  sur  tous  les  murs  de  Bédouin  , 
portent  le   caractère   d'une  profonde  bar- 
barie :  95  La  Commune  de  Bédouin,  y  est-- 
j>  il  dit ,  est  en  contre  -  révolution ,  et  tous 
>9  ses  habitans  suspects  de  complicité  pour 
îj  n'avoir  pas   déclaré  les  Auteurs  des  at- 
V  tcntats  commis  contre  la  liberté..  5 5 

Le    fanatisme    de    quelque  genre    qu'il 
soit  est  le  fléau  de  Tordre  social.  Un  arbre 


17^  Incendie  de  Bédouin , 

coupé  pendant  la  nuit ,  causer  la  destine--' 
tion  de  toute  une  ville  ,  anéantir  ses  ha- 
bitans  ,  son  commerce  !  L'esprit  s'égare 
parmi  les  raisonnemens  et  les  réflexions.  O 
Rousseau  !  ce  n  était  pas  là  ton  sentiment , 
lorsque  tu  disais  que  si  une  révolution  devait 
coûter  une  seule  goutte  de  s  aug  humain,  il  fallait 
f  abandonner  ;  mais  les  Gouvernans  ne  s'ap- 
puyaient alors  que  de  quelques  phrases  de 
cet  écrivain  ,  qui  au  premier  coup  -  d'œil 
flattaient  leurs  vues  ,  tandis  qu'ils  déchi- 
raient les  pages  où  ce  publiciste  déve-> 
loppait  les  moyens  d'obvier  aux  funestes 
conséquences  qui  pouvaient  en  résulter. 

Ce  serait  injurier  le  peuple  français  que 
d'induire  de  toutes  les  atrocités  commises^^ 
dans  ces  tems  de  désolation  ,  qu'elles  ont 
été  le  fruit  du  fanatisme.  La  cupidité  ^  laC 
haine .  et  la  vengeance  allumèrent  seule^ 
les  torches  ,  et  aiguisèrent  les  poignards»  i 
car  dans  cette  circonstance  sur  -  tout ,  le 
Président  de  la  Société  populaire  de  Bc-* 
douin  s'est  vanté  ^  après  sa  destruction  , 
qu'il  était  l'auteur  de  ce  délit. 

Suchet  se  présente  dans  la  plaine  à  la 
tête  d'un  bataillon  de  l'Ardèche  ;  la  ter- 
rible Commission  le  précède  ;  soixante 
pères  de  famille  de  Bédouin  sont  de  suite 
interrogés  :  en  vain  ces  malheureux  élèvent 
la    voix   contre  de   fausses  accusations  ; 


par  ordre  du  prêtre  Maignet.         1 7  3 

r  Accusateur  public  qui  avaitpuisé  ses  leçons 
dans  les  pages  des  séances  du  tribunal  ré- 
volutionnaire de  Paris ,  les  interrompt  à 
son  gré  pour  leur  dire  :  tfi  n'as  pas  la  parole , 
hors  des  débats.  Cet  axiome  ,  complément 
d'une  proscription  arrêtée  depuis  long- 
tems  ,  les  conduit  à  Féchafaud  ou  à  la  fu^ 
silladc. 

Une^ jeune  fille,  qui  depuis  long-tems 
n  habitait  plus  Bédouin  ,  se  jette  aux  ge- 
90UX  de  Maignet ,  implore  sa  clémence  en 
faveur  de  son  père  détemi  dansles  prisons 
de  Bédouin.  Maignet ,  sur  sa  déclaration  , 
ayant  appris  qu  elle  était  de  cette  Com* 
mune,  la  fit  aussitôt  arrêter ,  et  conduire 
devant  le'  tribunal  qui  y  siégeait ,  et  deux 
jaurs  après  elle  accompagne  son  malheù^ 
•veux  père  à  la  i^iort.  ^Ce  qui  reste  dans  lés 
maisons  de  détention ,  est  entraîné  jusqu'au 
pied  de  Téchafaud  via  terre  y  fume  en- 
core du  sang  de  leurs  proches  von  les  laisse 
près  de  cet  affreux  spectacle,  jusqu'à  ce 
que  des  voitures  arrivent  pour  les  conduire 
dans  différentes  prisons  du  département. 

Suchetdonne  alors  le  signal, «t  le  soldat 
lance  la''flamme  de  toutes  parts.  Ceux 
deS'habitans- qui  ont  évité  la  hache  du  bour- 
reau ,  cherchent  leuf^  salut*  dans  les  mon- 
tagnes voisines;  des  pelotons  de  ces  soldats 
épars  dan6  la  campagne  ,  6e  font  un  jeu  de 


174  Incendie  de  Bédouin \, 

leur  donner  la  chasse  à  travers  les  rochers  { 
le  plomb  en  atteint  plusieurs  ,  ^  parmi 
lesquels  un  grand  nombre  rend  le  dernier 
soupir  au  milieu  des  convulsions  les  plus 
douloureuses; et  ces  tirailleurs  ne  cessèrent 
leur  feu  ,  que  lorsque  la  consternation  de  ; 
ces  habitans  les  fit  enfoncer  dan^  les  creuie^ 
des  montagnes  ,  après  avoir  vu  la  flamme 
|ie  leur  laissant  plus,  aucune  retraite  dans 
leur  malheureuse  patrie.  j 

Cependant  la  .flamme   a   tout  dévoré  t 
des   enf^n&  au  berceau  ,  des:femhies   eut 
ceintes  ,  des  vieillards  ;  et"  lèS  .eflbns  de  ]»! 
plupart  d'çn^jre  ièux  pour   échapper  a  ^r> 
fléajD ,,  {;,Voye^  i»:t^tneiKi^éâiiaàgrMusrcdu* 
tpmll.,  ,ttikg^^A'£,'dii.  disiavfficprilimbmirti} 
iie.6(Ç|:tr  qu^-prQlonger.ilettf)  terreur,  jîLs»  ' 
niôrt  les  attend^i  chaque»  pafl.  Une  femme 
accpuç)iéeîi4epiiis  quatréjijoùrfs  \  veât.  rija*. 
cendie  gagïier.^jde4ieiwfe;}^'Sà.ïTièrd;,  âgè^^ 
de  quatrer^^i^gfc-fonze  atW'îJ  ^  ^paraly tique. j  . 
fesait-,ent6ndr.é  dsuafik^ôOiJfJWîlies  cri*  Us  plu^  ^ 
lamentables  ;•.  ^uspitonii ,  sa,- J&Hei .  Uilv  met  son 
nousrison  ,cjîjri8;)es  hxm    qu.ellël'àttajaho 
fQrtçmenj:.;/.€!tt^jraide  d'un,  de  ^a'efa&ôs  , 
âgé ,  de.  troifr  apft  v  elle  s'empresaéide  lireSidii* 
lit  le  tna'telaiWH^quël  eUe<e^t!é tendue;;; k^^ 
elle  est;  jfarve&ufi.à  trwoèrj  çe.tte  préciewso 
charge  jusqifes  siui:  le.  seuil  de  la  porte  ;  la 
Ëûblesse  d.e .cette  femme  el leffcoî  larrêtent 


7hm  /7   Aty  i^^v 


par  les  ordres  du  prêtre  Maignet.     176 

à  cet  endroit;  La  flamme  qui  brûle  autour 
^elle  ,  ne  lui  laisse  .que  le  tems  de  détacher 
son  jeune  enfaut  avec  lequel  eUe  s'éloigne  , 
en  poussant  les  sanglots  du  désestpoir  que 
.lui  arraché. la  vue  de  sa  mère  s   qui  déjà 
Ressentant  les  vives  atteintes  du  feu ,   l'ap- 
pelé   vainement  à  son  secoure  *f  mais,  les 
charbons  afdens  la  couvrent  de  ioutes  parts, 
et  les  décombres  enflammés  rérrasent.      "^ 
.    Jl  existait  dans  cette  <2bmmqne  une  fih 
lyrique  en  soie  considérable;  soii:  magàsîÀ 
jdontenaît  à  cette  époque  po^rt^ôo^ooo  ïhL 
aie  soie.  £91  vain  on  fit  quelques  teniat^vâ 
«pour  .  le  sauver  >  de  x:et   embrâiement^ét- 
méralr,  là  funeste  politique  des  niveleute 
•f  évolutionnaires:  le  ^réisip^a  ^au  :  milieu  *  des 
ifiammes^  -  Un  hèfHtal  :  emîer  mslàim^b^ 
.Gomidune  'iïoiivhilementxcmsufmtjffureTk 
ienvelbppé»  dansinctteprosciriptroii.  L'églisp 
•^nt  là  ''  cqmtruction  àvaij:  counè  33o  ,bab 
livres.,  résistait  à^l»  flaimitiEfqtlà  mine'iot 
Remployée  pouf'  hâter  9a iiidestFaction  :  ses 
.souterrains   sont  remplis  de  >poudte />A 
blnentôt'iune  terrible  détonation ,  jointe  au 
^£âaç^  ^épouvantable  des  ruines  ^apprirent 
'jatK  Imn  ijuxUBedouîn  n'ej^sataw^us.       '  ^ ^^ 
Ce   malheureux  pays  avait  fourni  fifio 
r?volohtaires  à  Tarméej  iiAurs  lettres  à  leurs 
aparsns  coateioàient  lefrex|>ressions;  de  leur 
«mour  poiir  k,  RépuWiijueii  iong-fiMaia 


176  .  Incendié  d&  R  tdouin  , 

après  la  destruction  de  leurs  fpyers  cl  le 

massacre  de  leurs  parens*^c(  Ne  nous  rb- 

>9  commaBdez  pass  écnvaieiUrtls  ,   d'être 

99  répubticainsii*...  Nous  ne  sommes  pas  au 

/»>  service  4e  lâfiépublique  pour Ja  tromper. 

5)  Nqus  hxL  vso^cnmes  attachés  pour  la  ^servir 

rv- jusqu'à  la ;m(Mrt.  51  r  ::..::         iî  vi 

,  ;C.ettehelliqueusejeunQs6eaT&ttcependyit 

été  rmuocontie «cause  delamort  des iauteuiB 

•diè  Jeura  i  .jours/ HDelr^père  fut  assassiné  .par 

iâ- Commission;  \  69ÙS  le  prétexte  que  osom^ 

J&Is  étaito&nâ^éji  émigré •.•.<.^;)!  Il  servaitia 

dRépublique.Vi^èt  j*Dn  nom  oonsighé  «ur  dès 

•icl^istrestdiedaiCQanmuhe  paarmi  ceux.dqi 

adéieasêurs.de  la^pattk/;  iie^soUicite  paaàm 

instant  leurs ..j u^Kfish  &oft\k% ^' (leurs  pères. 

istà  prêtflrèatassfiirm6nt;és{)^ativfin):  yainem«Att 

deur  olpséifisancr  aux  kiisiBe  da  dlépubliquè) , 

^w  kur  t|xrès^oanL'4efieDi26nt  eniregisivéxA 

dadVfunicipaliiéj;  iJAcrausateunipublic  prà^ 

îOOnce  la  l4t?ik[mri&éihûrsr,deisi.dèbatç.      .  i 

.Cesaffre«Kjèvèn«Lmensviuitc&  <J'autrei^LUBsi 

Combles  .ipoQtamisv^idanB  le  ^dépactemenits» 

jfurent  r^oonioés  :à  Robespierre  nu  U  iGomdé 

Hit  jaiisfait  zda  da  lOthâttHie:  ^de.  Miaijgnit);^i£ït 

la  répQn;sèqlaNbQaaique]et£roidé.ikrc]emQi^ 

/Maignetaprès;fiétte.expédition  ,  ordonne 
au^  dbabitans  édiappés^  der£air>  pour  jamaqs 
lems^  j^nciennes  ihkbjt^idoi3ié.:.ii^'audacieux 


.  par  ordre  du  prêtre  Maignet.       177 

Proconsul  va  plus  loin  ,  il  condamne  le 
tenfitoire  à  une    éternelle,  stérilité  ;  ici  le 
délire  le  dispute  à  Fatropté,  Ceux  qui  purent 
survivre  à  cette  catastrophe  ,  errèrent  long- 
tems  dans  ks  bois  et  les  montagnes  ,  n'ayant 
d'autre  asyle   qiie    quelques  trous  creusés 
de  leurs   mains,    et  ne  devant  leur  subsis- 
tance qu  à  la  pitié  de  leurs  semblables.  Cet 
état  de   réprobation  outrageante  ne   cessa 
que  lorsque  la  Convention  éclairée  sur  le 
motif  de   tant  de   forfaits  que  la  faction 
conspiratrice    lui  av^it   celé  ,  rendit  à  ces 
malheureux  leurs  biens ,  et  leur  fournît  lep 
pioyens  de  rpiever  leurs  habitations  et  d'eii- 
semencer  leurs  terres*  ^ 

Mais  il  faut  que  le  nom  de  Bédouin  ac- 
compagne toujours  celui  de  la  Conveiilîon, 
et  serve  à  çffraj^er  le  peuple  ^t  à  lé  r^idr^ 
plus  circonspect  sur  le  choix  des  'm'âhclà- 
tajres  auxquels  ïl  confié  s,es  destinées. 

On  lit  dans  les  annales  anciennes  lé  récit 
de  plusieurs  villes  livrées  aux  flammés  ipiv 
des  conquérans  fairouches.  Mais  il  jti'y  91', 
et  vraisemblablement  il  n'y  aur^  k}}^^ 
Francie  qu^ôti  aura  vu  des  cités  tq^ites  éù- 
tî^res,tëilés  que  la  Vendée,Lyon  et  Bédouin, 
démolies  ^t  incendiées  dp  siang-froid  paf  lés 
ordres  d'hommes  qui  se  disHientlégîslaièuïs. 
Jamais^lés  Anglais ,  l^sr  Atitrifeh|en.s  et  âutWïs 
ennemis  coalisés  n'ont  pu  faire  autàtftMe 
Tome  VL  M 


1 7  8  Crimes  de  Monestier,  dans  le  département 
mal  à  la  France  ,  que  lui  en  a  fait  le  Comité 
de  Salut  public. 

^— .  I    ,  il  Mil  1       ,MM^— ^M—a — ^  — ^^^MM^ 

Crimes  du  prêtre  Monestier  ,  Proconsul 
dans  le  département  des  Hautes  et  Basses- 
Pyrénées. 

Encore  un  prêtre  parmi  les  persécuteurs 
de  rhumanité.  Monestier  ,  ex-curé  de  la  ci- 
devant  paroisse  de  St,  Pierre  ,  à  Clermont, 
département  du  Puy-de-Dôme ,  dès  les 
premiers  instans  de   la  révolution ,  quitta 

,  îétole  sacerdotale  pour  endosser  les  cou- 
leurs de  la  liberté.  Apôtre  de  ce  nouvel 
évangile  ,  il  parcourt  les  campagnes 
jusqu'aux  portes   de  Paris;  mais  toujours 

,fan^ti,qqcou  plutôt  hypocrite ,  il  précise  les 
7>ienfaits.  dç  la  liberté  y  lorsqu'il  ne  respire 
que  la  tyrannie  et  le  brigandage.  Il  mérita 
sans  peine  la  confiance  des  maratistes ,  et  fut 
nommé  à  la  Convention.  Enfin  ses  goûts 
satxguînaîres  lui  valurent  un  proconsulat 
aans  les  départemens.  Il  fpt  envoyé  dans 
celui,  des  Hautes-Pyrénées.  Muni,  de  pou- 
voirs illimités  ,  son  caractère  se  déploie  en 
piropçrtion  ;  immoralité  ,  perfidie ,  cruauté, 

'  c^omposent  çekii  de  Thomme  public  ;  ivro- 

'gnetie  et  crapuleuse,  débaucha  remplissent 
sa  vie  privée,  ! 


des  Hautes  et  Bass€s-Pyrénées. '^   179* 

Laf  société  de  Bagnères  est  le  tempte-où 
retentissent  ses  accens  corrupteurs;  Au  jtibni 
de  la  Convention  ,  A  invite  les  femmes  et 
les  filles  à  s'abandonner  aux  désirs  di^s  Sans^ 
Culottes  ,    For  sera  le  prix  de  leiirfe  jp^i^o^ 
titutions,  et  une  couronne  nationale  cdn- 
dra  le  front  de  celle  qui  les  aura  corhblé 
de  ses   faveurs.  Il  provoque  la' wjde^r' à 
déchirer  son  voile  ;  il  s'enorgueillit  hautes 
ment  de  ses  débauches  multipUées.-  •        { 
La.  Vierge-Marie  et  St.  Joseph  lui  four- 
nissent les   sarcasmes,  les    plus  indëcén^. 
Sectateur  des  Hébert  et  des  Chaumeijte ,  il 
ordoinme  le  dépouillement  des  églises  î'  il  y 
.préside^  Ces  vètemens  que  soti  hypocrisie 
aîvtfit' autrefois  endossé  pour  captiver   le 
résptct,  il  les  reçoit  aujourd'hui  pour  proh 
voquer  les  huées  de  la  multitude.         -^    j 
L'immoral  Monestier  fait  pis  ,  il  prend 
le  nom  de  Papa-la- Vertu.  Cette  dénomina^ 
tion  sacrilège  et  ridicule  lui  fut  nombre  db 
fois  confirmée  par  cette  horde   de  :  gkaiTes 
qu'il  s'était  attaché  ,  et  dont  lescbissiàntes 
adulations   augmentèrenb  '  rivressçrrjde'''sa 
domination  ;  et  de  quels. hommes  ,  grands 
Dieux ,  était-il  entoinré  ?  Qu'on  me  désign)i^, 
dit-il,  les  plus  scélérats  ;  ce  sont  cenib  qu'il 
me  faut  :  pardsan  de  la  terreur  ;  c^es^  sur 
Tautelide  ciette  déesse  que  sa  main  sicrifie 
désormais*  .  ■:.'ui.\j 

M   2 


.1 8o  Crimes  de  Monesti^r^  dans  le  département 
..  :L€5^  malheureux  prisonniers  deyîeiinent 
Tobjet  de  ces  prédications  sanguinaires*  A 
JlTarbes.,  il  iâvitê  le  Peuple  à  s  armer  de 
fusils ,  d.e  saWes  et  de  poignards ,  et  à  fondre 
^v«c  lui  dans  les  prisons  potir  égorger  les 
.déteniifs^  Il  ne  craint  pas  de  s  y  transporter, 
et  il  n  est  pas  et  iBoycn  qu'il  ne  mette  Cn 
4usQge  poury  exçrcer  sa  tyrannie.  Jongleur 
féroce ,  il  lève  son  sabre  sureuK  ,  provoque 
par  ses. menaces  <une  insurrection  ;  afin  de 
^notiver  le  massacre  qu'ilwLédtte  ,il  mdt  le 
comblera  Tàpouvaiiteen  exhibant  les  terri' 
:bles  }pouvoiri$  pot'tés  dans  sa  comœissioin* 
Digne  émule  des  barbares  Proconaukt.sos 
fcoîlègues^  il  é^uffe  les  semioLens  Ide;*!* 
^nature.  Les  prisonniers  dénués  idertMtt 
-sejcours ,  ne  peuvent  s'en  procurer  du 
dehors.  Malheur  À  -ceux  qui  vont  d'inter*- 
ïomprb  .pojiir  obtenir  la  pexmissîon  de 
donner  quelques  soins  à  leurs  paréos  >^à 
4eurs  amis!  Ce  devoir  sacré  ^est  p<mr  eux 
^n  tiae  dje  prosoription. 

. 'Unenjoune  femme  se  jette  à  :ses  piicdiS!.; 
iedle  implore  sa  pitié  i  en  faveur,de  son  pcr.e, 
(^éi(»nWtprèâ:dehK>urir  faute  de  aecowr&.U 
,ki fiepousse  avec  viQlemce.  Dans  l-exccs  de 
isa.  ;  dfi(»uleur  ^  elle  istit  .enteiidre  quel- 
jque^expressions  4CQntre  .t:ûtte  tyrannie. 
AuSRôit  il  donfieiordre  de  la  d^re  «tran 
duire  au  tribunal  révolutionnaire  idéi£aria;; 


des  Hautes  et  Basf es 'Pyréné^i^      i8i 

et  pour  la  punir  de  cet  élan  que/Iini  avait 
irradié  la  piété  filiale  éplorées  ii  veol 
quelle  fasse  la  route  à  pîéd  ,  bien  quelle 
sôtt  enceinte. 

Une  époQse  éplorée  demande  ki  liberté 
de  sofa  mari  :  demain  ^  répond  le  tôgre  ;  tii 
verras  sa  tête  d'un  côté,  et  son  corps  dé 
lautre.  ; 

'  Voyez ,  réchaiaùd  ,  At-il ,  montrairt:  du 
âoigt  à  des  fonctionnaires  publics  qui  de^ 
mandent  un  acte  de  justice  ;  vous  y  mon* 
terez  demain.  .         i 

Monestier ,   qui  se;  croit  tout  permis  > 

oka  bien  mettre  en  délibération  Farresta^ 

àon  de  son  collègue  Ferand.  Il  abrogé  de 

son  autorité  la  sage  institmion  des  ju9és. 

'  f .  A  iTaibes  ,    trois  :  ^  citoyens  avaietit   é  té 

acquittés  par  le  juré  de  cette  ville.  Mohes* 

tier  convoque  le  Peuple  au  son  du  tambour 

dans  la  salle  de   la  Société  populaire  ;  1^ 

tribunal  criminel  y  est  également  appelé» 

Monestier  présente   un   acte  *  d  accusatioa 

contre  les  trois    acquittés  ,   ordonne    au 

tribunal  criminel  de  les  juger  révolutionnai^^ 

rement.  Il  procède  en  même-tcms  à  Tinter* 

rogation  de  ces  trois  citoyens ,  et  leur  impose 

la  loi  de  ne  point  se  justifier,  et  Vous^aver 

beau  faire  ,  leur  dit-il  ^  Téchafaud  est^êt  ; 

vous  Tavez  vu  ,   dans  une    heure   votts  y 

monterez.  ?>  La  hache  était    effectivement 

\-  M  3 


1 8  2  Crimes  de  Mt^ntstiety  dtAis  ttJép/zrt. ,  et  c. 

suspeàdue.  ;En  Vain  les  enfans  d€  ces  trois 
nkalhebreuses  victimes  arrosent  èes  pieds 
de  leurs  larmes'.  Leur  innocence  ,  les  géhiis^ 
semens  de  la  tendresse  filiale  ,  ri^  ne  pé- 
hètrè  son  tœur,  Leyin^et  les  liqueurs  dont 
il  segoargèy  achèvent  de  rahriitir  ;  ilhâtè 
rinstantdu.suppUcCv^      :;        :  ;  ' 

Le  citoyen  Lasalle  occupe  le  fauteuil»  W 
veut  parler  :  Tais-toi  ^.lui  ditce  boucreau 
eiipaQaché  ;  ta  têt^i;va  tomiben  Eh  bien  ! 
répond  Lasalle  V  puisque  vous  voulez  ma 
mort ,  j  e  n'ai  plus  rien  à  dire.  Monestier  Si3rt; 
Xiàsalleparleà  ses:  juges.  Le  Peuple iittendri 
attes^teiibniihnocehtëà  Malheureux  v  lui  dit 
It  Président ,'  que  ne  parlais-tu  ainsîr  eh 
présencede  Monestier  !  Enfin  ,  il  Éallutaïitr 
à  réfihâfeud.  Monestier  r  se,  tient  ?  à  4ine 
croiséeC  de  éon  appartement  «en  face^  de  la 
guilk>tine.  .Les  Jacobiqs' ,  a  ses  ordres  ,  dan- 
sent autour  de  réchcifaiid ,  et  leur  «dorâon 
se  prolonge  jusque»:' sous  la  fenêtrê^du  Re^ 
présentant:,^  qui  sourit  à  leur  gaûé  féroce.?  ' 

Une  troupe  de  brigands  appelés  de-toutes 
parts  forment  une  armée  révolutionnaire. 
Une  Commission  populaire laccompagnc  ; 
traînant  à  sa  suite  la  guillotine.  La»  loi  qui 
suspend  ces  affreuses  légions  ,  est  procla- 
m^^  et  Monestier  quitte  le  pays  eii 
Tugrasant. 

S'il  fallait  consigner  les  assassinats  com* 


Crimes  dû  Proconsul  Dartigoyte.     1 83 

mandés  par  Monestier ,  le  lecteur  s'égare- 
rait au  milieu  du  sang  et  des  cadavres.  Il 
suffira  de  dire  ici  quil  a  conduit  àiFécha- 
faud  les  meilleurs  patriotes  du  Midi ,  et  il 
s'est ,  dans  les  tems  ,  disculpé  de  la  pros-î» 
cription  qu  il  avait  dirigée  contre  eux ,  en 
disant  qu'il  navait  sévi  que  contre  les 
Fédéralistes  et  les  anti  -  Maratistès.  Son 
acharnement  contre  cette  classe  de  citoyens^ 
ne  tendait  rien  moins  qu'à  dépeupler  tout 
le  Midi. 


Un  mot  sur  les  crimes  du  Proconsul  Dartigoyte 
dans  le  département  du  Gers. 

Dartigoyte,  dans  le  cours  de  sa  mission, 
n'a  cessé  d'avilir  son  caractère  en  insultant 
à  l'humanité  et  aux  bonnes  mœurs.  Toutes 
les  femmes  qui  s'adressèrent  à  ce  Représen- 
tant ,  ne  le  quittèrent  jamais  sans  avoir  à 
rougir  du  langage  obscène  dont  il  avait 
l'habitude.  Il  mettait  en  réquisition  les 
mères  et  les  filles  pour  le  spectacle  ;  il  en 
troubla  un  jour  l'action  parla  sortie  la  plus 
indécente,  et  révolta  la  pudeur  par  sa 
nudité. 

Les  détenus  furent  attachés  par  ses 
ordres,  à  des  crèches  comme.^^  vils 
animaux.  On  leur  distribuait  la  plus^goû- 

M  4 


184  Procofîsidat  de  Ba  ^ 

tante  nourriture.  Dans  la  Société  populaire, 
il  fesait  la  motion  de  ne  laisset  à  chaque 
particulier ,  que  mille  livres  de  «venus  , 
et  de  corifisqùer  le  reste  au  profit  de  là 
République.  Des  adresses  ^  dahs  le  sens  de 
ces  motions,  dirigées  par  lui,  parvinrent  à  la 
Convention.  Il  avait  aussi  un  tribunal  à  ses 
ordres  ,  qui  fil  exécuter  sans  jugeraens  le 
citoyen  Lelong.  La  confiscation  ,  la  dépor- 
tation ,  la  réclusion  ,  étaient  sans  cesse  à 
Tordre  du  jour  dans  le  sein  de  laSbclété. 
Dartigoyte  s'emparait  impudemment  des 
eîFets  les  plus  précieux  de  ses  victimes  ,  et 
inenaçàït  cïe  là  guiliotînè  ceux  qui  ehchéri^ 
rent  sur  lui  dahs  ces  brigandages  jour- 
naliers. 


Dû  Ff(rconMat  "dt  Bè  àahs  le  àépnrternenî  du 
Càhlàl  et  àntris. 

Bô.  Klùsûttoân  à  Goïistantinople  ^  Juif 
sur  lès  bords  du  Rhih ,  Montagnard  ,  Ther-^ 
ïnidôrieh  pendant  là  révolution  ,  s'est  %n- 
totiré ,  dans  le  département  du  Cantal  , 
d'homtnèi les  plus  immôraïix.  Il  érijgéa,  dans 
ce  Département  une  Commission  révolu- 
tionnaire. Lé  vol  et  rasSassiriat  furent  com- 
pletmment  organisés.  Des  contributions 
exhOTMtantes  furent  imposées.  On  fabri- 


dans  le  département  du  Cântat,  etc.    it5 

quait ,  dans  le  sein  de  la  Commission  , 
de  faux  timbres  des  villes  de  Coblentz  et 
de  Worms  ;  on  menaçait  ceuît  qui  hési- 
taient de  payer  ces  contributions  ,  de  leur 
faire  parvenir  de  ces  letttès  tjui ,  attestant 
leur  correspondance  avec  les  émigrés  ,  cau- 
seraient leur  mort. 

Ce  Représentant  étant  à  Clhors  ,  trouva 
le  Peuplé  inquiet  sur  Ses  subsistaftcés.  Rassu- 
rcz-vôus  ,  dit-il  au  Peuple ,  la  France  aura 
assez  de  12  millions  d'hommes  ;  ïiouls  ferons 
périr  le  reste. 

Dans  un  canton  du  district  dé  Figeac  , 
"comme  il  fésait  abattre  tous  les  signes  du 
culte  catholique,  qu  il  pénétrait  dahs  lestera- 
j()les  et  dans  les  maisons  pariicUlièreS  pour 
y  enlever  1  ot ,  latgént;  et  fesâit  même  arra- 
cheir  les  croix  aux  feniftiés  ,  il  y  eut  un 
Trtouvemént  causé  par  céS  ekcès.  Un  coup 
de  fusil  fut  lâché  dans  la  fôulé.  feô  crie  à 
1  assassinat.  Son  tribunal  et  la  guillotine 
atriVeïit,  et  Uombire  d'habitàiis  périrent. 
A  Rèîms  ,  Bô  disait  publiquement  qu'en 
révolution,  ou  ne  devait  côiinàïtre  nî 
parens ,  ni  amis  ;  que  lé  fils  pouvait  égorger 
son  père  ,  si  celui-ci  n  était  pas  â  la  hauteur 
des  circonstances. 


J  8  8    Pro consulat  (TEsnue^LavalUe  v  it c. 

être  supplicié;  ainsi,  fartes  en  sorte  et  pre&sez  A 
Commission  ,  afin  qu'à  Tarrivée  de  Talmont,  Enju* 
bault  soit  prêt  à  recevoir  les  mêmes  honneurs.  9f 

La  lettre  suivante  est  plus  caractéristique; 

De  Rennes  ,  le  9  Pluviôse  (  28  janrîeT  1794  ). 

EsNUE-  Lavallém^  ëu  mime  Comité. 

tt  J'ai  reçu  votre  lettre  ée  matiii  à  mon  rcl^èilt 
jugez  combien  la  nouvelle  que  vous  m'annoi^e; , 
relativement  au  scélérat  fédéraliste  Jourdain ,  m'a 
égayé  ;  c'est  le  chef  des  conspirateurs  de  Laval  que 
je  regrettais  le  plus  de  ne  pas  atteindre  ;  j'espère  que 
ces  dépêches  pour  son  voyage  isetont  bientôt  prête 1 9 
et  qu'il  pourra  se  mettre  en  route  dans  le  cours  de 
la  semaine. 

"  J'^^ppi^cnds  dans  ce  moment  ,  par  François  y 
mon  collègue  ,  q\i  Enjubault-Laroche  ,  père  ,  doit 
être  jugé  et  partir  de  compagnie  avec  Talmont , 
qu'il  m'a  aussi  aunoncé  être  arrivé  hier  aa  soîr  à 
Laval. 

99  Je  vous^  recommande  aussi  de  faire  à  Jourdain  v 
après  son  jugement  et  son  exécution  ^  fes  mêmet 
honneurs  qu'à  Enjubault  pèrté  ^  et  à  Talmont ,  >  €d 
sera  une  pique  de  plus  à  fabriquer.  Je  crois  que  vOtiS 
ferez  bien  d'en  commander  de  suite  encore  (fitt" 
qu'autre,  afin  d'en  avoir  de  prêtes  au  besoin ,  à  for 
Cl  mesure  que  les  conspirateurs  Mayennois  seront 
arrêtés.  Je  ne  puis  prendre  un  arrête  qui  ordonne 
la  translation  d'Ënjubault  fils ,  et  Sourdille-Lavalettei» 
a  Laval;  tout  ce  que  vous  pouvez  faire  ^  et  moiaossi-'^ . 
c'est  d'écrire  au  Comité  de  Sûreté  générale  de  ta 
Convention  nationale  ,  pour  demander  que  ces 
deux  fédéralistes  soient  conduits  à  Laval  pour  y  être 
jugé^^exécutés,  afin  de  jeter  la  terreur  dans  î'âmc 
des^Hlistes  et  des  fédéralistes  de  Laval.  Le  tableat| 


de  lenr  supplice  y  sera  infiniment  plus  salutaire 


Précis  des  crimes  commis  à  la  Rochelle.    i8$ 

qu'à  Paris  ,  où  ces  individus  nç  sont  presque  pas 
connus  ,  et  c. 

99  J'attends  de  vos  nouvelles  au  premier  moment 
•UT  Téxécution  des  mesures  que  je  vous  ai  recom- 
ibandées,  relativement  à  Talmont  et  à  son  Agent 
et  concierge  ,  et  que  je  vous  recommande  relative- 
ment à  Jourdain.  9)  Salut ,  et  c." 

Tout ,  dans  cette  lettre  ;  est  prévu  pour 
raccomplissement  de  la  haii^  et  delà  veu- 
gean'ce.  Jourdain  fut  sacrifié  ,  et  sa  tête 
fiu  transportée  à  Esnue ,  lieu  de  sa  naissance, 
et  fut  exposée  sur  une  pique  en  face  de 
la  maison  habitée  par  sa  famille  désolée, 
i^uant  à  Enjubault  ,  père  ,  son  supplice 
bxt  accompagaé  des  circonstances  les  plus 
outrageantes. 


/ 
pJtÉjCIS  historique  des  crimes  commis   à  la 

JBioihelle  etd  Rochefort ,  sous  le  Proconsulat 

4e  Niou  ,  Trulard  ,  Mazade  ,  Lequinio  , 

Laignelot ,  Garnicr  (  de  Saintes  J. 

ïiE  S  Maisons  d'arrêt  de  la  Rochelle  étaient 
conformément  à  la  loi ,  sous  la  surveil* 
lance  de  la  Municipalité.  Celle  rf(/e  le  cou- 
vent des  DamesJBlanches  était  sous  Tins- 
pectîon.du  Comité  de  surveillance.  Un  vais- 
j5cau  rase  et  mouillé  près  de  Tiie  d'Aix , 
servait  égaletûent  de  prison.  On  y^Vn- 
lassé  dans  les  teras  une  tçès-grande  qualRité 


igo  Précis  des  crimes  commis 

de  prêtres  ,  dont  plusieurs  sont  morts  , 
suffoqués  par  Fair  épais  et  pestilentiel  qui 
y  régnait.  La  tour  de  la  Lanterne  et  celle 
de  St.  Nicolas,  ont  servi  par  la  suite  de 
prison  aux  Vendéens  ;  l'air  y  ^tait  '  si 
infect,  que  plusieurs  factionnaires okt  péril 
L'huissier  ,  chargé  d  aller  prendre  et  rfin- 
troduire  les  prisonniers  ,  est  également 
mort,  ainsi  que  plusieurs  juges  de  la  Goni^ 
mission  militaire  ,  qui  procédaient  ti^aii* 
moins  à  l'interrogatoire  dans  une  salle  très- 
vaste.  Quelques  spectateurs  assidus ,  pat- 
mi  lesquels  on  remarqua  Legros ,  chanteur 
de  rOpérade  Paris,  ont  pareillement  été 
victimes  de  la  contagion. 

Le  régime  des  prisons  fut,tôur-à-tour 
cruel  et  humain  ,  selon  que  les  Commis- 
saires de  la  Convention  furent  plus  ou 
moins  partisans  de  la  terreur.  Le  Concierge 
d'une  de  ces  maisons  d'arrêt  avait  coutume 
d'appeler  tous  les  détenus  Monsieur.  L^'un 
d'eux,  fournisseur  de  la  République ,  y 
était,  comme  suspecté  dans  sa  comptabi- 
lité ;  u  pourquoi ,  dit-ij  ,  au  Concierge  nç 
m'appelles- tu  pas  citoyen  ?  je.  ne  suis  pas 
ici  comme  aristocrate  ,  je  n'y  suis  qu'en 
qualité  de  fripon.  —  Ah  !  je  te  demande 
p^cdpn,  lui  dit  le  Concierge ,  je  te  croyais 
su^PIct  ?« 

La  petite  ville  de  Brôuages  ,  située  entre 


à  la  Rochelle  et  à  Rochejort.        191 

Soubise  et  Mareincs ,  avait  aussi  sa  maison 
d  arrêt ,  elle  servait  de  prison  aux  hommes 
et  aux  femmes,  à  raison  de  sûreté  générale* 
Le  nombre  de  ces  détenus  fut  considé- 
rablement augmenté  par  les  suspects  de  la 
Charente-Inférieure. 

Le  tribunal  révolutionnaire  établi  à  Ro- 
chefort ,  était  composé  de  gens  très-mal 
famés  ,  ils  ont  à  peu-près  tous  disparus. 
Créés  par  Lequinio,  ex-moine  et  Laignelot^ 
ils  ont  condamnés  à  mort  le  Représentant 
du  peuple  Dechézeau  ,  le  5  ventôse  an  2 , 
(  «3  février  1794).  Ils  condamnèrent  éga- 
lement à  mort  Charles-Auguste  Farigneau , 
comme  convaincu  d'avoir  entretenu  des 
intelligences  avec  Tennemi  de  FEtat ,  c<en 
r»  ne  cultivant  pas  sa  terre  ,  et  en  disant 
99  que  si  tous  les  propriétaires  voulaient 
p^  Ten  croire  ,  ils  sèmeraient  de  manière 
»>  à  n  avoir  du  grain  que  pour  eux  ;  n  tel 
était  au  moins  le  texte  du  jugement. 

Ce  tribunal  a  siégé  révolutionnairement 
à  plusieurs  époques.  Quelques  Vendéens 
ont  été  jugés  à  mort  ;  le  sort  de  ces  Ven- 
déens ,  fut  par  la  suite  confié  à  une  Com- 
mission militaire*  Nombre  périrent  sur 
Téchafaud  ,  d'autres  furent  jugés  à  quelques 
années  de  fer.  Trois  de  ces  derniers  s'étant 
évadés  dans  la  nuit ,  furent  arrêtés.  iJÊ^m* 
mission    demanda  aux.  deux  ProcoasUs 


ig^  Précis  des  crimes  commis 

quel  parti  il  fallait  prendre  à  leur  égard  , 
ils  répondirent  qu'il  fallait  les  ranger  dans 
la  classe  des  instigateurs ,  et  les  condamner 
à  mort.  Ils  subirent  ce  supplice  le  6  floréal 
an  2  (  25  avril  1794  ). 

Tous  les  jours  le  tribunal  envoyait  cinq 
ou  six  victimes  à  1  echafaud.  Le  nombre  et 
les  noms  de  ces  infortunés  sont  inconnus  ; 
le  tribunal  n  ayant  tenu  aucun  registre  de 
ceux  qu'il  a  fait  périr. 

Les  Députés  qui  ont  été  en  mission  dan$ 
ce  département ,  sont  les  nommés  Xiou  > 
Trulard  ,  Mazadc  et  Garnier  (  de  Saintes  ) 
qui  y  a  séjourné  peu  de  tems. 

Sous  le  régime  de  la  terreur  ,  Lequinio 
et  Laignelot  y  ont  fait  une  plus  longue  ré^ 
sidence.  Leur  mission  paraissait  avoir  pour 
principal  objet ,  la  destruction  de  toute 
idée  morale.  (1)  Lequinio  fit  un  jour  à  la 
Société  populaire  une  scène  épouvantable  , 
parce  que  personnç  ne  voulait  accepter  les 


(i)  Le  nom  de  Lequinio  c'est  présenté  sous  notre 

Ïlume  ,  dans  j5lusieurs  occasion^,  qui  ne  font  point 
onneur  à  celui  quile  porte.  Ce  Lequinio,  ex-moinié, 
a  beaucoup écrM  sur  la  morale  ;  semblable  aux  prêtres , 
il  n*a  rien  fait  de  tox^t  ce  qu'il  a  prêché  ;  toujours  ojti 
le  surprend  ,  bas  valet  du  Comité  de  Salut  public  , 
lui  fesant  la  cour,  et  exécutant  avec  un  zèle  barbare\, 
les  iPsures  les  plus  sanguinaires.  Il  n'est  rien  de 
pire  qu'un  scélérat  Jhypocrite, 


à  la  Rochelle  et  à  Rochefort.       igS 

fonctions  de  bourreau.  Un  ancien  chantre 
de  la  cathédrale  s'étant  enfin  présenté  , 
reçut  Faccolade  fraternelle  de  ce  Repré- 
sentant ,  avec  le  titre  de  vengeur  du 
peuple. 

Ces  deux  Proconsuls  portèrent  la  même 
immoralité  à  Rochefort ,  d'où  ils  écrivirent 
le  premier  frimaire^ ,  aux  Jacobins  de  Paris  : 
««  Nous  venons,  de  donner  à  celui  qui 
^^  se  charge  soigneusement  de  l'exécution 
55  des  jugemens  du  tribunal  révolution- 
5»  naire  ,  le  nom  de  vengeur  du  peuple  , 
9)  et  à  rinstrument ,  celui  de  justice  du 
99  peuple  95. 

C'était  dans  des  orgies  que  les  bourreaux , 
les  juges  et  les  jurés  préparaient  leurs  ju- 
gemens ;  et  Tun  d'eux  disait  :  c  est  de  la  ma-' 
nière  dont  nous  posons  les  questions  que  dépend 
le  sort  des  accuses. 

Dans  le  cours  de  ses  visites  domiciliaires  , 
le  Comité  de  Rochefort  se  présenta  avec 
un  appareil  si  effrayant  chez  Tépouse  du 
Député  JWow  ,  qui  était  enceinte  ,  quelle 
vît  son  terme  avancé  ;  elle  ,  son  enfant , 
la  domestique  et  la  nourrice  périrent  peu 
de  tems  après. 

Tous  lés  moyens  d'ajvilir  ,  de  dépraver  le 

sexe   étaient  mis  en  usage  dans  cette  ^ville: 

Les  jeunes  filles  étaient  forcées  d'asàîstèt 

à  toutes  les  exécutions  ,  et  à  venir  puisé* 

tome   VI.  N 


i 94  ;        .  '  Précis  des  crimes  commis 

dans  le  spectacle  de,  TefFusion  de  sàng^» 
Toubli  de  toute  moralité  ,  et  Fhabitude  de 
la  férocité.  Celles  'qu'effrayait  la  vue  de 
Téchafaud,  étaient  obligées  de  dissimuler, 
sous  peine  d'arrestation  -,  elles  étaient  sou- 
mises à  la  censure  de  toutes  les  prostituées 
des  Proconsuls  ,  et  des  principaux  Agens  * 
révolutionnaires  ",  et  les  femmes  honnêtes  . 
Hiévitaient  la  prison  qu  en  leur  fesant  la 
cour.  .  * 

Telle  était  enfin  Faudace  de  ces  révolu- 
tionnaires ,.  que  Fun.  d  £ux.,  à  Fépoque  de  la 
clôture  des  Jacobins  de  Paris  y  dit  en  pleine 
Société  populaire  ,  et  devant  le  Repré- 
sentant Blutel  lui-même  :  lis  ne  sont  que  sept 
uni  quarante  -  six  à  lui  ^Convention  ^  .  nous 
sommes  douze  mille^^  et  noms  marcherons. 
:.•  Avant  Faa.rivée.  de liequinio  et  dé  Làigne- 
lot,  les  jeunes  gens  de  la.  Rochelle  avaient 
été  convoqués  pour 'tirer  au  sort ,  àFetfet 
de. former  un  corps, de  cavalerie.  Réunis  à 
laM^on  Commune  ,  ils  éludèrent  ce  ti- 
rage sous  différen»  prétextes  ,  et  les  repré- 
seifttations  des  oflSciers  Municipaux  fureût 
sans  effet.  Ils  y  répondirent  en  dansant ,  et 
se  retirèrent.  Au  bout  de  huit  jours  ,  on 
les  convoqua  de  h6\iveau.  Ils  se  prêtèrent 
c^efte  fois  de  bonne  grâce  à  ce  tirage  ,  sept 
se  présentèrent  même  volontairement  y  et 
le:$ort  décida  des  autres.  Lequinio  en  fit 


à  lu  Rochelle  et  à  Rcchejort.  igS 
arrêter  une  vingtaine  qu  il  dénonça  à  l'Ac- 
cusateur public  ;ils  furent  provisoirement 
condamnés  à  la  détention ,  jusqu'à  ce  que 
la  Convention  nationale  eût  prononcé  sur 
leur  sort. 

Le  tribunal  ,  après  ce  jugement  ,  se 
rendant  à  Saintes  ,  fut  arrêté  par  les  ordres 
de  Lequinio.  Le  Président  ,  qui  seul  avait 
opiné  pour  la  mort  de  trois  de  ces  jeunes 
gens  ,  fut  mis  en  liberté  le  lendemain  ;  les 
autres  trois  Juges  furent  consignes  dans  leur 
auberge. 

Le  21  mars  i793  ,  quatre  prêtres  ,  dé- 
tenus depuis  long-tems  à  la  Maison  d'arrêt, 
furerit ,  par  ordre  de  l'Administration  du 
district ,  conduits  au  port  pour  être  em- 
barqués pour  Tisle  de  Rhé-,  le  but  de  cette 
translation  était  d'empêcher  qu'ils  ne  com- 
muniquassent avec  le  général  Marcet ,  qui 
venait  d'être  arrêté  après  sa  déroute  dans 
la  Vendée.  Le  peuple  était  exaspéré.  Le? 
quatre  prêtres -ifurent  massacrés;  on  les* 
avait  déposés  dans  un  corps-de-garde  près 
le  port  de  hier  ,  en  attendant  que  rembar- 
quement fut  prêt,  La  garde  fut  forcée  ;  bri 
traîna  leurs  corps  dans  la  ville  ,  et  leurs 
têtes  furent  portées  au  bout  des  piques.  Le 
lendemain  deux  autres  prêtres  éprouvèrent 
le  même  sort. 

Lequinio    entend   dire   dans   la  société 

N    2 


igô  Précis  des  crimes  commis  à  la  Rochelle,  ecL 

populaire  de  Fontenay  ,  que  les  prison- 
niers ,  au  nombre  de  4  ou  5oo  ,  étaient 
eh  rumeur;  c'étiait  une  inquiétude  vague  au 
sujet  du  bruit  qu'ils  entendaient  dans  la 
ville  pour  les  préparatifs  d'une  fête ,  et  qnih 
prenaient  pour  un  mouvement  dirigé  contre 
eux.  Lequinio  se  présente  dans  Tapparte- 
tement  des  insurgés  :  Où  est ,  s'écrie-t-il ,  le 
chef  de  la  redellion?  Quel  est  celui  d'entre  vous 
qui  excite  les  autres  à  rinsurrection?\Jn  homme, 
haut  de  six  pieds,lui  répond  qu'il  n  y  apoint 
d'insurrection  ,  mais  que  les  prisonniers 
craignent  qu'on  ne  veuille  les  massacrer» 
Le  ton  déterminé  dont  il  articule  cette 
crainte  ,  épouvante  le  Représentant ,  qui , 
le  prenant  pour  un  motêUr  de  la  prétendue 
insurrection ,  lui  brûle  lâchement  la  cervelle  ; 
son  secrétaire  en  terrasse  un  autre  d'un  coup 

de  feu.  Mes  b ,  ajoute  Lequinio,  si  queU 

quun  ctentYe  vou^  ose  remuer  ,  vous  serez  tous 
fusillés  ;  surveillez-vous ,  car  vous  répondrez 
tous  les  uns  pour  les  autres.  (  Voyez  la  lettre  M 
de  la  gravure  du  tome  premier ,  page  1  ,  du 
discours  préliminaire.  ) 

Le  24  frimaire  (  14  décembre  1793  ),. 
Lequinio  écrivit  à  la  Convention  :  u  Je 
»5  viens  de  donner  ordre  que  4,5 00  bri- 
f9  gands  qui  encombrent  les  prisons  de 
99  Fôntenay-le-Peuple  ,  soient  fusillés.  Ces 
t)  prisonniers     voulaient    faire     quelques 


Crimes  (Tun  dénonciateur  à  Caen.    ig7 

»f  mouvemens,  j'ai  brûlé  la  cervelle  au  plus 
5j  audacieux  ;  j'ai  dit  par-tout  qu'il  ne  fal- 
f>  lait  plus  faire  de  prisonniers  dans  la 
5j  Vendée  ,  et  il  faut  ce  décret  pour  finir 
55  cette  guerre.  55 

Tel  est  Tapperçu  des  massacres  en  masse 
qui  ont  eu  lieu  sous  les  auspices  de  cet  ex- 
moine ,  qui ,  s'entourant  comme  ses  misé- 
rables collègues  ,  d'une  foule  dé  femmes 
.prostituées  ,  épousa  leurs  mœurs  et  leur 
caractère. 


Crimes  cTun  dénonciateur  à  Caen  ,   le  3 
février    lygS, 

Au  tems  où  la  terreur  pesait  particulière- 
ment sur  les  prêtres  ;  Gombaud  ,  curé  de 
Saint-Gilles  ,  à  Caen  ,  et  qui  s'était  refusé 
constamment  à  prêter  le  serment  civique  , 
quitte  la  ville  ,  où  de  jour  en  jour  il  deve- 
nait plus  suspect ,  et  se  réfugie  à  Paris. 
Ne  pouvant  plus  vivre  dans  la  capitale  , 
faute  de  ressources  ,  il  prend  le  parti  de  re- 
tpurner  à  Caen ,  et  s'y  cache  dans  la  maison 
d'un  ami.  Un  de  ses  anciens  paroissiens 
hantait  cette  maison  ;  un  jour  qu'il  vint  y 
faire  visité  ,  l'hôte  du  Curé  lui  dit  :  44  Re- 
55  tirez-vous  dans  votre  chambre  ,  une  cje 
55  vos  ouailles  est  ici ,  un  tel  pourrait  vous 

N   3 


igS   '  Crimes  iTiin  dénonciateur  à  Caen. 

55  voir,  —  -  Qu'ai-je  a  craindre  de  lui,  répond 
5  5  Gômbaud  ;  je  lui  ai  toujours  fait  du  bien', 

■55  cVst  monèompèréy'ai  tenu  un  desesenfaiis 

55  sur  les  fonds  baptismaux.  '9  Uirnpruderft 

Curé  se  laisse  donc  voir  ;  son  paroissien  , 

$ans  lui  rien  dire  ,  sort  de  la  maison  pour 

'aller  de  suite' dénoncer  son  ancien  Pasteu^. 

"L'âsyle  de  celui-ci  est  cerné  le  jour  même*; 
Gombaud  trouve  moyen  de  s'évadeï*  ;  41 
se  sauve  dans  les  bois  voisins  ,  on  Ty  pour- 
suit ;  on  lâche  même  des  chiens  sur  lui% 
il  ne  peut  éc-happer  à  de  telles  recherches  ; 
ramené  à  Çaen  ,  il  y.  est  presquaussitçt 
guillotiné,    'y 

Le  peuple  ,  -j^r^sént  à  cette  exécution ,  la 
trouva  un  peu  sévère  ;  il  n'Qsait  dire  illégale 
et  cruelle.  Le  Cùte  montra  d  ailleurs  beau- 
coup de  constance  sur  Fécliafaud.  On  veii^t 
lui  fairfe  prêtef  îè  serment  civique  ;  irrepb'ùd  : 

'  Citoyens  !'  vous  n'hâtiez  pas  pins  de  droit  d'exiger 

'  ce  serment  ,  que  de  me  guillotiner. 

L'exécution  à  peine  achevée  ,un  citoyen 
demanda  la  parole  aux  assîstans  ,  qui  en- 

"  tbùraient   réchafàiid  :   u  Citoyens  t  voîis 

'55  venez  de  voir  justicier  un  .  prêtre  pour 

*  55  refus  de  serment";  j'ai  à  vous' dénoncer 
55  un  bien    pïus  grand   cô.upàblé*  Depiiîs 

"  59  plusieurs anrxées  il  existe  ^lafisnos  prisons 
39  un  assassîi^  qti'ôn  semblé  a^^bif  oublié  ^ 

'  53  et  pourtant  il  devait  passer  îtf  premier*  5  3  — 


JProconsulat  de  Merlin  de  Thionville^     1 99 

-On  crié  bravo.  Ordre  est  donné  ,  par  le 
peuple  ,  à  TExécuteur  des  jugemens  ,  de 
rester  auprès  de  Tinstrument,  On  va  à  la 
prison  pour  .vérifier  le  fait  dénoncé  ;  le  cri> 
xninel  est  trouvé,  .On  fait  assembler  les 
Juges â  la  hâte;  Taffaire  est  rapporté  som- 
mairement en  moins  dune  heure,  et  le 
malheureux  est  guillotiné. 

Du  proconsulat  de  Merlin  de  tliionv.ille.  : 

JVIerlin  de  Thionvilte  est  k  fik.dun  pra- 
cureur  de  cette  ville  :  dans  toutlje  çQurs  du 
régime  révolutionnaire  ,  il  fut  le, bas  valet 
des  Jacobins  et  de  la  Montagne  ,  et;  parvint 
à  se  faire  nommer  copimissaire  auxiarméeç. 

Pendant  le  cours,  de  sa  mission  'ii.  étala 
un  faste  des  plus  insolent  ;  il  traînâil;  à  $a 
suite  une  foule  de  courtisans  et  de  femmes; 
les  plus  beaux  chevaiUX  et  quatre  voilures 
formaient  une  partie,  de  son  coïtège»  Les 
Autrichiens  s'en  emparèrent  dans  une  af- 
faire ,  et  sa  correspondance  tomba  entre 
leurs  mains. 

Merlin,  crapuleux. dan  S;  ses  goûts  et  ses 

actions,  fit  citer  devant   un   juge  de  paix 

.une  fille  publique  à  qui  il  avait   donné  un 

assignat  de  10  mille  livres  pour  un  de  5oo 

livres.  Cette  femme  dans  sa  défense  exposa 

N  4 


500    Procomulat  de  Merlin  de  Thionvilîè. 

qu'un  des  premiers  hommes  de  la  Répu- 
blique devait  être  plus  généreux  que  les 
autres  citoyens  :  d'ailleurs  ,  qu'il  lui  avait 
promis  de  faire  sa  fortune ,  attendu  que  sa 
qualité  de  Représentant  le  mettait  dans  le 
cas  de  faire  des  heureux  ,  et  qu  elle  regardait 
c€  léger  don  comm«  le  premier  effet  de 
ses  promesses.  Le  juge  de  paix  alloua  le  billet 
de  1 0,000 1.  à  la  femme  ,  motivé  sur  ce  que  le 
genre  de  plaisir  que  cette  femme  lui  avait 
procuré  n'était'  ni  né  pouvait  être  soumis 
à  une  taxe  :  et  il  ne  resta  à  Merlin  que  la 
honte  d'avoir  rendu  publics  ses  honteux 
plaisirs ,  par  cette  démarche  encore  plus 
avilissante. 

Merlin  ,  de  retour  à  Paris  ,  entretint  la 
St.-Rotnain ,  petite  danseuse  de  l'Opéra.  Ce 
nouvel  âccroissenieht  de  dépense  l'excita  à 
faire  l'indécente  motion  ,  à  la  tribune  de  îa 
Convention,  qui  sôus  l'apparence  de  la 
crainte  de  la  diminution  du  salaire  des 
Représentans  ,  tendait  plutôt  à  son  augmen- 
tation. <4  On  parle  de  diminuer  les  indem- 
n  ni  tés  des  Représentans  du  peuple  ,  dit- 
>5  il  :  je  ne  ferai  pas  ici  le  généreux  ,  je 
>5  dirai  en  franc  républicain  ,  que  je  suis  le 
jy  mari  d'une- femme  malade  (1)  depuis  six 

(1)  Cette  femme  ,  infiniment  respectable  ,  était 
aveugle  lorsque  Merlin  Tépousa  ,  par  l'appât  d'une 


Pfoconsulat  de  Merlin  de  Thionvilte.     «oi 

7f  mois  ,  et  père  de  plusieurs  enfans  ,  je 
99  ne  rougis  pas  d'avouer  mes  besoins.  »• 

Après  cette  scène  frappée  au  coin  du 
charlatanisme  le  plus  impudent ,  Merlin  fut 
chez  la  St.-Romain  insulter  à  la  crédulité  du 
peuple  que  lui  et  ses  collègues  achevaient 
de  réduire  aux  abois  ,  sous  le  masque  de  la 
franchise  républicaine.  EfFectivementMerlia 
ne  tarda  pas  a  se  jouer  de  la  misère  publique 
en  afficlûint  le  luxe  le  plus  marqué.  Cest 
au  château  du  Rainci ,  cette  magnifique  pro- 
priété de  la  maison  d'Orléans  ,  qu  il  Tétala 
avec  une  impudence  qui  n  a  pas  d'exemple. 
Un  nombre  infini  de  voitures  remplissait 
journellement  les  cours  de  ce  château  ,  et 
une  table  servie  avec  profusion ,  y  recevait 
un  grand  nombre  de  convives.  Devenu  pro- 
priétaire du  Calvaire,  il  prodigue  les  trésors 
de  la  France  pour  Tembellissement  de  cette 
maison.  On  cite  à  son  sujet  Tanecdote  sui- 
vante. Avant  la  révolution  ,  il  s'était  pré- 
senté au  théâtre  de  la  Montansîer  pour  y 
jouer  les  troisièmes  rôles  dans  la  comédie  : 
se  trouvant  un  jour  chez  cette  Directrice,  il 

somme  de  20,000  lîv.  environ ,  qu^elle  lui  apporta 
pour  dot.  Ce  petit  avoir  ne  peut  pas  permettre  à 
Merlin  le  luxe  qu'il  affiche.  Il  est  ces  personnes  qui 
doutent  de  la  destination  des  voitures  d'argen- 
terie de  rélecteur  de  Mavence ,  lors  de  la  reddition 
de  cette  place.    '  - 


202     Proconsulat  et  mœurs  de  Lakanal.  ' 

luiditutvous  souvenez-vous,  Mademoiselle, 
»i  d'avoir  refusé  de  me  recevoir  à  votre 
»j  théâtre,pour.jouer  dans  la  comédie?  — Hé 
»5  bien  î  lui  répondit  la  Montansier,  je  vous 
3  5  ai  refusé  parce  que  vous  étiez  trop  laid;  je 
55  vous  ai  rendu  service  ,  puisque  vous,  avez' 
5  5  depuis  joué  un  des  premiers  rôles  dans 
5*  la  tragédie  révolutionnaire:  vous  y  avez 
55  gagné  davantage,  n'est-ce  pas  ?  55 
Disons-ici  que  la  Convention  ne  futquua 

-sale  tripot  de  tragi-comédiens;  encore  si 
les  membres  n'avaient  *  été  que  ridicules^  : 

.  mais  hélas  !  ils  furent  atroces*  Il  n'y  a  pas  ïe 
mot  pour  rire  dans  Thistoire  de  leurs  crimes, 
on  n  en  n'a  pas  le  courage. 

Sur  le  Proconsulat  et  mœurs  de  Lâkanâl. 

i-'AKANAL  ,  prêtre  doctrinaire  ,  Député  du 
département  de  la  Nièvre  ,  fut ,  tour-à- 
tour  ,  Brissotin  ^  Montagnard  du  ventre,, 
de  la  plaine  ,  et  c, ,  par^tout  intrigant  et 
bavard  insupportable.  Il  parvint  à  la  fin  à 
à  se  faire  envoyer  en  mission.  On  ne 
peut  lui  reprocher  d'avoir  fait  verser  le 
sang;  mais  dans  le^  différentes  missions 
qu'il  a  rempli  ,  il  a  déployé,  l'appareil  de 
la  puissance  avec  un  faste  qui  annonçait 
son  orgueil  et  son  ineptie.  A  Bergerac^ 


Vroconsulat  et  mœurs  de  LakanaL       2p3 

département  de  la  Dordogne ,  à  Chantilly 

et  autres  lieux  ,  on  le  vit  toujours  marcher 

entouré  de  canons  et  d'un  corps  de  troupes 

composé  d'infanterie  et  de  cavalerie.  Son 

but    n'était  pas    d'inspirer    de    l'effroi.   II 

aimait  le  bruit;  il  jouissait    au   milieu  du 

tumulte  de  tout    genre.  Il  se  plaisait  aussi 

I     beaucoup  en  voyant  l'inquiétude  se  peindre 

sur  le  visage  de  ceux  qui  rapprochaient, 

•  Connu  sous  le  titte   de  Montagnard  ,   on 

-  n'osait     l'aborder     qu'en     tremblant,     A 

Chantilly  ,  il  s'est  rendu  coupable  de  spo- 

liatures  en  tout  genre. 

Il  fait  une  fois  appeler  des  prêtres  mis- 
sionnaires ;  après  avoir  jeté  l'incertitude 
dans  leur  âme  ,  il  feint  d'écrire  l'ordre  de 
leur  arrestation.   Tenez  ,  leur  dit-il ,  à  la 

fin  :  lisez  ;  je   vous  ordonne de  vous 

retirer  tranquillement  et  modestement  : 
allez  prêcher  l'Evangile  ;  allez  prêcher 
l'amour  de  la  République.  Ce  trait  qu'on 
peut  traiter  d'espièglerie  ne  sert  qu'à  dégra- 
der le  caractère  du  Législateur;  mais  du 
moins  ce  Proconsul  s'amusait  plus  inno- 
cemment que  les  CoUot,  les  Carrier-,  les 
'  'Lebon  ,  et  c.  "         "•'''-'•  "> .-  ♦ 

'  "  Son  cœur  s'enflammait  facilement  à>la 
*  vue  d'une  jolie  femme.  Une  foule  d'ânéc- 
•'  dotes  en  ce  genre  pourraient  figurer  dans 
-  un    roman.   Nous   n-'en   citerons    qu'une 


S04      Proconsulat  et  mœurs  dç  LakanaL 

pour  montrer  que  Tamour ,  chez  lui ,  dégé- 
nérait en  lâche  tyrannie. 

Epris  des  charmes  de  la  fille  du  concierge  . 
du  Jardin  desFoliés-de-Cïiartres  ,  à  Mous* 
seaux ,  il  s  aperçut  qu'elle  nourrissait  un 
fond  de  mélancolie  dont  il  voulut  savoir  It 
motif.  Il  conçut  que  Tamour  pouvait  bien 
en  être  le  sujet.  Vous  paraissez ,  lui  dit-^il 
un  jour  ,  recevoir  mes  soins  avec  répu- 
gnance. Vous  aurais-je  offensé  ?  Mon  inten- 
tion cependant  est  de  vous  épouser.  Cela 
ne  se  peut,  lui  répondit  avec  candeyr 
cette  jeune  fille.  J'ai  un  amant ,  je  lui  iBti 
promis  mon  cœur.  Rien  de  plus  naturel  , 
répliqua  le  caffard  ;  pourquoi  ne  me  Tavez- 
vous  pas  dit  plutôt  ?  Mais  dites-moi  :  Est-il 
à  Paris  ?  —  Monsieur  ,  je  ne  puis  vous  le 
dire  ,  parce  quil  est  de  la  réquisition. 

Lakanal  lui  offrit  alors  ses  bons  offices 
pour  lui  faire  rendre  son  amant.  Cette 
jeune  fille ,  trop  crédule  ,  lui  confie  le  lieu 
de  sa  retraite.  Aussitôt  Lakanal  le  dénonce. 
Heureusement  le  jeune  homme  averti  à 
tems  ,  avait  quitté  sa  retraite  à  l'arrivée  des 
jannissaires  commandés  pour  le  saisir. 

Lakanal ,  outré  du  peu  de  succès  de  cette 
démarche  ,  fit  le  lendemain  une  sortie  vio- 
lente contre  les  jeunes  gens  de  la  pre- 
mière réquisition ,  qu'il  traita  dépolissons. 
Cette  indécente  sortie  ne  satisfit  point  sa 


À 


Crime  du  Proconsul  Lecarpentier.     5io5 

colère.  Il  fit  ses  efforts  pour  faire  évincer 
le  père  de  sa  place  de  concierge  ;  mais  la 
Commis^on  d'Agriculture  et  des  Arts  ne 
voulut  pas  partager  finfamie  de  LakanaL 

Ce  Prêtre  ignare  et  immoral  a  presque 
toujours  été  chargé  de  la  partie  de  Tins- 
traction  publique.  Il  est  aujourd'hui 
Membre  de  l'institut ,  place  qu  il  s'est 
procuré  en  allant  chez  tous  les  savans  pour 
mendier  leurs  voix. 

O  J.  Jacques  !  Si  les  morts  sont  sensible» 
aux  outrages  qu'on  leur  fait ,  que  dois-ta 
penser  en  apprenant  que  le,  prêtre  Lakanal 
se  porte  pour  ton  éditeur  ?  La  Fable  de 
ÏAne  chargé  d'or  et  de  reliques  ne  Ta  poin( 
guéri  de  ses-sottes  prétentions. 

O  mon  .pays  !  à  quels  plats  Tyrans  étais- 
tu  donc  réservé  sous  tous  les  régimes  ? 

Crimes  du  Proconsul  Legârpentier. 

Ce  Député  Montagnard  ,  l'un  des  Agens 
les  plus  actifs  et  les  moins  scrupuleux  du 
Comité  de.  Salut  public ,  eut ,  pour  sa  part, 
trois  Départemens  à  purger  de  leur  popu- 
lation ,  celui  de  la  Manche  ,  celui  de  Flsle 
et  Vilaine  ,  et  celui  des  Côtes-du-Nord. 

A  Cherbourg,  il  arrive  la  nuit.  Il  débute 
par  se  faire  rendre  compte  des  mesures^ 


2o6     Crimes  du  Proconsul  Luatpentief^- 

qu  on  a  prises  contre  les  suspects.  Ils  sont^ 
tous  en  arrestation  ,  mais  les  Sœurs-Grises , 
font  encore  leur  service  dans  les  hôpitaux* . 
Il  chasse  ces  femmes  utiles  à  Fhumanité.  Il  / 
incarcère  celles  qui  ont  refusé  le  serment 
civique.  ASaint-Mâlo,  se  ihettant  au-dessus-- 
de  la  loi  ,  il  ordonne  des  visites  domici-. 
liaires  pendant  la  nuit. 

Les  prisons  sont  pleines  ;  il  ny. a  plus  de 
place.  Lecarpentier  va  bientôt  en  faire.  Il 
fait  trier  les  détenus..  Ceux  qui.  ne  sont 
que  suspects  ,\resteront  dans  leurs  cachots  ; 
mais  la  guillotine  réclame  les  prévenus  de 
fédéralisme  et  de  conspiration.  Lecarpen- 
tier eût  souffert  de  laisser  le  bourreau  un. 
seul  jour  oisif. 

Même  conduite ,  même  amour  pour  le 
sang  humain  ,  et  le  régime  révolutionnaire 
à  Coutance. 

A  Port-Mâlo  ,  presque  toutes  les  classes 
de  la  Société  passent  par  son  épuratdire, 
nobles  et  prêtres  ,  riches  et  pauvres  ,  admir 
nistrateurs  et  citoyens  privés.  4«  À  votre 
exemple,  écrit  le  Proconsul  Lecarpentier  au 
>5  Comité  de  Sûreté  générale  ,- j'ai  appé^^ 
55  satiti ,  pour  ma  part,  le  poids  de  la jus- 
»?  tice  nationale.  Je  nai  fait  grâce  à  per- 
55  sonne.  >»  Ses  proclamations  englobent 
tous  les  états.  Ses' atrêtés  sont  tous  des 
arrêts  de  proscriptions  et  de  mort.  Celui 


f 


Révélation  du  conventionnel  Julien.    207 

du  1 1  prairial,  an  2,  (  3o  mai  1794),  porte 
qu  il  fait  au  Comité  de  Salut  public  ,  un 
envoi  de  29  détenus  ,  pirmi  lesquels  le 
misérable  comptait  douze  femmes.  Foilà 
du  gibier  ,  s'écrie-t-il ,  en  voyant  partir  ces 
malheureux* 

On  cessait  apparemment  d'être  homme 
du  moment  qu'on  devenait  Proconsul, 


RÈY ÈLATiOK  du  conventionnel  Julien 
(  de  Toulouse.  ) 

Julien  (  de  Toulouse  ) ,  Ministre  protes- 
.  tant ,  se  montra  à  la  Convention  digne  de 
la  robe  noire  qu'il  portait  avant  d  y  entrer; 
îl  fut  Tun  des  persécuteurs  du  culte  et  des 
prêtres  catholiques,  et  ne  valait  pas  mieux 
que  ceux-ci.  Charlatan  plutôt  qu  homme 
public  ,  ses  mœurs  privées  étaient  loin 
d'être  pures  et  conformes  à  la  réformation 
dont  il  tenait  état  avant  d'être  député.  Il 
fut  décrété  d'accusation  comme  complice 
de  Chabot,  Delaunay  (d'Angers)  et  Basire, 
accusés  de  trafiquer  de  leurs  opinions  poli- 
tiques ;  il  parvint  à  se  soustraire  ,  et  ne  re- 
parut qu'après  le  9  thermidor.  Malgré  les 
éfForts  qu'il  fit  pour  répondre  aux  impu- 
tations graves  dont  on  le  chargea  ,  son 
mémoire  rie  le  justifie  pas ,  sans  doute  ;  maig 


2o8    Révélation  du  conventionnel  Julien. 

il  révèle  bien  des  iniquités  conventionnelles 9 
dont  rhistorien^oit  faire  son  profit.  On  ne 
saurait  que  très-peu  de  choses ,  saris  les  indis* 
crétions  et  les  récriminations  des  scélérats  , 
se  démasquant  eux-mêmes  tour-à-tour.  Nous 
apprenons  d'abord  dans  le  mémoire  de 
Julien  ce  que  nous  savions  ,  que  Robes- 
pierre  aspirait  à  h,  dictature;  mais  on  saura 
que  Chabot  s'était  rendu  le  bas-valet,  et  en 
quelque  sorte  l'exécuteur  des  desseins  de 
Robespierre.  Le  Capucin  écrivait  ainsi  à 
r Avocat  d'Arras  :  <<  Robespierre  ,  toi  qui 
55  chéris  les  patriotes  ,  daigne  te  souvenir 
9î  que  tu  m'as  compté  dans  Ifeur  liste  ;  om 
5j  j'ai  toujours  marché  derrière- tbî  dans  le 
j9  bon  chemin  ;  ne  m'abandonne  (1)  pas  à 
55  la  fureur  de  mes  ennemis  ,  qui  sont  les  '^ 
99  tiens  ,  n'en  doute  pas.  N'oublie  pas,  sur- 
»>  tout ,  que  je  suis  malade  au  secret ,  pour 
99  avoirponctuellementexécuté  tes  ordres.  « 

a  C'est  d'après  ton  conseil  ,  dit-il  autre 
55  part  au  Tyran  ,  que  je  crus  devoir  taire 
99  quelques  faits  dans  ma  déclaration  ,  qui« 
9  9  cependant  ,  serviraient  aujourd'hui  à 
99  mettre  les  deux  Comités  en  garde  contre 
99  les  manœuvres  de  la  faction.  99 

Du  fond  de  sa  prison ,  Chabot  entretenait 


(i)  Ne    dirait-ron   pas    d'une   parodie  du   Patir 

nosUr, 


îiivélatîon  du  conventionnel  Julien*  209 

là  correspondance  la  plus  active  avec  Ro-» 
bespierre.  Celui*ci  dirigeait  Jcs  accusations  ; 
et  Chabot ,  pour  se  conformer  à  ses  intén4 
tions ,  lui  m?irqu'ditqu  il  fallait  décréter  d'accu^ 
sation  les  fuyards.  Il  fallait ,  pour  se  concilie^ 
la  bienveillance  de  Robespierre  ,  lui  présen* 
ter  la  tête  sanglante  de  ceux  dont  il  avait 
juré  la  perte.    ' 

Julien  nous  apprend ,  entre  autres  parti- 
cularités, qu  Amar,  dans  son  rapport  >  ad 
tojet  de  Tâffaire  de  Delaunay  (  d'Angers  )  , 
Conclut  à  l'accusation  de  ceux  désignés  dans 
ce  rapport  ;  cela  allait  de  droit ,  car  il  était 
en  principe  reconnu  qu'un  Député  mis.eii 
arrestation  ,  était  déjà  condamné  ,  ai^isi 
que  tous  les  individus  arrêtés  comme  sus- 
pects. Si ,  une  seule  fois  ,  ce  principe  ne 
s'est  pas  réalisé  ,  il  est  à  croire  que  les  7  S 
n'ont  survécu  à  leur  arrestation  que  par 
tin  rafinement  de  barbarie. 

Poursuivi  d  asyle  tîn  asyle  ,  Julien  (  dé 
Toulousiê  )  prend  le  parti  de  se  rendre  au 
Comité  de  Sûreté  générale  ;  il  était  déjà 
dans  Fintérieur  du  local ,  lorsqu'il  apper- 
çoît  un  de  ses  collègues  qui  en  sortait.  Ce 
Représentant  lui  dit  ,  en  le  voyant  :  «<  Où 
f  f  vas-tu  ,  malheureux  ?  Tu  cours  au  sup- 
>5   plîce.  —  Vâ-t-en.  —  Eloigne-toi    de  ce 

T^   séjour   de   mort —  Mais    je    n'ai 

ff  rien  à  me  reprocher  ,  lui  répond  le  tar- 
Tome  VL  o 


i 


819  Révélation  du  proconsul  Julien^,  tU. 

5J  tufFe  Ministre  protestant.  —  N'importe  i 
î5  ta  perte  est  résolue  ,  éloigne  toi.  jj  Les 
absurdités  les  plus  manifestes  ,  les  choses 
les  plus  frivoles  donnaient  lieu  selon  lui , 
aux  plus  terribles  accusations.Telles  sont  les 
prétendus  complots  de  fédéralisme  qjiii  ont 
fait  vetser  tant  de  sang  innocent  ;  Timagi- 
haire  conspiration  des  prisons  qui  a  donné 
lieu  à  un  rapport  ,  écrit  en  lettres  de  sang , 
et, a  fait  extraire  des  nombreuses  bastilles  de 
Paris  ,  une  multitude  infinie  de  malheureux 
détenus  ,  pendant  plus  de  six  mpis  ,  pour 
àvoir^  voulu  assassiner  le  Tyran  depuis 
iipan.  •  . 

;  ISIjous  apprenons  encore ,  par  les  soiiis  de 
julien,  que  Vadier  écrivait  à  un  de  .^s 
agens  à  Toulouse  ,  de  ne  rien  négliger  pour 
perdrt  les  prévenus  de  fédéralisme .  et  (Canti^ 
maratisme\  qu'au  3i  mailles  choses  étaient 
portées  au  point  qu  on  empêcha  les  députés 
dénoncés  de  parler  pour  leur  défense  à  la 
tribune  de  la  Convention  ;  que  les  suit^es 
des  évènemens  de  cette  journée*  n'appar- 
tiennent qu'à  ctna  qui  en  furent  les  auteurs 
secrets  ,  qu'à  ceux  qui  forcèrent  la  main 
à  la  majorité  de  la  Convention  ;  (\ixHenriot 
voulait  tout  engloutir ,  etla  Commune  cons* 
piratrice  sauver  seulement  quelques-uns  dt 
ses  partisans  ;  que  Robespierre  se  plaignait 
couvent  de  ce  qu'on  palliait  les  crimes  sup- 


Crimes  de  V ex-conventionnel  Dupin.   211 

posés  des  prétendus  fédéralistes;  qu ainsi 
|)lusieurs  de  ces  êtres  malheureux  ont  été 
cruellement  trompés  dans  la  suite.  Il  dé^ 
clare  encore  que  Vadier  leur  fesait  dire 
d'être  tranquilles  ,  et  les  fesait  guillotiner* 
Ces  révélations  de  Julien  (  de  Toulouse) 
sur  les  menées  des  Montagnards  ,  dont  il 
était  Tun  des  coriphées  ,  sont  précieuses 
pour  Thistoire. 

Crimes  de  Dupin .  membre  de  la  Convention , 
•  et  ci-devant  Contrôleur-général  des  Fermes. 

Xj£  crime  capital  de  ce  Montagnard  ,  est 
d'avoir  provoqué  le  supplice  de  Sa  pères  de 
famille. 

-  Mais  ,  dira-t-on ,  c'était  des  Fermiers* 
généraux. 

■  Eussent-ils  été  des  scélérats  ,  fallait-il  les 
envoyer  à  la  guillotine  sans  les  entendre  ? 
Dupin ,  la  cause  première  de  ce  grand  forfait, 
en  a  fait  laveu  solennel  dans  cette  même 
tribune  de  la  Convention  ,  où  il  avait  de- 
mandé renvoi  des  32  prévenus  au  tribu- 
nal révolutionnaire. 

L'afiaire  des  malheureux  Fermiers-géné- 
raux est  peut-être  Tune  des  plus  exécrables 
qu  on  ait  à  reprocher  à  la  Convention*  Sa 
conduite,  dans  cette  circonstance,  fut  des 

02 


«,i  2    Crimes  de  f  ex- conventionnel  Dupin. 

plus  viles  et  des  plus  atroces.  Jamais  peuple 
de  ce  tems  n'eut  pour  le  gouvernement  un 
Sénat  plus  corrompu  et  plus  sanguinaire» 
Cambon ,  Dupin ,  les  deux  Comités  de  Sûreté 
générale  et  de  ÎSalut  public ,  et  toute  la  Conr 
vention,  la  Convention  entièye  ,  offrent  ici 
le  spectacle  le  plus  dégoûtant  de  la  perver*. 
site  humaine.  (  Voy.  le  Tabl.  n^.  3  ,  tome  2*  ) 
Les  Fermiers- généraux  n  ^talent  pas  ^ans 
reproches,  (i).  Beaucoup  d'entr'eux  se  mon- 
trèrent d'avides  concussionnaires  ,  et  ne 
contribuèrent  pas  peu  à  creuser  ce  déficit 
qui  amena  la  révolution.  La  justice  nationale 
avait  des  droits  à  exercer  sur  leurs  fortunes , 
et  peut-être  sur  leurs  personnes  ;  mais  fallait? 
il  s'y  prendre  ain&i  ?  Uhp  rentrée  de  2oa 
millions  ,  annoncée  paY  Cambon  ,  devaitr 
elle  être  la  miçe  en  jugement  des  Fermiers- 
généraux  ?  Devait-on  violera  leur  égarc^ 
toutes  les  règles  de  la  procédure  criminelles  ? 
Dupin  ,  alléché  par  Todeur  de  porte-feuilles 
bien  garnis  de  çè3  millionnaires ,  devait-il 
dégrader  son  tiçre  auguste  de  Législateur  ^ 
^u   point  de  devenir  le  plus  suspect  des 

-*r  '  ^  i .  ■'  '  ■'  "!■■  '•'  !"'.'" ' "  '  ■———<> 

(i)  Le  malheureux  Lavoisier,  quoique  Fermier» 
général ,  n'avait  rien  à  se  reprocher  ;  son  plus  grand 
crime  fut  d'être  l'ami  des  sciences  ,  et  le  premier 
chymiste  de  l'Europe.  Là  France  de  deux  siècles  ne 
réparera  cette  perte  ,  malgré  les  prétentions  .dé 
•Fourçroy. 


Crimes  du  proconsul  Lejeune.         1 1 3 

dénonciateurs  ,  le  plus  vil  des  brise-scellés  »' 
et  le  plus  plat  des  agens  de  Robespierre?  Et 
cette  Convention  qui  décrète  tout  ce  qu  ort 
veut  dans  la  crainte  de  déplaire  au  Comité 
de  Salut  public  ;  qui  croit  en  être  quitté 
pour-  faire  imprimer  le  repentir  de  Dupin , 
couvert  du  isang  de  trente-deux  pères  de  fa- 
mille ,  et  les  mains  et  les  pochés  pleines  dé 
leur  or,. de  leurs  bijoux  ,  de  leurs  billets  au 
porteur  !...  Sainte  Liberté,  il  faut  que  tu  aies 
bien  des  charmes  pour  conserver  des  adora- 
teurs après  tous  les  crimes  que  des  monstres 
ont  commis  en  ton  nom. 


Crimes  de  S.  P.  Lejeuxe  ,  Membre  de  la 
Convention. 

D'A  B  O  R  D  très  -  modéré  ,  ce  Député  , 
bientôt  après  ne  respira  plus  que  le  sang  \  il 
fabriqua  une  petite  guillotine  avec  laquelle 
il  s  amusait  à  couper  des  têtes  d'oiseaux  et 
de  poulets  ;  il  avait  sans  cesse  sou^  les 
yeux  cette  guillotine  ,  placée  sur  sa  tablé 
dans  sa  salle  à  manger  ,  ou  dans  sa  chambre 
à  coucher ,  ou  dans  son  cabinet.  \ 

Lejeune  ,  décrété  d'arrestation  ,  ré- 
pondit dans  un  imprimé  prolixe  ,  u  que 
n  le  fait  était  une  calomnie  atroce  ;  il  y 
n  déclare  en  outre   que  jamais   il  n'a  été 

O  2 


s  1 4         Crimes  du  proconsul  Lejeum. 

9  5.repaître  sa  vue  du  spectacle  douloureux  de 
>5  la  destruction  d'un  de  ses  semblables,  m 
n  n'est  pas  dans  notre  intention  de  chercher 
des  coupables.  Pourtant  nier  simplement 
iinfait  ,  n'est  pas  le  détruire. 

Mais  on  Taccuse  d'un  crime  bien  plus 
grave ,  et  pour  sa  justification  ,  il  avoue  et 
il  imprime  son  aveu  ;  on  l'accuse  d'avoir 
fait  périr  .des  citoyens.  • 

Sa  réponse  est  curieuse  ,  quoique  ban- 
nale  ,  et  fait  le  procès  à  toute  la  Con- 
vention. 

44  On  m'accuse  de  ne  respirer  que  le  sang, 
parce  que  j'ai  envoyé  au  tribunal  révolu- 
tionnaire ,  d'après  des  ordres  précis  et 
formels  ,  quelques  hommes  mis  hors  la  loi. 
Où  est  mon  crime  ?  des  Représentans  du 
peuple  qui  siègent  parmi  vous  (  il  s'adresse 
à  ses  collègues  )  n'ont-ils  pas  fait  la  même 
chose  ?  Je  n'ai  été  dans  cette  circonstance 
qu'un  instrument  passif.  Si  je  n'avais  pas 
obéi  ,  n'eût-on  pas  dressé  mon  acte  d'accu- 
sation ,  et  la  Convention  nationale  ne 
m'eût-elle  pas   envoyé  à  l'échafaud  ? 

5  5  De  deux  cents  individus  hors  de  la  loi 
dans  les  départemens  de  Loire  et  de  l'Ain  , 
où  j'ai  été  envoyé,  quatorze  seulement  ont 
péri.  Où  est  donc  mon  crime  ?  Si  dans  cette 
circonstance  ,  le  sang  innocent  a  coulé  , 
j'ai  tout  simplement  fait  mon  devoir.  5» 


Crimes  du  proconsul  Lejtunt.  2 1 5 

n  est  facile  tle  répondre  à  ce  Proconsul 
«ans  employer  ces  mots  de  providence  éter- 
ndU  ^  de  monstres  ,  qu'on  lit  dans. sa  justifi- 
cation prétendue. 

Carrier ,  Lebon  ,  Maîgnet ,  et  tous  les 
scélérats  conventionnels  ,  ont  vouhi  se 
justifier ,  en  répondant  comme  Lejeiine  : 
J{ous  avons  obéi  ;  il  fallait  obéir  ou  mourir. 

En  pareil  cas ,  le  devoir  d'un  Législateur 
est  de  mourir  plutôt  que  de  faire  périr 
quatorze  individus  qui  n'avaient  commis 
d'autres  crimes  que  d'avoir  improuvé  la 
journée  du  3 1  mai. 

Un  Représentant  du  Peuple  dont  le  pou- 
voir fatal  fait  mouvoir  à  son  gré'Finstru- 
ment  du  supplice,  et  qui,  sur  sa  table, 
amuse  les  convives  à  répandre  le  sang  dé  la 
volaille  avec  une  petite  guillotine ,  n'an- 
nonce-t-ir  pas  ce  caractère  féroce  ,  qui  ne 
craint  pas  de  se  jouer  de  la  vie  de  ses  sem- 
blables? Cette  barbare  récréation  eut  cumulé 
sur  la  tête  d'un  simple  citoyen  toute  l'hor- 
reur du  crime  ;  mais  il  n'est  point  d'ex- 
pression pour  peindre  le  honteux  avilisse- 
ment où  elle  plonge  un  Législateur.  Lejeune 
en  a  senti  les  funestes  conséquences  ;  mais 
vainement ,  dans  son  mémoire  soi-disant 
justificatif,  a-t-il  cherché  à  éloigner  l'incul- 
pation de  cruauté  que  ce  trait  élève  de 
toutes  parts   contre  lui.  Lejeune  ne  sera 

O  4 


$ i6       Crimes  du  praconml  Lejeuni^   > 

jamais  regardé  que  comme  un  atrocci  agent 
des  Décemvirs  ,  qui  peut-être  n'eussent  pas 
couverts  notre  math,eureus,e  patrie  de  tant 
de  deuil  et  de  ruines ,  s'il  ne  se  fût  présenté 
des  hommes  comme  Lebon ,  Leje^ne  et 
tant  d autres,  qui ^  sous  la  dénpminatioii» 
évasive  .  d'Agens  passifs,  se  sont  livrés  à 
toutes  sortes, d'excès. 

Lejeune  ose  bien  invoquer  la  justice 
divine  en  sa  faveur.  II  ignore  sans  doute 
que  le  cœur  pur  ose  seul  élever  vers  elle  sa 
yoij;  touchante  ;  semblable  à  cet  homme 
couvert  d'opprobre  et  de  forfaits  ,  qui 
détom;ne  en  frémissant  la  vue  de  ;  Técha- 
faud(4^essé  pour  son  supplice,  le  coupable 
cheijcherà  oublier  l'idée  d'un  Dieu  vengeur^ 
L'insensé  !  détruit-Il  ses  remords?  Lejeune , 
ton  cœur  doit  être  bourrelé  par  le  spectacle 
de«  quatorze  citoyens  ,qu"e  tu  as  sacrifié ,  et 
oppressé  par  ce  déchirant  souvenir.  Les 
mots  d'assassin  et  de  bourreau  ne  se  pré- 
sentejit-ils  pas  à  chaque  instant  sur  tes 
lèvres  souillées  de  leur  sang?  Les  ombres 
du  crime  qui  ombragent  tes  regards  pexi- 
dant  la  lumière  du  jour ,  ne  te  font-elles, 
pas  voir  leurs  cadavres  sanglans  et  tronqués, 
qui  te  disputent ,  pour  ainsi  dire ,  le  passage  ?. 
La  justice  humaitie  en  épargnant  tesjours  ^ 
ne  voulut  qu'augmenter  ton  supplice. 


Crimes  de  Duhem.  217* 


Crimes    de  D  u hem. 

No  u  s  ne  ferons  pas  un  crime  à  Duhem . 
des  malades  qu'il  a  pu  tuer  ,  il  u  y  a  pas 
encore  de  décret  contre  les  médecins 
ignares  qui  compromettent  la  vie  des  ci- 
toyens. Mais  il  était  écrit  sur  le  livre  des 
destins  ,  que  ce  Duhem  serait  le  tourment 
de  la  pauvre  espèce  humaine  dans  tous 
les  sens. 

On  n'a  pas  oublié  la  motion  qu  il  fit  à 
la  Commune  daller  briser  ou  incendier 
les  presses  chez  les  Imprimeurs  de  Paris 
suspectés  de  travailler  en  faveur  des  Brîs- 
sotins.  Incapable  de  détruire  par  le  rai- 
sonnement les  principes  de  cette  faction 
où  il  y  avait  quelques  lumières ,  Duhem 
trouva  plus  court  et  plus  aisé  de  rompre 
le  travail  des  Imprimeurs.  C'est  ainsi  qu'en 
agissait  avant  Duhem  ,  le  calif  Omar ,  qui 
ordonnait  de  brûler  les  bibliothèques. 

En  conséquence  on  vit  à  la  chute  du 
jour  y  une  horde  de  Jacobins  réunis  à  des 
fédérés  ,  courir  ,  le  sabre  en  ^main  ,  les 
rues  de  Paris  ,  violer  lasyle  du  citoyen 
Garncry  ,  et  rompre  ses  presses.  On  ne 
trouve  que  la  sœur  du  Typographe  ^  on  la 


^m 


&  1 8     Un  mot' sur  le  proconsul  Pocholle. 

prend  à  la  gorge  pour  la  forcer  de  déda* 
rer  oif  est  son  frère. 

Mêmes  atrocités  furent  commises  chez 
Gorsas  ,  et  rue  Guénégaud.  Ces  attentat! 
s'appelaient  alors  du  patriotisme. 

Duhem  se  qualifiait  de  républicain  paf 
excellence.  Nous  ne  dirons  ici  rien  autt'e' 
chose  de  ce  Député  rentré  dans  le  néant , 
d'où  il  n'aurait  jamais  du  sortir  pour  .%t 
montrer  le  persécuteur  de  la  pensée ,  et  le 
violateur  du  plus  sacré  des  droits  et  dès 
devoirs  de  Thômme. 


Encore  un  mot  sur  le  Proconsul  Pocholle.  .  • 

Charles  VII ,  Roi  de  France  ,  fut  un 
Prince  comme  il  y  en  eut  tant  d'autres  ;  il 
vit  Agnès-Sorel  ,et  se  prit  de  passion  pour 
elle.  Cette  femme  lui  dit  dans  le  style  et 
les  mœurs  du  tems  :  <«Un  Astrologue  m'a 
55  prédit  que  je  serais  aimée  un  jour  par  un 
55  Monarque  plein  de  vertus  et  de  cou- 
55  rage  ,  de  lumières  et  d'énergie.  Charles, 
55  vous  n'êtes  pas  encore  l'homme  digne 
5  5  de  moi.  Voilà  que  les  Anglais  envahissent 
55  la  France  ,  y  commettent  tous  les  excès  , 
55. et  vous  les  laissez  faire.  Quand  vous  au- 
55  rez  repoussé  l'Ennemi  commun;  quand. 
55  vous    aurez    rétabli   l'ordre    dans     les 


Un  mot  sur  le  proconsul  Pocholle.     «  i  g 

w  finances  de  FEtat  /venez  à'moi  ;  je  con-^ 
«  sens  d'être  alors  toute  à  vous.  î>    • 

Les  cendres  d'une  femme  de  ce  caractère 
méritaient  sans  doute  le  respect  de  la  posté- 
rité. PochoUe  n'en  tint  compte.  Nous 
lisons  dans  les  registres  de  la  Municipalité 
du  canton  de  Loches ,  que  ce  Député  ,  in- 
sensible au  souvenir  de  la  belle  conduite  de 
cette  femme ,  sans  égard  pour  ce  qu'on 
doit  aux  morts,  viola  l'asyledes  tombeaux; 
et  d'une  main  profane  ,  s'empara  du  crâne 
d'Agnès-Sorel ,  en  arracha  les  cheveux  qui 
y  étaient  attachés  ,  et  détruisit  ce  monu- 
ment funéraire  ,  propriété  nationale  ,  à 
laquelle  les  étrangers  ne  manquaient  pas . 
de  venir  porter  le  tribut  de  leur  admi- 
ration. 

Citoyen  PochoUe  ,  on  ne  viendra  jamais 
rendre  hommage  à  votre  cendre;  mais 
quelqu'un  pourra  bien  écrire  avec  un 
charbon  sur  votre  bière  :  <«  Là  est  ren- 
)»  fermé  le  corps  de  PochoUe  ,  violateur 
H  du  tombeau  d'Agnès-Sorel.  Cet  homme 
55  bas  et  cupide  dispersa  les  restes  d'une 
55  femme  ,  la  gloire  de  son  sexe.  PochoUe 
55  ne  po'uvant  atteindre  à  son  mérite, 
5  5  voulut  s'en  venger  par  ce  lâche  attentat. 
>5  Passans  !  bénissez  le  nom  d'Agnès  Sorel  ; 
>5  vouez  à  l'infamie  le  nom  de  PochoUe.  5>. 


«20  Troconsnlat  de  DuboucheU 

'■'..''  ■       ■  ■  I' 

Trocomvlat  de  Dubouchet ,  dans  le  dépar- 
tement de  Seine-et-Marne. 

C  E  médecin  ,  Membre  de  la  Convention , 
fut  envoyé  en  mission  dans  le  département 
de  Seine  et  Marne. 

Il  fallait  voir  ce  Député  toujours  bien 
coiffé  et  plusieurs  diamans  à  ses  doigts  y 
prêcher  le  sans-culotisme  le-  plus  outre' 
dans  les  termes  les  plus  sales  et  les  plus* 
grossiers.  Ce  Proconsul  petit  maître ,  affec-' 
tant  les  airs  farouches  d'un  Montagnard  l 
allait  en  mission  escorté  de  4  à  5oo  volon- 
*taires  ,  et  fesait  traîner  à  sa  suite  plusieurs^ 
pièces  de  canon.  Arrivé  dans  une  Com- 
mune ,  il  promulguait ,  avant  tout  ,  un 
arrêté  ,  ordonnant ,  sous  deux  heures  ,  une 
forte  contribution;  et  lei?  sommes  levées 
servaient  à  payer  les  orgies  scandaleuses 
de  son  armée  révolutionnaire.  Il  en  restait 
quelque  chose,  sans  doute  ,  entre  les  mainS" 
procon^ulaircs  de  Dubouchet.  Mais  qu'on 
ne  demande  pas  te  qu'il  gardait  pour  lui. 
II.  n'a  jamais  rendu  de  comptes.  Cartouche* 
était  plus  loyal  ;  en  demandant  la  TDOurse  , 
souvent  il  la  partageait  avec  les  propriétaires,  ' 
et  plus  d'une  fois  il  la  vidait  en  faveur  de 
CtWL  qui  n'avaient  rien. 

Le   médecin   Dubouchet    ne   fut  point 


Horreurs  commises  à  Dax.  sîi 

heureusement  envoyé  dans  nos  Départe- 
mens  méridionaux  ;  avec  les  goûts  qu'ori 
lui  connaît ,  que  de  familles  il  eût  saignées! 
Du  moins  ne  fut-il  que  concussionnaire. 

Crimes  commis  sous  le  proconsulat  de  Pinet  et 
Cavaignac ,  dans  le  département  des  Basses-^ 
Ty renées  et  autres. 

A  Baypnne,  on  représentait  une  pièce 
nouvelle.  Deux  Gendarmes  ne  pouvaient 
trouver  place.  Rigodot ,  Tun  d'eux  ,  marié 
de  la  veille  ,  aperçoit  une  loge  vide  ;  il  se 
la  fait  ouvrir  de  force  ,  et  demande  la  pa-^ 
rôle  aux  Spectateurs.  «4  II  est  bien  étonnant , 
dit-il ,  que  sous  le  règne  de  Tégalité  ,  il  y 
^t  des  privilèges.  Cette  loge  était  vacante; 
on  me  la  refuse ,  parce  qu  elle  est  destinée 
aux  deu5c  Représentant  qui  arrivent  ce  soir 
4  Bayonne.  Je  ne  reconnais  point  de.Re- 
présentans  ici  au  spectacle  ;  à  la  bonne-^ 
çieure  ,  chez  eux ,  quand  ils  renden^t  hu 
justice.»  5 

.  H  s'agissait  de^  Pinet  et  de  Cavaignac. 
prévenus  ,  sans  doute  ,  ils  ne  se  présen- 
tèrent pas  à  la  comédie ,  mais  ils  se  rendirent 
à  la  Société  des  Jacobins  pour  y  dénoncer 
èur-le-champ  les  deux  Gendarmes  , .  qui 
(tirent  arrêtés  de  suite  ,  et  peu  de  jours 


1 


22sr  Horreurs  commises. à  Da^. 

après  ,    guillotinés  ,    comme    convaincus 
d'avoir  outragé  la  Représentation  nationale; 

Contraignons  notre  juste  indignation 
pour  raconter  quelque  chose  de  plus  atroce 
encore. 

Labarrère  ,  prévôt  de  la  Maréchaussée 
de  Dax  ,  département  des  Landes  ,  mis.  en 
état  d'arrestation,  avait  une  fille  de  17 
ans  et  fort  jolie  ,  demeurant  à  St. -Sévère. 
A  l'arrivée  de  Pinet  et  Cavaignac  en-  cç 
Keu.,  elle  court  aussitôt  solliciter  là  déli- 
vrance de  son  père.  Les  deux  Prdconsuls 
la  lui  promettent.  Demain  ,  nous  devons 
nous  rendre  à  Dax  ;  notre  premier  acte 
de  justice  sera  de  te  rendre  l'Auteur  de  tes 
jours. 

La  jeune  fille  leur  marque  sa  vive  recon- 
naissance ,  et  ajoute  qu'elle  va  faire  le 
voyage  de  Dax  tout  exprès  pour  receveur 
son  père  dans  ses  bras. 

Cavaignac  lui  propose  de  la  conduire 
dans  sa  voiture.  Elle  l'accepte.  Le  monstre  ^ 
en  route ,  exige  d'elle  le  prix  de  la  rançon 
de  son  père.... 

.  Ce  n'est  pas  tout.  L'infortunée  attendait 
le  surlendemain ,  chez  une  amie  ,  l'effet  des 
promesses  qu'on  lui  avait  fait  acheter  si 
cher.  Un  tambour  se  fait  entendre  y  c'était 
à  Dax  l'usage.  On  conduisait  à  la  guillotine 
au  son  du  tambour.  La  jeune  fille  met  IdL 


•  .  Atrocités  commises  dans  la  Vendée.    I2s3 

tête  à  la  croisée...,  O  crime  !  ô  désespoir  ! 
on  menait  son  père  à  Téchafaud.  Elle 
tombe  évanouie ,et  ne  revint  à  elle  que  pour 
ft'écrier  :  Les  monstres  !  ils  m'ont  violée 
en  me  flattant  de  me  rendre  mon  père  !.... 
Une  répugnance  invincible  nous  fait 
passer  sous  silence  une  infinité  de  traits 
pareils.  Nous  aurions  de  quoi  en  faire  plu- 
sieurs volumes. 

Atrocités  commises  dans  le  département 
de  la  Vendée  et  autres  circonvoisins ,  sous 
les  proconsulat  de  Hentz  ,  Franicastel , 
Ingrand,  Richard,  Chuodieu,  Lequinio  , 
Laignelot,  Phelîppeaux,  Bourdon  (de 
rOise  ] ,  Goupilleau ,  Thurreau,  Ruelle , 
Cavaignac  ,  MéauUe ,  Bourbotte ,  etc. 

vJn  devrait  peut-être  remonter  jusqu'à 
Mirabeau,  pour  trouver  la  cause  pre-* 
mière  de  cette  épouvantable  guerre  civile 
tt  religieuse  de  la  Vendée ,  où  l'on  répandit 
plus  de  sang  que  la  rivière  ,  dont  ce  Dé- 
partement porte  le  nom ,  n'a  fait  couler 
d'eau  jusqu'à  présent.  Mirabeau  n'était  pas 
de  bonne  foi ,  quand  il  rédigea  et  fit  dé« 
crétcr  une  constitution  à  part  piour  le 
Clergé.  Il  avait  trop  de  lumières  pour 
ignorer  qu'il  était  d'une  bonne  politique 
de  ne  faire  aucune  mention  du  culte ,  et 
de.  ne  point  s'occuper  sépaïément  de»  mî* 


««4  Atrocités  commises  dans  le  département 

nîstres  de  la  religiou  ;  mais  ce  moderne 
Machiavel  prévoyait  que  la  constitution 
civile  du  clergé  servirait  bientôt  de  pierre 
d'achoppement,  et  deviendrait  une  pomme 
de  discorde. 

Le  serment  exigé  ,  pour  son  exécution  , 
mit  le  comble  aux  désordres  ,  et  fut  comm^ 
la  torche  incendiaire  qui  causa  le  premiéf 
embrasement  de  la  Vendée.  L'Assemblée 
constituante  commença  le  mal  par  son 
imprévoyance  ,  la  législative  lé  consomma 
par  son  ineptie.  U  était  tems  encore 
d'étoufFer  ce  germe  de  dissention  civile  , 
lors  du  rapport  des  C6m,missaires  envoyés , 
au  mois  d'août  1791,  dans  le  départejmçnt 
fanatique  de  la  Vendée.  Sans  reculer  d^cv^nt 
la  superstition,  il  ne  s'agissait  que  d'en 
détourner  la  vue  ,  et  de  laisser  libres  dabit 
leurs  croyances  et  les  actes  de  leur  Foi ,  dci 
milliers  de  bons  Poitevins  qui ,  à  ce  prix  i 
pussent  continué  à  payer  leurs  imposition»  , 
et  même  à  prendre  de  rattachement  pour  I9 
RépubliqMe..  Jamais  ces  hommes  bornésr, 
mais  labQ\*içu3^ ,  n  eussent  souffert  que  lès 
Anglais  vomissent  parmi  eux  de$  légiona 
entières  qui  furent  bien  reçues  ^  patoQ 
qu  elles  parurent  ne  débarquer  que  pont 
venir  au  secours  de  IpuyS  autels  menâtes  ,- 
et  de  leurs  prêtres  persécutés.  Le  Gouver- 
nement britapliicjueprQfiîft^aveq  S2i  perfidici 


\ 


de  la  Vendée^  et  autres  circonvohinSé^'-  SSî5 

ordinaire-,  de  cette  faute  capitàté'*dti^ 
Gouvernment  Français  ,  et  conçut  des* 
plus  «ini^tres  projets  i  tant  qu  il  eut  un  pied' 
clandestin  sur  -  notre  tèrrîfoire,  •  :  ' .  *  r?  ; .  ♦ 

La  sécoi*de  législatuiîé-  ne  prît  aucune* 
déteraîin|Lti4^n  sage  pfôiir'rassfurtr  les  âmes» 
faibles  ,  et-  calmer  lefertrièïit  que  ffilétoHsF 
ennelniâ  'a\aîent*  jetés; -  tl  fallait '-sur-tôub 
enlèvera  la^hoblèsfe^  et/au  clergé  tout  pré- 
texte d^gitatîon.      - 'j^i-  /   * 

La  Convention  dotitlc  système  était  tJf 
tout  détruiré  pour  rèjgher  ^clù^vëtnènt  / 
loin  dafrêter  le  mal- à  sk-  naissance  ,•  s^ém-' 
pressa  avec  une  perfidie' îitrôeëvde-fiftWnîr^ 
eïle-înèitté  les  brandons  ^rtéteisSâlt^èsî  j^dur 
iaceiidiet  ces  roûlfeeïitîeasès^  cduttéW;  jf^ê^ 
com«a*idement  d^ïiné  à'^ùb^-Dlifiayé^ 
semblait  sUinoncer  iiftë't^^ndûité  tôtitô-iôpï^ 
posée:  Ce  Général  se  côndmî^Tt  avec  autârit? 
depnideQceque  de  patrk)tism^Ë,r  Sahs^céi^. 
férir ^  â^éîrl^s  seuls  àrmiCs  delà  persriafeSfé^fiV 
on  lê^i«î  faire  rêhtrép'dâns4a«ôuMÎ!5>*toft-âtl# 
loisdtsJa^R^Ubli^e  f  céifl^^'ifuî  ^araissaiéni 
d%abbrd-  leis^^plu^  àîdlJatH^cdhttr'elié.   Kfaîi! 
ce  n'était -^as  le  côtn'ptè^ 'dès  Jacobins  d'é^ 
Part»  V  des  généraux  -tènS^riSèto  ne'  coifi^ 
\nena:ieAt  point  à  leurs  .vtrés,-  il  -i^eflr  felfcîît* 
des  4iamtnes:  ignares  et  des' bôutrètttfx  i^hyii? 
niâttre*  a  efcéèution  '  aveuglement  efe  âânîP 
toute  leur  atrocixé  Icte^décf^Mî-^ail^âairèS^ 
Tome  VI.  p 


S26  Atrocités  commisesdam  le  département 

et  destructeurs  qu  ils  fesaient  rçndre.  On 
qualifia  les  Vendéens  de  brigands  :  cette 
dénomination  fausse  €^perfide  fut  peut-être 
la  première  source  de  toutes  \t$  i^alamitéa 
de  ce  pays  infortuné.  Comme,  pfi  s'y  at- 
tendait, cette  mésujte.  accrut  le .  parti,  des 
méâontenS)  et  fournit  un  texte  au^&.sensiens 
incendiaires  des  prêtres  y  appii|yé«  par  les 
nobles,  a  Vous  voyez  jaien  ,  direnHlsauK 
55  habitansdela  Vendée  ,.quW  yeqt  vou» 
w  ,trâi^r^  en  bn^ind^&vec  lesqjuf}^.  pq  ne 
99  ménage  rien:  si  ypi^s  ne  vou^  défendez  » 
9^  vous  alle^  être  i  volé  S:,  violés.  1  noyés  ,  in-< 
çendiiés  ,  égorgea.  >>  »  > 

..|La  nouvelle  des  affreuses  journées  de 
septembre  vint,  m,ettre  le  comble  à. la  rage 
4es.Vend^riSb  11$  crurent,  devoir  s'armer 
jusqu'aux  dentç  pour  défendre  leurs  ptêtres 
et  leurs  autels«  Ab  commencement  de  cette 
guerre,  affreuse,  on  avait  vu  jusqu'aux 
fGrSQ^e&  des-  nobles  prendre  Tépée  et  çom- 
battrp-ppuçr  leHi^-'palirohemins^  et;pQur  le 
T^rçit^e»  Ce  i^tbien  pi^  sous  la  GonvcntioïK. 
]|§syenclé|&ii>  né  furent  plus  re!d0ini4issalilest, 
eux  qu'on  avpit  vu  traiter  avec  des  égards 
les  volontaires,  de  la  Gatde  nationale  % 
échaetger  leurs  :a^ignats-  contre -dk  l'argent 
et û^ renvoyer. sur iewpîur.olè,  apr^M^aivoir 
^&  4'^ux  la  proo>ess9:4e.  né  point  com^ 


delà  Vendée^  et  autres  circônvoùin$.  927 

Msus  la  Montagne  qui  n'était  pas  assei( 
généreuse  pour  rendre  justice  aux  vertuf 
de  ses  ennemis,  dans  sa  politique  infâmci 
et  mal-adroite ,  après  le  3 1  mai  trop  fameux, 
fit  poursuivre  et  arrêter  ceux  qui  racontaient 
naïvement  les  bons  traite  mens  qu'ils  avaient 
reçii3  dans  la  Vendée.  On  opposa  à  ces  rap^* 
ports  des  imputations  ridiculement  atroces , 
pour  aigrir  les  partis  ,  àu^lieu  de  chercher  à 
les  réunir  ou  du  moins  à  les  calmer.  D^ns 
tous  les  JQurpaux  vendus  à  la  faction  de  la 
Montagne  ,  ainsi  quç  d^^ns  les  tribunes  des 
Jacobijqs  ,;  des  Cordeliers ,  de  la  Com];nune  » 
et  même  de  la  Convention  ,  on  affecta  de 
débiter  que  les.  Vendéens  arrachaient  les 
yeux  aux  volontaires  avec  des  tire-bourre  > 
^'ils  les  enterraient  tous  vifs.  Malheur  aux 
incrédules  i  On  en  fit  guillotiner  plusieurs 
pour  Tcxemple.  C'est  ainsi  qu  on  animait 
tout  le  reste  dç  la  France  contre  la  Vendée  ; 
et  c'est  ainsi  qu'elle  devint  le  tombeau  d'un 
taillion    d'hommes.    Les   Vendéens  ,    ca- 
lomniés ,  réalisèrent  par  la  suite  les  atro- 
cités qu'on  leur  prêtait  :  ils  firent  plus  ,  ils 
payèrent  des  volontaires  nationaux  pour 
commettre  des  meiirtres ,  afin  d'allonger  la 
Uste  de  leurs  forfaits  ,  et  grossir  le  parti  de 
l'opposition  au  récit  de  ces  horreurs. 

Les  prêtres  souriaient  entre  eux  de  tous 
ces  désordres ,  et  poursuivaient  leur  plan* 
-  P  2 


îsS  Aïrocités^cammises  dans  le  dépârtenittit 

Abusant  de  la  crédulité  des  femmes  ;  ils 
J)àrç6ura:ient  les  xâttipàgne's  ,  afFuWés"  de 
Mrrs 'hatbits  dé  catàctère',  ét'uri'St.-Sàcre- 
merit  à  la  main.  Us  fchkhtaîent  la*inesse  à 
la  tête  des  pelotoftVarraés,  et  disaient 'au* 
épouses  des  combattant  t  u  Sî;  ^cyS' maris' 
ii'  meurent  sur  "*  ïè^  champ'  '  dé  '■  Bàtkffle  , 
99  consolez  -  VOUS  ,'âriïes  cathçJlïcJiittV  As^ 
yi  vous  seront  rehdus  ati^bdliiî  *dê^  trois 
>>' jours  ;  Dieu  fera  Un  mîràîde^'potiï-VôusJ 
jS-  Gm^rsaiitifes-fcm-Àiyst  v6^  ttïâîfli  ;  ttibfc^ 
^V  pour  la  sainte  E^ijë,  ressusciteront  (i)^ 
y^'  àu^bput  de  trois •  îottrs  ïv  If  arrivait  dfe- 


r.':"- • 'T"  .'"'^    •    .  I  5*>  '^li-  .'■•■    îi» 


ten 


'espoir  qa'il,ressiiscitéràu  d^s  inr'éis fôuVs. 
de  ce , teins  sa  voisiue  arrivfii,  ct<«e,  plaiiit;;?.dé:  la  mau*-- 
vaise  odeur  qui  règne  daçis  p  maison.  La  .veuve  luL 
confie  Qu'elle  provient  du  xadàvre  de  son  mari, 
qu'elle  avait  conservé  dans  Pespoiri^u'il  se  rânïine^ 
mitv  mais  que  le  te'rme  étant  expiré", ^dU&.ptesseft'v 
tait  qu'il. n'était  pas^*no.rj  en  état  degrâci^,  et  que  «y 
résurrection  n'aurait  lieu  que  dans  un  an.  ^ 

.Un  ciiltlvatèur  étâit'àâhgereusement  blessé,  il ^cr 
traîne  avec  grand  peine  vers  sa  chaumière.-  Safemme 
vient  à  sa  rencontre ,  et  li^j  prête  ^oi^bças:  pour  l'ai» 
der  à  parcourir  le.  peu   (ji^,^çhcj;nin^\\i.  ùji  jçstç.; 
Arrivés  à  leur  demeuré  ,  il  se  "plaint  à  sa  femme  dès 
douleurs  qu'il  éprouVe  f  et  lui  dit  qu'il  craint  d'é- 
prouver, une  longue  agoàie.  Le*  seul  terme  à   sea. 
maux  ,  c'est  la  mqrt ,  et^qu'elle  doit  s-'apprêter  à  la 
lui  donner,  afin  çle  hâter  l'instant  de  sa  résurrection  : 
iTètfeoialhcureasê-rinvrtfei' s'acquitter  de  ttrâî  îii» 


de  la  Vendée,  et  autres  circonvohin^    ssg 

là  que  les    femmes   elles-mêmes   forçaient 

leurs  maris  à  prendre  les  armes.  Les  plus 

pçitrqris    ou    les    plus    pacifiques    étaient 

obligés  de  marcher  au  nom  de  la  religion 

de  leurs  pères-  La  Vendée  et  la  Convention 

fournissaient  ,  chacune  de  son.  côté  ,  des 

scélérats  prêts  à  tput  :  Tune  avgit.ses  nobles 

et  ses  pire  très  ;  Tautre  ses  généraux  et  ses 

proconsuls  ,  triés  par  le  Comité  de  Salut 

public. 

actes  que  "prescrivent  la  religion  catholique  ;  et  à 
peiné  a-t-il  achevé  ,  qu'elle  le  tue. 
:  Une  jeune  tille,  non  moins  crédule,  ne  quittait 
point  le  chevet  de  son  amant  ,  qu'une  maladie  de 
langueur  consumait  depuis  quelques  mois  ;  sur  le 
point  de  le  voir  expirer ,  elle  se  rappelle  cette  pré- 
tendue résurrection.  Il  ne  s'agissait  plus  que  de  lui 
(lire  donner  la  mort  par  les  troupes  rép.ublicaines  ; 
quelques  coups  de  fusds  qu'elle  entend  dans  le  voi- 
sinage ,  l'avertissent  de  leur  approche.  Elle  apper- 
çoit  e£Fecnvement  quelques  soldats  ;  tWt  saisit  un 
arme,  fait  leu  sur  eux ,  et  s'échappe  par  une. porte 
de  derrière,  dans  les  bruyères  voisines.  Au  co|ip  de 
fco  les  soldats  accourent  vers  cette  maison  ,  en  en- 
foncent les  portes ,  et  massacrent  ce  fcune  homme. 
Qoelcmes  heures  après  la  jeune  fille  revient  au 
logis  de  son  ajnant ,  le  trouve  mort.  Elle  ferme  soi- 
^ensement  la  porte  ;  le  second  jour  elle  met  sur 
une  table,  à  côté  de  son  lit ,  quelques  provisions. 
Le  lcndeinaiiv5oir  elle  arriveàbas  bruit;  elle  écoute; 
elle  appelle  ,  un  profond  silence  règne  dans  Tin- 
térieur.  Elle  revient  encore  le  lendemain  ,  dans  la 
confiance  qu'il  sommeillait;  mais  la  putréfaction  qui 
fesait  déjà  ses  ravages,  Tavertit  que  son  amsnt était 
peidu.  ponr  elle 

P   3 


àSb  Atrocités  commises  dans  le  dépdrttméht 

Les  décrets  sur  la  Vendée  sufBraient 
seuls  pour  faire  ïe  procès  à  la  Convention  , 
qui  donna  à  ce  département  le  nom  de 
vengé.  C'était  le  département  exterminé  l 
qu'il  fallaitdire.il  faudrait  condamner  tous 
les  Membres  de  cette  Convention  à  par- 
courir ces  malheureuses  contrées  ,  pour  y 
t^nir  registre  de  toutes  les  réclamation^  ,  dé 
toutes  les  malédictions  dont  elles  retentiront 
encore  long-tems. 

La  Vendée  ne  fut  pas  la  seule"*  sacnfiéc 
au  système  affreux  de  la.  Montagne  :.le> 
départemens  de  Mayenne ,  de  Mayenne  et 
Loire  ,  des  Deuît- Sèvres  ,  de  la  Charente- 
Inférieure  ,  et  plusieurs  autres  encore  par- 
tagèrent ses  malheureuses  destinées. 

Une  partie  de  toutes  les  atrocités  que 
nous  allons  dénoncer  à  la  postérité  ,  le  fut 
dtu  Comité  de  Salut  public  :  mais  cons- 
tamment sourd  au  cri  de  Thumanîté  ,  il 
avait  arrêté  ,  dans  son  horrible  politique  » 
de  faire  ^exterminer  une  moitié  des  Français 
par  Fautre  ,  pour  réaliser  ce  partage  de* 
terres  réclamé  par  Chaumette.  Chaque  fois 
qu'on^  apportait  la  n^ouvelle  d'une  cxterr 
mination  d'un  grand  nombre  de  familles  » 
alors  de  féroces  brava  éclataient  de  toutes 
parts  ;  à  la  Convention  ,  à  la  Commune  , 
5ur-tout  aux  Jacobins  et  aux  Cordeliers* 

On  distribuait   des   listes   mortitaires  ^ 


de  la  Vendée^  et  autres  circonvoisinsi     s3 1 

comme  s'il  eût  s'agit  d'étrangers,  armés 
contre  la  France.  Et  cependant  c'étaient 
des  frères  qui  s'entr  égorgeaient  ;  et  l'oii 
remarquera  qu'il  périssait  autant  de  Ré*- 
publicains  que  Me  Vendéens. 

Dans  les  différentes  armées  que  nous 
connaissons  sous  le  nom  de  troupes  de  la 
Vendée  ,  on  comptait  une  infinité  de 
femmes  ,  la  plupart  ex-nobles ,  qui ,  dans 
plusieurs  occasions ,  donnèrent  les  preuves 
de  la  plus  grande  intrépidité.  Ui:ie  soeur  de 
Lescure ,  à  l'affaire  de  Thouars ,  le  14  sep- 
tembre 1793  ,  fit  le  service  d'une  pièce  de 
huit,  pendant  une  partie  de  l'action  ^  et 
ne  quitta  ce  poste  qu'avec  la  vie.  Une 
femme  ,  dont  nous  ignorons  le  tiom  ,  com^ 
mandait  un  corps  de  troupes  à  l'affaire  de 
Gesté.^  On  la  vit  rallier  ses  troupes  pendant 
trois  fois  ,  et  les  ramener  autant  de  fois  au 
combat,  en  chargeant  elle-même  à  leur 
tête.  Un  coup  de  feu  renversa  cette  héroïne 
sur  le  champ  de  bataille. 

Ces  traits  de  valeur  mériteraient  sans 
doute  notre  admiration  ,  si  on  ne  voyait 
quelques-^es  de  ces  femmes ,  se  dépouiller 
ensuite  cette  sensibiHlè ,  le  plus  bel  appa- 
nage  de  leur  sexe  ,  pour  savourer  à  longs 
traits  le  plaisir  de  la  vengeance.  Les  mal- 
heureux prisonniers  étaient  fusillés  de  part 
€t  d'autre;  elles  s'offraient  pour  être  les 

P  4 


i3^  Atrocités commùisdam  le  dipàttement 

à^s.instrumens  de  leur 'supplice  v  eUcs -ap- 
plaudissaient à  i  mhumation. -de  .ces;  iinalr 
béù reîix:,  doiu  Us  cris  plaintifs  annonçaient 
■encore-  un  reste:  d- existence.      .     :.  /j. 

Le  trait  suivant  est  d'une  atrocké,  si  réflé- 
chie ,  qu;t)n  le  jugera  sans  peine  inspiré  par 
i aveugle,  fatiatisme^. Deux  jeun«eSvfille5^  sont 
fcondiiites  au  général  Duhoux  ;  ^ elles  -lui 
;d£mandent  Thonneur  et  la  vie.  Ce  Prépubli- 
:cain.,Hjouché:de  leur  jeunesse. et  de  Fait 
ïd'hooBeteté-quillit  sur  leur  physionomies 
Id&cïenvtdie  à  leiiT  habitation  ;  pe^  éloignées 
îayecuixeoortbreust» escorte.  EUeg  invîtcnst 
leur&pacotècteurii  à  sCi  rafraîchir.;  quelqu^s- 
omâ   acioeptent.  7  La  colonne    républicaine 
-avait  à  peine:  défilé  ^  qu'elles  font  entourer 
déur  inaison  par  une  foule  de  Viendéens  ,  et 
jvioieffliLtf massacrer  de   sang-froid. teux  qui 
javaieîlt.protégé  leur  vie;et  leur,  hoiiuèur. 
Ces  deux  jeunes  filles  ,  qui  ^  par  Ja:  suite  > 
joûtétè  guillotinées.,  montrèrent  une  grande 
fermeté  devant  leurs  juges. 
: .    Suri  la  route  d'Harney»  à  Lav^l ,  ;des.  Ven- 
déens arrêtèrent  un  volontaire. .  qui  rejoi- 
gnait spix  çorp§  ;  ils  lui  coupèrent  les  pieds 
et  les  mains,  lui' crevèrent  les  yeux  ,  le  per- 
cèrent de  plusieurs*  coups  ,  et  le  laissèrent 
expirer  sur  la;  route.  .    ;  .. 

Un  Vendéeuicultivait  son  champ  ,  ayant 
son  iiisil  à;ses  côtés  \/û  apperçoit  un  volonr 


:  de  la  Vendée ,  et  antres  circonvoisim.  233 
;taire  ,  le  couche  en  joue  et  le  tue.  De  retour 
.chez  lui ,  il  .dit  :  et  Ma  foi  !.j  ai  tué  un  bleu.  ?:» 
Ccst  ainsi  qu  ils  appelaient  les  volontaires» 
:Sa  femme  lui  dît  :  <*  Mais  ,  il  fallait  donc 
j>  Je  fouiller.  Allons-y  ensemble.  5 9  Arrivés, 
quelle. est  leur  surprise  de  reconnaître  leur 
enfant,  dont  ils  ignoraient  le  sort  depuis 
long-tems  ! 

JLors  de.  la  prise  de  Fougères  ,  ils  for- 
cèrent le  Maire  à  crier  plusieurs  fois  i.vivt 
le  iRoi  !  en  lui  promettant  la  vie  :  néan- 
moins, ils,  le  fusillèrent  en  présence  de  ses 
concitoyens. 

-A  la  Roche-Servière  ,  lerf  Vendéens  en- 
terrèrent un  fils  vivant  sur  le  cadavre,  de 
son  père  assassiné. 

Coquerçau  ,  chef  des  chouans  ,  fesait 
«arracher  les  yeux  à  tous  ses  prisonniers, 
ensuite  on  les.  perçait  de  mille  coups. 

Au  mois  de  brumaire  ^n  2  (novembre 

1793)  ,  les  chouans  arrêtèrent  la  diligence 

de  Nantes  à  Laval:  ils  pillèreût  les  voya- 

-geurs  et  les  massacrèrent.  Un  jeune  homme 

iiouvelleftient  ma;:ié  ,  ayant  été  dépouillé 

.  à  nud  i  éprouva  les  plus  cruels  traitemens. 

Lep  cris  de  sa, jeune,  épouse  fixèrent  Tatten- 

tiôn  de  ces  fjanâjtiques  ;  ils  la*  mirent  à  côté  de 

iSpn  époux  ;  et. ,:  aprè^  lui  avoir  faitéprou- 

fver  des  outrages  sans  nombre  ,  ils  1^  massa- 

cfèrjeçt  sur.  le, corps  de. son, mari  expirant. 


«34  Atrocités  commises  dans  le  di^rttnipnt 

Lés  aftreuses  lois  de  représailles,  activé^ 
de  part  et  d  autre ,  ont  produit  des  suppliée^ 
d'un  genre  nouveau.  Les  Vendéens  avaient 
traversé  cinquante  volontaires  d'une  corde 
à  puits  ;  cette  corde  ,  qu'ils  agitent  forte- 
itient  par  les  deux  extrémités  ,  fit  périr  ces 
malheureux  au  milieu  dWe  longue  et  dou- 
loureuse agonie.  Quelques  jours  après  ,  les 
républicains  font  quelques  prisonniers;  ils  les 
précipitent  vivans  dans  un  puits,  et  pressem 
leurs  corps  sous  le  poids  des  pierres  et  des 
décombres  dont  ils  le  remplissent, 

A  l'instar  du  gouvernement  républicain^, 
la  Vendée  avah  aussi  ses  tribunaux  révolu- 
tionnaires. Quelques  citoyens  ,  dont  le» 
noms  ne  nous  sont  pas  parvenus ,  ont  été 
les  victimes  de  leurs  jugemens  ;  d'autres  , 
par  des  réponses  conformes  à  l'opinion  defe 
juges  de  ce  tributial ,  ont  évité  la  mort. 

Le  citoyen  Duporruard  ,  de  l'Orient  , 
ancien  juge  de  l'amirauté ,  avait  été  nommé 
au  tribunal  de  Quimper  :  comme  il  s'y 
rendait ,  il  fut  arrêté  sur  la  route  qui  com- 
munique à  ces  deux  villes  ;  les  chouans  le 
•firent  descendre  de  sa  voiture  ,  lui  ban- 
dèrent les  yeux,  et  le  firent  irtatcher  pendant 
une  bonne  demi-heure  :  il  appréhendait 
sans  cesse  <i'être  massacré.  Lorsqu'on  liai 
débanda  les  yeux  ,  il  se  trouva  dans  ufi 
appartement  éclairé  par  des  lampes.  Six 


de  la  Vendée ,  et  autres  cîrconvoisins*    235 

personnes  entouraient  un  bureau  ;  deux 
d^éntre  eux  semblaient  reipplir  les  fonctions 
de  président  et  de  greffier.  La  porte  était 
éeenpée  par  des  gardes.  Le  Président  lui 
âyâbt  demandé  ses  noms  et  qualités  ,  Fin- 
terpeila  de  dire  :  <«  SU  avait  occupé  des 
99  places  dans  la  République.  99  II  dit 
»»  qu  oui.  —  Quelles  places  ?  —  Celles  de 
»»  juge. — Pour  quoi  les  avcz-vous  acceptées? 
»  — Je  n'ai  pu  faire  autrement.  — Etes- vous 
fj  républicain  ?  —  Non. — ^Avez-vous  acheté 
»»  des  biens  nationaux  ? — Non. — Greffier , 
99  dit  alors  le  Président ,  voyez  si  le  nom 
99  de  Monsieur  est  inscrit  dans  Tencyclo- 
«>  pédie  de  la  mort,  m  Le  Greffier ,  après 
avoir  feuilleté  un  gros  registre  ,  assura  que 
non.  ««  On  va  vous  reconduire  à  votre  voi- 
h  tare  ,  sous  condition  que  Vous  recom- 
>»  manderez  à  tous  les  amis  du  Roi  d'idée ep  ter 
99  le  plus  de  places  qu  ils  pourront  dans  la 
f9  République  ;  mais  qu'ils  n'achètent  pas 
M  de  biens  nationaux.  99  Detix  de  ceux  qui 
siégeaient  dans  ce  tribunal,  vinrent  alors 
Fembrasser  ;  il  les  recoilnut  pour  être  ses 
tousins.  Il  apprit  de  leur  bouche  quils 
jugeaient  pour  et  au  nom  de  Louis  XVIIL 
«  Nous  avons  ,  ajoutèrent-ils ,  des  pouvoirs 
99  de  lui.  Si  vous  aviez  été  acquéreur  de 
99  biens  nationaux ,  vous  auriez  été  fusillé.99 
fls  lui  apprirent  en  même  tem$  qu'ils  avaient 


9t36  Atfoiités  commises  dans  U  d^purtmsnt 

la  liste  de  tous  ceux  qui  a,chetaientj4e;-c^ 
biens.  Ils  avaient  une  cQr)re$po^d^nc^  ÇHÎviîë 
avec  toutes  lestadministration^  dépaxtem^ni 
taies  ,  qiii'^  leur  fes^ient  passer  presque- jg^i; 
par,  jour  le  .nom;des  acquéreurs  et^di^  ji^eps 
vendus.  On  rebanda  les  ye.u?c  au  citoyei} 
Duporruard  ,  pour  le  freconiduire  a,  :  sa 
voiture.  •  •..«  -        .     ,  \  j  .. 

\  Un  autre  particulier  fuf  arrêté  sur.  la 
route  de  Nantes,  et  conduit  dans  une^chau? 
mière  où  siégeait  un  tribunal.  S'étant  déclara 
royaliste  ,  et  acquéreur  de,  biens,  patiooajyxij 
dans  Imtention  de  lesïendr^[auxi  pjfQjjyi^v 
taires  Iqrs  de.  la  cpntre-i:éYRlutiQp  ;  Ûî /m 
renvoyé.  Ces  juges,  d',apr.ès  diffé^rens vrapn 
ports,  déployaient  moins  de  sévérité  visrà-viç 
lés  acquéreurs  des  propriétés  du  clergé  ,,qu4 
regard  de  ceux  qui  avaient  acquis  celles 
des  Nobles,  ••  it 

Les  horrçyrs  commises  par  une  foule- de 
scélérats  qui  déshpnoraientles  afméeS;yé:Tj 
publicaines  ,  . pprten.t^ .  ua. , caractère  aiissi 
atroce.  Des  Représeiïtans  ., ,  parmi  lesquels 
on. nomme  Hentzr  et  FrmcasUl^  en  ^ sont 
principalement  responsables  ,  puisque;. ^e 
soût  eux  qui  les  ordonnèrent  ou  les  approur 
vèrent  ;  et  ,;poMr  prouver  que  la  plupart  d/ç* 
ces  faits  ont  été  Touvra^ge  du- Comité'  4iç 
Salut  jpublic ,  c'est  quils  ont  été  dénonkcés  à 
çe&  Membres  par  douze  commissaires. dp  î^ 


delà  Vendée  et  autres  circonvoisins.  ^  ^3y 

Commission  d'Agriculture ,  envoyés  dans 
ce  pays  pour  y  protéger  les  récoltes. 

'Ce-  iut  d'abord  'à  AngeïS  ^ue  ces  deux 
Proconsuls  exercèrent  lefir  sanguinaire  au* 
torité.  Ils  se  portèrent  ensuite  dans  diffé- 
rentes communes  ,   selon  que  la  soif  du 
carnage^  leur  fit  entrevoir  ûs  moyens  de 
Hétanchcn  Cette  ville  ,  ainsi  que  celle   de 
Saumur  ,  avait  une  Commissk>n  militaire  ; 
$cs«  Membres  ne  sfe  nimitraient  jamais  en 
public   qu'entourés  de'  gendarmes  ;   per- 
sonne ne  pouvait  les  approcher.  Les  pré- 
vsebus ,  à  ce  redoutable   tribunal  ,   étaient 
diin^  un  isolement   affreux  :   leur   procès 
s^iffitmisait    sans  témoins  ^;.  et  la  faculté 
consolatrice- d avoir  un.  défenseur  officieux 
leur  «tait  interdite.  Si ,  parmi  ces  accusés  , 
ifc-Ven    trouvait,  quelques  t  uns    qui    em- 
ployassent pour  leur  ■  défense  des  moyens 
▼ktoiicux  ■,:  deux   juges  -  quittaient  leurs 
sièges ,  citaient  •des'.Éiits  atroces  à  la  charge 
dcs^ «accusée-,  et?  en  attestaient  eux-memei 
Tauthenticité..  Us  s'étaient  frayes' de  cette 
manière  mille  chemins  pour  conduire  leurs 
victimes  au  bord  de  leur  fosise^  Là ,  le  plomb 
meurtrier  i  mais  pas.  toujours  homicide  , 
nnversait  le  mort  à  côté  du  blessé  ;  une 
couche  épaisse  de  terre  étou&ii  Inentôt  les 
ctis  de  la  douleur  et  du  désespoir.  Si  quel' 
ques-uns  conservaient  encore  asses  de  força 


s58  Atrocités  commises  dans  le  département 
pour  soulever  cette  mai^se  de  terré  ,  et  s'ils 
tendaient  leurs  mains  pour  implorer  le 
secours  de  leurs  concitoyens  ,  un  monstre , 
nommé  Goupil ,  plongeait  son  sabre  dans 
les  flancs  des  uns  ,  et  hiÊichait  les  bras  des 
autres  ;  il  s'en  retournait  ensuite  au  son  des 
instrumens  ,  qui  jouaient  Tair  çn  ira  ;  et  en 
criant  vive  la  République  !  il  montrait  soil 
sabre  tout  sanglant  :.  vous  n'êtes  pas  répubWi 
cains ,  disait-il  au  peuple  attendri  à  la  vue 
dun  spectacle  aussi  déchirant. 

Par  suite  des  formes  inquisitori^les  àxk 
tribunal  ,  sept  cent  soixante-huit  individus 
futent  condamnés  sans  autre  preuve 'dis 
délit  que  la  vague  imputation  d  avoir  porté 
les  armes  contre  la  République.  Un  citoyen 
nommé  Macé  ,  domicilié  près  d'Angers  î 
arrêté.faute  de  passe-port  »  était  du  nombre 
de  ces  infortunés.  On  les.  conduisait  tous!  à 
la  fusillade  ,  lorsque  sa  Municipalité  arrive 
et  le  réclame  comme  un  excellent  patrioteé 
Ce  ne  fut  pas  sans  peine  qu'elle  obtint  sa 
liberté  :  la  Commission ,  dans  son  dépit  dé 
se  voir  ainsi  arracher  sa  proie  ,  chargea  les 
réclamans  des  invectives  les  plus  dures.  On 
trouvera  à  la  fin  de  ce  volume  les  noms  des 
citoyens  massacrés  parles  ordres  des  Com^ 
missions  populaires  d'Angers  et  de  Saumui*« 
-  Angers  avait  coumgeusement  repoussé 
l'armée  Vendéenne.  La  Commission  pro<» 


de  la  Vendée i  et  autres  circonvoisins*     si3g 

posa  de  faire  couper  les  têtes  des  ennemis- 
tués  sous  les  murs  de  la  ville ,  de  les  mettre 
au  bout  d'une   pique  ,  et  de  les  promener 
4ans  les  rues ,  on  devait  ensuite  les  placer 
«ous  les  remparts.  Les  Angevins  s'empres- 
«èfent  de  creuser  des  fosses,  et  d'y  ensevelir 
les  cadavres.  Cette  action  qui  ,  chez  un 
peuple  humain  ,  eût  mérité  à  ces  braves 
haibitàns  des  droits  à  la  reconnaissance  pu^* 
Ij^Uque  ,  fut  traitée  de  modérantisme  par 
cette  Commission  impie. 
:  Quelqu'un  des  membres  de  ce  tribunal , 
Kncontrait-il  un  homme  mal  vêtu  :  Si  tu 
iiaU  un  bon  républicain ,  disait-il ,  tu  entrerais 
ihet  un  coquin  de  marchand  ^  et  tu  lui  deman^ 
4mUs  de  quoi  f  habiller. 
XeiteCommission  s'entourrait  des  hommes 
4ontles  passions  étaient»les  plus  sanguinaires; 
elle  les  chargeait  même  de  procéder  à  Tin- 
tenrogatoire  des  détenus.  Cet  interrogatoire, 
comme  le  jugement ,  n'étaient  qu'un  simu- 
Iftcte  de  pure  forme  ,  dont  on  ne  tenait  au- 
cunes notes.  Ces  Commissaires  se  conten* 
talent  de  faire  des  listes ,  et  de  mettre  eh 
flKUge ,  à  côté  du  nom ,  la  lettre  F.  (  foutu  ). 
Un  jiommé  Obrumier  remplissait  un  jour 
ffitte  fonction.  Deux  femmes  ^quilui  avaient 
ICmIus  de  grands  services  ,  cherchent  à  se 
concilier  sa  bienveillance ,  en  lui  rappellant 
kurs  anciens  bienfaits  ;  elles4ui  observent 


240  Atfociiér  commises  dans  ledipûrtânMt 

d-ailleurs  qu'elles  ne  sorft  arrêtée  que  par 
mesure  de  sûreté  ,  et  qu'eUes  ncint  jamais- 
porté  les; armes  contrela. République;  te 
féroce* Obrumicr  trace  de  sang-froid  la  fatale 
lettre  f  à  côté  de  leurs  noms.  Elk^. furent 
fiisillées  aydc  70  autres  femmes.-On  le^  'vii/ 
passer  précédées  d'une  musique  qui  jouait^ 
les  airs  de  là. Liberté.  Deux  jeunes  filles^  iii-: 
térçssantes  par  la  fraîcheur  et  rinnocfencé 
de  leur  âge  {elles  avaient- i5  à  16  alï$  j^y 
couvraient  par  intervalle» îV*de  leurs  :<îris> 
funèbres,  le  briiit  de  cettemusique  miliiq^re  : 
Saiweirtious^  ^'écriaient«e£les  ^ea  embrassaicrt 
les  genoux  de  leurs  bourreaux ,  sauvez^nùw 
lavie  !  Les  agens  de  la  Commission  l^^é^ 
poussaient  ,  et  insultaient  en  meme-tetos-i^ 
la  force  armée  «t  au  peuplefqui  vfensia&t 
des  larm.es  y  en.  leu^  reprochant  de  d'hêtre 
pas  républicams.  .   i    :  —  .  1 .  ; 

.  Le  nom.rcLé'.\  Bardçul  ^  commissaire' des 
prisons,  disait  à.  cette.  Commission  :  Pour> 
quoi  aller  sidom  .p(nurjtmtlet>les  coqtUns^'nc 
vaudrait-il  pas  mieux  Veè  massacrer'^  suf^U» 
placée  .'   '  "il    /•        h  j.-i'.;i..T 

\  Les  proGonsuU  HentretfrancastelcOB** 
mencèrentleurautoritésanguinaireàAngersJ 
Soixante  et  un  prêtre  du  département  d«  :la^ 
Nièvre^  presque  tous sexa^éiiaÎTes V avaieiiC. 
été  transférés;  à  AngersL'  iLcicbinité'  révplu- 
tijonnaire  ) dcicexiie  yillèiJoiétaiL'ipas  iadéflii^ 


de  la  Vendée ,  et  autres  circonvoistns.    84  i 

sur  le  sort  qu'il  leur  ferait  ;  mais  il  déli- 
bérait sur  les  moyens  à  employer  pour  s  eu 
débarrasser  plus  promptement,  a  Les  en- 
»ï. verrons-nous  à  Nantes  ?  Les  enverrons- 
f>  nousàla  Commission  militairePLes  ferons- 
u  nous  fussiller  au  coin  dW  bois  ,  ou  leur 
»  ferons-nous  faire  la  pêche  au  corail  devant 
»  la  ^eaumette  ,  parlez  ?  »?  Telles  sont  les 
questions  qui  furent  faites  au  Représentant 
Francastel.  Le  registre  de  ce  Comité  contient 
une  note  ,  par  laquelle  ce  Député  or- 
doime  qu  il  fallait  les  faire  filer  à  Nantes. 
Ils  furent  eflfectivement  livrés  aux  bourreaux 
à  sous-pape  ;  et  Goupil  rapporta  leurs  vête- 
mens  au  Comité  d'Angers.  Cette  anecdote 
est  antérieure  au  siège  de  Nantes. 

Francastel  ne  voulait  pas  que  le  Comité 
révolutionnaire  inscrivît  sur  les  registres  les 
noms  des  hommes  que  Ton  fesait  fusiller; 
c'était  pour  se  mettre  à  Tabri  de  tout  repro- 
ches ,  qu'ils  ne  laissaient  exister  aucun  titre 
capable  de  prouver  que  des  femmes  et  des 
enfans  avaient  été  enveloppés  dans  leurs 
massacres  journaliers. 

Les  rebelles  venaient  d'effectuer  le  passage 
de  la  Loire  à  Varades;  une  quantité  d'habi- 
tans  delà  campagne  avaient,  malgré  eux,  pris 
part  à  la  révolte.  Se  voyant  près  de  l'armée 
républicaine ,  ils  offrent  au  général  Moulin 
de  mettre  bas  les  armes ,  s'ils  peuvent  espérer 

Tome   VL  ^ 


é/^i  Atrocités  commises  dans  le  dépaftemeàt 

ttnr  pardon.  Ce  Général ,  dont  raulbrité 
était  circonscrite  ,  fait  assembler  les  Auto- 
rités constituées  de  Saint-Florent;  on  arrêté 
provisoirement  qu  il  sera  donné  des  sauf- 
conduits  à  huit  ou  dix  d'entre  eux ,  poiir 
engager  leurs  compagnons  à  se  rendre. 
Effectivement ,  1,200  rentrent  sous  les  lois 
de  la  République,  Le  généra  Moulin  s'em- 
presse de  faire  part  de  cet  évènemient  à 
Francastel ,  en  lui  demandant  quel  serait  le 
sort  de  ces  1,200  hommes,  Francastel  les 
fait  conduire  à  Angers ,  et  déposer  dans  la 
ci-devant  église  dé  Saint-Maurice  ,  aux  cris 
de  Vive  la  République  !  et  périssent  les  brigands! 
Le  lendemain  ils  sont  fusillés  dans  la  plaine 
de  Sainte-Game.  Ces  actes  de  perfidies  , 
nombre  de  fois  répétés ,  n^ont  pas  peu  servi 
à  perpétuer  la  guerre  de  la  Vendée. 

La  Société  populaire  de  Niort ,  soulevée 
d'indignation  à  la  vue  des  atrocités  com- 
mises dans  la  Vendée  par  les  généraujt 
Grignon  ,  Huchet ,  et  c. ,  sous  les  yeux  de 
ces  deux  Représentans  ,  députa  au  Comité 
de  Salut  public  quatre  Commissaires.  Ro- 
bespierre régnait  alors  ,  et  ces  quatre  ci- 
toyens faillirent  payer  de  leur  tête  une 
démarche  inspirée  par  leur  ardent  désir 
de  servir  la  République  ;  le  Comité  de  Sa- 
lut public  les  accusa  même  d'avancer  des 
faits   faux  ,    puisque    la    correspondance 


.  Irf^  la  Vendée ,  et  autres  circomoisins.  *    945 

d'Hentz  et  de  Francastel  qui  étaient  sur 
ks  lieux,  ne  fesait  aucune  mention  de 
ce  qu  ils  avançaient.  Ces  deux  Députés  re- 
çurent alors  Tordre  de  se  rendre  dans  la 
Vendée  ;  ils  prirent  leur  route  par  Niort , 
ne  respirant  que  la  vengeance  contre  là 
Société   populaire. 

Ils  y  arrivèrent  le  24  germinal  an  9  (  i3 
aviril  1794),  et  se  glissèrent  furtivement 
dans  les  tribunes  de  la  Société.  Le  len- 
demain ils  annoncèrent  leur  arrivée  ;  la 
Société  convoqua  une  assemblée  extraor- 
dinaire pour  les  recevoir  ,  et  ils  y  arri- 
vèrent au  milieu  des  applaudissemens 
réitérés  des  Assistans  et  des  Sociétaires.  Le 
Président  se  met  en  devoir  de  les  compli- 
menter, il  est  durement  apostrophé  ainsi 
que  le  peuple.  Un  instant  après  Hentz 
s  élance  à  la  tribune ,  interrompt  un  ora- 
teur qui  parlait  de  la  nécessité  sur  Finstruc- 
tion  publique  ,  le  traite  de  contre-révolu- 
tionnaire ,  déclame  contre  ceux  qui  savent 
lire  et  penser  ,  et  traite  de  muscadines  les 
mères  qui  desiraient  donner  de  Téduca- 
tion  à  leurs  enfans. 

Hentz  toujours  à  la  tribune  ,  Toeil  sombre 
et  Tair  inquiet ,  provoque  la  dissolution 
de  la  Société,  fait  Téloge  des  généraux 
Grignon  et  Huchet ,  en  disant  de  ce  dernier  : 
"  Que  c'était  un  bon  et  franc  sans-culotte  ; 

0.2 


«44'  Atrocités  commises  dans,  le  diparlemeni 
»  que  c'était  le  seul  homme  qui  convînt  à 
>ï  la  Vendée  ;  que  s'il  avait  dissoutla  Société 
»  populaire  de  Luçon  ,  il  en  avait  le  droit; 
>5  que  dans  une  ville  contre  -  révolution- 
55  naire  ,  le  Militaire  est  tout  ;  le  Général 
>5  est  souverain ,  et  doit  exercer  la  toute 
>j  puissance.  îj  Revenant  ensuite  à  Tinsti- 
tutiondes  Sociétés  populaires ,  il  dit  qu  elles 
ne  doivent  être  composées  que  de  bons 
sans-culottes ,  et  non  d'orateurs  et  de  riches, 
ni  des  hommes  qui  parlent  toujouirs  d'hu- 
manité ;  ces  derniers  sont  toujours  dan- 
gereux. 

Passant  ensuite  à  la  guerre  de  la  Vendée , 
îl  fait  un  crime  à  la  Société  de  l'envoi  des 
quatre  Commissaires  à  Paris  pour  faire 
cesser  le  brûlement  ;  il  n'y  avait  que  des 
contre-révolutionnaires  qui  pussent  s'api- 
toyer  sur  les  brigands  de  la  Vendée 

La  Municipalité  de  Niort  fut  également 
traitée  de  contre  -  révolutionnaire  ,  parce 
qu'elle  avait  fait  sortir  de  la  maison 
d'arrêt  les  prisonniers  qui  y  étaient  en- 
tassés ,  au  point  qu'il  y  régnait  une  maladie 
épidémique.  Plus  de  quatre  cents  détenus 
étaient  déjà  morts  ,  ainsi  que  les  commis- 
saires des  prisons  ;  un  notable  qui  se  trou- 
vait à  la  séance  ,  voulut  parler  du  motif 
qui  avait  déterminé  ce  déplacement  ;  il  fut 
interrompu  par  Hentz  ,  qui  s'écria  :  «i  Je 


delà  Vendée^  et  autres  circonvoisins.  ^4$ 

f  9  m  attendais  bien  à  trouver  ici  quelques- 
35  uns  de  ces  scélérats  que  je  viens  de  si^ 
99  gnaler  ,  encore  plus  scélérats  que  ceux 
99  qu  ils  protègent.  <« 

Un  Membre  fatigué  de  ces  scènes  scan- 
daleuses ,  proposa  la  dissolution  de  la  So- 
ciété. Aussitôt  Hentz  et  Francastel,  sans 
permettre  aucune  discussion  à  cet  égard, 
déclarèrent  la  Société  dissoute  ,  et  s'é- 
crièrent :  ((  Sortons  ,  allons  ,  sortons  de 
ii  suite  ;  que  quelques  bons  sans-culottes 
5î  viennent  demain  le  matin  à  notre  au- 
«  berge  ,  ils  formeront  un  noyau ,  et  ils 
jî  choisiront  ceux  qui  doivent  former  la 
ii  Société  !  n  Hentz  en  entrant  chez  lui  , 
dit  à  Francastel  :  n  As-tu  vu  comme  j'ai 

»  arrangé    ces  b là,  ils    n échapperont 

M  pas  celle-ci  ;  on  a  confiance  en  nous.  »> 
Ces  deux  Députés  voulurent  ensuite  enlever 
les  pièces  de  conviction  contre  Grignon  et 
Huchet,  déposées  au  Comité  de  surveillance 
de  Niort  ;  un  Membre  s  y  opposa  avec  éner- 
gie ,  un  autre  Membre  dit  que  le  Comité  de 
Luçon  avait  sauvé  la  chose  publique  ,  en 
fesant  arrêter  Fassassin  Huchet  :  u  il  a 
5j  outrepassé  ses  pouvoirs  ,  mais  sans  cela  , 
n  dit  Hentz  ^  eût-il  sauvé  la  chose  publique  ? 
55  il  faut  qu  il  y  ait  des  victimes.  55  Le  gé- 
néral Bard  qui  avait  été  destitué  vint  leur 
demander  justice  ,  il  fut  chargé  de  fers  sans 
être  entendu»  C^  3 


846  Airocités  commises  dans  le  département 

,  Us  se  transportent  de  là  à  Luçon ,  et  font 
incarcérer  tous  les  citoyens  qui  avaient  dé- 
noncé rincendiaire  Huchet  5  Tarrachent  en- 
suite du  tribunal  de  Rochefort  ,  pour 
renvoyer  à  celui  de  Paris  ,  où  il  fut 
absous. 

Quarante-rhuît  individus  des  deux  sexes 
étaient  malades ,  et  ne  pouvaient  se  rendre 
du  fort  St.  Pierre  à  Tîle  de  la  Montagne  , 
où  leur  translation  avait  été  ordonnée  par 
Hentz  et  Francastel.  Le  Commandant  tem- 
poraire ordonna  à  la  troupe  qui  les  escor- 
tait de  les  fusiller  en  chemin,  ce  qui  fut 
exécuté.  Les  Membres  du  Comité  de  sur- 
veillance voulurent  faire  quelques  obser- 
vations sur  cette  mesure  qui  confondait  le 
coupable  avec  l'innocent;  ce  Commandant 
répondit  que  cela  ne  les  regardait  plus  , 
que  les  prisonniers  n  étaient  plus  sous  leur 
surveillance.  Le  président  de  la  Commission 
lui  ayant  démandé  ,  par  quel  ordre  il  avait 
fait  fusiller  ces  citoyens.  Il  répondit  qui! 
lavait  pris  sur  lui  ,  que  ces  gens  n  étaient  bons 
quà  tuer.  D'ailleurs  il  n'avait  point  de 
voitures  pour  leur  transport.  Quelques 
lettres  de  ces  deux  Représentans  méritent 
de  fixer  plus  particulièrement  l'opinion 
publique.  - 


Âc  la  •Vdttdé.e^'  et  autres;  circtmvoisins:     S 47 

Lsttrb  de  cts  deux  Proconsuls  au  général  Grignon/^ 
.    commandant  une  division  de  l'armée  révoluiionaaire\ 
dans  La  Vendée. 

éi  Tu  feras  trembler  en  même-tcms  tous  lés  bri- 
gands .  auxquels  il  ne  faut  pas  faire  de  quartier^..^ 
Nos  prisons  en  regorgent.  Des  prisonniers  dans  l^i 
Vendée!....  Ilfeut  donner  la  chasse  à  ce  qui  reste  de 
rassemblement  et  de  révoltés,  incendier  les  maisons 
écartées  ,  moulins,  et  c. 

n  Signé  i  Francastel.  >» 

«  L'ordre  général  a  été  donne  ,  d'incendier  tous 
les  fours  et  moulins  ,  toutes  les  maisons  isolées  ,  les 
châteaux  sur-tout;  enfin,  d'achever  la  transformation 
de  ce  pays  en  désert ,  après  avoir  sous-tiré  les  richesses 
qu'il  renferme....  Pas  de  mollesse  ni  de  grâces  dans 
un^pays  qui  mérite  l'indignation  et  la  vengeance  na- 
tionale.... Ces  vues  sont  celles  de  la  Convention. 

99  Signé  ,  Francastel.  99 
Le  8  Nivôse  (  28  décembre  I7g3  )  Fran- 
castel écrit  aux  Jacobins  de  Paris  : 

.  >*.  Qj^'ils  viennent  dans  la  Vendée ,  ces  nouveaux 
modérés  qui  abusent  du  beau  nom  de  morale  ,  de 
justice  ,  et  qui  énervent  l'esprit  public  par  les  sen- 
timens  d'honnêteté;  pour  moi ,  périétre  des  devoirs 
que  m,'impose  le* bonheur  du  peuplé,  la  Vendée  seri 
dépeuplée  ,  mais  la  République  sera  vengée.,  j»        • 

.    Cette  lettre  est  écrite  d'Angers.         *    '' 

-  Le  général  Huchet ,  dont  Hehtz  et  Fpn* 
castel  avait  épousé  si  ardemment  les  iri- 
térêts  s  était  campé  aux  Sorinières.  Une 
Municipalité  d'une  Commune  exposée 
aux  incursions    des  Vendéens  ,    vint   èta 

'■  ■'•••    ■■  ■■  ■'-  -0.-4    ■  •' 


548  Atrocités  commises  dans  le  département 

écharpe  ,  accompagnée  de  plusieurs  cîv 
toyens  connus  ,  implorer  son  appui.  Il 
prit  à  part  ces  Députés ,'  et  demainda  à 
chacun  d'eux  s'ils  avaient  monté  la  garde 
pour  les  rebelles.  Il  en  interrogea  ainsi 
vingt- trois  qu  il  fit  passer  dans  un  champ 
voisin  ,  où  il  les  fit  fusiller.  Après  cette 
exécution  ,  il  dit  tout  haut  que  sïl  tenait 
les  femmes  de  ces  scélérats ,  il  leur  ferait 
subir  le  même  sort  sur  les  cadavres  de 
leurs  maris. 

Le  même  jour  ,  les  Députés  HenU  et 
Francastel  étant  venus  le  visiter  dans  son 
camp  ,  il  leur  demanda  s'ils  ne  seraient 
pas  curieux  de  voir  sa  fricassée  humaine  ;  et 
d'après  leur  consentement ,  il  les  conduisît 
dans  ce  camp  ,  où  ils  jouirent  un  instant 
de  ce  spectacle  ,  et  donnèrent  des  éloge* 
à  sa  conduite.  (  Voyez  les  lettres  H.  L  J.  B. 
de  la  gravure  du  tome  II ,  page  i.  )' 

Il  ajouta  :  a  Comment  trouvez-vous  aussi 
J5  le  superbe  coup-d'œil  de  tous  ces  pays 
99  que  j'ai  fait  incendier;  observez  l'effet  dé 
99  ces  flammes,  qui  se  disputent  avec  les 
j5  nuages.  j>  (  Voyez  la  lettre  A.  de  la  gravure 
du  tome  II.]  r.  / 

Pendant  que  ces  deux  Députés  étaient  au 
Pont-de-Cé,  le  Comité  révolutionnaire  y 
fit  fusiller  douze  cents  personnes.  Ua 
nommé  Pecquenel ,  chirurgien  du  bataillon 


'S 


«leJn  Vendée ,  et  autres  circonvoisinu     S49 

des  Ardennes  ,  choisit  environ  trente  ca- 
davres des  plus  robustes ,  et  les  fit  écor- 
cher ,  dans  le  dessein  d'en  faire  tanner  les 
peaux  pour  les  transformet  en  culottes. 
Le  premier  tanneur  à  qui  il  s'adressa  ,  re- 
fusa net  sieis  services  ;  le  second  suivit  cet 
exemple.  On  le  menaça  d'un  traitement 
pareil  à  celui  qu'on  avait  fait  éprouver  à 
ces  trente  cajdavres.  u  Vous  êtes  libres  , 
»  leur  ^  répondit-il ,  de  me  faire  périr,  mais 
J5  je  ne  puis  me  résoudre  à  prêter  mes 
«  mains  à  cette  opération.  îj  Aucun  de  ses 
ouvriers  n'ayant  voulu  se  souiller  par  cette 
înfame  action ,  on  en  chargea  quelques 
soldats  ,  en  qui  l'habitude  du  carnage  avait 
étouffé  toute  espèce  de  répugnance. 

Mais  revenons  à  la  ville  d'Angers  ,  avant 
de  promener  nos  regards  sur  ces  contrées 
noyées  dans  le  sang  et  couvertes  de  char- 
bons et  d'ossemens.  Boussac  dit  Marat , 
écrit  à  la  Municipalité  d'Angers,  de  re- 
cevoir et  de  donner  ,  comme  par  le  passé 
du  travail  au  citoyen  Besnard  ,  parce  que , 
dit-îl ,  nous  l'avions  ,  par  ordre  du  Re* 
présentant  Bourbotte  ,  requis  de  venir  nous 
uider  pour  rintirrcfgatoire  ^individus  guil- 
lotinabljts. 

e  -  Voici  «ne  lettre  de^  Membres  de  ce  Co- 
mité  au  Montagnard  Aii^ftar^ ,  Représentant 
«lu  peuple,  ^.  '..  ^  .  .     . 


fi5o  Atrocités  commises  dans  le  dépûirietAmt 

(€  citoyens ,  nous  vous  eùvoyons  le  noHinté^Heiili 

Verdier  ,  dit  de  la  Sorinière  ,  copie  de  son  interrô* 
gatoire  ,  son  procès-verbal  d'arrestation  ,  une  suite 
d'interrogat  qu'il  a-  plu  au  dé|)aTtement  de  lui 
faire  subir  ;  enfin  ,  ui^c  pièce  qui  le  concerne ,  et 
signé  Garot.  Vous  ne  serez  pas  long-tems  à  vqiv  qut 
c'est  un  présent  que  nous  faisons  à  la  guillotine ç 
iiotre  vœu  sera  rempli ,  si  la  danse  qu*ït  mérite  suit 
de  près  Tcnvoi.  Sous  peu  vous  en  recevrez  un  autre 
d'aussi  bonaloi;  c'est  le  sieurDelahayes-DuhQmme« 

qui  vient  de  nous  arriver L'exemple  est  un  motif 

si  puissant  sur  le  peuple  ,  que  le"  Comité  vous  prie 
de  lui  envoyer  la  sacram  s anctam  guilloti'n am,  et 
les  ministres  républicains  de  son  culte....  Il  n  est  pas 
d'heures  dans  la  jo^imée  qu'il  xie  nous  arrive  des 
lécipièndaires  que  '  nous  désirons  initier  dans  ses 
mystères.  — J^gcz  de  l'a  joie  que  nous  éprouvons  i 
fin  songeant  que  cette  divinité  .  (  libératrice  de  la 
République)  ,  n'est  pas  près  d'être  abandonnée^ 
Pour  que  le  service  n'éprouve  aucuA.ret2ird,tjouvèiç 
bon  que  nous  en  prévenions  Saint-Félix  ttyéfb- 
phante  ,  du  Sacré -Collège.  ' 

5>.  Salut,  et  c.  Signe\  Thierry  ,  Président  ;  Robin  ; 
Obrumier  y  père;  Maunion  ;  Louis  Choudîeu  $ 
"MAntiN  ^CoKHiER^  Secrétaires,  a 

La  correspondance  des  Généraux  des 
armées  républicaines  ,  va.  npuS  ouvrir  la 
scène  du  carnage.  Leur  plume  distillait  le 
sang  ,  leurs  subordonnés  vont  le  faire 
couler  à  grands  flots. 

Voici  des  extraits  de  Turreau  ,  général 
en  chef,  à  Grignon  ,  général  divisionnaire^ 

«1  Les  environs  du  payiou  tutetrouves,t'offtèntuii 
champ  pour  fouiller,  incçadier  métaieries,  bois,  etc. 
et  purger  le  pays  des  scélérats  qui  Thabitent.  Fais  dc> 


de  la  Vendée ,  et  autres  circonvoisim:^  .  jfiSi 

incursions  sur  tous  les  sens  ;  que  quelques  marches 
de  nuit  te  mettent  à  portée  de  surprendre  quelques 
lassemblemens  partiels  ,  et  c. 

99  Signé ^TvRKZAV,  jj 

i<  Il  est  bien  étonnant  que  tu  me  demandes,  mon 
Camarade,  s'il  faut  désarmer  les  gardes  nationales  de 
la  Vendée  ;  c"'est  mettre  en  question  s'il  est  prudent 
d*ôter  à  nos  ennemis  les  moyens  de  nous  faire  du 
mal  ;  croyons  que  dans  ce  maudit  pays  nous  ne 
devons  nous  fier  à  personne  ,  et  agissons  en  consé- 
quence; J'ai  reçu  une  croix  de  St. -Louis  ,  un  calice 

et  une  patenne Dépcçhç-toi.  de  m'envoyer  une 

collection  complète  de  tous  ces  br.inbQpons* 

99  Signée  TURREAU.  i^ 

.  «  Continue,  mon  Camarade,  à  brûler  le  pays,,  et  à 
exterminer  les  rebelles  ;.plus  je  v^iis  en  avant ,  plus 
je  suis  à  portée  de  juger  qu'il  y  a  peu  d'habitans  à 
excepter  de  la  proscription. 

J5  Signe\  TuRREÀU.'î» 

Le  général  de  brigade  Grignon  ne  pou- 
vait pas  recevoir  d'ordres  plus  précis  , .  le 
Député  Frahcastel  et  le  général  en  cheif 
Turreau  ne  pouvaient  mieux  placer  leur 
choix.  C'est  à  la  tête  d'une  colonne  de 
Tarmée  dite  révolutionnaire ,  que  le  gé- 
néral Grignon  part  d'Argcnton-le-Peuple  ^ 
«  Mes  Camarades  ,  dit-il,  à  sa  trouJf)e y  nous 
i\  entrons  dans  le  pays  des  insurgés,  vous 
î)  y  brûlerez  tout ,  voils  passerez  au  fil  de 
«.  la  baïonnette  tous  les  habitant  que  vous 
«  y  trouverez.  Il  peut  y  avoir  quelques  pa- 
»  triotes  dans  le  pays  ,  mais  c'est  égal  ^  il 


95s  Atrocités  commises  dans  le  dipattement      ' 

f>  faut    tout    sacrifier,  n Cest  égal  !  O 

ma  patrie  !....  •  ' 

On  croirait  peut  -  être  que  Grignon  se  ■ 
transporte   réellement  dans  les  pays   ha-  ' 
bités  par   les   insurgés  ;    mais  c'est   dam  j 
des  Communes  voisines  ,  qui  avaient  docb  | 
nées  de  nombreuses  preuves  de  leur  dé- 
vouement à  la  République  ,  et  qui  réduites 
à  leurs  propres  forces  ,  avaient  néanmoins 
repoussé  à  plusieurs  reprises  les  attaques 
de   larméie  Vendéenne,  S'il  s'en  trouvait 
quel ques-uneç  dont  rattachement  pour  le 
gouvernement    républicain    parut  chan- 
celant ,  on  doit  en  accuser  Finexpérience 
et  la  mauvaise  foi  de  jios  généraux  ,  qui 
les    abandonnèrent    aux    incursions    ré- 
pétées de  Tarmée    dite  royale  ,  aux  yeux 
de  laquelle  le   moindre   mouvement    ré- 
volutionnaire eût  été  pour  ces  malheureux 
habîtans   un  arrêt  de  mort. 

Revenons  à  Grignon.  Déjà  ses  bataillons 
sont  en  tri  arche  ;  Tétendart  de  la  mort 
flotte  dans  leurs  rangs  ;  ils  avaient  à 
peine  fait  une  lieue  ,  que  rigoureux  ob- 
servateuts  des  ordres  de  leurs  chefs  ,  c'eijt 
à  qui  enchérira  sur  ses  compagnons  par 
une  cruauté  brutale  ,  et  jusqu'alors  sànS 
exemple.  Les  campagnes  qu  ils  parcourent , 
sont  bientôt  un  vaste  cimetière.  Une  mère 
de  famille ,  dont  le  sein  est  frappé  dun 


de  la  Vendée^  et  autres  drconvoiUns.  253 
fer  meurtrier ,  entr'ouvre  son  ϔl  mourant , 
et  cherche  le  nourrison  qu'elle  allaitait  il 
B  y  a  qu  un  instant.  Elle  le  voit  :  le  même 
coup  les  a  percé  Fun  et  l'autre  ;  Tenfant 
est  encore  fixé  sur  la  pointe  du  fer  qui 
Ta  arraché  du  sein  de  sa  mère.  L'Auteur 
de  ce  double  attentat  contre  la  nature  , 
porte  ce  trophée  au  milieu  de  ses  com- 
pagnons ,  qui  jouissent  tous  avec  une  joie 
féroce  des  cris  et  des  convulsions  que  la 
douleur  arrache  à  cette  tendre  victime. 

Plus  loin  ,  une  autre  mère  de  famille 
périt  sous  les  yeux  de  son  époux  désarmé , 
et  de  trois  enfans  en  bas  âge.  L  un  d'eux  , 
comme  évanoui  de  douleur  et  de  rage  ,  se 
roule  à  terre  près  du  cadavre  maternel 
qu'il  n'ose  fixer.  Les  deux  autres  s'attachent 
après  ses  membres  ,  comme  pour  s'unir  ^ 
par  une  mort  volontaire  ,  à  sa  dernière 
heure.  Le  mari  s'élance  sur  son  épouse 
chérie  qui  semble  l'appeler  encore  ,  et 
son  cœur  est  partagé  entre  Texcès  de  son 
désespoir  conjugal  ,  et  la  violence  de  la 
tendresse  paternelle.  (  Voyet  la  lettre  E.  de 
kf  gravure  du  tome  II  ,  page  i.  ) 

De  jeunes  femmes  renversées  sur  les 
pierres  amoncelées  le  long  des  grandes 
routes  ,  et  aux  pieds  des  arbres  ,  expirent 
assassinées  par  ceux-là  même  qui  venaient 
d'assouvir  dans  leurs  bras  leur  criminelle 


s54  Atrocités  commisesdahs  le' département 

lubricité.  (  Voyez  la  lettre  G.  de  la  gravure  du  \ 
jomà  IL  )  Cette  armée  poursuit  sa  carrière  \ 
précédée  de  la  terreur ,  et  par  -  tout  le 
pillage  ,  et  le  meurtre  signalent  son  pas- 
sage. Elle  arrive  à  Bressuire ,  petite  ville  du 
département  des  Deux-Sèyres  ,  et  n  aban- 
donne cette  Commune  quaprès  avoir 
exterminé  honunes  ,  femmes  et  enfans , 
et  qu  un  incendie  général  eut  consumé  jus- 
qu'aux subsistances. 

Un  Commissaire  pacificateur  apprend 
que  cette  terrible  colonne  menace  son 
pays  ;  il  vient  au-devant  de  Grignon  qui  le" 
fait  désarmer  ,  en  lui  demandant  qui  il  est  ? 
Ce  Commissaire  ayant  satisfaità  sa  demande, 
en  disant  qu  il  est  autorisé  du  départemîent 
et  du  général  Barre  ,  à  mettre  une  garde 
nationale  en  activité  ;  Grignon  répond 
quil  ne  connaît  ni  département  ni  district , 
ni  général  Barre  ,  et  le  fait  garotter  ainsi 
que  sa  garde.  L'ordre  de  les  fusiller  était 
déjà  donné  ;  le  Commissaire  pacificateur 
ne  doit  son  salut  qu'au  témoignage  d'un 
soldat  ,  avec  lequel  il  avait  fait  toute  la 
guerre  de  la  Vendée  ;  mais  les  dix  hommes 
de  garde  furent  hachés  à  coups  de  sabre. 

Ce  Commissaire  était  maire  de  la  Com- 
mune de  Floutière.  Grignon  le  force  à  l'y 
suivre ,  et  refuse  de  prendre  de  sa  main  la 
liste  des  grands  coupables  ,  en  disant  que 


di  ia  Vendée ,  et  autres  circonvôùinu     255 

cette  précaution  était  inutile,  A  peine 
arrivé  dans  cette  Commune  ,  la  troupe  se' 
disperse  ;  bientôt  des  tourbillons  de  flammes 
obscurcissent  les  airs  ;  le  sang  des  habitans 
inonde  les  rues  ,  et  le  soldat  chargé  de 
butin  ,  achevé  de  massacrer  tout  ce  qui  se 
présente  à  ses  yeux. 

Trente  dé  ces  brigands  assouvirent  leur 
rage  sur  une  femme  âgée  de  soixante-dix 
ans  ,  ainsi  que  sur  une  autre  plus  difforme 
et  presque  aussi  âgée  ;  et  comme  la  cruauté 
avait  présidé  à  cette  débauche  effrénée  , 
ib  la  couronnent  de  mille  coups  ,  en 
perçant  leurs  victimes ,  tandis  que  d'autres 
coupent  en  morceaux  un  citoyen  connu  et 
sa  servante ,  ainsi  que  deux  vieilles  femmes , 
dont  Tune  était  en  enfance. 

Quatre-vingts  individus  se  retiraient  à  la 
Châteigneraye  ,  avec  un  laissez-passer  de 
leur  Municipalité.  Ils  sont  arrêtés  et  con- 
duits au  général  Guignon  ,  qui  en  fait 
fusiller  un  grand  nombre  ;  et  renvoie  , 
comme  par  grâce ,  six  vieillards ,  les  femmes 
et  les  enfans. 

Le  Château  de  Pouzanges ,  qui  se  trouvait 
dans  ce  canton ,  renfermait  de  jolies  pri- 
sonnières.Le  Général,  et  quelques  Membres 
de  son  état-major  vont  dîner  avec  elles. 
Après  le  repas  ,  il  fallut  que  ces  femmes 
souffrissent  leurs  embrassemens  et  tout  ce 


fi56  Atrocités  commises  dans  le  dipûfiemenl 

que  leur  inspira  le  libertinage  le  plus  di 
bordé.  Quelques  soldats  même  furent  adm 
en  partage  dans  cette  orgie  scandaleuse.  O 
les  entendit  s'écrier  ,  en  sortant  ,  qu'i 
avaient  joui  de  quatre  belles  filles.  Tro 
d'entre  elleà  furent  fusillées  après. 

La  Commune  de  Bon-Père  ,  instruite  c 
l'arrivée  de  la  division  Grignon  ,  et  cra 
gnant ,  selon  les  bruits  qu'il  affectait  c 
répandre  ,  qu'il  n'eût  réellement  la  missic 
précise  de  tout  massacrer  et  incendiei 
députe  vers  ce  Chef  le  Commandant  de 
garde  et  sa  Municipalité  ,  pour  prend; 
auprès  de  lui  quelques  renseignemens  si 
ses  intentions.  Il  ne  leur  cela  point  qi 
tels  étaient  ses  ordres.  Cependant,  comn 
cette  Commune  jouissait  d'une  réputatic 
de  patriotisme  non  suspect ,  il  leur  accorc 
deux  jours  pour  enlever  leurs  effets  les  pi 
précieux.  Dix-sept  individus  ,  que  ces  d 
pûtes  avaient  conduits  au  Général ,  comn 
autant  de  victimes  expiatoires  en  témc 
gnage  assuré  de  la  constante  résistance  i 
leur  Commune  aux  insurgés ,  furent  fusilla 
Après  cette  expédition  ,  Grignon  pron 
de  les  aller  voir  ,  et  de  visiter  leur  gari 
nationale. 

Le   11   pluviôse  (  3o  janvier  1794)  , 
s'avance  effectivement  du  côté  de  Bon-Pè'i 
La  flamme  qui  éclaire    de  tous   côtés 


de  la  Vendée i  et  autres  circonvoisins.     25^ 

campagne,'  (  Voyez  la  lettre  A  de  la  gravure  du 
tome  II.  )  annonce  au  loin  son  arrivée. 
Quelques  habitans  vont  à  la  découverte  , 
et  par  leurs  récits ,  reviennent  semer  reflEroi 
parmi  leurs  concitoyens.  Déjà  le  bourg  de 
Mcilleray  ,  peu  distant  d'eux  ,  ne  renfer- 
mait plus  que  des  cadavres  et  des  ruines 
fumantes.  Tout  ce  quil  y  avait  de  répu- 
blicains ,  ayant  Tex-curé  à  leur  tête  ,  avait 
été  soigneusement  ramassé  ;  et  le  massacre 
de  ces  malheureux  s'effectua  avec  de  nou- 
veaux rafinemèns  ,  qui  prolongèrent  leur 
trépas  au  milieu  des  angoisses  les  plus 
Wribles.  , 

Tous  les  habitans  avaient  eu  ordre  de 
se  rendre  à  l'église,  La  colonne  sépare  ies 
hommes  d'avec  les  femmes  ;  ils  sont  tous 
fouillés  et  dévalisés  ;  l'ex-curé  est  conduit 
le  premier  dans  le  cimetière  ;  là  ,  on  le 
fusille.  Cette  mort  inattendue  est  annoncée 
au  reste  de  ces  malheureux  par  le  bruit  de 
la  mousqueterie  et  par  la  vue  des  cadavres 
mutilés   et  ensanglantés  de  leurs   compa- 
triotes ,   lorsqu'ils   sont  conduits  ,  chacun 
à  son  tour ,  à  ce  champ  de  carnage.  Douze 
femmes  sont  égorgées   dans  les  rues  ,  ou 
périssent    au   milieu    des.   flammes  ,    ainsi 
I     qu'un  malheureux  vieillard ,  âgé  de  quatre- 
vingt-quatre  ans ,  retenu  au  lit  par  ses  in- 
firmités. 
Tome  VI.  R 


f 


258  Atrecités  commises  dans  le  département 

La  commune  de  Bon-Père ,  forte  de  son 
patriotisme  ,  ne  pouvait  pas  se  persuader 
qu  elle  était  comprise  dans  la  proscription. 
Un  de  ses  habitans  vient  au-devant  des 
soldats  de  cette  division.  Le  crime  était 
peint  dans  leurs  regards.  Ce  citoyen,  appelé 
Guesdron  ,  ne  craignit  pas  de  leur  repro- 
cher hautement  une  conduite  réprouvée 
par  les  lois  et  Thumanité,  Soldat  comme 
eux,  il  appartenait  à. une  armée  dont  la 
valeur  était  le  plus  ferme  bouclier  de  la 
vie  et  de  la  fortune  de  ceux  dans  le  sang 
desquels  ils  venaient  de  tremper  leurs 
mains.  Ces  reproches  faits  avec  cette  noble 
audace  inséparable  de  la  vertu ,  en  impose 
aux  assassins. 

Le  citoyen  Guesdron  augurait  avanta- 
geusement du  changement  heureux  qui 
s'était  opéré  dans  leurs  cœurs.  Plein  de 
cette  confiance ,  il  vient  trouver  Grignon  ^ 
lui  raconte  ce  qui  vient  de  se  passer.  Grignon 
lui  répondit  :  ,Tu  es  bien  heureux  que  je  ne 
Refasse  pas  fusiller*  Enfin  ce  Général  entre 
à  Bon-Père  :  il  y  voit  quatre  cents  hommes 
sous  les  armes  ,  et  tous  animés  du  désir  de 
se  sacrifier  pour,  le  maintien  de  la  Répu- 
blique. Grignon  eut  d'abord  envie  de  faire 
oharger  cette  garde  par  son  escorte  ;  mais 
comme  elle  n'était  que  de  vingt -cinq  à 
trente  hommes  ,  il  fut   intimidé    par   le 


de  la  Vendée ,  et  autres  drconvoisins.     sjg 

nombre,  La  Municipalité  était  à  la  tête  ; 
deux  cents  femmes  qui  formaient  un  corps 
à  part ,  lui  présentent  un  bouquet.  La  Mu- 
nicipalité raconte  au  Général  les  services  que 
ces  braves  habitans  ont  rendus  à  la  Répu- 
blique ,  et  qu'ils  sont  toujours  dans  la  dis- 
position de  lui  continuer.  Un  ordre  de 
désarmement  sort  de  la  bouche  de  Grignon, 
et  il  dit  qu  il  a  ordre  de  tout  incendier  et 
de  tout  fusiller* 

Cette  Commune  remit  ses  armes  et  ses 
munitions  ,  et  envoya  une  députation  au 
général  Barre  ,  qui  ,  sur  leur  invitation  , 
attesta  le  civisme  qu'elle  avait  montré  sous 
ses  ordres,  Grignon  renvoie  alors  les  dé- 
putés au  Général  en  chef,  leur  promet  de 
ne  rien  entreprendre  jusqu'à  leur  arrivée. 
Mais  sa  colonne  avance ,  ce  pays  est  bientôt 
livré  aux  flammes ,  et  les  habitans  égorgés. 

Cependant  l'armée  des  vendéens  était 
près  de  Bon -Père.  L'incendie  de  cette 
Commune  parut  au  Général  une  action 
plus  glorieuse  que  de  combattre  un  en- 
nemi ,  dont  il  accrut  les  espérances  par  sa 
retraite. 

Cinq  hussards,  détachés  de  celte  colonne, 
se  renfermèrent  dans  la  cour  d'une  maison  , 
au  Bois-Tison-d'Eau  ,  y  égorgèrent  une 
femme  de  quatre-vingt-quatre  ans  ,  et  ses 
deux  filles  ,  non  sans  avoir  fait  précéder  ce 

R  2 


a6o  Atrocités  commise^  dans  le  département 

massacre  des  outrages  les  plus  odieux.  Ils 
emportèrent  de  cette  ijiaison  dix  mille  livres 
•  en  espèces  monnoyées  ou  en  argenterie. 
La  Municipalité  de  Montournois ,  décorée 
de  son  écharpe  ,  et  réunie  à  une  grande 
quantité  de  patriotes  ,  attendait  sur  la  place 
de  cette  Commune  Farmée  révolutionnaire , 
pour  lui  donner  le  salut  fraternel.  Ttoîs 
Officiers  de  cette  armée  se  présentent ,  an- 
noncent l'arrivée  prochaine  du  Géipiéral , 
promettent  aux  bons  habitans  de  Mon- 
tournois qu  il  ne  4eur  sera  rien  fait ,  et 
invitent  quatre  d'entre  eux  à  monter  à 
cheval  pour  aller  au-devant  de  Grignon. 

Ces  trois  Officiers  font  appeler  le  sacris- 
tain du  lieu  ,  le  renferment  dans  F  église , 
et ,  à  force  de  menaces  ,  le  forcent  de  dé- 
signer Fendroit  où  est  renfermée  Fargen- 
terie  propre  à  leur  culte.  Ils  s'en  emparent 
aussitôt.  La  Municipalité  leur  justifie  en 
vain  d'une  lettre  ,  par  laquelle  le  district 
de  la  Châtaigneraye  ordonne  que  cette  ar- 
genterie y  soit  transportée  le  jour  même* 
Ils  répondirent  encore  ,  cest  égal. 

Trois  soldats  de  la  même  armée  entrèrent 
un  jour  dans  la  tour  du  château  de  la 
Bridurière  ,  Commune  de  Moutiers  sur  le 
Loir.  Ils  demandèrent  des  chevaux.  On  leur 
répondit  qu'il  n'y  eh  avait  pas.  Us  veulent 
d«  Fargent;  même  réponse.  Us  se  meittalejat 


de  la  Vendée  ,  et  autres  circonvohim.     a6i 

en  devoir  de  massacrer ,  lorsque  le  jardinier 
les  invite  à  passer  à'ia  métairie ,  en  assurant 
quil  en  emprunterait  pour  les  satisfaire. 
A  peine  y  sont-ils  arrivés  qu'un  des  volon- 
taires propose  de  mettre  le  feu  à  la  maison  , 
et  déjà  Ton  commençait  à  incendier  un  lit 
où  était  aouchée  une  vieille  femme.  On 
les  appaisa  à  force  d'assignats  ;  et  sur  leur 
invitation  ,  trois  domestiques  s'offrent  de 
les  conduire  à  Moutiers.  Chemin  fesant  , 
un  volontaire  lâche  un  coup  de  fusil  dans 
le  dos  de  Fun  de  ses  guides ,  et  le  renverse 
roide  mort  ;  les  autres  ne  durent  leur  salut 
qu'aux  fusils  qui  manquèrent. 

Quatre  de  ces  soldats  se  transportent 
dans  une  autre  métairie  ,  où  ils  forcent  les 
propriétaires  à  leur  donner  de  l'argent  pour 
se  préserver  de  l'incendie  :  cependant  cette 
maison  est  livrée  aux  flammes.  Ils  n'épar- 
gnent pas  les  femmes  après  les  avoir 
indignement  violées. 

Le  citoyen  Loyau  ,  étant  à  la  caille  au 
passage  de  l'armée  révolutionnaire  ,  fut 
couché. en  joue  par  un  cavalier,  qui  brûla- 
sur  lui  deux  amorces.  Sa  femme  et  sa  nièce, 
qui  étaient  dans  la  cour,  sont  apperçues  par 
quelques-uns  de  ces  pillards  ;  aussitôt  ils 
se  précipitent  sur  elles  le  pistolet  à  la  main , 
et  leur  demandent  leur  porte-feuille.  Un 
d'eux  arrache  aussitôt  à  Loyau  sa  montre 

R  3 


302  Atrocités  commises  dans  le  département 

et  ses  assignats-,  et  le  reste  de  la  maiso 
est  livrée  au  pillage.  Les  détachemens  d 
cette  armée  ,  qui  avaient  saisis  dans  1( 
environs  plusieurs  habitans  ,  les  fusîUèren 
Vingt-sept  subirent  ce  supplice  dans  lacot 
du  citoyen  Loyau. . 

A  Saint-AubinidU'Pluz ,  la  Municipalîi 
et  la  gardé  nationale  sont  massacrés  ,  et  ] 
plupart  des  maisons  incendiées ,  parc 
qu  on  avait  trouvé  dans  le  clocher  u 
devant  d'autel  que  Grignon  prétendit  êti 
un  signe  de  i^allicment  des  Rebelles.      ^ 

La  colonne  arrive  aux  Essarts  où  ell 
séjourne  pendant  quelque  tems.  Cette  Gon 
mtme  fut  ensanglantée  par  Tégorgemei 
de  vingt  jeunes  gens  qui  ,  conformément 
la  proclamation  des  Représentans  ,  étaiei 
rentrés  dans  leurs  foyers  après  avoir  dépoi 
leurs  armes.  Depuis  cette  époque ,  î 
avaient  manifesté  leur  amour  pour  la  R 
publique  par  la  guerre  continuelle  qu  i 
avaient  faite  aux  Vendéens. 

Au  milieu  de  toutes  ces  ruines  ,  la  Cor 
mune  des  Herbiers  existait  encore  au  va'ûU 
de  l'incendie  ,  qui  couvrait  son  territoire 
trois  lieues  à  la  ronde.  Filles ,  femm( 
enceintes ,  enfans  à  la  mamelle ,  avaiei 
succomoé  sous  le  fer  meurtrier.  Maisons 
bestiaux,  fourrages,  grains  ,  tout  éta 
consumé  par  les  flammes» 


de  la  Vendée^  et  autres  circonvoisins*     263 

Des  soldats  entrent  à  la  Pépinière ,  dans 
la  maison  du  citoyen  Joubert  à  quelques  pas 
des  Herbiers,  Ils  y  mettent  le  feu.  Un 
valet  veut  détacher  les  bœufs  de  Tétable  , 
il  est  atteint  d'un  coup  de  fusiL  Un  domes- 
tique ,  excellent  républicain ,  éprouvé  le 
même  sort.  Une  fille  de  confiance  à  qui 
l'on  enlève  1200  liv,  ,  ne  doit  son  salut 
qu'à  une  prompte  fuite.  On  les  punissait 
de  mort ,  parce  qu'ils  avaient  voulu  sauver 
les  bestiaux  de  l'embrasement. 
i  La  femme  Rustaut  ,  du  village  des  Her- 
biers ,  vint  au-devant  d'un  détachement 
de  cette  armée  pour  lui  offrir  des  rafraî- 
chîssemens  ;  elle  était  porteuse  d'un  certi- 
ficat de  civisme,  signé  du  général  Barre. 
Ces  monstres  lui  déclarent  qu'ils  en  veulent 
à  sa  bourse.  Us  lui  enlèvent  environ  42  liv. 
qu'elle  avait  sur  elle  ,  et  la  forcent  de  ren- 
trer dans  sa  maison  pour  lui  donner  le 
peu  d'argent  qu'elle  peut  y  avoir  caché* 
Aussitôt  quatre  d'entre  eux  la  saisissent ,  et 
leurs  camarades,au  nombred 'une vingtaine,  . 
assouvissent  sur  elle  leurs  infâmes  désirs:, 
et  la  laissent  presque  nue.  Cette  "femme 
ramasse  le  peu  de  forces  qui  lui  restent  en 
voyant  ses  granges  en  feu.  Elle  veut  voler 
au  secours  de  ses  bestiaux.  Trois  de  ces 
furieux  accourent ,  et  la  menacent  de  la 
faire  brûler  avec  ses  bœufs.  Elle  s'échappe 

R  4 


804  Atrocités  commises  dans  le  département 
et   court   se   réfugier  chez  sa   mère.   Elle 
n'était  plus  ;  quelques-unc  de  ces  rôdeurs 
lui  avaient  coupé  la  tête  et  un  bras. 

Le  général  Ancey  était  dans  la  Commune 
des  Herbiers.  Grignon  y  arrive  et  dit  aux 
habitans  qu'ils  sont  bienheureux  que  son 
collègue  y  soit,  parce  qu'il  les  aurait >  sans 
cela ,  fait  tous  fusiller  sans  distinction  dès 
Républicains.  Tels  étaient  les  ordres  du 
Général  en  chef:  il  avait  même  fait  subir 
ce  sort  à  des  Municipalités  en  écharpe. 

Le  général  Ancey  prévient  les  habitais 
d'emporter  leurs  effets  les  plus  précieux  , . 
attendu  qu'à  2  heures  de  l'après-midi ,  leur 
Commune  sera  incendiée  selon  les  ordres 
précis  du  Général  en  chef.  Un  instant  après, 
ordre  du  Commandant  de  place  à  Fontenai, 
de  fournir  400  voitures  à  bœufs  pour  le 
transport  des  grains  et  fourrages  ,  avec  me- 
nace du  fusiller  tous  les  habitans  ,  en  com- 
mençant par  la  Municip'alité ,  si  ces  voitures 
n'étaient  pas  prêtes  pour  le  lendemain.  Ces 
malheureux  se  détachent  de  toutes  parts 
pour  trouver  un  nombre  de  bestiaux  et  de 
voiture^  suffisans.  Mais  tout  est  dévasté^ 
onze  cents  mille  bœufs  ou  vaches  avaient 
péri  dans  ces  contrées  par  le  fer  et  le  feu» 
Le  peu  qui  reste  de  ces  animaux  utiles 
errent  dans  les  genêts.  Leur  épouvante  les 
rend  innaccessibles.  Enfin,  le  matin,  on 


de  la  Vendée  ,  et  autres  circonvoisins.     265 

charge ,  sur  ce  qui  se  trouve  de  voitures  , 
'les  grains  et  fourrages.  Aussitôt  la  générale 
bat.  On  apprend  que  la  division  de  Grignon 
avait  essuyé  un  échec  près  St.-Fulgent.  Le 
général  Ancey  ^  à  la  tête  de  deux  mille 
hommes  ,  préféra  de  mettre  à  exécution 
Tordre  de  brûler  cette  Coftimune  ,  avant 
de  se  retirer  à  Cholet.  Aussitôt  la  flamme 
s'élève  de  toutes  parts  ,  les  volontaires  dé- 
pouillent les  femmes ,  violent  les  filles  ,  et 
arrachent  leurs  boucles  d'oreilles  et  leurs 
anneaux. 

Si ,  dans  ces  incendiés  ,  quelques  mal- 
heureux habitans  avaient  la  faculté  d'em- 
porter quelques  peu  d'effets  ,  ils  n'étaient 
pas  plutôt  au  milieu  de  la  colonne  ,  que 
les  volontaires  ,  à  l'exemple  des  généraux  , 
fondaient  sur  eux  ,  fesaient  essuyer  aux 
femmes  et  aux  filles  les  violences  les  plus 
outrageantes  ,  massacraient  le  tout ,  et  lais- 
^  «aient  cette  foule  de  cadavres  nuds  et  tnu- 
tilcs  sur  la  route. 

Des  volontaires  ,  après  avoir  pîUé  et 
incendié  toute  une  maison ,  poignardèrent 
les  vieillards  et  les  enfàns.  Ils  s'étaient  ré- 
servés les  jeunes  filles.  tJne  d'elles  ,  sur  le 
point  d'être  victime  de  leur  brutalité  ,  voit 
iout-à-coup  son  amant  accourir  à  sa  défende. 
Mais  que  fera-t-il  contre  cette  troupe 
d'assassins  ?  Leur  nombre  rend  ses  efforts 


s66  Atrocités  commises  dans  le  département 

inutiles/Sa  résistance  ac^croît  leur  furèui 
Séus  ses  yeux  ,  ils  assouvissent  leurs  mon: 
tnicux  désirs^  Ils  le  forcent  ensuite  à  imite 
leur  pxemple.  A  peine  ces  deux  amans  d 
ploraient  dans  leurs  embrassemens  la  fatalii 
de  leur  sort ,  que  ces  bourreaux  les  pe 
cèrent  du  même  fen 

Cinquante  Républicains  qui  habitaiei 
une  petite  Commune  ,  vinrent  au-devai 
de  la  colonne.  Ces  bonnes  gens  avaiei 
préparé  un  banquet  fraternel  pour  les  reo 
voir  ;  la  troupe  l'accepte.  On  se  met  à  tabL 
et  ce  repas  est  assaisonné  d'une  gaieté  qi 
paraît  sincère.  Il  n'est  pas  plutôt  ache\ 
que  les  soldats  entraînent  leurs  hôtes  dai 
le  cimetière  ,  et  les  y  poignardent. 

Dans  le  mois  de  floréal ,  an  2  ,  (mai  179^ 
cinq  cavaliers  entrèrent,  à  Soulans ,  chez 
citoyen  Baudet ,  administrateur  du  distri 
de  Challans.  Ils  demandent  à  sa  femir 
de  confiance  le  linge  de  son  maître  en  '. 
menaçant  de  leurs  sabres.  Sur  cesentrefait< 
des  Vendéens  arrivent ,  chassent  ces  cavî 
liers  ,  et  emmènent  cette  femme  avec  eu: 

Le,  19  thermidor ,  (  6  août  )  le  pays  ayai 
été  conquis  par  les  Républicains ,  çl 
revient  à  Soulans.  La  maison  était  rempi 
de  volontaires  occupés  au  pillage.  Un  d'eu 
lui  enlève  ses  assignats  et  son  argents  C 
idétachejnent  était  de  la  colonne  du  Perrie 


de  la  Vendée,  et  autres  circonvoîsins.     267 

Treifte  Volontaires  étant  venus ,  le  28 
messidor,  même  année  ,  (  16  juillet  lygS  ) 
chez  le  citoyen  Froidfond,  enfoncent  les 
coffres  ,  les  armoires  ,  le  fouillent  lui-même 
ainsi  que  son  oncle  ,  et  volent  tout  ce  qu  ils 
trouvent.  Les  maisons  voisines  sont  égale- 
ment mises  au  pillage.  Un  mois  auparavant, 
une  colonne  de  Machecoult  lui  avait  enlevé 
sa  femme  ,  son  fils  et  plusieurs  bestiaux. 

Le  citoyen  Pillet  de  la  même  Commune, 
estrencontré  par  un  détachement.  Il  s'avance 
pour  se  faire  reconnaître.  Son  patriotisme 
généralement  connu  ,  semblait  le  mettre 
à  labri  de  tout  danger  ;  c'était  dans  cette 
confiance  qu'il  se  transportait  vers  ces 
soldats.  Il  est  sur  -  le  -  champ  fusillé  sans 
avoir  été  entendu ,  ainsi  qu'un  de  ses 
parens. 

..  Une  colonne  revenant  de  Saînt-Leger  , 
entre  dans  cette  Commune  ,  y  met  tout  à 
feu  et  à  sang  ,  égorge  la  veuve  Pillet.  Les 
citoyens  sont  assassinés  dans  leurs  maisons 
et  dans  les  rues.  On  estime  qu'il  fut  tiré 
plus  de  cinq  mille  coups  de  fusils  sur  ce 
'  pays.  Les  traîneurs  étaient  chargés  d'effets. 
Une  femme  disant ,  les  larmes  aux  yeux  » 
qu'il  était  bien  affreux  d'être  ainsi  traité  par 
des  Républicains  ,  fut  aussitôt  assassinée. 
Une  petite  fille  de  14  ans  avait  été  violée 
par    quelques    soldats    de    cette   troupe; 


s68  AtrocHés  commises  dans  le  département 

D'autres   qui    suivaient  ,   la  i^assactèrent^ 
Une  colonne   commandée  par  radjudant«=» 
général  Chadot,  pille  Gurmarche.  Le  dtoyei^ 
Bçtis ,  au  service  de  Tarmée  ,  et  revenu  1^ 
veille  pour  cause    de   maladie,   n'est  pass 
exempt  de  ce  brigandage.  A  TEspinacièrc  ^ 
deux  citoyens   employés  aux  charroit-^e' 
larméç  ,  sont  massacrés ,  ainsi  qu'une  jeune 
fille.  Quelques  volontaires  entrent  chez  le 
citoyen  Baudet ,  se   mettent   en  devoir  de 
fusiller  ses  petits  enfana  ;  mais  Taîné  leur 
ayant  dit  qu'ils  n'étaient  pas  chez  des  bri- 
gands ,  que  ,  comme   eux ,  ils   étaient  au 
service    de   la   République  ,    fut  tué   d'un 
coup  de  pistolet  à  bout  portant.  Ce  jeune 
homme  était  absent  de  l'armée  depuis  deux 
jours  pour  cause  de  maladie.  Cette  maison 
fut  entièrement   dévastée  ,   et  la  mère  du 
propriétaire  qui   coupait    du  blé  dans  un 
champ  voisin  ,  fut  massacrée. 

Ces  horreurs  se  commettaient  le  lende- 
main d'une  proclamation  ,  qui  invitait  tous 
les  habitans  à  rentrer  dans  leurs  possessions  ; 
Proclamation  faite  par  les  ordres  du  Co- 
mité de  Salut  public  ,  qui ,  dans  le  même 
instant ,  commandait  d'attaquer  sur  trois 
colonnes  ceux  des  Vendéens  qui  étaient 
encore  armés. 

A  la  Huichère ,  cinquante  Volontaires  du 
bataillon  de  la  Charente  inférieure  pillent»  ^ 


r  de  la  Vendée ,  et  autres  circonvoisins.  269 
insultent ,  détruisent  les  clôtures  ,  et  cou- 
pent les  arbres  à  fruits.  Bressuire  ne  fut 
abandonné  qu'après  qu  on  eut  exterminé 
'  hommes  ,  femmes  et  enfans  ,  et  qu  un  in- 
cendie général  eut  consumé  jusqu'aux 
subsistances. 

Un  autre  Général  fait  bâillonner  deux 
jeunes  filles  et  les  livre  à  ses  soldats  ;  par 
«es  ordres  ,  les  enfans  sont  précipités  au 
fond  d*un  puits  ,  et  cet  homme  a  Timpu- 
dence  de  dire  qu  il  est  le  boucher  de  la 
Convention. 

Des  Communes  sont  investies  pendant 
la  nuit ,  les  habitans  sont  ramassés  dans  un 
même  local  et  fusillés.  Dans  d'autres  cir- 
constances ,  des  Communes  entières  sont 
invitées  à  se  réunir  dans  un  champ  indiqué^ 
Tous ,  -sans  exception  ,  s'y  rendent.  La 
Municipalité  en  écharpe  est  à  la  tête  ;  la 
Garde  nationale  est  sous  les  armes  ;  des 
groupes  de  femmes  ,  d'enfans ,  de  vîeiU 
lards  les  suivent.  La  brigade  révolution- 
naire arrive ,  les  cerne  ,  et  bientôt  ils  ne 
sont  plus. 

Quelquefois  on  vît  ces  brigands  tourner 

leurs  poignards  les  uns  contre  les  autres  , 

et  offrir  à  l'observateur  étonné  une  masse 

de  meurtres  présidée  par  Tappas  du  gain,, 

Après  la  prise  de   Noir-Moutier  ,   une 

itfuniçipalité  en  écharpe  vxjat  désigner  ua 


«70  Atrocités  commises  dans  le  département 

repaire  deVendéens  ;  elle  fut  fusillée.  jParn 
cette  horde  de  massacreurs  ,  un  soldai 
possesseur  d'une  somme  de  24  louis  en  i 
qu'il  avait  enlevée  à  un  rebelle  ,  avait  é 
tué  par  un  de  ses  camarades.  Un  aut 
soldat  tue  ce  dernier  pour  avoir  cet  01 
vingt-cinq  ou  trente  pressés  par  le  mên 
motif  s'arrachèrent  successivement  la  vi 
A  Bourgneuf ,  ladjudaht-général Lefev 
donne  le  spectacle  d'une  noyade.  C'est 
5  ventôse  an  2  (  23  février  1794),  qu 
ordonne  à  Pierre  Macé ,  capitaine  du  bai 
ment  le  Destin  ,  d'embarquer  dans  s< 
navire  ,  pour  Nantes  ,  quarante-un  iii<j 
vidus  extraits  des  marais  de  Saint-  Cy 
fesant  partie  des  pays  insurgés.  L'arrêté  \ 
la  Municipalité  portait  qu'ils  seraient  ti 
duits  à  la  Commission  militaire  de  Nantc 
A  sept  heures  du  soir  ,  le  navire  mit  à 
voile.  Quarante-un  prisonniers  ,  parmi  b 
quels  étaient  deux  hommes,  dont  un  aveug 
depuis  six  ans  ,  âgé  '  de  soixante-dix-hi 
ans  ;  douze  femmes  de  difFérens  âges  ;  quin 
enfans  ,  dont  dix  depuis  l'âge  de  six  à  d 
ans  ,  et  cinq  à  la  mamelle  ,  furent  doi 
embarqués  avec  quatre  fusiliers  volontaii 
et  un  caporal.  Arrivés  à  la  hauteur  1 
Pierre-Moine  ,  le  capitaine  reçoit  un  secoi 
ordre  de  l'adjudant  Lefevre  ,  d'extraire  < 
son  bâtiment  la  nommée  Jeanne  Bidet ,  i 


de  la  Vendée ,  et  autres  circonvoisins.     sy  i 

conduire  le  reste  à  la  hauteur  de  Pierre- 
Moine  y  et  de  les  jeter  à  la  mer  comme 
rebelles  à  la  loi.  Cet  ordre  ,  qui  frappait 
sur  des  vieillards ,  des  femmes  et  des  enfans 
à  la  mamelle  ,  s'étendit  aussi  sur  les  quatre 
fusiliers  et  le  caporal.  Sans  doute  que  , 
témoins  d'un  assassinat  aussi  atroce  ,  ils 
devenaient  redoutables  aux  yeux  de  l'adju- 
dant Lefevre. 

Ses  exploits  ne  se  bornèrent  pas  à  ce 
seul  fait.  Deux  cent  soixante  insurgés  se 
rendent  à  cet  Adjudant  ;  il  les  conduit  à 
Angers  ,  et  le  lendemain  ils  sont  fusillés  et 
noyés  au  Pont -de -Ce.  Quatre  mille  per- 
sonnes ont  subi  cet  affreux  sort  au  même 
ebdroit.  Cet  Adjudant  rapporte  aussi  que 
depuis  le  Mans  jusqu'à  Savenay  ,  la  route 
était  couverte  de  cadavres  d'hommes  et  de 
femmes  hachés  à  coups  de  sabre, 

Garnier  (de  Saintes)  écrivait  alors  ,  du 
Mans  ,  aux  Jacobins  de  Paris  ,  qu'on  ame- 
nait les  prisonniers  par  trentaine  ,  que  dans 
trois  heures  on  les  jugeait ,  et  qu'à  la  qua- 
trième ils  étaient  fusillés. 

Le  général  Cordelier  ,  à  Clisson  ,  fesaît 
égorger  les  femmes  etles  enfans  qui  n'avaient 
pu  suivre  leurs  maris  à  Nantes ,  à  cause  de 
leur  faiblesse.  Le  lendemain  ,  comme  il 
passait  par  le  bourg  de  Vallet  ,  plusieurs 
citoyens  et  citoyennes  viennent  au-devant 


\ 


272  Atrocités  commises  dans  le  département 

de  lui  ,  en  criant  :  vive  la  République  !  Ils 
n'en  furent  pas  moins  fusillés  sur-le-champ 
par  ses  ordres. 

A  Saint-Laurent-des-Autels ,  deux  cents 
femmes  ,  enfans  et  vieillards  sont  également 
assassinés.  Un  guide  obsei'vait  à  Cordelier 
que  s'il  voulait, surprendre  les  Vendéens  ,  il 
le  pouvait  facilement  dans  les  marais  proche 
la  Chapelle-Hulin.  Les  détails,  utiles  quil 
donna  à  cette  occasion  lui  valurent  la  mort. 

Mortagne  était  assiégé  ;  deux  citoyens 
viennent  le  lui  annoncer ,  afin  de  l'engager 
à  y  porter  du  secours  :  ils  sont  tués*  Deux 
Ordonnances,  pressées  par  le  même  motif, 
sont  mises  en  état  d'arrestation.  Cordelier 
rebrousse  chemin  ,  préférant  continuer 
d'exercer  ses  brigandages.  La  garnison  de 
cette  place  lui  avait  fait  demander  des  car- 
touches .;  il  se  contenta  de  répondre  que  la 
peur  l'excitait  sans  doute  à  cette  démarche , 
et  ne  fit  donner  aucune  munition. 

Lusignan  ,  général  de  brigade  ,  s'em- 
presse de  suivre  les  traces  de  ses  frères 
d'armes.  Le  village  de  la  Pallue  ,  près  les 
forges  de  Cugan  ,  le  voit  un  jour  arriver 
avec  trente  cavaliers.  Il  rencontre  à  Fentrée 
les  femmes  du  village  ,  et  leur  demande  où 
sont  leurs  maris  ;  elles  répondirent  qu'ils 
étaient  chez  eux  ,  occupés  à  leurs  travauii: 
de  tisserands,  5ur  ses  ordres  ,  elles  vont  les 


de  la  Vendée  ,  et  autres  circênvoisinsi     ^^S 

chercher:  ils  se  présentent  avec  leurs  tabliers 
cje  travail.  Ce  Général  les  conduit  à  Clisson , 
^t  dix  -  sept  d'entre  eux  ,  tous  pères  de 
famille  dont  les  enfans  étaient  aii  service 
de  la  République  ,  sont  fusillés  dans  cette 
ville. 

Les  nommés  BtUlevaére  et  Musca  dé- 
noncent en  même  tems  à  la  force  armée  en 
cantonnement  au  Château- d'Eau  j  plus  de 
huit  cents  individus  ,  tous  habitans  des 
Communes  voisines  de  Nantes  :  ih  sont 
également  fusillés  sans  aucun  jugement. 
.  A  Paimbœuf ,  la  Municipalité  et  le  Comité 
livrent  aux  bourreaux  armés  une  foule  d'in- 
dividus que  la  haine  et  la  cupidité  avaient 
proscrits. 

Belordre ,  adjudant  du  général  Délage  , 
passe  la  Loire  à  plusieurs  reprises  ,  sous 
prétexte  de  détruire  les  Vendéens.Il  ramène 
une  fois  de  la  côte  vingt-trois  femmes ,  filles 
ou  enfans  de  Tâge  de  dix  ,  douze  ,  qua- 
torze et  dix-sept  ans  ;  dix-sept  sont  fusillés. 
Une  vieille  femme  était  du  nombre  ;  il 
l'abandonne  à  ses  soldats  ,  qui  la  hachent 
à  coups  de  sabre  ,  et  la  précipitent  dans 
la  Loire. 

Le  général  Huche t  s'ébranle  aussi  ei^ 
recevant  les  ordres  du  général  en  chef 
Turreau.  Nous  allons  ici  transcrire  sa 
lettre. 

Tome  VL  S 


«74  Atrocités  commises  dans  le  département 

TuRRjRAv  ^  Général  en  chef  de  r  armée  de  F  Ouest. 

'  *«  Il  est  ordonné  au  général  Huchet  de  partir  sur- 
le-champ  pour  se  rendre  à  Luçon;  il  prendra  le  com**^ 
mandement  de  toute  la  force  armée  qui  s'y  trouve  ^ 
^insi  que  dans  les  postes  adjacents.  Il  fera  enlever , 
par  tous  les  moyens  militaires  ,  les  subsistances  et 
fourrages  qui  se  trouvent  par  sa  droite  ,  et  c.  Aussi- 
tôt les  enlèvemcns  faits  ,  tous  les  bourgs  ,  villages , 
hameaux  ,  fours  et  moulins  ,  seront  entièrement  in- 
cendiés sans  exception.  Les  habitans  qui  seront  re- 
connus avoir  pris  part  directement  ou  indirecte- 
ment à  la  révolte  ae  leur  pays  ,  seront  exterminés 
sur-le-champ.  Il  se  conformera  particulièrement  à 
l'arrêté  des  Représentans  du  Peuple  ,  du  8  ventôse 
(  ap  février  1794) ,  concernant  les  réfugiés  ;  il  re- 
mettra au  général  Barre  notre  ordre  portant  sa  sus- 
j)ension  provisoire. 

•f  Signé ,  TuRREAU.  ji 

Huchet  ne  se  croit  pas  digne  de  la  con- 
fiance de  son  chef,  s'il  ne  se  distingue  par 
quelques  actes  barbares.  Un  Officier  de 
santé  lui  déplaît  ^  il  le  fait  massacrer.  Dans 
le  jardin  de  la  maison  qu  il  habitait  ,  il  y 
avait  le  cadavre  d  un  citoyen  tué  par  ses 
ordres.  Il  ordonne  à  urie  jeune  fille  ,  pleine 
de  vertu ,  d'aller  lui  cueillir  une  salade  dand 

ce  même  jardin  ,  en  lui  disant  :  B ,  si 

tu  n'y  vas  pas ,  je  t'attacherai  les  mains  ;  jt 

ti  f  sur  ce  corps ,  et  j^  te  ferai  fusiller 

'  aprjs. 

D'après  les  ordres  de  Turreau  ,  il  part  de 
Chollet  »  à  la  tête  de  sa  division ,  et  la  fait 


k 


•  de  la  Vendée ,  et  autres  cîrconvoisins%    27 5 

avancer  avec  tant  de  précipitation  ,  qu'il  est 
impossible  aux  habitans  d'enlever  ce  qu'ils 
ont  de  plvis*^récieux.  Sur  quelques  obser- 
vations faites  à  ce  sujet  par  plusieurs  d'entre 
eux  ,  il  les  menace  de  les  faire  fusiller. 

Un  jeune  homme  ,  une  jeune  fille  et  leur 
père  ,  arrêtés  par  ses  ordres ,  spnt  mis  entre 
les  mains  des  hussards.  On  fait  briller  le 
sabre  à  leurs  yeux  ;  ils  veulent  fuir ,  on  le? 
fusille.  Le  nommé  Laurent ,  volontaire  ,  se 
précipite  sur  Tun  d'eux  ,  et  l'achève  à  coups 
de  sabre. 

Quelques  soldats  de  cette  même  colonne 
entrent  dans  une  maison  où  étaient  vingt  à 
vingt-cinq  malades  des  deux  sexes ,  et  les 
égorgent.  Huchet  se  transporte  sur  les  lieux 
pour  s'assurer  si  la  maîtresse  du  logis  avait 
été  tuée.  ' 

Ce  Général  accoste  ,  près  Montaigu , 
deux  vieillards  qui  s'occupaient  à  la  mois- 
son ;  il  en  assassine  un  de  sa  main ,  pendant 
que  ses  soldats  égorgent  l'autre.  A  quelques 
pas  de  là,  plusieurs  individus  sont  amenés 
mç  le  bord  du  chemin  ,  où  ils  sont  fusÛlés 
et  sabrés.  Au  Poiré  ,  Huchet  tue  de  sa  main 
une  femme  et  un  homme  ;  .et  pendant  cette 
expédition  il  ordonne  à  ses  soldats  d'en 
auassacrer  cinq  autres. 

La  garnison  de  Mortagne  reproche  à  cç 
Général  d'avoir  ,  pendant  neuf  jours  dfî 

S  2'    ' 


■% 


276  Atrocités  commises  dans  le  département 

suite  ,  donné  le  même  mot  d'ordre  et  de 
rallieipent ,  ce  qui  pouvait  compromettre 
la  troupe ,  en  facilitant  aux  Veitdéens  les 
moyens  de  la  surprendre. 

Quand  les  trois  colonnes  marchèrent 
pour  attaquer  Charette  vers  Legé  ,  Hu- 
chet  en  commandait  une.  L'expédition 
fut  sans  succès  ;  mais  au  retour  ,  il  donna 
ordre  au  troisième  bataillon  des  Vosges  dé 
n'épargner  ni  hommes ,  ni  femmes  m 
ienfans.  Tout  ce  qui  avait  jusques-là  échappé 
aux  flammes  ,  grains  et  fourrages ,  en  devint 
la  proie....  Il  a  péri  dans  cette  marche  en- 
.  viron  cinq  cents  personnes  sabrées  ou  61- 
sillées.  Il  se  fesait  passer  pour  Charette,  afin 
d'induire  les  habitans  en  erreur ,  et  de  tirer 
d'eux  l'aveu  qu'ils  étaient  royalistes ,  ce  qui 
lui  servait  de  prétexte  pour  les  faire  fusiller. 

Ses  cruautés  ont  été  telles ,  que  le  gé- 
néral Ferrand  ,  indigné  de  tant  d'horreurs  , 
s^est  séparé  de  lui.  Ingrand  l'a  désapprouvé, 
et  s'est  vu  forcé  à  mettre  un  frein  à  ces  atro- 
cités. Six  mille  Vendéens,  du  nombre  de 
ceux  qui  avaient  été  battus  à  Angers  et  au 
Mans ,  avaient  repassé  la  Loire ,  et  s'étaient 
retirés  dans  leurs  foyers  ;  mais  à  la  nou- 
velle des  massacres  et  incepdies  ordonnés 
par  Huchet ,  ils  rejoignirent  Charette  et 
se  battirent  dans  les  tems  avec  toute  la 
fureur  du  désespoir. 


de  la  Vendée  ,  et  autres  circonvoisins.     «77 

Huchet ,  après  avoir  fait  camper  sa  . 
troupe  dans  deux  champs  de  froment , 
donna  ordre  dy  mettre  le  feu.  Il  a  de  même 
fait  incendier  plusieurs  fermes  et  un 
village  ,  après  en  avoir  enlevé  les  bestiaux 
et  les  effets. 

Pendant  ces  expéditions  ,  Turreau  ne 
restait  pas  inactif.  La  Commune  de  Cha- 
lonnes  ,  entourée  des  armées  Vendéennes  , 
avait  en  vain  fait  part  aux  Représentans , 
aux  Généraux  et  aux  Autorités  constituées 
de  la  position  critique  où  elle  se  trouvait. 
Privée  d'armes  et  de  soldats  >  car  sa  jeu- 
nesse la  plus  vigoureuse  était  incorporée 
dans  les  troupes  républicaines  ,  la  laissait 
à  la  merci  des  ennemis.  Effectivement  elle 
fut  attaquée  à  Timproviste  et  forcée  de  se 
réfugier  dans  Tisle.  Cependant  ,  revenue 
de  cette  première  surprise  ,  son  vœu  est 
de  chasser  les  assaillans.  Un  Commissaire 
nommé  le  Febvre  ,  envoyé  pour  s'opposer 
à  toute  incursion  »  et  qui  avait  fui  dès 
rapproche  des  Vendéens  ,  ordonne ,  pour 
rendre  ce  projet  inutile ,  qu'on  brûle  ovL 
coule  une  partie  des  bateaux  qui  étaient 
sur  la  rive. 

Turreau  arrive  sur  ces  entrefaites.  Les 
habitans  croyant  trouver  en  lui  un  libé- 
rateur ,  sortent  de  leur  retraite  aux  cris  de 
vive    la  République  l  vive  la  Convention  ! 

S  â 


«7  â  Atrocités  commises  dans  le  département 

Trois  cents  rebelles  étaient  rangés  en  ba- 
taille devant  la  division  Turreaù  ;  mais  se 
battre  n'était  pas  sa  mission,  il  bivouaqua 
toute  la  nuit  ;  et  le  lendiemain  ,  les  flammes 
apprirent  aux  habitahs  die  Chalonnes  ,  la 
perte  de  leurs  propriétés.  Les  soldats  de  ce 
chef  ne  le  cédaient  pas  en  atrocités  à  ceux 
des  autres  colonnes.  Le  viol  et  le  brigan- 
dage étaient  à  Tordre  du  jour  dans  ces  odieux 
bataillons  ;  les  femmes  ,  lesenfans  ,  et  ceux 
qui  échappèrent  aux  sabres  de  ces  assassins*, 
furent  judiciairement  fusillés. 

Dagonrie  ,  Commissaire  du  pouvoir 
exécutif  à  Quimpér ,  instruit  que  le  jour  de 
St.  Corantin ,  patron  de  Tégilse  cathé- 
drale de  cette  ville  ,  les  habitans  des  mon- 
tagnes voisines  en  dtScendaient  pour  satis- 
faire aux  devoits  de  leur  religion  ,  fait  as- 
semblèt*  lihe  force  àrmëe  imposante  ,  s'en- 
toure d'une  artillerie  chargée  à  mitraille  , 
et  se  fait  apporter  au  milieu  de.  la  place 
publique  ,  les  vases  de  Téglisc  ,  et  tout  ce 
qui  était  Fobjet  du  culte  de  ces  bons  mon- 
tagnards. Il  se  fait  un  jouet  de  leur  piété  , 
boit  dans  quelques-uns  de  ces  vases  ,  .pisse 
dans  les  autres;  enfin  ,  les  indécences  les 
plus  révoltantes  ,  font  reculer  d'horreur 
ces  bons  montagnards  ,  ils  reprennient 
fort  tristement  le  chemin  de  leurs  mon- 
tagnes. 


de  la  Vendée ,  et  autres  circonvoisins^     279 

Dans  le  nombre  des  atrocités  commises 
par  les  Vendéens ,  nous  avons  omis  les 
traits  suivans  :  ^  : 

Au  Leroux ,  ils  clouèrent  à  Tarbre  de  la 
liberté ,  un  volontaire  qu'ils  nourrirent 
dans  cet  état  pendant  trois  jours  ;  au  bout 
dé  ce  tems  il  expira. 

A  la  Commune  de  Machecoult ,  ils  jetèrent 
dans  un  puits  deux  cent  cinquante  volon- 
taires ,  ce  qui  donna  lieu  au  trait  de  re* 
préssailles  que  nous  avons  cité  page  â34»> 

Suite  des  atrocités  commises  ians  le  Dépar^ 
tement  de  la  Vendée  et  autres  départ emens 

.  circonvoisins ,  sow  l^  Prpconsulal  de  Carrier» 
Hentz,etc. 

li'ŒiL  étonné  parcourt  les  superbes  et  vastes 
plaines  de  la  Vendée  ,  dont  les  iriamenses 
productions  refluaient  sur  une  partie  de 
notre  sol.  Quelle  profonde  soUtude  !  les  trou- 
peaux ne  bondissent  plus  dans  ces  prairies 
jadis  émaillées  de  fleurs  -,  k  laboureur  ,  par 
Ks  chants  innocens ,  nç  bâte  plus  les  pas 
du  bœuf  traçant  de  pénibles  siUoiis  ;  ces 
antiques  forêts  ,  ouvrage  de  plusieurs  siè- 
cles ,  ont  ployé  leurs  têtes  sous  la  hache ,  et 
la  flamme  a  dévoré  létw^troncs  dépouillés  \ 
ThabitM^  des  airs  ne  trouvi^splus  un  bran* 

S  4 


çtSo  Airocités  commises  dans  le  diparUmeni 

châge  pour  se  reposer.  Les  ruines  ont  pris 
la  place  de  ces  habitations  agréables ,  séjour 
du  bonheur  et  de  Tinnocence  ;  le  croas- 
sement du  corbeau ,  et  le  cri  clapissant  de 
Toiséau  de  la  nuit ,  y  font  entendre  leurs  lu- 
gubres concert^  vdes  plantes  parasites  se  sont 
emparé  de  ces  champs  jadis  si  fertiles  ;  des 
jossemens  humains  sont  épars  sur  leur  sur- 
face ;  le  crêpe  de  la  mort  couvre  ces 
malheureuses  contrées  ;  il  se  déchire  :  et 
le  nom  de  Carrier  écrit  en  caractère  de 
sang  ,  s'offre  aux  regards  du  voyageur  ; 
les  voix  gémissantes  de  tant  de  victimes  , 
retentissent  sous  cette  voûte  funèbre  r 
toutes  accuisent  Carrier  :  c'est  Carrier  qui 
est -leur  assassin;  c'est  Garrîèr  qui,  dans 
sa  barbare  insouciance ,  a  privé  leurs  ca- 
davres de  sépulture  ,  pour  les  livrer  à  la 
dent   des  animaux  carnassiers. 

Mais ,  qu'avait  donc  fait  ce  malheureux 
pays  ,  pour  s'attirer  une  si  terrible  répro- 
bation ?  étaif-il  habité  par  des  êtres  en  hor- 
reur au  genre  humaifr  ?  Ouvrons  les  fastes 
sangl'ans  de  l'anarchie  ,  nous  y  trouverons 
les  causes  de  cette  proscription  ,  dont  on 
î'a  enveloppé. 

La  Convention  et  la  France  entière  gé- 
missaient sous  la  domination  d'une  faction 
orgueilleuse  ,  qui  du  sommet  d'une  mon- 
tagne révolutionnaire   lançait  se^oudrei 


de  la  Vendée^  et  autres  ciuonvoisins.     281 

destructeurs  ,    et  menaçait   d'engloutir  la 

patrie  sous  ses  éruptions  volcaniques.  Déjà 

d'horribles  catastrophes  avaient  signalé  sa 

funeste    puissance    d'extermination  ;    une 

dernière    explosion    plus  violente  mit  le 

comble  au  désespoir  universel  ;  la  terreur 

fut   solennellement    proclamée   à    Tordre 

du  jour  ;  et  ce  décret  en  jaillissant  comme 

une  lave  brûlante  de  ce  gouffre  empoisonné, 

répandit  à  la  fois  sur  tous  les  points  de  la 

Jlépublique  Fattente  et  Teffroi  d'un  entier 

anéantissement.  Mais  il  ne  suflRsait  pas  d'un 

j)areil  décret  ;  et  il  semblait  impossible  de 

trouver  pour  son  exécution  assez  d'Agens 

dUgnês  de  cette   mission  infernale. 

C'en  est  fait  ;  de  la  caverne  convention- 
nelle s'élancent  au  loin  les  nombreux  génies 
de  destruction  et  de  mort  ;  ils  se  partagent 
tous  les  départemens  de  la  République. 
Ceux  de  l'Ouest  sont  dévolus  au  farouche 
Carrier  ,  et  Nantes  devient  le  siège  de  son 
despotisme  sanguinaire.  C'est  là  ,  qu'une 
maison  ,  dont  il  a  chassé  le  légitime  pro- 
priétaire ,  se  change  pour  ce  nouveau 
Cacus  en  un  antre  affreux  où  se  trace  le 
plan  de  mort ,  et  d'où  partent  tous  les 
ordres  et  le  signal  de  tous  ks  forfaits  révo- 
lutionnaires. 

L'horreur  des  cachots ,  les  travaux  expé- 
ditifs  d'une  Commission  militaire  ^  ne  suf- 


s82  Atrocités  commises  dans  le  département 

fisent  pas  à  ses  projets  de  dépopulation.  U 
crée  de  nouveaux  supplices  ;  la  fusillade 
et  les  noyades.  C'est  dans  ce  dernier  sur- 
tout qu  on  lui  voit  développer  un  rafiBL^- 
nement  tellement  varié  ,  que  les  réflexions 
qu'il  produit  ne  servent  qu  à  dégrader  Tes- 
pèce  iiumaine.  Emule  des  Nérons  et  des  Cali- 
gula ,  le  théâtre  de  ses  sanglantes  tragédies  , 
est  celui  de  ses  orgies.  Compatriote  de 
Couthon ,  dont  nous  avons  été  nous- 
mêmes  quelque  tems  la  dupe.  Il  fut  Tesclave 
des  volontés  sanguinaires  de  cet  être  am-^ 
,  bilieux  ,  qui  ne  dut  un  peu  de  célébrité 
qu'à  ses  infirmités  ,  fruit  de  ses  débauches , 
et  à  cette  extrême  popularité  qu'il  affecta 
si  long-tems  pour  éblouir  le  peuple  ,  lors- 
qu'il lui  forgeait  des  chaînes. 

Le  8  octobre  1793,  (17  Vendém.  )  Carrier 
arrive  à  Nantes  ;  cette  Commune  avait 
déjà  son  Comité  révolutionnaire  ,  dont  les 
Membres  étaient  Goulin  ,  Chaux  ,  Grandir 
Maison  ,  Bachelier ,  Perrochaux  ,  Mainguet  y 
Lévêque  ,  Nain  ^  Bologniel ,  Galloi  ,  Du* 
rassier  ,  Bataille  ,  Joly  et  Pinard ,  tous 
monstres  nés  pour  le  crime  ,  et  se  fesant  un 
jeu  de  la  fortune  et  de  la  vie  des  hominefi. 
Ce  Comité  bien  imbu  des  principes  révo* 
lutionnaires  ,  n'était  pas  encore  à  cette 
hauteur  d'énergie  républicaine  ^que  le  sys- 
tème des  dépopulateurs  exigeait  desAgens 


delà  Vendée,  et  autres  circonvoisins.  283 

subalternes.  Aussi  voit  on  Carrier  s'em- 
porter contre  cette  Autorité  ,  lorsque  fa- 
tigué des  importunités  de  ceux  qui  viennent 
solliciter  la  sortie  de  quelques  détenus  ,  il 
s'écfie  :  (<  Comment  ce  f,%..  Comité  révo- 
yj  lutionnaire  travaille  -  t-  il  donc  ?  vingt- 
9^  cinq  mille  têtes  doivent  tomber,  et  je  n'en 
99  vois  pas  encore  une.  m  " 

Ce  fut  sans  doute  pour  complaire  à  ce 
despote  redoutable ,  que  ce  Comité  ,  après 
s'être  adjoint  tous  ks  Membres  des  autres 
Autorités  constituées ,  reconnus  pour  dé- 
terminés révolutionnaires  ,  prit  en  séance 
secrète  un  arrêté  portant  un  or-dre  d'incar- 
cération ,  motivée  sur  les  suspicions  les 
plus  frivoles ,  d'attentats ,  de  conspirations 
et  de  liaisons  avec  les  rebelles  ,  et  sur-tout 
ceux  que  le  cri  public  désignait  pour  leurs 
complices  ;  leurs  Agens  secondaires  sont 
.autorisés  à  incarcérer  dans  tous  les  quartiers 
'de  la  ville ,  les  individus  ainsi  désignés* 
:Quel  vaste  champ  pour  ces  êtres  qui  comp- 
taient pour  ennemi  ,  tout  ce  qu'il  y  avait 
de  gens  riches  ,   probes  et  laboriei^x. 

Jusques-là  ,  Carrier  avait  eu  beau  pro- 
voquer les  dénonciations  contre  lesNantais  : 
en  vain  n'exigeait  -  il  que  la  signature  de 
deux  Sans  -  Culottes  ,  pour  incarcérer  un 
Aristocrate.  Ce's. funestes  sugges-tions  avaient 
■été  repoussées  de  toutes  »  parts  ô  enfin  il 


s 84  Atrocités  commises  dans  le  département 

fallut  prendre  un  autre  moyen  pour  rem- 
plir les  prisons  ;  on  eut  recours  à  Fexécra- 
ble  invention  des  conspirations^ 

Le  22  brumaire  (  12  novembre  179^  )  , 
la  générale  battit  ;  le  canon  d'alarme  tonna.; 
les  Sans-Culottes  prirent  les  armes  ;  des  par 
trouilles  nombreuses  parcoururent  les  rues  ; 
de  forts  détachemens  ,  protégés  par  Fartil- 
lerie ,  fermèrent  toutes  les  issues  ,  et  trois 
mille  citoyens  y  inscrits  sur  des  listes  pré- 
parées avant  cette  époque  ,  furent  fouillés:, 
pillés  et  incarcérés.  Le  même  jour ,  plusieurs 
de  ceux  qu'on  arrêta  furent  guillotinés. 
Durassias ,  Tun  des  agens  du  Comité  ,  écrir 
vait  à  ce  sujet  à  Crepin  :  t«  Tuas  laissé  lu 
99  compagnie  Marat  sans  armes  ;  mais  nous 
99  avons  inventé  une  conspiration  pour  ar- 
5  5  rêter  les  Aristocrates  ,  et  nous  avons  pris 
99  leurs  armes  m.  Déjà  Ton  avait  agité  au 
Comité  si  Ton  ferait  périr  les  prisonniers 
en  masse  ;  Chaux  avait  un  autre  moyen 
pour  opérer  leur  destruction  ;  c'était  d'iiv- 
troduire  dans  les  prisons  un  homme  affidé 
qui  y  aurait  fait  une  insurrection  ,  et  tous 
auraient  été  fusillés.  Ce  plan  se  rapportait 
précisément  à  ce  qui  se  passait  alors  daas 
les  prisons  de  Paris.  Un  Officier  municipal 
.d«  Nantes  voulut  lui  observer  ,  qu'on  trai- 
tait lestement  les  affaires  au  Comité ,  sur- 
tout lorsqu'il  s'agissait  de$  propriété^»  delà 


'de  la  Vendée  ,  et  autrei  circonvoisins.     285 

liberté  et  de  la  vie  des  citoyens.  Le  même 
Chaux  lui  répondit  :  a  Nous  marchons  ici 
»)  sur  les  corps  morts  et  sur  les  jolies  fem- 
>9  mes  !!!!!  i> 

La  fameuse  Compagnie  révolutionnaire  , 
dite  Marat ,  avait  présidé  aux  arrestation6  ; 
elle  exigea  même  des  proscrits  une  somme 
de  cent  livres  pour  subvenir  aux  frais  de 
leur  incarcération. 

Lors  de  l'organisation  de  cette  troupe  , 
formée  sous  les  auspices  de  Francastel  et 
de  Carrier ,  un  Membre  du  Comité  s'écriait 
à  chaque  nomination  :  tt  N'y  en  a-t-il  pas 
»  un  plus  scélérat  ?  Il  nous  faut  des  hom- 
t>  mes  de  cette  espèce  pour  mettre  les  aris- 
99  tocrates  à  la  raison  9  9. 

Tel  était  le  mode  par  lequel  chacun  de 
ces  militaires  passait  au  scrutin  épuratoire  ;. 
on  en  exigea  ensuite  le  serment  que  nous 
allons  retracer. 

**  Je  jure  que  Marat  ^  tant  calomnié ,  tant  avili  par 
le  parti  Feuillantin  ,  par  les  crapauds  du  Marais , 

rr  les  contre-révolutionnaires ,  ne  vécut  que  pour 
défense  du  peuple ,  et  qu41  mourut  victime  de 
son  dévouement  pour  le  peuple. 

"  Je  jure  que  les  principes  révolutionnaires  qu'il 
professa  ,  et  dans  ses  écrits  ,  et  à  la  tribune  conven* 
lionnelle  ,  furent,  sont  et  seront,  toujours  les 
miens. 

n  Je  jure  que  les  sociétés  populaires  sont  les  vraies 
colonnes  de  la  liberté  et  de*  Tégalité  ,  et  que  je  les 
regarderai  toujours  comime  telles,  n 


286  Atrocités  commises  dans  le  dépariement 

Suit  la  promesse  de  poursuivre  les  ca- 
lomniateurs de  ces  sociétés  ,  et  la  déclaration 
d'une  guerre  à  mort  aux  Royalistes  ,  Feuil-^ 
lans  ,  et  c.  Le  sercûent  de  ne  jamais- coinb' 
poser  avec  les  parens  ,  amis  ,  et  c. ,  ni  avec 
les  intérêts  personnels  ,et  de  ne  reconnaître 
pour  frères  que  les  seuls  patriotes  et  les 
défenseurs  de  la  République  ,  et  c. 

Ce  fut  à  la  suite  de  ce  serment ,  que  les 
soldats  enthousiasmés  de  ce  conventionnel, 
demandèrent  qu'il  leur  fût  permis  d'adopter 
le  titre  d'armée  de  Marat. 

Un  choix  fait  d'après  ces  diffiérens  prin- 
cipes ,  incorpora  dans  ce  corps  tout  ce  qiic 
Nantes  avait  de  gens  perdus  de  réputation 
et  de.  crimes.  Us  attentent  ,avec  une  impu^ 
dence  impunie  ,  à  la  liberté  et  aux  pro- 
priétés des  citoyens.  On  leur  délègue  aussi 
la  fatale  mission  de  fusiller  les  victimes  à 
bord  des  bagarres,  et  Carrier  les  encourage 
et  les  récompense  :  il  en  rassemble  chez  lui 
un  jour  une  trentaine  :  «<  Je  vous  croîs  ^ 

59  leur  dit-il ,  tous  de  bons  b je  vais  vous 

5J  donner  des  pouvoirs  ,  j'espère  que^ous 
f5  les  exécuterez  ,  et  que  vous  remplirez  mes 
55  volontés  9%  Il  fixe  ensuite  la  solde  de  ces 
soldats  à  dix  livres  par  jour ,  somme  exhor- 
bitante  ,  qu'on  leur  prodigue  à  dessein  d'en 
faire  autant  de  bourreaux  entièrement  dé^ 
voués.  Par  un  arrêté   postérieur  ,  Carrier 


de  la  Vendée ,  et  autres  eirconvoisins.     sSy 

le$  avait  entièrement  subdrdonnés  à  la  sur- 
veillance du  Comité.  Mais  offrons  ici  quel- 
ques traits  des  Membres  de  ce  Comité  ,  en 
attendant  que  la  marche  historique  déve- 
loppe naturellement  lesi  faits  qui  peuvent 
concourir  à  peindre  leur  moralité. 

Bachelier  ,  président  ,  notaire  prévarica- 
teur ,  frappa  de  préférence  ses  confrères  de 
ses  mandats  d'arrits  :  leur  incarcération 
augmenta  sa  clientelle  et  les  produits  de  son 
étude.  Chaux  ,  jaloux  d'un  terrain  qui  était 
à  sa  convenance  ,  disait  :  «<Je  ferai  arrêter 
«  le  propriétaire  ,  il  sera  trop  heureux  de 
'i)  m'abandonner  sa  possession  pour  sortir 
n  de  prison  >  j.  Jadis  banqueroutier  ,  il  pros- 
crivit tous  ses  créanciers  ;  il  était  au  greffe 
du  Tribunal ,  àTépoque  où  une  loi  enlevait 
au  Citoyen  le  droit  de  relâcher  les  détenus  : 
((C'est  bien  dommage  ,  dit-il,  toute  la  ville 
9i  de  Nantes  eut  passé  par  nos  mains  ;  nous 
^9  eussions  Ait  incarcérer  tous  les  habitans 
«  les  uns  après  les  autres  ;  ceux-ci  pour  une 
»îi décade,  ceux-là  pour  deux  ;  après  un 
^>  quartier  plus  ou  moins  long  y  les  Nantais 
9J  en  eussent  mieux  valu  »». 

Grand-Maison ,  assassin  avant  la  révolu^ 
tion  ,  n  avait  échappé  aux  lois  que  par  le 
moyen  des  lettres  de  grâces  qu  il  avoit  ob- 
tenues par  le  crédit  de  quelques  nobles. 

Goulin  ,  ex -noble  ,  était  connu  par  une 


-288  Atrocités  commises  dans  le  département    ^ 

vie  des  plus  licentieuse  ;  on  Taccusait  publia 
quement  d'avoir  frappé  d'un  bâton  son 
père  ,  deux  jours  avant  sa  mort.  Il  fit  mourir 
dans  les  cachots  son  bienfaiteur;  une  jeune 
femme  ,  dont  il  partageait  le  cœur  et  la 
fortune,  ne  fut  pas  plus  épargnée.  Ce  Goulin 
reprochait  souvent  au  Tribunal  la  lenteur 
de  ses  formes,  u  Ah  !  Président ,  disait-il  , 
55  au  nommé  Philippe  Tronjoly ,  avec  votre 
5j  air  sévère  ,  lorsque  vous  êtes  sur  le  siège 
5  5  vous  avez  Tame  trop  timorée  ;  est-ce  qu  il 
5  5  faut  des  preuves  pour  faire  passer  cer- 
55  taines  personnes  au  rasoir  national?  On 
5  5  leur  fait  mettre  la  tête  à  la  fenêtre  sui 
5  5  rétiquette  du  sac  »5.  ^ 

Ce  Comité  reçut  Tordre  de  Carrier  ,  le 
lo  Pluviôse  ,  an  2,  {  29  janvier  1794  )",  de 
faire  incarcérer  ,  sous  vingt-quatre  heures, 
les  courtiers  ,  et  ceux  qui ,  depuis  la  révo- 
lution ,  avaient  exercés  ce  commercé.  Le 
lendemain  ,  il  joint  à  cette  liste  générale 
tous  les  interprètes  ,  sans  exception  ;  tous 
les  acheteurs  ,  acheteuses  ,  revendeurs  et 
revendeuses  de  denrées  de  première  néces- 
sité ,  sans  nulle  distinction. 

u  Peuple  ,  âvait-il  dit  un  jour  dans  le  sein  de  la 
société ,  prends  ta  massue ,  écrase  tous  ces  gros  négo- 
cians,  tous  ces  hommes  qui  se  sont  enrichis  du  fruit 
de  tes  sueurs  ;  vas  ,  cours  enfoncer  ces  magasins  qui 
regorgent  de  richesses  ;  prends  ce  sabre ,  et  exter- 
mine tous  ces  scélérats ,  qui  abusent  de  ta  patience  ; 


de  ia  Vendée ,  et  autres  circonvùisins.     9&9 

mais  je  saurai  bien  au  défaut  du  Peuple  tirer  ven^ 
"geance  de  ces  vampires  publics  ,  la   guillotine   me 
iera  justice  de  tous,  et  je  ferai  rouler  leurs  têtes  sur 
récbafaud  national.  9t 

Mêmes  propos  à  la  société  populaire 
d'Ancenis  :  «jJe  vois  PAR-TOUT,  dit  Carrier, 
jj  des  gens  en  guenilles  ;  vous  êtes  aussj 
99  bêtes  ici  qu'à  Nantes  ;  Fabondance  est 
i>  près  de  vous ,  et  vous  manquez  de  tout. 
31  Ignorez-vous  donc  que  la  fortune  ,  les 
»»  richesses  de  ces  gros  coquins  de  négo- 
«  cians  vous  appartiennent  ?  et  la  rivière 
«  n'est-elle  pas  là  ?  35  De  quel  effroi  ne 
péhétrait-il  pas  les  Nantais ,  en  disant  qu'ils 
étaient  tous  scélérats ,  et  qu  il  fallait  jouer 
à  la  boule  avec  leurs  têtes. 

A  la  suite  de  ces  imprécations  venaient 
les  arrestations  ,  qui  dans  un  instant ,  et 
sous  les  prétextes  les  plus  frivoles  ,  mon- 
tèrent à  plus  de  trois  mille.  Ici  ce  sont 
toutes  les  filles  suspectées  d'avoir  été  ,  il 
y  avait  un  an  ou  deux ,  à  la  messe  d'un 
prêtre  réfractaire.  Le  plus  léger  soupçon 
de  mœurs  équivoques  devient  contrç 
d'autres  un  motif  de  proscription  ;  çt 
Carrier  punit  par  la  noyade  une  faute 
souvent  supposée  ,  tandis  qu'il  se  souille 
publiquement  dans  la  fange  de  la  débauche 
la  plus  crapuleuse. 

Prieur  de  la  Marne  ,  collègue  de  Carrier 

Tome  VL  T 


tQO  Atrocités  c<fmmtses  dans  te  département 
dans  cette  mission  ,  essaya  un  jour  de  lu 
faire  quelques  représentations  sur  le  dange 
des  noyades  ,  et  proposait  de  substituer  î 
ces  mesures  illégales  la  fusillade  sur  1( 
cl^amp  de  bataille.  Carrier,  qui  savait  com 
bien  ces  expéditions  étaient  du  goût  de 
Comités  qui  les  approuvaient  ,  et  de  1; 
Convention  qui  y  applaudissait  ,  repouss; 
dédaigneusement  Prieur  ,  en  le  traitan 
d'imbécille  en  révolution  ,  et  les  baignade 
révolutionnaires  continuèrent. 

On  parlait  un  jour  à  Robespierre  de  ce 
atrocités  ,  et  de  la  peur  que  tous  les  Nar 
tais  ,  jusqu'aux  enfans  ,  avaient  de  roim>r 
eeulf  de  Carrier.  «  C'est  un  patriote ,  répond 
49  le  Tyran  ;  il  connaît  ses  devoirs^  et  Nanti 
55  avait  besoin  d'un  pareil  homme. .  . . 

Revenons  aiix  Membres  des  Comités  r^ 
volutionnaires. 

La  citoyenne  Mallet  fut  conduite  e: 
prison;  ladjudant  général  Richard  s'em 
para  de  son  or  ,  de  son  argent ,  de  se 
assignats  ,  et  de  soixante- dix  mille  livre 
de  tabac  ,:sous  prétexte  quil  était  en  r< 
quisition.  Cinq  semaines  après  ,  Perrochau 
€t  Bologniel  lui  apportèrent  sa  liberté,  i 
peine  sortie  ,  elle  réclame  ce  qui  lui  ava 
été  enlevé  ;  Perrochaux  Tinvite  à  venir  a 
Comité  ,  pour  avoir  la  clef  de  son  appartc 
^ent.  Chemin  fesant ,  il  la  presse  d'allt 


de  la  Vendée^  et  autres  circbnvoisins.     agi 

voir ,  dans  la  prison  du  Bon-Pasteur  ,  sa 
sœur ,  dont  il  lui  montre  la  mise  en  liberté» 
A  peine  entrée  dans  cette  maison  ,  elle 
apprend  sa  nouvelle  arrestation.  Elle  se 
plaint  à  Perrochaux ,  qui  visitait  la  prison , 
de  cette  nouvelle  et  injuste  incarcération 
quji  altérait  sa  santé  •  Bon!  dit-il ,  la  guillotine 
guérira  tout  cela.  Joly,  quelque  tems  après, 
fcsant  une  visite  dans  cette  prison  ,  de- 
mande au  geôlier  si  ce  n'est  pas  la  veuve 
Mallet  ?  Sûr  Taffirmative,  il  dit  :  Elle  est  bien 
bonne  pour  aller  boire  à  la  grande  tasse. 
'  La  femme  de  confiance  de  cette  prison- 
nière^  pressait  Perrochaux  de  lui  obtenir 
quelques  secours  :  Tu  es  une  bête ,  lui  dit-il , 

.  lorsque  cette  b sera  morte  ^  tu  y  gagneras 

davantage ,  tu  seras  maîtresse  à  ton  tour. 

Cependant  le  Comité  fait  afficher  que 
ceux  qui  solliciteront  en  faveur  des  détenus, 
seront  regardés  comme  suspects.  L'amitié 
et  la  piété  filiale  franchirent  souvent  les 
barrières  élevées  par  Tinhumanité  ;  mais 
avec  quelle  dureté  furent-elles  accueillies  ! 

Une  malheureuse  épouse  demandait  à 
Goulin  des  nouvelles  de  son  mari  :  Bon  , 
pi  importe,  lui  répondit-il ,  plutôt  il  mourra , 
pliitot  nous  aurons  son  bien. 

Perrochaux  ,  de  son  côté  ,  exige  que  la 
citoyenne  Brelonville  lui  sacrifie  son  hon- 
lieur  ,  afin  d'obtenir  la  liberté  de  son  père* 

T  2 


«9^^  Atrocités  commises  dans  le  département 
Témoignant  ailleurs   sa  soif  d'argent ,   il 
demande  à  la  citoyenne    Ollemard-Dvdan 
une  somme  de  3o,ooo  liv.,  pour  la  laisser 
jouir  de  sa  liberté. 

Carrier  ,  de  son  côté  ,  affichait  une  in-^ 
flexibilité  féroce  ,  mais  qui  n  était  pas  tou* 
jours  à  répreuve  des  séductions  de  For  ou' 
des  plaisirs  lubriques.  Le  citoyen  Throuard^ 
accompagné  de  sa  fille  ,  invoquait  un  jour 
&a  justice  en  faveur  du  citoyen  D&tvo  ^ 
détenu ,  destiné  pour  le  voyage  de  Paris  \ 
là,  il  fesait  valoir  auprès  de  ce  Représentant 
le  délabrement  de  sa  santé.  Carrier  quitte 
brusquement  le  local  où  ils  étaient.  Throuard 
le  poursuit  dans  celui  où  il  se  redre.  Il 
le  voit  armé  d'un  chandelier  ,  dont  il  veut 
le  frapper.  Throuard  lui  représente  que  s'il 
est  républicain  ,  il  ne  doit  pas  frappcir  un 
citoyen  qui  a  donné  des  marques  éclatantes 
de  son  patriotisme  depuis  1789.  Cette  re* 
montrancc  ,  au  lieu  d'appaiser  Carrier  ; 
valut  aux  malheureux  pétitionnaires  d'être 
poussés  avec  violence  et  fureur  hors  de  la 
maison. 

La  citoyenne  Perrote  Breret  avait  un  frère 
détenu  à  la  maison  d'arrêt  dite  f  Entrepôt  ; 
ignorant  le  sort  qui  lui  était  destiné ,  elle 
se  transporte  chez  Carrier  ,  qui  lui  demande 
d'abord  quel  âge  a  son  frère  :  Trente  •  six 
uns ,  répond-elle.  //  est  bon  à /.•...  à  l'eau  , 


de  la  Vendée^  et  autres  circonvoisins.     SgS 

répliqua-t-il;  s'il  ri  avait  que  dix-huit  ans ,  je 
pourrais  te  le  remettre;    mais  il  faut  quil 
périsse ,  et  bien  d'autres  à  sa  suite  ^  et  les  trois 
quarts  de  Nantes.  Quelques  jours  après ,  cette 
soeur  désolée  fait  une  nouvelle  tentative  au- 
près de  lui ,  et ,  prosternée  à  ses  genoux  » 
demande  une  permission  de  sa  main  pour 
voir  son  frère  ,  ainsi  que  quelques  infor- 
mations   sur   le    sort   qu  on   lui   prépare. 
Carrier  lui  répond  que  son  jugement  était 
prononcé    depuis   son    incarcération   ,    et 
quil  serait  noyé  sans  d'autres  formalités, 
ÉUc  insiste  pour  avoir  le  jugement.  Il  lui 
répond  avec  fureur  que  c'était  lui  qui  ren- 
flait ces  jugemens  ,  et  que  si  elle  récidivait , 
il  la  ferait  L....  à  Teau  ;  en  même-tems  il 
là  frappe  du  fourreau  de  son  sabre  ,  et  la 
j€ttc  à  la  porte.  Elle  n'était  pas  au  bas  àt 
Tcscalier  qu  il  la  fait  remonter  ,  et  lui  offre 
la  liberté  de   voir  son  frère  ,  à  condition 
quelle  s'abandonnera  à  ses  désirs.  En  lui 
parlant  ainsi  ,  il  la  saisissait  par  la  main  \ 
et  cherchait  à  l'embrasser.  Elle  résiste  à  ses 
foUicitations  ,   en  lui  observant    que   son 
honneur  est  ce  qu'elle  a  de  plus  ch^r  ;  T?t 
que  le  sacrifice  qu'il  en.  exigeait  ne  serafit 
peut-être  d'aucune  utilité  à  son  frère.  Toat 
ce  qu'elle  put  obtenir  de  lui ,  fut  quelle 
pouvait  aller  au  Comité  pour  avoir  la  per- 
mission qu'elle    demandait.  Elle   appVèrïd 

T  3 


«94  Atrocités  commises  dans  le  département 

alors  que  son  frère  doit  partir  pour  Pain- 
bœuf,  Elle  retourne  auprès  de  Carrier  ^ 
lui  demande  la  permission  de  pourvoir  à 
sa  subsistance  pendant  la  route.  //  ri'a 
besoin  de  rien  ,  lui  répond-il  ,  il  aura  suffis 
sammcnt  à  boire.  Et  pour  se  débarrasser  des 
importunités  de  cette  jeune  fille ,  il  la 
menaça  de  lui  faire  subir  le  mêrae  sort  que 
son  frère  ,  si  elle  ne  s'éloignait. 

Habitué  à  fouler  ainsi  ,  d  un  pied  or- 
gueilleux ,  les  droits  de  l'humanité  ,  il  ne 
respectait  pas  davantage  le  caractère  sacré 
des  fonctionnaires  publics  ;  et  plus  d'une 
fois  les  représentations  officielles  des  Au- 
torités constituées  ne  leur  obtinrent  de  lui 
que  de  brutales  injures  et  des  proscriptions, 

La  Commune  de  Nantes  avait  fait  quel- 
ques achats  de  grains  pour  sa  subsistance. 
La  municipalité  de  Rozier  ,  se  disant  auto- 
risée du  représentant  Carrier,  avait  mis 
un  embargo  sur  les  bâtimens  chargés  de 
ce  transport.  Une  députation  des  Au- 
torités constituées  de  Nantes  ,  se  rendit 
auprès  de  lui  pour  le  solliciter  à  ordonner 
le  prompt  transport  de  ces  grains.  C6  Est-ce 
»5  que  cela  me  regarde,  f.....?  C'est  à  vous 
5  5  d'écrirç  au  département  de  Mayenne  et 
5  5  Loire.  Vous  voulez  me  faire  faire  une 
55  c.....ade ,  f.....  ;  mes  collègues  ont  pu 
»5  donner  des  réquisitions  qui  se  trouvent 


de  la  Vendée ,  et  autres  circonvoisîHs.    2g'5 

»  en  opposition  à  la  mienne ^^^  Un  Membre 
de  la  députation  voulut  lui  mettre  sous  les 
yeux  les  lettres  jxistificatives  de  cet  empê- 
chement; Au  fait,  au  fait  ^  h lui  dit-iL 

Un  autre  voulut  parlet  à  ison  ^;our*  Tàh-toi^, 
lui  dit-il  \  je  montais  Vân  dernier  une  'bou^ 

tique  qui  raisonnait  mieux  que  toi. 

Tel  fut  le  résultat  d'une  démarche  dont 
lobjet  aurait  dû  être  sacré  aux  yêiix  d'un 
ami  de  Thumanité  ;  mais  les  destinées  de 
TEmpire  français  étaient  erttre  les  mains 
de  ses  plus  cruels  ennemis. 

Le  Maire  de  Nantes  se  ttâ^nsportc  à  son 
tour  dans  la  maison  dé  plaisance  habité,e 
par  Carrier.  La  sentinelle  lui  Refuse  d'abord 
l'entrée  ;  mais  il  pénètre  a  la  faveur  de-  sa 
qualité.  Quelle  ne -fut  pas  sa  surprise  en 
le  voyant  entre  deux  femmes  dans  le  plus 
grand  désordre.  Ce*  sardanapatev*â  son 
aspect  se  lève  ave^*  ftitiei,  et  *s^'4Îcrié  4 
Pourquoi  la  sentin€U€^fve4'4ir4'dle  pàsf:..u  sa 
hdionnette  au  tra'otrs  diftêfps  ?  Que  viens^tu 
\hercher  ici  ?  Des  subsistances  pour  rives  frères , 
pour  mes  malheureux  concitoyens  -qui  softt  ft" 
duits  aune  demi-livre  de  pain  exécrable  par 
joMr.  Carrier ,  pour^toute  réponse ,  Tinvèc- 
live  et  le  chasse  de^fô-ptésence« 

Le  citoyen  MifiiiT^i  Ptésidéili  du  Dépar* 
tement ,  vient  aussi  lùï  demander  deà  sub« 
sistances.  Allà-en  ^hercktr^  dam  la  Vendée  ^^ 


B9§  4^ocUés  commis es'dans  le  département 
dit  Carrier.  On  lui  observe  que  les  Com-^ 
missaire'ç  ont  été  repoussc$«  Ce  sont  des 
i!9^y^6f,,:î§plique-t-il;  j>  parie  défaire,  seul 
IV.touîiideJa  Ver^dée  avec  une  quenouille.  Ce 
tifait  sufiif ait ,  s'il  en  '  .était  besoin ,  pour 
j)rouver  combien  nQS  Tyrans  av/iient  une 
petite  idée  de  cette  Vendée  ,  qu'ils  ne 
pfeignaijejtit;:  si  redput^ble  qu'e-pour  modver 
Jif  jLirs  ej^écrables  fureurs* 

:  Le  citoyen  S^uvigni  ^  adjudant-général 
4é.Naîitjes  ^  ^e  présente  un  jour  chez  lui 
pour  lui  faire  quelques  observations.Carrier 
le  menace  aussitôt  de  la  ptison ,  et  mande 
la  garde  pput  le  faire  arrêter.  Si  je  ïai 
mis^nqué ,  lui  dit  cet  Adjudant  ^  fais -moi  punir  ; 
je  k  rernefffHon  tfj&^^.  Carrier ,  furieux  de.  ce 
sang-froid  ,  saisit  son  sabre  pour  le  frapper. 
.,  \^ouq'i(f6i.,^lLQ,mbeçrty  y  Agens  du  Comité 
p^éyolpt^io&naire ,  avaient  i:eçu  des.  pouvoirs 
trcsrétondus  deHGarriei/jpour  la  conduite 
deçi  gabarres  ,  avec  défense  à  qui  que  ce 
fût  de  les  entrave^Çid^i?^  toutes  les  opéra- 
tions que  pourraient  exiger  'tes  différentes 
x>pération^.         :-;,  ..v      .^ 

,  pn  yertu  de  cet  .pr4a^<e.  v  ils  se  mettaient 
cpdç.i^oir  d'enlever:  d^jlisntrepôt  une  quan- 
tité de  dét^w  ,  .pareil  iesquels.on  comp- 
iftit  be^iifQupvjiç  ;  femntes  -  ei^ceintcs  et 
plusieurs  enfans..©n;Ja[ae;-.  igje,.  Le  P^é^sident 
pi  TAc^cttSaxei»:  pijblic  du  tribunal  criminel 


de  la  Vendée,  et  autres  circonvoisins.     297 

k  transportèrent  dans  cette  maison  d  arrêt 
pour  s'opposer  à  une   extraction  si  con- 
traire aux  lois.  Fouquet ,  sourd  aux  réclama- 
tions de  ces  deux  fonctionnaires  ,   voulut 
faire  Tenlèvement  malgré  eux.  Il  fait  venir 
à  cet   effet  vingt  hommes    de    garde.    Le 
Président  et  l'Accusateur  public  se  déco- 
rèrent alors  des  marques  distinctives  de  leurs 
charges  ,    et ,   de   par  la  loi ,  ordonnèrent 
aux  soldats  de  se  retirer;   ce  qu'ils  firent , 
après  en  avoir   requis  par  écrit  leur  refus 
de  laisser  sortir  les  prisonniers. 

Carrier ,    instruit    de    l'opposition    des 
Membres   du  tribunal    criminel  ,    le    fait 
mander    le   lendemain.    Le    Président    se 
rendit  à  son  invitation,  it  C'est  donc  toi  y 
»  j...  f.....  de  Président,  ^2*/  flu$sitôtle/urieux, 

^.  Carrier  ,  qui   t'opposes  à   mes  ordres  ? 
".Tu  disque  tu  veux  juger  :  eh  bien  !  b...... 

)^ juges  donc  ;  et  si ,  dans  deux  heures  , 
»  l'cn^trepôt  n'eçt  pas  vide  ,  je  te  fais  fu- 
>î  siller  ainsi  que  ton  tribunal,  >»  Le  Prési- 
dent fut  tellement  frappé  que  la  feèvre  le 
^sit  en  rent^'^rU[chez  lui  ,  et  le  conduisit , 
peu  de  jours  aprè;. ,  au  tombeau.  Au  milieu; 
de  çp3  accès  ,  il  s'jécjri^it  !  Carrier  eitrUparlifr 
Carrier  est  un  scéUrat.j^^  Carrier  est-il  aruté  ?^ 
.  .ÛnCommis&airç  de  l'Oricfit  ,lai  appojtç;) 
yu  jour  des  dépeiq^^ep'j.Çafri^r  ,  après  =les[ 
^yxpir  lues  j.s'éç^îe,:^  N^^^  fA^s  tous  4Ç-S.: 


k 


3oo  Atrocités  commises  dans  le  dépattemetil 

Le  sans-culotte  Goulin  écrit  d  abord  en 
ces  termes  aux  Membres  du  Comité  de 
surveillance  de  Nantes. 

i«  Frères  républicaîAs  ,  les  Représentans  me  re— 
mettent  les  pièces  ci-jointes  que  je  m'empresse  der 
\ous  faire  passer:  examinez  et  sur-tout  agissez  roidc 
et  vite,  frappez  en  vrais  Révolutionnaires  ,  sinon  je 
▼ous  réprouve.  Le  Carreau  populaire  vous  est  dé- 
volu ,  sachez  en  user ,  ou  vous  êtes,  ou  pour  mieux 
dire  nous  sommes  foutus.  Vous  manquez,  dites-vous^ 
de  bras  exécuteurs;  parlez,  demandez,  et  vous 
obtiendrez  tout  :  Force  armée  ,  Commissaires  , 
Courriers ,  Commis ,  Valets ,  Espions  ,  or  même 
s'il  en  est  besoin  ,  encore  une  fois ,  et  je  suis  sût 

que  vous  serez  servi  sur  les  deux  toits Songef 

au  Navire etc.  a 

Le  général  Grignon  ,  dont  il  est  parlé 
dans  le  cours  de  cet  ouvrage  ,  ravageait 
les  environs  de  Fdhtcnai-le-Peuple  et  de 
Bressuire.  Huche ,  d'après  les  ordres  dé 
Thurem  ,  ravage  les  environs  de  Luçon  ;  et 
Westermann  ^  vantant  ses  victoires  répétées^ 
court  de  massacres  en  massacres  ,  n'épar- 
gnant ni  les  adversaires  pris  les  armes  à 
la  main ,  ni  Thabitant  paisible  des  cam-» 
pagnes* 

,  Cette  horde  de  sîcaires,  aveugles  instru- 
mens  d'utie  faction  qui  ne  veut  dominer 
que  sur  des  cadavres ,  se  livre  aux  même» 
fureurs  que  les  autres  divisions»  Le  pillage , 
le  meurtre  J'incendie  y  tels  sont  le»  forfaits 
qui  signalent  le  passage  de   ces   brigands 


de  la  Vendée ,  et  autres  circonvoisins.     Soi 

dans  un  espace  de  cent  lieues.  Ils  ont 
trouvé  dans  leur  violence  envers  les  femmes 
dafiEreuses  jouissances.  Plus  d'une  mère 
de  famille  expirante  sur  la  place  qui  a  été 
témoin  de  son  déshonneur,  voit  son  enfant 
ballotté  par  ces  furieux  ;  ils  se  le  jettent 
de  Tun  à  Tautre  ,  et  le  reçoivent  sur  leurs 
baïonnettes.  Barbarie  sans  exemple ,  comme 
au-dessus  de  toute  expression  !  Ces  brigands 
fanatisés  avaient  reçus  de  la  bouche  de 
Carrier  des  éloges  faits  pour  enivrer  le 
crime  ,  et  Taiguillonneraux  derniers  excès. 
A  Montaigu ,  Carrier  harangue  la  colonne 
des  Cordeliers  en  ces  termes  :  u  Braves 
»ï  soldats ,  vous  qui  avez  porté  le  nom 
5y  d'armée  infernale  au  Nord ,  j'espère  que 
39  vous  le  porterez  de  même  ici.  Je  vous 
-fî  ordonne  de  mettre  le  feu  par-tout,  et 
99  de  tout  fusiller  sans  distinction.  99 

On  ne  sera  pas  étonné  de  la  célérité 
de  ces  expéditions  militaires  ,  en  lisant  les 
ordres  laconiques  qu'il  donne  au  général 
Dufour.  tu  te  plains ,  lui  dit-il ,  des  déndn* 
dations  ;  sois  tranquille  ,  je  t'ai  rendu  justice. 
Brûle ,  brûle  ,  brûle.  Ce  Représentant  qui 
n'avait  de  l'audace  que  pour  assassiner  , 
satisfait  de  faire  trembler  tout  Nantes ,  ne 
se  présente  jamais  en  face  des  ennemis.  Il 
a  néanmoins  assisté  à  l'incendie  d'une  Com- 
mune; citait  celle  de  Petit-Fages  ^oix  il  ne 


3o2  Atrocités  commises  dans^  le  département 

restait  que  quelques  femmes  et  ènfans.  Le 
feu  et  la  flamme  vomirent  la  destruction  , 
et  Carrier  se  fit  un  point  de  gloire  de  donner 
le  signal  de  Tincendie  en  mettant  lui-même 
le  feu  à  Téglise. 

L'axmée  révolutionnaire  n  est  pas  la 
seule  qui  J)orte  la  mort  dans  le  sein  des 
familles.  Pinard^  Membre  du  Comité  révo- 
lutionnaire ,  à  la  tête  d'un  détachement  de 
Mulâtres  ,  parcourt  les  campagnes ,  et  sème 
par-tout  TelFroi,  A  son  nom  les  femmes 
fuient  ;  elles  savent  que  cet  homme  s'est 
déclaré  leur  ennemi.  C'est  à  elles  qu  il  a 
juré  une  guerre  à  mort.  Les  charmes  de  la 
jeunesse  n  ont  aucun  empire  sur  son  âme 
féroce.  Il  arrive  près  la  forêt  de  Pimé  ,  chez 
la  nommée  Chauvette  ^  ^dont  le  mari  avait 
pris  les  armes  avec  les  Vendéens  ,  mais  que 
sa  femme  avait  refusé  .de  suivre  sous  des 
étendards  qu'elle  condamnait.  Elle  avait 
chez  elle  quelques  militaires  conduisant  un 
convoi  à  Nantes.  Pinard  leur  dit  qu'elle 
était  la  femme  d'un  brigand;  qu'il  avait 
tué  ce  jour-là  six  femmes,  et  qu'elle  serait 
la  septième  :  u  Consoles-toi ,  dit-il  à  cette 
j5  femme  ,  qui  tenait  son  enfant  dans  ses 
5  5  bras  ;  consoles-toi ,  ton  enfant  sera  expc- 
55  dié  avant  toi.  C'est  Pinard  qui  te  parle  , 
15  Pinard  qui  fait  la  guerre  aux  femmes.  »» 

Le  citoyen  Mariette^  l'un  de  ceux  quicscor- 


de  la  Vendée ,  et  autres  circonvoisins.  3o3 

tait  le  convoi ,  présent  à  cette  scène ,  s  arma 
d'une  noble  indignation  ,  et  fesant  briller 
S9n  sabre  ,  il  dit  à  cet  assassin  qu'il  n'arri- 
verait à  cette  femme  qu'en  marchant  sur 
son  corps.  Pinard  désarmé  par  ce  ton 
ferme  ,  se  contente  de  dire  à  Mariette  qu  il 
est  un  crâne  ;  et  se  retournant  vers  cette 
femme  ,  il  lui  demande  soixante  mille  liv. 
qu'un  seigneur  des  environs  avait  caché 
dans  un  local  qu'elle  n'ignorait  pas.  Elle 
affirma  que  le  dépôt  avait  été  enlevé*  Ce 
brigand  arrêté  dans  son  homicide,  et  fhistré 
dans  l'espoir  de  sa  cupidité ,  se  retire  la 
rage  dans  le  cœur  ,  en  menaçant  Mariette. 

Le  lendemain ,  le  convoi  et  la  troupe  qui 
accompagnait  Pinard  se  rencontrèrent  dans 
une  forêt.  Ce  malheureux  avait  déjà  mas- 
sacré deux  femmes;  lune  d'elles  demandait 
grâce  pour  deux  enfans  de  cinq  à  six  ans. 
Cette  mère  tombe  un  instant  après  morte 
aux  pieds  de  Pinard  ,  qui  vint  furieux  ,  le 
pistolet  à  la  main ,  pour  donner  la  mort  à 
ces  deux  enfans.  Mariette  et»  un  autre  ci- 
toyen les  avaient  déjà  adopté.  Qne  veux-tu 
faire  de  cet  enfant ,  dit-il  à  ce  Citoyen  géné- 
reux ?  0  tes- toi  de  laque  je  lui  brûle  la  cervelle. 

Mariette  le  couche  en  joue  ,  et  le  force 
d'abandonner  son  affreux  dessein.  Bientôt 
deux  volontaires  amènent  un  vieillard  , 
grand-père  de   ces  deux  enfans  ;  c'était  le 


3o4  Atrocités  commises  dans  le  département 

seul  espoir  de  sa  vieillesse ,  a  qui  cette  in- 
fernale guerre  avait  enlevé  le  reste  de  sa 
famille  :  Otez-moi  la  vie^  mais  conservez-là  à 
mes  deux  en/ans.  Tels  étaient  les  cris  lamen- 
tables de  cet  infortuné  vieillard. 

L'assassin  Pinard  s'écartait  de  la  route 
pour  se  gorger  du  sang  des  femtnes  et 
des  enfans.  Trois  de  ces  malheureuses  dont 
îl  avait  joui ,  furent  livrées  de  son  chef  à  la 
garnison  de  la  Commune  de  Vue.  Elles 
forent  traitées  avec  une  barbarie  dont  la- 
suite  fut  des  plus  funestes.  Une  d'elles  essuya 
dans  un  seul  jour  ,  les  outrages  de  plus  de 
cent  de  ces  furieux.  Ses  compagnes  subirent 
un  sort  a  peu-près  semblable.  De  pareils 
atrocités  les  avaient  tellement  afFa:iblies,.que 
sortant  de  leurs  bras ,  elles  ne  purent  se 
soutenir ,  et  elles  étaient  en  outre  dans  un 
état  d'imbécillité  déplorable.  Trois  jours 
après  ,xes  bourreaux  les  fusillèrent. 

Quelquefois  'fatigué  de  carnage ,  Pinard 
conduisait  ses  prisonniers  au  Comité.  Le 
citoyen  Heilré-Lambauche  ,  propriétaire  _ 
aux  environs  de  Nantes  ,  âgé  de  7  1  ans , 
fut  enlevé  de  son  domicile  ,  ainsi  que  sa 
fille.  Pinard ,  accompagné  de  trois  noirs  , 
avait  bu  le  vin  de  ce  citoyen  ,  et  s'était 
emparé  d'une  somme  de  quatre  mille  livres. 
En  route  ,  il  leur  dit  :  u  Vous  n'avez  que 
»î  deux  partis  ,  ou   de  boire  à   la  grande 


de  la  Vendée  ,  et  autres  circonvoisins.  3o5 
99  tasse,  ou  la  fusillade.  99  D  autres  partîcu* 
liers  \  conduits  par  le  même  au  Comité  , 
sont  indistinctement  traités  de  brigands 
par  ces  membres ,  et  renvoyés  à  la  Com* 
mission  militaire  en  termes  qui  respirent 
la  dérision  la  plus  barbare,  u  On  recom- 
99  mande  ,  y  disent-ils^  les  gredins  ci-de§sus.. ., 
99  Ces  honnêtes  gens  sont  fatigués ,  mala-; 
99  des  ;  ils  ont  besoin  des  soins  les  plus 
99  délices.  C'est  justice  de  leur  expédier^ 
99  un  billet  d'hôpital.  En  vérité ,  en  vérité , 
59  le  Comité  révolutionnaire  ne  peut  s'em- 
^9  pêcher  de  les  recommander  chaudement 
99  à  ses  frères  de  la  Commission  militaire 
99  et  révolg^onnaire.  99 

Pinard  ,  à  la  tête  d  un  détaqhemeut 
composé  de  noirs  et  de  blancs ,  entre ,  le 
S  8  octobre  1793,  dans  la  maison  de  la, 
citoyenne  Tarel ,  y  exerce  toutes  sortes  de- 
"vexations  ,  lui  enlève  son  or  et  ses  assi- 
gnats ,  ainsi  qu  à  toute  sa  famille.  Pinard 
sort  ,  en  le^  menaçant  de^  la  guillotine  ,1 
cle  la  baignoire  nationale ,  et  d'une  seconde» 
visite  pour  le  lendemain.  Cette  visite. 
leut  effectivement  lieu  à  deux  heures  du, 
Knatin. 

La  troupe  ,  commandée  par  un  Noir  ,  fit 
Lever  toute  cette  famille  ,  qije  IVn  consi- 
gna provisoirement  dans  une  salle  basse. 
Etendant  ce  tems-là  ,  tous  leurs  effets  sont 
Tome  VI.  v 


3o6  Atrocités  cBmmises  da7\s  le  département 

mis  en  ballots  et  en  paquets  ,  et  trente  voi- 
tures en  sont  chargées.  On  parle  ensuite  de 
brûler  la  maison  ;  la  belle-sœur  de  la  ci- 
toyenne Tarel  offre  sept  à  huit  cents  livrels 
pour  empêcher  cet  incendie  :  on  atcepte 
Targent ,  et  la  maison  est  brûlée.  Tous  sont 
ensuite  placés  sur  un  tombereau  ;  le  mari 
seul ,  âgé  de  soixante-cinq  ans  ,  suivit  à 
pied  ,  et  fut  conduit  avec  les  autres  ^u 
Comité  révolutionnaire  de  Nantes4^^^e  Lieu- 
tenant de  cette  ttoupe ,  qui  était  un  mu- 
lâtre ,  vantait  sa  modération  dans  cette" 
opération  ,  puisqu'il  s'était  contenté  de' 
brûler  la  maison  ,  quoique*  ses  ordres  por- 
tassent de  tout  tuer.  On  lui' répondit  qu'il 
aurait  bien  fait  de  le  faire. 

Au  milieu  de  cette  nuée  d'assassins  qui 
ont  répandu  la  consternation  générale , 
Carrier  se  dîstuigue  par  l'horreur  plus  pro- 
fonde ,  plus  universelle  ,  dont  son  nom 
seul  glace  les  cœurs.  A  son  approche, 
chacun  se  renferme  ;  et  cette  iafFreuse  soli- 
tïide  qui  le  livre  tout  entier  au  supplice  de 
sfes  remords  -,  ne  fait  qu'accroître  dans  son 
âme  bourrelée  le  besoin  de  la  solitude. 
Dans  chaque  figure  humaine  qu'il  apperçoit, 
il  peut  reconnaître  une  victime ,  et  craint 
de  trouver  uil  .vengê^ur.  Tout  le  mondé  le 
fuit ,  et  il. fuit  tout  le  monde  ;  et  dans  l'excès 
de  ses  frayeuifs  ,   il  donna  un  jour  Tordre- 


de  la  Vendée ,  et  autres  circonvoisins.  Sof 
de  tirer  un  coup  de  fusil  àurie  jeune  femme 
qui ,  par  hasard  ,  se  trouvait  à  sa  fenêtre 
dans  rinstant  où  il  traversait  la  place.  Soa 
espoir  est  dans  le  désespoir  des  Nantais  , 
qu  il  provoque  à  dessein  par  mille  fureurs  , 
et  dont  un  seul  murmure  suffirait  pour  en 
motiver  la  ruine  ,  préméditée  depuis  long- 
tems  ;  car ,  dans  une  orgie  ,  il  avait  dit  à 
sesconfidens  ,  quil  aurait  voulu  voir  Nantes 
remuer  un  peu,  afin  de  pouvoir  déclarer 
cette  ville  en  état  de  contre-révolution* 

Avant  de  dessiner  Teffirayant  tableau  des 
massacres  ,  pénétrons  un  instant  dans  les 
prisons  ,  où  les  hommes  et  les  femmes  > 
jetés  pêle-mêle  ,  sont  confondus  pour  tous 
les  besoins  et  pour  toutes  les  souffrances. 
Un  peu  de  pain  et  d'eau  ,  telle  est  leur 
nourriture  journalière.  Des  enfans,  exténués 
de  besoins  ,  cherchent  là  nuit  le  baquet 
qui  renferme  Teau  ,  ils  tombent  dans  celui 
destiné  aux  ordures  ,  et  s'y  noient. 

Un  officier  de  santé  est  envoyé  par  la 
Commission  militaire  dans  les  prisons  , 
pour  constater  le  nombre  des  femmes  en- 
ceintes ;  il  en  reconnut  plus  de  trois  cents 
qui  Tétaient  depuis  cinq ,  six  et  huit  mois/ 
Cet  ^étatsi  respectable  ,  et  sacré  pour  les 
Hurons  eux-mêmes  ,  ne  les  exempte  pas 
de  la  noyade.  L'bfficiér ,  à  son  retour  ,  ne 
les  vit  plus.   L'affliction  que  lui  causa  ce 

V    2 


3o8  Atrocités  commises  dans  le  département 

premier  événement  s'accrut  à  la  vue  de 
plusieurs  enfans  qui  ,  dans  moins  de,  cinq 
minutes  ,  expirèrent  en  sa  présence  ,  faute 
d'alimens.  Huit  cents  femmes ,  et  autant 
d^enfans  ,  sans  paille  ,  sans  nourriture  , 
éprouvaient  les  horreurs  du  froid.  If  sort 
aussitôt ,  et  peint  la  situation  des  détenus 
aux  citoyennes  qui  avoisinaientles  prisons  , 
en  les  invitant  à  leur  porter  quelque  nour- 
riture. 4  6  Comment  faire  ,  repondirent-elles, 
»j  Grandmaison  fait  incarcérer  tous  ceux, 
J9  qui  apportent  à  manger  à  ces  femmes  et 
f>  à  leurs  enfans?  n 

Dans  un  profond  cachot  était  renfermée 
tarie  mère  ,  du  nom  de  Jourdan  ,  avec  ses 
filles  ,  dont  la  plus  jeune  avait  treize  ans* 
Un  jeune  homme  ,  nommé  Delille  ,  et  le 
directeur  des  hôpitaux  y  descendirent  pour 
sauver  cette  dernière.  Le  premier  spectacle 
qui  frappe  leurs  yeux  est  celui  de  plusieurs 
cadavres  inanimés  de  femmes  et  d'enfans. 
Es  trouvent  ensuite  cette  malheureuse  mère 
entourée  dans  la  paille  avec  ses  filles  ,  qui 
se  pressaient  autour  d'elle  pour  conserver 
le  peu.de  chaleur  qui  leur  reste.  La  plus 
jeune  était  ensevelie  sous  ses  hardes  ;  ils 
Tinvitent  à  les  suivre  ;  non .,  vous  n'aurez 
pas  ma  fille ,  s'écrie  cette  malheureuse  mère, 
en  soulevant  avec  effort  s^  tête  languissante, 
non  ^  nous  voulons  mourir  toutes  ensemble^  Il 


de  la  Vendée^  et  autres  circonvoisins.    3og 

fallut  user  de  violence  pour  entraîner  cette 
jeune  personne  hors  du  fatal  cachot.  Elle 
y  avait  contracté  une  maladie  grave  ,  qui 
l'entraîna  au  tombeau,  après  avoir  langui 
pendant  six  mois  dans  la  prison. 

Les  maisons  d'arrêt  étaient  tellement  en- 
combrées ,  que  cinq  ou  six  détenus ,  et,  par 
la  suite  une  trentaine ,  mouraient  par  jour 
dans  chaque  salle  ,  et  les  cadavres  y  res- 
taient abandonnés  pendant  plus  de  trente- 
six  heures.  La  corruption  fut  si  contagieuse^ 
qu'elle  s'étendit  au- dehors,  et  plusieurs 
factionnaires  en  perdirent  la  vie.  Ce  n'était 
plus  des  maisons  d'arrêt ,  maïs  des  lazarets 
pestiférés  ;  et  quarante  malheureux  ,  dé- 
voués à  la  mort ,  consentirent  seuls  à  essayer 
de  les  nettoyer ,  pour  racheter  leur  vie  au 
prix  de  ces  dangers  ;  mais  plusieurs  y 
périrent  sur-le-champ,  et  le  peu  qui  sur- 
vécut fut  indignement  fusillé  par  ordre  de 
Carrier. 

L'action  de  la  peste  n'était  pas  asser 
prompte  encore  ,  et  la  guillotine  continuait 
ses  sanglantes  épurations.  Un  jour  ,^  un  jeune 
enfant  de  i3  ans  avait  été  conduit  à  l'écha- 
faud  ;  placé  sur  la  planche  fatale ,  ri  regar* 
dait  le  bourreau  avec  douceur ,  et  deman- 
dait avec  une  naïveté  attendrissante  :  Me 
feras  -  tu  bien  du  fnal  ?  Aussi  -  tôt  la  hache 
tombe.....  Dieux!  son  col  n'atteignait  pas  la 

V  a 


3 10  Atrocités  commises  dans  le  département 

ligne  où  frappe  le  fer  mortel  ;  Imnoçenté 
victime  a  le  crâne  partagé  en  deux ,  et  n'a 
point  encore  expiré  !  Il  faut  recommencer  , 
Il  faut  rajuster  son  corps  pour  les  dimen- 
sions fatales  .  et  sa  vie  prolongée  par  cette 
opération  ,  se  termine  ainsi  par  une  éter- 
nité de  supplice. 

Un  autre  jour ,  six  jeunes  fiUçs  ,  douées  de 
tout  ce  qui  commande  aux  hommes  Imtéret 
et  l'amour  ,  apprennent  l'arrêt  de  leur  des- 
tinée de  la  bouche  du  concierge  :  44  Mes 
3t5  amies  ,  leur  dit- il  y  préparez  -  vous  à  la 
5>  mort  ,  car  dans  une  heure  vous  ne  serez 
jî  plus  ,  c'est  Carrier  qui  le  veut  ainsi.  Que 
5>  l'on  nous  juge  ,  au  moins ,  s'écrient-elles  , 
3)  qu'on  nous  entendent!  95  Tout  est  sourd  à 
de  si  justes  réclamations.  N'ayant  plus  d'es- 
poir que  dans  le  ciel ,  elles  se  prosternent  la 
face  contre  terre  »  et  s'adressent  à  rÉternel 
consolateur  des  opprimés  ;  une  heure  après 
elles  sont  guillotinées  sans  jugement.  Le 
supplice  de  ces  six  infortunées  fit  une  telle 
impression  sur  l'esprit  de  l'Exécuteur,  qu'il 
en  mourut  huit  jours  après. 

Carrier  en  mit  un  des  départemens  voisins 
en  réquisition  ;  et  sans  doute  pour  le  mettre 
nu  pas ,  il  le  maltraita  tellement  à  coups  de 
sabre  ,  qu'il  en  tomba  malade.  Pour  ap- 
précier par  apperçu  la  quaptité  de  personnes 
^u'on  égorgeait  journellement ,  il  est  boa 


de  la  Vendée ,  et  autres  circonvoisins.     5 1 1 

de  savoir  qu'un  jour  le  bourreau  avait  tant 
guillotiné  ,  qu  il  déclara  être  fatigué  ,  ha- 
rassé ,  au  point  de  ne  pouvoir  plus  remuer 
les  bras  pour  travailler. 

Les  :  formalités  judiciaires  étaient  trop 
longues  au  gré  de  Carrier  ;  les  têtes  ne  pleur- 
vaient  pas  à  son  idée  :  il  avait  pris  sur  lui 
de  les  abroger  ,  en  envoyant  à  cet  effet  des 
ordres  précis  aux  Juges  du  Tribunal  cri- 
min^el. 

.    Le  5^7  frimaire  (17  décembre  1793^),  ,  il 
fait  tenir  au   Président  une  liste  de  vingt- 
quatre  individus  ,  prévenus  d'avoir  été  pris 
'les  armes  à  la  main  (1). 

On  lit  Tordre  suivant  :  u  Pour  ordre  au 
n  citoyen  Philippe  ,  président  du  Tribunal 
»  criminel,  de  faire  exécuter  sur-k-champ  ^ 
>5  sans  jugement ,  les  vingt-quatre  brigands 
»  ci-dessus  ,  qui  viennent  d'être  arrêtés  les 
V  armes  â  la  main.  Nantes  ,  le  27  frimaire» 
»»  an  II  ;  le  Représentant  da  peuple  > 
75  Carrier.  »?     , 

Un  nouvel  ordre  verbal  est  donné  au 
Tribunal  ,  qui  ,  pressé  par  le  Proconsul  » 
ordonne  que  la  liste  des  prévenus  sera  de 
suite  remise  ,  pour  être  exécutés  selon  la 
volonté    et    l'exprès    commandement    du 

(i)  Voyez  les  noms  de  ces  vingt- quatre  vie tim«s^ 
au  Supplément  t  à  la  fin  dece  volume. 

y  4 


s  j  a  Atrocités  commises  dans  le  département 

Représentant ,  et  que  la  confiscation  sera 
prononcée  ,  s'il  y  a  lieu. 

Une  autre  liste  de  vingt-sept  prévenus  est 
adressée  au  même  Tribunal ,  avec  ordre  dé 
les  faire  exécuter  sans  jugement:  tous  furent 
fusillés  (!)• 

Une  marche  aussi  rapide  dans  le  sys- 
tème de  dépopulation ,  était  trop  conforme 
aux  vues  du  Comité  de  Salut  public  ,  pour 
que  Carrier  n'en  fût  pas  récompensé  par  les 
éloges  de  ses  dignes  collègues,  u  Courage, 
5J  mon  brave  ami ,  lui  écrit  Hérault  de  Sé- 
»5  chelles,  voilà  comme  on  marche,  jai  lu 
5>  ta  lettre  au  comité  de  Salut  public ,  qui 
5>  en  a  entendu  la  lecture  avec  satisfaction  >». 

Ce  massacre  de  prétendus  brigands  ,  va 
nous  offrir  les  traits  de  la  plus  infâme  tra- 
hison. 

Une  proclamation  faite  par  Carrier  ,  as- 
surait une  amnistie  aux  rebelles  qui  se 
rendraient  à  Nantes  :  en  effet ,  quatre-vingt 


(i)  Voyez  ces  vingt-sept  noms  2m  Supplément ^ 
7L  la  fin  de  ce  volume. 

Il  importe  de  remarquer  que  dans  ces  cinquante- 
xrne  victimes,,  parmi  lesquelles  on  compte  sept 
femmes,  il  n'y  a  que  des  Laboureurs,  des  Tisserands, 
des  Tonneliers,  des  Jardiniers  et  des  Bateliers  ;  ce 
qui  prouve  assez  qlie ,  dans  le  système  des  pros- 
criptions ,  le  peuple  n'était  pas  plus  ménagé  que 
Içs  autres  citoyens.  ^ 


delà  Vendée ,  et  autres  circonvoisins.     3 1 3 

cavaliers  ,  tous  armés  et  équipés  ,  arrivent 
dans  cette  Commune  ;  et  après  avoir  rejeté 
tout  le  blâme  de  leur  insurrection  sur  leurs 
chefs  ,  ils  ofiroient  de  les  livrer  pieds  et 
poings  liés.  Les  Administrateurs  s'assem- 
blent ,  et  arrêtent  qu'il  en  soit  référé  à  Car- 
rier. Comme  chacun  craignait  de  rappro- 
cher ,  Xaud  fut  le  seul  qui  osa  lui  foire  part 
de  ce  qui  venait  d'arriver.  Cette  incertitude 
lui  attira  les  plus  grandes  invectives  de  la 
part  de  Carrier ,  qui  lui  intima  Tordre  de 
les  faire-  conduire  à  l'entrepôt ,  et  le  lende- 
main ils  furent  fusillés  dans  la  plaine  de 
.  Sainte-Mauve. 

Dans  le  jardin  de  la  prison  de  VEpe- 
roniere  ,  on  fusilla  un  jour  une  cinquan- 
taine de  détenus  :  on  a  vu  leurs  cadavres 
nuds  entassés  les  uns  sur  les  autres. 

Quatre-vingt-six  cavaliers  qui  étaient  en- 
core venus  remettre  leurs  armes  ,  furent  fu- 
sillés au  poste  du  bourg  Fumée.  Ils  étaient 
arrivés  à  onze  heures  du  matin  ,  à  une 
heure  après  midi  ils  n'existaient  plus. 

Un  détachement  d'infanterie  vint  aussi  se 
rendre  volontairement  ,  les  soldats  furent 
conduits  à  la  plaine  de  S  te  .-Mauve  et  fusillés. 
Le  canonnier  Jacob  suppléait  aux  coups  de 
feu  ,  en  fesant  sauter  avec  son  sabre  les 
têtes  de  ceux  qui  avaient  échappé  aux 
balles. 


3 14  Atrocités  commises  dans  Udèparte\ 

Environ  quatre-vingt  femmes  »  ex 
de  l'entrepôt ,  traduites  à  ce  champ  de  car 
nage ,  y  furent  fusillées  ;  ensuite  on  les  dé 
pouilla  ,  et  leurs  corps  restèrent  ainsi  ép 
pendant  trois  jours. 

Cinq  cents  enfans  des  deux  sexes,  doi 
les  plus  âgés  avaient  quatorze  ans    ,  901 
conduits  au   même    endroit    pour   y   êtf^ 
fusillés.  Jamais  spectacle  ne  fut  plus  atte 
drissant  et  plus  effrovablc  ;  la  petitesse  d.çil 
leur  taille  en  me  urs  àFabri  des  cou 

de  feu; ils  délienv  liens  ,  s'éparpille 

jusques  dans  les  bataillons  de  leurs  bour 
reaux  ,  cherchent  un  refuge  entre  leur] 
jambes  ,  quils  embrassent  fortement  ,  « 
levant  vers  eux  leur  visage ,  où  se  peignem 
à  la  fois  l'innocence  et  l'effroi.  Rien  ne  fài 
impression  sur  ces  exterminateurs  ,  ils  le 
égorgent  à  leurs  pieds  ;  d'autres  parviennen 
à  s'écarter  de  ces  bataillons  de  la  mort  :  d 
soldats  se  détachent ,  et  le  plomb  arreti 
leur  course  ,  en  les  renversant  sur  la  pou 
sière  :  des  cavaliers  les  atteignent  et  les  mas 
sacrent  ;  les  plus  proches  sont  assommé; 
par  ces  cannibales.  La  vigueur  de  Tâge  Iç 
fait  relever  plusieurs  fois  sous  les  coups  i 
crosse  qu  on  leur  assène  ;  autant  de  fois  1 
sont  renversés  ,  jusqu'à  ce  qu'ils  soient  privé 
de  la  lumière.  Malheureux  enfans  ,  ils  ap 
pellent  à  haute  voix  leur  père  ,  leur  mhx\ 


■*»  »* 


de  la  Vendée  >  et  antres  circonvohins.     3 1 5 

à  leur  secours  :  hélas  !  ils  ne  sont  plus.  La 
Nature  est  muette  pour  eux  ;  rhumanité  ne 
peut  se  livrer  à  ses  heureux  sentimens.  La 
mort  attend  ceux  à  qui  elle  inspire  le  plus 
léger  mouvement  :  un  soldat  perd  connois- 
sance  à  la  vue  de  ce  spectacle  horrible  ,  le 
fer  achève  de  le  plonger  dans  les  ténèbres. 
Un  Officier  ose  demander  grâce  ;  il  est  tra-  ' 
duit  au  milieu  d'un  de  ces  groupes  d'en- 
fans  ,  et  fusillé  avec  eux. 

Tous  ces  cadavres  entièrement  dépouillés, 
sont  entassés  les  uns  sur  les  autres.  Le  Co- 
mité sourit  à  cette  méthode  de  disposer  ainsi 
les  corps  morts  ,  en  appelant  cet  exhausse- 
ment une  montagne. 

Un  Commandant  conduisait  soixante- 
douze  prisonniers  d'Ancenis  à  Nantes  ;  sur 
la  route  il  les  fit  fusiller  par  partie  ,  à  l'ex- 
ception de  trois.  Un  gendarme  de  son  dé- 
tachement lui  demandait  comment  il  ferait 
pour  justifier  cette  fusillade,  c*  Ce  sont  des 
>5  brigands  ,  répondit  -  il  ;  ils  sont  censés 
;5  s^être  révoltés  en  route  ;  il  y  en  a  déjà 
>»  de  trop  à  Nantes  »%  Le  Comité  lui  donna 
une  décharge. 

Enfin ,  par  tout  la  destruction  a  marqué 
ses  traces  par  les  ruines  fumantes  et  le  sang 
humain.  Ici  le  soldat  a  trouvé  des  charmes 
dans  les  cris  lamentables  des  malheureux 
incendiés  dans  leur  chaumière  :  là ,  de  jeunes 


3i6  Atrocités  commises  dans  le  département 
Elles  ont  expiré  au  milieu  des  violences , 
inspirées  par  la  licence   la  plus  effrénée  : 
plusieurs  de  ces  brigands  ont  Aême  assouvi, 
leurs  infâmes  désirs  jusques  sur  le  sein  des 
femmes  inanimées  quils  viennent  de  mas- 
sacrer ,  tandis'  que  d'autres   fouillant   avec 
leurs   baïonnettes   dans  les   entrailles  des 
femmes  enceintes  ,  en  retirent  les  lambeaux 
d  une  innocente  victime  prête  à  recevoir  le 
jour* 

Avant  de  parler  des  noyades ,  nous  dirons  . 
Un  mot  sur  les  cent  trente  -  deux  tvlantais 
envoyés  à  Paris  ,  pour  être  traduits  au  Tri- 
bunal révolutionnaire.  En  voyant  une  pa- 
reille démarche ,  on  croirait  qu'un  reste  de 
pudeur  a  suspendu  pour  un  instant  le  fer 
meurtrier  dans  les  mains  de  ces  bourreaux. 
Une  liste  de  cent  trente-deux  Nantais  ,  pres- 
que tous  négocians  ,  prise  au  hasard  ,  est 
confiée  à  Bologniel  :  tous  sortent  de  prison 
sans  pouvoir  se  charger  des  effets  les  plus 
utiles.  Leurs  parens ,  leurs  amis ,  ne  peuvent 
les  embrasser  ;  ils  partent  sous  une  escorte 
nombreuse  ;  les  infirmes  sont  à  pied  :  an- 
noncés par- tout  comme  complices  de.  la 
Vendée,  par -tout  une  populace  furieuse 
fait  retentir  à  leurs  oreilles  Theurlement  af- 
freux ,  à  la  guillotine  !  A  Saumur  ,  ils  sont 
traînés  à  petits  pas  derrière  une  voiture 
d'individus  qu  on  conduisait  au   supplice» 


\ 


de  la  Vendée  ,  et  autres  circonvoisins.     3 1 7 

Cet  affreux  spectacle  les  affecta  tellement, 
que  plusieurs  eu  moururent.  Conduits  dans 
les  prisons  d'Angers  ,  ils  y  furent  traités 
comme  des  gens  destinés  à  la  mort.  Le  Bour- 
reau les  comptait  un  jour ,  en  leur  disant: 
J  Savez 'VOUS  que  je  puis  vous  expédier  tous  en 
I  moins  d'une  heure?  C'est-là  quun  père  eut  la 
I  douleur  de  voir  expirer  son  fils  sur  le  pain 
I  destiné  à  sa  subsistance.  Il  souffrit  pendant 
vingt-quatre  heures  les  angoisses  de  la  mort , 
sans  qu  il  fut  possible  d'obtenir  le  moindre 
secours  des  garçons  de  la  geôle  :  ce  n'est 
pas  le  dernier  qui  soit  mort  ainsi  victime 
de  la  dureté  des  concierges.  Un  jeune  homme 
malade  sort  de  son  cachot ,  et  tombe  sur  un 
tas  de  fumier  qui  était  au  milieu  de  la  cour 
des  prisons  ;  on  le  traîne  aussitôt  sur  un  lit 
de  cadavre  ,  où  il  achève  de  rendre  le  der- 
nier soupir.  Angers  est  attaqué ,  Igs  Nantais 
offrent  à  la  Municipalité  de  prendre  les 
armes  pour  combattre  les  assiégeans ,  contre 
lesquels  ils  avaient  si  souvent  et  avec  succès 
essayé  leur  courage  ;  ils  promettent  de  ren- 
trer après  l'action  dans  leur  prison.  Cette 
pétition  attendrit  la  Municipalité  ;  mais  elle 
u  osa  prendre  sur  elle  de  déférer  à  la  de- 
mande de  ces  détenus  ,  qui  leur  était  dé- 
peints sous  les  couleurs  les  plus  affreuses. 

A  leur  départ  d'Angers  ,  Bologniel   les 
quitte  et  les  remet  entre  les  m^ins  d  un  dé<- 


] 


3i8  Atrocités  commises  dans  It  département 

tachement  de  la  force  armée ,  qui  commence  . 
à  les  garrotter  :  cette  mesure  leur  parut  si 
outrageante  ,  que  plusieurs  en  murmurè- 
rent ;  aussitôt  des  volontaires  sortent  de 
leurs  rangs  ,  en  portant  Tarme  haute  ,  et 
les  contraignent  à  se  prêter  à  cette  humi- 
liation ;  on  les  menaça  de  les  fusiller  au 
moindre  mouvement  que  ferait  l'un*  d'eux* 
Ce  ne  fut  pas^  sans  de  grandes  appréhen- 
tiohs  qu'ils  firent  cette  route.  Ils  savaient 
que  le  pont  de  Ce  avait  souvent  été  lé 
théâtre  de  sanglantes  exécutions  envers  plu- 
sieurs convois  de  détenus  qui  les  avaient 
précédés. 

Enfin  ils  sont  rassurés  par  les  militaires 
eux-mêmes,  qui  témoignent  avoir  été  trom- 
pés sur  leur  compte  ,  et  sont  prêts  à  réparer 
leur  erreur  ,  en  les  défendant  contre  tous 
ceux  qui  viendraient  attenter  à  leur  vie.  C'est 
au  milieu  de  ces  consolantes  promesses  que 
ces  infortunés  arrivent  à  Saumur  ;  la  plu- 
part sont  reconnus  par  un  Commandant  de 
bataillon  ,  qui  trouva  parmi  eux  ses  frères 
d'armes  :  ttOù  donc  trouver  maintenant  des 
M  patriotes  15  ?  s'écrie-t-ir  avec  le  plus  vif 
étonnement.  Quelques  jours  après  l'Adju- 
dant de  la  place  vint  leur  dire  :  et  Mes  amis, 
55  réjouissez- vous,  vous  partez  demain  pour 
55  Paris 5 5.  Ces  mots  n'étaient  plus  un  énigme 
pour  eux  ;  ils   quittent  Saumur  ,  dans  la 


de  la  Vendée,  et  antres  circonvoisins.    3 1^ 

pleine   confiance   qu  ils  paraîtront   devant 
un  Tribunal  ,  où  il  leur  sera  permis  de  se 
justifier.  Ils  arrivent  à  Paris  ,   les  mêmes 
calomnies    les   précèdent  ;   on   cherche   à 
irriter  le  public ,  par  la  fausse  nouvelle  que 
TEtat-major  de  Farmée  de  Charette  est  ar- 
rivé et  sera  fusillé  le  lendemain  à  la  plaine 
des  Sablons.  Ce  bruit  fut  répaiidu  par  Hen- 
riot ,  qui  cherchait  une  occasion  pour  ex- 
citer le  peuple  à  se  porter  sur  les  prisons  : 
car  ce  Général ,  à  l'arrivée  des  Nantais ,  dit  : 
i%  Carrier  est  une  f...  b...  ,  je  les  aurais  fait 
«  fusiller  ,  ce   sont  tous  des  aristocrates  >»• 
Ces  malheureux  Nantais  étaient  si  évidem- 
ment condamné  d'avance  ,  que  TEpouse 
d'un  d'eux  étant  allé  à  la  Municipalité  pour 
demander  quelques  papiers  nécessaires  à  la 
justification  de  son  mari  ,   en  reçut  cette 
réponse  :   tt  Cela  est  inutile  ?  ce  sont  des 
»i  hommes  sacrifiés  ;  ils  ne  sont  plus  >».  De 
son  côté  ,  Carrier  se  plaint  de  la  faiblesse 
de  Francastel.  tx  Ces  cent  trente-deux  Nan- 
93  tais  r  dit-il ,  n'étaient  pas  destinés  pour 
n  Paris  :  j'avais  écrit  à  Francastel  pour  les 
»>  faire  noyer  au  pont  de  Ce  ;  mais  ce  foutu 
n  coyonn'a  pas  osé  »».  (Le  citoyen  Saiitin  , 
Ministre  de  la  police ,  était  du  nombre  de  ces 
victimes  ). 

Lors  de  leur  départ  de  Nantes ,  Chaux  était 
d'avis  qu  on  mêlât  parmi  eux  un  citoyen  non 


320  Atrocités  commises  dans  le  dépatiement 
détenu  ,  dont  Tévasion  facilitée  à  dessein, 
servirait  de  prétexte  pour  faire  fusiller  tous 
les  autres  indistinctement^  Le  Commissaire 
du  Comité  ,  Maingûet,  assura  quils  de* 
vaient  être  fusillés  dans  la  journée,  et  Ton 
avait  proposé  dans  la  Société  populaire  de 
nommer  trente  hommes  vigoureux  pour 
une  expédition  secrète. 

Le  Courier  était  tout  prêt  ;  il  se  nom-^ 
mait  Lalloue  ;  c'était  un  jeune  homme  de 
dix-neuf  ans  ,  originaire  de  Paris  ,  de  la 
section  du  Pont  Neuf ,  voleur  de  profes* 
sion  ;  ses  premiers  faits  révolutionnaires 
dataient  du  2  septembre  ;  pendant  ces  mas- 
sacres, il  ^vai^  fait  un  cours  de  férocité 
qui  ne  le  cédait  en  rien  aux  scélérats  les  plus 
consommés  etlesplus  avides  de  sang  :  iljal'- 
lait  voir  ,  s'écriait  cet  infâme  jeune  homme 
dans  le  Comité,  comme  nous  les  dépêchions  aux 
prisons  de  Paris.  Il  aspirait  donc  à  Fhonneur 
d'ordonner  ,  et  de  présider,  jiu  massacre 
des  cent  trente-deux  Nantais  ,  et  il  se  pro-. 
mettait  bien  dans  cette  affreuse  mission  , 
de  se  distinguer  par  des  prouesses  supé- 
rieures à  ces  précédens  assassinats. 

Carrier  traitait  ce  jeune  tigre  avec  beau- 
coup de  familiarité  ;  il  mangeait  souvent, 
avec  lui  ,  et  par  ses  conseils  et  ses  exhor- 
tations sanguinaires  , il  en  fit  un  des  ins- 
trumens  les  plus  actifs  de  ses  fureurs.  Elles 


de  la  Vendée^  et  autres  circonvoisins.    32 1 

trouvèrent  une  foule  A^Agens  trop  zélés  à 
les  seconder  ^  à  les  devancer. 

Des  soldats  de  la  compagnie  Marat ,  re- 
çoivent des  mains  du  Comité  huit  individus 
pour  les  prisons.  Le  chemin  leur  parut  trop 
long ,  ils  les  massacrèrent  à  coups  de  sabre 
sous  les  fenêtres  du  Comité. 

Dès  long-tems.  Carrier  avait  témoigné  son 
goût  pour  Texccrablc  invention  des  noyades* 
En  soupant  chez  le  nommé  Philippes  ,  il  lui 
avait  dit  :  <*  Bah  !  bah  !  vous  autres  juges  ,  il 
99  vous  faut  cent  preuves ,  cent  témoins  pour 

ff  faire  guillotiner  un  homme  ,  f. le  à 

5>  Feau,  vous  aurez  plutôt  fait.  >> 

Attachons-nous  ici  à  auelques-unes  de 
ses  expressions ,  recueillies  pendansle  cours 
de  sa  vie  politique ,  pour  nous  pénétrer  de 
plus  en  plus  qu'il  était  rhomm.e  de  tous 
les  despotismes. 

&'agissait-il  d'interroger  sa  pitié  enfaveur 
des  enfanSi^que  Iç  Comité  désignait  sous 
le  nom  de  bugands  ?  ce  sont  des  touvetaux  , 
disait-il ,  il  faut  les  détruire  ;  et  lui  demaii- 
doit-on ,  si  c'était  la  sa  dernière  sentence  ;  il 
répondait:  ne  suis -je  pas  Représentant  du 
peuple?  PiiWtur  s ,  il  les  désigne  sous  une  autre 
expression  non  moins  affreuse.  Ce  sont  des 
vipères ,  dit-il  ,  il  faut  les  étouffer. 

Il  existait  cependant  un  arrêté  du.  Co- 
mité de  sûreté  générale  enfaveur  des  enfaûs , 

tome  VI.  X 


322  AtrociUs  commisfs  daiti  le  département 

mais  les  instructions  particulières  en  éloi- 
gnait Texécution.  Nombre  de  bons  citoyens 
se  présentèrent  pour  en  sauver  ;  mais  le 
Comité  révolutionnaire  se  piroînit ,  non- 
seulement  de  faire  défenses  expressés  au 
Concierge  de  délivrer  des  enfans  à  qui  que 
ce  fut  ;  mais  encore  il  proscrivit  et  fit  ar- 
rêter ceux  qui  les    avaient  réclamés. 

Le  Commissaire  ordonnateur  de  la  ma- 
rine se  présenta  pour  choisir  ceux  qui 
pouvaient  être  employés  sur  les  vaisseaux  ; 
Futilité  publique  commandait  cette  dé- 
marche ,  déjà  sanctionnée  par  les  Comîtéà 
de  gouvernement  ;  on  lui  répondit  froi- 
dement que  les  ordres  étaient  changés. 

Le  citoyen  Hérisson ,  chaircuitier],  se  pré^ 
sente  pour  avoir  une  fille?  de  quatorze  ans  ; 
Fouquet  et  Lamberty  lui  disent  qu'il  est 
un  scélérat  de  vouloir  avoir  de  cette  race  ; 
Carrier  qui  était  présent  dit  ^  renvoyez-^oi 
ce  b...  là*  La  femme  le  Normand  ,  avec  la* 
quelle  Carrier  vivait  dans  une  intimité  scan- 
daleuse ,  occupait  quelques  femmes  pour 
les  armées  ;  elle  denlande  un  jour  à  Carrier 
qui  les  payera  ?  La  guillotine  ,  répond -il  ? 

Un  Membre  du  tribunal  lui  demandait 
quelques  éclaircissemens  sur  un  article  de 
la  loi  :  la  guillotine ,  toujours  la  guillotinée 
Cet  instrument  de  mort  était  son  code  su- 
prêmé,  Eiifin  ,  un  dernier  trait  acheva  de 


de  laVendie^yet  autres  circonvoisinr^^  3  «3 

développer  la  moralité   cfe  ce  Prdconsul* 
5ur  la  fiir  don  dîner  ,  il :s oublia  utt-joùf  àii 
poku-  de.;:déclarer.  ;que  ;  -comme  -dt^pxè'à 
^: récapitulation:,,  il  «y  avait  mille  habt tans 
j»r  lieucB  carréés^^il;  était  dértiôft'tré  qiic 
îc  sol  de.  la  France- ne  pouvait  lés  nourrir  ; 
qu  en  conséquence  ,   il-  était  esfsentiel  de  sfe 
délivrer  de  cet   excédent,  de  population-^ 
iâns  quoi  la  République  ne  pouvait  exister  : 
Jl  faudrait  commencer  par  îles  prêffes-,  iéi 
nobles  ,    les    marchands  ^    les   banquier  is., 
les  ■  négocians  ,    qui-  n€';  peuvent  •  aimer  la 
République  ;  et    dans    son   transport ,    il 
.criait  :  Tue  ,  tue  ,  tue. a  Dans  mon  dépar- 
99  tçmcnt.^icontintui't'U ,  nous  allions'  à  la 
53  chasse  aux  prêtres.  Je  n  ai  jamais'  tant 
99  ri  qu'envoyant  la  grimace  que  fesaient 
»3  ces  b.......  là  eh  mourant.  j> 

Transportons  -  nous  maintenant  sur  les 
}>'ords  de  la  Loire',  nous  y  verrons  ses 
flots  i  grossis  par  les  cadavres  d'individus, 
de  tout  âge  et  de  tout  sexe.i  Les  enfans  à 
la  mamelle  ne  trouvent  point  de  grâce  au- 
près de  ces  bourreaxix;  en  vain  les  mères, 
ail  moment  de  la  ^submersion  ,  demandent 
à  genoux  qaon.  épargne  CCS  mnocentes 
victimes:  Bahl  bah  !  s- écrient  les  •  digne^ 
échos  de  la  morale  de  Carrier  ,  ce  sont  des 
louvetaux  qu'il  faut  Mouffer*  {  Voyez  ia  lettri 
K.dç  la  gravure  duiome  2  ,  j>,  !•  )  ^' 

X  2 


.  i:^    Urtfuttés  commises  dans  le  département 

La  livnuttie  humàîn. croit  obtenir  ,  par 
Iduûoiitê  de  Carrier  ,  lé  terme  de  ces 
uo\aoks  ,  en  laver  tissant  de  ce  qui  se  passe  j 
.^4  \:Tk^  terras  bien  d^ autres  ,  loi  réponçUiL  Ei 
vain  le  mêmie  citoyen  insiste  en  faveur  def 
femmes  ,  Carrier  répond  qu  il  n'y  à  pai 
d  autres,  moyens  pour  sans  -  culotiser  lei 
femmes  ;  d^ailleurs ,  qu'il  a  des  ordres  pour 
cela.  Il  confie  à  un  autre  citoyen  que  s'il 
n'agissait  pas  ainsi ,  il  se  ferait  guillotiner', 
que  telles  étaient  ses  instructions. 

Les  premiers  qui  subirent  ce  supplice 
furent  quatre-vingt  malheureux  prêtres  du 
département  de  la  Nièvre  ,  condamnés  à  la 
déportation.  Transférés  d'abord  à  Angers  j 
delà  à  Nantes  ,  Canîer  les  fit  conduircsur 
\me  gabane  ^  où  ,  selon  ses  expressions , 
le  décret  de  déportation  fut  exécuté  vertu 
calement. 

Ce  Représentant  écrivit  à  ce  sujet  à  la 
Convention.  Cet  événement  fut  dépeint 
comme  accidentel.  Cependant  ,  la  vérité 
perce  à  la  fin  de  sa  lettre  :  Oiid  torrent 
raclutionniùre  ^  s  écrie-t-il ,  que  LîCîe  Lcirei 

Au  récit  de  cette  no^'ade .  un  Membre  de 
la  Couvendon  eut  Timpudeur  d'en  deman- 
der la  mendon  honorable  :  et  pas  un  de  ces 
vik  Sénateurs  ne  réclama  courre  cerie  pro- 
portion ,  propre  à  dégrader  le  peupic 
Cran^^ais  dons  la  personne  de  ses  Reprèsen- 


de  fa  Vendée ,  et  atdres  circonvoisins.   325 

tans.  Dès-lors  les  noyades  fet  les  supplices 
de  tout  genre  pâturent  légalisés  :  la  Conven- 
tion sembla  mêtne  s^assocîer  à  ses  crimes  , 
et  en  autoriser  la  continuation  (i). 
•  Parmi  les  prêtres 'noyés  ,  deux  septua- 
génaires furent 'roulés  sur  les  rives  de  la 
Loire ,  où  ils  furçht  recueillis  par  des  mate- 
lots.  Lé  Comité  en  étant  instruit ,  les  réin- 
tégra dans  les  prisons:  ils  ont  disparu. 
La  dépouille  des  prêtres  étaient  sur  une 
gabarre  ;  on  TéValtekit  à  une  somme  de 
quarante  mille  livres.  Carrier  vint  y  dîner  ; 
et  Lattiberïi  lui  ayant'  demandé  ce  qu  on 

fdrait  de  ces  dépouilles":  F. ,  s'écrià-t-il , 

ceux  qui  ont  fait  tauvrage/n  est-ce  pas  pour 
eux  ?  Dans  Tdrgie  qui  eut  lieu  à  cette  occa- 
sion ,  Carrier  et  ses  convives  burent  à  la 
santé  des  calotins  qui  avaiên't  bu  à  la  gfande 
tasse^  Il  y  eut  encoife^  dans  un-  autre  tems 
une  seconde  noyade  de  prêtres. 

Ainsi ,  il  ne  lui  sûflftt  pas  d;ordonnèr  ces 
fatales  expéditions  ;  il-  vient  repaître    ses 


(i)  On  agitait  une  fois  ,  en  présence  de  Carrier  , 
rexécution  du  décret  de  déportation  :  Oui ^  oui  , 
dit-il,  les  déporter  à  ma  manitre. 

Il  faut ,  dit-il  une  autre  fois  au  Comité  ,  que  vous 
opériez  cet  après  -  dîner  ,  sans  exception  de  qui  que  et 
soit,  —  Ne  t"^ embarrasses  pas ,  Représentant  ,  ion  affaire 
sera  faite  ce  soir.  Telle  fut  la  réponse  d'un  del 
Membres.  .       '- 

X  3 


3  20  AirocUés  commist^:dans,  Uiiip^fjtcrAent 

regards  de.  ces  sanglantes  tragédies;,  £t  lé 
cri  des  victimes  a  souvent  retenti,  à  soïi 
oreille.  C'est  dans  les  gabarrestjuèlesbchants 
patriotiques  annonçem  Fivresse  des. con- 
vives. ,   et .  leur    pefsévér&nce  .  dans  teurs 
affre iax  desseins..  ,CVîs1;. à  Robiti\  qi.ie  Carrier 
s'adresse  P9ur  égayer»»^  mcgistruëusesociété, 
en  lui  disant':  u^Pptit  b  .>  .  v.,  .pjetit  revo- 
ie lutionnaire  yÇh^.ntë.la:Çamdle  et  ia  chan- 
.?5..son  de  la  Montagne,  jî  Ces  :  élans  id'une 
joie  féroce  étaient  entremêlés  .par  ie^, récit 
^t  çeux^qui.  présidaient  d'ordinaire    aux 
'l:^aigna(cles.jLambç.jtj{:Sijr-tqKt  y? vantail  ses 
prçqcss.es  ,  et  s'é>:5n4*ii  Ipriguement.  swr  lés 
, coups  de  .saixre^  qu  iJ .  donut^it:^  ^ceux   qui 
tentaîçnt  .c^e  s'écl^i^p^r  àjla.nage*  j  : 

Ç^Ufil  mçlangie.  affr,epx  de  iq^s  les  crimes  ! 

.M2.lh.e1jr  au  citoyen -qui  ^  pw  ^fis.  vertus  ^  a 

fixé  ie^.cœur  dupe,  épouse,  dont  lés  appas 

ont  allumé  Içs  feux  criminels  du'  Proconsul  ! 

Cl'e3t,.en  prjé!cipit^nii;l;'épouxr  au  foijd  des 

")eaux  ,  qti]il  brise  lies  liais  qui.mejttent   un 

frein  a   ses    désirs  !  Alors   les  Commis  de 

ÎTïat^âfor  prêtaient  leur  infâme  ministère 

à  Tenlèvement  de'ces  raalhéureiises ,  fait  au 

nom    du  Représentant   du   peuple  ,   q,ui  , 

,  disaient-ils  ,. a  v^<?joen  rf'^//^j  (1). 

(i)  Sous  le  régime  monarchique  ,   les  Rois  ^   les 
.  Trinces^  se  contentaient  <de  faire  enfermer  à  la  Bas- 
tille les  maris  des  femmes  qu'ils  convoitaient. 


de  la  Yendée^  et.  autres  circonvoisins.     827 

Trois  jeunes  prisonnières  de  la .  Ven- 
dée ,  que  la  voix  publique  nous  dépeint 
avec  tous  les  charmes  de  la  beauté  ,  de 
la  jeunesse  et  tout  l'intérêt  du  malheur, 
sont  réservées  pour  les  plaisirs  du  Procon- 
sul ,  qui  ,  .après  avoir  assouvi  ses  coupables 
feux  ,  les  repousse  de  son  sein  ,  et  les  fait 
précipiter  dans  la  Loire.    , 

La  seconde  noyade  eut  lieu  la  nuit  du 
24  au  25  frimaire  an  2  (  14  au  1 5  décembre 
Jjg3  ).  Qn  conduisit  cent  trente-huit  déte- 
nus au  corps-de-garde  de  la  machine  ,  en 
leur  fesai^^  accroire  qu'on  les  conduisait  à 
.Bellç-Isle.  Pendant  ce  trajet,  un  des  détenus 
parvint  à  s'échapper  ;•  Grandmaison  ren- 
versa d  un  coup  de  pistolet  celui  avec  lequel 
il  était  attaché.  Arrivés  à -la  «gabarre  ,  les 
.Rebelles  se  .trouvèrjent  trop  courtes  pour 
les  descendre  au  fond  ;  on  pourvoit  à  cet 
inconvénient ,.  en  les.  précipitant ,  la  tête 
première ,  à  fond  décale.  Aussitôt  on  ferma 
Fécoutille  ;  les  conducteurs  chavirèrent  la 
gabarré  ;  les  charpentiers  soulevèrent  les 
sabords  ;  le  fond  s'ouvre  ^  et  tout  e.st  en- 
glouti.. Ces  infortunés  ,  nullement  instruits 
du. genre  de  mort  qui  leur  était  destiné  ,  se 
sentent  à  peine  submergés  ,  qu'ils  font 
entendre  des  cris  affreux:  sauvez  -nous.  ^ 
sauvez-nous ,  il  en  est  encore  tems ,  s'écrient-il& 
à  leurs  propres  assajssins.  D  autres ,  emportés 

X  4  '     '. 


SaS  Atrocités  commises  dans  le  département 

par  un  juste  désespoir ,  disent  :  sautons  dans 
les  bateaux ,  nos  bourreaux  périront  avec  nous. 
Alors  ils  s'accrochent  aux  barques  où  les 
Exécuteurs  s'étaient  retirés  avant  la  submer- 
sion ;  mais  à  coups  de  sabre  on  leur  hache 
les  mains  ,  et  à  coups  de  rame  et  de  croc 
on  assomme  ceux  qui  paraissent  assez  vigou- 
reux pour  échapper  à  la  nage.  (  Voyez  la  ' 
lettre  0  de  la  gravure  du  tome  i  ,  pag.  i  des 
Réflexions  préliminaires.) 

Dans  une  de  ces  noyades  ,  un  matelot 
implorait  la  pitié  de  celui  qui  présidait  à 
ces  horribles  exécutions  /^n  faveur  d'unt 
femme  qui  se  débattait  près  du  bateau.. Cette 
malheureuse  l'appelait  à  haute  voix  ,  invo- 
quait son  secours  :  est-ce  que  tu  es  de  moitié 
avec  elle  ^  dit  Lambertî  ?  Aussitôt,  dun. 
coup  de  sabre  ,  il  fend  la  tête  de  cette 
malheureuse. 

Parmi  ceux  qui  périrent  de  cette  manière, 
on  en  remarque  plusieurs  déjà  juges  pour 
des  délits  criminels  ,  et  *qui  ,  d'après  tin 
appel  en  cassation  ,  avaient  obtenu  la  révi- 
sion de  leur  procès  devant  un  autre  tri- 
bunal. En  vain  l'Accusateur  public  près 
celui  de  Nantes  les  réclame  ;  et  demande 
au  Comité  uiie  décharge  justificative  du 
retard  dans  l'envoi  de  ces  prisonniers  ;  le 
Comité  se  tait  et  continue  ses  affreuses  opé- 
rations. Cependant, quelques-uns  échappent 


de  la  Vendée ,  et  autres  çirconvoisins'.     S29 

^ux  flots  ;  Tun ,  condamné  par  la  police 
correctionnelle  ,  s'accroche  à  un  rocher  , 
^t  y  reste  suspendu  jusqu'au  jour  :  il  est 
Repris  et  plongé  dans  les  cachots.  Un  autre, 
plus  heureux,  évite  la  mort  et  le  Comité. 

Joseph-Leroi  ,  condamné  à  quatte  ans 
de  détention  ,  fut  un  de  ceux  qui  échappa. 
Les  détenus  avaient  les  mains  liées  der- 
rière le  dos  ,  ils  étaient  en  outre  attachés 
deux  à  deux  ;  on  les  sépara  pour  les 
faire  descendre  dans  la  gabarre ,  il  vint  à 
bout  def^ couper  avec  ses  dents  la  corde  de 
son  camarade  ,  qui  à  son  tour  le  débar- 
rassa de  ses  liens.  Aussitôt  que  le  fond 
s'entr'ouvrit ,  il  eut  la  liberté  de  riager,  ce 
'qii'îl  effectua  pendant  deux  heures  au  mi- 
lieu des  cadavres  :  étant  parvenu  à  échap- 
per des  flots  ,  il  fut  repris  et  conduit  à 
onze  heures  du  matin  ,  au  Comité  révolu- 
tionnaire ,  dont  les  Membres  se  mirent  à 
rire  en  Tappercevant  :  u  Voici  un  homme 
j»  qui  s'est  sauvé-,  disent-ils ,  <{u  en  feTons- 
>5  nôu^  ?  il  faut  le  f,.i....  à  Peau  répliqua 
95  Joly  :  '-Bachelier  ajouta':  fesons-le  recon- 
>5  duire  au  BufFay  ,  nous  le  mienerons  ce 
»  soir  avec  les  autres.  9>  Alors  on  le  trans- 
féra au  Buffay ,  couvert  d'une  capote  ,  et 
à  onze  heures  du  soir ,  il  fut  mis  au  secret 
dans  une  basse-fosse  ,  où  il  est  resté  trois 
mois  et  demi ,  réduit  à  une  demi-livre   de 


33o  Atrocités  commises  dans  le  département 

pain  par  jour  ,  et  à  une  chopine  d'eau. 

Le  Comité  ,  pour  se  garantir  des  éva- 
sion^ continuelles  ,  qui  mettaient  au  grancf 
jour  ses  forfaits  ,  avait  pris  ,  comme  on 
Ta  déjà  vu,  la  précaution  de  faire  garotter 
ceux  qu'il  destinait  à  ce  supplice.  La  com- 
pagnie Marat  était  chargée  de  cette  fonction, 
mais  Joly  les  surpassait  tellement  dans 
cette  opération  ,  qu'il  en  garda  le  nom  dt 
garotteur  par  excellence.  On  fesait  sortir  les 
détenus  de  leurs  cachots  à  coup§  de  sabre^  pu 
enks  frapp?int  s\ir  la  tête  avec  le  pommeau 
d'un  pistolet,.  Un  de  ses  collègues  les  mer 
naçait  de  leur  brûler  la  cervelle  ;  on  les 
liait  ensuite  par  douzaine  ,  et  les  soldats 
de  Marat  s'amusaient  aies  percer  avec  leurs 
baïonnettes  ,  en  attendant  Tinstant  dp 
départ. 

:    Une  masse  de  huit  cepts  individus  ainsi 
garottés  ^  fut  conduite  à  bord  de  la  fatale 
.gabarre. .       . 

-  :  Le  nommé  Perdreau ,  batelier ,  le  len- 
demain de  cette  expédition  ,  demanda  une 
éprise  de  tabac,  au  citoyen  Thomas  ,  officier 
de  santé ,  .qui  profita  de  son  état  d'ivresse 
«pour  s'informer  de  la  manière  dont  ils  pro- 
cédaient à  ces  noyades.  Il  répondit ,  que 
d  abord  on  les  dépouillait,  qu  ensuite  ,  on 
les  attachait  par  .les  poignets  et  les  bras  ; 
queçfin  on  les. fesait  monter  deux  à  deux 


de  la  Vendée^  et  autres  circonvouins.     SS  i 

dans  un  bateau  ,  d'où  on  les  précipitait , 
la  tête  première,  dans  la  Loire.  Ce  Citoyen 
lui  ayant  observé  que  quelques  -  uns  pou- 
vaient échapper  en  nageant  sur  le  dos  ;*  ' 
il  répondit  que  quand  cela  arrivait.,  il  y 
avait  dés  gats  pour  les  assortimen. 
. .  Deux  militaires  furent  dire  un  soir  à 
Carrier  qu  ils  conduisaient  dans  un  bateau 
trois  cents  prisonniers  faits  à  Ancenîs;  ils 
lui  demandèrent  en  même  tems  ses  ordres* 

Carrier  leur  répondit ,  >>  comment  f, 

h  imbécilles  que  vous  êtes  :  f......moi  ces 

39  bougres  -  là  à  Teau ,  et   que  demain  il 

•fî.ncn    soit  plus  question.  5»  Ce   qui    fut 

.    cflFectué. 

j'  'Dans  une  autre  circonstance ,  cinq  cents 

j8ortaient   de  l'entrepôt  à  onze  heures  du 

:jsdir  q;  Robin  qui  était  un  des  conducteurs  , 

•se  jetait  ,  chemin  fesant  sur  eux ,  avec  tant 

de  rudesse,  qu'il  en  renversait  dix  ou  douze 

à  la  fois.  Les  liens  dont  ils  étaient  serrés  , 

s'opposaient    à  ce   qu'ils    se  relevassent  : 

Robin  se    précipitait  sur  eux  à  coups    de 

sabre ,  et  ne  cessait  de  frapper  que  lorsqu'ils 

étaient  relevés.  Ces  scènes  furent  souvent 

répétées  pendant  l'espace  qui  leur  restait 

à  parcourir.    Entrés   dans   la  barque  ,  on 

leur  enlève  leur  vêtement  ;  on  avait  même 

-projeté  de  les  dépouiller  entièrement.  Les 

femmes  demandent  en  grâce-  qu'on  leur 


33z  Atrocités  commises  dans  le  département 

laisse  au  moins  le  linge  qui  les  couvre.  L'in- 
dignation des  matelots  appuya  cette  prière , 
et  cette  triste  consolation  leur.fut  laissée  en 
mourant.   A  peine  ces  victimes  sont-elles  ^ 
précipitées   dans  la   Loire  ,     qu  elles    sont 
assomm^ées  à  coups  de  crosse ,  et  les  soldats 
Marats  font  un  feu  continuel  sur  la  surface 
qui  les  entoure.  Le  bruit  dès  vagues  ,  celui 
de  la  mousqueterie  et  les  chants  affreux  des. 
principaux  Agens  de  ces  supplices  ,  étouf- 
fent les   cris   des    mourans.  Les  habitant 
des   bords  de  la  Loire  ,   ont  entendu  pluï 
d'une  fois  dans  le  courant  de  la  nuit  »  -ces 
mousquetadesqui  se  prolongeaient  pendant 
plusieurs  heures. 

Le  Comité  avait  d  abord  choisi  la  huit 
pour  ces  expéditions  ;  mais  cet  çssaî 
de  sa  tyrannie  ,  effectuée  sans  le  moindre 
obstacle ,  le  rendit  plus  aiidacieux.  Il  jeta 
tout-à-fait  le  masque  ,  et  le  soleil  éclaira 
bientôt  ses  nombreux  forfaits  ;  des  hommes, 
des  femmes,  des enfans  totalementnuds  sont 
précipités  du  haut  des  gabarres  dans  les  flots. 

Les  bourreaux  s'amusent  sur  le  pont  à 
les  frapper  à  coups  de  sabre  ;  ils  tranchent 
la  tête  aux  uns  ;  ils  en  saisissent  d'autres  par 
les  jambes  et  les  culbutent  dans  la  Loire, 
Lorsque  le  nombre  des  victimes  est  tro^ 
considérable  ,  tout  est  prévu  pour  qu'au- 
cunes n'échappent  -,  les  crocs,  les  rames,  k 


\ 


'     delà  Vendée^  et  autres  circonvoinns.  3o3 

plomb ,  plus  sûrement  dirigés  les  atteignent 
de  toutes  parts.  Lamberty  se  distingue 
toujours  dans  cette  série  de  massacres.  Ha- 
bile à  couper  les  bras  et  les  mains  de  ceux 
qui ,  dans  les  premiers  tems ,  s'accrochaient 
au  bateau ,  il  plonge  à  plusieurs  reprises 
son  sabre  dans  le  cœur^  de  ceux  qui  sont 
à  portée  de  ses  coups. 

Une  quantité  de  femmes  ,  la  plupart 
enceintes  ,  et  d'autres  pressant  leur  nour- 
risson sur  leur  sein  ,  sont  menées  à  bord 
des  gabarres.  Les  cris  les  plus  lamentables 
se  mêlent  aux  sombres  murmures  des  flots* 
Ces  infortunées  n'attendent  plus  rien  de 
la  pitié  des  hommes.  Leur  douleur  se  ma- 
nifeste sous  les  traits  les  plus  affligeans  : 
ici  une  mère  invoque  le  secours  du  ciel 
en  faveur  de  son  enfant  ;  plus  loin  cette 
autre  ,  l'œil  fixé  sur  le  tendre  fruit  d  un 
Kên  chéri  ,  l'arrose ,  en  sanglottant ,  de 
ses  larmes  :  ailleurs  ,  une  autre  lui  présente , 
en  frémissant  ,  ses  mamelles  ,  dont  les 
sources  nourricières ,  vont  dans  peu  être 
taries  :  voyez  encore  cette  infortunée  »  son 
faible  fils  est  étendu  à  ses  côtés  ;  elle  pro- 
mène sur  lui .  son  regard  sombre  ,  et  ne 
pouvant  se  familiariser  à  l'idée  de  cette 
funeste  séparation  ,  elle  s'écrie  :  fi>  Quoi  ! 
«  l'on  nous  fait  donc  périr  sans  jugement 
u  et  sans  nous  entendre.  99  Les  innocentes 


534  Atrocités  commises  dans  le  département 

caresses  ,  le  sourire  de  ces  tendres  vic- 
times ,  versent  dans  lame  de  ces  mères 
éplorées  ,  un  sentiment  qui  achevé  de  .dé-» 
chirer  leurs  entrailles  ;  elles  répondent  avec 
vivacité  à  leurs  tendres  caresses  ,  en  songeant 
que  c'est  pour  la  dernière  fois  !  !  Une  d'elles 
venait  d'accoucher  sur  la  Grève  ,  les  bour-* 
reaux  lui  donnent  à  peine  le  tems  de  terminer 
ce  grand  travail  ;  ils  avancent  ,  toutes  sont 
amoncelées  dans  la  gabarre  ,  et  après  lesi 
avoir  dépouillées  à  nud  ,  on  leur  attache 
les  mains  derrière  le  dos.  Les  cris  les  plus  aîb 
gus ,  les  reproches  les  plus  amers  de  ces  mal- 
heureuses mères  se  font  entendre  de  toutes 
parts  cpntïe  les  bourreaux  ;  f  ouiquet^' 
Robin  et  Lam^erty;  y  répondaient  à  coups 
de  sabres  ,  et  la  timide  beauté ,  déjà.ajssèz 
occupée  à  cacher  S4  nudité  aux  monstres 
qui  l'outragent  ,  détourne  en  frémissant 
ses  regards  de  sa  compagne  défigurée  par.  le 
sang  ,  et  qui  déjà  chancellante  vient  rendre 
le  dernier  soupir  à  ses  pieds.  Mais  le  signal 
est  donné  ;  les  charpentiers  d'un  coup  de 
hache  lèvent  les  sabords,  et  l'onde  les  ense- 
velit pour  jamais.  ("Fo^^^z  la  lettre  0.  delà  gra^ 
vitre  du  tome  I ,  page  i  du  discours  prélimiri.  } 
Les  difFérensTenseignetnens  sur  ces  expé- 
ditipns ,  font  monter  le  nombre  des  noyades 
qui  ont  eu  lieu  à  Nantes  à  vingt-cinq ,  paitni 
lesquelles  on  en  compte  une  de  six  cents 


de  la  Vendée,  et  autres  circonvoisins^     336 

enfans.  On  ne  peut  affirmer  au  juste  le 
nombre  des  individus  qui  ont  été  préci-: 
pités  dans  les  flots  ;  les  outrages  qu  on  leur 
fit  éprouver  furent  si  variés  ;  les  Agens  de, 
ces  atrocités  y  portèrent  un  tel  rafinement ,. 
que  la  plume  ne  peut  saisir  tous  les  traits 
que  ces  phénomènes  de  cruauté  inventèrent 
à  chaque  minute.     ' 

Quelquefois  on  les  avait  vu  sur  le  pont 
de  ces  bateaux  stationnés  au  milieu  de  la 
Loire,  se  faire  une  espèce  de  passe -tems, 
en  y  précipitant  quelques-unes  de  leurs 
victimes.  Mais  habiles  dans  la  funeste 
science  de  donner  la  mort ,  ils  créèrent  un 
nouveau  genre  de  supplice  qu  ils  nom- 
mèrent mariages  républicains*  Cette  horrible 
cérémonie  consistait  dans  l'assemblage  der 
deux  personnes  de  difFérens  sexes  ,  nues  et 
attachées.  Tune  à  Fautre.  La  bisarre  imagina-- 
tion  de  ces  montres  y  réunit  tantôtla  vieillesse 
à  côté  de  la  vieillesse  ,  la  jeunesse  à  côté  de 
la  jeunesse  ,  et  quelquefois  ces  deux  âg<;s 
furent  entremêlés.  On  peut  d'abord  se  faire 
une  idée  de  Tironie  et  des  sarcasmes  que 
vomissaient  les  acteurs  de  ces  atroces  tra- 
gédies :  mais  on  se  peindra  difficilement 
les  impressions  douloureuses  qui  déchi- 
raient ainsi  la  pudeur  ,  et  combien  était 
terrible  pour  le  cœur  sensible  et  aimant , 
ce  jeu  cruel  qui  consistait  à  exposer  à  nud 


336  Atrocités  commises  dans  le  département 

deis  charmes  que  rimagination  ne  se  peint 
jamais  que  sous  les  couleurs  du  plaisir  et 
avec  ridée  du  bonheur.  (  Voyez  la  lettre  P 
de  la  gravure  du  tome  i ,  page  i  des  réflexions 
préliminaires  ). 

Debout  sur  les  bords  de  la  Loire  ,  ces 
malheureux  restaient   pendant  une  heure   \ 
exposés  aux  intempéries  de  Tair  ,  et  au^ 
insultes  de  ces  Cannibales  ,  qui  finissaien*- 
par  les  frapper  sur  la  tête  à  coups  de  sabre  ^ 
et  les  précipitaient  ensuite   dans  ce  fleuve  • 
Endurcis  par  tant  de  cruautés  ,  ils  dédaL  ^ 
gnèrent  souvent  la  précaution  de  conserve:^ 
leurs   victimes  jusqu'à  Finstant  fixé  pou::* 
leur   mort.   Conduits  par  partie  dans  le^ 
bateaux  ,  dont  on  fermait  les   écoutilles  ---s 
le  défaut  d'air  en  suffoqua  plusieurs  à  diffé — 
rentes  reprises.  Un  événement  semblable ,  - 
qui  arriva  à  d'autres  malheureux  ,  ne  peut  ^ 
être    attribué   à   la  simple  négligence.   La  - 
gabarre  se  trouva  clouée  ,   et  dans    cette 
espèce  de  tombeau  vivant,  plus  de  quatre- 
vingt  citoyens  trouvèrent  la  mort.  Un  grand 
nombre  resta  souvent  pendant  trois  jours 
privé  de  toute  espèce  d'alimens.  Ce  n'était 
qu'avec  des  peines  infinies  que  des  matelots 
parvenaient  à  leur  faire  passer  des  secours. 
Il  est  intéressant  pour  Thonneur  de  l'hu- 
manité de  remarquer  que:  ceux  qui  furent 
employés    à    ces    opérations    montrèrent 


de  la  Vendée ,  et  autres  circonvoîsins.     33^ 

d'abord  tant  de  répugnance  ,  qu'il  fallut 
les  sabrer  et  les  menacer  des  plus  grands 
supplices  pour  les  forcer  à  prêter  leur 
ministère. 

Au  milieu  de  tant  d'horreurs  ,  un  sen- 
timent pénible  cherche  encore  à  calculer 
le  nombre  des  victimes  que  ces  bourreaux 
précipitèrent  dans  la  nuit  du  trépas  ,  par 
tous  les  moyens  destructeurs  que  Tenfer 
seul  pouvait  leur  inspirer.  (  Voyez  la  lettre  K 
de  la  gravure  du  tome  //,/?•!)• 

En    nivôse    an   2  ,    (  décembre    lygS  ) 
Lamberty  étant  chez  Carrier,  avec  plusieurs 
généraux  ,  montra  à  ceux-ci  la  Loire  ,   en 
disant  :  Il  y  en  a  déjà  passé  2800.   Un  de 
ces  généraux  demanda  ce  que  cela  signi- 
fiait. Carrier  répondit  :  Eh  bien!  oui,  2800 
dans  la  baignoire  nationale.  Un  affidé  du 
Comité  porta  un  jour  le  nombre  des  sub- 
mergés à  6000.   Fouquet  se   vantait  d'en 
avoir ,   pour  son   compte  ,    expédié   ainsi 
plus  de  9000  ,  et  les  différens  aveux  sufBsent 
pour  motiver  cette  assertion  d'un  homme 
cligne  de    foi  ,  qui  assura  c[ue  ,   pendant 
long-tems  ,  et  dans  une  étendue  de  dix-huit 
lieues  ,  la  Loire  était ,  depuis  S^umur  jus^ 
qu'à  Nantes  ,  toute  rouge  de  àang.  Enflée 
par  la  foule  immense  des  cadavres  quelle 
roulait  avec  ses  flots ,  elle  portait  Tépou- 
vante  à  l'Océan  ;   inais   tout-à-coUp   uat 
Tome  VI.  Y 


33S  Atrocités  commises  dans  le  département 
-marée  violente  repousse  jusques  sous   le^ 
murs  de  Nantes  ces  affreux  monumens  d^ 
tant  de  cruautés  ;  toute  la  surface  du  fleuve 
est  couverte  de  membres  flottans  ça  et  là  , 
que   se'  disputent   avec   acharnement    les 
poissons  voraces  qui  les  déchirent.    Quel 
spectacle  pour  les  Nantais  !  Une  sage  pré- 
voyance leur  interdit  Tusage  de  cette  eau 
et   des  poissons    qu  elle    nourrit  ;  Tun   et 
Tautre  empoisonneraient  infailliblement  les 
sources  de  la  vie. 

Mais  comme  si  le  ciel  eût  voulu  épou- 
vanter le  crime  lui-même  ,  par  le  spectacle 
forcé  des  victimes  de  ses  forfaits ,  une  mul- 
titude considérable  de  ces  cadavres ,  portée 
tout-à-coup  par  le  remoux  de  Fonde  sur 
ies  grèves  ,  y  restent   déposés  lors  de  la 
_J>^isse  de  la  marée.  Les  oiseaux  de  proie  , 
les  animaux  caîrnaciers  les  déchirent  par 
lambeaux.    L'effroi    éloigne   dabord   tout 
i^ecours  ;  mais  bientôt  des  invitations  for- 
melles et  le  sentiment  de  la  conservation 
•personnelle  fout  courir  en  foule  les  habi- 
Xans  riverains  ,  qui  consacrèrent  plusieurs 
jours  aux  devoirs  de  Tinhumation.  Que  de 
iarmès  î  qjife  de  gémissemens  se  mêlent  à 
5::^  d'ÇMloui^ei^s^s  fonctions  !  Ils  se  montrent 
eô  silence., -Cette  mère  infortunée ,  qui  serre 
^ncorfe  son  enfant  contre  son  sein  ;   elle 
Avmt  invité  le«  bourreaux  à   ne   pas  les 


d^  la  Vendée  ,  et^Autres  circonvoisins.  33q 
séparer.  Une  autre  avait  sa  Bouche  étroi-» 
temént  collée  ^ùr  les  lèvres  de  son  jeune 
nourrisson.  Dans' cet  état ,  elle  avait  paru 
chercher  à  recueillir  son  dernier  soupir. 
Un.  poisson  voracfi  à  déchiré  lès  entrailles 
de  cette  jeune  épouse  ;  le  fruit  qu  elle  por- 
taib^st  devenu  sa  tpâture. 

A  ces  victim^sn  des  noyadts  ,  ajoutez 
celles  des  fusillades  ou  de  la  guillotine  ^ 
dont  -nous  'n  avons  pu  citer  qu'une  par- 
tie; mais  qui  «''élevèrentà  un  nombre  tel , 
quer  3oo  Kominës  furent  occupés  pendant 
six  semaines  entières  sur  la  seule  place  du 
dépjartement  i  à  recouvrir  les  vastes  et  pro- 
fonde^ fossés  quon  y  avait  remplies  dû 
cadavres.  Ajoutiez  tous  ceux  que  les  besoins  ^ 
lé  misère  et: lés  maladies  pestilentielles  en-^ 
levèrent  dans  Tintérieur  des  prisons  ,  et 
qu^un  témoin  digne  de  foi  fait  monter  à  plus 
4e  dix/tnillë! H...  Rapprochez  ,  si  vous  en 
avez  Ib  courage  V  tous  ceux  que  itioisson- 
nèrent  ainsi ,  comme^à  Fenvie  ,  toutes  les 
fureurs  conjurées  avec  les  élémens ,  et  vous 
aurez  ,  par  uiï  calcul  approximatif ,  plus 
de  ioo,ooo;vifctit|cwjs  de  Carrier  à,  déplorer. 
Ajoutez  encore  plus  de  loo  mille  hommes 
péri  par  Lin«ptiç  fdes  généraux  ,  tels  que 
Ronsin ,  Saritferre V'ett*  Ce  dernier,  dans 
sa  première  affairé  lâisifa  pretïdreai^îhoiris 
80.  pièces  de  canoln  ^et  causa  la  jperte  d* 
i  Y  2 


340  Atrocités  commises  dms  le  département 

quinze  mille  homme^  Ge  qui  £Eiit  un  total 
de  plus  d'un  million  d'individus  deç  deux 
sexes  ,  et  tous  Français  ! . .  •'.  moissonnés 
dan§  cett€  malheureuse  guerre  de  la  Vendée , 
au  nom  de  la  royauté,,,,.,  de  la  religion.. •• 
de  la  liberté,... 

Mais  tirons  le  voile  sqr  tant  d'atrocités  : 
elles  fatiguent ,  elles  suffoquent  Fâme  ;  elles 
font  rougir  Thumanité.    ' 

Carrier  s'éloigne  enfia  de  Nantes  ,  où 
îl  laisse  encore  par- tout  les  ineffaçables 
monumens  de  sa  cruau-té  !  Les  Nantais  ,  à 
qui  son  absence  permit  de  renaître  au  sen- 
timent de  la  vie  ,  n'en  sentirent  que  plus 
vivement  la  profondeur  de  leurs  plaies; 
Il  n'était  pas  de  famille  qui  ne  fût  dans  le 
deuil  y  et  qui  ,  dans  l'excès  d'un  juste  dé-î 
sespoir  ,.  in 'exécrât  à  jamais  la  mémoire  dé 
ce  Tyran  et  de  la  Convention. 

La  haine  de  Carrier  pour  les  Nantais , 
n'est  pas  encore  éteinte  dans  son  cœur.- 

Des  Députés  de  cette  Commune  viennent 
à  Paris  solliciter  des  subsistances.  Carrier 
d'abord  leur  promet  de  les  aider.  Le  lende- 
main il  apprend  que  Fouqùet  et  Lambertj^ 
deux  de  ses  agens  les  plùs^ffidés  ,  pnt  été 
guillotinés.  Alors  il  s'emporte  contre  les 
Députés ,  les  menace  de  solliciter,  auprès 
de  la  Convention  l'installation  d'une  Com- 
^issÎQn  militaire  ,  u  qu'il  se  mettra  à  la  tête 


de  la  Vendée i  et  autres  circonvoisim.     S\\ 

55  et  qu  il  fera  roulef  toutes  les  têtes   des 
»  Nantais  sur  Féchafaud  national,  n 

Mais  le  fer  vengeur  mit  fin  à  ses  desseins 
criminels.  Le  Comité  révolutionnaire  de 
Nantes  traduit  au  tribunal  de  Paris  ,  accuse 
Carrier  de  touS  les  crimes  qu  il  a  commis. 
Le  peuple  ne  pouvant  contenir  sa  juste 
indignation  ,  le  demande  à  haute  voix.  La 
Convention  cède  presque  à  regret  aux  cris 
de  Thumanité  éplorée  >  qui  demande  ven- 
geance ;  et  après  avoir  épuisé  toutes  les 
formalités  de  la  garantie  accordée  aux 
Représentans  accusés ,  elle  le  livre  au 
tribunal  qui,  enfin,  par  jugement  du  6 
frimaire  ,  an  3  ,  {26  novembre  1794  J  le 
condamne  à  mort ,  et  purge  à  jamais  la 
société  d  un  monstre  qui  Ta  tyrannisée  ,  et 
qui  Ta  déshonorée  par  les  actes  les  plus 
révoltans. 

Voici  le  texte  du  jugement  r 

«<  Le  Tribunal,  après  avoir  entendu  la  déclaration 
5î  du  jury,  portant  1^.  qu'il"  est  constant  que ,  et  c. 
»  suit  une  énumération  très-longue  de  crimes  ^  (\rxi 
>j  se  trouvent  relatés  dans  l'historique  ci-dessus. 

"  *°*  QP^  Taccusé  Carrier  est  convaincu  de  s'être 
»»  rendu  coupable  de  tous  ces  faits^  ; 

>5  3^.  Qu'il  l'a  fait  dans  des  intentions  crimî- 
99  nelles  ; 

.  '*  4°-  Qj^^l  ^^'  également  constant  que  MoreaUy 
n  dit  Grankmais on ^  est  signataire  de  l'ordre  du  i5 
f^  frimaire ,  pour  noyer;  qu'il  a  conduit  les  détenu» 
>j  à  la  gabarre  ,  et  maltraité  les  victimes ,  en  leur 

V  3 


S42  Atrocités  commises  dam  la  Vendée  ^  àc* 

jj  coupant  les  doigts  à  cotips  de  sabre  ,  et  qu'iPest 
j»  convaincu  de  Tavoir  fait  dans  des  intentions,  crir 
jî  minelles  ; 

n  b^.  Que  Finard  est  convaincu  d'avoir  commis 
99  plusieurs  assassinats  de  femmes  et  d'enfans  ; 
»  d  avoir  volé  une  somme  de  40P0  liv. ,  et  d'avoir 
îj  incendié  plusieurs  habitation»,  et  qu'il  l'a  fait 
9>  dans  des  intentions  criminelles  ; 

jj  En  conséquence  le  Tribunal ,  après  avoir  en* 
n  tendu  l'Accusateur  public  sur  l'application  delà 
99  peine  ,  et  d'après  les  lois  par  lui  invoquées  , 
99  condamne  lesdits  Carrier^  Grandmaison  et  Pinard 
99  à  la  peine  de  mort,  et  déclare  leurs  biens  acquis 
»9  et  confisqués  au  profit  de  la  République  99. 

A  regard  des  autres  Accusés ,  les  faits 
furent  déclarés  constans  ;  mais  ils  furent 
acquittés  sur  la  question  intentionnelle,  O 
crime  de  la  jurisprudence  révolutionnaire! 
Des  hommes  convaincus  de  tant  d  atroces 
forfaits  ,  a  convaincus  d'avoir  ordoimé  les^ 
55  fusillades,  les  noyades;  dé  s'être  approprié 
99  les  dépouilles  de  leurs  victimes  jj  :  cette 
•  foule  barbare  d'Exécuteurs  reconnus  de  ces 
ordres^sanguinaires;  ctHéron  ,  u  convaincu 
55  d'avoir  assassiné  des  enfans ,  d'avoir  porté 
99  publiquement  à  son  chapeau  des  oreilles 
35  d'hommes  ,  etc.  également  massacrés  par 
jî  lui; 99  tous  ces  monstres  échappent  au  fer 
de  la  justice  ,  parce  que  leur  intention  n'est 

pas  supposée  contre-révolutionnaire! ' 

Tous  ces  forfaits  qui  ont  couvert  la 
révolution  de  sang  et  d'opprobre  ,  ne  sont 
pas ,  censés   les   plus  grands  des  attentats 


\ 


Précis  des  crimes  du  proconsul  Lehon.   343 

contre  la  révolution  elle-même  !  Ah  !  ces 
forfaits  sont  les  seuls  qui  n'admettent  pas 
d'excuses,  et  qu un  républicain  sincère  doit 
frapper  sans  pitié.  Le  prétexte  de  la  liberté 
ne  fait  qu'ajouter  à'  l'horreur  du  crime  qui 
l'usurpe  ,  et  la  république  ne  reconnaît  que 
la  vertu. 

JV.  5.  Ces  hommes  ne  sont  pas  les  seuls  cou- 
pables des  horreurs  commises  dans  la  Vendée. 

On  ne  doit  pas  oublier  que  le  malheureux  Phe- 
lippeauK  a  été  sacrifié  pour  avoir  voulu ,  au  mois  de 
mvôse  an  2  (janvier  1794  ),  dévoiler  au  Comité  de 
Salut  public  et  à  la  Convention  ces  atrocités.  Mais 
Phelippcaux  devait  savoir  que  le  Comité  de  Salut 
public  avait  ordonné  de  tout  exterminer. 

Précis  historique  des  crimes  comviis  à  Arras  , 
Cambrai  et  autres  lieux ,  sous  le  Proconsidat 
du  prêtre  Joseph  Lebon, 

liA  mission  de  Lebon  dans  les  Départe- 
mens  frontières  du  Nord  ,  peut  être  com- 
parée à  l'apparution  de  ces  noires  furies  si 
redoutées  dans  les  tems  du  paganisme» 
Comme  elles  ,  il  sème  sur  la  route  ,  les  poi- 
sons ,  les  serpens  et  la  mort.  C'est  dans  sa 
malheureuse  patrie  ,  dans  Arras  qu'il  en- 
tasse victimes  sur  victimes  ;  mais  avant  de 
parler  de  cette  Commune  ,  entrons  avec 
lui  dans  celle  de  Cambrai.  Son  redoutable 
tribunal  l'entoure.  Le  costume  de  chacun 
de   ses   Membres  ,   les  armes  meurtrières. 

Y  4 


344  Précis  historique  des  crimes 

dopt  ils  sont  couverts ,  ajoutent  à  leur  aîr" 
rebarbaratif  et  à  la  terrible  renommée  dont- 
ils  jouissent. 

L'arrestation  de  quelques  femmes  sans 
cocardes ,  signale  leur  entrée.  Ils  se  trans- 
portent au  département  où  ils  requièrent 
une  maison  toute  meublée  pour  le  Repré- 
sentant et  sa  suite.  Lebon  s'étehd  négligem- 
ment sur  un  fauteuil  ,  et  jette  ses  pouvoirs 
sur  la  table  ,  en  disant  :  Vous  me  connaissez 
sans  doute.  Cependant  ses  sbires  parcourent 
la  salle.  Ils  trouvent  par-tout  des  emblèmes  ' 
de  la  Royauté.  Ici  c'est  une  rosette  suspen- 
due à  un  lustre  qu'ils  transforment  en  fleurs 
de  lys.  Là  c'est  une  vieille  carte  d'Angle- 
terre colée  derrière  un  tableau.  Les  armoi- 
ries de  ce  royaume  qu'on  y  voit  encore  , 
excitent  les  emportemens  de  ces  furieux*. 
Ils  crient  à  la  guillotine.  Lebon  ,  son  sabre 
à  la  main  qu'il  agite  d'une  manière  épou- 
vantable ,  se  promène  à  grands  pas  dans  la 
salle  et  se  répand  en  imprécations  et  en 
juremens  affreux  contre  les  Administrateurs, 

A  la.  Municipalité  il  déploie  la  même 
impudence.  JSTy  a-t-il  ici ,  demande-t-il  , 
ni  nobles  ,  ni  prêtres  ?  Il  n'y  a  ni  nobles  ,  ni 
ex-prêtres,  répond  avec  assurance  un  Muni- 
cipal. Le  mot  d'ex-prêtre  heurta  peut-être 
avec  trop  de  violence  le  passionné  Lebon.  Ce 
Magistrat  fut  destitué  et  envoyé  enprison. 


commis  ious  le  proconsul  J.  Lebon.    345 

Le  même  scandale  Taccompagne  à  la 
Société  populaire.  Qjiel  est  le  Monsieur , 
dit-il ,  qui  monte  à  la  tribune  ?  Il  ny  a  point 
ici  de  Monsieur  ;  nous  sommes  tous  égaux  , 
xépond  un  Sociétaire,  et  Egaux  !  qui  de  vous 
3j  oserait  se  dire  mon  égal  ?  moi ,  le  Repré- 
-39  sentant  de  26  raillions  d'hommes  î  95 

Sa  présence  opprime  déjà  les^  maisons 
darrêt.  Le  Concierge  reçoit  Tordre  de 
n  obéir  à  aucun  acte  de  mise  en  liberté , 
sans  en  référer  au  trit>unal  révolutionnaire. 
Toutes  communications  au-dehors  sont  dé- 
fendues ;  en  vain  on  insiste  pour  que  le 
perruquier  aie  la  liberté  dy  pénétrer,  u  Je 
j>  mp  charge  ,  dit-il  ,  de  faire  raser  les 
99  détenus  avec  le  rasoir  national.  99  Veut- 
on  lui  mettre  sous  les  yeux  quelques  pièces 
en  faveur  des  détenus  :  t^  Je  n'ai  pas  besoin 
99  de  vos  preuves ,  je  m'en  rapporte  à  ce 
îî  qu'on  m'a  dit  ;  il  faut  qu'il  y  passé.  99 

Avant  d'aller  plus  loin  ,  fesons  connaître 
les  individus  quïl  associe  à  ses  brigandages  , 
et  précisons  quelques  faits  qui  leur  sont 
particuliers. 

Célestin  Lefetz ,  vice-président  du  district 
d'Arras,  ex-Génovéfin,  ensuite  prêtre  cons- 
titutionnel ,  fondé  de  pouvoirs  du  Repré- 
sentant du  peuple ,  brise  les  scellés  ,  pille 
les  effets ,  et  viole  toutes  les  lois  de  la  dé- 
cence en  fouillant  les  détenus. 


346         Trécis  historique  des  crimes 

Hidoux  n'apposait  jamais  de  scellés  cm 
présence  des  parties  intéressées.  Il  vient 
arrêter  une  femme  perdue  de  ses  membres 
depuis  huit  ans  ,  et  la  traîne  sur  un  matelat 
le  long  deTescalier,  en  lui  disant  :  «4  Crèves, 
99  vieille  garce ,  nous  aurons  plutôt  ton  ' 
bien. 

Gamot ,  ex-procureur,  s'offrait  de  trouvet 
des  papiers  à  la  charge  des  détenus  ,  si  ToO 
se  trouvait  embarrassé  pour  les  condamneiT» 

Warnier  ,   administrateur  du   district 
et    Ausart ,    Tagent  national ,  tous  deu^ 
ex-Oratoriens ,  brisaient  les  scellés  et  cro — 
chetaient  les  portes. 

Bacqueville  ,   meunier  ,    homme  d'un^ 
naturel  très-bouillant ,  disait  à  la  Société^ 
populaire  ,     comme      on     y    parlait     de 
l'embarras  qui  résultait  du  ^rand  nombre 
des  détenus  :  //  ny  a  pas  tant  d'affaire  ,  il 
faut  tout  guillotiner. 

Duponchel,  ancien  laquais  ,  homme 
ignare,  nommé  à  la  place  du  Maire  d'Arras, 
donna  Tidée  de  faire  périr  les  prisonniers 
en  masse  :  a  Qu'on  me  demande  ma  signa- 
55  ture  ,  s'écriait-il  ,  pour  les  faire  fusiller  , 
55  je  suis  prêt  à  la  donner  ,  car  c'est  un 
5)  tas  de  gueux.  55 

Jouy  ,  juré  ,  à  l'époque  du  9  ther- 
midor ,  dit  publiquement  :  a  Qiie  la 
n  Convention  était  plus  scélérate  que  les 


commis  sous  le  proconsul  J.  Lebon.     347 

w  deux  Robespierre  ;  qu  il  n'y  avait  pas 
>î  d'autres  moyens  pour  les  sauver  que  de 
»  se  porter  aux  maisons  d'arrêt  pour  y 
9i  assassiner  tous  les  prisonniers  ,  parce 
♦j  que  c'était  des  prisons  que  sortaient  les 
»  conspirations,  n 

Danel  ,  chirurgien  ,  jure  ;  le  Directeur 
de  rhôpital  lui  avait  refusé  son  paiement 
à  raison  de  son  ignorance,  m  Eh  bien  !  P9l 
?5  dit  Danel  ,  je  vais  aller  trouver  Lebon  ^ 
n  je  gagnerai  davantage  à  faire  guillotiner.»» 
Lebon  fut  très-content  de  ce  nouveau  pro- 
sélyte, u  C'est  ,   dit-il  ,  un   de   ces  b 

»»  à  poil ,  comme  il  m'en  faut  ;  j'aime  à  les 
jj  trouver  tout  façonné  pour  la  mort.  »» 

Caubrières  ,  juré  et  accusateur  public  , 
fils  d'un  valet  de  caserne  ;  il  avait  puisé  son 
éducation  au  milieu  des  corps-de-garde.  Il 
citait  toujours  la  terrible  maxime  de  Saint- 
Just  :  La  révolution  est  un  coup  de  foudre  ,  il 
faut  frapper. 

Darthé ,  homme  de  loi  à  Saint-Pol  ,dans 
la  prétendue  conspiration  de  Boulogne , 
fit  guillotiner  un  vertueux  père  de  famille  ; 
et  le  soir  ,  les  mains  encore  fumantes  du 
sang  de  cet  infortuné  ,  il  ose  les  présenter 
à  une  de  ses  filles  en  la  forçant  de  danser 
avec  lui. 

Lemire  ,  perruquier  ,  juré  au  tribunal  ; 
ce  monstre  n'avait  que  le  mot  gnillolinc  à 


348  Précis  historique  des  crimes 

la  bouche  :  c*  On  avait  eu  tort ,  disait-il  n 
9J  jour ,  d'avoir  suspendu  son  activité  ;  car; 
9>  si  on  l'eût  encore  laissé  aller  trois  mois, 
«  on  aurait  commencé  à  être  tranquille.»» 
Il  fut  le  dénonciateur  de  la  famille  Mayoul- 
sur-Saint-Leger  ,   dont  la  fin  tragiquç  est 
rapportée  plus  bas.  On  lui  demanda  lors 
de  ce  jugement ,  s'il  y  en  avait  beaucoup  à 
gpuillotiner  ce  jour-là.  Toute  la  sacrée  sequelU 
y  passera  ,  répondit-il.  Un  autre  Citoyen  k 
questionne  à  son  tour  ,  pour  savoir  s'il  n'est 
pour  rien  dans  cette  affaire.  Je  suis  leur  dé^ 
nonciateur  ,  ajoute- t-il.  —  Mais  tu  restes  i 
à  ce   que  je  crois ,  chez  elle.  —  Oui  ,  j'y 
reste  ;  je  boirai  leur  vin  ,  et  je  les  ferai 
encore  guillotiner. 

Rémi.  C'était  la  perle  des  jurés.  Lebon 
l'appelait  son  petit  canarien  ,  allusion  à  un 
habit  jaune  qu'il  portait.  Sa  vie  publique  ;  à 
Bapaume  ,  n  avait  été  qu'un  tissu  de  crimes. 
A  Cambrai ,  il  criait  sur  la  place  :  »5  II  y 
55aura  au  moins  600  têtes  qui  tomberontici 
y 9 par  mois.  Il  est  bien  étonnant  qu'on  ne 
59  vienne  pas  nous  dénoncer.Il  faut  que  nous 
îîsoyons  dénonciateurs,  témoins  et  juges.  » 
Intime  avec  le  bourreau  ,  Petitpierre ,  il  en 
recevait  différentes  hardes  ,  ainsi  que  sa 
digne  cohorte.  Lebon  avait  la  montre  du 
citoyen  Bourdon  ;  sa  femme  ,  le  collier  de 
la  citoyenne  Rauguilly  ,  et  c.  etc.  Lebon  ne 


f. 


commis  sous  le  pro consul  J.  Lebon.     3^g 

^-/7J  roulait  laisser  subsister  qu  une  quinzaine  de 
Êuniiles  dans  Cambrai.  Elles  suffisaient  , 
i  son  avis  ,  pour  soutenir  cette  ville. 

Parmi  cette  bande  de  voleurs,  Taccusa- 

tcur  public  ,  Caron  ,  beau-frère  de  Lebon  ,        ^^ 

y  tient  une  place  remarquable.  C'est  lui  qui 

fait  des  signes  aux  jurés  dans  le  cours  des 

débats  ,  c'est  lui  qui  dresse  les  actes  d'accu- 

âation.    Son  Secrétaire  lui  demandait   un 

jour   sur  quels   chefs    il  baserait  un   acte 

d^accusation.  Aristocrate  ,  dit  Caron. — Arîs- 

tiocrate  ,  c'est  bientôt  dit.  —  Eh  !  f....  bête  ! 

«n  met  aristocrate  enragé^  anti-maratiste ^ 

9nodéré .,  et  c.   L'ex-capucin ,  Pottier  ,   son 

<:ollègue ,   un   misérable    vuidangeur,    le 

cousin  de  Robespierre ,  Carreau  ,  et  trois 

ou  quatre  oncles  de  la  femme  de  Lebon ,  se 

£rent  principalement  distinguer  par  leurs 

T>rigandages  et  leur  cruauté. 

L'huissier  André  mérite  de  trouver  ici 
sa  place.  Chargé  de  la  surveillance  des 
xnaisons  d'arrct ,  il  s'y  transportait  souvent 
a.vec  réponse  de  Lebon  et  ses  frères.  Cha- 
cun d'eux  fesait  éprouver  des  outrages 
sans  nombre  aux  détenus.  André  chasse 
"€me  mère  qui  attendait  son  enfant  qu'elle 
^vait  conduit  à  son  mari  incarcéré.  Il  disait^ 
^n  la  frappant  à  coups  de  pieds  :  La  révo-- 
dution  est  un.coup  de  foudre  ,  il  faut  frapper^ 
Cet   Huissier    se  plaignait  de    ce    que 


35o         Précis  historique  des  crimes 

Cambrai  n  était  pas  à  la  hapteur,  qu'il  y 

avaitune  foule  d'aristocrates  à  raccourcir  f 

1»  Car ,  disait-il  ,  lorsque  le  tribunal  acquitte 
quelques  accusés  ,  les  spectateurs  manifestent  leur 
joie  ;  quand ,  au  contraire,  il  y  en  a  de  condanméi, 
il  régne  parmi  eux  un  morne  silence.  C'est  de 
l'aristocratie.  En  conséquence  ,  on  va  faire  venir 
»à  grande  force  des  accusés  des  autres  Communes) 
pour  accoutumer  les  habitans  de  Cambrai  à  ce 
spectacle;  après  cela,  on  frappera  les  grands  coups, 
et  quarante  à  cinquante  têtes  de  scélérats  tombe- 
ront chaque  jour  »». 

Comme  les  jurés ,  il  spéculait  sur  les  dé- 
pouilles des  détenus  ,  il  les  invitait  à  se  vêtir 
de  leurs  meilleurs  habits  ,  et  à  prendre 
leurs  bijoux  ;  on  le  vit  même  traiter  dure- 
ment le  citoyen  Limeliette  qui ,  au  moment 
de  monter  au  tribunal ,  avait  mis  sa  lAônt'^c 
dans  la  poche  du  nommé  Lévêque.  André' 
fouille  ce  dernier  :  «t  C'est  toi ,  dit-il ,  Scé- 
5J  lérat ,  qui  a  pris  sa  montre.  Voyez  ces 
59  coquins  d'aristocrates  ,  ils  sont  voleurs 
55  jusques  sur  Téchafaud.  55 

Le  tribunal  révolutionnaire  était  en  acti- 
vité. Lebon  ,  pour  se  soustraire  aux  sollici- 
tations ,  fait  mettre  sur  sa  porte'  cettef 
inscription  :  «t  Ceux  qui  entreront  ici  pour 
55  demander  l'élargissement  des  détenus  , 
55  n'en  sortiront  quepour^ller  en  prisori.'sj 
En  effet ,  tous  ceux  qui  osent  l'aborder  , 
subissent  cette  peine. 

Lebon  ,  un  jour  de  fête ,  se  transporte 


commis  sous  le  proconsul  J.  Lebon.     55 1 

fax  la  place  des  exécutions  ,  où  par  un 
effet  de  son  goût  barbare  ,  Torchestre  était 
placé  à  côté  de  Téchafaud  :  44  Jeunes  filles  , 
n  dit-il  à  celles  qui  s'y  trouvaient ,  n'écoutez 
>j  pas  toujours  vos  mères  ,  suivez  la^  voix 
9y  de  la  nature  ,  livrez-vous  ,  abandonnez- 
»j  vous  dafns  les  bras  de  vos  amans.  >> 

Par  TefFet  de  ses  suggestions  perfides  , 
une  troupe  de  jeunes  enfans  menaient  une 
conduite  des  plus  licencieuses.  L^athéisme . 
^t  la  négligence  de  tous  devoirs  leur  atti- 
xaîent  les  monstrueux  éloges  du  Proconsul. 
ies  menaces ,  les  prières  des  parens  étaient 
infructueuses.  On  en  vit  même  d'assez 
liardis  pour  dire  aux  auteurs  de  leurs  jours 
<]u  ils  les  dénonceraient  aux  Représentans  , 
sHls  recevaient  le  moindre  mauvais  traite- 
ment dé  leur  part.  Ils  traitaient  leurs  mères 

de  b ,  de  s putains ,  à^ aristocrates. 

Plusieurs  d'entr  eux  formaient  une  garde  à 
Lebon^  et  criaient  sans  cesse  :  Vive  Joseph 
Lebon  !  Déjà  familiers  avec  le  sang ,  quel- 
ques-uns avaient  de  petites  guillotines  avec 
lesquelles  ils  s'amusaient  à  donner  la  mort 
à  des  oiseaux  et  à  des  souris.  Le  jeune 
Damiens  ,  âgé  de  i3  ans,  correspondait 
avec  d autres  enfans  de  son  âge,  et  s'infor- 
maitauprès  d'eux  de  ce  que  disaient  leurs 
parens  sur  tel  ou  tel  événement.  Lebon 
lavait  chargé  d'ouvrir  les  lettres  a  la  poste ,' 


352         Précis  historique  des  crimes 

et  sa  femme  prêtait  souvent  son  ministère  Je! 

à  cette  opération. 

Le  spectacle  de  cette  ville  fut  bientôt 
soumis  à  sa  surveillance  immédiate  ;  s'éta- 
blissant  le  censeur  des  ouvrages  dramati- 
ques ,  il  les  défigure  par  les  retranchemens 
qu'il  y  fait.  Dans  YEpoux  Républicain  ,  il  fit 
rayer  cette  phrase  :  Mes  amis ,  ne  jugez  point 
vos  frères  sans  les  entendre.  Il  chassa  de  la 
scène  les  meilleurs  articles  ,  et  finit  par  \^ 
rendre  déserte. 

Des  femmes  ne  s'étaient  pas  ,  un  jour  ^ 
levées  à  son  arrivée  :  C4  Voyez  ,  ces  musca  ^ 
55  dines  ,  ditAl  ,  autrefois  on  se  précipL^^^ 
»>  tait  au-devant  d'un  Prince  pour  lui  oStit^ 

55  sa  place  ,  ces  b.... -là  ne  se  dérangent:^ 

55  pas  pour  le  Représentant  de  25  millions 
55  d'hommes.Tonnerre  de  Dieu  !  je  les  ferai 
55  f.,..,  en  arrestation  pour  leur  apprendre 
55  le  respect  qu'elles  me  doivent.55 

Souvent  au  milieu  du  spectacle  ;  il 
s'élançait  sur  la  scène  ;  et  tirant  son  sabre , 
il  l'agitait  avec  fureur,  et  les  spectateurs 
quittaient  un  lieu  qui  était  devenu  l'arène 
de  ce  gladiateur.  D'ordinaire  il  remplissait 
les  entr'actes  par  ses  discours  au  peuple 
sur  la  loi  agraire  et  sur  l'éducation  des 
en  fans. 

L'établissement  de  cette  loi  agraire  est 
l'appas  grossier  qu'il  tend  aux  habitués  de 


lommis  sous  le  proconsul  J.  Lebon.     55$ 

5â  Société  populaire.  c<  Il  y  a  assez  long-tems, 
J5  Sans-Culottes ,  s'écrie-t-il  ,  que  vous  ha-. 
5t.  bitezdes  caves  ;  c'est  pour  vous  ces  belles 
9i  maisons  ,  ces  hôtels  d'aristocrates  à  guil- 
M  lotinen  m  Trouvant  le  code  révolution- 
naire trop  lent  à  son  gré,  il  annonce  qu  il  a 
dans  les  mains  un  expédient  plus  propre  à 
les  faire  jouir  sans  délai  des  bienfaits  de 
cette  loi  :  c'est  la  guillotine.  Alors  il  excite 
le  peuple  à  la  délation. 

a  Dénoncez  hardiment,  dit-il,  pour  quitter  plutôt 

»j  vos  chaumières ,....  Sans-Culottes.  C'est  pour 

«  vous  qu'on  guillotine  ;  si  Ton  ne  guillotinait  plus 
jj  vous  mourriez  de  faim.  Il  faut  que  lc3  Sans- 
i>  Culottes  prennent  la  place  des  richesjadis  ceux-cî 
«  se  divertissaient  toute  la  journée.  Eh  bien!  Sans- 
n  Culottes,  ce  doit  être  assez  pour  vous  de  travailler 
99  désormais  la  moitié  de  la  journée  ,  et  de  vous 
9>  délasser  le  reste  du  tems. 

'99  Te  voilà  bien  embarrassé  ,  f. bête  ,  dit-il 

99  un -jour  à  un  particulier,  qui  se  plaignait  de  sa 
99  misère  ;.  n'y  a-t-il  pas  quelqu'un  dans  ta  rue  qui 
99  soit  riche  ,  noble ,  gros  marchand  ;  viens  me  le 
99  dénoncer  -,  je  te  donnerai  sa  maison  ,  tu  y  de- 
99  meureras ,  tu  auras  tout  à  gogo. 

Dans  cette  sociétç  populaire  ,  Leroux 
parlait  de  mettre  la  fusillade  à  Tordre  du 
jour,  Lebon  voulait  un  2  septembre; 

a  II  ne  faut  conserve!'  ici^  s'écriait-il,  que  des  hommes 

99  énergiques  ,   des  h à   poil  ^    sur  qui  la  patrie 

99  puisse  compter.  Les  instans  sont  critiques  , 
99  l'aristocratie  lève  la  tête  ,  il  viendra  peut  -  être 
J9  un  instant  où  il  faudra  agir  vigoureusement.  Il 
99  n'est  peut-être  pas  éloigné  ;  il  faudra  tomber  sur 
tome  VI.  Z 


354         Précis  historique  des  crimes 

99  les  prisons  ,  ajoutait-il  en  fesant  briller  son  snbr*^ 
5»  et  égorger  tous  les  scélérats  qu'elles  renferment  *• 
$9  ils  conspirent ,  et  c.  ,  et  c. 

Nous  allons  citer  ici  quelques  traits  o  ^^ 
ce  Proconsul  a  développé  toute  Thorreif-  ^ 
de  Tarbitraire,  Nous  le  verrons  foulant  au^^ 
pieds  toute  espèce  de  pudeur,  traîner  lui  -*• 
même  dans  les  cachots  des  citoyens  que  1^^ 
hasard  présente  à  ses  regards.         ^ 

La  citoyenne  Omoran,  dont  le  mari  avaic==^ 
été  guillotiné  ,  venait  à  Arras  pour  déposeï — ' 
dans  une  affaire  criminelle.  Lçbon  la  faît:::^ 
conduire  au  Comité  avec  cette  note  :  t«  Le^ 
99  comité  de  surveillance  dira  pourquoi  la 
99  femme  du  guillotiné  Omoran  n'est  point 
»5  encore   en  arrestation.  99    Cette  femme 
ayant  justifié  de  la  citation,  le  Comité  crut 
devoir  faire  quelques  observations  à  Lebon* 
«fi  Ce  ne  sont  point  des  images  que  je  vous 

5>  demande  ,  dit-il ,  c'est  de  la  f en 

>5  prison.  9j 

Le  beau-frère  de  Lebon ,  Régnier ,  arrête 
et  conduit  à  la  Municipalité  une  femme  qui 
avait  vendu  du  vin  au-dessus  du  maximum. 
Le  citoyen  Brabant  ,  officier  municipal , 
lui  fait  subir  un  interrogatoire  ,  et  la  met 
en  liberté.  Régnier  s'emporte  contre  lui ,  le 
menace  ,  et  court  avertir  Lebon.  Celui-ci 
se  transporte  aussitôt  à  la  Maison  Com- 
mune ,    saisit   fortement  Brabant   par   le 


commis  sous  le  proconsul  J.  Lebon.  555 
collet ,  Tentraîne  sur  la  place  ,  Fexpose  aux 
regards  du  peuple  ,  en  disant  :  Voyez  comme 
vos  Magistrats  font  leur  devoir.  Il  le  fait 
ensuite  conduire  à  la  maison  d  arrêt. 

Chamonat ,  marchand  de  vin  ,  est  incar- 
céré ,  parce  qu  il  ne  salue  pas  Lebon.  Deux 
jeunes  filles  qui  sVtaient  mises  à  rire  en  le 
voyant  passer  ,  sont  traduites  au  corpsnde- 
^arde  pour  être  mises  en  arrestation.,  La 
citoyenne  Gamonet  est  traduite  au  dépar- 
tement par  ses  sbires  -,  Lebon  ordonne 
qu'on  la  fouille  :  on  lui  fit  ôter  jusqu'à  sa 
chemise. 

Lebbn  rencontre  la  fille  Gérard  ,  qui 
•allait  au  comité  faire  signer  son  passe-port  ; 
où  vas'tu?  qui  es-tu  ?  lui  demande-t-il.  Cette 
jeune  personne  répond  que  cela  ne  le  regar- 
dait pas.Conduite  au  Comité  par  ses  ordres, 
elle  est  pendant  quelque  tems  le  jouet  de 
ces  forcen'^s.  Lebon  la  fait  conduire  à  la 
maison  d'arrêt,  où  le  Concierge  ,  dès  sou 
entrée  ,  la  désigna  comme  un^.  fille  pour  la 
guillotine.  Elle  fut  tellement  affectée  de  cç 
propos  ,  qu'elle  faillit  perdre  la  vie.  Son 
père  et  sa  mère  sont  arrachés  de  leur  domi- 
cile et  chargés  de  fers. 
;  Un  Juré  voit  un  jour,  dans  la  Commune 
ûe  Camblains  j  uncfemme  qui  ^iUaitait  sort 
enfant  à  la  porte  de  sa  chaumière.  Elle  n'a- 
vait point  de  cocarde  ;  il  lui   en  fait  un 

Z    2 


356  Précis  historique  des  crimes 

reproche  ,  en  la  menaçant  de  la  guillotîne^^^* 
Ci  Est-ce  quon  gxdllotine  pour  cha  ,  répon    -*^ 
^5  la  paysanne  ?  Je  r  viens   de   ché  camps 
99  et  je  voie  y  retourner;  nai  mi  besoin 
«j  cocarde  pour  ouvrer..  — Quoi ,  b.  •  •  .  .  . 
9J  reprend  le  Juré  en  colère  ,  lu  réponds 
55  je  vais  à  Arras  ,  je  te  ferai  guillotiner.  - 
fî  Eh  bien  !  va  ,  si  tu  me  fais  guislotiner  pot 
|5  cha  ,  m  a  ben  raison  d'dire  quen  eu  guilU 
»>  tine  à  Arras  qui  sont   aussi  innochens  que 
>5  ch  Vinnochent  que  je  tiens  dans  mes  braux.^y 
Elle  fut  incarcérée  et  guillotinée  quelques 
jours  après. 

La  citoyenne  Desvignes  et  sa  fille  ,  assises 
sur  le  rempart  d'Arras  ,  s'occupaient  à  lire 
Clarisse  Harlowe.  Lebon  lâche  près  d'elles 
tin  coup  de  pistolet  ;  et  ,  sansleur  donner 
le  tems  de  revenir  de  leur  frayeur ,  il  ren- 
verse la  fille  d'un  coup  de  poing  dans  l'es- 
tomac ,  arrache  le  livre  des  mains  de  la 
mère ,  en  la  menaçant  de  l'assommer  "du 
pomeau  de  son  sabre.  Il  ordonne  ensuite 
à  la  fille  d'ôter  son  mantelet  et  son  mou- 
choir ;  il  lui  plonge  sa  main  dans  le  sein  , 
et  la  retire  en  l'égratignant  ;  et  après  l'avoir 
palpé  avec  indécence  ,  il  lui  enlève  les 
boucles  d'argent  qu'elle  avait  à  ses  souliers. 
Leur  porte-feuille  contenait  quelques  gra- 
vures grossières  d'un  almanach  de  Milan  ; 
elles   furent  aux  yeux  de  Lebon  des  em- 


commis  sous  le  proconsul  J.  Lebon.     35t 

Hêmes  de  la  royauté  :  ce  qui  causa  la  tra- 
ducdon  de  ces  femmes  dans  une  maison 
d'arrêt.  Il  les  conduisit  lui-même  à  la  Pro- 
vidence. La  fille  Desvignes  voulait  lui  faire 
quelques  observations  en  .chemin  :  u  Eh  ! 
5  5  marches  donc;  tu  es  bien  familière,  lui, 
9j  disait-il  en  Tcn traînant  avec  plus  de 
9  9  rudesse,  >>  L'ivresse  avait  présidé  à  cette 
action  brutale  ,  car  ,  le  lendemain  ,  nen 
conservant  aucun  souvenir ,  il  fit  mettre 
oes  deux,  citoyennes  en  liberté. 

Au  mois  de  février  ,  Lebon  rencontre  , 
sur  les  cinq  ou  six  heures  du  soir ,  le  citoyen 
Payen  ,  fepnier  des  environs,  u  Oit  vas-tu  ^ 

99  lui  dit-il,  —  A  JSfcuvillc.-" Descends 

9  9  Tes  poches  ?  ton  porte  -  feuille  ?  »>  Le  fer- 
mier donne  son  habit  ,  qu'on  lui  retient  , 
ainsi  que  son  cheval.  Quelques  pas  plus 
loin  ,  Lebon  apperçoit  un  autre  fermier  : 
€4  Voici  encore  ,  dit-il  ,  un  de  ces  fermiers 

99  à  grosses  bottes A  bas  î  jj  On  lui  fit 

les  mêmes  questions  ,  et  il  subit  le  même 
sort  :  c'était  le  troisième  qu'il  avait  dévalisé 
dans  la  soirée.  Lebon  les  conduisit  lui-même  ^ 
au  département.  Il  ne  lui  manquait  que  ces 
expéditions  nocturnes  pour  le  rendre  cour 
pable  de  tous  les  genres  de  crimes.  Rémi 
avait  dès  long-tems  fait  ses  premières  armes 
sur  les  grandes  routes.  En  1791  ,  il  avait 
aiYeté   un  fermier  >  en  lui  demandant  la 

2  3 


358  Précis  historique  des  crimes 

bourse  ou  la  vie  ;  n^ais  ,  renversé  par  le 
robuste  cultivateur  ,  il  avait  échoué  dans 
ses  criminels  desseins. 

Gilles  et  Garlier  ,  agens  de  Lebon  ^ 
arrêtent  le  citoyei:i  Vasseur  ;  son  écrou 
mérite  de  trouver  ici  sa  place  :  u  Le  Con- 
îî  cierge  de  la  maison  ditedes  Baudets^  y  esi-il 
>5  dit,  recevra  le  nommé  Vasseur ,  prévenu 
>5  d'être  complice  de  la  faction  des  intrigans 
55  qui  veulent  protéger  tous  les  crimes.  >> 
Ces  Commissaires  font  aussi  conduire  dans 
les  maisons  d'arrêt  des  enfans  en  bas  âge  ; 
ils  les  visitent  souvent,  cherchent  à  les  per- 
vertir ,  en  les  engageant  à  secouer  le  joug 
paternel.  Ces  malheureux  devinrent  par  la 
suite  le  fléau  le  plus  redoutable  des  prisons; 

La  conduite  perfide  de  Lebon  à  Tégard 
d'un  ex-,carmê  ,  doit  être  consignée  ici. 
Ce  Moine  ,  xonnu  sous  le  nom  de  Père 
Gérard  ,  logeait  chez  ses  tantes.  Il  ve- 
nait d'y  faire  conduire  une  assez  grande 
quantité  de  meubles.  Lebon  persuade  à  ses 
tantes  qu'elles  doivent  chasser  cet  homme  : 
ce  vieillard  ,  presqu'infirme  ,  est  alors  telle- 
ment tracassé  ,  qu'il  est  contraint  d'aller 
chercher  ailleurs  une  maison  hospitalière. 
A  peine  est-il  sorti  ,  qu'il  est  dénoncé 
comme  émigré  ;  Lebon  et  ses  tantes  par- 
tagent ses  dépouilles. 

Il  s'agissait  de  procéder  à  l'épuration  des 


tommis  sous  le  proconsul  J.  Lcbon.     S5g 

prisons  ;  la  société  populaire  fut  choisie 
pour  cette  opération.  On  avait  construit 
une  estrade  élevée  ,  sur  laquelle  les  détenus 
devaient  paraître  les  uns  après  les  autres. 
Lebon  présidait  à  leur  interrogatoire  ;  il 
s'adressait  ensuite  aux  Sociétaires  ,  pour 
s'informer  auprès  d'eux  si  le  détenu  était  . 
riche  ,  noble  ,  ou  agent  d'émigré.  Le  citoyen 
Gayette  fut  inculpé  de  royalisme  ,  sur 
l'attestation  de  Jouy  ,  qui  dit  l'avoir  connu 
au  collège  ,  et  qu'alors  il  en  professait  les 
principes  :  Lebon 'fit  écrire  le  mot  royaliste 
à  côté  de  son  nom.  On  rendait  justice  aux 
vertus  sociales  du  citoyen  Landa  ,  mais 
malheureusement  il  était  riche  :  emportez- 
moi  ce  bougre-là  ,  dit  aussitôt  Lebon.  Ce 
Proconsul  commande  à  un  prêtre  de  lui 
faire  voir  le  diable.  Des  religieuses  sont 
apostrophées  par  les  propos  les  plus  obs- 
cènes. De  jeunes  filles  sont  inculpées  d'aris- 
tocratie ,  parce  que  la  pudeur  leur  interdisait 
l'entrée  des  danses  et  des  orgies  qui  avaient . 
lieu  les  décadis  dans  le  temple  de  la  Raison. 
La  citoyenne  Bacqueville  ,  Tune  d'elles  , 
veut  observer  qu'elle  n'avait  pu  y  assister^, 
vu  sa  détention  :  44 Tais- toi ,  lui  dit  Lebon  ; 
99  tu  n'as  pas  la  parole  ,  tu  l'auras  à  l'Abba- 
95  tiale  (la  prison). 

Un  jeune  homme  ,  pour  se  soustraire  i 
la  réquisition ,  jouait  le  béat.  Ses  par  en  s  , 

Z  4 


36o  Précis  historique  des  crimes 

soit  tendresse  ou  esprit  de  fanatisme ,  sem- 
blaient partager  son  opinion.  Cette  famille 
est  conduite  à  la  société  :  t<  Voyons ,  dit 
55  Lebon  au  jeune  homme  ,  si  ton  Jésus- 
5)  Christ  te  sauvera  de  cette  affaire.  j5  II 
s'adresse  ensuite  à  la  mère  ,  en  criant  qu  il 
va  faire  un  miracle  ,  qu'il  va  faire  parler 
cette  vieille  ;  et  prenant  un  pistolet  à  sa 
ceinture  ,  il  la  couche  en  joue  :  u  Parle  , 
5)  ajoute-t-il  ,  où  je  vais  te  brûler  la  cer- 
55  velle.5>  Cette  femme  se  contente  de  lever 
les  yeux  au  ciel,  a  Voilà  comme  ils  sont 
<<  tous  ,  s'écrie-t-il  ;  ils  s'adressent  là-haut , 
55  comme  s'ils  pouvaient  en  obtenir  quel- 
55  que  chose.  55  Le  lendemain,  il  fît  publier 
à  son  de  trompe  que  cette  famille  serait 
guillotinée  dans  la  journée.  L'exécution: 
eut  en  effet  lieu  le  soir  ,  aux  flambeaux. 

Quelques  Membres  s'intéressaient  en 
faveur  du  prêtre  Aysart  ,  âgé  de  quatre- 
vingt-quatre  ans  ,  et  demandaient  sa  dé- 
portation. Lebon  observa  qu'il  ne  fallait- 
pas  suivre  ainsi  les  mouvemens  de  la  pitié; 
que  plus  ce  prêtre  Hait  vieux  ,  plus  son  aristo^ 
cratie  était  enracinée  ;  d'ailleurs  on  trouve- 
rait d'autres  moyens  pour  s'en  débarrasser. 
Alors  on  fixa  le  nombre  des  prêtres*  à  guil- 
lotiner à  dix  par  décade. 

L'indignation  publique  était  à  son  comble. 
Pour  la  comprimer ,  Lebon  avait  autorisé 


commis  sous  le  proconsul  J.  Lehon.      36 1 

ses  Agens  à  faire  incarcérer  toutes  les  per- 
sonnes jugées  inciviques  ,   même  hors  du 
district  d'Arras.  Le  Comité  exige  en  vain 
XJLVL  ordre  du  Représentant,  u  Si,  Icur-ré- 
»  9  pond  -  il  ,    vous    cherchez    d'éternelles 
»  5  formes   pour    sévir  contre    les  scélérats 
9  9  qui    nous    assassinent  ,    nous  «n'aurons 
^  3  jamais  fini.  Je  m'adresserai  à  des  hommes 
^  a  plys  dignes  que  vous  d'opérer  le  salut 
»  -à  public  95.  Prenant  ensuite  le  ton  du  des- 
Ji^ote  le  plus  absolu  ,  il  ajoute  :  uTout  in- 
*  3  dividu  qui  s'aviserait  de  transmettre  un 
^  ^  ordre  que  je  n'aurais  même  pas  donné 
^  ^  verbalement ,  paierait  sa  témérité  de  sa 
^5  tête  5>. 

Les  maisons  de  détention  étaient  en- 
combrées, Lebon  et  ses  Agens  avaient  mis 
tant  d  ardeur  ,  que  vingt  -  quatre  heures 
avaient  suffi  pour  cette  opération.  Le 
Comité  avait  reçu  un  ordre  des  plus  im- 
pératifs pour  faire  réincarcérer  ceux  que 
le  représentant  Laurent  avait  fait  mettre 
en  liberté.  Les  détenus  sont  privés  de  toutes 
les  consolations  qu'ils  reçoii^ent  du  dehors. 
Il  fut  même  défendu  à  ceux  de  leurs  do- 
mestiqueç  ,  dont  la  fidélité  ne  s'était  pas 
démentie  ,  de  les  approcher  davantage  : 
plusieurs  ,  même  ,  furent  incarcérés.  Cette 
rigueur  avait  été  précédée  par  l'arrêté 
suivant. 


562         Préuis  historique  des  crimes 

•    De  par  Joseph  Lebon^  le  iS  ventôse  an  9. 

a  Les  gens  détenus  comme  suspects  n'ont  p! 
f»  aucuns  besoins  ;  la  République  Us  nourrit  fi 
99  gaiement ,  partant  qu'on  ne  leur  laisse  aucui 
99  sommes. 

9J  Qji  il  soit  dressé  procès-verbal  exact  de  toui 
99  celles  qu'on  trouvera  chez  eux  ,  pour  leur  êi 
j>  rendues  dans  le  cas  ou  ils  seraient  élargis  ^  ( 
>>  pour  être,  dans  l'autre  cas,  versées  dans  le  tré» 
>>  public  î>.       y 

Lefetz  paraît ,  et  défend  de  ne  laissa 
entrer  aucuns  objets  ,  pas  même  des  corne 
tibles.  Du  pain  et  de  l'eau  sont  bans  pour  c 
bougreS'là  ^  dit-il.  Il  y  avait  deux  puits  dai 
Tune  de  ces  prisons  ,  on  ne  laisse  q\\t 
faculté  de  puiser  de  Teau  dans  celui  q 
était  infecté  par  le  voisinage  des  latrirre 

Il  s'agissait  cependant  d'exécuter  dai 
son  entier  Tordre  de  Lebon  sur  Tenlèv 
ment  des  sommes  appartenantes  aux,déi 
nus.  Le  8  février  1794  ,  une  force  arm 
imposante  est  introduite  dans  les  prison 
Les  Détenus  ont  ordre  de  descendre  da 
la  cour  ;  ils  sont  tous  fouillés.  Ensuite  ( 
place  des  factionnaires  à  toutes  les  isssu 
d,es  chambres.  44  Sentinelles  ,  dit  Lefetz  ai 
55  soldats  ,  si  un  de  ces  b.  .  .  .  là  avan 
55  pour  monter  ,  foutez-lui  la  baïonne» 
99  au  travers  du  ventre.  >9  Les  Commissaiî 
se  répandent  alors  dans  les  logemens  d 
Détenus  y  s'emparent  de    tous  les  corne 


commis  sous  le  proconsul  J*  Lebon.     363 

ibles  qui  s  y  trouvent ,  brûlent  pendant  la 
ttuit  leurs  bois  ,  et  ne  sortent  de  table  qu'à 
Jcpt'heures  du  matin,  gorgés  de  vin  et  de 
liqueurs.  Le  même  jour  ,  à  trois  heures 
ïprès-midi ,  ils  recommencent  leur  brigan- 
dage :  effets  ,  bijoux  ,  tout  devient  leur 
oroie  ;  ils  n'épargnent  même  pas  un  jeune 
înfant  de  cinq  ans  ,  dont  ils  déchirent  les 
oreilles  pour  en  retirer  les  anneaux. 

Des  femmes  ,  dépouillées  jusqu'à  la  che- 
nîse  ,  sont  en  butte  à  la  plus  insolente 
ubricité.  La  rougeur  qui  couvre  leurs  fronts 
ndique  leurs  alarmes  ;  elles  détournent,  en 
rémissant,  leurs  regards  de  Thomme  impu- 
iique  qui  les  outrage.  Il  poursuit  avec  opi-' 
liàtreté  ses  desseins  affreux  ;  sa  main  a  déjà 

itteint 6  4  Tu  pourrais  bien  y  avoir 

j  caché  quelques  papiers  suspects  ;  tu  en 

5  es  bien  capable î»  Voilà  le  motif 

lont  il  voile  ses  infâmes  procédés. 

Carreau  fouillait  une  jeune  fille  ;  elle 
)pposait  quelque  résistance  à  ses  projets 
:riminels.  Il  fait  placer  deux  sentinelles  à 
es  côtés  ,  avec  ordre  de  la  percer  de  leur 
baïonnette  au  premier  mouvement, 

Duponchel  soutient  à  une  autre  qu'acné 
rst  enceinte  ;  il  imite  sur  son  corps  le  pro- 
:édé  des  accoucheurs  :  4<  C'est  dommage  , 
9  dît-il  après  cet  outrage  ;  mais  il  faut  que 
>  tu  passes  à  la  guillotine.  « 


564         Précis  historiqicf  dei  crimes 

Les  hommes  n'étaient  pas  traités  d'une?    " 
manière  plus  décente  ;  il  fallait  qu'ils  missent 
bas  leurs  culottes  :  les  expressions  les  plus 
dégoûtantes  frappaient  leurs  oreilles  ,  tant 
^uils  restaient  entre  les  mains  de  ces  impu-' 
dens  voleurs.  Lefetz  enleva  la  bande  ^qui    ) 
couvrait  un  cautère  ,  parce  qu'il  prétendit 
qu  on  pouvait  y  cacher  des  assignats. 

Après  ces  scènes  révoltantes,  ils  se  ré' 
pandent  de  nouveau  dans  les  chanibre^  ^ 
font  main-basse  sur  tout  ce  qui  se  présente    ' 
et  ne  sortent  que  le  matin ,  après  s'être  repi^ 
des  provisions  qui  s  y  trouvèrent.  Les  Dé    ' 
tenus  avaient  été  forcés  de  passer  ces  deu^^ 
nuits  dans  la  cour  ,  exposés  à  un  froid  de^ 
plus  rigoureux.  Parmi  ces  scélérats  ,  il  s'en^ 
est  trouvé  d'assez  impudens  pour  se  faire< 
donner  une  décharge  par  le  propriétaire 
des  effets  volés. 

Les  prisonniers  n'avaient  pas  encore 
épuisé  la  fureur  de  leurs  bourreaux.  La 
porte  s'ouvre  une  troisième  fois  ,  avec  le 
"même  appareil  ;  on  enlève  les  femmes  ,  et 
on  les  conduit  à  la  Providence  ,  maison  de 
force  destinée  de  tout  tems  aux  prostituées, 
et  surveillée  par  la  nommée  Lemaire.  Cette 
mégère  prenait  plaisir  à  annoncer  le  sup- 
plice de  quelques-unes  d'entre  elles  ,  en 
disant  :  AtijonrcTInn  je  craches  du  sang. 

Au  départ  dés  femmes  pour  la  Provi-^ 


commis  sous  le  proconsul  J.  Lebon.     S65 

dence  ,  le  citoyen  Clément  traversa  la  cour, 
en  s'écriant  :  t<  Ma  femme  ,  ma  pauvre 
«>  femme  !  mes  £nfans  ,  mes  chers  enfansî 
«  Les  scélérats  !  ils  les  ont  enlevés  ;  ils  vont 

«  les  massacrer Je  n  ai  plus  rien  au 

»j  monde  ;  j'ai  tout  perdu,  je  veux  mourir,  ti 
Ces  accens  douloureux  fixent  Tattention 
des  Détenus ,  qui  se  pressent  autour  de  ce 
-père  infortuné.  11  frappe  tous  ceux  qui  rap- 
prochent ;  il  ne  veut  point  de  secours  :  il 
demande  la  mort.  Le  commissaire  Gilles 
arrive  ,  et  le  fait  plonger  dans  un  cachot. 
Ce  Père  respectable,  se  voyant  au  milieu  de 
la  garde,  revient  à  lui  ;  il  se  persuade  qu'on 
le  conduit  à  Téchafaud:  u  Mes  amis  ,  dit-il 
M  à  ceux  qui  Fentouraient,  je  suis  heureux, 
5>  je  vais  à  la  guillotine  ;  dans  un  quart- 
»5  d'heure  je  ne  serai  plus  ,  mes  maux  seront 
55  finis,  n 
Dans  l'interrogatoire  que  les  Commissaires 
fesaient  subir  aux  Détenus  ,  ils  regardaient 
le  silence  et  la  timidité  comme  une  preuve 
de  leur  haine  pour  la  révolution.  La  fanar- 
tîque  inquisition  ,  dans  ses  froides  ven- 
geances ,  ne  connut  peut-être  jamais  de 
moyens  aussi  perfides.  D'abord  ,  par  *des 
questions  insidieuses  ,  ils  s'efforcent  de  leur 
arracher  un  aveu  qui  peut  les  conduire  à 
Téchafaud,  en  assurant  qu'ils  ont par-deters 
eux  des  pièces  à  charge  ;:  que  la  moindrfc 


366  Préciy  historique  des  crimes 

dénégation  pouvait  leur  devenir  funeste  ; 
et  que  ,  dans  le  cas  contraire  ,  on  regar- 
derait comme  une  erreur  les  faits  dont  ils 
étaient  accusés.  L'innocence ,  enlacée  dan> 
les  pièges  qui  lui  étaient  tendus  ,  et  inti- 
midée par  ces  prétendues  preuves  que  le* 
Commissaires  disaient  avoir  en  leur  puîs^ 
sance  ,  offrait-elle  dans  le  cours  de  ses  dé  ^ 
clarations  un  mot  ,  une  phrase  un  pf^ 
équivoque  ,  alors  on  dressait  un  procès  -^ 
verbal  dont  Lebon  tirait. parti  selon  se^ 
affections  sanguinaires. 

Les  Commissaires  se  font  également  un 
jouet  delà  pudeur.  C'est  aux  jeunes  filles^ 
qu'ils  adressent  les  paroles  les  plus  obscènes: 

«  Tu.es  bonne  à  f. ,  disait-on  à  l'une 

99  d'elles;  vois  si  tu  veux  me  le  permettre^ 
5>  si  non  tu  iras  à  la  petite  fenêtre.  îj 

Une  autre   est  criminelle  à  leurs  yeux  , 
,parce  qu'elle  n'a  pas   assisté   à  leurs  bals 
patriotiques  ;  elle  en  démontre  l'impossi- 
bilité j  vu  sa  détention,  u  Veux-tu  te  marier, 
jj  lui   demande   Duponchel  ,  peu  importe 
59  avec  qui?  55  Sur  une  réponse  affirmative, 
jl  rejp^ifend  j.-du  ton  le  plus,  terrible  :  «<  Tu 
«Vne  crains  donc  pas  la  mort?.  ......  Tu 

»  périras  dans  trois  jours.  ~  Tu  rie  yevifi 
?».. donc  pas  soi;tir-,  dit  à  son  tour  Bacque- 
55  ville  ?  >9  Elle  répond  qu  elle  le  veut  bien  , 
pourvu  giie  jse^  pareus  j.ouissent  du  même 


I 


commis  sous  le  proconsul  J.  Ltbon.     367 

1)ienfait  :    u  Tu   n'auras  bientôt   plus   de 
V  »  parens  ,  s'écrie  de  nouveau  4e   furieux 
^5  DuponcheL  ?)  Ce  colloque  épouvantable 
se  termine  par  les  propos  les  plus  indécens^ 
Tu  rougis  ,  lui  dit-on  ;  elle  a  de  la  pudeur  ^ 
ajoute  Caubrières  ;  cest  du  fanatisme ,  ré- 
plique le  médecin  Blondel.  Il  appartenait 
â  rimmoral  Duponchel  de   terminer  une 
scène    aussi     indécçnte  :    il    lui    soutient 
cju'eile   est   enceinte  ,   et  s'en  assure  ,   en 
j)arcourant  de  ses  mains  impures  le  corps 
^e  cette  jeune  vierge, 

Caubrières  savait  aussi  faire  tomber  Tin- 
nocence  dans  ses  pièges,  u  Je  viens  d'inter- 
fj  roger  plusieurs  individus  ,  disait-il  un 
«  jour  ;  c'est  comique  ;  je  ne  trouvais  pas 

M  de   quoi  les  faire  guillotiner  ;  mais 

«  vous  m'entendez par  de  certains  dé- 

»5  tours,  je  les  ai  si  bien  interloqués  ,  que 

>»  demain  leur  tête  tombera.  C'est  f. »> 

Ces  rapports  excitaient  long-tems  les  rires 
de  Lebon  et  ceux  de  sa  femme. 

Le  citoyen  Dauchez  venait  d'ê  tre  acquitté  ; 
quelques  jurés  l'embrassaient  pour  lui  té- 
moigner leur  joie.  Il  avance  vers  Cau- 
brières. Retires-loi ,  lui  dit-il  ,  fai  voté  ta 
mort.  Cette  réponse  lui  mérita  les  éloges 
de  Lebon  ,  dont  le  goût  antropophage  se 
décèle  à  la  réception  de  la  loi  du  22 
prairial,  u  A  la  bonne   heure  ,  s'écric-t-il  ; 


568         Précis  historique  des  crimes •   . 

»j  voilà  ce  que  j'attendais  ;  nous  pourrons 
5j  maintenant  faire  tomber  des  têtes.  » 

Ivre  de  sa  puissance ,  il  veut  en  reculer 
les  bornes.  C'est  dans  cette  intention  qu'il 
écrit  au  district  de  Saint-Omer.  Il  lui  re- 
cofnmande  de  Ténergie  et  du  courage,  et 
il  désigne  les  gens  riches  et  éclairés  comme 
autant  d'ennemis  de  la  République.  La 
Société  montagnarde  lui  fait  une  réponse 
qui  mérite  de  trouver  ici  sa  place. 

«  Le  fanatisme  de  la  religion  ,  le  fa- 
5>  natisme  de  la  royauté  ,  le  fanatisme 
5j  des  richesses  ,  et  tous  les  fanatismes 
î5  possibles  ,  dit-elle  ,  ne  cessent  de  faire 
5j  leurs  ravages.  Vous  avez  le  remède  qui 
35  convient  à  tant  de  maux  ;  c  est  la 
55  guillotine.  Elle  encourage  les  faibles  , 
95  soutient  les  chancèlans  ,  et  n'effraie  que 
»5  le  crime  ;  elle  sera  ici  en  pleine  activité , 
55  et  le  tribunal  de  notre  district  a  de 
35  quoi  l'alimenter  pendant  plusieurs  dé- 
35  cades  ,  et  c.  55 

Les  sinistres  desseins  de  Leboù  mena* 
çaient  même  Lille.  Il  parlait  d'aller  révo- 
lutionner cette  ville  ,  dans  laquelle  il  se 
proposait  de  faire  tomber  au  moins  4,000 
j^êtes. 

Une  caisse  remplie  de  couteaux ,  avait 
été   saisie  à  Boulogne,  Lebon   déroule  le 


commis  sous  le  proconsul  y.  Lebon.  36g 
ctêpc  de  la  mort  sur  cette  ville.  Ces  cou- 
teaux sont  transformés  en  poignards  des- 
!:înés  pour  une  vaste  conspiration.  Aussitôt 
les  détacheraens  de  la  bande  terrible 
Partent  pour  cette  Commune.  Les  arres-- 
ations  et  les  vols  pèsent  sur  plus  dun 
itoyen.  Darthé  était  un  des  envoyés  de 
^bon.  Un  Membrç  du  Directoire  du  dis-, 
rict  voulut  le  dissuader  de  cette  prétendue 
onspiration,  Darthé  se  fâche  ;  et  s'armant 
le  tpute  Tarrogance  de  Lebon ,  il  s'écrie  : 
(  Le.  district  est  composé  de  sacrés  modér 

%  rés Les  détenus  ont  l'esprit  aigri  ;  on 

♦  ne  peut  ramener  cette  sorte  de  gens  â 
3  l'amour  de  la  République  ;  il  faut  qu'ils 
9  pourrissent  dans  les  prisons  ;  nous  pren-s 
9  drons  des  mesures  à  la  Carrier,  m 

Lebon  avait  fait  le  rapport  de  cet  événe- 
ment à  la  Convention,  a  Vous  frémirez, 
M  d'horreur  ,  dit-il  à  la  fin  de  sa  lettre  , 
>5  j'attends  vos  ordres  ;  si  vous  voulez  que 
»  j'agisse  par  moi-même  ,  lâchez-moi  la 
»  bride.  Songez  aux  prisons  qui  regorgent* 
n  que  je  voudrais  faire  évacuer.  î^ 

Le  Comité  de  Salut  public  plein  de  cont- 
fiance  dans  ses  talens  révolutionnaires  ,  lui 
écrivît  plusieurs  lettres  ,  où  son  énergie 
puisa  continuellement  un  nouvel  aliment. 
Nous  allons  citer  ici  quelques  fragmens  4e 
cette  correspondance. 

tome  VI.  A  a 


^70  Précis  historique  des  crimes    , 

Paris  ,  ce  26  Brumaire  ,  Tan  2  de  la  République  fran^aiM* 

Xes  Représentans  du  peuple^  membres  du  Comité  de  Salut    1 
public  ,  au  citoyen  J.  Lebon^   Représentant  du  peïtplt 
dans  le  département  du  Pas-de-Calais, 

Le  Comité  de  Salut  public,  citoyen  Collègue  ♦ 
vous  observe  ,  qu'investi  de  pouvoirs  illimités  m,  v(?t*-^ 
jdevez  prendre  dans  votre  énergie  toutes  les  mesures  corn — 
mandées  pour  le  salut  de  la  chose  publique. 

Continuez  votre  attitude  révolutionnaire,  V AMnisti"^^ 
^prononcée  lors  de  la  Constitution  captieuse  et  invoqué^^ 
par  ious  les  scélérats^  est  un  crime  qui  ne  peut  en^ 
couvrir  d'autres  ;  les  forfaits  ne  se  rachètent  point  ^ 
contre  une  République ,  ils  s^ expient  sous  le  glaiv^.  Le 
Tyran  rinvoqua  :1e  Tyran  fut  frappé.  V.ôus  pouvez. 
Vous  devez  même  faire  acquitter  à  la  trésorerie  les 
frais  de  voyage  des  Députés  qui  sont  venus  dénoncer- 
les  projets  fédéralistes  ;  les  dénonciateurs  ont  bien 
mérité  de  la  Nation. 

^  Déjà  les  conspirateurs  s'arment  de  nouveau  contre 
elle ,  le  Comité  de  Salut  public  est  instruit  que  le 

})rojet  infe;rnal    de   livrer  les  places    de  première 
igné  existe. 

Portez  Tœil  de  la  surveillance  sur  tous  les  points, 
depuis  Dunkerque  jusqu'à  Maubeuge,  Le  centre  de 
ces  intelligences  paraît  être  Douay.  Dirigez  sur 
Douay  Tactivité  de  l'observation.  Souvenons-nou» 
de  Givet  et  des  trahisons. 

Secouez  sur  les  traîtres  le  flambeau  et  le  glaive^  marchez 
toujours^  citoyen  Collègue ,  sur  cette  ligne  révolutionnaire 
que  vous  décrivez  avec  courage.  Le  Comité  applaudit  à 
vos  travaux, 

.   Salut  et  fraternité  ,  les  membres  du  Comité  de  Salut 
public,  Barrère,  Carnot  ,  Billaud-Varennes. 

raris  ^  le,,..  Brumaire^  Billaud-Varennes  ^  seul,  écrit 
à  Lebon, 

^  *Le  Comité  de  Salut  public  applaudit  aux  mesures  que 
voui  avez  prises  ;  il  yous  obserye  que  les  autorisations 


commis  sous  le  procons^il  J.  Ltbon.    Sji 

tjue  vous  demandez  seraient  surabondantes.  Toutes 
€65  mesures  vous  sont  non-seulement  permises ,  mais  com^ 
mandées  par  votre  mission.  Rien  ne  doit  faire  obstacle 
à  votre  marche  révolutionnaire  ;  abandonnez- voua 
à  votre  énergie,  vos  pouvoirs  sont  illimités  :  tout 
ce  que  vous  jugez  convenable  au  salut  de  la  chose 
publique,  vous  pouvez,  vous  devez  le  faire  sur-le- 
champ. 

Nous  vous  adressons  un  arrêté  qui  étend  votre 
xnissicn  aux  départemens  voisins. 

Armé  de  ces  moyens,  de  votre  énergie,  continuez 
à  renverser  sur  eux-mêmes  les  projets  des  ennemis 
de  la  République. 

Salut  et  fraternité^  Billaud-Varennes. 

On  voit  par  ces  lettres  que  Lebon  a 
reçu  la  plus  grande  latitude  pour  continuer 
ses  opérations  révolutionnaires  :  aussi  tout 
est  en  activité,  a  II  dépêche  à  chaque  instant 
5j  des  gibiers  de  guillotine.  S'il  garde  le 
5j  silence,  c'est  tant  mieux.  Joseph  Lebon 
u  travaille  bien  fort....  Les  têtes  vont 
5j  tomber  comme  la  grêle.  »5 

Cependant  la  Convention ,  par  un  décret 
du  27  germinal ,  an  2  ,  (16  avril  1794  ) 
évoqua  le  jugement  de  tous  les  délits  révo- . 
lutionnaires  ,  au  tribunal  de  Paris.  Cette . 
nouvelle  fut  un  coup  de  foudre  pour 
Lebon.  Il  se  plaint  au  Comité  en  ces 
termes  :  C4  II  vient  de  nous  arriver  une  cir- 
»5.  culaire  qui  nous  jette  dans  Tembarras  ; 
99  mais  elle  ne  sera  communiquée  qu'aux 
$9  vrais   Républicains,  Si   vous  êtes   dang 

Aa  2 


372         Précis  historique  des  crimes 

>j  rintention  de  laisser  subsister  cet  arrêté  , 
55  commandez-moi  de  périr  ,  ou  rappelez- 
5j  moi  dans  le  sein  de  la  Convention  ;  assi- 
5)  gnez  aussi  un  asyle  aux  braves  qui  m'ont 
>5  secondés  ,  et  c.  n  Le  Comité  de  Salut 
public  maintient  le  tribunal  de  Lebon.  Le 
25  floréal  suivant ,  (  14  mai  1794  )  il  le 
,  mande  auprès  de  lui.  Par  cette  miissive  ; 
«  on  lui  rend  toujours  justice  de  Téner- 
5J  gie  avec  laquelle  il  comprime  leS: 
5j  ennemis  de  la  révolution  ;  mais  il  s'agit 
5>  de  la  diriger  d'une  manière  plus  utile  ; 
>>  c'est  de  ce  dont  on  Tinstruira  à  Paris.  55 

Mais  avant  son  départ ,  il  veut  repaître 
Ses  regards  dii  supplice  d'un  citoyen  que  sa 
vengeance  avait  déjà  signalé.  Jean-François' 
Payen ,  fermier  de  Neufville-la-Liberté  dont  ' 
Lebon  avait  été  curé  constitutionnel  , 
n'avait  jamais  voulu  assister  à  sa  messe.  ' 
Lebon  avait  adressé  à  la  Municipalité  Tar-  ■ 
rêté  suivant  : 

*6  Lebon  charge  les  OflBciers  municipaux; 
99  de  Neufville-la-Liberté  de  faire  arrêter 
55  et  conduire  au  Département  tous  ceux  ,  • 
99  mâles  et  femelles  ,  qui ,  en  92  et  g3  ,; 
55  n'ont,  pas  assisté  aux  messes  dès  prêtires' 
5j  constitutionnels  M  Sottise  nécessaire  de  ce' 
tems4à.  Payen  n'avait  pas  plutôt  été  arrêté' 
que  Lebon  se  transporta  dans  son  dotnî- 
cile  ,  et  dit  ;  u^^Me  voici  donc  dans  le  salon 


commis  sons  le  proconsul  J.Lebon.     3tS 

f5  de  Payen  :  qui  aurait  cru  ,  quand  j'étais 
35  curé  ,  que  je  serais  un  jour  le  maître  de 
99  cette  maison  ?  Oui ,  j'en  suis  le  maître. 
99  Payen  sera  guillotiné  ,  et. tout  ce  qui  est 
»5  ici  m'appartient  ;  il  faut  qu'on  m'obéisse.tf 

Lebon  fit  donc  traduire  Payen  ,  lié  et 
garrotté,  des  prisons  d'Arras  à  celle  de 
.Cambrai,  Il  arrive  à  huit  heures  du  matin* 
On  le  conduit  directement  au  tribunal  où 
on  le  condamne  sans  Tentendre.  A  dix 
heures  ,  il  n'existait  plus.  Lebon  n'eut  pas 
plutôt  vu  tomber  sa  tête ,  qu'il  partit  pour 
Paris. 

L'absence  du  Proconsul  ne  rabattit  rien 
de  l'audace  de  ses  agens.  Forts  des  secrets 
de  leur  indighe  maître  ,  ils  en  tirent  de$ 
pronostics  épouvantables.  Ils  fixent  l'atten- 
tion de  cette  Commune  tremblante  sur  la 
prochaine  arrivée  de  ce  tigre,  a  Çà  ne 
99  durera  pas  toujours ,  s'écriait  Rémi  ;  çà 
5j  ne  durera  pas  toujours  ;  Lebon  ,  à  son 
M  retour  ,  va  les  travailler  à  blapche 
»>  taille.  9  5 

En  effet ,  Lebon  paroît  et  annoncé  qu'il 
y  aura  au  moins  six  cents  têtes  qui  tombe* 
ront.  Instruit  des  vues  des  Tyrans  ,  il  se 
transporte  à  la  Société  populaire^  t*  Braves 
99  Sans-Culottes  ,  dit-il ,  je  vous  nourris 
9  9  dans  l'aisance  ;  je  vous  loge  dans  les 
M  maisons    d'aristocrates  ;  c'est  pour  vous 

Aa  3 


374  Précis  historique  des  crîmer 

55  que  la  guillotine  travaille  ;  jurez  de  mes 
55  soutenir,  55  II  exigea  un  serment  de  touss 
ces  membres  qui  Tentouraient  d'ordinaire^ 
çn  criant:  Vive  Joseph  Lebonl  . 

55  Le  Comité  de  Salut  public  m'a  reproché 
55  d'avoir  été  trop  mou,  trop  modéré, 
55  disait-il  hautement.  On  va  voir  ,  f...,,  , 
55  si  je  ne  suis  pas  à  la  hauteur.  55  Enfin  ^ 
selon  les  expressions  de  l'Accusateur  pu- 
blic ,  Darthé ,  dans  ses  lettres  à  Lebas  : 

ïj  Lebon  est  transporté  d'une  sainte  fureur  contre 
rînertie  qui  entravait  les  mesures  révolutîorfnaiTes. 
U  casse  son  tribunal  et  le  compose  de  soixante 
bougres  à  poil.  Les  détenus  sont  plus  étroitement 
claquemurés.  Les  têtes  des  aristocrates  tombent 
comme  grêle.  Lebon  est  sans  cesse  occupé  à  dresser 
des  actes  d'accusation.  Par  ses  ordres  ,  le  Comité 
cle  surveillance  a  fait  des  arrestations  sans  nombre 
à  St.  Pol.  Il  n'y  a  pas  un  de  ces  coquins-là,  observe 
Darthé  ,   qui  n'ait  mérité  d'étCinuer  dans  le  sac  99. 

Pour  que  la  guillotine  ne  désempare  pas  , 
Lebon  ordonne  à  chaque  Commune  de 
lui  envoyer  une  liste  des  principaux  con- 
tribuables. Voici  l'arrêté  qu  il  leur  fit  passer 
à  cette  occasion  : 

i<  Les  Agens  sont  requis  de  faire  dresser  de  suite 
une  liste  des  principaux  contribuables  de  leur 
Commune  ,  savoir  : 

lo  dans  celles  au-dessous  de  600  ârnes^ 

i5  dans  celles  de  600  à  2000. 

so  dans»  celles  de  «000  à  3ooo. 

40  dans  celles  de  3ooo  à  4ooo«. 


commis  sous  le  proconsul  J.  Lehon*     SjS 

5o  dans  celles  de  4000  à   5ooo. 

£t  dans  les  Communes  au-dessus  des  5ooo  âmes , 
la  liste  de  tous  les  individus  payans  annuellement 
toutes  contributions  jointes  au-delà  de  cinquante 

Les  difFérens  ordres  quil  transmet  au 
Comité  de  surveillance  ,  pour  faire  incar- 
cérer les  citoyens  ,  sont  également  frappés 
au  coin  de  la  turpitude  et  de  la  scéléra- 
tesse. Il  suffit  d'en  lire  deux  pour  s'en 
convaincre. 

((  L'ex-président  de  Madré  ,  écrit-il ,  est  riche  ; 
le  Comité  de  surveillance  voudra  donc  bien  me 
faire  part  des  preuves  de  civisme  qu'il  a  données 

{)Our  ne  ]^as  être  mis  en  état  d'arrestation,  comme 
es  autres  individus  de  sa  classe. 
j>  D'après  ce  que  m'a  dit  le  personnage  renvoyé, 
il  n'y  a  qu'un  instant  au  Comité ,  il  parait  qu'il  â 
une  façon  de  penser  qu'il  craint  de  manifester  ; 
or ,  un  tel  homme  pense  apparemment  mal ,  et  devient 
dangereux  ,  mettez-le  où  vous  voudrez  ,  jusqu'à 
nouvel  ordre  jj. 

Lebon  ne  s'en  tient  pas  là.  Il  met  une 
foule  de  témoins  en  réquisition  pour  dé- 
poser contre  les  prétendus  conspirateurs 
de  Saint-Pol  ,  Commune  que  Lebon  avait 
désignée  comme  une  petite  Vendée. 

Mienne ,  porteur  de  pouvoirs  ,  s'y  trans- 
porte ,  et  dit  à  son  entrée  dans  cette  ville  : 
//  ne  faut  que  des  gueux  pour  fonder  la  Répu^ 
blique.  Aussitôt  il  convoque  la  Société  po- 
pulaire ,  lui  fait  part  de  la  réquisition  du 

▲  a  4 


s 7  6  Précis  historique  des  crimes 

Représentant ,  et  la  /Municipalité  arrête 
qu'il  sera  fait  sur-le-champ  une  proclamation 
par  laquelle  les  Sans-Culottes  sont  invités 
de  venir  déclarer  au  sein  de  la  Société  po- 
pulaire ,  tout  ce  qu'ils  savent  de  trames  des 
aristocrates  ,  contre  lesquels  on  va  informer, 
sous  peine  de  complicité.  Mienne  termine 
en  promettant  le  partage  des  biens  des 
condamnés,  ^ 

Darthé  ,  Lebas  ,  LeboA  et  son  Epousé 
étaient  originaires  de  cette  Commune  ;  des 
haines  particulières  y  organisèrent  une 
boucherie  ;  une  cinquantaine  de  citoyens 
furent  incarcérés. 

Mienne  ,  Flamand  et  Duez  leur  firent  un 
crime  d'avoir  assisté  à  la  plantation  d'un 
arbre,qui  avait  eue  lieu  à  Saint-Pol  en  1791, 
le  jour  de  la  St,  Pierre  ;  ce  qui  s'exécutait 
depuis  un  tems  immémorial  dans  cette 
Commune.  Trente  d'entr'eux  furent  con- 
duits dans  les  prisons  d'Arras  ,  et  l'Accu- 
sateur public  prit  des  conclusions  si  vigou- 
reuses que  vingt-huit  périrent. 

Cet  affreux  tribunal  n'admet  aucune 
forme  légale.  La  soif  du  sang  qui  dévore 
le  Tyran  ,  y  dicte  ses  arrêts ,  et  les  chars 
de  la  mort  voiturent  les  victimes  au  nombre 
de  12  ,  i5  ,  20  ,  25  à  la  fois. 

Deux  jeunes  personnes    du    nom   de 


commis  sous  le  proconsul  J.  Lebon.     3^^ 

^4ayoul-sur-Saint-Leger ,  autant  intéres- 
santes parleurs  charmes  que  par  leur  vertu , 
xae  quittaient  point  leur  père  ,  vieillard , 
travaillé  de  la  goutte ,  et  par  de  petits 
croncerts  exécutés  sur  Xtuxjor té-piano  ,  elles 
cherchaient  à  adoucir  les  douleurs  de  ce 
"V^ieillard,  On  leur  fit  un  crime  de  ce  léger 
divertissement.  Lors  de  la  prise  de  Valen- 
c^ienne  ,  ces  deux  jeunes  filles  ,  leur  père  et 
leur  mère  montèrent  sur  Téchafaud, 

La  veuve  Bataille  tenait  chez  elle  un 
ï^egistre ,  sur  lequel  elle  consignait  les  sora- 
xnes  quon  lui  confiait  pour  des  actes  de 
fcienfaisancc.  On  la  regarde  comme  chef 
d^une  grande  conspiration  f^éV^tHh^ssairi 
de  Lebon  se  transportent  chez  elle  ;#BOi| 
registre  est  compulsé  et  ses  papiers  enlevés^ 
On  Tarrête  ,  ainsi  que  ceux  dont  les  noms 
étaient  inscrits  sur  ce  registre,  et  tous  sont 
conduits  au  tribunal  révolutionnaire  ,  au 
Tiombre  de  vingt-trois  ":  trois  seulement 
échappèrent  à  la  mort.  LéfcBourreau  se  per- 
mit d'exercer  sur  le  cad^lhre  de  ceux  qui 
furent  sacrifiés  les  plus  grandes  horreurs  , 
en  les  plaçant  dans  les  postures  les  plus 
lubriques. 

Lebon ,  sa  Femme  etDuquesnoy ,  avaient 
assisté  à  ce  jugement  ;  et  par  leurs  signaux 
ils  avaient  achevé  de  décider  leur  sort. 
L'atrocité   de   ce    jugement    se    manifeste 


378         Précis  historique  des  crimes 

encore  plus  évidemment  à  l'égard  de  deux 
citoyennes  du  nom  de  Baclers.  Leur  tante, 
morte  depuis  finit  ans  ,  avait  consigné  une 
somme  de  trente  sols  entre  les  mains  de  la 
veuve  Bataille.  C'était  à  cause  de  cette  pa- 
renté quelles  étaient  mises  en  jugement.  On 
en  fit  l'observation  aux  jurés  ,  ils  déclarè- 
rent qu'ils  étaient  convaincus  :   elles  mar- 

*  chèrent  à  l'échafaud. 

Cependant   Lebon    devint   furieux  ,  en. 
voyant  acquitter  trois  des  prévenus  :  il  fit^ 
arrêter  le  président  du  tribunal ,  Betignet  , 
l'accusateur  public  Demensur  ,  le  juré  Le- 

.blond  ,  et^QP  frère  ,  Adjudant  général.  Il 

Itejià^îS^  ^^  ^^^  conduire 

tmÊo  heures  àParïs  :  son  ordre  porte  qu'ils 
seront  incarcérés  <<  comme  prévenus  d'in- 
»>  trigues  pour  arracher  les  conspirateurs 
>j  du  glaive  de  la  loj^,  et  de  tentatives  pour 
jj  avilir  la  représentation  nationale  m. 

Dourlens  fils  ,  Camus  ,  et  cinq  autres  , 
étaient  au*  tribun|l ,  et  se  défendaient  d'une 
manière  vîctorSuse.  u  Citoyens  jurés  ,  dit 
>j  l'accusateur  :^public  Caron  ,  vous  venez 
>j  d'entendre  les  défenses  des  accusés  ;  eh 
»5  bien  !  je  vous  assure  que  ce  sont  autant 
>>  de  mensonges  ;  ce  sont  autant  de  cons- 
59  pirateurs  ;    vous   êtes    assurément   assez 

.55  convaincus  ,    et  vous  seriez   des  lâches 
»j  vous-mêmes  ,  si  vous  laissiez  de  pareils 


commis  sous  le  proconsul  J.  Lebon.      Syg 
»5  monstres  sur  la  terre  »».  Ce  réquisitoire 


■/ 


suffit  pour  les  faire  égorger. 

Joseph  Lebon  étant  curé  constitutionnel 
c3e  Neufv'ille  ,  avait  eu  une  rixe  avec  l'an- 
cien curé  ,  qui  continuait  de  dire  la  messe 
dans  la  même  église.  Cité  devant  le  juge 
de  paix  Maniez  ,  il  fut  condamné  à  6  livres 
d'amende.  En  mission  dans  le  département , 
îl  vient  à  Beaurains ,  Commune  voisine  de 
3a  Neufville  ,  il  se  rend  à  la  Société  popu- 
laire ,  où  ,  après  avoir  harangué  le  peuple, 
il  ajoute  :  <«  Je  ne  vois  plus  ces  petits  mor- 
95  ceaux  de  bois  ,  tous  ces  petits  marmots  m. 
Il  prend  ensuite  quelques  in^Kiç|q)^ons  sur 
ce  qui  se  passe  dans  le  J^s  ;  on^Ttti  rap- 
porte quW  nommé  Coquet  avait  casslS'les 
vitres  du  maire  de  Beaurains  ;  mais  que  le 
juge  de  paix  ,  à  la  sollicitation  du  maire  , 
avait  assoupi  cette  affaire.  <«  Il  y  a  long-tems, 
J9  s'écrie  Lebon  ,  que  je  veille  à  la  conduite 
55  de  ce  juge  de  paix  :  U  est  tard  aujour-"" 
55  d'hui  ,    qu'on  se  rend^jdemain  à  Arras 
55  pour  faire  la  dénonciatioii  55, 

Lebon  qui  ne  perdait  pas  de  vue  le  juge 
de  paix  depuis  la  condamnation  qu'il  avait 
prononcée  contre  lui ,  le  fait  arrêter  ,  con- 
duire au  tribunal  de  Cambrai  ,  où  il  fut 
guillotiné  le  lendemain  de  son  arrivée. 

Le  juge  de  paix  qui  succéda  à  Maniez  , 
fut  digne  du  choix  de  Lebon,  Cet  Officier 


38o         Précis  historique  des  crimes  - 

public  instruit  de  la  prochaine  arrivée  du 
Proconsul ,  fit  la  motion  de  faire  couper 
quatre  têtes  pour  lui  en  faire  hommage. 

Quel  horrible  assemblage  offre  cette" 
troupe  de  brigands.  L'infâme  Rémi  se  com- 
pare à  un  grand  seigneur  ,  44  il  peut  offrir 
99  tous  les  jours  à  ses  amis  un  plat  de  têtes 

V  de  guillotinés  n.  Flamant  trempe  la  main 
dans  le  sang  qui  ruisselle  au  bas  de  Fécha- 
faud  ,  et  s'écrie  :  Ah  !  que  cela    est  beau  ! 
JLebon  y  plonge  son  sabre  ,  en  disant  :4t  II 
>>  y  along-tems  que  je  désirais  cela:  »»  As-tiM^ 
vu  comme  le  lait  coulait  avec  le  sang  l  de-* 
mandait  MIJhi£pr  Tantropophage  Carlier.. 
L'assasi&i  jbarËftli^e  veut  point  faire  dou- 

'  blci*  de  cuir  le  panier  qui  reçoit  les  têtes  , 
afin  de  voir  couler  le  sang  ;  il  reproche  à 
celui  qui  donne  cet  avis  ,  de  n'être  pas  à  la 
hauteur.  Lebon  assiste  à  toutes  les  exécu- 
tions :  placé  au  balcon  de  la  Comédie  ,  il 
fait  entendre  les  cris  de  vive  la  République  ! 
Lebon  force  en^re  les  mères  de  famille  à 
se  transporter  'èur  la  place  des  exécutions 
avec  leurs  eiifans.  Il  n'avait  pas  fait  un 
mystère  de  sa  mission  dans  ces  départemens» 
*Un  maître  de  poste  l'avait  prié  de  lui  faire 
avoir  des  chevaux  pour  le  service  public  : 
44  Adresse-toi ,  lui  dit-il ,  aux  Représentans 

V  près  des  armées  ;  ma  mission  ici  est  de 
>>  faire  couper  des  têtes  ?% 


commis  sons  le  proconsul  J.Lebon.     38i 

Le  tribunal ,  de  son  côté  ,  crée  des  cri- 
mes :  ses  questions  d'usage  consistent  dans 
ces  mots  :  a  As-tu  été  à  la  messe  des  prêtres 
«  constitutionnels  ?Non.  —  Fanatique  ,  per- 
n  turbateur  ,  aristocrate  ,  guillotiné  »% 

Si  Ton  ne  savait  de  quel  délit  accuser  les 
prévenus ,  les  galeries  étaient  interrogées  ; 
le  mot  aristocrate  quelles  prononçaient 
babituellement,  était  le  cri  de  la  mort. 
'  Des  capucins  ,  des  religieuses  de  la  Bel* 
tique  ,  sont  installés  pêle-même  sur  les  ban* 
luettes.  Prisonniers  de  guerre  avant  la  réu- 
lion  de  ces  provinces  à  la  France ,  entendant 
^eu  le  français  ,  on  se  contente  de  leur 
lemander  s'ils  sont  auteurs  des  sermons 
u'ils  ont  prêches  :  un  oui  est  leur  sen* 
ence  de  mort  ;  les  femmes  comme  com- 
plices les  accompagnent  à  Téchafaud. 

La  Supérieure  des  Ursulines  y  figure  avec 
Tielques-unes  de  ses  religieuses.  Elle  cher- 
lie  à  toucher  les  juges  en  faveur  de  ses 
ompagnes,  en  leur  disant  :  <«  Que  si  Texer^ 
»  cicede  la  religion  catholique  était  regardé 
'  comme  un   crime  ,  elle   seule  devait  en 

•  porter  la  peine  :  quand  amt  trois  soeurs , 

•  entrées  au  couvent  à  Tâge  de  quatorze  a 
quinze  ans  ,  elles  n'ont  fait  qu'obéir  au 
vœu  qu  elle  en  avait  exigé  :  pardonnez* 
leur ,  sécrie-t-clle  ,  et  je  meurs  contente  ti. 

'ouces  furent  égorgées  ;  et  le  Bourreau  se 


382         Précis  historique  des  crimes. 

permit  les  plus  grandes  horreurs  sur  leurs 
cadavres. 

Pierre-François  Devault ,  vieillard  de  68 
ans  ,  était  en  jugement  :  il  récusait  les  té- 
moins ses  dénonciateurs  ,  avec  lesquels  il 
était  en  procès.  Qu  as-tu  fait  pour  la  Repu- 
blique  ?  lui  demande  le  Président  :  il  veut 
répondre  ;  Lebpn  fait  un  geste ,  et  Devault 
est  condamné. 

Lallart-Bellette  avait  été  acquitté  ,  Lebon   ' 
s'emporte  contre  les  jurés  ,  à  qui   il  dit  : 
«4  Quand  je  vous  donne  un  riche  ou  utt 
5  5  noble  à  juger   »    vous   ne   devez  pas  1^ 
.55  regarder  comme  innocent  55.  Il  le  fait  tra-^ 
duire   de    nouveau  au   tribunal  ,   comm^ 
prévenu  d'avoir  servi  la  côntre-r évolution^ 
de  toutes  manières  :  quelques  fragmens  de 
gazettes   étrangères   qu'on  trouva  chez  lui 
dans  la  perquisition  qu  il  ordonna  ,  furent 
le  motif  de  sa  condamnation. 

Petain  ,  concierge  de  la  prison  de  Saînt- 
Pol ,  accusé  davoir  favorisé  Tévasion  de 
deux  détenus ,  avait  été  acquitté  :  un  arrêté 
de  Lebon ,  du  1 5  germinal ,  le  remit  en 
jugement,  et  trois  jours  après  il  monte  à 
Téchafaud. 

La  femme  Plunquet  venait  d'être  mise 
en  liberté  :  à  son  entrée  chez  elle ,  des 
sbires  l'arrêtent  de  nouveau,  et  la  traduisent 
au  tribunal.  £lle  réclame  en  vain  la  parole 


commis  sous  le  proconsul  J.  Lebon.     383 

pour  se  défendre  :  hors  des  débats  ,  s'écrie- 
t-on  :  elle  est  condamnée.  Son  crime  était 
d'avoir  signé  une  pétition  au  ci-devant  Roi , 
en  faveur  des  prêtres  ,  dans  les  tems  où 
l'autorité  royale  et  la  liberté  des  cultes 
étaient  sanctionnées  par  la  constitution. 

Le  citoyen  Duvieuxfort  nourrissait  depuis 
long-tems  un  perroquet ,  qui  disait  à  mer- 
veille :  vive  l'Empereur  !  Les  possessions  de; 
ce  citoyen  étaient  en  partie  dans  les  pays 
soumiS'à  Tautorité  de  la  maison  d'Autriche. 
Le  perroquet  est  dénoncé  ,  il  crie  vive  U 
Roi ,  la  Reine  !  et  c.  Un  décret  est  lancé 
contre  ce  citoyen,  sa  fille  ,  et  quelques  per- 
sonnes de  sa  maison  :  ils  sont  acquittés  à 
Béthune.  Un  arrêté  de  Lebon  les  fait  tra- 
duire au  tribunal  d'Arras  :  la  déclaration 
du  jury  fut  que  les  accusés  étaient  conr 
vaincus  d'être  auteurs  et  complices  de  la 
conspiration  ourdie  contre  le  peuple  Fran-î^ 
çais  ,  en  enseignant  à  leur  perroquet  à  pro- 
férer les  mots  odieux  de  iiiveje  Roi  /et  c; 
en  conséquence  ils  furent  condamnés  4 
mort. 

Devieuxfort  était  déjà  garotté  sur  li 
planche  ,  lorsque  Lebon  arrive  :  ««Arrêtez  ^ 
99  dit-il ,  que  le  scélérat  en  mourant  emporte 
99  le  désespoir  de  nos  victoires  :  m  il  monte 
aussitôt  sur  Téchafaud ,  ordonne  qu'on  le 
délie  ,  et   qu'on  le    fasse    descendre  ;    il 


384  Précis  historique  des  crimes. 

annonce  alors  au  public  quelques  victoires 
remportées  parles  armées  françaises.  (  Voya 
la  lettre  F.  de  la  gravure  du  tome  I  y  page  i 
des  réflexions  préliminaires.  ) 

Ensuite  s'adressant   à   Duvicuxfort  ,  il 
lapostrophe  en  termes  les  plus  injurieux:' 
«t  Expédiez-le  maintenant ,  dit-il  au  bouT', 
99  reati ,  et  périssent  de  rage  les   ennemis    \ 
j>  de  la  République,  n  l 

On  ne  saurait  mieux  caractériser  la  lur-    ' 
pîtude  de  ce  tribunal  ,  que  par  la  conduite 
qu'il  tint  à  Tégard  du  perroquet  ;  il  voulait 
le  mettre   en  jugement.  Enfin  Tépouse  de 
Lebon  se  Tappropria ,  et  cherchant  àeffacet 
son  éducation   aristocratique  ,    elle   TiaS- 
truisait  à  crier  vive  la  Montagne  ! 

Le  ci-devant  Comte  deBéthune,  accasé 
d'émigration,  pourvu  néanmoins   de   cc^' 
tificats  authentiques  ,  avait  été  absous,  t^^ 
même    jour  Lebon  ordonne   de  nouve^^ 
sa  mise  en  jugement  ,  il  est  condamné     ^ 
mort.    Le))on  qui    avait   trouvé    dans  L^s 
papiers,     de    Béthune  ,    une  lettre    dai^^s 
laquelle  il  était  traité  de  scélérat ,  s'acharr^a 
tellement  à  sa  perte,    qu'il  fut  exécuté      a 
dix  heures   du  soir.  Il  eut  encore  des  vicj- 
toires  à  publier  ce  jour  là ,  et  le  fatal  couteaw 
resta   suspendu    sur    la   tête    de    Béthunè 
jusqu'après  la  lecture  de  ces  nouvelles.  Uti 
juré   ayant  vu   la  tête   de    cet    infortuné 


i 


commis  sous  le  proconsul  J.  Lebon.  385 
citoyen ,  s'écria  :  ««  Si  les  lêtes  de  veaux 
n  étaient  aussi  fraîches  que  celle-là ,  j'en 
f>  ferais  provision.  »» 

Le  défenseur  de  Béthun^  avslit  été  in- 
carcéré. A  sa  sortie  ,  Lebon  lui  fit  les  plus 
sanglans  reproches  sur  ce  qu  il  s'attachait  à 
défendre  les  aristocrates.  //  faut  être ,  lui 
dit  -  il ,  sans  -  culotte  et  coupe  -  tête  comme 
nous. 

Couronnons  ce  volume  d'atrocités  par 
un  fait  encore  plus  barbare  : 

Deux  jeunes  gens  ,  Tun  nommé  Vaillan, 
et  l'autre  fils  du  maître  de  poste  de  Lens  , 
condamnés  à  mort,  avaient  étéconduitsàdix 
heures  du  matin  sur  la  place  des  exécutions, 
etgarottés  aux  pieds  deTéchafaud.  Pendant 
deux  heures  ils  restent  exposés  aux  injures 
et  aux   insultes  d'une  populace  effrénée  ; 
on    les  couvre  d'ordures  ,  on   brûle   leurs' 
habits  ;  quelques-uns  même  osent  les  frap- 
per. Une  de  ces  victimes  perd  la- connais- 
sance ,  le  Bourreau  lui  jette  uh  stean  d'eau 
sur  la  figure.  Sept  individus  condamnés  à 
mort ,  arrivent ,  il  sont  guillotinés  ,  et  lèuri 
sang  inonde  ces  deux  jeunes  gens  ,  qui  dé*' 
tournent  la  vue  en  frémissant.  Le  Bourreau' 
portant  la  tête  du  dernier  supplicié  ,  l'ap- 
pliqua toute  sanglante  sur  les  lèvres  mou-^ 
rantes  de  l'un   d'eux.  Enfin  la  mort  met' 
un  terme  aux  angoisses  douloureuses  quei 

Tome   VI.  B  b 


386         Précis  historique  cUs  crimes 

ce  monstre  leur  faisait  essuyer  depuis  deux 
heures  ,  avec  un  rafincmcnt  de  cruauté 
bien  digne  de  lafFreux  emploi  qu'il  fesait 
de  son  horrible  ministère. 

La  tyrannie"  apprêtait  de  nouvelles  vic- 
times. Près  de  deux  mille  personnes 
dirent  égorgées  ou  périrent  à  Arrias  et  à 
Cambrai.  Les  prisons  encombrées  ,  et  de^ 
Venues  le  tombeau  d'une  infinité  d'indi^ 
yidus  de  tout  âge  et  de  tout  sexe  ;  cin- 
quante mille  familles  ruinées  et  dispersées  , 
ne  satisfesaient  pas  ces  tigres  altérés  de 
sang  et  de  brigandages.  (Déjà  on  avait, 
creusé  sous  Téchafaud  une  fosse  capable 
de  contenir  soixante-quatre  têtes  à  la  fois  ,. 
lorsque  le  g  ^thermidor  fit  cesser  ces  égor- 
gemens  ,  avec  les  pouvoirs  des  monstres 
dévoués  aux  a,nciens  Comités  de  gouver- 
liement;.  :, 

Lebon,  la  veille  de  soçl  départ ,  fait' 
assembler  les  Autorités  constituées.  Il  pé- 
rore* en  faveur  jde  Robespierre  ;  il  veut 
rassembler  ses  braves  pour  le  venger.  Tous^ 
proposent  différentes  mesures  contre  les 
détenus  ;  il  s  agissait  de  décider  du  sort 
de  céi^x  qui  depuis  long-tems  étaient  portés 
sur  la  liste  de  mort,  Lebon  voulait  les  faire 
tiraduire  àp;^ris;  mais  ses  ppuvqirs  étaient 
expirés  ,  sa  motion  resta  ç^pç  effet.  Il 
l^art,    et  biexuôt  frappé   de  Texécratioa 


€ûfnmis.soîLs  le  pracônmlj.  Leboh.     3if 

publique ,  il  est  accusé  et  traduit  au  tribunal 
d'Amiens.   En  vain  sa  cohorte  s'agite    en 
tout  sens  pour  arracher  des  déclarations 
en  sa  faveur  ,  il  est  frappé  du  glaive  de  la 
loi.    A  la  lecture  de  sqû  jugement ,  il  de- 
mande qu'il  lui  soit  permis  de  se  pourvoir 
en  cassation.   La  Convention  consultée  , 
accueille  sa  pétition  par  Tordre  dû  jour. 
Instrument  servile  de  ces  moteurs  de  tous 
les  crimes  5  il  est  brisé  comme  un   faible 
:roseau  dès  quHl  a  cessé  de  leur  être  utile* 
£t  aussi  lâches  que  tpes  brigands  qui  fuient 
à,  laspect  d'une   force  majeure  ,  en  aban- 
donnant leurs  compagnons  chargés,  de  fers  [ 
les  Membres  du  Comité  décemviraî  livrent 
I^ebonà  toute  la  rigueur  dèslois;  ils  crurent 
sans  doute  par  ce  moyîen-se  débarrasser  du 
poids  de  la  haine  des^  Fran^çais.  Ils!  étaient 
dansrerréup,.la  France  les  .accusait;  plus 
scélérats  et  plus  astucieux   que  cet  Agent 
secondaire ,  ils  furent  sacrifiés  à  leur  bàrbarp 
politique.  ../::;.  ,  :;    ..ot 

V  Le  i3  vehdém.  ,  ari  4  {5  octobre  1-796  ) 
Joseph  Lebon  ,  vêtu  d'une  chemine  -irbuge  j 
fut  conduit  sur  la  place  idite  du  Grand-» 
Marché  ,  à  Amiens ,  oùni  xânmiria  sur rjéchâ-^ 
faùd  une  vie  souiliée  des  plbdgrandsifoirfaîfisi 
Lebon  en  mourant  dit  qu  il  périssait  ^pour 
avoir  suivi  les  instructions  du  Comité  de 
Salut  public,  (  Voyez  le  tome  IL  —'*  Exécuté 
à  Arras ,  Ihei  Amiens  )•  B  b    2 


388  Crimes  commis  dans  le  départ,  du  Nord  ^ 

Précis  historique  des  crimes  commis  dans  le 
département  du  Nord  ,  sous  le  Fraconsulat 
de  f  ex-moine  Duquesnoy. 

Ernest  Duquesnoy ,  trois  fois  moine , 
autant   de  fois  passant  de  la  sacristie   aa 
corps-de-garde  ,  montra  toujours  cet  esprit 
turbulent  qui  lui  fesant  abhorrer  la  vie  pairi 
sible  du  cloître  ,  lui  inspira  , ,  sous  Thabit 
militaire ,  ce  caractère  grossier  qui  lui  valut 
le. mépris   de  son  corps.  Sans  cesse   dans 
les  cabarets  »  sotisang  s  allume  par  la  quaû-^ 
tité  de  boissons  dont  il  s  abreuve.  Né  de 
parens  violens  ,  leur  fureur  codle  dans  ses 
veines.  Son  père  est   noté  d  assassinat  ,  il 
s'est  déjà  rendu  coupable  d'un  pareil  crime. 
Aggresseur  sans  frein  ,  deux  citoyens  ont 
déjà  succombé  sous  ses  coups:,  et  ce  n'est 
qulk  la    faveur  de  la  révolution?  qu'il  ose*' 
reparaître  dans  son  pays  ,  d'où  l'avait  chassé 
tin   décret  de  prise  de  corps.   Son  séjour 
dans  Paris  ,   où  il  s'était  réfugié  i  avait  été 
ensanglanté   par  une  de  ses  actions  homi- 
cides. iAu  milieu  d£S  coupables  intrigués  qui 
prohoisliquaicnt  te'  régime  conventionnel  ^ 
û  se  distingua  par  une   conduite  des  plus 
dépravée  ;    lès  tripots  ,  les    tavernes  ,    le 
voient  alternativement  partager  ses  loisirs» 


ïous  le  procomul  Duquesnoy.        3Sg 

Enfin ,  dans  une  orgie  des  plus  crapuleuse , 
il  est  promu  à  la  première  législature  ;  son 
naturel  fanatique  ,  et  son  penchant  pour 
rivresse ,  le  firent  bientôt  réélire  à  la  Con- 
vention par  les  meneurs  de  ce  corps  mal- 
heureux  ,  qui  le  regardaient  déjà  comme 
l'instrument  de  leur  sanglante  politique. 

Duquesnoy  associé  à  Lebon ,  lui  imprime 
ses  élans  révolutionnaires  ;  il  Tencourage 
dans  sa  marche  populicide  :  a  Courage  , 
99  dit-il  à  Lebon ,  lors  du  jugement  de  la  veuve 
9  9  Bataille  et  de  ses  coaccusés  :  courage  !  vas 
9  9  toujours  ferme;  nous  reviendrons  ces 
^j  jours-ci  avec  St.  Just  et  Lebas  ,  et  ça  ira 
>j   bien  plus  roide.  j» 

Lebon  outrage  les  jurés  qui  en  avaient 
sicquité  quatre.  <t  Duquesnoy  ,  lui  dit  \  fais- 
9  9  moi  f....  tous  ces  b....  là  dedans  ,  si  non 
9»  je  me  brouille  avec  toi.  Sa  correspond 
99  dance  porte  le  même  caractère.  J'étais  à 
»5  dîner  avec  Robespierre  quand  il  a  reçu 
55  ta  lettre  ,  écrit  -  il  à  Lebon  ;  nous  avons 
55  bien  ri ,  vas  ton  train  et  ne  t'inquiète  de 
55  rien  ^  la  guillotine  doit  marcher  plus 
55  que  jamais.  r> 

Ces  deux  Conventionnels  réunis  oflFrent 
une  masse  de  puissance  encore  plus  ter- 
rible. Il  faut  que  les  têtes  pleuvent  comme 
la  grêle.   Dans  une  lettre  quils  écrivent 

Bb  2 


r. 


Sgo   Crimes  commh  dans  le  départ;  du  Kord , 

de   concert  au  Comité  de    Sâlut  public  , 
ils   s'expriment  ainsi  : 

<«  Nous  sommes  inondés  d'un  t^s  de  vauriens 
civils  et  militaires  >  que  nous  avons  envoyés  au 
tribunal  pour  y  subir  la  peine  4e  leurs  crimes  contre 
la  république.  Nos  arrêtés  autorisent  le  tribunal 
criminel  du  Pas-de-Calais  à  expédier  ces  scélérats 
xévolutionnairemcnt  ;  mais  il  renvoiç  nos  coquiiis 
à  des  jurés  qui  vont  les  innocenter  à  tort  et  à 
travers  n,  :  ^ 

Après  avoir  demandé  ati  Gpmîté  qu'il 
confirme  leurs  arrêtés  pour  Torganisation 
de  ce  tribunal ,  sans  quoi  ils  enverront  lés 
prévenus  à  celui  de  Paris  ;  ils  observent 
que  leur  procès  sera  moins  coûteux  à  Arras , 
et  que  l'exemple  sera  utile  à  l'armée. 

La  mission  de  Duquesnoy  ne  regardait 
que  les  armées  ;  et,  par  un  abus  d'autorité^ 
•que  plusieurs  de  sescgllègues  oi;t  imité  ,  il 
-s'immisce  dans  la  sur\^eillance  des  dépar- 
temens  frontières.  Dans  une  autre  circons- 
tance ,  sous  prétexte  de  maladie  ,  il  obtient 
un  congé  ,  se  transporte  à  Boyefflcs  ,  son 
pays  natal  ,  dans  l'intention  ,  comme  il 
l'avoua  ensuite  ,  de  remonter  Fesprit  public 
dans  le  département  de  Calais.  Aussitôt  les 
mandats  d'arrêts  se  multiplient ,  et  la  per- 
sécution met  au  jour  ses  batteries  redou- 
tables. C'est  au  milieu  des  orgies,  qu'il 
endoctrine  les  Autorités  constituées  ,  et 
quil  leur   persuade  de   faire  arrêter  sans 


sous  le  proconsul  Duquesnoy.'        Sgi 

examen  quiconque  serait  dénoncé  ,  n'im- 
porte par  qui.  Les  mauvais  traitemens  , 
les  injures  attendaient  ceux  que  Tinnoeence 
de  leurs  parens  détenus  ,  conduit  à  son 
domicile  pour  invoquer  sa  justke.r 

Une  femme  était  parvenue  à  l'approcher; 
elle  réclame  son  mari  ,  il  lui  dit  de  venir 
le  trouver  à  jour  nommé  à  Bé thune.  Elk 
s'y  transporte  ,  et  après  beaucoup  de  diffi- 
cultés pour  obtenir  une  audience  ,  elle 
lui  rappelle  le  rendez-vous  qu'il  lui  a  donné 
pour  s'occuper  de  la  liberté  de  son  mari. 
««  Tu  en  as  menti ,  répond  le  déloyal  Dn- 
9  9  quesnoy  ,  si  je  t'ai  dit  l'autre  jour  de 
9  9  venir  ici ,  c'était  pour  me  débarrasser 
99  de   toi.  >5  ,     ' 

Pendant  son  séjour  à  Boyeffles  ,  il  se 
rendit  coupable  de  plusieurs  actes  despo- 
tiques. Nous  nous  contenterons  d'en  citer 
un  :  comme  il  r-egarde  ses  parens  ,  il  suffim 
pour  donner^une  idée  de  sa  conduite  dans 
cette  Commune. 

La  loi  du  21  messidor  rendait  la  liberté 
à  tous  les  cultivateurs.  Le  bruit  se  répand 
que  Duquesnoy  a  pris  un  arrêté  contraire; 
la  femme  Goujie ,  açcompagiiée  d'Augustin 
Mathicr  ,  cultivateur,  et  muire  d'une  Com- 
mune voisine  ,  s'en  vont  chez  ce  Repré- 
sentant, leur  cousin.  A  peine  cette  femme 
eut  ouvert  la  bouche  ,  pour  lui  souhaiter 

B  b  4 


âg^  Crimes.commis  dans  le  départ,  du Kcrd , 

le  bonjour,  que  notre  furieux  s'écria-: 
a  Qu'est-ce  que  tu  viens  f.**..  ici  ?  je  n  aï 
»9  que  faire  d'aristocrates  et  de  contre-révo- 
9)  lutionnaires  dans  ma  maison;  99  en  même, 
tems  cette  femme  est  assaillie  de  soufflets 
et  de  coups  de  poings  sur  la  tête  ;  il  criait 
toujours  :  f.,,.  moi  le  camp.  Cette  femme 
succomba  sous  les  mauvais  traitemens  de 
Duquesnoy ,  et  tomba  à  la  renverse  dans 
sa  cuisine,  il  ne  cessa  de  la  frapper  à  coups 
de  pieds  ,  ^n  vociférant  :  F...  moi  le  camp  , 
sacrés  aristocrates  :  F.....  moi  le  camp. 

L'anihilation  de  la  loi  du  21  messidor 
par  Duquesnoy  ,  n'était  que  trop  assurée* 
Son  arrêté  en  date  du  ig  messidor  an  2, 
(7  juillet  I7g4)  postérieur  à  l'époque  de 
la  chute  des  conjurés  ,  ne  fait  qu'ajouter 
une  teinte  plus  tyrannique  à  cet  abus  de 
pouvoirs  ,  qu'il  n'a  cessé  de  manifester 
dans  le  cQurs  de  ses  différentes  missions 
Après  un  considérant  écrit  en  termes  per- 
fidement révolutionnaires  de  ces  tems-là, 
il  ordonne  que  ceux  desdits  cultivateurs  rais 
mal  à  propos  en  liberté  ,  seront  sur-le- 
champ  réincarcérés  ,  et  livrés  aux  tribunaux 
qui  doivent  en  connaître.  Le  tribunal  de 
Paris  était  alors  le  seul  à  qui  une  loi  ré- 
cente attribuait  le  jugement  des  délits  dits 
révolutionnaires. 

Cet  arrêté ,  et  les  menaces  de  Duquesnoy, 


\ 


sous  le  proconsul  Duquesnoy.     .   3^ 

firent  émigrer  plus    de  cinq  cents  culti* 
vateurs  des  districts  deBéthune  ,  d'Arras  * 
de    Douai  et  de  Cambrai,  Cependant  une 
liste  de  cinquante-sept  individus  se  dresse 
dans    un  instant   d'ivresse.   Leroux  ,    pré- 
sident   du    district,  Clément,   du  village 
d'-Aix  ,    Go  blet ,   commis  ;   puis  Curé     et 
Bla.imont  ,   ces    deux    derniers    adminis* 
trateurs  du  district ,   coopérèrent  à  cette 
liste  de  proscription  ,  tous  furent  regardés 
comme  suspects,  pour  n'avoir  pas  assisté 
à  la  messe  des  prêtres  constitutionnels.  Du- 
qixesnoy  dicte  les  noms   de  ceux  que    la 
haine   lui    désignait  ,     et    tous    avalaient 
d"* avance    le   sang    de    ces    victimes ,    en 
buvant   à  la  santé  de  la  sainte  guillotine. 
Mais    cette    liste    ne    contenait    que    des 
hommes   peii    faits  par    état ,    pour  être 
ï'egardés  comme    contrerrévolutionnaîres. 
VJn  des    assistans    en   fit  la  remarque  en 
Ces  termes  :  <<  Sacredié    nous  sommes  de 
*i  foutues   bêtes  ,  nous  n'avons  pas  mis  de 
*ï  ci  -  devant    sur  la  liste  ;  f,....  prenons 
^5  garde  à  nous  ,  ça  serait  trop  vulgaire.  15 
On  y  entremêla  quelques  ci-devant. 
Cinquante-sept  victimes  furent  chargées 
de  fer  ,  et  mises  sur  trois  chariots.  Leur  ar- 
restation avaiÉ^  été  suivie  de  la  violation  de 
leurs  propriétés.  Les  armoires ,  les  coffres 
.  avaient  été  enfoncés  ou  crochetés  ;  pn  les 


394  Crimes  commis  dans  le  départ,  du  Nord. 

'fit  parquer  une  nuit  comme  un  troupeau 
de  bétail.  Si  quelques-uns  affaissés  par  la 
douleur  et  Tépuisement  prenaient  un  instant 
de  repos  ,  Clément  les  réveillait  à  coups 
de  pieds,  A  Béfliune  ,  à  Arras  ,  on  dé-  a 
couvrit  les  voitures  ,  afin  de  les  exposer  éi 
aux  regards  d  un  peuple  égaré  par  Lebon 
ct^Duquesnoy.  Ils  furent  insultés  et  couverts 
de  Huées  ;  on  voyait  parmi  ces  malheu- 
reux, des  vieillards,  et  des  femmes  malades; 
lune  d'elles  venait  d'accoucher  ;  son  enfant 
qu'on  lui  avait  enlevé  ,  faillit  périr  par 
Fengorgement  de  son  lait. 

Voici  quelques  paragraphes  de  la  lettre 
que  Duquesnoy  écrit  à  leur  sujet  aux 
Membres  du  Comité  de  Salut  public,     . 

<«  Je  vous  fais  passer  ,  citoyens  Collègues ,  tro^* 
arrêtés  que  j'ai  pris  ici.  Je  vous  fais  passer  égaleme^^ 
la  liste  de  cinquante-sept  individus  qui  vont  pat*^^^ 
pour  le  tribunal  de  "Pzris  ^formant  à-peu-près  le  ti^[^ 
de  ceiLK  du  district  qui  doivent  y  être  traduits.  Je  si>^^ 
presqu'entièrement  délivré  de  la  goutte  ;  j  espè^^ 
me   rendre    à  Arras   sous  peu    de  jours  ,   pour      y 
prendre  des  mesures  pour  y  faire  réincarcérer  to"*^^ 
les  contre-révolutionnaires  des  campagnes  ,  élar^^* 
par  une  fausse  application   de  la  loi  ,  et  c.  m. 

Cette   lettre  datée  de   Béthune  ,  est  dti 
16  messidor  an  2  ,  (4  juillet  1794.  ) 

Duquesnoy  comptait  tellement  sur  les 
tons  offices  du  tribunal  révolutionnaire  , 
pour  le  délivrer  de.ses  ennemis  ,  qu'il  dit 


^'  sem  le  proconsul  Duquesnoy.     *   SgS 

^    hautement  aux  habitans  deBoyéfflies  ,  quik 

'     pouvaient   aller  voir  passer  les   Bacons  \ 

^   famille  proscrite.  Les  enfans  de  Duquestioy 

dévastèrent  aussitôt  leur  jardin  ;   celui  du 

citoyen  Fromentin  ,  également  détenu  ,  a 

été  exposé  à  leur  pillage  ;   ses  étangs  ont 

été  mis  à  sec  ,  etDuquesnoy  s'est  approprié 

le  poisson. 

Si  Taudace  caractérise  le  crime ,  la  lâcheté 
devient  aussi  son  partage  au  moindre  dan- 
ger qui  menace    son  auteur.  L'ex  -  moine 
IDuquesnoy  qui  ne  parlait  sans  cesse    que 
de  détruire  le  fanatisme  ,  éprouva  un  accès 
de  goutte  remontée  pendant  son  séjour  à 
3Boyeffles  ;  la  crainte  de  la  mort  s'etnpare 
de  ses  esprits  ,  il  demande  un  confesseur: 
tin  ci-devant  curé  ,    oubliant  les  inimitiés 
de  famille  s  y  transporte.  A  sa  vue ,  Duques- 
•  noy  laisse  couler  quelques  larmes  ,  et  dit  : 
«t  Ah  !  je  vois  bien  que  Thomme  vertueux 
55  et  sensible  ,  \sait    oublier  les  injustices. 
5î  C'est  Dieu ,  ajoute-t-il ,  qui  vous  envoie 
'^5  pour   me  confesser  ,   permettez-moi  de 
55  satisfaire  au  devoir  de  chrétien.  Je,  sais 
55  que  je  vais  mourir...  55  Je  ne  vous  con- 
fesserai pas  ,  répliqua  Tex-curé  ,  cela  n  est 
pas  de  saison  ;  d'ailleurs   vous  n'êtes  pas 
en  danger  ,  nous   verrons    cela   un  autre 
jour.    Quelques    jours  après ,  Duquesnoy 
célébra   sa    convalescence    par  de  conti- 


Sg6  Crimes  commis  dans  le  départ,  du  Xori , 

nuelles  orgies.  Sans  doute  ,  il  eut  hontt 
de  sa  faiblesse  ^  car  il  fît  incarcérer  c^t 
cx-prêtre  et  sbn  frère.  Le  Comité  de  Sû- 
reté générale  les  rendit  à  la  liberté.  Les 
cinquante-sept  victimes  dont  nous  avons 
déjà  parlé  doivent  également  leur  liberté 
à  la  fameuse  époque  du  9  thermidor. 

Le  citoyen  Hoyez  ,  horloger  ,  était  mis 
en  jugement  au  tribunal  de  Lebon  ;  Du- 
quesnoy  accourt,  et  ses  dépositions  le  font 
condamner  à  mort.  Ce  Citoyen  dit  à  l'exé- 
cuteur Petitpierre  ,  au  moment  où  il  le 
liait  à  la  planche  :  <<  Ce  que  je  regrette  le 
»j  plus ,  c'est  que  celui  qui  me  fait  mourir 
n  aujourd'hui  est  celui  à  qui  j'ai  sauvé  la 
»y  vie.  n 

Hoyez  avait  sauvé  Duquesnoy  de  la 
corde  ,  quelques  années  auparavant. 

Sous  les  auspices  de  Lebon  et  Duquesnoy, 
le  président  du  district ,  Lefetz  ,  avait  offert 
une  gratification  de  mille  écus  à  un  citoyen, 
pour  l'exciter  à  dénoncer  une  foule  de  dé- 
détenus. Duquesnoy  abuse  d'une  femme 
détenue ,  Tengage  à  divorcer  avec  son  mari 
chargé  de  fers  ;  et  après  avoir  fait  pronon- 
cer le  jugement  ,  il  s'empare  du  bien  du 
mari.  Par  ses  instigations  ,  un  procès  est 
intenté  à  un  autre  détenu  ;  le  tribunal  pro- 
nonce contre  le  gré  de  Duquesnoy:  il  mande 
les  juges  dans  un  cabaret,  les  injurie  ,  et 


-,  sous  le  proconsul  Duquesnoy.        Sgj 

menace  de  les  casser ,  parce  qu  ils  n'ont  pas 
condamné  Thorame  qu'il  haïssait. 

Duquesnoy  influence  les  sociétés  popu- 
laires que  Leboh  avait  chargées  de  Tépu- 
ration  des  détenus.  Dans  une  de  ses  lettres» 
en  d^te  du  29  messidor ,  il  recommande  aux 
Men)bres  composant  la  Commission  pour 
Tépuration  des  détenus ,  de  regarder  comme 
ennemis  de  la  révolution  ceux  qui  n'ont 
rien  fait  pour  elle.  Il  juge  que  les  Mathier 
tont  de  ce  nombre.  ««La  femme  de  son  col- 
*5  lègue  Lebon  pourra  donner  des  renseî- 
»  gnemens  sur  les  Mathier,  qu'il  a  toujours' 
•V  regardés  comme  des  ennemis  de  Tégalîté, 
^  et  n'ayant  pout  amis  que  des  aristocrates' 
'V  et  la  moinerie,  etc.  m  On  voit  que  ce 
Mathier ,  son  cousin  ,  qu'il  avait  sî  mal  reçu 
chez  lui ,  ne  resta  pas  long  -  tems  sans 
éprouver  le  poids  de  sa  vengeance. 

Un  caractère  aussi  haineux^  et  dont  Tirri- 
ation  se  perpétuait  par  les  vapeurs  du  vin , 
levait  porter  la  désorganisation  dans  l'ar- 
née  que  la  mission  de  Lebqn  chargeait  de 
flirveiller.  Son  imbécille  de  frère ,  promu 
aar  sa  protection  au  généralat  ,  également 
idonné  à  l'ivresse  ,  dénonce  tous  les  gêné- 
aux  qni  ont  le  ma-Iheur  de  lui  déplaire.  La 
juillotine  ,  la  fusillade  ,  privent  la  Répu-i 
:>lique  de  ces  chefs  instruit?.  Gïllet ,  chef 
ie  brigade  au  corps  du  gémé,  est  un  de 


400  Crimes  commis  dan  s  le  départ.  duKord , 

et  sa  fille  ,  et  s'installe  dans  leur  maison/ 
A  Bergues  ,  on  Ta  vu  entouré  d'une 
vingtaine  de  citoyens  totalement  ivres.  Le 
local  quils  occupaient  représentait  une  vraie 
tabagie.  On  buvait ,  on  trinquait,  en  criant 
à  tue-tête  :  vive  la  République!  vive  la  guillo- 
tine !  Duquesnoy  chancelle  au  sortir  de  cette 
auberge  ;  quelques  pas  plus  loin  il  tombe 
par  terre  :  plusieurs  citoyens  s'empressent 
de  le  relever  pour  le  conduire  chez  lui. 
Duquesnoy  avait  été  envoyé  à  Metz,  Des 
patriotes  prononcés  furent  députés  vers 
lui  : 

«c  Tu  as  des  yeux  qui  me  déplaisent^  dit- il  à  Vun 
d*eux.  A  un  autrç  :   Tu  as  Pair  d^un  évéque ,  tu  nt 

Îeux  pas  être  patriote,  A  un  troisième  :  Tu  es  un  fripon* 
e  viens  ici,  ajoute-t-il,  avec  des  pouvoirs  illimités. 
L'esprit  public  n'est  pas  bon,  je  le  mettrai  au  pas; 
sous  quinze  jours  j'en  ferai  fusiller  cinq  à  six  cents i 
tant  à  Metz  qu'à  JVancj  »>. 

Le  feu  se  manifesta  le  même  jour  aux 
fours  de  la  Munitionnaire  ;  Duquesnoy  s'y 
rendit  ians  marque  distinctive.  Le  Juge  de: 
paix  ,  décoré  de  sa  médaille  ,  y  donnait 
des  ordres,  Qjie  fais-tu  là  ,  lui  demande 
Duquesnoy  ?  Le  Juge  de  paix  réplique  que 
rincendie  étant  dans  son  arrondissement, 
son  devoir  Ty  appelait,  Duquesnoy  exhibe 
ses  pouvoirs  ,  et  le  fait  incarcérer.  Plus 
loin,  Duquesnoy  rencontre  un  habitant  de. 


sous  Je  proconsul  Duquesnoy.         401^ 

la  campagne,  il  le  prepd  au  collet  et  le 
maltraite  de  coups  :  un  jetihe  homme  ,  âgé 
de  seize  ans  ,  témoigne  sa  sensibilité  ;  Du* 
^uesnoy  fond  sur-  lui ,  et ,  d'un  coup  .  de 
poing  dans  i-estomac ,  le»  renversé  à  dix  pas 
de  là.  Un  Citoyen  ,  du  nom  de  Mahu^  cou- 
vert de  sueur  ,  se  retirait  de  lincendie  , 
dans  l'instant  où  il  cessait:  ««Que  fais-tu- 
5j  là  ,  dit  Duquesnoy  ?  Pourquoi  ne  tra- 
j>  vailles- tu  pas?  — J'ai  peut-être  travaillé 
'j>  plus  que  toi ,  répond  ce^  Citoyen  ,  sans 
fj  le  connaître.  »5  II  eticorê  battu  et  incar- 
céré. ((  Où  vas-tu,  demande-t-il  à  un  em- 
jj  ployé  au  dépôt  des  habillemehs  militaires?  - 
»>  -— A  mon  bureau.  —Tu  m'as  lair  d'un 
'jj  aristocrate.  En  prison  !  m  Un  enfant  , 
''nommé  Dorvaux  ,  est  encore  conduit  en 
^prison.  Un  militaire,  à  qui  on  avait  appli- 
qué les  vessicatoires  ,  au  premier  coup 
d'alarme  avait  quitte  son  lit ,  pour  former 
la.  chaîne  avec  ses  camarades  ;  Duquesnoy 
lui  donne  un  coup  de. poing  dans  le  dos  ; 
il  se  retourne  ,  et  en  reçoit  un  autre  dans 
l'estomac:  Duquesnoy  le  fait  encore  arrêter 
et  conduire  au  corps-de-garde. 

On  remarqua  qu'il  était  dans  un  tel  état 
d'ivresse ,  qu'il  ne  pouvait  tenir  son  crayon  ; 
îl  se  laissa  même  aller  par  terre ,  en  voulant 
passer  par-dessus  un  petit  mur.  On  peut 
juger ,  par  ces  légers  renseignemens  ,  com^^ 

Tome  VI.  ce' 


40?  Massacres  et  incmdies 

bien  les  faits. qw  nous  om  èchap|>é  ajoi^- 
teraient  à  ce  taUeau  d-unc  vie  crapuleuse 
et  féroce.  Duquesnoy  a  été  condamné  à  mor  ^ 
à  Paris ,  le  28  prairial  an  3  (  16  juin  iTgby^ 
.(  Voyez  le  Tableau  »^.  2 ,  tome  2. j 


Massa  c  RE  s  et  incendies  dans  les  Colonies 
Françaises. 

Avant  les  désastres  survenus  à  Saint-t)o- 
luingue  ,  pn  calculait  à  deux  cents  niillipi\s 
tourâoiis  ou  à  peu  près  la  valeur  des  denrées 
«coloniales  importées  en  France  ;  à  quatre- 
vingt  et  quelques  millions ,  celle  de  ces  den- 
rées qui  se  consommaient  dans  Tintérieur 
de  TEtat  ;  à  1 20  miUîorisou  environ  ,  céljes 
qui  se  vendaient  à  Tctrànger  ;  etenyiron.à 
60  millions  les  marchandises  que  Tétrançer 
Jious  fournissait  ;  eh  sorte  que  la  balance 
ordinaire  du  commerce  était ,  en  faveu^*  de 
la  France  ,  d'une  soixantaine  de  millions 
par  ajn  ,  dont' elle  était  redevable  à  la  seule 
.colonie  de  Saint-Domingue  ,  qui  ,  d'après 
les  calculs  du  Ministre  Necker ,  rendait  à  la 
Métropole  plus  que  toutes  les  autres  colo- 
nies Françaises  ensemble. 

Cet  état  de  splendeur  devait  naturelle- 
ment extîter  la  jalousie  de  TAngîe terre  ,  si 
avide  de  la  souveraineté  commerciale  ;  et 


dans  les  colonies  françaises.  Î4a3 
«ans  aspirer  à  s'approprier  cette  portion  si 
importante  des  Antilles  Françaises  par  une 
invasion  qui  soulèverait  toutes  les  puissances 
3de  l'Europe  ,  contre  son  despotisme  ,  le 
Cabinet  Britannique  a  du  diriger  toutes  ses 
*  ^mesures  vers  leur  entière  dévastation  ;  dans 
^rim possibilité  de  conquérir  ,  Hd  i  voula 
anéantir. 

Telle  est  l'origine  politique  des  fféaux 
^ui ,  par  un  horrible  privilège  ^  ont  pesé 
«i  spécialement  sur  la  colonie  Française  de 
-Saint-Domingue  ;  et  quelle  que  puisse  être 
:1a.  sincérité  de  tjuelques  provocateurs  ou 
âgens  principaux  de  la  révolution  colo- 
niale ,  les  ruines  de  Saint-Domingue  ,  les 
cendres  de  ses  habitations  si  florissantes  ,  le 
désespoir  de  deux  cents  mille  Français 
^échappés  par  une  fuite  lointaine  aux  fureurs 
des  farouches  Africains  ,  la  perte  de  deux 
cents  mille  autres  égorgés  par  ces  tigres  dé- 
muselés ,  la  joie  sanguinaire  de  TAnglais 
applaudissant  à  ces  massacres  ,  et  les  perpé- 
tuant avec  son  or  et  son  machiavélisme  ; 
voilà  les  accusateurs  irrécusables  de  ccS 
vains  philantropes  ,  voilà  la  réfutation  de 
leurs  systèmes  destructeurs  ! 

La  révolution  Française  fut  un  coup  de 
foudre  pour  ses  colonies  ;  le  seul  mot  des 
Droiês  de  C Homme  ,  devint  Tarrêt  de  disso^ 
lution  de  leur  système  social  /fondé  sur  une 

c  c  2 


1404  Massacres  et  incendies 

servitude  alors  nécessaire  ,   et  qu'il  apparu 
.tenait  au  tems  seul  de  modifier  :  Ce  que  je 
craindrais ,  a  dit  Rousseau  aux  Polonais ,  sur 
le  projet  d  affranchir  leurs  esclaves  :  «trce 
îj  n'est  pas  seulement  Tintérêt  mal  entendu» 
9î  lamajur-propre  er  les  préjugés  des  maî- 
3)  très  ^  ce:  sont  les  vices  et  la  lâcheté  des 
99  serfs  ;  la  liberté  est  un  aliment  de  bon 
9}  suc ,  mais  de  forfe  digestion  ;  il  faut  des 
99  estomacs  bien  sains  pour  la  supporter  ^n 
Si  les  préjugés  invétérés  des  Colons  et  des 
grands  Planteurs ,  leur  amour-propre  habi'- 
tué  à  un  système  de  distinctions ,  en  quelque 
sorte  indiquées  par  la  Nature  ,  si  Tinstincit 
.aveugle4erintérêtrepoussaitcommeunjoùg 
humiliant  et  funeste ,  le  niveau  d'une  Comr 
mune  égalité  ,  c'est  sur-tout  dans  la  lâcheté^ 
dans  les  vices  des  serfs  ,  qu'elle  trouvait  un 
obstacle  plus  insurmontable  ;  le  cœur  plein 
de  toutes  les  viles  habitudes  de  l'esclavage , 
les  uns  s'imaginèrent  que  pour  être  libres  , 
il  suffisait  d'être  mutins  ;  d'autres  ,  incapa- 
bles d'apprécier  leurs  droits  autrement  que 
par  leurs  besoins  sensuels  ,  se  livrèrent  avec 
une  intempérance  effrénée  à  leurs  appétits 
honteux  et  sanguinaires  ;  tous  prouvèrent 
que  ,  si  une  fausse  philosophie  avait  stipulé 
pour  l'égalité  ,  en  revanche  la  politique  ^  la 
vraie   justice    et   même    l'humanité  récla- 
maient contre  ces  indiscrétions  précoces 


danî  les  cdlmus  ffûniçmsh.  40S 

pour  les  voiles  de  la  prudende  et  les  droits 
seuls  imprescriptHïlés  du  t^iris. 

Ce  fut  un  crime  de  Vouloir  anticiper  sur 
ces  droits  ;  et  tandis  que  la  France  s'avan- 
çait à  grands  pas  vers  la  liberté  républi- 
caine ,  dont  ses  lumières  lui  permettaient 
de  faire  un  digne  usage  ,  elle  ne  pouvait 
être  que  funeste  dans  un  pays  où  la  raison 
était  moins  éclairée  |  et  ppur  une  espèce 
dont  les  facultés  plus  tardives  n'avaient  en- 
core reçu  aucun  développement  de  l'édu- 
cation. Cependant ,  à  Paris  ,  une  société  de 
préteflidus  amis  des  Noirs  déguisait ,  sous  l'in- 
tention apparente  de  leur  affranchissement, 
le  but  réel  du  bouleversement  des  colonies, 
et  l'espoir  de  partager  les  dépouilles  des 
propriétaires  mis  en  fuite  ou  massacres. 

Un  mulâtre  ,  que  son  intelligence  supé- 
rieure à  celle  des  hommes  de  son  espèce 
avait  mis  en  relation  avec  les  principaux 
.  moteurs  de  la  révolution  Française  {  Rai- 
mond  )  était  le  point  de  contact  entre  les 
agitateurs  révolutionnaires  de  la  Métropole^ 
et  les  révoltés  de  la  colonie  ;  une  lettre  d/a 
sa  main  ,  en  donnant  la  mesure  de  son  in- 
fluence sur  la  dévastation  et  les  troubles  de 
Saint-Domingue  ,  en  fera  connoître  aussi  les 
moyens  et  le  but. 

((  Notre  cau&e,  écrivait- il  aux  hommes  de  couleui 
qui  s'insurgeaient  pour  Tcgalité   politique,  com- 

GC    3 


4o8  Massacres  et  incendies  . 

étant  ce  qui  nous  intéresse  davantage.  C'était 
à  en  encQurager  la  culture  ,  à  en  activer  U 
fécondité  ,  que  devaient  ,s'appliquer  toutes 
nos  prétentions ,  c'étaità  rihtérêt  des  Colons- 
Propriétaires  ,  si  naturellement  d  accord 
avec  celui  de  la  Métropole  qu'il  feUait  parler 
et  demander  des  conseils  ;  et, c est  contre 
les  propriétaires  qu'ont  toujours  été  dirigés 
les  soupçons  ,  les  ordjes  ,  les  armes  de 
l'autorité.  Là  ,  se  trouve  l'explication  des 
désastres  de  Saint-Domingue ,  qui  sont  pour 
tant  de  Français  une  énigme. 

11  n'entre  point  dans  notre  plan  de  suivre 
pas  à  pas  les  intrigues  qui  ont  frappé  tant 
de  coups  faux  et  désastreux  aux  colonies  , 
de  citer  successiveipent  la  foule  dé  décisions 
contradictoires ,  de  mesures  incohérentes  , 
de  marches  incertaines  et  croisées  des  divers 
partis  qui  se  sont  arrachés  le  sceptre  de  la 
puissance  ,  pour  en  faire  réciproquement 
une  arme  de  destruction.  Nous  croyons 
néa.nmoins  devoir  à  la  clarté  des  faits  que 
nous  voulons  offrir,  de  dire  que  les  décrets 
vagues  et  entortillés  de  l'Assemblée  cons- 
tituante furent  les  fermens  les  plus  actifs  de 
dissention  dans  les  colonies  ;  que  ,  comme 
des  armes  à  deux  tranchans  ,  ils  paraissaient 
propres  à  défendre  les  uns  et  les  autres  ,  et 
ne  servaient  qu'à  les  blesser  tous. 

Epouvantés   des    principes    révolution- 


dans  Us  cûloniesfrança}s€s.         ^ôg 

naires  qui  se  développaient  tin  France  au 
nom  des  Droits  de  THomme  ,  les  colons- 
propriétaires  songèrent  sérieusement  à  en 
prévenir  l'effet  contagieux  sur  leur  pays 
^nenacé  d'un  entier  bouleversement.  A  Saintp 
Etomingue  comme  en  France  ,  on  s'était 
réuni  dès  1789,  en  assemblées.  On  avait 
pris  les  armes  pour?  la  liberté  politique; 
Les  Assemblées  primaires  avaient  créé  au 
Cap ,  au  Port-au-Prince  et  aux  Cayes  des 
Assemblées  provinciales  ,  qui  rivalisaient 
d'enthousiasmes  ,  et  recevaient  l'impulsion 
de  celle  du  Cap.  Une  assemblée  supérieure 
s'était  constituée  à  Saint-Marc  sous  le  nom 
d'assemblée  coloniale ,  formée  des  Repré- 
sentans  réunis  de  toutes  les  provinces.  Ce 
fut  là  que  se  conçut  l'idée  sage  et  patrio- 
tique de  combiner  pour  le  régime  intérieur 
des  Colonies  une  constitution  distincte  pour 
les  principes  et  les  moyens  de  la  consfifu* 
tion  française  ,  et  soumise  seulement  à 
l'acceptation  de  la  Métropole  dont  les. 
droits  exclusifs  pour  la  législation  extérieure 
et  commerciale  de  la  Colonie  n'en  étaient 
pas  moins  reconnus  et  respectés.  Cette 
conception  simple  et  naturelle  trouva  de 
grands  obstacles  dans  lajalousie  de  l'assem- 
blée provincial^  du  Cap  ,  qui,  protégée  par 
le  Gouverneur  militaire  de  la  Colonie  i  et 
corrompue  par  le  dévouement  servile  des 


410  Massacres,  et  incendies 

autres  assemblées  provinciales  ,  répugnait 
à  reconnaître  une  autorité  supérieure  à  k 
sienne.  Elle  affecta  de  travestir  les  projeo 
de  rassemblée  de  Saint-Marc  en  projets 
coupables  d'indépendance  ;  elle  cassa  des 
municipalités  qui  paraissaient  les  partager; 
et  par  ses  ordres  ,  le  colonel  Mauduit  fol 
chargé  de  dissoudre  rassemblée  de  Saiot-^ 
Marc  à  main  armée  ,  comme  il  avait  fait 
contre  un  Comité  du  Port-au-Prince.  Obi^s* 
sancc  fut  à  la  force  ;  et  à  la  vue  des  troupM 
qui  l'assiégeaient,  TÂssemblée  toute  cndère« 
au  nombre  de  quatre-vingt-cinq  membvet  « 
s'embarqua  sur  le  Léopard  ,  le  7  août  179O) 
et  vint  présenter  à  la  barre  de  TÂssemblée 
constituante  son  innocence  à  reconnaître  t 
et  son  oppression  à  venger. 

Cette  démarche  fut  sans  effet;  et  le  19 
octobre  suivant ,  l'Assemblée  constituante , 
tout  en  promettant  expressément  de  ne 
porter  aucune  loi  sur  l'état  des  personnes  dans 
les  Colonies ,  sans  la  demande  précise  et  for^ 
melle  des  Assemblées  coloniales ,  consacra  par 
le  même  décret  l'accusation  d'indépendance 
élevée  contre  celle  de  Saint-Marc ,  et  en 
cassa ,  sous  ce  motif,  toutes  les  délibérations 
et  tous  les  actes. 

Cependant  l'Assemblée  provinciale  du 
Cap  ,  triomphante  et  libre  ,  ne  tarda  pas 
à  adopter  les  alarmes  de  l'Assemblée  qu'elle 


dans  lés  colonies  frûnçaiits.        411- 

avait  proscrite.  Avertie  à  tem^  <k  rapproche  " 
êtxiTi  homme  de  couleur,  nommé  Ogé  ^ 
parti  de  France  avec  des  décrets  perfide- 
ment équivoques  de  FAssemblée  constî- 
mante  pour  troubler  les  Colonies  au  nom  dei 
l?Egalité  ,  elle  ordonna  toutes  les  mesures 
propres  à  prévenir  le  soulèvement  médité  ; 
mais  ne  put  empêcher  le  débar<jttcment 
^Ogé ,  qui  se  iftit  aussitôt  à  la  tête  d'un 
le^dsemblement  nombreux.  On  promit  trois 
cents  portugaises  à  celui  qui  le  mettraic  à 
taoTt.  Apr^s  beaucoup  de  brigandages  et 
de  massacres,  il  fut  obligé  de  fuir  chez  îes 
Espagnols  qui  le  rendirent  à  ses  juges  natu* 
tels ,  et  il  périt  enfin  sur  la  rOu^  avec  vingt 
de  ses  complices ,  après-  tfiae  procédure 
qui  dura  deux  mois.  L'exécution  se  fit  sur 
ÏH  place  du  Cap  avec  solfeftnit^.  L'Assemblée 

{provinciale  y  assista  toute  entière  ;  toutes 
es  troupes  prirent  les  armes  ,  et  les  dt^- 
peaux  tricolors  furent^déployés.'  Le  con-^ 
cours  immense  des  citoyens  qui  parurent 
applaudir  à  ce  supplice  ,  fit  dti  cet  acte  dou' 
loureux  de  sévérité  une  espace*  de  fête  natio- 
nale. Cette  journée  offrait  aux- jf>ahi»ans  de 
FAssemblée  de  Saint-Marc  là  justification 
et  le  triomphe  de  ses  principes  ;  et  celle 
du  Cap  vit  tout-à-coup  se  déclarer  contre  , 
elle  les  dispositions  lés  plus  haineuses.  De 
nouvelles  insurrections  de  Nègres  dans  la 


419  'Mtissacfes  et  incendies 

partie  du  Sud,  en  justifiant  davantage  la 
précédente  rigidité  deTÂssemblée  de  Saint- 
Marc  y  ajoutent   à  Tindignation  générale 
contre  celle  du  Càp.  Mauduit ,  qui  avait  si 
bien  servi  les  prétentions  ambitieuses  de 
celle-ci ,   en   partage  aussi  la  défaveur ,  et 
périt  victime  de  ses  propres  soldats  désa^ 
busés....  :.  de  nouvelles  troupes  arrivées  de 
France  avec  les  dispositions  les  plus  favo- 
rablefs  à  l'Assemblée  exilée ,  se  joignent  aux 
régimens  déjà  existans   dans  la  Colonie, 
rétablissent   au  Port-au-Prince  le   Comité 
que  Mauduit  y  avait  dissous  ,  font  sortir 
des  prisons  les  citoyens  que  ce  Colonel  avait 
fait  arrêter,  et  protègent  de  leurs  armes  une 
Municipalité  nouvelle  et  une  Commissioft 
judiciaire  qui ,  sous  les  auspices  de  l'appro- 
bation générale,  s'organisent  pour  la  pour- 
suite de  tous  les  fauteurs  de  troubles.  Le 
ihaire ,  Lerembourg,  est  chef  de  ce  tribunal 
dont  les  jugemens  se  rendent  et  s'exécutent 
avec  la  même  célérité.  Un  interrogatoire 
rapide   et   quelques   témoignages   suffisent 
aux  juges  ;  un  mot ,  un  signe  du  Président 
qui  n'a   besoin   que  de  porter  la  main  au 
cou ,  annoncent  Farrêt  fatal.  Des  Exécu- 
teurs toujours  prêts  s'emparent  de  la  vic- 
time, et  lé  premier  arbre,  devient  l'instru- 
ment de  son  supplice. 

Cependant    l'opinion    générale  et  une 


dans  les  colonies  françaiies.  4^ 

proclamation  du  gouverneur  Blanchelan<te 
appellent  les  Assembléel»  'primaires  pour 
remplacer   celle  provinciale  du   Cap  par 
une  Assemblée  coloniale.  Aussitôt  la  noii* 
velle  non-officielle  encore  dW  décret  du 
i5  mai  1791  9   qui  admet  les  hommes  de 
couleur  à  la  jouissance  des  mêmes  droits 
:politiques  que  les  blancs  ,  excite  tine  fer- 
mentation   universelle.    On    se    précipitle 
dans  les  assemblées  primaires  poux^- terminer 
.toute  élection,  ayant  que  la  publicité ^au* 
thentique  et  formelle  ^e  la  loi  en  eut  ouveit 
les  portes  aux  hommes  dte  couleur.  ÏAvtxs 
.prétentions  anticipées  ^  appuyées  par  de^ 
menaces  et  des  émeutes  ,  arment  contr'^tik 
4es  citoyens.  Dans  le  délire  de  l'indignatioft 
et  de  Teffroi ,  :  quarante  villes  bu  bouirg^ 
;s  annèrent  pour  leur  destruction.  On  mît 
4m  prix,  à  chaque  tête  de  mulâtres  qu  appôr^ 
terait  un  Africain  ;  et  c'est  alors  quon  les 
^fusilla  dans  les  rues  du  Cap ,  comme  dans 
les  forêts  Ton  fusille  les  bêtes  fauves. 

Le  désespoir  doubla  Faudace  des  hommes 
de  couleur  révoltés.  Ils  s'adjoignirent  et 
armèrent  leurs  Nègres ,  qui ,  tout-à*c6up 
et  au  nombre  de  cinquante  mille  ,  serépan-* 
dirent ,  la  torche  d  une  main  et  le  poignard 
de  Tautre  ,  sur  la  vaste  et  riche  plaine  da 
Cap.  C'est  dans  cette  ville  que  devait  se 
tenir  ,  le  %b  août  l^^i%  la  nouvelle  Assemi;* 


^414  Massacres  il  incendies 

blée  coloniale  ;  ce  fut  le  s3  qu  éclatèrent 
rinsurrection  et  lincendie  ,  qui  dévorèrent  ' 
en  quelques  heures  les  innombrables  éto- 
.blis^emens  que  deux  siècles  de  travaux 
•avaient  élevés  à  la  prospérité  nationale'; 
qu'on  imagine  un  torrent  de  feu  roulant  sur 
i5  lieues  de  pays.  .Ceux  que  la  flamme 
avait  épargnés  ;  ceux  qu  une  fuite  tirop 
•lisnte  laissa  en  proie  au  danger ,  tombèrent 
30u$  le  fer  des  assassins  ;  femmes  ,  enfans^, 
vieillards  ^  rien  ne  lut  respectée  pour  périr, 
il  suffisait  d'être  né  blanc. 

L  msurrectiou  et  la  terreur  se  propagè- 
rent rapidement  daps  le  jceste  de  laCoLome. 
Des  troupes  d'hommes  ide  couleur  zt  de 
Akoirs  répandus  dans  les  campagnes  y  poin- 
taient la  dévastation  et  La  mort;  ce  que  h 
brigandage  le  plus  effréné  ,  ce  que  la  plus 
rafinée  barbarie:  peuvent  cumuler  d'iunv 
reurs  ,  ils  le  commirent.  • 

Le  Cap  ,  le  Port-au-Prince  et  les  Cayeis 
étaient  les  seules  places  en  état  d'arrêteir 
les  entreprises  des  révoltés.  Le  Port-au- 
Prince  qui  ,  dans  tous  les  tems  ,  avait  mà^ 
nifesté  le  plus  -^d'énergie  contre  eux  ,  fut 
aussi  la  ville  contre  laquelle  ils  dirigèrent 
la  plus  grande  partie  de  leurs  forfait»» 
Campés  à  trois  lieues  de  ses  murs ,  ils  lui 
ôtèrent  toute  communication  du  côté  de 
4a  terre  ;  ils  allèrent  même  jusqu  à  détQurner 


dans  Us  colonies  française^.  ^     4.1$ 

les  sources;  et  plus  d'unie  fots  le  besoin 
d'efiu  occasionna,  entre  les  déuchéirhens 
#viincés  de  Tune  et  de  l'autre  armée  ,  des, 
^ptions  sanglantes  où  les  homiaes  de  cou- 
leur eurent  presque  toujours  layantage. 
...  Cependant  TAsseçiblée  coloniale  s'était 
^ièuoie  au  Cap  ;  et  après  quelques  exécu- 
«tipns  tumultuairement  faites  (  i) ,  des 
Ji^flQLfnes  dê^  couleur  et  des  Nègres  qu^oa 
^tlpecta  ,  elle  av^t  pris  solennellement 
AQUS  sa  protection  ceiix  qui  resteraient 
JSid$les  à  Tordre ,  et  promis  Texécution 
imt^  entière  du. décret  du  i5  mai ,  aussitôt 
j^-il  durait  été  envoyé*  Ces  dispositions 
4ineQèrent  des  conférences  où  l'on  parla 
idÉ  conciliation^  La  fatigue  plutôt  que  la 
iTpnliance  fit  déposer  les  armes. . 
oî.  JJn  décret  nouveaiu  ,  du  24  septembre  , 
j^>portaofiicieUement  la  révocation  de  celui 
idu  i5  ihai ,  qui  n  avait  jamais  été  reçu.  Les 
«belles  reprirent  les  armes ,   et  jurèrent 

(i)  Des  correspondances  interceptées"  avaient 
4lésigné  aux  sonpç'ons  une  foule  de  nègres  restés 
<latis  kCap;  oi^en^rassémbla-ua  grand  nombre  dam 
JOL  Savanne  de  la,  Fossette  ,  où .  4ès  foss^^  construis 

four  contenir  vingt  à  trente  cadavres ,  recevaient 
eux  qui  étaient  Tusillés  ;  on  les  forçiait ,  pour  cette 
'exécution,  de  se  mettre  à  genoux  sur  le  bord 
anéme  de  ces  fosses ,  où  ils  s'entertai€at,eux-même8 
fn  tombant.  Tout  ceci  se  ferait,  par  les  ordres  de 
Commissions  militairement  établies  par  TAssemblée 
toJomale.  ^    ,  -.  . 


41 6  Massacres  et  incendies 

d'obtenir  par  la  force  cç  que  leur  refusait 
la  loi.  Au  Port-au-Prince  4  on  avait ,  sur  la 
foi  de  la  paix  jurée  ,  >laissé  i5oo  hommiek 
de  couleur  entrer  en  armes  dans  la  vïHc^ 
et  s'établir  un  quartier  général  au  gouver- 
nement; bientôt  aux  i5oo  hommes  étaient 
venus  se  joindre  successivement  plùsieurt 
détachemens  de  2  à  3oo  hommes  ;  et  cette 
affluence  donna  aux  blancs  des  inquiétudes 
que  Tévènement  ne  tarda  pas  à  justifiti; 
Une  rixe  particulière  et  préparée  servit  aUX 
hommes  de  couleur  de  signal  de  ralliement. 
On  etitend  la  générale  dans*  leurs  casernes; 
Il  s'engage  une  action  J^ntr^èux  et  le  régî*^ 
ment  de  ligne  de  Normandie  que  la  Muni- 
cipalité avait  appelé  à  *  son*  secours;  La 
résistance  fut  vive  ;  et  ce  ne  fut  qu'après  ua 
combat  opiniâtre  de  quelques  heures  ,  que 
les  hommes  de  couleur  se  déployèrent; au 
bourg  delà  Croix^des-Bouquets.  Ils  com- 
mirent, en  s'éloignant  de  la  ville-,  tout  et 
que  la  rage  et  tai)arbarie  peut  inventer  de 
plus  révoltant.  Dés  blancs  mialades  furent 
massacrés  dans  I05  hôpitaux  ,  les  maison^ 
pillées  et  dévastées  ;  les  propriétaires  égorgés 
au  milieu  des  plus  cruels  tourmehs  ;  etpoui: 
comble  de  désolation  ,  un  incendie  épour 
vantable  dévorant  les  édifices  et  les  richesses 
immenses  d'une  cité  si  florissante  ,  teji 
furent  les  iBéaux  qui  signalèrent  ïa  retraite 


dans  les  colonies  françaùis.         ^vj 

dés  révoltés  qui  inondèrent  aussitôt  toute 
la  province  de  TOuestl'  Le  camp  principal 
dans  cette  partie  ,  et  comme  le  chef-lieu 
des  assassins ,  était  près -des  hauteurs  dô 
Léogane  ,  au  Trou-Cassé  ;  c'est  de4à  que , 
chaque  jour,  quiiize  ou  vingt  hommes  de 
couleur  partaient  à  la  tête  d'une  troupe  de 
ndirs ,  et  fusillaient  impitoyablement  tous 
les  blancs  qu'ils  rencontraient ,  hommes  , 
femmes  ,  enfans.  ils  n'étaient  bien  reçus 
du  chef  du  Trou-Cassé  ,  l'abbé  Ouvrière  , 
qu'en  rapportant  les  oreilles  des  blancs 
qu'ils  avaient  massacrés. 
.  Au  îiJord  ,  et  dans  la  plaine  du  Cap  , 
qui  déjà  n'était  plus  qu'un  monceau  de 
cendres ,  ils  se  livrèrent  à  peu  près  aux 
fnêmes  fhreurs,;  les  Blancs,  réfugiés  chez 
les  Espagnols  ,  élâîèht  vendus  par  eux 
ccfnt  trente-deux  livres  par  tête  aux  Nègres 
qui  les  sciaient  entre  deux  planches  ;  et 
les  enfans  étaient  pqftés  aux  bouts  des 
piques  ;  trente-trois  pères  de  famille  ,  pris 
dans  leurs  habitations  ,  ptts  du  carrefour 
Alquier  ,  furent  pendus  vivans  à  des 
arbres  ,  et  si 2  autres  "â  des  crochets  fichée 
^à  sept  pieds  de  hàût-eur  ;  à  cette  même 
époque  ,  trois  Nègres  commandeurs  de 
l'habitation  Charitte  près  le  Cap  ,  furent 
accrochés  par  -  dessous  le  menton ,  pour  ' 
ii'avoir  pas  voulu  ré volter  leurs  ateliers  ^ 
Tome  VI.  d  d 


4iS  Massacres  et  incendies    ' 

on  doit   juger    quelle  fut  la   durée    des 
tourmens  d'un  pareil  supplice.  Les  hommes 
de    couleur  présidaient   à  ces    atrocités  \ 
et  Ton  vit  Tun  d'eux  ,   nommé  Caiidy, 
arracher  alors  avec  des  tire-bouchons  les 
yeux    aux  victimes  ainsi  crucifiées  à   des 
arbres.  A  la  nouvelle  des  révQltés  et  de 
l'incendie    de  la   province  du  iNQrd  ,  les 
citoyens  du  Port-de-Paix  ,  étaient  accourus 
en   armes;  et  en  leur. absence  ,  Içs  assàs^ 
sinats  et  les  incendies,  éclatèrent,  dansi leur ^ 
pays  ;   la  ville  fut   aussitôt  le  refuge   de- 
tous   les  habitans  d'alentour  ,  qui   accpu*- 
rurent  tout  nuds  ,  à  la  faveur  de  }t^  iiuit , 
à  travers  les  bois  ;  des  hom;i|Les  de  côiir 
leur   envoyés  par  k  .Mulâtre  [Pinchinat, 
affluaient  aussi  ajniés  .  de    tputçs  pièces  ; 
et   telle  était  refFro.nteXie  avec  laquelle  ils 
menaçaient  la  ville  ,du  piUage  et  de  l'in-^ 
cendie  ,  que  les  çitpy^ens  étaient  obligés  de 
rester  tout  le  jour  sur  pied  ^  et  chaque  soir  de 
mettre  les  femmes,  les  enfi^ns ,  les  vieillards 
et  les  malades  en  sûreté  dans  le  fort  et  dans 
les  vaisseaux.  Indignés,  de  cette  déplorable 
consternation  ,  les  grenadiers  du  régiment 
çi-devantd^  la  Reine  ^  entourèrent  les  fossés 
de  la  ville  ,  pour  empêcher  les  hommes  de 
couleyr  qui  s'y.  trouvaient  alors  de:  sortir, 
et  dernandèrent   que  ^  pour  prévenir  leur 
tf^hispn  ,  ou  les  embarqHât  tous  à  bord  dt 


daniles  cdldnies  françaises.        -419 

la  Nouvelle  Rosalie.  Cette  idémarche  éner- 
gique effraya  les  hommes ;d^  couleur.,  qui 
s'y  rendirent  aussitôt  àpinès  »  avoir  déposé 
leurs  armes  V  et  prévinrent,  par  cette  sou^ 
ftiission  les  vengeances  terribles  prêtes  à 
éclater.   .      •     •         '.   ,       , 

Au  Sud  ,  rinsurrection/  éclate  d'abord 
aux  Cayercites  ;  les  hommes  de  couleur  se 
portent  chez  le  citoyen  Séjourné  ,  assas- 
sinent sa  mère  ,  le  saisissent  lui-même  et 
rattachent  à  un  poteau,  violent  sous  ses 
yeux  sa  jeûne  épouse  qu  ils  livrent  aux  fu- 
reurs lubriques  de  leur  troupe  ,  lui  ouvrent 
ensuite  le  ventre  ,  eti  arrachent  Tenfant 
qu  elle  portait ,  th  frappent  le  visage  du 
malheureux  Séjourné  ,  qu  enfin  ils  assas- 
sinent à  son  tour,  et  sortent  en  jetant 
Tenfant  dans  un  parc  à  cochons  (r).  Cette 
action  atroce  ,  ainsi  que  le  spectacle  jour- 
nalier des  assassinats  commis  à  Jacmel  , 
à  Plimouth  ,  à  Lance  ,  a  Veau  ,  à  Saquin  , 
et  dans  divers  quartiers  du  Sud ,  inspirèrent 

(  I  )  Il  ne  faut  pas  laisser  ignorer  une  abomina- 
tion du  même  genre,  et  plus  atroce  encore,  exercée 
Î)ar  les  hommes  de  couleur  sur  la  malheureuse 
àmille  Plainguel.  Après  avoir  coupé  par  morceaux 
la  mère  et  le  gendre  ,  cventré  la  jeune  femme  en- 
ceinte ,  et  jeté  son  fœtus  aux  cochons  ,  ils  s*empa- 
rèrent  aussi  de  trois  petits  enfans  ,  qu'ils  grillèrent 

Dd  2 


45.0        .    Massacres  et  incendies  \ 

une  telle  horreur  aux  Nègres  de  la  dé- 
pendance dejërémie,  que  rinsurrection  y 
fut  générale  contre  les  hommes  de  couleur. 
La  Municipalité  pour  les  soustraire  à  Tin^ 
dignation  due  à  tant  d'atrocités  ,  leur 
offrit  des  bâtimens  dans  la.  rade  ,  où  ils 
furent  nourris  .  et  protégés. 

/  Telle  était  la  position  de  St.  Domingue , 
malgré  larrivée  des  .  trois  Cotnmissaires 
jcivils,  Mirbech^  Roume  et  St.  Léger  ^  des- 
cendus au  Cap  dans  les  premiers  jours  de 
décembre  1791.  Tous  les  quartiers  gémis« 
saient  sous  la  dépendante  ou  la  terreur  des 
>hommcs'  de  couleur  ,  qui  avaient  déjà 
égorgé  plus  de  quatre  mille  Blancs  ,  et 
voulaient  enfermer  le  reste.  Les'Commis^ 
saires  crurent  devoir  pour  ramener  la 
tranquillité ,  accorder  une  amnistie  à  tous 
les  coupables  ;  mais  loin  de  se  prosterner 
devant  cette  indulgence  ,  trop  généreuse 
pour  eux  -  mêmes  ,  ils  en  refusèrent  le 
bienfait  aux  victimes  qu'ils  tenaient  sous  le 
couteau. 

Au  petit  Goave  ,   le  Comité  reçut  lam- 

«ous  les  pieds  à  petit  feu.  L'un  a  été  écorché  tout 
vivant ,  çt  Ton  a  fait  porter  à  l'autre  la  tête  et  la 
peau  de  son  frère  ,  dont  ils  firent  un  tambour  sôus 
ses  yeux  ,  et  comme  pour  le  faire  assister  tout 
.vivant  et  par  anticipation  au  supplice  qu'ils  lui 
destinaient ,  et  qu'il  éprouva  à  son  tour. 


dam  les'  cotonies  françaîsh.  4 «1 

nîstic  le  i3  décembre  1791  à  midi  ;  maïs 
le  Président  ,  Gaston  Duvivier  ,  en  em- 
pêcha la  publication  ;  et  le  soir  même 
à=  trois  heures ,  cinquante  hommes  de 
couleur  allèrent  à  la  géole ,  s'emparèrent 
de  trente-trois  détenus  aux  fers  qu'ils  garot- 
tèrent  ,  et  conduisirent  aux  limites  dû 
petit  Goave-  ,  où  ces  cannibales  eurent 
la  .cruauté  de  les  fusiller  aux  jambes  ,  et 
de  les  sabrer  ensuite ,  afin  de  prolonger 
et  accroître  leurs  douleurs.  En  suite  un 
détachement  de  vingt-cinq  hommes  se  porta 
auTrou-Canarie  ,  parles  ordres  du  même 
Duvivier  ;  et  telle  fut  la  précision  avec 
laquelle  îjts  furent  exécutés ,  qu'ils  massa* 
crèrent  soixante  -  dix  Blancs  dans  cette 
soirée. 

Ce  ne  fut  qu'après  ces  exécrables  expé^ 
ditions  ,  que  les  scélérats  encore  couverts 
de  sang ,  vinrent  sur  les  cadavres  palpitans 
de  leurs  victimes  ,  publier  dérisoirement 
Tamnistie. 

Les  Commissaires  civils  employèrent  tous 
les  moyens  de  conciliation  avec  aussi  peu 
de  succès.  Les  promesses  de  paix  des  Hom- 
mes de  couleur  n  étaient  que  des  pièges  ; 
et  la  confiance  des  Blancs  fut  plusieurs  fois 
récompensée  par  la  plus  horrible  trahi- 
son. A  Bayné  ,  près  du  petit  Goave  ,  les 
Hommes  de  couleur ,  soua  le  prétexte  d'une 

D  d  3 


422  Massacres  et  incendiet    '^ 

délibération  pacifique  ,  avaîerit  *  cohvoqué 
les  habitans  de  la  Commune  ?  il5>  dcscen-i 
dent  avec  joie  et  sécurité  du  haut  des  Mon 
nés  où  ils  se  tenaient  retranchés  ;?  et  iréunis 
au  bourg ,  ils  sont  pris  au  nombre! de  trente- 
sept  ,  gârottés  et  conduits  à  deux  cents  pas 
du  bourg  ,  où  les  Hommes  de  couleur  les 
fusillent.  C'est  ainsi  qu  après  ks  concordats 
faits  aux  Cayes  de  Saint-Louis  ,  à  Bayeul  et 
à  Âquin ,  les  habitans  qui  se  redraient  pai-^ 
siblem.ent ,  furent  toiit-à-coup  circonvenus 
par  une  troupe  d'Hommes  db  couleur ,  qui 
les  désarmèrent  et  les  assassinèrent. 

Voici  encore  un  trait  de  Fatroce  jterfidié 
des  Hommes  de  couleur.  Les -^Jègres  ré^ 
voltés  dans  la  parde  des  Anglais  ,  qui  csl 
au-delà  de  Tiburon  ,  du  côté  des  Cayes  ; 
après  avoir  égorgé  les  Blancs  du  côté  de 
Cavaillon ,  venaient  comme  un  torrent  pour 
se  jeter  dans  la  partie  de  la  grande  Ance  , 
jusqu  alors  intacte  ;  il  fallait  que  ces  Nègres, 
pour  y  arriver ,  passassent  par  Tiburon  ;  les 
Habitans  de  cette  ville  ,  mêlés  avec  les  Mu- 
lâtres ,  marchèrent  avec  confiance.  Les  deux 
troupes  en  présence ,  le  premier  feu  que 
firent  les  Mulâtres  fat  dirigé  contre  les 
Blancs  ,  et  trois  frères  tombèrent  à  Tîns- 
tant  victimes  de  cette  trahison  ;  la  plus 
grande  partie  des  Blancs  ne  put  y  échap- 
per ;  et  ^eux  qui   restaient  appelèrent  à 


dans  les  colàniès  françaises.        47$ 

teur  ^secours  leurs  propres  Nègres  r  Jean 
Kina  ,  enclave  du  citoyen  Laroqué  ,  se  mit 
à  la  tête  de  deux  cents  Nègres,  avec  les- 
quels il  établit  un  poste  ,  d'où  il  repoussa 
avec  *vatleur  les  révoltés  ,  qui  assiégeaient 
Tiburon  ,  et^  les  Hommes  de  couleur  qui 
voulaient  le  leur  livrer.  Il  périt  cihq  cents 
Nègres  rébelles  ,  et  cinquante  ou  soixante 
Mulâtres  ;  le  reste  prit  la  fuite. 

Peu  de  jours  après  ,  ceux-ci  soulevèrent 
*  les  Nègres  du  Port-au-Prince ,  de  la  Croix 
dès  Bouquets  ,  de  TArcaye  et  des  Habi- 
tations voisines  ,  au  nombre  de  plus  de 
cent  mille  ;  ils  lancèrent;  des  chiens  dans  les 
bois ,  pour  forcer  les  Blancs  qui  sy  réfu- 
■giaient  oe  sortir  ;  et  le  massacre  en  fut 
-porté  à  un  tel  excès  ,  qu  au  lieu  de  donner 
•i32  livres  par  tête  comme  on  le  leur  avait 
promis  ,  on  en  pa^a  par  paires  d'oreilles  \ 
et  presque  tous  en  portaient  à  leurs  cha- 
peaux ou  à  leurs  bonnets  en  place  de  ca- 
carde. 

A  cette  progression  toujours  croissante 
de  désastres  et  de  forfaits  ,  que  pouvaient 
opposer  les  Commissaires  civils  ,  qui ,  bor- 
nés à  la  seule  force  de  la  raison  et  des 
réquisitions  morales ,  n  avaient  reçu  de  la 
loi  que  des  faisceaux  sans  hache  ?  Impufs^ 
sans  pour  réprimer ,  ils  essayèrent  en  vaia 
de  concilier  des  haines  trop  inconcilia* 

D  d  4 


4^4  Massacres  -çt  incendies 

blés;  et  les  fureurs  Africaines  mises  aut 
prises  avec  les  passions  Européennes  ,  coti- 
tinuèrent  à  fermenter  ensemble  pour  I9 
désolation  et  la  dévastation  d  uti  pays.,  que 
la  Nature  elle-même .  semble  avoir  destin^ 
à  rinaction  et  au  repos.- 

Ce  n'est  point  en  révolution  quil  est 
permis  de  rétrograder;  et  ce  fut  en  accorr 
dant  solennellement  aux  Hommes  de  cou: 
leur  cette  égalité  politique  ,  dont  1»  pré- 
tention servait  de  prétexte  à  tous  leùlrs 
forfaits  ,  que  TAsseiùblée  législativie  espéra 
dy  mettre  un  terme.  Le  décret  du  4  ayrîl 
1792  ,  qui  consacra  cette  égalité  v  loin  d'ir- 
riter les  préjugés  orgueilleux  de^Colons , 
leur  offrit  un  moyen  honorable  dVbîtn- 
donner  ,  par  respect, pour  la  loi,  des  prin- 
cipes qu  il  eût  été  plus  humiliant  de  ne 
paraître  abjurer  que  forcément  ;  il  fut  donc 
accueilli  avec  plaisir  ,  et  enregistré  dans 
tous  les  Tribunaux  ,  sans  réclamation ,  sans 
délai  ;  on  envoya  même  à  plus  de  cent 
lieues  en  mer  une  députation  d'honneur 
au-devant  des  Commissaires  civils  San- 
thonax  ,  Polverel  et  Ailhaud  ,  qui  venaient 
chargés  dé  son  exécution. 

On  ne  leur  demandait  point  de  vengean* 
ces  ,  ni  même  de  punitions  ;  mais  on  espé* 
rait  une  juste  sévérité  pour  l'avenir  ;  ils 
devaient  du   moins  et  ils  promirent  une- 


dans  les  colonies  françaises.         4^$ 

•entière  impartialité.  Missionnaires  intimes 
de  Brissot ,  ils  étaient  devancés  par  le  soupr 
çon  que  cet  ami  des  Noirs  les  avait  chargés 
en  secret  d'jen  opérer  TafFranchissement  ;  et 
le  94  septembre  i79St ,  une  seiqaine  après 
)eur  débarquement  ,  ils  déclarèrent  dans 
un:e  proclamation  authentique ,  que  sincè- 
rement attachés  au  décret ,  dont  Texécution 
leur  avait  été  confiée  ,  ils  reconnaissaient 
1  esclavage  commre  4<  nécessaire  à  la  culture 
»  et  à  la  propriété  des  coloiiies  ,  et  ne  tou- 
?»  cheraient  jamais  à  cet  égard  aux  préro- 
9i  gatives  des  Colons  ♦>  ;:§aiithonax  ,  par- 
ticulièrement,.  poussa  rhypocrisie  jusqu  a 
protester  expressément  da^s  ;une  proclar 
mation  du  4  décembre  9  que  <«  si  rÀssem* 
«5  blée  nationale  égarée  po»vîiit  se  porter  à 
If  oublier  sur  ce  point. les  -prérogatives  des 
»5  habitans  de  Saint-Domingue  ,  çt  à -d^ 
jrtruire  dans  le  régime  colonial. le  gçf me 
^j  de  sa  prospérité  ,  il  déclarait ,  lui ,  qut 
j5  jamais  il  ne  se  rendrait  r^ixéçuteur  d'une 
f^  pareille  injustice  ,  qu  iî  s  y.  opposerait  de 
M  toutes  ses  forces  ,  et  quîl  ien  fesait  le 
99  serment  solennel  t9« 

Ces  promesses  étaient  au tai^t  de  meor 
songes  atroces  ;  et  les  brîgiands  révoltés 
trouvèrent  dans  les  déposit^res  de  Tau^ 
torité  nationale  des  complices  et  des  pro- 
tecteurs. Investis  d'une  force  armée  de  i3 


'4^         '    Massacrés  et  incendia.  ' 

mille  hommes  pour  la  •reslauration  de  ror- 
dre  et  de  la  prospérité  dans  les  Colonies^ 
par  rentier  et  prompt  anéantissement  des 
rébelles ,  ils  ne-  ^devaieftt  redouter  d'obsta^ 
clés  que  dans^a  funeste  dësrtmîon  des  Hom^ 
mes  de  couleur  libres  et  des  Blancs;  et 
l'objet  spécial  de  leur  mission^  le  but  po^ 
çitif  de  la  loi  qu'ils  venaient  exécuter  iiait 
rétablissement  de  Tharmonie  et  de  Téga- 
lité  entre  ces  deux  classefs  trop  long-^ems 
distinctes  ^  et  leur  fusion  civique  et  légale 
tn  une  seule  et  même  femillct.  -Tel  était  1^ 
Vœu  de  la  philosophie  ,  tel  était  cehiidc^ 
tons  les  cftôyen^'i  qui  9  vqyaût  dans  cette^^ 
Téunîoh  feàtérttteile  ,  ràccroîss^ment .  dcp 
forces  a  opposer  à  rlnsurrection  des  cs*^ 
claves  ,  qui  allait  aussi  en  croissant.,  appe* 
latent  à  gfaflds'jcris  et  avec  une^ sincère  im* 
patience 'Fentièïê'^xëcutiori  dé  la  loi.   .  î   : 

Mais  là  guerre  civile  semblait  être  dans 
le  cœur  des  Commissaires  civils  -,  ils  furent 
accusés  dWoir  employés  ce  moyen  pour 
Servir  leur  ambition  ;  et  loin  de  songer  à 
effacer  les  distinctions  de  couleurs  ,  c'était 
à  les  augmenter  ,  à  fomenter  la  lutte  des 
préjugés  ^tif ''^•a|)'plîquaientoces  Commis- 
saires en  aspitiint ,  suivant  l'expression  de 
S^nthonax  lui-même ,  à  la  dictature  cotbnialeX 

Ije  ,pi?emier  aicte  public  d'autorité  fut ,  de 
lai  part  des 'Commissaires  ,  Tordre  au  gé- 


dans  les.  colonies  françaises.        427. 

néral  Desparbès  de  tenir  ses  troupes  sur  la 
défensive  ;  et  c'est  ainsi  qu  ils  paralysèrent 
Tardeur  de  braves  ^  soldats  ,  indignés  de 
laudace  des  brigands  révoltés  ,  et  specta- 
teurs impuissans  des  désastres  de  la  colonie. 
^«  Depuis  un  ip;ois  que  nous  sommes  dé- 
^vbarqués.,  écrivirent-ils  alors  aux  Com- 
if  missaires  ,  ce  'ièms  peut-être  aurait  suffi 
fi-  déjà  pour  réduire  des  esclaves  révoltés  , 
99  dont  la  multitude  indiscipliuéfe  Tembar- 
99  rasse  elle-même  ;  et  cependant  nous  per- 
«ivdons  ce  terni sprécieiiiK  jdâns  une  inaction 
htàïissi  dangereuse  qu'humiliantCi  : 
:  99  Qu'attendOns-nous  ,' MWhj  ou  pliitôt, 
w  qu'attcndez-vous  pour,  mettre  en  acfioii 
»:  six  mille  «soldats  français  q*ui  lie  peuvent 
fsT'sans  indignation.végéterja^hement  en  se 
fj.  tenant  surla  'défensive  y  iiuahd  le  salut 
w  de  la  colonie  et  Ja  conservation  des  pro-^ 
99  priétés ,  que  nous  sommes  Venus  défendre^ 
iff'  semblent  dépendre  d'une'  attaque  gêné- 
n  raie  ?  Cependant  les  brigands  se  prévalent 
99  de  notre  inaction  qu'ils -prennent  peut- 
«  être  pour  de  la  timidité.,  attaquent  jour-» 
99  tîellementen>détailplusieùr'S  petits  camps, 
f9  dont  la  perte ,  en  affaiblissant  d'autant 
99  notre  parti ,  fortifie  le  leur,  et  ils  brûlent 
>9  à  nos  yeux  des  propriétés  qu'une  attaque 
»>  pliis  ptojnpte  aurait  soustraites  à  l'in- 
». ccndie.jn  ..',.-. 


42S         .  Massacres  et  incçndiei 

On  leur  avait  promis  Tattaque  du  i  s  aa 
i5  octobre  ;  et  le  19  ,  aucun  prépatatîfjiie 
s'annonçair  encore  ;  cwtnce  fneme  jour 
qu'ils  exprimaifint  ainsi  deur  généreuse  im- 
patience ,  et  c'est  par  des  arrêts  tyranniques 
qu  on  répondit  à  cette  expression  franche 
du  courage  ,  et  le  général  Dcsp^rbès  expia 
par  la  destitution  et  la  déportation  le  ton 
commun  à  toute  sa  troupe  d'iavoirdémjandé 
des  ordres  pour  se^battrc  contre,  des  rebelles  ei 
les  anéantir^ 

L armée  ainsi  comeniié:  dans  rîntéribuf 
semblait  du  moins  autoriser  la  convocation 
dés  Assemblées  jirimaires  sollicitées  par  tous 
les  bons  citoyens ,  pour  constituer  enfin  lé**^ 
gaïement  Pégalité  politique  ,  et  diOnner  à  1» 
colonie  des  Magistrats  et  des  Représentans 
de  son  choix;  la  présence  imposante  d'une 
force  militaire  permettait  une  réorganisa-» 
lion  de  la  garde  nationale  ,  conformément 
au  décret  qui  admettait  les  hommes  de 
toutes  les  couleurs  aux  droits  d'éligibilité; 
mais  loin  d'effectuer  cette  salutaire  incor-* 
poration  ,  loin  de  consommer  le  mélange 
déjà  commencé  des  hommes  de  toutes  les 
couleurs  ,  sous  les  mêmes?  armes  et  sous 
les  mêmes  drapeaux  ,  Santhonax  crée  tout 
exprès  un  sixième  bataillon  de  garde  na- 
tionale ,  exclusivement  composé  d'hommes 
de  couleur  ,  et  dans  lequel  on  fait  même 


dans  les  colonies  françaiiks.  4^9 

entrer  forcément  des  hommes  déjà  enrôlés 
dans  les  compagnies  de  leurs  sections  res^ 
pectîves* 

-  Pour  mieux  consacrer  cette  existence  dis- 
tincte et  séparée  d'une  caste  que  la  loi  or-» 
donnait  de  fondre  avec  celle  des  blancs  , 
de  manière  à  n'en  faire  qaune  seule  ,  le 
Dictateur  affecte  de  n  accorder  de  confiance 
qu'aux  hommes  de  couleur ,  n'admet  qu'jeux 
à  l'honneur  de  l'escorter  et  de  le  défendre , 
et  crée  des  compagnies  franches  exclus!* 
vcment  composées  de  ces  mêmes  citoyens* 
L'Assemblée  coloniale  devait ,  ainsi  que 
les  Municipalités  anciennes ,  faire  place  à 
d'autres  magistratures  choisies  directement 
par  tous  les  citoyens  ;  les  Commissaires 
abrogent  en  effet ,  le  1 2  octobre  ,  cette  as- 
semblée coloniale  pour  y  substituer  une 
Âutoiité  de  leur  composition  ,  une  Commis'^ 
sien  intermédiaire  ,  formée  de  12  membres^ 
dont  six  blancs  au  choix  de  l'Assemblée 
•coloniale ,  et  six  hommes  de  couleur  à  celui 
'des  commissaires  civils ,  ce  qui  consacrait 
une  lutte  des  couleurs,sous  le  prétexte  men- 
songer de  les  mettre  en  équilibre.  La  loi /en 
autorisant  la  dissolution  de  l'Assemblée  colo- 
niale, en  prescrivait  l'immédiate  réélection  ; 
mais  les  Commissaires,  obligés  de  convoquer 
les  Assemblées  comunalespourla  formation 
<les  Municipalités ,  les  restreignirent  provi"> 


43o  .Massacres  et  tncenxlies 

soîrement  à  cette  opération ,  et  investirent 
la  corporation  hétéroclite  qu^ils  avaient ima-' 
ginée  ,  de  toute  l'autorité  que  la  loi  n  avait 
voulu  conférer  qu'4  une  Àsseniblée  colo- 
niale du  choix  du  peuple. 

La  Commission  intermédiaire  3insitrzvchût 
en  autorité  populaire  ,  les  Commissaires 
civils  ,  sûrs  de  la  diriger  à  leur  gré  par  le 
fait,  des  créatures  qu'ils  y  avaient  placées 
arbitrairement ,  et  par  la  menace  d'une  des- 
titution aussi  arbitraire  ,  contre  ceux  qui 
contrarieraient  leurs  vues,  ne  travaillèrent 
plus  qu'à  empêcher  son  remplacement , 
qu'à  réprimer  tyranniquement  l'élan  naturel 
de  tous  les  citoyens  vers  le  droit  inalié- 
nable d'élire  eux-mêmes  leurs  Magistrats  et 
leurs  Représentans,  Polverel  se  chargea  des 
provinces  de  l'Ouest  et  du  Sud  ;  Santho- 
nax  resta  dans  le  Nord  :  la  ville  du  Cap  , 
qui  s'était  le  plus  signalée  par  son  zèle  à 
réclamer  l'exécution  de  la  loi  à  laquelle  ces 
Dictateurs  substituaient  si  insolemment  leur 
volonté  ,  méritait  les  premiers  coups  de  leur 
vengeance  tyrannique  ;  et  ce  fut  le  2  dé- 
cembre que  Santhonax  y  donna  la  mesure 
de  son  audace ,  et  apprit  par  quels  forfaits 
il  était  prêt  à  subjuguer  toute  résistance  à 
son  oppression. 

La  protection  spécialement  affectée  en 
faveur  des  hommes  de  couleur,les  patrouilles 


dans  Us  colçnies  francises.         43i 

nombreuses  qu  on  ne  commandait  qu^à  euix, 
ae  pouvait  qu  agiter  les  esprits  ,  et  faire 
craindre  aux  blancs  une  proscription  auissi 
^roce  qu'injuste.  '  Les. troupes  elle-mêmes. 
partageaient  cette  indignation  des  citoyens, 
avec  d'autant  plus  de  raison  qu  on  voulait  for- 
cef  tin  de  ces  régîmens  d'accepter  des  bornâ- 
mes de  couleur  généralement  détestés ,  pour. 
QfBciers ,  au  détriment  de  ceux  que  l'ancicn- 
ijeté  de  leur  service  et  l'estime  de  leurs, 
camarades  appelaient  aux  grades  vacan$« 
Cette  répugnance  des  soldats  manifestée 
par  des  murmures  avait  suffi  à  Santhonax. 
pour  ordonner  la  convocation  extraordi-. 
Qaire  de  toute  la  ligne  sur  le  champ  de 
Mars  :  Les  hommes  de  couleur  avaient  été 
J)areillement  appelés  en  bataille  ;  on  affecta 
d[e  leur  faire  charger  les  armes  en  présence 
dçs  troupes  qui  étaient  sans  cartouches.  Les 
citoyens  qui  en  voyaient  leurs  gibernes  toutes 
garnies ,  crièrent  à  la  trahison ,  et  les  blancs 
devaient  d'autant  plus  la  redouter  contre 
eux-mêmes  ,  que  seuls  ils  n'avaient  reçu 
aucun  ordre. 

Sur  ces  entrefaites ,  on  arrête  un  Citoyen 
de  couleur  portant  un  sac  que  réclament 
aussitôt  le  général  Laveaux  et  un  Chef  du 
bataillon  des  hommes  de  couleur  ,  comme 
étant  une  provision  de  biscuits  destinés  pour 
eux  ;  malgré  cette  réclamation ,  le  sac  porté 


432  Massacres  et  incendw 

à  la  Municipalité  est  ouvert  et  se  trouve 
ne  contenir  que  des  cartouches.  D'un  autre 
côté  ,  Ton  voyait  passer  continuellement 
dans  une  rue  des  bières^  semblables  à  celles 
dans  lesquelles  on  met  les  esclaves  qu  cm 
porte  au  cimetière  :  on  arrête  une  de  ces 
prétendues  bières  ,  c'était  des  fusils  qu  elle 
contenait. 

Le  bruit  de  ces  découvertes  ne  laisse  plus 
de  doutes  sur  des  projets  hostiles  ;  les  têtes 
s'échauffent, les  citoyens  s  agitent ,  et  avant 
qu  ils  aient  eu  le  tems  de  se  réunir  armés 
en  état  de  défense  imposante ,  les  hommes 
de  couleur  firent  une  décharge  à  laquelle 
ripostèrent  ceux  qui  se  trouvèrent  à  portée: . 
d'autres  se  rendirent  à  Tarsenal  d'où  ils  ti- 
rèrent deux  pièces  de  canon  de  4  ,  qui 
furent  augmentées  d'une  cinquième  enlevée 
sur  la  place  d'armes.  Déjà  trois  ou  quatre 
soldats  du  régiment  du  Cap  avaient  été 
tués  aux  fenêtres  de  leurs  casernes  par  les 
hommes  de  couleur ,  et  ceux-ci  avaient 
aussi  tiré  dans  les  rues  deux  ou  trois  rafales 
sur  les  blancs. 

L'action  eût  eu  les  suites  les  plus  funestes 
sans  le  courageux  dévouement  de  la  Mu- 
nicipalité et  du  citoyen  d'Assas ,  colonel  du 
régiment  du  Cap  ,  qui  se  jetèrent  entre  les 
deux  feux ,  et  réussirent  à  calmer  l'agita- 
tion universelle,  D'Assas  eut  le  pied  fracassé 


datù  les  colonies  frùriçahes.         453 

ffiine  décharge  qtié  flttnt  sur  lui  Iti 
Irommes  de  ccralétrV'^  et  àoti  domestiqué 'fut 
iné  a  ses  côtés.  Dalfcaûrf,  major  dû  taèmè 
tégîttiefîit:,  ne  dut  son  ;ssiltlt  qu^â  la  frâyeut 
de  ion  cheval  qui  en  se  cabrant  reçut  lé 
toup   destiné  à  son  maître*  ' 

Cette  journée  du  2  déVrenlbre  se.tétnfiîn^ 
par  la  retraite  deè  hOmmfes  de  couleur 
àti  poste  de  Bclair  ;  'difr;  èous  le  prétexte 
de  frayeurs  àrtïficïeusdfnènt  entretenues j^ 
ils  continuèrent  à  twënacet  ja  ville  dé  leu#S 
armes  et  de  leurs-  fureurs.  Après  de  nohi- 
Brtîuses  députattofns  qui  leur .  portkîehMrf 
Tceu  fraternel  dé  là  réconciliation  ïâ'pllûiâf 
sincère ,  ils  rentrèrent'  te  6  dans  la  ville  en: 
armei  ,  €ft  reprirent' letirt  casernes  /après 
avoir  dicté  les  proscriptions  de  plusieurs* 
cîtoyeiis  dont  Santhonax  ,  de  conceit  avec 
éwt  ,  ordonna  la  déportation  en  France;  ^ 

Ce  fut  à  Id  suîcc  d'ë  ces  jourrréeèn(ju*i| 
autorisa ,  le  6  décembre  ,  Rochartibèàu  à  li 
formation  de  ces  compagnies  exclusives 
d'hommes  de  couleur ,  dont  nous  avons 
parlé  plus  haut  :  on  lés  disait  destinées  à' 
ûîïe  Sortie' contre  lés  révbltès^  qt»i  étaieni 
réellement  lés*  véritat)lfc$  ennemis  de  la'cb- 
Ibnîé;  rirais  elles  né'fureiit  enire  lesmains  du 
Çofrfmtssàflre  que  des  itfs(rumens  de  terreur' 
et  d'è^ptessioh  toïitre  ïa  classe  déiblàncs' 
qu'A  avait  juré  d'anéantie  Cesont  les  colorfs^ 

Tome  VI.  Ee 


544  Massacrts  et  incendtes    \ 

spontanétnent  réunis  sous  le  général  Lavaux, 

oui  essayèrent  plus  tard  des  attaques  vigou- 

reujse^  contre  les  révoltés  qui  infestaient  la 

presque  totalité  de  la  province  du  nord,  et 

qui ,  après  les  avoir  forcés  dans  leurs  derr 

niersT  retranchemens, touchaient  au  moment 

lipvreux  de  les  voir  déposer  leurs  armes  i 

lorsque  Santhonax  trop  intéressé  à  la  durée 

dè.\la  révolte  ,   ordonna  à  laiimée  triom* 

pliante  d'abandonner  son  attitude  et  de 

sÇjtenir  sur  1^  défensive.       , 

_.Ia.  nouvellô  des   troubles  supposés  a^ 

Çprt-au-Prince  sêrvit/de  prétexte  à  Tordre 

^^1  .ramena  subitement  dans  la. ville  unç 

^rmée  qui ,  par  la  rapidité  de  ses  succès^ 

avait  tellement  réduit  les  révoltés ,  que  huit 

jmrs,  au  plus,  auraient  suffi  pour  terminer  cette 

expédition.  Cette  cessation  des  opérations  dç 

la  campagne  consterna  les  citoyens  qui  ap-^ 

prirent  presqucn   même   tems  la  fausseté 

des  craintes  qu'on  avait  communiqué  sur. 

la  ville  du  Port-au-Prince.  Santhonax  pro-. 

mit  une  sortie  nouvelle. et  très-prochaine;, 

mais  ce  fut  contre  la  ville  de  St.-Marc  quil. 

partit  le  28  février,  escorté  d'une  portion. 

de  Tarmée  de  ligne  ,  laissant  les  citoyens. 

livrés  à  leurs  propres  forces  y  et  ^  la  mercir 

des  hommes  de  couleur  qui  fiers  de  Km-, 

punité  V  ne  marchaient  plus  que  le  fusil  à, 

la    main  et   des   pistpïeçs  à  I9  ceint^re• 


dans  Jes  coloniey  françaises.        4â5. 

l^liisi^ui's  proyiQcatjUuiS  qu'ils  se  pendirent^ 
coiure  le^  Btonca..^  restèrent  sans  eflfiéts.if 
grices  à  la  pri;idenc&  il£[^  ces  derniers  ;qaiî 
ne  remuer enipointi  ?  1-  .  r-^';  !  .  »  i  :'>  :\o\- 
Gependant^Polverela^vait  «atain  soulevév> 
daqs  lies  prPMinces.deiFOutistiet  du  Sod,* 
les  Hommes  d^  couleur  !fiJt:kfif:i^lègresUb^^ 
contre  les  Blancs  ;  1»  loi':di(ri4iavrit  avait» 
Qbteausoiii^e^écution  dans  les  tilles  pidn^* 
cipales ,  et  notamment  au  Pôrt-au-Prince  ;> 
les  Hommes  de  couleur  ,  conte ns  .de  l'éga;-*. 
lité  que  leur  assure  la  loi  ,i  ny  aspiraient) 
plus  à  cette  suprématie  .-promise' par  les* 
commissaires  >  et  telle  est  la  cause  du  vqyà^éf 
de  S^inthonax  ;  qui ,  ne  cachant  ptils .  sow 
puojet  d'assiéger  cette,  wUe  *  fait  aianeit  en: 
secret  les  esql^es  de  St.-Marc  ,  met  les.qua- 
torze  paroisses  de  FOuest  en  -réquisitions 
armée  contre  le  Port-au-Prince  ^  et  vient i 
1  assiéger  par  terre  et: v:par  mer  ;l?arméé* 
de  terre  commandée  par  Lasalk  ,  se  i  pré*» 
sente  aux  porties  de  la  viUb  ,  qui  iconseût  à 
les  lui  ouvrir , ,  ^  m«ais.  en  rcfuaant  i  Tentrée  àt 
une  horde  d'hommes  de  Couleur  qui  avaient/ 
juré  solennellement  en  quittant  iSt«-Marc  it 
de  n'y  revenir  qu'après  avoir  attéré  la  factions 
des  Blancs  aU-Port-au-Prince  ,  et  extermini\ 
jusqu  au  dirnier.:  On  offrit  pareillement  àJ 
Santhoiiax  quiLse  présenta,  dans  la  rade  lesî 
premiers  jours  d'avril  ,  de  s'expliquer  .swri 

£  e  s 


456.  Masuxcrçs  et  incendies  ^' 

tous  les  griefs  încoimus  qui  avaient  pu 
motiver  son  appvoche  hostile  ;  mais  trop 
impérieux  pour  écouter  aucune  proposi- 
tion de  conciliation ,  il  ordonne  Tattaque , 
et  dès  neuf  heures  du  matin  ,  le  19  avril , 
trois  volées  de  baétèrie  fondent  sur  la  ville, 
qiilne  comptantpkfê  sur  aucun  m^nagetnent 
comménciC  enfin  à  riposter:  le  feu  «ira  en- 
viron huit  heures  ;  et  si  les  femf^mes  ,  les 
enfans  ,  les  vieillards  ne-  se  fussent  {>réci- 
pités  Sur  les  bords  de  ta  mer ,  pou)?  exciter 
la  pitié  des  marins ,  il  eut  duré  plus  long- 
tcjTDS  encore.  Trois  mille  boulets  tirés  mr  la 
Ville  y  endommagtèrient  presque  toutes  les 
cases.  .On  en  a  compté  jusqu'à  tj  ,  dirigés^ 
sur  rib&tel  ttusnicipai.  ^^ 

L'armée  entra  le  lendemain  i3  avril  ;  et 
comme  la  Municipalité  Favait  prévu,  tous 
les  habitam  qui  n  avaient  pas  pris  la  fuite 
furent  incarcérés ,  pillés  et  embarqués  ar- 
bitrairement. 

Huit  ou  dix  déclarations  faites  par  des 
nègres,  portaient  qu'ils  avaient  fiait  écoïcher 
vifs  les  blancs  qu'ils  attrappaient ,  qu'ils  les 
mutilaient  de  toutes'  les  manières  ,  qu'ils 
afvaient  été  portés  à  ces  actes  horrible^  en 
buvant  de  l'eau  bénite  ,  et  qu'on  les  avait 
fait  jurer  secrètement  d'ensevelir  dans  le 
silence  les  atrocités  qu'ils  devaient  c6m* 
mettre* 


danr  hv  colotws  frtmçahïs.  X^ri 

Ceoxîdès  tîtoyens:qiiî  échappèrent  i  ces 
massacres  furent  dépoiiéîs;  cm  en  fait  inionter 
le  .nombre  i' plus  desixteiits  ,  et  ce  soht/, 
ponr  la  plupart ,  des  soldais  e(  xies  dcctsy- 

sans.-  '■  '.  ■^'-  '''"  '-'^  ■  ''/  -'*-  '^* 

Tous  les  Vaisseaux  de  commerce;  <,-toià 
le^  bâtiraens  de  FEitat  létaiënf  autant  de 
bastilles  ffbttaràtes ,  dont  Santhonax  se  Ser- 
vait dans  Les  déportations  arbitraires  ;  pour 
sb  débarrasser  de  ceux  qu  il  avait  provisoi- 
rement jetés  dans  les  cachots.  De  cent  shc 
Citoyens  blancs  ;.  'enfermés  à  bord  du  St.- 
Honoré ,  dont  vingt- quatre  de  la  garde  soldée 
du  Port -i  au  r  Prince  ;  quatre  malhisureuses 
femmes  ,  dont  deux^sexagéHairès^  ;  touls 
entassés  sans  lit  ,  sans. lioige  ,  sànis^ argent^, 
5an$  vivres  ^  ssins  secours  ;  plusieurs  son(t 
morts*  danatxètte  bière ilpuante  ,  plusieurs 
ont  été  jetaéS'iii  la  mer;:  grand «nombore  de 
citoyens  ont  été  arrachas  à  leurs  iamillésf , 
pour  être -employés  en  qualité  de  matelots  ; 
nombre  dé  cultivateurs  théine' la  vieillesse 
la  plus  aVadcéé,  n?jén'^a  pas  été  esiceptée. 
Un  homme  r^pôctable,  Lauthillm^'  âgé  de 
rsioxamé-^eize  ans  vU'été  obligé  dé^ sfaririr  ep 
ecettie  qualité  ;  arrivé  à 'Paris  actablé  de  &r 
^  ligues  ^  il  meartk  -    ■         , 

•'  oLa  grande  quantilé  de  ces  déporiàdoni^, 
cda:  resacrestatloiis  arbitraires  n'étonnera 
plus V  lorsqu'on  saura  que  tes  mêmes. pou- 

£e  3 


îjSjS  MatîMfh'tt  incendier  '\ 

voirs'  attribués  eh  France  par  ks  Décemtirs 
aux  Comités  révolutionnaires  ,  i  étaient  at- 
tribués àSaint'DQminguediààiS):ious  sei 
•cjuaxtieÉs  yià  tous  les- nègres  ,  à  tousriesvinur 
lâtrcs  qui  couraient  par  bandes  sur  toutes 
^esthabcitationsi;;»  dans  toutes  les  'tnaismis  , 
les  pîUaienrviestkicendîiaient  <;'éç6xgéaiei& 
les  habitans',  et'  violaient  les  féraides  et 
les  filles  làe  ceux  quiils  traîiïaient  à.  bord/^ 
-daprèsiles  ordres  .'de  Polvercl  .tletj  de 
:Santhona?d.  -J*    ■  -  .  :  "■  r      ;  jc  .•..!' t 

X^dofaise  pdgneia: douleur ?<!& tant  de 
dBûiiillesI,  dont  Leb  chefs:étaieht:eniiassés  dans 
.ceS:  bastilles  ilottantes  ,  sani  qu'<on -kiiV  eôt 
laisséla&culté  «lie  ^ems  de  faire  aucuneproH 
.vision^  et  de  réiEflear leurs  araires  vqu  onima- 
igicue  Vétat  affreuxi  de  .tous'  lc«  pitoyebs  me*- 
nacésr/d'un  isort'j^areilivj  fit  TexcèS'  d'indi- 
gnation,  de  deuil  et  de  terreur  qu  avait 
.répandu  la  nouvelle  de  ces  horribles  triom- 
phes ;  et  Fori  jugera  avec  quelle  alégresse 
fut  reçue  la.  frégate  i/2  Concorde^,  'qui  ap- 
porta le  7  *inai  dans  là  rade  du  Cap. le  gé^ 
néral  Qalbaud  , 'en  qualité; d«  Gouverneur 
jgéniéral^de,  Sâirit-I>ominguei.i:Tomcs  les 
AutôritéS'.constituSefi  lui  adreàsiirent  Leuss 
plaintes  unanimes  ;  ses  premiers  soins  furent 
donnée' auÀbesoiris  tiés  troupes. 4/cpt  à  l'or- 
ganisatibn  delà  défense  de  la  Goiojaiexontbe 
les  révoltés  dtes    nègres;    cependant'  Içs 


dam  tes  cùlonieï françaises.        4^9 

déclamations  des  victimes  de  la  tyrannie  dés 
Commiissâîres  civils  se  multipliaient  ;  ce 
qui  fit  le^jilus  d'împressîoh  sur  tdti'slés 
esprits  ,  ce  fut  dé  vdir  Fëtat  affreux  des  pri- 
sonniers qne  cei?  Commîssàirts  àvâ^  fait 
jeter  à  fôiids  de'  ciaf/tofut  coiiVért's'de  bïeS- 
isures  ,  tout  ihondéy  dé  lëiir  prêtre'  sang'î 
avec  défense  expresse  aux  céntte-AmîfauSd 
d'ién  descendre  aucun' à  fèrfëv  soirs  quelque 
prétexté  que  ce.  fûtv  Des  inalâdies*  tifàii^ 
gieuses  ^^étaiënt  manifestées  parmi  eux  ;  et 
àbandbriâés  par  les  chirurgiens  ;  qtie  la 
tefreut  ^mpêchzntde  lés  visiter  *,  plusieurs 
avaient  tléjà  péïi  tniséirâblettient.  îj'^xtès 
de  ces  besoins  avaietrt  •  fûnrcé  lés  contte- 
Âîiiiràùx  à  éiifreindfc  lés  J3|rôKibitioiis,'ct  à 
méttte  à  terre  trèiité*-  uric*  ^(fersônnés  ih4^ 
lades  \  dont  plusieurs*  moururent  quelquei 
jours  aprèsi  -  /'*'  ---     '^     '  '       '       '  ^ 

Cependant  les  CqmÀîssjiîw's  civils  v  pré- 
cédés de  iôîxânte-dix  ^iàléts  'êliàr^  'déJ 
dépouillés  dii  Port-au-Princé  ,  a^ortaféniÉ 
au  NordTàÙdàcèéxtéréimatrîce  qui  venait 
de  désaster  la  partie  de  rOUesï  :  ù  Nous 
5>  venons  de  la  purger  de  fous  les  factieux  ^ 
ty  de  tous  lés  aristocrates  de  la  peau  ,  s'é- 
>»  crient-îlsïe  lojuîn,  eii  arrivant  aa  Cap  ; 
5J  que  ceux  qui  se  trouvent  entachés  des 
ff  mêmes  cfriities  daife  la  partie  du  Nord 
fr  sortent  de  la  Colonie  ?  ttîr  les  Commis- 

£  e  4 


44^  "Massacres  et  incendieT 

est  mis  eh  pièces  ;  le  second  haché  à  coups 
dé  sabre  et  noy^  dans  son  sang ,  est  tràiné 
éhez  Santhonax ,  qui  le  fait  arrêter/ 
^  Dans  la  ïiuit  ;  des  milliers  de  révoltés  , 
appelés  par  Pôlverel  et  Santhonax  ,  entrée 
dans  la  ville  ,  y  exercèrent  les  cruautés  Ici 
plus  inouies  :  la  place  de  Cliigni  et  ses  en* 
virons  furent  rempli  deleurs'hoîireurs  ;'il$ 
y  défoncèrent  tous  les  magasins ,  qu'ils  pil- 
lèrent ,  après  avoir  égorgé  les  habitans. 
Ajoutez  à  toutes  ces  atrocités  que  ce  soflt 
les  nègres  doitiestiqaes',  etifôlés  secrète^ 
ment  depuis  quelque  tems  par  Polvérét  et 
Santhonax  ,  qui,  après  avoir  égQrgélctifs 
maîtres  ,  s  étaient  emparés' îde  leurs  armes., 
et  tiraient' sut' là  tiroupè  dé  Galbçnidipixlci 
fenêtres  des  tnàiions.  Huit  cents  femmes  et 
leurs  ciifans  /  WfugîéS  aux  casernes  ,  ont 
disparu  pour  la  plupart^:  de  jeunes  inno^ 
cèntes  ,  déjjôt  pf écieiix  ^  cprifîëeS  aux  sôih^i 
de>  dames  dû  Gap  ,  ont  été  HHolées  et  èù-: 
suite  assà^iriéc».  Tou^  les  citoyens  hàbitiaiht 
hors- de  la  Jville- ,  qui  purent  échapper  aux 
poignards  de  leuts  domestiques  ,  se  réfu- 
giaient à  FArsenal ,  conjurant*  le  général 
Gnlbaud  de  ne  point  abahdoilnerà  ces  sfcé- 
létâts  le  reste  de  la  population  blahchiè-:' 
trois  personnes  '  se  réfugiant  \aux  casérnerf 
forent  fusillées.     ''     '  r,?  :  ^ 

»  L'armée  :  slir  quatre  coldnaiés  sortît   def 


dans  les  'Sorties  frnnçàises.         4qS 

yàrseitadaTec  •chacûiié  une^pièceide  canom 

JbdHtûasskrre  fetommença  pa:^  les  fenêtre^ , 

idifcù  Je^s  Nègres  tiiriMcnf  sur  rarmée  ,   et 

onpêchaiènti  les  Blancs  de  se  téunir  ;  Pol- 

Mewl  etiSanthcmax  cercaras  d'^etre  arrêtés  , 

lûrivent  lalfuite  par  les  derrières-,  entraînant 

•avec  euxle  frire  du  '  général» G»/iaud  ;  let 

se8'compaghons>  d'infortuniesi,;  tous  chargés 

de<ftrs,  au  mîlîsea  d'aQe:^ailB  dbftrois  cenu 

JKDoiiDes  :  i ilMiett;ez 5 ^ircut^ilis, fin» fuyant'; 

99  et  sur-tout  Dufay  ,  homme. de  couUuPv 

yi i  'mettez  le  >feii)  pa]Mpue.^.t}uîil9  *  soien t  tous 

^i:gTÎlIés  cammtt:dés'x:ochoris«:tfi     . 

f  i  Gctbaud'  qub  ne-  fiesaiti  pmm  la'  guëvre  aux 

jNi^es  et' auK 'Mulâtres  sapptrenànt  la  ref- 

tiHÎtedePolveriel  etdeSaofliotiax^  se  retira 

Ini-tmême  à' ramenai ,  dorniaiiti ordre  dar^* 

jpêter  Ies'.pOiÉiim0Miresi*civils.;Les  Mulâtres 

«et'Negm  ^nfiacdia  par  cette /retraite  ,  sort 

•tirent  du  Gxui^^enieniemêi'recioinniehcèrefit 

deurfeu.rLes  Bbacs  accablésipab  leur  noi» 

^rê!|3p:irent;la>laiie  ':  dans  toutes;  les  rues' , 

dans  toutes  les^maîsons'.y  on-  n'entendait 

7qiie'gémisseauna.'jct  cris  de  id^sespoin  Ix^f 

siiiofeus  réumniàvoL  mmiins^j  eflprayés  pâl- 

dar.cris  desIbiigaïUs  ^  tààijwàémnt  Galb'aud 

àik  ne  piisi U exposer  ^:rnni  loi^oyaiit  cé^ 

Jsoiu  de  moifebbi  tecmi  |poiid  ^  ils  /le  ^foirc^^ 

obnt  de  se.rexoiiaKqaer^ '>i   >;  :/>     . 

-..  A  chaque  iiMtafit.aii'iAi^t  àtôver  ^  au 


4  46  .  Massacres  tt  incen^in  -  " / . 

C'est  lorsque  la:  ville  était  en  proie  ^ux 
flammes  ,  et  que  le  sang  européen^y  coulât 
de  toutes  parts  ,  que  lès  Commissaires  civils 
firent  un  appel  à.  tous  les  Nègres  révoltés 
dans  les  Mornes  ;  et  ce  fut  le  21  juin  que 
parut  cette  proclamation,  qui,  la  première  , 
oSrit  aux  Africains  la  liberté.  Beaucoup  de 
Nègres  crurent  que  cette  liberté  les  auto-i 
risaient  à  continuer  le  massacre  et  la  dévas-* 
tation  ,  et  bientôt  les  Commissaires  ne, 
furent  plus  maîtres  d'arrêter  ces  désordres. 

Les  incendies  et  les  pillages  coqtijiuèrept, 
deux  mois  après  la  ruine  du  Cap.  Les  cl^c-r. 
mins  étaient  des  deux  côtés  bordés  de. 
Négresses  et  de  Mulâtresses  ,  qui  g^^rdaîent 
le  pillage  que  leurs  homities  apportaie^^  en 
dépôt  sur  la  route.  Il  y.  eut ,  le  sr6 .,  une: 
proclamation  qui  portait  la  peine  de  mort 
contre  ceux  qui  continueraient  à  tuer  ,  à 
piller  et  à  incendier:  on  conçoit  quelle  fut 
sans  effet  ;  mais  ,  le  24  juillet  suivant ,  elle 
fut  étendue  aux  malheureux  qui  viendraient 
chercher,  dans  les  décombres  de  leurs  mai- 
sons  ,  ce  qui  pourrait  avoir  .  échappé  aux 
flammes  ;  et  c'est  ainsi  que  plusieurs  pro- 
priétaires ou  économes ,  surpris  sur  leurs 
propres*  habitations  ,  ont  été  fusillés. 

La  retraite  de  presque  tous  les  Blancs 
ouvrit  la  porte  à  un  genre  nouveau  de  pira- 
terie ;  quand  un  Homme  de  couleur  trou- . 


dans  les  colonies  françaises.        447  * 

y^y  à  spn  gré  une  propriété  d'un  Blanc 
fugitif ,  voici  de  quel  moyen  il  usait  poui[ 
se  rappropner  sans  retour  :  il  allait  trouyer 
ce  Blanc  dans,  son  asyle ,  afFectàit  un  intérêt 
jparticulier  pour  ses  malheurs  ,  l'avertissait 
que  la  Commission  le  voulait  faire  arrêter , 
offrait  de  lui  fourair  un  passeport  pour  la 
Nouvelle-Angleterre  ,  et  de  gérer  ses  bien^ 
^ous  son  nom  ;  les  fugitifs,  acceptaient  c,ç$ 
offres  avec  reconnaissatxce ,,  et  livraient  une; 
procuration  extorquée*  ^ 

.  V  Tous  ces  désordres  étaient  impunis,  Le^ 
Commissaires  nommèrent  Glgno^x  com- 
inajgidant  de  la  place  ,  et  Galineaude  Gasq,^ 
commandant  de  Tarsenal:  Vergi^iaiix  obtiat[ 
l^  place  de  sénéchal.    ^     i     .      :.  /«: 

Entre  les  plus  féroces  assassins  se  dis-^ 
tinguait  un  nommé  Gaulard  ,  qui  avait ,  ei^ 
plein  jour  et  sur  le  grand  chemin ,  massacré 
\t  citoyen  Lavaux  ,  riche  propriétaire  du 
Port-de-Paîx  ,  au  moment  même  où  il  lui 
amenait  des  farines  dont  il  avait  fait  à  ses, 
ifraîs  les  avances. 

Tous  ces  hommes  ,  en  remplacement  des, 
troupes  blanches  que  les  persécutions  et  ie[ 
découragement  avaient  presqu  entièrement, 
cîssîpëes  ,  organisaient  des  compagnies 
franches  de  Noirs  ,  qui ,  tout  fiers  de  leur' 
liberté  nouvelle  ,  résistaient  â  toute  disci- 
pline y  et  se  servaient  souvent  de  leurs 


444  Massâcra  et  incendiei 

Nord  de  la  mer  ,  à  la  faveur  d'unts  fumée 
épaisse  ,  des  femmes  essoufflées,  échevelées^ 
ensanglantées.  Les  Nègres  furieux  ,  amà 
que  les  Mulâtres  ,  de  voir  tant  de  victimes 
leur  échapper ,  pourvus  de  matières  com>' 
bustibles  ,  mirent  le  feu  dans  le  haut  de  :1a 
rue  du  conseil  ^  et  en  plusieurs  autres  env 
droite.  Polverel  et  Santhonax  leur  avait 
recommandé  d^é^argner  seulement  le  Gou- 
vernement,  les  iCasernes  i  la  Providettce^ck 
le  Trésorau. 

Le  madndu  22:^  plus  ;  de  iquinze.  -mille 
révoltés,  appelés.pBr  Polverel  et  Santhooax^ 
descendirent  dans:  la  ville:*,  là  ^torche  él  le 
poignard  à  la  main  ^  et  Yecommencèrènî 
avec  ceux  de  la:  veille  toiites  les  horreurs 
dont  on  a  déjà  parlé  ;  quelques-uns  même 
soufflaient  des  tisons  dans  des  |>aillassesL 
Galbaud  ,  vivement  affecté  dé  ^nt  datro»- 
cités  ,  invita  inutilement  par  écrit  les  Coirh 
missaires  de  les  faire  cesser.  Lcfs. -maisons 
des  environs:," encore  intactes^  furent  ipiliéds 
et  ravagées  par  ces  brigatids.  -  :      .  i^ 

'  Une  vingtaine  de  lœtlheureax  esclaves 
-fidèles  ,  qui  s'étaient  ré&igiés  horsr'^de  ht 
Ville  ,  furent  fusillée  en  descendant  le  pafltfe 
da  :Bel^Ainl  Les*  femmes  bkabches  et  dès 
^fens  livrés  à  laifanjitaUiaé  des*Nt>irs,  étaîient 
enfermés  dans  les.  easemes  ,  ainsi  que  la 
troupe  de  iigtvq^'iie' feu  y  »ràit»été  mis  plu* 


dans  les  colonies  françaises.         445 

sieurs  fois  ;  il  ne  fut  bientôt  plus  possible 
d'en  sortir ,  non  plus  que  de  larsenal ,  dans' 
1*8  environs  duquel  Tincendic  fesait  de 
grands  progrès.  Galbaud  donna  des  ordres 
pour  faire  cesser  Tintendie  ,  et  pour  le 
transport  de^  poudres  à  boi^d  des  bâtimçhs. 
tes  Nègres  voyant  ces  bâtimens  défiler  dans . 
la  passe  ,  se  portèrent  au*  forts  ,  dans  le 
dessein  de  noyer  ceux  quils  n'avaient  pu 
assassiner.  - 

Santhonax  étant  au  camp  de  Breda ,  pcn-* 
dant  que  la  ville  était  en  feu  ,  se  mit  à  U 
fenêtre  ,  et  dit  que  c  était  le  plus  beau  jovr' 
dé  sa  vie. 

Le  ôo  juin  ,  Etienne  Laveaùx  ,  délégué 
dt  Santhonax  ,  avait  donné  Tordre  de 
ihettre  le  feu  à  la  flbtte  ;  ce  qui  fut  pré- 
venu par  le  général  Galbaud,  qui  fit  en- 
douer  les  canons  des  batteries  et  enlever 
les  poudres.  L'ordre  portait  de  tirer  sur  les 
vaisseaux ,  dès  qu  il  se  ferait  un  mouvement 
de  descente.  ■ 

Ce  fut  le  24  juin  que  Galbaud  quitta  la 
rade  ,  emmenant  avec  lui  tous  les  bâtimen* 
chargés  de  tout  ce  qu'il  y  avait  dans  le  Cap 
d'hommes  attachés  a  Tordre  et  à  la  justice , 
et  abandonnant  leurs  propriétés  et  jeur 
patrie  à  tous  lès  hommes  que  la  soif  du 
pillage  ,  de  la  débauche  et  du  meurtre  avait 
rassemblas  autour  de  Polveréï  etSanihonaX. 


45o     Crimes  commis  dans  la  Belgique , 

y  envoya  (i).  plus  impudens  dans  ce  pay^ 
conquis  ,  ces  dilapidateurs  plongèrent  les 
habitans  dans  cette  morne  consternation 
qui,bien  loin  d'exciter  les  peuples  à  secouer 
un  joug  trop  pesant,  les  laissa  stupidement 
écraser  sous  son  poids. 

Tout  ce  qui  pouvait  irriter  plus  cruel- 
lement les  esprits ,  fut  mis  en  usage.  Le  culte 
catholique  y  était  observé  avec  la  plus  grande 
fidélité  :  les  Belges  y  attachaient  tout  le 
prix  que  la  superstition  inspire  aux  hommes 
simples  et  crédules.  On  ne  tarda  pas  \ 
heurter  ouvertement  leurs  opinions  reli- 
gieuses par  la  profanation  des  objets  qu'elles 
avaient  consacrés.  Une  horde  de  Jacobins  » 
comme  une  nuée  de  ces  sauterelles  que  l'his- 
toire nous  peint  si  malfaisantes ,  parcourent 
les  différentes  Communes  de  ces  provinces, 
pénètrent  dans  les  temples  ,  outragent  et 
chassent  les  ministres  du  culte  ,  s'affublent 
de  leurs  chasubles ,  montent  sur  les  autels , 
y  prêchent  ouvertement  l'athéisme  dans  le 
style  le  plus  ordurier.  Ces  scènes  indécentes 
tendaient  à  la  dévastation  des  Eglises.  Toute 
l'argenterie  est  pillée  par  ces  brigands,parmi 
lesquels  on  comptait  des  septembriseurs. 
Les  calices  ,  les  patènes  ,  les  ciboires  sont 


(i)  Ces  premiers  Commissaires  furent  choisis  et 
présentés  par  la  Commune  de  Paris. 


sous  les  proconsuls  conventionnels     ^5 1 

«n  leur  puissance  :  iis  les  font  sauter  en 
Fair  avec  dérision ,  ils  se  permettent  de  pi&ser 
et  de  cracher  dans  les  calices  et  Us  cibohreSt 
Les  plus  grossières  plaisanteries  accom- 
pagnées de  tout  ce  que  la  dérision  a  de 
plus  amer  ,  firent  frémir  d'indignation  les 
Belges.  Mais  trop  circonspects  pour  la 
faire  éclater  au  dihors  ,  ils  se  préparèrent 
des  maux  ^ans   nombre. 

Ces  brigands  enhardis  par  ce  premier 
succès,  se  transportent  chéries  particuliers 
les  plus  riches  :  ils  en  exigent  des  contribur 
tions  arbitraires  :  ils  s'approprient  les  meu- 
bles ,  les  bijoux  qui  flattent  le  plus  leurs 
goûts  rapaces.  Le  nommé  Hugxtenin  »  ce 
fameux  Président  de  la  Commune-Septembre  j, 
Y  exerça  ses  rapines  avec  Taudace  la  plus 
caractérisée.  Ce  Sans-culotte  éhonté  s'était 
réservé  le  lit  de  la  Ootivernante  des  Pays- 
Bas  pour  son  appartement  de  Paris  ;  c'était 
là  où  il  recevait  les  Sans-culottes  du  faux- 
bourg  Antoine  ,  s'enîvrant  sans  ces$e  avec 
de  Feau-de-vie  dont  il  ayait  toujours  une 
provision  sur  sa  cheminée.  L'un  de  ces  francs 
iSans-culottes  lui  témoigna  sa  surprise  de  le 
voir  logé  av-ec  une  magnificence  vraiement 
Toyale  :  Huguenin  lui  observa  que  tout 
ce  qu'il  voyait  était  destiné  pour  être  vendu 
au  profit  des  Sans-culottes.  Huguepin.  avait 
fait  conduire  à  Paris  douze  charriots  chargés 

f  f  2 


4^^^  Crimes  commis  dans  la  Belgique  ^ 
de  meubles  er  de  tableaux  précieux  dont 
une  partie  servit  à  décorer  ses  appartemens  : 
Le  nommé  Bezon  se  distinguait  parmi  ces 
voleurs  ;  on  y  voyait  aussi  plusieurs  Belges 
dont  beaucoup  avaient  été  flétris.  Ils  se  con- 
fondirent parmi  les  patriotes  opprimés. 

Tous  ces  faux  patriotes  Belges  ont  été 
par  la  suite  chargés  des  fournitures  les 
plus  considérables  de  Farmée.  L'agiotage 
et  les  dilapidations  de  tout  genre  ont  acquis 
d'immenses  richesses  à  plusieurs  d'entr'eux 
qui ,  par  la  suite  ,  sont  en  partie  devenus 
les  ennemis  les  plus  déclarés  de  la  révo- 
lution. 

C'est  au  milieu  des  ravages  de  ce  ramas 
de  scélérats  de  tous  les  pays  ,  que  s'effectua 
la  réunion  de  la  Belgique  à  la  France.  La 
stupeur  et  la  consternation  ôta  aux  Belges 
jusqu'à  la  douce  satifaction  de  se  livrer  à 
l'enthousiasme  que  cette  opération  politique 
leur  dictait, 

Dumourier  lui-même  avait  tellement  été 
indigné  de  la  ccyiduite  de  cette  foule  de 
concussionnaires,  qu'il  en  fit  arrêter  plu- 
sieurs. Les  difiFérens  Commissaires  que  la 
Convention  choisit  dans  son  sein  ou  parmi 
les  Jacobins  les  plus  atdens  de  Paris  et 
ceux  de  la  Belgique  qui  les  surpassaient 
en  brigandages  ,  remirent  les  mêmes  ma- 
ximes en  activité* 


seusles  proconsuls  cotivenlionnels.     45S 

On  avait  déjà  vu  Danton  et  son  col- 
lègue Lacroix  pressurer  à  la  hâte  les  for- 
tunes des  habitans  de  la  Belgique  ,  lors  de 
la  déroute  de  Dumourirr, tandis  que  d'autre 
part  leur  main  avide  ramassait  la  solde  dejS 
défenseurs   moissonnés  par  le  fer  ennemi. 

Le  génie  révolutionnaire,  danssa  poli- 
tique étroite,  tremblait  à  la  vue;xie  cette 
immense  population  et  ne  connaissait  pas 
de  moyen  de  la  substanter ,  en  fcsant  re- 
vivre rindustrie  et  les  arts  quils  avaient 
proscrits.  Il  n'eut  alors  d  autres  ressources 
que  de  déployer  dans  ces  heureuses  contrées 
le  machiavélisme  des  plus  lâches  despotes. 
Le  siècle  de  fer  s'y  renouvelle  so\j^  le  pro- 
çonsulat  de  différens  Conventionnels,  Les 
coups  que  Ton  porte  aux  Belges  se  suc^ 
cèdent  avec  tant  de  rapidité  ,  les  frappent 
avec  tant  de  violence  ,  qu'étourdis  par  lé 
bruyant  midrteau  qui  rivait  leurs  fers  ,  il 
jie  leur  reste  pas  même  la  faculté  de  ré- 
fléchir. S'il  n'y  eut  point  de  boucheries  hu- 
maines, si  on  n'y  alluma  point  de  bûchers 
funèbres,  c'est  que  le  sang-froid  des  ha- 
bitans de  ces  régions  ,  opposa  sans  cesse 
une  égide  puissante  à  l'effervescence  des 
Commissaires  français  et  des  brigands  de 
leur  pays.  i 

Le  Comité  de  Salut  public ,  sans  au- 
cunes vues  politiques  ,  cruel    comme   'de 

Ff5 


454     Crimes  commis  dans  la  Belgique , 

chétifs  atpbitieux  qui  ne  visent  qu'à  la  ty- 
rannie du  moment ,  savai^t  bien  que  ses  loii 
révolutionnaires  étaient  insuffisantes  pour 
faire  disparaître  la  moitié  de  la  population 
gémissante  sous  son  Gouvernement  :  il 
s  avisa  d'une  résolution  bien  digne  de  lui. 
Ce  fut  de  réduire  ce  peuple  au  désespoir , 
de  le  forcer  à  une  juste  insurrection  ,  afin 
de  déployer  au  milieu  de  ses  Communes 
Vétendart  de  la  mort.  Ce  fut  de  provoquer 
par  cette  affreuse  perspective  ,  la  résistance 
à  r oppression  ,  maxime  sacrée  ,  lorsque  les 
iacdeux  en  eurent  besoin  pour  élever  leur 
trône ,  et  qu  ils  criminilisèrent ,  dès  l'ins- 
tant qu  elle  pouvait  devenir  le  juste  effort 
de  Vindignation  publique  :  il  s'agissait  donc 
de  convertir  ses  plaines  en  autant  de  Vendées 
qui  eussent  été  à  la  fois  le  tombeau  des 
Belges  et  d'une  infinité  de  Français  :  idées 
d'une  immense  population  ,  vous  effrayez 
l'âme  des  despotes  ,  tandis  qu'un  Gouver- 
nement humain  sourit  en  voyant  ses  cités 
et  ses  bourgs  habités  par  une  foule  de  ci- 
toyens rendant  les  nations  voisines  tribu- 
taires de  leur  industrie;  au  milieu  des  plus 
pénibles  travaux,  l'air  retentit  de  ces  cris  si 
doux  pour  leurs  fondés  de  pouvoirs,^  Vive 
notre  Gouvernement  !  Mais  qu'importait  à  des 
hommes  ne  respirant  que  la  mort  et  le  bri- 
gandage ,  que  leur  importait  la  réunion  de 


sous  les  proconsuls  conventionnels     455 

la  Belgique  ?  Ils  n  aspiraient  qu  à  s^emparer 
de  la  fortune  publique.  Les  riches  dépouilles 
des  Belges  flattaient  leur  cupidité  ,  Tillusiou 
de  la  jouissancelesentoutait  dé  ses  charmes; 
ils  s'étaient  déjà  partagés  leurs  terres.  Ces 
peuples  conquis  ou  rendus  à  la  France ,  que 
pouvaient  -  ils  attendre  de  ces  Agens  qui 
n  avaient  pas  hésité  de  sacrifier  leurs  con- 
citoyens, leurs  amis,  leurs  frères.  Des  arrêtés 
plus  terribles  que  les  lois  révolutionnaires, 
des  nuées  d'espions,  de  délateurs;des  tribu^ 
naux  révolutionnaires,  des  commissions  mi- 
litaires, les  fusillades,  les  échafauds  ,  tout 
concourait  à  faire  repentir  le  Belge  de  sa 
résignation.  Les  contributions  en  argent  se 
multiplient  à  Tinfini.  Sous  la  foi  des  traités 
les  plus  sacrés  ,  ces  peuples  ont  reçu  les 
assignats  français  au  taux  de  l'argent  ;  amis 
de  la  liberté  y  ils  chérissaient  ce  signe  mo- 
nétaire qui  avait  fait  triompher  une  révolu- 
tion dont  ils  goûtaient  d'avance  les  principes, 
et  qu'ils  considéraient  comme  le  pbrt  de  la 
félicité.  Eh  bien  !  dans  ces  contributions 
frappées  au  sceau  du  brigandage  le  plus 
effréné  ,  ils  veulent  offrir  l'assignat;  c'est  de 
l'or  qu'on  leur  demande  ,  et  on  les  force 
de  recevoir  l'assignat  au  pair. 

Vouons  ici  à  l'exécration  des  siècles 
futurs  quelques  -  uns  de  -ces  Proconsuls 
envoyés  en  mission   dans  de  ces  malheù- 

F  f  4 


456     Crimes  commis  dans  la  -Belgique  , 

reuses  provinces  ;  leur  dévouement  au'  ré- 
gime d'horreur  qui  nous  a  comprimé  ,  les 
fit  distinguer  par  les  Comités  d^  Gouver- 
nement ,  et  rimpunité  les  rendit  plus  témé- 
raires. Une  réflexion  générale  sur  ces  faux 
républicains ,  fut  de  les  voir  abjurer  tout- 
à  -  coup  ce  sans  -  culotisme  qui  fut  le  bou- 
clier ,  à  laide  duquel  ils  séduisirent  la  fai- 
blesse et  la  crédulité  ,  pour  étaler  en  tous 
lieux  un  faste  oriental  si  insultant  pour  les 
peuples   qu'ils  réduisaient  aux  extrémités. 

Briez ,  homme  immodéiré  ,  dans  sa  vie 
politique  et  privée  ,  connu  par  ses  actes 
vexatoires  et  ses  rapines  ,  s  appropriait  les 
meilleurs  vins  ,  et  fesait  pour  ainsi  dire, 
mettre  en  réquisition  les  plus  belles  femmes; 
il  s'est  rendu  coupable  de  tous  les  excès 
que  son  ivresse  et  la  corruption  dé  ses 
mœurs  lui  suggérait.  Ce  Briez  est  mort  vic- 
time d'une  honteuse  maladie, 

Laurent  était  toujours  ivre.  Aussi  c^est 
dans  cet  état  qu'il  se  transportait  dans  les 
églises  pour  enlever  les  tableaux  les  plus 
précieux.  La  fameuse  bibliothèque  de  Lou- 
vain ,  celles  du  chapitre  de  Tournay  et  du 
duc  de  Bourgogne  ,  ont  été  dilapidées. 

Jean-Baptiste  Lacoste  ,  flétri  déjà  de  tous 
les  vices  qui  lui  étaient  communs  avec  ses 
collègues  ,  les  surpassa  par  son  amour  pour 
le  sang.  Il  fit  guillotiner  à  Valenciennes 


sous  les  proconsuls  conventionnel.     457. 

sept  religieuses  et  le  citoyen  Portalcs ,  Ma- 
gistrat de  cette  ville.  Les  juges  se  mon- 
trèrent dignes  du  farouche  Proconsul,  par 
les  débats  outragcans  qui  s'élevèrent  dans 
le  cours  de  la  procédure  de  ces  infortunés. 
Toutes  les  corporations  connues  sous  le 
nom  de  béguignage^éprouvèrent  ses  fureurs, 

Haussmann  ,  marchand  de  toiles  à  Ver- 
sailles ,  montagnard  hypocrite  et  féroce, 
palliait  son  amour  pour  les  richesses  par 
sa  sobriété  et  son  austérité  apparentes  ; 
mais  il  était  aussi  cupide  que  ses  infâmes 
collègues.  Chupier,  jacobin  de  Paris,  fut 
son  adjoint  dans  toutes  les  vexations  qu'il 
se  permit. 

Quel  vaste  champ  la  Belgique  n'ouvrait- 
dle  pas  à  ces  hommes  nourris  dans  la  fai- 
néantise et  le  crime  ,  pour  acquérir  d^ 
richesses.  Les  Potentats  d'Allemagne  ,  les 
Communautés,  les  Eglises,  les  Princes- 
évêques,  jouissaient  d'un  immense  revenu* 
Les  arts  embélissaient  leurs  demeures  , 
leurs  basiliques  ;  le  commerce  y  fesait  cir- 
culer l'or  des  peuples  voisins  ;  ses  ports  » 
ses  canaux  multipliaient  les  branches  de 
l'industrie.  Le  Belge  sobre  ,  patient  et  labo- 
rieux ,  vivait  à  l'abri  d'une  honnête  ai- 
sance. La  liberté  proclamée  par  le  peuple 
français ,  déploie  son  étendart  sur  ses  fron- 
tières» ♦ ;  • .  • 


458     Crimes  commis  dans  la  Belgiquf, 

Mais  ,  Belges  !  ce  n'est  pas  votre  fortune 
particulière  que  les  brigands  attaquaient  » 
la  France  entière  devait  fondre  dans  leurs 
mains  dilapidatrices  ;  la  France  ,  comme 
vous  ,  souffrait  les  horreurs  de  la  famine  ; 
chacun  de  nous  allait  à  votre  exemple, 
passer  la  nuit  sur  le  seuil  du  ^boulangea, 
pour  en  recevoir  une  mesquine  portion 
d'un  pain  dégoûtant  :  vautours  créés  pour 
dévorer  les  productions  du  sol  le  plus  fer- 
tile de  TEurope ,  et  Tindustrie  de  ses  laboh» 
rieux  habitans ,  ne  les  vit-on  pas  écraser 
chacun  de  nous  individuellement,  et  saper 
le  gouvernement  dans  ses  basés  les  pliii 
solides  ,  en  dilapidant  ses  finances  pour 
se  les  partager  ? 

Tout  est  mis  en  réquisition  par  une  foule 
de  Commissaires  savans  dans  Fart  de  déro*- 
ber  leurs  escroqueries  ;  ils  ne  tiennent  au- 
cune note  des  objets  saisis  *,  ceux  qui  étaient 
chargés  de  fournir  des  toiles  pour  Tarmée , 
s'emparaient  des  mousselines  et  des  den- 
telles ;  d'autres  prenaient  indistinctement 
les  souliers  d'hommes  et  de  femmes.  Un 
de  ces  Commissaires  avait  mis  en  réqui- 
sition quatre  cqnt  mille  aulnes  de  toiles 
de  Courtray  pour  l'usage  de  l'armée. 
Cette  toile ,  connue  sous  le  nom  de  celle 
d'Hollande  ,  est  de  5  liv.  l'aune.  Comme  la 
qualité  n'était  pas  spécifiée  suç  le  piocès* 


sous  les  proconsuls  conventionnels.      45g 

verbal ,  le  Commissaire  fit  porter  au  maga- 
sin quatre  cents  mille  aulnes  dune  toile 
grise ,  propre  à  faire  des  sacs  ,  qui  s'élève 
tout  au  plus  à  1 8  sols  Taulne.  Le  moindre 
calculateur  peut  d'un  coup-d  œil ,  appré- 
cier rénorme  bénéfice  que  le  Comnfissaire 
infidèle  se  procura  par  cette  fraude. 

Les  Belges  portaient,  par  goût,  des  armes 
à^un  travail  précieux  ;  épées  ,  fusils ,  tout 
est  requis.  On  estime  que  les  épées  seules 
^  se  montent  à  ime  somme  de  plus  de  8o  mille 
louis  ;  quant  aux  fusils  ,  dit  de  chasse,  on 
en  porte  le  nombre  à  cinquante  mille  ,  qui 
Fun  dans  Fautre  étaient  d'une  valeur  de 
quatre  louis. 

La  plus  infâme  concussion  s'exerça  pour 
la  levée  des  chevaux  ;  les  plus  beaux  étaient 
requis  chez  les  cultivateurs  ,  qui  ne  les  ra- 
chetaient quavec  des  sommes  exhorbî- 
tantes.  Les  perfides  fournisseinrs  achetaient 
ensuite  des  harideles  pour  le  service  de 
Farmée  ,  quils  se  procuraient  à  un  prix 
modique  de  trois  louis.  Plus  de  soixante 
mille  chevaux  ont  été  Fobjét  d'un  mono- 
pole affVeux.. 

Les  bœufs  et  vaches  étaient  laissés  aux 
habitans  aisés ,  moyennant  un  prix  assez 
haut.  Mais  cette  nuée  de  Commissaires  qui 
se  suivaient  à  la  file,  rentraient  chez  les 
particuliers  qui  avaient  déjà  contribué  pour 


460     Crimes  commis  dans  la  .Belgique  , 

la  conservation  de  leurs  bestiaux  ,  et  le 
propriétaire ,  dépouillé  peu  à  peu  de  soa 
or ,  était  à  la  fin  obligé  de  les  livrer. 

Ce  fut  sur-tout  sous  le  commissariat  dt 
Joubert ,  à  qui  on  avait  confié  les  intérêts 
de  l'aAnée  ,  qu'il  n  y  eut  plus  de  bornes 
pour  les  vols  et  les  exactions;  il  les  sanc- 
tionnait tous  par  son  exemple.  Cet  effronté 
concussionnaire  acheva  d'opprimer  le 
peuple. 

Les  blés ,  les  fourrages  destinés  pour 
Tarmée  ,  sont  transportés  au-delà  du  Rhin, 
et  la  plus  effrayante  famine  attaque  le 
citoyen  et  le  soldat;  les  chevaux  périssent 
d'inanition  ;  Tarmée  de  Sambre  et  Meuse 
manqua  tellement  de  pain  ,  que  plusieurs 
bataillons  n'en  eurent  pendant  un  mois  que 
douze  livres  par  chaque  individu.  Joubert 
avait  près  de  dix  mille  chevaux  de  réserve 
dans 'un  parc  ;  et  dans  son  insouciance 
pour  nos  revers  ,  il  les  laissait  oisifs  /tan- 
dis que  Tarméc  dans  une  retraite  ,  était  obli- 
gée de  faire  sauter  ses  munitions  d'une 
rive  à  l'autre  ef  d'abandonner  ses  bagages. 

Les  Belges  ,  écrasés  de  tous  côtés  par  les 
insolens  vampires,  n'eurent  bientôt  -çAus  la 
liberté  de  se  pourvoir  devant  leurs  admi- 
nistrations ,  pour  y  déposer  leurs  justes 
plaintes;  Joubert  les  casse  et  substitue  à 
leur   place  une  nouvelle  Administratioa 


Sêus  les  proconsuls  conventionnels.     461 

composée  de  huit  hommes  de  guerre  ; 
alors  le  régime  constitutionnel  se  changea 
en  militaire  ,  d'autant  plus  exécrable ,  que 
ces  huit  individus  étaient  tous  complices  de 
ses  brigandages.  La  toute  -  puissance  est 
dans  leurs  mains  ;  il  ne  reste  au  faible 
qu'à  gémir  et  à  se  taire^ 

Le  général  Lefebvre  ,  instrument  du  ré- 
gime dont  il  était  un  des  principaux  agens, 
se  jouait  des  propriétés  et  de  la  liberté  des 
citoyens  ;  Joubert  fesait  des  réquisitions 
multipliées  pour  la  table  des  Généraux. 
L'Administration  de  Bonn  ne  voyait  plus 
de  moyens  licites;  pour  y  satisfaire  ;  un  des 
membres  en  fit  lobservation  à  Lefebvre  , 
^ui  Tarracha  de  la  séance  et  le  fit  plonger 
dans  un  cachot. 

Le  citoyen  Bergars  rédigeait  un  journal. 
Dans  un.  de  ses  numéros,  il  dévoilait  les 
liaisons  du  sénat  de  Cologne  avec  TEnnemi  ; 
Lefebvre  le  fit  maltraiter  de  coups  de  bâton 
et  charger  de  fers.  Sa  femme  vint  implorer 
sa  liberté  auprès  de  ce  Général ,  en  lui  ob- 
servant que  son  Epoux  était  entièrement 
dévoué  à  la  cause  du  peuple.  Que  rn  importe 
À  moi,  dit  Lefebvre,  qu'il  soit  patriote  ou 
aristocrate  ? 

La  compagnie  Rousseau  ,  qui  avait  l'en- 
treprise des  transports  militaires  ,  enlevait 
les  hommes  et  les  chevaux  pour  le  service 


462     Crimes  commis  dans  la  Belgique; 

des  armées  ;  elle  leur  avait  promis ,  il  est 
vrai ,  un  salaire  proportionné  à  leurs  tra- 
vaux ;  mais  aujourd'hui  elle  achève  de  rai- 
ner les  malheureux  habitans  de  la  canih 
pagne  en  leur  fesant  supporter  une  perte 
de  cinq  sixième.  Ils  prétendent  légitimer 
ce  dernier  acte  de  leurs  rapines  ,  sur  le 
mode  de  paiement  que  le  gouvernement  a 
observé  à  leur  égard ,  en  les  liquidant  en 
bons  ,  qui  perdaient  80  pour  100  sur  h 
place  ;  cependant  ces  bons  admissibles  en 
paiement  de  domaines  nationaux ,  ont  éeé 
employés  par  ces  entrepreneurs,  à  Tacqui- 
sition  des  plus  belles  propriétés  de  la  Bel- 
gique ,  et  ces  bons  sont  devenus  dans  leurs 
mains ,  un  signe  représentatif  de  la  valeur 
métallique  ;  ajoutons  à  cela  les  sommes 
exhorbitantes  qu'ils,  se  procuraient  par 
toutes  sortes  de  voies  pour  les  différentes 
fournitures  quileurétaient  nécessaires*;  nous 
connaîtrons  d'un  coup-d'œil  la  source  de 
ces  fortunes  étonnantes  ,  dont  Fexistence 
déshonore  le  gouvernement  et  excite  l'in- 
dignation générale.  Pour  appuyer  cette  as- 
sertion ,  il  suffit  de  nommer  ici  un  de  ces 
cupides  fournisseurs  et  de  dévoiler  la  gra- 
dation de  son  odieuse  fortune. 

Jean-Baptiste  Verstraetcn,  natif  de  Bru- 
xelles, avait  en  1790  abusé  du  nom  du 
vicomte   de  Nieulan,  dont  il  contrêfesaît 


sûus  les  proconsuls  conventionnelu     465 

la  signature  ,  pour  voler  plusieurs  sommes 
à  4ifférens  particuliers  de  Saint  -  Orner  , 
Calais  et  Boulogne-sur-Mer  ;  ce  Vicomte 
fut  obligé  de  signaler  ce  faussaire  par  une 
affiche.  Verstrafeten  était  en  prison  lors  de 
l'entrée  des  Français  dans  la  Belgique ,  et 
à  la  suite  du  mouvement  nécessaire  dans 
une  pareille  circonstance  ,  il  parvint  à 
s^échapper.  Ce  filou  obtint  du  Gouverne- 
ment la  préférence  sur  des  citoyens  hon- 
nêtes pour  les  fournitures,  soit  en  sub- 
sistances ou  ce  qui  pouvait  concerner 
Téquipement  de  Tarmée.  Cet  homme  qui 
n'^avait  pas  un  écu  avant  de  commencer 
ses  premières  livraisons  ,  montrait  au  bout 
de  quelques  tems  un  gillet  à  la  hussarde 
garnie  de  six  rangs  déboutons,  quil  annon- 
çait être  de  pierres  fines  ;  il  estimait  la 
valeur  de  ce  gillet  à  une  somme  de  quatre- 
vingt-seize  mille  livres  (  écus  ).  Tant  d'ob- 
jets d'un  si  grand  prix  ,  dilapidés  et  yen- 
<lus  ;  des  contributions  montant  à  plus 
d'un  milliard ,  ont  à  peine  fourni  unç 
somme  de  600  mille  livrçs  au  gouverne- 
ment français ,  qui  a  établi  une  Commis- 
sion pour  épurer  les  comptes.  Cette  admi- 
nistration a  ^éjà  plus  coûté  que  la  Bel- 
gique n'a  rapporté  à  la  France. 

Quatre  cents  maisons  des  plus  riches  de 
Bruxelles,  décorées  de  tableaux  précieux  et 


464     Cfirms  commis  dans  la  Belgique^ 
des  plus  riches  meubles  ,  ont  été  piilé^. 
Plus  de  vingt  mille  maisons  dans  la  Bel- 
gique, ont  été  la  proie  de  ces  vampires; 
les  Commissaires,  à  leur  arrivée,  s'empa- 
raient de  tout  ce  qui  leur  convenait  ;  ik 
se  distribuaient  dans  les   appartemens  les 
plus  somptueux.  L'hôtel  et  le  lit  du  duc 
d'Arambert  furent  occupés  par  eux  ,  à  leur 
sortie,  tout  disparut;  ils  s'étaient  sur -tout 
attachés  à  la  cave  de  cet  ex-duc  ;  elle  reur 
Icrmgdt  quarante    mille  bouteilles   de   via 
d'un  grand  prix.  Lefebvre  (  de  Nantes)  était 
loge  dans  ce  palais  ;  ce  Proconsul  fastueux 
ii'admettait    que  des   grenadiers    pour   sa 
garde.  Tout  en  affectant  Tinsultante  haûr 
teur  des    princes  ,   il  avait   épousé    leurs 
mœurs. 

A  tant  de  fléaux  réunis  pour  désespérer 
les  Belges ,  les  faux  amis  de  la  liberté  éri- 
gèrent des  tribunaux  révolutionnaires,  qui 
îîU  nom  des  lois,  rougirent  leur  fer  assas- 
rsî'n  dans  le  sang  des  malheureux  habita ns 
de  ces  contrées  ;  on  fit   même  guillotiner 
plusieurs  individus  ,    sous  prétexte    qu'ils 
avaient  refusé  des  assignats.  Ces  jugemens 
1  taient  d'autant    plus  révoltans  ,  que    ces 
Commissaires,  comme  nous  l'avons  déjà  dit, 
avaient  les  premiers  déprécié  les  assignats. 
Un  homme  nommé  Lamothe,   commis- 
saire civil  à  Mons  ,  dont  le  souvenir   ne 


sous  les  proconsuls  conventionnels.     465 

s'^efFacera  jamais  ,  fit  fusiller  six    paysans 

sans  jugement  préalable Les  hommes 

de  sang    né    voulaient    conquérir  que    la 
Belgique  et  non  les  Belges. 

Des  persécutions  si  multipliées  et  si  ré- 
voltantes ,  étaient  bien  propres  sans  doute 
à  terrifier  les  Belges  ;  ils  eurent  à  éprouver  ^ 
outre  les  décrets  révolutionnaires  ,  une 
foule  d'arrêtés  ,  d'ordonnances  ,  émanés 
des  Proconsuls  et  de  différentes  Autorités 
constituées ,  qui  remplissent  douze  énormes 
volumes.  Avec  un  peu  de  modération,  il 
est  aisé  de  faire  de  la  Belgique  ,  Tun  des 
plus  forts  boulevards  de  la  République 
française. 

On  se  trompe  quand  on  croit  que  le 
Belge  répugne  à  un  système  nouveau  par 
ignorance  ou  superstition  ;  c'est  par  une 
juste  défiance  sur  les  effets  des  innovations. 

Cet  esprit  de  défiance  lui  vient  de  la 
comparaison  qu'il  a  fait  de  son  état  avec 
celui  des  autres  peuples;  elle  a  toujours, 
depuis   des  siècles,  été   à  son  avantage. 

Son  ancienne  constitution  ,  quoique  te- 
nant dans  son  principe  quelque  chose  de 
la  féodalité  ,  a  été  successivement  élaguée 
à  tel  point  qu'on  ne  ressentait  rien  de  l'op- 
pression des  Grands  ;  les  prérogatives  des 
Nobles  étaient  peu  de  chose  ;  les  emplois 
étaient  électifs,  et  souvent  le  prix  du  mérite« 
Tome  VI.  G  g 


466     Crimes  commis  dans  la  Belgique  ^ 

jLe  roturier  ,  les  emportait  presque  tous , 
'parce  que  le  besoin  se  dirige  toujoun 
vers  les   talens. 

Quant  aux  prêtres  de  ce  pays,  ils  affichaient 
d'ailleurs  des  mœurs  assez  bonnes  ;  leur 
puissance  ,  sur-tout  dans  les  matières  têm« 
porelles  ,  était  fort  bornée  ;  Texerciee  en 
était  sage  et  modéré  ,  et  leurs  excmpdons 
presque  rien. 

De  là  résultait  qu  en  jettant  les  yeux  sur 
le  Continent ,  le  Belge  ne  voyait  aucun 
peuple  plus  heureux,  plus  florissant ,  où 
les  bonnes  mœurs  ,  le  commerce  et  sur-^ 
tout  lagriculture  ,  fussent  phis  honorés  , 
les  emplois  moins  prostitués  ,  la  finance 
aussi  bien  régie ,  et  les  impôts  ,  que  le 
Belge  asseyait  d'ailleurs  lui  -  même ,  plus 
supportables. 

Ce  n  est  donc  pas  à  l'ignorance  ,  à  la 
superstition  qu  il  faut  parler  ici ,  c'est  à 
cette  défiance  des  innovations  qu'il  faudrait 
vaincre  ,  et  on  sent  que  la  chose  n  a  jamais 
été  moins  facile ,  depuis  qu  à  tous  ses  argu* 
mens ,  le  Belge  a  ajouté  le  tableau  désolant 
des  malheurs  de  la  France  depuis  sa  révo- 
lution. 

On  prétend  faussement  que  le  Belge  en 
général  est  peu  instruit ,  c'est  une  erreur  ; 
il  est  calculateur  et  logicien  ;  s'il  parle  peu , 
s'il  agit  avec  lenteur  et  prudence  ,  ce  n'est 


sous  Us  procoHsuls  conventionnels.  467 
pas  une  preuve  dé  stupidité',  c'est  une 
preuve  de  sagesse.  Au  reste  ,  si  on  pouvait 
lui  reprocher  quelque  chose  du  côté  de 
Tésprit  ,  ce  léger  défaut  serait  compensé 
par  bien  des  vertus  ;  il  a  éminemment  toutes 
celles  qui  maintiennent  les  républiques  ; 
Tamour  de  Tordre ,  du  travail  ,  de  la  jus- 
tice ,  la  simplicité  ,  la  décence  ,  l'éco- 
nomie ,  la  probité  profonde ,  Tobéissance 
aux  lois.  Les  vBelges  sont  les  anciens  ado- 
rateurs de  la  liberté  ;  leur  haine  contré  le 
despotisme  ne  s'éteindra  jamais  ;  ne  les 
violentez  pas  ,  ayez  le  courage  et  la  patience 
de  les  éclairer  ;  si  la  vérité  est  lente  à  les 
frapper  ,  ils  la  sentent  fortement  ;  si  leurs 
passions  sont  plus  difliciles  à  s'alIùmcr , 
elles  sont  aussi  plus  constantes  v  lorsqu'ils 
sont  traités  avec  douceur  et  justice,  hommes, 
argent  ,  tout  est  pour  le  gouvernement  , 
témoin  leur  générosité  lors  des  périls  do^ 
Marie- Thérèse  ;  quand  ils  sont  pénétrés 
d'un  principe,  ils  périssent  pour  lui,  témoin 
kur  énergie  à  la  fin  du  seizième  siècle  ,  telle 
qu'ils  l'ont  montré  en  1789.  Quant  à  la 
bravoure  on  ne  saurait  la  leur  refuser  ,  et  si 
on  en  peut  dire  actuellement  d'eux  comme 
César  :  horum  omnium  fortissimi  sunt  Belga^ 
du  moins  leurs  soldats  ont  marché  de  pair 
avec  les  plus  courageux  défenseurs  de  la 
répuT)lique  française  ;   dix-neuf  bataillons 

Gg  2 


468     Crimes  commis  dans  la  Belgique  « 

ont  péri  presqu'en  entier  depuis  quaàre  ans 

sous  ses  drapeaux. 

De  ce  caractère  du  Belge  on  peut  infé- 
rer aisément  quelle  est  la  meilleure  manière 
de  le  gouverner. 

Calculateur  ,  il  se  pénètre  facilement 
dç  l'obligation  de  faire  des  sacrifices  à 
rÉtat  ;  observateur  des  lois,  il  les  paie  fi- 
dèlement ;  mais  adorateur  de  la  justice  ,  il 
s'irrite  de  la  violation  des  propriétés  ,  du 
mépris  des  lois,  quel  qu'en  soit  le  prétexte. 
Par  exemple ,  on  a  crié  dans  la  Belgique  à 
loccasion  de  l'emprunt  forcé  ;  tnais  ce  n*a 
pas  été  contre  le  principe  ,  c'a  été  contre 
la  forme  ,  contre  l'arbitraire  des  réparti- 
tions; çna  crié  encore  sur  le  paiement  des 
vingtièmes  arriérés  ,  ce  n'a  pas  été  non  .plus 
sur  le  fond  ,  c'a  été  encore  sur  le  mode 
de  perception  :  les  hommes  opulens  ,  as- 
tucieux ou  protégés  sont  parvenus  à  les 
payer  en  assignats  au  pair  :  les  bonnes  gens 
qui  n'ont,  pu  approcher  les  bureaux  ont 
dû  les  payer  en  numéraire  :  cela  leur  pré- 
sente l'égalité  comme  un  mot  vide  de  sens. 

Patient ,  le  Belge  supporte  avec  courage 
le  malheur  si  on  lui  démontre  qu'il  est 
l'ouvrage  de  la  nécessité  •,  mais  s'il  est  celui 
de  la  malveillance  ,  de  la  rapine  ou  des 
passions,  il  se  roidit 

Plein  de  probité  ,  le  Belge   déteste  les 


sous  les  proconsuls  conventionnels.     469 

agens  infidèles  et  le  Gouvernement  qui 
s'en  servirait  ;  plein  d'économie ,  il  mé- 
prise le  Gouvernement  qui  n  a  pas  d'ordre 
dans  ses  finances  :  d'après  cet  esprit  de 
comptabilité  ,  nous  pensons  qu  un  Gou- 
vernement totalement  ruiné  pourrait  en- 
core être  respecté  et  assisté  par  les  Belges , 
s'illeur  montrait  son  bilan  et  leur  présentait 
un  plan  bien  solide  d'amélioration;  au  lieu 
qaun  Gouvernement  riche  qui  n  aurait  ni 
ordre  ni  permanence  dans  ses  mesures  ,  en 
serait  abhorré.  Aussi  ,  rien  n  indigne  plu$ 
ce  peuple  que  la  dilapidation  énorme  des 
Agens  de  la  France  et  le  luxé  insolent  qu'é- 
talent des  hommes  qui  y  sont  arrivés  réelle- 
ment Sans-culottes. 

Voilà  pourquoi  quand  on  dépouille  les 
Belges  ,  sur  un  qui  ne  se  plaint  que  pour 
lui ,  on  en  entend  vingt  s'oublier  -et  dire  : 
Pu  moins ,  si  l'État  en  profitait  ! 

Mais  ce  qui  irrite  le  plus  le  Belge  ^ 
c'est  le  faussement  de  la  foi  qu'on  lui  donne: 
son  amour  -  propre  se  coalise  alors  avec 
son  amour  de  la  justice  :  il  regarde  les 
promesses  qui  ne  sont  pas  suivies  d'effets, 
comme  une  insultante  dérision.  Un  sys- 
tème de  terreur  n'y  produirait  rien  de  bon, 
la  force  d'inertie  ferait  avorter  toutes  se& 
mesures. 

Cette  force  d'inertie  est  le  grand  moyen 

G  S  3 


47 o     Journées  du  g  thermidor^  etc. 

des  .Belges;  aucun  peuple  n'en  étudie  rem^ 
ploi  comme  lui  :  c'est  encore  de  son  esprit 
de  calcul  et  de  patience  que  sort  ce  moyen 

irrésistible. 


Jo  URJ^É ES  du  g  thermidor  ,  12  germinal , 
Q  et  4.  prairial  an' 2  ^  an  3  ,  et  i3  ven- 
démiaire ,  un  4.  (1) 

La  Convention  nationale  réclame  la  jour- 
née du  9  thermidor  ,  comme  Tépoque  de 
son  courage  et  de  sa  gloire  ;  elle  ne  fut 
que  celle  de  sa  peur  et  de  son  incurable 
égoisme.  Sans  doute  Thumanité  a  fait  son 
profit  de  ce  triomphe  à  jamais  remarquable 
sur  le  colosse  d'orgueil  et  de  despotisme 
qui  écrasait  la  France  entière  ;  un  baume 
réparateur  s'est  répandu  sur  nos  cicatrices  ; 
l'espoir  légitime  du  salut  et  du  bonheur 
enivra  les  âmes  ,  plaça  dans  toutes  les 
bouches  les  accens  de  la  reconnaissance  ; 
et  les  législateurs  qui  n'avaient  pas  tous 
bien  mérité  de  la  patrie  furent  nommés 
par  elle  ses  vertueux  libérateurs  ;  ils  s'é- 
criaient eux-mêmes   avec    orgueil  c'est  /lu- 

(i)  9  Thermidor  ,  an  2  (  «7  juillet  1794  ).     - 
14  Germinal  ,  an  3  (  premier  mai  1795  ). 
4  Prairial,  an  4  (  23  mai  1795  ). 
i3  Vendémiaire  ,  an  4  {  i3  octobie  1796  ). 


Journées  du  9  thermidar  »  etc.       47 1 

jaurd'hui  que  nous  avons  sauvé  la  Républiquel 
et  de  tous  les  points  de  la  Républiqite  # 
on  leur  répondît  avec  transport  :  Vivait 
nos  sauveurs  et  nos  pires  !  Mais  ces  élans  de 
gratitude  aveugle  ,  ces  rcmercîmens  étaient 
ceux  du  malheureux  mutilé  ,  à  qui  son  as- 
sassin laisse  par  fatigue  un  souffle  de  vie. 
Ce  n  est  point  la  terreur  qu'attaquèrent 
les  dignes  émules  de  Robespierre  ,  ce  fut 
cette  dictature  ,  qui  dédaignant  déjà  de 
les  admettre  à  titre  de  co-associés ,  les 
menaçait  tous  de  ses  proscriptions  et  ntf 
leur  laissait  que  Fexpectative  d'être  ses 
victimes.*  4  Robespierre  est  un  grand  homme, 
J5  il  fait  bien  marcher  la  machine  révolu- 
)>  tionnaire  ,  n  s'écriait  un  grand  nombre  i 
en  se  pressant  autour  de  ce  Dominateur 
superbe  ,  tant  qu  il  leur  permit  de  Tescorter 
comme  ses  gardes  du  corps  ,  jaloux  d'ob- 
tenir de  lui  un  seul  regard  de  faveur  :  mais 
son  orgueuil  s'indignait  de  trouver  dans 
ces  instrumens  de  son  despotisme  ,  la  pré- 
tention d'être  utiles  complices ,  ou  même 
des  serviteurs  indispensables  ;  non  content 
d'avoir  sacrifié  Danton  qu'il  avait  supposé 
vouloir  aspirer  un  moment  à  marcher  de 
niveau  avec  lui ,  il  annonça  hautement  le 
même  sort  à  tous  ceux  qui  se  présentaient 
comme  ses  concurrens  ,  il  expulsa  des  Ja- 
cobins Tallien    et  Frérori  ,  il  indiqua  au* 

Gg  4 


47  2  jfournéeS'du  g  thermidor ,:  et c» 
dacietisement  une  quantité  d'autrescoUègues 
marqués  pour  ses  vengeances  ;  et  par  cette 
indiscrétion  mal-adroite  ,  il  arma  contre  lui 
des  hommes  obligés  à  le  perdre  pour  n'être 
pas  perdus  euxrmêmes  ,  et  dressa  ainsi  son 
propre  échafaud. 

Tallien  ,  Fréron  ,  Cambon  ,  Vadier  , 
Billaud  ,  CoUot ,  Bourdon  (  de  l'Oise  ) ,  Le- 
gendre  avaient  été  spécialement  désignés 
par  le  Tyran  vindicatif,  et  ces  mêmes  hom- 
mes furent  ceux  qui  les  premiers  levèrent 
le  bouclier.  Pressés  du  besoin  de  se  sauver, 
ils  n'intéressèrent  à  leurs  périls  leurs  autres 
collègues  ,  que  par  Teffroi  contagieux  d'un 
péril  semblable ,  le  parti  de  la  Plaine  sur 
lequel ,  depuis  le  3 1  mai ,  pesait  principa- 
lement riiorrible  terreur:  ce  parti  comptait 
si  peu  sur  les  intentions  des  chefs  de  Fin-» 
surrection  ,  qu'on  le  vit  long-tems  indécis  , 
impassible  entre  le  Dictateur  farouche  qui 
se  vantait  le  8  thermidor  (i)  de  Tavoir  tou- 
jours protégé  ,  et  ses  antagonistes  nouveaux 
qui ,  descendus  de  leur  Montagne ,  venaient 
de  banquettes  en  banquettes  recruter  des 
auxiliaires  à  leur  querelle.  Prodigues  de 
promesses  et  de  protestations  ,  ils  ne  triom- 


(i)  Robespierre  ,  le  8  thermidor  ,  déclara  qu'il 
n'avait  pris  aucune  part  à  la  mise  en  arrestation  dcf 
73  ,  qu'il  s'y  était  même  opposé. 


Journées  du  9  thermidor .  ttc.     4/3 

plièrent  pas  sans  peine  de  la  répugnance 
qu'inspiraient  leurs  anciens  torts  ,  de  la  mé- 
fiance que  méritait  leur  soudaine  conversion. 

Comment  se  dissimuler  en  effet  que 
beaucoup  d'entre  ces  aggresseurs  duTyran^, 
en  étaient  les  émules  ;  que  ces  Membres  des 
Comités  de  Salut  public  et  de  Sûreté  gé- 
nérale qui  proscrivaient  aujourd'hui  Robes- 
pierre, étaient  précisément  ceux  qui,  depuis 
sa  longue  absence  du  Comité  de  gouver- 
nement ,  dirigeaient  seuls  les  atrocités  tou- 
jours croissantes  du  Tribunal  révolution- 
naire ,  accéléraient  par  toute  la  France  la 
marche  des  guillotines  ,  et  en  multipliaient 
Faction  exterminatrice  ?  Quel  crime  repro- 
chaient-ils enfin  à  celui  qu'ils  vouaîcnt  au 
supplice  ,  que  celui  de  leur  préparer  le 
même  sort  ?  Qu'opposaient-ils  à  ses  prin- 
cipes ,  que  des  principes  semblables  ,  la 
terreur  ? 

u  Je  parlerai  avec  le  calme  de  la  vertu  , 
»5  (  quelle  vertu  )  !  dit  Vadier  ,  j'accuse 
5>  Robespierre  d'avoir  appelé  le  rapport 
»»  de  Catherine  Théos  une  farce  ridicule  de 
95  mysticité ,  d'avoir  dit  que  c'était  une 
5>  femme  à  mépriser,  tandis  que  nous  prou- 
55  virons  qu'elle  avait  des  correspondances 
5)  avec  Pitt ,  avec  la  duchesse  de  Bourbon, 
55  avec  Bergasse.  j» 

Hélas  !  que  promettait  au  peuple  ,  à  la 


474    Journées  du  g  thermidor  ^  etc. 

justice ,  à  rhumanité ,  une  semblable  ac<- 
cusatlon  ?  et  qui  ne  savait  alors  même  que, 
dans  cette  dispute  de  proscription ,  la  raison 
et  rhumanité  étaient  cette  fois  du  côté  de 
Robespierre  ? 

Cambon  à  son  tour,blessé  par  Robespierre 
dans  son  orgueuil  financier  ,  ne  lui  reproche 
avec  amertume  que  Timprobation  de  ses 
plans  et  de  ses  calculs  ;  et  c'est  ainsi  quç 
l'opinion  nationale  semblait  encore  se  décla- 
rer pour  Robespierre  contre  le  destructeur 
abominable  de  la  fortune  publique  qui» 
en  imaginant  le  projet  de  son  grand  livrt^ 
paraissait  avoir  eu  celui  de  le  faire  brûler 
dans  une  insurrection. 

Aux  yeux  de  Billaud,les  torts  de  Robes- 
pierre étaient  ses  déclamations  contre  les 
Comités  de  gouvernement  ,  quil  accusait 
d'avoir  dégarni  Paris  de  ses  canons  ;  il  lui 
reproche  encore,  et  Barrère,  Panis,  Amar, 
Thirion, Bourdon  (de  TOise) ,  Tallien,  etc. 
lui  reprochent  avec  fureur  ,  non  pas  d'en- 
traîner despotiquement  et  les  Comités  et 
]a  Convention  elle-même  à  des  mesures 
atroces  et  parricides  ,  mais  de  calomnier  et  la 
Convention  et  les  Comilés  dans  leur  marche 
énergique  et  révolutionnaire  -,  non  pas  de 
conspirer  contre  la  vie  et  la  liberté  de 
tous  les  citoyens  ,  mais  d'étendre  les  arres-- 
iations  et  les  proscriptions  sanguinaires  jusqua 


Journées  du  g  thermidor^  etc.       475 

sut  eux-mêmes ,  d'' environner  ses  collègues  de 
mouchards  ;  de  les  avoir  placés  nommément  sur 
une  liste  connue  de  ses  victimes. 

Vadier  n  accuse  pas  Dumas ,  président 
du  Tribunal  révolutionnaire  ,  d'égorger 
indignement  les  meilleurs  citoyens  ,  mais 
d'avoir  Voulu  faire  passer  pour  conspirateur 
If  vertueux  Collot-d'Herbois. 

Dumas  est  arrêté  ;  mais  le  premier  chef 
de  Billaud  ,  qui  laccuse  ,  c'est  celui  d'avoir 
toute  sa  famille  émigrée  :  Robespierre  ,  le 
jeune  ,  est  arrêté  ,  sur  la  motion  d'Elie 
Lacoste  ;  mais  seulement  pour  avoir  sonné 
le  tocsin  aux  Jacobins  contre  les  Comités^  dont 
Lacoste  est  membre  ;  de  même  que  Fréron , 
pour  obtenir  l'arrestation  de  Couthon  , 
Saint-Just  et  Lebas  ,  ne  leur  reproche  que 
£  avoir  ,  par  passe-tems  royal  ,  demandé  cinq 
à  six  têtes  ....de  la  Convention  ! 

Un  seul  semble  un  instant  songer  à  l'in- 
nocence ,  si  odieusement  assassinée  par  le 
tribunal  révolutionnaire  ;  mais  s'amendant 
•aussitôt ,  nous  ne  sommes  pas  pour  cela  des 
modérés ,  continue  Tallien  ,  et  nous  voulons 
que  le  Président  du  tribunal  révolutionnaire 
traite  les  accusés  avec  décence  ,  c'est-à-dire  , 
sans  doute  qu'il  les  envoie  poliment  à 
l'échafaud.  Ainsi ,  dans  regorgement  jour- 
nalier de  soixante  victimes  non  écoutées  , 
Tallien  ne  voit  quune  violation  de  forme. 


470      Journéerdu  g  thermidor  ^  etc. 

qu'un  manque  de  politesse  ;  mais  quelque» 
mots  grossiers,  adressés  à  un  Représentant 
du  Peuple  ,  réveillent  toute  son  indigna- 
tion ;  il  dénonce  Tinsulte  faite  à  un  Collègue 
par  un  juge  du  tribunal ,  comme  un  crime 
de  Use-représentation  nationale  ! 

Cest  ainsi  qu'au  nom  seul  de  leurs  dan- 
gers personnels  ,  et  jamais  en  réparation 
des  outrages  faits  au  Peuple  et  à  rhumanitéf , 
}a  Convention  mit  tout  d'un  coup  cent 
vingt  individus  hors  là  loi ,  mesure  injuste 
autant  qu  atroce  ^  qui  en  confondant  d'in- 
sensées victimes  d'un  égarement  révolu- 
tionnaire avec  les  coupables  avérés  et  faciles 
à  distinguer  de  la  révolte  de  la  Commune 
contre  la  Convention  ,  a  fait  planer  si 
long-tems  sur  quelques  hommes  échappés 
à  cette  odieuse  proscription  ,  un  droit  de 
mort  que  l'humanité  repousse  et  que  la 
philosophie  a  peine  encore  à  reconnaître. 

Robespierre  et  son  frère ,  Saint-Just ,  Cow- 
thon  ,  Lebas  ,  tous  représentans  mis  en  ar- 
restation par  la  loi  ,  étaient  en  révolte 
ouverte  contre  elle ,  et  méritaient  sa  prompte 
sévérité  ;  Henriot ,  à  la  tête  d'une  armée 
qu'il  dirigeait  contre  la  Représentation 
nationale  ;  Fleuriot  ^  maire  ,  et  Payan  , 
procureur  de  la  Commune ,  s'étaient  cons-i 
titués  les  directeurs  de  la  rébellion  ,  et 
devaient  en  porter  la  peine  \  mais  de  quel 


Journées  da  g  thermidor  ,  et  c.     477 

droit  en  menacer  tant  d'autres  qui  n'étaient 
pas  notoirement  dans  Tinsurrecition  ?  et 
présume-t-on  le  crime  pour  avoir  le  plaisir 
cruel  de  le  frapper  ? 

Ce  fut  un  double  tort  d'avoir  attribué 
à  cet  arrêt  de  mort  la  dispersion  soudaine 
des  satellites  du  Tyran  et  de  la  t)Tannie  en 
rébellion  à  la  Commune.  Si  la  nouvelle 
du  décret  de  condamnation  en  masse  avait 
écarté  quelques  partisans  peureux ,  yindî- 
gnation  de  son  iniquité  avait  centuplé 
Taudace  et  la  force  du  reste  des  révoltés  , 
dont  la  défection  ne  doit  s'attribuer  qu'à 
lîapproche  soudaine  des  troupes  conven- 
tionnelles ,  et  sur- tout  à  la  lâcheté  de  Ro- 
4>espierre  ,  incapable  de  se  mettre  à  la  tête 
de  son  armée  qui  l'appelait ,  et  qui  préféra 
ia  honte  certaine  de  périr  sur  Téchafaud  , 
au  risque  glorieux  de  périr,  comme  Catilina, 
sur  le  champ  de  bataille,  Robespierre  fut 
guillotiné  avec  vingt-un  de  ses  complices  > 
le  10  thermidor  ;  le  lendemain  ,  soixante- 
dix  membres  de  la  Commune  périrent  sur 
le  même  échafaud  ,  et  quinze  autres  le  12. 
(  Voyez  le  tableau  n^.  2  ,  Jin  du  tom  II.  )• 

La  grande  facilité  du  triomphe  de  la 
Convention  est  un  témoin  de  plus  qui 
dépose  de  l'inutilité  de  cette  mesure  ex- 
trême qu'elle  opposait  ainsi  à  des  ennemis^ 
forts  de  sa  seule  faiblei»se  ,  et  qu'un  seul 


478  Journées  du  9  thertnidor  *  eic. 
regard  fit  rentrer  dans  le  néant.  Ce  n'était 
donc  point  Turgence  des  dangers  ,  mais 
seulçment  Thabitude'et  le  goût  des  moyens 
révolutionnaires  ,  qui  inspiraient  alors  la 
Montagne  ;  et  c'est  avec  toute  la  bonne-foi 
de  la  persuasion  la  plus  inébranlable  que 
Legendre  ,  en  la  félicitant  d'avoir  sauvé  la 
République ,  en  offrait  pour  preuve  les  dé- 
crets de  mise  hors  la  loi  »  quelle  venait  de 
•xendre. 

On  ne  devait  pas  attendre  de  ceux  qui 
^c  servaient  avec  tant  d'orgueil  de  pareilles 
armes  ,  qu'ils  les  abandonneraient  après  le 
triomphe  ;  ce  n'était  pas  la  terreur  quils 
avaient  voulu  détruire  ;  et  de  tous  les  ins^ 
trumens  affreux  que  Thumànité  leur  ordonr 
nait  de  briser  ,  ils  devaient  naturellement 
jie  rejeter  que  ceux  qui  les  avaient  ou 
blessés  ou  menacés  eux-mêmes  ;  ainsi  ,  ce 
ne  fut  point  l'abrogation  du  Comité  qui 
réunissait  despotiquement  tous  les  pou- 
voirs ,  ce  fut  le  complettement  de  ses 
Membres  que  prononça  la  Convention, 
Contente  de  rentrer  ainsi  dans  le  droit  de 
participation  à  ce  despotisme  ,  elle  s'em.- 
pressa  de  lui  ravir  cette  faculté  si  abusive 
d'arrêter  même  provisoirement  un  Repré- 
sentant du  Peuple  ,  mais  elle  lui  laissa  le 
droit  d'opprimer  vingt-cinq  millions  de 
Français;  ses  quarante  -  quatre  mille  bas* 


Journées  du  9  thermidor  ^  etc.       479 

tilles  ,  de  les  assassiner  avec  sa  foule  in- 
nombrable de  tribunaux  révolutionnaires  , 
de  commissions  militaires  et  révolution- 
naires. Ces  prisons,  ceséchafauds  n'étaient- 
ils  pas  les  échafauds  et  les  prisons  du  des- 
potisme qu  on  venait  d'abattre  ,  et  ne  de- 
vaient-ils pas  tomber  à  jamais  avec  lui  ? 
Mais  loin  d'ordonner  que  ces  prisons  s'ou- 
vrissent toutes  à  la  fois  ,  pour  rendre  à  la 
liberté  les  victimes  d'une  tyrannie  vaincue, 
on  voyait  les  héritiers  de  cette  tyrannie 
n'en  laisser  échapper  les  prisonniers  que 
successivement  et  en  petit  nombre;  et  fiers 
d'avoir  ,  dans  un  jour,  prononcé  dix  ou 
douze  libertés  pour  les  détenus  de  Paris  , 
ils  allaient  dans  les  lieux  publics  et  dans  les 
Spectacles  se  pavaner  de  leur  bonté ,  et 
recueillir ,  comme  d'autres  Titus  ,  les  ap- 
plaudissemens  et  les  hommages  d'une  re- 
connaissance-trop  facile. 

C'est  ainsi  qu'à  l'abri  d'une  modération 
hypocrite  se  maintenait  le  régime  révolu- 
tionnaire avec  toutes  ses  institutions  ;  la 
loi  du  22  prairial  ne  fut  pas  même  abrogée 
nommément,  et  l'on  jugeait  toujours  en 
son  nom  dans  la  Belgique  ,  à  l'Orient  et 
à  Brest.  Le  déficit  des  bourreaux  du  tri- 
bunal assassin  de  Paris  commanda  quelques 
modifications  dans  son  organisation  ,  et 
sur-tout  dans  sa  composition  ;  mais  il  con« 


480     Journée  du  9  thermidor  ^  etc. 

tinua  d'être  un  tribunal  révolutionnaire . 
et  le  fer  de  la  guillotine  immola  encore  des 
Jédiralistes  et  des  avilisseurs  de  la  Représea- 
lation  nationale.  Ce  n  était  donc  pas  la 
réparation  de  ses  anciens  forfaits  que  mé- 
ditait cette  Convention  qui  frappait  ainsi 
de  mort  quelques  propos  moins  haxdis  que 
vrais  contre  elle  ;  et  Téchafaud  dtsfédira- 
listes ,  qui  se  dressait  encore ,  attestait  assez 
la  persévérance  des  partisans  de  la  terreur 
d^ns  ses  romans  perfidement  destructeurs , 
et  la  fausseté  de  ses  promesses  données 
dans  le  moment  des  dangers  aux  amis  des 
soixante -treize  Députés  prétendus  fédéra" 
listes.  L'opinion  publique  eut  à  lutter  deux 
mois  encore  pour  obtenir  leur  réintégration 
si  hypocritement  jurée  ;  et  les  vainqueurs  de 
thermidor,  en  rappelant  ces  mandataires  , 
parurent  moins  réparer  une  violation  ma- 
nifeste de  leurs  droits,  qu'acheter  ,  par  une 
faveur  politique  ,  de  courageux  auxiliaires 
contre  la  faction  des  Jacobins  ,  qui  jurait 
de  venger  Robespierre. 

Cette  ^faction  ,  un  instant  étourdie  par 
le  coup  qui  avait  anéanti  son  chef,  n'avait 
pas  tardé  a  reprendre  ses  espérances  et 
son  audace;  son  antre  ,  fermé  dans  la  nuit 
du  9  au  10  thermidor,  s'était  rouvert  quel- 
ques jours  après  sous  les  auspices  de  la 
victoire  ;  et  aussitôt  cette  victoire  y  avait 


Journées  du  9  thermidor  ,  et  c.      48 1 

trouvé  ses  détracteurs  les  plus  effrontés  , 
ies  plus  implacables.  Les  Jacobins  du  9  M^r- 
midor  ,  s'écriait  Collot ,  ne  Jurent  pas  les 
vieux  &t  fidèles  Jacobins  ;  ceux-ci  vont  re^ 
prendre  leur  lustre  ;  et  c'est  ainsi  que  Collot 
encourageait  ses  frères ,  encore  consternés 
de  la  catastrophe  thermidorienne  :  Jaco^ 
bim^  reprenez  votre  ancienne  énergie  ,  s'écriait 
J un  deux  ,  en  les  invitant  au  développe- 
ment de  leurs  anciennes  fureurs  ;  et  déjà 
Billaud  menacé  ,  annonçait  le  réveil  pra-^ 
chain  et  terrible  du  LION....  Le  lion  Billaud  , 
ses  émules  féroces  Collot ,  Barrère ,  Vadier, 
Amar  ,  Vouland  ,  accusés  par  l'exécration 
universelle  de  tous  les  désastres  dont  les 
Comités  où  ils  régnaient  avec  Robespierre , 
avaient  couvert  tout  le  sol  français  ,  trou- 
vaient des  soutiens  intrépides  dans  la 
majorité  des  Montagnards  ,  qui  ,  après 
avoir  été  les  instrumens  habituels  et  ser- 
viies  de  leurs  fureurs  ,  prévoyaient  les 
dangers  d'une  responsabilité  solidaire  ; 
ceux  mêmes  qui ,  restés  paisibles  specta- 
teurs de  ces.  forfaits  ,  y  avaient  néanmoins 
concouru  par  l'autorisation  de  leurs  lois 
révolutionnaires  ,  redoutaient  une  juste 
récrimination  ;  et  celui  qui  ,  le  premier , 
attaqua  l'ancien  Comité  ,  et  dénonça  ses 
nombreux  forfaits  si  bien  prouvés  par  les 
ruines  de  Lyon ,  par  les  cendres  de  Bédouin, 
Tome  VI.  h  h 


489      Journées  du  9  thermidor ,  etc. 

par  la  dévastation  du  Midi ,  et  de  toute  la 
Vendée  ,  par  les  flots  ensanglantés  de  la 
Loire  ,  de  FOcéan  ,  du  Rhône  et  de  la 
Méditerranée  ;  Lecointre  fut ,  le  14  fruc- 
tidor ,  an  2  ,  déclaré  calomniateur^  par  un 
décret  de  cette  Convention ,  pour  qui 
,  rheure  de  la  justice  n'*arriva  jamais  qu  avec 
celle  de  ses  dangers. 

Chaque  jour  laudace  des  Jacobins  ajou- 
tait à  Firritation  de  Fopinion  publique; 
et  ce  déni  révoltant  de  justice  n'enchaina' 
ni  les  réclamations  de  la  patrie  indignée , 
ni  les  fureurs  de  ses  assassins  impunis  v 
leurs  conspirations,  sans  cesse  renaissantes  1 
forçaient  chaque  jour  la  Convention  à  des 
capitulations  nouvelles  avec  cette  opinion 
nationale  qu'elle  redoutait ,  et  qui  seule 
pourtant  fesait  sa  force  ;  c'est  ainsi  que  se 
détruisait  pièces  par  pièces  Fédifice  affreux 
de  la  terreur  ;  c'est  ainsi  qu'après  de  lon- 
gues résistances  ,  et  malgré  un  premier 
rapport  de  Merlin  contre  les  soixante-treize 
Représentans  en  arrestation  ,  et  leurs  Col- 
lègues mis  hors  la  loi ,  la  Nation  obtient 
enfin  le  1 8  frimaire ,  et  le  18  ventôse ,  an  3, 
la  rentrée  de  ces  Mandataires,  dont  si  peu 
ont  répondu  depuis  à  son  amour  et  à  ses 
espérances. 

Leur  retour  fut  un  épouvantail  terrible  , 
et  le   motif  principal  d  une   émeute    qui 


Journées  du  g  thermidor  ,  et  c.     483 

éclata  le  12  germinal  ;  une  disette  momen- 
tanée en  fut  le  prétexte.  Une  horde  de 
femmes  jacobines  ,  et  des  instrumens  ré- 
volutionnaires ,  viennent  à  la  barre  pré- 
senter une  pétition  ;  TOrateur  dit  : 

ce  Vous  voyez  des  hommes  du  14  juillet ,  du 
10  août ,  du  3i  mai.  Depuis  le  g  thermidor  vous 
avez  mis  la  justice  à  Tordre  du  jour.  Ce  mot  est 
vide  de  sens.  Vous  avez  dit  que  cette  journée  ramè- 
nerait l'abondance  ,  et  nous  mourons  de  faim» 
L'assignat  ne  vaut  pas  un  cinquième  de  sa  valeur. 
Le  peuple  veut  du  pain  ^  la  constitution  de  i-ygS  et 
la  liberté  de  nombre  de  patriotes  incarcérés.  » 

Une  partie  des  Montagnards  applau- 
dirent. Certainement  il  y  avait  quelques 
vérités  dans  cette  pétition  ;  mais  ceux  qui 
en  étaient  les  organes  ne  méritaient  au^ 
cune  confiance. 

Cette  députation  était  suivie  d'un  grand 
nombre  d'individus  armés  de  pistolets  et 
de  gros  bâtons  ;  en  général  c'était  des  gens 
inconnus  et  à  figure  sinistre.  Le  Président , 
Pélet(de  la  Lozère  j  »  répondit  évasive- 
ment  en  parlant  contre  Tafiarchie  ,  et  ac- 
corda les  honneurs  de  la  séance  aux  Pé- 
titionnaires, qui  entrèrent  en  foule.  Tallien, 
André  Dumont ,  Bourdon  (  de  TOise  )  , 
parlèrent  dans  le  même  sens  ;  des  huées 
vives  ,  des  menaces  audacieuses  présa- 
geaient d'affreux  assassinats. 

Au    moment    où    le    crime    allait    se 

H  h  3 


4S4  journées  du  9  thirmidor ,  ttî. 
cônsotnmer  ,  les  Conjurés  furent  comme 
interdits  par  Tembarras  de  reconnaître 
reûrs  victimes.  Utie  députatiôn  dcTHomme- 
Atiné  était  venue  deux  heures  auparavant  ; 
et ,  confondue  avec  les  Représentans  du 
peuple  ,  ainsi  que  là  section  de  TUiiîté  en 
masse ,  contribuèrent  à  jeter  dans  TAssem- 
bléé  une  confusion  qui  arrêta  le  poignard 
des  assassins  ,  indécis  sur  le  choix  beaucoup 

Ï)lus  qu'épouvantes  du  nombre.  Cependant 
e  général  Pichegru,  nommé  momentané- 
ment au  commandement  de  la  troupe  pari- 
sienne ,  rétablissait  au  dehors  ,  de  concert 
avec  Barras  et  quelques  autres  Représentans, 
Tordre  menacé  par  d'impuissantes  émeutes  ; 
les  cris  des  révoltés ,  dans  le  sein  de  la  Con- 
vention ,  furent  en  vain  appuyés  par  quel- 
ques mandataires  qui  ne  firent ,  par  cette 
adhésion  criminelle  ,  qu  offrir  à  la  loi  de 
nouveaux  traîtres  à  frapper.  Les  députés 
Barrère  ,  Billaud  ,  Collot ,  Vadier  ,  qu'on 
voulait  sauver,  par  cette  révolte ,  et  que 
la  Convention  trouvait  si  pénible  de  con- 
damner ,  furent  ,  par  un  attermoiement 
honteux  avec  la  justice,  condamnés  le 
soir  même  à  la  peine  de  la  déportation  (i). 


[i\  Carnot,  Tun  des  membres  de  cefamcux  Comité 
de  destruction ,  prit  leur  défense  ,  et  déclara  que  sî 
tes  collègues  étaient  coupables  il  avait  partagé  leurs 


Journées  du  g  thermidor .  etc.  485 
€t  Farrêt  s'exécuta  le  lendieqiain  malgré  Top- 
position  d'une  bandç  dçfHrieux  qui  s'étaient 
id  abord  emparés  de  la  vof ture  qui  les,  con- 
duisait à  leur  destination.  Huit  des  Mont^- 
■gnards.  qui  avaient  protégé  la  rébellion  , 
furent  ,1e  jour  même,  décrétés  d'arrestation; 
le  16,  on  en  fit  autaqt  contre  njeuf  autres  ; 
-et  contre  sept .  encore  ,.  Ift  sg  suivant, 
(V.    le   Tableau ,  J^.""  2  ,  tom.  i )'. 

A  ces  Députés  arrêtés  ,  on  joignit  encore 
quelques  Jacobiujs ,  tels  que  Raisson  ,  Ros-^- 
^signol  ,  Facbe.  eï  is^utres  ,  qupn  envoya  au 
château  de  Ham  ,  où  ils  restèrent  détenus 
jusqu'après  le.  i3  Vendémiaire  ,  sans  être 
interrogéis  ,  entendus  ni  jugés ,  et  appri- 
rent parleur,  propre  expérience  tQute l'im- 
portance de§  formes  protectrices  de  la 
jsûreté  individuelle  dont  ils  s'étaient  joués 
^si  impudemment  contre  tant  d'ianocens  ; 
£)n  les  viola  aussi  contr'eux ,  comme  en 
vertu  de  la  Loi  cjw  Talion  ;  mais  cette 
loi  n'est  pas  celle  dp  l'équité. 

Cependant  ces  illégalités  ,  qui  étaient 
-des  conséquences  du  gouvernement  révo- 

-crimes.  Carnot  a'^iyaitpas  )i>e9Qin  de  cet  aveu,  per- 
sonne n'ignorait  que  sous  prétexte  de  ne  s'occuper 
que  de  la  guerre  il  prenait  part  à  tous  les  actes 
Sanguinaires  ,  et  même  qu'il  en  rédigeait  :   de  ce 

-nombre  se  trouve  Tinstructioa  de  la  Commission 

.crO^anffc., 

Hh  S 


486  Journées  du  g  thermidor  iy  etc. 
ludonnaire  ,  commençaient  *  à  en  dégOHttfr 
ses  vieux  partisans  ,  devenus  aùjbût?d'hui 
ses  victimes  ;  la  multitude  apptéicîait  en- 
fin toute  rinîfjui té  dt  ràtbitràîre,  et  vou- 
lait une  Constitution  régulière  et  fixe  ; 
ses  meneurs  lui  fifcnt  demànidber  celle  de 
1793,  qui  n  avait  ffûhc  •Gôftstittilioh  que 
le  nom.  A  ces  cris  univcrs^èls  de  Cons- 
titution, la  Convention  créporiâitipar' la 
création  d'une  Commission  chargée  d'en 
prépafèr  Ics'Ldîs  ùi^dtiih\ue%i  céim  hkh 
moyen  de  temporisation  îhdWpehsable  ;  et 
nécessairement  l'audace  desVidnspirateurt 
devait  amenai  aye<î<îè  liouveauxfrrimes  à 
réprimer  \  iaPdëiÀônStraiibilile^la  Héccssité 
d'un  Côdé^iéfeial  plus  vigOt*rëux  qui  «lui 
dont  ils  féclatiïaiént  l'exécution.  .  .  .  Plus 
ils  pressentaient  cette  utile -et  sage  substi- 
tution ,  plus  ils  s'àcliarnaieht  à  la  prévenir, 
et  le  mauvais  succès  de  la  dernière  insur^ 
rection    était  loin   de  les    décourager. 

Les  circonstances  d'ailleurs  se  trouvaient 
bien  plus  favorables.  La  pénurie  des  sub- 
sistances était  extrême  ;  et  si  le  Gouver- 
nement sous  lequel  le  peuple  meurt  de 
faim  est  toujours  sans  excuse  ,  jamais  Gou- 
vernement ne  fut  plus  coupable  que  ce 
Comité  de  Salut  Public  ,  qui  ,  resté  tou- 
jours maître  de  la  fortune  publique  et  par- 
ticulière  par  le  droit  de  préhension  <jù'ii 


Journées  du  g  thermidor  ^  etc.     487 

s^était  conservé ,  avait  néanmoins  laissé 
approcher  la  famine  jusqu'au  sein  de  cette 
capitale  populeuse  quil  s'était  chargé  de 
nourrir  (1).  Les  murmures  ^  comme  les  be-r 
soins  étaient  universels;  le  rentier  ruiné  par 
la  baisse  subite  de  tout  papier- monnaie  , 
louvrier  obligé  de  perdre  à  la  rçcherche 
tf  un  chétif  morceau  .  de  pain  ,  sa  journée 
dun  travail  nécessaire  pour  en  payer  le 
prix  ;  la  malheureuse  mère  de  famille  atten- 
dant en  vain  pendant  une  nuit  entière 
aux  portes  du  boulanger  quelques  onces 
de.  pain  ou  de  riz  insuffisantes  pour  ses 
isnfans  exténués  ;  le  père  tendre  et  pauvre 
56  suicidant  de  désespoir  au  milieu  dnne 
famille  épuisée  de  besoins  ;  du  côté  op- 
posé .,  rimmoralité  la  plus  effrontée  affi- 
chant avçc  scandale  son  luxe  nouveau  et 
sa  criminelle  abondance  ;  le  monopole , 
sous  le  masque  de  la  liberté  du  commerce  , 
pompant  avidement  toutes  ses  ressources 
et  arrêtant  la  circulation  de  tous  ses  pro- 
duits ;  Tagiotage  impuni  se  jouant  du  cré- 
dit particulier  ,  et  altérant  au  gré  de  ses 
spéculations  meurtrières  le  crédit  national , 
trafiquant  de  la  substance  et  s'engraissant 
du  sang  du  peuple  ;  le  nouveau  riche  affec- 

(i)  On  doit  se  rappeler  les  rapports  mensongers 
de  Bois^y-d'Augial ,  sur  les  subsistances. 

H  b   4 


488  Journées  du  g  thermidor,  etc. 
tant  ridiculement  les  manières  de  rancîea 
régime  et  la  volonté  de  le  rétablir  ;  quel 
contraste  énergiquement  accusateur  du 
Gouvernement  subsistant  !  quelle  satyre 
de  son  impuissance!  quelle  excuse  des 
plaintes  aveugles  du  Sans-Culotte  ,  trop 
iaigri  pour  remonter  de  sang-froid  aux 
véritables  auteurs  de  sa  détresse ,  à  ses 
tyrans  révolutionnaires  ,  ainsi  que  des  es» 
pérdnces  chimériques  du  Royaliste ,  trop 
habile  pour  perdre  cette  occasion  de  ré- 
tablir Tancien  régime  ! 

Une  insurrection  convenait  également 
aux  deux  partis;  les  Jacobins  seuls  en  avaient 
la  tactique  et  laudace  ;  les  Royalistes  ; 
spectateurs  perfides  ,  en  espéraient  Tavaii- 
tage  par  l'anéantissement  de  la  Convôntionu 
Le  premier  prairial  fut  le  jour  marqué  pour 
cette  grande  tentative ,  à  laquelle  il  ne  maïi- 
qua  ni  chefs  habiles  quoiqu'obscurs,ni  secta- 
teurs déterminés  ;  l'acte  suivant  fut  comme 
le  manifeste  qui  annonça  les  hostilités. 

Insurrection  du  peuple  pour  avoir  du  pain  ei  recouvrer 
ses  droits, 

a  Le  peuple  ,  considérant  qu'on  le  laisse  impi- 
toyablement mourir  de  faim  ;  que  le  gouvernement 
est  tyrannique  ;  qu'il  fait  arrêter  arbitrairement  et 
tranférer  de  cachot  en  cachot  les  meilleurs  patriotes; 

39  Considérant  que  Tinsurrection  est  le  plus  saint 
des  devoirs  ; 

i^onsidéranl  que  c'est  à  la  portion  du  peuple  la 


Journées  du  g  thtrmidot ,  elc:      489 

plus  voisine  du  gouvernement  à  le  rappeler  à  ses 
devoirs»  le  peuple  .arrête .: 

n  Que  les  citoyens  de  tout  âge  ,  de  tout  sexe  ,  se 
porteront  â  la  Convention  pour  lui   demander  du 

J^ain ,  Tabolition  du  gouvernement  révolutionnaire , 
a  constitution  de  1793,  la  destitution  de»  Membres 
du  gouvernement  actuel ,, leur  arrestation  ;  la  liberté 
des  patriotes  ,  la  convocation  des  Assemblées  prî- 
imaicei  pour  le  2  5  itieiftidor. 

.f*>  Il  ?ci^a  pris  les  mesures  nécessaires  pour  assurer 
le  $i|cçès  dp  ceitte  insurrection.;  les  bixrières  seront 
fermées  ;  le  peuple  s'emparera  de  la  rivière  ,  du 
télégraphe  vies  canonniers*,  le»  cavaliers  et  autres 
soldats  qui  se  -trouvent  à  Paris ,  sont  invités  à  se 
.nmger  sous  les.  drapeaux  du  peuple. 

i>  Tout  pouvoir  eSnané  du  peuple  est  suspendu  ; 
tout,  fonctionnaire  public  qui  refusera  d'abdiquer 
>'sur«l&^hamp  sera  puai  comme  ennemi  dû  peuple  ; 
quiconque  pjroposefait  de  marcher  contre  le  peuple 
sera  puni  comme  ^e^nçii^i  de  la  liberté;  les  Sections 
partiront  dans  un  désordre  fraternel  ,.  et  emmène- 
ront celles' qui  se  trbuverant'sur'leur  passage.  Le 
mot  de  ralliement:  du  peuple  est  du  pain  ,  et* /a 
iQiutitution  di  1793  ;  quiconque  ne  porter^  pas  ce 
signe  de  ralliement  sera  arrêté,  n 

Cette  ;proclam?ition  écsun  déjà  répandue 
depuis  plusieurs  jours  dans  les  départcmehs  ; 
.déjà    nombre    de    fonctionnaires  publics 
-  avaient  .abdiqué,  leurs    fonctions   pour  se 
^  ranger  du  côté  de  Tinsurrection.  Les  Co- 
mités de  Salut  public  et  de  Sûreté  géné- 
rale devaient  en  être   prévenus.  Eh  bien  ! 
ce  ne  fut  que  le  matin  dn  premier. Prairial , 
que  Fun  des  Membres  de  celui  de  Sûreté 
générale  en  fit  part  à  la  Convention, 


490     Journées  du  g  thermidor ,  et  e. 

Les  Chefs  de  rinsurrection  s'étaient  dîs^ 
tribués  les  difFérens  quartiers  de  la  viUè 
de  Paris  ;  ce.  fut  dans  le  Ê^vbourg  Map- 
ceau  que  le  rassemblement  commença.  Des 
Hommes  et  dés  fetnmé$^^y  de  petites  son^ 
nettes  à  la  main,  où  frappant  sur  des 
chaudrons  ,  des  casserolles  ^  et  des  poëk&i^ 
invitaient  ies^ citoyens  à  se 'réunir.  Dans 
le  faubonfg  Antoine;  là  force  armée  était 
sous  les  armes  ,  et  dans  diffiirèiites  sectionii 
où  le  part}  jacobin  dominait,  nomim 
d'individus    s* étaient  emparés  •  dfe-  ' Ist.  sàflfe 

.des  séances, ", i ',.":' '   ''':'";■''..  '-V    : ''^'.:'-    » 
Cette  multitude*,  soulevée    àr>la-ibi»,;Ct 
'  dirigée    Vers   le    mêmef  -  bu t  ï  arrive  •  âtft 
"mêmiès  heures  autour  deîà<3oïivçtttion. 

Les  tribunes  étaient  occupées,  parades 
femmes ,  la  plupart  ivres  v  plusieurs  tenaient 
à  leurs  mains  des  enfans  :  dupaifi  *i  dttpaih; 
nous  mourrons  de  faim -^  nos  enf ans 'n'ont  pas 
mangé  depuis  pîusieurs  joun'.^^Téis  'soïitf  les 
cris  auxquels  le  président. Vernier  ^honirirc 
d'un  certain  âge  ,  essaye -envain^^d'imposer 
silence  ;  les  femmes  redoublent  "avec  me- 
naces; André  Dumont  s'empare  du  fea- 
teuil ,  mais  sa  pétulance  paraît  peu  propre 
à  en  imposer  à  l'audace  de  cette  multitude 
effrénée. 

Le  général  Hoche  monte  dans  les  tri- 
bunes pour  faire  sortir  quelques  femmes 9 


Journées  du  9  thermidor^  etc.       491 

^nctis  qu  une  horde  de  forcenés  assiégeait 
*f  entrée  de  la  salle.  André  Domontcède  la 
présidence  à  Boissy-d'Anglastqui  cn^rein?- 
{dit  les  fonctions  avec  plus  de  sang- frcMd  ; 
^s  ^hommes  armés  engorgent  la  salle  de  la 
t^berté  ;  une  partie  de  la  garde  de  la  Con- 
V(ention  veut  les  repousser^.le  nombre  des 
tonjurés  grossissait  ;  Ion  en  vient  aux 
mains.  Plusieurs  fois  repousséés-,  les  femmes 
irariaiMit  qu  on  les  égorgeait;  Ion  arrête  quet 
tjues-uns  des  Conjurés ,  un  nombre  de  Déi- 
-^tités  abandonnent  leur  poste  ;  une  partie 
de  la  Montagne  applaudissait  aux  efforts  des 
insurgés,  qui  après  des  attaques  réciproques, 
pénètrent  enfin  dans  la'salle"  se  répandent 
dans '^lesi)anquet tes  ,  armés  de  sabres^  die 
«piqijfes ,  de  fourches  ,  de  croissans  fiké&aa 
4lciut  des  bâtons.  L'on  entend  les.cris:  vive  la 
Montagn^!  du  pain  et  la  Constitution  de  ijg3. 
'y.  Ce  fut  alors  que  le  député  Firaud  .périt 
^etime  de  son  courage;  irrités  par  sBTé^- 
«stance  ,  les  révoltés  ie  saisirent  de  ^lui 
dans  la  salle  ,  lui  coupèrent  la  tête ,  .qu'ils 
-présentèrent' devant  le  Président,  en  mêime 
'lems  que  d  autres  furieux  lui  counnau'- 
-daient  de  proclamer  et  ^e  isignerdes  décrets 
-{irononcés  par  cette  nuïitiiude  en  délire. 
Woissy-d -Allias  refuse  ,  ont  Presse  !sur  sa 
poitrine  des  piques  et  des  baïonnettes  ;  im* 
Mu>bile^ii  pcrsisÀ  danssèn  rtfus  ;  quelques 


498     Journées  du  9  Ihermidor ,  et  e. 

coups  de  pistolets  sont  tirés  sur  lui  ,  ii|l 
entend  le  sifflement  des  balles  $fuis  chsuk 
ger  de  couleur. 

Cependant  un  pétitionnaire  avait  lu  If 
manifeste  de  Imsurrection  ;  et  toutes ^Ui 
conclusions  qu  il  présente ,  ainsi  quç  niilit 
autres  propositions  non  moin»  .rfollesr  et 
non  moins  airoees,  avaient  reçu  d'un  pew 
nombre  de  Députés  montagnards  et  de  1|  i 
foule  dans  laquelle  ils  sont  confondus  ,  \t 
titre  mensonger  de  lois  nationales  \  les  fiir 
reurs  de  ces  Législateurs-improvistes.cr^  \ 
saient  en  raison  de  la  facilité  de  les  satisr 
faire  ;  eljes  n'éprouvaiem  d'autre  résistance 
que  celle  du  Président ,  qui  n  avait  :i  leujr 
opposer  que  son  silepce.  Les  progrès  dcjs 
révoltés  ,  manifestés  au  dehors  par  dos 
signaux  que  quelques  affidés  iesaient  dcf 
hauteurs  du  dôme  des  Tuileries ,  et  procU- 
mes  au  loip  par  le  son  funèbre  du  tocsin 
national  avaient  rassemblé  tous  les  citoyens 
sous  les  murs  de  la  Convention  ;  mais  ii^ 
restèrent  indifférehs  sur  les  dangers  qwK 
courait  la  Convention.  La  têt^  de  Féraud 
fut  même  promenée  au  milieu  de  la  foros 
armée.  Beaucoup  de  citoyens  de  bonnfr- 
foi  disaient  :  u  Avec  tout  cela,  les  Sani^ 
5>  Culottes  ont  raison.  Lion  croyait  jq.uie))fi 
99  chute  de  Robespierre  et  la  rentrée  de^ 
9»  jâ  et  des  mis  hors  la  loi  proci^rai^alt 


Jâurnies  du  g  thirniidot  «  et  t.     4§2. 

*  Vabôndance  ;  nous  allons  de  mal  en  pis  , 
M  ilous  sommes  sans  pain  ,  les  assignats 
99  sans  crédit ,  et  les  rentiers  meurent  de 
Wih  Ae  faim.  '9 

»'Sut  le  soir^  tous  les  citoyens  se  retî- 
Hffeiit  et  laissèrent  la  Convention  à  la 
Ibefci  de  ceux  qui  engorgeaient  la  salle* 
L^alarmé  se  répand  vers  les  dix  heures  sur 
le  bruit  que  Goujon ,  Peyssard ,  Duquesnoy  ^ 
BourbotU  et  Albitte  avaient  demandé  que 
Ton  décrétât  la  destitution  de  toutes  les 
Autorités  constituées  depuis  le  9  thermi-> 
dor  ,  et  avaient  fait  décréter  des  visites 
domiciliaires  pour  découvrir  lès  accapa- 
rcmens  de  subsistances.  La  destinée  des 
citoyens  étant  liée  au  sort  de  la  Conven- 
tion ,  beaucoup  crièrent  aux  armes  !  mais 
9s  n'avaient  aucun  point  de  ralliement. 
Les  représentans  Legendre  [  de  Paris  ) ,  et 
Delcloy  (  du  départ,  de  la  Somme  )  ,  se 
ihirent  à  la  tête  du  bataillon  de  la  Butte ^ 
des-Moulins  ,  entrèrent  au  pas  de  charge 
dans  la  salle  de  la  Convention  ,  le  sabre 
•à  la  main  et  drapeaux  déployés  ,  tout  le 
bataillon  criant  :  hors  la  loi  la  Montagne  l 
m  bas  leç  brigands  !  Ils  mirent  en  fuite  les 
févoltés  qui  s'étaient  emparé  de  la  salle  , 
et  qui  se  sauvèrent  dans  leurs  sections  , 
triant  :  aux  armes  !  mais  tout  le  monde  fut 
iourd  i  leur  appel.  Dans  le  court  espace  de 


494     Journées  du  9  Ihirniidot  j  de. 
dix  minutes  ,  la  salle  fuc  libre  ,  èt^totts  lei 
Représentans  revenus  à  leur  poste ,  déffé^ 
tèrent  d'arrestation  leurs  collègues,  Du^en 

noi ,  Bourboite  ,  Diiroi ,  Prieur  de  la  Mamt^ 
Romme ,  Soubrany  ,  Goujvn  ^  Albitte  aîné, 
Peyssard ,  Lecarpentier  de  là  M^iche ,  Pintl 
aine ,  Borie ,  Fayau  ,  Ruki  ;  tous  coupaUa 
d'avoir  pris  part  active  à  la  rébellion  et  àfM 
délibérations  criminelles  des  assassins  de  Féruûd. 

Tallien  dit  :  Je.  demande  que  demain  k 
soleil  ne  se  lève  pas  sur  leurs  têtes.  Bourdon 
(  de  rOise  )  demande  quon  les  faille  dans  le 
salle. 

La  lenteur  des  secours  apportés  par  lei 
Parisiens  à  la  défense  de  la  Convention , 
inspira  aux  insurgés  Taudace  de  la  persé- 
vérance et  Tespoir  du  succès;  ils  revinrent 
le  lendemain  à  la  charge ,  mais  en  meil- 
leure contenance  et  avec  tout  Tappareil 
d'une  armée  déterminée  à  combattre.  Les 
bataillons  des  faubourgs  St. -Antoine  et 
Saint -Marceau  ,  descendirent  avec  leurs 
canons  et  vinrent  jusques  sur  les  hauteurs 
avantageuses  de  la  place  du  Carrousel , 
ou  ils  les  braquèrent  sur  la  troupe  pari- 
sienne qui  investissait  la  Convention.  Plu- 
sieurs fois  la  mèche  fatale  fut  suspendue 
ftur  les  lumières  des  canons,  et  des  Repré- 
sentans envoyés  sur  les  lieux  ,  pour  préve- 
nir l'explosion  ,  furent  forcés  de  permettre 


Journèti  du  g  thermidor ,  tt  c.     495 

r  VQrateur  des  faubourgs  d'allçr  à  la  tête 
i'ùne  députation,  présenter  à  TÂssemblée 
nationale  ,  le  vœu  de  ses  commettans  pour  la 
wnstitution  de  g3  ,  pour  la  liberté  4^s  patriotes 
Upour  le  rapport  d'un  décret  qui  regardait  for 
\t  (argent  comme  marchandises. 

Gossuin  ,  qui  avait  été  envoyé  au  Ca- 
rouzel  pour  engager  les  Citoyens  armés  à 
fraterniser  ,  revint  sans  succès.  Il  apperçut 
i  la  barre  de  la  Convention  une  députation 
les  rebelles ,  et  sans  connaître  le  motif  de 
a  pétition  qu  ils  avaient  lue  ,  il  fit  la  mo* 
ion  inconsidérée  de  donner  le  baiser  fra- 
ternel à  rOrateur  de  la  députadon  ,  ce  qui 
fut  décrété. 

L'Orateur  sans-culotte  fut  reconnu  pour 
te  fils  d'un  ci  -  devant  employé  comme 
espion  auprès,  des  cours  étrangères  ,  sur- 
;out  dans  les  pays  en  révolution  ;  il  se 
lommait  Saint  -  Ligier.  La  Convention  , 
linsi  réduite  à  capituler  ,  pour  prévenir 
.'effusion  du  sang  ,  promit  solennellement 
ie  mettre  promptement  en  acdvité  la  const- 
itution de  1 7  93  ,  et  ces  promesses  eurent 
.'effet  salutaire  de  calmer  les  révoltés ,  qui 
(ans  renoncer  à  leurs  espérances  ,  ajour- 
nèrent l'expédidon  et  se  retirèrent  avec 
eurs  armes. 

Le  lendemain  éclaira  im  nouvel  attentat. 
L'assassin  de  Féraud,  livré  au  tribunal  et 


496     Journées  du  9  thermidor  ,  et  c. 

condamné  à  mort ,  avait  été  arraché  de  k 
charette  fatale  par  des  hommes  déguiséi 
en  femmes  ,  qui  le  portèrent  en  triomphe 
au  feubourg  St.- Antoine  ;  la  nouvelle  de  ce 
crime ,  si  facile  à  prévoir  ,  frappa  d'efiroi  les 
citoyens ,  parmi  lesquels  se  trouvait  une 
partie  de  la  Jeunesse  de  Paris  ,  surnommée 
la  jeunesse  de  Freron.  Le  général  Menou  ,  à 
la  tête  de  vingt  mille  hommes  ,  dirigea 
sa  marche  vers  le  fauxbourg  Antoine  ,  fit 
trembler  les  révoltés  qui  se  barricadèrent 
en  vain  dans  la  rue  .principal^  ;  on  leur 
coupa  toute  communication  avec  le  faux- 
bourg  Saint-Marceau  ;  et  dans  l'impuis- 
sance de  soutenir  une  longue  défense  ,  ils 
livrèrent  leurs  canons ,  leurs  fusils  et  même 
quelques  chefs  de  la  rébellion ,  parmi  les- 
quels s'était  distingué  un  Nègre  qui  com- 
mandait les  canonniers.  Une  Commission 
militaire  ,  établie  aussi-tôt,  jugea  les  vaincus 
et  en  condamna  à  mort  un  grand  nombre, 
parmi  lesquels  se  trouvèrent  vingt-un  gen- 
darmes ,  comme  convaincus  de  s'être  réunis 
aux  rebelles  ,  mais  la  plupart  avaient  été 
cntr^nés  de  force  dans  cette  défection. 
Cette  Commission  ,  chargée  pareillement 
de  juger  les  Représentans  décrétés  d'arres- 
tion  le  premier  prairial  ,  dont  deux  ne 
furent  pas  saisis  ,  condamna  Peyssard  à  la 
déportation  ,  et  à  la  mort  Duroy  ,  Goujon , 


Journées  du  9  thermidor ,  et  c.      497 

Rômme  ,  Duquesnoy  ,  Bourbotte  et  Soubrany^ 
{voyez  le  tableau^  n.  2  ,  tome  II)  [1)  qui  tous 
eurent  le  courage  de  se  poignarder  avec  le 
même  couteau  ;  trois  seulement  purent  être 
conduits  àla  guillotine;  quan  t  aux  trois  autres 
que  Ton  crut  morts ,  les  médecins  en  rappel- 
ièrent  à  la  vie  deux  ^  Homme  qui  est  actuelle- 
tuent  à  Saint-Pétersbourg  ,  où  il  avait  fait 
Féducation  d'un  prince  russe,  et  Goujon  y  qui 
n'a  survécu  que  de  six  semaines  à  spn  suicide* 
Cette  victoire  de  la  Convention  sur  les 
Sans-culottes  ,  qui  là  harcelaient  sans  cesse , 
fiit  décisive  (^);  et  les  sections  autorisées 

(i)  L'établissement  d'une  commissioii  militairs 
pour  juger  des  Représentans  du  peuple ,' était  un 
outrage  Elit  aux  principes  et  une  vengeance  qu'exer- 
çaient la  Plaine  ,  les  Soixante-treize  et  les  mis  hors  la 
loi.  C'est  le  cas  de  dire  qu^ils  furent  plus  impoli- 
tiques que  les  Montagnards  à  Fépoque  du  3i  mai. 
Cependant  Ton  ne  peut.se  dissimuler  que  dans 
cette  circonstance  une  partie  de  cette  même  Moti* 
tagne  se  joignit  à  la  Plaine,  f 

(2)  Si  les  Comités  de  Salut  public  et  de  Sâreté* 
générale  avoient  voulût  ils  auraient  évité  cette  in- 
surrection ^  et  épargné  le  sing  d'un  grand  nombre 
d'individus  qui  n'étaient  que  des  instrumens  passifs. 
Tout  cela  était,  combiné  ;  on  voulait  donner  une 
autre  constitution  et  réduire  lés  Sans-culottes  au 
silence  ,  ainsi  que  les  partisans  de  la  terreur  et  de 
Kobespierre.  Cette  Convention  ,  après  avoir  appelé 
nombre  de  fois  la  multitude  à  son  secourjs  ,  n'en 
ayant  plus  besoin ,  il  fallait  bien  s'en  débarrasser. 

Mais  pourquoi  toujours  du  sang? 

tome  VI.  I  i 


49'      Jôurnies  du  g  thirmiddr,  etc. 

ensuite  à  prononcer  Fincarcération  ou  le  dé'- 
sarmement  de  tous  les  Âgens  de  la  terreur , 
travaillèrent  avec  une  activité  et  une  passion 
qui  épouvantèrent  ces  mêmes  Législateurs  , 
qui  avaient  ainsi  livré  leurs  anciens  protégés  à 
la  discrétion  des  citoyens,  La  haine  aveugle 
frappa  indistinctement  une   foule   d'amis 
purs  de  la  liberté ,  de  patriotes  vraiment 
dignes  de  ce  nom.  Les  mêmes  actes   arbi- 
traires s'exercèrent  dans  les  départemehs  ; 
Topinion    désormais  affranchie  de    toute 
contrainte  ,  ne   se  déchaîna  point,  contre 
cette  foule  d'instrumens  servU^s  du  gduver-: 
ne  ment  révolutionnaire  ,  san&  attacher  la 
juste  et  publique   indignation  aux  inven- 
teurs et  soutiens  de  cet  exécrable  gouver- 
nement. Trop    bien  avertie  par  le    long 
abandon  qui  faillit  assurer  sa  perte  au  pre- 
mier prairial ,  la  Convention  était  depuis 
long-tems  convaincue  du  peu  de  confiance 
qu  on  lui  accordait  ;  et  dans  Timpossibilité 
de  reconquérir  les  suffrages  de  la  Nation ,, 
elle  s'occupa  de  l'asservir  par  la  crainte. 

Obligée  enfin  à  la  retraite  ,  elle  voyait 
avec  effroi  cet  abandon  d'un  pouvoir  qu'elle 
avait  raison  de  croire  si  nécessaire  à  sa 
sûreté  ;  néanmoins  les  mieux  intentionnés 
sentirent Jes  dangers  que  la  liberté  allait 
courir ,  si  toute  la  Représentation  nationale 
avait  été  changée  ;  représentation  nouvelle 


Journées  du  g  thermidor  ,  ttp.     499 

^u^uraient  partagés  des  hommes  ,  ou  ulcé- 
rés par  le  souvenir  du  régime  révolution- 
naire ,  ou  apportant  dans  les  deux  conseils 
des  opinions  peut-être  subversives  du  gou- 
vernement républicain. 

Les  besoins  indispensables  dassurer  au 
Peuple  la  garantie  de  la  charte  constitu- 
tionnelle ,  les  détermina  donc  à  se  main- 
tenir en  majorité.  Les  patriotes  éclairés  se 
rangèrent  de  cet  avis  ,  en  convenant  de  la 
violation  des  principes. 

Il  fut  question  de  soumettre  à  la  sanction^ 
du  Peuple  ,  et  ce  décret  qui  limitait  ses 
droits  délections  ,  et  la  Constitution  elle* 
même.  Tous  les  partis ,  également  fatigué» 
de  la  révolution  ,  s  accordaient  à  chercher 
le  repos  dans  une  constitution  fixe  ;  et 
quelqu'imparfaite  que  parût  celle  qu'on 
présentait ,  chacun  Tadopta  avec  d'autant 
plus  de  plaisir ,  qu'elle  portait  avec  elle- 
même  les  moyens  de  modifications  qu  in- 
diqueraient le  tems  et  l'expérience  :  les 
Jacobins  ,  plutôt  par  mauvaise  humeur  que 
de  bonne-foi ,  réclamaient  le  pacte  social  de 
g3  ,  que  la  Convention  leur  avait  promis 
de  mettre  en  activité;  ils  arguaient  de 
nullité  contre  toute  acceptation  à  laquelle 
ne  pouvaient  participer  les  détenus  ,  à 
l'exemple  de  Marat ,  qui  écartait  la  cons-» 
titution  de  Condorcet ,  par  Timpossibilité 

li  2 


5oo      Journées  du  6  thermidor ,  ete. 

de  consulter  les  armées  occupées  à  com- 
battre^ 

Les  Assemblées  primaires  accueillirent  i 
la  presquunanimité  la  constitution  nou- 
velle. Il  n  en  fut  pas  de  même  du  décret 
qui  raccompagnait  ^  et  la  Convention ,  qui 
s'attendait  au  refus ,  Féluda  par  adresse  de 
ce&  interprétations  ;  elle  accola  sa  loi  par^ 
ticulière  au  code  constitutionnel ,  sur  lequel 
seul  eUe  provoqua  officiellement  une  dé« 
libération  ;  et  tout-à-coup  se  déclarant  ju^e 
exclusif  des  procès- verbaux ,  elle  interpréta 
en  faveur  de  son  décret ,  et  comme  con* 
séquence  nécessaire,  tous  ceux  qui,  sans 
en  faire  aucune  mention  expresse  ,  por« 
taient  de^  suffrages  d'acceptation  de  la 
constitution. 

Cependant  les  royalistes  tentèrent  de 
persuader  qu'on  ne  devait  accepter  Tactc 
constitutionnel  qu'après  avoir  discuté  à 
fond  et  prononcé  sur  les  décrets  des  5  et 
l3  fructidor,  moyen  infaillible  d'ajourner 
indéfiniment  l'acceptation  de  la  Constitu- 
tion. Les  vrais  patriotes  ne  furent  pas  les 
dupes  de  cette  supercherie. 

Le  royalisme  aiguillonnait  les  mécon- 
tentcmens  ,  excitait  à  une  résistance  active  » 
provoquait  des  mouvemens  dont  il  espé- 
rait faire  son  profit.  Dans  lc?S  conciliabiile^ 
où  se  trouvaient  une  partie  des  Président 


Journées  du  g  thermidor\  ete.       Soi 

des  sections ,  on  tournait  la  République  en 
ridicule ,  et  Ton  vit  alors  certains  Députés  , 
liés  personnellement  à  là  éause  de  la  li- 
berté ,  être  obligés  d'entendre  ces»  disposi- 
tions et  de  se  taire.  Parmi  les  hommes  qui 
se  distinguèrent  parleur  franchise  royaliste , 
on  doit  citer  Richer-Sérisy  ,  dont  les  nu- 
méros du  journal  de  YAccusatenr  puhlk 
portent  le  cachet  le  mieux  marqué  de  sa 
haine  contre  la  République  ;  et  le  ci-devant 
comte  Barruel  de  Btauvert ,  qui  rédigeait 
aussi  un  journal  des  Actes  des  Martyrs ,  avec 
les  mêmes  principes  et  la  même  audace-, 
et  qui  entretenait,  comme  Président  du 
canton  de  Mantes  ,  une  correspondance 
avec  les  Assemblées  primaires  de  Paris  , 
les  encourageant  impunément  aux  plus 
fortes  mesures  (i) ,  et  leur  offrait,  des  bras 
et  des  subsistances. 


(i)  Tous  les  royalistes  intriguaient  :  d  un  côté,  la 
faction  d  Orléans  ;  de  Tautre  ,  les  partisans  de  la 
famille  de  Louis  XVI. 

L*un  des  meneurs  de  la  section  de  TUnité  prétea* 
dait  que  le  duc  d'Yorck  gouvernerait  mieux ,  et  que 
Ton  ne  réussirait  pas  facilement  à  rétablir  la  monar- 
chie ,  si  préalablement  on  n'incarcérait  tous  \t% 
patriotes  ,  et  sur- tout  si  on  ne  déportait  pas  tous  les 
terroristes.  Cette  lutte  des  royalistes  les  affaiblit 
eux-mêmes  ;  et  les  bons  citoyens  s'^pperçurent  qu'il», 
allaient  être  la  dupe  de  meneurs  inconnus  depuis  la. 
révolution. 

li  3 


5ô2      Journées  du  g  thermidor,  etc.\ 

On  avait  vu  le  machiavélisme  des  Comités 
exciter  sous  main,  aux  époques  de  prairial , 
les  émeutes  de  Sans-culottes  ,  pour  avoir 
occasion  de  les  comprimer. 

La  même  astuce  meurtrière  mettait  peut- 
être  en  œuvre  ,  dans  cette  dernière  circons- 
tance ,  tous  ces  provocateurs  insensés  de 
Fancien  régime  ,  qui  appuyaient  adroite- 
ment les  réclamations  dune  partie  des 
Parisiens  contre  le  principe  violé  ,  par  les 
décrets  des  5  et  i3  fructidor,  et  tous  ces 
Meneurs  eurent  Tadresse  d'échapper  à  Fex- 
plosion  du  i3  vendémiaire. 

S'il  n'est  pas  clairement  démontré  que 
ces   principaux   agitateurs  pouvaient    être 
secrètement   d'accord   avec   les   Comités  , 
pour  opérer  un  mouvement,  il  est  certain 
du   moins   que   ceux-ci  le  desiraient  avec 
ardeur.  Voici    le    résultat   dun   entretien 
qu'un  citoyen  eut  avec  le  député  G........ , 

place  du  Garrouzel ,  à  dix  heures  du  soir , 

le  12  vendémiaire  :  il  observait  à  G 

que  la  Convention  courait  le  même  danger 
que  le  Roi  au  lo  août  ;  que  si  tout  Paris 
se  mettait  dans  la  tête  de  détruire  la  Con- 
vention,  Pariis  réussirait.  —  a  Oui,  reprit 
•5  le  Député  ,.mais  au  lo  août,  les  Sans- 
5  5  culottes  se  déclarèrent  contre  la  Cour. 
5  5  II  fût  arrivé  bien  autre  chose  ,  si  elle 
55  avait  fait  tirer  quelques  coups.de  canon 


Joiimêes  du  g  thermidor  ^  etc.     5o3 
J5  sur    la   multitude    par    le    guichet    du 
.  55  Louvre  ,  et  braquer  les  pièces  sur  toutes 
9  9  les  autres  issues  ,  ce  que  nous  ferons  ; 
99  au  lieu  que  les  Sections  de  Paris  .ont  la 
9  9  gaucherie  ,  (  heureusement  pour  nous  ) 
99  de  ne  pas  rallier  à  elles  les  Sans-culottes.ti 
Ce    Citoyen   lui    répondit:    4 1  Vous   avez 
55  raison  ;  jamais  une  insurrection  ne  peut 
5  5  réussir  par  des  hommes  bien  frisés  ,  bien 
55  poudrés,   et  en  bas   de    soie    blancs,  rj 
Effectivement  ,  les  Sans-culottes  furent 
signalés  par  les  Meneurs  de  sections  ,  qui 
étaient  tous  bien    endimanchés  ;  quelques- 
uns  ,  même  ,  furent  assez  sots  pour  dire  : 
4  6  II  faut  lever  la  séance  ,  voilà  Theure  où 
55  les  ouvriers  sortent  de  leurs  ateliers,  m 
Plusieurs   partis    dans    la   Convention , 
les   Girondins   mis   hors   la    loi    et    leurs 
soixante-treize  amis  rentrés,  croyaient  que 
l'insurrection  ,  comme  Tindignation  géné- 
rale ,  ne  se  dirigeaient    que    contre   cette 
portion  de  la  Montagne ,  qui  avait  défendu 
constamment   le  régime  de  la  terreur  ,  si 
universellement    et    si    justement    exécré. 
L'audace  des  royalistes  ,  qui  ne  ménageait 
plus  rien  ,  parce    qu'elle  ne  doutait  plus 
du  succès ,  prouva  bientôt  que  leurs  fureurs 
destructives  embrassaient  la  totalité  de  la 
Convention   natiQnale.    Depuis  long-tem» 
les  Comités  avaient  attiré  auprès  d'eux  , 

li  4 


5 04     Journées  du  g  thermidor^  etz. 

avec  grand  appareil ,  des  bataillons  d'élite^ 
qu'on  enferma  dans  un  camp  bien  palissade, 
pour  empêcher  toute  communication,  tout 
rapprochement  avec  les  citoyens  de  Paris^ 

A  cette  troupe,  la  Convention  adjoignit 
tin  bataillon  sous  le  nom  de  Patriotes  de  8g; 
c'était  en  partie  tous  ceux  que  les  Sections 
et  les  Comités  de  la  Convention  avaient  fait 
incarcérer  après  Tinsurrection  de  prairial  ^ 
sous  la  dénomination  de  terroristes^  c'est-à^ 
dire,qui  avaient  la  plupart  occupé  des  places 
sous  le  régime  de  la  terreur  ,  sans  eu  avoir 
été  tous  des  partisans.  Cette  réunion  ne 
montait  pas  à  plus  de  2600  ;  il  est  constant 
quon  les  crut  généralement  en  nombre^ 
beaucoup  plus  considérable  (i).  Cette  levée' 
de  boucliers  provoqua  Talarme  ,  et  justifia 
en  apparence  Tinsurrection  de  plusieurs 
Section^, 

Sans  fusils  en  état,  sans  cartouches, 
mais  sur- tout  sans  canons  ,  quelques  Sec- 
tions s'avancèrent  contre  une  armée  bien 
disciplinée  ,  approvisionnée  de  munitions 
de  tout  genre  ,    et   maîtresse  d'une  artil- 


(1)  Le  bruit  public  fesaît  monter  à  trente  mille 
hommes  la  troupe  de  ligne  ;  il  est  de  fait  qu'il  n'y 
avait  que  quatre  mille  cinq  cents  hommes.  Plusieurs 
t)éputés  disaient  que  les  royalistes  auraient  le  dessus, 
«ils  étaient  instruiti  du  peu  de  troupes  qu'il  y  avait» 


Journées  du  9  thermidor  ^  etc.       5o5 

lerîe  formidable^  Le  mouvement  fut  rapide, 
simultané  ,  universel.  L'effroi  que  fit  naî- 
tre la  vue  des  hommes  réarmés  par  la 
Convention  ,  semblait  motiver  la  nécessité 
de  se  tenir  sur  la  défensive ,  chacun  igno- 
rant '  les  intentions  de  cet  appareil.  On 
te  rassembla  donc  tumultuairement  ;  et 
c'est  au  milieu  de  cet  empressement  inat- 
tendu ,  qu'il  devint  facile  d'égarer  ceux 
des  citoyens  qui  pouvaient  avoir  les  meil- 
leures intentions.  </ 

Les  premières  mesures  se  dirigèrent  con- 
tre la  sec  tionLepelletier.  Le  général  Menou, 
qu'on  avait  chargé  ,  le  12  Vendémiaire  , 
de  la  réduction  de  cette  Section ,  retran- 
chée en  armes  au  chef-lieu  de  son  arron- 
dissement ,  crut  devoir  la  traiter  avec  des 
ménagemens  conciliateurs  ;  il  parlementa  , 
et  les  insurgés ,  en  paraissant  céder  à 
cette  indulgence  ,  y  virent  un  motif  d'es- 
poir ,  et  même  le  garant  d'un  succès  iné- 
vitable. 

Le  soir  même  ,  au  général  Menou 
succéda  Barras  ;  beaucoup  de  sections 
prirent  les  armes.  Le  i3  ,  à  5  heures  du 
matin  ,  un  Secrétaire  principal  du  Comité 
de  Sûreté-générale  ,  averti  par  les  rapports 
des  observateurs  qu'on  battait  la  générale 
dans  certaines  sections  ,  s'empresse  d'en 
porter  la  nouvelle  au  Comité ,  qu'il  in- 


5o6     Journées  du  g  thermidor ,  etc. 

vite   à  prendre  ,  pendant  qu'il  en  est  teiM 
encore   ,     des    mesures   pour  arrêter  ce 

signal  contagieux^  de   guerre  civile Di 

quoi  vous  mêlez-voUs  ,  lui  répond  brusque- 
ment le  représentant  Gauthier  ?  Laissez 
faire  ces  badauts ,  rhous  savons  bien  ùù  nom 
les  amenons.  Effectivement  la  générale  se 
battait;  les  proclamations  se  publiaient 
aux  carrefours  des  différentes  Sections  sous 
les  yeux  et  comme'  sous  les  auspices  des 
patrouilles  delà  cavalerie  conventionnelle, 
qui  suivait  officieusement  ,  dit-on  ,  et  les 
tambours  et  les  proclamateurs  ,  sans  Ici 
troubler  dans  leurs  fonctions. 

On  aurait  cru  que  les  rassemblemens 
étaient  protégés  par  ceux  mêmes  quils 
semblaient  menacer  ;  ils  se  grossirent  consi- 
dérablement en  quelques  heures  ,  et  la 
foule  armée  des  secftionnaircs  s  avança  vers 
les  lieux  occupés  par  les  troupes  de  la  Ré- 
publique et  de  la  Convention  ;  elles  cédè- 
rent le  Pont-Neuf  à  leur  masse  impor- 
tante ,  et  ce  pont  fut  un  point  de  com- 
munication nécessaire  entre  les  habitans 
des  deux  rives  de  la  Seine.  Conduits  par 
des  Généraux  choisis  au  hasard,  et  au 
milieu  desquels  on  distingua  deux  Maré- 
chaux-de-camp de  Tancien  régime  ,  et 
Danican ,  remarquable  par  son  effronterie 
joyaliste  ,.  les  insurgés    se  divisèrent  sur 


Journées  du  g  thermidor ,  elc.       607 

ux  colonnes,  dont  Tune  marcha  par  la 
g  St.  Honoré  vers  la  rue  de  rEchelie 
la  Convention  ,  et  lautre  par  le  quai 
la  Monnaie  vers,  le  pont  ci-devant 
>yal  et  les  Tuileries.  On  a  hasardé 
aucoup  de  conjectures  sur  les  intentions 
térieures  de  ces  colonnes  armées  :  il 
est  point  douteux  que  les  chefs  des 
)yalistes  voulaient  terminer  tout  par  un 
•up  de  main  décisif;  mais  il  est  possi- 
e  et  présumable  que  d'autres  meneurs 
us  circonspects,  sans  être  moins  roya- 
les ,  sentaient  Fimpossibilité  de  réussir 
ir  une  attaque  ouverte  ,  et ,  que  calculant 
ieux  pour  le  profit  de  leurs  projets  Ur 
rticides  l'emploi  de  cettte  masse  énorme 
:  citoyens ,  ils  espéraient,  au  moyen  d'une 
iternisation  adroite  avec  les  troupes  répu- 
icaines  ,  amortir  la  puissance  de  ces  trou- 
s  par  le  mélange  et  la  confusion  de 
utes  les  armes  ,  enlever  à  la  Conven- 
m  Tappui  de  ces  soldats  voués  à  la  dé- 
idre  ,  la  réduire  à  la  seule  force  de  ce 
taillon  des   Patriotes  de   89  ,   facile  alors 

dissiper  ou  à  détruire  ,  et  imposer  ainsi 
'Assemblée  nationale  l'obligation  de  con- 
Iter  les  Départemens  sur  le  fameux  décret 

réélection  ;  ce  qui  eût  assuré  son  renvoi. 
Dilà  du  moins  ce  que  semblaient  annon- 
r  ces  hommes  qui  ,    quoiqu'en   armes ^ 


b 


5o8      Journées  du  g  thermidor^  etc. 

tenaient  en  main  Tolivier ,  et  présenuùent 
aux  troupes  ce  signe  auguste  de  la  paix  et 
de   la    fraternité. 

Au  sein  de  la  Convention  et  des  Coi 
mités,  quelques  hommes  inclinaient  aià 
voies  de  conciliation  ;  mais  plus  clairvoyaoi 
sur  leurs  intérêts  ,  les  Montagnards  se 
hâtèrent  de  trancher  la  difficulté  :  Si  h 
sections  ne  nous  attaquent  pas  ,  avaient-ib 
dit ,  nous  attaquerons.  A  deux  heures  de 
relevée  ,  un  Officier  de  la  force  armée 
dit  :  L'affaire  ne  tardera  pas  à  s''engager. 
Enfin  quelques  minutes  avant  4  heures 
et  demie,  André  Dumont  trahissant  indis- 
crètement le  secret  de  Tattaque ,  parait 
dans  le  salon  de  la  Liberté  ,  où  se  pro- 
menaient inquiets  ses  collègues  :  En  placc^ 
Citoyens ,  en  place  ,  s'écrie-t-il  comme  pour 
annoncer  quelque  grande  nouvelle  ;  et 
aussitôt  une  décharge  terrible  explique 
son  annonce. 

Le  feu  était  parti  des  fenêtres  de  quel- 
ques maisons  de  la  rue  Honoré  sur  les 
soldats  de  la  Convention  ,  et  notamment 
de  la  maison  du  traiteur  Venua.  Le  canon, 
placé  à  rinstant  même  vis-à-vis  l'église 
Saint-Roch  ,  foudroya  une  foule  d'insurgens 
qui  s  y  étaient  placés.  Maîtresse  alors  de 
la  rue  Honoré ,  la  troupe  dirigea  son 
artillerie  sur  les  Sectionnaires  qui  se  reti* 


Journées  du  9  thermidor ,  ete.      509 

^tent,  n'ayant  d'autres  armes  que  leurs 
bsils.  Cependant  par-tout  où  il  fut  pos- 
lible  ^e  se  retrancher ,  il  y  eut  résistance. 
Les  canons  ,  braqués  sur  le  quai  d'Orsay  » 
Srent  feu  sur  une  colonne  qui  s'avançait 
(e  long  des  Théatins ,  composée  des  sections 
du  Théâtre  -  Français  ,  de  l'Unité  ,  de  la 
Fontaine-de-Grenelle  et  de  Bon-Conseil , 
lesquelles  étaient  dirigées  parDanican  ,  qui 
Rit  provoquer  le  Commandant  du  poste  du 
pant,des  Tuileries  (i)/£n  même  tems  ,  en' 
bce  de  la  rue  de  l'Echelle ,  un  combat  s'en- 
gagea entre  la  troupe  qui  environnait  le 
Comité  de  Sûreté-générale  {2)  et  les  Ci- 
toyens qui  se  trouvaient  en  présence. 

CetteUriple  décharge  fut  pour  la  Con- 

irention  la  gairantiede  son  triomphe.  Quel« 

)ues   Membres  s'élancent   de  leurs  places 

>our  aller  sur   le  champ  de  bataille.  Que 

—       - — " — ■ " — '-  — 

(i)  A  la  première  décharge  qui  fut  faite  sur  cette 
K>lonnc ,  elle  %c  tauVâ;  les  uns  en  jetant  leurs^  fiisili , 
es  autres  en  se  cacb^nt  ^nt  lei  portes  cochères.  De^ 
'emmes  eurent  le.couage  de  reste;  à  leurs  croisées  , 
mi  le  quai ,  et  leur  crièrent  :  0  Us. lâches  !  â  Us  pot* 
fr<mj  /  Ce  n'est  pas  que  Ton  puisse  blâmer  ces  ch 
ïoyetis  de  ne  pas  avoir  osé  lutter  contre  Tartillerie  d# 
  C  onvention^  ncanmoins,  si  les  Sans-culottes  eussent 
un  devoir  se  mêler  de  la  querelle  ,  les  canons  au- 
raient été  enlevés,  et  la  Convention  faite  prisonnière. 

(9)  Ce  Comité  de  sûfecé  générale  se  tenait  alors  à 
['ancien  b&tcl  de  firiennc. 


5 10     Jôurnits  du  g  thermidof  ,  et  c\ 

tout  le  monde  reste  ,  s'écrie  Lecoînte-Puy- 
ravcau  moins  rassuré  sur  les  dangers, 
ou  que  tout  le  monde  sorte  avec  les  bataillensl 
tout  le  inonde    resta. 

C'est  sur-tout  dans  la  rue  St,  Honoré 
que  Faction  fut  plus  meurtrière;  1  opi- 
niâtreté inutile  de  quelques  citoyens  ne 
fil  qu'augmenter  le  nombre  des  victimes, 
que  Ton  porte  à  228  individus,  dont  65 
de  la  troupe  conventionnelle.  N  y  eot-il 
péri  qu'un  seul  homme  ,  les  vainqueurs 
n'auraient  encore  qu'à  pleurer  sur  leur 
triomphe  ! 

Bonaparte  ,  qui  dirigeait  l'artillerie ,  fit 
tirer  toute  la  nuit  le  canon  à  poudre  pour 
effrayer  les  Scctionnaires  et  empêcher  une 
nouvelle  réunion.  Cette  tactique  épargna 
beaucoup  de  sang  ;  car  déjà  des  insurgés 
allaient  de  plortc  en  porte ,  pour  se  rallier 
de  nouveau  et  marcher  rue  Saint-Honoré  : 
et  peut-être  que  si  les  sections  insurgées 
eussent  eu  un  succès  de  quelques  momens , 
le  sang  eût  coulé  à  grands  flots. 

Du  succès  de  cettte  joiifnée ,  résulta  ,  en 
faveur  de  la  Convention ,  l'acceptation  de 
Facte  constitutionnel ,  même  de  la  part  de 
ceux  qui  tenaient  fortement  pour  la  consd- 
tiition  de  gS.  ..    ,^ 

Passons  rapidement^  sur  ces  journées 
meurtrières  ,    dont  le   résultat  inquiétait 


I 


Journées  du  g  thermidor^  de.     5ii 

t>eaucoup  de  citoyens  ,  et  qui  craignaient 
de  voir  renaître  le  régime  de  la  terreur. 
P'abord  Barras  distribue  des  diplômes  à 
ceux  pour  lesquels  et  avec  lesquels  il  a 
vaincu  ;  déjà  ils  se  donnent  les  places  ; 
mais  bientôt  quelques-uns  de  ces  patriotes 
turbulens  se  déclarèrent  contre  le  Gouver- 
nement, c'est-à-dire,  parlaient  de  la  consti- 
tution de  1793  ;  ce  qui  les  fit  expulser  de 
beaucoup  d'emplois. 

On  établit  quatre  Commissions  pour 
juger  les  chefs  de  la  rébellion  ;  40  per- 
sonnes le  furent  par  contumace  (1) ,  à 
l'exception  de  Lebois  et  de  Lafond-Soulé  ^ 
qui  furent  exécutés.  Plusieurs  autres  furent 
condamnés  à  la  détention.  (  Voyez  le  Tableau 
A"^.   2  ,  Tom.  2.  ) 

Sur  les  cinq  places  de  Directeur,  l'une 
échut  à  Barras  ;  on  le  crut  dès-lors  capable 
de  donner  de  Ténergie  à  ses  collègues. 
Lar éveiller e  -  Lépeaux  ,  Letcurntur  (  de  la 
Manche  )  et  Rewbel ,  furent  nommés  , 
le  premier  comme  victime  du  3 1  Mai , 
l'autre  comme  officier  éclairé  dans  là  ma- 


(i)  Pourtant  Ton  ne  peut  refuser  de  dire  que  le 
gouvernement  ne  fit  aucune  recherche  pour  arrêter 
ceux  qui  s'étaient  soustraits  aux  poursuites.  Beau- 
coup se  promenaient  dans  Paris  :  l'un  des  mis  hors 
la  loi  fut  arrêté  ,  et  l'on  n'exécuta  pas  le  jugement 
de  mort  rendu  contre  lui. 


5it*      *"  j///nidoT ,  etc^ 

fi-**  * 

/r  .        ..,^îy/;e   en  reconnaissance 

r  ^   :•  ^/^'r^nait   de  conclure  entre 

.'    .'  /./*  ^f /5  République  Française , 

-' pj^'^^^ ivcc   Sycyes,   qui   obtint  au 

Il  '    're  ^^  ï^C"^^  place,  quu  refusa; 

^,;,v//^^l/3ça  par  Carnot ,  dont  la  nomi- 

^///^^^usa    de  Tépouvante,   Comment 

/ï^'î^^,i  oublier   ce  Comité   de  Salui-Pu- 

^^y^jotit  il   fut  un  Membre  si  marquant , 

tes  ces  mesures   atroces  ,  ces  créations 

î^ Tribunaux  révolutionnaires,  cette  or- 

^fl/sation    de    la   Commission    d'Orange 

qu'il  a    signée  ? 

Nous  ne  nous  étendrons  pas  davantage; 
nous  attendrons  la  fin  de  la  mission  de 
chacun  pour  juger  de  ses  droits  à  Testime 
et  à  la  reconnaissance  du  peuple. 

JV.  B.  La  Convention  a  rendu  , 

Onze  mille  deux  cent  dix  Lois. 

II  a  été  dénoncé  sous  son  règne ,  par  ses  Membres 
individuellement  ,  ou  par  ses  Comités  de  Salut 
public   et  de   Sûreté   générale  , 

Trois  cent  soixante  conspirations  , 

Et  Cent  quarante  insurrections. 


Résultat  général,  etc.  5x3 

»  ■  ■»         —       I  II       I    II       ■  ■      l.i    ■         ■  ■■■■■■      I      ■       .1  ]«■■.,.        ni    »   «       ,,  I         > 

RESULTAT    GENERAL 

Des   événcmens  de  la   révolution  française^ 

Es  T  -  I L  donc  écrit  dans  le  livre  des  des- 
tinées de  toutes  les  nations  qu'elles  ne  seront 
gouvernées  que  par  des  hommes  corrompus 
ou  sanguinaires  ?  - 

Hélas  !  bien  peiy  d'hommes  publics  ont 
été  de  Tavis  de  ce  sage  Capitaine  thébain  , 
que  le  philosophe  Montaigne  donne  ,  dans  ' 
ses  Essais  \  pour  le  premier  et  le  plus  par- 
fait des  hommes  : 

<<  Epaminondas  ne  pensait  pas  qu  il  fust 
iî  loisible ,  pour  recouvrer  mesme  la  liberté 
M  de  son  pays,  de  tuer  un  homme  sans 
)>  cognoissance  de  cause.  »> 

Mais  ,  à  ce  beau  trait  d'humanité  que 
nous  a  conservé  Thistoire  grecque ,  nos  Me- 
neurs de  la  révolution  ,  nos  Proconsuls  ^ 
nos  Membres  du  Comité  de  Salut  public  et 
la  Convention  ne  manqueront  pas  d'oppo- 
jer  cet  autre  trait  des  annales  romaines  , 
que  nous  a  transpais  Sénèque  Tépistolaire  : 
44  II  y  a  des  crimes  qu'on  est  autorisé  à  com- 
^>  mettre  par  les  décrets  du  Sénat  et  les 
5  5  arrêtés  du  Peuple  (i).  '5 

(i)  £x  senatus  consultis  plebisque  scitis  scebra  cxer^ 
gtntur.  ÉPiST.  xcv. 

tome  VI.  K  k 


5 1 4  Résultat  général 

Les  Fondateurs  de  la  République  fran- 
çaise ,  qui  ne  peuvent  se  justifier  que  par 
des  récriminations  ,  ne  manqueront  pas  de 
nous  dire  ,  à  nous   autres  plébéiens  ,  qui 
croyons   qu'on  peut  concilier  à  la  fois  les 
droits  de  la  liberté  et  les  devoirs  de  Thuma- 
hité  :  <<  Qu'avez  -  vous  à  nous  reprocher? 
5?  Nous  n  avons  fait  que  ce  qui  a  été  fait 
99  avant  nous.  Nous  ne  prétendons  pas  être 
55  meilleurs  que  Moyse ,  Zoroastre ,  Romu- 
m  lus  et  presque  tous  les  grands  Législateurs 
99  du  tems  passé.  Celui  des  Hébreux  ,  pour 
3  5  les  conduire  à  la  porte  de  la  terre  pro- 
9  9  mise  ,  ne  les  fait-il  pas  marcher  sur  des 
99  milliers  de  cadavres  hébreux  ?  Zoroastre, 
35  pour  faire  prendre  son  culte  religieux  et 
9j  civil  et  pour  réformer  les  Perses  ,  boule- 
9  9  verse  cet  ancien  royaume ,  provoque  des 
M  guerres  civiles  et  religieuses  ,  change  la 
5 5  dynastie ,  et  meurt  au  sein  de  la  gloire 
5  5  et  du  crime.    Qu'est-ce   qui   ignore    de 
55  quelle  nature  ont  été  formés  les  premiers 
5  5  élémens"  de  la  République  romaine  ?  Ro- 
5?  mulus   commence  cet  Empire  par    tuer 
55  son  frère ,  appelle  à  lui  tous  les  brigands, 
15  les  nîveleurs  ,  leur  partage  les   terres  , 
55  organise  un  Sénat  d'hommes  sans  prin- 
5  5  cipes  et  sans  caractère  ;  et  si  la  Conven- 
15  tion  a   panthéonisé    Marat    et    divinisé 
M  Robespierre,  les  premiers  Sénateurs  de 


des  événemms  de  la  révolution.       5i5 

t>  Rome  Dût  fait  Tapothéose  de  ce  même 
9  9  Romulus  ,  qui  avait  plus  de  génie  que 
99  nous.  Qu'on  ne  fasse  donc  pas  le  procès 
99  k  la  Convention;  si  elle  a  commis  des 
55  crimes  ;  ils  sont  tous  politiques.  ^9 

Voilà  le  langage  des  hommes  de  sang  qui 
ont  régi  la  France  ,  et  particulièrement  sous 
le  gouvernement  révolutionnaire.  Et  qu'oti 
ne  s'y  trompe  pas,  telle  fut  la  morale  dW 
grand  nombre ,  dani?  lequel  on  doit  remar-* 
quer  des  pTotestans ,  $oi-disant  philosophes  ; 
tous  se  son^t  conduits  d'après  ces  principes , 
depuis  l'ouverture  jusqu'à  la  fin  de  la  ses- 
sion conventionnelle. 

Comparons  d'abord  les  deux  classes  des 
Députés  protestans.  La  première ,  celle  qui 
a  ouvert  la  révplution ,  coopéré  à  la  pre*- 
mière  de  nos  constitutions,  et  aidé  à  sappèr 
l'ancien  gouvernement  jusque  dans  ses 
bases  ,  est  demeurée  spectatrice  silencieuse 
du  gouvernement  révolutionnaire  ,  et  a 
favorisé  par  une  lâche  et  cruelle  adhésion 
la  tyrannie  de  Robespierre.  Tous  se  sont 
ptosternés  devant  le  monstre  ,  et  n'ont  pas 
craint  de  former  la  majorité  qui  légalisa  les- 
atroces  mesures  de  l'avocat  d'Arras  ;  ils  ont 
été  les  notables  du  ventre  de  la  Convention , 
de  cette  masse  inerte  qui  n'eut  pour  carac* 
tère  que  la  bassesse  et  la  versatilité.  Deux 
mois  avant  sa  chute,  Robespierre  fut  élu 

Kk  2 


5î6  Résultat  général 

Président  de  la  Convention  par  scrutin 
secret.  Nous  le  demandons  aux  Membres 
lÈle  ce  Sénat  qui  réunis3ait  tous  les  pouvoirs , 
lequel  d'entre  eux  ,  protestant ,  catholique 
ou  philosophe  ,  osa  refuser  sa  voix  au 
jnônstre  :  tous  les  suffrages  furent  unanimes 
tu  sa  faveur  ;  il  ne  lui  manqua  qu'une  seule 
yoix ,  la  sienne  ! 

Depuis  le  g  thermidor  ,  quand  le  péril 
fut  passé  ,  ce  qu'on  appelait  le  vtntre  de  la 
Convention  s'empara  du  gouvernement.  Au 
lieu  de  réparer  les  forfaits  qui  en  étaient 
susceptibles  ,  il  s'en  permit  de  nouveau^ 
qui  lui  furent  particuliers.  Les  protestant 
Johannot ,  Pelet ,  Boissy,  et  c. ,  organisèrent 
la  banqueroute  la  plus  infâme ,  la  plus  impu- 
dente ,  et  telle  qu'aucune  puissance  tyran- 
nique  n'aurait  jamais  pu  Timaginer.  D'une 
main  ils  conduisaient  à  l'échafaud  les  restes 
du  despotisme  de  Robespierre  ,  auteur  du 
maximum^  de  ce  vol  décrété  contre  les  pro- 
priétaires de  fonds  ,  tandis  que  dé  l'autre 
main  ils  dirigeaient  la  chute  des  assignats 
(  cette  autre  espèce  de  vol)  au  préjudice  de 
ce  même  peuple  et  des  rentiers. 

La  différence  de  la  banqueroute  du  pro- 
testant Cambon  d'avec  celle  des  protestans 
Johannot ,  Boissy  et  complices  ,  fut,  en  ce 
que  le  vol  du  premier  affectait  les  tenanciers 
de  biends-fonds ,  au  lieu  que  celui  des  ther- 


des  évènemens  de  la  révolution.       Si? 

mîdoriens,  achevait  de  ruinei  les  patriotes 
journaliers  ;  en  sorte  que  la  totalité  de  la 
nation  fut  la  victime  sous  les  deux  régimes  , 
€t  pillée  tour  à  tour  par  chacune  des  fac* 
tions  qui  déchiraient  son  sein. 

Nous  ne  peindrons  pas  ici  les  protestans 
de  la  Montagne  ,  présidée  par  les  protes- 
tans Marat  et  Jean-Bon-Saint-Andté  ;  les 
excès  et  les  massacres  de  cette  faction  sont 
décrits  dans  le  cours  de  cet  ouvrage.  Mais 
il  résulte  de  ce  tableau  et  de  cette  division 
des  deux  classes- de  protestans  ,  que  Tune 
ctlautre  furent  plus  ou  moins  sanguinaires, 
et  plus  ou  moins  coupables  dans  la  forma- 
tion de  nos  mœurs  révolutionnaires, 

La  secte  ,  depuis  des  siècles  ,  couvait 
dans  son  sein  un  feu  lent  et  caché  ,  et  la 
révolution  fut  pour  elle  un  ouvrage  de  res- 
sentiment plus  ou  moins  énergique ,  et  plus 
ou  moins  profond  ,  que  ses  individus  te- 
naient de  leurs  ancêtres.  Une  sanglante 
révolution  devint  si  nécessaire  pour  éteindre 
en  eux  ce  feu  dévorant ,  que  Barnave  ,  le 
plus  modéré  ,  le  plus  doux  de  sa  faction  , 
répondait,  dans  la  première  de  nos  Assem» 
blées  constituantes  ,  à  des  Français  plus 
humains  que  lui ,  et  qui  lui  témoignaient 
leur  aversion  pour  les  premières  exécutions 
sanglantes  du  peuple  :  Etait-il  donc  bien  pur 
le  sang  que  vous  regrettez  ?  Ge  mot ,  dans  ua 

Kk  3 


5 1 8  Résultai  général 

sens  ,  parut  patriotique  et  révolutionnaire  ; 
mais  il  annonçait  clans  son  Auteur  un 
homme  cruel. Quels  tableaux  nous  ferions^^i 
nous  avions  le  courage  de  descendre  dans 
les  détails  sur  la  personne  de  ceux  qui  ont 
figuré  dans  les  diverses  phases  de  cette  ré- 
volution, grosse  de  tous  les  crimes  à  la  fois. 

Mais  nous  ne  sommes  point  condamnes 
à  parler  de  cette  foule  de  Sénateurs  qui 
avilirent  eux-mêmes  la  Représentation  na- 
tionale. Devons-nous  entretenir  nos  lecteurs 
aussi  fatigués  peut-être  que  nous  ,  de  ces 
Députés  agioteurs  (  i  )  qui  traitaient  la  nation 
en  prostituée ,  et  disaient  que  la  République 
française  n'était  bonne  qu'à  être  volée,piIlée 
et  qui  en  conséquence  faisaient  rendre  des 
décrets  ruineux  pour  la  fortune  publique  : 
mais  ils  avaient  trouvé  d'avance  le  prix  de 
leur  trahison  ;  ou  bien  ,  ils  se  fesaient  re- 
cevoir fournisseurs  de  la  République  sous 
un  nom  emprunté. 

Désignerons-nous  ici  plus  particulière- 
ment ces  lâches  adorateurs  de   Marat  et  de 

(i)  Dans  ce  nombre  ,  Ton  doit  remarquer  Bour- 
sault ,  ci-devant  comédien  ,  dont  le  souvenir  du 
proconsulat  ne  s'effacera  jamais  dans  le  Comtat- 
Venaissin.  Cet  ex-Conventionnel  jouit  d'une  for- 
tune scandaleuse,  et  affiche  dans  Tintérieur  de  son 
hôtel  le  luxe  d'un  ci-devant  Prince.  Il  vaut  mieux  , 
dit-il ,  que  la  fortune  de  la  République  soit  dans  les  mains 
d'unpatriote  tel  que  mot ,  que  dans  celles  d'un  royaliste. 


des  évènemens  de  la  révolution.       5 1  ^ 

Robespierre  successivement ,  et  ces  autres 
de  la  même  trempe  ,  qui  ont  eu  Fimpudeur 
de  prendre  la  défense  des  Massacreurs  de  la 
Glacière  d'Avignon  et  de  solliciter  Famnistie 
pour  ce  forfait  inoui  de  ces  mêmes  hommes , 
affreux  agens  de  toutes  les  réactions.  Et 
pourquoi  ne  pas  nommer  un  M.  de  Rovère 
qui  prit  le  nom  de  Leblanc  marchand  de 
vin  ,  et  qui  ,  comme  nous  Favons  déjà  dit , 
pour  se  faire  porter  au  Sénat  conventionnel», 
se  prétendit  le  petit-fils  d'un  boucher  ?  Ré- 
péterons-nous encore  ici  que  ce  Rovère 
qui  sefesait  appeler,  selon  les  circonstances , 

Monsieur  le  Marquis  de Général  de  l'armée 

des  égorgeurs  de  la  Glacière ,  se  vanta  d'avoir, 
de  compagnie  avec  Hassenfratz  et  Pache  , 
organise  le  3i  mai  ,  d'avoir  poussé  à 
la  guillotine  Mainvieille  et  Duprat  ;  d'être 
arrivé  à  la  Convention  sans  le  sou  et  criblé 
de  dettes  ,  et  de  se  voir  400,00a  !•  Pauvre 
Nation  !  dans  quelles  mains  tu  es  passée  ! 
c'est  un  miracle  que   tu  existes  encore. 

Devons-nous  parler  de  cette  foule  de  Pror- 
consuls  ,  n'ayant  aucune  connaissance  dans 
Fart  militaire  ,.  envoyés  près  les  aïmées  : 
ils  y  voulaient  ordonner  les  batailles  ,  ea 
dépit  des  Généraux  expérimentés:  combien 
de  braves  tués  par  l'ineptie  de  ces  hommes 
dont  le  moindre  crime  était  l'ignorance  ! 
nos  succès  ,  nos  victoires  n'^ont  été  assurés 

K  k  4 


520  pésultal  général 

que  depuis  qu'il  n'a  plus  été  envoyé  de  ceî 
individus  présomptueux  et  perfides.  Jamais 
nous  n  eussions  fait  la  conquête  de  lltalie, 
sous  la  conduite  de  tels  hommes. 

Plusieurs  de  ces  Généraux  nous  ont  assuré 
que  rignorance  de  quelques*uns  de  ces  Pro- 
consuls avait  fait  périr  des  milliers  de  Fran- 
çais, Sans  égard  aux  observations  que  leur 
lésaient  les  Généraux,ils  disaient  tiij'efitends 
5j  que  vous  exécutiez  mes  ordres,  votre  tête 
5>  en  répond  :  je  prends  sur  moi  totit  évé- 
»>  nement.M  Quelle  caution  !  O  Turcnne  ! 
<\x  calculais  avant  de  donner  une  bataille  , 
combien  elle  pourrait  perdre  d'hommes, 
tu  ménageais  le  sang  des  Français.  Grand 
homme  de  guerre  ,  tu  étais  digne  de  com^ 
mander  à  des  troupes  républicaines. 

En  dernier  analyse,  voici  donc  le  résultat 
des  crimes  commis  pendant  la  révolution  : 
des  fleuves  de  sang  encombrés  de  cadavres, 
de  grandes  provinces  incendiées ,  des  villes 
entières  disparues ,  un  million  d'hommes 
détruit  par  les  fureurs  civiles,  au  nom  de  la 
religion,  de  la  royauté  et  de  la  liberté  ;  un 
million  d'autres  dévoré  par  la  coalition!  des 

puissances  étrangères  (i). 

**  ■  I"  «Il  I  II  ——— ———«—— ——   I  _^ 

(i)  Néanmoins  ,  il  faut  faire  passer  à  la  postérité 
le  résultat  du  courage  invincible  et  sans  exemple 
des  défenseurs  de  la  République.  Si  la  coalition 
des  puissances  étrangères  nous  a  déyoré  beaucoup 


/ 


des  évènemens  de. la  révolution.       52 1. 

La  barbarie  et  la  corruption  ,  tous  les» 
crimes  et  tous  les  vices  ont  été  portés  à  leur 
comble.  Mais  la  Convention,  qu'avait-elle  à 
faire  ?  fonder  un  gouvernement  :  rien  n'était 
plus  facile.  Plus  de  noblesse  ,  plus  de  clergé 
du  premier  ordre,  plus  de  droits  féodaux, 
plus  de  corporation  civile  et  judiciaire  ,  la 
journée  du  lo  août  était  avouée  de  presque 
toute  la  France, 

Il  est  vrai  ,  les  Puissances  étrangères  ont 
tout  fait  pour  autoriser  cette  Convention  à 
prendre  des  mesures  capables  de  rebuter  leg 
Français  ^  de  les  dégoûter  du  régime  repu-* 
blicain.  Tous  les  partis  doivent  verser  dej 

■  Il      '  ■  ■    I  I  II  II     <    I         I  I        ■  ■  •      1 1    I     I       I  là 

d'homniei  ,  les  armées  françaises  ont  remporté  iroit 
cent  dix-huit  victoires ,  dont  soixante-cinq  en  bataille 
rangée  ;  il  a  été  tué  à  l'ennemi  six  cent  trente-six 
mille  huit  cent  quatre-vingts  hommes  sur  le  champ 
de  bataille  ,  sans  comprendre  le  gfdnd  nombre  dé 
blessés  et  morts  dans  les  hôpitaux.  Il  lui  a  été  fait 
deux  cent  soixante-seize  mille  neuf  cents  prisonniers. 
Il  faut  joindre  à  cela  la  prise  de  deux  cent  quatre- 
vingt-dix-huit  places  fortes ,  ou  villes  de  la  pirertiicré 
classe  ;  cinq  cent  vingt  forts  ,  camps  ou  tcdoutes  ; 
huit  mille  neuf  cents  canons  ;  deux  cent  ioixante- 
huit  mille  cinq  cents  fusils  ;  quatre  millions  huit 
cent  cinquante  mille  livres  .de  poudre  ;  trois  cent 
trente-quatre  drapeaux. 

La  valeur  française  a  réuni  à  la  France  les  tunt 
départemens  de  la  Belgique  et  pays  de  Liège  ,   le» 
départemens  du  Mont-Blanc  et  du  Mont-Terrible  ; 
procuré    la    liberté    aux    Hollandais     et    à    toute- 
ritaiic  ,   et  G.  -  .   .      .. 


52 1  Résultat  général 

larmes  atùères  à  la  vue  du  tableau  ef* 
froyable  que  nous  mettons  ici  sous  leurs 
yeux.  Que  d'innocens  ,  que  d'êtres  qui 
n  avaient  pas  encore  vu  le  jour ,  ont  péri 

dans  le  sein  de  leur  mère  f.... Que  ce 

tableau  du  moins  persuade  tous  les  peuples 
quils  ne  doivent  pas  se  révolutionner, 
sans  que  préalablement  la  philosophie  ne 
leur  en  ait  tracé  la  route.  Ce  n'est  pas 
l'ouvrage  d'un  jour  qu'une  révolution  :  les 
Hollandais  avaient  renoncé  à  la  leur  ,  il 
y  a  douze  ans.  Us  ont  attendu  la  nôtre 
et  l'ont  commencée  comme  nous  la  finis- 
sons. La  chute  du  clergé  en  France  fut 
l'ouvrage  de  deux  siècles  ;  les  prêtres  l'ont 
bien  senti ,  et  pour  prolonger  leur  règne , 
ils  ont  temporisé  avec   les  évènemens. 

Dans  notre  révolution  ,  ce  qui  leur  a 
fait  le  plus  de  bien  ,  ce  sont  les  horribles 
journées  des  2  et  3  septembre  ,  ce  sont 
les  noyades  de  Nantes  ,  ce  sont  les  mauvais 
traitemens  qu'ils  ont  éprouvés.  Ce  n'est  pas 
les  prêtres  qu'il  fallait  tuer  ,  mais  bien  les 
préjugés  ;  ce  qui  ne  pouvait  s'opérer  que 
par  l'instruction  publique  sagement  or- 
ganisée. 

Si  ceux  qui  ont  dirigé  la  révolution  avaient 
eu  de  bonnes  intentions  ,  les  prêtres  eussent 
été  bien  payés  ;  seulement  on  les  eut  soumis 
aux  lois  de  la  République  ,  sous  peine  de 


■i  f     ■ImI'i 


XaJ. 


«  Orjciïnîjtef. 

Lc9  Partisans  d«  la  Commun^  i  à.is  ancî^noês  LlniLtes  ^ 
1  L«s  PaTrlorei  du  cul -de- sac  niuphin*  Les  PiirLotes 
-OIS  RPWriTTtc  0)''^=^'^  LesPffïionïsttï.  Les Philîpoùna.  Les FLmsTer» 
'  Kinuy£5  P«KUT8,  Les  Frocomu^s.  Les  Propagandlsies. 

^fncraîrtj.  L«  R^^énèrïcËiiTS.  Les  R^^lâtËurâ.  Le* 
Sfiembléâ  COn^^^'^^^"^^^^'  ^*^  Hobuiocraics^  Le  Rocher.  Leï 

Slemblee  IpfTïJ'^^^^  <^^  Cobourg^  Les  Sïiigii]aac»»s.  Les  Sani-» 

o^r».  Les  Suspecu, 
OnVûntioa  naf^ '^^"™^^'^*'i*"-  !■**  Tiicotemer    L«  Triumvirs. 


ï  l  àe  priirlil^  L«  VeAtrc*  Lci  VindécD^*  La  Yen- 


des  èvènemens  de  la  révolution.      5s3 

la  déportation.  En  les  persécutant ,  or\  les 
21  rendu  intéressans  :  D'ailleurs  le  Gouver- 
nement a  été  infidèle  à  leur  égard  ,  il  n  a 
tenu  aucune  des  paroles  qui  leur  avaient 
été  données. 

Mais  voici  quelle  a  été  la  spéculation 
d'une  partie  des  prêtres  ;  car  Ton  a  dû  re- 
marquer que  les  plus  acharnés  contr'eux 
étaient  des  leurs.  Ils  ont  dit:  «4  II  faut  que 
55  plusieurs  de  nous  périssent  pour  ressus- 
5J  citer  notre  puissance  ,  c'est  un  sacrifice 
35  à  faire.  î5  Ainsi  ,  chaque  prêtre  que  Ton 
a  maltraité,  a  donné  un  nouveau  degré 
jde  puissance  à  la  masse. 

L'on  s'est  conduit  avec  la  même  mal- 
adresse envers  lejs^  royalistes  ,  quoiqu  eux 
et  les  prêtres  aient  eu  les  premiers  torts. 
On  ne  corrige  pas  celui  quon  pend ,  dit 
Montaigne.  C'est  ainsi  que  vainement  on 
tua  les  royalistes  ,  sous  prétexte  de  tuer 
leur  fanatisme  pour  un  gouvernement  qu'ils 
devaient  naturellement  aimer  ,  parce  qu'ils^ 
y  trouvaient  leur  compte  ,  et  parce  que  , 
depuis  1 ,400  ans  ,  ils  y  étaient  habitués. 
Un  préjugé  politique  ou  religieux  de  14 
siècles  ne  se  détruit  pas  en  cinq  ou  six 
années. 

Si  les  Meneurs  de  la  révolution ,  nous  .le 
répétons,  avaient  eu  de  bonnes  inten- 
tions ,  ils  auraient  empêché  les  révolution- 


5^4  Résultat  général 

naires  outrés  de  poursuivre  avec  un  achar- 
nement barbare,  les  prêtres  et  les  royalistes. 
Encore  une  fois,  ce  n'est  pas  en  assommani 
les  hommes  qu'on  les  corrige  ,  et  nous 
ne  sommes  pas  de  Tavis  de  Tabbé  Raynalj 
qui ,  dans  son  histoire  philosophique  ,  pré- 
tend quon  ne  peut  régénérer  une  nation  qui 
dans  un  bain  de  sang. 

Il  fallait  leur  prouver  que  le  gouver- 
liement  républicain  est  le  meilleur  de  tous; 
qu'il  est  indulgent ,  pacifique  pour  tous* 
C'iest  à  force  de  vertus  et  d'humanité  que 
l'on  fait  rougir  l'ennemi  de  son  pays  et 
de  l'égalité.  Le  médecin  qui  traite  un  en- 
gorgement d'humeur  ,  donne  l'émétiquc 
à  son  malade  pour  lui  procurer  un  moment 
de  crise  ;  mais  tout  de  suite  après  il  lui 
administre  les  caïmans. 

Tandis  que  d'un  côté  la  Cour  et  ses  Pro- 
tecteurs défendaient  la  Bastille  au  nom  dé 
la  royauté  ;  que  par  la  suite  encore  ,  dam 
le  Comtat-Venaissin  ,  à  Jalès  ,  dans  la  Ven- 
dée ,  on  massacrait,  on  incendiait  au  nom 
de  la  religion  et  de  la  royauté ,  les  grands 
Meneurs  de  la  révolution ,  jaloux  de  tout 
abattre  sans  vouloir  rien  reconstruire  ,  ont 
incarcéré  au  nom  de  la  liberté  ,  pillé  au 
nom  de  la  fraternité ,  incendié  au  nom  de 
Tégalité  ;  guillotiné  ,  mitraillé  ,  noyé  ,  au 
Âom  dé  l'humanité. 


des  évènemens  de  la  révolution.       525 

Il  a  été  planté  cinquante-un  mille  six  cent 
trente-quatre  ^rbres  de  la  liberté ,  et  Ton  a 
incarcéré  quatre  cent  mille  individus.  Il  a 
été  porté  plus  de  cent  soixante  mille  bonnets 
rouges  ,  signe  de  la  liberté  ,  et  Ton  a  guillo- 
tiné ,  égorgé  un  millipa  d  individus.  On  a^ 
ruiné  et  fait  mourir  de  faim  une  parde  de 
la  population  ,  pour  gorger  uaç  classe  de 
nouveaux  riches. 

Toutes  ces  horreurs  ne  sont  pas ,  certes  ! 
Touvrage  de  la  philosophie  ,  ni  de  la  révo- 
lution, mais  bien  Touvrage  de  la  corruption, 
de  la  cupidité  ^  de  Tignorance*  Hélas  !  est-ce 
donc  une  vérité  historique  que  tout  peuple 
vieilli  qui  se  révolutionne,  e;5t  sacrifié  à  l'am- 
bition d'un  petit  nombre  ,  qui  sait  en  reti- 
rer le.  fruit? 

La  philosophie  seule  dçvr^ît  donc  révo- 
tîonner  ,  et  non  les  hommes,  i^is  peuple  en 
masse  ne  peut  faire  son  bopihcqr ,  parce  que 
Ton  ne  raisonne  pas  en  m^sse  :  Ton  ne  peut 
s^'entendre  quand  tout  le  monde  parlç  à  la 
fois.        . 

D'après  tout  ce  que  nous  avons  éprouvé 
pendant  la  révolution  ,  tou^  les  partis 
qoivent  être  bien  convaincus  de  la  nécessité 
de  maintenir  un  gouvernement  établi.  Celui 
que  nous  avons  est  loin  sans  doute  d'être 
parfait  ;  ce  n'est  qu'avec  le  tems  qu'il  s'amé- 
liorera. Malheur  donc  à  celui  qui  veut  en- 


526  l^isuHat  général ,  et  c. 

core  révolutionner  !  Ton  ne  pourrait  éviter, 
malgré  toutes  les  précautions  ,  les  mêmes 
horreurs  que  nous  avons  éprouvées.  Les 
échafauds  se  dressent ,  les  proscriptions  se 
combinent  dans  le  secret.  Il  est  des  hommes 
pour  qui  la  vengeance  est  un  besoin  ,  et  le 
crime  tin  aliment. 

Le  peuple  ht  doit  pas  plus  avoir  de  con- 
fiance dans  une  faction  qui  lui  parle  du 
bonheur  commun  ,  que.  dans  celle  qui 
semble  vouloir  lui  faire  regretter  l'ancien 
régime.  Presque  toujours  des  intérêts  par- 
ticuliers dirigent  ceux  qui  parlent  le  plus 
haut  du  salut'public. 

Le  soldat,is6ùs  la  monarchie,  avait  cinq 
sous  par  joui*  pour  défendre  la  royauté  et 
servir  les  caprices  de$  rois  entre  eux  ;  sou^ 
une  république  ,  c^fest  sa  propre  cause ,  c'est 
lui-même  que  le  soldat  défend:  il  descen- 
drait de  sa  dignité  ,  s'il  servait  l'ambition 
des  gouvemans  contre  le  peuple  ,  ou  les 
intérêts  d'une  faction  liberticide. 

Le  but  de  cet  ouvrage  est  donc  de  ratta- 
cher tous  les  esprits  à  la  constitution  ,  afin 
d'éviter  de  nouveau  les  maux  dont  nous 
n'avons  tracé  le  tableau  ,  que  pour  en 
inspirer  l'horreur.  » 


5t  1         Co^mité  de  salut  public  de  la  Cicmveniton. 

.-    <ggggBBBB-.H  I  lÊÊSSSSÊSSÊÊBS       ■  ■ggâBB—  ' 

l    TABLEAU  des  Membres  de  la  Convention  nationale  qui 
ont  composé  le  Comité  de  Salut  public. 

179  3-      . 

JuE  7  Avril  Barrèrc.  Delmas.  Bréard.  Danton.  R,  Lîndet, 
r     Trellhard.  Guyton-Morveaux.  Lacroix ,  d'Eure  et  Loire« 
!     Cambon. 
!         1 1  Mat.  Les  mêmes  Membres. 

12  Juin,  Les  mêthes;  mais  on  a  adjoint  Jeanbon-Saint- 
André  et  Gaspaiin. 

Barrère.  Delmas.  Bréard.  Cambon ,  fîls  aîné.  Danton* 
Guyton-Morveaux.  Lacroix,  d'Eure  et  Loire.  Jeanbon-: 
Saint-André.  Gasparin. 

1 1  Juillet.  Décrété  qu*il  n'y  auroît  que  neuf  Membres. 

Barrère.  Gasparin.  Couthon.*Thuriot.  Saint- Juû.  Prieur  ^ 
de  la  Marne.  Herault-Séchelles.  R..  Lindet.  Jeanboh-Saint* 
André.  Robespierre. 

13  Août,  Le«  mêmes  Membres. 

Septembre,  Les  même  Membres.  ^ 

Il  Octobre  (ou),  20  Vendémiaire  \  an  2.  Les  mêmes 
Membres. 

22  Brumaire  ^  Novembre.  Les  mêmes  MeÀibres. 

23  Frimaire  ^Décembre*  Barrèrc.  Billaud-Varénne.  Car- 
not.  Coilot  d'Herbois.  C.  A.  Prieur,  R.  Lindet.  Robéir<^ 
pierre.  Couthon,  Saint- Juft.  Jeanbon-Sajnt-André.        \ 

Nivôse^  Janvier  1794.  Les  mêmes  ^Membres.  ^  . 
Pluviôse^  Février,  Les  mêmes  Membres.  ,  .'_  ;. 
Vcntose  ^  Mars.  Les  mêmes  ^embrë^'.  ,  "  ^'  "^  ' 
Germinal  ^  AvriL  Les  nâêines  Mémbriès'.  ,.  '  , 
JFÏ9réal ,  Mai,  Les  mêmes  Membres.       '  .  '^  '  . 

Prairial^  Juin.  Les  mêmes  Membres.      .  \ 

Messidor,  Juillet.  Les  mêmes  Membres.  , 

Tàermidor  jusqu*au  9  Juille^  Les  ^mêmes  Membres.*     ^' 

14  Thermidor  t  Août,  AnciAis,.  Cartîot.  Barrère.  Coilot 
d'Herbois.  Billaud-Varenne.  Prieur ,  àe  la  Côte  d'or.  Lindet. 
Eschasseriaux  l'aîné.  Bréard.  Laloy .  Thuriot.  Treiihard* 
Tallitn.  '  .   .  ..     '  " 

1 5  Fructidor ,  Août,  Fourcroi.  Coch'<^n«  Delmas.'Melrlin 


r^sS  Comité  de  Salut  ptAltc 

deDouay,  Eichasseriaux  l'ainë.    Bréard*  Laloy.  Thuiiotil 
Treiihard,  Prieur ,  de  la  Côte  d^or.  Carnot.  Lîndet. 

j4n   III. 

15  Vtndémîaîrt ,  Septembre.  Prieur  de  la  Marne.  Guyton- 
Morveaux.  Richard.  Fourcroi ,  Cochon.  Delmas.  Merlin  de 
Doiiay.  Eschasseriaux  aîné.  Bréard.  Laloy.  Thurlot  et 
TreilUiard. 

15  Brumaire*  Cambacérès.  Pclet  9  de  la  Lozère.  Camot. 
Prieur,  de  la  Marne.  Guyton-Morveaux.  Richard.  Four- 
croi. Cochon.  Delmas.  Merlin  de  Douay.  Bréard   Thuridt. 

15  Frimaire*  Boiasy  d'Anglas,  André  Dûment.  Dubois- 
Prancé.  Cambacércs.  Pelet ,  de  la  Lozère.  Carnot.  Prieur , 
3e  la  Maine.  Guyton-Morveaux.  Richard.  Fourcroi.  Del- 
inas.  Merlin ,  de  Douay. 

15  Nivosi,   Bréard.  Marec*  Chasal*   Botssy    d'Anglas. 
André  Dumont.  Duboîs-Crancé.  Cambacérès.  Pelet,  de  la 
Xozère.  Carnot.  Prieur,  de'  la  Marne.  Guyton-Moxveaux* 
•Richard. 

15  Pluviôse.  Merlin,  de  Douay.  Fourcroi.  Lacombe, 
du  Tarn.  Bréard.  Marec.  Chasal.  Boissy  d'Anglas.  André 
Pumont.  Dubois-Crancé.  Cambacérès.  Peler,  de  la  Le- 
zére.  Carnot 

15  Ventôse,  Sieyès.  Laporte.  Rewbell.  Meilin  ,  de 
Douay.  Fourcroi.  Lacombè,  du  Tarn.  Bréard.  Marec. 
Cîiasal.  Boissy  d'Anglas.  André  Dumont.  Dubois-Crancé. 

Le  Comité,  ce  mois- ci,  sera  composé  de  seize  Membres. 

1 5  Germinal.  .  Cambacérès.  Aubry.  Tallien.  Creuzé- 
Latouche.  Gillet.  Roux,  de  la  Haute- Marne.  Sieyès.  La- 
porte. Rewbell  Merlin,  de  Douay.  Fourcroi.  Lacombe, 
du  Tarn.  Bréard.  Marec.  Chasal. 

15  Floréal,  Treilhard.  Fer^nont.  VernJer.  Habault-Pom- 
mier.  Doulcet.  Cambacérès.  Aubry.  Taïlien.  Giliet.  Roux, 
de  la  Haute-Marne.  Sieyès.  Laporte.  Revbcïl.  Merlin ,  de 
Douay,  Fourcroi.  Lacombe,  du  Tarn. 

ij  Prairial.  Marec.  Gart|on.  Larivière.  Blad.  Treilhard. 

Fermont.  Vernier.  Rabault-Fômmier.  Doulcet,  Cambacérès. 

Aubry.  Tallien.  Gtllet.  Roux,  de  la  Haute-Marne.  Sieyès. 

Rewbel . 

.15  Messidor.  Bpissy  d'Anglas.  Louve  t.  Jean  -  de  -  Brie. 


dt  la  Convention  Nationale*  529 

Lf  sage ,  d'Eure  et  Loire.  Marec.  Gamon.  Larîvière»  Blad. 
Treilhard.  Ferment.  Vernier.  Rabault-Pommier.  Doulcet. 
Cambacérès.  A^ibry.  Tdllien. 

15  Thtrmidor,  Merlin,  de  Douay.  Letourneur ,  de  la 
Manche.  Sieyès.  Rewb^ll.  Boissy  d'Anglas.  Louvet.  Jean- 
de-Brie.  Lesige,  d'Eure  et  Loire.  Marec.  Gamon.  Lari- 
vière.  Blad.  Fermont.  Vernier.  Rabault-Pommier.  Doulcet. 

i^ Fructidor.  Laréveillère-Lépaux.  Cambacérès.  Daunou. 
Berlitr.  Merlin,  de  Douay.  Letourneur ,  de  la  Manche* 
Sieyès.  Rewbell.  Boissy  d'Anglas.  Louvet.  Jean-de-Brie. 
Lesage  y  d'Eure  et  Loire.  Marec.  Gamon,  Larivière.  Blad. 

An   IF. 

1 5  Vendémiaire,  Chénier.  Eschasserlaux ,  aîné.  Gourdan» 
Thibaudeau.  Laréveillère  -  Lépaux.  Cambacérès.  Daunou* 
Berlier.  Merlin  de  Douay.  Letourneur ,  de  la  Manche. 
Sieyès.  Rewbell.  Boissy  d'Anglas.  Louvet.  Jean-de-Brie. 
Lesjge ,  d'Eure  et  Loire. 

Comité  de  Sûreté  générale^ 

1793- 

Il  Janvier»  Bazîre.  Lamarque.  Chabot.  Legendre,' de 
Paris.  Bernard,  de  Saintes.  Rovère.  Ruamps.  Maribon- 
Montaut.  TalLen.  Ingrand.  Jean-de  Brie.  Duhcm. 

SuppUans. 

Lasourcc.  Grangeneuve.  Quinète.  Drouet.  Bréard.  Ker- 
velégan. 

II  Septembre.  Panîs.  Lavîcomterîe.  GufFroy.  Chabot* 
Alquier.  Lejeune.  Bazire.  Gafnier ,  de  Saintes.  Julien ,  d« 
Toulouse. 

An  IL 

3  Vendémiaire^  26  Septembre  Rulh.  Joseph  Lébon.  La-: 
vîcomterie.  Amar.  VouUand.  Panis.  A.  Benoît.  Guffiroy. 
Moi!>e  Bayle.  Lebas.  Vadicr.  David. 

22  Vendémiaire^  14  Octobre.  Adjoints.  Laloy.  Dubarran. 
Jagot.  Louis ,  du  Bas-Rhin, 

Tom.YJ.  tl 


530  Comité  dt  Santé  générale 

Brumaire.  Panis,  Lavîcomterie.  GufFroy.  Chabot.  L©- 
jeune.  Gtrnicr^  de  Saintes,  Laloy.  Dubarran.  Jagot.  Louis, 
du  Bas-Rhin.  Amar.  Vadier.  VouUand.  David.  Moïse 
Bayle. 

Frimaire.  Panb.  Lavîcomterîe.  Guffroy.  Lejeune,  Gnr- 
nier,  de'Saintes.  Laloy.  Dubarran.  Jagot.  Louis,  du  Bas^ 
Rhin.  Amar.  Vadier.  Voulland.  David.  Moïse  Bityle. 

Nivôse.  VouUand.  Louis,  du  Bas-Rhin.  Moïse  Bayle, 
Laioy.  Lavicomterie,  Vadier.  Dubarran.  Elie  Lacoste.  Ja^^ot 
Louis ,  du  Bas-Rhin.  Guffroy.  Amar.  Cambon.  D.ivid.  Le- 
ba«.  Panis. 

Pluviôse,  Lavîcomterîe.  Vadier.  Amar.  VouUand.  Elit 
Lacoste.  Giîffroy.  Dubarran.  Louis,  du  Bas-Rhin.  David. 
Moïse  Bayle.  Lebas.  Jagot.  Ruih,  Laloy.  Panis. 

Vtntose,  Vadier.  VouUand.  Louis ,  du  Bas-Rhin.  Jagot. 
Amar.  Rulh.  pubarran.  David.  Moïse  Bayle.  La vicomterie . 
Lebas.  Elie  Lacoste.  GufFroy.  Laloy.  Panis. 
Germinal.  Les  mêmes. 

Floréal.  VouUand.  Vadier.  Amar.  Elie  Lacoste.  Dubar- 
ran. Jagot.  Louis  y  du  Bas  -  Rhin.  Lavicomterie.  Moïse 
Bayle.  Philippe  Rulh.  David.  Panis. 

Prairial,  Vadier.  Amar.  VouUand.  Elie  Lacoste.  Dubar- 
ran, Jagot.  Louis,  du  Bas- Rhin.  Lavicomterie.  Moïse 
B«yle.  Ph  lippe  Rulh.  David.  Panis. 

Messidor,  Vadier.  Amar.  VouUand  .Philip^^e  Rulh.  Moïse 
Bayle.  Lavicomterie.  Elie  Lacoste.  Jagot.  David.  Guffroy. 
Dubarran.  Louis,  du  Bas-l\hin.  Panis. 

Thermidor,  jusqu^au  13.  Dubarran.  Amar.  Louis,  du 
Bas- Rhin.  VouUand.  Vadier.  Philippe  Rulh.  Moïse  Bayle. 
Lavicomterie.  Elie  Lacpste.  Jagot.  JJavid.  Guffroy.  Laloy. 
Panis. 

13  Thermidor.  Vadier.  Moïse  Bayle.  VouUand.  Elfe 
Lacoste.  Dubarran.  Amar.  Guffroy.  PhUippe  Rulh.  Le- 

fendre,  de  Paris.  Goupilleau,  de  Fontenay.  Merlin,  de 
IhionviUc.  André Dumont.  Bernard, de  Saintes.  Louis, du 
Bas-Rhin.  1 

Fructidor.  Colombelle.  Meauld  ,  Clauscl.  Mathieu. 
Montmayou.  Lesage-Sènaut.  Bourdon ,  de  l'Oise.  Amar. 
Dubarran. -Guffroy.  Philippe  Rulh.  Legendre ,  de  Paris. 
Goupilleau  ,  de  Fontenay.  Merlin  ,  de  Thionville.  André 
Pumont.  Bernard ,  de  Saintes.  Louis, du  Bas-Rhin, 


de  la  Convention  Nationaît*  531 

An    III. 

15  yendémla:  n.  BentzhoWe.  RewhelL  La  porte.  Rcver- 
chon.  Colombelle.  Meauld.  Clause!.  Mathieu.  Montmayon.' 
Lesage  Sénant.  Bourdon ,  de  l'Oise.  GufFroy.  Legendre,  de 
Paris.  Goupilleau ,  de  Fontenay.  Merlin ,  de  Thionvillc» 
André  Dumont. 

ly  Brumuire,  Garnier  de  l'Aube.  Barras.  Armand,  de  la 
Meuse  Laignelot.  Bentabolle.  Rewbell.  Laporte.  Rever-^ 
chon.  Colombel.  Meauld.  Clausel  Mathieu.  Montmayon. 
Lesage  -  Senaut.  Bourdon,  de  i  Oise.  Levasseur ,  de  la 
Meurthe. 

1 5  frimaire.  Legendre ,  de  Paris.  Goupilleau  ,  de  Mon- 
taigu.  Lomont.  Boudin,  de  Lmdre.  Garnier,  de  l'Aube. 
Barrjs.  Armand,  de  la  Meuse.  Laignelot.  Bentabolle.  Rew- 
bell. Liporte.  Reverchon.  Meauld.  Mathieu.  Montmayon. 
Bourdon ,  de  l*Oise. 

15  Nivôse.  Clauzgl.  Rovèrç.  Guffroy.  Vardon.  Legen- 
dre, de  Paris.  Goupilleau,  de  Montaigu.  Boudin ,  de  llndre* 
Garnier ,  de  TAube.  Barras.  Armand ,  de  la  Meuse.  Lai- 
gnelot. Bentabolle.  Rewbdl.  Laporte.  Reverchon. 

ij  Pluviôse,    Mathieu.   Auguis    Perrin ,    des   Vosges.^ 
Bourdon,  de  POisc.  Clause!.  Rovère.  GufFroy.  Vardor. 
Legendre,  de  Paris.  Goupilleau   de   Montaigu.  Lomont." 
Boudin ,  de  l'Indre.  Garnier ,  de  TAube.  Barras.  Armand , 
de  la  Meuse.  Laignelot.  Philippe  Ruih. 

i^Ventose.  Isabeau.  Calés.  Gauthier, de  TAins.  Deleclov. 
Pémartin.  Montmayon.-  Mathieu.  Au^uis.  Perrin  ,  des 
Vosges.  Clauzel.  Rovère.  Guflfroy.  Legendre,  de  Paris. 
Goupilleau ,  de  Montaigu.  Lomont.  Boudin  ,  de  Plndre. 

15  GermlnaL  Courtois.  Thibaudeau.  Sevestre.  Chénicr. 
Isabeau.  Calés.  Gauthier,  de  l'Ain.  Djlecl  y.  Pémartin. 
Montmayon.  Mathieu.  Auguis#  Perrin,  des  Vosges.  Clau- 
zel. Rovère.  (  Thibaudeau  a  donné  sa  démission  ). 

15  Floréal.  Guyomar.  PicAret.  Kervelégan,  Bergoîng. 
Courtois.  Sevestre.  Chénier.  Isabeau.  Ca.ès.  Gauthier.,  de 
r^in.  Debdoy.  Pémartin.  Montmayon.  Mathieu.  Auguiis. 
Perrin,  des  Vosges.  Calés. 

15  Prairial.  Genevois,  Lomont.  Boudin.    Kîrvclégan, 

LI2 


532  Confite  dt  Santé  gêner jU  dt  la  Convention  Nationale: 

Montmayon.  Courtois.  Pémartin.  Pîerret.  Guyomar.  Isa-, 
beau.  Calés.  Gauthier.  Bergoing,  i^evestre.  Chénier. 

15  Messidor.  DeUunay,  d'Angers.  Mariette.  Perrin, 
des  Vosges.  Baillv,  Baiileul.  Chéiiier.  Sevestre.  Courte  s. 
Genevoia.  Kervelégan.  Pémartin.  Pîerret.  Guyomar.  CaUs. 
Bergoine.  Lomont.  Rovère.  Boudin. 

15  Thermidor,  Calés.  Pémartin.  Gauthier ,  de  TA  in.  Isa- 
beau.  Bergoing.  Kervelégan.  Guvomar.  Pierret.  Perrin, 
des  Vosges.  Rovère.  Mariette.  Bailly.  Baiileul.  Lomont. 
Delaunay.  Boudin. 

15  Fructidor.  Quirot.  Montmayon. ,  Colombel.  Hardy. 
Barras.  Lomont.  Rovère.  Mariette.  Boudin.  Calés.  Pémar- 
tin. Gauthier,  de  TAin.  Isabeau.  Bailly.  Baiileul.  De- 
launay. 

An    I  V. 

15  Vendémiaire,  Bordas.  Guyomar.  Roberjot.  Kervelégan. 
Quirot.  Montmayon.  Colombel.  Hardy.  Barras.  Calés.  Pé- 
martin. Gauthier,  de  TAin,  Isabcai^  ^aiily.  Baiileul.  De- 
launay, 


TA B  L  EAU  des  Députés  de  la  Convention  qui 
ont  lié  envoyés  en  mission  dans  Us  Départemens 
depuis  le  il  Septembre  1791,  au  1  Octobre  1796, 
(10  Vendémiaire  an  ^). 


A  L  B  E  R  T.  26  nlvose  ,  an  3  ,  envoyé  cm  mission  ave« 
Coiombel. 

Albitte.  21  septembre  1793  ,  envoyé  à  Lyon  pour  le 
siège  ;  et  dans  le  département  de  l'Ain. 

Alquier.  26  octobre  1793  ,  à  Lyon  ;  20  vendémiaire,  an 
a ,  à  Rouen ,  avec  Faussedoirc ,  à  Ververne  ;  23  frimaire  ^ 
an  3 ,  dans  le  département  de  H  lUte-Loire ,  avec  Pierret  ; 
10  nivôse,  an  3,  avec  Lcvasseur  (de  la  Meurthe)  ,  et 
Treilihard. 

Amâr.  Dans  le  département  de  l'Ain. 

Antoine.  Dans  le  département  de  la  Meurthe.  ' 

AugÛis.   18  prairial,  an  3  ,  en  mission. 

AuBRY.  3  prairial ,  an  3 ,  chargé  de  la  force  de  Paris  avec 
Delmas. 

AuDOT.  3  septembre  1793,  à  Toulouse. 

AuFFMAN.  Le....  an  2 ,  à  Bruxelles  et  en  Hollande. 

Bailly.  27  brumaire ,  an  î ,  en  mission  avec  Genevois." 

Bancal.  1793  ,<itfprès  de  Dumouriez  avécCamus,  Drouet 
et  Qjinette. 

Bar.  28  pTÎmaire,  an  3  ,  en  mission. 

Barras.  8  brumaire,  an  2 ,  près  l'armée  sous  Toulon  avec 
Fréron,  Sallicéty  et  Gasparin,  à  Marseille  ;  23  germinal , 
an  3  ,  nommé  près  la  force  armée  destinée  à  assurer  les 
subsistances  de  Paris  ;  1 3  vendémiaire  ,  an  4 ,  nommé 
général  en  chef  de  l'armée  de  Paris  et  de  l'Intérieur. 

Barthe.  9  septembre  1793»  près  l'armée  du  Nord  avec 
Isoré  et  Drouet. 

Bassal.  En  1793 ,  à  Lyon^ 

Bjvzirb  26  février  1793,  à  Lyon» 

Baudran.  29  nivôse,  en  mission  avec  Cavagnac.   " 

Beaudot.  26  juillet  1793  ,  dans  le  département  du  Lot;  29 
août  1793,  près  l'armée  deâ  Pyrénées  orientales;  ij 
brumaire ,  département  de  la  Gironde ,  près  les  armées 

Ll3, 


j]4  DéputJs  de  la  Convention 

du  Rhin  et  de  la  Moselle  avec  Lemane  «  Hermann  et 
Lacoste  (  du  Cantal }. 

Bbauchamps.  12  frimaire.,  près  l'armée  des  Pyrénées 
oiientales, 

BBAuPRi.  14  nîvcsej  en  mission  ;  20  thermidorien  mission. 

BeckeR'  a  Landau. 

Beffroi.  8  p  uviose^  an  9 ,  à  Tarmée  d'Italie. 

Bbrmier.  En  mission  dans  le  département  d'Eure  et  Loire> 
le  1 1  pluviôse ,  an  3. 

Bessom.  24  germinal j  en  mission  avec  Olivier-  Gerente 
et  Richou. 

Bellegardb.  II  février  1793,  pour  visiter  les  frontières 
du  Nord  ;  1 2  avril  1793  ,  af  ec  Cochon  et  Lequinio ,  rem- 
plir, conjointement  avec  Dubois -Dubais  et  Briez,  la 
mission  dont  ces  derniers  sont  chargés. 

Bbvtabolle.  20  septembre  1793,  «rappelé  avec Levasseur. 

Beruer.  27  août  175)3,  près  l'armée  du  Nord,  avec 
Treilhard. 

Berkard  (de Saintes).  17  août  1793,  envoyé  dans  divers 
départemens  avec  Bassaf,  Alquier  et  Reverchori }  dans  le 
département  de  la  Côte  d*Or. 

Bion.  6  pluviôse,  an  3  ,  en  mission. 

BiTTER.  25  thermidor,  an  3  ,  se  rendra  à  Nice. 

Blad.  1 3  messidor ,  an  3 ,  dans  le  département  de  l'Ouest , 
avec  Tallien  ;  1 5  thermidor ,  sa  mission  est  terminée. 

Blanqui.  14  germinal ,  en  mission  dans  plusieurs  dépsrtc- 
mens  avec  Fayolie ,  Periès  et  Joseph  Lacombe. 

Blaux.  31  janvier  1793,  dans  les  départemens  de  la 
Meurthe,  de  la  Mozelle  et  du  Bas-Rhin  ;  25  ventôse,  an 
3 ,  dans  les  départemens  de  la  Somme  avec  Casenave. 

Bc.  28  vendémiaire,  an  2,  prpl  Tarmée  des  Ardennes 
avec  Coupé,  Hentz;  J  nivcse,  an  2,  dans  les  départe- 
mens de  la  Marne  et  de  l'Ardèche ,  pour  y  prendre  des 
mesures  de  salut  public;  6  frimaire,  an  3,  dans  le  dis- 
trict de  Reims;  21  floréal,  an  3,  en  mission  avec  Piquet 
dans  le  département  du  Cantal. 

Bodin.  28  prairial ,  en  mission  avec  Guesno  et  Mathieu. 

BoissET.  22  vendémiaire,  an  3 ,  dans  les  départemens  de 
l'Allier  et  à  Lyon  ;  13  germinal ,  avec  JEspinassy  et  Ca- 
droy;  24  prairial,  rappelé  ;  25  brumaire,  an  2,  ses 
arrêtés  sont  approuvés  ;  2  frimaire ,  il  retourne  dans  les 
départemens  de  l'Hérault  et  de  TAveyron. 


envoyés  en  mission.  5^5 

BoissiEU.  a8  ventôse,  en  mission  avec  Dumas,  Real, 
Brunel  (  de  l'Hérault  ) ,  Méaule ,  Pagânei  et  Gomaireî , 
en  Tan  3. 
BoissY  d*Anglas.  a  Lyon ,  «n  l'an  2. 
BoNNET-MoKTY.  i8  juillet  1 793  ,  daris  le  départetitbnt  du 
Calvados  avec  R.  Lindet  et  Duroi  ;  3  septembre  1^93 , 
rappelé  avec  Duroi. 
Bonnet.  13  brumaire ,  il  est  rappelé  ;  il  étoit  envoyé  ptês 

l'armée  des  Pyrénées  orientales ,  an  2. 
Bonnet  (  de  la  H^ute-Loire  ).  20  germinal ,  an  3  ,  ért  mis- 
sion avec  Dulaure  et  Bousquet, 
Bonneval.  18  juillet     793,   dans   les   départemens  de 
Seine  et  Oise  et  circonvoisin%,  aVec  Roux  ,  Maure  et 
Dubouchet. 
BoREL.  27  pluviôse ,  an  3  ,  en  mission  avec  Gûerîn. 
Bordas.  29  brumaire,  an  3  ,  dans  les  départemens  du  Bec- 

d'Ambès  et  Charente ,  Bordeaux ,  avec  Du vaL 
BouïLLEROT.  28  fructidor,  an  2,  près  l'Ecole  de  Mar^^ 
avec  Moreau  ;  2  brumaire,  an  3,  dans  les  départemens  du 
Cher  et  de  la  Haute-Garonne  ,  avec  Mallarmé  ;  16  btu- 
maire,  ses  pouvoirs  dans  celui  du  Tarn. 
BouRBOTTE.  18  Mars   1793,  à  Orléans  avec  Delmas  et 
Mathieu  ;  i  août  1793:  il  restera  près  l'armée  deô  cÉrtes 
de  la  Rochelle. 
fiotjRDON  (derOisc).  Dans  le  département  de  la  Vendée, 
an  1  ;  3^  jour   complémentaire  ,  dans  le  département 
d'Eure  et  Loire,  avecFleury  ,  an  3  ;  4  vento:e ,  an  3 ,  à 
nie  Saint-Domingue,  avec  Gîraud  et  Vardon. 
Bourdon  (Léonard).  En  mars  1793,  ^^^^  le  département 
du  Jura  avec  Proste;  le  17  août  1793  ,  dans  divers  dé- 
partemens ,  avec  Bassal,  Bernard  et  Reverchon. 
BouRET.  19  frimaire,  an  2,  à  Cherbourg;  le  25  fructidor  y 
dans  le  département  du  Morbihan  -,  15  germinal ,  an  }  , 
dans  celui  de  la  Manche. 
BouRSAULT.  Dans  difïerens  départemens,  en  l'an  2;  le  17 
messidor,  an  3,  en  mission  avec  Durand-Maillane  et 
Guerin  (  du  Loiret. 
BoussiON.  22  pluviôse,  an  3,  en  mission  dans  les  dépar- 
temens dei  la  Gironde  et  de  la  Dordogne. 
Bousquet.  20  germinal,  an  3^  en  mission  avec  Dulaure  et 
Bonnet  (  de  la  Haute  Loire. 

LI4 


5}6  Députés  de  la  Convention 

Brbard.  aÇ  août  1793,  a  Brest,  avec  Trehouart. 

Briez.  12  avril  ij^^'^  ,en  mission  avec  Bellegarde ,  Cochon 
et  Lequînio,  prêt  les  armées  ;  le  6  août  1793  »  il  est 
rappelé. 

B  RI  VAL.  Dans  le  département  de  la  Vienne,  en  l'an  2. 

Brue.  30  brumaire  I  an  3^  près  les  armées  des  Côtes  de 
Brest  et  de  Cherbourg. 

BRu^EL.  28  ventôse^  an  3,  en  mission  avec  B.éal,Bois- 
sieu  ,  RuauU,  Paganel  et  Gomaire. 

Brun  ET.  £n  mission  à  Marseille. 

Cadroi.  29  brumaire,  dans  les  départemens des Bouches- 
du- Rhône ,  avec  Expert ,  an  3  ;  17  floréal,  an  3  ,  en  mis- 
sion; 24  prairial , rappelé  avec  Boisset;  12  messidor,  en 
mission  à  Lyon  en  1793* 

Cales.  17  Juin  1793,  P'^^  l*armée  de»  Ardennes ,  avec 
Massieu  et  Perin;  5  nivôse,  an  3  ,  à  Besançon  ;  le  18  ven- 
démiaire ,  dans  les  départemens  de  l'Orne  et  de  la  Sar- 
tho  ,  avec  Gènissîeux. 

Camus.  13  décembre  179*,  près  l'armée  de  Dumouriez; 
13  janvier  1793,  Commissaire  <l^ns  la  Belgique  ;  il  est 
mandé  dans  le  sein  de  la  Convention;  14  mars  1793^  il 
est  rappelé  à  Paris, 

Carra.   13  juin  1793  ,  est  rappelé  de  sa  mission  à Blois. 

Carrier.  12  juillet  1793  ,  envoyé  dans  le  département  de 
la  Seine-Inférieure  ;  le  22  vendémiaire,  an  2 ,  envoyé  près 
l'armée  de  l'Ouest,  avec  Bourbotte,  Francastcl ,  Pinet , 
Thurreau  et  Hcntz. 

Cassagne.   i«^  nivôse,  an  2  :  il  est  rappelé.     / 

Cassenies.  27  thermidor,  an  3,  dans  le  département  du 
Mont-Blanc. 

Castillon.  8  ventôse,  an  3  ,  en  mission  avec  Grenat  ;  16 
prairial,  rétabli  dans  sa  mission  avec  SouHgnac  et 
Cazenave. 

Cavaignac.  h  Mai  1793,  près  l'armée  des  Côtes  ;  29 
nivôse,  an  3 ,  en  mission  avec  Baudran. 

Cazenave.  15  germinal,  en  3  ,  en  mission;  i  floréal ,  an 
3,  en  mission  avec  Meîîhan  ;  4  floréal ,  an  3,  continua- 
tion de  sa  mission  avec  Blaux ,  dans  le  département  de  1^ 
Somme;  î6  prairial,  rétabli  dans  sa  mission  avec  Sou- 
lîgnac  et  Castillon. 

Chabot.   28  juillet   1793 ,  continuation  de  sa  mission 


tnvoyis  en  mission,  533 

et  de  celle  de  Dumont^  dans  le  département  de  la 
Somme* 

Chambon.  23  prairial,  an  3,  en  mission  à  Marseille  avec 
Merlin  (  de  Douai  ) ,  dans  les  départemens  du  Nord. 

-Chanvier.  17  nivôse,  an  3 ,  envoyé  en  mission. 

Chateauneuf-Randon.  27  août,  près  les  armées  des 
Alpes  y  pour  le  siège  de  Lyon  ;  le  i  brumaire  >  an  2 ,  dans 
les  départemens  de  la  Lozère  ,  TArdèche,  l*Aveyron  ,  le 
Gard  et  l'Hérault;  2  frimaire,  adjoint  aux  Dépuffis  en- 
voyés à  Lyon. 

Charbonkières.  a  Marseille. 

Char  LIER.  20  nivôse,  an  2  ,  à  Lyon. 

Chaudrok-Rousseau.  10  juillet  1793 ,  à  Bordeaux  avec 
Tallien,  Ys^beau  et  Carreau;  le  3  septembre  1793  »  rap- 
pelé de  Toulouse  avec  Leiris  -,  le  20  septembre  ,  il  est 
rétabli  dans  sa  mission  du  département  de  la  Haute- 
Garonne;  le  22  frimaire,  an  2,  dans  les  départemens  du 
Cantal ,  de  l'Aveyron  et  de  la  Lozère ,  pour  épurer  les 
Corps  administratifs  et  les  Municipalités; le  18  prairial, 
an  3 ,  rappelé  de  sa  mission  avec  Paganel ,  près  l'armée 
des  Pyrénées  occidentales* 

Clauzel.  27  août  1793,  près  Tarmée  des  Pyrénées  orien- 
tales avec  Expert  ;  le  24  prairial ,  en  3 ,  en  mission  avec 
Dentzel  ;  le  2y  prairial ,  ses  pouvoirs  sont  étendus  aux 
départemens  cle  TAudc  et  des  Pyrénées  orientales  ;  le  29 
tberm'dor ,  an  3  ,  sa  mission  avecChazal  est  étendue. 

Chazal.  Le  10  prairial,  an  3  ,  en  mission  avec  Coupé  (  des 
Côtes  du  Nord  )  ;  le  29]thermidor ,  an  3 ,  sa  mission  est 
étendue  avecClauzcl. 

Cher R  1ER.  14  ventôse,  en  mission;  16  ventôse,  mission 
qui  étend  ses  pouvoirs  sur  un  autre  département ,  an  3. 

Chiappe.  15  germinal,  an  3,  envoyé  près  l'armée  des  Alpes 
et  dltalie;  le  14  fructidor ,  an  3 ,  il  est  spécialement 
attaché ,  avec  Real,  à  l'armée  des  Alpes. 

Cledel.  8  frimaire,  an  3 ,  chargé  de  mission  avec  Robin  et 
Letellitr  ;  le  9  frimaire,  an  3 ,  décret  relatif  à  ses  pouvoirs. 

Cochon.  8  pluviôse,  an  3,  près  les  armées  de  Hollande, 
avec  Ramel  ;  le  6  février  1793  ,  nommé  Commissaire  à 
la  place  de  Varier  ;  12  avril  1793  ,  nommé  avecLequinio 
et  Beilegarde;  le  2  septembre ,  près  l'armée  du  Nord. 

CoLLOMBEL,  26  nivose,  an  3^  en  mission  avec  Albert. 


5J8  Députés  de  la  Convention 

CoLLOT  d*Herbois.  1  août  1793  9  dans  les  départeir.ens  de 
Loire  et  TÂisne ,  avec  Isoré  et  Lequinio;  à  Lyon  ,  immé- 
diatement après  le  siège. 

CouFi.  28  vendémiaire,  an  2 ,  près  l'année  des  Ardennes , 
avec  Hentz  et  Bô. 

CoUPt  (des  Côtes  du  Nord).  10  prairial ,  an  3,  en  mis- 
sion avec  Chazal  ;  19  fructidor  ,  avec  Lamarre  et  Froger. 

Courtois.  13  juin  1793 ,  maintenu  près  l'armée  du  Nord; 
31  août  1793,  envoyé  dans  les  départemens  voisins  de 
Paris  avec  Viennet. 

CouTHON.  3  mars  1793 ,  Commissaire  dans  la  principauté 
de  Salm,  avec  Goupiileau  et  Michel;  envoyé  à  Lyon 
pour  le  siège. 

CussET.  Adjoint ,  le  29  juin  1793,  aux  quatreDéputés  déjà 
envoyés  près  l'armée  de  la  Mozelle. 

Dartigoete.  a  frimaire,  an  2,  continuera  ses  pouvoirs 
dans  les  départemens  du  Gers,  des  Landes,  des  Hautes 
et  Basses-Pyrénées;  35  germinal^  an  2,  attentat  sur  sa 
personne. 

Debry  (  Jean).  19  frimaire,  an  3,  se  rendra  dans  les  dé- 
dartemcns  de  la  Drôme,  de  Vaucluse  et  de  TArdèche; 
5  ventôse ,  an  3  ,  décret  concernant  se^  pouvoirs  'y  6  veiv- 
tose  ,  décret  qui  étend  ses  pouvoirs. 

Delacroix.  6  septembre  1793,  dans  le  département  de 
Seine -Inférieure,  avec  Louchet  et  Legendre;  23  fri- 
maire, an  3  ,  à  Versailles  et  lieux  circonvoisins  ;  24  fri- 
maire, an  3 ,  décret  relatif  à  ses  pouvoirs  ;  25  tl^rmidor  y 
il  se  rendra  près  de  la  Manufacture  de  fusils  de  Mau- 
beuge. 

Delmas.  18  mars  1793  ,  Commissaire  à  Orléans  avec 
Mathieu  et  Bourbotte  ;  1  prairial ,  an  3  ,  dirigera  en  chef 
la  force  armée  de  Paris  ;  3  prairial  ,  an  3  ,  il  est  chargé 
de  la  direction  et  de  la  surveillance  de  la  force  armée 
avec  Gillet  et  Aubry. 

Delamarre.  19  prairial,  an  3 ,  en  mission  avec  Saladin 
et  André  Dumont;  15  prairial,  an  3,  rétabli  dans  sa 
mission. 

Delaunay.  27  floréal,  an  3 ,  déjà  à  Tarmée  de  TOuest  ; 
ses  pouvoirs  sont  étendus  à  Tarmée  des  Côtes. 

Delcher.  2"  jour  complémentaire ,  en  mission. 

Deleyre  27  frimaire ,  an  3 ,  près  l'Ecole  normale  de  Paiis* 


tnvoycs  en  mission»  «jjç 

Dentzel.  24  prairial ,  an  3  ,  en  mission  avec  Clauzel  ;  to 
fructidor ,  dans  le  département  de  la  Manche. 

Despinassy.  27  floréal,  en  3,  en  mission  avec  Poulain- 
Grard-Pré,  à  Lyon.     ^ 

Desrues.  23  vendémiaire ,  an  3,  à  Brest  et  à  TOrient 
avec  Villers. 

Droueï.  16  mars  1793  ,  adjoint ,  avec  Batellîer^ Commis- 
saire près  l'armée  du  Nord;  9  septembre,  en  place  de 
ceux  à  l'armée  du  Nord,  avec  Isoré  et  Bartlie. 

Drulh.  7  nivôse .  en  4 ,  en  mission  avec  Talot  et  Leftvre 
(de  1 1  Loire-fnfériei  re)  j  Richou. 

DuBARRAN.  5  brumaire,  an  2,  dans  le* département  du 
Calvados,  pour  suivre  les  opér4tions commencées  par  les 
Représentans  du  Peuple. 

DuBois-CRANct.  15  vendémiaire i  an  2,  rappelé  de  Lyon 
avec  Gauthier. 

Dubois  (  du  Haut-Pihin  ).  4  ventôse ,  en  mission  avec  Talot 
et  Lefèv re  (  de  la  Loire-Inférieure  ). 

Dubois  Dubay.  4  mai  1793 , restera  près  Parmée  du  Nord, 
avec  Briez,  jusqu'à  son  rappel. 
-  DuBoucHET.  18  Juillet  1793  5  dans  le  département  de  Seine 
et  Marne,  avec  Bonneval,  Roux  et  Maure. 

Dumas.  25  acût  1793  ,  dans  le  département  du  Mont- 
Blanc  9  avec  Simon  ;  28  ventôse,  an  3  j  en  mission  avec 
Héal ,  Brunet ,  Boissieu ,  Ruault ,  Paganel  et  Gomaire. 

DuMONT  (André).  28 juillet  1793,  dans  le  département 
de  la  Somme ,  avec  Chabot  ;  4  septembre,  il  restera  seul 
dans  ce  département;  19  germinal,  an  3 ,  en  missson 
avec  Saladin  et  Delamarre. 

DuLAURE.  20  germinal, an  3,  en  mission  avec  Bonnet  et 
Bousquet. 

DuPORT.  20  nivose,  an  3 ,  en  mission;  17  germinal ,  an 
3 ,  rappelé  pour  donner  des  renseignemens  à  la  Con- 
vention. 

Dupuis,  fils.  A  Lyon,  en  1793  et  an  2. 

DuQUESNOi.  2  octobre  1793,  en  mission  dans  le  départe- 
ment du  Nord  ;  2  août  1793  ,  envoyé ,  avec  Lebas ,  près 
l'armée  du  Nord. 

Durakd-Maillane.  17  messidor,  en  mission  avec  Bour- 
sault  et  Guérin  (  du  Loiret  ) ,  à  Marseille. 

DuROY.  18  juillet  1793,  dans  le  Calvados,  avec  R«Lindct 
et  Bonnet-Monty  5  3  septembre  >  rappelé. 


540  Députés  de  la  Convention 

DuvAL  (  de  la  Seine-lnférieure  ).  26  germinal,  en  mission; 
28  fructidor  ,  29  brumaire,  an  3,  en  mission  dans  le  dé- 
partement du  Bec-d' Arabes  avec  Bordas. 

DuvAL  (  Charles  }•  25  thermidor,  an  3,  en  mission  ou 
en  congé. 

Ermakm.  22  juillet  1793,  en  mission  prèsi*armée  de  la 
Mozelle. 

Es» ue-Lay ALLÉE.  Nivosc ,  an  2 ,  en  mission  dans  les  dé« 
partemens  de  l'Ouest  et  du  Centre. 

EscuDiER.  9  acût  1793 ,  adjoint  à  Gasyparin  aux  années  des 
Aipes  et  d'Italie. 

EsPiNASST.  II  prairial ,  an  3 ,  en  mission  avec  Ferauiti 
pour  remplacer  Poultier  et  Guérin  à  Toulon  ;  24  prairial  9 
an  3 ,  en  mission  avec  Cadroi  et  Boisset  ;  ils  .sont  rap- 
pelés te 

Expert.  5  Juin  1793 ,  adjoint  aux  Députés  près  Tarmée 
des  Pyrérées  ;  2.7  août ,  ad  joint ,  avec  Qauzel,  près 
Tarmée  des  Pyrénées  orientales  5  envoyé  à  Lyon  en  Pan  j. 

Fabrb.  2  nivôse,  an  2,  près  l'armée  des  Alpes  avec 
Gaston. 

Faure.  12  mars  1793  ,  en  mission  avec  Petit- Jean;  en  sep- 
tembre J793,  en  mission  d'ans  le  département  de  la 
Meurthe;  24  pluviôse,  an  3. 

Faure  (  de  la  Haute- Loire).  Septembre  1793 ,  départemens 
des  Voges,  de  la  Meurthe ,  de  la  JVlozeile  et  du  Bas- 
Khin  ;  Tan  2 ,  en  mission  dans  le  dép.  de  la  Haute-Loire. 

Fayolles.  14  germinal, an  3  ,  en  mission  avec  fiianque  , 
Periès  et  Joseph  Lacombe. 

Feraux.  10  ventôse,  an  3,  près  l'armée  de  Mozelle  et 
du  Rhin. 

Feroux.    I©  prairial, an  3,  en  mission  à  Lyon. 

Fery.  7  février  1793,  Commissaire  près  les  frontières 
du  Rhin. 

Fleur  y  (  des  Côtes  du  Nord  ).  7  ventôse ,  an  3  ,  en  mis- 
sion ,  3*  jour  complémentaire ,  an  3 ,  dans  le  département 
d'Eure  et  Loire  ,  avec  Bourdon  (  de  l  Oise. 

FoucHi  (  de  Nantes).  L'an  2 ,  à  Lyon  lors  du  siège. 

FrancaStèl.  22  vendémiaire,  an  2  ,  en  mi«^sion  dans  le 
département  de  la  Vïjndee  et  autres  environnant  ^  avec 
Bourbotte ,  Carrier  ^  Pinet  et  Thurreau,^ 


mv0yis  en  missiùn*  ^     J41 

Fkakçois  (  de  la  Sarthe  ).  17  bmmaire,  an  3  ,  dans  le  départ, 

des  Alpes  Maritimes  et  circonvoisins  avec  Servières. 
Fréron.  8  brumaire  van  2  ,  près  Tarmée  de  Toulon  avec 
Barras ,  adjoint  à  Sallicetty  et  Gasparin ,  à  Marseille  ;  18 
vendémiaire,  an  4,  en  mission  dans  le  Midi. 
Fricot.  28  thermidor,  an  3 ,  en  mission. 
Froger.  24  nivôse,  an  3  ,  en  mission  dans  les  départemens 
qui  environnent  Paris ,  avec  Souiignac,  Lequinioet  Jaco- 
min;  19  fructidor^  an  3^  en  mission  avec  Lamarre  et 
Coupé  (  des  Côtes  du  Nord  ). 
Gantois.  17  pluviôse,  an  3,  en  mission. 
Garmier.  17  septembre  1793,  adjoint  au  citoyen  Lecar«> 
peritier-,  25  septembre,  dans  le  départ,  de  rVonne;  21 
sept.,  se  rendra  sur  le  champ  dans  le  district  de  Tonnerre* 
Garnier  (  de  PAubs  ).  27  germinal ,  an  3 ,  en  mission  avec 

Meynard  et  Qiroulr. 
G  ARM  1ER  (de  Saintes).  10  prairial,  an  2,  en  mission  dans 
le  département  de  la  Gironde;  21  floréal  ^  an  3,  appelé  de 
mission  pour  donner  des  rensèignemens  à  la  Convention. 
Garreau.  10  octobre  1793 ,  en  mission  dans  le  départe- 
ment de  la  Gironde. 
Gasparin.  9  août   1793  «  adjoint  aux  Représentans  près 
les  armées  des  Alpes  et  d'Italie  avec  Escudier  ;  8  bru» 
maire ,  an  2 ,  envoyé  près  l'armée  sous  Toulon  avec 
Barras,  Fréron  et  Sallicetty. 
Gaston.  2  nivôse,  an  2,  en  mission  près  l'armée  des 

Alpes ,  avec  Fabre. 
Gaudin.  10  juin  1793  ,  est  adjoint  aux  Représentans  dans 
les  départemens  de  la  Vendée  et  des  Deux-Sèvres;  12 
septembre,  il  est  rappelé. 
Gaultier.  20  juillet  1793 ^  envoyé  à  Lyon;  15  vendé- 
miaire, an  2j  rappelé  de  Lyon;  a  Marseille. 
Genevois.  27  brumaire,  an  3,  en  mission  avec  Bailli  ;  en 
mission  dans  le  département  de  la  Meurthe  avec  Antoine 
Levasseur ,  Faure  et  Mazade.  ^^ 

Genissieux.   18  vendémiaire ,  an  3 ,  en  mission  dans  le  dé- 
partement de  l'Orne  et  de  la  Sarthe  avec  Calés. 
G  ENTES.  En  mission  l'an  3. 

Gerente  (Olivier).  24  germinal,  en  mission  avec  Besspn 
N  çt  Richou  ;  le  a 8  germinal ,  ses  pouvoirs  sont  étendus  au 
département  de  la  Lozère* 


54^  Députés  de  la  Convention 

Gbxtil.  11  juin  1793 ,  en  mission  près  Tarmée  de  h 
Mozclle. 

61LLET.  15  septembre  1793»  continuera  ses  fonctions  pour 
Parmée  de  Brest  ;  3  prairial  9  an  ^ ,  chargé  de  la  surveil- 
lance et  de  la  direction  de  la  force  armée  de  Paris  y  avec 
Aubry  et  Delmas;  24  ventôse,  an  3 ,  décret  (jui  proroge 
ses  pouvoirs;  23  messidor,  an  3  ,  il  est  envoyé  en  mission. 

GiRAUD.  4  ventôse,  an  3,  dans  rîle  Saint-Domingue  avec 
Vardon  et  Bourdon  (de  l'Oise)  ;  25  germinal,  an  3  j 
envoyé  en  mission;  10  vendémiaire,  en  mission  avec 
Perrin  (  des  Vosges  )  et  Phlieger. 

GiROT  PoussoL.  1 5  nlvoçe,  an  3 ,  en  mission  avec  Duboîs- 
Dubay  et  Menuau  ',  7  ventôse,  an  3  ;  les  mesures  prises 
par  eux  sont  approuvées. 

CiRousT.  27  germinal,  an  3  ,en  mission  avec  Meynard  et 
Garnier  (  de  i'Aube  ). 

GoDEFRoV.  5  fructidor ,  an  2 ,  en  mission  dans  les  départ, 
de  Seine  et  Marne,  et  de  TAube,  avec  Maure. 

GûMAiRE.  28  ventôse >  an  3,  en  mission  avec  Dumas, 
Real,  Ruault,  Paganel,  Brunet  (de  THérault) ,  BoissieUi 

GouLY  ( de  rile-de- France).  14 frimaire, an  2, en  mission 
dans  le  département  de  TAin. 

GoupiLLEAu  (de  Montaigut).  17  prairial,  an  3,  appelé 
pour  donner  des  renscignemens  sur  les  objets  de  sa  mis- 
sion ;  14  messidor,  an  3  ,  en  mission. 

GouPiLLEAU  (deFontenay).  3  mars  1793,  Commissaire 
dans  la  principauté  deSalm;  11  mars  1793  ,dans  les  dép. 
de  Loir  et  Cher,  d'Indre  et  Loire  ,  avec  Taliien;  6  avril 
1793 ,  adjoint  aux  Commissaires  du  dép.  de  la  Vendée. 

GossuiN.  10  mars  179}  ,  remplace  Lecjuinio  près  Tarmée 
du  Nord. 

Grand-Fré.  27  floréal, an  3,  à  Lyon  ,  avec  Despinassy 
et  Poulain. 

Grenot.  8  ventôse,  an  3,  en  mission  avec  Castillon  ;  14 
ventôse  ,  décret  concernant  ses  pouvoirs. 

GuERiN.  28  pluviôse,  an  3^  en  mission  avec  Borel  ;  it 
prairial ,  an  3 ,  en  mission  ou  remplacé.  17  messidor ,  en 
mission  avec  Boursault  et  Diirand-Maillane. 

GuESNO.  28  prairial ,  en  mission  avec  Mathieu  et  Bodin  , 
en  Tan  3  ;  ij  thermidor,  an  3,  qui  rapporte  la  disposi- 
tion du  1 5  thermidor. 

GuiLLEMARDET.  13  frimaire,  en  mission  dans  l'an  3. 


envoyés  tn  mission.  y4j 

GuiLLERAULT.  22  germinal ,  an  3  «  en  mission. 

GuiMBERTEAU  28  Vendémiaire ,  an  2,  en  mission  <îans  les 
départ,  de  Loir  et  Cher ,  d'Indre  et  Loire  j  16  frimaire, 
an  i ,  prè»  l'armée  des  Côtes  de  Cherbourg  ,  avec  Jehon 
et  Phlieger. 

GuFFROY.  13  mars  1793 ,  en  mission  à  la  place  de  Lom- 
bard-Tachan. 

GuYOT.  2  frimaire,  an  2 ,  en  mission  près  l'armée  du  Nord. 

GuYARDiN.  An  2,  dans  le  départ,  du  Haut  et  Bas-Rhin. 

GuFFROY  (Florent).  25  frimaire,  en  3 ,  en  mission  dans 
divers  départ.  ;  25  nivôse,  an  3,  ses  pouvoirs  sont  étendus. 

Hemtz.  7  février  1793 ,  en  mission  près  les  frontières  du 
Centre,  avec  Fer  y  ;  4  octobre,  an  2,  en  mission  près 
Tarmée  du  Nord  et  du  dépaift.  de  la  Vendée;  28  vendé- 
miaire ,  an  2 ,  près  Parmée  des  Ardennes ,  avec  ^ô  et 
Coupé;  18  frimaire,  an  2, à  Dunkerque. 

Hermamn.  13  brumaire ,  an  a  ,  en  mission  près  les  armées 
du  Rhin  et  de  la  Mozelle  |  avec  Brauadot ,  Lamarre  et 
Lacoste  (  du  Cantal  ). 

HouRiER  (C.  Éloy  ).  18  pluviôse^  an  3  ,  en  mission. 

HuMBERT.  16  frimaire,  an  2,  en  mission  dans  les  dépar- 
temens  de  la  Haute-Vienne. 

Ja VOGUES.  20  juillet  1793,  adjoint  aux  citoyens  Revcr-» 
chon  et  Laporte;  20  pluviôse,  an  a ,  rappelé  de  sa  mis- 
sion ;  en  mission  dans  le  département  de  l'Ain. 

Jacomin.  24  nivôse,  an  3 ,  en  mission  dans  les  dép.  envi- 
ronnant Paris,  avec  Soulignac ,  Froger  et  Lequinio. 

Jard-Panvilliers.  18  thermidor,  an  3 ,  adjoint  à  Cochon. 

Jarry.  7  pluviôse,  an  3  ,  en  mission  avec  Masson,  Foul- 
tier  et  Letourneur. 

JsANBON'SAiMT-ANDRi.  Mafs  1793  ,  dans  le  départ,  du  Lot 
et  de  laDordogne,  avec  Lacoste;  4  octobre  179}  ^  en 
mission  à  Brest  avec  Prieur. 

Jehon.  16  frimaire,  an  2,  en  mission  à  l'armée  de  TOuest 
avec  Guimberteau  et  Phlieger. 

Imgrand.  14  brumaire,  an  2  ^  en  mission  dans  les  départ, 
de  la  Haute- Vienne  et  de  la  Vienne  ;  1 1  frimaire,  an  2  , 
décret  relatif  à  diverses  imputations  qui  lui  ont  été  faites. 

JouBERT.  26  vendémiaire ,  an  3  ,  près  les  armées  du  Nord , 
Sambre  et  Meuse,  avec  Portier;  16  frimaire,  an  3  ,  il 
exercera  sa  mission  près  le  quartier-géiéral  de  l'armée 
et  Sambre  et  Meuse. 


•4 


544  Députés  dt  U  Con9tntîon 

JouRDAK.  A  Marseille. 
IsABEAU.  Octobre  1793*  en  mission  dans  le  départ,  delà 
Gironde  avec  Tallien  ;  15  thermidor^  an  1,  envoyé  à 
Bordeaux;  3  juillet  1793»  piês  l'armée  des  Pyrénées 
orcidentales ;  le  10  juillet,  à  Bordeaux  avec  Garreau, 
Tallien  et  Beaudot  ;  en  fructidor ,  en  3 ,  à  Bordeaux. 

IsNARD.  12  floréal,  an  3,  en  mission;  19  âoréal,an  3, 
décret  relatif  à  sa  mission  dnns  le  départ,  des  Bouches- 
du-Rhône;  23  Aoréal  «  an  ^ ,  extension  de  ses  pouvoirs  au 
département  des  Basses- Alpes. 

IsoARD.  14  pluviôse,  an  3,  en  mission  avec  Pépin. 

IsoRi.  25  mars  1793 >  dans  les  départ.  delOise  et  Seine- 
Inférieure;  1  août  1793,  dans  les  départ,  de  Loire  et  de 
l'Aine  avec  Collot  (  ci*Herbois),  Lequinio  et  Le)eune  ;  9 
septembre  1793  ,  près  l'aimée  duNord  avec  Drouet. 

Julien,  i  août  1793  >  en  mission  prés  l'armée  des  Cotes 
de  Brest  y  avec  Rulh  et  Meaulle.  ' 

Lacombe  (loseph).  14  germinal,  an  3^  en  mission  avec 
Blanqui  et  Periès. 

Lacombe  (St.-Michel).  15  prairial,  an  3,  en  mission  ou 
en  congé. 

Lacoste.  26  Juillet  1793,  remplace  le  citoyen  Delcher  ; 
mars  1793  ,  dans  les  départ,  du  Lot  etdela  Dordogne  , 
avec  Jeanbon-Sajnt- André ,  dans  le  départ,  de  la  Haute- 
Loire  avec  Regnaud  et  Faure. 

Lacoste  (du  Cantal).  1 3  brumaire ,  an  2,  près  les  armées 
du  Rhin  et  delaMozelle^  avec  Lemanne^  Baudot  et 
Ehrmann. 

Lacoste  (Elie  ).  7  vendémiaire,  an  3  ^  près  la  Manufac- 
ture d'armes  deTouI. 

Lacroix  (  d'Eure  et  Loire ).  29  août  1793  *  ^*"®  ^^^  départ, 
de  la  Seine-Inférieure. 

Laignelot.  18  frimaire,  an  2,  avec  Lequinio; pourront 
exercer  leurs  pouvoirs  dans  le  départ,  de  la  Vendée. 

Lakaknal.  12  frimaire,  ap  2,  à  Bergerac,  auprès  de  la 
Manufacture  d'armes;  17  nivôse ,  an  2 ,  dans  le  départ, 
de  la  Dordogne  et  environnans ,  est  investi  de  tous  les 
pouvoirs  dont  sont  revêtus  les  Représentans  du  Peuple  ; 
22  vendémiaire,  an  3,  nommé  près  l'Ecole  normale 
avec  Sieycs. 

Lamarre.  1 9  fructidor ,  an  3 ,  en  mission  avec  Coupé 
(des  Côtes  du  Nord  )  et  Froger.  Laport». 


envoyés  en  mission.  ^45 

Laîorte.  An  a ,  en  mission  à  Lyon  ;  an  3 ,  S  Lyon.' 
Laurence.  15  septembre  1793  ^  adjoint  aux  autres  Rtfpré- 

sentans  prés  Tarmée  du  Nord  ;  24  germinal  an  } ,  en 

mission. 
Laur^çot.  I  pluviôse,  an  3  ,  en  mission  ;  9  prairial ,  an 

3,  nouvelle  mission. 
Laurent X  du  Bas-Rhin  ).  3  ventcse ,  an  3  ,  en  mission  dans 

les  départ,  de  Paris ,  voisins  de  Paris. 
Laplanche.  28  vendémiaire ,  an  2 ,  sa  conduite  dans  *le$ 

dépar?.  de  Loir  et  Cher,  est  approuvée,  ses  arrêtés' et 

réquisitions  coilfirmés;  7  brumaire,  an  2,  en  mission 

dans  le  Calvados  ;  18  brumaire^  ^^  3»  '^^  caisses  d'ar* 

genteries  déposées  chez  lui  seront  apportées  au  Comité. 

des  Inspecteurs  de  la  Salle. 
Lecarpentier.  En  mission  dans  les  départ,  de  la  Manche  f 

de  nie  et  Vilaine  et  de  la  Côte  d'Or. 
Lebas.  2  août  1793 ,  près  l'armée  du  Nord, avec  Duques- 

noy  ;  2 1  août  1793 ,  il  est  rappelé. 
Lebon.  9  août  1793,  envoyé  à  Abbevîllc  à  la  place  de 

Chabot  ;  4  septembre ,  il  est  rappelé  ;  17  vendémiaire  , 

an  2,  dans  ledép.  de  l'Oise,  pour  rétablir  Tordre  à  Beau* 

vais ,  dans  les  départ,  du  Nord ,  Pas-de- Calait ,  Arras  y 

Cambrai ,  &c. 
LEf  EBvRE  (  de  Nantes).  4  ventôse,  en  mission  avec  Du- 
bois (du  Haut-Rhin)  etTalot ,  an  3  ;  5  fructidor,  an  3  , 

ses  pouvoirs  sont  prorogés. 
Lefiot.  27  frimaire,  an  2 ,  dans  les  départ,  du  Cher  et  de 

la  Nièvre,  avec  Legendre  (de  Paris  ;. 
Lfgekdre  (  de  la  Nièvre).  2  ventoic,  an  3 ,  envoyé  eH 

mission. 
LsGEKDRE  (  de  Paris  ).  26  février  1793  ,  Commissaire  à 

Lyon  ;  1 5  août  1793 ,  dans  le  départ,  de  ia  Seine-Inférieure 

avec  Loucher;  6  septembre  1793,  dans  le  même* départ. 

avec  Lacroix;  27  irimaire,  an  2,  dans  les  dép4rt.  du 

Cher  et  la  Nièvre ,  avec  Lefiot. 
Legot.  24  frimaire ,  an  3 ,  dans  !e  départ,  de  la  Manche  ; 

23  pluviôse,  an  3,  sa  conduire  dans  le  départ,  de  la 

Manche  est  approuvée. 
Leieuke.  I  août  1793 ,  dans  les  départ,  de  l*Oise  et  1* Aisne» 

avec  Lequinîo,  Collot  d'Kerbois  et  Isoré. 
Lemake.  1 3  bnuBaire,  an  2  ,  près  les  armées  ds  Rhin  et  de 

U  Mozelie ,  avec  Eàndoc  et  Hertsann. 

Tom.  FI.  M  m 


546  Demies  de  la  Conftntionl 

Lbmoikb.  I)  rendémiaire,  an  3  »  dans  les  départ.  Aejjonxt^ 
Haute  Loire  et  de  l'Ardèche,  pour  y  surveiller  les  tra- 
vaux de  l'exploitation  des  mines  et  manufactures  d'armes. 
Leqitimio.  23  février    17939  Commissaire  près  les  fron- 
tières du  Nord;  12  avril  1793  ,  nommé  près  les  armées 
avec  Bellegarde  ,  Cochon,  Dubois  - Dubay  et  Briez; 
1  août  1793  9  ^"^  ^^  départ»  de  POise  et  de  l*Âisne  , 
avec  Isoré  ^  Collot  d*Heibois  et  Lejeune;  7  septembre 
1793  y  dans  le  départ,  de  la  Charente-Inférieure ,  avec 
Laignelot  ;  18  frimaire  ,  an  d ,  ses  pouvoirs  dans  la  Vendée 
et  le  départ,  de  la  Charente-lnféneure ,  avec  Laignelot  ; 
24  nivôse  »  an  3 ,  dans  les  départ,  voisins  de  Paris  ,  avec 
Froger ,  Soulignac  et  Jacomin. 
Lbsterpt-Beauvais.  a  Toulon,  an  1794. 
Lbtellier.  8  frimaire ,  an  3 ,  en  mission  avec  Robin  et 

Cledel. 
Lbtgurmeur.  22  juillet  1793 ,  près  Parraée  du  Nord ,  avec 
Levasseur  et  Ricord  ;  4  octobre  1793*  dans  le  départ,  de 
l'Orne,  pour  prendre  des  mesures  de  salut  public;  9  bru- 
maire ,  an  2,  il  eft  rappelé. 
Letourmeux  (deia  Manche).  7  pluviôse,  an  3,  en  mis* 
sionavec  Poultier,  Mathieu  et  Jarry  ;  xo  pluviôse,  décret 
concernant  son  envoi  en   mission  ;   17  prairial  ,  an  j  , 
délégué  près  le  cajnp  sous  Paris ,  avec  Thabaud. 
Levasseur.  22  jû:!et  1793,  P^^*  l'armée  du  Nord;  20 
septembre,  rappelé  avec  Bentabolle  ;  18  vendémiaire^ 
dans  le  département  de  TOise,  à  lap'ace  de  Lebon;  dans 
le  dép.  de  la  Meurthe  avec  Faure^  6enevois  et  Mazade. 
Levasseur  (  de  la  Sarthe).  10  nivôse,  an  5  ,  en  mission 

avec  Alquier  et  Treilhard. 
Legris.  3  septembre  1793  ,  rappelé  de  Toulouse. 
LiNDET*  3  juin   1793,  quoique  Membre  du  Comité  de 
Salut  public;  il  est  adjoint  aux  Représentans  près  l'armée 
des  Alpes;  17  juin  1 7v3, rappelé  de  Lyon  ;  22  juin  1793, 
nommé  Membre  du  Comité  de  Salut  public;  18  juillet 
1793  ,  dans  le  Calvados,  avec  Bonnet  Monty  et  Durôi. 
LoisEAU.  27  ventôse,  an  3,  dans  les   départ,  voisins  de 
Paris ,  pour  surveiller  et  assurer  les  approvisionnemens 
de  cette  commune. 
LosEAu.  17  ventôse,  an  3  ,  en  mission. 
LoucHET.  15  août  1793,  envoyé  dans  le  départ,  de  la 
Seine-lnfériourc  avec  Legendre  (de  Paris  );  6  septembre 


envoyés  •/>  mission.  547 

1793 ,  il  est    envoyé  dans  le  départ,  avec  Delacroix  et 
Legendre  (de  Paris  ). 
Maignet.  6  juillet  1793  ,  envoyé  à  Lyon;  dans  le  départ» 

de  Vauclttse. 
Mailhe.  X  pIuviose,an  3 ,  envoyé  en  missioa;  1 5  germinal; 

dans  le  départ:  de  la  Côte  d'Ôr ,  an  3 . 
Mallarmé.  13  brumaire  j  an  2 ,  écrit  avec  Lacote  de  l'ar- 
mée du  Rhin  et  de  la  Mozelle;  27  vendémiaire,  an  3 ,  est 
rappelé  5  ses  pouvoirs  dans  les  départ,  de  la  Haute-Ga- 
ronne et  du  (jers,  oîi  il  est  avec  Bouiilcrot ,  s'étendront  à 
celui  du  Tarn. 
Mariette.  En  mission  à  Marseille. 
Massieu.  17  juin  1793,  près  l'armée  des  Ardennes  avec 
Perrin  et  Csdès  ;  25  brumaire,  an  2,  se  rendra  près 
l'armée  des  Ardennes. 

Mathieu.  18  mars  1793,  à  Orléans  avec  Bourbotte  et 
Delmas;  17  juin  1793,  envoyé  dans  les  départ,  delà 
Gironde ,  de  Lot  et  Garonne ,  et  autres  circonvoisins , 
avecTreilhard;  20  juillet  1793  ,  ils  sont  rappelés  ;  7  plu- 
viôse ,  an  3  ,  en  mission  avec  Letourneur ,  Jarry  et  Poul- 
tier  ;  8  pluviôse,  an  3,  rappelé  de  Tarmée  d'Italie  ;  28 
prairial ,  an  3 ,  en  mission  avec  Guesno  et  Bodin. 

Mauldb.  p  inai  1793»  dans  le  départ,  de  la  Charente  | 
adjoint  aux  autres  Députés. 

Maure.  18  juillet  1793 ,  dans  les  départ,  de  Seine  et  Oise, 
et  autres  circonvoisins ,  avecBonncval ,  Roux  et  Dubou* 
chec;  5  fructidor, an  2,  dans  les  départ,  de  Seine  et 
Marne,  et  de  l'Aube,  avec  Godefroy. 

Mazade.  Dans  le  départ,  de  la  Meurthe,  avec  Antoine 
Lcvasseur,  Faure  et  Genevois. 

MIaulle.  20  juin  1793  ,  près  l'armée  du  Nord;  «4  juin 
1793  y  ^^^  ^^  départ,  du  Centre  et  de  l'Ouest ,  avec  Fau- 
cher, Phelippeaux  et  Lavallé,  pour  faire  prendre  les 
armes  contre  les  Rebelles  ;  1  août  1793  ,  près  l'armée  de 
Brest,  avec  Ruelle  et  Juliicn;  18  frimaire,  an  2 ,  envoyé 
à  Cherbourg  ,  puis  à  Lyon  ;  10  frimaire  9  an  2  ,  rappelé  \  ' 
en  mission  dans  le  départ,  de  I  Ain. 

Meïllaud.  I  floréal^  an  3  ,  en  mission  avec  Cazenave. 

Menuau.  1^5  nivôse,  an  3,  en  mission  avec  Dubots-Dubay 
et  Girot-Pousols. 

Merlin  <de  Douay  ).  17  prairial,  an  3 ,  décret  relatif  aux 
pouvoirs  qui  lui  sont  confiés  dans  le  départ,  du  Nord  ;  23 
prairial  ^  ses  pouvoirs  et  ceux  de  Chambon  sont  étendus  à 
d^autres  départemens,  an  3.  M  z 


j49  DipuUs'^t  la  Convention 

AIljllin  ( de Thionville ),  6  brumaire,  an  3,  envoyé  aux 
armccs  du  Rhin  et  de  la  Mozelle  ;  23  germinal ,  an  3 , 
en  misMon. 

TVItRLiNOT.  Dans  le  département  de  l'Ain. 

MtYNARD.  27  germinal,  an  3,  en  mission  avec  Gîroust  et 
Garnier  (de  l'Aube  )  ;  27  floréal ,  an  3 ,  il  lui  est  assigné 
une  noMvelIe  destination. 

MicBAUD.  14  vendémiaire,  an  3,  en  mission  avec  Musset  ; 
extsp.sion  de  leuis  pouvoirs  aux  départ,  des  Vo5=ges  et  de 
Id  Nièvre  ;  il  est  seul  dans  le  départ,  de  la  Meurthe. 

IVIicHEL.  3  mars  1793  ,  commissaire  dans  la  principauté  de 
^.i.m  avecGoupiiieau  et  Couthon* 

Michel  (du  Morbilun).  15  floréal,  an  3  »  est  envoyé  en 
mission. 

AIii  HAUD.  2  nivôse ,  an  2 ,  près  l'armée  des  Pyrénées  oricn* 

.    talcs ,  avec  Soubrany  (  du  Haut  et  Bas-Rhin  )• 

MoMESTiER.  En  mission  dans  Le  dép.  des  Hautes-Pyrénées. 

MoREAu.  28  fructidor ,  an  2  «  près  l'Ecole  de  de  Mars  avec 
Bouillerot. 

Musset.  14  vendémiaire,  an  3, extension  de  ses  pouvoirs 
au  départ,  des  Vosges  et  de  la  Nièvre  ;  4  germinal ,  an  3  , 
il  est  envoyé  en  mission  ;  29  messidor ,  an  3 ,  il  est  en- 
voyé en  mission. . 

Kl  ou.  25  germinal ,  an  3  ,  en  mission  dans  les  départ,  de  la 
Charente- Inférieure. 

]NiocHE.  A  Lyon  en  1793;  16  vendémiaire,  an  4,  ses  pou- 
voirs sont  prolonges. 

OuDOT.  3  septembre  1793  ,  dans  le  départ,  du  Calvados. 

Paganel.  21  brumaire,  an  2,  se  rendra  dans  le  départ,  du 
Lot,  pour  y  épurer  les  autorités  constituées.  19  nivôse , 
an  3  ,  envoyé  en  mission  5  28  vent.  3,  an  en  mission  avec 
Gomaire-Dumas,  Real ,  Kuault,  Brunet  (  de  THérault  ) 
et  Boiîisieu  ;  18  prairial ,  an  3  ,  il  est  rappelé  avec  Chau- 
dron Rousseau. 

Palusne-Champeaux.  2  ventôse,  en  3,  en  mission  avec 
Topsent;  5  fructidor,  an  3 ,  ses  pouvoirs  sont  prorogés. 

Patrin,  15  nivcse,  an  3  ,  en  mission  avec  Vcrnerey. 

Pauchot.  13  juillet  1793,  dans  les  départ,  de  la  Seine-» 
Inférieure  et  autres  circonvoisins ,  avec  Carrier. 

Pelet  (  de  la  Lozère  ) .  18  germinal ,  an  3 ,  en  mission. 

PfiitETtER.  3  vqntose ,  an  3  ,  rappelé  de  sa  mission. 

Pémères.  28  germinal ,  an  3 ,  en  mission  ;  30  prairial ,  an 
3 ,  ses  pouvoirs  font  étendus  à  d'autre$  départ,  ;  10  ther- 


miclor»  m  5^  îl  se  r^drg^  avec  TabaiK  »  au  aànp  sous 

Paris. 
Pefin.  14  pluviôse,  en  mission  avec Isoard. 
l'BRRiM  (des  Vosges).  29  therfnidoi:,an  3 ,  en  mission  ;  17 

juin  179} ,  pr&  l'armée  des  Ardennes  avec  Massieu  e€ 

Calés;  10  vendémiaire,  ah  4 1  en  mission  avee  Giroc-i 

Pousols  et  Phliegcr. 
Peries,  14  germinal,  an  3  ,  dans  les  départ.  avecBlanqui, 

FayoUe  et  Joseph  Lacombe. 
Petit- Jean.  12  mars  1793  ,  en  mission  avecFaure. 
Peyrès.  22  fructidor  ,an  2 ,  dans  plusieurs  départ,  du  Mor-. 

bihan  et  autres ,  avec  Thtbeaudeau. 
Peyssard,  2j  juillet  179J  f  en  mission  près  l'armée  du 
.   Nord. 
Phlieger.  16  frimaire,  an  2,  près  Tarmée  des  Pyrénées 

orientales  avec  Jehon  et  Guimberteau  ;  10  vendémiaire, 

an  4,  en  mission  avec  Perrin  (  des  Vosges)  et  Girot-^ 

Pousols. 
PiERRET.  23  frimaire,  an  3 ,  dans  le  départ,  de  la  Haute* 

Loite  avec  Alquier. 
PiNET.  22  vendémiaire,  an  2 ,  près  l'armée  de  l'Ouest  avec 

Bourbotte ,  Francastcl  et  Turreau. 
PiORY.  14  bruu  maire,  an  2 ,  dans  le  départ,  de  la  Vienne. 
Piquet.  21  ventôse^  en  mission  avec  B6. 
FocHOLLE.  30  ventôse»  an  3  ^  en  mission  à  Lyon;  25  et  26 

thermidor ,  an  3  ,  en  mission  ou  congé. 
Pointe  (  Noël ).  20  juin  1793  ,  à  Saint-Etienne;  24  vendé- 
miaire ,  an  2 ,  dans  les  départ,  de  la  Nièvre  et  de  l'Allier  ; 

a 8  frimaire,  an  2 ,  dans  le  départ,  du  Cher  ;  14  pluviôse  , 

en  3 ,  en  mission. 
FoMMB.  $  août  1793 ,  dans  le  départ,   de  l'Hérault  avec 

Servierre  ;  en  mission  à  Marseille  avec  Charbonnier. 
ÇpULTiER.  27  juin  1793  ,  dans  les  départ,  des  Bouches-du* 

Rhône;  pluviôse ,  an  3  ,  en  mission  avec  Mathieu ,  Le- 

tourneur  et  Jarry  ;  18  floréal,  an  3  ,  rappelé  dans  le  sein 

de  la  Convention  ;  11  praiiial,  an  3,  en  mission  ou 

remplacé. 
PouLAiN-GRANDPRi.  27  florcal,  an  3 ,  en  mission  à  Lyon 

avec  Despinassy  et  Grandprey. 
Porcher.  2  nivôse,  en  mission  dans  plusieurs  départ.  ;  12 
.  prairial^  an  3 ,  concernant  sa  mission  ;  5  thermidor  ^  an  3, 

relatif  à  ses  pouvoirs  et  ceux  de  Cazenave. 
Portier.  26  vendémiaire,,  an  }  ^  eii  mission  avec  Joubcft.^ 


550  Difutis  it  ta  Ctnpm^bn 

prêt  les  «rmées  du  Nord  et  de  Sambreee  Bfèiiëe. 

P&iEUR.  4  octobre  1793^  à  Brest  arec  Jeanbon  -  Satot- 
André  ;  4  septembre,  à  Tannée  de  i'Oaest  ayecHentz. 

PiojEAV.  17  brumaire,  an  3,  ptès  Tarmés  des  Pyrénées 
orientales,  avec  Gouptlleau  (de  Fomenay  >. 

P&oftTE.  27  septembre  1 79 3  9  adjoint  aux  Uépatés  en  mîs- 
siondans  le  Jura  et  départ,  circonvoisios  j  en  mars  1793» 
cnToyé  dans  le  départ,  du  Jura  avec  Léonard  Bourdon. 

QuiKETTE.  En  1793 ,  envoyé  près  l'armée  de  Dumouriezj 
avec  Bancal,  CaiLuset  Drcuet. 

RjLMEL.  &  pluv.  an  3  ^  près  les  armées  de  Hothnde  avec 
Cochon  ;  !>/  thermidor  |  an  3  ,  envoyé  dans  la  Hollande 
et  la  Belgique. 

RiAL»  28  ventôse,,  an  3,  en  mission  ou  congé;  14 fruc- 
tidor, an  3  ,  il  est  spécialement  attacbé  à  l'armée  des 
Alpes  avec  Chiappe. 

Retebcrq^.  17  août  1793,  envoyé-dans  différens départ. 
avec  Bissai ,  Bernard  et  Alquier,  à  Lyon  ;  dans  l*an  3  ,  en 
.mission  à  Lyon* 

Reynaud.  En  1793  ^  à  Lyon;  en  mission  dans  le  départ,  de 
la.  Haute- Loire  avec  Lacoste  et  Faure. 

Ricard.  22  juillet  1793  ,  eu  mission  près  Tarmée  da  Nord 
avec  Levasseur  et  Leiourneur. 

Richard.  2  ventôse ,  an  3 ,  envoyé  en  Hollande  parle  Co- 
mité de  Salut  public  ;  son  envoi  est  approuvé  par  la  Con- 
vention. 

RicoRD.  En  mission  à  Marseille  et  à  Toulon. 

RiCBOu.  7  nivôse ,  an  3  ,  en  mission  avec  Drulh  ;  24  ger- 
minal »  an  3,  en  mission  avec  Besson  et  Olivier-Gérente. 

Rivaux.  30  nivôse,  an  3  ,  en  mission. 

RiTTBR.  20  fructidor,  an  2  9  se  rendra  près  les  armées  qui 
lui  acront  indiquées,  avec  Vidal. 

Robert  ( de  Paris).  6  floréal,  an  3 ,  en  mission;  28  février 
Ï793  9  Commissaire-adjoint  da-is  leBrabant. 

RoFERTjEOT.  4  nivosc,  envoyé  en  mission  en  l'an  3. 

RoBESPïERP  E ,  jeune-  En  Tan  2 ,  à  Marseille  et  à  Toulon. 

RoEiN.  8  frimaire ,  an  3 ,  en  mission  avec  Letellier  etCledeL 

RoGER'Bucos.  rç  vendémiaire,  an  3,  chargé  de  surveiller 
dans  les  dép.  du  Nord  et  de  l'Aisne,  la  distribution  deSL 
secours  en  faveur  des  pîl^és  incendiés  par  l'ennemi  ;  30 
bramaire ,  atî  3,  envoyé  dans  les  dépar.  du  Nord  et  de 
TAisne. 

RovÈRB.  ^6  icvrier  1793 ,  en  mission  i  Lyon» 


€H90yis  in  mission.  5  fx 

RouGBMOHt.  19  vendémiaire,  an  3  •  près  Pétablissementde 

de  Meudon,  avec  Trelihard. 
RouYBU.  26  germinal,  an  3,  nommé  près  la  force  armée 

ebsployée  à  protéger  l'arrivage  des  subsistances  de  Paris  ; 

16  vendémiaire 4  an  4,  ses  pouvoirs  sont  prolongés-,  % 
brumaire ,  an  4,  il  est  rappelé. 

Roux.  x8  juillet  1793 ,  près  l'armée  des  Côtes  de  Brest  aveâ 
Julien  et  Meaulle. 

RuAULT.  28  ventôse,  an  3,  en  mission  avec  Paganel, 
Gomaîre,  Dumas,  Real,  Brunet  {  de  l'Hérault  )  et 
Boissieu. 

RuEL.  I  août  1793,  près  le  déparc,  de  Seine  et  Oise,  avec 
Maure  et  Dubouchct. 

RuLH.  16  septembre  1793,  en  mission  datts  les  départ,  de 
la  Marne  et  de  la  Haute-Marne. 

Saladim.  29  germinal,  an  3  ^  en  mission  avec  Delamarre 
et  André  Dumont. 

Salicsty..  8  brumaire,  an  2,  près  Tarmée  sousToidon, 
avec  Barras  et  Fréron  ;  à  Marseille. 

Sauvé.  13  prairial,  an  3,  autorisé  à  se  rendre  à  Ram- 
bouillet. 

Savarv.  ;  fructidor,  an  3,  en  mission. 

SsaviÈRES.  27  brumaires ,  an  3 ,  dans  le  départ,  des  Alpes- 
maritimes  et  circonvoisins,  avec  François  Cde  la  Sarthe  ); 
23  fructidor,  an  3 , envoyé  dans  le  départ.  duYar ;  6août 
1793  »  ^^^^  ^®  départ,  de  l'Hérault,  avec  Pomme. 

SiBYÈs.  22  brumaire,  an  3 ,  nommé  près  l'Ecole  normale , 
avec  Lakanal. 

Simon.  28  septembre  1792 ,  adjoint  aux  Commissaires  de 
Parmée  du  Midi  ;  25  août  1793 ,  «nvoyé  dans  le  Mont- 
Blanc  arec  Dumas. 

SouBRAMMY.  Pçtobre  1793 ,  dans  le>départ.de  la  Gironde, 
avec  Isabeau  et  Beaudot  ;  2  ni vosç ,  onyoyé  près  l'arméa 
des  Pyrénées  orientales  avec  Milbaud. 

SouLiGMAC.  24  nivôse,  an  3  ,  dans  les  départ»  qui  avoisinent 
Paris,  avec  Froger,  Léquinio  et  Jacominj  16  prairial, 
an  3  ,  rétabli  d^  sa  mission  avec  Castillon  et  Cazenave  ; 

17  prairial, an  3,  envoyé  près  le  camp  sous  Paris,  avel: 
Letourncur.  (  de  la  Manche  ). 

Tabaut.  10  thermidor,  an  3 ,  se  rendra  au  camp  sous  Paris 

avec  Pénières.    . 
TÀLLiEN.  1 1  mars  1793  ,  ^^"^  ^^  f^^P^^^:.  d*Indrp ,  Ldne  et 

Cher;  23  août  1793 ,  dans  les  départ,  de  Lot  et  Garonne, 


55*     Députés  de  U  CûHPtntioH  tnlfayis  tn  mission, 

la  Dordogde  et  la  Gironde,  avec  Gôûpîlieau  (  de  Foii'^ 
tenay  )  ;  en  octobre  1793 ,  dans  les  départ,  du  Morbihan 
et  autres,  avec  Peyrès ;  1 3  mess.clor,  ah  },  décret  relatif 
à  ses  pouvoirs,  dans  les  départ,  de  l'Onest,  oii  il  est  en- 
voyé avec  filad;  15  thermidor,  an  3  ,  sa  mission  est 
terminée. 

Talot.  4  ventôse,  en  mission  avec  Dubois  (du  Haut- 
Rhin  )  et  Letebvre  (de  la  Loire-Inférieme  ) ,  en  Tan  3  ; 
4  ventôse  au  10  prairial,  an  3 ,  il  est  rappelé. 

Tellier.  26  fructidor,  an  3 ,  en  mission. 

Thibaud.  a6  fructidor ,  an  3 ,  envoyé  en  Hollande  ;  28 
fructidor ,  sci  pouvoirs  sont  étendus  à  la  Belgique. 

Thibaudeau.  aa  fructidor ,  an  2 ,  dans  Is  départ,  du  Mor- 
bihan et  autres,  avec  Peyrts;  2 j  fructidor,  an  2, rappelé. 

ToFSEMT.  2  ventôse,  an  2,  en  mission  avec  Paiasne  et 
Chainpeaux  ;  le  17  thermidor ,  an  2 ,  le  décret  concer- 
nant Topsent  et  Guesno  est  rapporté. 

TrIouaud.  2J  août  1793 ,  à  Brest  avec  Bréard  ;  20  juin  ^ 
à  POrient. 

Treil«ard.  16  janvier  1793,  dans  la  Belgique;  26  inarsv 
rappelé;  le  17  juin,  dans  les  départ,  de  la  Gironde  et 
Lot  et  Garonne^  avec  Mathieu; 20  juillet,  rappelé;  27 
août ,  à  l'armée  du  Nord  avec  Berlier  ;  1 9  vendémiaire , 
an  3  ,  à  Meudon  avec  Rougemont  ;  ic  nivôse,  an  3  ,  en 
mission  avec  Alquier  et  Levasseur  (  de  la  Meurthe  ). 

TuREAu.  24  Juin  1793,  près  l'armée  desCoics  de  la  Ro- 
chelle; 2i  vendémiaire,  an  ,2,  prè«  de  TOuest,  avec 
Bouibotte ,  Carrier  ,  Francastel  et  Pi.net. 

Vardon.  4  ventôse,  an  3,  à  Tlle  Saint-Domingue,  avec 
Bourdon  {  de  l'Oisfe  et  Giraut. 

Varlet.  6  février  1793  ^  est  rappelé  de  sa  mission. 

Verneret.  En  nivosé,  an  2,  en  mission  dans  le  départ. 
'  de  l'Allier  ;  15  nivôse ,  an  3  ,  en  mission  avec  Patrin. 

Vidal.  20  fructidor, an  2,  se  rendra,  avec  Ritter,  près 
les  années  qui  leur  seront  indiquées;  14  nivôse,  an  5  ^ 

'    rappelé  de  sa  mission. 

ViENNET.  31  août  1793 ,  dans  les  départ;  voisins  de  Paris 
avec  Courtois. 

ViTET.  18  ventôse,  en  mission  à  Lyon  avec  Boissy  d' An- 
glas  et  Alqtiier  ;  1795  ,  en  congé. 

Villers.  23  vendémiaire,  an  3,  se  rendra  à  Brest  et  à 
l'Orient  avec  Desrues. 


LisU  des  Membres  cU  la  Convention. 


553 


Liste  des  Membres  de  la  Convention  nationale  j 
*  commencée  le  9i  Septembre  4792  ,   et  Jinie 
le  26  Octobre  1795  (  4  Brumaire  ,  an  4.  } 


Nota,  Les  Membres  qui  ont  été  de  TAssemblée 
législative  sont  désignés  par  une  étoile  au  commen- 
cement des  lignes. 


Albert  ,  aîné  ,  député 
du  Haut- Rhin* 

*AIbite,  de  U Seine-Infé- 
rieure. 

Albite ,  jeune ,  de  la  Seine- 
Inférieure. 

Alboùy,  du  Lot. 

Allafort,  de  la  Dordognc. 

Allain  ,  du  Cher. 

Allard  ,  de  là  Haute-Ga- 
ronne. 

Allassœur,  du  Cher. 

Alquier,  de  Seine  et  Oise. 

Amar  ,  de  Tlsère. 

Amyon ,,  du  Jura. 

Anacharsis  {  Ciootz  ) ,  de 
rOise; 

Andrei^  de  Corse. 

Anthoine ,  de  la  Moselle. 

Antiboul ,  du  Var. 

Antonelle  ,  des  Bouches- 
du-Rhône. 

Aoust ,  du  Nord. 

*Arbogast^  du  Bas-Rhin. 

Armouville,  (J.  B.)  de  la 
Marne. 

Arrighi  ,  de  Corse. 

Tome  VL 


Artauld,  duPuy^de-Dôme. 

Aubry  ,  du  Gard. 

Audouin,  de  Seine  et  Oise. 

*Audrein,  du  Morbihan. 

Aiiger ,  de  l'Oise. 

*Augui«  dcsDeux-Sèvrei* 

Ayral  ,   de  la  Haute^-Ga* 
ronne. 

*  Azema  ,  de  l'Aude. 

Babfey ,  du  Jura. 

Baille  ,   des  Bouches-du- 
Rhône. 

Bailleul  ^  de  la  Seine-In- 
férieure. 

Bailly-Juilly ,  de  Seine  et 
Marne. 

Balivct,  de  la  Haute-Saône. 

Ballade  ^  du   Gard. 

Bàlland  ,  des  Vosges. 

Balmain,  du  Mont-Blanc, 

Bancal,  du  Puy-de-Dôme* 

Bar  ,  de  la  Moselle. 

Barailon  ,  de  la  Creuze, 

Barbaroux ,  des  Bouches* 
du-Rhône. 

Barbau  -   Dubarran  ,     du 
Gers. 

N  a 


554 

Barras ,  du  Var. 
Barrère-de-Vieuzac  ,    des 

Hautes-Pyrennées.    ' 
Barety,  des  Hautes- Alpes. 
Barrot^  de  la  Lozère. 
Barthélémy,  Haute-Loire. 
Bassal ,  de  Seine  et  Oise. 
Batellier ,  de  la  Marne. 
Baucheton  ,  du  Cher. 

*  Baudin  ,  des  Ardennes. 
Baudot,  de  Saône  et  Loire. 
Baudran  ,  de  l'Isère. 
Baujard  ,  d'Ille  et  Vilaine. 
Bayle,(Pierre)  dcsBouches- 

du-Rhône. 
Bayle  ,  (  M.  ]  idem.  »  . 

*  Bazire,  de  la  Côte-d'Or. 
Bazoche^   de  la  Meuse. 
Beauchamp-Chevalier,  de 

TAUier. 
Beauchamp  ,  idem, 
Bcaugrard  ,    de    Tille    et 

Vilaine. 
Beauprey  ,  de  l'Orne. 

*  Beauvais  ,  de  Paris. 
Becker  ,  de   la  Moselle. 
Beftroy  ,  de  l'Aisne. 
*Bélin  ,   idem, 
Bellegarde,  de  la  Charente. 
Belley,  de  St.-Domingue. 
Bentabole,  du  Bas-Rhin. 
Beraud,  de  Rhône  et  Loire. 
Bcrgoints,  de  la  Gironde. 
Berlier  ,  de  la  Côte-d'Or. 
Berlucat,  de  Saône  etLoire. 
Bernard  ,  de  la  Charente- 
Inférieure. 

Bernard-des-Sablons ,  de 
Seine  et  Marne. 


LisU  dés  Membres 


Bernard  -  de  -  Sainte  -  Af- 
frique,  de  TAveiron. 

Bernier  ,    de    Seine    et 
Marne* 

Bertezenc ,   du    Gard. 

Bertrand  ,  du   Càntal- 

Bertucat  ,    de    Saéne     et 
Loire. 

*Besson,  du  Doubs. 

Bezard  ,   de  TOise. 

Bidault^   de  TEure. 

Billaud-Varennes,  de  Paris. 

Bion  ,  de  la  Vienne. 

Biroteau,  des  Pyrennces- 
Orientales. 

Bissy,jeune,delaMayenne. 

Blad  ,  du  Finistère. 

Blanc  ,  de  la  Marne. 

Blanval,  du  Puy-de-Dôme* 

Blanqui^  des  Alpes-Mari- 
times. 

Blaux^de  la  Moselle. 

Blaviel  ,  du  Lot. 

Blondel ,  des  Ardennes. 

Blutel ,   de  la  Seine-Infé- 
rieure. 

*  Bô  ,  de  TAveyron. 

Bodin  ,  d'Indre  et  Loire. 

*Bohan  ,  du  Finistère, 

Boilleau  ,  de  l'Yonne. 

Boiron ,  de  Rhône  et  Loire. 

Boisset ,  de  la  Drôme. 

Boissier,  du  Finistère. 

Boissieu  ,  de  l'Isère. 

Boisson ,  dç  S.  Domingue« 

Boissy-d'Anglas ,  de  l'Ar- 
dèché. 

Bolot ,  de  la  Haute-Saône. 

BoUct ,  du  Pas-de-Calais. 


de  la  Convention  nattânaU. 


555 


Bonguyode  ,  du  Jura. 
Bonnemain  ,  de  TAube. 
Botinesœur ,  de  la  Manche. 
Bonnet ,  de  TAude. 
Bonnet  ^  du  Calvados. 
Bonnet,  de  la  Haute-Loire. 

*  Bonn  eval,  delà  Meurthe. 

*  Bonnier  ,  de  l'Héirault. 
*Bordas,  de  la  H.  Vienne. 
Borel,  des  Hautes- Alpes. 

*  Borie ,  de  la  Corrèzc. 
Bornier ,  (Dutron)  de  la 

Vienne. 

Boucher -Saint-  Sauveur, 
de  Paris. 

Boucherau ,  de  TAisnc.   * 

Boudin  ,  de  Tlndre. 

Souillerot ,  de  TEurc. 

Bouquier ,  aîné  ,  de  la 
Dordogne. 

Bourbotte ,  de  l'Yonne. 

Bourdon  9  de  l'Oise.* 

Bourdon,  (Léonard)  du 
Loiret. 

Bouret ,  des  Basses-Alpes. 

Bourgain  ,  de   Paris. 

Bourgeois,  de  la  Seine-In- 
férieure. 

Bourgeois,d'£ure  etLoire. 

Boursault ,  de  Paris. 

*  Bousquet  ,   du  Gers. 
Boussion,  de  Lot  et  Ga- 
ronne* 

Boutroue  ,  de  la  Sarthe. 
Bouygues  ,  du  Lot. 
Boyaval ,    (  Laurent  )    du 

Nord. 
Boyer  -  Fonfrède  ,    de  la 

Gironde. 


Bozy,  de  la  Corse* 
Bresson  ,  des  Voges 
*Bréart ,  de  la  Charente* 

Inférieure. 
Briez  ,   dti  Nord. 

*  Brissoft  ,  Loire  et  Cher. 

*  Brissot ,  de  l'Eure. 

*  B rival ,  de  la.  Corrèssel  • 
Brin,  de  la  Charente 
Brué  i,  dn  Morbihan. 
Brunel ,   de  1  Hérault.  ' 
Burot,.  du  Pas-de-Calali. 
Buzbt ,   de  L'Eure.  .> 
Cabarot ,  de    Lot  et  Ga- 
ronne. 

Cadroy,  des  Landei*^'  ■► 
Caila  ,  du  Lot.  :i^ 

Calés,  de  la  Haute "^Ga* 
.rodne.       '  »       '  * 

Calon  ,  de  l'Oise. 
Cambàcérès,  de  FH^iwilt.^ 

*  Cambon  ,  idem.    •*      ? 
Camboire  ,    de    la    Dtk-i 

dogne. 
Cathbouiàs,  de  F  Aveyrofa/ 
Camille -Desmoulins,  do 

Paris.  ...     ;î  V 

Campmas  ,  du  Tarn.  i 
Campmartin ,  de  l  Arriègc; 
Camus ,  de  la  Haute-Loiïc. 

*  Cappin  ,  du  Gers,  !  > 
Carelly  ,   flu   Mont-Blanc. 

*  Carnot,duPas-de-Galais^ 

*  Carpenticr ,  du  Nord.  "^ 
Carra ,   de  TOrne.    ■   • 

*  Carrier  ,. du, Cantal.    '  ♦ 
Casabianca  ,  de   Corse. 
Caseneuvé  ,  des  Hauteâr 

Alpes. 

N  n  2 


156 


*'    Liste  des  Membres    . 


Caseneuve  ,    des   Baises- 

Pyrcnnées. 
Cassanyei ,  des  Pyrennées- 

Orientales. 
Castainy  ,   de  TOrne. 
Castilhon  ,  de  THérault. 
Cavaignac  ,  du   Lot. 
Chabanon,  (Bertrand)  du 

Cantal. 
Chabot,  de  Loîre-et-Cher. 
Chaillon ,  de  la  Lpire-In- 
.  fiérieure. 
Châles  ^  (  Lambert  )  d*£ure 

et  Loire. 
Chambon,  de  la  Corrèze. 
Chambon-Latour^duGard. 
Chambord  ,  de  Saône  et 

Loire. 
Champeaux  ^  de  la  Côte- 

du-Nord. 
Champigny ,    d'Indre    et 

Loire. 
Champmartin  ,     de  *  TAr- 

riège. 
Chanvier,  de  la  H.-Saône. 
charbonnier  ,  du  Var. 
Charlier  ,  de  la  Marne. 
iCharrel  ,  de  l'Isère  , 
Qhassct  ,    de     Rhône    et 
.„  Loire. 
Châteauneuf-Randon ,  de 

la  Lozère.      ^ 
Chatelin,  de  TYonne. 
*  Chaudron-Rousseau,  de 

la  Haute  Marne. 
Chauraont ,  d'IUe  et  Vi- 
laine. 
Ghauvier  ,   de    la  Haute  - 

Saône. 


chauvin,  des  Deux-Sèvres. 
Chazal ,  du  Gard. 

*  Chazaud  ,  de  la  Cha- 
rente. 

Chedanneau ,  idem. 
Chenier,  de  Seine  et  Oise. 
Cherrier  ,  des  Vosges. 
Chevalier ,  de  l'Allier. 
Chiappe  ,  de  la  Corse. 

*  Choudieu  ,  de  Maine  et 
Loire. 

Christiani,  du  Haut-Rhin. 

Clausel  ,  de  TArriège. 

Claverie  ,  de  Lot  et  Ga- 
ronne. 

Cledèl  ,  du  Lot. 

Cochet ,  du  Nord. 

Cochon,  des  Deux-Sèvres. 

Colaud  la  Salcette  ,  de  la 
Drôme. 

CoHot-d'Herbois,  de  Paris. 

Collombel ,  de  la  Meurthe. 

Colombel  ,  de  l'Orne. 

*  Condorcet ,  de  l'Aisne. 
Constant,  (  Saint-Estève  ) 

de  l'Arriège. 
Gônte,  des  B.-Pyrennées 
^■Corbel,    du   Morbihan. 
Cordier  ,     de     Seine     et 

Marne. 
Corenfustier  ,     de     l'Ar- 

dèche. 
Cosnard ,  du  Calvados. 
Couhey  ,   des  Vosges. 
Coupard  ,   des  Côtes-du-» 

Nord. 

*  Coupé  ,  de  l'Oise. 
Couppé  ;  de  la  Côte-du- 

Nord. 


de  la  Convention  nationale. 


m 


Coutî«on-Dumas ,  de  la 
Creuzc. 

*  Courtois ,  de  l'Aube. 
Coustard  ,    de    la    Loire- 
Inférieure. 

*  Couthon  ,   du  Puy-de- 

Dôme. 

*  Couturier  ^  de  la  Moselle. 
Crassous^de  laMartinique. 
Creuzé,  de  la  Vienne. 
Creuzé  -  Latouche  ,    de  la 

Vienne. 
Crevés  ,   du  Var. 
Crévélier,  de  la  Charente. 

*  Curée  ,  de  l'Hérault. 
Cusset,  de  Rhône  etLoire. 
Cussy  ,   du  Calvados. 
Dabray,  des  Alpes  mari- 
times. 

Danjou  ,  de  l'Oise. 

*  Dameron^  de  la  Nièvre. 
Dandenac  ,    Faîne  ,     de 

Maine  et  Loire. 

Dandenac  ,  jeune  ,  idem. 

Dange  ,  de  l'Aube. 

Danton  ,   de'  Paris. 

Daoust,  (Jean-Marie)  du 
Nord. 

Dartigoyte  ,   des  Landes. 

Dauberménil  ,  du  Tarn. 

Daunou^  du  Pas-de-Calais. 

Dautrjche,  de  la  Charente- 
Inférieure. 

David  ,  de  Paris. 

David ,  de  TAube. 

Debourgcs,  de  la  Creuzc. 

Dechezeau  ,  de  la  Cha- 
rente- Inférieure. 

*Dcbry,(Jean)  de  TAisne. 


Defermon,d'Ifle  etVilainé. 
Defrance  ,    de    Seine    et 

Marne. 
Dehouliere  ,  de  Maine  et 

Loire. 
Delahaye  ,  de  ...... 

Delaportc,  du  Haut-Khïti. 
Delaunay,  jeune ,  de  Maine 

et  Loire. 
Delaunay-du-Pcrret ,   des 

Bouches-du-Rhône. 
Delacroix,  (Charles) de  la 

Marne. 
^'  Delacroix  ,     d'Eure     et 

Loire.  . 

Delagueulle  ,   du   Loiret* 
Delamarre  ,  de  l'Oise. 
Delaplanche,  de  la  Nièvre. 
*Delaunay,  de  Maine  et 

Loire. 
Dcibrel,  du  Lot. 
Delcasso  ,  des  Pyrennéeft- 

Orientales. 

*  Delcher    d«  la   Haute  - 
Loire 

Dcleage  ,  de  l'Allier. 
Delecloy ,  de  la  Somme* 
Deleyre ,  de  Befe-d'Ambct 
Delleville  ,  du  Calvados. 

*  Delmas  ,  de   la  Haute- 

Garonne. 
Del  tel ,  du  Tarn'. 
Denis-Roy  -,  de  Seine  et 

Loire. 
Dentzel,   dn  Bas-Rhin. 
Dequence  ,  de  la  Somme. 
Derazey,  de  ITndrc. 
Derbez-Latour,  des  Basies- . 

Alpes. 

Nn  3 


558 


Liste  des 


Desacy  ,  de  la  Haute- 
Garonne. 

*  Descamps  ,  du  Gers. 
Dei»grouas  -  la  -  Prise  ,    de 

rOrne. 

*  Despinassi ,  du  Var. 
Desrozieres  ^    dEure    et 

Loire. 
Desrues  .  de  Paris. 
Deviri ,  de  la  Charente. 
Devcrité  ,.  de  la  Somme. 
Deville  ,  de  la  Marne.  ' 

*  Deydicr  ,  de  TAin. 
DizcA^  des  Landes. 
Doublet  ,    de    la   Seine- 
.     Inférieure. 

Douge,  de  l'Aube. 

'Doulcet ,  (  Pontecoulan  ) 
du.  Calvado's.  ! 

Dornierdela  Haute-Saône. 

Drouet ,  de  la  Marne. 

Drulhe  ,  de  la  Hautcr 
Garonne. 

Dubignon  ,  dllle  et  Vi- 
laine. 

Duboë  ,   de  TOrne. 

Dubois,  du  Haut-Rhin. 

Dubois-Bdiegarde  ,  de  la 
Charente. 

*  Dubois  -  Dubais  ,  du 
Calvados. 

Dubois  -  de  -  Crancé ,  des 
.  Ardennes. 

Dubois,  (Julien)  deTOrne. 
Dubouchet,  de  Rhône  et 

Loire. 
Dubouloz ,  du  Mont-Blanc. 

*  Dubreuil  -  Chambartcl , 
des  Deux- Sèvres» 


Membres 

Dubrœucq,  du  Pas-de- 
Calais. 

Dubusc,  de  TEure. 

Duchistel ,  du  Calvados. 

Duchezeau,  de  la  Charente- 
Inférieure 

Ducos  ,  aîné,  des  Landes. 

*  Ducos  ,  de.  la  Gironde* 
Dufay,  de  St.  Domingue. 

DuflFriche-Valazé ,  du 

Dugenne,  du  Cher. 
Dugué-Dassé  ,  de  l'Orne. 

*  Duhem  ,  du  Nord. 
Dulaure, du  Puy-de-Dôme- 
Dulier ,  de  l'isàre. 
Dumas  ,  du  Mont-Blanc. 
Dumont ,  du  Calvados. 
Dumont ,  de  la  Somme. 
Dupin  ,     le    jeune  ,    de 

TAisne. 

Duplantier,  delà  Gironde. 

Duperret ,  des  Bouches- 
du-Rhône. 

Dupont ,  jeune  ,  d'Indre 
et  Loire. 

Dupont ,  des  Hautes-Py- 
rennées. 

Duport ,  du  Mont-Blanc. 

Duprat ,  des  Bouches-du- 
Rhône. 

Dupuch ,  de  la  Guade- 
loupe. 

Dupuis ,  de  Seine  et  Oise. 

*  Dupuis  ,  fils ,  de  Rhône 

et  Loire. 

*Duquesnoy,  du  Pas-de- 
Calais. 

Durand  -  Maillanne  ,  des 
Bouches-du-Rhône. 


Durocher ,  de  la  Mayeime-* 

Duroy  ,  de  l'Eure. 

Duruy,   de  Seine. 

Dussaulx  ,  de  Paris. 

Dutrou  r  de  la  Vienne. 

Duval ,  de  TAube. 

Duval  ,  d'Ille  et  Vilaine. 

Dyzez ,   des  Landes» 

Edouard ,  de  la  Côte-d'Or. 

Egalité ,  (Joseph  duc  d'Or- 
léans )   de  Paris. 

Ehrmann  ,  du  Baâ-Rhin. 

Engerran,  de  la  Manche. 

Enjubault,  delà  Mayenne. 

Enlard,  du  Pas-de-Calais. 

*  Eschasseriaux ,  Taîné ,  de 
la  Charente-Inférieure. 

Eschasseriaux  ,  jeune  ,  de 
la  Charente-Inférieure. 

Escudier  ,  du  Var. 

Esnue  -  Lavallée  ,  de  la 
Mayenne. 

Espert,  de  TArriège. 

Estadens,  de  la  Haute- 
Garonne. 

Ezmard  ,  (  J.  )  du  Bec- 
d'Ambés. 

Fabre  .  des  Pyrcnnécs  - 
Orientiiles* 

Fabre  -  d'Eglantiite  ,  de 
Parii« 

Fauchet  ,  (  Tabbé  )  du 
Calvadoi. 

Faure,  de  la  HamU-Iahic, 

Faurc,  de  la  Seine -loié- 
rieure. 

Faurc ,  de  h  Creuze. 

Fauvre  -  labruiierie ,  d« 
Cher. 


de  la  ConvetUiûn  nationale»  5^9 

Fayau  ,  de  la  Vendée* 

*  Fayc  ,     de    la    Hauti- 
Vienne. 

FayoUe ,  de  la  Drômc.. 
Ferrand  ,  de  lAin. 
Ferraud ,      des     Hautes* 

Pyrennées. 
Ferroux  -  de  -  Salin   ,    du 

Jura. 
Fery  ,  des  Ardenne». 
Finot ,  de  l'Yonne. 

*  Fiquet  ,.  de  l'Aisne. 

*  Fleury  ,   des   Côtes-du- 
Nord. 

Florence  -  Guyot ,    de  b 

Côte-d'Or. 
Fochcdey,  du  Nord. 
Forestier ,  de  l'Allier. 
Fores t   ,     de    Khône    et 

Loire* 
Earîcher»  de  Loire- In£é« 

rieure. 
Fouchc,  de  la  Loire-Infér 

rieure. 
Foucher  ,  du  Cher. 
Fourcroy,  de  Paris. 
Fourmy  ,  de  rOrnc. 
Fournel ,  de  Lot  et  G^ 

ronne« 
Fournier ,   de    Rhôtie  et 

Loire, 
Foui$edoire  ,  de  Loire  et 

Cher. 
Francastel ,  de  1  Eure. 
VftfK^oh  de  la  Somme. 

*  Frecîne  ,    de    Loire 
Cher. 

Fremenger  ,     d'Eure 
JU^irc^ 

N  a  4 


et 


et 


56ô 


Liste  des  Membres 


Fréron.,  de  Paris. 

Froger  ,   de  la  Sarthe. 

Gaillard  ,  du  Loiret. 

Gamon  ,   de  rArdèchc. 

Gantois  ,  de  la  Somme. 

Gardien  ,  de  llndre  et 
Loire. 

Garilhe  ,  de  TArdèche. 

Garnier ,  de  lAube. 

Garnicr  ,  de  la  Charente- 
Inférieure. 

Gafnier  ,  (  Antoine  )  de 
la  Meuse. 

Garnot,  de  St.-Domingue. 

Garos  ,   de  la  Vendée. 

*  Garan-de-Coulon  ,    du 
.     Loiret. 

Gatrau,  de  Bec-d'Ambès. 

*  Gaston  ,   de  TArriège. 

*  Gaudin  ,  de  la  Vendée, 
Gaultier  ,    jeune  ,     des 

Côtes  -  du  -  Nord. 
Gauthier  ,  de   l'Ain. 

*  Guai  -  Vernon  ,  de  la 
Hartite-Vienne. 

*Gelin,de  Saône  et  Loire. 
Genevois,    de   l'Isère. 
Genin,  du  Mont-Blanc. 
Génissieu  ,  de  l'Isère. 
Gensonné,  delà  Gironde. 

*  Gentil  ,  du  Loiret. 
Gentil ,   du  Mont-Blanc. 
Geoffroy, jeune,  de  Seine 

et  Marne. 
Gérard  -  Ï>esrivière5  ,    de 

l'Orne. 
Gérente  ,  (Olivier)  de  la 

Drôme. 
Germinac  ,  de  la  Corrèze. 


*  Gertoux  ,   des   Hautcs- 

Pyrennées. 

*  Gibergues  ,  du  Puy-de- 

Dôme. 

Gillet ,  du  Morbihan. 

Girard ,  de  l'Aude. 

Girard  ,  de  la  Vendée. 

Giraud  ,  de  la  Charente- 
Inférieure. 

Giraud,  de  l'Allier. 

Giraud  ,  des  Côtes  -  du  - 
Nord. 

Girot-Pouzol ,  du  Puy- 
de-Dôme. 

Gleizal ,  de  l'Ardéche. 

Godefroy ,  de  l'Oise. 

Gomaire ,  du  Finistère; 

Gorsas  ,  de  Paris. 

Goujepn ,  de  Seine  et 
Oise. 

Gouzy ,  du  Tarn. 

Goudclin  ,  des  Côtes-du- 
Nord. 

Gouly,  de  l'Isle-de-France. 

*  Gossuin  ,  (  Eugène  )  du 
Nord. 

*  Goupilleau-de-Fontenay, 

(J.F.)  de  la  Vendée. 
Goupilleau-de-Montaigu , 

(P.C.)  idern. 
Gourdan  ,  de  la  H.-Saône. 
Goyer-la-PIanche  ,   de    la 

Nièvre. 

*  Granet  ,  des  Bouches- 
du-Rhône. 

*  Grangeneuve  ,  de  la 
Gironde. 

*  Grégoi re ,  (  H.  )  de  Loire 
et  Cher. 


de  la  Convention  nationale' 


Grcnot ,  du  Jura. 

*  Grosse-du-Rocher,  de 
la  Mayenne. 

Guchan  ,  des  Hautes -Py- 
^rénnées. 

*  Guadet,  de  la  Gironde. 

*  Guérin  ,  du  Loiret. 
Guermeur,  du  Finistère* 
Guezno  ,    idem, 

Guiter ,  des  Pyrennées- 
Oricntales. 

GuflFroi,  du  Pas -de- Calais. 

Guîllerault,  de  la  Nièvre. 

Guillemardet ,  de  Seine 
et  Loire. 

Guillermin  ,  de  Seine  et 
Oise. 

Gumcry,  du  Mont-Blanc. 

Guimberteau,  de  la  Cha- 
rente. 

Guîot ,  (  Florent  )  de  la 
Gôte-d'Or. 

*  Guyton-Morveau  ,  de  la 
Côte-d'Or. 

Guyardin  ,  de  la  Haute- 
Marne. 

*  Guyes  de   la  Creuze. 
Guyet-Laprade ,  de  Lot  et 

Garonne.  - 

Guyomar,  des  Côtes-du- 
Nord, 

Hardy  ,  de  la  Seine- Infé- 
rieure. 

Harm^nd  ,  de  la  Meuse. 

*  HaussiAann  ,  dé  Seine 
et  Oise. 

Havin  ,  de  la  Manche. 
Hecqiiet  ,    de    là    Seine- 
Inférieure. 


55i 

du 


*  Henri  -  Larîvière  , 
Calvados. 

Hcntz  ,  de  la  Mozelle. 
Hérard  ,  de  l  Yonne. 

*  Hérault  -  Séchelle  ,    de 
Seine  et  Oise. 

Himbert  ,    de    Seine    et 

Marne. 
Hourier-Ëloi^de  la  Somme, 
Hubert,  (Michel)    de  U 

Manche. 

*  Huguet ,  de  la  Creuze* 
Humbert ,  de  la  Meuse. 

*  Ichon ,  du  Gers. 

*  Ingrand  de  la  Vienne* 

*  Isnard  ,  du  Var. 
Isoré  de  TOise  , 
Izoard,  des  Hautes-Alpes. 
Jac ,  du  Gard. 

Jacob  ,  de  la  Meurthe. 
Jacomin  ,  de  la  Drôme. 
*Jagot ,   At  l'Ain. 

*  Jard  -  PanVillier  ,     des 

Deux  -Sèvres. 

Jarry  ,  de  la  Loire  -  Infé- 
rieure. 

Jaurand ,  de  la  Creuze. 

Javogues  ,  fils  ,  de  Rhône 
et  Loire. 

*  Jai  (  de  Sainte-Croix  )  , 

de  la  Gironde. 
Jean-Bon  (Saint-André)  , 

du  Lot. 
eannest  ,  de  TYotitie. 
ohannot^  du  Haut-Rhin, 
orrand  ,  de  la  Crcuzé.    • 
oubert ,  de  THérault.    ■ 
ouenne  ,  (  Longchamps) 

du  Calyados. 


56t 


Liste  des  Miinbra 


onrdan ,  de  la  Nièvre. 

^  ouve,  du  Puy-de-Dôme. 

^  ullien  ,  de  la  Drôme. 

[  ullien  (  de  Toulouse  )  , 
du  .... 

Julien ,  (Jean)  de  la  Haute- 
Garonne. 

Karcher ,  de  la  Mozelle. 

Kersaint,  de  Seine  et  Oise. 

Kervelegan ,  du  Finistère. 

Laa  ^  des  Basses-Pyrennées. 

*  Laboissière  ,  du  Lot. 
Lacaze,  &k ,  de  la  Gironde. 
Lacombe  ,  de  Laveyron. 
locombe-Saint-Michel,  du 

Tarn. 

*  Lacoste  ,  du  Cantal. 
Lacoste  ,    (  £lie  )    de  la 

Dordogne. 
Lacrampe  ,    des    Hautes- 

Pyrennées. 
Ladrise  ,   de   TOrne. 
JLacroix,  de  la  H.  Vienne. 
Lafond  ,  de  la  Corrèze. 

*  Laguyre  ,  du  Gers. 
Laignelot  ,  de  Paris. 
Lakanal ,  de   TArriège. 
Laloue ,  du  Puy-de-Dôme. 
Laloy,  de  la  Haute-Marne. 
Lalande  ,  de  la  Meurthe. 
Lamarque,delaDordogne. 

*  Lambert ,  de  la  Côte- 
dOr. 

Lanjuinais  ,    de    rille    et 
,    Vilaine. 

Lanot ,  de  la  Corrèze. 
Lanoue,  du  Puy-de-Dôme. 
Lanthenas  ,  d«  Rhône  et 
Loire. 


*  Laplaigne  ,  du  Géra* 
Laporte  r  du  Haut-Rhin. 
Laroche  ,  du  Lot  et  Ga- 
ronne. 

*  Lasource  ,  du  Tarp. 
Laurence  ,  de  la  Manche. 
Laurenceot  ^  du  Jura. 
Laurent,  des  Bouches-dur 

Rhône. 

Laurent ,  de  Lot  et  Ga- 
ronne. 

Laurent ,  du  Bas- Rhin. 

Lavicomterie  ,  de  Paris.. 

Leblanc  >  des  Boùches-da- 
Rhône. 

Lebon  ,  dut  Pas-derCalais» 

*  Lebreton  ,  d'Isle  et  Vi- 
laine. 

Lecarlier  »  de  TAisne. 
Lecarpentier,cfe  laManche. 
Leclerc,  de  Loire  et  Cher, 

*  Lecointre  ,  de  Seine  et 

Oise. 

*  Lecointe  -  Puyravaux  , 
des  Deux-Sèvres. 

Lecomte  ,  de  la  Seine-In- 
férieure. 

Lefebvre  ,  de  la  Loire-In- 
férieure. 

Lefebvre  ,  de  la  Seine-In- 
férieure. 

Lefiot ,   de  la  Nièvre. 

Lefranc  ,  des  Landes. 

Legendre  ,  de  la  Nièvre^ 

Legendre  ,   de   Paris. 

Legot  ,   du  Calvados. 

Lehardy,  du  Morbihan^ 

Lehaut ,  de  la  Sarthe. 

Lejeune ,  de  l'Indre  ». 


de  la  Cûnvention  nationale. 


56J 


Lejeunei  (René-François) 

de  la  Mayenne. 
Lemaignan ,  de  Maine  et 

Loire. 

*  Lemailhaud  ,  du   Mor- 
bihan. 

Lemane ,   du   Mont-Ter- 
rible. 

*  Lemoine,  de  la  Manche. 
Lemoine,  (de  Vernon)de 

la  Haute-Loire. 
Lemoine ,  du  Calvados. 
Lepage,  du  Loiret. 
Lcpelletier-Saint-Fargeau , 

des  Vosges. 
Lequinio  ,  du  Morbihan. 
Lesage,  d'Eure  et  Loire. 
Lesage-Senault,  du  Nord. 
Lesterp-Beauvais ,  de  la 

Haute-Vienne. 
Letourneur  ,  de  la  Sarthe. 

*  Letourneur ,  de  la  Man- 
che. 

Levasseur ,  de  la  Meurthe. 
Lievasseur ,  de  la  Sarthe. 
Leyris  ,   du  Gard. 
Lidon  ,  de  la  Correze. 
Lindet ,  de  l'Eure. 
*Lindet,   (Robert)  idem. 
Lion ,  des  Isles-du-Vent. 
Littée  ,  idem. 
Lobinhes  ,  aîné  ,  de  TA- 

veyron. 
Loflficial,  des  Deux-Sèvres. 
Loiseau ,  d'Eure  et  Loire. 
Lombard  -  Lachaux  ,     du 
.    Loiret. 

Lonchamp,  du  Calyados. 
Lomont ,  idem. 


Loncle ,    des    Côtcs-dti- 

Nord. 
Lonqueiîe,d'Eure  etLoire, 
Louchet ,  de  TAveyron, 
Louis  ,  du  Bas  -  Bhin. 

*  Louvet ,  de  la  Somme. 

*  Loysel,  de  l'Aisne. 
Lozeau  ,  de  la  Charente- 
Inférieure. 

Ludot ,  de  l'Aube. 
Magniez,  du  Pas-de-Calaîs. 

*  Maignjen,  de  la  Vendée, 

*  Maignet ,    du    Puy-de- 

Dôme. 

*  MaiJhe  ,  de  la  Haute- 
Garonne. 

Mailly,  de  Saône  et  Loire. 
Mainvielle,  des  Bouches- 

du  Rhône. 
Maisse  ,  des  Basses- Alpes. 

*  Mallarmé ,  de  la  Meurthe. 
Mallet,  du  Nord. 
Manuel  ,   de  Paris. 
Maragon  ,  de  TAudc. 
Maras  ,  d'Eure  et  Loir. 
Marat ,  de  Paris. 
Marbot ,  de  la  Drômc* 
Marcoz ,  du  Mont-Blanc. 
Marec  ,  du  Finistère. 
Marcy ,  jeune ,  de  la  Côte- 

d'Or. 

Maribon  ,  (  Montant  )  du 
Gers. 

Mariette  ,  de  la  Seine- 
Inférieure. 

Marin  ,  du  Mont-Blanc. 

Marquis  ,  de  la  Meuse. 

Martel ,  de  l'Allier. 

^arvejoub,  du  Tarn. 


et 


et 


564  Liste  des 

Martin  ,  de  la  Somme. 
Martineau ,  de  la  Vienne. 
Martinel ,  de  la  Drôme. 
Massa  ,  des  Alpes  -  Mari- 

times. 
Massieu  ,  de  TOise. 

*  Masuyer  ,   de   Saône 
Loire. 

Mathieu  ,  de   TOise. 

Mauduyt  ,    de    Seine 
Marne. 

Maulde  ,  de  la  Charente. 

Maure  5  aîné,  de  l'Yonne. 

Maurel ,  d'ille  et  Vilaine. 

Mazade  ,    de    la    Haute- 
Garonne. 

MeauUe   ,    de    la   Loire- 
fcrieure. 

Meillan  ,  des  Basses  -  Py- 
rennées. 

Méjansac  ,  du  Cantal. 

Meliinet ,    de    la    Loire- 
Inférieure. 

Menesson,  des  Ardennes. 

Menuari ,    de    Maine     et 
Loire. 

Mercier ,  de  Seine  et  Oise. 

*  Merlin- de -Thionville  , 

de  la  Mozelle. 
Merlin  -  de  -  Douai  ,     du 

Nord. 
Merlino  ,  de  l'Ain. 
Meyer  ,  du  Tarn. 
Meynard,delaDordogne. 

*  Michaud  ,  du  Doubs. 
Michel ,  de  la  Meurthe. 
Michel  ,  du   Morbihan. 
Michet,  de  Rhône  et  Loire. 
Millard ,  de  Saône  et  Loire. 


Membns 

Mills ,  de  St.  Domîngnei 
Milhaud  ,  du  Cantal. 
Mirande  ,  idem. 
Mollet ,  de  l'Ain. 
Mollevaud,  de  la  Meurthe. 
Moltedo  ,  de  la  Corse. 
Monel,  de  la  Haute- Marne. 
Monestier,   du  Puy-de* 
Dôme. 

*  Monestier,  de  la  Lozère^ 

*  Monnot ,  du  Doubs. 
Montégut,  desPyrennées- 

Orientales. 
Montgilbert,  de  Saône  et 

Loire. 
Montmayou  ,   du  Lot. 
Mot'eau   ,     de    Saône    et 

Loire. 
Moreau  ,  de  la  Meuse. 
Morin,   de  l'Aude. 

*  Morisson ,  de  la  Vendée. 
Moulin  ,  de  Rh.  et  Loire. 
Moycsset,  du  Gers. 

*  Musset ,  de  la  Vendée. 
Neveu  ,   des  Basses  -  Py- 

rennées. 
Nioche  ,  d'Indre  et  Loire. 

*  Niou  ,  de  la  Charente- 

Inférieure. 

Noally,  de  Rhône  et  Loire. 

Noël ,  des  Vosges. 

Nogueres,  de  Lot  et  Ga- 
ronne. 

Obelin  ,  d'ille  et  Vilaine. 

Opoix,  de  Seine  et  Marne. 

Osselin  ,  de  Paris. 

*  Oudot,  delaCôte-d'Or. 

*  Paganel ,  de  Lot  et  Ga- 
ronne. 


de  la  Convention  nationale. 


56S 


Palasme  ,   des   Côtes-du- 
Nord. 
î    Panis  ,  de  Paris. 
.    Payne ,  (Thomas  )  du  Pas- 
de-Calais. 

Patrin ,  de  Rhône  et  Loire. 

Pechina^desHautes- Alpes. 

Pelé  ,  du  Loiret. 

Pelet ,  de  la  Lozère. 

Pelletier  ,  du  Cher. 

Fellissier ,    des   Bouches- 
du-Rhône. 

Pémartin  ,  des  Basses-Py* 
rennées. 

Penières,  de  la  Corrèze. 

Pépin  ,   de  Flndre. 

Perard,  de  Maine  etLoire. 

Pérès  ,  de  la  Haute  -  Ga- 
ronne. 

Periez  ,  de  l'Aude. 

Perrin  ,  des  Vosges. 

Perrin  ,  de  TAube. 

Personne  ,    du    Pas-de- 
Calais. 

Pétion  ,   de  Paris. 

Petit ,  de  TAisne. 

Petitjean  ,  de  l'Allier. 

Peyre ,  .des  Basses-Alpes. 

Peynard  ,    de    Maine    et 
Loire. 

Peyssard,  delaDordogne. 

Pflieger ,  aîné  ,  du  Haut- 
Rhin. 

Phelippeaux,  de  la  Sarthe. 

Picqué  ,  des  Hautes  -  Py- 
rjennées. 

Pierret ,  de  l'Aube. 

Piette  ,  des  Ardennes. 

Pilastre  ,  Maine  et  Loire* 


Pinel ,  de  la  Manche. 

*  Pinet ,  aîné  ,  de  la  Dor- 

dogne. 

*  Piorry ,  de  la  Vienne. 
Plaichard-Cholière,  de  la 

Mayenne. 
Plazanet,  de  la  Corrèze, 
PochoUe  ,    de    la    Seine- 
Inférieure. 
Pointe,  (Noël)  de  Rhône 
et  Loire. 

*  Poisson,  de  la  Manche. 
Pomme  ,  de  la  Guyanne- 

Française. 
Pons,  (de  Verdun)  de  la 

Meuse. 
Porcher ,  de  l'Indre. 
Portiez  ,  de  l'Oise. 
Pottier,  d'Indre  etLoire. 
Poulain  ,  de  la  Marne. 
Poulain- Grand- Pré  ,  des 

Vosges. 
Poulticr  ,   du   Nord. 
Précy ,   de  l'Yonne. 
Pressavin  ,   de   Rhône   et 

Loire. 

*  Prieur ,  de  la  Côte-d'Or. 
Prieur  ,  de  la  Marne. 
Primordièrcvde  la  Sarthé. 
Privât- Garilhe,   de  l'Ar- 

déche. 

Projean,  de  la  Haute-Ga- 
ronne. 

Prost ,   du  Jura. 

Prunelle  -  de  -  Lierre  ,  de 
l'Isère. 

Qu«inec  ,  du  Finistère, 

*  Quinette  ,  de  l'Aisne. 
Quiot ,  de  la  Drôme. 


566 


Liste  des  Membres 


Quîrot ,  du  Doubs. 
Rabaud-Saint-£tienne ,  de 

TAube. 
Rabaud  ,  du  Gard. 
Bafiron,  de  Paris. 
Rameau ,  de  la  Côte-d'Or. 
Ramel-Nogaret^  de  T  Aude. 
Real ,  de  Tlsère. 
Rébecqui ,   des  Bouches- 

du-Rhône. 
Regnaud ,  de  la  Manche. 
Reguis  ,  des  Basses-Alpes. 
Réveillcre  -  Lcpanx  ,     de 

Maine  et  Loire. 
Revelle  ^  (  le  comte  )    de 

Seine-Inférieure. 
♦Reverchon,  de  Saône  et 

Loire. 
Rewbell  ,   du  Haut-Rhin. 

*  Reynaud  ,  de  la  Haute- 
Loire. 

Ribereau  ,  de  la  Charente. 
Ribet ,  de  la  Manche. 
Riboucher ,  de  Rhône  et 
Loire. 

*  Richard  ,  de  la  Sarthe. 
Richaud  vde  Seine  et  Oise. 
Richoux  ,  de  1  Eure. 
Ricord  ,  du  Var. 

*  Ritter  ,  du  Haut-Rhin. 
Rivaud  ,    de    la    Haute- 
Vienne. 

*  Rivery ,  de  la  Somme. 
Rivière  ,  de  la  Gorrèze. 
Roberjot ,    de    Saône    et 

Loire. 
Robert  -  Lindet  ,    de     la 

Haute-Marne. 
Robert ,  de  Paris. 


Robert,  des  Ardeimes. 
Robespierre  ,  jeune  ,   de 

Paris. 
Robespierre  ,  aîné  ,  ideM* 
Robin ,  de  TAube. 
Rochegude  ,  du  Tarn. 

*  Rommcf,  (  Gilbert)  du 

Puy-d«-Dôme. 
Rouault ,  du  Morbihan. 

*  Roubaud  ,  du  Var. 
Rougemont  ,    du    Mont* 

Terrible. 

Rougier ,  de  la  Haute- 
Loire. 

Rovére  ,  des  Bouches-du- 
Rhône. 

Rousseau  ,  de  Paris. 

Roussel ,  de  la  Meuse. 

Roux,  de  TAveyron. 

Roux,  de  la  Haute-Marne. 

*  Roux  -  FaziUac  ,  de  b 
Dordogne. 

Rouyer,  de  THérault. 
Rouzet  ,    de    la    Hautes- 
Garonne. 
Roy  ,  de  Seine  et  Marne. 
Royer ,  de  l'Ain. 

*  Ruamps ,  de  la  Charente* 

Inférieure. 

Ruault  ,  de  la  Seine-In- 
férieure. 

Rudel,  du  Puy-de-Dôme. 

Ruelle  ,   d  Indre  et  Loire. 

*  Ruhl  ;  du  Bas-Rhin. 
Saint-Martin, de  TArdèche. 
Saint-Martin-Valogne  ,  de 

l'Aveyron. 
Saint-Prix ,  de  TArdèche, 

*  Salàdin,  de  la  Somme. 


lie  la  Convention  naliçnate. 


i^l 


i     Saliçetti^  de  la  Corse. 
Salles  ,  de  la  Meurthe. 
Salle,  da  Lot. 
Salleles  ,  idem. 

*  Sallengros  ,  du  Nord. 
»  *  Salmon ,  de  la  Sarthe. 

Saurine  ,  de  l'Aude. 

*  Sautayra ,  de  la  Drôme. 

*  Sautereau ,  de  la  Nièvre. 
Sauvé  ,  de  la  Manche. 
Savary  ,   de  l'Eure. 
Savournin  ,  (  Marc- Ant.  ) 

des  Basses-Alpes. 
Scellier  ,  de  la  Somme. 
Seconds ,  de  l'Aveyron. 
Seguin ,  du  Doubs. 
Sergent ,  de   Paris. 
Serre  ,  des  Hautes-Alpes. 
Serres ,  deJ'Isle-de-Francc. 
Scrveau  ,  de  la  Mayenne. 
Servières^  de  la  Lozère. 
Servonat ,  de  l'Isère. 
Sevestres,  d'IUe  et  Vilaine. 

*  Siblot  ,  de  la  Haute- 
Saône. 

Sieyes  ,  de  la  Sarthe. 
Sillery  ,  de  la  Somme. 
Simon  ^  du  Bas-Rhin. 
Solemiac  ,  du  Tarn. 

*  Soubrany  ,  du  P.uy- de- 

Dôme. 

Souhait,  (Julien)  des 
Vosges. 

Soulignac  ,  de  la  Haute- 
Vienne. 

Taillefer ,  de  la  Dordogne. 

Tallien,  de  Seine  et  Oise. 

Talot ,  de  Maine  et  Loire« 

T^veau  ,  du  Calvados. 


*  Tavemel ,  du  Gard. 
Tellier,  de  Seine  et  Marne. 
Terrât  ,  du  Tarn. 
Texier ,  de  la  Creuze. 
Thabaud  ,  de  l'Indre.   . 
Thibaudeau ,  de  la  Vienne. 
Thibault ,  du  Cantal 
Thierriet ,  des  Ardehnes. 
Thirion  ,  de  la  Moselle. 
Thomas  ,  de  Paris. 
Thomas  ,  de  l'Orne. 

*  Thuriot ,  de  la  Marae« 
Tocquot ,  de  la  Meuse. 
Topsent ,   de  l'Eure. 
Toulouse ,  de  l'Ardèchc. 
Tournier  ,    de  l'Aude. 
Trehouart,d'Ille  etVilainc. 
Treilhard ,    de    Seine    et 

Oise. 
Triboulat ,  du  Tarn. 
TruUard,  de  la  Côte-d'Or. 
Turreau  ,  de  TYonne. 
Vadier^  de  PArriège. 
Valdruche  ,  de  la  Haute* 

Marne. 
Vallée  ,  de  l'Eure. 
Valadi ,    de   l'Aveyron. 
Vardon ,  du  Calvados. 
Varlet,  du  Pas-de-Galaîs. 
Vasseur  ,  de  la  Somme. 
Veau,  d'Indre  et  Loire. 
Venaille,  de  Loire  et  Chçr. 
Venard,  de  Seine  et  Oise. 
VerdoUin  ,     des    Basses- 

Pyrennées. 

*  Vergniaud  ,   de  la  Gi- 
ronde. 

Vernier ,  du  Jura. 
Vermon ,  des   Ardennes« 


568 


Liste  des  Membres  de  la  Convention, 


du  Doubs. 


*  Verncrey  , 
Vigée  ,   du  ... . 
Villcitc  ,    (  Charles  )    de 

rOise. 

Villctard  ,  de  TYonnc. 

Vidal,  des  B.-Pyrcnnées. 

Vidalin  ,  de  T Allier. 

'»  Vidalct ,  de  Lot  et  Ga- 
ronne. 

*  Viennet ,  de  1  Hérault. 
Vigneron  ,   de  la  Haute- 
Saône. 

Vîllars  ,  de  la  Mayenne. 
Villers,  de  la  Loire-Infé- 
rieure. 


Vincent  ,  de  la  Seine 
Inférieure. 

Vinet ,  de  la  Charente 
Inférieure. 

Viquy,  de  Seine  et  Marne 

Vouland  ,  du  Gard. 

Wanderlincourt  ,  de  h 
Haute-Marne. 

Yger  ,  de  la  Seine-Infé- 
rieure. 

Ysabeau ,  d'Indre  et  Loire. 

Zangiacomi ,  &ls  ,  de  h 
Meurthe. 


Fin  du  Tome  VI. 


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